This is a digital copy of a book that was preserved for générations on library shelves before it was carefully scanned by Google as part of a project
to make the world's books discoverable online.
It has survived long enough for the copyright to expire and the book to enter the public domain. A public domain book is one that was never subject
to copyright or whose légal copyright term has expired. Whether a book is in the public domain may vary country to country. Public domain books
are our gateways to the past, representing a wealth of history, culture and knowledge that' s often difficult to discover.
Marks, notations and other marginalia présent in the original volume will appear in this file - a reminder of this book' s long journey from the
publisher to a library and finally to y ou.
Usage guidelines
Google is proud to partner with libraries to digitize public domain materials and make them widely accessible. Public domain books belong to the
public and we are merely their custodians. Nevertheless, this work is expensive, so in order to keep providing this resource, we hâve taken steps to
prevent abuse by commercial parties, including placing technical restrictions on automated querying.
We also ask that y ou:
+ Make non-commercial use of the files We designed Google Book Search for use by individuals, and we request that you use thèse files for
Personal, non-commercial purposes.
+ Refrain from automated querying Do not send automated queries of any sort to Google's System: If you are conducting research on machine
translation, optical character récognition or other areas where access to a large amount of text is helpful, please contact us. We encourage the
use of public domain materials for thèse purposes and may be able to help.
+ Maintain attribution The Google "watermark" you see on each file is essential for informing people about this project and helping them find
additional materials through Google Book Search. Please do not remove it.
+ Keep it légal Whatever your use, remember that you are responsible for ensuring that what you are doing is légal. Do not assume that just
because we believe a book is in the public domain for users in the United States, that the work is also in the public domain for users in other
countries. Whether a book is still in copyright varies from country to country, and we can't offer guidance on whether any spécifie use of
any spécifie book is allowed. Please do not assume that a book's appearance in Google Book Search means it can be used in any manner
any where in the world. Copyright infringement liability can be quite severe.
About Google Book Search
Google's mission is to organize the world's information and to make it universally accessible and useful. Google Book Search helps readers
discover the world's books while helping authors and publishers reach new audiences. You can search through the full text of this book on the web
at jhttp : //books . qooqle . corn/
A propos de ce livre
Ceci est une copie numérique d'un ouvrage conservé depuis des générations dans les rayonnages d'une bibliothèque avant d'être numérisé avec
précaution par Google dans le cadre d'un projet visant à permettre aux internautes de découvrir l'ensemble du patrimoine littéraire mondial en
ligne.
Ce livre étant relativement ancien, il n'est plus protégé par la loi sur les droits d'auteur et appartient à présent au domaine public. L'expression
"appartenir au domaine public" signifie que le livre en question n'a jamais été soumis aux droits d'auteur ou que ses droits légaux sont arrivés à
expiration. Les conditions requises pour qu'un livre tombe dans le domaine public peuvent varier d'un pays à l'autre. Les livres libres de droit sont
autant de liens avec le passé. Ils sont les témoins de la richesse de notre histoire, de notre patrimoine culturel et de la connaissance humaine et sont
trop souvent difficilement accessibles au public.
Les notes de bas de page et autres annotations en marge du texte présentes dans le volume original sont reprises dans ce fichier, comme un souvenir
du long chemin parcouru par l'ouvrage depuis la maison d'édition en passant par la bibliothèque pour finalement se retrouver entre vos mains.
Consignes d'utilisation
Google est fier de travailler en partenariat avec des bibliothèques à la numérisation des ouvrages appartenant au domaine public et de les rendre
ainsi accessibles à tous. Ces livres sont en effet la propriété de tous et de toutes et nous sommes tout simplement les gardiens de ce patrimoine.
Il s'agit toutefois d'un projet coûteux. Par conséquent et en vue de poursuivre la diffusion de ces ressources inépuisables, nous avons pris les
dispositions nécessaires afin de prévenir les éventuels abus auxquels pourraient se livrer des sites marchands tiers, notamment en instaurant des
contraintes techniques relatives aux requêtes automatisées.
Nous vous demandons également de:
+ Ne pas utiliser les fichiers à des fins commerciales Nous avons conçu le programme Google Recherche de Livres à l'usage des particuliers.
Nous vous demandons donc d'utiliser uniquement ces fichiers à des fins personnelles. Ils ne sauraient en effet être employés dans un
quelconque but commercial.
+ Ne pas procéder à des requêtes automatisées N'envoyez aucune requête automatisée quelle qu'elle soit au système Google. Si vous effectuez
des recherches concernant les logiciels de traduction, la reconnaissance optique de caractères ou tout autre domaine nécessitant de disposer
d'importantes quantités de texte, n'hésitez pas à nous contacter. Nous encourageons pour la réalisation de ce type de travaux l'utilisation des
ouvrages et documents appartenant au domaine public et serions heureux de vous être utile.
+ Ne pas supprimer V attribution Le filigrane Google contenu dans chaque fichier est indispensable pour informer les internautes de notre projet
et leur permettre d'accéder à davantage de documents par l'intermédiaire du Programme Google Recherche de Livres. Ne le supprimez en
aucun cas.
+ Rester dans la légalité Quelle que soit l'utilisation que vous comptez faire des fichiers, n'oubliez pas qu'il est de votre responsabilité de
veiller à respecter la loi. Si un ouvrage appartient au domaine public américain, n'en déduisez pas pour autant qu'il en va de même dans
les autres pays. La durée légale des droits d'auteur d'un livre varie d'un pays à l'autre. Nous ne sommes donc pas en mesure de répertorier
les ouvrages dont l'utilisation est autorisée et ceux dont elle ne l'est pas. Ne croyez pas que le simple fait d'afficher un livre sur Google
Recherche de Livres signifie que celui-ci peut être utilisé de quelque façon que ce soit dans le monde entier. La condamnation à laquelle vous
vous exposeriez en cas de violation des droits d'auteur peut être sévère.
À propos du service Google Recherche de Livres
En favorisant la recherche et l'accès à un nombre croissant de livres disponibles dans de nombreuses langues, dont le français, Google souhaite
contribuer à promouvoir la diversité culturelle grâce à Google Recherche de Livres. En effet, le Programme Google Recherche de Livres permet
aux internautes de découvrir le patrimoine littéraire mondial, tout en aidant les auteurs et les éditeurs à élargir leur public. Vous pouvez effectuer
des recherches en ligne dans le texte intégral de cet ouvrage à l'adresse |http : //books .qooqle . corn
kj: *1 o 1 1 fa*r)
II
III II
lisË
m
|tIsJ
HARVARD
COLLEGE
LIBRARY
NOUVELLE
BIOGRAPHIE GÉNÉRALE
DEPUIS
LES TEMPS LES PLUS RECULÉS
JUSQU'A NOS JOURS.
TOME VINGT-CINQUIÈME.
Holst. — Irwin.
l'ARIS. — -nt'OCIUl'IlIC DE FIIININ DIDOT FR ÈR ES , Fll« ET C. ir , RUE JACOB, 56.
NOUVELLE
BIOGRAPHIE GÉNÉRALE
DEPUIS
LES TEMPS LES PLUS RECULÉS
JUSQU'A NOS JOURS,
AVEC LES RENSEIGNEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES
KT l/lNDICATION DKS SOUIUKS A CONStH.TKK ;
PUBLIÉE PAR
Mil. FIR1IN DIDOT FRÈRES,
SOUS LA IIIHKCTION
DE M. LE D r HOEFER.
fcomt ttingt-Cmqmèmc.
PARIS,
FIRMIN DIDOT FRÈRES, FILS ET C' B , ÉDITEURS,
IMPRIMKURS-LIBRAIRKS UK L INSTITUT |>K FRANCK,
RUE JACOB, 5(>.
M DGCC LVÏII.
Le» éditeur» se réservent le droil de traduction et de reproduction * I VI ranger.
KPZL9071 tes)
'■;<> s
< . ;
NOUVELLE
BIOGRAPHIE
GÉNÉRALE
DEPUIS LES TEMPS LES PLUS RECULÉS JUSQU'À KOS JOUIS.
H
; holst (Hans- Peter), poète danois, né à
Copenhague, le 22 octobre 1 8 1 1 . Il est maître de
danois à l'Académie des Cadets de terre à Copen-
hague, depuis 1836. On a de lui plusieurs ou-
vrages qui se distinguent par l'élégance du style;
les plus connus sont : Fsedrenelandske Roman-
cer (Romances patriotiques) ; Copenhague, 1832,
in-8° ; 2 e édit., 1840 ; — Digtninger (Poésies) ;
il)., 1833, in-8°;— Noveller (Nouvelles), au nom-
bre de trois;ib., 1834,in-8 ; — Digte (Poésies),
premier recueil, 1840, l re et 2 e édit. ; deuxième
recueil, 1850, in-8°; — Farvel (Adieu); ib.,
1840 : ce poème a été traduit dans les princi-
pales langues de l'Europe; — Ude og hjemme
(Au dehors et au dedans), en prose et en vers;
ib., 1843, l re et 2 e édit. ; souvenirs d'un voyage
en Allemagne, en France, en Italie et en Sicile
(1840-1842) \— Gioacchino, drame ; ib., 1844,
io-8°; — Albert Thorwaldsen, discours en
vers; ib., 1844; —Adam Œhlenschteger,
poème et discours; 1850, in-8°; — Den Utle
Hornblseser (Le Petit Trompette), chants patrio-
tiques relatifs à la guerre du Slesvig-Holstein ;
1851, in-8°; — Sicilianske Skizzer og Noveller
(Esquisses et Nouvelles siciliennes); ib., 1853,
in-8°. H a traduit de l'allemand et du français
plusieurs drames et vaudevilles, et édité : Ny-
taarsgave fra danske Digtere (Étrennes delà
partdes poètes danois) ; MV, 1835-1838, in-12;
— Eros, poésies lyriques, 1857, jn-8°. E. B.
P.-L. MOlier. not. dans Dansk Panthéon. - Damk Kon-
vers.-Lex.
* holstein, nom d'une maison princière al-
lemande, alliée à la plupart des dynasties euro-
péennes. Parmi les membres de cette maison qui
jouèrent un rôle dans l'histoire, on remarque :
Adolphe l« de Scbaumbourg. En 1110 il fut
nommé comte de Holstein et deStormarn.
Adolphe II, son fils, lui succéda en 1130; il
réunit au Holstein la Wagrie. D'abord dépouillé
KOUV. BIOCU. CÉNÉR. — T. XXV.
de ses États par le duc de Saxe, Albert l'Ours, il
y rentra après la victoire remportée sur ce der-
nier par Henri le Superbe, devenu à son tour
duc de Saxe. A partir de 1142, le Holstein, le
Stormarn et la Wagrie ne formèrent plus qu'un
État, sous le nom générique de Holstein.
Adolphe II f, fils du précédent. Vaincu par
Walderaar de Slesvig, fils du roi de Danemark,
et fait prisonnier, il ne recouvra la liberté qu'en
abandonnant ses Etats au vainqueur. LerHolstein
passa au Danemark, et resta pendant vingt-cinq
ans sous sa domination.
Adolphe IV, fils du précédent, mort en 1261.
Une bataille livrée le 22 juin 1227 contre le même
Waldemar de Danemark, et où la victoire* se
prononça pour Adolphe, mit fin à la domination
danoise pour le Holstein. En 1239 Adolphe IV
abdiqua pour se retirer dans un cloître. A sa
mort, ses États furent partagés entre ses deux
fils, Jean I er et Gerhard I er , et après eux les comtes
de Holstein donnèrent naissance aux deux lignes
wagrienne et de Rendsbourg. La première s'é-
teignit en 1315, l'autre continua seule de régner
en Holstein.
Gerhard IV, mort en 1404. Il réunit au titre
de comte de Holstein cehii de duc de Slesvig
(15 août 1386). Il périt dans une bataille contre
les Dithmarses (4 août 1404).
Adolphe VIII, mort le 4 décembre 1459. Il
demeura seul souverain du Slesvig et du Hol-
stein. Dans la personne de ce prince s'éteignit la
famille de Scbaumbourg. Son neveu Christian ,
fils de sa sœur et destiné à lui succéder, dé-
clara, après de longs démêlés avec le Danemark,
que, dans le cas où il deviendrait roi de ce pays,
le Slesvig ne serait jamais réuni à ce royaume.
Adolphe Vin fut regretté de ses sujets. Lorsque,
après sa mort, le Holstein se trouva en proie aux
troubles civils, on s'écriait: « Ah ! ce n'est plus
maintenant comme au tec ps d'Adolphe. »
1
3
HOLSTEIN — HOLSTEMUS
Christian I er d'Oldenbourg, mort le 22 mai
1481. Déjà roi de Danemark, de Suède et de Nor-
vège, il fut élu duc de Slesvig et comte de
Holstein et de Atorifitro pér lei étais provin-
ciaux, toutefois à la Condition de la perpétuelle
séparation des duchés d'avec le Danemark. En
effet, les 6 mars et 5 août 1460, Christian pro-
clama cette séparation dans deux Freiheitsbriefe
( lettres d'affranchissement) (voy. Christian I er ,
roi de Danemark ).
Jean et Frédéric ï v , élus conjointement ducs
de Slesvig et de Holstein ('voy. Jean et Frédé-
ric 1 er de Danemark).
Christian ou Chrétien II, roi de Danemark
{voy. ce nom).
Frédéric I er (voy. ce nom ).
Christian III (voy. ce nom). II fut élu duc de
Slesvig et de Holstein avant de ceindre la cou-
ronne de Danemark. Il fonda, avec son frère
Adolphe, mort en 1586, les deux principales
lignes de la maison de Holstein, savoir : 1° la
ligne royale, avec ses branches collatérales de
Holstein-Sonderburg, Augustenburg et Holstein-
Sonderburg-Beck ( appelée depuis 1826 Holstein-
Sonderburg- GluckBburg); 2° la ligne ducale
dite de Holstein-Gottorp , souche de la maison
actuelle de Russie et de la maison ducale d'Ol-
denbourg (voy. ce nom).
Frédéric II, roi de Danemark, duc de Sles-
vig-Holstein (voy. Frédéric II). Il gouverna les
duchés conjointement avec Jean le Vieux et
Adolphe, ses deux oncles.
Christian IV, roi de Danemark (voyez ce
nom) .11 gouverna les duchés conjointement avec le
duc Jean- Adolphe, qui, en 1608, établit pour le
trône ducal le droit de primogéniture.
Frédéric III (voy, ce nom), fils de Jean-
Adolphe.
Frédéric /F, fils de Chrétien-Albert. 11 eut de
violents démêlés avec le roi Frédéric IV, qu'il'
vainquit, et auquel il imposa une nouvelle recon-
naissance de ses droits , en vertu du traité de
paix du 18 août 1700.
Charles-Frédéric de Holstein-Gottorp, fils |
du précédent, mort en 1739. Dépouillé d'abord i
de sa part héréditaire par le roi de Danemark i
Frédéric IV, il recouvra plus tard ses droits
sur le Holstein; mais depuis 1714 la maison
ducale ne rentra jamais dans le gouvernement
collectif des deux duchés. En 1725 Charles-
Frédéric épousa l'aînée des filles de Pierre le i
Grand.' \
Chartes-Pierre'- Vlric (voyez Pierre IU, empe-
reur de Russie) et Frédéric V,roi de Danemark
(voy. oe nom).
Christian Vit, roi de Danemark ( voy. ce nom).
Il obtint du grand-duc Paul de Russie en échange
des comtés d'Oldenbourg et de Delmenhorst, la
renonciation de ce prince au Slesvig et la ces-
sion du Holstein-Gottorpien, avec sa part et ses
droits dans les « arrondissements commune ».
Tels sont les termes du traité deKiel (16nov.
1773). [A partir de ce moment, l'histoire des
princes de Holstein se confond avec celle des rois
de Danemark. V. R.
ErtcH ftt GiUbei-, Enepkl. — Uslaure, Btudes sur le
Schttwif -Holstein. — Conttrsat. LeaOk.
tfoLsTKiN (Jeên-Louis), comte de Lethra-
bofg, homme d'État danois, né à Liibtz (Mec-
klembourg), le 7 septembre 1694, mort le 29 jan-
vier 1763. Après avoir étudié à Hambourg, sous
| J.^Alb. Fabricius, puis à Utrecht, il voyagea en
! France et en Angleterre. Nommé en 1724 grand-
chambellan de Christian VI, il devint après l'a-
I vénement de ce prince grand-bailli de Séeland
! (1730), et président de la chancellerie ou pre-
mier ministre (1735). Il fut créé comte en 1750.
! L'Académie des Sciences de Danemark , dont il
! fat l'un des fondateurs, l'élut pour président, le
13 novembre 1742. Il était versé en histoire, en
droit, en théologie et dans les sciences naturelles. II
laissa en manuscrit une traduction de Tacite et
des mémoires, en français, sur sa vie jusqu'en
1727, et sur celle de son père. Membre du Col-
lège des Missions, le comte de Holstein établit
des écoles de missionnaires, à Copenhague pour
le Groenland, et à Trondhjem, pour la Laponie.
11 avait réuni dans son château de Lethraborg
une galerie de tableaux, une collection de cartes
et de médailles, et une grande bibliothèque. Le
parc environnant était orné de nombreuses sta-
tues et de monuments couverts d'inscriptions.
Un membre d'une branche collatérale, Fré-
déric-Adolphe, comte de Holstein, né le 18 oc-
tobre 1784, mort le 21 mai 1836, s'est distingué
comme promoteur de l'agriculture et de l'in-
dustrie. Il fonda en 1810, dans son comté de
Holsteinborg, la première caisse d'épargne qui
ait existé en Danemark. On a de lui : Nogle Be-
traglinger over Landmandens og isœr Gods-
eierens nœrvœrende Stilling (Considérations
sur la position actuelle de l'habitant de la cam-
pagne et principalement du propriétaire); Co-
penhague, 1834, in- 8* ; — Bidrag til Danmarks
Krœnike (Documents pour l'histoire du Dane-
mark en 1828); Slagelsc, 1829, in-8°; — Om de
danske raadgivende Provindsial-Slœnders
Vœsen og Vœrd (Sur les États provinciaux con-
sultatifs en Danemark, leur essence et leur im-
portance ) ; ib. , 1 83 1 ; 2 e édit. ; Copenhague, 1 832 ;
trad. en allemand par N. Falck; Slesvig, 1833,
in-8\ Dès l'établissement de ces états, il y siégea
comme député (1835). Beau vois.
Kofod Ancher, Cursus vitx Holsteinianœ ; in fol. —
HJelmatJerna, fœvtule; Copenh. 1766. - Chr. Molbech,
Det K. danske ndenskabernes Selskabs. hist.,- Copenh.,
18». — J. Holm, Fr. Ad. Grève af Holstein ,• Copenh.,
1844 (840 p.) gr. tn-8°; -Œst., Materialier, n" 78, 10*.—
Eralew, Forfatter- Lexicon.
holstenics (Luc ou Lucas), non latinisé
de Luhas Holstë, érndit allemand, né à Ham-
bourg, en 1596, mort à Rome, le 2 février 1661.
Après avoir achevé ses études dans sa ville natale,
il se rendit à Leyde, où professaient alors Vos-
sius, Meurtius, Heinsius. 11 fut l'élève et bientôt
l'ami de ces illustres philologues, et se lia par-
HOLSTENIUS
6
ticulièrenient avec le géographe Clu vier, qu'il ac-
compagna en Italie et en Sicile, vers 1618. Au
retour de ce voyage, il passa quelque temps à
Leyde, et sollicita vainement une chaire dans le
gymnase de Hambourg. Irrité de cet injuste
échec, il résolut déporter son érudition dans des
pays plus capables de l'apprécier, et se rendit
d'abord en Angleterre (1622), où il passa deux
ans, puis en France, où la protection des frères
Dnpoy lai procura la place de bibliothécaire du
président de Mesmes. Pendant son séjour à Paris,
Holstenius, qui avait été élevé dans la foi pro-
testante, se convertit au catholicisme. On a fait
honneur aux jésuites , et particulièrement au
P. Sirmond, deoe changement dereligion,et on l'a
attribué à des motifs intéressés. Holstenius, dans
une lettre à Peiresc, déclare que la lectare des
philosophes platoniciens le conduisit à l'étude
des Pères de l'Église, et que l'étude des Pères de
l'Église l'amena dans la communion catholique»
S'il eut des raisons d'un autre genre, nous l'igno-
rons; mais il faut remarquer à sa louange qu'il
montra toujours une tolérance rare chet les con-
vertis. Peiresc, avec lequel il était en correspon-
dance, le recommanda au nonce apostolique, le
le cardinal François Barberini,qui se l'attacha.
En 1627 il suivit le cardinal en Italie, vécut dans
sa maison, devint son bibliothécaire en 1636, et
obtint par son intercession cinq ou six bénéfices
en Allemagne. Mais la guerre de Trente Ans rendit
les revenus de ses bénéfices fort incertains.
En 1629 il fut chargé de porter le chapeau de
cardinal au nonce Santa-Croce à Varsovie; en
1637 il travailla à la conversion de Frédéric,
landgrave de Darmstadt, et plus tard il alla re-
cevoir à Inspruck l'abjuration de la reine Christine*
Le pape Innocent X le nomma btbtiothéeaire du
Vatican ; on prétend môme qu'il voulait lui don-
ner le chapeau de cardinal. 11 ne réalisa pas cette
intention, et Alexandre VU, qui traita aussi
Holstenius avec beaucoup de faveur, ne t'éleva
pas non plus à la dignité de prinoe de l'Église.
Holstenius mourut à l'âge de soixante-cinq ans,
et légua ses biens au cardinal Barberini, qui lui
fit élever un tombeau dans l'église de Sainte-
Marie delt' Anima. Luc Holstenius joignait à
un savoir étendu une critique ferme et pénétrante,
une latinité nette et correcte. Mais, trop ami de
la perfection pour être satisfait de ses travaux,
il forma de grands projets littéraires, amassa
beaucoup de matériaux, et ne laissa que des notes
et des dissertations, dont la plupart ne parurent
qu'après sa mort. Baisse, qui appréciait son ta-
lent, s'est plaint, dans une lettre à l'abbé Bou-
chard, qu'il n'en ftt pas jouir le public ; « Je ne
doute point, dit-il, des grandes richesses de
M. Holstenius; je me plains seulement de son
bon ménage, Que sert l'abondance sans la libéra-
lité?... Il faudrait qu'il possédât moins, ou qu'il
donnât davantage. Et quoique je sache qu'il
amasse pour la postérité, et qu'il enrichira nos
neveux, il semble qu'il ne devrait pas cependant
nous déshériter ni garder la meilleure partie de
sa gloire pour un avenir qu'il ne verra point. »
On a de lui : Endecasyllabi in nuptias Thad-
dxi Barberini et Annx Columnx; Rome,
1627, in-4* ; — Emendationes in Eusebii li-
brum contra Hieroclem, dans l'édition de la
Démonstration évangélique d'Eusèbe, 1628,
in-fol.; — Porphyrii liber de Vita Pythagorx,
nec non sententix ad intelligibilia ducentes,
et de Antro Nympharum in Odyssea Des-
criptio, grœce tt latine. Interprète et notatore
Lucca Holstenio, qui Dissertationem de vita
Porphyrii et scriptis adjecit; Rome 1630,
in -8°; Cambridge, 1655, m-8°. Les notes
d'Holstenius sont savantes , mais elles ne vont
que jusqu'à la page 175 ; la Vie de Porphyre est,
suivant Ruhnkenjus « un modèle de la manière
d'écrire la biographie savante » ; elle a été réim-
primée : dans la Bibliotheca Grxcaôe Fabricius,
t. IV; Demophili, Démocratie, et Secundi
Sententix morales, grœce et latine, Holstenio
interprète, cum notis; Rome, 1638, in-8°;
Leyde , 1639 , in - 12 ; dans les Opuscula
Ethiea et Moralia de Gale, Cambridge, 1670,
in-8 , et dans les Opuscula Grxca de Conrad
Orelli, Leipzig, 1819, in-8°; — Note in Sallus-
tium philosophum de Dits et Mundo , dans
l'édition de ce philosophe par Léo Allatius;
Rome, 1638, in*8°; — Note in Âpollonu
Argonautica, dans l'édition des Argonautiques ;
Leyde > 1641 , in-8°; — Arriani de Venatione,
grœce et latine , interprète Luca ffolster.io ;
Paris, 1644,in-4°; — ChrUtiani Ranzovii ad
GeorgiumCalixtum Epistola, qua sui ad Ec-
clcsiamcatholicam accès sus rationes exponit ;
Rome, 1651, in-8°. Luc Holstenius, qui avait
beaucoup travaillé à la conversion de Ranzau ,
publia et probablement rédigea cette lettre ; —
Lucx Holstenii Testimonium adversus Gerse-
nistas pro Thoma a Kempis, publié par
Gabriel Naudé dans son Testimonium adversus
Gersenistas triplex ; Paris, 1652 , in-8° ; — De
A&yssinorum Communione sub unica specie;
de Sabbatho fiumine, dans les Symmicta d'Aï*
latius ; — Codex Regularum quas SS. Patres
monachis et virginibus sanctimonkilibus ser*
vandas prxscripsere, collectus olim a S. Be~
nedicto Anianensi; L. Hoi. in très partes
digestum auctumque edidit, cum appendice
in qua S» S. Patrum exhortationes ad wio-
nachos et virgines de observantia vitk re-
ligiosx; la mort empêcha Holstenius d'ajouter à
cet ouvrage, comme il se le proposait, des notes,
dès préfaces et un glossaire; on y suppléa par
quelques remarques trouvées dans ses papiers ;
— Collectio Romana bipartita veterum aliquot
Historiée ecclesiasticx Monumentorum : cette
collection, commencée par Holstenius, ne parut
qu'après sa mort ; Rome, 1662, in-8° ; — Pas-
sio SS. Perpetux et Felicitatis et Boni/acii
romani, nec non actaSS. Tavachi , Probi et
Andronici, cum notis et animadversis ad
1.
HOLSTENIUS — HOLT;
Baronii Martyrologium Romanum; Rome,
1663; Paris, 1 664, in-8° ; — Annotationes in Geo-
graphiam sacram Caroli a S. Paulo, Italiam
antiquam Cluverii et Thesaurum Geogra-
phicum Ortellii; quitus accedit Dissertatio
duplex de Sacramento Conftrmationis apud
Grxcos; Rome, 1666, in-8°. Les notes sur la
Géographie sacrée de Charles de Saint-Paul
furent réimprimées avec le texte de cet ouvrage ;
Amsterdam , 1704, in-fol. ; — Theodoti An*
cyrani Expositio in Symbolum JSicœnum,
adversus Nestorium, primum édita, avec
une trad. latine de L. Holstenius ; Rome, 1669,
in-8° ;— Diss. de EpistolasynodicaAlexandri,
episcopi Alexandrini, et de episcopatu Synesii ;
dans Tédit. de Vffist. Eccl. de Théodoret et
dlfragrepar Henri de Valois, Paris, 1673, in-fol.;
— Dissertationes epistolicx; dans les Antiqui-
taies Ecoles, orient, de Richard Simon ; —
Hotx et Castigationes in Stephani Byzantini
EOvtxà publiées par Th. Rycke ; Leyde , 1684 ,
in-fol. L'éditeur a joint aux notes de Holstenius
des fragments inédits du poème géographique
de Scyronos de Ghios, avec la trad. latine de
Holstenius et quatre opuscules ; savoir : Comm.
in veterem picturam Nymphxumreferentem ;
De Pila Stqffilari; De Milliario aureo ; Laus
Bore»; les trois premiers ont été insérés dans
les Antiquit. Rom. de Grœvius ; le dernier est
un Éloge du vent Borée que Holstenius corn»
posa pour l'Académie des Humoristes. « II y a
bien de l'esprit et delà lecture dans cette pièce,
dit Bayle, mais franchement elle est plus digne
d'un écolier que d'un homme grave, qui parlait
devant plusieurs cardinaux. » — EpistoL ad
F.-C. Barberinum de Fulcris seu Verubus
simulacri Dianse Ephesiœ; dans la Symbolica
Dianx Ephesiœ Statua de C. Ménestrier et
dans les Anliq. Grxc. de Gronovius ; — Epis-
tolx XXII ad Petrum Lambecium scriptx ;
Iéna, 1 708, in-8°. Larobecius, neveu de Holstenius,
eut envers lui des torts graves, et en fut déshérité.
Les lettres que son oncle lui adressa ont été
réimprimées dans un Recueil de Lettres d? Hols-
tenius publié par fioissonade; Paris, 1817, in-8°.
En 1627 Holstenius traduisit, pour l'édition de
saint Athanase, sept homélies inédites attribuées
à ce saint. Il avait l'intention de publier un
recueil des anciens géographes grecs. Ce projet,
auquel il attachait avec raison beaucoup d'im-
portance, dont il parle souvent dans ses lettres,
et qu'il n'accomplit pas, a été repris par Hudson,
par Gail, par Bernhardy, qui l'ont réalisé impar-
faitement, et par M. Mûller, qui a beaucoup
étendu le plan d'Holstenius et donné la première
édition complète des Geographi Graeci minores,
dans la Bibliothèque grecque de A. F. Didot.
Z.
L. Allatlus, Alpes vrbonse. - pupln, Bibliothèq.
eeeiés. ( (Ux-icptlème alècle). — Nicéroo, Mémoires, voL
XXXI. - Cbauffeplé. Nouveau Dict. hitt. - Bayle, Nou-
vel Ut de la République aes Lettres, Juillet 168*. — Sax,
Onoti/iaticon, t. IV. - Wilken*, Lsben des gelehrten
8
Holler,
Lut» IJolstenii; Hambourg, l7iS, in-*»;
Cimbriatttterata.
holstetn (Kornelis), peintre hollandais,
né à Harlem, en 1553, mort vers 1583. Il
reçut les premières leçons de son père, qui
peignait à gouache et sur verre ; mais il quitta
ces genres pour se consacrer à l'histoire. II
mourut à la fleur de l'âge, et si subitement, que
Ton suppose que sa mort ne fut pas naturelle.
Parmi ses productions on cite deux tableaux qui
suffisent pour sa gloire : Le Triomphe de Bac-
chus et Lycurgue instituant son neveu héritier
de ses biens. A. de L.
Jakob-Campo Weyerroan et Uoubraken, De Sckilder-
honst der Nederlanden, t. III, p. 168. — Descaraps, La
Fie des Peintres hollandais, t. H, p.jw. — PUklngton,
Dictionarv qf Pointers.
* holt ( Sir John) , jurisconsulte anglais, né
à Tbames (comté d'Oxford), en 1642, mort
en mars 1710. II fut envoyé à l'âge de seize
ans au collège Oriel, à Oxford ;. mais, au lieu
de s'appliquer à l'étude, il se livra à toutes
sortes de dissipations. Il se montra si peu scru-
puleux dans le choix de ses camarades qu'on a
pu raconter avec vraisemblance l'anecdote sui-
vante. Quarante ans après sa sortie de l'univer-
sité, il reconnut dans un accusé conduit devarit
son tribunal un de ses anciens compagnons.
II lui demanda ce qu'étaient devenus tel et tel de
leurs amis. « De notre société, répondit l'ac-
cusé, il ne reste que votre seigneurie et moi :
tous les autres ont été pendus. » Vraie ou fausse,
cette anecdote est caractéristique ; celle qui suit
est encore plus curieuse. Pendant une de ses es-
capades, Holt se trouva dans une petite au-
berge, sans argent La fille de l'hôtesse souffrait
d'un accès de fièvre qui avait résisté à l'art d'un
médecin de campagne. Holt proposa de la guérir
au moyen d'un talisman, et écrivit quelques mots
grecs sur un parchemin qu'il roula autour du
bras de la malade. Celle-ci guérit, et le jeune
voyageur fut dispensé de payer son écot. Près
d'un demi-siècle plus tard, une vieille femme fut
amenée devant le grand-juge sous l'inculpation de
sorcellerie. On l'accusait de posséder un charme .
Holt se fit présenter cette pièce de conviction et
reconnut le parchemin qu'il avait donné autre-
fois à son hôtesse. L'accusée fut mise en liberté,
et Ton assure que cette bizarre aventure contri-
bua beaucoup à faire cesser les absurdes procès
de sorcellerie qui déshonorèrent les annales ju-
diciaires de l'Angleterre jusque dans les pre-
mières années du dix-huitième siècle.
Holt débuta au barreau en 1663. Quatorze
ans se passèrent sans qu'il sortit de l'obscurité.
A partir de 1676 il fut employé dans tous les
procès importants, mais sans jamais acquérir
une grande réputation d'éloquence. Apres la ré-
volution de 1688, il fut élu membre de la Con-
vention et élevé à la dignité de grand-juge (lord
chief-justice) du Banc du Roi. Guillaume III
l'admit dans son conseil privé, et voulut lui con-
fier le grand-sceau en 1700. Holt refusa d'être
9
HOLT — HOLWELL
10
chancelier, et resta jusqu'à sa mort à la tète du
Banc du Roi. Il laissa la réputation d'un magis-
trat instruit , intègre et qui n'asservit jamais ses
jugements aux passions politiques. « Depuis son
élévation comme magistrat , dit lord Campbell,
il surpassa les hautes espérances que Ton avait
conçues de lui , et pendant la longue période de
vingt-deux ans il grandit constamment dans
l'admiration et l'estime de ses concitoyens. A
une intégrité exempte de toute souillure, à une
fière indépendance, il joignait la combinaison
rare d'un profond savoir en jurisprudence avec
un bon sens exquis.... 11 avait le génie de la ma-
gistrature, comme Milion avait celui de la poé-
sie, Wilkie celui de la peinture. » L'amour de
la justice fut pour Holt une passion à laquelle il
sacrifia tout, amusements sociaux, distractions
littéraires, intérêts de parti. Il consacra toutes
ses facultés à un unique objet, et il mérita de
devenir en Angleterre le type du juge intègre et
éclairé : « The model on which in England the
judicial character has been formed, » dit lord
Campbell.
Rien ne fait plus d'honneur à Holt que sa
conduite impartiale et humaine dans les procès
publics. « Interrompez-moi autant qu'il vous
plaira, disait-il à lord Preston, si vous pensez
que mon résumé n'est pas exact. » « Quel que soit
mon sort , je ne puis que reconnaître que j'ai été
honnêtement jugé, » disait un complice de lord
Preston, Ashton, qui fut ainsi que lui condamné
à mort pour haute trahison. Ce jnge si traitable
pour les accusés l'était beaucoup moins pour les
grands pouvoirs de l'État. Il résista à la chambre
des pairs, qui voulait lui faire rendre compte d'un
de ses jugements. Dans une autre circonstance ,
il sembla empiéter sur les prérogatives de la
chambre des communes et menaça même, dit-on,
le président (speaker) de la chambre de l'en-
voyer à Newgate. La prorogation du parlement
mit fin à cette collision. On cite encore un
exemple remarquable de l'indépendance de Holt.
Une abominable pratique, qui consistait à enlever
des jeunes gens des deux sexes, pour les trans-
porter aux colonies, avait lieu sans que le gou-
vernement y mit obstacle. La populace, exas-
pérée, voulut détruire la maison où les recruteurs
renfermaient provisoirement leurs victimes.
Aussitôt une compagnie des gardes fut envoyée
contre l'émeute. L'officier qui la commandait
réclama l'assistance du grand-juge. — « Supposez,
dit Holt, que la foule ne se disperse pas, que ferez-
vous?— J'ai ordre de faire feu, » répondit l'officier.
— Faites, répliqua le grand-juge; mais je vous
préviens que si un seul homme est tué, et que
vous soyez mis en jugement pour meurtre , je
vous ferai pendre , vous et vos soldats. » Holt se
rendit ensuite avec quelques constantes sur le
lieu du tumulte, et promit qu'il serait fait justice
des recruteurs. La foule se dispersa tranquille-
ment. On a de Holt : A Report of divers cases
in pleas of the crown, adjudged and détermi-
née in the reign o/the laie king Charles the
Second; 1708, in-fol. Z.
Ufe of tir John Holt s Londres, 1764, to-8*. — Btogra-
phia Britannica.- Wetaby» Lices ofEminent Judgts. -
Lord Campbell , The lAves of the Chie/s-Justice of En-
gland . t II.
holt (/o/m), grammairien anglais, vivait à
la fin du quinzième siècle. Il enseigna à Oxford
la grammaire et les rudiments des belles-lettres
avec zèle et habileté. Il mit au jour un traité
destiné à guider les études des commençants, et
il l'intitula : Lac Puerorum, or mylkejbr chil-
dren (Lait pour les Enfants), imprimé par
Winkin de TVorde , in-4°, sans date. On ne con-
naît, à ce qu'il parait , qu'un seul exemplaire de
ce volume; il faisait partie de l'immense collec-
tion d'Heber. Les bibliographes ne mentionnent
également, circonstance singulière, qu'un seul
exemplaire (dans la bibliothèque Grenville) d'une
autre édition imprimée chez Richar Pynson,
sans date, in-4°. G. fi.
Wood, Athênse Oxonienses, vol. I, col. 18. — Dlbdln,
Tf/poçraphical ÀntiquiOet , vol. Il, p. 380, et lÀbrary
Companion, p. su. - BMiotheca Grenviliana, p. ttt.
; holtei (Charles de), littérateur allemand,
né à Breslau, le 24 janvier 1797. Il servit d'a-
bord comme volontaire dans l'armée prussienne,
débuta ensuite comme acteur aux théâtres de
Breslau et de Dresde. Il vécut longtemps à Berlin,
et dirigea en 1837 le théâtre de Riga. Holtei a
introduit le vaudeville sur le théâtre allemand.
Ses principaux travaux sont : Gedichte (Poésies ) ;
Berlin, 1826; — Jahrbuch deutscher Bûhnen-
spiele (Annales de la scène allemande); Berlin,
1829-1831, 3 vol.; — Schlesische Gedichte
( Poésies en dialecte silésien) ; Berlin , 1830 et
1850; — Deutsche Lieder (Chansons alleman-
des) ; Schleusingen, 1834 et 1836; — Vierzig
Jahre (Quarante Années), mémoires de Holtei;
Berlin, 1843-1850, 8 vol.; — Stimmen des
Waldes ( Voix de Forêt) ; Breslau, 1848 et 1854 ;
— Die Vagabunden (Les Vagabonds ) , roman ;
Breslau, 1852, 4 vol. ; — JSin Mord in Riga ( Un
Meurtre à Riga), idem ; Prague, 1855. R. L.
Conv.'Lez — Plerer, ffnieerjaf.Lex, Suppléai. — Jul.
Schmldt, Getchichte der deutxchen lAtteratur dêt XIX***
Jahrh., 1« édlt.; Leipzig, 185».
HOLTT. Voy. HOELTT.
holwell (John Zephaniah), administra-
teur et écrivain anglais, né à Dublin, le 7 sep-
tembre 1711, mort à Pinner (comté de Mid
dlesex), le 5 novembre 1778. Son père, qui
était marchand de bois de construction , le des-
tina au commerce, et renvoya apprendre le fran-
çais et le hollandais dans une ville des Pays-
Bas. De retour en Angleterre , il fut placé comme
élève chez un chirurgien. En 1732 il se rendit
au Bengale en qualité de clerc au service de
la Compagnie anglaise des Indes orientales, et
s'éleva par degrés jusqu'au rang de membre du
conseil du Williamfort en 1756. A cette époque
Surajah Dowlah, nabab du Bengale, vint mettre
le siège devant Calcutta; le gouverneur anglais
et les plus anciens membres du conseil s'en-
11
HOLWELL — HOLYDÀY
12
fuirent 9 et tout le soin d'une défense impossible
retomba sur Holwell. Après d'énergiques efforts,
il capitula, et obtint la promesse que la vie des
prisonniers serait respectée. Cette convention
fut horriblement violée par les soldats du nabab,
qui entassèrent les cent quarante-six Anglais
dans un réduit de dix-huit pieds carrés appelé
le Trou noir (Black-Hole). On était alors au
temps des plus fortes chaleurs (12 juin), et un
seul homme aurait eu beaucoup à souffrir dans
un pareil cachot mal aéré; ce que cent quarante-
six personnes souffrirent pendant toute une nuit
serait impossible à imaginer, si Holwell, qui survé-
cu taux tortures de cette effroyable prison, ne l'eût
raconté. Lorsque à six heures du matin on ou-
vrit aux prisonniers, on en trouva vingt-trois
qui respiraient encore sur les cadavres de leurs
compagnons. Rendu à la liberté au bout de quel-
ques mois, Holwell alla rétablir sa santé en An-
gleterre , puis il revint prendre en 1758 sa place
dans le conseil du fort William. Clive lui remit
en 1759 le gouvernement du Bengale; mais la
Compagnie ne le maintint pas dans ces hautes
fonctions, qu'elle confia à Yansittar en 1769, et
Holwell, se plaignant que ses services fussent
méconnus, retourna en Angleterre jouir d'une
grande fortune légitimement acquise. Il fut le
premier Européen qui étudia les antiquités in-
diennes ; et bien qu'il ait commis à ce sujet un
grand nombre d'erreurs, à cause de son igno-
rance du sanscrit, il eut le mérite de frayer la
route à des études plus profondes. Il était membre
de la Société royale. On a de Holwell : Narra-
tive of the Sufferings endured in the Black
H oie of Calcutta; Londres, 1757, in-8°; — .
India Tracts; 1763,in-4°; — Interesting his-
torical Events relative to Bengal and Indos-
tan; as also the Mythology of theGentoos;
and a Dissertation on the Metempsychosis ;
Londres, 1765-1766-1771, 3 vol. in-8°. Les deux
premiers volumes ont été traduits en français ;
Paris, 1768, 2 vol. in-8° : cet ouvrage contient,
outre une histoire de l'Inde depuis Aurengzeb,
un Essai sur la Mythologie des Hindous. L'auteur
parle avec une admiration particulière àtsShas-
tras des Gentous, qu'il représente comme le
plus ancien code religieux qui existe, et la
source de la cosmogonie et de la mythologie des
Égyptiens, des Grecs et des Romains. Il incline
même à regarder ces institutions comme d'ori-
gine divine, opinion singulière qu'il maintint plus
explicitement dans le dernier de ses ouvrages; —
An Account of the manner of inoculating
for the small pox in India; Londres, 1767,
in-8° ; — A new Experiment for the Prévention
of Crimes; Londres, 1786, in-8 ;— Disserta-
tions on the Origin, Nature and Pursuits of
intelligent Beings, and on divine Providence,
religions worship ; Londres, 1788, in- 8°. L'idée
que les hommes sont des anges tombés, condam-
nés a souffrir dans des corps mortels, est le prin-
cipe fondamental de cet ouvrage, qui, comme les
autres productions de l'auteur, contient, au mi-
lieu de beaucoup de bizarreries, des témoignages
d'un cœur bienveillant et d'une pensée indépen-
dante. Z.
Atiatic annual Register, 1. 1. — Chalmers, General
biographical Dictionary.
I holtimann (Adolphe), archéologue al*
lemand, né en 1810, à Karlsruhe. Il étudia à
Berlin, a Munich et à Paris, où il eut pour maître
Eugène Burnouf. De retour en Allemagne, il de*
vint précepteur du prince de Bade , et fut nommé
en 1852 professeur de la littérature allemande à
l'université de Heildeberg. On a de lui : Ueber
den griechischen Vrsprung des indischen
Thierkreises (De l'Origine grecque du zodiaque
grec); Karlsruhe, 1844; — Untersuchungen
ueber dos Nibelungenlied (Recherches sur le
poëme des Nibelungen); Stultgard, 1854; — -
Rama, poëme indien d'après Walmiki; Karls-
ruhe, 2 e édit., 1843;— Indische Sagen (Mythes
indiens); ibid., 1845-1847, 3 vol.; — Beitrxge
zur Erklœrung der persischen Beilinschriften
(Études pour servir à l'interprétation des inscrip-
tions cunéiformes persanes); ibid., 1845. R. L.
Plerer, Univertal-Lexik , Supplément. — Conv.~Lex r
holyday (Barten), poète et traducteur
anglais, né à Oxford, en 1593, mort à Ilsley,
près d'Oxford, en octobre 1661. Il lit ses
études dans sa ville natale, et entra dans les
ordres. En 1618, il accompagna comme chape-
lain sir P. Stewart en Espagne et, à son retour,
il fût nommé archidiacre d'Oxford , puis chape-
lain du roi. Il perdit ces deux place» pendant
la révolution, et se tint caché pendant quelque
temps ; il finit cependant par se rapprocher du
pouvoir républicain qui lui donna la cure de
Chilton, dans le comté de Berk. La restauration
lui rendit ses anciennes places , mais ne l'éleva
pas aux dignités ecclésiastiques qu'il espérait.
Son ouvrage le plus connu est une traduction de
Perse et Juvénal, dont la meilleure édition est
celle d'Oxford, 1673, in- fol. Cette traduction
manque absolument d'élégance et de poésie,
mais elle est fidèle. « Si nous nous étions pro-
posé, dit Dryden, de rendre exactement et
presque vers par vers le sens de ees deux au-
teurs, Holyday l'a déjà fait pour nous, et à l'aide
de ses savantes notes on peut comprendre non
seulement Perse et Juvénal, mais même, ce qui
est plus difficile, les vers du traducteur. » Dryden
dit encore de cette traduction : « Holyday a
voulu être littéral ; il a saisi le sens et laissé
échapper la poésie ». Les autres ouvrages de
Holyday sont : Technogamia, ou te mariage
des arts, pièce jouée devant Jacques I e * à Christ-
Church, en 1617, et publiée en 1630; — Phi-
losophie polito-barbarge Spécimen, in quo
de anima et ejus habitibus intellectualistes
quœstiones aliquot libris duobus illustran-
tur; 1633, in-4°; — • Cornes jucundus in Via;
1658; — Survey of the World, poème en dix
livres; 1661, in-8°. Z.
Mhenx Oxonienseï, t. II. - Dryden, V<w**, t. IV,
ts HOLYDÀY
p. t«6, «S ( édlt. «te Malone). - CtaUnew, General Mo-
graphical JHctionary.
EiOLYOAKE ( Francis ), connu aussi sous le
nom latinisé de Francisât* de Sacra-Quercu,
philologue anglais, né en 1567, à Nether Whi-
tacre (comté de Warwick), mort le 13 no»
vembre 1653. Après avoir fait ses études h
Oxford, il fut maître d'école dans cette ville, et
devint recteur de Southam en 1603. H fit partie
de l'assemblée du clergé dans la première année
du règne de Charles I er , et pendant les guerres
civiles il eut beaucoup a souffrir pour la cause
royale. On a de lui : Etymological Diction ar y
of Latin Words; 1606,in-4°. Z.
Wood, Athente Ovonienses. t. II. — Biographia Dra-
matica.
holyoa&e ( Thomas), fils du précédent, né
à Southam en 1616, mort le 10 juin 1675. Il
était chapelain du Collège de la Reine à Oxford
lorsque la guerre civile éclata. Il entra alors au
service du roi, et obtint une commission de capi-
taine. Après la défaite du parti royaliste, il pra-
tiqua la médecine jusqu'au retour des Stuarts,
qui récompensèrent sa fidélité par plusieurs bé-
néfices. Il compila un dictionnaire sur le même
plan que celui de son père, mais dans des pro-
portions plus vastes. Cet ouvrage parut après sa
mort; 1677, in-fol. Z.
Chalmers, Gêner, Biogr. Pictionary.
* holzbauer ( Jgnace), musicien allemand,
né a Vienne, en 1711,mortàManheim, le? avril
1783. Il voyagea en Italie pour se perfectionner
dans son art, et devint maître de la chapelle du
duc de Wurtemberg et de l'électeur palatin.
Vers la fin de sa vie il fut atteint de surdité*
Voici le jugement que porte sur lui Mozart ;
« Holzbauer écrit bien; il a un non style, fait
bien accorder la partie vocale avec l'instrumen-
tale, et compose de très-belles fugues » (Bio-
graphie de Mozart de G.-N. de Nissan, p. 323).
On a de Holzbauer : Isacco, oratorio; — Betu-
lia libsrata, oratorio ; —vingt-six Messes à qua-
tre voix, avec orchestre ; — trente-sept Motets ,
avec orchestre; —un Miserere, avec orchestre;
— // Figlio délie Selve, opéra; Schwetzingen,
1753; — Issifile, opéra représenté pour la pre-
mière fois à Mannheim en 1753; — Don Chis-
ciotte, opéra; — Nitteti, opéra représenté pour
la première fois au théâtre de Turin en 1757 ;
— Alessandro nelV Jndie, opéra représenté
pour la première fois au théâtre de Milan en
1759; — Ippolitoed Aricia, opéra représenté
pour la première fois au théâtre de Manheim en
1768; —Adriano in Siria; 1772; — Gunther
de Schwartzbourg, opéra allemand, représenté
HOLZSCHUHER 14
tuors pour deux violons, alto et basse ; — Treize
Concertos pour divers instrumente. R. L.
FétU, Biographie univ. des M usiciens. — Musicalu-
che Correspondenz, octobre, 1790, — Erscb et Gruber,
Allgem. Encwktopeedie.
holzer (Jean- Rodolphe), historien suisse,
mort à Berne en 1736, où il avait exercé pen-
dant longtemps les fonctions de membre du
conseil , s'«st fait connaître par l'ouvrage : Die
Bûndnisse und Vertrœge der Helvetischen
Nation, welche theils die untersehiedenen
Stsedte, und Republiken mit einander, theils
aile insgesammt mit auswœrtigen Potentaten
haben ( Les Alliances et Contrats des Villes et
Républiques suisses entre elles, et de toute la
Suisse avee les puissances étrangères); Berne,
1737, in-4«. V-u.
Adelunf , Suppl. à Jôeher.
■olzhauskr (Barthélémy), fondateur de
la congrégation des Barthélemytes , né à Langnau,
en 1613, mort h Bingen,en 1658. Il renonça à
la profession de son père, qui était cordonnier,
pour étudier et s'adonner aux pratiques reli-
gieuses. Il vécut d'abord en allant chanter des
hymnes sur les routes; plus tard, grâce à la re-
commandation dequelques personnes charitables,
il entra à Neubourg dans un établissement des-
tiné aux étudiants pauvres; puis il fut admis
chez les jésuites d'Ingolstadt, qui lui enseignèrent
la philosophie. Reçu prêtre en 1639, il conçut le
projet de rendre aux hommes voués comme lui
au sacerdoce la vie en commun des premiers
âges de l'Église. Secondé par d'autres ecclésias-
tiques, il fonda à Tittmoningen une maison des-
tinée à réaliser ce dessein, et pour que cette ins-
titution portât tous ses fruits, il ouvrit, en 1640,
à Salzbourg, un séminaire préparatoire. Holz*
bauser fut successivement curé à Tittmoningen,
à Leoggenthal et à Bingen, où il mourut. Son zèle
et les pratiques de dévotion auxquelles il se livrait
le portaient à la rêverie, à l'exaltation, même à
des visions. Dans telle localité, il fit des prédic-
tions; dans telle autre il crut avoir des révéla-
tions. C'est ainsi, dit-on, que, visité par Charles U v
alors fugitif, il prédit à ce prince un avenir meil-
leur, Holzhauser a publié : Constitutions cum
exereitiis clericorum sxcularium in corn*
muni vivantium; Cologne, 1662 et années
suivantes. En 1680, ces Constitutions furent
confirmées par la cour de Rome; — De ffumi-
litate, publié en même temps qu'un traité De
V Amour de Dieu; Mayence, 1663; — Opuscu-
lum visionum variarum. Il s'y trouve des
prédictions où l'on a voulu voir divers événe-
ments survenus depuis. V. R.
Pocbfelder, Lebentgeschiehte des ehrwuerdigen Bart.
en 1776; *- Der Tod der Dido (La Mort de
Didon), mélodrame; 1779;— Le ISozze d*A-
rianna et di Bacco, opéra; — Tancredi, opéra
représenté pour la première fois au théâtre de
Munich en 1782; — Cent quatre-vingt-seize
Symphonies pour orchestre; — Pix-buit Qua-
pour la première fois au théâtre de Mannheim, 4 Holzhauser; Munich, i8J7, m-*». - Biog. nneraw.
r r . - - - * Bart. Holzhauseri, etc.; Bamberg, 178t. — Vlguier, Vé-
ritable Prophétie du vénérable (Barth.) Holzhauser.
— Ersch et Gruber, Allgem. Encjfklopœdie.
* iiolzschuher (Eucharie-Charles), ar-
chitecte allemand, vivait au commencement du
dix -septième siècle. I) éleva dans le style an-
tique, imité de la renaissance italienne, l'hôtel
HOLZSCHUHER — HOMfiËRG
16
de ville de Nuremberg, commencé en 1616 et
achevé en 1619. C'est on monument imposant
de 86 mètres de longueur, qui s'élève en deux
étages de chacun trente-six fenêtres. Au centre
et aux extrémités se voient des attiques en forme
de pavillon , qui donnent de l'élégance et de la
légèreté à l'édifice. Le porche d'entrée à voûtes
d'arête, reposant sur trois piliers, a un effet de
solidité et de force que l'architecte a obtenu par
des moyens ingénieux et fort simples. La cour
carrée de l'intérieur est belle aussi; mais ses
galeries à jour ne sont terminées que de trois
cotés, les travaux ayant été suspendus et la
guerre de Trente Ans ayant empêché l'exécution
de la quatrième face avec les arrière-bâtiments
projetés. La conception du plan et de la façade
de l'hôtel de ville de Nuremberg prouve que
Holzschuher était un architecte détalent. 11 des-
cendait d'une ancienne famille patricienne. D. R.
Beschreibung der vornehmsten Merkwûrdigkeiten
der Reicfustadt Nûrnberg, par G. G. de Murr*; grand
In- 8°; Sulzbach, 1801. — Nachricht sur dlteren und
neueren GeschicMe der Reicfustadt Nûrnberg, par
J.-C.-F. Kiefhaben ; Noremberg, 1803.
HOMAi (Ljéhérazad ou Tchéréhazad) ,
surnommée Schemiran, reine de Perse, de la
dynastie des Kéianides, régna de 388 ou 386 à
356 avant J.-C. Son père, Ardeschir Bahman
(Artaxerxès Longue-Main) l'épousa, et mourut
peu de temps après, la laissant enceinte. Quoi-
qu'il eût un fils, il disposa du trotte en faveur de
l'enfant dont sa fille accoucherait. Homaï, ayant
donné le jour à un fils, l'exposa sur l'Euphrate,
de peur d'être obligée de lui céder plus tard le
pouvoir suprême. Elle gouverna de manière à
mériter l'affection de tous ses sujets. Cependant
l'enfant royal, recueilli par un paysan et élevé
conformément à la condition de son père adoptif ,
s'engagea dans l'armée, se distingua dans les
guerres contre les Grecs, et devint général. Il
fut alors reconnu par sa mère, qui abdiqua en sa
faveur au bout de trente-deux ans de règne. Il
prit, à son avènement, le nom de Darabl er . Homaï
avait choisi pour capitale la ville de Balkh. Elle
mourut dans la province de Fars. On prétend
que les palais de Hézar-Sitoun (Mille Colonnes)
à Istakhar (Persépolis) et de Tchéhel Minar
(Quarante Colonnes) furent construits par ses
ordres. Quelques auteurs disent qu'elle était
fille deHarets, roi d'Egypte, femme de Bahman ;
d'autres, qu'elle était sœur deDarab. Homaï pa-
rait être la Parysatis (Perizadeh, fille de fée)
des Grecs. Cette dernière était en effet fille d'Ar-
taxerxès, femme et sœur de Darius Nothus le
Bâtard , qui régna de 423 à 404 avant J.-C, qui
fit, comme Darab, la guerre en Asie Mineure. Elle
jouit d'un grand pouvoir sous le règne de son
mari et de son fils Artaxerxès Mnémon , mort
en 358. Des historiens mal renseignés auront
pu facilement la prendre pour souveraine, tandis
qu'elle n'était que femme ou mère du roi. Les
Orientaux semblent confondre Homaï, surnommée
Schemiran, avec la fameuse Sémirarais. Ces
deux reines ont en effet plusieurs traits de res-
semblance; toutes deux régnèrent avec gloire
dans les mêmes pays ; toutes deux elles usur-
pèrent le pouvoir sur leur propre fils ; toutes
deux elles firent de grandes constructions; mais
l'une vivait au quatrième, l'autre au vingtième
siècle avant J.-C. E. Beauvois.
Modjmel at-Uwarikh, trad. par M. Mohl; dans le
Journ. Asiate, mi, 1. 1, p. 168, sir. - Flrdoosl, History
of the eariy Kings of Persia, trad. par Atktnsoo;
Lond., 188î',in-8°, p. 48S-M. — Hamzah Isfafaanl, An-
nalium Libri X, texte et trad. par Cottwaldt, p. S7. —
Mlrkhond, Hist. ofihe early Kings of Persia, trad. par
D. Shea, 355-357. — Anquetli du Perron, Les Medes et
les Perses comparés aux Kéaniens ; dans les a ne. Mém.
de l'Acad. des Inscriptions, t. XI.. - Malcolm, flirt.;
of Persia; Londres, 1815 in-t», 1. 1, 68-33&-4Q.
homa! dah. Voy. homéidah.
homann (Jean- Baptiste), géographe alle-
mand, né le 20 mars 1663, à Kamlach (Ba-
vière), mort à Nuremberg, le 1 er juillet 1724.
Ses parents l'avaient destiné à la vie monastique.
Voulant se soustraire à cette carrière, pour la-
quelle il ne se sentait pas de goût, il quitta la
maison paternelle, et se rendit à Nuremberg, où
il embrassa la religion protestante. En 1687,
J.-B. Homann devint notaire, mais il s'occupa
préférablement de la gravure en cuivre et de la
confection de cartes géographiques. Ce genre
de travail , dont on sentait alors tout le besoin ,
l'intéressa vivement, et son ardeur s'accrut avec
les succès qu'il y obtint. En 1702 il fonda une
maison pour le commerce de ces cartes, et il en
publia successivement près de deux cents, qui se
distinguèrent généralement par leur bon marché.
11 confectionna aussi des sphères armillaires et
des globes portatifs, ainsi que d'autres objets
mécaniques d'art. L'Académie des Sciences de
Berlin l'admit au nombre de ses membres; l'em-
pereur d'Allemagne le décora d'une chaîne d'hon-
neur en or, et Pierre le Grand le nomma son
agent en Allemagne. Homann mourut après avoir
élevé à une grande prospérité son établissement,
qui contribua aux progrès qu'a faits en Alle-
magne l'étude de la géographie, et qui lui survé-
cut. Son fils, Jean-Christophe Homann, né en
1703, mort en 1730, le dirigea pendant quel-
ques années en commun avec son ami le géo-
graphe Jean- Michel Franz. Plus tard il devint
la propriété de Christophe-François Fembo. Les
principaux travaux de J.-B. Homann sont :
Atlas du Monde entier, en 126 cartes in-folio;
Nuremberg, 1716; —Atlas methodicus ex-
plorandis juvenum prqfectibus in studio
geographico, ad methodum ffubuerianum oc-
comodatus; ibid., 1719, in-folio. Cet Atlas,
composé de 18 cartes, est précédé d'une intro-
duction en 4 feuilles. V-c.
Kyrlng, Litterar. Almanach : GeschicMe der Ho-
mann'schen (ïfficin, p. M. — Gaspart et Bcrtuch, Geo-
araph. Ephemeriden vom Jakre, 1801 ; livr. IX. — Ban-
der, Gelehrtes Baiern, t. !, p. 518. - Encyclop. des Gens
du Monde. - Wlll, Nûrnberg. Gelekert. LexiMon.
homberg (Guillaume), chimiste hollan-
dais, né le 8 janvier 1652 à Batavia (Java), mort
17
HOMBERG
18
le 24 septembre 1715 à Paris. Son père, gen-
tilhomme saxon ruiné par la guerre, s'était
mis au service de la Compagnie hollandaise des
Indes orientales. En quittant les Indes, il vint
avec sa famille à Amsterdam, où il séjourna
plusieurs années. Le jeune Guillaume Homberg,
qui n'avait presque rien appris aux Indes, se
mit avec ardeur à l'étude, et rattrapa le temps
perdu. Il suivit des cours de droit à Iéna et à
Leipzig, et se fit recevoir avocat à Magdebourg
en 1674. En même temps, l'étude de la nature
excitait sa curiosité ; il herborisait le jour et ob-
servait les astres la nuit. « Il devenoit ainsi
botaniste et astronome par lui-même, et en
quelque sorte malgré lui, dit Fontenelle; car il
s'engageoit toujours plus qu'il ne vouloit. Il
poussa assez loin son étude des plantes, et dans
le même temps il se fit un globe céleste creux
en façon d.e grande lanterne, ou, à la faveur d'une
petite lumière placée au dedans, on voyoit les
principales étoiles fixes emportées du même mou-
vement dont elles paroissent l'être dans le ciel. »
Les travaux de Otto de Guéricke attirèrent
l'attention de Homberg, qui s'attacha à lui pour
s'instruire dans la physique expérimentale, « et
cet habile homme, quoique fort mystérieux, ajoute
Fontenelle, ou lui révéla ses secrets en faveur de
son génie , ou ne les put dérober à sa pénétra-
tion ». Ses amis, voyant Homberg s'éloigner
de plus en plus du barreau , s'imaginèrent de
chercher à le marier, pour le rappeler à sa pro-
fession par les nécessités de la vie; mais pour
rester plus maître de lui-même, il s'éloigna de
son pays et alla en Italie. Il s'arrêta un an à
Padoue, où il s'appliqua à la médecine, à l'a-
natomie et à la botanique. A Bologne, il tra-
vailla sur la pierre phosphorescente qui porte le
nom de cette ville ; il parvint à lui rendre sa
lumière, dont le secret s'était presque perdu ; à
Rome il se lia particulièrement avec Marc-Antoine
Celeo , gentilhomme romain qui réussissait fort
bien à faire de grands verres de lunette : il s'y ap-
pliqua avec lui, et réussit. Homberg vint ensuite
en France ; de là il passa en Angleterre, où il tra-
vailla quelque temps avec Boyle. Il retourna
alors en Hollande , où il se perfectionna encore
en anatomie sous Graff, et enfin il revint à
Quedlimbourg retrouver sa famille. Peu de
temps après il se fit recevoir docteur en méde-
cine à Wittemberg. Ses parents voulaient qu'il
s'adonnât à la pratique de son art; mais lui,
toujours désireux d'apprendre, partit pour vi-
siter les pays du Nord. Les phosphores faisaient
alors du bruit. Balduin et Kunkel avaient trouvé
chacun un phosphore. Homberg vit d'abord Bal-
duin, et trouva celui de ce chimiste très-beau et de
la nature de la pierre de Bologne, quoiqu'un peu
plus faible en lumière; il en obtint le secret en
échange de quelques autres. Il alla trouver Kunkel
à Berlin , et il obtint son secret pour celui du
petit homme qui se cache dans un tuyau quand
le temps doit être pluvieux et en sort quand il
doit faire beau : c'était le vrai phosphore, ex-
trait de l'urine. Homberg alla voir les mines de
Saxe , de Bohême, de Hongrie et de Suède. A
Stockholm il travailla avec Hierna dans le nouveau
laboratoire de chimie que le roi de Suède ve-
nait de créer, et contribua aux premiers succès
de cet établissement. « On s'adressoit souvent
à lui , dit Nicéron, ou pour lui demander des dé-
cisions sur des difficultés qui partageoient les
plus habiles, ou pour l'engager à des recherches
qu'ils n'osoient entreprendre, et les journaux de
Hambourg de ces temps-là, imprimés en alle-
mand , sont pleins de mémoires qui venoient de
lui. » — « Dans tous ses voyages, dit Fontenelle, il
s'instruisoit des singularités de l'histoire naturelle
des pays et observoit les industries particulières
des arts qui s'y pratiquent; car les arts fournis-
sent une infinité d'expériences très-dignes d'at-
tention inventées quelquefois par d'habiles gens
inconnus, et assez souvent par de gros artisans
ne songeant qu'à leur utilité ou à leur commo-
dité , et non à découvrir des phénomènes de
physique , en ont découvert de rares et de mer-
veilleux dont ilsnes'apercevoientpas. Ainsi il se
composoit une physique toute de faits singuliers
et peu connus, à peu près comme ceux qui, pour
apprendre l'histoire au vrai, iraient chercher les
pièces originales cachées dans des archives. »
Sur les instances de son père, Homberg revint
en Hollande; mais au lieu de s'y fixer il retourna
à Paris. Son père le rappelait encore, et il allait
partir lorsque Colbert l'envoya chercher de la
part du roi. Ce ministre lui fit des offres avan-
tageuses, et, après quelques jours de réflexion,
Homberg consentit à rester. « Sa plus puissante
raison étoit, dit Fontenelle , que la pratique fa-
milière aux protestants de lire tous les jours un
chapitre de l'Écriture Sainte lui avoit rendu fort
suspecte l'Église protestante, dans laquelle il étoit
né, et qu'il se sentoit fort ébranlé pour rentrer
dans l'Eglise catholique , ce qu'il fit en 1682. »
Chauffepié ne croit pas que ce soit là le vrai
motif de la conversion de Homberg, qui se sera,
dit-il, laissé éblouir par la grandeur des offres
que lui fit Colbert, et se sera flatté d'une haute
fortune. Quoi qu'il en soit, Homberg perdit Col-
bert l'année suivante, et son père l'ayant déshé-
rité pour avoir changé de religion, il se trouva
dans une grande gêne. Il se lia avec l'abbé de
Chalucet, qui fut depuis évéque de Toulon, et
qui était fort curieux de chimie. Homberg était
trop habile pour croire à la pierre philosephale;
mais un autre chimiste, qui travaillait aussi avec
le prélat, lui donna, pour vaincre son incrédulité,
un lingot d'or qu'il prétendait avoir obtenu par
transmutation, et qui valait bien 400 fr. Hom-
berg accepta, et par prudence s'en retourna à
Rome, en 1685. Il se livra dans cette ville à la
pratique de la médecine, et avec assez de succès :
« II ne vantoit ni ses remèdes, ni sa capacité,
dit Fontenelle; il n'osoit dire plus qu'il ne savoit,
ni donner le vraisemblable pour assuré, et par
19
HOMBEBG
20
là il ne pouvait guère être le médecin que de
malades assez raisonnables. 11 se faisoit même
peu d'honneur des succès , et renvoyoit à la na-
ture la plus grande partie de la gloire; mais au
lieu de l'art de se faire valoir, il avoit celui de
découvrir assez juste par des raisonnements fins
la cause de la maladie et le remède qui conve*
Doit » De retour à Paris au bout de quelques
années, il y marqua sa place parmi les plus sa*
vants par ses vastes connaissances, ses expé-
riences, ses découvertes, par une machine pneu*
matique de son invention plus parfaite que celles
de Guérickeet de Boyle, par des microscopes de
sa façon, très-simples, très-commodes et donnant
d'assez bons résultats. Dès que l'abbé Pignon eut
en 1691 la direction de l'Académie des Sciences, il
y fit entrer Homberg et Tournefort. Il donna aussi
à Homberg le laboratoire de l'Académie. Hom-
berg donna une nouvelle vie à ce corps savant
par ses communications intéressantes et nom-
breuses. Le duo d'Orléans, voulant apprendre
la chimie et la physique expérimentales, s'adressa
à Homberg, sur l'indication de l'abbé Dubois, le
prit auprès de lui en 1702, lui donna une pension
et un laboratoire parfaitement fourni, ou le duc
venait chaque jour assister à des expériences
et en faire lui-même. Ce prince ayant aussi fait
venir d'Allemagne la même année un grand mi-
roir ardent, Homberg s'en servit pour faire un
grand nombre d'expériences nouvelles sur la
fusibilité et la volatilité des métaux. En 1704
on vint offrir à Homberg de grands avantages
delà part de l'électeur palatin; mais l'attache-
ment qu'il avait pour le duc d'Orléans ne lui
permit pas d'accepter. Il fut donc nommé pre-
mier médecin de ce prince à la fin de 1704 ; mais
toute charge qui exigeait résidence hors de Paris
étant incompatible avec le titre d'académicien
pensionnaire, aux termes du règlement de l'Aca-
démie, Homberg déclara que s'il fallait opter,
il se déterminerait pour l'Académie. Le roi le
jugea digne d'une exception, et Homberg garda
les deux places. En 1708 il se maria à la fille du
médecin Dodart, laquelle aimait tant la chimie
qu'elle servait souvent à son mari d'aide et de
préparateur intelligent. Quelques années après
il devint sujet à une légère dyssenterie qu'il se
guérissait et qui revenait de temps en temps. Le
mal prit bientôt plus de force et finit par Tenir
porter. Peu de jours avant sa mort, il écrivit au
duc d'Orléans, devenu régent, pour lui recom-
mander tout ce qu'il avait le plus aimé, sa veuve
et l'Académie des Sciences.
« Quoiqu'il fût d'une complexion faible, dit
Fontenelle , il était fort laborieux et d'un cou-
rage qui lui tenoit lieu de force. Son caractère
d'esprit est marqué dans tout ce qu'on a de lui,
une attention ingénieuse surtout, qui lui faisoit
naître des observations où les autres ne voient
rien, une adresse extrême pour démêler les
routes qui mènent aux découvertes, des tours
d'expérience singuliers et qui seroient trop artifi-
cieux si on avait tort de s'obstiner à les connoitre,
une finesse sensée et une solidité délicate, une
exactitude qui, quoique scrupuleuse, sçavoit
écarter toutjfinutile; toujours un génie de nou-
veauté pourqui les sujets les plus usez ne Té-
taient point... Il donnoit de bonne grâce ce qu'il
savait; il laissoit aux gens à sentir le prix de ce
qu'il leur avoit donné. Sa manière de s'expliquer
était tout à fait simple, mais méthodique, précise
et sans superfluité... Jamais on n'a eu des
mœurs plus douces ni plus sociables ; il était
même homme de plaisir... Une philosophie saine
et paisible le disposoit à recevoir sans trouble
les différents événements de la vie, et le ren-
doit incapable de ces agitations dont on a,
quand on ▼eut, tant de sujets, o
Homberg a fait connaître en France la décou-
verte du phosphore , dont il a donné, d'après
Kunfcel, une description détaillée, Il étudia un
des premiers les propriétés de ce nouveau corps,
et essaya de démontrer que la flamme du phos-
phore est plus intense que celle du feu ordinaire.
Le phosphore était , selon lui , « la partie la plus
grasse de l'urine concentrée dans une terrô fort
inflammable ». Homberg dfvisait les phosphores
en deux espèces : la première comprenant ceux;
qui luisent jour et nuit , sans qu'il soit besoin de
les allumer, pourvu seulement qu'on ne les tienne
pas dans un air trop froid , comme sont tous
ceux que l'on fait d'urine et de sang humain,
c'est-à-dire le phosphore proprement dit; la se-
conde renfermant ceux qui, pour paraître lumi-
neux, ont seulement besoin d'être exposés au
grand jour, sans qu'il soit nécessaire de se mettre
en peine si Pair dans lequel on les expose est froid
ou chaud ; tels sont la pierre de Bologne et le
phosphore de Balduin , ce que l'on appelle au •
jourd'hui des sels pyrophoriques , substances
que l'on avait confondues primitivement avec le
vrai phosphore. A propos de la préparation du
phosphore de la première espèce, Homberg re-
marque que toutes les urines ne donnent pas
du phosphore ; qu'il faut qu'elles proviennent de
personnes qui boivent de la bière; celles qui
viennent du vin en donnent à peine. « Cette ob-
servation fort curieuse, ajoute M. Hoefer, ne pa-
rait pas dénuée de fondement quand on songe que
l'orge, qui entre dans la composition de la bière ,
est, comme tous les grains des céréales, riche en
phosphates, dont le vin est presque entièrement
dépourvu. L'auteur raconte que la découverte du
phosphore appelé phosphore de Homberg est due
au hasard. Voulant un jour calciner un mélange
de sel ammoniac et de chaux vive, il fut surpris
de voir que ces deux substances produisaient ,
en fondant, une masse blanche qui avait la
propriété de devenir lumineuse à chaque coup
de pilon. Voici comment il enseigne à préparer
son phosphore : Prenez une partie de sel am-
moniac en poudre , et deux parties de chaux
vive; mêlez-les exactement , remplissez-en un
creuset et mettez-le à un petit feu de tante.
ai
HOMBERG
32
On voit d'après cela que le phosphore de Hom-
berg est du chlorure de calcium. Dans un autre
mémoire il indique une méthode pour faire l'ar-
bre de Diane; qui ne diffère pas beaucoup de la
méthode d*Eck de Sulzbach, dont il ne parait pas
avoir eu connaissance. Dans un mémoire sur la
glace, il s'attache à prouver que si l'eau aug-
mente de volume en se congelant , c'est parce
qu'il y a dans ses pores beaucoup plus d'air ren-
fermé que dans ceux de tous les autres liquides ;
que lorsqu'on fait congeler l'eau dans le vide , et
qu'elle est bien purgée d'air, elle n'a rien de par-
ticulier dans sa congélation ; qu'en un mot la
glace formée dans le vide a, conformément à la
loi générale , moins de volume que n'en avait
l'eau avant d'être congelée. Homberg attribuait
Tévaporationde l'eau dans le vide» non pas à la
diminution de la pression de l'air, mais au mou-
vement de la matière éthérée , qu'il suppose éga-
lement jouer un grand rôle dans les phénomènes
de la lumière. « « Mais les plus importants de tous
les mémoires de Homberg, ajoute encore M. Hoe-
fer, sont ceux qui traitent de la saturation des aci-
des par les alcalis, ou réciproquement. On y trouve
les premiers jalons de la grande loi des propor-
tions définies dans lesquelles s'effectuent les com-
binaisons des acides et des bases. La force des
acides , dit l'auteur, consiste à pouvoir dis-
soudre, celle des alcalis consiste à être dis-
solubles; et plus ils le sont t plus ils sont
parfaits dans leur genre. Substituez aux roots
dissoudre et dissolubles, neutraliser et neu-
tralisables , et vous aurez la définition des aci-
des et des bases , telle qu'on la donne aujourd'hui.
Pour démontrer que le même alcali (potasse)
se combine avec des proportions différentes
d'acides différents , Homberg traitait une quan-
tité déterminée (une once) de sel de tartre cal-
ciné (potasse) avec de l'esprit de nitre en excès
( acide nitrique concentré). Après avoir fait éva-
porer jusqu'à siccité , il pesait le résidu , et Yaug-
mentatioH du poids du sel indiquait la quan-
tité d'acide absorbée. Il avait ainsi dressé une
table des différentes proportions d'acides volatils
( susceptibles d'être chassés par l'évaporation )
se combinant avec la même quantité de base.
Dans un second mémoire, il revient sur le même
sujet, et s'attache de plus en plus à démontrer
que la quantité d'ua acide que prend un alcali
est la mesure de la force passive de cet alcali.
Enfin il fait voir dans ce même travail que la
chaux éteinte (carbonatée) dissout la même
quantité d'acide que la chaux vive. Cette expé-
rience lui servit d'argument pour renverser la
théorie de quelques chimistes, d'après laquelle
la chaux devait perdre sa force alcaline par la
calcination. Enfin dans une Notice sur les huiles
des plantes , il signale l'imperfection des pro-
cédés employés par les distillateurs et les phar-
maciens dans la préparation des essences. Il dit
qoe pour retirer des plantes (des roses par
exemple) toute leur huile essentielle, il faut les
laisser macérer pendant quinze jours dans de l'eau
acidulée par de l'esprit de vitriol. » — Homberg
a attaché son nom à l'acide borique, qui reçut
d'abord le nom de sel sédatif de Homberg.
Homberg n'a pas publié de corps d'ouvrage;
ses recherches sont consignées dans les mémoires
suivants, imprimés dans V Histoire de V Académie
des Sciences : Manière de faire le Phosphore
brûlant de Kunkel; 1692; — diverses Expé-
riences du Phosphore; ibid.; — Réflexions
sur différentes végétations métalliques; ibid.;
— Manière d'extraire un sel volatil minéral
en forme sèche; ibid. ; — Réflexions sur l'ex-
périence des lames de verre qui se brisent
dans le vuide; ibid.; — Expériences sur la
glace dans le vuide; 1693; —, Expériences
du ressort de Voir dans le vuide; ibid.; —
Expérience de V évaporât ion de Veau dans
le vuide , avec des réflexions; ibid.; — Ex*
périences sur la germination des plantes;
ibid. ; — Observations de la différence du
poids de certains corps dans Vair libre et
dans le vuide; ibid. ; — Observation curieuse
sur une infusion d'antimoine; ibid.; — Ré-
flexions sur un fait extraordinaire arrivé
dans une coupelle d'or; ibid. ; — Nouveau
Phosphore; ibid.; — Observations sur des
étincelles de lumière et sur les couleurs
telles qu'on les voit dans le vuide; 1694; —
Dissertation sur la diversité des parties des
huiles des plantes ; 1695 ; — Dissertation sur
l'origine et la nature des esprits acides;
ibid. ; — Observations sur la diverse pesan-
teur du même air , selon la variété des degrés
de chaleur; 1696; — . Observation sur la
quantité exacte des sels volatils acides
contenus dans les différents esprits acides;
1699 ; — Essais pour examiner les sels des
plantes; ibid. ; — Observations sur cette sorte
d'insectes qui s'appellent ordinairement de-
moiselles; ibid.; — Essais sur les injections
anatomiques; ibid.; — Observations sur la
quantité des acides absorbez par les alcalis
terreux; 1700; ^ Observations sur les dis-
solvons du mercure ; ibid. ; — Observations
sur les huiles des plantes ; ibid. ; — Sur Va-
cide de l'antimoine; ibid.; — Observations
sur le raffinage de l'argent; 1701; — Obser-
vations sur quelques effets des fermentations ;
ibid.; — - Observations sur les analyses des
plantes; ibid.; — Observations sur les sels
volatils des plantes; ibid. ; — Essais de Chi-
mie; 1702; — • Observations faites par le
moyen du verre ardent; ibid.; — Essai de
l'analyse du soufre commun ; 1703; — Obser-
vations sur un battement de veines semblable
au battement des artères; 1704; — Suite des
Essais de Chimie, article 3 : Du Souphre prin-
cipe ; 1705 ; — Observation sur une dissolution
de l'argent; 1706; — Observations sur le fer
au verre ardent; ibid.; — Suite de l'article
des Essais de Chimie : Du Souphre principe ;
23
HOMBERG — HOME
24
îbid. ; — Eclaircissement touchant la Vitri-
fication de VOr au verre ardent; 1707; —
Observations sur les Araignées; ibid. ; — Mé-
moire touchant les Acides et les alcalis;
1708; —Suite des Essais de Chimie, article 4 :
Du Mercure; 1709; — Observations touchant
l'effet de certains acides sur les alcalis vo-
latils; Ma.;— Observations sur les matières
sulphureuses et sur la facilité de les changer
d*une espèce de soufre en une autre; 1710;
— Mémoire touchant les Végétations arti-
ficielles; ibid.; — Observations sur la Ma-
tière fécale; 1711; — Phosphore nouveau,
ou suite des observations sur la matière fé-
cale; ibid.; — Observations sur V Acide qui
se trouve dans le sang et dans les autres par-
ties des animaux, deux mémoires; 1712; —
Manière de copier sur le verre coloré les
pierres gravées; ibid.; — Observation sur
une séparation de Vor avec V argent par la
fonte; 1713; — Observation sur une subli-
mation du mercure; ibid. ; — Observations
sur des matières gui pénètrent et qui tra-
versent les métaux sans les fondre; ibid.;
— Mémoire touchant la volatilisation des
sels fixes des plantes; 1714. Homberg donna
aussi le secret de faire de beau carmin ; on trouve
encore de lui diverses expériences sur le noufre
d'antimoine, la préparation d'une sorte d'or po-
table, etc. L. Louvet.
Fontenelle, Éloge de G. Homberg. — Chauffcplé, Nouv.
Dict. hist. et crit. — Nlcéroo, Mémoire» pour servir à
l'hitt. des hommes illustres dans ta rép. des lettres,
t XIV, p. 151. - Duhamel, Regiœ Scient. Jcad. Hist. —
F. Hoefer, Histoire de la Chimie, U 11, p. 807 et saiv.
* hombres-firmas (Louis-Augustin, ba-
ron D f ), naturaliste et agronome français, né vers
1785, à Âlais (Gard ), mort dans cette ville, le
5 mars 1857. Il était petit-neveu des savants
Boissier et Sauvages. En 1812 il fut nommé
membre du conseil d'arrondissement d 'Alais,
fonctions qu'il conserva pendant vingt ans. En
1818 il fut appelé à celles de maire de sa ville na-
tale, et les exerça jusqu'en 1826. Ses travaux
scientifiques lui méritèrent, en 1836, la nomina-
tion de correspondant de l'Académie des Sciences.
11 fit des voyages scientifiques en Suisse, en Ba-
vière, en Belgique, en Hollande, en Angleterre, en
Italie. On a de lui : Mémoire sur VArrosement
dans les Cévennes; 1809, in-8° ;— Recueil de
Proverbes météorologiques et agronomiques
des Cévennes, suivi des Pronostics des pay-
sans languedociens sur les changements de
temps ;in•8• ; — Nivellement barométrique des
Cévennes; 1832, in-8° : la Société royale de
Géographie décerna une médaille d'or à ce mé-
moire ; — Mémoire sur quelques végétaux qui
croissent spontanément dans le département
du Gard; 1834, in-8°; — Recherches sur les
baromètres vivants; 1838, in-8°; — Mémoire
sur le Mûrier des Philippines; 18.., in -8°; —
Recueil de Mémoires et d'Observations de phy-
sique 9 de météorologie, d'agriculture et d'hit*
toire naturelle; Nîmes, 1839-1847, 6 vol.
in-8°; l'auteur a réuni dans ce recueil les diffé-
rents mémoires qu'il avait précédemment publiés.
Le tome XXVIII de la Société royale d'Agricul-
ture contient de M. dHombres un Mémoire sur
le Châtaignier, et Ton trouve de lui quelques
notices dans le Recueil de V Académie du Gard*
Des essais qu'il a faits sur les différentes variétés
de la pomme de terre lui valurent une médaille de
la Société royale d'Agriculture. Parmi plusieurs
communications qu'il fit à l'Académie royale des
Sciences, on remarque : une Description de la
Nerinée gigantesque , qui fut insérée dans le
compte-rendu de cette académie (année 1 838 ) ; —
une Note sur la collection géologique des Cé-
vennes, qu'il avait formée à Alais (1839) ;— le Ré-
sumé des Observations métérologiques faites
à Alais pendant trente-cinq ans (ibid.);— une
Note sur les fossiles des environs d 1 Alais
(1740), etc. Il fit don au Muséum d'Histoire na-
turelle de Paris des fragments d'os fossiles dé-
couverts dans les Cévennes. Guyot de Fere.
Discours de M. de Retz, sur la tombe d'Hombres de
Firroa». — Renseignements particuliers.
home (David), controversiste écossais,
vivait dans la première moitié du dix-septième
siècle. Il descendait d'une famille considérable
d'Ecosse. Il passa la plus grande partie de sa
vie en France, où il fut pasteur de Gergeau. Jac-
ques I er remploya à concilier Tilenus et Du Mou-
lin , et même à réunir, s'il était possible , toutes
les sectes protestantes dans une même profes-
sion de foi : projet qui fut reconnu impraticable.
On ignore la date de la mort de Home. On a de
lui: De Unione Insulas Britannica Tractatus;
Londres, 1605, in-4°; — Lus us poetici; Lon-
dres, 1605, in-4°; — Le C ontr assassin ; Ge-
nève, 1612, in-8°; — Lettres et Traitez chr es-
tiens; Berg, 1613, in-12; — V Assassinat du
Roy, ou maximes du Vieil de la Montagne va-
ticane et de ses assassins , practiquées en la
personne de deffunct Henry le Grand; in- 8° ;
— Régi suo Scotix Gratulatio ; Edimbourg ,
1617, in-4° ; — Apologia basilica , seu Machia-
velli ingenium examinatum in libro quem
« Princeps >» inscripsit; Paris, 1626, in-4°; —
Pœmata; Paris, 1639, in-4*. Les poésies latines
de Home ont été réimprimées en partie dans
les Deliciœ Poetarum Scotorum; Amsterdam ,
1637, 2 vol. in-12. On attribue à Home une
General HistoryofScotland; Edimbourg, 1617,
in-fol. Z.
Prosper Marchand, Diction, historique. — Eag. et Ém.
Haag, La France protestante.
home (Henri), lord Kames, jurisconsulte
et philosophe écossais, né en 1696, à Kames, dans
le comté deBerwick, mort le 27 décembre 1782.
Il étudia le droit à l'université d'Edimbourg, et
fut reçu avocat en 1724. Diverses publications
sur des sujets de jurisprudence lui valurent d'a-
bord une nombreuse clientèle; puis, en 1752, la
place de juge de la cour de session, avec le titre
de lord Kames, et enfin en 1763 la dignité de
2&
HOME
26
lord du Justicier, c'est-à-dire du suprême tri-
banal criminel d'Ecosse. Les soins de l'agricul-
ture et les méditations métaphysiques furent
pour lui un délassement de ses travaux judi-
ciaires, et donnèrent lieu à quelques-uns de ses
meilleurs ouvrages. Ses écrits, qui sont nombreux
et variés, attestent un esprit solide, instruit, in-
dépendant, qui mettait de la clarté et de l'agré-
ment dans les sujets les plus abstraits. On a de
lui : Remarkable Décisions in the Court of Ses-
sions ; 1728, in-fol. : ouvrage que l'auteur aug-
menta et arrangea plus tard sous forme de dic-
tionnaire; 1741, 2 vol. in-fol.; — Essays on
several Subjects in law; 1732, in-8° ; - - Essays
on several Subjects concerning British Antique
lies; 1747, in-8°; -~ Essays on the Principles
ofMorality andnatural Religion; 1751,in-8°.
Henri Home avait eu dès sa jeunesse beaucoup
de goût pour les discussions métaphysiques , et
il avait entretenu une correspondance sur des
sujets de philosophie avec Berkeley, Butler, le
docteur Glarke et d'autres éminents logiciens.
Enhardi par l'exemple de son ami David Hume,
dont il prétendait combattre le scepticisme , il
tenta de prouver, dans ses Essais sur les Prin-
cipes de la Moralité et de la Religion natu-
relle, que les lois qui président à la conduite
de l'homme ont leur fondement dans la consti-
tution de l'être humain , et sont aussi certaines,
anssi immuables que les lois physiques qui rè-
glent tout le système du monde. Une doctrine
aussi fortement empreinte de fatalisme souleva
beaucoup de réclamations dans le clergé, et Home
crut prudent d'adoucir quelques passages dans
la seconde édition; — Thestatute Law ofScot-
land abridged, with historical Notes; 1757,
in-8° ; — Historical Law Tracts ; 1759, in-8° ;
— Principles ofEquity; 1760, in-fol.; — In-
troduction to the Art of Thinking; 1761 , in-1 2 :
compilation bien faite et destinée à la jeunesse;
— Eléments of Criticism; 1762, 3 vol. in-8°.
Cet ouvrage, où Home essaya de rattacher la cri-
tique littéraire aux principes philosophiques ,
fut très-admiré, et il a encore des lecteurs; —
Sketches ofthe History of Mon; 1773, 2 vol.
in-4°; — The Gentleman Former, being an
attempt to improve agriculture by subjec-
ting it to the test of rational principles;
1777, in-8°; — Loose Hints upon Education,
chiefly concerning the Culture ofthe Heart;
1781, in 8°. Z.
Woodfaouselee, Memotrs of the IÂfe and Writings of
hon. Henry Home of Kames ; t vol. in-4». — Cbalmen,
General Biographical Dictionary.
ho aie ( Francis ), médecin anglais, vivait au
dix-huitième siècle. Il pratiqua la médecine à
Edimbourg, et fut professeur de matière médi-
cale à l'université de cette ville. On a de lui :
De Febre rémittente; Edimbourg, 1750, in-8°;
— On the Contents and Virtues ofthe Dance-
spaw; ibid., 1751, in-8°; — Principia Medi-
cinœ; ibid., 1758, in-8° ; traduit en français par
Gastellier, Paris, 1771, in-8°; — The Princi-
ples of Agriculture and Végétation ; Edim-
bourg, 1758, in-8°; — Médical Facts and Ex-
periments; Londres, 1758, in-8°; — Inquiry
into Nature, Cause and Cure of the Croup;
1765, in-fol. — Clinical Experiments, histo-
riés and dissections; Lond., 1781, in-8*. Z.
Biographie médicale.
home ou hume (John), auteur dramatique
écossais, né près d'Ancrum, dans le comté de
Roxburgh, en 1724, mort le 4 septembre 1808.
Destiné à la carrière ecclésiastique, il achevait
ses études à Edimbourg lorsque éclata la révolte
jacobite de 1745. 11 entra comme volontaire dans
l'armée royale, fut fait prisonnier au combat de
Falkirk, et ne recouvra la liberté qu'après la
bataille de Culleden. Il revint à ses études, et
fut nommé, en 1750, ministre de Athelstaneford,
dans l'£ast-Lothian. Tandis qu'il remplissait ces
fonctions ecclésiastiques, il fit jouer au théâtre
delà Canongate, à Édimboorg, en décembre 1756,
sa tragédie de Douglas. Cette production, par-
faitement innocente d'ailleurs, était une pièce de
théâtre : ce fut assez peur soulever le clergé
écossais, au point que Home dut abandonner sa
paroisse, et quitta même l'Ecosse. Cette persé-
cution ne nuisit en rien à ses succès littéraires.
David Hume, son ami et peut-être son parent,
le loua « de posséder le véritable génie théâtral
de Shakspeare et d'Otway, purifié de la barbarie
de l'un et delà licence de l'autre ». Avec cette
recommandation, Home présenta, au mois de
mars 1757, son Douglas au public de Covent-
Garden, qui l'applaudit médiocrement. Cependant
cette tragédie intéressante et bien écrite triom-
pha de la froideur du public, et finit par rester
au répertoire. Malheureusement pour sa ré-
putation , Home fit suivre sa première pièce de
cinq tragédies qui ne la valaient pas à beaucoup
près, et dont voici les titres : Agis; 1758; —
The Siège of Aquileia; 1760; — The fatal
Discovery; 1769; — Alonzo ; 1773, in-8°; —
Alfred; 1778, in-8°. Alfred n'eut que trois re-
présentations. A la suite de cet échec Home re-
vint en Ecosse. Depuis 1762, il avait reçu une
pension de lord Bute. Son dernier ouvrage in-
titulé : History of the Rébellion in Scotland
in 1755-6, in-8°, n'eut aucun succès. Home pro-
tégea le mérite littéraire autant que le lui per-
mettait la médiocrité de sa fortune; il encouragea
les premiers essais de Macpherson , alors simple
maître d'école, et lui fournit de quoi visiter les
montagnes de l'Ecosse et recueillir les poésies
gaéliques, dont Macpherson publia la traduction
sous le nom de Poèmes ffOssian. Macpherson,
comme témoignage de reconnaissance, légua en
mourant 2,000 I. s. à Home. Z.
Baker, Biographia dramatica. — Centleman's Maga-
zine, LXXVIII.
home (Sir Everard), chirurgien anglais,
né en 1756, à Greenlaw-Castle , dans le comté
* de Berwick (Ecosse), mort à Chelsea, le 31 août
27
HOME — HOMEM
28
1832. Après avoir étudié sous le célèbre John
Hunter, son beau-frère, il se rendit à Londres,
où il pratiqua- la médecine avec le plus grand
succès pendant plus de quarante ans. En 1813
Georges IV l'éleva à la dignité de baronet. Il pré*
sida pendant un grand nombre d'années le Col-
lège royal des Chirurgiens. Il était chirurgien de
l'hôpital de Chelsea , professeur d'anatomie et
de chirurgie au Collège royal , et membre de la
Société royale de Londres. On a de lui, outre
un grand nombre de mémoires publiés dans les
Philosophical Transactions : a Dissertation
on the propriétés of pus; Londres, 1788,
in-4° ; — Practical Observations on the Treat*
ment of Stricture in the Vrethra and in the
Œsophagus; ibid., 1795-1803, 3 vol. in-8°; —
Practical Observations on the Treatment of
Ulcers on the Legs, considered as a branch of
military surgery; ibid., 1797, în-8°; — Prac-
tical Observations on the Diseasesofthe Pros-
tate Gland; ibid., 181l,in-8°; — Lectures on
comparative Anatomy; Londres, 1814, 2 vol.
in-4°. Z.
Rose, New gênerai Biographical Victionary. — Bio-
graphie médicale.
Homéidhah, schérif de La Mecque, de la
dynastie des Catadides, assassiné en 719 de
l'hégire (1319 de J.-C. ). Second fils du schérif
Abou-Nami, qui mourut en 701 (1302), il dis-
puta le gouvernement de La Mecque à ses frères
Roméitsah, Abou'l-Ghéits , et Othéifah, et resta
maître de la ville , conjointement avec son frère
atné Roméitsah. S'étant déclarés indépendants
du sultan d'Egypte, Nasser Mohammed, les
deux princes furent saisis et détenus au Caire ,
jusqu'à l'époque de leur évasion, en 704 (1304)»
Abou'l-Ghéits avait été investi du schérifat du-
rant leur captivité; ils le chassèrent, et régnè-
rent quatre ans ensemble. Ils se firent ensuite la
guerre. Homéidhah, resté unique possesseur
de la succession paternelle, fut attaqué en 713
(1313) par une armée égyptienne , dont le cé-
lèbre Abou'l-Féda commandait un détachement.
Il évacua se capitale ; mais lorsque les troupes
ennemies se furent retirées, il rentra à La Mecque,
s'empara de Abou'l-Ghéits, qui avait été rétabli,
et le fit mettre a mort. L'année suivante, ses
États furent envahis de nouveau et son armée
vaincue par Roméitsah , assisté de 200 cavaliers
égyptiens, en 715 (1315). Assiégé dans une for-
teresse, où il s'était réfugié, il s'échappa secrè-
tement, laissant entre les mains de l'ennemi s*
famille et ses trésors. Il alla implorer le secours
de Oldjaïtou , ilkhan de Perse , et en obtint un
grand corps de troupes. Mais à la nouvelle de la
mort d'Oldjaïtou (716-1316), cette armée se
dispersa, et Homéidhah faillit tomber entre les
mains d'un chef arabe des environs de Baghdad.
Ayant perdu l'espoir de rétablir ses affaires et
d'enlever La Mecque à son frère Othéifah, il était
sur le point d'aller se rendre aux Égyptiens, lors-
qu'il fut assassiné par trois Mamlouks trans-
fuges, qu'il avait pris sous sa protection. £. B.
Abou'l-Péda, Annales Mutlemlci, êdit. de Reiskc,
t. V, p. 181, 10», ttS, 297, 311, 818, 848. - MlkHst, Hist.
des Mamlouks, trad. par M. Quatremére, t li, part. Il,
p. 191, 827, 242, 282.
* romem (Francisco), poète portugais, vi-
vait au seizième siècle ; il était fils de Pedro
Homem et grand-écuycr (estribeiro môr) du
roi Emmanuel. Ses œuvres ont été données dans
le Cancioneiro de Resende, qui , publié in-fol.,
1516, par Hernando de Campos, vient d'être
réimprimé par la Société des Bibliophiles de
Stuttgard , 4 vol. in-8°. Les œuvres du père ,
également poète, se trouvent dans le même
Cancioneiro. F. D.
Barbosa Machado, Bibliotheca Lusitana.
* homem de ANDtUDE (Jozé), chimiste
portugais, né à Lisbonne, le 24 novembre 1658,
mort le 17 mai 1716. 11 exploitait à Lisbonne
une boutique de pharmacie, et il a laissé un
grand nombre d'ouvrages manuscrits sur la
science qu'il cultivait. Ses ouvrages imprimés
sont : Apologia pharmacexitica pela verda-
deira trituracdo do Jalapa e dos Aromaticos
discutientes que entrâo na composicdo da
Senedicla, etc.; Lisbonne, 1691 ; — Segunda
parte ; 1695, in-4 8 . F.D.
Barbosa Machado, Bibliotheca Lusitana.
homem ( Fr. -Manoel ), théologien et his-
torien portugais, né à Lisbonne, le 29 décembre
1599, mort le 7 octobre 1662. Il était le con-
fesseur d'un descendant d'Inès de Castro, du
marquis de Cascaes , chargé d aller représenter
Joâo 1Y à la cour de France. Tallemant des
Réaux nous a tenu au courant des excentrici-
tés du seigneur portugais. Manoel Homem fit le
récit de la pompeuse ambassade du marquis.
En recevant solennellement le marquis, au mo-
ment où il remettait ses lettres de créance au
roi enfant, Marie de Médicis lui fit observer
gracieusement qu'il y avait des liens de parenté
entre elle et la maison de Castro. Alvaro Perez
de Castro, marquis de Cascaes, devenu le repré-
sentant de cette grande famille, était trop flatté
d'un pareil rapprochement, pour ne pas en
instruire les deux cours, et il nous est permis
de supposer que la remarque de la reine ne fut
pas étrangère à la publication de Manoel Ho-
mem. Son livre a pour titre : Discripçao da Jor-
nada $ Bmbaixada extraordinaiia que fez
a França D. Alvaro- Pires de Castro, conde
de Monsanto e marquez de Cascaes; Paris,
1644, pet. in-4°. La seconde partie, qui suivit
de près oette publication, fut imprimée en Bre-
tagne;— Relaçao secunda dos grandezas do
marquez de Cascaes e de sua Chegada a ci*
dadede Nantes e assistencia nella até partit
para Portugal; Nantes, 1645, pet. h>4°. Après
avoir fait imprimer ces deux opuscules, devenus
très- rares, Manoel Homem profita de son voyage
à Nantes pour éditer sous un nom supposé
l'ouvrage suivant : Resurreiçào de Portugal e
20 HOMEM
Morte fatal de Castella>per Fernam Homem
de Figueiredo. Guillaume Le Monnier publia
cet ouvrage sans date et sans nom de lieu ; il
parut in -4°. C'est à la même époque que fut
également imprimé en France un ouvrage du
même auteur d'une nature bien différente; il est
intitulé : Averdade do Ante-Christo contra a
mentira inventada, dedicado à Mademoiselle
(sic) filha do duque de Orléans, Tiro dé
Luiz XIV; Paris et Lisbonne. Nous n'avons ja-
mais rencontré ce volume. Nous connaissons en-
core de Manoel Homem : Kalendario qua-
driennal conformé ù estylo da orâem do*
pregadores. Resolucâo de algumas duvidas
graves pertenentes ao of/icio divino : confe~
rencia rubrical de arïibos os breviarios velho
etnovo t etc., etc.; Lisbonne, Paul Craesbeeck,
1643, in-8 .— Manoel Homem n'était jamais resté
étranger à la politique de son époque, et il est
permis de supposer qu'il fut tout autant con-
seiller d'ambassade que simple confesseur du
marquis excentrique qu'il accompagnait. Retiré
dans le couvent de son ordre à Lisbonne, il
n'abandonna pas la question qu'il avait abordée
jadis , et il publia : Memoria da disposiedo dos
armas Castelhanas que injustamente inva-
desdo o reino de Portugal no anno de 1580.
Despertadora ao valor Portuguez para ndo
temer; do prudencia e conselho para ordenaf
o présente; daprevencâoe cautelapara dis-
por ofuturo; Lisbonne, 1655, în-4°. Manoel
Homem a laissé un grand nombre de manuscrits,
dont on trouve la liste dans la Bibliotheca Lu*
sitana de B. Machado. Ferdinand Denis.
Échard, Scriptores Ord. Prœd., t. II, p. 881. — F. Pedro
Monteiro, Ctaustr. dominlù., t. 111, p. sfto. — Barbosa
Machado, Bibliotheca Luiit. — Tallemant des Réaui, His-
toriettes.
HOMÈRfi (*Ou.ijpoc ), le plus grand des poètes
grecs , vivait entre le onzième et le huitième
siècle avant J»-C. Les renseignements biographi-
ques nombreux que l'antiquité nous a transmis
sur lui n'ont aucune autorité historique (1);
mais ils sont intéressants, parce qu'ils représen-
tent Homère tel que les anciens l'avaient ima-
giné , tel que les modernes l'ont généralement
accepté. Avant de discuter la date et la valeur
de ces documents , nous résumerons rapidement
(1) « On ne sait rien de ia vie d'Homère, dit Letronne,
car 11 ne faat pas compter les détails contenus dans le«
deux petits écrits qu'on attribue a Hérodote , à Plntar-
que, et dans quelques autres , sortis de la plume de com-
mentateurs obscurs; tons sont remplis de contes Inven-
tés après coup, parmi lesquels sont les plus extravagant*
qu'aucun commentateur ait imaginés. De là cette pré-
tention de tant de lieux qui se disputaient l'honneur de
lui avoir donné naissance. Dans ce conflit chacun se for-
mait une opinion différente , selon ses préjugés, la tra-
dition qu'il suivait de préférence ou son goût pour le
merveilleux On était allé Jusqu'à le croire Campa -
nien , Lucanlen , Romain , Syrien , Égyptien ou même
Indien •, opinion extravagante, dont Lucien se moque
avec esprit dans son Histoire véritable (I), M). Aussi
l'rocius, à la vue de cette prodigieuse diversité, disait, en
raillant , qu'il serait plus simple d'appeler Homère le
citoyen do monde.
— HOMÈRE 30
le plus accrédité , la Vie $ Homère faussement
attribuée à Hérodote. D'après cette fiction, Ho-
mère naquit à Smyrne, d'une femme originaire
de Cyme et nommée Crithéis. Sa mère , sur-
prise par les douleurs de l'enfantement pendant
une fête, le mit au jour aux bonis du fleuve Mê-
lés , et il dut à cette circonstance son premier
nom de Mélésigène. Élevé par les soins de Phé-
mius, qui tenait une école de belles-lettres et de
musique, il lut succéda dans cette profession, et
fit bientôt l'admiration des habitants de Smyrne
et des étrangers qui affluaient dans cette tille.
Un patron de vaisseau, appelé Mentes , lui pro-
posa de le suivre dans ses voyages. Homère,
qui méditait Y Iliade et qui désirait, voir les lieux
dont il aurait à parler, accepta; et, s'embarquant
avec Mentes, il visita l'Egypte, la Libye, l'Es-
pagne, l'Italie. Arrivé à Ithaque, il fut atteint d'un
mal d'yeux. Mentes, pressé d'aller jusqu'à Leu-
cade, le laissa chez. Mentor, un des principaux
habitants d'Ithaque. Homère apprit là sur Ulysse
beaucoup de détails dont il profita pour son
Odyssée. Il repartit ensuite avec Mentes, et vi-
sita les côtes du Péloponnèse ; mais, arrivé à Co-
phon, il fut encore pris de son mal d'yeux, qui
l'obligea à retourner à Smyrne , où il termina
V Iliade. Sa cécité, devenue bientôt complète, lui
fit donner le nom d'Homère, 'Ou,yjpoç, qui si-
gnifie aveugle dans le dialecte de Cyme. La pau-
vreté le força de quitter Smyrne et d'aller cher-
cher des ressources à Cyme, puis à Phocée, où
ses poèmes lui furent dérobés par Thestoridès,
qui alla les débiter comme siens à Chios. Ho-
mère l'y suivit. Abandonné sur le rivage par les
pécheurs qui l'avaient transporté, il fat recueilli
par un berger nommé Glaucus, qui le conduisit
dans la petite ville de Bolissus. De là 11 se rendit
à Chios, où il ouvrit une école, et composa son
Odyssée. Le désir de réciter ses poèmes devant
un public plus nombreux le décida à parcourir
la Grèce ; mais il ne put dépasser les Sporades,
et mourut dans 111e d'ios. Tel est l'Homère tra-
ditionnel. Jusqu'à quel point doit-on le regarder
comme réel ? C'est une question qui ne peut être
résolue que par une étude approfondie sur la
nature des poèmes qui portent son nom , et sur
la date de leur composition. Lorsque, six siè-
cles environ avant l'ère chrétienne, les Grecs
commencèrent à fixer dans des récits en prose
les vagues souvenirs de leur passé , ils possé-
daient un grand nombre de poèmes, divisés en
deux classes : les uns , consacrés aux généalo-
gies des dieux et des héros , étaient attribués à
Hésiode; les autres, destinés à célébrer les ex-
ploits des héros , et comprenant une vingtaine
d'épopées , dont l'ensemble forma plus tard le
cycle épique, étaient presque tous placés sous
le nom d'Homère. Le plus ancien texte relatif à
Homère le désigne comme l'auteur de la Thé»
baïde (1). La première fois qu'il est question de
(1) (Tétait l'opinion du poète Caillnus, qui vivait 6*0 av.
J.-C. j opinion rapportée par Pausanias, IX, 9, 8.
31
poèmes homériques (Opqpcta I*yj), il s'agit en-
core de la Thébaïde que Clisthène, tyraii de Si-
cyone, défendit aux rapsodes de réciter, parce
qu'elle chantait la gloire d'Adraste et des Ar-
giens (1). Jusqu'au temps des Alexandrins , la
plus grande partie du cycle épique, des hymnes
et plusieurs compositions satiriques furent re-
gardés comme l'œuvre d'Homère. Mais dès le
sixième siècle ayant J.-C, Y Iliade et l'Odyssée
durent à leur beauté plus éclatante de se déta-
cher de ce vaste ensemble , et d'attirer plus par-
ticulièrement l'admiration. Ces deux poèmes
devinrent l'objet d'études persévérantes, et don-
nèrent lieu à des discussions qui ont été reprises
par les modernes. Certains critiques revendi-
quèrent Y Iliade et YOdyssée pour deux au-
teurs différents ; d'autres nièrent que ces deux
poèmes eussent été primitivement écrits ; d'au-
tres enfin prétendirent que Y Iliade avait été
composée par portions détachées (2), qui furent
plus tard réunies sous Pisistrate, de manière
à former un tout. Ces discussions, dont Sénèque
parle avec mépris (3), auraient peu laissé à faire
aux modernes si elles avaient été conduites avec
une méthode rigoureuse, si la décadence, puis
le moyen âge n'y eussent mis tin et n'en avaient
détruit ou enseveli pour des siècles tous les
monuments. La Renaissance eut pour mission
d'exhumer les chefs-d'œuvre de l'antiquité et
non de les soumettre à un contrôle sévère.
Cette tâche était réservée à l'érudition moderne.
Longtemps avant que Wolf niât, vers la fin du
dix-huitième siècle, l'unité de composition de
Y Iliade et de l' Odyssée , et mit en doute jus-
qu'à l'existence du poète auquel on les attri-
buait, divers critiques émirent des idées analo-
gues. Wolf déclare avoir trouvé dans Casaubon
des indices de son opinion. Hédelin d'Aubignac
fut plus explicite. Dans un ouvrage présenté
sous le titre modeste de Conjectures académi-
ques, \\ prétendit que les poèmes homériques,
Y Iliade en particulier, contiennent une infinité
de choses qui ne peuvent raisonnablement être
l'œuvre du même poète; qu'il est vraisemblable
qu'Homère n'a jamais existé ; que Y Iliade et
YOdyssée ne sont qu'un assemblage , une com-
pilation de divers poèmes ou de vieilles tragé-
dies qui se chantaient anciennement dans la
Grèce; que cette compilation, faite d'abord par
Lycnrgue, fut refaite avec plus de soin par l'or-
dre de Pisistrate et de son fils Hipparque. Les
Conjectures académiques, composées vers 1674,
n'obtinrent pa3 immédiatement le visa de la
(l) Hérodote, V, 67. M. Grote a très-bien montré que
dans ce passage il ne peut être question qoe de la Thé-
6*Me,etnoo de V Iliade, (History qf Greece, U II, c. si.}
(S) « U n'écrivit pas V Iliade d'ensemble , dit Suidas, et
jnrec cette suite qui existe aujourd'hui; mais, après avoir
eotupoeé Mûrement chacune de ses rapsodies, Il les dé-
bitait «par gagner sa vie dans les villes où 11 séjournait,
et le» y laissait. »
(S) Sénèque, De Brevitate Fltœ, XIII : « Grscornm Me
morbus fuitquaererc... prier scriptaesset 1 lias an Odjasea,
prrctcrea an ejusdena esset anctoris. »
HOMÈRE 32
censure, et ne parurent qu'en 1715; mais Bail-
let consigna dans ses Jugemens des Savons ,
en 1685, une opinion peu différente. Voici ce
curieux passage : « J'ai ouï dire à un homme de
lettres des pays étrangers qu'on travaille en Al-
lemagne à faire voir qu'il n'y a jamais eu d'Ho-
mère , et que les poèmes qui portent son nom
ne sont que des rapsodies ou des compilations
que les critiques ont composées de diverses
pièces de vers ou chansons détachées à qui on
a donné la liaison et la suite que nous voyons
aujourd'hui (1). » Ce que Baillet annonçait se
réalisa cent dix ans plus tard. Dès 1693 Per-
rault, qui connaissait le livre de Baillet et
le manuscrit de d'Aubignac , en reproduisit les
arguments et les conclusions dans ses Paral-
lèles des Anciens et des Modernes ( 1. 111,
p. 36). Boileau, dans sa polémique contre Per-
rault, repoussa le paradoxe de d'Aubignac avec
un extrême dédain (2). Bentley, au contraire,
en 1713, se rencontra presque avec l'auteur
des Conjectures académiques. Sans contester
l'existence d'Homère, il souleva et résolut né-
gativement la question capitale de l'unité de
composition. « Homère , dit-il , écrivit une suite
de chansons et de rapsodies destinées à être
chantées par lui-même pour un petit salaire et
un bon repas , aux fêtes publiques et aux au-
tres jours de réjouissances. Il composa Y Iliade
pour les hommes, et YOdyssée pour l'autre
sexe. Ces chansons détachées ne furent ras-
semblées dans la forme d'un poème épique
qu'au temps de Pisistrate, environ cinq cents
ans après (3) ». Ce n'était qu'une boutade jetée
en passant. En 1725, un écrivain bien inférieur
à Bentley pour l'érudition, mais au moins son
égal pour l'originalité et l'étendue de la pensée,
Yico, aborda la même question , et la traita avec
une supériorité de vues qui n'a pas été surpas-
sée. Vico écarte d'abord l'Homère factice, fabri-
qué par les rhéteurs et les sophistes , cet Ho-
mère savant philosophe, profond moraliste,
enveloppant de sages préceptes sous de poéti-
ques allégories , et se proposant d'adoucir les
mœurs du peuple. Loin de là, dit-il , Homère
reproduit fidèlement des mœurs violentes et
grossières. Ses héros sont féroces , mobiles ,
obstinés, déraisonnables. Ses dieux ne Talent
pas mieux que ses héros. Les caractères et les
mœurs des personnages homériques , loin d'être
l'œuvre d'un philosophe, n'ont pu être conçus
que par des êtres à l'esprit faible , à l'imagina-
tion vigoureuse, aux passions violentes; ils
sont l'œuvre de tout un peuple à cette époque
de barbarie où les peuples n'ont d'autre histoire
que la poésie. V Iliade et YOdyssée ne furent
pas d'abord écrites , et les chants ou rapsodies
(1) Voy. Jugemens des Savons, t. III, p. M.
(t) ///» Réflexion critique, a la suite de la traduction do
Traité du Sublime de Longin.
(S) rnilelentberus Llpsensls, Remar ks vpon a late dis-
course o/free thinking, vu.
33
HOMÈRE
34
dont elles se composent ne furent réunis que
bien plus tard, sous les Pisistratides. Ainsi s'ex-
pliquent lc3 différences et les contradictions qui
abondent dans ces deux poèmes. Œuvre mul-
tiple de beaucoup de générations, l'épopée ho-
mérique, commencée dans le jeune âge de la
Grèce héroïque et achevée dans sa vieillesse,
représente, sous les deux formes différentes de
Y Iliade et de Y Odyssée, et par les caractères
opposés d'Achille et d'Ulysse, une période bis-
torique de plus de quatre cents ans. Le poète
.auquel on l'attribue est comme la guerre de
Troie, qui fournit à l'histoire une précieuse épo-
que chronologique et qui pourtant n'a jamais eu
lieu. Homère est la personnification, le type des
Grecs qui parcouraient le pays en chantant les
aventures des héros. Sa cécité et sa pauvreté
représentent la misérable condition des rapso-
des. Tant de villes de la Grèce se disputèrent
l'honneur de lui avoir donné naissance, parce
que les peuples de ces villes étaient bien réelle-
ment eux-mêmes des Homères, les véritables
auteurs de Y Iliade et de YOdyssée (1). Cette
magnifique intuition de Vico, malheureusement
compromise par la barbarie du style et par de
singulières erreurs de détail, passa inaperçue.
En 1769, Thomas Wood, sans prendre la ques-
tion d'aussi haut, toucha un côté que Vico
n'avait qu'effleuré, et soutint que les poèmes
homériques n'avaient pas été primitivement
écrits (2). Cette opinion , assez répandue chez
les anciens, négligée par les modernes, rencon-
tra des partisans, entre autres J.-J. Rousseau (3)
et Mérian (4); plus tard elle frappa vivement
Wolf, que ses études avaient déjà conduit à dou-
ter de l'authenticité de certains chants de l'I-
liade. Ce doute, d'abord partiel , s'étendit peu à
peu à l'ensemble des deux poèmes. Wolf hési-
tait encore lorsque la publication, en 1788, des
Scolies sur V Iliade découvertes à Venise par
Dansse de Villoison, confirma ses doutes. Les
Scolies de Venise prouvaient que les plus grands
critiques anciens , Zénodote , Aristarque , Cratès,
avaient tenu pour suspects et même pour apo-
cryphes des vers et des passages entiers de
Y Iliade et de YOdyssée; elles attestaient le
travail qui avait réuni et coordonné les membres
épars et incohérents de chaque épopée. Ces té-
moignages anciens, se joignant aux conjectures
de Casaubon, de d'Aubignac, de Bentley, de
Wood ( Wolf ne connut Vico que plus tard ),
achevèrent de porter la conviction dans l'esprit
du philologue allemand, qui publia, en 1795, ses
célèbres Prolégomènes (5). Ses conclusions sont,
(1) Vico!, Scienza nuova, 1. III, De la Découverte du
véritable Homère.
(*) Wood, An Essay on the original Genius and Wri-
ting$ of Borner; Londres, lo-*°.
(S) Sur r Origine des Langues.
(*) Dissertation; dans les Mémoires de F Académie de
Berlin, an. 1788-1789.
(8) Prologomena ad Homerum, sive de operum home'
ricorum prisca et genuina forma variisque mutatio-
nibus ; Halle, 1785, in-8°.
ÏSOUV. B10CR. GÊNER. — T. XXV.
au fond, les mêmes que celles de d'Aubignac;
mais l'étendue de son savoir, la vigueur, l'en-
chaînement et la portée de ses arguments , met-
tent entre lui et le critique français l'immense
intervalle qui sépare une hypothèse féconde d'un
paradoxe stérile. Les Prolégomènes furent le
signal d'une controverse qui dure encore. On a
très-peu ajouté depuis aux objections que Wolf
proposa contre l'unité de composition des
poèmes homériques , et ses arguments sont à
peu près les seuls que nous aurons à examiner.
La question de l'écriture est le centre de l'ar-
gumentation de Wolf. Suivant l'opinion com-
mune des anciens , l'écriture fut apportée aux
Grecs par les Phéniciens. A quelle époque? On
l'ignore. On ne sait pas mieux combien il fallut
de temps pour approprier l'alphabet phénicien à
la langue grecque de manière à ce qu'il pût servir
à la transcription de poèmes aussi longs que 17-
liade et YOdyssée. En supposant même l'alpha-
bet grec constitué à une époque très-reculée, il
fallait, pour l'appliquer à des œuvres étendues,
des instruments de transcription qui manquaient
aux Grecs, réduits, avant l'importation du pa-
pyrus égyptien vers 630 avant J.-C, à écrire
sur des tables de bois et de pierre, sur des feuilles
de métal, et plus tard sur des peaux de chèvre
et de mouton, matériaux peu commodes, qui de-
vaient singulièrement limiter l'emploi de récri-
ture. Ceux qui s'obstineraient à faire remonter
au delà du huitième siècle l'usage de l'écriture
auraient à répondre aux questions suivantes :
1° La forme de la prose est inhérente à l'em-
ploi de l'écriture. Pourquoi , si l'écriture était
en usage dès le dixième siècle ( date pro-
bable de la composition des poèmes homéri-
ques), la prose ne s'est-elle formée que cinq
siècles plus tard? 2° On emploie d'abord l'écri-
ture à graver sur des monuments certains faits
dont on veut conserver le souvenir. Pourquoi
si l'écriture était en usage dès le dixième siècle,
les plus anciennes inscriptions ne remontent-
elles pas au delà du septième, et pourquoi
sont-elles en caractères informes qui attestent
l'enfance de l'art d'écrire? 3° L'écriture sert sur-
tout aux transactions sociales. Pourquoi si elle
existait, les Grecs me l'employèrentils pas à la
transcription de leurs lois , et pourquoi faut-il
descendre jusqu'au septième siècle ponr trouver
une législation écrite (1)? Ces difficultés avaient
déjà frappé les anciens, et les avaient conduits
à nier l'usage de l'écriture du temps d'Homère.
« Tardivement , dit Josèphe (2), les Grecs con-
nurent la nature des lettres On prétend
même qu'Homère ne laissa point ses.poémes
par écrit, mais que, transmis par la mémoire,
ils furent plus tard formés par l'assemblage de
chants séparés, et que c'est pour cela qu'on y
trouve tant de discordances. » Ce témoignage
(l ) Les lois de Zaleucus, chez les Locricna Épfeéphyrlens,
M 6 olymp., 664 avant J.-C.
(f) Contra Jpionem, 1, f.
85
est fortement, corroboré par l'examen des deux
poèmes. Nulle part H n'est question d'écriture.
Un seul passage semble faire exception. Le poète,
racontant l'histoire de Bellérophon, dit que Prœtus
« l'envoya en Lycie, et lui remit des signes fu-
nestes (o^ata Xuypoî), ayant gravé (ypà+aç)
sur une tablette pliée ( èv ufvaxi 7rruxTcî> ) des
choses mortelles, et lui ordonna de les montrer
à son beau-père (1) ». On ne sait pas bien ce
que veulent dire ces signes funestes que le poète
appelle pins loin un signe mauvais (<rij(&<x *a-
xâv); le sens des mots que nous avons traduits
par tablette pliée n'est pas plus clair, et la si-
gnification de Ypotyaç ( ayant inscrit ) est tout
aussi incertaine. Ce serait forcer le texte contre
toute vraisemblance que d'y voir une lettre
écrite en caractères alphabétiques. Des signes
convenus entre Prœtus et son beau-père suffi-
saient pour indiquer à celui-ci que le porteur
de la tablette devait être mis à mort. Si ce pas-
sage prouve quelque chose, c'est contre l'exis-
tence de l'écriture alphabétique du temps d'Ho-
mère; car, comment ce poète, si précis dans ses
descriptions , eût-il parié d'une manière si vague,
si inintelligible, d'un art qu'il aurait connu? Il
en est de même d'un autre passage souvent
cité (2). Neuf héros grecs tirent au sort à qui
combattra contre Hector. Chaque héros jette
dans un casque son sort, sur lequel il a tracé
un signe , non pas son nom ou la première
lettre de son nom, ce qui eût été intelligible
pour tous, mais un signe, que celui-là seul qui
l'a tracé peut reconnaître : preuve naïve que
les héros grecs ne savaient pas écrire. Pas plus
dans Y Odyssée que dans V Iliade il n'est fait
mention d'épitaphe, ni d'inscription. Au hui-
tième livre de VOdyssée (3), Euryale, voulant
humilier Ulysse, le compare au commandant
d'un vaisseau marchand , qui a pour fonctions
de se souvenir de la cargaison (çoprov hv^jmov).
Si l'écriture eût existé , le moindre registre au-
rait dispensé le conducteur du vaisseau de cet
effort de mémoire. Enfin la versification même
des deux poèmes atteste qu'ils ne furent pas
primitivement écrits. La mesure de beaucoup
de vers de Y Iliade et de VOdyssée ne s'ex-
plique qu'à la condition d'admettre dans un très-
grand nombre de mots une ftttre, le digamma,
qui se prononçait incontestablement du temps
d'Homère, mais qui n'a jamais figuré dans au-
cun manuscrit de ce poète. « Si Homère écrivit
ses poèmes, dit Porson, il serait intéressant de
montrer comment cinquante ou soixante mille
digammas purent disparaître ( dans les trans-
criptions postérieures ), sans qu'on s'en aper-
çût (4). ^ Pour rendre raison de ce phénomène,
(l) Iliade, I. VI, 166, etc.
(S) Iliade, 1. VII, 178, etc.
(3) Odyssée, 1. VIII, 168, etc.
(4) Porson, Examen de VEssay on tfye Greek Alphabet,
bu R. PayneKnight, dans le Monthly Review, laurier et
avril 179*
HOMÈRE 36
il fout absolument supposer entre la composi-
tion de Y Iliade et de VOdyssée et leur première
transcription un très-long intervalle durant le-
quel le digamma tomba en désuétude chez les
Ioniens, qui firent les premiers manuscrits
d'Homère, et qui ne tinrent pas compte d'une
lettre qu'ils ne prononçaient plus (1).
En accordant à Wolf que les poèmes homéri-
ques n'ont pas été primitivement écrits, faut-il
conclure avec lui qu'ils ont été composés par por-
tions détachées et sans vue d'ensemble? Les
poètes privés de l'écriture doivent-ils se borner
à des productions de courte étendue, telles que les
romances espagnoles ou les chants populaires de
la Servie ? En limitant ainsi l'essor de la poésie
primitive, Wolf a méconnu les prodiges dont la
mémoire est capable lorsque l'absence de l'art d'é-
crire l'oblige à déployer toutes ses ressources (2).
L'argument tiré de l'impossibilité absolue de
composer et de conserver de mémoire des poè-
mes aussi longs que Y Iliade et VOdyssée ne se
peut soutenir, et doit faire place à une objection
d'une plus grande portée. Sans le secours de
l'écriture, la récitation est le seul moyen de pu-
blier un poème. Les aèdes et les rapsodes ré-
citaient leurs vers dans les banquets, dans les
fêtes, où ils ne pouvaient faire entendre que des
chants d'une courte étendue. Pourquoi au-
raient-ils composé d'ensemble un poème dont ils
ne pouvaient réciter que des portions détachées,
comme un mécanicien qui monterait à grand'peine
une machine dont on ne pourrait faire usage qu'à
la condition de la démonter. Il faut le reconnaî-
tre, si V Iliade et l'Odyssée ne pouvaient pas être
révélées au public dans leur ensemble, Homère
n'a pu avoir l'idée de cet ensemble, et Wolf a
eu raison de nier l'unité de composition des poè-
mes homériques; mais cette nouvelle impossi-
bilité est aussi peu démontrée que la précédente.
Si des banquets, des fêtes particulières ne suffi-
saient pas à l'audition de tout un poème, il
existait des fêtes nationales, des luttes poétiques
où se pressaient des milliers d'auditeurs animés
d'une infatigable curiosité. Suivant la remarque
d'Ot. Mùller (3), « les Grecs écoutaient plus tard
dans une seule fête environ neuf tragédies, trois
drames satiriques, et trois comédies, sans penser
qu'il vaudrait mieux répartir cette puissance in-
tellectuelle entre plusieurs journées; pourquoi
les Grecs du temps d'Homère n'auraient-ils pas
pu entendre dans un seul jour Ylliade ou l'G-
dyssée, moins longues, après tout, que trois tétra-
(1) Voy. Gieae, Veber den jEolisehen Dialekt, aect.
14, p. 160.
(S) Wolf lui-même a constaté cette puissance de la
mémoire : « stupes fortasse ad tantam capacltatem mé-
morise, quae totum Homerum coiuplectt potuerlt. Mlbi
vero Id etiam paruin videtur, mulloque plura nonnun-
quara bonos rapsodos tenu Use susplcor. » ( Proiegom,
p. CI.) César nous apprend (B. 6\,VI, 13) qu'à une époque
où le* Gaulois connaissaient récriture, leurs poCmes conti-
nuaient d'être confiés exclusivement a la mémoire des
druides.
(S) History of Literature of ancien* Greecef. •*•
37 HOMÈRE
logies tragiques et tarif comédies ? » L'attention,
comme la mémoire» a dû atteindre dans certai-
nes circonstances un degré dont nous n'avons
plus idée aujourd'hui. Les grandes fêtes populai-
res n'étaient pas les seules occasions qu'eut le
poète de faire connaître un poème dans son en-
semble : il le récitait aux banquets des princes,
et la récitation pouvait alors être partagée en
plusieurs journées, puisque les mêmes auditeurs
y assistaient. L'Arioste dans son Orlando se re-
présente lisant ses vers à une réunion de sei-
gneurs. A certains endroits de son récit, il s'ar-
rête, et remet la suite à un autre jour. Cet arti-
fice du poète italien était une réalité pour les
rapsodes aussi bien que pour les trouvères aux-
quels l'Arioste l'emprunte. Rien ne s'opposant à
ce que de longs poèmes fussent récités dans leur
ensemble, on comprend qu'un génie sublime ait
eu l'idée de substituer aux chants courts et iso-
lés des aèdes une composition vaste et suivie.
Ainsi tombent les objections tirées de l'ignorance
de récriture. Aucune preuve extérieure n'existe
contre l'unité des poèmes homériques, et c'est
en définitive à ces poèmes mêmes qu'il faut de-
mander s'ils ont été composés suivant une vue
d'ensemble, où sllsne sont qu'un assemblage de
chants détachés.
Dans cette seconde partie de la discussion,
Wolf s'est particulièrement attaché à Y Iliade,
où l'unité est en effet moins sensible. Nous pen-
sons avec M. Grote que le procédé inverse est
plus légitime. Puisqu'il s'agit de démontrer que,
dès le temps d'Homère, on a pu composer de
longs poèmes , il convient d'examiner d'abord
YOdyssée dont l'unité est plus manifeste. Un
plan conçu d'avance a présidé à l'ensemble du
poème. Un seul personnage dont l'attention ne
s'écarte jamais en est le héros. Un seul fait es-
sentiel en est le sujet : posé dès le début, pour-
suivi à travers les épisodes, il n'a son dénoû-
ment qu'à la fin du poème. Dans ce plan si ar-
tistement tracé on n'a relevé qu'une contradic-
tion. Le voyage de Télémaque ne concorde pas
avec celui d'Ulysse, à moins qu'on ne suppose
que le jeune prince, malgré son désir de retour-
ner à Ithaque et son refus de s'arrêter à Sparte,
passe trente jours dans le palais de Ménélas. Il
y a là un oubli de la part de l'auteur de YOdys-
sée ; mais cette inadvertance, qui s'explique si
facilement parla nature de la poésie populaire (1),
n'autorisait nullement Wolf, W. Millier et
Thiersch à regarder les quatre premiers livres de
YOdyssée et le commencement du cinquième
comme un poème séparé. Les aventures de Té-
lémaque intéressent surtout par leur rapport
avec celles d'Ulysse ; elles concourent à un en-
semble dont elles sont une partie essentielle. Les
voyages d'Ulysse pouvaient donner lieu à des
chants séparés ; mais tels que le poète les ra-
(1) Fby. Nltzsch,f>ton und Gang der Odyssée p. xuii,
dut le second volume de son Commentaire sur l'Odys-
sée, et Payne Knlght, Prolegom., c, xxin.
M
conte Us forment les parties constitutives d'une
action où tout s'enchaîne et a sa place marquée
dans un plan préconçu. L'unité évidente de YOdys-
séemA une présomption en faveur del'unité moins
apparente de Y Iliade, Ce poème a pour sujet le
ressentimentd'Achille, qui, outragé par Agaroem-
non, cesse de prendre part à la guerre., et aban-
donne les Grecs à leurs propres forces. Ceux-ci,
après des alternatives de victoire et de défaite ,
vont être jetés à la mer lorsque Achille consent
à envoyer à leur secours son ami Patrocle, qui
succombe dans un combat contre Hector. Achille,
chez qui l'ardeur de venger ton ami domine le
ressentiment, rentre dans la lutte et tue Hector.
Ainsi présentée, dans une vue sommaire, Y Iliade
offre bien un plan d'ensemble. Tous les grands
incidents se rattachent l'un à l'autre, et tous
sortent du fait essentiel qui est le sujet du poème.
Achille quitte le champ de bataille parce qu'il est
irrité contre Agamemnon ; les Grecs sont vain-
cus parce que Achille s'est retiré; Patrocle inter-
vient parce qu'ils sont réduits aux dernières
extrémités , et il meurt pour les défendre; Achille
rentre dans la lutte pour venger un ami , et il
le venge en tuant Hector. Le poème finit lorsque
l'événement capital qui lui a servi de point de
départ a produit tous ses effets , c'est-à-dire
qu'il finit juste au moment où l'art le plus
consommé en aurait marqué le dénoùment. 11
est bien difficile de prétendre qu'un pareil en-
semble a été formé après coup avec des éléments
qui n'avaient pas été primitivement destinés à
ce but. Wolf lui-même ne s'y résigne qu'avec
beaucoup de peine, et il est au fond bien moins
aftirmatif que d'Aubignac et que Vico (1). Mais
enfin, il cède, dit-il à un examen plus appro-
fondi du poème et aux témoignages des anciens.
On ne peut nier, en effet, qu'un examen attentif
ne soit défavorable à l'unité de composition de
Y Iliade. Outre des contradictions de détail assez
nombreuses, certaines parties semblent avoir été
ajoutées après coup à la construction primitive.
Les six livres compris entre le I er et le "VIII e , loin
de concourir au but du poème, le font oublier
ou le contredisent. Qu'Agamemnon ait attendu
la dixième année de la guerre pour passer la
revue de ses troupes et pour les mettre en or-
dre, le fait, quoique étrange, ne répugne pas aux
(1) Rien n'est plus significatif et pins éloquent que ce
beau passage où Wolf s'étonne et s'Irrite ae sa propre
audace ;« Nune qooque usu evenit mthi nonunqnam.
quod non dabltoeventuriim Item multls esse, ut, quotlca
abducto ab blstoricls arguments anlmo , redeo ad contl-
neotem Ho merl lectlonem et Interpretatlonem,... atquc
Ita penltus immergor lu Ulum yelutl prono et llquldo alveo
decurrentem tenorera actionum et narraUouain ; quotlen
animadverto ac reputo mecum, quam in unlversum ses-
ttmantl anus hls car minibus lnsit color, aut certe quam
egregle carmlnl utriqae suus color constet, quam apte
unique tempora rebns, res temporibus, allquot locl adeo
slbl aliudentes, congruant et constent, quam denlquc
œqaabiliter In primartts pereonis eadem linéaments
serventur et Ingenlorum et antroorum : vlx roihi quU-
qnam Irascl et succensere gratins poterlt, quam Ipae fa-
do mini, m {Pref. de ledit, de VIlj Halle, 1794, p. xxil
39
procédés de la poésie populaire ; mais on com-
prend moins que le combat singulier entre Paris
et Ménélas n'ait lieu aussi qu'après neuf ans.
Hélène, du haut des remparts, signale les princi-
paux chefs grecs à Priam, qui depuis neuf ans
les voit combattre et qui démit les connaître;
elle s'inquiète de ne pas voir ses frères, et se
demande s'ils sont morts, ou s'ils se cachent à
cause d'elle; depuis neuf ans que dure la guerre,
elle aurait pu s'en informer. Au premier livre,
Zeus promet de venger Achille; il ne tient pas
sa promesse dans léss livres suivants jusqu'au
huitième, et au quatrième il l'a si bien oubliée,
qu'il règle sa conduite d'après des considérations
toutes différentes. Le neuvième chant est rem-
pli par l'ambassade envoyée à Achille, fait ca-
pital , complètement oublié dès le onzième. Le
dixième livre, tout entier épisodique, avait for*
tement éveillé les soupçons des anciens (1). A
partir du onzième jusqu'au vingt-deuxième in-
clusivement, on ne sort plus du sujet; les deux
derniers chants s'y rattachent aussi sans en être
une suite nécessaire. Ainsi huit ou neuf chants
ne concourent pas à l'ensemble du poème. Un
pareil résultat est tout à fait inexplicable si l'on
suppose que Y Iliade a été composée et écrite
dans les mêmes conditions que d'autres poèmes,
tels que V Enéide ou Le Paradis perdu. Il fout
absolument passer de cette opinion à une autre
manière de concevoir la composition de Y Iliade.
Les diverses hypothèses proposées à ce sujet
peuvent se réduire à trois. Nous examinerons
d'abord la plus ancienne, celle qui a été adoptée
par d'Aubignac, Bentley, Vico; celle à laquelle
Wolf a attaché son nom, 1 et que William Mûl-
ler (2), B. Thiersch (3) et Lachmann (4) ont
présentée sous la forme la plus précise et la plus
rigoureuse.
Wolf et son école supposent que les poèmes
homériques sont un assemblage de chants exé-
cutés d'abord séparément et sans aucune vue
d'ensemble. Lachmann a décomposé Y Iliade en
dix-huit pièces qui ne sont peut-être pas, dit-il,
d'autant de poètes différents, mais qui forment
en tous cas autant de poèmes distincts et indé-
pendants. M. Grotefend a proposé une autre
combinaison. Mais tous les critiques de cette
école prétendent que Y Iliade et Y Odyssée (5)
(l)« Les anciens, dit Ensuite, prétendent qne cette
rapsodle lot composée par Homère comme nn poème
séparé, qu'elle ne faisait pas partie de l'Iliade, et qne
Plslstrate l'y Introduisit. » Bust., p. 78S.
(S) W. Millier, Homerische Forschule , seconde édi-
tion; Leipzig, 1886, avec une introduction et des notes par
Baomgarten Cruslus.
(5) Thiersch, Ueber dos Seitalter und Faterland de*
Borner; Halbersladt, 1SU.
(4) Uchmann, Fermeté Betrachtunçen ûber die Iîias;
dans tes Mémoires de V Académie de Berlin, 1841, sect.
xxvi, xxvin, xxix.
(6) Wolf cependant reconnaît l'unité de l'Odyssée :
« Odyssea, cujus admirabllis summa et compages pro prsc-
clarlssuno mooumento grsscl Ingenll habenda est. » (Pro-
leçom., p. exvn-icxx). Mais 11 prétend qu'elle n'est pas
de l'époque d'Homère.
HOMÈRE 40
sont une réunion de petits poèmes originairement
distincts, rapprochés par la similitude des sujets
et de l'inspiration, fondus par le travail de plu-
sieurs générations de rapsodes , et enfin consti-
tués définitivement par la compilation des Pisis-
tratides. Que la poésie populaire et primitive pro-
cède par chants détachés, c'est un fait dont on
trouve des exemples dans des littératures plus
rapprochées de nous que la littérature grecque.
La vie et les exploits du Cid ont été chez les Cas-
tillans l'objet de chants séparés ou romances (1);
Marco, le héros servien, a été célébré dans dea
ballades ou chants de courte étendue (2). H est
possible et même probable qu'il en rat de même
pour Achille et pour Ulysse, et que leurs ex-
ploits devinrent l'objet de chants populaires ;
mais il ne s'en suit pas que Y Iliade et Y Odyssée
soient un recueil de ces chants populaires.
Chacun de ces poèmes est le développement d'un
seul sujet, d'un point central qui s'épanouit en
une vaste circonférence. Cette unité de compo-
sition, évidente dans Y Odyssée , reconnaissable
même dans Ylliade, malgré les interpolations,
ne saurait être le résultat d'une simple juxta-
position de pièces séparées. Nous pensons que
Wolf a beaucoup exagéré l'importance du travail
des Pisistratides ; mais leur œuvre, quelle qu'en
soit la valeur, ne fut en définitive qu'un arran-
gement , et il est impossible qu'un simple arran-
gement de chants séparés ait produit la plus
admirable des formes littéraires, celle que les
plus grands poètes des âges suivants ont imitée
sans jamais l'égaler. Que l'on fosse par la pensée
sur les Romances du Cid ou sur les Ballades de
Marco le travail attribué aux Pisistratides , et
l'on aura une série d'événements qui se succé-
deront sans nécessité logique, et qui embrasse-
ront la vie entière du héros; on n'aura pas le
développement suivi, au milieu d'une grande di-
versité d'épisodes, d'un fait unique, tel que la
colère d'Achille, ou le retour d'Ulysse dans son
palais envahi par les prétendants. Pour trans-
former les chants populaires de la Grèce en
épopée homérique » il ne fallait pas moins qu'un ,
très-grand poète; les Pisistratides y auraient
perdu leur temps, ou plutôt n'en auraient pas
même eu l'idée. Nous croyons donc que l'hypo-
thèse qui nie l'unité de composition de Ylliade
et de V Odyssée soulève beaucoup de difficultés et
n'en résout aucune.
God. Hermanh (3) a proposé une secondé hy-
pothèse, qui selon lui explique à la fois, dans les
poèmes homériques, l'unité de l'ensemble et les
contradictions de détails. Il suppose l'existence
de deux poèmes primitifs, une Iliade et une
(1) Voê. Le Romancero , édit de Depping et Galiano;
Leipzig, 1844.
(s) Wuk Stephanowitscb, Danitza, ou Chante popu-
laires des Serviens, traduit en français par M" Bllsa
Volart; Paris, 1884, 1 vol. 1d-8«.
(8) God. Hermann, Prmjf. ad Odysseam; Lelpiig, 1888,
et sa dissertation Ueber Homer und Sappho, dans ses
Opwcula, voLV, p.74.
41
Odyssée dont Homère ou tout autre poète était
l'auteur et qui n'avaient qu'une médiocre étendue.
Cette Iliade et cette Odyssée primitives furent
successivement développées par (une série de
poètes qui agrandirent l'œuvre de leurs prédé-
cesseurs , jusqu'à ce qu'elle formât un ensemble
capable de satisfaire la curiosité des auditeurs.
Cette hypothèse trouve, comme la première, des
précédents dans la poésie épique des différents
peuples. Plusieurs épopées françaises du moyen
âge sont, dans leur forme actuelle, le développe-
ment de poèmes primitifs assez courts. Mais là
encore l'exemple détruit la supposition qu'il
devrait étayer. Dans les œuvres ainsi développées
il y a entre le chant primitif et les additions suc-
cessives une disproportion choquante que l'on
ne trouve point dans les poèmes homériques,
dont l'ensemble est empreint du même carac-
tère et du même génie. Deux jets primitifs indé-
finiment étendus n'auraient pas conservé cette
vigueur, cette harmonie.
Les difficultés de l'hypothèse d'Hermann n'ont
pas échappé à M. Grote, qui en a proposé une
nouvelle. 11 laisse de côté YOdyssée, qu'il regarde
comme l'ouvrage d'un seul auteur. Dans ï Iliade
il trouve deux poèmes : une Achilléide, des-
tinée à célébrer la colère d'Achille, et à laquelle
appartiennent le 1 er chant, le VIII e et tous les
autres depuis le XI e jusqu'au XXII e inclusive-
ment. Les deux derniers le XXIII e et, le XXIV e
sont une addition qui ne sort pas du sujet; mais
les chants du II* au VII e inclusivement et le X e ap-
partiennent à un autre sujet : ils se rapportent
plus directement à la lutte contre Ilion, et for-
ment une Iliade proprement dite. Le IX e livre
est une addition faite à YAchilléide et une ad-
dition malheureuse ; car elle est en contradiction
avec le reste du poème. Cette ingénieuse hypo-
thèse rend bien compte des incohérences qoe
présente Ylliade, mais elle est elle-même su-
jette à de graves objections. Deux poèmes juxta-
posés offriraient dans le style, dans les caractères
des personnages, dans les événements, des dis-
cordances bien plus fortes que celles qui nous
frappent dans les divers chants de Y Iliade, où
les faits, sans doute, ne concordent pas toujours
entre eux, mais où les caractères sont admira-
blement suivis, et dont le style offre une par-
faite unité. Si Ton réalisait la supposition de
M. Grote, si l'on retranchait de Y Iliade ou
Achilléide tout ce qui selon lui n'en faisait pas
primitivement partie, on aurait un poème plus
régulier peut-être, mais infiniment moins inté-
ressant. L'admirable caractère d'Hector ne trou-
verait plus à se développer dans les belles scènes
avec Paris, avec AndromaqueetHécube. Achille
lui-même y perdrait. Les exploits de Diomède,
d'Ulysse, d'Ajax rehaussent les siens , puisque
en définitive tous ces héros, malgré leur cou-
rage, succombent à une tâche que seul il peut
accomplir. L'attention ne se détourne un mo-
ment d'Achille que pour se reporter sur lui avec
HOMÈRE 42
un redoublement d'intensité. D'ailleurs on peut
affirmer qu'il y avait dans le cœur du poète une
sorte de combat entre ses propres sentiments
et les nécessités de son sujet Forcé de montrer
les Grecs vaincus, il retarde autant que possible
l'événement inévitable, et il sème d'exploits écla-
tants la route qui conduit à la défaite. Cette
inspiration patriotique, qui répondait pleinement
aux sentiments des auditeurs, fait comprendre
que le chantre d'Achille ait longuement développé
les combats des autres héros, et qu'il ait laissé
les épisodes empiéter sur l'action principale.
Quant aux incohérences, elles s'expliquent par
les circonstances de la composition et de la trans-
mission de Y Iliade. Des chants très-nombreux,
reproduisant sous une forme rhythmique les
légendes populaires et en créant de nouvelles,
avaient cours chez les Grecs, et formaient toute
l'histoire d'un peuple qui ne connaissait pas en-
core l'écriture. Un poète choisit une de ces lé-
gendes et la développa en y rattachant une foule
de personnages et d'événements célébrés dans
d'autres légendes. Cette idée neuve et féconde,
conçue et réalisée par un puissant génie, donna
naissance à la plus grande des formes littéraires.
Les Grecs eurent des poèmes oui par l'ensemble
se détachaient des chants populaires et qui par
les détails y touchaient de toutes parts. Si pendant
des siècles de transmission orale les poèmes en
rapport perpétuel avec les chants populaires leur
firent de fréquents emprunts, si Y Iliade surtout
reçut des additions qui troublèrent la liaison du
récit, l'ensemble resta intact. Une preuve très-
forte que bien avant les Pisistratides , Y Iliade et
YOdyssée embrassaient les mêmes sujets qu'au-
jourd'hui et formaient déjà un tout complet, ar-
rêté, c'est que les poètes cycliques qui versifiè-
rent le cercle entier des légendes de la guerre
de Troie ne touchèrent jamais aux faits célébrés
dans les poèmes homériques : réserve d'autant
plus significative qu'ils n'eurent pas les mêmes
scrupules à l'égard les uns des autres. Wolf, il
est vrai, a cru trouver dans les poètes cycliques
mêmes un argument contre l'unité de compo-
sition de Ylliade et de YOdyssée. Si l'unité gé-
nérale d'action que l'on remarque aujourd'hui
dans ces deux poèmes avait existé dès le temps
des cycliques, pourquoi, dit-il, nel'auraient*ilspas
imitée? Mais d'abord les poèmes cycliques sont
perdus , et nous ne pouvons pas vérifier s'ils
différaient de Ylliade et de YOdyssée autant que
le suppose Wolf; puis, si les poètes cycliques
n'observèrent pas exactement la forme homé-
rique, c'est que, venus longtemps après Homère
et n'ayant pas hérité de son génie, ils ne purent
pas accepter la partie la plus glorieuse, mais la'plus
difficile de son héritage. Les plus nobles formes
litténires s'altèrent, et toujours l'épopée dégénère
en chronique versifiée.
Ainsi, il n'existe point d'argument décisif contre
l'unité de composition de Ylliade et de YO-
dyssée. L'opinion qui attribue chacun de ces
48
HOMÈRE
44
poèmes à un seul auteur, sauf les mterpolations
plus ou moins nombreuses, est la plus vraisem-
blable, la seule qui résiste à la discussion. Mais
les deux poèmes sont-ils du même auteur? Plu-
sieurs anciens l'ont nié par des motifs bien futiles ;
les modernes, qui ont adopté cette manière de voir,
ont trouvé des raisons plus solides ou du moins
plus spécieuses. L'état social parait plus avancé,
plus raffiné dans V Iliade que dans YOdyssée :
différence qu'explique suffisamment la diversité
des sujets. Les magnifiques palais de Ménélas et
d'Àlcinous , les fêtes pacifiques des Phéaciens
ne pouvaient trouver place dans le camp des
Grecs devant Troie. On remarque, il est vrai,
une différence plus essentielle dans les notions
relatives aux divinités. Dans Y Iliade les hommes
sont meilleurs que les dieux, dans Y Odyssée tes
dieux sont meilleurs que les hommes. Dans 1*0-
dyssée aucun mortel n'ose résister à un dieu ;
encore moins ose-t-il l'attaquer ou le blesser.
L'Olympe ne retentit plus des querelles des
dieux et des déesses. Athéné consulte humble-
ment la volonté de Zeus, et craint d'offenser Po*
séidon, son oncle, en venant au secours d'Ulysse.
Un dieu n'inflige un châtiment ou n'accorde
sa protection que dans un but moral , et non
par caprice. Dans Y Iliade, Zeus envoie "Oveipoç
( Le Songe) pour tromper Agamemnon. Athéné,
après avoir pris conseil des dieux, pousse Pan-
darus à la trahison et à l'assassinat. Paris, viola-
teur des lois de l'hospitalité, n'est pas puni de
son crime, tandis que dans Y Odyssée les dieux
châtient les mortels qui ne respectent pas les
lois de Zeus hospitalier. Les dieux de Y Iliade
vivent sur le mont Olympe, ceux de Y Odyssée
habitent le ciel vide, bien au-dessus àe& régions
terrestres. Dans le premier de ces poèmes , ils
sont visibles à chaque mortel, excepté quand ils
s'enveloppent eux-mêmes d'un nuage, tandis que
dans le second ils sont habituellement invi-
sibles» excepté quand ils revêtent la forme hu-
maine. En somme, selon la remarque de Benja-
min Constant, H y a plus de mythologie dans 17-
liade et plus de religion dans Y Odyssée (I). Si
à ces différences générales on ajoute d'assez
fortes divergences de détails (S) , on reconnaîtra
que les deux poèmes ne sont pas contemporains,
que Y Odyssée est postérieure à Y Iliade et
qu'elle en est séparée par un intervalle assez
long. Cet intervalle est-il tel qu'il n'ait pu être
rempli par la vie d'un seul homme? Noos ne le
croyons pas. A coté des ffifférences il faut si-
gnaler les analogies, qui ne sont pas moins no-
tables. La religion est au fond la même dans les
deux poèmes et bien distincte de la religion d'Hé-
(l) Benjamin Constant, fie la Jtettfton, t. III.
(i) Ma est te messagère des dteoi 4ms l7tta<f#_tHer-
mes est lenr messager dans l'Odyssée ; Éole, dam VO-
dyuée, est le dispensateur et le maître des Vents, qni
dans Mimée sont des divinités Indépendantes; au
huitième fcfrre de rod§me Aphrodite est ta femme
d'Héptestos, «ai dans V Iliade est marié à l'une des
Grâces.
siode. Les con n aissa nc es géographiques (l) sont
aussi incertaines et presque aussi limitées dans
Y Odyssée que dans Y Iliade; les arts ne sont pas
plus avancés (2). Le cuivre (ou le bronze) est
toujours la matière dont se fabriquent les armes
défensives et offensives. L'emploi du fer pour
cet usage ne commence qu'avec Hésiode. Bien
au-dessus de ces analogies s'élève la similitude
générale des idées, du style, du génie, qui em-
pêchera toujours de rapporter les deux poèmes
à des siècles et à des pays différents. Mais que
dans le même siècle et dans le même pays aient
vécu deux poètes d'un génie incomparable, telle-
ment semblables qu'on les a confondus, so«
périeurs à tous les antres et égaux entre eux,
c'est là un fait si étrange que pour l'admettre il
faudrait qu'il n'y eût aucun autre moyen d'ex-
pliquer les disparates qui existent entre Y Iliade
et Y Odyssée. Or, nous n'en sommes pas réduits
à cette unique hypothèse. Longin (3), pour rendre
compte de la différence des deux poèmes, pré-
tend que Y Iliade fut composée par Homère à
la fleur de l'âge, et Y Odyssée par le même poète,
que la vieillesse avait refroidi. « Homère, dans
Y Odyssée t peut être comparé, dit-il, au soleil
couchant qui, sans avoir la même force, garde la
même grandeur. » Vico s'est moqué de cette
affirmation que Longin aurait dû donner comme
une simple supposition. A ce titre elle a du
prix, et si on la complète par certaines notions
accessoires, elle peut expliquer les disparates
des deux épopées. Homère jeune, s'ouvrant une
carrière où nul ne l'avait précédé, s'attacha plus
étroitement aux anciennes traditions, aux chants
populaires qui représentaient les Grecs dans
toute la rudesse des temps héroïques. Homère
vieux, plus sûr de son génie, plus maître de ses
inspirations, substitua aux idées violentes et
grossières des anciens temps les idées plus éle-
vées , plus pacifiques que lui suggéraient son
propre génie et la vue d'une société où le com-
merce avait déjà développé le bien-être et la ri-
chesse. Ce n'est là qu'une hypothèse sans doute,
mais plus vraisemblable que la supposition em-
pruntée par des critiques modernes aux chari-
zontes (4) de l'antiquité.
(1) Ln géographie d'Homère est peu étendue et em-
preinte d'un caractère fabuleux. La plupart des régions
visitées par Ulysse soot imaginaires, et on a Men vaine-
ment essayé de les identifier avec des paysrérts. Le potut
connaissait la Grèce continentale et les Iles grecque»
situées à l'ouest do continent, la Crète et les principales
Iles de la mer Egée, la Tnrace, la Troade, PHeitespont et
l'Asie Mineure , entre la Paphîngonle an nnrd et la Lyctn
an s«d ; M ne mentionne jamais te PnnUEuxln ; Il con-
naissait aussi, mais vaguement, la Libye, l'Egypte, la Pné-
nicle. Les Slkèie» et ta Sicante sont nommés dans TO-
dyssée; mais rien ne prouve une le pott* connut ritaste.
Foy. Vaicker, HemerUche Geo§r«pAie % ch. ixz, sect.
5S-63 (ouvrage savant, mais qui manque de critique);
Dkert, HomerUeàe Geooraphie, et surtout Vois, yiUe
rreHkunde, dans ses Krittehe Btdtter; Stittlgnrd, fa»,
I. Il» p. SU.
(S) Munn, Minéralogie homérique.
(8) Longin, De Subi., IX, 18.
45
Les résultats de eette longue controverse sur
la nature des poèmes homériques, en établissant
l'unité de composition de V Iliade et de YOdyt-
sée et l'nnité d'auteur pour les deux poèmes,
nous fournissent les moyens de chercher à
quelle époque a vécu cet auteur. Les deux
grandes épopées reconquises par une première
discussion serviront de point de départ à la se-
conde.
L' Iliade et V Odyssée sont toute la poésie et
toute Thistoire d'une des plus longues et des
plus mémorables périodes de la Grèce antique.
En dehors des poèmes d'Homère nous ne pos-
sédons sur l'âge héroïque qu'un amas de légendes
et de traditions, qu'on a essayé bien vainement
de dépouiller de leur caractère fabuleux et poé-
tique, pour les ramener à la réalité. La période
où vécut Homère n'a donc point d'histoire, et
doit rester à jamais plongée dans un crépuscule,
qui permet tout au plus de distinguer quelques
grandes masses d'événements, et seulement dans
leur forme générale. Ainsi, en partant du huitième
siècle avant J.-C, on les Grecs placent les dou-
teux commencements de leur chronologie (1),
et en remontant vers des temps plus anciens, on
trouve que quatre ou cinq siècles avant l'ère des
Olympiades, les Achéens, établis principalement
dans le Péloponnèse et ayant à leur tète la
grande famille des Pélopides, occupaient la pre-
mière place parmi les tribus grecques, et exer-
çaient sur elles une sorte de suzeraineté. On
▼oit aussi que les Achéens engagèrent une lutte
contre des peuples asiatiques, dont le centre
était la ville dllion, qu'ils sortirent de la lutte
victorieux et épuisés, que des dissensions intes-
tines dont les Pélopides furent les plus célè-
bres victimes désorganisèrent la confédération
acbéenne déjà bien affaiblie ; que les peuplades
vassales s'émancipèrent; que d'autres peuplades,
grecques d'origine, mais restées plus près de la
barbarie dans les montagnes du nord-ouest, en-
vahirent successivement la Thessalie, la Béotie
et le Péloponnèse. Cette période d'invasion, qui
commença vers la fin du douzième siècle et s'a-
cheva au neuvième, eut pour résultat de substi-
tuer les Hellènes aux Achéens comme race domi-
nante, et de remplacer par une civilisation et une
religion à certains égards très-différentes la civili-
sation et la religion que représentent les poèmes
homériques. V Iliade et Y Odyssée appartiennent
YOifsiéêk deux auteors «fièrent» s 'appelaient les chvrU
zonte» ( oï x^pitovreO, *** aéparateBrs. Voy. Grauert,
Veber die homerlschen Choriwnten; dans le Rheinisch-
Muséum, l«7. P. m, p. m.
(I) Podf les deux premiers stèetea qui totteot Père de»
Olympiades, 776 avant J,-C, la chronologie grecque est
encore très-incertaine; pour ceux qui précèdent, elle
n'existe pas. Ce que ton appelle de ce nom, ee sont dea
dates de convention destinées à servir de points de repère
dans des espaces illtmttés.Entre les divers système* ebroBO-
logiqaes aussi pea fondés les uns que les antres, nous
adoptons celui d'Ératosthéne : prise de Troie, lias avant
J.-C; retenr des Iféraettdes (ou Invasion dortenae;,
no* ; émtfrattM ienienno» M* s fondation de Cm»,,
fttt; fondation de Sroyrne, 1015.
HOMÈRE 46
certainement à cette période intermédiaire. Con-
sacrées à la gloire et au triomphe des Achéens ,
mais pleines du récit de leurs malheurs et du
vague pressentiment de malheurs plus grands
encore, elles forent composées lorsque la confé-
dération achéenne en décadence, et près d'une
ruine complète, s'attachait à la mémoire de sa
grandeur passée, et lorsque les souvenirs de la
guerre de Troie s'étalent déjà transformés en
poésie populaire, ce qui n'a guère pu avoir lieu
avant le onzième siècle. D'un autre côté les deux
épopées ne peuvent pas avoir été composées
après le neuvième siècle ; car, dès le huitième,
Homère se serait trouvé dans un état de choses
si différent de celui qu'il a chanté que, pour
peindre une époque complètement disparue, il
aurait dû faire un effort archéologique tout à fait
incompatible avec le caractère naïf et spontané
de sa poésie. Cest donc entre 1 100 et 800, et plus
près de la première date que de la seconde, qu'il
faut placer l'existence d'Homère.
Si Y Iliade et Y Odyssée, interrogées avec soin
sur l'époque où vivait leur auteur, ne nous don-
nent qu'une vague approximation , elles nous
fournissent sur sa nationalité des détails nom-
breux mais contradictoires. Beaucoup de ces
détails feraient croire que le poète était Euro-
péen. Sa mythologie s'est évidemment formée
en Europe. Elle est l'œuvre des aèdes thraces
qui vivaient soit en thessalie autour du mont
Olympe, soit en Béotie près de l'Hélicon, et qui
coordonnèrent les diverses légendes locales en
un vaste système mythologique. Il semble que
Homère asiatique aurait choisi pour la demeure
de ses dieux quelque montagne de l'Asie Mi-
neure, rida et le Gargaros plutôt que l'Olympe
thessalien, et qu'il n'aurait pas comparé Nau-
sicaa à Artémis marchant sur la Taygète ou l'É-
rymanthe. En général lorsque Homère parle des
localités d'Europe , il est plus précis , plus mi-
nutieusement exact que pour les localités d'Asie.
Cependant on peut, en faveur de l'origine asia-
tique des poèmes homériques faire valoir la tra-
dition très-répandue qui place en Asie la nais-
sance d'Homère, et la langue de ses poèmes, qui
est l'ionien, c'est-à-dire un dialecte d'Asie. Si on
veut préciser davantage la question de nationa-
lité, et chercher à quelle tribu grecque apparte-
nait Homère, on rencontre les mêmes contradic-
tions. Dans les deux poèmes les premiers rôles
sont donnés à des Éoliens, à Achille, à Ulysse , la
plus grande partie des légendes est d'origine
achéo-éolienne, et beaucoup d'usages particuliers
aux Éoliens y sont rapportés -, mais il serait diffi-
cile de contester l'origine ionienne, peut-être
même athénienne de la légende d'Hélène. D'au-
tres faits plus concluants attestent que, se-
lon l'expression d'Aristarque, un cœur ionien
battait dans la poitrine d'Homère. Partout le
poète montre pour les divinités ioniennes,
Athéné, Poséidon, un respect significatif. Les
institutions politiques auxquelles il fait allusion
47
HOMÈRE
48
sont ioniennes, tandis qu'il ne mentionne jamais
les autres institutions que les Doriens répan-
dirent parmi les Grecs. Si ses connaissances géo-
graphiques en ce qui concerne l'Asie sont géné-
ralement vagues, il parle avec une singulière pré-
cision des pays situés au nord de l'Ionie et dans
le voisinage de la Maeonie. Suivant la remarque
d'Ot. Mùller, « la prairie d'Asius, le fleuve du
Caystre avec ses cygnes, le lac Gygès , le mont
Tmolus avec le rocher de Sipyle, d'où coulait
rAchéloiis, semblent lui être connus par des sou-
venirs d'enfance ». Telles sont les données con-
tradictoires que Ton recueille dans l'Iliade et
Y Odyssée, et sur lesquelles il faut asseoir la
biographie d'Homère. Les témoignages des an-
ciens à son sujet ne méritent confiance qu'au-
tant qu'ils nous aident à résoudre ces difficultés,
à concilier ces contradictions.
Ces témoignages sont innombrables ; car il
n'est pour ainsi dire pas un auteur grec ou latin
qui n'ait parlé d'Homère. Déjà les anciens
avaient senti le besoin de rassembler ces no-
tions dispersées et d'en former une vie d'Ho-
mère. Nous possédons huit de ces vies, en y
comprenant une fiction intitulée Joute d'Ho-
mère et d'Hésiode. (*AY<&v'Oprfjpou xocrHatofiou).
Quatre sont anonymes, les quatre autres portent
les noms d'Hérodote, de Plutarque, de Proclus,
de Suidas. Suidas vivait au onzième siècle de l'ère
chrétienne, Proclos ( différent du philosophe de
ce nom) au deuxième, Plutarque au deuxième
aussi. La Vie qui nous est venue sous le nom
d'Hérodote serait inappréciable si elle était au-
thentique. Mais le moindre examen démontre
que c'est une fiction fabriquée un siècle tout au
plus avant J.-C, afin de répondre aux questions
que soulevaient déjà l'origine et la transmission
des poèmes homériques. Les Vies anonymes
sont encore plus récentes. Ces biographies, dont
la plus ancienne est postérieure à Homère d'un
millier d'années, n'ont aucun prix à titre de
documents originaux ; elles ne valent que par les
renseignements qu'elles renferment. Elles nous
font connaître les noms de cinquante auteurs
environ qui, spécialement ou en passant, s'étaient
occupés de la patrie et de l'époque d'Homère.
La plupart de ces auteurs n'ont fait que répé-
ter ce que d'autres avaient dit avant eux. Si
l'on s'en tient aux écrivains qui ont constaté des
traditions anciennes et émis des opinions origi-
nales, on n'a plus devant soi qu'un petit nom-
bre de témoignages dont les contradictions ne
sont paa inconciliables. Mais ces témoignages
mêmes ne sauraient dans aucun cas avoir l'au-
torité de notions positives qui manquaient aux
anciens aussi bien qu'à nous. Ce sont des tradi-
tions, des conjectures, rien de plus. Entre la
composition des poèmes homériques et les plus
anciens historiens grecs, il s'écoula au moins
quatre siècles. C'est un vide qu'il sera toujours
impossible de combler.
Les diverses dates assignées aux poèmes ho-
mériques diffèrent de près de quatre cents ans.
D'après Cratès et Ératosthène, Homère vivait
dans le premier siècle après la guerre de Troie.
Aristote et Aristarque le font vivre du temps de
l'émigration ionienne, 140 ans après cette guerre;
Apollodore le chronologiste , 240 après; Por-
phyre, 270 après ; les marbres deParos, 277 après ;
Hérodote, 350 après. Non-seulement septailles,
comme on le dit, mais dix-sept villes et même
dix-neuf revendiquèrent l'honneur d'être la pa-
trie d'Homère. Entre ces prétentions dont la
plupart n'ont aucun fondement, il faut distinguer
celles de Cyme, soutenues par l'historien Éphore,
celles de Colophon défendues par Nicandre, et
surtout celles de Smyrne et de Chios. Smyrne
a pour elle Pindare, Scylax et Stésimbrote. Chios
s'autorisedes témoignages de Simonide, d'Acusi-
laus , d'Hellanicus, de Thucydide , et du fait qu'il
avait existé à Chios une famille d'Homérides et
que Homère y était l'objet d'un culte. Si à l'aide
des poèmes homériques on essaye dechoisir entre
ces assertions contraires, on écartera d'abord les
dates extrêmes d'Éralosthène et d'Hérodote, et
entre les autres on s'arrêtera àcelled'Aristute et
d'Aristarque, parce qu'elle coïncide avec un fait
historique dont l'influence sur la poésie homé-
rique a été capitale : nous parlons de l'émigration
ionienne. L'invasion des Doriens fit refluer beau-
coup de Grecs, Ioniens et Éoliens sur les riva-
ges de l'Asie, où ils fondèrent des colonies floris-
santes. Les Ioniens et les Éoliens, séparés par-
tout ailleurs, se trouvèrent, par suite d'événements
douteux, réunis à Smyrne. Cette union des deux
tribus ne fut pas de longue durée. Les Éoliens
expulsèrent les Ioniens, qui se réfugièrent à Co-
lophon, à Chios et dans d'autres établissements
de leur race. Plus tard la fortune changea. Les
Ioniens, partis de Colophon, reprirent Smyrne, qui
fut dès lors une des principales villes de leur
confédération. Si l'on place, avec Aristote et Aris-
tarque, la vie d'Homère à Smyrne, dans la pé-
riode qui suivit l'émigration ionienne, 140 ans
après la prise de Troie, les principales difficultés
qui nous frappent dans ses poèmes se trouvent
résolues. Les Éoliens, partis d'Europe, établis
d'abord à Cyme, comptant parmi leurs tribus la
grande race des Achéens, et se vantant d'avoir
pour chefs des princes de la famille d'Agamem-
non, apportaient en Asie un fonds inépuisable
de légendes et de chants nés dans la Grèce d'Eu-
rope, en retraçant avec précision les principaux
sites, et profondément empreints de la mytho-
logie qui s'y était développée. Au contact de la
terre d'Asie, théâtre des exploits de leurs ancê-
tres, à la vue des campagnes 4e la Troade, où
leurs héros populaires avaient eombattu et trouvé
une mort glorieuse ou une victoire éclatante, les
Éoliens sentirent redoubler leur intérêt pour les
légendes , les ehants de la guerre de Troie, qui
depuis plus d'un siècle déjà les charmaient et les
exaltaient. Us portèrent dans Smyrne l'enthou-
siasme dont les remplissait le souvenir de la
-*9
HOMÈRE
50
grande lutte des héros achéens contre la famiUe
de Priam; Us y trouvèrent, gouvernée par des prin-
ces athéniens qui prétendaient descendre de Nes-
tor, la race ionienne, qui, pour la civilisation et
la culture intellectuelle, devança toujours les
autres tribus grecques, et qui, moins originale,
moins poétique, devait, par sa vive intelligence,
son sentiment exquis de Fart, son esprit progres-
sif , les éclipser toutes un jour. Les Éoliens et
les Ioniens, réunis par le hasard de rémigration,
confondirent leurs légendes. Un poète, Ionien
d'origine (son langage, son génie brillant et fa-
cile l'attesteraient au défaut de la tradition) eut
l'idée de rassembler les légendes poétiques des
aèdes et de les grouper autour d'une légende
principale qui leur servit de centre. De cette idée'
féconde naquirent V Iliade et Y Odyssée, ces poè-
mes qui sont à la fois l'œuvre de tout un peuple
et d'un seul homme, dont le fond appartient à la
Grèce d'Europe, et qui ont pris leur forme en
Asie, qui sont éoliens et ioniens, que toutes les
villes grecques revendiquent à bon droit, et
qu'une seule ville, Smyrne, a vus naître. Un des
procédés les plus familiers à certaines époques,
c'est de symboliser dans un nom, dans une
légende , toute une période historique. Ainsi,
les traditions relatives à Homère nous re-
présentent, non l'histoire réelle du poète, mais
l'histoire de l'origine et de la transmission de
ses poèmes. Si on l'a fait naître à Cyme, c'est que
dans cette première colonie asiatique des Éoliens,
les légendes des héros achéens s'étaient ranimées,
avaient pris une vie nouvelle et dès lors im-
mortelle. Si on l'a fait naître à Chios et à Colo-
phon, c'est que les Ioniens, expulsés de Smyrne,
se réfugièrent à Chios et a Golophon, y portant
avec eux les chants que, à défaut de l'écriture,
la mémoire des rapsodes conservait fidèlement.
Si l'on tient compte de la tradition qui repré-
sente Homère venant après de longs voyages se
fixer à Chios, si l'on songe que dans cette tleflo-
rissait une famille des Homérides et que le
poète y était l'objet d'un culte, on admettra
comme vraisemblable que Homère» chassé de
Smyrne avec les autres Ioniens, trouva un asile
à Chios, peut-être même qu'il y composa son
Odyssée : supposition qui expliquerait pourquoi
les légendes achéennes tiennent moins de place
dans ce poème, pourquoi les divinités ioniennes
y sont particulièrement vénérées, et pourquoi
aussi on y sent une civilisation plus avancée,
un état social moins violent, plus propice aux
jouissances physiques et intellectuelles. Ces con-
jectures, nous le répétons, ne sont pas des faits
historiques, mais elles montrent que, pour ex-
pliquer l'origine et la composition de Y Iliade et
de Y Odyssée, on n'a pas besoin de recourir à
l'hypothèse paradoxale de Wolf ; il est plus sim-
ple et plus raisonnable de s'en tenir à l'opi-
nion générale, mieux comprise et judicieusement
amendée.
L Iliade et Y Odyssée furent la base et comme
le centre d'un développement poétique qui em-
brassa toutes les légendes de la guerre de Troie,
comprit les exploits des héros argiens devant
Thèbes, et s'enfonça même plus avant jus-
qu'aux origines mythiques de la race grecque.
Tandis que les Homérides de Chios se transmet-
taient fidèlement, de génération en génération, les
chants du poète dont ils portaient le nom, d'au-
tres rapsodes, en récitant les mêmes œuvres,
entreprirent de les compléter par des composi-
tions analogues sur des sujets qu'Homère avait
laissés de côté, ou qu'il avait touchés en passant.
Les plus importantes de ces productions se
conservèrent chez les anciens, et formèrent ce
qu'on appela le Cycle épique. Ce vaste recueil,
qui commençait au mariage d'Uranus et de Gaea
et finissait au meurtre d'Ulysse par son fils
Télégonus, comprenait un grand nombre de
poèmes aujourd'hui perdus dont les titres même
sont imparfaitement connus et dont les auteurs
sont incertains (1). La Titanomachie (2) (Trra-
vopiaxCa); La Danaïde (Àavaic); VAtthide
('AxOîc); ou l'expédition des Amazones (3);
VŒdipodie (4) ('OiStwoSeia); La Thébaïde (5)
(Ov)6aïç) 1 ou l'expédition d'Amphiaraiis; Les
Épigones ('£7rrrovoi), ou VAlcméonide (6) ('AXx-
jtaiwvCç) ; La Minyade (Mivvàç),ou la Phocaïde
(4>wxak); Xa Prise d'Mchalée (7) (OtxaXiaç
4XaxTi;); Les Chants cypriaques (8) (Ta
Kûirpia) (9); VÉthiopide (10) (Al0toict;); La
Petite Iliade (1 1) ('IXidu; (uxpd), La Destruction
de Troie (12) ( 'IXCov rcépmç ) ; Les Retours des
Héros (13) (Noa-cot) (14); La Télégonie (15)
( TyiXefoveCa ) : toutes ces épopées se rattachent
étroitement aux poèmes homériques ; mais, quoi-
que formées des mêmes matériaux et animées
des mêmes sentiments, elles n'offraient pas, au
jugement des anciens , la même puissance de gé-
nie, le même art de composition.
Les hymnes qui portent le nom d'Homère ne
lui appartiennent que pour avoir été longtemps
liés à la récitation de ses poèmes. Les anciens don-
naient à ces compositions, souvent très-courtes,
parfois assez étendues , le titre d'ouvertures ou
a) Procïus, dans no passage de sa Chrestomathie, cité
par Photius (cod. JS9) , a donné une courte analyse du
Cycle épique. Foy. sur ce sujet Welcker, Der Epische
Kyklus; Duntzer, Fragmenta Bpicorum Grxcorum ,•'
Wtllluer, De Cyclo epico ; Leutsch, Thebaidos cycliae
Reliquiae; Lange, Uberdie Kyklischen Dichter.
(3) Attribuée h Eumelus de Corlntbe et a Arctinus
(S) Att. a Hégésinus.
(4) Att. à Cinétbon.
(5) Att. à Arcttnus, et plus souvent à Homère.
(6) AU. à Homère.
(7) Att à Créopbyle de Samos et à Homère.
(8} Att. à Staslnus et à Leschès.
(9) Après les Cfumtt cypriaques venait dans le Cycle
Y Iliade d'Homère.
* (10) Attribuée à Arcttnus.
f (il) Att. à Homère, a Thestoridès, à Cinétbon, à uiodore
d'Erythrée et plus souvent à Lescbès.
(19) Att. à Arctinus.
(18) Att. à Hagias de Trézène.
(14) Après les Retours venait VOdystée d'Homère.
(15) Att. * Eugammon de Cyrène et A Cinétbon.
51
HOMÈRE
52
de préludes (tcpootuia), On les attribue aux
rapsodes , qui les chantaient comme préludes à
leur récitation épique. Les productions de ce
genre qui nous restent offrent une telle diversité
de ton et de langage qu'il faut y voir des débris
d'hymnes composés dans un laps de plusieurs
siècles, depuis le temps d'Homère jusqu'à là
guerre médique. Parmi les trente-quatre hymnes
homériques Tenus jusqu'à nous, plusieurs ont
peu de valeur; mais il en est six qui méritent
une attention particulière, soit à cause de leur
étendue, soit pour leur couleur mythologique;
ce sont les hymnes adressés à Apollon Délien,
à Apollon Pythien (I), à Hermès, à Aphrodite,
à Démêler et à Dionysos. L'auteur de Y Hymne
à Apollon Délien est m homéride qui s'appelle
lui-même « le poète aveugle qui habite la rocail-
leuse Chios ». Thucydide l'identifie avec l'auteur
de Y Iliade, et c'est peut-être d'après ce rapsode
aveugle que les anciens se formèrent l'idée
d'Homère. V Hymne à Apollon Pythien contient
l'histoire de l'établissement dn sanctuaire pythien
par le dieu qui tua l'hydre (ty&totiva) et qui, sous
la forme d'un dauphin, conduisit les Cretois à
Crissa, où ils furent les prêtres de son temple.
V Hymne à Hermès, qui ne peut être antérieur
à la trentième olympiade, puisqu'il y est fait men-
tion delà lyre à sept cordes, invention de Ter-
pandre, est le récit des ruses d'Hermès. Le dieu
nouveau-né quitte son berceau et dérobe les trou-
peaux d'Apollon dans les pâturages de Piérie. Il
façonne la lyre à sept cordes avec une écaille de
tortue , et lorsque son larcin est découvert , il
apaise la colère d'Apollon en lui donnant ce
mélodieux instrument. VHymne à Aphrodite
célèbre la naissance d'Énée, et se rattache in-
timement à Y Iliade. VHymne à Déméter est
consacré au séjour de ta déesse dans la demeure
de Céléus à Eleusis. Déméter, irritée de l'enlè-
vement de sa fille Perséphoné , se réfugia chez
les Éleusiniens, et y resta cachée, privant les
mortels de ses bienfaits, jusqu'à ce que Zeus
consentit à lui rendre sa fille. Cet hymne,
œuvre évidente d'un poète attique, appartient
à une période religieuse que Y Iliade et Y Odys-
sée font à peine pressentir. Le» idées qui ont
inspiré Y Hymne à Dionysos sont encore plus
éloignées de l'âge homérique. Le dieu, sem-
blable à un jeune homme, avec sa noire che-
velure flottante et un manteau de pourpre sur
les épaules, se tenait aux bords de la mer lors-
que des pirates tyrrhéniens l'enlevèrent, et le
portèrent sur leur vaisseau. Bientôt divers pro-
diges manifestent la présence du dieu. Le vin
ruisselle sur le navire, une vigne chargée de rai-
sins se suspend à la voile, le lierre sombre, avec
ses grappes éclatantes, s'entrelace autour du mât.
Dionysos prend la forme d'un bon, une ourse
apparaît près de lui, et les pirates épouvantés
(1) Dans les édition* d'Homère , ces «feai bymaes n'eu
forment généralemeut qu'an sent.
seprécipitent dans la mer, oii ils sont changés en
dauphins. Ces fictions signafent dans la poésie
grecque l'invasion d'un élément religieux (l'é-
lément mystique et orgiaque), tout à fait étranger
à la mythologie d'Homère.
Outre les poemesdu cycle épique et les hymne* ,
on attribue à Homère des productions d'un genre
tout différant, et qui sont même la parodie de
la poésie héroïque : le Margitès, Les Cereopes,
La Batrachomyomachie, etc. Le Margitès,
qu'Aristote plaçait incontestablement au nombre
des œuvres d'Homère, et qu'il regardait comme
la source de la comédie, au même titre que
Y Iliade et Y Odyssée étaient la source de la tra-
gédie, est perdu. Cette perte est fort regrettable.
H serait curieux de voir les formes majestueuses
de l'épopée appliquées à des peintures comique*
de mesura, à des tableaux satiriques. Le héroe
du MargÙes était un sot qui avait une haute
idée de son intelligence « qui savait beaucoup
de choses, mais 'qui les savait toutes mal ».
« Les dieux, dit le poète , ne l'avaient fait ni ter-
rassier, ni laboureur, ni habile à quoi que ce fut :
il manquait de toute industrie *. Selon quel-
ques critiques grecs, Pigrès, frère d'Artéimse
et contemporain des guerres médiqnes, était
l'auteur du Margitès (1), mais il est pro-
bable qu'il ne fit qu'interpoler un poème ptas
ancien ; et sans faire remonter le Margitès jus-
qu'à Homère, on peut l'attribuer à un rapsode
homérique. Les Cereopes, ces malicieux petits
génies qu'Hercule emprisonna pour se venger de
leurs méchants tours, et qui lui échappèrent par
de nouveaux stratagèmes, formaient le sujet
d'un poème, aujourd'hui perdu, destiné à égayer
les auditeurs attristés par les infortunes de*
héros épiques. Dans le même but furent com-
posées d'autres petites pièces , telles que : Lm
Chèvre sept fois tondue (At( ènxântxtoç); La
Chanson des ÉpieichUdes ('EmxixXC&ç), dont
nous ne connaissons que (es titres ; Le Four ou
la Cruche (K6(uvqc 4) Kspauic), où l'appareil
mythologique et poétique est appliqué aux plus
humbles objets de la vie commune, etXa Batra-
chomyomathie ( Bottp^ou.v©u«xC« ). L'auteur
de ce petit poème, probablement Pigrès, raconte,
dans un style emprunté à Y Iliade, les combats
des rats et des grenouilles. Ces productions, que
les anciens ne craignaient pas de placer sous le
nom d'Homère, appartiennent en effet à ta poésie
homérique : elles en marquent l'extrême déca-
dence.
Tandis que le grand mouvement poétique,
suscité par Y Iliade et Y Odyssée, aboutissait à
des parodies, les deux poèmes confiés si long-
temps à la mémoire des rapsodes trouvaient
enfin dans récriture un moyen de transmission
plus exact et plus durable (3). Vers 630 &\wî
ff) rof. SoM», m not IUyovk-
(S) Héraclide du Pont prétend (Hist. Grtec. fruym.,
«dit. Didot, t. II, p. sio ), que Lycurgue apporta dans le
Nfoponnète tee poèmes d'Homère, Jcnquje-tar taeettitus
o3 HOMÈRE
J.-C, sous le règne dePsammétik, l'Egypte fat
ouverte aux marchand* grecs, quien rapportèrent
le papyrus ou bibias. L'importation de cette
matière légère, peu coûteuse» admirablement
appropriée à l'écriture, eut chez les anciens des
effets presque analogues à l'invention de l'im-
primerie chez les modernes : elle hâta la diffusion
et assura la durée des œuvres littéraires (1).
Mais les difficultés qui s'opposaient à la trans-
cription d'ouvrages aussi étendus que Y Iliade et
Y Odyssée furent lentes à écarter. Les rapsodes,
jusque-là détenteurs principaux, peut-être uni-
ques, des deux poèmes, répugnaient à se dessaisir
d'un privilège auquel ils devaient toute leur im-
portance. La masse du public, habituée h con-
naître les poètes par la récitation des rapsodes, ne
réclamait pas des manuscrits qu'elle n'aurait
pas su déchiffrer. Mais à partir d'Archiloque
une classe de lecteurs s'était formée cultivant la
poésie, désireuse d'en posséder tes monuments,
n'ayant pas le loisir de les graver dans sa
mémoire. Pour cette classe, qui s'accrut peu à
peu, se firent les premières copies de l 1 Iliade et
de Y Odyssée, bien incomplètes sans doute, mais
permettant de contrôler la récitation des rapsodes,
qui continuaient de débiter à la cour des princes
et aux fêtes publiques des morceaux plus ou
moins longs des épopées homériques, choisis
selon leurs convenances particulières on celles
de leurs auditeurs. Ce mode de récitation tron-
quée et arbitraire avait fait disparaître l'unité
primitive des deux poèmes, et facilitait les plus
larges interpolations. Solon, d'après Diogène
Laeree, porta remède au mal en ordonnant aux
rapsodes de suivre dans leur récitation le plan du
poêle (2). Pisistrate, suivant de nombreux témoi-
gnages (3), fit un pat plus décisif vers laconsti-
hors de ri ont e. Mais tout ce qui concerne Lycurgue est
trop incertain, r époque de «on existence est trop dou-
teuse poar qu'on tienne compte ée l'assertion d'Héra-
cllde, répétée par Plutarque.
(1) M. Egger, Histoire de la critique chez les Gr$cs t
p. 48*.
(S) litogène Laeree, Un • Ta & 'Oojqpov il fecofoXvJc
IXçgev, IxetOev ajpx e<T ^ ai xov àpX^Ufivov. L'auteur du
Dialogue d'Hipparque, attribué à Platon, fait honneur de
ce règlement au ils de Pisistrate. On ne saurait dire
quelle était l'obttgatton que Solon on Htpparqne im-
posèrent aux rapsodes; le sens de l'expresston , é£
CmoêoXTfc, ê£ VKùkrr\it(j>ç t dont se servent Diogène et le
Pseudo-Platon, est incertain. {Voy. Rermann, Opnscula %
t. v, p. a»; t. vu, p. <«, 161.)
(3) Wolf dit, dans ses Proleyomea*, p. cxui : « Vox
totius antlquitatis. et si summam spectes, consentons
rama testator Piststratiim carmin a Homeri prhnuro con-
signasse IHterto, et In enm online» redegtste qoo mine
ieguntur » ; mats il ne cite que huit autorités : Clcéron
(Oc OraU. III. 84) ; Pansants*, VIL,SS ; Joseph*, C. jipiotu,
I, 2; Élten, V. H , XIII, 14 ; Llbanius , Ptateg. i» /ni.,
t. I, p. no, «dit. de Belsk . Bustathe, p. S; et un anonyme
dans L. AllattuSjDe Pat. Hom. On remarquera qne le pins
ancien deeea témoignages est celui de Clcéron, qui vivait
cinq siècles après Pisistrate. On remarquera aassj, et ceci
est plus grave , que dans lea seolles de Venise , qui résu-
ment les travau de» Alexandrins sur Homère, et qui
citent plusieurs éditions de ce poêle , il n'est Jamais
parlé de la récession, de Pisistrate. On a expliqué de dif-
férentes manières oe silence étonnant {va*. ftuacJul,
54
tution du texte homérique. 11 rassembla en un
tout les parties séparées de chaque poème. On a
longtemps ignoré les noms des amis ( fraipot, dit
Pausaniaa) de Pisistrate qui l'assistèrent dans
cette entreprise. Une scolie sur Plaute (1),
récemment découverte, nous en fait connaître
quatre : Conchylus (ce mot est douteux) (2),
Onomacrite d'Athènes, Zopyre d'Héraclée et
Orphée de Crotone. Tels sont les noms des pre-
miers éditeurs connus d'Homère, de ceux qui,
suivant une opinion générale, firent un tout de
ses membres dispersés. En accomplissant une
tache aussi difficile, ils durent commettre in-
volontairement et volontairement bien des er-
reurs. Us semblent avoir rattaché à Y Iliade des
épisodes qui n'appartenaient pas à ce poème (3).
Ils introduisirent certains passages pour flatter
l'orgueil des Athéniens ou pour servir les des-
seins politiques de Pisistrate. Onomacrite, banni
plus tard pour avoir fabriqué des vers qu'il at-
tribuait à Musée , est particulièrement suspect.
Ces infidélités reprochées aux éditeurs (4) de
Pisistrate sont peu de chose en comparaison des
interpolations probables desrapsodes. En suppo-
sant avec vraisemblance qu'ils apportèrent peu
de critique dans leur récension, il est sûr qu'ils ne
purent pas altérer essentiellement les deux poème»
qu'ils reconstituaient ; car ces poèmes étaient géné-
ralement connus par la récitation des rapsodes, etil
en existait certainement déjà des manuscrits. Le
grand méritede leur œuvre fut de servir de base à
d'autres éditions qui se succédèrent rapidement.
L'auteur du Dialogue d'Hipparque attribue une
récension nouvelle au fils de Pisistrate, Hip-
parque, qui eut pour collaborateurs les poètes
Simonide et Anacréon. Les villes grecques lea
plus florissantes, rivalisant avec Athènes, firent
faire de Y Iliade et de Y Odyssée des transcrip-
tions dont le texte, pour ainsi dire officiel, servit
aux récitations solennelles des fêtes publiques,
et à la récitation libre et journalière des rap-
sodes. On connaît six de ces recensions politi-
ques (ou des villes ), comme les appellent les
Alexandrins, celles de Marseille» de Chics, d'Ar-
gos, de Sinope, de Cypre et de Crète. A Athènes
les copies d'Homère devinrent assez communes
pour qu'Alcmiade souffletât un maître d'école
Me Mexandrtnischê Bibliothek, p 59, et Welcker, Der
Bpiseke Xykhts, p. 88* ) ; il n'en pronve pas motos que
les Alexandrins n'attachaient pas à l'édition de Pisistrate
l'importance énorme qne lui ont accordée Wolf et son
école.
(t) Voy. Mtscbl, CoreUarium dispmtationis de MMfctf ne»
cis alexandrinis deque Pisistrati curis homericiSf
Bonn, 1840. Cette scolie confirme pleinement l'opinion
de Wolf sur l'édition de Pisistrate.
(*) Foy. sur cette leçon, Duntzer, Borner und der
eplsche Kyklo$ y p. 88.
(S) Par exemple la Dolonéa, qui forme le dixième chant
de V Iliade ( voy. le passage d'Eustathe cité plus haut).
Aristophane de Byzaoce et Aristarque rejetaient comme
apocryphes lea cinq cents derniers vers de l'Odyssée.
(t) On croit que tes Alexandrins font allusion è ce*
é(Uteojrsk»squ'UaparLentdesaUa<A^mute«ou arrangeurs
d'Homère.
55
HOMÈRE
56
qui n'en possédait pas une. Ces transcriptions
successives épuraient, mais bien imparfaitement,
le texte altéré des poèmes homériques. On n'é-
tudiait pas encore V Iliade et Y Odyssée à un
point de Tue critique. Comme ces deux épopées
étaient le fondement de toute éducation li-
bérale et exerçaient une immense influence sur
les esprits, les philosophes furent naturellement
conduits à exposer, à recommander ou à réfuter
les principes moraux et les doctrines religieuses
qu'elles contenaient. Pythagore, Xénophane,
Heraclite condamnèrent Homère comme un ar-
tisan de mensonges qui avilissait la majesté des
dieux, tandis que Théagène, Métrodore, Anaxa*
gore, Stésimbrote dévoilèrent la profonde sa-
gesse que le poète avait cachée sous des fables
amusantes. A ces derniers remonte l'absurde
manie de voir dans les chants populaires de la
Grèce primitive des allégories morales. Cette
plate et extravagante interprétation dont Socrate
se moquait, que Platon réfutait, qu'Aristarque
contredisait de toute la force de son savoir et
de son bon sens, resta pourtant en faveur chez
les rhéteurs et les grammairiens anciens; elle a
été longtemps en honneur parmi les modernes,
et peut-être en trouverait-on des traces même au-
jourd'hui.
Les sophistes du temps de Périclès, Prodi-
cus, Protagoras, Hippias, s'occupèrent d'Homère
d'une manière plus utile , et frayèrent la route
aux Alexandrins. Sous leur influence parurent
des éditions nouvelles, fruits de la comparaison
de différents manuscrits, et l'on fit encore quel-
ques pas vers le rétablissement du texte homé-
rique. Mais cette tâche offrait des difficultés que
l'application raisonnée de la critique pouvait seule
surmonter. Les manuscrits, déjà nombreux, of-
fraient de grandes divergences, et Ton avait peine
à se reconnaître au milieu de tant de passages
omis, transposés, ajoutés, tronqués (1). Parmi
les éditions qui devancèrent et préparèrent celles
d'Alexandrie on en signale deux, l'une du poète
Antimaque deColophon, l'autre d'Aristote, qui
fut, dit-on, assisté de Callisthène et d'Anaxar-
que (2). Celle-ci reçut le nom d'édition de la cas-
sette ( V) ix toO vàpfapioç ) , parce qu'Alexandre
avait l'habitude de la porter avec lui dans une
magnifique cassette provenant du trésor de Da-
rius: On cite encore deux autres recensions qui
se rattachent aux éditions politiques : Yéolique
( atoXixrj), ainsi nommée sans doute parce qu'elle
-avait été faite dans quelque ville éolienne, et la
cyclique ( KuxXwrij ) , qui faisait apparemment
(1) Beaucoup de vers d'Homère cités par les auteurs de
cette époque, Arlstote entre autres, ne se retrouTcot pas
dans le texte actuel. Un passage de la Poétique semble
même démontrer qu'un long épisode de V Odyssée man-
quait aui manuscrits de ce poème qu'Arlstote aTatt sous
les yeux. ( Foy. liRger, HUt, de la Crit., p, 508. )
(1) Arlstote avait aussi composé des Problèmes Home'
riqms ( discussions exégétiques et grammaticales ), au-
jourd'hui perdus, mais qui nous sont en partie connus
par les scottes de Venise. ( Voy. Egger, HUt. de la Crit.,
p. 118.)
partie de la collection des poèmes cycliques.
Ces éditions n'étaient que des préparations au
grand travail de critique qui commença avec Zé-
nodote d'Alexandrie. Le moment était venu de
constituer définitivement le texte d'Homère. La
période créatrice de la littérature grecque était
close. Il ne restait plus aux lettrés de.ia cour
des Ptolémées qu'à recueillir pieusement , à
classer, à conserver avec vigilance, à épurer les
grandes oeuvres du passé , dont la bibliothèque
d'Alexandrie leur offrait le plus riche dépôt; à
les commenter, à expliquer ce qui, n'étant plus
lié à des mœurs, à des institutions vivantes, de-
venait intelligible pour tous, excepté pour les
savants. Trois écrivains placés entre eux dans
des rapports de maître à élève furent à la tète
d'une nombreuse éeole qui, occasionnellement ou
exclusivement, s'occupa des poèmes homériques.
Zénodote (1) posa les fondements de la critique
systématique en établissant deux règles pour
épurer le texte corrompu. H rejeta 1° ce qui était
en contradiction avec l'ensemble de l'ouvrage;
2° ce qui paraissait indigne du génie de l'auteur.
A ces deux règles Aristophane et Aristarque en
ajoutèrent deux de plus. Ils rejetèrent : 3° ce qui
était contraire ou étranger aux coutumes de l'âge
homérique; 4° tout ce qui ne concordait pas avec
le langage et la versification épiques. Zénodote,
qui ouvrit la voie à la véritable critique, resta
loin de la perfection. Il retrancha de longs passa-
ges, en altéra et en transposa d'autres arbitrai-
rement; enfin, il agit avec les poèmes d'Homère
comme il eût fait avec son propre ouvrage. St
témérité aurait porté une atteinte irréparable
aux poèmes qu'il prétendait restaurer, si elle
n'avait trouvé des correctifs dans la méthode
prudente d'Aristophane, et d'Aristarque. Le pre-
mier (2) rétablit dans son édition beaucoup de
vers exclus par Zénodote, et commença ce que
le second acheva si heureusement. La réputation
d'Aristarque (3) était immense chez les anciens;
mais avant la publication des scolies de Venise
on pouvait difficilement se rendre compte de son
mérite. Ces précieuses scolies, en jetant un jour
inattendu sur l'origine des poèmes homériques
permirent aussi d'apprécier le grand critique
qui leur donna le premier une forme définitive.
Les scolies de Venise dérivent de quatre sources
principales aujourd'hui perdues, savoir : 1° le
traité d'Ari8tonicus sur les signes critiques em-
ployés par Aristarque dans son édition de Y Iliade
et de Y Odyssée (4) ; 2° celui de Didyme sur
l'édition d'Aristarque (5) ; 3° la Prosodie home-
(1) Foy. DOntser, De Zenodoti Studiis Homericii,
Gœttlngue, 1848.
(S) Foy. Nauk, Aristophanis Byxantii Fragmenta;
Halle, 1848.
(8) Foy. Lchrs, De Aristarchi Studiis Homericls, Kc-
ntgsberg, 1888, et Egger, Aristarque, dans la Bévue des
Deux Mondes, I" férrier 1846.
(4) F oy.Frtedlauder , Aristonicus, Ilepl £i)(u{i0v tt*
•JDudtèoc ; Gcetttngue, 1888.
(5) Foy. Sebnildt , Didymus Chalcenterus, Fragmenta,
Lelpstg , 1884, et l'article Didyme dans cette Biographie,
57
rique d'Hérodien (1) \ 4° le traité de Nicanor sur
la ponctuation de V Iliade (2). Les extraits de
ces quatre ouvrages cités dans les scolies de Ye^
nise nous font suffisamment connaître les pro-
cédés d'Aristarque. Les obèles ou signes criti-
ques, inventés par Aristophane, lui servirent à
noter les vers qu'il trouvait indignes du reste du
poème, mais qu'il n'osait pas rejeter, dans l'im-
possibilité où il était de décider s'il fallait les im-
puter à une défaillance accidentelle de l'auteur
ou aux interpolations des rapsodes. Quant aux
vers qui , selon lui, étaient évidemment apocry-
phes , il les rejeta , et son jugement fit loi.
Wolf n'en comptait pas moins de quarante ab-
sents pour cette cause du manuscrit de Venise ,
et Plutarque nous en a conservé quatre que les
éditeurs modernes ont fait rentrer dans le texte
d'où Aristarque les avait bannis (3). Le grand
critique alexandrin poussa peut-être la rigueur
trop loin; mais, grâce à ses travaux, le texte, si
longtemps incertain, fut fixé avec tin degré de
précision qui n'existe pour aucun autre auteur
grec, et auquel les siècles ont apporté moins de
changements qu'on ne l'a prétendu. D'après
Schoell (4), « ce fut surtout par les soins des
grammairiens d'Alexandrie des troisième et qua-
trième siècles après J.-C. que le texte des poèmes
d'Homère prit définitivement la forme sous la-
quelle ils nous ont été transmis ». « Le travail
d'Apion/grammairien du temps de Tibère, devint
la base d'une dernière révision, qui fut faite dans
les troisième et quatrième siècles après J.-C. par
des grammairiens pour ainsi dire éclectiques, qui
choisirent presque au hasard des leçons de di-
verses éditions. » « C'est cette dernière édition
qui seule nous est parvenue, et qui constitue
notre texte vulgate. » Ces assertions, qui portent
atteinte à l'autorité du texte homérique, sont exa-
gérées. Le texte d'Aristarque a été beaucoup
plus respecté que ne le croit Schoell. On a trouvé
récemment en Egypte des papyrus du deuxième
siècle avant J.-C., contenant des passages d'Ho-
mère, et on a constaté une identité complète
entre le texte des papyrus et celui du manus-
crit de Venise publié par Villoison (5).
Le texte homérique une fois constitué fournis-
sait une large hase à l'interprétation. Sur ce point
encore, Aristarque, partisan du sens positif, en-
nemi dés explications allégoriques, avait donné
un excellent exemple, qui ne fut pas assez suivi.
De son vivant même il eut pour contradicteur
Cratès de Malles , qui fonda l'école grammaticale
de Pergame, et eut le mérite d'introduire à Rome
(i) Le mot prosodie, dans le sens que lot donne Héro-
dlen, s'étend aax règles de l'accentuation, de la contrac-
tion, des esprits.
(î) Fou. Frlediander, Nicanor, Hepi 'JXtoowj; oriYpfc;
Kœnlgsberg, 1860.
(S) Plutarque, De audiendis Poetis. Les vers supprimés
par Aristarque sont dans le IX* livre, 45846t.
(*) Histoire de la littérature grecque, 1. 1, LU, ch.jlV.
(8) Fou. deux articles de M. A, de Longpérter dans le
Bulletin archéologique, 1865, p. 61, 1846, p 40.
HOMÈRE 58
l'étude de la littérature grecque. Du temps d'Au •
guste, Didyme écrivit sur Homère des commen-
taires très-étendus , où il résuma les immenses
travaux des critiques alexandrins. A sa suite
vinrent Apollonius, auteur d'un Lexique <$ Ho-
mère (1), et Apion, à qui on a donné une place
beaucoup trop élevée dans l'histoire de la cri»
tique homérique. Longin et Porphyre (2) eurent
peut-être plus d'importance, mais en général la
seconde école d'Alexandrie se perdit dans les
vaines subtilités de l'interprétation allégorique.
Les scolies, fruits de tant de travaux, sont dis-
persées dans divers manuscrits; il n'en existe
pas de collection complète. Les plus utiles sur
l'Iliade sont celles que Villoison publia d'après
un manuscrit du dixième siècle de la bibliothè-
que Saint-Marc à Venise; 1788, in-fol. Elles ont
été réimprimées avec des additions par I. Bek-
ker; Berlin, 1825-26, 3 vol. in-4*. Bacchmann
y a fait un petit nombre d'additions dans ses
Scholia ad H orner i Iliadem ; Leipzig, 1835.
Les meilleures scolies sur X Odyssée ont été pu-
bliées par Buttmann, Berlin, 1821; elles sont
principalement empruntées aux scolies données
en 1819 par Ang. Mai d'après un manuscrit de
Milan. Le commentaire d'Eustathe, compilation
dénuée de jugement et de goût, contient beau-
coup d'informations précieuses puisées à des
sources aujourd'hui perdues. Exécuté au douzième
siècle par un Byzantin, ce volumineux travail,
dernier mot de l'antiquité sur Homère, ne pré-
céda que de trois siècles l'époque où l'imprimerie
livra le texte des poèmes homériques à la cri-
tique et à l'admiration des modernes.
La première édition des Œuvres d'Homère
fut publiée par Démétrius Chalcondyle; Flo-
rence, 1488, 2 vol. in-fol. : elle est belle et assez
correcte. Les exemplaires n'en sont pas extrê-
mement rares ; mais il est difficile d'en trouver
un dans un état irréprochable; ils se payent
alors de 600 à 2,000 fr. On connaît trois exem-
plaires sur vélin, tous trois en Italie (à Venise ,
à Florence et à Naples ). Un exemplaire non
rogné (circonstance unique pour un livre aussi
ancien) fut acheté, en 1806, au prix de 3,600 fr.
pour la Bibliothèque impériale de Paris. La se-
conde édition parut chez Aide, Venise, 1504,
2 vol. in-8°; la seconde édition aldine (Venise,
1517, 2 vol. in-8°) rat reproduite à Florence en
1519, à Louvain 1523. Bientôt de nombreuses
éditions se succédèrent à Strasbourg, à Baie, à
Venise , à Rome, mais sans aucun profit pour le
texte. L'édition donnée par Henri Estienne dans
ses Poetx Graeci principes (Paris, 1566, in-fol.,
t. I er ), quoique exécutée avec trop de précipita-
tion, fait époque dans l'histoire critique du texte
(i) Publié par Villoison d'après nn manoserit du
dixième stècle; Paris, 1778,1 vol. in-foL; Leipzig, 1773,
1 vol. in-*».
(s) Fou. une bibliographie des travaux de Porphyre sur
Homère dans la thèse de M. Val. Parisot Intitulée ; De
PorphyriOy tria tmewuOa; Parts, 1841.
59
HOMÈRE
60
homérique; elle fut reproduite pur de nombreux
éditeurs pendant près d'un siècle. L'édition des
Elzevier (Amsterdam, 1656, 2 vol. in-4°), soi-
gnée par Cor. Schrevelius, n'est remarquable
que par sa beauté typographique; celle de Wet-
sten (Amsterdam, 1707, 2 vol. in-12) est plus
jolie que correcte. Barnes publia à Cambridge
( 1711, 2 vol. in-4°) une bonne édition avec un
texte revu sur plusieurs manuscrits et un com-
mentaire perpétuel ; l'impression en est fort belle :
ce dernier mérite et celui de la correction recom-
mandent l'édition d'Oxford ( 1714, 2 vol. in-8°) ;
mais elles furent surpassées l'une et l'autre par
celle de Clarke (Londres, 1729-1740, 4 vol.
in-4°). Clarke améliora sur plusieurs points le
texte de Barnes, et ses notes, quoique bien sur*
passées depuis, sont encore estimées. L'édition
d'Ernesti, Leipzig, 1759-1764, 5 vol. in-8°, re-
production très-améliorée de celle de Clarke,
mérite beaucoup d'estime; elle a été réimprimée
à Glascow en 1814, avec les Prolegomena de
Wolf, et à Leipzig en 1824. Nous citerons encore
une édition de luxe publiée aux frais de quelques
seigneurs anglais; Oxford, 1800, 4 vol. in-4°.
Les exemplaires sur grand papier se payent de
50 à 100 1. st. Une nouvelle période critique
commence avec la seconde édition de Wolf (dans
la première édition, il avait reproduit le texte
vulgate ) : Homeii et Homeridarum Opéra et
Reliquiœ, ex veterum criticorum notationi-
bus , optimorumque exemplariumfide; Halle,
1794, in -8° ; 1. 1 et II, contenant les Prolegomena
dont il a été si souvent question dans cet article,
et le texte de V Iliade. Une troisième édition de
Wolf, comprenant V Iliade et Y Odyssée , parut
à Leipzig, 1804-1807, 4 vol. in- 8°. Wolf avait
aussi commencé une édition de luxe, Leipzig,
1806, in -fol., qui n'alla pas au delà du premier
volume (contenant les douze premiers livres de
Y Iliade). En dégageant le texte d'Homère des
altérations successives qu'il avait subies , en le
ramenant à la pureté de la récension d'Aristar-
que, Wolf a fait preuve d'un savoir, d'une déci-
sion, d'un goût admirables ; mais on regrette qu'il
n'ait ajouté à son texte ni commentaires ni notes
critiques, de sorte que, dans beaucoup de cas,
il est impossible de savoir pour quels motifs il
adopta des leçons différentes de la vulgate. Parmi
les éditions postérieures, il faut citer, du moins
à titre de curiosité, celle de Richard Payne
Kniglit , qui d'abord, dans de nouveaux Prole-
gomena ad Homerum (1814), puis dans sa ré*
cension du texte ( Londres, 1820,in-4°), prétendit
revenir, non pas comme Wolf à l'Homère des
Alexandrins, non pas même à celui de Pisistrate,
mais à l'Homère primitif. Pour atteindre ce ré-
sultat, il débarrassa le texte d'une foule de pas-
sages qui lui paraissaient des interpolations, et
il l'augmenta par compensation de plusieurs
milliers de digammas. Cette ridicule tentative, où
l'auteur gaspilla un savoir réel, est une preuve
de plus que la critique moderne doit borner son
ambition à restaurer le texte d'Aristarque. De-
puis Wolf les principales éditions d'Homère sont :
l'éd. de Boissonade ; Paria, 1823/4 vol. in-32 ; —
de 6. Hermann; Leipzig, 1825, 2 vol, m-8°; —
de 6. Dindorf; Leipzig, 1826-1828,3 vol. in-12
(la quatrième édit. de G. Dindorf a paru à Leip-
zig, 1865, 2 vol. in-T et in-12 (1); — de Bothe;
Leipzig, 1832-35, 6 vol. in-8° : une des meil-
leures pour le texte, et des plus utiles pour le com-
mentaire, qui offre un choix judicieux des scolies
grecques et un bon résumé des travaux des com-
mentateurs. Tous les ouvrages attribués à Ho-
mère, avec les fragments des poètes cycliques,
sont rassemblés dans un volume (Paris, 1837,
ûv8° ) , qui fait partie de la Bibliothèque grec-
que de A.-F. Didot, et qui offre, avec un texte
soigneusement revu par G. Dindorf, une traduc-
tion latine littérale. Une des meilleures recensions
du texte est celle d'Im. Bekker; Berlin, 1843.
Parmi les éditions séparées de Y Iliade, on dis-
tingue celle d'Adrien Turnèbe ; Paris, 1 554, in-8° ;
—- celle de Cambridge ; 1689, in*4° ; — celle de
Glascow ; 1747, 2 vol. in-8°; — celle queDansse
de Villoison donna à Venise; 1788, in -fol.,
d'après un manuscrit de la bibliothèque Saint-
Marc, avec d'anciennes scolies du plus grand
prix pour l'histoire du texte homérique ; — celle
d'Alter ; Vienne, 1789-1790, 2 vol. in-8° : d'après
un manuscrit défectueux , mais qui offre quel-
ques bonnes leçons nouvelles ; — celle de Heyne ;
Leipzig, 1802, 8 vol. in-8° (un 9 e volume, con-
tenant les tables a été ajouté par Graefenhan en
1822) : immense travail, qui, sans égaler pour la
pureté du texte l'édition de Wolf, est très-pré-
cieux pour le commentaire, et constitue une
sorte d'encyclopédie homérique ; —celle de Lam-
berti, remarquable comme édition de luxe;
Parme (chez Bodoni), 1808, 3 vol. in-fol.; —
celle de Weichert ; Meissen, 1818, 3 vol. in-8*; —
et enfin l'excellente édition deSpitzner; Gotha,
1832-1636, 2 vol. in-8" : dans la Bibliotheca
Grxca de Jacobs et Rost. L'Iliade, avec la pa-
raphrase grecque de Théodore Gaza, fut publiée
à Florence; 1811-1812, 4 vol. in-8°. AngeloMai
donna : Iliadis Fragmenta antiçuissima, cum
picturis; Milan, 1819, in-fol. Ce volume repro-
duit en 68 planches les miniatures qui décorent
un manuscrit très-ancien de la bibliothèque Am-
breisienne ; il contient aussi des scolies médites
surYOdyssée. Coray avait entrepris, sous le titre
à? Édition de Bolissa ( "Exfanc poXiwrta ), une
édition de Y Iliade avec un commentaire grec,
destinée spécialement à ses compatriotes ; il n'en
fit paraître que quatre chants ; Paris, 1811-1820,
4 vol. in- 8°. Enfin les deux premiers chanta ont
été publiés par Freytag ( Saint-Pétersbourg, 1837,
in-8°), avec un commentaire savant mais diffus.
Les éditions séparées de YOdyssée méritent
peu d'être signalées ; mais il faut citer l'excel-
(l) L'édition d'Homère publiée par Ptckertng ( Londres,
1880, 9 vol. ln-48 ) est d'une trèa-JoHe exécution ; tt existe
des exemplaire» sur papier de Chine et «
01
HOMERE
62
lent commentaire allemand de NHzsch sur l'O-
dyssée; Hanovre, 1826, etc. : les trois volumes
publiés jusqu'ici ne dépassent pas le douzième
chant
L'édition princeps delà Batrachomyomachie
est un petit in -4° , sans lieu ni date , avec une
double traduction latine, Tune intercalaire, l'antre
en vers. Ce livre, que Ton croit imprimé à Ve-
nise, est d'une rareté excessive {voy. Dibdin,
Bïbliotheca Spenseriana, t. II); l'édition de
Venise, 1486, in -4* , dont les lignes sont alterna-
tivement imprimées en rouge et en noir, est très-
recherchée. Celle de Paris, 1507, in-4°, passe
pour être le second livre grec imprimé à Paris.
Les éditions de Wittemberg, 1513, de Paris,
1542, 1562, in-4°, n'ont d'autre mérite que leur
rareté , et c'est aussi à titre de curiosité biblio-
graphique que Ton estime celle de Maittaire;
Londres, 1721, gr. in-8°. La Batrachomyoma-
chie, avec la traduction en grec vulgaire de Démé-
triusZeni, fut publiée par Ilgen dans une savante
édition des Hymni homerici cum reliquis Car-
minibus minoribus Homero tribui solitis;
Halle, 1791, in-6*. Les Carmina minora ont
été aussi édités par Matthiae, Leipzig, 1805,
in-8° ; et par Franke, Leipzig, 1828, in-12. Her-
mann a donné une bonne édition des Hymnes,
Leipzig, 1806, in-8° , avec une lettre à Ilgen sur
la date et les interpolations des Hymnes. V Hymne
à Véméter (Hymnus in Cererem), découvert
par Matthsei dans la bibliothèque de Moscou en
1778 , fut publié pour la première fois par D.
Ruhnken; Leyde, 1780, in-8°, et 1782 (avec
deux lettres critiques). Mitscherlich en donna
une édition annotée ; Leipzig, 1787. in-8° (réim-
primée avec des additions; Leyde, 1808), et
Bodoni en fit paraître une édition de luxe; Parme,
1805, très-grand in-fol.
Les traductions d'Homère dans presque toutes
les langues modernes sont extrêmement nom-
breuses; on en trouvera dans la Bibliographis-
ches Lexikon de Hoffmann la liste très-longue
bien qu'incomplète : la reproduire ici , même en
l'abrégeant, serait aussi fastidieux qu'inutile ; car
aucun traducteur (Voss peut-être excepté) n'a
rendu cette incomparable vérité dans la peinture
du monde physique et du monde moral , cette
grandeur naïve qui distinguent l'original ; aucun
n'a approché de ce langage simple et riche, har-
monieux sans recherche , et naturellement pitto
resque. 11 suffira d'indiquer les noms de quelques
traducteurs ; ce sont, en français : Jean Samson
(153Q), Hugues Salel (1542-1574), Amadis Ja-
myn (1580, 1584, 1605),Salomon Certon (1605),
La Valterie (1681), M roo Dacier (1709), G. de
Rochefort (1766-1770), Lebrun (1776-1819),
Bïtaubé (1780-1785), Aignan (1809), Bignan
(1830), Dttgas-Montbel ( 1815-1818, 4 vol. in-8°).
La traduction de Dugas-Montbel reparut avec des
améliorations fort importantes, dues en grande
partie à la révision d'Ambr. Firmin Didot, qui la
destinait à la grande collection des auteurs grecs
traduits en français qu'il avait entreprise ; Paris,
1828-1834, 9 vol. in-8°, dont trois volumes de
notes (1). Cliapman , Pope et Cowper ont donné
des traductions d'Homère en vers anglais; la
première se distingue par l'énergie , la seconde
par une admirable versification, la troisième
par un véritable sentiment de la poésie homé-
rique ; mais toutes trois sont, en somme, peu
dignes de l'original. La traduction en vers alle-
mands de Voss, Altona, 1793, 4 vol. in-8°,
rend avec bonheur la naïveté , la grandeur, la
simplicité d'Homère, mais elle n'en a ni la gra-
cieuse facilité , ni l'harmonie.
Salvini, Monti, Pindemonte, qui ont traduit
en vers italiens, le premier tous les poèmes
d'Homère , le second Y Iliade , le troisième l'O-
dyssée , n'ont pas mieux réussi que les traduc-
teurs anglais et français. Il existe beaucoup de
versions de la Batrachomyomachie ; et si quel-
ques-unes ont du prix , c'est seulement comme
raretés bibliographiques. V Hymne à Déméter
a été traduit en vers italiens par Pindemonte , et
en vers allemands par Voss, dont la version est
accompagnée de bonnes notes explicatives; Hei-
delberg, 1826. A ces travaux (commentaires et
traductions) destinés à l'interprétation des poè-
mes homériques il faut ajouter le Lexicon no~
vum homericum et pindaricum de Damm ,
ouvrage d'une critique peu profonde , utile ce-
pendant à consulter dans l'édition très-améliorée
de Rost, Leipzig, 1836, in-4°; le Lexicologus
de Buttmann; Berlin, 1825-1837 , très-supérieur
à tous égards, et YHomerisches Glossarium
de Dœrierlein , Erlangen, 1850-1853, 2 vol. gr.
in-8°.
Pendant que l'érudition épurait et expliquait
le texte des poèmes homériques , la critique lit-
téraire s'efforçait d'apprécier et quelquefois tâ-
chait de rabaisser le génie de leur auteur. A la
fin du dix-septième siècle et au commencement
dn dix-huitième, la réputation du grand poète
grec donna lieu à une guerre de plume des plus
vives (2). Nous ne reviendrons pas sur ces
discussions stériles d'où la gloire d'Homère est
toujours sortie intacte et rajeunie. L'auteur de
V Iliade et de Y Odyssée est aujourd'hui, comme
au temps de Lucrèce, le « toujours florissant
Homère (3) » , et l'on peut dire avec M. J. Ché-
nier:
Trois mille ans ont passé sur là cendre d'Homère ,
Et depuis trois mille ans Homère, respecté,
Kst Jeune eneor de gloire et d'immortalité.
En racontant dans quelles circonstances ont
»
(l) Voy. sur les traductions françaises d'Homère deux
articles de M. Egger dans la Nouvelle Revue encyclopé
dique, n" 4 et 8. Voy. aussi, dans la Revue des Deux
Mondes ,\* traduction du 1" livre de V Iliade, en fran
çats du treizième siècle, par M. fi. Llttré.
(1) Voy. Rlgaalf, Querelle des Anciens et des Modernes,-
Paris, 1856.
(8) Inde mini specles semper florentis Horoeri
£ioriens, visa est lacpyroas effundere salsas
Coeplsst, et reram natnram expandere dtetls.
Lacr., De /fat. Rer., 1. 1, ▼. m.
63
été composées Y Iliade et Y Odyssée y nous avons
donné implicitement les raisons de leur immor-
telle jeunesse. Ces deux grandes épopées naqui-
rent chez un peuple doué au plus haut degré
du goût du beau , à une époque où , la science
et l'histoire n'existant pas encore, tout dans
le domaine de l'intelligence était poésie; où le
seul moyen de connaissance était l'observation
immédiate de la nature physique et morale. Les
poèmes homériques, dont tous les éléments, pen-
sées, sentiments , expressions , images , ont été
puisés directement à cette source, gardent un ca-
ractère de vérité complète et naïve , inimitable
parce qu'elle est spontanée, et que les plus
heureux efforts de l'art ne peuvent retrouver.
De pareilles circonstances ne se sont pas ren-
contrées depuis les vieux âges de la Grèce, et
après trente siècles Y Iliade et Y Odyssée restent
la plus grande création poétique de l'esprit hu-
main. Léo Jodbert.
VU* Homeri (i), dans les BiOYpâqpot de Westermann ;
Brnnswick, 1845. — Maxlmllten Sengebusch , deux Dis-
sertations placées en tète de l'Iliade et de l'Odyssée ,
édit, Dlndorf ; Leipzig, 1855 ( c'est une discussion critique
de toutes les sources anciennes relatives à Homère ). —
Blackwell, An Enquiry into the Life and Writings of
Homer; Londres, 1785. — Nitzscb, avait, homericantm
Spec, I, 1884; Qusestio homeriea If, sive indagandm
per Odysseam interpolationit prœparaU, 1818 ; Historiée
crUicœ Homeri Initia qusedam, 1819; De Historia Ho-
meri, maximeque de scriptorum carminum setate
meUtemata, 1890, 85, 87 ; De Aristotele contra Wolfla-
nos, issi ; Sententiœ veterum de Homeri patria ; article
Odyssée dans VEncyclop. de Ersch et Gruber. — Lacb-
mann, BetracMungen ûber d. Mas, mit. Zusdtzen von
M. Zumpt; Berlin. 1847. — Lauer, Geschichte der Ho-
merisehen Poésie; Berlin, 1851. — Sainte-Croix , Réfuta-
tion d'un paradoxe de Wolf; Paris, 1798. - F. Schtegel,
Veber die Homerisehe Poésie , mit Rucksicht auf die
Wolfschen Untersuchungen ; Berlin , 1796. — Franceson,
Essai sur la question : si Homère a connu l'usage de
récriture, et si les deux poèmes de niiade ePde l'Odys-
sée sont en entier de lui ; Berlin, 1818. - Lange, Ver-
such die poeUsche Binheit der Iliade zubestimmen , ein
sendtchrieiben an Goethe ; Darmstadt, 18î6. — Dugas-
Montbel, Histoire des Poésies homériques ; Paris, 1881.
— Hermann, Briefe ueber Homer und Hesiod; Heidel-
berg, 1817, in-8°. — Kaiser, De diversa Homericorum
Carminum Origine ,-HeUitlberg, 1885, ln*8°. — Havet, De
Homer ic. Poem. Origine; Paris, 1848. — Bernbardj, Epi-
crisis disputationis WolAanœ de Carminibus Homeri;
1848, in-8°. — Baeumlln, De Compositions Iliadis et Odys-
sées; Stuttgard, 1847, u>8*. - Genelll, 48 Umrisse xum
Homer mit Erlaûterungen von S. Forster; Stuttgard,
184*. — Geppert, Veber den Vrsprung der Homeris-
chen Gesânge; Leipzig r 1840. - A.-G. Scblegel, De Ceo-
çraphia Homeri Gomment»; Hanovre, 1788. — Camme-
rer, Ueber die Weltkunde des Homer os im AUgemeinen;
Kempten, 1888. — Bryant, A Dissertation concerning
the War of trou as described by Homer; Londres, 1796.
— Wakeficld, A Letter to J. Bryant concerning his Dis-
sertation in the War ofTroy; Londres, 1797. — Le Che-
valier, Tableau de la Plaine de Troye; 1791. — J. Ren-
nel, Observations on the typography of the plain of
Trou; Londres, 1814. — Spohn, De Agro Trojano in Ho-
meri carminibus descript. ; Leipzig, 1815. — Niebuhr,
Die Sikeler in der Odyssée* dans le Rheinischen Mu-
séum, 1817, p. 145. - Welcker, Die homer. Phàaken u
die Insein der seligen, dans le Neuen Rhein. Mus.
Jahrg., I, p. 119. — Terpstra, Anliquitas Homeriea;
(1) Les principaux ouvrages à consulter sur Homère
ont été mentionués dans le courant de l'article ; nous ne
répéterons pas ces Indications, excepté pour quelques ou-
vrages généraux sur 1a littérature et l'histoire grecques.
HOMÈRE — HOMMAÏRE DE HELL
64
Leyde, 1881. - F. Tascher, Lttters illustraUng the ana-
tomieal and médicinal Knowledge of Homer; Londres,
1798. — Malgatgne, Études sur.PAnatomie et la Physio-
logie d? Homère, dans le, Bulletin de VAcad. de Méde-
cine de Paris, 1841. — Nagelsbach, Die Homerisehe
Théologie in ihrem Zusammenhange dargesteltt; Nu-
remberg, 1840. — Lebrs, Quxstiones epiess ; Kœnigtberg,
1837. - Fabriclus, Bibliotheca Grssca, t. I er , p. 317, édlt.
de Harles. — Scboell, Histoire de la Littérature grecque,
1. 1", p. 101-165. — Ulrlcl, Geschichte der hellenischen
Poésie, 1. 1. - Bode, Geschichte der hellenischen Dicht-
kunst. - OL Muller, Geschichte der griech. Uteratttr.
— W. Mure, Critical Account of the Language and lAte-
rature of ancient Gréece. — Bernbardj. Grundriss der
griech Utteratur, — Thtrlwall, History of Greece, t. I e '
append. — Grote, History of ancient Greece, t. H. —
Grotefend, article Homer., dans ÏEncyklop. de Ersch et
Gruber. — Gulgnlaut, art. Homère* dans V Encyclopédie
des Gens du Monde. — American quarterty Review,
décembre 1817. — North American Review, octobre
1888. — Quaterly Review, janvier 1881. — Letronne,
dans le Journal des Savants, 1819, 1880. — Edinburgh
Review, février 1848, octobre 1846, octobre 1850. — Fau
rlel, Cours sur V Épopée homérique, résumé par M. Egger
en douze articles dans le Journal de r Instruction pu-
blique de 1886. — Westminster Review, Janvier 1847. —
A. Plctet, Les Poèmes homériques, dans la Bibliothèque
de Genève, 1855. 1856. — Jacob, Veber die Bntstehung
der Ilias und der Odyssée; Berlin, 1856. - Lud. Frled-
lander, Die homerisehe Kritik von Wolf bis Grote,
1856. - H. Netto, Bibliotheca Homeriea; Halle, 1837,
ln-4*.
bomâre, grammairien et poetetragique grec,
né à Byzance, vivait vers 280 avant J.-C, sous
le règne de Ptolémée Philadelphe. Il était fils du
grammairien Andromaque et de la poétesse
Myro. Il fut un des sept poètes qui formèrent la
pléiade tragique d'Alexandrie. Les anciens lui
attribuent diversement 45, 47 et 57 pièces, dont
il ne reste rien , excepté le titre tfEurypyleia.
La statue de ce poète était dans le gymnase de
Zeuxippe à Byzance.
Un autre grammairien, portant le même nom,
et surnommé Sellius, composa des hymnes et
d'antres poésies, un traité en prose Sur les
Masques comiques (Ilepl tûv xopuxûv 7tpo<no-
itcov), et des Sommaires (HepioxaC) des comédies
de Ménandre. Y.
Suidas, aux mots "OuYjpoc, Mvpto et SiXXto;. —
Tzetzés, Chil, XII, 109, ad Lycophr., p. 164, édit. de
Millier. — Dlogène Laerce, IX, 113. - Chrlstodore,
Ecphrasis, 407-418 ; dans les Anal, de Brunck, voL 11,
p. 471. — Fabridus, Btbliot. Grseca, voL II, p. 307, 451.
- Welcker, Die Griech. Tragôd., p. 1151.
hommairê de hell ( Ignace-Xavier Mo-
rand), géologue et voyageur français, né à
Altkirch (Haut-Rhin), le 24 novembre 1812,
mort à Ispahan (Perse), le 29 août 1848. Sorti
de l'École des Mineurs de Saint-Étienne en 1833,
il s'embarqua deux ans après ( le 2 octobre 1 835)
pour Constantmople. Son but principal était de
reconnaître la constitution géognostique de la
Crimée et celle des steppes de la Nouvelle-
Russie, afin de résoudre la grande question de
la rupture du Bosphore et de l'ancienne com-
munication de la mer Noire et de la mer Cas-
pienne. Après avoir exploré les environs de
Constantinople, il se rendit dans la Russie mé-
ridionale, qu'il parcourut en tons sens. La cour de
Saint-Pétersbourg lui confia plusieurs missions
scientifiques et industrielles, et lui dut la décou-
65
HOMMAIRE DE BELL — HOMMEL
6tf
verte de mines de fer sur les bords du Dnieper.
Forcé par sa mauvaise santé de rentrer dans sa
patrie, il vint à Paris vers la fin de 1842, et
soumit à l'Académie des Sciences un mémoire
Sur la différence de niveau entre la mer
Caspienne et la mer o?Azow 9 qui fut inséré
dans les comptes-rendus des séances. An mois
d'avril 1844, la Société de Géographie loi décerna
son prix annuel pour un ouvrage intitulé : Ré-
sumé d'un Voyage à la mer Caspienne et No-
tice sur la carte de la Russie méridionale.
L'année suivante le gouvernement français le
chargea d'explorer les pays avoisinant la mer
Noire et la mer Caspienne au triple point de
vue de la géologie, de la géographie et de l'his-
toire. H se rendit de nouveau à Constantinople,
et le 25 novembre 1847 il adressait à M. Etie
de Beaumont le résultat d'expériences minu-
tieuses sar la force et la direction des courants
du Bosphore ( Comptes-rendus de l'Académie
des Sciences, 1848, t. XXVI, p. 143). Quelques
mois auparavant (29 mai), Le Courrier de Cons-
tantinople avait publié un mémoire présenté
par loi au grand-vizir, sur l'antique projet de
canalisation entre le golfe de Nicomédie et' la
mer Noire. A la fin de cette année, il se dirigea
vers la Perse, et le 9 février 1848 atteignit Té-
héran. Il offrit ses services au schah, qui se pro-
posait d'amener dans cette capitale les eaux de
la rivière de Chahroud; puis se porta sur les
bords de la mer Caspienne, y demeura quelques
jours, et reprit ses explorations dans l'intérieur
de la Perse, où le froid, la fatigue, les maladies
contagieuses et des travaux incessants ne tar-
dèrent pas à lui faire trouver la mort. Membre
des Sociétés de Géologie et de Géographie, che-
valier de la Légion d'Honneur, il reçut encore des
distinctions particulières des cours de Russie, de
Sardaigne et de Turquie. Les nombreux échan-
tillons de roches recueillis par lui ont été achetés
par le Muséum d'Histoire naturelle, et sont au-
jourd'hui catalogués et mis à la disposition du
public. U a laissé trois volumes contenant la Re-
lation de ses voyages. Les deux premiers, plus
pittoresques que scientifiques, consacrés à la
description des lieux et aux usages des peuples
visités, sont dus à la plume de M lle Jeanne
Hériot, femme d'Hommaire de Hell, qui fat du-
rant douze années la compagne de ses fatigues
et de ses périls. Le troisième comprend toute
la partie scientifique, et jette une vive lumière
sur la géogno8ie, l'histoire et la géographie des
contrées que baignent les mers Moire et Cas-
pienne. L'ouvrage est, en outre, accompagné de
vingt-cinq planches et d'une carte. Louis Lacour.
Bulletin de la Société de Géographie, câbler de Juillet
1880. — Bulletin de la Société Géologique de France,
*• série, t. VII, p. 4M.
hommbl (Charles-Ferdinand), juriscon-
sulte allemand/ né à Leipzig, le 6 janvier 1722,
mort le 16 mai 1781. H étudia à Halle, et devint
plus tard professeur de droit à l'université de
MOT. B10CR. GÉNÉR. — T. XXV.
Leipzig. Homme! rat un des premiera en Alle-
magne à propager les idées de Beccaria. Très-
versé dans la connaissance de l'antiquité, il
publia des travaux remarquables sur le droit ro-
main. Ses principaux ouvrages sont : De Apol-
line juris perito; Leipzig, 1748, in-4° : dans
cette dissertation Homme! prouve que les oracles
étaient souvent consultés pour la décision des
procès; — Grammaticarum observalionum
Jus civile illustrantium Spécimen; Leipzig,
1749, in-4°; — Obleetamenta Juris feuda-
lis, seu grammaticx observatUmes jus rei
cUentetaris et antiquitates germanieas varie
illustrantes; Leipzig, 1755, in-4°; — De
singulari Jmperatorum in legibus novis con-
dendis Modestia; ibid., 1759, in-4° ; — Ef-
figies Jurisconsultorum; ibid., 1760, in-8°;
— Litteratura Juris; ibid., 1761, in- 8°; ibid.,
1779, in-8°, avec beaucoup d'additions; — Bi-
bliotheca Juris rabbinica et Saracenorum
arabica; Leipzig, 1762, in-8°;, — Jurispru-
dentia numismatibus illustrata 9 nec non
sigillis, gemmis, aliisque picturis vetustis
varie exornata; Leipzig, 1763, in-8°; — De
ordinariis Facullatis Juridicx Lipsiensis;
Leipzig, 1763,in-4°,'et 1767, in-8° ; — De Forma
Tribunalis et Majestate Prxtoris; Leipzig,
1763, in-4° : inséré dans quelques éditions des
Antiquitates Romanx de Nyerup ;— Deutscher
Flavius (Flavius allemand,); Baireuth, 1763,
1766, 1767, in-8° : cet ouvrage contient des ins-
tructions sur la rédaction des sentences et des
requêtes; — Rhapsodia Quœstionum in for o
quotidie obvenientium, neque tamen legibus
decisarum; Leipzig, 1764-1781, in-4°. Cette
première édition parut par programmes déta-
chés; en 1766, Hommel commença à les réunir
en volumes; il en publia une troisième édition
à Baireuth, 1769-1779, 5 vol. in-4°; une qua-
trième fut donnée par son gendre Rôssig , Bai-
reuth, 1782-1787, 7 vol. in-4°. Ce recueil, qui
contient des observations snr plus de neuf cents
cas juridiques, a eu une Heureuse influence sur
la jurisprudence des tribunaux allemands; —
Electores Saxonix Legislatores ; Leipzig, 1765,
û>4°; — Palingenesia librorum Juris vête-
rum 9 seu Pandectarum locà intégra ad mo-
dum indicis Labitti et Wielingi exposita et
ab exemplari Florentino descripta; Leipzig,
1767-1768, 3 vol. in-8°. Dans cet ouvrage Hom-
me! a cherché à recomposer les ouvrages des
jurisconsultes romains, dont les fragments se
trouvent disséminés dans le Digeste. Les diffi-
cultés de ce travail, entrepris pour la première
fois par Hommel, étaient nombreuses» L'auteur
a su en vaincre une grande partie; mais les dé-
fectuosités de son ouvrage, qui est estimé encore
aujourd'hui, ne méritaient pas une censure aussi
acrimonieuse que celle qui en fut faite par Roch
(voy. ce nom); — Epitome Juris canonid;
Leipzig, 1768, uv8° : publié d'abord sous le
pseudonymede Curtius Antonius, et ensuiteavec
8
67
HOMMEI/— HOMPESCH
le nom de Hommel; Leipzig, 1777» in-8°;— •
Erklarung des goldenen Horns aus der nor-
dischen Théologie (Explication de la Corne
d'Or, d'après la théologie du Nord); Leipzig,
1769, in-8°; — Vber Belohnung und Strafe
nach tùrkischen Gesetzen (Sur les Récom-
penses et les Peines, d'après les lois turques);
Balreuth, 1770 et 1772, in-8°, sons le pseudo-
nyme d'Alex, de Joch (voy. un examen détaillé
de cet ouvrage, remarquable pour l'époque où il
fut publié, dans les Philosophische Aufsàtxe
de Jérusalem); — Monurchomachi et Ma-
chiavellus in concordiatà adducti; Leipzig,
1775, in-4°; — Ariadne Jurisdictionum con-
currentiutn; Leipzig, 1779, in-8°; — Philo-
sophische Gedanken iïber dos Criminalrecht
( Pensées philosophiques sur le Droit criminel ) ;
Breslau, 1784, in-8° : les idées fondamentales de
cet ouvrage se trouvaient déjà exprimées dans
une préface de Hommel qui fut mise en tête de
la traduction du Traité des Peines de Beccaria,
publiée à Breslau en 1778. £. G.
Wetdllch, Zuverlâstige Nachrichten von den jetitle-
benden Rechtsgelehrten, p. 94» (autobiographie). — Er-
nest! , Hommelii Memoria (dans les Opuscula orat.
philol. d'Ernesti et dans lé tome VII des Rhapsodies de
Hommel). — Rosslg, rit a Hommelii ( dans le tome VII
des Rhapsodiœ de Hommel).
* homme Y (Jacques ), historien et publiciste
français, né en 1643, à Séez, en Normandie, mort
à Angers, le 18 octobre 1713. Il entra de bonne
heure chez les Augustins de la province de Saint-
Guillaume, et publia bientôt après le Millelo-
quium sancti Gregorii; Lyon, 1683, in-fol.
L'année suivante il fit paraître un supplément
des Pères, en glanant après Ondin (Paris, in-8°).
Ces deux ouvrages le mirent en honneur auprès
des savants du temps; mais celui qui lui donna
le plus de réputation et aussi le plus d'ennemis
fut une espèce de gazette historique qu'il publia
sous le titre de Diarium Europxum historico-
litterarium, ou suivant une autre édition,
F asti annui, in quibus res poliiicâs insi-
gniores, ecclesiasticœ litterariœque per uni-
versum orbem primo sœculi XVIII anno
breviter et dictim narrantur. C'est une façon
de journal qui eut à peine assez de durée pour
causer de grands embarras à l'auteur. Amelot
de La Houssaye avait été mis à la Bastille pour
avoir retracé l'histoire du gouvernement de Ve-
nise; l'ambassadeur de Venise prétendait cette
fois que le P. Hommey avait, dans ses récits,
exagéré la réparation faite au roi de-France par
lasérénissime république en 1701, et exigea l'exil
de l'écrivain à Bar-le-Duc. Le P. Hommey en
prit son parti, et, par une lettre de soumission
respectueuse, il apaisa le ressentiment de l'am-
bassadeur, et obtint la levée de son bannisse-
ment le 2 août 1704. Le père Hommey passa à
Angers les dernières années de sa vie. Il avait,
publié en 1696 une édition nouvelle, avec notes,
de.rouvrage de Gordien Fulgence Liber absque
litteris de Mtatibus mundi et hominis. H a
laissé manuscrits un MilUloquiumsaneti Chry-
sostomi et une ffUteire de Louis XIII, réfu-
tation de l'ouvrage de Levassor. Célestin Port.
Morétl, floutelUt de te Mépuètiqtiê des Lettres, avril
Ilot, p. «68. - tourn. des Sav. t tl août 1684. — Poeq. de
Uvonnlère, Notes manuscrites A la biblioth. d'Angers.
hompbsgh ( Ferdinand , baron de ), dernier
grand-maltre de l'ordre de Saint-Jean-de-Jéru-
salem, né à Dusseldorf le 9 novembre 1744,
mort à Montpellier au commencement de 1803.
Il appartenait à une ancienne famille noble, au-
jourd'hui décorée du titre de comte, dans le du-
ché de Juliers, où elle possède la grande-maî-
trise héréditaire des chasses. Fils d'un conseiller
de l'électeur palatin, Jean-Guillaume de Hom-
pesch, il vint à Malte à l'âge de douze ans, fut d'a-
bord page du grand-maltre Rohan, et s'éleva suc-
cessivement jusqu'au rang de grand'croix, par la
protection de l'Autriche, dont il fut pendant vingt-
cinq ans le représentant près de l'ordre de Malte.
Après la révolution de 1789, l'influence de la lan-
gue de Bavière devint prépondérante à Malte sur
les langues de France, et à la mort de Rohan, en
1797, Hompesch fut nommé grand-maltre à sa
place. C'était le premier Allemand qui eût été re-
vêtu de cette dignité. Le 10 juin i 798, la flotte de
Bonaparte, qui se rendait en Egypte, se présenta
devant Malte. Hompesch disposait seulement de
quatre cents chevaliers, d'un régiment d'infan-
terie de cinq cents hommes, et de la milice levée
sur une population de 10,000 âmes, qui toutefois
ne montrait pas un grand attachement pour le
gouvernement qu'elle avait eu jusqu'alors. Les
Français débarquèrent sur {plusieurs points de
l'Ile. Le 12 ils s'emparent du fort de La Valette,
et le lendemain la ville de Malte se soumet par
une capitulation pour laquelle le grand-maltre
ne fut pas même consulté. L'effet de la surprise,
la mollesse et l'inexpérience des chevaliers, la
connivence de quelques-uns, la faiblesse de ca-
ractère du grand-maltre, l'insurrection fomentée
parmi les habitants, toutes ces causes rendirent
la défense presque nulle» Par cette honteuse ca-
pitulation, l'ordre livrait à Bonaparte 1,200 bou-
ches à feu avec une prodigieuse quantité de
munitions et un trésor évalué à trois millions. Le
vainqueur traita le grand-maltre avec peu d'é-
gards. Hompesch écrivit au général Bonaparte qu'il
eût mis un grand empressement à aller lui offrir
l'expression de sa reconnaissance, si, par une
délicatesse qui avait pour objet de ne rien faire
qui pût rappeler aux Maltais sa personne et leur
ancien gouvernement, il ne se fût déterminé à
éviter toute occasion de se montrer en publié.
On détruisit dans son palais et sons ses yeux
les armes et les signes de son ordre et de sa
puissance, et lui-même fut embarqué pour
Trieste trois jours après la reddition delà place.
On lui compta cent mille écns pour prix de son
argenterie, qui fut portée à bord des vaisseaux
français, et on lui promit une rente de pareille
somme, qu'il us toucha jamais. Arrivé à Trieste,
69
HOMPESCH — HONDEKOETER
70
Hompesch protesta contre une capitulation qu'il i
n'avait ni stipulée ni ratifiée , et quelques mois I
après il abdiqua en faveur de Paul I er , empereur |
de Russie, qui lui fit une pension. Après la mort !
de l'empereur Paul, la Russie ayant cessé de lui
payer sa pension, Hompesch tomba dans de
grands embarras d'argent. Pressé par ses créan-
ciers, il se rendit à Montpellier pour réclamer du
gouvernement français une pension qui lui avait
été promise, mais qu'il avait d'abord refusée et
dont il avait en quelque sorte dégagé ce gouver-
nement par sa protestation. Il venait d'obtenir
avec beaucoup de peine un secours de 15,000 fr.,
lorsqu'il mourut subitement. L. L--t.
Arnanlt, Jay, Jouy et Norvlns, Biogr. nouv., des Con-
temp.— Rabbe, Vleilh de Bois) o lin et Sainte-Preuve,
Biogr. univ. et portât, de» Contemp. — Cùnvert&Uons-
Lexikon.
* honberg ( Wernher, comte de] Homburg
ou), minnesinger du quatorzième siècle. Le ma-
noir féodal, berceau de sa famille, s'élevait
jadis non loin de Wagenstetten, dans l'évéché
de Baie, dont les seigneurs de Honberg étaient les
avoyers. Le père de notre poète était mort en
1289, laissant trois fils, Wernher, Rodolphe et
Ludolphe, et sa veuve dut aliéner une partie de
se» vastes domaines ; le produit de cette vente
ne suffît pas pour tirer de la gène la famille
obérée, et les orphelins furent obligés plusieurs
fois encore de recourir au même expédient.
C'est dans un acte de cette nature passé en 1304
entre les trois frères et le couvent de Wormes-
bach que le nom de Wernher de Honberg parait
pour la première fois. Mai3 bientôt le jeune
comte révèle son existence autrement que par
de pacifiques contrats. Héritier de l'humeur
batailleuse de son père, il s'empare de la cita-
delle de Greinau; puis il se brouille avec l'em-
pereur Albert, et prend les armes en faveur des
Suisses. L'avènement d'un nouveau césar,
Henri VII, le ramène sous la bannière impériale;
il la suit en Italie, et se distingue tellement au
siège de Brescia que l'empereur le nomme ca-
pitaine général de la ligue lombarde. Rien de
plus flatteur que les termes dans lesquels cette
nomination fut notifiée à la confédération gi-
beline : De nobilitate sanguinis* armorum*
que strenuitate et expertentia, née non
fide, circumspectione et industriel, nobilis
viri Wernheri, eomitis de Honberg , fidelù
dilecti nostri, concipientes fiducicm spe-
cialem, ipsum in capitaneum generaletn
ordinavvmus Ligx confédération^ , etc. »
Tschudil, 259. La confiance d'Henri VII ne fut
pas trompée. Une histoire entière ne suffirait
pas, dit Albert de Strasbourg, pour raconter les
victoires incroyables, incredibiles victorias,
que le comte Wernher remporta en Lombardie.
Les chroniques italiennes elles-mêmes sont i
pleines de ses hauts faits , et s'accordent mieux :
sur sa bravoure que sur son nom, qu'elles dé- j
figurent toutes plus ou moins, L'appelant Guar-
nerius (je Ocrnborc ou simplement Warneriue \
Teutonicus, Warner l'Allemand. En quelques
semaines, il réduisit presque toute la Lombardie,
battit les Crémonais près* Asti, prit d'assaut
Soncino et Camizana, brûla Lozzo, etc., mais
des dissentiments survenus entre lui et le gou-
verneur de Milan, l'astucieux Maffeo Viseonti,
arrêtèrent le cours de ses succès, et le bouillant
chevalier reprit furieux le chemin de ses foyers.
En 1315 nous le retrouvons à Mergarten, com-
battant dans les rangs des impériaux contre les
Suisses, ses anciens alliés. En 1316 il embrasse
la cause de l'anti-césar Frédéric le Beau contre
Louis de Bavière , et est fait prisonnier à la ba-
taille d'Ësslingen. En 1320 il retourne en Italie
au secours des gibelins, et assiège Gênes inutile-
ment. Il ne survécut pas beaucoup à cet échec,
et périt à peu de temps de là, sans doute les
armes à laraain. Les poètes et les historiens, qui
nous ont laissé ignorer comment et quand il
mourut, n'ont pas négligé du moins de déplorer
son trépas. Un minnesinger associe à l'éloge du
fameux Jean de Brabant celui du comte de
Honberg « qui brisa tant de lances en l'honneur
des belles,
Der manig hundert tûsent speff
Durch m inné hat tentechen »;
Un autre, auteur d'un poème sur les couleurs ,
prétend avoir appris leur signification du brave
Wernher de Honberg. Avait-il dans des vers
aujourd'hui perdus commenté le langage emblé-
matique du bleu et du rose, c'est ce que nous
ne pouvons dire. 11 ne nous reste de lui que
sept chansons , mélancoliques adieux que le
guerrier-poëte dut adresser à sa belle en partant
pour ses lointaines expéditions. Les rimes en
sont riches et les strophes harmonieusement
rhythmées ; elles nous ont été conservées par ie
manuscrit Manesse. A. Pey.
HaRfcn, Minnesinger. - Bodmcr, Sammlung von Min*
nesingern. — Docen, Muséum fur altdeusehe Uteratvr
und Kunst. — Tschudt, Chroniques de la Suisse; Baie,
1733. — E&cher, dans l'Encyclopédie universelle d'Brsch
et Gruber.
bondekoeter (Gillis), peintre hollandais,
né à Utrecht en 1583, mort vers 1626. Il ne
quitta jamais sa patrie, et sa vie n'ofîre aucun
fait intéressant. « 11 peignait, rapporte Houbra-
ken, le paysage avec un style admirable, et les
fleurs avec une exactitude et un naturel pré-
cieux. » Ses nombreux ouvrages ont conservé
un prix élevé. Rares en France, ils sont plus
répandus en Angleterre et surtout en Hollande.
A. de L.
Jatob Carapo Veyérman, De Schllderkonst der neder-
landers, tom. 11, p. 887. - Pilklogton, Dictionarf of
Pointers*
hondekoetbe ( Melchior ), peintre hol-
landais, petit-fils dn précédent, né à Utrecht, en
1636, mort dans la même ville, en 1695. H était
fils et élève de Gisbrecbt Hondekoeter, et apprit
de lui à peindre avec exactitude toutes sortes
d'animaux, particulièrement tes oiseaux. 11 su**
vit ensuite les avis de Jean-Baptiste Weeniio,
ft.
71
HONDEKOETER — HONDT
72
son oncle, paysagiste distingué. Dans sa jeu-
nesse il était fort religieux , et prononça même
dans l'église de Safnt-Jean dTJtrecht un sermon
qui édifia tous ses auditeurs et le fit solliciter
d'entrer dans le ministère évangélique. « Qui le
croirait? s'écrie Descamps , cette vie réglée et
pieuse se changea en une crapule abominable ;
11 eut le malheur d'épouser une méchante femme
dont les sœurs ne valaient guère mieux. Il em-
ploya d'abord la douceur pour les ramener et
toute sa raison pour leur résister, mais il ne
put vaincre leur humeur insociable; et, ne trou-
vant d'autre asile contre leur fureur que le ca-
baret, et d'autre consolation que dans la dé-
bauche, il s'y livra tout entier: le plus sobre et
le plus sage de tous les hommes en devint,
par la persécution de sa femme , le plus intem-
pérant et le plus déréglé. » Ses excès abrégè-
rent ses jours. Presque tous les tableaux de ce
peintre représentent des oiseaux, la plupart vi-
vants; personne n'avait jusqu'à lui mieux peint
des poules, des coqs, des paons, dont il re-
présentait parfaitement les plumes. Il avait
accoutumé un coq à se tenir près de son che-
valet aussi longtemps et de telle façon qu'il le
voulait. La touche de Hondekoeter est ferme et
large, son pinceau onctueux, sa couleur bonne.
H ornait ses fonds de paysage, bien finis et bien
harmonies avec ses sujets. Ses tableaux, presque
tous restés en Hollande, se vendent fort cher.
L'Angleterre en possède cependant un certain
nombre, qui ont figuré avec honneur à l'exposi-
tion de Manchester (1857). On voit encore de
ce maître dans la galerie de Vienne trois ta-
bleaux représentant des Oiseaux de basse-
cour; — à Rotterdam, galerie Léers , Plusieurs
Coqs qui se battent ; — galerie Bisschop, des Oi-
seaux de rivière dans un beau paysage; —
au Louvre de Paris : V Entrée des Animaux
dans V Arche;— Le Concert discordant, exé-
cuté par des oiseaux de diverses espèces; —
Combat entre un Coq et un Poulet d'Inde, en
présence d'un paon, d'un pélican, d'un poulet
et d'autres animaux; — deux Perdrix mortes.
Alfred de Lacaze.
Jakob Campo Weyerman, De SeMlderKonst der Ne»
derlanders, t. II, p. 887-389. — Pllktngton , Dictionary
ùj Painters. — Descamps , La Fie des Peintres hollan-
dais, etc., t. Il, p. no-m.
hoivdt ou hondius , famille d'artistes fla-
mands dont les principaux membres sont :
hondt (Josse), graveur, né en 1546, à Wac-
kene, petit bourg de la Flandre, mort à Londres,
le 16 février 1611. « il fut, dit Moréri, mené à
Gand par ses parents dès l'âge de deux ans , et
commença à huit à dessiner et à graver sur le
enivre et sur l'ivoire, sans avoir eu aucun maître.
H fit de si grands progrès dans cet art , qu'il fut
regardé comme l'un des plus célèbres ouvriers
de son siècle, et passait pour un des plus ha-
biles pour fondre des caractères d'imprimerie. »
11 était en même temps bon mathématicien et
cosmographe intelligent 11 se retira en Angle-
terre pendant la lutte de sa patrie contre les
Espagnols, et porta à Londres les produits de son
talent. Ses travaux y forent appréciés et juste-
ment récompensés. Plus tard il vint se fixer à
Amsterdam, et s'adonna à la gravure géogra-
phique. On connaît de lui : Orbis terrarum
Descriptio geographica; 1597;— Atlas de
Gérard Mercator, nouvelle édition revue et aug-
mentée d'un tiers; il donna un abrégé du même
ouvrage sous le titre d'Atlas minor, in-4°
oblong, très-souvent réimprimé; — Italix ho»
diernx Descriptio; —les Cartes du Voyage
à la Guyane par Walter Raleigh; Nuremberg,
1599, in-4°; — une édition du traité d'Isaac
Pontanus Des Globes et de leur usage, avec
observations et planches; — les Cartes et
planches des Voyages de Drake et de Caven-
disk. — Moréri lui attribue un Theatrum Artis
scribendi, et fait son éloge comme littérateur.
Moréri, Grand Dictionnaire. — Basait. Dictionnaire
des Graveurs — GandelUni, NoUzUdegV Intagliatori,
t. X-XI, p. 144. — Notices sur les Graveurs; Besançon,
1807, i vol. ln-8».
W hondt ( Henri de), dit le vieux , graveur
flamand, fils du précédent, né à Gand, en 1573,
mort à La Haye en 1610. Il fut élève de Jan
Wierix et de son père, dont il apprit la gravure
géographique. Son plus grand ouvrage consiste
en une suite de portraits de cent quarante-
quatre artistes, flamands pour la plupart. Ses
autres estampes sont en assez petit nombre,
s'étant occupé à graver des cartes géographi-
ques. On connaît de lui |les portraits de Cor-
neille Cort, graveur d'Anvers; — d'Henri de
Clèves , peintre anversois ; — de Gilles Coninx-
loo, autre peintre anversois ; — de Jean Bugen-
hagen, réformateur allemand (1599) ; — de Phi-
lippe Melanchthon, réformateur allemand ; —de
John Wiclef, réformateur anglais; — de Bans
Holbein , peintre balois; — de John Cnoxe, ré-
formateur écossais ; — de Jean Calvin, réfor-
mateur français; — de Girolamo Savonarola,
réformateur italien; — Le Jugement de Salo-
mon, d'après Karl van Mander; — La Femme
surprise en adultère, d'après le même; — Ré-
créations flamandes , d'après P. Breughel;— .
Manière comique de guérison établie à Meu-
lebeci le jour de la Saint- Jean , en cinq es-
tampes; — Les Neuf Muses sur le Parnasse,
d'après Th. Zucchero. Le monogramme de Henri
de Hondt se compose d'un h minuscule appuyée
sur un H majuscule. A. de L.
Gandcllini, Notizie degF Intagliatori, t. X-XI, p. 140-
141.— Haber, Manuel, t. V, fol. S46. — Baron d'Helneke,
Idée, etc., fol. 204.— Basan, Dictionnaire des Graveurs.
hondt ( Henri de), dit le jeune, frère du
précédent, graveur et technographe flamand , né
à Londres, vers 1580, mort à Amsterdam, vers
1650. Les biographes le citent comme le meil-
leur graveur de sa famille. Élève dé son père,
il termina la plupart des cartes que celui-ci avait
laissées inachevées. De retour dans sa^atrie en
73
HONDT — HONE
74
1620, Hondt le jeune grava un nombre consi-
dérable de portraits , de paysages et de sujets
historiques, exécutés d'un style ferme et avec
beaucoup de facilité. Ses estampes sont recher-
chées ; parmi les meilleures on cite : les por-
traits de Bernard, duc de Saxe-Weimar; —
de la reine Elisabeth d'Angleterre; — de
Jacques I«r, roi d'Angleterre (1608); — de
Ferdinand I er , empereur o7 Allemagne (1634);
— de Guillaume, prince d'Orange (1641);
— de Francis Drake, amiral anglais; — Les
Quatre Saisons, d'après PaulBril ; — les mêmes,
d'après P. Stefani, en quatre pièces ; — Les Douze
Mois, douze pièces; — Paysans et Paysannes
avinés, d'après P. Breughel,deux pièces (1642) ;
— Musiciens grotesques, deux pièces originales ;
— Jésus-Christ et les Disciples oVEmmaûs,
d'après Giles Mostaert; — Saint Paul jeté par
la tempête sur Vile de Malte, d'après le même ;
— Le jeune Tobie , accompagné d'un ange,
péchant un poisson dans le Tigre, d'après
Giles de Saen; — Saint Jean-Baptiste prê-
chant dans le désert, d'après le même; —
Vue de La Haye , d'après le même, etc. Les
fonds et paysages de toutes ces estampes sont su-
périeurement traités. Le monogramme de Hondt
le jeune fut quelquefois celui de son frère, seu-
lement Y h minuscule est plus évasée par le bas ;
d'autres fois, et c'est le plus souvent , il signait
d'une H majuscule traversée par un /. Comme
écrivain, Hondt le jeune a laissé d'excellents
écrits sur les arts figuratifs : Prxstantissimo-
rum aliquot Theologorumprotestantium Bf-
Jigies «ri incisa; La Haye, 1602, in-fol.; —
Theatrum Honoris, in quo pictorum Belgii
insigniorum imagines, etc.; Amsterdam,
1618, in-fol.; — Pompa funebris Caroli V,
tonp.y Bruxellis celebrata; La Haye, 1619,
in-fol.; — L'Institution de la Perspective ( en
flamand ),trad. en français; La Haye, 1625.
A. de L.
- Gandellinl, Notizie degV Intagliatori, t. XI, p. 14S-148.
— Basan, Dictionnaire des Graveurs.
hondt (Guillaume), graveur flamand, frère
du précédent, né à La Haye, en 1601 , mort à
Dantzig. H fut élève de son père, et apprit sous
ses leçons à manier le burin avec beaucoup de
goût. Gandellini l'appelle famosissimo inta-
gliatore e maestro di loggan inglese. Parmi
ses nombreuses estampes on cite : son portrait,
d'après van Dick; — ceux de François Franck
le jeune, peintre flamand ; — du prince Mau-
rice d'Autriche (1623) , excellente gravure ori-
ginale; — Ladislas IV, roi de Pologne, id.;
— Bernard, duc de Saxe-Weimar ;— Jean-
Casimir, roi de Pologne, d'après G. Schulze;
— Charles, prince de Pologne, évêque de
Breslaw, d'après le même; — Luisa-Maria
Gonzaga, reine de Pologne, d'après Juste d'£g-
mont. Le monogramme de Willem Hondt est
un G enlacé à mi-corps dans le premier jambage
d'une H. A. de L.
Gandellinl, NoUtie degV IntaQliatori, t. XI, p. 19». -
Basai), Dictionnaire des Graveurs.
hondt ( Abraham), peintreet graveur hol-
landais, parent des précédents, né à Rotterdam, en
1638, mort à Londres, en 1691. {Suivant Weyer-
man , la vie de cet artiste distingué fut une suite
de libertinage et de débauches dont il se complaît
à rapporter certains épisodes. Les mauvaises
mœurs de Hondt nuisirent à sa réputation et
à sa fortune. Il dut quitter sa patrie, et passa en
Angleterre, où il eut une grande vogue : néan-
moins, il y mourut misérable. Ses ouvrages se
distinguent par une entente supérieure de -com-
position : « Jamais, dit Descamps, il ne fut mé- '
diocre; il est quelquefois supérieur et souvent
égale les meilleurs maîtres. » Ses tableaux/d'une
grande variété de genres, sont peu connus en
France. Parmi les principaux on cite : L'Incen-
die de Troie; on y admire la disposition des
figures , la correction du dessin , une touche libre
et hardie; — Le Marché aux Chiens à Am$~
ter dam : le peintre, a représenté près de trente
espèces de chiens caractérisés avec beaucoup
de vérité; — à Anvers, L'Entrée des Animaux
dans l'Arche, qui décèle de grandes connaissan-
ces en histoire naturelle. Hondt a laissé encore
d'excellents Paysages , des Chasses , un Promé*
thée déchiré par le vautour; au fond est une
vue de V enfer. Gomme graveur à l'eau-forte, on
aune suite de chasses à divers animaux. A. de L*
Jakob Campo Weyerman, De Schilderkonst dcrNeer-
landers, L III, p. 187-159. - Descamos, La VU des
Peintres hollandais, i. II, p. 854. - PUUngton, Dietio-
nary of Painters. — Gandellinl. Notizie degV Intaglia-
tori, t X-XI, p. 188. — Basan, Dictionnaire des Graveurs,
honb ( William), libraire et pamphlétaire
anglais, né à Barth, en 1779, mort à Tottenham,
le 6 novembre 1842. Il appartenait à une famille
de dissidents. Il fut d'abord destiné au barreau,
et passa quelque temps chez un procureur; mais
il quitta bientôt cette carrière, se maria en 1800,
et ouvrit une librairie. Plusieurs opérations in-
dustrielles qu'il tenta en même temps tournèrent
mal ; ses affaires de librairie ne réussirent pas
mieux, et il fit faillite. Il ne se releva que pour
retomber, et demanda aux lettres des moyens
d'existence pour lui et pour sa nombreuse fa-
mille. Il écrivit dans le Critical Review, dans le
British Lady's Magazine, publia en 1815 le Tra-
veller, et en 1816 un recueil hebdomadaire inti-
tulé : The Reformist's Register; qui cessa bientôt
de paraître. En 1817, il publia des pamphlets
qui eurent un immense succès, dû en partie à
leur mérite littéraire, en partie aux illustrations
humoristiques de Georges Cruikshank, et surtout
à leur tendance politique, hardiment libérale.
Hone osa même parodier, contre le ministère et
ses partisans dans le clergé, le Book ofcommon
Prayers, hardiesse qui le fit traduire en justice.
Il fut acquitté. Le produit de ses pamphlets et
d'une souscription faite à son profit après son
procès lui aurait donné de quoi vivre s'il n'avait
de nouveau compromis sa fortune dans le corn-
76
HONE — HONIGBERGER
76
merce des livres. Trois ans de résidence forcée
dans une prison pour dettes furent te résultat de
cette imprudence. Tant de déceptions ramenè-
rent Hone aux idées religieuses, sans le rappro-
cher de l'Église officielle. 11 rentra dans la secte
des dissidents , et devint prédicateur d'une de
leurs chapelles. Ses dernières années se partagè-
rent entre les fonctions évangéliques et des tra-
vaux pour les Revues et les Magazines : travaux
incessants et Ingrats qui ne contribuèrent pas à
sa réputation et ne le mirent pas même à l'abri
dn besoin. On a de lui une édition du Gardener
de Shah; 1806; — The political House that
Jack built (1816); — A Slap at Slop (1816);
— Ancient Mysteries described, especially
the english miracle plays founded on the
apocryphal New Testament story, extant
among the unpuôlished Mss. in the British
Muséum (1823) ; — Every Day Book, en 2 vol. ;
Table Book; — Year Book; — Sports and
Pastimes of the en g lis h ; 1838, in-8°. Z.
Barly Lift and Conversion of William Hone, anar*
rativê witten b* Uimset. - Bnglish Cyclopadia ( Bio-
graphy ).
HOlfElN BRN-ISHAK AL-ABADI ( AboU-
zéid ), médecin arabe nestorien, de la tribu des
Abadites, né dans les environs de Hirah, en 176
de l'hégire (792 de J.-C.) ou plutôt en 194
(809), mort en 260 (873) ou 264 (877). Il étudia
d'abord sous Yahya lbn Messueh ; mais, blessé
de ce que son maître le dédaignait comme 61s
d'un marchand d'aromates , il quitta sa patrie et
se rendit dans l'empire grec, où il recueillit
un grand nombre de manuscrits. De retour à
Baghdad , il s'attacha au célèbre Gabriel , fils de
Bakhtischou, et finit par gagner l'estime de Yahya.
Le khalife Motewekkel l'ayant choisi pour mé-
decin , le mit à l'épreuve en lui ordonnant de
composer un poison. Sur son refus, il le fit jeter
en prison et l'y retint toute une année. Après
s'être convaincu de la probité de son médecin, il
le mit en liberté , et lui accorda toute sa con-
fiance. Sur la fin de sa vie Honéin fut anathéma-
tisé parle patriarche nestorien Sergius, parce
qu'il condamnait le culte des images. Il en fut,
dit-on , si vivement affligé , qu'il s'empoisonna.
Comme il était président de la commission que
le khalife avait chargée de traduire les ouvrages
scientifiques des Grecs , on lui attribua un grand
nombre de traductions qui sont de son fils Ishak,
ou de son neveu Hobéiseh , ou de ses disciples.
Il traduisit en syriaque et en arabe des ouvrages
d'Hippocrate, de Galien, d'Euelide, de Platon,
de Paul d'Égine, de Themistius, de Nicolas, et
écrivit plus de vingt traités originaux sur les ma-
ladies des yeux, l'agriculture, la physique, l'his-
toire, la philologie. On lui doit également une
grammaire syriaque et un dictionnaire syria-
que-arabe, le premier qui ait été composé.
E. Beauvois.
Ibn Khalllkan, Biogrùphical Diction., trad. par M. Mac-
Gucktn de Slaae, t. I, p. 478. — Ibn Âbl Osalbiah, Hist.
Ou Médecins. — Abou'l-Faradj, Uistoria Dynastiarum,
p. 171, 173; Cnronica Syriaca, p. 170. — Had)l Khalfah,
Lex. BUflioçraph. et Encyclop.— Asscmanl, fiibl. Orient.,
U II, p. J70, 488; t. III, «part. II,fp. 168. - Casiri, Biblio-
theea Arabieo-Hispana Escurialensis, t. II, p. 1*6. —
Wiistenfeld, Geschichte der arabischen Aerzte, p. «6-19.
— Journal Asiatique, 1854, II, p. 196 su. - De Ham-
mer, L'iteraturgeschtchte der Araber, IV, 388-845. —
Gart, De InUrpretibus et explanatoribus Euclidis ara-
bicit ; Halle, 1813.
honbstb ( Saint ) était né à Nîmes, et rivait
dans le troisième siècle. Il fut disciple de saint
Saturnin, premier évéque de Toulouse, qui lui
imposa la prêtrise et l'envoya prêcher dans la
Navarre et la Biscaye. Sa vie est peu connue.
Là, comme presque toujours , il reste un grand
doute parmi les hagiographes; les uns le met-
tent au rang des martyrs, d'autres le considè-
rent comme simple confesseur. Suivant les
PP. Richard et Giraud , la principale partie de
son corps se conserve à l'église dTères (Seine-et-
Oise), où l'on célèbre sa fête le 16 février. Quel*
eues autres- établissements religieux , mais sans
aucune preuve, prétendent également posséder
d'importantes reliques de saint Honeste. A. L.
Bailtet, Fies des Saints, t. m, 18 septembre et 80 oc-
tobre. — Richard et Giraud, Bibliothèque sacrée.
* HOHESTis ( Christophe de ), médecin itar
lien, né à Florence vers 1320, mort en 1393, à
Bologne, où il était professeur; il a laissé un ou-
vrage fort justement 7 délaissé aujourd'hui, mais
qui au quinzième siècle jouissait de quelque au-
torité. Son Expositio super Antidotarium Mê*
sue, imprimé à Bologne en 1488, in-folio, fut
réimprimé à tterrare et joint à l'édition donnée
en 1661 des œuvres de Mesué. G* B.
Negrl. SerUtori Fiorentini, p. 189. - AJfdo*»l f . Boto-
onesi Dottori, p. 185. - Kealner, MedidnUokes Gt-
lehrten-Lexikon, p. 418.
^hosigbbbgbb (Martin), médecin et voya-
geur allemand, né en 1795, à Cronstadt (Tran-
sylvanie ). Après avoir étudié la médecine , il se
rendit au Caire, en 1815, et obtint un emploi
dans la pharmacie de Mohammed- Ali. En 1821,
pour se soustraire aux atteintes de la peste,
qui ravageait l'Egypte, il passa en Syrie, et par-
courut ce pays durant huit ans, trouvant par-
tout un favorable accueil , à cause de ses con-
naissances médicales* Il se rendit ensuite à
Lahore, dans le Pendjab, et fut nommé médecin
du maharadjah Rendjit-Singh, et directeur d'une
fabrique de poudre. Ayant formé un jeune mu-
sulman de qui U pût se faire remplacer, il re-
vint en Europe ( 1832 ), exerça la médecine ho-
mœopathique à Constantinople (1837-1838),
puis retourna à Lahore, où il y reprit ses an-
ciennes fonctions. La Compagnie des Indes lui
accorda une pension en 1849, à l'époque où le
Pendjab fut annexé aux possessions britanni-
ques. Après avoir passé quelques années en Eu-
rope, il est allé s'établir dans le Kaschmir, en
1852. Honigberger a rendu de grands services à
la botanique, à l'archéologie et à la numismati-
que. Les plantes qu'il recueillit dans l'État de
Caboul ont été décrites par Jacquin, sous le titre
77
HOMGBERGER — HONORAT
78
de Sertum Cabulicum; Vienne, 1832. Les fouil-
les exécutées sous sa direction dans les Topes on
tours massives de l'Afghanistan et les médailles
qu'il y trouva ont été décrites avec détail par
£. Jacquet, dans le Journal Asiatique de Paris,
1836, t. II; 1837, II; 1838, 1; 1839, 1. On a de
Honigberger : Relation d'un Voyage de Dereh
Ghaiihhan à Caboul, en 1832, dam Journal qf
the Âsiatic Society ofBengal, t. III ; — Frû-
chte aus dem Morgenlande > on aventures de
voyages, suivies d'expériences médicales, et d'un
dictionnaire des termes médicaux en turc, en
arabe, en persan, en kaschmirien et eu quatre lan-
gues européennes ; Vienne, 1851, in-8°. Beauvois*
Honigberger, Retat. ; Journ. Asiat., istfl. — Vivien de
Salnl-Martin, Découverte* géographiques en Afghanistan,
dans Nouv. Annales des Voyages, 1847, t. IV, 18V8, 1. 1.
s HONIGBR, HŒNIGBB et HONIBJGEB ( jVt-
colas), littérateur allemand, né à Kœnigshofen, ;
en Franconie , mort vers 1598. On ne sait de sa
vie que ses travaux, dont les principaux sont :
Historische Erzaehlung der otlomanischen
Pforte ( Histoire de la Porte Ottomane ) ; Baie,
1573 ; — Hofhaltung des Tùrkischen Kaysers
und des ottomanischen Reichs Beschreibung
( Description de la Cour du Grand-Turc et de
l'Empire Ottoman), traduit de l'ouvrage de Geuf-
froi; Bâle, 1577; — traduction allemande de
Cxlii secundi Curionis Descriptio de Bello
Melitensi a Turcis gesto Historia Nova; —
Bâle, 1580, in-fol. ; — traduction allemande de
lnnoc. Gentiletti Examen Consilii Tridentini;
ibid., 1587, in-4° ; — Der neuven Welt unndt
Indianischen Koenigsreichs Neuve unndt
grùndlïche Bistori von allen Geschichten,
jffandlung und Thaten der Hispanier unndt
anderer Voelker (Nouvelle Histoire détaillée du
Nouveau Monde et du Royaume Indien, traitant
des Espagnols et d'autres peuples ), fait d'après
les Res Brasilianorum de Jérôme Benzoni;
Bâle, 1579, in-fol.; ibid., 1582, in-fol. Cet ou-
vrage fait partie de la Collection des Grands
Voyages publiée par Isaac et Théodore de Bry,
V-u.
Erseb et Grober, Aîlçemeine Encyklopedie. - Zedler,
Grosses Oniversai-Lexiton. — JOclier, Allgem. Gelehr-
Un-Lexikon.
' ; HONNORAT ( S. -S.)» archéologue français,
né à Digne, vers 1795. fl étudia la médecine,
obtint en 1817 le diplôme de docteur, et alla s'é-
tablir dans sa ville natale. On a de lui : Dic-
tionnaire Provençal-Français; Digne, 1845-
1847, 3 vol. in-4°; ce répertoire de la langue
d'Oc ancienne et moderne contient plus de
90,000 mots de différents dialectes, leur pro-
nonciation figurée, leurs synonymes, définitions,
étymologie, radicaux, équivalents en langues
modernes, les origines des principales coutumes
et institutions, une grammaire, plusieurs traités
et une table bibliographique des ouvrages pro-
vençaux imprimés depuis le seizième siècle.
L'auteur a complété son grand dictionnaire par
un Vocabulaire Fronçais-Provençal; Digne,
1849, in-4°. P. L— t.
Louandre et Bonrquelot, Ut Littér. française contem-
poraine.
honorât (Saint), archevêque d'Arles, né,
suivant Baillet, dans la Gaule Belgique, sur les
confins de la Champagne et de la Lorraine, dans
la seconde moitié du quatrième siècle, mort,
suivant tous les légendaires, le 14 ou le 15 jan-
vier 429. Il était d'une famille consulaire, qui
était restée fidèle aux anciens dieux. Aussi laissa-
t-il ses parents, sa patrie, dès qu'il eut embrassé
la religion des chrétiens. Son frère Venantius
ayant imité son exemple, ils partirent ensemble,
sous la conduite d'un saint homme, nommé
Caprasius, et parcoururent d'abord l'Achaïe.
Mais Venantius étant mort durant ce voyage,
dans la ville de Méthone , Honorât et son guide,
renonçant à pousser plus loin leur pèlerinage,
reprirent le chemin des Gaules, et s'arrêtèrent
dans la mer de Provence, en vue de Cannes,
dans l'Ile sauvage de Lérins, où ils fondèrent
un monastère qui a joui plus tard d'une grande
et juste célébrité. C'est, en effet, de ce monas-
tère que sont sortis , durant les cinquième et
sixième siècles , les plus fameux docteurs , les
évéques les plus lettrés de la Gaule méridionale.
Léonce, évêque de Fréjus, qui aimait Honorât,
l'avait aidé dans l'exécution de sa pieuse entre-
prise. On a coutume de faire remonter la fondation
du monastère de Lérins à l'année 410 ; mais cette
date est fort incertaine. Quoi qu'il en soit, Pa-
trocle, archevêque d'Arles, ayant été massacré
par un soldat barbare en l'année 426, suivant la
chronique de Prosper, Honorât fut appelé de
Lérins par les suffrages de l'église d'Arles et
placé sur le siège vacant. Mais la mort vint bientôt
l'y trouver, et les actes de son court pontificat
sont demeurés inconnus. La fondation de Lérins
est ce qui a le plus contribué à rendre son nom
célèbre ; aussi, vers Tannée 1391, ses restes mor-
tels forent-ils transportés dans cette lie. Cassien
lui a dédié dix-sept de ses Conférences.
Tous les écrits de saint Honorât sont perdus*
Au milieu du cinquième siècle , dans les actes du
concile d'Arles, il est fait mention de la règle qu'il
avait imposée aux religieux de Lérins. Mais
cette règle n'est pas non plus parvenue jusqu'à
nous. B. H.
Gallia Christiana, 1 1, col. M7. — nta 5. Honorât*
ab IMario conscripta , \a Appendice Opervm S. Leo-
nis. — vioceoUas Berralts, Chronologia Lirinensis.
honorât ( Saint), évêque de Marseille, né
dans la première moitié du cinquième siècle,
mourut après l'année 492, puisqu'il compta lé
pape Gélase I er parmi ses admirateurs. On a
lieu de supposer que cet illustre docteur avait
fréquenté dans sa jeunesse l'école de Lérins.
Suivant Lenain de Tillemont, son épiscopat
commence à Tannée 475. C'est une date conjec-
turale. Cependant cette conjecture, admise par
les auteurs duGallia Christiana, parait beau-
1 coup mieux fondée que les assertions du Pi Le-
79
cointe au sujet des évoques Dalmatios et Anto-
ninus. De tous les anciens annalistes Gennadios ,
ou le continuateur de Gennadius, est celui qui a
le plus amplement parlé de saint Honorât , évêque
de Marseille. Il loue la facilité de son éloquence,
et la variété de son savoir, comparant sa bouche
à une bibliothèque, Os suum quasi armarium
scripturarum aperit. Enfin, après avoir parlé
de ses Homélies fort goûtées par le pape Gélase,
l'historien, qui est un contemporain , raconte
que le saint évêque emploie présentement ses
loisirs à composer une vie de saint Hilaire d'Arles.
N'est-ce pas cette Vie de saint Hilaire qui a été
publiée par Vincent Barrai dans sa Chronologie
de Lérins? On peut le croire. Plusieurs criti-
ques attribuent pourtant le même ouvrage à
l'évéque Viventius. B. H.
Gallia Christtana. L I, coL 636. — Bartbius, Advert.,
Ut. 88. cli. 8.
* honorâtes ANTONINUS, écrivain ecclé-
siastique latin, vivait dans la première partie du
cinquième siècle. Il était évêque de Constantia en
Afrique pendant la persécution des catholiques
par le Vandale Genséric. On a de lui une noble
et touchante lettre (Epistola ad labores pro
Christo fer endos exhortatoria) , écrite vers
437-440, et adressée à un Espagnol nommé Ar-
cadius, qui avait été banni pour sa foi. L'évéque
l'encourage à supporter de plus rudes épreuves
encore pour la cause de la vérité. La lettre d*Ho-
noratus, publiée d'abord par J. Sichardus dans
son Antidot. contraomnes hxreses ,Bâle, 1528,
in-fol., a été insérée dans la Magna BibL Pa-
trum , Cologne, 1618, in-fol., vol. V, p. 1 1 1 ; dans
laBiW. Pat; Paris, 1644 et 1654, vol. IU; dans
la Bibliot. Patr. Max. ; Lyon, 1677, in-fol.;
vol. VIH, p. 665. Y.
Bulnart, Hittoria Persecutlonis Vandalicœ; Parte,
1694, par. II, C. 4, p. 483.
honoré ou honorius, scolastique de l'é-
glise d'Autun , naquit plutôt en France qu'en Al-
lemagne , malgré les dires de l'abbé Lebeuf , et
mourut en un lieu inconnu, après l'année 1130.
On possède en général peu de renseignements sur
la vie des écrivains qui ont paru dans le douzième
siècle ; il n'y en a peut-être pas un autre sur le-
quel on en ait moins conservé que sur Honoré
d'Autun. C'est un reproche qu'on peut adresser
à sa modestie. Il a, en effet, parlé de lui-même
dans son catalogue des Flambeaux de V Église
(DeLuminaribus Ecclesix ) ; mais il l'a fait avec
tant de concision et de sobriété, qu'on lit seule-
ment dans ce passage les titres de quelques-uns
de ses livres , et le nom du prince sous lequel
il a vécu. Honoré d'Autun occupe cependant ,
par le nombre et la diversité de ses ouvrages ,
une place considérable dans l'histoire littéraire
du douzième siècle. En voici la liste :
Elucidarium. Cet ouvrage, tour à tour at-
tribué à saint Anselme de Cantorbéry, à saint
Augustin, à Guibert de Nogent, à Pierre Abélard
lui-même, parait devoir être désormais maintenu
sans contestation au scolastique d'Autun. C'est
HONORAT — HONORÉ
80
un traité sommaire de théologie , dans lequel ont
a remarqué quelques opinions paradoxales. Ce-
pendant il a eu longtemps une grande renommée,
et on l'a traduit plusieurs fois en français et en
allemand. Il a été publié sous le nom ide saint
Anselme, à Paris, en 1560, in-8°, par les soins
de Claude d'Espence; — In Cantica Cantico-
rum et Sigillum Marix, écrits de même nature,
qu'il faut joindre l'un à l'autre, et qui ont été
imprimés pour la première fois à Cologne en
1540, in-8°; — Jnevitabilis , ou Dialogus de
gratia et liber o arbitrio, dans les Biblio-
thèques des Pères; — Spéculum Ecclesiœ,
recueil de sermons , publié à Cologne en 1531 et
à Baie en 1544; — Gemma Animas, somme li-
turgique souvent imprimée séparément et dans
les Bibliothèques des Pères; — Sacramehta-
rius, autre opuscule liturgique , inséré dans les
Anecdota de B. Pez, t. II, col. 249; — Hexa-
meron, dissertation sur l'ouvrage des Six Jours,
que Bernard Pez a publiée dans le même tome
de ses Anecdota, col. 70; — Eucharisticon 9
exposition de la croyance de l'Église sur l'eucha-
ristie , dans le même volume du même recueil ,
col. 348 ; -— Tractatus de 3eo et Vita eeterna,
dialogue attribué plus d'une fois à saint Augus-
tin, et imprimé dans l'appendice de la dernière
collection de ses Œuvres, t. VI, p. 169; —
Imago Mundi 9 abrégé de cosmographie et d'his-
toire, qui a été longtemps dans toutes les mains.
Les exemplaires manuscrits en sont,, en effet,
très-nombreux, et l'on en compte sept éditions ; —
De Apostolico et Augusto , traité de la puissance
du pape comparée à celle des rois, dans les Anec-
dota de B. Pez, t. H, p. 180. Honoré s'y montre
partisan extrême des droits du saint-siége. Qu'il
conteste aux rois le droit de conférer les dignités
ecclésiastiques , on ne peut s'en étonner : depuis
le concordat de François I er , et sous le régime des
contrats analogues , qui , plaçant l'Église dans
l'État , ont fait de l'épiscopat une fonction civile,
c'est, en effet, au prince séculier qu'appartient la
collation des titres ecclésiastiques : mais cet état
de choses n'est certainement pas régulier. La lo-
gique d'Honoré est plus téméraire lorsqu'il ré-
clame pour les papes le droit de choisir, de nom-
mer et d'instituer les rois. C'est ce qu'ils n'ont ja-
mais fait sans encourir le reproche d'usurpation;
— Scala Cœli, publié par B. Pez, Anecdota,
t. D, p. 157 ; — Elucidatio Psalterii, dans le
même tome du même recueil , p. 96 ; — De Lu-
minaribus Ecclesiœ, compilation bibliogra-
phique, en quatre parties, dont la dernière, la
plus originale, est aussi la plus intéressante. Ce
catalogue, qui a été souvent imprimé, se trouve no-
tamment dans la Bibliothèque des Pères, t. XX
de l'édition de Lyon; — De Solis Affectibus,
dans le même recueil, col. 1020 du tome XX;
— De Hœresibus, même volume, col. 138; —
Summa duodecim Quaesllonum, dans les
Anecdota de B. Pez, t, 11, p. 201 ; — Dialogus
inter Magistrum et JHscipulum, même vo-
81 HONORÉ
lume, p. 215 ; — De RxUio et Palria Animx,
même volume, p. 224; — De Libero Arbitrio,
ibid., p. 237; — De Vita Claustri, même
volume. Telle est la liste complète des ou-
vrages d'Honoré d'Autun qui ont été reproduits
par l'impression. Les auteurs de Y Histoire lit'
ter aire ajoutent à ce catalogue le traité De Phi*
losophia Mundi, publié sous le nom d'Honoré
dans la Bibliothèque des Pères, une Liste chro-
nologique des papes , et un Commentaire sur les
Proverbes eXYBcclésiaste. Les deux premiers de
ces écrits ne doivent pas être séparés ; ce sont
deux parties d'un même ouvrage. Mais cet ou-
vrage n'est aucunement de la plume d'Honoré.
Nous en avons déjà nommé l'auteur : c'est Guil-
laume de Conches (voir son article). Quant au
Commentaire sur les Proverbes, c'est un plagiat,
et on ne prouve pas d'une manière suffisante que
ce plagiat ait été réellement commis par Honoré
d'Autun. Les auteurs de Y Histoire littéraire
nous ont, en outre, donné un long catalogue
d'ouvrages inédits que divers bibliographes étran-
gers ont attribués à Honoré d'Autun. Il est re-
grettable que ce catalogue n'ait pas encore subi
l'épreuve d'un contrôle scrupuleux , car il peut
contenir diverses erreurs. Dès à présent nous en
signalerons une : il s'agit des Gloses sur Platon.
Ces Gloses, mentionnées dans le De Philosophia
Mundi, ne sont pas d'Honoré d'Autun, mais de
Guillaume de Conches. Ajoutons qu'après avoir
été longtemps profondément ensevelies, comme
le disent les auteurs de Y Histoire littéraire,
elles ont été retrouvées de nos jours. B. H.
Cas. OadlD, De Script. Ecoles. — Lebeaf, Dls&rt.; 1. 1,
p. S5*. - Hist. imér. de la France, t XII, p. 165.
* honoré I er , prince de Monaco, mort en 1 581 .
H succéda à son père Lucien, assassiné en 1525
par Bartolomeo Doria, marquis de Dolce-Aqua.
Fort jeune encore, il fut placé sous la protection
de l'empereur Charles-Quint, et le servit utile-
ment dans ses guerres. Il se distingua surtout à
la prise du fort de La Goulette et à celle de Tunis,
en 1535. 11 signala également sa valeur à la tête
de ses galères contre les Turcs, à la bataille de Lé-
pante ( 7 octobre 1571 ). 11 avait épousé, en 1545,
sa cousine IsabeEa Grimaldi, dont il eut sept ou
huit enfants. Son fils Charles 11 lui succéda.
* honoré il , prince de Monaco, petit-fils du
précédent, né en 1599, mort le 10 janvier 1662. Il
succéda en 1604, sous la tutelle de son oncle Fré-
déric Lando, à son père Hercule, troisième fils
d'Honoré F r . Pendant son gouvernement, Lando
consentit à recevoir une garnison impériale dans
Monaco ; mais Honoré devenu majeur crut que les
véritables intérêts de son pays étaientde s'appuyer
sur la France ; aussi se plaça-t-il sous la protec-
tion de Louis XIII par un traité conclu à Péronne.
le 17 septembre 1641. Pour indemniser Ho-
noré n de ses domaines situés dans le duché
de Milan et le royaume de Naples , domaines
qui ne devaient pas manquer dtètre confis-
qués par les Espagnols aussitôt le traité connu,
82
le roi de France lui donna en propriété pour
lai et ses descendants, avec titre de pairie, le
duché de Valentinois, la baronnie de Buis en
Dauphiné, la seigneurie de Calvinet en Au-
vergne, et le comté de Cardaler en Lyonnais.
En 1642, Honoré, au milieu de la nuit, attaqua
la garnison espagnole de Monaco, et l'obligea à
évacuer sa capitale. Depuis lors il se montra fi-
dèle allié de la France, qui le maintint dans sa
puissance et sa liberté. Honoré n avait épousé
Ippolita Trivulce, à laquelle Louis XIV adressa
ses hommages avant de les fixer sur madame de
Montespan. Honoré H eut de ce mariage Hercule,
mort en 1651, et trois filles, dont la seconde, Te-
resa-Maria, épousa, en 1672 , Francisco-Sigis-
mondo,duc d'Est. Ce futLouis Grimaldi,fils d'Her-
cule, qui succéda à son grand-père Honoré H.
* honoré m ( Camille-Léonor), prince de
Monaco, né le 10 septembre 1720, mort en 1780.
Il succéda, le 29 décembre 1731, à sa mère Louise-
Hippolyte, sous la tutelle de Jacques-François-
Léonor de Goyon-Matignon, comte deThorigny,
son père. H entra au service de la France, et en
1746 it fut dangereusement blessé à la bataille
de Rocoux. A Lawfeld (2 juillet 1747), son che-
val fut tué sous lui par un boulet. Le 23 avril
1751 il devint possesseur du duché de Valenti-
nois par la mort de son père. En 1757 il épousa
Marie-Catherine de Brignole, nièce d'un doge
de Gênes. En novembre 1760, il termina la con-
testation de territoire qui subsistait depuis
plusieurs siècles entre la communauté de la Tur-
bie (comté de Nice) et celle de Monaco, par un
traité conclu avec Charles-Emmanuel IH, roi de
Sardaigne. Il laissa deux fils, dont l'aîné, Joseph-
Marie- Jérôme- Honoré, lui succéda.
* honoré iv ( Charles-Maurice- Anne ),
prince de Monaco , duc de Valentinois , né le
17 mai 1758, mort en 1819. Après un règne pai-
sible, il vit, le 14 février 1793, sa principauté
réunie à la république française. Il épousa > le
14 juin 1777, Louise-Félicité-Victoire d'Aumont,
dont il eut deux fils, Honoré-Gabriel et Tan-
crède-Florestan-Hoger -Louis , qui, l'un après
l'autre , lui succédèrent.
* honoré v (Gabriel), prince de Monaco,
duc de Valentinois, né en 1778, mort en 1841. n
fut nommé pair de France le 4 juin 1814, et après
te traité de Paris il rentra dans l'héritage paternel.
Mais le 20 novembre 1815 sa principauté fut
placée sous la protection de la Sardaigne. Par sa
déclaration du 8 novembre 1817, le roi Emma-
nuel I er reconnut la souveraineté d'Honoré V, en
8eréservantcependantledroit de l'occuper mili-
tairement. Honoré V se fit surtout connaître par
une monnaie de bitlon représentant 5 et 10 cen-
times, et qui pendant quelque temps inonda la
France. Cette monnaie, débitée avec prime, pré-
occupa assez le gouvernement de Louis-Philippe
pour qu'il crût devoir en interdire la circulation.
Honoré V est auteur d'un ouvrage Sur le Paupé-
risme en France et les moyens d'y remédier;
as
Paris, 1939. H mourut i
HONORÉ —
ï enfants, et eut pour
successeur son frère ïlorestan 1 er .
Mémoires historiques de Louis X/f% t. IF, p. Mo. —
Slsmondf, Histoire des Français, L XXV, p, 170. — Dic-
tionnaire de la Conversation.
honoré. Voy. Honorius.
HOSOAÉ PB SAIBTB-MARIB (Le P. BlaiSÔ
Vauxfxlb, en religion), théologien français, né
à Limoges, le 4 juillet lôôl, mort à Lille, en 1729.
11 entra dans Tordre des Carmes, à Toulouse, en
1671, et fut envoyé comme missionnaire dans le
Levant De retour en France, au bout de quel-
ques années, il remplit les postes de prieur, de
provincial et de visiteur général des trois pro-
vinces. On a de lui : Expositio Symboli Aposto-
lorum dogmatioa y hsstorico-hxretica, histo-
rico-positiva, et scholastica, etc.; Perpignan
1689; — Dissertation apolégétique sur la
Théologie mystique; Bordeaux, 1701, in-12.
Cette dissertation n'était que le prélude de Fou*
vrage suivant : Traditions des Pères et auteurs
ecclésiastiques sur la Contemplation; Paris,
1706, 2 vol. in-8% livre qui a été traduit en ita-
lien et en espagnol ; l'auteur y ajouta en 1701 un
3 e volume sous ce titre : Des Motifs et de la
Pratique de f amour de Dieu; Paris, 1713,
in-8° ; — Traité des Indulgences et du Jubilé;
Bordeaux, 1701, in-12; 3*édit, Malines, 1735,
in-12; — Réflexions sur les règles et sur Vu-
sage de la critique touchant l'histoire de l'É-
glise, les ouvrages des Pères, les actes des
martyrs, les vies des saints, etc.; Paris et
Lyon, 1713-1720, 3 vol. in-8»; cet ouvrage est
rempli de recherches et d'observations curieuses
et savantes, la plupart sur des points impor-
tants ; mais l'auteur manque parfois de critique,
quoiqu'il donne de bonnes règles sur la critique
elle-même, principalement dans son premier vo-
lume, le plus estimé ; — Dissertation histor. et
critique sur la Chevalerie ancienne et moderne,
séculière et régulière; Paris, 1718, in-4% avec
fig.j — Vie de saint Jean de la Croix; Tour*
nay, 1724; — Observations sur l'Histoire ec-
clésiastique de Fleury; Malines, 1726-1729.
La critique porte principalement sur ce que
Fleury dit de l'Église romaine , de la dignité et
de l'autorité des papes, de la déposition des
évéques , des appels au souverain pontife , de la
soumission due aux canons, etc. Le P. Honoré
de Sainte-Marie prit une part active aux querelles
religieuses de son temps. Il défendit la bulle
Vnigenitus dans des écrits intitulés : D\fficul~
tés proposées à l'auteur de l'Examen théolo-
gique, etc.; Paris, 1714, in-8*; — Dissertation
sur la constitution Unigenitus; Bruxelles,
1727, in-4°. Il fit paraître aussi des Observations
dogmatiques , histor. et critiques sur les ou-
vrages de Jansenius, de Saint- Cyran, d'Ar»
nault, du P. Quesnel et de Petitpied;Ypres,
1724, in-4°. Guyot de Fehe.
Le P. Martial, Biblioth. Seriptorum vtriusqwcongre-
gationis et sessus CarmeUtarwn excalceatorum.
HONORIUS 84
HONORIA. Voy. GlATÀ,
honorius ( Flavius-Augustus ) , empereur
d'Occident, second fils de Théodose par sa pre-
mière femme $li* Flacilja, né à Constantinople,
le 9 septembre 384, mort à Ravenne, le 27 août
423. Il fut décoré du consulat k l'âge de deux ans,
et reçut à la même époque le titre de césar. En
389 U accompagna son frère à Rome, et en 393
il fut déclaré auguste. En 394, consul pour la
seconde fois, il alla rejoindre à Milan ( qu à Rome,
selon Zosime) son père, qui le proclama solen-
nellement empereur d'Occident et lui donna en
partage l'Italie, les Gaules (avec l'Espagne et la
Bretagne), l'Afrique et l'Illyrie occidentale. Il le
plaça en môme temps sous la tutelle énergique de
Stilicon, qui, par son mariage avec Serena ( 1 ) , nièce
de Théodose, était cousin du jeune empereur.
Théodose mourut peu après cet arrangement,
le 17 janvier 395. Honorius, qui n'avait pas en-
core onze ans , et qui joignait à son extrême
jeunesse beaucoup d'apathie, ne pouvait être
empereur que de titre. Tout le pouvoir apparte-
nait à Stilicon, qui en fit vigoureusement usage
contre les barbares. Honorius résida à Milan, où
il fut consul pour la troisième fois en 396 et pour
la quatrième en 398. Dans cette môme année il
épousa sa cousine Maria, fille de Stilicon et de
Serena. Ce mariage de pure forme fut célébré par
Claudien ( De Nuptiis ffonorii et Mariœ, et
Fescennina in Nuptias Honor. et Mar.), qui
prédit aux jeunes époux une brillante postérité.
Le vœu du poète ne se réalisa pas, et Maria mou-
rut quelques années après, sans que le mariage
eût été consommé. Des voyages de l'empereur à
Ravenne, à Brescia, à Vérone, à Padoue, à
Altinum , et surtout un redoublement de persé-
cution contre les païens marquèrent l'année 399.
Depuis la conversion de Constantin le paganisme,
abandonné par les empereurs, avait rapidement
décliné malgré le patronage du sénat romain. Au
lieu de le laisser s'éteindre tranquillement, Gra-
tien et Théodose résolurent de précipiter sa ruine
par des ordonnances qui atteignaient les prêtres
païens dans leur fortune et leur sûreté. Arcadius
entra avec ardeur dans la môme voie d'intolé-
rance, et Honorius l'y suivit. Par une loi datée
de Rome le 29 janvier 399, il confisqua les reve-
nus des temples au profit de l'armée, ordonna
la destraction des statues et de tous les objets
du culte païen; les temples eux-mêmes furent
convertis en églises ou en édifices d'utilité pu-
blique. Enfin tous les rites païens furent prohi-
bés. Cet édit, qui consommait la ruine du paga-
nisme, froissait trop d'intérêts et de croyances
pour ne pas rencontrer de l'opposition. Il souleva
un mécontentement qui produisit des révoltes ,
(l) Serena était fille d*an frère de Théodoae nommé Ho-
norius et mort ayant 8*1. Honortna laissa outre Serena une
autre fille, appelée TbermantU, qui fut mariée i un offi-
cier dont le nom est Inconnu {voy. Zosime. V, *,) ; Clan-
dlen, Laus Serense ,• Du Cange, FamiL Bytant., p. 75 ; TU"
lemont, Histoire des empereurs, vol. V. t p. iso.
85
HONORIUS
86
facilita les invasions des barbares et hâta la ruine
de l'empire.
En 400 les Visigoths, sous le commandement
d'Alaric,et peut-être à l'instigation des ministres
d'Arcadius, traversèrent les Alpes Juliennes et
mirent le siège devant Aquilée. En 402 ils rava-
gèrent la Vénétie et la Ligurie. Rome s'alarma et
répara ses murailles ruinées. L'empereur, qui
avait d'abord songé à s'enfuir en Gaule, trouva
plus sûr de s'enfermer dans Ravenne, qui devint
dès lors la résidence de la cour d'Occident. L'em-
pire fut momentanément sauvé par la victoire
de Stilicon à Pollentia (Polenza sur le Tanaro,
dans le Piémont), le 29 mars 403. Pendant ces
années de crise l'histoire ne trouve rien à dire
d'Honorius, sinon qu'il fut consul pour la cin-
quième fois en 402, et pour la sixième en 404,
et que dans son séjour à Rome en 404 il supprima
les combats de gladiateurs. Cet acte, inspiré
par le christianisme, fait honneur à Honorius ;
malheureusement, la douceur habituelle de son
caractère tenait à sa pusillanimité et à son iner-
tie. La terrible invasion des Goths, qui envahirent
l'Italie en 405, au nombre de 200,000 hommes,
et sous le commandement de Radagaise, ne le tira
pas de son apathie. Renfermé dans Ravenne, il
laissa Stilicon vaincre les Goths à Fésules en 406.
La patt qui suivit la victoire de Fésules permit
à Honorius d'intervenir à Constantinople en fa-
veur de saint Chrysostome, et à Stilicon de né-
gocier avec Alaric afin d'enlever l'Illyrie à l'em-
pire d'Orient. Pendant que l'empereur et le
ministre s'occupaient à des objets secondaires ,
la Gaule était affreusement ravagée par les bar-
bares. Les Alains, les Suèves et les Vandales
s'étaient déjà avancés jusqu'au cœur de ce pays ;
les Alemanes et les Bourguignons passèrent le
Rhin à leur tour. Les Alemanes s'établirent sur
les bords du fleuve depuis Bâle jusqu'à Mayence.
Les Bourguignons, sous la conduite de leur roi
Gondicaire, se rendirent mattres de l'Helvétie, et
se répandirent dans le pays des Séquaniens et
des Éduens, jusqu'à la Loire et à l'Yonne. Les
troupes romaines de la Grande-Bretagne, ne comp-
tant plus sur le faible monarque qui régnait à
Ravenne, se donnèrent pour empereur un officier
nommé Marc, dont ils se défirent au bout de
quelques mois, puis Gratien, qui eut le même
sort, et enfin Constantin, un simple soldat, plein
de courage et de talent. Cet usurpateur conçut
l'idée hardie de mettre sous sa domination tout
l'empire d'Occident. TJ reconquit rapidement la
plus grande partie de la Gaule sur les barbares, en
408, et envoya son fils Constant s'emparer de l'Es-
pagne. L'homme le plus capable de défendre l'em-
pire venait de succomber à une intrigue de palais.
Un officier de la maison impériale, nommé Olym-
pius, exploitant avec habileté le mécontentement
de farinée et la crainte que causait à Honorius
l'ambition effrénée de Stilicon, obtint du faible
empereur l'ordre de tuer le grand général qui
deux fois avait sauvé l'Italie. Stilicon eut la tête
tranchée le 23 août 408 (1). Cette exécution n'a-
jouta rien à l'autorité d'Honorius, et ouvrit l'I-
talie aux barbares. Tandis que le lâche prince
s'abritait derrière les murs de Ravenne, Alaric
mit Rome à rançon en 408, s'en empara en
409, et plaça Attale sur le trône. La cour de Ra-
venne était un théâtre d'intrigues et de meurtres .
L'assassin de Stilicon, Olympius, était supplanté
par Jovius, qui faisait bientôt place à Eusèbe, le-
quel ne tardait pas à être mis à mort à l'insti-
gation d'AUobichus. Des hasards heureux sau-
vèrent Honorius d'une ruine complète. La fidélité
d'Héraclien lui conserva l'Afrique. Quatre mille
auxiliaires venus de Constantinople défendirent
Ravenne contre les Visigoths. Alaric, mécontent
d' Attale, lui enleva la pourpre impériale en 410,
et ne la lui rendit que pour l'en dépouiller en-
core. Il marcha ensuite sur Rome, dont il s'em-
para pour la seconde fois, et qu'il mit au pillage.
Il survécut peu à sa victoire, et son frère Ataulphe
conduisit les Visigoths hors de l'Italie. L'usur-
pateur Constantin, qu'Honorius avait été forcé
de reconnaître, pénétra jusqu'à Vérone; puis,
effrayé de l'exécution d'AUobichus, avec lequel il
était en correspondance, il rentra en Gaule, fut
assiégé dans Arles par le général Constance, et
se rendit en 411, à condition qu'il aurait la vie
sauve. A peine arrivé en Italie, il fut égorgé par
l'ordre d'Honorius.
La défaite de Constantin plaça Constance au
premier rang. Aspirant à la main de Galla Pla-
cidia, sœur de l'empereur, il défendit vaillamment
un trône dont il se regardait comme le futur
possesseur. Un certain Jovinug, qui commandait
une forteresse sur le Rhin, se révolta, eut des
succès éphémères, et fut tué en 412 ou 413.
Héraclien, devenu rebelle à son tour, eut le même
sort. Ataulphe, qui avait proclamé Attale empe-
reur pour effrayer Honorius, abandonna bientôt
sa créature, et épousa Galla Placrdia. Il désirait
la paix ; mais Constance, voyant dans Ataulphe
un rival redoutable , le chassa de la Gaule et le
rejeta en Espagne, où le roi visigoth fut assas-
siné peu après, en 415. Attale tomba entre les
mains du vainqueur, et Honorius se contenta
d'exiler l'empereur déchu. Une amnistie générale
rassura les complices, désormais soumis, des di-
vers usurpateurs. Honorius fut consul en 407,
409, 411 (ou 412), 415,417. Le mariage de
Constance avec Galla Placidia en 4 i 7, le douzième
consulat d'Honorius en 418, le traité qui céda
aux Visigoths la Gaule méridionale avec Tou-
louse pourcapitale, l'occupation de ta rive gauche
du bas Rhin par les Franks, l'émancipation de
PArmorique, l'obscure usurpation (418-422 ) de
Maxime dans l'Espagne , ravagée par les Suèves ,
les Alains, tes Vandales et les Visigoths, l'as-
ti) Sa fille Thermantta qa'Honortos Tenait d'épouser
fttt aussitôt répudiée et mourut sept ans après. Sa femme
Sertna , reléguée a Rome , y fat mise à mort pendant le
siège de cette ville par Marie, sous prétexte qu'elle cor-
respondait avec les Goths.
87
sociation de Constance à l'empire en 421 , sa
mort peu de mois après, le treizième consulat
d'Honorius en 422, la brouîllerie de l'empereur
et de Placidia Galla, qui s'enfuit à Constanti-
nople avec ses deux enfants, Valentimen et Ho-
noria, en 423, tels sont les seuls faits notables
que présentent les dernières années d'Honorius.
Il mourut d'hydropisie à l'âge de trente-neuf
ans, après vingt-huit ans et huit mois d'un règne
désastreux. On montre encore à Ravenne son
mausolée que l'on suppose avoir été bâti par
l'ordre de sa sœur Placidia , et l'on pense qu'il
fut enseveli dans cette ville, bien qu'on ait
cru avoir découvert en 1542 son corps, avec
ceux de ses deux femmes Maria et Thermantia, %
dans l'église de Saint-Pierre à Rome. Le long
règne d'Honorius est remarquable par le dé-
membrement .de l'empire d'Occident. Dans cette
crise terrible, au milieu des hardis aventu-
riers Stilicon, Alaric, Constantin, Constance,
qui protégèrent ou attaquèrent les débris 'de la
puissance romaine , on distingue à peine l'insi-
gnifiante figure de l'indigne fils de Théodose.
Timide sans bonté, cruel même quelquefois par
lâcheté, Honorius resta un enfant jusqu'à la fin
de sa vie, et peut-être dut-il à sa faiblesse de
mourir sur le trône. Les eunuques et les aven-
turiers militaires qui se partageaient ou se dis-
putaient le pouvoir dédaignèrent de briser un
prince imbécile, qui fut toujours leur jouet et
leur instrument. Y.
Zoslme, V, 68, 59; Vî. - Orose, VII, 86-W. — Olym-
piodore, dans la Biblioth. de Photius, cod. 80. -Claadien,
Opéra. — Mareellin, Chron. — Idace, Fasti et Chroni-
con. — Prosper d'Aquitaine, Chron. — Prosper Ttron,
Chr. — Cassiodore, Chron, — Chronicon Paschale,
Toi. I, p. 868-579, édit. de Bonn. — Procope , De Bello
Fandalico, 1, 1-3. — Jornandès, Dé Reb. Get. t c. 19-82. —
Socrate , Hist. Ecoles., VI, 1 ; VII, 10. - Sozomène, Hist.
Eccl., VIII, i ; IX. *, 6-16. - Théodoret, Hitt. Eccl., V, 86.
— Tkéophane, Chronog., p. 116-130, «dit. de Bonn. — Zo-
naras, XIII, si. — Godefroy, Chronol. Cod. Theodos. —
Tillemont, Histoire des Empereurs, vol. V. — Gibbon,
History of Décline and Fall of Roman Empire , ch. S9,
80, 81, 88. — Eckhel, Doctrina Fummorum, vol. vin,
p. 171. — . On Cange , Fam. Byzantines. — Le Beau , His-
toire du Bas-Empire , t. V, édlt. de Saint-Martin.
honorius julius, géographe latin, d'une
époque incertaine. On a sous son nom un court
traité géographique publié pour la première fois
par J. Gronovius, dans son édition de Pompo-
niusMela;Leyde, 1685, d'après un manuscrit
imparfait de la Bibliothèque royale de Paris.
Dans ce petit traité, qui porte le titre de Julii
Honorii oratoris Excerpta qu& adcosmogra-
phiam pertinent, le monde se divise en quatre
océans : l'oriental , l'occidental , le septentrional,
le méridional (Oceanus orientalis, occidentale ,
septentrionalis, meridianus). On y trouve un
catalogue des mers, lies, montagnes, provinces,
villes, rivières, nations contenues dans chacune
de ces régions. Ce catalogue est une simple énu-
mération, excepté pour les rivières, dont la
source, l'embouchure et quelquefois la longueur
sont spécifiées. On ne sait rien de Julius Hono-
rius, qui parait être le même que le Julius Ora-
HONORIUS 88
tor mentionné par Cassiodore (JWt>* £ec*.,c. 25).
Sa Cosmographie servit de base à une compi-
lation qui, successivement agrandie, devint la
Cosmographie d'Éthicus (voy. ce nom). Y.
Wesseling, Préface de son édition des Itinéraires ro-
mains; Amsterdam, 1786, in-* . — Brandis, Das geo-
graphische Lehrbuch des Julius Honorius, dans le Bhein.
JtftU.,1858, L IX, p. 198.
honorius I er , soixante -neuvième pape,
originaire de la Campanie et fils du consul Pé-
trone, successeur de Boniface V, élu le 14 mai
626, mort le 12 octobre 638. L'Église était
alors divisée par l'hérésie des monothélites,
dont Sergius, patriarche de Constantinople, était
le chef. H soutenait qu'on ne devait reconnaître
à Jésus-Christ qu'une seule opération et qu'une
seule volonté, conséquence de l'unité de per-
sonne; c'était nier que le Christ eût été réelle-
ment homme, puisqu'on supposait ainsi son
incarnation opérée sans volonté. Sergius avait
déjà mis dans ses intérêts l'empereur Heraclius;
il résolut de gagner Honorius. Dans sa lettre,
il s'efforça de prouver que plusieurs Pères de
l'Église avaient enseigné une seule opération, et
qu'aucun n'avait parlé de deux ; il ajouta qu'a-
près tout il n'y avait rien à craindre en cette
occasion, et beaucoup à gagner ; car une franche
déclaration de principes en ce sens ferait ren-
trer les eutychéens dans le sein de l'Église. Ho-
norius, trop confiant, repoussa les avis de So-
phrone qui combattait le monothélisme, et
répondit en ces termes : « Nous confessons une
seule volonté en Jésus-Christ, parce que la Di-
vinité a pris, non pas notre péché, mais notre
nature telle qu'elle a été créée avant que le
péché l'eut corrompue..». Nous devons rejeter
ce3 mots nouveaux qui scandalisent les églises,
de peur que les simples, choqués de l'expres-
sion des deux opérations, ne nous croient nes-
toriens , ou ne nous croient eutychéens si nous
ne reconnaissons en Jésus-Christ qu'une seule
opération. » Dans sa treizième session , tenue
le 28 mars 681, le concile de Constantinople
revint sur cette décision, et Honorius, malgré
son infaillibilité, fut, quarante- trois ans après sa
mort, solennellement excommunié. Voici les
termes même de la sentence : « Avec eux (Ser-
gius et ses adhérents) nous croyons devoir
chasser de l'Eglise et anathématiser Honorius,
jadis pape de l'ancienne Rome, parce que nous
avons trouvé dans sa lettre à Sergius, qu'il suit
en tout son erreur, et autorise sa doctrine im-
pie. » Déjà pourtant, Jean IV (641 ) tout en
condamnant VEcthèse (Exposition) d'Héraclius,
qui soutenait le monothélisme, avait cherché à
défendre Honorius; et saint Maxime (660), éga-
lement opposé à cette doctrine, avait entrepris
la même apologie. Honorius envoya en An-
gleterre saint Birn, qui convertit Cinegiste, roi
des Saxons; il fit de grandes réparations à plu-
sieurs églises , et renouvela tous les vases de
Saint -Pierre. Il eut pour successeur Se vé-
rin. On a d'Honorius huit lettres dans les Con-
89
HONORIUS
90
ciles de Labbe, t. V, pi 1681 à 1685 ; deux dans
Yltalia sacra dlJghelli,t. IV, p. 1085, et une
épigramme de vingt-cinq vers dans la Biblio-
thèque des Pères de M. de LaBigne, t. VIII,
p. 538. Alfred Franklin.
Labbe, Sacrotancta Concilia; Paris, 1671, 15 yol. In-
fo!.; L V, p. îrn à 17B3. — Ughelll, Iialia sacra; Venise ,
1717 -w, 10 roi. in-fol. — M. de La Digne, Bibliothèque
des Pires ; Cologne, 1618, 15 vol. In-fol. — Bruys, Hist.
des Papes; La Haye, 175*, S voL in-*»; 1. 1. p. fil. - Mer*
lin, Examen exact et détaillé du fait d'Honorius; 1788,
In- 11. — Fr. Marchesius,CIf peut Fortium, $ive vindicte
Honorii papa; Rome, 1680, in-4°.
honorivs n (Lambert de Fagnan), cent-
soixantième pape, successeur de Calixte n, né
dans le comté de Bologne, élu le 21 décembre
1 1 24, mort au monastère de Saint-André, le 14 fé-
vrier 1130. Après la mort de Calixte n, les car-
dinaux élurent Thibaut, cardinal du titre de
Sainte-Anastasie , qui prit le nom de Célestin;
mais pendant qu'on chantait le Te Deum destiné
à remercier Dieu de cette élection, la faction de
Robert Frangipani proclame Honorius aux cris
de Lambert, évéque d'Os&e , pape! Thibaut,
pour apaiser les troubles, renonce volontaire-
ment au pontificat, et Honorius ceint la tiare.
Quand il se vit bien affermi sur le trône, il son-
gea à faire régulariser son élection. A cet effet il
se dépouille des marques de sa dignité et se pré-
sente au conclave. Les cardinaux, considérant
avant tout la paix de l'Église, confirment la
nomination de Lambert. Roger, comte de Si-
cile, duc de Ponille et de Calabre, refuse de de-
mander l'investiture à Honorius qui lui, dé-
clare la guerre; battu partout, le pape dut bien-
tôt accepter la paix. En France , le clergé,
irrité de quelques réformes entreprises par
Louis VI, se soulève, et Etienne, évéque de Paris,
excommunie le roi. Honorius déclare l'excom-
munication abusive; mais saint Bernard prend
le parti de l'évéque, et écrit au pape lettres sur
lettres. Louis VI y est traité de persécuteur,
d'impie, de second Hérode qui cherche à
étouffer non plus Jésus naissant dans une
crèche, mais triomphant dans son Église
(Epist. 49). L'évéque, si bien soutenu, finit par
l'emporter. Honorius, à la prière de Boleslas,
duc de Pologne, envoya en Poméranie saint
Othon, évéque de Bamberg, qui y prêcha la foi
chrétienne; un siège épiscopal fut établi à VaHis.
Le concile de ïroyes (13 janvier 1128) donna une
règle à l'ordre des Templiers, qui avait commencé
de s'organiser à Jérusalem en 1 1 18. Honorius fut
enterré à Saint-Jean-de-Latran, et eut pour suc-
cesseur Innocent HI. On a d'Honorius onze lettres
dans les Conciles de Labbe, t. X, p. 908 à 912;
deux bulles et quelques fragments dans Yltalia
sacra dTghelli, passim. A F.
Labbe, t. X, p. 908 à 944. - Broya, t II, p. eu. —
Saint Bernard, Opéra omnia ; Paris, 1690, s vol. In-fol. ;
EpistoUe 13, 14, 49 ad Honorium — H. Martin , Histoire
de France; Paris, 18B7 ; t. III. - J.-A. Hartmann, Fit»
Pontiftcorum Romanorum Fictoris III..» Honorii It..;
Marbourg, 1789. — Vita Honorii papse //, ex ms. Pan-
dulfi, Pisani; Fila ejusdemex cardinali Jragonio;àiue
Muratorl, Rerum Italicarum Scriptores; Milan, 1788»
87 vol. in-fol.; t. III, p. 480.
honorius m (Cencio Savelli), cent-
soixante-quatorzième pape, successeur d'Inno-
cent III, né à Rome, élu le 18 juillet 1216, mort
le 18 mars 1227. Les événements qui remplissent
le pontificat d'Honorius peuvent se ranger sous
trois titres : intervention en faveur d'Henri III
d'Angleterre, préparatifs contre la Palestine,
croisade contre les Albigeois. Jean Sans-Terre
ayant refusé de reconnaître un archevêque de
Cantorbéry nommé par Innocent HI, celui-ci
déclare le trône d'Angleterre vacant, et l'offre
au fils de Philippe-Auguste, qui accepte. Jean
effrayé se soumet et donne son royaume au pape;
ordre au roi de France de renoncer à l'Angle-
terre. Mais , en dépit du saint-siége, les barons
anglais chassent Jean, et défèrent la couronne à
Louis, fils de Philippe-Auguste, dont la femme,
Blanche de Castille , était petite-fille d'un roi
d'Angleterre. Louis et son père, quoique excom-
muniés , continuent leurs armements. Après la
mort de Jean, les barons reviennent sur leur déci-
sion, et couronnent Henri HI, son fils. Honorius
le soutient contre la France. « Qu'on ne nous dise
pas, écrit-il fièrement, que ce n'est pas à nous
à prendre la défense de ce roi, sous prétexte
qu'il s'agit de choses féodales; il a été dit à Jé-
rémie : Je t'ai établi sur les peuples et les
royaumes pour arracher et détruire, édifier et
planter. » Philippe, menacé d'une seconde
excommunication, soutient pins timidement son
fils, qui, battu à Lincoln, doit revenir en France.
Honorius, le lendemain de son sacre, avait écrit
au roi de Jérusalem pour l'assurer de son zèle
en faveur des croisés; en effet, il presse le dé-
part des évêques français, et demande le con-
cours du roi de Hongrie; puis, voulant donner à
la croisade un chef puissant , il jette les yeux sur
Frédéric, roi de Sicile ( voy. Frédéric H ) ; il le cou-
ronne empereur d'Allemagne, et lui fait prendre
l'engagement solennel de se transporter en Pa-
lestine avant deux ans. On sait quels furent,
sous les pontificats de Grégoire IX et d'Inno-
cent IV, les suites de cette promesse. En atten-
dant, Honorius s'occupe des Albigeois; il pro-
tège la maison de Montfort, et excite contre
les comtes de Toulouse Philippe -Auguste et
Louis VJH. En 1226, un légat excommunie Rai-
mond , et confirme au roi de France le droit sur
les terres de ce comte. — Honorius, le premier,
accorda des indulgences dans la canonisation des
saints. Par une décrétale, il défendit à l'univer-
sité de Paris d'enseigner le droit civil; mais Ri-
gord, médecin et historien de Philippe-Auguste ,
nous apprend qu'on n'eut point égard à cette dé-
fense. Honorius m, on le voit, marcha sur les
traces d'Innocent III, mais il n'avait ni la même
ardeur, ni la même capacité; aussi l'autorité su-
prême qu'il prétendait s'attribuer sur les sou-
verains reçut-elle quelques atteintes; en Dane-
mark, par exemple, le comte de Schwerin
91
HONORIUS — BONTHEIM
99
s'empara du roi Waldemar II et le retint trois
mois en prison , malgré les instances et les me-
naces du pape. Honorius mourut après un pon-
tificat de dix ans et huit mois; il eut pour suc-
cesseur Grégoire IX. On trouve six lettres
d'Honorius Iil dans les Conciles de Labbe,
t. XI, p. 242 à 245, vingt-sept dans Yltalia
sacra d'Ugheili, passim; dix-neuf dans les His-
toriés de Duchesne, t. V, p. 861, et quelques
autres dans les recueils de D. Martêne, de Ba-
luze, de d'Àchéry, de Waddlng; presque toutes
d'ailleurs ont été réunies dans l'ouvrage d'Inno-
cent Ciron, Compilatio Epistolarum décréta-
lium Honorii 111; Toulouse, 1645, in-fol. On a
publié sous son nom : S. D. Honorii papm ïtl
adversus tenebrarum principem et ejus ange-
los Conjurationes, extractœ ex originali Romse
servato, anno 1629 : médiocre compilation,
plusieurs fois réimprimée avec le titre Orimore
d'Honorius. A. F.
Labbe, t. XI, p. SW-S09. - Claconl, Hist Pontifie- -
H» Martin , t. IV. — Dochesne , Historiés Francorum
ficriptores. — Rigord, Getta Philippi-Augusti. — On-
chesoe, Histoire des Papes et souverains chefs de FÉ~
çlise; t. H, p. 1306. — Fita Honorii papas ///, ex ms.
Bern. Guidonis ; Fit* ejusdem ex altero ms. bibliothec*
Ambrosiana ; dans Muratori, Berum Italicarum Scrtp-
tores, t. III, p. S68 et 670.
honorius it (Jacques Savelli), cent-
quatre-vingt-sixième pape, successeur de Mar-
tin IV, né à Rome, élu le 2 avril 1285, mort le
3 avril 1287. Honorius IV avait étudié à l'uni-
versité de Paris, et avait été chanoine de Châ-
lons- sur- Marne. La goutte qui paralysait set
pieds et ses mains lui rendait fort difficile la cé-
lébration de la messe. Le roi de Sicile, Char-
les II, neveu de saint Louis, était tenu en prison
par Pierre d'Aragon, qui, à la suite des Vêpres
siciliennes, avait envahi le royaume; Honorius,
comme son prédécesseur, soutint la France
dans cette guerre désastreuse, et n'épargna point
les excommunications contre le parti d'Aragon.
Il profita d'ailleurs de ce protectorat pour donner
à la Sicile une nouvelle constitution très-favo-
rable au clergé. Honorius mourut à Rome, dans
le palais qu'il avait fait bâtir près de Sainte-Sa-
bine, et eut pour successeur Nicolas IV. On repro-
chée Honorius IV d'avoir trop favorisé l'élévation
de sa famille. On a de ce pape une lettre dans 17-
toitajocra d'Ugheili, h VIII, p. 636, et quelques
fragments dans les Annales de Wadding.
Alfred Franklin.
Labbe, t. XI, p. 11S7 i ttt». - Bfuys, t. III, p. 189.
— Ducbesne, 1. 11. p. l Ml. — Mézerav, Abrégé chrono-
logique; t. III, p 17 à 37. - Platlna, Hist. Pontif. — Cia-
coni, Hist Pontifie.
hoiitan (De La). Voy. LaHontah.
iiontbeim ( Jean-Nicolas m ), plus connu
sous le pseudonyme de Justinus Febronius,
jurisconsulte allemand, naquit à Trêves, le
27 janvier 1701, d'une famille patricienne, et
mourut le 3 septembre 1790. Il étudia la juris-
prudence, fut reçu docteur, embrassa ensuite
l'état ecclésiastique, et fit un voyage à Rome
pour s'affermir dans sa nouvelle vocation. Mais
en lui fournissant l'occasion de pénétrer dans les
replis de la politique sacerdotale, ce voyage de-
vait faire de lui l'antagoniste de la curie ro-
maine. En 1732, le jeune Hontheim occupa une
chaire de droit civil dans sa tille natale, et ht
paraître plusieurs traités de jurisprudence. Neuf
ans plus tard, nommé conseiller intime de l'élec-
teur-archevéque de Trêves, il fut initié aux af-
faires politiques et ecclésiastiques les plus im-
portantes ; il assista successivement à l'élection
de l'empereur Charles VII et à celle de Fran-
çois I er , et défendit à la diète les libertés de
l'Église nationale allemande. En 1748, il fut sa-
cré évêque ( in partibus ) de Myriophis, et son
prince le nomma suffragant du 6iége de Trêves,
dignité qui! remplit sous trois électeurs succes-
sifs (Frédéric-Georges, Jean-Philippe et Clément
Wenceslas ).
Ce n'est pas toutefois cette haute charge qui
fit connaître Hontheim à l'Europe savante. Déjà,
lors de son retour d'Italie, il avait pris la réso-
lution d'écrire l'histoire dé sa patrie. Son His-
toria Trevirensi$,diplomatioa et pragmatica,
parut en 1750 ( 3 voh in-fol. ), et, en 1767, il j
ajouta un savant Prodromus (2 vol. in-fol. ).
Dans le premier de ces ouvrages , où sont en-
tassés 1,365 documents, la constitution politique
et ecclésiastique de Trêves est développée avec
lucidité ; dans le second , l'auteur passe en re-
vue toutes les sources de son histoire. Enfin, en
1763, Hontheim publia, sous le pseudonyme du
jurisconsulte Justinius Febronius, son fameux ou-
vrage sur l'État de l'Église, dont voici le titre
complet : De Statu Ecclesix et légitima Po-
testate Romani Pontificis Liber singularis t
ad reuniendos dissidentes in rcligione chris-
tiana compositus; Bullioni (apud Guillelmum
Evrard» ), 1763, in-4°. A ce premier volume,
imprimé de fait à Francfort, étiez Esslinger,
vinrent se joindre quatre volumes supplémen-
taires. La rumeur qu'excita cette publicatioa
hardie d'un esprit indépendant fut immense:
des l'année 1765» on en fit une édition nou-
velle, augmentée par l'auteur; un extrait alle-
mand en avait été donné en 1764, et un autre,
en latin, parut en 1777 ; des traductions le pro-
pagèrent dans toms les pays de l'Europe (i).
Partout on en entreprit la réfutation , et la vé-
ritable consécration de sa célébrité arriva de
Rome même : le pape Clément XUI fit mettre
ce livre à l'index, malgré la dédicace, qui
était adressée au pontife lui-même. En effet,
la cour de Rome ne pouvait se faire la moindre
illusion sur la tendance de cet ouvrage, où
(1) La traduction française. Intitulée: De l'État de VÊ-
glise et de la Puissance légitime du Pontife romain, par
Rcmacle Llssotre; Wwrzbourg (Sedan), 1766, 2 vol. in-iî,
n'est pas complète et renferme des additions do traduc-
teur. 11 en parât une seconde : Traité du Gouvernement
de l'Église et delà Puissance du Pape par rapport à
ee gouvernement ; FenUe (Paris), 1766, ln-*«; et 1767,
8 vol. ta-ia.
93
HONTHEIM — HOO
94
Febronios Hontheim s'est appliqué à établir la
ligne de démarcation entre la puissance spiri-
tuelle du pape et la puissance ecclésiastique de
ia cour de Rome. « Sans tomber dans le pro-
testantisme , a-t-ti l'air de dire à ses compa-
triotes, vous pouvez fort bien tous opposer aux
envahissements et aux abus de la cour pontifi-
cale. » La constitution de l'Église primitive , le
caractère représentatif des conciles généraux,
la base toute humaine sur laquelle repose la
primauté de l'évêque de Rome , l'influence fu-
neste des décrétales du faux Isidore, les ten-
dances d'envahissement des nonces, t'influence
illégale des ordres mendiants, rétablissement
des mandats et des réserves , qui dépossédè-
rent, au douzième siècle , les évêques du droit
de conférer les prébendes, le monopole des élec-
tions épiscopales exercé par les chapitres, au
détriment du bas clergé et du peuple, telles sont
les principales questions traitées parle savant
conseiller de Trêves. Or, comme les principes
émis par lui reposaient sur le terrain historique;
comme son livre, au lieu de déclamations, n'of-
frait guère que de nombreuses citations em-
pruntées aux Pères de .l'Église , il exerça une
grande influence. Dans les années qui suivirent
la publication de ce fameux livre, la puissance
papale fut effectivement limitée dans beaucoup
d'Etats. Aussi, dès qu'on eut découvert le véri-
table auteur de De Statu Ecclesiœ, les persé-
cutions commencèrent. Le pape Pie VI se montra
très-acharné contre Hontheim. L'ex -jésuite Beck,
conseiller intime de l'électeur Clément- Wences-
las, ne se borna pas à des reproches et à des me-
naces contre le pseudo-Febronius : il les fit peser
aussi sur ses nombreux parents, qui tous occu-
paient des charges dans l'électorat de Trêves.
Le malheureux vieillard ( Hontheim était alors
âgé de soixante-dix-neuf ans), obsédé, fatigué,
terrifié peut-être, finit par se soumettre au saint-
siége. Lorsque sa déclaration de rétractation ar-
riva (en 1778) à Rome, Pie VI tint un consistoire
spécial pour faire part au monde catholique de
cet heureux événement ; mais plusieurs gouver-
nements catholiques s'opposèrent à la publica-
tion, dans leurs Étals,des actes de ce consistoire.
D'ailleurs le retentissement de cette polémique
avait été trop grand , trop général , pour qu'une
tardive manifestation de repentir eût pu neu-
traliser les effets déjà produits par l'ouvrage.
Voici ce que l'auteur écrivit à ce sujet à l'un de*
ses amis : « J'ai cédé, comme a fait Fénelon,
pour échapper à des tracasseries continuelles.
Ma rétractation ne saurait nuire à la religion
chrétienne ; elle ne profitera point à la cour de
Rome. Le monde penseur a lu mes thèses et les
a acceptées. » En 1788, Hontheim se démit de
ses charges, et passa les dernières années de sa
vie dans sa terre de Monquentin. 11 légua sa
vaste bibliothèque à sa ville natale. Outre l'ou-
vrage cité, on a de lui : Decas Legum Mut-
trium; Trêves, 1736, in-fol.; — HistoriaTrevi»
remis, dogmatica et practica, etc., ab anno
418 ad annutn 1745; Weithem , 1750 , 3 vol.
in-fol. ; Augsbourg, 1757, 2 vol. in-fol. ( Spach,
dans YEnc. des G. du M., avec add. )
SchUcbtegroll, Necroloç., 1791.
honthoest ( Gérard), peintre hollandais,
né à Utrecht, en 1592, mort à La Haye, en 1660.
Il suivit les leçons d'Abraham Rloemaert, et se
rendit à Rome, où il rat fort occupé par le haut
clergé et la noblesse. Il passa ensuite en Angle-
terre, et peignit plusieurs tableaux pour le roi
Charles I er . Sa réputation se répandit dans le
reste de l'Europe, et divers souverains l'appelè-
rent à leur cour : c'est ainsi qu'il fit les portraits
des enfants de la reine de Bohême; ceux dn
prince Robert; de V électeur Palatin, de là
reine de France Marie de Médias; du roi et
de la reine de Danemark, de plusieurs autres
princes ou personnages considérables. Ses prin-
cipaux tableaux d'histoire sont : à Paris, une
Judith ; — à Dresde , V Enfant prodigue parmi
les prostituées ; — - à Gand , dans la cathédrale \
Saint Sébastien ; le Christ mort , snr les ge-
noux de sa mère ; — à Rome, église de la Ma*
donna délia Scala, La Décollation de saint
Jean. Ces morceaux sont d'une belle manière et
d'un dessin correct. Le meilleur des élèves de
Honthorstfut Joachim Sandrart.
Son frère, Vilhem, mort à Berlin en 1683, était
un peintre de portrait fort estimé,.
A. t>B L.
Jakob Carapo Weyerman et Honbraken, De Schilder-
konst der Ned&rlanders, t I, p. 379-380. — Deicaraps,
La rie de* Peintres hollandais, L I, p. m, 936. ~
PiJklngton, Dictionary of Painters.
*aoo (Thomas), Anglais de naissance (proba-
blement du Bedfordshire) , capitaine et diplomate,
fut nommé, le 1 er octobre 1435 , chancelier de
France, au nom d'Henri VI, roi de France et
d'Angleterre. En 1436, il commandait les forces
anglaises en Normandie, dan6 le pays de Caux, et
y causa de grands ravages. Le roi d'Angleterre
lui accorda , en 1442, une pension de quarante
livres sterling 'sur le comté de Norfolk. Tho-
mas devint ensuite baron de Hoo et de Hastiug,
et rat créé chevalier de l'ordre de la Jarretière,
distinction qui ne s'accordait et ne s'accorde en-
core qu'aux personnages les plus éminents, nés
Anglais on alliés de l'Angleterre* La même an-
née, 1442, Thomas Hoo était capitaine de Man-
tes, sous les ordres du duc d'York, lieutenant
généra], avec 50 hommes d'armes à cheval,
20 hommes d'armes à pied, 210 archers, etc.
Il l'était encore an 1 er octobre 1449 , époque où
il cessa de porter le titre de chancelier de France.
En 1443, le chevalier Thomas Hoo, fut un des
ambassadeurs députés par le roi d'Angleterre
vers le gouvernement français , à Vendôme et à
Tours. Le double résultat de ces négociations fut
la conclusion d'une trêve entre les deux pays et
le mariage d'Henri VI, roi d'Angleterre, avec Mar-
guerite d'Anjou. En 1446, Thomas Hoo servit .
de nouveau comme diplomate on commissaire,
pour arrêter les trêves qui furent de nouveau
95
HOO — HOOD
96
conclues le 15 décembre de cette année, au
prieuré deJulIiers, entre Mantes et Meulan. Il né-
gocia, au même titre, le 29 octobre 1449,1a
reddition de Rouen, lors du recouvrement de la
Normandie par Charles VII. Il mourut après le
12 février 1450, date de son testament
VàLLET DE VlRIVlLLE.
Dugdale, Baronagium Jnglicanutn.— An*elme,Grands
Officiers de la Couronne , au 78 e chancelier. — Mm. Ba-
laie 9087; 7. fol., ts à 158. - Bibliothèque de V École des
Chartes, 1* série, t. III, page 185. - Daniel, Histoire de
ta Milice française, L I, pag. ne.
hood (Lord Samuel ) , baron de Cathering-
ton, célèbre amiral anglais, né le 24 décembre
1735, à Butleigh (Somersetshire), mort à Bath,
le 27 janvier 1816. Son père était ministre pro-
testant; mais Hood préféra la carrière maritime
à celle ecclésiastique, et dès l'âge de seize ans
(1751) il s'embarqua comme garde-marine. En
1756 il était déjà capitaine de la frégate de 32
Vestal. Il signala son courage et ses talents en
diverses occasions, sous les ordres des amiraux
Holmes et Saunders : au bombardement inutile
du Havre; pendant trois ans dans la Méditer-
ranée, et le 13 février 1759, où, après un com-
bat d'une demi-journée, il fit amener pavillon
à la frégate française La Bellone. En 1768, il
fut nommé au commandement de Boston, et de-
vint quelques années après commissaire de l'ar-
senal de Portsmouth , avec le titre de baronet
En 1778 il portait, comme contre-amiral, son
pavillon à bord du Bar fleur, vaisseau de 64,
et commandait la station de Boston. Il recueillit,
le 30 juin, à Sandy-Hood, les débris des Anglais
obligés d'évacuer Philadelphie. Le 12 août 1780,
s'étant réuni à de Grave , il attaqua le comte de
Grasse dans la baie de Chesapeak, mais il dut
battre en retraite , et le 29 avril 1781 reçut avec
Drake un nouvel échec devant La Martinique. Le
26 janvier 1782 de Grasse et le marquis de Bouille
vinrent à leur tour assaillir Hood devant Saint-
Christophe. Par une manœuvre hardie ( renou-
velée depuis par Nelson à Trafalgar), Hood
sépara les deux escadres françaises, et repoussa
de Grasse, mais il ne put empêcher Bouille de
s'emparer de 111e. Le 9 avril 1782 il comman-
dait, sous les ordres de Rodney, l'avant-garde de
la flotte anglaise qui cherchait la flotte française. ,
Il la rencontra au delà de La Dominique, et ayant
voulu l'arrêter dans le canal Sainte-Lucie, il fut
fort maltraité; mais le 12 il prit une brillante
revanche devant Les Saintes, perça le centre de
la ligne française, et fit prisonnier le comte de
Grasse, qui montait La Ville de Paris ( de 120 ),
après avoir échangé quatre-vingts bordées avec
ce vaisseau. Il s'empara ensuite, au passage de
Mona, le 29 avril, de deux vaisseaux et de deux
frégates. A la paix de 1783, il fut créé pair d'Ir-
lande et baron de Catherington. En 1784 les
électeurs de Westminster le choisirent pour leur
représentant au parlement, et lui continuèrent
leur confiance en 1790, après sa nomination I
aux fonctions de lord commissaire de l'amirauté. '
11 était alors amiral de Portsmouth. En août 1793,
à la tête d'une flotte immense, unie à celle d'Es-
pagne et de Naples,ilse présenta devant Marseille
et somma les habitants de reconnaître Louis XVU
et la constitution de 1791; les Marseillais refu-
sèrent Hood réussit mieux «auprès des Toulo-
nais, qui arborèrent le drapeau blanc dans la
nuit du 27 au 28 août, et lui livrèrent leur rade
et leurs forts. Dès le 30 l'armée républicaine se
présentait devant la ville, et le 19 décembre,
après un siège acharné, Hood fuyait abandon-
nant les révoltés française la vengeance de leurs
compatriotes, emmenant ou brûlant les Tais-
seaux (1) qui se trouvaient en rade, dévastant
ou incendiant les magasins et les arsenaux. Ce
fait est une tache dans la vie, glorieuse du reste,
de Hood. Le 20 septembre 1793, il avait débarqué
en Corse et secondé l'insurrection de Paoli ; mais ce
mouvement fut bientôt comprimé Jl bloqua alors le
port de Gênes, força le grand-duc de Toscane à
éconduire l'ambassadeur français, et échoua dans
une attaque contre l'île d'Elbe. En 1796, il re-
vint en Angleterre» Nommé gouverneur de l'hô-
pital de Greenwich et vicomte, il devint amiral du
pavillon rouge, grand'croix du Bain, etc«
Alfred deLacaze.
Loodge, Portraits of illustrions Personages, t. VIII. —
Biographie étrangère. — Bnglisch Cyclopsedia ( Bio-
graphe ).
hood (Thomas), poète et humoriste anglais,
né à Londres, en 1798, mort en mai 1845. Fils
d'un des associés d'une maison de librairie à
Londres, il fut élevé pour le commerce, et placé
très-jeune dans le comptoir d'un marchand. Mais
sa santé délicate et son esprit vif ne conve-
naient pas à ce genre d'occupation. Son père
l'envoya alors à Dundee, où résidait une partie
de sa famille. Pendant un séjour prolongé , sa
santé se rétablit, et en même temps se développa
en lui un goût très-vif pour la littérature. Il se
mit à écrire des articles pour les journaux de la
localité, et pour le Magazine de Dundee, qui
avait alors beaucoup de réputation. De retour
à Londres, il témoigna le désir d'étudier le des- '
sin et l'art du graveur. Il fut en conséquence
placé chez un de ses oncles qui suivait cette pro- ,
fession. Il y acquit un certain talent d'artiste,
et s'en servit avec avantage pour illustrer ses
œuvres poétiques. La nature l'avait fait poète;
une bonne partie de son temps était employée à
faire des vers. Ses essais furent insérés dans le
Magazine de Londres, et attirèrent aussitôt l'at-
tention. Vers 1821 il embrassa définitivement la
littérature comme carrière, et fut admis comme
sous-éditeur au Magazine. Le directeur en chef
était John Scott, qui l'avait fondé et rendu flo-
rissant par ses talents. Cette prospérité fut in-
terrompue par une mort prématurée, à la suite
d'un duel. Le Magazine cessa bientôt de pa-
rt) Ce fat sir Sldncy Smith qat rot chargé de cette i
cuttoo: on comptait dlx-»cpt vaisseaux de ligne, autant
de frégate».
97
HOOD — HOOFT
9d
raitre, et Hood fat obligé de travailler à d'autres
revues. Pendant quelque temps, il fut directeur
du New Monthly Magazine, puis d'un autre
Magazine qui portait son nom. Un travail trop
assidu et le découragement amenèrent une sé-
rieuse maladie. Des amis influents obtinrent du
gouvernement une petite pension en sa faveur.
Hood traîna quelque temps encore une existence
pénible, et mourut à quarante-sept ans, laissant
une veuve et de jeunes enfants presque sans res-
sources. Ses amis littéraires contribuèrent li-
béralement pour le soutien de sa famille. Ses
divers ouvrages ont presque tous un cachet
original et supérieur. Deux traits saillants le dis-
tinguent, l'humeur enjouée et comique, le sé-
rieux et le pathétique. H semblerait que l'un
dût exclure l'autre; mais cette humeur en-
jouée n'avait pas sa source dans la vivacité
d'esprit; elle venait plutôt de l'observation et de
pensées profondes. Les sujets qui lui convenaient
le mieux et vers lesquels il penchait étaient de
couleur sérieuse et sombre. Un autre trait re-
marquable, c'est que même dans ses esquisses
comiques et satiriques domine un esprit de
bienveillance, de bonté, de générosité. On y sent
que ce n'est pas pour humilier ou faire rire
qu'il retrace les faiblesses, les ridicules, les bi-
zarreries et les défauts de l'humanité , mais pour
la corriger et la porter au bien. Son premier
ouvrage, Whims and Oddities (Fantaisies et
Singularités), eut une grande popularité. En 1827,
il essaya une suite de National Taies ( Contes
nationaux) ; mais sa prose parut avoir moins
d'attraits que ses vers. Un roman en forme,
Tylney-Hall, eut un médiocre succès. L'ou-
vrage qui a pour titre The plea of Midsummer
Fairies est d'une imagination brillante et su-
périeur à ses autres productions. Il étendit sa
réputation en publiant pendant plusieurs années
des Comte Annuals, et dans Up the Rhine re-
traça avec une verve satirique les manies des
voyageurs anglais. En 1843, il publia, sous le
litre de Whimsicalities, les articles et les es-
quisses qu'il avait donnés autrefois au New
Monthly Magazine. Une de ses dernières pro-
ductions fut la pièce célèbre qui a pour titre
Song of the Shirt (la Chanson de la Chemise).
Il suppose que c'est le chant d'une de ces pau-
vres couturières (classe nombreuse à Londres)
qui, pour avoir le pain de chaque jour, travaillent
de l'aiguille dix-huit à vingt heures, et jeunes
encore, mais épuisées, finissent par succomber
à cette lutte mortelle. Jamais on n'avait tracé un
tableau aussi pathétique. La sensation fut im-
mense, et excita dans le public une vive sym-
pathie pour les souffrances et la misère de cette
classe malheureuse. Ce qui est assez curieux,
c'est que cette pièce parut pour la première fois
dans le journal charivarique le Punch. J. c.
Cyclopxdia of Bnglish literature.
hooft (Pierre), poète et littérateur hollan-
KOUV. BIOCR. GÉNÉR, — T. XXV*
dais, né à Amsterdam, le 16 mars 1581, mort à
La Haye, le 21. mai 1647. Fils du bourgmestre
Cornelis Hooft, l'un des nobles qui, en 1587,
résistèrent, au péril de leur vie, à la tyrannie de
Leicester, il se forma par l'étude des classiques
de l'antiquité et par des voyages en Italie. Après
son retour, il remplit, depuis 1609 jusqu'à l'é-
poque de sa mort, les fonctions de grand-bailli
de Muiden et de juge de Gooiland, sans aspirer
jamais à de plus hautes fonctions auxquelles sa
naissance, son savoir et ses richesses pouvaient
pourtant lui permettre de prétendre. Tacite,
qu'il traduisit en hollandais, était son modèle
comme historien , et il s'efforça de l'imiter dans
ses propres compositions historiques. Sa réputa-
tion se fonde principalement sur ses tragédies et
ses poésies erotiques. Ses lettres méritent aussi
d'être étudiées. Créateur du dialecte classique hol-
landais, en poésie comme en prose , Pierre Hooft
a été surnommé pour cette raison l'Homère et
le Tacite hollandais. « Malgré les tentatives de
la Chambre de Rhétorique d'Amsterdam pour
soustraire, dit M. van Kampen, le hollandais de
la dépendance du français et du latin, dans la»
quelle la maison de Bourgogne et les chambres
flamandes le tenaient par un nombre infini de mots
et de phrases étrangères, cette langue était tou-
jours rude et inflexible ; sa littérature, pauvre, n'a-
vait pas encore d'histoire, pas d'épttres suppor-
tables, pas de poésies légères, encore moins de
poésies erotiques, pas de drames, si ce n'est
quelques imitations des mystères français. Tout
cela lui fut donné par un homme qui avait reçu
sa première instruction au sein de cette Société,
et qui était l'ami de la plupart de ses membres.
A l'âge de dix-sept ans Pierre Hooft alla en
Italie, et en rapporta le goût de la douceur, de
la rondeur et de la plénitude dans l'expression
poétique, qualités qu'il chercha à mtrodnire dans
sa langue maternelle. La Hollande lui doit ses
premières poésies erotiques , qui portent le ca-
chet d'une grâce et d'une douceur dont personne
encore n'avait donné l'exemple dans son pays,
et qui ne sont défigurées que par quelques jeux
de mots fades, par des concetti et par un lan-
gage d'amour conventionnel emprunté à l'Italie
et à l'Espagne. Hooft s'est aussi essayé avec
succès dans le genre dramatique. 11 rejeta en-
tièrement sa tragédie d'Achille et Polyxène,
composée avant son voyage en Italie, et publia
une idylle dans le goût du Pastor Fido, et deux
tragédies, dont Tune, Bato, appartient aux temps
fabuleux de la Hollande, et dont l'autre, Gérard
de Velzen, est tirée de l'histoire nationale. A
part les duretés, les invraisemblances et la pe-
santeur des constructions, ces compositions
sont pleines de force et de vie, surtout Bato, ou
le poète, comme dans Gérard , introduisit, à
l'exemple des rhétoriciens ( Bederijkers), des
personnages mythologiques. On y trouve aussi,
comme dans les premières compositions trafi-
ques des Grecs, des personnages allégoriques,
99
HOOFT — HOOGE
100
tels que la Forée, le Pouvoir, etc. Mais Hooft ne
développa pas seulement le style poétique, il
rendit des services plus grands encore à la prose-
Son Histoire de Henri IV, celle de la Maison
de Médicis, plus abrégée, et surtout Y Histoire
détaillée de la Lutte pour V Indépendance des
Pays-Bas, de 1555 à 1587, sont rédigées dans
un style fleuri, souvent tita-près de la poésie,
mais en même temps énergique et nerveux , qui
ne sacrifie rien à 1* vérité, et qui brille surtout
par la description des hauts faits et la peinture
des caractères. Cependant Hooft, traducteur de
Tacite, imita trop servilement son modèle. Les
, lettres que nous avons de lui sont trop défigu-
rées par ces mêmes jeux de mots qui occupent
tant de place dans ses chants erotiques. D'un
autre côté, il y manifeste si bien son noble
cœur, son amour de la vérité et sa sagacité poé-
tique, qu'on lui pardonne volontiers le tribut
qu'il paye au mauvais goût de son siècle. » On
a de Pierre Hooft : Het Leven van Koning Hen~
drih IV ( La Vie du roi Henri IV) ; Amsterdam,
1626, in-fol.; 1638, in-4°, 1652, in-12; — De
Aederlandsche Historien (Histoire de Néer-
lande) ; ibid., 1642-1654, 2 vol. in-fol, ; nouv,
édit., 1820-1823. Son Histoire de la Maison de
Médicis parut à Amsterdam, 1649, in-4°. On a
imprimé les Anciennes pièces du théâtre de
Hooft à Leyde, en 1739. Ses autres ouvrages en
vers ont été recueillis avec ses pièces de théâtre,
sous le titre de Poésies mêlées , par Jacques
Van der Burg, en 1636, in- 12. Ses lettres ont été
publiées par Huydecooper en 1738, et sa tra-
duction de Tacite par Brandt en 1684. Son éloge
ayant été mis au concours , le prix fut remporté
par Jean de Kruyff. J, V.
Karl Bernhardt, dans VMlg. Encyktopxdie d'Erach et
Graber. — Van Kampen, dans la même Encyclopédie^
article HollwndUche Sprache und LUeratur. — Conver-
satiotis-Uxikon. — Siegenbeek, Beknopte Geschiedenit
der Nederlandsche Letterhunde. — A. Ypey, Beknopte
Geschiedenis der Nederlandsche Taie. — Witte, Dior,
- Barlseus . EpUL - Acta Brvdit., 1709. - Sedler, Uni-
vénal- Lexikon.
hooft (Nicolas), peintre hollandais, né à
L,a Haye, en 1664, mort le 21 janvier 1748. Il fui
successivement élève de Daniel Mytens, de Vil-
lem Doudyns et d'Augustin Terwesten. Il pei-
gnait très-bien l'histoire et devint directeur de
l'Académie des Artistes de sa ville natale. Riche
par sa famille, il produisit peu, quoiqu'il mourut
plus qu'octogénaire. Ses ouvrages sont tous
restés dans sa patrie, A. de L-
Oampo Weyermaa, De Sehilderkonst der Ned erh m
dert, t. iv. - Deacamp», La Vifi des peintres hoUon*
dais, t. UI, p. 83.
hooft ou hoofft (Gérard), littérateur
Hollandais, mort prématurément le 18 décembre
1768. Il appartenait à une famille patricienne
d'Amsterdam , et devint secrétaire de sa ville
natale. Des sa jeunesse il se voua aux muses
latines , sous la direction de Pierre Barman le
second. En 1767 il publia, avec Henri Coudera,
Van Santen et Lambert Schepper, un recueil de
Juvenilia, et en 1770 Jérôme de Bosch a pu-
blié les poésies posthumes de Hooft, à Amster-
dam, in-8«. J. V.
J. de Bosch, Notice en tête des Poésies posthumes de
Gérard de Hooft.
■oooe ( Pieter de), peintre hollandais, né
▼ers 1643. H fut l'un des meilleurs élèves du cé-
lèbre Nicolas Van Haerlem dit Btrghem, et ses
premiers tableaux ont la manière de cette grande
école. Plus tard , il travailla dans le goet de
Metzu, de Mierls, de Cloques, de Slingelandt,
mais sans atteindre le fini précieux de ces il-
lustres artistes. La touche de Hooge est large,
son coloris vrai, son dessin correct et de bon
goût; tout son faire est d'une grande facilité , lé-
ger, mais plein de force et de naturel. Ses sujets
sont bien choisis et les détails traités avec agré-
ment. On cite de lui : à La Haye, un Souper; à
Amsterdam, un Intérieur} à Paris, un Corps
de garde. A. de L.
Pllkington, Dictionary of Pointers. — Jakob Campo
WeyermaB et Houbraken, De Sehilderkonst der Nedev-
landert. t, II, p. m. •«- Des«aapa, lan*d*t PetMtret
hoiutndou, %, il, p. m-%n-
hooge (Romeyn de), graveur hollandais,
né à La Haye, vers 1650, mort vers 172a. H *é-
cut longtemps à Paris, où il semble avoir été
attiré par Van der Meuten; il repassa ensuite
dans sa patrie et y termina ses jours. Sa vie est
moins connue que son talent L'on trouve
dans ses ouvrages beaucoup d'imagination et de
facilité; « mais, dit Basan, comme il s'est laissé
souvent emporter à la fougue de son génie, Ton
rencontre dans la plupart de ses compositions
des idée» singulières et gigantesques et peu de
correction de dessin : ces défauts se trouvent sur-
tout dans les sujets allégoriques qu'il a composés
sur les affaires de son temps, où d'ailleurs il a
fait entrer une satire triviale et exagérée. »
Ses principaux ouvrages sont : L'Entrée de
Louis XIV dans Dunkerque en 1646, d'après
Van der Meulen ; — Charles II, roi d'Espagne,
descendant de son carrosse pour rendre hom-
mage au Saint-Sacrement; — Le Massacre
des deux frères de Witt; -r- Les Excès et
les Cruautés commises par les Français en
Hollande durant la campagne de 1672, suite
de huit estampes fort estimées que l'on rencontre
dans un livre rare intitulé t Avis fidèle an»
véritables Hollandais touchant ce gui s'est
passé dans les villages de Bodegrave et
Swammerdam ; tô73, in-4° ; — La Foire d'Arn*
heim ; — La Synagogue des Juifs portugais à
Amsterdam; — Les ligures de l'Histoire du
Nouveau Testament de Basnage; Rotterdam,
1699 et 1704, 2 vol. in-fol.; — de V Académie
de l'Art de la Lutte (en hollandais) ; 1674 ; trad.
en français, 1712, in*4 p ; — de la Bible en hol-
landais ; 1721 ; — des Hiéroglyphes des Égyp-
tiens; Amsterdam, 1735, petit in-fol.; — des
Contes de LA Fontaine; 1635, 2 vol. ia*8'; —
101
HOOGE - HOOGSTRAATEN
102
du Déeaméron de Boecace; 1695, 2 vol. in-8 # ;
— de VHeptaméron; 1698, 2 vol. in-8°; —
des Cent Nouvelles nouvelles; 1701, 2 vol.
in»8*. Toutes ces gravures sont fort recher-
chées, même séparées du texte. A. w L.
P. Basan, Dictionnaire des Graveurs. — G. Gaadellini,
Notiti* deir Intaçliatori, -» Jakab Campo Weyennaii ,
Z>* SchUdertonst der Ifederlandert; U 111, p. J14-117,
HOOGEE8 (Gosvin), pobliciste et poète hol-
landais, né en 1636, mort le 14 avril 1676. Après
avoir visité les principaux pays de l'Europe et
s'être arrêté quelques mois à Caen , où il se lia
avec Bochartet Huet,il succéda, en 1661, à
Gnevius comme professeur de droit, d'histoire
et d'éloquence à l'Académie de Deventer. Quel-
que temps après, il rut élu bourgmestre de cette
ville ; mais ses opinions politiques à la fois très-
hostiles aux Anglais et libérales à l'excès, ame-
nèrent sa destitution. On a de lui : Oratio de Ju-
lio Cxsare tyranno, jointe, ainsi que ses Adhor-
tationes ad Cives de libertate tuenda, à
l'édition qu'il donna de la Libertas publica et
du traité De Jure Imperii de son ami H.-R,
Schele ; Amsterdam, 1666, in-12 ; — Orationes II
ad sennatum Daventriensem, quarum prima
de Patriafortiter defendendapost acceptam
cladem 9 amo 1664 ; altéra de pace Batavorum
et Britannorum, anno 1667 con/ecta; Ams-
terdam, 1669, in-12; —* Poemata juvenilia;
Amsterdam, 1682, in-12; dans ce même vo-
lume se trouvent réunis les trois discours ci*
tés de Hoogers, les Poemata de son frère Jean
Hoogebs, ministre protestant, le Funus de Sau-
maise et Vlter suecicum de Huet
Sai, OiuMHBjtfcon, L V, a. lit,
hooge yen ( Henri), philologue hollandais ,
né à Leyde, en janvier 1712, mort en 1791.
Son père, peu fortuné, fit les plus grands sa-
crifices pour lui faire donner une éducation clas-
sique, et l'envoya au gymnase de Leyde. Le jeune
Hoogeven resta pendant plus d'un an toujours
le dernier de sa classe, à cause des brosqueries
de son professeur Torrenius. Mais dès qu'il n'eut
plus à souffrir des incartades de ce dernier, il se
mit bientôt au niveau de ses condisciples, et il
n'y eut que Pierre Burmann , l'un d'eux , qui le
dépassa. Sorti du collège en 1729, il commença
l'étude de la théologie ; mais il ne l'acheva pas.
En 1732, sa position précaire le força d'accepter
les fonctions de co-recteur au gymnase de Go-
rinchem. L'année suivante il devint recteur du col-
lège de Woerden , qui venait dvétre nouvellement
créé; en 1738 il se rendit en la même qualité à
Culenbourg. En 1745 il fut appelé à diriger le col-
lège de Bréda; en 1761 il devint recteur de
celui de Dordrecht, et en 1764 de celui de Delft.
H eut toujours pour but d'améliorer l'instruc-
tion secondaire et de faciliter aux jeunes gens
les moyens d'acquérir un fonds solide de con-
naissances. Ses ouvrages sur la langue grecque
prouvent qu'H l'avait étudiée jusque dans ses
moindres détails. On * de lui i iV. figera pe
praecipuisGrxcx dictionis Jdiotismiê libellus,
perpétuas animodverswnibus Ulustratus et
guam plurimis idiotismis auctus; Leyde,
1743, in-8°$ ibid., 1762 et 1766, M*-8°, tvec des
adjonctions} en 1777, Zeune publia une nouvelle
édition de cet ouvrage de Yiger, ainsi trans-
formé par Hoogeven, en y joignant diverses re-
marques • qui n'eurent pas l'approbation de ce
dernier, qui y répondit par : ZeuniiAmmadver-
siones in Vigerii libellum ad justam exa-
minis lancem revocatœ; 1781, in-8 ; — Doc-
trina Particularum Linguas Grœcœ; Delft,
1769, 2 vol. in-4°; Schutz en a donné un abrégé,
publié à Dessau, 1782, in- 8° ; selon Wolf , cet
ouvrage pèche par le manque de philosophie et
de finesse grammaticale; mais il est très-pré-
deux à cause de la quantité d'exemples qui s'y
trouvent rassemblés. Hoogeven a aussi publié
en latin plusieurs discours et pièces de poésie
dont l'indication se trouve dans YOnomasticon
de Sax, t. Vffl, p. 47. E. G.
Harlest, Vitm Philoltyorum, t. IV, p. il*. — Strodl-
maon , Neuet çeUhrtes Europe partie XU, p. 1041. —
fflracfelng, His&r. LUter, fiandimch. «. Rrach et Gra-
ber, Encpklopvdie.
* uboquesuwêlb (Bans), peintre alle-
mand, né vers 1500, mort à Mannes, en 1544.
Il composait et peignait bien l'histoire. Plusieurs
églises de Belgique conservent de ses ouvrages.
Son tableau capital est V Entrée de Vempereur
Benri VI dans Bologne. A. »* L-
Descamps, La Fie des Peintres allemand*, 1 1, p. 58.
* hoogsta ad (Qérart van), peintre belge, né
à Bruxelles, vivait en 1661 : il peignit d'abord le
portrait avec succès ; ayant acquis dans ce genre
une belle fortune, il se mita peindre l'histoire,
et y réussit. Ses compositions sont ingénieuses,
son dessin est correct -.plusieurs grands tableaux
d'autel à Bruxelles et dans quelques autres villes
du Brabant témoignent de son talent. Cest sur-
font dans les sujets religieux qu'il s'est fait re-
marquer. On connaît de lui plusieurs traits delà
Passion de Jésus-Christ; des martyrs, des
saints, etc. A. de L.
JakoJ) Campa WeycrJffM et HoaJtorakftii, De Sekilder-
konstder Nederlanders , \. II, p, 118. — Deacamps^ la
rie des Peintres flamands, etc., t. II, p. lSt,
VQO68TEAATE9 (Jacques vam) , domini-
cain hollandais, natif de la ville dont il porta
le nom» mourut a Cologne, le 21 janvier 1527,
Reçu maître es arts à Louvain en 1485, il devint
prieur des Dominicains de Cologne. La Réforma-
tion trouva en lui un fougueux adversaire» M
s'attaqua surtout à Reuchlin, qui ne le ménagea
guère, malgré les conseils de modération d'É-
rasme que Hoogstraaten n'écouta pas non plus,
et dont il reçut fort mal les avis.
Les principaux ouvrages de ce polémiste, au-
jourd'hui oubliés, sont : Defensorium Fratrum
mendkantium contra Curatos, etc.; Cologne,
103
HOOGSTRAATEN — HOOGZAAT
104
1507, in-4°; —Defensio scholastica principum
Alemani» in eo quod sceleratos detinent in-
sepultos in ligne contra Petrum Ravenna-
tem; Cologne, 1508, et 1511, in-4»; — Ad
X. D. Philippum S. Ecclesix Coloniensis ar*
chiepiscopum Tractatus magistralis décla-
rons quam graviter peccent quxrentes auxi-
lium a maleftciis; Cologne, 1510, in-4°; —
Epitome de Fide et Operibus adversus chimœ-
ricam illam atque monstrosam Martini Lu-
theri libertatem falso ab eo christianam
appellatam ; Cologne, 1 525, in-4°. V. R.
Échard, Scriptoree Ordinis Prœdicator. — Foppeos,
BibL Belg.
hoogstraatbn (Dire*), peintre belge,
né à Anvers, en 1596, mort à Dort, le 20 dé-
cembre 1640. débuta par être apprenti orfèvre,
et apprit ainsi le dessin et la gravure. Fort
jeune encore, il grava an Ecce Homo dont les
épreuves sont aujourd'hui fort recherchées. Il
s'adonna aussi à la dorure sur argent, et fit
faire quelques progrèsàcettepartiederorfévrerie.
Hoogstraaten parcourut ensuite PAllemagne, et
y reçut les leçons de plusieurs bons maîtres.
De retour dans sa patrie, il se consacra à la
peinture; ses œuvres sont rares. Le dessin en
est bon, la couleur franche; la nature y est re-
produite avec vérité et intelligence. A. de L.
Arnold Honbraken, De Schilderionst der Nederlan-
ders y t. 1. p. S86-3SB. — Samuel Hoogstraaten, Fie des
Peintres (en hollandais). — Descamp», La Fie des Peintres
Flamande, etc., 1 1, p. 148, ta. - PlUungton, Dictlo-
nary o/ Painters.
hoogstraaten (Samuel van) peintre et
littérateur hollandais, fils du précédent, né à
Dordrecht, en 1627, mort dans la même ville, le
19 octobre 1678. Son père l'initia aux prin-
cipes de la peinture, et le plaça ensuite dans
l'atelier de Rembrandt Samuel ne survit pas
absolument la manière forte et brune de son
maître ; et, livré à lui-même, il peignit avec un
égal talent L'histoire, le portrait, le paysage,
les animaux, les fleurs, les fruits et même les
sujets inanimés. Il eut en ce dernier genre de
grands suecès à Vienne, où l'empereur Ferdi-
nand III essaya vainement de l'attacher à sa
cour. De là il se rendit à Rome, où il se perfec-
tionna dans le haut style. Il passa ensuite en
Angleterre, et y travailla très-liicrativement
Après avoir séjourné quelque temps à La Haye,
il revint jouir de sa fortune dans sa ville natale,
où ii forma un grand nombre de bons élèves.
Houbraken, qui fut de ce nombre, juge ainsi
son maître : « Il peignit bien dans chaque genre;
il ordonnait avec jugement ; son dessin était assez
correct, et d'une grande fraîcheur; il tomba
cependant dans un défaut qu'il condamnait dans
ses leçons et ses écrits ; c'est celui de peindre
«rnment, et ses couleurs vives sentaient trop la
palette. » Ses portraits sont ressemblants et ses
tableaux d'histoire composés avec intelligence
et une belle entente de lumière; on en trouve
dans presque toutes les grandes galeries de
l'Europe.
Samuel Hoogstraaten était un des hommes
les plus' lettrés de son temps : son Traité sur
la Peinture est encore recherché ainsi que deux
autres ouvrages intitulés : Le Monde Éclairé et
le Monde Aveugle, Il a laissé en outre la re-
lation de son Voyage en Italie; plusieurs pièces
de vers, etc.
Son frère Jan 'suivit Samuel dans son
voyage, et mourut fort jeune, à Vienne : il pei-
gnait fort bien l'histoire, et avait été reçu
menribre de l'Académie de Peinture de Dor-
drecht, en 1649. A. de Lacaze.
Houbraken, De Schilderiorut der Nederiandcrt, t If,
p. tso-ttt. - Pllkltigton, Dictienary of Painters. — Des-
carops, La Fie des Peintres Hollandais, t. II, p. 1*1, us,
ISS.
hoogstraatbh ( David van), philologue
hollandais, né à Rotterdam, le 14 mars 1658,
mort à Amsterdam, le 21 novembre 1724. Fils
d'un libraire, il étudia à Leyde les langues an-
ciennes, puis la médecine ; et, après avoir été
reçu docteur, il vint exercer son art à Dordrecht.
Son goût pour la littérature lui fit accepter une
place à l'Ecole Latine d'Amsterdam , où j\ fut
plus tard co-recteur, fonctions qu'il résigna en
1722, parce qu'il était devenu sourd. Il mourut
des suites d'une chute qu'il fit dans un des canaux
d'Amsterdam. David Hoogstraaten a donné des
éditions de Phèdre, de Térence et de Cornélius
Népos. On a en outre de lui : Dissertatio de
hodierno Medicinx Statu ad Nicolaum Van
der Kappen; Dordrecht, 1683, in-8°; —
Woordenboek der Nederlandsche en latyn-
sche taal( Dictionnaire Hollandais -Latin); Am-
sterdam, 1684, in-4°; — Poemaium Libri XI ;
Rotterdam, 1710; Amsterdam, 1729. Il avait
commencé avec Schuer le Groot Allgemeen
Histor. - Qeogr. - Geneal. en oordeelkundig
Woordenboek (Grand Dictionnaire universel
Historique, Géographique, Généalogique et Criti-
que ), d'après Moréri, Bayle, Budée et autres ;
Amsterdam, 1723, 8 vol. in-fol. : la mort le
surprit avant que le second volume fut imprimé.
J. V.
Sax, Onomast., t. V, p. 6S6. - Moréri, Grand Dict.
Historique, — Convers.-Lexikon. — Biogr. Médicale.
hoogzaat (Jan) t peintre hollandais , né à
Amsterdam, le 12 mars 1664, mort en 1712. H
fut le plus habile des élèves de Gérard de Lai-
resse, qui le fit travailler à plusieurs de ses
propres ouvrages. Hoogzaat décora seul pour
Guillaume III, roi d'Angleterre, le château de
Loo, et peignit le plafond de la Salle Bourgeoise
de l'hôtel de ville d'Amsterdam. Ici on lui re-
proche d'avoir trop fini son œuvre, qui perd
beaucoup de ses détails par l'élévation de la
salle. Hoogzaat a exécuté aussi plusieurs grands
tableaux pour la municipalité d'Ast
A. de Lacaze.
Jakob Campo Weyerman et Houbraken , De Schilder-
konst der Nederlandert, 1. 111, p. ro-m. - Deacanpa
105
La FU des Peintres Hollandais, 1 U, p. 875. -PUking-
ton , Dietionary qf Pointers.
hook ( Théodore - Edward ), romancier,
journaliste et auteur dramatique anglais , né à
Londres, le 22 septembre 1788, mort le 24 août
1841. Peu de mots peuvent résumer sa vie.
Beaucoup d'esprit., et de talent , une phase
brillante de jeunesse, une faute grave dans un
emploi public, bien des années remplies de
chagrin et d'amertume, malgré leur éclat exté-*
rieur, l'habitude de la prodigalité , une mort
prématurée , et rien que la misère pour sa fa-
mille , tels en sont les principaux traits. Son
père était un compositeur, assez célèbre dans
son temps; sa mère, une personne distinguée
par la beauté, l'esprit et le mérite. A peine âgé
de quatorze ans, il perdit cette mère tendre et
prudente. Ce rot un grand malheur pour lui :
tout son avenir s'en ressentit. Son père se re-
maria bientôt; mais cette seconde femme ne
fat point pour l'enfant une seconde mère. Le
jeune Théodore était depuis quelques années au
célèbre collège d'Harrow. Le vieux Hook se
laissa facilement persuader qu'il était inutile de
l'y maintenir plus longtemps. U était fier de son
fils, qui annonçait les plus brillantes dispositions
d'intelligence; et d'ailleurs il espérait tirer parti
de ses talents précoces. Après des études assez
imparfaites, Théodore, ayant au plus seize ans,
fat admis comme associé dans ses affaires. En-
touré de musique dès son berceau, il était déjà
pianiste exercé; il avait la voix juste et belle,
et chantait à ravir la romance pathétique et la
chansonnette légère. Il était la merveille, l'idole
des amis de la maison, musiciens de tous âges
et de tous sexes acteurs et actrices. De là au
théâtre il n'y avait qu'un pas , et bientôt il en
devint un des habitués. Les idées de vaudeville
et de drame fermentaient dans sa jeune tête.
En 1805 il débuta par un opéra-comique, inti-
tulé Le Retour du Soldat ( The Soldier's Re-
turn), qui eut beaucoup de succès. L'ouverture
et la musique étaient de Hook le père, qui se fit
nommer, tandis que son fils voulut rester in-
connu; mais le secret ne fut pas gardé long-
temps. Cette Muette le mit en rapport avec Ma-
thews et Liston , deux célébrités dramatiques
du temps. L'année suivante il composa pour
eux 'une autre pièce, le Prenne qui pourra
(Catch him who can), où leurs qualités oppo-
sées, le sang-froid comique de l'un, l'extrême
vivacité et les ressources mimiques de l'autre ,
trouvèrent amplement à se déployer. Le succès
en fut encore plus brillant. D'autres pièces sui-
virent dans une rapide succession : La Fille In-
visible, — La Folle Musique, — V Enquête
par Jury y — La Forteresse , — Tekeli, etc.,
qui accrurent sa popularité , et dont quelques-
unes sont restées au théâtre. Malgré leurs dé-
fauts , elles témoignaient dans le jeune auteur
( il n'avait pas encore vingt ans), d'une vive in-
telligence de l'art dramatique, et d'un talent re-
marquable comme écrivain et compositeur.
HOOGZAAT — HOOK. 106
Ces succès le firent rechercher dans la société.
Il y apportait tout ce qui pouvait plaire et éblouir,
beaucoup de gaieté et de saillies, une causerie
brillante, un talent merveilleux d'improviser,
paroles et musique, les chansons les plus spi-
rituelles sur les visiteurs ou les incidents de la
soirée. «En Angleterre, rapporte M* Mathews,
où ce talent est fort rare, on n'avait jamais vu
improviser ainsi. C'était un jeu pour Théo-
dore Hook que de s'asseoir au piano, et sur
des airs qu'il composait à mesure , de chanter
un opéra bouffe complètement inédit Pour
ne point laisser de doute sur la réalité d'im-
provisation, il se laissait volontiers imposer
un sujet, ou, pins volontiers encore, il le
prenait dans les propos qui venaient d'être
tenus, dans les incidents qui avaient marqué
la soirée. On commença à parler de lui dans
la société aristocratique, où il n'avait pas en-
core pénétré. La marquise de Hertford rat
curieuse de l'entendre, et elle en rat charmée.
L'éloge de ses talents comme causeur et musi-
cien arriva jusqu'au prince régent (depuis
Georges IV), et il fut invité à un souper donné
dans Manchester-Square. Hook contait qu'il fut
d'abord très-ému et intimidé de se trouver avec
un aussi grand personnage. Biais la bienveil-
lance du prince le mit bientôt à son aise , et, le
Champagne aidant, il redevint lui-même, et
charma tellement la société , que le régent lui
dit à son départ : « Monsieur Hook, j'espère
bien vous revoir et vous entendre encore. » Ce
désir obligeant fut satisfait; et, de plus en plus
charmé , à quelques soupers de là; on entendit
le prince déclarer que, puisque Hook n'avait ni
fortune indépendante ni profession assurée, il fal-
lait faire quelque chose pour lui. Chacun applau-
dit à ce bienveillant intérêt dans le nouveau
monde où vivait Hook, et où il était devenu en
quelques mois le favori de tous. On ignore si
quelque influence secrète ne rat pas mise enjeu,
ou si on avait présenté sous leur vrai jour à S.
A. R. les antécédents et la jeunesse de Hook;
mais, vers la fin de 1812, on le promut à un em-
ploi plus brillant et plus lucratif qu'il n'aurait pu
raisonnablement l'espérer ; il fut nommé receveur
général et trésorier de l'Ile Maurice, avec des ap-
pointements de près de 2,000 liv. sterling par an
(50,000 fr.). » Les devoirs de ce poste n'exigeant
qu'une partie de son temps, il ne s'occupa que de
ses plaisirs. Cette existence délicieuse dura cinq
ans; mais un jour vint qui brisa ce beau songe !
Vers la fin de 1817, le gouverneur de l'Ile, sirFar-
quhar, fut forcé, par l'état de sa santé, d'aller
passer quelque temps en Angleterre, et le major
général Gage John Hall prêta serment comme vice-
gouverneur provisoire. Avant de partir, le gou-
verneur nomma une commission de oinqmembres
qui devait vérifier tous les comptes de la tréso-
rerie et constater la situation financière avant que
la responsabilité passât en d'autres mains. Cet
examen eut lieu ; le rapport des commissaires ,
107
HOOK
108
en dite dn io novembre ^ atteste qnllt avalent
trouvé les livres et la caisse en règle : et sir
R; Farqnhar mit à la voile. Dean mois après, le
16 Janvier 1818, le vice-gouverneur reçut d'un
des commis de la trésorerie, une lettre qui, mal-
gré le rapport des commissaires, avançait qu'une
erreur grave existait dans les comptes au pré-
judice du gouvernement. Il s'agissait d'une
somme de 37,000 dollars, payée à la trésorerie
quinze mois auparavant * et qui n'avait Jamais
figuré au crédit de l'administration. Le général
Hall nomma sur-le-champ, après avoir instruit
Hook de ce qui se passait* une nouvelle commis-
sion chargée d'etaminer à nouveau les comptes
do trésorier et l'état de la caisse. L'enquête dura
un mois , et le résultat fut la découverte de
plusieurs Irrégularités > d'omissions nombreuses
et de différences inexplicables dans les livres de
la trésorerie. Le 9 mars, à once heures du soir»
Théodore Hook» qui soupait chez un de «es
amis , Ait arrêté par ordre du gouverneur, et
tramé» à la lueur des torches , sous les yeux de
la foule qu'avait attirée ce spectacle, jusqu'à la
prison commune; Peu de jours après, il fut livré
aux mains d'un détachement de soldats qu'on
embarquait pour l'Angleterre * et envoyé oomme
prévenu devant la justice criminelle de son pays.
Avant son départ) tout ce qu'il possédait (même
ses meubles les plus insignifiants ) fut saisi et
vendu an compte de l'administration. Sa tra-
versée fut longue et même dangereuse; il n'ar-
riva à Portsmouth qu'en janvier 1819. Le décret
d'arrestation et les autres documente officiels
fUrent envoyés à Londres , et passèrent sous les
yeux des magistrats. D'après leur examen,
Pattomey général déclara que, sans juger les
fautes officielles de Hook, et l'équité qu'il y au-
rait à le poursuivre an civil, il n'y avait pas lien
de considérer l'affaire comme criminelle. L'ac-
cusé fut en conséquence relâché , et rentra dans
Londres* n'ayant au monde que deux pièces
d'or. Mais il n'en restait pas moins sous le coup
de la suspicion légale, et dès ce moment il eut
à subir les interrogatoires de la commission ap-
pelée audit footo% et cinq longues années s'é-
coulèrent avant qu'on eût statué sur cette af-
faire > qui intéressait son existence autant que
son honneur. Pendant ces interminables délais,
un autre que lui serait mort de faim et de dou-
leur ; mais, grâce à son caractère léger, il résista
et s'appliqua à se créer des ressources par sa
plume. Il essaya d'établir un Magazine; il ne
réussit point. Il fit jouer une petite pièce composée
à l'Ile Maurice ; elle ne produisit aucune sensation.
Un incident le poussa dans le journalisme poli-
tique. En avril 1820, il fit à Londres chez un ami
la connaissance de Walter Scott, et à la fois le
ebârma par son esprit et lui inspira un vif intérêt
pour sa fâcheuse position. H arriva que deux pu
trois Jours après Walter Scott rat consulté par un
noble de ses amis, qui lui demanda si l'on ne
pourrait pas trouver à Edimbourg quelque
homme do talent pour diriger en province un
journal anti-démocratiqoe. W. Scott recom-
manda Hook. Quelque temps après, à l'étonne-
ment général , commença le John Bull. Dans
le cours de 1820, les incidents du procès de la
reine Caroline avaient excité l'opinion et irrité
les esprits à on point extraordinaire. Georges IV
était en butte à une impopularité extrême. John
Bull prit audacieusement en main sa défense,
ainsi que celle des principes de la haute aristo-
cratie. Chaque semaine, C'était un feu roulant
d'articles étincelants d'esprit, d'allusions mor-
dantes, de persiflage hardi , d'invectives pleines
de verve. îl semblait, dit une revue, qu'une lé-
gion de démons à sarcasmes avait été recrutée
pour la rédaction. Il parait positif pourtant que
Hook seul, mais dans le plus grand secret,
fournissait tout. Aucune des personnes soup-
çonnées de collaboration n'y écrivit en réalité
une ligne. Le journal était soigné dans toutes
ses parties. Aussi obtint-il tout d'abord et cou*
serva-t-ll durant plusieurs années une circula-
tion très-étendue. Après la mort de Hook, on
sut par ses manuscrits que ses bénéfices per-
sonnels, provenant du John Bull, montèrent
pendant quelque temps à plus de 2,000 liv. par
an (50,000 fr. ); plus tard, les circonstances
étent changées, il n f eh retirait plus en quelque
sorte qu'une bagatelle. Georges IV dut beaucoup
au John Bull. Mettacée par un aussi virulent et
redoutable antagoniste, l'aristocratie vrhig n'osa
plus soutenir la reine Caroline. Les grandes
dames du parti s'en éloignèrent peu à peu , et
leur retraite fil penser aux gens réfléchis de la
classe moyenne que s! la conduite du monar-
que envers sa femme était, dans le principe,
impossible à justifier, celle-ci n'était pas restée
à rabri du reproche, tl y eut dans l'opinion pu-
blique , et cela grâce à John Bull, un revire-
ment, un refroidissement presque complet. —
Les poursuites de Y audit board avaient traîné '
en longueur. En 1823, elles arrivèrent enfin à
terme. Il fut établi que les livres avaient été
tenus avec beaucoup d'irrégularité et de négli-
gence ; que si Hook n'avait pas détourné lui-
même, il avait laissé voler, et en conclusion,
le rapport le déclara définitivement débiteur de
la couronne pour une somme de 12,000 liv. st.
(300,000 fr.). En même temps , il fut arrêté de
nouveau et conduit dans une de ces prisons
pour dettes nommées spunging-houses. Bien
qu'il y pût recevoir encore quelques amis, ce
fut une triste et pénible captivité. Sa santé s'y
altéra. Au bout d'un an, il fut transféré dans
une autre prison ( lé Domaine du Banc du
roi). Là, grâce à certaines tolérances passées
en usage, il pouvait de temps en temps sortir
de sa prison et diner ches un ami, ou passer
une journée dans les champs ; mais il ne profi-
tait guère de cette demi-liberté. Tout son temps
était consacré au travail. John Bull, peu à peu
revenu de ces habitudes agressives qui l'avaient
14)9
HOOK
110
rendu célèbre, mais conservant la supériorité
réelle de l'esprit et du zèle, avait pris un rang
élevé dans la presse du parti conservateur*
Nonobstant les soins qu'il exigeait , Hook, dé-
barrassé de Vaudit bourd et de sa correspon-
dance litigieuse f débutai dès 1824» dans la car-
rière des romans, et prit aussitôt le premier
rang parmi les coryphées du genre} Walter
Scott excepté. Il obtint des succès lucratifs :
ses trois premiers volumes (Sayinge and
Doings, l re série) lui rapportèrent plus de
2,000 liv. »t»; la seconde série parut au prin-
temps de 1826» et justement à cette époque la
liberté lai fut rendue , mais avec cette déclara-
tion formelle que la couronne réservait tous ses
droits sur la dette de l'Ile Maurice. Il alla aus-
sitôt s'établir à Putney, dans un cottage, au
bord de la Tamise : c'était une résidence qu'il
avait toujours aimée; et on peut dire que. dès
lors il reprit son rang dans le monde , bien que
pendant deux ou trois ans il ne vit que peu de
personnel» Il poursuivit alors avec autant d'ac-
tivité que d'ardeur ses travaux littéraires, et
de nombreux ouvrages remplissent cette der-
nière période de 1826 à 1841. Sans parler des
Réminiscences de Michael Kelly, son ancien
ami, dont il rédigea d'une manière très-piquante
les notes à peine lisibles, il publia successive-
ment la troisième série des Sayings and Doings,
( 1828); Maxwell (1830); la Vie de Sir David
Baird (1832); la Fille du Curé, et Amour et
Orgueil (1833). Chacun de ces ouvrages était
en trois volumes. En 1836, il devint rédacteur
en chef du New Monthly Magazine , et ce fut
là que parurent par chapitres Ùilbert Gurney
et Gurney marié, publiés depuis en 6 volumes;
puis Jack Êrag ( 1837) ; — Naissances, Morts,
Mariages (1839) ; — Les Préceptes et la Pra-
tique ; — Les Pères et les Fils (1840); enfin, peu
après sa mort, Peregrine Bunce, dont une bonne
partie ne semble pas sortie de sa plume, car on
y cherche en vain ces rapides esquisses de ca-
ractères et cette vive intelligence de la vie qui
distinguent ses autres productions. Qu'on ajoute
a ces trente-huit volumes publiés en seize ans les
travaux et la direction d'un journal hebdomadaire
et celle d'une revue mensuelle, et on verra
qu'il n'encourut jamais le reproche qui s'attache
à une existence oisive. Mais, sous un autre rap-
port, il eut des torts plus graves. Avant d'être
arrêté en 1823, il avait formé une liaison avec
une jeune femme, jusqu'alors irréprochable , et
dont le dévouement ne lui manqua jamais dans
les crises qui suivirent, mais qui appartenait à
une classe tout à fait inférieure. Cette première
faute eut de tristes conséquences ; elle mit Hook,
honnête homme au fond, et dominé par sa
conscience, dans l'impossibilité de contracter
un mariage convenable. D'un autre côté , bien
qu'il eût souvent pensé à réparer ses torts et à
légitimer l'existence de ses enfants par un ma-
riage légitime , il n'eut jamais le courage de
pousser aussi loin le sacrifice. De là, mille
soucis et bien des malheurs. En outre, il parut
oublier entièrement la dette qui pesait sur
lui. Il avait toujours reconnu qu'il était dûment
responsable d'une somme de 9,000 livres sterl.
(225,000 fr. ), bien que les commissaires chargés
de l'examen eussent déclaré le déficit être
de 12,000 liv.; mais pa3 un sou ne fut payé.
Et, lorsqu'avec son talent et sa facilité de
travail , il gagna pendant des années bien au delà
d'un honnête entretien pour lui et les siens,
avait-il le droit de disposer d'une seule guinée
en dehors de ses dépenses légitimes? Six ans
d'économie, durant la prospérité de John
Bull, l'auraient mis en état de régler à peu près
ses comptes avec la trésorerie. Il parut n'en
avoir jamais le moindre souci , et cette tache
qu'il laissa volontairement sur sa vie lui ôta mille
favorables chances , en écartant de lui le patro-
nage de l'administration. Après avoir séjourné
deux ans à Putney ,où son établissement avait beau*
coup de comfort plutôt que du luxe, il quitta tout
à coup cette résidence, en 1827, pour prendre une
vaste et belle maison sur la lisière du quartier
le plus fashionable de Londres. Là, ses dé-
penses augmentèrent considérablement. Il eut
voiture, hospitalité fastueuse, et les relations
d'un homme riche. 11 se fit recevoir à plusieurs
clubs , et y passait souvent la soirée à des dî-
ners recherchés ou au jeu. Il fut invité de toutes
parts dans les familles de l'aristocratie, et peu à
peu il s'engagea dans une vie de grand luxe et
un courant d'habitudes et de rapports où s'ab-
sorbait le temps précieux qu'il aurait dû passer
à son bureau , et dans des dépenses de nature à
absorber et au-delà les profits de sa plume.
De nouvelles dettes s'accumulèrent rapidement
dans de telles proportions, qu'il fut obligé, vers
1831, de quitter son brillant hôtel de Saint- James
pour une maison plus modeste, près de la Tamise.
C'est là qu'il résida jusqu'à la fin de sa vie, n'ad-
mettant guère dans son intérieur qu'un petit
nombre d'amis ou de collaborateurs; mais il n'en
continua pas moins ses relations avec le grand
monde. Les lettres et les cartes arrivaient en
foule à l'un ou l'autre des clubs dont il était
membre. D était le lion des assemblées fashio-
nables, Y étoile de ces réunions qui ont lieu à
Noël ou à Pâques dans les châteaux aristocra-
tiques d'Angleterre. 11 vivait dans un tourbillon
de fêtes, de dîners et de soirées splendides. En
apparence, c'était une vie de plaisirs et bien des
jouissances d'orgueil ; mais, au fond, c'était une
vie fiévreuse et constamment troublée. Son
Journal manuscrit porte bien souvent la trace
des pensées amères, des chagrins, des anxiétés
qui le dévoraient secrètement, tandis qu'au mi-
; Heu de ces fêtes riantes où , assis à table à côté
d'un duc et pair, les traits épanouis par le sou-
! rire , il se livrait à une gaieté extérieure et à une
conversation étincelante. Malgré lui , il songeait
aux trois ou quatre créanciers courroucés chez
m HOOK
lesquels il fondrait aller, le lendemain matin, sol-
liciter quelque répit nécessaire. On retrouve des
allusions constantes à cet étrange contraste dans
les romans qu'il écrirait alors.* En voici un
passage : « Les cruelles agitations qu'entraîne
après elle la gêne d'argent compensent, et bien
an delà, les joies troublées d'un luxe coupable.
Pensez-vous qu'un alderman savourât de bon
cœur sa soupe à la tortue, s'il lui fallait la
manger assis sur la corde roide? Répondez à
cette question, et je voua dirai ensuite ce
qu'est la splendide misère d'un homme qui dé-
pense le double de son revenu, devant à son
orfèvre, à son tailleur, à son carrossier, non-
seulement son argenterie, ses habits et ses
voitures, mais encore le privilège de s'en ser-
vir à sa guise. » Ailleurs, et sans doute après
une journée où les usuriers delà Cité, les mena-
çants attorneys, les besoins impérieux de quel-
ques dettes de jeu avaient épuisé sa patience, il
mettait dans le cœur d'un de ses héros « cette
sensation morbide, cette angoisse morale qu'é-
prouve tôt ou tard un dissipateur insensé ». II le
peignait abattu, découragé par les conversations
de son avocat et de son banquier, tout prêt à
se ranger, à mettre de l'ordre dans ses dépenses :
« Mais tout à coup la pensée que *** se réjoui-
rait de le voir malheureux, et que*** triomphe-
rait à son club, traversait comme un éclair sa
pensée ; aussitôt il prenait la résolution de com-
battre encore, et rêvait vaguement un avenir
meilleur. »
Peut-être comptait-il, pour sortir de tous ses
embarras, sur le patronage des puissants amis
qu'il avait dans le parti conservateur; mais le
résultat le plus clair de tous les sacrifices qu'il
était obligé de faire pour vivre dans leur intimité
fut une vague réhabilitation des soupçons d'im-
probité que l'affaire de Ffle Maurice avait lait
peser sur lui. L'opinion l'acquittait sur ce point :
par malheur l'accusation de négligence subsistait
encore et suffisait pour lui fermer la carrière des
emplois publics. Il continua donc à travailler et
à espérer, mais sans réformer ses habitudes de
dissipation. Sa santé, ses facultés s'épuisèrent
peu à peu sons le poids des anxiétés et du tra-
vail. Un passage de son journal , en date du
14 juillet 1841, donnera l'idée du triste état où il
était arrivé. H devait dîner chez un de ses amis
intimes; mais il n'arriva qu'au dessert, et ne
mangea que quelques fruits arrosés d'un mé-
lange d'eau-de-vie et de Champagne, auquel il
ajoutait quelques pincées d'une poudre chimique.
On voyait qu'il eût voulu paraître gai comme à
l'ordinaire, mais sa volonté n'y suffisait plus. On
avait passé au salon; et comme il se tenait de-
bout, une tasse de café à la main, il se tourna
tout à coup vers une glace, et dit : « Oui , j'ai
vraiment l'air de ce que je suis, un homme
épuisé de bourse, d'esprit et de corps! » Il
avait , au vrai, la figure d'un fantôme. Aucune
des personnes présentes à cette scène ne le Fevit
m
ensuite. Il mourut le mois suivant (24 août) sans
souffrance apparente, entouré de quelques amis,
dont aucun ne s'aperçut qu'il expirait. Il n'avait
pas encore cinquante-trois ans accomplis. Cet
homme d'esprit et de talent, si fêté pendant sa
vie, eut des funérailles tristes et solitaires. Aucun
des représentants de l'aristocratie, qu'il avait
défendue avec tant de zèle et de dévouement, ne
vint apporter sur sa tombe un dernier témoi-
gnage de sympathie. Ses exécuteurs testamen-
taires n'eurent à constater qu'une insolvabilité
sans remède. Ses livres et ses meubles produi-
sirent 2,500 liv. sterl., dont la couronne , créan-
cier privilégié, s'empara tout aussitôt. On espé-
rait que les lords de la trésorerie renonceraient
à tout ou partie de cette rentrée, en faveur des
cinq enfants que sa mort laissait absolument
sans ressources. Cet espoir ne fut pas réalisé',
et il fallut recourir à une souscription publique
pour soutenir cette famille désolée. On vit alors
jusqu'où va la reconnaissance des partis. Les
hommes politiques qui avaient profité de la
plume et des talents de Hook, ou qui l'avaient
tant recherché et fêté pour les charmes de son
esprit, se tinrent à l'écart. Quelques vieux amis,
quelques généreux parents apportèrent seuls un
tribut libéral. Il y eut cependant une exception;
le roi de Hanovre parut se souvenir des services
rendus à sa famille, et envoya 500 livres. Mal-
gré tous les efforts , la souscription n'atteignit
qu'un chiffre peu élevé et insuffisant pour les
infortunes à soulager. — Peut-être, on trouvera
que nous avons exposé un peu au long la vie de
Théodore Hook, qui ne renferme pas de grands
événements. Mais cette vie nous a paru un en-
seignement;' elle met en relief deux principes de
conduite et de morale qu'on est très-porté à
oublier : l'un, que la vie a, dans toutes les con-
ditions , des devoirs sérieux qu'il est fatal de né-
gliger ; l'autre , qu'une première faute est comme
un boulet que l'on traîne jusqu'à là tombe, si
tous les efforts , toute l'énergie possible ne sont
pas consacrés à s'en affranchir, quand la faute
est réparable, et qu'en matière d'argent , Tordre,
l'économie, les privations sont le moyen le plus
assuré de réparation et d'indépendance. C'est là
notre excuse pour le développement que nous
avons donné. Le nom de Théodore Hook res-
tera. Ses chansons et ses facéties politiques ont
sans doute beaucoup perdu de leur piquant et de
leur importance, mais elles sont de nature à
éclairer les pages sérieuses de l'histoire. Parmi
ses romans, ceux qu'il n'a pas tout à fait gâtés
par les exagérations extravagantes dont il avait
pris l'habitude au théâtre demeureront, avec les
ouvrages de miss Edgeworth et de miss Austin,
l'expression la plus vraie de la société anglaise
contemporaine. Hook n'est pas comparable à ces
deux écrivains pour l'art de composer une fable
et de soigner un à un les détails d'un livre. Il
travaillait trop vite pour arriver an même fini ;
en revanche, la verve pittoresque, le bonheur
113
HOOK
114
de certaines : esquisses , la perspicacité sati-
rique, la connaissance approfondie de Londres
et de ses moindres types, mâles ou femelles,
donnent à ses fictions quelque chose de plus
original , un caractère plus tranché. Parmi tes
romanciers de nos jours, en un mot, nous ne
voyons que deux peintres exarts de la vie réelle :
Théodore Hook pour la classe élevée et la classe
moyenne; Charles Dickens pour les classes po-
pulaires. Humoriste à la façon de Smollett et de
Foote , Hook les dépasse par le coloris magique
de sa phrase. Comme eux, il laisse percer dans
ses plus folles esquisses un fond de véritable
philosophie; comme eux enfin, et comme tous
les vrais humoristes , à la seule exception de
Swift, il ne dut rien à l'art, rien à l'érudition, et
trouva toutes ses ressources dans les instincts
mêmes de sa nature. J. Chahut.
Chain bery. CpclopedUa of English Literature.—London
Quaterlv Geview, 184».
hookb (Robert), mathématicien, astro-
nome et mécanicien anglais, né le 16 juil-
let 1638, à Freshwater, dans l'île de Wight,
mort le 3 mars 1703. Fils de ministre, il reçut
un commencement d'éducation sous le toit pa-
ternel; devenu orphelin, en 1648, faible de cons-
titution, contrefait (.bossu), d'une santé débile,
sans fortune, il passa les premières années
de sa jeunesse dans la gène et les souffrances,
et à l'âge de quinze ans (1653) il s'estima heu-
reux, pour compléter ses études, d'entrer au
collège de Christ-Carch , à Oxford, en qualité
d'écolier servant, de goodman. Dans cette re-
traite savante, son génie trouva toutes les faci-
lités, tous les moyens de développement qu'il
pouvait souhaiter; aussi fit-il des progrès ra-
pides dans les mathématiques et les diverses
branches des connaissances humaines qui en
dépendent. Toutefois, il résulte des inventions et
découvertes qu'on lui attribue ou dont il se di-
sait l'auteur, qu'il était plus encyclopédique que
profond : sachant un peu de tout, en géométrie,
astronomie, physique, mécanique; il était en
outre maître es arts; docteur médecin, et ar-
chitecte.
Une fois maître de ses actions, il se livra, s'il
faut l'en croire, à la recherche d'inventions plus
folles, plus extravagantes les unes que les autres,
telles que l'art de voler et de se soutenir dans
l'air à l'imitation de la colombe d'Architas! La
fabrication de muscles artificiels pour suppléera
l'incapacité de ceux que la nature nous a donnés
pour faire mouvoir des ailes d'une étendue suf-
fisante et rivaliser ainsi avec les oiseaux ; ces
muscles, pour le dire en passant, auraient exigé
une force d'au moins 12,000 chevaux de vapeur,
L'âge et l'expérience l'ayant rendu plus raison-
nable, il s'occupa d'études et de découvertes
utiles, sérieuses et approuvées par le bon sens.
S'étant assuré que la marche des horloges réglées
par un balancier éprouvait sans cesse des va-
riations, et se rappelant que Galilée et d'autres
physiciens avaient proposé \e pendule comme
mesure exacte du temps, il eut l'idée de rem-
placer le balancier par cette machine. C'est
ce qui résulte des écrits qu'il publia contre Huy-
gens quand celui-ci fit paraître son horloge à
pendule (1857).
L'application d'un ressort au balancier des
montres, pour en régler le mouvement, dont on
attribue communément l'invention à Hoygens,
avait été déjà, à ce qu'il paraît, l'objet des médita-
tions de plusieurs mécaniciens en horlogerie : on
trouve en effet dans Y Histoire de la Sociétéroyale
de Londres (1868), parmi les titres d'écrits pré-
sentés à cette société, des mémoires où il est
question de cette application. Hooke dit qu'il en
eut l'idée dès l'année 1880, et qu'il la commu-
niqua à MM. Brouncker et Morai , comme l'é-
chantillon de certaines inventions an moyen
desquelles il espérait résoudre le fameux pro-
blème du calcul des longitudes par des horloges.
Ce ne fat qu'en 1675 que Huygens fit faire des
montres dont le balancier était réglé par un res- .
sort contourné en spirale (coquille d'escargot);
le docteur Hooke en fut profondément affecté :
il intenta à Oldenbourg, secrétaire de la So-
ciété royale de Londres, un procès en forme,
l'accusant d'avoir communiqué à des savants
étrangers des découvertes dont les registres de la
Société royale étaient dépositaires. Il fut très-
facile à Oldenbourg de se justifier : car Y Histoire
de la Société royale, qui vient d'être eitée, avait
paru en français dès 1669.
Vers la même époque, l'abbé Hautefeuille pré-
tendit aussi avoir eu, le premier, l'idée d'un res-
sort régulateur appliqué aux balanciers des
montres; il intenta même, à ce sujet, un pro-
cès sérieux à Huygens. En examinant de bonne
foi les témoignages des écrivains contemporains
qui, dans leurs ouvrages , s'occupent de cette
grave question, on reste convaincu que Hooke
Ait le premier qui fit l'application d'un ressort
modérateur aux balanciers des montres, mais
que ce ressort était droit; par un de ses bouts,
il était fixé sur la platine de la montre ; l'autre
extrémité, en quelque sorte libre, était obligée
de se conformer aux oscilliations du balancier.
Le régulateur de l'abbé de Hautefeuille était
aussi un ressort droit : le P. Alexandre le dit
formellement dans son Traité des Horloges.
L'inventeur en fit part à l'Académie des Sciences
en 1674, seulement de vive voix. A cette époque,
Huygens était à Paris, et l'on serait porté à
croire, d'après un rapport de LaHire fait à l'A-
cadémie, que ce fut le succès de l'abbé mécani-
cien qui lui fit prendre la résolution de chercher
pour les montres un régulateur comparable à
celui dont il avait si heureusement doté les hor-
loges à poids. « Aussitôt, ajoute de LaHire, il fit, à
ce qu'il disait, des expériences avec des pincettes
à ressort dont on se sert pour le feu ; et ayant
remarqué que les vibrations ou mouvement des *
branches étaient assez égales, il fit construire une
116
HOOK
116
montre avec un ressort en spiraie. » Pour cou-
per court à tonte discussion, ne serait-il pas
permis d'avancer que les trois prétendants à l'in-
vention eurent, à peu près dons le même temps,
]a même idée , chacun de son coté , mais que le
système de Huygens a prévalu , comme le plus
avantageux ? — Hooke publia en 1 675 un éohappe-
ment nouveau à deux balanciers. La propriété
remarquable de cet échappement était que des
secousses subites ne dérangeaient point les vi-
brations du régulateur ainsi composé; c'était bien
là un perfectionnement ; mais des inconvénients
qui lui étaient inhérents le firent abandonner.
Quelque temps après que les horloges à pendule
furent connues, on inventa un nouvel échappe-
ment» dans le but de supprimer la cycloïde,
dont l'application était accompagnée de beaucoup
de difficultés et d'inconvénients inévitables
{voy. Hutoens). Le nouvel échappement s'ap-
pela à rocket ou à ancre. Hooke passe com-
munément pour en avoir été l'inventeur : on l'ap-
pliqua pour la première fois, à Londres, vers
1680, sans que l'on sût positivement à qui en ap-
partenait l'invention} mais Smith, horloger de
Londres, dans un écrit qu'il publia, en fit hon-
neur à Clément, aussi horloger de Londres. De
son coté, Hooke assurait qu'il en avait eu l'idée
plusieurs années auparavant, et que peu après
l'incendie de Londres (1666) il avait présenté à
la Société royale une pendule réglée par cet
échappement. L'échappement à ancre est au-
jourd'hui appliqué aux horloges en bois dites
coucous ; il règle aussi les pendules de luxe qu'on
place sur les cheminées. Hooke, tout semble
le prouver, inventa aussi le pendule circulaire :
on en trouve la description et celle de tout ce qui
l'accompagne dans les Lectiones Cutlerianx; et
malgré cela Huygens s'attribua encore cette in-
vention. Est-ce à tort ou à raison? On ne le sait;
mais ce qui est bien certain, c'est que la théorie des
oscillations isochrones dé ce régulateur ne peut
appartenir qu'à Huygens. Hooke, suivant Mon-
tucla , n'était pas assez profond géomètre pour
calculer les propriétés de la cycloïde.
On doit aussi à Hooke le baromètre à cadran.
H s'occupa aussi des rapports des vibrations des
cordes tendues avec les tons qu'elles rendent sui-
vant leurs longueurs. Àuzoutet Picard ayant fait
•paraître un micromètre de leur invention, Hooke
ne manqua pas de s'associer à cet honneur, assu-
rant dans ses lettres que, dès l'année 1665, il avait
fait part à Hovel (Hévelius) d'un projet qu'il avait
formé d'appliquer un télescope aux grands instru-
ments d'astronomie : ses raisons manquant de
preuves suffisantes, il ne fut pas écouté. 11 est pré-
sumable qu'il eut le premier l'idée de V octant
pour prendre les hauteurs en mer malgré les
mouvements du vaisseau, dont il publia la des-
cription en 1674 , dans ses remarques sur la
Machine céleste cPHovel. Il inventa encore,
ce qui n'était pas bien difficile, un instrument
pour tracer mécaniquement toutes sortes de ca-
drans solaires. Hooké, devenu justement célèbre
par ses découvertes, jouissait de l'estime parti-
culière des fondateurs de la Société royale de
Londres, dans laquelle il fut admis en 1M1.
Le chevalier Cutler se proposant de fonder
une chaire publique dans laquelle on enseigne-
rait les théories et les pratiques de la mécani-
que, engagea le docteur Hooke à la remplir
moyennant certains honoraires; de là est venu
le nom de Lectiones Cutlerianee que porte le
recueil des leçons excellentes qu'il donna dans
cette chaire.
Hooke professa aussi l'astronomie au collège de
Gresham ( Londres ). Si, comme il a été dit ci-
devant , la plupart des découvertes de ce savant
manquent d'intérêt et de gravité, il en est quel-
ques-unes qui décèlent en lui une puissance de
génie du premier ordre ; et, par exemple, on ne
voit nulle part le principe de la gravitation uni-
verselle aussi clairement énoncé et mieux déve-
loppé, avant Newton, que dans le livre ou il
traite des Preuves du Mouvement de la Terre.
« J'expliquerai , dit-il , un système du monde
différent à bien des égards de tous les autres et
qui est fondé sur les trois suppositions suivantes :
1° Que tous les corps célestes ont non-seule-
ment une attraction ou une gravitation sur leur
propre centre, mais qu'ils s'attirent mutuellement
les uns les autres, dans leurs sphères d'activité;
2° Que tous les corps qui ont un mouvement
simple et direct continueraient à se mouvoir en
ligne droite, si quelque force ne les en détournait
sans cesse et ne les contraignait à décrire un cercle,
une ellipse ou quelque autre courbe plus compo-
sée; 3° Que l'attraction est d'autant plus puissante
que le corps attirant est plus voisin. » Il ajoutait
qu'à l'égard de la loi suivant laquelle décroît cette
force, il ne l'avait pas encore examinée; mais
que c'était une idée qui méritait d'être suivie,
conjecture prophétique, et qui se vérifia d'une
manière si brillante dans les travaux de Newton.
Hooke fit plusieurs expériences pour donner
quelque certitude aux conjectures qui viennent
d'être exposées : il suspendit une boule à un til
trè8-long,et, après lui avoir imprimé un mouve-
ment de va-et-vient, il lui en fit prendre un autre
dont la direction formait un angle avec le pré-
cédent : ainsi donc la boule obéissait à deux im-
pulsions ; et il remarqua qu'elle décrivait une el-
lipse. Hooke imagina aussi unsystèmede signaux;
un appareil pour lever l'eau par le moyen du feu ;
un instrument qui, lancé dans la mer, remontait
spontanément à la surface , apportant un échan-
tillon de la vase qu'il avait touchée. Il entreprit,
en 1660, la solution de la parallaxe des étoiles,
et la détermina d'une manière plus sûre que
celle que Galilée avait proposée : il fixa, pour cet
effet, dans une situation perpendiculaire un té-
lescope de douze mètres ; et il observa pendant
plusieurs années la Zfn/fcmtedelatêtedu Dragon
passant par le méridien fort près de son zénith :
il trouva constamment que dans le solstice d'hiver
117
HOOK — HOOKE
118
elle en était plus proche de 27 à 30 secondes que
dans Tété» Il publia ces observations en 1 674, et les
donna comme une démonstration sans réplique du
mouvement de la Terre f ce qui serait vrai ai la
parallaxe était sensible.. Il y a» au reste, d'autres
raisons qui ne permettent pas de considérer ces
observations comme concluantes.
Lorsqu'il fut question de rétablir la ville de
Londres, détruite en très-grande partie parle
feu (1666), Hooke ne manqua pas de saisir cette
occasion pour ajouter un nouveau titre à la con-
sidération dont il jouissait déjà. Le plan de re-
construction et d'amélioration qu'il proposa fut
trouvé supérieur à celui que les architectes of-
ficiels de la ville avaient dressé; il eut donc la
satisfaction d'être nommé, par acte du parlement,
un des intendants chargés d'assigner aux incen-
diés les emplacements auxquels Us pouvaient
avoir des droits , de régler et juger les contesta-
tions oui s'élevaient entre eux.
£nfin| Hoôk a attaché son nom au perfectionne-
ment du microscope.
Ce savant universel était d'un caractère iras-
cible, orgueilleux, -envieux, ne doutant de rien,
toujours prêt a soutenir que les inventions de
ses contemporains étaient des plagiats des
siennes.
Ûooke succéda à Oldenbourg comme secrétaire
de la Société royale. Les livres ou mémoires
qu'il a laissés sont très -nombreux : voici
les titres des principaux t Micrographia, or
philosophical descriptions oj minute bodies,
made by magnifying glosses, with observa-
tions and inauiries; Londres» 1666, in-fol»;
avec 38 planches, reproduites par Baker, en
1745; — LectioneS Cutlerianœ / 1678-1679,
in-4°. Ses Œuvres posthumes ont été publiées en
1701, in-fol., sous la direction de Richard Walker,
secrétaire de la Société royale de Londres.
Tetssèdrb.
Le P. Aleiandre , Traité des Horloges. — Montucla,
Histoire des Mathématiques. — Smith, Entretien sur
r Horlogerie. — Ferdinand Berthoad, Histoire de la
Mesure du Temps." Walker, yu et Œuvres potthtttnes
du docteur Hooke.
HOOKE (Nathaiiiei). historien anglais, né
vers 1690, mort le 19 juillet 1763. On a très-
peu de détails sur sa vie. On voit pat une lettre
de lui, adressée à lord Oxford et datée du 17 oc-
tobre 1722, que, « saisi de la maladie épidémi-
que de devenir riche ^ , il se lança dans les spé-
culations de la Compagnie de ta Mer du Sud et
s'y ruina complètement. Il fut ensuite recottV
mandé à Sarah, duchesse de Marlboroùgh, qui lui
fît une donation de 5,000 liv. st., à condition
qu'il l'aiderait à rédiger ses Mémoires. Cet ou-
vrage parut sous le titre de AU Àtcount ofthe
Conduct of the dowager duchess of Marlbo-
roùgh; Londres, 1742, in-8*. La duchesse ne
tarda pas à se brouiller avec lui , « parce que,
disait-elle , Hooke, ne lui trouvant aucune reli-
gion, avait voulu la convertir au papisme. » Hooke
était, en effet, catholique, et grand partisan du
quiétisme de Fénelon. Il amena un prêtre pour
entendre la confession de Pope mourant , et ex-
cita par son zèle la colère de Bolingbroke. On a
de Hooke : The Roman Historyjrom the buil-
ding of Rome to the ruin of the common-
wealth; Londres, 1733-1771,4 vol. in-4°. Cette
histoire, qui a bien peu de valeur aujourd'hui, a
été plusieurs fois réimprimée. L'auteur s'y dé-
clare pour le parti démocratique avec autant de
partialité que Middleton en avait mis à soutenir
le parti aristocratique dans sa Vie de Cicéron ;
— Observations on Jour pièces upon the roman
Sénate; 1758, in-8°*. Hooke répond principa-
lement aux traités de Middleton et de Chapman
«tir le même sujet. Les Discourt et Réflexions
critiques qu'il à Insérés dans son histoire ont
été traduits en français par son fils Joseph Hooke.
<— Hooke a traduit du français, de Ramsay, la
fiedePénelon, 1723,in-l2, et les Voyages de
Cyrus, 1739, în-4». t,
Chalmers, General ÈidgrapMcàt Dtctionarg.
ttodftfe ( Luce- Joseph ), théologien français,
d'origine anglaise, fils du précédent, né vers 1716,
mort à Saint-Cloud, en 1796. tl fit ses études au
séminaire dé Saint-Nicolasdu-Chardonnet, fut
reçu docteur de Sorbonne, et nommé professeur de
théologie en 1750. L'année suivante il présida
à la thèse de l'abbé de Prades ( voy. ce nom ).
Là discussion publique de cette thèse prouva
qu'elle contenait une foule de propositions hété-
rodoxes ; Hooke,- qui avait eu le tort de la signer
sans l'examiner, essaya vainement de conjurer
l'orage en dénonçant lui-même les principes ir-
réligieux de l'abbé de Prades. Le cardinal de
Tencin obtint contre lui, le 9 mai 1752, une
lettre de cachet qui déclarait vacante la chaire
de théologie qui lui était confiée, et enjoignait à
la Sorbonne de le remplacer immédiatement. Le
prieur et les professeurs de Sorbonne ainsi que
les professeurs du collège de Navarre intervin-
rent en faveur de Hooke , et obtinrent la révoca-
tion de la lettre de cachet: Le parlement rendit
même, en 1762, un arrêt pour maintenir Hooke
en possession de sa chaire ; mais l'archevêque
défendit aux jeunes séminaristes de suivre les
cours de ce docteur. Hooke répondit à cette me-
sure par une Lettre adressée à l'archevêque,
1763, in-12, dans laquelle il se plaignit avec di-
gnité d'une persécution que rien ne justifiait
Cette lettre est accompagnée de pièces justifica-
tives qui avaient déjà para en 1754, in-4°. Au
commencement delà révolution, Hooke était con-
servateur de la bibliothèque Mazarine. Il fut
destitué en 1791, pour cause de refus de ser-
ment, et remplacé par l'abbé Le blond. Il se re-
tira à Saint-Cloud, où il mourut. On a de lui :
Religionis naturalis révélât» et catholicx
Prineipia, in usum Academim juventutis;
Paris, 1754, 2 vol. in-8°; seconde édition cor-
rigée et augmentée par dom Brewer; Paris,
1774, 3 vol. in-8°; —Discours et Réflexions
119
HOOKE — HOOKER
120
critiques sur V Histoire et le gouvernement de
V Ancienne Rome; Paris , 1770-84, 4 vol. in-12 :
traduction d'un ouvrage anglais de son père; —
Principe sur la Nature et V Essence du Pou-
voir de l'Église; Paris, 1791, in-8°. L'abbé
Hook est l'éditeur des Mémoires du maréchal
de Berwich ; Paris , 1778, 2 Toi. in-12. Z.
Barbier, Examen critique des Dictionnaires histori-
ques, i
hookbR' ou to well ( John ) , historien
anglais, né à Exeter, vers 1524, mort dans la
même Tille, en 1601. 11 fit ses études à Oxford,
et voyages ensuite en Allemagne. Il résida à Co-
logne et à Strasbourg. De retour en Angleterre, il
rat chargé d'une mission en Irlande. Il représenta
ensuite la ville d'Exeter an parlement de 1571..0n
a de lui : The Orderand Usage o/Keeping ofthe
Parliaments in JBngland; Londres, 1572, in-4°;
— The JSvents of Cornets, or blasing stars,
mode upon the sight of the cornet Pagania,
which appeared in november and december
1577; Londres, 1577,inr4°; — The Description
ofthe Citie of Excester t in-4°; — A Pam-
phlet of the Offices and Duties of everie par-
ticular Sworne Officer of the citie of Ex-
cet ter - f Londres, 1584, in-4°; — A Catalogue
of the Bishops of Excester; Londres, 1584,
uv4°. Ces trois derniers ouvrages furent réim-
primés à Exeter, 1765, in-4°. Hooker fut aussi
le principal éditeur des Chronicles d'Holinshed,
qu'il augmenta considérablement , surtout en ce
qui concerne l'Irlande, et auxquelles il ajouta
une traduction de Geraldus Cambrensis. Z.
prince, WortMes of Devon. — Wood , Mhetue Oxo-
hookbr ( Richard ) , théologien anglais , ne-
veu du précédent, né à Heavitrée, près d'Exeter,
vers 1554, mort le 2 novembre 1600: Ses pré-
cocesdispositions frappèrent l'évêque Jewell, qui
renvoya au collège de CorpusChristi (Oxford).
Eu 1577 il fut nommé agrégé de ce collège, et
devint, deux ans plus tard, professeur d'hébreu.
Il entra dans les ordres en 1581, et contracta
peu après un mariage des plus malheureux. Sa
femme, une vraie Xantlppe, dit Wood, fit le
tourment de sa studieuse existence. H vé-
géta plusieurs années dans la petite cure de
Drayton-Beauchamp (comté de Buckingham) :
l'évêque Sandys l'en tira pour le faire nom-
mer maître du Temple. Là il engagea une
vive controverse avec Walter Travers, un des
prédicateurs du Temple, qui soutenait la disci-
pline et les doctrines de Genève. H publia à ce
sujet un traité qui devint le germe de son cé-
lèbre ouvrage intitulé The Laws ofecclesias-
tical Polity. Pour travailler plus tranquillement
à cette oeuvre de prédilection, il échangea sa maî-
trise du Temple contre la cure de Boscomb
(Wiltshire). Il termina à Boscomb quatre
livres de son ouvrage, qui parurent en 1594.
L'année suivante, la reine Elisabeth le nomma
recteur de Bishopsbourne, dans le comté de
Kent, où il passa le reste de sa vie. Le cinquième
livre de ses Laws of ecclesiastical Polity parut
en 1597, et Hooker composa encore trois livres
qui furent publiés après sa mort. On a aussi
de lui divers traités religieux. Le docteur Gau-
den donna une éditieu des ouvrages de Hooker
avec sa Vie; 1662, inrfol.; une seconde édition
avec la Vie de Hooker par Walton parut en
1666, in-fol., et fut réimprimée en 1675, 1682,
1723, 1820, 1830. La dernière édition est celle
d'Oxford , 1838, 3 vol. in-8°. Y.
Bioçraphia Britannica. — Chalmen, Général Bio-
çraphical DicUonary. — .Mlddleton, Evangelieal Bto-
çraphp, t. II.
* hooker ( Thomas ), théologien américain,
né en 1586, à Marfield,en Angleterre, et mort le
7 juillet 1647, à Hartford ( Connecticut). En quit-
tant l'université de Cambridge, où il fut successive-
ment étudiant et professeur, il alla prêcher quel-
que temps à Londres , puis a Chelmsford ; frappé
d'interdit en 1630 par l'évêque Laud, pour avoir
attaqué les privilèges de l'Église établie, il se re-
tira en Hollande, et de là dans la Nouvelle- An-
gleterre (1633). Après avoir exercé à Cambridge
les fonctions dé son ministère , il se mit à la tête
d'une centaine de fidèles, et fonda, an milieu des
solitudes du Connecticut, la ville de Hartford,
dont il fut le pasteur jusqu'à sa mort. On a de
lui : An Exposition of the Lord's Prayer;
Londres, 1645, in-4°; — The Sain f s Guide;
ibid., 1545, in-12; — A Survey of the summe
ofChurch Discipline; ibid., 1648, in-4°; —
The Saints Dignity and Duty ; ibid., t651,
in-4° ;— The Poor Doubting Christian, 7 e édit,
1743. Th. Hooker s'était fait une grande répu-
tation comme prédicateur; sur les deux cent*
sermons manuscrits qu'il fit passer en Angleterre
au docteur Higginson, près d'une centaine furent
imprimés par les soins de ce dernier.
P. L— Y.
D. Neal, History of New England, 1710, f vol. —
Bodleianand BriUsh Muséum Catalogues.— Allen, Bio-
graphical American DicUonary,
J hooker ( Sir William-Jackson ), bota-
niste anglais, né à Norwich, en 1785. Il était des-
tiné au commerce; mais son goût pour la bota-
nique le porta de bonne heure à entreprendre un
voyage en Islande, dans le but d'en étudier l'his-
toire naturelle. Malheureusement,il perdit tous les
objets qu'il avait réunis, ce qui ne l'empêcha
pas de publier, en 1809, une relation de son
voyage, dans laquelle il décrit les plantes de cette
lie. Voué dès lors tout entier à la botanique, il
publia un grand nombre d'ouvragés importants
sur les différentes parties de cette science.
En 1815, il épousa la fille de Dawson Turner,
savant botaniste et archéologue, et hérita de la
fortune assez considérable de son cousin William
Jackson, de Canterhury. Vers la même époque
il accepta la chaire de botanique que lui offrit
l'université de Glasgow. Il quitta cette chaire
121
HOOKER
122
yers 1840, pour devenir directeur du jardin
royal de Kew, place qu'il occupe encore actuel-
lement. « Depuis que ce jardin a été placé sons
sa direction, dit VEnglish Cyclopxdia, une
foule d'améliorations ont été introduites dans
cet établissement, qui n'a pas aujourd'hui de
rival dans le monde pour la variété et la beauté
de ses collections de plantes vivantes. Sous
l'administration de sir "W. Hooker, de vastes
serres et d'autres bâtiments ont été érigés. Le
muséum des produits usuels du règne végétal a
été commencé , et une nouvelle construction a
été élevée en 1856 pour cette collection vrai-
ment nationale. Les facilités d'accès ont été aussi
augmentées , et ces jardins sont destinés à de-
venir un grand établissement d'éducation pour
la diffusion parmi le peuple des connaissances
de rhi3toire naturelle du règne végétal. » Créé
en 1836 baronet, sir W. Hooker est du petit
nombre des hommes de l'Angleterre qui ont
reçu cette distinction en récompense de leurs
travaux scientifiques. Il a été pendant plusieurs
années un des vice-présidents de la Société Ljn-
néenne, et associé de la Société royale. En 1855,
il a été décoré de la Légion d'Honneur. On a de
loi : A Tour in Iceland; 1809, 2* édition,
1813; — Monograph on the British Junger-
mannix; 1812-1816; •=- Muscologia Britan-
nica; 1818 (avec le docteur Taylor); 2* édit,
1833 : on y trouve la première description com-
plète des mousses de la Grande-Bretagne; —
Musci exotici; 1818 ; — Flora Scotica; 1821 ;
— Exotic Flora ; 1823-1827, 3 vol. : l'auteur
donne la figure et la description des plantes exo-
tiques nouvelles, rares ou intéressantes à d'autres
titres, et principalement de celles qu'il serait
désirable de voir cultiver en Angleterre ; un grand
nombre de plantes y sont décrites et figurées pour
la première fois ; — Flora Borealis Americana ;
1833-1840, 2 vol. ; — The British Flora; 1830,
5 vol. ; 5 e édition, 1842 : cet ouvrage renferme
une description complète des plantes de la
Grande-Bretagne , classées, dans les premières
éditions, suivant le système artificiel de Linné;
mais, à la cinquième édition, la méthode natu-
relle a été adoptée ; — Icônes Plantarum, or
figures with brief descriptive characters and
remarks of new and rare plants , selected
from the author's herbarium; 1837; — Spe-
cies Fîlicum; 1846-1863; — 4 Centuryofor-
chidaceous Plants; 1846; — Kew Gardens,
or a popular guide to the royal botanic Gar-
dens at Kew; 1847 ; — On the Victoria regia;
1851. En 1816, sir W, Hooker entreprit la con-
tinuation de la Flora Londinensis de Curtis,
dans laquelle il a décrit plusieurs plantes
nouvelles. Il fit aussi paraître une continuation
du Botanical Magazine, fondé en 1787 par
Curtis; et de 1828 à 1833 il publia le Bo-
tanical Miscellany, recueil qui contient la
description et la figure d'un grand nombre de
plantes, particulièrement de celles qui sont en
usage dans les arts, la médecine on l'économie
domestique. Cette œuvre a été poursuivie dans
le Journal of Botany t dont il est directeur. De
1826 à 1837 sir W. Hooker publia, avec le doc-
teur Greville, d'Edimbourg, Y Icônes Filicum,
contenant la figure et la description des fougères.
Aidé de M. J. Berkeley, il donna une continua-
tion de VEnglish Flora de Smith, comprenant
les champignons. Sir W. Hooker est en outre
un des rédacteurs des Annals and Magazine
of Natural History. L. L— t.
The EnglUhCfclopadia ( Btography ). — ^Conversa-
tUmt-Laritom.
; hooker (Joseph-Dalton), botaniste et
médecin anglais, fils du précédent, né en 1816.
Élevé pour la profession médicale, il prit le
grade de docteur en médecine , et quitta bientôt
la pratique de cet art pour suivre la carrière dans
laquelle son père s'était distingué. En 1839, il
fut attaché comme chirurgien assistant à l'expé-
dition que sir James Ross devait diriger dans
l'océan Antarctique. Il s'embarqua à nord de
VÉrèbe. Quoique nommé chirurgien, l'objet
réel de ses investigations était la botanique des
contrées que l'expédition visitait : ses recherches
furent généreusement encouragées par le com-
mandant de l'escadre. Le résultat rot la publi-
cation delà Flora Antarctica 9 1845-1848, 2 vol.,
ouvrage dans lequel il a décrit et figuré un grand
nombre de plantes nouvelles; et par la com-
paraison des espèces obtenues dans ce voyage
avec celles des autres parties du monde, il a
grandement contribué à faire avancer la connais-
sance des lois qui gouvernent la distribution des
plantes sur la surface de la terre. En 1848, le
docteur Hooker partit pour une autre expédi-
tion scientifique : ses investigations s'étaient por-
tées la première fois sur les plantes des climats
froids et tempérés; il ne put rester en repos qu'il
ne connût aussi celles des climats tropicaux. Il
avait à choisir entre les Andes et l'Himalaya;
il préféra cette dernière chaîne de montagnes.
Sa route fut tracée à travers des districts non
soumis à l'autorité britannique. Il eut de nom-
breuses aventures , et se trouva même parfois
dans une position dangereuse; c'est ainsi qu'il
fut pendant quelque temps retenu prisonnier
par le gouverneur d'un district dans le Sikkim-
Himalaya. De retour en Angleterre en 1852, il
publia son Himalayan Journals f en deux vo-
lumes. C'est un des pins intéressants voyages
scientifiques qui aient été publiés dans ce siècle.
Il ne donne cependant qu'une idée imparfaite
des travaux de l'auteur. Ses collections de
plantes et le premier volume de son grand ou-
vrage intitulé Flora Indka montrent mieux
encore l'intelligence qu'il dut déployer durant
ses trois années de voyages et de fatigue dans le
Sikkim et le Népal himalayens. Quelques-unes
de ses importations botaniques sont pins connues
pourtant que sa Flora Indica; ainsi, en 1851,
peu de temps avant son retour, il surprit le pu-
128
HOOKER - HOORN
124
blic par renvoi de dessins et de descriptions
d'un grand nombre de nouvelles espèces de
rhododendrons du Sikkim-Himalaya i plusieurs
de ces espèces ont été depuis introduites en
Angleterre et font 1* gloire des expositions an-
nuelles de rhododendrons. Dans ses voyages, le
docteur Hooker reçut l'assistance morale du gou*
vernement; mais la plus grande partie de ses
dépenses fut défrayée par ses propre* ressour-
ces. Avant son voyage dans l'Himalaya, le doc-
teur Hooker était attaché au Mnséum de Géologie
économique, et il enrichit te second volume des
Transactions de cette institution d'an remar-
quable mémoire ayant pour titre : On the Végé-
tation of thecarbon\ferous period, as eonu
parte wilh that ofthê présent day. A son
retour de l'Himalaya, le docteur Hooker se
maria à la fille araée du rev. W. Henslow, pro-
fesseur de botanique à l'université de Cambridge.
H est un des examinateurs des candidats pour
le service médical des Indes orientales, associé
de la Société royale et membre du conseil de la
Société Linnéenne. Outre les ouvrages déjà cités,
on a encore de M. J. Dalton Hooker : The Rho-
dodendrons of the Sikkim-Himalaya; 1849-
1851 ; — et Flora NovK-Zelandix; 1853.
L. L— t.
The EngHih Cjfclopmâta ( Mographf ). - Cenverun
■oolb ( John ), poète dramatique anglais, né
à Londres, en 1727, mort prèsdeDorking 9 en 1803.
A l'âge de dix-sept ans, connaissant passablement
le latin et le français et sachant un peu de grec, il
entra dans les bureaux de la Compagnie des Indes
orientales. H consacra ses loisirs aux lettres, et
s'adonna particulièrement à l'étude de l'italien.
Passionné pour l'Arioste, 11 commença une tra-
duction du Roland Furieux; Il le laissa quel-
que temps de côté et traduisit la Jérusalem
délivrée du Tasse. Cette œuvre parut en 1763,
2 vol. in-8° , avec une dédicace à la reine, écrite
par Johnson. Encouragé par le succès, il donna
une traduction de six pièces de Métastase, 1767,
2 vol. in-8*, auxquelles il en ajouta douze au-
tres, dans une nouvelle édition; 1800, 3 vol.
in-8°. Il fit représenter trois tragédies : Cyrus,
1768, Timanthes, 1770, et Cléenice, 1775. Le
premier volume de sa traduction du Roland
Furieux parut en 1773 ; mais sa nomination à
la place d'auditeur de la Compagnie des Indes
apporta do retard dans ses travaux littéraires,
et les derniers volumes ne parurent qu'en 1783.
L'ouvrage entier forme cinq volumes m-8°. En
1763 Hoole résigna ses fonctions d'auditeur, et
se retira dans une maison de campagne près de
Dorking, ou H mourut. Hoole lut un des amis de
Johnson et l'assista dans sa dernière maladie,
dont il a laissé un journal intéressant. Z.
IHoçrapkia DrammHca. — Gmtteman's MagmwhM n
vol. Uttlll.
■ootBB, ■»»«■> ou hovmhi (Jean), pré-
lat anglais et un des martyrs de la réforme an-
glicane, né dans le comté de Somerset en 1495,
brûlé vif le 9 lévrier 1555. Il adopta les doc-
trines protestantes à l'université d'Oxford. Sa
conversion l'obligea à quitter l'université, puis
l'Angleterre en 1540. H passa une partie de son
exil à Zurich et s'y fortifia dans ses opinions
religieuses. De retour en Angleterre, à l'avéne-
ment d'Edouard VI, Q prêcha à Londres avec
un grand succès. Il fut promu en 1550 à l'évéché
de Gk>uce8ter. Mais sa répugnance à revêtir les
habits sacerdotaux l'empêcha d'abord d'occuper
cette dignité, et il subit même à ce sujet un em-
prisonnement de quelques mois. Q accepta
enfin, et travailla avec beaucoup d'ardeur à l'é-
tablissement de la réforme. Son zèle le désignait
à la persécution. Arrêté de nouveau, peu après
l'avènement de Marie, fl refusa d'abjorei le pro-
testantisme, et fut condamné à être brftlé vif,
supplice qu'il subit avec un rare courage. Parmi
ses ouvrages on remarque : A Déclaration of
Christ and his Office; 1547, in-8°; — tesson
ofthe Incarnation of Christ; 1549, in-8°; —
Twelve Lectures on the Creed; 1581 , ln-8".
Plusieurs lettres de Hopper sont conservées dans
les archives de Zurich. Z.
Wood, Àthens Oxonisnses, t. h - Foi, Martin. —
Bumet , Histont ofRtform. — Mlddleton , EvançeUeal
■oopbu (Georges ), théologien anglais , né
à Grimley (comté de Worcester), en 1640,
mort à Barkley (comté de Somerset ), en
1727. Après avoir fait ses études à Oxford, il
devint chapelain de Morley, évêque de Win-
chester, fut attaché en la même qualité à l'ar-
ohevéque Sheldon, qui lui donna la cure de Lam-
beth, et fut nommé en 1677 aumônier de In
princesse d'Orange. En 1686 il assista le due
de Monmouth, condamné à mort. La princesse
d'Orange, devenue reine d'Angleterre, le nomma
en 1691 doyen de Cantorbéry, et le choisit pour
chapelain. Il fut élevé en 1703 à la dignité épis-
eopale de 8aiut-Asaph et transféré au mois de
mars suivant à l'évéché de Bath et Wells. Ses
principaux ouvrages sont : Âfair and metho-
dical Discussion of the first and great Con-
troversy between the Church of England
and the Church of Rome, concerning the In-
fallible Guide; 1687;— De Valentinianorutn
Hmesi Conjectures, quibus illius origo ex
JSgyptiaea theologia deducitur; 1711; —
An Inquiry into the Ancient Measures , the
attic, the roman, and especially the jewisti,
with an appendix concerning ourold english
money and mesures of content; 1721 . %.
Todd, Uves ofthe Deans «/ Canterbwrg. ~ CJulmet»,
General BtoçrapMeal Dicttonam.
HOOBir TAU tlooswtck ( Pierre» W-
colas , baron de ) , antiquaire hollandais , né h
Amsterdam, le 27 mars 1742, mort à Paris» Je
5 janvier 1809. Son amour de l'art lui fit aban-
donner de bonne heure la Hollande pour aller
visiter les pays étrangers. Il se rendit en Italie,
125
HOORN — HOPE
m
s'aiTêta à Rome et à Florence. H se trouva alors
en rapport avec des connaisseurs renommés, tels
que Pickler, Mengs, les cardinaux Borgia et Al-
bani; en même temps il sut mériter la bien*
veillance du grand duc Léopold, H était par*
venu à rassembler une collection de pierres
rares et précieuses , quand, au mois d'octobre
1789, elle lui fut dérobée par son valet de
chambre. Il poursuivit le voleur, l'atteignit è
Amsterdam; mais il était trop tard : deux cents
pièces de oe trésor en avaient disparu. Hooru se
contenta de racheter ces reliques sans chercher
autrement k se venger du voleur. Mais l'impres-
sion produite, par ce vol lui fut funeste. JI
mourut dans un voyage qu'il fit h Paris pour y
compléter ses collections. Hoorn était un collec-
tionneur infatigable , sinon des plus érudits et
des plus fins; seulement il protégea de son
mieux les arts et ceux qui les cultivaient. Le
catalogue des curiosités amassées par Hoorn et
des pierres et camées qu'il possédait a été dressé
par Lebrun et Dubois, V. R.
Brsch et Gruber, Mlg. Encyc.
hoqrne (Jean de), anatomiste hollandais,
né à Amsterdam, en 1021, mort à Leyde, te 13 jan-
vier 1670. Après avoir terminé son cours de
philosophie, il étudia la médecine à Utrecht.
Au bout de quelques années, il fit un voyage en
Italie, et à peine arrivé dans ce pays, il prit
du service dans les troupes de la république de
Venise. Il renonça bientôt à l'art militaire, et
suivit les cours des principales universités d'I-
talie, de Baie et de Montpellier. Reçu docteur à
Baie, il revint à Amsterdam, où Ton ne tarda pas
à lui confier une chaire d'anatomie et de chirur-
gie ; il la quitta en 1643, pour en aller occuper
une semblable à Leyde. « Hoorne jouissait, dit
Jourdan, parmi ses contemporains, d'une grande
réputation que le temps a ternie, parce qu'elle
tenait moins à son mérite réel qu'à son adresse
et à son savoir-faire. Il y aurait cependant de
l'injustice à ne pas convenir que l'anatomie lui
doit quelques progrès , et qu'il contribua beau-
coup à répandre le goût de cette science , que
lui-même avait puisé dans les leçons du célèbre
Swammerdam. On peut lui reprocher de s'être
arrogé plusieurs découvertes dont l'honneur ap-
partenait à d'autres. C'est ainsi, par exemple,
qu'il voulut disputer à Pecquet celle du canal
thoracique , quoique tout son mérite , sous ce
p rapport , se borne à être Pus des premiers qui
l'ont décrit dans l'homme. » Ses principaux ou-
vrages sont : Epistola de Anevrysmate ; Pa-
ïenne, 1644, in-8«; — Bxereitdtiones anato-
mïex I et II ad Observation*! Fallopii ana-
tomicas et earumdem examen per Vesalium,
addita ubique epicrisi ; Leyde, 1649,in-4°;~-
ffovus Ductus chyliferus, nunc primum de-
lineatus, descriptus et eruditorum examini
propositut; Leyde, 1 652, in-4° ; ~-De Ductibus
Salivalibus Disputationes ; Leyde, 1656-1657,
in-4 9 : Hoorne y décrit le canal dont la découverte
a été depuis attribuée à Warthon; — Dtotrtatio.
de Nutritione ; Leyde, 1658, in-4°; — Bisser-,
tatio de JEgilope ; 1669, in-4° ; — Stenonio dé
Glandulis oris disputanti; Leyde, 1661, in-4° ;
— M icrocosmus , seu brevis manuductio ad
historiam corporis humant, in gratiam dis-
cipulorum édita; Leyde, 1660, 1662, 1665 «
in* 12; Leipzig, 1675, in-12; trad. en français,
Genève, 1675, in-12, « Ce manuel, quoique
très-court, dit Jourdan, fut fort estimé dans le
temps, à cause de la clarté et de la précision qui
y régnent partout. On y trouve peu de détails
originaux ; mais l'état de la science est repré-
senté avec beaucoup d'ordre et d'une manière
très-lumineuse » ; — Microtechne, id est brevis-
sima chirurgix methodus ; Leyde, 1663, 1668,
in-12; Leipzig, 1675, in-12; — Dissertationis
anatomicQ-medicx pars prior de partibus in
ore contentis ; Leyde, 1666, ln-4°; — Prodro-
mus observationum suarum drca partes gé-
nitales in utroque sexu; Leyde, 1668, in-12;
1672, in-4*; — Qbservationes anatomico-me-
dicœ, annotationibus recentiorum in anato-
micis pariter ac chirurgicis industriam pa-
tefacientibus adductœ; Amsterdam, 1676,
in-12; publié par Just Schrader. Hoorne a donné
une édition des œuvres de Botaffi , Leyde, 1660,
in-8o, et du traité De Ossibus de Galien,
Leyde, 1665, in- (2. Pauii a fait paraître une
collection des œuvres de Hoorne sous ce titre : a
Qpuscula Anatomico- Chirurgien; Leipzig, *
1707, in-8*». J. V.
Jôcher, Gelehrten-Urtbon. — Joardao, Biographie
médicale. - Bracb «I Gruber, AUg. gnc*Mlapa$die.
hope (Jean), baron Nnwiv et comte Ho-
petoun, général anglais, né le 17 août 1766,
mort le 27 août 1823. Entré au service en 1784,
il fut nommé lieutenant-colonel en 1793, se dis*
ttegua aux Antilles en 1795 et 1796, et obtint le
grade d'adjudant général. De retour en Europe,
il représenta le comté deLinlithgon à la chambre
des communes. En 1799 il fit partie de l'expé-
dition anglaise envoyée en Hollande, et reçut une
grave blessure au Helder, L'année suivante, il fit
la campagne d'Egypte, et fut blessé au siège du
Caire. Le grade de major général et la place de
gouverneur de Portsmouth furent la récompense;
de ses services. Il quitta ce poste pour être em*
ployé d'abord sous lord Cathcnrt, puis comme
lieutenant général sous John Moore. Lorsque ce
général eut été tué à la bataille de La Corogne, le
16 janvier 1809, Hope prit le commandement dé
l'armée anglaise, et parvint à effectuer l'embaiv
quement de ses troupes en présence de l'armée
française, supérieure en nombre et victorieuse.
Cette belle manœuvre valut à Hope la décor*,
lion de l'ordre du Bain. {1 commanda une divi-
sion à Walcheren , et obtint des succès dans
cette campagne désastreuse pour l'Angleterre. Il
alla ensuite à l'armée d'Espagne , qu'il quitta
bientôt pour devenir commandant en chef des
forces d'Irlande. E» 1813 il revint en Espagne,
ni
HOPE — HOPK1NS
128
«a moment où les Français, sons les ordres du
maréchal Soult, défendaient la ligne des Pyrénées
contre les troupes de Wellington. Il commanda
Taile gauche à la bataille de Nivelle, et après la
victoire H fut chargé de bloquer Bayonne. Cette
place, défendue par le général Thouvenot, tenait
encore quinze jours après la prise de Paris. Le
14 anil les assiégés firent une sortie dans la-
quelle le général Hope fut fait prisonnier. La
nouvelle de la paix lui rendit la liberté. Il fut
créé pair, avec le titre de baron Nidry, le 3 mai
1814, et en 1816, par suitede la mort de son frère,
il hérita du titre de comte Hopetoun. Il mourut
à Paris, qui était sa résidence de prédilection. Z.
Anmua Biographe mi ObUwtrp (M** )• - Napter,
Fminsular Wqt.
bopb (Thomas), archéologue anglais, né
en 1774, mort le 3 février 1835. Il était parent
des Hope d'Amsterdam, et descendait comme eux
de la famille écossaise des Hope de Craig-Hall.
11 nous apprend que dès l'enfance l'architecture
fut son amusement de prédilection. Devenu
maître de sa fortune à l'âge de dix-huit ans, et
ne trouvant pas dans les livrés des aliments
suffisants pour ses goûts archéologiques , il cher-
cha dans les voyages de quoi satisfaire sa passion
favorite : elle le conduisit dans les pays où l'ar-
chitecture avait fleuri , et jusque dans ces régions
d'où la civilisation s'était retirée. Les monuments
* égyptiens sur les bords du Nil , ceux de l'Ionie ,
de la Grèce septentrionale, du Péloponnèse, de
la Sicile ; les édifices du style tartare et du style
persan en Turquie et en Syrie; les monuments
moresques et arabes sur les côtes d'Afrique et
en Espagne; ceux des Étrusques et des Lom-
bards en Italie , et enfin les édifices gothiques de
la France, de l'Allemagne, de l'Espagne et du
Portugal , furent pendant huit ans l'objet de ses
recherches. De retour en Angleterre, il consacra
ses loisirs et ses revenus à agrandir sur un plan
nouveau sa maison de Fortland-Place. Cette
somptueuse demeure, dans laquelle il disposa
des galeries d'antiques, de sculpture et de pein-
ture, lui fournit le sujet de sa première publica-
tion Household Furniture (1805, in-fol., avec
soixante planches) , qui, malgré les railleries de
la Revue d'Edimbourg , exerça une grande in-
fluence sur le goût public. Ses Costume of the
Ancients, publiés en 1809, contribuèrent à
mettre à la mode l'imitation des anciens. Il donna
la même année un Essai sur V Architecture des
Théâtres , dans la Review of Publications of
Art de J. Landseer. Il découvrit et patronna le
premier le talent de Thorwaldsen , qui exécuta
pour lui son Jason en marbre. La protection
de Hope ne s'adressa pas toujours aussi heureu-
sement. Un artiste français nommé Dubost dont
il avait acheté fort cher un ouvrage, mais avec
qui il avait fini par se brouiller, exposa pour se
venger un tableau intitulé La Belle et la Bête
(Beauty and the Beast), où il avait représenté
M. Hope et sa femme. Ce scandaleux tableau,
que le public était admis à Toir moyennant un
prix d'entrée, avait déjà rapporté beaucoup d'ar-
gent au peintre , lorsqu'un frère de M 1 ** Hope
creva la toile à coups de canne. Dubost lui intenta
un procès , et demanda mille livres sterling de
dommages-intérêts ; le jury lui en alloua cinq.
Cette aventure rendit Hope plus réservé dans
ses relations avec les artistes. A l'exception d'un
petit ouvrage sur les Costumes modernes ( en
1812), il ne fit rien paraître jusqu'en 1819, où il
publia, sous le voile de l'anonyme, Anastasius,
or memoirs of a modem greek at the close
of the eighteenth century. Ce roman, qui eut
un moment l'honneur d'être attribué à lord By-
ron, dut son succès aux circonstances politiques
au moins autant qu'à son mérite. Les faits re-
cueillis par Fauteur sont nombreux, exacts, bien
choisis, mais le cadre où il les a placés a peu
de prix. Bon observateur, écrivain agréable,
Hope est un romancier médiocre. VAnastase a
été traduit en français par Defauconpret , Paras,
1820, 2 vol. in-8° ; nouvelle édition avec une
notice de Buchon, Paris, 1844, in-12. Les deux
derniers ouvrages de Hope ne parurent qu'après
sa mort: le premier, intitulé On the Origin and
Prospectus of Mon , Londres, 1831, in-8°, con-
tient des spéculations téméraires, aussi opposées
à la vraie philosophie qu'à la vraie physique,
fort peu orthodoxes, et souvent inintelligibles.
VHistoricalBssay on Architecture, publié en
1835, et traduit en français par A. Baron,
Bruxelles et Paris, 1839, 2 vol. in-8° , vaut
beaucoup mieux, bien qu'il n'ait pas reçu les
derniers soins de l'auteur, et qu'il ne soit vers
la fin qu'une suite de fragments et de notes
prises à la hâte. Z.
English Cyclopmdia {Biography }.
■opital (L'). Voy. L'HOPITAL.
hopkins ( Ézékiel ), prélat anglais, né à Sand-
ford ( Devonshire ) en 1633, mort à Aldermanbury
en 1690. Fils d'un vicaire , il entra dans les or-
dres, et après avoir été chapelain du collège de la
Madeleine à Oxford , puis prédicateur puritain à
Londres, il suivit en Irlande lord Robartes ( de-
puis lord Truro), dont il avait épousé la fille
Araminta , et qui le nomma doyen de Raphoe.
U devint évoque de Raphoe en 1671, et fut trans-
féré en 1681 sur le siège épiscopal de London-
derry. Le grand mouvement catholique de l'Ir-
lande en 1689 le força de se réfugier à Londres,
où il fut élu ministre d'Alderoanbury et où il
mourut peu après. On a de lui : Exposition qf
the LoroVs Frayer ; 1691 ; — An Exposition
ofthe Ten Commandements; 1692, in-4\ Ces
deux ouvrages avec cinq sermons furent re-
cueillis en 1710, in-fol. Chalmers cite une édition
plus récente dont il n'indique pas la date , 4 vol.
in-8°. Z.
Wood, Attente Oxoniensêt, t H. — Prince, Worthies
«/ Devon. — Chalmers , General Biogr, Dictionary.
HaPKiirs (Charles), poète anglais, fils du
précédent, né en 1664, à Exeter, mort en 1699.
129
HOPKINS - HOPPERS
130
11 venait d'achever ses études à Cambridge
lorsque l'Irlande s'insurgea contre Guillaume m.
Hopkins s'engagea dans les troupes de ce prince,,
et alla guerroyer contre les catholiques. De re-
tour en Angleterre, il se lia avec les plus spiri-
tuels écrivains de son temps , Dryden entre au-
tres , et obtint le patronage du comte de Dorset.
L'abus des plaisirs abrégea ses jours. On a de
. loi : Epistolary Poems and Translations ,
1694, inséré dans la Select Collection de Ni-
chols; — Pyrrhus king of Pirus, tragédie;
1695 ; — Art of Love; — Boadicea, queen of
Britain, tragédie; 1697; — Friendship im~
proved, tragédie; 1700, in-4°, Z.
Baker, Biographia DramaUca. — Chalmen, General
Biographiccl Dietionary.
hopkins (John) t poète anglais, frère du
précédent, né le 1 er janvier 1675, mort au com-
mencement du dix-huitième siècle. Comme son
frère, il cultiva la poésie , et Ton croit qu'il mou-
rut aussi prématurément que lui. On a de Hop-
kins : The Triumphs ofPeace, or the glories
of Nassau; a pindaric poem; 1698; — The
Victory of Death, or the fait of beauty; a
visionary pindaric poem; 1698, in-8°; —
Amasia, or the works of the muses, a collec-
tion of poems; 1700, 3 vol. Z.
NichoU, Poems. - Oulmeri, Gênerai Biographieal
Dictionary.
hopkins (Samuel), théologien américain,
né le 17 septembre 1721, à Waterbury (Con-
necticut), et mort le 20 décembre 1803 à Nev*-
port (Rhode-Island). H fut élevé au collège
d'Yak, embrassa, en 1743, l'état ecclésiastique,
et présida, de 1770 à 1780, une congrégation de
Newport. C'était un homme pieux, zélé, plein
d'enthousiasme, au dire de Channing qui fit de
lui un bel éloge; mais ses opinions religieuses
donnèrent lieu a une vive controverse. Ceux
qui les adoptèrent prirent le nom d'hopkin-
sians; ce sont les puritains du calvinisme. On
a de lui : Dialogue concerning the Slavery
of the Africans, 1776, où il prouvait que le
devoir aussi bien que l'intérêt des États-Unis
était d'affranchir les esclaves; — System of
Doctrines containedin divine relation; 1793,
contenant l'ensemble de ses croyances particu-
lières sur le souverain bien, le péché, etc.; —
plusieurs dissertations théologiques, dont un
Traité sur le Millenium, etc. P. L— y.
Whlttier, Old Portraits and modem Sketches; 19*0, —
Channlog, Moral Argument against calvinism,- 1W0. —
Allen, Biographieal American Dictionary, i« édlt.
hoppbr (Marc), jurisconsulte suisse, mort
en 1565. Reçu maître es arts, il professa ensuite
le grec, la logique, la physique et les Institutes
de Justinien. 11 mourut de la peste. On a de lui :
Lexicon Latino-Gr&cum; Baie, 1563, in-fol.;
— Opéra Grxco-Lalina — 11 donna aussi une
édition des Opuscula d'iEneas Silvius (Pie II),
qu'il fit précéder d'une introduction de sa façon.
Sedler, Univers.- Lex.
hoppbrs (Joachim), en latin Hopperus,
NOUV. BIOGR. GÉNÉR. — T. XXV.
jurisconsulte belge, né à Sneeck (Frise;, le
11 novembre 1523, mort à Madrid, le 15 dé-
cembre 1576. Après avoir fait ses premières
études à Harlem, il commença à Louvain, sous
Gabriel Mudée, dont il fut l'un des élèves fa-
voris, un cours de droit qu'il alla terminer 4
Paris et à Orléans. De retour à Louvain en 1549,
il y obtint le grade de licencié, et fut pourvu
d'une chaire de droit à l'université de cette ville.
U reçut en 1553 le bonnet de docteur , et l'année
suivante il renonça à la carrière de l'enseigne-
ment pour occuper une place de membre du
grand conseil de Malines. Lorsque le gouver-
nement espagnol créa une université à Douay,
Hoppers fut chargé de sa formation. Appelé à
Madrid en 1566, il devint membre du conseil
privé de Philippe II , et chancelier pour les af-
faires des Pays-Bas. Aux lumières du juriscon-
sulte il joignait celles du philosophe et de l'his-
torien. Ses liaisons d'amitié avec Viglius lui
avaient ouvert la carrière politique, dans laquelle,
malgré sa modération et son attachement à son
pays , il ne fut pas toujours sans reproche.
Voici la liste de ses principaux ouvrages : De
Juris Arie Libfï III; Louvain* 1553, in-fol.;
—Ad Justinianum de Obligationïbus iretOavâv
Ubri V; Louvain, 1553, in-fol.; — Dispositio
in libros IV Institutionum; Cologne, 1557,
in-8°; — Dispositio in libros Pandectarum;
Cologne, 1558, in-8° ; — Isagoge in veram Ju-
risprudentiam Ubri VIII. Priores quatuor
continent peratitla juris civilis : posteriores
elementajuris , sive principiajusti et injusti;
Cologne, 1580, in-8° ; — Ferdinandus; sive de
institutions principis liber I; Anvers, 1590,
in-fol. ; — Seduardus , sive de vera jurispru-
dentia; Anvers, 1590, in-fol., publié par les fils
de l'auteur, et réuni à l'ouvrage précédent et à
un autre qui a pour titre : Themis hyperborea,
sive de tabula regum FrisUe. H. Conring a
donné une nouvelle édition de ces trois écrits
à Brunswick; 1656, in-4°. Le Recueil et Mé-
morial des Troubles des Pays-Bas du roy 9
opuscule écrit en français par Hoppers , mais
désigné par le P. Lelong'sous le titre latin de
Commentarius de Tumultibus Belgicis, a été
inséré par Hoynek van Papendrecht dans la se-
conde partie du tome II de ses Analecta Bel"
gica; La Haye, 1743, in-4°. Il existe à la bi-
bliothèque royale de Madrid une traduction es-
pagnole du mémoire d'Hôppers. La bibliothèque
royale de Bruxelles conserve une collection de
lettres manuscrites d'Hôppers, et la bibliothèque
de l'université de Giessen possède un manuscrit
contenant quatre cent quatre-vingt-six lettres de
cet homme d'État. De Nélis , évèque d'Anvers,
en a publié deux cent vingt dans le recueil in-
titulé : Joaehimi Hopperi Epistolx ad Viglium
ab Aytta Zuichemum, sanctioris consilii
prxsidem, Louvain, 1765 ; ou, avec un autre
titre, Utrecht, 1802,Jn-4°. On en trouve aussi
quelques-unes dans les Illustrium Virorum
13!
HOPPERS — HOHA€£
192
Epistolm ÈètetttorM , vei a Btlgis, vtl ad Beh
gas scriptœ, Leyde, 1617, in-4% et dans le
tome IX du Compte+rendu dès sé&nces fa la
Commission royale d'Histoire (de Belgique)*
Enfin ) le Sylloge de Barman* en contient a»; et
M. Hameft {Oûtalogus lâorirum uunweripta*
rum, p. 17) «le cette» que l'on conserve à Bfr
sançon. E. RegrAku.
Vater* Antre, BiètMhea* Belçic*. - ftt» AoriMtfH
Bopperi, en tête du tom. II, seconde partie, des AnaUcta
tielgtca de Hoynëkvan Papeodrechi. — Siàliothecd tiut-
themiana, tom. IV, a*» SS,80S et tt JOt. - J. Britt , COéê
04 F Ancien Droit de Belgique.
boppueb ( Henri-Parktns), navigateur an-
glais, né en 1795, mort le 22 déeembre 1833*
Quoique son père fût peintre esses distingué, il
préféra ta carrière maritime, et débuta en 1808*
sous les ordres de l'amiral Moore, dans les eaux
de l'Espagne et do Portugal. Il fit ensuite partie
des escadres de ta Manche et de l'Amérique
septentrionale. En 1816, il accompagna en Chine
lord Amherst, plénipotentiaire auprès dn Céleste
Empire. En 1818, il prit dn service comme se-
cond sur le brick Alexander, commandé par
Parry, qui suivait alors Ross dans les mers po-
laires. En 1819 il fit le même voyage sur 1e
Griper, dépassa le 110* de longitude ouest, et
obtint un prix du parlement. En mai 1821, il fit
partie, comme lieutenant dé YSecla (capitaine
Lyon), de l'expédition dirigée par Parry, et en 1824
il suivit de nouveau Ross dans son voyage de dé-
couvertes an pôle nord. Il commandait alors ta
Furie, qui se perdit dans les glaces. Les souf-
frances qu'il endura furent telles que depuis cette
époque sa vie ne fat qu'une tante agonie. Cet
intrépide navigateur mourut à peine âgé de
trente- huit ans.
Le récit des voyages auxquels il avait pris part
se trouvant rapporté adx notices de Parry et de
Ross {voy. ces noms), ce serait faire double em-
ploi que de le reproduire ici. A. de L.
Vf alkenaSr, Collection dêê Relattom do Vv§ageu
hobacb (Quinius-HoratiusFlaccus), cé-
lèbre poète latin, né à Venusiom le 8 décembre
an de Rome 689 (65 avant J.-C), mort à Rome
le 27 novembre 746 (8 «vaut J.-C.), Il est né
sous le consulat de L. Aurelius Cdtta et de
L. Maniius Tofquatus , a l'époque où César,
compromis par la première conjuration de Cati*
lina, rêvait déjà la èhute de la république (1).
L'enfance du poète fat troublée par lé nrdit
des guerres civiles. Tout jeune il porta les armes
lors des sanglantes représailles exercées par
Octave contre les meurtriers du dictateur. Plus
tard il devint l'ami de Mécène ; et ses dernières
années s'écoulèrent auprès du conseiller d'un
prince qui réorganisait le monde. Chacune de ces
époques lui é suggéré de nobles pensées et inspiré
de sublimes accents. Il a aimé la liberté quand
(1) Cotta et ManUos dénient être Mussloét m Ca-
pitule le Jour de leur installation. Suétone dit qne Géaar
était do. complot foy. Sallusté , CatU,, t XVIII, et
Suétone, C'a?*., § IX.
elle émit possible} puis il a, prêter* l'unité du
pouvoir à l'anarchie, et n'a, du moins, célébré
oe pouvoir que quand fl était devenu modéré,
réparateur et tetétaire* L'histoire de ses poésies
est celle de Rome pendant le long enfantemenl
de l'empire, torique ta siècle pactfiqae et lit-
téraire, qu'on appelle ta ttàrie d'Auguste, sue*
eédait è des tempe de troubles et de discordes.
La revolutiofl ojut s'accomplit alors, et qui il
passer ta puissance souveraine des mains du
peuple dans celles d'un empereur, était une
révolution seetata. La vieille soeiété romaine se
mourait d'un mal dont elle ne pouvait guérir
qu'eu changeant de forme, et tas circonstances
de ta vie dn poète résument oe changement.
Elles nous reflètent toutes ees transformation»,
ces hésitations , ces croyances nouvelles, ces
fortunes subites, ces positions conquise* ou per-
dues Ad tempe M les Roulante éenan^èfett M
vie agitée du forum et lés terribles étttotionS de
ta démocratie contre un fepes qtfilë payaient dé
leur liberté. Horace, qui« par sa naissance* feu»
ehait à ta classe dèé affranchis, et pif sue
amitiés' , Aux conseillers du ptrace et au prince
rm-méiné, représente lé mondé romain dans tous
les degrés de sa hiérarchie; il nous initie à m
vie littéraire comme à ta vie de la haute société
patricienne. Poète, il réunit les goûts délicats
que lui a inspirés son séjour en Grèce â l'allure
indépendante de l'esprit itatiote, et, tout en
imitant les formes grecques dans* ses vers, il
n'offensé jamais la musé latine dans ce qu'elle
a d'archaïque et de pur. il traite dés genres"
divers, qu'il marque de son caractère aimable ,
de ses mœurs polies, dé sa dignité personnelle s
de sa tolérance, qui n'est pas dé ta mollesse»
S'il cède aux coutumes raffinées de là grande
ville dont il est l'hôte depuis tant d'années, c'est
en gardant l'empreinte dé ta aère énergie des
montagnes de la Pouille, oh il à pris naissance,
tous les nommés illustres de son temps sont
Ses amis, et en le prenant pouf guide nous serons
admis avec lui dans leur intimité la plus fami-
lière. Mécène, Agrippa, Auguste lui-même.
Virgile , Varius, les Pisons, sont les principaux
membres de cette illustre pléiade* Suivre le
poète dans sa vie et dans ses œuvres , c'est pé-
nétrer au vif dans le siècle d'Auguste, le plus
beau que puissent vanter les lettres latines.
Legrand poète romain naquit, pour le répéter,
à Yenusinm, dans ta paya des Saoïnites < sur
les confins de i'Apulie et de ta Lucarne, on a
Cru longtemps que son père, qui n'était qtrtin
afrranchi, avait appartenu à quelque membre «m
ri Irostre famille des Hotaues, dent» selon l'an-
tique usage, il avait pria ta nom en montant m
liberté; puis, lorsque de récentes reoheimmt
eut tes monuments éplgraphiqoea du royaume
dé ftfples eurent mit connaître lé nom on t*
tribu romaine dans laquelle étalent inscrits tan
habitants de Venusium qui faisaient partie de la
trita JTornftnj on supposa quota père do poète
133
HORACE
134
avait reçu son nom comme affranchi de la Tille
à laquelle il avait appartenu en qualité àeser*
vus publiais. Quoi qu'il en soit, après avoir
conquis sa liberté, il exerça dans son pays les
fonctions de receveur Ou collecteur pour les
ventes à l'enchère , fonctions qui né valaient du
titulaire qu'une assez mince considération, mais
qoe les confiscations amenées par la réaction
des partis, en temps de guerres civiles, pou-
vaient quelquefois rendre lucratives. Aussi avait*
il fait l'acquisition d'une petite propriété sur les
bords de l'Aufidns (Vofanto des modernes), à
quelques milles de Veousium. C'est là qu'Horace
a passé son enfance et que ses yeux s'ouvrirent
au grand spectacle des scènes de la nature ; c'est
là qu'il parcourait les montagnes * sans autre
protection que celle des divinités aimables dont
la mythologie romaine peuplait les valions et les
forêts; c'est là qu'il reçut du ciel une première
faveur, qui faisait présager sa destinée de poète
et qu'il à pris soin de raconter dans ses vers»
« J'étais encore bien jeune, dit-il, et j.e m'étais
endormi , fatigué de mes jeux, sur les pentes
du Vultur, qui descend vers la Lucanie. Des
colombes vinrent me couvrir d'un vert feuil-
lage. Les habitants d'Acheruntia, suspendue
comme un nid d'aigle, ceux de la forêt de
Bantium et du vallon fertile de Ferente , me
virent avec surprise dormir en sûreté parmi
les ours et les noires vipères, sans autre abri
que des branches de myrthe et de laurier* Les
dieux seuls inspiraient tant d'audace à un en-
fant (1): »
Au milieu des distractions d'une vie champêtre,
dans un beau pays et sous un ciel pur, Horace
atteignit l'âge où les soins de l'éducation doivent
remplacer les jeux de l'enfance. Il est probable
que cette enfance annonçait déjà le génie du
poète et lui promettait un glorieux avenir. Du
moins le père d'Horace, qui comprenait sa tâche,
sut-il s'imposer de pénibles sacrifices pour déve-
lopper, par une brillante culture, l'heureux na-
turel de son fils. Pauvre du mince revenu d'un
champ peu fertile, macro pauper agello , il ne
voulut point envoyer le jeune Horace à l'école de
Flavius, qui, pour un salaire mensuel, rassem-
blait à Venusium les riches enfants des nobles
centurions, apportant chaque matin sur l'épaule
gauche et leurs jetons et leur ardoise (2). Il le
conduisit à Borne pour y recevoir l'éducation li-
bérale qu'on y donnait aux fils des chevaliers ou
des sénateurs. « A me voir fendre la foule, vêtu
richement et suivi de plusieures valets, ajoute le
poète reconnaissant, on aurait pu croire que
les revenus d'un vaste patrimoine défrayaient
la dépense de tout eet équipage. Mon père lui-
même, incorruptible gardien de ma jeunesse»
me suivait chez tous mes maîtres. Que dirai-je
de plus 1 Veillant sur les actions et les paroles*
fl) Voy. Carmlnum Lib. lit, ode iv, v. 9-JO.
(i) Sermonum Lib /, sat. vi, v. 11-7*
il sut préserver de toute flétrissure cette fleur
d'innocence aussi fragile que précieuse, bravant
les reproches qu'on aurait pu lui faire, si tant
de soins et de dépenses ne m'avaient conduit
qu'à quelque emploi modeste tel que celui qu'il
avait exercé. Et certes ce n'est pas moi qui
m'en serais jamais plaint I Grâces lui soient
rendues , et puisse ma reconnaissance égaler
ses bienfaits I Tant que ma raison sera d'ftccord
avec mon cœur) je m'applaudirai d'être son flli.
Loin de m'exoUser comme tant d'autres de tttott
humble naissance, en disant qu'il ne m'a {ras
été donné de placer mon berceau dans quelque
noble famille , j'aurais à recommencer ma vie , Je
pourrais naitte parmi les faisceaux et la pourpre
que je ne choisirais pas un autre père (1). * 0e
tels sentiments j conçus et exprimés à l'époque
où les différentes classes de là société romaine
étaient séparées par des barrières presque in-
francbissabte&t font à la fols l'étage d'Horace et
de son père, l'un présidant avec tant de sèle et
d'intelligence à une éducation qu'il regarde
comme rhérjtaa* le plut précieux pour son fils,
l'autre proclamant bien haut son humble origine
pour rapportera soit père ta mérite de sa propre
élévation.
Horace noue a laissé de soft éducation d'antres
souvenirs qui, sans doute, excitaient moins sa
reconnaissance. Il a immortalisé dans ses vers
Orbilius et son martinet, OrbiUum plagosum (2),
ainsi qu'il l'appelle > et Suétone a confirmé la
justesse de l'épithète en nous apprenant que ce
grammairien déchirait ses rivaux par ses dis-
cours et ses élèves avec ta fouet (3). C'est à l'aide
de cette méthode qu'il Initiait Horace aux vers
déjà vieillis d* Andronicus et à la poésie d'Homère,
toujours jeune. « j'ai au le bonheur d'être élevé
à Rome, dit Horace dans une de ses épltres,
et d'y apprendre tout ce que les Grecs avaient
souffert de la colère d'Achille* Plus tard je
devais visiter la docte Athènes et me mettre
à la recherche du vrai dans les jardins d'A-
cadémns (4), * Ce voyage de la Grèce était alors
et fut encore longtemps le complément de toute
éducation patricienne. Horace y trouva des jeunes
gens de son âge appartenant aux premières
familles de Rome; Bibultts, Acidinus, Mes-
sak, le fils de Cieéreu. H fréquenta sans doute
les mêmes écoles, suivit les leçons des mêmes
maîtres , et, devenant l'ami de ses condisciples,
grâce à son aimable caractère, grâce à l'in-
souciance du jeune âge, il renversa cette
barrière puissante que la naissance élevait entre
le fils de l'affreneni et ceux des nobles pa-
triciens. C'est là, sur cette terre où l'art semble
le fruit du sol et du climat , qu'Horace a com-
posé ses premiers veré, et Ce fut en grec qu'il
voulut d'abord écrire, u nous l'a dit t « Né de
W Sëfimnttm lib. 1, iafc vi, V 78-98.
(S) Epistolarum Lib. lt, ëp. i, v. ÎO-71.
(i) De MwtribusGramfnttticlt , ffix.
(*) Epistolarum Lib. Il, ep. il, v. W-M
135
HORACE
136
l'autre côté de la Méditerranée, je roulais ce-
pendant écrire mes vers dans l'idiome d'Ho-
mère ; mais Qairinus m'apparot après minait,
à l'heure où les songes ne mentent pas. — Si ta
portais du bois à la forêt, m'a-t-il dit, tu ne
serais pas plus insensé qu'en voulant grossir
la foule des poètes de la Grèce (1). » Horace
échappait ainsi aux dangers d'une imitation ser-
vile et improductive qui l'aurait relégué à un
rang secondaire. Il imita les Grecs sans doute,
mais comme des modèles qui l'avertissaient de
son propre génie et provoquaient en lui l'ému-
lation libre , hardie , féconde. H est l'un des
exemples les plus purs de l'imitation originale ,
la seule qui vive de sa propre vie et trace à
chaque littérature la voie qui lui est propre.
Si Horace a fait le voyage d'Athènes à vingt
ans, vers l'an de Rome 709 (av. J.-C. 45), trois
ans s'étaient écoulés depuis la bataille de Phar-
sale , et le monde romain se trouvait alors dans
cette période de calme pendant laquelle la dicta-
ture de César servit d'entr'acte aux deux guer-
res civiles .qui préparèrent la chute.de la repu*
Nique. Mais, dès l'année suivante, César tom-
bait sous le poignard de Brutus, et la retraite du
meurtrier à Athènes venait interrompre, par les
préoccupations d'une guerre imminente, les
paisibles .études d'Horace. Entraîné par la jeu-
nesse et par l'exemple de ses compagnons
d'étude, le jeune Horace dut quitter les doctes
entretiens des jardins d'Académus pour entrer
dans la vie militante et se mêler aux luttes
sanglantes des partis. Plutasque nous apprend
qu'en arrivant à Athènes Brutus, accueilli, par
de vives acclamations et entouré de toute la
jeunesse patricienne , avait affecté de se livrer à
des études philosophiques ou littéraires. Chaque
jour il allait entendre le philosophe académicien
Théomnestus on Cratippe, de la secte du
Lycée (2)» Cest là, sans doute, qu'il connut
Horace, dont le caractère à la fois fin et naïf,
la justesse de pensée, la précision de langage ne
pouvaient manquer de lui plaire. Aussi, lorsqu'il
partit pour rassembler l'armée qu'il allait op-
poser aux soldats d'Octave et d'Antoine, le fils
de l'affranchi, Horace, le suivait comme le sui-
vaient le fils de Cicéron , celui de Caton, Mes-
sala et tant d'antres jeunes gens, l'espoir des
grandes familles de l'aristocratie romaine.
Maintenant devons-nous croire que ce jeune
homme de vingt-deux ans, occupé jusqu'alors
de ses études, fils d'un père qui avait été es-
clave, sans antécédents militaires d'aucune sorte,
sans goût véritable pour une profession qu'il
abandonna au premier revers (3), ait été tribun
(Il Sermonum IAb. /, ut. x, y. M-M.
(i) Voy. Plut, Brut., f xxit.
(B) Horace semble se reconnaître pea propre au métier
des armes lorsqu'il se déclare imàeiUt dans la première
épode, on 11 propose i Mécène de prendre part à côté de
loi au dangers de la guerre acuaqoe-:
Regei tanin labora qaid javrai smo
ImbcUi» se armas pâma }
dans l'armée de Brutus, alors entouré de l'élite
de la société patricienne? Et cependant Horace •
l'a dit : « Revenons à moi, Mécène, à moi le
fils d'un affranchi, à qui chacun jette ce nom
comme un reproche aujourd'hui, parce que je
suis devenu votre commensal , autrefois parce
que, tribun militaire, je commandais à une lé-
gion romaine (1). »
Des critiques modernes ont pensé que lesjhautes
fonctions du tribunat étaient incompatibles avec
la condition servile d'un jeune homme pris sur
les bancs dé l'école, et que les nécessités de la
guerre civile ne suffisaient pas pour justifier une
telle infraction aux habitudes de la hiérarchie
militaire sous la république. Ils ont donc supposé
au passage d'Horace un sens ironique tout diffé-
rent du sens absolu j de telle sorte qu'Horace au-
rait dit à Mécène : « Parce que tu me témoignes
quelque amitié , les envieux ( dans leur exagéra-
tion maligne) font de moi, pauvre fils d'affranchi,
ton commensal habituel ; et parce que je servais *
à Philippes , ils vont jusqu'à dire que j'y com-
mandais comme tribun une légion romaine! »
Noos avons exprimé ailleurs quelle est notre
opinion sur les conditions du tribunat militaire
et sur les modifications qu'il a subies aux diffé-
rentes époques de la puissance romaine. Nous
avons dit pour quelles raisons il nous semble que
l'on doit accepter les vers d'Horace comme ex-
primant une des circonstances importantes de sa
vie et le compter au nombre des tribuns mili-
taires ayant secondé Brutus dans cette campagne
brillamment ouverte, qui commença par des
triomphes et finit à Philippes par la défaite com-
plète du parti de la république (2). Du reste le
grade qu'il occupait a fait peser sur sa mémoire
une responsabilité plus grande. « Tous deux pré-
sents à Philippes, écrit-il à Pompeius Varus,
nous cherchâmes notre salut dans une fuite ra-
pide, et j'eus le tort d'abandonner mon bou-
clier : »
Tecnm PhiHppos et celerem fngam
Sensl, rellctrnon bene parmnta (8).
Il n'a pas manqué de commentateurs et de bio-
graphes excusant Horace, et voyant plutôt dans
sa plainte naïve l'imitation du poète gret Alcée,
que l'aveu d'un manque de courage peu hono-
rable pour un jeune homme que la confiance du
chef avait appelé à un poste élevé dont sa nais-
sance Péloignait. Leasing, Wieland, Benjamin
Constant, Walkenaèr, Millman, ont pensé qu'il
ne fallait pas s'empresser de conclure, du bon
mot d'un vaincu rappelantle sort d'un autre poète,
qu'il avait vu succomber sa cause sans regret et
sans combat. Nous le pensons aussi. Horace n'é-
tait pas un guerrier, mais il était jeune et plein d'en-
thousiasme ; il combattit et rat vaincu avec son
(I) Sermonum Lit. /, sat vz, t. 4S-46.
(s)r - - --
roy. la vie d'Horace mise en tête de r édition elac-
virieone des enivres de oe poète donnée par H
Dldot en 18SS.
(V Carminum IM>. il, ode vn, v. •, io.
137
HORACE
13$
parti tout entier. La république avait fait son
temps. Si Horace n'alla pas se réfugier avec Pom-
peius Varas sur les vaisseaux de Sextus Pompée
pour recommencer la guerre, il n'alla pas se ran-
ger sou8les drapeaux du vainqueur, à l'exemple
de Messala et de Lamia, ses compagnons d'ar-
mes; il revint à Rome, où nous le retrouverons
poète : c'était là sa vocation.
Tandis que le flot de la guerre civile emportait
Horace et le déposait vaincu au rivage d'Italie,
le petit champ de Venusium avait été confisqué
au profit des vétérans. Désormais il ne pouvait
plus offrir au jeune tribun l'asile ou il aurait ou-
blié, peut-être, ces luttes sanglantes qui défen-
daient le repos. Appien nous apprend que Venuse
avait été choisie pour devenir une de ces colonies
partagées au soldat, dit-il , comme l'auraient été
des terres conquises sur l'ennemi (1). C'est donc
à Rome que se rendit Horace , pauvre , inconnu ,
semblable, comme il le dit lui-même, à un oi-
seau dont on a coupé les ailes ; mais il était jeune,
il se sentait poète, et l'avenir était à lui :
Paupertas Impulit audax
Ut
« C'est l'audace de la pauvreté qui me fit faire
des vers (2). » Ces vers, toutefois, n'étaient pas
écrits pour flatter le parti vainqueur : le soldat
de Brutus ne devint pas tout à coup le courtisan
de Mécène. La bataille de PhUippes avait été
perdue par la république en l'an de Rome 712,
et c'est en 715 qu'Horace fut présenté au ministre
d'Auguste : on a vu depuis des conversions plus
rapides. Quelques-unes des compositions du
poète écrites vers cette époque respirent le regret
du passé et le ressentiment de ces luttes stériles
, engagées par l'ambition des chefs. La guerre de
Pérouse et les cruautés dont fut souillée la prise
de cette malheureuse ville avaient excité l'indi-
gnation d'Horace quand il écrivit la XVI" épode :
« Les voilà donc revenues les discordes san-
glantes! Rome va périr sous les efforts de ses
enfants. Ni le Bfarse ni le Toscan n'avaient rien
pu contre elle; il était réservé à notre génération
impie de l'anéantir de ses propres mains. Point
d'autre remède que d'imiter les Phocéens fuyant
leur ville après l'avoir maudite, et laissant pour
asile aux loups ravisseurs leurs champs, leurs
temples et le foyer paternel. » Quittant le style
lyrique pour la satire, Horace composait en-
core vers le même temps la seconde satire du
livre I er , où , n'osant pas écrire contre Octave et
César, il flétrissait les compagnons de leurs plai-
sirs ou de leurs débauches. Crispas Sallustius,
Galba, Vilhus, Cupiennius, Tigellius le chanteur
sont, tour à tour, et sous prétexte de morale,
immolés à ses rancunes politiques. S'il fallait en
croire le commentateur Acron, Mécène lui-même,
sous le nom de Maltinus, aurait été compris
dans cette vengeance du poète (3). Mais Horace
(1) Appien, De Bell. ctoiL, Ilb. IV, f S.
. (t) BpUtolarum £16. //, 1, t. Il-Sl.
(3) SermommlÀb. /, sat, n, t. SB. Foi* Braonbardt»
était jeune , amoureux , et bientôt l'amour fit tort
à la politique. Ses poésies Pavaient fait connaître,
elles le firent aimer. Ce fut le temps des Néère,
des Pyrrha , des Chloé , des Galathée, des Colo-
ris. Horace chantait ses amours et ses amitiés;
car il avait déjà pour amis Varius et Virgile :
Virgile, chassé comme lui du champ paternel,
trop voisin de Mantoue; Varius, l'élève chéri de
Catulle (1), le poète tragique le plus éminent de
l'époque : esprits charmants tous deux, cœurs
purs et dévoués.
Est-ce le dévouement de ses amis ou quelques
débris échappés au naufrage de sa fortune qui
permirent à Horace d'acheter une charge de
scribe des questeurs? Nous l'ignorons. Nous n'a-
vons sur cette circonstance de la vie du poète
que trois mots de Suétone : Scriptum qiuc$*
torium comparavit, il acheta une place de scribe
à la questure (2). » Pour un ancien tribun c'était
déchoir, peut-être, mais moins que ne l'ont sup-
posé en général les biographes ou les commen-
tateurs, faute de connaître la nature des fonctions
que quelques inscriptions récemment découvertes
permettent maintenant de mieux étudier (3).
yoL m, p. ti. OreUI ne croît pu qu'Horace ait voulu
faire allusion à Mécène , poisqu'en supposant qne l'esprit
de parti ait alors excité le partisan de Brutus à écrire
contre le ministre d'Octave, Il aurait probablement sup-
primé on modifié le vers qui pouvait le blesser lorsque,
devenu son ami, il flt paraître le premier livre des Satires.
rof. l'Horace édité par Oreltt, L II, p. 18, M.
(1) rof. CatulL, X, 1, et Weicbert, De Ludo Varia y
p. 18.
(t) vie d'Horace.
(S) Nous croyons qu'il s'agit ici des scribm quëtstorU
sexprimi, attachés au questeur urbain chargé du trésor
publie avant qu'Auguste, puis Néron, y eussent appelé,
l'un les préteurs, l'autre un préfet nommé prsêfectm
mrarii. Les tcribœ qiutstorii texprtmi, formant un col-
lège et par conséquent nommes à rie, i moins qu'ils ne
résignassent leur emploi , étalent chargés des registres
de la comptabilité publique, Cest en y apposant leur si-
gnature qu'ils donnaient i ces documents l'authenticité
nécessaire. Voilà du moins ce que l'on peut conclure d'un
passage de Clcéron où il dit : « T a-t-il plus habile faus-
saire que L. Alenus? Il a transcrit les registres publics et
y a contrefait la signature dès sezprtml ( De Natwra
Deontm, Ub. III, | 80). » Déjà une Inscription de Tivoli
nous avait fait connaître un Titus Sabldlus Mailmuv,
scribe du questeur, auquel les Tlburttns avalent élevé un
monument funéraire, par décret du sénat , en reconnais-
sance de ce qu'il avait été le patron de cet Important mu-
nidpe. Nous pouvions en conclure que la charge de scribe
à la questure n'était pas incompatible avec la position
hiérarchique que les habitant» d'une ville exigeaient de
celui dont Ils faisaient choix pour les protéger et veiller
i leurs intérêts. Une Inscription nouvelle (voy. Journal
de Borne, 185», n* lff , p. 6M ) vient de confirmer cette
conjecture; elle offre ce rapprochement remarquable
que le personnage auquel elle est consacrée , Manlus
Valerius Bassus, a été, comme Horace, tribun militaire et
scribe du questeur. Notre poète pouvait donc porter
Panneau d'or :
Tu, cum projectls Insigntbus, anulo equestri ;
Romanoque babttu, prodls ex Judice Dama.
(Sermon, Ub. II, sat. vn, v. 63, st.)
fréquenter la hante société romaine, devenir l'ami de Mé-
cène et rester un modeste employé dn trésor :
De re commun! scribae magna atque nova te
Orabant hodie memlntsses, Quinte, reverti.
« Les scribes te prient de revenir aujourd'hui, Quintus ;
vous avez à délibérer ensemble d'une Importante a(-
139
HORACE
140
Content de peu, sans ambition, sans intrigue
Horace devait à ses premières publications un
nom qui ne lui permettait plus de rester obs-
cur. C'était une conquête à mire que celle de ce
jeune homme dont les mordants ïambes prenaient
une si belle place dans l'histoire naissante des
lettres latines. Cette conquête, Mécène la fit. Ho-
race lui rat présenté par deux, autres poètes ,
Virgfle et Varies. Conduit par eux, il franchit le
seuil du palais où demeurait ce conseiller d'Au-
guste, cet esprit fin et délié dont m haute intel-
ligence politique, la douceur, les goûts littéraires
semblaient si propres à calmer l'Italie encore tout
agitée de ses longues discordes. C'est à Horace
que nous devons l'histoire d'une entrevue qui
toutefois ne décida pas encore de son avenir, ffeuf
mois s'écoulèrent entre cette première démarche
et le jour où il prit rang parmi les amfB de Mé-
cène, auquel il a rendu en gloire plus qe'ti n'en
a reçu en bienfaits. Void comme il s'exprime :
« Votre amitié, Mécène, ne s'obtient pas en la
briguant. U fout la mériter, et voua ne l'accor-
dez qu'à eeui qui s'en rendent dignes. Aussi
n'est-ce pas le hasard qui m'a valu cette amitié
précieuse. Virgile , l'excellent Virgile , et Varius
après lui , vous avaient parlé de moi. Je parus
devant vous; je balbutiai quelques mots comme
un enfant timide. J'étais incapable d'en dire da-
vantage. Je ne me vantai pas d'une illustre ori-
gine; je ne prétendis pas que je parcourais mes
domaines monté sur un coursier de noble race.
Je vous ai dit ce que j'étais. Vous m'avez fait
une courte réponse, selon votre habitude, et je
me retirai. Mais, neuf mois après, vous m'avez
rappelé pour me faire prendre place au nombre
de vos amis. J'en suis fier, car j'ai su plaire à
celui qui juge les nommes d'après leur vraie
noblesse , la noblesse du coeur (1). »
Horace resta toujours ce qu'il avait été dans
(cette première visite à Mécène. Au milieu de la
foule inquiète des courtisans, des ambitieux, des
solliciteurs s'agjtant autour de l'ami du prince,
de ce conseiller favori qui avait le crédit et la
puissance, il fut simple, vrai, affectueux, don-
nant à sajoqange, toujours pure et délicate, un
eertaia tour familier qui rétablissait , malgré la
différence des rangs, cette égalité nécessaire pour
(jue r.amitfé subsiste* Aussi dura-t-elle longtemps.
Pendant vingt ans» jusqu'à la mort qui les frappa
tous deux à quelques mois de distance, ils vé-
curent presque, toujours ensemble, sans que l'af-
fection d'Horace pour Mécène se soit fatiguée un
seul instant du poids de la reconnaissance, il lui
devait son indépendance, ses loisirs, et aimait
à le redire sans cesse ; mais il sut les défendre
contre les exigences de l'amitié quand elles me-
naçaient de devenir quelque peu tyranniques. Ni
flatterie, ni servilité, ni inconstance dans cet
faire, » dttltaraoe en parlant des occupations de toutes
sortes qui le priyent à Rome de sa liberté. (Serm,IAb. Il,
$at. vi, y. 53 -6*. )
(i) Sermonum Ub. /, sat. vi, v. 54-64.
échange de bienveillant patronage et de tendro
gratitude. Il y avait alors des clients et des para-
sites t cela s'est vu de tous temps ; mata à la cour
d'Auguste on avouait son titre. Horae* n'a ja-
mais été le parasite 4e Mécène ; il a toujours été
son ami.
Au printemps de l'année 717, Mécène partit
pour Blindes, chargé par Auguste de traiter
avec Antoine, qui, a la ttte d'une flotte nom-
breuse, se dirigeait vers les Bûtes d'Italie. Danois
un an déjà Hontes était admis dans l'intimité de
Mécène; il Ait do voyage, et nous en a laissé le
récit. A vecun mérite littéraire inférieure d'autre*
compositions du poète, la satire du voyage à
Brindes (1) n'en a pas moins un grand intérêt
pour la biographie d'Horace et pour l'histoire de
la vie familière des riches patriciens dans leurs
fréquentes excursions hors de Home. Horace suit
la voie Appia, que des fouillas nouvelles vien-
nent de découvrir entièrement, avec sa longue
avenue de tombeaux et son pavé basaltique, où
les roues du char qui portait te poète ont aidé
à creuser le sillon qu'on y voit tracé. A seize
milles de Rome il se repose à Aricie , là où der-
nièrement on a retrouvé , sur les bords de la
voie antique, tes ruines d'un'4toer«orttf*i dont
les voûtes recelaient encore quelques vases con-
tenant forge destinée au* montures des voya-
geurs; c'est Vhospitium modieum qui rut le
terme de sa première journée. Le second jour il
arrive au forum d'Appiue, station des marais
Pontras connue seulement par son voyage et par
celui de saint Paul. C'est là que ce dernier s'em-
barque, au milieu du tumulte causé par les
bruyants mariniers et les hôteliers fripons; c'est
là que, dans le silence et le myBtère, quelques chré-
tiens de Rome viendront bientôt au-devant de l'A*
notre pour le conduire dans la ville éternelle, à
laquelle il apporte un empire plus durable que
celui des Césars (2). Le canal sur lequel s'em-
barquait le poète conduit encore aujourd'hui
jusqu'à la mer les eaux du Nymphseus, sorti du
pied de la montagne au haut de laquelle s'élè-
vent les remparts pélasglques de Korba. Les
moustiques y pullulent toujours, les grenouilles
y coassent ; mais on n'entend plus le matelot et
le voyageur chanter pendant la nuit leur mai-
tresse absente. Vers le matin Horace débarque
à Feronia ,et trois milles plus loin il retrouve à
Terracine Méeène, Cocceius Nerva et Fonteius
Capito. Ce sont les ministres accrédités pour con-
clure un de ces traités par lesquels les triumvirs
se partageaient l'empire du monde quand ils
étaient las de se le disputer lés armes à la main.
A Fondi t ces nobles patriciens , qui vont déci-
der de la paix ou de la guerre, s'amusent des
prétentions d'un magistrat de village; puis, à
(1) Sermonum Ub. /, sat v.
(i) m Nos frères de Rome vinrent an-devant de nous
Jusqu'au forum d'Appius. Paul les ayant vus rendit grâces
à Dieu et fat rempli d'une nouvelle confiance. »Acte$ des
Jpôtres, en. xxvxn.
141
HORACE
142
Smuessa, Horace cal rejoint par *trgn>, ▼a-
rius et M. Plotius Tueea, « les âmes les plue
candides qui forent Jamais, dit-il , €t mes amis
les phis chers. Quels embrasseraente , quels
transports de joie! Tant que j'aurai ma raison
il n'est rien que je compara à un aimable
ami. » A Capoue, Mécène, malgré ses hâta-
tndes efféminées , se délassé 4» voyage en jouant
à la paume; Horace et Virgjle vont dormir. Le
premier nous apprend qull souffre das yena,
son mal habituel; le second * déjà cette santé
débile qui doit trop tôt Venlove» aux lettres :
Lusumtt Mscenas, dormttutn ego VlrflHuaquej
ftamqae plia UepU IpUsltum et Indef* cnMto.
Des hommes d'État illustres pat leur aafa>
sanoe, consommés dans les affaires, 4es postas
qui vivront à jamais dans l'avenf* et seront la
cloiro littéraire du siècle 4'Auguste, voilà les
types de cette société d'élite an milieu de la-
queHe Horace est désormais *?•«*• à wHrra. B y
a bien aussi dans *a troupe voyageuse 0ea Pa-
rasites, des beuffitms complaisants. Aflapene!,
Messius et Sameatas font assaut da plaisants*
ries pour divertir les voyageurs. Mais si notre
poète fait, à limitation de Lucinus (I), «n réeit
enjoué du voyage, tfl «*<»** a»«c nna douce
eaieté les inconvénient» delà route pan frayée
qn'» partir de Béaévent * éoène pcéstra à la
grande voie Àpfaa, r*$f*a ttfarta», il est «as*
tant par son récit même qu'il est l'ami et non
le complaisant da teut-puissant ministre. Il lut
vendra désonmais en nommages, an louanges
fines et sincères, «eayfl doit à ses friraanoaa
affectueuses, et il garda» aa dignité. De Brindns,
on Horace prend aongéda son ieateur, il snifit
«ans doute Mécène à Tarante, C'est là qn'O*
taveet Antoine, signant un traité qui datait etm
fcientét rompu,, prorogèrent tour triumvint 9
dont te temps venait d'expirer j Horace ï *m*
posa peut-être eette oaejftm «areatèr» sombra *
mélancolique où l'ombre da phëaeaph* tarent*
Areuvtas demande è an nanteniar la pieuse au-
mône d'un peu de paHMièra (3). Horace montrait
ainsi, dans deux compositions d^un genre aussi
opposé que cette «da et la satin» du voyage à
Blindas , une «exittaté de talent dont U aimait
à se vanter. * Le raètnt d'Arcbaoïroe, a-*41 dit,
se mêle dans mes vers à cakii da la mate Sapbo,
à celui d'Alcoe. Traiter toujours des sujets nou-
veaux, passer aous les yeux et dans les mains
de nobles lecteurs, vnilà la gtoirequa j'aima, v
Tempérât hs efe*eeM masejn P*** maaeulâ Sapbo.
Tempérât aiceu* ......... »t , . . .
(1) Porphyrton dit à propos de cette satire ; tortll um
Itac saBra *m&wr mraiivt iter sww a Rima m«*
ad Brmdisium de$cf*bens; primwn a fiotna Cqywm
usque, et inde/rctvm Siciliens*.
(î) Kirchner { QwesL Qorat. ) et WalcJumaBr ont sup-
posé qu'Horace ayalt dû composer cette ode pendant «on
vojage à Tareote, en se fondant sur ce lait que le poète
y menttoone plusieurs localités de la Calabre et y parle
des flots de l'Adriatique; en sorte que tout y atteste la
présence de l'auteur dans l'Italie méridionale, et que rien
n'y rappelle le séjour délions*.
I ingenois ocnUsque legt , maritasejie tenait (1).
j De retour à Rome , Horace continua d'y pu-
! Mier les dix satires de son premier livre. C'est
; entre la publication de ce premier livre et l'a-
I chèvement du second qu'il faut placer le don que
1 lai fit Mécène d'une ferme dans la Sabine (2).
Jamais présent ne fut reçu avec plus de recon-
naissance, jamais bienfait ne valut à son auteur
une renommée plus durable. En devenant l'ami
de Virgile et d'Horace, en mettant ce dernier
au-dessus des soins ordinaires de la fortune, en
lui rendant doux et facile ce recueillement de
la solitude si favorable au développement des
beautés littéraires, Mécène a fait de son nom un
titre d'honneur pour ceux qui donnent aux let-
tres f appui généreux de la richesse et de la
puissance. Horace, de son côté, loin des exi-
gences de la ville et des rivalités bruyantes, de-
vait a la libéralité de Mécène cette indépendance,
cette liberté d'esprit qui lui permirent de peindre
la soçjété romaine avec ses ridicules ou ses vices,
sans la calomnier jamais , sans jamais la flatter,
la jugeant telle qu'il la vit avec sa douce phi-
losophie :
Et mini res, non me rébus sobjungere conor (8).
peureux dans son domaine , Horace l'a chanté
souvent, et se plaisait à en décrire le site pitto-
resque au milieu des montagnes de la Sabine.
Pics élevés, vallée profonde, source voisine de
l'habitation, torrent impétueux emportant quel-
quefois dans ses crues rapides l'espoir du labou-
reur, chaque accident de terrain est retracé dans
ses vers avec cet accent de vérité , cette pro-
priété d'expressions qui n'appartiennent qu'aux
poètes vraiment dignes de ce nom. Dès la re-
naissance des lettres , l'intérêt qui s'attachait à
Horace fit chercher avec ardeur l'emplacement
4e sa villa; et, malgré les détails nets et préeis
de sa description, on a cherché longtemps. Nous
avons constaté ailleurs quels avaient été les tra-
vaux entrepris à ce sujet ( Vie d'Horace, édition
elzevirienne de MM. Didot, ch.IV). Nous avons
dit comment Cluvier fut le premier, vers le com-
mencement dudix-seplième siècle, qui reconnut
dans Je bourg moderne de Vicovaro l'antique Va-
ria, oh se rendaient les colons cultivant le champ
d'Horace (4) :
Qulnque bonos sontum Variam diœitterre patres (s) ;
comment Holstenius, l'ami de Cluvier, son com-
pagnon de voyage et sou habile annotateur, fit
faire à la question un pas da plus; comment
i} détermina le nom du torrent moderne de Li-
canza, qui se jette dans TAnio à deux milles de
Vicovaro, et retrouva dans «a cours d'eau la
pigenfia dont Horace avait ditt
(t) V<*V- faute* Biogr. $w fforace eu tôle de l'édition
«isevirfcnne d'Horace publiée par Uty. flrmiu Didot,
(9) EpUtolmrum W>. I, *, ▼. 1».
(A) Cluv., Ital. ant., p. 785.
(5) EpUtoh lab. I, xiv, v. *>
148
HORACE
144
Mé quottcs reflett gettdvs Bigentia rivua,
Qnem Mandela Mbit (l)
puis, comment dans Rocca Giovane, petit vil-
lage placé sur le sommet d'an pic aigu, à quatre
milles de Licenza, il reconnut le Fanum putre
VacurtXy ce temple de Vacuna qui déjà tombait
en ruines au temps d'Horace , et qui fut rétabli
par les soins de Vespasien, ainsi que le prouve
une inscription où on lit que cet empereur répara
le temple de la Victoire : Mdem Victortx resti-
tua. Bientôt deux antiquaires, guidés par ces
diverses indications, crurent retrouver dans
quelques ruines romaines situées sur la rive
droite de la Digentia, à quatre milles environ
de Bardella, en remontant la vallée , et à un ki-
lomètre environ du petit village de Licenza,
le site précis de la villa donnée à Horace par
Mécène.
Des travaux récents semblent devoir modifier
cette opinion, et reporter sur un autre point de
la vallée de la Digentia le site de la villa d'Ho-
race (2).
C'est au delà du village moderne de Rocca
Giovane, en suivant la voie antique qui se déta-
chait de la via Valeria pour se rendre de Tibur
an temple de Vacuna, qu'après avoir dépassé ce
temple on parvient, en s'élevant toujours, à
une colline nommée dans le pays Colle del Poe-
tello, au delà de laquelle on observe un terras-
sement artificiel régulier, maintenant en culture,
et qui toutefois a évidemment servi d'aire à on
édifice. Des briques rompues par le soc de la
charrue et mêlées à la terre du champ sont les
seuls débris de construction ancienne restés sur
le terrain; mais la forme du terrassement, son
aplanissement, la régularité de ses angles, in-
diquent le travail de l'homme et présentent la
disposition des villas romaines dont les pentes
des monts Albains offrent, aux environs de Tus-
culum, d'Albano, de Lanuvium, un si grand
nombre d'exemples. C'est un plateau élevé : in
arcem ex urbe removi ; et toutefois ce plateau
est parfaitement abrité à l'orient par le monte
délia Costa, au midi par le monte del Corgna-
leto, dont les cimes se rapprochent, défendant
le plateau contre l'ardeur du soleiKou les pluies
qu'apporte le vent d'est dans cette partie du lit-
toral de la Méditerranée. « Souvent le dieu
Faunns abandonne le mont Lycée pour le mont
(1) EpUtolarum Lib. 1, xvm, lot, 105.
(i; MM. Firmln Dldot , désirant que la nouvelle édition
des Œuvres S Horace qu'ils se préparaient à publier
conUnt les détails les plus précis sur les lieu qu'avait
habiles le poète, Je me rendis, en 1854, dans la vallée de
la Digentia. Voulant en faire dresser une carte exacte,
j'avais pris pour compagnon de voyage l'habile architecte
M. Pletro Rosa, auquel l'Institut archéologique de Rome
doit le tracé de la via Appla, la découverte du diverso-
rtum de l'Arlda, et qui nous donnera bientôt une pré-
cieuse carte A grande échelle dn Latlum, et des voles
anUques qui le sillonnaient. Ses études sur les lieux
mêmes l'ont amené à reconnaître, derrière le peUt vil-
lage de Rocca Giovane, l'emplacement désigné sur la
carte Jointe à l'édition elzevlrlenne de MM. Dldot comme
celui de la villa d'Horace,
Loorétile, et vient protéger mes chèvres contre
les vents pluvieux et les feux de Tété (1). »
Que le Corgnaletos soit précisément lé Lucré-
tile, nous en trouvons la preuve dans un pas-
sage d'Anastase le Bibliothécaire. Rendant compte,
dans la vie du pape saint Sylvestre, des dona-
tions faites par l'empereur Constantin à l'église
de Saint-Pierre-et-Saint-Marcellin sur la via La-
bicana, Anestase cite un fonds de terre dans la
Sabine appelé Ad duos Casas et placé sous le
mont Lucretius (2). Clavier avait déjà reconnu
que le mont Lucretius de l'auteur du Liber Pon-
t\ficalis ne pouvait être que le Lucrétile chanté
par Horace (S) ; mais, trompé par quelques rap-
ports de nom, il croyait le reconnaître à Monte
Libretti , près de Cures , où il supposait qu'a-
vait dû s'élever la villa donnée par Mécène. Ce-
pendant, une pièce d'archives annexée au registre
du cadastre dressé pour la vallée de la Digentia
fait mention du Fundus ad duos Casas, sur le
sol duquel s'élève maintenant une petite église
construite vers le seizième siècle, et devenue,
par une transformation de nom qui constate son
origine, la M adonna dette Case. C'est donc bien
véritablement la cime du Lucrétile qui domine
et abrite ce terrassement artificiel sur lequel de-
vait s'élever la villa du poète. Si les soins de la
culture pendant un grand nombre de siècles ont
adouci les traits du tableau; si le noyer, le châ-
taignier, le figuier ont remplacé le chêne et
l'yeuse, quercus et ilex; si les moissons et la
vigne croissent où croissaient la prunelle et le
cornouiller (4), c'est l'effet du travail de l'homme ;
mais' les reliefs du terrain, les grands traits de
géographie physique ne changent pas, et ils sont
encore dans la petite vallée de la Digentia ce
qu'ils étaient an siècle d'Auguste. On doit s'at-
tendre à retrouver auprès de la villa d'Horace
cette limpide fontaine dont il a célébré l'abon-
dance et les bienfaisantes qualités en homme
qui n'avait à offrir à ses hôtes que le vin âpre
de la Sabine, et encore dans de petites coupes :
Vile potabls modieto Sablnum
Cantbarls (S).
En effet, à quelques minutes du terrassement
artificiel que nous croyons avoir servi d'aire à la
maison d'Horace, tout auprès de l'églisede la Ma-
donna délie Case, au pied d'un roc, à l'ombre
d'un immense figuier, on voit une source dont
l'eau fraîche et pure sort du rocher assez abon-
dante pour former déjà un ruisseau qui va 3e
jeter dans la Digentia, offrant cette circonstance,
remarquable que la Digentia, aujourd'hui la
(1) Carmin. LAb. h xvn, v. 1-*.
(l) Possesslo In terrltorlo Sablnensi, quaecognomlnatiir
Ad dwu Casas., sub monte Lacretio. (Anast, dans Mu-
rat, Script Rer. Ital., t III, p. 110.)
(3) Haud dublo mon» Lucretius Idem est qui LucreWis
dlcttur ab Horatto. ( Ou t., Ital. Ant. f p. «71. -
(*) ... Rublcunda benlgnl
Corna vêpres et pruna feront
(EpUtolarum Lib. /,XVI, v. 8-9.)
(») Carminutn Lto. 1, ode xx, v. I, t.
145
HORACE
14ft
LiceMOf ne porte ce dernier nom qu'à partir
du point où elle reçoit cet affinent. Jusque-là
on rappelle simplement il Sivo. Font etiam
vivo dare nomen idoneus, a dit Horace dans
son épître à Quinctias (i). Il faut ajouter que
cette fontaine aimée do poète porte dans le pays
le nom de Fonte delY Oratini, et que nous
avons parlé tout à l'heure du Colle del Poetello.
Sans doute il ne fout pas exagérer la valeur qu'on
peut donner à de tels rapprochements de noms;
ainsi c'est à tort queFlavio Biondo croyait trou-
ver à Vaccone, non loin de Rieti, le temple de
la déesse Vacuna; c'est à tort aussi qu'on à
voulu placer une villa d'Horace à Pnêneste,
parce qu'il s'y trouve un domaine appelé la Te-
nuta di Campo-Orasto. Cependant on sait avec
quelle ténacité certains noms se conservent à
travers les âges, et si Vaceone, par exemple, ne
nous indique pas le temple chanté par Horace,
ne peut-il pas indiquer les bois de Vacuna, si-
tués aussi près de Rieti, et dont parle Pline en fai-
sant la description de la quatrième région de l'Ita-
lie^)?
La fontaine de l'Oratini, voisine de la mai-
son du poète, doit-elle être identifiée avec la
fontaine Bandusie, splendidior vitro, à laquelle
il a adressé une ode si gracieuse (3)? Il y a de
fortes raisons d'en douter. Ce nom de Fons
Bandusia, Horace ne l'a écrit qu'une fois ; c'est
dans l'ode qu'il lui consacre, et rien n'y indique
qu'elle soit située près de sa maison de campagne.
Il est probable que c'est un souvenir de Yenusia,
sa patrie. Du moins peut-on citer à l'appui de
cette opinion un passage du Bullaire romain.
Une bulle du pape Pascal II, datée de l'an 1103,
parle non-seulement d'un bourg Bandusium.,
placé près de Venouse, mais encore d'une église
de Saint-Gervais-et-Saint-Protais qui s'élève dans
le même lieu, sur les bords de la fontaine de
Bandusie (4). On peut supposer, il est vrai, que,
par souvenir, Horace avait appelé ces eaux lim-
pides, qui donnaient tant de charme à son habi-
tation, du nom de la fontaine à laquelle il allait
rafraîchir ses lèvres pendant les jeux de son
enfance ; mais ce'n'est qu'une conjecture, puis-
que, partout où il a parlé de la fontaine voisine
de son toit, tecto vicinus aquxfons, il ne lui a
pas donné de nom.
Quoi qu'il en soit, si aucun des rapprochements
que l'on peut faire entre les descriptions d'Ho-
race et l'aspect des lieux n'est parfaitement con-
cluant par lui-même pour déterminer le site précis
de sa villa, il parait résulter de cet ensemble de
témoignages une forte présomption en faveur de
l'emplacement indiqué sur la carte nouvelle. —
(I) Bpittolarvm Lib. /, xvi, ▼. H.
(l) H. N„ LUk III, | XTit (xii).
(3) Carminum Lib. III, ode xin.
(*) Ecclesiam S. Sateatoris, cum aliis ecclesiit de
Cattello BanduH. Item EccUsiam SS. MM. Gervaêi et
Protasi in bandusino fonte apud renurtwn ( Pascal II,
an nos, Bullar. Jtom., t, II, p, 1»).
Distance à partir du temple de Vacuna,— abri
des montagnes, — position élevée, — identité
du Lucrétile avec le Corgnaleto, — voisinage
d'une source dont l'abondance et la fraîcheur se
rencontrent rarement dans ce massif de l'Apen-
nin , — noms conservant à travers les siècles le
souvenir d'Horace , — tout semble réunir sur ce
point de la vallée de la Digentia tes chances tes
plus favorables pour y reconnaître l'emplacement
de cette maison modeste, longtemps la seule pos-
session du poète, qui s'y trouvait si heureux :
Sttb beattu unlcto SaMnta (1).
Nous devons à la libéralité de Mécène cette pi-
quante variété des poésies d'Horace, qui nous
trace de si gracieux tableaux de la vie des champs,
en même temps qu'il nous peint les tracas de la
ville, les embarras de la foule, les intrigues, les
agitations, les loisirs de la société romaine. Rome,
dès les premiers temps de sa fondation, avait
eu deux passions : la guerre et l'agriculture;
'étendre son territoire et le fertiliser. Elle allait
prendre ses généraux à leur charrue, et les ré-
compensait après la victoire par le don de quel-
ques arpents de terre. Caton, le vieux Romain,
composait un traité d'agronomie, et le poème le
plus accompli delà muse latine est celui. où Virgile
a décrit l'aimable diversité des travaux delà cam-
pagne. Horace aime et fait aimer cette vie calme
de la Sabine, où il semble retremper dans l'air
pur des montagnes la vigueur de son esprit. S'il
faut se rendre à Rome, c'est à regret qu'il quitte
la vallée de la Digentia ; mais du moins il nous
promène avec lui dans la grande ville. Avec lui
nous allons du champ de Mars à la voie Sacrée,
du Quirinal au mont Aventfn. Dès le matin tout
s'éveille : les affaires ou la cupidité amènent sur la
place publique le peuple des plaideurs, des solli-
citeurs, des parasites. Il faut fendre la foule et que-
reller les oisifs, au risque de s'entendre dire : « Qu'a
donc cet insensé, qui renverse tout en courant chez
son Mécène (2) !» Les chars, roulant pesamment
sur le pavé de lave, heurtent contre un cortège
funèbre. L'entrepreneur, suivi de ses mulets et
de ses manœuvres, se hâte d'aller ruiner par de
folles constructions quelque nouvel enrichi ; des
poutres, hissées par des machines, menacent de
retomber sur les passants. Ici le candidat, averti
par ses nomenclateurs, va serrer la main de tout
électeur influent dans sa tribu (3) ; là c'est un
chasseur traversant le Forum avec une meute,
des pieux et des toiles, pour rapporter, le soir,
un sanglier acheté au marché voisin. Un poète
cherche des auditeurs et poursuit les passants
de ses vers. Puis viennent les fâcheux, désireux
d'exploiter le crédit qu'ils supposent à Horace.
Et cependant que lui dit Mécène quand ils sont
tète à tête dans une litière ? Il lui parle du gladia-
teur Syrus ou se plaint du froid des premières
(1) Carminum Lib. II, ode xvm, ▼. H.
(l) Sermonum lAb. Il, sat vx, ▼. 19-81.
(9) Epistolarum Lib. i, vx, M.
147
HORACE
148
matinées d'automne (1). Aussi quel plaisir tort*
que, échappé de la ville, le poète ae réfugie dans
les montagnes 1 Sans ambition, à l'abri des ma*
lignes influences qu'apportent les derniers mois
de Tannée, qu'a*t-il de mieux à Caire que d'ai*
griser les traits de la satire (9)T
Dès les premiers vers du second livre, bous
voyons l'effet que produisirent à Rome les Satins
d'Horace. « Si j'en crois certaines gens, dit-il, ma
verve est trop mordante, et je passe toutes
les bornes; d'autres disent que mes écrits sont
sans nerf, et qu'on pourrait aligner en un
jour mille vers comme les miens (3). * Sans
le bruit qui se faisait autour de lui à chaque
composition nouvelle, Horace ne se serait pas
ainsi mis eu scène. Four avoir le droit de parler
de lui-même;, il avait dft reconnaître! avec sa
pénétration et son tact si parfait, l'impression
produite sur le public par les traits acérés ou
plaisants de cette comédie un pen triste que lui
donnait la société romaine. C'est qu'alors ,•
comme a^rès toutes les révolutions , la satire
avait à faire, à Rome, une ample moisson de
vices et de ridicules, d'anarchie et la terreur
avaient achevé leur rôle i les haines de parti
s'adoucissaient, sans doute, mais l'influence des
discordes civiles avaient amené dans l'ordre so«
cial des transformations, des métamorphoses
dont on se sentait blessé et qu'où attaquait par
l'ironie , a défaut d'armes plus puissantes. Les
classes de la société, si longtemps séparées,
avaient été en partie confondues. Les proscrip-
tions avaient déplacé les fortunes ; ceux-ci étaient
ruinés , ceux-là riches au delà de leurs espé-
rances, et l'argent donnait la fantaisie de deve-
nir homme d'Etat. De là l'importance des par-
venus, fiers des suffrages qu'Us avaient achetés \
de là le désir de courir à la fortune par toutes
les voies , la chasse aux héritages , les rapines
de l'usure, la prodigalité des uns, l'avarice des
autres. De là aussi cette verve satirique du poète
qui met en scène,, quelquefois sous leur propre
nom, l'avare et le prodigue, l'ambitieux, l'ama-
teur de bonne chère, le coureur d'aventures
galantes, La satire était devenue la comédie de
l'époque; elle remplaçait le théâtre et consolait
les vaincus en les faisant rire anx dépens de ceux
qui profitaient delà victoire. Mais bientôt la toute-
puissance d'Auguste, légitimant les changements
survenus pendant la lutte des partis, fit taire l'es-
prit d'opposition jusque dans son expression la
plus détournée, et sut imposer aux plus grands
poètes de son temps les complaisants mensonges
du panégyrique et de l'apothéose.
Nous trouvons, dans la sixième satire du so-
ft) Sermonum Lib, //, sat. vi, t. tt-45,
(I) Ergo abl me In montes et In arcem ex orbe removi,
Quld prias illustrera satiris musaqae pedestrt?
Nec mala me ambitio perdit, nec plumbeas Aaster
Aatamnnsque gravis, Llbltin» quœstus acerlwp.
( Sermonum Uh. U r sat. vz,
(S) Sérmmwm 14*. //, ait. i, v. 1-4.
oond livre, un renseignemeiit préeteira pour
fixer l'ordre chronologique des poésies d*Horaoe.
« Il y aura bientôt huit ans, dit-il, que Mécène
« m'admit au nombre de ses amis (l). » Puis-
que l'intimité du grand seigneur et du poète
avait commencé en l'an de Rome 716, c'est donc
de l'année 723 que pourrait dater la composition
de cette pièce, où l'auteur adresse ses remerot-
ments à Mécène pour le don de la villa qui
comblait ses vesux e Ao* erat in votis (2). Quel-
ques-unes des épodes appartiennent à la même
époque. Mécène allait partir pour accompagner
Octave dans la guerre actiaque et braver sur
les légers vaisseaux des Liburnes les citadelles
flottantes ou s'abritait Antoine : alta navium
propugnacula (3). Horace aurait voulu enivre
son ami i c'est le sujet de la première épode.
Puis, dans la neuvième, éclate le chant de
triomphe pour la victoire d'Actium : « fo triitm-
phel Ou sont les chars dorés et les pures
victimes 1 Ni le vainqueur de Jugurtfca, ni ce-
rai de Oarthage n'ont obtenu tant de gloire.
L'ennemi a échangé sa pourpre contre des
vêtements de deuil. Tenez, esclaves; Tenez
élans de larges coupes les vins de Ohio et de
Lesfees : nous n'avons pms à craindre pour
la fortune de Oésar. » Ainsi commence cette
période de la vie littéraire d'Horace, où l'ode
devint l'expression de ses sentiments politiques,
amoureux, religieux ou philosophiques. Pendant
près de huit années, de trente-six à quarante-
quatre ans , il a publié les trois premiers livres
des (Mes, et il a donné à la littérature latine ce
qu'elle n'avait pas eu encore , ce qu'elle n'a pas
eu depuis , un poète lyrique. Horace répond-il
complètement à l'idée qu'on se fait de l'inspi-
ration lyrique? son enthousiasme est-il réel?
croit-il toujours à ce qu'il chante? Nous ne
le pensons pas. Le temps du vrai lyrisme n'é-
tait déjà plus. Le sentiment religieux dans
toute sa ferveur, la passion de la liberté, l'élan
de tout un peuple , traduit par la voix d'un
chantre inspiré, peuvent seuls le produire.
C'est la forme naturelle de la poésie dans les
cantiques des prophètes, les chants de Tyr-
tée, quelques chœurs de la tragédie grecque.
Déjà Pindare, célébrant les vainqueurs d'O-
lympie,de Delphes ou de Corinthe, n'atteint
plus au sublime de ces premiers modèles , et
crée, à force d'art, une poésie que des courses
de chars et l'appareil d'une fête ne sauraient
lui ipepirer. Horace a dû célébrer aussi cette
fête de la naissance de Rome, ces jeux séculaires
dans lesquels on remerciait ies dieux du Capi-
tale d'avoir donné l'empire du monde au peuple
romain.; sujet plein de grandeur, pour lequel
le poète n'a pas trouvé de ces aeeents pas-
sionnés qui émeuvent une nation. Le Carmen
(i) Sêrmthnm LUk /f, sàl i, t. 4*.
(l) Smwumtm Lib. il, sat. vi, ▼. 1. Voyez, pour la date
précise 4e cette satire, ta note l de la page Si.
$)Epodon Lib., carm. I, v. 1,1.
149
HORACE
no
sœculare n'est qu'une élégante prière adressée
par ua chœur 4e jeunes gens et de jeunes filles
à des dieux auxquels i|s ne er»ieat plus,
Ce qu'on trouvera dans les odes d'Horace» è
défaut de fol religieuse ou politique, c'est l'gx»
pression des sentiments intimes du coeur. ï*e
poète est beureu* de £e livrer au charme d'une
société d'élite qui l'accueille ayac foveur, U est
heureux d'aimer) heureux de voir le calme suc-
céderai orages, fces Partbes ont perdu les aigle*
enlevas à Crassps \ jEJius Gallus pénètre jw>
que dans Je Térnen ; la Hliéta, 1a Vindélieie, la
Norique sont conquises; les Cantabres , les Bre-
tons sont soumis, Qcfcve a reçu le nom d'4w«
$w<*. H tonne aux {tomaiPfti pavr le» eonapier
de Jgur liberté perdue, le gloire des armée et
celle dos arts. Succès militaires, affaires pu-
bliques» affections privées, moeurs 4e le ville i
occupations do 1a campagne, incidents familial
d'une vie littéraire pesées dans 1* culte de*
Muses et le fréquentation d'une cour polie, tel»
sont les sujets de eee petite poemee, *ù, eepi
atteindre à le poésie lyrique des anciens jour*,
Horace met le eberme de son eepHt et l'élé-
vation de sa pensée, II sait trouver dans les
maximes de k morale et dans les principes d'une
douce philosophie, tout aussi pian que dans lee
faiblesses 4» ccepr, de? motifs heureusement
choisis pour transporter dans Ja langue latine ce
qui, che» les lyriques grec*, peut paraître avec
avantage sens la toge romaine. Pour le vérité des
sentiments, pour la vivacité des images, les pièces
les pins intimée eont les pins saisissantes,
et le Jtenec (fratu* eram t%H (l), cette ode ai
fine et ai vrais, qu'elle soft ou non rjuuitetjou
d'une ode de la Grèce, remportera toujours sur
ces odes, quelque peu officielles, où le poète aé«
lèbre eu vers magnifiques les gleiree de l'empire*
On a déployé toutes lee ressource* de l'éru-
dition pour assigner ua ordn» cbroaoiogujne è
chacune de ces eomposi ftona charmantes j pieu
pan', cependant, portent en elles mêmes nue
date certaine, et l'avantage de le connaître n'ar
joute guère eu plaisir qu'on éprouve en la lisant.
Il est probable d'ailleurs, pu plutôt il résulte
d'un examen attenW, que chacun des livrée
à" Odes contient des pièces écrites. 4 différentes
époques de la vie d'Horace. Tout en qu'on peut
espérer, c'est de déterminer dans quelles oroitee
de temps ils ont été écrite, et par conséquent
quelles Déifications ce tempe g dû apporter
aux talents du poète, à, #ee goûta on à ceux da
son public (2).
Vers la un de Tan de Home 733, Horace $t
paraître un recueil des poésies qu'il avait com-
posées jusqu'alors, c'est-à-diredeux livrée des £o>
tires, les trois premiers livres des Odes et le pre-
mier livre des lettres. La vingtième épitre, espèce
d'envoi qu'il adresse è son oeuvre, nous est pré-
(i) Carmimm, Ub. m, ode ix.
(S) Voyez à la fin la note sur l'ordre chronologique
des poéaios.
pause par les renseignemeutsqa'il y donne sur sa
personne et sur l'âge qu'il avait alors, * Si Ton
t'interroge sur mou compte, dit-il è oe livre
qui va paraître pour la première fois aux éta-
lages des libraires, réponds que, pé sans forr
tune et d'un père affranchi, j'ai déployé bore
de mon humble nid une eue ambitieuse. Cet
aveu m'enlève toute prétention à le noblesse ,
«M» j'y gagnerai en mérite et en gloire, Dis
aussi que j'ai su plaire , dans Rome, à ee que
le tege et l'épée y comptent de plus illustre,
Ajoute, pour ceuit qui veulent tout savoir,
que je euie un petit nomme, ami du soleil,
facile è s'emporter, a'apaiaaat de même, et
voyant passer sur se tète blanchie le que*
rontfequatrième Mfif. aujourd'hui que noua
avons pour éeuauis bépide et son collègue
lioHiue (l). »
Si lee odeud'Horece ne rappelle** en rien, par
l'ordre dans laquai allée «ont disposées, l'époque
de leur ceiuateitioa» cet ordre, oepandaat, ne
doitpee être l'effet d'un simple cepriet ; et le poète
sembla avoir eu pour but principal d'exciter
l'attention du lecteur par la variété des sujets
qui l'inspirent. La première ode, adressée à
Mécène, eeUieKe eon suffrage. « gi tu me pro-
clames un poète lyrique, hû dit-il, ma tète
ira toucher lee deux (2)» » La seconde s'a-
dresse è Auguste, la troisième au vaisseau da
Virgile, (4e prince qui adonné lapât* an monde,
le ministre auquel Horace doit ses loisirs, le
grand poète qui fut eon guide et sou ami ont
lee premier? tournages de sa muse dans la car-
rière nouvelle qu'elle va parcourir. Pois vien-
nent l'ode philosophique è Sestiusj la chanson
d'amour è Pyrrha ç le chaut de guerre où, tout
en s'excusent d> monter sa lyre è la hauteur
des exploite d'Agrippé, il la fait vibrer avec
lent d'énergie j l'éloge qu'il fait à Plancus des
fraîches campagnes où l'An» précipite ses ondes.
Pt non-seulement les sujets s'entremêlent ainsi,
tour è tour philosophiques, descriptifs ou
amoureux , appelant è leur aide le sentiment , la
morale ou l'image; mais la métrique iy varie
de telle sorte que lee neuf premières pièces du
recueil sont composées chacune dans un mode
différent, preuve du talent flexible avec lequel
Horace savait adapter è la poésie latine les
mètres divers employés par les poètes lyriques
de le Grèce, C'est qu'il avait un secret merveil-
leux pour pliera la pensée le génie de sa langue,
pour eu démêler et en assembler les nuances.
« «Jamais homme, dit Fénelon, n'a donné uu
tour plus heureux è la parole pour lui taire
signifier un beau sens avec brièveté et délica-
tesse (3). » Sans doute Horace avait trouvé la
langue latine assouplie par lestravanx des poètes
qui Pavaient précédé; depuis longtemps déjà elle
avait perdu sa rudesse , et l'affreux vers satur
(1) Êpistolarum Ub. /, xx, v. *û-iB.
(«) Carmirwm Ub. /, orf. 1, v. 38-39.
(9) Vénéloo, Dialogue d'Horoce et ae rirgilt.
151
HORACE
152
Bien, comme iP rappelle, avait fait place à
l'hexamètre des Grecs (1). Lucrèce et Catulle
avaient habitué l'oreille à ira rhythme plus sa-
vant, plus harmonieux et plus flexible. Cepen-
dant Orbilius dictait encore à Horace enfant
ies poésies surannées de Livius Andronicug, et,
pour arriver au développement complet de l'art
d'écrire des vers, pour élever une poésie d'i-
mitation , et pour ainsi dire de traduction, telle
qu'Orbilius l'admirait chez ses poètes favoris,
jusqu'à la maturité du goût qui a fait des écrits
du siècle d'Auguste la plus haute expression de la
littérature latine, il fallait réunir cette finesse de
sentiment, ce tact parlait, cette verre d'exprès*
sions , cette richesse de pensées qui sont l'a-
panage de quelques rares génies dont Horace est
pour nous l'un des meilleurs modèles.
La maigre biographie attribuée à Suétone,
seul document authentique que l'antiquité nous
ait légué sur la vie d'Horace, est aux Jeux
tiers remplie par le récit des rapports d'amitié
qui existèrent entre le poète et l'empereur.
Auguste avait compris quelle peut être la puis-
sance des lettres à une époque où,, par un tra-
vail successif, la littérature d'un pays est ar-
rivée à son plus haut point de perfection et par
conséquent d'autorité; or, ce temps était venu.
De quelle année, cependant, devons-nous dater
les premiers rapports qui s'établirent entre
Auguste et Horace? Suétone n'en dit rien. D'a-
près une ancienne vie du poète tirée d'un ma-
nuscrit originaire de la Vaticarie et publiée pour
la première fois par M. Vanderbourg (2), Horace
aurait été présenté à l'empereur au début de sa
carrière littéraire. L'auteur anonyme dit en effet :
« Horace fut introduit auprès d'Auguste par
Mécène et PollionJ Après cette présentation,
Mécène l'invita à transporter dans la langue
latine les mètres variés inventés par les Grecs et
encore inconnus aux Romains (3). » D'abord,
il est peu probable que ce soit Mécène qui ait
inspiré à Horace le désir de reproduire dans sa
propre langue les mètres d'Archiloque , d'Ateée
ou de Sapho ; le poète n'a reçu, sous ce rap-
port, d'inspiration que de lui-même. U nous l'a
dit : « Quiconque croit en soi guide les autres et
marche en tète de l'essaim (4). Puis, en
supposant que , dès les premiers temps de son
séjour à Rome, Horace, sous le patronage de
Polhon et de Mécène, ait été présenté à Octave,
il parait certain que les rapports plus intimes
qui s'établirent entre eux sont postérieurs de
plusieurs années à la bataille d'Aetium. Le poète
a passé à Praneste l'été de l'an de Rome 727,
(1) HorridnsUle
Deflmlt numéros Saturnins.
(Bpistolarvm Lib. Il, h y. m-iW.)
(t) Paris, 1811, 1. 1, p. x.Y-iYn.
(S) MmeenaUs vero et Potllonù intervent*, in gratiam
J*êuM récent* e$L Dein, a Mmeenate roçatus est
trm&rre varietates wutromm Lntinit incognito*
ftur mpmd Crarcet tarant* fuermnt.
<*)£** 14». /.XOC, V.tl,t3.
pendant lequel, 'ainsi qu'il nous l'apprend, il
relisait les poèmes d'Homère (Bpist. £.11, v. 1, 2).
Prœneste était , d'après Suétone, un des séjours
favoris d'Auguste, n est donc possible que de
cette époque date la liaison qui se forma entre le
chef de l'empire et l'ami de Mécène; du moins
l'éloge du prince revient dès lors plus souvent
sous la plume du poète.
Il aurait été difficile que, trompé dans les
espérances de sa jeunesse, frappé des maux de
la guerre civile, heureux d'y échapper, Horace
résistât aux séductions qui l'entourèrent Quel
prince d'ailleurs a jamais possédé mieux qu'Au-
guste l'art de n'exiger de ses sujets que te sacrifice
de la portion d'indépendance qui pouvait gêner
son pouvoir! Les formes républicaines vouaient
encore ce qu'il y avait d'absolu et de complète-
ment monarchique dans le gouvernement : voile
transparent sans doute, et ne cachant la vérité
qu'à ceux qui mettaient quelque bonne volonté
à ne pas là découvrir, mais suffisant, toutefois,
à justifier la capitulation des consciences faciles.
H n'est donc pas étonnant que l'esprit conciliant
et délicat d'Horace , rendant justice à ce qu'il y
eut de réparateurdans le gouvernement d'Auguste
après la victoire, se soit laissé entraîner par ces
flatteuses avances , cette familiarité des grands
qui jettent dans une ivresse si douce des âmes
même fortement trempées; car Auguste fit les
avances. H voulut avoir Horace près de sa per-
sonne et écrivit à Mécène : « Jusqu'ici j'adres-
sais à mes amis des lettres écrites de ma main;
mais je suis accablé d'affaires et ma santé n'est
pas bonne : amenez-moi notre Horace, afin qa*Q
puisse m'aider (1). » Le poète refusa d'aliéner
son indépendance, et, loin de lui en vouloir de
son refus, Auguste lui répondit : « Notre cher
Septimius pourra vous dire quel souvenir je
conserve de vous; l'occasion s'est offerte de
m'exprimer devant lui sur votre compte. Si voos
avez cru devoir mépriser mon amitié , je ne vous
paye pas du même mépris (2). » Et puis encore :
« Usez des droits que vous avez sur moi, comme
si vous étiez mon commensal. Et ne le series-
vous pas, ainsi que je le désirais, si votre santé
l'eût permis (3)! » Le moyen de résister à ces
aimables cajoleries , à ces rôles intervertis , à cet
empereur qui se fait le courtisan du poète ! Horace
pouvait-il refuser de dédier quelqu'une de ses
poésies au prince qui lui écrivait : « Sachez que
je suis faehé contre vous de ce que vous ne vous
adressez pas à moi dans vos épttres. Craignez-
vous de vous Caire tort auprès delà postérité en M
faisant connaître que vous avez été mon ami (4) ? »
A une plainte si aimable, le poète ne pouvait faire
moins que de répondre :« Ce que je crains, Ce-
(1) Suétone, rie d'Horace,
(t) Suétone , rie d'Horace, traduction de M. Patin,
dans son étude sur Virgile et Horace, collection des clas-
siques de M. D. flisard.
(S) Snétone, VU d'Hormce.
(*) Suétone, rie d'Home*.
15S
HORACE
154
sar,en vous voyant soutenir seul le fardeau d'un
vaste empire, défendre l'Italie par vos armes, ré-
former ses mœurs et lui donner des lois, ce que
je crains, c'est de dérober au peuple, par de longs
discours, le temps que vous consacrez à son bon»
heur (1). » Jusque-là la louange n'était que jus-
tice. Auguste avait donné à Rome la gloire au de-
hors, Tordre au dedans-, et son pouvoir était la
condition nécessaire d'un repos durable. Mais
quand le poète accuse de démence le vertueux La-
béon ; quand Virgile efface l'éloge de Gallus, parce
qu'ils ont encouru la disgrâce du maître, ils dépas-
sent la mesure. Nous regrettons alors que ces
grands esprits, si ingénieux et même si sincères
dans l'expression de leur enthousiasme, se soient
aveuglés sur certains excès de la toute-puissance,
et qu'ils semblent avoir obéi plus encore à l'ins-
piration de leur gratitude qu'à celle de leur patrio-
tisme. C'est à la demande d'Auguste qu'Horace,
revenant à la poésie lyrique qu'il avait abandonnée
pendant quelques années, composa le quatrième
livre de ses Odes. L'empereur fondait sa dynastie
et voulait que Drusus et Tibère, alors en Ger-
manie, eussent leur part dans ces vers qui consa-
craient la gloire militaire et popularisaient le pou-
voir (2). Ce fut encore à la demandedu prince que
le poète, en 737, célébra les Jeux Séculaires ; il
était devenu le chantre de tous les succès, de
toutes les fêtes, et savait, par l'élévation des pen-
sées , la pureté du goût, la variété des formes ,
sauver ce qu'il y avait d'officiel dansées panégyri-
ques de l'empire. Pendant les dernières aimées de
sa vie, Horace se trouva ainsi rapproché, par l'af-
fection du prince et par celle de Mécène, de ce que
Rome comptait de plus illustre parmi ses citoyens.
Le talent du poète était admiré de tous ; sa vie était
facile , ses rapports aimables , son amitié désirée.
S'il avait été ambitieux d'honneurs ou de riches-
ses , il aurait pu tout obtenir ; mais il ne deman-
dait à ces hommes puissants qui l'entouraient
que l'échange d'une douce familiarité, d'une
élégante causerie. A la ville , il habitait sans doute
près du vaste palais que Mécène avait fait cons-
truire sur le haut du mont Esquilin. Du moins,
dans l'épttre ou il s'adresse à son livre, il lui
dit : Fuge quo descendere gestis (3). A la
campagne , il commençait à préférer le séjour
de Tibur, dont la température était plus douce,
aux âpres montagnes de la Sabine. Nous lisons
dans Porphyrion qu'à l'époque où il écrivait le
quatrième livre de ses odes il passait à Tibur
tous ses moments de loisir (4). C'est que déjà
sa santé n'était plus aussi bonne. Dans la quin-
zième épltre du livre premier, il, interroge Num-
mkis Vala sur le climat et les productions de
Salerne et de Veliœ. Il a besoin de passer au
(1) Bpi$tolarum, LU. Il , i, y. 1-4.
(l; K bf. la ♦• ode du livre IV et U 14» du même livre.
(8) Epùtolarum Lib. /, xx, ▼. S.
(4) Tiburi erUm fere otium suum confirebat, ibique
carmina conscribtbat. {Foy. Braonliardat., I , aect II,
p. SS8, IS4.)
milieu d'un air tiède la saison des frimas. Le
médecin d'Auguste, Musa, lui défend les eaux
de Baïa, et ne lui a pas rendu la santé en le
faisant plonger dans l'eau glacée en plein hiver.
Plus tard il se plaint à Celsus Albinovanus d'un
malaise général , d'une inquiétude d'esprit qui ne
lui permet . pas le repos. 11 ne veut rien faire ,
dit-il , de ce qui pourrait guérir son mal ; il évite
ce qui lui serait salutaire, pour ne rechercher
que ce qui peut lui nuire. S'il est à Rome il re-
grette Tibur, s'il est à Tibur il veut revenir à
Rome (1). L'habitation qu'il avait alors sur les
bords de l'Anio, il la devait sans doute à la li-
béralité d'Auguste ; du moins Suétone nous dit
qu'à deux reprises le prince, par ses dons , aug-
menta la fortune du poète (2). Horace prouvait
sa reconnaissance à ses nobles amis en ne s'é-
loignant d'eux que le moins possible, et en leur
consacrant sa personne comme ses vers. Le siècle
d'Auguste, ce grand siècle littéraire, a commencé
avec Virgile et devait finir avec Ovide, qui ne fit
qu'entrevoir l'auteur de V Enéide (Virgilium
vidi tantum). Vers l'époque à laquelle nous som-
mes parvenus, Virgile, Properce, Tibulle, Gallus,
Varius étaient morts ; Ovide avait à peine écrit
quelques élégies. Horace seul brillait de tout l'éclat
de son talent. Comme s'il eût prévu que l'on tou-
chait à cette décadence qui souvent suit de bien
près, dans les lettres ou dans les armes, l'apogée
de la gloire , le poète consacra les dernières ins-
pirations de sa muse à composer son épltre aux
Pisons; espèce de testament littéraire qui, dès le
temps de Quiritilien, était appelé Y Art Poétique.
Maître dans l'art d'écrire, Horace se faisait le
législateur du bon goût ; par ses préceptes, il
fixait avec l'autorité de son génie les règles de
cette poésie latine qu'il avait faite si belle et
rendue si nationale. Les conseils qu'il donne
aux Pisons, dans Pépitre qu'il leur adresse, ré-
sument ce qu'il devait à lui-même , à l'étude pro-
fonde des poètes grecs , à celle de sa propre
langue et des mœurs de la société romaine; car, '
avant tout , Horace a été un poète romain. S'il
a emprunté à la Grèce quelques rhythmes, quel-
ques images , il s'est gardé de toute imitation
servile; ce sont les mêmes formes peut-être,
mais ce n'est pas le même langage , ce n'est plus
le même esprit. Odes , satires , épttres ont la
sève et la vigueur de leur originalité native. Un
certain tour sérieux et moral jusque dans l'iro-
nie de la satire , une urbanité sans apprêt , mais
non sans dignité, une plus grande solidité de
pensées et de style compensent la richesse d'i-
magination des Grecs, leur élégance plus facile,
leur harmonie plus cadencée. Horace n'oublie
jamais qu'il parle à un peuple-roi, dont la gra-
vité et le génie pratique ont survécu à la perte
(I) BpUtolanun IAb. 1, vin, v. s-it.
(S) Prmterea teepe eum inier altot joeos « purittimum
pewm » et « homuneionem hpidisHmum • appellat,
unaque et altéra liberalitaêe locuptetavU. ( Suétone, Fie
& Horace. )
155
HORACE
1*6
de ses libertés Ainsi la lecture des poésies qu'il
nous a laissées, empreintes de l'esprit de son
siècle > est-elle pllis utile à quiconque vent coin
naître la société romaine que les pins heureuses
découvertes de l'archéologie*
Ce fut dans l'été de 746 que Mécène, sentant
sa fin prochaine) légua à Auguste le soin de té
remplacer près d'Horace* « 8ouvénet>vous d'Hd*
race comme de moi-même* éorrfhVil à Tempe»
reur : Horatii Flteci) ut met* este menur^
Ce dernier vœtt d'une affection si longue et à
▼raie aurait été exaucé sans doute \ mais Horace
ne devait pas survivre à son ami* H l'avait dit :
« Le même coup nous frappera tons deux» Je Pal
juré , je le jure encore : dès que tu me montreras
le chemin, je serai prêt. Nous iront, oui, nous
irons ensemble à notre dernier asifo s
.... tlle êtes tittamqae
Daeet raina»* N«n ego perfMua
Dixi sacrameotnm : tblmus, lbimas,
tJtcuroque procèdes, uupretoain
Carpere iter* comité* parât! (i) t
Le 5 des calendes de décembre, c'est-à-dire
le 27 novembre de ta même aimée , Horace mou-
rut après une courte maladie, et la violence dû
inal ne lui ayant pas permis de signer un testa-
ment , il déclara devant témoins que l'empereur
était son héritier. Auguste accepta l'héritage du
poète, et* ne Voulant pas séparer dans la mort
ceux qui avaient été si unis dans la vie , il lit
enterrer le poète à l'extrémité des Esquilles ,
auprès du tombeau de Mécène (2). Horace, fié
le 8 décembre 689, était sur le jxrfrit d'accomplir
la cinquante- septième année de sort âge. Onie
jours manquaient encore pour qu'elle rat écou-
lée; mais il faut se rappeler que, dans cet inter-
valle i Joies César avait réformé le calendrief.
Or, l'année 708, pendant laquelle il opéra cette
réforme, avait été prolongée de deux mois in-
tercalaires ) de telle sorte qu'elle avait eu quatre
cent quarante-cinq jours de durée. Il en résulté
que, de fait, Horace a vécu cinquante-sept arts
deux mois et quelques jours. 11 était petit et re-
plet, nous dit Suétone j breviê ûtqne obesti*.
Auguste, le remerciant de l'envoi de ses livres,
et faisant allusion à la forme des manuscrits qui,
chex les anciens , étaient roulés , lui disait avec
plus de familiarité que de goût *. « Vous parais^
sez craindre que vos livres né soient plus grands
que vous; mais si la taille Vous manque, vous
ne manquez pas de rotondité. Tâchez-donc, si
vos volumes ne sont pas plus hauts qu'une
chopine {sextariolum), qu'ils aient du moins
l'honnête ampleur de votre ventre. » Ses yeux
étaient noirs ; il avait un front ombragé par des
cheveux de la même couleur qui blanchirent
avant l'âge. Il tirait quelque vanité de la frai*
cheur de son teint et du sourire qui Séiait si bien
à sa jeunesse (3). Des médaillons conformâtes
<i) e*mfrtft*t vu** //, ode xm, v. s-i*
(1) Suétone, ru d'Horace.
(S) Reddea
Forte Utiu , nlgros anguita fronte ctpttlos ;
portant le nom A'HûtaHUê Semblent, malgré
leur exécution incorrecte et barbare , se rap*
porter an portrait que le poète a tracé de lui-
même dans ses vers*
81 les monuments iconographiques sont rares
et insuffisants pour ceux qui aimeraient à con-
templer les traita d'Horace , l'homme intérieur,
le philosophe aimable sont péntê dans ses œu-
vres avec autant de vérité que de détails, et
peu d'auteurs se sont livrés au publié avec plus
d'abandon. Cependant m l'a jugé longtemps
d'une manière bien diverse. Les une l'ont admiré
comme ua moraliste sévère et un homme pro-
fondément religieux (i) \ d'autres l'ont traité de
joyeux épicurien et d'habile courtisan (2). il a
été tour à tour un parasité discret, un adroit
esclave (3) , eii un modèle dé bravoure et de
chasteté (4). Chacun l'appréciait sur quelque
partie de ses «sevrée, sans en embrasser res-
semble, sans tenir compte du temps en fl avait
vécu» Les travaux de Wmlaad, de Leasing, d«
Wetxel, en Allemagne * de Milman en Angle-
terre, le livre de M. Walekenaër, l'étude sur
Virgile et Horace, par M, Patin, ont éclairé
d'un jour nouveau son caractère , sa vie et son
époque. Us ont prouvé que cette fois encore la
vérité se trouve entré les extrêmes. Horace, on ne
saurait le nier, a pratiqué cette facile morale qui
enseigne non lé sacrifice, mais le bon «sage des
biens de la vie. Lorsque l'avènement do pouvoir
absolu at chercher dans la philosophie une ex-
cuse pour se retirer des «flaires publiques oa
une consolatiOfl de s'en voir éloigné * Horace se
fit disciple d'ÊpîcurC; Les esprits énergiques et
sévères s'étaient réfugiés dans le stoïcisme. Ren-
fermés en eux-mêmes* ils avaient voulu m
créer une liberté quelle qu'elle fût, et ils l'a-
vaient placée datte le fond du cœur comme dans
un sanctuaire» se tendant indépendants des
événements par ht pensée, et se consolant de
ne plus commander aux autres en ee «omman-
dant à euXometnee. Lés hommes d'une nature
plus délicate et plus fine, aimant la poésie et
les arts , oubliaient, en se livrant au charme da
repos, au commerce ai doux d'une société élé-
gante, le temps glorieux où le Forum était ouvert
à la généreuse ambition de leur jeunesse; C'est
parmi ces derniers qu'il nous faut placer Ho-
race ; mais peut-être était-il supérieur à tous par
cette constante étude de soi-même et des antres
à l'aide de laquelle H travaille sans cesse à se
corriger; par tant de réflexions profondes et
mélancoliques qu'il rend plus saisissantes en les
jetant dans la Joie des festins; enfin, par cette
modération , médiocrité cf or, comme il l'ae-
Reddes dulce loqnl, reddes ridere décorum.
{BpiOolarltm Lib, /, vn, t. SS-«7.)
Me plnguem et hitldmn, befte coratt date vises.
C Bpistolmim ZM. /, tv, ▼. il )
(1) Dacier.
(I) Sanadoft.
(8) Voltaire.
(*) Polnsinet de Slvrr.
*57 HORAGE
peUe, qui rejoigne de tous les excès. Sans doute
sa morale n'est pas la stricte morale du devoir,
sa raison n'est pas sans faiblesse , sa sagesse est
la sagesse du motràe; mais elles préservent du
*ice et conseillent la vertu. Leur voie est large ,
mais elle est droite. Si l'on n'y trouve aucune de
ces yérités sublimes qui doivent plus tard chan-
ger le monde ancien et renouveler les sociétés
vieillies, elles sont d'une application journalière
dans tes mœurs polies et faciles du siècle d'Au-
guste. Elles touchent même par cent points di-
vers à là société moderne, téhioin ces citations
empruntées à chaque instant à ses écrits pour
donner autorité à la sagesse usuelle de notre
temps, S est peu d'esprits cultivés qui ne trou-
vent , sans la chercher, l'occasion d'invoquer Ho-
race comme un conseil présent; qui ne répè-
tent, pour en avoir éprouvé l'utilité pratiqué,
les maximes de sa douce philosophie; et qui
ne pensent de ce poète charmant ce que Voltaire
a si bien su lui aire :
AvS* toi ta» éfttitend I Wdffrif Htidlgencë,
A jouir sagement S'uJM bottnétê opulence,
A vivre avec sol- mène, a servir ses amis,
A se nwquer qo peu de ses sots enneseto ,
A sortir d'une vie ou triste on fortunée
fin rènfiaiit grâce aux dieux de nous l'avoir donnée.
tfowL BE8 Vergers^
des traductions, de» écrits destiné» à ^explication
des œuvtei tTHortéë, nous noué bornerons I un
résumé sommaire présentant les indication» princi-
pales (•)* du regarde comme l'édition primitive
des ouvres d'Horace un volume in4«,de 497 feuil-
let», imprimé efa lettres rondes, d'une forme peu
gracieuse, et qui ne porte rii date ni nom de typo-
graphe. On ignore même quel fut cet imprimeur.
Quoique peu correcte, cette édition a fourni de
bonnes leçons, on en connaît deux ou trois exem-
plaires en Angleterre, oè eue a été payée jusqu'à
» livres sterling < 4K0 franc* environ )» mais en
France elle ne s'est jamais, nous le croyons du
moins, montrée en venté publique. Une antre édi-
tion, également sans lieu, sans date et satts nom
d'impriméter, forme Utt volume itt-4» detZ* feuil-
lets, en caractères rond», assez beauï, et qui ont
de la ressemblance avec ceux dont Philippe de
Lavagniâ taisait usage vers 1475. Ce volume est fort
rare et fort cher. tJn bel exemplaire se conserve
dans la bibliothèque de lord speflser. Laissant de
côté une on deux édition» fort anciennes dont
l'existence est douteuse, notia arrivons à celle don-
née S Saples en 1474, îtt-l", pa* Àmauld de Bruxel-
les î il y a 1611 feuillets dans l'exemplaire, Unique
jusqu'à présent, que possède lord Spenser ; le texte
présente quelque bonnes leçon». L'édition de Milan,
Àht Zarotus, 1474, in-4», n'a été achevée qu'après
celle de Naples; elle est moins rare; on en connaît
en Angleterre quatre ou cinq exemplaires. tJn vo-
(1) ou ttoitSfi êe plu* amples détails dans le Manuel
du lÀbraire de M» 4.-<L Bruset, *• édition, t. Il, ». ei9>
SU, et dans le Cutmtoçue de h» Bibiiotnèqtu de
M. Fralckenaêr, Parts, 1858, p. 84,-W. Bn 1771 on pu-
blia à Leipzig une Èibliotheca Horatiana> tive tylia-
toi* eiUidttwn HordtU, interpretationum, versionum,-
mais eé tra? ail est aujourd'hui bled arriéré. Vt>W aussi
Qoérard, La France Littéraire, t. IV, p. isi-iss.
158
lume imprimé à Ferrare, en 44T4, ne contient que
les Épitrei et les Ode» $ c'est Un in-4« de 106 feuil-
lets, et rexemplalre dépesé dans la Mibliotheca
Spenseriana passe pour le seul qui existe encore.
Citons ensuite comme conservant de la valeur les
deux éditions données! Milan par Philippe de LaVa-
gnia, U78 et 44T7 ( cette derrière bien incorrecte),
et les trois éditions de Venise, pet PMUppum
Qohddm P*tH> 447*-447a\ et 4M. tJne édition
in-folio* sans nom de lieu* mais qu'on croit impri-
mée a Venise* et qui est datée de isélfest là pre-
mière avee daté qui renferme le commentaire d'A-
crdn sué toutes les ouvres d'Horace. L'édition de
Milan, AntOniO Misccmini, 1482, in-folio, est la
première qui ait donné le commentaire du Flo-
rentin Christophe Landinl, souvent réimprimée à
la fin du (Jaiiiiieme Siècle ; il en a été de même de
l'édition de ténise, Arrivé béni, 1490, itt-folio, qui
se recommandé par une nouvelle révision du tette.
L'édition in-folio publiée à Strasbourg ett 449g, par
Jacques Loencr, a h) mérite de présenter un tette
établi d'après des manuscrits trouvés en Allemagne ;
eue est ornée de figures gravée» sur boi» représentant
des sujets tiré» des oeuvre* d'Horace. Dibdin ( Si-
bliotheca Bpent&iana, u il,) a reproduit neuf de ces
figures; les critiques les plus habiles ont reconnu le
mérite littéraire de cette édition \ elle n'est pas fort
rare, mai» peu d'exemplaires sont en bon état, fin
4804, Aide publia I Venise le premier Horace d'un
format portatif* è'est un MM* de 149 feuillets
treifctaro et MtHJcherené de» bibliophiles * son
prix va toujours en augmentant : 11 s'est élevé
jusqu'à 800 et jusqu'à 4*099 fraftes tttttt ventes ré-
centes de Rattouardet deBeàrzi L'édition de Phi-
lippe Junte, Florence, 4009 * im*, presque aussi
rare que celle d'Aide, est infiniment moins chère.
La même année oh mit au jour a Pâti», itt-folio ,
uae édition* avec le commentaire, plusieurs 4 fois
réimprimée de JosseBade. fin 450», Aide donna une
édition nouvelle d'Horace * elle est plu» correcte
que Celle de 45 et, et quoique augmentée de quelques
notés, son prix est moindre ; il en est de même des
réimpressions (lui sortirent en 494Ôetéh 452? de
l'imprimerie AWihé ; celle de 4985 présente une re-
cension nouvelle faite par Muret d après Uh manus-
crit. On peut Citer à caUse de l*exiguîté insolite deson
format et de là bisarrerie des caractères employés
l'édition d'Alexandre Paganinl; Venise, 4S24 , in-24.Le
Volume édité a Bâle en 4555 par Georges tfàbricius,
in-folio, est estimée à causé de la réunion de notes
d'un grand nombre de commentateurs ; il a reparu eu
4970 et en 4580. un des biussavants et des plus judi-
cieux commentateurs d'Horace, Dents Lambin, pu-
bliai Lyon, ett 4964, un travail fréquemment réim-
primé { l'édition de Vehisè, Pâttl Manuce, 4S66, in-4*,
est la plu» reenerchée des bibliophiles • celle de Paris,
48*9, in-folio, est là plu» complète. C'est de même,
à Cause de» commentaire», qu'on estime les éditions
deLeyde, 4997 (et 4é44 ), in-4*, avec lès notes dé
Cruquius, et d'Anvers, t608, ln-4°, avec celles 3e
Lasvinus Torrentius, Les Éstientte ont plusieurs fois
réimprimé Horace ; mais les éditions qu'ils en ont
données ne sont pas très-recherchées ; nous nous
bornerons à citer celle publiée par Henri Êstienne,
en 4937, in-8° , OÙ le texte a été habilement revu
d'après des manuscrits. Nous trouvons au dix-sen-
ttème siècle l'édition dé Sedan. 1627, in-52, rcmar.
quable en raison de l'extrême finesse des caractères
employés t ce petit volume est rare et fort cher,
lorsqttil est d'une belle condition. L'édition ehevi-
rienue, Leyde, 4629, 5 tomes petit ifl-lâ, est jolie :
159
HORACE
160
les amateurs tiennent à la posséder ; mais elle n'a
aucnn mérité littéraire spécial. L'Horace de Da-
niel Elaevier, Amsterdam, 1676, petit in-12, est d'une
exécution typographique très-soignée ; et quoique
le texte laisse à désirer pour la correction , ce vo-
lume est très-recntrcbét de beaux exemplaires se
sont payés au delà de 100 francs dans les fentes pu-
bliques, et un exemplaire , avec toutes les marges,
est monté à 280 francs à la vente Bérard. Cette
édition renferme le commentaire de ^'Anglais John
Bond, pubf* pour la première fois en 1600, et très-
fréquemment réimprimé , quoique assez médiocre ;
mais ces notes courtes et multipliées, tout en lais-
sant intactes beaucoup de difficultés, en expliquent
un grand nombre, conduisent le lecteur comme
par la main, et rendent de très-grands services aux
étudiants; aussi le travail de Bond est-il devenu po-
pulaire : plus savant il eût été moins répandu. L'édi-
tion de Leyde, 4670, in-8°, fait partie de la collection
Fariorum ; elle est due à Corneille Schrevelius, phi-
lologue médiocre : les beaux exemplaires sont rares
et recherchés. L'édition ad usum Delphmi est peu
commune ; elle contient le commentaire assez mé-
diocre de Louis Desprez : ce travail, malgré ton
faible mérite, a été fort goûté en Angleterre, où il a
été réimprimé au moins vingt fois, de 1664 à 4622.
On signale comme torrecte une assez belle édition
donnée par J. Talbot à Cambridge, en 1689, in-4».
Nous arrivons au travail de Bentley, qui se recom-
mande par une grande sagacité critique, mais au-
quel on peut reprocher la hardiesse des conjectures
du très-savant éditeur. Publiée en 4741, cette édi-
tion fut réimprimée a Amsterdam, 1745, 2 tomes
in-4°; elle ne s'écoula pas rapidement, car eu 4728
on crut devoir en rajeunir le titre. De nombreux
auteurs attaquèrent la façon téméraire dont Bentley
avait modifié les passages qu'il regardait comme
corrompus. Pierre Burmaun reproduisit ce texte
en 4745, à Utrecht, en élaguant toutefois les correc-
tions trop hasardées du philologue anglais. L'édi-
tion deCunningham, La Haye, 1724, 2 vol. pe-
tit in-8«, a été entreprise dans le but de faire op-
position au travail de Bentley : il est suivi pas à pas
et combattu avec chaleur. On autre Anglais, William
Baxter, avait, dès 4701, donné une édition qui a été
réimprimée en 4725 et vantée par les bibliographes
britanniques ; elle n'a cependant guère été remarquée
sur le continent Nous passerons rapidement sur
les éditions de Londres ( J. Pine ), 1733-1757 ( en-
tièrement gravée et ornée de jolies vignettes ) ; de
Paris, 4755, in -24 ( caractères d'une finesse et cPune
netteté remarquables ) : de Glascow, 4744 ( annoncée
• comme exempte de toute faute typographique, ce
qui n'est pas exact ) ; nous en laissons de côté bien
d'autres qui ne pourraient être mentionnées que
dans une bibliographie spéciale i nous citerons ce-
pendantle volume imprimé par Baskervilleà Birming-
ham, en 4762, in-42, et dont l'exécution est fort
dégante. Le même imprimeur a aussi donné en 4770
un bel Horace, in-4*. Cest un autre genre de mé-
rite qui fait rechercher les éditions donnée* en Al-
lemagne, par Jani ( Leipzig, 4778-82, 2 vol. in-8° ;
les Odes seulement), et par Gesner, 4788 ( réimpri-
mée en 1802 ) : tes travaux de ces éditeurs jouissent
d'une juste réputation. L'in-4* publié à Strasbourg,
en 1788, par Oberlin, ne donne que le texte nu; c'est
un beau livre et correct, mais oublié. Il en est de
même du grand in-folio imprimé à Parme, en 4790,
chez Bodoni : sa somptueuse exécution typographi-
que ne le fait pas sortir de la classe des livres pas-
sés de mode. Deusin-4* édités à Londres, en 479*95,
par H. Homer et C. Combe, tout bien moins splen-
dides; mais le commentaire, formé d'un choix d*
notes des éditeurs antérieurs, est utile. L'édition
de G. Waketteld, Londres, 4794, 2 vol. petit in-* ,
est soignée et correcte ; celle de C. F. Wetzel, Li-
gnitz, 4799, 2 tomes in-8°, est d'une exécution fort
disgracieuse , mais l'étendue de ses tables la recom-
mande aux travailleurs. Pierre Didot l'afné mit
au jour, en 4799, un très-bel Horace, grand in-foëo,
orné de douze jolies vignettes dessinées parPer-
cier. Ce livre est un digne rival du aomptueox
volume de Bodoni ; et les charmante» vignettes gra-
vées par Cirardet lui conservent une grande valeur.
Un érudit fort distingué, C.-G. àfitscoertich,
voulait publier un Horace complet; il n'adonné
que les Odes (Leipzig, 4800, 2 voL in-8> ) ; mais
son commentaire est d'an très-grand prix. On a
fait peu d'attention en France à l'édition de Pra-
dicow ( Wittemberg, 4806 in-8°); eue est digne
d'être signalée par suite de la hardiesse avec laquelle
le texte a été réformé. C. Fea donna à Borne,
en 4812, 2 vol. in-8% une édition dans laquelle il
s'attacha aux manuscrits du Vatican et à ceux
d'autres bibliothèques dltalie restés hors de U
portée des érudits anglais et allemands. Les correc-
tions qu'il introduisit aussi dans le texte n'ont pas
toutes reçu l'approbation des critiques. On peut
regarder comme un élégant bijou l'édition de
Pickering, Londres, 4820, in-48 ; U en a été tiré des
exemplaires sur papier de Chine et sur peau véfin,
La même année, J.-H. Bothe publia à Heidelberg
deux volumes in-8° dans lesquels il suivait, en le rec-
tifiant, le travail de Fea. En 4829, on réimprima à
Leipzig, 2 voL in-8», l'édition de G.-J. Dosring, qui, à
partir de 4803, avait paru en volumes Isolés, publiés
à part; le choix éclairé des leçons, la science solide
répandue avec une habile sobriété dans les notes .
mettent ce travail au premier rang. Il a été réim-
primé arec élégance à Oxford en 4854. L'édition en
4 vol. in-8*, Londres, 4825, qui fait partie de la nou-
velle collection des ad usum publiée par Valpy, est
niédiocrementestimée ; celle en trois volumes (Paris,
4829 ) qui figure dans la collection des classiques
de Lemaire a pour base le travail de Dosring. On
doit mentionner comme objet de curiosité le vo-
lume in-64, publié en 1828 avec les caractères mi-
croscopiques d*H. Didot : il a le mérite d'être en-
core plus Uliputùn que les éditions de Janon à
Sedan et de Pickering à Londres. Le travail de
G. Braunhard, Leipzig, 4854-55, 4 tomes in-8%
offre les résultats de longues et patientes recher-
ches. Nous voici arrivés à une édition qui fit quel-
que bruit dans le monde savant, à celle de P. Hof-
man Peerlkampf, Harlem, 1854, in-8°. Le savant
Hollandais voulut établir que les poésies lyriques
d'Horace avaient été défigurées par des interpola-
tions téméraires; il rejette desodes entières ; U con-
damne dans les odes et dans les épodes 644 vers ; il
attribue à des moines du moyen âge la sixième
partie environ de ee qu'on est habitué à regarder
dans les Carmina du poète latin comme l'œuvre
d'Horace. M Peerlkampf a fait imprimer en itali-
que tous les vers qu'il regarde comme supposés, ce
qui donne, tout d'abord, à son volume un aspect
singulier. Les juges les plus compétents ont re-
connu dans l'introduction où l'éditeur développe
ses vues, des aperçus sagaces et des observations ju-
dicieuses au milieu de beaucoup de sophismes qui
n'ont pu soutenir un système exagéré {voir la Bi-
bliothèque universelle de Genève, tome LVIIL, un
article de 11. Berger de Xivrey dans le Journal des
161
HORACE
162
£>ébats t 9 août 1838, etc.). L'édition d'Orelli, Zurich,
* 857, 2 Toi. in-8° (réimprimée en 1845 ), est regardée
comme une des meilleures productions de la critique
moderne ; le savant auquel on la doit avait lu tout
ce qui avait été écrit sur Horace, et il a fort habi-
lement trié, amendé, disposé ce qu'avaient dit de
bon les commentateurs qui l'avaient précédé, dans
une troisième édition, publiée en 1850; le travail
d'Orelli a reçu de notables améliorations soit pour
la constitution du texte, soit pour les notes. L'é-
dition de Dillenburger (Bonn, 1848) est estimée,
sans être destinée aux érudits de profession; elle a
été réimprimée en 1851 et en 1854. En 1855, J. Ritter
a publié à Leipzig une édition (2 vol. in-8° ) d' Horace
sur des manuscrits du neuvième et du dixième siècle,
et accompagnée d'excellentes notes. C'est jusqu'à
présent la meilleure édition. Laissant de côté d'au-
tres publications, nous mentionnerons la charmante
édition publiée par MM. Firmin Didot, 1855, in-48;
elle est ornée de vignettes dessinées par Barrias, et
donne un texte soigneusement revu par M. Dubner,
dont le commentaire perpétuel est bien supérieur,
à celui que Jean Bond avait donné dans l'édition
si renommée des Elsevier ; elle est précédé d'une
Tie du poète par M. Noël des Vergers (4).
Parmi les éditions séparées % de quelques por-
tions des œuvres d'Horace nous citerons l'édition
de luxe de la cinquième satire du premier livre,
imprimée à Rome,! 4816, in-folio, avec une tra-
duction italienne, dont les trois éditions successives
sont ornées de gravures qui diffèrent dans chacune
d'elles. Ce rat une grande dame anglaise, la duchesse
de Devonshire, qui se passa cette fantaisie typogra-
phique et artistique. Les Epistolœ commentants
uberrimisinstructa % par S. Obbarius, Leipzig, 4847,
in-8°, ont été louées dans quelques journaux alle-
mands. Deux éditions de XArt poétique avec des
notes étendues, l'une par Schelle, Leipzig, 4806,
in-8*, l'antre par Streuber, Bâle, 4839, méritent
d'être consultées.
Traductions en français : Habert publia en 4549
envers français les Semons satyriques, qui repa-
rurent en 4554 avec des augmentations; Petetier
avait mis au jour XArt poétique ; on, y joignit les
poésies lyriques traduites par de La Porte, les Épi-
ires par deux écrivains qui ne se nommèrent pas,
et le tout, imprimé à Paris en 4584, forme 2 vol.
petit in-12, qui n'ont guère d'autre mérite que leur
rareté. On trouve plus de fidélité dans la traduction
en vers français faite par les deux frères Le Cheva-
lier d'Agneaux, lesquels s'exercèrent également sur
Virgile ; elle parut en 4588, petit u>8°. Laissant de
côté des tentatives sans portée faites au dix-sèptièine
siècle, nous arrivons à la traduction d'André Dacier,
dont la première édition parut de 4684 à 1689, et qui
a été plusieurs fois réimprimée (Paris, 1709, 10 vol.
in-12, 1714, 4729* 1753). Cette version, fidèle mais dé-
pourvue d'élégance, ne rend nullement le charme
des vers d'Horace ; si elle conserve encore sa place
dans quelques bibliothèques, elle la doit aux notes
qui l'accompagnent, et qui, dans chaque édition suc-
cessive, gagnaient en étendue. On a laissé tomber
dans un juste oubli* la version du père Tarteron,
Paris, 1760, in-42, qui, faute d'une meilleure, fut
souvent réimprimée dans la première moitié du dix-
huitième siècle. La traduction du père Sanadon, pu-
| bliée à Paris, en 1728, 2 vol. in-4°, est mieux écrite
que celle de Dacier, mais elle rend moins exacte-
(i) Voir dans Le Moniteur du 3 décembre 18W un ar-
ticle de H. Sainte-Beuve sur cette édition.
IfOUT. BIOGR. GÉNÉR. — T. XX*.
ment le sens de l'original; les notes sont intéres-
santes. Le traducteur avait adopté une orthographe
bizarre et rangé les écrits d'Horace dans l'ordre où
il pensait qu'ils avaient été composés. On est sage-
ment revenu au classement habituel et à l'orthogra-
phe usuelle dans l'édition d'Amsterdam (Paris), 4756,
8 voL in-42. Il faut d'ailleurs convenir que ce n'est
pas à un moine qu'il faut s'adresser pour avoir
une bonne traduction d'Horace. La belle édition
d'Amsterdam, 1735, 8 vol. in-12, offre un choix des
traductions et des notes de Dacier et de Sanadon.
La traduction de Batteux, 4750, eut du succès; elle
est accompagnée de notes succinctes , et elle a été
réimprimée plusieurs fois, notamment en 4823, 2 voL
in-8°, avec un commentaire par N.-L. Achaintre.
Le travail de Binet, 4783, a été loué sous le rapport
de la fidélité ; il a obtenu en 4827 une sixième édi-
tion, 2 vol. in-42. Il y a bien plus d'élégance dans
la traduction en vers'.de M. Daru, publiée d'abord en
4798, 2 vol. in-8°, et qui reparut, avec des correc-
tions heureuses, en 4804, 4 vol. in-8°; la septième
édition est de 1826, et ce travail , quoique n'attei-
gnant pas sans doute la perfection , est digne du
succès qu'il a obtenu. En 1824, Campenon et Des-
prei publièrent une traduction d'Horace en prose ;
elle est une des meilleures de celles que possède la
langue française. S'attachant moins que Binet à la
rigueur du texte, ces deux littérateurs l'emportent
grandement pour l'élégance du style; ils ont joint
à leur travail des extraits du commentaire que
l'abbé napolitain Galiani avait composé sur le
poète latin. Ce commentaire, vanté à l'avance, tant
qu'il était resté inédit, signalé comme fort spirituel,
fort piquant, et peu ressemblant aux élucubrations
pesantes des annotateurs habituels, n'a pas répondu
à l'attente qu'avaient excitée des éloges exagérés.
M. Panckoucke mit au jour, en 4832, les Œuvres
d'Horace , traduites par dix-huit littérateurs diffé-
rents (MM. Amar, Andrieux, Arnault, etc.). Cette
publication est d'un mérite très-inégal; à côté
de très-bonnes pages, on en rencontre de fort mé-
diocres. Citons aussi les traductions en vers de
MM. Ragon, 1831-32, 4 vol. in- 18; L. Duchemin,
4839 et 4846, 2 vol. in-8°; Cabaret-Dupaty, 4857,
2 vol. ; Goupy, 4844, 2 vol, in-8°; 4847 et 4857,
in-18; D. Frion, 4843, 2 vol. in-8*; J. Collet, 4845,
in-18. Une version en prose, dont les diverses par-
ties sont dues à MM. Chevriau, Génin, GuiardetNi-
sard, fait partie de la collection des auteurs latins
avec une version française publiée sous la direc-
tion de M. Nisard; ce volume, mis au jour en 4839,
est précédé d'une notice sur Horace par M. Patin.
Les tentatives faites par divers auteurs pour tra-
duire telle ou telle partie des œuvres d'Horace sont
extrêmement nombreuses; en ce qui touche les
poésies lyriques, nous mentionnerons les Cinq Li-
vres des Odes d'Horace Flace, traduits en vers
français par J. Mondot, Paris, 4579 (la plus an-
cienne version de ce genre qui ait paru dans notre
langue); — l'Essai de traduction de quelques Odes
et de VArt poétique , par l'abbé Le Febvre de La
Roche ; Paris, 4788, gr. in-8» (volume tiré à petit
nombre et qui n'a pas été mis dans le commerce);
— les Odes traduites en vers, revues pour le texte
sur dix-huit manuscrits, par Ch. Vanderbourg;
Paris, 4812-13, 5 vol. in-8° : travail estimable, sur-
tout à cause du commentaire ; mais Vanderbourg
s'était volontairement imposé le joug d'un système
qui a rendu Horace méconnaissable : il a voulu
rendre le texte vers pour vers, strophe pour stro-
phe, en calquant le français sur lo latin; il s'est
6
163
HORACE
164
ainsi donné beaucoup de peine afin de ne pas réussir.
On a loué sous certains rapports (a traduc-
tion en vers de M. de Wailly et celle de M. Léon Ha-
lévy. On peut citer aussi celles de M. Lenoir (1822),
Worras de Romilly (1826), Stievenart (1808), Mon-
tigny (1836), Dupont (1856), P. Neveu '1842),
Ruffy (1844), J. Lacroix (1848). Tout récemment on
a vu paraître celle de M. G. de Nattes, Paris, 1896,
2 vol. in-8° (le second volume est en entier occupé
par les notes); celle de M. Goupy a été souvent
réimprimée.
N'oublions pas un livret sans aucun mérite, mais
cnii doit à sa rareté l'honneur d'enflammer toutes
les convoitises des bibiiomanes : les Odes d? Horace,
envers burlesques (par H. Picou) ; Leyde, J. Sam-
bix (Elzevier), 1655, petit in-12. Voilà un de ces vo-
lumes qu'une demi-douzaine d'amateurs seulement
ont la bonne fortune de posséder ; ses heureux pro-
priétaires se gardent bien de le lire, mais ils le cou-
vrent de maroquin et de dorures ; on a vu des exem-
plaires ayant toutes leurs marges (circonstance
inappréciable pour un bibliophile) s'adjuger récem-
ment à 140 et 153 fr. aux ventes Monturan et Ber-
tin.
La traduction en vers des Satires par M. Raoul ,
Tournay, 1818, in-8°, n'est pas sans mérite. Celle
des Épttres et des Satires par M. Bon Le Camus ,
Paris, 1842, in-8°, a reçu des éloges. VArt poétique
a été traduit en vers par Cornette, 1802; par Ché-
nier, 1815 ;par Baudouin, 1834; par Bon Le Camus,
1841. M. Gonod en a donné une version accom-
pagnée du texte, d'un commentaire et d'une intro-
duction; le tout forme un gros volume publié à
Clermond-Ferrand en 1841.
Les œuvres complètes d'Horace ont été traduites
en Italien par J. BorgianeHi; Venise, 1736, 4 vol.
ïn-8° (plusieurs fois réimprimées); par G. Solari,
Gênes, 1811; par T. Gargallo, Paterme, 1809-41,
2 vol. in-4° (cette dernière traduction a obtenu un
grand succès ; une cinquième édition a vu le jour
à Sienne, 1825, 4 vol. in-18). La traduction des
poésies lyriques par Pallavicini, Leipzig, 1756 , Ve-
nise, 1743, est estimée; nous ne nous arrêterons
pas à un grand nombre de traductions italiennes
de diverses parties des oeuvres d'Horace, nous men-
tionnerons seulement comme singularités une ver-
sion en argot de la cinquième épitre dans les Rime
burlesche de Ferrari (Venise, 1570), et VArt poétique
en dialecte milanais, Milan, 1832. L'Espagne peut
montrer la traduction en prose d'UrbanoCampos,
1682 (il en existe plusieurs éditions) ; et celle en vers
de Xaveriode Burgos, Madrid, 1820-23, 4 vol. in-8°,
rémprimée à Paris, en 1841. Un poète estimé, Th.
de Triarte, a mis en vers Y Art poétique. Les tra-
ductions anglaises de Creech et de Smart sont ou-
bliées ; mais celles de D. Watson, 1740, et de Ph.
Francis ont de la réputation et ont été fréquem-
ment réimprimées. En Allemagne nous trouvons
une traduction complète due à C.- J. Preiss ; Leipzig
1805-1808, 4 vol. in-8°. Rosenhuyn (Kœnigsberg,
1818) et Voss (Brunswick, 1820) se sont exercés de
la même manière.
Les Odes ont été traduites et accompagnées de
notes par Ramier et par von der Decken ; Wieland
en a fait autant pour les Satires et pour les Épttres,
Gûnlber s'est attaché aux poésies lyriques (Leipzig,
1822). Plusieurs musiciens du seizième siècle es-
sayèrent de mettre en musique des vers d'Horace,
et, depuis, cet exemple a trouvé quelques imitateurs;
Philidor s'exerça de cette façon sur le Carmen
sœculare, et son travail vit le jour à Paris en 1780.
Le Manuel du Libraire, t. II, p. 640, cite ces ten-
tatives, auxquelles on peut ajouter celles de Bene-
dlctus Ducis, qui publia à Ulm, en 4559, des Odes
d'Horace à trois et quatre parties. G. Brunet.
Suétone, Vita Horatii, dans presque toutes les édi-
tions du po^te , et publiée d part par RicbLer ; Zwlckau,
1890, in-4°. — Massorijftta Horatii, ordine chronologico
delineata ,■ Ltjàc, 1708, in-8*. — Grotefend, article Ho-
race dans V Encyclopédie d'Bfsch et Gruber, sect. H,
t. X. p, 487*476. — Van Ovtinerem, Horax ait Mensch
tfrttf Mrger vonMom (trt4nlt du hollandais par Walet}}
Lelpiig, 1801, in-8<\ - Arnaud, Essai sur la rie 4' Horace,
d'après AlparotU (dans ses Variétés littéraires).— 4.
Wetchert, De Ç. Horatii Obtrectatoribus ; Griouna,
18*1, in-4«. - C. Francke, Patti Horatlani ; Berlin, 1889,
ln-t». - j. toute), Horace, revue Historique et littéraire
(en allemand) ; Tubingue, 18U, U-*\ ~ J. Murrs y, Ort-
ginal fPiews o/ th* passait in V* Life and IPriMnai
af Horace y Dublin, tau» Ib-8°. — Boa. Salvertc, h**
race et l'empereur Auguste g Paris, 18M, uv*«. -
Schoell, Histoire de la Littérature romaine, i. 1. — Du-
saulx, Les Satiriques latins; Mémoire sur Horace, dans
les Mémoires de l'Académie des inscriptions, t. XLIlt,
p. 117. - Kœted, De ru* et Moribus Horatii; Copenha-
gue, 1780, in-a«.- SeiU, Ueraliu* Placent, naoh seine*
Lebenund seinen Dicktungen, biographwhe Aehemd-
lung ; Nuremberg, 1818, in-.8<\ — G,- J. Grotefead, IHe
schrifttteUerische Laufbahn des HoratiuSj Hanovre,
mo,ln-8°.- J. Jacob, Horai und seine Freunde ,- Berlin,
1858, in-8». _ WalckenaëY, Histoire de ta Fie et des Poé-
sie* d'Horace ; Parla, 1840, 1 vol. tn-8* (1). - Vf. Teaffel,
article Horace dans la Mêal'BncpihpeJàie der olaseis*
ohen AUherthmmsuHêsenoha/t de Pauly, t. 111» p. lut-
148s. — Ernestl, Parerga Horatiana t - Haie, 1818.
La maison donnée au poBte par Mécène a été l'objet
de quelques travaux spéciaux : Capmartin de Chanpy,
Découverte de la Maison d Horace ; Rome, 1767, 3 vol.
in- 8». — D. de Sanetts, DissertnzUme sopra la Villa di
Orasio Ftaceo; Rome, 1T81, la*4°. *- Clem. Vamettl,
Sopra la rW* du lui dipinta di Q. Horatio *Jlaeco\
Roveredo, 1780, in-8°. — Campeoon , Cntertuchwujsn
ueber dos Landhaus des Horaz -, Leipzig, 1826, in-8°.
En tait de discussions littéraires sur le talent et sur les
écrits d'Horace, on peut mentionner C.-D. Janl, De In-
génia Horatii ; Haie, 1775, ln-4«.— Sulzer, Théorie der
sohânen Ktinste, t. Il, p. 68l-«i7. -* Fsbrtchis, HMiotheca
Latina, 1. 1, p. S*M*4. — fieraherdt, Esquisse de ta titté-
rature latine (ta aUeuMOd), p. I69~at*. - Baebr, GeseU-
chte der Rom. Liter., p. 88-848, et p. 68-33Tde la seconde
édition, 163t.— Fuerstenau, De Carminum aliquot Hora-
tianontm Chronologia; Hersfeld,1838,ln-8°. — Streuber,
Chronologie der Dichtungen des Horaz\ Bâte, 1843, ln-8°.
— DUlenburger, Qussstiones Horatiana; Bonn,t64l, ln-8°.
~%\xcnwr,Qu**tienes Horatiana, Leipzig, 1884, in-4°;
et Novœ Quxstiones, 1647. - H. Croft, Horace éctairci
par la Ponctuation t fari», 1810, ln-8°. — Duentter, Mri-
m von Horaz ; Brunswick, 1841-46, 3 vol. to-8°. — j. Tate,
Horatius restitutus, or the books of Horace arranged
in chronological order ; Londres. 1837 (le Quarterly Re-
vient, n° 124, consacre un arttcle à cet ouvrage, et en fait
l'éloge,». — Ernestl, Clavis Horatiana ; Berlin, 18W-1804, S
vol. in-8». — Dœderleto, Leetionum ItorattanarwH De-
çà» ; Krlangen, 1818. — Matthiœ, De Leeis nonnullis Ho-
ratii t Altenbourg, 1818. — Martin, De aliquet Horatii
Carminibus Commentatio critica; Posen, 1844.
Les travaux particuliers sur telle ou telle portion des
écrits d'Horace sont fort nombreux ; nous nous borne-
rons i mentionner quelques-uns des principaux : Dis-
sertation critique sur l'Art poétique d'Horace (par le
marquis de Sévigné) ; Paris, 1808, petit ln-lt.— T. H. van
Reenen, Disquisitio de Horatii Flacci Epistolaad Piso-
nesf Amsterdam, 1806, in-8°. — Mittermayer, Ueher den
Brie/ an die Pisonen; Ascha/fenburg. i887,in-4«. - B.
Feys, VArt poétique d'Horace considéré dans son or-
donnance; Paris, 1886, in-8«. — D. Ulrich, De Satyra Ho-
ratiana; Breslau, 1817, ta-4». - J.-A. Estienne, Étude
morale et politique sut les Épitres d'Horace; Paris,
in -8°. — C. Morgenstern, De Satirœ atque Epistolas Ho-
(t) Voir quatre articlea de M, Patin «ir' cet ouvrage, dans It
Joumml des Savants, 1841 et 184a.
165
HORACE — HORAPOLLON
166
ratiamm Discrimine; Leipiig, 1801, in«4°. — «Schmelskopf,
De Horatiano Carminé sœculari; Leipzig, 1838.
On trouve aussi quelques monographies relatives à cer-
tains points de vue sous lesquels on peut envisager le
poëte latin : D.-G. Btdermann, De Horatio Musico; Prêt-
berg, 1768, in- 8°. - Waliin, De Heratio Lyrico; Upsal,
1804, ln*8«. - Berger, Hermlng, Nora:us. Benner, Pflu-
ger et Brleyleb ont écrit des traités De Philosophia
Horatii.
horaces (Les trois), personnages d'une
des pins célèbres légendes romaines. Sous le
règne de Tullus Hostiiius, septième siècle avant
J.-C, Albe et Rome se disputaient la suprématie.
On convint de remettre la décision de la querelle
à un combat singulier. Chacune des deux ar-
mées possédait trois frères, du même âge en-
viron et de la même force. Les trois Romains
s'appelaient Horaces , les trois Albains Curiaces ;
c'est ainsi du moins que' les partage la tradition
la plus générale , car certains récits font des Cu-
riaces les champions de Rome et des Horaces
les défenseurs d'Albe. La narration de Tite-Live
et la tragédie de Corneille ont rendu populaire
cet héroïque combat, qui eut pour dénoûment
la mort de deux Horaces et des trois Curiaces.
Lorsque le seul Horace survivant rentra vain-
queur dans Rome, orné des dépouilles des
vaincus, sa sœur Horatia, fiancée à l'un des
Curiaces , poussa des cris plaintifs. Ses lamen-
tations excitèrent la colère d'Horace, qui la tua
en s'écriant : « Ainsi périsse tonte Romaine qui
pleurera un ennemi. » Le roi nomma des duum-
virs pour juger le fratricide ; ils le condamnèrent.
Déjà, selon la terrible formule de la loi (lexJior-
rendï carminis ), Horace, la tète couverte d'un
voile, allait être battu de verges , pour être en-
suite suspendu à l'arbre fatal ( infelici arbori ) ,
lorsque, de l'avis du roi Hostiiius* , il en appela
au peuple. Son père le déclara non coupable,
ajoutant que, dans le cas contraire, il l'aurait puni
lui-même en vertu de ses pouvoirs paternels.
Le peuple acquitta Horace. « Cependant, dit
Tite-Live, pour qu'un crime aussi éclatant ne
restât pas sans expiation , on obligea le père à
racheter son fils en payant une amende. Après
quelques sacrifices expiatoires, dont la maison
des Horaces ( gens Horatia ) (i) conserva de-
puis la tradition , le vieillard plaça en travers de
la rue un poteau, espèce de joug, sous lequel
il fit passer son fils, la tête voilée. Ce poteau,
conservé et entretenu à perpétuité par les soins
de la république, existe encore aujourd'hui. On
rappelle le poteau de la sœur (tigillum soro*
rîum ). On éleva un tombeau en pierre détaille
à l'endroit où celle-ci reçut le coup mortel. »
Le récit de Tite-Live n'a aucune autorité his-
torique; c'est Une légende dont le fond peut
(1) Ancienne maison patricienne appartenant à la troi-
sième tribu , celle de Luceres , et faisant remonter son
origine au héros Horatlus, auquel un bois de chênes était
consacré. D'après les rapports des Horaces avec les Cu-
riaces d'Albe, on pense qu'ils étaient de race latine. Les
frurnomsde la cent Horatia sont Barbatus, Codes,
Pulvillus.
être réel , mais dont le développement appartient
à la poésie populaire. Y.
Denya d'Halicarnasse , III. 15 M, 81. — Tite-Live, I,
84-86. - Valèrc Maxime, VI, s. — Florus , I, 8. — Ci-
céron, Pro Mil., 8 ( Schol. Bob. in Milon., p. 877, édlt.
Orelli); De Invent., H, fo. — Festus, an mot Soror.
TigilL, p. NT, édlt. de MnUer. - Plutarque , Paraît.
Jlfin., 16, - Aurellus Victor, De FUr. illust., 4. — Zo-
naras, VII, 6.
horanyi (François-Joseph-Alexis), his-
torien hongrois, né à Ofen, le 15 février 1736,
mort le 1 1 septembre 1809. Entré de bonne heure
dans l'ordre des piaristes , il s'y fit remarquer
par son amour des lettres et les efforts qu'il fit
pour leur progrès dans son pays. Afin de mieux
atteindre ce double but, il séjourna long-
temps à Rome et à Venise, visita l'Angleterre,
la Hollande et d'autres contrées. Horanyi resta
dévoué jusqu'à la fin de ses jours aux intérêts
de son ordre. Il se fit connaître par ses tra-
vaux historiques , relatifs surtout au passé de la
Hongrie. On a de lui : Memoria Hungarorum
et Provincialium seriptis editis notorum;
Vienne, 1775-1777, 3 v. in-8*; — Nova Me-
moria Hungarorum, etc.; Pesth, 1792 ; 1 vol.
in-8°. C'est une continuation jusqu'à la lettre C
de l'ouvrage précédent; — Scriptores piarum
scholarum liber aliumque artium magistri;
Bude, 1808, 2 vol. in-8°; — Joa. Bethlenii Bis- .
toria Rerum Transylvanicarum, ab an. 1662
ad a. i&73 9 productaetconcinnata. Pluribus
mendis sublatis recognovit , et prxfatvone de
progenie, vita et inpenii monumentis ejus- «
dem scriptoris auxtt A. Horanyi; Vienne,
1782, 2 vol.; — M. Simonis de Keza Chro-
nicon Hungaricarum, ex cod. membranaceo
éd.; Vienne, 1782, in-8 6 ; — F. Forgacs, epis-
copi Varqdinensis et cancellarii Ferdinand /,
Rerum Hungarix sui temporis Commentant,
lib. XII; Presbourg, 1788, in-8°. V. R.
Wallasky, Conspettus Republ. literar. in Hungaria.
— Ersch et Gruber, Allg. Encyklopesdie.
HORAPOLLON OU HORUS APOLLO ('Ûpa-
nâXXojv). Nous avons sous ce nom un petit
traité grec en deux livres , intitulé Hierogly-
phica, le seul ouvrage ancien qui nous soit
parvenu sur l'interprétation des hiéroglyphes,
mais dont l'origine et l'autorité ont été l'objet
d'opinions très-diverses. Si l'on s'en rapporte au
titre qui se lit sur les manuscrits , cet ouvrage
aurait été composé en égyptien par Horus Apol-
lon ou Horapollon Nih'aque , et traduit en grec
par un certain Philippe, inconnu d'ailleurs. Mais,
d'abord , cet Horus est-il le fils d'Osiris , divi-
nité que les Grecs d'Egypte assimilaient à leur
'Apollon et à laquelle on pourrait avoir attribué
un livre sur les hiéroglyphes , de même que les
prêtres mettaient sons le nom de Thot ou Her-
mès leurs ouvrages de science et de philosophie?
Est-ce simplement un nom d'homme? Suidas
cite un grammairien distingué, de Phœneby tis en
Egypte, nommé Horapollon, qui enseigna à
Alexandrie, puis à Constantinople, sous l'em-
pereur Théodose, et écrivit des commentaires
167
HORAPOLLON
168
sur Sophocle, Alcée, Homère, et un ouvrage
séparé intitulé Tejievixài ou T«(Aéw) ( les Tem-
ples ). On connaît encore un autre Horapollon ,
natif d'Egypte, et qui vivait sous l'empereur
Zenon. Auquel de ces deux auteurs doit-on at-
tribuer les Hïeroglyphica ? On penche pour le
premier, sans pouvoir former à ce sujet autre
chose que des conjectures. D'après la nature de
son ouvrage, on peut affirmer qu'il était Égyp-
tien. Il vivait probablement vers le commence-
ment du cinquième siècle. Le traducteur grec
est tout à fait inconnu. Il paraît avoir vécu à
une époque bien postérieure , peut-être au quin-
zième siècle, et sa prétendue traduction se ré-
duisit sans doute à des interpolations. Les Hié-
roglyphiques contiennent deux livres , dont le
second, bien inférieur au premier, a dû subir des
remaniements et des additions. On remarque dans
tout l'ouvrage beaucoup d'idées qui semblent
étrangères à l'antiquité égyptienne et paraissent
plutôt empruntées à des récits merveilleux d'his-
toire naturelle, comme on en lit dans Élien, aux
superstitions des gnostiques ou aux explications
de songes, comme les Oneirocritica d'Achmet et
d'Artémidore. Le style dénote aussi une époque
à laquelle les traditions du sacerdoce égyp-
tien devaient être perdues. Ces critiques, émises
par F.-A. Wolf et Wyttenbach , avaient fait suc-
céder un discrédit complet à l'aveugle confiance
qu'on avait longtemps accordée au livre d'Ho-
rapollon, lorsque Champollion, initié déjà par
l'étude de la pierre de Rosette aux principes de
l'écriture hiéroglyphique, soumit ce livre à un
nonvel examen, et y puisa quelques indications
précieuses. Toutefois, sur une trentaine d'hié-
roglyphes expliqués par Horapollon et qui se
retrouvent sur les monuments, il n'y en eut
d'abord que treize dont l'interprétation lui parut
pleinement confirmée par l'étude des textes,
savoir : le croissant renversé de la lune , le sca-
rabée, le vautour, les parties antérieures du
lion, les trois vases, le lièvre, l'ibis, l'encrier,
le roseau , le taureau, l'oie cbénalopex , la tête
de Koncoupha et l'abeille. Champollion reconnut
aussi qu'il fallait chercher les applications de
ce livre non-seulement dans l'écriture hiérogly-
phique proprement dite , mais dans les sculp-
tures sacrées qui concourent à la décoration
symbolique des monuments. « La plupart des
images symboliques indiquées dans tout le livre
premier d'Horapollon, dit Champollion,, et dans
la partie du deuxième qui parait la plus authen-
tique, se retrouvent dans des tableaux sculptés
ou peints , soit sur les murs des temples et des
palais, sur les parois des tombeaux, soit dans
les manuscrits , sur les enveloppes et cercueils
des momies, sur les amulettes; etc., peintures
et tableaux sculptés qui ne retracent point des
scènes de la vie publique ou privée, ni des
cérémonies religieuses , mais qui sont des com-
positions extraordinaires où des êtres fantasti-
ques, soit même des êtres réels qui n'ont entre
eux aucune relation dans la nature, sont cepen-
dant unis , rapprochés et mis en action. Ces
bas-reliefs, purement allégoriques ou symboli-
ques, qui abondent sur les constructions égyp-
tiennes , furent particulièrement désignés par les
anciens sous le nom d'anaglyphcs. Cette dis-
tinction établie, il est aisé de voir que l'ouvrage
d'Horapollon se rapporte bien plus spécialement
à l'explication des images dont se composaient
les anaglyphes qu'aux éléments on caractères
de l'écriture hiéroglyphique proprement dite : le
titre si vague de ce livre Hiéroglyphiques
( Sculpture sacrée ou gravure sacrée} est la seule
cause de la méprise (1). » Un savant très-
versé dans la langue copte, M. de Goulianof, a
fait grand usage d'Horapollon pour appuyer son
système. Selon lui, les hiéroglyphes d'Horapol-
lon doivent s'expliquer uniquement par des rap-
ports de son entre le nom de l'objet représenté
et celui que les prêtres voulaient indiquer à leurs
adeptes. C'est ce qu'il nomme paronomases, et
que Haproth désignait par le terme d'hiérogly-
phes acrologiques , parce que ce prétendu rap-
port n'existe souvent qu'entre les lettres initiales.
M. de Goulianof, en admettant les interpréta-
tions d'Horapollon, suppose que les explications
symboliques qui les accompagnent souvent sont
un artifice des prêtres égyptiens pour empêcher
les profanes de pénétrer les vrais principes de
l'écriture sacrée, réservée, selon lui, aux seuls
initiés. Sans admettre cette intention captieuse
dans l'ouvrage d'Horapollon, nous ne sommes
pas éloignés de penser que la plupart des exégèses
qui suivent l'énoncé de chaque hiéroglyphe ont
été ajoutées par des Grecs qui ont donné cours
à leur imagination ou à leur savoir, à défaut
d'une exacte connaissance du système hiérogly-
phique.
Les Hiéroglyphiques furent publiés pour la
première fois par Aide dans sa Collection des
Fabulistes grecs; Venise, 1505, in-fol. ; ils paru-
rent séparément avec une traduction latine de
Bernardin Trébatius de Vicence; Paris, 1521,
in-8°. La traduction de Trébatius avait d'abord
paru à Augsbourg, 1515, elle fut réimprimée par
Froben, Baie, 1518, in-4°; par Robert Estienne,
Paris, 1530, in-8°, et à Baie, 1534, in-8°. Une
autre traduction latine, par Phasianini, parut à
Bologne; 1517, in-4°. Mercier donna une édition
d'Horapollon avec une nouvelle traduction latine
et des notes, Paris , 1548, in-4° ; cette édition
fut réimprimée avec des corrections de Morel ,
Paris, 1551, in-8°. D. Hoeschel profita de ces
divers travaux pour son édition publiée à Augs-
bourg, 1595, in-4°; 1605, in-4°; Lyon, 1626,
in-fol. N. Caussin l'inséra dans son Syntagma
Electorum Symbolorum; Paris, 1616, in-4°.
Cor. Paw reproduisit les notes de . Mercier,
d'Hoeschel, de Cassin, dans son édition {Utreeht,
(i) Hoeschel pense que les Hiéroglyphiques faisaient
partie du traité d'Horapollon Sur les Temples.
169
HORÀPOLLON — HORLEMÀN
170
1727, in-4°), restée longtemps la meilleure, mais
bien surpassée par celle de Conrad Leemans ;
Leyde, 1835, 'grand in-8*. Le texte à été re-
censé a l'aide de plusieurs manuscrits et éclaira
par de nombreux rapprochements tirés des au-
teurs grecs et latins. Des planches Hthographiées
reproduisent les hiéroglyphes d'Horapollon dont
la valeur a été reconnue sur les monuments.
Les Hiéroglyphiques ont élé traduits en fran-
çais par Jac. Kerver, Paris, 154a, in- 8° ; 1553,
in-l2;et par Requier, Paris, 1779, in-12; en
italien par P. Vasolli da Fivizzano , Venise, 1548,
in-8°; en allemand (traduction attribuée à Hol-
bein), Bâlé, 1554, in-fol. [ Wladimir Brunet de
Prestes, dans VEncyc. des Gens du Monde,
avec des additions par Y j.
Suidas, au mot 'ûpairéXtav. — Etienne de Byzanee,
au mot gcvtôqOlc. - PnoUos, Bibl. % cod., 179, p. |M V
éd. BekJker. -EusUthe, Comm.inOdy. - D'OnrlUe,
Excerpta qxuedam Censurarum in Horapollinem, dans
leFannus crttica; Amsterdam, 1788, in-8», p. 548-886. -
L. Bachmann, Farise Lectiones in Horapollinems, dans
ses jénecdota ,*ol II, p: 406. — ChampollioD, Précis du
Système Hiéroglyphique des anciens Égyptiens, p. 847
et sutr. — Goullanof, Essai sur les Hiéroglyphes d'Ho-
rapollon ; Paris, 1817, ln-4°. — Lenormant, Recherches
sur rOriçine et r Utilité actuelle dés Hiéroglyphes d*Ho-
rapollon; Paris, 1888, ln-8°. — A. S. Corey, The Hiero-
glyphies o/Horapollo; Londres, 1840, in -8°. — Bunsen ,
jSgyptens SteUe in der fTeltgcsch., vol. I, p. 401.
HORÂTIUS COCLÀS. Voy. COCLÈS.
hordal ( Jean ), jurisconsulte lorrain, vi-
vait dans la première moitié du dix-septième
siècle. Il descendait de Pierre Darc, troisième
frère de la Pucelle d'Orléans, dont il devint
l'historien. Cet ouvrage ne fait que résumer ce qui
avait été écrit avant lui sur Jeanne Darc. H est
intitulé : Heroinx nobiUssimx Joannx d'Arc
Lotharingie, vulgo Aurelianensis Puellx, His-
toria, ex variis gravissimx aique incorrup-
tissimœ ftdei scriptoribus excerpta. Ejusdem
mavortix virginis ilnnocentia a calumniis
vindicata; Pont-à-Mousson, 1612. in-4°.
i O. Calniet, Bibl. lorraine.
horebout ( Guérard ) 'peintre flamand ,
du quinzième siècle, né à Gand , mort en An-
gleterre. H jouissait d'une grande réputation, et
peignit dans l'église de Saint-Jean de Gand' deux
Tolets qui renfermaient un retable d'autel en
sculpture. Sur l'un de ces volets il a peint la
Flagellation du Christ , sur l'autre la Des-
cente de Croix. On conserve dans les galeries
de Gand quelques autres bons tableaux de Ho-
rebout Henri VIII, roi d'Angleterre), appela cet
artiste à sa cour, et le nomma son premier
peintre. Horebout exécuta de nombreux mor-
ceaux pour son protecteur et pour les princi-
paux seigneurs anglais. Il mourut riche dans
son pays d'adoption. A. de L.
Descamps , La Fie des Peintres hollandais, 1. 1, p. 4*.
horfelin (Antonio de) , peintre espagnol,
né à Saragosse, en 1597, mort dans la même
Tille en 1660. Tl fut élève de son père, Horfelin
de Poultier, qui peignait passablement le portrait
et qui, reconnaissant les dispositions de son
fils , l'envoya à Rome. A son retour, le jeune
Antonio se fit une belle réputation, non-seulement
comme portraitiste, mais comme peintre d'his-
toire. On cite de lui un grand tableau qu'il fit
pour la confrérie des charpentiers de Saragosse
et plusieurs bonnes toiles dans des églises de la
même ville. Il possédait à un haut degré la pureté
du dessin et l'harmonie du coloris.
A. de L.
Viaçe arUstico à parias pueblos de Espana, etc.; Ma-
drid, 1804. — Cean Bermadez, Dictionario artistico, etc.
— Qûtittet, Dictionnaire des Peintres espagnols.
* horioolo (Bartolomeo), poète italien",
né à Trévise, vivait au milieu du seizième siècle.
L'épopée chevaleresque, mise à la mode par
Berni et Ariosto, était alors ce que le public
demandait aux libraires, ce que les libraires de-
mandaient aux auteurs. Horioolo, comme bien
d'autres, s'essaya en ce genre , avec assez peu
de succès. Son Ruggero 9 publié à Venise en
1543, fut réimprimé en 1544, en 1545 et en 1618.
Se moquant lui-même des héros qu'il avait en-
trepris de chanter, Horioolo publia en patois de
Trévise une parodie burlesque de ces romans
qui devaient plus tard troubler la cervelle de
don Quiehotte : Le Semplicita over go/ferie
de 7 cavalieri erranti , sans lieu ni date (vers
1558), est un mince volume qui, n'ayant été
imprimé qu'une seule fois , est devenu extrê-
mement rare ; le petit poème qu'il renferme est
accompagné de quelques capitoli où la décence
n'est pas fort respectée. G. B.
Melzl, Bibliograjla dei Romanzi, 1888, p. 800. — J. C.
Brunet, Manuel du Libraire, t. II, p. 648.
horlEman , ou plutôt harlbman ( Char-
les , baron) , architecte et écrivain suédois, né
à Stockholm, le 27 août 1700, mort le 9 février
1753. Fils d'un intendant des jardins du roi , il
vint étudier les beaux-arts en France , en Hol-
lande et en Italie (1721-1727), et fut, à son
retour, nommé intendant de la cour (1728), et
chargé de continuer le palais royal de Stockholm,
qui ne fut achevé qu'en 1753. Il traça le plan
d'un grand nombre d'autres édifices publics,
tels que la cathédrale de Calmar, l'observatoire
de Stockholm. Ses constructions sont plus élé-
gantes que grandioses. On le considère comme
l'un des plus grands architectes de la Suède. Il
avait une prédilection exagérée pour le style
italien , et l'employait même lorsqu'il avait à ré-
parer des édifices gothiques. Membre de la cham-
bre des nobles par droit de naissance, il joua
un certain rôle à la diète et dans les affaires po-
litiques. Le titre de sénateur (Riksrdd) lui fut
offert en 1746; mais il le refusa. Horleman était
membre des Académies des Sciences et des Beaux-
Arts de Stockholm. On a de lui : Dagbok œfver
en îfràn Stockholm genom atskilliga Rikets
landskaper gjord resa (Journal d'un voyage
dans différentes contrées du royaume en 1749);
Stockholm, 1749, in-8°, traduit en allemand;
Leipzig, 1751 ; — Breff 9 etc. (Lettre au comte
Piper sur ses autres voyages en Suède) ; Stock-
171
HORLEMAN — HORMAYR
172
hoir», 1751 , arec une continuation, 1753, m-8°;
ces relations renfermentd'intéressantes remarques
sur le sol, les rivières, les mines de la Suède;
— Tal ont utlssndska resor (Discours sur ses
Toyages à l'étranger); iWd., 1746.
E. Beautois.
C. G. Teasln, JBraninme (éloge); Stockholm, 17M,
trad. en allem. par Dttbnert, GreiiiwaJd. 1*58. - Klein,
Stockholm*- Magazin., t. I. p. 71-9S. — Rosenhane, An-
teckningar. — Biographiskt-Lexicon, VI, 2W-30S.
hormann ( Guillaume ) , littérateur anglais,
né à Salisbury vers l'an 1470, mort en 1635; il
fut vice-prévôt du collège d'Etal, et se distingua
par l'étendue de ses connaissances dans les lan-
gues classiques. Entre autres ouvrages de sa
composition, on peut citer sa réplique en vers
latins à une satire que le grammairien Lilly
avait dirigée contre lui, et un volume intitulé
Vulgaria, qui n'est pas sans intérêt pour la con-
naissance des mœurs de l'époque , et qui a ob-
tenu deux éditions, l'une et l'autre très-rares
(Londres, 1519 et 1530). G. B.
Bibliotksca grmvUkmm, p. 848. - Biogr. Britannica.
* hormayr ( Joseph , baron de ) , historien
allemand, né à Inspriïck, le 20 janvier 1781,
mort le 5 novembre 1848. Il était le petit-fils de
Joseph Hormayr, chancelier du Tyrol , qui au
dix-huitième siècle avait su ranimer dans ce
pays la culture intellectuelle (voy. Ersch et
Gruber, Encyklopœdie). Le jeune Hormayr
montra de très-bonne heure un goût marqué
pour l'histoire; dès l'âge de treize ans il fit pa-
raître sa Geschichte der Herzôge von Meran
(Histoire des ducs de Méran). Mais son père lni
imposa l'obligation de se consacrer à l'étude de
la jurisprudence. Après avoir suivi de 1794 à
1797 les cours de droit à l'Académie dlnsprùck ,
Hormayr entra en 1799 dans la landwehr tyro-
lienne , et il obtint bientôt le grade de major. En
1802 il fut placé à Vienne au ministère des af-
faires étrangères , et il y rat peu de temps après
mis à la tète des archives secrètes. Il accompagna
en 1805 le prince de Lichtenstein au congres de
Presbourg. Quatre ans après il se fendit en
Tyrol , pour y préparer une révolte générale
contre les Bavarois. Son entreprise eut un succès
presque complet ; sauf la forteresse de Kufstein,
les envahisseurs perdirent tout le Tyrol. Pendant
la guerre qui s'ensuivit (voy. Hofer) , Hormayr
resta chargé du gouvernement de ce pays , ex-
cepté ce qui concernait les opérations militaires ;
son esprit inventif lui fit trouver des ressources
inespérées. Après l'armistice de Znaïm, Hor-
mayr retourna à Vienne, où il se Uvra à des
travaux historiques. En 1813 il fut incarcéré
pendant quelque temps avec plusieurs autres
habitants du Tyrol. Deux ans après il fut nommé
historiographe de l'Empire et de la famille impé-
riale. Il vécut à Vienne jusqu'en t828, époque où
il accepta les fonctions de conseiller ministériel
au département de l'extérieur et de référendaire
pour les affaires féodales et ecclésiastiques, que
lui conféra le roi Louis de Bavière. Il fut aussi
, chargé des rapports à taire sur les archives et
1 les collections d'objets d'art et d'antiquité. Eo
1832, il devint ministre résident auprès de la
cour de Hanovre; de 1839 à 1846 il occupa les
mêmes fonctions auprès des villes hanséatiques.
Depuis il fut mis à la tète des archives du
royaume de Bavière. Hormayr a éclairoi de nom-
breux points difficiles de l'histoire de l'Autriche
et de la Bavière. C'est en grande partie grâce à
lui que les derniers volumes des Monumenta
Boica ont été publiés avec beaucoup de soins et
d'habileté critique, ce qu'on ne peut pas dire
de ceux qui les ont immédiatement précédés.
Cependant, il faut remarquer que Hormayr n'est
pas toujours impartial dans ses appréciations
historiques, et que son style est souvent ampoulé.
On a de lui : Kritisch-diplomatische Beitràge
zur Geschichte Tirols im Mittelalter ( Maté-
riaux critico-diplomatiques pour servir à l'his-
toire du Tyrol dans le moyen âge) ; lnsprûck,
1802-1803, et Vienne, 1805, 2 vol. in-8° ; —
Geschichte der gefursteten Grafschaft Tirol
( Histoire du comté de Tyrol ) ; Tubingue, 1806-
1808 ; — Œstreichischer Plutarch oder Leben
und Bildnisse aller Regenten des ôstreichi*
schen Kaiserstaats (Plutarque autrichien, ou
vies et portraits de tous les princes de la maison
d'Autriche); Vienne, 1807-1820, 20 vol.; —
Mistorisch-statistisches Archiv/ûr SudDeut-
sehland ( Archives historiques et statistiques
pour l'Allemagne du Sud ) ; Vienne, 1808, 2 vol.;
— Archiv fur Geschichte y Statistik, Litte-
ratur und Kunst (Archives d'Histoire, de Sta-
tistique, de Littérature et des Beaux-Arts);
Vienne, 1810-1828, 16 vol. in-4°;— Taschen-
buch/Ur die vaterlandriche Geschichte (Re-
cueil annuel pour l'histoire de la patrie) ; Vienne,
18(M848, 27 vol. ; les volumes publiés de 1820
à 1829 ont été rédigés avec la collaboration de
Mednyanski; — Allgemeine Geschichte der
neuesten Zeit vom Tode Friedrichs des Gros-
sen bis zum zweiten Pariser Frieden (His-
toire générale des temps modernes depuis la
mort de Frédéric le Grand jusqu'à la seconde
paix de Paris) ; Vienne, 1817-1819, 3 vol. ; ibid.,
1832; — Geschichte Andr. Hofer s (Histoire
d'André Hofer); Leipzig, 1817, in-8°; — Wien,
seine Geschichte und Denkwûrdigkeitcn
( Vienne, son Histoire et ses Curiosités ) ; Vienne,
1823-1825, 9 vol., avec planches : cet ouvrage
contient près de quatre cents documents con-
cernant la constitution municipale, l'industrie
et les arts de l'Allemagne du moyen âge; —
Kleinehistorische Schriften und Gedachtniss-
reden ( Petits Écrits historiques et Discours com-
raémoratifs ) ; Munich, 1832; — Lebensbilder
aus dem Be/reiungskriege (Scènes des guerres
dedélivrance) ; Iéna, 1842-1844, 3 vol. ; — Ane-
monen aus dem Tagebuche eines alten PU-
germannes (Anémones tirés du journal d'un
vieux Pèlerin) ; Iéna, 1845-1847, 4 vol. ; — Dus
Béer von Innerôstreich im Jùiege von tsci)
HZ
HORMISDAS
t74
( 1/ Armée de l'Autriche intérieur© dan* la guerre
de 1 «69 ) $ Leipzig, 1348. Hormayr a aussi édité :
Die gokUne Chronik va» Mohe/ischwangau
( La Chronique dorée de Hoaeuschwangau);
Munich, 1943. E. G.
Gonv.-Léx. - IfeiurfftiMog. der Deutschen, t. XX vi.
hormisdas I er (en pehlwi, Okhromazdii en
parti, Àonrhmazdaï * en persan* faurmouzd et
Jformouz; en arménien, Ormtot ; en arabe, Hor-
inizdan)> Schakinschah (roi des rois) de
Perse, le troisième de la dynastie des Sassa-
nide* , régna de 271 à 272. Sa mère était fille de
Mahree, roi de l'une des contrées de la Perse,
au temps des Artacides. Durant le règne de
son père Schabour I er (Saper), il gouverna
avec gloire la province de Khorassan. Avant
appris que les envieux l'accusaient d'aspirer au
trône, il coupa Tune de ses mains, afin d'ôter
toute inquiétude au roi. Les historiens musul-
mans qui rapportent ce fait prétendent que
les princes mutilés étalent exclus du trône; ils
disent pourtant qn'Horraisda* succéda à son père.
Ce monarque régna un an dix mois selon Hanv
zah isfahani; un an dix jours selon Mirkhond*
11 annula la sentence d'exil prononcée contre
Manès, lui permit de prêcher ses doctrines en
Perse, et lui assigna pour résidence le château
de Deskerah , en Sedjestan. Il fonda la ville de
Ram Hormouz. Son fils Behram I er lui succéda.
£. BfiAUVOIS.
Modjmet at*tmvaribh, fragm. trad. par M. &Iohl, dans
le Journ. Àsiat., 18M, t. 1, p. 160. — Harazab Isfahani.
Ann.> texte et trad. par Gottwildt. — lbn-al-Atslr, R a -
mil aUtewarihh. — Eutychius, Jnn, 884. — Aboul- Fa-
rad), Hist. Dynast., 82. — Flrdoust, Schah-Nameh. —
Mlrkhood, Hist. des Sassanides, à la suite de Mém. sur
les Antiq. de Perse, par SllYestre de Sacy ; 179S, ln-4«,
p. 290. - Agathias, Chr&n., 180. — Moritman, Etktserung
der Mûnzen mit Pehlwi Legenden; dans le Journ. Àsiat.
ullem., t. VIII, p. 37. - De Longptrter, Essai sur les mé-
dailles des rois de Perse de la dynastie des Sassanides:
Parte, 18*0, ln-4<>.
HO*Mi6DAs il, surnommé Kouhida, hui-
tième roi sassanide, régna sept ans cinq mois,
de 300 à 308, ou de 303 à 311. Il succéda à
son père, Narsi ou Narsès , qui avait abdiqué
pour se consacrer exclusivement aux exercices
de piété. Ayant obtenu la main d'une fille du roi
de Caboul , il la fit mettre à mort , parce qu'elle
refusait de l'accepter pour mari. C'est la seule
•action violente qu'on ait à lui reprocher. Il fit
construire un grand nombre d'édifices et fonda
.la ville de Vehesch-Hormouz : son fils pos-
thume Schabour II Dzou'l-Actaf lui succéda.
Il avait trois autres fils : Ardeschir, qui régna
après son frère; Narsès, que Schabour tenta
de faire roi d'Arménie, et Hormisdas. Ce der-
nier prince , qui était l'ainé , fut exclu du trône ,
parce qu'il avait mécontenté les grands. Il
s'enfuit en Arménie, passa ensuite à Cons-
tantinople, et embrassa le christianisme. Les
empereurs l'accueillirent avec distinction et l'em-
ployèrent à faire la guerre contre sa patrie. Lûrs
de son expédition en Perse (363), Julien lui confia
le commandement jde la cavalerie et d'une partie
de l'armée. E. B.
Tliéophane, Chronographie. — Tillemont, Hist. des
Empereurs, t. IV, 196-198, 888, et les sources citées a l'ar-
ticle précédent.
HORMISDAS ill y dix-septième roi sassanide,
succéda à son père Yeadeàjerd III en 457, et
régna jusqu'en 458, ou 460, ou 464. Le Modjmel
et Hamsah Isfahani ne font pas mention de lui.
Quelques historiens le représentent comme un
prince juste et libéral. D'autres disent qu'il se
livra à l'iniquité. Son frère atné Firouz, mécontent
de n'avoir eu en partage que le Sedjestan , se re-
tira chez les Huns Ephtalites, et promit de leur
céder la ville de Termedz et une partie du Kho-
rassan , s'ils l'aidaient à s'emparer de la Perse.
Ayant obtenu une armée de 30,000 hommes, il
vainquit Hormisdas* et se plaça sur le trône. On
ne sait pas avec certitude s'il fit massacrer son
frère ou s'il lui laissa la vie. K. B.
Môme» sources que pour Hormidas I".
houmisdas IT, vingt-troisième roi sassa-
nide, fils et successeur de Chosroès I er (Khosrou
Anouschirwan ) , régna dé 579 à 590. Sa mère,
fille du khacan des Turcs, était la principale
femme du roi. C'est à cette circonstance qu'il
dut la préférence qui lui fut accordée au détri-
ment de ses frères aînés. Il eut pour maître
l'excellent ministre Bouzourdj-Mihir. Ce dernier
ayant , dit-on , secrètement embrassé le chris-
tianisme, s'efforça d'en inculquer les principes
à son élève. Hormisdas ne tira aucun profit de
ces enseignements. Il favorisa pourtant les chré-
tiens, et traita avec distinction les patriarches
nestoriens Ézéchiel et Jesujabus. Avant son
avènement, il s'était signalé dans des expéditions
militaires, et il gouverna d'abord avec assez de
sagesse- Mais ayant perdu son précepteur, au
bout de dix-huit mois de règne , il se livra à
ses mauvais penchants. Un de ses premiers actes
avait été de rompre les négociations de paix en-
tamées entre son père et les ambassadeurs de
Tibère, empereur d'Orient. Ce dernier prince,
désirant vivement mettre fin à la guerre qui du-
rait depuis huit ans , renvoya au Schahinschah
( grand-roi ) , un grand nombre de prisonniers
perses. Hormisdas, qui attribuait cette conduite
conciliante à la crainte et à la faiblesse , n'en
devint que plus exigeant. Il refusa de céder la
forteresse de Dara en Mésopotamie , et réclama
l'arriéré du tribut que ses prédécesseurs avaient
imposé aux Grecs, tl traita avec mépris les ambas-
sadeurs grecs, et les fit reconduire à la frontière
; par les chemins les plus impraticables. Cependant
Tibère n'avait pas négligé de tenir ses troupes sur
un pied respectable. Aussitôt qu'il eut appris la
rupture des conférences, il ordonna à ses généraux,
Maurice et Narsès l'Arménien, de passer le Tigre et
. de ravager la Médie. En 580 l'armée persane ayant
été mise en déroute a Callinicus , Hormisdas se
prêta plus facilement à la reprise des négocia-
tions. Mais ses prétentions exagérées rendirent
, tout accord impossible. Maurice se remit en cam-
175
HORMISDAS
176
et vainquit, en 681, dans la plaine de
Constantine, une armée commandée par Tam-
chosroès ou Tenkhosrou. Lorsqu'il retourna à
Constantinople pour prendre possession du trône,
resté vacant par la mort de son beau-père Ti-
bère, il laissa le commandement de Tannée à
Jean de Mystacon. Ce général perdit la bataille
d'Amid , en 582 ; mais son successeur Philippique
répara cet échec, et remporta, en 586, la ba-
taille de Solacon en Mésopotamie, où périt la
moitié de l'armée ennemie. Plus tard les Perses
furent encore vaincus à Martyropolis , en 588.
Pendant que ces événements se passaient dans
la partie occidentale de l'empire , les khazares
avaient franchi le Caucase et ravagé l'Arménie
et l'Adherbaïdjan. D'un autre côté, le Khacan
des Turcs , Saweh , oncle maternel d'Hormisdas,
avait envahi le Khorassan, à la tète de trois à
quatre cent mille hommes, protestant que son
unique désir était d'obtenir un passage pour aller
attaquer les Grecs. Le célèbre Behram Tchou-
bin, gouverneur de l'Arménie, rat chargé de
tenir tète à cette masse indisciplinée. Il n'emmena
avec lui que 12,000 hommes d'élite; ce corps
aguerri défit les Turcs dans une bataille où périt
leur' roi. Behram traversa ensuite le Djihoun
et mit le siège devant la place d'Avrizeh , où s'é-
tait enfermé le fils et successeur de Saweh; S'é-
tant rendu maître de la personne de ce prince,
il l'envoya à Madain, capitale des Sassanides.
Le khacan fut traité avec ménagement, et obtint
la paix à condition de reconnaître la suzeraineté
du roi de Perse. Hormisdas , jaloux de la gloire
de son général , et le soupçonnant d'avoir dé-
tourné à son profit une grande partie des dé-
pouilles de l'ennemi , lui envoya les insignes du
déshonneur , des chaînes et un fuseau. Behram
se suspendit les unes au cou , et s'attacha l'autre
à la poitrine. Dans cet accoutrement , il se pré-
senta à ses troupes , et les excita à se mettre en
insurrection contre l'autorité royale. Indignée
de l'outrage fait à son chef, l'armée entière jura
de le venger, et se porta sur Nisibe. Elle fut
rejointe par les troupes de Behram Nikhordès ,
fils de Siawesch, qui, à la suite d'une défaite es-
suyée en Albanie (590) , avait éprouvé un traite-
ment analogue à celui de Behram Tchoubin. Ce
n'étaient pas les seuls mécontents qu'eût faits Hor-
misdas: Ce monarque avare et tyrannique s'était
également attiré la haine du peuple.Aulieu d'imiter
son père, qui était facilement accessible, il vivait
loin des regards de ses sujets , et ne paraissait
en public qu'orné des emblèmes de la royauté.
On lui avait donné le sobriquet de Tadj Dar
(porte -couronne). Il voulait juger lui-même,
et prononçait la peine de mort pour les plus
minces délits. Inquiété d'une prédiction portant
qu'il serait détrôné par des rebelles, il fit périr
un grand nombre de personnages de distinction,
parmi lesquels on cite le mobedan mobed (granoT-
prêtre). On évalue à treize mille personnes le
nombre des victimes de sa cruauté. Se défiant
même de son fils Khosroa Parwiz , que Behram
Tchoubin avait proclamé roi, il résolut de le
faire enfermer. Mais Khosrou se réfugia à Ar-
debil, dans rAtropatène, et ses oncles maternels
Bestam Kestehem et Bindouieh firent soulever
les habitants de Madaïn. Hormisdas tomba entre
les mains des révoltés et fut jeté dans un ca-
chot. Ayant convoqué le peuple, il offrit d'abdi-
quer en faveur de son plus jeune fils. Cet
enfant fut égorgé, sa mère sciée par le milieu
du corps, et Hormisdas eut les yeux crevés.
Khosroès fut invité à venir prendre possession
du trône. Ce prince rentra, en effet, dans sa
capitale; mais il désavoua les persécuteurs de
son père, et le réinstalla dans le palais. Hor-
misdas , adouci par l'adversité, se borna à de-
mander qu'on mit auprès de lui un homme ins-
truit, capable de l'entretenir et de lui faire des
lectures. Il pria aussi son fils de disgracier ses
deux oncles. Mais Khosroès refusa, de peur
d'augmenter le nombre de ses ennemis. N'ayant
pu s'accorder avec Behram Tchoubin, il lui livra
bataille à Neharwan , et fût complètement vaincu.
Réduit à quitter la Perse, il se rendit, par le
conseil de son père, dans les possessions des
Grecs , pour implorer leur secours. Ses oncles
raccompagnèrent jusqu'à une certaine distance;
mais ils retournèrent à son insu dans la capi-
tale. Hormisdas fut massacré par eux , en 591,
dix mois après qu'il eut été privé de la vue.
E. Beauvois.
Outre les sources citées à Hormldas 1 er : Menander Pro-
tector, dans Fragm. Histor. Grœcorum, de Ch. Millier;
Paris, 1861, t. IV, p. S56. - Éragre, Hist. Ecclésiast.,
t VI, ch. 15. — Théophylactc Simocatta, Historiée Reruma
" Mauritio gestarum, I. III. ch. 18 ; 1. IV. ch. s. — Assemanl,
Bxblioth. Orient., t. III, part. 1, p. 810. — Caussln de Per-
cerai, Hist. des Arabes, t II. — Not, des Manuscr., t. H.
hormisdas, cinquante-unième pape, suc-
cesseur de Symmaque, né à Frosinone, dans la
campagne 1 de Rome, élu le 26 juillet ou le 28 no-
vembre 514, mort le 6 août 523-. Anastase, qui
régnait alors en Orient, soutenait l'hérésie d'Eu-
tychès ; Yitalien, son compétiteur à l'empire, pro-
tégeait le catholicisme. Yitalien s'approche de
Rome à la tête d'une armée de catholiques ré-
voltés par la persécution, et Anastase, effrayé, se
décide à des concessions; feignant de vouloir se
réunir à l'Église romaine, il demande au pape
qu'un concile soit rassemblé à Héraclée. Hor-
misdas envoie des légats (515) qui posent comme
conditions que les Eutychéens accepteront le
concile de Calcédoine tenu contre eux en 451, et
qu'ils prononceront la condamnation d'Acace,
patriarche de Constantinople et le plus ardent
protecteur de l'hérésie; les légats revinrent à
Rome sans avoir rien obtenu. En 517, seconde
ambassade aussi inutile que la première: l'em-
pereur repousse le formulaire de réunion et
renvoie deux cents évéques venus pour le con-
cjle d 'Héraclée. Anastase meurt (518) ; Justin,
son successeur, se montre plus favorable aux
idées d'Hormisdas, et le 15 juillet Jean, pa-
177
triarche de Constantinople, fait annoncer la cé-
lébration du concile de Calcédoine. Une troisième
légation, en 519, fit enfin cesser le schisme qui,
depuis la condamnation d'Acace, séparait l'Église
de Constantinople de celle de Rome. Le pa-
triarche Jean signe le formulaire apporté par les
légats. Il contenait, entre autres conditions,
qu'on rayerait des dyptiques, par conséquent de
la communion des fidèles, le nom d'Acace, celui
de ses successeurs jusqu'à Jean, et ceux des
empereurs Zenon et Anastase. On a beaucoup
blâmé la disposition relative àEuphèmeet Macé-
donius, qui, comme successeurs d'Acace, durent
être rayés des dyptiques; ces deux patriarches,
dont la vie avait été exemplaire, n'avaient eu
d'autre tort que d'obéir à la nécessité de ne point
troubler la tranquillité de l'Orient et de préférer
d'être séparés 'de l'Église romaine plutôt que de
condamner la mémoire d'Acace, que l'opinion
publique protégeait. Le zèle et l'activité d'Hor-
misdas s'étendirent également en occident : il
envoya d'excellentes instructions à saint A vit de
Vienne pour la Gaule Narbonnaise, à Jean de
Taragone et à Salluste de Séville pour l'Es-
pagne. A Rome, il s'occupa surtout des formes
extérieures de la religion, et propagea dans le
clergé l'étude de la psalmodie. Û eut Jean I er
pour successeur. On ad'Hormisdas quatre-vingts
lettres dans le recueil des Conciles deLabbe, t. IV,
p. 1420. Alfred Franklin.
Labbe, Sacroscmcta Concilia; t. IV, p. 1415 à imi.
- Bruys, Histoire des Papes; 1. 1", p. 183. — Barontas,
Annales Eeclesiaiticx ; t IX, p. 14». - Alletz, Histoire
des Papes, t I e ', p. 15t. — Eleary, Histoire EccUsias-
tique, t. VII, p. 18 à 88.
HOMt, BORNE OU HORNBS (Philippe 11
de MoNTMORENCY-NrvELLE, comte de), noble
brabançon, célèbre par son supplice, né en 1522,
décapité à Bruxelles, le 5 juin 1568. Fils aîné de
Joseph de Montmorency, seigneur de Nivelle, et
d'Anne d'Egmont, il perdit son père à l'âge de
huit ans. Sa mère épousa en secondes noces
Jean, comte de Horn, qui descendait de Jacques,
grand-veneur héréditaire du Brabant, en faveur
duquel l'empereur Frédéric ni avait érigé, en
1.450, la terre de Horn (dans l'ancien territoire
de Liège) en comté. Jean, n'ayant pas eu d'en-
fants de sa femme, adopta ceux du premier Ut, et
leur laissa toute sa fortune, à la condition de porter
son nom. En conséquence Philippe de Nivelle prit
le titre de comte de Horn. Attaché de bonne
heure à Charles-Quint, il obtint de cet empereur
le gouvernement de la Gueldre, le collier de la
Toison d'Or et la charge de capitaine général de
la mer. Sous Philippe II, il devint chef des
finances des Pays-Bas, et on assure qu'il vendit
pour plus de 300,000 écus de son bien afin de
subvenir aux besoins du trésor public. Ainsi
que le comte Lamoral d'Egmont (voy. ce nom),
son parent, dont il partageait les idées de tolé-
rance religieuse, il s'était signalé aux batailles
de Saint-Quentin et de Gravelines; mais sa liai-
son avec le prince d'Orange, sa haute naissance
HORMISDAS — HORN
178
et son crédit devaient amener sa perte. En 1565,
il s'était joint à ses deux amis pour avertir la
gouvernante, Marguerite de Parme, des dangers
qu'entraîneraient la persécution des hérétiques
et l'introduction de l'inquisition dans les Pays-
Bas, en suscitant une effroyable guerre civile.
L'année suivante, Marguerite, voyant un soulève-
ment imminent, voulut négocier une paix qu'elle
se réservait sans doute de rompre quand elle
trouverait le moment favorable. Elle chargea le
prince d'Orange, le comte d'Egmont et le comte
de Horn de négocier en son nom avec les con-
fédérés, et en effet un acte fut signé le 23 août
1566, par lequel elle promettait de suspendre
l'inquisition et de permettre les prêches par-
tout où les protestants étaient déjà maîtres des
églises, mais cela seulement jusqu'à ce qu'elle
connût la volonté du roi son frère. Malgré Tin-
exécution de ces promesses fallacieuses, les
comtes d'Egmont- et de Horn refusèrent de se
joindre à la confédération des Gueux, à la tête
desquels se trouvait le prince d'Orange. Enfin
l'impitoyable Philippe H ordonna de noyer l'hé-
résie dans le sang. Le 16 février 1568, le con-
seil de l'inquisition avait prononcé une sentence
contre les peuples des Pays-Bas. Le duc d'Albe
érigea un tribunal d'exception, qu'il nomma le
conseil des troubles , mais que le peuple et les
soldats espagnols eux-mêmes nommèrent le tri-
bunal du sang (el tribunal de la sangre) :
il était composé de douze juges espagnols , et
présidé par le duc lui- même ou par Vargas.
Dix-huit mille personnes périrent, trente mille
émigrèrent La mort ne suffisait pas aux persé-
cuteurs; on prolongeait les supplices par des raf-
finements atroces. Quoique le comte d'Egmont
et le comte de Horn n'eussent jamais renoneé
au culte catholique, il leur suffit d'avoir repoussé
le joug de l'inquisition pour être livrés au tri-
bunal de sang. Le duc d'Albe les fit arrêter tous
* deux par surprise à Bruxelles en 1567, et or-
donna de procéder contre eux. Condamnés à la
décapitation, ils périrent ensemble de la main
du bourreau. Le tombeau du comte de Horn a
été découvert en 1839, dans l'église Saint-Martin
de Weert.
Le frère du comte de Horn, Floris de Mont-
morency, seigneur de Montigny, retenu prisonnier
en Espagne, subit le même sort ou mourut em-
poisonné en 1570, à Simancas. En lui s'éteignit
la branche des sires de Nivelle de la maison de
Montmorency. Le territoire de Horn fut alors
réuni à l'évéché de Liège. Plusieurs autres
branches de l'antique maison de Horn conti-
nuèrent cependant de fleurir, entre autres celle
de Beaucignies, à laquelle appartenait Eugène-
Maximxlien, comte de Horn et de Beaucignies»
lieutenant général et grand d'Espagne, gouver-
neur de la Gueldre, qui fut élevé à la dignité de
prince par Charles H, roi d'Espagne, le 19 oc-
tobre 1677. La branche masculine s'est éteinte
en 1763, et la fétaiûineen 1826. L. L— t.
179
HORtt
180
Procès des comtes d'Eomont et de Horn,' Amsterdam
(Bruxelles), 1719, 1 vol. In-lt, servant de supplément a
la traduction de Strada, par On Ryer. — La Déduction
de l'Innocence de mesure Philippe de Montmorencu,
comte de Homes, sans nom d'auteur ni de lieu d'Impres-
sion (sept. 1888, selon Relffenberg ). — Strada, De bello
Belgico. — La Poplinlère, Fraie et entière Histoire des
Derniers Troubles advenus tant en France qu'en
Flandre depuis 156t. — BentUoglio, Guerre di Flandra.
— De Tbou, Hist. sui temp. — Mlnana, Historia de Es-
paha. ~ Laderché, Annal. Ecoles., tem. XXIII, p. 180
et sulv. — Ferreras, Synopsis de Espana, — W a taon,
Hist. de Philippe IL — Sismondt, Hist. des Français,
tome XVIII, p. 449, MO, 483-48*; tome XIX, p. il. — Relf-
fenberg, dans le Dict, de la Conversation,
horn (Georges), en latin Hornius, historien
é et géographe allemand, né bGreussen (princi-
pauté de Schwareburg-Sondershausen), en 1620,
mort à Leyde, en 1670. Il fit ses études dans &a
ville natale. La guerre le força de passer dans
le Brandebourg, puis en Hollande. A La Haye,
il devint gouverneur d'un jeune Anglais, Thomas
Morgan, qu'il suivit à Londres. Durant le séjour
qu'il fit dans les Iles Britanniques, Horn se dé-
clara formellement pour le presbytérianisme. II
fut rappelé en Hollande pour occuper à Harder-
wick les chaires d'histoire, de politique, et de
géographie, d'où il passa à Leyde comme profes-
seur d'histoire. C'était vers* 164a. En 1659, Horn
eut une dispute assez vive avec Isaac Voss sur
l'âge du monde. Ce fut Horn qui la commença
par son De Vera sEtate Mundi, Leyde, in-4° ,
en attaquant la dissertation publiée par Voss, et
dans laquelle ce dernier prétendait prouver que
la naissance du monde était plus ancienne de
mille quatre cent quarante ans que ne le porte
l'ère vulgaire. Voss maintint son opinion dans
ses Castigationes ; La Haye, 1659, in-4°.
Horn répliqua par Auctarium defensionis pro
VeraMtate Mundi; Leyde, in-4°. Suivant Mo*
réri , « Horn étoit un homme d'une grande lec-
ture ; mais comme il se boit quelquefois trop à
sa mémoire, il est tombé dans plusieurs fautes
assez considérables. 11 avoit le talent de propo-
ser les choses brièvement et avec netteté : son
esprit s'égaroit néanmoins de temps en temps
jusqu'à l'extravagance, et l'on croit que cet ac-
cident venoit d'une perte de cinq mille florins
qu'il fit avec un alchimiste de La Haye. » Il
mourut fou à l'âge de cinquante ans.
Ses principaux ouvrages sont : Rerum Britan-
nicarum Libri VIU quibus res in An g lia, Scotia
et Hibernia, anm«,1645, 1646,1647, bello gestœ
exponuntur; Leyde, 1648, in -8°; — De Origù
nïbus Américains làbri IV; La Haye, 1652,
in- 12 ; l'auteur prétend que l'Amérique a été peu-
plée successivement par les Phéniciens, les Can-
tabres, puis par les Chinois, les Huns, etc. Une
pareille supposition ne supporte plus la critique.
L'auteur base surtout son opinion sur quelques
usages bizarres ou cruels qui se retrouvent chez
les habitants de l'ancien continent. Cela prouve
seulement que l'homme est comme prédestiné à
commettre les mêmes erreurs dans quelque ré-
gion qu'il habite, parce que les mêmes passions,
les mêmes besoins engendrent les mêmes effets.
L'ignorance complète dans laquelle les Espagnols
trouvèrent les Américains au point de vue des
sciences, des arts, et même de l'expression et
de la reproduction des idées, prouve suffisam-
ment que les Péruviens et les Mexicains étaient
des réunions d'hommes assez modernes, des
peuples à l'état d'enfance qui n'avaient reçu au-
cune idée du dehors. Si les Phéniciens, les Can-
tabres, les Chinois avaient abordé en Amérique
et, comme le prétend Horn, y eussent laissé leurs
superstitions et leurs vices , ils y auraient laissé
aussi quelque tracedc leur civilisation : ce qui n'é-
tait pas. Us seraient venus par mer, et les Indiens
que trouvèrent les Castillans n'avaient pas même
l'idée d'un bâtiment capable d'affronter la mer.
Horn, dans son livre, a beaucoup trop accepté les
récits fabuleux de Garcilasso de Vega et des
premiers chroniqueurs espagnols. — Une édition
de Septime-Sévère avec des Notes ; Leyde, 1654,
in-8°; — Historié Philosophiez Libri VII;
quitus de origine, sectis et vita philosopha-
rum ab orbe condito ad noslram eetatem
agitur; Leyde, 1655, in-4°; — Dissertations
Historié* et Politicx ; Leyde, 1655, in-12; —
Historia Ecclesiastica et Politica, depuis la
création du monde, avec une introduction à l'his-
toire universelle politique ; la première édition
de l' Historia Ecclesiastica est de Leyde, 1665,
in-12; avec continuations, Leyde, 1687} et
Francfort, 1704; trad. en français, Rotterdam,
1699-1700, 2 vol. in-12; ~» Aroa Nox, site
historia imperiorum et regnorum a condito
orbe ad nos ira tempora; Leyde, 1666, In-12;
~ Accuratissima Orbis Delineatio, sive geo-
graphia vêtus, sacra et prophana, exhibens
guidquid imperiorum, regnorum, principa-
tuum, rerumpublicarum ab initio rerum ad
présentent usque mundi statum; Leyde,
1667, in-fol.; — Orbis polilious imperiorum,
regnorum, principatuum, rerumpublica-
rum, cum memorabilium hist or iis et geo-
g raphia veteri ac recenti; Leyde, 1668, 1669,
in-12; c'est une suite historique et géographique
de l'arec Nox ; •— Orbis imperans, seu trac-
tatus de XIII orbis imperiis, animadversio-
nifrus Ulustratus, etc.; Leyde, 1668, in-J2;
—Arca Mosis, sive historia mundi, quas corn*
plectitur primordia rerum naturalium, om-
nium artium et scientiarum; Leyde, 1668,
in-8°. Selon l'auteur l'on trouve dans la Genèse
les prolégomènes de toutes les sciences. Son livre
est fort ingénieux et témoigne d'une grande érudi-
tion, mais ne souffre pas un examen sérieux ; —
Une traduction latine de l'ambassade hollandaise
en Chine ; Amsterdam, 1668, in-fol. avec fig. ; —
Ulyssea, sive studiosus peregrinus omnia
lustrons littora; Leyde, 1671, in-12 : ouvrage
posthume qui reproduit de curieux documents ;
— Des traités politiques insérés dans divers
recueils ; — Observatioim sur les institutions
politiques de Boxhorn. On lui attribue un coin-
181
HORN
183
mentaire latin sur l'état présent des Églises en
Angleterre, publié sous le nom à'Honorius Rêg-
gius, avec un Appendis contenant les décrets
donnés dans le synode de Glascow contre les
évêques en 1647, in-4*. L— z— e.
Wttten , Dtar. - Strare, Ad. litter. - Grandltn ,Otia.
hobn (Antoine- Joseph, comte de), assassin
belge, né en 1698, roué vif à Paris, le 26 mars 1720.
Fils cadet de Philippe-Emmanuel, prince deHorn,
il appartenait à l'ancienne et illustre famille de
ce nom. Son père avait servi avec distinction
dans les dernières guerres de Louis XIV, et reçu
sept coups de feu à la bataille de Ramillies. Sa
mère était une princesse de Ligne. Entré de
bonne heure au service autrichien , il dut à sa
naissance d'arriver jusqu'au grade de capitaine;
mais sa mauvaise conduite l'avait bientôt fait
réformer. Pendant un séjour de deux mois à
Paris, il se livra à tant d'excès de tous genres ,
que &a mère', veuve alors , inquiète de ce qui
pouvait en résulter, envoya un agent pour payer
ses dettes, et en même temps solliciter du régent
une lettre de cachet qui l'expulsât de France. Cet
agent n'arriva que le samedi saint : la veille, le
comte de Horn avait été arrêté; voici dans
quelles circonstances. On était alors dans toute I
la fureur de l'agiotage surexcitée par le système
de Law (voy. ce nom). Le 22 mars 1720, le
comte de Uorn , sous le prétexte d'un achat de
100,000 écus d'actions, avait donné rendez-
aanter la honte qui rejaf Uirejtd'un tel jugement sur
uu grand nombre de familles nobles* On lui pro-
posa de faire déclarer fou le comte de Horn et
de le faire enfermer pour le restant de ses jours
aux Petites-Maisons , où un de ses oncles était
déjà. Le régent fut inflexible et voulut que la
justice eût son cours. « Quand j'ai du mauvais
sang, je me fais saigner, » répondit-Il aux solli-
citeurs. « D'ailleurs, ajouta-t-il, j'en partagerai
la honte avec vous. » L'instruction du procès se
fit avec une rapidité telle, que le 26 mars 1720,
six jours après la perpétration do crime, le comte
de Horn et son complice expiraient sur la roue
en place de Grève* Sismondi , loin d'attribuer
l'énergie de cette répression au régent, pense
qu'elle eut lien, au contraire, par son apathie.
Seton lui , le régent avait promis d'épargner an
jeune comte au moins l'ignominie et les douleurs
atroces du supplice de la roue; sa mort suffi-
sait pour expier son crime, et personne n'avait à
gagnera l'opprobre du supplice; « mais Dubois
et Law ne songeoient qu'à rassurer les agioteurs,
ajoute-t-il , et le régent , qui ne vivoit plus que
pour les plaisirs des sens , qui repoussait loin de
lui les fatigues de penser et de vouloir, qui
chaque jonr manquoit à quelqu'une des pro-
messes qu'il avoit faites la veille, après s'être en-
gagé à sauver au comte de Horn ces dernières
lrorreors , le laissa périr sur la roue avec son
complice. » Après cet événement, le gouverne-
vous à un courtier dans un cabaret de la petite | nient ne von hit pas que le marché des effets publics
rue de Venise, qui allait de la rue Quincampoix
à la rue Saint-Martin. Le courtier vint au rendez-
vous , et entra dans un cabinet particulier où se
trouvait déjà le comte de Horn avec deux indivi-
dus qu'il disait ses amis : l'un se nommait d'Es-
tampe ou d'Étampes, l'autre était un prétendu
capitaine réformé piémontais du nom de Laurent
de Mille. Après les premiers compliments et à un
signal convenu, tous trois se jetèrent sur l'homme
aux actions ; le comte de Horn lui porta plu-
sieurs coups de poignard et s'empara de son
portefeuille. Laurent de Mille voyant que le cour-
tier vivait encore, l'acheva. Mais en se débattant
la victime avait fait du bruit ; un garçon du ca-
baret ent'rouvrit la porte du cabinet, et, voyant
un homme plein de sang , il ferma cette porte à la
clef et donna l'alarme en eriant à l'assassin. Se
voyant découverts, les meurtriers sautèrent par la
fenêtre. Le comte de Horn fut arrêté au moment
où il se laissait tomber dans la rue ; de Mille
parvint à s'échapper dans la foule qui encom-
brait lame Quincampoix, mais on put suivre sa
trace, et il fnt arrêté à la hauteur des Halles.
D'Estampe seul réussit à s'évader. Les deux as-
sassins pris en flagrant délit furent conduits à la
Conciergerie et livrés à la justice ordinaire. Le
principal coupable était allié aux plus grandes fa-
milles de France, et même au régent par sa mère.
Le public pouvait croireque l'autorité s'efforcerait
d'étouffer l'affaire. De hauts personnages inter-
cédèrent auprès du duc d'Orléans pour lui repré-
oontinaàt plus longtemps dans la rue Quincam-
poix, qui ne paraissait pas assez sûre ; il le trans-
porta sur la place Vendôme, qu'on appela le Camp
de Condé, parce que le ducde Bourbon-Condés'y
faisait remarquer comme le plus riche, le plus
avide et le moins scrupuleux des agioteurs.
L. Louvet.
Satnt»8imoa, Mémoires. — Dangtav, Mémoires. - Ou-
clot. Mémoire* secrets. — Mar mortel, Histoire de Jet
Régence. - Lacretelle , Hist. du Dix-Huitième Siècle. —
Marquise de Créqoy, Souvenirs. - Sismondi , Hist, des
Français, tome XXVII, p. 418-41».
horn, famille suédoise, qui a produit plu-
sieurs hommes remarquables, descend de 8ig*
mund Horne , noble brabançon, qui s'établit en
Suède vers le milieu du quatorzième siècle.
HOftN ( Clas-Christersson), amiral suédois,
né vers 1520, mort le 19 septembre 1558, au
presbytère de Aby, en Œstergoethland. Il remplit
d'abord des fonctions administratives, entra
ensuite dans l'armée, et eut le commandement
suprême dans plusieurs expéditions. Il vainquit
dans quelques rencontres les Russes et les Da-
nois. Mais c'est principalement comme marin
qu'il se distingua. Nommé amiral en 1564, il
défit les Danois près du rocher de Klippro, au
nord- du Sund de Kalraar. L'année suivante, il
croisa dans la Baltique avec une escadre de
quinze vaisseaux de guerre, la plus considérable
que la Suède eût encore équippée, et remporta
l'avantage dans cinq combats qu'il livra à la flotte *
danoise, combinée avec celle de Lubeck. Son plus
ISS
HORN
184
beau fait d'armes est la victoire qu'il gagna, en
1 566, près de Hled'ŒIand, ayant sous ses ordres
soixante-huit navires. C'était Tan des meilleurs
conseillers du roi Éric XIV, dont il calma sou-
vent la fureur sanguinaire. £. B.
TegeJl, Brie XIV, M*. - Nordin, JSremHme. - Ad-
lenparre, tHstortika SamUngar., t. U, p. 10 et saiv. -
TJMMUBW, SvmuM Plutarch. - Bioçraphitkt Lex.. t. -VI.
horn (Gustave-Carlsson), général suédois,
né à Œrbybus (Upland), le 23 octobre 1592,
mort à Skara, le 16 mai 1657.11 était petit-cou-
sin du précédent, et fils de Caii-Henrkson,
général distingué. Après avoir étudié aux uni-
versités de Rostock, Iéna, Tubingue (1608-
. 1612), il fit ses premières armes, en Finlande,
sous son frère Ewert, et se rendit ensuite en
Hollande, pour se perfectionner dans l'art mili-
taire sous Maurice d'Orange. Rentré dans sa
patrie en 1618, il fut employé à diverses missions
diplomatiques, devint sénateur (1624), fit plu-
sieurs campagnes en Livonie et en Allemagne.
La ville de Colberg (Poméranie) tomba entre
ses mains en 1629. A la bataille de Leipzig (1631),
il commandait l'aile gauche de Tannée suédoise.
Gustave-Adolphe, qui l'appelait son bras droit,
le chargea de conquérir quelques provinces ri-
veraines du Rhin. Horn se rendit maître de Co-
blentz, des pays de Trier et de Bade, de l'Al-
sace, de la Souabe. En 1634, il fut fait prisonnier
à la bataille de Nordlingen, livrée, malgré ses
avis, par le ducBernhard de Saxe-Weimar. Les
Impériaux . le traitèrent avec les plus grands
égards , mais ils le tinrent captif durant sept ans,
à Ingolstadt et à Burghausen, £n 1642, échangé
contre trois généraux , au nombre desquels se
trouvait le fameux Jean de Werth, il retourna
en Suède par la Suisse, la France et la Hollande,
et fut accueilli partout sur son passage avec
les plus grands honneurs. La république de Ve-
nise lui offrit le commandement général de ses
troupes; mais il aima mieux rentrer dans sa pa-
trie, qui avait besoin de ses services et qui sa-
vait apprécier son mérite. En 1644 il envahit la
Scanie, qui appartenait alors au Danemark, s'em-
para dUelsingœr, de Landskrona et de Laholro;
mais il échoua devant la place de Malmœ, défen-
due par le roi de Danemark en personne. Le
traité de Brœmsebro mit fin à la guerre en 1645.
Horn fut créé comte de Bjœrneborg en 1651,
nommé grand-maréchal et ministre de la guerre
en 1652. Les soldats ne l'aimaient pas, parce
qu'il réprimait leurs désordres; mais les peuples
conquis l'avaient surnommé l'Humain et le Ma-
gnanime. Il était fort instruit, parlait plusieurs
langues, et écrivit,* durant sa captivité : Ducis
perfecti Munus. On lui attribue un mémoire
sur la bataille de Leipzig. E. Beau vois.
Bmporagrlos, Concio Funébrti; Stockholm, 1660-, in-4°.
— Florander, Encomium Militiœ Homianse ; Upsal, 1948.
— Berch, Lefnadsbeskr. - GJœrwel, Sv. Biblioth., part. II
p. «M, e* Hist. Archiv, part. V, p. 58. — X. F. af Lund-
fetad, Svensk Plutarch, I8t», In-8», lWr. I. - Fryxell,
BeraetUlser ur Svetuka Historien, t. VI-VIII. — Tret-
tiâriga krigels nwrkvaerdigasto Personer, notices par
A.-J. ArwtdMOD, portrtttt par Sàbaton, la-foL — Biogra*
phiiht LtXik., X. VI, p. S4S-S47.
horn (Arvid-Bernhard, comte db), homme
d'État suédois, né le 6 avril 1664, à Wuorentaka
(Finlande ), mort à Ekebyholm , le 17 avril 1742.
Entré au service de l'empereur d'Allemagne en
1682, il fit la campagne de Hongrie, combattit à
Mohacz, et servit ensuite dans Tannée hollan-
daise (1690-1695). De retour dans sa patrie, il
devint major général de cavalerie (1700), et fut
accrédité comme ambassadeur auprès de Sta-
nislas, roi de Pologne (1704). Le rang de comte
lui fut donné en 1706, avec les fonctions de
gouverneur du duc de flolstein, neveu du roi.
En 1710 il succéda à Nils Gyldenstolpe comme
président de la chancellerie (premier ministre).
Au lieu de soutenir les intérêts du prince confié
à ses soins, il prépara la voie du trône à Chique-
Éléonore, sœur de Charles XH. Cette princesse
fut, en effet, élue pour succéder à son frère ; mais
elle dut renoncer à plusieurs prérogatives de ses
prédécesseurs. Horn, qui avait beaucoup contri-
bué à/aire réduire le pouvoir royal, s'arrogea une
telle autorité, que la reine lui ordonna de quitter
son poste, le 20 mai 1719. Mais la diète affec-
tant de le considérer comme un homme indis-
pensable, il fut replacé à la tête des affaires en
1720, et gouverna avec assez de sagesse, s'effor-
çant de maintenir la paix. Renversé en 1738,
par le parti des chapeaux, qui fit déclarer
la guerre, à la Russie, il vécut assez pour voir
les suites malheureuses de la politique de ses
successeurs. Le comte de Lynar, ambassadeur du
roi de Danemark, le caractérise en ces termes :
« Le comte de Horn a beaucoup de pénétration,
une grande routine dans les affaires, cette jus-
tesse d'esprit qu'il faut à un premier ministre et
avec cela de la fermeté et un parfait désintéres-
sement.... C'est dommage que tant de belles
qualités aient, en quelque façon, été ternies par
une ambition démesurée et vindicative dont le
baron de Gœrtz fut la victime. Ses ennemis l'ac-
cusent d'avoir utilement employé le masque de
l'hypocrisie pour gagner le clergé et en imposer
aux esprits faibles. Cependant il a toujours té-
moigné de la noblesse dans ses sentiments et
choisi d'ordinaire les moyens les plus honnêtes
pour parvenir à ses fins. » E. B,
Berch, Le/nadsbeskrifn, part. 8. — Geijcr, Teckninçar
af Prihetstiden. — Crasenstolpe , Politiska âsigter;
Stockh., 1818. — Thomaas, Sventk Plutarch. — Biogra-
phUkt Ux., VI, 24S-S47. - Gust. Horn, A.-Bi Horn.
Notice suivie de sa correspondance avec Charles XII et
antres personnages ; Stockholm, 18M( SOS p. ), in-8*.
horn (Frédéric, comte de ), général suédois,
descendant de Clas-Christersson Horn, né en
1725, à Husby (Sœdermanland), mort le 1 er janvier
1796. Il servit d'abord dans l'armée suédoise, ob-
tint un congé à la paix d'Abo ( 1743) , et entra
dans un régiment français. Il se distingua dans
les guerres d'Allemagne et prit sa retraite en
1749, avec le grade de colonel. Lors de la guerre
de Sept Ans, il fut attaché, en qualité d'aide de
camp général, à la division du maréchal d'Es-
185
HORN — HORNE-TOOKE
186
tréea, et déploya autan? de courage que d'habileté
à la bàtailled'HastenbecManô le Hanovre (1757).
Rappelé dans sa patrie en 1760, il prit part an
coup d'État de 1772, et fut rondes membres du
comité chargé de réviser la constitution. Son
dévouement à la cause du roi lui valut le titre de
comte (1772) et le grade de lieutenant général
(1778). Cinq ou six ans avant sa mort, son roya-
lisme exalté se changea en haine contre Gus-
tave III, parce que le commandement de la garde
royale lui avait été retiré. £. B.
J.-G. Oxenstjerna, Amminnelsctal i Frimurertloçen ;
Stockholm, 1796. — Rlatell, jénecd. otn Gustav lit,
p. 115, 1*3, 191. - Biographiskt Lez., t. VI, p. lS8-iS6.
horn (Frédéric, comte de), fils dn précè-
dent, homme politique suédois, né en 1763, mort
à Copenhague, en 1823. Dans sa jeunesse, il
brilla à la cour de Gustave 1H, dont il était le fa-
vori. Mais, irrité de la disgrâce de son père, il
prit part au complot contre la vie du roi. Son
château de Hnfvudsta était le lieu de réunion
des conjurés. Apres le meurtre de Gustave ni,
il montra beaucoup de faiblesse, et demanda sa
grâce; il fut condamné à la peine capitale, à la
dégration et à la confiscation de ses biens. Cette
peine ayant été commuée en bannissement per-
pétue], il se retira en Danemark, et fut traité avec
de grands égards par le ministre Bernstorf. Quoi-
qu'il eût combattu avec les Danois contre les An-
glais (1800), il rat plus tard expulsé du Danemark
sur les instances de Gustave IV, et se retira en
Allemagne. En 1813 il rentra en Danemark, après
s'être fait naturaliser. On a de lui des Poésies lé'
gères (Sina Skaldestycken); Copenhague, 1816,
que Rahbek n'a pas dédaigné de traduire (Copen-
hague, 1824). Sonfûseias-Frédéric, né le 1 1 mars
1791, fit, en 1814, la campagne de Norvège; il
a assisté à plusieurs diètes. £. B.
Thaarnp, Nekrotog., Hf r. 8, p. 194-196. — BiograpMskt
Lex.. VI, sss-tss. — Brslew, Forf.-Lex.
HOftif (Jean tan), médecin suédois, né en
1662, à Stockholm, de parents hollandais, mort
dans cette ville en 1724. Après avoir étudié l'obs-
tétrique à Paris et à Leyde, où il rat reçu doc-
teur en médecine (1690), il retourna dans sa
patrie (1691), fut chargé d'un cours d'anatomie,
et devint premier médecin du roi Frédéric (1724).
BJne faut pas le confondre avec Jean van Hoorne,
professeur d'anatomie à Leyde. On a de loi :
De Partu Prxternaturali; Leyde, 1690.; —
Svensia vxlœfvade Jordegumina (L'Accou-
cheuse exercée); Stockholm, 1697, in- 8°;
2 e édit, 1715. On en fit une traduction alle-
mande qui fut imprimée plusieurs fois, notam-
ment à Stockholm, 1765, in-8°; — Anatomes
publiée, anno 1705, Stockholmim habita lec-
Ho tertia, ouvrage posthume. E. B.
GezeUas, Dkt. Biogr. suédois. — Adetang, SuppL à
HOftif (François -Christophe), littérateur
allemand, né à Brunswick, le 30 juillet 1781,
mort à Berlin le 19 juillet 1837. Jl étudia .le
Droit à Iéna et à Leipzig, et obtint en 1803 une
place de professeur au Grçue Kloster, l'un des
collèges de Berlin. Des raisons de santé l'o-
bligèrent à renoncer dès 1807 à renseignement
public. Le meilleur travail de Hora est sa cri-
tique de Shakespeare, Shakespeares Schaus-
piele ( les Œuvres Dramatiques de Shakes-
peare); Leipzig, 1823-1831 , 5 vol. ; résultat de
vingt annéesde recherches. On lui doit en outre :
Guiscardo, roman; Leipzig, 1801 et 1817 ;—Die
Dichter (Les Poètes), roman; Berlin, 1801,
3 vol. et 1817 ; — Kampfund Sieg (Combat et
Victoire), roman; Brème, 1811; — IÀebeund
Lhe ( Amour et Mariage), roman; Berlin, 1811 ;
—Novellen; ibid., 1819-1820, 2 vol. ;—Umri$se
sur Geschichte und Kritik der schanen LLte-
ratur Deutschlands von 1790-1818 (Études
historiques et critiques sur la Littérature alle-
mande depuis 1790 jusqu'à 1818); Berlin, 1819
et 1821 ; — Geschichte und Kritik der Poésie
und Beredsamkeit der Deutschen von Lu-
ther s Zeit bis zur Gegenwart (Histoire Cri-
tique delà Poésie et de l'Éloquence des Allemands
depuis Luther jusqu'à nos jours); Berlin, 1822-
1829, 4 vol.; — Un choix des écrits posthumes
de Horn fut publié par Schwab et Foerster :
Psyché; Leipzig, 1841, 3 vol., etc. B. L.
Franz Hora, BiographUches Denkmal; Leipzig, 1899.
; HOftN (Henri-Maurice), poète allemand ,
né * Chemnitz, le 14 novembre 1814. Il fit ses
études à l'université de Leipzig, et revint plus
tard à sa ville natale où il demeure encore au-
jourd'hui. On a de lui : Die Pilgerfahrt der
Rose ( Le Pèlerinage de la rose ) ; Leipzig, 2 e édit,
1853;-— Die Lilie vom See (Le Lys du Lac);
ibid., 1853; — Magdala, ibid., 1855;— Die
Dorfgrossmutter (La Grand'Mère Villageoise),
1856; — Christoph Columbus, ibid.; 1856.
B. L.
Plerer, Universal-Lexican, Supplément.
borne ( D.-R. de ), médecin, français, né vers
1740, mort à la fin du dix-huitième siècle. Il rat
successivement premier médecin de l'hôpital
militaire de Metz,médecin ordinairede la comtesse
d'Artois, et médecin consultant du duc d'Orléans,
On a de lui, entre autres ouvrages : Examen des
Principales Méthodes d? administrer le Mer-
cure pour la Guérisondes Maladies Vénérien''
nés; Paris, 1769; — Observations faites par
ordre du gouvernement de Différentes Métho-
des d'administrer le Mercure dans les Mala-
dies Vénériennes; Paris, 1779, 2 vol. in-8°; —
Mémoires sur Quelques Objets qui intéressent
plus particulièrement la Salubrité de la Ville
de Paris; Paris, 1788, in-4°. lia publié aussi
des articles dans la partie médicale de V Ency-
clopédie méthodique. J. V.
Des BuarU, Lés Siècles Littéraires de la France. -
Qaérard, La France Littéraire.
HOftHB-TOO&E ( John), publiciste et philo-
logue anglais, né à Westminster, le 25 juin 1736,
mort le 18 mars 1812. Il était fils d'un mar-
chand de volailles nommé Home. Il tut élevé à
187
HORNE-TOOKE — HORNEMAN
188
Westminster et à Etqn , et acheva ses études à
Cambridge. Au sortir de l'université, il entra dans
les ordres pour plaire à ses parents, et obtint
une cure dans le comté de Kent, en 1760. Mais il
remplissait à contre-cœur les devoirs de sa pro-
fession, et il s'empressa de s'en affranchir, en
accompagnant sur le continent (1765) le fils d'un
gentilhomme du voisinage. Il rencontra à Paris
Wilkes, et se Ha avec ce fameux agitateur. 6e
retour en Angleterre, il prit une part active aux
débats politiques, et contribua beaucoup à l'élec-
tion de Wilkes comme représentant du comté de
Middlesex en 1768. L'année suivante il fonda,
pour soutenir la même cause, la société pour le
maintien du bill des droits; mais , s'apercevant
que la société s'occupait moins du bien public
que du payement des dettes de Wilkes, il rompit
avec cet immoral aventurier en 1770, et perdit
une grande partie de sa popularité. Junius lança
contre lui à cette occasion des sarcasmes aux-
quels Home répondit avec une énergie qui mit
le public de son coté. Cette vie bruyante de pu-
bliciste était si contraire à ses devoirs ecclésias-
tiques, qu'il résigna son bénéfice, et résolut d'é-
tudier le droit. Quatre de ses amis lui en four-
nirent le moyen en lui assurant une rente de
400 livres par an, jusqu'à l'époque de ses débats
au barreau. Dans le cours de ses études de
droit, il eut l'occasion de rendre service à un
propriétaire nommé Tooke, qui était en procès.
Tooke, en récompense, légua toute sa fortune à
l'étudiant, qui prit le nom de son bienfaiteur. Hor-
ne-Tooke, fidèle à ses habitudes d'opposition , se
déclara fortement contre la conduite du minis-
tère dans les affaires d'Amérique, et ouvrit une
souscription pour les veuves et les orphelins des
« Anglais massacrés, disait-il, par les troupes
du roi à Lexington et à Concorde ». Le ministère
poursuivit cette proposition comme un libelle» et
fit condamner Horne Tooke à 200 1. ster. d'amende
et à douze mois de prison. Certaines expressions
de l'acte d'accusation le conduisirent à s'occuper
du rôle des particules ( prépositions et conjonc-
tions) dans la langue anglaise. Il en fit le sujet
d'une Lettre û Dunning, écrite lorsqu'il était
prisonnier, et publiée en 1778. £n sortant de
prison» il demanda à praJkraer comme avocat, et
fut rejeté du barreau à cause de sa profession
ecclésiastique. Voyant se fermer devant lui une
carrière où il se promettait d'éclatants succès , il
se retira dans un domaine du comté de Hun-
tiogdon. Mais il ne put tenir à la vie paisible
des champs, et il revint à Londres se plonger
dans les tracas politiques. Il embrassa la cause
de la réforme électorale, trouva un auxiliaire
dans le jeune Pitt , et se prononça avec sa
fougue et son imprévoyance habituelles en faveur
du jeune politique qui devait tromper si vite les
espérances réformistes. En 1*790, Horne-Tooke,
redevenu plus que jamais un membre ardent de
l'opposition , se présenta -aux électeurs de West-
minster, et il n'eut que dix-sept cents voix, fin
1794, il rat arrêté sous l'inculpation de hante
trahison, à cause de ses rapports avec la Société
constitutionnelle. On ne put rien prouver contre
lui, et après des débats où il montra beau-
coup de calme, d'intrépidité, de présence d'es-
prit, il fut acquitté. Il se représenta devant
les électeurs de Westminster, et eut deux mille
huit cents voix. Il finit cependant par obtenir un
siège au parlement, mais d'une manière peu
digne de ce vigoureux avocat de la réforme par-
lementaire. Lord Camelford le fit nommer re-
présentant pour le bourg de Old Sarum. La
chambre l'admit pour toute la durée de la session,
et décida qu'à l'avenir aucun ecclésiastique ne
ferait partie de la chambre des communes.
Horne-Tooke renonça enfin à la politique, et se
retira à Wimbledon, ou il passa ses dernières
années. Son principal ouvrage est intitulé r'Eraa
7tTepoévTa, or Diversions of Purley ; 1786,in-8°;
1798-1805, 2 vol. in-4° : c'est on développement
de sa Lettre à Dunning. Les deux volumes com-
prennent dix-huit chapitres qui traitent des su-
jets suivants : Division et Distribution du Lan-
gage; Quelques Considérations de V Essai sur
l'Entendement Humain de Locke ; des Parties
du Discours, le Nom, l'Article et l'Interjection ; Sur
le Mot That ; Les Conjonctions ; Étyraologie des
Conjonctions anglaises; Adverbes; proits de
l'Homme; de l'AbstraGtion ; des Adjectifs et des
Participes. Cet ouvrage, surtout dans l'édition
de Richard Taylor, Londres, 1840, est encore
utile ou du moins curieux. L'auteur est ingé-
nieux, et, au milieu d'une foule d'hypothèses
hasardées, il rencontre parfois des idées fines et
fécondes; malheureusement il n'a aucune notion
de la philologiecomparée. H savait, outre sa langue
mère, le français, l'italien, un peu le latin et le
grec, et avait étudié avec soin l'anglo-saxon. Il
composa quelques pamphlets politiques dont le
meilleur, Two Pairs of Portraits, fut publié
en 1788. L'auteur y établit un parallèle contrasté
entre lord Chatham et lord ftoUand ; entre Pitt
et Fox. Z.
Bngllth Cfctop. (Biêgraphp). - Haslitt, SpirU qf th*
A*.
hornbol (Ottocar ni), chroniqueur alle-
mand , voyez Ottocar.
*BOftKEMAN (JênS'Wilken), botaniste danois,
né le 6 mars 1770, à Marstal , dans l'Ile d'^Ercs,
où son père était pasteur, mort le 30 juillet
1841. Après avoir voyagé en Allemagne, en
.France, en Angjeterre( 1798-1 800 ), il fut nommé
en 1801 lecteur au Jardin Botanique de Copen-
hague, et en 1808 professeur de botanique à l'u-
niversité. U fut de* 18.03 à 1817 secrétaire de la
Société d'Économie rurale. Chargé, en 1805, de
continuer la publication de la Flora Danica, il fit
de nombreuses excursions en Danemark et dans
une partie de la Norvège. On a de lui : Forsœg
til en Dansk atcononomisk Plantetere (Essai
de Botanique économique pour le Danemark ) ; Co-
penhague, 1796, m-8°; 3 e édit., augmentée d'une
189
HORNEMAN - HORNER
190
Description des Plantes de la Norvège et du
Hotstetn; ib., 1621*1638, 2 toi. in-8«; — Flora
Qanica: icônes plantarumtponte nascenUum
in regniê Dunia et Norvegix, in dueatibus
Slesvici et Holsati» et in comitatibus Oiden-
burgi et DelmenhûTste», t VUI-XH1; ib., 18064
1840, in-fol. Ce magnifique ouvrage, en 14 vol. in*
fol. , est l'œuvre de huit naturalistes danois. Il eon*
tient 2680 planches accompagnées d'un texte ex-
plicatif en latin, en danois et en allemand; -~
Enumeratio Plantarum Sorti Botanici Haf-
niensis ; fb., 1807, in*8°, avec supplém.; 1809,
3 e part.; — Hortus Regius Botanicus Haf*
niensis; ib., 1813*1814, 2* part. in*6 9 ,avec un
supplém., 1 819-1822, 3 e part., —De Indole Plan-
tarum Guineemtotn; ib., 1819, m-4°; *-* No»
menclatura Florm DanicœEmendata;ib+ 1 827»
Il a fourni des mémoires à plusieurs recueils ,
parmi lesquels il suffit de citer Tidsskrift for
iVaturvidenskaberne (Revue d'Histoire Natu-
relle), t. I~V, 1822-1828; — Naturhistorisk
Tidsskrift de Kro?yer, t. Mil} — Vidensto»
bernes Selshabs Afhandlinger (Traités de l'A*
cadémie des Sciences ); 1821.
Son fils Claus*Jacob-Émile Hoimun, né
le 19 avril 1810, à Copenhague, où iiexftrea la
médecine, a publié : Maandàog i Stethosko-
pien (Manuel de Stétfcoseopie), ib., 1842, in«8 j
— Beretning otn Sundkedscommissions Vir*
ksomhed ( Rapport sur l'activité de la commis*»*
de salubrité); ib., 1852, ûv8°. fi. B.
J. W. HorneoMn, »atot>iogr. dans Gtnefllog, QçBi?gi\
Archivât. 1, 31S-320, - Tidsskrift for mtçraturog ktrnst.
VI. 238-248. — Conv. Lex. der neuesten Zeil. — Ërsfew,
Forfatter-Lean.
■OBSBMAJiff (Frîedrick-Konrad), voyageur
allemand, né à Hildesheim, en octobre 1772,
mort en Afrique, après le 7 avril 1800. Il était
fils d'un ministre luthérien , et reçut sa première
instruction par tes soins de son oncle Crome,
recteur de l'école de Lvnebourg, chez lequel il
vint demeurer en 1788. De 1791 à 1794 il étudia
la théologie à Gcsttmgue; en 1795 il fut nommé
maître adjoint à la grande école de Hanovre.
Mais la passion des voyages et l'amour de l'in-
connu le préoccupaient constamment. Ayant ap-
pris qu'il existait à Londres une société qui en-
voyait à ses frais des voyageurs en Afrique pour
y faire des découvertes, il s'adressa, par rentre-
mise du conseiller Blumenbach de Gœttingue, à
cette société, et lui proposa un plan au moyen
duquel il espérait pénétrer dans l'intérieur de
l'Afrique. Ce plan Ait adopté : Homemann se
rendit alors à Gœttingue, et s'instruisit des lan» 4
gués et des usages des peuples de l'Afrique, de'
la nature, du climat, de û manière de déter-
miner la position géographique des . tieux , et ac-
quit quelques connaissances eu. médecine. En
février 1797 il se rendit à Londres. Reçu avec
cordialité par la Société Africaine, on ielaissa libre
sur les moyens d'exécuter son voyage, et le budget
ouvert pour ses dépenses fut illimité. Le 29 juin
1797 U quitta l'Angleterre, vint à Paris, où La-
lande le présenta à l'Institut; un sauf-conduit
lui rat aceordé, et le consul général du Rociu; (c
recommanda par lettre à un riche commervant
de Tripoli , Hadji-Kassan ben Hassan, qui lui «ut
plus tard de la plus grande utilité. Le 1 1 août
Hornemann s'embarqua pour Alexandrie, où il
arriva le 13 septembre 1797. Bien accueilli par
le consul anglais, il remonta le Mil par Rosette,
en compagnie d'un moine allemand qui allait se
fixer au Caire, où Ils arrivèrent le 27 septembre;
Hornemann y trouva deux autres de ses com-
patriote*, le major Schwarz et Joseph Freuden-
burg ( natif de Cologne ), qui lui donnèrent beau*
coup de renseignements utiles. Freudenburg avait
embrassé depuis douze années la religion maho*
métane, avait fait trois fois le voyage de La
Mecque , et parlait avec facilité les divers dia-
lectes usuels taras et arabes. Il consentit à ac-
compagner, comme interprète , Hornemann dans
son voyagede découverte». L'armée française s'em-
parait alorg de l'Egypte; le voyageur allemand fut
présenté à Bonaparte, qui, à la recommandation
des savants de l'expédition, lui délivra des. passer-
ports et lui offrit tout ce dont il pourrait avoir
besoin. Hornemann quitta Le Caire le 4 septembre
1798; il visita d'abord les ruines du fameux
temple de Jupiter- Amioon (aujourd'hui l'oasis
de Siouah ), puis la ville de Sirah, où, pris pour
un espion français , il courut de grands dangers
et ne dut son salut qu'à son sang-froid et à un
exemplaire du Koran trouvé dans le pillage de
son bagage. Le 17 novembre 1798 il entrait à
Murzuck, capitale du Fezzan. Il y perdit son
àdèie compagnon Joseph Freudenburg, et lui»
-même rat longtemps indisposé d'une fièvre en-
démique. A peine convalescent, il se dirigea vers
Tripeèi, et fort bien reçu par le pacha, il put
faire partir pour Londres le récit de ses décou-
vertes. Le 1 er décembre 1799 il reprit son iti-
-né*ai*e,*t le 20 janvier 1860 il rentra à Bfurxack,
d'où il écrivit encore à la Société Africaine de
Londres pour lui annoncer la continuation de son
voyage. Le 7 avril *800il partit avec une cara-
vane pour Boornou ; depuis lors, on n'a plus
entendu parler de loi.
Le journal de ses voyages, écrit par lui-même
en allemand et adressée la Société Africaine,
fut publié simultanément à Londres, età Weknar,
par les soins de Gû, Kônift 1 802, in^ i laçebuck
einer Beise vom Caira mach Munuck; il a
été traduit en français par Griffet de La Baume :
Voyage dans V Afrique Septentrionale depuis
JLe Caire jusqu'à Mour&ouk; capitale du
royaume du Fea&an ; suivi d } Éclaircissements
sur la Géographie de l'Afrique, par BenaeJI,
augmenté de Notes et d'un Mémoire sur Us
OaiiSy etc., par L. Langlèa, Paris, an xi (1803),
2 part. in-8°, avec 2 cartes. Alfred es Lao&xb.
Zeitgenosseti> n» 111, ■*-» Btftraenbach,'.£e* te Naekrtclk
V9tn Tode Uornmnmam •( Danp le raterléwéUoh*s
Archiev de Spiel \.
IHMlWBR (Jftdfecte), homme politique ai»-
191
HORNER — HORREBOV
192
glais, né à Edimbourg, le 12 août 1778, mort à
Pige, le 8 février 1817. Il fit ses études à l'uni-
versité d'Edimbourg, où il se lia avec Henri
Brongham, et débuta ensuite au barreau sans
négliger aucune branche de la science et de la
littérature. En 1802 il contribua à la fondation
de la Revue d'Edimbourg; et en 1803 il alla
s'établir à Londres. Des membres éminents du
parti v*hig, Àbercrombie, James Mackintosh,
Samuel Romilly l'accueillirent avec faveur; et à
l'avènement de ce parti aux affaires, en 1806, le
jeune avocat écossais eut une place dans la com-
mission nommée par la Compagnie des Indes
orientales pour la liquidation des dettes du na-
bab d'Arcot. Au mois de novembre 1806 il
fut envoyé au parlement par le bourg de Saint-
Joes, grâce à l'intervention de lord Henry Petty.
11 ne siégea pas longtemps dans cette assemblée.
Le ministère whig fut renvoyé par le roi le 24
mars 1807, et le parlement dissous le 27 avril.
Horner échoua aux élections générales, et dut un
siège parlementaire à la protection de lord Car-
rington. Lorsqu'en 1812 lord Grenville et lecomte
Grey furent chargés de former un ministère, ils
offrirent une des places de secrétaire de la tré-
sorerie à Horner, qui refusa. En 1813 et 1814
il prit une grande part aux débats parlemen-
taires , et devint un des chefs de l'opposition.
Le 25 juin 1816 il parla en faveur des droits
des catholiques , et contre l'administration op-
pressive qui pesait sur l'Irlande; ce fut Son der-
nier discours. Des symptômes de phthisie pul-
monaire le forcèrent d'aller passer l'hiver en
Italie, où il succomba au bout de quelques mois.
Son corps fut enseveli dans le cimetière protes-
tant deLivonrne; sa statue en marbre, par Chan-
trey, est placée dans l'abbaye de Westminster.
On a de Horner d'assez nombreux articles in-
sérés dans la Revue d'Edimbourg.
Son frère puîné Léonard Horner, minéralo-
giste distingué et membre de la Société royale,
s'est fait connaître par d'excellents articles dans
le Mineral-Kingdom et dans le Penny-Maga-
%ine. Il: a publié en 1843 d'intéressants mé-
moires sur la vie de son frère. Z.
L. Borner. Memoirt and Corretpondenee of Franck
Horner, - BnglUh Cpctopœdia (MoprapAy ).
HOBKIUS. Voy. HORH.
HOBOLoeics ou HOROLoei. Voy. Dondi.
~ horbbboy ou horhebob( Pto-re), astro-
nome danois, né à Lœkstcer ( Jutland ), le 14 mai
1679, mort le 15 avril 1764. Fils d'un pécheur,
fl ne commença ses études qu'à dix-huit ans.
Entré à l'université en 1703, il eut pour maître
l'astronome Olof Résiner, dont il développa les
découvertes. S'étant fait connaître par un tra-
vail sur la géométrie d'Euelide, il fut nommé
professeur de hautes mathématiques ou astro-
nomie à l'université de Copenhague, et con-
serva cette chaire près de quarante ans, jusqu'à
l'époque où il se démit en faveur de son fils
Christian (1753). En 1716, dorant son séjour à
Copenhague /Pierre le Grand rechercha la so-
ciété d'Horrebov, et lui offrit une place avanta-
geuse à Saint-Pétersbourg. Ce savant étajt
membre des Sociétés royales de Copenhague ,
de Londres, de Berlin, et correspondant de
l'Académie des Sciences de Paris. Il inventa une
méthode que Bernoulli regardait comme admi-
rable, savoir de trouver la hauteur du pôle
par le moyen de deux étoiles qui soient situées
l'une au nord et l'autre au sud et qui aient à peu
près la même déclinaison. Horrebov était grand
partisan du système des tourbillons de Descartes.
Oh a de lui : Décades X Paradoxorum mis-
cellaneorum; Copenhague, 1704, in-4 p ; — De
jEquinoctiorumPrxcessione;\b. f 1706;— Pro-
dromus Géométrie; ib., 1714; — Détermina-
tio Apparentis Diametri Solis; ib., 1716; —
Decas ObservaUonum Medicarum, ib., 1725;
— Clavis Astronomie, part. I, 1725; II, m,
1740-1741, où il détermina la parallaxe du Soleil ;
— Copernicus Triumphans, sive de paraUaxi
orbis annui; ib., 1727, in-4°. H y décrit unins-
trument astronomique perfectionné par lui y le
Triduum; — Ars interpolandi: ib., 1731;
— Atrium Astronomie, sive tractatatus de
inveniendis refractionibus , obliquitate ec-
cliptice atque élévation» poli; ibid., '3 e part.,
in-4°;— Basis Astronomie; 1734-1735, 3* part.,
in-4° : ouvrage contenant, outre la vie de Rœ-
mer, une méthode ingénieuse pour détermi-
ner le temps de l'équinoxe , sans connaître ni
la hauteur du pôle , ni le temps vrai, ni la ré-
fraction : — Consilium de Novo Methodo Pas-
cali; 1735-1738; 3 e part. — TheoriateUuris; ib.,
1739; — Computus Ecclesiasticus; ib., 1742;
— Nova Theoria Motuum Lunarium; ib.,
1743; — Nove Physiees capita Ylll de Den-
sUateStratorum et Altitudine Atmosphère;
ib., 1749; — Danske Skathammer (Le Trésor
Danois) ,trwtantde géométrie et de navigation; ib.,
1745, in-4°, avec append., 1746;— Opéra Ma-
thematico-Physica, 1740-1741, 3 vol. in-4° :
recueil des écrits de Horrebov, contenant ses
écrits publiés de 1725 à 1739 et quelques trai-
tés inédits; — des Mémoires dans Videnska-
bernesSelshabs Skrifter (Recueil del' Académie
des Sciences), t. HI-V. B.
Wolf , Hitt Ordbog., VU, p. m-lM. - Bernoulli.
Notwellet Uttér., formant le t IV do Recueil pour le»
AtitronomeS{*ér\\n, 1T77, ln-8°, part. 8, p. 61-71. — rCyerup,
UniversUwts AnnaUn, et Utteratur-Lextk.
Hoa&BBOY (Christian), l'un des vingt
enfants du précédent, astronome danois, né à
. Copenhague, le 15 avril 1718, mort le 19 sep-
" tembre 1776. Il succéda à son père comme pro-
fesseur d'astronomie, en 1753. On a de lui : Re-
petitaParallaxeos OrbisAnnuiDemonstratio;
Copenhague, 1744-1746, 3 e part.; — De Parai-
laxiFixarumannua; ib., 1747 ; — De JEqua-
tione gênerait Sectionum Conicarum; ib.,
1748; — De Excentricitate Solis vel Terre;
ib., 1749-1750, 2 e part.;— DeSemita quamin
Soledtscripsit Venus die ejunii 1761; tb, 1761;
193
HORREBOV — HORSBURGH
194
— Eleînenta Astronomie Sphericse; ib., 1762,
in-8°;2 6 édit, 1783, etc.
Son frère Pierre Horrebov, né en 1728,
mort en 1812, fit, en 1761, un voyage au Nord-
land, pour observer le passage de Vénus sur
le soleil, et publia : De Transite Veneris per
discum Solis; Copenhague, 1761; — Tracta-
tus Meteorologius , continens observationes
26 annorum, in observatorio Hafniensi fac-
fcw;ib., 1780, in-4°, etc. E. B.
Nyerup et Kraft, Datuknorsk Litteratur-Lex.
horrebov (Nicolas), voyageur danois,
frère des précédents, né à Copenhague, le 17
septembre 1712, mort en 17160. Après avoir
passé l'examen de docteur en droit ( 1740), il
devint assesseur à la haute cour (1744), et rem-
plit ces fonctions jusqu'en 1747. Le roi le char-
gea de visiter l'Islande (1750-1751), et d'y faire
des observations astronomiques et physiques, et
de rechercher ce que le gouvernement pouvait
faire pour le bien-être de cette lie. Horrebov re-
connut que l'Islande était placée plus à l'est
qu'on ne le supposait, et qu'il y avait quatre degrés
de différence entre sa position réelle et celle que
lui donnaient les géographes. A son retour il
publia : Ttllforladelige Efterretninger om Is-
land ( Renseignements authentiques sur l'Is-
lande); Copenhague, 1752; traduit en anglais,
1758, in -fol.; en allemand, 1753, in- 8°; et en
français, d'après l'allemand , sous le titre de
Nouvelle Description , historique , civile et
politique, de V Islande; Paris, 1764, 2 vol.
in- 12. Cette relation est exacte, mais mal écrite
et remplie de plaisanteries déplacées et d'injures
contre Anderson , qui avait publié un mauvais
ouvrage sur l'Islande. • E. B.
Bosching. Nachrichten, t. I, 47-68, 988-569. - Mol-
bech, Det Kongel. Danske Vi&enskabernet Selskabi
Hist.; Copenhague, 1848 , ln-8°, p. 14t. —Nyerup, Lit-
ter.-Lex.
horrocksou horrox (Jérémie), astro-
nome anglais, né à Toxteh, près de Liverpool, vers
1619, mort le 3 janvier 1641 (vieux style). Placé
par son frère au collège Emanuel à Cambridge en
1633, il tourna bientôt son attention du coté de
l'astronomie. Lui-même a raconté quelles diffi-
cultés il éprouva pour savoir les auteurs qu'il
devait consulter. Un traité de Gelliljrand l'indui-
sit à acheter les écrite de Lansberg, et il regretta
plus tard le temps qu'il avait perdu à les étudier.
Ensuite il connut les ouvrages de Tycho-Brahé
et de Kepler. Au moment où la cour et le par-
lement étaient engagés dans des discussions qui
aboutirent à la guerre civile, quatre jeunes gens
oubliaient la politique pour perfectionner l'astro-
nomie. Les travaux de Horrocks ont jeté de l'é-
clat sur cette petite société, où il avait pour com-
pagnons W. Crabtree, W. Milbourn, W. Gas-
coygne. Horrocks doit surtout sa réputation à
deux observations : H vit le premier la pla<-
nète de Vénus sur le disque du Soleil; le pre-
mier aussi il remarqua que les mouvements de
la Lune peuvent être représentés par une orbite
NOUV. BIOGR. GENER. — T. XXV.
elliptique, pourvu qu'on admette la variation
de l'excentricité de l'ellipse et qu'on donne un
mouvement oscillatoire à la ligne des apsides.
Newton, qui plus tard montra que ces deux sup-
positions étaient les conséquences de la théorie
de la gravitation, attribua à Halley ce qui appar-
tenait en réalité à Horrocks.
L'observation du passage de Vénus sur le
disque du Soleil (Venus in Sole Visa ), faite le 24
novembre 1639, fut publiée par Hevelius à la fin
de son Mer curius in Sole Visus; Dantzig, 1662.
Les autres ouvrages de Horroks parurent sous
le titre de Jerem. Horrocdi Âstronomia Ke-
pleriana defensa et promota, praedpue adver-
sus Lansbergium et Hortensium. Ejusdem
Bpistolas et Observationes cœlestes Jo. Flam-
steedii De Inœqualitate DierumsolariumDis-
sertatio astronomica, Tabulée Solares. Novss
Théorise Lunaris ab Horroccio primum adin-
ventx Explicatio. Ab eodem Flam. item iV«-
meri Lunares, et Calculus eidem Théorise
innixus; Londres, 1672, in-4°. Ce volume pa-
rut avec deux autres titres : Excerpta ex Epis»
tolis Jet. fforroccii ad Gui. Crabtrium et
Opéra posthuma, avec la date de 1673, 1678.
Les travaux de Horrocks sont peu nombreux ;
mais il ne faut pas oublier, en les jugeant, que
cet astronome mourut à vingt-deux ans. Z.
Blrch, History ofthe. Royal Society. — Chaînera,'
General Biographical Diction. — English Cpclopsedia
(Biography). — Lalande, Bibliographie Attronomique.
horsburgh (Jacques), hydrographe anglais,
né le 23 septembre 1762, à Elin, petit village du
comté de Fife, en Ecosse, mort le 14 avril 1836.
Élevé au milieu des rudes travaux de la campa-
gne, il fit pressentir de bonne heure un caractère
résolu, audacieux même. Son intelligence se dé-
veloppa aux écoles de son village, où il apprit
assez de mathématiques pour parvenir, quand il
s'embarqua comme mousse à seize ans, à pos-
séder la théorie de la navigation. Il courait les
mers depuis sept ans lorsqu'un bâtiment sur le-
quel il était embarqué comme premier officier
marinier se perdit, le 30 mai 1785, sur la petite
lie de Diego Garcia ou Chago , située dans la
mer des Indes, entre l'Ile Maurice et les Maldives.
Ce sinistre, causé par la défectuosité des cartes
qui lui avaient été remises, lui fit sentir la né-
cessité de faire des observations nautiques et
d'en constater les résultats. Celles qu'il fit dans
plusieurs voyages successifs à la Chine, à Bom-
bay, à Calcutta, à Batavia, à la Nouvelle-Guinée,
l'amenèrent, concurremment avec la lecture des
voyages et des livres d'astronomie, à dessiner et
à graver des cartes ou à construire des globes.
Ses premières cartes, retraçant le détroit de Ma-
cassar, la côte ouest des Philippines et le détroit de
Dam pierre par la passe de Pitt, furent remarquées,
ainsi que le mémoire qui les accompagnait, d'un
de ses anciens capitaines qu'il eut occasion de
rencontrera Canton. Ce capitaine ayant commu-
niqué ces travaux à plusieurs de ses collègues
7
195 B0RJ8BU&GH
et au vénérable de la loge anglaise, ceux-cj les
transmirent à A. Dalrjmple, hydrographe de ja
Compagnie des iodes, à Londres, lequel fit pu-
blier et obtint des directeurs une petite sqmme
d'argent que Horsburgh employa à acheter à>s
instruments. Stimulé par les encouragements
qu'il avait reçus, Horsburgh continua d> flavj-
jiiier, et étendit la sphère de ses travaux. Avant
ton retour à Londres, eu 1805, sur la goejette
Anna, qu'il commandait, \\ avajt consigné fla^s
un mémoire qui fut communiqué par sir Heqrj
Cavendish à la Société Royale de Londres, les
observations météorologiques qu'il avait £utes
depuis plusieurs années, celles surtout auxquelles
il s'était livré, à des intervalles de quatre beureq,
du mois d'avril 1802 au mois, de février J8Q4t *t
qui Pavaient conduit à constater un fait non, re-
marqué jusqu'à lui, les modifications que ('at-
mosphère éprouve deux fois par jour entre les
parallèles de 26° de lat. nord et 4e 26° de lat.
sud. Dans cet écrit, dont un extrait fut jnséré dans
les Transactions Philosophiques, de Londres, il
exposa les causes et les effets des oscillations
du baromètre dans les régions tropicales. Hors-
burgh, élu membre de la Société Royale en 1806,
succéda, Tannée suivante, à Dalrymple,qui venait
de courir. Depuis ce moment jusqu'à sa mort,
causée par l'excès du travail, i\ se consacra
jour et nuit, pour ainsi dire, à l'accomplissement
àes travaux que lui imposaient ses nouvelles, fonc-
tions.
Ûq lui doit, indépendamment d'un, nombre
considérable de cartes hydrographiques, les ou-
vrages suivants, qui ont rendu d'inapprécrçWçs
services à la navigation, le premier surtout, coq-
sidéré avec raison comineun guide infailjpe dans
les mers de l'Inde : Directions fox Sailing to and
fromthe East Indies, China, etc. Sixoditions.de
cet ouvrage, successivement augmenté et amé-
lioré par l'auteur, qui le corrigeait encore, à
son lit de mort, ont paru de 1809|£ 1852. Il a
été traduit partiellement ou dans sou entier : par
M. Gallois, dans : Introduction à Vouvxagt
d*Jfforsburgh sur les Navigations de l'Inde
(Annales Maritimes de 1824, t. 23, p. 65-127 );
par M. Nonay, dans : Instructions Nautiques
sur le canal de Mozambique, et sur Us Iles e(
les Dangers dans les nord et nord-est de tifada-
ga%ear; Paris, Imp. roy., 1824, in-8° ; et §om le
second titre de ; Instructions Nautiques sur le.
Port de Bombay et ses Environs , les Iles La-
çuedives et Maldives, la Rivièrede Calcutta
et une Partie de la Maie du Bengale; Paris,
Imp. roy. , 1827, in-8°; -7 par M. Leprédour, dan,s :
Instructions Nautiques sur Iq Navigation de
la Mer de Chine, tirées et traduites, etc. Paris,
Imp. roy.,1824, in-8° et 1837, !&39,en 5 vol. u>8°;
— ■ par M. B. Darondeau, dans : Instructions Nau-
tiques sur la Mer de Chine, etc., 3 e édition re-
vue sur la 5 e édition, anglaise de 1843, et augr
mentée de documents récents empruntés àdi*
verses publications françaises et étrangères;
— H0RSLEY
1W
Pari*, 1851et 1853, hv4°. On, a, encore deÇors*-
burgh : Registre Météorologique dfitfivjf à in-
diquer les fempfttesen; IÇer; Londres, 1816;—
Extrait du traité de ifackensie sur (es relève-
ments à la Mer$ — Remarq\^es sur Plusieurs
jpançsde Glace qui pnjç élfi rencontrés dans
r hémisphère austra\ (dans les Transactions
Philosophiques <teJft3Q), H y attribua l'appari-
tion en J828 de cinq b,âncs de glace qui furent
remarqués par 37° 31 de lat sud et 18°17' de laj.
est du méridien o> ^flrei à, l'existence d'une
grande étendue de terre auprès dq cercla po-
laire antarctique entre le méridien, de foudres
et le 2u* degré de long, est, et il explique la de*-
oente de ces glaces,, jus.qu.0 alors sans exemn)e,
soit par quelque viplent secousse pu trejnjile-
ment de lerre, soit par j'action 4'un volcan qui
les aurait brisées ou détachées du point où. ellçs
s'étaient formées. Très~9élé partisan tfe l'Église
anglicane dont il suivait les préceptes avec une
rigoureuse exactitude, il levait défendue dan*
les deux ouvrage suivants : Apologie, du fro,iié
de saint Cmw m r-ffuff*: de f Église
(s.d.) ; in-8 a ;r- 4mtai« de VÉalisfi Natio-
nal*; Londres, 183$, fa-â°. P. Lçvp:r.
annales Maritimes et, coloniale^ —Fraye* Littéraire.
— Rose, New. Dietiohary.
HOftSCH ( PhiHppe-Joseph ). médecin alle-
mand, né en 1772, mort le 22 janvier 1820. II
fut médecin du roi de Bavière, et professa la
science médicale à Wortzbôurg. Il a publié di-
vers ouvrages estimés; les principaux sont :
Annales de V École clinique de Wurtibourg;
1809-1810, in-8° ; — Manuel de Thérapeutique
générale; ibid, 1811, in-8»;— Introduction à
ta Cl\niqùe; ibid., 1817, in-8^; — Manuel de
Pathologie spéciale et de Médecine; 1819,
M, in-8°. V, R.
horset (Jérôme), diplomate anglais, vivait
dans la deuxième moitié du seizième siècle. Il
fut envoyé en 1584 et 1590 en Russie \m la
reine Elisabeth, s'y trouva au couronnement
dn successeur divan le Henaçant, et a laissé
par écrit ce qu'il y a vu et observé. Ses mé-
moires, au nombre de trois, sp»t : Ihe Jfosf
solemne and maanificent Coromtion of PJte~
dor Ivanovich, emperot ofiRussm , the tentb
of june in the yeav t584; -* Trwfae of
Russia, and the Northern Régions; — 4
Discourse of the second and third em&oy-
ment ofM. Jérôme Morse» mq», S4*te jrom
her Majesty to th* emperox of Ru&sw; —
les deux premier» se trouvent dans Mahhty* 1 *
Collection et dans Puvcbfl* Pilgvimasfi; — le
troisième, encore inédit, se conserve an BritisJk
Muséum. F* A, Gt— «.
Adelang, VbersioM ter ReUenâcu *» AuafcHUL tff
|700.
HORS^ey (Joh#) t archéologue anglais, n^
dans le^or^umbexlan,^ en 1685, mort au mois
<)e de^JeauV^ ^73lt. fl était pasteuv 4'une con-
tféga.tion, d> dvssji^eAts i Morj)et,h , et membre
197
HORSLEY ~ HORST
198
de la Société Royale* Versé dans les mathénu*
tiques et l'histoire naturelle, il se distingua sur-
tout par sa profonde connaissance des antiquités
de son pays. Il donna des preuves de son savoir
archéologique dans des lettres adressées à Ro-
ger Gale sous la date de 1729, et insérées dans
la View of Northumberland de Hutchinson.
Son grand ouvrage, intitulé Britannia Romana,
ne parut qu'en 1732, après sa mort. C'est une
étude sur les traces que les Romains ont laissées
dans la Bretagne. £e I er livre donne l'histoire
de la domination romaine dans cette lie, la liste
de leurs légions et de leurs forces auxiliaires, la
description de leurs stations fortifiées; le II* livre
contient les inscriptions et les sculptures romaines
découvertes en Bretagne ; le III e est consacré à la
géographie de l'Ile, d'après Ptolémée, Y Itinéraire
d'Adrien, UAotitia, Y Anonyme de Ravenne,
la Table de Peutinger. Z.
Cbalmers, General Biogr. Diction.
Borslet (Samuel), prélat anglais, né en
1733, mort le 4 octobre 1806, Il fit ses études
à Cambridge, entra dans les ordres, et devint
vicaire de son père, recteur de Hewington. En
1767 H™* membre de la Société Royale, et Tan-
née suivante il alla à l'université d'Oxford ser-
vir de précepteur à Hencage, comte d'Aylesbury,
alors lord Guernsey. La protection de ce sei-
gneur lui valut en 1774 la place de recteur d'Ay-
lesbury. Il était déjà, depuis 1773, secrétaire de la
Société Royale-. Ses publications scientifiques et
le zèle avec lequel il défendit le christianisme le
désignèrent à la protection de Lowth, évoque
de Londres et du chancelier Thurlow, qui le
nomma, en 1790, évèque de Saint- David.Horaley
fut transféré, en 1793, sur le siège épiscopal de
Rochester, et, en 1802, sur celui de Saint- Asapb.
Ce prélat était un travailleur infatigable» et il joi-
gnait à on savoir profond une grande vigueur
intellectuelle. On lui reproche d'avoir eu quelque
chose de dictatorial dans les manières, et de
n'avoir pas su s'entendre avec ses collègues de
la Société Royale. Ses principaux ouvrages sont :
Apollonn Pergzi lnclinatiqnum libri dm;
Oxford, 177Q; — Remarhs on the Observa-
tions mode in the voyage towards the North
Pôle for determining the accélération of the
pendulum in latitude 79** 61'; in a Letter
to the hon. Constantine-John Phipps; 1774,
in-4° ; — une édition des œuvres de Newton,
1785, 5 vol. in-4 Q ; — Animadversions on the
History oftheCorrupUons oj Chris tianity by
Dr Priestley ; 1783: ces remarques donnèrent
lieu à une réponse de Priestley, et Horsley, ré-
pliqua: On the Propriétés of the Greek
and Latin Languages ; 1796, in-8°; — Hosea
translated from the hebrew, with notes ex-
planatory and critical ; 1801, in-4°; réim-
primée avec des additions, 1804, et en 1844
sous le titre de Biblical Critieism; — Euclidis
Elément or um Libri priores XII, ex Corn-
mandini et Gregorn versionibus latinis;
glaiSj
Oxford, 1802, in-8°j — Euclidis Datorum
Liber, cum additamentis nec non tractatus
alii ad geometriam pertinentes ; Oxford, 1803,
in-8°; — Sermons; 1810, 1812, 3 vol. in-8°;
— Tracts in controversy with Dr Priestley
upon the historical question of the beliefof
the first âges in Our-Lord's divinity ; 1812,
in-8° ; — The Speeches in Parliament; 1813,
in-8».
Chalmen, Général Biogr. Diction.
"■OR8LBY (John Callcott), peintre an-
is, né à Brompton, en 1817. Après avoir fait
ses études dans les écoles de l'Académie royale,
il débuta, vers l'âge de dix-sept ans, par des ta-
bleaux qui attirèrent l'attention de Wilkie; de*
puis ce temps il a exposé, d'abord à l'Institut
Britannique, puis à l'Académie royale, de nom»
breux tableaux de chevalet. En 1842 il délaissa
le genre pour l'histoire, et la peinture à l'huile
pour la fresque. A la suite du concours ouvert
pour la décoration des salies du Parlement , il
fut chargé d'exécuter deux fresques : La Prière
et La Paix, puis Satan inspirant de mau-
vaises pensées à la femme. Un carton repré-
sentant La Religion lui valut en 1845 une ré-
compense de 400 livres, et il en reçut une se-
conde de 200 livres pour son tableau oV&enri,
prince de Galles, Horsley est un des peintres
qui, dans ces dernières années, ont lutté avec
le plus de persévérance et de talent pour ffire
adapter la peinture historique à la décoration
des édifices publics, et spécialement des églises;
car, suivant lui, des peintures religieuses orne-
raient mieux, instruiraient autant, et ne distrai-
raient pas plus que les versets et les textes de
l'Écriture que l'on inscrit actuellement sur les
murs. Mais ses efforts n'ont pu triompher du
goôt anglais. Perdant courage, il est retourné à
ses tableaux de genre, qui lui sont achetés à prix
d'or. Les qualités que lui reconnaissent ses
compatriotes sont l'éclat du coloris, la vérité du
dessin , l'effet du clair-obscur, et le fini qu'il
donne parfois à ses ouvrages. Ses tableaux les
plus renommés sont : Le Madrigal; Henri,
prince de Galles; Une Scène tirée de don
Quichotte, etc. M. Horsley est membre de l'A-
cadémie royale depuis 1845. Cinq tableaux de
cet artiste figuraient à l'exposition universelle
de Paris : Jeunesse et Vieillesse ; — Lady Jane
Grey et Roger Ascham; — Le Madrigal ; —
Le Fidèle Ami; — V Allegro et le Penseroso.
E. Cottenet.
The> Art Journal, 1887.
borst ( Nicolas van der), peintre belge;
né à Anvers, mort à Bruxelles, en 1646. Il était
élève de Rubens. Il peignait déjà parfaitement
le portrait et l'histoire lorsqu'il parcourut l'Alle-
magne, la France et l'Italie. Il se fixa à Bruxelles,
on l'archiduc Albert l'attacha à sa personne. Van
der Horst a beaucoup travaillé pour les libraires
et les graveurs. Ses dessins sont moins rares que
7.
199
HORST — HORTEMELS
20O
ses tableaux. Remarquables par leur finesse et
leur correction, ils sont très-recherchés.
A. deL.
Descamps, La Fie des Peintre» flamands, t. 1, p. 267.
HOfiST (Grégoire), médecin allemand, né à
Torgau,en 1578, mort à Ulm, le 9 août 1636. En
1608 il fut premier médecin du landgrave de
Hesse, se retira en 1622 à Ulm, et s'acquit le
surnom à'Esculape de V Allemagne. Ses princi-
paux écrits sont : De Somno et Somniis ; ibid.,
1606, in-4° ; — De Elémentis et Temperamen-
tis ; ibid., 1606 , in-4° ; — De Naturali Conser-
vatione et Cruentatione Cadaverum; ibid.,
1606, in-8° ; — De Partibus Humant Corporis
et earum actionibus; ibid., 1606, in-8°; —
Scepsis an Corpus Humanum post mortem
durare possit colore floridum et incorrup-
tum etanjluxus sanguinis cadaveris humant
occisi prœsentiam interfectoris indicet? ibid.,
1606, in-8° ; — De Morbis eorumque Cousis;
Giessen, 1612, in-4°; Marbourg, 1629,
in-4° ; — De tuenda Sanitate Studiosorum et
litteratorum Libri duo; Giessen, 1615, in-8°;
1617, in-12; Marbourg, 1628, h>8°; 1648,
in-12; — Anatome Corporis Humant; Gies-
ner, 1617, in-fol. ; — De Natura Motus Ani-
malis et Voluntarii; Giessen, 1617, in-4«; —
Conciliator Enucleatus, seu Pétri Aponen-
nensis differentiarum philosophorum et me-
d9torum Compendium; Giessen ,1621, in-8° ;
— Febrium Continuarum et Malignarum
Prognosis ; ibid., 1622, in-4° ; — Observatio-
num Medicarum singularium Libri quatuor
priores; accessit Epistolarum et consultation
num liber; Ulm, 1645, in-4°, Nuremberg,
1652, in-4° ; — Centuria Problematum Medi-
corum? accedit Consultationum et epistola-
rum Medicinalium liber tertius ; Ulm, 1636,
in-4° ; — Herbarium Horstianum, seu de se-
lectis plantis et radicibus libri duo; Mar-
bourg, 1630, in-8°; — Institutionum Physi-
carum Libri duo; Nuremberg, 1637, in-4°.
D r L.
Ersch et Grnber, Ailgemeine BncyKlopœdie. - WÏtte,
Mémorise Medicorum.— Biographie Médicale. — Freher,
Tfieatrum Eruditorum. — Bayle, Dict. Hist. — Van der
Linden, De Scriptoritms Medicii.
horts ( Jean- Daniel ) , fils atné du précé-
dent et médecin comme lui, né en 1620 à Gies-
sen, mort le 27 janvier 1685 à Francfort-sur-le-
Mein. Il enseigna la médecine à Marbourg et à
Giessen, devint médecin particulier du land-
grave de Hesse-Darmstadt , et se retira sur la
fin de ses jours à Francfort On a de lui : Posi-
tionum Anatomicarum Décades decem; Mar-
bourg, 1638, in-4 ; — Anatome Corporis Hu-
mant tabulis comprehensa ; ibid., 1639, in-4°;
— Anatomia Oculi; Marbourg, 1641, in-4°; —
Compendium Physicae Hippœraticx ; Mar-
bourg, 1646,in-8°;Darmstadt, 1662, in-4 ;, —
Manuductio ad Medicinam; Marbourg, 1648,
m-8°; 1657, in-12 ; Ulm, 1660, in-12 ; — Phar-
macopœa Galeno-Chymica Catholica , post
Renodxum, Quercetanum, aliosque hujus
generis oeleberrimos utriusque medicinœ
doctores practicos adomata ; Francfort, 1651,
in-fol. , 1665, in-12 ; — Physica Hippocratea
Tackenii, Helmontii, Cartesii, Espagnet ,
Baylxi, etc., aliorumque recentiorum corn-
mentis illustr. ; Francfort, 1682, in- 8°.
D r L.
Witte, Diarium Bioçraphicum. - Bayle, Dict. Hist.
— Ersch et Grnber, Allgemeine EncyJdopssdie. — Ju-
cher, Allgem. Gel.-Lexikon.
borst (Grégoire), frère du précédent, né
à Ulm le 20 décembre 1626, mort le 31 mai
1661. Il fut professeur au collège d'Ulm, publia
une édition de Marcellus Donatus et du Traité
des Animaux de Conr. Gesner, et écrivit lai-
même : Dissertatio de Mania; Giessen, 1677,
in-4°; —Spécimen Anatomix Practicx in
Academia Giessena aliquot philiatris exhù
bitum. Adjecta sunt quœdam de Moxa;
Giessen, 1678,in-4°. D r L.
Freher, Theatrum Eruditorum.— Bayle, Dist. Hist. —
Biographie Médicale»
horstius. Voy. Merler (Jacques),
hortemels (Frédéric), graveur français,
hé à Paris vers 1688. Il se fit remarquer par la
teinte douce ( morbidesza ) qu'il donna à ses
œuvres; mais il n'a pas su éviter l'excès de
mollesse, et souvent ses personnages, trop lour-
dement ponctués de noir dans leurs chairs, res-
semblent à des lépreux. Son dessin est du reste
correct. Ses meilleurs ouvrages sont les gra-
vures qu'il a exécutées pour le Recueil deCrozat,
parmi lesquelles se font surtout remarquer Jésus
portant la Croix, d'après le Giorgione ; — UA-
doration des Rois, d'apr*ès PaoloVéronèse; —
La Naissance de saint Jean-Baptiste, d'après
le Tintoret; — Le- Mariage de sainte Cathe-
rine, d'après le Veronèse; — La Mort a"Abel y
d'après Andréa Sacchi ; — La Vierge en médi-
tation , autrement dit L'Intérieur de la Vierge,
d'après Domenico Féti; — Jésus et la Sama-
ritaine; d'après B. Garofalo; — La Pente-
côte, d'après Gaudenzio Ferrari; — diverses
pièces d'après N. Bertin et d'autres maîtres,
entre autres le portrait de Philippe d'Orléans,
d'après J.-B. Santerre. A. de L.
Giovanni Gori Gandelll ni, Notizie degli Intagliatori.
— Basan, Dictionnaire' des Graveurs.
hortemels ( Marie- Madeleine ) , dame
Cochin, fille du précédent, femme graveur fran-
çaise, née à Paris, vers 1690, morte dans la même
ville, en 1777 (1). Élèvede son père, elle montra
fort jeune beaucoup de goût pour la gravure.
Elle épousa Nicolas Cochin, qui cultiva ses dis-
positions. Sa principale occupation fut de ter-
miner au burin les sujets que son mari disposait
à l'eau-forte : elle en conservait avec tant d'in-
(1) Basan dans sa seconde édition la fait naître, on ne
tait pourquoi , à Utrecht, en 1687, et mourir dans les gale-
ries du Louvre en 1787. Il la désigne comme cousine de
Frédéric Hortemels et comme femme de Charles-Nicolas
Cocbin qui, selon Watelet et Gandelllni, fut son flls.
201
HORTEMELS — HORTENSIUS
202
telligencelegoût et le pittoresque, que les ama-
teurs recherchent particulièrement ceux des ou-
vrages de Nicolas Cochin où son épouse a rais la
dernière main. On reconnaît à Marie Hortemels
une touche spirituelle, hardie et cependant moel-
leuse. On remarque de cette artiste ; Mercure
annonçant la Paix aux Muses, d'après la
fresque de Michel Corneille fils, peinte sur la
Tonte de la salle de la Reine an château de Ver-
sailles; — Pénélope travaillant au milieu de
ses femmes, d'aprè3 le même; — Aspasie dis-
cutant au milieu de philosophes grecs; —
d'après le même ; — Saint Philippe baptisant
V Eunuque de la reine Candace, d'après Ni-
colas Bertin ; — Le Triomphe de Flore, d'a-
près le Poussin ; — Jphigénie sauvée, avec cette
devise : « Tantum religio potuit; » original; —
La Franche- Comté conduise, d'après Charles
Le Brun; — Don Quichotte, d'après le dessin
de Charles-Nicolas Cochin; — Le Chanteur de
Cantiques, d'après le même; — le Portrait
du cardinal Henri de Thiard de Bissy, évé-
que de Meaux, et celui du cardinal de Ro~
han de Soubise, évêque de Strasbourg, tons
deux d'après Bigaud , etc. À. de L.
HORTENSE EUGÉNIE DE BEAUHARNAIS.
Voy. Napoléon (Louis).
borto ou ab Horto (Gardas de). Foy.
Orta.
hortensia, dame romaine, fille de l'orateur
Hortensius, vivait vers 50 avant J.-C; Héritière
de l'éloquence de son père, elle plaida devant les
triumvirs la cause des dames romaines qui avaient
été frappées d'une contribution pour subvenir
aux frais de la guerre contre Brutus et Cassais.
Son discours, qui nous a été conservé par Ap-
pien, déplut aux triumvirs, mais charma le peu-
ple , et la taxe fut diminuée. Y.
Valère Maxime, VIII, 3. - Quintilien, I, 1, — Appicn,
Bel. cto., IV, 92.
hortensius (Maison des), Bortensiagens,
maison plébéienne dont les membres historiques
sont ;
hortensius (Quintus), tribun du peuple en
4 19 avant J.-C. Il accusa C. Sempronius, consul
l'année précédente, d'avoir mal conduit la guerre
des Volsques ; mais il retira son accusation sur
les instances de quatre de ses collègues.
Tite Ltve, IV, 4». - Valère Maxime, VI, 5, s.
hortensius (Quintus), dictateur vers 286.
Le peuple, accablé de dettes, s'était soulevé et re-
tiré sur le Janicule. Hortensius , créé dictateur
pour remédier au mal, remit en vigueur la loi Ho-
ratia Valeria (de l'année 446 avant J.-C.) et la loi
Publilia (de l'année 336), qui déclarait que les
décisions du peuple obligeaient tous les citoyens
(ut quodplebs jussisset omnes quirites tene-
ret). Par une autre loi il établit que les nundinee
(jours de marché) seraient des jours d'audience
( diesfasti) et que l'espace de trois marchés (tri-
nundinum) serait le terme nécessaire entre la
proposition d'une loi votée par 'centuries ( lex
centuriata») et sa promulgation.
Pline, Hist. Nat., XVI, 37. - Tite Live, Eptt., XI. -
Smltb, DioUonary of Antiquities, au mot Nundinx.
hortensias (Lucius), préteur en 171 avant
J.-C. Il succéda à C. Lucretius dans le comman-
dement de la flotte pendant la guerre contre
Persée, et imita les déprédations et les violences
de son prédécesseur. Û réclama de la ville d'Ab-
dère 100,000 deniers et 50,000 boisseaux de
blé. Irrité de ce que les Abdéritains s'étaient
placés sous la protection du consul Mancinus et
du sénat, il mit leur ville au pillage, fit trancher
la tête aux principaux citoyens , et vendit les
autres comme esclaves. Le sénat se contenta de
déclarer l'acte injuste, et de faire mettre en li- .
berté les Abdéritains vendus. Hortensius con-
tinua ses brigandages, et fut de nouveau répri-
mandé par le sénat pour sa conduite à l'égard
des Chalcidiens ; mais il ne fut ni rappelé ni
puni.
Tite Llve, XLUI, 8, *, 7. 8.
hortensius ( Lucius ) , père de l'orateur,
et préteur en Sicile en 97 avant J.-C. Il laissa
la réputation d'un administrateur juste et hon-
nête. 11 épousa Sempronia, fille de C. Sempro-
nius Tuditanus.
OcéroD, C. ?err. t 16; ad AU., XIII, 8, 80, Si.
hortensius ( Quintus ), célèbre orateur,
né en 114 avant J.-C, mort en 50 avant J.-C.
A l'âge de dix-neuf ans, en 95, il parut au
forum. Son premier discours mérita les applau-
dissements des consuls L. Crassus et Q. Scœ-
vola, qui étaient l'un le plus grand orateur,
l'autre le plus grand jurisconsulte de ce siècle. Il
plaida ensuite pour Nicomède, roi de Bithynie,
qui avait été expulsé par son frère Chrestus, et
obtint sa réintégration. Ces débuts éclatants l'a-
vaient déjà placé au premier rang des orateurs
judiciaires, lorsque les dissensions civiles inter-
rompirent sa carrière. Il servit pendant la guerre
Sociale (91,90), d'abord comme simple légion-
naire, puis comme tribun militaire. En 86, il dé-
fendit le jeune Cn. Pompée accusé de s'être ap-
proprié une partie du butin pris à Asculum. Les
troubles des années suivantes ne laissèrent pas
de place à l'éloquence ; et, lorsque la dictature de
Sylla eut rétabli un peu d'ordre, Hortensius se
trouva à la tête du barreau (rexjudiciorum) i
Crassus était mort avant le retour de Marins,
Antonius, Catulus et d'autres orateurs avaient
péri dans les proscriptions. Hortensius régna sans
rival jusqu'à l'avènement d'un talent encore plus
grand que le sien, celui de Cicéron. Il s'attacha
fortement au parti aristocratique (optimates),
investi du pouvoir suprême par la législation de
Sylla. Ses principaux plaidoyers furent consacrés
à défendre des membres de ce parti, accusés de
mauvaise administration ou de corruption. Tant
que la justice resta entre les mains du sénat,
Hortensius triompha sans peine des accusateurs.
La partialité et très-souvent la vénalité des juges
lui répondaient du succès. Cette période de sa
30B
HORTENSIUS
204
vie dora plus de dit ans, pendant lesquels sa for*
tune et sa réputation ne firent que croître.
Questeur en 81, il se distingua par son intégrité;
édile en 75, il donna des jeux d'une splendeur
extraordinaire; préteur urbain en 72, il dut ju-
ger ces mêmes nobles qu'il avait défendus jus-
que là ; enfin, en 69 il fut élu consul avec Q. Cce-
cilius Afetellus. Après son consulat, il obtint
pour province l'Ile de Crète ; mais il 1 abandonna
à son collègue*
Dans Tannée qui précéda son consulat, il dé-
fendit Verres contre Cicéron. Ce procès si re-
marquable par le talent des avocats, Tétait en-
core plus par son importance politique. Deux
grands partis, la haute aristocratie (optimates)
et la classe moyenne, se disputaient le pouvoir,
le droit de juger, l'administration des provinces;
Tissue du procès de Verres devait avoir une in-
fluence décisive sur ces prétentions rivales. L'ac-
cusé n'échappa à une condamnation que par
un exil volontaire, qui fut une victoire pour l'ac-
cusateur et le commencement d'une longue sé-
rie d'échecs pour l'aristocratie. Hortensius em-
ploya inutilement non éloquence à la défense de
ce parti; il s'opposa à la loi Gabinia, qui inves-
tissait Pompée ( le général favori de la classe
moyenne ) d'un pouvoir absolu sur la Méditer-
ranée, et à la loi Manilia, qui transférait deLu-
cullus, Tami de Sylla, à Pompée la conduite do
la guerre contre Mithridate. Dans ces débats po-
litiques il eut encore Cicéron pour adversaire.
Mais l'apparition d'un nouveau parti plus violent,
composé de la plèbe et de quelques patriciens
ruinés et ambitieux, amena un rapprochement
entre Hortensius et Cicéron. Celui-ci défendit
avec Hortensius le vieux sénateur C. Rabirius,^
et Hortensius mit dans ses poursuites contre
Clodius un acharnement qui faillit lui coûter
la vie. Cette tardive union fut inutile. Pompée,
revenu de la guerre contre Mithridate, refiisa de
s'y associer, et s'entendit avec César et Crassus,
les deux chefs du parti démocratique. Horten-
sius comprit qu'il était impossible de lutter contre
eette coalition. Tout en restant fidèle à son parti,
il renonça à la politique et se renferma dans ses
devoirs d'avocat. 11 plaida avec succès la cause
de Flaccus, accusé de prévarications , celle de
P. Lentulus Spinther, de Sextius , de Valerius
Messala et enfin d'App. Claudius. Il mourut
avant le commencement de la guerre civile.
Depuis plusieurs années déjà,* il n'était plus,
dit M. Rinn, que Tombre de ce qu'il avait été
dans sa jeunesse. Cette décadence, au jugement
de Cicéron, tenait surtout à la nature de son
éloquence. Depuis que Rome avait profité de
Tart des Grecs pour perfectionner le talent, d'a-
bord brut et grossier, mais énergique , de ses
orateurs, elle avait pris surtout ses modèles chez
les Athéniens, dont le goût sévère et l'esprit
caustique faisaient bonne justice de tout ce qui
ressemblait à Tenflure et à l'afféterie. Horten-
sius introduisit à Rome l'éloquence asiatique,
que l'on peut caractériser en deux mots : l'em-
phase et le trait Lorsqu'il débuta, dans 6a jeu-
nesse, avec une élocution rapide et vive, pleine
de chaleur et d'éclat, un tour de phrase har-
monieux et qui faisait ressortir la pensée, une
voix sonore et douce, un geste trop savant peut-
être pour un orateur, mais que les Romains,
accoutumés à la mimique expressive de leurs
théâtres, lui pardonnaient aisément, il plut à la
fois par un mérite réel et par la nouveauté de
son talent. Il avait une mémoire prodigieuse,
qui laissait à sa disposition, non-seulement toutes
les idées importantes pour sa cause, mais les
paroles même de son adversaire. Il avait intro-
duit le premier l'usage d'exposer avec une bonne
fol apparente, au commencement de son discours,
la division qu'il se proposait de suivre, et de ré-
sumer avec une exactitude extérieure et perfide
les arguments de son adversaire. Tout cela sé-
duisait la foule et même les habiles ; mais quel-
ques-uns de ses vieux devanciers exhalaient leur
humeur en railleries et en boutades, quand Us
voyaient cette abondance facile, souvent dépour-
vue de dignité, ces traits brillants, ces pensées
plus éclatantes qu'utiles au développement des
raisonnements et des faite. Et quand la vieillesse
vint, cette manière, qui avait quelque chose de
séduisant dans un jeune homme» parut manquer
de gravité chez un consulaire. A ces traits que
nous a laissés Cicéron, il est impossible de ne
pas reconnaître en grande parGe les déclamateurs
des siècles suivants, à cela presque ces derniers
s'exerçaient sur des causes imaginaires, où aucun
intérêt réel ne les forçait de modérer les écarts
de leur talent. Si nous avions les discours d'Hor-
tensius, nous verrions assurément remonter jus-
qu'au plus beau temps de l'éloquence latine ce
mal venu de l'Asie, et que Pétrone signale dans
le langage des déclamateurs. Quintilien trouve
que ce qui restait d'Hortensius ne répondait pas
à sa haute réputation. Cet orateur cultivait les
lettres, mais d'une manière beaucoup moins sé-
rieuse que Cicéron. Il connaissait peu l'histoire
et dédaignait la philosophie. Cicéron se flattait
cependant de Tavoir converti sous ce rapport,
et lui avait dédié son traité sur l'importance et
l'intérêt de la philosophie. Il composait des poé-
sies légères; il était lié avec Catulle, dont les
œuvres contiennent quelques pièces qui lui sont
adressées. »
Hortensius fut un épicurien aimable. H devait
à son talent une immense fortune dont il jouis-
sait avec magnificence. Il eut peu d'ambition, et
au milieu de la corruption presque générale il
garda une honnêteté relative. Il fut fidèle à son
parti et ne trahit pas ses amis. Cicéron, il est
vrai, pendant son exil et dans ses lettres à At-
tiras, accuse Hortensius déjouer double jeu, de
proposer tout haut son rappel, et d'intriguer
pour qu'on le laisse hors de l'Italie. IMen ne jus-
tifie ces imputations. Hortensius n'était pas un
grandcaractère, maie il avait d'aimablesqualites;
205 aofttÊfWltJS
et 11 Hé Semblé pas iraé la mpdfté fût att
nombre de ses! âêfttitt. Les auteurs anciens pur-
lent souvent de son Wxët fia înâlsod'dtt mont
Palatin devint plift tard !ft «effleure d'Autiste.
Il posséTJait trois vill&S; l*Hfiè à B&ffl, l'autre à
TUsculurn ; la troisième; et lé tiltis htagh1tiq.u€t è
Lauretuni. Il ferait le gtfflt bu plutôt ta folie des
arbre*. 11 arrosait Iftl-ftiehie ses plâtades avec
du fin: et l'on rapporte (ftl'àjant à plaider ave*
Cieêrdii, il lé pria de le laisser parler fe È>re-
irlfëh, pai+Jë qu'il avait tfcsolh d'aller à sa hialson
o^îuscuKnll ttbiilf Arroser uMptotatie. 8a pas-
sion* t^bilr lès poissons de fcéè vivi«rs fl'ëtatt pal
mollis extraordinaire. Tftrrdn reporté qa'Htir*-
terffeltife en agissait ateè ses poissons cfcmtté les
aVMfës avec lëtir àfgent : fl fl'tfsâlt pas y tbb-
cher. Quand ils étaient malades; il les soifcttaU
avec" autant de sollteltbdë que slls eussent étft
des homme*: Il pièïira la mort d'une trititeûè.
' HdHétiHii* eut m filé de sa première tëasm
LutatW, m de Gàtaïtrii AfrrSs la ttoYt de Ltt-
tâHàj il époutô MâKHè, fmm Ae caton. By eut
à eè sujet entre" les déttx illustre* Romain* ttrt
ctMétisë tràftsacUën dent on ttwlve dans Ph>
tar^ëfâmrisatliHo1t(!). T.
Cicérbh { ttéêrôri Ht la pfînfcfpkiè' Itfùfce poW ta vtà
tfltertëiisittl ). ^dfr. dttf VOrumtutieon TvlHemmm
d'Orelil l'tndlcattçp des passages relatifs à Hortenslua.
- QBintiilen, 1. IV, c. 5; X, 6; XI. I, *: XII, 1. io*. -
Veflèluâ F'àtercttitts, ti, lé, 86, W. - ValereiMiiiHe,'
VIII, 10 ; IX, 4. - Aubi-Gelle, I, S ; XIX, 9. — Pline, HisU
Ifati, IX, H ; X, 13 ; XXXV, 40, — Vairon, De Be JUu-
tica, lll, 17. — l'iutarqiic, CM. min., *B. — Mèmàtrès de
i'Jbhd. déi Inscripilbni et Belle* ■ Lettre*, l VI, p. tod.
- hûikt , Spétimin Histbried-JHHdêciim de Q. Har-
teitsio orat. Cxceroni œmntof Levde , 1810, to-8» — Lia-
sen, Dissertatio de hortensia orcùore; Abo, 18B, in-W.
- Rlnh, dans rtncgcl. des tiètii du Moitié.
ttëfttEftsIus (QuiHtU&'Rotèdliis), fila du
précédent, mort eh 42 avant J.-C. H mené d'a-
bord une vie fort déréglée. Sofa éducation dèmblé
àtdir été peu stirvêlllée par son (>erè, et Cfcéron;
tjui en 50 le rencontrft Vivant avec des &éd\à-
ièurs et dans H plus b*sSe société, attribue sa
inauvaise conduite à l'influence pernlcieiis> d'un
affranchi nommé Salvius. Son père M m Iè
il) HdueMta4 avait beaucoup d'estime pour Gaton et
désirait devenir son parent: il lof demanda la main de sa
fine Pdrd4, déjà mariée a àltrakis, dùtii elle Aiiii èa àëtit
éiltèdts. a A cotise Uer là fKftiir*, dlt-tt, il était nul
honnête que profitable à la réBQbilqne qu'une femme
belle, à la fleur de l'ftge. ne restât pas Inutile, en lais-
&Ûi ffftsiër Hgë d'imi; dès enfants, et qu'elle tié fût
fH Héii pldft à chargé I «OU tttfrl; et né l'appartnit pas
cil ,1b! ddnmiat plus d'enfants qn'H ne voulait en avoir :
qu'en communiquant ainsi les femmes arix citoyens bon-
riêrés*, la vertu se' multiplierait, et deviendrait cdtnmunè
dafls lèl faonHes. » « 91 Bibulus, djontait-il, vent absora>
nient conserver sa fenime, )e la lui rendrai dés qu'elle
sera devenue inére, et que par cette communauté d'en-
fabts je me «erat pins étroitement ont à Caton et A Bibn-
las. » Otttfa ne p^rnt pas tr<rp surpris du raisonnement;.
mais 11 objecta rattachement de fttbuli» prônt Poreia.
« Alors Hortenslus, changeant de langage, dit Plutarque,
ne cralgnft p'a« de âèrnàhder ouvertement à talon sa
femme Mare»*, qui étitt efaeôre en âge d'avoir des en-
fants, et en avait dopné suffisamment à Caton. Caton,
voyant la passion d'Hortenslus et son désir extrême d'a-
voir Marcîa porfr femme, ne refusa pas dé là Inl céder. »
-t HORVATH! 306
point de le déshériter; quelques auteurs préten-
dent qu'il accomplit ce projet et laissa ses
biens à Marcia. Cependant Hortensius recueillit
une partie de l'héritage paternel. La guerre civile
lui offrit uhe occasion de relever sa fortune. Il
rejoignit César dans la Gaule Cisalpine» et fut
chargé d'occuper Ariminium. Ii eut ensuite le
commaudenient d'une escadre dans l'Adriatique,
et, pendant une croisière, il débarqua à Cumes et
rendit visite à Cicéron, à qui il offrit ses bons
services. H était gouverneur de la Macédoine en
44, et Brutes devait lui succéder. Après le
meurtre de César, Marc Atitorae donna cette
province à son frère Calas. Mais Brutus en
avait déjà pris possession avec l'assistance d'Hor-
tensius. Celui-ci porté par Antoine sar la liste
dé proscription, se vengea eu ordonnant la mort
de Calas Àntbnitis, qui était tombé entre ses
mains. Fait prisonnier à son tour ft la bataille
de Philippe*; il lut immolé sur le tombeau de
GalUS: Y.
ClCëron, Ad Ml; Vf, 8; VU, 8| X, ii, 16-18; Phi-
lippe X, 6< 11. » Platarqoe, Cas., U. — Suétone,
Jut. Ca?«.,Sl.
hortensius (M. Èoriaius), fils du pré-
cédent, vivait an commencement de l'ère chré-
tienne, fl était si pauvre, que f'èmperetir Àugdste
fut obligé de venir à son secours. Sous Tioèrè', on
le voit avec quatre enfants, plus pauvre 4be ja-
mais, et implorant encore la bienfaisance im-
périale. t t.
Tacite, Jhn., if; 87,88. - Suétone, Au$. il, — blbn
Casaius 4 XVI t.
ftûftTErtilttt ( Lambert ), philologue néer-
landais 1 , hé àMôntfOTt, eti 1501, mort vers 1575.
9à vie est peu cohnue : or> ignore josqyà soh
ôdm ; et ii n'est désigné que par son surnom de
fiortènshis (fils de jardinier). Préfet du col-
lège de N&tfden lots de la prise de cette ville
par lès Espagnols etl 1572, il courut tes plus
gratid* dangers et vit massacrer son fils. On a
dé lui : Secessionumcivilhifn Ultrajectinarum
et Béllorum àb atinô 1 524 usque ad transla-
tibriëm epiicopatus ad Èurgundos Libri Vtt;
Baie, 1546, rtf-fel.; — tk Titmutiîbus Anabap-
tistarttrti ; Baie, 1548, m-4°; — De Bello Ger-
manicô; Bâlè, i3ê0, in-4°j — BnarraHones
in firgilH jÈHeida ; BA\e, 1567, 1577, iff-fbl.;
— Ëxplictitionèi in lucttrîi Pharsaliam ;Bffle,
i 578; iif-fbl. Z.
FftppénsV èMlCttttêta Belçtcu.
J HonvATH ( Michel ), historien' hongrois, né
fe 30 octohte 1809, à Stèntes. Il fut destiné à
la* carrière ecclésiastique^ obtint en 1844 à Vienne
Une chaire de tangue et littérature hongroises, et
hit nommé en mars 1848 évèque de Czanéd.
Membre de la chambre des seigneurs de la Hon-
grie, il vota en faveur de l'indépendance" de sa
patrie, et devint ministre de Pinstràetion pu-
blique et des cultes. Après Fhrtervention de la
Hussie en Autriche, 11 s'exila , et tut condamné
par contumace à la peine de mort. On a de lui :
Az ipar es Kereshedés tôrténetê Magyaror-
207
HORVATH
szagban ai utolsô hôrom.szà&ad alatt (His-
toire du Commerce et de l'Industrie de la Hongrie
durant les trois derniers siècles); Ofen, 1840;
— ii 1 MagyaroW tôrténete ( Histoire des Hon-
grois ) ; Papa, 1842-1846, 4 vol; texte allemand,
Pesth, 1850-1852. R. L.
Conv.'Ltx. — Pierer, Cniversal-Lex. Supplément
horwitz, famille juive qui, pendant plu-
sieurs générations , a compté dans son sein des
écriyain8 estimés, dont les plus connus sont :
Horwitz ( Sabbatai Scheftel), Ha-Levi ben-
Akiba, chef de la synagogue à Prague au com-
mencement du seizième siècle. On a de lui les
ouvrages suivants, écrits en hébreu : Pelakh
harimonim (Moitié des Grenades) ; Kerez, 1793,
in-4°. C'est une explication du Bassis Rimonim
(Jus des Grenades) de Sal. Galicho; — Niche-
math Ch'abbtaï ffalevi (Souffle ou Essence des
Sabbats de Levi); Prague, 1616, in-4° : traité
sur Famé , sous la forme de dialogue entre un
maître et son élève ; — Chéphah Toi ( Abondance
de Rosée); Hanau, 1612, in-fol., deux autres
éditions. Écrit sur la Cabbale , donnant une clef
du Jetzirahy du Zohar et des principaux livres
cabbalistiques.
: Horwitz (Abraham), fils du précédent et
connu aussi sous le nom de Scheftélés, né a
Prague dans la première moitié du seizième
siècle. On a de lui les ouvrages suivants, écrits en
hébreu : Brith Abraham (Alliance d'Abra-
ham); Cracovie, 1602, in-4°; plusieurs autres
éditions : traités sur la pénitence. — Khesed La"
bratiam (Grâce faite à Abraham); Cracovie,
1577, in-fol. ; réimprimé avec le précédent et
dans plusieurs éditions du Talmud. C'est un
commentaire sur l'Introduction de Maîmonide
au livre talmudique Aboth; —Jesch Nokhalin
( ce sont ceux qui se confient à l'Éternel) ; Pra-
gue, 1615, nv4°, avec des remarques dues à
son fils Isaie Horwitz et à son petit- fils Scheftel
Horwitz. C'est une instruction morale , adressée
à ses enfants ; — Hemek Bracah ( Vallée de
Bénédiction) ; Cracovie, 1597, in-4°, avec des
notes de son fils Isaie Horwitz; réimprimé plu-
sieurs fois avec des ouvrages semblables. Ce
sont des remarques sur les bénédictions.
Horwitz (Isaïe), fils du précédent, né à
Prague, vers 1550, et mort à Tibériade, en 1629.
11 est le plus célèbre de toute sa famille. Il fut,
au commencement du dix-septième siècle, rabbin,
d'abord à Francfort, pois à Posen, ensuite à
Cracovie et enfin à Prague. En 1622, il partit
pour Jérusalem ; divers désagréments le for-
cèrent de quitter cette ville et de se retirer à
Tibériade. On a de lui les ouvrages suivants,
écrits en hébreu : Schné Loukhoth habbrith
(Les deux Tables de l'Alliance); Amsterdam,
1649, in-fol.; plusieurs édit. Cet ouvrage jouit
d'une grande réputation parmi les juifs. Il se di-
vise en deux parties : la première traite de
l'existence de Dieu, de la Loi, des Prérogatives
du peuple d'Israël , des Attributs de Dieu, du
— HOSAGK. 208
Sanctuaire, du Jugement/ du Libre Arbitre, du
Messie, du Culte, des Cérémonies et des Fêtes; la
deuxième Jpartie se compose de dix traités sur
six cent treize préceptes , la Loi Orale, etc. Il a
été fait de cet ouvrage trois abrégés, l'un par
Jech. Mich. Eppstein, rabbin à Prossnitz ; Ams-
terdam, 1663, in-4°; -plusieurs autres éditions;
le second par Sam. Zoref Ha-Levi ; Francfort,
1681, in-4° ; et le troisième par Sam. Dav. Œtt-
ling ben-Jechia ; Venise, 1705, in-8°; — Bigdei
Jeschah (Vêtements de Salut ). Cet écrit, qui est
on commentaire sur le livre de Bfardoché, n'a
été imprimé qu'en partie d'abord avec le Seder
Mohed (Ordre de l'Assemblée)» ensuite à part;
Amsterdam, 1757, in-4° ; Zolkiew, 1826, in-fol.,
et plus souvent encore, soit avec le livre de Mar-
doché, soit dans des éditions du Talmud; —
Haggahoth Csépher hemek Bracah (Réflexions
sur le livre la Vallée de Bénédiction), imprimé
avec la Vallée de Bénédiction, ouvrage de son
père, Cracovie, 1597, in-4°, ainsi que dans les
deux éditions de l'ouvrage précédent; — Scha-
har Baschamajim (Porte desCieux); Ams-
terdam, 1717, in-4°, avec une préface et des
gloses d'un de ses arrière-petits-fils, Abraham
Horwitz; commentaire cabbalistique sur les
psaumes et sur les prières. Ce même volume
renferme le Sépher Brith Abraham ( Livre de
l'Alliance .d'Abraham ), de son père , Abraham
Horwitz.
Horwitz (Sabbatai Scheftel ), fils du précé-
dent, mort à Vienne en 1658 ou 1650. Il fut rab-
bin d'abord à Posen, ensuite à Francfort, et enfin
à Vienne. On a de lui les trois ouvrages suivants ,
écrits en hébreu : Sepher vavei hahamoudim
(Livre des Clous des Colonnes) : traité de morale
ascétique, en six sections, et servant d'introduc-
tion au livre de son père : Les deux Tables de
V Alliance, avec lequel il fut imprimé, Ams-
terdam, 1649, in-fol. ; plusieurs autres éditions;
— Tsavahah (Testament), imprimé avec le
petit écrit de son grand-père : Jesch Nokhalin;
Amsterdam, 1717, in -4° : instruction morale
adressée à ses enfants, auxquels il le laisse
comme son testament ; — Khidouschei massé-
pher Bracoth ( Explication du Livre des Bé-
nédictions), imprimée avec la Vallée de Béné-
diction de son grand-père; Amsterdam, 1757,
in-4°,et Zolkiew, 1826, in-fol.
Horwitz (Isaïe ) ben Jacob, neveu du précé-
dent et petit-fils d'Isaie Horwitz, né en Pologne,
où il mourut, en 1695. On a de lui : Beth halévi
(Maison de Lé vi ); Venise , 1663, in-4"; com-
mentaires sur quelques passages du Talmud,
relatifs à la jurisprudence juive. Mich. Nicolas.
J. Boïtorf, Mabbinica Bibliotheca. — WolU BMioth.
Hebraica. — Rossl , Dizion. degli jéutori. Ebrei. — J.
Font, BMioth. Judaica.
* hosagk (David), médecin américain, né
le 31 août 1769, à New- York, et mort dans la
même ville, le 23 décembre 1835. Après avoir
reçu en 1791, à Philadelphie, le diplôme de doc-
209 HOSACK
leur, il visita les écoles spéciales d'Edimbourg
et de Londres, prit part aux travaux de la So-
ciété Royale de cette ville, et, de retour à New-
York, occupa la chaire de botanique et de ma-
tière médicale au collège de la Colombie. De
1820 à 1828 il a présidé la Société Historique de
New-York ; vers la même époque il collabora
activement à la publication du Médical and Phi-
îosophical Register. On a de lui : Médical
Essays; 1824-1830, 3 vol. ; — System of Prac-
tical Nosology; 1819; 2 e édit., 1821 ; — The
Practice ofPhysic; 1838 : ouvrage posthume
édité par un de ses élèves ; etc. P. L— y.
Memoir of D. HosacJc, by J.-W. Francis, in JPtf-
liams's American Médical Biographe .
* hosidius (Cn. Geta), propréteur deNu-
midie sous l'empereur Claudius, en 42 après
J.-C. II vainquit et poursuivit dans le désert
un chef maure nommé Sabalus. Ses troupes
eurent beaucoup à souffrir de la soif; et il son*
geait déjà à la retraite, lorsqu'un Numide lui ré-
véla certains artifices magiques pour obtenir de
la pluie. Hosidius les employa avec succès , et
son armée, rafraîchie, 'allait continuer la pour-
suite, lorsque Sabalns, effrayé, se rendit. Hosidius
fut ensuite lieutenant de À. Plautius en Bretagne,
et remporta une victoire si éclatante, que, malgré
sa position secondaire, il obtint les ornements
du triomphe. H fut consul suppléant en 49. Y.
. Dion Cassius, LX, 9, SO.
HOSIDIUS GETA. Voy. G ET A.
HOSIUS ("Oatoc, le Saint) ou OSICS, écri-
vain ecclésiastique espagnol dont la vie embrasse
tout un siècle (257-357). H est douteux qu'il soit
né en Espagne et surtout à Cordoue; mais il est
sûr qu'il fut pendant soixante ans environ
évéque de cette ville. Il assista en cette qualité
au concile dlliberi ou Eliberi, près de Grenade,
dont la date est diversement fixée à 300 et à 305.
Il souffrit pour sa foi (confessus sum, dit-il dans
sa lettre à Constance) pendant la persécution
de Dioctétien et de Maximien. Sa fermeté chré-
tienne lui valut la faveur de Constantin , qui
l'envoya à Alexandrie, en 324, avec mission d'a-
paiser la querelle de l'évêque Alexandre et du
prêtre Arius. Il devait en même temps calmer,
s'il était possible les disputes élevées au sujet
de l'observation de la fête de Pâques. Il échoua
dans cette œuvre de conciliation, et n'en conserva
pas moins toute la confiance de l'empereur.
L'année suivante il parut au concile de Nicée.
Baronius prétend qu'il le présida comme légat
du pape, assertion peu fondée, au jugement de
Tillemont , et qui ne s'autorise du témoignage
d'aucun ancien historien ecclésiastique. Hosius
souscrivit le premier les actes du concile, pré-
sida habituellement cette assemblée , et pro-
nonça (èÇéfieTo) ou rédigea (d'après Tillemont)
le symbole ou profession de foi de Nicée. En 347,
il tint le concile de Sardique. En 355, pressé par
l'empereur Constance de participer à la coar
damnation d'Athanase, il refusa dans une lettre
— HOSIUS
310
touchante, où il rappelait ses souffrances pour la
foi.. Une seconde tentative de Constance, qui ap-
pela Hosius près de lui à Milan, ne fut pas plus
heureuse; une troisième réussit mieux. Le vieil-
lard, presque centenaire, ne put résister aux me-
nacés et peut-être aux violences de l'empereur; il
consentit à communier avec deux prélats ariens,
Yalens et Ursacius, mais sans souscrire à la
condamnation d'Athanase. Il mourut peu après.
Saint Athanase et saint Augustin louent hau-
tement sa vertu et excusent sa faiblesse. Z.
Saint Athanase, Histor. Arian. ad Monach., c 41,
44. — Saint Augustin, Cent. Epistolam Permeniani, I, 7.
- Ensèbe, De Fit. Constantini, il, 68; III, 7. - Socrato,
Hist. Eccl. t I, 7, 8; II, SO, t9, 81. -r- Soiomène, I, 10, 16,
17 ; III, il. - Tillemont, Mémoires pour servir à VHisU
Ecclés., vol. VU, p. 800. - CetlUer, Auteurs sacrés,
vol; IV, p. 811. <- Nicolas Antonio, Bibliot. F et. Hisp.,
L II, c. l. - Baronius. Ann. Bceles. — GaJIand, Bibl.
Patrum, toI. v ; Proleg., c. VIII.
hosius (Stanislas), prélat polonais, né à
Cracovie, le 5 mai 1504, mort à Caprarola, près
de Rome, le 5 août 1579. H commença ses études
à l'académie de sa ville natale et les termina à
Padoue et à Bologne, où il se fit recevoir doc-
teur en droit. Il retourna ensuite en Pologne, où
le roi Sigismond I er l'avait nommé son secré-
taire. Ce prince l'avança dans la chancellerie,
et l'employa dans les affaires les plus im-
portantes du royaume. Hosius s'étant engagé
dans les ordres sacrés, fut pourvu d'un eano-
nicat à Cracovie, puis de l'évêché de Kulm par
le roi Sigismond-Auguste. Il eut ensuite l'é-
vêché d'Ermeland. il attaqua avec énergie la ré-
forme protestante, qui commençait à se répandre
en Pologne. Lors du synode tenu à Piotrkrowo,
en 1551. il publia une confession de la foi ca-
tholique, qui fut traduite dans presque toutes les
langues de l'Europe. Appelé à Rome par le pape,
et envoyé ensuite en mission auprès de l'empe-
reur Ferdinand I er , il réussit à obtenir la pro-
longation du concile de Trente, dans lequel il
figura parmi les plus savants prélats et fit preuve
du zèle le plus ardent poifr le maintien de la
hiérarchie. On assure que l'empereur, en lui ac-
cordant ce qu'il demandait relativement à la con-
tinuation du concile, lui dit qu'il ne pouvait pas
résister à un homme dont la bouche était un
temple et la langue un oracle du Saint-Esprit.
Le pape le chargea d'assister au concile en qua-
lité de légat, et Hosius le présida. En 1561 il
obtint le chapeau de cardinal. De retour dans son
diocèse, il se montra infatigable non moins
qu'habile dans ses efforts pour y étouffer le pro-
testantisme , notamment dans la Prusse occi-
dentale. Les protestants l'appelaient ordinaire-
ment le Dieu des Polonais, et donnaient à la foi
orthodoxe le nom de/ot hosienne. En 1564,
il fonda à Brunsberg le premier collège que les
jésuites aient eu en Pologne et que plus tard le
gouvernement transforma en gymnase acadé-
mique. Hosius rendit de grands services au roi
de Pologne Sigismond-Auguste dans ses négo-
ciations avec la Prusse. Le pape Grégoire XIII
2ii
H0S1US *-
le rappela à Rome, et le lit grand-pénitencier de
l'Église. Il mourut aux environade cette Tille, dont
le séjour paraissait contraire à sa santé. Les sou-
verains pontifes et les éori vains de son temps l'ont
appelé colonne dé V Église, V Augustin de son
siècle, etc. Parmi ses écrits on cite i Genfessio
CathOliCû Pidei Christian*, sive explicatio
con/essionis apatribusfactx in synodoprovin-
ciali habita Petneovix % anrio 1651 ) Mayence,
1557 , in-fol. Ses œuvres ont été publiées sons
le titre de Opéra ùmnia; Cologne, 1684, 2 vol.
in-fol. On y trouve : De Communione sub utra-
que Specie ; — De Sacerdotvm Conjugio ;—De
Missa vulgari lingua celebranda, etc., qui
avaient été imprimés à Paris en 1561. J. V.
ftcsclus, Fita Hotii. — Oldobl, Athènes RbM. — Sta-
râvolsciiis f Deseriptot. Polon. — GétièbtatA, Chron. —
Sponde, Annal. — Fra Paolo, Istoria dèl Concilio dt
Trento. - Scarpi, Histor. Concil. Trident. — frehtf,
Tketttr. — Schrttokb, Kirclienfetch. teit. der B^fotma-
tion. - Palavicini , UiH. Concilii Trident., liv.II, ch. *.
• — De Tbou, Hist. sui temp. - fooréri, Grand Dict. Histor.
— Ersch et Gr&bet, Àltg. EnqfOopMie. *- Bayle, DM.
Ont. « tiiàor.
ifosl»l!fifi* (Jtdn)i proprement Wirth,
philologue 3uissé, né en 1515, à Steifl (canton
de Zurich), mort à Bâlé, le 7 juin 1575. Après
avoir terminé ses études à l'Université de Ta-
bingue, il vint en 1543 à Baie, où il enseigna la
rhétorique et la logique. On a de lui : Quxstio-
nttm Diatecticarum Libri VI; 1543 et 1557;
— Urbatii Bellufiensis Inêtitutionum Grdm-
maticaruth Lib. II; 1546; — De SylloQismi
catégoriel Modis; 1560; — De MOdis Figura-
rutn utilibus in logica; 1560; — AHstotelis
Organi Correctio; 1573, 2 vol.; — Controverse
Dialeclicx ; 1576. R. L.
fiûdatu , Ttittltatal., p. ko. - HeJweclto, Antiquit.
Gostar. — Ryde , Bibl. Bodlei.
flOffiPiftiEif ( Rodolphe ), théologien protes-
tant suisse, né le 7 novembre 1547, à Altdorf,
mort à Zurich, le 11 mars 1626. Plusieurs de
ses parehts avaient été mis à mort pour avoir
propagé la religion réformée ; Rodolphe Hospi-
nien fat élevé par Jean Wolphius, son oncle ma-
ternel, et par Rodolphe Gdalterus, son parrain. Il
passa quelques années au» universités de Mar-
bourg et de fieidelberg, et de retour en sa patrie,
obtint successivement différents emplois ec-
clésiastiques. A l'âge de soixante-seize ans il
tomba en enfance, et il ne sortit de ce triste état
que par la mort. Dupiri dit de* kû dans sa Bi-
bliothèque des Auteurs séparés de la commu-
nion romaine* du seizième et du dix-sep-
tième siècle; Paris, 1718 : « Personne n'a
mieux que loi démêlé ni détaillé l'histoire des
différends qui ont été entre les sectes séparées
de l'Église romaine; et en cela, sans y penser,
, il a rendu service a l'Église catholique, les varia-
tions et l'opposition de la doctrine de ces sectes
: faisant voir combien elles ont en tort de se sé-
parer de l'Église romaine, puisqu'elles ne peu-
vent pas s'accorder entre elles. Hospinien était
! outré sacramentaire et grand ennemi des lu-
HOSP1NIEN 212
i thériens et des uMquitaires, avec lesquels il
croyait que Ton ne devait point avoir 4e société
ni de communion. Le style de cet auteur est
simple , très -intelligible et composé de, termes
ordinaires assez latins. »
On a de Hospinien i î)e Templis, hoc est de
origine^ progrès su, usu et abusu templorum,
ac omnino rerum omnium ad templa pertinen-
ft«m/ Zurich, 1567, in-fol., l rë édit< : sic emen-
data, aucta, looupletaia^ eum integris ca-
pitibus tum responsionibus ad Roberii Bellay-
mini, Cses. BaronH, cardinaliunUeisociorum
eorum, sophismata et argumenta* quibus ido-
latriam Romanam defendere conantur, ut
pro nova mérita haberi possitf Zurich, 1602,
in-folio.; — De Monachis, hoc est de origine
et progressu monachatus et ordinum mo-
nasticorum equitumque militarium omnium,
Libri sex; Zurich , 1588, in-fol., 2 e édit., aug-
mentée, ibid., 1609, in-fol» ; — De Festis chris-
tianorum, hoc est de origine, progressu,
cesrimoniis et riUbusfestorum dierum chris-
tianorum Liber unusf in quo ostenditur ex
probatis auctoribus, veramprimitivam Eccle-
siam paueissima habuisse /esta, progressu
autem temporis prodigiose a superstitionis
hominibus numerum eorum accumula lum
et multipliées errores in observatione Mo-
rum introductos esse, adeoque a ver a anti-
quitatis veneranda simplicitate ac vestigiis
Ecclesiam hac etiam in parte longissime ré-
cépissé; Zurich, 1593* in-fol.; 2 e édit., aug-
mentée, ibid., 1612, in-Jbl. Les additions de la
seconde«édition répondent aux elyections du car-
dinal Bellarrain et du jésuite Jacques Gretser;
— De Festis Judœorum et Ethnicorum , hoc
est de origine, progressu, cserimoniis et ri-
tibus Jestorum dierum Judxorum, Grœco-
rum, Romanorum, Turcarum, Indéanorum,
IÀbri très; Zurich, 1592, in-fol.; 2 e édit. aug-
mentée, ibid., 1611, in-fol.) —Bistoria Sacra-
mentaria, hoc est libri quinque de Cœnx
Dominiez prima ihstitutione ejusque veto
usu et abusu in primitiva Ecclesia ; tum de
origine) progressu, cserimoniis et ritibus
missœ, transubstantiationis et aliorum p&ne
infinitorum errorum quibus Cœnx prima
instUutio horribiliter in papatu poilu la et
pro/anata est; Zurich, 1598, in-fol.; — De
Origine et Progressu Controversiœ Sacramen-
tarirn de Cœna Domini inter Luther anos,
Ubiquistas et Orthodoxos quos Zuingliano*
seu Calvinistas vocant; Zurich, 1602, in-fol.
Les luthériens, qu'Hospmien attaquait très-vi-
vement en eet ouvrage, y répondirent dans un
livre allemand que l'on attribue à Léonard
Hutter. Hospinien travailla à une réplique; mate
son ouvrage ne fut pas terminé; — Concordia
Discors ; de origine et progressu formula
Concordi» Bergensis liber unus; in quo ejus
errores et/alsa dogmata, Sacrse Seripturx,
orthodoxis symboles, toti atUiquUaH puriori.
213
et ipsi etiam Augustanm Confession* répu-
gnant ia t etc.; Zurich, 1609, in-fol. Cet ouvrage
fut une nouvelle cause de controverse religieuse.
L'électeur palatin Frédéric IV, qui cherchait
alors à concilier les -luthériens et les calvinistes,
blâma beaucoup Hospinien de l'avoir fait pa-
raître. Hutter y répondit dans l'écrit : Con*
cordia eoncors ; seu de origine et progressu
formula concordia Eotlesiarum confessionie
Angustanse; Wittemberg, 1614, in-fol. Hospi*
nien voulut répondre à ce livre, qui était extrê-
mement emporté* Il y renonça cependant pour
ménager les princes luthériens et pour ne pas
fournir de nouvelles matières aux railleries des
catholiques qui te divertissaient de ces dis-
putes; — Historia Jesuitica; de origine , ra-
gulïs , eonstitutionibus, privilegiis, incre*
mentis, progressu, et propagatione ordinis
Jesuitarum, etc.; Zurich, 1619, in-fol.? — An
Anima sit in toto corpore sùnul? De /m-
mortalitate ejus; Zurich, 1586, in-4°$ — De
Origine et Progressu RituumetCxrimoniarum
ecclesiasticarum; Zurich, 1585. Une édition
complète des Œuvres d'Hospinien a paru à
Genève, en 7 vol. in-fol., 1669 à 1661. R. L.
Job. Henr. Heidegger, Bospinianm rééêvivuj, se*
historia vite et obitus Rodolpki Hotpimani; dans l'é-
dition des Opéra omnia tiosplniani. — Bayltf, Dict. —
Crenius, Jnimadvers. PhUotog., P, IV, p. tw-lM. -
J. Fabrtoliu, Historia Bibl., P. I, p. U9, MO * P. Ii, p. HO,
511 ; P. UI, p. 87-88. - Sax, Onomast. Liter.
hospital. Voy. L'Hospital.
hosschius (Sidronius), nom latinisé de
Sidron Hossch, poète latin moderne, né à Merck-
hein , près de Dreinunde en Flandre en 1596,
mort à Tongres en 1653. Fils d'un berger, il
garda lui-même les troupeaux dans son enfance.
Il reçut cependant quelque éducation et entra
chez les jésaites à l'âge de vingt ans. D'abord pro-
fesseur d'humanités , puis directeur des novices ,
il cultiva la poésie latine comme un délassement
Quatre élégies de lui publiées en 1635 attirèrent
l'attention du gouverneur des Pays-Bas, Léo-
pold-Guillaume, qui le nomma précepteur de ses
pages, et ensuite de ses enfants. Hosschius
quitta ces fonctions au bout de deux ans, et se
retira chez les jésuites de Tongres, où il mourut.
Ses poésies latines furent publiées par son col-
lègue Jacques Wallins sous ce titre : Elegiarum
Libri VI, de Cursu Vite Humanx, de Christ o
Patiente, de Lacrymis 5. Pétri, deque aliis
arguments; Anvers, 1656, in- 12 ; elles ont été
souvent réimprimées, entre autres dans la col-
lection Barbou; Paris, 1723, 2 vol. in- 12. Les
Élégies sur la Passion de Jésus-Christ ont été
traduites en vers français par Lancelot Des-
landes; Paris, 1756, in-8°. « C'est par nécessité,
dit Baillet, plutôt que par bienséance, que j'ai
cru devoir marquer le temps de la naissance et
de la mort, aussi bien que la qualité et le pays
de Sidronius Hosschius, de peur qu'on ne s'y
trompât en le croyant né aux siècles les plus
heureux de Borne florissante, sous prétexte qu'il
HOSPINJEU — HOSSÉIN
314
égale les premiers d'entre tes anciens poètes la-
tins qu'elle a prodoits, et que ses écrits semblent
nous porter a le confondre avec eux. » Cet éloge
est fort exagéré. Les poésies de Hosschius sont
dé bonnes compositions de collège, des amplifi-
cations purement et élégamment versifiées, mais
elles n'ont rien qui rappelle, même de loin, les
chefs-d'œuvre du siècle d'Auguste. On lui a élevé
eh 1844, au lieu de sa naissance, une fontaine
monumentale surmontée de son buste. Z.
Foppens, Êibliotheca Belgita. — Paquot, Mémoires
pour servir à l'ffUUHre bitt. de* Pays-Bas, t II. — Bail-
let* Jugements Ses Bâtants. — Van Hulst, Revue du Payé
de Liège, an. 184*.
HOBséiK, second fils d'Ali, et troisième imam
des «chiites ( chef spirituel des dissidents ), né en
l'an 4 de l'hégire (625 de J.-C. ), tué à Kerbelah
en Irak* te 10 mobarrem de l'an 61 ( 10 octobre
680). Plus belliqueux que son frère Hassan, il
l'engagea à défendre courageusement son trône.
Lui ayant «accédé» comme imam» en*49 ( 669 ) ,
il prétendit que' te khalifat ( pouvoir temporel
«t spirituel) devait rentrer dans la famille d'Ali
après la mort de Moawiab. 11 fut néanmoins
forcé de reconnaître pour héritier présomptif de
Moavriah, Yézid, fils de ce dernier* Lors de IV
Ténement de Yézid, en 60 (679 ), il quitta Mé-
dine, où il résidait habituellement, et se rendit à
La Mecque pour faire valoir ses prétentions. Les
habitants de la grande ville de Koufahj qui étaient
toujours disposés à la révolte , lui promirent je
te proclamer khalife s'il voulait se rendre au
milieu d'eux. Hosséin , chargea son cousin Mos-
lim Ibn~Akil d'aller traiter avec les koufites, et»
sans attendre te retour de son messager, il se
mit en route avec tonte sa maison. Il se trou-
vait à Kadesiah lorsqu'il apprit que MosHm avait
été mis à mort A cette nouvelle les Arabes qui
lui servaient d'escorte se dispersèrent. Resté
seul avec 72 cavaliers de sa famille, il voulait
retourner sur ses pas ; mais la retraite lui ayant
été fermée par un détachement de 4,000 nommes,
il offrit de céder à Yézid tous ses droits au
khalifat et de se rendre auprès de ce prince, ou
d'aller combattre les infidèles. Ces propositions
furent rejetées par Amrou Ibn-Sad , comman-
dant du corps ennemi. Les 72 cavaliers furent
tués l'un après Faofre dans divers combats
singuliers. Hosséin périt le dernier. Il fat in-
humé à Mesched, où te prince bouide Adhad
ed-Daulah lui fit plus tard élever on magnifique
tombeau, qui est visité par un grand nombre
de pèlerins. Les schiites le révèrent comme on
martyr et célèbrent en son honneur ( le 10 mo-
harrem ) des fêtes pompeuses, où l'on joue des
espèces de mystères et de passions. Hosséin est
le héros d'une foute de légendes pieuses. Il eut
pour successeur son fils Ali Zein al-Abkhn, qui
échappa seul avec les femmes au massacre de
Kerbelah. E. Bbautois.
Tabarf, Ckron. — Abon'I-Féda , Jnn. Muslem, édit.
Relake, 1, 10S, 8S3, SSS, m. - HaMarl, Séances, trad. de
Fbindoustani, par l'abbé Bertrand j Parts, 1SM, in-8*. -
215
HUSSEIN
216
Mrt Meer Haiao-All, Observations en the Muisulmant
of Indiak Leadres, lftft, 1. 1. — Quatr«mère, Mém. sur
la Fie d'Abdallah ben-Z obéir; dans Journ. Asiat., 183»,
t. I,.p. 818-880. — Price, Chronolog. Retrospect., I, 870,
890, «06 et sulv. — Weil, Gesch. der Chalifen, t. 1. — Be
Hammer, LUeratur CeschicMe der Araber, 1. 1, 806 ;
H, 168.
HOSSÉIN BEN-MAKSOCR (Abolt'l-MoghUs),
surnommé Al-Helladj, mystique musulman de
Perse, né en Khorassan, ou à fieidah (Fars),
martyrisé à Baghdad , le 23 dzou'l-cadeh 309
(mars 922 ). Il avait pour aïeul un guèbre, qui
s'était converti à l'islamisme. Après avoir étudié
sous les plus célèbres sofis, et notamment sons
Djonéid , qui lui prescrivit, durant deux ans, la
retraite et le silence, il parcourut le Khorassan,
le Marwaraannahar, le Sedjestan, l'Hindoustan
et même une partie de la Chine, prêchant, écri-
vant et convertissant un grand nombre d'ido-
lâtres. Les uns lui attribuaient le don des mi-
racles , les autres le traitaient d'imposteur et de
magicien. Il émit, en matière 1 de religion et de
morale, plusieurs opinions nouvelles, qui ne s'ac-
cordaient pas toujours entre elles ou avec sa
manière de vivre : tantôt il pratiquait scrupu-
leusement les préceptes de l'islamisme, tantôt
il enseignait que les bonnes œuvres étaient plus
méritoires que les exercices de dévotion. Au
reste , ses mœurs étaient irréprochables, et il vi-
vait avec la plus grande simplicité. Il profes-
sait la doctrine du panthéisme, qu'il résumait en
cos roots : Je suis Dieu et tout est Dieu. Ghaz-
zali et d'autres philosophes ont tenté de le dis-
culper d'hérésie, en interprétant mystiquement
ces paroles. Mais les imans et les schéikhs de
Baghdad prononcèrent contre Hosséin une sen-
tence de mort, et le déférèrent au bras sécu-
lier. Jeté en prison par ordre du wizir Ali ben-
Assa, il en fut tiré au bout d'un an et demi pour
être mis à la torture. Loin de murmurer, il pria
pour ses persécuteurs. Son cadavre fut brûlé,
et les cendres en furent jetées dans le Tigre. Il
avait écrit une trentaine d'ouvrages théologi-
ques et mystiques. E. B.
Ibo Khalllian, Biograph. Diction., ï, 423. — Aboirl-
Féda, Arm. Mntlem., II, 389.- Ferid ed-Din Atthar, Tedz-
hiret al-Bwliga ( Mémoire des Saints), fragm. trad. dans
Bliltfiensammlung ausder morgenltendischen Mystik,
par Tholuck ; Berlin, 1825, tn-8°, p. 310 827.
hosséin ben-Masoud nl-Ferraal-Baghewi
( Mohyi as-Sonnet Abou-Mohammed ), juris-
consulte arabe de la secte de Schaféi, né à Ba-
gischwer ( Khorassan ), mort en 510 de l'hé-
gire (1116 de J.-C. ) ou 516 (1122). On a de
lui plusieurs traités dont le plus eonnu est
Messabih as-Sonnet ( Lumières de la Sunna ),
abrégé des six grands recueils de traditions re-
latives à Mahomet et contenant 4484 traditions.
Cet ouvrage, qui a eu plus de vingt-cinq com-
mentateurs, a été refondu en 737 (1336) par
Wali ed-Din Abou-Abdallah Mohammed ben- Ab-
dallah sous le titre de Mischkat al-Messabih
( Niche des lumières ). Cette nouvelle rédaction
a été traduite en anglais par le capitaine Mat-
thews; et le texte arabe, accompagné d'une
explication, a été tithographié à Calcutta vers
1854. E. B.
Ibn-KbaUlkan, BiograpMcal Diction., t. I.d. M9.-
Abou'1-Féda, ^tm. Muslem., t III, p. 389. — Hadjl-Khal-
fab, Uxic. Bibliogr., édlt. Fluegei, 1. 1, n« BU. 1423;
t. II, 2908, 3789, 4172,; t. IV, 7319; V, 991*. 10796, 19128,
12812. — De Hammer, LiteraturgescMcMe der Araber,
t. VI, p. 2*3.
hosséin wirka-baIkara ( Abou'l-ghaù
Bahadour-khan ), sultan du Khorassan, né à
Hérat, en moharrem 842 de l'hégire ( juin 1438
de J.-C. ),*mort en Dzou'l-hiddjeh 911 ( avril
1506.) Son père, Ghéiats ed-Din Mansour ben-
Baïkara, n'avait point de principauté, quoique
fût arrière-petit-fils de Tamerlan. Dès sa jeu-
nesse, Hosséin se distingua par son habileté dans
les exercices militaires. Enfermé par ordre de
Abou-Saïd , sultan de Samarkand, à l'occasion
de la révolte de son parent Mîrza-Sultan Weis,
en 856 (1442), il fut ensuite mis en liberté, et
se retira à Hérat, auprès de Baber, puis auprès de
Mirza-Sindjar, prince de Merw Schahdjihan, qui
lui donna une de ses filles en mariage. Le gou-
vernement de Merw Schahdjihan lui ayant été
confié durant l'absence de son beau-père, il
tenta d'usurper l'autorité suprême; mais le re-
tour du prince légitime fit échouer cette entre-
prise. Hosséin s'enfuit dans le désert, se mit à
la tête de quelques cavaliers, et réussit à en-
lever aux Turcomans la viHe d'Asterabad et les
provinces de Mazandéran et de Djordjan, en 862
(1458). H se fit aimer de ses sujets par sa jus-
tice, et envahit l'empire du sultan Abou-Saïd,
qui lui réclamait quelques territoires (864-1459).
Mais, repoussé et poursuivi jusque dans ses pro-
pres États, il se réfugia enKharizm et n'en sortit
que pour aller assiéger Hérat , capitale de son
ennemi. Ne pouvant s'en rendre maître , il s'a-
vança à la rencontre d' Abou-Saïd, qui était en
expédition. L'indiscipline de son armée le ré-
duisit de nouveau à la nécessité de s'enfuir en
Eharizm. Après la mort de son adversaire, il
s'empara de Hérat, 8 ramadban 873 (21 mars
1469 ), de Thous, de Nischabouret de tout le
Khorassan. Mais le trône lui fut disputé par un
arrière-petit-fils de Schah-Rokh , Mirza Yadig-
hiar Mohammed ben-Baïsanghor, qui était sou-
tenu par Ouzoun- Hassan et par les anciens of-
ficiers de Abou-Saïd. Il se vit enlever le Kho-
rassan, et perdit, par suite de la défection de
ses troupes, les avantages que lui avait donnés
la victoire de Derbend Schakhan ( 874-1469 ).
Son rival entra à Hérat le 9 moharrem 875
(7 juillet 1470) et se livra aux plaisirs, tandis
que ses officiers tyrannisaient les habitants delà
ville et leur faisaient regretter le gouvernement
de Hosséin. Ce dernier avait demandé asile aux
Turcs Erlauts de Méimenah. Quoique la plu-
part de ses officiers l'eussent abandonné succes-
sivement, il parvint à réunir un corps de 850
hommes d'élite et marcha sur Hérat. Telle fut la
rapidité de sa marche et l'insouciance de ses en-
nemis, qu'il pénétra dans son ancienne eapitaic,
217 HOSSÉIN
à l'insu de Yadighiar, et le saisit dans son pa-
lais sans éprouver la moindre résistance.
L'ayant fait mettre à mort, en safar 875 ( août
1470), il accorda une amnistie générale à tous
ses sujets et permit aux Turcomans de retour-
ner dans leur pays. Après avoir reconquis ses
anciennes possessions : le Kharizm, le Djordjan,
le Mazandéran et le Khorassan, il attaqua Mah-
moud-Mirza,fils d'Abou-Saïd et prince deHissar-
Schadouman, qui se préparait à envahir le Kho-
rassan. Il le vainquit à Tchekman-Séraï , près
d'Andekhond, en 876 (1471), et s'empara de
Balkh. Un autre fils d'Abou-Saïd , le prince de
Badakhschan, Aboubekr, ayant été vaincu par
son frère Mahmoud, se retira auprès d'Hosséin-
Mirza, qui lui fit épouser une de ses filles. Mais
ce prince ne tarda pas à prendre les armes contre
son beau-père-, il fut battu à Merw, et, après
avoir longtemps erré, tomba entre les mains de
Hosséin , qui le priva de la vie, en 879 (1475).
Ce ne fut pas le seul rebelle que le sultan de
Khorassan trouva dans sa propre famille. En
902 (1496), son fils aîné Hosséin-Badi ez-Zeman,
jaloux de la préférence accordée à son frère
Motzaffer, se révolta dans son gouvernement de
Balkh; mais il fut vaincu près d' Asterabad , et
son fils Moumin, ayant été fait prisonnier, fut
mis à mort, en 903 (1497). Badi ez-Zeman alla
se mettre sous la protection de Dzoulnoun, gou-
verneur rebelle du Candahar , avec l'aide du-
quel il fut sur le point de s'emparer de Hérat.
Hosséin, qui était en guerre avec un autre de
ses fils, obtint la paix, en restituant Balkh à son
fils, et en cédant le Séistan à un frère deDzoul-
noun, en 904 (i\$&). Dans la dernière année de
sa vie, il fut attaqué par le puissant khan des
Ouzbeks, Schéibani ou Schahi-Beg. Trop faible
pour résister, et devenu impotent de corps et
d'esprit, il demanda au Mogol Baber des se-
cours, qui n'arrivèrent qu'après sa mort. Hos-
séin fut, avec Schah-Rokh, le plus puissant des
descendants de Tamerlan. Il fit de sa capitale la
ville la plus florissante de l'Asie musulmane
et l'embellit de superbes édifices. Sa cour était
peut-être, à celte époque, la plus brillante et la
plus polie du monde entier. Elle renfermait un
grand nombre d'hommes distingués, tels que le
wizir Ali-Schir, le poète Djami, le moraliste
Hosséin-Waitz-Kaschéfi. Hosséin-Mirza faisait
instruire aux frais de l'État environ douze mille
jeunes gens. Non content de protéger les lettres,
il les cultivait lui-même. On a de lui des vers en
turc tchagataïen, et un ouvrage mystique en
persan, intitulé : Medjalis al-Oschak ( Assem-
blées des Amants ) , contenant des notices de
soixante- quinze personnages célèbres , tels que
Djafar as-Sadik, Hosséin ben-Mansour al-Hel-
ladj, Ferid ed-Din Atthar, Omar Iba-Faredh,
Djelal ed-Din Roumi, Hafitz, Djami, Baber et
l'auteur lui-même. E. B.
Kbondemlr, K Masse t- al- Jkhbar, trad. librem. dans
Chronological Retrospect de Price, t. 111, p. 695-608,
218
et*, 62S-M0,669.— DJaml, Tedzkiret; fragment trad. par
de Sacy, dans flot, des Manu ter., t. IV. p. MS-269. —
Sam-Mirza, Tedikiret, t, I.— Baber, Mémoirs, trad. par
Erskfne. — Er&kine, Hist. of India, 1. 1. — De Ha ramer,
Gesch. der sehœnen Redehûnste Persitns, 299. — Gore
Ouseley, Biographe Notices o/Persian Poets, 247 281.
hossein-badi-ez-zem an , fils atné du pré-
cédent, mort à Constantinople , en 926 (1520).
Après la mort de son père, il régna conjointe-
ment avec son* frère Motzaffer. Leur incapacité
et leurs discordes firent une si mauvaise impres-
sion sur Baber, qu'il se hâta de s'en retourner
avec les troupes auxiliaires qu'il avait amenées à
leur secours. Ils furent vaincus i>ar Schéibani,
khan des Ouzbeks , qui se rendit maître de leur
capitale, en moharrem 913 (mai 1507). Mot-
zaffer mourut la même année, et Badi ez-Zeman
se retira auprès de Schah-Ismaïl, sofi , qui lui
donna la ville de Réi. II tenta de recouvrer ses
États, assiégea Asterabad , et fut mis en fuite.
Après avoir erré, près d'un an, dans l'Hindous-
tan , il alla retrouver Schah-Ismaïl , qui venait
d'envahir le Khorassan. Il le suivit ensuite à
. Tébriz. Lors de la prise de cette ville, en 1514,
il tomba entre les mains du sultan Selim I, et fut
emmené à Constantinople, où il passa ses der-
nière années. Un de ses fils, Mohammed-Ze-
mari'Mirza, se retira dans l'Hindoustan , à la
cour du grand-mogol Baber, qui lui donna une
de ses filles en mariage et le nomma gouverneur
du Behar. Lors de l'avènement de son beau-frère
Houmayoun, en 937 (1530), il lui disputa le
trône ; mais il fut jeté en prison. S'étant échappé,
il se rendit dans le Goudjerate, à la cour de Ba-
hadour-Schah, après la mort duquel il fut re-
connu roi du pays par la reine mère et les
Portugais de Diu (943-1537). Mais il fut expulsé
au bout de quelques mois de règne par un cou-
sin du feu roi, et se réconcilia avec Houmayoun,
qui le fit gouverneur de Djouanpour. Il périt en
combattant pour ce prince à Tchoupah-Ghat,
sur le Gange, le 9 sefer 946 (27 mai 1539 ).
Le dernier prince Timouridedu Khorassan fut
Féridoun, fils de Hosséin-Mirza-Baïkara , qui
s'était rendu maître de Asterabad, Dameghan et
Kerret , et qui fut tué par les Ouzbeks, en 915
(1509). E. Beauvoïs.
Sam. Mirza, TedzkireV; dans Not. des Mss., t. IV,
p. 278.- Price, Chronofqg. Retrospect., t. III. - Ersklae
Bist. of India, t. 1, II.
hosséin Ben-Ali ( Mewlana Kemal-ed-
Din), surnommé al-Waitz al Heravi, al-Kaschefi
(le Prédicateur de Hérat, le Commentateur), cé-
lèbre écrivain persan, né à Beihac, mort en 900
de l'hégire ( 1494 de J.-C. ), ou plutôt en 910
(1504). Il résidait à Hérat ( Khorassan ), capi-
tale de Hosséin-Mirza, et jouissait de la faveur
du wizir Ali-Schir. Il était aussi savant qu'élo-
quent. On a de lui : Akhlac % Mohsini ( Mœurs «
du Bienfaisant), ouvrage dédié àAbou'l-AToAsin,
fils du sultan Hosséin-Mirza; il a été édité par-
tiellement dans Persian Sélections de Lums-
den, Calcutta, 1811; à Hertford, 1823, m-8°
(13 chapitres); et parl.-W.-D. Ouseley, ibid.,
219
HOSSÉIN — HOSTE
220
1850, in-8° ( 20 chap. ). H. G, Keçne en a
traduit 12 chap.; ib., 1851, in-8*. Il en a été pu-
blié une version en hindoustani, intitulée Oendj i
Kfiouni ( Trésor de Borfté); GaJcutta, 2 e édit,
.1*48, in-8°, VAkhlac i MoWni est uq traité de
morale adressé aux roisj il est divisé eu qua-
rante sections, sous chacune desquelles l'auteur
expose up précepte appuyé d'exemples, d'anec-
iîûtes et de citations empruntées au Coran, aux
tradition» prophétique et aux meilleurs poètes.
On y trouve de noble* sentences, des pensées
ingénieuses, de» réflexions profondes exprimées
avec une élégante simplicité. L'auteur P45te pour
le Montaigne et le La. Bruyère des Persans; —
Anwar i Sahaifr ( Lumière* Canoniques ), dé-
dié au wiiir Scuéjih-Ahmed-SoAgïk et édité à
Hertford, 1805; à Calcutta, |S16, in-fol,;1824,
ù>4°; 1834, 2 vol, in<8°i * »Bompaj, 1823; a
Londres, 1827, in-4°, par j. Michaej enfin à
Ilertforçl, 1851, in-4°, par J.*W.-D. Ouseley.
C'est un recueil de fobles originaires de l'Inde,
et dont la première rédaction paraît avoir été le
Pantchatantra, qui fut traduit successivement du
sanscrit en peblvi par Barzouïeb, du petuvi en
arabe par ibnal-Mokaffa, sous le titre de Kalil-
ah et Dmnafr, et de l'arabe en persan par
Abou'l-Meali-NasraUah. Cette version était par-
semée de termes arabes et de locutions surannées.
Hussein la retoucha, et substitua au style simple
de son prédécesseur des périodes cadencées et
rimées, des expressions pompeuses , des méta-
phores hyperbolique^. Il relia plu* étroitement
entre eux les divers épisodes , eu omit quel-
ques-uns, et ajouta, une préface, où U raconte
l'histoire du livre de Çalilafr étPimnah. §a tra-
duction fut rajeunie sous le titre de Eyar i Ha*
nisch (Pierre de TQuctie de la Science), par
Abou'l-Fadhl, voir ÀftAWw EUe a été mise en
turc, sous le titre de fiaumayoun- tfanwh
(Livre Auguste)» par Wa>ib-Ali-Tschélépi, en
tundou&tani ; eu géorgien, par WaHtaug VI et
Soulkhan-Saba-Orbelian; enfin en [anglais par
Ch. Stewart : An Introduction to the Anxvari
Qoohyly of Hussein Vaiz Kashify , contenant
le texte et la traduction des sept premiers chapi-
tres, Londres, 1821, in-4°; et parE.-B. Eastwick :
Anvari Suhaiti, Hertford, 1854, in-8°; —
Raudhet as Schoada (Jardin des Martyrs ). Cet
ouvrage, divisé en dix chapitres, traite de la vie et
de la mort de Mahomet, de Fathime, d'Ali, d'Has-
san, le martyre d'Hosséiu, de Moslim, d'Ocaïl ,
du sort de la famille de Mahomet. Jl a été abrégé,
sous le titre de Deh Medjalis (Dix Assemblées),
d'où l'on a extrait la vie de Mahomet, qui a été tra-
duite dans les Mines de l'Orient, 181 1, t. II; dans
New Asiatic Miscellany, Calcutta, 1790, m-4°,
* t. I ( avec la vie de Fathime ), et dans Asiatic
Journal and Monthly Register, 1. 1, Londres,
1816, in-8°; — Makhzan al Inscha (Magasin
de l'Art Épistolaire ) ; — Djewahir at-Tefsir
( Perles de l'Exégèse ), commentaire de la 2 e et
delà 3 e sourate du Coran; — Commentaire
du Metsnewi de Bjelal édùin Raumit -~
Traité d } Alchimie et d'Astrologie.
E. BEàUVOIS.
KhoDdçnir, #a*è «hffwr. - U^l, Khatiwh Qendj.
- H*dji fHialfQb, U*\c. BMioqrwh.* t.i, n° «83; n,
8159, 4T74; III. 6648; V, 10855, 11*77, 11369. 11841, 11730.
— SUvMtre de Saoy, préf. 4tt Cali\* et Dimnm, ou fa-
ftfef de MMw* en crabe. m Rrowot, «t. «Un» Bullrt.
Ssiêntif, 4e \?4cad. de$Sç. de Saint-Pétersàourg, t. V,
1889. — Dorn, Catal. des Mss. Orient, de la BibUoth. de
Saint-Pétersbourg, p. 14T4VI, 40t.
HoasÉuf-.KBA«. Voy. Mm Gholàm Ho«r
anm RiUM.
BtMBBlff-tACBA, HOSSÉD^SCHAH. VOfOS
Housséi*.
PQ8T ( Qeorgius ), voyageur danois. Voyez
bost ( Nicolas»Thcmmi ), botaniste autri-
chien, né en 1763, mort le |3 janvier 1834. 11
fut directeur du jardin de Schœqbrunn pendant
quarante ans et premier médecin de l'empereur.
Il se |it surtout connaître par ses ouvrages de
botanique. On a de lui : leones et Descriptio
Graminum Ausêriaeorum, 4 vol. in-tol.; —
Flora Austviaca; 1897, 3 vol. in«g*. C'est le re-
cueil de ses observations durant sa direction du
Jardin de Schœnbruna; — une Monographie
du Saule. On y trouve la description et les
Êgures de plus de cent espèces. V. A.
GaUlien, MedieinUehes SchrifUUlè*r-&xik.
H08TV ( Le P. Paul), mathématicien français,
né en 1659, à Pom%de.Veyle ( Bresse ), mort à
Toulon, le 13 février 1900. Il entra dans la con-
grégation des Jésuites, et enseigna tes mathéma-
tiques dans plusieurs collèges de son ordre. Ses
goûts l'ayant porté à l'étude spéciale des mathé-
matiques appliquées à la navigation, il eut oc-
casion de se foire remarquer du due de Morte-
mart et des maréchaux d'Ëstrées et de Tourville
quHl suivit, pendant doute ans, dans leurs diver-
ses expéditions, en qualité de chapelain. Lors-
qu'il mourut, il était professeur au séminaire
royal de Toulon. On a de loi les ouvrages suivante :
Traité des Évolutions Navales, eomposé sur
les Mémoire» de Tourville (tig.); 1691,m-fol.,
manuscrit ; — Tr*ité dés Signaux et Évolutions
Navales, qui tonHent des règles utiles aux
officiers généraux et particuliers dhine ar-
mée navale, sous la dictée du maréêhal de
Tourville; Toulon, 1696, in-4% avec 32 pi.
coloriées. Ces deux ouvrages existent à la bi-
bliothèque du dépôt général des cartes, et plans
de la marine, à Paris ; — l'Art des Armées Na-
vales, ou traité des évolutions navales, etc.
(pi.) ; Lyon, 1697, et 1727, in-rol. Le P. Hoste
ne se borne pas à exposer dans cet ouvrage les
principes de la tactique navale, il eu fait l'ap-
plication à la bataille de Lépante et à eelles qui
furent livrées sous le règne de Louis XIV ; —
Théorie de la Construction des Vaisseaux
(pi.); Lyon, 1697, m-fol. Indépendamment des
deux mémoires déjà cités , la bibliothèque du
dépôt général des cartes et plans en possède une
troisième copie sur les mémoires du P. Hoste, et
S»l no#rE -
intitulé iAtcJiiteotuiv Navûle, ou pratique de
la construction des vaisseaux. Avant de pu-
blier sa Tàéarie de la Construction des Vais-
seaux , le P. Hoste l'a? ait soumise à Tourville,
qui n^vait pas approuvé toutes les vues de
l'auteur. Les deux adversaires, os pouvant s'enr
tendre, convinrent que deq* vaisseau* seraient
construits sur las plans de chacun d'eux}
le résultat de cette joute fut défavorable au
P. Hoste, qui s'empmaa de le reconnaître; —
Recueil des Traités de Mathématique (sic)
qui peuvent être nécessaires à tin gentilhomme
pour servir par mer au pat terre} Paris» 1692,
3 vol. in-12; -r Observation, de Vtçlipse du
Soleil du il juillet 1684, faite à Lyon dans
le grand collège des Jésuites ( dans le Journal
des Savants y 1684, p. 200.) P. Lçvpr.
Mémoires ée Trêvoujx. — Journal des Savants, -r
Catalogue général tes MtoUotMque* de <» Mqrtnç.
HOBTK ( William ), marin anglais, né en
1780, mort le 6 décembre 1828. Il entra fort
jeune dans la marine royale, et débuta sur Je
vaisseau Minerva, que commandait l'illustre
Nelson, alors commodore. Ge grand marin prit
W. Hoste en amitié et lui apprit son métier. Sous
un pareil professeur, Hoste devint facilement un
habile officier. Il suivit Nelson lorsqu'il attaqua
vainement le* lies Canaries et fut repoussé de-
vant Ténériffe. fl se distingua au combat de Saint-
Vincent, on les Anglais, quoique inférieurs en
forces, battirent les Espagnols ( 14 février 1797 ) ,
et passa sur Thesea 9 cap. Ra|p. Miller.Nelson ne
tarda pas à le rappeler dans son escadre, et il put
prendre une part active aux divers combats livres
sur les côtes d'Egypte. De 1809 à 1813 M com-
mandait VAmphion,, et on le voit sans cesse dans
la Méditerranée, bataillant contre les Français : ses
succès furent divers; tantôt vainqueur, tantôt re-
poussé, il sut maintenir haut le pavillon britannique
deyant tapies (mai 1809), devant Lissa (i 3 mars
181 1), sur les cotes de l'Jstrie et de la Dalmatie
en 1811 et 1812 j à la pris* deFiume,de Raguse,
des bouches, du Cattaro, et de, Parga, en 1813, .
1S14. En 181a il fut créé baronet et comman-
deur de l'ordre du Rai*. Il mourut a quarante-
huit an» ; les Anglais l'honoraient du surnom de
Nelson le jeune*
Son frère, Thmas $dm*d, né en. 1794, mqrt ,
le as juillet 1834, le- suivit dans, la plupart cjeses
expéditions. Ilétajt&i cfcéttf lorsqu'il voulut pren-
dre ta carrière mittaJKk, qu'il se glissa furtive-
ment à bord du bâtiment que commandait son
frère, sftcacbaaau* un porte-.voix, et ne se montra
que loin en mer. Il avait alors treize ans; après
la pacification de 1814, Uparcourut les mers d'A-
mérique et d'Irlande, et reçut le grade de com-
modore. en 1825. Alfred de Lacaz?.
Annyal OfiUuwu,
; ft<*$T*Ui (Uippoiute >; littérateur fonçais ,
né vera 1812. Ha été curateur <j u Théâtre-His-
torique, de l'Ambigu Comique, et dirige aujour-
d'hui le théâtre de la Gaîté. Membre de la Légion
HOST1US 999
d'Honneur depuis 1856 , il a publié ; Versailles
Pittoresque et anecdotique ; 1837, grand in- 18,
avec 74 pi.; — If s Contes Bleusde ma Nourrice;
1842, in- 18 ; — François les Bas-Bleus y ou la
France et le Salon, 1842, in- 18 ; — Les Trois
Vertus de la Jeunesse; 1842, in-18; — Bon-:
jour et Bonsoir, contes pour les enfants ; 1844,
in-8°. — Les Enfants d'aujourd'hui, 1844,
in* ; — Béforme Théâtrale, suivie de YEsr
puisse d'un projet de Loi sur les Th4dtres[f
1848, in-8°; «r- U* Amis #e V Enfance i 1848,
in-8° avec vignettes ; — Tableau synoptique
des. Nerfs encéphaliques , d'après les cours, et
sous les veux du facteur Calma-Grand^
1834 , iu-plano T II a placé un Cours de Bâta-,
nique Élément**** en. tète de la Flore des.
Dames ; 1839, in-18. \\ est auteur du texte expji-.
catif de Paris,-Qr léan*,, parcours phtto.res.que
du chemin de fer de Paris à Orléans ,• 1843.
in-4°. G. de F.
Renseignement* particulier t.
hosyimew (<?. Valent NostHianus %esi
sius Quintus), empereur romain, fils de Ter*,
pereur Dechis et d'Herennia Etrusoilla , mort
▼ers 252 de l'ère çbfétianne. Après la mort
de Decius et d'£trusous , il fut revêtu de la
pourpre avec Itebonianus Salins, et périt peu
après, soit de la peste qui ravageait l'empire, soit
par les embûches de son collègue. Les récits de
cette époque sont assez incertains pour que
l'on, ait pu douter si qostUien était le fUs, le
gendre ou le neveu de Decius. ; mais la question
semblerésolue par Zetsiroe. Savant cet historien,
Decius avait, outre Etruscus,un second fils qui
fut associé avec Trebonianus à la dignité im-
périale, y.
Aur. Vi«t«r,0e <*«., 80 ; Episl, 80. - Entrope, |X, 5.
— ZoaUnè, |, *S8. — Zooaras, vol. I, p. 625, édit. du
Louvre. — Côdréne, p. 451, é&it. de Boni}. — 'Ttyleirionï,
Histoire des Empereurs, vol. fil.
POSTILIUS TULLCS. f*oy % TULLUS.
* hostilius, poète latin, d'une époque incer-
taine. H écrivit des mimes. Il n'est mentionné
que par Tertullien dans le passage suivant :
« Quand vous voyez jouer les pièces bouffonnes
des Lentulus. et des Hostilius , dites-moi si ce
sont vos farceurs ou vos dieux qui excitent les
risées que vous faites ! » On sait que Lentulus
vivait sous Domitten, et Hostilius doit apparte-
nir à la même époque. I! est dès lors impossible
de l'identifier avec un autre Hostilius qui vivait
au moins deux, siècles plus tôt, si on en juge par
ce vers que cite de lui Priscien ( le 719 e de l'édit.
Putsch») :
Saspe grçges pecuum ex tiibçrnis paslobu'pulsl.
AjVeicUert, parune conjecture probable mais que
n'autorise aucun manuscrit, pense qu'il faut
ljre, dans Priscien, Hostius ( voy. ce nom } au
lien d'Hostittus. Y.
TertuUtien, aqoI. % 15. — Weicbert, Poet. Latin. ReligyUe;
Leipzig, 1880, p. 17.
* hostius, poëte latin, vivait dans le second
siècle avant J.-C. Festus, Macrojbe, Scrvius
923
HOSTIUS — HOTHBY
224
citent plusieurs vers (six en tout) du premier et
du second livre du Bellum "Histricum de Hos-
tias. Ces fragments , le titre de l'ouvrage et les
expressions des grammairiens nous apprennent
que le Bèllum Histricum était un poème en
vers hexamètres sur la guerre d'Ulyrie , qui eut
lieu sous le consulat de A. Manlius Vulso et de
M arcus Juniusfirutus, en 178, événement raconté
dans le quarante-unième livre de l'histoire de
Tite Live, et que le poète vivait avant Virgile;
mais comme aucun auteur ancien ne donne sur
lui le moindre renseignement biographique, on
ignore la date précise de sa vie. Des critiques
ont essayé de suppléer par des conjectures au
silence des anciens. Ainsi on trouve dans l'A-
pologie d'Apulée que le véritable nom de la
Cinthia de Properce était Hostia, et Properce
nous dit que Cinthia avait un grand-père célèbre
par son savoir : :
Est tibl forma potens, suât caste Palladis artes,
Splendtdaque a docto sœpe rcfulget avo.
Ce grand-père de Hostia devait s'appeler Hostius,
et vivre vers le temps des Gracques. On peut
sans invraisemblance le regarder comme l'au-
teur du 1 Bellum histricum, qui , si l'on en
juge par la rudesse de la versification et du
langage, doit remonter au deuxième siècle avant
J.-C. Y.
Festus, aux mots Tesca, Scseva. — Macrobe, VI, 3, s.
— Servtus, ad Tirgil. y£neid., XII, m. — Welcbert,
Poet. -Lot. Reliq., p. i-18.
*HOSTfiESHAM (Nicolas), médecin anglais,
vivait au milieu du quinzième siècle. On manque
de détails sur sa vie. On sait seulement qu'il est
auteur de quelques ouvrages restés inédits : De
ModoconficiendietdispensandiMedicamenta;
et Antidotarius. 6. B.
Fabricius, Bibliotheca Latina Médit jEvi, t. V, p. 34*.
— Kestner, Medicinisches Celehrten-Lexikon, p. 416.
* hostrup ( Christophe ), l'un des meilleurs
poètes comiques danois, né en 1819. Q était étu-
diant en théologie lorsqu'il fit jouer Les Voisins,
d'abord dans la société des étudiants , puis sur
le théâtre royal de Copenhague (1845). Encou-
ragé par le brillant accueil qu'obtint cette pièce,
il composa , en moins de dix ans , un grand
nombre de comédies, de vaudevilles ,' de farces
et d'opéras. Devenu pasteur de Silkeborg en Jut-
land (18S4), M. Hostrup n'écrit plus pour le
théâtre. Ses pièces ont été réunies sous le titre
de Poetiske Skri/ter ( Œuvres Poétiques ) ;
Copenhague, 1852 , 4 vol. in-8°. Elles sont en
prose, mais entremêlées de nombreux couplets.
Les plus remarquables sont : Gjenbœrne
(Les Voisins de Face); — Intrigerne (Les
Intrigues ) ; — Fodreiise Eventyr ( Inci-
dents d'un Voyage à Pied); — Spurven (Le
Moineau ) ; — Tordeiiveir (L'Orage ) ; — Mœs-
ter og Lxrling ( Le Maître et le Disciple). Il a
aussi publié, sous le pseudonyme de Jeus Chris-
trup, un recueil de chants pour les étudiants*
E. B.
r P. L. Môller, Det nyere Lystspil % Danmark of Fran-
torig; Copenhague, 1858, in-it
hotbam (Henri); amiral anglais, né le
19 février 1776, mort à Malte, le 19 avril 1833.
Dès l'âge de dix-huit ans, il commandait le sloop
Arrow, et en 1800 il était capitaine de frégate.
Hotham se distingua dans divers engagements
contre les Français. En 1804 il était sur les côtes
du Portugal, en 1805 dans les Indes; en 1809 il
combattait sur les côtes de La Rochelle, et l'année
suivante sur celles d'Espagne. En 1812, capi-
taine à bord du vaisseau Northumberland et
suivi du Grumbler, il forçait, après un rude com-
bat, deux frégates françaises à s'échouera l'entrée
de Lorient; en 1813, il était colonel de marine,
en 1814 contre-amiral, en 1815 commandeur de
l'ordre du Bain. Cette même année; il bloquait
les côtes de France, et Napoléon, vaincu, chercha
un refuge à son bord : il demandait à être
traité en hôte ; on sait l'hospitalité que lui donna
l'Angleterre. Notham fut en 1818 nommé com-
missaire de l'amirauté. En 1831 il passa vice-
amiral, et, chargé de la croisière dans la Méditer-
ranée, il mourut dans l'exercice de ses fonctions.
A. ne L.
Biog. Brit.— FicL et Conquêtes des*Français, t. VII.
* hothby (Jean) t moine anglais, vivait dans
la seconde moitié du quatorzième siècle. Il ap-
partenait à l'ordre des Carmélites, et paraît avoir
passé la plus grande partie de son existence en
Italie. Hothby n'était connu jusqu'à présent que
par deux traités de musique qui existent , l'un
à la Bibliothèque impériale de Paris, sous le
n° 7369, intitulé : Hothby 9 anglicl 9 Proportions
Musicx , l'autre à la bibliothèque Se l'Institut
de Bologne, sous le titre de : P. Jo. Hothobi,
carmelitx, De Proportionibus et Canto Figu-
rato, de Contrapuncto , de Monocordo.
MM. Danjou et Morelot ont découvert récemment
en Italie un autre ouvrage de Hothby, dont ils
ont rencontré deux manuscrits, le premier à la
bibliothèque Magliabeochiana de Florence, le
second à celle de Saint-Marc à Venise , et qui
a pour titre : La Caliopia Légale, reducta in
brevita, per maestro Giovanni- Angelico Octobi,
carmelita. Bien que ce traité ne porte aucune
division de matière, il se compose néanmoins
de quatre parties distinctes. Dans la première, le
savant religieux s'occupe des sons et de la sol-
misation par muances. La seconde partie est re-
lative aux mouvements des sons ou de la voix:
c'est la partie la plus importante du traité au
point de vue de la notation et du rapport des
neumes avec les notes carrées ; elle démontre la
relation qui ' existait au moyen âge entre les
neumes et la notation noire qui les a remplacées,
tant dans le plain-chant que dans la musique
figurée. La troisième partie concerne les diverses
proportions de durée des sons. Enfin, la qua-
trième partie traite des intervalles en usage dans
le plain-chant. Dans son excellent ouvrage sur
V Histoire de V Harmonie au Moyen Age, M. de
Coussemaker a publié, avec la traduction
française en regard, ce traité de Hothby, qui est
225
HOTHBY — HOTMAN
226
un des plus précieux documents sur la situation
de l'art à cette époque. Dieud. Denne-Baron.
De Coussemaker, Histoire de l'Harmonie au Moyen
Age % p. S9B ; Paris, 1861. in-4<>. — Fétto, Biographie
universelle des Musiciens.
J motho ( Henri-Gustave), littérateur alle-
mand, né à Berlin, le 22 mai 1802. Il visita la
France. l'Angleterre , les Pays-Bas et l'Italie,
où il recueillit les principaux documents pour
son ouvrage sur la peinture , et obtint en 1829
la chaire de philosophie à l'université de Berlin.
H était un des principaux représentants de
l'école philosophique de Hegel. On a de lui :
Vorstudien fur Leben und Kunst (Études
préliminaires sur la Vie et sur l'Art) ; Stuttgartd,
1835; — Geschichte der Deutschen undNieder-
tendischen Malerei (Histoire de la Peinture de
l'Allemagne et des Pays-Bas) ; Berlin, 1840-1843,
2 vol. M. Hotho publia aussi les Leçons oVEsthé-
tique de Hegel ( Vorlesungen ueber Msthetik);
Berlin, 1835-1838, 3 vol., et collabora, avec
Schulze, Marnheineke , Gans, Henning, Miche-
let et Foerster, à l'édition des Œuvres com-
plètes du célèbre philosophe. R. L.
Convert.-Lex. der Gegenwart. — Jul. Scbmidt, Ges-
chichte der Deutschen Literatur Un XIXten Jahrh ;
#> édtt.; Leipzig, 1855, vol. Il, p, 484.
hotmau ( François) % célèbre jurisconsulte
et pubticiste français, né à Pari3, le 23 août 1524,
mort le 12 février 1590, à Baie. A l'âge de quinze
ans il se rendit à l'université d'Orléans pour y
étudier la jurisprudence; il y suivit les cours de
Pierre L'Estoile. De retour à Paris, il exerça d'a-
bord la profession d'avocat plaidant. Abandonnant
bientôt la pratique des affaires, il commença en
1546 un cours libre de droit romain à l'univer-
sité de Paris. L'année suivante il embrassa la ré-
forme, et se retira à Lyon, parce qu'il craignait
surtout la sévérité de son père, catholique très-
zèlé. Peu de temps après il partit pour Lausanne,
où il venait d'être nommé professeur de belles-
lettres et d'histoire , sur la recommandation de
Calvin , avec lequel il se lia intimement. En 1555
il se rendit à Strasbourg, où les instances de
Sturm lui firent accorder des lettres de bourgeoisie
et la permission de faire un cours de droit. Il
y trouva, comme professeur en titre de droit
civil, son ami Baudoin, auquel il rendit bientôt
le séjour de Strasbourg insupportable par les
calomnies qu'il répandait contre lui. Baudoin
ayant quitté cette ville, Hotman fut nommé à sa
place en 1556. Son talent d'exposer avec clarté
et son grand savoir attirèrent beaucoup d'étu-
diants autour de sa chaire. Plusieurs princes de
l'Allemagne ainsi qu'Elisabeth, reine d'Angle-
terre , l'engagèrent à venir professer dans leurs
universités. Mais il refusa leurs offres, afin de
rester plus près de la France, où il désirait avec
ardeur voir triompher la réforme. Après avoir
accompagné, en 1556, Calvin au synode de Franc-
fort, il devint en 1560 un des principaux instiga-
teurs de la conspiration d'Amboise. On hésitait
NOUV. BIOGR. GÉNÉR. — T. XXV.
encore à l'en accuser; mais aujourd'hui le doute
n'est plus possible, après la publication que
M .Dareste a faite d'une lettre de Sturm (Biblio-
thèque de V École des Chartes, année 1854), où
celui-ci fait connaître la conduite tenue à cette
occasion par Hotman. Ayant fait partie d'une
ambassade envoyée parla ville de Strasbourg au-
près de l'électeur palatin , Hotman parvint à se
faire passer auprès de ce dernier pour le confi-
dent des chefs du parti huguenot de France,
avec lesquels il n'avait eu' aucune relation jus-
qu'alors. L'électeur le nomma son conseiller et
l'envoya en mission auprès de Condé , qui, de
peur de se compromettre, ne reçut pas Hotman,
mais traita avec lui par internfédiaire. De retour
à Strasbourg, Hotman se mit à divulguer des par-
ticularités vraies et fausses sur la marche du
complot, dont il annonçait aussi le but réel,
qui était de ne pas laisser vivant un seul membre
de la famille des Guise. L'entreprise ayant
échoué, il accusa d'abord Rascalon, ensuite Coli-
gny et enfin Sturm, son bienfaiteur, d'avoir fait
connaître aux Guise la conjuration. C'est alors
que Sturm écrivit la lettre mentionnée, laquelle
nous apprend que le libelle publié alors contre
le cardinal de Lorraine sous le titre de : Epistre
envoyée au tygre de la France, émane bien
de la plume de Hotman , ainsi qu'on l'avait déjà
conjecturé. En septembre 1560 Hotman se ren-
dit à Nérac, auprès d'Antoine de Navarre, qui
l'accueillit avec fort peu de bienveillance, mais qui
le rappela bientôt après en France, pour lui con-
férer les fonctions de maître des requêtes dans
son conseil. Hotman fut ensuite envoyé par An-
tome en Allemagne pour engager les'princes pro-
testants à promettre aux huguenots le secours
de leurs armes en cas d'une guerre civile. De
retour en France, en 1562, il suivit d'abord
Condé à Orléans, puis il retourna en Allemagne
pour y justifier la prise d'armes des calvinistes.
Il prononça dans ce but un discours violent à la
diète de Francfort, à laquelle ilfit en même temps
connaître les fameuses lettres de Catherine de
Médicis, où elle implorait l'aide de Condé contre
les Guise. Après la paix il accompagna en 1563
Condé à la cour; il y fit la connaissance de
Montluc, évêque de Valence, qui lui confia une
chaire de droit à l'université de cette ville. Grâce
aux efforts de Hotman et de Bonnefoi^ cet éta-
blissement, alors en pleine décadence, se releva
bientôt; et les étudiants y affluèrent de nouveau,
surtout lorsque Hotman eut obtenu la suppression
de l'université de Grenoble. Au commencement
de l'année 1567 Hotman fut appelé à Bourges,
pour y occuper la chaire de droit devenue vacante
par le départ de Cujas. Cinq mois après son ar-
rivée dans cette ville, sa bibliothèque et ses meu-
bles furent pillés par le peuple, soulevé contre
lut, probablement à eause de quelques expres-
sions imprudentes qui hii étaient échappées sur
la religion catholique. Il s'enfuit à Paris , où le
chancelier L'Hôpitalle fit nommer historiographe
8
trr
HOTMAN
228
du roi. Pariant la seconde guerre civile il aida
de ses conseils lea chût* de son parti , qui l'en-
voyèrent, an I56S, comme commissaire à Blois,
dont ils s'étaient emparés. Après la rupture de
la paix de Longjumeau, il se réfugia avec sa
femme et ses enfants à Baneerre , et il assista au
premier siège de cette ville , pendant lequel il
eempoea sa Oensolatio e Sacri* Littêri». Bq
1670 il alla reprendre à Bourges ses fonctions
de professeur. Deux ans après, dès qu'il eut
connaissance de la blessure de Ooligay, il se ca«
cha dans les environs de Bourges,etpanrinttosuit9
à gagner Genève, où il devint en 1673 professant
de droit romain. La même année le landgrave de
Hesse obtint que les biens d'Hotman qui avalent
été confisqués en France lui fussent restitués,
à l'exception de sa bibliothèque, qui avait été une
seconde (lois pillée. En 1579 il se rendit à Paie,
sur les instances de ses enfants, qui craignaient
la prise de Genève par les armées du duc de
Savoie; l'année suivante il rot nommé conseiller
d'État par Henri IV, alors roi de Navarre, et
chargé de traiter avec les cantons suisses pour
l'envoi de troupes à la solde des huguenots. En
1584 il quitta de nouveau Bâle, où il avait été
appelé en 1591 à (aire partie du collège des ju»
risconsultes, et ii alla retrouver à Genève ses
anciens amis.
Dans ses moments de loisir il se voua à 1* rt*
cherche de la pierre philosophai, qui l'avait
déjà préoccupé autrefois. Il y dépensa tout le
reste de sa fortune, et se mit dès lors plu* que
jamais à trafiquer de ses épttres dédfcatûirea et
à solliciter des gratifications, ce que lui reprochent
avec raison les auteurs de La Franoe.prot€stawte.
Hôiman finit par tasser ses aneiens protecteur»,
les princes protestants de l'Allemagne, et ae
trouva bientôt sans ressources, il résolut alors de
retourner à Bâle. Peu de temps après son arri-
vée dans cette ville, il mourut, avant d'avoir pu
entièrement achever la révision de ses ouvrages,
qui l'occupait alors. Il fut enterré avec pompe
dans la cathédrale.
Gomme jurisconsulte, Hotman a )oué,dit M . fia-
reste, après Gujas et Dooeau, mais à coté de Bau-
douin et de Duaren, un grand rote dans la révolu-
tion scientifique qui s'opéra au seizième siècle
dans la jurisprudence. D'accord avec la non»
velle école, dont il rot un des principaux sou*
tiens, Hotman recommandait aux légistes l'étude
approfondie de l'histoire dea lettres et de la phi-
losophie, entièrement négligée par leabartholistea,
et il appuyait ce conseil par son propre exempte.
Mais le caractère particulier qui le distingue
des autres grands jurisconsultes de cette époque,
c'est qu'il fut surtout philologue et antiquaire»
« Ses travaux de critique, dit M. Dareste,
et ses recherchée sur les antiquités romaines
sont ses principaux titres à la reconnaissance des
savants. » Sa qualité d'érudit ne l'empêcha pas
de proposer à ses contemporains un nouveau
système de législation pratique et approprié à
leurs mœurs comme à leurs besoins. Loin de
s'engouer outre mesure du droit romain , il en
critiqua la plupart des dispositions, et insista
pour qui] fût remplacé par un code unique pour
toute la France, dans lequel seraient fondues les
diverses coutumes.
L'indépendance et l'originalité de sop esprit se
se retrouvent aussi dans son fameux ouvrage sur
le droit public français. « Quelque éloigné que soit
de la vérité historique le système du jurisconsulte
protestant, dit Augustin Thierry dans ses Consi-
dérations sur V Histoire de la France, on doit
lut reconnaître le mérite de n'avoir pas eu de
modèle et d'avoir été construit tout entier sur
des textes originaux, sans le secours d'aucun
ouvrage de seeonde raafn. En 1574 11 n'en exis-
tait pas encore de ce genre. » La Franco-Qallia %
daps laquelle Hotman fait preuve d'une éru-
dition saine et la plus forte qu'il rat possible
d'avoir alors sur le fond de l'histoire de France,
eut une influence Immense sur lea esprits.
« Cet ouvrage a été, dit M. Dareste, la pre»
mière tentative sérieuse faite par le parti protes-
tant peur fixer ses idées et déterminer nettement
oe quHl voulait, ce qu'il ferait , s'il armait au
pouvoir. Oe fut comme une nouvelle voie ou-
verte, dans laquelle on se précipita à Tenvi. »
Vers la fin du seizième siècle les principes poli-
tiques énoncés par Hotman (Virent, il est vrai,
abandonnés par les huguenots ; mais ils ont été
alors repris en grande partie par les ligueurs.
Kn somme, la Franco- Qallia a eu au sei-
zième siècle une importance presque aussi
grande que le Contrat Social au dix-huitième.
Ces deux écrits, malgré certains airs de con-
formité, poursuivaient cependant des buts entiè-
rement différents : le premier vantait la pré-
pondérance de l'aristocratie ; tandis que le second
préconisait le règne des masses.
« La latinité de Hotman est pleine de rapi-
dité, de clarté, et d'élégance, » dit avec raison
M. Sayous. Ces mêmes qualités se retrouvent dans
le style des écrits qu'il a composés en français. »
On ne s'étonnera done pas si M. Dareste pro-
clame Hotman un de nos prosateurs les plus re-
marquables du seizième siècle. La netteté de ses
vues, la vivacité de ses passions faisaient que chez
lui le tissu du discours était nerveux et serré, tan-
dis que les phrases dea autres écrivains ses con-
temporains sont généralement lourdes et traî-
nantes. D'un autre coté, Hotman est bien de son
siècle, en se servant continuellement des injures
les plus outrageantes dans ses ouvrages de po-
lémique, soit religieuse, soit politique, et soit
même scientifique. — On a de Hotman i DeGm-
dlbus Cognationis et Adfinttatis ; Paris, 154A;
— De Actionibus; Lyon, 1548, et Bâle, 1559,
in-8°; — V Apologie de Socrate, traduite en
français; 1549, in-8% — De Usuris et Fœ-
nore; Lyon, 1551, in-8*; — De Statu Primi-
tive Ecclesix ejusque Sacerdotiis, de Ponti-
fieis Romani Potestate atqut Amplitudine;
190
HOTMAN
280
Genève, 1563, in-8° ; réimprimé à Strasbourg,
en 1555» in-fol., avec le livre du cardinal Pôle :
Pro Ecclesiasticx Unitatis Defensione, ainsi
que dans le tome IV des Œuvres de Dumoulin :
cet ouvrage, qui porte pour nom d'auteur Fr. Vi-
Herius, est dirigé contre la réfutation du Com-
mentaire sur l'Édit des Petites Dates de
Dumoulin, publiée par Raymond Leroux; —
Commeniarii in XXV Ciceronis nobiliores
Orationes , eas maxime gua quastionem ali-
quam juris civilis insignem continent, una
cum Notis ad Asconium Pedianum ; une pre-
mière partie, comprenant un commentaire sur
treize discours, parut à Paris, 1554, in-fol.; le
tout fut publié à Baie, 1594, in-fol.; cet ouvrage
fut un premier et déjà excellent essai de l'emploi
du droit romain pour l'explication des plaidoyers
de Cicéron ; — Commentarius de Verbis Juris,
Antiquitatum Romanarum Elementis ampli"
ficatus;B*k 9 155» et 1563, in-fol.; Paris, 1558
et Lyon, 1569, in-fol.; — Epistre envoyée au
Tygre de la France, sans nom de lieu ni date,
in- 8°, imprimée a Strasbourg: il est maintenant
hors de doute qu'on doit attribuer à Hotman ce
pamphlet virulent dirigé contre le cardinal de
Lorraine un peu après la conspiration d'Am-
boise; le cardinal mit tout en œuvre pour en
découvrir l'auteur, « qui, s'il eût été appréhendé,
dit Brantôme, quand il eût eu cent mille vies 9
les eût toutes perdues ». Le libraire L'Hommet»
citez lequel on trouva quelques exemplaires de
V Epistre, fut condamné à mort et exécuté.
M. G. Brunet possède le seul exemplaire de ce
libelle qui soit parvenu jusqu'à nous ; — Juriscon-
sulte, sive de optimo génère juris interparer
tandi ; Baie, 1 559, in-8° i cet ouvrage se compose
de deux parties ; la première a été réimprimée
à Lyon, 1566 et 1569, in-16; la seconde a paru
de nouveau, avec beaucoup d'additions, à Lyon,
1564, in-4°; — Commentarius in IV Imt*
tutionum libros; Baie, 1560 et 1569, in-fol.;
Venise, 1569 et 1588 ; Lyon, 1565, 1567, et 1688,
in-foL; — PartiHenes Juris Civilis elemen-
tari»; Baie, 1560, in-8°; Genève, 1589, in-16,
avec adjonctions; — Commentarius in Epis-
tolam Ciceronis ad Quintumjratrem de pro»
vincia recte administranda; Lyon, 1564,
in-4°; Baie, 1591, in-8°; — Corpus institu-
tionum Juris inJustinianilib. IV, Ulpianil
et Cau II. concinnatum; Lyon, 1566» in-16;
— Modesta et moderata de Sacramento Eu*
charistix Sententia; Lyon, 1 566, in-8°; pubtiéde
nouveau, sons le titre de : De Sacramento Camss
Christian* modesta Disputatio; La Haye,
1635, in -8»; — UAnti-Tribonian, ou discours
sur Vestude des loix; Paris, 1567, 1603 et
1609, inr8°; traduit en latin, Hambourg, 1647,
înf-8°; Leipzig, 1704, hv8°, et 1718, in-4% à la
suite de VHistoria Juris Romani de Hoffmann:
ce livre fut écrit pour recommander les réformes
que le chancelier L'Hôpital avait le projet de
faire dans la législation civile de la France et
qui consistaient surtout à ramener à l'unité le»
coutumes de la France. « Pour faire comprendre
l'utilité d'une pareille réforme , dit M. Dareste ,
Hotman entreprend la critique du droit romain ,
qui alors était, avec le droit canonique, seul en-
seigné publiquement en France , à l'exclusion du
<■ droit françai8.Rien n'est plus vif, plus spirituel et,
malgré certaines exagérations , plus sensé que
cette attaque dirigée par un professeur de droit
romain contre la science qu'il enseigne. 11 montra
que sur une foule de pointa les dispositions de
ce droit ont cessé d'être en vigueur et n'ont
plus d'intérêt pratique. » — De Tribus' Quar-
to*, Fakidiana t Legiiimaria et Pegasiana;
Lyon, 1569, in-fol.j — Qussstionum illustrium
Liber; Genève, 1573, 1576, in-8°; très-
augmenté, ibid., 1578; Lyon, 1679 et 1585,
in-8°; Hanovre, 1620, in-12; — Commentatio
Tripartita ad Libros Feudorum; Lyon, 1573,
in-fol. ; Cologne, 1574, in-12 ; le premier* Hot-
man ramena ici la féodalité à son origine germa-
nique; avant lui on la mettait constamment en
rapport avec le droit romain ; — Franco-€tallia ,
seu traetatus isagogicus de rcgimine regum
Gallix et de jure successionis ; Genève, 1573,
in-8° et in-12 ; réimprimé avec des changements,
sous ce titre : IÀbellus statum veteris reipu-
blicx QallicaBy deinde a Francis occupâtes,
describens ; Cologne, 1574, in-8° : augmenté d'un
18 e livre , Cologne, 1576, in-8° ; augmenté de six
nouveaux chapitres, Francfort; 1686, h>*% et
1666, in-8°; Londres, 1721, in-8*, traduit en.
français par S. Goulart, sous le titre de Gaule
tronque; Cologne, 1574, in-8°; réimprimé dans
le tome H des Mémoires de ? Estai de France
sous Charles IX; traduit en anglais, Londres,
1711, in*8°; nous avons déjà mentionné les
qualités générales et l'importance de ce livre, dont
nous allons donner ici on aperçu succinct. La
Franco-Gallàa est le manifeste politique d'un
parti, déguisé sous la forme d'une thèse d'his-
toire. « 11 est aisé de se figurer, dit Augustin
Thierry, par quel abus de méthode fauteur,
imposant à l'histoire ses idées préconçues, ar-
rive à montrer que de tout temps en France la
souveraineté fut exercée par un grand conseil
national, maître d'élite et de déposer les rois,
de faire la paix et la guerre, de voter les lois ,
de nommer aux offices et de décider en dernier
ressort de toutes les affaires de l'État. En dépit
des différences d'époque, de mœurs, d'origine
et d'attributions , il rapproche et confond en*
semble sous un même nom, comme choses de
même nature, les états généraux des Valois,
les parlements des barons des premiers rois de
la troisième race, les assemblées politico-ecclé-
siastiques, les revues militaires et les plaids
de la seconde, et enfin les assemblées des
tribus germaniques, telles que Tacite les dé-
crit. Le point de départ de cette prétendue nar*
ration est l'hypothèse d'une hostilité constante
des indigènes de la Gaule contre le gouverne*
8.
231
HÙTMAN
232
ment romain: L'auteur suppose entre les Gaulois
et les peuples germaniques voisins du Rhin
une sorte de ligue perpétuelle pour la vengeance
ou le maintien de la liberté commune. Les ban-
des franques victorieuses et les Gaulois affran-
chis, formant au cinquième siècle une seule na-
tion, fondèrent le royaume de la Gaule franque,
dont le premier roi Hilerik , fils de Mérowig» fut
élu par le suffrage commun des deux peuples
réunis. » La monarchie continua à rester élec-
tive et non héréditaire, dit ensuite Hotman; le
peuple (ce qui, dans le langage de l'époque ne
désigne pas l'ensemble de la nation, mais les
états assemblés par ordre), garda le droit de
déposer les rois et de surveiller toutes les me-
sures d'intérêt général. Hetman s'efforce de cons-
tater ainsi chez nous l'existence de ce que nous
appelons le gouvernement représentatif, qui est,
selon lui, le meilleur des gouvernements. « Hot-
man, dans lequel on a voulu voir un républicain,
dit M. Baudrillart dans son ouvrage sur Bodin
et son Temps , ne parle de l'Angleterre qu'avec
admiration ; il partage son culte entre ce pays
et la prétendue démocratie royale de nos ancê-
tres. Mais on doit se demander si c'est bien l'é-
quilibre entre les trois pouvoirs (royal, aristo-
cratique et populaire), que poursuit le juriscon-
sulte pamphlétaire. Il en est un qu'il traite fort
durement , un autre qu'il semble favoriser d'une
particulière affection. Pour un publiciste consti-
tutionnel il parle de la royauté avec trop d'a-
mertume et d'emportement, et paraît porter à
l'aristocratie un intérêt bien exclusif. Il n'aime
pas ^autorité bourgeoise du parlement, qu'il ap-
pelle « usurpateur de la souveraineté des états et
de la puissance des grands comme des rois. » Au
fond , ce que veut Hotman , on n'en peut douter,
c'est le triomphe de l'aristocratie » ; — De Fu-
roribus Gallicis , korrenda et indigna ami-
ralli Castillioni nobilium atque illustrium
virorum cœde; Edimbourg, 1573, in-12; réim-
primé dans V Histoire des Troubles de Belgi-
que; La Haye, 1619, in-8°; traduit en français ;
Baie, 1573, in-12 : ce livre, publié sous le pseu-
donyme tfErnestus Varamundus , contient un
récit de la Saint-Barthélémy, suivi de pièces
justificatives; — Institutiones Dialecticx, ex
fontibusphilosophorum ; Genève, 1573 et 1593,
in-8° ; — De Statibus Veteris Ecclesix Gallias;
Cologne, 1574, in-8° ; — Nota Renovatm in Cœ-
saris Commentaria; Lyon, 1574, in-fol.; Franc-
fort, 1-606, in-fol., avec fig. , — G. Colinii Cas-
tellioniiy magni quondam Francise amiraHH,
Fi*a;l575 et 1579; Utrecht, 1644;— Ad Ti-
tulum codicis de Pactis et Transactionibus ;
Bâle et Genève, 1575, in-8°; — Matagonis de
Matagonibus decretorum baccalaurei Monx-
toriale adversus Italo-GaHiamsiveAnti-Fran-
co-Galliam A. Matharellialvernogeni ; 1575,
in-8° ; Paris, 1577, in-8° ; réimprimé avec l'ou-
vrage suivant, 1578, 1584 et 1593, in-8°; ré-
ponse satirique, en latin macaronique, à une
réfutation de la Franco-Gallia , entreprise par
Matharel dans le but surtout de défendre les
droits des reines mères à la régence, droits en-
tièrement contestés par Hotman. Papire Masson
ayant répliqué à ce dernier pour soutenir les
idées de Matharel, Hotman écrivit une nouvelle
diatribe encore plus violente et plus injurieuse
que la première, sous le litre de : Strigilis Fa-
pirii Massoniy sive remediale charitativum
contra rabiosam frenesim Pap. Massoni , je-
suitœ excucullati , per Matagonidem de Ma-
tagonibus , baccalaureum formatum in jure
canonico, et inmedicina si voluisset; 1-575,
1576 et 1578, in-8° ; — Ad titulum Codicis de
Judiciis; Bâle, 1576, in-8 6 ; — Ad Titulum Co-
dicis de Vsufructu; Bâle, 1576, in-8° ; — Ad
Titulum Codicis de Pignorïbus et Hypothecis ;
Bâle, 1576, in-8°; — Consiliorum Volumen;
Genève, 1578 et 1586, in-fol.; — Nullitatis
Protestationes adversus Formulam Concor-
dix Orthodoxarum Ecclesiarum nuper ins-
titutam a guibusdam doctoribus ubiqui-
tariis; 1579, in-8° ; pamphlet théologique, plein
d'invectives contre les luthériens, rédigé en deux
jours et demi , et publié sous le pseudonyme de
Joh. Palmerius; André Pouhen ayant répondu
à Hotman, celui-ci répliqna par un nouveau
pamphlet intitulé : In virulentam planeque
sophisticam A. Pouhenii Criminationem ad
versus Palmerii Protestationes ; Genève, 1580,
in-12 ; sous le pseudonyme d'Aspastes Salas-
sus; — Disputatio de Aureo Justinianeo;
Bâle, 1584, in-8°; Genève, 1585, in-8°, avec
l'ouvrage précédent; — Antiquitatum Roma-
narum Libri V; Bâle, 1584 ; Paris et Genève,
1585, in-8°: cet excellent ouvrage contient des
recherches étendues, la plupart confirmées par
la science moderne , sur la constitution romaine ;
—De Castis Incestisve Nuptiis 9 et de Spuriis
et Légitimât ione; Genève, 1585, in-8°; Lyon,
1593, et Francfort, 1619, in-8? ; — Brutum Fui-
men papse Sixti V adversus Henricumregem
Navarree; 1585, in-8°; Leyde, 1585, 1602 et
1603, in-S°; inséré dans le tome ni de De
Monarchia Romani Imperiiàe Goldast; pam-
phlet injurieux contre la papauté, traduit en
français, 1585 et 1587, in-8°; — De Controver-
sia Patrui et Nepotis in Successione regni ;
Francfort, 1585, in-8°; Genève, 1586, in-fol. :
écrit dirigé contre les prétentions à la couronne
du cardinal de Bourbon , lesquelles avaient trouvé
un défenseur dans Antoine Hotman , le frère de
François ; — Observationumet Emendationum
Libri XIII; Genève, 1586 et 1589, in-fol.; plu-
sieurs parties de ce recueil avaient déjà paru sé-
parément; on y trouve les Amicabiles Respon-
siones ad Cujadum, réimprimées à Hanau,
1601, in-8°, et 1611, in-12, critique des plus
acerbes de quelques opinions de Cojas ; — De
JureSuccessxonis Regise in regno Franccrum
leges aliquot ex probatis autoribus collecte;
1588, in-8° : cet écrit, dans lequel Hotman dé-
233
HOTMAN
234
fcud les droits de Henri IV à la couronne de
France , n'est pas en contradiction aussi directe
avec la Franco Galiia que Labitte Ta prétendu
dans ses Prédicateurs de la Ligue. Mais Hot-
man s'y montre cependant tout autrement sou-
cieux des droits de la royauté qu'auparavant:
en la dépouillant du caractère électif, il considère
la royauté comme entièrement héréditaire selon
une loi de succession immuable, qu'il place même
au-dessus des états généraux ; —Ad Tractatum
M: Zampini de Successione Prorogative
primi principis Francise Responsio : cet ou-
vrage, écrit aussi pour soutenir les droits de
Henri IV , parut en 1588, sous l'anonyme, sans
lieu ni date ; il y a des raisons plausibles pour
l'attribuer à Hotman ; —Disputatio de Dotions ;
Cologne, 1591, in-8°; dans un recueil sur cette
matière ; — Scholx in duos titulos Digestorum
de Testamentis et de Uberis Hseredes insti-
tuendisvel exhasredandis ; Genève, 1 593, in-8°;
Francfort, 1665, in-4°;— De Donationibus VIII
Libri Codicis; Genève, 1593, in-8° ; — Consola-
tio e Sacris IÀtteris; Lyon, 1593, in-8° ; Hano-
vre, 1613, in-12; dans ce livre, écrit pendant le
siège de Sancerre, l'auteur réunit « tous les traits
choisis par lui dans l'Ancien Testament qui
montraient la main et le secours de Dieu inter-
venant pour consoler son peuple d'élection, pour
le relever et le venger de ses ennemis. Le sen-
timent de vengeance, était violent dans l'âme de
Hotman ; et on le voit toujours y céder sans re-
mords, parce que de bonne foi il croit ne voir
dans ses ennemis que les ennemis de Dieu. »
C'est ainsi que s'exprime M. Sayous au sujet de
la Consolaiio; — Scholx in duos titulos Di-
gestorum dePactis et Transactionibus ; Ge-
nève, 1594, in-8<> ; — De Eo quod interest et
de Mora; Hanovre, 1599, in-8°; — la presque
totalité des ouvrages de Hotman fut réunie dans
ses Opéra, 3 vol. in-fol., Genève, 1599-1601,
qui contiennent en outre quelques écrits restés
jusque alors inédits, tels que : De Sponsalibus;
De RUu Nuptiarum et Jure Matrimonio-
rum , etc. ; — une partie des lettres de Hotman
a été publiée dans le recueil suivant : Francisci
et Joannis Hotomannorum patris et filii et
clarorum virorum ad eos Bpistote;Amtiterdaxu,
1700, in-4° ; La Haye, 1730, in-4° , ainsi que dans
\esCelebrium Virorum Bpistolx de Hummel,
et dans les Bpistolx Reformatoribus scriptm
de Fuesli. Mais le plus grand nombre de ces let-
tres est encore inédit , et on en trouve dans les
bibliothèques de Strasbourg, de Baie, de Zurich,
de Genève, de Gotha, au British-Muséum et
surtout à la bibliothèque impériale de Paris (an-
cien fonds latin, n° 8585, 8586 , collect. Dupuy,
n° 268; suppl. latin, n° 1297); douze de ces
lettres ont été publiées par M. Dareste dans la
Revue historique du Droit Français (année
1855). Ernest Grégoire.
Herelet, Pita Hotomanni (en tête des Opéra de Hot-
«a* et dan» Ulbfcer, fit* JwritconsuUorum). ~ Scé-
▼oie de Sainte-Marthe, Blogia, t IV. - Bayle, Diction.
— Nlcéron, Mémoires» t. XI. — nareste, Estai sur Fr.
Hotman; Paris, 1860. — Haag, La France Protestante.
— Sayous, Études littéraires sur les Écrivains français
de la Réformation, t. II.
hotman (Antoine), jurisconsulte français ,
frère du précédent , né vers 1525, mort en 1596.
Après avoir étudié la jurisprudence , il entra
au barreau du parlement de Paris. Resté
catholique, il soutint par plusieurs écrits les
droits à la couronne du cardinal de Bourbon.
IX fut nommé avocat général près du parle-
ment de Paris , après la journée des Barricades.
En 1593 il y conclut, au péril de sa vie , en fa-
veur de la loi salique, lors du fameux arrêt qui
détruisit les espérances de Philippe H. Après
l'entrée de Henri IV dans Paris, Hotman reprit
la profession d'avocat. Dans son Dialogue des
Avocats, Loisel le représente comme un homme
aussi judicieux que savant On a d'A. Hotman :
Traité de la Dissolution du Mariage par
l'impuissance et la froideur de V homme ou
de la femme; Paris, 1581, 1595, 1610, in-8°;
dans cet ouvrage, écrit avec une grande liberté
d'expression , Hotman se déclare contre le con-
grès; — Les Droits de l'Oncle contre le Neveu ,
en faveur du cardinal de Bourbon; 1585,
in-8°; — Pogonia, sive dialogus de barba;
Anvers, 1586; Rostock, 1624, in-4°; inséré dans
VAmphitheatrum de Dornavius et dans le
tome I er des Opéra de François Hotman, auquel
cette facétie a été souvent attribuée; — Avertis-
sement sur les lettres octroyées a M. le car-
dinal de Bourbon , oit Von réfute les préten»
lions du roi de Navarre; 1588, in-8°; —
Traité sur la Déclaration où Von prétend
prouver que M. le cardinal de Bourbon est
appelé à la succession du royaume; Paris,
1588, in-8° ; — Traité de la Loi Salique; 1593,
in-4°; inséré dans les Opuscules françoises
des Hotmans ; — Traité des Droits et Libertés
de V Église gallicane; souvent réimprimé,
entre autres à Paris, 1639. £. G.
Ersch et Gruber, EncyJdopxdie.
hotman (Jean), diplomate et écrivain fran-
çais, fils de François Hotman, né à Lausanne en
1552, mort le 26 janvier 1636. Après avoir étudié
la jurisprudence, il passa en Angleterre, où il
resta pendant cinq ans au service du comte de
JLeicester. Lorsqu'il fut de retour en France, le
roi de Navarre le nomma , en 1585, maître des
requêtes de son hôtel , et l'envoya ensuite en
Allemagne pour y négocier avec les princes pro-
testants, mission dont Hotman fut aussi chargé
sous Louis X1I1, et dont il s'acquitta à la pleine
satisfaction de ces souverains. Sans se convertir,
lors de l'abjuration de Henri IV, Hotman tenta
de nombreux efforts pour amener la réunion des
catholiques et des protestants. On a de lui : An-
tichoppinus, imo potius epistola congratula-
toriaM. NicodemiTurlupini de Turlupinis
ad Bercatum Choppinum de Choppinis,
S. Vnionis Bispanitano-Gallicx advocatum
235
HOTMAN ~ HOTT1JNGER
236
incomparabilissimum; Chartres , 1590, in-8*;
réimprimé avec le Monitoriale et le Strlgilis
de François Hotmail et YEpitre de Passavant
de Bèze; Villiorban, 1593, in-8°; — De la
Charge et Dignité de V Ambassadeur ; Paris,
1 604, in-8° ; troisième édition augmentée , Franc*
fort, 1613, in- 12 ; réimprimé dans les Opuscules
françaises des Hotmans; — Anti-Colazon f
ouvrage attribué à Hotmail par Bayle , dans le-
quel l'auteur se défend d'avoir été, dans le traité
précité , le plagiaire de Ch. Pascal ; — Opus-
cules françaises des Hotmans; Paris, 1616,
in-8° : ce recueil contient, outre VAnti-Tribonian
de Fr. Hotman et quelques ouvrages de son
frère Antoine, les écrits suivants de Jean, son
fils : La Version du Don royal du roi de la
Grande-Bretagne (Jacques I er ) j— De la Pro-
vidence ;—Du Progrès de VAme raisonnable ;
— Le Philosophe, ou l'advis sur les diverses
occupations de V homme; — La Version de
la préface de De Thou sur son Histoire; —
Deux Advis par Souhait pour la Paix de VÉ-
glise et du Royaume. — Quelques lettres de
Hotman se trouvent dans le recueil qui contient
celles de son père; il y en a une trentaine d'i-
nédites ao British-Muséum et d'autres à la Bi-
bliothèque impériale de Paris (Ane. fonds latin,
û° 8585 et 8586). E. G.
Haag, La France Protestante.
*hotot (Guillaume de ), moine français,
né dans la seconde moitié du quatorzième siècle,
mort évéque de Sentis, le 6 mai 1434. Vers
Tannée 1411, nous le voyons abbé de Gormery,
en Tonraine. Il ocoupait cette abbaye depuis
quelques mois, lorsque arrivèrent des bandes
anglaises , qui le rançonnèrent d'abord , et s'é-
tablirent ensuite dans son logis. Chassé de Cor-
mery, Guillaume de Hotot assiste, en 1416, au
concile de Constance. En 1417, le pape le nomme
abbé de Corbie. Cependant ce fut une nomination
presque vaine. En effet , un compétiteur élu par
les moines , soutenu par le roi , lui contesta vi-
vement la possession de cette abbaye. Il repa-
raît à Cormery en 1423» En 1433, au mois de
février, le pape le choisit évoque de Sentis. Ho-
tot conserve néanmoins encommende le monas-
tère de Cormery, et* réclame en outre devant
les tribunaux le prix auquel il a cédé , par voie
de concordat, ses droits équivoques à la pos-
session de Corbie.
Guillaume de Hotot prononça, dans le concile
de Constance, un discours sur les neuf propo-
sitions de Jean Petit; Oratio de novem Arti-
culas Joannis Parvi, que nous a conservé le
numéro 1485 des manuscrits du Roi, t. H, p. 236.
Mais c'est à tort que le catalogue de ces manus-
crits lui attribue, sous le num. 5264, un Ca-
lendaHum commencé à Rome en 1372, et fini
dans la même ville en 1382. Comme le déclare
la préface même de ce Calendarium , c'est L'ou-
vrage d'un certain Guillaume , né dans le dio-
cèse de Cahors , qui ne fut pas abbé de Saint-
Paul de Cormery, mais de Saint-Paul à Rome,
Abbas B. Pauli aima urbis. B. H.
Gallia Christiana, t. X, col. lis», 1454, et ton. XIV,
col. 167, 188.
■ottm&br, ancienne famille suisse, dans
laquelle on compte plusieurs générations d'éru-
dits et d'écrivains, dont voici les principaux.
BOTTINSER ( Jean-Henri ), orientaliste et
théologien réformé, né a Zurich, le 10 mars 1620,
et mort dans les environs de cette ville, le 5 juin
1667. Porté par ses goûts à l'étude des langues,
il se perfectionna à Groningue dans la connais-
sance de l'hébreu sons H. Alting, et dans celle
de l'arabe sous Matth. Pasov. En 1639 on lui
proposa d'être précepteur des enfants de Jacq.
Golius; il accepta avec empressement cette po-
sition, qui lui permit de vivre dans l'intimité du
plus savant arabisant de cette époque. Golius
lui donna d'utiles conseils pour ses études et
lui ouvrit sa riche bibliothèque. Rappelé à Zu-
rich au moment où II venait de trouver l'occa-
sion de faire un voyage en Orient, Hottinger re-
tourna dans sa patrie pour occuper la chaire
d'histoire ecclésiastique, à laquelle il ajonta, en
1643, celle des langues orientales. En 1655, à la
demande de l'électeur palatin , le sénat de Zu-
rich lui accorda un congé pour aller enseigner la
théologie et les langues orientales à l'université
d'Heidelberg. Hottinger resta à Heidelberg jns-
qu'en 1661. Il se rendit alors aux vœux de sa
ville natale, qui réclamait ses services. En 1 667
les états de Hollande le nommèrent profes-
seur à Leyde. II se préparait à aller s'établir dans
cette ville quand il se noya dans le Limmat,
avec deux de ses enfants et un de s«s amis, en
se rendant à une maison de campagne qoll
avait dans les environs de Zurich.
Hottinger a une place distinguée parmi -les
philologues qui ao dix-septième siècle ont tra-
vaillé à répandre la connaissance des langues
sémitiques, connaissance qui a rendu de si
grands services à la théologie biblique. On a
été plus sévère que juste en lui reprochant de
n'avoir pas assez mûri ses ouvrages et de les
avoir composés avec précipitation. On petit l'ac-
cuser avec plus de raison de manquer de mé-
thode; mais ce défaut lui est commun avec tons
les écrivains de son temps. Un des premiers il fit
connaître un grand nombre d'écrivains syria-
ques et arabes , non-seulement par des notices
biographiques et bibliographiques, mais encore
par des extraits de leurs ouvrages. Enfin, on ne
peut oublier qu'il contribua aux progrès des
études orientales, en établissant à ses frais
une imprimerie arabe à Heidelberg, pendant
qu'il était professeur dans cette ville.
Ses principaux ouvrages sont : Exercita-
tiones Anti-Morinianstde Pentateucho Sama-
ritano; Zurich, 1644, in-4°. Cet écrit a pour bat
de prouver que la recension hébraïque du Pen-
tateuque est préférable à la recension samari-
taine, contre le P. Morin, qui avait soutenu Yo-
287
HOTTINGER
288
pinioa contraire dan» ses Evmreitatione* in
utrumque Samaritanorum Pentattuchum. U
y a autant d'exagération dan* le sentiment d'Hot-
tiuger que dans ©«lui de boa adversaire ; — The-
sauna Philologieus^ te* Clavis Scriptural Zu-
rich, 1649, io-8 1 deux fois réimprimé : ©'est une
espèce d'introduction il l'étude de l'Ancien et du
Nouveau Testament) -»• fiistoria Orientant,
qum ex variée orientalium monutnentis col*
leota agitt Zurioh, 1661, in-4°j 2 e édit. augm.,
Zurtah, 1660, in-4° : ouvrage remarquable pour
l'époque où il fat fiait, mais dépassé par les tra-
vaux, plus profond* et plus solides, des orienta-
listes postérieurs ) -*- Historié EeeUsiasticse
Met» Testament* Enneas; Zurich, 1061-166?,
9 vol* pet* in»* ; réimprimée a Hanau, 1666*1667.
Cette histoire ecclésiastique, qui «'étend du com-
mencement de l'ère chrétienne au seizième
siècle, renferme des recherches savantes; mais
ette cet écrite sans méthode; — Grammatica
ChaUtxo*&tfriae0i Ubri Ji, cum triptioe ao-
pendiee chal4ea t syrm et rabbinied; Zurich,
1652, iu*8°; — Émeçma Orientale sordibus
bitrbarisaU eontemptui prmértim iintfua-
rum orientalium oppositumt Heidelberg, 1668,
in-4°. Recueil des huit dissertations sur l'u*
Uiité et l'usage des langues sémitiques dans
tes éludes théologiquee : on retrouve dans ia
plupart d'entre eUee k dessein bien marqué 1
de mettre en relief les rapports mutuels des dia-
lectes sémitiques -, — Promptuarium, site bi-
bliotheea orienialis exhibera catatogum iive
centurias aliquot tam auctorum quam ti-
brorum hebraicwum, iyriacorum, arabi-
contm, œyyptéacorum ; Heidelberg, 1658, in-4°;
en outre des noms des écrivains et des titres
de plusieurs de leurs ouvrages , on trouve dans
cette bibliothèque des extraits de ces ouvrages .
propres à donner une idée de leur contenu. A
une époque où il n'y avait que trés-peu d'écrits
arabes et syriaques imprimés et où les copies ma-
nuscrites étaient rares et chères, ce recueil dut être
d'une grande utilité; — Grammatica Quatuor
Linguarurh, Hebraiciï, Chaldeœ, Syriacœ et
Arabie» , Harmonica ut ad linguam hebrai-
cam, tanquam matrem exterarum, accommo-
dentur prœcepta-cui accedit Technologia Lin-
gux Arabica historico-theotogica; Heidel-
berg, 1659, in-4°; ouvrage remarquable^ non-seu-
lement par sa concision, mais encore par l'exac-
titude avec laquelle sont indiqués les caractères
essentiels de chacune de ces quatre langues : on
cite surtout le chapitre intitulé : De Vsu hujus
Grammatie» harmonicas in analysi contextuè
sacrij-*- Etymologicum Orientale, sive texi-
con harmonicum heptaglotton ; Francfort.,
1661, in-4°. Les sept langues sont l'hébreu, le
chatdéen, le syriaque, l'arabe, le samaritain,
l'éthiopien et le rabbinique, quoique ne compre-
nant que tes racines. Cet ouvrage, complément
de la Grammatica Harmonica, a été très-utile
à l'étude comparée des langues sémitiques. Es-
timé pendant longtemps, il a été depuis remplacé
avec avantage par le Lexicon Heptaglotton dé
Castelli; — Cippi Hebraici, sive ffebrœorum
tam veterunv quam recentiorum monumenta;
Heidelberg, 1669 , in- 8° ; 2 e édit., augm. ,ibid.,
1662, in-8° ; '—Enneas Dissertationumphilol*-
theolog,; Zurich, 1662, in-4°. Michel Nicolas.
Ji*Hi Heidegger, ffittôria Vits et Obitus J.-H. Uot-
Ungeri ,• fturich, 1SB7, ln-ll. - Bayle , Dictiotmaire histo-
rique. — Nicèron, Mémoires, tofn. Vlll. — Leonh, Mëls-
téF, Èêrûkmié Éurbher, tort». 11; *- Mejer, GêtthieMè
der Sc*rtf*r*h> iorai 1IM
ItOtTlMBft {Jeari-Jâcqides ), fils du pré-
cédent, historien et théologien , dé à Zurich, en
1692, et mort dallé Dette ville, le 1» décembre
1735. Il fut f>rtrfesséur de théologie dafli sa ps>
tiltf. De ses nombreux écrit» il faut citer t
Sfotm Pûlmteinus inftlix CôticilH Tridën-
tm mdéximtm, i«go, in-4* ; — %<x Èxer-
ciMtonum Bistotico-Thêoiogicanm de Pa*
nimtia prmnt)*, née nm ntmnnm socle-
sise; Zurich, 1706, in-4 ; — BëtietMhe Kir-
chèngmhtohte ( Histoire Eëcléslàéfkfiie dé la
Stdtfsé},' fettricty 1)08-1729, 4 toi. u*a% ouvrage
encetfe wmèi-*tHOmèë mt0rie+>ThMogioa
qua prxdestinationem et Godêëchdlci pieu-
dohmmi advèrëdftortêm yfatiattommmta
essê êernêhiir'atUti Z*tr\&i ili^ m4*) —
PèhtM DUééTiattohum BtoUoo-Theohgiaa-
r%7»» îtètW, 17*3, in*l*j -»*Fata Dottrinm
de PméèëtiMtioM et Gtatia De* sahâairi,
sëeUn&a et d&veïsâ, indê a bèati Aposto*
lâfUni ëœâêSiti ad hac %isque tempord in dn-
naiê§ digma f Zurich, 1787* nV4 a . M, if<
^àtcfcldi, Éiôiiùth. theotj. iéleàttt, fort. I, If éi ift,
HOTTiNtiÊR ( î)aM ) , rlWmistïiaté, pdH-Ûte
de Jean-Henri Hottinger ( n° 1 ), né à Zurich, et
mort dads cette ville, en 1736. Une chaire d'his-
toire ayant été créée à Zurich, il fut le premier
h la remplir. Il s'occupa principalement des mé-
dailles et des anciennes monnaies de son pays.
On a de lui : Deftummis Bracteatis Tigutirtts;
Zurich, 1702, in-4 6 .
hottinger ( Jeàil - tienr i ) y tMrfogien,
frère du précédent, né à Zurich, le 5 décembre
1681, et mort à Heidelberg le 7 avril 1750. Àprè*
avoir étudié la théologie dan? sa ville natale, à
Genève et à Amsterdam, il fut, en 1704, riofnmé
professeur de philosophie à Marboûrg. L'année
suivante il fut chargé dé renseignement des an-
tiquités hébraïques, et eh 17 (0 de celui de la théo-
logie. A des opinions calvinistes rigides il ajouta
la plupart des principes de Cocceius , et il exposa la
doctrine formée de ce mélange, dans on manuel
de dogmatique intitulé : Typus Doctrine Chrïs-
tianae; tfrancfort-sur-Mein, 1714, hi-Ô*. Cet ou-
vrage souleva des tempêtes : otiacctrsaJf.*H. Hot-
tinger de corrompre /a jeunesse par des prfftcTftes
mystiques, et en 1717 îl fut forcé de donner sa
démission. Il Se retira alors à Frankenthal, où il
devint pasteur de l'Église réformée. En 1721 il fut
239
HOTTTNGER — HOUÀRD
240
appelé à une chaire de théologie à l'université
dUeidelberg. II l'occupa jusqu'à la fin de ses
jours. Outre l'ouvrage déjà indiqué, il publia
quelques autres écrits, parmi lesquels les deux
suivants méritent d'être remarqués : Disqui-
sitio de Revelationibus extraordinariis in
génère et de quibusdam kodiernis vulgo dic-
tis inspiratis in specie; 1717, in-8°. Il s'agit
dans ce livre des prophètes des Cévennes, qui,
après avoir (ait du bruit en Angleterre, com-
mençaient d'attirer l'attention en Allemagne; —
Typas Pastoris Evangelxci; Baie, 1741, in- 8°.
hottinger (J*an-/7enri), cousin germain
des deux précédents et comme eux petit-fils de
Jean-Henri Hottinger ( n° 1 ), né à Zurich, en
1680, et mort dans cette ville, en 1756. U était,
médecin ; U se livra surtout à l'étude des sciences
naturelles. On a de lui . une dissertation sur les
cristaux , une description des glaciers et quelques
opuscules insérés dans les Miscellan. Acajde-
mix JSaturst Curiosorum.
HOTTUiesi( Jean- Conrad), théologien, de
la même familleVrae les précédents, auteur d'un .
traité De Decimis Judxorum Exercitatio,
Leyde, 1713, in-4°.
bottinger ( Jean- Jacques) , philologue,
littérateur et théologien, petit-fils du théolo-,
gien aux mêmes prénoms , né à Zurich, en 1750,
et mort dans cette ville, le 4 février 1819. II.
professa dans sa ville natale les littératures
grecque et latine depuis 1789, et le grec et la
philosophie à partir de 1796. Il prit une part
considérable au Nouveau Musée Attique ( Neues
AUisckes Musœum), Zurich et Leipzig, 1805 à
1809, que publiait Wieland. Il avait auparavant
fait paraître une revue de théologie, de phi-
losophie et de littérature, sous le titre de Biblio-
thek der neuesten theologischen , phiioso-
phischen und schœnen Literatur; Zurich,
1784-1786, 3 vol. in-8°. On lui doit en outre un
assez grand nombre d'ouvrages qui prouvent
ses connaissances variées et étendues; voici les
titres des principaux : Diatribe philos, theolog.
de Miraculis , cui adjectus est Excursus Phi-
losophicus ad Doctrinam Bon net ; Zurich, 1 770,
in-go. __ Versuch einer Vergleichung der
deutschen Dichter mit den Griechen und
Rœmern (Essai d'une Comparaison des Poètes
Allemands avec les Grecs et les Romains);
Mannheim, 1789, in-8°; — Veber Bodmer (De
Bodmer); Zurieh, 1785, in-8°; — Veber SaL
Gessner (De Sal. Gessner); Zurich, 1796,
in-8°;— Opuscula Oratorio; Zurich 1816,
in-8° ; — Opuscula Philologica , critica atque
hermeneutica ;Lepzig, 1817, in-8°.
hottinger ( Jean- Jacques ) , neveu du
précédent, né à Zurich, en 1783. On a de lui
quelques écrits, parmi lesquels on cite surtout
Huld. Zwingli und seine Zeit, dargesteUt
fur das Volk ( Histoire d'Huld. Zwingle et de
son Temps, écrite pour le peuple) ; Zurich, 1841,
in-8°. Il a publié, avec M. H.-H. Vœgeli, Y His-
toire de la Réformation deBullinger, à Fraoen-
feld; 1838,3 vol. in-8°.
Erttb et Gruber, Allgem. Bncyttopmdie.
hotze ( David tan ) , général autrichien
d'origine suisse, né à Richtenswgl , près de Zu-
rich , vers 1740, tué à la bataille de Zurich, le
25 septembre 1799. Fils d'un paysan qui exer-
çait la médecine , il fréquenta le gymnase de
Zurich , embrassa la carrière militaire, et entra
au service du Wurtemberg, où il devint capi-
taine de cavalerie. En 1771 il passa an service
de la Rnssie , et se distingua dans la guerre contre
les Turcs. En 1773, le grand-duc Paul le nomma
adjudant major au régiment de ses gardes. Ce-
pendant Hotze quitta la Russie et vint en Au-
triche, où l'empereur Joseph II le créacolonel. Il
fit encore la guerre contre la Turquie. Joseph II lui
conféra le commandement de Jassy, etle chargea
de l'instruction militaire de son neveu François.
A son avènement an trône , celui-ci l'éleva au
grade de général major. En 1793, Hotze servit
sous Wurmser contre les Français, et se distingua
à la pri^e des lignes de Weissembourg. En 1795
il couvrit la retraite du comte de Wartensleben,
et rut nommé feld-maréchal lieutenant. Deux
ans après il commandait le centre de l'armée au-
trichieune au combat de Noresheim , puis il
s'empara de Kitzingen, et marcha sur Wurtz-
bourg, où, sous les ordres de l'archiduc Charles,
il remporta de nouveaux avantages. Les Suisses
l'appelèrent au commandement en chef de leurs
troupes; mais en arrivant à Zurich il apprit
que Berne était au pouvoir de l'ennemi , et il
retourna à Vienne. En 1799 il occupa les Gri-
sons , et rejoignit l'armée de l'archiduc Charles,
qui s'empara de Zurich. Opposé à Massena sur
la frontière, dans la campagne suivante , il rem-
porta quelques succès, et finit par reprendre Zu-
rich ; mais il essaya vainement de soulever ses
compatriotes contre les Français. Bientôt l'oc-
cupation de la Suisse fut abandonnée aux Russes.
Hotze y resta avec 25,000 hommes pour attendre
l'arrivée de Souvarof, pendant que l'archiduc
Charles se retirait sur le Rhin. Une nouvelle ba-
taille ayant eu lieu devant Zurich, les 25 et 26
septembre 1799, Hotze y périt. J. V.
J. C. Faesl , Kurxe Lebensbeschreibung des K. K. ge-
ner al- feldmarschall- lieutenant $ D. Hotze; Zurich , 17W
et 1800, in-*®.
houard (David), jurisconsulte français, né
à Dieppe, le 26 février 1725, mort à Abbevilie,
le 15 décembre 1802. Il étudia le droit, fut reçu
en 1747 avocat au parlement de Normandie,
exerça sa profession à Dieppe, et devint conseil-
ler échevin de cette ville. Il fit une étude appro-
fondie des origines du droit normand. Nommé
d'abord correspondant, puis, en 1785, membre
associé de l'Académie des Inscriptions et Belles-
lettres , il vint habiter Paris, où il fut tout à la
fois avocat au Parlement et censeur royal. I! se
retira en 1789 dans sa ville natale, qu'il quitta
plus tard pour se fixer à Abbevilie. On a de lui :
241
HOUARD ~ HOUBIGANT
242
Anciennes Lois des François conservées dans
les coutumes angloises, recueillies par lAUle-
ton, avec des Observations historiques et
critiques, etc.; Rouen, 1766, 2 vol. in-4° ; nouv.
édit., Rouen et Paris, 1779, 2 vol. in-4°; —
Traités sur Us Coutumes Anglo-Normandes,
publiées en Angleterre, depuis le onzième
jusqu'au quatorzième siècle, avec des re-
marques sur les principaux points de V his-
toire et de la Jurisprudence française anté-
rieures aux Etablissements de saint Louis;
Rouen et Paris, 1776, 4 vol. in-4°; le premier
volume contient des extraits du Domesday-Book,
rôle des propriétés foncières de l'Angleterre,
dressé de 1080 à 1086 par Tordre de Guillaume
le Conquérant; — Dictionnaire analytique,
historique , étymologique, critique et inter-
prétatif de la Coutume de Normandie ; Rouen,
1780-1782, 4 vol. in-4° : on trouve dans le Sup-
plément, placé à la fin du dernier volume, Y An-
cien Coutumier en vers , production singulière
du treizième siècle, dont l'auteur, selon Houard,
se nommait Richard Dourbault. Mercier, abbé
de Saint-Léger, a combattu cette opinion dans
une Lettre à M. Dupuy, sur Fauteur de la
Coutume de Normandie en vers , insérée au
Journal des Savants du mois d'août 1785.
Houard est auteur d'un Mémoire sur les Anti-
quités galloises, imprimé dans le tome I ,r des
Mémoires de V Académie des Inscriptions.
E. Régna rd.
Note sur la Fie et les Ouvrage» de M. Houard; dans
tes Mém. de V Académie det Inscriptions, tom. I, p. m.
— Guilbert , Mémoires biographiques et- littéraires det
Grands Hommes du Départementde la Seine- Inférieure.
houbigant (Charles- François), célèbre
commentateur biblique, né à Paris, en 1686, et
mort dans la même ville, le 31 octobre 1783.
Entré en 1704 dans la Congrégation de l'Oratoire,
il enseigna successivement les belles-lettres à
Juilly, la rhétorique à Marseille et la philosophie
à Soissons. H était supérieur du collège de Ven-
dôme quand il fut appelé à Paris, en 1722, pour^
faire les conférences de Saint-Magloire, confé-
rences qui étaient publiques et qui portaient sur
les points les plus importants de l'antiquité et de
la discipline ecclésiastiques. L'excès de travail
auquel il se livra pour se préparer convenable-
ment à ces exercices lui causa une maladie dan-
gereuse , à la suite de laquelle il resta frappé
d'une surdité complète. Condamné par cette in-
firmité à une vie retirée , il se voua tout entier
à l'étude, et principalement à la culture des lan-
gues orientales. Vers la fin de sa longue vie, il
perdit ses facultés intellectuelles à la suite d'une
chute. Le P. Houbigant n'était pas moins distin-
gué par les qualités du cœur que par celles de
l'esprit. On loue surtout sa bienveillance et sa
douceur, qui ne s'altérèrent jamais dans l'isole-
ment auquel le força son infirmité. Douze ans
avant sa mort , il fonda dans le village d'Avilly,
auprès duquel il avait une maison de campagne,
une école de filles à laquelle il légua une rente
annuelle de 175 livres. Une de ses plus agréables
distractions était de composer et d'imprimer lui-
même ses propres ouvrages ; il avait dans ce but
établi une petite imprimerie dans sa maison de
campagne, où il avait l'habitude d'aller passer les
vacances. On a de lui : Racines delà Langue
Hébraïque; Paris, 1732, in-8°; cet ouvrage est
en vers, à l'imitation des racines grecques de
Port-Royal ; dans la préface, il défend le système
de Masclef, qu'il avait adopté,, et il s'efforce de
montrer, non pas seulement là nouveauté des
points- voyelles, mais encore leur inutilité et
même leurs inconvénients pour l'étude de l'hé-
breu; — Prolegomena in Scripturam Sa-
crant; Paris, 1746, in-4°. Dans cet ouvrage, où
il suit les traces de L. Cappel, il cherche d'abord
à établir qu'il s'est glissé dans le. texte original
de l'Ancien Testament des fautes qui, sans at-
teindre les points de dogme et de morale, défi-
gurent cependant les Livras Saints, y produisent
des obscurités ou en affaiblissent l'énergie; il
donne ensuite les règles d'après lesquelles on
peut découvrir^ corriger ces fautes, qui sont dues
principalement à la négligence des copistes; —
Conférences de Metz, sans indication de lieu
et sans date. Houbigant y exposa d'une manière
populaire les principes de critique développés
dans l'ouvrage précédent; — Psalmi Hebraici
menais quam plurimis expurgati (Leyde);
1 748, in- 1 6. Cet ouvrage est surtout remarquable
en ce que l'auteur a inséré dans le texte même
les corrections faites d'après les principes posés
dans ses Prolegomena. C'était un essai de l'é-
dition qu'il se proposait de publier de UAncien
Testament dans le texte original; — Biblia
Hebraica cum notis criticis et versione la-
tina ad notas criticas facta. Accedunt libri
grxci qui deutero-canonici vocantur, in très
classes distribua ; Paris, 1753 et 1754, 4 vol.
in-fol. : cet ouvrage , fruit d'un travail de vingt
ans, fut publié aux frais de la Congrégation de
l'Oratoire, à laquelle il coûta quarante mille francs.
L'exécution typographique est soignée. Les ca-
ractères furent gravés exprès par Fournier le
jeune. H est imprimé en deux colonnes, dont l'une
contient le texte et l'autre la traduction. L'hé-
breu, qui n'a pas de points-voyelles, n'est que la
reproduction de l'édition de van der Hooght de
1705. Les corrections proposées par Houbigant,
qui ne tient aucun compte du kri et du ktib des
massorèthes, sont, soit à la marge, soit en forme
de tables à la fin de chaque volume. Elles sont
de quatre espèces différentes. Celles du Penta-
teuque sont prises en général du Code samaritain,
auquel, avec le P. Morin, il donna une valeur
exagérée; d'autres sont prises de divers manus-,
crits, qu'il ne décrit pas avec assez de précision
et qui appartenaient soit à la Congrégation de
l'Oratoire, soit à la Bibliothèque royale de Paris ;
d'autres encore sont prises des anciennes versions ;
enfin un grand nombre sont purement conjectu-
rales et dressées d'après les principes critiques ex-
243
HOUBIGANT — HOUBRAKEN
244
posés dans ses Prolegomena. Cette révision du
texte de l'Ancien Testament n'a pas obtenu tes
suffrages des hommes compétents. On a reproché
à Houbigant de ne s'être pas fait des idées justes
de la valeur des documents dont il s'est servi,
de n'avoir pas eu une connaissance assez profonde
de la langue hébraïque, et d'avoir procédé trop
arbitrairement dans ses conjectures. On a fait re-
marquer qu'A avait laissé passer sans les rele-
ver des leçons suspectes ou décidément vfcfieusea,
tandis qu'il remplace des leçons fort correctes
par des conjectures qui ne sont pas même d'ac-
cord arec la grammaire. On peut voir, au reste,
sur les mérites et les dètauts de ce travail les
écrits de Meyer et de Sebald Ran, dont nous
donnons les titres parmi les ouvrages à consulter.
En outre du texte hébreu, des corrections propo-
sées, de la version latine et des apocryphes grecs
de l'Ancien Testament, ces quatre volume* ren-
ferment les Prolegomena Imprimés déjà en
1746, des notés critiques destinées à justifier les
variantes, soit dans le texte, soit dans les traduc-
tions, et quelques introductions critiques ou pré-
faces, placées en tête de quelques livres de la Bible
et consacrées à en défendre l'authenticité et à en
expliquer les principales difficultés. Latradoctiou
latine fut imprimée à part sous oe titre : Vêteris
Testamenti Versio nota; Paris* 1753, 3 vol.
in-8°. Les notes critiques et les Prolégomènes ont
aussi été réimprimés a part, sous ce titre t Nota
Criticse in univêrsôs Vêteris Testamenti Hbros,
cum hebraicê tum Grèeeeécriptos, cum integrts
Prolegomeniê , ad exempter Patisiense denuo
recensas; Francfort-sur-Mem, 1777, 1 vol. in-4*; —
On a encore du P. Houbigant quelques traductions
d'ouvrages anglais; — on Examen du Psautier
français des R P. Capucins; La Haye (Paris),
1764, h>8°;— une traduction latine des ^rot^rte*
et de YEcclésiaste ; 1763, in-12 ; — un fragment
intitnlé Introduction, et devant servir de pré-
face à on livre qui n'a jamais paru. — Houbigant
laissa un grand nombre de manuscrits, parmi les-
quels on cite une grammaire hébraïque en latin ; —
une traduction de l'ouvrage d'Origènecontre Celse
qui se perdit par la négligence de l'abbé Chevreuil,
censeur royal, chargé de l'examiner ; — une Vie du
Cardinal de JJértiMe, fondateur de la Congréga-
tion de rOratoire, qui était prête à être mise sous
presse quand Londet , censeur royal , exigea des
suppressions et des changements dans plusieurs
passages qui lui parurent hostiles aux Jésuites ,
modifications qneleP. Houbigant refusa; — une
traduction française de sa version latine de la
Bible, dont la publication ftit empêchée par 1 abbé
RibalHer, qui ne voulut pas donner son approba-
tion, sous te prétexte que, selon l'archevêque
de Paris , % fl y avait déjà un nombre suffisant de
traductions semblables ; — un Traité de la Venue
tfÉlie, destiné à prouver qu'elle n'est pas aussi
prochaine que certaines personnes le pensaient à
cette époque ; — des Remarques sur le livre d'As-
truc intitulé : Conjectures sur les Mémoires Ori-
I ginaux dont il parait que Moïse s'est servi
I pour composer le livre de la Genèse. —Enfin,
1 il avait entrepris un ouvrage sur la manière d'é-
I tudier et d'enseigner les belles-lettres, quand la
publication du Traité des Études de fiollin le
fit renoncer à un travail détonna» inutile.
Michel Nicolas.
Notice eut lit ru et le» Ouvrage» du P. Houbigant, par
Cadryj Uns Le Magasin Encyclopédique, mai 1806. —
Sebaldus Ratio», Spécimen Obsetvationwn aa_ C.-Pr.
Houbigantii Prolegamend in Script. Sacrât* ; Trêve*,
Ml, 10-4° j réimprimé à Uyde en 178$, son» le litre :
E»ereitation«t Philologie» ad C-Fr. Houbigantii Pro-
legomena. - G. W Meyer, Gètch. der SchrtfterkUer.,
tome ÎV, p. ist-iM, M4-*M, tes et 4M.
notTBHAKE« {Arnold), peintre, biographe et
poète hollandais, né à Dort, le 28 mars 16604
mort à Amsterdam, le 14 octobre 1719, D'une fa-
mille aisée, il fit de bonne* études, et préféra
la peinture à toute antre carrière. Guillaume
Drillenbourg, Jacques Laveoq et Samuel Hoag-
straten furent successivement ses maître». Apre»
avoir exercé quelque tempe son art dan» an ville
natale, il se rendit a Amsterdam, et de la en An-
gleterre, où il dessina le» portrait» des principaux
personnagesdu pays pour un historiographe qui ne
le paya point. Houbraken revint à-Amsterdam qu'il
ne quitta plus. Il y exécuta un grand nombre de
tableaux et y composa plusieurs ouvrage» litté-
raire» qui eurent du succès II était considéré
comme un des bons poètes de son temps, et
sa Vie des Peintres hollandais suffirait seule
pour loi assurer la réputation d'un historien éru-
dit et d'un critique consciencieux. Houbraken eut
l'avantage de voir les tableaux dont il a fait la
description et de connaître beaucoup des maîtres
dont 11 a écrit l'histoire} cependant on désirerait
qu'il se ftrt plu» étendu en quelque» endroits et
resserré en d'autre». Puis se» dates sont placées
confusément, sans aucun ordre chronologique.
Néanmoins, sans ce travail la biographie et les
œuvres des anciens peintre» de Flandre et de Hol-
lande seraient aujourd'hui .presque inconnu»». Le
Jnériteo? Houbraken comme artiste eatpftn» con-
testable. Selon Descampsj * il dessinait assez bien ;
ses compositions sont d'un nommé d'esprit, son
pinceau est délicat; mais sa couleur est outrée,
souvent trop rouge et en général peu vraie. Se»
draneriea, pliéee avec noblesse, présentent mie
variété de tons qui fatigue l'ati- Cependant se»
fond» sont riches, et il règne un bon goût dan»
son architecture, » Ses principaux tableaux sont s
à l'Hôtel de la Monnaie de Dort, les portraits en
pied de tous le» personnage» tenant les premier»
emplois de cette ville; — à La Haye, V Histoire
ffOreste et de Pylade; — la Continence de Sci-
pton ; — à Paris, Le Sacrifice d'Jphigénie.
A. ha h.
Jatob Cftttpo Weyermad, De JchUdorkofut der Ne-
dsHmdere.
HOVBRAftEH (Jacob), graveur hollandais,
fils du précédent, né à Amsterdam, en 1685, mort
vers 1746. Il apprit le dessin sous la direction
de son père, qu'il aida dans la composition de la
345
HOUBRAKEK — HOUDÀN-DESLÀNDES
346
Vie des Peintres hollanaais, dont il grava lis
Portrait*. On cite de lui j le Sacrifice de Ma*
noach, d'après Rembrandt, et beaucoup d'autres
estampes remarquables par l'expression et vue
finesse de burin peu commune; tels sont ses por-
traits : da Czar Pierre le Grand; •— de Geor-
ge P r , roi d'Angleterre) — de Guillaume M %
prince d'Orange ; — de Jean Kugper ;—deJa*
cob van Boom. Parmi les pins rares sont ceu* i
de Guillaume VIU landgrave de Hesse-Cas*
sel; — de Glasey; — de Albert S*ba;+- de
John Taylor ; «— de Mieris / de. Verkolje ;— de
S.-k. de Bruine; etc. à.nL.
F. Baaan, Dicttonnoin des Greeenrt*
Houçéui. Voyez Hossé» et Hussein,
bocchard (Jean-Nicolas) % général Iran*
cals, né à Forbach ( Moselle), en 1740, guillotiné
le 17 novembre 1793. Il quitta à quinte ans la
maison paternelle pour s'engager dans le régi-
ment de Roy al- Allemand, cavalerie; il parvint an
grade de capitaine dans celui de Bourbon-dra-
gons, et fit, en cette qualité, la plus grande partie
de la guerre de Sept Ans, en Allemagne* plus
tard il. suivit son régiment dans la Corse, où U
reçut à la joue une blessure dont U conserva tonte
sa vie U cicatrioe. Il était, au moment où la ré*
volution éclata, lieutenant-colonel d'un régiment
de dragons. Employé dans l'armée de Cnstine , il
parvint promptement an grade de général de divi*
sion,et fut chargé du commandement de l'armée de
la Moselle. Il avait reçu du comité de salut public
l'ordre de combiner ses opérations avec celles de
Beauharnais ( qui avait succédé à Custine dans
le commandement de l'armée du Rbin) pour
délivrer Mayence, réduite alors à la dernière ex-
trémité ; mais ces deux généraux mirent de telles
hésitations dans l'exécution de cet ordre , que la
garnison de la ville assiégée , désespérant d'être
secourue , se vit forcée de se' rendre. Houchard
passa ensuite au commandement de l'armée du
nord. Les Anglais venaient de pénétrer sur le
territoire français. Tandis que le duc de Cobourg
observait les Français de son camp de Herni et
faisait poursuivre le siège du Quesnoy, le duc
d'York porta ses troupes devant Dunkerque. A
cette nouvelle, le comité de salut public écrivit à
Houchard ; a U faut absolument préserver Dun-
kerque et empêcher l'ennemi d'avoir une place
de communication et de sûreté sur un point aussi
important : le salut de la république est là ». Et
en même temps il ordonna aux généraux des
différentes armées de lui envoyer en toute hâte
les renforts dont il avait besoin. Bientôt le mo-
ment d'attaquer l'ennemi arriva, et Houcliard
montra encore sa lenteur, sa mollesse ordinaires;
cependant, forcé d'agir par les représentants du
peuple Delbrel , Bentabolle et Levasseur de la
Sarthe , qui se trouvaient alors en mission près
de lui , il gagna, le 8 septembre 1793, la bataille
d'Hondschoote , dont les conséquences furent la
levée da siège de Dunkerque et la reprise de
Fumes et deMenin. Les alliés perdirent dans ce
combat environ 3,000 hommes tués, blessés ou
laits prisonniers. La perte des Français rat à peu
près égale. Cette victoire, outre qu'elle déga-
gea Dunkerque, fut surtout importante par
reflet moral qu'elle produisit. Néanmoins, avec
on antre général que Houchard, les résultats
eussent été bien plus considérables. Si le 8 il eût
donné l'ordre de poursuivre les vaincus, il leur
eût facilement coupé toute communication avec
Furnes,et, enfermant l'armée anglaise qui as-
siégeait Dunkerque , il ne lui eût laissé d'autre
moyen de salut que celui de capituler. Cette se-
conde faute était beaucoup moins pardonnable
que la première. Arrêté et conduit à Paris, Hou-
chard fut traduit devant le tribunal révolution-
naire, sont l'accusation 1* d'avoir Denise sa
coopération au plan discuté I Bltche entre les
générant et les représentants du peuple pour la
délivrance de Mayence, et d'avoir ordonné la
retraite de son armée) Y d'avoir, en recevant
Fouira de faire lever le siège de Dunkerque,
Changé le plan d'attaque qui lui avait été envoyé
par le comité de salut public , de telle sorte que ,
pouvant envelopper les ennemis de manière à
n'en pas laisser échapper un sent , Il leur avait,
par de mauvaises dispositions, donné les moyens
de se soustraire à une défaite complète. Il se
contenta de nier les faits qui lui étaient reprochés
etde protester deson dévouement a la république.
Condamné à mort à l'unanimité, il tenta de se sui-
cider dans sa prison; mais fut secouru à temps.
Cet événement donna Heu an décret de confis-
cation des suicides condamnés. Il rat exécuté le
lendemain 17 novembre 1793. H. Lbsobur.
Lé Moniteur mni—rêêt, ait 1791 n*Mli-l4#j an r»,
n«» 5, ne, Mi, t*8, t»6 i an u, n»» «69, te, il. - Thiara,
Uistoire de la Révolution Français*, t. v. — Lamartine,*
Histoire des Girondins, t. VU. - THsot, Histoire dé la
RewoluUo*. — La Bai , Dictionnaire BHcfeiopédiqm.
HOCDAifDBSLAJiDBS (Frarrçois-Sulvai*
Denis) y littérateur français, né le 6 janvier
1754, à Vernou, près de Tours, mort subitement
le 28 juin 1807. Elève de l'École militaire , il en-
tra comme sons-lieutenant dans le régiment de
Bretagne, avec lequel il fit le siège de Gibraltar
en 1782. An moment de la révolution, il était
capitaine, et, sans en adopter les principes, il
resta, cependant à l'armée jusqu'au moment où
un décret de la Convention en éloigna les nobles.
La retraite de chef de brigade lui ayant été no-
cordée, il vînt s'établir près de Chinon avec sa
famille, et consacra son temps à l'étude. On a de
lui nu* Histoire du Siège de Gibraltar; Lyon,
1783, in* : cette relation, écrite par un témoin
oculaire, est suivie d'une Ode sur la Prime du
Fort Saint* Philippe, «*» laquelle rabatteur
chante son régiment, q»i*t distingua à l'amant
de cette forteresse. Houdan-Deslandes avait laissé
un poème mfitnlé: la Nature sauvage et pu.
toresque, qui lut imprimé en 1808, in»8°, poème
didactique en trois chants, où l'on trouve «Quel-
ques béantes poétique» à enté d'taeoroctaons
graves.
J. V.
247
HOUDAN-DESLANDES — HOUDETOT
248
Chalmd, Bioçr. de la T<mraêne.—Qpéxu& f IaFromce
Mtérain.
houdaed. Voy. Lamotte.
houoâtbr (Julien), théologien français,
né à Noyen (Maine), en 1562, mort au Mans,
le 28 novembre 1619. Il avait été nommé rec-
teur de la Sorbonnele 10 octobre 1595. Il fat
dans la suite chanoine de la cathédrale du Mans,
curé de Saint-Nicolas dans la même ville , puis
supérieur du séminaire diocésain. Son épitaphe
nous apprend qu'il avait recueilli de nombreux
documents sur l'histoire du Maine; mais nous ne
connaissons de lui que l'écrit suivant : Du De-
voir des Curés ,* Le Mans , 1612, in- 12. B. H.
Mortel. Dic/fonn. -B. Haaréau, Hist. Littér. du
Maine, t. II. p. 85t.
hocdetot ( Robert, sire de ), capitaine fran-
çais, mort en 1358. Il était d'une famille consi-
dérable parmi les Normands : dès les premiers
temps de leur établissement dans la Neustrie, en
1034, un de Houdetot accompagnait Robert, duc
de Normandie, dans son pèlerinage à Jérusalem.
Un chevalier du môme nom se trouvait parmi
les seigneurs normands que Guillaume le Con-
quérant conduisit en Angleterre. Deux Houdetot
étaient à la première croisade. Un autre faisait
partie de l'expédition qui, en 1070, conquit Naples
et la Sicile. Robert de Houdetot commença à figu-
rer dans les guerres de Flandre en 1323, d'abord
sous le maréchal de Trie, puis sous Raoul,
comte d'Eu, connétable de France. En 1342 il
était sénéchal de la province d'Agenois. Deux ans
après, le roi Philippe de Valois le fit grand-maître
des arbalétriers de France. Toute sa vie se passa
à la guerre, et on lit son nom dans toutes les
listes des capitaines qui combattirent les Anglais
sous le règne de Philippe de Valois et les pre-
mières années du roi Jean. La famille de Robert
d'Houdetot se divisa en plusieurs branches, qui
continuèrent à tenir un rang distingué en Nor-
mandie, de B.
Le P. Anselme. - Moréri, Dict. hist.
houdetot (Claude -Constance -César,
comte de), général français, né en 1724, mort
en 1806. Il se distingua dans les guerres du règne
de Louis XV. Il se trouva à Fontenoy et sur
d'autres champs de bataille, et devint lieutenant
général. Il avait épousé, en 1748, Elisabeth-
Françoise-Sophie de La Live de Bellegarde
( voyez ci-après ).
houdetot ( Élisabeth-Françoise-Sophie,
comtesse de), née vers 1730, morte le 22 janvier
1813. Si le nom de la comtesse de Houdetot se
trouve placé dans un dictionnaire historique, ce
n'est pas qu'elle ait jamais prétendu à cette illus-
tration. Sa vie n'était point destinée à la publicité.
Elle fut une femme aimable, spirituelle, d'un ca-
ractère plein de charme et de, bonté, d'un com-
merce agréable et doux. Elle aimait la société des
gens d'esprit; il lui arrivait parfois de faire des
vers qui avaient un cachet de grâce, de finesse et
de sentiment. S'ils étaient connus et répétés au
delà du, cercle de ses amis, c'était contre son gré;
elle craignait de passer pour une femme auteur.
Bien qu'à cette époque réunir dans son salon
des hommes d'esprit et des littérateurs fut de-
venu un titre à la renommée, madame de Hou-
detot n'aurait sans doute laissé de souvenirs que
dans sa famille et dans la société où elle avait
vécu, et son nom ne serait pas ajouté à ceux de
madame du Défiant et de madame Geoffrin. Hais
Rousseau, en lui donnant place dans ses Con-
fessions, a fait d'elle une héroïne de roman.
Lorsque, dans tes derniers temps de sa vie, il
écrivit ses souvenirs, l'imagination se mêlait
sans cesse à la mémoire : ce n'est point la vé-
rité des récits qui donne du charme à son livre.
Ceux qui ont [été comparés à des témoignages
exacte et sincères, et particulièrement ceux qui
se rapportent à M me de Houdetot ont été ramenés
à une réalité qui ne ressemble pas aux impres-
sions passionnées et rêveuses que lui donnaient
ses retours vers le passé : lui-même semble con-
fondre la passion qu'il éprouva pour elle avec
celle qu'il ressentait' pour le personnage imagi-
naire de Julie dans la Nouvelle Èéloïse. Les Con*
fessions ne sont pas une histoire consciencieu-
sement racontée, mais Fépanchement d'une âme
orgueilleuse, malveillante et mélancolique; son
imagination lui représente sous une couleur idéale
les faits qui reparaissent dans son souvenir et
les émotions qu'il avait autrefois éprouvées.
M me de Houdetot parlait peu de l'époque où Rous-
seau lui avait témoigné cette passion qu'il a re-
présentée comme si vive; elle disait simplement
que beaucoup d'exagération s'était mêlée aux
souvenirs de Rousseau et en avait altéré l'exac-
titude, et que si la vérité manquait à ses Con-
fessions, elle était plus altérée encore lorsqull
faisait la confession des autres. Sa relation avec
Saint-Lambert, dont Rousseau avait eu l'indiscré-
tion de parler, n'était nullement cachée; elle
dura pendant près de cinquante ans, et dans les
mœurs du temps elle put être considérée comme
respectable ; il vivait dans l'intérieur de M** de
Houdetot comme un vieil ami de la maison , et
lorsque son intelligence fut troublée et son carac-
tère aigri, elle redoubla de soins pour lui. Elle
lui ' survécut dix ans, et conserva jusqu'à son
dernier jour sa bonté, son goût pour les plaisirs
de l'esprit et de l'imagination et sa bienveillance
attentive pour tous ceux qui l'entouraient. De
temps en temps elle faisait encore des vers ; un
an avant sa mort, elle disait à propos du ma-
riage d'une de ses petites-filles :
Pour célébrer en vers cette heureuse journée,
Je sens que Je ferais des efforts superflus.
Mais je bénis ma destinée ;
Car J'aime encor si je ne chante plus.
DE B.
houdetot ( César- Ange, comte de), fils des
précédents, naquit en 1750; il servit dans l'Inde
pendant la guerre de 1778, et fut commandant
de l'Ile de France et de La Martinique pendant les
guerres de la révolution et de l'empire. H fut
'249
HOUDETOT
260
lieutenant générai, ainsi que Payait été son
père. Il avait épousé en premières noces ma-
demoiselle de Fognes, qui mourut d'une ma-
ladie de poitrine , jeune encore. C'était elle qui
répondait lorsqu'on lui demandait : « A quoi
rêvez-vous ? — Je me regrette. » On a imprimé
en quelques pages ses Poésies, publiées en 1782
avec une notice écrite par le cardinal de Brienne,
archevêque de Sens. Db B.
De Conrcelles, DicU des Généraux fronçait.
; houdbtot ( Frédéric-Christophe , comte
de ), fils du premier mariage du précédent , na-
quit le 16 mai 1778. Il rat, en l'absence de son
père, retenu aux colonies par son service, élevé
par les soins de son grand-père. Atteint par la
conscription en 1798 , il servit comme canon-
mer pendant quelque temps. Son goût pour les
arts le conduisit dans l'atelier de Regnault, et
bientôt après dans . celui de David. Il vivait
chez sa grand'mère, parmi des hommes d'esprit
et des gens de lettres. Le plaisir de la conver-
sation, devenu alors plus sérieux, portait sur
de plus graves sujets que le mérite ou Je succès
des ouvrages littéraires. Nourri à cette école, il ac-
quit une appréciation fine et juste des personnes et
des événements, un esprit bienveillant et modéré
qui le rendaitagréaWedans les relations sociales et
apte à la conduite des affaires. Nommé, en 1806,
auditeur au conseil d'État en même temps que
M. Mole , son parent et son intime ami , il fut en-
suite appelé en Prusse, après la conquête qui suivit
la victoire d'Iéna, et fut placé à la tête de l'ad-
ministration des contributions indirectes. Afin de
tirer un meilleur parti de l'occupation des États
prussiens , Napoléon avait autant que possible
conservé le mécanisme de l'administration, en
plaçant les subalternes sous la direction d'un
administrateur français; en même temps il avait
pensé que déjeunes auditeurs destinés à exercer
des fonctions civiles et à y apporter la justice,
la régularité et les ménagements dus à leurs con-
citoyens, auraient autant que possible les mêmes
égards pour les vaincus, ce qu'on ne pouvait
espérer des administrateurs militaires. Ce n'en
était pas moins une triste mission à remplir;
M. de Houdetot sut se faire estimer et aimer
dans la société de Berlin, et maintint l'ordre
dans une administration qu'avait dirigée avant
lui le baron deStein. A son retour en France, à
la fin de 1807, il fut nommé sous-préfet à Château-
Salins, puis appelé à l'importante préfecture du
Gard. En 1809, la descente d'une armée anglaise
à Flessingue et l'urgente nécessité de défendre
une côte où rien n'avait été disposé pour s'op-
poser à cette invasion , mirent en évidence ses
talents et son zèle, et il seconda les mesures
prises par le maréchal Bernadotte : le 12 mars
1813 il fut nommé préfet de Bruxelles. Mais
bientôt sa position devint triste et difficile. La
bataille de Leipzig et la retraite de l'armée en
France laissaient la Belgique sans défense. Le
général Maison sut avec un très-faible corps
d'armée se maintenir pendant quelque temps
à Bruxelles, et l'administration conserva en-
core assez d'autorité et d'influence, pour main-
tenir le bon ordre et prévenir tout mouvement
de révolte parmi une population, qui, n'appar-
tenant pas à la patrie française aurait pu regarder
la conquête comme unedélivrance.M.de Houdetot
rentra en France lorsque Bruxelles lut évacué
par le général Maison. Après la Restauration, il
eût été , s'il l'eût voulu, placé dans une grande
préfecture; il préféra son loisir, sa liberté et
son atelier. L'année suivante, après les Cent-
Jours, il accepta pour quelque temps la préfec-
ture du Calvados ; c'était un dévouement méri-
ritoire : à peine pouvait-il espérer d'alléger
les maux qui pesaient sur sa province , oc-
cupée par un corps prussien. Il avait à lutter
contre l'ardeur de haine et de vengeance des
vaincus de 1806 : ils étaient exigeants et mena-
çants ; déjà plusieurs préfets avaient été enlevés
et emmenés prisonniers. M. de Houdetot sut ré-
sister, et n'accorda rien que ce qui était autorisé
parle gouvernement du roi. Aucune contribution
de guerre ne fut imposée, aucune réquisitionna
fut exigée* les établissements publics furent res-
pectés. En même temps il eut a se garantir contre
d'autres violences : une réunion de royalistes
s'était formée, et avait pris les armes pour la
défense d'une cause qui ne courait plus aucun
danger. Elle ne voulait reconnaître aucune auto-
rité constituée; au point que quelques-uns de
ces volontaires royaux avaient pu venir dans le
cabinet du préfet lui signifier leurs volontés. Ils
furent désavoués par le duc d'Aumont, leur
chef; mais, pour suivre cette ligne d'impartiale
modération, pour résister à l'esprit de réaction ,
un préfet avait besoind'étre approuvé et soutenu
par le ministère. Telle n'était point la disposition
de M. deVaublanc, qui venait d'être appelé au
ministère de l'intérieur. M. de Houdetot donna
sa démission. Avant de quitter ses fonctions, il
avait eu l'heureuse occasion de sauver le général
Grouchy, en le faisant avertir que l'ordre était
donné de l'arrêter. Au mois de mars 1819 il fut
nommé pair de France; en 1849 le. départe-
ment du Calvados l'élut député à l'Assemblée
législative. Depuis 1852 il n'a pas cessé de siéger
au corps législatif. Il est aussi depuis longtemps
membre du conseil général, qu'il a constamment
présidé. Depuis 1841 il est membre libre.de
l'Institut , Académie des Beaux-Arts. De B.
Docum. partie.
; houdetot ( Charles - Ile - de - France ,
comte de ), général français, né à l'Ile-de-France,
le 6 juillet 1786. Il était fils du général comman-
dant de l'Ile-de-France , qui revint avec sa fa-
mille en France. A quinze ans il entra dans la
marine, comme novice, et il se trouva à plusieurs
combats de la flottille de Boulogne; il était sur
le vaisseau UAlgésiras, à la bataille du 21 juillet
1805,aucap Finistère, etle 21 octobre à Trafalgar,
où il fut dangereusement blessé. En 1809, il passa
251
HOUDETOT ~ 4 HOUD1N
252
dans l'armée de terre comme lieutenant au
1 er régiment de chasseurs à cheval ; il fit la cam-
pagne de Wagram , puis il prit part comme capi-
taine à la campagne de Rassie, soos le maréchal
prince d'Eckmùhl , dont il devint aide-de«camp t
une action d'éclat lui valut le grade de chef d'es-
cadron et la croix de la Légion d'Honneur. U
resta attaché au maréchal pendant la campagne
de 1813 et la défense de Hambourg, et rentra
avec lui en France; en 1816 il le suivit à l'ar-
mée de la Loire. Âpres avoir été plusieurs an-
nées sans activité, il fut compris dans le
corps royal d'état-major et reçut la croix de
Saint-Louis. En 1823 il servit en Espagne son»
les ordres du maréchal Lauristao, et devint lieu-
tenant-colonel et officier de la Légion d'Hon-
neur. En 1826 il entra comme aide de camp
dans la maison du roi Louis-PbUJpne, alors
duo d'Orléans; il est resté attaché à ce prince
pendant tout son règne et jusqu'à sa mort, 11 fut
nommé colonel en 1830, maréchaMe-camp en
1836, et grand-officier de la Légion d'Honneur en
1840 : il avait fait avec distinction plusieurs cain*
pagnes en Afrique, et y avait commandé une di-
vision. En 1842 il devint lieutenant général.
Quelque temps auparavant il avait été chargé de
la formation des chasseurs à pied* Se* idées sur
l'habillement, l'armement et les manoeuvre* de
ce corps furent accueillies avec une approbation
unanime; et l'essai réussit si bien, que la créa-
tion de dix bataillons, sous le nom de chat"
seurs d'Orléans, fut immédiatement décidée; ce
nombre fut plus tard porté à vingt. Plusieurs des
innovations dont on avait éprouvé les avantages
furent adoptées pour toute l'infanterie française,
et ont passé dans les année* étrangères. En
1837 il fut élu député par l'arrondissement de
Bayeux, et il a siégé à 1* chambre jusqu'à la
révolution de 1848. Il fut mi» a. la retraite par le
gouvernement de la république* depuis, il n'a
point désiré reprendre du service, restant attaché
et dévoué à la Camille d'Orléans*
Deux des frères du général de Hondetot,
fienrie&Aurèle, ont trouvé la mort sur le champ
de bataille avant l'âge de vingt ans ; Henri périt
en 1810 à l'armée d'Aragon; il avait déjà mérité
la croix de la Légion d'Honneur, et le maréchal
Suchet, dans un rapport qui frit fendu public,
parle de sa mort en termes honorables. Aurèle
fut blessé mortellement à la bataille de Leipzig.
On iguora d'abord qull eût succombé à ses bles-
sures et la croix de la Légion d'Honneur lui fut dé-
cernée après sa mort Ds fl.
Doc. particHliert.
; nouDETOT ( César- François -Adolphe,
comte n'), autre petit- fils de M* e d'Houdetot, est
né en 1799. Il a servi dans l'armée de 181& à 1*3Q.
Entré dans le» finances, il est fixé depuis long-
temps au Havre dans l'emploi de receveur par-
ticulier; c'est dans cette ville que ses livres
ont été composés avec ses propres souvenirs*
M. Adolphe d'Houdetot a publié en 1860 un
récit du départ du roi Louis-Philippe, ayant
pour titre Honfleur et Le Havre > ou huit jours
d'une royale infortune. Il avait préparé et di-
rigé jusqu'à leur accomplissement les mesures
nécessaires pour rembarquement du roi et de la
reine ; et il le fit connaître le lendemain au com-
missaire de marine. On a encore de M. d'Hou-
detot : Le Chasseur rustique, qui retrace la
chasse ordinaire avec tout le charme et la cou-
leur que lea paysages peuvent inspirer ; — La
petite Vénerie i in-8°j -* Les Chassée excep-
tionnelle*, sont composées d'épisodes de chasse
dont le caractàre est aussi animé que spirituel ;
— >Dix Épine* pour une Fleuri œuvre qui semble
animée par la souffle de Vauvenargues. F.
Doc. parti* ~ Afetittfvr «u * Juillet i*fit.
* aïooDiH ( Robert ), mécanicien , physicien
et prestidigitateur français, né à Blois (Loir-et-
Cher ), le 6 décembre 1*0*. Fils d'un horloger
de Btofe, il fit se* études au collège d'Orléans, et
fut placé comme ckfc chei un notaire de cam-
pagne ; mais, se sentant une vocation décidée pour
l'escamotage, il vint à Paris, oùil suivit avec ar-
deur les séances des meilleurs escamoteurs, et tt
les devina ai vite que bientôt ce fut lui qui leur
fournit Jeun meilleures pièces, Poursuivant ses
étude» Mécaniques, il obtint des succès qui
lui valurent des médailles dn jury national pour
ses merveilleux automates. H commença par
s'essayer dans des soirées d'amateurs, et y
réussit, par la finesse de son jeu et par ses
ssJIHe» ; bientôt les premiers salons de Paris se
le disputèrent. M. R. Boudin fit une révolu-
tion dans l'art de la prestidigitation ; ce n'était
ptos le vieil escamotage avec les gobelets, les
boites à double fond et les compères; c'était un
homme du monde, vêtu oomme tous les assis-
tants, et qui, sans tout cet attira* des sorciers en
robe, sans baguette et sans gobelets, émerveil-
lait les spectateurs par son adresma et son es-
prit. En 1845 il ouvrit au PaJais-iVoyai ces
Soirées fantastique» qui attirèrent la meilleure
société de Paris. Se» automates , Aurttf t La VoL
tigeur, VOremper, Le PéUissier, La BouteiUe
inépuisable, excitèrent une admiration générale.
Au bout de dix ans il céda son établissement à
son élève et beau-frère M* HanaitteuU). Aujowr-
(1) Votet sa estante «e U putoMoce «t 4e l'utilité
d'un prestidigitateur. Ou sait combien les marabouts sont
hostiles en Afrique à la civilisation française. En iSSY, le
gouvernement français pensa qa*tt pouvait, grijce a*
talent te M. notert Hoadto, détruire l'toSuençe exercée
par eea dernier» sur les indigènes. On annonça aux
Arabes l'arrivée d'un homme extraordinaire, opérait
des miracles. Lorsque font fat disposé pair le* expé-
riences, les marabouts ne furent pas les «oins emprea-
sé> à a»j rendre. La» efforts qu'ils firent ponr discréditer
dans l'esprit de leurs dupes ce redoutable concurrent
devaient faire ressentir davantage tes choses anjprmaalus
qui allaient confondre leur raison. 11 fallait frapper Juste
et fort sardes Imaginations grossières et sur des esprits
prévenus. Robert Boudin étudia les hommes devant les-
quels il était appelé à déployer les ressources dn anst
talent, et il opéra sar eu une fascination telle. , one
leurs facultés mentale* forent plus d'une fols ébranlées*
253 HOUDÏN *■
dlim M; Robert Houdln rit retiré dans sa ville
natale, et s'y occupe de travaux de mécanique,
d'électricité et de la publication des Confidence
(?<un Prestidigitateur, ouvrage en 2 vol,, qui
doit paraître vers la fin de 1*66. A. Jadm.
flatta, MoberiHoudin.ta vie, ses œuvrai, ion thi&v*.
- Monitmir, octobre, lftftT, — tfooMnsnt* fartfoiiJfef*
e( que pendant quelques instants plusieurs «t'entre enx
parurent privés de la raison. Nous ne citerons que quel-
ques-unes de ees curieuses eipérlenœs. Un des moyens
employés par les marabout» pour se grandir aux yeux
des Arabes et établir sur eux leur domination , c'était de
faire croire en leur invulnérabilité. L'un d'eux faisait
charger une arme à feu qu'on tirai! sur 1*1 pune eonttsr
dvtanee. Impassible, le marabout prononçait quelques,
paroles cabalistique?, et le coup ne partait pas. Uu,
premier coup d'œtl, Robert Houdln comprit le mys-
tère. Il démontra que le fusil ne faisait point explosion
parce que le marabout avait habilement bouché la Jn«
miere. Furieux do se voir ainsi dépouillé de son auréole «
le thaumaturge laissa éclater sa colère. Le prestidigita-
teur ne s'en émut aucunement, et ne vit là qu'une occasion
d'établir sa supériorité. « Tu peux te venger, djWl ft«
marabout; prends un pistolet, celui que tu voudras,
charge- le toi-même. Voie! des balles, mets-en dans lé
canon $ mais auparavant, afin de la reconnaître, fâls-y
une marqpe av«o ton couteau, » L'Arabe suivit de pqlnt en
ÏDint ces prescriptions. « Tu es bien sûr maintenant , dit
obert Houdln, que ton arme est chargée et que lç
coup partira ; dls->mol n'éprouvea*tu aucune peine do me
tuer ainat, quoique Je l'y autorise? —.Tu es mon en»
nerai, répondit froidement l'Arabe, ]e te tuerai. » Sans
répliquer, Robert Houdln piqua une pomme sur la
peinte d*on couteau; puis,eatme et souriant, il alla se
piaee* devant l'Arabe et lui commanda de faire feu. Le
coup partit , la pomme alla voler au loin , et k sa place
apparut Axée sur la pointe du couteau la balle marquée
par l'Arabe. Tout le monde eetinatt le tour delà boe>
teUte Inépuisable j devant les Avattes, en fut du eafé qae
l'pablle physicien Ht venir de la sorte, mais la. plupart
refusèrent d'en boire , croyant ce breuvage sorti des otf-
ieinea du diable. Une autif expérience frappa plus Ibrte*-
meat l'eaprit des indigènes. Houdln, eonnalaaant le
culte qu'ont ces hommes pour la force physique, leur
dit qui! avait te pouvoir de les énerver, de les priver de
leur forée) et pour le prouver M fit apporter un ooffâe
de petite dimension, et qu'un enfant eut pu aoqlayqr
avec un doigt. On sait qu'à la volonté du prestidigitateur
ee coffre devient si lourd qu'il semble être rivé au soi,
et que les hommes les plus robustes ne peuvent l'en ar-
racher. Quand les marabouts, se virent dans l'impos-
sibilité de soulever un objet d'un aussi mince volume, ijs
furent anéantis et ne mirent pas en doute qu'il n'eût le
pouvoir de les énerver à sa fantaisie. Ils manifestèrent
cette opinion devant Robert Houdln, qui leur répondit
aussitôt : « Eh bien» oui, J'ai le pouvoir de vous anéantir;
et si l'un de voua veut se prêtera mon eipérienee, Je
le ferai évanouir en fumée. a Le nombre des curtarix
était grand* Le Jour fixé pour cette expérience* «m ma-
rabout fanatique avait consenti à se livrer au sorcier ;
on le Ht monter sur une table et on le revêtit d*one gaie
transparente; puis Robert HunHa et une autre personne
soulevèrent la table par las deux bouts et l'on vit l'Arabe
disparaître au milieu d'un nuage de fumée, A cette vue tous
lés spectateurs s'enfuirent tumultueusement de la salte.
Bu proie à «ne terreur Inimaginable, poussant des cla-
meurs insensées, se livrant à des démonstrtttops inspirées
par la démence, ils parcoururent ainsi une grande dis-
tance. Enfin l'un d'eux, moins terrifié, arrêta ses cama-
rades, et leur dit qu'il fallait voir ce qQ'étatfc devenu le
marabout. \U revinrent sur leurs pas, et ne furent pas
peu surpris de le retrouver sain et sauf près de la salle
où l'expérience avait eu Heu. Pressé de questions, il leur
dit qu'il était semblable à un homme ivre, ne pouvant
rien se rappeler et Ignorant cornaient il se trouvait en
eet endroit. Ces faits singuliers ont porté une grave at-
teinte à la suprématie des marabout», et ont fait du
eesèbre prestidigitateur «q objet d'admiration parmi les
HOUDiON 254
eUHJDOif (Je^ Antoine)* statuaire fran-
çais , né à Versailles , en 1740, mort le 16 juil-
let 1828. A cette époque, beaucoup de comman-
de» monumentale*, suite et complément de*
grand* travaux de Louis XIV, avaient été ache-
vées successivement dans les résidences royales
et dans la magnifique enceinte des Tuileries ;
mais leurs auteurs n'existaient plu», ou ils étaient
arrivés a l'âge du repos; en sorte que le jeune
artiste, privé pour lui-môme d'un de ces maîtres
qui servent de guide au talent novice, semblait
s'instruire en étudiant la sculpture faite par le*
autres plutôt qu'en la pratiquant lui-même. Néan-
moins, le mécanisme de l'art lui fui; enseigné par
Michel- Ange ôlodta, et, plus tard, il reçut des
conseils de Pigate. Mais la nature l'avait fait sculpo
teur. Élève laborieux, et distingué de l'École de*
Beaux-Arts, il remporta le grand prix de sculpr
ture à dix-neuf ans , et partit pour Rome. H était
en Italie lorsque les villes d'Herculanum , de
Stables et de Pompéi reparurent à la lumière
du oiel et que le sol rendit inopinément aux arts
et aux science* le dépôt qu'il avait reciré dans
son sein pendant tout de siècles. A 1* voix de
Wmckelmann, interprète chaleureux de l'anti-
quité et vivement secondé par. les efforts de Ra-
phaël Mengs pour «a raviver le sentiment , l'I-
talie se ranimât Un jeune homme plein de feu et
d'émulation ne pouvait être spectateur indiffè-
rent de ce réveil. Houdon pas** dix ans sur la
terre classique à cette époque d'enthousiasme ,
et de. plus, il fut chargé à, Rome d'un travail qui
fixa sur lui l'attention publique. Il n'était pas
rare alors de voir les Romains confier a nos lau-
réats académiques d'importantes . commandes.
SlodU avait (ait , pour U basique de Saint-
Pierre, un groupe 4e saint Rruno, fondateur dp
Tordre des Chartreux, au moment où celui-ci
refuse la mitre qui lui qst "apportée par uq ange.
Houdon exécuta en marbre la, statue colossale du
mémo saint, qu'on admire so^us le porche de
l'église de Saiote^arie-des-Aages : inspiration
de Le Sueur, elle donne Vidée la plus fidèle <fe
l'humilité et de la ferveur claustrales. Mais nul
éloge ne dut flatter plus l'auteur que celui qu'en
fit le pape Clément XIV» «- Si te règle de son
ordre, dit le spirituel pontife, ne lui prescrivait
pas le silence, elle parlerajt. » De retour en
France, Houdon esquissa le petit modèle en plâ-
tre d'un Morphte, qui,, exposé au salon de
1771, valut à l'artiste sou agrégation à l'Académie
de Peinture et Sculpture; quatre ans. après, tra-
duite en marbre de grandeur naturelle, cette
figure le fit recevoir académicien. Elle ne fut
pas sans influence sur l'heureuse réaction qui
s'opérait dans la marche de l'art. Mn^. Vestale ,
servant de lampe de nuit, offrit un exemple de
l'ingénieux et poétique système d'ornementation
appliqué par les Grecs à leur industrie. Une Mi-
nerve, médaillon en marbre, compléta pour l'ar-
tiste une exposition toute mythologique* Acadé-
mjciea» Houdon crut» sa pouvoir, mieux payer
255 HOUDON
son tribut an corps enseignant que par un de ces
ouvrages propres à former des dessinateurs, et
qui finissent par devenir, dans l'école, l'expres-
sion consacrée de la structure musculaire du
corps humain, un Écorché. Cette étude, haute
de cinq pieds et demi (dimensions convenables
à l'amphithéâtre), est fort estimée. Pour l'ins-
truction élémentaire, elle est rationnellement
préférable à ces moulages sur préparations ana-
tomiques qui , ne donnant que la nature morte,
peuvent conduire l'élève à de graves erreurs.
L'auteur en fit lui-même, pour l'usage privé,
une réduction , reconnue supérieure à l'original
en grand. Mais la preuve que ces deux résultats
furent on double service rendu à l'art , c'est que
les reproductions s'en répandirent bientôt dans
tous les ateliers de peinture et de sculpture.
V Écorché deHoudon fut partout regardé comme
le meilleur rudiment du dessin.
Déjà la réputation de l'artiste avait franchi les
mers. L'assemblée générale des États-Unis ayant
décerné une statue à Washington, Houdon fut
appelé en Amérique pour l'exécution du monu-
ment; il y fut conduit par Franklin. A Philadel-
phie, il résida dans la maison même du libéra-
teur. Là , pouvant observer à loisir la physio-
nomie de son hôte , il modela le buste , qu'il
rapporta en France. C'est à Paris et d'après ce
modèle, frappant de ressemblance, qu'il fit la
statue en marbre inaugurée dans la salle de
l'État de Virginie. De cette image dérivent pres-
que tous les portraits, peinture, sculpture ou
gravure , du guerrier-citoyen. Les études de Hou-
don en Italie avaient favorisé chez lui l'aecord de
la vérité de nature avec un faire large et facile,
qui convenait bien au portrait. Sans négliger ces
riens qui contribuent tant à la ressemblance , il
savait faire un choix dans les détails, et con-
server au style de la grandeur. Ce n'est pourtant
pas ce grand goût des anciens, qui manifeste toute
l'âme du modèle par la simple et énergique ex-
pression de quelques traits du visage ; mais c'en
est un reflet satisfaisant. En 1773, les bustes de
Catherine 11, impératrice de Russie, du prince
Galitzin et de Diderot; en 1775, ceux de Tur-
got, le nom le plus populaire de France à cette
époque; de Gluck, le plus grand artiste de l'Eu-
rope; de Sophie Arnould, actrice aimée du pu-
blic et toujours sûre de lui plaire, représentée
dans le rôle à'Iphigénie , eurent un succès im-
mense. Mais nous devons ajouter que l'artiste
avait exposé en même temps un petit bas-relief
en marbre figurant une Grive suspendue par la
patte, chef-d'œuvre de vérité et de naïveté. O
vanité des gloires humaines ! la sublime image
de Gluck , où respire le génie , eut probablement
moins de part à la vogue que l'oiseau mort.
Houdon dut songer en riant à la caille de Pro-
togène. On attendait l'artiste au salon de 1781 :
il devait y produire la figure de Diane, com-
mandée par l'impératrice de Russie; la statue
àtTourviUe, dans des proportions colossales,
256
pour la Collection des Français illustre» que
Louis XVI faisait exécuter ; enfin la statue de
Voltaire assis : ces trois objets en marbre. Le
parti pris de représenter Diane entièrement nue
est un oubli de toutes les convenances mytho-
logiques ; il fit refuser à l'ouvrage les honneurs
du salon. Dans le fait, cette détermination de
l'artiste est inexplicable. Un poète seul pouvait
s'écrier en la voyant : Oui, c'est Diane! En
dépit de l'exclamation de Rulhière , nous n'y pou-
vons voir qu'une suivante de Vénus; ce qui
n'empêche pas que l'arrêt d'exclusion ne nous
semble trop rigoureux. Ce bannissement était si
peu prescrit par les bienséances de l'art, que la
répétition de la même figure en bronze s'est vue
longtemps au milieu de la principale cour de la
Bibliothèque du Roi, et se voit encore au Louvre,
dans le Musée d'Angoulême. La difficulté de sa-
tisfaire par le costume moderne aux exigences
sculpturales a été la seule cause de l'espèce de
recherche qu'on a pu reprendre dans l'amiral
Tourville, où l'auteur, privé des moyens de
donner à la simple pose un caractère monu-
mental, a tâché de faire concevoir un marin
luttant à la fois contre les ennemis et les élé-
ment conjurés. Il se trouvait plus à Taise pour
la statue de Voltaire. Fidèle aux doctrines grec-
ques bien entendues , et averti par le triste essai
d'une figure nue tenté par Pigale, il habilla le
personnage; mais l'ajustement fut une simple
draperie. Ce marbre présenta au public parisien
une image aussi noble que vraie de son poète
et de son philosophe favori. La statue; pleine
de vie, ne fut critiquée que sur la manière dont
elle était vêtue, c'est-à-dire qu'elle renouvela,
comme on devait s'y attendre, l'éternel débat sur
b question du costume dans les statues monu-
mentales érigées aux contemporains; mais le
système grec triompha. Elle fut offerte par
M me Denis à l'Académie Française; de là elle
passa au Théâtre-Français, dont elle décore le
vestibule.
Le buste de Molière, pour le foyer du même
théâtre, fut aussi l'ouvrage de Houdon, qui en-
richit encore du buste de Voltaire ce brillant
local. A chaque exposition du Louvre, l'artiste
produisait des portraits nombreux et toujours
bien accueillis. Telle était sa fécondité que quel-
quefois son contingent occupait seul autant de
place que celui de tous ses confrères. La popu-
larité s'attacha à son talent, et il fut pendant
assez longtemps le sculpteur de son époque.
Louis XVI, le comte de Provence, Mesdames
de France , Adélaïde et Victoire; le prince
Henri de Prusse; /.-/. Rousseau, dont le sta-
tuaire alla mouler le masque en toute hâte à
Ermenonville, aussitôt qu'on eut appris la catas-
trophe de sa mort ; Suffren, le héros de l'Inde;
deux des jeunes officiers français qui avaient pris
part à la guerre de l'indépendance américaine,
La Fayette et Bouille; Franklin, et D'Alem-
bert, la princesse Daschkof, comme directeur
257
HOUDON — HOUKL
268
de l'Académie des Sciences à Saint-Pétersbourg;
Buffon, de qui le buste, commandé par l'impéra-
trice de Russie , est peut-être le chef-d'œuvre de
son auteur; Le lieutenant de police Lenoir;
Sacchini, Gerbier, Mentelle, Vabbé Barthé-
lémy, Mirabeau ; Mirabeau, dont le nom, comme
un tonnerre lointain, annonce l'orage qui va
fondre sur la France. Quel cortège de célébrités !
L'artiste avait connu presque tous ses modèles;
bien venu de chacun, il fut admis dans l'intimité
de plusieurs; et, comme il était du commerce
le plus affable, comme sa spirituelle bonhomie
avait beaucoup de charme, il était devenu l'ami
de presque tous ; en sorte que c'était un plaisir
de lui entendre raconter ses souvenirs, ce qu'il
faisait avec une naïveté pleine d'intérêt. La naï-
veté était dans l'homme. Quand on rapproche
les uns des autres ses ouvrages dans divers
genres et de différentes époques , on reconnaît
que cette qualité y est constante et qu'elle forme
le caractère prédominant de tous. La pratique du
portrait devait la rendre durable , et l'on peut
dire qu'il s'est peint dans ses œuvres. Ses têtes
de jeunes filles sont comparables aux plus char-
mantes études sorties du pinceau de Greuze,
avec qui elles rivalisent d'ingénuité , d'innocence
et de grâce. La jolie figure de La Frileuse, trop
connue pour avoir besoin d'être décrite, est
un type de naïveté.
* La révolution venait d'éclater. H était difficile
à Houdon d'échapper au danger de sa renommée.
A défaut de toute commande publique ou privée,
et pour occuper ses loisirs , ayant eu l'impru-
dence de reprendre une vieille statue de sainte
Scolastique , abandonnée depuis plus de trente
ans dans un coin de son atelier, il fut dénoncé à
la tribune de la Convention. Mais un membre
de l'assemblée prit sa défense ; il eut la présence
d'esprit de faire de la sainte une statue de la
Philosophie , et l'artiste , qui avait exécuté les
portraits des plus grands philosophes , fut hono-
rablement acquitté. D'ailleurs , plus de travaux
brillants! une jeune génération d'artistes s'en
empare, et cet empressement des ambitions
nouvelles est justifié par une meilleure direction
dans la marche* de l'art , direction à laquelle
Houdon avait contribué lui-même par ses exem-
ples. H fut encore chargé d'une statue en pied
de Cicéron , pour l'escalier du Sénat conserva-
teur, et de plusieurs sculptures colossales pour
la colonne monumentale de la grande armée à
Boulogne-sur-Mer. Mais l'âge de la retraite était
arrivé pour lui. Il avait atteint la vieillesse sans
infirmités. Sa tête , presque entièrement chauve,
avait pris un caractère si vénérable que Gérard,
dans son tableau de V Entrée de Henri IV à
Paris , peignit d'après lui un des magistrats qui
présentent au roi les clefs de la ville. Il finit par
perdre la mémoire. Revenu à l'état d'enfance,
après avoir parcouru le plus grand cercle de la
vie humaine, et toujours préoccupé de son art,
alors même qu'il n'y pouvait plus réfléchir, il
NOUV. BIOGR. GÉNÉR. — T. XXV.
croyait voir une sculpture dans un caillou , et
il le ramassait ; le soir, on trouvait les poches
du vieillard lestées de ces chefs-d'œuvre. Mal-
gré l'absence de sa raison , il continua d'être
assidu aux séances de l'Institut et aux repré-
sentations du Théâtre-Français. Ses dernières
années forent un assoupissement presque con-
tinuel ; le dieu du sommeil , qui avait eu le pre-
mier hommage de son talent, semblait lui avoir
réservé ce bienfait , pour lui épargner les an-
goisses qui rendent si pénible la fin de l'exis-
tence. Agrégé à l'Académie de Peinture et Sculp-
ture en 1774, académicien et professeur en 1778;
membre de l'Institut et de la Légion d'Honneur
dès l'origine de ces institutions , professeur actif,
puis honoraire, puis émérite, à l'École Royale
des Beaux-Arts, il n'a manqué à Houdon aucune
de ces distinctions personnelles auxquelles l'o-
pinion publique attache du prix. [ Miel , dans
VEnc. des G. du M.]
Nouvelle Biogr. des Contemp. - Archiv. du Mutée,
* HOUDON ( Mârie-Ange-Cécile Langlois,
M me ), femme du précédent, née en 1748, morte à
Paris, le 22 février 1823. On a d'elle : Belmour,
par M™* Dymmer (miss Damer ), roman tra-
duit de l'anglais par M»*H-n; Paris, 1804,
2 vol. in-12. Ersch attribue à tort cetle traduc-
tion à M me G.... Houdin.
Beuchot , Bibliogr. de la France ; 1818, p. 787. - Ha-
ïra), Annuaire Nécrologique; 1818; - Qu'rard, La\France
Littéraire.
hoc dry ( Vincent), écrivain religieux fran-
çais, né à Tours, le 22 janvier 1631, mort à Paris,
le 29 mars 1729. Ses études achevées, il entra
chez les jésuites de Paris en 1644, et fit ses vœux
en 1665. Il professa pendant quelques années
dans les établissements de sa Société, et se livra
ensuite pendant trente ans à la prédication;
enfin il ne s'occupa plus que des travaux de com-
position dans son cabinet. On a de lui : Sermons
sur tous les sujets de la Morale chrétienne,
par le P. ***, de la Compagnie de Jésus;
Paris, 1696 et ann. suiv., 20 vol. in-12; —
Traité de la manière d'imiter les bons prédi-
cateurs, avec les tables pour les différents
usages qu'on peut faire des sermons sur tous
les sujets de la morale chrétienne; Paris,
1702, in-12 ;— Bibliothèque des Prédicateurs,
contenant les principaux sujets de la morale
chrétienne; Paris, 1712, et ann. suiv., 23 vol.
in-4°; Liège, 1716, 4 vol. in-fol. L'auteur a mis
à contribution pour cette compilation les ser-
monnaires anciens et modernes. Houdry a en
outre composé des poésies latines , parmi les-
quelles on cite : Ars Typographica, carmen;
et une pièce de vers sur la Collation, où il fait
de fort jolies descriptions de la fraise, de la
crème et du melon.- J. V.
Mémoire* de Trévoux, janvier I7î8 et avril 1746. —
Chaudon et Delandine, Dict. univ.'.Hist^ Crit. et Bibliogr.
— Quérard, La France Littéraire, i
* houel (Nicolas), philanthrope français,
du seizième siècle, était né à Paris, où il excr-
9
959
HOUEL —
çait la profession d'apothicaire. Soutenu par
Henri III, par la reine et par d'autres personnages
distingués, il fonda au faubourg Saint-Marceau
un établissement qu'il appela Maison de la
Charité chrétienne* On y trouvait une chapelle,
un enclos nommé Jardin des Simples, où Ton
cultivait des plantes médicinales , -une apothi-
cairerie complète, une école pour les jeunes or-
phelins et un hôpital coatigu. Les jeunes or*
phelins y étaient initiés aux lettres et instruite
dans la matière médicale. Ils étaient chargée
d'administrer aux pauvres honteux de la ville et
des faubourgs les médicaments qui leur étaient
nécessaires. L'hôpital était mue sorte d'hôtel
pour les voyageurs indigents. Après la mort
d'Honel le roi ordonna que les soldats et gentils-
hommes pauvres blessés à la guerre seraient
traités et médicamentés gratuitement dans cet
établissement, ainsi que les pauvres honteux;
puis les soldats invalides furent logés gratuite-
ment à cet hôpital, à l'exclusion des voyageurs;
enfin tout l'établissement fut attribué aux sol-
dats blessés , et ce fut le premier essai d'un hô-
tel des invalides en France. On a deHouel : Aver-
tissement et déclaration de l'Institution de
la Charité Chrétienne , établie es fauxbourg
Saint-Marcel en 1578; Paris, 1580,in-8°. J. V.
Paulin Paris, Catalogue des Manuscrits Français M
la Biblioth. Royale. - i\ Ulong, £M. Bistor. de la
France,
houel ( Jean - Pierre - Louis - Laurent ),
graveur français, né à Rouen, en juin 1735,
mort le 14 novembre 1813. Il étudia à Paris la
peinture chez Casanova et la gravure chez
Lebas et Lemire. Il reçut du roi une pension
pour qu'il achevât ses études à Rome, où il pei-
gnit un assez grand nombre de gouaches. A son
retour, il fut accueilli par d'Azincourt, riche
amateur, dans les collections duquel il trouva un
grand nombre de modèles précieux. Après avoir
vendu beaucoup de copies de ses gouaches, il
entreprit, en 1776, un nouveau voyage, et se
rendit en Sicile, à Lipari, à Malte, où il copia
des monuments et des ruines pendant plusieurs
années. Revenu avec ces matériaux, il en com-
posa un ouvrage en 4 volumes in-folio, avec
264 planches toutes gravées par lui au lavis, et
qu'il publia sous ce titre ; Voyage Pittoresque
des Iles de la Sicile, de Malte et de Lipari;
Paris, 1782-87. Les descriptions fidèles de cet
ouvrage offrent d'autant plus d'intérêt, aujour-
d'hui encore, que les tremblements du sol , les
ravages des volcans, les guerres et les révolu-
tions ont détruit une partie des chefs-d'œuvre
qu'a reproduits Houel. L'impératrice Catherine n
fit acheter les dessins de cet ouvrage ainsi que
plusieurs peintures de l'auteur. Depuis son retour
en France, Houel était agréé à l'Académie royale
de Peinture, qui l'avait pris pour son graveur.
Admis aux réunions dé madame Geoftrin, il se
lia avec Diderot, D'Alembert, Marraontel, Vien,
Boucher, avec J.-J. Rousseau lui-même. Il
HOUGHTON 260
a publié une Histoire des Éléphants de la Mé-
nagerie nalienale, avec la relation de leur
voyage à Paris, 1798» in-8°; et il avait com-
mencé une Histoire Naturelle des Deux Élé-
phants , mdle et femelle, venus de Hollande
en France en Van Vit ia t re livraison parut en
1808, gr. in*é°. 0. us F.
Notice de Le Carpentter sur Houel f Rouen, 1815, !»-»•.
Motion (John), prélat anglais, né dans le
Middlesex, en 1651, mort en 1743. Élevé à l'u-
niversité d'Oxford, au collège de La Magdelèae, il
en devint membre agrégé (Jellow), et en fut
élu président en 1687. Jacques IT, qui cherchait
à faire prévaloir le catholicisme dans l'université,
cassa l'élection de Hough, et substitua à ce doc-
teur, Parker, évêque d'Oxford. Cet acte arbitraire
causa de violents débats, au milieu desquels Hongh
montra autant de modération que de dignité.
A l'approche de Guillaume d'Orange, Jacques
se hâta de rendre au collège de La Magdelène ses
privilèges et son président, concession tardive et
forcée, qui ne réconcilia pas l'université avec
les Stuarts. En 1690 Guillaume 111 nomma ce
fidèle champion du protestantisme évoque d'Ox-
ford. En 1699 Hough fut transféré sur le siège
épiscopal de Lichfield, et en 1717 sur celui de
Worcester, qu'il occupa Jusqu'à sa mort. On a
de lui des Lettres, qui ont été insérées dans sa
Vie par Wilraot. Z.
Chalmers, General Biograph. DictUmary,
hocghton (***** ), voyageur anglais, né
vers 1750, mort a Tarra (Afrique) , après 1793,
Dès le début de sa carrière, il fit partie de la lé-
gation anglaise dans le Maroc. En 1779, nommé
sous-gouverneur (major) de Gorée, il offrit à
la Société Africaine de Londres de déterminer le
cours du Niger et de visiter les grandes villes que
l'on suppose exister au delà du désert. Son but
était Tombouctou. Il mit à la voile le 16 octobre
1790, et mouilla le 16 novembre à Gillifrie ( em-
bouchure de la Gambie). Il remonta ce fleuve l'es-
pace d'environ trois cents lieues; il traversa par
terre le reste de la Sénégambie, et s'arrêta à Mé-
dina, capitale du royaume de Woulli; il y fut
bien reçu du roi Jatta, qui lui conseilla de ne pas
aller plus loin dans l'intérieur de l'Afrique.
Houghton ne tint aucun compte de ces conseils
et pénétra dans le Bondouj le roi Alroani,
moitié maure moitié païen, se conduisit à son
égard avec une grande perfidie, et lui vola la plus
grande partie de son bagage. Quittant les Fou-
lahs , Houghton entra sur le territoire des Sera-
woullisou Seracolets\ par les royaumes de
Kajaaga ou Galam et de Kasson ; il séjourna à
Tïésie, et reçut l'hospitalité de Tiggjty-Sego, frère
de Sego-Jalla, roi de ftas&on; il y fut l'objet de
quelques fêtes, et dans les repas auxquels il était
invité les mets se composaient surtout de rats,
de taupes, d'écureuils , de serpents, de sauterel-
les, etc. Il remarqua que les femmes n'avaient
pas le droit de manger des œufs. Il supposa que
261
HOUGHTON — HOULAGOU
262
» cette coutume avait été inventée par quelque
vieux et rusé Intrschreen (prêtre) qui aimait
beaucoup les garder pour lui ». Houghton entra
ensuite dansleKasson, fut bien accueilli par Sego-
Jalla, qui lui fit présent d'un cheval blanc. U pé-
nétra ensuite dans le Kaarta, et, s'avançant vers le
nord, il s'arrêta à Simbing, petite ville frontière
du royaume de Ludamar. Ce fut de là qu'il écri-
vit au crayon la dernière lettre que le docteur
Laidley reçut de lui» Abandonné de ses servi-
teurs nègres, il s'avança néanmoins jusqu'à Jarra,
ville du Ladamar, et se joignit à une caravane de
marchands maures qui allaient acheter du sel à
Tischet, ville située près des marais salants du
grand désert. « Après deux jours de marche, rap-
porte Mungo-Park, devinant les mauvaise* inten-
tions de ses compagnons de route» Houghton de-
manda à retourner à Jarra i les Maures essayèrent
d'abord de le dissuader ; mais quand ils virent
qu'il persistait dans cette résolution, ils lui prirent
tout ce qu'il avait et s'entourent aux grands pas
de leurs chameaux. Le malheureux major, se
voyant aussi lâchement trahi , retourna à pied
à Tarra , un endroit où Ton trouve de l'eau et
qui appartient aux. Maures, Tl avait, été déjà
quelques jours sans prendre aucun aliment, et
les Maures refusaient de lui en donner. On ne
sait pas précisément s'il périt de faim où s'il Ait
massacre par les barbares mahométans : son
corps fut traîné dans les bois, et l'on me montra
de loin l'endroit où on le laissa sans sépulture. »
Tels sont les renseignements recueillis par
Mungo-Park sur Houghton, dont le sort loi était
réservé à lui-même quelques années plus tard.
La catastrophe qui termina les jours de Hough-
ton et le pillage de ses papiers rendirent presque
nul pour la science son courageux dévoue-
ment; cependant ses Lettres furent recueillies et
publiées dans les t. II et ITI des Mémoires de la
Société Africaine, Londres, 1792-1798, in-4°j;
trad. en français par Lallemand , sous ce titre :
Voyages et Découvertes dans Vintérieur de
l'Afrique, par le major Houghton et Mungo-
Park ; Paris, an vi, in-8°. Alfred de Lacaze.
William Smith, Collection, de Voyages autour du
if onde, t. IX, p. 1, 1*; 88, 48. — Hoefer, Afrique Cen-
trale. — WalkenaCr, Bibliothèque des Voyages, t. VII.
houlagou , le premier des ilhhans ou rois
mongols de Perse, né en 614 de l'hégire (1217
de J.-C), mort le 19 rebi second 663 (février
1265), dans son campement d'hiver, sur les
bords du Zerrineh ou Tchogatou ( Adherbaïdjan ).
Petit-fils de Gengiskhan et quatrième fils de
Toulouï, il fut, à l'avènement de son frère aîné le
grand-khan ( empereur) Mangou,en 649 (1251),
chargé d'achever la conquête de la Perse. L'ar-
mée qoi fut mise sous ses ordres se composait de
70,000 cavaliers et de 1 ,000 ingénieurs chinois.
Précédé d'une avant-garde de 12,000 hommes,
il partit de Mongolie en 651 (1253) et n'arriva
à Samarcand qu'en 653 (1255). Il réclama des
troupes auxiliaires de tous les princes de l'Asie,
de ceux môme qui avaient jusqu'alors conservé
leur indépendance. Le sultan d'Icône, l'atabek
de Fars, le roi de Géorgie, les seigneurs du Kho-
rassan, de l' Adherbaïdjan , du Schirwan, de
l'Irak se hâtèrent d'obtempérer à ses ordres. Le
schéikh des Ismaéliens ou Assassins, Rokn ed-
Din Khour-Schab, fut invité à se rendre au camp
d'Houlagou. Il refusa, mais il offrit de payer
tribut aux Mongols et de leur livrer toutes ses
forteresses à l'exception d'Alamout, de Lems-
cher et de Lai. Après quelques négociations peu
sincères, Houlagou prit le parti de ravir par
force ce qu'il ne pouvait se faire livrer par ruse.
Il fit envahir de plusieurs côtés le pays des Is-
maéliens, et se présenta lui-môme, devant leur
capitale Meimoun-Diz, à la tète de 10,000 hom-
mes. Rokn ed-Din fut forcé de se rendre avec son
fils et ses principaux officiers, le 19 schawal 654
(9 novembre 1256). Après avoir fait démolir
toutes ses forteresses , au nombre de plus de
cent, il fut envoyé à la cour de Mangou, et as-
sassiné à son retour par ordre d'Houlagou. Ce
dernier fit ensuite massacrer toutes les popula-
tions ismaéliennes, sans en excepter les enfants
au berceau. U n'épargna que quelques savants,
qu'il prit à son service, comme l'astronome
Nassir ed-Din Thoussi et le médecin Mowaftek
ed-Doulah, aïeul de l'historien Raschid ed-Diq.
Pendant que son général Baïdjou portait la
guerre en Asie Mineure, où deux frères se dis-
putaient le trône d'Icône, Houlagou se préparait
à envahir l'Irak, dernier débris du khalifat de
Baghdad. Motassem occupait alors le siège pon-
tifical C'était un prince bon et pieux, mais fort
incapable. Trahi par ses ministres, dont les uns
voulaient le déposer et dont les autres étaient
d'intelligence avec les Mongols, il ne prenait
aucune mesure pour la défense de sa capitale.
Cependant l'ennemi approchait. Houlagou hési-
tait à attaquer une ville qui ne comptait pas
moins d'un million d'âmes, et des troupes qui
avaient plus d'une fois vaincu les généraux mon-
gols; son astrologue Hossam ed-Din, qui était
sunnite , lui annonça les plus grands malheurs
s'il offensait le successeur de Mahomet. Mais
le schiite Nassir ed-Din et les prêtres boud-
dhistes lui promirent le succès le plus com-
plet. Rassuré par ces derniers, il rejeta les offres
de Motassem, qui consentait à payer tribut.
Après avoir défait l'armée ennemie, il alla in-
vestir Baghdad, et y fit lancer des billets, par
lesquels il s'engageait à ne faire aucun mal aux
personnes inoffensives, aux ministres du culte et
aux juges, aux savants et aux descendants d'Ali.
Au bout d'une quinzaine de jours, le 4 safar
656 (10 février 1258), le khalife sortit pour im-
plorer la clémence d'Houlagou. Il fut d'abord
traité avec égards, et ordonna à ses sujets de
déposer les armea. La ville fut mise au pillage ;
il y périt environ 800,000 personnes; les chré-
tiens , qui s'étaient enfermés dans une église
sur l'invitation des Mongols , furent seuls épar-
9.
2G3
HOULAGOU. — HOULLIER
264
gnés. Après avoir fait mettre à mort le khalife
et son fils aîné , 15 safar (21 février), Houla-
gou s'éloigna des ruines de Baghdad , à cause
de la corruption de l'air produite par la dé-
composition des cadavres. Il soumit successi-
vement plusieurs villes de Mésopotamie, Nisibe,
Harran, Roha, Biret, et se dirigea ensuite sur
Damas. Le souverain de cette ville, Nassir Salah
ed-Din Yousouf, arrière-petit-fils de Saladin,
avait envoyé de riches présents à l'empereur
Mangou, et en avait obtenu une lettre de sauve-
garde. Mais il avait négligé de fournir des troupes
à Houlagou, et ses possessions étaient trop à
la convenance de ce prince pour ne pas exciter
sa convoitise. Ne s'occupant que de poésies, il
n'inspirait aucune confiance à ses troupes, qui
tentèrent de le détrôner. Il consumait en dis-
putes avec des princes ses voisins le temps qu'il
aurait dû consacrer à des préparatifs de défense.
A la nouvelle de l'approche des Mongols, il se
retira vers l'Egypte avec une partie de ses su-
jets, espérant obtenir an asile ou des secours du
sultan des Mamlouks. Houlagou s'étant rendu
maître d'Alep, après un siège de cinq jours
(658-1260), fit 100,000 prisonniers qui furent
vendus comme esclaves. Les places de Hamat
et de Damas se soumirent spontanément pour
se donner des titres à la clémence du vainqueur.
Les musulmans de ces villes n'eurent à souffrir
que les représailles des chrétiens exaspérés par
plusieurs siècles d'oppression. Vers la même
époque, Houlagou interrompit sa marche victo-
rieuse, pour aller briguer, en Mongolie, le trône
suprême, resté vacant par la mort de Mangou.
Mais il n'était qu'à Tebriz, lorsqu'il apprit l'é-
lection de son frère Goubilaï. Ses généraux con-
tinuèrent à soumettre la Syrie, s'avancèrent jus-
qu'à Ghazah, et menacèrent l'Egypte. Le sultan
mamlouk Cottouz s'avança contre eux à la tête
de 1 2,000 hommes , et rencontra à A in Djalouth
(source de Goliath), entre Naplous et Baïssan,
le général Kitouboca, qui fut vaincu et périt
dans la bataille, le 25 ramadhan 658 (3 septembre
1260)-. C'était le premier avantage important
que les musulmans remportaient sur. les Mon-
gols, depuis l'époque de Djelal ed-din Kha-
rizm Schah. A la suite de cet échec, les vaincus
évacuèrent toute la Syrie, et n'y rentrèrent qu'à
la nouvelle du meurtre de Cottouz. Mais 6,000
d'entre eux furent encore battus par 1400 musul-
mans. Ils furent plus heureux contre le nouveau
khalife Mostansir, qui, après avoir été reconnu
en Egypte, s'avançait à la tête de 3,000 hommes
pour reconquérir les États de ses prédécesseurs.
Ce prince fut tué à Anbar, près de l'Euphrate.
Les projets de vengeance que conçut Houlagou
furent ajournés à l'occasion de ses querelles avec
son cousin Bercaï, khan de Descht Kiptschak.
Ce dernier, qui avait embrassé l'islamisme, dé-
testait Houlagou à cause de sa cruauté à l'égard
du khalife et des musulmans. Il envahit le Schir-
wan, sous prétexte que cette province et l'Ad«
herbaïdjan faisaient partie du lot attribué à son
père Djoutchi. Repoussé au delà du Caucase, il
surprit l'armée d'Houlagou et la détruisit en
partie. Plus tard il se mit en relations avec le
sultan mamlouk d'Egypte, qui lui avait envoyé
une ambassade. Houlagou se vengea de sa dé-
faite, en faisant massacrer tous les sujets de
Bercaï qui se trouvaient en Perse. Peu de temps
avant sa mort, il maria son fils Mangou-Ti-
mouravec Ouns-Khathoun, princesse du Fars,
et réunit ce pays tributaire à ses domaines im-
médiats. Cet ilkhan ne jouissait pas d'une com-
plète indépendance : il reconnaissait, comme
les autres princes mongols, la suzeraineté du
grand-khan, représentant de Gengiskhan. Ses
possessions étaient comprises entre l'Oxus, le
Caucase, l'Euphrate, le golfe d'Oman, llndus.
Il eut sept filles et quatorze fils, dont deux ré-
gnèrent après lui , Abaka et Takoudar-Ahmed.
Sa mère, Sioorkoukiti-Beighi, et sa principale
femme Docouz-Khathoun, Tune nièce, l'autre
petite -fille de Oang-Khan, roi des Kéraïtes,
étaient chrétiennes, de la secte des nestoriens.
Elles ne négligèfent jamais les intérêts de leurs
coreligionnaires, dont un grand nombre durent
la vie à leur intercession. Houlagou avait pour
alliés les Géorgiens et les Arméniens; il reçut
en 1260 une lettre du pape Alexandre IV, qui
l'exhortait à embrasser le christianisme. S'il
ne jugea pas à propos de se rendre à ce vœu,
il accorda du moins de grandes immunités aux
couvents et aux ecclésiastiques. Ce prince avait
le goût des constructions ; le palais d'Alatag, le
temple d'idole de Khoî et l'observatoire de Me-
ragha furent élevés par ses ordres. La protection
qu'il donnait aux sciences n'était pas toujours
éclairée; ainsi il préférait l'astrologie à l'astro-
nomie, et consacrait des sommes considérables
à des expériences d'alchimie. On peut lui. re-
procher d'avoir été plus cruel que ses intérêts
ne l'exigeaient et d'avoir fait massacrer plus d'un
million de ses semblables. £. Beauvois.
• Raschtd ed-Di n , Hist. des Mongols de Perse, trad. par
Quatremère, t. I. — Wassaf , Cfiron. — Abonl-Faradj,
Hist. Dynast. — Le faux Fakhr ed-Dtn, fragm. dans
Chrestom. Arabe de Sacy, t. I. — Abou'1-Féda, jinn m
Muslem., t. IV, V. - Makrizt, Hist. des Mamlouks d'E-
gypte, trad. par Quatremère. — HaTthon, Hist. Orient.
— Tchamtchlan, Hist. d'Armén., t. III. — firosaet, Hist.
de Géorgie, t. 1, et Ad dit. à VHist. de Géorgie. — Rela-
tion du voy. d'Houlagou en Tartarfe, trad du chinois ,
dans le Journ. Asiat., 18», II, 283. — Priée, Chronoloçical
Retrospect, t-. II. — D'Ousson, Hist. des Mongols, t. II.
— De Haromer, Geschichte der Ilchane, t. I. — Abc!
Rémusat, Sur lesRelat. des Chrétiens avec les Mongols;
dans les Mém. de l'Acad. des Inscr., t. VI (18M).
hoitllier (Jacques), médecin français,
dont le nom latinisé est ffollerius, né à Étampes,
mort en 1562. Beçu docteur à la faculté de
Paris, il en fut doyen en 1546 et 1547. Il cultiva
la médecine et la chirurgie avec un égal succès.
« Gomme il étoit riche, dit Éioy, et qu'il ne se
soucioit pas du gain, il donnoit à ses malades
tant d'assiduité, de temps et de réflexion, que
265
HOULLIER — HOUMAYOUN
266
souvent il réussissoit à guérir les maux que les
autres médecins regardoieut comme désespérés.
11 n'en fallut pas davantage pour établir solide-
ment sa réputation; le public, qui apprécie les
talents par les succès, le regarda bientôt comme
un des plus habiles praticiens de Paris. Houllier
sa voit tirer parti de tout ; et comme il étoit per-
suadé que la joie est le meilleur de tous les
remèdea, celui qui fait l'effet le plus prompt et
le plus assuré, il travailloit non-seulement à
guérir le corps par ses médicaments, mais il ta-
choit encore de divertir l'esprit par sa conversa-
tion enjouée et ses discours agréables. » « Malgré
les soins pénibles d'une pratique étendue, dit
Jourdan, il ne négligea pas la littérature médi-
cale, dans laquelle son nom est devenu célèbre.
Son principal mérite fut de travailler assidû-
ment à ramener aux principes d'Hippocrate les
esprits courbés sous le joug de l'école galéno-
arabique. Cependant, s'il repousse les subtilités
et les discussions oiseuses, s'il bannit les inutiles
recherches sur les causes prochaines des mala-
dies, il ne sut pas. apprécier la noble simplicité
de la thérapeutique d'Hippocrate, et adopta en
grande partie les remèdes favoris et la polyphar-
macie dégoûtante des Arabes. » C'est à Houllier
qu'on doit le mode actuel d'application du séton ;
auparavant on l'appliquait au moyen d'un fer
chaud. Une maladie qui l'emporta rapidement
ne lui permit pas d'achever ses nombreux ou-
vrages; aucun ne fut publié par lui-même; ceux
qui parurent pendant sa vie furent imprimés
d'après les cahiers de ses disciples, écrits sous
sa dictée, suivant l'usage adopté dans les écoles
à cette époque. On a de lui : Ad libros Galeni
de Compositions Medicamentorum secundum
locos, Periochxacto ; Paris, 1543, in- 16 ; Franc-
fort, 1589, 1603, in-12 ; — De Materia Chirur-
gicaLibri très; Paris, 1544, in- fol. ; 1552, 1571,
in-8°; 1610, in-fol.; Lyon, 1547, 1588, in-8°;
Francfort, 1589, 1603, in-12; — De Morborum
Curatione; De Febribus ; De Peste ; Paris, 1 565,
in-8° ; publiés par les soins de Didier Jacot; —
DeMorbis Internis Libri duo, authoris scho-
liis et observationibus illustrait ; Paris, 1571,
in-8°; 1611, in-4°; Venise, 1572, in-8°; Lyon,
1578, in-8°; Francfort, 1589, 1603, in-12; —
Magni Hippocratis coaca Prxsagia; Lyon,
1576, in-fol. Cette édition grecque et latine a
été publiée par D. Jacot. « Elle a le mérite, dit
Jourdan, d'une savante critique du texte, et elle
est accompagnée d'excellentes remarques. » —
In Aphorismos Hippocratis Commentarii sep-
tem; Paris, 1579, 1583, in-8°; Leipzig, 1597,
in-8° ; Francfort, 1597, in-16 ; 1604, in-8° ; Lyon,
1620, iu-8°; Genève, 1646, 1675, in-8° : ce com-
mentaire est aussi célèbre que l'édition d'Hippo-
crate que nous venons de citer. A l'exception
des deux derniers, les ouvrages de Houllier ont
été réunis sous le titre à' Opéra practica ; Paris,
1612, in-4°; Genève, 1623, 1635, in : 4°; Paris,
1674, uv-fol. Le principal éditeur de cette collec-
tion fut Cnartier. On y trouve aussi des notes de
Duret, élève de Houllier, des remarques d'An-
toine Valet, des commentaires de J. Hautin, et
la thérapeutique des femmes en couches par
J. Lebon. J. V.
Éloy, Dict. hUt. de la Méd., anc. et mod. [— Jourdan,
dans la Biogr.- Médicale.
houmatoun ( Nassîr ed-Din Mohammed),
padischah ( empereur) de l'Hindoustan, le se-
cond de la dynastie des Grands-Mongols, né
dans la citadelle de Caboul, le 4 dzou'lcadeh 913
de l'hégire (6 mars 1508 de J.-C), mort à
Delhi, le 11 rebi premier 963 (24 janvier 1556).
Il était fils aîné de Baber, qui ne possédait alors
que les contrées situées entre l'Helmend , le
Djihoun, l'Indus et le Béloutchistan. Nommé
gouverneur de Badakhschan, lors de la conquête
de ce pays en 926 (1520), il y résida jusqu'en 932
(1526), époque où il conduisit dans l'Inde un
corps auxiliaire. H se signala par divers exploits,
s'empara d'Agra, et commanda l'aile gauche à la
bataille de Kanwab, en 933 (1527). Sa bravoure
et son affabilité lui concilièrent l'affection de
son père, qui le désigna pour son successeur.
H monta sur le trône le 9 djoumada 1 er de l'an
937 (29 décembre 1530). Son empire, dont la
capitale était Agra, se composait de provinces
nouvellement réunies par la force des armes et
différant entre elles par la langue et la religion.
La possession lui en fut disputée par le prince
afghan Mahmoud Lodi, dont le frère Ibrahim
avait été dépouillé par Baber du trône de Delhi.
Houmayoun défit à la bataille de Dourah, sur le
Gange ( mai 1531 ), l'armée de ce prétendant, qui
alla mourir obscurément dans le Bengale. Mais
il lui restait à l'intérieur des rivaux non moins
redoutables, ses frères et ses cousins. Doué d'un
caractère conciliant, il s'était efforcé de prévenir
les révoltes, en satisfaisant toutes les ambitions.
Dès les premiers jours de son règne, il avait
donné à son frère Kamran le Caboul et le Can-
dahar, à Askéri la province de Sambhal, à Hin-
dal le Mewat ou Alwar, et avait reconnu son
cousin Soliman, gouverneur de Badakhschan, ne
se réservant qu'un droit de suzeraineté sur ces
provinces et la possession immédiate de l'Hin-
doustan et du Pendjab*. Quelque temps après,
il céda même cette dernière province à Kamran,
qui s'en était emparé, et y ajouta de son propre
mouvement le pays d'Hissar-Firouzah. Deux
petits» fils de Hosséin-Mirza Baïkara, qui vivaient
à sa cour, Mohammed-Sultan-Mirza et Moham-
med-Zéman-Mirza, gendre de Baber, s'étant
révoltés, furent jetés en prison, 940 (1533). Le
premier fut privé de la vue. Le second s'échappa,
et se retira auprès de Bahader, roi de Goudjé-
rate et de Malwah. Houmayoun , irrité de ce
que Behader donnait asile à tous ses ennemis,
envahit le Malwah, s'empara de Mandou, (942
1535), et conquit ensuite le Goudjérate, dont
le roi se réfugia dans l'île de Diu, qu'il céda
"aux Portugais. Après s'être rendu maître de la
267
HOILMA^OUIN
26S
forteresse de Tchampanîr, l'empereur .se livra
aux plaisirs, et permit à ses troupes de l'i-
miter. Pendant ce temps, les Afghans envahis-
saient le Béhar, les princes indigènes do Malwah
recouvraient leur indépendance, et Mohamraed-
Sultan-Mirza se révoltait à Canoudi. Askéri-
Mirza, frère de Houmayoun, qui l'avait fait gou-
verneur du Goudjérate, ayant été expulsé de ce
pays par les habitants, se dirigea sur Agra, pour
se faire proclamer empereur (943,1536). Mais
avant d'avoir exécuté son projet il rentra dans
le devoir, et se joignit à l'armée impériale pour
faire la guerre aux Afghans. Depuis la mort du
prince Tatar-Khan-Lodi, qui avait péri en com-
battant contre les Mongols, en 941 (1534), les
Afghans reconnaissaient pour chef Schir-Khan,
qui s'était élevé d'un rang inférieur à la dignité
de premier ministre du roi de Béhar, et avait
fini par usurper la couronne. Alarmé des progrès
de ce général, et désireux de remplacer par de
nouvelles conquêtes celles qu'il venait de perdre,
Houmayoun entra dans le Béhar, en 944 (1537),
s'empara de la forteresse de Tchounar, après
six mois de siège, et pénétra jusqu'en Bengale.
Mais lorsqu'il voulut rentrer dans ses États, au
bout de six mois, 11 vit que la retraite lui était
fermée par les Afghans. Arrivé en présence de
l'armée ennemie, il se fortifia dans son camp, et
perdit trois mois en escarmouches meurtrières.
Il ne pouvait attendre aucun secours de ses
frères Kamran et Hindal-Mlrza, qui s'étaient ré-
voltés à Agra. Livré à ses seules ressources, il
entra en négociations avec Schir-Khan, et il était
sur le point de signer la paix, lorsque les Afghans
l'attaquèrent à l'improviste et détruisirent son
armée à Tchonsa, au confluent du Gange et du
Karamnassa, le 9 sefer 945 (27 juin 1539). H
s'enfuit presque seul. Rentré dans sa capitale, il
jugea à propos de se réconcilier avec ses frères,
et d'amnistier tous les rebelles. H leva une nou-
velle armée de 90,000 hommes, que les défec-
tions réduisirent de moitié. Quoique les Afghans
ne fussent qu'au nombre de 10,000, ils le vain-
quirent de nouveau à- Canoudj, le 10 moharrem
947 (17 mai 1540), et le poursuivirent jusqu'au
Setledj. Houmayoun ne put obtenir un asile dans
les États de Kamran. Il fut rejoint par deux cent
mille Mongols, que les vainqueurs avaient
expulsés de l'Hindoustan, et entreprit de con-
quérir le royaume du Sind et le pays des Radj-
pontes , pour en faire la base de ses futures
opérations contre Schir-Khan. Abandonné de
son immense armée, qu'il ne pouvait entretenir,
il persista néanmoins dans son dessein, et fut par-
tout repoussé. Après avoir erré deux ans dans le
Sind et le Radjpôutana , il passa dans le Séistan,
qui dépendait du roi de Perse Schah-Tahmasp.
Ce monarque l'appela dans sa. capitale, à Kazwin,
et lui rendit de grands honneurs, qu'il lui fit
payer par beaucoup d'humiliations. Zélé schiite,
il menaça son hâte de le faire brûler, comme
hérétique, s'il ne reniait tes doctrines sunnites.
I Mais sa sœur Sullannm-Khanum tempéra cette
! ferveur de prosélytisme; il fournit à Hou-
I mayoun 14,000 hommes pour conquérir le Ba-
i dakhschan, le Caboul et le Candahar, se réser-
vant, en retour, la possession de cette dernière
province. Le prince mongol s'étant emparé de
la forteresse de Blst, puis de la ville de Can-
dahar (952, 1545), vit accourir sous ses drapeaux
une grande partie des troupes de Kamran;
il occupa Caboul et le pays de Badakhscban,
mais il tomba dangereusement malade. Le bruit
de sa mort s'étant répandu, les prétendants à la
couronne commencèrent à relever la tête. Kam-
ran recouvra Caboul, avec les secours qu'il avait
obtenus de son beau-père Schah Hosséin-Ar-
ghoun, roi du Sind. Assiégé dans Caboul, il s'en
échappa secrètement, et se retira chez les Oua-
beks. II fut rejoint par un ministre de Hou-
mayoun, Keratbha, qui avait déserté avec 3,000
hommes à la suite d'une discussion. Mais, ne pou-
vant compter sur les Oazbeks, eunemiade sa na-
tion, il fit en 955 (1548) la paix avec son frère,
qui lui donna le gouvernement de la province du
Koulab ou Khoutblan, située au nord dn Dji-
houn. Houmayoun envahit ensuite le Khanat de
Balkh, possédé par les Ouzbeks ; nais, craignant
une trahison de Kamran, qui n'amenait pas le
contingent stipulé, il retourna à Caboul, et perdit
dans cette retraite presque toute son armée. Le
revers éprouvé par l'empereur rot pour Kamran
une nouvelle occasion de révolte. Il s'empara du
Badakhschan, et surprit à Aschterkeram, en
956 (1550), l'année impériale qu'il mit en dé-
route. Mais vaincu à Schouterguerden, en 957
(1551), il éprouva une dernière défaite en 959
(1552). Il chercha refuge auprès de Selim-Schah,
roi de Delhi, qui le traita avec dédain, mais le
retînt prisonnier pour s'en faire un instrument
contre Houmayoun. Ayant effectué son évasion,
il se retira dans la tribu des Oakers, qui le li-
vrèrent à l'empereur en 960 (1553). Jusque alors
Houmayoun, suivant les conseils que son père
lui avait donnés au lit de mort, s'était gardé de
tremper les mains dans le sang de ses frères; il
avait toujours traité avec indulgence ces princes
indignes. Il s'était contenté d'exiler à La Mecque,
en 957 (1551), Askéri-Mirza, qui l'avait tant
de -fois trahi. Kamran fût privé de la vue, et
alla mourir à La Mecque, en 964 (1557). Hihdal-
Mirza avait été tué en 1551, en combattant pour
Houmayoun contre Kamran. Ces divers événe-
ments débarrassèrent enfin l'empereur de tous
ses rivaux, n se prépara alors à reconquérir
l'Hindoustan. Ce pays, après avoir été gouverné
avec habileté par Schir-Khan, puis par Sélim,
était actuellement en proie aux discordes civiles.
Mohammed-Schah avait usurpé le trône en 960
(1553), après avoir mis à mort son neveu Firouz-
Schah, fils et successeur de Sélim. Mais il ne
jouit point paisiblement du fruit de son crime.
Ses beaux-frères et cousins , Ibrahim-Khan et
Sekander-Schah, avaient pris les armes contre
269
HomMAYmm — hourcastremé
2T0
lui, lorsque Houmayoun envahit le Pendjab. An
lieu de se rallier centre l'ennemi commun, le*
princes afghans firent ce qu'avalent fait les
princes mogols, ils continuèrent à se disputer un
trône chancelant A la faveur de ces discordes,
Béhraro»Khan, premier ministre de Houmayoun,
défit à Matchiwara, sur le Setledj, un corps de
40,000 cavaliers, en 961 (1554). L'empereur lui-
môme, à la tète de ft,ooo hommes seulement,
remporta une grande victoire à Sirhend, sur
îoo^ooo Afehans, le * sehiban 962 (21 juin 1566).
Entrée Delhi quelques mois plus tard, il se proposa
de diviser flfindonstan en six gouvernements,
dont chacun aurait une administration et une ar-
mée séparée. Il pensait qu'une armée de 13,000
hommes lui aurait suffi pour maintenir dans la
dépendance les diverses parties de son empire.
Mais ces projetsn'eurant pas desnite. Étant tombé
du haut d'une plateforme, où il faisait des ob-
servations astrologiques* il mourut de sa chute
au bout de quelques jours. Ses officiers cachèrent
sa mort durant deux semaines; ils n'en laissèrent
circuler la nouvelle qu'après avoir averti le prince
Akbar, qui a* trouvait dans le Pendjab» Ho»»
ronyoun était affable, «eoértux, humain, brave.
Il ne Ht jamais le mal par principe, et ménagea
toujours tes peuples vataftug. Mais son incons-
tanea et sa légèreté ueutraUsaient toutes ses
bonnes qualités; et sa faiblesse fut la source du
la plupart des révoltas qui troublèrent son règne.
Il était versé dans les mathématiques et surtout
dans l'astronomie» Doué d'un esprit brillant, il
s'adonnait avec passion à la culture des lettres
et composa an Diw*n 011 recueil de poésies*
£. Bbauvois.
Joober (DJauber), Teikertk Mivakiat, or private me~
moirs of Humayoon, trad. par Ch. Steffart ; Londres,
18S2, in-4<>. — Nitzam ed-DIn Ahmed, Tlrtkh. — HaMer
Mirza Doiiglilat, Tarikh % Raschidi. - Abd el-Kader, Ba-
daooni, Tarikh. — Abou'l-Fadbl, Akbar-Nameh. — Khafi-
Kan, Tarikh. - Ferlahtah, Hist. o/tàe RiseoftheMa-
homedan Power in India, trad. par Brigg», t. II. —
Neamet Ullah , tiist of the Afghane, trad. par Dora,
1889, in-*», 1. 1. - Sandja* Ma! Mou»**!, Khokusët <&~
tewarikh. — Sam Mirza, Tedzkiret. — Prlce , Chrono-
log. Retrospect, t. III. — W. Ersklnfe, Hist. of tnûia
under the two fint fovertigruof the Houte ef Tuïmtmr,
Baber an4 ffttmayun ; Loodrw, 1W*, t vol, in-8<>, tout
le t. II.
HOrjNG-WOU. Foy.TcHOU-YotJAN-TCHAKG.
HomcASTREMÉ (Pierre), littérateur fran-
çais, né à Navarreins (Béarn), le 24 décembre
1742, mort vers 1815. Placé dans le commerce
au sortir de l'école , il lisait avec avidité tous les
livres qu'il pouvait rencontrer, et se mit à com-
poser de petits vers à la Bernis, en même
temps qu'il apprenait seul le dessin et la mu-
sique. Ses parents l'envoyèrent alors à Paris,
où il se fit recevoir avocat. Il revint exercer sa
profession dans sa ville natale ; mais la capitale
l'attirait, et, en 1767, il offrit à Louis XV des
dessins à la plume de sa composition. Trois ans
après il adressa des vers à Voltaire, qui lui
répondit :
. ... Je vong cède ma lyre ;
Vos doigte sont faite pour l'animer.
En 1773 Hourca8tremé réunit ses premières pro-
ductions poétiques, et fit imprimer en tète les
stances de Voltaire. Cependant, comme il avait
négligé dans ses vers les règles élémentaires de la
versification, qull ignorait peut-être , il s'avisa de
rassembler dans une préface les vers de Voltaire
qui lui paraissaient défectueux, pour couvrir en
quelque sorte ses propres négligences , et ne
craignit pas de dire que Voltaire avait souvent
ckwillé ses vers, pour plus de solidité sans
doute. Deux ans après il présenta à l'Opéra un
drame lyrique en cinq actes, intitulé Marins et
Àrtste* On le lui renvoya pour y joindre un
divertissement; il en fut piqué et garda son
drame. L'Académie de Marseille ayant mis au
concours l'éloge eu vers de Christophe Colomb,
il y envoya une pièce qui n'eut pas le prix. Re-
tirée Oraville en 1784, il s'occupait de mathé-
matiques, cherchant la solution des problèmes
de la quadrature du cercle , de la trisection de
l'angle et de la duplication du cube, lorsque la
révolution éclata. Il vint alors à Paris et entra
en correspondance avec les hommes les plus
notables des états généraux, et leur adressa ses
vues sur les moyens de régénérer la France. A
la pince on avait été la Bastille il voulait qu'on
élevât nn immense bâtiment qui aurait pu con-
tenir l'assemblée nationale , les académies , etc.
En 1789, il envoya à l'Assemblée constituante
un projet d'organisation des tribunaux, où il
exposait le plan de bureaux de conciliation. Il
envoya ses autres ouvrages à la même assem-
blée; et comme l'un d'eux contenait un nouveau
système d'éducation, il fut peiné devoir qu'on
n'avait pas songé à le choisir pour précepteur
du dauphin» La chute de la monarchie ne lui
présageant rien de bon, il s'en retourna pru-
demment à Oraville , et y resta tout le temps de
forage. Il avait mis au commencement d'un de
ses livres son portrait avec cette inscription :
Jtr simplex et reclus. Le comité révolution-
naire du Havre lui demanda l'explication de
cette devise ; il en donna une qui parut satis-
faisante, et ne fut plus inquiété. En 1795, il
adressa à la commission chargée de la révision
de la constitution de 1793 un projet qui lui
paraissait propre à prévenir les révolutions. Non
compris dans la liste des écrivains secourus par
la Convention, il s'offensa de cette injustice et
attribua son déboire à Chénier, qu'il appelait le
plus incorrect et le plus faible des versifica-
teurs. Revenu à Paris en 1796, il travailla au
Courrier lyrique et aux Étrennes de Mné-
mosyne. De nouveaux ouvrages d'Hourcastremé
n'eurent point de succès, et il tomba ensuite
complètement dans l'oubli. Dans un de ces
livres il nie la rotation de la Lune sur son axe
et le mouvement de la Terre autour du Soleil;
il explique un instrument nommé trisecteur,
qu'il a imaginé pour couper un angle en trois
parties égales; enfin, il donne l'histoire na-
turelle de mollusques qu'il appelle Beroé, le
27.1
HOURCASTREMÉ - HOUSSAYE!
272
Peigne et la Meuse. On a de lui : Poésies et
Œuvres diverses, en vers et en prose ; Londres
(Rouen), 1773, 2 vol. in- 12 : le premier volume
renferme une comédie en trois actes et en prose
intitulée : La N&uvelle Eve; — Catéchisme du
Chrétien, par le seul raisonnement ; Toulouse»
1789, m-8°; — Aventures de messire Ansel-
me, chevalier des Lois; Paris, 1790, 2 vol.
in-12; 1796, 4 vol. ra-8°. On trouve dans le
1 er volume de cette seconde édition la Métope
de Voltaire mise en prose, et dans le 2 e le .drame
lyrique de Marins et Arisbe; — Essai sur la
Faculté de Penser et de réfléchir ', dans lequel
Vinstinct se trouve caractérisé et mis à sa
véritable place; Paris, 1805, in-8°; — Essais
d'un Apprenti Philosophe sur quelques an-
ciens problèmes de physique, d'astronomie,
de géométrie, de métaphysique et de morale,
l rc partie, 1805, in-8°; — Solution du Pro-
blème de la Trisection géométrique de V Angle,
suivie de celles de la Quintisection, Septisec-
Uon, etc.; Rouen, 1812, û>8°. En 1773, Hour-
castremé avait annoncé un Traité sur le Com-
merce, et plus tard un extrait du Dictionnaire
Philosophique, dans lequel il prétendait avoir
donné à tous les arts et à toutes les sciences
sans exception le plus haut degré de perfection
possible. J. V.
Hourcastremé , Aventurts de messire Anselme, —
Quérard, La France littéraire.
hocrelle ( Pierre-François ), médecin
français, né à Reims, au mois d'avril 1758, mort
dans la même ville, le 15 mai 1832, à la suite
d'une attaque de choléra. On a de lui : Disser-
tation sur VEmpyème et les différentes es-
pèces d*épanchements qui peuvent se faire
dans la capacité de V estomac; Strasbourg,
1808, in-4°; — Remarques topographiques ,
médicales et politiques sur la Fille de Reims
et son territoire; Reims, 1810, in-4°. Il avait
travaillé à un ouvrage sur les différentes épidé-
mies qui ont affligé son pays. J. Y.
Bourqnelot, La Littér. franc, contemp.
houssay. (Frère Jean du), religieux her-
mite du Mont-Valérien près Paris , né à Chail-
lot, en 1539, mort au Mont-Valérien, le 3 août
1609. Les religieux au milieu desquels vivait
Jean du Houssay formaient une communauté
particulière qui ne dépendait d'aucune autre.
Ils ne prononçaient que les vœux simples de
pauvreté , de chasteté et d'obéissance : leur but
en se réunissant avait été de marcher sur les
traces des anciens hermites. Ils se soumettaient
au travail des mains, à l'abstinence et quelque-
fois à la réclusion perpétuelle. C'est comme
reclus que se fit connaître Jean du Houssay;
il ne vécut pendant quarante-huit ans que de
pain grossier, de racines crues , et ne but que
de l'eau ; encore ne fut-ce qu'une fois par jour
et après le coucher du soleil. Henri m,
Henri IV, les reines Marguerite de Valois et
Marie de Médicis lui vinrent faire visite dans
sa retraité. Les Frères Hermites habitaient le
Mont-Valérien depuis un temps immémorial
lorsque» vers le milieu du dix-septième siècle, on
les força à quitter leur monastère pour le céder
à une communauté de prêtres; mais un arrêt
du parlement, qu'ils obtinrent le 30 juillet 1664,
les réintégra dans leurs droits. Depuis lors jus-
qu'à la fin du siècle suivant ils ne furent plus
inquiétés. Leurs statuts ont été publiés en 1776
sous ce titre : Règle et Constitutions des Frères
Hermites du Mont-Valérien près Paris, sur
le modèle des anciens solitaires ; Paris , in-12 .
On y trouvera un beau portrait de Frère Jean
du Houssay; ce livre est intéressant à cause
de la singularité de certaines règles. Le sui-
vant, qui ne l'est pas moins, contient le même
portrait : Livre d'Église et Cérémonial des
Hermites du Mont-Valérien, à Paris; 1786,
gr. in -8°. Louis Làcooit.
Règle et Consumions des frères Hermites, Avcrttsse-
; houssayb (Arsène), littérateur français,
né à Bruyères, près de Laon, le 28 mars 1815.
Son père, qui s'occupait d'agriculture, s'opposa
d'abord au goût du fils pour la littérature ; mais
en 1832 le jeune Houssaye partit de sa ville na-
tale et vint à Paris, où il se lia avec Hégésippe
Moreau et Paul van del Heyl. Il rencontra
M. Théophile Gautier dans les salons du Louvre,
et bientôt il fit connaissance avec Gérard de
Nerval, Ourliac, MM. Roger de Beauvoir, Clé-
singer, Célestin Nanteuil, Marilhat, Alphonse Es-
quiros, etc. Cet essaim d'artistes vint se loger
dans une même demeure, rue du Doyenné, et,
pendant plusieurs années, ils vécurent en com-
mun; cette époque, M. Houssaye l'a caractérisée
ainsi lui-même :
Obt le beau temps passé ! nous avions la science ,
La science de vivre avec insouciance.
La galté rayonnait en nos esprits moqueurs
Et l'amour écrivait des livres dans nos cœurs.
Chacun finit cependant par trouver sa voie par-
ticulière. M. Houssaye ressuscita en vers et en
prose le style du siècle de Louis XV. « Le
jeune romancier, dit M. Alpb. Esquiros , avait
rencontré dans sa nature une fleur d'origi-
nalité. Dans un temps où l'influence du drame
s'étendait à toute la littérature, où le poison
jouait un si grand rôle à la scène et dans les
journaux, où le sang débordait de la coupe,
M. Houssaye osa se faire un horizon à part,
avec des églantiers à ses pieds, une verte et
savoureuse forêt dans le lointain. Les livres
de cet écrivain respirent tous un mélancolique
sentiment du paysage. Dans les descriptions
agrestes, M. Houssaye n'est pas seulement
artiste , il est poète. Amant de la nature , il ne
la voit pas seulement avec les yeux , mais avec
le cœur. A mesure que le talent de l'auteur
mûrissait, sa main, plus ferme et f>lus hardie,
jetait çà et là des traits critiques, des caractères
neufs, des passions sauvages qui variaient le
273 H013SSAYE
fond du tableau, mais sans jamais en altérer la laissa cm fils.
grâce première. » D'un autre côté, on lui reproche
un style parfois maniéré, prétentieux; il a du
trait et des mots fins, trop de concettis, des
négligences, des inexactitudes; mais de la verve,
de l'imagination, du sentiment, delà poésie. <* Son
talent, a dit M. Philarète Chasles, c'est un sourire
tempéré par une larme, un trait d'esprit mouillé
par un trait de sentiment. » M. Jules Janin, plus
sévère, l'a appelé « l'Hérodote du dix-huitième
siècle malade », et Théophile Gautier a dit dans
Le Moniteur que ses Portraits du Dix-huitième
siècle « sont autant de petits chefs-d'œuvre qui
resteront »
Après s'être essayé par quelques articles dans
les journaux , M. Arsène Houssaye publia sa
première œuvre importante,' La Couronne de
Bluets, qui eut du succès; la seconde, intitulée
La Pécheresse, acheva de le poser dans ce monde
de la littérature facile, qui se plaît surtout à la
peinture des mœurs légères. Depuis Jprs, il a pu-
blié bon nombre de romans, quelques-uns avec
M. Jules Sandeau. Plus tard il fit imprimer des
vers, et, en 1840, il fit un voyage en Hollande
pour y étudier l'école de peinture hollandaise.
De 1838 à 1843, il rendit compte des expositions
des beaux-arts dans la Revue de Paris. De 1844
à 1849 il dirigea le journal L'Artiste, qui avait été
créé par Achille Ricourt en 1831, mais qui était
loin de prospérer, M. Houssaye y appela ses an-
ciens amis, et le journal prit un essor brillant. Il y
a donné bon nombre d'articles sous le nom de lord
PUgrim. M. Arsène Houssaye n'en continua pas
moins de travailler pour la Revue de Paris, où il
commença sa Galerie de Portraits du Dix-hui-
tième Siècle. Bientôt M. Véron l'appela au Cons-
titutionnel. A la suite d'un second voyage en
Hollande, M. Houssaye publia une Histoire de la
Peinture flamande, qu'on adapta aux planches
gravées de l'ancienne Galerie Lebrun.
£n 1847, sur le point d'être nommé profes-
seur d'esthétique au collège de France, il prit part
aux banquets réformistes en présidant un banquet
d'étudiants. Après la révolution de février 1848,
il fonda un club, et se présenta contre Odilon
Barrot, aux électeurs de son département. Au
mois de novembre 1849, grâce à l'influence de
M lle Rachel, il fut nommé administrateur de la
Comédie Française. A cette époque il quitta la
direction de L'Artiste. Son administration du
Théâtre-Français, d'abord mal accueillie par les
artistes, qui voulaient rester en république, lut
pourtant très-heureuse; il sut retenir M Ue Ra-
chel , sans négliger d'autres éléments de succès;
de nouveaux talents d'écrivains se produisirent
sur notre première scène, et les recettes géné-
tales doublèrent.. Au mois de décembre 1851,
M. Arsène Houssaye accrut, dit-on, sa fortune
personnelle par d'heureuses spéculations. L'année
suivante, il composa pour M Ue Raehel des vers
pour saluer l'empire renaissant. En 1854, il per-
dit sa femme, qui était fort distinguée et qui lui
274
Le 30 janvier 1856 il a été rem-
placé par M. Empis comme administrateur du
Théâtre-Français , et nommé inspecteur-général
des œuvres d'arts et des musées des départe-
ments, position créée pour lui par l'empereur.
On a de lui : La Couronne de Bluets , ro-
man; Paris, 1836, in-8°; — La Pécheresse;
Paris, 1836, 2 vol. in-8°: ce roman a été réim-
primé sous le titre de Le Ciel et la Terre, his-
toire panthéiste, dans les Romans , Contes et
Voyages; —Les Aventures galantes de Mar-
got; Paris, 1837, in-8° : quelques exemplaires
de la troisième édition ont paru sous le titre de :
Les Galanteries de Margot, substitué par l'é-
diteur au titre primitif, que l'auteur fit rétablir
par autorité de justice; — Le Serpent sous
VHerbe; Paris, 1838, 2 vol. in-8° ; — La Belle
au Bois dormant; Paris, 1838, 2 vol. in-8°; —
Les Revenants (avec M. Jules Sandeau) ; Paris,
1839, 2 vol. in-8° ; — Fanny; Paris, 1840,
in-8° : la couverture porte Romans sentvmen-
tals, tome I er ; le tome H contient Les Aven-
tures galantes de Margot , et le tome Hl La
Couronne de Bluets; — Les onze Mattresses
délaissées; Paris, 1840, 2 vol. in-8 ô ; —Poé-
sies, les Sentiers perdus; Paris, 1841 , in-iî;
— Madame de Vandeuil (avec M. Jules San-
deau); Paris, 1842, in-8° : l'héroïne de ce ro-
man n'est pas la fille de Diderot; — Mademoi-
selle de Kerouare (avec le même); Paris,
1842, in-8°; — Études sur le Dix-huitième
Siècle : le Café de la Régence; Paris, 1842,
2 vol. in-8*; — Milla (avec M. J. Sandeau);
Paris, 1842, in-8°; — Marie (avec le même);
Paris, 1843, in-8'; — Madame deFavières;
Paris, 1844, 2 vol. in-8°; •— La Vertu de Ro-
sine; Bruxelles, 1844, in- 18 : d'abord publié
dans Le Constitutionnel; — Les Caprices de
la Marquise, comédie en un acte , jouée au
théâtre de l'Odéonle 12 mai 1844; Paris, 1844,
in-12; — Revue du Salon de 1844 ; Paris, 1844,
in-4°; — La Poésie dans les Bois; Paris, 1845,
in-18; — Romans, Contes et Voyages; Paris,
1846, 1847, in-12; — Histoire de la Peinture
flamande et hollandaise /Paris, 1846, in-fol.
avec 100 gravures sur cuivre; 2 e édit., 1847,
2 vol. in-8°; nouv. édit, 1857,*in-18; — Les
trois Sœurs; Paris, 1847, 2 vol. in-8° : ce ro-
man avait d'abord paru en feuilletons dans Le
Constitutionnel; — Voyage à Venise; Paris,
1849, in-12 : c'est le troisième volume des Ro-
mans, Contes et Voyages ;— Critique accom-
pagnant la suite de V Histoire du cheva-
lier Desgrieux et de Manon Lescaut ( avec
MM. Sainte-Beuve et J. Janin); Paris, 1847,
in-16; — Au Peuple des campagnes (23 arti-
cles composant la profession de foi. du candidat
à l'Assemblée nationale) ; Paris» 1848, in-8°; —
Galerie de Portraits du Dix-huitième Siècle,
4 e édition, revue et corrigée , l r ® et 2 e série ;
Paris, 1848, in-12; 6 e édition, Paris, 1857,
5 vol. in-18, contenant : Poètes et Philosophes;
275
HOUSSAYE — HOUSTON
276
Peintres et Musiciens; la Cour; le Théâtre;
— Poésies complètes; Péris, 1849, in- 12 : ce
volume renferme : Les Sentiers perdus, Cécile,
Silvia, Ninon, La Poésie dans les Bois, poèmes
antiques; — Philosophes et Comédiennes;
Paria, 1860, in-12; 4* édit, 1857, in-18 ; c'est
la 3 e série de la Galerie de Portraits du Dix*
huitième Siècle; — Fresques et Bas-Reliefs,
poèmes antiques ; Paris, 1851, in-18 \ — Le Re-
pentir de Marion; Paris, 1851, in-8°; — La
Comédie à la Fenêtre t écrite le matin pour
être jouée le soir; Paris, 1652, in-12; —
V Empire, c'est la Paix! stances dites par
M 11 * Racbel devant S. A. I. Louis-Napoléon
Bonaparte, le 28 octobre 1852; Paris, 1852,
in- 8°, en couleur; in4blR>; — Histoire du
41 e Fauteuil de V Académie Française ; Paris,
1855, in-8* ; 4 e édit, considérablement aug-
mentée; Paris, 1857) in-18; — La Pantoufle
de Cendrillon , illustrée de cent vignettes;
Paris, 1855, in-8°; — Histoire de l'Art en
France; recueil raisonné et annoté de tout
ce qui a été écrit et imprimé sur la peinture,
la sculpture, l'architecture et la gravure
françaises, depuis leur origine jusqu'à nos
jours; Paris, 1856, in-8 ;— Les Femmes
comme elles sont; Paris, 1857, in-18; — Voya-
ges humoristiques; Amsterdam , Paris, Ve-
nise; Voyage à ma Fenêtre ;Paris, 1857, in-18;
— Lo Violon de Franjole : romans , contes,
nouvelles; 5 e édit., 1857, in-18; — Œuvres
Poétiques : Les Romans de la Vie; Le Musée
des Poètes ; Le Paradis perdu ; La Poésie dans
les Rois , poèmes antiques , contes et légen-
des; nouv. édit, Paris, 1857, in-18; — Galerie
flamande et hollandaise, texte, in-fol.; 1857,
avec 32 planches gravées.
M. Arsène Houssaye a rédigé avec MM. Théo-
5 bile Gautier et Paul Mantz le texte de Les
Peintres Vivants. On cite encore de lui dans
divers recueils ; Mathilde; Marie de Joysel;
Cornille Schut ; le Joueur de Violon ; Lom-
proz et Marguerite; Rachel et Lucy ^L'Arbre
de la Science ( sous le nom de Voltaire) , etc.
Parmi les articles de L'Artiste , on remarque :
Prudhon, Voltaire. Il a travaillé au recueil in-
titulé Le Foyer de V Opéra : Les Coustou; la
Philosophie des arts; — au Fruit Défendu;
— à la Revue des Deux Mondes, où dl a donné
les Vanloo ( 1 er août 1842) ; Jacques Callot
( 15 septembre 1842) ; Boucher et la Peinture
sous Louis XV ( I e ' juillet 1843); Chamfort
(1 er juillet 1848); — à la Revue Démocrati-
que, en 1840, et a divers autres journaux. — On
trouve de lui dans la Bibliothèque des Feuil-
letons : L'Abbé Prévost et Manon Lescaut
(t. VII);— La Fontaine aux Loups (t. VIII) ;
— Mademoiselle de Marivaux ( tome XI ). —
Enfin, il a fait paraître au Moniteur : La Re-
cherche du Bonheur; et des lettres sur les
Musées de Province. Enfin il vient de publier
Le Roi Voltaire, un volume in-8°. C'est un pa-
radoxe historique comme l'Histoire du ki e fau-
teuil. L. Locvet.
Ch. RofciB, Galerie du Gens de Jjettres au Dix-neu-
vième Siècle. — Bug. de Mlrecotirt, Le$ Contemporains ;
Arsène Houssaye. — Diet. de ta Conversation. — Boor-
quelol, La Ut ter. franc, eoniemp. — 4. Janln tournai
dès Débats dei M et M tout im. - Théodore de Ban-
ville, Gâterie du Dix-neuvième tiède.
HOUSSAYB. Fop. An BU*.
HOU88RAU (Etienne), historien français né
au Mans dans les première* années du dix-
huitième siècle, mort le 6 octobre 1763. H ap-
partenait à la congrégation de Saint Maur, et il
a travaillé an tome XI des Mistoriens de
France. Mais ce qui est son titre principal à la
reconnaissance des érudits , c'est cet immense
recueil de pièces sur la Touraine , le Maine et
l'Anjou, qui, rassemblées sons sa direction , for-
ment aujourd'hui une des meilleures collec-
tions historiques delà Bibliothèque impériale. Les
diplômes occupant les neuf premiers volumes
du recueil; viennent ensuite de simples extraits
de oartulairts, un dictionnaire topographique,
une histoire des archevêques de Tours , une his-
toire des évoques d'Angers, une histoire de Tou-
raine, des dissertations, des -notes, etc. B. H.
B. taureau, Hist. tUUr. tu Mains, t. IV, p. ttt.
Housséix. Voyez Hossém et Hussein.
J hovston ( Samuel) t général, sénateur du
Texas au Congres, ancien président do Texas,
naquit dans le comté de Rockbridge ( Virginie),
en mars 1793. La vie de ce général est associée à
des événements qui resteront dans l'histoire, et
cependant ce n'est pas un homme supérieur;
mais c'est un type très-remarquable de ces
hommes de l'ouest, hardis, aventureux , am-
bitieux de renommée et de popularité, pleins
de ressources, et menant de front les aventures,
le roman et le progrès de la civilisation. Fort
jeune, il perdit son père, et sa mère alla s'établir
avec sa famille sur les rives dn Tennessee , alors
la limite de la civilisation dans l'ouest. Là , le
Mur sénateur ne put recevoir qu'une mince
éducation. Il passa quelques années parmi les
Indiens Cherokees , et y puisa des goûts et des
habitudes qui donnent a son caractère une cou-
leur originale. Au fond , il se sent bien plus
heureux au milieu des vastes forêts et des
prairies qu'au sein de la civilisation. Il débuta
par être commis d'un petit marchand , puis il
ouvrit une école. Ces occupations pacifiques ne
lui allaient pas. Il s'engagea dans l'armée, et
servit sous le général Jackson dans la guerre
contre les Creeks. Il s'y distingua beaucoup, et
à la fin des hostilités il était lieutenant. Cette
carrière fermée, il en essaya une autre. Il étu-
dia le droit et s'étabHt comme avocat à Nashe-
ville. C'est vers ee temps que commence sa vie
politique. Après avoir occupé plusieurs places
peu importantes dans l'État de Tennessee , il fut
en 1823 nommé représentant an congrès, et con-
tinua à y siéger jusqu'en 1827, année où il fut élu
J77 HOUSTON — HOUTMAJî
gouverneur de l'État En 1829, avant la fin
même du terme de sa place, il donna sa démis-
sion, et alla s'établir an milieu des Cherokees,
dans l'État à demi sauvage d'Arkanaas. Pen-
dant sa résidence au milieu dea Indiens, il put
voir de prêt les fraudes de tous genres dont
osaient les agents du gouvernement à l'égard
des pauvres Indiens. Il en foi ému de pitié et
d'indignation , et te rendit à Washington pour
les exposer et en obtenir justice. Sa mission gé-
néreuse eut peu de succès. Ses attaques contre
les coupables lui suscitèrent plusieurs procès en
calomnie. De dégoût, Il quitta la place et re-
tourna auprès de ses amis indiens.
Dans une visite qu'à fit au Texas, on lui de-
manda la permission d'user de son nom pour
une convention qui allait se former, afin de ré-
diger une constitution pour le Texas avant son
admission dans l'Union mexicaine. II y consen-
tit, et rat élu membre de l'assemblée à l'unani*
mité, lia constitution proposée fut rejetée par
Santa-Anna, qui avait alors le pouvoir. Le mé-
contentement des Texiens fut porté au comble,
quand on leuv demanda de livrer leurs armes»
Ils résolurent de résister. Une milice fut orga-
nisée, et Austin, le fondateur de la colonie» fut
nommé général en chef, poste où il fut bientôt
remplacé par Houston.
Ce général improvisé conduisit la guerre avec
vigueur et habileté, et la termina glorieusement
par la victoire de San-Jacintho (avril 183a),
Les Mexicains furent mis en déroute complète,
avec une perte de 700 hommes, tandis que lea
Texiens n'en eurent» dit-on, que 7 tués et 30
blessés» Santa-Anna lui-même tomba au pou-
voir des vainqueurs, et ses récentes cruautés à
la prise de la forteresse d'Alamo, défendue par
les Américains, avaient produit une si grande
irritation» qu'on eut bien de la peine a le sous-
traire à une vengeance sommaire. La même
année , l'indépendance du Texas fut reconnue
par le Mexique , et le général Houston inauguré
comme premier président de la nouvelle répu-
blique. A l'expiration de ces fonctions, comme la
loi interdisait une réélection immédiate, il devint
membre du congrès. En 1&41 il fut nommé de
nouveau président. Son projet favori était de
faire admettre le Texas dans l'Union Américaine ;
mais, malgré ses efforts , il acheva le temps de
son administration sans y avoir réussi. Ce ne
fut qu'en 1844, et après de vives discussions au
sein du congrès, que le Texas fut admis comme
État de l'Union. Le général Houston fut élu sé-
nateur, dignité dont il jouit encore. Deux on
trois fois, ses amis l'ont mis en avant comme
candidat à la présidence. Mais bien qu'il soit un
des chefs du parti démocratique qui est en pos-
session du pouvoir et de la popularité depuis
vingt-cinq ans, que lui-même soit populaire, sa
candidature n'a pas eu beaucoup de succès.
J. Chamjt.
American, Biographe* — Notés particulières
278
houstouh ou HoesTOM ( William ), bo-
taniste anglais , né vers 1695, mort en Amérique
en 1733. il partit fort jeune comme chirurgien
de marine, et parcourut diverses contrées de TA*
mérique. De retour en 1728, il se rendit à Leyde
et y suivit les cours de Boerhaave. De concert
avec van gwieten, il commença une série d'ex-
périences anatomiques, et reconnut que les ani-
maux ne peuvent plus vivre lorsque l'air pé-
nètre dans les cavités des plèvres. Houstoun fut
reçu membre de la Société royale de Londres
en 1739 ; il repartit presque immédiatement pour
le nouveau continent, et s'y livra à la botanique.
On lui doit la première description authentique
de la plante qui fournit la contra-yerva. On a
de lui Reliqui» Motutonianim, seu Planta*
rum in America meridionali çollectarum
Icônes s Londres, 1761, in-4". Cet ouvrage, orné
de 25 planches, a été édité par J. Banks. Il contient
les caractères de quinie genres et de onze espèces
originaires des environs de Venezuela. Grono-
vius a donné le nom de hwsionia à un genre
de rubiaoées dont toutes les espèces sont des ar-
bustes de la Caroline, delà Virfuûeetdu Mexique;
ce genre portait déjà un nom : o'était le bow
verdia de Saliab, A. pn L.
• MUnraphiê mMfeiUi.
boutbeim ( Ubêrt), poète latin belge, né à
Toogres, au commencement du seizième siècle,
mort en 15ÔJ. Entré de bonne heure dans la
congrégation des Hiéronoymites, il enseigna d'a»
bord les belles-lettres à Mon* , au Colleginm
Mondamm; plus tard il devint prieur dn cou-
vent de son ordre établi à Liège. On a de lui :
Ethiea ViteRatio; Liège, l673,in-4°; — Thea*
trurn Vitehumanx, comédie; Liège, 1574,
in-4°; — Gedeon, tragi-comédie; Liège» 1575,
in*4°;~*r Oratio in NatalemChrisli, vertu
heroico; Anvers, 1577, in-^; — KautoYsitvia,
seu de mala vicinla; Mons, 1580, in-8°; — -
Compendivm de Versibusfaciendis. £. G.
Foppens, BiblUXheca Belgica.
HOUTMAïf (Corneille), navigateur hollan-
dais, né à Alkmar (1), 'vers 1560, mort dans le
royaume d'Achem, vers 1605. Ses compatriotes
le considèrent à juste titre comme le fondateur
de leur commerce direct avec les Indes ; du moins
est-il constant que, le premier, il fit flotter le pa-
villon néerlandais dans ces contrées lointaines.
Jusqu'à lui les Hollandais étaient véritablement ,
pour le trafic des épices et des autres produc-
tions hindoues ou malaises, tributaires des Es-
pagnols et des Portugais ; les persécutions qu'ils
éprouvèrent dans les ports de la Péninsule , soit
de la part des gouverneurs royaux, soit de l'in-
quisition, les décidèrent à s'ouvrir des relations
avec les pays de production. Ils cherchèrent
vainement un passage au Cathay par le nord-est;
d'un autre coté , les caravanes par la Tartarie et
(1) Plusieurs biographe* français le font naître à Gouda;
nous avons préféré la version des auteurs hollandais.
279
HOUTMAN
280
la Moscovie présentaient tant de dangers et
étaient soumises à tant d'avanies de la part des
nombreux princes dont il fallait traverser les
possessions, que le commerce devenait impos-
sible. Houtman résolut de faire cesser cet état
de choses : ses affairesl'ayant appelé à Lisbonne,
il s'y informa soigneusement de tout ce qui con-
cernait le commerce des Indes et des routes
qu'une longue expérience avaient rendues fami-
lières aux Portugais. Sa curiosité parut indiscrète
aux autorités , dans un pays où il était sévère-
ment défendu aux étrangers de demander ou
recevoir des renseignements sur les pays trans-
atlantiques. Houtman fut jeté en prison et con-
damné à paver une amende fort au-dessus de sa
fortune , et qui n'avait ^té prononcée que pour
rendre sa délivrance impossible. La nécessité lui
inspira l'idée de s'adresser aux principaux mar-
chands d'Amsterdam , leur promettant pour prix
de sa liberté qu'il leur donnerait les moyens de
se frayer une route vers les Indes. Sa proposi-
tion fut acceptée et sa rançon soldée. En 1594,
de retour dans sa patrie , il ne pensa qu'à l'exé-
cution de sa promesse, sons le triple mobile de
l'intérêt, de la vengeance et de la reconnaissance.
Après avoir écouté ses rapports, les marchands
d'Amsterdam résolurent de former une société
sous le nom vague de Compagnie des Pays
Lointains, Les premiers directeurs (1) firent ar-
mer quatre bâtiments : le Maurice, La Hol-
lande , V Amsterdam et Le Pigeonneau , por-
tant ensemble 247 hommes d'équipage et 100
pièces de canon ou pierriers ; les capitaines étaient
Jan Jansz de Molenaâr, Jan Dignumsz, Jan Ja-
cobsz Schellinger et Simon Lambertsz Man.
Houtman dirigeait la flotte comme commis du
commerce ou subrécargue. La flottille mit à la
voile du Texel le 2 avril 1595. Le 16 on relâcha à
l'Ile de Maïo (lies du cap Vert), le 2 août près
du cap des Aiguilles, le 3 septembre à Sainte-
Marie de Madagascar, où les Hollandais durent
plusieurs fois combattre les naturels ; ils y sé-
journèrent jusqu'au 15 février 1596 : leur séjour
y fut marqué par de nombreux incidents. L'hos-
tilité des habitants et la mort de plusieurs de ses
compagnons décidèrent Houtman à se diriger
sur les Maldives, et le 1 er juin il était en vue de
Sumatra. Le 23 juin il entra dans le port
de Bentam, et ce même jour il fut reconnu
pour capitaine major de l'expédition. Il fut fort
bien reçu, du moins en apparence , par l'empe-
reur Raïa Dauma et ses principaux officiers ; car
ceux-ci, excités par les Portugais, tendirent di-
verses embûches aux Hollandais, que la vigilance
de leur chef empêcha seule d'être massacrés.
Cependant, le 28 août, Houtman ayant eu l'im-
prudence de se rendre avec sept hommes seule-
■ (1) Us étaient an nombre de dix: leurs noms méritent
d'être conservés : c'étaient Henri Hudde, Renier Paaw,
Pierre Hasselaar, Jean Jansz, Carel de Oude, Jean Pop-
pen, Henri Buyk, Dlrk van Os, Syvert Pletersi Sem, et
Arent van Grooteohuyze, . ■ ; ^.
ment chez lesabandar (gouverneur) de la viiie,
il fut aussitôt arrêté. Ses compagnons ayant
vainement réclamé sa mise en liberté vinrent
mouiller devant Bentam , prirent ou brûlèrent
les bâtiments qui s'y trouvaient, et commen-
cèrent à canonner la place. Houtman, menacé de
mort, supplia ses compatriotes de cesser les
hostilités : ils y consentirent à regret; cependant,
le 22 octobre, ils obtinrent la mise en liberté
du capitaine major moyennant une rançon de
deux mille réaies de huit. La guerre recommença
presque aussitôt, et dura jusqu'au 6 décembre,
où Houtman, voyant qu'il n'y avait ni honneur
ni profit à espérer dans ces parages, se dirigea
sur Jacatra. Là, les insulaires, après quelques
pourparlers, attaquèrent traîtreusement la pi-
nasse Le Pigeonneau, assassinèrent le capi-
taine Jan-Jacobsz Schellinger et une partie de son
équipage. Les Hollandais eurent un vif combat à
soutenir pour repousser leurs ennemis, auxquels
ils tuèrent plus de cent cinquante hommes; mais,
trop faibles pour tirer vengeance des Jacatrans,
ils levèrent l'ancre durant la nuit et atterrirent à
Madure. Le roi de cette lie et le chérif (chef de la
religion) demandèrent aux voyageurs la per-
mission de venir à bord; elle leur fut accordée,
et ces deux chefs s'y rendaient avec environ
trois cents des principaux seigneurs, leurs
femmes et leurs enfants, lorsque les Hollandais,
f craignant encore une trahison, ouvrirent tout à
coup un feu terrible sur les pirogues indiennes,
qui furent broyées en un instant; le roi, le
chérif furent au nombre des morts ainsi que la
plus grande partie de leurs familles. Vingt et an
Madurois échappèrent seuls au carnage. Houtman
? reconnut bientôt que ses hommes avaient agi avec
trop de précipitation: il relâcha les prisonniers;
mais, comprenant qu'il lui serait impossible de
renouer des relations commerciales après un pa-
reil massacre, le 11 il toucha à Laboc (la petite
Madure). Le 25 décembre Jan de Molenaâr, capi-
taine du vaisseau le Maurice, et qui avait corn*
mandé l'expédition jusqu'à Bentam , mourut su-
bitement; l'autopsie de son cadavre prouva qu'il
avait succombé au poison. Houtman, qui avait
été continuellement en querelle avec Molenaâr,
et qui même s'était battu avec lui, fut hautement
aceusé de ce crime* Une révolte s'ensuivit, et
le 27 le capitaine major fut mis aux fers par l'é-
quipage de son propre vaisseau ; néanmoins, le 30
il fut absous par le conseil des officiers supérieurs,
et réintégré dans son commandement. Le 11 jan-
vier 1595 il reconnut que le nombre des matelots
était devenu insuffisant pour le servicedes quatre
navires, et fit brûler Limiter dam comme difficile
à manœuvrer. Le 18, il fit aiguade à Bali,et fut
parfaitement aecueilli du foi et des habitants. Le
26 février Houtman reprit la mer, et ne s'arrêta
plus que le 10 août sur les côtes de Hollande,
après un voyage de vingt-neuf. mois. Les équi-
pages réunis ne comptaient plus que quatre-
vingt-neuf hommes, encore la plupart scorbu-
281
HOUTMAN
282
tiques. On le voit, cette expédition était loin
d'avoir rapporté à la Société des Pays Lointains
les bénéfices qu'elle avait espérés ; mais c'était
le premier pas fait dans une nouvelle carrière ;
désormais la voie des Indes était ouverte aux
Hollandais : ils ne l'abandonnèrent plus. Dès
l'année suivante les négociants de Middelbourg
armèrent deux vaisseaux,£e Lion et La Lionne,
dont ils donnèrent le commandement à Hout-
man. Cette seconde expédition fut encore plus
désastreuse que la première, et son chef ne pa-
rut pas avoir profité des leçons qu'il avait reçues
dans les Maldives. On lui donna pour pilote l'ha-
bile Anglais John Davis (vgy. ce nom) : ils
mirent à la voile le 15 mars 1798, et leur navi-
gation fut rapide et heureuse jusqu'à Madagascar,
où ils firent aiguade; ils visitèrent ensuite les
Comores, les Maldives, la Cochinchine, et le
21 juin 1799 mouillèrent en rade d'Àchem (fie
de Sumatra;). Ils se chargèrent assez facilement
de poivre et d'autres épiées ; mais, au moment de
leur départ, le roi ayant invité Houtman à une
fête d'adieu , ses gardes apostés se ruèrent sur
les Hollandais, en tuèrent plusieurs et firent
prisonnier le commandant, son frère Frédéric
et* neuf de leurs compatriotes. Les équipages des
deux vaisseaux zélandais, privés d'nne partie de
leurs officiers, et craignant une attaque imminente,
levèrent l'ancre aussitôt et s'enfuirent àMalacca ;
ils touchèrent aux lies Nicoban et à Ceylan, et
rentrèrent à Middelbourg le 29 juillet 1600. Le
29 décembre suivant, le général Paul van Carden
et le subrécargue Adam Vlaming , trafiquant en
rade d'Àchem, virent arriver cinq des Zélandais
prisonniers : ces hommes venaient de s'échapper
de la forteresse de Pédir, où étaient encore dé-
tenus Houtman et quelques autres. Le 31 Hout-
man vint lui-même à bord avec trois Hollandais.
Vlaming obtint facilement du roi la liberté des
fugitifs; mais, à l'instigation d'un prêtre espa-
gnol, le monarque revint sur sa parole; il fit
enlever de nouveau Houtman, et le fit transpor-
ter dans l'intérieur des terres ainsi qu'un nommé
Hans Decker, qui servait d'interprète. Van Car-
den essaya vainement de se faire rendre par la
force ces deux malheureux. H s'empara de tous
les bâtiments qui se trouvaient dans le port , et
offrit de les échanger contre les prisonniers : le
roi préféra les laisser brûler. Depuis lors on
n'entendit plus parler de Houtman, et on ignore
l'époque et le genre de sa mort. Durant sa cap-
tivité il s'était occupé d'observations astrono-
miques il les remit à Vlaming. Il signalait no-
tamment plus de treize cents nouvelles étoiles
qui/dans la suite, furent groupées en treize cons-
tellations nouvelles.
La relation du premier voyage d'Houtman a
été publiée en hollandais à Amsterdam et à Mid-
delbourg, 1598, in-fol. Elle fut traduite en latin
sous le titre de JHarium nauticum Itineris
Batavorum in Indiam Orientaient, annis
1595, 1597, Amsterdam, in-fol. ;Arnheim, in-4°,
fig.; en français, Premier Livre de V Histoire de
la Navigation aux Indes Orientales par les
Hollandais et des choses à eux advenues,
Amsterdam, 1606, in-fol., fig. et cartes. Elle fait
partie du recueil hollandais intitulé : Histoire
du Commencement et des Progrès de la Corn-
pagnie des Indes des Provinces-Unies des
Pays-Bas, contenant les principaux voyages;
Amsterdam , 1646, in-fol., ou 2 vol. in-4°, avec
fig. Cet ouvrage a été souvent traduit en fran-
çais, et donne des notions fort curieuses sur les
premières expéditions des Hollandais et sur les
pays qu'ils visitèrent. Alfred de Lacaze.
Recueil des Voyages qui ont servi à l'Établissement et
aux Progrez de la Compagnie des Indes orientales for-
mée dans les Provinccs-Vniet des Pays-Bas ( Rouen ,
17*8, 10 vol. ln-8», avec cartes et flg.}, t. I««\ p. «3-436;
t. Il; p. 1-158, t. III. Voyage de P. van Carden, etc.,
p. 176-196. — J.-P.-J*. Du Bois, fies des Gouverneurs gé-
néraux aux Indes Orientales; La Haye, 1768, ln-t°,flg.
et cartes; Introduction, p. 4-6. — Raynal, Histoire
Philosophique des deux Indes . t. II, p. 14 et 15. — Gro-
tfus, Historia, I. XI. - Histoire de ta Conquête des Mo-
luaues, t. III, p. 86.
houtman ( Frédéric ), navigateur hollandais,
frère du précédent, né vers 1570, mortvers 1613.
Il suivit la carrière du commerce et de la navi-
gation , et accompagna son frère dans son se-
cond voyage aux Indes orientales de 1598 à 1600.
Il fut pris avec lui par le roi d'Achem et en*
fermé dans la citadelle de Pédir. 11 s'enfuit avec
son frère, et vint trouver Paul van Carden dans
la rade d'Achem le 31 décembre 1600; mais
comme il était fort malade, il refusa de retour-
ner à terre et évita ainsi une longue captivité.
Il occupa divers emplois au service de la Com-
pagnie des Indes, et le 12 novembre 1619 (1)
fut nommé gouverneur d'Amboine. Ce fut sous
son gouvernement qu'eut lieu la conquête défi-
nitive des Moluques par les Hollandais et mal-
gré l'opposition armée des Anglais. Frédéric
Houtman contribua beaucoup à la pacification
de ces lies. Il parait avoir succombé, jeune en-
core, à l'influence pernicieuse du climat, car dès
1624 van Speult gouvernait à Amboine. Hout-
man a laissé une bonne description d'Amboine;
— quelques observations astronomiques f
— et Spraakende woord-boek in de ma-
leische ende madagarschetalen met vêle ara-
(l) Et non en l607,cotnme l'écrit Eyriès dans la Biogra-
phie universelle de Mlchand. Houtman fut nommé par le
gouverneur général, Jean Pietersz Coen, en remplace-
ment de van den Brocek, qui se plaignit amèrement de
ce changement. Coen lui écrivit la singulière lettre qui
suit : « Je sais surpris que vous vous formalisiez si fort
de l'arrivée de M. Houtman auprès de vous, et que vous
vous oubliiez en quelque façon vous-même. Vous de-
vriez user de plus de réflexion , et considérer qu'il sied
mieux au subalterne de plier qu'an supérieur. La lune
domine bien sur la nuit ; cependant lorsque le soleil se
montre, n'est-elle pas obligée de céder? Bn reste-t-elle
moins la même! Bile ne perd rien de sa dignité; mais
elle attend son temps el ne cherche point à troubler
l'ordre de la nature. Le paysan cède an gentilhomme ,
le gentilhomme au comte, le comte au duc, le duc au
roi, le roi à l'empereur, l'empereur à Dieu, et Dieu A
toutes choses avec une certaine harmonie et nn certain
ordre. Jacatra, >8 novembre 1619.>
283
HOIJTMAN — HOVE
284
bische en turksche woorden; Amsterdam,
1603, in-4* : c'est un dictionnaire des langues
malaie et malgache. A. de L.
Recueil des reloges qui ont ont servi à rétablissement
des Hollandais dan* les Indes, etc.; t III , Voyage de
P. van Carden , p. 181. — Dubois, Fie des Gouverneurs
généraux hollandais aux Indes Orientale» ; Introduction*
p. 6 et M.
houtteyillb ( Alexandre-Claude- Fran-
çois) , littérateur français, né en 1686, à Paris, où
il mourut le a novembre 1742. Il entra dans la
congrégation de l'Oratoire, qu'il quitta pour être
attaché comme secrétaire au cardinal Dubois,
Le succès qu'il avait obtenu dans des confé-
rences tenues à Tours sur divers points de l'His-
toire Sainte, lui donna l'idée d'un ouvrage qu'il
publia en 1722 sous le titre ; La Vérité de la
Religion Chrétienne prouvée par les faits ,
précédé d'un Discours historique et critique
sur la méthode des principaux auteurs qui
ont écrit pour ou contre le Christianisme de-
puis son origine; ln-4°. Cet ouvrage, auquel
le Journal de Trévoux (t. V) donna de grands
éloges , eut d'abord beaucoup de succès ; mais il
souleva bientôt de nombreuses critiques, qui lui
reprochaient le défaut de méthode, des inexacti-
tudes sur divers points de doctrine, des omissions
graves, des arguments trop faibles contre les rai-
sonnements des incrédules présentés avec trop de
force; une élocution maniérée, pleine de néolo-
gismes et de chutes visant à l'épigramme. V. Four-
mont et Souchay l'attaquèrent, le premier dans
sa Lettre d*lsmael Ben Abraham Juif converti,
l'autre dans la Bibliothèque Française (t. It,
2 e partie ), où il fit insérer une lettre toute com-
posée, des expressions singulières qu'avait em-
ployées l'auteur. Mais la critique la plus impor-
tante fut celle de l'abbé Desfontaines, dans vingt
Lettres à Vabbé Houtteville. Celui-ci répondit
par une Lettre à M*** au sujet de quelques
difficultés sur le livre de « La Religion Chré-
tienne prouvée par les faits, » 18 mars 1722.
Du reste , toutes ces critiques n'empêchèrent
point l'Académie Française d'admettre Houttê-
ville au nombre de ses membres, le 23 février
1723, et de le nommer son secrétaire perpétuel
le 27 février 1742. A la fin de l'année 1723 il fut
aussi nommé abbé de Saint-Vincent du Bourg-
en-mer, diocèse de Bordeaux. Il profita des cri-
tique* qui lui parurent fondées lorsqu'il donna
une seconde édition, en 1740, 3 vol. in-4*.
Ainsi on lui avait reproché d'avoir défendu les*
faits contenus dans les Évangiles avant d'avoir
prouvé l'authenticité des Évangiles eux-mêmes;
et il consacra cinq nouveaux chapitres à cette
controverse. L'ouvrage fut réimprimé en 1749
et 1765, en 4 vol. in-12, sous ce titre : La Reli-
gion Chrétienne prouvée par les faits, ete.
Houtteville est, en outre, auteur d'un Essai
philosophique sur la Providence; 1728, in-12.
Houtteville a donné aux mémoires de littérature
du P.Desmolets une Dissertation sur la préfé-
rence à donner à Hérodote sur C testas, et
une autre Sur la Religion de Chalcidius, conti-
nuateur de Timée, et une réponse à'ia réfuta-
tion qu'on avait faite de cette dissertation. Enfin,
on a de lui quelques discours académiques,
entre autres les Éloges de Bossuet et du maré-
chal de Villars. . , G. ne F.
Son Éloge par Marivaux, Recuett.des Harangues pro
noncèes par les membres de l'Académie française, t V
— Morérl, Dictionnaire Historique, — Sabatier, Troi-
sième Siècle Littéraire. - Jaurnal de Trévoux* Jotn et
août 1711.
tiQUWALD ( Christophe- Ernest, baron de),
poète dramatique allemand, né à Straupitz (basse
Lusace), le 29 novembre 1778, mort le 28 jan-
vier 1845. II étudia à Halle, où il se lia avec
Contessa. Au sorte de l'université, il prit part
aux affaires de sa province; puis, en 1815, par
suite de la nouvelle organisation de la basse Lu-
sace, il se retira complètement de la vie officielle.
Néanmoins, il fut nommé, en 1822, syndic de ta
province j il alla demeurer alors à Lûbben , où 11
mourut. 11 cultivait depuis longtemps la poésie.
Après avoir publié dans les journaux quelques
essais poétique! sons, lé pseudonyme d'Ernest
de Wa\hy4o (anagramme , de son nom ). D
fit paraître : Momantische Accài'de (Accords ro-
mantiques), 2 vol. \ Berlin, l$l?; — Die Frets-
tatt {La Ville libre); — m Heimhehr (Le
Retour) ; 1821 i — Dos Bild ( Le Portrait) ; -
Fluch und Segen ( Bénédiction et Malédiction) ;
— Der Fiirst und der Burger (Le Prince et le
Bourgeois) ; Leipsig, 1623; — DieFeinde (Les
Ennemis ) ; Leipzig, 1825 ; — Die Ràuber ( Les
Brigands).} Leipzig t 1830; — Vermischte
Schriften (Écrite mêlés) ; Leipzig, 1825 ; —BU-
derfiir die Jugend ( Portraits pour la Jeunesse) ;
Leipzig, 1829-1892 et 1839. ' V. R.
Cmv.-Lemit.
hovb ( Antoine vàn ) , en latin Antonius
JJovsaus, poète latin et historien hollandais, né à
Sgtnond (Nord-Hollande) (1), vers 1505, mort
dans l'abbaye d'Epternacb, le 8 octobre 1568 (2).
Il ât profession chez les Bénédictins du lieu de
sa naissance, et se livra avec assiduité aux tra-
vaux historiques et littéraires. Philippe II le
nomma abbé d'Epteroacb (Luxembourg), en
1583. Hove mourut dans cette dignité. Quel-
ques heures avant d'expirer, il composa lui-
même son épitapbe (3) :
On a de lui : Zuermondius, vel de temporis
nostri statu, ac conditione dialogus, for-
tasse obamabilem rerum vatietatem non in-
jucundus; Leyde, 1£63, in-12. L'auteur y rap-
porte un entretien qu'ils eurent lui et son frère
(l) C'ett à tort que Jacquet de ta Torre le fait naître
à Wurmer. Van Hove dans le titre de placeurs de ses
ouvrages ajoute à son nom Hstcmundanus.
(t) C'eut la date Inscrite aur son tombeau ; on ne sait
pourquoi Sweert Je fait mourir le f septembre.
(S) fille est ainsi conçue :
Hic Jacet excelsl pneceptor amoris Horaras,
Exspeetaqoe sut Judlela ora Del.
Urna ferait flores, ▼ entent atque omaia dreua :
Corpoa uumt eubltet, mena cotet alta polos.
285
HOVE — HOVEL
286
Théodore avec un philosophe chrétien nommé
Pierre Zuennend, la veille de la mort, de ce
dernier, il prête à Zuermond des discours assez
disparates sur la Providence divine, l'immorta-
lité de rame , les hérésies du seizième siècle ,
les grands hommes du temps , etc. On trouve
dans cet ouvrage quelques documents utiles
pour la biographie et l'histoire générale; — De
Arte amandi Deum : accessit Odarum, Hym-
norumac Precum Liber; Cologne, 1566, in-lft*
—-Historié van de édile welrqeboreneHeereth
ende Graven van Egmond^etc. (Histoire des
Seigneureet des Comtes d'Egmond) ; 1630, in-12,
goth. ; seconde édition, augmentée d'un Cota*
logue des Abbés d'Egmond, avec leurs Vm
en abrégé, et quelques Épitaphes des anciens
comtes de Hollande, etc. ; Harlem, 1664, in-4° ;
— plusieurs Chronologies de maisons nobles des
Pays-Bas et diverses poésies latines. A. L.
Préface de Zuermondius , feuillets i, xxxvm et
xxxix. — Sweert, Rer. Belgie. Annal, p. 1M,1M. —
Val. André, Bibliatkeea Belçica, p. 67-68. - Foppens,
BibliotheÔa Belgica, p. 79*80. — Van Heussen, Historia
Episc. Harlem., p. 76. — Jacques de LaTorre.
hovbdrn ( Roger de), historien anglais, né
dans le comté d'York, vivait vers la fin du dou-
zième siècle; il fut chapelain d'Henri H, et rem-
plit auprès de ce monarque d'importantes fonc-
tions diplomatiques. Ses Annales Rerum Angli-
carum forment une continuation de l'histoire
ecclésiastique de Bède, et s'étendent de l'an 731
à l'an 1202 ; cette production a de l'importance,
surtout lorsque, vers la fin de son œuvre, l'écri-
vain parle d'événements qu'il a dû bien con-
naître ; an commencement il ne fait guère que
copier d'autres chroniqueurs. Ces Annales se
trouvent dans les Rerum Anglicarum Scrip-
tores, édités par Sa vile; Londres, 1596, p. 230-
471. H s'en rencontre des extraits dans les
Scriptores Brunsvicenses, édités par Leibnitz,
t. I, p. 846-880. 6. B.
Vosstos, De HUtortcii laUMs, H, M. - Cave . Scrip-
iore* ecclaiattici. L II, p. «s, - Fabriclus, biblioth.
Latina MediijEvi, 1. 111. p. Wt.~ Recueil de» Historien»
des Gantes, t. XI, p. LXXX ; t XIII, p. M.
HOTEL, BÔVBLRE(l), en latin Hevblius,
célèbre astronome allemand , né à Dantzig, le
28 janvier 1611, mort le 28 janvier 1687. Fils
d'un riche brasseur, il fut d'abord destiné au
commerce; plus tard, sur le conseil de quelques
amis de sa famille, il étudia le droit ; mais bien-
tôt il sentit se développer en lui une véritable
passion pour les mathématiques. Il y était en-
couragé encore par son maître, P. Krùger, qu'il
aidait dans ses observations astronomiques. H
s'occupait aussi à tailler et à polir le verre, et
à faire, pour son propre usage, des instruments
de précision. Désireux de se perfectionner dam)
ses études et de se mettre en relation avec les
(1) Moml et aon dirtoatil Hovelke soit les Trait
noms du célèbre astronome, ainsi que l'attestent la si-
gnature de ses lettres écrites en allemand.
\ savants de son temps, il visita les principales
i contrées de l'Europe j il séjourna une année à
Londres, et suivit les cours de J. Wallis, de
Jacques Usher, de J. Hartlieben, et d'autres
fondateurs futurs de la Société royale de Londres.
A Paris, il se lia d'amitié avec le P. Mersenne,
avec Gassendi et Bouillaud, comme le témoigne
sa correspondance. Le P. Kircher, qu'il connut
à Avignon, devint aussi un de ses amis et corres-
pondants» Ces voyages lui fournirent en même
temps l'occasion de quelques observations
d'éclipsés de Soleil. En quittant la France,
il se disposait à visiter l'Italie, où il désirait faire
connaissance avec Galilée, lorsque ses parents
le rappelèrent auprès d'eux. Hovel fut de retour &
Danùig en 1634, après quatre a îs d'absence.
Seul survivant de ses frères, il géra la brasserie
de son père, fort âgé, devint un des magistrats
de sa ville , et épousa, à vingt-quatre ans, la
fille d'un riche négociant, Catherine Rebaschke,
dont il n'eut point .d'enfants. Sur le conseil de
son maître mourant,' il consacra tous ses loisirs
à l'étude de l'astronomie, et débuta le l« r juin
1639 par une observation soignée d'une éclipse
de Soleil. Ce phénomène lui donna l'idée de se
vouer particulièrement à l'étude de la Lune et à
dresser les premières cartes sélénographiques.
Il avait pour cela toutes les qualités requises : une
vue excellente, une main habile au dessin et à
la gravure, une patience à toute épreuve et une
grande dextérité à travailler le verre. Son talent
d'opticien le mit» en outre, à même de se fabriquer
pour son usage d'abord deux lunettes, l'une de
six et l'autre de douze pieds de longueur, qu'il lui
aurait été alors impossible de se procurer à prix
d'argent. Mais à la nouvelle que Gassendi, son ami,
avait aussi le projet de faire des cartes lunaires,
Hovel voulut renoncer à son travail : ce ne fut
qu'à la prière de Gassendi, lui assurant qu'il
abandonnait son projet, que Hovel reprit sa sé-
lénographie. U agrandit le plan qu'il s'était d'a-
bord tracé : au lieu de se borner à une carte de
la pleine Lune, il dessina toutes les phases lu-
naires. Ce travail l'occupait nuit et jour : Les
observations qu'il avait faites la nuit, il les gra-
vait le jour au burin sur cuivre. Lus planches
ainsi obtenues sont remarquables de netteté ; la
gravure à l'eau -forte, plus expéditive, n'aurait
pas donné le même résultat. Après cinq ans de
veilles laborieuses et patientes, il publia, à ses
frais, l'important ouvrage : Selenographia, sive
Lunas descriptif, atque accurata tam ma-
culorum ejus quant motuum diversorum
aliarumque omnium vicissitudinum pha-
siumque, telescopii ope deprehensarum , de-
Uneatio ; Dantzig (Gedani), 1647, in-fol. Dans
les deux premiers chapitres, l'auteur traite de
la fabrication des verres (lentilles); il insiste
sur la nécessité de se procurer un verre très-
pur, bien homogène, exempt de bulles et de rai-
nures, et sur lequel les lentilles (convexes) doivent
être d'une épaisseur égale aux bords. « On en
287
HOVEL'
288
reconnaît, dit-il, le.défaut, lorsque les centres ne
se correspondent pas parallèlement des deux
cotés (centra ab utroque latere non sibi
icopaXX^Xœç correspondent), et un télescope,
fait avec de pareils verres, ne peut être d'aucun
usage. » Ce que Hovel appelle télescope (teles-
copium) était un instrument dioptrique, une
Traie lunette, où le Terre concave était tourné
vers l'œil et le Terre convexe vers l'objet. Son
polémoscope, ainsi appelé parce qu'il le croyait
utile pour des reconnaissances militaires, était une
lunette catadioptrique, dont le tube est, au-delà
du milieu, coudé à angle droit ; dans cet angle
est placé un miroir incliné de manière à recevoir
l'image des objets par la plus longue portion du
tube et à la réfléchir par la portion la plus pe-
tite, où elle est reçue par une lunette. Les deux
premiers chapitres de la sélénographie sont d'un
grand intérêt pour l'histoire de l'optique. Les
suivants sont consacrés aux observations que
l'auteur a faites avec ses télescopes sur les étoi-
les, la voie lactée, les planètes, le Soleil et parti-
culièrement sur la Lune (pag. 109-495), qui était
le principal but de son travail. Hovel augmenta,
le premier après Galilée, le catalogue des
étoiles, surtout de celles qui sont situées dans le
zodiaque. De ce que les étoiles ne sont pas gros-
sies par le télescope, il en déduisit leur éloigne-
ment excessif, comparativement à celui des
planètes. Leur scintillation ou ce qu'il appelait le
tremblotement des rayons adventices (tremulus
motus radiorum adventitiorum) lui semblait
montrer que leur lumière n'est pas empruntée
du Soleil, comme l'est celle des planètes, mais
que c'est une lumière propre, native (lumen
proprium, a Deo nativum ). Quant à l'exagé-
ration dn diamètre des étoiles, due à leur scintil-
lation, il croyait y remédier ou du moins rendre
leurs disques plus nets et bien arrondis, en
plaçant devant l'objectif un diaphragme percé
d'un trou rond de très-petit diamètre ; ce qu'il
gagnait ainsi en exactitude par l'affaiblissement
de la lumière des étoiles , surpassait de beau-
coup ce que lui faisait perdre l'inflexion 1 des
rayon3 aux bords du trou circulaire du dia-
phragme. Hovel trouva ainsi pour le diamètre de
Sirius, 6"3 et pour celui de la Chèvre, 6'';
valeurs angulaires qui donneraient à ces astres
au moins 228 millions de lieues de diamètre, en
supposant qu'à la distance des étoiles les plus
voisines de nous une seconde de diamètre cor-
respondrait au moins à 38 millions de lieues
(valeur du second grand axe de l'orbite terrestre).
Or, ces grandeurs sont évidemment exagérées,
comme le prouvent les observations des pa-
rallaxes, dans lesquelles les diamètres apparents
ne joHent plus aucun rôle. — Hovel observa
le premier les phases de Mercure; Galilée n'a-
vait pu voir, avec ses lunettes, que les phases
de Vénus. L'astronome allemand observa, le
3 mai 1661, le passage de Mercure sur le disque
du Soleil, phénomène qui intéresse particulière-
ment les astronomes, parce qu'il leur permet de
calculer avec une très-grande approximation l'or-
bite de la planète. Comme, d'après les tables de
Longomontanus, ce passage devait avoir lieu le
1 er mai, d'après les tables Rudolphines le 3 mai,
et d'après les Alphonsines le 11, il* s'imposa la
tâche d'observer tous les jours le Soleil depuis le
1 er jusqu'au 11 mai; et il trouva que les tables
Rudolphines avaient indiqué le passage de Mer-
cure de H heures trop tôt. C'était le troisième
passage arrivé depuis l'invention des lunettes : ie
premier avait été observé le 7 novembre 1631, à
Paris, par Gassendi, qui recevait l'image solaire
sur une feuille de papier blanc, dans une cham-
bre obscure, d'après le procédé employé par
Scheiner pour suivre les taches du Soleil ; on se
rappelle ce que disait à cette occasion le célèbre
philosophe : « J'ai vu ce que les alchimistes
cherchent depuis si longtemps en vain : j'ai tu
Mercure dans le Soleil » ( le soleil étant l'or et le
mercure le métal qui porte encore ce nom). La
seconde observation de ce phénomène est due à
Skakerœus, en 1631, qui avait fait pour cela le
voyage de Surate dans l'Inde. Hovel, au lieu de
viser directement à l'astre, se contentait, comme
Gassendi, d'examiner l'image agrandie du Soleil
dans une chambre obscure. Les satellites de Ju-
piter furent soumis par lui à des observations
nouvelles et plus exactes que celles de Galilée et
de Marins. Quant aux cinq nouveaux satellites
que le P. Antoine deRheita prétendait avoir dé-
couverts le 29 décembre 1642 (ce qui en aurait
porté le total à neuf), il les mit avec raison sur le
compte de quelques étoiles du voisinage. Dans
une observation rapportée à 1647, l'astronome de
Dantzig vit Jupiter sans bandes. Cette absence
intermittente de bandes fut depuis constatée par
d'autres astronomes, notamment par Herccnel
en 1793. Saturne fut pour Hovel comme pour
Galilée une véritable pierre d'achoppement. Vers
1640 il déelara qu'il ne comprenait rien aux phé-
nomènes que cette planète lui présentait. Plus
tard, elle lui paraissait composée de trois parties:
d'une partie centrale, elliptique, et de deux parties
latérales, plus petites, simulant des espèces d'an-
ses (brachiola), en forme de lunules, ou de crois-
sants attachés par leurs pointes au corps central,
dont un intervalle vide les séparait : il expli-
quait la phase ronde de la planète en supposant
que les deux lunules qui raccompagnent ont été
transportées, par un mouvement de rotation, l'un
devant, l'autre derrière son disque. — De 1642
à 1645, Hovel observa assidûment les taches du
Soleil, ce qui lui permit d'estimer la rotation du
Soleil autour de son axe à 27 jours. L'astre cen-
tral était selon lui un glohe incandescent, en-
touré d'une atmosphère analogue à celle de la
Terre, et les tâches proviendraient de la conden-
sation des vapeurs dans cette atmosphère.
La lune fut, pour le répéter, l'objet principal des
travaux d'Hovel. Ses cartes, offrant jour par jour
toutes les phases croissantes et décroissantes,
289
HOVEL
290
sont un modèle d'exactitude (i). Galilée avait le
premier remarqué que les sommets des plus hautes
montagnes delà Lune se dessinent, particulière-
mentaux quadratures,comme des points lumineux
détachés du bord éclairé; et, pour une hauteur
d'environ 8,900 mètres il évalua à un vingtième
du diamètre du disque l'intervalle obscur qui sé-
pare ces points lumineux du bord éclairé. Hovel
le réduisit à un vingt-sixième, ce qui porte les plus
hautes montagnes à environ 5,200 mètres (2).
II crut aussi avoir remarqué que la phase dé-
croissante de la Lune .est moins éclatante que sa
phase croissante, ce qui semblerait indiquer
que la partie occidentale du disque lunaire est
plus propre à réfléchir la lumière du Soleil que
la partie orientale. Hovel décrivit très-bien les
causes de la libration optique, en vertu de la-
quelle les taches lunaires voisines du bord s'en
éloignent, disparaissent et reviennent dans l'hé-
misphère visible. Pour expliquer ce phénomène,
il faut se rappeler que c'est seulement au centre
de la Terre que la Lune présente toujours la
même face , et que c'est de la surface du globe
terrestre que nous l'observons; les contours lu-
naires différeront donc plus ou moins, suivant
que les lignes menées au centre de la Terre et à
un point de sa surface formeront entre elles des
angles plus ou moins grands. Hovel voulut d'a-
bord donner aux montagnes delà Lune les noms
des philosophes et astronomes célèbres (ce que
fit plus tard Riccioli); mais il renonça bientôt à
cette idée, dans l'appréhension de provoquer des
sentiments d'envie et d'inimitié plutôt que de
reconnaissance: Videbar facile fieri posse ut,
cum ista nomenclatura gratiamcolligere vel-
lem, invidiam atque inimïcitiam mihi fore
conflarem (3). C'est cependant la nomenclature
de Riccioli qui fut définitivement adoptée depuis.
Hovel admet qu'indépendamment de la lu-
mière réfléchie du Soleil , la Lune a une lumière
propre, quoique très-faible : « Ce qui le prouve,
dit-il, c'est que pendant les éclipses qui ont
lieu à l'apogée , lorsque l'ombre de la Terre ,
étant plus éloignée du Soleil, est plus poin-
tue (acutior), la Lune parait plus nettement
rouge (rubicundior aliquantulumque luci-
dior) que durant une éclipse au périgée, où
elle parait plus obscure ( obscurior subnigrior-
que) (4) ». Il croit, comme Galilée, que la Lune
est propre à être habitée , mais par des animaux
et des plantes entièrement différents des nôtres
(t) Noos avons pu nons-méme vérifier l'exactitude asses
grande des cartes sélénographiques d'Hovel a l'aide d'une
excellente lunette ( grossissant 90 fois), sortie des ateliers
du successeur de Frauenhofer, et qui a figuré à l'Exposi-
tion universelle de 1886.
(1) Les taches circulaires dont la Lune est'parsemée, et
qui paraissent comme des coquillages ronds incrustés
dans une pâte blancbe, sont, suivant Hovel, des vallées
qui ne paraissent aussi régulières qu'à cause de leur
grand éloignement , qui nous empêche d'en voir les irré-
gularités, i
(S) Selenoçraphia, p. M«.
(4)/Md. t p. 116.
WOUY. BlOCa. GÉNÉR. — T* XXV.
en grandeur et en qualités. « Parce que, ajoute-
t-il, nous n'y apercevons aucun être, il ne -s'en-
suit pas qu'il n'y en ait point. Un homme élevé
'dans une forêt, au milieu d'oiseaux et de qua-
drupèdes, pourrait-il se faire une idée de l'eau
et des animaux sans pieds qui y vivent (1) » ? —
Par une singulière loi du développement de l'es*
prit humain que nous avons souvent signalée ,
l'homme croit d'abord ce qu'il imagine; puis il
],ne veut plus croire ce qu'il ne voit point.
Encouragé par l'accueil fait à son œuvre, Hovel
continua avec plus d'ardeur encore son étude du
ciel, malgré ses fonctions de syndic de sa ville na-
tale, qu'il remplissait depuis 1641. Pour aug-
menter le pouvoir amplificatif de ses instruments;
il ne trouva malheureusement d'autre moyen
que de faire des lentilles d'oculaire dont la dis-
tance focale dépassait celle des objectifs ; de là
' des tuyaux d'une longueur telle ( il y en avait de
150 pieds), qu'il lui fut presque impossible de les
empêcher de se plier et de les monter convena-
blement. La renommée de l'astronome de Dant-
zig se répandit dans toute l'Europe. Les sa-
vants, les ambassadeurs et les princes étaient
curieux de visiter son observatoire. Au premier
rang des savants qui firent tout exprès le voyage
à Dantzig figurent Halley et Is. fiouillaud. En
1660 il reçut aussi la visite de Jean Casimir, roi
de Pologne , auquel il offrit une horloge à pen-
dule , qu'il avait lui-même construite, sans avoir
eu connaissance de l'invention de Huygens.
En 1677 Hovel obtint de Jean HI Sobieski, qui
était également venu le voir, une pension an-
nuelle de 1,000 florins et l'exemption des rede-
vances qu'il payait au fisc-, comme proprié-
taire de brasseries. Par reconnaissance, l'as-
tronome plaça les armoiries de son royal bien-
faiteur au ciel : c'est la constellation désignée
sous le nom é'écu de Sobieski. Hovel fut aussi
inscrit, en 1664, sur la liste des savants euro-
péens pensionnés par Louis XIV; mais il ne
toucha que sept annuités, et reçut deux fois des
cadeaux. En retour, il envoya au roi tous ses
ouvrages, et lui en dédia une partie. Membre de
la Société royale de Londres presque dès sa
fondation, il entretenait une vaste correspon-
dance (2) avec les principaux savants de la
France, de l'Angleterre et de l'Italie. Parmi ces
savants nous citerons : Gassendi, Bouillaud, Ro-
berval,le P. Messenne, Desnoyers Linemann, etc.
En 1664, la joie du savant fut troublée par un
malheur domestique : Hovel perdit sa femme
après vingt-sept ans d'un mariage stérile. Un
an après il épousa une jeune fille de seize ans,
Elisabeth Koopmann ; il en eut une fille, qui
(1) Galilée, dans son Syitema Mundi, avait déjà Indi-
qué cet argument
(t) Une faible partie seulement de cette correspondance
a été imprimée; la plus grande partie est restée inédite :
la Bibliothèque impériale de Paris en possède trois gros
volumes ln-fol. ( n° s des manuscrits). Il serait utile pour
l'histoire des sciences de la publier.
10
291
HOVEL
292
mourut en bas âge, et deux fils qui lui survé-
curent. Cette seconde femme l'aida, comme sa
première , dans ses observations.
Après s'être occupé de la Lune, il reprit ses
recherches sur les comètes et publia sa Corne'
tographia, Dantzig, 1668, 800 p. in-fol., ou-
vrage dédié à Louis XIV. )Le I er livre contient
la description de la comète de 1652, qu'il aperçut
lo 50 décembre, près deRigel (Orion) : « La tête
était ronde et son diamètre un peu moindre de
celui de la pleine Lune ; la barbe avait 6 à 7 de-
grés de longueur. » Il considère les nébulosités
cométaires comme des exhalaisons des planètes,
tandis que les noyaux ou lunules seraient des
exhalaisons du Soleil. La courbure des queues,
que Galilée et Gassendi voulaient expliquer par
des effets de réfraction atmosphérique, Hovel
en cherchait la cause dans les différences des
nébulosités qui les composent. Il pense que la
queue d'une comète pourrait envelopper la
Terre sans que l'on s'en aperçût autrement
que par un affaiblissement considérable de
la lumière du jour, et il n'est pas éloigné de
croire que les ténèbres qui accompagnèrent
la mort de Jésus -Christ eurent cette ori-
gine. Hovel annonça, en outre, que les nébu-
losités augmentent à mesuré que les comètes
s'éloignent du Soleil. Newton admet ce fait, et
lui assigne une cause physique en disant que
« les têtes des comètes doivent s'appauvrir ou
diminuer de volume en s'approchant du Soleil ,
puisque c'est à leurs dépens que s'engendrent
les queues; et réciproquement lorsque, après le
passage au périhélie, les nébulosités n'ont plus
à pourvoir à la formation des queues déjà par-
venues à leur maximum d'étendue, elles gran-
dissent nécessairement. » Les observations ré-
centes de la comète d'Encke ( à courte période )
ont mis l'importante remarque d'Hovel au
nombre des vérités scientifiques les mieux éta-
blies (1). Quant à leur mouvement, les comètes
suivent, ajoute Hovel, des paraboles, comme des
corps projetés avec force à la surface de la Terré.
On s'est emparé de ces paroles pour contester à
Newton la priorité de sa découverte. La courbe
que décrivent les comètes dans leur mouvement
autour du Soleil est en effet une parabole ; mais,
comme l'a fait remarquer Moritucla, il y a
entre la théorie de Newton et celle d'Hovel une
différence profonde : suivant le premier, Ta co-
mète décrit une courbe parabolique dont le So-
leil occupe le foyer par un effet de la gravitation
universelle, tandis que, dans l'idée d'Hovel, le
Soleil n'est pas plus au foyer de l'orbite para-
bolique de la comète que la Terre n'est au foyer
de la parabole du corps projeté d'un point de
la surface du sol (2). La Cométographie souleva
une vive pojémjque à laquelle prirent surtout
(t) Arago, Agronomie, t. II, p. 889.
(1) Montucta, Hïsi. des Math., L II. ~ C'est à Darfel
( voy. ce nom ) que paratt revenir l'honneur de ta décou-
verte de l'orbite parabolique des comètes.
part deux mathématiciens français, Petit et
Auzout.
Dès J641 Hovel travailla à un nouveau cata-
logue des fixes. Kepler f avec les observations
de Tycho-Brahé , avait déterminé les positions
de 1,000 étoiles : (Hovel entreprit d'en porter le
nombre à 3,000. Mais ici il rencontra des dif-
ficultés très-grandes : comme les télescopes ne
grossissent pas les étoiles , il se servit, pour les
observer ou viser, de simples pinnules (diop-
tres), comme l'avait fait Tycho, et il perfec-
tionna même ces instruments (1). Dans l'idée
d'obtenir une plus grande précision, il donna à
ses quarts de cercle et à ses sextants des di-
mensions jusqu'alors inusitées ( de 6 à 9 pieds
de rayon ), et au Heu de les faire en bois re-
couvert de lames métalliques, il les fit faire
cntîèremenf en laiton. Dans ces travaux, il se fit
d'abord aidef par un jeune homme, nommé
Ketzner, qui mourut au bout de trois ans ;
pois, après avoir 'perdu successivement encore
trois de ses aides , il se fit assister par ses do-
mestiques, et surtout par sa femme, qui lui était
d'un grand secours. Ne reculant devant aucun
sacrifice , il avait fait agrandir, à grands frais ,
son observatoire, en unissant par une plate-
forme trois de ses maisons contiguês : un
atelier de graveur, une imprimerie et une bi-
bliothèque complétaient cette construction, qui
dominait de tous côtés un vaste horizon. Armé
de tous ces moyens, Hovel recommença ses obser-
vations dès 1657, et fit paraître, en 1673, la pre-
mière partie de sa Machina Cœlestis , qui con-
tient la description de ses observations et de ses
instruments , la manière de les manier et les .
moyens de travailler le verre. L'auteur nous y
apprend aussi qu'il avait entre ses mains tous les
manuscrits de Kepler et sa correspondance iné-
dite. Les principaux savants de l'Europe reçurent
chacun un exemplaire de cette première partie
de\& Machina Cœlestis. Robert Hooke, que l'au-
teur avait oublié dans la liste des favorisés , at-
taqua l'ouvragé avec violence. Taxant d'erronées
toutes les observations de l'astronome allemand,
il soutenait qu'avec l'emploi combiné (qu'Hovel
s'obëtinait à rejeter) dq télescope et du sextant
on pouvait atteindre des observations quarante à
soixante fois plus précises. C'était dire assez clai-
rement que les observationsti'Hovel n'étaient cer-
taines qu'à une minute près (2>. Ces attaques du
(i) Les plus anciennes pinnules étaient de simples Ian*ps
percées de trous ronds; plus tard on leur donna la forme
de tnbes cylindriques, dont le bout tourné vers l'oeil
était percé d'un trou circulaire très-petit ( oculaire). On
employa ensuite des pinnules fendues longltudlnalement.
Tycho plaçait au centre un cylindre, et sa plnnule avait
deux fentes parallèles et éloignées d'un diamètre du
cylindre. Hovel imagina une vis pour élargir et rétrécir
la Assure ; les deux côtés de chaque piaaule étalent gar-
nis de verniers,de manière à pouvoir lire quatre on cinq
fois l'observation et s'assurer de l'exactitude des divisions,
foy. Delambre, Hist. de F Astronomie moderne, t 11 .
p. Mi.
(t) S'il y a des erreurs dans les observations d'Hovel,
elles viennent inoins de l'emploi de simples pinnules
393
HOVEL — HOVERLANT
294
savant anglais irritèrent extrêmement Hovel, déjà
naturellement irascible. A cela il faut ajouter
que, le 26 septembre 1679, un incendie causé
par la vengeance d'un domestique mit en cen-
dresl'observatoired'HQvel, avec ses instruments,
sa bibliothèque, la plupart de ses manuscrits (1)
et l'édition presque entière de la seconde partie de
la Machina Cœlestis, volume de 1286 pages, où
il avait consigné tous ses travaux astronomiques ;
on n'en sauva que sept exemplaires , dont cinq
étaient entre les mains du relieur. Heureusement
que l'auteur avait déjà envoyé cette seconde partie
de son ouvrage aux savants qui avaient reçu, six
ans auparavant, la première (2). Ce malheur, qui
fut aussi une grande perte pour l'astronomie, ac-
cabla Hovel, déjà avancé en âge, et hâta sa mort
Ses papiers fripent dispersés par ses héritiers ;
l'un d'eux fit convertir le cuivre qui avait servi
à la gravure de la grande carte de la Lune en
une boite à thé, et les autres plaques furent fon-
dues dans un atelier 4'orfèyre.
Outre les ouvrages cités , on a de Hovel :
Eclipsis Solis observata (le 4 nov. 1649);
Dantzig, in-4°; reproduit dans la Machina
Cœlestis, t. H, p. 17 ; — Qbservatio Eclipsée*
Solaris (le 8 avril 1652 ) ; ibid.; — Epistpla de
Motu Itunœ libratorio in certas tabulas re*
daclo, adressée à Riccioli; Dantzig, 1654; —
Mercurius in Sole visas ( le 3 mai 1661 );
Dantzig, 1662, in-fol.; — < Historiola miras
Stellse in collo Ceti; Dantzig, 1662; on y
lit l'histoire des observations de l'étoile pé-
riodique o de la Baleine (appelée depuis Y Ad-
mirable) y te 1648 à 1662 : dans cet intervalle
l'étoile fut plusieurs fois de troisième grandeur et
plusieurs fois invisible^ — » Annus Climatericus,
seu rerum uranicarum observationum annus
quadragesimus nonus ; Dantzig, 1685, in-fol.;
— Prodromus Astronomie exhibens funda-
menta, etc.; ibid., 1690, in-fol. ( ouvrage post-
hume ); — Firmamentum Sobiescianum, sive
uranographia, etc.; ibid., 1690, in-fol. ( ouvr.
posth.). On trouve des lettres d'Hovel impri-
mées dans \e$Philosaph. TransacL, t. I-XVI;
dans les Âcta Erudit. Ups., an. 1682-84 ; dans
Lubienietrki , Theatrum Cameticum, t. I;
combinées avec d'énormes sextants, que de la réfraction
supposée trop faible,' ainsi que de l'aberration et de la
natation, que Hovel Ignorait comme Flarasteed.
(1) Les manuscrits de Kepler, que Hovel avait achetés
d'un fils de ce grand astronome , furent heureusement
sauvés. Hovel eut l'intention de les publier. Après sa
mort, ton gendre, Lange, le* vendit, en itot, à 0. Hansch
pour loo florins. Celui-ci publia une partie des lettres
et mit le reste en gage pour ùoe somme de 8S8 florins à
Francfort; ces papteas tarent, en 177*, transportés à
Satnt-Petersboniff par Mwr et v endos pour J,000 roubles.
(2) Le sombre des exemplaires ainsi envoyés était de
90. comme Hgvel ledit lui-même ( Sylloge nova Epitt.,
t. IV, p. 160). C'est ce qui eiplique ta rareté extrême de
cet ouvrage. Les bibliothèques de Paris ont été les plus
favorisées: elles possèdent presque toutes un on même
plusieurs exemplaires de la Machina Cœlestis, Pars pos-
ttrior, légués par les savants français auxquels l'auteur
«s avait envoyés. Poy. Zach, Bphémérides, 1. 1, p.. 939.
dans P. Gassendi, Opéra; dans Sylloge nova,
Epist varii argumenti, Nuremberg, 1760-66;
dans Murr, Journal pour VHist. des Arts ,
t. XVII, et dans Zach , Monat. Correspond.,
t. Vf II. Le recueil des lettres adressées par les
savants de tous les pays à Hovel , avec les ré-
ponses de ce dernier, formant ensemble 16 vo-
lumes manuscrits in-folio, fut vendu en 1760,
par un* fies héritiers, pour 100 ducats à un des
frères De l'Isle, se rendant à Saint-Pétersbourg.
A la mort de De l'Isle, ce précieux recueil fut
acquis par Godin, qui mourut en Espagne. Plu-
sieurs de ces volumes furent, vers la lin du dix-
huitième siècle, achetés par le gouvernement
français, et se trouvent aujourd'hui dans divers
dépôts publics, où 'ils attendront peut-être encore
longtemps un éditeur. , F. H.
Hutton, Math, and Philos. Diçt, artlcl. Hevellus. —
Lalande, astronomie, t. I. — Montucla, Hist. des Math.,
t. Il, p. 6*8-640. — Delarabre, Hist. dé l'Astron. mo-
derne,*. II, p. 485-485. — IL Westpbafen, Leden, Studien
und Schrtften des Astr. J. Hevelius ,• Kœnigsberg, 1820,
in-8°. — Zach, Monatliche Correspond., t. VIII. —
Brsch et Gruber, Attgemeine Encyklopxdie.
HOYBRLAAJT DR RK ACWELACRE (Adrien-
Alexandre- Marie) t écrivain belge, né à Tour-
nay, le 9 mars 1758, mort dans, la même ville, le
18 septembre 1840. D'abord avocat , il fut en
1790 élaptré de Tournay, et nommé député aux
états généraux. Il accompagna, en cette der-
nière qualité , la division du général Kochlar
4ans sa retraite sur Mons, lors de la déroute des
patriotes. En 1795 il accepta Ja place de juge
de paix à Tournay, et deux an» plus tard il fut
envoyé par son département au Conseil des
Cinq Cents. Après lu chute du Directoire, Ho-
verlant redevint avocat dans sa ville natale. Ce
fut alors qu'il s'occupa, mais sans succès, de la
composition de nombreux ouvrages, parmi les-
quels nous citerons : Exposition succincte des
Constitutions de la province de Tournay, de-
puis Jules César jusqu'à nos jours , etc. ;
Tournay, 1814, in-8°; •— Mémoire sur VÉtat
de la Servitude au Royaume des Pays-Bas,
couronné par l'Académie royale des Sciences et
des belles-Lettres de DcuxeUes, en sa séance du
7 mai 1818; Courtray, 1819, 2 vol. in-8°. En
couronnant cet écrit, d'une indigeste érudition,
l'Académie avait déclaré qu'il ne serait imprimé
dans ses Mémoires qu'après avoir subi les
changements et les corrections qu'elle jugerait
convenable». Loin de se conformer à cette déci-
sion, Hoverlant publia son travail à ses frais,
en y ajoutant un second volume de notes, plus
fort que le premier ; — Essai Chronologique
pour servir à V Histoire de Tournay ; Tournay
et Lille, an xm ( 1805); 1834, 102 tom. qni se
divisent en 114 vol. in- 12, plus 3 vol. de table,
et un atlas in-fol. : c'est un recueil, sans ordre
et sans plan, de documents connus ou sans in-
térêt; l'auteur y répand une foule de calomnies et
d'injures contre un grand nombre de ses coin-
10.
295
HOVERLANT — HOWARD
29C
patriotes. Les exemplaires complets de ce bizarre
ouvrage sont devenus très-rares. £. Regnard.
Mercure belge, tom. VI, p. 576. — Auteurs excentrl-
quei. Messire Huverlant de Beauwelaere ; dans le Bi-
bliophile belge, t. III, p. Wî. — tiiogr. gén. de* Belges,
howard (Catherine), reine d'Angleterre,
née vers 1520, décapitée le 13 février 1542.
Elle était fille d'Edmond Howard et de Joie
Colpepper de Hallingbarn. Edmond Howard
était le troisième fils de Thomas Howard,
duc de Norfolk. Catherine fut élevée sous les
yeux de son aïeule, la duchesse douanière de
Norfolk. A un banquet donné par l'évêque de
Winchester au roi Henri VIH, ce prince re-
marqua pour la première fois Catherine Howard.
Elle avait une très -jolie figure, une taille bien
proportionnée et un aimable caractère. Henri
venait d'épouser Anne de Clèves, dont ses en-
voyés auprès du duc son frère avaient eu la
maladresse de lui faire un portrait beaucoup
trop flatté. Anne était disgracieuse et vulgaire;
la comparaison que le roi établit entre elle et
Catherine contribua à changer en aversion l'é-
loignement que la princesse allemande lui avait
inspiré dès le premier coup d'ceftl. Six mois
après l'arrivée d'Anne en Angleterre , son ma-
riage avec Henri VTII fut déclaré nul. Cette
union était à peine dissoute , que les lords du
parlement , parmi lesquels se trouvait le duc de
Norfolk, oncle de Catherine Howard, supplièrent
« humblement le roi, au nom et dans l'intérêt de
son peuple, dont il affermirait le bonheur en aug-
mentant, avec la grâce de Dieu, le nombre de ses
héritiers, » de contracter un cinquième mariage.
Henri accéda promptement à cette demande;
son divoree avec Anne de Clèves avait été pro-
noncé le 9 juillet 1540; son union avec Ca-
therine Howard eut lieu le 8 août de la même
année. Le roi parut d'abord enchanté de sa nou-
velle épouse ; il lui donna toute l'affection que
son cœur était capable de ressentir; et, comme
témoignage public de sa satisfaction, il fit com-
poser par son confesseur, l'évêque de Lincoln,
un hymne d'action de grâces pour remercier le
ciel de la félicité dont il jouissait. Bien que
Henri Vin, en se faisant proclamer par le par-
lement chef (te l'Église anglaise , se fût séparé
de l'Église romaine , il n'en était pas moins de-
meuré catholique sur presque tous les autres
points, entre autres sur celui de la confession
auriculaire. De son côté, la jeune reine témoi-
gnait à son seigneur et maître ( her lord and
master) la plus vive tendresse; cependant,
<c les jours aimables de ce monarque, dit un
historien, étaient depuis longtemps passés ».
Sa corpulence avait atteint un. degré extraordi-
naire, et les traits de son visage, autrefois très-
beaux, avaient pris une expression morose qui
était le reflet de son caractère. Probablement
Catherine s'était laissé plutôt éblouir par le
rayonnement de la puissance suprême du tyran
qui la plaçait sur le trône, que fasciner par l'in- l
constant amour de l'homme qui avait fait périr
sur l'échaiaud celle de ses quatre précédentes
épouses dont il s'était montré le plus passionné-
ment épris.
Il y avait quinze mois que Catherine était
reine d'Angleterre et que Henri Vfll lui prodi-
guait les marques de son affection, lorsque le
roi fit avec elle un voyage à York. 1 Ce voyage
eut des conséquences funestes pour la reine.
Pendant son absence de Londres, un homme de
basse extraction, nommé Lascelles, se présenta à
Cranmer, archevêque de Canterbury et primat
d'Angleterre, pour lui communiquer les confiden-
ces que lui avait faites sa sœur, ancienne do-
mestique dans la maison de Norfolk. D'après ce
rapport, Catherine aurait eu pour amants, avant
son mariage, Dereham et'Mannock, deux gen-
tilshommes au service de sa grand'-mère. Après
avoir consulté le chancelier et le comte d'Hert-
ford, ses amis, Cranmer se décida à transmettre
cette révélation au roi dès son retour. Il eutt en
effet , la hardiesse d'écrire à Henri une lettre
dans laquelle il -lui dévoilait l'inconduite passée
de Catherine. Avec un prince sanguinaire comme
l'était Henri, une telle inculpation devait amener
la perte de l'accusateur ou de l'accusée; aussi,
pour la hasarder, fallait-il un mobile plus puis-
sant que le prétendu .devoir d'ouvrir les yeux
du roi sur l'indignité de son épouse. Lingard, qui
s'attache à rechercher les causes secrètes des
événements historiques, r présume que Catherine
Howard fut victime d'un complot tramé contre
elle par le parti de la réforme, qui avait compté
se relever lors du mariage d'Henri avec une
princesse allemande; au lieu de cela, il s'était vu
écraser par le succès des intrigues de la maison
de Norfolk. Le duc de ce nom était, avec l'évêque
Gardiner, à la tête du parti qui s'efforçait de dé-
terminer une réaction en faveur de l'Église ro-
maine ; mais Henri VIII, également opposé aux
luthériens et aux papistes, condamnait et faisait
exécuter ensemble les principaux adhérents de
l'une et de l'autre religion. Ainsi avait péri Tho-
mas Cromwell, longtemps ministre favori du roi
et ami de Cranmer, qui n'avait pas oséMe discul-
per de l'accusation d'hérésie et de haute trahi-
son. Pour que la pusillanimité de l'archevêque ne
l'eût pas retenu de dénoncer la reine au roi lui-
même et sur des témoignages aussi suspecta que
ceux dont l'histoire fait mention, il fallait qu'il
se sentit soutenu par les nombreux adversaires
des Howard. Suivant Hume, Catherine, avant
d'être devenue reine , avait puissamment con-
tribué, à l'instigation du duc de Norfolk, À perdre
Cromwell dans l'esprit de Henri VHI par d'as-
tucieuses insinuations. D'un autre coté, et à ren-
contre de cette assertion , on trouve dans les
Mémoires (Records) de Burnet, une lettre de
Norfolk dans laquelle ce seigneur dit que, malgré
leur proche parenté, Catherine Howard est son
ennemie; mais cette allégation n'était sans
doute fondée que sur quelque mésintelligence
297
HOWARD
29S
passagère entre le duc et sa nièce; car on n'en
troave point de trace nulle autre part. Hume,
qui admet comme réelle la dissolution de
mœurs de Catherine, dit que le roi ne voulut pas
d'abord ajouter foi à l'accusation lancée par le
primat contre la reine ; mais la méfiance suc-
céda bientôt dans son esprit à l'incrédulité. Par
son ordre Dereham et Mannock furent arrêtés
et interrogés; tous deux reconnurent la vérité
des faits reprochés à Catherine, ce qui parait
d'autant plus extraordinaire que cet aveu en-
traînait leur propre condamnation. La reine ,
citée devant le Conseil des Lords, répondit à ces
imputations par une dénégation formelle; mais
dans la même soirée; elle céda aux suggestions
de Cranmer, se reconnut coupable, et signa sa
confession. Cependant l'aveu de fautes com-
mises avant son mariage ne suffisait pas pour
motiver une sentence de divorce ou une accu-
sation de haute trahison. On se livra aux plus
minutieuses recherches sur sa conduite depuis
qu'elle avait épousé le roi. Il fut prouvé que la
reine avait pris à son service un de ses an-
ciens amants, Dereham ; et Ton prétendit
qu'elle avait admis une nuit, dans sa chambre,
pendant plusieurs heures, sans autre témoin que
lady Rochford, un gentilhomme de la chambre,
nommé Thomas Culpepper, son parent du côté
maternel,- et à qui elle avait été promise autre-
fois en mariage. Sur ces indices , Culpepper et
Dereham furent mis en jugement, condamnés et
exécutés, comme coupables de haute trahison ;
leur procès n'avait duré que quelques jours.
Celui de la reine se prolongea pendant près de
deux mois, soit parce qu'il y eut, à ce sujet, de
grandes divisions dans le Conseil, soit que Henri
fût retombé dans ses premières incertitudes.
Suivant la coutume de ce temps, où Ton tendait
aux accusés toutes sortes de pièges pour les
forcer, par la lassitude de la persécution ou par
l'espoir du pardon, à se reconnaître coupables
de crimes dont souvent ils étaient innocents,
Catherine se vit fortement pressée par les lords
du Conseil de parler sans feinte et sans appré-
hension; car la loi était juste et le roi miséri-
cordieux. La reine renouvela donc ses précé-
dents aveux, reconnaissant qu'elle avait offensé
Dieu, le roi et la nation. Évidemment, ces
aveux n'avaient rapport qu'aux irrégularités de
sa conduite avant son mariage, et au tort qu'elle
avait eu de les cacher au roi. En effet, lorsque,
en exécution de l'arrêt qui la condamnait à la
peine capitale, Catherine monta sur l'échafaud,
elle déplora de nouveau les désordres de sa vie,
en affirmant néanmoins, sur son espérance de
salut éternel , qu'elle ne s'était jamais rendue
coupable d'infidélité envers son seigneur et
maître. Plusieurs membres de la famille Ho-
ward et des personnes attachées à son service
avaient été poursuivis et jugés comme nonrévé-
lateurs de complot. Lady Rochford, convaincue
d'Avoir ûcilité à la reine un adultère dont, ce-
pendant, il n'y avait pas de preuves, eut la tête
tranchée en même temps que sa maîtresse.
Camille Lebrun.
Burnet, Records. — Lords* s Journals. — Hume, His-
tory of Engkmd. — LJngard , Hittory of Engiand. —
Lytteltoo, History of Engiand.
howaed ( Charles lord Effingh&si ), comte
de Nottingham, amiral anglais, fils de lord Wil-
liam Howard d'Ëffingham , lord grand-amiral , et
petit-fils de Thomas, second duc de Norfolk, né
en 1536, moitié 14 décembre 1624. En 1559 i!
alla, comme ambassadeur, complimenter Char-
les IX sur son avènement. A son retour, il rat
nommé député pour le comté de Surrey. Il servit
comme général de cavalerie dans l'armée conduite
par le comte de Warwick contre Insurrection
des comtes de Northuniberland et de Westmo-
reland en 1560, et commanda, l'année suivante,
une escadre dans la Manche. Il succéda en 1573
à son père dans le titre de lord Effingham et
dansie poste de lord chambellan de la maison
de la reine; et en 1585 il rat élevé au grade de
grand-amiral. Les immenses préparatifs que
faisait Philippe pour envahir l'Angleterre don-
naient à la place de commandant de la flotte
anglaise une' grande importance. Il avait sous
ses ordres les premiers marins du temps : •-
Drake, Hawkins, Frobisher, et plus de deux \*
cents vaisseaux. L'invincible Armada, comman- ?
dée par le duc de Médina Sidonia, sortit du Tage
le 29 mai 1588. Assaillie par une violente tem-
pête, elle se réfugia dans le port de La Oerogne,
et le bruit courut que le projet d'invasion était
abandonné. Elisabeth voulait, par économie,
que le grand -amiral licenciât une partie de ses
équipages. Howard, prévoyant que le danger s'é-
tait que retardé, refusa d'obéir. L'événement
donna raison à ses prévisions. Le 20 juillet l'Ar-
mada arriva en vue des côtes d'Angleterre, et
manœuvra pour gagner la Flandre. Lord Howard,
la laissant s'engager dans la Manche, s'attacha à
sa poursuite, et lui enleva plusieurs vaisseaux.
Quelques iours après, les Espagnols jetèrent
l'ancre devant Calais ; mais des brûlots anglais
lancés sûr l'Armada y portèrent un tel désordre,
que le duc de Medina-Sidonia prit le parti de
retourner en Espagne. Des tempêtes lui firent
perdre une grande partie de sa flotte; et il ra-
mena moins de soixante vaisseaux dans le port
de Santander. Les Anglais n'avaient perdu
qu'un seul vaisseau. En 1596 Elisabeth envoya
contre les côtes d'Espagne une flotte^de cent
cinquante voiles , montée par quatorze mille
hommes de troupes de débarquement. Lord Ho-
ward eut le commandement de la flotte, et le
comte d'Essex celui de l'armée. La flotte an-
glaise entra dans la baie de Cadix , et malgré la
prudence de lord Howard, qui n'aurait pas voulu
brusquer l'attaque, Essex mit immédiatement le
siège devant Cadix, qui capitula. Essex voulait
garder sa conquête ; mais lord Howard s'y op-
posa, e{ se contenta d'incendier la ville et d'en
299
HOWARD
300
raser les fortifications. Au retour de cette expé-
dition, où il ne s'était distingué que par sa pru-
dence, il fut créé comte de Nottingham. Jaloux
de la faveur du comte d'Essex, il quitta la cour,
et n'y revint qu'après la disgrâce du comte.
Lorsque Essex en vint à une révolte ouverte,
Howard l'assiégea dans sa maison» le fit prison-
nier, et, quoique son ennemi, le traita' avec ci-
vilité. Quoiqu'il eut été un des juges, de Marie
Stuart, il figura officiellement au couronnement
de Jacques I er , qui le confirma; dans ses emplois.
En 1605, il fut chargé d'aller, ratifier la paix avec
le. roi d'Espagne Philippe ttl. <U céda, en jôle; sa
dignité d'amiral à VUliers»eomtede Buekingham v
et reçut en échange une pension de 1,000 livres
sterling et une indemnité de près du double de
cette somme. Z.
.BitySàïMa Britannica,- Llofd, Stat* wmNU*. -
Hnme, Historf qf Englan4. — Loyde, Portraits _of II-
lustrions Personnages, t. Ul. . .
howabd (Françoise), comtesse d'E$sbx>
puis comtesse ns Somïebsbt, femme célèbre par
le rôle dramatique qu'elle remplit dans les in*
trigues de cour qui agitèrent le règne de Jac-
ques I er t roi d'Angleterre. Françoise était fille
de lord Howard, comte de Suffolk; née en 1594,
elle mourut en 1632. A l'âge de treize ans elle
fut mariée au comte d'Essex, qui n'avait pas plus
de quatorze ans. immédiatement après la céré-
monie religieuse, les jeunes époux se séparè-
rent; le comte entra à l'université , d'où, ses
études achevées, il partit pour le continent ; la
comtesse fut remise à la garde de sa mère, qui,
dit-on , s'appliqua plus à développer sa beauté
et son esprit, qu'à faire naître ou à cultiver les
qualités de son âme. Bientôt, la jeune lady Essex
devint l'ornement de la cour; sa supériorité
physique et intellectuelle la mettait au-dessus
de toute rivalité. Parmi ses nombreux admira-
teurs , on distinguait le prince Henry, fils aine
de Jacques, et le vicomte de Rochester, alors
favori du roi. Henry mourut à l'âge de dix-huit
ans, en 1612 ; mais il parait que, de son vivant,
et quoiqu'il fût l'héritier présomptif de la cou-
ronne , Robert Carr, vicomte de Rochester, lui
avait été préféré par lady Essex. Robert Carr
était un Écossais dont la famille avait donné de
grandes preuves d'attachement à Marie .Stuart:
cette circonstance, jointe à un accident qui lui
arriva sous les yeux de Jacques I er en remplis-
sant son service d'ecuyer de lord Hay, lui valut
d'abord des marques d'intérêt de la part de ce
monarque. Les agréments de sa- personne et de
son caractère, le soin extrême avec lequel il
cherchait tout ce qui pouvait plaire à son royal
maître, le firent rapidement monter en faveur.
Jacques le combla de biens et de distinctions ;
les présents des solliciteurs de grâces ajoutés
aux dons du souverain lui procurèrent bientôt
une fortune princière. D'abord créé baron de
Branspeth, puis chevalier de la Jarretière, il avait
obtenu, en 1612, le titre de vicomte de Rochester.
Sans occuper aucune place dans le gouvernement,
il était tout-puissant à la cour, et l'influence des
deux frères Howard (le comte de Suffolk et le
comte de Northanipton, le premier, lord cham-
bellan, le second, lord du sceau privé ) balan-
çait à peine l'ascendant du simple courtisan. Une
lutte de pouvoir était engagée entre la maison
Howard et le parvenu écossais, lorsque ce der-
nier s'attacha k> la Jœlle et coquette Françoise
Howard de Suffolk. dUeur intimité était déjà
établie lorsque le comte d'Essex revint en An-
gleterre et réclama ses droits d'époux sur la
comtesse: elle ne lui répondit que par des dé-
dains. Il se plaignit et s'irrita; elle pleura et
récrimina. Pendant ce temps, la liaison secrète
de Françoise et de Rochester subsistait toujours;
dans une de leurs entrevues furtives, ils convin-
rent entre eux que la comtesse demanderait et ob-
tiendrait le divorce, afin de pouvoir épouser eon
amant. Ge projet, favorable aux intérêts des Ho-
ward, qui devaient ainsi trouver un aUié dans
leur compétiteur au. pouvoir, obtint leur appro-
bation. Le toi lui-même en parut satisfait, l'an-
tagonisme permanent qui existait entre ses mi-
nistres et son favori lui ayant suscité plus d'une
fois des embarras. Mais une opposition inat-
tendue vint à la traverse de ce mariage : sir
Thomas Overbury, l'ancien ami et le conseiller
intime de Rochester, trouvait trop hien son
compte à la durée de cette mésintelligence pour
ne pas chercher à l'entretenir : le public, sachant
qu'à avait l'oreille du favori du roi, achetait fort
cher sa protection. Quand Rochester lui com-
muniqua ses intentions, il s'emporta jusqu'à
qualifier d'infâme un mariage avec une femme
aussi vile... Une telle hardiesse de la part d'un
homme qui avait de nombreuses obligations à
l'amant de cette femme prouve la déconsidéra-
tion personnelle de lady Essex, non moins que
l'insolence d'Overbury. Celui-ci, voyant son pa-
tron inébranlable dans sa résolution , finit par
lui déclarer qu'il avait la volonté et le moyen
de mettre un obstacle insurmontable à leur
union. Probablement ces moyens étalent la di-
vulgation des amours illicites de Rochestei et
de lady Essex; depuis un an, ainsi que du véri-
table but du procès en séparation intenté par
la comtesse à son mari. Rochester rapporta à sa
maîtresse son entretien avec Overbury. Fran-
çoise, furieuse contre celui-ci, promit une
somme de mille livres sterling à sir John Wood,
sous la condition de provoquer et de tuer en
duel sir Thomas. Mais les amis de la maison
Howard lui firent abandonner ce projet violent.
On essaya d'abord d'éloigner Overbury; en le
nommant à une ambassade; puis, on interpréta
son refus d'accepter cette mission comme une
insnlte au souverain qui la lui offrait ; en consé-
quence, l'âme, le confident, le conseiller intime
de lord Rochester fut enfermé dans la prison
de la Tour de Londres, dont on changea le gou-
verneur, pour donner cette place, ainsi que
301
HOWARD
302
celle de geôlier, a des créatures des Howard.
Dès que ceux-ci se furent débarrassés de la pré-
sence de cet opiniâtre adversaire, on commença
à instruire devant une cour judiciaire la procé-
dure du divorce du comte et de la comtesse
d'Essex. Pendant la durée de ce procès, basé
sur l'impuissance du mari, Jacques montra {xmr
la cause de lady Essex une singulière partialité :
elle est explicable par ce fait que Rochester
ayant un jour* mandé chez lui M trésorier du
roi, lui avait remis la clef de sa propre cassette,
en lui disant cty prendre tout ce* Qu'elle conte-
nait {>our l'usagé de son maître ; il y avait virigt-
cinq initie livres sterling, eu ot. Aucun présent
ne pouvait être {rtus ojïfrortùh : làcâssette royale
était à sec. Grâce aux mouvements que se
donna Jacques podr aplanir les difficultés de ce
divorce, un jugement i donnant gain de cause à
Françoise Howard fut rendu à une majorité de
sept voix contre cititf. La veillé de ce jour de
triomphe pour là comtesse, Ovérbury mourut
subitement dans sa prison. A freine Françoise
Howard se vit-elle juridiquement dégagée de
ses premiers tiens, (ju'èUë épousa Son amant,
créé â cette occasion comté de Somerset. La
cérémonie tiuptialè eut lietj dans la chapelle du
palais, et la rtëriëe partit , lés cheveux épars,
en boucles, stir ses épaulés, distinction réservée
aux épousées vierges. Jacques hondra de sa
présence les tioèés du ëoratè de Somerset et de
Françoise Howard ; elles fiireht suivies de fêles
somptuetises pour lesquelles la cour et la ville
rivdlisërërit de luxé et de prodigalité : « attestant
ainsi, disent les chroniqueurs, la servilité des
hommes, qui, pour gagner les bonnes grâces du
favori du sotiveralri, Célébraient par des ré-
jouissances publiques un mariage qu'en par-
ticulier ils stygmatisa'ieht comme illégal et
adultéré ». Gé mariage, en confondant les
intérêts de la maison Howard avec ceux du
nouveau comte de Somerset , fit cesser les dis-
sensions qui troublaient le conseil royal. Lady
Somerset devint la femme la plus adulée de la
cour d'Angleterre, comme elle était la plus belle,
« et, ajoute là chronique ,• la plus dissolue de
son temps ». Pendant environ quinze mois, son
orgueil et sa cupidité furent complètement satis-
faits: les grâces royales pleuvaient sur elle; les
courtisans mendiaient ~sa protection , les hauts
fonctionnaires la lui payaient. Mais tout a coup
s'éleva un nouveau favori, dans la personne de
Georges Villiers, qui, dans la suite, fût créé duc
de Buckingham. Jacques I er , avons-nous dit,
était fort obéré*, pour alimenter la source à peu
près tarie de ses revenus, on eut recours à la
vénalité des charges. Villiers ayant acheté la
place d'échanson du roi, acquit promptement, par
ses qualités brillantes , la bienveillance de son
maître. Les ennemis secrets de lord et de lady
Somerset, et ils en avaient beaucoup parmi leurs
partisans apparents, se liguèrent alors contre
eux. La mort soudaine d'Overbury, dont nul
n'avait osé jusqu'à ce moment éclaircir la
cause , devint le sujet de bruits sourds, de se-
crètes recherches, qui aboutirent à la conviction
générale que cette mort était l'œuvre de la com-
tesse de Somerset. Le parti qui voulait perdre
l'afncieri favori de Jacques fit adroitement par-
venir ces rameurs à l'oreille du roi ; et celui-ci,
appréhendant, avec sa timidité naturelle, qu'une
partie de l'infamie de ce Crime ne retombât sur le
protecteur an coupable , chargea le procureur
général, sh* Edouard Coke, d'instruire et de pour-
suivre cette affaire. Aptes un long examen et de
nombreux interrogatoires , Françoise Howard
fut déclarée coupable d'avoir recouru à la sor-
cellerie pour s'aliéner l'affection de son mari, le
comte d'Essex; et pour captiver l'amour de Ro-
chester ; de s'être concertée avec le comte de
Northampton, son oncle, décédé depuis lors,
pour se débarrasser d'Overbury ; enfin de s'être
procuré, par le moyen d'une femme, sa confi-
dente; trofe sortes de poisons qui avaient été
remis au geôlier Weston et administrés par ce
dernier à Ovérbury, de complicité avec le gou-
verneur Elwes. Heureusement pour lady So-
merset et pour son mari^ l'amitié du roi pour
ce dernier se ranima à l'issue de cette procé-
dure; Somerset avait été arrêté en même temps
que sa femme , sous l'inculpation de complicité
avec elle. Jacques lui fit conseillera plusieurs
reprises de s'avouer coupable, en lui promettant
que sa vie et sa fortune seraient sauvées. « Qu'est-
ce que la vie et la fortune, quand l'honneur est
perdu ? » répondit le comte, qui, à la barre, pro-
testa toujours hautement et fermement de son
innocence. 11 est très-probable que, en effet, il
n'avait pas participé au crime de sa femme.
Celle-ci, cédant aux exhortations du ministre
Whiting, avoua son crime : elle fut condamnée
k mort ; mais peu de jours après elle reçut sa
grâce, ainsi que Somerset, qui avait été déclaré
coupable malgré ses dénégations. Les quatre
complices de lady Somerset avaient été jugés
avant elle, condamnés et exécutés.
Camille Lebrun.
Howell, State triais. — "Bacon, Werk$. — Butler, Me-
moirs. — HdWe, Chrmicle. - Ltafard, History of En-
gland.
HOWARD (Sir Robert) y poète et historien
anglais, AI» de Thomas, comte de Berkshire, né
en 1626, mort en 1608. Il fut élevé au collège de
La Magdeleine à Cambridge. Pendant la guerre
civile, il souffrit avec sa famille pour la cause
royale, et à la restauration il fut élu membre du
parlement pour Stockbridge dans le Hampshire.
Nommé député à la Convention en 1688, il se
montra sélé partisan de la révolution. Son ar-
deur et ses prétentions littéraires lui attirèrent
les railleries de ses adversaires. Shadwell le
tourna en ridicule dans sa comédie des Sullen
ZoverSf sons le nom de Sir Positive A t-all. On
a de lui : une traduction du quatrième livre de
Y Enéide de Virgile; 1660, in-8°; — une traduc-
aOS HOWARD
tion de YAchilléide de Stace; 1660, in-8°; —
Blind Lady, comédie; 1660, in- 8°; — Sur*
prisai, comédie, 1665, in-fol. ; — Committee,
comédie; 1665, in-fol.;— Vestal Virgin , tra-
gédie; 1665, in-fol.; — Indian Queen, tragédie;
1665, in-fol. ; — Great Favourite or the Duke
o/Lerma, trag. ; 1668, in-4° ; — The History
qf the Reigns of Edward II and Richard II,
with refiections and characters of their chief
ministers and favourites ; also a comparise of
thèse princes with Edward I and III; 1690,
h>8° ; — A Letter to M. Samuel Johnson ,
occasioned by a scurriUms pamphlet entitled
Animadversions on M. Johnson' s Answer to
Jovian ; 1692, in-8°; — The History of Reli-
gion ;1694, in-8°.
Edouard Howard, frère de sir Robert, s'ex-
posa à la sévérité des satiriques en écrivant de
mauvaises pièces, dont on trouve les titres dans
la Biographia Dramatica.
James Howard, qui appartenait probablement
à la même famille, fit jouer vers le même temps
deux comédies, AU Mistaken et The English
Monsieur, qui eurent un moment de succès et
qui sont aujourd'hui oubliées. Z.
304
Cibber, Lives. — Baker,* Biographia Britannica. —
— Chalmers, General Biographical Dictionary.
howabd (Charles), comte de Carlisle,
diplomate anglais, né en 1629, mort en 1686. Il
coMourut activement à la restauration de Char-
les II, et fut chargé peu après d'une mission en
Russie. Depuis la découverte de l'emplacement
d'Arkangel par Chancellor (voy, ce nom), vers le
milieu du seizième siècle, les Anglais jouissaient
en Russie de privilèges commerciaux fort im-
portants, que le tzar Alexis leur retira pendant
les troubles de leur révolution. Une tentative que
fit Gromwell pour renouer des relations commer-
ciales avec la Moscovie n'eut aucun succès. Char-
les H, rétabli sur le trône de son père, reçut une
ambassade qui lui apportait les félicitations du
tzar, et saisit cette occasion pour demander le
rétablissement des privilèges abolis. Il résolut
donc d'envoyer un ambassadeur à Moscou, et fit
choix de Charles, comte de Carlisle, vicomte Ho-
ward de Morpeth,undes plus brillants seigneurs
de la cour' d'Angleterre. « Outre qu'il étoit bien
fait, dit la Relation de son ambassade, d'une
taille fort avantageuse et d'un port très-majes-
tueux, il avoit une grâce d'esprit et une vivacité
particulière en ses discours, et dans toutes ses
actions il affectoit une promptitude et une diligence
extraordinaires. » Il devait, après avoir terminé sa
mission en Russie, passer en Suède et en Dane-
mark pour remercier les souverains de ces royau-
mes des ambassades qu'ils avaient envoyées au
roi d'Angleterre. Le 15 juillet 1663, l'ambassa-
deur, sa femme, son fils aîné et uue.partie de
leur suite, s'embarquèrent sur. un vaisseau de
guerre de cinquante canons qui atteignit Arkan-
gel le 19 août; mais là il dut attendre jusqu'au
5 septembre un second vaisseau qui portait le
reste de sa suite. A peine eut-il mis le pied sur le
sol russe que de légères difficultés d'étiquette lui
en présagèrent de plus graves pour l'avenir. L'am-
bassade anglaise, partie d'Arkangel le 12 septem-
bre, remonta la Dwina, puis la Soukhona jusqu'à
Vologda, sur des barques halées par trois cents
bateliers. Arrivée à Vologda le 17 octobre, elle
s'y arrêta trois mois pour attendre les commis-
saires impériaux et le tramage, qui s'établit très-
tard cette année. Enfin, en janvier 1664 elle
quitta Vologda. Les bagages et une partie de la
suite, formant un convoi de soixante traîneaux,
furent envoyés en avant le 7 janvier. Le comte
de Carlisle avec ce qu'il lui restait de monde se
mit en marche le 15. Ce second convoi se com-
posait de cent quarante traîneaux. Ce voyage,
dans un pays peu habité , à travers d'immenses
plaines de neige, dura trois semaines, et mit aux
plus rudes épreuves la patience de l'ambassadeur.
L'accueil qu'on lui fit à Moscou fut loin de le
dédommager. Le mauvais vouloir des commis-
saires retarda son entrée, qui eut lieu le 6 fé-
vrier au soir. Quelques jours après, le 1 1 février,
le comte de Carlisle fut reçu par le tzar en au-
dience solennelle. L'éclat de cette cour orientale
éblouit les gentilshommes anglais. « U nous ar-
riva alors, dit la Relation , comme à ceux qui
sont éblouis parla lueur du soleil d'or dès qu'ils
sortent des ténèbres ; car à peine pûmes-nous
souffrir d'abord cette splendeur qui se présenta
à nous dès que nous fûmes entrés dans la salle
d'audience. L'éclat des pierres précieuses y
sembloit disputer l'avantage avec la clarté du
soleil , de sorte que nous nous perdîmes parmi
cette confusion de lumière et de gloire. »' Le tzar
était assis sur un trône- très-élevé; et, « comme
un soleil brillant, dardoit partout des rayons
d'une lumière précieuse ». Environ deux cents
boyards, couverts de vestes de drap d'or, d'ar-
gent ou de velours semés de pierreries, et assis
autour de lui sur des bancs tapissés « estoient
autantde rayonsde ce soleil, élevé comme dans son
char de triomphe ». — « La majesté du prince,
la grande pompe de sa cour, ne ravirent pas seu-
lement les uns en admiration , mais donnèrent
même d'abord à quelques autres de la crainte,
comme si c'eust été une assemblée non pas
d'hommes, mais de dieux. » Mais, si la cour de
Moscou avaitla magnificence d'une cour asiatique,
elle en avait aussi l'étiquette pompeuse et hu-
miliante. Ainsi, dans un dîner qu'Alexis donna à
l'ambassade anglaise lord Howard ne fut pas ad-
mis à la table du tzar, pas même à celle des
principaux boyards. Comme on était en carême,
on ae servit pas de viandes. « Gela n'empescha
pas pourtant qu'il n'y eust près de cinq cents
plats qui estoient assez proprement accommo-
dés, n'eust été que la vaisselle estoit si noirastre,
qu'elle sembloit estre plustost de plomb que
d'argent Nous n'eûmes point de serviettes,
et la nappe estoit d'ailleurs si estroite qu'à peine
305
HOWARD
30G
estoit-elle de la largeur de la table. Les assiettes
estaient aussi si rares, que pendant tout le repas
il n'y eut qu'à chacun la sienne. » Les discus-
sions relatives aux privilèges commerciaux traî-
nèrent en longueur et aboutirent à un refus peu
déguisé delà part du tzar. Lord Howard, impa-
tienté, quitta Moscou le 24 juin 1664, et se dirigea
vers la Livonie, qui appartenait alors à la Suède.
Il s'embarqua à Riga le 13 août, et visita les
cours de Stockholm et de Copenhague ; et, quoique
accueilli avec plus d'égards, il ne réussit pas
mieux. II revint en Angleterre par le Holstein,
la Westphalie , la Belgique et Calais. Il fut pré-
cédé à Londres par un gentilhomme russe, Michel
Golovin, qui venait de la part du tzar se plaindre
de sa conduite. Lord Howard reçut l'ordre de se
justifier par écrit des griefs qu'on lui imputait,
et rédigea une apologie qui fut remise à l'envoyé
du tzar. Charles II le nomma ensuite gouverneur
de la Jamaïque. La relation des trois ambas-
sades de lord Howard, rédigée par son secrétaire,
parut d'abord en anglais : Relation of Charl.
Howard '$ three Embassies from Charles II
to the courts of Muscouy, Sueden and Den-
mark, 1663 and 1664; Londres, 1669, in-8°;
elle a été insérée dans la Collection des Voyages
de Harris. Gny Miège traduisit ou plutôt refit cet
ouvrage en français sous le titre de : La Relation
de trois Ambassades de monseigneur le comte
de Carliste, de la part du sérénissime très-,
puissant prince Charles II, royde la Grande-
Bretagne, vers leurs séréntssismes majestés*
Alexey Michailovitz, czar et grand-duc de,
Moscovie, Charles, roy de Suède, et Frédé-,
rie III, roy de Danemarc et de Norwège, en
Van 1663 et finie en 1665; Amsterdam, 1670,
in- 12. Miège en donna une édition corrigée et
augmentée, Amsterdam, 1672; réimprimée à
Amsterdam, 1700; et traduite en allemand,
Francfort, 170i,inrt2. Cette Relation a été pu-
bliée de nouveau, avec un savant Préambule, par
le prince Augustin Galitzin, Paris, 1857; dans la
Bibliothèqueelzevirienne. « Excepté peut-être les
célèbres voyages d'Olearius et deMeyerberg, dit
le baron Korf, aucun des nombreux ouvrages que
les étrangers nous fournissent sur la Russie du
dix-septième siècle n'a un aussi puissant intérêt
que la relation des trois missions du comte de
Carlisle.... Elle contient le récit des voyages de
l'ambassadeur...., le compte-rendu presque jour
par jour de la marche des négociations, et enfin
une description géographique et surtout ethno-
graphique de la Moscovie de cette époque. Pleine
de données essentielles pour l'intelligence de
l'histoire du commerce européen , cette relation
fait connaître la situation, l'hospitalité, l'éti-
quette de la cour de Russie. Tout cela est rendu
par une plume spirituelle et habile, et semé
d'observations justes et solides, quoique le ton
de la narration tourne souvent h l'ironie et au
sarcasme. » Z.
Le baron Korf, article traduit au rosse par le Pr, Au-
gastln, Galitzin; dana le Bulkt. du Blblloph. d'arrU 1887,
et en tête de son édtt. de la Relation (Biblioth. Blzevir).
Howard (John), célèbre philanthrope an-
glais, né en 1726, à Hackney, mort à Cherson en
Russie, le 20 janvier 1790. Fils d'un tapissier qui
s'était retiré des affaires avec une belle foYtnne, il
perdit son père de bonne heure, et, renonçant au
commerce, il fit un voyage en France et en Italie.
De retour en Angleterre en 1752, il &e maria, et
devint veuf au bout de trois ans. Admis vers le
même temps dans la Société royale de Londres,
il s'embarqua pour aller constater les effets du
tremblement de terre de Lisbonne. Son vaisseau
fut pris par un armateur, et Howard, retenu en
France comme prisonnier de guerre, eut beau-
coup à souffrir pendant sa captivité. Ses souf-
frances personnelles, celles dont il fut témoin,
tournèrent ses pensées du côté des prisonniers, et
décidèrent du reste de sa vie, qu'il consacra en-
tièrement à la philanthropie. Rendu à la liberté,
Howard se remaria presque aussitôt après. Il
eut le malheur de perdre sa seconde femme, et,
quittant sa demeure de Lymington, il s'établit à
Bedford, où l'attirait une congrégation de dissi-
dents. Il était fort attaché à leurs opinions et
assistait à leurs assemblées. Nommé en 1773
sheriffâu comté de Bedford, il remplit pendant
plusieurs années des fonctions qui le mirent à
portée, dit-il lui-même, « de prendre une con-
naissance exacte de la détresse à laquelle les
prisonniers sont quelquefois exposés, et de vi-
siter les maisons de détention dans toute l'étendue
du royaume ».
Howard soumit les résultats de ses recherches à
la chambre des communes, qui lui vota des re-
merclments. Encouragé par l'approbation pu- *
blique, il poussa ses explorations sur le continent
en 1775 et 1776, voyagea dans le même but en
Ecosse et en Irlande, et revit les prisons de l'An-
gleterre. Puis, après avoir fait part au public
des faits qu'il avait recueillis et des améliorations
possibles dans l'état des prisonniers, il reprit ses
voyages. Le Danemark, la Suède, la Russie, la
Pologne, l'Espagne, le Portugal le virent succes-
sivement poursuivre avec un infatigable dévoue*
ment son but philanthropique. Au retour de
chaque excursion, il ajoutait un appendice à son
grand ouvrage. En 1785 il visita les principaux
lazarets de l'Europe le long des côtes de la Mé-
diterranée, et, à son retour, passant par Vienne,
il fut reçu avec distinction par l'empereur Jo-
seph. Il arriva en Angleterre en 1787, et après
un court repos il recommença sa revue des pri-
sons d'Irlande et d'Ecosse. Dans l'été de 1789 il
repartit avec l'intention de pénétrer plus avant
dans l'Asie, et passa par la Russie. Arrivé à
Cherson en Crimée, il fut atteint d'une fièvre
pernicieuse et mourut chez le banquier Markus.
Howard ne laissa qu'un fils, qui mourut fou
neuf ans après son père. Une statue fut élevée à
Howard dans l'église de Saint-Paul, et de brillants
témoignages d'admiration furent payés à sa me-
307
HOWARD — HOWE
308
moire par Barke et par Delille, qui, dans son
poëme de La Pitié, lui consacra un beau passage,
dont nous citerons quelques vers :
Ton âme le connut ce noble et tendre lêle,
Howard 1 dont le nom seul console les prisons.
Qu'on ne me vante plus les malheurs vagabonds
De ce roi voyageur, père deTélémaque,
Cherchant pendant dix ans son Invisible Itbaqne.
Avec un but plus noble, on tœnr pins coucageox.
Sur les monts escarpés, sur les flots orageux,
Dans les sables brûlants, vers la zone Inféconde
Où languit la nature aux limites du monde ,
Aux lieux où du croissant on adore les lois.
Aux lieux où triompha l'étendard de la croiit
Partout où Ton connaît le malheur eties larmes
Suivant d'un doux penchant les invincibles charmes,
Le magnanime Howard parcourt trente climats.
Devant loi la mort fait, la donlënr se retire,
Ht l'ange affreux dn mai io ma*dit et l'admire.
Reviens, Il en est temps, reviens cœur généreux ;
Le bonheur appartient à qui fait des heureux.
• Reviens dans ta patrie, en une paix profonde,
Goûter la liberté que ta donnais au monde i
Ton œii chez aucun peuple, au palais d'aucun roi ,
N'a rien vu d'aussi rare et d'aussi grand que toi.
On a de Howard : The State of the Prisons
in England and Wales , with preliminary
observations and an account of some foreign
prisons; 1777, in-4°; 1 er Appendix, 1780,
in-4° ; .2 e Append., 1784, in-4°. Cet ouvrage a
été traduit en français par M lle de Keralio;
Paris, 1788,2 part. in-8°; — An Account o/the
principal Lazarettos in Europe, with varions
Papers relative to thePlague; together with
further observations on some foreign prisons
and hospitals; with additional remarks on
the présent state of chose in Great-Britain
andlreland, 1789, in-4° ; traduit en français
par. Th. Bertin , Paris, 1801, in-8°. Z.
Alkin, V iew o/the Cliaracter and public Services of
the late John Howard ; 1791, in-8°. — Gentleman** Ma-
gazine, vol. LX, LX11I, LXIX. - Dlxon, Life of Howard.
— firown, Me/noirs of the public and private Life of
John Howard; Londres, 1818, in-4«.
HOWARD {Georg. -Edmond) , poète et écrivain
politique anglais, né vers 1725, mort en 1786.
II fut élevé à l'école du docteur Sheridan , ami
de Swift, et au collège de La Trinité à Dublin.
Après avoir été clerc, soldat et procureur, et
tout en écrivant dans tous les genres, depuis la
poésie jusqu'à la jurisprudence, il se fit entre- i
preneur de bâtiments. Il contribua aux embellis-
sements de Dublin, et ramassa une fortune d'en-
viron 60,000 liv. sterl. Ses écrits forment quinze
vol., dont quatre in-4° et onze in-8° ; les principaux
sont : Treatises on the Law andEquity Side of '
the Exchequer, 4 vol. in-4°; et trois tragédies
intitulées : Almeyda, or the rival hings ; 1769,
in-8°; — The Siège ofTamor; 1773,[in-8 ; —
The Fethale Gamester; 1778, in-12. Z.
IHograpMa Dramatica.
HOWARD {Henry), peintre anglais, né le
31 janvier 1769, mort à Bath, le 5 octobre 1847. \
Élève de Philippe Reinagle, il fut admis comme i
étudiant a l'Académie royale en 1 788, reçut en 1 790 '
la première médaille d'argent ( prix de dessin ) et |
la médaille d'or (prix de peinture), et partit
pour l'Italie Tannée suivante. De Rome il envoya,
en 1794, à l'exposition de l' Académie royale, son
premier tableau, \&Mort deCaïn. Dé retour en
Angleterre, il exposa en 1795: Puck; Ariel; Sa-
tan s' éveillant sur le lac enflammé; et un
portrait : — en i J96 : Énée et Anchise; etZes
Planètes tirant leur Lumière du Soleil; — En
1797 : Le Péché et la Mort passant par
les Constellations ; Éorée ètOrythie; Bylas
et les Naïades; La Visite des trois Marie au
Sépulcre; Éole convoquant lès Zéphyrs. Il
serait trop long d'ériumërër les ouvrages que,
dans un espace de cinquante-trois ans ( 1794 à
1847), Howard ne cessa d'afaësser à l'Académie
royale. Une pareille assiduité au travail est un fait
très-rare chez un artiste- mais elle ne tourne pas à
la gloire dû peintre. Parmi tant; d'oeuvres, aucune
n'est supérieure, quèlbjufes-uhes seulement s'é-
lèvent au-dessus du médiocre; là meilleure ap-
partient an genre mythologique :' c'est la Nais-
sance de Véntis, peinte en 1829. Associé de
l'Académie royale en 1801, il en hit nommé
membre en 1808 et secrétaire en l»ii . Cette
place, que Howard remplit avec beaucoup de
zèle, contribua à le maintenir dans Yéé traditions
strictement classiques. « Le principal mérite de
ses peintures, dit YAthehéèum, est de d'avoir ja-
mais rien qui choque l'œil : ïl est classiquement
froid. Telle partie de ses fléaux est jolie, telle
autre est habilement touchée, et votis trouvez çà
et là une certaine grâce qui rappelle l'antique.
Cependant vous passez sans être ému de ce que
tous avez vu, et par conséquent Vous l'avez bien
vite oublié. Howard était toujours sur le point
de faire de grandes choses ; mais, comme beau-
coup d'autres, il ne dépassa jamais là ligne qui
sépare l'imitation de la supériorité personnelle.
Sa place dans l'histoire de l'art ne séra<ni émi-
nente ni stable, et dans vingt ails on né connaîtra
peut-être Howard que comme l*anii de Flax-
man. » Z.
Athenœwfn % octobre et 13 novembre 18*7. — English
Gyciopœdia( Biographe).
HOWARD, faty. CAhiisLE, Norfolk, Nor-
THAMPTON, et iSiftiREt.
Howe (John), théologien hôn-ébnrortniste
anglais, né le 17 mai 1630, à Longborough
(comté dé Leicestér), mort à tôndrfes, le 2 avril
1705. Après avoir fait ses études à Cambridge
et à Oxford, Il fut ordonné prêtre non-confor-
miste, et devint ministre de Great-Torrington
(Devonshire). Il se maria en 1654, et fiât choisi
ensuite pour chapelain domestique de CromwelL
Il garda cette position sous Richard Cromwell,
et après la déposition de celui-ci il revînt à Great-
Torrington. En 1675, il accepta la place de nû-
nistre d'une congrégation de Londres; mais la
persécution le décida à suivre, en 1685, lord
Wharton sur le continent. La déclaration de li-
berté de conscience de Jacques H le ramena en
Angleterre. Howe fut un des puritains les plus
309
HOWE
310
éminents du dix-septième siècle. Il joignait à un
grand savoir théologique la connaissance des
langues classiques et de l'hébreu: Ses principaux
ouvrages sont : A Tteatise on Deligkting in
God; 1674, in-* 4 ;— TheWving ïbmple, oï ade-
signed impnovement of tlmt notion thaï a
good man îs thJèOkmptë of God; 1674, in-8°.
Ses Œuvres feomplèie* furent publiées en 1724,
in-fol., avec sa Vie par le docteur Calkrhy ; elles ont
été réimprimées à Lonitréfr, 1810^16, 8vol.in-8°}
et Londres, 1848; 3 vol. in^8°, avec one Vie de l'au-
teur par le révérend Hewlett. • Z.
H. Roger», lÀfè of John kawetxeUh an MnaiysU o/ï
hit fTritings ; Londres, ia$6, io>48. . .
howe [Jean), homme politique anglais, né
dans le comte de Nottingjiajn , vers. 1 660, mort
en 1721. Élu membre, de là Convention pa,r le
bourg de Circcster, il fit, comme représentant
de ce bourg on du, comté de Gloucester, partie
des trois derniers parlements de. Guillaume lit
et des trois premiers de la reine Anne, Partisan
déclaré de la révolution de 1688, il fut nommé
chambellan de Ja reine Marie; mais un jpéçon^
tentement particulier le jeta dans l'opposition ,
et il se montra surtout l'ennemi des, Hollandais
qui entouraient le roi. En 1699, quand l'armée
fut. réduite, Howe obtint de la chambre qu'on
payerait la demi-solde, aux officiers licenciés.
Dans la discussion relative au traité de partage
conclu entre Louis XIV et Guillaume III, Howe
s'éleva avec tant de vivacité contre les auteurs
de cette transaction, que le roi regretta que l'i-
négalité des rangs ne lui permît pas de deman-
der raison de cette insulte. A l'avènement de la
reine Anne, Howe fut nommé membre du con-
seil privé, vice-amiral du comté de Gloucester et
payeur général des gardes et garnisons. Il garda
cette place jusqu'à l'avènement de Georges 1 er , en
septembre 17 14, et eut Walpole pour successeur.
Il se retira dans sa terre de Howell, où il mourut,
laissant un Panégyrique du roi Guillaume ///,
des Chansons et d'autres Poésies. Il contribua
puissamment à relever la Compagnie des, Indes
orientales et à préparer sa future grandeur. Z.
lAtrd Macaqlay, History of England, t. J1I et IV. —
Lord Mahon, Éitt. of England, 1. 1. —Rose, New General
BiograpMcal Victionary.
howe (Lord Richard), amiral anglais, né
à Londres, en 1725, mort dans la même ville,
le 5 août 1799. Il fit ses études à Wesmins-
ter-Sehool, entra an service dès l'âge de qua-
torze ans comme midshipman à bord du Setiern,
et fit une première campagne sous les ordres du
commodore Anson, dans les eaux de l'Amérique
du Sud. Ite 1743 à 1745, il servit comme lieu-
tenant de la frégate Cornet /dans les Antilles,
et se distingua à Curaçao et à Saint-Eustache
contre les Français. A son retour en Angleterre,
il fut promu au grade de capitaine, et retourna
immédiatement prendre rang dans 1a station de
la Jamaïque ; il eut part à de sanglantes actions,
entre autres à celle de La Havane ( 2 octobre
1748). En 1751, trois bâtiments de guerre
lui tarent confiés pour protéger le commerce
britannique sur les côtes de la Barbarie; il
s'acquitta honorablement de cette mission.'
En 1755 il commandait The Dunkirk (de
60 canons), qui faisait partie de la flotte de l'ami-
ral Bdscaven, et fut occupe spécialement de la
défense dés côtes septentrionales de l'Angleterre.
Eh 1757; sobs l'amiral Hawke, les Anglais, ayant
repris l'offensive, attaquèrent successivement
Fffe d*Aia; Cherbourg et Saint- Cast. Howe se
conduisit avec courage dans ces différentes af-
faires, ou le : succès ne répondait pas toujours à
sdn audace. En 1758, son frère aine ayant été tué
an Canada; Richard Howe lui succéda dans le
titre de IMrofr d'Irlande:' 5 Eri 1770 il devînt
contre^amiral âè' Fescadré bleue: et commanda
lés forces! a^gfïfisé , s dans la Méditerranée. Vice-
âmirai en 1776, il fut envoyé sur les côtes de
l'Amérique septentrionale, et fut riommé , avec
sbn Irèrè le major général William Howe, com-
missaire pour rétablir là paix dans les- colonies
anglo-américaines. Quoiqu'ils assurassent le par-
don à fous les sujets rebelles qui le méritaient,
aucun colôfi ne voulut se reiidrë sur une pro-
niesse aussi vague, et les hostilités continuè-
rent. Richard Howe joignit encore inutilement
ses efforts à ceux de son frère pour dé-
fendre Bostoù. 11 détruisit le 18 octobre Fal-
riipùlth, ville maritine du Massachusetts. Cette
rigoureuse mesure décida les Américains à
iàttcer des lettres de marque contre leurs en-
nemis. Le 7 mars 1776, les Anglais furent obligés
d'eVacuet Boston : ils se retirèrent à Halifax,
dans laNouvelle-Écosse. Philadelphie succomba
également le 18 juin 1778, et sa garnison fut
conduite à grand'peinë à New-York. Howe re-
prit alors la mer : l'amiral français d'Estaing
venait de se présenter devant Rhode-Island, et
dé forcer les Anglais à brûler quelques frégates
et à en couler deux autres pour en éviter la
prisé. Howe accourut aussitôt : une tempête af-
freuse sépara les deux flottes. Les Français al-
lèrent se réparer à Bdstdn ; Howe les y suivit,
mais, ne trouvant pas le moyen de les attaquer
avec avantage, il rentra à New-York, et re-
mit le commandement de la flotte au commo-
dore Byron, et partit pour l'Angleterre, où il resta
dans le repos jusqu'en 1782. Au mois de septembre
de cette année, chargé de ravitailler Gibraltar,
pressé par les Français et les Espagnols, il partit
de Plymouth avec trente-quatre vaisseaux deligne,
des frégates , des brûlots et un grand nombre de
bâtiments de transport; et, quoique les assiégeants
lui fussent supérieurs, il accomplit sa mission
du 11 au 21 octobre, et rentra heureusement en
Angleterre : ses compatriotes déclarèrent qu'ils
lui devaient la conservation de Gibraltar. Lors
de l'avènement dePitt au pouvoir (19 décembre
1783), Howe entra au ministère comme premier
lord de l'amirauté*; il conserva cette position
jusqu'en 1788, où il fut créé comte de la Grande-
Bretagne. Malgré son grand âge, en 1793, le roi
311
HOWE — HOWEL
31*
le nomma amiral ofthe white Jlag , et, en cette
qualité /il dut défendre les côtes britanniques et
le canal de la Manche. U bloqua quelque temps
le port de Brest, et, le 28 mai 1794, rencontra la
flotte française devant Ouessant, sur les cotes
nord-ouest de Bretagne : les Français avaient
vingt-six vaisseaux de ligne; les Anglais vingt-
cinq. Mais, on doit le reconnaître, les équipages
de Howe étaient composés de marins expérimen-
tés, tandis que les vaisseaux français n'étaient
montés que par des volontaires républicains, qui
voyaient la mer et le feu pour la première
fois ; les officiers capables étaient peu nombreux,
la plus grande partie des états-majors de la ma-
rine ayant émigré. Après quelques affaires par-
tielles qui eurent lien le 29, l'amiral anglais, par
ses manœuvres habiles, gagna l'avantage du vent.
On se battit le 1 er juin : l'action dura longtemps
et fut opiniâtre; enfin, six vaisseaux français fu-
rent pris, un autre, coulé à fond : ce fut Le Pen-
seur, d'héroïque mémoire; l'escadre anglaise
souffrit beaucoup , mais ne perdit aucun bâti-
ment. Ce combat glorieux valut à Howe et à
ses marins les remerciements du parlement bri-
tannique. L'amiral reçut un épée d'or et une
médaille de la main du roi ; qui le créa en même
temps chevalier de la Jarretière et le nomma gé-
néral des troupes de marine. En 1797 il quitta le
service; cependant,en l799,lorsqu'éclata la grande
et dangereuse révolte des équipages des flottes de
Portsmouth et de Plymouth, il ne craignit pas
de se rendre au milieu des révoltés, et contri-
bua à les ramener dans le devoir. Il était d'ail-
leurs fort aimé <Jes matelots, qui l'avaient sur-
nommé Dick blach à cause de son teint basané.
Il survécut peu à cet événement, et mourut d'un
accès de goutte remontée. L'Angleterre le mit
justement au premier rang de ses hommes de.
guerre. Howe brilla moins comme orateur : sui-
vant ses biographes, « il s'exprimait au parle-,
ment, dont il était membre, d'une manière si obs-
cure et si ambiguë, qu'il était presque impossible
de comprendre ce qu'il voulait dire ». A. de L.
Narrative ofthe Proceedings ofhis majesty Fleet un-
der the command of earl Richard How from the
i A of mayto î d of june 1795; Londres 1799, in-4°. —
Collini, Peeraçe. — Biog. Navalis. — Edmond Lodge ,
Portraits of illustrieus. Personnages of Great-BrUain,
L VIII, p. 109-192. — Jobn Gorton, A gênerai Biogra-
phical Dictionary. — Biographie Étrangère; Paris,
1819. — Jobn Barrow, lÀfe of lord Richard Howi % admi-
rai of the British fleet; Londres, 1888, in -8°.
howe (William 9 baron), général anglais,
frère du précédent, né en 1725, mort en 1814.
Il entra fort jeune dans l'armée britannique et.
parvint rapidement aux grades supérieurs. En
1775, il fut envoyé en Amérique, et le 25 mai.il
descendit à Boston avec des forces considérables.
Les généraux Clinton et Bourgoyne l'accompa-
gnaient : ils attaquèrent, le 17 juin, les retranche-
ments élevés par les Américains à Bunkershill,
et les enlevèrent, mais avec de grandes pertes. En
octobre suivant, le général Gage s'embarqua pour
l'Angleterre,confiant le commandement supérieur
à William Howe,alors major général.Howeeswya
vainement de pacifier les colonies révoltées; ses
promesses et son amnistie n'abusèrent pas les in-
surgés, qui n'y virent qu'un moyen de les frap-
per sûrement après leur avoir fait déposer tes
armes. Le 17 mars 1776; How fut contraint
d'évacuer Boston, y laissant une grande quan-
tité d'artillerie et de munitions. Washington y
entra aussitôt ; How se retira à Halifax. Le
22 août, ayant été rejoint par Clinton et Cornwal-
lis, il débarqua avec trente-cinq mille hommes
à Long-Island, en avant de New- York, et le 27 U
battit les Américains, qui perdirent beaucoup de
monde, tout en se retirant en bon ordre. Après
cette victoire, Howe proposa encore une récon-
ciliation; mais il fut impossible de s'entendre
même sur les bases. Le 15 septembre les An-
glais occupèrent New- York, et le 20 la plus
grande partie de la ville fut incendiée. Les deux
partis s'accusèrent mutuellement de cet acte
odieux. Howe tourna ensuite les Américains,
afin de les couper des provinces de l'Est. Le
28 octobre il força le passage de la Brunx, et le
1 er octobre il s'empara du camp de Washington,
qui, refusant une bataille, évacua le New-Jersey.
Ces succès furent sans résultat pour les Anglais.
Dès le 2 janvier 1777 Wasingthon attaquait lord
Cornvallis à Trenton, et délogeait ses troupes
de Princetown. Le printemps et l'été se pas-
sèrent dans une observation mutuelle, Wa-
shington évitant toujours une action générale et
décimant ses ennemis dans des escarmouches
quotidiennes. Le 23 juillet, Howe fit embarquer
une partie de son armée sur la flotte de son
frère, et descendit le 25 août dans la baie de
Chesapeak, d'où il s'avança sur Philadelphie. Wa-
shington -fit mine de vouloir défendra cette
ville, mais il ne persévéra pas dans ce dessein.
Le 11 les Américains furent battus sur la Bran-
dy wine, et le 26 ils évacuèrent Philadelphie.
Howe détruisit alors tous les forts américains
élevés sur les rives de la Delaware. Attaqué à
Timproviste le 4 octobre, à Germantown, par l'in-
fatigable Washington, il ne repoussa les assail-
lants que par des prodiges de valeur et après
de grandes pertes. Néanmoins il se maintint
dans Philadelphie jusqu'au 8 mai 1778, où il s'em-
barqua pour l'Angleterre, laissant à Clinton une
armée démoralisée et des positions fort com-
promises. Depuis cette époque, William Howe
n'exerça plus aucun commandement. A. dx L.
John Corny, Life of gênerai Washington ; Londres,
1800, in-8°. — Fr. Gulzot, Vie du général Georges Wa-
shington', Paris, 1859, in-8° ; - Spark, American Bio-
graphy, 1. 1! p. 395 ; III, M. — Le même, WrUinçs of
Washington. — Biographie Étrangère.
bowel Dda, ou le Bon, qui prenait le titre
de Mab Cadfill, Brenin Cymru, c'est-à-dire
de fils de Cadell, brenin ou chef des pays des
Kymris, mort en 948, réunissait sous son pouvoir,
dès les premières années du dixième siècle, les
trois régions principales du pays de Galles
ou de la Cambrie, désignées avant la conquête
dis
HOWEL — HOWELL
314
de ce pays par les Anglo-Saxons, au huitième
siècle, sous les noms de Gwynned , Powis et
Dehembarth. Quoiqu'il ne semble pas avoir eu
sur les petits rois ou brenins inférieurs plus
d'autorité que ses prédécesseurs, son habileté,
sa sagesse et ses vertus lui donnèrent sur la
nation cambrienne un ascendant dont il profita
pour élever un monument législatif d'une exécu-
tion aussi difficile que méritoire, en codifiant,
à l'aide des usages et des traditions orales qui
avaient cours de son temps, les coutumes qui,
depuis des siècles, régissaient la Cambrie. Ac-
ceptées, après mûre délibération, par l'assemblée
du pays, composée des principaux seigneurs,
des chefs de clan , des représentants de chaque
clan, des anciens , sans l'assentiment desquels
aucune loi ne pouvait être établie, modifiée ou
abrogée, les lois de Howel furent sanctionnées
d'abord par le peuple, ensuite parle papeAnas-
tase , près duquel il se rendit en personne en
913. Ces lois apportèrent de grands adoucisse-
ments à la législation pénale antérieure. Entre
autres améliorations, on y remarque la substitu-
tion de la preuve testimoniale et l'affirmation
sans serment aux épreuves et aux combats ju-
diciaires; elles devancèrent ainsi de plus de trois
siècles l'abolition par saint Louis du duel judi-
ciaire dans ses domaines. Ce n'est pas sous ce
rapport seulement que les lois de Howel sont
à consulter ; c'est à elles qu'il. faut recourir pour
se faire une idée nette et précise de la compo-
sition de la société kymrique au dixième siècle,
des droits respectifs du brenin et de ses infé-
rieurs, de la condition légale de la femme, du
partage des terres, de la manière dont se ré-
glaient les successions, des usages agricoles, de
l'administration delà justice, etc., toutes choses
rassemblées par Owen sous le titre de lois
dHowel, dans trois compilations distinctes,
analysées avec une rare sagacité par M. de La
Borderie, à qui nous empruntons la presque to-
talité des détails qui précèdent. La dissertation
de M™ e Du Chàtellier sur le même sujet con-
tribue à faire apprécier la haute portée du mo-
nument du à Howel. Après la mort de ce prince,
le pays de Galles, retombé dans une série de
guerres et de dissensions intestines dont sa sa-
gesse l'avait préservé, fut le théâtre des incur-
sions et des ravages, tantôt des Angles; tantôt
des pirates danois. P. Levot.
Notice historique sut tes Loi* d' Howel le Bon, par
A. de La Borderie ; Rennes, io-8°. — Des Lois d'Howei-
Dda, Mab Caàell, Brenin Cymru (fils de Càdell, chef
au pats desKymris), par A. Du Ckltelller; Paris, ln-8°.
howel (Laurence), théologien anglais, né
vers 1660, mort en 1720. Élève de l'université de
Cambridge , il entra dans les ordres, et, fidèle à
la cause des Stuarts, il refusa de prêter serment
à GuillaumelU, à la reine Anne et à Georges 1 er .
D se fermait ainsi l'accès des dignités ecclésias-
tiques, et se plaçait vis-à-vis du pouvoir dans
une position d'hostilité pleine de dangers. 11 ne
tarda pas à en faire l'expérience. Ponr on pam-
phlet intitulé : The Case o/Schism in the Church
of England truly stàted, destiné à prouver
la légitimité du refus de serment, il fut condamné
à cinq ans de prison et à cinq cents livres st.
d'ameude. Howel mourut dans la prison de
Newgate. On a de lui : Synopsis Canonum
SS. Apostolorum et Conciliorum Œcumeni*
eorum et Provtncialhtm ab Ecclesia Grxca
receptorum; 1708, in-tol.; — Synopsis Cano-
num Ecclesise Latinœ; 1710-1715, in-fol.; —
The View of the Pontiftcate, from Us sup-
posée begining to the end of the Council of
Trent; 1712; — History o/the Bible; 3 vol.
in-8*. Z.
Hittorical Rcgitter for 1717 et I7f». — Chalmers, Ge-
neral Bioçraphical Dictionary. ,
howell ( William), historien anglais, né
vers 1630, mort en 1683. Professeur dans l'uni-
versité d'Oxford, il se fit connaître par une
History offhe World from the earliest times
to the ruin o/the Roman Empire %n the
west; J680, 4 vol. in-fol., ouvrage dont Gibbon
a fait l'éloge. On a encore de lui : Elementa
Historié Civilis; Oxford, 1660. D'après Chal-
mers, W. Howell est l'auteur d'un abrégé de
l'histoire d'Angleterre intitulé Medulla Historié
Anglicanes, et attribué à Laurence Howel. Z.
Chalmers, General Bioeraphteal Dictionary.
howell (/âmes), historien anglais, né
vers 1596, à Brecknock, dans le comté de Caer-
marthen (pays de Galles), mort en no-
vembre 1666. Il fnt élevé an collège de Jésus
à Oxford, et quitta l'université en 1613, sans
avoir pris d'autre grade que celui de bachelier.
Son père, chargé de famille, ne pouvant lui fournir
de quoi continuer ses études, il -accepta la place
de surveillant d'une manufacture de verre, et
fit en 1619. un voyage sur le continent pour le
compte des fondateurs de cet établissement. 11
visita la Hollande, la Flandre, la France, l'Es-
pagne et l'Italie. De retour en Angleterre en
1621, il fut agrégé au collège de Jésus. Il voyagea
bientôt après avec un jeune gentilhomme , et alla
ensuite négocier à Madrid la restitution d'un
vaisseau marchand anglais qui avait été confis-
qué. Son activité et son habileté le firent choisir
pour secrétaire par lord Scropeen 1626. L'année
suivante, le bourg de Richmond l'envoya à la
chambre des communes. En 1632 il alla en Da-
nemark comme secrétaire; d'une ambassade
extraordinaire, et à son setour il fut employé au
même titre par Strafford en Irlande. La chute
de Strafford et la guerre civile lui enlevèrent .
ses emplois; il fut même arrêté en 1643, et dé-
tenu jusqu'après la mort du roi. Il chercha à se
rapprocher de Cromwell, et lui adressa un dis-
cours flatteur. Charles U, rétabli sur le trône,
oublia cette légère infidélité à la cause royale, et
créa pour Howell la place d'historiographe.
Ses ouvrages sont nombreux ; le plus connu est
sa correspondance intitulée : Epistolw Ho-
welianœ; familiar letters, domtsiic and tih
81*
HOWELL - HOWITT
316
reign, partly historicat, partly political, and
partly philosophical ; 1645-1655, 4 vol. cor-
respondance souvent réimprimée. Z.
Blooraphia Britannica. — Athenm Oxonienus, io\. II.
— Cb^lmer^ General Dioçraphical Dictionary.
howick ( Charles Grey, vicomte). Voy.
Grev.
î bowitt ( W illiaj»), poète, romancier et
voyageur anglais, né es 1795, à Heanor (comté
de Derby )* Comme toute sa famille, il est
membre de la Société des Amis. De bonne
heure, il montra une avidité extrême d'ins-
truction. Après avoir achevé les études ordi-
naires, il se mit à apprendre la chimie, la physi-
que, la philosophie, à lire les meilleurs écrivains
d'Angleterre, (f Italie et de France , et plus tard
acquit une connaissance complète de l'allemand.
Son goût pour la poésie se développa et s'agran-
dit au milieu de séjours prolongés à la cam-
pagne, dont les beautés et les jouissances avaient
pour lui le plus vif attrait. A l'âge de vingt-huit
ans il épousa une jeune fille appartenant comme
loi à la Société des Amis , miss Mary Botham,
dont les goûts et les talents étaient en parfaite
harmonie avec les siens : leur» noms ont été
si longtemps et si intimement associés dans des
œuvres diverses, qu'A est difficile de les séparer.
Leur premier ouvrage, Le Ménestrel de la
Forêt parut, en 1*23, et porte en *itr»feurs
deux noms. 11 fut accueilli avec beaucoup, de
faveur par les critiques de la presse, et, ce qui
est à remarquer, par plusieurs poètes du temps
d'une réputation reconnue. Us ajoutèrent à Féelat
de ee premier succès par beaucoup de poésies
lyriques, qui parurent dans les Animais feshifr-
nables du temps. Peu api& la publication du Mé-
.nestrel, ils entreprirent un voyage à pied en
Ecosse, recueillant les images et les traditions,
«'enivrant des beautés des lacs, des paysages y de
la nature cultivée ou sauvage, et parcoururent
ainsi plus de 500 milles. On dit qu'en passant,
ris firent une courte visite a Gretaa-Green , et
que le vieux forgeron, voyant leur jeunesse et le
•bonheur qui rayonnait sur leur figure , les prit
pour des amoureux qui avaient besoin de son
ministère : il fut un peu étonné quand il apprit
que le nœud conjugal était déjà bel et .bien
formé. En 1827 ils publièrent un poème plein
d'intérêt, fondé sur le-véûitfdes ravages de la
peste à Eyam par le révci-William Mompesson,
et y ajoutèrent d'autres-poésies d'un mérite
remarquable. En 1831 M. Howitt donna au
monde littéraire Le Livre des Saisons, mi fies
ouvrages les plus agréables et les plus instruc-
tifs qui aient paru en ce genre. On dit qu'il fut
offert à six éditeurs au moins, et rejeta par
tous : on n'en voulait à aucun prix. Il y airait
de quoi décourager. L'auteur fut pris d'un tel
dégoût et pour les éditeurs et pour son livre
malencontreux, qu'il pria ufe> ami, qui s'était
chargé des négociations; détacher une pierre
au manuscrit et de le lancer dans la Tamise. Get
ami pourtant, honnie judicieux, pensa qu'il va-
lait mieux avoir quelque chose que rien du tout,
et finit par vendre le manuscrit à Colburn et
Bentley pour 75 liv. sterling. Ce fut une petite
mine d'or pour les heureux libraires ! L'ouvrap*
à- cjénassé la vingtième édition. Mais hélas!
qu'y gagna l'auteur ? La gloire sans doute d'être
reproduit des milliers de fois; mais pas une
parcelle de cet or récolté largement par les
éditeurs ne vint paver cette gloire.
Libéral prononce en politique, M. Howitt
tourna, malgré les conseils de ses amis, ses
idées vers la politique. A cette époque , tous
ceux qui dénonçaient les abus du pouvoir royal,
du clergé et du barreau étaient regardés comme
des hommes dangereux. Telle était l'énergie de
conviction chez M. Howitt , et en même temps
son courage , qu'il n'hésita point à publier son
History of Priesicrâft (Histoire de la Politique
sacerdotale ) , qui était de nature à soulever
contre lui de nombreux et puissants ennemis.
Toutes les sectes religieuses ou prétendues re-
ligieuses y étaient passées en revue, et les arti-
fices, les abus et 14, politique astucieuse de cha-
cune dévoilés et jugés avec une critique indépen-
dante et sévère; ce fut, dit un écrivain anglais,
comme une Recharge de canons à la-Paixhans
contre les superstitions anciennes et modernes.
L'ouvrage produisit une grande sensation. Il eut
beaucoup de succès,' et d'année en année les
éditions se renouvelèrent. Ceux même qui n'ap-
prouvaient pas l'extrême sévérité des jugements
et }a tendance générale du livre , reconnaissaient
la droiture et le courage de l'auteur. Peu après
icette publication, il fut nommé alderman de Not-
tingham, où il résidait alors. M. Howitt y devint
très-populaire, comme champion des droits po-
pulaires, et plus d'une fois ^ reçut des présents
publies comme témoignage, de cette estime.
Mais il s'aperçut bientôt que la vie politique a
de rudes exigences. Il fallait en toute occasion
faire des discours dans les meetings , répondre à
des adversaires passionnés, appliquer son temps
et ses facultés \ des devoirs jugés indispensa-
bles, et peu ûVtW^s lin* restaient pour les pro-
ductions plus attrayantes du cabinet. Il quitta
donc tyottingharo et l'arène politique pour se
retirer dans le beau village d'EsheJr, et c'est là
qu'il, composa , au sein d'une retraite paisible
et occupée , l'un de ses ouvrages les plus popu-
laires, The Rural Life in England, 2 vol.
( La Vie Rurale en Angleterre )i description fidèle
et gracieuse des plaisirs, amusements, coutumes
et occujpjations. de la campagne dans rjfkerxy En-
gland( la joyeuse Angleterre); « On y respire, dit
un critique , un, parMn d'aubépine en fleur et
de foin nouvellement fauché qui pénètre d'une
douce ivresse, et dont l'attrait est bien de na-
ture à faire déserter la ville, cet amas de bri-
ques, pour les bois riants et les fraîches vallées
de la campagne. » D'autres ouvrages suivirent :
Colonisation et Christianisme, où il expose
317
HOWITT - HOWITZ
318
comment leg nations de l'Europe ont traité les
indigènes dans leurs colonies ; — Visits to Remar-
kable Places, Old Halls, andBattle Fields,
and sçenejs illustrative of striking passar
ges in English Bis tory. Bien que d'un prix
élevé, ce dernier ouvrage fut rapidement en-
levé et plusieurs fois réimprimé.
Après une résidence de trois ans à Esher,
H. et M™* Howjtt allèrent s'établir à Heidelberg,
pour l'éducation de leurs enfants. Ils s'y per-
fectionnèrent dans l'allemand, et recueillirent des
matériaux, nombreux pour d'autres ouvrages.
Pendant son séjour à Heidelberg, M. Howitt pu-
blia, en 1841, La Vie des Étudiants en Alle-
magne. Le livre fut attaqué avec une grande
virulence par la pressé anglaise. Le goût national
était-il choqué par cette peinture fidèle de l'é-
tudiant avee son air fanfaron , son visage pâle
et rêveur et son éternelle pipe? Quoi qu'il en
soit, le succès de l'ouvrage fut médiocre. L'année
suivante, il donna : La Vie Rurale et Domes-
tique en Allemagne; et, après avoir quitté
le pays, Expériences en Allemagne, où il
voulait retracer l'esprit de chicane et de rapa-
cité parmi les Allemands et certains ridicules
de la société. Les journaux allemands attaquè-
rent ces critiques comme d'indignes satires.
En 1846 parut V Aristocratie d'Angleterre,
qui est 'un manifeste énergique de réforme, et
où il exposé que Tes cinq sixièmes des places^,
pension^ , dignités 1 dans' ta marine , l'armée et le
clergé totat ^otosîtëment réservés à l'àristo»-
cratie. B' avait condensé 1 en tnV seul foyer' ces
faits qui défrayent d'usage lés attaques des jour-
naux : vrais à des degrés différents, ils forment
une redoutable machine de guerre.
En 1 847 parurent par séries deux volumes il-
lustrés intitulés iHaunts and Homes ofSritish
Poets. C'est avec un vif* intérêt qu'on recherche
les souvenirs et les anecdotes qui ont rapport
à der -poètes célèbres, aux choses et anx lieux
que letrr talent a en quelque sorte consacrés.
M. Howitt avait eu des relations d'amitié avec
la plupart d'entre eux et visité réellement les
lieux qu'il décrit ; aussi cet ouvrage fut-il ac-
cueilli avec beaucoup de faveur. Quelques ou-
vrages de fiction, quelques livres pleins de sens
et d'imagination pour la jeunesse échappèrent de
sa plume féconde et infatigable dans les années
qui suivirent o Hâtons-nous d'arriver à deux
entreprises qui ont .eu, beaucoup d'influence sur
sa vie.
En 1846 M. Howitt était devenu co-proprié-
taire et un des directeurs du Journal du Peuple.
Ses talents, son expérience et sa réputation au-
raient dû lui en assurer la direction absolue. Mal-
heureusement il n'en fut pas ainsi. Les discus-
sions devinrent bientôt de querelles. Les associés
se séparèrent au bout d'un an, dans des circons-
tances qui entraînèrent une perte considérable
pour M. Howitt. Se croyant libre de tout enga-
gement, il publia le Journal d f Howitt, ce qui
était le Journal du Peuple avec un titre diffé-
rent. Mais ne pouvant retirer son capital de ce
dernier, il s'ensuivit des procès dispendieux. Le
nouveau journal fut arrêté dans son succès, et
les pertes d'argent furent sérieuses.
En 1852 M. Howitt partit pour l'Australie.
Toutes les imaginations étaient alors exaltées
par la découverte des mines d'or. Son intention
n'était pas de s'établir mineur ou colon ; mais,
dominé par l'esprit d'aventure et de recherche,
il voulait étudier de près le caractère et les res-
sources de cette colonie. Le résultat fut un ou-
vrage du plus grand intérêt, land, Labour,
and Gold , or two years in Victoria.
Parti d'Angleterre en juin 1852 avec ses deux
fils , M. Howitt n'arriva à Melbourne qu'après
un voyage de trois mois et demi. Ses expériëïÊ
ces du pays commencèrent au sortir du na-
vire. On lui demandai liv. sterling. (loofiv)
pour le seul transport de son bagage à Mel-
bourne. Dans cette ville, tout se vendait à 300
pour J00 du prix d'achat. Deux petites cham-
bres, avec un mobilier mesquin, prix 6 liv.
( 150 fr. ) par sçpiaine, et le reste à l'avenant.
M. Howitt avait un frère établi depuis plusieurs
années comme médecin à Melbourne; ce fut
pour lui une source précieuse de renseignements,
dont il a tiré bon parti. J[I se rendit aux mi-
nes , e| les visita sqceessivement. Mais c'est dans
.son ouvrage . qu'il faut lire ses. aventures , ses
dangers, ses observations sur le climat, la ri-
chesse <fes mineurs , le système qui gouverne leur
exploitation et la vente des terres. Après un
séjour de deux ans dans ce pays , ou il avait
tout observé de ses yeux et recueilli les rensei-
gnements les plus exacts, il songea à revenir en
Angleterre yers la fin de 1854. L'ouvrage qu'il
donna l'année suivante est non-seulement le ta-
bleau le meilleur et le plus 1 complet de cette flo-
rissante colonie, mais un des livres les plus in-
téressants de voyage qui aient été publiés.
J. Chanut.
Men o/the lime.
howitz (Frajiz-Gothard), médecin da-
nois, né a Copenhague, le 25 décembre 1789,
mort le)3 avril 1826. Après avoir été reçu doc-
teur en médecine (1815), il voyagea à l'étranger
(1815-1818), et fut nommé professeur de phar-
macologie à l'université de Copenhague (1819),
et médecin de divers établissements publics. On
a de lui : Om Afsindigfiedog tilregnehe (Sur la
Démence et rimpuiabjlité), dans Juridisk Tids-
skrtft de CErsted, t. VHI ; et à part, Copenhague,
1824, in-8°. Cet écrit, où il nie la liberté de la vo-
lonté humaine, futréfutépar J.-L.Heiberg,P. Hort
et A. S. CErsted; — Determinismen eller Hume
mod Kant ( Le Déterminisme, ou Hume contre
Kant), ibid., 1824, in- 8°; et Ultimatum sur le
Déterminisme, ib., 1825; où il soutint avec
beaucoup de talent les opinions qu'il avait émises
dans son premier ouvrage; — Pharmacopgea
inpraxipubUca a medicis danicis sequenda;
S19
îb., 1828, in-12 ; — des Mémoires àènsActa So-
cietatis Medicm Hafniensis, t. VI, VJf, et dans
Bibliothek for Lxger ( Bibliothèque pour les
Médecins), 1821. B.
BOOiothek for Lxger, t. VII, p. 184-148. - Dansk IA-
teraturtidende, 1886, n« 19. — Neuer Nekrotog der
Deutschen; llmenu, 1886. p. 848-848. - Brslew, For-
fatter-Lex.
howman ( Jean ), surnommé Jean de Feo
kenham, du lieu de sa naissance, dans le comté de
Worcester, né vers 1516, mort au château de
Wisbeach (lie d'Ely), en 1585. Il était fils de pau-
vres paysans; mais son intelligence et ses goûts
studieux le firent accueillir par les bénédictins
d'Evesham, qui l'envoyèrent achever ses études
au collège de Glocester à Oxford. Après avoir
reçu les ordres, il devint chapelain de l'évêque
de Worcester, puis de Bonner,' évoque de Lon-
dres, qui tous deux s'opposèrent avec vigueur aux
progrès de la réforme en Angleterre. En 1549,
le zèle catholique d'Howman le fit emprisonner
à la tour de Londres ; il y demeura jusqu'à IV
vénement de la reine Marie (1553), qui l'attacha
à sa personne. Elle le chargea de convertir Jane
Grey lorsque la mort de cette infortunée prin-
cesse eut été résolue, et le nomma peu après
abbé de Westminster. Dans la prospérité How-
man se montra beaucoup plus tolérant: il com-
battit les mesures cruelles prises contre les
protestants, et sauva probablement la vie à la
princesse Elisabeth, par ses prières et ses re-
montrances à la reine Marie, alors que cette
reine avait résolu la mort de sa sœur. Elisabeth
étant montée sur le trône voulut se montrer re-
connaissante : elle offrit à Howman l'archevêché
de Cantorbéry, pourvu qu'il embrassât la ré-
forme. Jl refusa formellement , et de plus, dans
la chambre des lords, où il siégeait comme abbé
mitre, il s'opposa à toutes les mesures qui pou-
vaient favoriser la religion réformée. Elisabeth
crut vaincre cette obstination en lefaisantconduire
à la tour en 1560. Howman y resta jusqu'en 1563,
où l'éveque de Winchester obtint son élargisse-
ment. Mais au bout de quelques mois il fut arrêté
de nouveau. Le reste de sa vie se passa dans une
alternative de captivité et de liberté précaire. De-
venu septuagénaire, il termina enfin ses jours
sous les verrous, au château de Wisbeach. Ca-
tholiques et protestants s'accordent à reconnaître
Howman comme un prélat aussi savant que libéral
et charitable. On a de lui : le récit de sa Confé-
rence avec Jane Grey; Londres, 1554, in-8°,
et 1626, in-4 a ; — des Oraisons; — des Ser-
mons , — et quelques écrits de controverse.
A. L.
Wood, Athenœ Oxonienses.
iiotee (Anna,née OwEN),illuminée allemande,
née à Eiderstadt, en 1584, morte en 1656. En
1599 elle épousa un noble du pays , appelé Her-
mann de Hoyer, après la mort duquel elle se
retira sur une terre qu'elle possédait, pour s'y
adonner à la culture des lettres et de la poésie.
Visitée par un alchimiste, du nom de Tetînguis,
HOWITZ — HOYER 320
dont elle avait réclamé les soins pendant une
maladie, elle s'associa aux rêveries de cet homme,
qui demeura dans sa maison et qu'elle considéra
comme un prophète. Puis elle prit parti pour les
anabaptistes, et se crut elle-même inspirée. Son
ardeur à faire des prosélytes lui occasionna des
dépenses qui compromirent sa fortune. Elle dut
quitter son pays pour aller en Suède, où elle vécut
sur un domaine dont la reine Christine l'avait
gratifiée. On dit que, sentant sa fin s'approcher,
elle se rendit inaccessible pour n'avoir point de
témoins de sa mort. Elle avait des habitudes sin-
gulières, celle, par exemple, de ne manger que
du poisson pourri. Ses œuvres, parmi lesquelles
des poésies sacrées dirigées contre le3 luthériens,
ont été publiées à Amterdam en 1650. Y. R.
Colberg, Platomitch-Hermetisch, Christentkum. —
Holberg, Dœn und Norw. Staats-und Aeichshistorie. -
Sedler, Univ.-Uxic.
hoyer {Michel), poète latin moderne, né
à Hesdin (Artois), en 1593, mort à Lille, le 14 juin
1650. Il reçut la prêtrise, et enseigna plusieurs
années les belles-lettres au collège de Saint-Pierre,
à Lille. Plus tard il fit profession chez les er-
mitesde Saint Augustin, à Ypres.ll fut régent de
poésie et de rhétorique dans plusieurs établisse-
ments de son ordre. II était préfet des études à
Lille lorsqu'il mourut. On a de lui : Flammulœ
Amorti s. JP. Augustini versibus et iconïbus
exornatx; Anvers, 1629 et 1639, in-16; —
Theatrum Castitatis,sive Susannaet Gamma,
tragœdix; attaque poemata; Tournay, 1631,
in-12; — Oratio encomiastica , de Sancti-
taie Vitœ et Divina Sapientia Joannis
Duns Scott, doctoris Mariant et subtilis;
Douay, 1640,in-4° ;— Vitœ Religiosx ldea t seu
Vita S. Patris Ephrxm Syri, scriptoris an-
tiquissimi et religiosissimi ; Douay, 1640,
in-16; — S. Theodoray virgo et martyr An-
tiochena, tragœdia : aliaque poemata ; Anvers,
1641, in-12; — Epïcedion in Obitum eximii
patris Benrici Lancilotti, S. Thi doctoris Lo-
vaniensis; Anvers, 1643, in-4°; — Historiés
tragicx, sacras et prof an», Décades dux;
Cologne, 1647, in-12; Bruxelles, 1652, in-16;
ces histoires sont entremêlées de vers et écrites
avec élégance. A. L.
Valère André, Bibliotheea Belgica. p. 678-674. - Le
P. Pbil. ElMtus, Encomiasticon Augustinlan., p. 490. -
Paquot, Mémoires pour servtr à r Histoire littéraire des
Pays-Bas, t. 1, p. 157-159.
hoyer (Jean-Godefroi de), écrivain militaire
allemand , né à Dresde, le 9 mai 1 767, mort à Halle,
le 7 mars 1848. 11 servit avec distinction dans
les armées saxonne, russe et prussienne, et fut
nommé inspecteur des forteresses delà Poméranie
et de la province de Prusse. Ses principaux
travaux sont : Pragmatische Geschichte der
sxchsischen Truppen (Histoire pragmatique des
Troupes saxonnes) ; Leipzig, 1791 ; —Bandbuch
der Pontonnier wissenschaft (Manuel de la
Science du Pontonnier); Leipzig, 1793-1794,
2 vol.; 2 e édit.", 1830; —Geschkhteder.Kriegs-
321
HOYER — HOZIER
322
kunst (Histoire de l'Art de la Guerre); Gcet-
tingue, 1797-1800, 2 vol. ;— Allgemeines Wœr-
terbuch der Artillerie (Dictionnaire universel de
l'Artillerie); Tubingue, 1804-1831, 3 vol.; — Al-
lgemeines Wœrterbuch der Kriegsbaukunst
(Dictionnaire universel de l'art des fortifica-
tions ) ; Berlin, 1815, 3 vol. ; — Lehrbuch der
Kriegsbaukunst (Traité de l'Art des Fortifica-
tions); Berlin, 1817-1818, 2 vol; — Lehrbuch
fur den Elementarunterricht in den Kriegs-
wissenschaften (Traité élémentaire des Sciences
militaires ) ; Berlin, 1827, 2 vol. ; — System der
Brandraketen nach Congreve und andern
( Système des Fusées de guerre d'après Congreve
et autres), avec un supplément sur les canons à
vapeur de Perkins ; Leipzig 1827, en trois plan-
ches. L'auteur, après avoir tait J'historique des
fusées, entre dans l'examen des procédés techni-
ques de fabrication et de l'application de ces
pièces d'artifice à la guerre; enfin, il conclut
qu'elles peuvent être un utile supplément à
l'artillerie. — Literatur der Kriegswissens-
ehaften und Kriegsgeschichte (Liste des Ou-
vrages sur les Sciences et l'Histoire militaires) ;
Berlin, 1831-1840 ; — Franz Sforza I Visconti ;
Magdebourg, 1841, 2 vol. R. L.
Conv.~Lex.-Bev. Bneyc, 18*8,
hoynck tan papendrecht (Corneille-
Paul), historien hollandais, né à Dordrecht, le
1 er janvier 1686, mort à Malines, le 13 décembre
1753. Issu d'une ancienne et noble famille de Hol-
lande, il fit ses premières études à Malines et à
Paderborn. Il suivit un cours de théologie, d 'abord
chez les jésuites de Malines, pais à l'uni-
versité de Louvain, où il fit son droit, et devint
licencié en 1713. Ordonné prêtre, il fut envoyé
comme vicaire à La Haye ; mais Thomas-Philippe
d'Alsace, ayant été nommé archevêque de Ma-
lines, le choisit pour secrétaire, et s'en fit ac-
compagaer dans un voyage à Rome, pendant
loquet on résolut d'imposer au clergé la bulle
Vnigenitus. En 1717 Hoynck van Papendrecht
obtint une prébendedu chapitre de Saint-Rombaut
de Malines; il fut peu de temps après nommé
vicaire général. Marie-Elisabeth , gouvernante
des Pays-Bas, voulant lui témoigner sa satis-
faction pour le zèle qu'il avait montré contre les
jansénistes, fit frapper une médaille d'or des-
tinée à rappeler le souvenir de ses services. En
1731 il fut appelé à une prébende de chanoine,
gradué de la faculté de droit à Saint-Rombaut-,
et, l'année suivante, il fut nommé archiprêtre. Il
rédigea, vers 1735, avec le père Wouters, un
nouveau catalogue des livres défendus, qu'ils
espéraient faire autoriser sous le gouvernement
de Marie-Elisabeth. Ce catalogue fut, en effet,
publié par un édit impérial; mais le conseil de
Brabant s'y opposa énergiquement le 12 jan-
vier 1736. Hoynck van Papendrecht consacrait
ses moments de loisir à des travaux sur l'his-
toire des Pays-Bas, lorsqu'il mourut à l'âge de
soixante-sept ans. Son portrait a été fait par
NOGV. 1I0GR. CÉNÉR. — T. XXV.
le peintre Smeyers. Ses principaux écrits ont pour
titres : ffistoria Bcclesix Ultrajectinx, a tem-
pore mutatx religionis in Fœderato Belgio,
in qua ostenditur ordinaria sedis archiépis-
copales et capituli jura intercédasse , etc. ;
Malines, 1725, in-fol. : une traduction flamande
en a été publiée à Malines, 1728, in-fol. ; —
Analecta Belgica ad historiam scissi Belgii
potissimum attinentia ; La Haye, 1743, 3 vol.,
en 6 parties in-4°. Sur l'une des feuilles de garde
de son exemplaire de cet ouvrage, aujourd'hui
conservé à la Bibliothèque royale de Bruxelles,
le savant bibliophile van Hulthem a consigné le
jugement suivant: « L'auteur, chanoine de Ma-
lines , a bien mérité delà patrie en publiant ces
morceaux précieux, qui, presque tous, paraissent
pour la première fois. H y a ajouté des notes sa-
vantes, judicieuses, et très-bien écrites en latin.
Plot à Dieu que nous eussions beaucoup de cha-
noines pareils I » Hoynck van Papendrecht a
aidé Foppens dans la composition de sa Biblio-
theca Belgica. E. Recnaju>.
Foppeos, Bibliotheca Belgica, Préface, p. ni. — Bt-
bltetheca Hvltàêmiana, t. IV, n° W,i49. - Gœthils,
Histoire des Lettr$t 9 des Sciences et des Arts en Belgique
et dans les pays limitrophes , 1. 1.
ho vos (Gaspar de), peintre espagnol, né
vers 1540. 11 étudia la peinture à Madrid, dans
les ateliers de l'habile Gaspar Becerra, et acquit
bientôt un talent assez distingué. En 1569 il fut
chargé, avec Gaspar y Palencia, de Valladolid,
de l'ornementation du grand maltre-autel de la
cathédrale d'Astorga, dont Becerra avait peint le
tableau capital. On voit d'Hoyos plusieurs bons
tableaux dans divers couvents. A. de L.
QaUllet, Dictionnaire des Peintres espagnols.
* boz (Juan de La), poète dramatique espa-
gnol, né à Madrid, vers 1620; il devint chevalier
de Saint- Jacques en 1653, regidor de Burgos en
1657 ; il vivait encore en 1689. Il ne nous reste
qu'un fort petit nombre de ses comédies ; Bl Cas-
tigo de la Miseria est une des meilleures du
théâtre espagnol ; elle mérite d'être placée immé-
diatement après V Avare de Molière, ce qui est
déjà un rang fort honorable. L'avare est retracé
avec verve et gaieté, et l'intrigue, quoiqu'un peu
compliquée, est bien conduite. Hoz prit le sujet
dans une des Nouvelles de Marie de Zayas, fort
goûtée à cette époque, mais il y introduisit des
changements considérables. El Castigo de la
Miseria a été inséré dans le premier volume du
Teatro Espanol, publié par Huerta, et dans le cin-
quième volume du Tesoro del Teatro Espanol;
Paris, 1838. Une production d'un autre genre, El
Montanez Juan Pascual y primer Asistenle de
Sevilla , met en scène avec habileté un trait de
la vie du roi Pèdre le Justicier. G. B.
Slsmondl, Histoire de la Littérature du Midi, t. IV,
p. 186. — Tteknor,:25ristory ofSpanish Literatur*, II. 417.;
— Von Schacb, Geschichte des dramatisehen Literatur
<»5pa*tfan, t. III,p.Mi.
*uozibr (Etienne d'), poète et chroniqueur
français, né à Salon, le 18 octobre 1547, mortà Aix
en 1611. Gentilhomme provençal, il devint capi-
11
323
HOZIER
324
taine de la ville de Saloa en 1&80. Pendant qu'il
occupait cette charge, il mit en ordre les archives
de l'hôtel de Tille et en inventoria les titres, qui
étaient dans une grande confusion. Son goût pour
les vieilles chartes passa dans sa famille. Il vint
plusieurs fois à la cour, et suivit, en 1 589, la prin-
cesse Christine de Lorraine en Toscane, où ette
allait épouser le grand-duc Ferdinand de Médicis.
On a de lui quelques pièces devers imprimées de
son temps, tant en français qu'en provençal ; mais
il avait surtout un goût décidé pour l'étude de l'hia*
toire. tl avait composé des Chroniques qui avaient
pour titre: Épitome des Événements du Mande
dès sa création. César Nostradamus, qui était
son cousin, le cite à la dernière page de son Hi$+
toire de Provence comme un de ceux qui lui
avaient fourni des matériaux pour la composi-
tion de cet ouvrage. J. V.
Nostradamus, Mist de Provence. — Dictionnaire des
Hommes Illustres de la Pqgventfe, — lf orérl , le Gran$
Dictionnaire Historique.
hozier (Pierre d'), seigneur ne La Garde,
en Provence, célèbre généalogiste français, fils
du précédent, hé à Marseille, le. \Q juillet 1592,
mort à Paris, le 1 er décembre 1660. Son père lui
fit donner une excellente éducation. Il entra,
dès qu'il eut perdu son père, dans la compagnie
de chevau-légers du maréchal de Créqui, qui re-
cherchait alors sa généalogie. D'Hozier s'offrit à
ce seigneur pour l'aider dans ce travail, et com-
posa en effet la généalogie de cette illustre maison/
L'ouvrage eut tant de succès, qu'il entreprit ensuite
la recherche générale des généalogies des autres
familles nobles du royaume ; et il s'acquit dans ce
genre une telle réputation, que Louis XIII le fit, en
1620, l'un des cent gentilshommes de l'ancienne
bande de sa maison, le décora de l'ordre de Saint-
Michel en 1628, lui accorda en 1629 une pension^
et en 1641 la charge de juge d'armes de France,
sur la démission du vicomte de Saint-Maurice ,'
qui l'indiqua lui-môme au roi pour son succes-
seur (1). La réputation d'Hozier augmentant
chaque jour, le roi le fit en 1642 l'un de ses.
maîtres d'hôtel. Louis XIV lui conserva les
mêmes emplois, le commit pour lui certifier la
noblesse des éouyers et des pages de ses écu-
ries, et lui donna un brevet dé conseiller d'État
en 1654. « De véritables grands hommes, dît
Voltaire, ont été bien moins récompensés : leurs
travaux n'étaient pas si nécessaires à la vanité
humaine. » Pierre d'Hozier fut consulté de toute
la France et de plusieurs endroits de l'Europe.
« Il a voit une mémoire si prodigieuse, dit l'abbé
Ladvocat, qu'il citoit sur-le-champ et sans se
tromper, les dates des contrats, les noms, les
surnoms et les armes de chaque famille qu'il
avoit une fois étudiée. Ce qui fit dire au célè-
bre d'Ablancourt, en parlant de, M. 4'Hozjer,
(1) Cette charge avait été créée, à la sollicitation des
états généraux, par édtt du moto de Juin 1611, et con-
férée la même année à françols de Chevriers de Saint-
Maurice, seigneur de Salagny, d'une ancienne maison
du Méconnais.
qu'il falloit qu'il eût assisté à tons les mariages
et à tous les baptêmes de l'univers. » Il était
d'une probité irréprochable. « On Ta peint, dit
Chaudon, comme un homme qui allioit les ver-
tus morales avec les vérins chrétiennes, ami
fidèle et officieux, d'une société douce et d'une
conversation agréable. » Lié avec fhéopbraste
Renaodot (voy. ce nom), il coopéra, en 1631, à
la fondation de la Gazette de France, et en as-
sura le succès en lui fournissant des nouvelle*
tirées de la vaste correspondance qu'il s'était
établie. Ses principaux ouvrage» sont ; Recueil
Armoriai , contenant , par ordre alphabé-
tique, les Armes et Blasons des ancienne* Mai-
son* de Bretagne} Paris, 1638, m-fol.; — Les
Noms, Surnoms , Qualités, Armes et Blasions
de tous les Chevalière de VQrdre- du Saint-
Esprit; Paris, 1643, h>fol.; — Remarques
sommaires sur ta Généalogie de la Afai-
son de Gondi', Paris, 1652, in-fo>.; — Généalo-
gie de la Maison de La Rockefeucauèd ; Paris,
1654, in-4'; — Généalogie de la Maison de
Bournonville;Vwn&,ib8T, m-fol. — La Gé-
néalogie de la Maison d'Amante; Dijon, 1A69»
in-fol. — Table Généalogique pour faire voir
que la Maison de Saint-Simon descend par
femmes de la maison de France, justifiées par
titres et preuves ; Paris, 1638, m-fbl. Il a laissé
en manuscrits Généalogie des Principales Fa-
milles de France, 150vol. in-fol. ; conservés à
la Bibliothèque impériale. J. V.
Dict. des Hommes Ut. de la Provence. — Morért, Grand
Met. Mittor. - AkW Robert, État de Uk Provence dans
$d Nooletfie. *r Lelong, WMoth Jfist.. <fe te France, -
Ladvocat, D\ct. Historique portatif. — Chaudon et
Delandlne, Dict. Vtittx. hist. t crU. et bibHôgr. — Le fias,
Dict. eneyetop. de la France». •* Saint Prosper, dans le
Dict. 4f la, C<wuk*«>
* hozib» (Louisr Roger a'), généalogiste fran-
çais, fils aîné du précédent, né à Paris, le 7 janvier
1634, mort le 29 juin 1708. Juge d'armes de
la noblesse de France, gentilhomme ordinaire
de la chambre du roi en 1658 , et chevalier de
samt*Mioh£l en 165Û, il devint aveugle en 1675,
et la roi lui fit une pension. J. V.
Morért, Grand Dict. Hisiar.
hozibr (Charles-René n*}, généalogiste
français, frère du précédent, né à Paris , le 24
février 1640, mort à Paris, le 13 février 1732.
Juge d'armes de la noblesse de France à Paris,
et chevalier de Tordre de SainfcMaurice de Sa-
voie, il se fit remarquer par l'étendue do ses
connaissances dans l'art héraldique et par plu*
sieurs ouvrages qu'il composa par ordre de
Louis XIV. On a de loi : Remarquée sur Vais*
toire de Charles iX, ôVVarillas, dan» l'édi-
tion de Paris, 1686, a vol. in-4».; — Recherche»
de la Noblesse de Champagne.; Châlons, 1673,
2 vol. in-fol. : faites par ordre de Louis XIV,
sous la direction de Caumarnn. 11 a aussi com-
posé la Généalogie de la Maison de Confiant
Châlons, in-fol.; et la Généalogie de. la Maison
de La Fart; Montpellier, 1695, in-fol. lia laissé
as*
HOZIER
326
en manuscrit le» Mecherches des Armoiries de
Bourgogne. J. V.
Uorfrt, Grand D^çL tiistor. -P. Leloog, Mttotk.
Hist. de la France. - Chaudon et Uelandinc, Dict. Univ. t
MsL, crU. et bibUogr. - Le Bas, Dict. encyclop. de la
Franc*. — Salnt-Prosper, dans le Met. de la Couver*.
hozibr (Zoufe-Péerre »'), généalogiste fran.
çaut, ne? eu du précédent, et ils aîné de Louis-
Roger d'Hozier, né à Parte, le 90 novembre 1 685 ;
mort dans la même ville, le 25 septembre 1767.
Il suoeédaà son oncle dans la charge de juge d'ar-
mes, devint conseiller du roi en ses conseils
et ehevaher de l'ordre de Samt-Mkhel, dont il
devint le doyen. C'est pendant son exercice
qu'a paru l' Armoriai général de ta France, ou
registre de la noblesse de France; Paris,
1736-1768, 10 vol. in-fol., avec fig. (avec Ant.
M. d'floziefdeSérigny ils), « ouvrage recherché,
dit M. Quérard, dont les exemplaires complets
ne sont pas communs; ils doivent contenir six
registres. » On lui doit en outre Lettre en forme
de défi littéraire signifié au corps entier de
la littérature} 1756, in-12. J. V.
MorérI, Grand Met. Histor.-K Leloog, sUbUoth. Hist.
de la France. — Chaud oo et Delandjne, Dict. Univ, /»«£.,
crU. et biblioçr. — Quérard, La France Littéraire. -
Salnt-Prpsper, dans le Dict. de la Couvert .
H021EH de 8ER1GNY {Antoine- Marie d'),
généalogiste français, fils du. précédent, né à Pa-
ris,^ 28 août 1721, mort vers 1810. Il succéda
à son père dans la charge de juge d'armes,
qu'il perdit à la révolution. Il avait composé
un mémoire sur Ja maison de Baint-Remy de
Valois, issue de Henri n par bâtardise, et dé-
livra un certificat à la comtesse de Lamotte
(voy. ce nom), qui prétendait descendre de cette
maison, et qui a inséré ce certificat & la suite du
mémoire qu'elle publia pour sa défense. Il re-
prit plus tard la suite de Y Armoriai publié par son
père, et le discontinua, « pour ne pas s'exposer,
dit Chaudon, à mortifier la vanité de certains
nobles ou à trahir la vérité ». H est auteur des
troisième et quatrième registres de Y Armoriai
général de France ainsi que de V Histoire Généa-
logique de la Maison de Çhastelard; Paris,
1756, in-fol. J. V.
Cbaudon et Delaûdtne , Dict. Univ., hist, cHt. et bi-
blioçr. — Quérard, La France Littéraire, - Salnt-Pros-
per, dans le Dict. de la Convere,
* noziEft ( Ambreise-Louis-Marie d'), gé-
néalogiste français, neveu du précédent, fils afné
de Denys-Louis d'Hozier, président en la chambre
des comptes de Rouen, né en 1764, mort vers
1830. Peu favorable à la cause de la révolution,
Ambroise d'Hozier s'était retiré & Chartres pour
échapper aux dangers qui le menaçaient dans la
capitale; il y fut inearcéré pendant la terreur, et
jouit d'une grande tranquillité sous le Directoire.
Impliqué en 1803 dans l'affaire de Georges Ca<
doudal, Pichegru et Moreau, il fut arrêté de
nouveau, et ne sortit de prison, après leur con-
damnation, que pour être envoyé en exil. De re-
tour en France à la première rentrée du roi en
1814, il remplit, au lieu de sa charge de juge
d'armes, qui ne fut point rétablie, celle de vérifi-
cateur des armoiries de France près le conseil du
sceau des titres. Les papiers des d'Hozier, qui
avaient été déposés aux Archives, lui furent
rendus, et la noblesse française, que la révolu-
tion avait dépouillée de la plupart des titres né-
cessaires pour régler des intérêts de famille, fut
fort heureuse de retrouver dans son cabinet des
titres originaux et un grand nombre de minutes
et d'extraits de titres. Plus tard ces papiers ont
été vend us, et on doit regretter leur absence aux ar-
chives. On a d'Ambroised'Hozier : l'indicateur
Nobiliaire, ou table alphabétique des noms des
familles nobles susceptibles d'être enregistrées
dans V Armoriai général de feu M. d'Hozier;
Paris, 1818, in-8° : ce travail devaitavoir douze
cahiers, le premier seul a paru ; — Armo-
riai général de la France, registre 1 er et re-
gistre II ; Paris, 1823, 2 vol. in-8° -, c'est une
nouvelle édition du travail de Louis-Pierre
d'Hozier auquel il avait contribué; on a publié
sous son nom le registre VII, vol. XI, de Y Ar-
moriai général d'Hozier, ou registres de la
noblesse de France continués par M. le prési-
dent d'Hozier, ancien juge d'armes de France
et vérificateur des armoiries près le conseil
du sceau et M. le comte Charles d'Hozier, son
frère; Paris, 1847-1848, in-8°, avec des portraits
etarmes. M. Stadler a pris part à' cette publica-
tion. J.V.
Rabbe, Vlellh de Botsjolin et Sainte-Preuve, Biog.
univ. et portât, des Contemp. — Arhault, Jay, Jouy et
Norvtns, Biogr. nouv. des Contemp. — Quérard, La
France Littéraire. — Bourquelot, La Littérature franc,
contemp.
* hozier ( Abraham-Charles- Auguste d'),
officier français, frère du précédent, né à Paris,
en 1775, mort à Versailles, le 24 août 1846.
Chevalier de Malte et page du roi, il ne se sé-
para de Louis XVI que le 10 août 1792, et passa,
comme son frère, dans les prisons des Chartres
tout le temps de la terreur. Rendu à la liberté,
il prit du service dans les troupes royales de
l'ouest, ne voulut point concourir à la pa-
cification, et reprit les armes en 1799, sous
Limoëlan, dont il avait toute la confiance. La
pacification de 1800 le trouva revêtu du grade
de colonel d'état-major. Il se fixa à cette épo-
que à Rennes, pour liquider les dettes de la divi-
sion du chevalier de La Prévalaye,démissionnaire,
et prit de nouveaux engagements avec le général
Georges Cadoudal. Lors de l'explosion de la ma-
chine infernale, le 3 nivôse an rx, un mandat
d'arrêt fut lancé contre Charles d'Hozier par
le ministre de la police. Il devait être arrêté
à la sortie du spectacle, mais l'actrice Richard i,
qui le savait , le fit évader par les derrières
du théâtre. De retour à Paris, par ordre de
son chef, d'Hozier rendit les plus grands ser-
vices aux royalistes : se mettant à la tête d'un
manège et d'un établissement de voitures pu-
bliques , il brava ainsi toutes les recherches de
la police. Rappelé en Angleterre par son gêné-
11.
327
HOZIER — HROTSVITHA
328
rai, il y concerta tous les projets qui se ira- y
maient alors contre le premier consul, et revint
à la fin de 1802 pour préparer les logements et
faire tous les approvisionnements d'armes et de
poudre nécessaires à leur exécution. Ce fut lui
qui, dans les premiers jours d'août 1803, con-
duisit, habillé en cocher, la voiture dans laquelle
Georges Gadoudal fut introduit de Saint- Leu à
Paris. Ce fut encore lui qui, dans cette ville, servit
d'intermédiaire entre ce général et ses officiers.
Arrêté et mis en jugement dans les mois d'avril
et de mai 1804, avec Georges Cadoudal, Pi-
chegru, Moreau, etc., il fut condamné à mort;
mais cette peine fut commuée en une détention
perpétuelle* Du chAteaudeLourdesilpassaen 1805
au château d'If, d'où il sortit le 14 avril 1814,
après la restauration. U reparut à la cour avec
le titre d'écuyer cavalcadour du comte d'Artois,
et fut nommé colonel de cavalerie, chevalier
de Saint-Louis, etc. Après la révolution de
Juillet, il se retira à Versailles, où il vécut dans
la retraite. J. V.
Rabbe, Vtellta deBolsJoltn et Sainte- Preuve, Bioç. univ,
et portât, des Contemp.— àrnauld, Jay, Jouy et Norvtns,
Bioç. nouv. des Contemp.
* hrafnkel, surnommé Freysgode ( prêtre
de Frey, parce qu'il avait élevé un temple à ce
dieu ), l'un des colonisateurs de l'Islande, vivait
au dixième siècle de J.-C. Né en Norvège , il alla
avec son père Halfred s'établir dans la partie
orientale de l'Islande, et défricha la vallée d'A-
delsbol. Ses nombreux vassaux le 'nommèrent
juge du district. Il soutint un grand nombre de
duels, et ne paya jamais d'amendes aux parents
de ses victimes. Mais ayant tué un de ses ber-
gers, il fut privé de sa charge et expulsé de ses
domaines, après avoir vu brûler le temple de son
dieu ; Hrafnkel colonisa une autre vallée -et re-
couvra bientôt son ancienne puissance et son
premier domaine, où il mourut paisiblement.
La Saga ( histoire ) qui contient le récit de ces
événements est l'une de celles qui jettent le plus
de jour sur la colonisation de l'Islande , les
mœurs de ses habitants sous le paganisme, et
leurs institutions judiciaires et religieuses. Elle
a été publiée sous le titre de Hrafnkel Freys-
godes Saga, texte par K. Gislason , trad. par
N.-L. Westergaard, Copenhague, 1848, in-8°, et
forme le 1. 1 des Nordiste Oldskrifter.
£. B.
Landnamaboh.- Millier, Sagabibliothek, 1. 1, p. 108-
108:
hrotsvitha, religieuse et auteur drama-
tique allemande , vivait probablement dans la
dernière moitié du dixième siècle (1). On a peu
(l) La date de sa naissance et celle de sa mort sont
également incertaines; on croit seulement qu'elle poussa
sa carrière fort au-delà de l'aa 968, puisque le fragment
qui subsiste de son Panégyrique des Othons comprend
les événements de cette année, et que postérieurement
à ce poème elle en composa un autre relatif à la fonda-
tion du monastère de Gandershelm. Hrotsvitha fut son
nom, on plutôt-, li semble, son surnom. U serait difficile
de donner d'une manière positive et sans objection
de détailsi sur la vie de Hrotsvitha avant son
entrée dans l'abbaye de Gandersheim. Mais ses
écrits témoignent d'une certaine expérience du
monde et des passions. Quant à sa carrière mo-
nastique, elle en fait connaître elle-même quel-
ques particularités. Retirée au monastère de
Gandersheim, peu de temps après Gerberge,
avant 959, vers l'âge d'environ vingt-trois ans,
elle y perfectionna son éducation. Ainsi que cela
se pratiquait dans tontes les maisons de l'ordre
de Saint-Benoit, elle passait de l'étude des
Livres Saints à celle des oeuvres classiques. A
ces goûts studieux elle joignait des qualités
rares, entre autres la modestie. Dans la pré-
face en prose de tes légendes , composée vers
l'an 960, elle s'excuse sur la solitude du cloître
et son âge, encore éloigné de la maturité , des
fautes de prosodie et de grammaire qui ont pu
lui échapper. « En écrivant ses vers, elle n'a eu,
dit-elle, d'autre but, que d'empêcher le' faible
génie que lui a départi le ciel de croupir dans
son sein et de se rouiller par la négligence; elle
a voulu le forcer, sous le marteau de sa dévo-
tion, à rendre un faible son à la louange de
Dieu. » Dans V Histoire de la Nativité de la
Sainte Vierge, elle supplie dès le début la
mère de Dieu d'opérer en sa faveur le miracle
qui délia la langue de l'anesse de Balaam. Elle
eut pour institutrice une religieuse du nom de
Rikkarde et la jeune abbesse Gerberge. Elle
les aima, et surpassa l'une et l'autre. On a pré-
tendu, sans preuve bien concluante, qu'à son ta-
lent comme écrivain Hrotsvitha joignait celui de
compositeur de musique. L'auteur de cette asser-
tion (1) se sera laissé induire en erreur par ces
mots de modulari, comporter e, d'un emploi fré-
quent dans les écrits de Hotsvitha. Quant à la
personne de la célèbre abbesse de Gandersheim, on
ne la connaît guère que par la belle gravure sur
bois qui se trouve à la tête de la première édition
des œuvres de Hrotsvitha, donnée par Conrad
Celtes. Elle représente l'illustre femme dans
l'habit de son ordre, offrant à genoux ses poésies
au vieil empereur Othon I er . Si la ressemblance
n'est peut-être pas exacte, elle est certainement
plus probable que celle du portrait fourni par
Fréd. Seidel , l'auteur des Icônes et Elogia Vi~
rorum aiiquot prxstantium , celui-là même
possible, le sens de ce mot. Stgntfie-t-U, comme le pense
Jacob Grlmm et après lui M. Magnin, «'appuyant l'un et
l'autre sur un passage de Hrotsvitha elle-même, etgnifle-
t-U la voix forte, la voix retentissante (clamor vali-
dtu)? « Ego clamor validas Gandesheimensis », dit quelque
part la docte abbesse. Ou bien fant-il traduire , avec
Gottsched, Hrotsvitha par Rose blanche? Cette dernière
Interprétation n'est pas dénuée de vraisemblance. On
sens absolument Improbable est celui fourni par Seidel,
qui prétend que le nom de Hrotsvitha cachait, moyen-
nant la suppression de l'H Initiale, celui de Helena a
Rossow, qui ferait remonter l'origine de la savante reli-
gieuse à une ancienne famille saxonne mentionnée dans
b chronique d'Knzelt.
(l) Gust. SehUUng, Univ. LexQc. der Tonkttn$t'.« On
a encore d'elle (de Hrotsvitha), dlt-ll', le martyre d'une
sainte mis en vers et en î
329
HROTSVITHA
330
qui propose de lire Helena a Rossow pour
Hrotsvitha. Quelques auteurs, Schurzfleisch, eu
son édition des œuvres de Hrotswitha, 1717,
hv4°, et Wieiand, dans le Neue deûtsche Merkur
(avril 1803), ont reproduit cette gravure, si peu
authentique, de Seidel.
Des détails biographiques qui précèdent il
convient de passer à l'examen des œuvres mê-
mes de Hrosvitha. Écrites en latin, elles ont eu
d'abord deux éditions , la première imprimée à
Nuremberg, en 1 501 , en un volume petit in-folio,
par les soins de Conrad Celtes ; la seconde don-
née à Wittemberg en 1717 (1) par Schurzflefech,
et qui est la reproduction de la-précédente, avec
des éclaircissements. L'édition de Celtes est la
transcription d'un manuscrit de la fin du dixième
ou du commencement du onzième siècle, décou-
vert dans un monastère de l'ordre de Saint-Be-
noit. Du couvent de Saint-Emmeran de Ratis-
bonne ce manuscrit est passé dans la Bibliothè-
que royale de Munich , où il se trouve encore. H
est divisé en trois livres ou parties. Le premier
contient huit poèmes ou légendes; le second,
des comédies en prose rimée. Le tout est suivi
du poème ou fragment de poème intitulé : Pa-
négyrique des Othons. Telle est la division
première et originale, renversée ensuite par
Celtes. Dans le premier livre du manuscrit se
trouvent les huit récits suivants : L'Histoire
de la Nativité de V immaculée Vierge Marie
mère de JHeu, tirée du Protévangile de saint
Jacques , en 859 vers hexamètres léonins ; —
L'Histoire de V Ascension de Notre- Seigneur,
en 150 hexamètres, également léonins, et sur un
récit traduit de grec en latin par Jean L'Évéque;
— La Passion de saint Gandolfe, martyr, en
564 vers élégiaques. Ce saint Gandolfe fut en
effet martyr d'une méchante épouse, appelée
Ganea, qui, après l'avoir trompé, le fit assassiner
à Varennes en Bourgogne. Il y eut des miracles
sur la tombe de Gandolfe; et, ce qui peint sa
femme, c'est la réponse qu'elle fit quand on les
lui raconta. Elle s'en souciait, disait-elle (ici
nous n'oserions traduire) « non secus ut ventris
crepitum ». Cette réponse méritait un châti-
ment : il fut analogue à sa faute. Nous ne pou-
vons encore citer que le texte : « In pœnae per-
fidiam ( in parnam perfidix? ) venter illi
quoad viveret perpetuo crepabat. » Tel est le
sujet quelque peu scabreux sur lequel porte ce
troisième récit de Hrotsvitha ; — Le Martyre
de saint Pelage à Cordoue, en 401 hexamètres,
d'après une relation orale que l'auteur tenait
d'un Espagnol : c'est ce qui explique certains
hispani8mes de cette pièce, tels que rostrum pour
faciès ; — La Chute et la Conversion de
Théophile, vidante ou archidiacre d'Adona en
Cilicie et non en Sicile , comme on le trouve
à tort dans les éditions de Celtes et de Schurz-
fleîsch. Le sujet de ce récit est l'histoire as-
ti) Et non 1707, comme le porte le titre.
sez commune d'un clerc qui, vers 538, se voua
pa/ dépit ou par ambition au culte du diable;
—L'Histoire de la Conversion d'un jeune Es-
clave, exorcisé par saint Basile. Cette fois
c'est par amour que le héros de ce récit, qui
contient 249 vers, se voue à Satan; — L'His-
toire de la Passion de saint Denis* Ce poème,
en 266 vers hexamètres, est calqué sur la lé-
gende placée par les Bollandistes sous la date
du 9 octobre : il y a de la poésie véritable et de
la grandeur dans la relation que donne Hrots-
vitha du voyage du saint décapité; — L'His-
toire de la Passion de sainte Agnès, vierge
et martyre. Cette histoire est empruntée à
saint Arabroise. Ne pouvant se faire aimer d'A-
gnès, qui, devenue chrétienne, a fait vœu de
chasteté, le fils du préfet Sempronius tombe dans
une mélancolie qui inspire des craintes pour ses
jours. Le père s'irrite et menace, mais en vain,
la jeune vierge. En même temps elle refuse
d'adorer, dans le temple de Testa, le feu sacré.
Conduite alors dans un lieu de prostitution et
dépouillée de ses vêtements, elle voit croître
miraculeusement ses cheveux, qui couvrent sa
nudité comme d'un voile. Le fils de Sempro-
nius la suit et tombe mort au moment où il
porte la main sur elle. Accusée de magie par le
préfet, Agnès obtient du ciel la résurrection du
jeune insensé, qui se fait chrétien ainsi que son
père. Poursuivie néanmoins par les prêtres
païens , Agnès meutf de la main du bourreau et
prend place dans le chœur céleste des vierges
martyres.
Le second livre contient six comédies , com-
posées, selon l'expression même de l'auteur, à
l'imitation de Térenee. Elles sont intitulées, Gai'
licanus; Dulcilius; Callimaque; Abraham;
Paphnuce; Sapience, ou foi, espérance et
charité. Célébrer le triomphe de la chasteté, tel
est, en général, le but que se propose la nonne
de Gander^heim et pour y atteindre elle ne
craint pas d'imaginer des drames dont les moyens
sont bien souvent étranges, surtout sous une telle
plume. Pour en citer deux exemples, les saints
ermites Abraham et Paphnuce, ne craignent pas
pour retirer, le premier sa nièce, l'autre la cour*
tisane Thaïs, des lieux de perdition où elles
sont allées se corrompre, d'y pénétrer sous un dé-
guisement. Quant à la trame des œuvres théâ-
trales de Hrotsvitha , elle est assez mince et
souvent invraisemblable. C'est ainsi que d'une
phrase à une autre un miracle s'accomplit. Et ce
miracle, on le devine, c'est presque toujours, la
conversion de la jeune pécheresse.
La première de ces pièces, Gallicanus, est
tirée de deux légendes, et l'action n'en dure
pas moins de vingt-cinq ans. « C'est une pièce
libre, dit M. Yillemain, écrite dans une prose
assez correcte, et où il y a un sentiment vrai de
l'histoire. »
Duleitius, qui vient ensuite, est la plus gaie,
la plus comique du répertoire de Hrotsvitha.
331
HROTSVITHA — HUALCOPO-DUCHICELA
333
« Elle prouve jusqu'à L'évidence, dit M. Magnin,
que les pièces de Hrotsvitha n'étaient pas seu-
lement destinées à être lues, comme l'ont avancé
quelques critiques , notamment M. Price, mais
qu'elles ont dû être représentées. En effet , tout
le mérite comique de ce petit drame consiste en
une suite de jeux de théâtre qui s'adressent bien
plus aux yeux qu'à l'esprit. » Voici par exemple
un trait qui n'a rien que de plaisant. Dnlcitius,
amoureux des trois vierges chrétiennes, héroïnes
de la pièce, et que l'on veut forcer à adorer les
dieux, s'introduit dans une cuisine voisine de
l'endroit où elles sont retenues : ses sens s'éga-
rent, et, croyant adresser ses caresses aux jeunes
filles qu'il convoite, il se jette sur la vaisselle
qui garnit l'office. « Tantôt, dit une des vierges
(Irène) qui a jeté ses regards à travers les fentes
de la porte, tantôt il presse tendrement des
marmites sur son sein, tantôt il embrasse des
chaudrons et des poêles à frire et leur donne
d'amoureux baisers... Déjà, ajoute-t-elle, son vi-
sage, ses mains, ses vêtements, sont tellement
salis et noircis, qu'il ressemble tout à fait à un
Éthiopien. »
Callimaque, la troisième pièce du théâtre de
Hrotsvitha , est peut-être ce qu'elle a écrit de
plus dramatique. On n'y rencontre d'ailleurs
point les situations, parfois étranges , qui sur-
prennent dans les autres pièces. Il s'agit ici de
la passion effrénée d'un païen pour; une jeune
femme chrétienne, qui, craignant les surprises de
son propre cœur, demande à Dieu de la faire
mourir. Sa prière est exaucée, et Callimaque,
qui l'a si fort aimée, ose, comme Romeo (1),
violer sa tombe à peine fermée. Nous avons déjà
indiqué les sujets des quatrième et cinquième
pièces du recueil dramatique de la nonne de
Gandersheim. Là sixième et dernière , intitulée
Sapience, ou foi, espérance et charité, est
encore empruntée aux légendes. L'action a moins
de, mouvement que dans les autres drames :
ce sont trois vierges qui refusent d'obéir à
l'ordre que leur intime l'empereur Adrien d'a-
dorer le3 idoles. Elles résistent aux tortures,
puis elles périssent par le fer. Après avoir ras-
semblé et enterré leurs restes à trois milles de
Rome, la mère des jeunes martyres élève son
âme vers le ciel et exhale sa vie dans une aspi-
ration suprême.
La dernière partie du manuscrit de Munich
contient un fragment poétique, de 837 vers, inti-
tulé: Panegyris,sivehistoria, Oddonum.Enûn,
on a imprimé, d'après une copie plus récente, une
chronique, en 837 hexamètres, ayant pour titre :
Carmen de Constructione, sive de primordiis,
Cœnobii Gandesheimensis. On a attribué à tort
à Hrotsvitha un ouvrage intitulé : De la Chasteté
des Nonnes, Cette erreur vient d'une phrase j
mal interprétée due à Henri Bodo. On a pris !
(i) Ce rapprochement est fait par M. Magnin, à qui nous j
devons une si judicieuse étude du théâtre et de la vie de j
Hrotsvitha.
pour un titre ce qui était de la part flë l'auteur
une appréciation des œuvres mêmes de l'abbesse
de Gandersheim.
M. Magnin, qui a donné, avec le texte en re-
gard, une traduction du théâtre de Hrotsvitha,
après avoir raconté comment il avait été amené
à entreprendre cette œuvre, fait remarquer qu'à
la suite des comédies on trouve dans le ma*
nuscrlt de l'auteur deux fragments, l'un de tretaé
Vers élégiaques, l'autre de trente-cinq vers hexâ*
mètres., tl a paru à Nuremberg (1857), par les
soins de M. Barrak, une édition complète des
Œuvres de Èrolsvitha. Enfin , on vient de pu-
blier (1858) Die Nonne ton Gandtrsheini (L&
Nonne de Gandersheim ), par Dauber.
V. RoSËltWALD.
Henri Bodo, Sf/niàgm. dé Écclet. Gandesh., ap. Letbn
(Script. Ser. Brungvie. ). — jéèta Sanct. — Seidei, lames
et Eiog. Firor. aliguot prmskmt. ; 1670, in-fol. — Sax,
Onomast. JAter. — ba Gange, Index Script, med. et inf.
Latin. — vilietoatn , Tabl. de ta Lltt. dii moyen égë. ~
Magnin, Théâtre de Hrotsvttha. — Fabrtcius» BilH. med.
♦i Inf. jEUxtis.
hua (Eustache- Antoine), magistrat et légis-
lateur français, né en janvier 1759, à Mantes
( Ile-de-France ), mort le 29 mars i836. En
1789 H était avocat au Parlement de Paris. Il
fut nommé en 1791 député à l'Assemblée légis-
lative, où il siégea parmi les modérés. Lors de la
dissolution de l'Assemblée législative, il fut obligé,
pour se soustraire aux poursuites dont il était
menacé, de chercher un asile chez un de ses
beaux-frères. En 1815 il fut nommé avocat gé-
néral près la cour royale de Paris. Il eut à por-
ter la parole dans un grand nombre de procès
politiques. Dans l'affaire de Lavalette, il con-
clut à la mort, et demanda la condamnation des
trois Anglais qui avaient favorisé l'évasion de
cette victime de la justice des partis. II porta
toujours aussi des conclusions sévères dans les
procès relatifs à la presse, et entrait ainsi dans
les vues du procureur général Bellart auquel il
avait dû son entrée au parquet. Son dévouement
le fit nommer, en 1 81 8, avocat général à la cour de
cassation. En 1823 il devint conseiller à la même
cour. Il avait, en outre , été nommé inspecteur
général des écoles de droit, fonctions qui lui fu-
rent retirées après la révolution de 1830. Hua
est auteur d'un Projet de Réjbrmation de la Lé~
§i$lation Hypothécaire /Paris, 1842,in-8°, ainsi
que de plusieurs articles dans le Nouveau Reper*
toire de législation de Favard de Langlade. On
lui a attribué un Commentaire sur la Loi du
1 1 brumaire an Vil et des Conférences sur le
Code Civil : ces deux ouvrages sont de Hua
Bellebat, son parent et beau-frère. Il a laissé de
nombreux manuscrits sur des matières de lé-
gislation et de politique, et des Mémoires de sa
vie. Guyot DE FÈRE.
Rab'be, Biog. des Cont. - Documents particuliers.
Hualcopo-ducbicela, quatorzième sou-
verain ou scyri du royaume de Quito, né dans
les premières années du quinzième siècle, mort
vers 1463. Le royaume de Quito, soumis vers la
S$3
HUALCOPO-DUCHICELA — HUÀRTE
334
tin da dixième siècle par la race des Oarans et
reconnaissant pour son souverain législateur le
roi Quitu, offrait une organisation sociale dif-
férente de «elle que l'on observait à Cuve*.
Vainqueur* d'an peuple déjà eiviteé, les Oarans
scyris professaient une sorte de sabéismei qui
prédomina bientôt dan» lertr empire.fo fameux
temple dû Soleil qui s'élevait jadis sur 1* hau-
teur du PanecMlet et dont plusieurs écrivains
ont peut-être trop protnptemënt nié l'existence,
recevait le scvri* et c'était là qu'on lui confé-
rait sotannetienient les insignes dd pouvoir,
lorsqu'il avait été accepté par tes chefs. Antacai
Duchiceia, après un règne de soixante ans; avait
laissé le pouvoir à son ftlt Gualieaj mâf»aelui>«i,
disent les anciennes chroniques* montra des in-
clinations si perverse», que les chefs réunis en
assemblée générale lui substituèrent son jeune
frèr«> Hualcopo-Duchtcela, qui monta sur le
trône en 1430. C'était un prince ami de la paix,
auquel on attribue IWeétteh de grands monu-
ments j mais le dburième inca du Pérou, Topa
Yupangui, profita de son indolence pour l'atta-
quer, et la perte de «on royaume eut été plue
prompte, si son second frère, Epidaohhna n'eût
pas pris courageusement le commandement de
son armée. Pendant les premiers temps de l'in-
vasion, Hnaleopo se retira dan» Liribamba, ca-
pitale du Poruhua, et il semble qu'il ait été do-
miné exclusivement alors par l'amour conjugal,
car il fit construire de magnifiques bâtiments
dans un b'eu reculé, pour nue son épouse pût
y faire ses couches à l'abri de toute inquiétude.
Il marcha ensuite à l'ennemi; mais l'intrépide
Epielachima ayant été tué dans une bataille qu'il
regardait lui-même comme décisive, il ne resta .
au malheureux scyri d'autre ressource que de '
se retirer de nouveau dans Liribamba. Il était
là dans une position" inexpugnable, et il s'y main-
tint durant quelques années, grâce au courage
et à l'habileté de son neveu Oalfcuchima, qui se
montrai dit-on, dans cette lutte extrême supé-
rieur encore à son pore. Quoi qu'il en soit,
l'empire des scyris était démembré, finca vic-
torieux s'était retiré triomphant à Cusco , lors-
que les descendants de Qutiu sentirent que In
domination péruvienne allait l'emporter; Huat-
copo mourut bientôt, accablé de chagrin, et lais-
sant l'empire à Cacha, son fils aîné, qui* maigre
ses talent* et son courage, vit finir en lui la dy-
nastie des scyris. Ferdinand Dams.
U. Juan de Velaaco, ttUtôrfù dêl RHnû de Çtittà m M
jémeriea méridional, eto ; Quito, ms, s yol. lot*. —
Collection Ternaux Comparu, Histoire du Royqume de
Quito, trad. abrégée de l'ouvrage précédent. — Sàlazza,
Histoire manuscrite d* R09aume.de Quito.
mjabtb n avarro {Juan de Dtos), médecin
et philosophe espagnol, né à Saint-Jean-Pied«de-
Port, dans la basse Navarre, entre les années
1530 et 1535, mort à la fin do seizième siècle.
Les biographes n'ont fait que répéter sur ce pen-
seur ce qu'ont écrit Bayle et Baillet , et c'est à
tort qu'on le fait naître en 1520. Il fut envoyé fort
jeune à l'université de Hoésea , et ce fut la qu'il
fit des études tout à la fois profondes et variées.
Après avoir terminé ses humanités , il se fit re-
cevoir médecin, puis voyagea dans toute l'Es-
pagne. Satisfait, en vrai philosophe, de cette simple
exploration, il se retira dans la ville universi-
taire ou il avait pris ses degré», et il exerça la
médecine, s'il ne se contenta même du titre de
docteur sans voir des malades. Ces renseigne-
ments sont bien restreinte, ils contiennent ce-
pendant tbut ce que m critique moderne a pu
découvrir sur l'un des penseurs les plus origi-
naux du seizième siècle. Bordeu ajouté qu'au
dix-huitième Siècle la mémoire de Huarte aussi
bien qae sa famille vivaient encore dans sa pa-
trie ; mais on peut supposer que le célèbre mé-
decin use Ici d'une de ces phrasés banales
comme en renferment la plupart des éloges, car
Feijoo , qui était si bien fait, par l'originalité de
sa pensée, pour apprécier Haarte , se feùhtenta de
lé lire dans une traduction latine , h'ayant fra
même lé lire eh espagnol. Un savant afîèrhand ,
qui l'a traduit , et qui avait voyagé dans la Pé-
ninsule - 9 avoue qflll he put se procurer autan
renseignement sut lui-, et qu'à réfute en II gou-
vernait l'Espagne sa trlémoiré y ëtait compfete-
mént ignorée. Le livre ne l'est pas, et les derniers
travaux philosophiques du siècle mi dut donné
une juste célébrité. Huarte « établit sur les bases
de la physiologie l'influencé du physique sur le
moral ».
Le traité que nous signalons ici est intitulé, avec
une simplicité bien concise et bien rare ponrl'é-
rJbtpie : Éxàtiien de Ingénies , para las scien-
citts donde de tnuestra la différencia de
habilidades que hay en los hombres, y el ge-
nerode letrai qbecadatano responde en parti-
cular qfllcina plantiniatia ; 1593, pet. in-8°;
Ëaerça 1675; et Pampelune, 1578. Cet ouvrage
rat réimprimé en diverses villes de la Péninsule,
en 1580,1594, 1607,11640, 16&2; traduit en latin,
par Théodore Arctogonius , Strasbourg, 1612, et
par Joachim Csssar, caché sous le nom à'Ms-
ehàclhs Major, luio, 1B21, 1622, 1661, 1663.
Camille Camilli le fit passer en italien , 1582,
1586, 1590; Chappuys en donna une version
française, Lyon, 1580, et Paris, 158&; Vion
Dalibray en fit paraître une autre, Paris, 1645,
1658, 1661 et 1675; Savinier d'Alquié s'exerça
aussi de la même manière, Amsterdam, 1672,
Leasing mit au jour en 1752 une traduction alle-
mande, qui reparut en 1785, avec des additions.
V Examen fut de même, en 1594, en 1616, en
1698, mis à la portée des lecteurs anglais. Toutes
ces réimpressions, toutes ces traductions attes-
tent que c'était un livre d'une portée véritable.
Parmi des théories fort hasardées , telles qu'un
système sur la génération, qui peut servir de base
aux systèmes absurdes qui enseignent l'art de
créer à volonté des hommes de génie ou de pro-
créer tel ou tel sexe, on trouve chez Huarte des
vues hardies et qui devancent l'époque où eUes
335
HUARTE — HUASCAR
336
furent émises, 8e rapprochant parfois du système
phrénologiqae du docteur Gall. On reconnaît
qu'elles sont dues à un esprit ferme et curieux, à
un observateur attentif, qui a de l'originalité
dans les pensées et dans l'expression. La méta-
physique et la physiologie de Y Examen ne sau-
raient plu&étre admises aujourd'hui ; mais l'œuvre
n'en reste pas moins remarquable , et elle se ter-
mine par d'excellents préceptes hygiéniques pour
l'éducation physique et intellectuelle des enfants.
Huarte avait une érudition étendue, mais souvent
il manque de critique, reproche auquel n'échappa
d'ailleurs aucun de ses contemporains. Il dédia
son livre à Philippe II, et, chose remarquable, la
redoutable inquisition espagnole, si prompte à
s'alarmer, ne parut rien y trouver à redire, bien
qu'à coup sûr elle eût pu se formaliser de plus
d'un passage. Les théories du docteur navarrais
trouvèrent des défenseurs et des antagonistes ;
un médecin français, Jourdain Guibelet, établi à
Évreux, lui opposa, en 1631, V Examen de V Exa-
men des Esprits, volume complètement oublié
aujourd'hui, mais dans lequel un éclairé critique
a signalé des vues ingénieuses et des faits cu-
rieux présentés avec verve, avec esprit, et d'une
façon attachante. L'Examen a trouvé dans ces
derniers temps un ingénieux interprète et un ap-
préciateur très-impartial dans M. J. M. Guardia,
qui a publié un travail étendu sous le titre d'Es-
sai sur l'ouvrage de /. Huarte : Examen
des Aptitudes diverses pour les Sciences; Pa-
ris, 1855, in-8°. La dernière édition espagnole,
publiée à Madrid en 1846, par D. Ildefonso Mar-
tinez y Fernandez, pèche fort du côté de la cor*
rection, mais on y donne une bibliographie éten-
due de cet écrivain.
Ferdinand Denis et G. B.
Antonio, Bibliotheca Hispana nova, t. I, p. 5*8. —
Struve, Bibliotheca Philosophica, t. II, p. 98. — Ticknor,
History of Spanish Littérature, t. III, p. 18t. — Re~
vista de Madrid, 1889. — Du Rourc, Analecta Biblion,
t II, p. W-57. — Réveillé* Parlse, Gazette Médicale. 1«* jan-
vier 1841, et Recueil des Travaux de Ut Société du dépar-
tement de F Eure; 1848, p. 188. — Bayle, Dictionnaire
Critique. — Bordeu, Recherches sur l'Hist de la Méde-
cine, — Ad. Baillet, Jugements des Savants. — Moréri,
Dict. Edlt.
htjascar (Inti Cusi Huallpa), incaou souve-
verain péruvien , né à Cuzco , mort en 152 (1).
Il naquit à Quito , et fut le fils atné de Huayna-
Capac. Le nom sous lequel il est connu dans
l'histoire, nom si fréquemment altéré, signifie
la chaîne d'or. Selon la tradition , dans la joie
que l'Inca ressentit de la naissance d'un fils,
il ordonna qu'on fabriquât cette chaîne com-
mémorative, dont chaque chaînon était gros
comme le poignet d'un homme, et qui n'avait pas
moins de 700 pieds de long. Zarate nous apprend
qu'elle tenait deux cotés de la grande place de
' (1) Ovtedo lui donne le nom de Gaascara. Voy. la nou-
velle édit. de Wistoria Natural y Moral de las Indias,
publiée en 1855, sous les auspices de l'Académie d'Histoire
par M. Amador de Los Ries, p. 168. Oo donne également à
ce prinoe le nom de Guaynacalva et de Cmco. Anello
OMv* l'appelle Tupa Intirvsi Palpa ou Vascar. ;
Cuzco et que, plus tard, on la jeta dans la lagune
de Urcos. Selon Ànetto Oliva, elle avait été fabri-
quée avec l'énorme quantité d'or que les chefs
avaient apportée en présent an successeur du
trône , lors de la solennité qui lui promettait
l'empire.
Dès que Huayna-Capac rat mort , Huascar fut
investi du pouvoir suprême , et alla habiter te
palais des incas a Cusco, avec sa mère l'im-
périeuse Rava-ŒIlo. En vertu des dernières dis-
positions de l'empereur, Atahualpa hérita du
royaume des scyris, et établit sa résidence royale
à Quito. Il est faux que les rivalités qui ensan-
glantèrent ces deux règnes, à leur début, aient
commencé lors du partage de l'empire. Du-
rant plus de quatre ans, .les deux frères vé-
curent en bonne intelligence. Ce fut à la mort du
chef qui gouvernait la vaste province de Caâar
que les dissentiments éclatèrent. Vers le milieu
de 1529, le fils de Chamba, chef puissant sous
Huayna-Capac, s'étant rendu pour ainsi dire
feudâtaire du souverain de Cusco, Atahualpa,
fort de son droit, réclama, et une guerre vio-
lente éclata. Excité par sa mère, l'ambitieuse
Rava-ŒHlo , car par lui-même il était dépourvu
de cette énergie qui conduit aux conquêtes ou qui
maintient les empires, Huascar leva une armée
puissante, s'empara de Tumi-Bamba, dans le
pays de Canar. De son côté, Atahualpa leva des
troupes , se rendit dans la contrée qu'on lui dis-
putait, et dans une première campagne fut vaincu
par Tannée de Huascar.
Fait prisonnier et gardé avec négligence par
les guerriers du souverain de Cusco, l'héritier
des scyris parvint à s'échapper de sa prison et
rentra dans Quito (1). Il prit alors des mesures
pour rentrer en possession de la province de
Canar, et marcha en 1530 contre Tumi-Bamba,
à la tète d'une armée puissante, dont un général
célèbre dans les fastes péruviens , Ruminahui ,
commandait l'arrière -garde. Dès lors l'étoile
de; Huascar commença à pâlir; non-seulement
il fut victime de l'impéritie de ses généraux ,
mais ayant perdu Rava-ŒIlo, dont la force
d'âme soutenait sa faiblesse, il ne sut pas com-
prendre que son frère l'emportait sur lui en
puissance réelle et en habileté. Enfin il eut
l'imprudence de refuser tout accommodement»
et, s'étant mis à la tête d'une armée de
150,000 hommes, il marcha centre le souverain
de Quito ; son impéritie ou plutôt son amour
pour un puéril divertissement fut cause de sa
perte. S'étant écarté du gros de son armée avec
800 hommes seulement pour prendre le plaisir
de la chasse, il tomba au pouvoir de son frère, et
en 1532 ses troupes, malgré leur nombre, furent
taillées en pièces.
Velasco affirme que Huascar inea ne fut pas
traité indignement, comme plusieurs historiens
(li II fit accroire alors au peuple qu'un dieu l'avait
changé en serpent et que sous cette forme 11 avait pu
échapper à la captivité.
337
HUASCAR — HUATNA-CAPAC
333
le prétendent, et il dit même qu'il fut environné
de respect; on ne l'en enferma pas moins dans
une forteresse de la province de Xauxa, et
bientôt il pot avoir la triste certitude qu'il avait
cessé de régner, que son frère était proclamé
empereur du Pérou à Caxamarca.
Atahualpa n'accepta pas d'abord la souverai-
neté h laquelle les peuples l'appelaient; il fit
même des propositions d'arrangement à son frère,
et jamais, dit l'historien qui parait le mieux in-
formé, Huascar ne voulut faire une réponse caté-
gorique qui lui eut laissé une partie de l'empire. H
attendit en vain que son parti, encore puissant, le
délivrât de sacaptivité ; il mourut neuf mois après
sa défaite dans la forteresse de Xauxa ; et il est
probable , bien que Velasco n'en dise rien , que
ce fut de mort violente. Tous les historiens sont
àj peu près d'accord pour nous le représenter
comme un prince faible et d'un esprit médiocre.
Il est hors de doute que 'les dissentiments qui
éclatèrent entre son frère et lui aplanirent les
difficultés de la conquête et contribuèrent an
succès prodigieux des armes de Pizarre.
Ferdinand Denis.
Fr. Marco* de NI», Conquista de la Provinci* de
Quito, manusc qui a terri de base a VHistoria de Go-
nutra. — Xerè», Histoire de la Conquête. - Cavello Bal-
boa, Histoire du Pérou; dans la collection Ternaux Cou-
pant. — Velasco, HUtoria det Reino de Quito. —
rescott, HUfaru o/Peru.
huayha-capac, surnommé fe Conquérant,
empereur du Pérou, né dans la seconde moitié
du quinzième siècle, mort ao mois de décembre
1525. Quoiqu'il fût le fils aîné de Topa-Inca,
qui l'avait eu de sa sœur, ce prince ne devait
pas succéder à l'empire. Capac-Guari, fils d'une
simple concubine, aurait été désigné par le
vieux souverain, mort en 1493, pour ceindre le
bandeau impérial. Le début du règne de Huayna-
Capac fut ensanglanté par une épouvantable tra-
gédie. Il était trop jeune pour réclamer ses droits ;
celle qui lui avait donné le jour ne se contenta
pas d'aller invoquer devant les grands les lois
de l'empire, elle accusa ouvertement Mama-
Chiqui-Oello, mère de l'héritier présomptif, d'a-
voir empoisonné Topa-Inca. Celle-ci fut mise à
mort, son fils s'en alla en exil, et Huayna-Capac
fut couronné à Cosco.
Le jeune souverain sortait à peine de l'enfance;
lorsqu'on lui donna pour le diriger un cousin de
son père; mais Apoc-Gualpaya prétendit bientôt
user du pouvoir temporaire que les grands lui
avaient confié pour monter sur le trône. Sa tra-
hison fut découverte : on l'enferma; son procès
lni fut fait régulièrement, et il périt avec les
hommes de sa race. Selon Anello Oliva, qui
parait si bien informé et que n'a pu consulter
l'habile Prescott , Huayna-Capac avait seize ans
lorsqu'il commença à gouverner; on lui adjoignit
pour conseiller Auqui-Topa-Inca , et quelques
mois après il épousa sa sœur Mama-Cusirimay.
Ce fut d'une sœur plus belle et plus jeune
qu'il eut Huascar-Inea. Lors de son mariage
politique, des fêtes magnifiques eurent lieu,
auxquelles succédèrent des solennités funéraires
d'une pompe inexprimable; elles étaient desti-
nées à célébrer la mémoire de Topa-Yupanqui
et de Mama-Oello : cette espèce d'apothéose eut
lieu dans tout l'empire, c'est-à-dire sur une éten-
due de mille lieues, aux frais du trésor public
de Cusco. Huayna-Capac alla pleurer solennel-
lement à Caxamarca son père et sa mère, puis
il revint dans sa capitale.
Alors commencèrent une série de conquêtes
et de travaux qui font de?ce règne l'époque la
plus brillante de l'histoire du Pérou. Après avoir
détrôné, en 1487, le dernier scyri du royaume
de Quito, il se prit tout aussitôt à couvrir
l'empire d'édifices utiles, qui malheureuse-
ment n'ont pu résister aux efforts destructeurs
des conquérants espagnols. Il ouvrit des routes
gigantesques et donna une impulsion aux arts dont
plusieurs siècles n'ont pu encore effacer les ves-
tiges. Le propre frère de l'inca, Sinchi-Ruca,
se présente ici comme l'ordonnateur de ces
constructions architectoniques, qui frappèrent
les étrangers d'étonnement lors de la conquête de
Cusco (1). Avant de commencer ses conquêtes,
Huayna-Capac voulut visiter son empire et même
le royaume de Quito, qui conservait une sorte
d'indépendance ; à Quito même il s'éprit d'une
passion violente pour la belle Vay ara, la fille du
scyri qui commandait naguère à ces régions,
dont la civilisation parait avoir eu un caractère
bien différent de celle qui se développait à
Cusco. Il en eut un fils; mais cette princesse vé-
cut peu de temps, et le jeune Atahualpa la rem-
plaça dans le cœur du jeune souverain. Lorsque
Huayna-Capac songea à porter ses armes jusqu'au
Chili, il laissa dans Cuzco Huascar-Inca (2)
.pour lui succéder, et il pourvut à tous les évé-
nements que son absence aurait pu amener.
Huayna-Capac, empereur et pontife à la fois,
(i) Cavello Balboa , dont l'histoire est fort détaillée,
prétend, an contraire, que ce fut le Jeune Huascar dont
l'inca ae fit accompagner durant aea pérégrination*
guerrière* : la critique la plus exercée échoue, il faut
bien le dire , pour découvrir la vérité de* fait* devant
tant de documenta contradictoires.
(i) Comme les peuples de l*Anahuac, les Péruviens, di-
visés en deux races bien distinctes, faisaient reposer les
.principes de leur art sur une civilisation dont tt ne res-
tait plus que des traditions et des vestiges à l'époque
de.la conquête. Les ruines deTtnauanaco, de Catiar, ete,
dont on admire encore aujourd'hui l'étrange soli-
dité et respect vraiment grandiose, n'ont rien qui te
cède à celles d*Uxmal et de Palenqué. SI ce que Je
P. Calancha nous rapporte du temple de Pachacamae
n'est pas exagéré, ce sanctuaire, comparativement mo-
derne , avec les constructions qui en dépendaient et
qui n'occupaient pas moins d'un quart de lieue de tour,
pouvaient entrer aussi en comparaison avec l'art le plus
grandiose des Mexicains. Alclde d'Orblgnv et après lui
MM. Rlvero et Tsohudi ont donné récemment d'intéres-
sants documents sur l'art monumental des Péruviens.
Nous savons de science certaine qu'un voyageur cons-
ciencieux est allé dans ces derniers temps mesurer sur tes
lieux mêmes les grands monuments aymara représentés
Jusqu'ici par des vues exécutées approximativement; le
travail de M. Angrand sera une vraie révélation pour
l'histoire de Fart américain.
HUAYWA-CAPAC
340
était, par son intelligence et par «on courage ,
l'homme le plus éminent des vastes États qu'il
gouvernait. A diverses reprises, et sans qu'il soit
possible aujourd'hui de spécifier ses expédi-
tions militaires dans un ordre chronologique
très-précis, il quitta les délices de Cusco pour
aller porter la civilisation dans les régions du
sud, A peine ce prince avait-il édifié, dans Tumi-
Bamba, le Mullucancha, le palais magnifique
consacré à Maraa-Oello, sa mère, quo les Caran-
guis et leurs alliés se révoltèrent : une expédi-
tion fut dirigée contre eux. Selon Velasco, cette
levée de boucliers amena une bataille à. la suite
de laquelle périrent plus de 20,000 Caranguis ;
selon d'autres, elle conduisit les armées péru-
viennes dans des contrées ignorées , où, après
des succès , elles éprouvèrent d'épouvantables
revers. Cunti-Mollo, le chef aimé de l'inca, y
périt. Huayna-Capac prit alors le commande-
ment de son armée, et il vengea vaillamment le
désastre qui avait décimé ses soldats. On voit
encore la Pucara ou forteresse qu'il édifia avant
de retourner à Tumi-Bamba. L'année suivante
fut marquée par sa deuxième campagne contre
les Caranguis, campagne durant laquelle nombre
de nations furent soumises, sans que Ton pût
dompter le peuple rebelle qui l'avait motivée et
qui mit en fuite même les Orejones, les guerriers
compagnons immédiats de l'inca. Un des résul-
tats de ces expéditions militaires, c'est qu'il n'y
en eut pas une seule qui ne répandit la civilisa-
tion péruvienne et qui ne substituât ses lois,
comparativement humaines * aux coutumes de
peuples primitifs \ livrés depuis longtemps aux
horreurs de l'anthropophagie. Partout l'idiome
harmonieux des Incas, le quichua , était sub-
stitué au langage des peuples sauvages, si bien
qu'au milieu du seizième siècle les mission-
naires qui s'avaneèrent jusqu'aux frontières
du Chili furent surpris de pouvoir se faire en-
tendre dans la langue parlée à Cusco (1). Cer-
taines constructions civiles et militaires, des
routes, des tambos ou caravansérails, des for-
teresses , qu'il ne faut pas confondre avec les
grandes constructions théocratiques d'un autre
âge, attestent encore aujourd'hui quelles furent
les prévisions du conquérant civilisateur dont
le Pérou se glorifie.
Un fait remarquable caractérise aussi l'admi-
nistration de l'inca. ce fui l'abaissement tem-
poraire de cette classe aristocratique que les
Castillans désignèrent sous le nom d'orejones ,
et la réhabilitation des yanaeonas ou du peuple,
que les guerriers opprimaient. Le règne de
Huayna-Capac, n'ayant pas duré moins de cin-
quante ans et le territoire que ce prince gouver-
,'l) Dès te temps de Huayna-Capac, a les lois des Incas
étaient reconnues, d'un côté,jusqu'à la ligne, à Quito, de
l'autre Jusqu'au 36p>« degré de latitude sud, au Rlo-Maule,
toujours sur les montagnes; car jamais elles ne régnèrent
an sein des plaines chaudes situées à l'est des Andes. »
' AJcide (TOrblgny, V Homme américain. )
nait «'étendant Bar ai degrés et demi du norJ
au sud, il faudrait, pour marquer chronologi-
quement les grands faits qui s'accomplirent alors
au Pérou, un espace qu'on n'a pu consacrer
ici qu'aux souverain» renommés qui ont changé
la face de l'ancien monde. Mou» constaterons
seulement, d'après Velasco» qu'on ne ren-
contra jamais sous ce règne on pauvre, ou un
mendiant, ee qui établissait un contraste frap-
pant entre le Pérou proprement dit et le royautae
subjugué de Quito» qu'un autre mode d'adminis-
tration régissait.
Huayna-Capac résidait de préférence à Quito,
dont l'admirable climat le séduisait* fer lé fin de sa
vie , ayant confié le gouvernement des nouvelles
conquêtes à Atahualpa* il se mit en route , accom-
pagné de aa cour et d'une brillante armée, pour se
pendre à Cusco. Il avait quitté le magnifique palais
d'Atun-Canar et il venait de pénétrer dans la
province de Tumi-Bamba, lorsqu'une nouvelle
formidable lui parvint; il apprit par un courrier)
venude'la cote de Las Eameraldas* que deux gran-
des embarcations , désignées sous te nom de
huamfms , amenaient deux cents étrangers en-
viron, d'une race toute différente de celle qu'il
gouvernait. Plus tard , on vint lui dire que ces
liémmes étaient si complètement couverts de
barbe, qu'on les comparait aux lamas, et qu'ils
venaient de débarquer à Afocamès* Huayna-
Capac, selon la tradition» devint eJars profondé-
ment taciturne, et se retira dans la solitude.
Supérieur à la plupart des hommes de son
temps et surtout à ceux de sa race* le législateur
péruvien comprenait en quel péril se trouvait le
pays. Une prédiction, d'ailleurs, fort accréditée,
et qui datait de Viracocha-Inca> lui annonçait
une funeste catastrophe : il ne fit plus qu'un
court séjour à Tumi-Bamba et donna des or-
dres pour qu'on le ramenât dans les monta-
gnes. Rentré dans son palais de Quito, rien ne
put dissiper la mélancolie profonde où il était
plongé , et, bientôt il expira.
Au moment de mourir, Huayna-Capac avait
fait venir les quippo-camayo^ les hommes
chargés d'expliquer ces aide-mémoire en cor-
delettes que l'on désignait sous le nom de quip-
pos (1); il leur avait dicté ses dernières vo-
lontés. Par ces dispositions, finca Huascar de-
vint héritier de l'ancien empire du Pérou avec
tons les trésors qu'il renfermait; Atahualp* de-
vait occuper Je trône des anciens scyris du
royaume de Quito. Quelle que soit l'habileté dont
on s'est plu parfois à revêtir les quippbs-ca-
mayo* ils n'ont pu répandre une lumière suffi-
sante sur cette période; le moyen employé par
(1) Ces quippos n'étaient pas toujours composées «le
cordelettes aux couleurs variées. Un vieil historien pré-
tend que les dispositions testamentaires de l'inca furent
recueillies sur des bâtons destinés à recevoir des espèces
de runes. Cavello Baiboa va beaucoup plus loin ;il pré-
tend que l'écriture avait été connut: Jadis dés peuples d»
Pérou.
341
HUAYNÀ-CÀPÀC — HUBER
342
eux pour la transmission des faits était si im-
parfait, qu'on ne connaît pas même d'une ma-
nière absolue là date de la mort de Huayna-
Capac. Ce qu'il y a de certain , c'est que son
corps fut embaume, ainsi ô^i'll l'avait ordonné
par son testament, él ses funérailles furent
célébrées avec une solennité qui laisse bien loin
d'elle tout ce (ju'on nous raconte des pompes
du même genre. Plus de mille Victimes s'im-
molèrent volontairement pour aller servir, dans
le inonde mystérieux dont leur parlaient les
Cushipatas , te souverain magannime que deux
empires pleuraient également. Velasco affirme
que « le corps embaumé resta vingt jours ex-
posé sur son trône (1), et que les populations
accoururent en foule l'adorer, comme une divi-
nité. » Le sage et puissant Huayna-Capac, qui par
la force de son intelligence était sorti des té-
nèbres de l'idolâtrie ou d'un sabéisme grossier,
eût été le premier, s'il eût vécu , à repousser
ces honneurs sacrilèges. Ferdinand Denis.
• Niza, Las dos Lineas. — Ltravit, AnUouedadei del.
Peru. — AcosU, HUtoria Natural y Moral. — Calan-
cha, Coronica Moralitada; ta-fol. - ArriagB, Idoia-
tria del Peru. — Juan de Velasco, Historia del Reino
de Quito; Paris, 1841, t vol. manuscrits dans la Collect.
des Voyages, Relations et Mémoires publiée par Ternatix,
Carapans. — À-fteilo Oltva , ftekMort dû Pèrou^ ptiMWë
parle même. — Rivero et Tschtidl , Antifvedû&es dei
Peru,- in -4°, avec aU.; In fol. obi.
hubb (Jean- Michel)) physicien polonais, né
à Thorb, le l* r octobre 1737, mort à Varsovie, le
16 juillet 1807. Il fit ses études à Leipzig et
à (kettingue, et devint, en 1782* professeur des
sciences physiques et mathématiques et directeur
de l'école militaire de Varsovie. Après le partagé
de la Pologne, il quitta Varsovie., H se retiré dans
le village de Potyczy* auprès de eette ville. On a
de lui : Vtrsuch einer analytischen Abhand-
lung von Kegelschnitten (Essai d'une Disserta-
tion analytique sur les Sections Coniques) ; Goet-
tingue, 1 769 ; — De Figura Telîuris ; ibid ., 1 76 1 *
in -4° ; — De Telîuris Forma; Varsovie, 1780;
(1) An commencement du dix-septième sièele on
exhuma cette momie vénérée* * Le corps de tluayna-
Capaç, nous disent MM. Rivero et îschudt, fut transféré
de PataltacU * Totaiicba, où Vmi fonda ta paroisse de
San-filas ; il était en état si parfait de conservation que
le monarque paraissait vivant. Les yeux avaient été
remplacés par une petite lame d'or, adaptée si bien,
qu'on eût dit de vrais yeux. Tout le corps avait été pré-
paré avec une sorte de bitume; on remarquait à la tête
une cicatrice, venant d'un coup de pierre qu'on lui avait
lancée à ta guerre. Cette tète conservait toute sa cheve-
lure, fort épaisse et dans son intégrité. H y avait ^
quatre-vingts an* environ cependant que le monarque
étail mort. Lé licencié Polo Ahdegardo apporta cette
momie, avec d'autres momies d'incas, de Cusco à Lima.
C'était sous le vice-roi D. àntfrès. Hurtado de Mendoza,
deuxième marquis de Cafiete-Garcilasso, ajoute que les
corps pesaient si peu de chose que le premier Indien
venu les portait dans ses bras ou sur ses épaules, â la
maison de chaque cabailero qui demandait a les voit*.
On les transportait ainsi , couverts de blanches couver-
tures, par les rues et les places de la ville, et l'on voyait
alors les Indiens, tout en larmes, poussant des gémisse-
ments et se Jetant à genoux par respect. » Finalement
ces restés mortels furent enterrés dans un corral ( on
simple enclos) de Saint-Andréa à Lima.
— Réflexions sur V Architecture >• Kœnigsberg
et Leipzig, 1765; — Von den Kometen (Des
Comètes); Thorn, 1769; — Der Landwirth,
Oder Entwichelung der allgemeinen Grund-
sœtzè des Âckerbaus durch Naturlehre und
vleljeèhrige Beobachtung (L'Agriculteur, ou
développement des principes généraux de l'a-
griculture basés sur la science et l'expérience ) ;
Varsovie, 1779-1?82, 2 vol. ; — Ueberdie Aus-
duensïung unà ihre Wirkungen in der At-
mosphère (Des Exhalaisons et des Effets qu'elles
produisent dans l'Atmosphère); Leipzig, 1790;
— Vollsîœndigpr und deutlicher Unterricht
in der Naturlehre (Traité des Sciences Phy-
siques) ; Leipzig. 1793, 3 vol.) 2 e édit. 1801,
4 vol. : cet excellent ouvrage, qui a été comparé
aux Lettres d'Euler à une Princesse alle-
mande, traite de la physique, de la géographie,
dé l'optique , de l'astronomie» de la statique, de
la mécanique et de l'acoustique. R. L.
Meusel, Gelehrtes feutsehland. — Golâbeck, Literar.
Nachrtchiefivon Preutsèn, vol. 1, p. 58; vol. II, p. 37.
— HAlMche UPtrûriScke Eekuna ( 1807 , /nfeftl£*ns-
blatt, etc., «8 )$ - Der Çioeraph, voh UI> p. 496,
hubbb (Ulric), jurisconsulte et pubticiste
frison, né à Dorkum, le 13 mars 1636, mort
le 8 novembre 1694. Son grand-père, Henri
Huber, originaire de Zurich, était venu servir
dans les troupes hollandaises lors de la guerre
des Provinces-Unies avec Philippe II, et s'était
ensuite établi en Frise. Le jeune Ulric étudia à
Franeker, à Utrecht et à Marbourg, se lit re-
cevoir eh 1657 docteur en droit à Heidelberg,
et la même année fut nommé professeur d'élo-
quence à Franeker. En 1670 il refusa d'accéder
aux instances que faisait auprès de lui l'Aca-
démie de Leyde pour l'attirer dans son sein ;
lés états de la Frise augmentèrent peu de temps
après ses appointements, et le nommèrent d'a-
bord professeur de droit public, et en 1679
membre du tribunal suprême de leur pays
siégeant à Leuwarde. Outre ses querelles avec
Duker et Perizonius , dont il sera question plus
loin, Huber entra aussi en discussion avec les
ministres de Leuwarde, contre l'avis desquels il
soutint qu'il est non-seulement permis mais
même nécessaire aux étudiants en théologie d'ap-
prendre à danser, afin qu'ils acquièrent dans la
tenue et dans les gestes une aisance qui les dis-
tingue du vulgaire. Il avait épousé en premières
noces la petite-fille du célèbre jurisconsulte Jean
Althusen; il en eut un fils nommé Zachariae,
qui devint professeur de droit à Franeker, et qui
a publié plusieurs ouvrages juridiques concer-
nant le droit frison, ain'si que Dissertationes
Juridicœet Philologicx; Franeker 1703, et
Amsterdam, 1721, in-4° : ouvrage dans lequel il
fait preuve, selon Maubold, d'une connaissance
approfondie de l'ancien droit romain. (Pour
plus de détails, voy. Vriemoet, Athenx Frisicx,
et Ersch et Gruber, Encyklopâdie). On a de Hu-
ber : De Genuina MtateAssyriorum et Regno
Medorum; Franeker, 1662, ù>8°: dans cet
343
HUBER
344
ouvrage Huber défend l'opinion commune sur
la durée de Tempire des Assyriens contre les at-
taques d'Usserius et de'quelques autres érudits ;
1688 et 1696, in-4°; Amsterdam, 1721, in-4°;
— De Jure Civitatis; Franeker, 1672, 1684,
1692, 1698, in-4° ; Francfort, 1708 , in-4° ; avec
des remarques de Chr. Tbomasius , léna, 1752,
in-4° : dans cet ouvrage , écrit pour combattre
les doctrines absolutistes de Hobbes , Rousseau
puisa une partie des principes fondamentaux de
son Contrat Social; il emprunta les autres à
Wolf : son mérite se borne donc a avoir mis en
excellent français des maximes politiques jus-
qu'alors enfouies dans de gros traités rédigés en
latin; cependant il est exagéré de prétendre,
comme l'ont fait certains critiques, que Rous-
seau a copié mot à mot le De Jure Civitatis de
Huber. Le premier volume parut à Franeker, en
1677, in-4°; le second avec une nouvelle édition
du premier, ibid., 1688 ; une dernière édition des
deux fut donnée par Zacb. Huber; Franeker,
1696, in-4 a ; — Prxlectiones civiles ad Insti-
tutiones, una cum Positionibus ad Institu-
tiones etPandectas; Franeker, 1678, in-4°;
augmenté de : Prxlectiones ad Pandectas,
ibid., 1686 ; 1699, avec des notes de Thomasius ,
Leipzig, 1708; avec des Notes de Mencken et de
Gebaucer, ibid., 1735; ibid., 1749; toutes ces
éditions sont in-4 a ; — PositUmes Juris f con-
tracta secundum Institut ione s et Pandectas;
Franeker, 1682, Leipzig, 1685 (avec des remar-
ques de Thomasius), et Amsterdam, 1728, in-8°;
dans cet ouvrage Huber exposa une nouvelle
méthode pour renseignement du droit, laquelle,
répandue bientôt après par les écrits de Beyer,
remplaça dans les universités de l'Allemagne
la méthode ramistiqne ; — Auspicia Domestic*,
orationes XII; Franeker 1682 , in-8°. Dans ce
recueil de discours on remarque le quatrième,
De Frisix Jurisconsulte, et le dixième , De
Pœdantismo; — Heedendeyse Rechtsgeleer-
theyt soo elders als in Frieslandt gebraikeliik
( Jurisprudence moderne et ancienne de la Frise) ;
Franeker, 1684, Leuwarde, 1699, în-4°; —
Positiones Juridico-Theologicx ; Franeker,
1686, in-4* : ouvrage écrit pour contester l'opi-
nion de Duker, lequel avait soutenu que la
divinité des Écritures pouvait être prouvée par
les seules lumières de la raison. Huber prétendait,
au contraire , que la vérité de la révélation ne
pouvait entrer dans la persuasion de l'homme
qne par le témoignage intérieur du Saint-Esprit;
— De Concursu Rationis et Scripturx; Fra-
neker, 1687, in-8» ; — Spécimen Philosophie
Civilis; Franeker, 1686, m-8°; — Disserta-
tions Juridico-Theologicx VII, deFœderibus
et Testamentis una cum Libro singulari de
Prxtorio; Franeker, 1688 et 1698, in-8°: dans
ce recueil Huber contestait la signification at-
tribuée par Perizonius au mot prxtorium dans
un passage deYÉpttre à Philippe de saint Paul.
Perizonius (voy. ce nom ) répondit avec aigreur;
— De Jure popularis, optimatum et regalis
imperii; Franeker, 1689, h>8°; — Institu-
tiones Historiés Civilis; Franeker, 1692, in-8*;
ibid., 1703, 3 vol. in-4°: cet ouvrage ayant été
attaqué avec violence par Perizonius, Huber
répondit à ce dernier dans une brochure pleine
d'invectives, intitulée : De Calumnia centum et
viginti errorum J. Perizonii ; Franeker, 1693,
in-8°. Perizonius répliqua par une critique
encore plus acerbe ; — Eunomia Romana, site
censura censurx juris Justiniani; Franeker,
1700, in-4° : ouvrage écrit pour justifier lesdis-
Ejsitions des lois romaines. Huber a encore pu-
lié plusieurs ouvrages et dissertations sur des
matières juridiques; la majeure partie en a été re-
cueillie dans les Opéra minora Hubert, publies
en 2 vol.; Utrecht, 1746, in-4°, par les soins de
Wieling. t. G.
Camp. Vitrtaga, Oratio funebrit in Hubert exsequiis ;
Franeker, 1694, ln-fol.; réimprimé dans Y Eunomia de
Huber. — Chàuffeplé, Nouv. DicU Hixtor. — Vriemoet,
' Athenee Frisicœ, p. 444. - Benthem, Holldnd. Kirchen
and Schulen-Staat , t. 11. — JOcher, Allgem. Gel.-
Lexikon. — Haubold, Inttitutiones Juris Romani Itite-
rartm, n« ni. — Hugo, LOtrbuch der juristischen gê-
Uhrten CeschicfUê. - Nettelbladt, HaUische BeUràge,
t. XI, p. t4.
huber (Jean- Rodolphe), peintre suisse,
surnommé le Tïntoretde VHelvétie, né à Bâle,
en 1668, mort en 1748. Il puisa les principes de
son art à l'école de Manne- Wetich, qui peignait
sur verre; puis il se forma et se perfectionna
* sous deux artistes renommés, C. Mayer et Joseph
Vernet. A dix-neuf ans il fit le voyage d'Italie. A
Mantoue il rechercha et étudia particulièrement les
œuvres du Titien, et, détail remarquable, à Rome
il admira bien plus les tableaux de €. Maratteqne
ceux de Raphaël. Il se rendit ensuite en France,
d'où il vint se fixer à Baie. Les portraits qu'il y
peignit le mirent en renom ; et en 1696 il fut
appelé à la cour de Wurtemberg, où il resta jus-
qu'à 1700. A la peinture du portrait il ajouta
f dès lors celle de l'histoire. Quelques-uns de ses
* tableaux , assez nombreux, ont été gravés par
B. Audran, C. Drevet, J. Houbracken , Thur-
neisser, etc. Huber peignait vite et avec feu.
Il s'attachait surtout à donner à ses peintures
un brillant coloris. Quoique surnommé le Tin-
toret suisse, il ne soutenait guère la comparaison
avec le grand peintre italien. 11 aimait le faste,
et dépensa une partie de sa fortune en tableaux,
: gravures et autres curiosités. Il laissa quelques
* dessins d'un trait ferme et hardi. V. R.
Nagler, fleues AUg. Kùnstl.-Lexik.
huber ( Marie), théologienne protestante
suisse, née à Genève, en 1695, morte à Lyon,
le 13 juin 1753. Sa famille était originaire de
Schaffhouse. « Sa beauté, dit l'abbé Pernetti, lai
fit craindre, dès l'âge de dix-sept ans, les dangers
dont elle est si souvent la source : elle se livra
alors à une retraite austère et à la pratique des
bonnes œuvres, qu'elle n'a jamais interrompue,
sous quelque prétexte que ce pût être. La seule
liberté qu'elle se donnoitétoit d'écrire, n'ayant
345 HUBER
jamais eu de maître que son génie, et n'ayant
jamais lu d'autre livre que la Bible. » — • « Elle
avoil l'esprit vif et pénétrant , dit Senebier ; elle
disoit avec franchise qu'elle avoit toujours aimé
la vérité avec passion, et qu'elle favoit recher-
chée avec chaleur.... On s'occupe souvent de
ses ouvrages avec intérêt; ils peignent son cœur
de la manière la plus touchante; ils étonnent
par l'étendue et la profondeur des connoissances
qu'ils annoncent; ils entraînent par la mé-
thode qui y règne et le coloris qui les caracté-
rise. Mais ce qu'il y a de plus surprenant, c'est
que, comme en lisant ses écrits, on ne sauroit la
prendre pour une femme, de même ceux qui ont
vécu avec elle disent qu'en l'écoutant on ne Tauroit
jamais prise pour un auteur. » On a de M Ue Hu-
her : Le Système des Anciens et des Modernes f
concilié par l'exposition des sentiments dif-
férents de quelques théologiens sur l'État des
âmes séparées des corps, en quatorze lettres;
Londres, 1731, 1733, 1739, 1757, deux parties
in-12; avec une Suite du livre des quatorze
Lettres sur V État des Ames séparées des Corps 9
servant dé réponse au livre du professeur R.
(Ruchat); Londres, 1739, 1757, in-12; —Le
Monde Fol préféré au Monde Sage, en vingt-
quatre promenades ; Amsterdam, 1731, 1733,
1744, 2 vol. in-12; — Lettres sur la Religion
essentielle à Vhomme, distinguée de ce qui
n'en est que V accessoire; Amsterdam, 1738,
deux parties, 1739, 1754; nouv. édit., Londres,
1756, cinq parties in-8° : ontrouvedans la dernière
édition les Œuvres posthumes de M u ° Huber;
ce sont diverses pièces qui servent de supplé-
ment anx Lettres sur la Religion essentielle
à V homme; — • Réduction du Spectateur an-
glais à ce qu'il renferme de meilleur, de plus
utile et de plus agréable, avec nombre d'inser-
tions dans le texte, des additUmsconsidérables
et quantité de notes; Paris, 1753, six parties,
in-12. Senebierlui attribue Y Histoire d*Abassay 9
1753, in-8°, que beaucoup de bibliographes don-
nent à M Ue Fauque. J. V.
Peniettl, Les Lyonnais dignes de mémoire, X, II,
p. »S9. - La France Littéraire de 176*. - Senebier,
Histoire Littéraire de Genève, tome III, p. 84. —
MM. Haag, La France Protestante.
hubek (Jean- Jacques), botaniste et ana-
tomiste suisse, né à Bâle, le 11 septembre 1707,
mort à Casse! , le 6 juillet 1778. Il fit ses études
à Berne et Strasbourg et vint en 1736 à Gœt-
tingne, où Albrecht de Haller, son ancien profes-
seur, lui fit donner une chaire à la faculté de
médecine. Six ans plus tard il fut appelé à Cassel,
où il enseigna jusqu'à sa mort l'anatomie et la
chirurgie. Haller s'est servi des travaux de Huber
pour la rédaction de sa Flore de l'Helvétie. Il
était membre des Académies de Londres et de
Berlin. Ses principaux travaux sont : Positiones
Anatomico-Botanicœ; Baie, 1733, in-4°; — De
Medulla Spinali ; Gœttingiie , 1739, in-4°; —
De Medulla Spinali, speciatim de Nervis ab
ea provenientibus ; Gœttingue, 1641, in-4°; —
346
T Cogitationes tumultarise de Aereatque Electro
(Economie animait famulantUms et impe-
rantibus; Cesse! , 1747, in-4°; — Observa-
tiones ac Cogitotiones nonnullx de Monstris;
Cassel, 1748, in-4° ; — Observationes nonnullx
circa Morbos nuperorum; Cassel, 1755, in-4°;
— Observationes aliquot Anatomicx; Cassel,
1760, in-4 # ; — Animadversiones nonnullx
Anatomicx; Cassel, 1763, in4°; — DeSrroribus
aliquot Rei Médiat popularibus ;Cswel, 1767,
in-4° ; — De Chirurgi» cum Unatome Nexu;
Cassel, 1 767, in-4°. IK. L.
F. Boerner, NachrUhten von jetzt lebendin géUhrten
Arzten. — ■■ Putter, Geschisckte der Gœtting. Univer-
sitsst. - Erjch et Graber, Allgem. BncyJOopxdie.
huber ( Jean ), peintre suisse, né à Genève,
en 1722, mort dans la même ville, en 1790. Il
manifesta dès son enfance un goût très- vif pour
les arts du dessin, et s'adonna à un genre frivole
dans lequel il n'avait pas du moins à craindre
de nombreux rivaux : la silhouette découpée.
Si l'on en croit la Biographie Rabbe , « il décou-
pait un profil sans regarder ce qu'il faisait, ou en
déchirant une carte et les mains derrière le dos ».
Le portrait de Voltaire était celui qu'il reprodui-
sait le plus heureusement. Il avait poussé l'a-
dresse jusqu'à faire découper ce visage par son
chat, en lui présentant un morceau de fromage.
Les éloges que lui valut sa dextérité dans les dé-
coupages l'engagèrent à se livrer à la peinture,
qu'il apprit sans maître et sans conseils. Il com-
posa quelques tableaux pleins de vérité, mais
dont on a singulièrement exagéré la valeur en les
comparant à ceux de van Dyck et de Greuze.
Huber entreprit aussi de peindre plusieurs scènes
domestiques de la vie de Voltaire, près duquel il
avait demeuré vingt ans. L'impératrice Cathe-
rine H ayant été instruite de ce projet , écrivit à
l'artiste qu'elle retenait tous ses tableaux. Huber
en composa quelques-uns, et Senebier assure que
cette suite a été gravée. « Mais l'exposé d'un
de ces tableaux fera connaître la manière d'Huber,
et laissera moins de regrets , dit la Biographie
Rabbe, aux curieux qui la cherchent vainement
Voltaire y est représenté sortant do lit et pas-
sant ses culottes ; dans cette position , il présente
son derrière à D'Alembert et à Fréron, l'un le
baise et l'autre le fesse. » Huber passa de l'é-
tude de la peinture à celle des aérostats , et pu-
blia ses aperçus sur le vol des oiseaux. H divisa
les oiseaux de proie en rameurs et en voiliers;
dans la première classe, il range le gerfaut, le
sacre, le faucon, et il appelle ces oiseaux de
haute volée; dans la seconde classe, qui com-
prend les oiseaux de basse volée , il met l'autour,
l'épervier, l'aigle et le vautour. Il avait établi
cette division d'après la conformation des ailes;
fl soutenait que la queue ne sert point de gou-
vernail à l'oiseau , et que son seul usage est de
l'aider quand il monte ou quand il descend. Les
tentatives pour mettre sa théorie en pratique et
imiter le vol des oiseaux dans les airs ont ton-
347
HUBER
348
jours été infructueuses. Huber s'en tint pm-
déminent à la discussion doctrinale et ne tenta
jamais delà réaliser. H était entré en 1752 dans
le conseil des Deox Cents de Genève. La plupart
de ses découpures, exécutées sur vélin, se trou-
vent en Angleterre dans les eabinetsdes curieux.
On a délai : Note sur la Manière de diriger les
Ballons fondée sur h vol des oiseaux de
proie; dans le Mercure dé fr&nse du 13 dé-
cembre 17&3 ; — Observations sur le Vol des
Oiseaux de Proie; Genève, 1784, in-4% avec sept
planches dessinées par Fauteur. J. V.
Seoebier, Hist. lUUfr. de Genève, (oqie III p. 328. -
M»« d'OberUrch, Mémoires. _ Ra&be, Biofr. univ. .et
port, des Contemp.— MM, Haag, La France Prçtestante.
huber {François), naturaliste genevois, fils du
précédent, né à Genève, le 2 juillet 1750, mort à
Lausanne, le 22 octobre 1 83Q. fl suivait les cours de
physique de Saussure, lorsque, à l'âge de quinze
ans, sa santé s'étant altérée, il fut conduit à Paris
pour consulter un médecin, qui lui conseilla d'ha-
biter la campagne et de se livrer aux travaux rusti-
ques. Il se retira dans un village près de Paris, où,
quelques années après, il épousa M tl- LuJlm, qui
lui donna des preuves de dévouement lorsqu'il
fut devenu aveugle. Aidé par elle et par un ser-
viteur intelligent nommé Burnens , il parvint 4
rendre de grands services $i la science. Ses étude£
sur les abeilles ont révélé; des faits nouveaux; \\
fit connaître les mystères de fécondité de la reine
de chaque ruche ; il détermina le sjége et la
puissance des sens, chez ces insectes, leurs pro-
cédés de travail, l'organisation de leur société ,
leurs mœurs, les meilleurs procédés pour l'ex-
ploitation des ruches ? etc. Plus tard, de concert
avec Senebier, jl fit des observations sûr la
germination. Ces travaux ont été publiés flanc
les deux ouvrages, intitulés : Nouvelles Obser-
vations sur les Abeilles, ? e édif. ; Paris, 1796»
in 8°; la l re édition 'avait paru à Genève. Ces
observations ont été données aussi dans la Bi-
bliothèque bvitar\mq,ufi % \. 3UY> spjis ^ titre
de Mémoire sur l'Origine de la Cire; et
t. XXVII, sous celui de lettres à M. Pictet;
~ Mémoire sur l'influence de l'Air et des di:
perses Substances Gazeuses dans la Germina-
tion des différentes fiantes ,• Çeiiève, f8Qi f
in-8°. pour sa correspondance, JBJuber avait
une sorte dlroprimerie ; ^ composait avec des.
caractères mobiles disopsés çjajjs. des cases j
quand ces caractères élajent. rrçunîs, H les endui-
sait de noir avec pue. feujljç de papier couverte
d'une encre particulière, et imprimait ensuite.
Son fils, Pierre sjvws* W l'avait aidé dans ses
travaux et qui est jnort en janvier 1841, est au-
teur de travaux sur divers sujets de zoojogie,
parmj lesquels on remarqqe une histoire fa
Mceur*dft fourmis indigènes, e.t des Observa*
lions su* tes pourrons.
Gcïof de Fèb,e.
Rubbe, fliopr., Supptëjppitf.— Qenrion, Annuaire Dio-
grap — Documents particuliers.
huber (Michel), littérateur et traducteur -
français, d'origine allemande, né à Frontenhausen
(bavière), en 1727, mort à Leipzig, le 15 avril
1804. Venu fort jeune à Paris, il se lia avec plu-
sieurs hommes de lettres distingués, et fournit
beaucoup d'articles au/ la littérature allemande
au Journal Étranger dont Arnault et Suard
avaient entrepria la continuation. En 1766, il fut
appelé à l'université de Leipzig pour y enseigner
la langue française , et fendit de grands services
aux deux nations, dont il possédait la langue, par
ses traductions de l'ajlewand en français. On a
de lui : Mémoires pour servir à V Histoire de
la fie et des Ouvrages de Winckelmann; sans
date, in-a° ; — Vie. de MansteiH; en tête des
Mémoires historiques, politiques, et militaires
sur la Russie par le général Mansteôt, 1772,
2 vol. in-8 ; ~r- lettre de M. Winçtelmanu
sur les Découvertes iïBervulanum, à M. U
comte de Bruàl, traduite de l'allemand ; Paris,
1764, in-4 a ; réimprimée dans le Bectyeil a>
Lettres, etc., publié par jansen, 17&4, in-g°; —
la Mort oVAM, poème en, cinq chants,, tradoU
^e l'allemand de, tysm* * HfU, M° i très-sou-
vent fétmnrttné depuis ; — Idylles , au poèmes
champêtres de Ge$sr\er, traduits de FaUemand
pour la première fois; 1762, iu-8°: on attribue
au ministre. Turgpt la, plus grande partie de cette
traduction} — - Paphnis et le Premier Naviga-
teur, traduit de l'allemand dc Gessner; Wk,
in-8 tf : oea traductions $ont reproduites dans les
diverses éditions 4es. Couvres, de Gessner en
français; — Choix 4* Polies allemandes;
J766, 4 vol. «via* ~r WUhelmine, poème de
Thummel, traduit de l'allemand ; 069, in-g° ; —
lettres Choisies de Gellext, traduites de l'alle-
mand, avec l'éloge de, l'autour ; 1770, jn-8° ; —
Méfierions sm la &in$u,ve+ par M. Hagedorn 4
traduites de l'allemand ; 177&, 9 tawtfs in-8° ; —
Histoire de VArt de VAntiquitt % o& \Vincke^
mann, traduite de l'allemand; Leipzig, 1781,
3 vol. in-4° ; — lettres philosophâmes, #or la
Suisse, par Meiners, traduite* de l'allemand;
1786, 2 vol. in-8°; — Notice générale des
Graveurs, divisés par nations, et des Peimtrts
rangés par écoles, précédée de l % Histoirt de la
Peinture et de la Gravure; Leipzig, J7S7,
in-8 ; nouv. édition, refondue en partie, avec
Ç.-C.-H. Rosjt 4 sous te titre de Mmuét (2*6 Cu-
rieux et des Amateurs de faxt, contenant «m*
Notice abrégée, des. Graveur* #tvi*# par na-
tions, etc.; ïuwJi, 1791 et &m>, ft voj, in-*° -,
un »* vol. a été publié en ltyfts -~ U nouveau
#obins<m, t^uitdel'aMema^4eÇairipei 1794
8 vol. in* ; — Catalogue du. Cabinet d'Es-
tampes de Brandes ; Leipzig, 1703-1796, 2 vol.
in-8« ; — Catalogue du Cabinet oie Winckler ;
1802, 8 vol. in~8°. Huber a revu (a traduction
française de la Méthode naturelle. a?instructm
propre à accélérer, sans traduction, Vintelr
Ugenee des mots de chaque langue étrangère,
par Wolke; 1782-1788, 2 vol. in-8°. L, L— *
Râbbe, vietlh do BolaJoUa et 8aioCe-FrcaT« v moçr.
349
HUBER
S50
univ. et portât. des Contemp. — Qaérard, La France
Littéraire.
* h user (Pierre-François-Antoine, baron),
général français d'origine allemande, né à Saint-
Vendel (Prusse), le 20 décembre 1775, mort le
25 avril 1832. Son pays natal ayant été réuni à
la France, il s'enrôla dans un régiment de chas-
seurs à cheval, en 1793, et fit les campagnes de
Tan il à Fan v à l'armée de Sambre et Meuse.
11 passa ensuite à l'armée du Rhin , se distingua
à la bataille de Hohenlinden ainsi que dans plu-
sieurs autres affaires , et rat blessé plusieurs fois.
Envoyé plus tard au eamp de Bruges, il fit les
campagnes d'Autriche, de Prusse, de Pologne,
d'Espagne, de Portugal et de Russie,' où il reçut
encore une blessure. Colonel en 1 81 3 et créé baron,
il fit la guerre d'Allemagne et la campagne de
France. Promu général debrigadele 15 mars 1814»
il fut mis en non activité le 1 er septembre, puis
nommé inspecteur adjoint de cavalerie le mois
suivant. Apres le retour de nie d'Elbe, Napoléon
lui confia le commandement dHine brigade de ca-
valerie dans l'armée du nord, avec laquelle Huber
fit la campagne de Waterloo. A la seconde restau-
ration il reprit sa position de non activité, puis
il fut appelé dans lés inspections, et enfin chargé
du commandement d'une brigade de l'armée des
Pyrénées qui fit la campagne d'Espagne en 1823
pour rétablir Ferdinand Vil sur le trône. Nommé
lieutenant général le 8 août , il rentra en France
en 1824; mis en disponibilité, il fat admis à la
retraite deux ans après. Son nom figure sur l'arc
de triomphe de l'Etoile. 3. V.
C. Maillé, Bioçr. des Célébrités militaires des armées
de Terre et de Mer de 178* A 1810.
j huber ( Victor- Aimé), littérateur allemand,
est né à Stuttgard, en 1800. Il étudia la médecine
aux universités de Wuiizbourget de Gœttingue,
visita ensuite la France , l'Espagne , le Portugal ,
l'Angleterre et l'Ecosse, et revint, en 1823, en Al-
lemagne. 11 renonça bientôt à la pratique de la
médecine pour se consacrer aux travaux litté-
raires. On a de lui : Skiizen aus Spanien (Es-
quisses sur l'Espagne ) ; Çœttingue, 1828-1835,
4 vol.; 2 e édit , 1845; — J»e Geschichte des Cid
(Histoire du Cid) ; Brème, 1829 ; — Chronica del
Cid ; Marbourg, 1^44; — Die neuromanische
Poésie in Franhreich (ta Poésfe' néoronau-
tique en France); Leipzig, 1833; — Die en-
glischen UniversÙabten (Les Universités an-
glaises) ; Cassel, 1839-1840,2 vol.; —Die con*
servative Parteï (Le pajtlConservateur ); Halle,
1841; — Die Opposition (L'Opposition), ibid.,
1842 ; — Suum cuique ; Berlin, 1 849 ; — Shizzen
aus Irland (Esquisses sur ^Irlande); Berlin,
1850; — Berlin, Brfurtund Paris; Berlin,
1850. Ueber die Arbeiter-association in En-
gland (De l'Association des Ouvriers en Angle-
terre) ; Berlin, 1852 ; — Veber spanischfi Natio-
nalïtœtund Kunst im 1 6<«» und 17 fe » Jahrhun-
dert ( De la Nationalité et de l'Art espagnol aux
seizième et dix- septième siècles ) ; Berlin, 1852 ;
— Reisebr\efe aus Belgien, Franhreich, En-
gland, fm Sommer 1854 (Lettres sur un voyage
en Belgique, en France et en Angleterre, exécuté
dans Tété 1854) ; Hambourg, 1855, 2 vol.; — Shiz-
zen aus der Vendée und Bretagne (Esquisses de
la Vendée et de la Bretagne) ; Bertm, 1853. M. Hu-
ber est le fondateur de la revue Janus, qu'il a di-
rigée depuis 1845. R. L.
Conv.-Lex. — Ktrchhoff, fferséfeAnfes.
* huber (louis ou Aloysius) y conspirateur
français, né à Wasselonne ( Bas-Rhin), en 1812.
Çorroyeur de son état; il prit part à l'insurrection
de juillet 1 830, et demanda, dit-on, la république à
la commission municipale- installée après la vic-
toire à l'hôtel de ville de Paris. Il entra ensuite
dans la Société des Droits de f Homme, et, com-
promis dans l'affaire dite du complot de Neuilly,
il fut condamné à cinq ans de prison. Il dut sa
liberté à l'amnistie du 11 mai 1837. Placé néan-
moins sou9 la surveillance de la haute police, il
resta quelque temps dans la capitale, et partit
pour Londres. En revenant en France , le 8 dé-
cembre 1 837 , il perdit son portefeuille à Boulogne,
au moment où il débarquait ; un employé de la
douane le ramassa et le remit aux autorités.
On y trouva des pièces compromettantes et un
plan de machine infernale. Ffubef fat arrêté à son
hôtel et traduit devant la cour d'assises de la
Seine, avec M M# Grouvelle (voy. ce nom),
Steuble, Leproux, Anat et d'autres. Huber tut
condamné à la déportation pour complot contre
la vie du roi. Irritable et récalcitrant, il subit une
prison rigoureuse, qui altéra sa santé. La révo-
lution de Février le remit en liberté. Le 13 mai
1$48 il fut nommé gouverneur du Raincy. Membre
du comité central de la nouvelle Société des Droits
de l'Homme et président du comité centralisateur
qui avait remplacé le Club des Clubs , il présida
à l'organisation de la manifestation du 15 mai. Il
rédigea un manifeste, fixa le jour, l'heure et le
Heu de la réunisn, et" convoqua les clubs et les
corporations ouvrières pour aller porter en masse
une pétition en faveur de la Pologne à l'Assemblée
nationale. Huber fit publier sa convocation par les
journaux et par des affiches , disant que la ma-
nifestation devait être pacifique et que Ton devait
se présenter sans armes ; cependant il avait fait
décider à la fin que, si on était attaqué, on se dé-
fendrait et qu'on irait chercher ses armes. Au
iourindiqné, Huber partit de la place de la Bastille,
| a iaïtéte de la manifestation, entouré des bannières
I et des délégués des clubs. Arrivé à la place de U
; Concorde, il se détacha du cortège, et une deroi-
: heure avant l'ouverture de la séance de l'Assem-
blée, il pénétra dans la salle; le secrétaire géné-
ral le fit sertir ; mais Hnber s'y trouvait encore au
moment où la séance commençait. Invité de nou-
| veau à se retirer, il déclara que, « si on laissait lire
! la pétition dont il était porteur, tout se passe-
I rait bien; majs que si on s'y rerasait, il y aurait
! du désordre ». Cependant la salle fut bientôt efl-
' vahie , la pétition fut lue , et Blanqui \
351
HUBKR — HUBERT
352
un discours. Huber monta ensuite à la tribune, et
demanda que le peuple pût défiler devant l'As-
semblée. Epuisé, il s'évanouit. Le tumulte con-
tinua; revenu à lui , Huber s'élança de nouveau
à la tribune, menaça le président; et, après une
nouvelle discussion , il déclara l'Assemblée dis-
soute: il y avait plus de trois heures que la lutte
durait. Le bureau du président fut envahi. M. Bû-
chez se leva et se laissa jeter à la porte. Presque
tons les membres de l'Assemblée quittèrent alors
leur banc et se séparèrent Le président avait
donné Tordre de battre le rappel, puis l'avait re-
tiré, pendant que la garde nationale se réunissait
de tous les cotés. Au milieu de cet inexprimable
tumulte, quelques insurgés se détachèrent de la
bande pour proclamer à l'hôtel de ville un gou-
vernement provisoire. Huber voulut annoncer la
dissolution de l'Assemblée constituante à la garde
nationale de service ; mais il fut arrêté : réclamé
par la foule , il redevint libre. Arrêté de nou-
veau vers six heures du soir et conduit $ la
mairie du quatrième arrondissement, il recouvra
sa liberté par l'intervention du maire. Huber
entra alors chez un de ses amis , se fit raser et
s'enfuit à Londres. Mis en jugement pour sa par-
ticipation au complot du 15 mai contre la repré-
sentation nationale, il ne se trouvait pas parmi
les accusés présents devant Ta haute cour siégeant
à Bourges. Là un témoin qui avait été secrétaire
de la préfecture de police sous Caussidière,
M. Monier, déclara qu'il avait vu dans les ar-
chives de cette préfecture un rapport au préfet
Gabriel Delessert, relativement à l'affaire Grou-
velle, précédé de deux lettres signées Huber.
En apprenant cette déposition, Huber quitta
Londres et vint se constituer prisonnier. Les dé-
bats étaient avancés ; son affaire resta disjointe,
et il ne put comparaître que devant la haute cour
siégeant à Versailles le 10 octobre 1849 (1). Le té-
moin Monier développa longuement son dire. Hu-
ber le démentit avec véhémence, prétendant que
c'était une invention de Raspail, de Blanqui et de
Caussidière pour se sauver en perdant un absent.
Défendu par M* Buvignier, et reeonnu coupable
par le haut jury, Huber fut condamné à la dé-
portation le 12 octobre 1849. Après le rétablisse-
(l) Huber demanda d'abord inutilement la comparution
de Blanqui et de Raapail. M. Bâchez, appelé comme té-
moin, avoua qu'à trois heures et demie li avait aperçu
Huber et lui avait dit : « Voua n'êtes pas l'ennemi de la ré»
publique ni de l'Assemblée nationale : eb bien, vous pour
vez me rendre un grand service: faites vos efforts pour
faire sortir les gens qui sont Ici, afin que l'Assemblée
puisse délibérer; et si vous n'y réussissez pas, tâchez de
me faire mettre A la porte. » M. Bûche» eipliquait qu'il
n'avait pas demandé la dissolution de l'Assemblée, mais
une mesure qui le forçât à quitter son siège, afin de sauver
r Assemblée et d'évité* une lutte qui aurait pu coûter la
vie à plusieurs de ses membres. 11 comptait aussitôt la
réunir ailleurs, au Luxembourg par exemple. Huber dé-
clara» qu'il n'avait pas compris cela; mais qu'apprenant
que la garde nationale convoquée arrivait, et que le prési-
dent ne voulant pas permettre le défilé, il ne trouva d'autre
moyen pour sortir de cette situation que de prononcer la
dtMolutkm de l'Assemblée ».
ment de l'empire,, il déclara renoncer à la poli-
tique, et recouvra 'sa liberté. L. Locvet.
Moniteur, 1838, 18W, 1849.
Hubert (Saint), apôtre des Ardennes, mort
en 727. Les règnes de Clotaire III, de Childé-
ric II, de Thierry III et de Dagobert II ont été,
pour la France, des époques terribles de déchire-
ments et de meurtres. Grimoald, Ébroïn, saint
Léger, tour à tour enfermés, rasés, puis repla-
cés sur les marches du trône, se vengeaient, à
chaque revirement favorable de la fortune, des
revers qu'ils avaient essuyés, en jetant leur rival
au fond d'un cloître, en égorgeant ses partisans,
et surtout en le dépouillant de ses biens, de ses
dignités et de ses trésors. A cette époque d'a-
narchie, le peuple, devenu presque insensible
aux luttes de la Neustrie et de l'Austrasie, ou
plutôt aux rivalités des maires du palais , lais-
sait passer les événements politiques avec use
sorte d'indifférence, et donnait toute son atten-
tion à des événements d'un autre ordre, dont le
succès intéressait plus vivement sa foi religieuse.
Ce qui lui importait, c'était de savoir les travaux
de saint Éloi (voy. ce nom) , les miracles de saint
Goer, les souffrances de sainte Audeberte, les fon-
dations pieuses de sainte Bathilde, les prodiges
opérés aux tombeaux des bienheureux. Assuré-
ment il était beau, lorsque les chefs de l'État s'en-
tr'égorgeaient pour étendre ou pour conserver
leur puissance, de voir des hommes généreux,
dévoués au salut de leurs frères, entreprendre,
dans le seul but de convertir quelques pauvres
âmes, des voyages lointains et périlleux, braver
la colère et les menaces des grands, et jeter au
milieu d'une vaste solitude les fondements de
quelque monastère, retraite paisible au pied de
laquelle venaient se briser en mugissant les tem-
pêtes politiques. Saint-Hubert est un des hommes
en qui se personnifient le plus exactement les
habitudes de vie et les instincts religieux de son
siècle. Dans un temps où il valait mieux agir
que méditer, il laissa de côté l'ascétisme, prit
en main le bâton du voyageur, et s'achemina
vers les populations qui n'avaient pas reçu ou qui
avaient oublié la parole de Dieu.
Saint Hubert était issu de la race royale; il
descendait de Clovis par son père Bertram ou
Bertrand, duc d'Aquitaine, et par sa mère Hug-
berne. Sa naissance, d'après les renseignements
les plus certains, peut être fixée à l'an 656. Les
premières années de sa vie sont enveloppées
d'obscurité; tout ce qu'on en sait, c'est que son
éducation , un peu négligée par ses parents, fut
dirigée par une de ses tantes, nommée Oda, et
qu'il épousa, étant encore jeune, une dame de
distinction appelée Floribane, dont il eut un Gis
qui lui succéda dans l'épiscopat. Hubert était
habile dans les arts libéraux et dans le métier
des armes ; il avait été revêtu de la dignité de
comte du palais. La jeunesse d'Hubert se passa
dans la dissipation et dans les plaisirs. Vers l'an
674, fuyant la tyrannie d'Ébroïn, il se réfugia
353
HUBERT
354
à la cour du roi d'Austrasie , auprès de Pépin,
dit d'Héristall, son parent. Il y fut investi d'un
emploi émineot, et y demeura jusqu'à l'époque de
sa conversion, conversion toute miraculeuse sui-
vant quelques-uns de ses biographes, et qui pa-
rait avoir eu lieu en 683. Hubert chassait un
jour dans la forêt des Ardennes : tout à coup,
au milieu du chemin, un cerf lui apparut, portant
entre ses bois un crucifix rayonnant. Hubert en-
tendit distinctement une voix qui loi disait :
« Si ta ne te convertis, si tu ne changes pas de
conduite , tu descendras bientôt en enfer. » A
ces paroles, Hubert descendit de cheval, se pros-
terna et dit : « Seigneur, que voulez-vous que je
« fasse ? — Va trouver Lambert : il t'instruira de
mes volontés. » Hubert obéit. Lambert était
alors évèque de Maëstricht; sa réputation de
sainteté s'était répandue au loin. Il avait été ,
comme Hubert, victime de la tyrannie ôTÉbroîn.
II accueillit le néophyte avec bienveillance, l'ins-
truisit, lui donna la cléricature, et se fit aider
par lui dans ses bonnes œuvres. Quelques chro-
niques racontent avec de curieux détails un
voyage que fit Hubert à Rome, par les conseils
de saint Lambert. Le jour de son entrée dans la
ville sainte, le pape Serge eut une vision, dans
laquelle lui fut révélé le martyre de saint Lam-
bert et l'arrivée de son disciple. Dieu ordonnait
à Serge de revêtir Hubert de l'épiscopat et de
le sacrer évêque de Tongres, en remplacement
de saint Lambert ; ce qui fut exécuté. C'est pen-
dant la cérémonie de son sacre qu'il reçut de la
sainte Vierge l'étole (1), et de saint Pierre la clef
dont il devait faire usage pour laguérisondes en-
ragés, des fous, des possédés, etc. Hubert revint
ensuite à Maëstricht, et y exerça les fonctions
épiscopales. Par ses soins, le corps de son
maître chéri, saint Lambert, fut transféré à Liège
( Leodium), qui n'était alors qu'un petit village,
et où il fixa lui-même sa résidence en prenant le
titre d'évêque de Liège. La religion chrétienne
avait déjà été prêchée dans les Ardennes par
Euchaire, Valère, Materne, Paulin, Servais, Re-
macle et autres ; mais la population de cette con-
trée sauvage et barbare n'avait pas brisé toutes
ses idoles. Hubert en renversa un grand nombre
par ses prédications. Il mourut dans un lieu ap-
pelé Vur ou Vuren (Fura ), près de Bruxelles.
Son corps fut enterré dans l'église de Saint-Pierre,
à Liège, et les miracles innombrables qui s'y firent
rendirent son tombeau célèbre. Cène fut qu'en-
viron un siècle après la mort d'Hubert que ses
restes furent transportés (825) au monastère
d'Andain on d'Andaye, qui prit dés lors le nom
ft Abbaye de Saint- Hubert, en Ardennes, sous
lequel il jouit d'une haute célébrité pendant tout
(1) Cette étale éUit de sole et d'or ; il y a environ mille
ans qu'on en emploie des parcelles pour la guérison des
malades. Selon le témoignage du P. Robertl, qui écrivait
vers 1021, on a usé de cette étole 17 pieds romains et
s doigts; et cependant elle est toujours intacte et delà
longueur a'une étole ordinaire.
WOUV. BIOCR. GÉNÉR. — T. XXV.
le moyen âge. [ J.-B. Hubert, de Charleville, dans
YEncycl des Gens du Monde.]
Batllet, Fie des Saints.
Hubert ( Etienne ) , médecin et orientaliste
français, né à Orléans, vers 1568, mort dans
cette ville, en 1614. Il fit ses études à Paris, où il
fut reçu docteur en médecine. H s'y appliqua
aussi à l'étude de l'hébreu et de l'arabe, et en-
treprit à ses frais un voyage en Afrique, afin de se
renseigner, sur les lieux mêmes, des découvertes
que les Arabes avaient faites autrefois dans la
science médicale. A son retour, il fut nommé
professeur d'arabe au Collège Royal (Collège de
France ), et devint premier médecin de Henri IV,
qui l'envoya auprès de Muley, empereur du Ma-
roc, pour y traiter de la délivrance des captifs
français et conclure des conventions politiques et
commerciales. Hubert réussit dans cette double
mission ; et, après un séjour de près d'une année
dans les principales villes marocaines, il rapporta
en France plusieurs livres arabes curieux , entre
autres une version du Coran dont il fit pré-
sent à Scaliger. Il reprit ses leçons publiques,
mais , ne pouvant faire payer ses émoluments
parles trésoriers, il quitta 1600, sa chaire, et se
retira à Orléans, où il pratiquait là médecine ,
lorsqu'une mort prématurée vint le frapper. Hu-
bert a été enterré dans l'église de Saint-Samson,
où l'on voyait son épitaphe en hébreu, arabe, grec
et latin. L — z— e.
Josepu-Scallgeri, Epitt.— Dora Géron, Bibliothèque des
Écrivains de Tourratne, 1 1, p. S38. — Charles Brainne,
dans Les Hommes illustres de r Orléanais, t. I, p. 280-
181. — isaac Casaunon, ÊpistoUe; Rotterdam, 1709,
ln-K - Éloy, Dictionnaire historique de la Médecine.
* hubbrt, moine brabançon, au milieu du
onzième siècle. Il a écrit , après l'année 1047 ,
une Vie de saint Gudule, que Bollandus a pu-
bliée dans ses Acta Sanctorum, à la date du
8 janvier. Baillet juge que le récit d'Hubert a
peu d'autorité. Les auteurs de Y Histoire litté-
raire en ont meilleure opinion. B. H.
Hist. Littér., t. VU, p. tt».
* hubbrt (Léonard) (i), théologien belge ,
vivait vers l'année 1490. Il fut d'abord religieux
carme, évéque de Darie, suiïragantdeFévéquede
Liège, puis inquisiteur à Liège. Sixte de Sienne at-
teste,en outre,qu'il professa pendant quelque temps
la théologie dans les écoles de Paris. Le cata-
logue de ses ouvrages nous est offert par Jean de
Tritenheim : In Evangelium Lucœ; — De Be-
gimine Principum ;— De Jmmunitate Eccle-
siastica;— Contra ffxreticos Mvellenses; —
De GenealogiaNobilium Francorum;— Ser-
mones. B. H.
Fabricius, Bibiioth. Met. JEtat. — Slxtna Senensis, J».
blioth. Sancta, llb. IV.
hubbrt ( Nicolas ), sculpteur français , né à
Orléans, mort dans la même ville, en 1670. Cet
artiste , qui ne voulut jamais quitter sa ville na-
tale malgré les efforts de Colbert, fut d'une pro-
digieuse fécondité, et il n'était guère, à Orléans, de
(f) Alègre deCasanate lui donne le prénom de Bernard.
12
HUBERT
356
mouumcut public ou particulier, religieux, ou pro-
fane, qui ne possédât avant la révolution quelque
morceau dû à son ciseau. On citait chez les Filles
de la Visitation de Sainte-Marie (Visitandines).i
les figures en pierre des Douze Apôtres y dont on ad-
mirait les attitudes variées et le beau caractère ; —
chez tes Chartreux , Saint Bruno ; — chez les Mi-
îiimes, Saint François de Paule; — au por-
tereau Tudelle, la Croix nommée LeMortiuà Iq
Vif; — sur l'ancien pont au-dessus du peut fort
des Tourelles, ta Vierge tenant l'Enfant Jé-
sus, etc. M. de Buzonnière, tout en rendant justice
à la rapidité d'exécution de Hubert, trouvé que \i
mérite de cet artiste est au-dessous de sa réputa-
tion. « Chez hubert, dit-il, la pensée artistique
est vulgaire ; son style est commun et son ciseau
manque d'originalité. Ses statues pouvaient servir
à deux fins ; on voyait jadis dans les apparte-
ments de révêché deux statues païennes qui
furent converties ail christianisme par l'addition
' de certains emblèmes : la Vérité, qui sans
doute n'était pas dans son costume allégorique,
était devenue Sainte Hélène; un philosophe
arec avait été transformé en Saint Pierre, à
l'aide d'un trousseau de vraies clefs attachées à
son bras. Eh revanche, lorsqu'on fit de l'église
Saint-Michel une salle de spectacle, l'architecte,
pour tirer parti des vrais saints jadis sculptés par
Hubert, eu fit dès cariatides à l'aide de masques
et d'attributs du paganisme. » À. de LacIze.
M. de Buzonuière, Histoire Architecturale d'Orléans.
— Charles Brainoe, Les Hommes illustres de l'Orléa-
nais, t. 1, p. 20-21.
* hubert (Franfoise)i femme poète fran-
çaise, née à Nogent-le-Rotrou , à la fin* du
seizième siècle. Sœur de Florent Hubert, bailli
de Nogent-le-Rotrou, elle «épousa Robert Garnier,
juge criminel du Maine j qui cultiva la poésie
tragique avec succès. Il est fait mention d'elle
dmsVAlmanach des Dames Savantes depuis le
commencement de la monarthie; Paris, 1728.
Elle vivait encore en 1634. Ses Œuvres n'ont pas
été imprimées. A. R— r (de Chartres).
D. Llroo, Manuscrit de la Bibliothèque de Chartres.
— Janvier, Additions manuscrites ù ta Bibliothèque pu-
blique de Chartres.
hubert (Matthieu), prédicateur français,
né en 1640, à ChàtUlon-sur-Colmont, près de
Mayenne, mort à Paris* le 22 mars 1717. Élève
de Mascaron au collège du Mans, Matthieu Hu-
bert acheva ses études chez les otatoriens de
Paris, et sortit de leur maison pour aller en
d'autres collèges enseigner les belles-lettres. Ses
Sermons > qui avaient eu du succès, furent re-
cueillis après sa mort, et publiés par les soins de
sa congrégation. Ils parurent en 1725, en 5 vol.
in-12. B.H.
De Monteull, Notice sur Hubert, en tête des Sermons.
- B. Hauréau, Hist. litt. du Maine, t. III, p. 288.
hubert (François), graveur français, né à
Abbeville en 1744, mort en 1809. Il était élève de
Jacques Beauvarlet, et s'est fait connaître par un
grand nombre d'estampes parmi lesquelles on
cite : La Nouvelle Héloïse, d'après tétëbure;
— Honnysoit qui mal y pense, d'après le même ;
— Bonny soit qui mal y voit, d'après L. Ca-
resme; — Le Retour de la Nourrice, d'après
Greuze (17B7) ; — Le Cordonnier, d'après G.-M.
Kraus; —Une Suite de Costumes militaires, d'a-
près Graincourt ; — une Suite de Vues de Suisse ;
— les portraits dd Maréchal de tourville ; — du
Maréchal de fabonrie; — de Y Amiral de Châ-
teau- Regnaûlt ; — dd idarécnal buquesne; '
du Comte de Forbin; — de L.-F.-G. à 1 Or-
léans de Là Motte i, évègû'e d'Amiens ; — de
Marie-Atïtoinetie (^Autriche, dauphine de
France, d'aérés foàvéïié; — de Hue de MÏro-
mesnil, garde dès sceaux de France, d'après
Méon ; — du Comte de Toulouse ; — du Duc
de Brézé; -r dii Diic de Beau fort: — de Jean
Bàrt; — du Chevalier de ta Roche-Saint'
André, etc. A. de t.
F. Basan , Dictionnaire des G'raveuts anciens et mo-
dernes. — D r O.-R.. Nagler, If eues allgemeines Kûnst-
ter Lexikon.
*HUfeEnf [Ïean-Èapti&te), ingénieur fran-
çais, né à Chauhy (Picardie), le t* r mai 1781, mort
âRochefoft, en septembre 1 1845. i>lacé,àsasortie
de l'École Polytechnique, en 1799, dans le ser-
vice des constructions navales, il fut attaché ,
deux ans plus tard, au port dé Rochefort. Grâce
à lui, de tous tés arsenaux de France celui de
hochemrt fut le premier (wurvu des machines
les plus propres à perfectionner et à sim-
plifier le traVail des ateliers. Hubert n'avait guère
ijue vingt -cinq ans lorsqu'il construisit son
moulin à dragUer i'fehtfée des bassins, moulin
employé depuis au tàmïtiage du plomb et à la
Préparation de la peinture, et dont le méca-
isme, aussi simple qu'ingénieux, est une con-
ception des plus heureusfes. Non loin de ce
moulin, il en établit un de sciage. Travaillant
habituellement environ dix-huit heures par
jour, et appliquant toutes ses facultés à l'étude
de la mécanique appliquée aux arts , il inventa
en outre diverses machines d'Un emploi spécial
et économique. Telles sont : l° la machine à
tourner les vis de pointage de caronade en fer ;
i à là machiné à mortaiser lés caisses de poulie^ ;
3* la machine a encastrer les dés de réas de pou-
lies, portée dès le premier essai à son plus haut
degré de perfectionnement; 4 b l'insaisissable
machine à tourner les gournablés coniques , en
bois de fil droit ou tors, au moyen d'un burin
annulaire brisé, s'ouvrant à tous diamètres dans
son mouvement longitudinal sur une génératrice
soulevée elle-même par une pédale. Ces diverses
machines furent le sujet de deux rapports pré-
sentés, le 5 février 1816 et te 23 novembre 1818,
par MM. Sané, Molard, de Prony et Gh. Dupin,
à l'Académie des Sciences, qui s'empressa d'ad-
mettre Hubert au nombre de ses correspondants .
Depuis longtemps préoccupé du désir d'amélio-
rer les procédés de commutage employés dans les
corderies de la marine , il rut envoyé à Brest
357
HUBERT — HUBNER
358
pour y combiner ses • projets avec eeak de
M. Lair, directeur des constructions navales de
ce port; et de la raaion de leurs idées ré-
ciproques résulta l'adoption d'une machine
qui, tout en diminuant la- consommation du
chanvre, apporta dans la confection du cordage
le perfectionnement le pluB' essentiel, la solution
de l'important problème fie l'égale tension des fil*
de caret dans les torons, solution due à i'étan
blissement d'un crible de projection accélérant
et régularisant la marche de )& machine. Hu-
bert a particulièrement fait ressortir les avan-
tages de remploi de la vapétfr dans lés cons-
tructions nivales», (jar la conetrattion d'Utt grand
nombre de batiiheiits qui > touB j ont justifie 7 la;
supériorité de -m» talents et démontré qu'à» Utt
esprit d'invention trètwemarquabte il joignait
on jugement presque InfcHlible, attesté par te
te perfection qu'ont obtenue de prime («bord
tontes se» inve**tens. Le ptemieif il construisit
des navires à Valeur «his&iit la solidité de M
striiclore! à lai supériorité, de ta mafcbe ? et dès
1830, éclairé par'l'etpériéntt du sphinx^ ba-
teau à vapeur fie 160 chevaux, «proposa det
améliorations «sfcéé&'sives qui eurent pour ré*
sultat principal 'de rendre plue' èffteàce la comW
naison des forcfeâ de» la vapeur et du vêtit. TéHW
l'objet de son tiîpport sut 16 *toW»*R*r*> dé B90
ehevaux. I^^aVéuxl^irtUgfftf^Wm^d'ffn*^
sur ces matières Sont : Ktippàh sW tes Mtailsé'è
ConstruétiM tiéà Maàkitth m-bâtèdu é'Wfc
peur L*S\\mx;dé 46b èhete<il& ;4o«m y ll&aèj
m-fol., saitt dé JW# et d'une MMMVbn*ùr
la Conduite et PSntfëtieh dé* tèttehtote ti toi*
peur marines , par Mi ÛantpoMnûc (p. 69-7*7
etl-ltf); ^ Rapport *ur lèàivénkages fuê
présentent lès Maéhthesà bûsêb pression sut
ceMs i #pres4ldhtànl>èu èleUe, du Von ferait
usage deiadètente'\Ann. mûrit. : Sciences et
Arts, t. LX1V, p. lfrîDiOn doit enéotfe à Hut
bert le travail suivant exécuté de concert avec te
général d'artflïerie Barbé : fablt de Proportions
des Càplês en 1 Fer et des ustensiles pour ser±
vir à Uikr installation et à leur manœuvré}
Paris, Im^. roy., f825,ih-4° avec fcianeheB.
P. LfetOT.
annales Matit. ie 18ié, lêis/lg^o, 1837, ÏSS8. fct 4è4».
— Notice Nécrologique* par MM. de trtéurt «t NosWe^i.
HUBERT t>E li'ÈÎslPl*» , voyageur IrariÇaM
Voy. L'Espiné: • ,!V "
flUBfefcTfftt ttteCASAL.T(^.CASALl>t^RA*N.
COLAS. ' : K ' ! '' ' n
HuttiîT {Jean-Hubert), litteVatèWf belgeVBé
n Hny, le 16 jûiHet 1764, mort --à- Bruxelles,' le
12 février 1831 11 était agent général et èoti-
sjeiilér désordre vlé Malte dans lès Fays-ftas,
et consacrait a la culture des lettres et de là
musique ses rares moments de loisir /fl de»-
vint membre de \A Société dé Littérature de
«rtrxellesét'librrespondantdelà «fwsiété d*Ému-
latîon de Liège. On a de luî : LuHti et 'Victor,
nouvelle; Bruxelles, il&ïfi&'lS* ;-± Étéonore
et Monval, nouvelle; Bruxelles, an n, h>18 ♦."
ces deux ouvrages ont été publiés sous les ini-
tiales J. H. H.; ^- Euménie, roman moral;
suivi de La Journée Sentimentale; Bruxelles
et Paris, an ix, in-18; 2'édit., Bruxelles,
1801, in-i*j •=— Coup (VŒil sur Êruxelles;
Bruxelles, 1809, in- 12 : c'est une description de
cette ville; — L'Amante romanesque, comé-
die^ mêlée d'ariéttes, saàs tftoni de lieu ni date,
in-32; — PoVêies dUMèest Bruxelles, 181';,
in- 12. Le neveu de HuMn a publié, en y joignant
une notice su? l'auteur : Pbêàies choisies de J.-ff.
Hubin ^BHi*eHé8|l«95,ifri8. N. L.
• imité tir tête Ma PbeHes CHoitiki dèj.-dufrin.
■Obubr {Jean ), géographe et historien alle-
mand,^ né à ettfaU; le i? mars 1668, mort à
Hambourg, lé 6i mars- 1731; Il fit ses études à
Leipzig^ et devint ; «tt 3094 , recteur du»éollége
de Metfsbourg, et eh 1711 recteur du JOhan*
neum de Mambodrg. If à écrit beaucoup d'On^-
vtages destines à l'usage des écoles. Son Hvre :
Fragen ans der ûlten und nèuen Géographie
(Questions de Géogrtphié ancienne et moderne ) -,
liéiprig, 1693, iil-12,' eut, dans Tés^ace de quel-
^Ueà années, trente-six éditions. Parmi ses autres
travaux noué citerons : Pragen tins derpolitis*
ehtà Bistbrte (Questions d'Histoire politique) ;
Lèî^tig, 1 70t-l 721;—. Eintèilting in die po-
litisent Hïstôtie ( Introduction à Pttistoire po-
litique), ibid., 1722, 1 vol;— Zweiràal 52 bi-
àische Historien (Cent Quatre histoires bibli-
ques), centième édition corrigée, publiée far D.-J.
Lindttfer ç Leipzig, 1826;— Genenlogische Ta-
beilen (tableaux Généalogiques) ; Leipzig, 1 1 708-
1733. 4 Vol.; — GeneâtbgÛche Pragen (Ques-
tions Généalogiques) ; ibid., 1719-1737, 4 vol ; —
Bibliotheca Historica, publiée avec Fâbricius et
Richey; Leipzig, 1715-1729,, 10 vol; — Ce fut
Hiibner qui donna au géographe Homann (voy.
ce nom) lldée d'enluminer les cartes géogra-
phiques.
Son fils Jean HnBNka, mort à Hambourg, éfi
1753, continua quelques-uns des ouvragés dé
son père, et publia : Muséum Geographicum ;
Ham" bourg, 1746;— Bibltotheeâ Geneatogica ;
Hambourg, 1729 ;~ Voltslœ'ndige Géographie
fGedgraphie tJni veréellë ) ; Hambourg 1 730 ,
S vol.; etc. R.L.
ï. A. Fàbrteiai, Ëttfg. MàhèrH; flàfl» les Mémo*. iTûfitl-
6W0fe,t.vliL p. *i«. t-ActaptvMàr.) Sa^pleto., t X.^-
bnt|iaer»,^i#^. Gdlhrt. Usç. - S*i,Onoma$tic?n
> - : l iitôTTÊtt \RoAotpke- Jules- Èrnno), jiein-
tfèd'hîsto^fe allemand, né à Œls (Silésîe)en
1806. ïî commença l'étude de son art à Berlin,
feh i&21, sô'ûl? la' direction deW.Schadow,et sui-
vît son mâttre à Dusseldorf en 1827, avec Hil-
«ebrandt, Lessing et Sohn. L'année suivante, îl
ê^iposà a Berlin son tableau Les Pécheurs, d'après
la ballade de Goethe. Ce tableau attira l'ai te n-
Ifon sur sou auteur, 5 quî fit ensuite un voyage en
Italie. 1 A son retour en Allemagne, rlubner finit
par s'établir à Dresde, en 1839 ; deux ans après 11
12.
359
HUBNER — HUBSCH
360
fut nommé professeur de dessina l'académie de
cette ville. 1J obtint une grande médaille d'or
à l'exposition de Bruxelles en 1851. « Hiibner,
dit la Conversations- Lexikon , est un artiste
remarquable par une grande pureté de formes et
par la beauté de son coloris, quoiqu'on lui ait
reproché d'avoir trop prodigué l'azur dans ses
premiers tableaux. Si l'on peut désirer ça et la
plus de profondeur, plus de vigueur dans le co-
loris et plus d'énergie dans l'expression, le spec-
tateur ne peut jamais se soustraire à l'impression
harmonique de l'ensemble, à la beauté des tons
et à la grâce de l'expression qui dominent dans
les tableaux de Hûbner. » Parmi ses tableaux
on cite: Booz et Ruth; — Roland délivrant
la princesse Isabelle de la caverne des bri-
gands ; — Le Départ de JVoémi (1833);— Sam-
son ébranlant les colonnes du Temple; —
Le Christ et les Évangélistes ( 1835) : tableau
d'autel à l'église de Meseritz; — Lès Deux
Amants du Cantique des Cantiques; — L'Âge
d y Or; Le Christ à la colonne; — Enfants
dormant dans la forêt sous la protection de
leur ange gardien; etc. On lui doit en outre
une suite de bons portraits. La Félicité et Le
Sommeil, d'après VOctavien de Tieck, est une
oeuvre de la plus grande délicatesse. La gravure
et la lithographie ont multiplié a l'infini sa figure
de L'Allemagne, qu'il avait dessinée pour l'album
du roi Louis de Bavière. A l'exposition univer-
selle de 1855, à Paris, on voyait de lui : Charles-
Quint lisant son bréviaire au couvent de
Saint-Just, et des cartons de vitraux pour l'é-
glise des Dominicains à Cracovie et pour la cha-
pelle de la Vigne du feu roi de Saxe Frédéric-
Auguste. L. L— t.
Conversations- Lexikon.
* hûbner (Joseph-Alexandre de), diplo-
mate autrichien, né à Vienne , le 26 novembre
1811. Entré dans la chancellerie impériale d'É-
tat en 1833, il fut successivement chargé, en 1835
et en 1837, de deux missions à la cour du roi
des Français Louis-Philippe. A la fin de 1838 il
se trouvait à Milan, où il décrivit par ordre les
cérémonies du couronnement del'empereur d'Au-
triche. Attaché comme secrétaire à la légation
de Lisbonne en 1841, il devint en 1844 consul
général d'Autriche à Leipzig et chargé d'affaires
auprès de diverses petites puissances allemandes.
Les incidents diplomatiques soulevés par l'insur-
rection de Cracovie et la prise de possession de
cette ville libre par l'Autriche l'appelèrent un
moment à Paris en 1846; mais il retourna peu
de temps après à son poste. H se trouvait à Mi-
lan, retenu par des affaires privées, lorsque éclata
la révolution de Février. Chargé d'une nouvelle
mission à Paris en 1849, il y fut élevé, vers la
fin de la même année, au poste de chargé d'af-
Xaires. Le U janvier 1853 il fut nommé con-
seiller privé et accrédité par le gouvernement
autrichien comme ministre plénipotentiaire- au-
près de l'empereur des Français. Il figura en cette
qualité dans ie congrès qui signa, en mars 1856,
le traité de Paris, lequel mit fin a la guerre d'O-
rient. Au mois de mai suivant il fut élevé an
rang d'ambassadeur. Quelque temps après U fit
un voyage à Naples, dans le but supposé d'in-
viter le roi des Deux-SicUes à faire des conces-
sions à l'Angleterre et à la France, qui avaient
rompu leurs relations diplomatiques avec cette
puissance. 11 revint ensuite à Paris, où il a repris
ses fonctions. . J. V.
Courte BioçrapHe, pur Ordre alphabétise, detovs les
Généraux, Ministres, Ambassadeurs, etc., quiamtMuré
dans les affaires d'Orient, dans YlUustratien n* en.
I fltJBSCH (Henri), architecte allemand, né
à Weinheim (grand-duché de Bade), en 1795.
U fit ses études à Heidelberg, sons la direction de
Wembrenner. Fatigué, comme beaucoup de ses
contemporains, du vieux style académique, et
pensant que les formes architectoniques de la
Grèce et de Rome étaient insuffisantes à .satis-
faire aux exigences de rarchitecture des temps
modernes, il se voua avec zèle à l'étude de rar-
chitecture du moyen âge, glorifiée à cette époque
par le plus grand nombre des poètes et des ar-
chéologues. De Tannée 1817e 1819 il entreprit un
voyage en Italie et en Grèce ; et à la vue des mono-
mente qu'il visita, il modifia et mûrit ses idées. H ac-
quit la conviction qu'il y avait à créer une nouvelle
architecture monumentale,inspiréerdu styleàplein
cintre pratiqué an douzième siècle en Europe, et
dont le but et la construction devaient se lier avec
clarté dans la forme et l'ornementation. Après
s'être appliqué à l'étude des monuments romans
des bords du Rhin, à la suite d'un second voyage
d'Italie en 1822, il fut nommé en 1824 profes-
seur d'architecture à l'Institut de Stadel, fondé à
Francfort-sur-le-Mein,et destinée former des artis-
tes et des constructeurs. Ce fut là qu'il étudia son
Projet d'un Théâtre avec Charpente en Fer;
Heidelberg, 1825, in-folio, avec six planches ; —
&& Plans pour F Église de Barmen (1825-1829);
— la Maison.des Orphelins de Francfort- sur-
le-Mein (4826-1829). En 1827 il fut nommé ar-
chitecte et inspecteur des travaux de construction
à Carlsruhe. C'est dans son ouvrage intitulé: Dans
quel Style devons-nous bâtir? qu'il exposa ses
principes sur l'architecture. Selon sa théorie, le
style roman ne doit pas offrir un type absolu
pour, les temps modernes; il ne doit être que le
vêtement dans lequel se produisent les exi-
gences architectoniques de l'époque actuelle. Il
critique et voue au ridicule les pastiches du style
ogival comme des œuvres hors de saison, nul-
lement en rapport avec nos idées et nos mœurs.
Hûbsch, depuis son séjour à Carlsruhe, éleva
dans cette ville, dans le duché de Bade et aux
alentours, une suite de monuments dans le style
roman, qui, par ses soins et ceux de ses confrères
Lanaur» et Gartner, s'étendit très an loin. Parmi
ses œuvres les plus considérables nous citerons le
Palais de la Chancellerie des Finances et VÊ-
cote des Filles à Carlsruhe (de 1828-1830);
361
HUBSCH - HUC
362
dans la niême ville, Y École Polytechnique, com-
mencée en 1832 et achevée en 1836; les Églises
de Zaisenhausen d'Epfenbach, de Stagen,
de Mulhausen, près Pforzheira. V église de
Bulach, près Carlsruhe, commencée en 1837,
est une de ses œuvres capitales ; elle est du style
roman. Il a encore bâti les églises de Rottweil, de
Bauschlott, de Waitzen, de Dûrrheim; enfin
le grand et beau Musée de Carlsruhe, commencé
en 1837 et achevé quelques années plus tard.
Ses ouvrages sur son art ont pour titre : Ve-
ber griechische Architectur (De l'Architecture) ;
Heidelberg, 1822, in-4°; — Entwurfzu einem
T/îea^erlProjetd'unThé&^^eidelberg 1825,
in-folio; — In welchem Stile sollen wir bauen
(Dans quel Style devons-nous bâtir) ? Carlsruhe,
1828 ; —Bauwerke (Monuments d'Architecture)
Carlsruhe et Bade, 1838 ;—Die Architectur und
ihr Verhxltniss, zur heutigen Malerei und
Sculptur (L'Architecture et ses Rapports avec la
Peinture et la Sculpture du jour); Stuttgard et
Tnbiogue, 1847.
D. Ramée et R. L.
C<mvtrsat.-Lex' — Fûnli, Zurich und die wicktigs-
ten Stâdte am Rhein ; Leipzig, 1846.
hitby (Le P. Vincent) , théologien français,
né à Hennebon (Bretagne) le 15 mai 1608,
mort le 24 mars 1693. II entra en 1643 dans
l'Ordre des Jésuites, où il prononça ses vœux, et
professa la théologie à Orléans, puis à Vannes.
Son zèle religieux le fit nommer directeur
des retraites, dont il avait été l'un des fonda-
teurs. Il s'attachait à inventer ou à propager
tous les moyens qui lui semblaient propres à
exciter la dévotion. Émule de Marie Alacoque,
il créait ou répandait l'adoration du Sacré-Coeur
de Jésus, l'adoration perpétuelle du Saint-Sacre-
ment; il multipliait les congrégations en l'hon-
neur de la Vierge, dont les adeptes portaient une
croix blanche sur la manche ; il distribuait des
médailles, des chapelets bénits, de petits livres,
des images qui se colportaient de toutes parts.
Il exaltait tellement la foi des fidèles, qu'on loi
attribua môme quelques miracles. Il a écrit : une
Retraite Spirituelle;— LesMotifs d'aimer Dieu
pour chaque jour au mois;— La Pratique de
V Amour divin, et d'autres œuvres ascétiques
qui ont été recueillies, revues et corrigées par
l'abbé Lenoir-Duparc , et publiées sous le titre
d' Œuvres spirituelles du P. Vincent Huby;
Paris, 1753, 1761, 1769; Lyon et Paris, 1827,
in-12. L'abbé Baudrand en a donné une édition
avec changements; Paris, 1767, in-12. On a publié
aussi, en 1824, des Conversations propres à
faire naître et à entretenir V Amour divin
dans nos cœurs, extraites des œuvres du
i>. Jïttty;in-24. G. de F.
D. Lobineau, Histoire des Saints de Bretagne, — Pierre
Pbonamic (Champion), rie des saints Fondateurs des
Retraites.
J huc (E.)> missionnaire français , de la con-
grégation de Saint-Lazare, né à Toulouse, le
1 er août 1813. H partit en 1839 pour la Chine,
en qualité de missionnaire apostolique. Dans Tau
tomne de 1844 il se mit en route avec M. Gabet ,
pour explorer les déserts de la Tartarie et se
rendre delà au TKibet, où, suivant les instruc-
tions qui leur avaient été données par le vicaire
apostolique de Mongolie, ils devaient chercher à
propager le christianisme et entreprendre des
conversions. Accompagnés d'un jeune lama et
revêtu» du costume sacré de ces prêtres, ils sur-
montent tous les périls du désert, et ce n'est que
par hasard qu'ifs reçoivent l'hospitalité généreuse
de Tatares nomades. Arrivés àKounboun, célèbre
couvent lamaîqne, ils y étudient la langue thibé-
taine. .Vers la fin de septembre de l'année 1845
ils se mirent à la suite de la caravane thibétaine
qui Tenait de porter le tribut à l'empereur de
la Chine, pour se rendre à Lhassa, capitale du
Thibet. Ils y arrivèrent vers la fin de décembre, et
s'y établirent dans une modeste demeure. Bientôt
ils furent soumis à plusieurs interrogatoires par
les autorités locales. Sur leur déclaration qu'ils
venaient seulement prêcher la religion de Jésus-
Christ, ils furent traités avec égards et logés aux
frais du régent. Malgré tes bonnes intentions
du régent, l'ambassadeur chinois leur intima
l'ordre de quitter le thibet; et bien qu'Us mani-
festassent alors le désir de se rendre de ce pays
à Calcutta, ils furent contraints de reprendre
la longue route de la Tartarie et de la Chine. Au
mois d'octobre 1846 Us étaient de retour à Ma-
cao. L'abbé Huc a consigné les diverses circons-
tances de son voyage dans un livre intitulé : Sou-
venirs d'un Voyage dans la Tartarie, le Thibet
et la Chine, pendant les années 1844, 1845
et 1846; Paris, 1.850, 2 vol. in-8°, avec une carte.
Ce livre eut un grand succès : plusieurs éditions
et des traductions en diverses langues se succé-
dèrent rapidement. Ce succès est dû à la fois à la
description du pays, si peu connu jusqu'alors, au
style aussi varié qu'élégant, et au grand nombre
d'épisodes curieux dont l'auteur a su habilement
parsemer son récit. La description des parties de
la Chine visitées par l'abbé Huc lui a suggéré la
rédaction d'un ouvrage qui fut publié par ordre
de l'empereur à l'Imprimerie impériale, sous le
titre de : V Empire Chinois, faisant suite à
V ouvrage intitulé : Souvenir d'un Voyage dans
la Tartarie et le Thibet; Paris , 1854, 2 voh
in- 8°. Il en existe plusieurs éditions et unç tra-
duction anglaise. Cette description a été cou-
ronnée par l'Académie Française. Enfin, à une
époque toute récente M. Huc a fait paraître un
ouvrage intitulé : Le Christianisme en Chine ,
en Tartarie et au Thibet; Paris, 1857, 3 vo-
lumes in-8°, avec carte. Cet écrit contient un
grand nombre de renseignements historiques ;
mais la question de la propagande catholique en
Chine en est le mobile et le but. M. Huc pense
que « l'Évangile remplacera bientôt en Asie lo
« philosophisme de Confucius, les traditions boud-
« dhiques et les interminables légendes des Védas ;
« enfin que Brahms , Bouddha et Mahomet dis-
«63 HUC — HUCBALD
« trontpour faire place au vrai Dieu, etc. (ï). »
Le troisième volume du Christianisme en
Chine, le dernier publié, s'arrête en 1722, à la
mort de l'empereur Khang-hi. J. K.
Documents particuliers. - Souvenirs d* vn Voyage en
Tartarié,de Pabbé Hue. - L'Empire Chinois, do même
auteur.
364
hvcbald on HtfeBÀLI» (S), moine de Baint-
Amand, au diocèse de Tôuriiay. Le» biographes
ne s'accordent point sur te lieti de' Isa naissance;
les uns en font un Français, les autres un Belge.
Selon l'opinion la plus généralement admise, il
serait né en 840, et serait' mort le 20 juin93o, à
Tâge de quatre-vmgt*dix ans. ïfeveo du célèbre
Mflon, directeur de l'école de l'abbaye de Sâlht-
Amand, ce rat à ce monastère et sous la protection
de son onde que Huebald fit set premières étu-
des. Les progrès du jeune ho vite dams les lettres,
'dans les sciences et surtout dans la tnusique fu-
renttellemént rapides qu'ils excitèrent bientôt la
jalousie de son propre maître. Huebald avâft
composé et noté le étant d'un office pour ta Wte de
Saint-André; cet outrage lui ayant attiré des
ifloges justement mérité*, Milott éfcfat si irrite
qu'il défendît l'entrée 1 de l èon éc^e h son nevea,
en lui reprochant de vtttttafr Briller àsësdépens.
Huebald avaftafors vtn$;ans * cliâssé dé son mo-
nastère, il se retira à Nevert , où il ouvrit eue école
dans laquelle il enseigna !à musique; ce fut là
6^1'il composa des chants : en l'honneur de sainte
Cilinlé, dont il a éçrît'ausst la vie. Mais le dé-
sir d'augmenter ses connafssances le décida peu
de temps après à se rendre à Sàfat-Genriain
d'Àuxerre pour y' suivre les leçons de Héric,
un des hommes les plus savants qu'il y eût alors.
■Ce faisons la direction de ce moine, qui comp-
tait fteroi an nombre de.ses disciples, que Huc-
îtold compléta ses études littéraires et musi-
cale?. Il ne tarda pas cependant à se reconcifîér
avec son oncfe,et revint àSaint-Amand, rappor-
tant avec lui les reliques de saint Cyr et de
sainte Julitte; et à la mort de Milon, en 872, il
lui succéda dans la direction de son école. Quel-
ques années plus tard il lui vint à l'idée d'é-
crire un poème à la louange des chauves, qu'il
dédia au roi Charles le Chauve. Ce singulier
poème, composé de cent trente-six vers latins
dont tous les mots commencent pafnn C, a été
imprimé plusieurs fois air* seizième et dix-sep-
tième siècles. En voici le premier vers :
Carmina clarisonœ calvis cantate Camœnse.
En 883, Huebald ayant été invité par Ro-
dulfe, abbé de Saint-Bertin, à venir diriger l'é-
cole de ce monastère, il se rendit à son désir. Ro-
dulfe fut tellement satisfait de ses services qu'il
(l) Tome 111, à la fin de la préface.
(î) L'orthographe de ce nom varie dans les auteurs la-
tins du moyen âge : le» ans écrivent Vbaldus, Hubal-
dus ou Hubolduf ; les autres Hucbaldus, ffugbaldus ou
Hucboldus. Nous avons adopté, avec M. de Coussema-
ker, Torthographe Êncbald ou Hugbald , qui semble la
plus conforme à l'origine tcutonique de ce nom, qui se
compose de fine ou ffuç , intelligent, et de bald, hardi. i
lui fit présent, *«a, témoignage de sa reconnais-
sance, déterres considérables situées dans le
yermandpjsjinajs Huebald, entièrement livré à
l'étude et aux exercices de piété, attachait peu
de prix aux rieuses; aussi ne les accepta-t-il
aju'à )f) condition d'en faire don aux moines de
J.abbaye de Saint-^ertin- Le bruit de sa renom-
mée parvint Jusqu'à Foulques, archevêque de
P.Çimsj ce prélat, ayan{; résolu 4e rétablir les
deux ecqjes existant anciennement dans son
église, appela, auprfà.de Juj, m 893, Hue-
bald et Beny 4'Auxerrle, auxquels il confia la
(hrection de ces (Mes, qui, J)ientot florisianlês ,
produisirent une foule de savants formés par les
.soins des deux cèdres maîtres, HucbalcJ n'était
pas seulement connu dans lœ inonastèijes ; son
savoir et son caractère 4ui avaient attiré l'essaie
de la cour; j| parait même qu'il y jouissait d'im
certain crédit et que ce /ut à sa prière que Foul-
ques pjtfint de Charles Je Simple, en 899, le
tjtre de chancelier <}u sàyauws, car on fttles
mots suivants à la fin d'un diplôme quj confère
ce titre h l'archevêque de Reims : Impetratum
Mt .mediante fiucbaldv mcmacà(K Aprfcs la
mort de Foulques, au mois de juin de l'année
«tfante, Huebald retourna à Saint-Àmand, où
il passa paisiblement tetoste de ses jours -dans
te silence du clottre et au milieu de ses travaux
littéraires. On pense que ce fut à cette époque
<prtl rédigea ses. principaux traités de musique.
11 était âgé dequatre-Tingt-dix ans, comme nous
l'avons dit phis haut, lorsqu'il cessa de vivre;
son <sorp S fut déposé <fanB le tombeau érigé à la
mémoire de son oncle Milori, dans l'église Saint-
Pierre, à Saint- Amand.
Au milieu de la barbarie des neuvième et
dixième isieclés, HucbaM fut dn nombre de ces
hommes laborieux dont les efforts et les lu-
mières sauvèrent d'un complet anéantissement
les lettres, les sciences et les arts, réftigiés au
lotïd des monastères. Il était lié avec la plupart
des» «avants de son époque, qui tous lui accor-
dent lesplus grands éloges pour ses connaissances
dans les lettres et dans la musique. Frodoard,
Sigebert de Oemblours, qui ont Vécu peu de
temps après lui, Trithème, Moianus et d'autres
historiens en parlent dams les mêmes tennes.
Huebald a écrit en ltttinla Vie de plusieurs saints
personnages : celle de saint Lebuin ou Le bwin 9
patron de Devénter, recueillie par Martène ; ceiles
de sainte Rictrude, de sainte Aldegonde , de
sainte Malabérte;—Xkm Histoire desàinleCï-
linie, mère de saint Rémi'; ~ les Actes de
saint Cyr et de sainïe Julitte, sa mère: ces
actes ont été recueillis par les Bollandtstes; —
une Vie de saint Pierre, laissée imparfaite; —
un Commentaire latin sur la règle de Saint-Be-
noit; — un petit poèirie latin , De Laude Calvo-
rum, dédié à Charlet le Chauve, publié à Bade
en 1516 et en 1519,in-4°, et en 1547, in-3°; ce
poëme a été inséré par Dornan dans son Am-
phitheatrumSapïentiœ Soçraftcxf et par Gas-
865
HUCB4JLP
pard Barthius dans ses Adversaria ; — une
épître en vers latins à Charles le Chauve; —
Trithème cite de lui des lettres écrites à divers
savants de son temps. Les traités de magi-
que de Hucbald , après être restés longtemps en
manuscrits, ont été publiés par Gerbert, ahbé
de Saint-Biaise, dans lé'premier volume de son Ba-
cueildes Écrivains ecclésiastiques. Le premier
de ces traités, qui semble appartenir à la jeu-
nesse de l'auteur, est intitulé Liber Ubaldi, pe-
ritissimi music\, de Barmonica Institutione.
Malgré son titre,' cet ouvrage, qui est basé sur
le système musical des Grecs, né traite nullement
de l'harmonie ; il n v y est question, au contraire,
que des sons, des intervalles, des consonnances,
des tétracordes et de la * notation ; c'est une
sorte de commentaire du Traité de Béginon de
Prum, écrit au neuvième siècle sous le même
titre, et qui a aussi pour objet les neumes ou
signés de notation des antiennes et des répons.
Quelques auteurs doutent au'il soit de Hucbald ;
Gerbèrt annonce qu'il l'a tiré d'un manuscrit de
la bibliothèque dé Strasbourg, conféré avec un
autre manuscrit provenant de la bibliothèque
Malatestina,de Césène. Vient après; sous le titre
de Alia Musicci, un traité ou fragment de traité
qui contient principalement une exposition des
huit tons du plain-chant ; on trouve à la suite
plusieurs extraits de musique qui ne se lient
point entre eux, et dans lesquels il est ques-
tion des dimensions des tuyaux d'orgue, du
poids des cymbales , des modes et des con-
sonnances. Ces divers fragments, tirés des
manuscrit* des bibliothèque? de Strasbourg et
de Saint-Émeran de Batisbonne, mut attribué»
à Hucbald par les mots explicii Musiça Uw-
baldi, qui se lisent à Ja fin. Mais l'ouvrage le pjn*
important (Je ce moine, et dont il est incontesta-
blement l'auteur, est celui qui a pour titre fluc-
baldi, monachi Elnonensis, Mu$icm BncWi-
dion ; il en existe des manuscrits en France, en
Italie et en Allemagne; tous «ont anonymes,
excepté deux : celui de la bibliothèque Maglia-
becctiiaiia, de Florence, en tête duquel on Ut En-
eàiridiou Uckaèalçli Francigenx t et celui de
la Bibliothèque impériale de Paris, »° 7202,
qui est intitulé EMkiridion Mu$icx, outhore
Uekabaldo , Francïgenx. C'est un traité de mu-
sique élémentaire suivant les principes des Grecs
exposés par Boèce, avec l'explication d'un sys-
tème <je notation particulière qui parait appar-
tenir à Hucbald. Au moyen de dix-huit carac-
tère» diversement tournés ou inclinés, la nota-
tion de Hucbald peut représenter les sons d'une
échelle composée de quatre tétracordes désignés
sons les dénominations de graves , finales, su-
periores, excellentes, et auxquels on a ajouté
deux sons plus aigus, ce qui fait en tout dix-
huit sons. Les caractères de cette notation ré-
pondent aux lettres suivantes et aux noms des
notes modernes, que nous avons placés au-des-
sous de ces lettres :
r ABC
toi, la, si, ut.
Graves.
DE F G
ri,md,fa,sol,
a b c d
ta, si, ut, ré,
Superiores.
e f g a
mi, fa, sol, la,
Excellentes.
366
bc.
bc.
A la suite des dix-neuf chapitres dont l'ou-
vrage se compose, Hucbald en a fait un ample
comnieptaire dialogué entre un élève et son
maître. Ce commentaire se divise en trois par*
ties; la seconde partie contient des détails qui
n'existent point dans le traité précédent, sur la
diaphonie ou harmonie ecclésiastique, dont
Isidore de Séville avait parlé près de deux siè-
cles auparavant; mais Hucbald entre dans beau-
coup plus de développements, et ses définirons,
remarquables par leur clarté pour le temps où
il vivait, sont appuyées de nombreux exemples
de cette harmonie barbare composée de suites de
quartes, de quintes et d'octaves, qui était alors
en usage. — Le dernier traité de Hucbald, pu-
blié par Gerbert, est intitulé : Oommemoratio
brevis de Tonis et Psalmis modutandis. Cet
ouvrage, quoique ne renfermant que les règles
relatives au chant ecclésiastique, offre un grand
intérêt pour l'histoire de la musique, en raison
des fragments de psaumes et d'antiennes qu'il
contient, et où se rencontrent des intonations
différentes de l'ancienne tradition des églises
ditalie. Dans son édition, Gerbert a placé à la
fin de c$ traité un tableau des huit tons du plain-
chant notés à la fois avec des nëûmes et avec les
caractères inventés par Hucbald. Ce tableau,
l'un des plus précieux monuments de l'époque;
en ce qu'if donne la clé d'une partie des neumes
en usage au neuvième siècle, a été reproduit
par Gerbert d'une manière inexacte j M. de Cous-
semaker, dans la traduction qu'il a donnée de ce
traité dans son Mémoire sur Hucbald, page 89,
a rectifié ce tableau d'après celui que contient
le manuscrit n° 7212 de la Bibliothèque impé-
riale de Paris.
Les traités de Hucbald, antérieurs de plus d'un
siècle à ceux de Gui d'Arezzo, prouvent que
<fest avec raison que l'on a contesté plusieurs
inventions attribuées à ce dernier. En effet,
ïîucbald se sert déjà dans ses exemples de la
lettre grecque appelée gamma, que ■ différents
auteurs ont dît avoir été ajoutée par Gui d'Arezzo
à l'ancienne formule grégorienne, A,B,C,D,E,F,
pour désigner la note la plus grave de l'échelle
musicale, et dont il aurait tiré le nom de
gamme. Hucbald dispose aussi les caractères de
sa notation entre des lignes qui ne forment pas,
11 est vrai, des portées distinctes, mais qui déter-
minent lé plus ou moins d'élévation des sons;
on employait également le bémol et le bécarre
avant Gui d'Arezzo, en sorte qu'il ne resterait
réellement de ce moine que l'application des
syllabes ut, ré, mi, fa, sol, la, pour désigner
les six premières notes de la gamme, et peut-
être aussi l'usage des clés de/a et dW, qui dé-
terminent la portée des voix dans l'étendue de
l'échelle générale.
S67 HUCBÀLD
Hucbald ne fut pas seulement célèbre par ses
ouvrages sur la théorie musicale ; les anciens
auteurs lui accordent encore les plus grands
éloges pour les chants pleins d'une mélodie douce
et régulière qu'il composa, disent-ils, en l'hon-
neur de plusieurs saints. Manillon cite un office
de nuit destiné à être chanté à la solennité de
la fête de saint Thierri ; la musique de ces
hymnes, notée suivant la manière de Hucbald ,
parait être perdue. Dieudonné Demie-Baron.
Histoire Littéraire de la France, par les Bénédictins,
t. VI. — Mabillon, Acta Sanetorum. — Gerbert, Scrip-
tores Bcclosiastici, de Musioa Sacra. — FéUs, Biogra-
phie universelle des Musiciens. - De Coussemaker,
Mémoire sur Hucbald et sur ses Traites de Musique;
Paris, 18*1, io-4*. - Le même, Histoire de l'Harmonie
au moyen âge; Paris, 18*2, ln-4*.
Huçéuf. Voy. HosséiNET Hussein.
HUCHTBNBURG OU HUGTEHBUBCH ( JaC-
gués van), peintre hollandais, né à Harlem en
1639, mort à Rome en 1669. Élève de Nicolas
Berghem, il partit tout jeune pour Rome, où il
travailla avec un grand succès. L. L— t.
Descamps, La Fie des Peintres flamands et hollandais.
— Pinkerton, Diet. of Pointers.
HUCHTENBURGH OUHUGTBNBU&CH (Jean
van)» peintre et graveur hollandais, né à Harlem
en 1646, mort à Amsterdam, en 1733. Plusieurs au-
teurs affirment qu'il apprit les premiers éléments
de son art,sous la direction de son père,qui était un
artiste distingué ; d'autres pensent qu'il reçut
des leçons de Jean Wyck. Son frère Jacques, qui
vivait à Rome, l'appela près de lui vers 1665 et
lui donna des conseils. Jacques van Huchten-
burgh étant mort prématurément, Jean se décida
à venir à Paris, où il entra chez van der Meu-
len; mais il étudia surtout les ouvrages de
Wouwermans, qu'il prit pour modèle. En 1670
Huchtenburgh retourna en Hollande, et devint le
peintre du prince Eugène de Savoie, qui estimait
beaucoup son talent et lui envoyait les plans
exacts de ses sièges et de ses batailles pour
qu'il pût les représenter avec fidélité. Huchten-
burgh peignit ainsi les batailles que le prince Eu-
gène livra en 1708 et 1709; elles ont été gravées
en un vol. in- fol., à La Haye, en 1725. En 1711
Huchtenburgh se rendit à la cour de l'électeur pa-
latin, où , reçu avec honneur, il fit plusieurs ta-
bleaux. Il passa presque toute sa vieillesse à La
Haye. Huchtenburgh surpassait van der Meulenet
approchait de Wouwermans pour la délicatesse
de la touche, pour l'expression et même pour la
perspective aérienne. Son habileté à caractéri-
ser les diverses passions, les individus et les peu-
ples excitait À bon droit l'admiration de ses con-
temporains. Ses eaux-fortes et ses gravures en
taille-douce ont aussi beaucoup de mérite. lie
musée du Louvre possède de Jean Huchten-
burgh : Choc de Cavalerie ;— Vue d'une Ville
de Guerre avec les Apprêts d'un Siège.
L. L-t.
Descamps, La Fie des Peintres flamands, allemands et
hollandais. — Pinkerton, DUt. of Pointers: — Fréd.
Villot, Notice des Tableaux exposés dans les galeries du
- HUDDE 36*
Musée imp. du Louvre; !• partie t écoles aUemaade, fla-
mande et hollandaise. — Convers^-Lexilen.
huddart ( Joseph ), géographe anglais , né à
Allenby (duché de Gumberland), en 1741, mort
en 181 6 . Son père était cordonnier, et l'élevapour
l'état ecclésiastique; mais le voisinage du golfe
de Fprth l'entraîna vers la carrière maritime. 11
se fit d'abord pécheur, puis sur ses propres éco-
nomies il se fit construire un brik sur lequel il
exécuta des explorations géographiques dans le
canal Saint-Georges, dont il dressa une carte
restée estimée. Durant ce temps (de 1768 à
1773) il étudia l'astronomie, apprit le dessin, et
devint bon géographe. En 1774, il partit pour les
Indes, et releva toute la cote occidentale de Su-
matra. 11 s'engagea au service de la Compagnie
des Indes, comnte capitaine, fit quatre voyages
d'Europe en Asie, et dressa les cartes entières de
la péninsule gangénique, depuis Bombay jusqu'à
Coringo. En 1788 il devint l'un -des directeurs
de la Compagnie, retourna en Europe, et, en-
traîné par l'amour de la science qu'il possédait
si bien, il dressa la carte des Iles occidentales
de l'Ecosse. Il s'appliqua aussi à la fabrication
de câbles et de cordages mieux confectionnés
que ceux jusque alors en usage dans la marine. Il
éleva une corderie à Mary-Port, et vit ses mo-
dèles acceptés par l'Amirauté. Outre un grand
nombre de cartes, il a laissé une esquisse du dé-
troit de Gaspar, passage entre les lies de Banca
de Billiton et de nombreux mémoires dans les
Philosophical Transactions. A. de L.
jinnual Begistér.
hudbb ( Jean ), seigneur de Waweren, ma-
thématicien hollandais, né à Amsterdam en 1633,
mort dans la même ville, le 16 avril 1704. Il
étudia le droit et surtout les mathématiques dans
sa patrie; il visita ensuite la France, et s'arrêta
à Saumur ( 1 3 janvier 1 659 ) pour s'y perfectionner
dans la jurisprudence. De retour à Amsterdam,
il occupa successivement les charges d'échevin,
de trésorier et de bourgmestre, de 1668 à 1693.
Il était fort lié avec Descartes et Schooten.
De très-bonne heure il s'occupa de mathéma-
tiques et de mécanique; plusieurs inventions
faites par lui dans sa jeunesse se trouvent
rapportées dans Ylntroductio in Geometriam
Cartesii de Fr. Schooten. En 1672 il dirigea les
travaux entrepris pour inonder la Hollande,
à l'effet d'empêcher l'armée française de s'a-
vancer. En 1689 il inventa une machine propre
à purifier l'eau des canaux d'Amsterdam. Dans
son Commercium Epistolicum, Leibnitz, qui
était lié avec Hudde, nous apprend que celui-ci
avait le premier résolu la quadrature de l'hy-
perbole ainsi que le problème de déterminer
l'équation d'une courbe qu'où ferait passer par
autant de points qu'on voudrait, et qu'il avait
aussi écrit des traités remarquables sur les
rentes viagères et les probabilités de la vie hu-
maine. Hudde avait entrepris un grand ouvrage
intitulé : De Natura, Reductione 9 Détermina-
369
HUDDE — HUDSON
370
tione,Resolutione atque Tnventione Mquatio-
num; il ne le publia pas, et en légua le manuscrit
à un de ses neveux. Des fragments en furent
mis au jour à la suite de Ylntroductio de Schoo-
ten (Amsterdam, 1659, in-4°, t. I, 402-507),
sous le titre de : Huddenii de Deductione
Equationum (juillet 1657 et avril 1658) et De
Ma&tmis et Minimis Epistolae II; il y sim-
plifiait beaucoup la méthode des tangentes de
Descartes. Cet ouvrage a été traduit en fran-
çais : Méthode des Tangentes ;dans le Journal
Littéraire, n oa de juillet et d'août 1713. On doit
aussi à Hudde une règle pour déterminer si une
équation a des racines égales et pour trouver
ces racines, laquelle a conservé son nom. Dans
son Traité tf Architecture Navale, Nicwitsen
a communiqué des calculs de Hudde sur le jau-
geage des vaisseaux. L— z— s et E. G.
Moréri, Le Grand Diet. Historique. — Paquot, Mém.
pour servir à VHist. des Pats-Bas, t VII, p. 814-S17. —
Acta Eruditorum; 1704, p. 186. - MontQcla, Histoire
des Mathématiques, t. II, p. 149 et 1U.
bitdson (Henri), navigateur anglais 1 , né
vers le milieu du seizième siècle, mort en 1611,
doit sa célébrité aux divers voyages qu'il a faits
pour trouver un passage qui abrégeât la route
d'Europe aux Indes orientales par le nord, le
nord-est, ouïe nord-ouest. Les tentatives isolées
entreprises dans ce but jusqu'en 1607 ayant été
infructueuses , des négociants anglais s'associè-
rent alors pour faire les frais d'une nouvelle ex-
péditioD, dont ils confièrent le commandement à
Hudson , marin expérimenté et homme résolu.
Parti de Gravesend le l* r mai 1607, il reconnut
le 13 juin, par 73°, une terre faisant vraisem-
blablement partie de la côte orientale du Groen-
land. Parvenu, le 14 juillet, sur la côte du Spitz-
berg, par 80° 23', il y trouva des traces de bes-
tiaux, des animaux aquatiques et deux ruisseaux
d'eau douce et chaude. Poursuivant sa route le
long de la côte orientale du Groenland , il attei-
gnit , a-ton dit, le 82° de latitude , mais plus
vraisemblablement le 81° seulement on les extré-
mités les plus reculées du Spitzberg. Arrêté par
des murailles de glace, il continua de pousser
au nord-ouest, avec l'intention de revenir par le
détroit de Davis; mais les glaces lui fermèrent
de nouveau le passage , et il dut alors revenir en
Angleterre, où il arriva le 15 septembre. Reparti
le M avril de Tannée suivante, il essaya de
passer entre le Spitzberg et la Nouvelle-Zemble,
dont il avait reconnu les côtes l'année précé-
dente. Encore empêché par les glaces de trouver
un autre passage que celui connu sous le nom
de détroit de Waigatz, il se dirigea vers le nord-
ouest, du côté du golfe de Lomley; mais, recon-
naissant bientôt que la saison était trop avancée,
il revint encore sur ses pas, et rentra le 26 août
dans le port de Gravesend. L'insuecès de ees
deux tentatives découragea la compagnie anglaise,
qui renonça à courir les chances d'une troi-
sième, n n'en fut pas de même de Hudson. Sti-
mulé par l'espoir d'être plus heureux, il ac-
cepta ou provoqua les offres d'une compagnie
de négociants hollandais , qui lui fournirent, en
1609, un navire bien approvisionné, et le char-
gèrent de chercher un passage par le nord-est
ou le nord-ouest Ayant appareillé du Texel le
6 avril , il doubla le cap Nord le 5 mai , prolon-
gea les côtes septentrionales de la Nouvelle-
Zemble, et rencontra encore des bancs de glaee
qui lai firent perdre tout espoir d'arriver, par
cette mer, au passage qu'il cherchait. Son équi-
page, composé d'Anglais et de Hollandais, vi-
vant fort mal ensemble, habitués d'ailleurs, pour
la plupart, à la seule navigation des mers orien-
tales, déclara ne pouvoir supporter la rigueur
du froid. Hudson lui proposa alors d'aller à la
recherche du passage , soit vers le détroit de
Davis, soit vers la côte de Virginie, où il devait
en exister un, par les 40° environ , suivant des
cartes et mémoires qu'il avait reçus du capi-
taine Smith, de cette colonie. La première de ces
propositions ayant été acceptée, le capitaine an-
glais s'avança jusqu'aux l)es /de Feroë, et por-
tant ensuite le cap au sud, il relâcha, le 18 juil-
let, à la côte d'Amérique, afin de s'y procurer
un mât de misaine. Il s'y occupait d'échanges
quand ses matelots, redoutant l'animositédes na-
turels, qu'ils s'étaient aliénés, le contraignirent à
remettre à la voile, le 26 du même mois. Parvenu,
le 3 août, à 37° 45' de latitude, il y prit terre,
puis, rangeant la côte jusqu'à 40° 30', il découvrit
entre deux lies une grande baie, qu'il nomma
Baie tf Hudson, et qu'il remonta en canot sur
une étendue d'environ 50 lieues. Les vivres'me-
naçant de lui manquer, il tint conseil avec son
équipage sur la route à suivre. Le contre-maître
du navire, qui était Hollandais, voulait qu'on hi-
vernât à Terre-Neuve, d'où l'on se serait ensuite
remis à la recherche du passage parle nord-ouest.
Hudson , que son équipage avait déjà menacé,
craignait qu'il ne se mutinât de nouveau et que
la difficulté de se procurer des vivres ne le mit
hors d'état de reprendre sa navigation. Il proposa
donc d'aller passer l'hiver en Islande. Tout son
monde avait semblé y consentir ; mais les Anglais
ayant changé d'opinion à mesure qu'ils se rap-
prochaient de leur pays, il se décida à rentrer,
le 7 novembre, dans le port de Darmouth. Le
seul fruit que Hudson recueillit de cette expé-
dition, ce fut la cession de son droit de décou-
verte aux Hollandais, qui fondèrent, sous le nom
de Nouvelle- Belgique , l'établissement colonial
dont Robert Carre s'empara en 1664 , et qui,
depuis cette époque, a pris le nom de Nouvelle-
York. Dégagé de ses obligations envers la com-
pagnie hollandaise par le refus des conditions
qu'il mettait à un troisième voyage, il renoua tf vec
l'ancienne compagnie anglaise. Celle-ci, malheu-
reusement , exigea qu'il fût assisté d'un marin
expérimenté, nommé Colebrune, qu'elle jugeait
propre à le guider, mais dont l'adjonction exerça
une fâcheuse influence sur les actes de Hudson
et sur fe conduite ultérieure de son équipage.
*71
HUDSON
372
Parti de Blackwal le 17 avril H\Q 9 il n'était
pas encore sorti de la Tamise, que, saisissant
un prétexte pour se délivrer de Colebrune, il le
renvoya à Londres avec une lettre dans laquelle
il s'efforçait de justifier cet étrange procédé.
Arrivé, vers la fin du mois de mai suivant/ à
un port de la côte ouest d'Islande, il eut a. y
déjouer un complot <)e son équipage, complot
motivé sur le renvoi de Colebrune. Ayant remisa
la voile le l* r juin» il reconnut, le 1§, la terre que
Davis avait nominée la pésolation , entra le 24
dans le détroit etlegolfequj, depuis, ont pris son
nom, visita la côte ouest du golfe ainsi que
d.f*utres parties de ce golfe, pénétra dans une baie
au sud-ouest, qu'il appela Sptwf-#icàeJ,parcequ'il
l'avait (Jjécouverfe le 29 septembre, et se trouva
bientôt arrêté par les glaces. . Les, vjyres embar-
qués a Londres étaient consommés, et la stérilité
du pays n'offrait aucune 'perspective de pouvoir
les renouveler. Les ojs.eaux que l'on tua préser-
vèrent bien, il est yraf, l'équipage des derniers
excès de la fajin; mais cette ressource manqua
au printemps, et Hudsou, après huit jours passés
inutilement à chercher des. vivres , regagna son
vaisseau, alors dégagé des glaces. Résolu à re-
tourner en Angleterre, il semblait néanmoins
avoir Je pressentiment qu'il n'y aborderait pas.
Préoccupé de cette triste pensée, il distribua à
l'équipage le peu de biscuit qui restait , régla la
solde ,de chacun, et accompagna chaque dé-
compte d'un certificat de services. Ces témoi-
gnages de sollicitude qu'il donnait en pleurant à
ses matelots ne firent aucune impression sur
eux. Déjà ils lui en voulaient d'avqir privé de
son emploi son contre-maître Yyett, coupable de
les avoir excités à la révolte. Au moment du
départ (21 juin 1611), les complices de ce contre-
maître exécutèrent leur projet. A leur tête se
trouvait un nommé Henri Green, à qui Hudson
avait sauvé la vie à Londres, en lui donnant asile
d'abord dans sa maison, puis sur son navire, où
il l'avait recueilli àl'insu des armateurs. Tous se
saisirent de Hudson, de son fils, encore enfant,
de James Woodhouse, mathématicien, embarqué
comme volontaire , du charpentier et de cinq
autres matelots. Les jetant sans provisions, sans
armes , dans la chaloupe du vaisseau, ils les
abandonnèrent à leur triste sort. On a toujours
ignoré ce que devinrent ces infortunés, qui, vrai-
semblablement , moururent de faim ou furent
massacrés par les sauvages, pet acte de cruauté
ne resta pas complètement impuni. Green et
deux de ses complices périrent dans une ren-
contre qu'ils firent des sauvages , et le principal
auteur de la rébellion, Yvett, qui avait déjà fait
plusieurs voyages avec Hudson, mourut miséra-
blement à bord. Quand les débris de l'équipage,
maltraité par la faim et les maladies , arrivèrent
en Angleterre au mois de septembre, Habacuc
Pricket , écrivain du vaisseau , donna tous les
détails de la rébellion. On conjectura bien qu'il
y avait participé; mais il écarta toute poursuite
par j'adresse qu'il eut de se rendre nécessaire
en donnant des renseignements desquels il ré-
sultait qu'il y avait un passage au nord-ouest
vers le 60°. La compagnie arma alors les navires
La Résolution et La Découverte t ^onte\\e confia
le commandement aux capitaines Button et In-
gram, avec mission d'aller s'assurer de l'existence
du passage indigné par Pripket, qui s'embarqua
avec eux, efde recueillir, s'il en était temps en-
core, ^ud&on et ses malheureux compagnons.
La nouvelle expédition n'eut aucun résultat; on
ne trouva ni le passage signalé par Pricket ni
les victimes de la révolte. Comme Hudson n'a-
vait pas fait acte de prise fie possession de sa
découverte, a. u nom de l'Angleterre, un Canadien
français, nommé £our4pn, fint envoyé en 1656
pour l'assurer à la France. Cette prise de pos-
session fut renouvelé^ ensuite plusieurs fois,
notamment en 16? J, par le P. Albanel , jésuite,
qui, accompagné de Denis de Saint-Simon , pé-
nétra dans la baie 4'ffu(Json par une route qui
n'avait pas encore été suivie. Mais ces divers
a«t«s isolés, non sanctionnés par l'intervention
du gouvernement français, restèrent sans effet
par suite de la création de (a célèbre Compa-
gnie de fa baie d'Hudson, que Charles II autorisa,
en 1672, à s'établir au suit de cette baie, où le
commerce des fourrures |ui $ procuré de grandes
richesses. P. Lnvor.
Recueil 4e Porpbap, \. IV. — Petits Powge* de De-
bry, t X et XI. — pescriptio açDel^neqUo Geoçraphica
Detectionis Freti, sive transita* ad occasum, skpra ter-
ras americanas in Chinam atque Japoniam ducturi,
recens investigati, « M. Henrica Hudsono, Jngto. etc.;
Amsterdam, 16 1 3, in-4». — Histoire générale des Papaçes,
par l'abbé Prévost, t. XIV et XV. - ro'yage de ta Baie
d'Hudton, etc., traduit d'EHls, 1 vol. in-lt. - John
Christ. Adelung, GescMctOe der Scktffatrte* ; Halle.
1768, p. 286.
BCDSpN (Jean), philologue anglais, né à
Widehope ( Cumberland ), en Jft52, mort à Ox-
ford, le 27 novembre 1719. Après avoir fiait ses
premières études sous Jérôme fiecbstetter, il
entra en 167(3 au collège de Ja Jlejne à Oxford ,
comme éjève servjtenr. Il prit le grade de ba-
cjielier es arts le 4 juif Jet i$81, celui de' maître
le. 12 février 1 684, et se Ht ensuite recevoir doc-
teur en théologie. Au mois de mars 1686 il fut
élu membre du collège de l'Université. En 1701
i) succéda au docteur Thomas Hyde dans la
charge de bibliothécaire de la bibliothèque Bod-
lynne à Qxford, place qull remplit jusqu'à sa
mort, et en 1 7 1 2 U fut nommé principal de Sainte-
Affarie-Hall. Des* études trop assidues et <Jes hahi-
tudes trop sédentaires abrégèrent sa vie.. On a
de Hudson : Jntrodifctio ad Çhronographiam ,
sive ars chronologica in epitomen redacta ;
Oxford, 1691, in-8°; — une édition de Velleius
Paterculus; Oxford, 1693, in-S° préimprimée
en 1711 : la première édition contient les An-
nales • Velleiani de Henri Dodwell, qui ont été
rétranchées à la seconde; — uneédit. de Thu-
cydide j Oxtord, 1696, in-fol.; — Geographiœ
Veteris Scriptores Grasci minores, graece et la-
373 HUDSOM
ttye, cum JHssertatioftibus et Annotation^
bus ffenrici Dodwell : accedunt Gepgraphicq
Arabièq t cum notis; Oxford, 1698, 1703, 1712,
3 vol., in-8°. Cette collection, enrichie des. dis-
sertations instructives mais diffuses de Pod^yell,
était restée jusqu'à nos jours |e recueil je plus
complet des Geographi fir$çi minores^ et elle
devait à cette circonstance plus qu'à son mérite
d'être très-recherchée: mais, ty. Ç. Muller enâ
donné, dans la Biblioifihgue Grecgup de A. -F.
Didot, une collection bien plus complète, ei
très-supérieure pour la puret^ et l'interprétation
du texte; — piomsii Salicarnassensis Qpeffi
omnia, gfxee et latine^ Cfim Annotaiionibuf z
Oxford, 170.4, 2 yol. m-fol.; — Dionys\\ Içnr
gini de Sublimitaie t\belïus t cûmprsefatiqn^
de VitaetScïiptis Lpngini; notis, etc.; Oxfgr/J,
1710, in-4°; l'718, inr6°; — offris 4fli^sta t
De Voclbus Atiicis. et îfellen'icls '; Greqprtys
Martinus, pe Grxcarunï titerarun^ Pronon-
ciations ; Oxford, 1712. (tiré ; première édi-
tion du glossaire de Mœrjs; — Fabularyty
AZsopicarUnit Colfèctio ,' quôtguot grxce repe-
riuntur; acçedit Interprefatio ïqiina'; 'px,-
ford, 17J8, ïp T 8*; — flavii JfpsevfiïÔperq
qux reperlr} potueïurit ottinia. 4 a. cod. ms$,
diligentèr reçenstài, nova versipne' fonayi't
et notis lïlusïrqvit /. Û.; Oxford J* J720,
2 vol. in-fol. Cette excellente édition, imprimée,
en grande partie du vivant d'Hudson. parjat a^rès
sa mort par les soin$ d'Antoine ttaîl. Z. ,,
Hall , préfacé à l*édilt. de Josèphe. — Wôod , Athense
Qxonieniet, vol. II. — Bêographia Brititrïnica. - £baur-
HUP9Q*(3 r ^. a «)f P«iûtre anglai*,ftt.s!i
1701, dans le Pevonsbire,ejt mort en 1779. Élève
de Bichardson, dont il épousa ^ filte, il fut, après
la mort de son maître, le peintre favori (Ju grand
monde , et amassa upe fortune c©nsjdéraji>Je, q^j
lui permit 4e réunjr $ sa vi|Ja de Tyyickerçfoara
une belle collection de tableaux et d'estampe^
Constamment heureux durant $a longue c#j?rière,
il n'eut d'autre rival, dans la peinture de. por-
traits , que le fameux Reynplq* , a qui jl avait
donné des leçons. Son dessin est correct, mais
froid; jl rendait exactement le module, mai»
on lui reproche de ft'avnjr pa**u varier les poses'
et le costume. On cite, comme ses meilleures
pièces, les portraits 4e Çh^rks f 4u€ fa Marié*,,
rotigh, de JJxndel, Je seul, dit-on, que l'jom con-
naisse de ce compositeur, et de l'archevêque
Potter. La plupart de ces ouvrages ont été gra-
vés par John Faher le jeune. P. L— y.
Cyclopsedia of Qiograpfry, t. II.
hldsON (William), naturaliste anglais, né
dans le Westmoreland,vers 1730, mort en 1793.
Jt fut d'abord apprenti chez un pharmacien au-
quel il succéda plus tard. Sa profession lui per-
mit de se livrer à son goût pour l'étude des
plantes, et il devint un des plus habiles bota-
nistes de son temps. Il fut en correspondance
avec Linné, Haller et d'autres naturalistes, et po-
pularisa le premier en Angleterre ja classification
— HUE
874
(lu botaniste suédois, En ftffy un inc/noMe qui
détruisit, avec son magasin, son herbier et sa ppl-
faction d'insectes, le décida à quitter les affaires.
Il était membre de la Société royale et attaché ( on
ignore à quel titre) au British-Museum. On a
jfa luj une Flora Anglica , 1762, in-s°, avec une
préface latine par son ami Benjamin Stiilingfleet.
<M ouvrage, où les plantes sont arrangées selon
le système de Linné, contribua beaucoup à faire
pféritorr ce système en Angleterre. Hudson, qui
avait particulièrement étudié les insectes et les
mollusque*, méditait une Pùkn& britannique;
Inais lés matériaux recueillis à cet effet furent
détruits dans l'ineendie de 1763: Z.
Ityjteney,' Skêtchê* of Botany. — Chalmers, Gênerai
ptogrtPhiea* fHdUm- . » .
î HlWgogi ( Henri* Norwm ), littérateur amé-
rwsjn, né le 38 janvier 1*14, h Gornwsll ( État de
Yermpnt). il fut d'abord ouvrier carrossier, et
ne songea qu'assez tard à compléter ses études
en suivant, de 1835 à 1840, les cours du collège
de Mlddlebury. Après avoir pris ses grades
universitaires , : il parcourut les grandes villes de
l*tJnion, en faisant des lectures sur Shakspeare,
son auteur favori, dont il commença en 1850
une édition complète \ Shahspêqre's Works f
Boston, 1850-1855, il vol., d'après celle pu-
bliée en 182o à ChisWlck. En 1849 il fut or-
donné prêtre de la secte congrégâtionaliste, et
dirigea pepdant (Jeux ans (1853-1854) lé Church-
Ùah f feuiïle ré|ïgieuse de New-York. On a de
tili un grand nombre d'articles dé critique et de
littérature insérés dans le vemocràtic Review
(Ï84&), le Church Review et 1! American Whig
tfeyiew. ' ' ' ''P. t-r-v.
A 'fhé'Cyctop»d\aef Xmèrîcàn LiUràture t t. H.
* IfttfbsoN LOWE(Slr)' Voyez Lowfij
• * BtJB, trouvère français, quï vivait aii trei-
iîième siècle ; fl ne reste de éës" diverses produc-
tions que deux chansons contenues dans des
manuscrits de la Bibliothèque Impériale. La se-
conde nous apprend qu'il s'était croisé : il se
qualifie de châtelain d'Arras. 6. B.
r DlneâuK, Trouvères dti nari dé la France. — His-
toire UMralrt 4e la firence, tu XXIJ1, p. «|6.
i|ij« op |^aijb-$elv^, trouvère fran-
çais fui trei^v^oe ^èclp; U ae reste de lui qu'un
fragment 4e chanson que , d'après, le roman de
Guillaume ,<jls Dôle> l'empereur Conrad com-
manda ^ ce ménestrel dans. une cour qu'il tint
à Mayeùce, G. B.
Histoire Littéraire de la France, t. XXIII, p. W8.
W^tje de la p'ERTÉ , châtelain et trouvère
français, qui vivait au treizième siècle et sur
lequel on n'a que de vagues renseignements. Il
prit une part fort active à la querelle des grands
feudataires contre la régence de Blanche de Cas-
tille ; il reste de lui trois sirventois, qui le mon-
trent comme un ennemi redoutable de la mère
de saint Louis ; il y attaque vivement le clergé
et le iiomte de Champagne Thibaut. Ces pièces,
au jugement de M. Paulin Paris, sont remar-
quables parla netteté de l'expression, la régula-
375
HUE
376
rite des vers et l'énergie, sinon la sincérité, de
l'accusation. Elles ont été insérées dans le Ro-
mancero français publié par M. Paris en 1833
et dans le Recueil de Chants historiques édité
M. Leroux de Lincy. G. B.
Hittoire Littéraire de la Frmnee, t. XXIII, p. 618-
6SJ.
* hub du taillis (Pierre- Paul ), juriscon-
sulte français, né à Chartres, le 19 mars 1743,
mort dans la môme ville, en 1784. Avocat «a par-
lement de Paris, il s'est distingué par son rare
dévouement pour les malheureux. On a de lui :
Lettre du 25 décembre 1776 en faveur des
Quatre Innocents inculpés du vol des meubles
et vases sacrés du château des Faures , près
Ablis; » — Lettre en faveur de Cirasse ,
chirurgien au Gué de Longroi , et consorts ;
— Mémoire pour de BiontbaUly et sa femme;
1771. R— a( de Chartres).
Gazette des Trib., 1777, t. II, p. 44. - Doyen, Histoire
de Chartres^ t. II, p. 461.
hue (François) t Français connu par son
dévouement à la famille royale, né à Fontaine-
bleau, en 1757, mort à Paris, le 17 janvier 1810.
Il appartenait à une famille de magistrats, et ac-
quit, en 1787, la charge d'huissier de la chambre
du roi. En 1791 il fut nommé premier valet de
chambre du dauphin. Dans la journée du 20 juin
1792 il se plaça près de la reine et du jeune prince
pour les protéger. Le 10 août il était resté aux Tui-
leries après le départ du roi ; il dut s'échapper du
château par une fenêtre, sauta dans le jardin et
s'enfuit à travers les coups de fusil jusqu'à la
rivière, où il gagna à la nage un bateau qui le
tira de danger. Le lendemain il pénétra aux
Feuillants, et reprit son service auprès du roi.
Après la translation de Louis XVI au Temple,
qui eut lieu le 14 , Hue fut compris au nombre
des personnes désignées par le roi pour le service
des princes, et choisi pour celui du dauphin.
Dans la nuit du 19 août, il fut conduit à l'hôtel
de ville avec les autres personnes de service,
interrogé et réintégré dans la Tour, où il resta
seul attaché au roi et à la famille royale. Un
peu avant le 2 septembre, il rat arrêté de nouveau
et conduit à l'hôtel de ville, d'où Billaud-Va-
rennes voulait le faire partir pour l'Abbaye ; mais
Tallien le fit retenir à la commune. Hue resta
ainsi enfermé dans un cachot de l'hôtel de ville
pendant tout le temps du massacre des prisons.
Depuis ce moment les portes du Temple lui furent
fermées. Mais son zèle lui suggéra les moyens de
faire encore parvenir des renseignements utiles
à ses anciens maîtres. Un jour qu'il écrivait à la
reine pour lui rendre compte d'une commission
dont elle l'avait chargé, il fut surpris par des
commissaires des comités révolutionnaires qui
venaient visiter ses papiers ; il n'eut que le temps
de mettre sa lettre dans sa bouche et de l'ava-
ler. Dans son testament , Louis XVI se souvint
de la fidélité de ce loyal serviteur. « Je croirais
calomnier les sentiments de la nation , y dit-il ,
si je ne recommandais ouvertement à mon fils
MM. de Chamilly et Hue, que leur 1 véritable
attachement pour mot avait portés à s'enfermer
avec moi dans oe triste séjour, et qui ont pensé
en être les malheureuses victimes. » Après la
mort du roi, Hue continua de correspondre avec la
reine, et se hasarda à pénétrer dans la Concier-
gerie pour la voir. Arrêté de nouveau, il passa de
la prison de La Force dans une maison d'arrêt
du faubourg Saint-Antoine, et de celle-ci à l'ab-
baye de Port-Royal, puis enfin à la maison de
détention du Luxembourg. Le 9 thermidor loi
rendit la liberté. Lorsqu'on décembre 1795, le
Directoire consentit à l'échange de la fille de
Louis XVI avec les députés français détenus eo
Autriche, Hue, sur la demande de la princesse,
obtint la permission de l'accompagner; il resta
auprès d'elle pendant les trois ans de séjour
qu'elle fit en Autriche ; et, lorsqu'elle en partit
pour aller à Mittau épouser le duc d'Angouléme,
il la suivit, et fut attaché au service dn roi et
qualité de commissaire général de sa maison. En
1806, il vint en Angleterre pour faire imprimer
un livre qu'il avait composé dès 1794 sor la fia
du règne de Louis XVI. Au moment de retour-
ner à Mittau, il reçut de Louis XVUI Tordre de
se rendre à Hambourg pour remplir auprès du
sénat de cette ville les fonctions d'agent confiden-
tiel du roi ; mais il ne put remplir cette mission :
les autorités de Hambourg lui enjoignirent de
se constituer prisonnier dans une forteresse ou
de sortir immédiatement du territoire; il pré-
féra se cacher dans la ville et y resta neuf mois,
à la faveur d'un passeport que lui délivra Bour-
rienne, ministre de l'empereur. Cette position
n'était pourtant pas sans danger ; Hue se déter-
mina à quitter Hambourg sur une simple barque,
et regagna la Hollande; de là il revint en Angle-
terre, et se rendit à Mittau. En 1814, il rentra en
France à la suite de Louis XVIII, et donna ses
premiers soins à la réimpression de l'ouvrage qn'il
avait publié en Angleterre. Lorsque Louis XVUI
dut quitter la France au retour de Napoléon en
1815, Hue reçut la périlleuse commission de re-
tirer du trésor de la liste civile les diamants de
la couronne, et d'en accompagner le transport
hors du royaume, ainsi que celui d'autres valeurs
en numéraire. A la seconde restauration , Hue
reprit les fonctions de premier valet de chambre
du roi et de trésorier général de sa maison mili-
taire et de son domaine , emplois que le roi lui
avait confiés déjà à sa première rentrée. H en jouit
peu de temps. On a de lui : Dernières Années
du Règne et de la Vie de Louis XVI; Londres,
1806, in-8°; Paris, 18l4,in-8* ; Paris, 18l6,m-6° :
les éditions françaises ont été revues par Gence.
M. Chavard a publié : M. Hue peint par lui-
même, ou lettres autographes de ce modèle
de la fidélité, avec des remarques sur des
sujets politiques à Vordre du jour; Paris,
1824, in-8°.
Son fils, le baron André-Marie Htns, né en
1786, mort le 16 septembre 1854, dans sa pro-
377
HUE — HUEMATZIN
378
priété de Saint-Sauveur, près de Bray (Seine-et-
Marne), servit en 1804, comme sous-lieutenant,
dans le régiment de Dillon, à la solde de l'An-
gleterre, fit plusieurs campagnes à Malte., en
Sicile et en Espagne. Revenu en France en 1814,
il fut nommé brigadier dans la l re compagnie
des mousquetaires et suivit Louis XVUI à Gand.
Devenu, à la seconde restauration, capitaine et
aide de camp du duc de Feltre, il succéda à
son père dans sa charge de premier valet de
chambre du roi. U remplit les mêmes fonctions
auprès de Charles X, et après la révolution de
Juillet, il se retira dans sa propriété de Saint-
Sauveur, où il vécut dans la plus grande retraite
jusqu'à* sa mort. L. L— t.
Geoee, dans U Bioçr. des rivants. — Arasait. Jay,
Joay et Norvins, Bioçr. nouv. des Contemp. — llabbe,
Miogr. vnic. et portaU des Contemp.
X HUE (Anatole François), marquis de Ca-
ligny, le dernier représentant de cette famille,
naquit à Valogne, le 31 mai 1811 ; il est l'auteur
de plusieurs inventions hydrauliques et d'un mé-
moire sur l'hydrodynamique, couronné par l'Ins-
titut en 1839. H a reçu une médaille de première
classe à l'exposition universelle de 1855 ( section
d'Agriculture).
Doeum. partie.
■CE DE CALIGNY. Vop. CàUGNT.
hubl (Joseph-Nicolas), philosophe français,
né à Mattaincourt, le 17 juin 1690, mort àRomeux,
le 3 septembre 1769. Après avoir fait ses études
à Paris, il rat nommé curé de Romeux. Ayant
connu l'abbé de Saint-Pierre, il lui emprunta son
goût pour les projets et les réformes tendant ai*
bien public. Il provoqua les décrets qui ordonnè-
rent que les grandes routes de la Lorraine rossent
plantées d'arbres; il étudia le plan d'un canal de
jonction entre la Méditerrannée et la mer du Nord ;
il obtint qu'un synode se prononçât contre le
danger des inhumations précipitées. Un Essai
philosophique sur la Crainte de la Mort lui est
attribué par Barbier (Dic(ionnaire l des Anony-
mes ) ; cet ouvrage est demeuré peu connu. Tou-
chant à des questions délicates, Huel voulut
réformer les maisons de religieuses et les mettre
en mesure de rendre à la société d'importants
services. Il fit imprimer, en 1750, sans y mettre
son nom, un livre intitulé : Moyen de rendre
nos religieuses utiles et de nous exempter
des dots qu'elles exigent. Faisant table rase
de treize cents couvents de filles qu'il suppo-
sait exister en France, Huel demandait qu'on
les rebâtit sur un plan plus modeste, et que
les trente mille religieuses qu'ils renfermaient
lussent réparties dans deux mille cinq cents
maisons groupées en cinquante districts, et char-
gées de l'éducation publique. Les maisons nou-
velles devaient, suivant l'importance des villes
où elles auraient été élevées , contenir cinquante,
vingt-cinq ou dix religieuses. Une administration
centrale aurait régi avec économie les ressources
des anciens couvents. Ces idées n'étaient point
dénuées de justice mais elles étaient alors impra-
ticables. La cour souveraine de Nancy décréta
la suppression du livre qui les développait; Huel
se fit connaître, et l'affaire n'eut pas de suite ;
onze ans plus tard, son écrit fut réimprimé avec
quelques changements sans importance, mais il
passa inaperçu. Des bibliographes ont signalé ,
mais à tort, une troisième édition. G. B.
Durival, Description de la Lorraine et du Uarrots. — *
Michel, Dictionnaire historique des Hommes Marquants
de l'ancienne province de Lorraine, 18». - V. vuic-
mtn, Biographie Fosgienne .«■ 184*. — Clesse, Remarque*
bibliographiques sur Huel ,• dana les Mémoires de VA-
cadémie de Nancy, 1856, p. Ml.
huklya (Alonsb-Sanchez), navigateur es-
pagnol, vivait à la fin du quinzième et au com-
mencement du seizième siècle. On lui attribue la
découverte du Nouveau Monde. H était de cette
petite ville de Huefva qui fait partie du comté
de Niebla et qui compte parmi ses anciens ha-
bitants tant de marins célèbres. On a prétendu
que ce personnage , jeté par le hasard des tem-
pêtes sur les côtes de l'Amérique méridionale, en
serait revenu avec trois ou quatre de ses com-
pagnons, et qu'il aurait abordé à nie de Madère ;
puis on a ajouté qu'ayant recueilli ces marins,
Colomb en obtint les premiers renseignements
qui le guidèrent ; on a fait le même conte à pro-
pos de Pereetrello, son beau-père. Georges Horn,
Laet, Aldejpete, Jozé de Acosta, Grotius lui-même,
rapportent cette tradition, plus ou moins alté-
rée; Mariana affirme même le débarquement de
Huelva à Madère ; Garcilasso, qui était néà Cusco,
mais qui vivait à Cordoue, l'accueillit; enfin elle
est très-sérieusement admise par fray Jerommo
de La Conception,- dans son livre intitulé Cadiz
Ilustrada. Les prétentions des Espagnols sont
aujourd'hui rejetées. F. D.
Ocios de Bsp a fioles ewiiorados, t. VI, p. itl.
*BI7BMATZ1N, savant mexicain, vivait à
Tezcuco au septième siècle, et passait pour le
docteur par excellence de cette Athènes du Nou-
veau Monde. On lui attribue la composition du
Teoamaxtli ou Teomaxtli (le livre divin) (1),
Cette espèce d'encyclopédie faisait connaître,
dit-on, les émigrations de la race aztèque de-
puis son départ des rivages de l'Asie jusqu'à
son arrivée sur le plateau de l'Anahuac; elle
spécifiait les haltes diverses que dut faire la
nation envahissante sur les bords du Rio Gila.
On affirme que le Teomaxtli faisait partie de
ces monceaux de livres aztèques, condamnés
au feu sans examen par l'évèque de Mexico,
Zumarraga. Peut-être a-t-on exagéré l'impor-
tance de ce recueil hiéroglyphique, au point
de vue de la mythologie et de l'histoire; c'était
néanmoins une source précieuse, dont l'ab-
sence se fera longtemps sentir. Nous ne pou-
vons nous figurer aisément aujourd'hui l'étendue
des pertes littéraires que fit alors le Mexique.
Peut-être que si l'œuvre de Huematzin fût
(1) Selon les derniers documente palliés par M. l'abbe
Brasseur de Bourbon rg, ce Htre célèbre aurait «ne ori-
gine plus ancienne encore.
379 HUEMATZIN
parvenue jusqu'à nous, on aurait maintenant dès
renseignements pour établit la signification réelle
des hiéroglyphes mexicains. Lorsqu'on se rap-
pelle que le palais de Tezcttco renfermait dans
son sein certaines divisions intérieures destinée*
aux docteurs qui s'occupaient spécialement de
certaines sciences ; quand on a présent an souve-
nir ce qui nous est raconté des vastes ménage-
ries, des jardins délioieux consacrés à. l'étude
de l'histoire naturelle , et qtil e*4staient simultt-
nément à Mexico et à* Tezcuœ , il est difficile
de borner le rôle de Hueraatzjn à celui d'un
simple théoricien développant des traditions
barbares et purement fantastiques (1). Ce savant
aztèque, sur lequel nous, ajons des renseigne-
ments si peu précis, paraissait avoir fondé* son en-
seignement sur des, o^Kervalfons très«multipliéest
En 1626 il n'y avait peu,t-étre pas en Europe un
seul édifice consacré à la culture des sciences
que l'on sût comparer 'aux vastes établissements
que nous venons de citer m\ dont Cortez décrit
minutieusement jui-méme le pins important,
Ferdinand Demis.
Torqocwada, Monarchia Indiaw. fr Pus ta ma nie»
Chroniea Mexicana; Mexico, un, in-8°. ~ Prescott,
History of Mexico, t. 1, p. 86. — L'Abbé Brassettr de
Bourg, Histoire des Nattons civHitéeèdWMaritue et dm
V Amérique centrale, t. I. .. , . ■
UUBN (Nicole hf). Voy* Le BÎuiîn. .",
huerne ms pommjkcse (L.-F)y écono-
miste français, né à Paris, en i 7 65» mort le
25 juin 1840. Élu par le département de Seine-
et-Marne membre de la chambre des députés» où
il siégea de 1615 à 1816 et de 1820 à 1827, il
s'y occupa des questions d'économie publique,
dont quelques-unes furent l'objet de notices dont
voici les principales .Des Canaux navigables
considérés d'une manière- générale , avec, de $
Recherches comparatives sur. la Navigation
intérieure nie ila France et 4e V Angleterre ;
1822, in-4% avecatlas.de U pi.; — Des Colo-
nies agricoles et de leurs avantages, pour
assurer des secoure à l'honnête indigence^
extirper la mendicité , réprimer les malfai-
teurs et donner., une, existence rassurante
aux forçats libertés , tout en accroissant la
prospérité de, V agriculture \ja sécurité pu-
blique, la richesse deJÉUtft avec des re-
cherches comparatives- <tvr Us divers modes
de secours publies § , de atfanisajtèon et de ré-
pression des, délits i ain$h*m,*ur les moyens
d'établir avec succès. des* colonies, agricoles
en France et ia t nécessité :d y. recourir ; con-
tenant plusieurs tableaux statistiques, etc.;
■Paris, 1832, in** * .-ajrecviâ tableaux; — Re-
cherches sur un Moyen spécial de Crédit pu-
blic pour terminer prompiement les Canaux
entrepris* par VÉtui*. sans emprunt et en al-
légeant tes ithaDg es actuelles des contribua»
- <l)ll «st évidejtf que le» ToUèquct on le* peuples de
race iaconnue qui ont occupé le Guatemala et le Yucatan i
étaient supérieurs aux Aztèques. Peut-être Iluemaûl'n
éUlt-11 simplement le dépositaire de leur doctrine.
HUET 380
blés ; Paris, 1832, in-8* ; — Observations gé
nérales sur les Causes de l'existence des Ma-
rais et sur les moyens de les assainir ; Parts,
1834} in-8* (Extrait de la 18*lr?r. de La Maison
Rustique dû dix-neuvième siècle ) ; — Ques-
tions et réponses sur les moyens d'établir
en France des colonies agricoles de divers
genres et étyfbrfner une société de bienfai-
sance propre à eh assurer te succès, etc. ;
Paris, 1838, iri-8°. îtuerne de Pomtnetise a tra-
vaillé aux Annales des Ponts et Chaussées, an
Journal de ? industrie, à la MaAsbn Rusti-
que, etc. ' • ' G. tra F.
Joutridl dt Us tibrdirle. t«fe, lftil, 189*. — Nôtict
sur les TrsSaué de M. Huerne de Pomsneutey Parti,
in-8».
ttfrfeRTA (LA). Vày.hk Huêrta.
niiEsçAR et D'ifttttè ( rMa Mariana de
Silva-Bazajs y SiBMiENTo, duchesse de), peintre
espagnole, morte h Madrid, le 17 janvier 1784.
Elle montra beaucoup de talent dans le dessin
et la peinture, et mérita d'être reçue membre de
l'Académie iîé San-Férharido, Te 20 janvier 1766.
Plus tard elle fut élevée à la vice-présidence de
cette assemblée. Elle a laissé plusieurs bons ta-
bleaux qui se trouvent dans les salles de l'Acadé-
mie; mais un, puis grand nombre appartiennent
à des, gajerias particulières. Dena Maria de SiJva-
Bazàn avait été veuve deux fois ; elle futenterrée à
Saa*$alvadoYi auprès dn duc d'Arcos l son dernier
mari. On leur a érigé un. élégant cénotaphe, sur
, lequel figurent leurs bustes sculptés par les Mi-
! «bel; - A. SB 1.
QntUet) Dict, de* PeiStru espagnols, — Las Constitu-
tiones u Jetas de la* Academia de S dn- Fernando de
lâdria:
HfcEir { Pierre- Ùâniel)\ évoque o^Avraiicnës,
un dés hômthes les pfflft savants tfe Ffânoe , na-
quit à Càen, te 8 févrieï iô40, & mourut à Paris;
le ^janvier mi, dans la h^afsdh t>rofesgeiïeS
Jésûftes, où il s'était retiré. Son J*rt*, faitie!
Huet, conseille! 4 du roi et secrétaire eà là cour de
S. M., avait épflusë uneftouehnaise, plus jeune
que lui, Isabelle ftlloh de Berferaville , dont il
eut deux fils eltotiàfré filles. Il lYffltmit dé bonne
heure, et ïaissM a sa fetrime fa tutelle de ses en-
fants. Pierre-Daniel, élevé d'abord sons les yeux
de sa mère, apprît à cinq ans les premiers élé-
ments delà langue, qui lui furent enseignes par
un prêtre do voisinage. 11 perdit Mentor cette
mère dévouée dont on vanttît'tes grâces & Tes*
prit. Recueilli par une de ses tantes, épouse de
Gilles Macé, mathématicien renommé, qui plus
tard lui légua sa bibliothèque, il fit ses premières
études dans le 'monastère des PP. Croisieis , puis
chez les Jésuites du collège dn Mont, oh il acheva
ses humanités. Il y avait compté parmi nés con-
disciples Bernard GigauH de Belle/ont, qai de-
vînt en 1 66Q maréchal de France, et qui avait en
pour précepteur Brébêuf, te traducteur de La
Pharsale. Une éducation sagement dirigée dé-
veloppa à la fois les facultés infellectaefles et» la
constitution physique du jeune Huet, habile dans
381
HUET
382
tous les exercices du corps. A treize ans, il étudia
les belles-lettres, sous Antoine Halley, habile
professeur et poëte latin distingué, et la philoso-
phie sous le P. Mambrun , qui lui inspira un goût
très-vif pour les mathématiques et particulière-
ment poiir la géométrie. A seize ans, il commen-
çait l'étude do droit; lorsque la lecture de la Géo-
graphie sacrée de Bochart lui inspira une nou-
velle ardeur f>oùr lès recherches de l'érudition, et
lui fit sentir la nécessité, pour acquérir une con-
naissance approfondie de l'antiquité, d'étudier sé-
rieusement le grec et l'hébreu. Il se passionna
pour cette double étude* et il nous apprend lui-
même qu'il lut pendant sa vie vingt-quatre fois
le texte hébreu des Écritures. Lié bientôt avec
Bochart, avec les deux Cahaignes, dont l'un a
écrit la vie Abrégée des Hommes illustres de
Caen, Avëd Thouroude et Grentemesnil, savants
hellénistes, Daniel Huet avait dès l'âge de vingt
ans pris tin raiig-distlngué dans la science et dans
le monde. A Paris, où l'appela le désir d'aller
puiser l'instruction dans son plus brillant foyer, il
rechercha tous tes hommes d'élite dont le com-
merce pouvait lui être de quelque secours dans
ses aspirations encyclopédiques : les PP. Sirmond
et Pétau , auxquels il a écrit plusieurs lettres la-
tines; les poètes latins Rapin, Guyet et Com-
mire$- les laborieux .et érudits commentateurs
Philippe Labbe, Coeaari, Gârnier et les deux
frères Dupuy. Grand amateur des curiosités bi-
bliographiques, il se lia aussi avec te conserva-
teur de la Bibubthôque MazarinL, Gabriel Naudé»
qui lui donna d'utiles conseils pour former la
sienne. Il était âgé de vingt-deux ans, en 1652,
lorsque la reine Christine appela à sa cour, sur
la recommandation de Vossius, l'illustre Bochart,
qui invita son jeune ami Huet à l'accompagner
dans ce voyage. Son absence ne fut pas longue.
Lorsqu'après s'être arrêté quelque temps à Co-
penhague , où il admira* dans le Collège Royal*
le globe d'airain fabriqué par Tychotftrahé, il
fut arrivé à Stockholm , la -reine de Suède avait
déjà perdu une partie de son ardeur pour la
conversation» deSigens érudiU, et son premier
médecin venait d'obtenir d'elle qu'elle suspen-
drait , dans l'intérêt de sa santé^ les études vers
lesquelles l'entraînait une ardetur trop passionnée.
Huet trouva à k Bibliothèque loyale de Stock-
holm un manuscrit qui contenait quelques frag-
ments des Commentaires 4 } Qw&m sur saint
Matthieu ; et cette décnûvçrte' lui inspira la pre-
mière idée de l'édition qu'il donna plus tard de
cet ouvrage- L'hiver approchait, et, se hâtant
de prendre congé de la reine, il se dirigea vers
la France, en passant par Leyde, où il salua
Minsius, et par Amsterdam, où il visita Alexan-
dre Morus, Isaac Vossius et le rabbin Manassé-
Ben- Israël. De retdur dans sa ville natale, il se
vit arec plaisir associé, ainsi que Bochart, à la
nouvelle ACatfémi* que -tenaient d'y fonder plu-
sieurs hommes de lettres , réunis par Jacques
Moysant de Brieux, ancien conseiller au parle-
ment de Met?,, et dont Segrais, Halley et Mé-
nage faisaient partie.
A cette époque commencèrent ses démêlés
avec Bochart, auquel il s'était empressé de com-
muniquer son manuscrit des Commentaires
d'Origène. Bochart, ayant voulu lire le fameux
passage controversé sur l'Eucharistie, vit avec'
surprise que Huet y avait omis une dernière
ligne , et aussitôt il le dénonça au monde savant
comme s'étant rendu coupable de mauvaise foi.
Il n'en fallait pas davantage pour les brouiller.
Huet ne s'en livra pas avec moins d'ardeur à sou
travail favori, et n'employa pas moins de dix
années pour l'achever. f Son ancien professeur,
Antoine Halley, et Jean- Baptiste Coteiier, l'aidè-
rent de leurs. avis, pour une publication faite par
lui avec le plus grand soin. De nouvelles liaisons
avec les savants et les littérateurs vinrent étendre
le cercle de ses études, il se mit alors en rapport
avec Chapelain, dont i) prit plus d'une fois la
défense contre des critiques, exagérées sans
doute quand elles s'adressaient au savant, et lé-
gitimes quand elles condamnaient le poëte ; avec
Etienne te Moyne, ie, pasteur Morin, et Baille-
hache , savants hellénistes ou orientalistes ; avec
le duc de Longueville, gouverneur de Normandie,
qui l'invita plus d'une, fois à faire sa partie d'é-
checs; avec la belle et savante abbesse de l'ab-
baye aux Dames de Caen, Mariè-Éleonore de
Rohan , qui a tracé, selon là mode de l'époque ,
un portrait de Huet, âgé d'environ Vingt-huit
ans, portrait que l'on trouve imprimé, en 1659,
à la suite des Mémoires de M? 1 * de Môptperisier,,
avec celui de la spirituelle abbesse, qu'il avait
composé lui-même. Les Mémoires defluet nous
le montrent, en 1659, fixé à Paris, après avoir
refusé d'aller à Rome auprès de la reine Christine,
qui l'y avait appelé. On lui avait aussi propose
de se charger de l'éducation de* Charles-Gustave,
héritier de cette princesse au trône dé Suède. H
ne put se résoudre à quitter la France.
Huet prenait,, à cette époque, parti en faveur
des anciens contre ses nouveaux amis fresmarets ,
Sairit-Sorlin et Charles Perràuty, grands partisans'
des modernes, qui auraient, disait-iîj pensé tout
autrement, s'ils eussent été plus versés dans la
connaissance de l'antiquité. Il fréquentait Pélisson
etConrart. Il dit du premierjque la nature lui avait
donné les grâces de»l'esprit pour le dédommager
des imperfections du corps; et*Jù second, Çu'jl
était étranger à la littérature ancienne-, mais
qu'il passait pour être versé dans les lettrés mo-
dernes. Santeuil et Charles Dupérrier étaient
deux poètes latins estimés, rien de plus ^ ajoute-
t-il. Les grands travaux de Huygens le rappelè-
rent à l'étude de l'astronomie. Son goût pour les
études scientifiques se réveilla, et, se trouvant à
Caen, en 1662, il y fonda une Académie à^s
Sciences, qui correspondit bientôt avec la Société*
royale de Londres, et qui, subventionnée par Col-
bert, compta parmi ses membres le duc de Beau-
villiers de Saint- Aignan, membre de l'Académie
383
HUET
384
Française. Il se mit à étudier l'anatomie, et, quoi-
que myope et malade des yeux, « il disséqua , dit-
il , plus de hait cents yeux de divers animaux,
pour comparer cet organe, à longue ou à courte
vue, chez les différents oiseaux ». A l'aide des
instruments astronomiques de Gilles Macé, il ob-
serva le passage de la comète de 1664, dont il
indiqua le parcours à ses amis. Il cultiva aussi
la chimie, et le résultat de ses études en cette
partie fut la composition d'un poème sur le sel,
qu'il dédia, en 1670, au duc de Montausier, qu'il
avait connu, lorsque, fréquentant l'hôtel de Ram-
bouillet, il se laissait aller aux séductions du
bel esprit, et se déclarait l'admirateur de Ma-
deleine de Scudéry, l'illustre Sapho, «t de Julie
d'Angennes, pour laquelle le doc, qui l'épousa
après une cour assidue de quinze ans, fit com-
poser la fameuse Guirlande de Julie. Au mi-
lien d'études si variées, il ne négligeait pas les
beaux-arts; il connaissait Le Brun, et ce fut à
sa prière' que celui-ci peignit le tableau du Bap-
tême de Jésus-Christ, destiné à l'église de Saint-
Jean, dans laquelle Huet avait été baptisé. Le
jésuite Parvilliers , qui avait enseigné à Damas
la littérature arabe, se trouvant à Gaen, renou-
vela son zèle pour l'étude de l'arabe et du sy-
riaque. C'est pendant le séjour qu'il fit à Caen,
queBochart, au milieu d'une discussion soutenue
contre lui sur l'origine de quelques médailles es-
pagnoles, mourut subitement, le 16 mai 1667,
d'une attaque d'apoplexie.
Huet, qui avait, dans sa jeunesse, traduit en
latin les Pastorales de Longus et composé un
roman médiocre, Diane de Castro , ou le /aux
inca, ouvrage tout rempli des fadeurs et des
galanteries mises à la mode par l'hôtel de Ram-
bouillet, écrivit en 1670 son Essai sur l'Origine
des Romans. Il y soutenait, avec l'auteur de
Télémaque et l'évêque Camus, que les com-
positions romanesques peuvent êtres lues avec
profit, pourvu qu'elles aient un but moral. Son
travail rat imprimé en tète du roman de Zaîde,
par madame de La Fayette, qui lui disait plai-
samment à ce sujet : « Nous avons marié nos
enfants; » L'année précédente, il avait composé
une hymne latine dédiée à Notre-Dame de la
Délivrance, que l'évêque deBayeux avait adoptée
et consacrée parmi les chants d'église. Aucun
genre ne lui était étranger. iS mort de Picart de
Perigny, ayant laissé vacante, en 1670, la place
de précepteur du dauphin, fils de Louis XTV, le
duc de Montausier proposa au choix du roi Mé-
nage, Bossuet ou Huet. Le roi choisit Bossuet pour
précepteur et Huet pour sous-précepteur. Ins-
tallé à la cour, Huet continua à mener de front les
travaux les plus divers. Il dirigeait pour son royal
élève cette belle édition des classiques ad usttm
delphini, qu'il enrichissait de notes et d'expli-
cations, et pour laquelle il avait appelé à son
aide plusieurs savants, parmi lesquels il cite avec
honneur Anne Lefêvre, plus connue sous le nom
de madame Dacier. Il continuait à préparer son.
édition d'Origène, et il publia un de ses plus
importants ouvrages, sa Démonstration évan-
gélique. Il fut en 1674 élu membre de l'Aca-
démie Française; et ce fut Flécbier qui répondit
au discours du récipiendaire.
Pendant qu'il travaillait à la Démonstration
évangélique, de sérieuses réflexions sur la vie
un peu mondaine qu'il avait menée jusque-là
le fortifièrent dans son projet d'entrer dans les
ordres ecclésiastiques, et il se prépara peu à
peu au changement d'existence que devaient lui
imposer ses nouveaux devoirs. « Je changeai
d'abord la forme de mes habits , dit-il, dans ses
Mémoires. Je m'étais vêtu à la mode des gens
de cour, on, pour ainsi dire, à la mode des
hommes d'épée ; je modifiai graduellement mon
costume, et je fis en sorte que l'on s'aperçût à
peine du changement opéré dans ma manière de
me vêtir. » Il avait été admis par l'évêque de
Bayeux, François deNesmond, à entrer dans
les ordres mineurs. Le souverain pontife l'auto-
risa à abréger tes délais d'usage; et, après s'être
livré pendant trois jours consécutifs à de pieux
exercices, il fut ordonné prêtre, en 1676, par
Claude Auvry, évêque de Coutances , près du
tombeau de sainte Geneviève. En 1678 il reçut
du roi l'abbaye d'Aunay, vacante par la mort de
Charles Fournier, et il en prit possession au
mariage du dauphin, en 1680. Bien que son sé-
jour dans cette riante abbaye, située aux bords
de l'Orne, et qu'il appelait son Tempe, lui causât
plus d'un embarras, par suite des discussions
qu'il eut à soutenir, et qu'il soutint en proprié-
taire normand , peu disposé à faire l'abandon
de ses droits oontre les moines, qui coupaient
ses bois et vendaient son poiré et son cidre, ce
rat là cependant qu'il put se livrer avec le plus
d'abandon et de charme à ses études favorites.
Il y composa ses Questions d'Aunay, sur VAc-
eord delà Foi et delà Raison; sa Critique
de la Philosophie de Descartes; les Mémoires
pour servir à V Histoire du Cartésianisme;
sa Dissertation sur la Situation du Paradis
terrestre; ses notes sur l'Anthologie Grecque,
ses Origines de Caen; il y donna une édition
de ses poèmes grecs et latins. En 1685 il eut à
soutenir contre Boileau une vive discussion, ?ui
le passage du Traité du Sublime, où Longin rap-
pelle le Fiat lux de la Genèse , dans lequel Huet
ne trouvait de sublime que la merveille racontée.
La même année, Louis XIV l'appela à l'évêché
de Soissons; mais, après avoir attendu pendant
qnatre ans les bulles pontificales, Huet se décida
à permuter avec Brùlart de Sillery et à accepter
en échange l'évêché d'Avranches , où il ne fut
installé qu'en l'année 1692. Sa passion pour l'é-
tude ne l'abandonna pas au sein de ses fonc-
tions épiscopales , « malgré les plaintes des pay-
sans des environs, que ses gens renvoyèrent plus
d'une fois en leur disant: Monseigneur étudie,
etqui protestaient, en se retirant, qu'ils deman-
deraient au roi un évêque qui aurait* fini ses
385
HUÊT
386
études. » Après avoir pendant dix ans exercé ses
fonctions épiscopales, il s'en démit, en 1699,
avec la permission du roi, qui, par forme de
compensation , le nomma abbé de Fontenay. U
était là tout auprès de sa Tille natale; mais il
ne reçut pas de ses compatriotes la haute con-
sidération et les égards auxquels il avait droit
Il y fat inondé, dit-il, d'une pluie de procès, et
il avoue lui-même, du reste, dans sa correspon-
dance inédite avec son neveu de Char signé de
Piédoue , qui fournit sur sa vie et sor son ca-
ractère des révélations précieuses, qu'il sou-
tint parfois ses droits avec une ftpreté qui sou-
leva contre lui l'opinion publique. Huet se dé-
goûta de son abbaye, et prit avec les jésuites
de Paris des arrangements par suite desquels il
trouva dans leur maison de la rue Saint-An-
toine un logement où il s'établit toutes les fois
que ses affaires rappelaient dans la capitale, et
où il finit par s'installer tout à fait.
Sa vieillesse n'avait ni altéré ses facultés mo-
rales, ni affaibli sa robuste constitution, qu'il
avait toujours soutenue avec le plus grand soin
à l'aide de l'excellent régime auquel il s'assujettit
dès l'âge de quarante ans. « Il ne soupoit jamais,
dit l'abbé d'OIivet, dlnoit sobrement, et prenoit
le soir le bouillon rouge du médecin Détonne. » Il
a, dans un poème sur le thé, qu'il envoyait à
Graevius, en 1687, signalé les services que lui
avait rendus cette plante et l'heureuse influence
qu'elle exerçait sur sa bonne humeur, sa santé
et ses forces. Il se délassait de ses travaux d'é-
rudition en composant des vers grecs et latins,
des églogues, des épigrammes, et au milieu de
toutes ses occupations de savant et de littéra-
teur il trouvait encore assez de temps pour écrire
de longues lettres d'affaires, avec cette écriture
fine, nette et serrée qui frappe tous ceux qui
ont pu lire ses manuscrits. C'est d'une main
ferme et sûre qu'à l'âge de quatre-vingt-six ans
il rédigea, en double expédition, le 16 mai 1716,
son testament olographe, retrouvé, en 1825,
avec une foule de papiers précieux, dans un gre-
nier de la maison de Caen, située Cour du
Grand Manoir, testament curieux à plus d'un
titre , et dans lequel on peut signaler plus d'un
trait de son caractère et de son esprit (1). Cet
(1) Ces papiers, qui sont aujourd'hui entré les mains
de M. Abcl Vautler, de Caen, membre du corps législatif
sont : 1° deux liasses de lettres écrites par Huet à son
neveu Piédoue deCnarsigné, procureur général au bu-
reau des finances de Caen , depuis le 10 mars 1706 jus-
qu'en l'année 1714 IncloslTement II y est question prin-
cipalement des abbajes d'Ânnay et de Fontenay ; *° une
assez longue correspondance entre l'abbé Piédoue de
l'Aunay, aumônier et secrétaire d'Huet, avec Piédoue de
Cbarslgné, son frère ; J° nn diplôme de membre de l'A-
cadémie française, déllTré à Huet en 1074; 4° le manus-
crit autographe du Faux Inca, composé par Huet à l'âge
de vingt-cinq ans, et publié seulement sept ans après sa
mort ; 5° enfin le double du testament olographe de Huet,
portant la date du 16 mai 1716. Ce dernier document a
«té publié en 1853, par M. Charma , professeur à la fa-
culté de Caen, dans le Bulletin de la Langue, de l'His-
toire et des Arts de la France, 1. 1", p. 186. U BlbUo-
MOOV. BlOGRo GÉNÉR. — T. XXV.
acte atteste dans son auteur une singulière ap-
titude pour les affaires, une mémoire prodi-
gieuse , un rare esprit de détails , une circons-
pection extrême : il ferait honneur au plus ha-
bile juriste et au notaire le plus exercé.
Il est peu de noms aussi célèbre dans l'histoire
desletti^squeceluidusavantévèqued'Avranches.
Poète, philosophe, théologien, astronome, physi-
cien, chimiste, géomètre, helléniste, hébraïsant de
premier ordre, il n'est aucune des sciences hu-
maines dans lesquelles, il n'ait pris une place émi-
nente>Une sorte d'impétuosité et de fougue le
poussa dès son enfance vers l'étude, qui devint pour
lui l'objet d'une passion insatiable. A là ville, à la
campagne, à la cour, tout le temps fut donné au
travail ; il y sacrifia une partie du temps consacré
au sommeil; il lut ou se fit lire pendant ses re-
pas, dans ses promenades, dans ses voyages,
et grâce à sa prodigieuse mémoire, il put con-
server tout ce qu'il avait appris : ce fut donc
surtout par l'érudition qu'il se distingua dans
tous les genres auxquels il appliqua son intelli-
gence, fortement investigatrice. Dans sa Lettre h
Segrais sur l'origine des romans, il fit l'apologie
de ce genre de composition plutôt en antiquaire
qu'en homme de goût. Nous avons fait remar-
quer qu'une de ses œuvres les plus médiocres
rat cette Diane de Castro, ou ce Faux Inca,
qu'il composa dans l'âge des passions , et qui
n'atteste chez lui qu'une imagination peu active
et une médiocre sensibilité. Sa Correspondance
inédite nous apprend qu'il faisait peu de cas lui-
même de ses poésies françaises; il estimait, avec
raison, davantage ses vers grecs et latins. H ma-
niait avec assez d'habileté l'épigramme, et le
Huetiana en conserve pins d'une à l'adresse de
ses compatriotes, peu disposés, comme c'est l'u-
sage, à reconnaître son mérite. M écrivait, le
27 septembre 1708, à son neveu : « Outre trente
particuliers dont j'ai fait la fortune à Caen , j'ai
servy votre compagnie et le présidial. Par re-
connoissance , quand je vais à Caen, j'y trouve
envie, haine, médisance et mépris. Dieu soit
béni! c'a esté le sort de Notre-Seigneur, qui doit
nous servir d'exemple et nous consoler. » Son
traité de la traduction, De Interpretatione, fort
estimé de Segrais et dédié à André Graindorge de
Prémont, est un long dialogue entre IsaacCa-
sanbon , de Thon , et le jésuite Honton le Duc ,
conçu à la manière des anciens. On y passe en
revue les plus célèbres traducteurs et interprètes,
et on y expose quelques-unes des règles qui
leur sont imposées. Le recueil de ses dissertations
diverses, publié par l'abbé Tilladet, en 2 volumes
in- 12, et le Huetiana attestent l'immense variété
de ses connaissances. Il y aborde, ainsi que dans
ses lettres latines et françaises, une infinité de
sujets, sur lesquels il rassemble toujours des ren-
tbèque impériale possède un recueil de lettres de Huet
adressées au P. Martin, franciscain de Caen, et M. Sainte-
Beuve fait espérer la publication d'une autre correspon-
dance, pins étendue, avec Ménage, de 1660 a 1691.
13
887
HUET
388
geignements nombreux et puisés aux sources, il
écrit sur VOrigine de la Rime, sur l'Antiquité
des Jets d'eau , sur les Progrès de la Chimie,
sur YOrigtoiede la Rougeole et de la Petite Vé-
role, sur ta Manière d'expliquer ta Sainte
Écriture, sur la Pourpre, sur la Rosée, sur la
Salamandres sur la Nature des Comètes^ ete.
Ses travaux géographiques et historiques ont
plus de valeur et d'importance. Il est te digne
émule de Bocnarù, dans son Traité sur ia Si-
tuation du Paradis terrestre^ sujet sur lequel
le ministre de Caten ataH commencé un travail
analogue, qui n*a pas été publié, et qu'on accusa
à tort Huet d'avoir copié. Voltaire estimait* pour
tes documents considérables qu'elle réunit, son
Histoire du Commerce et de ia* Navigation
des anciens, ouvrage que Ton peut consulter,
même après celui dlîeeren. Les Origines de
Caen complètent VBistoire de Caen par «Je
Bras, et ont servi beaucoup à l'ouvrage, plus ré-
cent, de l'abbé de La Rue, dont les Essais sur
ta Ville de Caen ont le tort* comme les deux
ouvrages précédents, de donner plutôt l'histoire
des monuments que celle des hommes. Voilà
bien des livres pour un homme qui a dit, non
sans quelque raison j « que tout ce qui a été
écrit depuis que le monde est monde tiendrait
dans quelques in-folio si chaque chose n'avait
été dite qu'une fois ». C'est à ses ouvrages philo-
sophiques que l'évêque d'Avranches doit princi-
palement sa célébrité. L'esprit dans lequel ils
sont conçus l'a fait ranger jusqu'à présent parmi
les écrivains qui se proposent de ramener
l'homme à la foi par les sentiers du doute -, et
qui obscurcissent l'éclat des lumières naturelles
afin que l'âme, ne comptant plus sur l'appui delà
raison , ne reconnaisse d'autre autorité que celle
de la révélation. Pascal avait employé cette mé-
thode périlleuse avec une amertume éloquente,
et avait été lui-même effrayé des attaques qu'il
dirigeait contre la raison humaine immolée au
pied de-la croix. Huet reprit son argumentation
avec plus d'ordre et surtout d'érudition, il se
plut, dans ta démonstration évangélique, à
signaler les vains efforts de la raison pour s'é-
tablir dans ta ferme possession du vrai. La foi
seule , selon' lui , peut mettre un terme aux agi-
tations de Pesprit, et c'est précisément pour
faire sentir tout le prix de cette grâce surnatu-
relle que Dieu a donné à tfaomme des facultés -si
débiles. Dans les Questions U'Aunay, et la Cri-
tique de la PhiUtsoptoe.èmrtésienne, il fut plus
explicite encore : il prend un à un les arguments
du père de la philosophie moderne : il soutient
qu'une fois engagé dans son doute méthodique,
Descartes n'en peut régulièrement sortir; que la
notion de l'existence personnete n'est pas la
première qui se présente à l'esprit; il nie que
l'évidence soit la marque de la vérité, que l'âme
soit mieux que le corps, qu'elle ait une no-
tion directe de l'infini, notion qui n'est, au coà-
traire, dit-il, conçue que comme négation du
fini, et ne peut fournir aucune démonstration
solide de l'existence de Dieu. Il condamne donc
sans ménagement un système de philosophie
qu'il considère comme offensant la religion, puis-
qu'il met l'autorité de l'évidence sur la même
ligne que celle de la foi.
Mais c'est surtout dans son Traité de la Jftti-
blesse de V Esprit humain qu'il semble avoir
voulu faire servir le pyrrhonisme philosophique
Au triomphe de la foi. Dans son premier livre, il
cherche à démontrer, par treize motifs, que la
vérité ne peut. être connue de l'entendement
par le secours de la raison* avec une pleine et
entière certitude* dans le second, il tait con-
naître j usqu'à quel point, à défaut d'une eertitede
complète >, l'esprit humain peut atteindre à 11 vé-
rité. Tout ce qu'il en sait ne peut être considéré
que comme ayant pour base une sorte de vrai-
semblante et de probabilités qui suffisent pour
lui faire croire qttU n'est pas dans un continuel
égarement. 11 conclut enfin dans le troisième
livre que tes vérités premières v H même les
propositions telles que peètes-ei : l'homme est
composé d'au corps et d'une èmci l'homme sent
et vit, ete.fr qui n'étaient que probables ou humai-
nement certaines quand ettes étaient simptetoent
admises sur te témo&age de la raison» de-
viennent* par ta foi, certaine» d'une certitude
absolve et<nvwe.i£ grand Arnauld avait, en t«92,
condamné les attaques de Huet contre le carte-
siamstoe; le Journal de Trévoux-, en 172-%
voulut prouver cjne te fruité de la faiblesse
de V Esprit toummn né pouvait être de l'évêque
ri'Avranet*». Il fallut que l'abbé d'etivtt, l'édi-
tent idu balte, ainsi que des mtetiana-, pro-
duis* le mamwerit et te soumit à l'Académie
Française* qui le fit examiner par ferivhi et La
Montioyfe. ^ Journal de Tnév&ux nes'ttaitpas
contenfé de hier l' au fl mitfcit é de l'ouvrage , il
en avait essayé ta réfutation. Huet fat dé-
fendu parte père fiait», et crithtuéen 1733 par
Crbuzafc} dans «an Examen du Pyrrhonisme
ancien et moderne. D'autres écrivains, Voltaire
et Brttckfer entre autres, ont étendu le scepti-
cisme de Huet jusqu'à ses croyances religieuses
et mis eh oMttte ta sincérité de sa foi. On com-
poserait unfe bibliothèque des écrits auxquels de
semblables discussions ont donné lieu. La ques-
tion a été agitée tout récemment encore dans
les deux sens par deux écrivains très-versés
dans les tirades philosophiques^ M. Christian
Bartbolomess, <jùï considère ïiuet comme pyr-
rhonien en philosophie, et M. l'abbé Flottes,
qui soutient que c'est calomnier l'évoque d'A-
vranches que de lui donner ce titre. Il est cer-
tain, et tout le monde en convient, que Huet
s'est, dans tous ses ouvrages de pbitosophte, at-
taché à soutenir que la philosophie qdî s'abstient
de tout assentiment dogmatique est celle qui est
la plus favorable au christianisme, et une ses
principaux arguments consistent à mettre ia
raison aux prises avec elhvméme, en déveAop-
389
HUET
290
pant les preuves dont m servent les sceptiques
pour répondre aux philosophes dogmatiques,
afin que, sa faiblesse étant constatée , elle sente
la nécessité de la foi. Il nous semble qu'il est
difficile de ne pas voir dans Huet le représen-
tant du scepticisme thééfogique qui a été déve-
loppé de nos jours avec tant d'éclat par l'abbé de
La Meonais.
Huet légua à la maison professe «tes jésuites
de Paris ses précieux manuscrits et sa belle bi-
bliothèque, qui, après la destitution de l'Ordre
des Jésuites, en 17*4, allait être rendue avec
celle des religieux, lorsque le légataire de Huet
mit opposition a ia vente , et obtint gain de
cause, en vertu d'un arrêt du conseil du roi.
L'impératrice de Russie en offrit 80,040 écus ;
mais elle fut achetée par Louis XV, qui en enri-
chit la Bibliothèque royate>, en assurant a» neveu
de Huet une rente de 1176e ovre» au capital
de 35,000 flvMftt fiai» tannée même oti il rédi-
geait ce testament*, Muet publia sa remarquable
Histoire du Commerce et de la Navigation des
Anciens, il conserva presque toutes ses facultés
pendant les dernières années de sa vie* qu'il
consacra en grande partie * la composition de
ses Mémoires % conuneneés en 1742 à la seHt-
eitation de ses amis, et qui sont connue sous le
titre de Commentarius de 8ébu* ad eum per-
tinèntièw, ouvragé dont M. Gh. Nisârd a ré-
cemment donné ia traduction, et qui est pour
la biographie du célèbre éveqûe d'Avranohes le
point de départ le pins exact et 1e plus sûr. C'est
à Page de quatre-vingt-onze ans qu'il termina
sa vie, si longue et si bien remplie. Il était doyen
de l'Académie Française. Ses principaux ouvrages
sont: DelnterpretattonefAifridiu); Paris, 1661,
in-4°; -\Or%genis Vommentària in Sacram
Scripturam; Rouen, 1668, 2 Vol. in-fol.; — De
VOrigfne des Roman* s Paris, 167ôv in-12; —
Animadversiones in Mam&ium et 8caligeri
notas ;'ûné. y 1679, in-4° ;- Demonstratio Evan-
§eliea; ib., 1679, in-ftd: ; — Cénsttra Pkiloso-
phim Cartesiànm; nV., 1689, in-12ç — - Quaes-
tiones Alnetanx de Cortcordia tiatiànis et
Fidei;$b., 1690, in-4°j — Nouveaux Mémoires
pour servir à l'histoire du Cartièrianismeï
ib., 1692, in-12 ; — Dissertations sïir diverses
matières de religion et de philosophie; ibid.,
1712, in-12; — HisttAre du Commerce et de
la Navigation des Anciens ; ib\è: y 1716, m-12;
— Commentarius de 'Rébus ad eum p ert i nent
tibus; Amsterdam^ 1718, m-ifr; fca plupart de
ces ouvrages ont eu plusieurs éditions. On a
publié le HHetiam à Parte en I7fcâ C'est m
même année aussi qu'à été publié à Paris, par
l'abbé d'OMvet, celui die tous les ouvrages de
Haet qui à soulevé le plus d'oppdsition et sus-
cite' les plus vives controverses ; c'est te Traité
de la Faiblesse de VEsprït humain, dont l'au-
teur avait fait une traduction latine, impri-
mée à Amsterdam , en 1730$ 1 vol. in-12.
C. Hippeau*.
Commentarius de Rébus ad eum pertinentibus / ma,
I in- 8°, publiés par M. de Saliengre ; traduits en anglais
| par John Aikin, Londres, 1736; et en français par M.Nl-
; sard, Paris, 1858, ln-8°. — Tittadet, Recueil de Disser-
tations sur diverses matières de religion et de phi-
| lologie- Paris. 1712, lo-li; La Haye, 171 4 et 17*0, 5 vol.
i in-12. — Huetiana - D'Alembert, Histoire des Membres
de V Académie Française : éloge de Huet. - Nouveaux
Mémoires de l'abbé d'Artigny, t. IL - Bibliothèque uni-
verselle de Leolerc, t. XV. — Journal Littéraire de La
Haye, t. IL — Du pin, Bibliothèque des Auteurs ecclé-
siastiques, dix-septième siècle, t. V. — Mémoires de Lit-
térature, par le P. Desmolets, t. il. —Œuvres &Ar~
nauld, t. III. ~ LejbniU, Opéra emnia, t. V, éd. de Du-
tens. — Crouzaz, Examen du Pyrrhonisme ancien et
Moderne. — Journal de Trévoux, 17S5. — Brucker,
Historia crttica PhilosophUe, t. V. — De Gerando,
Histoire comparée des S y sternes de Philosophie, t. III. -
factionnaire des Sciences Philosophiques. — Christian
Bartho tomes*, Huét et son Système théologique, — Étude
sur Daniel Huet, évéeue d'Avranches, par M. de Godr-
nav, dans les Mémoires de l'Académie de Caen, 1854. —
Etude sur Daniel Huet, évèque d'Avranches, par l'abbé
Flottes; Montpellier, 1187.
HUET db guerville ( Paul), de la famille
do précédent, hé à Caeh, le 31 juillet 1777, mort
en 1854. Maire de Sedan pendant l'occupation de
cette vHle par l'armée prussienne sous les ordres
du comte de Zietben ■> il parvint à établir une
correspondance au péril de sa vie avec le baron
de Choisy, commandant le château, et put par ce
mot en conserver au roi le fort de Sedan jusqu'au
16 septembre , sauvant ainsi sept à huit millions
de projectiles que ce fort renfermait. Pendant
les Cent Jours il resta à la tête de l'administra-
tion, par ordre de M. le baron de Fremont* préfet,
et de M. Bedoch, commissaire pour l'empereur,
bien qu'il ait donné trois fois sa démission et
qu'il "ait refusé de signer l'acte additionnel.
Louis XVIII le nomma maire le 5 juin 1816. La
ville de Sedan lui doit l'érection de la statue
du maréchal de Tttrenne, la construction de
l'hôtel de ville, du palais de justice et de la salle
de spectacle. Ayant pris une part très-active aux
luttes électorales de 1890, il donna sa démission
après la révolution de Juillet, et se retira au châ-
teau de Laviot ( Belgique), ou il mourut.
•Documents particulière inédits; Correspondance
manuscrite, et Testament olographe de Huet.
ï muet Mt GtJEftviLL* ( Paui- Edmond) ,
petit-fih du précédent, né à Sedan, en 1&22, col-
laborateur à divers recueils périodiques , est le
descendant et représentent direct de cette famille.
■cet DE fbo«erviI;Le ( Claude- Jean-
Baptiste), écrivain et législateur français, né à
Romoràntin, en Sologne, lé ô octobre 1752, mort
à Orléans, en 1838. En 1791 , connu dans son
département par quelques écrits sur tés affaires
publiques, il fut élu dépoté du Loiret à l'Assem-
blée législative , ou il se montra partisan de la
monarchie constitutionnelle. Il obtint- des amé-
liorations dans l'administration forestière de son
département, une indemnité de 50,000 fr. pour
les pertes éprouvées dans l'Orléanais , et il en fit
réduire les contributions. L'année suivante , en
voyant les calamités qui menaçaient la France, il
revint dans son département. Il y futtraité comme
suspect et deux fols incarcéré. Depuis il se tint
13.
391
HUET
392
éloigné des affaires publiques pour se livrer à la
culture des lettres. 11 fut un des fondateurs de
l'académie d'Orléans, dont il devint le secrétaire
perpétuel et qui lui doit quelques travaux. 11 a
publié : Description plaisante d'une Fête
donnée à V occasion de la paix de Grenelle
(dans le Courrier de l'Europe , 5 novembre
1779) ; — Essai sur la Topographie d'Olivet;
1784, in-8°; —Notice sur la Vie et les Ouvrages
de Louis Pulci, avec un extrait de son poème
intitulé :Morgmte Maggiore (Esprit des Jour-
naux, ann. 1784); — Dissertation critique
sur deux ouvrages intitulés : Chroniques de
Turpin; Orléans, 1785, in- 12, et dans le t. m
des Mélanges de MiHin; — Éloge de Pilaire
des Roziers; Orléans et Paris, 1785, in-12; —
Recherches sur VOrigine de la Gabelle en
France (Esprit des Journaux, 1788) ; — Ré'
quête du tiers-état au roi; 1788, in-8°; —
Vues générales sur VÉtat de V Agriculture
dans la Sologne et sur les moyens de V amé-
liorer ; Orléans et Paris, 1788, m-8° : ce tra-
vail était demandé par rassemblée provinciale ;
— Réflexions d'un Citoyen sur les Pouvoirs
législatif, exécutif et judiciaire et sur V appel
au peuple; Orléans, 1789, in-8°; — Avis im-
portant sur la Manière de délibérer aux
États généraux, 1789, in-8°; — Catéchisme
des Trois Ordres, pour les assemblées d'élec-
tion (sous la rubrique deUn Gentilhomme fran-
çais ) ; 1789, in-8° ; — Des articles de politi-
que et de littérature dans le Journal de Paris,
dans V Esprit des Journaux et dans la Chro-
nique de Paris. G. de F.
Vergnand-Romagnesi, Notice historique et biogr. tur
C.-J.-B. Huet de Frobervitle; 1889.
huet de froberville (Barthélémy),
historien français, frère du précédent, né le 22
janvier 1761, à Romorantin, en Sologne, mort le
î2 février 1835. Après avoir fait ses études , il
partit comme officier dans le régiment de l'Ile-de-
France, et arriva dans cette colonie en 1778. Il
commanda, en 1781 , un détachement qui fit
partie de l'escadre du bailli de Suffren pour
l'expédition de l'Inde, et se distingua surtout
à l'affaire de Goudelour, sur la côte de Coro-
mandel. Les Français étant rentrés en pos-
session de Pondiehéry, Huet y fut envoyé.
Lorsque les troupes françaises en furent
retirées, il revint à l'Ile-de-France, et bientôt
quitta le service pour se fixer dans cette colonie.
L'estime dont il jouissait le fit appeler à remplir
quelques fonctions publiques, qu'il abandonna
bientôt pour s'occuper de plusieurs ouvrages
qu'il méditait sur l'histoire, les mœurs et la
langue des Malgaches. Il a publié à l'Ile-de-
France les ouvrages suivants,: Grand Diction*
naire Malgache; 2 vol. in-fol. : Dumont-Dur-
ville en a donné un abrégé dans son Voyage sur
V Astrolabe, partie philosophique ; — Traduc-
tion des Saintes Écritures en malgache,
idiome du sud, 2 vol. in-fol. ; — Collection
des Voyages de Mayeur, interprète de Be-
niowsky à Madagascar; 10 vol. in-fol.; —
Histoire de Ratsimilaho, roi de Foulepointe,
d'après la tradition des Malgaches ; in-fol. ; —
Essai sur les Malgaches : cet ouvrage, qui de-
vait être imprimé à Londres, a été égaré ; «— Le
Cimetière de Port-louis, scènes historiques;
2 vol. in-8°; — Sydner, ou les dangers de
Vimagination, roman; — Journal tenu pen-
dant la guerre de Vlnde, de 1781 à 1783,
in-fol. On lui attribue un poème burlesque in-
titulé : La Culpaïde. Il a rédigé le Journal des
iles -de-France et de Bourbon. Une nouvelle
édition de Y Histoire de Vile de Madagascar,
par Etienne de Flacourt , commencée par Huet,
est restée inachevée. , G. de F.
Louandre, l/s Littérature front, contemporaine. —
Renseignements particuliers.
huet de COETL18AN ( Jean-Baptiste-
Claude Reghàult), administrateur français, né
à Nantes, le 9 juin 1769, mort le 12 décembre
1823, à Savenay. 11 appartenait à une famille
distinguée dans la magistrature, fit ses études
chez les Oratoriens de sa ville natale, et fut reçu
avocat à Rennes en 1790. Partisan de la révo-
lution, il écrivit d'abord dans la Chronique du
Département de la Loire- Inférieure, rédigée
par une société de patriotes. H assista comme
délégué de la garde nationale de Nantes à la Fé-
dération générale qui eut lieu auChamp-de-Mars
de Paris le 14 juillet 1790. En 1792 il fut
membre du conseil communal de Nantes , et
commanda en second un des bataillons de la
garde nationale de cette ville. En correspondance
avec les fédéralistes du Calvados, il se réfugia
dans l'armée des Pyrénées orientales après la
chute des girondins ; quartier-maître dans les
compagnies franches, il se distingua comme ca-
pitaine d'état-major pendant le siège de Roses,
et à la prise de Figuières , sous les ordres du
général Pérignon. AMe de camp du général Du-
gommier, il fat chargé d'apporter à la Convention
des drapeaux pris sur l'ennemi. Huet quitta
bientôt le service militaire, et revint à Nantes, où
il fut nommé secrétaire général de l'administra-
tion centrale du département de la Loire-In-
férieure à la fin de 1795. En cette qualité, il
prit une part active à la création de l'école cen-
trale, et fut un des fondateurs de l'Institut dé-
partemental des Sciences et des Arts. Cette so-
ciété ayant reçu du gouvernement consulaire la
mission de s'occuper d'une statistique du dépar-
tement, Huet s'empressa d'envoyer sur cet objet
un manuscrit qui fut imprimé par ordre du
ministre. Sous le Directoire, Huet avait été pro-
posé pour remplir le ministère de la justice ; mais,
préférant rester à Nantes, il refusa. Nommé en
1802 membre du Tribunat, il ne voulut pas non
plus accepter; ce qui n'empêcha pas Napoléon
d'être indisposé contre lui, parce qu'il avait été
élu avant Lucien Bonaparte, son compétiteur. U
était depuis 1800 secrétaire général de la préfeo-
393
HUET
394
tare delà Loire-Inférieure. Impliqué, en 1806,
avec le receveur général du département, dans un
procès criminel, Huet resta vingt mois à la pri-
son de La Force à Paris. Le receveur général rat
condamné à huit ans de fers et à la flétrissure
pour faux en écriture publique et surcharges sur
ses registres. Huet fut solennellement acquitté ;
mais, au moment où il allait sortir de prison, un
ordre du gouvernement l'y retint. Belleville, in-
tendant général du Hanovre et ancien préfet
de la Loire-Inférieure obtint enfin sa liberté.Huet
revint à Nantes, et rat nommé, en 1J809, sous-
préfet à Bazas. H y était à peine arrivé, qu'il
se fit remarquer par son intrépidité, en ar-
rêtant avec quelques gardes nationaux l'insu-
bordination d'un régiment de lanciers polonais
qu'on envoyait en Espagne. Destitué à la pre-
mière restauration, Huet revint à Paris, et bien-
tôt il fut appelé aux fonctions de chef de la pre-
mière division au ministère de l'intérieur, la-
quelle rat réunie au ministère de la police gé-
nérale après le retour de Napoléon. L'arrondis-
sement de Chftteaubriant le choisit pour député
à la chambre des représentants. A la seconde
restauration, il prit un passeport pour l'Angle-
terre; mais, arrêté au premier relai, il rat amené
à la Conciergerieetmisau secret. Il resta en pri-
son du 1 er mai 1816 au 8 mars 1817. Le I er janvier
sa fille avait obtenu sa liberté; mais Huet refusa
d'en profiter, et attendit encore trois mois un
jugement : il finit par se décider à sortir de sa
prison, sans avoir été interrogé et sans qu'on
lui eût fait connaître les motifs de sa détention. -
Ses habits avaient été entièrement défaits pour
s'assurer qu'il n'emportait aucune correspon-
dance. Plus tard, Huet rat chargé de rédiger la
partie politique du Journal du Commerce, en
opposition avec le ministère Yillèle. Poursuivi
devant le tribunal de police correctionnelle, en
novembre 1822, pour attaque contre le gouver-
nement, il rat condamné, malgré la défense de
M' Barthe. Après cette affaire, Huet retourna
dans son département, et se retira à Savenay.
« Huet se distingua surtout, dit M. Armand Gué-
raud, comme publiciste habile et administrateur
éclairé, puis comme statisticien consciencieux ,
digne du titre qui lui avait été donné de premier
statisticien de son temps. » On ade lui : Statisti-
que du Département de la Loire-Inférieure,
publiée par ordre du ministre de V intérieur ;
Paris, 1802, in-8°; nouv. édition, revue et aug-
mentée, sous ce titre: Recherches économiques
et statistiques sur le Département de la
Loire- Inférieure, Annuaire de l'an XI; Nantes,
an xn, in-4°; — Mémoire pour J.-B. Huet,
secrétaire général de la préfecture et membre
du collège électoral du département de la
Loire*Infétïeure; Paris, 1806, in-4°; —De
l'organisation de la puissance civile dans
Vintérét monarchique, ou de la nécessité
d'instituer les administrations départemen-
tales et municipales en agences collectives ;
Paris, 1820, in-8°. Huet de Coetlisan a laissé
plusieurs manuscrits inachevés. Membre de l'A-
cadémie Celtique, il avait rédigé des notes sur les
Pierres de Carnac. Il a fait insérer divers ar-
ticles dans la Revue Encyclopédique et dans
d'autres recueils. Son Histoire des Courtisans
de Rome, écrite en latin, et ses Recherches sur
l'Économie politique des Anciens, sur les*
moyens qu'ils mettaient en usage pour faire
vivre leurs armées et transporter leur maté-
riel decampagne n'ont pas encore été publiées.
J. V.
Mahul, Annuaire NécroL, 18M.T- Dngast Matifeux,
Bibliographie révolutionnaire de Nantes, — Le Ly-
cée armoricain, t. III, p, 167. — Gucpin, Histoire de
Nantes. — Armand Guérand, Notice sur Huet de CoetU-
san t dans la Biographie Bretonne, — Aabbe', Vielh de
BoUjolin et Sainte-Preuve, Biogr. univ. et port, des Con-
temp. Notice biographique, dans la Revue Bncyctop.,
1893, t. XX, p 701. — Quérard, La France Littéraire.
ÎHtJBT (Paul), peintre français, né à Paris,
en 1804. Il étudia la peinture sous Gros et Pierre
Guérin, et se consacra au paysage, où il s'est dis-
tingué par l'aspect poétique de ses sites et par
une couleur harmonieuse et fine. Ses tableaux
ont paru à presque tous les Salons successifs ,
depuis celui de 1827. On peut citer, entre autres :
Inondation de Saint-Cloud (1832) ; —Soleil
couchant (id. ); — Vue des Environs d'An-
tibes ( id.) ; — Fourré de forêt (id. ) ; — Soirée
d'Automne ( 1833 ) ; — Vue d'Avignon (id. ) ; —
Vue duChdteaueTBu (M*);— Une Matinée de
printemps (1835 );—Un Coup de Vent, souve-
nir tf Auvergne (1838 ) ; — Paysage composé,
soleil couchant ( 1839 ) ; — Intérieur de Forêt
(1841);— Vue du Port et de la Rade de Nice
(id.) ; — Vue d'Avignon et du Château des Papes
(1843); — Paysage, scène tirée de VArioste
( 1848) ; — Vue prise aux environs du col de
Tende ( 1849 ) ; — Les Rives enchantées ( 1850 ) ;
•— Le Calme du Matin ( 1852) ; — Les Marais
salants, aux environs de Saint-Valéry -sur-
Somme ( 1854). M. Huet a exposé aussi, à dif-
férents Salons, des paysages gravés à l'eau-
forte. H a reçu une médaille de première classe en
1848 et 1855 et la croix de la Légion d'Honneur
en 1851> G. de F.
Documents particuliers.
J huet ( François), philosophe et publiciste
français, né le 26 décembre 1814, à Villeau ( ^ure-
et-Loir). Issu d'une famille de cultivateurs, il
devint à l'âge de vingt ans professeur suppléant
d'histoire au collège Rollin à Paris, et fut nommé
en 1835 professeur de philosophie à Gand; il
y resta en cette qualité jusqu'en 1850, époque
où il donna sa démission. On a de lui : Étude
sur ffenri de Gand; 1838; — Éléments de
Philosophie pure et appliquée; 1848 : dans cet
ouvrage, dont l'auteur prépare une édition plus
complète, il a pour but de restaurer et de com-
pléter les doctrines de Descartes, de Platon et de
Leibnitz, en partant du double principe de l'indé-
pendance de la raison et de son accord nécessaire
avec la foi chrétienne; — Le Règne social du
395 HUET .
Christianisme; 1853 : ouvrage mis a Yinçiw}
— Essais sur la Réforme catholique; tttfi :
en collaboration avec M. Qordas-pejXfflulini lat
innovations à faire dans le sein dû caibotiotiUMi
proposées par M. Hue t dans cet onwage consta-
tent à laisser participer les fidèles m gouverner
ment de l'Église , sans supprimer peur pela ft>**
- 'dre hiérarchique. — M. Hoet est encore auteur
d'un Discours sur lu Réforma de fa PMteso-
paie, qui sert d'introduction au Cartésianisme
de M. Bprdas-Demouiin. A, I^hûbut.
Documents particuliers.
hvbtb (Jaume i>e), poète espagnol, natif
<je l'^rajpu, vivait au commencement du sei-
zième siècle. Il est l'auteur de deux comedias ,
intitulées, l'une Vidrwna x in-b Q ,&k 18 feuilleta,
et Vautre ^«ortna^n-^, eq 15 feuillets; tontes
deux, imprimées sans date et sans nom de ville,
$ont excessivement rare*. Dans |'«ne et dans
l'autre , il y a dix interlocuteurs., et il s'agit $\
mouro qui se dénouent par un beureux mariage-
Elles offrent la singularité qu'elles se terminent
par quelques mauvais vers, latiqa, oji fauteur
s'excuse de n'avoir pas mjenx. fajt. L'inquisition
castillane, qui mettait alors beaucoup c|e livres
dans son Me* ex#w&Qtorius , plaça la Te$a*<
rina sous. Urufcriquede YaUadolifl, 1559. P, fl.
Tickpor, History ofSpa^h Mtferqture, \. II, p,£8,
qrjBT^IM* (ps L4). Vqv. hh Hubtçbjg.
* HfJBTTB (louis ), opticien français, né à Ren^
née* le 21 octobre 1756, mqrtàNan|ôs,|e 2 septem-
bre 1805, ébaucha sa première éducation, chez Je*
frères de la Doctrine chrétjeimé, en même tejnps,
qu'il travaillait cbez son p£re, tourneur en t>pjs;
mais, tourmenté du désir d> trpuyer dans les
voyage* lointains m aljmeni & son imagiqatjqn.
ardente, il quitta, à quinze ans la. maison pater-
nelle. Ce fut en Jlojlaude qu'il puisa, les. prer
mières notions de l'art de l'opticien, dans lequel
il devait plus tard acquérir une légitime répu-
tation. Il vjsita ensuite la Prusse , la Pologne et
la Russie , puis il consacra près de cinq ans fr
parcourir l'Italie. La yue et l'étude des monu-
ments. d« ce pays ne {prent qu'accroître son avi-
dité de connaître. Dans le but de la satisfaire,
il se rendit en Orient. Après quelques excursions
dans presque toutes les villes de l'Archipel et
une partie de la Grèce continentale, excursions
suivies d'un assez long séjour à Constantinople,
il gagna Alexandrie, d'où il pénétra p>ns. la
haute Egypte , en Arabie et eu Syrie. Revenu en
France, après quinze ans d'absence, il consacra
deux années à se perfectionner dans son art, la
première à Paris, la seconde à Londres,. Revenu
à Rennes en 1788, il s'y maria, et vint s'établir b
Nantes en 1793. Partageant désormais son temps
entre les travaux intellectuels et les occupa-
tions manuelles destinées à subvenir aux besoins
de sa famille , Huette enrichit l'optique de quel-
ques inventions ou procédés utiles. En 1794 il
appliqua les lentilles achromatiques à des mi-
croscopes qu'il avait lui-même fabriqués , lenlil-
- HUEZ 396
les qui remplissaient parCtfomentle* conditions
exigées de grossjsaeraent et de netteté , dans des
dimensions restreintes, entre % et 3 altimètres de
diamètre et une distance toile cor ropondiutie*
L'un des fondateurs, en 1798, a> l'Inclut dé-
partemental de le Lpûertpfewu!*, aujourd'hui
Soeiélé académique, il soumit * nette société, en
1802, un Menmre sur fr* Amusements aalva-
nvm&. En 1803 4 luicomwùqua la. ^ctfpltûA
d'un aoM^eïof^H^^/içMqu^avaitexéçnté,
Cet instrument , fart exwt, et d'un, transport fa*
cile , renfermait en tow^rne son niveau a Mie
d'air, propre a. donner la ligne boriaontafe en
tous sens. Qn t'emploie avantageusement dans les
observations d'astronomie nautique et poux, la
détermination à terre de toute espèce de plan hor
riaonta). La même année il présenta à l'Institut
des verres, plans à faces parallèles de 8 à 10 cenr,
timètres de diamètre, qui, soumis à des épreuves
rigoureuses, forent reconnus d'une précision ir-
réprochable. Deux ans plus tard il mit sous les
yeux du même oorpa savaut un objectif achro-
matique de 0,50 e de tfomètre sur 0^,70° de
foyer, construit ayeo du fÙnt-rglass français, dont
l'eiimJlot affranchissait 1$ Fraqee du tribut qu'elle
*Y*Jt JUWue-là payé à l'Angleterre pour ce proh
dui( VesprH proCo^démenl observateur de
Huette av Mt eorççu l'idée de. cet instrument à la
YUe d'qu v*rrç en çrj»t»l provenant de la ma-
nufactuxe <Ju ÇJreu&o.t, Le poids, de ce verre l'avait
conduit } Caire Je. calcul des, courbures en rap-
port avec le pouvoir ^iapersif d> cette matière,
pqqp i'a^hro<matis.e* avec le verre de Paris. Le
aucjtès justifia «es. calculs, et cet objectif, ap-
pliqué k une excellente tapette de John PoUoud,
^PPPPrta avantageusement la, comparaison avec
l'objectif de l'opticien anglais, sans aucune ré-
duction d'ouverture. Indépendamment de ces,
travaux, Huette a lais.se en mapuscrit ; fies Mé-
moires, sur ï tfgypte e( lq Syrie , qu| offrent
d> l'intérêt, mê^ne a,près }e voyage de Volney;
— Relation $un Voyage à Jérusalem et au»
Liww Maints; — Ascens&n <w Cratère $u
mont Eti\a. P, Levo-t,
Annales et Procès-verbc^v des séances publiques de
la Société Académique de Nantes et de la boire-tnfè-
vieùre. — Documents inédite.
h va? a (Dona Bavbm-Marta de), peintre es-
pagnole , née à Madrid , en 1733. Ses charmants
tableaux de genre lui firent onvrir, par une hono-
rable exception, les portas de l'Académie de
San- Fernando, «a 1752. Ltgoftt et la délicatesse
dont sont empreinte» sea nombreuses productions
les font rechercher des amateure. A. ne L.
Las OonstUuHonet f Aeta* de lq Aeademtm de San-
Fernando, de Madrid, -r Q^tel, Dictionnaire des
Peintres espagnols.
huez (Claude) y magistrat français, né à
Troyes, le 3 avril J724, massacré dans la même
ville, le 9 septembre \ 7 89. Il fut successivement
conseiller au bailliage et présidial de sa ville na-
tale, assesseur civil, lieutenant criminel, et enfin
maire de Troyes ( 29 juillet 1786 ). En 1787, il
Ml HUEZ — HUFELAND
siégea à l'assemblée provinciale de Chàlons.
Huex, en 1789, vint à Paris et révéla aux {che*
yins de son. pays les intrigue* qui se passaient
sans ses yeux pour excita» des troubles à Paris
et daps tes previnees. Ses lettrée furent sous-
traites à la poste, et dès Ions il fut dévoué à la
haine des ennemis du nouvel ordre de choses, qui,
sous le masque du patriotisme, le dénoncèrent à
ses concitoyens seron* on accapareur, tin ennemi
de Keefcer, delà liberté, etc. On Paeeqs* même d'a-
voir empoisonné des Marines vendues aux boulan-
gers (le ïtttyea. )) était alors, prewdeat du haU?
liage de cette ville et de la chambre de police,
il siégeait lorsque la salle fut envahie par une
troupe fie forieux i arraché de wm itégê, tt M
traîné dans, te cour, de Pfco{e| de vXb une corde au.
cou ; une (emme lui crev,a. les yeux avec des ci-
seau.*, pendant qu'il respirait encore, et d'hor-
ribles, mutilation* furent exercées sur son
corps. (0- fl- UfW»*-
Moderne (ISM.- Arnau^t, Jay. Jo^yet^rv^ns, Biogra-
phie nouvelle des Contemporains.
HUFEL41ID (GotUieb), jurisconsulte allemand,
né à Dantzig, le 19 octobre 1760, mort £ Halle,
le 25 février 1817." fl fit ses études à Leipzig et
à Gœttinguè, visita l'Allemagne, la France et les
Peys-ïjas, et enseigna le droit aux universités de
Iéna, de Wwrtzbourg, de Laidsbut et 4e palle.
Oe fut lui qui, en commun avec Ersch, eut l'idée
de publier la grande encyclopédie allemande
connue sous le nom dÏAllgemeines Èncyklopae-
die ôVErsch et Gruber. Il céda ses droits à Gruber
(voir ce nom). Les principaux ouvrages de Hufe-
land sont : De Legum in Pandectis interprétant
darum Subsldio, ex earum nexu et çonsecu-
tione petendo ; Iéna, 1785 in-4° ; — Ueber den
Grundsatz des Naturrechts (Du Principe du
Droit naturel) \ Leipzig, 1785; — Ueber einige
Rechte protestantischer Fur sien (De quel-
ques Droits des Princes protestants) ; Iéna, 1788 ;
— Lehrbuch des Naturrechts (Traité du Droit
naturel) ; |éna ? 1790; 2 e édit., 1795;— Beitrœgè
zur Berichttgung der positiven Rechtswissens- |
chaft (Matériaux pour rectifier quelques erreurs |
de la Science du Droit positif) ; Iéna, 1 792 ; —Ein- I
leitur\g In die Wissenschaft des teutseken |
Privatrechts (Introduction à la Science du Droit (
privé allemand); Iéna, 1 796; — Lehrbuch der j
Geschichte und Encyklopxdie aller in Teuts- !
chland geltenden positiven Rechte (Histoire et j
Encyclopédie de tous les Droits positifs ayant
valeur en Allemagne) ; Iéna, 1796. Get ouvrage,
(1) Ce cripe ne resta pas Impuni : le 27 novembre sui-
vant, la cour prévôtaïe de Tïoyes condamna les nommés
Claude- Augustin Picard , Jean Albert , ChrUtppbe Harlot
et Jacques Tous^iqt à a voie « bras, jambes, cuisses et*
reins rompus vifs », qprés avoir fait amende honorable
nus en chemise , la corde an col et tenant en main une
torche de cire ardente ; la femme Marguerite Vilain ,
femme Joannes , fut également condamnée , après avoir
de même fait amende honorable, à être pendue et étran-
glée. Ce Jugement fut exécuté dans toute sa Juste sévé-
rité. {Moniteur du î* décembre 1789.)
398
dont la première partie seule a paru, traite de
l'histoire du droit romain ; — Abriss der Wis-
senschaftskundeund Méthodologie der Rechts
gelehrsamkeit ( Éléments de la Science et
de la Méthodologie de la Jurisprudence ) ; Iéna,
1797 ; — Insti&uMonen des gesammten po-
sitiven Rechts (Institution du Droit positif en-
tier); Iéna, 17tt*;à*édit., 1803;— Ueber den
eigenthumlichen Geisi des roemischen Rechts,
in Allgemeinen uhd in Minaelnen (De l'Esprit
particulier dn Droit romain en général et en par-
ticulier); Giesaen, 18t5-1817, 2 vol. R. L.
Bioçr. de Hnfeiand, en tète de ta thèse de K.-F. Walcb, -
Reliquim G<9ti$0ver&s inter Bvtgarvm 4e Bulgarit et
Afart,wym ÇQfiam (fa pr#?tatym?daÉw;Iéna, 1785.
HUFKUaw (Ghrtsfaphe-GuUlaume), méde-
cin allemand, né le 13 août 1762, à Langensalza
(Tkuriuge), mort à Berlin, le 26 août 1836.
Fils d'un médechi, il étudia lui-même la. mé-
decine à Iéna, et à Gœttinguè, et obtint en 1783
le grade de docteur, il exerça ensuite l'art de
guérir à Weiroar, occupa en 1793 une chaire
à l'université de Jéna, et vint en 1798 a Berlin,
où il fut chargé de la direction du Collegium
Medicum et de la surveillance de l'hôpital public
La Charité. Le roi de Prusse le nomma son
médecin particulier, et l'Académie des Sciences
le reçut parmi ses membres, pepuis la fondation
de l'université de Berlin (1809), il y enseigna la
patholofie spéciale et la thérapie. Hufeland a
joui d'une grande réputation comme médecin
pratique et comme professeur. Ses nombreux
ouvrages ont été souvent réimprimés en Alle-
magne; plusieurs furent traduits en français.
Voici les principaux : fiemerkungen %eber die
hunstlichen und natiir lichen Rlattern, zu
Weimar in Jahre J788 ( Observations sur la
Petite Vérole artificielle et naturelle qui régna
à Weimar daqs Fan 1788); Leipzig, 1789, 1793,
1798, uvr8°; -r- Neutre Annalen der fran-
zçesisehen Arzneykunde (Annales de Médecine
française) ; Leipzig, 179H8QQ, t-I-HI; — Ueber
die Vngewissheit des Todes uud das ein-
zigeuntntegliche Mitfel sichvan seiner Wir-
kliçhkeit zu ueberzeugen und das Lebendig-
begraben unmaegHçh zp, mqcfyen (De l'Incer-
titude dans, l'Apparence de la mort et du seul
moyen de se convaincre de sa réalité et d'cna-
péçher l'enterrement à>n vivant); Weimar,
1791, in-8R; Graet*, 179| et J834, in-8°; —
Aufklaei^ngen der Arzneyivissenscbaft ans
den neuesten Mntdeçhungen ffer Physik und
Cheptiï (Explications touchant la Médecine,
d'après, fes dernières Couvertes de physique
et de chïimej; W**" 1 **» 1793-1794, in-8°; —
VQllstaçftdwe parsteùung der Kraefte und
des Gefrrauchs, (fer salzsauern Schu)ererde
in Çmnkheilen (Exposition complète des
ver-tys et de l'usage 0u Wfuriate 4e Baryte) \ Ber-
lin, 1794, in-8°; — Çrinnçrungen an aile
Muetter denen die Gesundfie\t ihrer Kinder
am Berzen hegt (Avis aux Mères touchant la
399
HUEELAND — HUGEL
Santé de leurs Enfants); Bietefeld, 1794: -Ge-
meinnûtzige Aufsaetze zur Be/œrderung der
sundheït, des Wohlseyns und vernûnftiger
GemedicinischenErfahrung (Dissertations po-
pulaires sur la Santé, sa conservation, etc.) ; Leip-
zig, 1794,in-8°; — Ideenueber Pathogenie,
oder Einfiuss der Lebenskraft ouf Bntste-
hung und Form der Krankheiten (Idées sur
la Pathogénie, ou de l'influence de la force vitale
sur l'origine et la forme des maladies); Iéna,
1795, in-8° ; — Ueber die Ursachen, Brkcnnt-
niss und ffeilung der Skrofelkrankheit (Traité
de la Maladie scrophuleuse) ; Berlin, 1785, in-8°;
3 e édit, Berlin, 1819 : ouvrage couronné par
l'Académie impériale des Curieux de la Nature;
traduit en français sur la 3 e édition allemande
(1819) et accompagné de notes, par J.-B. Bous-
quet; Paris, 1821;— Makrobiotik, oder die
Kunstdas menschliche Leben zuvertoengern
(Macrobiotique, ou l'art de prolonger la vie hu-
maine) ; Iéna, 1796 ; 6* édit, Berlin, 1842 : ouvrage
célèbre, qui a été traduit de tontes les langues
européennes. On en a des traductions françaises
dU. Duvau, Iéna, 1798,2 vol. in-8°; Coblcntz,
1799, 2 vol.; Lausanne et Lyon, 1809; Ham-
bourg, 1805; Paris, 1810; d'À.-J.-L. Jourdan,
Paris, 1824 ; — Bemerhungen ueber dos Ner-
venfieber und seine Complieationen in den
Jahren 1796, 1797, et 1798 (Observations sur
la Fièvre nerveuse et ses complications pendant
les années 1796, 1797 et 1798) ; Iéna, 1799, in-8° ;
_ Rinrichtung und Gesetze des medici-
nischen Instituts zu Iéna (De l'Établissement
et des Lois de l'Institut médical de Iéna) ; Iéna,
1798, in-8°; —Pathologie; Iéna, 1798,in-8°;
— Guter Rath an Mûtter ueber die wichtigs-
ten Punkte der physischen Erziehung der
Kinder in den ersten Jahren (Avis aux Mères
•nr les points les plus importants de l'Éducation
physique des Enfants dans les premières années) ;
Berlin, 1799, 1803, in-8°, 5 e édit, 1844; trad.
en français, Francfort-sur-le-Mein, 1800; —
System der praktischen Heilkunde (Système
de Médecine pratique); Iéna et Leipzig, 1800-
1805, 2 vol.; — Ueber die Vergiftung durch
Branntwein (De l'Empoisonnement par l'Eau-
de-vie); Berlin, 1802, in-8°; — Ueber lau-
warme Boeder (Des Bains tièdes); Francfort,
1802, in- 12; trad. française, Mannheim, 1803;
— Der Schlaf und die Schlafzimmer in Be-
ziehung auf die Gesundheit mit einem An-
hange ûber die Kunst dos Leben zu verlaen-
gern (Le Sommeil et les chambres à coucher et
leurs rapports avec la santé, avec un supplément
sur l'art de prolonger la vie) ; Vienne, 1803, in-8°;
— Bemerhungen ueber das in Jahre 1806
und 1807 in Preussen herrschende Nerven-
fieber (Observations sur la Fièvre nerveuse qui
a régné en Prusse en 1806 et 1807) ; Berlin, 1807,
in-8* ; trad. en français par Yaidy , Berlin, 1808 ;
— Arnienpharmaeopœa (Pharmacie des Pau-
vres) ; Berlin, 1810 ; — Gesehichte der Gesund-
heit nebst einer physischen Charakteristik
. des jetzigen Zeitalters (Histoire de la Santé, et
Caractéristique physique de notre époque) ; Berlin,
1812, in-8°; — Ueber die Eriegspest alter
und neuer Zeiten (De la Peste causée par la
guerre dans les temps anciens et modernes ) ; Ber-
lin, 1814, in-8°i — Praktische Uebersicht der
vorzuglichsten Heilquellen Deutschlands
(Aperçu pratique des meilleures Eaux minérales de
r Allemagne); Berlin, 1815,in-8°;4 e édit., 1840;-.
Aufforderung an aile Aerzte Deutschlands
und ties Auslandes fur die Beibehaltung der
û/ficinellen Natnen der Heilmittel (Adresse
à tous les médecins sur la nécessité de conser-
ver les noms officinale des médicaments) ; Berlin,
1815; trad. française, Berlin, 1821; — En-
chiridion Medicum, oder Anleitung zur me*
dieinischen Praxis , Vermaechtniss einer
bOjaehrigen Erfahrung (Enchiridion Medi-
cum, ou introduction à la pratique de la médecine,
résultat d'une expérience de chiquante ans) ; Ber-
lin,! 836 ; 9 e édit., 1851 ; — Kîeineremediciniscke
Schrtften (Opuscules de Médecine) ; Berlin, 1822-
1834, 5 vol. — Ce fut Hufeland qui fonda le
Journal der praktischen Heilkunde (Journal
de Médecine pratique), 1795, qui existe encore
aujourd'hui. D r . L.
Augustin (P.-L), Hu/elands Leben tend ïFirUnfir
JTissenschaft, Staatund Menschheit ; Postdam, 1837 ; -
StourdJa( Alexandre de). Hufeland, Esquisse de sa vie
et de sa mort; Berlin 1887. — Cons.-Lex.
UÛFffAGÉL. Voy. HGEFNjEGEL.
hug (Jean-Léonard), théologien allemand,
né à Constance, le 1 er juin 1765, mort à Fri-
bourg, le 1 1 mars 1846. 11 fut professeur de théo-
logie à l'université de Fribourg. On a de lui :
Die Erfindung der Buchstabenschrift , ihr
Zustand und frûhester Gebrauch im Alter'
thume (L'Invention de l'Écriture en caractères,
son état et son usage dans l'antiquité); Ulm,
1801 ; — Einleitung in die Schri/ten des
Neuen Testaments (Introduction aux écrits du
Nouveau Testament) ; Stuttgard, 1808, 2 vol.;
4 e édit, 1847 : ouvrage qui a été traduit en fran-
çais et en anglais; — Untersuchungen ûber
den Mythus der beruhmtesten Voelker der
alten Welt (Recherches sur le mythe des prin-
cipaux peuples de l'antiquité); Fribourg, 1812;
— Katechismus (Catéchisme); ibid., 1836; —
Gutachten ûber das Leben Jesu von D.-F.
Strauss (Critique de La vie de Jésus par D.-F.
Strauss ) ; ibid., 1840-1844, 2 vol. V— u.
ConversaL'Lex.
J uugel ( Charles - Alexandre - Anselme ,
baron de), voyageur allemand, né à Ratisbonne,
le 25 avril 1796. Il fit ses études à l'univer-
sité de Heidelberg, entra en 1814 dans l'armée
autrichienne, et assista comme capitaine à la der-
nière guerre contre Napoléon I er . Après 1830 il
visita la Grèce, l'Egypte, l'Indoustan, et péné-
tra jusqu'au Thibot. U a publié : Enumerafto
Plant arum quas in Novx Hollandix oraaus-
trooccidentali, ad fiuvium Cygnomm et in
401
HUGEL — HUGO
402
sinu Régis Georgii, de Buegel collegit; Vienne,
1837; — Fische von Kaschmir (Poissons do
Kaschmir); Vienne, 1838; —Kaschmir und
dos Reich der Sikhs (Cachemire et l'empire
des Sikhs); Stuttgard, 1840-1842, 4 vol.; —
Dos Becken von Kabul ( Le Bassin de Kaboul ) ;
Vienne, 1851-1862, 2 vol. ; — une relation ra-
pide du voyage , et qui a été faite par M. Hu-
gel même , se trouve dans les comptes-rendus
officiels de l'Assemblée des Naturalistes alle-
mands; Prague, 1838, et Graetz, 1843. R. L.
Conv.- Lex. der Gegenwart.
hugfort (Ignace), peintre de l'école flo-
rentine, né à Florence, d'un père anglais, en 1703,
mort en 1778. Quelques petits tableaux, qui fu-
rent jugés dignes de figurer dans la galerie de
Florence, lui firent une réputation que ne lui eus-
sent pas acquise ses ouvrages de plus grande
proportion. Parmi ces derniers, assez nombreux
dans les églises de Florence , un seul obtint un
succès qui a été en partie confirmé par la posté-
rité : c'est un tableau de l'église Sainte-Félicité
représentant V Archange Raphaël et le jeune
Tobie rendant la Vue à son Père. A Pistoja
on voit de ce maître une Sainte Thérèse, dans
l'église del Carminé, et la Réception des Reli-
ques de saint Jacques, à Saint- Barthélémy.
Hugfort était très-habile connaisseur en peinture,
et savait reconnaître au premier coup d'œil les
ouvrages non-seulement des maîtres , mais en-
core de leurs élèves.
Hugfort eut un frère nommé Henri , né en
1695, religieux de l'Ordre de Vallombreuse, qui
excella dans l'art de peindre la scagliole, et mou-
rut en 1771. E. B— n.
Orlandi, Abbecedario. — Laazl, Storia delta Pittura.
— Tlcozzl, Dizionario. — Fantozzf, Guida dï Firenze.
— Toloroei, Guida di Pistoja. - Valéry, Voyages Mito-
' riques et littéraire» en Italie.
hcghes (John), poète anglais, né à Mari-
borcMigh (Wiltshire), en 1677, mort le 17 fé-
vrier 1720. Il fut élevé à Londres, dans l'Aca-
démie des dissidents. La poésie , la musique et
le dessin l'attirèrent également, et dans chacun
de ces arts il fut un amateur distingué et non
un talent original. Sa poésie, qu'il mit au service
du parti whig, lui valut la place lucrative de se-
crétaire des commissaires de paix. 11 mourut le
soir même de la première représentation du Siège
de Damas. Ses œuvres, parmi lesquelles on re-
marque un poème sur la paix de Ryswick , The
Court of Neptune, Pindaric Ode on the Bouse
of Nassau, et plusieurs pièces de théâtre, furent
publiées en 1735, 2 vol. in- 12. Il traduisit les Dia-
logues des Morts, de Fontenelle; les Révolu-
tions du Portugal, de Vertot; les Lettres
d'Abélard et d'Héloïse. Il fournit des articles
au Tatler, an Spectator, au Guardian, et pu-
blia une édition des Œuvres deSpenser; 1715,
6 vol. in- 12. Z.
Jobnson, Lines of the English Poets. — Biographia
Britannica. — Biographia Dramatica.
hcghes (Jabez), traducteur anglais, frère
du précédent, né en 1685, mort le 17 janvier
173f. Il traduisit V Enlèvement de Proserpine,
de Claudien, et l'épisode de Sextus et Eric»
thon, dans la Pharsale de Lucain; 1714,
in-8*; — les Vies des Césars, de Suétone,
1717 ; — des Nouvelles de Cervantes , dans la
Select. Collection of Novels and Historiés;
1729. On publia de lui après sa mort Miscel-
lanies in verse and prose; 1737, in-8 . Z.
Chatoiera, General Biographical Dietionary.
hughes (John), philologue anglais , né en
1682, mort en 1710. Il était membre du collège
de Jésus à Cambridge. On a de lui une bonne
édition du traité Sur le Sacerdoce (H«pl lepu-
<TWTic) de saint Chrysostome; 1710, in-8°;
réimprimée en 1 7 1 2. Z.
Chalmen, General Biog. Met.
hughes ( Griffith ) , naturaliste anglais , vi-
vait au dix-huitième siècle. Il était ministre de
la paroisse de Lacy, dans 111e de La Barbade, où
il résida pendant douze ans. A son retour il pu-
blia Natural History of Barbadoes ; Londres,
1750, in-fol., avec vingt-quatre planches ; réim-
primé en 1760 , in-fol., avec vingt-neuf planches.
Hughes était membre de la Société royale de
Londres, et il inséra dans les Philosophical
Transactions un mémoire sur les zoophytes des
côtes des lies Barbades. Z.
Wats, Bibliotheea Britannica. - Clément de Genève,
Cinq pennées littéraires.
J hugi (François-Joseph), naturaliste
suisse, est né en 1795, à Grenchen (canton
de Soleure). Il étudia les sciences naturelles à
Landsbut et à Vienne, visita une partie de l'Al-
lemagne et de la Hongrie, et fonda, de retour
en sa patrie, un musée d'histoire naturelle que
lui acheta en 1830 la ville de Soleure. Hugi
s'est surtout fait connaître par ses travaux
sur les glaciers, sur la formation desquels il émet
des théories particulières. Ses principaux ou-
vrages sont : NaturhUtorische Alpenreisen
(Voyages scientifiques dans les Alpes); Soleure,
1830; — Die Erde als Organismus (La Terre
considérée comme un Organisme) ; ibid., 1841 :
cet ouvrage est le fruit d'un voyage que M. Hugi
entreprit en 1835 dans le nord de l'Afrique , en
Sicile et en Italie; — Ueber dos Wesen der
Gletscher (De la Nature des Glaciers); Stutt-
gart, 1842; — Die Gletscher und die erra*
tischen Blôcke (Les Glaciers et les Blocs erra-
tiques); Soleure, 1843. M. Hugi est aussi le
fondateur du jardin botanique de Soleure. R. L.
Conv.-Lex.
hugo (fferman), érudit belge, né à Bruxelles,
en 1588 , mort à Rhinberg, le 1 1 septembre 1629.
Sa famille était originaire de la Bourgogne. 11
entra comme novice chez les jésuites de Tournay
en 1605, professa les humanités à Anvers, et de-
vint préfet des études à Bruxelles. Il suivit en
Espagne le duc d'Arschot, dont il était le confes-
seur, et de retour en Flandre, Ambroise Spi-
nola le prit pour son aumônier. Hugo suivit
409
Spinola sur les champs de bataille, et déploya au
milieu des combats on grand sang-froid. La
peste s'étant déclarée dans le camp espagnol,
Hugo y succomba. On a de lui : De prima
Seribendi Origine, et univers» rei litterarim
antiquitate; Anvers, Piantin, 1617, in-8° ; réim-
primé avec additions de C.-H. Trotz, Trêves,
1738, in-8° ; trad. en français, sous le titre de :
Dissertation historique sur l'Invention des
Lettres et des caractères d'écriture, et sur
les instruments dont les anciens se sont ser-
vis pour écrire; Paris, 1774, in-12 ; — De Vera
Fidecapessenda ad Neo-Eyangelicanam Syno-
dum Dordracenam Apologetici Librï très,
HUGO , 404
nova f en cinq hvres, dédiés à Philippe IV ; An-
vers, Piantin, 1628 et 1630, in-fol. Selon l'opi-
nion de quelques bibliographes, toutes les gra-
vures de ce livre, le titre excepté, seraient de
Gallot; — Vita P. Carol\ Spinolœ, Societatis
Jesu, pro christiana rehigione in Japonia
mortui, trad. de l'italien <lu P. Fabio-Amhxo&ia
Spinola; Anvers, Piantin, 1630, in- 8°, avec
portrait; — VitaJohannis Bfirchmanni Flan-
dro-Belgse religiosi Societatis Jesu, trad. de
l'italien du P. Yirgilio Çepario ; Anvers, Pian-
tin, 1630, in-8°, avec portrait. Le P. Hugo a
laissé en manuscrit une Bistoria Bruxellx et
trois tomes Contra Alkeos. C'est à tort que
adversus Balthasarem Meisnerum fathera- \ Cbaudon et Delandine lui onj attribué la traduc-
num et Henricum Brandiumcalvinistum,Qtc.;
Anvers, Piantin, 1620, in-8° ; Baltfcasar Meisner
répondit a cet ouvrage par Xl\ Dispuktftimes ;
Strasbourg, 1623, in-8° ;— Pia Qetideria, ëm-
blematis, elegiis etaffectibus SS. Patrum il-
lustrala; Anvers, 1624, in-8°, avec de jolies
figures sur cuivre de Poetius a Bolowert; et
1628, in-12, aveefig. sur bois. Ce recueil, réim-
primé fort souvent, est divisé en trois livres ; le
premier a pour titre: GemitusAnimx peniten-
tis;h second Vota Animas sanctae ; le troisième
Suspiria Animae amant U. Ce sont de longues
paraphrases, en vers élégiaques, de passages choi-
sis de l'Écriture Sainte. Hugo, a délayé dans une
soixantaine de vers chacun des versets qu'il a
pris ponr texte, et a substitué à la simplicité su-
blime de ses modèles de froides amplifications;
il versifie, du veste, asseï bien ; il est même quel-
quefois poète, mais il n'a jamais été inspiré par
la musc de David. Les pia Desideria ont été
traduits en français par Boèce de Bolowert,
Anvers et Paris, 1627, in-8°; une autre édition
a para sous le titre de F Ame amante de son
Dieu, Cologne, 1717, et Paris, 1790, in-12,
avec 60 fig. Plusieurs éditions ont aussi été pu-
bliées en anglais , par Edmond Arwaker, Lon-
dres, 1686, m-8°,47 grav. ; en allemand, par Karl
Stengel , Augsbourg, 1628, in-12 , et Wesel, 1706,
' in-16; en espagnol, par le P. Pedro de Salas;
enfin en hollandais , en italien ; — Qbsidio Bre-
dana armis Philippi IV, auspiciis Isabelte,
ductu Ambr. SpinoUe, prxfecta; Anvers,
Piantin, 1626 et t§29, in-fol. Le P. Hugo avait
été présent à ce siège, et sa relation peut être
consultée avec fruit; elle a été traduite en espa-
gnol par Emanuel Sueyro : Sitia de Breda ren-
dida a las armas del reu don Phelippe IV, a
la virtud de la infante dona Isabel, al va-
lor del marques Ambr. Spinola, etc. , Anvers,
Piantin, 1627, in-fol.; en français, par Philippe
Chifuet : Le Siège de la ville de Breda con-
quise par les armes du roy Philippe IV, par
la direction de Vinfdnte Isabelle-Ci.- Eugé-
nie, par la valeur du marquis Ambr. Spi-
nola , Anvers, Piantin, 1631, in-fol., avec cart. ;
en anglais; et enfin en italien , Milan, 1627, in-8°,
très-rare ; — De Militia equestvi antiqua et
tion française du Voyage astronomique et géo-
graphique dans VIS tôt de F Église pour me-
surer deux fayré* 4u méridien, par les
PP. Maire et Poscovish» Paris, $770, uv4°.
A. L.
Sotwel, De Scxiptorifius Qocietatis Jesu. — Goethals,
Histoire des Lettres en Belgique, t. II. — Cbaudon et
Delandine, Dictionnaire Universel. — Aiofs et Augustin
de Bâcher, Bibliothèque des Écrfrakns de la Cempaçnie
de Jétu*.
HUGQ ( Charles-Louis ) , historien français ,
né à Saint-Mihieï (Lorraine), en mars 1667,
mort à Etival, le 2 août 1739. Il entra en 1683
dans l'ordre des Prémontrés réformés de Lor-
raine, et fit profession en 1687. Après avoir ob-
tenu à Bourges Je grade de docteur, il professa
la théologie à Jand'heurs en 1691 , et à Étirai
en 1693. Coadjuteur c|e l'abbé d'Çtivalen 1710,
il devint l'année suivante abbé de Fontaine- An-
dré. Enfin, il obtint l'abbaye cfÉtîval en 1722,
et fut nommé évêque de Ptolémaïde en 1728.
Ses travaux les plus importants sont : Vie de
saint Norbert , archevêque de Magdebourg et
fondateur de V Ordre des Chanoines réguliers
Prémontrés; Luxembourg, 1704, in-4»;* —
Traité historique et critique sur V Origine de
la Maison de Lorraine; Berlin (Nancy) , 1711,
in-8° : cet écrit, publié sous le pseudonyme de
Balireourt, fut condamné par le parlement de
Paris, le 17 décembre 1712, en même temps
que l'ouvrage suivant : — Réflexions sur deux
ouvrages nouvellement imprimés , concernant
V histoire de la Maison de Lorraine (Nancy ),
1712, in-12 : ces deux ouvrages sont : La Lor-
raine ancienne et moderne de Jean Mussey , et
le Supplément de V Histoire de la Maison de
Lorraine, par le P. Benoît Picard , capucin ; —
Ifistoire de la Maison des Sales, originaire
de Béarn; Nancy, 1716, in-fol. ; — Sacrm An-
tiquitatis Monumenta historica , dogmatica ,
diplomatica, cum notis; 1725-1731, 2 Toi.
in-fol. : le premier est imprimé à Eh val, et le
second à Saint-Dié ; — Sacri et canonici Or-
dinis Praemonstratensis Annales. Par s prima,
monasterologiam , sive singulorum ordinis
monasteriorum singularem historiam com-
pleetens; Nancy, 1734-1736, 2 vol. in-fol. : la
seconde partie devait contenir l'histoire générale
405
HUGO
406
de l'Ordre de* Prémontrés. Le P. Blampain ,
prémontré dT^tival, a publié sur ce travail : fur
gement des Écrits de M. Hugo, abfréd'Ééival,
historiographe de l'ordre des Prémontrés
(Nancy), \73$ tl ift-8 , Op attribue à; Hugo la
Défense de ta Lorraine contre les prétentions
de la FWHCf, etc., par Jean-Pierre-Louia P. P*. ;
La Haye, 1697, in-13. Hugo, qui n'a mis son
nom à aucun de seg outragea, a laissé manua-î
crite une 8\sto\re de fywraine jusqu'à pré-
&n( (4718). Ç. Rbonaju).
Ooœ faltuet, MMfotAégin £Qrroiw. — Mqréi% Grand
Dictionnaire Historique. — J. teloog, Biblioth. hist. fo,
la Franep, édit. de Fcvrçt de Fontette. — Barbier, Dic~
tionnair* de* Ouvrage* Anonyme.— Quéraçé, ha Franee
Littéraire.
huqo (Gusfaw), jurisconsulte allemand,
né le 23 novembre 1764, à Loerrach (Bade),
mort à Gcpttiqgue, le 16 septembre 1844. Qepuis
1788 il enseigna le droit à l'université de Gcet-
tingue. Conformément aux conseils donnés par
Leibniz et Putter, il fut un des premiers pro-
fesseurs qui enseignèrent le droit romain suivant
l'ordre naturel des matières, et non d'après la
suite des titres adoptés dans le* In&titutes ou les
Pandeetes. Jl distribua l'histoire dq droit romain
dans des époques, déterminées, et appliqua la
philosophie du droit positif à l'étude du droit
civil. lié principal ouvrage (te Hugo, lekrbuch
des çivilistischen Cursits (Cours de Droit
civil), embrassa les traités suivants : 1° Lehr-
buch (fer juristisfihçn Encyclopédie (En-
cyclopédie du Droit); Berlin; 1811; 8 e édit.,
1835 ; 2° lehvbuch des JSaturreohts, als etoer
Philosophie des posïtiven jtechts ( Traité du
Droit naturel, considéré comme philosophie
du Droit positif); Berlin, 1809; 4 e édit., 1819)
3° JLehrbuch der Geschichte des roemis-
chen Mçchts bu au/ Justinian t Histoire du
Droit romain jusqu'à l'empereur Justinien);
Berlin, 1810; 11 e édit., 1832; 4° Haudbuek
des rwmisçhm Mwhts (Manuel du Droit
romain ) ; ibid.; V édit., 1826 ; — Chrestema*
thie von Bewisstellen fuer das keutige
roemisçbe Recht (Chrestomathie d'Argument*
en faveur du Droit romain d'aujourd'hui); Badin,
1807 : Supplément; Gcettingue, 1812; 3 e édit.,
1820 i — Lehrpuch der Qescfàfihte. $e$. Çwhts
seit Justinian ( Jtfstojre du Droit depuis l'em-
pereur Justinien ) ; Berlin, 1812 ; 3 e édit., 1&3Q ;
— Lehrbuch der JHgesten (Traité des Di-
gestes) ; ibid., 1822 et 1828; une partie de ces
ouvrages remarquables a été traduite en français
par Jourdain et revue par F. Poncelet : B%s r
totre du Droit romain; Paris^ 1821, a vol.
in-8°; — Fragmenta d'Ulpien; Gcettingue,
1788; — Civilistisches Magasin (Magasin du
Droit civil) ; Berlin, 1814-1837, 6 vol.; — Bei-
traege zur civilistichen pùcher - Kenntniss
der letzten vierzig Jahre ( Matériaux pour la
Bibliographie du Droit civil des dernières années);
Berlin, 1828-1845, 8 vol. V — u.
Conv. Le».
HUGO (Joseph'Léopold-Sigisbert, comte),
général français, né à Nancy, en 1774, mort à
Paris, le 30 janvier 1828. Engagé comme simple
soldat à quatorze ans, il était officier en 1790,
et parcourut de la manière la plus brillante la
série des guerres de la révolution. « Il signala
de bonne heure, dit la BiographieR&bbe, ses ta-
lents et son courage, soit dans la Vendée, soit
suri les bords du Bhjn, soit enfin sur ceux dn
Dairahe. A la bataille de Vihiers, dans la Vendée,
à la tête seulement de cinquante nommes, il arrêta
plusieurs milliers de Vendéens; et quelques an-
nées plus tard, en Italie, an fameux combat de
Caldiepo, où l'armée française fut un moment
repoussas, Hugo, alors chef de bataillon, en en-
levant ce village et en s'y maintenant pendant
quatre heures, malgré les efforts de l'ennemi,
sauva l'armée française de la nécessité de repas-
ser l'Adige, et lui prépara la victoire qui suc-
céda à sa défaite momentanée. Passé au service
du roi de Naples, Joseph Bonaparte, et sur la de-
mande de ce prince, qui l'avait connu aux con-
férences de Lnnéville, auxquelles, malgré sa
grande jeunesse, Hugo avait assisté en sa qualité
de commandant de place, ce rat lui qui extirpa de
ce royaume le fléau du brigandage, en détruisant
les bandes dn chef redoutable connu sous le nom
de Fra Diavolo (voy. ce nom). » Nommé en
récompense de ses services colonel, maréchal du
palais, et chef militaire de la province d'Aveline,
Hugo acquit de nouveaux droits à l'estime du
roi Joseph, qui Remmena en Espagne, lorsqu'il
changea de couronne. £n Espagne, Hugo fut
chargé de la formation et du commandement du
régiment royal étranger, et bientôt le roi ajouta
à ces fonetien» l'inspection de tous les corps
fpnoés ou à former dans le royaume. A trente-
quatre ans, Hngo était général et gouverneur
des provinces d'Avila, de Ségovie, de Soria,
puis de Gnadalaxara, de Siguienia et de Molina
d'Aragon. U guerroya pendant trois ans contre
le fameux Ëmpecinado ( voy. ce nom), et le battit
en trente-deux rencontres. Par sou activité,
Hugo réussit à délivrer des guérillas tout le
cours du Tage, et à rétablir les communications
entre les corps français. On a estimé à plus de
30 millions de réaux la valeur des convois qu'il
enleva aux insurgés de 1809 à 1811. A Qcana,
il arrêta le corps de Balleateros , et opéra des
diversions importantes pour l'armée française. En
1812 il fut nommé au commandement de la
place de Madrid, et il commanda l'arrière-garée,
lorsque, peu de temps après, les Français forent
obligés d'évacuer cette capitale. Dans cette retraite
précipitée^ et désastreuse, il sauva l'armée et le
roi Joseph* lui-même, en arrêtant les Anglais à la
hauteur d'Alegria. Rentré en France en 1813,
le général Hugo fat immédiatement appelé par
l'empereur Napoléon au commandement de
Thionviile. Les places de guerre de l'intérieur
avaient été assez mal entretenues sous l'empire.
Hugo défendit Thionviile, à peu près dépourvue
407
HUGO
408
de munitions de guerre, ouverte de toutes parts,
et avec une faible garnison, pendant quatre-vingt-
huit jours d'un blocus très-serré. Foroé de l'a-
bandonner par suite de la déchéance de Napoléon,
il alla la défendre encore, pendant les Cent-Jours,
contre les alliés, qui, à leur retour, voulaient la
démanteler et emporter son matériel. La se-
conde restauration lui rendit le repos. H se re-
tira à Blois , où il s'occupa de la composition
de divers ouvrages. En 1824 , il fut compris
dans l'ordonnance qui mit d'un coup cent cin-
quante généraux de l'ancienne armée à la retraite.
Revenu plus tard à Paris, il fut emporté par
une attaque d'apoplexie foudroyante. « Le ca-
ractère du général Hugo était, dit la Biographie
Rabbe, un heureux mélange de candeur, de
franchise et de bienveillance. 11 était homme d'es-
prit, et sa conversation, pleine de souvenirs in-
téressants , était aussi instructive qu'elle était
agréable. » On a de lui : Coup d'oeil mi-
litaire sur la manière d'escorter, d'attaquer
et de défendre les convois, et sur les moyens
de diminuer la fréquence des convois et d'en
assurer la marche; suivi d'un mot sur le
pillage; Paris, 1796, in-12; — Mémoire sur
les moyens de suppléer à la traite des nè-
gres par des individus libres, et d'une ma*
nière qui garantisse pour l'avenir la sûreté
des colons et la dépendance des colonies
(sous le pseudonyme de Genty) ; Blois, 1818,
in-8°; — Journal historique du Blocus de
Thionville en 1814, et de Thionville, Sierck
et Rodemack en 1815, contenant quelques dé-
tails sur le siège de Longwy; rédigé sur des
rapports et mémoires communiqués par
M. À. -À. M*** (pseudonyme), ancien officier
d? état-major au gouvernement de Madrid;
Blois, 1819, in-8° > — Mémoires du général
Hugo; Paris, 1825, 2 vol. in-8° : on retrouve à
la suite le Journal historique du blocus de
Thionville; — L'Aventure tyrolienne, par Si-
gisbert (un des prénoms de l'auteur), roman;
Paris, 1826, 3 vol. in- 12. « Le général Hugo s'oc-
cupait depuis longtemps,dit la Biographie Rabbe,
d'un grand traité de la défense des places fortes.
On assnre qu'un gouvernement étranger, ayant eu
connaissance de l'importance et du mérite de ce
travail, chercha à se l'approprier en offrant une
somme considérable au général Hugo, qui eut le
patriotisme de la refuser. Cependant le manus-
crit, dont le gouvernement français avait demandé
la communication, resta enfoui dans les cartons
du ministère, soit par suite de l'inertie de l'ad-
ministration, soit que les moyens indiqués par
l'auteur ne lui parussent pas répondre à son
attente. Le général Hugo proposa en 1827 son
ouvrage par souscription ; mais il n'eut que le
temps d'en publier le prospectus, qui a paru sous
ce titre : Prospectus de l'ouvrage intitulé :
Des grands moyens accessoires de défense
et de conservation aujourd'hui indispensa-
bles aux places fortes, aux armées, aux co-
lonies et aux États qui les possèdent ; Paris,
1827, in-8». » L. L— t.
Araault, Jay, Jouy et Norvins, Diogr. nom. des Con-
temp. — Babbe , Vieilli de Botsjolln et Saiote-Prenve ,
Bioçr. univ. et portât, des Contemp. — . C. Multté, Bioer.
des Célébrité* militaires des armées de terre et de
mer de m» h isso.
*hugo (J.-Abel), littérateur français, fils
aîné du précédent, né vers 1798, mort en
1855. Il avait rejoint son père en Espagne et
était officier dans l'armée du roi Joseph lors-
qu'il revint en France avec sa mère. Après la
restauration, il se fit homme de lettres, travailla
pour le théâtre et les petits journaux, et pro-
duisit quelques ouvrages plus importants. On a
de lui : Traité du Mélodrame, par MM. A!
Al A! (avec Armand Malitourne et J. Ader);
Paris, 1817, in-8° ; — La Vengeance de la Ma-
done, fragment traduit de l'italien; Paris ,1822,
in-8° ; — Romances historiques , traduites de
l'espagnol; Paris, 1822, in-8°; —L'Heure de la
Mort; Paris, 1822, in-8*; — Les Français en
Espagne, à- propos-vaudeville en un acte (avec
Alph. Vulpian); Paris, 1823, in- 8°; — Précis
historique des Événements qui ont conduit
Joseph Napoléon sur le trône d'Espagne, ex-
trait des Mémoires du général Hugo; Paris,
1823, in-8 9 : tiré à 60 exemplaires ; — Pierre
et Thomas Corneille, à-propos en un acte et
en prose; Paris, 1823, in-8° ;. publié sons le
pseudonyme de Monnières, avec Romieu;
— Histoire de la Campagne d'Espagne en
1823, ornée de gravures par Couché fils; Paris,
1824, 2 vol. in-8°; —Les Tombeaux de Saint-
Denis, ou description historique de cette
abbaye célèbre, des monuments qui y sont
renfermés et de son riche trésor; suivie du
récit de la violation des tombeaux en 1793,
de détails sur la restauration de Féglise en
1806, et depuis en 1814; de notices sur les
rois et les grands hommes qui y ont été en-
terrés et sur les cérémonies usitées aux ob-
sèques des rois de France, et de la relation
des funérailles de Louis XVIII; Paris, 1824,
in-18; — Vie anecdotique de Monsieur, comte
d'Artois, aujourd'hui 5. M. Charles X, roi
de France et de Navarre , depuis sa nais-
sance jusqu'à ce jour; Paris, 1824, in-18; —
Histoire de l'empereur Napoléon; Paris,
1833, in-8°; — France pittoresque, ou des-
cription pittoresque, topographique et sta-
tistique des départements et colonies de la
France, offrant en résumé, pour choque
département et colonie , Vhistoire, les anti-
quités, la topographie, etc.; Paris, 1833,
3 vol. in- 4° ; — France militaire, histoire des
armées françaises de terre et de mer, de
1792 à 1833; ouvrage rédigé par une société
de militaires et de gens de lettres d'après
les bulletins des armées, Le Moniteur, les
documents officiels, les notes, mémoires,
rapports et ouvrages militaires de l'empereur
Napoléon, des maréchaux, amiraux et gé-
409
HUGO
410
néraux en chef, etc., rem et publié par A.
Hugo; Paris, 1834, 5vol. gr. in-4° ; — France
historique et monumentale, histoire générale
de France depuis les temps les plus reculés
jusqu'à nos jours, illustrée et expliquée par
les monuments de toutes les époques édifiés,
sculptés, peints, coloriés, etc.; Paris, 1836-
1843, 5 toI. in-4% avec cartes et planches.
Ainsi que ses frères Victor et Eugène, Abel
Hugo coopéra an Conservateur Littéraire et
aux Annales de la Littérature. Une ode de lui
sur la Bataille de Denain fut couronnée , en
1 822, par la Société d'Émulation de Cambrai. La
même année il donna une édition du Romancero
historia del re de Espana don Rodrigo;
Tannée suivante il commença la publication des
Tablettes Romantiques. Il avait annoncé , en
1821, une collection intitulée : Le Génie du
Théâtre espagnol, ou traductions et ana-
lyses des meilleures pièces de Lopez de Vega;
P. Calderon et autres auteurs dramatiques,
depuis le milieu du seizième siècle jusqu'à
la fin du dix-huitième ; mais cet ouvrage n'a
pas paru. Abel Hugo a en outre publié : Le
Conteur, recueil de contes de tous les temps
et de tous les pays , paraissant mensuelle-
ment; Paris, 1833, in- 12. Vice-président de la
Société orientale, il a donné des articles à la Re-
vue de V Orient, fondée en 1841. Il est Fauteur
de deux articles : Souvenirs et Mémoires sur
Joseph Bonaparte, qui ont paru dans la Revue
des Deux Mondes, 15 février et 15 avril 1833.
L. L-t.
Quérard, £a France Littéraire. — Bourquelot, La
Littér. franc, contemporaine.
hugo (Eugène), poète français, frère du
précédent , né vers 1801 , mort à la maison de
Chareuton, au mois de mars 1837. Camarade d'é-
tude de son frère Victor, il s'enthousiasma
comme lui pour la poésie, et créa avec lui Le
Conservateur Littéraire, dans lequel il écrivit
quelques articles de critique. On lui doit en
outre une Ode sur la Mort du duc d 9 Enghien,
qui lui valut un prix à l'Académie des Jeux Flo-
raux ; et on trouve de lui, en tète des Œuvres en
prose d'André Chénier, une notice extraite du
Conservateur Littéraire, que M. V. Hugo a re-
produite dans ses œuvres. Exalté, solitaire, cha-
griné, dit-on , par une passion malheureuse , il
perdit l'esprit, et fut d'abord confié aux soins du
docteur Esquirol, qui nepnt le guérir. J. V.
Bourquelot, La Littér. franc, contemporaine. .
* hugo (Victor-Marie, vicomte), célèbre
poète et romancier français, frère des deux
précédents et second fils dn général Hugo, né à
Besançon, le 26 février 1802. Son père avait été
un des premiers volontaires de la république;
sa mère, Sophie Trébuehet, fille d'un armateur
de Nantes, Bretonne de naissance, royaliste de
cœur, avait partagé les dangers de l'insurrec-
tion vendéenne. 11 trouva ainsi dans, les sym-
pathies contradictoires de ses parents deux
sources opposées d'inspiration qui devaient suc-
cessivement animer ses œuvres. Il eut une en-
fance errante, aventureuse, singulièrement
propre à développer en lui le génie poétique.
Suivant son expression, il parcourut l'Europe
« avant la vie ». Il avait à peine six semaines,
lorsque sa famille quitta Besançon pour l'île
d'Elbe. Après avoir passé trois ans dans cette
lie, que devait rendre célèbre le premier exil
de Napoléon, il habita pendant deux ans Paris
avec sa mère. Celle-ci l'emmena ensuite en Ita-
lie dans la province d'Avellino (royaume de
Naples), dont le colonel Hugo était gouverneur.
Le futur poète joua au pied du Vésuve , vit
« ces bords embaumés où le printemps s'arrête »,
et tressaillit peut-être au récit dea aventures
de Fra Diavolo, le fameux bandit que son père
poursuivait à travers les montagnes des Ab-
bruzzes. En 1809, sa mère le ramena à Paris.
Ce nouveau séjour, qui dura deux ans , laissa
dans l'âme du poète de doux souvenirs , sou-
vent célébrés par lui. M me Hugo, avec ses fils,
occupait une maison solitaire du faubourg
Saint-Jacques, impasse des Feuillantines. Un
vieux prêtre marié, M. de La Rivière, venait don-
ner des leçons de grec et de latin aux enfants,
dont l'intelligence se développa rapidement
dans cette vie retirée et libre. « J'eus, dit
M. V.
J'eus, dam ma blonde enfance, bêlas! trop éphémère,
Trois maîtres : un jardin, un vieux prêtre et ma mère :
Ainsi Je grandissais sous ce tripie rayon.
Un dramatique incident troubla cette stu-
dieuse et poétique existence. Le général La Horie,
ancien lieutenant de Moreau , suspect à la police
impériale, était venu demander asile à M me Hugo,
et occupait une petite chambre dans cette de-
meure écartée. « La plus douce occupation du
guerrier philosophe , au milieu de cette inaction
prolongée qui le dévorait, était de s'entretenir
avec le jeune Victor, de le prendre sur ses ge-
noux, de lui lire Polvbe en français... de lui
faire expliquer Tacite en latin (1). » La police
finit par découvrir l'asile de La Horie. Le gé-
néral, jeté en prison, n'en sortit que pour s'as-
socier à la tentative de Mallet et tomber à ses
cotés, fusillé dans la plaine de Grenelle. « On
sent quelle impression profonde et amère du-
rent jeter dans l'âme ardente du jeune enfant les
discours du mécontent et le suppliée de la vic-
time : cela le préparait dès lors à son royalisme
de 1814 (1). » Quelques jours après l'arrestation
de La Horie, au printemps de 1811, M me Hugo,
avec ses fils, partit pour l'Espagne, où son mari
était devenu général et premier majordome du
palais du roi Joseph. Le jeune Victor fut mis au
séminaire des Nobles, où il resta un an. Il devait
entrer dans les pages du roi Joseph; mais les
événements devinrent bientôt si menaçants pour
(1) Article Hugo dans la Bioçr. de Banne, soppl.
(S) loid.
411
HUGO
4\î
cette nouvelle royauté, que M™* Hugo ramena 4
Paris ses deux fils cadets Eugène et Victor. Elle re-
prit son logement des Feuillantines, et fit achever
à ses enfants leur éducation classique sous le vieu*
M. de La Rivière. «Les idées religieuses tenaient
très-peu de place dans cette forte et chaste dis-
cipline. Le fond de la philosophie de leur mère
était le voltairianisme, et, femme positive qu'elle
était , elle ne s'inquiéta pas d'y substituer une
croyance pour ses fils. Tous deux, le jeune
Victor surtout, avaient rapporté dé l'Espagne - 9
outre la connaissance pratique et l'accent gut-
tural de cette belle langue, quelque chose de la
tenue castillane, un redoublement de sérieux,
une tournure d'esprit haute et arrêtée, un Sen-
timent supérieur et confiant, propice aux grandeà
choses ; ce soleil de la Sierra , en bronzant leur
caractère avait aussi doré leur imagination. Victor
commença à treize ans, an hasard, ses premiers
vers; il s'agissait de Roland et de chevalerie (1). »
La chute de l'empire et la première restauration
arrivèrent avant la fin de ses études. Vers le
même temps des dissentiments domestiques,
aigris par la dissidence de leurs opinions poli-
tiques, amenèrent une séparation entre le gé-
néral Hugo et sa femme. Le général, usant
de ses droits de père, et destinant ses deux
fils à l'École Polytechnique, les plaça à la pen-
sion Cordier, où ils restèrent jusqu'en 1818. fls
suivirent de là les cours de philosophie, de
physique et de mathématiques au collège Louis-
le-Grand. Victor montrait une singulière apti-
tude pour les mathématiques; mais il 'préférait
la poésie, à laquelle il réservait ses loisirs. Dans
la première ferveur du royalisme qu'il avait
puisé auprès de sa mère, il composa une tragé-
die classique , intitulée îrtavnène, où il célébrait,
sous des noms égyptiens , là restauration des
Bourbons. 11 en commença une autre sons le
titre de Athélie, ou les Scandinaves, qu'il ne
poussa pas au delà des trois premiers actes.
Une pièce devers qu'il adressa, en 1817, à l'A-
cadémie Sur les Avantages de V Étude , sujet
mis au concours, attira vivement l'attentionné*
juges. Ils l'auraient même couronnée, dit-on , si
elle ne s'était terminée par ces vers :
Moi qui, toujours fuyant les cités et les (tours,
De trois lustres à peine M va finir le cours.
Ces vers, si l'on en croit ti biographie de Rabbé,
parurent une mystification ail*, académiciens, qui
se contentèrent d'accorder Ûné mention hono-
rable à l'auteur. « Si véritablement il n'a que
cet âge, dît M. Ray nouât»! dans son rapport
sur le Concours, l'Académie a dû un encoura-
gement au jeune poète qui a fâît les vers sui-
vants ; » et il citait quelques vers tout classiques
par la forme et la pensée.
En 1818, Victor Hugo obtint de son père là
permission de ne pas se présenter à l'École
Polytechnique, et dès lors il s'adonna entièrement
(f ) Art. Hugo dans la Biographie de Rabbe, sappl.
aux lettres. Une ode sur la Statue d'Henri IV;
une autre sur Les Vierges de Verdun ; une troi-
sième intitulée : Moïse suf le mt, furent couron-
nées par l'Académie des Jeux Moraux de Tou-
louse ; la troisième lui valut le grade de maître es
jeux floraux. Ces débuts académiques sont assez
singuliers pour le futur chef dé Véébte roman-
tique ; mars il Avait à péihe dix -huit ans, et son
originalité poétique ne s'était J&s encore dégagée.
Cette partie de là vie dé M. Victor Jatfgo à été
peinte d'après de* relèvements intimes par
l'auteur anonyme (M. Sainte-Beuve) de l'ar-
ticle Hugo dans la Èi&grùfihîcteVbe. ftous em-
pruntons à cette notice une* fcâgé empreinte
d'exagération, mais qui représente arec vivacité
fan formation du vigoureux talent de M. Hugo.
« Les années 1819 et 1820 furent sans doute les
plus remplies, les plus laborieuses, lés plus arden-
tes, les plus décisives de sa vie. Amour, politique,
indépendance , chevalerie et religion, pauvreté
et gloire, étude opiniâtre, lutte contre le sort en
vertu d'une Volonté de fer, tout èta lui apparut et
grandit à la fois à" ce degré dé hauteur qui
constitue le génie. îbrit s'êtiibrasa , se tordit ,
se fondit Intimement dans son être au feu des
passions, sous le soleil de la plus âpre jeunesse,
et il en sortit cette nature d'un alliage mystérieux
où la lave bouillonne sonè le granit, cette armure
brûlante et sonde, à là poignée éblouissante de
perles , à la lame brune et sombre , vraie ar-
mure de géant trempée eux lacs volcaniques. Sa
passion pour la jeune fille qu'il aimait avait' fini
par devenir trop claire aux deux familles, qui,
répugnant à unir un couple de cet âge et sans
fortune, s'entendirent pour ne plus se voir
momentanément. Il à consacré cette douleur de
l'absence dans une pièce intitulée : Premier
soupir : une tristesse douce et fière y est em-
preinte..... ffand 1 Istande 1 (\iï\ lé" croirait? com-
mencé dès 1820. Han eTftftwtfe, qti'il fie publia,
par suite d'obstacles matériels, qu'en 1823, de-
vait être à l'origine et dans la conception première
un tendre message d'amour destiné à tromper les
argus, à n'être IWtthément compris tyfee d'une
seule jeune ntle*...'. IKrr&nt ce même temps Vic-
tor Hugo eomftosàit «dn premier volume d'odes
royalistes et religieuses. On sait comment son
royalisme lui était venu. Quant à fa féngion; elle
lui était entrée dans le cœur pat ITmàginàfion
et rmtettigencé; M y voyait avant tout la pllis
haute forme de la pensée huraàtae, la jpïufc do-
minante des perspectives poétiques* Le genre
de monde qui! fréquentait alors, et qui raceueil-
lait ave? toutes sortes dé caresses, entretenait
journellement l'espèce d'illusion quH se Taisait
à lui-même sur ses croyances. Mais la fond de
sa doctrine politique était toujours rtttdépenâanee
personnelle; et le philosophisme positif de sa
première éducation, quoique recouvert des*syrn-
botes catholiques , persistait obscurément des-
sous. » Ainsi préparé à la poésie pur ta passfcm
et l'étude, M. Victor Hugo commença, en 1822, la
113
HUGO
414
série de pnblioations qui le portèrent rapidement
au premier rang des écrivains de son époque.
Avant d'apprécier ces œuvres nombreuse*, nous
donnerons encore quelques faits de la vie domes-
tique du poète. H perdit sa mère en 1821 , et cet
événement douloureux relâcha un peu les liens
qui le rattachaient au parti royaliste. Au mois
d'octobre 1822, il épousa une beUe jeune fille,
M elle Foucher, qu'il aimait depuis l'enfance d'une
passion vainement traversée par les calculs des
deux familles. En 1823 il reçut une pension de
Louis XVUI. Il n'avait rien fait pour appeler sur
lui cette faveur; il avait chanté les Bourbons ,
comme on poète ému aux souvenirs du passé*
touché de l'antiquité vénérable et glorieuse des
fleurs de lis; comme un artiste désintéressé » et
non comme un homme de parti. On raconte qu*
ce ne fut pas seulement la lecture des Odes et
Ballades qui détermina Louis XV1IT à lui ac-
corder cette pension. Un camarade de M. Victor
Hugo, Delon, condamné à mort après 1a cons-
piration de Saumur, se cachait à Paris et cou-
rait risque à chaque instant d'être découvert.
M. Victor Hugo avait alors deux modestes loge-
ments sous son nom $ il écrivit à la m£re de Delon
pour lui en offrir un : son fils s'y cacherait) « et»
ajoutait-il, je suis trop royaliste pour, qu'on s'a-
vise de venir. le chercher dans ma chambre »>
Cette lettre » arrêtée par la police , fut déta-
chetée et mise soqs les yeux du roi avant de
parvenir à sa destination* Louis XVIII* après
l'avoir lue , dit : « Je connais ce jeune homme;
il se conduit en ceci avec honneur. Je hti
donne la prochaine pension qui vaquera. » La
pension vint, en effet, à M.Victor Hugo -, qui fut
deux ans sans en connaître l'origine. Pour Dektet
il n'avait pas, heureusement, répondu à une offre
qui lui aurait été fatale, et s'était réfugié dans un
lieu sur.
Quelques années avant, M. Hugo écrivait dans
Le Conservateur Littéraire, fondé par 6es frères
et par lui. Les articles qu'il y inséra, et qu'il a
recueillis plus tard en les jugeant sévèrement»
ne sont pas sans intérêt, ils prouvent du moins
que de seize à vingt ans l'auteur ne nourrissait
aucun projet de révolution littéraire j il n'admet-
tait même qu'avec réserve les innovations mo-
dérées de M. de Lamartine. Les ÈéditaUons lui
paraissaient « un livre singulier, danp lequel il re-
connaissait un poète, malgré les négligences, les
néologismes, les répétitions et l'obscurité ». Les
premières odes de M. Hugo ne dénotent pas une
tendance beaucoup plus vive vers de nouvelles
formes de poésie. Le moule en est tout classique»
les idées et les sentiments n'ont rien d'imprévu.
Un certain éclat d'imagination, une grande
habileté à manier la langue et la grandeur des
événements qui l'inspirent distinguent seuls ces
premières odes de tant de productions lyriques,
aujourd'hui oubliées. M. Hugo , on pouvait l'af-
firmer même d'après des essais aussi imparfaits,
était un vrai poète lyrique , et le propre du poëte
lyrique, c'est moins de trouver des idées nou-
velles que de donner une forme brillante et
sonore aux idées des autres. Jeune, il accepta
les idées du monde où it vivait. Il fut royaliste
et religieux à la manière de Chateaubriand. 11
déclara (Préface de son recueil à' Odes de 1822)
que « l'histoire des hommes ne présente de
poésie que jugée du haut des idées monarchiques
et des croyances religieuses ». Son but était de
réaliser le programme du Génie du Christia-
nisme^ «i en substituant aux couleurs usées et
fausses de la mythologie païenne les couleurs
neuves et vraies de la théogonie chrétienne » ;
en faisant parler à l'ode « ce langage austère,
consolant et religieux, dont a besoin une vieille
société qui sort encore toute chancelante des
saturnales de l'athéisme et de l'anarchie ». Ce
fut là d'abord tout le romantisme de M. Hugo;
il y était encore fidèle daûs son recueil de 1824,
bien que le royaliste en lui eût déjà perdu dé
son âpreté et qu'il commençât à faire écho aux
chants populaires qui célébraient une gloire d'a-
bord l'objet de tous ses anathèmes, la gloire de
Napoléon.
A côté de l'école monarchique et religieuse*
qui comptait dans ses rangs , avec des nuances
très- diverses» Chateaubriand, Bonald, de
Maistre, Lamennais, Lamartine, s'élevait une
autre école, moindre peut-être par le talent ,
mais supérieure en savoir, l'école de M me de
Staël. Les disciples de cette femme célèbre,
préoccupés surtout de la vérité des idées et des
sentiments, de leur enchaînement logique, du
rapport exact entre la pensée et l'expression,
protestaient contre ce qu'il y avait d'étroit, de
factice, dans les règles que s'étaient imposées les
poète» français et particulièrement les auteurs
dramatiques; ils cherchaient dans les littératures
étrangères, en Espagne, en Allemagne et surtout
en Angleterre, des modèles capables de développer
le goût français et de l'affranchir des conventions
académiques. Cette école, qui eut, à partir de
1826, dans le journal Le Globe un organe très-
répandu, exerça sur les esprits une influence à
laquelle M. Hogo n'échappa point. Dans la
préface de son recueil de 1826, il déclara ne
rien comprendre à la distinction des genres. « Il
lui semble, dit-il, que ce qui est réellement beau
et vrai est beau et vrai partout.... La pensée
est une terre vierge et féconde dont les produc-
tions veulent croître librement, et, pour ainsi
dire, au hasard.... En littérature comme en
politique, l'ordre se concilie merveilleusement
avec la liberté; il en est même le résultat. H faut
bien se garder de confondre l'ordre avec la régu-
larité. La régularité ne s'attache qu'à la forme
extérieure; l'ordre résulte du, fond même des
choses, de la disposition intelligente des éléments
intimes d'un sujet. La régularité est une com-
binaison matérielle et purement humaine ; l'ordre
est pour ainsi dire divin.... Le poète ne doit
avoir qu'un modèle, la nature ; qu'un guide, la
415
HUGO
416
vérité. D ne doit (As écrire avec ce qui a été
écrit, mais avec son âme et avec son cœur. De
tous les livres qui circulent entre les mains des
hommes, deux seuls doivent être étudiés par
lui , Homère et ta Bible. » A ces deux grands
maîtres M. Hugo en ajouta un troisième,
Shakspeare. Jusque-là il n'avait composé que
des odes , de petites pièces lyriques qu'il ap-
pelait ballades, et où il essayait de reproduire
les contes fantastiques et les superstitieuses
légendes du moyen âge, et deux romans Non
d'Islande et Bug-Jargal. Dans ces derniers
ouvrages, d'une valeur poétique très-médiocre,
on remarque la tendance de l'auteur à trans-
porter dans les compositions narratives les pft>-
cédés antithétiques de l'ode. Han d'Islande est
une espèce d'ogre anthropophage qui « boit
l'eau des mers et le sang des hommes »: Il a
pour digne pendant le nain Habibrah ; et ces
deux hideuses figures semblent inventées pour
faire ressortir les créations idéales à' Et fiel,
d'Ordener et de Marie. Vu contraste aussi vio-
lent produit de l'effet, mais il est peu conforme
à la vérité ; cependant Fauteur l'appliqua bientôt
au genre qui, avec le roman, exige le plus de
vérité, au drame.
Le plus fort de la lutte entre les innovateurs
et les partisans des formes classiques était au
théâtre. M. Hugo, empressé de se signaler dans la
mêlée, courut sur ce nouveau terrain. H arrivait
avec Cromwell, drame de sept mille vers, et une
préface proportionnée au drame. Cette préface
est un étonnant amalgame de vrai et de faux,
beaucoup plus original par la forme que par le
fond. L'auteur ne fait guère que colorer et exa-
gérer les idées du Globe, mais il les exagère au
point de les dénaturer, et donne aux choses les
plus simples une apparence étrange. Il distingue
trois âges dans l'humanité : les temps primitifs,
qui vont jusqu'à Homère ; les temps antiques,
qui vont depuis Homère jusqu'à Jésus-Christ, et
enfin l'âge moderne, qui s'étend depuis Jésus-
Christ jusqu'à nous. La poésie dans le premier
âge est lyrique, épique dans le second, drama-
tique dans le troisième. L'ode, l'épopée, le
drame, telles sont les formes successives dont
chacune caractérise presque exclusivement
chaque âge de l'humanité. Cette théorie peut
donner lieu à de belles phrases , mais elle s'ac-
corde assez mal avec les faits. Dans la Bible la
partie épique ( Genèse ) est beaucoup plus an-
cienne que les parties lyriques (cantiques, psau-
mes, prophéties) ; en Grèce la poésie lyrique ne
commence qu'avec Archiloque, plusieurs siècles
après Homère. Enfin, pour refusera la littérature
grecque la poésie dramatique, il faut donner à ce
mot un sens tout particulier. « Le caractère du
drame , dit-il, est le réel ; le réel résulte de la
combinaison toute naturelle de deux types, le
sublime et le grotesque , qui se croisent dans le
drame comme ils se croisent dans la vie et dans
la création. Tout ce qui est dans la nature est
dans l'art. » Comme les anciens, selon lui, n'a-
vaient étudié la nature que sous une seule face ,
rejetant sans pitié ce qui ne se rapportait pas à
un certain type du beau , ils ne connurent pas le
drame. Mais, ajoute M. Hugo, « le christianisme
amène la vérité. Comme lui , la muse moderne
verra les choses d'un coup d'oeil plus haut et plus
large. Elle sentira que tout dans la création n'est
pas humainement beau , que le laid y existe à
côté du beau, le difforme près du gracieux, le
grotesque au revers du sublime , le mal avec le
bien, l'ombre avec la lumière. Elle demandera si
la raison étroite et relative de l'artiste doit avoir
gain de cause sur la raison absolue du Créateur,
si c'est à l'homme à rectifier Dieu ; si une nature
mutilée en sera plus belle ; si l'art a le droit de
dédoubler, pour ainsi dire, l'homme, la vie, la
création ; si chaque chose marchera mieux quand
on lui aura été son muscle et son ressort ; si enfin
c'est le moyen d'être harmonieux que d'être in-
complet. C'est alors que, l'œil, fixé sur des évé-
nements tout à la fois visibles et formidables ,
et sous l'influence de cet esprit de mélancolie
chrétienne et de critique philosophique que nous
observions tout à l'heure , la poésie fera un grand
'pas, un pas décisif, un pas qui, pareil à la se-
cousse d'un tremblement de terre, changera
toute la face du monde intellectuel. Elle se mettra
à mire comme la nature, à mêler dans ses créa-
tions, sans pourtant les confondre, l'ombre à la
lumière, le grotesque au sublime, en d'autres
termes le corps à l'âme, la bête à l'esprit. » Sous
l'emphase de ces paroles, destinées à être le mot
d'ordre d'une révolution littéraire se cachaient
beaucoup d'erreurs et quelques vérités qui n'é-
taient pas neuves. Il n'est pas exact que les Grecs
aient ignoré le grotesque ; les poètes attiques dé
l'ancienne comédie l'ont, aa contraire, employé
avec une audace inconnue des modernes, fl n'est
pas vrai non plus qu'ils aient rejeté le mélange des
genres, comme le prouve leur drame satyrique ;
mais il est vrai que, dans leur tragédie du moins,
ils ne visèrent jamais à une reproduction exacte
de la nature. Au lieu de la copier servilement, il
l'interprétaient. M. Hugo avait raison de vouloir
se rapprocher de la réalité et de prétendre à une
reproduction plus exacte et surtout plus com-
plète de la vie humaine et de l'histoire; il avait
raison aussi de voir dans Shakspeare le poète
dramatique par excellence; mais il avait fort de
croire que l'union systématique et contrastée du
grotesque et du sublime est la condition d'une
fidèle peinture de la vie humaine, et que le génie
de Shakspeare consiste à avoir réuni ces deux
éléments. Ce n'est pas ici le lieu d'apprécier en
quoi consiste réellement le génie de Shakspeare,
mais nous pouvons affirmer qu'il n'y a pas, en
bien comme en mal, le moindre rapport entre
les drames de M. Hugo et ceux du poète anglais.
Cromwell est une chronique dialoguée, sans vé-
rité poétique, sans réalité historique, et'où le
talent de l'auteur est aussi grand que mal'em-
417
HUGO
418
ployé. M. Hugo s'est efforcé consciencieusement
de réaliser les théories de ses amis du Globe
sur le drame historique ; et» s'il n'a pas réussi,
c'est que ces théories étaient en contradiction
complète avec son génie lyrique. Il avait trop
d'imagination pour s'asservir à l'histoire; et
Jonque, deux ans plus tard, il revint au drame,
il se mit peu en peine d'observer les préceptes
de la préface de Cromwell, ou du moins il ne
fut fidèle qu'à une seule de ses théories, à l'an-
tithèse du sublime ef du grotesque. La préface de
Cromwell, malgré ses défauts, peut être à cause
même de ses défauts, devint le point de rallie-
ment, l'étendard d'une nouvelle école, héritière
tumultueuse et émancipée de Chateaubriand et
de M™ de Staël, demandant à grands cris l'abo-
lition du vieux code classique, et promettant à
ce prix des chefs-d'œuvre. Les principaux re-
présentants de la nouvelle école se groupèrent
autour de M. Hugo , et formèrent un petit cercle
qui se décora du nom mystique de cénacle, et
se voua avec une ferveur religieuse à la promul-
gation* de la loi nouvelle. Ce cénacle, où bril-
laient autour du maître MM. de Vigny, Emile
Deschamps, Sainte-Beuve, Louis Boulanger,
David d'Angers, a été l'objet de beaucoup de
railleries, et il est difficile aujourd'hui de ne pas
sourire en lisant , dans les Poésies de Joseph
Delorme et dans les Consolations , les pièces
singulières ou M. Sainte-Beuve célèbre, en style
biblique, les apôtres du romantisme. Cependant,
il serait injuste de méconnaître que le cénacle
se composait d'écrivains et d'artistes très-distin-
gués. Si M. Hugo ne trouvait pas en eux des
juges sévères de ses défauts, il y rencontrait de
fins appréciateurs de ses qualités ; s'il exerça sur
- eux une grande influence, il ne resta pas insen-
sible à l'action de ces esprits délicats, et son ta-
lent y gagna. Dans cette période de 1828 à 1831
il produisit ses œuvres les plus éminentes, Les
Orientales; Mario'n Delorme, Hernani, Notre-
Dame de Paris, et Les Feuilles d'Automne.
Les Orientales, où M. Victor Hugo donna
libre carrière à sa faculté dominante, l'imagina-
tion, sont le plus parfait de ses ouvrages au
point de vue de la forme. Jamais le côté matériel
et extérieur des choses n'avait été rendu avec
autant de relief et de couleur, jamais la versifi-
cation française n'avait atteint ce degré de ri-
chesse pittoresque, d'harmonie savante, d'am-
pleur mélodieuse. L'admiration ne saurait man-
quer à une œuvre aussi puissante, bien qu'on
reproche au poète d'avoir sacrifié à la magnifi-
cence descriptive ce qui constitue le fond de la
poésie, c'est-à-dire les sentiments, les passions
et les idées, et d'avoir peint un Orient imagi-
naire, l'Orient créé par sa rêverie ardente et ca-
pricieuse, plutôt que l'Orient réel et historique.
Le dernier Jour a?un condamné, analyse mi-
nutieuse et déchirante <je la situation la plus dé-
sespérée où puisse se trouver l'âme humaine»
est encore une œuvre d'imagination et de rêve-
NOUY. BIOCR. CéNÉR. — T. XXV.
rie, bien plus que d'observation* Comme plai-
doyer contre la peine de mort, Le dernier Jour
d'un Condamné a peu d'importance ; mais il res-
tera comme une étude psychologique d'une éton-
nante vigueur. Marion Delorme restera aussi
comme une œuvre dramatique véritable, bien que
beaucoup trop lyrique encore. L'élément lyrique
déborde dans Bernant et enlève aux personnages
toute réalité, et même toute vraisemblance. Non-
seulement Charles-Quint, Hernani, don Ruy
Gomez ne sont pas historiques, ils ne sont
même pas vrais, et appartiennent à un monde fan-
tastique. Les beaux vers , les traits énergiques ,
les magnifiques tirades ne manquent pas dans
Hernani; mais de belles odes ne font pas un
drame, ou du moins, ce n'est pas le drame que la
préface de Cromwell promettait à notre siècle.
Il fut cependant accueilli par de bruyantes accla-
mations d'enthousiasme de la part des roman-
tiques, et triompha de l'opposition désespérée des
classiques. Les deux partis s'étaient donné
rendez- vous à la première représentation , le
26 février 1830, comme sur un champ de ba-
taille. Les romantiques l'emportèrent; et l'on ra-
conte plaisamment qu'ils dansèrent une ronde
dans le foyer du Théâtre-Français, en criant : « En-
foncé Racine ! » Notre-Dame de Paris et les
Feuilles d'Automne, quoique publiées après
la révolution de 1830, appartiennent à la période
précédente , et marquent le point culminant du
talent fie M. Hugo, pour la pensée, sinon pour
la forme. La prose de Notre-Dame n'est pas plu3
riche et plus vigoureuse que celle de la préface
de Cromwell et du Dernier Jour d'un Con-
damné , mais l'auteur a fait preuve dans ce ro-
man d'un talent créateur qu'on ne lui suppo-
sait pas. Si l'élément lyrique domine toujours»
si l'action est encore fondée sur l'antithèse vio-
lente de la laideur et de la beauté, du senti-
ment élevé et de la forme abjecte , du grotesque
le plus trivial et du grandiose le plus sinistre,
ce lyrisme n'est pas déplacé dans la description
du vieux Paris : ces contrastes excessifs nous
représentent à merveille le moyen âge finissant,
avec ses mœurs, ses superstitions, sa vie étroite,
sombre et poétique. Si Quasimodoest un monstre
chimérique, Claude Frollo un personnage de
mélodrame, Pierre Gringoire est une excellente
et piquante physionomie , Esmeralda une ra-
vissante figure ; enfin il y a dans toute cette œuvre
une ampleur, un mouvement, une puissance
descriptive dignes de l'épopée. Les Feuilles
d'Automne, dans un genre tout opposé, ne mé-
ritent pas moins l'admiration. Sans renoncer
aux riches peintures du monde extérieur, le
poète a fait une plus large place aux pensées
dont s'alimente la poésie lyrique la plus haute.
Pour chanter la grandeur de Dieu, la fragilité de
l'homme, la fuite rapide de la vie humaine, l'im-
mortel rajeunissement de la nature, pour s'api-
toyer sur les misères sociales , pour inviter le
siècle à la charité» il a trouvé des accents neufs,
14
419
HUGO
420
pénétrants , élevés. A côté de ces beautés de
premier ordre il est impossible de ne pas noter
deux graves défauts : la confusion dans les idées,
la diffusion dans le style, qui se montrent déjà
dans Les Feuillet d'Automne et qui se marque-
ront plus fortement dans les recueils lyriques
suivants : Le* Chants du Crépuscule, Us Vois
intérieures, Les Rayons et les Ombres. Le ta-
lent, sans avoir faibli, ne s'est pas renouvelé \ te
poète, forcé de se répéter, redit moins bien ce qu'il
avait déjà dit plusieurs fois. Un autre défaut, plus
grave parce qu'A n'est pas simplement littéraire,
c'est le développement de l'orgueilleuse personne
lité du poëte. Ou sentiment hautain de sa propre
grandeur a inspiré à M. Hugo des tirades d'une
superbe fierté; mais, ramené à tous propos, il fiv
tigue le lecteur. Les images les plus éclatante?
ne peuvent compenser une telle absence de tact
Les œuvres dramatiques postérieures à ffer*
nani donnent lieu à des remarques encore plus
sévères. Le Roi s'amuse , dont le succès rat
douteux à la première représentation et que
le pouvoir interdît a la seconde, offre de gran-
des beautés lyriques, mais Lucrèce Borgia,
Marie Tudor, Angelo sont des mélodrames.
Ruy-Blas et surtout Les Burgraves sont fort
au-dessus de ces compositions vulgairement em*
phatfques. Cependant Ruy Bios fut extrême*
ment maltraité par la critique, et le même public
qui avait applaudi Angelo siffla Les Burgraves.
M. Hugo , découragé ou indigné , renonça au théâ-
tre. Il aurait do pour sa gloire y renoncer après
Hernani.
M: Hugo n'a pas ajouté de nouveaux romans
à Notre-Dame. Il a publié une Étude sur Mi*
rabeau, où les côtés supérieurs du grand orateur
sontlaissé8 dans l'ombre, tandis que la partie ex-
térieure de «a vie et de son éloquence est ex*
primée avec un extrême relief. Élu en 1841
membre de l'Académie Française , en remplace-
ment de Népomucène Lemercier, il prononça un
discours qui étonna la nombreuse affluence ac-
courue pour l'entendre. On espérait qull traiterait
devant l'Académie la question des innovations lit-
téraires ; il ne parla guère que de politique, révélant
le désir, commun à tant d'antres littérateurs, de
prendre part aux affaires de son pays. Le Rhin,
lettres à un ami, trahissaient la même prétention,
et la justifiaient assez mal. Les Lettres consa-
crées à la description et aux légendes du Rhin
manquent de goût et d'esprit, et sont médiocres
an point- de vue du pittoresque. L'auteuY sem-
ble avoir réservé toute son imagination pour le
traité politique qui termine l'ouvrage, et dans
lequel il remanie la carte de l'Europe avec une
confiance imperturbable. Le roi Louis-Philippe,
qui aimait peu l'imagination en politique et même
en littérature , ne céda , dit-on , qu'eux vives
instances de la duchesse d'Orléans, quand fl
appela le poète à la chambre des pairs, par
ordonnance royale du 16 avril 1845. Avant
de suivre M. Victor Hugo dans sa nouveHe I
carrière, il faut revenir sur les changements
survenus dans ses opinions depuis le roya-
lisme de sa jeunesse. Il suivit le courant qui
entraînait presque toutes les intelligences vers
les opinions libérales. Napoléon devint soi
idole , l'objet de ses chants les plus enthou-
< siaefte», « le soleil dont il était le Memnon».
Ses rapports avec lut écrivains du Globe, l'ia*
ter4iction que le gouvernement de Charles X
mit sur Marion Delorme, l'éloignèrent de plus
en plus de la Restauration, et les événements de
WQ achevèrent de In détacher du royalisme, h 1
chanta la victoire du peuple tout en pleurant
. » . . tw aotte noe marte,
Que rapport* l'exil et que l'exil remporte §
et il rot l'écho des idées démocratiques, comme
dix ans plus tôt il avait exprimé les sentiment*
royalistes. Dans las deux cas, il obéissait mois*
à une conviction raisonnée qu'à son instinct de
poète. Lui-même nous a livré plus d'une fois le
secret de ses inspirations; il dit on tête des
Feuilles d'Automne t
Si ma téta , fournaise où mon «prit s'allume,
Jette le ver» d'airain qui J>QnUU>nnt et qu\ feroe
Dans le rhytninc profond, saoule mystérieux
D'où sort la strophe ouvrant ses ailes dans les deux ,
Cest que l'amour, la tombe, et la gtetre «t la rie,
L'onde qui fait, par l'onde Incessamment suivie,
Tout souffle, tout rayon, ou propice on fatal ,
Fait reluire et vibrer mon âme de cristal ,
Mon âme aui mltte vota, que le lilen que j'adore
Mit au centre de tout comme un écho sonore !
D'ailleurs, J'ai purement passé les jours manvair,
Et je sais d'où je viens si j'Ignore où te vais.
L'orage des parti», avee son vent de flamme,
Sans en altérer ronde, a routé mon âme.
Cet orage des partis, qui remua l'âme du poète
dans les six ou sept premières années qui sui-
virent la révolution de lidO, finit par s'apaiser.
La société revint an calme, et la poésie de
M. Hugo se ressentit naturellement de cet état
de choses. Les Râpons et les Ombres, comparés
aux Chants du Crépuscule, attestent un progrès
vers les idées conservatrices. Le poëte maltraite
fort « un homme populaire » , et invite son ami
David d'Angers à ne pas laisser entrer dans son
cœur
Les fareon des tribuns et leur songe abhorré,
de ne pa& se mêler un seul moment
Aux mêmes visions, au même aveuglement,
▲nx mêmes vœux haineos, iaeonaés on féroces,
Kntrépeu après i l'Académie, il fit, en plusieurs
circonstances , acte d'adhésion et de dévouement
à la monarchie de Louts-Phnlppe. Dans la cham-
bre des pairs il se montra conservateur avec
indépendance. M ne s'asservit pas a la politique
du ministère, et, tout en rendant plaine justice
« uu plus éminent des vois de l'Europe » , « ta
sage couronné qui laissait tomber du haut de
son trône les paroles de la paix universelle » ,
il eut de nobles flatteries pour une femille alors
bannie de France. Dans un beau discours, pro-
noncé le 14 juin «647, au sujet d'une pétition par
laquelle le prince Jérôme demandait à rentrer
«n France, il se déclara « du parti des exilés et
421
HUGO
422
des proscrite ». Dan» le même discours il aver-
tissait le pouvoir de s'occuper plus activement
a des masses , de ces olasses nombreuses et la-
borieuses où il y a tant de eourage , tant dln-
telligence, tant de patriotisme, où il 7 a tant de
germes utiles et en même temps , tant de fer-
ments redoutables ». Là, selon lui, était ledanger 3
là pouvait « s'ouvrir brusquement un abîme ».
Sa prévision se réalisa quelque» mois phis tard,
et une révolution politique, qui prétendait être*
une révolution sociale, emporta- la dynastie de
Juillet. M. Hugo donna asses v4te son assenti-
ment à « cette majestueuse forme sociale , la ré-
publique, que nos pères ont vue grande et terrthle
dans le passé, et que nous voulons tous voir
grande et bienfaisante dans l'avenir». Il eut près
de soixante mille voix aux premières élections
pour l'assemblée constituante , et fut élu aux
élections complémentaires de juin 1848. A peine
entré dans l'assemblée, il se prononça contre les
ateliers nationaux. Ce discours, était un. appel à
ia concorde qui s'adressait surtout « aux philo-
sophes initiateurs, aux penseurs démocrates,
aux sociahstea ». — « « Toutes les fois, leur disait»
il, que vous ne mettes pas en question la feuille
et la propriété , ces bases saintes sur lesquelles
repose toute civilisation, noua admettons avec
vous les instincts nouveaux <fe ttiurosnité; ad*
mette* avec nous les nécessités momentanées
des sociétés. » Ce mot de mêimntaméês parut
étrange dans la bouche d'un conservateur, et fit
soupçonner aux clairvoyants que les bruyantes
et populaires théories socialistes entraîneraient
le poëte orateur. Cependant, sojisrVlmimsJration
du générai Cavaignae, il sa imûntiot dans la nuança
modérée et dans l'indépendance des parti». A
demanda avec la droite l'établissement de deux
. chambres , avec la gauche la liberté de la presse
un moment suspendue par fêtât de siège, et l'a-
bolition de ht peine de mort. Un journal fondé
sous ses auspices, et rédigé «tans un style em-
phatique, L'Événement lit une guerre très-vivn
au général Cavaignae, et If. Hugo témoigna
d'une constante hostilité à l'égard de ce chef du
pouvoir exécutif, f I accueillit avec une grande
faveur Péètction du prince LeukvNanoiéon à la
présidence, et se prononça très-nettement pour
ce qu'on appelait le parti réactionnaire. Au mi-
lieu des murmures de la gauche , il demanda, le
30 janvier 1849, à la Constituante de se dissoudre
et de faire place à une assemblée législative. Oe
fut aussi sous les auspices du parti réactionnaire
qu'il se présenta aux élections de mai 184Ç. Il
fut le dixième sur la liste des vingt-huit députés
de Paris. Peut-être espérait-il une grande posi-
tion politique qui ne lui Ait pas offerte. En vain
L'Événement s'efforçait de déraciner dans -les
esprits « ce préjugé vulgaire et absurde que le
poète est inhabile et incompétent dans les af-
faires humaines » ; en vain il étalait cette défini-
tion étincelante de son poète homme d'État 1
« Bras et tète, cœur et pensée, glaive et flam-
beau , doux et fort : doux parce qu'il est fort , et
fort parce qui! est doux , conquérant et législa-
teur, roi et prophète, lyre et épée, apôtre et
messie. » Le pouvoir ne confia pas de porte-
feuille à M. Hugo, qui dériva très-sensiblement
ver3 la démocratie avancée. Il se sépara du parti
réactionnaire au sujet de ia proposition de M. de
Melnn relative à l'assistance publique; il sou-
tint la proposition le 10 juillet 1849, mais par
des motifs qui parurent entachés de socialisme.
Il semblait croirequll était au pouvoir d'un gou-
vernement de détruire l'indigence , et il sommait
l'assemblée de faire des lois contre la misère. Il
rompit plusouvertement avec la majorité le 20 oc-
tobre dans la discussion relative aux affaires de
Rome. Il déclara qu'il « repoussait de tontes les
forces de son cœur indigné ces sauvages auxi-
liaires, ces Radetzki, cesRaynau qui prétendent,
eux aussi , servir cette grande , cette sainte cause,
et qui font à la civilisation cette abominable in-
jure de la défendre par les moyens de la bar-
barie ». Il caractérisa la papauté d'une manière
qui amena entre lai et M. de Montalembert un
échange de paroles très-vives. La rupture était
consommée. Une fois engagé dans le parti dé-
mocratique, M. Victor Hugo en devint très-vite
l'organe le plus retentissant. Dans la discussion
des lois relatives à l'instruction publique, à la
déportation, à la réforme de la loi électorale , au
cautionnement des journaux , à la révision dte la
constitution, sa parole, toujours trop portée à
i*antith£se et à l'emphase, mais singulièrement
puissante, excita l'admiration des uns, l'Indi-
gnation des antres , et n'exerça en somme au-
cune influence sur la marche des affaires. En
1851 il prononça h défense de son fils atné, tra-
duit devant la cour d'assises pour la publication
d'un article sur la peine de mort. Son plaidoyer,
digne de l'auteur du Dernier Jour d'un Con-
damné, ne toucha point le jury.
On peut juger sévèrement cette partie de la vie
politique de M. Hugo; mais il est deux choses qu'on
ne saurait contester : le grand talent oratoire qu'il
y déploya, et le courage avec lequel il accepta la
responsabilité de ses opinions lorsqu'elles furent
proscrites. Banni de Frauee à la suite des évé-
nements de décembre i85i, R a véeu depuis à
Jersey et à Guernesey, remplissant se3 loisirs
d'exilé par des compositions qui n'ont rien ajouté
à sa gloire. Sans parler de deux ouvrages vio-
lents , ou la colère étouffe le talent , le recueil
lyrique des Contemplations a prouvé que les
défauts de M. Hugo n'avaient fait que grandir
avec les années , sans que ses qualités suivissent
la même progression* Jusque dans le chaos de
pensées et dans l'extrême redondance de style
qui caractérisent ce recueil , on trouve de bien
beaux traits, de belles pages, et des élégies pa-
thétiques sur le plus douloureux événement de
la vie du poëte, la mort de sa fille, qui périt
dans un naufrage en 1843.
Voici les titres des ouvrages de M. Victor
Î4.
423
HUGO - HUGOLINUS
434
Hugo; nous citons la première édition de chaque
ouvrage., et les éditions des œuvres complètes :
Les Destins de, la Vendée, ode; Paris, 1819,
in-8°; — Le Génie, ode à M, le vicomte de
Chateaubriand; Paris, 1820, in-8°; —Ode
sur la mort de S, A. R. Charles-Ferdinand
d'Artois, duc de Berri,ftls de France ; Paris,
1820, in-8° ; — Ode sur la naissance de S. A. /?.
W le duc de Bordeaux; Paris, 1820, in-8°;
— Odes; Paris, 1821, in-18; — Odes et Bal-
lades; Paris, 1826, 3 vol. in-18; — Moïse sur
le NU , ode couronnée par l'Acad. des Jeux Flo-
raux; Paris, 1822, in-8°; — Bonaparte, ode;
Paris, 1822, in- 8° ; — Han d'Islande, roman;
Paris, 1823, 4 vol. in-12; —Le Sacre de Char-
les X , ode ; 1825, in-8° ; — Bug-Jargal, roman ;
Paris, 1826, in-18; — Cromwell, drame en
cinq actes et en vers; Paris, 1827, in-8°; — les
Orientales , poésies; Paris, 1829, in-8°; — Le
dernier Jour d'un Condamné, roman; Paris,
1829, in-12; — Hernani, ou Vhonneur cas-
tillan , drame en cinq actes et en vers ; Paris,
1839, in-8° ; — Notre-Dame de Paris, roman.;
Paris, 1831, in- 8°; — Marion Delorme, drame
en cinq actes et en vers; Paris, 1831, in-8°; —
Les Feuilles d'Automne, poésies ; Paris, 1831,
in-8° ; — Le Roi s'amuse, drame en cinq actes
et en vers; Paris, 1832, in-8°; — Lucrèce Bor-
gia, drame en trois actes et en prose; Paris,
1838, in-8°; — Marie Tudor, drame en trois
journées et en prose; Paris, 1833, in-8°; —
Étude sur Mirabeau; Paris, 1834, in-£°; —
Littérature et Philosophie mêlées ; Paris, 1834,
2 vol. in-8°; — Claude Gueux, récit en prose;
Paris, 1834, in-8°; — Angelo, drame en trois
journées et en prose; Paris, 1835, in-8°; — Les
Chants du Crépuscule, poésies; Paris, 1835,
in-8° ; — La Esmeralda , opéra en quatre actes ;
Paris, 1836, in-8°; — Les Voix intérieures,
poésies ; Paris, 1837, in-8° ; — Ruy-Blas, drame
en cinq actes et en vers; Paris, 1838, in-18; —
Les Rayons et les Ombres, poésies; Paris,
1840, in-8°; — Le Retour de V Empereur,
ode; Paris, 1840, in-8°; — Le Rhin, lettres à
un ami; Paris, 1842, 2 vol. in-8°; nouvelle édi-
tion augmentée d'un volume entièrement inédit;
Paris, 1845, 4 vol. in-8°; — Les Burgraves,
trilogie en vers; Paris, 1843, in-8°; — Napo-
léon le Petit, pamphlet ; Bruxelles, 1852, in-18 ;
— ■ Les Châtiments, poésies; 1853, in-18; — Les
Contemplations, poésies; Paris, 1856, 2 vol.
in- 8°; — Œuvres complètes; Paris (Renduel),
1838, 22 vol. in-8°; nouvelle édition, Paris
(Fume), 1840 41, 13 vol. in-8°; — nouvelle
édition; Paris (Charpentier), 1841-1845, 15 vol.
in-12 ; plusieurs éditions dans divers formats, de
1852 à 1856, et dont deux sont encore en voie de
publication , et enfin une nouvelle édition , Paris
(Hachette), 1858, 23 vol. in-12.
Divers articles insérés dans Le Conservateur
littéraire, dans La Revue des Deux Mondes
et dans d'autres recueils, ont été imprimés sé-
parément ou insérés dans ses œuvres. Trots dis-
cours prononcés par M. Victor Hugo a l'Acadé-
mie française , l'on dans la séance du 3 juin 1841,
lors de sa réception, en réponse à M. de Sal-
vandy; le second, dans la séance du 16 janvier
1845, lors de la réception de M. Sainte-Beuve,
ont été imprimés à part, chez F. Didot , et insérés
dans le recueil.de l'Académie. Parmi les discours
prononcés à la chambre des pairs et aux Assem-
blées constituante et législative , plusieurs ont
été imprimés séparément, entre autres le discours
sur la transportation; 1850, in -8°. L. J.
Rabbe, JBieçr. univ. et port. des Contemporains,
«ippl. — Looaéûle, Galerie des Contemporains illustra,
1. 1. — Cb. Robin, Galerie des Gens de lettres an Dix-
neuvième siècle. — Sainte-Beuve, Portraits contempo-
rains, ëdlt. de 18*6, 1. 1. — Gustave Planche, Nouveaux
Portraits littéraires, édit. de 1854, t. I, et Bévue des
Deux Mondes, 18 mars 1888, année 1886, 4 roi. — A. Fon-
taney, dans la Revue des Deux Mondes, 1 er aoàt isss.
— Cbarleu Magnln, dans la Bévue des Deux Mondes,
loin 1840 et 18 mars 1848. — Encyclopédie des Gens du
Monde. — Dictionnaire de la Conversation. — Bour-
qaelot, Littérature Française contemporaine. — West-
minster Review, arril 1868.
; hugo ( Charles ) , littérateur français, fils
aîné du précédent , né à Paris , le 2 novembre
1826. Un des fondateurs du journal L'Événement
en 1848, il fut condamné, au mois de juillet 1851,
à six mois de prison , par la cour d'assises de la
Seine, pour avoir attaqué la peine de mort
à la suite de l'exécution des contrebandiers
de Montcharmon. 11 fut en cette circonstance dé-
fendu par son père. M. Charles Hugo ne sortit
de prison qu'à l'expiration de sa peine, en février
1852, et alla retrouver son père à Bruxelles, d'où
il l'a suivi à Jersey et à Guernesey. En 1857 il
a fait paraître un roman féerique intitulé : Le
Cochon de saint Antoine. J. Y.
Renseignements particuliers.
* huoo ( François-Victor) , littérateur fran- .
çais, frère du précédent, né à Paris, le 22 oc-
tobre 1828. Chargé de la partie étrangère dans
le journal L'Événement m 1848, il fut condamné,
en septembre 1851 , à neuf mois de prison ,
par la cour d'assises de la Seine, pour avoir
attaqué le gouvernement d'alors, à l'occasion de
l'arrestation à Paris d'un certain nombre de ré-
fugiés allemands. Enfermé dans la même cellule
que son frère , il fut relâché trois mois avant
l'expiration de sa peine. Il rejoignit son père à
Jersey, et le suivit à Guernesey. 11 a publié la
première traduction française des Sonnets de
Shakspeare, 1857, in-8°; et la Normandie
inconnue, ouvrage historique sur les lies de
la Manche. J. V.
Docum. particuliers.
* HUGOL1NUS PBESBYTBR1 , jurisconsulte,
italien, né dans la seconde moitié du douzième
siècle, à Bologne, mort un peu après 1233. Après
avoir étudié la jurisprudence sons la direction
de Jean Bassianus, il devint professeur de droit
à l'université de sa ville natale. H y fut aussi
nommé juge, et envoyé plusieurs fois comme
ambassadeur par la république. On a de lui :
495
HUGOLINUS - HUGOT
42G
Summa Digestorum, inséré comme appendice
dans les éditions de la Summa d'Azon, sauf la
première; cet ouvrage, important pour l'histoire
de la jurisprudence, avait été faussement attribué
à divers autres légistes; Savigny a prouvé qu'il
est dû à Hugolinus; — Diversitates , seu dis-
sensiones Dominorum, ouvrage précieux, trai-
tant des controverses entre les glossateurs, in-
séré dans le recueil publié par Haenel (voy. ce
nom), qui concerne cette matière; — Dislinc-
tiones : des extraits s'en trouvent dans le recueil
précité ; un manuscrit en existe à la Bibliothèque
impériale de Paris, n* 4609; — ■ Qusestiones;
cet ouvrage, dont Haenel a aussi donné plusieurs
extraits, existe dans le même manuscrit; —
Gtossx : remarques sur les diverses parties
du Corpus Juris, dans lesquelles Hugolinus a
fait preuve d'une sagacité critique rare à son
époque. Elles se trouvent dans plusieurs manus-
crits, la plupart à la Bibliothèque impériale de
Paris. — Hugolinus est encore auteur de quel-
ques autres ouvrages juridiques, qui ne nous ont
pas été conservés ; le recueil de lois féodales et
de constitutions des empereurs d'Allemagne,
connu sous le nom de Dixième Collation, a été
rassemblé par lui. £. G.
DlploccaUrliu, De PrmtanUa Dœtorum, n* 6t. —
Sartt, De Claris ArcMgymnasH Bononisnsis Professori-
bus, pars I. — Fantozzl , Scrittori Bolognesi, t. VII. —
Savigny, Histoire du Droit romain au moyen âge, t. V.
; hugon .( Gaud-Âmàble, baron ), vice ami-
ral et sénateur français, né à Granville (Manche),
le 31 janvier 1783. Il s'engagea à douze ans sur
un bâtiment de l'État , et y servit en qualité de
mousse et de novice. Lieutenant de vaisseau le
23 juin 1810, capitaine de frégate le 1 er sep-
tembre 1819, Une prit qu'une part secondaire aux
événements maritimes de la république et de
l'empire. Sous la seconde restauration , il contri-
bua à la réorganisation de la marine. Il fut nommé
capitaine de vaisseau le 23 mai 1825, et appelé
au commandement de l'Ile de Gorée. L'année sui-
vante, il se distingua à la bataille de Navarin,
où, commandant VArmide, il coula à fond la
frégate torque Lisagnan. Lors de l'expédition
entreprise contre la régence d'Alger, il eut la
direction d'environ cinq cents bâtiments chargés
des transports. Nommé contre-amiral le 1 er mars
1831, il reçut le commandement de l'escadre de
Toulon, destinée à former la station du Levant.
il rendit d'importants services au commerce eu-
ropéen, en purgeant l'Archipel des pirates qui
infestaient ces parages. En 1840, il commanda
l'escadre envoyée dans les eaux de Constan-
tinople pour contrebalancer l'influence de l'An-
gleterre et de la Russie, et à la suite de cette expé-
dition il reçut le brevet de vice-amiral. Employé
depuis à des travaux d'organisation intérieure, il
devint successivement membre du conseil d'ami-
rauté , et vice-président de la commission supé-
rieure instituée pour examiner les questions
relatives à la construction, à l'organisation et à
l'armement des bateaux à vapeur, Grand'croix
de la Légion d'Honneur (3 mai 1851 ), il fait
partie du sénat depuis le 26 janvier 1852.
Sicard.
Biographie des Membres du Sénat (1852). — Les grands
Corps politiques de l'État <18S«). — L'Album de la Se-
maine (1858). - Annuaire de la Marine (1884).
hugonet ( Philibert ), cardinal français ,
mort à Rome en 1484. Après avoir étudié tour à
tour à Dijon, à Turin, à Padoue, il devint cha-
noine de Mâcon, puis doyen de cette église. Ap-
pelé ensuite dans les conseils de Charles, duc
de Bourgogne, il fut chargé par lui de diverses
ambassades auprès des papes Paul H, Sixte IV,
et de Ferdinand, roi de Naples. Son oncle,
Etienne Hugonet, qui était évêque de Mâcon,
mourut en 1473. Philibert fut aussitôt pourvu
de sa charge, et en la même année, le 7 mai,
nommé cardinal-prêtre par Sixte IV. Après la
bataille de Nancy, Guillaume Hugonet, frère de
Philibert, fut pris par les Gantois et puni de
mort, comme un des plus zélés fauteurs de la
tyrannie bourguignonne. A la nouvelle de ce tra-
gique événement, Philibert se retira en Italie, et
fut nommé par le pape légat de Viterbe. il mou-
rut tellement pauvre et endetté, que ses funérail-
les furent célébrées aux frais de la chambre
apostolique. B. H.
Gallia Christ., t IV, col. 1091.
hugot (il ), surnommé le jeune, mu-
sicien français, né a Paris, en 1761, mort par
suicide, le 18 septembre 1803. 11 avait reçu des
leçons de flûte d'Atys. « Une belle qualité de
son, dit M. Fétis, une grande justesse d'intona-
tion et un coup de langue brillant lui procu-
rèrent de bonne heure une belle réputation. >»
Quand Yiotti organisa, à la fin de 1789, l'or-
chestre du théâtre des Bouffes italiens, Hugot
jeune fut choisi pour première flûte, et son frère
aîné chargé de la seconde partie. Hugot entra
aussi dans le corps de musique militaire de la
garde nationale de Paris ; et après la suppression
de ce corps, il devint professeur du Conserva-
toire de Musique, qui venait d'être créé par la
Convention. L'Opéra-Comique ayant succédé aux
chanteurs italiens, Hugot jeune resta dans l'or-
chestre du théâtre Feydeau. Son talent se mon-
tra avec avantage en 1796 et 1797 dans les con-
certs donnés à ce théâtre, où il joua des concertos
de sa composition et des symphonies de De-
vienne. Chargé par le comité du Conservatoire
de la rédaction d'une méthode de flûte, il s'oc-
cupait de ce travail lorsqu'il fut pris d'une fièvre
nerveuse; dans un accès, il se blessa de plu-
sieurs coups de- eouteau et se précipita de la
fenêtre d'un quatrième étage. Il mourut presque
sur le coup. Wunderlich, aussi professeur de
flûte au Conservatoire, recueillit les matériaux
que Hugot avait préparés et publia : Méthode
de Flûte adoptée pour l'enseignement dans
le Conservatoire de musique, par A. Hugot, et
terminée par Wunderlich; Paris, 1804, in-fol.
Parmi les compositions musicales de Hugot on
457
HUGOT
cite des concertos, des trios, des duos, des so-
nates et des variations pour flûte* J. Y.
Fétls, Biogr. mniv. des Musiciens.
HUGOU. Voy. B\SSKV1LLE.
HUGTENBURCH. Vop. HuCHTENBUfiCH.
hugubmn (Sulpiœ), révolutionnaire fran-
çais, né vers 1750, en Lorraine, mort vers 1803.
Il avait reçu une bonne éducation, et débuta avec
succès au barreau de Nancy. En 1778 il obtint
un prix de l'Académie de Lyon, pour un Mé-
moire sur tes Étangs (Lyon, 1779, in-«°) ; mais
de mauvaises relations l'entraînèrent dans le
débauche, et il se vit contraint de changer de
carrière. Il s'engagea dans les carabiniers,
déserta peu après , et entra commis dans l'octroi
de Paris. Lorsque la révolution éclata, il devint
l'un des chefs des émeutiers du faubourg Saint-
Antoine. Il figura dans tous les mouvements
populaires de la capitale, et se fit remarquer à
la prise de la Bastille (14 juillet 1789). Le
20 juin 1792 il guidait les factieux qui, après
avoir envahi l'Assemblée législative, se ruèrent
sur les Tuileries. Dans la nuit du 9 au 10 août
suivant, Huguenin conduisait encore les insurgés
qui chassèrent la municipalité ; il se fit nommer
aussitôt président de la commune. Il commit
alors des dilapidations et des vexations de tous
genres, et signa le 30 août avec Méhée-Lalouche
et Tallien des ordres qui remplirent de détenus
les prisons de Paris. Le 2 septembre il déclara
la patrie en danger, et donna ainsi le signal du
massacre des malheureux qu'il venait de Taire
arrêter. Il fut ensuite envoyé en mission à Lyon,
à Chambéry, puis à Bruxelles, où il acheva, dit-
on, de s'enrichir. S'il faut en croire Prudhommc,
il fit transporter dans sa demeure du faubourg
Saint-Antoine de Paris douze chariots pleins de
meubles, tableaux et effets précieux enlevés aux
châteaux princiers de la Belgique. Le 14 sep-
tembre 1793, Huguenin fut accusé de concussion
devant le conseil général delà commune, qui l'o-
bligea à rendre compte de ses missions. Il invoqua
ses services révolutionnaires, et réussit à détourner
la condamnation qui semblait devoir le frapper*
mais depuis il n'occupa plus aucune fonction pu-
blique, et mourut dans l'obscurité. H. Lesdeur.
Le Moniteur universel, an I79î, n«» 286, 246, 291*
an l« r , n« 629. — biographie moderne (Paris, isoèj. -I
Arnault, Jay, Jouy et Norvtos, Biographie nouvelle des
Contemporains ( Paris» 1823 ).
hucues, nom commun à un grand nombre de
personnages, dont la plupart appartiennent an
moyen âge, classés par ordre chronologique.
I. Hugues, saints ou ecclésiastiques.
Hugues (Saint), archevêque de Rouen, au
huitième siècle, mort à Jumiéges, le 8 avril 730.
Il était fils de Drogon , duc de Bourgogne et
de Champagne, et de Plectrude, Adaltrude, ou
Anstrude, qui était elle-même fille de Waraton,
maire du palais. Drogon avait eu pour père le
célèbre Pépin d'Héristal. Hugues était donc d'une
naissance doublement illustre. Il fut d'abord
— HUGUES 498
primicier de l'église de Mete* Ensuite il devint
è la fois archevêque de Rouen, éveque de Paris
et de Baveux , abbé de Jumiéges et de Saint-
Wandrille. Cette réunion de plusieurs bénéfice»
en une seule main était alors un fait ordinaire.
Souvent même ce ne sont pas des olercs, mais
bien des laïcs que Ton voit chargés en même
temps de plusieurs gouvernements ecclésiasti-
ques. On a publié les actes de saint Hugues. Mais
les auteurs de l'ancien et du nouveau Qalli*
Christian* ont rejeté ces actes comme apo-
cryphes et pleins de fables. a. H.
GaUi* Chréetiana , i. -VU, col. 26, et t. XI, coL 17. --
Bollandus t Acta Sanct., — Aprili inense, 1. 1, p. 841 —
Bailtet, Vies de* sntnte, 9 avrtl. - Ï1ir*m*i *b»Utr-
neUêntê , <* AtherU SpfciUgiù t t III, p. me.
■ugubs, éveque d'Aagouléme> mort en «90
suivant la Chronique d'Augottiême, et» suivant
les auteurs de Y Histoire Littéraire, en 993. H
appartenait par sa naissance aux anciens comtes
de Jarnac. Sa promotion sur le siège d'Angou»
lème eut lieu le 21 mars 973* Il s'y comporta
plutôt en baron qu'en éveque : ayant formé
le dessein de réunir, en sa main l'administra-
tion civile du diocèse, il ne s'arrêta pas de-
vant les protestations du comte Arnauld, et guer-
roya contre lui pendant plusieurs années. On croit
que, vers la fin de sa vie, Use retira dans l'abbaye
dé Saint-Cibard, y prit la robe claustrale, et y
mourut obscurément, faisant pénitence d'une vie
trop agitée. Il avait laissé plusieurs ouvrages;
maison ne tes retrouve pins» B. H.
Bit*. Utt. es la France, t VIII.
hitoubs» éveque de Nevers, mort le 8 mai
1050. On le voit sur te siège de Nevers dès
l'année 1026. II assistait au concile de Reims en
1049^ et en 1050 au concile de Rome où fut
logé Bérenger» C'était un bien médiocre poète,
comme le prouvent tes vers vraiment barbares
que lui attribuent les bénédictins»
fiisu Littër, de te franc* t. vin, p. *?*.
HUCrUBS Dtt bbbtbcil , éveque de Lan*
grès, mort lé 16 mars 1051. Il était -fils de Gel-
duin, comte de Breteuil, et frère de Yateranne,
abbé de Saint-Vanne. Après avoir étudié la théo-
logie à l'école de Chartres , sous la discipline de
Fulbert, Hugues fut appelé par le roi Robert
sur le siège épiseopal de Langres, dans les pre*
miers mois de Tannée 1031. C'était un prélat de
noble origine , et ses mœurs forent plutôt celles
d'un homme d-épée que d'un éveque. Traduit
devant le concile dé Reims nomme coupable
d'une grande série de crimes, parmi lesquels les
adultères et les homicides n'occupent pas le pre-
mier rang , il se présenta d'abord devant ses
juges et parut vouloir se défendre. Mais entre
la seconde et la troisième session il prit la fuite,
et fut excommunié. C'est alors que pour ex-
pier tant de méfaits il se rendit pieds nus a
Rome, auprès du pape Léon IX, qui, touché par
les marques d'une si grande pénitence, lui par-
donna. Il mourut à Biterne, lorsqu'il revenait
en France. On possède une lettre fort intéres-
429
iroauEs
480
santé de HugnéS dé Bretenil êur les erreurs de
Bérenger : elle a été publiée à la Smte des Œu-
vres de LaHfïunc. B. fl.
GàlttM •Chfmkénûs U ÎV, - BUti ÏAU. M l* «rame*
U Vif, p. Mi.
HUGUES, archevêque de. Besançon, pre-
mier du nom, mort le %1 juillet ip66.ll était âls
d'Humbert II, sire de Salins» Sa mère , qui se
nommait JErmenburge, était fille, dit*on, de Lam-
bert, comte de Chatons,. V^coeyêgu^ Gaucher
de Salins mourant en 1031, Hugues, son proche
parent , fut sans délai appelé sur le même siège.
Dès les premières années de son épisçûpaL il con-
gédia les chanoines qui qccupâienl l'erse de
Saint-Anatole de Salins, et donna cette église
aux moines de Saint-ÎJénigne de DU«n \ mais il se
repentit plus tard d'avoir fait os changement)
et reconstitua en 1046 1» chapitre de Saint-Aftà-
tole, qui a si longtemps subsisté aven éclat
L'église cathédrale de fiêaattéon n'était pas
achevée t Hugues y mit la dêrtrtère main et l'en*
ricMt de nombreuses donations, Léon IX en
consacra l'autel* Httgde* rétablit aussi l'église
abbatiale de Saint^Paul, oO. Il plaça des chanoine*
séculiers » sous la GOnduite d'un doyen* Cette
fondation est du U mars 1044. C% sont les actes
principaux de son Administration métropolitaine;
mais les historiens en rapportent beaucoup d'an»
très d'un moindre intérêt, Hugues était un la*
borieux prélat, toujours occupé de quelque nou*
velie entreprise. Son crédit auprès des empe-
reurs, auprès des papes, fut très-grand. Il
remplit, auprès de l'empereur Henri m, les fonc-
tions d'archi-chancclier, et assista comme légat
du saint-siége au couronnement de Philippe I er ,
roi de France. B. H»
DiiDOd de Chaînage» UisL 4e l'Utilise de Besançon, t. 1,
p. st.
HUGUES, archevêque de Lyon, né vraisem-
blablement à Romans, en t)auphiné, mort le
7 octobre 1106. Né dans Une des plus nobles
maisons, celte des ducs de Bourgogne, Hugues
fut d'abord prieur de Saint-Marcel de Châlons, et
ensuite évêque de Die. Il occupait lé siège de
Die, dans la province de Vienne, quand il fut
nommé légat du saint-siége. En aucun temps,
peut-être, la mission des légats apostoliques n'a-
vait été plus laborieuse et plus difficile. Il s'agis-
sait de réformer toutes les églises , et le saint-
siége ayant dicté lé programme des réformes ,
le devoir des légats était d'imposer partout, même
par la contrainte. Une sévère discipline, une ob-
séquieuse soumission. On contestait ici la né-
cessité de ces changements; on prétendait ail-
leurs que la violence du remède devait causer
dans l'Église un trouble plus grand que le
mal reconnu t sur tous les points se manifes-
taient des résistances » que Rome appelait des
révoltes; dans les assemblées d'évéques oonvo*-
quées à la fois au nord, au midi de la France *
éclataient les mêmes tumultes; les légats
étaient injuriés , les évêques étaient déposés ;
. les foudres de l'excommunication frappaient tour
à tour, et les plus hantes et les plus :
têtes , et de vénérables pasteurs qui avaient dé*
nonce tes périls de la liberté et des évêques»
des abbés du plus mauvais renom qni avaient
invoqué la liberté comme un rempart pour leurs
désordres ; les fidèles consternés ne savaient plus
où fuir les ténèbres, Où rechercher la lumière.
En oette universelle confusion* l'évêqué de Die
se montra tout a la fois un des plus actifs des-
légats, et un des plus dévoués à la cause de
Grégoire VII et dé l'omnipotence romaine.
Gomme récompense de ses ^datants services,
il fat nommé archevêque de Lyon , après la mort
de Gébem. La date de cette mort est incertaine.
Cependant on croit devoir fa rapporter à Tannée
1083< Deux ans après, Grégoire VU, sentant les
atteintes de sa fin prochaine , désigna trois hom-
mes également dignes, à son avis, de lui suc-
céder et do continuer son entreprise. Hugues
fut un de ces trois élus de Grégoire VII * mais
le conclave loi préféra Didier, abbé du Mont-
Csssûh On te vit alors se soulever contre le vote
qui l'avait écarté, s'emporter en injures , en ca-
lomnies contre te nouveau pape , et demander s»
déposition même aux représentants dé la puissance
séculière* Oé qui fat d'abord Un grand scandale,
et devint presque un schisme. Aussi le concile de
Bénévefit, en 1087, prononca-t-tt, contre l'arehe?
vêquo de Lyon et se* fauteurs» une sentence dj'e**<
communication. Dans Ces temps de trouble » tes
principaux rotes sont réclamés et comme usurpés
par les hommes les plus alertes , lès plus auda-
cieux; mais le mobile de leur audace est aussi :
souvent, plus -souvent peut-être, l'ambition per-
sonnelle qne le sèle du bien pubHot Hugues se
vit très-ooutpromis par sa conduite dans cette af-
faire. Aussi, après la mort de son rival et Yé~-
lection d'Urbain II, s'enripressa^t-il de faire pro-
fession de dévoûment au saint-siége , et de dé-
savouer tes sentiments sehismatiques qui lui
avaient été, dit-il, imputés par ses ennemis,
désignant comme tes plus opiniâtres et tes plus
véhéments l'abbé et les - moines de Cluny< Ur-
bain ne refusa pas un pardon qu'on lui deman-
dait avec les marques d'un tel repentir, et rendit
à l'archevêque de Lyon sou titre de légat. Dès
l'année 108&» peu de mois après l'avènement
d'Urbain » nous le voyons présider, en cette qua-
lité, le concile où fut absous Thierry, évêque de
Verdun» qui s'était déclaré pour l'empereur Henri
dans sa lutte mémorable contre Grégoire VU.
En 1093 il Ordonna Poppon évêque de Metz»
qui ne voulait pas être oonsaeré par son propre
métropolitain» l'archevêque de Trêves, complice
comme Thierry» mais complice impénitent» des
résistances impériales* Il est aussi particulier
à ces époques de grande effervescence qu'on
n'y conserve pas longtemps le souvenir des er-
reurs, des trahisons même, et que, dans le
transport du succès ou l'abattement de la dé-
faite, on ne juge les hommes qu'au poids de
leurs services présents. Ainsi, personne n'était
431
HUGUES
432
plus mal noté que l'archevêque de Lyon au mo-
ment où le conclave appelait Urbain II sur le
siège de Saint-Pierre. Quelques années après
personne n'était plus honoré, plus puissant que
lui. On rappelait avec emphase primat des
Gaules, te représentant et l'organe du saint-
siége dans l'Eglise de France; on le véné-
rait , on le craignait comme un véritable pape.
H préside en 1094 le concile d'Autan, qui con-
firme toutes les sentences déjà publiées contre
l'empereur, l'anti-pape Guibert et Philippe, roi
de France. La même année il préside encore
dans la même ville et à Brives, à Dol, à Sau-
mur, d'autres assemblées d'évoqués. Il est par-
tout, et partout il se signale parla même ferveur
pour les intérêts de l'Église romaine. Pierre le
Vénérable, qui ne passe pas pour un des hommes
les plus crédules de son temps , raconte même,
dans son enthousiasme pour le formidable légat
que, « lorsqu'il traverse les villes, émues, sa voix
seule y opère des miracles ». Au concile de Cler-
mont , en 1095, il fit renouveler par Urbain II
le décret apostolique qui soumettait toutes les
métropoles , des Gaules à la primatie de l'Église
de Lyon. Richer, archevêque de Sens, protesta
vainement contre les termes de ce décret : ses
protestations multipliées, ses démarches, ses
prières, ses ajournements n'eurent d'autre ré-
sultat que de le faire suspendre. Hugues eut la
gloire et la joie d'arriver bientôt à ses fins. Ri-
cher étant mort, Daimbert est éln son succes-
seur. Hugues interdit de le consacrer avant que
Daimbert ait solennellement reconnu la supré-
matie lyonnaise. Tout le clergé de Sens est dans
la plus vive agitation , et ne permet pas à Daim-
bert de se soumettre. Celui-ci parlemente, gagne
du temps, se rend auprès du souverain pontife,
espérant ramener par de bonnes raisons à recon-
naître les droits antiques de son siège ; mais
toutes ses raisons, bonnes ou mauvaises, sont
inutiles ; il n'est consacré qu'après avoir subi
la condition imposée. En 1096 Hugues assiste
au concile de Tours , présidé par Urbain II.
Quelque temps après il reçoit à Lyon son il-
lustre ami, Anselme, archevêque de Cantorbéry,
qu'il avait soutenu dans sa courageuse résistance
au roi d'Angleterre. Lorsqu'en l'année 1103 An-
selme se vit condamné à un nouvel exil, c'est à Lyon
qu'il vint chercher une retraite : il y resta seize
mois. Si, durant les dernières années de sa vie ,
Hugues s'occupa de moins grandes affaires, il
ne connut pas davantage le repos. C'est ce que
nous apprennent, non-seulement les fastes de l'É-
glise de Lyon, mais encore ceux de toutes les
églises soumises à cette métropole. Baudri, abbé
de Bourgueil , puis évêque de Dol, a célébré la
mémoire de Hugues en quelques vers, paimi les-
quels nous reproduirons celui-ci :
Magnas Romans fllius Eccleatae ;
Hugues fut, en effet, un des plus grands ser-
viteurs de l'Église romaine, un des lieutenants
les plus fidèles, et les plus braves de Gré-
goire VII; mais nous ne pouvons nous dissi-
muler aujourd'hui qu'il eut un peu trop l'hu-
meur de son chef. L'un et l'autre accomplirent
d'importantes réformes, puisque l'unité de l'É-
glise fut leur ouvrage; mais plus d'une fois l'on
et l'autre, trop impatients d'atteindre le but,
trahirent par excès de zèle la personnalité de
leurs mobiles secrets. Parmi les vertus qui leur
manquaient il faut nommer d'abord la modestie.
Les œuvres de Hugues sont ses Lettres, qu'on
trouve dispersées dans divers recueil». V His-
toire Littéraire a suffisamment indiqué toutes
ceHes qui sont parvenues jusqu'à nous. Elles
contiennent les plus utiles renseignements sur
l'histoire générale du douzième siècle. B. H.
Qallia Christ., t. IV, eoL 97. - HisU LUt. de la
Francs, v IX, p. m.
HUGUES, abbé de Cluny, né en 1024, à Semar,
en Briénois, diocèse d'Autun, mort à Cluny, le
29 avril 1109. Dalmatius, son père, et Arem-
burge de Vergy, sa mère, appartenaient l'un et
l'autre à la première noblesse de la Bourgogne.
A l'âge de quinze ans il fut reçu novice à Cluny,
et il devint abbé de cette maison à la mort d'O-
dilon, en 1049. La même année il assistait au
concile de Reims. Peu de temps après nous le
trouvons aux conciles de Mayence et de Rome.
Dans ces diverses assemblées, il se concilia l'es-
time du pape saint Léon, et celui-ci, ayant ap-
pris à faire le plus grand état de son jugement
et de son éloquence, le chargea d'une miswon
difficile dans les États de Hongrie. H la remplit
avec succès; et dès lors il fut prié par les papes,
par les rois, de donner son avis sur toutes les
grandes questions agitées en France ou à Rome.
Il exerça même plus d'une fois les fonctions de
légat apostolique. Son zèle pour les intérêts de
l'Eglise romaine a été vanté par les papes eux-
mêmes : telle était cependant la prudence de son
esprit, telle était l'indépendance de son caractère,
que, malgré l'autorité de Grégoire VII, il refusa
de remplir un autre rôle que celui de médiateur
dans la célèbre querelle de l'empereur et du
saint- siège. Les historiens de l'abbaye de Cluny
ont d'ailleurs raconté le détail de son intelligente
et laborieuse administration; personne n'a plus
contribué que lui à l'accroissement de ce monas-
tère : on peut dire qu'il en a été le second fonda-
teur. La vie de Hugues est bien connue. Plusieurs
contemporains, et entre autres Hildebert de La-
vardin, ont prisa tâche denous en transmettre les
plus importantes circonstances. Mais a-t-il laissé
d'autres écrits que ses lettres et quelques statuts?
S'il en existe, l'érudition ne les a pas encore si-
gnalés. B. H.
Hist. IAtt. de la France, t. VXIII, p. 166. — Bollandus,
Acta Sonet., » avril. — Gallia Christ., t. IV.
HUGUES (Saint), évêque de Grenoble, né à
Château-Neuf-sur-Lers , près Valence, en 1053,
mort le 1 er avril 1132. Son père, nommé Odi-
Ion , était un des seigneurs du pays. Il s'est fait
connaître lui-même par sa piété : on ne doit donc
pas trouver extraordinaire qu'il ait engagé son
433
HUGUES
484
fils à prendre l'habit ecclésiastique. Hugues fut
d'abord pourra d'un canonicat dans l'église de
Valence. S'étant ensuite engagé sous la conduite
du célèbre légat Hugues, évêque de Die, il le
suivit à Lyon, a Avignon, exécuteur subalterne,
il est vrai, mais plein de zèle , de toutes les sen-
tences dictées à Rome par Grégoire VII contre
les prélats simeniaques et insoumis. Tandis que
le* légat et son fidèle assesseur étaient dans les
murs d'Avignon , où se tenait un concile, quel-
ques chanoines de Grenoble se présentèrent, an*
nonçant la mort récente de leur évoque et de-*
mandant au concile de lui donner un successeur.
On désigna le chanoine de Valence. D accepta. On
était alors au plus fort de la querelle entre les
évêque» gallicans, qui s'efforçaient de justifier le
désordre de leur conduite en alléguant l'indé-
pendance de leurs sièges , et le pontife romain,
qui travaillait à confisquer les restes de cette in-
dépendance en accusant les mœurs et toutes les
condamnables pratiques des évoques gallicans.
Le nouvel évêque de Grenoble , ardent serviteur
de la cause ultramontaine, ne voulut pas être
consacré par son métropolitain Guermond , ar-
chevêque de Vienne, déjà dénoncé comme si-
moniaque. Aussitôt après son élection il se
rendit à Rome, où il reçut la consécration des
mains de Grégoire VII, en 1080. Après deux ans
d'épiscopat, il prit en dégoût les affaires du
siècle, et, se retirant au monastère de la Chaise-
Dieu , il y revêtit l'habit claustral. Mais le pape
ne lui permit pas de demeurer longtemps dans
cette solitnde. Rappelé par ses ordres à Grenoble,
Hugues gouvernait cette église en 1084, quand y
arma saint Bruno, cherchant un lieu désert pour
y fonder sa Théhaïde. Hugues le conduisit lui-
même dans les après montagnes où s'éleva plus
tard l'édifice de la grande Chartreuse. On le voit
en 1112 au concile de Vienne, et plus tard au
concile du Puy en Vélay. Il fut un des amis de
saint Bernard, auquel il alla rendre visite à Clair-
Taux. Innocent II canonisa Hugues peu de temps
après sa mort, le 22 avril 1134.
Saint Hugues est considéré comme l'auteur du
célèbre cartulaite de l'église de Grenoble, dont
Jacques Petit a publié plusieurs extraits à la
suite du Pénitentiel de saint Théodore de Can-
torbéry. On en trouve aussi quelques-uns dans
les Mémoires pour servir à V Histoire du Dau-
phiné. Dom Mabillon a en outre publié une lettre
de saint Hugues dans l'appendice du tome V de
ses Annales Ordinis S. Benedicti. B. H.
Histoire Littéraire de la France, t. XI,> 149. — Gai-
lia Christiana {vêtus), t. II.
hdgubs, abbé de Flavigny, diocèse d'Autun,
né en 1065, mort après l'année 1115. Il était
d'une naissance illustré, puisqu'il tenait par sa
mère à l'empereur Othon III. Cependant, dès sa
jeunesse il se voua tout entier à l'Église, et fit
profession d'observer la règle de Saint-Benoit à
l'abbaye de Saint- Vanne , à Verdun. Thierry,
évêque 3e Verdun , s'étant alors prononcé pour
l'empereur contre le pape, les moines de Saint-
Vanne ne suivirent pas son exemple. Ils avaient
peut-être comme lui le droit de faire un libre
choix entre les partis belligérants. Cependant,
Thierry les ayant chasses de sa ville épiscopale
comme des révoltés, ils se retirèrent dans l'ab-
baye de Saint-Bénigne de Dijon. Hugues était au
nombre de ces exilés. L'abbé de Saint-Bénigne,
Jarenton, lui fit d'abord le plus aimable accueil ,
et bientôt après il ne voulut plus avoir d'autre
compagnon que ce noble frère, si recomman-
dante, d'ailleurs, par les brillantes qualités de son
esprit. Ils parcoururent ensemble l'Angleterre, la
Normandie. Hugues passait par la ville de Ma-
çon, quand il y rencontra une assemblée d'é-
vêques, parmi lesquels Haganon, évêque d'Au-
tun, se plaignait vivement du fâcheux état où se
trouvait l'abbaye de Flavigny, privée depuis sept
ans de la tutelle d'un abbé. Les plaintes d'Ha-
ganon furent écoutées , et le gouvernement de
l'abbaye de Flavigny fut attribué au moine de
Saint-Bénigne. Il fut consacré le 22 novembre
1097. Mais deux ans après, Norgand ayant rem-
placé Haganon sur le siège d'Autun, Hugues et
le nouvel évêque eurent ensemble des contesta-
tions qui ^amenèrent presque aussitôt une écla-
tante rupture. Norgaud, cédant à la colère, sus-
pendit Hugues de ses fonctions sacerdotales.
Celui-ci quitta dès lors Flavigny, retournant à
Saint-Bénigne près de son bon ami Jarenton. Ils
parurent ensemble en 1100 au concile de Va-
lence, et obtinrent de ce concile une sentence
sévère contre Norgaud, qui fut d'abord sus-
pendu, puis déposé pour crime de simonie. Mais,
dans ces temps de trouble, les évoques déposés
se maintenaient sur leur siège tant qu'ils n'en
étaient pas expulsés par les clercs et le peuple
insurgés. Norgaud, sachant que les moines de
Flavigny ne regrettaient pas leur ancien abbé,
se rendit auprès d'eux , et leur donna pour chef
spirituel le prieur Girard. Ils avaient sans doute
le droit de résister à cette violence, et cela leur
eût été facile ; mais on ne s'inquiétait pas beaucoup
du droit quand on trouvait son profit à ce qu'il
fût violé. Girard , préféré par les moines , con-
serva son titre, et, après avoir fait quelques
vaines tentatives, Hugues renonça lui-même à
toute prétention sur l'abbaye de "Flavigny. Nous
le retrouvons en 1111 à Saint-Vanne, recevant
d'un évêque rebelle au saint-siége la crosse en-
levée aux mains de l'abbé Laurent C'est une ac-
tion que l'on a sévèrement condamnée. Nous
sommes bien loin de l'événement, et il nous est
raconté par l'abbé Laurent, témoin qui certes
peut être récusé; cependant il parait que Jaren-
ton lui-même, renonçant à défendre un ami si
coupable, prononça contre lui une sentence d'ex-
communication. Laurent fut rétabli sur son siège
en 1114. On ne sait pas où et comment Hugues
acheva sa vie si pleine d'incidents.
Ses écrits ne sont pas nombreux. Nous dési-
gnerons simplement sa chronique, appelée la
4SS
HUGUES
436
Chrmtfue de Verdun ou de Flav*çf^ i que le
P. Labbe * publiée pour la première fois dan* sa
Bibliotheca nova, t. I. C'est un des plus pré*
deux monuments de l'histoire du moyen âge.
EHe n'offre pas seulement une série de faits , on
y trouve encore d'amples et intéressantes nar-
rations. On attribue au même auteur encore
d'autres ouvrages; mais ce* attributions ne
sont fondées «pie sur dés conjectures. B. H.
CalUd Ckrtit , t iv, foi. m. - Chronlcân Pirdu-
nense* pantin. - HUt ÎAttêr. de te Ftnnee> t. X**. T».
HiTCrUBft , évêque âe Porto, mort après l'an*
née 1125. II avait été d'abord archidiacre de
Compostelle. Le siège épiscopal de Porto ayant
été rétabli en 1114, Hugues obtint des lors le
gouvernement de ce diocèse, «t ce fut à sa prière
qu'en 1120 Cftllistè It éleva l'église de Compos-
telle à la dignité d'église métropolitaine. Il as-
sista plus tard à divers conciles , en U2fe, 1128.
Il a raconté la translation des reliques de saint
Fructueux , récit inséré dans la collection des
BoHandistes au 16 avril. On lui doit encore la
principale partie d'une Hiêtoire 4e V Église de
Compostelle, qui a beaucoup servi àRoderigode
Cuuha. Il faut regretter que les exemplaires de
cette histoire n'aient pas encore été multipliés par
la presse. B; H.
HUt. Lutér. de ta Front e, t XI, p lit*
HueuBB de BAiirrB-MAiiiB, moine de
Fleuri , mort vers Tannée 1130. On n'a pas d'au-
tres renseignements sur sa vie. Mais les écrits
qu'il a laissés ont rendu son nom célèbre. Le
plus souvent cité est sa Chronique , Chronicon
Floriacense, aussi appelée Bistioria Ectlesius-
tica. Elle a été imprimée à Munster, en 1638.
On a fait plus de cas de son traité De Potêstote
regali et de saeerdotuli Dignitate, publié par
Baiuze, dans le tome IV de ses Miscetlanea, et
fidèlement analysé dans le tome X de V Histoire
Littéraire, C'est utte apologie fort vive de la
puissance royale. Les rois , suivant l'auteur, ont
été établis par Dieu , et c'est outrager Dieu lui-
même que d'élever sa voix contre leur toute-
puissance. S'il est quelquefois permis de leur
résister, c'est quand ils commandent une chose
contraire à la foi t pour sa foi le chrétien doit
mourir. Mais il ne faut pas que le prétexte de la
foi menacée serve à colorer deB défections , des
révoltes inspirées par cet esprit d'insubordina-
tion dont l'histoire offre tant d'exemples. La so-
ciété chrétienne n'est pas la société païenne t la
société chrétienne a pour principe et pour fon-
dement l'obéissance des sujets à leur souverain,
tandis «nie dans la société païenne, où le gou-
vernement des États n'était réglé que bar le ha*
sard î la puissance des rbis, faible par son ori-
gine , avait une action limitée et une durée qui
dépendait des circonstances. La dignité sacerdo-
tale est aussi, selon Hugues de Fleuri , d'institu-
tion divine. Elle possède des droits très-étendus ;
mais , d'un autre coté , elle est soumise à l'ob-
servation de nombreux devoirs. Au nombre de
ces devoirs il place 10 respect de là puissance
royale , et il s'élève contre le zélé indiscret des
évèques , qui , pour accroître leur propre auto-
rité , prétendent dégager lès peuples des liens
qui les asservissent a leurs chefs temporels. Au
douzième siècle, cet écrit du moine de Fleuri était
un manifeste énergique , ou se trouvaient réso-
lues d'Une manière plus ou moins conforme A l'in-
térêt public plusieurs ; questions d'une grande
importance. Aujourd'hui ce n'est plus qu'nne
déclamation soi* un lieu commun. Hugues de
Fleuri a encore composé une fie de Si Sacerdos,
éteque de Limoges, publiée parle P. Labbe,
dans sa tiibliôth. Hôvd Mùhttteripi. , t. U,
p. 661, et par les Bollattdîstes, eu 6 mai. Il faut
en outre inscrire au catalogue de *e* oeuvres tu
récit des miracles de saint Benoit, Liber Afifa-
rtltottifti S. Mnedtetiy dont il n'a encore été
publié que des extraits. Le Manuscrit nous est
signalé par Êevret de Fontette et par le* auteurs
de Vffistoire Littéraire comme existant autre-
fois à la bibliothèque dé Fleuri. Enfin le P. Le-
long, dans sa Bibliothèque Sacrée, attribue à
Hugues de Sainte-Marie nn Commentaire sur
les Psaumes , conservé parmi les manuscrits de
là cathédrale de Dtirhatth B. H.
tiist. Littér. de la France, t. X, p. ft8S. — Fevret de
Fûtatette, HUt. de Prante. — Lédglét du fresitoy, Mé-
thode pour étudier VkUtolre, t III, p. as.
Httfetrfes , religieux de Saint-Victor, né proba-
blement aux environs d'Ypres, mort dans 1 ab-
baye de Saint-Victor, le 11 février 1141. On
lui a quelquefois donné la Saxe pour pays natal ;
mais il parait mieux prouvé qu'il quitta dans sa
jeunesse la Flandre, sa véritable patrie, et fit
alors un séjour plus ou moins prolongé sur la
terre saxonne, chez les chanoines d'HamersIe-
bett. Enfin un historien peu sobre d'hypothèses
a prétendu le faire descendre des comtes de Bla-
kemberg. Mais cette assertion n'a pas le moindre
fondement. Dès qu'il eut pris le parti de renoncer
au monde , il se rendit en France , vers l'année
1118, et alla d'abord chercher une pieuse re-
traite à l'abbaye de Saint-Victor de Marseille.
Plus tard il quitta Saint-Victor de Marseille, et
vint à Saint- Victor de Paris, on il fut reçu par
l'abbé Gîlduln. Thomas , qui gouvernait l'école
de cette abbaye, étant tombé sous le poignard
de quelques assassins, Hugues hérita de sa
chaire, et l'occupa d'une manière brillante.
Il y recueillit de si vife, de si nombreux ap-
plaudissements , que le nom de cet humble reli-
gieux, étranger à toutes les affaires de son temps,
n'est pas resté moins célèbre dans l'histoire
que ceux de saint Anselme et de saint Bernard.
Il doit cette gloire à ses écrits. Aucun des
théologiens, aucun des philosophes du moyen
âge, pas même saint Bernard , n'ont eu tant de
copistes de leurs œuvres. Dans les bibliothèques
de tous les monastères , et nous n'exceptons
pas de ee nombre les plus humWes et les plus
pauvres, on possédaitdes exemplftiresde quelque?
437
HUGUES
436
œuvres du célèbre Victoria. On le considérait
alors, parmi les nouveaux docteurs» comme le
guide le plus éclairé, le plus sur, des consciences
chrétiennes, comme un autre saint Augustin, il
est vrai que son autorité s'affaiblit subitement
vers le milieu du treizième siècle > dans tes
grandes villes , les villes lettrées, comme Paris j
Cologne, Oxford ; mais elle demeura presque in»
taqte dans les écoles monastiques , où la théo*
logie cohtentieuse ne se substitua jamais compté»
teraent à la théologie mystique. S'exulique-t-en
cet immense crédit en lisant aujourd'hui les œu-
vres de Hugues de Saint-Victor ? Oui , sa» doute.
C'est un écrivain subtil, mais ingénieux» Son
langage, souvent incorrect, est en outre chargé
d'ornements qui ne trouveraient pas graoe de*
vant un goûi sévère; maïs il saisit ttmagination
par Tétrangeté même, par tabizarrerie des jeux de
mots, des antithèses. C'est un mystique, maie
non pas un de ces mystiques exaltés qui » dès
qu'ils paraissent en chaire» enlèvent un audi-
toire et le fatiguent bientôt j sa voix est donce »
et recherche pour les séduire les oreilles déli-
cates; si sa profonde piété lui permet rarement
de penser avec le calme de la raison > il la do-
mine assez toutefois pour exprimer ce qu'il veut
dire suivant les convenances littéraires; c'est un
mystique raffiné. Ajoutons que pas une des Heure
de son éloquence n*est dangereuse. Hugues de
Saint-Victor a sans doute de grandes prétentions
à l'esprit ; mais il n-'en a pas à l'originalité dog-
matique : personne n'est plus que lui fidèle sec-
tateur des Pères orthodoxes.
Ses œuvres ont été publiées à Rouen , en 1648,
en trois volumes in-fol., par quelques-uns de
ses confrères eh religion. Mais, que l'on en soit
averti , il ne faut pas ouvrir au hasard cet ample
recueil, et juger l'auteur sur le premier opuscule
qu'on y pourra rencontrer. Il a été, en effet,
reconnu que les éditeurs , gens d'un faible dis-
cernement , ont entassé pêle-mêle dans ce recueil,
sous te nom de Hugues de Saint- Victor, les écrits
authentiques de leur confrère et ceux de Hugues
de Fouilloi. Les preuves ne manquent pas crail-
leors pour établir que Hugues de Fouilloi n'est
pas le seul auteur du douzième et du treizième
siècle qu'ils aient dépouillé de cette manière au
profit de Hugues le victorin. D'un autre coté, de
plus savants critiques ont désigné plusieurs traités
considérables qui, négligés par les éditeurs de
1 64$, bien qu'appartenant sans contestation à Hu-
gues de Saint-Victor, attendent encore le secours
de la presse polir circuler dans toutes les mains.
Cependant toutes ces désignations ne sont pas éga-
lement admissibles. Les auteurs de Y Histoire lit-
téraire ont, par exemple, mentionné parmi les œu-
vres inédites de ce docteur un assez grand nombre
de pièces publiées en 1648 sous d'autres titres, ou
même sans titres particuliers, dans le fatras des
Miscellanea. La recherche des œuvres sincères
<»t des œuvres supposées de Hugues de Saint-
Victor est une affaire pleine de difficultés. L'au-
teur de cet article s'est proposé ce problème de
critique littéraire) et il espère l'avoir bientôt ré-
solu. B. Hauréau.
UUt, !Àtt. êê M France, t. XII, p. l. - Oddin, I)e
SùtlpL Bcclei. — VteQcal 4« teanvftls. Spéculum Hist.
— Jean Trithelm, De Script. Eccles. ~ Bulletin du
Comité hùtôr. dès tnonum. écrits de VhUt. de France,
t. III, * 17t. m- Dicttotm. élst Sciences p\ilo$oph. - Dit-
Uog» DisserUtié de Jfu§ène a S.-ruton.
Huovfis, évéque du Mans, né à Saint-Ca-
îais, dans la secondé moitié du onzième siècle,
mort au Mans , le & février 1 143. Son nom de
famille était en latin PuQantis , en français p¥
ou Péan» il fut d'abord archidiacre du Mans , puis
doyen de la cathédrale» On le toit dans les actes
occupant tes fonctions de doyen depuis l'année
litl.fin 1112 il fut retetn prisonnier avec Hil-
debert , son évéque , dans le château de Nogent-
to'Rotrou. C'était, du reste, UU digne ministre
d'un tel prélat ^ actif, prudent, courageux comme
lui. Hildebert ayant été nommé archevêque de
Tours, Guy, qu'on appelle Guy tVÈtampes, de-
vint évéque du Mans. Sous cette administration
nouvelle Hugues continua de présider le chapitre
de Saint-Julien , et de le réprésenter dans toutes
les grandes affaires ; mais après la mort de Guy,
il fut à «on tour appelé sur le siège épiscopal du
Mans, le 20 septembre 1135. Son avènement
n'eut pas lieu sous d'heureux auspices : il venait
de revêtir les Insignes de Tépiscopat, lorsque
Geoffroy, oomted* Anjou , quHl n'avaitpas voulu re-
connaître pour son souverain (fcoir Geoffroy IV,
comte d'Anjou), tint occuper le Mans, en
chassa l'évêque et pilla ses greniers. Hugues n'eut
la liberté' de reprendre le gouvernement de son
troupeau qu'après neuf mois d'exil. On le compte
au nombre des prélats qui s'employèrent avec le
plus de zèle à la construction de la nouvelle ca-
thédrale du Mans. B. H.
GHltla Ckristiuhâ. t. XtV, col. 58*, *tl. - Le Consi-
ster, Bondoontl, Êvêetm du Mans,
mnnuflft d$ Mdcon, évéque d'Auxerre,
mort le 10 octobre 1151. Il était de la maison
des eomtes de Maçon , et cousin de saint Ber-
nard. Celui-ci l'entraîna, par son exemple, dans
la solitude de Ctteaux. Il en sortit plus tard , par
les ordres de l'abbé Etienne , pour aller dans le
diocèse d'Auxerre fonder l'abbaye de Pontigny.
C'est comme abbé de Pontigny qu'il parut, en
1128, au concile de Troyes. £n 1135 il fut com-
mis par Thibault, comte de Champagne , pour
établir des chanoines réguliers dans l'église de
Saint-Loup de Troyes, jusque alors desservie par
des clercs séculiers» Le clergé d'Auxerre le choi-
sit pour évéque au mois d'août 1136. Au mois
de janvier de l'année suivante, Geoffroy, évéque
de Chartres, le consacra dans l'abbaye de Fer-
rière. On le voit, en 1138, établir les Prémontrés
à Auxerre , et terminer un grave débat entre
Manassé, évéque de Meaux, et Risende, abbesse
de Sainte-Fare. En 1140 il assistait au concile
de Sens, qui condamna la doctrine d'Abélard ; en
1 144, au colloque de Montreuil , entre le roi
4*9
HUGUES
440
Louis VII et Thibauld, comte de Blois ; en 1148,
au concile de Reims, où il combattit les opinions de
Gilbert de la Porrée. C'était un homme de grand
conseil : les évoques, les rois, les papes , le char-
gèrent de régler un grand nombre d'affaires dif-
ficiles , et qui réclamaient un examen impartial.
On lui reproche cependant une action qui est,
en effet , digne de blâme. Au lieu de transmettre
ses biens aux pauvres, aux églises d'Auxerre,
il fit à l'heure de sa mort on testament dans
lequel il légua presque tout ce qu'il possédait a
un de ses neveux. Saint Bernard fit casser ce
testament par le pape Eugène m. Plusieurs écrits
sont attribués à Hugues de Mâcon. Mais toutes
ces attributions sont contestées et contestables.
Il n'y a de certitude que pour ses lettres et tes
diplômes. B. H.
HisU Litt. de la France, t XJ1, p. *08. - Galtta Ckrtt*
tiana, t. XII.
hugues, cardinal, évêque d'Ostie, né en
France, et apparemment, comme l'assurent les
auteurs de Y Histoire Littéraire, dans le diocèse
de Beauvais , mort en 1 158. Ayant fait profession
d'observer la règle de Clteaux, il fut d'abord
abbé de Trois-Fontaines , au diocèse de Châlons.
Le pape Eugène le fit ensuite cardinal vers l'an-
née 1151, malgré l'opposition de saint Bernard ,
qui regrettait pour son ordre la perte d'un tel
homme. On lui attribue des commentaires sur
l'Ancien et le Nouveau Testament ainsi qu'un
livre sur les miracles du. pape Eugène. Mais ces
indications paraissent conjecturales, et l'on a
même lieu de croire qu'elles sont erronées. On
possède toutefois une de ses lettres, écrite à l'oc-
casion de la mort d'Eugène. B. H.
Hist. IAttér. de la France, t. XII, p. ITÎ.
hugues surnommé de Poitiers, moine de
Vézelay, mort après l'année 1161. Sa vie est
peu connue. Par Tordre de Ponce de Montbois-
sier, abbé de Vézelay, il écrivit Y Histoire de ce
monastère. Cette histoire , où il y a des détails
pleins d'intérêt, a été publiée par dom Luc d'A-
cheri, dans le t. III de son Spicilegium. On le
donna aussi pour l'auteur de la Chronique des
Comtes de Nevers, insérée par le P. Labbe dans
sa Nouvelle Bibliothèque des Manuscrits;
mais cette attribution n'est pas justifiée. B. H.
Hist. litt. de la France, t VII, p. 668.
hugues d'Amiens , archevêque de Bouen ,
né sur le territoire de Laon ,' vers la fin du
onzième siècle, mort le 11 novembre 1164. On
l'appelle Hugues d'Amiens, parce qu'il était de la
maison de Boves, qui prétendait tenir aux
comtes d'Amiens par un lien plus ou moins
étroit. Il eut pour maître le célèbre Anselme de
Laon. Quand il quitta son école, il prit l'habit
religieux au monastère de Gluny. En 1125, nous
le trouvons prieur de Saint-Martial de Limoges,
et peu après prieur de 'Saint-Pancrace de Leuves,
diocèse deChichester. Il gouvernait cette maison,
quand le roi Henri I er , informé de son rare me-
nte, le fit abbé de Reading, au diocèse de Sa-
lisbury. Une étroite union existait alors entre les
clercs normands qui résidaient sur l'une et sur
l'autre rive de la Manche, et, outre qu'Us se
rendaient volontiers de fréquentes visites, ils
étaient souvent appelés par les ordres du roi à se
contrôler, a se réfonneri^proquement. Hugues
parcourait la Normandie quand, au mois de no-
vembre 1128, mourut Geoffroy, archevêque de
Rouen. Aussitôt tous les suffrages rappelèrent
sur le siège vacant. Il fut consacré le 14 sep-
tembre 1130. On le voit, l'année même de sa
consécration , fonder l'abbaye de Saint-Martin
d'Aumale. S'étant déclaré pour Innocent H contre
son rival Anacet, Hugues reçut à Rouen ce
pontife au mois de mai 1131, et l'accompagna
quelque temps après au concile de Reims. On a
lait grand bruit de ses différends avec les abbés
de Normandie. Ces abbés jouissaient d'une assez
grande liberté. Un de leurs privilèges, fondé
plutôt sur la coutume que sur quelque décision
canonique, était qu'ils ne devaient aucun ser-
ment au pasteur métropolitain. Hugues prétendit
introduire dans son diocèse cet usage du ser-
ment , qui était en vigueur dans la plupart des
diocèses voisins ; mais les abbés lui résistèrent.
Le roi d'Angleterre, les prenant sous sa protec-
tion, plaida devant le pape la cause de leur in-
dépendance traditionnelle, et le pape écrivit à
l'archevêque de Rouen d'abandonner ses pré-
tentions, ce que celui-ci fut alors obligé de
foire, quoique à regret. Hugues assista en 1133
an concile de Jouarre, en 1134 au concile de
Montpellier. Il était, comme on vient de le voir,
jaloux de son autorité, et toujours prompt
à en faire valoir tous les droits, au mépris
même des volontés royales. Il le prouva bien
dans l'affaire de Richard , évêque de Bayeox.
Ce Richard, fils naturel du comte de Gloces-
ter, avait été pourvu de révêché de Bayeux
par le roi Henri. Mais les canons n'admettaient
pas un prélat convaincu de bâtardise. Hugues
refusa donc de le consacrer. Quelle fut à cette
nouvelle la fureur du roi ! On ne sait trop com-
ment cette contestation se serait terminée, si le
pape ne l'avait apaisée en accordant une dis-
pense à Richard. Cependant le roi Henri ne
pardonnait aucune offense. Connaissant toute
l'apreté d'humeur du roi, Hugues pensa qu'après
l'avoir plusieurs fois irrité, il devait éviter sa
présence. Il traversa donc les monts en 1135,
parut au concile de Pise, et même après la clô-
ture de ce concile il prolongea le plus qu'il put
son séjour, en Italie. Nouvelles plaintes du roi :
mais sa mort vint les interrompre. Hugues repa-
raît dans son diocèse en 1136, et s'attache au
parti d'Etienne de Blois. Sous le règne de ee
prince, il fut en grande faveur. Prenant part aux
affaires civiles comme aux affaires ecclésias-
tiques, il réconcilie le comte de Glocester et le
comte de Boulogne;, il termine par un discours
véhément le débat qui s'était élevé entre le roi
d'Angleterre et les évoques anglais au sujet de
441
HUGUES
443
leurs forteresses, et son influence est telle que
personne n'ose résister à ses avis, encore moins
à ses ordres. Les abbés normands ne lui refusent
plus le serment : dès qu'il l'exige de Théobald,
nouyeilement élu abbé du Bec, celui-ci ne tarde
pas à se soumettre. Très-occupé, d'ailleurs, de
son administration métropolitaine, il introduit
partout des réformes : la plupart des églises et
des monastères de Normandie ont longtemps con-
servé dans leurs chartriers des actes de ce prélat.
L'analyse de tons ces actes nous est offerte par
la Gallia Christiana. On y trouverait la matière
d'une longue et intéressante narration, si l'on
voulait choisir Hugues d'Amiens comme un
exemple pour montrer quelle était l'impor-
tance des fonctions épiscopales au douzième
siècle, et quelle était la vie d'un évoque labo-
rieux. Nous rappellerons encore qu'il siégeait en
1 148 dans le concile de Paris, réuni contre Gilbert
de La Porrée, en 1148 dans le* concile de Reims,
en 1151 dans le concile de Beaugency, et qu'il
était présent à Westminster, en 1154, au cou-
ronnement du roi .Henri IL II nous reste à par-
ler de ses écrits, qui sont assez nombreux.
Dialogi de Summo Bono Libri Vil. Ces
dialogues ont été publiés par D. Martène, dans
le tome V de ses Anecdota, p. 895 : ils intéressent
beaucoup plus un théologien qu'un philosophe;
cependant on rencontre dans les premiers le dé-
veloppement de quelques opinions qui appar-
tiennent à la philosophie morale : Hugues les
traite en disciple fidèle de saint Augustin. L'un
des pins curieux ouvrages de notre docteur a
pour titre : De Hxresibvs sui t emporte. Cet
écrit, dédié au cardinal Albéric, évèque d'Ostie ,
a été publié, comme appendice aux Œuvres de
Gtiibert de Nogent, par dora Lnc d'Acheri. 11 ne
faut lui demander aucun détail sur les contro-
verses fameuses provoquées par Roscetin,
saint Anselme , Abélard , etc. , etc. 11 ne s'a-
git ici que des hérésies subalternes , de celles
qui touchent à l'administration des sacrements
au sein de l'église. Mais , à l'égard de ces héré-
sies, Hugues nous fournit des renseignements
qui importent beaucoup à l'histoire de l'Églisedu-
rant le douzième siècle. On les chercherait vai-
nement ailleurs. Nous n'avons qu'à mentionner
deux opuscules In Laudem Mémorise y et De
Fide Catholica et Oratione Dominica , insérés
par dom Martène dans le t. IX de son Amplis-
sitna Collectif). De son traité De Creatione Re-
rttm, intitulé aussi Hexameron , il n'a été pu-
blié qu'un fragment, dans le t Y des Anecdota
de Martène. Un manuscrit complet de cet ou-
vrage se trouvait à Clairvaux ; il est maintenant
dans la bibliothèque de Troyes, sous le numéro
413, in-fol. Le tome Y des Anecdota nous offre
encore la Vie de saint Adjuteur, moine de Ti-
ron, par Hugues d'Amiens. Enfin un assez grand
nombre de ses Lettres ont été publiées par Du-
chesne, Martène, Guillaume de Malmeshury, La
Pomeraie, etc. B. H.
Gallia Christiana, t. H, col. 4t. - Hist. Uttér. de la
France, t. XII, p. 64T. — Catalogue des Manuscrits des
bibliothèques publiques des départements, t. II. — Guil-
laume de Malmesbiiry, Hist. Eceles., pantin. - Ordérle
Vital, Hist. Ecclés. % paasim.
HUGUES de frazan ou de TftâSAN, dixième
abbé de Cluny, mort après l'année 1166. De
prieur claustral il devint abbé de Cluny en 1157
ou en 1158. Quelques années après, ayant pris
le parti de l'antipape Victor IV, il fut excom-
munié par Alexandre IH et chassé de son abbaye.
Il se réfugia près de Frédéric Barbe-Rousse. Di-
vers ouvrages lui sont attribués, mais à tort,
suivant les auteurs de Y Histoire Littéraire, si
ce n'est une lettre à l'empereur Frédéric, publiée
par d'Achery, Spicilegium, t. H, p. 400. Dans
la collection de lettres de Pierre de Celles, il y en
a quatre à l'adresse de Hugues de Frazan. B. H.
Hist. Uttér. de la France, t. XIII, p. 871.
HUGUES, moine lorrain, né sur le territoire
de Toul, mort en 1168. On le voit d'abord
prieur de Saint- Jean de Laon, puis abbé d'Hum-
blières jusqu'à Tannée 1150, enfin abbé de Saint-
Amand depuis l'année 1150 jusqu'à sa mort. H
était très- puissant auprès du comte de Flandre,
comme le prouve une lettre que lui écrivit Pierre
de Celles au sujet de l'exil de Jean de SaKsbury.
Cependant tout ce qui nous reste de Hugues se
réduit à une autre lettre publiée (par Martène ,
Anecd., 1. 1, col. 443. B. H.
Hist. Uttér. de la France, t. XIII, p. 1*9.
hugues de fouilloi, chanoine de Saint-
Augustin , né au bourg de Fouilloi, près de Cor-»
bie, mort à une date incertaine , après l'année
1173. Le nom de ce chanoine est obscur. Il se-
rait célèbre si, pour marquer dans l'histoire, il
suffisait d'avoir lait un assez grand nombre de
livres médiocres, estimés pendant quelque temps
bien au-dessus de leur valeur. Mais les écrits de
notre chanoine ont eu cette étrange fortune d*être
tous attribués, quand on en faisait trop d'es-
time, à un écrivain très-fécond, dont ils n'ont
pas alors même augmenté la renommée , tandis
qu'ils l'ont ensuite compromise. Hugues de
Fouilloi fit profession d'observer la règle de
Saint-Augustin dans le prieuré de Saint- Lau-
rent de Heilly, qui dépendait de l'abbaye de
Corbie. En 1 149, les chanoines réguliers de Saint-
Denis de Reims le choisirent pour abbé; mais
il refusa cette haute dignité. Cependant, quatre
années après , Olric, prieur de Saint-Laurent,
étant mort, Hugues consentit à le remplacer.
Simon lui succédait ensuite dans cette charge en
1174. Hugues l'avait-il volontairement abdiquée,
on sa vie finit-elle à cette date même? C'est
ce qu'on ignore. Quelques auteurs ont supposé
que le pape Innocent H, mort en 1143, l'avait
mis an nombre des cardinaux. C'est une sup-
position gratuite, et qu'il faut rejeter sans antre
examen. Le discernement de ses œuvres , disper-
sées dans une foule de recueils manuscrits 9
et même imprimées sous d'autres non» que ta
449
HUGUES'
444
sien , est une affaire plus Intéressante et qui
réclame une laborieuse enquête.
De Claustro Anima Litri IV. Cet ouvrage*
souvent attribué à Hugues de Saint-Victor, a été
publié dans te deuxième tome de se* causes.
Dom final le restitue sans aucun embarras 4
Hugues de Fouillai, s'annuyant sur l'autorité
de quelque» manuscrits et de quelques ancien*
bibliographe*. Mais la question est plus obscure,
qu'elle n'a para l'être a. dom Brial, Vincent de,
Baauvais, presque cwtsmporajn des deux cha*
noines , et certainement le plus érudit de toua
les critiques de son temps» énonqe, les tau**
du problème et n'ose pas le résoudre, Jj sait qu*
le De Claustre Animm est diversejnant rang*
parmi lea œuvres de Hugues ta SajntrVwtar et
parmi otites de Hugue* de Fowttpi, etçanejh
dant il ne déclare pas quelle est à son, avis ia
plus exacte de ces attributions, Un des plus an-
ciens et des plus respectables annalistes, Jean
de Saint-Victor, affirme, pour sa part, qqe si di-
vers manuscrits du Cloître de l'Ame portent te
nom de Hugues de Fouilloi, cette inscription est
erronée , et qu'il faut le rendre au chanoine de
Saint-Victor. Cependant, malgré ce témoignage
et quelques autres encore, nous nous rangerons
à l'avis de dom Brial, par ce motif que le De
Claustro Animae, ouvrage d'un style lourd, dif-
fus, plein de prétention et dépourvu de tout
éclat , est véritablement indigne du célèbre vic-
torin. — De Medicinct Anima. Gomme le
précédent traité, Lajttédecime deVArm est at-
tribuée par divers bibliographes tantôt au eba-
noine de Saint- Victor, tantôt au chanoine du
Saint-Laurent. Pour oeku^ci se prononcent Al-
bério de Trois** ontainea, Casimir Qudtn» £ltie*
Dupin, dom Brial; pour celui-là Jean de Tri"
tenheim et la plupart des manuscrits. la Mé-
decine de V Ame noua para», comme à dom
Brial, un opuscule écrit sur le même ton que
Le Cloître de l'Ame , et noua ne Mfiumms pas
dé le restituer an même auteur, -* De Avilws,
ad Rainerium. C'est te prejurier de toeia traités
Sur les Ammaux, De Bestiis f inséré* parmi les
œuvres de Hugues de Saiut«-Vtotojr, Or, on ne
s'explique pas pourquoi eetta diseeriation spé-
ciale Sur les Oiseaux à été recueilli* par les édi-
teurs du victorin, ear elle no parait aeus son
nom dans aucun manuscrit, tandis que plusieurs
volumes, notamment lenumémAddu fonds même
de Saint-Vietor, l'assignent ainsi sans équivoque
au chanoine de SahnVLaurent ; Jmiyti libellais
domni Uugems de Folietm De Natur-a Avium %
ad Ratoertum ommremm. Quant an second
traité mtitnlé Bestiarntm, il est plus difficile
d'en «mnnattre Hauteur. Dom ftriai in dispute au
religieux de Saint-Victor, et le réclame pour
Alain <to LiMe, auteur d*un Bestiaire désigné par
Jean de Tritenhehn. Mais cette réclamation n'est
pas bien, fondée. Noua avons, en effet, réoenv
tnent découvert Le Bestiaire d'Alain de Lille, et
noua avons fait part au public du cette décou-
verte dans un des numéros de VAthepatum
français, Qr, que Ton compare le texte de l'un
et de l'autre ouvrage, et l'on verra qu'il n'y a
pas entre eux la moindre analogie. De son côté,
Casimir Oudin veut que le Bestiaire publié
parmi \m Œuvres de, Hugues deSaint» Victor soit,
comme le Fotaarwu, transporté au catalogue
du chanoine dt&wri-Idiurent* Cependant, toute
assertion de. et genru doit être fondée aux quel-
que chose, et eaUe-oi ne l'est sur rien , ni sur tes
manuscrits, nj sur te tfonojgnage plus ou moins
fidèle de quelques anciens bjhUographea. H faut
donc la rejeter. Pour revente au V^utarmre, ajou-
tons que le marna ouvrage est encore intitulé
dans quelque* copies du fcewèm* ot du qua-
torsiome siècle j Jfe ffqtur<s 4m*i> $e (Sa*
lumto 0ja*çê*$ata, DuMtov CvÀumtos. Que
l'on ne commette dune pas à roflcaaiun de ce
livre une erreur trop fréquente; que l'on ne dis*
tiague pas quatre traité» Avers la. où il a'aaitd'nm
seul ouvrage reproduit squô quatre titres diffé-
rents ; -»- De NupiïïS Xifrri //, Inséré* dans le
recueil de Hugues de Saint-Victor, ces deux li-
vres semblent, cojftjac* les précédents, apparte-
nir à Hugues de FuuHloi C'est l'avis de Ca-
simfr Oudni, de dosa Brial \ il est eunfirmé par
le plus grand nombre de» manuscrits, et rien m
nous invitée le contredira ; — De Arw Ne*m$$-
tka Des&cipUQ} De Axe* JSm moralti fmter*
pret&io; fie Vamt&e Hetnm mvndqnawmm-
Ce sont trois onuatule*., souvent séparés ;<«aaia
comme fauteur du Jte Y Mitât e jurant se dé-
ojarav dans eetraitd, l'auteur du De Arw moraU,
et comme il y a dans )&DeArt<* mystioarw pas-
sage qui renvoie le tectenr aux chapitras 3 et 4,
litre I e *, de la Des&iptim matait de l'Arche,
il eatiœeatestabie que oeatrpia opuscules, d*ail-
leura eonfomws quant à la méthode, l'esprit,
le st&fovont été compose* par le même docteur.
Ou es convient gteératesMot. Mai* Casimir
Quditt et don Brial ne consentent ne* TOlon-
tiera à caque ce docteur soit tiuguaa de Saint-
Victor. A leur «via, c'est peut*étre IJugueu de
FonjUei. Qf,nwi*nfhé*tow pas à àwe qu'ils se
sont trompé* •« «§É» V"* <* L'autre. D'abord,
tona le» manMSignU.et tous le», bJMwgiraphes de
quelqjue aueienju^té^ViBeent de Reauvais, Jean
de SainfctVieJtor, ISlooJU* Triveth, Kicbard de
CiuAYtifeuri d»ûai>d, Jean de TritenJrënx s'ae-
cordent è Mmsae? Hugues, le wtorâu Sanoite
celui-iji ae nemian lu^méme, quand, dans on du
ces trufe traités^ il invite 4 lire nu écrit de sa
plame iutitujéite tribu* Diebw. Ce De triom
Di*bw est, aoua aan vrai Utfé» le traité doat lea
éditeur» de W9 ont feit mal à propee le sep-
tième livre 4U) I?i4<m*l*w> et c'est ua ou-
vrugs tré^-authentique de Hugues de SaM-Vks
tor. Si &&» Brial avait fait cette reuiarqjae, il
aurait currigé Casimir Oudin, au lieu de l'an*
puyer; — De B* Mari* VwgMtate jWjWfMO»
dans le toraeia des Œuvres de Hugues de Saint-
Victor. Toutes les autorités anciennes attribuent
445
cet ouvrage m victorin, etles continuateurs de
dom Rivet ont été les premiers à supposer que
le chanoine de Saint-Laurent ayant pu composer
un traité sous le môme titre, il convenait de lui
adjuger celui-ci. Ce sont de* conjectures témé-
raires. On signale , il est vrai, quelque différence
entre la doctrine de ce traité et celle des Se»*
tentes; et les Sentences appartiennent ineon*
testablement à Hugues de Saint-Victor. AuraiMl
changé d'opinion sur quelque point de sa
croyance? C'est ce qu'on peut admettre. Ces chen*
gonents n'étaient pas rares an moyen âge , la foi
théologique n'ayant pas encore été dégagée de
tous nuages. On peut, d'ailleurs, apprécier que
l'opuscule intitulé De B. Jfaria? Vir+iniiaie
perpétua n'est pas du style propre an chanoine
de Saint-Laurent; — De Pattoribus et Ovibm,
ouvrage inédit, qui porte le numéro 2404 parmi
les manuscrits de l'ancien fonds du Roi, à la
Bibliothèque impériale. C'est un commentaire
allégorique et chrétien de quelques vers de la
neuvième églogoe de Virgue. Personne ne ré-
clame ces jeux d'esprit pour Hugues de Saint-
Yictor, et nous les trouvons convenablement at-
tribnés à Hugues de Fouilloi, tant par les ma-
nuscrits que par Manillon; — De Rota Prxlar
tionis et de Rota Simulations. Cet ouvrage, du
même genre que le précédent, fait partira même
volume, et l'on ne doute pas qu'il ne sôttdu même
auteur ; — In Lamentàtiones Hiefémtot. Bans
les Œuvres de Hugues de SaimWîctor, 1. 1,
p. 14a, il y a des gloses sur lès Lamentations de
Jérémie : ne stffttoe pas les mêmes gloses qui ont
été inscrites par Montfaucon sous le nom de Hu-
gues de Fouilloi , d'après un manuscrit de saint
Thierry? On peut le supposer, si Ton lie peut
plus le vérifier. Enfin 6nllt dans le catalogue dé
la Bibliothèque de Troyes, numéro 558 : Mag.
ffngonisde FoHeto Aîphabetum panitentiaie,
in quinque partes distinction. Aucun autre
manuscrit de cet Alphabet n'est parvenu jusqu'à
nous, et nous ne saurions dire si c'est un ou-
vrage qui mérite un^mMoftsp^^» ou «ce
n'est pas plutôt , sou* un titre de fantaisie ,
quelque fragment d'un des ouvrages dont noua
avons précédemment parlé, P'anfres de ces frag-
ments sont en effet intitulés : Tsuctatys de Con-
versatione monasUcmPe, dwtfecim Abtisw-
nibus, Flores , etc., atfcCçsopt des extraits du
De Claustro Anwi& u . & IUw$au.
Hist. LUtér. 4e te IMtfi t. XtfMfe. - Ctft, Ondt*.
De Script. Eccifis. -~ CaU&gm 4*s filon* des bjfil. <fe«
départ, t. II. — Tr^hclm^ ÛëScrijfi. Eecles.
buguiw, surnommé de Chahi?fi*b*ï, pré-
lat français, mort le 4 septembre U7§, dans l'ab-
bayede Saint-Victor, * Paris. Connue chancelier
(îeFranceentl51,ïlfiitappelé en U59*l'evfr»
cité de Soissons, Cependant il conserva ses foncr
lions près du roi, *k Je pape Alexandre 111 , qui
était fort jajèux d'entretenir de bons rappar}*
avec la coyr de France , lui écrivit plus d'une
fois à ce sujet. Hugutf le servit avec, rtte 4
HUGUES 44Q
avec succès, Une parait pas s'être montré moins
fidèle et moins habile serviteur du roi. Cepen-
dant, en l'année 1171, malgré la puissance des
amis qui plaidèrent sa cause auprès du roi, au-
près du pape, il fut atteint par une disgrâce dont
la cause n'est pas bien connue. Les œuvres de
Hugues de Champfleuri sont des Lettres nom-
I braises et intéressantes, qui ont été publiées
par les continuateurs de dom Bouquet dans le
I tome XVI de leur collection. B. H.
ijist. UUes. 4e la Ftawc*» fi. XIII, p. IM.
HCWUB8 de morceaux, abbé de Saînt-Ger-
main-des-Prés, mort le 27 mars 1182 (1). Après
avoir été moine de Véselay, il parait abbé de
Saint-Germain dès l'année 1162. Le 21 avril tl63,
il fit consacrer par le pape Alexandre HI sen
église abbatiale, et, ayanténergiquement protesté
contre la hardie prétention de Maurice, évo-
que de Paris, qui s'était présenté pour assister
à cette cérémonie, il écrivit une relation sottv
maire de l'événement. Cette relation a été pu-
bliée par les auteurs du Gallia Chrisliana*
t VII, tn^r., col. 71. Du Boulay veut que ce
sqit une pièce apocryphe* Nous la considérons,
an contraire, comme un des monuments les plus
curieux de cette antique indépendance dea
moines noirs, dont, au temps de Du Boulay, il
existait encore quelques vestiges. Les moines
de toutes robes n'ont pas assurément fabriqué
moins de pièces fausses que le» clercs séculiers
de tous grades; ma.is la relation de Hugues de
Monceaux nous parait avoir tous les caractères
d'un petit procès-verbal authentique. Le 19 mai
de la même année, Hugues assistait au concile
de Tours, Il y retrouva l'évèque Maurice encore
en proie à la plus vive émotion et se plaignant
dans les termes les plus vifs de l'outrage qu'il
avait reçu. Comme cela devait arriver, ils se
querellèrent devant le concile. Cependant le
concile et le pape donnèrent gain de cause à l'o-
rateur des moines, Le 22 août 116£ Hugues fut
un des abbés qui présidèrent à la cérémonie du
baptême de l'enfant royal qui rat depuis Phi-
lippe-Auguste. Vers le même temps il fut chargé
par le roi d'intervenir dans les affaires assez
troublées de l'abbaye de Sainte-Colombe, au
diocèse de Sens. En 1179 il assistait au concile
de Latran, Ce sont les actes principaux de sa
vie. Les historiens de l'abbaye de Saint-Germain
et les auteurs du Gallia Christian* nous en
racontent beaucoup d'autres circonstances, qui,
pour être peu dignes d'intérêt, attestent toutefois
qu'it jouissait d'un grand erédft tant à la cour de
France qu'à la cour de Rome.
Outre le récit de la consécration de l'abbaye
de Saint-Germain, Hugues de Monceaux nous a
laissé deux lettres imprimées dam le tome IV
du recueil d'André Ducbesne. B. H.
(i) fet inon pas *181, comme rassure Y Histoire IMii*
ratre, d'après le ÙaMu Christiana; car te Gallia Chris-
tfflfM,iM»» fournit préeteèvent la date 4« 1*8*.
447
HUGUES
448
GaîHa Cnristiana, t VII, col. ut. - Histoire Litté-
raire de la France, t XIII, p. 618.
uceuES foucaut, moine et historien
français, mort le 22 octobre 1 197. Les auteurs de
Y Histoire Littéraire se sont attachés à montrer
que l'auteur de la chronique intitulée De Tyran-
nide Siculorum vint, en quittant la Sicile, ha-
biter la France, et mourut abbé de Saint-Denis,
à la date que nous venons de rappeler. L'his-
toire de son administration abbatiale est dépour-
vue d'intérêt. Sa Chronique, an contraire, est
très-importante. Elle a été plusieurs fois publiée.
II nous suffit de désigner l'édition qui nous est
offerte par le tome VII des Historiens d'Italie par
Muratori. B. H.
Hist. Litt. de la France, t. XV.
huoubs de noh AHT, évoque de Coventry,
né, à Nouant en Normandie, mort au mois d'a-
vril 1198. Il était neveu d'Arnoul de Lisieux.
Après avoir fait ses études à l'université d'Ox-
ford, il devint archidiacre de Lisieux vers 1173,
et plus tard, vers 1185, évéque de Coventry.
H était légat du saint-siége en Angleterre quand
le roi Richard, partant pour la Palestine, confia
l'administration de son royaume aux évéques de
Durham et d'Ely. Hugues se montra l'opiniâtre
adversaire de l'évéque d'Ely, et le fit disgracier en
1191. Ce succès obtenu, il fut un des plus puis-
sants personnages de toute l'Angleterre. Mais,
comme il abusa de cette puissance, elle dura peu.
N'eut-il pas l'étrange audace de se déclarer contre
les moines, et de les remplacer, partout où il le
put, par des chanoines réguliers ?En même temps
que l'évéque d'Ely, les moines se plaignirent au
pape, au roi, et formèrent contre l'évéque de Co-
ventry une ligue si redoutable, qu'il fut chassé de
son siège en 1194. Ily revint l'année suivante, mais
après avoir versé, comme expiation de ses fautes,
5,000 marcs d'argent dans le trésor du roi. II
mourut sur le continent, en Normandie, pendant
un voyage ou pendant un autre exil. Parmi les
historiens anglais, les uns ont vanté son courage,
et même, ce qui est plus surprenant, sa douceur;
les autres l'ont accablé d'outrages. Telle est la
diversité des traitements réservés après leur
mort aux hommes de parti.
Hugues de Nonant nous a laissé un récit de
la disgrâce de l'évéque d'Ely, qui a été publié
par Roger de Hoveden, Script. Rer. Ang,.
p. 702. C'est un violent pamphlet. B. H.
. Hist. /.«t. de la France, tXV.
nr«UES de eibeaiont, théologien français,
au douzième siècle. On ne connaît pas sa vie.
De ses œuvres il ne reste qu'une Epistola
de Natura et Origine Animx, recueillie par
Martène et publiée dans le tome I de ses Anee-
dota. Cette lettre est moins d'un logicien que
d'un théologien, comme le prouve l'analyse qui
en a été faite par les auteurs de Y Histoire Lit-
téraire. L'auteur, quine.connaissait par le Traité
de VAme d'Aristote, a puisé toute sa doctrine
dans les écrits sincères on supposés de saint
Augustin. B. H.
* Hist. Litt. de la France, t. XI, p. m. - Martène,
Anecd., 1. 1, p. 368.
hugubs ktbéribn, théologien toscan, du
douzième siècle, contemporain du pape Alexan-
dre IU, auquel il dédia le principal de ses ou-
vrages. Il passa quelque temps à la cour de
Constantinople, et fut estimé de l'empereur Ma-
nuel Coronène.'A l'occasion de ses conférences
avec les théologiens grecs, il composa son traité
De Hseresibus quas Grœci in Latinos devol-
vunt, que l'on connaît encore sous cet autre
titre : De Immortali Deo Libri III. Il est im-
primé dans la Bibliothèque des Pères, édit. de
Lyon, t. XXIÏ, col. 1198. On trouve dans la
même Bibliothèque un opuscule de Hugues
Éthérien sur l'état de l'âme séparée du corps.
B. H.
J. TriUietm, De Script. Ecciet. - Elites Dnpta.,flf-
bUoth. des Auteurs eccU du douzième siècle.
hugues (Saint), évéque de Lincoln, né en 1140,
au château d'Avalon, mort le 16 ou le 17 no-
vembre 1200. Il fut d'abord chanoine régulier
en Bourgogne, ensuite moine à la grande
Chartreuse en Dauphiné, prieur de Witham en
Angleterre, enfin évéque de Lincoln, en 1184.
Henri U ayant fait enterrer Rosemonde, sa mal-
tresse, dans une église de religieuses, Hugues
eut le courage de protester contre cette infrac-
tion aux règles canoniques, et de faire exhumer
le corps de Rosemonde. C'est l'acte le plus im-
portant de sa vie, qui a été longuement racon-
tée par un de ses contemporains. Saint Hugues
a laissé la réputation d'un prélat très-lettré, lit-
teratissémus : cependant on n'a de lui que des
Statuts pour les religieuses de Cotun. On
trouve ces Statuts dans le Monasticon Angli-
canum, 1. 1, p. 924. Saint Hugues a été cano-
nisé en 1221. B. H.
Surins , Acta Sonet., t. Vf. - Aroanld d'indilly,
Vie des Saints, p. SSt. - Hist. Litt, de la France,
t. XV, p. 61*.
hugues be SAINT-CHB* , théologien, né,
comme on le suppose, dans le bourg de Saint-
Cher, près de Vienne, en Dauphiné, vers la fin
, du douzième ou le commencement dii treizième
siècle, mort à Orvieto le 19 mars 1263. Après
avoir fait ses études à Paris, il y professa Ton
et l'autre droit; puis, attiré par la grande re-
nommée de l'Ordre de Saint-Dominique, il s'y
fit admettre et jura d'en observer les règles, en
l'année 1225. En 1227, bien que sa profession
fût encore récente, il était élu provincial de
France, par considération pour l'éclat de son mé-
rite; puis, ayant abdiqué quelque temps cette
haute fonction, pour devenir prieur de la maison
de Saint- Jacques, à Pari3, il y fut appelé de
nouveau en 1236. On 'loue le zèle qu'il y mon-
tra. Outre qu'il prit'uneparttrès-active et très-
considérable à toutes les contestations auxquelles
son ordre fut alors mêlé, il fonda plusieurs mai-
sons dominicaines à Airxerre, à Toul, à Tours,
.449
HUGUES
450
.à Bourges, à Amiens, etc. En 1240, nous le
voyons remplir la charge de vicaire général de
toute la congrégation. Innocent IV lui conféra
la pourpre en 1244, en le nommant cardinal-
prêtre du titre de Sainte-Sabine. Occupé dès lors
des affaires pontificales, il remplit au nom du
pape plusieurs missions. En 1250 on le trouve en
Allemagne, ou il ne se comporte pas de manière à
mériter l'estime de tous les historiens. L'abbé
Fleury et M. Daunou censurent sa conduite en
cette légation, et celle de son collègue, Henri de
Suze. Frédéric n Tenait de monrir : il s'agissait,
pour l'Église romaine, de recouvrer en Allema-
gne cette souveraine autorité à laquelle Frédéric
avait constamment opposé l'insurmontable ob-
stacle de son intraitable orgueil. L'entreprise était
difficile. On dit que les négociateurs pontificaux
employèrent sans beaucoup de succès la vio-
lence, et qu'ils finirent par céder eux-mêmes
à la corruption. Cette dernière accusation pèse
toutefois moins sur le cardinal de Sainte-Sabine
que sur son collègue Henri de Suze, archevê-
que d'Embrun. Sous Alexandre IV, après Tan-
née 1254, Hugues de Saint-Cher conserva son cré-
dit, et deux affaires importantes lui furent con-
fiées; il eut à examiner les livres mystiques de
Jean de Parme et le célèbre pamphlet de Guil-
laume de Saint-Amour Sur les Périls des Der-
niers Temps. Il obtint la condamnation des doc-
trines diverses proposées par l'un et par l'autre.
Si haute toutefois qu'ait été dans son ordre,
dans l^Église, la position de Hugues de Saint-
Cher, il doit moins sa renommée à l'éclat des di-
gnités dont il a tour à tour été revêtu, qu'au nombre
et à 1'imporiance de ses ouvrages. Dans une de
ses épitaphes recueillies par Du Boulay nous
lisons ce méchant vers :
Iste fuit per qnem patuit doctrina sophtae.
C'est assurément un bien grand éloge; il est
pourtant moins emphatique qu'il ne parait l'être.
Hugues de Saint-Cher fut, en effet, parmi ses
contemporains, l'oracle des interprètes de l'É-
criture, comme saint Thomas fut celui des théo-
logiens dogmatiques — Il faut commencer la ca-
talogue de ses œuvres par une révision complète
du texte de la Bible, travail inédit dont on dé-
signe plusieurs exemplaires. Ce n'était pas, qu'on
se le persuade, une médiocre entreprise, au dé-
but du quatorzième siècle, que de recueillir,
ordonner et surtout purifier tous les textes de
l'Écriture Sainte, tant ils avaient été corrompus
par des scribes barbares durant les siècles pré-
cédents! A ce travail de correction littéraire
Hugues en joignit un autre, qui lui fit encore plus
d'honneur: il commenta tous les livres de l'An-
cien et du Nouveau Testament. Il n'y a pas une
bibliothèque qui ne possède quelque exemplaire
manuscrit de cette glose, ou du moins de plu-
sieurs des parties qui la composent. Elle a été,
d'ailleurs, souvent imprimée, soit intégralement,
soit partiellement. H nous suffit de désigner les
éditions intégrales de Bâle , 1498 et 1504; de Pa-
HOOV. BIOGR. CÉNF.R. — Ti XXV.
ris, 1538; de Venise, 1600, et de Lyon, 1669.
Enfin, les divers travaux de Hugues de Saint-
Cher sur les Liwes Saints eurent pour couron-
nement ces tables précieuses que l'on appelle
Concordances , tables dont il conçut le plan, et
à la rédaction desquelles il employa, dit-on, plus
de cinq cents religieux de son ordre. M. Daunou a
scrupuleusement recherché et très-exactement,
il nous semble , déterminé la part qui revient à
Hugues de Saint-Cher dans ces Concordances,
tant de fois revues, corrigées, développées, dont
l'édition la plus usuelle est celle d'Avignon, 1786,
en 2 vol. in-4°. Les Sermons de Hugues de
Saint-Cher ont eu moins de succès que ses glo-
ses. Panzer en signale une édition publiée à
Zwoll, en 1479, in-fol.; mais cette édition est fort
rare. M. Daunou ne désigne qu'un manuscrit
des mêmes Sermons dans le fonds de la Sorbonne.
Ce seul fonds nous en offre quatre, sous les nu-
méros 793, 794, 1406, 1.659. On doit encore au
même docteur un Commentaire sur les Senten-
ces de Pierre Lombard. H est inédit, mais des
copies nombreuses en ont été conservées en
France, en Italie, en Angleterre. Enfin, sous-les
titres divers de Spéculum Ecclesiœ, Tractatus
super Missam, Expositio Missœ % De Ordine
Mi&sœ, nous avons une dissertation de Hugues
de Saint-Cher sur les cérémonies de la messe :
dissertation qui a été autrefois très-estimée et
souvent reproduite par l'impression. B. H.
Panzer, Annal. Typogr.-Qnètit etÉchard, Script. Ord.
Pradic., t. 1. - Fabrtclna, Bibliothtca Media jEtat. -
Hist. Uttér. de la France, t. XIX, p. 88.
hugubs aicelin, théologien français, né à
Billiom, vers l'année 1230, mort en décembre
1297 ou 1298. C'est par erreur qu'on l'a souvent
nommé Hugues Seguin, Hugues Sévin. Il em-
brassa la règle de Saint-Dominique, au couvent de
Clermont, et vint ensuite achever ses études dans
la maison delà rue Saint-Jacques, à Paris. Quand
il en sortit, il recueillit dans plusieurs villes les
plus vifs applaudissements comme prédicateur
et comme professeur. En 1285 Hugues se ren-
dit à Rome, où il fut nommé par Honoré IV
maître du sacré palais; quelques années après,
le 15 mai 1288, il reçut de Nicolas IV le cha-
peau de cardinal. Nous le voyons plus tard
évoque d'Ostie et de Velletri. Ses ouvrages, s'il
en a laissé, paraissent aujourd'hui perdus. B. H.
Histoire littéraire de la France, t. XXI, p. 71.
BU6VES de castro-n ovo, sans douté de
nbwcastle, près de Parham, théologien an-
glais, vivait, suivant Luc Wadding, en 1310. Il
était de l'ordre des frères Mineurs, et fut en
philosophie un des défenseurs de Duns Scot.
Baieras lui attribue un traité ayant pour titre :
De Victoria Christi contra Antichristum, qui,
selon Fabricius, a été imprimé en 1471 , sans
nom de lieu. Un exemplaire manuscrit de cet ou-
vrage se trouve dans le numéro 1715 de l'ancien
fonds delà Sorbonne, à la Bibliothèque impériale.
Pits mentionne parmi les œuvres inédites du
15
461
HUGUES
4*3
môme auteur on TrecMus de Finale Jud&o
et un Commentaire sur le» Sentences de Pierre
le Lombard. Ce Commentaire aur les Sentence*
nous est offert par les .numéros 684, odô de la
Sorbonne. Mais ai PHs ni Bakeus n'ont connu
l'immense traité du même auteur intitulé s De
Laudibus B. Maria, dont le fonds de la Sor-
bonne nous présente trois copies» tons les numé-
ros 1697, 1698, 1704. Cet ouvrage, qui fournirait
à l'impression plusieurs volumes, doit être sans
doute un exposé complet de toute la matière. Il
se compose de douze livres, et le premier de ces
douze livres, qui est une simple paraphrase
de la Salutation évaogélique , ne contient pas
moins de huit chapitres. Le troisième livre traits
des prérogatives charnelles de Marie; le qua-
trième, de ses vertus; le sixième, de tous ses
noms; le septième et le huitième, des objets
célestes ou terrestres auxquels elle est ordi-
nairement comparée, etc. L'imagination des
franciscains s'est toujours complu dans ces
étranges fantaisies. Ce sont des mystiques té-
méraires. B. H.
Luc Wadding, Annal, Min* t. III. - Fabrlcius, «t-
bliotheca mediœ et injlmae Latinit,
bugues, religieux minime, né à Prato, dans
PÉtat de Florence, mort, dit-on, en Tartane,
après Tannée 1312. Reçu docteur en théologie,
il quitta le siècle pour se faire admettre dans la
congrégation des Minimes'; puis, par humilité,
H adopta l'habit des frères lais ou convers.
C'était un homme d'une austérité remarquable,
et qui s'imposait les plus dures mortifications.
Ainsi , au témoignage de Luc Wadding, il porta
pendant quarante ans sur sa peau nue une de
ces cuirasses de fer on cottes de inaille que les
Italiens appellent panziera. Aussi l'a- t-on souvent
nommé Hugues de Panziera ; voilà l'origine de
ce surnom. Luc Wadding compte parmi ses oeu-
vres une Lettre aux religieux Minimes de Prato,
ses anciens confrères, un traité De Vita Cm»
templativa, et un autre traité De Perfection»
Statuum. Ces ouvrages sont restés manus-
crits. B. H.
L. Wadding, BibHotà. Minor. -Fabriclus. Biblio-
theca Mediœ vEtat.
hvgues de maçon , Bugo de Matlscone,
inscrit par Baie, Pits et Fabriclus au nombre des
écrivains anglais, n'a pas vécu, comme ils l'ont
supposé vers l'année 1490 : il était certainement
mort longtemps auparavant, et il parait fort
douteux que l'Angleterre ait été aa patrie. On
a de lui un poème en neuf livscs , intitulé : De
militum Gestis mirabilibus. Ce poème est
inédit; ii se trouve, avec un commentaire de
G. de Grana, dans la bibliothèque de Troyes,
où il porte le numéro 906. B. H.
Hist. LUtér. de ta Froment. XII, p. 4ti. - Gâtai, de»
Man. des Bibiioth, des départ^ t II.
hitgues ( Guillaume d' ), prélat français,
né à Pujols, en Languedoc, mort a Embrun, le
27 octobre 1648. Il fut d'abord religieux corde-
lier, et se distingua dans son ordre au point
qu'il en fui. éhi supérieur général, Henri IV ,
ayant eu connaissance dssoa mérite, lui confia
diverses ambassades an Italie , an Allemagne, en
Angleterre, et Marie de Médtais, régente pendant
la minoritédeLoais KIU, te nomma Archevêque
d'Embrun en ltlt* Elisabeth de France, femme
de Pfafltppe IV, an rendant an Espagne auprès
de son mari, Gaulât*» d'Hugues (ht «barge de
raccompagner dans ne natage. CTetf encore lui
qui Ait envoyé an Angleterre pour négocier te
mariage d'HenriettttMarle, «sur d'Étisabdh,
avec te prince an GaUas. Durant nette ambas-
sade, il obtint ém ni Jacques la permission de
conférer palniqnemant te sacrement 4e la cou*
firmatiott à près de dix mille catholiques, b
iuïï il reçut à Grenoble te eenmenf dnbj**a-
tioa de François, dneda Lesdéguières. En 1*58,
le 22 juin, il sacra, dans la maison des chartreux
à Paris, Alphonse-Louis do Plesste de Richelieu,
archevêque d'Atx. La ville d'Embrun lui doit les
principales décorations de sa cathédrale et de
son palais archiépiscopal. B. H,
GeMie Cmrist., t. Ut toi. iOfg.
II. Hugues princes ou laïcs.
hugues le Blanc ou la Grande comte de
Paris et duc de France, fils du roi Robert qui
disputa la couronne à Charles le Simple (I), né
vers la fin du neuvième siècle, mort le 16 juin 955.
Son père fut tué à la bataille de Soissons, livrée
contre Charles te Simple le 15 juin 923. Hugues,
accourant avec Héribert de Vermandoœ, renou-
vela le combat, et força Charles à la fuite. U ne
chercha pas à prendre pour lui le titre de rot,
que son père avait porte, et le laissa à son nennv
frère Raoul, duc de Bourgogne. Il tourna tous
ses soins vers l'agrandissement de ses domai-
nes, et ne permit pas que la royauté qu'il avait
dédaignée devint trop puissante. U entra, en 927,
dans une ligue formée par Héribert contre Raoul
et en faveur de Charles le Simple, puis U jugeai
prudent de s'en détacher, et devint le médiateur
entre le roi de France et le comte de Verman-
dois. U ne tarda pas à*e brouiller avec oe dernier,
et aida Raoul à le dépouiller de ses États* Héni-
bert s'accommoda avec Raoul eu 93 ï, et le roi de
France mourut l'année suivante. La couronne
(I) tans ne célèbre passage de fci ÙMM Comédie
( Pur§., c xx h Daaft» met ci ecès* Augee* Capet , aum
le premier roi de la troisième race, nftis se* père ,
Hugues le Blanc, surnommé aussi Capet; H lui fait. dire :
« Je fus la racine de cette plante coupable qui par son
ombre funeste tnatt à toute terre chrétienne...... On
n'appela Hugues Capel... Je lus fils "d'un boucher de
Paris (flçliuol fui d'un beccato di Parigi}. » Ou a pr*~
posé diverses explications âe ces derniers mots, qui pris
à la lettre «ont une erreur Miarre. Solvant Graogier oa
aurait'donné répUhète de iàucfier au père de Rognes à
cause* de sa séYérité envers les criminels. M. Artaud de
Mentor pense que cette éplthète a pu être donnée a
Robert, père de Hugues, parée que Citait un riche pos»
sesseur de bestiaux. On raconte que François !•*, enten-
dant lire le passage de Dante, s'écria : « -Le Toscan en
a menti par la gorge.'» i foy. la trad. de Dante par Ar-
taud de Moctor. )
453
HUGUES
454
fut encore nne Ibis vacante. « Hngue* te Blanc,
dit M. Henri Martin, n'avait qu'à étendre le bras
pour la saisir; mais il préférait de plus solides
avantages ; pour la seconde fois, il aima mieux
faire nn roi qiie de l'être lui-même, et Tendre la
couronne que de l'acheter. Ce froid et prudent
calculateur passa sa vie à agrandir, a fortifier, à
enraciner sa maison dans le sol, et Téserva à ses
enfants l'occupation définitive de la royauté,
comme s'il eut été sot qu'elle ne pouvait leur
échapper. » D'accord avec le duc de Normandie,
le comte de Vermandois et les principaux pré-
lats, il rappela d'Angleterre le fils de Charles te
Simple, Louis, alors âgé de trehus ans, et le con-
duisit à Laon, où 11 fut sacré par l'archevêque de
Reims. 11 se fit investir par le Jeune roi du du*
ché de Bourgogne. Mais Louis d'Outre*mer,
quoique enfant, n'était pas disposé à se laisser
conduire. Il refusa de vivre à Paris comme le
voulait Hugues, et alla s'établir à Laon, qui de-
vint la capitale des derniers Carlovingfens. Le
comte de Paris se fortifia par une grande alliance
contre une ambition qu'il n'avait pas prévue,
et épousa Hedwige, sœur d'Othon le Grand, roi
de Germanie. Les hostilités éclatèrent en 936
entre le roi et ses gtonds vassau*. Hugues et Hé*
ribert renoncèrent à la suzeraineté de Louis , se
déclarèrent vassaux d'Othon, et avec les secours
du roi de Germanie forcèrent Louis à s'enfoir
an delà de la Loire. Le jeune roi se releva par
son courage et la sympathie qu'inspiraient sa
jeunesse et son malheur. Une paix générale con*
clue en 9*2 lui laissa la ville de Laon et replace
sous sa suzeraineté les comtes* de. Paris et de
Vermandois. La mort de Héribert le délivra peu
après du plus redoutable de ses feudataires;
il voulut en profiter pour étendre ses domaines
aux dépens du Vermandois, mais là encore il
rencontra l'opposition de Hugues. Le comte de
Paris s'allia au jeune Richard de Normandie, que
Louis voulait aussi priver de son duché. Le roi
se hâta d'offrir à Hugues le partage de la Nor-
mandie. Hugues accepta san6 aucun souci de sa
récente alliance, et envahit avec le roi le duché
de Richard. Louis ne se réservait que Rouen, le
pays deCaux et le Vexin Normand ; tout le reste
devait appartenir à Hugues. Les deux complices
ne furent pas longtemps d'accord, et avant la fin
de 944 Hugues avait déjà pris les armes contre
le roi. Apprenant que ce prince était tombé entre
les mains des Normands, Il eut l'air d'intervenir
en sa*fôveur, se le fit livrer, et le retint prisonnier
jusqu'à ce que Louis lui eût livré la ville de Laon.
Le roi n'observa pas une convention aussi oné-
reuse, appela à son secours .Othon de Germanie et
Conrad d'Arles, et inonda l'ïle^de-France et la
Normandie de soldats germains. Enfin la lassi-
tude décida les deux parties à traiter en 950.
Hugues se reconnut vassal de Louis, et lui rendit
la tour de Laon. Le roi mourut quatre ans
après, laissant deux enfants , dont le plus âgé
atait treize ans. Pour la troisième fois, Hugues
pouvait être roi, mais il savait qu'il aurait plus
de profit à disposer de la couronne qu'à se l'ap-
proprier. H fit couronner Lothaire, fils de Louis,
et obtint de lui l'investiture du duché d'Aquitaine.
Il essaya en 965 de s'emparer de Poitiers, ne
réussit pas, et aurait sans doute renouvelé ses ten-
tatives si la mortnel'ent enlevé l'année suivante.
Les contemporains de Hugues l'appelèrent Grand
à cause de l'étendue de ses domaines plutôt que
pour ses actions. Sa vie rot, comme celle des
autres seigneurs de son temps, une longue suite
de guerres, d'intrigues et de trahisons. « Le
dixième siècle, dit M. Henri Martin, peut pas-
ser pour l'ère de la fraude et du mensonge; ja-
mais, à aucune autre époque de notre histoire,
le sens moral n'a paru si complètement effacé de
l'âme humaine que dans cette première période
de la féodalité. » Z.
Adhétnar de Cfaabannals* Chroii. — Prodoaré , Chrdn.
*» Guillaume de Gensbloui, CAf\ - Ordérte Vital, Hirt.
-. Henri Martin, HiU. 0* France, 1 11, 1. XVI.
Hueovfi capet (l) 9 roi de France et chef
de là dynastie des Capétiens , second fils du
comte Hugues le Grand et de Hedwige, sœur du
rei Othon, né vers 946, mort le 24 octobre 996.
U Avait environ dix ans à la mort de son père»
le iô juin 956. tl eut pour héritage le duché de
France et le comté de Paris, tandis que son frère
Othon avait le duché de Bourgogie, et que son
troisième frère, Eudes ou Henri, était engagé dans
la filerfeature. JUm de France Lothaire n'était
guère plus Agé que le nouveau comte de Paris.
La jeunes** des deux princes fit cesser un mo-
ment la lutte qui avait divisé leurs pères. Un
commencement de querelle qui s'éleva entre eux
fut apaisé par leur onele maternel Bruno, arcbevé*
que de Cologne, etliothaire confirma Hugues dans
l'héritage paternel, y compris de prétendus droit»
sur l'Aquitaine. Le comte de Paris n'étant pas
assez puissant pour faire valoir ses prétentions
y renonça, et épousa* en 970, Adélaïde, soairii»
Guillaume Fier-à-Bras, duc d'Aquitaine, La mort
de Bruno en 965» celle d'Othon le Grand en 973
préparèrent de grands changements dens la si-
tuation de la France «n privant Lothaire de ses
meilleurs appuhc Le reidn. France fut conduit,
peut-être par l'influence de Hugues, à rompre
avee te roi de Germante Othon H, qui venait de
placer sur te trône de Lorraine, Chartes, second
jfils de Louis d Ontre<mer. Othon, qui setnhlsM
(1) U surnom de Capet, que te chef de la troisième dy-
nastie légua a toute sa race, vient, suivant bu Cange
( GlosS., au mot Capetus ), tle ce que Hugues se couvrait
ordinairement II tête d'«* capuce, on de ce que, étant
eulaat, il avait «outiiine, « par maniera de Jeu », de ra-
battre les capuces des gens qu'il rencontrait. « Voilà, dit
M. Henri Martin, une bien frivole origine pour un nom
ti fameax. 11 se revêtait d'âne ohape, a-t-on dit encore,
comme abbé laïque de plusieurs monastères ; et c'est
pour cela qu'on l'appelait Capet ou Chapet. Tous les
autres grands laïques avalent aussi des abbayes; ce n'é-
tait là rien de parttentier. Ce surnom ne se rapportait -H
pas plutôt an caractère de Uugues et ne désignait-il pas
son naturel opiniâtre et persévérant? Hugues l entêté,
de caput, tête. »
455
HUGUES
456
regarder Hugues comme son principal adversaire,
raarclia contre Paris au mois d'octobre 978, et
campa sor les hauteurs de Montmartre. On
raconte qu'il s'avança au galop jusqu'aux fossés
de Paris, darda sa lance contre une porte de la
viHe, et, content de cette bravade, commanda la
retraite. Les hostilités poussées avec si peu de
vigueur aboutirent à un accommodement en 980.
Au printemps suivant Hugues alla passer les
fêtes de Pâques à Rome avec l'empereur Othon
et le roi Conrad d'Arles. Lothaire engagea ,
dit-on , Conrad a faire périr Hugues ; mais ce-
lui-ci avait su se ménager l'amitié de l'impéra-
trice Théopbanie, qui le fit avertir, et il s'enfuit
déguise en palefrenier. Cette histoire est peut-
être une invention des chroniqueurs pour justi-
fier l'usurpation de Hugues et pour jeter quel-
que intérêt sur les années qui précédèrent son
avènement. Rien, en effet, n'est plus insignifiant
que sa vie à cette époque, « La seule chose, dit
Sismondi, qu'on nous ait apprise sur le gouver-
nement de ce duc de France, alors dans toute la
force de l'âge, c'est qu'il eut, en 981, une vision
de saint Valéry et de saint Riquier, qui l'engagè-
rent à se faire rendre- leurs reliques par Arnol-
phe, comte de Flandre, et à s'emparer de Mon-
freuil-sur-Mer. Le reste des Gaules ne présente
pas* plus de. souvenirs, si l'on en excepte celui
d'un combat livré la même année à Conqueu-
reue, entre le comte de Rennes et le comte de
Nantes. C'était le vrai siècle des rois fainéants;
tous les seigneurs de France, de Bourgogne et
d'Aquitaine semblèrent s'abandonner à une même
mollesse. » Au milieu de ce silence de l'histoire,
on s'aperçoit à peine de l'affaissement graduel
de la dynastie carlovingienne. « Lothaire, écri-
vait Gerbert à des amis de Germanie, est roi
de nom, Hugues l'est de fait; si vous vous fus-
siez assurés de son amitié, vous n'eussiez plus,
depuis longtemps, rien à craindre des rois des
Français. » Lothaire mourut en 986, laissant le
trône à son fils Louis. Celui-ci ne survécut que
d'un an à son père, et expira le 21 mai 987. Un
choniqueur, découvert récemment, Richer, donne
des détails fort intéressants sur le grand événe-
ment qui substitua une nouvelle dynastie à la
dynastie usée des Carlovingiens. « Au moment où
mourut le jeune roi, un certain nombre[degrand8
se trouvaient réunis auprès de lui à Senlis pour
juger l'archevêque de Reims, Adalbéron, accusé^
de trahison. Après avoir enseveli Louis à Com-
piègne, ils conférèrent ensemble touchant le bien
du royaume. Personne ne soutenant l'accusa-
tion contre Adalbéron, Hugues, au nom de tous,
le déclara justifié, et lui donna la préséance dans
l'assemblée; Adalbéron parla le premier sur la
question de chercher nn roi. Tous les grands
n'étant pas présents, il proposa qu'on ajournât
la décision, que chacun des assistants prêtât ser-
ment entre les mains du grand-duc ( Hugues ) de
ne rien chercher ni machiner en particulier sur
ce sujet jusqu'à la prochaine assemblée. » Tous
acquiescèrent et retournèrent chez eux. Dans
l'intervalle, le duc Charles ( frère de Lothaire et
duc de Lorraine) vint trouver Adalbéron, et le
pria de l'aider à faire valoir son droit hérédi-
taire. Adalbéron lui reprocha de n'être entouré
que de parjures, de sacrilèges, et le renvoya aux
grands du royaume, sans l'aveu desquels lui
ne pouvait rien (aire. Charles repartit pour
Cambrai , d'où il envoya aux seigneurs fran-
çais des messages que la plupart accueillirent
sans doute fort mal ; car ce prétendant n'osa se
rendre à l'assemblée des grands qui se réunit à
Senlis.. D'après le témoignage de Richer, cette
assemblée fut nombreuse et imposante : on y
vit figurer les Français, les Bretons, les Nor-
mands, les Aquitains, les Goths (de laSeptima-
nie), les Espagnols ( de la Marche d'Espagne ),
les Gascons. Les provinces les plus lointaines du
royaume furent représentées à Senlis, au moins
par quelques-tins de leurs barons. Richer ne
dit pas quels furent les absents ; mais on est as-
suré que Séguin, archevêque de Sens, ne vint
pas, ni les comtes Arnoul de Flandre, Albert
de Vermandois, Héribert de Troyes ; peut-être
Guillaume, comte de Poitiers et duc d'Aqui-
taine, et l'autre Guillaume, comte de Toulouse,
ne parurent-ils pas non plus. Le parti de l'an-
cienne dynastie protesta, par son absence, contre
un résultat prévu. L'archevêque de Reims ou-
vrit le débat par un très-remarquable discours :
« Charles, dit-il, a ses fauteurs, qui le préten-
dent digne du royaume par le droit que loi ont
transmis ses parents ; mais le royaume ne s'ac-
quiert point par droit héréditaire, et l'on ne
doit élever à la royauté que celui qu'illustre non-
seulement la noblesse matérielle, mais la sa-
gesse de l'esprit, celui que soutiennent la foi et
la grandeur d'âme; peut-on trouver ces qua-
lités dans ce Charles, que la foi ne gouverne pas,
qu'une honteuse torpeur énerve, qui a ravalé
la dignité de sa personne au point de servir
sans honte un' roi étranger et d'épouser une fem-
me inférieure à lui, prise dans le rang des sim-
ples guerriers? Comment le grand-duc souffri-
rait-il qu'une femme prise parmi ses chevaliers
devint reine et dominât sur lui?. Si vous voulez
le malheur de l'État, choisissez donc Charles !
Si vous voulez son bien, couronnez l'excellent duc
Hugues ! Choisissez le duc, illustre par ses ac-
tions, par sa puissance, et vous trouverez en lui
un protecteur non-seulement de la chose publi-
que, mais delà chose de chacun..» Tous applau-
dirent, et, du consentement de tous, le duc fut
élevé à la royauté; puis on se transporta de
Senlis à Noyon, et là, le métropolitain et les
autres évêques sanctionnèrent par l'onction du
sacre le choix de l'assemblée nationale et l'irré-
vocable déchéance de la race carlovingienne.
Le 1 er juillet 987 , l'archevêque de Reims posa
sur le front de Hugues Capet, dans la cafiiédrale
de Noyon, cette couronne de France que deux
des devanciers de Hugues avaient déjà, portée
457
HUGUES
458
et que ses descendants devaient se transmettre
durant tant de siècles. » (1)
Le titre royal conféré à Hugues-Capet n'ajou-
tait rien à sa puissance et l'obligeait à défendre
sa nouvelle couronne contre le duc de Lorraine.
Les grands vassaux se partagèrent presque éga-
lement entre les deux prétendants. Le duc de
Normandie, qui avait épousé une sœur de Hugues,
le comte de Vexin , l'archevêque de Reims , le
comte et l'évêque de Soissons', et deux grands
feudataires du duché de France, les comtes de
Chartres et d'Anjou, soutinrent Hugues Capet,
tandis que le comte de Flandre, l'archevêque de
Sens, les comtes de Vermandois, de Troyes et
le duc d'Aquitaine se déclarèrent pour Charles.
Hugues traita avec quelques membres de cette
redoutable ligue, fit couronner son fils Robert le
jour de Noël 987, et marcha contre le duc d'A-
quitaine, qu'il battit II revint ensuite défendre
le duché de France contre Charles, qui s'était em-
paré de Laon en mai 988. La guerre, assez lan-
guissante d'abord, devint plus vive au printemps
de 989. Le nouveau roi de France vaincu leva
le siège de Laon. Cet échec eut de graves
conséquences. « Hugues , dit un chroniqueur,
vit son autorité méconnue par ceux même qui
lui étaient soumis auparavant dans toute la
France; mais, grâce à la vivacité de son corps
non moins qu'à son habileté, il finit par étouffer
toutes les révoltes. » Adalbéron, archevêque de
Reims et l'un des plus zélés soutiens de Hugues,
était mort en 988. Le roi, dans l'espoir de gagner
quelques partisans de l'ancienne dynastie, donna
le premier archevêché des Gaules à Arnolphe, fils
naturel dé Lothaire. Arnolphe, malgré de grandes
promesses de fidélité, ne tarda pas à livrer Reims
à Charles, qui se vit maître des diocèses de
Laert, de Reims et de Soissons. Ce fut le terme
de ses succès. Hugues gagna Ascelin ou Adal-
béron', évêque de Laon. Pendant la nuit du jeudi
saint (2 avril 991 ), Adalbéron s'introduisit dans
le logis de Charles, endormi, s'empara de lui, de
sa femme et de son neveu, et le livra à Hugues.
Charles, envoyé à Orléans, y mourut peu après,
et son obscure postérité, qui s'éteignit en Alle-
magne vers le milieu du treizième siècle, n'essaya
même pas de troubler les Capétiens dans la pos-
session de la couronne de France. Cette dynastie
fut généralement reconnue au nord de la Loire,
mais les pays situés au sud de ce fleuve conti-
nuèrent à se maintenir indépendants. Le roi
Hugues était trop occupé dans le voisinage du
duché de France pour s'engager dans une lutte
contre l'Aqpitaine. II fit déposer canoniquement
Arnolphe, archevêque de Reims, et lui substitua
tGerbert. Le pape Jean XY déclara illicite la dé-
position d'Arnolphe, et mit en interdit le diocèse
de Reims. Cette difficile affaire n'était pas encore
réglée lorsque Hugues mourut, et les dernières
41) Henri Martin, d'après la Chronique de nicher, dans
son Histoire de France.
paroles qu'il adressa à son fils semblent se res-
sentir d'une certaine terreur religieuse. « O mon
cher fils ! dit-il à Robert, je te conjure, au nom
de la sainte et indivisible Trinité, de ne jamais
abandonner ton esprit aux conseils des flatteurs
qui chercheront à te séduire par des présents
empoisonnés , pour que tu disposes, selon leur
volonté , de ces abbayes que je laisse après Dieu
sous ton gouvernement. Qu'aucune légèreté
d'amené t'engage à piller leurs trésors, à les dis-
traire ou à les dissiper. Je te recommande en-
core, et cela par-dessus toute chose, de ne ja-
mais permettre qu'on t'arrache à la dévotion du
chef de notre religion, savoir, de notre père
saint Benoit; c'est lui qui, après la mort de ce
qui n'est que chair, te procurera, auprès de notre
commun juge, l'entrée du salut , seul port tran-
quille et seul asile assuré. » Dans la pénurie de
documents relatifs à Hugues-Capet, il est diffi-
cile de décider si le fondateur de la troisième
dynastie fut un prince éminent ou un homme
médiocre porté au trône par la force des choses.
Il ne manqua pas d'habileté, mais, les nécessités
de sa position l'obligèrent à prodiguer les do-
maines aux seigneurs et aux évêques. Parmi
les événements notables de son règne on cite la
fondation de la ville d'Abbeville et l'emploi de
la langue vulgaire ou romane dans un concile
tenu à Maison en 995. Z.
Guillaume de Jamiéges, Hist., liv. IV. — Frodoard;
Chron. — Glaber, Chron. — Richer, Chron. ; dans les
Monumenta Germante Hist. de Perlz.— Gerbert , Epist.
— Slgebert de Gembloux, Epist. — Helgand, Fita Ro-
berti régis. — Capefigue, Hugues-Capet et la troisième
race. — Et. Gallois, La Champagne et Us derniers Car-
lovinçiens; Paris, 1868, in-8®. —La Ferrlère, Histoire
du Droit français» t. IV. — Slsraondi, Histoire des
Français, t, III et IV. — Henri Martin, Histoire de
France, t. II, 1. XVI ; L III, 1. XVII.
HUGUES, roi d'Italie, né vers la fin du neu-
vième siècle, mort le 14 avril 947. Il était fils de
Thibault, comte d'Arles, et de Bertha, fille, selon
les uns du roi Lothaire n, selon d'autres de
Louis, roi d'Italie. Après la mort de Thibault,
Bertha avait épousé Adelbert de Toscane ; de
ce mariage était née Hermengarde , qui, devenue
la femme du marquis d'Ivrée , songea à mettre,
dans ces temps de bouleversement général , son
frère utérin Hugues sur le trône d'Italie. Toute-
puissante par ses charmes sur les grands de ce
pays , elle les décida à se liguer contre Rodolfe II,
roi de Bourgogne, qui avait succédé à Bérenger
en Italie. En 926 Rodolfe fut entièrement battu
à Novare, et se sauva en Bourgogne* Hugues
quitta alors la Provence, et se rendît à Pavie,
où il fut reconnu roi dans une assemblée géné-
rale de barons. Afin de faire régner un peu de
tranquillité dans son royaume , il usa d'un mé-
lange de ruse et de cruauté pour empêcher les
violences incessantes de ses turbulents feuda-
taires , et il y réussit pendant quelque temps. Il
prit aussi à tâche de contracter des alliances avec
les principaux souverains de l'Europe. En 931
il épousa la fameuse Maroria, courtisane- éhon-
459
HUGUES
460
tée, qui gouvernail la ville de Rome. Mais peu
de temps après, Albéric, fila de Maroïia, ayant
été maltraité paf Hugues , ameuta contre celui-ci
les Romains , qui enfermèrent Hugues an château
Saint-Ange, d'où il se sauta la nuit, en descen-
dant an moyen d'une corde. Hngoes, resté maître
du nord de FItaHe , soupçonna Lambert , mar-
quis de Toscane, son frère utérin, de vouloir
s'emparer de la couronne, et lui fit arracher les
yeux. Les Italiens, entrés de sa tyrannie crois-
sante, offrirent la couronne à Rodolfe de Bour-
gogne ; mais celui-ci n'accepta pas , Hugues lni
ayant abandonné la Bourgogne Cis-Jurane. En
934 Arnolt, duo de Bavière, tint en Italie pour
soutenir les ennemis de Hugues; mais il tut battu,
et dut bientôt se retirer. Hugues, ayant deux
ans auparavant associé au gouvernement son
fils Lothaire , rassembla alors une année consi-
dérable et marcha snr Rome pour en chasser
Albéric, qui y régnait en despote. Ne pouvant
s'emparer de la ville, il traita avec Albéric, et lni
donna sa fille en mariage. Mais bientôt ils se
brouillèrent de nouveau , et les hostilités recom-
mencèrent entre eux. Hugues se mita distribuer
les dignités ecclésiastiques et les grands nefs à
ses parents; plusieurs de ceux-ci, non encore
satisfaits, et bien loin de lui garder quelque recon-
naissance, complotèrent contre lni. Pendant
quelques années il sut déjouer leurs menées;
l'un d'eux, Bérenger, marquis d'Ivrée, allait être
lait prisonnier, pour être ensuite aveuglé , lors-
que Lothaire, fils de Hugues, lui fit savoir ce
qui se tramait contre lui. Bérenger se sauva au-
près du duc de Souabe. Un an après, en 041 ,
Hugues donna 1 Eudoxie, une de se* filles natu-
relles « en mariage au nevea de Romanus, empe-
reur de Constantmople; ce dernier envoya Tan-
née suivante une flotte pour soutenir l'entreprise
( que Hugues méditait contre les Sarrasins, qui
' s'étaient établis dans les Alpes Contiennes. Les
Sarrasins furent entièrement battus; Hugues
aurait pu les anéantir, mais il préféra traiter avec
eux , en leur imposant pour condition qu'ils em-
pêcheraient Bérenger de passer les Alpes. Les
Hongrois ayant fait invasion en Italie, il tes dé-
cida à se retirer après lenr avoir fait remettre
une somme considérable. Bérenger, qui n'avait
pas pu obtenir de secours de l'empereur Othoo,
gagné par les présents de Hugues, envoya en
944 Amédée, un de ses fidèles, en Italie, pour
y étudier les dispositions des habitants à l'égard
de Hugues. Amédée , se cachant sous les dégui-
sements les plus divers, noua des relations
avec beaucoup d'Italiens , lassés de voir tons
les emplois publics et toutes les dignités ecclé-
siastiques distribués aux Provençaux et aux in-
nombrables enfants naturels de leur roi. En 045
Bérenger parvint à entrer en Italie avec quelques
compagnons , et il fnt reçu à bras ouverts par
Manassès, évêque de Vérone, neveu de Hugues,
que ce dernier avait comblé de bienfaits. Hugues,
bientôt abandonné de presque tous «es anciens
partisans, envoya son Éta Lothaire 'à Pavie,
pour qu'il y fût reconnu roi à sa place. Quant à
lui, il se proposait de se rendre en Provence
avec tous ses trésors. Bérenger n'abusa pas de
sa victoire, et laissa la couronne à Bogues et
à Lothaire, se réservant Itaenice réel de l'au-
torité. Hugues ne supporta pas longtemps cette
humiliation. En 947 il quitta l'Italie, et arriva
dans ses États héréditaires, où il mourut bientôt
après.
Hugues, courageux et actif,, aimait à protéger
l'Église et les faibles contre les déprédations des
barons ; il voulait soumettre ses sujets à no gou-
vernement stable } mate 9 fut souvent peu scru-
puleux dans le choix de ses moyens, sans pour
cela mériter la quanficaubn de Ttftèr* eu petit
pied que lui donne M uratorl. E, GiutaeiaB.
Luitprand, Historia, Hb. IV, cap. 8 et 4; lib. v, cap. -
l-§, et il l»; Hb. VI, eap. l. — Wollhart et Boe%*e,
Hugo, «orné» JrelmtmOit Lt*itet M**. ~ «ras* et Gri-
ser, Encwlojmdi*.
Hueras le Grand, comte de Vermandois,
troisième fils de Henri I 9 *, roi de France, nées
1057, mort le 18 octobre 1102. Il épousa Alix,
héritière des comtés de Vermandois et de Va-
lois, et reçut le surnom de Grand, « surnom fré-
quent dans la maison des Oapets* dit Stemondi, qui
indiquait seulement la dignité du chef de leur fa-
tnlHe , et qui faisait presque toujours un contraste
étrange avec la nullité de celui qui le portait >.
Hugues, un des premiers, prit hveraix à rassest-
Mée de Clermont eh 1095. il se joignit à te se-
conde armée des croisée, partie à là fin de sep-
tembre 1090 de l'Ile-de-France et de la Nor-
* niandie, et dont le principal chef était Robert
Courte-Heuse. Cette armée traversa l'Italie dans
toute sa longueur, et hiverna dans les possesloDs
normandes de* la Pouille; mais Hugues de Ver-
mandois ne voulut pas s'arrêter, passa la mer
avec quelques chevaliers, et débarqua à Du-
razzo, où un officier de l'empereur Alexis 06m-
nène l'arrêta. H fat retenu prisonnier à Philippopo-
lis jusque l'arrivée de Godofroy de Bouillon, qui le
délivra. Pendant sa captivité il avait prêté ser-
ment de fidélité à l'empereur Alexis, acte de
faiblesse qui lui fat vivement reproché. 11 sui-
vit en Asie la grande armée des croisés, et se
distingua à la bataille de Dorylée, aux sièges de
Nicée et d'Antioche. Député avec Etienne, comte
de Chartres, auprès de l'empereur Alexis, il aban-
donna ses compagnons d'armes et revint en
France comme un fugitif, en 1099. De tontes
parts on l'accusa de lâcheté, et, pour se dérober
à l'animadversion publique, il dut retourner en
Terre Sainte l'année suivante, avec de nouvelles
bandes de croisés qui, encore, plus indisciplinées
que les premières , furent successivement dé-
truites par les Turcs dans l'Asie Mineure. Blessé
dans une rencontre près de Nieée, il alla mourir
à Tarse en Cilicie. Il laissa trois fils et trois lilles
de son mariage avec Alix, et fut la tige de la se-
conde maison de Vermandois. Z.
461
HUGUES
462
Ordérle Vital, Ckrtm~, U IX, X. - Guillaume de Tyr,
Hist, 1. II, VI, X. — Mlctaaoé, Histoire des Croisades,
1. 1. — SUraondl, Histoire de* français, U IV, p. «88. —
Sainte-Marthe. Histoire généalogique de la Maison de
France, t. II, y. 66'.
HUGUES I er , duc de Bourgogne, né vers
1040, mort en 1093. Son père Hugues ayant été
tué en 1057, Robert I er , duc de Bourgogne, père
de celui-ci , fit reconnaître comme ses héritiers
présomptifs ses deux autres fils, an préjudice
du jeune Hugues. Mais en 1075, lors de la mort
de Robert, Hugues, aidé par son beau-père Guil-
laume, comte de Nevers, s'empara en un mois de
toutes les places fortes de la Bourgogne, et força
ses deux oncles à quitter le pays. 11 gouverna
avec sagesse et protégea avec efficacité les églises
et les faibles contre tonte déprédation. Ayant
perdu en 1078 sa femme Sibylle, dont il n'avait
pas eu d'enfants, il se retira à Cluny , où il em-
brassa la vie monastique , malgré les représen-
tations du pape Grégoire VTL , qui voyait à re-
gret un prince aussi télé pour la justice quitter
le théâtre du monde. E. G.
Ordérle VK»I, Historia BceksiasMca. - Andr. Du-
thème, HUtoére é$s Bois, duos et comte» do Bourgogne.
— M. de torante» Hi$L 4u Orne* do Bourgogne
hugu&s u, duc de Bourgogne» surnommé
Borel et le Pacifique, né daos la seconde moitié
du onzième siècle, mort ea 1 142. Son père Eudes
étant parti en 1097 pour la croisade , Hugues fat
chargé de l'administration du duché de Bour-
gogne, dont il prit possession définitive en M 03,
Tannée do la mort d'Eudes. Trois ans après, les
églises de la Bourgogne vinrent se plaindre au
pape Pascal H, qui se trouvait alors à Dijon,
des exactions commises sur elles par Hugues;
celui-ci déclara alors qu'il s'en tiendrait doréna-
vant aux coutumes établies sous Hugues I er , son
oncle. En 1 109 Hugues accompagna le roi Louis
le Gros dans l'expédition contre les Normands;
en 1124 il vint au secours de ce même roi pour
repousser les Allemands, qui avaient pénétré en
Champagne. Après avoir fait en 1140 un pèle-
rinage à Saint-Jean de Compostelle, il mourut
deux ans après , ayant su garantir pendant qua-
rante ans son pays des malheurs de la guerre,
ce qui lut fit donner le surnom de Pacifique,
E. G.
Andr. Doefcesne, Histoire dos Rots, Ducs et Comtes de
Bourgogne. — Art de vérifier tes dates.
hugoks m, duc de Bourgogne, né vert
1150, mort au commencement de 1193. En 1102
il succéda a Eudes II, mu père, tous la tutelle de
sa mère Marie, nue de Thibaut le Grand, comte
de Champagne. Quatre ans après il prit part à
la guerre entreprise par le roi Louis le Jeune
contre le comte de Chatons. S'étant rendu en
1171 en Palestine» il rot surpris par une tempête,
et fit alors le vomi de bâtir une église à l'honneur
de la Vierge s'il échappait au danger. De retour
en 1172, il construisit, pour remplir son vœu, la
SainterChapelle de Dijon. U eut des démêlés avec
plusieurs de ses vassaux, tels que le comte de Ne-
vers et le sire de Vergy. Ce dernier, assiégé dans
son château, en 1185 parles armées du duc,
implora le secours de Philippe-Auguste, qui
força d'abord Hugues à lever le siège, et revint
l'année suivante, sur tes plaintes portées par
les ecclésiastiques contre les exactions du
duc, porter le ravage dans la Bourgogne. En
1187 Hugues accorda aux habitants de Dijon
le droit de commune. Deux ans après il con-
tribua avec le comte de Flandre et l'archevêque
de Reims à amener un accord entre les rois de
France et d'Angleterre. En i 190 il partit pour la
croisade avec Philippe- Auguste, et se trouva
l'année suivante à la prise d'Acre. Le roi étant
alors retourné en France, remit à Hugues le
commandement de l'armée française. A la ba-
taille d'Ascalon le duc dirigea les opérations de
l'aile gauche de l'armée chrétienne. Lorsque
Richard Cœur de Lion voulut marcher sur Jé-
rusalem , Hugues, jaloux des succès du roi , re-
fusa de l'accompagner, et se rendit a Tyr, où il
mourut peu de temps après. « Hugues fut moult
bon chevalier de sa main et ehevaleureux , mais
il ne rut oneques tenu à satge, ne à Dieu, ne au
monde » , dit le sire de Joinville. E. G.
Doehetoe, Histoire des Rois, Buts et Comtes de Bour-
gogne. ~ M. 4e Bwnlft #t»f< des Ducs de Bourgogne*
HUGUES iv, duc de Bourgogne , né le 9 mars
1312 , mort vers, la fin de 1272, Ayant succédé
eu 1218 à Eudes III, son père, il gouverna d'a-
bord soos la tutelle d'Alix de Vergy, sa mère. En
1237 il acquit, par échange de la seigneurie de
Salins, les comtés de Chalong et d'Auxonne, Dix
ans après il s'associa avec plusieurs grands feu-
dataires pour s'opposer à l'extension des juri-
dictions ecclésiastiques. En 1248 U se rendit
avec saint Louis en Palestine , fut pris à la ba-
taille de Maasoure , et se racheta en même temps
que le roi; Après être retourné en France en
1254, il y obtint en 1265 de Baudoin, empereur
de Constantinople , alors à Paris, le royaume de
Thessalonique. S'étant rendu en 1272 à Saint-
Jacques de Compostelle , il mourut pendant le
retour à Vilaines en Duesmois. U eut de ses
deux femmes, Yolande de Dreux et Béatrice de
Champagne, quatre fils et six filles, dont l'une,
Elisabeth , épousa l'empereur Rodolfe I er . E. G.
Duchesbe, Histoire des Rois* Ducs et Comtes de Bour-
gogne. — M. de tarante, HisL des Ducs de Bourgogne.
HUGUES v, duc de Bourgogne, né vers la
fin du treizième siècle , mort en 1315. Tl succéda
à Robert VI, son père, en 1305. On ne sait pres-
que rien sur sa vie. Il fut créé chevalier en 1313,
à Paris, par Philippe le Bel. E. G.
Docbesne, Histoire des Rois % Ducs et Comtes do Bour-
gogne. — Art de vérifier les dates,
* bugues i* r , comte de Champagne , vivait
au commencement du douzième siècle. Il accom-
pagna, en 1102, l'empereur Henri IV dans son
expédition en Flandre, et y rat grièvement blessé.
Trois fois il fit le voyage de la Terre Sainte, en
1113, 1121 et 1125. Là il se fit recevoir chevalier
du Temple, et fut félicité par saint Bernard en ces
termes : Foetus es ex comité mites, ex tUvite
463
HUGUES
464
pauper. Hugues avait acquis d'autres titres à l'es-
time du saint par plusieurs pieuses fondations,
entre autres les abbayes de Trois-Fontaines, de
Sermaise et deCheminon , et surtout par la conces-
sion du territoiredeClaûraux. Marié en premières
noces à Constance, fille de Philippe I ,r , roi de
France , dont il fut séparé en 11 04, pour cause de
parenté, il épousa Elisabeth de Bourgogne, dont
il eut un fils, nommé Eudes, qu'il ne voulut pas
reconnaître. Il mourut en Palestine, après avoir
institué son neveu Thibault héritier de ses com-
tés. Suivant P. Pithou, il les lui aurait vendus
vers Tan 1125. Etienne Gallois.
E. Gallois, SUt. des Comtes de Champagne.
hugues dbs payens (De Paganis) ou
de Pains, chevalier français de la maison des
comtes de Champagne, ainsi nommé de la terre
de Pains, en Champagne, entre Méry sur-Seine
et Troyes, né vers 1070, mort en 1136. « Se trou-
vant en Palestine, il forma, dit Le Bas, avec huit
antres gentilshommes, du nombre de ceux qui
avaient suivi Godefroy de Bouillon, le dessein
d'établir un nouvel ordre religieux et militaire,
consacré àjla défense de la Terre Sainte. Aux
trois vœux ordinaires de chasteté, d'obéissance
et de pauvreté qu'ils prononcèrent, en présence
de Gormond, patriarche de Jérusalem, ses com-
pagnons et lui joignirent le vœu de porter les
armes contre les infidèles, et spécialement celui
de pourvoir à la sûreté des chemins et de mettre
les pèlerins à l'abri des insultes des brigands.
Comme ils n'avaient point d'habitation certaine,
Baudouin H, roi de Jérusalem, intéressé à favo-
riser leur association naissante, leur accorda
pour un temps le quartier méridional de son
palais, bâti dans le voisinage des ruines de l'an-
cien temple de Salomon, d'où ils fuVent appelés
Frères de la milice du Temple, chevaliers
du Temple, Templiers. En 1127, Hugues passa
en Occident pour obtenir du saint-siége la con-
firmation de son institut, et fut renvoyé au con-
cile de Troyes, qui s'ouvrit le 13 janvier de
Tannée suivante. 11 se présenta à l'assemblée
avec cinq de ses chevaliers et exposa ses vues.
Le concile les approuva, ordonna que les mem-
bres du nouvel ordre porteraient l'habit blanc
avec la croix rouge, et chargea un nommé Jean
de Saint-Michel, au refus de saint Bernard, de
leur rédiger une règle par écrit. Hugues parcou-
rut ensuite une partie de la France, et de là passa
en Angleterre, en Espagne et en Italie. Outre les
aumônes abondantes qu'il- y recueillit pour les
besoins de la Terre Sainte, il y fit un grand
nombre de prosélytes , qu'il emmena avec lui
pour les enrôler dans sa nouvelle milice. »
Hugues , de retour dans la Terre Sainte, orga-
nisa son ordre. H le vit se répandre rapidement
bien au delà de la Palestine. En 1129, le Temple
avait déjà des établissements dans les Pays-Bas.
En 1131, Alphonse, roi d'Aragon et de Navarre,
l'institua, par un testament authentique, héritier
de ses États. Le testament ne fut pas exécuté,
mais il prouve quelle importance l'ordre du
* Temple avait déjà acquise plusieurs années avant
la mort de son fondateur et premier grand-
mattre. N.
Guillaume de Tyr, Histor. — Saint Bernard, Gpvs-
cula, édit. de Mabttlon. — Le Bas, Diction. Encyclop.
de la France, art. Templiers. — Fleury , Histoire ec-
clêsiastique, 1. LXVII.
hugues (Victor), administrateur français,
né à Marseille, mort dans le département de la
Gironde, en novembre 1826. Il appartenait à une
famille de commerçants. La turbulence de sa
jeunesse le fit envoyer de bonne heure à Saint-
Domingue , près d'un oncle et d'un frère qui y
étaient établis. Lorsque la révolution éclata dans
cette lie, il se trouvait propriétaire de la bou-
langerie qui fournissait le pain aux troupes.
Forcé de revenir en France en 1793, après avoir
vu périr son frère et son oncle, il eut occasion
de manifester les opinions les plus démocratiques,
et fut nommé accusateur public près les tribu-
naux révolutionnaires de Rochefort et de Brest.
Il exerçait ces fonctions lorsqu'au commence-
ment de 1794 il fut nommé avec Le Bas com-
missaire de la Convention aux lies du Vent. Peu
de temps après leur départ de Rochefort avec
huit cents hommes seulement, on apprit à Paris
que les planteurs de La Martinique, de La Gua-
deloupe et de Sainte-Lucie s'étaient livrés aux
Anglais. Les commissaires ne connurent cette
trahison qu'en arrivant à La Guadeloupe. Us ré-
solurent aussitôt de combattre lea Anglais , et
tirèrent au sort celui des deux qui débarquerait
à la tête des troupes pendant que l'autre reste-
rait à bord en cas d'événements. Victor Hugues
fut désigné. H repoussa d'abord les Anglais, qui
avaient tenté de s'opposer à la descente, et, pro-
fitant de ce premier avantage, il prit d'assaut le
fort de Fleur-d'Épée, qui domine la rade de La
Basse-Terre. Après plusieurs affaires très- vives,
il parvint à s'emparer de La Pointe-à-Pitre et à
ehasser les Anglais et les planteurs qui combat-
taient avec eux. Us tentèrent encore de résister,
et réunirent de nouvelles forces ; mais, cernés
enfin de toutes parts, ils furent obligés de capi-
tuler ; le général Graham ainsi que son armée
mirent bas les armes et furent faits prisonniers.
Vietor Hugues, sans perdre de temps, attaqua
le fort de La Basse-Terre, et força enfin, après un
siège long et meurtrier, le général Prescott et les
Anglais à l'évacuer. Le gouvernement français,
informé de la reprise de La Guadeloupe, envoya
une nouvelle escadre sous les ordres de Gogrand,
qui fut adjoint à Victor Hugues. La conquête
de La Désirade, des Saintes et de Marie-Galante
suivit eeHe de La Guadeloupe. Sainte-Lucie re-
tomba au pouvoir des Français, et les Anglais
furent encore chassés de Saint-Martin et de
Saint-Eustache; mais ils restèrent les maîtres
de La Dominique et de La Martinique. En 1798,
le général Pelardy, renvoyé de La Guadeloupe
par les commissaires du Directoire pour cause
d'insubordination et comme ayant cherché à y
465 . HUGUES — HUGUETAN
troubler la tranquillité, accusa Victor Hugues
de vouloir se perpétuer dans son emploi , en
cherchant à mettre les cultivateurs dans ses in-
térêts et à jeter de la défaveur sur le général
Desfourneaux et sur son expédition. En même
temps Pelardy faisait un tableau déplorable de
la situation de la colonie. Les ennemis de Victor
Hugues blâmaient aussi un de ses arrêtés, du
3 février 1797, qui autorisait les vaisseaux de
la république et les corsaires français à s'em-
parer de tout bâtiment neutre destiné aux îles
du Vent ou sous le Vent livrées aux Anglais et
occupées par les émigrés. On convenait que ces
mesures, exécutées de bonne foi, auraient pu
être avantageuses à la république, mais on sou-
tenait que Victor Hugues, pouvant seul armer
ces corsaires de matelots et de volontaires pris
parmi les troupes, les avait fait servir à com-
mettre des déprédations envers des tiers, et en
avait profité pour grossir sa fortune personnelle.
Victor Hugues nia avoir eu des corsaires à
lui; il déclara s'être borné à user de l'ascen-
dant que lui donnait sa place pour déterminer
les commerçants des Antilles françaises à faire
des armements en course dont ils ont retiré de
grands avantages. Ces accusations firent peu
d'impression sur le Directoire. Victor Hugues fut
maintenu dans son emploi, ctjLeBas ayant renoncé
à ses fonctions pour cause de santé, il fut déclaré
que tous deux avaient bien mérité de la patrie.
Victor Hugues revint bientôt après en France,
sur un congé de faveur qui lui rat accordé. Le
Directoire le nomma alors gouverneur de la
Guyane. H n'était pas parti lors des événements
du 18 brumaire, et Une se rendità sa destination
qu'après avoir été confirmé dans ses fonctions
par le gouvernement consulaire. Il les remplis-
sait encore en 1808, lorsque les Anglais et les
Portugais vinrent attaquer Cayenne. Il capitula
et revint en France. On l'accusa de n'avoir rien
préparé pour résistemux ennemis, de ne s'être
pas défendu avec assez de fermeté , d'avoir livré
la colonie sans avoir convoqué de conseil de
guerre ni consulté les autorités civiles et mili-
taires, enfin d'avoir sacrifié le pays qu'il était
chargé de gouverner au désir de sauver ses ri-
chesses personnelles. Traduit devant le conseil
de guerre de la première division miUtaire en
1809, il rat acquitté à l'unanimité, et ce juge-
ment, dont le commissaire impérial avait appelé,
fut confirmé par le conseil de révision. Quelque
temps après Victor Hugues retourna à Cayenne
pour réclamer la levée du séquestre que les
Portugais avaient mis sur son habitation. Il l'ob-
tint, et continua de vivre comme simple planteur
dans cette colonie ; frappé d'une cécité complète
en 1822, Victor Hugues revint dans sa patrie et
s'établit dans une grande propriété du départe-
ment de la Gironde, où il mourut. J. V.
Brian Edwards, Hist. de* Colonie* angL dan* te* Indes
occid. — Arnault, Jay, Jooy et Nonrlns, Biogr. nouv.
des Contemporain*. - Rabbe, VieUh de Boisjolin et
Salnte-Preote , Biogr. vnlv. et portât, de* Contemp. -
461 •
Moniteur, an n, b* Wt ; an in, *» 1 », «M, W ; au w.
n« 810; an v, n° MO; an vu, n» 188; an vin, p. «78,
an ne, p. m, 117»; an x, p. a», 88*.
HUGUES DE TOUCY. Voy. TOOCY.
HUGUES DBFORSIT. Voy. FORSIT.
HUGUES MBTEL. Voy. METEL.
HUGUES D'ESTE. Voy. ESTE.
HUGUES DE BEftSIL OU BÊEZE. Voy.
Berze.
huguet. Voy. Armand.
hugubt (Marc- Antoine), évêque consti-
tutionnel français, né à Moissac, en 1757, fusillé
le 15 vendémiaire an v ( 6 octobre 1796 )* Entré
dans les ordres sacrés dès sa jeunesse, il devint
curé d'un petit village de l'Auvergne, et fut élu
évêque constitutionnel du département de la
Creuse en 1791, sous la constitution civile du
clergé. Nommé député à l'Assemblée législative et
à la Convention nationale par le même départe-
ment t il se fit remarquer par l'exagération de ses
opinions. Il n'obtint cependant aucun crédit,
même dans le parti de la Montagne, où il siégea
constamment. Il dénonça successivement tons
les ministres dans les séances du 24 juillet et
du 5 août 1792, et mit si peu de mesure dans
les discours qu'il prononça à cette occasion
que des cris : A V Abbaye! retentirent dans la
salle. Huguet vota la mort du roi sans appel et
sans sursis. Mêlé depuis à toutes les émeutes
populaires, complice de toutes les conspirations
contre le gouvernement établi, il fut arrêté
dans la soirée du 12 germinal an m (1 er avril
1795) avec Dubem, Fous6edoire et Amar, comme
ayant pris part à la révolte qui venait d'éclater.
Emprisonné au château de Hara, il dut sa liberté
à l'amnistie accordée le 4 brumaire an rv (26 oc-
tobre 1795 ). Il en profita pour tramer, l'année
suivante, unenouvelleconspiration. Quelques cen-
tainesde factieux envahirent le camp de Grenelle
dans la nuit du 24 fructidor an iv ( 10 septembre
1796) et essayèrent d'entraîner les soldats à entrer
dans Paris pour renverser le Directoire et sedéfaire
des membres les plus marquants des deux con-
seils. Ce projet échoua complètement. Huguet,
ainsi que la plupart de ses complices, fut arrêté
au milieu du camp, livré à une commission
militaire , condamné à mort et fusillé. J. V.
Moniteur, an ni, n« 19», 19» ; an xv, n« *», >60 ; an v,
n* to. - Arnaolt, Jay, Jouy et Nonrln», Biogr. nouv.
desContemp.
* huguet an (Jean- Antoine), libraire fran-
çais, né en 1647, mort vers 1750. Il était fils de
Jean Huguetan, docteur en droit et conseiller
du roi Gustave-Adolphe. Établi libraire à Lyon ,
il quitta la France après la révocation de l'édit
de Nantes, et fonda une librairie importante en
Hollande. Il avait des comptoirs dans tous les
pays de l'Europe et jusque dans la Turquie d'A-
sie. Il s'occupa en outre d'opérations de banque,
et acquit une fortune colossale. Quelques histo-
riens disent qu'il promit à Louis XIV un prêt
considérable si. on lui restituait ce qu'on lui
devait, et que lorsqu'il eut obtenu cette restitu-
467
tion H refusa de tenir sa promesse, d'autres ac-
cusent Louis XIV d'avoir voulu le dépouiller,
du moins eu partie, du fruit de ses heureuses
spéculations. Ce qui est certain, c'est qu'on l'at-
tira en France en lui promettant la restitution de
ses biens , et aussitôt après son arrivée , Pont-
chartraio lui fit souscrire des lettres de change
pour plusieurs millions. Huguetan parvint à ré-
voquer par le même courrier les ordre* donnés
à ses correspondants, et se hâta de fuir en Hol-
lande; mais le gouvernement français le fit en-
lever, et il ne recouvra sa liberté qu'à la fron-
tière hollandaise, où un heureux hasard le fit
reconnaître. Huguetan épousa, dit-on, une fille
naturelle du prince d'Orange, et obtint le gou-
vernement de Vianan ; mais peut-être le con-
fond-on avec quelqu'un de ses fils. Quoi qu'il en
soit, Huguetan se retira plus tard en Danemark,
où il se mit à la tête d'une compagnie pour le
commerce maritime, et où il fonda des manu-
factures de laine et de soie, une maison de
banque, etc. Frédéric IV érigea la terre de Gul-
densteen en comté en sa faveur. On dit qu'il
mourut plus que centenaire, du chagrin de n'avoir
pu obtenir l'ordre de l'Éléphant. La Baumelle,
qui le vit à Copenhague, raconte qu'il vivait de
la manière la plus magnifique, et suivant M. Weiss
il soutint de sea dons la colonie de Fredericia.
— Huguetan avait un frère nommé Jean , qui
exerçait la profession d'avocat et s'est fait con-
naître par un Voyage d'Italie curieux et nou*
veau; Lyon, 1681, in-12. J, V.
Webs, Hitt. dm Protestant* réfugiés. — Eug\ et En.
Baagï La France Protestante. — Cbvudoa eft Debidioe.
Die t. mitu. Hiit., ÇriU et Bibliogr.
;hugi?ie* ( Pierre-Charles ), chirurgien
français, né à Séianne, en 1804. Interne des hôpi-
taux de Paris en 1828, il remporta plusieurs prix
de médecine et de chirurgie, devint prosecteur,
reçut le doctorat en 1834 , fut l'année suivante
professeur agrégé; il est aujourd'hui chirurgien
à l'hôpital Beaujon, et membre de l'Académie de
Médecine et de la Légion d'Honneur. On a de lui î
Diagnostic différentiel des Maladies du
Coude; 1842, in-4°; — Mémoire sur VBsthio-
mène ou dartre rongeante vulvo- anale,
inséré dans les Mém, de VAcad. de Médecine,
t'XTV ; — . Mémoire sur la Maladie syphilitique
des Femmes enceintes et des Enfants nouveau-
nés; (1840); — Mémoire sur les maladies de
la Glande vulvo-vaginale et les divers Ap-
pareils sécréteurs de la vulve; 1846 ; — Mé-
moire sur les Signes communs différentiels
des Organes contenus dans la Poitrine; dans
les Archives gén. de Médecine; — Rapport et
Considérations sur la Désarticulation ou Fa-
blation complète du Maxillaire inférieur ;
1857 , in-8°; et dans le t. XXII des Mém. de
VAead. de Médecine; — notes et additions au
Traité oVAnatomie descriptive de Bichat, qui
fait partie de Y Encyclopédie des Sciences médi-
c <* l * s ' H. H. et G. de F.
HUGUETAN — HUISSEÀU
468
Stchaille, Ut Xédeehu de PmrU ~ tocuments parti-
culiers.
I HUIILARD - BRKHOLLE8 ( /,„£, Al~
fonse), archéologue français, né à Paru, le
8 février 1817. Professeur d'histoire an collège
Charlemagne et membre du comité des mono*
ments écrits près le mtoatère de l'insiniction
publique, il a publié : Histoire résumée dût
Temps Anciens, comprenant V histoire ée la
Qrèce, de Gilltes, abrégée et modifiée (avec
M. E. Ruelle); Paria, 1840, 2 toi: in-8°; me
2 e édit., en 1845; ~- Grande Chronique de
Matthieu Péris, traduite en français, avec des
■êtes et précédée d'une introduction de M. le
due de Luynes; Paris, 1640-1841, 9 vol.
in-ff>; — Histoire générale du Moyen Age,
rédigée d*apres le programme universitaire
(avôo M. B. Ruelle}* Paris, 1842-1843, 2 vol.
i*8*; 2« édit, 1849, 2 vol. gr. in- 18. Le* m.
teors se sent posé les Mottes qu'exigeaient le
caractère et les nécessités de l'enseigneoMat
universitaire, auquel ils destinaient leur ou-
vrage; ils ont à la fois évité les développements
excessifs, sans tomber dans l'aridité des laits
présentés sans explications et sans détails; —
Recherches sur les Monuments et V Histoire
des Normands et de Us Maison de Souabe
dans V Italie méridionale; Paris, 1*44, *t.
in-fol. Cet ouvrage, publié aux (rate de M. le
duc de Luynes, est enrichi de 30 planches, gra-
vées d'après les dessins de M. Victor fiaitard;
— Historia diplomatica ftederiei Second*]
site constitutiones, privilégia, mandata, in-
strumenta quae supersunt isttus imperotoris
etjtHorum ejus. Accedunt epistoUs papdnm
et documenta varia : eollegit, ad fèdem char-
tarum et codicum recensait, etc.; Paris,
1. 1 et IV, 1852 à 1854; l'ouvrage doit avoir six
volumes. g. dis F.
Documents particuliers. - Journal de la Librairie.
* HITisseau (Jacques n'), hagiographe fran-
çais, né en Touraine, mort à Marmoutiers, le
24 septembre 1626. Il entra jeune encore à l'ab-
baye de Marmoutiers. Reçu docteur en droit
canon, il remplissait la fonction de garde des
chartes de son monastère, lorsqu'il fat choisi,
aveclsaïe Jaunay, quart-prieur de Marmoutiers,
pour accompagner Matthieu. Giron , le sacristain
chargé de transporter à Chartres la sainte am-
poule qui devait servir au sacre d'Henri IV. La
même année (1594), il fut nommé grand-prieur, et
résista aux tentatives exaltées, mais non intem-
pestives, des réformateurs de son ordre. Ayant re-
fusé en mai 1604 l'entrée du monastère à Matthieu
Renusson, visiteur de l'ordre de Saint-Benoit pour
la province de Tours, il fut frappé, ainsi que ses
partisans, d'une sentence d'excommunication,
déposé de sa charge et dépouillé de tout pouvoir.
Il interjeta appel comme d'abus , et malgré le
crédit des réformateurs, il n'en garda pas moins,
jusqu'à la fin de sa vie, le titre et l'autorité, de
grand-prieur de Marmoutiers, non sans luttes,
469
HU1SSEÀU — HULDBICH
comme on pense, ni sans procédures. A sa mort
il était provincial de la congrégation bénédictine
des Exempt» en France.
lyitaiaseaii a publié à Tours, en 1607» un re-
cueil de prieras sona le titre de Snehiridion Pre-
tum, à l'usage de ion abbaye? quelque temps
aprèt, le Supplément à èo Vhrxmique des
Abbé* de Mmrmamtiers, et Ters ttt&une Chro-
nAq*ê éèt Prient* dn même monastère, re*
«amen écrits d'un style simple, et d'après les
chattes authentique* consultées par lui sans
doute a f époque où il avait charge de les con-
serrer. Cette dernière chronique, rédigée d'a-
bord en français , fut traduite par l'auteur lui-
même en latin. Le mamiaerit original signé par
d'Havane**! cariai* à la Bibliothèque impériale,
t. XV de la ceilettion Hooaseau, fui* 3*9.
Géleatin Poav.
B i iê nrt 49 M* rm * #*-9, n* Pau» llartf nue, Mutw
crits à la Bibliothèque fcnpérfefe, — Stlmon, Chroni-
que» de Touraine, p. cxxxvi.
hctitzilihuilt, second roi des Mexicains,
né vers 1384, mort en 1409. Il succéda en 1989,
à son père Acamapitzin, fondateur de la mo-
narchie mexicaine. Après un interrègne de quatre
mois , H fut reconnu par une assemblée des no-
bles de la nation. Il avait prouvé sa valeur en
maintes occasions; à cette époque tes Mexicains
proprement dits ou Aztèques, fraction des Chl-
mimèqoes et arrivant du nord de la Californie,
. étaient tributaires des Tépanèques, peuple au-
tochthone de l'Anabuac. tes Aztèques habitaient
de misérables cabanes de joncs dispersées çà et
là sur les tles basses de l'immense lac de Tex-
cuco; ce fut de la réunion de ces Ilots par d'in-
génieuses mais grossières digues que sortit Mexico.
Au temps d'Huitzilihuilt la capitale des Aztè-
ques était Tenochtitlan , la plus grande des tles
du Texcuco, Le nouveau prince crut devoir con-
sacrer la souveraine puissance par la religion.
H se fit oindre ou plutôt teindre par le grand-
prêtre , qui lui plaça une espèce de mitre sur la
tête (1). Ses conseillers , pour cimenter son pou-
voir, le pressèrent de solliciter la fille de son su-
zerain Tezozomoc , roi des Tépanèques. La de-
mande fut faite à genoux t dans les termes les
plus humble* ; elle fut accueillie, et Huitzilihuilt
épousa la princesse Ayanchcihualt; ce qui ne
l'empêcha pas de se marier peu après avec Mia-
huaxochilt, princesse de Quauhnahuac ; mais la
polygamie était en usage parmi les anciens peuples
de l'Amérique centrale. En contractant ces gran-
des alliances» le but du jeune monarque était de
faire sortir sa nation de l'obscurité et de l'indi-
gence : il y réussit. Tzompan, prince de Xoltocan,
ayant attaqué Techotlala , roi des Acolhuacans,
celui-ci fit alliance avec les Aztèques, et grâce à
leur aide il battit complètement ses ennemis. Ce
service fut récompensé par quelques conces-
sions en terre ferme et par d'avantageuses
(i) I! est ainsi représenté suf les peintures btérogtypht-
qncs mexicaines.
470
conditions commerciales. Huitzilihuilt se mon-
tra aussi brave et aussi habile en soutenant
son beau-père dans plusieurs guerres contre <U\s
tribus voisines : il y gagna en puissance et en
considération. En même temps , il ne négligea
.rien pour ranimer dans ses États l'industrie et le
commerce; il appela des orfèvres, des sculp-
teurs, lit bâtir des édifices en pierre, encoura-
gea la culture et la mise en oeuvre du coton ,
creusa de nouveaux canaux, éleva de nouvelles
dignes. Il fht détourné de son gouvernement pa-
cifique par la haine de son beau-frère Maxtlaton,
( prinee de Coyaean, qui, sous le prétexte que su
propre soeur (1) Ayanchcihualt, avait été sa
.fiancée avant d'être l'épouse de Huitzilihuilt, fit
Assassiner lejeune Acolnahuacalt, fils de ce prince.
Ce crime ne resta pas impuni : la guerre ayant
éclaté entre Ixthlxochilt , roi de Texcuco et les
Tépanèques f \ e roi des Aztèques se joignit au
premier et Maxtlaton trouva la mort dans la
lutte. Cependant Clavigero conteste ce fait ( voy.
Maxtuwn ).
Huitzilihuilt mourut après un règne de vingt
ans. Outre le prince Acolnahuacalt, assassiné à
l'âge de dix ans, il laissa de sa seconde femme
Miahuaxocbilt un fils, le célèbre Mantezuma
Ilhuicamina, qui réunit sous sa domination tout
l'Anahuac. Cependant, ce fut le frère de Huitzili-
huilt, Chinwlpopoca, qui lui succéda immédia-
tement, par le vœu des nobles, Alfred de Lacaze.
Gomara, Hùtoria del Mexico ; Anvers, 1554, in-JJ. —
Torquemada, Monarquia Indiana; Scvtllc, 1614, 3 vol.
to-fôl. —Clavigero , Storia antica del Me$$ico, Mb. IV,
acet. îx. — De La ReaaoaMère, Pérou, dans V Univers
pittoresque^ p. 14.'
■uuiRiGH ( Jean - Jacques ) , théologien
suisse, née Zurich, en 1683, mort le 25 mai
1731. Il était d'une famille patricienne, dont
plusieurs membres s'étaient déjà fait remarquer
comme théologiens et comme philologues (2). Il
se rendit à Brème, où il étudia l'hébreu sous la
direction de Corn. Hase. Il partit ensuite pour
la Hollande, et alla continuer ses études des
langues orientales à Franeker et à Leyde. De
retour dans sa ville natale, en 170fi, il y fut
nommé pasteur de la Maison des Orphelins. En
1710 il fut appelé à occuper la chaire de morale
au gymnase de Zurich; peu de temps après il
fut chargé aussi de celle du droit naturel , qui
venait d'y être créée. Les académies de Heidel-
berg et deGroningue cherchèrent en vain à l'at-
tirer dans leur sein. On a de lui : Hxstoria
Jeschua Nazareni, a Judasis blasphème cor-
rupta, ex manuseriplo hactenus inedilo, he-
braice et latine, cum notis ; Leyde, 1705, in-8° ;
— Gentilis Obtrectator, sive^de calumniis
gentilium in Judasos commentarius ; Zurich,
1744, in-4°. — HuldYich a aussi fait paraître une
(l) Dans PAnahoac les frères épousaient leurs usant.
(%)*Fop. Zaéler, Unvcrtai-Uxikon , au met fJvl-
derich, Jean-Jacques Huldxlch, né à Zurich en 1569,
rooFl en 1638, dans eette ville, professeur de théologie,
est antenr dune qatniaine de traités et d'opuscules
Important* pour rttfetotrc de ta Confession helvétique.
4*1
HULDRICH — HUUN
472
dizaine de recueils de sermons prêches par loi
en allemand ; c'est à lui qu'on doit encore la
publication des Miscellanea Tigurina; Zurich,
1722, 3 vol. in-8°; collection de divers opus-
cules écrits par des savants de Zurich. Hul-
drich a enfin laissé en manuscrit un Commen-
taire sur l'ouvrage de Puffendorf : De Officio
Hominis et Civis. E. G.
Zimraermann, Fita Htdderici; en tête du dernier
sermon prononcé par Haldrteh, publié à Zarich, 17»,
tB-V,soo*4e titre de :*A<xuaxùxveiov* — Miscellanea
Duisburgensia, t. I. — Bioltotbeca Bremensis. — Zed-
ler, Untocrtal-L&ikon.
hulin ou HULLnr ( Pierre - Augustin,
comte), général français, né à Paris, le 6 sep-
tembre 1758, mort dans la même ville, le 9 jan?
vier 1841. Son père était marchand fripier sous
les piliers des halles. Engagé en 1771 dans le
régiment de Champagne, 'Hulin passa bientôt
dans les gardes françaises, où il fut nommé ser-
gent en 1780. Au 14 juillet 1789, il se distingua
à la tête du peuple qui faisait le siège de la Bas-
tille. Entré un des premiers dans la forteresse,
il s'empara du gouverneur Delaunay, que les
insurgés voulaient massacrer. Aidé d'un nommé
Ame, il essaya de le conduire à l'hôtel de ville;
en route il Voulut le couvrir de son chapeau ;
mais Delaunay ne souffrit pas qu'il s'exposât pour
lui. Lorsqu'ils arrivèrent sur la place de Grève,
le peuple se rua sur eux , enleva Delaunay des
mains de ses protecteurs, et le massacra sous
leurs yeux, malgré leurs efforts. Hulin et
plusieurs individus qui se signalèrent comme lui
dans la Journée du 14 juillet reçurent de la mu-
nicipalité de Paris, avec le titre de vainqueurs de
la Bastille, une petite médaille qui rappelait cet
événement. Le 8 octobre il fut promu au grade
de capitaine commandant de la 8 e compagnie de
chasseurs soldés. Il prit part aux grandes jour-
nées de la révolution. Cependant son zèle se
calma après la chute de la monarchie, et, devenu
suspect par sa modération , Hulin fut enfermé
sous la terreur : le 9 thermidor le rendit à la li-
berté. Il prit alors du service dans l'armée
d'Italie, et commanda à Nice ; en l'an in, à Klagen-
furth ; en l'an rv, à Milan; en l'an v, à Ferraré,
Il se trouvait à Paris à l'époque du 18 brumaire
(novembre 1799), avec le grade d'adjudant
général qu'il avait reçu depuis quelques années
du général Bonaparte , et eut une large part au
succès de cette journée. Revenu en Italie, il
contribua efficacement à la défense de Gênes
en l'an vin (1802). Envoyé auprès des con-
suls, il suivit Bonaparte à l'armée de réserve.
Après la bataille de Marengo, il commanda de
nouveau la place de Milan. Chef d'état-major de
la division Richepanse en Fan vin, officier
supérieur du palais en l'an rx, et chef de l'état-
major de la division Rivaud en Espagne en
l'an x, Hulin reçut du- premier consul, le 27
messidor de cette année (16 juillet 1802), l'ordre
de se rendre à Alger avec une mission secrète
auprès du dey. Sa mission réussit complètement.
En Tan xii (1804), il fut promu an grade de
général de brigade, et reçut le commandement
des grenadiers à pied delà garde consulaire. Le
29 ventôse de la même année ( 20 mars ), il hit
désigné par Murât, gouverneur de' Paris, pour
présider la commission militaire à laquelle un dé-
cret du premier consul ordonnait de juger le duc
d'Enghien ( voy. ce nom). De la brochure publiée
•plus tard par le général Hulin il résulte que les
membres de la commission allèrent à Vincennes
sans savoir de quoi il s'agissait; qu'ils condam-
nèrent le prince à mort parce que celui-ci avoua
qu'il avait porté les armes contre la France , et
déclara que sa naissance et ses opinions le ren-
daient l'ennemi du gouvernement établi, tout
en se défendant d'avoir trempé directement ou
indirectement dans aucun complot contre la vie
du premier consul, avec qui il désirait avoir une
entrevue. La commission rendit un jugement in-
forme, ordonnant l'exécution immédiate, juge-
ment qu'elle rectifia dans une seconde rédaction,
laquelle portait seulement quele jugement serait lu
de suite au condamné et expédié à diverses auto-
rités ; et pourtant les juges, retenus dans le château
fort, n'en sortirent qu'après avoir entendu une
détonation qui leur annonçait que leur sentence
était exécutée et rendaitainsiinutileles démarches
que Hulin comptait faire en faveur du condamné.
Il avait aussi voulu écrire au premier consul
pour lui exprimer le vœu du prince et du conseil;
mais le duc de Rovigo ( voy. ce nom ) lui avait
arraché la plume des mains en lui disant :
« Votre affaire # est finie; maintenant cela me
regarde. »
Promu la même année au grade de comman-
dant de la Légion d'Honneur, Hulin fut envoyé en
1805 à la grande armée et chargé du commande-
ment de Tienne après la prise de cette ville.
L'année suivante il fit la campagne de Prusse, et
à la fin de la guerre il reçut le commandement
de Berlin. A son retour à Paris il fut nommé
général de division le 9 août 1807, avec le com-
mandement de la l re division militaire. Créé
comte de l'empire en 1808, il fût pourvu en 1809
d'une dotation de 25,000 fr. sur le domaine de
Hayen en Hanovre. Pendant la guerre de Russie,
le général Hulin se trouvait le chef de la force
armée à Paris lorsque le général Malet («09. ce
nom) conçut l'audacieuse entreprise de ren-
verser le gouvernement impérial (24 octobre
1812). II avait déjà fait arrêter plusieurs per-
sonnages importants lorsqu'il s'adressa au gé-
néral Hulin. Celui-ci, moins crédule, l'ayant in-
vité aie suivre dans son cabinet, Malet lui tin
à bout portant un coup de pistolet qui lui fr&*
eassa la mâchoire inférieure, puis il se sauva à
l'état-major, où il fut arrêté. Cette affaire valut
à Hulîn le surnom populaire de Bouffe la Balte.
Il conserva le commandement de Paris, fut créé
grand 'eroix de l'ordre de la Réunion le 3 avril 1 813,
et, an mois de mars 1814, il conduisit à Blois
l'impératrice régente Marie-Louise , lorsque les
473
HULIN — HULL
474
alliés approchaient de la capitale. Le 8 avril suivant
après l'abdication de Napoléon, il adressa au
prince deTalieyrand son adhésion au changement
de régime dans les termes suivants :.« Dégagé
maintenant du serment de fidélité que nous avons
prêté à l'empereur, mon état-major et moi nous
nous empressons d'adhérer aux mesures prises
par le gouvernement. Mes principes sont inva-
riables; je me dois à la patrie avant tout. Per-
suadé que le nouvel ordre de choses ne s'éta-
blit que pour son bonheur, je prie Y. A. S. de
vouloir bien être l'organe de mes sentiments pour
la chose publique et de mon dévouement pour
notre nouveau souverain. » Hulin n'en perdit pas
moins le commandement de Paris et toutes ses
fonctions; mais le retour de Napoléon, Tannée
suivante, le remit à la tête de la force publique
de Paris, jusqu'à la seconde restauration. Banni
par l'ordonnance du 24 juillet 1815, il fut arrêté
au mois d'octobre dans le département de l'Ain,
amené à Paris, conduit à Cosne, et enfin l'ordon-
nance du 17 janvier 1816 le força à quitter la
France. Il se retira en Belgique et de là en Hol-
lande. Il paraissait fixé dans ce pays, lorsque l'or-
donnance du 1 er décembre 1819 lui rouvrit les
portes de la France. Rentré dans sa patrie, il resta
quelques années dans une propriété située dan3
le Nivernais, puis dans une terre située à La
Queue-en-Brie ( Seine-et-Oise), où ri vécut dans
la retraite. 11 perdit bientôt la vue, et revint à
Paris finir son existence, laissant ses titres et sa
fortune à son neveu et fils adoptif, M. Henri Hulin,
officier de l'armée d'Afrique. Le duc de Rovigo
ayant publié en 1823 un extrait de ses Mémoires
dans lequel, voulant se justifier d'avoir sciem-
ment et directement concouru à l'enlèvement et
à la mortdu ducd'Enghien, il établissait que tout
avait été calculé et mis à exécution par ïalleyrand,
alors ministre des affaires extérieures , le général
Hulin fit de son côté paraître : Explications
offertes aux hommes impartiaux au sujet de
la commission militaire instituée en Van xii
pour juger le duc d'Enghien; Paris, 1823,
in-8°. J. V.
» Arnault, Jay, Jooy et Norvins, Bioçr. nouv. des Con-
temp. — Rabbe. "Vieilh de Boisjolla et Sainte-Preuve,
Bioçr. univ. et portât des Contemp. — C. Maillé,
Bioçr. des Célébrités militaires des armées de terre et
de mer de 1789 à 1850. — Diet. de la Couvert. — Chateau-
briand, Mémoires d'outre-tombe, 4* volume.
* hpll ou hulls ( Jonathan ) , mécani-
cien anglais du dix-huitième siècle, sur la vie du-
quel nous ne savons rien et que nous ne trou-
vons dans aucune biographie anglaise , mais à
qui Ton a attribué la première idée de la sub-
stitution des roues à aubes mues par la vapeur
aux rames mues à bras d'hommes pour faire
marcher les bateaux, et la transformation du
mouvement de va-et-vient en mouvement cir-
culaire à l'aide d'une manivelle. Jonathan Hull
a consigné ses. découvertes dans un livre dont
voici la traduction du titre : Description et
figure d'une Machine nouvellement inventée
pour amener les navires el'les vaisseaux dans
les rades , les ports et , les rivières > ou pour
les en faire sortir contre le vent et la marée,
ou par un temps calme; à V occasion de la-
quelle S. M. Georges II a accordé des lettres
patentes mu profit de l 'auteur, qui en jouira
l'espace de quatorze ans; Londres, 1737.
« Quoique M. Jonathan Hull n'ait rien fait de
nouveau dans la construction de la machine
atmosphérique elle-même, dit M. R. Stuart, nous
ne devons pas moins mentionner son nom avec
tous les éloges qui lui sont dus pour avoir le pre-
mier proposé l'application des roues à aubes qui,
mues par la vapeur, servent à faire marcher les
vaisseaux , en remplacement des voiles poussées
par le vent. Il fallait, pour arriver à ce résultat,
convertir le mouvement rectiligne de va-et-vient
de la tige du piston en un mouvement de rota-
tion continue. Or c'était, disait-il très-ingénieu-
sement, ce qu'il était facile d'effectuer au moyen
d'une manivelle. 11 n'y a en effet que cette inven-
tion qui ait rendu la machine à vapeur appli-
cable, comme force motrice, à toute espèce de
machine. Hull ne put réussir à faire goûter son
projet du public, et son application de la mani-
velle tomba tellement dans l'oubli que, quarante
ans après, lorsqu'il en fut de nouveau question,
un brevet d'invention fut accordé à celui qui fit
revivre ce projet, et l'honneur de la découverte
réclamé par* le célèbre Watt, qui sans doute
ignorait qu'elle appartint à Hull. » Brewster
réduit à peu de chose le mérite de Hull : « Nous
ne regardons point, dit-il, comme une inven-
tion la substitution de la force des chevaux ,
de la vapeur ou de l'air échauffé à celle des
bras , car il nous faudrait alors admettre les pré-
tentions d'une foule de gens qui réclameraient
à l'envi l'honneur d'avoir employé la machine à
vapeur à battre le blé. Or, quand, en 1736, M. Jo-
nathan Hull proposa de faire l'application de
cette dernière force au vaisseau remorqueur, il
n'eut point d'autre mérite que de la substituer
à celle des bras; sa proposition ne portait nul-
lement le cachet du génie inventif, et le méca-
nisme qui convertissait le mouvement alterna-
tif du piston en mouvement de rotation des roues
à aubes est aussi grossier qu'imparfait. » Hull
avait prévu cette objection , car il disait dans son
livre : « Que si l'on me refuse le mérite d'une
nouvelle invention, parce que je n'aurais fait
qu'appliquer à ma machine la même force que
d'autres ont vu employer à d'autres usages , je
dirai que l'application de cette puissance n'est
autreque celle d'un instrument ordinaire ou connu
pour arriver mécaniquement à un résultat, qu'il
n'a pas jusque-là servi à obtenir. » Arago a re-
vendiqué pour Papin l'application de la vapeur
à la navigation. L'ouvrage de Jonathan Hull « ren-
ferme, dit-il, 1° la figure et la description de
deux roues à palettes placées sur l'arrière du
bâtiment : l'auteur voulait substituer ces roues
aux rames ordinaires; 2° la proposition de faire
475
HULL — HULLMÀNN
476
tourner les axes des roues à l'aide de la machine
de Newcomen, alors bien connue , mais employée
seulement, d'après les propres expressions de
Hull peur élever de l'eau à l'aide du feu ». Le
savant secrétaire perpétuel de l'Académie des
Sciences rappelle que Papin (voy. ce nom) a
proposé dam son recueil de 1696 de faire mar-
cher les bateaux à t'aide de roues drculaires au
moyen des pistons à vapeur qu'il avait imaginés,
comme il avait vu un appareil de cette espèce,
mu par des chevaux, faire marcher une barque
du prince Robert. * Papm a donc proposé, dans
un ouvrage imprimé, dit Arago, de faire marcher
les navires à l'aide de la machine à vapeur, qu*-
rant*deux ans avant Jonathan Huil. » Papm
s'était en outre occupé de la transformation du
mouvement reetiligne en un mouvement de ro-
tation continu, et pour cela il employait des
espèces de crémaillères formant l'extrémité des
pistons et qui s'engrenant à des petites roues
dentées, affermies sur les essieux des roues a
aubes, les faisaient tourner. « Le procédé que
Papût indique , dit encore Arago, pour trans-
former le mouvement reetiligne du piston en un
mouvement de rotation continu , n'est pas infé-
rieur, Je crois, à celui du mécanicien anglais;
car dans ce dernier les roues attachées à l'axe
principal et les roues à palettes ne communiquent
entre elles que par des cordes. » — * Si l'on s'en
rapporte aux dessins qui nous restent, dit M. Fi-
guier, le bateau de Jonathan Hull était de la dis-
position la plus grossière; il ne portait qu'une
seule roue qui, fixée à l'arrière, était mise en
mouvement par une machine de Newcomen à
l'aide de cordes et de poulies; il ne présentait ni
mâts ni voiles, et l'on ne voyait sur le pont que
le long tuyau de tôle servant de cheminée à sa
chaudière. Ce n'était donc qu'un simple remor-
queur dans lequel ta machine à vapeur rempla-
çait le cabestan ou le câble. Mais la machine de
Newcomen ne pouvant produire commodément
un mouvement de rotation, et l'irrégularité de son
action mécanique autant que la quantité consi-
dérable de charbon qu'il aurait fallu prendre à
bord du remorqueur pour alimenter la chau-
dière, rendait impraticable le projet de Jonathan
Hull, qui ne tarda pas à tomber dans l'oobH. »
L. LotJVET.
. Brcwster, Mécan. de PérÇuXbk, toi. ïf, p. m. -.
R. Stuart, ffist. de te Macktim à Fl^mr. - Arago, No-
tice sur la Machine à Vapeur jtom V Annuaire du Bur.
des Ijmg. pour 1837, p. Î84. — Quaierly Review, 1818,
tome XIV, p. 85* et 385. - Figuier, Espos. et Hist. des
princip. Découvertes scienHfiqms, tome i, p. «♦.
hull (***), général américain, né vers 1770,
mort en 1825. Les premières années de sa vie
sont peu connues ; on sait seulement qu'il se mit
dès 1788 dans les rangs des yankees et monta
rapidement au grade de général. En Ifllî, à la
tête d'un corps de 2,500 hommes, composé de
quatre régiments des milices de t'Onio et do
Michigan, il entra dans le haut Canada avec
l'intention de taire soulever cette contrée contre
la domination britannique. Il s'empara de San-
disiek, et parvint jusqu'à Moraviutown ; mais ces
rapides sucoèe furent bientôt suivis de revers.
Dans ses proclamation» il déclara' que nul ne
pouvait rester indifférent dans une lutte qui
avait pour but la liberté et l'indépendance s « Je
viens* disait-il^ vous délivrer de l'oppression des
Anglais i ee sont nos ennemis et les vôtres; au-
cun de ceux qui se trouveront à coté d'un Anglais
ou d'un Indien ne sera mit prisonnier s la mort
sera sur le champ son partage. » Un langage
aussi violent lit tourner contre lui tous les gens
modérés , et après quelques engagements , il fut
rejeté sur la rivière du Canard. Il se retrancha
dans le fottdu détroit, où legénéral anglais Brock
vint l'assiéger le 15 août 1812. Trois jours
après , Hull se rendit à discrétion, et Hvra son
artillerie (trente-trois pièces). Traduit en 1814
devant une eour martiale, su conduite fut sévè-
rement appréciée et depuis lors il n'a rempli
aucune fonction militaire. A. de L.
BU#r«*hie mmêlle de* Contemporains (MB).
hull( Thomas ), pogte anglais, né à Londres
en 1728, mort en 1808. Après avoir joué pen-
dant quelque temps sur des théâtres de pro-
vince, il fnt engagé à Govent-Garden. Sans être
un acteur remarquable, il entendait bien la théorie
de son art Comme poète il ne s'éleva pus au-
dessus du médiocre, et sa prose, quoique on peu
meilleure que ses vers, n'obtint jamais qu'un
succès de circonstance, il composa ou arrangea
dix-neuf pièces. Parmi fies autres ouvrages on
remarque Richard Plahtagenet, légende; 1774,
in«4° ; — Moral Taies in «erse ; 1797, 2 vol.,
in-8*. .Z.
BioçrapMu Dramatieat,
■ULLIN DE BOISCflWVALLIBR (LoutS-Jo-
seph), historien français, né le 18 janvier 1742,
mort à Paris, le 24 mars 1823. Employé dans
diverses administrations financières, il devint
conseiller référendaire de première classe à la
cour des comptes à sa formation, eul 807.. Après
quelques années d'exercice, il fut admis à la
retraite avec le titre de conseiller référendaire
honoraire. On a de lui : Répertoire ou alma-
nach historique de la Révolution française,
depuis l'ouverture de la première assemblée
des notables, le 22 février 1787, jusqu'au
1 er vendémiaire an K(22 septembre 1796);
Paris, 1797-1803, 5 parties io- 12 ; — Répertoire
historique de V Empire français , depuis le 'ré-
tablissement du culte et la paix d'Amiens
jusqu'au traité de TUsitt , faisant suite au
Répertoire ou almanach historique de la
Révolution française, 6 e partie; Paris, 1807,
in- 12. Chaque volume est terminé par une table
alphabétique des personnes et des matières.
Hullin a laissé quelques autres ouvrages manus-
crits. J.-V.
Rabbe, Vieilli de-Boisjolin et Sainte -Preave, Biogr.
univ. et portât, des Contemp.
HULLIN. foy. HULIN.
hullmann (Charles- IHetrich) , histo-
477
HULLMANN ~ HULOT
47»
rien allemand, né ca 1765, à Erdeborn, mort
à Bonn, le 12 inaro i«é6. Il fut professeur à
Bonn, et publia entre antres: Deutsche Fïnanir
gesehichte des Mittelalters (Histoire des Fins*
ces allemandes au moyen Age); Berlin, 1805;
— Gesehiehte des Ursprungt der Régalien in
Deutschland (Histoire de l'Origine des Droits
de Régale en .Allemagne); Francfort, 1806; -~
Geschichte des Ursprungs der Staende in
Deutschland (Histoire de l'Origine des États en
Allemagne); Francfort, 1606*1*08,3 vol.;
2 e édit. augmentée; Berlin, 1880 ; — GeschicMê
des byzantinischen Handels (Histoire du Com-
merce byzantin ) ; Francfort , 1808 ; Cologne ,
1818; — Staaisrecht des Alterthums (Droit
public de l'antiquité); Cologne, 1820 ; — Staed-
tewesen des Hittelalters (La Municipalité au
moyen âge); Bonn, 1825-1829, 4 vol. ; — Urs-
prànge der Kirchenverfassung des Mittelal-
ters ( Origines de la Constitution ecclésiastique
du moyen Age) ; Bonn, 1831 ; — Staatsverfas-
sung der Jsraeliten ( La Constitution de l'état
des Israélites); Leipzig, 1834; — Urspruenge
der roemischen Verfassungen (Origines des
différentes Constitutions de l'Empire Romain);
Bonn, 1835; — Jus pontificum der Roemer;
Bonn, 1837 ; — Handelsgeschichte, der Grie-
chen ( Histoire du Commerce des Grecs) : ou-
vrage estimé; Bonn, 1639» R. L.
Conv.-Lex.
hcllock (Sir John), Jurisconsulte anglais,
né à Barnard-Castle ( comté de Durham ), en
1764, mort le 31 juillet 1829. Avocat distin-
gué, et connu par de savants ouvrages de juris-
prudence , il fut nommé avocat de la couronner
(sergeunt at law) en 1816, et baron de la cour
de l'échiquier en 1823. Il mourut du choléra
pendant une tournée judiciaire. On a de lui ;
The Law ofcosls; 1792, in-8°; — The Law o/
cosls in civil actions and criminal procee*
dings; 1797, in-8°; 1810, 2 vol., in-8°. Z.
Rose, New général Bi$g. Diction.
iiJM>T ( Henri), jurisconsulte français, né
en 1732, à Paris, y est mort en 1775. Il fut reçu
avocat au barreau de Paris en 1753 ; mais, sans for-
tune et peu connu, il fut obligé de chercher des
ressources en donnant des leçons à des étudiants
en droit. Le conseil de Tordre des avocats
trouva ce genre d'occupation peu compatible
avec la dignité de l'avocat. Vainement Hulot se
défendit dans un mémoire qu'il publia, il fut
rayé du tableau. Il imagina alors d'entreprendre
une traduction des Pandectes de Justinien, dont
il n'existait encore que des traductions partielles.
Plusieurs légistes distingués de l'époque, entre
antres Potbier, approuvèrent ce projet; mais,
en 1764, au moment de faire imprimer son ou-
vrage, fruit de vingt années de travail , pour le-
quel il avait 1,500 souscripteurs, et quoiqu'il eût
obtenu le privilège des censeurs, il rencontra
des entraves et des obstacles qu'il n'avait pas
prévus. C'était le temps d'un attachement servile
aux préjugés aveugles et des erreurs de tra-
dition : la faculté de Droit de Paris, dont Hulot
cependant était membre, voulait faire de la
science des lois romaines un mystère, une sorte
de propriété à laquelle seule elle pouvait tou-
cher* elle craignait que cette traduction ne
nuisit à ses intérêts , à ses prérogatives) «I elle
parvint à faire révoquer le privilège. Hntot, qui
avait mis tout mm espoir dans l'ouvre a laquelle
il avait donné ses soins, rot découragé ; consu-
mé par le chagrin et le travail, il moorot à peine
âgé de quarante-trois ans. En 1782, son (H!*
essaya défaire paraître la traduction du Digeste,
et en obtint un nouveau privilège ; mais la Faculté
de Droit intervint de nouveau et eut encore*
le pouvoir d'empêcher l'impression. Enfin , en
1803, les libraires Behmer et Lamort, de Meta,
ne trouvant plus de difficultés pour publier cette
traduction, la firent paraître sons ce titre ? Cin-
quante Livres dn Digeste on des Pandectes
de Vempereur Justinien; Meta, 1803 à 1805,-
7 vol. in-4* en 35 vol. in-12. Les quarante-
quatre premiers livres sont traduits par Hotot,
les six antres par Berthelot. L'ouvrage a eu plu-
sieurs éditions. Guyot ne Feue.
Discours préliminaire, en tête de la traduction des
CtaqumnU Uvres Ou DtgesU.
*mlot (iV ), mécanicien français, né
vers 1715, mort è Paris en 1781. Il fut un des
plus nanties artistes en son genre. Ce n'était pas
un simple ouvrier, comprenant l'importance de
sa profession, il apprit les mathématiques, la
statistique, et une foule de procédés de «feinte
pratique pour former des alliages, teindre le»'
bois , tes os , l'ivoire , tremper l'acier, composer
des mastics. Hulot, d'une adresse supérieure/
porta l'art du tour à son pins haut degré de per-»
fectien, comme on en peut juger par les nom-
breuses machines qu'il exécuta , telles que tours
à guillocher, à portrait, etc. Il fournissait aux
horlogers des plate-formes pour fendre leurs
roues d'engrenage, et pour donner à ees machi-
nes tonte la précision possible, il avait «onstrnft
en bronze un diviseur original de deux mètres
de diamètre. Il rédigea VArt dm Tùurnenr mé-
canicien, l re part., Paris, 1775, in-fol., avec 44
planches, pour la Description des arts et» mé-
tiers faite ou approuvée par messieurs de l'A-
cadémieroyale des Sciences; la 2 e partie n'a pas
paru. Cet ouvrage, dédié au comte d'Artois, est
précédé d'une introduction dans laquelle l'auteur
prouve que presque toutes les professions indus-
trielles ont plus ou moins besoin de recourir à
l'art du tourneur pour donner la grâce , le fiai ,
la précision à certaines parties de leurs travaux.
Vient ensuite un abrégé de géométrie pratique
et de statique. Le chapitre II contient une no-
tice sur les bois, l'écaillé, l'ivoire, les os, et
autres matières que les tourneurs recherchent
de préférence; car il n'y a pas de matière à l'état
solide qui ne puisse être façonnée au moyen du
tOUr. TEYSSiftKE
479
HULOT — HULSZE
480
» DcmmctU, Us Siècles littéraires de to Frime*. ~
Qoérard, La fronce Littéraire.
hulot (Henri- Louis), théologien français,
né le 1 er mare 1757, à Avenay (Champagne),
mort le 1 er septembre 1829. Il fat professeur de
théologie au séminaire et à l'université de Rouen.
Il occupa cette dernière chaire avec distinc-
tion jusqu'en 1791, époque où il fut obligé de
s'exiler pour fuir les persécutions. Réfugié à
Gand, il y remplissait les fonctions de grand-
vicaire, lorsque l'entrée des Français dans les
Pays-Bas, en 1794, le força de s'éloigner. Il alla
habiter successivement Munster, Erfurt, Dresde,
Augsbourg. Lorsqu'il put rentrer en France, il
rat nommé curé de la paroisse d'Avançon, près
Chàteau-Porcien; puis d'Attigny (Ardennes).
Après vingt ans de travaux assidus dans cette
paroisse, il devint chanoine, enfin grand-vicaire
et officiai à Reims. On a de lui les écrits sui-
vants : Lettre aux Catholiques de Reims (en
latin et en français); Gand, 1793, in-8°; —
Lettre des Prêtres français à VÉvéque de
Gand (rédigée par Hulot et signée par 188 ec-
clésiastiques qui exprimaient à ce prélat leur
reconnaissance); — Collection des Brefs du
pape Pie VI; Augsbourg, 1796; — Lettres à
M. Schrofenberg, évéque de Freysingue et de
Ratisbonne, en faveur des prêtres français;
1796, in-8°; — Récit de la Mort de M. Mu-
sart, curé de Somonevesle (en latin, français
et allemand), 1797; — État des Catholiques
anglais; 1798, in-8°; — Salisburgensis cu-
jusdem religiosi (l'augustin Jan Rider) dé-
lecta Castigatio 9 seu vindicte cleri gallicani
exulis; 1800, Uv8°; cet ouvrage valut à l'au-
teur un bref très-flatteur du pape Pie VII; —
Lettre à un professeur d'Allemagne (Brigald,
professeur à Wurtzbourg ) ; 1801 , in-8° ; — Gai-
licanorum Episcoporum Dissensus innocuus ;
1801, in-8°; — Sur les Antiquités d'Attigny,
extrait d'un grand travail; — Sedis apostolicœ
Triumphus, seu Sedes apostolufa, protectore
Deo, semper invicta; Laon, 1836, in-8°. Il a
laissé manuscrits quelques ouvrages dé contro-
verse et des sermons. G. de F.
VAmi de la Reliçion, année 18». — Feller, Dict. Hist.
* hulphbhs (Abraham- Abrahamson), voya-
geur et archéologue suédois , né à Westeras, le
27 novembre 1734, mort en 1797 dans la même
ville, où H était commerçant. Il voyagea en Da-
nemark et en Russie et fit plusieurs excursions
scientifiques dans sa patrie. On a de lui : Besa
igenom stora Kopparbergs hœfdingdœme och
Dalame (Journal d'un Voyage dans la province
de Stora Kopparberg et la Dalécarlie); Weste-
ras, 1762 ; — Historick afhandling om Musik
og Instrumenter (Traité historique sur la Mu-
sique et les Instruments musicaux , avec une
notice des orgues de la Suède) ; ibid., 1773 ; —
Samlingar till en beskrifning cefver Norr-
land ( Collections pour une Description du Norr-
land); ibid., 1771-1789, 5 part. in-8°; —Sam»
Ungar'till m beskrifning œfver Gefieborgs
lân (Collections pour une Description de la pro-
vince de Gefleborg ou Gestrikland ) ; ibid ., 1793 ; '
ouvrages exacts, précis et détaillés; — Sam-
ling till korta beskrifning œfver svenska
stmder (Collections pour une Description abrégée
des villes suédoises), 1. 1, Westmanland,\\sA.,
1778; t. D, Sœdermanland, ib., 1783; t. III.
Westerbotten, ib., 1*797 ; — des poésies de peu
de valeur. E. B.
W esteras Stiftstidning, 1798. — AUmxnna Tidnin-
gar, 17W, a» 18. - Biooraphiskt Lexicon, VI, M7.
hulst (Pieter\kn der), surnommé Sol-
siffe (tournesol ), peintre hollandais, né à Dort,
le 18 février 1652, mort en 1708. Après avoir
étudié sous divers maîtres, il se rendit à Rome,
et, charmé du talent de Mario di Fiori, se con-
sacra à la peinture des fleurs, des plantes, des
fruits. La bande académique le surnomma Sol-
siffe (tournesol) parce qu'il est rare que cette
fleur ne se retrouve pas dans chacune de ses
compositions. H y introduisait souvent aussi des
reptiles. Ses ouvrages sont d'une bonne couleur,
d'une touche large et facile; ils sont moins
finis que ceux de Mignon et de Van Heem , mais
il y règne plus d'originalité et un mouvement
assez rare chez les peintres hollandais. Van
Hulst a peint aussi quelques portraits, mais ils
sont sans couleur et sans harmonie. A. de L.
Jakob-Campo Weyerman et Houbraken, De Sehilder
honst der Ntderlanders, t. III, p. 168-168. — Descamps,
La Fie des Peintres hollandais, t. II, p. 868. - Pllktag-
ton, Dietionarp of Pointer».
î hulst ( Félix-Alexandre van ), écrivain
belge et avoeat à la cour supérieure de justice
de Liège, né à Fleurus (Hainant), le 19 février
1799. Ses principaux ouvrages sont : Vie de
quelques Belges : Philippe de Comines, Car-
lier, Fassin, Ramone t, Lambrechts, Jeordon,
Plasschœrt ; Liège, 1841, in-8 ;— Mélanges:
littérature, économie politique, instruction
publique, archéologie, etc.; Liège, 1843,
grand in-8°. Hubert Goltzius, C. Plantin,
Ab. Ortélius ; Liège, 1 84 6 , in-8°, avec portraits ;
— Charles de Langhe et ses amis. P.*.
MM. Aimé Leroy et Arthur Dlnaax, archives hist. et
littéraires du nord de la France et du midi de la Bel-
gique; Valenclennes, 18**, ln-8° ; nouvelle série, totn. V,
p. 488 et 88*.
£ hulsze {Jules - Ambroise) > mathémati-
cien allemand, né à Leipzig, le 2 mai 1812. Il
est depuis 1850 chargé de la direction de l'École
Polytechnique de Dresde, et a publié, entre
autres : Allgemeine Maschinenencyklopàdie
( Encyclopédie générale des maehines ) ; Leipzig,
1839-1844, 2 vol.; — Die Polytechnische
Schule zu Dresden wâlvrend der ersten
f&nf und zwanzig Jahre ihres Wirkens
( L'École Polytechnique de Dresde pendant les
premiers vingt-cinq ans de son existence 1;
Dresde, 1853; etc. Depuis l835M.Hulsze est
un des principaux collaborateurs i du journal
481 HULS2E — HUMANN
scientifique intitulé : Polytechnisches Central-
blatt. R. l.
Conv.-Lex.
482
hulthem ( Charles - Joseph - Emmanuel
vak), hibliophile belge, né à Gand, le 4 avril
1764, mort dans la môme ville, le 16 décembre
1832. H fit ses études classiques au collège des
Augustins de sa ville natale, étudia le droit à
Louvain, et fut nommé, en 1789, membre de la
Collace (1) de Gand. En l'an v (1797) il fut
envoyé par le département de l'Escaut au Con-
seil des Cinq Cents, et, de 1802 à 1807, il fit
partie du Tribunat. Bien qu'il eût voté à Gand
contre le projet de conférer au général Bonaparte
la dignité impériale, van Hulthem était au mo-
ment de la chute de l'empire français recteur de
l'académie de Bruxelles. Après la création du
royaume des Pays-Bas , il devint greffier de la
seconde chambre des états généraux, secrétaire
perpétuel de l'Académie royale de Bruxelles, et
successivement curateur de l'université de Lou-
vain et de celle de Gand. Il se démit en 1817
de la première de ces fonctions, et en 1821 de
celle de secrétaire perpétuel de l'Académie.
Possesseur d'une assez grande fortune, van
Hulthem avait formé une nombreuse collection
de livres et de manuscrits relatifs surtout à
l'histoire et à la littérature de son pays, et dont
le catalogue méthodique, rédigé par A. Voisin,
bibliothécaire de la ville de Gand, a été publié
sous le titre de Biblxotheca Hulthemiana;
Gand, 1836, 6 vol. iu-8°. Acquise par le gou-
vernement belge au prix de 279,400 francs, elle
forme aujourd'hui l'un des fonds de la Biblio-
thèque royale de Bruxelles (.2).
Van Hulthem,. qui était fort érudit, et dont la
mémoire était remplie de faits ignorés, n'a livré
à l'impression que des articles insérés dans les
journaux de Bruxelles et de Gand et des dis-
'cours prononcés dans des cérémonies publiques,
notamment un Discours sur VÉtat ancien et
moderne de V Agriculture et de la Botanique
dans les Pays-Bas; Gand, 1817, in-8°. Colla-
borateur de l'édition des Annales d'Oudegherst,
publiées par J.-B. Lesbroussart, il lui a fourni
des lois, des chartes et des traités de paix tirés
de sa bibliothèque. Il a laissé sur les feuilles de
garde de ses livres environ dix-huit cents notes
précieuses sur l'histoire, la bibliographie et la
littérature des Pays-Bas. Enfin, il a fait des addi-
tions nombreuses à la Bibliographie historique
des Pays-Bas commencée par Ermens, en
8 vol. in-fol., manuscrits; à la Biblxotheca Bel-
gica de Çoppens; aux Mémoires de Paquot; à
YOnomasticon de Sax ; et à d'autres ouvrages,
imprimés ou manuscrits, relatifs à la Belgique.
E. Regnard.
(1) Conseil de la ville.
(») Le Catalogue des Tableaux, dessin», gravure*, etc.,
de van Hulthem, Gand, 18tt. in-8°, comprend 5,336 ar-
ticles, souvent composés de plusieurs pièces.
NOCV. BIOCK. CÉNÉR. — T. XXV.
annuaire de VAcad. roy. des Sciences et Belles-Lettres
de Bruxelles, année 1835, p. loi. — De Retffenberg, No-
tice sur M. van Hulthem ; dans le Bulletin du Biblio-
phile, «• série, 1856-1887, p. 386. — A. Voisin, Notice sur
Ch. van Hulthem; en tête du 1 er vol. de la Bibliotheca
Hulthemiana. — Camus, roy âge dans les Départements
nouvellement réunis, t. H, p. iî5. — Prospectus et Dé-
dicace aux États de Flandre de l'édition des Annales
d'Oudegberst donnée par J.-B. Lesbroussart.
humann (Jean-Georges), financier français,
né à Strasbourg, le 16 août 1780, mort à Paris, le
25 avril 1842. Après avoir acquis promptement
une grande fortune dans les opérations commer-
ciales et, dit-on, par la contrebande, il s'adonna
tout jeune encore aux affaires publiques. Élu suc-
cessivement au tribunal de commerce et à la
chambre de commerce de Strasbourg, puis au
conseil général et enfin à la chambre des députés
en 1820, il se rangea dans l'opposition libérale. Il
fut l'un des 221 signataires de l'adresse qui amena
la dissolution de la chambre en 1830. Distingué
par ses travaux et ses nombreux discours dans
les discussions sur le budget, au choix du nou-
veau gouvernement, il remplaça, en 1832, le
baron Louis au ministère des finances , et dirigea
cette administration jusqu'au 11 janvier 1836.
Nommé pair de France l'année suivante, il rentra
aux affaires avec le cabinet du 29 octobre 1840.
Comme administrateur, Humann a suivi sans
y rien changer le plan adopté depuis 1816. Il
ne croyait au développement de l'industrie fran-
çaise que sous la protection des tarifs. Il pen-
sait aussi que le pouvoir doit tendre à abaisser
les charges publiques, non par la réduction des
impôts, mais en amenant, par de grandes en-
treprises d'utilité générale, l'accroissement suc-
cessif des revenus individuels. Lorsqu'il prit
pour la seconde fois la direction des finances,
la situation venait de se trouver sérieusement
compromise en quelques mois par des inquié-
tudes, des embarras politiques et des travaux
extraordinaires. Le déficit avait été inopinément
élevé de plusieurs centaines de millions. On dut
contracter un emprunt, et le ministre, en vue
d'accroître les revenus, ordonna un recense-
ment général de la propriété immobilière. Cette
opération, devenue célèbre par la rumeur qu'elle
excita dans le parti de l'opposition et par les
troubles qui en furent les conséquences en pro-
vince, révéla pourtant l'existence de cinq cent
quarante mille propriétés qui ne payaient pas
l'impôt. Mais on reprocha au ministre la forme
blessante du recensement; on cita de lui un mot
qui devint une arme dans les mains des adver-
saires du pouvoir : « Il faut faire rendre à l'im-
pôt tout ce qu'il peut rendre! » énonciation
trop rigide et trop absolue, en matière d'impôt,
d'un principe de bonne administration. Du reste,
M. Humann partageait avec celte fraction d'hom-
mes politiques dont il faisait partie et qu'on ap-
pelait les doctrinaires cette inflexibilité d'idées ,
ce dédain de l'opinion qui devaient avoir une si
funeste influence sur le gouvernement de Louis-
Philippe. Esprit tenace, travailleur opiniâtre, il
16
483
HT3MANN — HUMBERT
484
apportait à la tribune une élocutfon plus solide
que brillante et dans la direction de ses bureaux
un rigorisme excessif. M. Humann mourut dans
son cabinet de travail par la rupture d'un ané-
vrisme et fut remplacé au ministère par M- La-
cave-Laplagne. A. Vicque.
Bajot, Chronologie Ministérielle; Paris, 1836, *• édi-
tion, in-8°. — Marquis d'Audlffret, Du Système finan-
cier de la France ,• Paris, 186», 5 voL ln-8».
humbert, cardinal français, né en Bourgo-
gne, mort vers 1063. 11 entra dans l'ordre de Saint-
Benoit , à Moyeo-le-Moutier, diocèse de Toul. Le
pape Léon IX, qui avait été évêqne de Toul, l'ap-
pela près de lui à Rome en 1049, et le cria arche-
vêque de Sicile, puis cardinal-évêque de Blanche-
Selve. Aucun Français, que l'on sache, n'avait
encore été honoré de la pourpre. Intimement lié
avec le pape et admis à tous ses conseils , le
cardinal Humbert fut envoyé en 1053 à Cons-
tantinople, en qualité de légat, pour négocier la
réunion de l'Église grecque, et de l'Église latine,
Victor II, successeur de Léon IX, lui témoigna
la même confiance. Il le nomma bibliothécaire
et chancelier, fonctions qu'il conserva sous
Etienne III et sous Nicolas U. A la mort de Vic-
tor II, il fut un moment question de l'élever au
suprême pontificat. On a de lui plusieurs ou-,
vrages , entre autres un traité contre les simo-
niaques, publié par dom Martène dans ses Aneç-
dota, et la relation de son voyage à Constanti-
nople. Ce dernier ouvrage, ainsi que deux écrits
polémiques dirigés contre l'Église grecque, ont
été imprimés plusieurs fois, notamment dans les
Annales Ecclesiastici de Baronius. A. L.
Histoire Littéraire de la France, — Auberi, Histoire
des Cardinaux français.
humbert, général de l'ordre de Saint-Domi-
nique , né à Romans, en Dauphiné, vers Tannée
1200, mort à Valence, dans la même province,
le 14 juillet 1277. Sa famille, qui jouissait de
quelque aisance, l'avait envoyé jeune encore
étudier à Paris les belles-lettres et le droit canon ;
il profita de son séjour dans cette ville pour
y suivre un cours de théologie, et pour assis-
ter assidûment aux prédications du célèbre do-
minicain frère Jourdan.On ajoute que le curé de
Saint- Pierre-aux-Bœufs se joignit au théologien
et au prédicateur pour détourner le jeune Hum-
bert de la voie que lui avait tracée l'affection
paternelle, et le décider à revêtir l'habit de
Saint-Dominique. C'est en 1224 , âgé d'environ
vingt ans, qu'Humbert quitta le siècle et se fit re-
ligieux. Ses études achevées , il fut envoyé par
ses supérieurs dans la ville de Lyon, où if expli-
qua l'Ecriture Sainte avec le plus grand succès.
Rn 1242 il fut élu provincial de Toscane; en
1244, provincial de France; en 1254, général de
l'ordre. Mais en 1263 il abdiqua cette haute
fonction , pour redevenir simple religieux dans
les maisons dominicaines de Lyon et de Valence.
On lui offrit en 1264 le patriarchat de Jérusa-
em ; mais il le refusa.
Ses œuvres répondent à sa vie. On n'y re-
marque pas, au point de we littérale* uiimirite
supérieur ; mais la plupart se recommandent par
leur utilité, et dans tontes se montre un esprit
simple et droit, ennemi de l'excès. Ce sont les
écrits d'un homme qui a conduit les affaires
d'nne grande corporation, plutôt que ceux d'un
régent ; ou d'un moine. Ils ont moins pour objet
d'orner ou même d'éclairer l'intelligence du
lecteur, que de régler la conduite de sa vie. N'y
cherchez pas de théorie : la pratique y est tout
On désigne d'abord : Officium Ecclesiasticum
universum tant noeturnum quarn dntrnum ,
I ad usum orâinîs Prxdicatorum. Ce titre n'in-
1 dique pas un traité, mais un recueil de pres-
| criptions liturgiques. Humbert n'en est pas à
1 proprement parler Fauteur, mais le compilateur.
! 11 est inédH. Nous mentionnerons ensuite :
1 Bocpositio super Èegulam Sancti Augustini.
1 Cette glose est fort longue. M. Daunou fa jugée
, fastidieuse, dépourvue de tout éclat, de toute
| originalité. C'est un jugement bien sévère. Nos
: anciens avaient, au contraire, une grande estime
1 pour cet ouvrage : non-seulement ils en ont
; multiplié les éditions séparées, mais ils lui ont
1 encore donné place dans le tome XXV de la
| Bibliothèque des Pères. A notre^avis c'est un
1 livre sagement composé et "un dés meilleurs
! manuels de morale ascétique. îl n'est pas même
sans quelque agrément, puisqu'on y lit des
; anecdotes racontées avec esprit et d'assez vives
j critiques des mœurs contemporaines. Ce qui
! manque surtout à maître Humbert , c'est Péru-
1 dition classique. licite quelquefois, il est vrai,
| Sénèque et d'autres latins ; niais il les cite les
j connaissant à peine, et sur là recommandation
i accidentelle -de quelque Pérè. Combien de fois
! son ignorance dé l'antiquité se trahit-elle par
d'étranges naïvetés! Voici rétymologïe qu'il pro-
I pose du mot templum : t Tèmpïom diciWr a
I Theos, quod est Deus , et platea , quasi Dei
! platea. » Cet exemple suffit; -— Expoiïtio
super Constitutiones'ordinis JfratmrA Prx-
; dicatorum. Cette exposition , qu'Hurnbèrt n'a
i* pas terminée, est inédite. Écbartf en désigne
i plusieurs manuscrits; — Liber de Fnstructwne
j Officialium ordinis Fratrum Prxdicatorvm,
, opuscule imprimé plusieurs fois, notamment à
i Lyon, en 1515; — ï>e Erudithhé Pracdicalo-
! rum. Cet ouvrage, quelquefois intitulé De Arte
; prœdicandî, a été inséré.dans la Bibliothèque
; des Pères, t. XXV. Le n° 1922 dés manuscrits dp
1 la bibliothèque deTrOyes l'attribuant à Humbert,
| abbé de ï*rulli, l'auteur du catalogue dé cette M-
blîothèque Te signale comme inédit, et s'étonne
! de ne pas le voir mentionné dans PÉrticle de
I V Histoire Littéraire qui concerne l'abbé Hum-
' bert. Que cette omission soit donc justifiée , et
| l'erreur du catalogue de Troyes corrigée ! ( Catal.
! des Mss. des départ., t. H, p. 793 ). — Liber de
Praedicatione Crucis. C'est un appel aux chré-
; tiens contre les infidèles. Humbert s'efforce de
i prouver l'urgente nécessité d'une croisade. Nous
485
HUMBERT
486
ne parions, toutefois, de ce traité que sur le
rapport d'Echard , car il est inédit et les exem-
plaires manuscrite en sont rares j — Liber de
his quai tractante, videbantur in concilia
generali Lugduni celebrando. Il s'agit du con-
cile conToqué dans la ville de Lyon par Gré-
goire X, en 1274. Hartène a publié quelques
extraits de cet ouvrage, dans son Thésaurus
Anecdot., t. VII, et c'est tout ce que nous en con-
naissons. Cela est certainement regrettable. Un
gros tivre composé sur un sujet aussi spécial
doit certainement, comme le présume M. Daunou,
contenir des renseignements utiles pour l'his-
toire; — VUaB. Dowinici. Cette vie de saint
Dominique n'a pas non plus été publiée; —
Epistolx. La plupart de ces lettres d'Humhert
ont été insérées dans V Année Dominicaine de
Souèges; — Epistola de Tribus Vûtis substan-
tialibus reltgiosorum ; dans la Bibliothèque
des Pères, t. JULV. C'est le même ouvrage
qui est intitulé : Epistola ad omues Religiom
de BssentiaUbus Religionis , dans le volume
165 <«*> du Sappi. latin de la Bibliothèque im-
périale. Tel est le catalogue des ouvrages au-
thentiques d'Humbert de Romans. On lui en
attribue quelques autres encore, mais qui doivent
être restitués , suivant les derniers critiques ,
a Gérard Frachet, à Guillaume Perrault, ou res-
ter, comme les manuscrits nous les offrent , ano-
nymes, jusqu'à ce que de plus certains témoi-
gnages en aient fait connaître les véritables au-
teurs. B. H.
Hist. Littéraire de la France. — Échard , ScHptores
Ordinis Pradicatorum. — Richard et Giraud, Biblio-
thèque Sacrée.
HUMBERT, abbé de PrulK, né à Gendrex, près
de Besançon, mort à Paris, le 14 mars 1298. Son
élection comme abbé de Prulli au diocèse de Sens
est du mots de juillet 1296 : il ne gouverna donc
Qas longtemps ce monastère. Nous n'apprenons
rien de plus sur sa vie. Ses ouvrages, tous iné-
dits , offrent quelque intérêt. Il faut désigner d'a-
bord ta commentaire sur la Métaphysique
d'Aristote, Sententiee super libros Metaphy-
sicx Aristotelis, dont on connaît trois manus-
crits, dans la bibliothèque de l'École de Médecine
à Montpellier, dans celle de Laon, et dans
celle de l'Arsenal, à Paris. Hnmbert a aussi com-
menté les Sentences de Pierre Lombard : Con-
clusiones super IV libros Sentêntiarum, parmi
les manuscrits des bibliothèques publiques de
Bruges, de Cambrai, de Charieville, etc., etc.
U avait aussi, suivant Charles de Viscb, com-
menté le Traité de l'Ame d'Aristote; mais ce
travail parait perdu. B. H.
Hist. LUtér. de ta France, t. XXI, p. 86.
BCMBEifT I er , dauphin de Viennois , mort
vers le 12 avril 1307, appartenait à l'ancienne
maison de La Tour-du-Pin. Ayant épousé Anne,
fille de Guigues VII, il hérita des États de ce
prince en 1281, après la mort de Jean I er (voy.
ce nom ), et fut la tige de la troisième race des
dauphins. Ce fut sous pumbert I er que les rois
de France commencèrent à s'immiscer dans les
affaires du Dauphiné. Au mois de décembre
1294, lors d'un voyage qu'il était allé faire à
Paris, Philippe le Bel le fit consentir à se re-
connaître vassal de la couronne moyennant
une rente annuelle de 500 livres. Pans le traité
signé à ce sujet , les deux princes se traitèrent
sur k pied de la plus complète égalité : le roi
s'engageait à secourir le dauphin, contre le
comte de Savoie, à le protéger même contre son
suzerain, l'empereur d'Allemagne, enfin à lui
fournir, au besoin, l'argent nécessaire pour mettre,
ses placer fortes en, état 4e défense; Humberf,
de son côté, promettait à Philippe le Bel de
lui amener des troupes poutre le foi d'Angleterre.
Ce traité, tout $ l'avantage d'Humbert, dont il
devait flatter la vanité , et sans intérêt réel et
actuel pour le roi de France, était un premier
pas dans cette voie d'intrigues et de manœuvres
qui devaient plus tord porter leqr fruit en amenant
la cession du Dauphiné en 1349. Humbert I er
eut pour successeur Jean II {voy, oe nom).
Valbqnnays, Histoire du Dauphiné et des princes qui
ont porté le nom de daupblnrf. — Claude de Rubys,
Histoire des Dauphin* et des ricomtes de Viennois.
— Trtcaut, Histoire des. Dauphins français. - André
Duchesne , Histoire généalogique des Dauphins. — Le-
quien de La Neuville, Histoire des Dauphins de Vien-
nois, d'Auvergne et de France. - Gava , Histoire généa-
logique des Dauphins. — Chronologie des Dauphins ,
dans X Art de vérifier les dates. — HUtoria' Delphino-
rum [ manuscrit de la Bibliothèque ' de Lyon ). — Mer-
cure d'avril 1711.- Histoire du Dauphiné par" Fontanteu
(manuscrit de la Bib.unp.). On trouve en tète dut* vol.
de cet ouvrage une savante disse nation sur l'origine et
les ancêtres de Guigues le Pieux. — A. Lanceidl, Re-
cherches sur Guy, dauphin; dans In Mémoires de VA-
caaémie des Inscriptions es Belles-Lettres, t. VI H.
RtTMBBsvr ii, né en 1313, mort à Clerraont
(Auvergne), le 22 mai 1355, succéda en 1333
a Guigues VIII, .son frère. Ce prince, à. qui on
doit la réunion du Dauphiné à la France, a été
fort diversement apprécié par les historiens. Quel-
ques-uns en ont fait presque un grand homme,
et pour expliquer la cession de sesfeajs se sont
lancés dans de longues considérations politiques
et religieuses. Nous croyons; nous, qu'il ne faut
pas aller chercher si haut les motifs de cet acte,
et que, ramenée a ses vraies proportions, la ques-
tion se réduit à de mis&a>lea affaires d'argent.
Humbert était un prince yain et léger, dévot jus-
qu'à la sottise, généreux jusqu'à la prodigalité,
ami du faste, du luxe, des titres et des beaux
habits. Les moines et les grands seigneurs de
sa eour abusèrent sans scrupule de sa faiblesse,
les uns pour se faire grassement doter, les autres
polir lui soutirer de bonnes terres, des équipages
ou de l'argent. Les revenus ordinaires du Dau-
phiné ne pouvant suffire à ses largesses , à ses
dépenses folles et inconsidérées , il eut recours
à mille expédients pour remplir ses coffres : il
pressura ses sujets, pilla les juifs, altéra les
monnaies, aliéna pièce à pièce la plus grande
partie de son domaih* privé, puis, se trouvant
un jour accablé de dettes, harcelé par ses créan-
ciers, circonvenu par d'habiles conseillers, qui
16.
487
HUMBERT
48S
n'avaient plus rien à attendre de lui, il 6e vit con-
traint de vendre ses États et de se faire moine.
Les folies de sa vie privée, dans laquelle nous
allons pénétrer, ne permettent pas d'apprécier
autrement son caractère et l'acte important qui
a donné à la France une de ses plus belles pro-
vinces.
Humbert II était à Naples lorsque la mort
de Guigues VHI vint l'appeler au gouvernement
du Dauphiné. Les finances de cet État se trou-
vaient alors tellement délabrées que le nouveau
souverain ne put, faute d'argent , venir immédia-
tement en prendre possession : il fallut que la
régente, Béatrix, frappât les juifs d'un emprunt
forcé pour payer ses frais de voyage. Il arriva
en Dauphiné (décembre 1333) plein d'idées de
grandeur qu'il avait prises à la cour de Naples.
Il commença par se parer d'une foule de titres
pompeux inconnus à ses prédécesseurs , tels que
ceux de prince du Briançonnais , de duc de
Champsaur, de marquis de Césane, de comte
de Vienne et d'Alton , de baron palatin de La
Tour, enfin de capitaine général des armées
du saint-siége. 11 ne lui manquait que le titre
de roi : il l'obtint au moyen de lettres patentes
de Louis de Bavière qui érigeaient ses États en
royaume, sous le nom de royaume de Vienne;
mais, de peur de se brouiller avec le pape, il
n'osa pas se décorer de ce titre.
Humbert s'occupa en même temps à mettre sa
maison sur un pied digne de lui : il fit deux rè-
glements, l'un pour les gages de ses officiers,
l'autre pour sa garde-robe et Je menu de ses repas
(1336). Son attention se porta sur les plus minu-
tieux détails : il y détermina le nombre de plats
et les qualités de mets à servir chaque jour sur
ses tables, et le rang que devaient garder entre
eux ceux qui avaient droit d'y manger; il fixa le
prix des étoffes et des fourrures de ses habits,
de ceux de la dauphiné et de tous ses officiers,
selon la qualité des personnes et les saisons (1).
Cette organisation princièreet les dépenses con-
sidérables qu'elle nécessitait ayant bientôt épuisé
ses finances, il lui fallut recourir aux expé-
dients. Il eut d'abord la singulière idée de mettre
ses États en ferme (1337) ; mais des difficultés
d'exécution firent échouer ce projet. H en conçut
alors un autre qui lui fut suggéré par le cha-
grin d'avoir perdu, deux ans auparavant (1335),
André', son fils unique : c'était de faire une ces-
sion du Dauphiné au roi de Sieile, moyennant
des avances considérables. Ce nouveau projet
échoua encore , et laissa le pauvre prince au mi-
lieu d'embarras inextricables, dont il ne put sortir
qu'au moyen de taxes arbitraires mises sur
les juifs et en cédant au plus récalcitrant de
(1) Ces règlements, extrêmement prédeux, par la mul-
titude des renseignements qu'ils donnent sur le prix des
denrées, des étoffes, etc., au quatorzième siècle, sont
Insérés inexftmtf» dans le t. II de VHist. du Dauphiné
de Valbonnais, p. 308-317. Ils ont été fort utiles à Ou
Cnnge pour l'explication d'un grand nombre d'expres-
sions de basse latinité.
ses créanciers, un marchand d'étoffes de Lyon,
les revenus des terres qu'il possédait en Nor-
mandie et en Auvergne, et la rente héréditaire
constituée en 1294 par Philippe le Bel à Hum-
bert I er , son aïeul (voy. ce nom). . i
Au mois d'août de 1338, il lui prit fantaisie
de faire la guerre et de s'emparer de Vienne. A
cet effet , profitant de la discorde qui régnait
entre le chapitre et l'archevêque, il y lit en-
trer des troupes , et obtint d'en être reconnu su-
zerain par les habitante; mais cette expédition
lui coûta cher. Le prélat dépossédé courut à
Avignon porter ses plaintes au pape : un procès
s'ensuivit à la chambre apostolique, et Humbert
fut condamné à payer à son adversaire des
dommages considérables. Pour se libérer, il
dut vendre ses terres de Normandie (1339).
L'année suivante, il se livra à une tentative du
même genre sur la ville de Romans, et il ne
réussit pas mieux. L'archevêque de Vienne,
suzerain de cette ville, l'excommunia, et le
pape le condamna en outre à une forte amende
pour avoir osé toucher aux biens des gens d'é-
glise. Ces deux affaires l'avaient rendu débiteur
envers la chambre apostolique d'une somme
de 16,000 florins , dont Benoit XII ne tarda pas
à demander avec instance le payement. Humbert
avait ses coffres vides et se trouvait fort em-
barrassé ; il exposa inutilement sa détresse et
offrit des terres en payement, notamment celle
d'Avisau; le saint-père ne voulut rien entendre,
et, pour donner plus de poids à ses réclama-
tions il l'excommunia. C'était la mesure la plus
propre à alarmer la conscience timorée de son
débiteur. Le malheureux dut se mettre en mesure
de chercher des fonds, et, en ayant enfin trou-
vé, il chargea son proto-notaire, Amblard de
Beaumont, de les porter à la chambre aposto-
lique. On vit alors jusqu'à quel point on se mo-
quait de lui : le pape ne voulut pas donner
l'acquit des 16,000 florins à moins que la terre
d'Avisau, dont la cession en payement l«i avait
d'abord été proposée, n'y fût jointe. Les deux ex-
communications dont Humbert avait été frappé
furent ensuite levées à condition qu'il expierait
ses fautes par ses œuvres pies, et c'est pour ac-
complir cette pénitence qu'il fonda près de Gre-
noble le monastère de Montfleury, auquel la ga-
lante M me de Tencin devait plus tard donner une
sorte de célébrité. Ces malheureuses affaires n'é-
taient certes pas dénature à mettre de Tordre dans
les finances d'Humbert ; aussi, songea-t-i) à faire
une cession de ses États. Cette fois, d'après les
conseils de quelques seigneurs de sa cour, il jeta
ses vues sur le roi de France. Il eut en consé-
quence une entrevue à Avignon avec le duc de
Normandie, fils aîné de Philippe de Valois : des
conférences s'ouvrirent, et on arrêta les ar-
ticles d'un traité (23 avril 1343) dont il convient
de rappeler les principales bases :
1° Le dauphin, dans le cas où il viendrait
à mourir sans enfants, transmettrait ses États
489
HUMBERT
490
à Philippe, duc d'Orléans, deuxième fils du roi,
ou, à son défaut, à l'un des fils du doc de Nor-
mandie.
2° Dans aucun cas , le Dauphiné ne pourrait
être incorporé an royaume, à moins que l'Em-
pire et la France ne se trouvassent par la suite
réunis sons un même chef.
3° Le nouveau dauphin et ses successeurs
devraient conserver à perpétuité les libertés, pri-
vilèges et coutumes dn pays, et porter le titre de
dauphin de Viennois (1).
4° Le roi acquitterait tontes les dettes d'Hum-
bert, passées et futures : celles-ci , cependant , li-
mitées à la somme de 25,000 florins d'or; il lui
assignerait 10,000 livres de rente en fonds de
terre en Languedoc, et lui payerait une somme
de 120,000 florins dans l'espace de trois ans;
enfin, il lui laisserait en toute propriété diffé-
rentes terres situées en Dauphiné, de la valeur
de 10,000 livres de rente.
5° La naissance d'un fils à Humbert anéanti-
rait le traité. Dans ce cas, il ne serait tenu qu'au
remboursement des 120,000 florins, et après sa
mort seulement. Les pensions et les sommes
payées pour l'acquit de ses dettes seraient per-
dues pour le roi;
• 6° Dans tous les cas , Humbert conserverait
jusqu'à sa mort la jouissance de ses États.
Ce traité ne le rendit pas plus riche : il avait
reçu 40,000 florins à compte sur les 120,000, et
deux mois après ils étaient entièrement épais-
ses : il fallut de nouveau recourir aux expé-
dients. Il fit proposer au roi de Sicile de lui céder
les terres qu'il s'était réservées en Dauphiné
moyennant un prêt de 30,000 florins. Cette né-
gociation échoua ; mais la cour de France , qui en
avait été instruite, s'en alarma, et pour lui ôter
le prétexte de former à l'avenir d'autres pro-
jets du même genre et, en même temps, le lier
davantage, elle vint à son secours. Elle avança
les termes désignés dans le traité , et affecta au
payement des 80,000 florins qui restaient dus
les revenus de plusieurs terres et les droits
levés par le roi en certaines provinces (1344).
Mais ces sources ne tardèrent pas à être épuisées :
on lui avait donné des terres pour lui tenir
lieu de la rente héréditaire qu'il possédait sur le
trésor royal ; il ne les eut pas plus têt en son
pouvoir, qu'il s'empressa de les vendre pour do-
ter des prieurés (1345).
A la même époque , malgré l'état précaire de
ses finances, Humbert conçut le projet le plus
insensé et le plus propre à consommer sa
' (l) La plupart des historiens ont dit par erreur qu'une
des conditions des traités d'Hombert avec la France
était que le titre de dauphin serait porté par les fils
aînée de ses rota. Le traité définitif, celui de 1349,
prouve le contraire, puisqu'il fut fait en faveur d'un
petit- fil* de Philippe de Valois. — 11 paratt qoe rien de
posttir ne fut arrêté à cet égard , qu'on s en remit à la
volonté des rois, et qu'ils restèrent maîtres du choix.
Mais , comme lis en disposèrent toujours en faveur de
leurs fil» aînés, cet usage finit par s'établir d'une manière
Invariable dans l'ancienne monarchie française,
ruine. Clément VI venait de publier une croisade
contre les infidèles : Humbert se mit en tête de
vouloir la commander. Il brigua cet honneur
avec tant d'empressement, fit tant de soumis-
sions au saint-père et de si magnifiques pro-
messes de dépenses, qu'il obtint le ruineux hon-
neur d'être le chef de l'armée chrétienne (1). Ce
titre brillant acheva de lui faire perdre toute
raison : il vendit sa vaisselle et ses joyaux
pour en faire faire des croix, des panonceaux
et autres bimbelots du même genre, destinés À
orner son casque et la proue de la galère qui allait
le transporter en Orient; il engagea à grands
frais, pour lui servir d'escorte, trois cents che-
valiers, à la tête desquels il se mit à parader
dans les rues d'Avignon, précédé de l'étendard
des croisés ; enfin , il assembla sérieusement son
conseil pour lui annoncer qu'allant au secours
des Grecs d'Orient, il avait résolu de gréciser
son nom et de se nommer à l'avenir Ym-
bert (2). Mais il restait un point important:
celui de l'argent. Pour s'en procurer, il mit en
œuvre tous les moyens que la nécessité lui sug-
géra : il aliéna les terres qu'il avait encore en
Languedoc; il fit publier dans toutes les pa-
roisses de ses États qu'il vendrait à des prix
modérés des franchises et des libertés ; il dé-
pouilla de nouveau les juifs; mit une imposition
générale sur ses sujets, etc., etc. Les fonds
nécessaires étant enfin trouvés , il donna le gou-
vernement du Dauphiné à Henry de Yillars, ar-
chevêque de Lyon, et, nouveau Godefroy de
Bouillon, il s'embarqua avec fracas à Mar-
seille le 2 septembre 1345. Les historiens nous
fournissent peu de renseignements sur cette
croisade : Humbert remporta quelques avan-
tages sur les Turcs; puis, cédant bientôt à
sa légèreté naturelle , il désira revenir en Eu-
rope. Le pape, qui avait été l'instigateur de la
guerre, se refroidit, lui aussi : il levait difficile-
ment les dîmes imposées à cette occasion sur
le clergé , et les rois de la chrétienté ne lui ve-
naient pas en aide. Craignant dès lors, avec
raison , d'avoir à supporter seul les frais de la
guerre, il entra facilement dans les vuesd'Hum-
bert. En conséquence, ce prince conclut un
traité de paix, licencia ses troupes, et revint dans
ses États vers le commencement de septembre
1347, après deux ans d'absence.
Par suite de cette malheureuse expédition, ses
finances étaient dans un état déplorable ; pour
les rétablir il imposa une taille générale de 6 gros
par feu, et se livra à de nouvelles et inutiles
dépenses. Il dotait des prieurés; il achetait à
(1) On lit dans un discours prononcé à ectte occasion
par Clément VI: « Et quia tnter caeteros principes reperl
iiutantem taepitu, svpplicantem hnmilius , optantem
ardentitu, offerentem liberalius, dilectum. flllum
Tmbertum deiphlnum Viennensem , idclrco.. . ducem
et capltaneum contra Turcos exercitns dnximus ordl-
nandum ( Balifte, Vite Paparum Aveniensivm).
(S) \oy. Memorabilia H. PUati, dans le 1 11 de VBist.
du Daupti, de Valbonnays, p. €23.
491
HUMBERT
493
crédit chez des marchands , qui le trompaient,
des bijoux, des ornements de chapelles. Plein
des idées de grandeur que lui avait données lé
commandement de la croisade, Humbert voulut
avoir un plus grand nombre d'officiers dans sa
maison, et créa une compagnie de gardes pour
veiller jour et nuit sùrfea personne ( f 347). Ses con-
seillers les plus dévoués lui adressaient en vain
de sages représentations ; nn mauvais génie sem-
blait l'entraîner à sa perte. Deux partis S'étaient
formés à sa cour : l'Un, vendu à Philippe de Va-
lois, dont Amblard de Beaumont était le chef (1),
l'encourageait très-probablement dans ces folles
prodigalités et dans cette mauvaise administration
qui, eh épuisant toutes les ressources du pauvre
prince, devait l'amener forcément à abdiquer.
L'autre, eu contraire, plus national, ayant à sa tête
le chancelier Jacqoes Brunier, s'efforçait de le
soustraire à ces fâcheuses influences, afin de con-
server la nationalité dauphinoise. Ce dernier parti
lui conseilla de se remarier (2), et proposa d'abord
Blanche, sœur du comte de Savoie, puis Jeanne,
Aile du duc de Bourbon. Cette dernière propo-
sition ayant été agréée, On dressa les articles du
contrat (1348) ; mais là cour de France se mit
aussitôt en mesure d'en entraver la conclusion.
Sous divers prétextes on suscita des lenteurs
et des ajournements , et on s'y prit de façon ,
que Humbert, voyant à la fin qu'on se moquait
de lui, déclara ne plus vouloir de ce mariage.
Sur ces entrefaites (octobre 1348), Jacques
Brunier était mort, et la perte de ce fidèle con-
seiller le laissait entièrement sous l'influence du
parti dévoué à la France. Dès lors, harcelé par
ses" créanciers, à bout de ressources , peut-être
aussi dégoûté des hommes , dlont sa faiblesse te
rendait le jouet, il résolut d'abdiquer le pouvoir
et de se faire moine. Le roi n'eut pas plus tôt
appris cette résolution, qu'il envoya en toute
hâte des députés pour l'y affermir. Des confé-
rences s'ouvrirent à Tournon et à Romans (févr.
et mars 1349), et enfin il intervint un dernier
traité définitif par lequel le dauphin se dépouil-
lait actuellement et irrévocablement en faveur
de Charles, fils du duc de Normandie, moyen-
nant le payement de ses dettes et la remise de
certaines sommes. Lé 16 juillet suivant, les deux
princes se réunirent # Lyon dans une assemblée
solennelle. Humbert y parut pour la dernière fois
entouré de toute sa noblesse ; it mit le duc Charles
en possession de ses États, par la tradition du
sceptre, de l'anneau, de la bannière et de l'épée
du Dauphiné. Puis , les barons et les seigneurs
(1) Ed 1840, lors d'un voyage d'Humbert a Pari» , Phi-
Lippe de Valois s'était fait des créatures auprès de ce
prince en s'at ta chant par des libéralités plusieurs gen-
tilshommes du Dauphiné. Le proto-notaire Amblard de
Beaumont, l'un des plus intimes conseillers d'Humbert,
avait reçu une pension de 200 liv. de rente sur le tré-
sor royal. (Voy. Hist. généal. de la Maison de Beaumont,
t. II, p. 487 et suiv.)
(2) Sa femme Marie des Baux, qui l'avait suivi dans la
croisade, était morte à Rhodes-, en mars ou avril 1847.
qui étaient présents prêtèrent hommage au nou-
veau dauphin et lui firent serment de fidélité.
Ce jour-là l'union du Dauphiné à la France fut
consommée (1).
Le lendemain (17 juillet 1349) Humbert prit
l'habit de Saint-Dominique à Lyon, dans le cou-
vent de cet ordre, et se retira ensuite au château
de Beauvoir, dont la propriété loi avait été ré-
servée. Il quitta le Dauphiné pour la dernière
fois Sur la fin de 1350, et se rendit à Avignon,
où le pape le promut aux ordres sacrés, le jour
de Noël, dans l'intervalle des trois messes qui se
disent en cette Solennité. Il prit le sous-diaconat
à celle de minuit, le diaconat et la prêtrise pen-
dant les deux autres et la célébra lui-même immé-
diatement après. Le pape le sacra ensuite patriar-
che d'Alexandrie, et lut donna l'administration
perpétuelle de l'archevêché de Reims. Mais ces
dignités ne pouvaient convenir longtemps an
caractère inconstant d'Humbert : il se fatigua
bien vite de son nouvel état, et voulut eu changer.
Le roi, qui n'avait rien à lui refuser, le nomma
à l'archevêché de Paris le 25 janvier 1364.
Comme il n'y manquait pins que l'agrément du
pape, Humbert se mit en route pour aller le sol-
liciter lui-même, et ce fut pendant ce voyage que
la mort tint l'atteindre, à Clermont en Auvergne,
à l'âge de quarante-deux ans. Dans son testa-
ment, il fit plusieurs legs à des églises et à des
maisons religieuses; il eut surtout grand soin de
donner dés ordres précis pour le payement de ses
dettes. Son corps., transportée Paris, fut inhumé
dans l'église des Dominicains,- à côté de Béatrrx
de Hongrie, sa mère.
Au milieu de ses prodigalités et de ses folies,
Humbert laissa au Dauphiné quelques bonnes
Institutions : c'est ainsi qu'il donna à la justice
un cours régulier en créant, sous te nom de con'
seil delphinal, un conseil chargé dé juger les
affaires particulières, conseil qui plus tard fut érigé
en parlement par Louis XI (1453): Enfin ii réor-
ganisa, par un édit du 25 juillet 1339, l'ancienne
université de Grenoble, et accorda divers privi-
lèges aux étudiants pour les attirer en plus
grand nombre. Ad. Rochas (de Die).
Guy Ailard, Histoire de Humbert //, dauphin de Vien-
nois ; Grenoble ( s. d. ), In-lx. — Valbonnays, Hist. du
Dauphiné, t. II. p. 3B9-379. — Lettre du même à- f abbé
de Vertoty insérée dans la Continuation des Mém. de
Litt. du P. Oesmolets, t. VI. — Berriat-Saiut Prix, Recher-
ches sur la Législation criminelle en Dauphiné., suivies
d'une description de» repae d'Humbert II ,• Paris, 1836,
In -8«>. — Le même . Histoire de /' ancienne Université de
Grenoble; Valence et Paris, 1889, in-8«; — Guy Ailard,
Les Présidents uniques et premiers Présidents du Conseil
Delphinal ; Grenoble, 1698, ln-lî. — Le P. Texte, Disser-
(1) Quelques mois avant son abdication (18 mars)
Humbert renouvela plusieurs ordonnances faites autre-
fois par ses prédécesseurs, et publia un règlement qui a
été regardé depuis comme la loi municipale du Dauphiné.
C'est ce qu'on appelle le Statut delphinal. Il ne se con-
tenta pas de confirmer les privilèges et les usages du
pays, 11 affranchit ses su)ets de diverses servitudes et
révoqua plusieurs droits extraordinaires introduits par le
despotisme féodal.
493
HUMBERT
494
tation sur Aunibert //, dans le Journal de Verdun t
oct. 1743, p- toi. — Touron, Hist. de Humbert II; dans
Hitt. de» hommes illustres de tordre de Saint- Domi-
nique, t. II. — A.. Rochas, Biographie du Daupfyiné. -
Humbert U à été lé sujet des deol pièces suivantes :
Humbert il, où lu réunion du Dauphin* à la France,
tragédie en cinq actes, en ver», lT7B,iA-8° C anonyme), —
Baçglnet, Humbert //, ou les dauphins français,
poëme eii un chant; Grenoble, 1Ô17, lti-8°.
* HUMBERT (Antoine), dit de Queyras ,
probablement à cause du lieu de sa naissance,
bel esprit du dix-septième siècie^ Il quitta le
Dauphiné pour venir se fixer à Paris, où il a
publié quelques romans, fîous connaissons les
suivants : Alexandre et Isabelle, histoire
tragi-comique; Paris, 1626,in-8°; — • Cléodonte
et Hermelinde, ou V histoire d'è la cour;
Paris, 1629, in-8°. L'auteur y raconte sous des
noms supposes quelques événements du règne de
Louis XIII. Ce roman parut la même année avec
le titre ainsi modifié : Histoire de, la Cour, sous
les noms de Cléomédonte et d? Hermelinde ;
— Les Triomphes de la Guerre et de V Amour,
histoire admirable des sièges de Cazalie et
de VImphirée, où s'est signalée la prodigieuse
valeur de Thorasmont , et les chastes amours
de. ce prinee eî de Vincqmparable Martésië;
Paris, 1Ô3Î. ih-8°. A. Rochas (de Die).
\.eaglet-l\nïïesi\oy r £ibliot?iè(iuede$ Romans,, t. 11. —
Catalogue de la Bibliothèque de là comtesse die Verrue
(1737, in -8°). - Biographie du Dauphiné.
ÉUMftÈftT (Abraham ce), mathématicien
allemand , né à Berlin, eh avril 1689, mort dans
cette même ville, lé 12 janvier 1761. D'une Fa-
mille française qui avait émigré en Prusse lors
de la révocation de l'édit dé Nantes , il entra en
J708 dans l'armée hollandaise , en 1711 dans
l'armée saxonne, et en 17 i9 dans le corps de génie
de la Prusse. Il dirigea les travaux de fortification
delà ville de Stettinet fixa sur lui l'attention parti-
culière du roi Frédéric-Guillaume I er , qui l'appela,
en 1 740, à Berlin , pour lui confier en partie l'éduca-
tion des princes de Prusse: L'Académie des Scien-
ces de Berlin l'admit en 1743 parmi ses mem-
bres. Humbert, quoique vivant en Allemagne ,
n'a guère écrit qu'en français. Seâ principaux
ouvrages sont : Lettres oVun Officier ingénieur
sur quelques sujets de Fortification et de géo-
métrie pratique ; Berlin, 1734, in-4° ; — Lettres
Politiques, Historiques et Galantes ; Amster-
dam, 1741-1743, 2 vol. in-12; — Traité des
Sièges , pour servir de supplément à V Attaque
et la Défense des places de M. de Vauban ;
Berlin, 1747, texte allemand ; Potsdam, 1747;
— Ouvrages divers sur les Bettes* Lettres, V Ar-
chitecture civile, militaire, les Mécaniques
et la Géométrie; Berlin, 1747; — Nouveau
Traité dit Nivellement; ibid., 1750; — L'art
du Génie pour instruction des gens de guerre ,
ibid., 1755; texte allemand, Bernbourg, 1756;
— une série d'articles dans les Mémoires de
VA cadémle de lier lin, dans la Bibliothèque Ger-
manique et dans le Journal de Berlin ; enfin
une traduction allemande de Y Attaque et Dé-
fense desplaees de Vauban (Der Angri/fund
die Vertheïdigung der Festungen ), avec com-
mentaires ; Berlin, 1744-1745, 2 vol. R. L.
Rathlef, Geschichte jetttlebender Gelehrten, vol. V,
p. 53. — Strôdtmann, Gelehrtes Europa t vol. V, p. iW. -
Rirsching, Handbuch. — Meusel, Lexicon der von 17W-
iSOû verstorbenen deutschen Schriftsteller. — Éloge de
Humbert, par J.-H.-S. Forraey.
humbert (Jean- Joseph- Amable) , général
français, né à Rouvray (Lorraine), le 25 no-
vembre 1755, mort à La Nouvelle-Orléans, en fé-
vrier 1823. Il était, dit-on, marchand de peaux
de lapin à l'époque de la révolution. Intelligent
et courageux, doué d'une, belle taille, il se jeta
dans la carrière militaire, et parvint jusqu'au grade
de général de brigade , auquel il fut promu le
9 avril 1794. Employé à l'armée de l'Ouest, il
en parcourut divers cantonnements , et se rendit
seul à une entrevue demandée par un chef' de
chouans. Après s'être plaint plusieurs fois de
diverses infractions faites à l'armistice par Cor-
matin-Desoteux. il opéra l'arrestation de ce chef,
dont les jours furent épargnés. Aux approches
de la révolution du 18 fructidor, le général Hum-
bert se déclara en faveur du Directoire. Il fut
sou veut maltraité dans les journaux du parti
Clichyen, qui, le raillant sur son premier état, lui
lancèrent force épigrammes. L'année précédente
le général Hoche,. qui avait apprécié ses capa-
cités à l'armée de l'ouest , l'avait demandé pour
commander, sou» lui , les troupes de débarque-
ment de l'expédition d'Irlande, entreprise en
1796, et qui, par une circonstance fatale, n'avait
pas réussi. Pendant une brume épaisse, qui
dura plusieurs jours, l'escadre française avait
été dispersée , et la frégate qui portait le général
en chef ayant fait fausse route, avait été obligée
de rentrer dans un port français. En 1798 fut
préparée nne seconde expédition composée de
deux escadres. La première, portant Humbert
avec environ 1 100 hommes , prit terre , le 4 août,
àKillala, sur la cote occidentale d'Irlande, où un
certain nombre d'habitants du pays vint se
joindre à lui. La seconde escadre n'arriva que
quelques jours après , fut battue par des forces
supérieures, et ne put opérer le débarque-
ment. Humbert remporta d'abord quelques avan-
tages ; mais bientôt sa petite troupe , réduite
à 844 hommes, fut enveloppée à Conangen
(8 septembre,) par l'armée de lord Cornwallis,
forte de f5,000 hommes, et obligée de mettre bas
les armes. Les instructions dont Humbert était
porteur tombèrent entre les mains du gou-
vernement anglais, qui les fit imprimer. Pri-
sonnier sur parole, Humbert obtint par ses
bonnes manières des succès que sa valeur avait
déjà préparés; il fut échangé, et vint aussitôt
reprendre du service à l'armée du Danube , où il
fut blessé à la fin de 1799. Il fit ensuite partie
dé l'expédition de Saint-Domingue (1802) , et,
sous les ordres du général Leclerc, il chassa les
noirs du Port-au-Prince. Après la mort de Le-
clerc, il repassa en France (1803), accompagnant
495
HUMBERT —
la veuve de son général, Pauline Bonaparte.
« Républicain très-décidé, dit Le Bas, Humbert
fnt mal accueilli de Napoléon , tandis qu'on fai-
sait circuler le bruit qu'il était fort bien avec sa
soeur : ce double motif le fit exiler en Bretagne. »
Se voyant à la veille d'être arrêté , il passa fur-
tivement aux États-Unis d'Amérique, où, quel-
ques années après l'insurrection des colonies espa-
gnoles, il vint tenter une entreprise aventureuse.
Il rassembla à La Nouvelle-Orléans un millier
d'hommes de diverses nations, et, avec l'aide du
chef mexicain Toledos, atteignit Kl-Puente-del-
Rey, entre Xalapa et Vera-Cruz, afin de se
joindre au généralissime des Indépendants , don
Jose-MariaMorelos, qui avait succédé à Hi-
dalgo del Costillo (voy, ce nom ). Cette jonction
ne put s'opérer : Morelos, battu à Atacama et pris
à Tepecuacuilco (5 novembre 1815), laissa
Humbert abandonné à ses seules forces. Celui-ci
lutta quelque temps, souvent avec avantage,
contre le vice-roi Calleja. Malgré des renforts
reçus par le RiodelNorte et du Nueva-Santander,
il dut se réfugier dans les États-Unis, ef y mou-
rut. H. Lesveur.
Le Moniteur général, an vr, n« 85»; an vn, n»« 15,
18, ît, *i, î07, 86*. — Thiers, Histoire de la Révolution
française. — Resumen historico de la Insurreeion de
Nueva-Espana, desde su origen hasta el desembareo
del senor E.X. de Mina; Mexico, 1881. — Mahul, An-
nuaire Nécrologique, année 1888. — Le Bas, Dict. ency-
clopédique de la fronce.
humbert (Sébastien), homme politique
français, né dans le Barrois, en 1749, mort à
Bar-le-Duc, en 1838. n était employé dans la régie
lorsque éclata la révolution. Partisan des idées
nonvelles et possédant quelque éloquence natu-
relle, il fut élu à plusieurs charges municipales.
En septembre 1792, les électeurs de la Meuse
l'envoyèrent à la Convention. Lors du jugement
de Louis XVI, il s'exprima ainsi : « J'ai déclaré
Louis coupable de haute trahison; j'ai voté
Tappel au peuple : je dois respecter le vœu de
la majorité. Je propose la réclusion pendant la
guerre et le bannissement à la paix. » Humbert
fut réélu par son département pour siéger au
Conseil des Cinq Cents; il sortit de cette assem-
blée en mai 1798, et devint commissaire du gou-
vernement près de la trésorerie nationale. Il
occupa cette place plusieurs années , donna sa
démission avant la chute de l'empire, et finit ses
jours tranquillement , dans son pays natal.
H. L.
Moniteur universel dn tOjaOYler 1798; an vi, n M 239,
s», tu. — Biographie Moderne ( 1806). — Arnanlt , Jay,
Jouy et Norvtm, Biographie des Contemporains ( 188 S).
humbert (Jean), orientaliste suisse, né à
Genève, le 30 mars 1792, mort le 19 septembre
1851. Après avoir étudié les langues orientales
à Paris, il fut nommé, en 1823, professeur d'a-
rabe à l'Académie de Genève. Il était cor-
respondant de l'Institut de France ( Académie
des Inscriptions). On a de lui : Anthologie
arabe, ou choix de poésies arabes inédites,
traduites en français, avec le texte en
HUMBOLDT m
regard et accompagnées d'une version latine.
littérale; Paris, 1819, in-S°; elle contient 65
pièces ; — Coup d'ceil sur les Poètes élégia.
que* français; ib., 1819; — Discours sur l'U-
tilité de la Langue Arabe ; Genève, 1823, in-8° ;
— Commentaire historique et critique sur
la tragédie de Mahomet; ib., 1825, in-8°;
— Choix de Poésies orientales en vers et en
prose, faisant partie de la Bibliothèque Choisie
de Méquignon-Havard ; Paris, 1830, in -8°; —
Arabica Chrestomathiafacilior;GeDère, 1834.
Ce recueil bien fait a été réimprimé au Caire ,
en 1837, à l'usage des Arabes; — Arabica Ana-
lecta inedita; ib., 1838, h>8°; — Guide de
la Conversation Arabe; 1838; — Nouveau
Glossaire genevois; — des articles dans le
Journal de Genève, dont il fut l'un des fonda-
teurs. E. B.
Qnérard , La France Littéraire. — Louandre et Bour-
quelot. Lu Littérature française contemporaine.
* humbert (François), orthopédiste fran-
çais, né à Châlon8-sur-Marae , le 22 octobre
1776, mort à Morley, le 4 juin 1850. Il servit
depuis 1795 jusqu'en 1800 comme chirurgien
dans les armées, et inventa un appareil à injec-
tions pour les vaisseaux lymphatiques. Fixé à
Morley (Haute-Marne), il s'occupa de la gué-
rison des déviations de la taille et du rachitisme,
et fonda dans cette ville, vers 1820, uu des pre-
miers établissements orthopédiques. Sa méthode
pour le traitement de la luxation du fémur, dé-
crite dansle livre intitulé : Essai et Observations
sur la manière de réduire les Luxations spon-
tanées de V articulation ilio-fémorale , mé-
thode applicable aux luxations congénitales
et aux luxations anciennes par cause externe
(avec Jacquier), 1835, lui valut de la part de
l'Académie de Médecine le prix Montyon. On
a aussi de lui : De V Emploi des moyens
mécaniques et gymnastiques dans le Traite-
ment des Difformités du système osseux;
1335, 4 vol. in-8°, et 3 vol. de planches
in-4°; — De l'Invention et de l'emploi de
l'Hybomètre, instrument destiné à faire con-
naître les divers changements que le corps
éprouve par suite d'une incurvation du ra-
Chis; 1834. J. V.
Documents particuliers.
HUMBERT AUX BLANCHES MAINS. Voy.
Satoje.
humboldt (Charles -Guillaume, baron de),
poète, critique, philologue, homme d'État, l'un
des plus grands esprits de l'Allemagne, naquit à
Potsdam, le 22 juin 1767. Il appartenait à une
famille noble de Poméranie. Son père, Alexandre-
Georges de Humboldt, major dans l'armée pi us-
sienne et chambellan du roi , avait épousé une
veuve, M me la baronne de Holwede , qui, ayant
déjà un fils de son premier mariage, avait confié
son éducation à l'écrivain Joachim Campe. Campe,
si connu au dix-huitième siècle par ses écrits
pédagogiques, était donc précepteur dans la mai-
497
HUMBOLDT
498
son Je Hamboldt , lorsque deux enfants y na-
quirent, Guillaume en 1767, Alexandre en 1769;
et c'est ainsi que le célèbre philanthrope fat le
premier maître de ces denx intelligences qui de-
vaient embrasser plus tard tous les domaines de
la science et des lettres. Quelques années après,
Campe fut remplacé auprès de ses élèves par un
grave et 3avant jeune homme nommé Kunth, qui
joua par la suite .un rôle important dans l'admi-
nistration prussienne et devint l'ami du baron
de Stein. Il n'y eut, dès le premier âge, que
d'austères influences autour des deux jeunes
frères. Guillaume de Humboldt avait douze ans
quand son père mourut; sa mère, bien qu'at-
teinte d'une maladie grave , redoubla de zèle pour
l'éducation de ses fils, et trouva des auxiliaires
dévoués chez plusieurs maîtres éminents. Le phi-
losophe Engel, qui était alors un des chefs de la
littérature sérieuse dans le nord de l'Allemagne et
qui fut plus tard employé à l'instruction du roi
Frédéric-Guillaume ni, exerça une action parti-
culière sur Guillaume de Humboldt. Le premier
écrit du jeune Guillaume est comme un résumé
des leçons de cet excellent maître; c'est une
étude , composée par lui à dix-neuf ans , sur
Dieu , la Providence et l'immortalité de l'âme
d'après Socrate et Platon. Enfin, en 1788, après
avoir étudié quelques mois à l'université de
Francfort-sur-1'Oder, Guillaume de Humbçldt ar-
rivait à Goettingue et s'initiait aux mystères de la
philologie, sous la direction de l'illustre Heyne.
La jeunesse de Guillaume de Humboldt fut à la
fois enthousiaste et sévère. H aimait, il recher-
chait avec passion les hommes célèbres de son
temps , mais déjà il savait les juger. Le généreux
publiciste Georges Forster, gendre du grand phi-
lologue Gottfried Heyne, exerça une singulière
attraction sur son esprit ; Forster fut l'ami de
sa jeunesse , comme Schiller celui de son âge
mûr. Grâce aux recommandations de Forster,
Humboldt put connaître intimement quelques-
uns des chefs de la littérature allemande, entre
autres Jaeobi et Jean de Muller. « C'était ma
passion, écrivait-il quarante ans plus tard, de
voir de près les hommes célèbres , de les étu-
dier avec soin, de me représenter exactement
leur manière de vivre et de penser; je les rat-
tachais à des idées générales; je classais les
hommes, les esprits ; j'en faisais, pour ainsi
dire , une science particulière. »
Guillaume de Humboldt avait vingt-deux ans
quand la révolution française éclata. Nourri,
comme il l'était, des principes du dix-huitième
siècle , élevé par des disciples de Rousseau , il
salua d'un cri d'enthousiasme la transformation
de la France. Dès le mois de juillet 1789, il partit
pour Paris avec son ancien maître, l'honnête
et naïf Campe. Campe était enivré de joie; il ap-
préciait tout avec les illusions d'un enfant : ces
événements qui allaient renouveler le monde au
milieu de si terribles orages lui apparaissaient
comme une idylle; et il nous a laissé, dans le
! récit de son voyage, l'expression de sa confiance.
Humboldt voyait les choses d'un regard plus
sûr. A la fois plein de sympathie et d'inquié-
tude, il continuait sur les hommes réunis et sou-
levés ces études de philosophie morale qu'il
avait commencées sur les individus célèbres de
son époque. L'homme d'État se manifestait déjà
à travers les* émotions d'une âme juvénile. Quand
il revint en Allemagne, au mois de septembre, il
n'avait rien perdu de ses généreuses croyances ;
mais cette leçon de politique en action avait pré-
paré son intelligence à des méditations plus
hautes. Deux ans après il publiait son premier
ouvrage ; c'étaient quelques pages rapides, sen-
sées, un programme de philosophie politique,
provoqué par les événements de la France. Ce
mémoire, publié en 1792 dans le Berliner Mo-
natschrift, portait ce titre : Idées sur l'organisa-
tion de V État 9 à propos de la nouvelle consti-
tution/rançaise (Ideen ûber Staatsverfassung
durch die neue franzôsische Constitution
veranlasst. Voy. Œuvres complètes de G. de
Humboldt, 1. 1, p. 301 ). L'auteur y condamne
avec force l'erreur dès théoriciens qui prétendent
fonder une constitution sur des idées abstraites.
La même année, Guillaume de Humboldt ré-
digeait un ouvrage plus étendu auquel il voulait
donner ce titre : Idées sur un essai de déter-
miner les limites de Faction que doit exercer
VÉtaU Son travail terminé, il avait renoncé à
le mettre au jour, jugeant le moment peu oppor-
tun pour des discussions de ce genre; le ma-
nuscrit, égaré puis retrouvé enSilésie, fut publié
à Breslau quelques années après la mort de l'au-
teur, et M. Alexandre de Humboldt l'a inséré
dans le 7* volume des Œuvres complètes de son
frère. L'âme de ce livre, si je puis ainsi parler,
c'est un sentiment très- vif de la liberté indivi-
duelle. Le type de la société par excellence ,
aux yeux de Féminent publiciste, ce serait un
ordre de choses où il y aurait aussi peu d'en-
traves que possible au développement légitime
de l'homme. Dans un temps où les législateurs
révolutionnaires faisaient prédominer l'idée de
l'État, on aime à voir les droits de la personne
humaine revendiqués avec tant de précision et
de noblesse. Le chapitre sur la religion n'est pas
moins intéressant. Plein de respect pour tout ce
qui élève l'âme , G. de Humboldt comprend la
grandeur du sentiment religieux, mais il place
à la même hauteur la loi morale qui guide
l'homme à la vertu. La philosophie de G. de
Humboldt, est une sorte de stoïcisme, non pas
sévère et attristé, comme celui de Marc Aurèle
et d'Épictète, mais un stoïcisme rassurant
et enthousiaste. Disciple de Kant,il voit dans la
moralité le plus haut degré de la vie religieuse;
et ce mot représente pour lui l'épanouissement
harmonieux et splendide de toutes les facultés
de notre nature. De là une idée très-hardie de
la dignité humaine, un sentiment très-élevé et
très-pratique à la fois du rôle qui appartient à
499
HUMBOLDT
500
l'homme et des devoirs que ses droit» lui impo-
sent. Telle est sa confiance dans la nature hu-
maine que la morale, dégagée môme de la reli-
gion, lui parait suffire à l'accomplissement de
nos destinées, ou plutôt la loi morale prend tous
les caractères sublimes de la loi religieuse dans
cette àme supérieure. A une certaine hauteur,
on l'a dit, toutes les. aspirations de l'esprit hu-
main se réunissent, tous les rayons de la vérité
se confondent. L'idéal de Guillaume de Humboldt,
c'est Tidéal de. la noblesse de l'homme. Ainsi,
une virile intelligence des devoirs de l'homme
et des droits qui en résultent, à une époque ou
l'État semble vouloir étouffer l'individu; une
impartialité philosophique et religieuse dans un
temps où le sentiment exalté des droits du genre
humain semblait exclure le respect des religions
positives, voilà les traits qui caractérisent dès le
premier jour la philosophie de Guillaume de Hum-
boldt. C'est parla que , supérieur au dix-hui-
tième siècle, il prépare de> l'âge qui va suivre.
Dans sa recherche enthousiaste de l'idéal de
l'homme* Guillaume de. Humboldt se prit de
passion pour l'antiquité hellénique. Le pays qui
a créé l'art, la poésie, la philosophie, et donné
au monde les premières constitutions libres, la
patrie de Sophocle et de Platon , de Phidias et
dePérielès* offrait au jeune penseur un éclatant
sujet de méditations. C'était le moment où de
grands philologues , Gottfried Heyne et Frédé-
ric-Auguste Wolf, renouvelaient f étude de
l'antiquité. Cette philologie, qui agrandissait
chaque jour son domaine, accueillit avec empres-
sement les indications de Guillaume de Humboldt.
Wolf professait depuis neuf ans a l'université
de Halle quand Guillaume de Humboldt, en 1 792,
se présenta ehez lui comme un disciple avide de
savoir, et lui demanda la solution de plusieurs
problèmes; il comprit dès le premier mot qu'un
tel disciple était déjà un maître. L'étude de
l'antiquité, pour Guillaume de Humboldt, ce de-
vait être une étude vivante. Interroger Phidias
et Sophocle * c'était contempler le genre humain
dans son héroïque adolescence , et il fallait que
ce travail fût accompli en vue de l'humanité
nouvelle; sans cela, l'érudition n'est qu'une pré-
tention pédantesque ou une curiosité frivole. Un
écrit de Humboldt sur ce sujet , une sorte de
programmé intitulé Essai sur les Grecs 1 fit
grand bruit en 1792 parmi les savants de Halle
et d'Iéna. Wolf, Dalberg, Schiller, le lurent
avec enthousiasme; Wolf surtout s'en inspira,
et quatorze ans pins tard , en publiant son Ex-
position de la Science de V Antiquité ( Dars-
telluftg der Alterthums-Wissenschaft, dans
le Muséum der Allerthums-Wissenchaft,
vol. I e1 , 1806) , il proclamait, dans la langue
même de Platon , tout ce qu'il devait à son excel-
lent compagnon d'études philologiques, <ru(iç(^
XoXoTfowvtéç xiv6ç 7to8' V)u.ïv xoXoû x'aYarôov.
Guillaume de Humboldt avait épousé, au mois
de juillet 1791, M Ue Caroline Dacheroden, esprit
facile et brillant , qui s'associait sans pédantisme
à ses belles études sur la Grèce. Pendant un
séjour qu'il fit il la campagne (c'était dans on
domaine de sa femme appelé Auleben, non loin
de Nordhausen ), il employa les loisirs de sa soli-
tude à lui enseigner la langue d'Homère. Il lisait
F Odyssée avec elle, et quand il entendait sur les
lèvres de cette compagne aimée les paroles que
le poète fait prononcer à. Pénélope et à Naosi-
caa, il lui semblait qu'ii comprenait mieux la
grâce et la simplicité de l'art antique. Wolf les
visitait souvent danâ cette retraite. Aux fêtes
de Noël, aux congés de Pâques , quand les tra-
vaux de l'université le laissaient libre, il allait
trouver Guillaume de Èhimboldt, et c'est
peut-être là, entre Humboldt et sa compagne,
que le grand philologue écrivit maintes pages
de ces Prolégomènes sur ti'omere ? qui allaient,
deux ans plus tard, foire une révolution dans la
critique.
Un an après avoir lié cette intimité sî féconde
avec l'auteur des Prolégomènes, Guillaume de
Humboldt allait conquérir une antre amitié qui
devait tenir aussi une place immense dans sa
vie. Au mois d'avril 1793 11 alla visiter Schiller
à léna; il l'avait déjà rencontré plusieurs fois,
soit à Weimar, soit à ïéna , en 1789 et 1790 ;
mais, dans ces rencontres rapides, Guillaume de
Humboldt n'avait pas su se faire apprécier do
poëte, et Schiller avait même des préventions
contre lui. Ces préventions disparurent bien
vite après quelques heures d'entretien. Schiller
s'occupait alors de philosophie ; il avait annoncé
à l'université d'Iéna un cours sué Pesiliétique;
Guillaume dé Humboldt rendit à Schiller les
mêmes services qu'il venait dé rendre à Wolf.
il fut pour lui , je n'ose dire un maître , mais
un de ces compagnons d'études qui excellent à
soutenir le courage , à ranimer l'inspiration , à
éveiller maintes Idées fécondes. On sait quelle
était l'amitié de Schiller pour Kœrner, ce con-
fident de toutes ses pensées , ce critique franc
et loyal qui était pour ainsi dire sa conscience
littéraire ; Guillaume dé Humboldt occupa bientôt
dans le. cœur du poëte un rang à peu près égal
à celui de l'excellent Kœrner. ta correspondance
de Schiller avec Kœrner est un document indis-
pensable à qui veut étudier le développement
poétique de Fauteur de Guillaume Tell; sa cor-
respondance avec Guillaume de Humboldt con-
tient aussi des indications du plus grand prix.
Schiller exerça une influence salutaire sur Guil-
laume de Humboldt; il éveilla chez lui le goût de
l'action , le désir de produire , et l'arracha aux
jouissances exquises, mais dangereuses, de la
contemplation solitaire. Guillaume de Humboldt ,
à son tour, lui rendait le courage et l'espoir,
quand le poète , tout occupé de ses travaux de
philosophie et de la préparation de son ensei-
gnement , se croyait mort pour toujours à la
poésie. Il connaissait Schiller, a-t-on dit , mieux
que Schiller ne se connaissait lui-même. II
501
fiUMËOLDT
502
devint aussi l'ami et le conseiller littéraire
de Goethe. Dès les premiers temps de cette fra-
ternelle alliance qui unit l'auteur de Faust et
l'auteur de Don Carlos, Guillaume de Humboldt
fut associé aux confidences des deux amis.
Qcethe travaillait alors à son poème à'Bermann
et Dorothée; il en adressait souvent des frag-
ments à Schiller, qai habitait encore Iéna, et en
même temps qu'il tut demandait son avis , il le
firiait aussi de soumettre son œuvre à la cri-
iqae de Guillaume de Humboldt. Gœthe lui-
Même vint passer quelques mois à Iéna pour
achever son œuvre sous les yeux de ses amis.
Iéna présentait alors le brillant spectacle que
Weimar devait offrir un peu plus tard; cette
petite ville, si calmé, si paisible , était un foyer
ardent de travail et de poésie. Tandis que
Fiente commençait à étonner les esprits et à
ravir les âmes par l'exposition de son audacieux
système, Gœthe mettait la dernière main à sa
familière épopée, Schiller achevait son esthé-
tique , Guillaume Schlegel traduisait Shakspeare,
et Guillaume de Humboldt s'essayait à reproduire
en vers VÂgamemnon d'Eschyle. Un autre vi-
siteur augmentait l'éclat de cette réunion;
M. Alexandre de Humboldt, célèbre déjà par
ses travaux scientifiques, était venu trouver
son frèreà Iéna, « et il répandait les dons de son
savoir, écrit Gœthe à Knebei , comme une véri-
table corne d'abondance ». C'est au milieu de ces
jouissances de l'esprit , au milieu des travaux
de Fichte ; des entretiens de Schiller, et de ses
propres tentatives poétiques, que Guillaume de
Humboldt avait vu grandir le gracieux chef-
d'œuvre de Gœthe.
Le nom de Guillaume de Humboldt est associé
pour toujours au nom d'ffermann et Doro-
thée. Est-ce seulement parce que le critique a
aidé le poète de ses conseils, parce que maintes
questions de forme et de prosodie ont été réso-
lues par lui sur la demande de Gœthe , parce
que dans un voyage à Berlin il a surveillé lui-
même l'impression de l'ouvrage et qu'il s'est ap-
pliqué jusqu'au dernier jour à en assurer la per-
fection suprême? C'est surtout parce que Guil-
laume de Humboldt a écrit un commentaire
d'Bermann et Dorothée , et que ce commen-
taire est un des chefs-d'œuvre de la critique al-
lemande. Il y avait déjà près d'un an que
Guillaume de Humboldt avait quitté ses amis
d'Iéna; il était retourné à Berlin, et de là il
était parti pour un long voyage dans le midi de
l'Europe. Un jour, en 1799, Schiller reçoit de*
Paris un manuscrit portant ce titre : Essais et'
thétiques sur J'Hermann et Dorothée de Ôte-
the. C'était le commentaire de Guillaume de
Humboldt. Pendant sou séjour à Paris, et avant
de se diriger vers l'Espagne, il avait résumé
dans ee livre le résultat de ses méditations sur
l'art , de ses entretiens avec Schiller et Kœrner,
de ses études d'après Kant et Fiente, de toutes
les inspirations poétiques que le génie créateur
de Gœthe avait éveillées au fond de son âme.
J'ai dit que Guillaume de Humboldt était part!
pour l'Espagne. Il avait depuis longtemps le
de*ir de visiter l'Italie et les autres contrées de
l'Europe méridionale. Les craintes que lui ins-
pirait sa inëre, atteinte d'une maladie incurable,
l'avaient empêché de réaliser son projet. Quand
il eut le malheur de là perdre , au mois de no-
vembre 179o, l'idée de ce voyage, devenu pour
lui une distraction nécessaire, se présenta plus
vivement fi son esprit. D'ardentes ambitions
littéraires se mêlaient chez loi à cette pensée.
On voit par ses lettres à ses amis qu'il s'accu-
sait amèrement dé ne pas avoir encore trouvé
sa voie. « Plus je m'interroge moi-même, écri-
vait-il , plus je demeure persuadé que ma vo-
eatidrt est d'embrasser la tyhthèsê du monde
moral, de comprendre et d'unir des choses qui
semblent inconciliables , d'apprécier l'humanité
sous les formes si diverses qu'elle revêt , de
tracer une sorte d'anthropologie comparée. » Ces
voyages devaient donc être une série de prépa-
rations au* grand travail de sa vie, à ce travail
qu'il se reprochait d'avoir négligé jusque-là. Il
voulut commencer par l'Italie. Son intention
était dé l'étudier à fond, de la posséder dans ses
moindres détails Les hommes et les choses,
lès classes instruites et lés classes ouvrières, le
Clergé , l'aristocratie , les artistes , le peuple, il
roulait tout connaître. Gœthe et Wolf lui don-
naient déjà des notes, des programmes d'étude,
des indications de toutes espèces. II se mît en
route avec sa femme et ses enfants au prin-
temps de 1797 ; son frère Alexandre s'était joint
à lui. Ils S'arrêtèrent quelque temps à Dresde
auprès de la famille Kœrner, puis ils se rendi-
rent à Vienne ; de Tienne ils devaient aller en
Italie , et de là en Espagne et en France. Les
hostilités venaient de cesser, et la signature de
l'armistice dé Léoben faisait espérer une paix
prochaine. Mais bientôt cet espoir s'affaiblit; la
guerre semble prête à renaître. Il ne retrouvera
plus dans l'Italie cette contrée propice aux mé-
ditations de l'étude, à l'enthousiasme de la na-
ture et de l'art , comme à l'époque où Gœthe y
renouvelait son génie. Est-ce le moment d'aller
visiter Rome et Florence? Il change d'itinéraire,
et se dirige vers la France. Il arrive à Paris au
mois de novembre 1797 ; il visite les bibliothè-
ques , les académies , les musées , les théâtres.
Son esprit, si sympathique et si ouvert, em-
brasse les choses les plus différentes, et trouve
partout matière à de fécondes études. En même
temps qu'il s'entretient d'Homère et de Wolf
avec les hellénistes de l'Institut, il assiste aux
représentations des théâtres et fait maintes com-
paraisons curieuses entre la scène allemande et
la scène française. Ses lettres à Gœthe , à Schil-
ler, à Kœrner, contiennent sur ce point les plus
intéressants détails. Enfin, après un séjour d'un
an et demi à Paris , il se met en route pour
l'Espagne. Ge voyage dura six mois. Ce qu'il y
503
HDMBOLDT
504
recueillit d'inspirations nouvelles, on le sait par
sa correspondance et par de beaux fragments
adressés à Schiller et à Goethe. Le récit de son
excursion au couvent de Montserrat est un des
meilleurs ouvrages qu'il ait écrits ; la peinture des
lieux, l'observation des hommes, tout est digne
d'éloges dans ces pages excellentes où brille avec
une poésie élevée une philosophie profondément
humaine. Schiller et Goethe en furent ravis.
Mais le vrai trésor qu'il rapporta de son
voyage en Espagne ce furent ses études sur la
langue basque. 11 était préoccupé, nous l'avons
dit, de son projet d'anthropologie comparée , et
il appelait de ce nom une histoire philosophique
de la culture humaine, un tableau comparé des
littératures et des civilisations qu'elles expri-
ment. A force de méditer son dessein, il arriva,
de déduction en déduction , à ce qui est la base
et le commencement de toute culture, la forma'
tion des langues. Ses premiers travaux sur ce
point furent consacrés aux anciens idiomes de
l'Espagne et particulièrement à la langue bas-
que. Ces études, qui ne virent le jour que plus
tard , prolongèrent son séjour à Paris. Pendant
que ses amis attendaient impatiemment son re-
tour, il ne se lassait pas d'interroger les manus-
crits et d'amasser des notes. Un jour même ,
voulant compléter les renseignements qu'il avait
recueillis dans son voyage, il laissa sa femme
et ses enfants à Paris , et repartit pour les pro-
vinces basques. Enfin, son enquête terminée, ses
matériaux recueillis et classés avec soin, il put
revenir à Paris et reprendre le chemin de l'Alle-
magne. Il y arriva vers la fin de l'été de 1801, et
un an après il était chargé de représenter le gou-
vernement prussien auprès du saint-siégc. La di-
plomatie ne l'enleva pas aux lettres : il menait
de front tous les travaux de l'esprit. Aussi bien,
dans un pays comme l'Italie, l'amour des arts
ne fait-il pas partie des devoirs d'un diplomate ?
M. de Humboldt comprit ainsi sa tâche, et
bientôt, tout luthérien qu'il était, il conquit
auprès du souverain pontife une influence con-
sidérable. Pie VII et ses cardinaux, alarmés de
la politique du premier consul, étaient heureux
de trouver chez le représentant d'un État luthé-
rien, non-seulement des dispositions amicales
qui pouvaient être utilisées plus tard, mais une
déférence si empressée , de si vives sympathies
pour l'Italie et le génie italien. C'est ainsi que le
diplomate profitait des généreux systèmes du
philosophe. Son hôtel était le rendez-vous des
intelligences d'élite. Les membres les plus émi-
nents de la société romaine recherchaient ces
brillants salons dont Mad. de Humboldt faisait
les honneurs avec toutes les séductions de
l'esprit et de la grâce. Auprès des princes et des
prélats on y voyait les savants et les artistes.
Les plus nobles hôtes de la ville éternelle de-
venaient les hôtes de Guillaume de Humboldt.
Un -jour, c'était Mad. de Staël et Guillaume
Schlegel , le lendemain Tieck, Welcker, Paul-
Louis Courier, une autre fois Thorwaldsen et
Christian Rauch. Ses lettres à Goethe et à
Schiller, ses traductions de Pindare et d'Es-
chyle , de belles poésies philosophiques, surtout
le poème intitulé Rome, nous montrent quelles
inspirations soutenaient son active pensée an
milieu de la pratique des affaires. Citons aussi
l'éloquente élégie qui porte ce titre : A Alexan-
dre de Humbolt. L'illustre voyageur, revenu
d'Amérique, avait dédié À son frère Guillaume
ses Tableaux de la Nature ; Guillaume, poureé-
lébrer son retour, lui renvoyait un sublime reflet
des scènes qu'il avait décrites. Cette élégie est
tout un poème sur l'Amérique, et l'on y voit
grandir ce sentiment de l'humanité qui est l'ins-
piration constante de son âme.
Ces pures jouissances furent Interrompoes
maintes fois par de cruelles épreuves; en 1805,
il apprit la mort de Schiller; en 1806, une nou-
velle plus sinistre encore vint le frapper de stu-
peur : la Prusse avait été abattue à Iéna, et il
ne tenait qu'au vainqueur de la rayer de la
carte. Les devoirs de Humboldt le retenaient à
Rome; pendant toute cette année 1807, où la
Prusse essayait detoe relever de ses runes,il dot
rester éloigné du mouvement qui commençait
dans l'ombre; mais en 1808, appelé en Alle-
magne par des intérêts de famille , il parut en
tout hâte, impatient de revoir sa patrie et peut-
être de la servir plus efficacement qu'à Rome.
Cette espérance ne fut pas trompée. A peine
était-il revenu en Prusse que le ministère Al-
tenstein-Dohna lui confia la direction de l'ins-
truction publique et des cultes.
Voici une des plus belles périodes de cette vie
généreuse. La situation était pleine de périls.
C'est dans les premiers jours du mois de janvier
1809 que Guillaume de Humboldt fut appelé à
réorganiser l'instruction publique; or, le 24 no-
vembre 1808, un homme dont il vénérait le pa-
triotisme, le baron de Stein, venait d'être exclu
du ministère prussien , sur un ordre impérieux
de Napoléon ; le 16 décembre, le même baron
de Stein avait été déclaré ennemi de l'empire
par un décret signé du camp de Madrid,, qui
contenait ces paroles : « Les biens que ledit Stein
posséderait soit en France, soit dans les pays de
la Confédération du Rhin, seront séquestrés.
Ledit Stein sera saisi de. sa personne partout où
il pourra être atteint par nos troupes ou celles
des alliés. » Et de quel crime M. de Stein était-
il coupable? Il avait voulu réveiller le patriotisme
tle l'Allemagne. Certes, Guillaume de HumboMt
n'était pas un homme d'action comme le baron de
Stein ; il n'était pas disposé comme lui à déchaî-
ner les passions populaires; mais ce patriotisme
irrité dont on punissait le grand ministre, il en
ressentait aussi les sublimes aiguillons. S'il ac-
cepte la direction de l'instruction publique et des
cultes, c'est pour travailler à la restauration de
toutes les forces morales de la Prusse. Il accom-
plit cette tâche avec un courage, une perse-
506
HUMBOLDT
506
rance et une élévation de vues qui seront pour
lui un titre éternel de gloire. On a souvent ad-
miré l'héroïque confiance de cette Prusse qui ,
courbée encore sons la main du vainqueur, au
lieu d'invoquer seulement le droit du sabre, fait
appel aux ressources de l'esprit. La fondation
de l'université de Berlin en 1810, au milieu des
inquiétudes et des afflictions de la défaite, est
certainement un des actes qui honorent le plus
le pays de Frédéric le Grand ; ce fut l'œuvre de
Guillaume de Humboldt.
Mais cette œuvre, que d'obstacles il eut à
vaincre pour la mener à bien ! Les ministres qui
avaient remplacé M. de Stein semblaient avoir
été terrifiés par le décret de Napoléon. A l'im-
pulsion énergique de l'homme d'État réforma-
teur avaient succédé rtrrésolution et la crainte.
On se contentait de vivre au jour le jour. Au-
cun plan de conduite, aucune pensée générale.
Guillaume de Humboldt était le seul qui obéît à
une politique résolue, et cette politique rappe-
lait trop souvent les hardiesses de M. de Stein
pour que les autres membres du ministère n'en
fussent pas alarmés. On lui suscita mille diffi-
cultés ; il resta ferme à son poste tant que sa
présence fut nécessaire à l'accomplissement de
ses projets. Une fois sa réforme de l'instruction
publique opérée par une législation nouvelle, une
fois Puniversité de Berlin établie sur des bases
solides , il se sépara d'une administration dont il
ne voulait pas partager la responsabilité devant
l'avenir. Il demanda au roi la permission de re-
prendre son service dans la diplomatie , et par
un décret du 14 juin 1810 il fut nommé ministre
extraordinaire et plénipotentiaire auprès de la
cour de Vienne.
Guillaume de Humboldt avait raison : les grands
serviteurs de la Prusse , en ce moment , n'étaient
pas dans les conseils de Frédéric-Guillaume III.
En se rendant à Vienne, il vit à Prague M. le
baron de Stein , qni fuyait la colère de l'empe-
reur des Français et répondait à ses menaces
en préparant le soulèvement de l'Allemagne.
M. de Stein avait applaudi aux réformes opérées
dans l'instruction publique par Guillaume deHum-
boldt; celui-ci fut heureux de visiter le grand
proscrit, et l'on peut dire qu'avant de partir pour
Vienne il prit ses instructions , comme si le baron
de Stein était encore le premier ministre de la
Prusse. Que devait faire Guillaume de Humboldt
auprès du cabinet autrichien ? Travailler à la ré-
conciliation de la Prusse et de l'Autriche, ras-
sembler les forces de l'Allemagne, et se préparer
ainsi aux luttes suprêmes qu'on entrevoyait dans
l'avenir. Tel était le programme du baron de
Stein; ce fut aussi celui de Guillaume de Hum-
boldt. La tache n'était pas facile. Lorsque l'Au-
triche en 1805 s'était levée contre Napoléon, la
Prusse, trop faible encore, n'avait pu répondre
à son appel. Maintenant l'Autriche, atterrée à
son tour par cette foudroyante campagne de 1 809,
ne songeait plus qu'à restaurer ses finances et à
prolonger la paix. Le mariage de Marie-Louise
avec le vainqueur de Wagram ( avril 1810 ) éta-
blissait d'ailleurs entre l'Autriche et la France
des relations qui ajournaient les espérances de
Stein et de Humboldt. Il fallait attendre. Pen-
dant plus de deux ans, Humboldt demeura à
Vienne sans y remplir de rôle actif. Ses travaux
littéraires lui furent un précieux secours pendant
ces heures trop lentes; qui sait s'ils ne furent
pas aussi un excellent procédé diplomatique?
Surveillé, comme il devait l'être, par les repré-
sentants de la France , il dissimulait sans affec-
tation ses pensées et ses vœux. Un homme si
profondément occupé de recherches philologi-
ques n'était pas bien redoutable pour l'influence
française. Enfin l'heure de l'action sonne. La
Prusse, entraînée par la Russie, se soulève en
1813 contre le dominateur de l'Europe : quel
parti prendra l'Autriche? Pendant que le nord
de l'Allemagne est en feu ; pendant que la Prusse
entière est debout, la monarchie des Habsbourg
hésite encore. C'est alors que Guillaume de Hum-
boldt est à l'œuvre. Un congrès se réunit à
Prague ; la France y est représentée par le duc
de Vicence, la Russie par M. Anstett, l'Autriche
par M. de Metternich, la Prusse par M. de Hum-
boldt. Au milieu de ces terribles péripéties, dans
l'intervalle de ces batailles qui tenaient le monde
en suspens, les négociations étaient singulière-
ment compliquées. Chaque jour pouvait détruire
le travail de la veille. L'habileté, la présence
d'esprit, la persévérance, la raison supérieure
de M. de Humboldt finirent par triompher des
irrésolutions de M. de Metternich. Pour un Al-
lemand il n'y avait qu'une politique possible à ce
moment-là : unir l'Allemagne contre la France.
Humboldt réussit à la faire prévaloir, mais au
milieu de quelles difficultés sans cesse renais-
santes ! La veille du jour où le traité d'alliance
fut signé entre la Prusse et l'Autriche, il igno-
rait encore quelle serait l'issue des conférences.
Enfin, le 10 août 1813, l'Autriche signa le traité
qui l'engageait décidément dans la coalition de
l'Europe contre Napoléon. Le baron de Stein en
poussa un cri de joie, et dans une lettre au comte
de Munster, il fait honneur de cette résolution de
l'Autriche à l'influence de Guillaume de Humboldt.
Dans toutes les conférences diplomatiques de
1813 et de 1814, à Francfort, à Châtillon, à
Paris, au congrès de Vienne enfin, Guillaume de
Humboldt représenta la Prusse avec la même
supériorité d'esprit. Une perspicacité singulière,
une admirable netteté de principes , voilà ce qui
caractérisait chez lui le négociateur politique. Il
excellait à deviner les secrètes pensées de ses
adversaires, à découvrir les parties vulnérables
de leur argumentation, à les amener peu à peu
vers des principes qu'ils ne pouvaient rejeter sans
compromettre leur propre cause. A cette clarté
impitoyable de l'esprit il joignait souvent une
ironie fine, polie, tranchante, l'ironie d'un phi-
losophe grand seigneur. Le Mercure du Rhin,
507
rédigé par te fougueux. Joseph Genres , disait de
lui : « i est clair et froid comme un soleil de dé-
cembre. » M. de Talleyrand, habitué a se jouer en
maître de toutes. les difficultés de la diplomatie,
fut plus d'une fois déconcerté au congrès de
Vienne par l'argumentation du ministre prus-
sien. Ce n'était plus cette temporisation ingé-
nieuse, ces spirituelles ambages de M. de Met-
ternich, dont il connaissait si bien tous les se-
crets; Guillaume de Humboldt excellait dans la
discussion , et il obligeait ses adversaires à dis-
cuter avec lui. « L'Europe, dit un jour M. de
Talleyrand , n'a pas trois hommes d'État de cette
force. »
Le congrès de Vienne n'eut pas seulement à
régler les grandes questions internationales de
l'Europe; il s'occupa aussi de la réorganisation
intérieure de l'Allemagne. L'Allemagne devart-
elle profiter de ce remaniement universel pour
se constituée enfin comme une puissance uni-
taire? D'ardents esprits, et M. de Stein à leur
tète, étaient prêts aux plus grands sacrifices
dans l'intérêt de cette unité chimérique,. « L'Au-
triche, disait le baron de Stein , s'éloigne de plus
en plus de l'Allemagne; ses intérêts la poussent
de plus en plus vers l'Italie et l'Orient; c'est
un mal, un grand mal, que cet éloignement de
l'Autriche, et le seul moyen d'y porter remède,
c'est de rattacher forcément la monarchie des
Habsbourg à la patrie allemande en lui rendant
cet empire d'Allemagne détruit par les événe-
ments de 1806. » Étrange système chez un es-
prit aussi résolument prussien que Tétait le baron
de Stein t Guillaume de Humboldt combattit ce
projet dans un mémoire qui est un chef-d'œuvre
de raison. Un projet analogue de Capo-d^Ja-
trias fut réfuté par lui avec la même vigueur.
Ce qu'il y avait de triste ctans cette discussion,
c'est que tous ces mémoires , ceux de. M. Capo-
d'Istrias et du baron de Stein, coroine celui de
Guillaume de Humboldt, étaient adressés* l'em-
pereur Alexandre. C'était la Russie , au congrès
de Vienne, qui décidait des destinées de l'Al-
lemagne. Humboldt fut du moing un «tes, pre-
miers à comprendre tout ce qu'une telle situa-
tion avait d'humiliant pour son pays. Tandis, que
le bacon de Stein invoquait jg protectorat de
la Russie avec un patrfotfcœe, aveugle, tandis que
M. de Metternich s'en ^éfiajt au point de vue
spécial des intérêts autrôhjgns, Humboldt ne
commettait ni l'une ni l'autre de ces fautes^ Aussi
Allemand que M. de Stein, aussi opposé que
M. de Metternich au protectorat çje la Russie,
s'il voulait que l'Allemagne fû| forte, il voulait
aussi qu'elle ne dût sa force qu'à elle-même.
L'empereur de Russie savait bien que Guillaume
de Humboldt était peu ravorahje à sa politique;
lorsqu'il conclut avec l'empereur d'Autriche, et
le roi de Prusse cette singulière association qui!
appela lui-même la sainte alliance, il exigea de
Frédéric-Guillaume fil. que Humboldt n'en sût
, rien avant que tout fût terminé.
HU!yïÇO^)T §08
Guillaume de Humboldt, en J815, était au pre-
mier rang parmi les adversaires déclarés de la
France; s'il ne partageait pas les fougueuses
passions des Stein et des Blûcher, il voulait ce-
pendant nous imposer des pertes de territoire
plus graves encore que celles que nous avons
subies, et il a combattu sur ce point les inten-
tions plus conciliantes de l'empereur de Russie;
le mal qu'il a pu nous faire ne nous empêchera
pas de proclamer la gloire qu'il s'est acquise dans
ces délibérations du congrès de Vienne. L'histoire
impartiale doit reconnaître qu'il y a déployé
toutes les qualités d'un esprit supérieur et qu'il
a étonné la vieille diplomatie européenne par la
fermeté de ses principes, et la loyauté de sa dis-
cussion.
De 1815 à 1820, Guillaume de Humboldt oc-
cupa encore des postes considérables dans le
gouvernement de son pars, ambassadeur à
Londres, représentant de la Prusse à la diète de
Francfort, membre du ministère à Berlin, il con-
tinua de servir sa patrie avec le même dévoue-
ment Mais la politique <Je la Prusse avait bien
changé; une, réaction odieuse avait succédé à
1'entbousiasme dé la lutte, et Guillaume de Hum-
boldt n'était pas un, de ces diplomates qui chan-
gent de principes selon les circonstances. 11 s'a-
perçut bientôt qu'il était suspect au gouverne-
ment dont il faisait P ar % Quand les cabinets
allemands, en 1819, soui prétexte de poursuivre
la démagogie, mirent la main sur toutes, les li-
bertés nationales, qiuantt les héros de 1813 fu-
rent partout disgraciés, quanti c|es hommes tels
que le général Gneisenau turent obligés de se
retirer du service, Guillaume de Humboldt entra
en lutte avec ses collègues. Il aurait pu quitter le
ministère.; i| aima mieux l re&^r pour combattre
dans le conseil même cette, politique insensée. H
savait bien d'avance qu'il serait vajncu • par un dé-
cret du 31 décembre 1819, il fût exclu du minis-
tère et destitua de ses fonctions au conseil d'État.
Cette <hsgrâce éclatante, un <& se& plus beaux
titres, lui ropvTfc jja carrière de, l'étude. Le
29 juin, 1^20, \\ lui ^ l'Académie d^ Sciences de
Berlin, dont il eMt membre fam* 1910, w»
mémoire sur la pJtmV>logie, compactée; c'était le
programme de# twaux qui advient remplir la
An de sa. vie ei immortaliser sou nom.. A partir
de cette date, il pe se passe. n&s une an#$e oà
quelque mémojjpfcne. soit çoœjujuniqqé par lui 4
l'Académie., e£ chacun <fà ces. mémoires esj
comme, le. bulletin d'un conquérait qui s'a-
vance, ^ travers de^ régions inconnues. Quillaume
de ItumboHt est le yérifcafcte créateur de la phi-
lologie, comparée. Avant lui , de grands esprits,
flaroana, Herder., FhabUè grammairien Adetoog,
fe brillant et profond Frédéric Schl^egel, avaient
préparé h route et fourni quelquefois des m-
djpations de g&u> ; Humboldt est le premier qui
ait constitué la science, Il en embrasse à la fois
les plus hautes questions et les détails les plus
techniques. Sa philosophie des langues, ses vues
Ô09 HUMBOLDT
sur l'origine dn langage, sur cettç merveilleuse
création de l'hprame, création non pas réfléchie,
volontaire et successive, comme le voulait la
superficielle philosophie du dix-huitième siècle,
mais création spontanée , instinctive, et, en un
certain sens , toute divine , ses vues , disais-je,
sur ces redoutables problèmes révèlent un pen-
seur du premier ordre.. Qn n'a rien écrit de plus
profond depuis qqe ces questions occupent d'é-
minents esprits, et plus d'un philologue ^ont on,
admire l'originalité ne fait que. développer les
principes de Guillaume de Hnmboldt. Quant aux
connaissances spéciales de, linguistique sur les-
quelles repose sa philosophie 0u langage , elles
sont de nature à effrayer jes plus latorieux es-
prits. Langues de l'Asie, de (' Amérique, de la
Polynésie, sans parler des idiomes de notre Eu-
rope, voilà quels sont pour Guillaume de Hum-
boldtles matériaux delà philologie comparée. Il
étudie avec la même, précision les rapports de
la langue basque avec le$ anciennes populations
de l'Espagne, et lés rapports du sanskrit avec
l'idiome parlé dans }Tle de Java. Sans désigner
ici tant de dissertations du plus grand prix sur
tous les points delà philologie, il suffira de citer
son principal ouvrage : Ça Langue kawi dans
Vile de Java, 3 volumes in-4°. Ce livre est la
première pierre de l'immense monument qu'A
voulait élever. Il avait l'ambition de suivre toute
la série des langues qui se parlent dansTOcéanie
et dan,s les lies de la ççier du Sud, persuadé qû^l
retrouverait ainsi les anneaux de la chaîne qui
lie l'Amérique à l'Inde. If commença par l'île de
Java. l'A langue IVàwi , née dans cette île , ne
présente que des rapports fortuits avec le sans-
krit. Cen y estpas une langue inculte et populaire
comme les autres idiomes polynésiens, c'est une
langue poétique et savante, il suffit d'énoncer ce
programme pour faire comprendre quelle était
déjà, entre les mains d'un tel maître, la gran-
deur de la philologie comparée (1).
Les dernières années de Guillaume de Humboldt
furent remplies par les recherches de là science ,
les joies de la famille, et les méditations philoso-
phiques et religieuses, te stoïcisme de sa jeunesse
avait fini par s'adqucir ; il espérai^ dans une vie à
venir, bien qu'il n/et^ pas besoin, disanVil, de cet
espoir, pour aimer la vejftu et remercier la Pro-
vidence. Selon |ui, \e$ aroes qiu\ par le mérite de
leur vie , s'étaient créé, une personnalité , étaient
seules assurées de survivre aw eprps. Ç'étaitia pen-
sée d'Aristote, et puisqu'il n'avaitpu s'élever à la
croyance chrétienne, ou lui sait gré 4u moins d'a-
voir adopté ce principe; il a dû y trouver des con-
solations, car s'U était vrai que l'âme fût le propre
artisan de son immortalité , Guillaume de Hum-
boldt pouvait attendre avec confiance la dernière
heure de son existence terrestre. Retiré au château
de Tegel, sur les bords du lac de Spandau, il donna
(1) Les manuscrits de G. de H. sur les langues améri-
caines on tonraniennts vont être publiés par les soins
d** M. fliisch'nmi!».
510
jusqu'à sa mort l'exemple du travail, de la
loyauté et de la vertu. Sa femme, qui avait été
pour lui une compagne si digne, si dévouée, était
morte au mois de mars 1829, et cette séparation
l'avait frappé au cœur. Trois ans après, il vit
mourir l'auteur de Faust Gœthe, Schiller, Caro-
line de Humboldt, tous les amis de sa jeunesse
avaient quitté ce monde ; de cette grande géné-
ration, son frère seul restait encore. Épuisé par
ses longs travaux, presque aveugle, Guillaume de
IJumboldt sentit bientôt ses forces s'affaiblir; son
esprit, du moins, ne se voila pas; il mourut le
8 avril 1835, à soixante-huit ans, dans toute la vi-
gueur de sonintelligence, dans toute la sérénité de
son âme, et au moment où ce pur esprit s'envola
de sa prison, sa bouche récitait encore, comme
une prière, les vers des poètes qu'il avait aimés.
Saint-René Taillandier.
Les Œuvres complètes de Guillaume de Humboldt ont
été publiées par Charles Brahdes, avec une préface
d'Alexandre de Humboldt; Berlin, 7 volumes, I8*t-
i&jf*. - V. sur Gutlteome de Humboldt sa Çtoçra^Me
par M. Gustave Schlesler;- l'ouvrage du même auteur
Intitulé : Erirtiœrungen an Wilhetm von Humboldt,
s voL; Stuttgart, 184S-18M ; et le savant livre de M. Ro-
bert Hayra, tTilAelm von. tfrwboMt Letwisbild und
Charakteristik; Berlin, 18(6.
J humboldt (Frédéric-Henri- Alexandre,
baron de ) , le plus grand savant de notre épo-
que, frère du précédent, naquit à Berlin, le
14 septembre 1769. Il était fort jeune lorsqu'il
perdit son père, qui s'était distingué dans la
guerre de Sept Ans comme adjudant du duc Fer-
dinand de Brunswick. De 1787 à 1789, il étudia
aux universités de Trancfort-sûr-rOder et pte
Gœttingue, où il eut, entre autres, pour maîtres
Gottlob Heyne et Blumenbach. Dans l'intervalle
des vacances, il fit des excursions géologiques au
Ôarz et aux bords du fthin, et en publia les ré-
sultats sous le titre de tlber die Çasalte ani
Rhein, nebst Ùntersuchungen ùber §yenùund
Basanit der Alten ( Sur les Basaltes du Rhin ,
ainsi que recherches sur le syénite et le hasa-
nïte, etc. ) ; ce fut là le début de ses nombreux
et importants travaux. Le goût pour les voyages
se développa en lui dé bonne heure, et il ra-
conte lui-même comment : « Élevé, dit-il , dans
un pays qui n'entretient aucune communication
directe avec les colonies des deux Indes , habitant
des montagnes , éloigné des côtes , je sentis pro •
gressivement se développer en moi une vraie
passion pour la mer et pour de longues naviga-
tions. Le goût des herborisations, Fétude de la
géologie, une course rapide faite en Hollande
(au printemps, 1790), en Angleterre et en
France, avec un homme célèbre, M. Georges
Forster, qui avait eu le bonheur d'accompagner
le capitaine Cook dans sa seconde navigation
autour du gjobç, contribuèrent à donner une
direction déterminée aux plans de voyage que
j'avais formés à l'âge de dix -huit ans. Ce n'était
plus te désir de ^agitation et de la vie errante ;
c'était celui de voir dé près une nature sauvage,
majestueuse et variée dans ses productions ; c'é-
511
HUMBOLÙT
512
tait l'espoir de rechercher quelques faits utiles
aux sciences, qui appelaient sans cesse mes vœux
vers ces belles régions situées sous la zone tor-
ride. Ma position personnelle ne me permettant
pas d'exécuter alors des projets qui occupaient
si vivement mon esprit, j'eus le loisir de me
préparer pendant six ans aux observations que
je devais faire dans Je nouveau continent (!).•»
Après le retour de son excursion avecForster,
M. de Humboldt, destiné d'abord aux finances,
passa quelques mois à l'école de Busch et Ebe-
ling à Hambourg; mais, dès juin 1791, il suivit les
cours de Werner à la célèbre école des mines de
Freiberg, où il se lia d'amitié avec Léopold de
Buch et André del Rio. 11 profita de son séjour
à Freiberg pour étudier surtout la flore souter-
raine, sujet alors peu exploré, et il résuma ses
observations dans un ouvrage fort intéressant
( Spécimen Florx subterranem Fribergensis
et aphorismi ex physiologia chemica planta-
rum; Berlin, 1793, in-4°), qu'il dédia à son maî-
tre, le célèbre botaniste WÛldenow (2). Nommé
assesseur au conseil des mines , il remplit , de
1792 à 1797 , les fonctions de directeur général
des mines d'Anspach et Bayreuth. Ces fonc-
tions administratives ne l'empêchaient pas de
se livrer à des recherches multipliées sur les
mofettes, sur une lampe propre à servir dans
les galeries souterraines, sur un appareil de
respiration d'après les principes de Beddoes;
en même temps il recueillit, dès Tannée 1792,
lorsqu'il apprit les expériences de Galvani,
les matériaux nécessaires à la publication d'un
ouvrage important, encore aujourd'hui souvent
cité, sur l'irritabilité des fibres musculaires et
nerveuses ( Uber die gereitzte Muskel und
Nerfenvaser, nebst Vermuthungen ûber den
Chemischen Procès» des Lebens in der Thier
und Pfianzenwelt) ; Berlin, 1797-99, 2 vol.
in-8°) ; enfin il fut le collaborateur de Schiller
pour le journal que le grand poète faisait paraître
sous le titre de Die Horen ( Les Heures ).
C'est ici que se présente, dans le développement
de la vie scientifique de M. de Humboldt, une
phase qu'il importe de signaler. L'illustre savant
croyait alors à l'existence de la force vitale ,
qu'il avait définie « une cause inconnue , empê-
chant les éléments d'obéir à leurs affinités pri-
mitives (3). » Cette théorie, mise dans la bouche
du philosophe Épicharme, fut développée , sous
(l) Voyage aux régions équinoxiales du Nouveau Con-
tinent.
(t) Cet opuscule fut, l'année suivante , traduit en alle-
mand par O. Fischer, accompagné de notes par Hedwig,
et d'une prérace par F. Ludwig ( Leipzig, 1704, in-8°).
(3) Voici ce qu'il dit, entre autres, dans les JphorUmes
qui accompagnent sa Flora Fribergensis subterranea :
« Rerum naturam si totam considères, magnum atque du-
rabile, quod Inter elementa intercedtt, diserimen perspi-
ctes, quorum altéra affinitatnm legibus obtempéra utla,
altéra, vinclis solutls, varie juncta apparent... Vimin-
, ternam, quae chymtca? affinitatis vincula solvft, atque
obstat quonilnus elementa corporum libère conjungantur,
vitalem vocamus, etc. »
forme allégorique, dans le Génie rhodkn , notice
gracieuse, qui plut singulièrement à Schiller
( Horen, 1795), et que M. de Humboldt repro-
duisit, à la prière de son frère Guillaume, dans
les Tableaux de la Nature, Mais, dès 1797,
depuis ses expériences sur l'irritabilité des fibres
musculaires et nerveuses , l'existence des forées
vitales ne lui paraissait nullement démontrée, et
il le déclara lui-même. « Depuis lors, dit-il, je
n'appelle plus force ce qui n'est peut-être que
l'effet de l'action simultanée des substances par-
ticulières et des forces physiques... Je nomme
vivante toute substance dont les parties arbitrai-
rement séparées changent, après leur séparation,
d'état moléculaire sous l'influence des conditions
extérieures permanentes. La rapidité avec la-
quelle les parties organiques, détachées d'un or-
gane vivant , changent d'état moléculaire, varie
beaucoup : le sang des animaux se transforme plus
vite que le suc des végétaux , les champignons
se décomposent plus vite que les feuilles d'ar-
bre , etc. En général , plus la vitalité ou l'irrita-
bilité est grande , plus la matière animée change
rapidement d'état moléculaire , après sa sépara-
tion (1). v La mort de sa mère, en 1796, excita
encore davantage le désir de voyager : il rési-
gna ses fonctions administratives, et s'initia, soas
le baron de Zach , à l'astronomie pratique. Après
quelques mois de séjour à Iéna et à Vienne, il
partit avec son ami L. de Buch pour l'Italie,
dans le but d'y étudier les volcans. Mais lesguerres
dont le pays était devenu le théâtre les firent re-
noncer à leur entreprise, et ils passèrent l'hiver
de 1797-98 à Salzboiirg et à Berchtesgaden, s'oc-
cupant de météorologie. Là M. de Humboldt fat
invité par lord Bristol à se joindre à une expé-
dition qui devait se faire dans la haute Egypte.
H accepta avec joie, et se rendit à Paris
pour acheter les instruments nécessaires à
cette expédition;, mais presque au même mo-
ment il apprit le départ de Bonaparte pour l'E-
gypte (en mai 1798), et l'arrestation de lord
Bristol à Milan. 11 reçut le meilleur accueil à
Paris de la part des savants , tels que Laplace
et Berthollet ; il y fitconnaissance avec son futur
compagnon de voyage , Aimé Bonpland , et le
Directoire lui permit de se joindre, avec tous ses
instruments , à l'expédition de Baudin ( voy. ce
nom). Celle-ci ayant été ajournée, il résolut de
prendre part à l'expédition française d'Egypte, par
suite de l'offre d'un bâtiment que lui avait faite le
consul suédois Skiôldebrand. Mais la frégate
suédoise qui devait le transporter à Tunis tar-
dant à venir, il partit avec M. Bonpland pour
l'Espagne, où il passa l'hiver de 1798-99. L'em-
pressement que mit le ministre espagnol , Luis
de Urquijo, a lui faciliter les moyens de. visiter
les possessions des Indes, le fit changer de
plan, et le 5 juin 1799 il s'embarqua avec
(l) Tableaux de la Nature, édlt. de 1849. t. II, p. *7i-
V7S, de notre traduction (Paris, 18M, in-8*»). Compares
aussi le Cosmos , 1. 1, p. 73 (de la traduction de M. Fayc)
613
HUMBOLDT
514
son ami à La Corogne , sur la frégate le Pizzaro.
Le navire échappa heureusement aux croisières
anglaises, et mouilla le 19juin dans te port de Santa-
Cruz. Les deux amis firent l'ascension du pic de
Ténériffe et explorèrent l'île en naturalistes. Enfin
le 16 juillet ils touchèrent, au port de Cumana,
pour la première fois le sol d'Amérique. Ils em-
ployèrent dix-huit mois à explorer les provinces
4)e l'État de Venezuela, arrivèrent en février i 800
à Caracas, quittèrent le littoral à Puerto-Caballo,
pour gagner l'Apure et de là le Cassiquiar, qui
réunit l'Orénoque avec l'Amazone. Le souvenir
de ce voyage a fourni à M. de Humboldt quel-
ques-unes des plus belles pages de ses Tableaux
de la Nature.
« Lorsqu'on a dépassé les vallons de Caraeas et le
lac de Tacarigua, où se mirent les bananiers j lors-
qu'on a quitté les champs parés de la verdure tendre
et transparente de la canne à sucre de TaTti ou le
sombre feuillage des cacaoyers, la vue se repose, au
sud , sur les steppes qui bordent l'horizon dans un
insaisissable lointain. De ce paysage , animé par une
luxuriante végétation, le voyageur étonné arrive à la
lisière aride d'un désert dénué d'arbres et couvert
de rares herbes. Pas une colline , pas un rocher ne
surgit comme un Ilot dans cet espace incommensu-
rable. Seulement quelques fragments de couches sé-
dimenteuses gisent épars sur une surface de deux
cents lieues carrées, et paraissent plus élevés que
le terrain environnant. Les indigènes leur donnent
le nom de bancs , comme si par une sorte d'intuition
ils avaient deviné cet état primitif où ces élévations
étaient des bas-fonds, et les steppes mêmes le lit
d'une vaste mer méditerranéenne. Au milieu de cette
nature grande et sauvage vivent des peuplades di-
verses, séparées par une singulière dissemblance de
langages : les uns , comme les Otomaques et les Ta-
roures, sont nomades, mangent des fourmis , de la
gomme et de la terre ; d'autres , comme les Ifariqui-
tains et les Macos , ont des demeures fixes , se nour-
rissent de fruits cultivés, sont intelligents et de
mœurs douces. De vastes espaces entre le Cassiquiare
et l'Atabapo sont habités non par des hommes, mais
par des tapirs et des singes réunis en société. Des
figures gravées sur des rocs montrent que cette so- .
litude même était jadis le siège d'un certain degré
de civilisation... Dans l'intérieur de la steppe, c'est
le tigre et le crocodile qui font la guerre au cheval
et au taureau ; sur ses bords boisés, c'est l'homme
qui s'arme perpétuellement contre l'homme. Là,
quelques peuplades dénaturées boivent le sang de
leurs ennemis ; d'autres, en apparence sans armes,
mais préparées au meurtre, donnent la mort avec
l'ongle empoisonné de leur pouce ; les tribus plus
faibles, en foulant la rive sablonneuse, effacent
soigneusement avec leurs mains la trace de leurs
pas timides. Ainsi, dans la barbarie la plus abjecte ,
comme dans l'éclat trompeur d'une civilisation
raffinée , l'homme se crée toujours une vie de mi-
sère. Le voyageur qui parcourt l'espace, comme
l'historien qui interroge les siècles, a devant lui le
tableau attristant, uniforme de la discorde hu-
maine (I). »
Le bassin de l'Orénoque était encore peu connu
avant le voyage de MM. de Humbold t et Bonpland*
(I) Tableaux de la Nature (ehap. Sur les steppes et
U* déserts), t. I,p. 13 H, et p. 40-41 (de notre trad.).
MODV. B10GR. eÉNÉR. — T. XXY.
Le premier trouva à ce fleuve, par le delta que
forment ses bras , par la régularité, par la quan-
tité, et par la grosseur de ses crues, une grande
analogie avec le Nil. Ces deux fleuves se res-
semblent encore en ce que, d'abord torrents
impétueux» ils se frayent un passage entre des
montagnes de granit et de syénite, et coulent en-
suite lentement, bordés de rivages sans arbres
et sur une surface presque horizontale. Leurs
sources n'ont été encore visitées par aucun Eu-
ropéen. L'Orénoque est du nombre de ces fleuves
singuliers qui, après avoir serpenté à l'ouest et
au nord, finit par s'infléchir tellement à l'est,
que son embouchure se trouve presque au même
méridien que ses sources. Du Chiguire et Ge-
hatté jusqu'au Guaviare, il- court à l'ouest
comme s'il allait porter ses eaux à l'océan Pa-
cifique. Dans ce trajet, il envoie au sud un bras
remarquable, le Cassiquiare, qui se réunit au
rio Negro, exemple unique d'une bifurcation de
deux grands bassins tout à fait dans l'intérieur
d'un continent. La nature du sol et la jonction
du Guaviare et de l'Atabapo avec l'Orénoque
font dévier ce dernier brusquement au nord.
C'est par une erreur géographique qu'on avait
longtemps pris le Guaviare, affluent de l'ouest,
pour la véritable origine de l'Orénoque. Les
doutes que le géographe Buache éleva, en 1797,
contre la possibilité d'une jonction de rorénoque
avec le fleuve des Amazones furent complètement
dissipés par l'expédition de M. de Humboldt,
qu'une navigation non interrompue de deux cent
trente milles géographiques , à travers un bizarre
réseau de rivières, conduisit du Rio Negro
par le Cassiquiare dans FOrénoque , c'est-à-dire
depuis les frontières du Brésil , par l'intérieur
du continent, jusqu'au littoral de Caracas. Le
périlleux passage des cataractes d'Aturès et May-
pnrès forme un des épisodes les plus intéres-
sants de cette première expédition , déjà si riche
en résultats. A son retour au littoral, M. de Hum-
boldt vint à La Havane pour se rendre par le
Mexique aux lies Philippines. Il abandonna
ce plan à la nouvelle que les deux corvettes le
Géographe et Le Naturaliste doubleraient le
cap Hora et viendraient aborder à Callao de
Lima. Pour joindre le capitaine Baudin , M. de
Humboldt loua aussitôt un bâtiment qui le trans-
porta de l'Ue de Cuba à Carthagène ( en mars
1801). Mais l'expédition de Baudin prit une
route toute différente de celle qui avait été an-
noncée : au lieu de doubler le cap Horn, elle
doubla le cap de Bonne-Espérance. Ce contre-
temps lui fit manquer l'un des buts de son voyage
au Pérou et du dernier passage de la chaîne des
Andes. En novembre il fut favorisé par un beau
temps, bien rare pendant la mauvaise saison dans
la contrée brumeuse du bas Pérou , ce qui lui
permit d'observer à Callao le passage de Mercure
sur le disque du Soleil , observation importante
pour la détermination exacte de la longitude de
Lima et de toute la partie sud-ouest du Nouveau
17
515
HUMBOLDT
516
Monde. Cette reprise de son voyage le conduisit i
de Carthagène an platée» de Bogota, après deux .
mois de navigation sur le fleuve la Magdeletae. ,
H visita, en traversant la cordillère de Qoindiu, la
volcan de Popay an, le Paramo d'Almaguer, le haut |
plateau de Los Pastes, et atteignit Qaito le a jan- j
vier 1809. Cinq mois lurent consacrés à l'expie- j
ration de la hante vallée de Quito et de la chaîne (
des volcans à cimes neigeuses , qui l'enseignent.
Dans son ascension du Ohhnborsjw , qui passa
longtemps pour la plus haute montagne du
globe (1), il s'éleva à 18,096 pieds, hauteur à
laquelle aucun homme n'était encore parvenu ; fl
ne lut restait plus que 200 pieds à monter pour en
atteindre le pic, lorsqu'il fut arrêté par une pro-
fonde crevasse qui s'ouvrait comme un goufre
devant les pieds du hardi voyageur. Franchis-
sant le Paramo de Assuay, défilé des Andes, il
descendit par Cuenca et les forêts de quinquina
de Loxa dans la vallée de l'Amazone supérieure
près de Jaen de Braeamoros; puis, traversant
le plateau de Caxamarca, fl atteignit Micoi-
pampa et le penchant occidental des cordillères
du Pérou. Ce fut de l'Alto de Guangamarca,
d'une hauteur de 9,000 pieds, qu'A jouit pour
la première fois de la vue de l'océan Pacifique,
magnifique spectacle, ranimé pour ainsi dire par
un souvenir d'enfance, par la lecture de l'expé-
dition de Yasco Nufiez de Balboa, le hardi com-
pagnon deFr. Pizarre. Voici comment l'illustre sa-
vant rend lui-même admirablement ce spectacle :
• Après avoir franchi bien des ondulations du sol,
nous atteignîmes enfin le point le plus élevé de
Y Alto de Guangamarca. La voûte céleste, long-
temps voilée, s'éclaircit soudain à une forte brise sud-
ouest, dissipa le brouillard. L'aior foncé de l'air at-
ténué des montagnes perçait entra les flocons serrés
des plus hauts nuages. Toute la pente occidentale
des cordillères , près de Chorifloset de Cascas, cou-
verte d'énormes blocs de quartz, les plaines de Chala
et de Molinos jusqu'au rivage près de Truxillo , gi-
saient là comme sous nos yeux. Nous aperçûmes
alors distinctement l'océan Pacifique, reflétant près
du littoral beaucoup de lumière, et reculant les
bornes de l'horizon dans un vague lointain. La joie
vive que je partageai avec mes compagnons de
voyage, Bonpland et Carlos sfontuf ar ( qui était venu
se joindre à nous à Quito ) nous fit oublier d'ouvrir
le baromètre sur l'Alto de Guangamarca... L'aspect
de l'océan Pacifique, eut quelque chose de solennel
pour celui qui devait une partie de son éducation
et ses désirs naissants à l'un des compagnons du
capitaine Gook fll). »
« Après avoir erré dix-huit mois dans l'intérieur
des montagnes, nous sûmes le désir bien naturel
de jouir de l'aspect libre de la mer; ce désir avait
été encore alimenté par les illusions auxquelles nous
étions souvent entraînés. De la cime du volcan
Pichincha, d'où la vue s'étend par-dessus les forêts
de la province de las Xsmeraldas, on ne distingue
(l) On sait aujourd'hui que c'est l'Ancien Monde qui
possède la plot haut* nontafiM du glofce : l'Bverest,
pie de l'Uimalaya, vient de détrôner le Kuntchindjlnga,
le Djawalhlr et le Uhawalagbiri de la même chaîne.
(S) Tableaux de la Nature, t. Il, p. Sis etsulv.
plus nettement rhorlfon de la mer » le regard
plonge du point on l'on est placé oomase du haut
d'un ballon aérostatique % on croit entrevoir, mais
on n'aperçoit plus rien, Quand nous eûmes atteint ,
entre Loxa et Guanea-Baroba, le Paramo de Gua-
raani, où gisent épars les débris de beaucoup d'é-
difices dlncas, nos muletiers nous assuraient que
nous apercevrions la mer, au delà de la plaine , su
delà dfos dépressions de Piura et de Lomhajèque.
Mais un brouillard épais voilait la plaine et le fit-
votai lointain ( nous visses sesussnent des usasses de
rochers de formes bizarres surgir et disparaître tour
l tour, comme des Iles au-dessus d'une mer de
brume ondoyante , spectacle pareil à celui dont
nous avions joui sur le pic de Ténériffe.... Le désir
que l'on a de von* certains objets ne dépend pas
seulement, il s'en faut, de leur grandeur, de leur
beauté eu de leur importance i il s'y mêle, dans
chaque nomme , accMentettsment à beaucoup d'im-
pressions de la jeunesse une vieille prédilection pear
certains travaus . le penchant pour k» choses loin-
taine* et pour un vie agitée. Des difficultés en ap-
parence insurmontables leur prêtent un channe
nouveau. Le voyageur jouit d'avance du mosneut où
il verra la crois du Sud* tes nues de MianMtn , oui
tournent autour du pôle austral, ta neige du Omsq-
boraao, la colonne de fumée des volcan* 4a Quito,
un bois de fougères en arbres, le ealsna de l'Océan
Les jours de ces impressions ineffaçables, si vive-
ment désirées» font époque dans la vie d'un bsenass. •
M. de Humholdt et ses compagnons arrivèrent
le M mars 1908 à Aeapuleo, après avoir tombé à
Callaoet Guayaquit. De Hk, fts allèrent visiter la
capitale du Mexique, où ils séjournèrent plusieurs
mois, la province Mechoacan et le volcan Joruelo.
De retour à Mexico, M. de HumboJdt mit en ordre
ses riches collections, puis il fit rasceanjon du
volcan de Toiuca (auquel il trouva 14,932 pieds de
haut), et dn Oofre de Perote ( de fl,S*8 pieds), et
se rendit à travers des forêts de chênes de Xafopa
à Tera-Craz , où régnait alors la fièvre janne, à
laquelle il échappa heureusement. Le 7 mars
1 804 il quitta le rivage du Mexique, et fit voile pour
La Havane, où il passa encore dix mois. La il
s'embarqua , avec M. Bonpland et Montufer, pour
Philadelphie, et reçut à Washington l'aecueil le
pins amical de Jeflerson ; enfin, quittant le juin
le Nouveau Monde , il arriva le 3 août 1804 à
Bordeaux, après cinq ans d'absence de l'Europe,
pendant lesquels il s'était passé bien des événe-
ments.
Les résultats de ce voyage d'exploration, si
important pour la géographie, l'ethtMgrapMe,
la géologie et l'histoire naturelle de f Amérique,
ont été consignés dans une œuvre monumentale,
divisée en sept parties, dont chacune forme un ou-
vrage à part. La l re partie a pour titre : Voyages
aux régions équinoxiales du Nouveau Con-
tinent; Paris, 1809-26, 3 voL uv8% édit» al-
lemande; Stuttgard, 1825-32, in-8°; otast is
relation historique proprement dite, avec an
atlas géographique , géologique et physique; —
2 e partie : Vue des ^Cordillères et Monuments
des Peuples indigènes de V Amérique; % Paris,
1810, gr. in-fol. , avec 69 phmehes; 1810, 2 voL
517
HUMBOLDT
518
in-»°, avec 19 planches; on y trouve figurés et
décrits les principaux monuments de la civili-
sation primitive du Nouveau Monde, particuliè-
rement du Mexique et du Pérou ; — 3* partie :
Recueil tf Observations de Zoologie et d'Ana-
tomiè comparée; Paris, 1805-32, 2 vol.; —
4 e partie : Bssai politique sur le Royaume de
la Nouvelle-Espagne; ibid., 1811, 2 vol. in-4%
avec atlas; le texte seul, 1811, 5 vol. in-*° :
c'est, sous un titre modeste , un ouvrage qui
contient des vues d'économie politique très-éle-
vées; il embrasse à la fois les richesses miné-
rales, l'agriculture, l'industrie, le commerce,
les finances et la défense militaire de ces régions,
aujourd'hui si divisées; — 6 e partie ; Recueil
d l Observations astronomiques, d'Opérations
trigonométriques et de Mesures barométriques
(revues et calculées par J. Oltmanns); ibid.,
1808-10, 2 vol. in-4* ; il comprend toutes les ob-
servations faites par l'auteur depuis le 12° de lat.
australe jusqu'au 41° de lat. boréale, plus un
tableau de plus de 700 positions géographiques,
dont 235 ont été pour la première fois retrou-
vées par lui; — 6* partie ; Physique générale
et Géologie; Paris, 1807 ; — 7 e partie : Essai
sur la Géographie des Plantes; ibid., 1806,
en aUem.; Tubingue, 1807 : dans cet ouvrage,
plus développé dans De Distributione geogra-
phiea Plantarum secundum cœli temperiem
et altitudinem montium, Paris, 1817, in-4°,
M. de Humboldt s'est montré l'un des créateurs
de la géographie botanique. A cette partie se
rattache un herbier de plus de 5,000 espèces
phanérogames , dont la moitié jusqu'alors in-
connue des botanistes , et qui fut d'abord donné
sous le titre de Plantes équinoxiales recueil'
lies au Mexique, dans Vile de Cuba, etc.,
Paris, 1809, 2 vol. gr. in-fol., avec 144 planches,
et dans Monographie des Mélastomes et au-
tres genres du même ordre, ibid., 1809-23,
2 vol. gr. in-fol., avec 120 planches color. Ces
matériaux furent enfin mieux classés et décrits
par S. Kunth, dans le grand ouvrage intitulé :
Nova Gênera et Species Plantarum quas in
peregrinatione ad plagam xquinoctialem Or-
bis Novi collegerunt, descripserunt et adum-
braverunt A. Bonpland et Alex, de Hum-
boldt; Paris, 1815-25; Paris, 7 vol. in-fol., avec
700 planches; puis, dans Mimoses et autres
Plantes légumineuses du Nouveau Conti-
nent , rédigé par C. S. Kunth, ibid., 2 vol. gr.
in-foL, 1819-24, avec planches coloriées ; dans
Synopsis Plantarum quas in itinere ad pla-
gam xquin. Orbis Novi collegerunt fj. et B.,
Slrasb. et Paris, 1822-26, 4 vol. in-fol. ; et dans
Révision des Graminées, etc., précédée d'un
travail sur cette famille par S. Kunth, Paris,
1829-34, 2 vol. gr. in-fol., avec 220 planches co-
loriées. A cette collection de magnifiques tra-
vaux se rattache enfin l'Essai politique de Vile
de Cuba; Paris, 1826.
M. de Humboldt fit paraître tous ces ouvrages
pendant son séjour à Paris (de 1805 à 1827).
Dans cet intervalle, il trouva encore le loisir de
s'occuper de chimie, d'analyser avec Gay-Lussac
l'air atmosphérique, de collaborer avec Berthollet
aux Mémoires de la Société d'Arcueil (l)et aux
Annales de Physique et de Chimie, et de faire
(1805) avec Gay-Lussac et Léop. de Buch ( voy.
ces noms) un voyage en Italie, pour faire des
observations hypsométriques sur le Vésuve, Ces
observations, il les renouvela avec plus de soin
et dans des circonstances plus favorables, dix-
sept ans plus tard, lorsqu'à l'époque du congrès
de Vérone (1822), il accompagna feu le roi de
Prusse à Naples. Déjà antérieurement , il avait
(1807 à 1808) rempli une mission politique pen-
dant le séjour du prince Guillaume de Prusse à
Paris, puis il avait accompagné son frère , Guil-
laumede Humboldt,dans son ambassade à Londres
( 1814 ), et fait plusieurs excursions en Angleterre
et en Allemagne (en 1818 lors du congrès d'Aix-
la-Chapelle), avec son illustre ami Arago et avec
M. Valenciennes.
Ce n'est qu'à partir de 1827 que M. de Hum-
boldt se fixa définitivement à Berlin, où, avec
le titre de conseiller intime, il n'a pas cessé
de jouir de la faveur méritée du feu roi de
Prusse Frédéric-Guillaume III et de son suc-
cesseur Frédéric-Guillaume IV. Ami de presque
tous leurs ministres , il a pu souvent leur don-
ner d'utiles conseils ; et s'il n'a pas été lui-même
secrétaire d'État, c'est qu'il a toujours mieux
aimé la science que l'administration des af-
faires. Ce qui prouve d'une manière incontes-
table cet amour extrême et vraiment désinté-
ressé de la science, c'est qu'à un âge où il
aurait pu , à l'exemple de tant d'autres , se re-
poser des labeurs d'une vie si bien remplie , à
soixante ans, M. de Humboldt ne craignit pas
d'entreprendre un des voyages les plus périlleux.
Comme il avait passé sa jeunesse à l'exploration du
Nouveau Continent, il voulut consacrer encore
ses vieux jours à la connaissance de la partie la
moins accessible et la plus mystérieuse de l'an-
cien monde. En 1829, il parcourut, en compa-
gnie de deux amis, Ehrenberg et Gustave Rose,
l'Asie centrale. Cette expédition, entreprise sous
les auspices de l'empereur Nicolas , se dirigea
à l'est par Moscou, Kasan, Catherinebourg, les
monts Ourals, Nishné-Tagilsk , Bogoslowsk,
Tobolsk et Altaï ; de là elle rayonna jusqu'aux
postes militaires de la Chine, près du lac Dsaï-
sang, dans la Dzongarie. De l'Altaï, les intrépides
voyageurs, retournant à l'ouest, passèrent par
les steppes dlschim, Omsk, Miask, le lac Umen,
Orenbonrg, Astrakan, la mer Caspienne, Sara-
tow, Sarepta, Woronesch, Tula, et revinrent à
Moscou, après avoir fait plus de 2,300 milles
géographiques dans un espace de neuf moi».
M. de Humboldt a communiqué les principaux
résultats de cette expédition, si importante pour
(t) C'est dans ce célèbre recueil qoe partit, en t«l",
son Mémoire sur Us Lignes isothermes.
17.
519
HUMBOLDT
520
la minéralogie, l'orographie et la climatologie,
dans son Asie centrale , recherches sur les
chaînes de montagnes et la climatologie com-
parée, Paris, 1843,3 Toi. in-8°;édit. allemande,
par Mahlmann, Berlin, 1843-1844, 2 vol. (1).
Le voyage de l'Asie centrale enrichit les Ansich-
ten der Natur ( Tableaux de la Nature), dont
la 1" édition avait paru en 1808, de nombreuses
additions qui en firent un livre presque nouveau,
publié à Berlin, 2 vol. in-12, 1849 (3 e édit.) (2).
Ces additions portent particulièrement sur les
steppes et Déserts et les éclaircissements
qui accompagnent cet admirable tableau. Les
rapprochements que l'auteur fait entre les déserts
de l'Afrique et les pampas de l'Amérique et les
steppes de l'Asie sont d'une saisissante vérité.
C'est dans ce nouveau voyage que l'illustre
voyageur a particulièrement battu en brèche
l'existence de ce prétendu plateau central de
l'Asie admis depuis Marco-Polo par presque
tous les géographes. En se trouvant dans la
Dzougarie chinoise, entre les frontières de la
Sibérie et le lac Saysan (Dsaîsang), à une
distance égale de la mer Glaciale et de l'em-
bouchure du Gange, il avait bien lieu de se
croire dans l'Asie centrale; cependant, le ba-
romètre lui apprit bientôt que le bassin de
l'Irtisch supérieur, entre l'Ustkamenogorsk et le
poste dzungaro-chinois de Chonimaïlachou, est
situé à peine à onze cents pieds au-dessus du
niveau de la mer. Le lac Baïkal lui-même n'est
qu'à 1332 pieds au-dessus du même niveau. Un
plateau élevé, mais d'une hauteur très-inégale,
se dirige, à part quelques faibles interruptions,
du sud-sud-ouest au nord-nord-est, depuis le
Thibet oriental jusque vers le noyau des mon-
tagnes de Kenteï, au sud du lac Baïkal ; il porte
les noms de Gobi, de Schamo , de Schaho et de
Hanhaï. Ce renflement du sol est situé entre le
79° et le 116° de longitude orientale de Paris.
Le bassin de Caschmir avait également donné ,
lieu à des exagérations hypsométriques , et le
plateau du Thibet, entre le 71° et 83° longitude
orientale, n'atteint pas tout à fait une hauteur
moyenne de dix- huit cents toises, ce qui est à
oeine la hauteur de la plaine fertile de Caxamarca
lans ïe Pérou ; mais il est inférieur de 2 1 1 toises à
la hauteur du plateau de Titicaca, et de 337 toises
au-dessous du niveau des rues de la ville supé-
rieure de Potosi. Il n'appartenait qu'à M. de Hura-
boldt de faire de ces rapprochements orographi-
ques qui, d'une manière si grandiose, mettent l'An-
cien Monde en contact avec le Nouveau. Sa Carte
des Chaînes de Montagnes et des Volcans de
VAsie centrale, tracée en 1839, et publiée
seulement en 1843, rectifie bien des erreurs
(1) La relation historique a été donnée par M. G. Rose,
dans Mtouraloçisck-geoçnoiUsche Reisc nach dem
Vrai, Altax «t dem Catpischen Me*re ; Berlin, 1887-18*2,
«vol., ln-8».
(l) Il en existe denx traductions françaises, publiées
presque simultanément, l'une de M. Galusky (Gide), et
l'autre du signataire de ce» arUele ( Elrmin Oidot ).
longtemps accréditées, et diffère ainsi radicale-
ment de toutes les cartes du même genre qui ont
paru jusqu'à ce jour. Indiquant à grands traits la
direction moyenne et la hauteur des chaines de
montagnes, elle représente l'intérieur du con-
tinent asiatique depuis 30° jusqu'à 60° de la-
titude, entre les méridiens de Péking et de
Cherson. — Ce fut à la suite de cette expédi-
tion que l'Académie de Saint-Pétersbourg établit,
sur la proposition de M. de Humboldt, des
stations magnétiques et météorologiques qui
s'étendent de Saint-Pétersbourg à Peking. Cet
exemple fut imité par le gouvernement anglais
pour l'hémisphère austral.
Après la révolution de 1830, M. de Humboldt
fut chargé par Frédéric-Guillaume m de recon-
naître , de la part de la Prusse , l'avènement du
roi Louis-Philippe. Depuis lors il renouvela,
presque chaque année , ses voyages à Paris, à la
grande satisfaction des nombreux amis et admi-
rateurs qu'il y compte depuis si longtemps. Vers
cette même époque il élabora et fit impri-
mer son Examen critique de la Géographie
du Nouveau Continent; Paris, 1835-38;
5 vol. in-8 4 ( édit. allemande par Ideler, Berlin,
1836 , 3 vol. ) , ouvrage plein de recherches
d'érudition. Son dernier séjour à Paris , qu'il a
toujours tant aimé, est de 1847 à 1848 ( d'octobre
à janvier). Nous ne mentionnerons qu'en pas-
sant deux petits voyages qu'il fit, l'un en 1841,
à Londres, en accompagnant le roi Frédéric-
Guillaume IV, qui tint sur les fonts de baptême
le prince de GaUes , l'autre en 1845 , à Copen-
hague. — Bien que l'illustre voyageur n'ait jamais
revu l'Amérique , où son nom est devenu si po-
pulaire, il s'est toujours vivement intéressé aux
progrès de la civilisation dans ce jeune et grand
continent. C'est sur les instances de M. de Hum-
boldt qne le général Bolivar fit, en 1828 et 1829,
exécuter par Loyd et Falmore un nivellement
exact de l'isthme de Panama entre Panama et
l'embouchure de la rivière de Chagres (l). D'an-
tres travaux, tels que tracés de canaux, de che-
mins de fer, d'écluses, de tunnels , ont été faits
depuis par d'habiles ingénieurs français. Mais
dans ces travaux, exécutés dans la direction mé-
ridienne, entre Porto-Bello et Panama, ou à
l'ouest, vers Chagres et Cruces , les points les
plus importants, signalés par M. de Humboldt,
points dirigés de l'est et du sud-est de l'isthme,
sont des deux côtés du littoral restés inaper-
çus. « Tant que cette partie, ajoute l'illustre sa-
vant, n'aura pas été représentée géographique-
ment par des déterminations exactes de latitude
et de longitude, faciles à exécuter, et hypomé-
triquement, en mesurant avec le baromètre les
reliefs du sol, je regarde le jugement, aujour-
d'hui encore (en 1849) si diversement répété,
savoir que l'isthme de Panama est impropre à
l'établissement d'un canal océanique (canal qui
(l) Philosoph, Transaet , 1890, p. 19.
5*1 HUMBOLDT
aurait moins d'écluses que le canal calédonien),
et, indépendamment des saisons, au libre pas-
sage des vaisseaux venant du Chili et de la Ca-
lifornie, ou de New-York et de Liverpool,
comme non fondé et tout à fait téméraire. » (1)
Le même qui, il y a plus d'un demi-siècle,
explora le Nouveau Monde, et qui à rage de
soixante ans visita l'Asie centrale, le même
homme entreprit, octogénaire, de passer en
revue, dans une oeuvre monumentale, l'en-
semble des connaissances humaines sur le ciel
et la terre. Le premier volume du Cosmos (édit.
allemande) parut en avril 1845, et le quatrième,
que nous avons sous les yeux, au commence-
ment de 1858. C'est dans cet ouvrage qu'il faut
chercher les vues générales de M. de Humboldt
sur le domicile planétaire départi au genre
humain , en même temps que là part de gloire
qui lui revient dans les progrès des sciences.
Le Cosmos est la synthèse du monde physique ;
c'est sur une grande échelle le développement
des Tablejiux de la Nature : dans l'un comme
dans l'autrelivre l'auteur a voulu montrer que la
forme sévère de la science, ou ladescription rigou-
reuse des phénomènes du globe , peut très-bien
s'allier avec une peinture animée des scènes de la
nature. H aurait complètement réussi dans cette
tâche ardue, si une certaine coquetterie de sa-
vant, qui perce surtout dans les notes, n'avait
pas rendu la lecture du Cosmos un peu fati-
gante pour les gens du monde, eux qui ne se fâ-
chent jamais quand , pour être, plus clair, on les
suppose plus ignorants qu'ils ne sont. D'un autre
côté, les savants et les érudits, qui goûteront fort
ces notes hérissées défaite etde citations ,ne trou-
veront pas au texte cette gravité didactique qui
repousse le profanum vulgus , et qui est pour
les initiés un des ornements nécessaires de la
science. 11 faut être bien habile dans le grand art
d'instruire et de plaire pour ne pas échouer contre
l'un de ces deux redoutables écueils. Mais lais-
sons là notre critique, et bornons-nous à dire
très-sommairement ce que le Cosmos renferme.
L'ouvrage débute (2) par des considérations
sur les sensations ou jouissances variées que pro-
cure l'aspect et l'étude de la nature. En première
ligne se place cette sensation générale de bien-
être qui résulte du simple contact de l'homme
avec la nature : cette mise en présenee du grand
Tout « adoucit la douleur et apaise les passions
quand l'âme est péniblement agitée » ; c'est le
pouvoir calmant qu'exerce sur nous le pressen-
timent d'une harmonie à jamais troublée. Puis
vient la sensation que produit en nous l'aspect
d'un paysage, la configuration de la surface du
globe dans des limites définies : la lutte des élé-
ments déchaînés , la nudité des steppes et des
déserts , la vue de champs fertiles , etc., excitent
522
des émotions de ce genre. L'auteur évoque ici,
avec bonheur, le souvenir d'une de ces nuits tro-
picales où les étoiles « versent une douce lumière
sur la surface mollement agitée de l'Océan » ; puis
il rappelle « ces vallées profondes des Cordillères,
dans lesquelles les stipes élancés des palmiers,
agitant leurs panaches, percent les voûtes végé-
tales, et forment, en longues colonnades, une
forêt sur la forêt». L'uniformité des variations
atmosphériques (1) et les contrastes de climats
et de végétation suivant la différence des hau-
teurs semblent, dans la zone torride , refléter
l'invariabilité des lois qui gouvernent les mouve-
ments célestes. Les détails que l'auteur fournit
à l'appui de ces peintures sont aussi beaux
qu'abondants. Malheureusement, cette abondance
même des détails à côté des pensées générali-
satrices, cette richesse de souvenirs et d'incidents
font souvent perdre au lecteur le fil conducteur.
Une troisième jouissance, plus raffinée , naît de
la connaissance des lois de la nature : l'homme
se plaît à trouver, comme disait Schiller, « le
pôle immuable dans l'éternelle fluctuation des
choses créées ». Mais l'auteur ne veut point, et en
cela il a bien raison, des rêveries de la philosophie
de la nature. Après ce préambule il trace à
grands traits et d'une main sûre le tableau de
l'univers depuis les nébuleuses et les étoiles jus-
qu'à l'écorce terrestre et la distribution des vé-
gétaux et des animaux sur le globe. Les roches
qui composent notre planète, et dont nous ne con-
naissons guère que la surface, M. de Humboldt
les divise en quatre classes : 1° roches d'éruption,
sorties de l'intérieur du globe, ou volcaniquement
(à l'état de fusion ), ou plutoniquement (à l'état
de ramollissement ) ; 2° roches de sédiment, pré-
cipitées ou condensées dans un milieu liquide, où
elles étaient primitivement dissoutes ou en suspen-
sion; 3° roches métaphoriques, dont la texture
et le mode de stratification ont été altérés, soit
par le contact ou la proximité d'une roche d'é-
ruption volcanique ou plutonique, soit par l'ac-
tion des vapeurs et des sublimations qui accom-
pagnent le soulèvement de certaines masses à
l'état de fluides ignés; 4° conglomérats, formés
des débris des trois roches précédentes divisées
mécaniquement. — Dès 1817, M. de Humboldt
eut l'heureuse idée de rendre la distribution de
la chaleur sur le globe par une représentation
graphique analogue à celle que Halley avait ima-
ginée pour le magnétisme terrestre. Les lignes
isothermes, isothères et isochimènes , repré-
sentant les températures moyennes annuelles es-
tivales et hivernales, a fourni depuis une base
certaine à la climatologie. Pour s'en faire une
idée bien nette, il faut partir de l'hypothèse qui
suppose la terre formée de couches homogènes,
ayant partout la même faculté d'absorber les
(1) Tableaux de la Nature ; dernière édit., t. II, p. 337
et sofv. ( de la trad. de M. Hœfçr ).
t«) Le 1» volume du Cosmos a été traduit en français
par M. H. Faye; Parts, 1846, tn-8».
(1) M. de Humboldt a l'un des premiers signalé la ré-
gularité des fnaxima et minima du baromètre dans 1rs
régions équinoxiales, ce qui permet d'y employer cet
instrument pour ainsi dire en guise d'horloge.
533
HUMBOLDT
524
rayons solaires et Je même pouvoir de rayonner la
chaleur vers les espaces célestes. Dans cette hy-
pothèse, les lignes isothermes, isothères et iso-
chimènes seraient tontes parallèles à l'équateur
et les mêmes à la surface du globe , à parité de
latitude. Or, tout ce qui fait varier (et c'est là ee
qui a toujours lien en réalité ) les pouvoirs ab-
sorbants et émissifs, dérange le parallélisme de ces
lignes. Ces inflexions, les angles sous lesquels
les lignes isothermes , isothères et isochimènes
coupent les cercles de latitude, la position dn
sommet de leur convexité on de leur concavité
par rapport an pôle de l'hémisphère correspon-
dant, sont des effets de causes qui modiôent plus
ou moins profondément la température sons les
diverses latitudes. C'est par là que M. de Hum-
boldt est arrivé à fonder la géographie des plantes
et des animaux sur des bases scientifiques. — Le
deuxième volume contient le tableau de l'histoire
des sciences; « le reflet du monde extérieur dans
l'imagination de l'homme » en forme la première
partie, et l'essai historique sur le développement
progressif de « l'idée de l'univers » la seconde.
C'est snrtout dans ce volume que l'auteur révèle
sa triple qualité de savant, de peintre et de pen-
seur (1). Après y avoir poursuivi le développe-
ment de Tidée de l'univers dans le temps, il re-
vient à V espace occupé par les corps célestes.
C'est là le sujet du troisième volume, exclusive-
ment consacré à l'astronomie (2). La zone des
astéroïdes, dont le nombre augmente tons les ans,
porta M. de Humbotdt à diviser les planètes en
trois groupes : 1° les planètes intérieures (Mer-
cure, Vénus, Terre, Mars), situées plus près du
Soleil, et en deçà des astéroïdes : elles sont
toutes de grandeur moyenne, un peu plus
petites que la Terre, relativement très-denses ,
peu aplaties, douées d'un mouvement de rotation
à peu près uniforme , de vingt-quatre heures au
moins, et dépourvues de satellites, à l'exception
de la Terre; 2° la zone intermédiaire des asté-
roïdes, qui se font remarquer par leur petitesse
ainsi que par l'excentricité et l'inclinaison de
leurs orbites; 3° les planètes extérieures (Jupi-
ter, Saturne, Uranus, Neptune), situées entre là
zone des astéroïdes et les extrémités encore in-
connues du système solaire , sont beaucoup plus
grandes, cinq fois moins denses, d'un mouve-
ment de rotation plus rapide, d'un aplatissement
plus sensible, et toutes pourvues de satellites.
Les observations de M. de Humboldt sur la lu-
mière zodiacale, probablement un effet du rayon-
nement de l'atmosphère solaire, méritent d'être
prises en considération par les astronomes. « C'est
surtout des régions tropicales, où les phénomènes
météorologiques montrent dans leurs variations le
plus d'uniformité et de régularité, qu'il est permis
(1) La traduction française de ce volume est de M. Ga-
losky ; Paris, 1848. /
(t) La première partie de ee volume (comprenant l'as-
tronomie stellalre) a été traduite par M. Paye; Paris,
1881 ; et la deuxième partie par M. Ualusky, ibid., 1888.
d'attendre des éclaircissements Sur la nature de la
lumière zodiacale. » Dans le quatrième volume,
paru en 1858 (1), entièrement consacré à la
physique du globe, l'auteur développe avec l'au-
torité du martre plusieurs points qu'il n'avait fait
qu'ébaucher dans le premier volume; tels sont,
entre autres, le magnétisme terrestre (lignes iso-
gones, isoclines et isodynames), les tremblements
de terre et la lone des volcans. Fidèle à sa méthode,
l'auteur traite ces intéressants sujets sous le double
rapport dé l'histoire et de la science du Cosmos f
eu entendant par ce mot l'enchaînement des phé-
nomènes terrestres et des phénomènes célestes.
« Rien de ce qui se passe sur notre planète ne sau-
rait, dit-il, être conçu sans une connexité cosmi-
que. Déjà le nom de planète ind ique sa dépendance
d'un corps central, des rapports avec un groupe
de corps célestes de grandeur différente, mais
probablement d'une même origine. On soup-
çonna de bonne heure l'influence du Soleil sur
le magnétisme terrestre, et Kepler avait même
supposé que tous les axes des planètes étaient
dirigés magnétiquement vers le même point du
«tel; et, suivant ce grand astronome, le Soleil
était lui-même un corps magnétique , doué de
la force qui fait mouvoir les planètes. «—Attentif
à tous les travaux de ses contemporains, M. de
Humboldt a toujours sain de conduire la science
jusqu'au moment même ou il écrit. Ainsi, en
analysant les découvertes relatives à l'intensité
du magnétisme terrestre , auxquelles il eut lui-
même une grande part, il arrive jusqu'aux va-
riations séculaires qui ne reposent encore que su-
un très-petit nombre d'observations , et il cite à
ce sujet celles qui ont été faites à Toronto, an
Canada, de 1845 à 1849, et qui paraissent montrer
une diminution magnétique. La périodicité des incli-
naisons, dont il parle ensuite , n'est connue d'une
manière certaine que depuis le fonctionnement
des stations magnétiques établies par le gouver-
nement britannique dans les deux hémisphères. H
en résulté, ce qu'avait déjà reconnu Arago, à sa-
voir que l'inclinaison magnétique est plus grande
à neuf heures du matin qu'à six heures du soir,
pendant que l'intensité de la force magnétique
(mesurée par le nombre des oscillations de l'ai-
guille horizontale) a son minimum dans la pre-
mière et son maximum dans la seconde pé-
riode. Quant aux variations de déclinaison,
M. Lambnt, cité par M. de Humboldt, y reconnut
une période de dix ans et huit mois. Dans l'in-
tervalle de 1841 à 1850, les moyennes des décli-
naisons mensuelles avaient leur mimnttwenl843
et leur maximum en 1848. Cette période décen-
nale coïncide, chose remarquable, avec la fré-
quence décennale des taches du Soleil.
Mais arrêtons-nous dans cette incomplète ana-
lyse du Cosmos. A part quelques défauts, qui ne
tiennent qu'à la forme ou à l'enchevêtrement des
détails, c'est un ouvrage qui restera : monumen-
(i) La traduction française n'en a pas encore paru.
525
HUMBOLDT — HUME
62(5
twm serepertnnius. Bien que produitànn âge que
peu d'hommes atteignent, il rappelle, par la vi-
gueur du style et la fraîcheur de l'imagination,
les oeuvres de la jeunesse de l'auteur.
Tandis que, par une lof fatale, tous les hommes,
à partir de quatre-vingts ans et souvent plus tôt,
voient leurs fatuités décliner et s'éteindre,
M. de Humboîdt, Menttt nonagénaire, semble,
par one faveur spéciale du elel, Nre exception
à cette loi de la nature t c'est que la eonscisnoa
d'avoir bien accompli sa mission terrestre est
seule capable d'entretenir et de ranimer ainsi,
jusqu'au moment suprême, l'étincelle de la vie
et du génie. Celai qui, par la multiplicité de ses
travaux et par les progrès qu'il a (ait ftdreà toutes
les sciences qo'H a cultivées, mérite le surnom
<YAristotemodern€> a en même temps noblement
consacré sa haute position à servir ses sembla*
blés : bien des savants doivent leurs places, leurs
honneurs et même leur renommée aux conseils
et à l'influence légitime do doyen des associés
de l'Institut de France et du conseiller favori du
roi de Prusse. — La Prusse a produit, dans deux
genres bien différents, deux hommes dont elle
s'enorgueillit a Juste titre : Frédéric H et Alexan-
dre de Humbolt. F. H.
Lftweoberg , A. V. ttumboldt, IlêUêfi In Jmertka and
Atien ; Berftn, iim. - PaMtttt tsatr, Lmt oftk* *r».
iàiri ummbûUt t uMn tan. ~ kims** Ji* r. n*m~
boldt, êiu Hograyh. DnUtmai ; Uipm, 1WI , t* édit. -
Convertations-Leïilum. - Gaisriedet Contemporains.
HtJMB (David), philosophe et historien an-
glais, né à Edimbourg, le 3 avril 1711, mort
dans la même ville, le 25 août 1776. H apparte-
nait à une branche peu fortunée de la famille
des comtes de Home ou Hume ; et comme il
était le frère cadet, il n'eut qu'un petit patri-
moine. Encore en bas âge, il perdit son père, et
sa mère le destina à la jurisprudence, mais ses
inclinations l'entraînèrent vers une autre carrière.
* Je suivis avec succès, dit-il dans son autobio-
graphie, le cours ordinaire de l'éducation, et je
fus saisi de bonne heure d'un goût pour la littéra-
ture, qui a été la passion dominante de ma vie
et la grande source de mes jouissances. Mes dis-
positions studieuses et mon intelligence firent
croire à ma famille que j'étais propre à la juris-
prudence; mais j'éprouvais une insupportable
aversion pour tout ce qui n'était pas recherches
philosophiques et savoir en général; et tandis
qu'on me croyait occupé sur Vînnius et Voet, je dé-
vorais secrètement Cicéron et Virgile. » — « Notre
éducation de collège en Ecosse, ajoute- t-il, déten-
dant peu au delà des langues, finit ordinairement
quand les écoliers ont quatorze ou quinze ans.
A cet âge je fus abandonné à mon choix pour
mes lectures , et je me sentis une inclination
presque égale pour les livres de raisonnement
et de philosophie , pour la poésie et les belles-
lettres. Quiconque est familier avec les philoso-
phes et les critiques sait qu'il n'y a rien d'établi
dans aucune de ces deux sciences, et qu'elles ne
contiennent guère que des disputes sans fin ,
même sur les articles fondamentaux. A leur
examen je sentis croître en moi une certaine au-
dace d'esprit qui, loin d'être inclinée à se soumettre
à aucune autorité sur ces matières, me condui-
sait à chercher une nouvelle méthode qui pût
établir la vérité. » Le voeu le plus ardent du jeune
homme était de se consacrer aux lettres, mais
la médiocrité de sa fortune ne lui permettait pas
de réaliser oe plan de vie, et sur les instances
lie sa famille il fit une faible tentative pour entrer
dans une carrière lucrative» U se rendit à Bristol
en 1734, et devint commis ches un riche mar-
chand. Quelques mois de cette profession le dé-
goûtèrent complètement du commer*ce. Il passa
en France, où la vie était moins chère, et avec
l'intention d'y poursuivre ses études dans une
ville de province. U s'établit d'abord à Reims, où
il séjourna peu, puis à La Flèche, où il passa près
de trois ans, uniquement occupé de méditations
philosophiques et de ses rêves de réputation. Le
séjour de La Flèche en lui rappelant la gloire de
Descartes l'encourageait à tenter la même entre-
prise ; mais il n'eut pas, comme le philosophe
français, la patience de mûrir lentement ses
Idées, et II les livra au public avec l'ardeur im-
prévoyante de la jeunesse. Rentré en Angleterre
à la fin de 1787,11 publia, au moisde février 1739
son Traité sur la Nature humaine. U avait
fondé d'immenses espérances sur cet ouvrage, qui
devait selon lui changer complètement la philo-
sophie (produce a total altération in philo-
sopha). Un peu déconcerté de voir que le monde
marchait comme avant, et que la philosophie
n'était pas renversée, il alla cacher son désap-
pointement dans la résidence maternelle, à Ni-
newells. Cet échec hâta chez lui l'expérience.
Laissant de côté l'ambitieux projet d'embrasser
la nature humaine dans une grande théorie, il
traça de courtes esquisses, qu'il publia en 1741,
sous le titre d'Essais de Morale et de Poli-
tique. Ce petit recueil, qui à force de révisions et
d'additions devint plus tard un chef-d'œuvre, eut
un modeste succès, dont l'auteur, moins exigeant
que la première fois, sut se contenter. En 1745
il fut attaché au marquis d'Annandale, qui à
cause de son triste état mental avait besoin
d'un compagnon. Cette position de secrétaire d'un
maniaque avait, malgré d'assez grands avantages
pécuniaires, quelque chose d'humiliant que Hume
ressentit avec amertume et dont il garda long-
temps le souvenir. En quittant le marquis d'An-
nandale il trouva une situation plus convenable
auprès du généra) Saint-Clair, qui l'emmena
avec lui en 1746 comme secrétaire d'ambassade
à Vienne et à Turin. « Ces deux années , dit
Hume, sont presque la seule interruption qui ait
été apportée à mes études dans le cours de ma
vie; je les passai agréablement et en bonne
compagnie; et mes appointements, avec mon
économie, me permirent d'acquérir une fortune
que j'appelais indépendante , quoique beaucoup
de mes amis fussent disposés à sourire quand
527
HUME
528
je pariai* ainsi; bref, j'étais maintenant maître
de près de mille livres. » De retour dans sa
retraite de Ninewels, il composa ses Discours
Politiques, qui formèrent la seconde partie de
ses Essais, et ses Recherches sur les Principes
de la Morale, où il reprit les doctrines du Traité
sur la Nature humaine. Ces deux ouvrages
parurent en 175), l'un à Edimbourg, l'antre à
Londres ; et, tandis que le premier obtenait un
grand succès , le second passa inaperçu. Vers la
même époque, Hume, qui avait perdu sa mère,
quitta Ninew ells et Tint s'établir à Edimbourg.
11 y était depuis quelques mois lorsque la faculté
des avocats le choisit pour son bibliothécaire. Ses
appointements furent une utile addition à son
petit revenu ; mais, bientôt choqué des observa-
tions des curateurs de la faculté, il renonça à
son traitement en faveur de Blacklock, le poète
aveugle. Il se contenta de l'avantage d'avoir à sa
disposition trente mille volumes. Trouvant dans
ce riche dépôt d'amples matériaux pour une
histoire de la maison des Stuarts, il se mit aus-
sitôt à l'œuvre. Le premier volume de cet ou-
vrage parut en 1754.
Hume avait de grandes prétentions à llmpar-
tialité, et il fat surpris d'être accusé de tontes
parts de ne voir les choses que d'un côté. « Je
lus assailli, dit-il, par un cri universel de re-
proche, de désapprobation et même d'exécration.
Anglais, Écossais et Irlandais, whig et tory,
homme d'église et sectaire, libre penseur et dé-
vot, patriote et courtisan, unirent leur rage
contre l'homme qui avait osé verser une larme
sur le sort de Charles F r et du comte de Straf-
ford ; quand les premières ébullitions de leur furie
furent apaisées, le livre, ce qui était encore plus
mortifiant, sembla tomber dans l'oubli. M. Millar
(le libraire) me dit que dans douze mois il n'en
avait vendu que quarante-cinq exemplaires.....
J'étais, je l'avoue, découragé; et si la guerre
n'eût pas en ce moment éclaté entre la France et
l'Angleterre, je me serais certainement retiré
dans quelque ville de province du premier de ces
royaumes ; j'aurais changé mon nom, et je ne se-
rais jamais plus retourné dans mon pays natal.
Mais comme ce projet n'était plus praticable et
que mon prochain volume était considérablement
avancé, je résolus de prendre courage et de per-
sévérer. » Entre le premier et le second volume,
il publia son Histoire naturelle de la Religion,
qui fut violemment attaquée par le docteur Hurd.
Le second YolumeàeY Histoire d? Angleterre, qui
embrasse la période depuis la mort de Charles I er
jusqu'à la révolution de 1688, parut en 1756.
« Ce volume, dit-il, eut le bonheur de donner
moins de déplaisir aux whigs, et fut mieux reçu ;
non-seulement il se soutint par lui-même , mais
il aida à relever son malheureux frère. » L'His-
toire de la Maison de Tudor fut publiée en 1759,
et deux volumes contenant Y Histoire de V An-
gleterre aumogen dge complétèrent l'onvrageen
1761. Arrivé à ce moment de sa vie, Hume, dans
Bon autobiographie, se félicite un peu naïvement
du succès de son œuvre. « Malgré la variété des
vents et des saisons auxquels mes écrits avaient
été exposés, dit-il , ils avaient assez réussi pour
que les droits d'auteur que me payait le libraire
surpassassent tout ce qu'on avait vu jusque-là en
Angleterre. Je n'étais pas seulement indépendant,
mais opulent. Je me retirai dans ma contrée na-
tale (il avait fait récemment un séjour à Londres),
bien décidé à ne remettre jamais les pieds
dehors, et avec la satisfaction de n'avoir jamais
présenté de requête à aucun homme en place, de
n'avoir même jamais cherché l'amitié d'aucun. »
Cette fière détermination ne fut pas de longue
durée. Le comte d'Hertford lui proposa, en 1763,
de raccompagner à Paria en qualité de •secrétaire
d'ambassade. Hume se fit un peu prier; mais
enfin le désir de revoir la France l'emporta sur
l'amour de la retraite. Sa réputation l'avait de-
vancé à Paris, et il y fut reçu avec une faveur
qui tenait de l'engouement A sa première visite
à Fontainebleau, les témoignages d'admiration
dont il fut accablé, même de la part des membres
de la famille royale, l'embarrassèrent un peu,
mais il s'y habitua vite. A Versailles le dauphin
voulut le présenter à ses trois fils. Ces enfants,
qui devaient être rois tous trois, et dont la vie
devait être si tragiquement agitée, débitèrent an
philosophe de petits compliments qu'on leur avait
fait apprendre. Le plus jeune (depuis Charles X),
alors âgé de six ans, avait oublié sa leçon et ne
put prononcer quequelques paroles inintelligibles.
« Toute cette nation, écrivait Hume à Ferguson,
depuis la famille royale jusqu'au dernier éche-
lon, semble avoir pris à cœur de me persuader,
par toutes espèces de marques d'estime, qu'elle me
considère comme un des plus grands génies du
monde. Je ne crois pas que Louis XTV lui-même
ait jamais eu à endurer pendant trois semaines
autant de flatteries. » — « Vous me demandez,
écrivait-il encore à Robertson, quel est mon genre
de vie : je ne mange que de l'ambroisie, je ne
bois que du nectar, je ne respire que de l'encens,
je ne foule que les fleurs. Tous les hommes, et
plus encore toutes les femmes que je rencontre,
croiraient manquer au devoir le plus indispen-
sable en ne m'adressant pas une longue et com-
pendieuse harangue à ma louange. » — «M. Hume
doit aimer la France , dit Grimm ; il y a reçu
l'accueil le plus distingué et le plus flatteur. Paris
et la cour se sont disputé l'honneur de se sur-
passer. Cependant M. Hume est bien aussi hardi
dans ses écrits philosophiques qu'aucun philo-
sophe de France : ce qu'il y a de plus plaisant,
c'est que toutes les jolies femmes (1) se le sont
(1) Une des pins spirituelles des dames à la mode, la
comtesse de Boufflers, lut écrivait : « Mais quelles expres-
sions employeral-Je pour vous faire connaître l'effet que
produit sur mol votre divine Impartialité? J'aurais besoin
en cette occasion de votre propre éloquence, pour bien
rendre ma pensée. En vérité , Je crois avoir devant Ira
yeux l'ouvrage de quelque substance céleste, dégng-c des
529
HUME
580
arraché et que le gros philosophe écossais se platt
dans leur société. C'est un excellent homme que
David Hume ; il est naturellement serein. Il en-
tend finement, il dit quelquefois avec sel, quoi-
qu'il parle peu ; mais il est lourd et n'a ni cha-
leur, ni grâce, ni agrément dans l'esprit, ni rien
qni soit propre à s'allier au ramage de ces char*
manies petites machines qu'on appelle jolies
femmes. » A côté de cette esquisse de Grimm ,
il faut placer une petite anecdote racontée par
M™* d*Èpinay. H était alors de mode de jouer des
proverbes dans les salons. Sur sa réputation
d'homme de génie, on crut Hume très-propre à
ce genre d'exercice. « H fit son début chez M. de
T..., dit M œe d'Épinay. On lui avait destiné le
rôle d'un sultan entre deux esclaves, employant
toute son éloquence pour s'en faire aimer; les
trouvant inexorables, il devait chercher le sujet
de leurs peines et de leur résistance. On le place
sur un sofa entre les deux plus jolies femmes de
Paris : il les regarde attentivement, il se frappe
sur le ventre et les genoux à plusieurs reprises,
et ne trouve jamais autre chose à dire que : « Eh
bien, mesdemoiselles... eh bien, vous voilà
donc... eh bien, vous voilà... vous voilà... » Cette
phrase dura un quart d'heure sans qu'il pût en
sortir. »' Cette mésaventure ne nuisit pas à Hume,
et les jolies femmes continuèrent à se l'arracher;
« Il est de tous les soupers fins, ajoute M me d'É-
pinay, et il n'y a point de bonnes fêtes sans lui. »
Lorsque lord Hertford fut, en 1765, nommé lord
lieutenant d'Irlande, Hume resta à Paris comme
chargé d'affaires jusqu'à l'arrivée du duc de Rich-
mond. Il retourna en Angleterre en 1766, et em-
mena avec lui J.-J. Rousseau. Cette liaison, si
vite suivie d'une brouille éclatante, fut pour Hume
une cause de nombreuses contrariétés. Sa popu-
larité parisienne en souffrit même un peu, quoique
les torts ne fussent pas de son côté. Depuis la
publication de sa correspondance on peut suivre
dans ses lettres à Blair les progrès et le déclin
rapide decette amitié. Sous des apparences lourdes
et froides, Hume, qui cachait delà vivacité et une
certaine tendance à l'enthousiasme, s'était pris
de goût et d'admiration pour l'insociable philo-
sophe de Genève. Il souriait à l'idée de lui mé-
nager une agréable retraite en Angleterre. En
vain s'entendait-il dire qu'il ne serait pas arrivé
à Calais sans s'être brouillé avec lui , il persista
dans son projet. Un ou deux mois suffirent pour
lui en montrer l'imprudence. Il avait eu d'abord
l'intention d'établir son hôte chez un jardinier
français de Fulham. Un riche propriétaire, M. Da-
venport, offrit à Rousseau un asile dans sa mai-
son de campagne du comté de Derby. Rousseau
accepta, malgré Hume, qui, commençant à le con-
naître, redoutait pour lui les suites de ce confi-
nement. « Il sera absolument sans occupation,
écrit-il à Blair, sans compagnie et presque sans
passions/qui pour l'utilité a daigné écrire les événements
ie ces derniers temps. »
amusement d'aucun genre. Il a très-peu lu du-
rant le cours de sa vie, et il a maintenant tout
à fait renoncé à la lecture. Il a vu très-peu , et
n'a aucune espèce de curiosité de voir ou d'ob-
server. Il a, à proprement parler, réfléchi et étudié
fort peu, et n'a pas en vérité beaucoup de savoir.
Il a seulement senti durant tout le cours de sa
vie; et, à cet égard, sa sensibilité s'élève à un
degré qui dépasse tout ce que j'ai vu jusqu'ici;
mais elle lui donne en outre un sentiment plus
aigu de la peine que du plaisir. Il est comme un
homme qui serait dépouillé non-seulement de
ses vêlements , mais encore de sa peau, et qui
dans cet état aurait à lutter avec les éléments
tumultueux qui troublent perpétuellement ce bas
monde. » Dans cette disposition d'esprit, Rous-
seau, livré à lui-même, au fond d'une solitude,
se créa les plus sombres chimères. Il en vint à
croire que Hume s'était entendu contre lui avec
les philosophes de Paris, et lavait attiré en An-
gleterre pour le faire oublier. Plein de cette idée,
il écrivit à Hume une lettre insensée où il expri-
mait les soupçons les plus injurieux, et donnait
à quelques faits vrais une odieuse et extravagante
interprétation. Le philosophe écossais,* qui aurait
dû avoir pitié d'une monomanie dont il avait si
finement décrit la cause , ne sut pas résister à
un premier mouvement d'indignation. H s'écria
que Rousseau était sans comparaison le plus noir
et le plus atroce coquin qui existât au monde,
et il publia leur correspondance. Tous les torts
étaient évidemment du côté de' Rousseau ; mais
le procédé final de Hume manquait de délicatesse.
H devait compatir aux manies d'un génie malheu-
reux, et ne pas les révéler avec une cruelle in-
discrétion. Après avoir clos par une publication
au moins inutile ce singulier épisode de sa vie,
Hume, qui semblait tenir un peu moins à l'in-
dépendance depuis qu'il possédait la fortune,
devint sous-secrétaire d'Etat en 1767. Il quitta les
affaires avec le général Conway en 1768, et re-
tourna à Edimbourg, «fort riche, dit-il (il possédait
un revenu de mille livres (26,000 f. par an), bien
portant, et avec perspective de jouir longtemps
de son aisance, et de voir les progrès de sa ré-
putation. » Son espoir ne se réalisa qu'incomplè-
tement, et il n'atteignit pas un âge avancé. Une
dyssenterie chronique dont il fut atteint depuis
1774 fit des progrès alarmants dans les premiers
jours de 1776. Le malade vit sans anxiété et sans
regret sa fin approcher graduellement, et il s'é-
teignit presque sans douleur. Hume a laissé de
lui-même un portrait un peu trop flatteur sans
doute, mais suffisamment exact pour que nous
le citions ici : « J'étais, dit-il, d'un tempéra-
ment doux, qui se possédait facilement, ou-
vert, sociable, gai, capable d'attachement, peu
susceptible de haine , et né avec beaucoup de
modération dans toutes mes passions, te désir
de me distinguer dans la carrière des lettres, qui
fut toujours ma passion dominante, ne m'a ja-
mais aigri le caractère, quoique j'aie vu tant de
531
HUME
&81
fois mes espérances renversées. Ma société n'était
désagréable ni à la jeunesse frivole, ni aux. per-
sonnes studieuses et instruites. Et comme je trou-
vais un plaisir singulier à fréquenter les femmes
modestes et vertueuses, j'eus toujours à me louer
de leurs procédés envers moi. Plusieurs hommes
éminents par leur sagesse ont eu , je le sais, de
justes raisons dé se plaindre de la calomnie;
mais je ne fus pas même atteint par sa dent en*
venimée; et quoique je me sois imprudemment
exposé àla haine des factions civiles et religieuses,
elles semblaient avoir perdu toute leur fureur à
mon égard : mes amis n'eurent jamais besoin dt
justifier un seul trait de mon caractère ni une
seule circonstance de ma conduite. »
Comme métaphysicien David Hume fut émt-
nent, quoique ses idées soient loin d'avoir la ri-
gueur scientifique qu'on leur a attribuée. Il était
sceptique, mais d'un scepticisme plus étendu que
profond et qu'il n'éleva Jamais à la hauteur d'un
système philosophique ; 11 s'en servit comme d'un
instrument contre ce qui lui paraissait des pré*
jugés en morale et en religion ; et 11 prétendit que
cette guerre était un jeu. ïl attaqua tes principes
de la religion naturelle en affectant pour eux un
respect qu'il ne ressentait pas (1). Il conseillait
la même réserve, la même dissimulation à ré*
gard du christianisme. Au colonel Edmonstone,
qui le consultait au sujet d'un jeune homme qui
éprouvait des scrupules au moment d'entrer dans
les ordres , il répondait t « C'est trop respecter
le vulgaire et ses superstitions que de se piquer
de sincérité à leur égard. S'est-on jamais fait un
point d'honneur de dire la vérité aux enfant* et
aux fous f Si la chose méritait d'être traitée sé-
rieusement, je lui dirais que l'oracle pythien,
avec l'approbation de Xénophon, avertit chacun
d'adorer les dieux établis par les lois de la ville.
Je voudrais qu'il fût encore en mon pouvoir
d'être hypocrite sur ce point. Les communs de-
voirs de la société l'exigent habituellement, et la
profession ecclésiastique ajoute bien peu à cette
innocente dissimulation ou plutôt simulation
sans laquelle il est impossible de vivre dans le
monde. » Ce curieux passage contient toute la
pensée de Hume. On volt que certaines réserves
de ses écrits sont de simples précautions dont
il ne faut pas tenir compte. Son scepticisme est
illimité. Admettant que toutes nos idées nous
viennent des sens, il prétend que, comme les
sens ne peuvent nous fournir que des notions in-
certaines et Illusoires, nous ne savons rien avec
certitude. Selon lui , nous ne connaissons à vrai
dire que nos idées, et il nous est impossible de
savoir si ces idées correspondent à des objets
réels. « L'esprit, dit-il, est une espèce de théâtre
(l) Par prudence il n'avait pas publié une de ses pre-
mières œuvres , les Dialogues sur la Philosophé» natu-
relle, dont le scepticisme agressif aurait eteite la colère
du elergé; mais il laissa daas son testament les indica-
tions les plus précises , les plus péremptoires pour la
publication aussi prompte que possible de cet ouvrage.
où chaque perception fait son apparition, passe
et repasse dans un continuel changement... Que
cette métaphore de théâtre ne nous abuse pas;
c'est la succession de nos perceptions qui cons-
titue notre esprit , et nous n'avons aucune idée,
même éloignée et confuse, du théâtre où oes
scènes sont représentées. Pour se reconnaître
dans cette multitude de phénomènes, les savants
les ont groupés en catégories, auxquelles ils ont
donné arbitrairement les noms de cause, de temps,
d'espace, de substance, d'âme, de Dieu. » Tout
ce raisonnement repose sur le fameux axiome ;
« Niml est in intettectu nisi quod prius fuerit in set-
su » $ que l'on y ajoute seulement, avec Leibnifa,
• nisi intelleotus ipse », et le scepticisme de Home
n'a plus de hase. Sa doctrine, excellente pour
détruire des erreurs accréditées, a peu de valeur
et d'originalité comme système philosophique. 11
ne fat qu'un critique hardi et pénétrant, et laissa
à Kent l'honneur d'être le grand métaphysicien
du scepticisme critique.
Les Essais de Humew la Littérature sont
bien au-dessous deses Dissertations Philosophi-
ques ; iln'en est pas de même de ses Essais Politi*
que* , qui comptent parmi ses meilleures pro-
ductions, et qui eurent le mérite de devancer les
écrits de ee genre publiés en France et en An-
gleterre. Quelques-uns des principes essentiels
de la science y sont exposés avec autant de fi-
nesse que de clarté. Hume est surtout estimé
comme historien. Toutes les parties du grand
ouvrage où il raconte les annales de la Grande-
Bretagne ne sont pas également remarquables.
Les deux, volumes consacrés au moyen âge ne
sont qu'une compilation intelligente et bien écrite;
YÙistotr* du Tudors laisse aussi beaucoup à dé-
•slrer pour l'étendue et la profondeur des recher-
ches. VBistoire dés Stuarts, sans être toujours
fondée sur des documents originaux, est un ou-
vrage supérieur, malheureusement un peu gâté
par les préjugés de l'auteur qui, cependant, se van-
tait de n'en pas avoir. Hume était Écossais et ai-
mait dans les Stuarts une dynastie nationale. Dé-
testant l'Angleterre et aimant la France, il ne pou-
vait en vouloir aux Stuarts d'avoir subordonné
leur politique à celle de Louis XIV. Le parti de la
liberté avait été longtemps en Angleterre celui
du protestantisme intolérant, et Hume les con-
fond volontiers. 11 ne voit dans les grandes luttes
soutenues pour les droits constitutionnels que
des agitations coupables ou stériles; ces droits
même ne sont à ses yeux que des illusions, et
leurschampionsdes fanatiques et des imposteurs.
Cette manière de voir, sceptique et fausse, est
insinuée avec infiniment d'adresse et finit par
gagner le lecteur. L'histoire de Hume, quoique
médiocrement érudite etécrite à un point de vue
faux, a exercé une grande et durable influence.
Les ouvrages de Hume sont ; Treatise upon
human Nature; Londres, 1730, réimprimé en
1748, sous le titre de Enquiry concerning hu-
man Understanding ; — Essays Moral, Poli-
633
HUME
534
tical and Literary; Edimbourg, 1742, 2 vol.
in- 8°. Ces Essais forent si favorablement accueil-
lis que l'auteur en donna Tannée suivante un se-
cond volume, et une seconde édition du premier;
une troisième édition du tout parut en 1748 :
ha Political Discourses , formant la seconde
partie des Essais, parurent en 1752 : la collec-
tion complète fut publiée sous oe titre : Essais
and treatises on several eubjects; 1760, 4 vol.
in- 12 j 1787, 2 vol. in- 8°; elle a été traduite par
Mérian, Amsterdam, 1759*64, 5 vol. in-12; Paris
(sous la rubrique de Londres), 1788, 7 vol.
in-12. Il a été donné séparément, et sous dif-
férents titres, trois traductions de la deuxième
partit des Eseags. La première est de M Ue de
La Chaux; Amsterdam, 1752, 1763, in-12;
Paris et Lyon, in-12 (Essais sur le Commerce,
le buaêi l'Argent ) : elle ne contient que sept des
seise discours de Hume ; quelques-uns de ces
discours sont suivis de réflexions du traducteur.
La seconde traduction est de l'abbé Leblanc ;
Amsterdam, 1754,2 vol. in-12; Dresde, 1755,
2 vol. in-8\ La troisième traduction est de
Mauvillon; Amsterdam, 1754, in-8*. Les Essais
Économiques de Hume, traduits par M 116 de La
Chaux, ont été insérés dans le t. XV de la Col-
lection des principaux Économistes > t. XV ;
— Enquirg concerning the Principlcs of Mo-
rale; Londres, 1752; traduit en français par
Robinet, Amsterdam, 1760, in-12; — History
of England under the house of Stuart;
Londres, 1764, 1 er vol., in-4»; 2 e vol., 1756; —
History oj the House of Tudor; 1759, 2 vol.
ml-4 ;— HisUof Eng.fromtàeearliestperiod;
2 vol. in-4°. V Histoire d'Angleterre, dont l'o-
riginal a eu un grand nombre d'éditions dans
tous les formats, fut traduite par M»' Belot, et
publiée, par parties, comme l'original, de 1760
à 1765* à Londres (Paris) et à Amsterdam (Paris).
Les trois parties réunies lurent ensuite réim-
primées à Amsterdam (Paris), sous Je titre
à' Histoire d'Angleterre; 1769, 18 vol. in-12.
Jl en parut en 1819, à Paris, sous la direction
de M. Campenon, une nouvelle édition (la meil-
leure de toutes ), revue et corrigée , formant
16 vol. i&-8 , avec la continuation jusqu'en 1760,
par SmoUet. D'antres publications supplémen-
taires (Adeiphus, Aikin), également traduites
en français, ont continué les événements jus-
qu'en 1820 ; mais tout ce qui est postérieur à
l'année 1686 n'a plus de rapport direct avec
Home; — Natural History of the Religion,
Londres, 1755 ; traduit en français par Mérian,
Amsterdam, 1759, in-8°; — Life written by
himself uHtha Letter front Dr Adam Smith to
M. Sirachan t containing an accountof his last
days and of his death, Londres, 1777 ; traduit
par Suard, Paris, 1777, in-12;— Dialogues on
natural Religion, ouvrage posthume traduit en
français, sous la fausse indication d'Edimbourg ;
1779 , in -8°. La meilleure édition des ouvrages
philosophiques de Hume a paru à Edimbourg,
1826, 4 vol. in-8°. -*Z« Vie et la Correspon-
dance de David Hume, d'après les papiers légués
par son neveu à la Société royale d'Edimbourg,
et d'autres sources originales ont été publiées
par John H. Burton; Edimbourg, 1846, 2 vol.
in-8°. L. J.
We of D' Hume, bg htmself. — Brenner, Dos Génie des
Hume oder Sammlung Aer vorxûglichsten Grundsâtze
dièses Philosophe*; Leipzig, 177*, in-S». - Pratt, Apo-
logv for the Life and fPriUings of Dav. Hume ; Londres,
1777, In-iî — Curions, particulars and genuine Anec-
dotes retpecting the late lord Chetterfield and Dav.
Hume; Londres, 1788, in-ll. — Rlteble, Account ofthe
Lifts and fWritings of Dav. Hume ,• Londres, 1807, ta-«e.~
Zschievche, Comment atio de D. Humio $ceptico; Balle,
1888, in-8». — Burton, Life and Correspondance of D r
Hume. - Êdinburgh Review, Janvier 18*7. - tVesmins-
ter Beview, octobre lft+e. ~ Revues des Deux Mondes.
l*r novembre 1886. — Lord Brougham, Men of Letter t of
the times of George M.
hitmb (David), jurisconsulte écossais, ne-
veu du précédent, né en 1756, mort à Edimbourg
le 30 août 1838. Il fut sher\ff<\e& comtés de Ber-
vrick et de West-Lothian, professeur de droit à
l'université d'Edimbourg, et enfin baron de la
cour de l'échiquier. On a de lui un ouvrage estimé
intitulé : Commentaries on the Law of Scot-
land y respecting the description and punish-
ment of crimes ; 1797, 2 vol. in-4». Z.
Rose, îfew gênerai Biographical Dlctionary.
HUME (Patrick), critique écossais, vivait
dans la seconde moitié du dix-septième siècle.
Il était maître d'école à Londres. Il publia sous
le titre de Annotations on Milton's Paradise
lost, 1695, in-fol., un commentaire dont l'évéque
Nevtton a fait l'éloge, et qui contient , au milieu
d'une foule de lieux communs, beaucoup de re-
marques j udicieuses. Z.
Le D r Hewton, préface de ion édition det Poettoat
Works de MUUra. ~ Rose, New Getu Dict.
HUMB (Sir Abraham), ingénieur anglais,
né vers 1748, mort en 1838. Il servit d'a-
bord sur V Or son, dans l'armement envoyé
contre la Hollande en 1787, et tint presque con-
tinuellement la mer pendant les longues guerres
de l'Angleterre contre la France (1793-1815).
En 1819 il obtint un emploi à Plymouth, où il
mourut à l'âge ce quatre-vingt-dix ans. On a de
Hume un court traité sur le perfectionnement
de l'architecture navale. Cet ouvrage, qui con-
tient des vues neuves et hardies, fut bien reçu,
et valut à l'auteur le titre de membre de la So-
ciété royale. Z.
Rote, General Biographical Dictionary.
hcmb (James Deacon), économiste anglais,
né le 28 avril 1774, à Newington, dans le comté
de Surrey, mort le 12 janvier 1842. Il ht ses
études à l'école de Westminster, et devint en
1790 clerc dans l'administration des douanes.
Son activité et son intelligence lui valurent mal-
gré sa jeunesse une place importante. En 1798,
il se maria, et, fixant sa résidence à Pinner, près
d'Harrow, il exploita une grande ferme, et se
livra à des expériences sur l'agriculture sans
négliger ses devoirs officiels. En 1822, il aban-
donna l'industrie rurale, et revint s'établir à Lon-
535
HUME
536
dres. Le gouvernement loi confia le soin de ré-
duire en un simple code les statuts, au nombre
de quinze cents, souvent contradictoires et même
inintelligibles, qui formaient alors l'inextricable
labyrinthe de la législation douanière anglaise.
Pour apprécier le service que James Hume ren-
dit à l'administration et au pouvoir, il faudrait se
faire une idée du désordre qui existait dans cette
branche considérable des affaires. Onze actes du
parlement préparés par Hume y portèrent la lu-
mière et l'harmonie. Ce grand travail exigea du
savant économiste des efforts qui ruinèrent sa
santé, et fut rémunéré par une indemnité de
cinq mille livres st. Sa compétence pour toutes
les questions d'affaires le fit appeler comme aide-
secrétaire (joint-astis tant -s ecretary ) au bu-
reau du commerce. Au commencement de 1840,
après quarante-neuf ans de service, il prit sa
retraite, mais il n'en jouit pas longtemps, et mourut
deux ans plus tard. Bien que Hume ait beaucoup
écrit , il a très-peu publié, et ses travaux se bor-
nèrent en général à préparer des papiers officiels ;
il fournit cependant mBritishand Foreign Re-
vient quelques articles d'économie politique, en-
tre autres un Essai sur le Commerce du Bois
de Construction; et il donna au Morning Chro-
nicle, sous la signature de H. B. T., une série d'ar-
ticles qui furent recueillis sous ce titre: Letters
on the Corn Laws and on the Right ofthe wor-
king classes; Londres, 1834, in-8°. Z.
Ençlish Cyclopœdia {Biography).
hume (Joseph), homme politique anglais, né
à Montrose, en 1777, mort le 20 février 1855.
II étudia la médecine, et passa cinq ans chez un
praticien; puis, après avoir suivi quelque temps
les cours de l'université d'Edimbourg, il fut, à
l'âge de vingt ans, nommé chirurgien pour le
service des Indes Orientales et attaché, en 1800,
comme aide-chirurgien, à l'armée qui faisait la
guerre aux Mahrattes. II se livra, dans ses loi-
sirs, à l'étude des langues orientales avec assez
de succès pour remplacer, pendant une maladie
grave, l'officier attaché en qualité d'interprète,
à l'expédition. Hume remplit aussi les fonctions
de payeur, et acquit dans ces emplois lucratifs
une fortune considérable qu'un riche mariage
vint encore accroître plus tard. De retour en An-
gleterre, il habita quelque temps Bath et Chel-
tenham; puis, après une excursion en Por-
tugal et en Grèce, il fat élu, en 1812, membre,
de la chambre des communes pour; le bourg
de Weymouth ; mais il n'y siégea que quelques
mois et ne put se faire réélire dans l'automne de
1812. Il ne rentra au parlement qu'en 1818,.
comme représentant de son bourg natal de Mont-
rose. Dans l'intervalle il se lia avec Place, Miil,
et d'autres disciples de Jérémie Bentham, et*
porta leurs idées dans la chambre des commu-
nes. De 1818 a 1830 il représenta le bourg de
Montrose; il fut ensuite élu par le Middlesex.
Défait aux élections de 1837, il dut à l'influencer
d'O 'Connell d'être élu pourKilkenny. En 1841 il '
échoua devant les électeurs de Leeds ; mais l'an-
née suivante il reçut de sa ville natale nn man-
dat qui lui fut conservé jusqu'à sa mort. « Home,
dit M. Bathery, est un exemple de ce que peu-
vent en politique l'esprit pratique et la persis-
tance dans une opinion donnée. Sans autre gé-
nie que celui des affaires, sans autre éloquence
que celle des chiffres, il sut conquérir le rang et
l'influence d'un chef de parti. Son opposition trèf-
avancée , presque toujours systématique , fat
néanmoins toute légale et parlementaire. Chef
du parti radical dans la chambre des communes,
il n'eut de ce parti ni la déclamation ni les pré-
tentions philosophiques. La tribune, les comités,
le contrôle minutieux des actes ministériels, les
calculs surtout, tels forent ses moyens et ses
armes. Pendanttootes les sessions on le vit consa-
crer quinze heures par jour à l'examen des affai-
res publiques, et il lui arriva de prendre la parole
jusqu'à quarante fois dans une seule séance. Ce
fut surtout dans les questions de finances qu'il
se fit une spécialité redoutable aux ministres. An
début de sa carrière parlementaire, les mesures
financières de M. Vansittart étaient à l'ordre du
jour : il déclara à ce ministre une guerre à mort,
critiqua tous ses plans, discuta tous ses calculs,
et montra dès lors ce fanatisme d'économie,
cette tendance à réduire toutes les questions aux
règles de l'arithmétique, qui caractérisa depuis
son talent et toute sa carrière politique. » Pen-
dant de nombreuses années Hume fut à la cham-
bre presque le seul avocat de la réforme finan-
cière, dans toutes les branches du budget, armée,
marine, administration, Église. H demanda l'a-
bolition de la peine du fouet dans l'armée, de la
presse navale, de l'emprisonnement pour dettes.
Avec un appui peu actif de la part de ses collègues,
il obtint le rappel des lois sur les coalitions, des
lois qui interdisaient l'exportation des machines et
de l'acte qui défendait aux mécaniciens d'aller à
l'étranger. 11 attaqua incessamment les abus dans
l'administration coloniale et municipale, les dé-
penses électorales, le système des licences, les
droits sur le papier, sur l'imprimerie, sur les
objets de consommation domestique. Il prit une
part active à l'émancipation des catholiques ro-
mains, au rappel des actes de test et de corpo-
ration, et à la réforme électorale de 1832. En
1835 il dénonça l'existence d'un complot oran-
giste qui avait commencé avant l'avènement de
Guillaume IV, et fit voter une adresse an roi, la-
quelle amena la suppression des loges orangistes.
La santé de Hume déclina rapidement après la
session de 1854, et il mourut au mois de février
suivant, à sa résidence de Burnley-Hall, dans le
comté de Norfolk. Malgré la vivacité de ses opi-
nions radicales , des orateurs de tous les parus
saisirent cette occasion de payer un tribut d'é-
loges à son caractère. Z.
Ençlish Cyclopœdia {Biography). — Rathery , dut
VBncyel. du Gens du Monde. — MU». Harriet Mtrttnciu,
fjistory ofthlrty years' Peace.
537
HUME — HUMIÈRES
J bumeou home (D.Dunglas), évocateqr,
né en 1835 dans les lies d'Orcades, descend
d'une ancienne famille d'Ecosse dont le cri de
guerre était home! home! A l'âge de quatre ans
il fut emmené en Amérique, où s'écoulèrent son
enfance et sa première jeunesse. Sa faculté de
seconde vue se révéla vers 1860. Il en est fait
mention dans un livre Dublié à Boston en 1853
par E. C. Rogers, Philosophy of mystericus
Agents. En 1855 M. Hume vint en Europe, et y
renouvela les prétendus miracles qui avaient
étonné le Nouveau Monde; ainsi, à Florence, les
meubles s'animèrent, dit-on, d'une vie surna-
turelle en sa présence, et les instruments de
musique résonnèrent harmonieusement sous des
doigts invisibles; on conte même qu'il s'enleva
plusieurs fois dans les airs devant une nom-
breuse assistance. M. Hume fit eu 1856 un
voyage à Rome, où il fut présenté au saint-père:
touché de la grâce, il se convertit; mais l'esprit
de sa mère lui prédit qu'il perdrait sa puissance
jusqu'au 10 février 1857. 11 revint à Paris où il
avait déjà séjourné, manifesta le désir d'ap-
prendre la médecine, et commença ses études ;
mais , à la date du 10 février, il faillit succomber
à une attaque de catalepsie suivie d'une crise
très-violente. C'est dans le cours de cette ma-
- Jadie qu'il vit le P. Ravignan, dont l'imagina-
tion fut , dit-on , vivement frappée par les phé-
nomènes qui eurent heu autour de lui. Depuis
cette époque M. Hume continue de se prétendre
l'intermédiaire entre la terre et les puissances
invisibles : il a donné des séances devant la plus
haute société de Paris, et plusieurs souverains
ont voulu être témoins des effets de sa mysté-
rieuse puissance. £. C.
H. Deiaage, U Monde illustre, 1887. « Le Courrier de
Paris, 1857.
■umiere (M me d\) Voy. Gaco«.
* humières, famille française qui tirait son
nom de la terre d'Humières en Artois, mais dont
la terre de Monchy-Humières en Beauvaisis de-
vint par la suite le siège principal. Sa généa-
logie remonte sans interruption jusqu'à Jean ,
seigneur d'Humières, châtelain de Saint-Omer,
qui assista à la bataille de Poitiers en 1356.
Parmi ses descendants on distingue : Philippe,
son petit-fils, qui combattit à Azincourt, où il
fut fait prisonnier, et qui s'attacha ensuite au duc
de Bourgogne; — Matthieu, fils du précédent,
qui marcha avec ce prince contre les Brugeois en
1437, et mourut à l'attaque du château de Milly
en 1442 ; — Adrien, fils du précédent, seigneur
d'Humières, Bacquincourt , Bouzaincourt, etc.,
chevalier de la Toison d'Or; — Jean III, petit-
fils d'Adrien, seigneur d'Humières, Monchy, etc.,
gouverneur de Péronne, Montdidier et Roye,
lieutenant général pour le roi en Dauphiné, Sa-
voie et Piémont, nommé en 1535 gouverneur du
jeune dauphin, fils de François I er ; — Jacques,
fils du précédent , seigneur d'Humières , Mon-
chy, etc., gouverneur de Péronne, Montdidier,
638
et Roye , lieutenant général en Picardie ; —
Charles, fils de Jacques, seigneur d'Humières,
marquis d'Ancre, tué à Ham, en 1595, ne laissa
point de postérité. L'héritage delà maison d'Hu-
mières passa alors à Jacqueline, sœur de Char-
les, mariée à Louis de Grevant, vicomte de
Brigueil, d'une maison originaire de Touraine,
dont les descendants joignirent à leur nom ce-
lui d'Humières. Cette dame fut maltresse de
Henri IV, qui la négligea bientôt pour Gabrielle
d'Estrées. Les terres de Monchy, Condun, etc.,
furent érigées, en 1690, en duché sous le nom
Humière8 en faveur de Louis de Crevant Hu-
mières, maréchal de France, arrière-petit-fils
de Jacqueline d'Humières et de Louis de Cre-
vant. A la mort du dnc d'Humières, en 1694,
le nom et le duché passèrent , à défaut d'hé-
ritier mâle , comme l'avaient prescrit les lettres
d'érection, à Louis d'Aumont, époux de Julie
de Crevant, troisième fille du maréchal et à leurs
descendants. J. V.
Anselme, Histoire générale de la Maison du Roi et
des Grands-Officiers de la Couronne. - Moréri, Grand
Dictionnaire Historique. - Le Bas, DM. encyclop. de la
France. >
*humièees (Jean d'), général français,
mort au mois de juillet 1550, fut successivement
chevalier de l'Ordre du Roi, puis chambellan
en 1517. En 1519 il reçut le gouvernement
de Péronne, Montdidier et Roye, et fut en-
voyé en 1527 comme ambassadeur en Angle-
terre. Fait capitaine de cinquante lances en
1530, et l'un des gouverneurs du dauphin en
1535, il devint en 1537 lieutenant général aux
pays d'Italie, duché de Savoie et principauté de
Piémont. Il entra en effet dans le Piémont avec
un corps de lansquenets; mais cette troupe in-
docile lui fit manquer la prise d'Ast, dont il se
dédommagea en s'emparant d'Albe. Il eut en
1538 une compagnie de cent hommes d'armes des
ordonnances du roi et servit au siège de Perpi-
gnan en 1542. Quatre ans après il fut nommé
chambellan du dauphin , du prince Henri U, et
gouverneur des enfants de ce prince. J. V.
Ch onologie Militaire, t. I, p. 187. - P. Anselme ,
Histoire des Grands-Officiers de la Couronne. — Hé-
rault, Abr. chronol. de l'Histoire de France. — P. Da-
niel, Histoire de France. — Sismondt, Histoire des
Français, t. XVI, p. m à SU.
hcmières (Charles), marquis d'Ancre, gé-
néral français, mort en 1595, d'un coup de mous-
quet qu'il reçnt à la prise de Ham. Gouverneur
de Compiègne pendant la ligue, puis lieutenant
général en Picardie, il fut un des premiers sei-
gneurs qui, aussitôt après la mort de Henri IH,
reconnurent Henri IV. Le 10 décembre 1590
il s'empara de Corbie, et fit passer la garnison
au fil de l'épée, sans en excepter le gouverneur.
Cinq ans après il périt au siège de Ham. En ap-
prenant sa mort Henri IV dit : « Je donnerais
Ham et bien d'autres places pour un homme de
ce mérite. » J. V.
.DeThou, Hlst. sui temp., ch. exil. — Davlla , Hist.
délie Guerre civili de Francia, Ut. XV. — Bentlvogllo,
fctt
Guerra di flsmdrt, Ut. II. — V.-P. Cayet, CArofttytf*
Novenaire, tome UX, Itr. VII. — SUmondl, Histoire des
Français, t, XXI, p. t*t.
■UMifcuts (Louis m Cebvant, marquis
puis duc d'), maréchal français, mort à Ver-
sailles, le 30 août 1694. Ami de Louvois, le mar-
quis d'Homières fit une fortune rapide. Turenne
«vait aussi de rattachement pour lui et surtout
pour sa femme , Louise de La Châtre. Louis XIV
lui accorda également de nombreuses faveurs.
Nommé gouverneur de Compiègne, sur la dé-
mission de son père, le il juin 1646, il fut créé
maréchal de camp le 4 septembre 1660, il leva
on régiment de cavalerie en 1651, et s'en démit
en 1653, servit aux sièges et à la prise de Mou-
zon et de Sainte-Menehould, à l'attaque des lignes
d'Arras et à la prise du Quesooy en 1654, ainsi
qu'à celles de Landrecies, de Condé, de Saint-
Guillain et de la Capelle en 1 655. Promu au grade
de lieutenant général des armées du roi, le 18 oc-
tobre 1656, il assista au siège de Saint-Venant et
à la prise de cette ville, et à celle de Mardick en
1657. A la bataille des Dunes, le 14 juin 166*,
il commanda les escadrons de l'aile droite. Il
rendit des services signalés à la prise de Don-
kerque, et concourut à la conquête de Bergues,
de Fumes et de Dixmude. H aida encore à en-
lever Oudenarde et Ypres, dont il fut nommé
gouverneur. Après la paix de 1659, il obtint en
1660 le gouvernement général du Bourbonnais,
avec le titre de sénéchal. En 1664, d'Humières
représenta Ariodant aux fêtes de Versailles, où le
roi jouait le personnage de Roger dans Le Palais
. ffAlcine. 11 servit comme lieutenant général à
l'armée du roi, sous le vicomte de Turenne, en
1 667, et se trouva à la prise de Tourna?, à celle de
Douai et enfin à celle de Lille. H fut employé à
l'armée de Flandre, sous le frère du roi, en 1668.
La paix d'Aix-la-Chapelle termina la guerre le
2 mai. Nommé gouverneur général de Flandre,
d'Humières tint à Lille une sorte deconr. Le roi
le créa maréchal de France en 1668, en même
temps que le marquis de Créqui et le marquis de
Bellefonds. On raconte que Louis XIV ayant de-
mandé au comte de Gramont s'il savait quels
étaient les maréchaux de la nouvelle promotion :
« Ont, sire, répondit celui-ci , c'est M. de Cré-
qui, M. de Bellefonds et madame d'Humières. »
En 1672 , d'Humières , comme ses deux collè-
gues, refusa de prendre l'ordre de Turenne, que
Louis XIV avait fait maréchal général en 1660.
Pour les punir le roi les exila. Bellefonds fut
envoyé à Tours, d'Humières alla à sa campagne
planter des choux, selon l'expression de M"* de
Sévigné, ainsi que le maréchal de Créqui, et vint
ensuite à Angers. Tous trois ne rentrèrent au ser-
vice à la fin de la campagne qu'après avoir fait
acte d'obéissance. Adjoint au maréchal de Luxem-
bourg, d'Humières fit peser d'énormes contribu-
tions sur la Hollande. En 1676, il avait investi la
ville de Condé avec le maréchal de Créqui quand
Louis XIV arriva à l'armée, le 21 avril. Cinq
HUM1ÈRES 540
jours après , cette petite place se rendit. A la fin
de Tannée, après le départ du roi, d'Humières
assiégea Aire , qui ne résista pas longtemps.
L'année suivante les maréchaux de Luxembourg
et d'Humières commencèrent l'investissement
de Valenciennes , le 28 février; le 4 mars
Louis XIV vint les rejoindre, et la place Ait em-
portée d'assaut le 17. Le 11 avril, il se trouva
à la bataille de Cassel, gagnée sur le prince d'O-
range par le duc d'Orléans : d'Humières com-
mandait l'aile droite. Au mois de décembre il
prit Saint-Guillaîn en quelques jours. L'année
suivante il se rendit maître de Gand. En 1683 fl
s'empara de Courtrai et de Dixmude. Au mois de
mars 1684, il s'approcha d'Oudenarde et bom-
barda pendant trois jours et trois nuits cette ville,
qu'il détruisit et où il n'essaya pas même d'en-
trer. La même année il perdit son fils unique, tué
dans la tranchée devant Luxembourg, le 13 mai.
L'année suivante Louis XIV chargea d'Humières
d'aller complimenter Jacques H, qui venait de
monter sur le trône d'Angleterre. A son retour,
d'Humières fut nommé grand-maître de l'artil-
lerie. En 1689 il commanda une armée nom-
breuse en Flandre. Le 27 août il échoua de-
vant Walconrt sur la Sombre , dont il avait
voulu enlever le château, et se laissa battre par
le prince de Waldeck. Cet échec força Louvois
à le rappeler , et le maréchal de Luxembourg le
remplaça. D'Humières n'en conserva pas moins
les bonnes grâces de son souverain, qui érigea en
duché-pairie sa terre de Monchy en Picardie.
Louis XIV alla même plusieurs fois l'y visiter,
et l'aida à embellir cette propriété. Nommé
commandant général dans toute la Flandre hors
les pays sujets à contribution, il fit tête à l'armée
espagnole augmentée des troupes de Hanovre,
tandis que le duc de Luxembourg agissait contre
celle de Hollande. En 1691 il fut reçu chevalier
des Ordres du Roi. Pendant le siège de Mons, il
campa à Saint-Guillain, puis il commanda l'armée
sur la Lys, et ensuite sous le dauphin. En 1692 il
était encore au siège de Namur, mats il ne servit
point en 1693.
Le maréchal d'Humières mourut assez promp-
tement, en manifestant le regret d'avoir négligé
trois choses dans sa vie : ses affaires, sa santé et
son salut. Il finit cependant d'une manière chré-
tienne , assisté par Bossuet, Fénelon et le père
Caflaro,tbéatin, son eonfesseur, à qui on attribue
un livre destiné à prouver que la comédie était
permise par la religion. D'Humières avait pour
devise diverses couronnes avec ces mots : A'o
quiero menos. « C'était, dit Saint-Simon, un
homme qui avait tous les talents de la cour et
du grand monde , et toutes les manières d'un
fort grand seigneur : avec cela homme d'hon-
neur, quoique fort liant avec les ministres et
très-bon courtisan. Il était brave, et se montra
meilleur en second qu'en premier... Il recevait
avec un air de liberté, de politesse , de discerne-
ment qui lui était naturel, et qui séparait toute
541
HT7MIÉRES~ HUMM£L
541
et la
idée <forgneB cTavee It
homme qui se veut si
traindre les antres. H avait lat plat
colères da monde, serteut ea jetant, et avec
cela leineflleaTlionnwditetBrmatajnnnla»
ment aimé. » B recevait aa etfct lont ce qu'a y
avait de plus âevéàmcsnret à m vOe,eta*
princes do sang rai faisaient da ftéinnatm vW
sites. Benscrade le célébra aa vers. « H M la
premier, dit Voltaire, «ni, aa anje d'Arras, aa
1 658, se fit serrir ea thhbéi d'argent à la traa»
ebée, et qui fit man g er à ses convives das m-
n'avait en longtemps que des asatonai de fer. » j
L.
Ckromotoçée MUUmÊn. tomt H, p. «
£f irfofe-» Jfiflfirr. - Le Nte #A«rigey, ÊÊématrm. -
Grtffet, Jomrmmà %iitui\mi dm ùm a X/#\ - Satat-Sfc-
moo, Méwotrms. — M-* 4e Sériel lettre*. — Grt-
uoard, Jfcmetres mOitmàrt* 4é Lomàs Xir. — Staaage.
JnnaUâ des P r v vimuê -UtÊim. — La Beat. Jfaf*4rc *
Hmto XI r. — I il pu. m ttwtn ém Êéçm es Unàs Xir.
- %atu»v, iMek m» Umu HV. - SumomA, Butoir*
des FnmçaU, UT, «H, Mi, «a. SSt, SIS, US. Ht. Ut,
u>; XXVI, », iss. - De CemeUe», MA hUtor.ém
TOmamt, ( Jean-Népemutène ), rcmhre pie-
niste et composHeor sllrmand, aé à Piosboaig,
le 14 novembre 1778, et mort w 17 octobre 1837,
à Wehnar. Son père, Joseph Hammel, nui naît
tnaro^feniaslq^àréeefeiiûna^
M enseigna les premiers éléments de soi art, at
à six ans le jeune Hammel était déjà partant
sur le piano à on degré d'habileté luanvausate
chez an enflant de cet âge. Ea 178a, son père
étant resté sans emploi par sotte de la sé p aras
skm de l'école de Wartberg, qaUta P t es n oar g
pour se rendre à Vienne, oeil flot nommé chef
d'orchestre da théâtre de Schilumder. Moaart
entendit Tenant, dont le talent précoce excita
tellement son intérêt qn'U w prit chai an et se
chargea de son édocatûa musicale. Ses progrès
tinrent dn prodige, et à rage de nanf ans il
faisait l'admiration des connaisseurs dans les
concerts où son illustre maître sa plaisait à le faire
entendre. Hammel entreprit alors avec son père
des tournées artistiques ea Alemagne, en Dane-
mark et en Ecosse; ce rat à Edimbourg qu'A
publia son premier ouvrage, qui oonantait en an
Air varié pour le pian*, qn'U dédia è la reine
d'Angleterre. Il se rendit ensuite à Londres, pais
visita la Hollande, et ea 17ts, après art années
d'absence, il était de retour à Vienne. Quoique
* peine âgé de seize ans, Is jeune virtuose s'était
déjà placé an premier rang des pianistes de
l'école allemande ; il ne se laissa pas cep enda n t
éblouir par ses succès, et, redoublant d'ardeur
pour le travail, il s'efforçait de perfectionner son
jeu eny appliquant les principes d'un rnécamanie
régulier qu'il avait posés dans les consens de
Clementi pendant son séjour en Angleterre. Jus-
que-là Hummel ne possédait encore qaa de
bibles notions en composition ; il s'adressa à
Albrechtsberger, et ft sons la direction de eesa-
at
; il recul ensuite de Saluai, avec
j sens mtimesnant, da précieux*
maats sur la style drnnitianf Sa i
uaaantradscaapelle du prince Esterons*, ea
1809, an fournit l'onoasioa de
de
k si èemoi qui est
«genre;!! écrivit
et dus ballets qui furent re-
présentés à Vienne, et bientôt il acquit une juste
célébrité, qu'il oevait particehèrouitatà es* corn
etèsoa talent d'exén»-
resta aa service du prince Ester*
hosy jusqu'en 1811, époque à laquelle a rnaonaa
à estai poaitne et vint à Vienne, où il se eaa>
sacra cxcHMâveioent à renseignement do piano -,
anàsen 1818 la place de maître de chapeee du
■ai de Wurtemberg an avant été offerte, il se
rendit à Stutlaard, pais alla quatre ans après
remplir las antoes fonctions auprès da grand*
duc da Saxe- Weimar. A partir de ce moment, il
aanxa iVaaitin mant à Weimar, profitant toute-
qui lui étaient accordés pour
la Russie, la Hollande, la
nelgin^etUFrance^eim-w^llant partout d'e-
mnanrt appiandr^rmmtii Au mois de mars
18X7, à son retour d'un de ces voyages, le bruit
de la in prochaine de Beethoven étant parvenu
à Weimar, Hummel partit aussitôt peur venir
è Yuans se réconcilier avec l'illustre musicien
qui, quelques années auparavant, s'était brouillé
avec fan, par suite d'une rivalité d'artistes. En
t dans m chambre du malade, Hummel
k contenir son émotion, d'abondantes
coulèrent de ses yeux. Beethoven lui ten-
dit la nana ; m s'embrassèrent avec effusion, at
tant rat ©abbé entre les deux amis, qui n'avaient
d'ailleurs jamais cessé de s'estimer. En 1819
Hummel revit U France peur la seconde lois;
il retourna aussi s Londres, et fit plus tard un
voyage en Pologne; mais, sentant le besoin de
repos, il revint à Weimar reprendre le cours de
ses paisible* occupations, et mourut peu de temps
après, è Tage de cinquante-neuf ans.
De même que chez Beethoven, le talent de
l'artiste s'est révélé chez Hammel sous trois
aspects différents ; l'exécution, l'improvisation
et la composition Gomme exécutant, Hummel a
continué l'école de Moiart en U perfectiomia^
par la régularité du méaaesine ; on a pu aller
plus loin que lui dans la difficulté vaincue, dont
on a même souvent abusé, mais aucun pianiste
n'a en on je* ptaspuT et plus correct et nasu
rendre use peasé* mus*a\e avec autant d€ £**,
de sentiment et de profonde», avec plus dedeh-
catesse et a'éléWà^slesdétaik.I^^;
pmviantiaaa. *^^"^<^*"££
S4S
HUMMEL — HUMPHREYS
544
par la grâce et la noblesse de ses idées, comme
par la science dont il a fait preuve, s'est élevé
à la hauteur des premiers compositeurs de son
temps; mais il ne pouvait lutter contre le génie
fougueux de Beethoven, et nul doote qu'il n'eût en
encore une plus grande réputation si Beethoven
fat venu vingt ans plus tard. Hummel s'est
également distingué dans la musique religieuse,
mais il n'a réussi que médiocrement au théâtre ;
son opéra deMathilde de Guise n'eut point de
succès.
L'œuvre de cet artiste se compose des ou-
vrages suivants :— Musique dramatique : Le Vin-
eende ffiAmore, opéra bouffe, deux actes ; — Ma-
thilde de Guise , opéra en trois actes ; — Der
Bans ist zu verkaufen (Maison à vendre),
opéra en un acte ; — Die Ruckfahrt der Kaisers
(Le Retour de l'Empereur), opéra en un acte;
— Hélène et Paris, ballet; — Sapho de
Mytilène, ballet; — Le Tableau parlant,
ballet;— -V Anneau magique, pantomime mêlée
de chants ; — Le Combat magique, id. — Hum-
mel a écrit aussi deux cantates : V Éloge de VA'
mitié, avec chœurs , et Diane ed Endimione,
avec orchestre. — Musique d'Église : Trois
messes à quatre voix, avec orchestre et orgue,
la première en si bémol, la seconde en mi
bémol, et la troisième en ré; — un Offertoire
(Aima Virgo) pour soprano solo, chœur, or-
chestre et orgue ; — Graduel (Quodquodin orbe)
à quatre voix, orchestre et orgue. — Musique ins-
teumehtale : Une Ouvertureh grand orchestre;
trois quatuors pour deux violons, viole et vio-
loncelle; deux grandes Sérénades pour piano,
violon, guitare, clarinette et basson ; — un grand
Septuor en ré mineur, pour piano, flûte, haut-
hois, cor, alto, violoncelle et contrebasse ; — un
antre grand Septuor militaire, en ut, pour piano,
flûte, violon, clarinette, trompette et contrebasse ;
—un grand Quintetti, en mi bémol mineur, pour
piano, violon, alto, violoncelle et contrebasse;
— une Symphonie concertante pour piano et vio-
lon ; — six Concertos de piano ; —des Rondeaux
et des Airs variés pour le même instrument, avec
accompagnement d'orchestre; — Le Cor en-
chanté tfObéron, grande fantaisie pour piano et
orchestre ; —des Trios pour piano, violon et vio-
loncelle; —des Sonates pour piano seul ; — et
un grand nombre d'autres pièces détachées com-
prenant des Fugues, des Rondeaux, des Va-
riations, etc. — Hummel a publié, à Vienne,
une Méthode complète, théorique et pratique
pour le piano, dans laquelle il a exposé les prin-
cipes qu'il s'était faits et les résultats de son
expérience. Diendonné Denne-Baron.
Fétis, Biographie universelle de* Musiciens. — Revue
Musicale. — Documents inédits.
■umphebt ( Laurent ) , controversiste et
philologue anglais, né à Newport-Pagnell ( comté
de Buckingham), vers 1527, mort le 1 er février
1589 (vieux style). Il fit ses études à Cam>
bridge, et s'appliqua particulièrement au latin et
au grec. Élu plus tard membre du collège de La
Madeleine, à Oxford, il fat nommé professeur
de langue grecque,. et entra dans les ordres.
En 1555 il quitta l'Angleterre, comme beau-
coup de protestants zélés, et alla chercher à Zu-
rich un asile contre la persécution. Après la
mort de Marie, il revint en Angleterre, et reprit
sa place au collège de La Madeleine. Il devint
successivement professeur de théologie au col-
lège de la Reine en 1560, doyen de Glocester
en 1570, et de Winchester en 1580. Ses opinions
religieuses, éloignées du cérémonial de l'Église
d'Angleterre, l'empêchèrent d'arriver à l'épisco-
pat. Humphrey était un bon linguiste et un ha-
bile théologien. On le regarde comme un des
principaux docteurs des non-conformistes an-
glicans. On a de lui : Bpistola de grxds LUe-
ris et Homeri lectione et imitatione , en tète
du Cornucopix de Junius ; Baie, 1558, in-fol. ;
— De religionis Conservations et Reforma-
tione, deque Primatu Regum; Bâle, 1559,
in-8* ; — De Ratione interpretandi auctores;
Baie, 1559, in- 8°; — Obadias Propheta, he-
braice et latine, et Philo « De Judice », gr&ce
et latine, à la suite du traité précédent; — Op-
timales, sive de nobilitate ejusque antiqua
origine, natura, officiis, disciplina; Baie,
1561, in-8°, avec une traduction latine du traité
de Philon De Nobilitate; — Joannis JueUi,
episcopi Salisburiensis, Vita et Hors; Lon-
dres , 1573, in-4°; — Jesuitismi Pars prima,
sive praxis roman» curim contrarespublicas
et principes; Londres, 1582, in-8*; — Jesui-
tismi Pars secunda :puritano-papismi seu doc-
trine jesuiticx aliquot rationibus ab Edm.
Campiano comprehensx et a Johanne Du-
rœo defensœ Confutatio; Londres, 1584, in-8°;
— deux Discours adressés à la reine Elisabeth
et quelques sermons. Z.
Wood. Athenm Oxoniênsés, vol. I. — Chaînera. Ge-
neral Bioçraphical DictUmary. — Chaaffepié, Diction-
naire Historique.
* humphreys ( David ), poète américain,
né en 1753 dans le Connecticut, et mort le
21 février 1818, à Newhaven. Élevé au collège
dTale, il s'engagea sous les drapeaux de Parmée
indépendante, et entra, en 1780, avec le rang de
colonel, dans l'état-major t de Washington. Par
la protection de ce dernier, qui l'honorait d'une
sincère amitié, il fut envoyé, en 1780, en qualité
de secrétaire de légation à Liverpool, revint en
1786 siéger à la législature du Connecticut, et
fut le premier ambassadeur de son pays accré-
dité en Portugal, où il résida six ans ( 1792-1797 );
à cette dernière date, il alla remplir le même
poste à la cour d'Espagne, et, depuis son retour
(1802), s'occupa de l'importation des laines de
mérinos. En 1*8 12 il commanda pour la dernière
fois la milice du Connecticut On a de loi de
nombreuses pièces de vers, qui forment un vo-
lume publié en 1804, et où l'on remarque : Ode
à Mont Vernon; Adress to the armies ofthe
545
HUMPHREYS — HUNALO
546
United-States (1782); Onthe Happiness oj
America (1785); Death of gênerai Washington
(1800), et une version poétique de La Veuve du
Malabar de Lemierre. P. L— y.
Everest, Poets of Conructfcut. —The Cyclopedia of
american Literature, t. L
hunald ou bunold, duc d'Aquitaine, né
vers 705, mort en 774. Son père Eudes avait ré-
clamé les secours de Charles Martel contre les
Sarrasins. Le prince franc fit payer par une sorte
de dépendance la protection qu'il accorda à l'A-
quitaine. Ëodes supporta assez patiemment la
suzeraineté de Chartes; mais Hunald se révolta
à l'idée de reconnaître une suprématie quelcon-
que. S'étantmis, à la mort de son père (735),
en possession de l'Aquitaine, il ajouta bientôt
après à ses États une grande partie de la Vas-
conie échue à Atton, son frère, et conçut le hardi
projet de briser par une résistance ouverte le
traité humiliant qui asservissait ses États au roi
de France, à ce prince dont les chefs aquitains
nièrent la souveraineté jusque sous la troisième
race, apposant au bas de leurs chartes la for-
mule bien connue : Rege terreno déficiente,
Christo régnante. Au printemps de 736, Char-
les Martel, dont une première sommation adres-
sée à Hunald était restée sans réponse, passa la
Loire, entra en Aquitaine et s'avança jusqu'aux
bords dé la Garonne. Y eut-il un avantage dé-
cisif dans la lutte entre les deux chefs, et qui
l'obtint ? C'est ce que les chroniques ne nous ap-
prennent pas; on voit seulement que Charles
trouva Hunald beaucoup plus aguerri et beau-
coup plus habile qu'il ne le pensait, et que la
confirmation définitive de l'hommage établi par
le père ne fut, de la part de ce prince, qu'une
feinte pour gagner du temps. C'est ce que parait
dire une chronique citée par M. Fauriel : « Eu-
don étant mort, Charles prit les armes contre
ses fils et leur fit beaucoup de mal ; mais la lutte
ayant ses vicissitudes et beaucoup d'hommes
ayant été tués de part et d'autre, les deux partis
conclurent une alliance qui ne devait pas durer
longtemps. » Quoi qu'il en soit, Hunald demeura
paisible possesseur de ses États , sous la condi-
tion de reconnaître la suzeraineté de Charles
Martel et de ses deux fils , Carloman et Pépin.
11 est probable qu'Atton, qui cherchait dans
Charles Martel un appui contre son frère, se ren-
dit, lors des négociations, coupable de quelque
trahison; car on le voit quelque temps après mis en
prison par ordre d'Hunald , et il faut remarquer
ce fait, parce qu'il présage et explique la lutte
qui s'éleva entre les deux frères en 745. Atton
ne subit qu'une courte captivité , et reprit bien-
tôt une certaine part au gouvernement de l'A-
quitaine. A la mort de Charles Martel , arrivée
en 742, Hunald envoya des députés à Odilon,
duc de Bavière, et ces deux princes, refusant
obéissance à Pépin et Carloman, conclurent une
alliance offensive et défensive, et convinrent
qu'aussitôt que l'un d'eux serait attaqué par les
NOIV. BIOGK. CÉNÉR. — T. XXV.
fils de Charles Martel, l'autre se mettrait im-
médiatement en marche pour le défendre ou
faire une diversion vigoureuse en sa faveur. Les
deux frères réunirent en effet leurs armes, pas-
sèrent la Loire à Orléans, entrèrent sur le ter-
ritoire des Aquitains, et se dirigèrent sur Bour-
ges; mais ils se contentèrent d'en, brûler les
faubourgs, la ville étant trop forte pour eux; et,
marchant droit à l'ouest , ils poussèrent jusqu'à
Lukes, aujourd'hui Loches-sur-Indre. Un chro-
niqueur franc s'extasie, en racontant le siège de
cette ville, sur la bénignité des vainqueurs qui
épargnèrent miséricordieusement, dit-il, tous les
habitants, se contentant de raser la ville, d'y
faire butin de tout, et de réduire en servitude la
garnison et la population tout entière. Pendant
que Pépin et Carloman se livraient ainsi à ladé-
vastion du pays de leur ennemi, une révolte écla-
tait contre eux au delà du Rhin. Les Alemanes
ou Souabes avaient pris les armes à l'instiga-
tion d'Odilon, et revendiquaient leur indépen-
dance. Les princes francs, quittant en toute hâte
l'Aquitaine, gagnèrent à grandes journées les
bords du Danube. Ils eurent bientôt réduit les
révoltés à l'obéissance. I/année suivante, ce fut
Odilon lui-même qui prit les armes, tandis que
Hunald, sûr de l'impunité, tombait comme la
foudre sur Orléans et sur Chartres. Il pilla et
incendia cette dernière ville, sans laisser debout
ni maison, ni couvent, ni église, pas même la
cathédrale placée sous l'invocation de la Vierge,
et reprit ensuite le chemin de son pays sans le
moindre obstacle. Mais les Bavarois et les
Saxons furent défaits, et les princes francs repa-
rurent en 745 à la tète d'une nouvelle armée sur
les bords de la Loire. Rien ne pouvait sauver
l'Aquitaine, et Hunald lui-même se voyait sur le
point de tomber entre les mains des vainqueurs,
lorsqu'à imagina un expédient qui le tira d'af-
faire sans compromettre sa dignité et sans
porter atteinte aux ressources guerrières dont
ses États 'pouvaient avoir besoin plus tard. Il
imagina de se retirer dans un cloître et de cé-
der son pouvoir à son fils Waifre, que les prin-
ces francs crurent dominer facilement,, tandis
qu'Hunald, de son côté, fondait sur lui les plus
grandes espérances. Il ne lui suffisait pas d'ab-
diquer pour assurer le trône au jeune prince ;
Atton avait une certaine part dans le gouver-
nement de l'Aquitaine, et il était à craindre qu'il
ne lui disputât l'autorité. Hunald l'attira à Bor-
deaux, et dès qu'il l'eut en son pouvoir, il lui fit
crever les yeux et l'enferma dans une prison
d'où il ne devait plus sortir.
Le chef aquitain ayant ainsi aplani de son mieux
la carrière de son fils, lui fit ses adieux, prit congé
de sa femme, et alla revêtir l'habit de moine dans
le monastère de l'Ile de Ré, où son père avait son
tombeau. Près de vingt-cinq ans , il sommeilla
dans le cloître; et Pépin put, après avoir assas-
siné Waifre, mourir tranquille (768), en pensant
que son successeur n'aurait rien à redouter d'un
18
547
vieux moine. Il se trompait ; Hunald jeta le froc,
déserta sou monastère, reprit le titre de duc, et
s'élança à l'aventure dans l'Aquitaine pour en
ci tasser les garnisons et les officiers de Pépin
(769). II rassembla autour de lui tous les mécon-
tents, profita habilement des troubles qui avaient
suivi la mort du chef de la dynastie carlovin-
glenne, s'ouvrit des intelligences jusque dans la
Vasconie, et fut au moment de parler en maître
à Charlemagne. Mais celui-ci parvint, par une
manœuvre habile, à l'envelopper entre la Dor-
dogne et la Garonne. Hunald gagna alors la Vas-
conie, puis, abandonné de son armée, il fut forcé
de se réfugier chez Loup, duc de Gascogne, qui,
n'osant résister aux ordres de Charlemagne, lui
livra le fugitif.
Hunald, conduit en Austrasle, s'échappa deux
ans après, et gagna la frontière des Alpes et de
là Rome. Certains auteurs prétendent que Char-
lemagne lui permit de se rendre en Italie pour
y rester sous la surveillance du pape Etienne II.
Arrivé à Rome, Hunald se présenta au souve-
rain pontife, et fit entre ses mains le serment
ou le vœu formel de ne jamais s'éloigner du
tombeau des deux apôtres. Il en devait être de
ce vœu comme de tous les traités qui lui avaient
été imposés jusque-là : Didier, roi des Lombards,
l'appela auprès de lui, pensant qu'il pourrait tirer
bon parti de son expérience et de sa renommée
dans sa lutte contre Charlemagne. Hunald s'en-
fuit aussitôt de Rome, et soutint avec son nou-
vel ami. le siège que le roi Franc vint mettre
devant Pavie en 774. Il y mourut la même an-
née, écrasé sous des pierres. Une tour, en s'é-
croùlant, l'ensevelit-elie sous ses ruines, ou
bien fut-il lapidé par les habitants qu'il exhor-
tait à ne pas capituler? L'expression du chro-
niqueur ( sicut meruit, lapidibus dignam
morte vitam finivit ) est obscure et ne noua
permet pas de décider cette question.
Le Bas, Dict. encyc. de la France. — Chronicon jtfow-
siacensis Camobii. — Frétfégaire, Continuât.. — Adon,
Chron. - Adrien de Valois, Hes Frwietem* I. XXV; —
Histoire générale du Langmdiùe, 1. VU. — Éfffe-
hard . Vîtes Caroli Magni Annotes. — FaurtcJ, His-
toire de la Gaule méridionale,
hïtnattld (Pierre), médecin français, était
d'Angers, où il exerça et enseigna Ta médecine à
la fin du dix-septième siècle et au commence-
ment du dix-huitième. On a de lui ; Discowfi
physiaiie sur les Propriétés de la Sauge et
sur le reste des plantes aromatiques, dans
lequel par occasion on traite de \a dissolu-
tion des corps et de la digestion des aliments
dans l'estomac ; Paris, 1698, in- 12; — Disser-
tation sur les fièvres malignes qui régnent
dans les saisons de Vêlé et de l'automne, et
en particulier sur celles de Vannée 1710;
Angers, 1710, in-12;— Entretiens sur la Rage
et ses remèdes, oit, par occasion, on propose
un nouveau système de la sanguification et
de quelques autres matières importantes à
Vart de guérir; Chàteau-Gontier, 1714, 1719,
HUNALD — HUNAULD 548
in-12; — Projet d'un nouveau Couru de Hé-
decine; Ohâteau«Genaer, 1718, in-12.
Un autre Pierre Hujuuu», aussi médecin à
Angers, a publié : Dissertation sur les Vapeurs
et les Pertes de Sang; Angers, 1756, in-12.
3. V.
Bioçr. MééUplô, — Qntrartf, to Frunc* Littéraire.
■un acm» {François- Joseph), anetomisfte
français, né à Châteauhrtant (Bretagne ), le 24 fé-
vrier 1701, mort à Paria, le 16 décembre 1743.
Fils de René Hunauld, médecin de Saint-Maki,
il appartenait à une famille dont tau* les membres
s'étaient consacrés à l'art de guérir. Il efiafertaaa
la même carrière, eommenen ses études à An-
gers, et se fit recevoir maître es arts* A dix-
huit ans il vint à Paris, et trois ans aprè* il prit
le grade de docteur à Reims* De retour à Paris ,
il se livra au* travaux anatotnêigues, et s'attacha
particulièrement a Winalovf et a Dnverney, ami
la firent entrer fe l'Académie de* Sciences en
1724, d'abord en qualité de chimiste adjeiat, seule
place alors vacante, puis cetnme.aaatoausteen
*728. A la mort a#Duveïn«y, «0.1730, Hunauld
le remplaça dan» la ehaijre d'anstofuie sa Jardin
du Roi. Il s'appliqua dès lors a l'exercice de sa
profession. Devenu médecin dn due depuis
maréchal de Rienetien, il raccompagna dans
son ambassade * V*enan$i7a&-t72in), voyagea
ensuite, en Angleterre, on H fut nommé membre
4e la Société Royale et en Hollande*, on il se fia
avec Boërhaave. .«. Quoiqu'il éprouvât dans se jeu-
nesse une grande répugnance pour les dissec-
tion*, dit la Biographie Médiate, il. parvint à
la surmonter et a se faire parmi tes anafomistes
une réputation que le temps at pas tout à (ait
détruite, en la restreignant néanmoins beau-
coup, L'ostéoiogie .Sut la» partie à Jaquette il s'ap-
pliqua de préférence, et malgré les ptegrès qu'a
fcit* la céphalogénie entre les mains des n*>
4erne&, on citera toujours avec éloge ses re-
cherchas sur les os du crâne de rbeoime. On kn
doit aussi la description de quelques cas inté-
ressants, de monstruosité» entre autres celui
d'un hydrocéphale dont la surface da cerveau
ne présentait aucune trace de circonvolutions, »
De puis on cite de lui : Discours sur les Fièvres
qui ont régné les année* dernières; Paris,
1606, in-12; — Xe Chirurgien Médtcin, on
lettres contre les chirurgiens qui exercent
la médecine j Paris, 172G, JflHtt; — Disserta-
tion en forme de lettre*, 00, si&etdos ouvrages
de Vaytew du tiare sur 4<? maladies des es;
Paris» 1726, hvta ; c'est une taochw* anonyme
contre J,-L. Petit» qui y est accusé de plagiat; —
Nouveau Traité dePhysitm* sm toute sa na*
ture; Paris, 1742, % vol. in-12v HunaaM a donné
dans les Mémoires de V Académie des Sciences
les articles suivants : Recherches anatvmÀques
sur les Os du Crâne deVMommt I73w; —
Examen de quelques parties d'¥* singe; 173&;
— Mémoire dans lequel on examine si i'kuite
d'olive est un spécifique contre la morsure
549
HUWAULD — HUNDT
550
des vipères (avec Geoffroy); 1737; — Re-
cherches sur les Causée de la structure sin-
gulière qu'on rencontre quelque/ois dans dif-
férentes parties du corps humain; 1740. Les
Philasophtcal Transactions contiennent de loi
des Réflexions sur VOpérattom d*une Fistule
lacrymale. J. V.
Biographie MééHéah.^ Qrtrirf, IM France UOétatte.
Bruno (Wiguiée), généalogiste allemand, né
en 1514, mort le 18 lévrier 158*, Il était de la fa-»
mille des comtes Huad de Lautevbacb. En 1530
il se rendit à faniv efsité d'ingolstadi , où il sui-
vit divers coni* sons la conduite de J. Agricola.
Cinq ans après il partit pour Bologne. En 1537 il
devint professeur de droit à lngolstadt,et en 1540
conseiller aùiiqoe à Munich. Après avoir occupé
plusieurs emplois dans la judicatore, il fut enfin
nommé président du conseil intime de Bavière.
On a de liri : Êayertsches Stanmbuch (Livre
des Généalogie* bavaroises); Ingolstadt, 1581,
1 598, 2 vol. m-toi; te premier volante fut réim-
primé à Mottich en 1599; il contient des notices
sur les familles bavaroises éteintes à Fépoqne de
sa publication; 1er second renferme la généalogie
de celles qui existaient encore alors. Un troisième
volume est resté en manuscrit; il se trouve à la
Bibliothèque royale de Monfeh; on y trouve nue
autobiographie de Ehffld ; — Mefropélis Satie-
burgensis continens prtmordia christumœ te-
ligionis per Êojariam et loca fuxdam tn-
dna; Ingofstadf , 1582, ia-fol.; Munich, 1620,
3 vol. râ-foL, avec des adjonctions de Gevrold;
Ratisbonne, 1719, 3 vol. m-fok; cette dernière
édition est incorrecte; — MrstUch-pfaltiseke
und bairische Généalogie nebst andern sur
pfalzbairiscKcn Geschiehte gch&rigen Sachen
(Généalogie des Princes palatins et bavarois ainsi
que d'autres choses concernant l'histoire dn
Palatinat ef de ta Bavière); Aûgsboorg, 1632,
in-fol. — H und a encore laissé eh manuscrit :
Généalogie der Bertoge in Baiern (Généalogie
des Ducs de Bavière), et Qcographisch-politis-
che Beschreibung von Baiern (Description his-
torique et politique de la Bavière). E. G.
KoboW, Baier-Getéhrten-Lexiton. — ». Tob. KAbler,
Uben taté&hrifte* JT. Hundt ; GwtUngue, f 750, ln-*°.
- OEtter, Histor. Bibliothek, t. M. — Erach et Gruber,
Encyklopxdie.
HCifDBiKBR (Jean-Pierre) , pédagogue al-
lemand, né au village de GranôVLaffert, dans 1»
principauté de Hildesheim, le 29 novembre 1751,
mort le ? février 1836. Destiné an commerce par
son père, qui était mercier, il slnstraisft néan-
moins der son mieux. II fat amst condvtt à re-
chercher les meilleures méthodes d'édneatkm, et
i! imagina lui-même des moyens rapides d'ensei-
gner aux enfants la lecture et récriture, a la
mort de son père, en 1775, ft organisa, font en
faisant son commerce dans te village natal, une
école de connaissances utiles pour tes adultes, et
il dirigea d'après ses propres méthodes celle qui
existait déjà pour les enfants. Eh 1798, H se ren-
dit en Hollande dans l'intérêt de son commerce.
Ses affaires ayant cessé de prospérer, il reprit
des élèves. 11 lui en vint de plusieurs endroits ,
de Hildesheim et de Brunswick, et le souverain
de ce pays l'encouragea dans ses efforts. Aide
par ce > prince, Hundeiker put établir une insti-
tution dans le château de Vechelde. Il en fut ex-
pulsé, après la campagne de 1813, par le prince
Guttlauroe-Frédéric, revenu dans ses États. Après
d'inutiles réclamations, Hundeiker alla se retirer
auprès d'un de sea beaux-fils dans les environs
de Dresde, où il mourut* Entre autres ouvrages.
On a de lui ; Chants pour V Enfance; - Abé-
cédaire. V. R.
Henke, BvséM*. «-Krach et Grqber, Mrwklop&die
hujijmuumçbn {Jean-Chrétien), natura-
liste allemand, né à Hanau, le 10 août 1783,m#rt
à Gfcsaen, le 10 février 1834. Professeur d'éco-
nomie forestière à Tubingue en 1821, il devint
en 1824 directeur de l'école forestière de Gies-
sen. Oa a de lui : Méthodologie und Grundriss
der Forstwissenschaft (Méthodologie et élé-
ments de la Science Forestière) \ Tubingue, 1819 j
— Encyklopœdie der Forstwissenschaften
(Encyclopédie des Sciences Forestières); Tu-
bingue, 1821, 2 vol. ; 3 e édition en 3 vol. 1835-
1840; vol. t et 2; 4 e édit, 1842-1843; — Lehr-
buch der Forst und landmrthschaftUchen
Naturkunde (Traité scientifique de l'Économie
forestièreetitirate);Tobingue, 1827-1840,4 vol.;
— DU Anatotnie t de Chemismus und die
Physiologie der Pflanzen (Anatomie, chimie
et physiologie des Plantes); Tubingue, 1829;
— Die ForstschsBtmng auf neuen wissens-
chaftlichen Grundlagen (La Taxation des Fo-
rêtsd'aprèa de nouveaux principes scientifiques ) ;
Tubmgoe, 1826, 2 vol.; — - Beitraege vur ge-
sammten Forstunssenschaft (Documents pour
servir à l'étude de la Science Forestière) ; Tu-
bingue, 1824-1829, 2 vol., ouvrage continué par
Klanprecht,
Son ni» Charles Bernard, né le 30 janvier
1810, à Friedewald, près Hersfeld , professeur
de théologie à Heidelberg depuis 1847, a pu-
blié entre autres : Der deutsche Protes-
tamUsmus, seine Vergangenheit und seine
heutigen Lebensjragen (Le Protestantisme al-
lemand, son passé et son présent); Francfort,
1816 ; 3* édition, 1849 ; -r Veber die ftatur und
die geschichtliche Entwiekelung der Bu-
mêmitâttsidee (Dn far Nature et du développement
historique de ridée de VHuntauité ) ; Heidelberg,
1852. R. L.
Cmv.-LesJ.
*»tJi»tKHM» (André) , professeur allemand,
né à Breslao, vivait vers la fin du quinzième
siècle; il enseigna à Erfnrt les belles-lettres, et fit
imprimer en cette ville en 1494 un Nova A rs
epistolandi, m-4°. G. B.
Haln, Repertorittm Biblioçrapkicnm, t. H, P. I, p. 113.
■un*? (Magnus), naturaliste et philosophe
allemand, né à Magdebourg, en 1449, mort à
Meissen, en 1519. Il enseigna la physique à l'u-
18.
551
HUNDT — HUNIADE
552
niversité de Leipzig, et devînt recteur de cette
école. Il est l'auteur d'un grand nombre d'ou-
vrages, parmi lesquels nous ne citerons qu'un
seul , curieux au point de Tue de l'histoire de la
médecine, parce qu'il est un des premiers dans
lesquels se trouvent des dessins anatomiques :
Anthropologium de hominis dignitate, na-
turel et proprietatibus , de elementis, parti-
bus et membris humant corporis, de jura-
mentis, nocumentis f accidentibus , vitiis,
remediis et physionomia ipsorum, de excre-
mentis et exeuntibus, de spiritu humano
ejusque natura, partibus et operibus, de
anima humana et ipsius appendiciis ; Leip-
zig, 1501, in-4°. Platner, dans son opuscule De
Maïjno Hundt , tabularum anatomicarum, ut
videtur, auctore, Leipzig* 1734, in-4°, appelle
Hundt « l'inventeur des dessins anatomiques »,
car les ouvrages de Ketham (Fasciculus Medi-
cinœ; Venise, 1495, in-folio) et de Peiligk
( Compendium Philosophie naturalis ; Leip-
zig, 1499), qui en contenaient déjà, avaient
passé presque inaperçus. D r L.
_ Ersch et Gruber, AUgem. Bncyklopsedie.
hume (André-Christophe- Albert), punii-
ciste allemand , né à Gœttingue, le 4 mai 1777,
mort le 31 décembre 1835. Après avoir suivi les
cours de l'université de sa ville natale et rempli
les fonctions de précepteur particulier, il étudia
la théologie, puis revint à l'enseignement privé.
De 1804 à 1814 il fut gouverneur des fils de De-
rental, premier maréchal de la cour. Nommé
capitaine de la landsturm lors de la guerre de
1812, il rendit beaucoup de services dans cette
position. En 1814 il fut pendant un an gouver-
neur d'un des princes de la famille royale. Puis
il devint secrétaire du général bavarois La-
motte. A son retour dans sa ville natale, il se
livra uniquement à l'étude des sciences et des
lettres. En même temps il écrivit dans les jour-
naux et recueils périodiques de l'Allemagne. En
dernier lieu il avait été nommé conservateur de la
Bibliothèque royale de Hanovre. Outre ses nom-
breux articles publiés dans les journaux, on a
de lui : Petite Histoire du Hanovre; — Es-
quisse historique et philosophique du Com-
merce des Esclaves nègres, etc., depuis son
origine jusqu'en 1820, 1. 1. V. R.
Conversât. -Lex. der Cegenwart.
hunéric (*Ov(âptxoç), second roi des Van-
dales en Afrique, fils et successeur de Genséric,
régna de 477 à 484. Il était encore enfant lorsque
son père le donna en otage à l'empereur Valen-
tinien, en 435 ; mais celui-ci renvoya bientôt le
jeune prince. Il épousa Eudocie, fille de Valen-
tinieo, alors prisonnière en Afrique. H succéda à
son père dans un âge avancé, et n'hérita d'au-
cune de ses grandes qualités. Avide, cruel et
lâche , il ne fut redoutable que pour sa famille
et ses sujets. Comme, d'après une loi de Genséric,
la couronne devait passer au prince le plus âgé
de la famille royale, Hunéric, désirant laisser le
trône à ses enfants, fit tuer son frère Théodoric.
11 cessa d'entretenir les flottes qui, sous Genséric,
portaient la terreur sur les rivages de l'empire
romain, et laissa les Maures s'établir sur le ter-
ritoire des Vandales. Il persécuta les catholiques.
Ce fut en vain que son allié, l'empereur Zenon ,
à la prière du pape Félix, lui envoya un ambas-
sadeur pour demander quelque adoucissement
à la persécution. Hunéric, loin de rien accorder,
fit border d'échafaud.*, de chevalets et de bour-
reaux les rues par où devait passer Vranius, le
député romain. 11 mourut peu après de la même
maladie qu'un autre célèbre persécuteur, Gâte-
rais. Y.
Procope, BeU. Vand., I, s, 8. — Victor Vttenais, dans
Ruinait, Historia Pertecutionis Fandalicse. — Gibbon,
History of Décline and Fait of Roman Empire.
- HUNIADE OU HUNYADB ( Jean - CORVIN ) ,
voïvode de Transylvanie, né vers 1400, mort le
10 septembre 1456. La première partie de sa vie
fut obscure, et a donné lieu à des légendes. On s'ac-
corde généralement à le faire naître en Valachie.
Son père était, dit-on , un boïard nommé Butho
ou Bushi, et sa mère, Elisabeth Morsinay» appar-
tenait à la famille impériale des Paléologues. Une
tradition encore plus incertaine, et fondée sur ia
ressemblance des noms, fait remonter la race
dHuniade Corvin aux Corvinus romains. D'a-
près une troisième version, Sigismond, roi de
Hongrie et ensuite empereur d'Allemagne, dans
une campagne qu'il fit contre les Turcs sur les
frontières de la Valachie en 1392 , connut Eli-
sabeth Morsinay. L'ayant rendue mère, il lui
laissa un anneau d'or et un écrit qui devaient
servir de signes de reconnaissance à l'enfant au-
près de son père. Elisabeth épousa le boïard
valaque Bushi, qui la laissa bientôt veuve. Un
jour que l'enfant jouait avec son anneau sur les
genoux de sa mère, un corbeau (corvus) le lui
enleva. L'oiseau fut abattu par un beau-frère
d'Elisabeth , et le jeune Jean reçut le nom de
Corvin (Corvinus). Quelques années après Jean
Corvin alla présenter à Sigismond l'anneau et
l'écrit laissés à sa mère , et fut comblé par ce
prince d'honneurs et de richesses. Il reçut le
château d'Huniadi avec soixante villages, et
ajouta à son nom celui de son nouveau domaine.
Ce récit, qui a tous les caractères d'une légende,
est dénué de preuves historiques ; il paraît avoir
été inventé pour expliquer les deux noms du
voïvode transylvain. Les Huniades avaient dans
leurs armes un corbeau tenant à son bec un an-
neau d'or, et de là sans doute leur vint le sur-
nom de Corvinus. Une grave difficulté chrono-
logique s'oppose à ce que Huniade soit le fils de
Sigismond. L'époque de la liaison supposée de
ce prince avec Elisabeth précéda de sept ou huit
ans la naissance d 'Huniade, et si pour éluder
la difficulté on rapporte cette liaison à Tannée
1399, on se trouve dans un nouvel embarras.
Sigismond était alors prisonnier au château de
Ziklos , et on ne peut pas lui supposer une in-
553
HUNIADE — HUNNIUS
554
trigue amoureuse en Valachie. Chalcondyle et
Dupas nous fournissent sur Jean Huniade des
récits aussi peu authentiques, et qui ne servent
pas à dissiper l'obscurité qui couvre sa naissance
et la plus grande partie de sa vie. Son histoire
ne commence qu'à la mortde l'empereur Albert II,
au mois d'octobre 1439. Albert laissait sa femme
Elisabeth enceinte , et le royaume de Hongrie se
trouvait sans souverain. Quoique la reine eût
accouché d'un enfant qu'on appela Ladislas,
beaucoup de Hongrois, redoutant les dangers
d'une longue minorité, appelèrent an trône Vla-
dislasIU, roi de Pologne. Huniade, qui s'était ac-
quis une grande réputation militaire au service de
Sigismond et d'Albert, se déclara pour ce parti,
et le fit triompher. Il fut le plus vaillant lieute-
n%nt de Yladislas. fin 1440 il harcela l'armée
d'Amurat, qui assiégeait Belgrade et la força à la
retraite. Il alla ensuite au secours (FHermann-
stadt pressée par Mezid-Bei, général d'Amurat,
battit complètement les Turcs et les rejeta au
delà du Danube. Yladislas le récompensa de cette
victoire par la dignité de voïvode de Transyl-
vanie. Irrité des succès du héros qne les Turcs
appelaient Yanho, Amurat envoya contre lui,
en 1442, une armée de 80,000 hommes. Huniade
marcha à leur rencontre avec 15,000 hommes,
et les mit en déroute à Yasag. L'année suivante
fut l'époque la pluf brillante de la vie <f Huniade.
Dans une campagne qui dura cinq mois, et qne
les Hongrois appellent longue à cause de ses
exploits, il remporta cinq victoires et prit cinq
villes. La principale de ces rencontres eut lieu
à Nissa. Les Hongrois franchirent» an cœur de
l'hiver, les défilés des Balkans et menacèrent An-
drinople. Amurat 'envoya une ambassade à Hu-
niade, et une trêve de dix ans lut conclue à Sze-
gedin, le 12 juillet 1444. La trêve, solennellement
jurée, fut violée moins d'un mois après par Yla-
dislas, malgré les représentations de Huniade.
Une éclatante défaite suivit ce parjure. L'armée
chrétienne fut accablée dans la plaine de Varna,
le 10 novembre 1444. Yladislas y périt et Hu-
niade s'enfuit. Les Hongrois le choisirent pour
gouverneur général pendant la minorité de La-
dislas le Posthume. Il exerça le pouvoir su-
prême jusqu'en 1453, et en fit un vigoureux
usage. Si dans sa terrible lutte contre les Turcs
il essuya des revers aussi éclatants que ses vic-
toires, il ne se découragea jamais, revint obsti-
nément à la charge, et partagea avec Scander-
berg la gloire d'avoir contenu l'invasion musul-
mane dans la péninsule hellénique. Profitant
d'un moment où les exploits du héros albanais
retenaient Amurat loin du Danube, il traversa ce
fleuve avec 24,000 hommes, et envahit la Servie.
Amurat lui proposa une trêve qu'il refusa , et
le 17 octobre 1448 commença la bataille de
Kossova. Elle dura trois jours, et se termina
par la destruction presque complète des Hongrois
qui furent accablés par la supériorité du nom-
bre. Huniade parvint à regagner la Hongrie à
travers les forêts de la Servie et de la Tran-
sylvanie. Une diversion de Scanderberg sauva
la Hongrie des suites de la défaite de Kossova;
mais ce pays se trouva hors d'état de rien entre-
prendre de plusieurs années. La majorité de La-
dislas et l'ascendant que prit sur ce prince le
comte Unie de Cilly, ennemi personnel de Hu-
niade, forcèrent le voïvode de Transylvanie à
l'inaction. Pendant ce temps les Turcs s'empa-
rèrent de Constantinople, et détruisirent les der-
niers restes de la puissance grecque. Le sultan
Mahomet H vint ensuite avec 150,000 hommes
et 300 pièces de canon mettre le siège devant
Belgrade, que défendait Michel Szilagyi, beau-
frère d'Huniade. Le voïvode, rassemblant à la
hâte une armée composée d'hommes de tous
états, bourgeois, paysans, étudiants, moines
mendiants, armés de pieux, de frondes, de
faux, accourut au secours de Belgrade. Il était
accompagné du légat pontifical Capistrano et de
plusieurs franciscains dont les discours électri-
saient ces bandes indisciplinées, mal armées ,
mais pleines d'une ardeur religieuse* Le 14 juillet
1456 Huniade dispersa la flottille turque du Da-
nube, et le 21 les Hongrois, ayant en tête Capis-
trano, repoussèrent les Turcs et pénétrèrent
dans leur camp. Mahomet leva précipitamment
le siège et abandonna toute son artillerie. Hu-
niade ne survécut que peu de jours à son triom-
phe, et mourut des suites des blessures reçues à
ce siège. Jean Huniade fut un des plus grands
capitaines de son temps. Vivant à une époque et
dans un pays peu civilisés, il eut toutes les qua-
lités des anciens chefs barbares, la ruse, la pa-
tience, l'audace , mais il en eut aussi les défauts,
et l'on signale dans sa vie plusieurs traits de
cruauté. Il laissa deux fils : Ladislas, qui eut la
tête tranchée pour avoir tué le comte de Cilly, et
Matthias, qui fut élu roi de Hongrie après la
mort de Ladislas le Posthume. Z.
Chalcondyle, 1. V-VII. — Difcas, 1. XXX-XLIV. — Bon-
flnliu, Dec. III, 4-18. — CalUroachns, De Clade Famensi.
— G.-B. Barberto, Fita Capistriani. — Bayer, Ditser-
tatiodeJoannis Huniadis Ortu et Nativitatf. — Chauffe-
pi*, Nouveau Diction. Historique.- Schwantner, Scrip-
torei Rerum Hungaricanm veteres ac çenuini. — Pray,
Annales Regum Hungariœ, ab ann. c. 997 ad ann. 1M4.
- Eogel, Histoire du Royaume de Hongrie , 1. III. —
Mallatb, Histoire des Magyares.— Ctaassln, La Hongrie,
son génie et sa mission.
HCJraïus (Gille), théologien protestant al-
lemand , né à Winnenden, dans le Wurtemberg,
le 21 décembre 1550, mort le 4 avril 1603. Ses
parents, qui étaient sans fortune, firent de grands
sacrifices pour qu'il pût faire ses études de col-
lège. En 1565 il se rendit à l'université de Tu-
bingue, où il se fit deux ans après recevoir
maître en philosophie. Il s'appliqua ensuite pen-
dant huit ans avec une grande ardeur à l'étude de
la théologie. En 1574 il fut nommé diacre à Tu-
bîngue. Deux ans après il fut appelé à occuper
une chaire de théologie à l'université de Mar-
bourg. Eu 1592 il devint professeur de théologie
fe \yittemberg en même temps que prévôt à
655 HUffMUS
1 'église du château de cette viite. L'année suivante
ii fut envoyé en Silésie peur y hâter le* progrès
de la réforme, Après être devenu m 1696 sur-
intendant général, il assista eu 1601 au colloque
deBatisboiMie,0Ù il ajfguiaaatA contre Gratter
et Tanner. Hunnius soutint pendant toute sa
rie des polémiques ardente* contre les catholi-
ques , les calviniste* #t «notre tous <*ux qui s'é-
cartaient d'une ligne de Ja confession d'Augs-
bourg. £nun, il ffl wnjtewnont tes ptns grands
efforts pour faire persécuter par son gouverne-
ment ceux qu'il ne reconoaissaj* pas comme liions
luthériens,
Hunnius laissa pfesienraffl*. L'un» Cille, se fit
remarquer par plusieurs ouvrages de théologie.
Vautre, Helckerich-Ulrieh , %t d'abord pro-
fesseur de droit à Gtessen^t ensuite à Marbourg.
Plus tard il se fit catholique, ef entra au service
de plusieurs prinoesectteêia&Jâques, Il «st auteur
de plus de cinquante ouvrage et dissertations
juridiques (voy. Jpgter, Beytrim wrmMt-
chen Biographie, t (V ) >
Les ouvrages <te Huwws a'unt pu» guère
d'intérêt aujourd'hui ; les principaux «ont : £W-
vinus tudaiwnt; WWmbw&, i$9g # nM°;
écrit d'une violence extrême oonfe* te peraonne
et la doctrine de Calvin ; Pareqs ( wy r m nom )
ayant répondu par non Calvin** orthodoxm,
Hunnius fit paraître , en 150&, aen 4nXMto-
rseus; — Anti-Qretserm ; WHtemherg, 1*02
{voy. Baillet, Jugements défi Sawnts, t VI);
— Anti-Tamenu (wy. Baillet, Jugements
des Savante, t. VI); — Josephus, deux co-
médies publiées à Marbourg, en 1634 et 1566.
Les œuvres latines de Hunnius ont été re-
cueillies en cinq votantes in-folio j Wittemberg,
1607 -1600. Le tome premier renferme tes
traités dogmatiques* le second les écrits polé-
miques , ie troisième et le quatrième fes ou-
vrages d'exégèse, le «inqmeme les thèses et ha-
rangues. Hunnius a encore publié de nombreux
sermons, des ouvrages de piété ainsi que divers
traités de controverse. E. G.
Adami, Vitse Theotojorum. cr Frtbei, Tteatrum. -
«ayle , Dictionnaire. — Eriétto, Uemer, Theolçqomm
tnttemh., t. J, p. MB. — Programma in JSg. Hunntutn;
Wittemberg, l«û8, 4a-* ë - 4J«aner, UieJtenpreOm au/
Hwnnms. — Butter, 7Arc»rtû0la 4* f«te Huunii. -
Ncumann, Programma de Fita Humdi ; WiUeuberg,
#704, i»-4°. - Er<*œann, ftiogr. sâmmtlicher Prô/este
in mttenberg. — Strieder, Hestitcke Gelehrtenget-
chiehte, t. VI, p. »o, et i. il, p. 8M. ^- JOcfcer, ,*tfp.
iHJOT ( Thomas ) , hébraïsanf anglais , né en
1696, et «toit à O*focd , le 31 oejobre 1774. 11
fit ses études à l'*niversiAé d'Oxford àHart-Halie,
•où il fut reou maître es arts en 1721. 11 était un
des quatre plus anciens agrégés de cette société,
quand elle. reçut une organisation régulière et prit
le nom de Collège de Hertford. Hunt consacra
ses connaissances jprnloJogiques à des travaux
sur l'Ancien Testament. Il fut surtout d'un grand
secours à Wallon , pour la publication de Ja po-
lyglotte de Londres. En 1738 il fut appelé à la
~ HUNT 556
chaine d'arabe fondée par le docteur Land , et
eu 1747 il fat nommé professeur royal d'hébreu
à Oxford, fi prit te grade de bachelier en théo-
logie en 1748, et l'année suivante celui de doc-
teur. Il était membre de ta Société des Antiquai-
res et de la Société Royale de Londres , dans la-
quelle ë Ait reçu en 1740. Hunt était un homme
timide, d'une modestie poussée à l'exeès, livré
tout entier à l'étude, et craignant beaucoup de
se produire an dehors. On a de lui : De Bene-
dietione patriarche Jacobi; Oxford., 1728
»-4% tiré seulement à cent exemplaires; — d«
Antiqvitate, Bleyantoa et UtiUtate Lingux
Arabie*! Oxford., 1739, in-4°. (Test le dis-
cowa qu'il prononça en prenant possession de
sa chaire d'arabe; — De Vsu Dialectorum
Orientaliutn, acprxcipue Arabise in hebrctico
codice interprmtando, Oratio; Oxford., t74«
in*4* : discours d'ouverture de ses leçons d'hé-
breu ; — Observations m eeveral Passages in
theboohofProverbe, with twoSennons; Oxford,
in-4% publiées l'année qui suivit sa mort paries
nome de Kennikot; — une Notice sur la rela-
tion de l'Egypte d'Abd - Attatif, qu'il avait tra-
duite, et dont il proposait la publication par sous-
cription : ce projet ne reçut pas d'exécution ; —
an fragment de saint Hippolyte, d'après deux
manuscrits de la Smliothèque Bodleyenne, dans
1a BUëtothecm BibUea de «arker, 1728, in-4°
En 4757 «uptdonna une édition des Œuvres
complètes de Hooptr, évéque de Batfe , et en
mo, avec eostar, une noureile édition annotée
de la Ht&mn Uel&onis Veterum fiersarum
de Thons. Hydn. M. N.
»Me, mm MognwMagf DfctfoMry.
wcvw (Henry), homme potttfque anglais,
né à Wittmgton, dans le Wiltshire, ie «novembre
1773, mort le 15 février 1*35. Son père était
m riche fermier, tet son édmation fot toute pra-
tiqua, tout agricole. L'amour de ^indépendance
M des plaisirs l'entramndans quelques écarts de
jeunesse que In vieux fermier réprima sévère-
ment. On assure qu'après une scène violente
Henry flunt s'engagea à bord d'un négrier de
Bristol. Cet engagement n'eut pas de suite; mais
quelque temps après , son mariage avec la fille
d'un aubergiste lui attira de nouveau la colère
paternelle. A la mort de son père, en 1797, Hunt
se trouva l'un des plus riches fermiers de TAn-
gieterne , et se donna tout entier, aux soins qu'exi-
geaient ses vastes exploitations. Sa ferme était
citée comme la mieux tenue -dn comté, et lors-
qu'on 1801 , sur la crainte qu'on eut d'une in-
vasion française , tous les propriétaires durent
fournir au lord-lieutenant un état de leur mobi-
lier, celui de Henry Hunt portait 1,600 sacs de
froment , 30 chevaux de trait, 30 bœufs et va-
ches, 4,200 moutons , etc. Le tout, estimé plus
de 20,000 liv. st., fut mis par lui à la disposi-
tion du gouvernement en cas d'invasion; il s'en-
gagea de plus à s'équiper avec trois de ses gens
pour le service de la cavalerie. Cette offre pa-
557
triotique lui fit beaucoup d'honneur, et fl fut
nommé à l'un des principaux grades de la yeo-
manty ou milice provinciale. Mais, toujours
emporté par sa mauvaise tête , il eut avec lord
Bruce, commandant de ce corps, une querelle à
raison de laquelle iï lut condamné à 100 liv. st.
d'amende et à six semaines d'emprisonnement.
Il connut, en prison , Waddington , Clifford et
autres radicaux , qui n'eurent pas de peine à en-
traîner dans lébr parti cet esprit fougueux, aux
sympathies populaires , à l'humeur ennemie de
tout frein. Hunt n'était, en y entrant, qu'un mé-
content, un meneur de localité : il en sortit l'un
des apôtres les plus fougueux de la réforme uni-
verselle. On le vit parcourir les villes, et les
comtés dans un équipage à la fois somptueux et
bizarre, réunissant lé peuplé sur son passage,
le haranguant , et faisant de la propagande poli-
tique avec le stvlé et les allures d'un charlatan.
Parmi les assemblée* de ce genre qu'il provoqua
de 1816 à 1810, Ott cite celles de Westminster,
de Spafields et de Manchester. A la suite dé
cette dernière , * qui fut dissipée par la force et
où périrent un assez grand nombre de personnes,
Hunt fut arrêté et condamné, le 15 mai 1820,
après de longs débats et une défense remarquable
présentée par lui-même, à deux ans et demi de
prison, à 1,000 liv. st. d'amende, et à donner
caution pour sa bbnne conduite pendant cinq ans,
& dater du jour de sa mise en liberté. Malgré la
popularité dont il jouissait auprès des classes
ouvrières , Hunt n'avait pu réussir à se faire
nommer au parlement; ses candidatures réité-
rées et orageuses, en 1818 à Preston, où il exer-
çait alors l'état de brasseur, à Westminster en
18f9, en 1826 * Ilchester, avaient constamment
échoué. Il fut plus heureux en 1830, «dans la
première de ces localités, et sa victoire, aussi
bruyante que l'avaient été ses défaites , fut re-
gardée comme un des symptômes les plus remar-
quables du mouvement imprimé en Angleterre à
l'opinion publique par la révolution française de
juillet 1830. L'année précédente, aux élections
de Westminster, il n'avait eu que 81 voix sur
15,000. H fut encore nommé en 1831 ; mais le
terme de cette session Ait aussi celui de sa car-
rière parlementaire. Après un essai infructeux
pour se faire réélire l'année suivante, il reprit
le cours de ses prédications démagogiques , qu'il
mêla d'une manière assez bizarre à l'exploitation
de diverses industries. Il vendit d'abord , sons
le nom de Café radical, des grains torréfiés,
dans le but, disait-il , d'affranchir les contribua-
bles des droits considérables imposés sur le café
des Antilles et de l'Inde. On le vit ensuite, monté
dans une calèche traînée par des chevaux blancs
et couvert d'un chapeau de même couleur, qui
lui avait fait donner le sobriquet de White Hat,
débiter lui-même dans les rues de Londres un
nouveau cirage dont il se disait l'inventeur, et
dont l'annonce se lisait de près d'un quart de
Hue, écrite en lettres gigantesques sur les murs
HUNT 6S8
de Black-Heatïî, Pendant une de ses tournées
dans l'ouest de l'Angleterre, il fut pris d'un accès
de paralysie pendant qu'il descendait de son
phaëton, et mourut peu de temps après à Abers-
fort. [ M. Rathery, à<u#VEncficL «tes G. du M.]
Rose, New General Biographie^ mctionarn, —
Conv.-Lex.
J HlWT (Leigh), poète et littérateur anglais,
né à Southgate (Middlesex ), le 19 octobre 1784 .
Son père était un créole des Antilles, et sa mère
une Américaine de Philadelphie. La révolution
d'Amérique changea sa destinée. Son père, qui
était avocat et ardent tory, défendit avec, une
telle hardiesse les droits de la métropole, qu'il
fut forcé de s'enfuir en Angleterre, n se fit mi-
nistre, et pendant quelque temps fut gouverneur
d'un neveu du duc de Chandos, nommé Leigh.
Le jeune Hunt, après d'excellentes études à
Cambridge, travailla d'abord dans le cabinet
d'un avocat, occupa ensuite une place de com-
mis au ministère de la guerre, et la quitta
pour devenir, en 1808, fondateur et co-proprié-
taire du journal hebdomadaire Examiner,
qui encore aujourd'hui jouit en Angleterre d'une
vogue méritée. Ses articles le rendirent très-po-
pulaire. Malheureusement son éducation n'avait
pas développé chez lui l'esprit pratique des af-
faires, et de plus, à cette époque, le parti tory
était tout-puissant. L'opinion indépendante et
très-libérale du journal blessait vivement l'ad-
ministration. Hunt était considéré comme un
factieux , et Pattorney général avait constam-
ment les yeux sur lui pour le prendre légale-
ment en défaut. Un passage d'un article politique
sur la régence proposée en 1810 en fournit
l'occasion. Ce passage paraîtrait aujourd'hui
très-doux et très-innocent. M. Hunt fut pour-
suivi, ainsi que le Morning Chronicle, qui avait
reproduit l'article incriminé. Le directeur du
Chronicle, jugé le premier, se défendit avec
vigueur et esprit, et fut acquitté. La poursuite
contre Y Examiner tomba naturellement à terre.
Une autre occasion fut bientôt saisie. Quelques
réflexions, sans caractère personnel, contre l'u-
sage du fouet dans l'armée fournirent la seconde
poursuite. Lord Brbugham, alors simple avocat,
fut chargé de la défense. Après avoir cité les
opinions de généraux distingués qui réprouvaient
l'Usage du fouet comme dégradant et cruel , il
soutint que la vraie* question à décider pour le
jury était si un Anglais avait le droit d'exprimer
sa conviction et ses jugements sur des sujets
d'intérêt public. Le jury prononça un acquitte-
ment. Mais M. Hunt ne fut pas aussi heureux à
la troisième poursuite. Il avait eu l'imprudence
de blesser un amour-propre de prince. Un jour-
nal fashionable ayant, en forme d'éloge, appelé
le prince régent (depuis Georges IV jun Adonis,
Hunt, dans un accès d'indignation contre la dé-
fection du prince à l'égard des whigs, ajouta
« de cinquante ans ». La phrase parut grosse
de sédition. L'accusation en fit ressortir l'extrême
559
HUNT
560
danger, et le jury déclara Leigh Hunt et son
frère John coupables. Chacun d'eux fut con-
damné à une amende de 500 liv. ( 12,500 fr. )
et à un emprisonnement de deux ans. Des in-
sinuations d'indulgence, et pour l'amende et
pour la prison, furent faites aux deux frères, à
condition que des attaques de ce genre ne se re-
nouvelleraient plus, mais elles furent repoussées
constamment. Sortis de prison, les MM. Hunt
continuèrent à écrire comme auparavant et main-
tinrent la supériorité de leur journal dans la
presse. Mais son éclat pâlit bientôt par suite de
l'ascendant des tories. Sur l'invitation de ses amis
Shelley et lord Byron, M. Hunt commença un
nouveau journal, le Libéral, qui n'eutqu'une très*
courteexistence. La révolution de Juillet vint ra-
nimer sa force et son influence. « Les trois jour-
nées de Paris, dit un Anglais , n'ont pas été une
date seulement pour là France, elles ont commencé
chez nous la chute de la puissance absolue du
torysme. » Le séjour prolongé ou les fréquents
voyages de Hunt en Italie lui fournirent l'occa-
sion d'en approfondir la langue, les mœurs et le
génie particulier. Ces études se réfléchissent dans
le choix des sujets qu'il traita plus tard en prose
et en vers. L'Italie colore son imagination an-
glaise. Son principal poème, V Histoire de RÛ
mini, est un des plus beaux récits poétiques
qui aient paru en anglais depuis l'époque de
Dryden. Parmi les plus importantes de ses
œuvres poétiques , nous citerons : son Capi-
taine Epée et Capitaine Plume; — le Pal-
jrey; — les récits poétiques intitulés Histoires
en vers, —et sa Légende de Florence, drame
en cinq actes, qui a eu beaucoup de succès sur
le théâtre de Covent-Garden, et qui est une des
pièces favorites de la reine Victoria.
Parmi ses ouvrages en prose, nous devons
mentionner avec éloges Sir Ralph Esher,
roman, ou plutôt l'autobiographie supposée d'un
gentilhomme de la cour de Charles H; —
Histoires des Poètes italiens, avec leurs vies
critiques ; — Les Hommes, les Femmes et les
Livres, où il a réuni plusieurs articles insérés
dans la Revue d'Edimbourg et autres feuilles
périodiques ; — V Indicateur; — Causeries de
table; — Imagination et Fantaisie;— Esprit
et Enjouement y qui sont des essais critiques et
choisis; — Autobiographie, en 3 volumes, qui
' renferme en outre le récit corrigé de ses rela-
tions avec lord Byron; — La Religion du Cœur,
manuel de foi et de devoir, où l'auteur expose
ses vues particulières sur ces sujets.
Leigh Hunt n'a point de rival comme traduc-
teur de la poésie italienne. Dans la longue liste
de ses traductions, nous pouvons citer YAminta
du Tasse, et Baechus en Toscane de JRedi.
Comme la plupart des écrivains, il a été exposé
à beaucoup d'attaques, de faux jugements et de
calomnies. Ses opinions politiques et religieuses
en avaient fourni le prétexte ou la cause. 11 parle
de lui-même avec une noble franchise dans son
autobiographie ; on voit que les traits saillants
de sa nature sont la droiture, la sensibilité, la
reconnaissance et un vif intérêt pour le bien-être
de ses semblables. Malgré l'étendue de ses tra-
vaux , il n'était pas arrivé à l'aisance pour ses
vieux jours. En 1847, la reine, sur la proposition
de lord John Russell , lui a accordé une pension
viagère de 200 liv. ( 5,000 fr.)* J. Chahut.
Mm of the Time.
I bunt ( William Holman ) , peintre anglais,
né à Londres en 1827. C'est un des chefs émi-
nents de cette école nouvelle qui s'est elle-même
appelée pré-raphaélite, et dont le mérite a été
longuement discuté. En 1846, M. Hunt exposa
son premier tableau à l'Académie, et quatre ans
après il était l'objet de l'attention générale. Ses
premiers sujets, tirés de nouvelles et de poèmes,
furent : Le docteur Rochecliffe célébrant le
service divin dans la maison de campagne de'
Jocelin Jolif/e, à Woodstooch (1847) ; — La
Fuite de Madeleine et Porphyre, d'après la
Sainte Agnes de Keats (1848); — Rienzi ju-
rant d'obtenir justice pour la mort de son
jeune frère, d'après Bulwer (1849). En 1860,
M. Hunt, changeant de style, fit choix de sujets
religieux et mystiques, qui commencèrent surtout
sa réputation : c'était d'abord Une Famille bre-
tonne convertie cachant un apôtre chrétien
contre la persécution des druides, tableau qui
fut suivi du symbolique Pasteur mercenaire en
1852. En 1851, il peignit dans un autre sentiment
Valentin enlevant Sylvie à Protée; en 1853,
Claudio et Isabella, et Nos Plages anglai-
ses, belle étude des plaines d'Hastings. Trois de
ces peintures furent vendues au prix de 50 et
60 livres à Liverpool et Birmingham. Le sens
caché de sa Lumière du Monde et de son Ré-
veil de la Conscience en 1854 fut expliqué
dans deux lettres adressées au Times par
M. Ruskin. En 1855, M. Hunt exposa à Paris
La Lumière du Monde; Moutons égarés;
Claudio et Isabella. Dans le premier de ces
trois tableaux, M. Hunt montre le Christ une
lanterne à la main , cherchant une âme éveillée
dans l'univers qui dort. La tête du Christ , ornée
d'une couronne d'or entremêlée d'épines , res-
pire une mélancolie onctueuse, une tristesse
pleine de pitié. Les détails sont d'un fini inimagi-
nable, commedans tous les tableaux de M. Hunt:
on distingue jusqu'aux gouttes de rosée aux
pointes des herbes qu'éclairent le reflet de la lan-
terne. A côté des minuties de détail, on trouve
dans toutes les œuvres de M. Hunt une extrême
variété demouvement, une grande puissance d'ex-
pression. D'autre part, la couleur est négligée et
la composition manque de charme; mais le faire
est plus vigoureux que dans les toiles de l'é-
cole anglaise précédente. L. Locvet.
Men of the Time. — English Cyclopsedia (Biographe ). '
— Th. Gautier, Les Beaux-Arts en Europe. — Delécluie,
Exposition universelle des Beaux-Arts, dans le Journal
des Débats des 6 et 30 août 1855. — Mérimée, Exposition
de Manchester; dans le Moniteur do 9 Juillet 1857.
561
HUNT - HUNTER
562
; hunt ( William), peintre anglais, naquit
à No, en 1790. Il s'est distingué comme aquarel-
liste. Ses tableaux sont nombreux et recherchés.
Men ofthe Time.
I bcnt ( Robert), physicien anglais, né le
6 septembre 1807, à Devonport (comté de De-
von). Après avoir été, pendant cinq ans, secré>
taire de la Société Polytechnique de Cornouailles,
il devint, sur la recommandation de sir H. de La
Bêche , conservateur du Musée de Géologie de
Londres, où il a fait dans ces derniers temps
un cours de mécanique. On a de lui des ou-
vrages estimés sur diverses branches de la phy-
sique : Researches on Light; Londres, 1844 : ta-
bleau des phénomènes de la lumière, ou l'auteur
étudie plus spécialement l'action chimique
exercée par les rayons solaires ; — Poetry of
Science; Londres, 1848; — Panthea, or tke
spirit of nature; 1849 ; — Elementary Phy-
sics ; 1850 ; — Manual of Pfrotography ; 1854.
M. Hunt a fait sur les sciences de nombreuses
lectures publiques et inséré plusieurs mémoires
dans le recueil de UBritish Association.
P. L— Y.
E Mm of the Time. - Cyclopxdià of Biography.
hvhtbr ( Robert), écrivain anglais, mort le
31 mars 1734. Nommé, en 1708, lieutenant gou-
verneur de la Virginie, il fut pris par les Fran-
çais dans la traversée et retenu prisonnier à
Paris jusqu'à la fin de 1709. En 1710, il alla
prendre le gouvernementde New-York, et y con-
duisit deux mille colons du Palatinat. En 1728
il devint gouverneur de la Jamaïque, où il mou-
rut. On a de lui une Lettre sur V Enthousiasme ,
qui a été attribuée à Swift et plus généralement
au comte de Shaftesbury. On lui attribue une
farce dramatique , intitulée Androboros. Z.
• Baker, Biaçraphia Dramatica. — Cbalmers, General
Biog. Diction.
huhtbr ( William ), médecin anglais , né
le 2 mai 1718, à Kilbridge, dans le comté de
Lanerk, en Ecosse, mort à Londres, le 20 mars
1783. Son père, qui le destinait au ministère ec-
clésiastique, l'envoya à l'âge de quatorze ans
étudier à l'université de Glascow. Hunter y passa
cinq ans; puis, se sentant peu de goût pour la
carrière sacrée, il accepta la proposition de Cul-
len, alla s'établir dans sa maison à Hamilton, et
reçut de lui pendant trois ans des leçons de mé-
decine. En 1741, il suivit à Edimbourg le cours
de Monro. L'année d'après il se rendit à, Londres,
où le célèbre accoucheur Douglas le logea dans
sa maison, le prit pour aide dans. ses travaux
anatomiques , lui confia l'éducation de ses en-
fants, et le fît nommer aide-chirurgien de l'hô-
pital de Saint-Georges. Douglas mourut en 1742*
Hunter, devenu indépendant, communiqua à la
Société Royale de Londres un mémoire Sur la
Structure et les Maladies des eartilages des
Articulations (imprimé dans les Philosophical
Transactions, vol. LXII). Vers la même époque
une société de chirurgiens de marine demanda à
Samuel Sharp de leur faire des leçons. Au refus
de Sharp, Hunter accepta la proposition, et s'ac-
quitta dé cet office avec un tel succès qu'on le pria
d'ajouter à ses leçons un cours d'anatomie. 11 le
commença en 1746. L'année suivante il fut reçu
membre de la corporation des chirurgiens, et
peu de temps après il visita la France et la Hol-
lande avec le fils de son ancien maître. Au re-
tour de ce voyage, qui fut de courte durée, il re-
prit ses leçons. Il ne tarda pas à abandonner
la chirurgie, et partagea tout son temps entre
renseignement de l'anatomie et la pratique de
l'accouchement. Il fut successivement nommé
accoucheur de l'hôpital du Middlesex de la Ma-
ternité de Londres, et médecin extraordinaire de
la reine en 1764. En 1750, il avait obtenu le
titre de docteur à Glascow, et avait commencé
à exercer la médecine. Sa clientèle devint bientôt
si nombreuse qu'il fut obligé de se donner Hew-
son pour suppléant dans son cours et pour col-
laborateur. Cette association ne dura que jus-
qu'en 1770, époque où Hewson céda à un autre
habile anatomiste, Cruickshank, la place de coad-
juteur de Hunter. Celui-ci fut élu en 1767
membre de la Société Royale. L'année suivante il
communiqua à ce corps savant un curieux mé-
moire sur des os trouvés près de l'Ohio en Amé-
rique; il y démontrait principalement, d'après la
structure des dents, que ces os appartenaient à
quelque grand quadrupède, distinct de l'éléphant,
auquel on les avait généralement attribués. Outre
ce mémoire, publié dans le L VIII e vol. des Phi-
losopha Transactions, il inséra dans les LX e et
LXl e vol. de la même collection des remarques
sur les os fossiles trouvés à Gibraltar, et une
description du nylghau, espèce d'antilope des
Indes. La Société des Antiquaires l'admit dans
son sein, et à la fondation de l'Académie royale
des Arts, il reçut dans cet établissement la chaire
de professeur d'anatomie. L'Académie de Méde-
cine et l'Académie des Sciences de Paris l'é-
lurent pour associé étranger. Il acheva et publia
à Londres, 1775, in-fol., une œuvre à laquelle il
travaillait depuis près de trente ans, son Ana-
tomy ofthe human gravid Utérus, en latin et
en français, ouvrage illustré de 34 planches,
représentant les objets de grandeur naturelle,
avec beaucoup de vérité et de précision. Il avait
commencé une description de ces figures anato-
miques ; il n'eut pas le temps de l'achever, et
laissa ce soin à son neveu le docteur Matthew
Baillie, qui le publia sous ce titre : Anatomical
Description ofthe gravid Utérus and its con-
tents; Londres, 1783, in-8°. En 1781, il succéda
au docteur J. Fothergill comme président du
Collège des Médecins. Sa pratique étendue et son
économie lui avaient permis d'amasser une for-
tune considérable. Il résolut d'en consacrer une
partie à l'établissement d'une école d'anatomie.
L'achat du terrain, la construction de l'amphi-
théâtre d'anatomie et du Muséum se firent à ses
frais. Il acquit une riche collection de prépara-
563
HUNTER
564
(ions anatomiques , des fossiles et d'autres ob-
jets d'histoire naturelle, des livres grecs et la-
tins, un cabinet d'anciennes médailles, pour le-
quel il ne dépensa pas moins de 20,000 1. s.
Il eut la satisfaction de voir ses trésors numis-
matiques révélés au public par son ami le doc-
teur Combe, dans unjivre intitulé : Nummorum
veterum Populorum et Urbium qui in Museo
Gultelmi Hunier asservantur Descriptio figu-
ris illustrata; 1783, in-4°. Tourmenté depuis
longtemps de la goutte, Hunter continua jusqu'à
la fin les travaux de sa profession. On rapporte
qu'il mourut avec la plus grande tranquillité. « Si
j'avais assez de force pour tenir une plume, di-
sait-il f j'écrirais combien il est aisé et doux de
mourir. » Hunter dnt son succès au moins au-
tant à ses excellentes manières qu'à son talent.
Il possédait un savoir étendu, mais il n'avait ni
le génie original, ni la puissance, d'investigation
de. son frère. Cependant on trouve dans ses écrits
quelques observations neuves. Il avait pensé que
les vaisseaux lymphatiques absorbent à toutes
les surfaces, et sont essentiellement les organes
de l'absorption; que les veines, par conséquent,
sont étrangères à cette fonction. Il dut donc
chercher à prouver qu'il existe des vaisseaux
lymphatiques dans toutes les parties du corps
où une absorption peut se faire. Ce fait n'était
pas encore bien connu ; Hunier l'établit au moyen
d'expériences, qu'il exécuta lui-même, ou qu'il
fit exécuter sous ses yeux par son frère John
Hunter, par Hewscin et par Cruikshank. Outre
les ouvrages de William Hunter cités plus haut,
on a de lui ; Médical Cômmentaries ; Londres,
1762, in-8*; — Two introductory Lectures to
his anatomical Coursé ; Londres, 178&, in-8°.
Les mémoires que Hunter a insérés dans les
Transactions Philosophiques et dans les Aetes
de la Société de Médecine de Londres ont été
traduits en allemand par Ç.-G. Kuehn; Leipzig,
1884-1785, 2 vol. in-8°. Z.
Slmroens, Account of tfte Life ànd fFritingt of WiU.
Hunter f Londres, 1718, tn-6°. — Vlcq d'Àzyr, Eloge, de
Hwkterç dans, le» Mémoires de VAcaA. de Médecine.-*
CbaU»er», General Biographical Victionary.
BUflTEiÇ(/oàw), célébré chirurgien et anato-
miste anglais, frère du précédent, né en Ecosse,
à Kilbridge, dans le comté de Lanark, près de
Glascow, le 12 février 1728, mort à Londres , le
8 octobre 1794, était le dixième enfant d'un fer-
mier peu fortuné. Il reçut une éducation fort né-
gligée, et pendant tout le cours de sa carrière
il éprouva les inconvénients qui résultent de
l'absence presque complète d'instruction élé-
mentaire. À dix-sept ans , il alla travailler chez
un de ses beaux-frères qui exerçait à Glascow
la profession de tourneur. A vingt ans, fatigué
d'un travail mécanique et excité par les suc-
cès de son frère William , il alla le retrouver
a Londres, et étudia l'anatomie sous sa direc-
tion. Un an après ses débuts , il secondait son
frère dans l'instruction de ses élèves. Enfin il
commença l'étude de la chirurgie d'abord à
l'hôpital de Ghelsea, sous le célèbre Chcseîden,
puis aux hôpitaux de Saint-Barthélémy et de
Saint-Paul. W. Hunter servit d'abord comme
chirurgien d'armée. Ce fut en cette qualité qu'il
accompagna en 1761 l'armée anglaise qui, sons
les ordres du général Hodgson, s'empara de Belle-
Isle, et que l'année suivante il fit partie d'un corps
d'armée qui opéra en Espagne. 0e retour en
Angleterre en 1763, il quitta le service, et se
livra à la pratique civile, tandis qu'il donnait
des leçons particulières d'anatomie et de méde-
I cine opératoire. Un des élèves qu'il eut ainsi pen-
| dant plusieurs années auprès de lui fut Jenner, le
célèbre inventeur de la vaccine. En 1768, il devint
chirurgien de l'hôpital Saint-Paul, et peu après
membre de la corporation des chirurgiens. En
1776, il fut nommé chirurgien extraordinaire du
roi. Mais, tout en s'occupant de pratique chirur-
gicale, Hunter consacrait les moments dont
il pouvait disposer à des études d'anatomie et
de physiologie, qui le conduisirent, en 1767, à
faire partie de la Société Royale de* Londres.
Les travaux de Hunter sur les diverses par-
ties de la science des êtres vivants lui assurent
un des premiers rangs parmi les hommes qui ont
dévoué leurs efforts aux progrès de la biolo-
gie : Us méritent d'autant plus d'être exposés
avec détail que jusqu'à ces derniers temps ils
sont loin d'avoir été toujours appréciés à leur
Juste valeur. Hunter. fut l'un des premiers à
comprendre que l'anatomie et la physiologie ne
donnent que des résultats incomplets et par con-
séquent, du moirt s partiellement, faux lorsqu'elles
se bornent à l'étude d'une espèce. Aussi em-
brassa-t-il dans toute leur généralité les études
qui se rattachent à la matière vivante, en se
livrant avec ardeur à l'étude des phénomènes
physiologiques sur tous les animaux qu'il pouvait
se procurer vivants , ainsi qu'à leur dissection
après leur mort. Il se faisait donner tous les
animaux qui mouraient à la Tour de Londres ,
et il achetait tous ceux qui mouraient dans les
ménageries particulières. Il acheta une maison
de campagne à Brompton, près de Londres, pour
pouvoir y élever les animaux qu'il voulait sou-
mettre à ses expériences , et il manqua à plu-
sieurs reprises d'être fort maltraité par les hôtes
dangereux qu'il y entretenait. Les dépenses que
ces études lui occasionnaient étaient très-consi-
dérables, et lui devinrent souvent très-onéreu-
ses. Quand il s'agissait d'une pièce anatomique
précieuse pour enrichir sa collection ou d'un
, animal rare à disséquer, aucune considération
d'économie ne pouvait l'arrêter. On raconte à
ce sujet des anecdotes singulières ; nous n'en
citerons qu'une , qui peint bien la manie du
collecteur, empressé de recueillir un objet
rare. En 1783 il y avait à Londres un Irlan-
dais, de taille gigantesque, nommé Patrick
O'Bryan, dans un état de santé qui ne laissait
aucun espoir. Hunter, qui voulait atout prix s'en
procurer la squelette, chargea un domestique
566
HUTrTEl
566
du soin de sorveftter le géant, afin de l'avertir
du moment où il rendrait le dernier soupir.
OBryan, averti des projets de Hunter et vive-
ment eflrayé de l'idée d'être disséqué après sa
mort, chercha avec un grand soin à prendre les
pins minutieuses précautions pour éviter un pa-
reil sort. Il ordonna qu'après sa mort on sur-
veillât auét 4t jour son cadavre, puis qu'on ie sub-
mergeât, après l'avoir enfermé dans un cercueil
de plomb. Lorsqu'il mourut, l'entreprise des
pompe* funèbres engagea dans Londres phi*
sieurs hommes pour surveiller ie corps, en exé+
cution des volontés du défunt. Hunter, in*
formé par son domestique que ces hommes se
rendaient dans une taverne lorsqu'ils n'étaient
point de garde , y alla ftuMnêrne , nu conversa*
tion avec l'un d'eux, et finit par lui offrir une
somme 4e 50 livres sterling si on le laissait en-
lever le corps. L'homme accepta, mais à la non*
dition qu'il s'entendrait avec ses confrères, et il
demanda 100 livres. L'empressement de Hunier
à accepter cette offre engagea les gardiens du
corpu è hausser leurs prétentions , et ils arri-
vèrent à demander une somme de ôOft livres
qu'Hunier consentit à payer. Ce fut è ce prix
(12,500 fr.) que Hunter obtint d'emporter de
nuit Je corps do géant dans une voiture de
louage; puis dans sa propre voiture jusque dans
sa maison de Brompton. Craignant d'être dé*
couvert, il prépara lui-même le squelette, en
coupant le corps en morceaux qu'il fit bouUHr.
Ce squelette, qui fut acheté ai cher, est eujour*
d'oui l'un des plus curieux ornements du musée
du Collège des Chirurgiens. A une autre époque,
faisant des études sur l'organisation des céta-
cés , il envoyait à ses frais un chirurgien sur
un navire baleinier, pour y faire des prépara*
tions anatomiques. Ces faits expliquent suffi'*
samment comment, malgré l'accroissement de sa
clientèle et malgré les sommes élevées que lai
donnaient ses élèves particuliers, il fut presque
constamment dans un état de gène, résultant
de ses dépenses continuelles pour ses études
ainsi que de l'achat d'un terrain et de la cons-
truction de bâtiments pour conserver ses col*
lectkms. D'après les biographes de Hunter, son
musée lui aurait conté plus de 70,000 1. st.
(1, 760,000 fr.). Il est pénibled'avoiràajouterqu'a*
près la mort de Hunter, qui n'avait laissé à sa
femme et à ses enfants, en dehors de son musée,
que des dettes pour tout héritage , cette collée*
non anatoniique, aujourd'hui encore la plus
précieuse peut-être de toutes celles qui existent
dans le monde , ne fut achetée par l'État que
15,000 livres (375,000 fr.). Encore fallut-il plu-
sieurs années de longues négociations. « Ce
n'est pas le moment d'acheter des pièces anato-
miques, disait à cette occasion Pitt, quand j'ai
besoin d'argent pour acheter de la poudre. »
Encore si Hunter avait pu recueillir, après sa
mort, toute la gloire que ces immenses travaux,
auxquels il avait usé sa vie, auraient dû lui mé-
riter. Malheureusement il n'en u*t pas ainsi» H
n'en avait publié qu'une partie de son vivant.
La part la plus grande et la plus importante
peut-être était restée manuscrite. Il laissait à sa
mort dix volumes invmlio de notes manuscrites
sur les préparations anatomiques qui composaient
son musée; et il avait fait faire par un artiste
nommé Bell, qu'il eut chez lui pendant plusieurs
années, un nombre considérable de dessins. Une
grande partie de ces richesses scientifiques fut dé-
truite, après sa mort , par son beau-frère Eve-
iardHfMne,aui prétendit avoir agi par ordre. On
soupçonna quecette action n'avait point eu d'autre
but que de faire disparaître la trace, de nom-
breux plagiats. Quoi qu'il 1 en soit* on ne peut
douter que eette manière d'agir n'ait considé*
reniement nui à la célébrité, de Hunter. Les
travaux remarquables du célèbre M, Owen sur
la collection de Hunter, dont il a dressé le cata-
logue , en s'asdant de ee qui avait été sauvé des
manuicrrU, démontrent de la manière la plus
évidente que Hunter a été un très-grand zoo-
tomiste, surtout lorsqu'on se rappelle l'époque
où il vivait, et qu'il avait constaté, dans ses
dissections, un prodigieux nombre de faits dont
la découverte, restée inconnue, a été faite de
nouveau par d'autres «natomistes. Cela ne veut
pas dire toutefois que nous cherchions à atté-
nuer le mérite de ceux qui sont venus après lui.
Mais tout en reconnaissant que les catalogues
publiés par M. Owen ne sont point de nature à
devoir changer l'histoire de la science* nous ue
pouvons nous empêcher. d'admirer, tel qu'il ré-
sulte pour nous de l'ensemble de ses travaux
publiés ou inédits» ce ferme génie qui embrassa
d'un seul coup d'o?ii toutes les branches îles
sciences biologiques, et de regretter vivement
que l'anéantissement de la plus grande partie de
ses travaux les ait empêchés d'exercer sur la
science des contemporains l'influence qui leur
devait être nécessairement acquise. D'ailleurs,
il faut bien ajouter que Hunter, privé de cette
instruction première dont l'absence se fait tou-
jours sentir, même chez les esprits les plus éle-
vés , et dédaignant de chercher le succès dans
les artifices de l'art oratoire , ne Art pas un pro-
fesseur brillant et suivi ; il ne rassembla jamais
plus de trente auditeurs autour de sa chaire»
même lorsqu'il eut atteint le premier rang comme
chirurgien et comme savant. Son enseignement,
tout rempli de faits nouveaux, d'idées nouvelles,
mais exposés sans aucun art et comme elles
se présentaient à l'esprit de l'auteur, n'était pas
de nature à attirer la foule des intelligences vul-
gaires , et ne pouvait plaire qu'à la très-petite
élite d'esprits élevés qui voient dans l'étude de
1a médecine autre chose que la préparation à
une carrière lucrative. Aussi l'enseignement de
Hunter, s'il a contribué à former un certain
nombre de chirurgiens d'un très-grand mérite ,
n'a pas contribué à vulgariser son nom et ses
idées , et n'est pas devenu pour lui , comme
,667
HUNTER
568
pour tant de savants d'un mérite bien inférieur,
le point de départ d'une prompte et brillante re-
nommée. Tout cela explique comment [Hanter
n'a pas reçu de ses contemporains et commence
à, peine à recevoir de la postérité la part de gloire
qui lui est si légitimement due.
Hunter, l'un des premiers peut-être, arriva à
considérer toutes les questions relatives aux
êtres vivants, soit dans l'état de santé, soit dans
l'état de maladie , comme ne formant pas autant
de sciences distinctes , mais comme étant les as-
pects différents d'une seule et même science, la
science de la vie , science dont toutes les parties
doivent s'éclairer les unes les autres et se prêter
un mutuel appui. C'est cet esprit élevé et généra-
lisâtes qui donne à tous ses ouvrages, quelle que
soit l'imperfection de la forme et souvent même
aussi l'inexactitude du fond , un si grand intérêt
et même un si grand charme ; car on y recon-
naît partout une supériorité incontestable sur les
notions scientifiques du temps , et comme le pré-
lude des travaux de la science moderne.
Hunter lisait peu. Patient observateur, puis
penseur indépendant, il partageait cette erreur
encore si commune, même chez de bons es-
prits , sur l'inutilité de l'érudition en matière de
sciences ; erreur qui fait que l'on croitdécouvrir, à
chaque siècle, des vérités d'observation qui sou-
vent existent déjà dans Âristote. Mais ce défaut
s'excuse plus facilement chez un homme comme
Hunter, qui , dans son amour sévère pour la vé-
rité , n'attachait d'importance à ses opinions et à
ses théories qu'autant qu'il les croyait vraies, et
se hâtait de les rejeter lorsqu'il arrivait à les ré-
voquer en doute. « Ne me demandez pas, di-
sait-il à ses élèves, ce que je pensais l'année der-
nière sur telle ou telle question : demandez-moi
ce que je pense aujourd'hui. » Du reste, bien qu'il
cite peu , on ne peut s'empêcher de reconnaître
qu'il y a entre ses idées et celles de Harvey une
ressemblance assez grande pour que Ton ne puisse
méconnaître la filiation qui unit ses travaux à
ceux de son illustre compatriote. Le grand obser-
vateur qui découvrit la circulation, après avoir fait
connaître le mécanisme du merveilleux appareil
hydraulique qui porte le sang dans toutes les
parties du corps, ne pouvait pas ne pas être frappé
du rôle que joue ce liquide dans l'organisme, et
ne pas considérer comme l'expression d'une vérité
physique les célèbres paroles de Moïse , que la vie
et Vâme de toute chair sont dans le sang. Aussi
s'était-il occupé avec beaucoup de soin de l'étude
du sang ; il avait reconnu la présence d'une ma-
tière coagulable dans le sérum qui se sépare du
caillot, et s'il n'a pas laissé beaucoup d'autres
découvertes sur ce point de physiologie, c'est
qu'il travaillait à une époque où l'usage du mi-
croscope n'était pas encore très-répandu et où les
connaissances chimiques ne s'étaient pas encore
entièrement dégagées des spéculations de l'alchi-
mie. Les idées de Hunter sur la vie du sang ne sont
au fond que les idées de Harvey, mais revêtues
d'une forme beaucoup plus nette et plus précise
par suite du nombre considérable de faits positifs
dont l'histoire du sang s'était enrichie entre les
mains de ces deux observateurs. Cette filiation
se retrouve également, dans un autre onire
d'idées , dans cette phrase remarquable que
M. Owen a trouvée dans les manuscrits de
Hunter, et qui contient en germe, quoique avec
une expression très-peu nette, les théories ac-
tuelles sur V arrêt de développement. « Si nous
pouvions suivre les développements successifs
des diverses parties de l'économie depuis leur
première apparition jusqu'à leur (entier achèye-
ment chez les animaux les plus parfaits, bous
pourrions probablement les comparer au mode
d'organisation de quelques-uns des animaux im-
parfaits, appartenant à chaque ordre de la créa*
tion; car, à aucune période, ils ne diffèrent de
certains de ces êtres inférieurs, ou, en d'autres
mots, si nous prenons une série d'animaux de-
puis le plus imparfait jusqu'au plus parfait,. nous
y trouverons probablement un animal imparfait
correspondant à quelque période de développe-
ment du plus parfait. » Ces paroles nous don-
nent la paraphrase de ce passage de Harvey,
dans son célèbre ouvrage De Motu Cordis* Sic
natura perfeeta et divina, nil faciens frus-
tra, nec cuiquam animait cor addidit>ubi
non erat opus, neque priusquam esset ejus
ususyfecit, sed Hsdem gradibus in/orma-
tione cujuscumque anknalis, transiens per
omnium animalium constitutions -(ut ita
dteam, ovum, vermem, fœtum) perfec-
tionem in singulis acquirit. » C'est égale-
ment dans l'ouvrage de Harvey sur la géné-
ration et dans ses expériences sur le dévelop-
pement de l'œuf que Hunter a pris le germe
de ses idées sur la vie, considérée comme
une force qui maintient les substances du corps
vivant dans un certain état de composition chi-
mique, tandis qu'elle les abandonne à la putré-
faction lorsqu'elle cesse d'exister.
Rien ne serait à coup sûr plus intéressant que
de suivre pas à pas la série d'idées qui conduisit
Hunter dans tous ses travanx sur l'économie
animale : la vraie biographie de l'homme de
génie est dans l'histoire même de la succession
de ses pensées. Mais les causes qui ont empê-
ché Hunter d'exercer une grande influence sur
ses contemporains ne permettent point un pa-
reil travail, et d'ailleurs il faut bien reconnaître
que cet enchaînement d'idées n'est point tou-
jours le fait d'un anatomiste, obligé, de travailler au
jour le jour, quand le hasard lui permet de dissé-
quer un animal rare ou un homme mort d'une ma-
ladie curieuse. Nous ne pouvons donc qu'indi-
quer ici successivement les travaux les plus
importants de Hunter dans les principales bran-
ches de la biologie, et dans ce but nous suivrons
l'ordre chronologique, car le lien qui devait réu-
nir tous ces faits épars nous échappe complè-
tement.
5G9
HUNTER
570
Onthe Descent pf the Testis; 1762. Explica-
tion du mécanisme de la descente des testicules
dans le scrotum pendant la vie intra-utérine. Ce
travail eut poar point de départ une observa-
tion d'un chirurgien nommé Sharp, qui, dans
on cas de hernie inguinale, avait observé que le
sac herniaire se confondait avec la tunique va-
ginale. C'est ce qu'on appelle actuellement une
hernie congénitale. Vf. Hunter , partant de la
découverte faite par Haller de l'existence des
testicules dans la cavité abdominale aux pre-
miers temps de la grossesse, pensa que l'observa-
tion de Sharp pourrait bien être en rapport avec
les faits annoncés par Haller, et il engagea
John Hunter à faire quelques recherches dans
ce but. Le travail de John expliqua d'une ma-
nière très-nette toutes les conditions anatomi-
ques et physiologiques de la descente des
testicules dans le scrotum. Ce travail eut un
très-grand retentissement ; — On Absorption by
Veins. Dans ce travail, John Hunter mentionne
on très-grand nombre de faits nouveaux concer-
nant l'histoire des vaisseaux lymphatiques, prin-
cipalement chez les animaux à sang froid, faits
observés par lui et par Hewson. Il admet que l'ab-
sorption se fait uniquement par le» lymphatiques,
et que les veines n'y contribuent point : on sait
que cette dernière conclusion est fausse, comme
Magendie l'a démontréde notre temps; — An Ac-
count of an Amphibious Bipes by Ellis. Ce
travail fait par Ellis , mais dont tontes les ob-
servations anatomiques sont dues à John Hunter,
est d'un très-grand intérêt pour l'histoire de la
science; car il contient la première description
qui ait été faite d'un animal énigmatiqne qu'un
médecin nommé Garden avait découvert près
de Charlestown, dans les marais de la Caroline.
Cet animal était la Sirène lacertine, dont la
place dans les cadres zoologiques n'a été bien ap-
préciée que plus tard, par Georges Cuvier, en 1 807;
—Essay on the naturalHistory of the human
Teeth; 1771 . Ce travail, qui fait encore autoritéau-
jourd'hui, contient de très-nombreuses observa-
tions sur la structure des dents, déjà étudiée, il est
vrai, par Leeuwenhoek, et sur leur accroissement.
On doit à Hunter ce fait intéressant que si l'on
nourrit un animal avec de la garance, les cou-
ches d'ivoire anciennement formées ne se colo-
rent point, tandis que celles qui se forment de-
puis l'emploi de ce régime se colorent en rougé;
— On the Digestion of the Stomach a/ter
death ; 1 772. Dans ce mémoire Hunter a démontré
le premier ce fait, important pour l'anatomie pa-
thologique, que l'on trouve quelquefois un ra-
mollissement très-marqué et même des perfora-
tions dans l'estomac d'hommes ou d'animaux
morts ou tués en pleine santé, perforations con-
sécutives à la mort et que l'on ne peut attribuer
qu'aune véritable digestion opérée par le suc gas-
trique sur les parois mêmes de l'estomac; —
Anatomical Observations on the Torpédo;
1773. Ce travail eut un grand retentissement Les
commotions produites par la torpille étaient
connues dé toute antiquité; maison en ignorait
la nature et l'on ne connaissait point leur point de
départ. Ce ne Ait que dans le courant du dix-
septième siècle (1661) que le célèbre Redi fit
connaître les organes qui produisent ces commo-
tions. Ces organes furent ensuite étudiés par
Stenon (vers 1673), Lorenzini (1678), Caldesi
(1487) et Réaumur (1714). Hunter en donna
une description très-complète, et il prouva qu'il
existe des organes analogues dans les gymnotes
ou anguilles de Surinam , dont les propriétés at-
tiraient vivement son attention. Mais jusqu'alors
on ne s'était point rendu compte de la nature de
l'agent qui produit ces remarquables phénomè-
nes. Tout récemment un médecin anglais nommé
Bancroft , qui avait longtemps voyagé en Amé-
rique et fait un très-grand nombre d'observa-
tions d'histoire naturelle, ami de Franklin et de
Priestley, avait soupçonné que les commotions
produites par la torpille pourraient être de
nature électrique. Le travail de Hunter eut
pour effet de décider Walsh, l'année suivante,
1772, à constater par des expériences si les
commotions de la torpille sont de nature élec-
trique. Cette découverte, si importante fut faite à
La Rochelle. Deux ans après, Hunter fit connaî-
tre en détail les organes électriques du gymnote
1774 ; — On Account of certain réceptacles
for air in birds which communicates with the
lungs and Eustdchian tubes, and are lod-
ged amông the fUshy parts and the hollow
bones of thèse animais. Dans ce mémoire, très-
important, Hunter rendit compte d'un grand
nombre de farfs concernant la respiration des
oiseaux, faits qui avaient été jusque-là si mal in-
terprétés. On savait depuis longtemps qu'il
n'existe point de moelle dans les os des oiseaux ,
et cette observation se trouve déjà dans l'ou-
vrage de l'empereur Frédéric II sur la faucon-
nerie. D'autre part Coiter, dans un ouvrage publié
en 1573, avait montré que les poumons des oi-
seaux présentent à leur surface de grandes
perforations, et le célèbre Harvey avait démon-
tré en 165t que ces perforations sont les orifices
de grandes cellules à parois membraneuses,
cellules logées dans l'abdomen et qui servent de
réservoirs à air. Hunter signala la liaison qui
existe entre ces deux ordres de faits ; c'est que
'l'air, après avoir traversé les poumons, se ré-
pand non-seulement dans les cellules aériennes,
mais encore jusque dans l'intérieur des os ; il
reconnut qu'en insufflant de l'air dans les cavités
dont les os sont creusés, on gonfle les poumons,
et qu'en poussant de l'air dans la trachée, on
peut faire sortir ce fluide par un trou pratiqué
dans une partie éloignée du squelette. Le célè-
bre Camper revendiqua l'honneur de cette dé-
couverte, tl est certain que les deux anatomistes
étudièrent cette question, et qu'ils publièrent les
résultats qu'ils obtinrent à peu près à la même épo-
que. Rien ne nous autorise d'ailleurs à penser que
571
HUNTER
572
l'an des deux aurait été le plagiaire de l'autre ;
— Expérimente on Animais or Vegetables
with respect ofthe power of produdng beat ;
1775; — On the Méat ofthe Animais; 1777.
Les expériences de Duhamel et Tillet en France
(1764), celles de Fordyce et Biagden en Angle*
terre (1774) avaient démontré ce fait, si re-
marquable , que la température dea animaux a
sang chaud ne s'élève point quand il» sont pta-
gés dans un milieu pmn chaud que kur corps , et
que ces êtres possèdent en quelque sorte la
propriété de résistera W chaleur, comme celle
de résister au froid. Ces «bservations conduisis
rent Hunter a rechercher si dan» les animaux à
sang froid il ne se passerait rien d'analogue.
Il fut l'un des premiers a constate*,, bien
qu'avec dea instruments tito-imparfaits, que
les animaux dits a sang froid ont une tempe»
rature propre qui est généralement supé-
rieure de quelques degrés è celle du milieu am-
biant, et qu'ils possèdent dans cette température
propre une force remarquable 4e résistance a»
froid. Il a constaté également que les œufs de
poule possèdent à un haut degré cette propriété,
et que tant qu'ils ment ils résistent à la: congé-
lation pendant un temps beaucoup» plu» long que
lorsque leur vie est détruite. Dans ces expérien-
ce* Hunter se montra le véritable émule de
Spallanzant ; — An Aecountof thefree Martin ;
1779. Les Anglais donnent le nom defree Mar-
tin aux ruminants hermaphrodites, et partie»*
lièrement à ceux du genre bœuf. Hunter montrai
que lorsqu'une vache met bas deux-veaux à In
fois, l'un mâle l'autre paraissant femelle, celui-
ci n'est ordinanemeat ep'v&free Martin, un her-
maphrodite impuissant à remplir l'une ou l'autre
fonction sexuelle ; — Account of a woman who
had the small pont éurtng Aer preonancg f and
who. seemed ta hameommunieated the sonte
disease ta the fmtw; 1780. Ce fut l'un des pre-
miers exemples connus de fecoinmunicatjisu d'une
maladie contagieuse de ta mère an fœtus; —
On aecount of an extraordinary Pheasant;
1780. Dans ce mémoire, Hunter décrit le pre-
mier un fait très-curieux de physiologie et
d'histoire naturelle : c'est que les vieilles poules
faisanes, lorsqu'elles deviennent, stériles par les
progrès de l'âge, revêtent peu à peu le plumage
des mâles , fait qur es0 devenu le point de dé-
part d'iintrav«Utrè**nrçminnn^ Geoffroy
SaimVHHairç ; — Accamné •/ tke aryeme of Hea-
ting in Fishes ; tfifc : desfeipfenaiiaiefnique
île l'organe de l'ouïe eues tes poissons. Les or-
ganes de rcweefcea&9»noisse«s«vaient déjà été in-
diquéaparStenooenlftftH Hunter fuaavee Geof-
froy le père et Camper ft* des ttatemtstesqui
donnèrent IsfcptuegraedsdétaHS. sur leu* struc-
ture ; — Observation' on the inflammation af
the internai Coatoftheveim; 1784.' Cet écrit,
dans lequel Hunter décrit pour la preniière fois
la terrible maladie connue sou» le nom de phlé-
bite, a une importance immense dans l'histoire I
de la médecine; car il explique des faits dont on
se rendait compte d'une manière très-inexact* f
et il montre l'impuissance des théories solidiste*
à tout expliquer en pathologie. Cette descrip-
tion est devenue le point de départ des travaux
d'Ahernethy sur le même sujet et plus tard de
ceux d'un grand nombre d* médecins et de cto-
rmgienafraneuie; — Treatiêe on the venereal
Mseaset 1786. Cet ouvrage et cerai de Sv*e-
dietar, que parut h peu] près à la même époque,
sont sans contredit les deux meilleurs ouvrages
que Von ait publié» jusqu'à notre siècle sur les
incendies ayphwtiquB»;, et comme ife reposée!
sur dea observations bien faites- recueillies par
dea espsits très-judicieux, ilo eut encore aujour-
d'hui une très-grande valeur. — Same O&ser»
vaiiom tendina ta show thaï tte walf, joei*
and doge, are ail the sama sparte* ; 17*7 >
expérience» d'accouplement entre des animaux
d'espèces différentes, analogues, à ceUes que
Bnfifon indiquait danaaes sunuléments j — Obser-
vations on. structure and œeonomf ej Whaks i
1787. Ce laenaoire est l'un des premier* eè
l'on trowve des imunamnas un peu précises
sur les diverses espèce» de cétacés et sur leur
organisation ; — An Meoumt of M. Stmter 's
methoé of the opération fer the étire of po*
piiied anemriêrn by Siaerard Même from ma*
teriaiâfurmshed bp M. Bunter* Ce travail a,
au point de vue chkurnknt , une grande impor-
tance, car tons ko cmntrgfeB» savent que les
Anghna revendiquent, en> faveur de H a nte r ,
tfmvention tfun&aattbedepoftr m cure des ané-
yiitmen,, que te» churorgiene français eroieat
devoir attribuer à* Ane* ci à Desauft» Comne il
y là a» point inspectant dans l'histoire de la
chisnrniev il est né ce s s aire m l'enaaMner avec
soin. Dons un ovvrags réeemsuesi publié sar les
anévoriuiia», M. Beecat a train* cette que&tiea
historique de* 1* manière la pta& complète* Il
a uavmitement établi' <*ie la méthode de trai-
tement des anwwmea par l'apptication d'ane
ligature aordestw> du sa» appartient ineontesta-
Mereent ai* «hwwgiea. français Dominique Anel,
quiprattqma ceA* opération le 30 janvier 1710 à
Borne, pour guérir un anévrisraede tfartère ra-
diale. Le texte même d'Anet ne permet «as de mé-
connaître, qu'il Vagissait pour lui d'une méthode
nouvelle». « An lieu que Von a accoutumé à faire
la ligature en haut et en ha» de Y aneurisia»,
je ne la lia que- du côté d'en haut; d'ailleurs, ou
ouvre le saeanqunamat, et je ne l'ai point teacbé
du tout y ne doutant pas que le sang ne se dis-
sipât*: aient la liberté de se porter du coté de
l'extrémité, et que ce sae une fois vuide ae se
remphst de nouveau, que les tuniques des
membranes qu» le formoient ne manquerofeat
pas de s'affaisser, et qu'ainsi le, tumeur devoit
disparaître , ce qui n'a pas manqpé d'arriver de
même que je l'avois pensé. » Des témoignages
positifs apprennent que plusieurs chirurgiees ei
Italie , en Allemagne et en Hollande, mirent ea
573
HUNTER
574
pratique cette méthode, que l'on appelait la mé-
thode d'Anel -, mais jusqu'à la fin du dix-huitième
siècle elle ne fut appliquée qu'aux anévrismes
d'artères peu volumineuses, parce que ronorair,
guait que la gangrène ne fût la conséquence,
nécessaire de l'opération. Gène fut que le 22 juin
17»5 que Desault, guidé par l'observation d «un
fait où il avait ru l'anévrisme poplité guéri spon-,
tanérnent par la formation d'une concrétion san-
guine , appliqua la métnode d'Anel au traitement
de l'anévrisme poplité, dans l'intention bien ar-,
rêtée de déterminer la coagulation du sauge l'aide
de la ligature. 11 est démontré qu'à la date d>
24 septembre de la même aimée, J„ Hunier igno-
rait encore la possibilité du fait, du moins pour,
les artères volumineuses , et il ne serait pas un-,
possible que lorsqu'il conçut le projet d'appli-.
quer la ligature au-dessus o*e la tumeur, sans,
pratiquer l'ouverture du sac, il ait eu connais-,
sauce de l'opération de Desault; car un chirur-
gien italien nommé Asaalini, qui avait assisté à
cette opération, à l'hôtel-Dieu, futa^ss\ le. té-
moin de la première opération de ce genre,,
faite par Hanter, le 12 décembre 1785, à Saint-
George» Hospital. Quoi qu'il en soit, la compa-
raison des dates ne peut laisser aucune incerti-
tude sur l'antériorité de l'observation de De-
sault. Il est juste toutefois d'ajouter que Hunter,
en transportant la ligature à quelque distance
au-dessus du sac, avait accompli un progrès.
véritable, car il avait rendu l'opération plus fa-' t
ciie , et même aussi plus sûre dans ses résul-
tats ; qu'il a également constaté que le mode d'ac-
tion de la ligature consistait à déterminer la coa-
gulation du sang; et enfin, qu'il a le mérite
d'avoir vulgarisé une méthode avant lui peu
connue. Mais ee mérite ne peut en aucune façon
rabaisser ceux d'Anel et de Desault-, — Tra-
vels in JSew South Wales by White. Cet ou-
vrage contient la description faite par Hunter de
plusieurs mammifères qui venaient d'être décou-
verts dans la Nouvelle-Hollande, et qui appar->
tiennent à la curieuse Camille des Marsupiaux,
parmi lesquelles on distingue le kanguroo ou
potoroo, et le grand phalanger volant ; — Obser-
vations on Betê; 1792. Dans ce travail, où
Hunter rend compte d'observations laites sur
l'organisation et les mcears des abeilles pendant;
plusieurs années , il est question de la découverte
faite par lui des organes qui sécrètent de là cire
chez ces animaux; — On/ossil Bones; 1794.
Dans ce travail J. Hunter fait connaître la na-
ture chimique de certains os fossiles provenant
des cavernes de Gaylnreulh, et donne une des-.
cription très-exacte de crânes d'ours qu'il a re-
connus parmi ces fossiles ; — Treatise on JBloo4 t
Inflammation and gun sJwt Wounds. Cet
ouvrage, dans lequel Hunter résume en quelque
sorte ses doctrines sur la vie , peut être eoosi-;
déré, bien, qu'il renferme lia certain, nombve de
théories qui ne sont plus admises , comme l'un
des ouvrages qui ont créé la physiologie patho-; ■
logique. Partant de cette idée déjà admise par
Harvey que le sang est un liquide vivant, et voyant '
dans le phénomène de la coagulation une des
conséquences les plus remarquables de la vie du
sang , JJunter étudie ce fait avec soin, et y cher-
che le point de départ d'un grand nombre
de phénomènes physiologiques et pathologiques.
Le fait t de sa coagulation devient pour lui
le type de tous les phénomènes d'organisation
qui se manifestent chez les êtres vivants , dans'
l'état de santé comme dans l'état de maladie. Il
décrit mieux qu'on ne l'avait fait avant lui les
diverses espèces d'inflammations , inflammation
adbésive, suppurative et ulcérative, et cherche
à expliquer la formation des cicatrices par le
phénomène de la coagulation du sang. Ces idées, '
qu'il avait conçues principalement d'après 1 l'é-
tude des plaies d'armes à feu , observées par lui
pendant le siège de Belle-Isle , ont été en partie
abandonnées. On a reconnu que le phénomène '
de la coagulation du sang n'a qu'une 'ressetn-'
blance apparente avec les phénomènes (Vo'rga-''
irisation, et qu'ji résulte en réalité de la mort
du sang plutôt que de son état de vie. Mais_
quoi qu'il en soit de cette partie de la/ doctrine , '
tous les physiologistes reconnaissent aujourd'hui
avec Hunter que le sang est un liquide vivant,
et que la vie du sang est un élément important'
de tous les grands phénomènes physiologiques.
Hunter faisait d'ailleurs l'application "de sa doc-'
trine à divers points de chirurgie , et particu-
lièrement au traitement des plaies d'armes à
feu. Jl fut l'un des premiers à s'élever contre la
pratique douloureuse du débridement, pratique
qui est aujourd'hui généralement abandonnée
parles chirurgiens d'armée. r
Hunter, dont l'éducation avait été frès«né-
gligée t était affectueux et désintéressé; mais iT
était sujet à dés accès de colère contre lesquels
il ne savait point se mettre en garde, et qui exer-
cèrent .une influence nuisible sur sa santé. Ce
fut à lasuîted'un semblable accident qu'il mourut
subitement le 18 octobre 1794, au Collège des Chi-
rurgiens, à la suite d'une vive discussion avec plu-
sieurs de ses collègues. Il vécut loin du monde,
n'ayant guère de relations qu'avec ses confrères
ou ses élèves. « Il était si loin , dit un de ses bio-
graphes,, de reposer son esprit dans les sociétés,
qu'il ressentait une fatigue réelle au milieu d'une
réunion dont la conversation n'avait pas de suite.
Aussi interposa- t-il quelquefois son intervention
maritale pour, empêcher les qisifs du monde de
se réunir chez lui. » Hunier avait épousé en 1771
miss 4pna ffome^ fille d'un* chirurgien militaire
sans fortune comme lui - 9 et il avait été oblige'
d'attendre, pendant plusieurs années, que l'ac-
croissement de sa position lui permît de se ma :
rier. . C. Dareste. ;
Cbalmer*.* r M4« Vnnter,- en têt* de la traduction com-
plète de ses œuvre* publiée par MM. Cnaasaîgnac et Kt-
chclot. — dvfeti, Catalogues ofthè Htintêrian Atmantm.
. h,iînter ( Henri ), prédicateur et traducteur
675
HUNTER — HUflTINGTON
57G
écossais , né à Culross, dans le Pertshire , en
1741, mort à Bristol, le 27 octobre 1802. Élevé à
Edimbourg, il entra dans les ordres, et fut suc-
cessivement ministre à Dumfermline, à South
Leith et à Londres. H eut dans la secte presby-
térienne une grande réputation de savoir, de
piété et d'éloquence. On a de lui : Sacred Bio-
graphy, or the characters ofScripture; 1783-
1792, 6 vol. in-8°; — Miscellaneous Ser-
mons; 2 vol. in-8°. H traduisit en anglais La
Physiognomie de Lavater, les Études de la
Nature de Bernardin de Saint-Pierre, les Let-
tres d'Euler à une princesse d'Allemagne ,
les 6 vol. des Sermons de Saurin, elles Voyages
de'Sonini. Z.
Gentleman's Magazine, yoI. LXXII. — Cbalmcrs, Ge-
neral Bioçraphical Dictionary.
HdfTER (Alexandre ), médecin et agronome
écossais, né à Edimbourg, en 1733, mort à York,
le 17 mai 1809. Il pratiqua successivement son
art à Gainsboroug, à Beverley, à York, fut
membre des Sociétés Royales de Londres et d'E-
dimbourg, et l'un de3 fondateurs de l'hôpital
des fous de York et d'une Société d'Agriculture,
dont il publia les mémoires sous le titre de Geor*
gical Essays ; 1803-1808, 6 vol. in-8°. On a de
lui : Observations on the nature and method
of Cure of the Phthisis Pulmonalis.... with
the origin, progress and design of the York
Lunatie Asylum; Londres, 1792, in-8°; —
— A new Method of raising wheat for a sé-
ries ofyears on the same land; Londres, 1796,
in-4°; —An Illustration of the Analogy bet-
ween vegetable and animal Parturition ; Lon-
dres, 1797, in-8° \— General Wiew of a plan
of universal and equal taxation; Londres,
1797, in-8°. Z.
Rose, New gênerai Bioçraphical Dictionary. — Bio-
graphie Médicale.
hunter ( William ), médecin et orientaliste
écossais, né à Montrose, vers 1760, mort en 181 5.
Il fit ses études au collège Marishal à Aberdeen,
où il prit le grade de docteur en 1777. Il entra
au service de la Compagnie des Indes, et fut at-
taché en 1781 à l'établissement médical du Ben-
gale. H fut chirurgien de marine de 1794 à 1806,
et pendant quelques années inspecteur générai
des hôpitaux dans l'Ile de Java. Chirurgien du
major Palmer, ambassadeur à la cour de Dov? lat
Ray Scindia, professeur et examinateur du col-
lège de Calcutta (1784-1794) , secrétaire de la
société asiatique (1794-1808), Hunter se trouva
dans une position favorable pour étudier les
langues et la littérature de l'Inde. On a' de lui :
A concise Accbunt of the Kingdom of Pegù,
with a description of the caves of Eléphant a f
Amboola and Canara; Calcutta, 1784, in-8°;
trad. en français par Langlès, Paris, 1793, in-8 ;
— An Essay on the diseases incident to In-
dian seomen , or Lascars, on long voyages;
Calcutta, 1804, in-fol.; — Mujmua-i- shuvnsi,
or a concise vievj of the Copernican system of
astronomy by Manlawi Abul Khuer, muter
the superintendence ofW. Hunter; Calcutta,
1807, in-8*; divers mémoires sur la médecine,
l'histoire naturelle, etc., dans les Asiatie Re-
searches et antres recueils périodiques. Z.
Rote, New gênerai Bioçraphical Dictionarg.
■UlITKftirS OQ HOKTHBft (Jacques ) , écri-
vain suédois, né dans l'Upptand, vivait au
dix-septième siècle: Bans sa jeunesse, il quitta
sa patrie, embrassa le cafaolieisme en Angle-
terre, et fut plus tard nommé secrétaire impé-
rial à la diète de Ratisbonne. Biais lors de l'in-
vasion des Suédois en Allemagne (1630) , il fut
privéde cette chargc.Ses lettres à plusieursperson-
nages célèbres, tels que Baner, Horn, Gyilens-
tjerna, Salvios, etc., ont été imprimées, sons le
titre de : Epislolx miscellanex , ornata ien-
tentiarum concinnitatevestiUe , etc. ; Vienne,
1631. K. B.
Sv. Mercurius, 1757 et 1758. — SJernman , Biè4. 3*io-
Gothica, t. n, p. 7». - Biographie Les., VI, «78.
HUNTUfCtàON ( Guillaume ) , prédicateur
méthodiste anglais, né en 1774, mort à Ton-
bridge- Wells, en 1813. Fils d'un laboureur du
comté de Kent, il fut tour à tour domestique à
la ville et à la campagne, et vécut dans la mi-
sère et la dissipation. Il finit par se convertir,
et se mit à prêcher avec un grand et souvent
scandaleux succès. Ses sectateurs élevèrent pour
lui à Londres nne chapelle dans Tichfieid , puis
une plus grande dans GroyW-Inn-Read. Après
la mort de sa première femme, qui était de basse
condition, Huntingdon épousa la riche veuve de
l'alderman sir James Saunderson. Parmi ses nom-
breuses et bizarres compositions religieuses, non*
n'en citerons que deux : The Arminian Skele-
ton, or the arminians dissected and anatomi-
zed; — The Bank and Faith. 2.
Soutbey, Letters of don Manuel Bspriclla. —4Sortoa,
Général Bioçraphical Dictionary.
HUNTiifGDON(i7(?»ry.DE). Voy. Hrheydb
Huntingdon.
huhïingfokd (Georges-Isaac), théologien
et philologue anglais, né à Winchester, en 1748,
mort en 1832. Elevé à Oxford , il succéda à son
frère Thomas dans la direction de l'école de
Westminster, et devint en 1789 maître do col-
lège de Winchester. Addington, qui avait été son
élève, le nomma en 1801 évéque de Gloucester.
Il fut promu en 1815 au siège de Hereford. On
a de lui : Mctrica Monostrophica ( Odes Mo-
nostrophiques en grec) ; 1781 ; — Introduction
to' the Writing of Greek, en deux parties, 1782 ;
— A Call for Union with the established
Church, addressed to english protestants;
1800 : adressé à Addington et réimprimé en 1808;
—A protestant Letter addressed to the rt. Bon.
Lord Somers ; 1 8 1 3, in-8° , et divers traités théo-
logiqoes. Z.
Rose, New gênerai Bioçraphical Dictionarg.
huntin&ton ( Robert), théologien et orien-
taliste anglais, né en février 1636 à Deorhyst
577
HUNTINGTON — HUOT
578
dans le comté de Gloucester, mort à Dublin, le
1 er septembre 1701. Après avoir reçu les élé-
ments d'une éducation classique à l'école libre
de Bristol, il fut admis en 1652 au collège Mer-
ton à Oxford, et en devint membre en 1658. Il
prit le grade de maître es arts en 1663, et, s'é-
tant appliqué avec succès à l'étude des langues
orientales, il obtint en 16^0 la place de chape-
lain de la factorerie anglaise d'Alep. Il occupa ce
poste pendant onze ans, et en profita pour vi-
siter Jérusalem, la Galilée, Samarie, Cypre en
1677, l'Egypte en 1781 et 1782. En 1678 il tenta
inutilement de parvenir jusqu'à Palmyre. En
1682 il revint en Angleterre, en traversant l'Italie
et la France, rentra dans l'enseignement, et rat
nommé maître du collège de La Trinité à Dublin.
11 accepta cet emploi à regret , cessa de le rem-
plir lors de l'invasion de Jacques II, et le résigna
en 1691. Nommé en 1692 recteur de Hallingbury,
dans le comté d'Essex, il se trouva fort mal
dans ce canton rustique, où il se représente comme
privé de livres et d'amis, comme exclu de la
société des vivants et des morts. Malgré son
aversion pour l'Irlande, il accepta l'évêché de
Raphoe, et mourut douze jours après sa consé-
cration. On n'a de lui qu'un court mémoire publié
dans les Pkilosophical Transactions (n° 161),
sous ce titre : A Letterfrom Dublin concerning
tàe porphyry Pillars in Egypt; il a été réim-
primé dans la Collection oj Curions Travels
and Voyages de Ray, t. II, p. 149-155. A la suite
du mémoire de Huntington , dans la même col-
lection , on trouve un extrait du Journal des
Savants, n° 25,1692, annonçant que des Anglais
de la factorerie d'Alep, ayant visité Palmyre,
y avaient remarqué quatre cents colonnes d'une
sorte de porphyre , et quelques temples entiers
avec des tombes, des monuments, des inscrip-
tions grecques et latines. Cette note apprenait au
public anglais que le voyage tenté inutilement
par Huntington venait de s'accomplir pour la
première fois. Les Philosophical Transactions
pour 1695 en contiennent un récit détaillé. Hun-
tington doit surtout sa réputation aux nombreux
manuscrits qu'il rapporta d'Orient. Outre ceux
qu'il acheta pour l'archevêque Marsh etl'évéque
Fell , il s'en procura pour son propre compte
de six à sept cents, dont il donna trente-cinq à
la Bibliothèque Bodleyenne, et dont il vendit le
reste à la même bibliothèque pour la faible
somme de 700 livres st. Huntington tenait avant
tout à se procurer la traduction syriaque des Épl-
tres de saint Ignace , et l'on voit par ses lettres
à -l'archevêque du mont Sinaï et au patriarche
d'Antioche avec quelle ardeur il poursuivit cet
objet de ses recherches, qui lui échappa. Par
une circonstance assez curieuse les Epitres de
saint Ignace ont été trouvées par M. Tattam
dans un de ces monastères mêmes de Nitra que
Huntington avait visités. Trente-neuf lettres
ont été insérées dans la Vie de Huntington par
Thomas Smith. Z.
HOUV. BIOGR. GÉftÉR» — T. XXV.
Srollh, Disser. de nta, Stud. Peregrinàtionibus et
Obitu Bob. Huntingtoni; Londres, 1704, !n-S°. - Mo-
graphia Britannica. — English Cyclopœdia ( Bio-
grapfiy ).
; huntington ( Daniel )/ peintre améri-
cain, né en 1816, à New-York. En sortant du
collège Hamilton, il embrassa la carrière des
beaux-arts, qu'il étudia sous la direction du pro-
fesseur Morse, et compléta son éducation par un
long voyage à travers l'Angleterre , la France
et l'Italie. Il habite aujourd'hui sa ville natale.
Ses principales productions, consacrées au genre
historique, sont : Henry VIII et Catherine
Parr; — Lady Jane Grey prisonnière à' la
Tour; — Les Saintes Femmes au Sépulcre;
— La Foi et V Espérance; — V Arrêt de mort
de Jane Grey. P. L— y.
North American Review. — Pierer, Universal-Lexi-
kon, Supplément, 1857.
huntadb (Jean ). Voy. Hcniade.
* bun yg, roi mexicain de.Tecpan-Atitlan, mort
en 1519. C'est pour ainsi dise le dernier souve-
rain de cette région mystérieuse unie jadis à
l'empire Quiche, où se trouvent de si imposants
vestiges d'architecture : les princes de Cakchi-
quel, voisins du Quiche, formèrent un royaume
à part, et Hunyg, descendant de ces souverains,
mourut de la peste , cinq ans avant l'arrivée des
Espagnols. Son petit-fils Francisco-Ernandez
Arana Xahila écrivit l'histoire de ce souverain.
Cette chronique, continuée jusqu'en 1597, est
l'un des livres précieux dont l'étude répandra
quelque lumière sur des annales qui assignent
à la civilisation du Nouveau Monde la plus an-
tique origine. F. D.
L'abbé Brasseur de Bourbourg, Histoire des Nations
civilisées du Mexique et de V Amérique centrale, 1. 1,
p. LXXXUI.
huot ( Jean- Jacques- Nicolas ) , naturaliste
français, né à Paris, en 1790, mort à Versailles,
le 19 mai 1845. Membre de plusieurs sociétés
savantes, il était à la fin de sa vie conservateur
de la Bibliothèque de la ville de Versailles. Il a
laissé différents travaux d'histoire naturelle, de
géologie, de statistique et de géographie, parmi
lesquels nous citerons : Annuaire administra-
tif, judiciaire , ecclésiastique, industriel .,
agricole et commercial du Département de
Seine-et-Oise; 18 e année, 1829, in-18; — Fos-
siles animaux et végétaux : l re partie , Osse-*
ments ; Paris, 1 836, in-18 ( avecC. P. Deshayes) ;
— Nouveau Cours élémentaire de Géologie;
Paris, 1837-1838, 2 vol. in-8°, avec atlas ; dans
les Suites à huffon éditées par Boret. Pour
préparer les matériaux de cet ouvrage, Huot
entreprit de lointaines excursions ; il visita entre
autres deux fois la Crimée et le Kouban; —
Nouveau Manuel complet de Géologie; dans
la collection Roret; Paris, 1839, in-18; —Nou-
veau Manuel complet de Minéralogie, ou
tableau de toutes les substances minérales;
collection Roret; Paris, 1841, 2 vol. in-18.
— Huot a revu, corrigé, augmenté, mis dans
un nouvel ordre et enrichi des plus récentes
19
679
HUOT —
découverte* te Précis de la Géographie uni-
verselle de fSaRc-Bren, 12 vol. in-8*. B a
terminé avec Larenaudière et Balbi le Traité
élémentaire de Géographie de Malte-Brun;
1830-1331, 2 vol. in-8°. — H a donné dans la
collection Éisard la traduction du De $ilu Orbis
de Pomponius Mêla. — JJ a travaillé au Voyage
dans la Russie méridionale et la Crimée, par
la Hongrie, la Valackie, la Moldavie, exécuté
en 1837 sous la direction de M. À. Peroidoff. fluot
accompagnait l'expédition en qualité de géologue .^
— On a en outre de lui dans les Annales des
Sciences naturelles : Observations sur le banc
de Grignon, sur le Calcaire renfermant des
restes de végétaux et sur les Couches supé-
rieures de cette localité; — Notice Géologique
sur le prétendu Fossile humain trouvé près
de Moret, au lieu dit Le Rocher, département
de Seine-et-Marne (tome III), Imprimé à part;
Paris, 1824, in-8°$ — Notice jsur la Vie et les
Travaux de J.-V.-F* Lamouroux ( tome V) ;
— Quelques Considérations géologiques sur
la Présence des débris d'Animaux vertébrés
dans les différentes couches de notre globe
( tome X ) ; — dans les Mémoires de la So-
ciété Linnéenne de Normandie.: Notice géolo-
gique sur un, Terrain occupant 9 sur la rive
droite de la Seine, la plaine située entre la
montagne de Triel et la rivière, et, sur la
rive opposée, l'espace compris depuis Meulan
jusqu'à RolUboise; — - dans la Galerie Fran-
çaise ( tome III ), une Notice sur la Vie et les
ouvrages de Lavoisier. — Huot est le principal
auteur de la continuation de la Géographie Phy-
sique, de Y Encyclopédie Méthodique; il fut un
des collaborateurs de V Encyclopédie moderne
et de Y Encyclopédie des Gens du Monde. Enfin
il a collaboré au Bulletin universel des Sciences,
à la Revue Encyclopédique, à la Revue Dépar-
tementale, au journal saint-simonien Le Pro-
ducteur, journal de la morale chrétienne.
l.L— T.
Paul Huot flls, La Vie et les Ouvrages deJ.-J.-N. Huot;
18M, ta-8». - Hardouin Michelin, NoUce lue à la Société
Géologique de France à f occasion du décès de M. Huot ;
Paris, 18*8, in-8». — Daniel, Biogr. des Hommes remarq.
du dép. de Seine*et-Oise. — Pascallet, Le Biographe et le
Nécroiooe, e* tirrafeo». — «Q»érant, La France LUMmfire.
~ Bourqueiot* La Littér. franc, contemp,
j hupfeu> (Hermann)y orientaliste alle-
mand,, né en 1796, à Marbour,g, occupe depuis
1843 une chaire à f université de Halle. Ses prin-
cipaux ouvrages sont : Exercitaiiones Jiïhio-
picx; Leipzig, 1825; — De Rei Grammaticae
apfudJudxos Initiisantiquissimisgue Scripto-
ribus; Halle, 1846;— De antiquioribus apud
Judaeos occentuum Scriptoribus ; Halle, 1846-
1847, 2 vol.; — De ver a Festorum apud ffe-
braeos Ratione; Halle, 1851-1852, 2 vol.; — Die
Psalmen (Les Psaumes); Gotha, 1855, t* r vol.;
— Die Quellender Genesis (Les Sources de la
Genèse ); Berlin, 1853. . R. L.
Conv.-Lex-. dcr Gegemcart.
h€ppazoi,i {François), centenaire piémon-
HUQUIER 580
tais, né à Casai, le 15 mars 1587, mort le 27 jan-
vier 1702. Ses parents, qui avaient de l'aisance,
renvoyèrent k Rome lorsqu'il eut acucyl ses
études, et le forcèrent à prendre l'babi^ ecclé-
siastique ; mais il ne s'engagea pas par des vœji*
perpétuels. Passionné pour les voyages , jl ri-
,stta la Grèce et les Échelles du Levant, se raarô
h Scio en lj&2&, et s'occupa d'dffaires oonuner-
ciales qui lui procurèrent une petite fortune, A
quatre-vingt-deux ans il fut pourvu du coasiijat
de Venise à Smyroe. La guerre lui enleva ces
fouettons; mais en 1699 jl reprit sa charge.
Sa vie était très régulière; il suivait un ré$w
sévère, ne buvait aucune liqueur fernxentee,
rangeait h peine et seulement du gibier rôti ou
des fruits, se levait de grand matin et se cou-
chait à la nuit. Exact à remplir ses devoirs re-
ligieux, jl faisait chaque jour une promenade de
plusieurs feeures, après avoir entendu la messe,
se renfermait ensuite pour écrire sa correspon-
dance, et donnait le reste de son temps à la so-
ciété. Malade pour la première fois en 1701, il eut
uncfièvne qui dura quinzejours.il guérit, mais
il resta sourd pendant trois mois. Quelques mois
auparavant, il avait perdu ses dents , et il ne vi-
vait plus que de txmiule ; mats ses gencives se
durcirent et il put se nourrir de poulet. Attaqué
de la gravelle, à la fin de l'apnée, îl mourut (f un
rhume. Il eut jusqu'à la fin l'usage de ses fa-
cultés. On dit qu'à cent ans ses die veux, qui
étaient blancs, étaient redevenus noirs, ainsi que
sa barbe et ses sourcils, et qu'à cent douze ans il
lui perça deux grosses dents, fl était d'un caractère
doux, faisait beaucoup de bien, et il n'eut jamais
d'autre passion que celle desfemmes, passion qu'il
poussait à l'excès. îl avait été marié cinq fois : A
épousa sa dernière femme à qw*re-vingt-dix-4iuit
ans et en eut encore quatre enfants. Ses quatre
premières femmes lui avaient dorme vingt enfants;
il en avait en outre vingt-cinq ittégiriœes. 11
laissa en manuscrit le Journal des Événements
les plus importants de son temps, en 92 vol.
in-fol. J. V.
Mercure de France, août Tf«.
HtfQViBE ( Jacques-Gabriet ), f$ravearfran-
çaSs, né à Orléans, en 1695, mort en Àn^eterre,
en 1772. Il vint tort jeune s'établir à Pans
comme marchand d'estampes, et réunit «ne fort
belle collection de dessins <et de .gravures, qu'il
laissait visiter à certains Jours de la semaine par
les artistes et les amateurs. Il dessina d'abord
des ornements dans le goût chinois , puis des
gravures à l'ean-ferte d'après Bouclier, Wat-
teau , Oiltot et autres maître*. On lui attribua
«ne estampe satirique •contre les Jésuites. Ces
Pères, a1orstout-putssants, i intéressère!it*ajo3tice
dans cette affaire. Une descente fut faite chez
Hugnier, «t quoiqtfette demeurât sans résultat,
H n'en fut pas moins Obligé de s'enftrir en An-
gleterre, on îl termina ses jours. 'Ses gravures
sont signées G. H. F.
Son êls, Gabriel Hcguiea, gravait aussi avec
S8i HUQUIfcR
talent : il suivit son pire «a Angleterre, et y
mourut. A. de L.
F. Basaii, Didimmbre du Graveurs. - Ch. Bratone,
dans léfffomfnes illustres de l'Orléanais.
* jMJft>A# , chef mariannais, mort en 1680.
Les missions organisées par le P. piego Luiz
de Sanvitores comroencajent à changer l'as-
pect d* l'archipel des lies Mariannes lorsque
Hurao, de la caste des Chamorris ou nobles, ré-
solut de chasser les Espagnols. 11 se retira dans
les montagnes, assembla les Chamorris, leur fît
un discours plein de véhémence dans lequel il
les excita à l'union, pour expulser de l'archipel
ces étrangers qui, sous le commandement de
Legazpi, s'en étaient emparés sans coup férir en
1565. Hurao connaissait parfaitement les forces
des chrétiens, et malgré l'infériorité de ses
armes , qui consistaient en massues et en ja-
velines durcies au feu, ou armées d'os hu-
mains , il osa résister. Sa petite armée s'éleva
un moment à 2,000 hommes. L'invention de
vastes boucliers, derrière lesquels les Mariannais
pouvaient affronter lafusillade des Espagnols, put
faire craindre un moment que l'insurrection
n'eût des conséquences fâcheuses pour les con-
quistadores. On parlementa, la paix se rétablit,
et Hurao conserva son indépendance. Ce chef
excitait probablement les craintes du gouverne-
ment espagnol , lorsque, dans une rixe insigni-
fiante , un soldat européen tua d'un coup de
baïonnette le seul Chamorris qui eût su dé-
fendre son pays contre les envahissements de
l'étranger. Ferdinand Denis.
Le P. Charles de GoMen, Histoire des Iles Mariannes
uouveltoBumt converties- -iFreycinet, V oyage autour
du Monde, t. II. — Dupoont d'Urviile, Poyage autour du
Monde.
nvKkVvr (Philippe), comte de Cœverbw
(chancelier de Chiverny), ministre et ma-
gistrat français, septième fils de Raoul Hu-
rault , né au château de Chiverny, le 25 mars
1528, mort au même lieu, le 30 juillet 1599. Il
acheta la charge de Michel de Lho&pHal, con-
seiller au parlement de Paris, et la remplit pen-
dant neuf ans. Maître des requêtes ordinaire de
l'Hôtel du Roi, fl s'attacha à Catherine de Médicis.
Chancelier du duc d'Anjou, il aHa au-devant de
ce prince à Turin lors de son retour de Po-
logne , et lui remit les fonds nécessaires pour
soutenir le luxe et la magnificence que le nouveau
roi déployait sur sa route. Carde des sceaux en
1578, chancelier après la mort du cardinal de
Birague en 1581, son crédit auprès de «Henri III
commença à décliner. Ce prince, à 6on voyage à
Chartres aprèsles barricades, lui ôta le gouverne-
ment d'Orléans pour le donner à d'Entragues. A
la fin d'août 1588, lors de son départ de Chartres,
il lui permit, avec les autres ministres, d'aller
passer quelques jours dans ses terres en lui don-
nant rendez-vous aux états généraux qu'il devait
tenir à Blois le 1 er septembre suivant. Arrivé
dans cette ville , le roi envoya Charles Bcnoist, -
son secrétaire, à Chiverny, château de Sologne à
— RURD 582
deux lieues de Blois, déclarer au chancelier qu'il
était très-content de ses services, mais lui ordon-
nait de ne plus se présenter à la cour. Ce ministre
était en chemin pour se rendre à Blois ; après avoir
eu un entretien avec Cliarles Benoist, il résolut
nje poursuivre sa route dans le dessein de parler
au roi. Malgré l'interven^on de la reine en sa fa-
veur, il ne put obtenir une audience. Après être
retourné à Chiverny, il.se retira dans son châ-
teau d'EoUmont, près Auneau, pour êjtre plus
éloigné de la cour. Là il reçut la visite de l'histo-
rien de Thou son beau-frère, qui se rendait aux
états généraux de Blojs, etflui pendant toute leur
durée le tint au courant de tout ce qui s'y pas-
sait. Dans cette retraite , loin des affaires, il
entrevoyait en quelque sorte l'avenir : il prévit
le sort que la dissimulation de Henri 1ÏI préparait
à la témérité et a l'insolence du duc de Guise.
Le chancelier de Chiverny vivait paisiblement
au château d'Ecumont quand , eu 1590, fleuri 1Y,
qui voulait rétablir l'ordre dans les finances et
dans les autres parties de l'administration de
l'État, lui envoya l'historien de Thou pour le
ramener à ia cour. Ce ministre, qui sous Henri m
avait manqué d'initiative, exécuta les ordres du
nouveau souverain avec beaucoup de zèle et de
fidélité. Pour le récompenser de ses services,
Henri IV le nomma gouverneur de Chartres et
lieutenant général de la province. Malgré son
dévouement, ne put échapper aux tirait? de J en-
vie : les notables assemblés a Rouçn deman-
dèrent qu'on lui enlevât ies sceaux , et l'accu-
sèrent de vendre des lettres d'abolition aux
traitants poursuivis pour leurs exactions, ij s'at-
tacha alors la marquise de Sourdis, jtante deGa-
brielle d'Estrées. Henri IV, qui lui cqnserya sa
faveur, servit de parrain a l'enfanj qui <jut ,1e
jour à cette liaison ; Gabrielle d'Estrées M Ja
marraine. Plus tard Hurault de Chiverny se re-
pentit de cette liaison ; tf moiuuit peu ^e 4£M>P S
après la marquise de Sourdis. Il é^t seigneur
de Gourville et de Giraudet. Qn a de Jui des
Mémoires qui s'arrêtent en juiUet J599, <tf que
l'abbé de Pont-lc-Voy, son fils, a continués jus-
qu'en 1601 ; Paris, 1636, in-4° : édition pleine de
fautes, reproduite en 1641, La Haye, 2 vol,
in-12;id., 2 vol. in»16, 1791, texte rectifié; —
Instruction à ses enfants. A. Roullier.
Note sur Hurautt de Chiverny, en léte de ses Mé-
moires dans la Collection de MM. Michaud et Poujoulat,
X. XX. p.4*i.
nrjRD (Richard), théologien et philologue
anglais, né en 1720, mort en 1808. Fils d'un
fermier du comté de Stafford, il eut le bonheur
de rencontrer dans une ville de campagne, à Bre-
wood, un excellent maître d'école. Il acheva ses
études à Cambridge , devint agrégé du collège
•Emmanuel en 1742, et fut ordonné prêtre en
1744. 11 publia son premier ouvrage en 1740, et
fit paraître en 1749 un commentaire sur VArt
poétique d'Horace. A l'occasion de ce travail, îl
se lia intimement avec Warburton, dont il fut le
I9.j
683
IHURD — HURTAUT
584
discple le plus dévoué et qui lui facilita l'accès
des dignités ecclésiastiques. Il devint reotenr
de Thurcaston en 1757, prédicateur de Lincoln'*
Innen 1765, archidiacre de Gloucester en 1767,
évêque de Lichfieid et Coventry en 1775, pré-
cepteur du prince de Galles et du duc d'York
en 1776, évéque de Worcester en 1781. Il re-
fusa, en 1783, l'archevêché de Gantorbéry.
Hurd, quoique écrivain distingué {lui-même,
est surtout connu par sa liaison 'avec War-
bnrton. Il accepta les opinions de ce célèbre
controversiste et érudit, mais il n'en eut ni
l'arrogance ni la rudesse. Les principaux ouvra-
ges de Hurd sont : Remarks on Hume' s Essay
on the natural History of Religion ; 1757 ; on
croit que Warburton eut beaucoup de part à
cette réfutation de Hume ; — Dialogues on
sincerity, retirement , the golden âge of Eli-
sabeth , and the constitution of the en g lis h
government; 1759, in-8°; — Dialogues Moral
andPolitical; 1765. —Hurd donna en 1788 une
édition des Œuvres de Warburton en 17 vol.
in-4°, et publia en 1795 une Vie de ce prélat; il
avait préparé une édition des Œuvres d'Addis-
son, qui parut après sa mort, en 1810, 6 vol. in-8°.
La même année on publia une édition des Œu-
vres complètes de Hurd, 8 vol. in-8*. Z.
Sa Fie en tète de ses ouvrages. — Nlchols , Llterary
Anecdote» of the Bighteenth Century. — Chaimers, Cen.
Bioçraphical Diction.
hurdis (James ), poète anglais, né à Bishop-
stone (comté de Sussex), en 1763, mort en 1801.
Il termina ses études à Oxford, fut agrégé au col-
lège de La Madeleine, et entra dans les ordres. En
1788 il publia son The Village Curate. Cet ou-
vrage fut suivi d'une tragédie intitulée Sir Tho-
mas More; -— d'autres œuvres poétiques; —
d'observations théologiques sur la Genèse ; -*■ et
des Remarks on the Arrangements of the Plays
of Shakspeare. Il fut élu en 1793 professeur de
poésie. Hurdis est surtout connu par saliaisonavec
Cowper, qui lui adressa plusieurs lettres. On es-
time ses travaux sur Shakspeare. Z.
Htyley, Ufe of Cowper. — Chaimers , General Bio-
çraphical Dictionary.
huré (Charles), littérateur français, né à
Champigny-8ur-Yoniie, le 7 novembre 1 639, mort
à Paris le 12 novembre 17Ï7. Il fut principal du
collège de Boncourt, et publia entre autres une
édition du Nouveau Testament, avec des notes ;
Rouen, 1692, 2 vol., in-12; — Novum Testa-
mentum regulis illustratum; Paris, 1693,
in-12 ; — Dictionnaire universel de V Ecriture
Sainte; Reims, 1715, 2 vol. in-folio. G. de F.
Qnérard, La France Littéraire.
huret (Grégoire), graveur français, né à
Lyon, en 1610, mort à Paris, en 1670. B a gravé
des portraits et des sujets d'après Champaigne,
Vouet, Bourdon et divers autres maîtres français,
et des sujets d'après ses dessins, entre autres une
Histoire de la Passion, en 30 estampes. Ses
effets sont larges, ses têtes expressives, ses
draperies bien jetées, et si son burin n'étonne
point par une manœuvre savante, il est du
moins conduit avec goût. Il s'occupa aussi d'ar-
chiteoture, et publia un ouvrage ayant pour titre :
Règle précise pour décrire le profil élevé du
fust des colonnes; Paris, 1665. Par suite de
quelques critiques sur cet ouvrage, il fil paraître
ensuite une Réponse de Grégoire Huret aux
quatre articles du Journal dit des Savans,
Paris, 1665, et Cinq Avis donnés aux auteurs
du Journal des Savans en considération de
ce qu'ils sont demeurés sans réplique; 1665.
G. de F.
Sncyclop. Méthod. : beaux-arts. — Peller, Dictionn.
IlUtor.
*hcrgue8 (Philippe de), d'Arras, échevin
de Tournai, chroniqueur français, vivait à Douai
au commencement du dix-septième siècle. On
a de lui : Mémoires d'eschevin de Tournay,
contenants les Actes plus signalez. des Con-
saulx, les Sentences et Jugements plus no-
tables de VEschevinage de la dite ville, re-
marquez et escrits par P. de Hurgues. Le
manuscrit de la bibliothèque de Tournai , petit
in-4° de 393 pages, a été édité en 1855, dans les
Mémoires de la Société Historique et litté-
rairede Tournai, par M. Fréd. Hennebert. J. P.
Le Courrier du Pat-de-Calaia, 31 ocU, 1855. — Ren-
seignements inédits.
HURTADO DB MBNZOZÂ. Voy. MeBTOOZI.
hurtact (Pierre-Thomas-Nicolas) , litté-
rateur français, ancien professeur à l'École mi-
litaire et pensionnaire du roi, né à Paris, le 17
(et non le 15) avril 1719, mort dans la même
ville, le 5 mai 1791. Il fut d'abord destiné eu
commerce de son père, qui était marchand de
chevaux; mais un penchant très-prononcé pour
la littérature modifia les projets paternels, et
le jeune Hurtaut fut mis au collège, où il se dis-
tingua bientôt par son aptitude et ses progrès,
et se voua à l'enseignement. On a de Hurtaut :
VArt de péter, essai théorique, physique et
méthodique, etc., en Westphalie, chez Florent
Q. au Soufflet; (Paris), 1751, in-12. Une seconde
édition, augmentée de V Histoire de Pet-en-VAir
et de la Reine des Amazones, etc., parut sous
la même rubrique en 1775; puis une antre,
en 1776,- augmentée de la Société des Francs-
Péteurs (par Le Corvaisier) ; in-8° ; — Coup-
d'œil anglais sur les Cérémonies du Mariage,
avec des notes, etc., ouvrage (supposé) traduit
sur la 2 e édition de Londres, par M. M*** ; Ge-
nève (Paris), 1750, in-12 ; — Dictionnaire des
Mots homonymes de la Langue française, etc.;
Paris, 1775, in-12 ; — Dictionnaire historique
de la Ville de Paris et de ses Environs; Pa-
ris, 1779, 4 vol. in-8° (avec Magny) ; — Essais
de Médecine, ou théorie du flux menstruel
et traité, des maladies de tête, traduit du la-
tin de Emott., 1739; — Iconologie histo-
rique et généalogique des Souverains de V Eu-
rope, t. 1 er et unique; Paris, 1787, in-8°. (avec
d'Hermilly ). — Manuale Rhetorices, ad usum
arlisdicendi candidatorum /Paris, 1757. Une
585
HURTÀUT — HUS
586
3 e édition parut en 1782, in-12 ; — Dissertation
historique sur V Invention des Lettres ou
Caractères d'Écriture; — Études convena-
bles aux Demoiselles ; deux publications dont
nous n'avons pu découvrir la date Hurtault
a coopéré à la Bibliographie Parisienne
(avec d'Hermilly ) pour les années 1769 et 1770.
Dans les dernières années de sa vie il prenait
le litre de doyen des maîtres de pension de
Vuniversité. Ed. de Manne.
Quérard, France Littéraire.
hurtault (Maximilien- Joseph), archi-
tecte français, né à Huningue (Haut-Rhin), [en
1765, mort à Paris, en 1824. Élève de Mique, il
resta longtemps obscur et employé en sous-ordre
au château de Trianon. Après la révolution, il
devint architecte inspecteur des salles du Con-
seil des Anciens et de celui des Cinq Cents. Sur
les dessins de MM. Percier et Fontaine, il dirigea
la restauration et la décoration de la chapelle»
du théâtre et des appartements des Tuileries.
En 1797, il concourut à P Académie, et remporta
le second grand prix. Il partit pour l'Italie, où
il réunit un grand nombre de matériaux qu'il
sut habilement mettre à profit à son retour. Il
construisit à Paris un grand nombre d'habitations
particulières; puis, devenu architecte du château
de Fontainebleau, il y restaura la galerie de
Diane , éleva la fontaine de Diane qui lui fait
face , ainsi que le pavillon de l'étang ; enfin il
traça le jardin qui entoure cette pièce d'eau et
rétablit les cascades du Tibre. En 1819, il exposa
au salon le projet d'une fontaine monumentale
à ériger sur le boulevard Bonne-Nouvelle, et fut
nommé membre de l'Institut. Il était déjà pro-
fesseur à l'Académie des Beaux-Arts et inspec-
teur général du conseil des bâtiments civils. Son
dernier ouvrage fut le plan d'un joli jardin ré-
servé au duc de Bordeaux dans le parc de Saint
Cloud. E. B— n.
Gabct, Dictionnaire des Jrtistes du dix-neuvième
siècle.
I H (JUTER ( Frédéric-Emmanuel ), historien
suisse, né à Schaffhouse, le 15 mars 1787. Il
étudia la théologie à Gœttingue, devint en 1824
pasteur à Schaffhouse, puis abjura le protestan-
tisme à Rome en 1844. En 1845 il alla se fixer
à Vienne, où il venait d'être nommé historiographe
de l'empire d'Autriche. On a de lui : Geschichte
des ostgothischen Kônigs Theodorich und
seiner Begierung (Histoire de Théodoric, roi
des Ostrogoths, et de son règne); Schaffhouse,
1807 ; — Geschichte Pabst Innocenz III und
seiner Zeitgenossen (Histoire du pape In-
nocent III et de ses Contemporains) ; Hambourg
et Gotha, 1834-1842, 4 vol. in-8« -.ouvrage
des plus remarquables, traduit en français;
— Denkwurdigkeiten aus dem letzten De-
cennium des achtzehnten Jahrhunderts
( Choses mémorables qui se sont passées dans
les dix dernières années du dix-huitième siècle ) ;
Schaffouse, 1840;— Die aargauischen Kloster
und ihre Ânkldger (Les Couvents d'Argovie
et leurs Accusateurs); Schaffhouse, 1841 ; —
Die Befeindung der hatholischen Kirche in
der Schweitz seitdem Jahre 1834 (Les Atta-
ques qui ont eu lieu contre l'Église catholique
en Suisse depuis 1834 ) ; Schaffhouse, 1842-1843,
4 parties; — Geburt und Wiedergeburt :
' Erinnerunqen aus meinem Leben und Blicke
au/ die Kirehe (Naissance et Renaissance : Sou-
venirs de ma vie et Aperçus sur l'Église ) ; Schaff-
house, 1845, 3 vol., in-8°; ibid., 1850, 2 vol.,
in-8°; — Geschichte Kaiser Ferdinand II
und seiner Eltern (Histoire de l'empereur
Ferdinand II et de ses Parents) ; Schaffhouse,
1850-1857, 9 vol. in-8° : ouvrage inachevé,
fait sur des documents originaux; l'histoire de
Ferdinand H ne commence qu'avec le neu-
vième volume; — Philipp Long , Kammer*
diener Kaisers Rudolph II ; eine Kriminal-
geschichte aus dem An/ange des siebzehnten
Jahrhundert ( Philipp Lang, valet de chambre
de l'empereur Rodolphe II ; cause célèbre du
commencement du dix-septième siècle ) ; Schaff-
house, 1851. E. G.
Hurter, Geburt und frieder geburt (autobiographie).
— Brnnner, Hurter vor dem Tribunal der WahrheiU-
freunde; Paderborn, 1880. — Briibl, Geschichte der ka
tholischen Literatur.
HURTREL d'à RBOVAiu(Louis -Henri- Joseph) y
vétérinaire français , né à Montreuil-sur-Mer, le
7 juillet 1 777, y mourut, le 20 juillet 1 839 . Il étudia
à l'école d'Alfort,et après quelques années d'étu-
des, il revint à Montreuil exercer la profession de
vétérinaire. Le camp de Boulogne fut pour lui une
occasion d'études et d'observations sur les mala-
dies des chevaux, surtout sur la morve et le
farcin, dont il constata la nature contagieuse. Il
fut nommé en 1814 commissaire du gouverne-
ment pour combattre Tépizootie de typhus qui ré-
gnait dans le département du Pas-de-Calais. Ses
principaux ouvrages sont : Notice sur les Ma-
ladies qui peuvent se développer parmi les bes-
tiaux soit durant les chaleurs et la sécheresse
des étés, soit dans le cours des automnes plu-
vieux et froids; 1819, in-8s 4 e édition, augmen-
tée; — Instruction sommaire sur VÉpizootie
contagieuse qui vient de se déclarer dans le
département du Pas-de-Calais ; 1827, in-8%
2 e édition, revue, corrigée et augmentée; — Dic-
tionnaire de Médecine et de Chirurgie vétéri-
naires ; Paris, 1826 et années suivantes, 4 vol.
in-4°, avec un atlas par Leblanc et Trousseau;
1826, grand, in-folio de 30 pi. ; — Traité de la
Clavelée, de la Vaccination et Clavélisation
dans les Bêtes à laine; Paris, 1823,in-8°. Il a
inséré des articles dans teDictionn. abrégé des
Sciences Médicales et dans quelques publications
spéciales. G. de F.
Documents particuliers.
HUS et non Huss ( ou Jean de Hussinetz) ,
célèbre précurseur de Luther, ainsi appelé du
nom de la ville où il naquit , en Bohème, le
6 juillet 1373, mourut brûlé comme hérétique à
587
HUS
588
Constance, en 1415, lé jour même de l'anniver-
saire de sa naissance. Issu d'tme famine obs-
cure, il commença sèé études dans sa ville
natale, les continua à Praschatitz, Bourg au voi-
sinage ,• et alla prendre ses grades à i'univef sfté
«te Prague, alors» très-florissante. Bachelier en
théologie à Vingt ans, maître es arts trots ans
après, il était en 1400 prêtre, et desservait la
petite ehapeHe dé Bethléem. L'éclat dé sa répu-
tation avait, dès cette époque, attifé flftf hri l'at-
tention de Wencéslas, foi de Bohême et de sa se-
conde femme Solfié de Bavière, qui le choisit
pour son confesseur, et lui donna toute sa con-
fiante. Les écrits de tyteliffe s'étaient depuis
pen répandus en Allemagne, et particulièrement
en Bohême. Hus les vit; fttut4! dire o>e sa foi
en 4 ftit contfistée, et qtfiï montra tout d'abord
pour les audacieuses nouveautés qu'il y trouva
une pieuse aversion ? teê mieux informés parmi
les écrivains catholiques l'affirment (1). Sans
doute vers 1402 il ne songeait guère à rompre
avec l'Église et la papatrfé, et à se fâire le pro-
pagateur de la doctrine dû fougoéfti héréslrff-
que d'Oxford. La témérité même et la hardiesse
des négations de 'VVycliffe étaient bien propres à
effrayer une âme naturellement douce, que l'ar-
deur de la lutte n'avait pas encore enflammée,
et qui, plus tard, au fort de la polémique et au
milieu du soulèvement général, ne se départit
point dune certaine modération à l'endroit des
dogmes fondamentaux de l'Église catholique.
Si Jean Hus fut en effet scandalisé à la lectarè
des livres de t¥ycliffe, à conp sûr il ne le fut
pas longtemps , car dès 1405 nous l'entendons,
à Prague , fulminer contre le clergé dans deux
germon* où il attaque la tyrannie, l'orgueil,
l'impureté, l'hypocrisie, l'avidité des prêtres dé
tout ordre, et invite l'archevêque à réprimer leurs
désordres et à purifier ces vases d'iniquité, flous
l'entendons accuser de front les prélats, qui dé-
pouillent le peuple au lieu de le défendre; le* or-
dres mendiants, qui vident la bourse des pauvres;
tes moines et les curés, dont les mœurs sont un
scandale pour tes laïques , qui captent les héri-
tages, extorquent les suce^ssion^,. font commercé
dés prières et de* sacrements, et le clergé tout
eritler, où la simonie se pratique à tous les de-
grés de l'échelle, on l'on voit vendre et acheter
les charges ecclésiastiques et trafiquer honteuse-
ment du Saint-Esprit (2). C'est probablement à
la même époque (jué Jean Hus composa son
traité De Sanguine Christi, dans lequel il s'élève
vivement contre le» faux miracles attribués au
prétendu sang de Jésus-Christ. Ce ne sont là,
selon lui, que mensonges et sacrilèges mômeries
de prêtres imposteurs, dont quelques-uns ont
été convaincus et punis dans plusieurs pays.
« Le sang de Jésus-Christ a été glorifié avec son
(1) Balblnus, r.pit. Rer. Bohém., p. 408. — Theobtldus,
Hist. Hussit., Chap. %.
(2) Hist. et Mon, J. Hus, tome II, fol. 26-31. ( édit. de
Nuremberg de 1M58).
. corps dans la résurrection. C'est leur propre
sang que des prêtres avares mettent diabolique-
ment dans l'hostie pour faire accroire aux sots
que c'est le sang du Christ. » Ce traité reçut
l'approbation de l'université et de l'archevêque
de Prague Sbynko.
La lutte commençait. Aimé du peuple, couvert
de la protection de la reine , estimé de tous à
cause de l'austérité de ses mœurs, Hus voyait
les haines s'accumuler sourdement autour de
lui. Mais la prudence n'était ni une vertu de cette
époque ni une qualité de cette âme enthousiaste.
Il eut crtr, en gardant le silence, manquer à sa
fnisstotf. « Moi aussi, «'écrle^t-H, Dieu m'a suscité
jtour percer la muraille afin qu'on découvrit la
multitude des abominations du heu saint. Il
a Jrtu att Seigneur de me faire sortir de l'endroit
où j'étais, comme un tison arraché du feu. Es-
clave malheureux de mes passions, 8 a fallu
que, comme Lot, Dieu m'ait tiré de l'embrase-
ment de Sodome, et j'ai obéi à la voix qui me
disait; Percez la muraille (1). » En 1407, prê-
chant devant l'archevêque; il opposait dans une
*ive antithèse le vrai chrétien au faux chrétien.
H dépeignait le dérèglement des prêtres et la
connivence des prélats; il osait faire remon-
ter jusqu'aux princes la responsabilité des fau-
tes que commettent leurs sujets ; il reprochait
au clergé ses vaines disputes qui engendrent
le schisme; il s'élevait fortement contre la
vente des indulgences, des reliques, des images
coloriées , et contre la vaine et mondaine ma-
gnificence des églises. « Les murs, disait-il,
sont couverts d'or et de tableaux, les pauvres
sont nus. » Il attaquait la simonie, la pluralité
des bénéfices, s'appuyant fréquemment de l'au-
torité de saint Bernard ou du témoignage de
saint Bonaventure. Dans un autre sermon du
même temps il répétait et renouvelait ses atta-
ques, rappelait le clergé à la simplicité et à l'hu-
milité été temps apostoliques, l'engageait à
revêtir le Christ , c'est-à-dire à imiter sa vie, et
associait les princes qui permettent les désor-
dres , en ne les réprimant pas , à la damnation
qui attend les pécheurs endurcis (2).
Fort de sa conscience et de la faveur de la
cour, Hus poursuivait sa route sans se soucier
des mécontentements qu'il semait autour de lui.
En mai 1408 il avait fait rendre à ses compatrio-
tes certains privilèges que la nation allemande
avait usurpés , et avait fait remettre en vigueur
l'ordonnance de Charles IY (fondateur de l'univer-
sité de Prague, en 1347 ) qui accordait trois voix
à la Bohême dans les délibérations et une seule-
ment aux étrangers. Ceux- ci, irrités de leur
échec, désertèrent la ville par milliers. C'était
une perte considérable pour les bourgeois de
Prague. On en voulut beaucoup à Hus, qui vit
cependant s'accroître par là son influence sur
(i) tes Réformateurs avant Ut Méform». par Éro. <;>*
Bonnechose, t.I, p. 114, édlt. in-lï.
(*) Hist. et. Mon. J. Hus, t. II, fol. 8».
589
HUS
«90
la jeunesse. Il en usa, à la fin de cette année, pour
entraîner l'université dans le parti des cardi-
naux qui avaient abandonné Grégoire XII à fa-
sollicitation des amis de la paix ecclésiastique.
L'archevêque de Prague, Sby&ko, qui jusqu'a-
lors avait ménagé Jean Hus, éclata à cette oc-
casion» Fidèle à Grégoire, auquel il devait tout,
il fit afficher aux portes des églises un mande-
ment par lequel il interdisait les fonctions sa-
cerdotales à Hus et aux partisans des cardinaux.
L'événement fléchit bientôt la colère de l'arche-
vêque, qui se soumit à la décision du concile de
Pise et reconnut Alexandre V.
Jean tins* alors rectaur de l'université (1409),
ne garda plus de mesure. Il avait pria une con-
naissance plus exacte des écrit» de Wyclîfîe. Dix
ans auparavant, il conaeiUait, dit- a», de les
brûler ou de tea jeter dans la Moldau : aujour-
d'hui, il ne craignait pa» de le» prôner publi-
quement. Lorsque Savuko, effrayé du progrès
des opinions nouvelle*, avait, l'année précédente,
ordonné qu'on déposai à l'archevêché tes livres
de Wycliffe, Hua avait été des premiers à en
appeler à Grégoire XiL La retraite des cardi-
naux à Uvouroe* la tenue du concile de Pise, la
déposition de Grégaire et l'élection d'Alexan-
dre ajournèrent la décision de cette affaire,
sans interrompre les prédications de Hus. Un
des premiers soins du nouveau pape fut de s'oc-
cuper de cette question. En décembre, 1409 il
publia une bulle contre les promoteurs des doc-
trines de Wycliffe, manda à Sbynko de les ex-
tirper par tous les moyens possibles, et jeta l'in-
terdit sur les chapelles particulières du royaume
de Bohème. L'archevêque de Prague fit brûler
sans forme de procès les livre* de Wycliffe qu'il
avait pu saisir i plusde deux cents volumes, dit-on.
Grande tempête dans l'université, qui accuse
l'archevêque d'avoir violé ses privilèges ; Hus se
porta pour les défendre- La question d'appel
était encore pendante a Rome, quand Alexan-
dre V mourut ( mai 1410 ), et Jean XXIli avait
à peine pris possession du siège pontifical que
Jean Hus lui adressait an nouvel appel (juin 1410),
dont nous avens la teneur ; « Contra combus-
tionem librorum Jounnis Vuiglef et montra
alia». Hus y accuse ouvertement Sbynko, en soit
nom et au nom de l'université de Prague, d'à-
▼oif arraché stibrepticernent Une bulle de con-
damnation à Alexandre V ; d'avoir fait suivre
dette balle de procédures iniques contre les dé-
tenteurs des ouvrages de Wycliffe; d'avoir in-
sinué faussement que l'hérésie se propageait en
Bohème* lorsque lui-même Sbynko, dans un
synode solennel tenu deux ans auparavant
( juillet 1408 ), avait déclaré, après une longue
et minutieuse information, qu'iL n'avait trouvé
ni pu trouver dans le diocèse de Prague tin seul
hérétique. Hus soutient qu'il est injuste et con-
traire aux notions vulgaires du droit que, dans
cette affaire, Sbynko soit à la fois juge et par-
lie ; il ajoute qu'il y a plusieurs livres qui sont
laissés aux mains des fidèles et ne sont pas ré-
putes, dangereux, bien qu'ils contiennent plu-
sieurs choses contre la foi, tels que les livres
d'Aristote, d'Averroès, etc. ; que Funiversité de
Prague, s'est opposée formellement à ce que les
livres de Wycliffe fussent brûlés ; que de plus
cette exécution a etf lien sans examen, sans
enquête préalable. Il réclame en outre contre
la sentence de l'archevêque qui défend de prê-
cher dans les chapelles, et enlève au peuple s»
nourriture spirituelle. Cette sentence, dit il, est
contraire à PÉvangtye et aux décrets des saints
Pères* La parole jïe Dieu ne doit pas être en-
chaînée. Il termine en disant que c'est parce
qu'il vaut mieux obéir à Dieu qu'aux hommes
qu'il a fait cette protestation et en a référé à la
juridiction du siège apostolique (1). Quatre car-
dinaux, commis par Jean XXIII pour juger ce
procès, après avoir prie l'avis de* docteurs en
théologie de t université de Bologne, décidèrent
que l'archevêque de Prague, en faisant brûler les
ttvm de Wy enfle, *▼** outrepassé ses droits*
Hus avait gain de cause', mais ses ennemis se re-
muèrent et obtinrent qu'il fût cité à comparaître
êft personne devant fo pape pour répondre aux
accusations qui circulaient contrer lui et rendre
témoignage de sa foi.
Cette citation troubla fort les partisans de
Hus. Le roi, la reine, les seigneurs, FuniversHé
intervinrent auprès du cardinal Othon de Co-
lonne qui ratait décidée. On envoya une ambas:
sade au pape pour le prier de dispenser Hus
de comparaître en personne- On déclarait unani-
mement qu'il était injustement accusé, et qu'il
n'y avait pas sûreté pour lui à faire le voyage
d'Italie. On suppliait en même temps Sa Sain-
teté de ne pas laisser peser sur la Bohème le
soupçon d'hérésie et de rouvrir les chapelles
aux prédicateurs; on lui proposait d'envoyer
aux frais de la couronne des légats pour s'as-
surer de la pureté et de l'intégrité de la foi en
Bohème ; on promettait de leur donner aide et
secours et de punir ceux qui seraient convain-
cus d'hérésie. L'archevêque lui-même , à l'ins-
tigation de la cour, écrivit au pape en faveur de
l'inculpé. H affirmait qu'après avoir réuni les
professeurs de théologie et les docteurs en droit
canon pour s'enquérir de l'hérésie prétendue au
sujet du sacrement de l'Eucharistie, il n'avait
trouvé la foi de personne en défaut; que grâce
a la médiation du roi et de la reine, son dissen-
timent avec Hus était terminé; que ce dernier
avait rendu témoignage de sa foi en présence
de l'inquisiteur du siège apostolique & il suppliait
enfin le pape de lever la citation (2). De son côté
Hus écrivit au collège des cardinaux : « Je suis
innocent, disait-il , de tout ce dont mes adver-
saires m'accusent ; j'en prends à témoin Notre*
Seigneur Jésus-Christ. Je suis prêt à paraître en
(1) Hisè. et Mon. J. au», tom. 1 fol. 89-91.
(2) Ibid., tom. I, fol. 87 (verso), 88.
591
HUS
592
présence de l'université de Prague, de tous les
prélats , de tout le peuple qui est venu m'écou-
ter, et à rendre devant eux, de vive voix et par
écrit, raison pleine et entière de la foi que Je
garde en mon cœur et à la confesser même an
péril du feu (1). » En même temps 11 envoya
des mandataires pour répondre en son nom
à tout ce qui lui serait reproché. Toutes ces dé-
marches furent vaines. Le pape fit pousser la
procédure. On refusa de recevoir et d'entendre
les procureurs de Hus : ils protestèrent au nom
de la justice ; on étouffa leur voix en les jetant
en prison. Hus, déclaré contumace, hérésiarque,
fut excommunié, et l'interdit lancé sur Prague
tant, qu'il y séjournerait. Condamné sans avoir
été jugé, Hus en appela à Dieu et au prochain
concile (2). Les lettres qu'il écrivit à cette époque
(1) Hist. et Mon. J. ira», ton». I, fol. M ( recto ).
(l) Voici la teneur de cet appel, dont on fit on crime à
Hns : a Le Dieu tout-puissant , unique essence em trots
personnes, est le premier et le dernier reloge de ceux
qui sont opprimés : c'eit le Seigneur qui garde la vérité
dans tons les siècles, faisant Justice à ceux à qui l'on fait
tort, se tenant près de ceux qui l'invoquent en vérité,
en condamnant à la perdition tous les pécheurs Incor-
rigibles. Notre-Selgneur Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai
homme , environné des pontifes, des scribes , des phari-
siens et des sacrificateurs, ses Juges et ses parties, et vou-
lant racheter de la damnation éternelle ses enfants élus
avant la fondation du monde, par nue mort sanglante et
Ignominieuse, a donné ce bel exemple à ses disciples de
commettre leur cause au Jugement de Dieu, qui peut tout,
qui sait tout, et qui fait tout ce qu'il veut. En suivant ce
saint et ce grand exemple, J'en appelle à Dieu, me voyant
opprimé comme Je suis par la sentence inique et par la
prétendue excommunication des pontifes, des scribes,
des pharisiens et des Juges assis sur la chaise de Moïse.
J'Imite encore dans cet appel saint Chrysostome , qui
appela de deux conciles ; le bienheureux évéque André de
Prague et Robert de Lincoln, qui appelèrent humblement
et salutalrement au souverain et très-Juste Juge, qui ne
peut être Intimidé par aucune frayeur ni corrompu par
des/présents, non plus que séduit par de faux témoins. Je
souhaite quêtons les fidèles chrétiens, principalement les
princes, barons, gentilshommes, vassaux et tons les habi-
tants de notre royaume de Bohême soient Informés et
émus de compassion de la prétendue excommunication
lancée contre moi par Pierre, cardinal diacre de Saint-
André, commis à cela par le pape Jean XXIII, à l'instiga-
tion de mon adversaire Michel de Causis et du consente-
ment des chanolnes.de Prague. Ce cardinal, pendant près
de deux ans, a refusé toute audience a mes avocats et
procureurs, quoiqu'on ne la doive.pas refuser à un Juif ; à
un païen et à un hérétique. Le même prélat n'a point
voulu acquiescer aux excuses raisonnables que J'ai allé-
guées pour être dispensé de comparaître , ni faire aucun
cas des témoignages authentiques de l'université de Pra-
gue. D'où 11 est clair que Je n'ai point encouru la note de
contumace:, puisque ce n'est point par mépris, mais par
des raisons valables , que Je n'ai pas comparu à Rome,
lorsque j'y ai été cité, 1° parce qu'on me dressait des
embûches en chemin ;*• parce que les périls des autres
m'ont servi d'exemple ; 3 e parce que mes procureurs se
sont engagés a subir l'épreuve du feu contre qui que ce
soit à la cour de Rome; *° parce qu'on a mis en prison
à cette cour mon procureur, sans qu'il refit mérité, au
moins qne Je sache. Ainsi, comme il est établi par tous
les anciens droits, tant par les livres divins de l'Ancien
et du Nouveau Testament que par les canons , que les
Juges visitent les lieux où le crime a été- commis, et que
là ils prennent information des faits dont on est accusé
de gens qui connaissent bien la personne en cause, qui
ne soient point malintentionnés , ni de ses ennemis, qui
n'agissent point par haine, mais par zèle pour la loi de
Diei»; et enfin, cpmmc il est ordonné par les mêmes
témoignent du trouble profond qu'il éprouva
avant d'entrer en guerre ouverte avec le saint-
siège. Après avoir longtemps hésité il quitta
Prague, obéissant, comme il dit, à cette parole
du Christ : Lorsqu'ils vous persécuteront dans
une ville, fuyez dans une autre (1). « Sachez,
mes bien-aimés, que c'est par l'exemple et l'aver-
tissement du Christ qne je me sais éloigné de
tous, de peur d'être aux méchants une occasion
de condamnation éternelle , et aux bons un su-
jet de tristesse et de deuil » ; il ajoute aussitôt
après : « J'ai fui pour prêcher plus librement
la parole de Dieu (2). » Pouvait-il, en effet,
rester en repos ? « Malheur à moi si je ne prêche,
écrit-il encore en parlant des désordres du clergé
et de l'indignité du pape; malheur a moi si je
ne pleure, si je n'écris (3) » ; et encore : « La vo-
lonté de Dieu et l'Écriture nous enseignent que
l'obéissance aux supérieurs n'est obligatoire que
dans les choses licites. Bf attachant à cette vé-
rité , j'ai mieux aimé obéir à Dieu en prêchant
qu'au pape et à l'archevêque et à tous ceux ( est-
taris satrapis) qui s'insurgent contre cette parole
du Christ : « Allez par toute la terre, etc. (4). »
Encouragé dans sa révolte par ses amis de Bo-
hême et d'Angleterre (5), Jean Hns entrait de
plus en pins dans la voie de la résistance, oppo-
sant la parole de Dieu à celle des hommes, les
commandements de l'Évangile à ceux de l'É-
glise, les préceptes des Apôtres et des premiers
Pères aux bulles et aux décrets du saint-siège
et des prélats. C'est ce qui paraît assez nette-
ment dans deux manifestes composés peu de
mois après sa retraite de Prague (1410). L'un est
un traité de controverse : De Libris Heeretico-
rum legendis; les premières lignes en sont
caractéristiques : Il faut lire et non brûler les li-
vres des hérétiques, Libri hsereticorum sunt le-
gendi non comburendi, dum in ipsis veritas
continetur. Probatur auctoritatibus sancto-
rum Augustini, ffieronymi, Ambrosii, Bedx t
Theodori, Liber ati y Cyrilli, Gelasii papx,
canonibus et rations. Le second est une sorte
de sermon qui a pour titre : Actus pro de/en-
sione libri Joannis Wklef De Trinitate
Sancta... La question de la Trinité n'est qu'on
prétexte; Hus y traite le même sujet que dans
droits, que celui qui est cité ou accusé comparaisse
dans un lieu sûr et libre pour pouvoir se défendre, et que
le Juge ne soit pas de ses ennemis, aussi bien que' les
témoins, 11 est manifeste que toutes ces conditions m'ayant
manqué, Je suis absous devant Dieu du crime de contu-
mace et déchargé d'une excommunication prétendue et
frivole. Moi, Jean Hus, Je présente cet appel à Jésus-
Christ, mon maître et mon Juste Juge, qui connaît, pro-
tège et Juge la Juste cause de qui ce soit. (/. HUt et
Hierony. Prag. Mon., t. I, in-fol., 87 recto, ibld., fol. iT
verso, traduit par Jacq. Lenfant, Hist. du Concile de
Constance, tome I, p. SS, 34. )
(1) Hist. et Mon. J. Hvs, epist. XI, tom. I, fol. 91
(verso).
(î) Ibid., epist. XI.
(3) Ibid., epist. IV. 1. 1, fol. 94 (verso ).
(k) Ibid., epist. V, 1. 1, fol. 95 ( verso).
(6) Ibid., epist XV, t. I, fol. 101.
593
HUS
594
te précédent, et proteste, an nom de l'Evangile
et de la raison, contre les violences des pouvoirs
ecclésiastiques pour étouffer la vérité. Toutefois,
Uns déclare qu'il ne prétend pas innover et
qu'il n'entend , ni dans cet acte ni dans au-
cun autre qui pourra à l'avenir sortir de sa
bouche, rien affirmer qui soit contraire à la
Sainte Ecriture , ou erroné de quelque manière
que ce soit. « Que si quelque chose de sem-
blable m'est échappé, par ignorance ou par sur-
prise, je suis prêt, dit-il, à le rétracter humble-
ment. Et si quelque personne de l'Église veut
m 'éclairer, soit par l'Ecriture, soit par la raison
( Scriptura Sacra vel ratvone valida ), je suis
prêt à me soumettre. Dès le commencement de
mes études, j'ai pris pour règle que toutes les
fois que dans un sujet quelconque je trouverais
une pensée meilleure, d'abandonner volontiers et
humblement la moins bonne (1). » Il attend
qu'on lui prouve que les livres de Wyctiffe sur la
Trinité contiennent quelque hérésie» Que s'il se
rencontre quelque maxime répréhensible dans
quelque autre de ses ouvrages, pourquoi avoir
confondu et brûlé ensemble le bon grain avec
le mauvais? Les Pères ne font-ils pas profession
de croire qu'on peut tirer quelque utilité de la
lecture et de la méditation des écrits des héré-
tiques? Il ne veut pas, quant à lui, adhérer à
cette sentence ni déserter la cause de la vérité.
On ne trahit pas seulement la vérité en la dé-
guisant, mais en la cachant, en ne la déclarant
pas ouvertement, en ne la défendant pas libre-
ment. Pour lui', il la proclamera, il la défendra
jusqu'au bout, dût son courage lui coûter la vie.
Il semble queHus apercevait le bûcher à l'extré-
mité de la route où il s'était engagé. « Si la crainte
de la mort vient m'assaillir, j'espère en mon Dieu
et dans le secours du Saint-Esprit : Dieumeraffer-
mira. Et si j'ai trouvé grâce devant ses yeux, il
me donnera la couronne du martyre. Quelle
plus belle victoire! Le Sauveur, encourageant
ses fidèles à la mériter, ne dit-il pas : Ne craignez
pas ceux qui tuent le corps ; et saint Chrysos-
torae : Que la crainte de la mort ne vous em-
pêche pas de dire librement ce que vous avez
entendu et de prêcher avec assurance ce qui
vous a été confié à l'oreille (2). » L'Écriture ,
les Pères, la raison, voilà ce que Jean Hus in-
voque sans cesse. Dans un écrit de 1411, où il
défend Wycliffe contre Stokes, licencié de l'u-
niversité de Cambridge, Hus établit en principe
qu'il n'y a que trois sources de vérité pour un
chrétien : l'Écriture, les sens et la raison (veritas
in Scriptura implicita, veritas a sensu co-
gnita , veritas élaborât a ab infallibili ra-
tione (3) . « Je ne crois ni ne concède, dit-il,
que Jean Wycliffe soit hérétique ; je ne le nie
pas non plus, mais j'espère qu'il ne l'est pas;
(1) HisU et Mon. J. Hus, tom. I, fol. 105.
(3) Jbid. y tom. I, fol. 106.
(8) lbUL, tom. I , fol. 108. Ailleurs il ajoute la révé-
lation.
car dans le doute j'aime mieux pencher pour le
meilleur parti... Rien ne serait plus absurde que
de dire : Dans les royaumes d'Angleterre , de
France, de Bohème, une multitude de prélats et
de clercs regardent Jean Wycliffe comme hé-
rétique, donc Wycliffe est hérétique. . C'est
comme si l'on disait : Chez les Turcs, les Sar-
rasins et les Tartares on ne regarde pas Jé-
sus-Christ comme Dieu, donc il n'est pas
Dieu (1). » Qu'on l'ait condamné comme héré-
tique, qu'on ait brûlé ses livres comme enta-
chés d'hérésie, cela ne prouve rien non plus
contre lui. Pour avoir le droit d'affirmer que
Wycliffe est hérétique, il faut montrer dans ses
ouvrages un dogme faux, contraire à l'Écriture et
qu'il a soutenu obstinément. Et encore Dieu
seul connaît le fond des cœurs, et il a dit : Ne
jugez pas de peur d'être jugé ; ne condamnez
pas, et vous ne serez pas condamné.
' Hus en quittant Prague y avait laissé de nom-
breux amis, tant à la cour que parmi le peuple.
Des scènes de violence eurent lieu ; le sang coula :
Sbynko, chef du parti resté fidèle au saint-siége,
fut contraint de s'enfuir, et Hus revint prendre
possession de la chapelle de Bethléem. Il conti-
nua de plus belle ses attaques contre le clergé ;
condamnant les pratiques observées dans les en-
terrements, niant l'efficacité des prières pour
les morts , sans craindre de compromettre la
foi au purgatoire. « Il serait bon, s'écriait-il,
d'enseigner au peuple à bien vivre et non pas
de lui faire accroire qu'après une vie honteuse
et coupable la messe d'un prêtre indigne suffira
à lui procurer la béatitude et à le tirer du
purgatoire (2). » Dans un des premiers ser-
mons qu'il prononça , il loue Wenceslas d'a-
voir forcé les prêtres à prêcher et à officier
sous peine de suspension de leur temporel. 11
y professe, après Wycliffe , que les princes ont
reçu de Dieu le glaive pour protéger les bons et
réprimer les méchants , qu'ils soient séculiers
ou prêtres (sive sint seculares f sive spiri-
tuales); que les princes doivent mettre leur
puissance au service de la vérité évangélique.
Cette doctrine trouva des contradicteurs, et Hus
prit aussitôt la plume pour s'expliquer ( 141 1 ).
Son traité a pour, titre : Contra occultum Ad-
versarium. Il y soutient que les princes sont les
vicaires de Jésus-Christ; qu'ils doivent veiller à
la défense de la loi de Dieu ; que défendre cette
loi c'est maintenir dans leur royaume la paix et
le bon ordre; que rien ne trouble davantage
la loi de Dieu et par suite la paix et le bon
ordre du royaume que les injures faites à Dieu,
la malice du clergé et la simonie; que, par con-
séquent , c'est le devoir des rois de réprimer
coercitivement ces vices du clergé. Il s'appuie
de l'autorité des Apôtres , de saint Augustin et
de saint Grégoire, et d'exemples empruntés à
(1) Joannis Hus Hist. et Monum., tom. I, foK 119
(recto).
(» /6W., tom. ir, fol. 51 (verso).
595
l'histoire, « Voilà qu'un foi étranger, dit-il,
sévit pour que le Dieu d'Israël ne soit pas blas-
phémé. Comment donc les rois Chrétiens ne
doivent-ils pas s'irriter et sévir saintement
(sancte irasci et sxviréb quand le Christ est
déshonoré par des prêtres injustes (1). •»
L'Italie présentait alors le spectacle delà pttts
triste division : les maux de la guerre citile s'a-
joutaient à ceux du schisme que le concile de
Pise n'avait pas éteint. Ladislas, soutenu par
Grégoire XII, disputait à Louis II d'Anjou la
couronne de Naples. Jean XXIII, qui tenait pour
ce dernier, lança successivement contre Ladislas
deux bulles d'excommunication d'une extrême
violence (sept, et décemb. 1411 ). 11 y prêchait
expressément la croisade contre cet ennemi du
saint-siége, le désignait à la haine et à Fexter-
minàtion, et accordait des indulgences à tous
ceux qui s'armeraient contre lui, donneraient de
l'argent pour cette cause, etc. Ces bofles eurent
en Bohême un grand retentissement. Le roi Wen-
ceslas les embrassa, et, à sa suite, la conr, les
chefs de l'université, les magistrats et le clergé.
Hûs, délaissé de ses puissants protecteurs, ne
faiblit pas. Interpellé devant l'archevêque de
Prague par les légats du pape, s'il voulait
obéir aux commandements apostoliques : « Je
veux remplir de grand coeur les commandements
apostoliques, dit-il. » EtcéUx-ci le croyant sou-
mis et attestant l'archevêque : « Vous entendez,
Monseigneur, il veut bien obéir aux ordres de
notre seigneur le pape. — Comprenez - moi
bien, reprit-il : j'ai dit que je veux de grand cœur
remplir les commandements apostoliques et
leur obéir pleinement, mais j'appelle ainsi la
doctrine des apôtres du Christ. Je ne consens à
obéir aux ordres du pape qu'autant qu'ils sont
conformes à cette doctrine; ma» si f y rencontre
rien de contraire, je n'y obéirai point, quand
même je verrais la flamme du bûcher prête
à dévorer mon corps (2). «C'était une déclara-
tion de guerre ; l'effet suivit bientôt , et peu de
jours après Hus publiait une dissertation sur
cette question : Est-il permis , selon la loi de
(1) 7. Hus, Hist. et Mon., loin. I, fol. 184 et suIt.
Voici uo des textes où eette doctrine est nettement
formulée : « Cum igittfr reges eteaeculares Domini, JuxU
Apostolfrm, ubisopra, ministfl Del suitt, in bocipsum
sert lentes, et ad hoc gladium portant et tributa acci-
piunt, ut vindictam faciant In eis qui malum agunt, et ad
hoc misai sont, at vlndicent, teste Petro Apostolo !,
Pétri s. Et sacertfotea debént snbjeett esse omni homanaa
creator* propter Denra , aive regl tanquam praecellenti,
sive duclbus, tanquam ab eo missis, quia sic est voluntas
ireï , ut dieft Ibidem Immédiates ChristiTicarius Petrus
apostolas; sequttur qaod lpsl reges, principes, et Do-
mini temporales debent sic lacère , ne sint ex consénsu
criminis participes. El sacerdotes debent in boc subjectl
esse regibus, ne slnt ex InobedienUa magis damnabiies,
qoara lpsi principes et Domini ex coosenso. » (Hus
Hist. et Mon., t. 1, foi. 186 recto.)
(a ) Responsio ad scriptum octo Doctorum. Hist. et
Mon. /. Hus, tom. I, foi. 303 (verso) -. « Sed si quid ad-'
versl ( régula? régis Christl ) concepero , non obediam,
etiam si ignem pro combnstione met corporis mets ocu-
lis praspouatls. »
flUS 596
Jésus-Christ, et convient-if, pour l'honneur de
Dieu, le salut do peuple et l'intérêt du royaume,
d'approuver les balles du pape qui ordonnent
la croisade contre Ladislas, roi de Naples et ses
partisans?
Ce n'est pas dans un esprit de révolte qu'il
efigdge cette controverse ; mais il n'est pas de
cent qui acceptent avec indifférence les buttes
du pape, sans s'inquiéter de savoir si elles sont
bonnes* ou mauvaises; il n'est pas de ceux qui
les blâment dans le secret de leur conscience
et les louent en public, de peur de compromettre
leurs dignités, leurs richesses, leur repos et leur
vie. Il proteste toutefois qu'il est prêt à se rendre,
s! on lui montre que ces bulles sont conformes
à la loi du Christ, et à les approuver de tout son
coeur; qu'il ne songe nullement a prendre parti
pour Ladislas et Grégoire Xlf, mais plutôt contre
etfx ; qu'il ne veut pas s'opposer à là puissance
que le pontife romain a reçue de Dieu, mais
att renversement de eette puissance. Éclairé
par la lumière de sa conscience, appuyé sur
l'autorité de la parole de Dieu et du témoi-
gnage des apôtres et des Pères , Hus établit que
les prêtres du Christ et lé pape lui-même n'ont
pas le pouvoir de donner ta pleine rémission
des péchés ; que ce pouvoir n'appartient qu'à Dieu
seul; que c'est utf blasphème qu'on homme,
quel qu'il soit, dise à un antre : je te remets tes
péchés; que promettre des indulgences pour
de l'argent, c'est se rendre coupable de simo-
nie. — Quant à la guerre , il n'est permis toi à on
prêtre , ni à un évêque, ni an pontife romain de
la faire ou de la provoquer dans sa propre cause.
Les armes des évêques sont les larmes; leur
glaive c'est la parole de Dieu*. Si le pape vent
vaincre ses ennemis, qu'il suive te Christ, dont il
se dit le vicaire ; qu'il prie pour ses ennemis et
pour l'Église ; qu'il dise : * mon royaume n'est
pas de ce monde » ; qu'il fasse du bien à ceux
qui lui veulent du mal ; qu'il bénisse ceux qui
l'outragent Les bulles condamnent Ladislas jus-
qu'à la troisième et la quatrième génération;
Dieu n'a-t-il pas dit : Le fils ne portera pas les
iniquités du père. Les bulles déclarent Ladis-
las et ses partisans blasphémateurs, relaps, hé-
rétiques ; mais ni lui ni ses partisans n'ont été
convaincus d'hérésie. Les bulles désignent Ladis-
las et ses partisans à l'eltertnination ; mais j'in-
terroge la conscience des vrais chrétiens, doux,
pieux et humbles de cœor : en est-il un qoi
consentirait à exterminer cruellement Ladislas
et 3es partisans, supposé qu'il le puisse? S*il ré-
pond non , il rejette les bulles et refuse d'ache-
ter d'un tel prix la rémission de ses péchés ; sll
répond oui, et ne sait pas par une révélation spé-
ciale que telle est la volonté de Dieu , il viole
manifestement la volonté de Dieu. Dira-t-on
qu'on ne peut en aucune chose résister à un
ordre du pape? Mais où prend-on que toute
sentence du pape doit être obéie? Une sentence
de qui que ce soit, et de quelque autorité qu'elle
597
HUS!
*v$
soit revêtue, ne doit pas être obéle si elle contient
née fausseté ou use erreur manifeste (si cvnti-
neat manifestamfalsUatemsivê errorem). Les
canons disent fréquemmimt qu'il faut tenir pour
hérétique | et non pour catholique* tout ce qui
aura été défini de contraire a la loi de Bien,
par qui que ee soit : prétendre qu'un pape ne
peut se tromperie' est plus qu'une erreur, c'est
un blasphème (l)<
Cette réponse de Jean Hus aux bulles du pape
enflamma tous k» esprits à Prague. La faction
hussite comprenait une partie de la noblesse et
le peuple presque tout entier. Les troubles qui
s'étaient produits lors de rexcomuwmeation
de Jean Hus se renouvelèrent» et avec plus de
violenee, La populace ééehatné* insulta les
prédicateurs de la croisade et les partisans des
bulles do pape y et fit entendre contre eux des
menaces de mort. La ville était en feu : Hus,
à la prière des chefs de l'université* contint
quelque temps les furieux) mais bientôt, entraîné
dans un raoovemeat qu'il ne pouvait phis diri-
ger, il s'emporta en fougueuses Invectives contre
le pape, ses adhérents et le clergé tout entier.
Aux apologies mal dissimulées des écrits" dt
Wycliffe (2), la faculté de théologie de Prague
avait répondu en condamnant dans unsgjtode
quarante-cinq articles tirés de ses ouvrages; Hus
s'émut* comme s'il était personnellement frappé * 9
opposa aux huit docteurs l'université, qui refusa
de souscrire à cette condamnation* et prit
la plume pour défendre celui qu'on regar-
dait comme son maître (3). Ses traités sut le
Retranchement du Temporel du Clergé et Sur
les Dîmes firent grand scandale. Il y posait en
principe que les rois et princes temporels 1 ont
juridiction sur l'Église , et droit de punir les
prêtres prévaricateurs en leur enlevant leurs
biens; que le clergé n'est pus propriétaire, mais
seulement usufruitier, dépositaire et dispensa-
teur pour les pauvres, des biens qui sont entre
ses mains; il déclarait qu'en supposant que les
richesses fussent un obstacle à la piété» à l'hu-
milité chrétienne et au service de Dieu , ce
serait rendre un grand service au clergé que de
les kn enlever (4). Weneeslas et les seigneurs
(i) Cette analyse de te réponse de Jean Has aux bulles
(ta pape Jean XX.UI n'est qu'une sotte de eltations ex-
traites et traduites presque littéralement du texte même.
( Voir Uirt. et Mon* J. Hus, du fol. 171 au fol. 18k)
(S> De tibriê hœretieorum kgendisg — Contra angli-
eum J- Stokes Wîeletfi calumniatorem ; — Actuspro
de/ensioM Ubrt /. WieUffi de Trinitate smuta\ déjà
cité*;.
(3 ) Le premier de ces traités a pour titre : Defensto
qtuyrumdam articutomm J. WieUfi. Hus prend la dé-
fense de ces deux articles condamnés. 1° Ceux qui né-
gligent de prêcher ou d'entendre la parole de Dieu à
cause d'nne.exeoamunication humaine sont excommu-
nies et au Jour du jugement seront réputés traîtres an
Christ.** Il est permis à tout diacre du prêtre de prêcher
la parole de Dieu sans la permission du siège apostolique
ou de l'évéque catholique. {Bise, et Mon. J. Hus, tom> 1,
fol. 111.)
(4) Hus proteste que son Intention n'est pas d'exciter
delà Bohème, qui voyaient le clergé accroître et
étendre ehaque jour ses domaines, jusqu'à pos-
séder le tiers- on Je quart du royaume, enten-
daient sans eotere énoncer ces doctrines» qui, ra-
menant FÈgfise» son humilité et à sa pauvreté
primkiveB, tendaient à les enrichir de ses dé-
pouille*; ou tout au moins établissaient leur
droit à user des biens du clergé comme des tours
propres. C'était la contre-partie de la doctrine
de Grégoire VII ; mais si Hus attribuait à la
puissance temporelle une surveillance sur l'É-
glise et ee droit exorbitant de coercition en cas
de simonie* de prévarication et de violation quel-
conque de la loi du Christ * il ne fout pas croire
qu'il pensai à accorder la liberté de conscience
an*. î-eprésentattte de la puissance temporelle. La
liberté de conscience* et ce qjne nous entendons
par ee mot au dra^rteuvième siècle est quelque
chose de fort étranger à cette époque de foi pas-
sionnée et d'ardentes controverses (I ). Les rois et
les princes, selon JtéA Hus, sont les premiers
serviteurs de In loi de Dieu* les premiers tenus
d'y obéir. A la fin de son JraUé sur Us Dîmes,
Hus va jusqu'à poser Cette proposition : Tout
tes princes I dépouille* le clergé : * Proteste* qaod non
est InteuUonls me» necuniversttatl sifaderéquod princi-
pes vel sae cula res Domlnl auferant bona a clero quando
Yolunt et qualiter valant. » Hist. et M. J. Bus, tom. I, fol.
Ht ( recto;. Néanmoins, dans plosfeurà passages de ses
ouvrages, Hus semble appeler de ses veto* U séparation
complète du temporel et du spirituel. Les biens tempo-
rel* que pffsièdêht te pape, les cardinaux et tes évéques,
•011* selon lui fa source des vices du clergé. Qu'ils re-
tiennent à la pauvreté des apôtres. LA désordre et le
trouble de 'fcgllse cesseront : « Oa quod Romands pon-
tîfe* flihll possldeât remporaltum, ut Chrlstas et Petrus
s&tioUrrUef, sed sit pauoer, mltt* et hnmllis, sœetilarem
domina Uonem et pempam ibjlcleas, et eessabH qeassa*
tio. (Rép. aux huit docteurs, tom. I, fol. 321, recto. }
fat ailleurs : « Jamais depuis le commencement du monde
fine fut phis nécessaire qu'aujourd'hui due les prêtres
fidèles, renonçant aux biens temporels, exhortassent les
èhrétiens, par leur propre exemple, à ne pas encourir la
perte du sahit éternel par art trop grand attachement
a*x biètt temporels. Tous 1 aujourd'hui, du plus grand au
plus petit , sont dominé* par l'avarice. » ( Hist. et Mon.
J. Hus, tom. Il, fol. 81.)
(l) 11 n'est pas besoin de lire de bien près les outra-
ges dé J. Hus pour se convaincre qu'il n'admet pas fa li-
berté de conscience telle que noua l'entendons aujour-
d'hui. Il cite à plusieurs reprises le compelle intrare ; et
bien qui I avoue que personne né peut croire qne volon-
tairement. 11 approuve l'emploi de la contrainte à l'é-
gard des hérétiques manifestes ; 11 penche cependant peur
te parti de l'humanité, car il dit : Altué est compellere,
aUud exterminare vel oecidêre. Au sujet des bulles du
pape Jean XXIII contre Ladislas et ses adhérents, il
s'exprime ainsi : AHud infidèles sic torquere, altud
christianos.... iterum aU* est eausu Awn Mantfesti
hseretici leçon Dei impufnant, aliud dum propter
duos vel très discordantes et de papatu eontendenies
sibimutuo distentiunt. {Hist. et Mon. Hus, tom. 1. fol.
81$.) Transformer J. Hus en apôtre de la tolérance,
c'est, nous le répétons, commettre un étrange ana-
chronisme, et s'abuser à la fois sur l'époque et sur
l'homme , quoiqu'il sort vrai de dire que Jean Hus repu*
gne à l'emploi de l'extrême violence contre ceux qui ne
croient pas, et professe pour la vie humaine un respect
fort étranger, à ses contemporains. On lui fit en effet un
crime d'avoir dit , tom. I, fol. ftft ( verso ). qu'il ne faut
point punir de mort les hérétiques. C'est le sujet de
l'article XVI lie parmi les XXXIX qu'on lui reprocha
le 8 juin à Constance.
599 EUS
seigneur temporel, tout prélat, tout évoque, en
état dépêché mortel, n'est ni seigneur temporel,
ni prélat, ni évoque, proposition fort étrange as-
surément, et qui ne semble plus être qu'une tau-
tologie quand on a pris la peine de lire les ex-
plications dont Hu8 raccompagne. S'il faut y voir
en effet autre chose que cette affirmation fort
innocente : tout seigneur temporel , tout prélat,
tout évéque en état de péché mortel n'est ni sei-
gneur temporel, ni prélat, ni évoque selon te
vérité, selon Injustice, selon V esprit de Dieu;
si le péché mortel est une cause de déchéance
positive des fonctions civiles ou religieuses, cela
va loin , et nulle société n'est plus possible.
La Bohême était en proie à un véritable
schisme. En face du clergé catholique s'élevait un
clergé révolutionnaire qui prenait le nom de clergé
évangélique : à côté des chaires catholiques se
dressaient les chaires et les tribunes des fauteurs
de Hus. Les deux partis se renvoyaient les épithè-
tes de blasphémateurs et d'hérétiques. Les popula-
tions engagées dans cette querelle y portaient
leurs instincts habituels de violence. Hus ne son*
geait plus à apaiser les troubles et à calmer ses
partisans. «La vérité, s'écriait-il, est venue met-
tre dans le monde le glaive et non la paix. » Cha-
que jour il s'éloignait davantage des traditions
de l'Église catholique : niait la nécessité de la
confession auriculaire (1), l'efficacité de la béné-
diction des* sépultures; attaquait comme une
idolâtrie le culte des images, la croyance en la
sainte Vierge, aux saints, à l'Église, et au
pape (2) ; affirmait que nous ne pouvons dire
d'aucun pécheur qu'il est frappé de la damna-
tion éternelle (3) ; accusait les prêtres de se don-
ner pour les créateurs de leur Dieu dans le sacre-
ment de l'eucharistie (4) ; soutenait les défail-
lances des siens, réglait leur foi, éclairait leurs
doutes, et rappelait à tous, amis ou ennemis,
les devoirs sacrés du sacerdoce chrétien (5).
Cependant Stanislas et Pierre de Znoyma,
Etienne Paletz, autrefois amis de Hus et confi-
dents de ses pensées, s'étaient séparés de lui, et,
unis aux docteurs de la faculté de théologie et à
Conrad, archevêque de Prague, lui faisaient une
wve opposition. Jean XXHI avait une seconde
(1) De tribus Dubiis, Hist. et Mon.J. Hus, tom. I, fol. 16S
(verso) et 169. « Sine conffesslooe ©ri* et solutlone pccna
exterlorts delenturpeccaU per cootrttlonem et humllita-
tcm cordis. »
(l) De tribus Dubiis, Jbid., fol. les (recto). - Qusestio
de Credere, tom. I, fol. 170 ( recto ).
(S) « Denollo nos homines mortales sine revelatione et
sine Scrlptura Sacra de bemus asserere qnod aeteraallter
ait damoatus. » (De tribus Dubiis, fol. 169, recto. )
• (») Contra prstdicatoretn Plzneusem, tom. 1, fol. 14S-
1*6. Ce n'est pas que Jean Bas nie la transsabstaottatlon ;
Il soutient qu'elle n'est pas un effet des paroles du prê-
tre, qui dans ce cas serait le créateur de son Dieu ; mais
que c'est Dieu même qui fait ce miracle à l'occasion des
paroles sacramentelles que prononce celui qui officie.
(DDequinqueO/ficiisSacerdotis, tom. I, fol. 15* (recto).
Ces cinq devoirs sont : Prêcher la parole de Dieu, prier
Incessamment pour le peuple, conférer gratis les sacre-
ments, étudier les Saintes Écritures, donner un bon
exemple aux autres.
eoo
f ois cité Hus à Rome; il n'en tint nul compte :
les armes spirituelles semblaient usées contre un
pareil adversaire. Le pape invoqua l'appui de
Wenceslas, du roi de France et des universités.
Gerson écrivit à ce sujet à l'archevêque de
Prague pour stimuler son zèle ( voir l'art. Ger-
son ). « n ne reste plus, lui disait-il, en termi-
nant, qu'à mettre la cognée du bras séculier à
la racine de cet arbre infructueux et maudit.
C'est à vous à implorer ce bras par toutes sortes
de voies, et vous y êtes obligé pour le salut
des Ames confiées à vos soins (1). » Conrad ne
fut pas sourd à cet appel. Il employa d'abord les
exhortations, puis les menaces ; enfin il jeta l'in-
terdit sur la ville de Prague et sur tous tes
faux où J. Hus séjournerait. Celui-ci se retira à
Hussinetz, emportant dans sa fuite cette impa-
tiencede propagande inséparable de sa foi, et cette
insouciance du péril qui est le caractère des fortes
convictions. Sa plume n'était pas brisée. A dé-
faut de sa parole, ses écrits arrivaient à Prague.
Sur la porte de sa chapelle de Bethléem, qu'a
ne remplissait plus de sa voix, on lisait les té-
moignages de sa présence au milieu des ses dis-
ciples. Un jour c'était un opuscule sur les six
erreurs , où était résumée presque toute sa po-
lémique contre le clergé catholique (2) ; un au-
tre jour, un traité Sur Y Excommunication (3).
Dans le même temps (1413), il écrivait et faisait
lire publiquement 3on traité De l'Église , le
plus long et le plus célèbre de ses écrits dogma-
tiques. On y trouve cette définition de l'Église :
« L'Église catholique, c'est-à-dire universelle, est
l'assemblée de tous les prédestinés présents, pas-
sés et futurs. » Hus soutient qu'il n'est pas vrai
de dire que le pape soit la tête et les cardinaux
le corps de l'Église : qu'elle a été, qu'elle peut
être gouvernée sans le pape et son collège de
cardinaux ; que c'est le Christ qui est le fonde-
ment et la vraie tête de l'Église ; que c'est la
loi de Dieu, et non la volonté arbitraire de la
cour de Rome, qui doit être la règle de tous les
jugements ecclésiastiques. « Quiconque, dit
Hus, connaît avec certitude que les commande-
ments du pape sont contraires à ce qu'ordonne
Jésus-Christ ou tendent à la ruine de l'Église,
doit y résister hardiment, de crainte de par-
Ci) Gerson . ap. Cotnlee, Jlist. Hus, p. ».
(s) Opusculum de Sex Erroribus, tom. I, foLlM (venoj.
Voici quelles so-nt ces six erreurs : 1° Terreur des prêtres,
qui se vantaient de faire le corps de Jésos-Christ, dass la
messe ; 9° Terreur qui consiste & dire : Je crois au pape
Je crois aux saints, je crois en la vierge; s» l'erreur qal
consiste dans la prétention des prêtres de pouvoir remet-
tre la peine et la coulpè du péché a qui 11 leur plaît;
4 e Terreur qui consiste à croire qu'il faut obéir i ses
supérieurs quelque chose qu'ils commandent; 1° Terreur
qui consiste à s'Imaginer qu'une excommunication engage
et excommunie actuellement celui contre qui eUe est
lancée, que ce soit Justement, ou non ; S» la simonie, que
Jean Hus appelle une hérésie , et dont 11 accuse la plus
grande partie du clergé.
(») Ce traité De Excommunicatione ne se troove pas
dans les ouvrages de Jean Hus ; 11 est plusieurs fois cité
dans la Réponse de Hus aux huit docteurs. Voir Hist. H
Mon. J. Hus, fol. 30» (verso ), SU ( verso ).
G01
HtJS
602
liciperau crime par son consentement (1). » Ces
divers traités de Hus , et surtout le dernier,
scandalisèrent la faculté de théologie de Prague,
qui s'empressa de répondre par la plume d'É-
tienne Paletz et de Stanislas de Znoyma. Nous
avons trois longs écrits de Hus relatifs à cette
controverse (2). On rappelle guidamiste , on
l'accuse de se séparer delà chrétienté. «J'atteste
Dieu, dit-il, que je suis pleinement chrétien, et
que je préférerais souffrir le supplice d'une mort
cruelle plutôt que de rien affirmer de contraire
à la foi ou de transgresser les commandements
rie Jésus-Christ. J'ai la même assurance touchant
ceux qui marchent avec moi, bien que j'aie la dou-
leur de voir que tous ne sont pas irréprochables
dans leurs mœurs. » Etencore : « Nous paraîtrons
tous deux devant le tribunal du Christ, avant
que mon adversaire m'ait surpris niant un iota
de la loi du Seigneur. Est-ce donc se séparer de
la chrétienté que de reprendre la simonie, l'a-
vidité et tous les vices de la cour de Rome (3) ? »
On dit qu'il faut une autorité pour interpréter
l'Écriture ; qu'elle est muette et inanimée ; non,
l'Écriture est vivante et parle par elle-même.
C'est le juge qu'il faut interroger et non le pape
et ses cardinaux , qui souvent jugent mal par
ignorance ou par avarice. On veut le flétrir lui
et ses partisans en les nommant wycliffites. Ce
n'est pas Wycliffe qu'ils suivent, c'est V Écri-
ture et la raison (4). Les docteurs de Prague
voyaient bien quel danger il y avait pour l'ordre
reli^eux et pour l'ordre civil à laisser nier tonte
autorité indiscutable, et s'introduire ainsi l'es-
prit de contrôle et d'examen. L'objection qu'ils
adressent à Hus à ce sujet aussi bien que sa ré-
ponse, sont •remarquables. « Par son fait ( sa
réponse aux bulles du pape contre Ladislas ), il
insinue cette grave erreur que les sujets ne doi-
vent pas croire et se soumettre aux lettres pa-
tentes des papes, des empereurs, des rois, des
princes et des seigneurs, qu'autant que des rai-
(1) De Ecclesia, chap. xcc, xx, xxi, du fol. 288 an
fol. 247.
(s) M. Emile de Bonnechose, dans ton Histoire des Ré-
formateurs avant la Réforme, parle do débat de Hus avec
les docteur» de la faculté de théologie de Prague, comme
s'il avait précédé l'apparition du De Ecclesia ; et a la
fin de sa publication des lettres de J. Hus , traduites en
français, le même auteur, donnant un catalogue par or-
dre de dates, des ouvrages du célèbre hérésiarque, place le
Traité de relise avant les Réponses de Hus à Etienne
Paletz, à Stanislas et aux Huit Docteurs. C'est une er-
reur manifeste. Le De Ecclesia est cité preaqu'à cha-
que page de ces trois écrits. Hus y renvoie sans cesse
ses adversaires. De plus , quand on soit de près le détail
de cette discussion, on voit qu'elle s'engagea à la sntte
du Traité de l'Église, et que la publication de ce traité
fut ce qui la suscita .
(Sj » Spcro quod prias ambo ad tribunal Christ! stabl-
aiusanteqoam nnum iota legis Domlnl invenertt me ne-
gare. » (Hist. et Mon. i. Hus, t. I, fol. 260.)
(*) « Ego entra fateor quod sententias veras qaas
M. Joanoes Vuigief sacra? théologie professer posuit,
teneo non quia ipse dlcit, sed qnla dlcens : Scriptnra Tel
infallibills ratio dlcit. SI autem allquem errorem po-
suerit, nec Ipsum, nec queracumque alium intendo In er-
rore qaantumlibet modice seqot » {Hist. et Mon, Hus,
tom. 1, fol. 284* recto,)
sons efficaces et très-évidentes lenr auront mon-
tré manifestement que ce que contiennent ces
lettres est vrai et raisonnable. Qui pourrait dire
quel trouble une pareille erreur mettrait dans le
monde (1)? » « On veut m'effrayer, répond Hus,
en soulevant contre moi les puissances séculières ;
mais qu'on sache qn'on ne me fera pas abandonner
la cause de la vérité. Sans crainte des vaines me-
naces, les fils de Dieu, vraiment pénétrés de son
esprit, ne doivent obéir aux lettres patentes des
papes, des empereurs, des rois, des princes et
des seigneurs, qu'autant que ce qu'elles contien-
nent sera conforme à la volonté du souverain
pontife et tout-puissant roi , le Seigneur Jésus-
Christ. Que si on leur ordonne quelque chose
de contraire, ils doivent résister jusqu'à la mort.
11 allègue l'exemple des Machabées, et répond :
« Eh quoi î si le pape ou le roi donnait l'ordre de
massacrer tous les juifs qui sont dans Prague, et
fournissaient des soldats pour une pareille be-
sogne, nos docteurs obéiraient sans discussion,
sans examen, sans objection ! Et si le pape leur
ordonnait de nous tuer, ils nous tueraient, sans
doute ; mais moi j'estime qu'il faut discuter de
pareils ordres, et s'enquérir s'ils sont justes et
raisonnables (2)... Non, ce ne serait pas une er-
reur monstrueuse, et le monde ne serait pas
bouleversé, mais la vérité et la justice pousse-
raient partout de vives racines ; la paix et la con-
corde seraient florissantes si les sujets regardaient
la légitimité des ordres qu'ils reçoivent, cher-
chaient leur raison selon la loi de Dieu, et s'as-
suraient ainsi de ce qu'il faut faire rationnelle-
ment (3). » Chacun peut et doit juger ses su-
périeurs, fant séculiers que spirituels, examiner
leurs œuvres, contrôler leurs commandements.
C'est au for de la conscience de connaître des
décisions des puissants de l'Église ou du siècle.
Leur résister dans certains cas, c'est obéir à
Dieu, c'est même vraiment leur obéir à eux-
mêmes, car ils ne doivent prescrire que ce qui est
bien et juste (4).
(1) « Vutt per suum factum inducere hune gravent
errorem quod Htteris patentions paparum, imperatorum,
regum, prlnclpum et domlnoruni a subditls non creda-
tur et stetur, nlsi veritas et rationabilitas talinm littora-
rura effleacibus et evtdenUsslmts rationibns et argumen-
tis fucrit ipsis subditls ostensa manifeste. Et quis posset
astimare quantus esset hic error et quanta perturba-,
tio in toto mundo? » (Hist. et Mon. J. Hus, 1. 1, fol. 294
recto. )
(s) Ces éloquentes paroles n'ont pas besoin de commen-
taire. II est difficile de revendiquer d'un ton plus haut
les droits de rhumanlté et les droits de la raison. Ce
qui est remarquable, c'est de rencontrer en 1418 une
sorte de prédlcUon et une condamnation anticipée de la
Saint -Barthélémy et des tueries de Philippe II. ( Hist. et
Mon, Hus, tom. I, fol. 295 recto. )
(8) « Patet quod non error insestlmabllls, nec pertu-
batlo iu toto mundo, sed veritas et justitia pullulè-
rent, pax et concordia crescerent, si sobditl, solura ad
veritatem lltterarum (patenttum) aspteerent, et ratlona-
Mlitatem juxta legem Domlnl ipsarum expeterent, et sic
cognoscerentqutd foret ratlonabitlterfaciendum. »(Hist.
et Mon, 1. 1, fol. 296 recto. )
(V) Ces quelques lignes sont extraites presque littéra-
lement de la Réponse aux Huit Docteurs, fol. Ml ( verso ),
603
BUS
604
Les ouvrages que Jeta Ha» composa ensuite
jusqu'à son départ pour Constance sont moins
le fruit d'un esprit calme et logique que le triste
témoignage des colères que les contradictions et
les obstacles peuvent allumer dans les âmes les
plus maîtresses d'elles-mêmes. C'est VAnalomiQ
Membrorum Antiehristi, le De Begno, Populo,
Vita et Moribus Antiehristi, double invective
contre le pape et la cour de Rome ; fe De Sacer-
dotum et Monachorum carnolium Abominç-
tione, dont le titre indique assez le caractère.
C'est une suite de sermons ou plutôt d'explica-
tions intitulées Sermones de Antichrislo. On
trouve dans tous ces écrits la wu|H^ impétueuse,
l'emportement et la chaleur unt peu wiihonde
de Luther.
L'empereur Sigismond , qui voulait attacher aa
gloire à guérir les maux dont sou#rajt )'ÉgÙ&ç,
avait obtenu du pape Jean XXIU fccouvoiatjou
du concile de Constance. Jean fins y ftd cité, *t
Sigismond écrivit à Wenceslas ù> l'y envoyer.
Au reste, malgré de tristes pi^sssentwuents et tes
conseils de ses amis, Hus n'hésita pas. Àraot 4e
quitter Prague, il annonça son départ par des
lettres affichées aux portes des Églises £t du
palais du roi. 11 y disait que si sa doctrine éjtajt
suspecte à qui que ce fût, on le dénonçai à Con-
rad, archevêque de Prague, ou mieux au con-
cile général ; qu'il ajjait y rendre témoignagne 4e
sa doctrine et de sa loi. Ses ensemis si tureut,
et Nicolas, évoque 4e Nazareth, grand-inquisiteur
.du diocèse de Prague, attesta par ^écrÂt que per-
sonne ne s'était présenté pour l'accuser, et quant
à lui, qu'il n'avait rien trouvé dans ses ac^es qui
ne fut d'un bon catholique, et dan* ses parafes
rien qui sentit l'erreur ou l'hérésie (qi+o4 IjWê-
sim saper et vel errprew ). Conrad attesta ausfi
son innocence, touf en l'invitant à se purger 4e
l'excommunication qui pesait sur Juù; jtfpendaat
il refusa de l'admettre à une assemblée du clergé,
et Hus lit dresser procès-verbal de ee relus
d'audience (1). Vers le milieu du mois d'octobre
(1414), il partit avec un sauf-conduit du roi
Wenceslas, et reçut en chemin celui de Sigis-
mond (daté de Spire, 18 octobre), dont la teneur
nous a été conservée <2). Hus allait à cheval,
et do Traité de l'Église, <*b. «{, paxUcuUèreoaeD* «a
fol. S59 ( verso ).
(t) Uist.et Mon. J. /lut. tojte»*, toi. s { jreno ).
(1) Voici le texte de ce sanf-condult : Slgtsmondus, Del
gratta , Itomanorum rex et Hiwgjuste etjuiklverai* et sln-
Kulis prlociplbus eccle«ia*Mcta et aaequjarlbua dpeibus et
ad quos prœsente» lllers pervenerUU gratiam regtam et
onne boaam. Venerafrilea , litres , pabile* et adejea
dilecti. houorabilem magiatcuoi i. Ho», «acre Théologie
baecalaureuna et actlara wagfetrum, pcteseoUvai aetea-
sorem , de Regno Boheralse ad eonoUf am générale Ao ci-
vitale CoosUnUeuai Qe4e6raadam , ,io pcoAtno transeun-
lem. quem etiam In noatram et Saorlteperii protecUunem
reeeptaoua et tntelam , vobto •nnubw M «eatrooi cvittbet
pleno xecoaMneMamoa affecta : deaJderaDtcs qnateoms
Ipsum , com ad vos pervenaEkt, «rate ju&cipere , iavora-
biltter traetare , atoue io fcfe *aae ad ceterttatem et ae-
curltatera itineris lpslus pertinent, taon per terrain .quant
per aquam, promouvant albi velilia, et debealts ostendere
vttuttatem, nec non ipanm cnm fanant, eqoia étalas
voyageant £ petites journées, accompagné de
quelques seigneurs, Henri de Latzemboch, Sta-
nislas Duba, et son ami fidèle Jean de Ghlura.
les populations accouraient sur son passage,
pour le voir et l'entendre. Les curés e£ les ma-
gistrats des villes qu'il traversait venaient fin-
terroger, lui soumettre leurs (Joutes ou leurs ob-
jections. Les plus défiants étaient désarmés après
s'être entretenus avec Jui. « Je n'ai point en-
core rencontré d'ennemi, eçrivait-il 4e Nurem-
berg; je sois bien accueilli parfont (1). »
#us entrai Constance le 3 novembre, au
milieu 4'ua£ grande multitude avide de |e con-
naître, 4 Ât aussitôt nojifrer son arrivée au
pape, ,<pu £t le plus /ayorable accueil à ses en-
voyés. « Quaud même Jean JIus aurait tué mon
propre frère, Jjwir dit-il, j'empêcherais de tout
mon pouyoir qu'on lui 6* U moindre iojnstice
pendant le temps de sou séjour ici (2). » S'il faut
même ajouter foi ? uue lettre qui se trouve parmi
.celles de /. Hm, \e pape, après s'être entendu
avec les cardinaux, jurait suspendu son inter-
diction et la sâpten^e ^ui l'excommuniait (3).
kyqrU d'éviter toujte «au*e 4e scandale et d'é-
motiou iiapulaice, U\» e'abstiut de prononcer
deux sermons qu'il ayaat composés. L'un est
une ^f lication du symJ^le des apôtres , rautre
a pour Wj«t l'union 4 la pajx de l'JÉghae. Le
$ noveinùre, Âe comeife s'uuy^; le 1$ «loi lien
la première session. n'y fut pas question de
#us. fl vivait et pariait liment , offiqteni cjia-
Wt jour dians sa cl>aml)r«, m u»Seu de ajes |«r-
Aisans. jÉtieau* PaÂetz «t M^îel de £au*is, ses
fflnernjs, savaient de^à commencé tes hostilités.
Aes p^rds affichés dans l'ég^se et sjgpaés dn
uom ,de ce dattier, dé^wc^e^t « 1'opixiAtn
J. Hus wcoêimwtf et &mw4 4'bérésU ».
f ( Que PW*'J£? ^ v ^ 4^ je pape , /ce sont vos
.cAmpa|rjo^sx]ui agissant contre vuus. > 1^ 2S,
Pus îut arrêté, ent>rmé chez le A^anfcre fc h
mbéAjrtify puis transféré au couvent des 4mw~
cains. Jean de Chlura réclama d'abord auprès dn
pape, qui esquiva 4oute responsatÂHté dans cet
acte; puis # s'Adressa ^ l'empereur, jjui n'était
pas encore aimé à Gouatance. &i^Lsmoud, ia-
digné, écrivit à ses ambassadeurs de faire ouvrir
les portés de la prison, ef, au besoin de les briser.
On passa autre : Jean de fihaum jarotesla pu-
bliouement dans un écrit qu'il fit afficher aux
portes de toutes tes églises de Constance, swjft
xebus miia alognUs per ow>saHmme *>as»ua , portua, paa-
teia, tersaa . doinbUa, JutU41c*Mpftea et aloe xiua aoUttiaae
icibutt , AelcMaH ant *1io ej^ovU solutiooia cuaece , oaaaieae
4»rorsoj taprattmnHo jyaaoto, U^paite , ajtate . «orarl et
redire libère permlttatis, sibique et aois, evaa oppa iacrtt,
ée aeeoro A *«Uo veati.H et debeaiia puniâert caoâuctu
aé honortm et wwûMQtlaw ^oatrat HaJ. Jùaê^m Spkat ,
anno Dom. 1M4, die oûtçiwU tt. (Mis*. H Mo*- Bm,
top. 1, 4oi. A.)
(1) iJÈire écrite 4tMu tm *ÊÊn§ aux ^déU$é»Pmm^
UiU. et Mon. J. Hm, tom. 1, fol. S7 (weo ) et M (recto).
(2) Stompb, p. 18, cité par tentant, Hiat. 4m iUmcUe
deCanst., tome I, p.pt.
;8) Lettre de /oap, curé de Unowitz, mmx fidèles de
Prague. Hist. et Mon, J. Mus, tom. J, fol. M (recto;.
605
HUS
«40
la violai*» «te swf-coiHiint et le mépris des or-
dres /formels de l'empereur (1). Qu'allai! (aire
Sigisjaotyd? La Pohéme s'agitait à la nouvelle de
l'emprisonnement 4e Hus ; à peine entré à Cons-
tance ( 25 décembre ), 1'eiaapereuF avait reçu une
lettre des barons de Bohème qui le suppliaient de
rendre Hus à la liberté. « Tout notre espoir, di-
sajeBi<-ils,esi, après Dieu , dans Votre Majesté. »
Ils lui écrivirent une seconde fois, invoquant
av«c force le droit des gens et rinriolafeiliiéde
la parole impériale (2).
Cette seconde lettre arrivait trop tard ; quel-
ques jours auparavant l'empereur s'était laissé
persuader de lever l'obstacle que le sauf-conduit
semblait devoir apporter à la liberté d'action 4n
concile. On lui avait démontré par de longs dis-
cours qu'il était dispensé de garder sa foi à un
homme accusé d'hérésie, et, bien plus, qp'jji
n'était pas en droit de couvrir de sa protection
un pareil homme. Toutefois, Sjgismond ne céda
pas sans résistance. Une lettre qu'il écrivait aux
Bohémiens en 1417 témoigne des efforts qu'il
fit : « Si Hua, dit-il, ne ftt entré qu'avec moi, a
Constance, peut-éfa* que ses affaires auraient
pris un antre Jour. Dieu sait , et je ne puis l'ex-
primer, combien j'ai été affligé de son malheur,
et tous ceux de Bohème qui .étaient alors auprès
de moi ont bien vu quels mouvements je jne
suis donnés pour cette affaire, et que plusieurs
fois je suis sorti du concile en furenr. J'avais
même quitté Constance lorsque les pères du con-
cile me tirent due que si je ne voulais pas per-
mettre que le concile exerçât la justice, Us n'a-
vaient que faire à Constance ; .de sorte que je $ris
la résolution de ne plus me mêler de cette af-
faire , parce que si j'eusse voulu m'intéresser
davantage pour Jean Sus le concile eût été en-
tièrement dissous (3). » Ce n'est pas le lieu de
disputer ici sur la valeur de cette espèce déraison
d'État que Sigismond semble alléguer pour pal-
lier une atteinte manifeste à la justice. Le pas-
sage que nous ^citons prouve simplement que
près de deux ans apsfe» h mor£ de fius la cons-
cience de l'empereur n'était pasin repos an sujet
4e la violation du .sa,u/-con4uiJ, (4).
(i) Hist. et JHm. I. fiut, Hem. Mqi. » ( wrao ).
C*) Voici un passage de cette lettre : « Cum Joannes
H us eonfisus Regiœ (use Majestatis litteris ad Constan-
tiem profectos esse*, queroadHKriom ex constant! faroa
acceptas, capftus ml Mm *i* JlteflM public* Adei,
neque hoc tantôt *ed in carperera conjeçtus, neque au-
ditus, neque convtetus contra leges et tuœ Regiœ Ma-
jestatis iitteras. Qood factum «t apnd «os et alibi eo
modo innotuH ut et principe» et barones , paupere* et
divltes mirai! siat sanctissimum illum Patrera ( le pape
Jean XX III) tam turplter contra legara auctoritatem ,
constitatlonem , vcritatem, et contra Iitteras Regiœ tuœ
Majestatis peecare potuisse , «mesertlm com homincni
Justum et InoQcentem sine causa conjecit in carcerem. »
Hist et Mon. J. Hus, tora. I, fol. 76. Par quatre fols le
droit des gens et le sauf-conduit impérial sont invoqués
dans ces quelques lignes.
(S) Hist. de la Guerre des H m sites, Jean Cochlée, liv. LV,
cité par Lenfant, Hist. du Concil. de Const, tora. I, p% 88.
(4) La question de savoir si le sauf-conduit donpé par
Sigismond à Jean Uns, et qu'il reçut quelques jqurs après
i Les ennemis de Hus ne s'étaienj pas Jbornés
j à de vagues imputations. Quelques jours après
| son emprisonnement, Michel de Causis avait
dressé un acte d'accusation en huit articles,
qu'il avait présenté au pape, et qu'il faisait suivre
de récriminations envenimées contre la conduite
que Hus avait tenue en Bohème. Jean XXIII
nomma trois commissaires pour faire une en-
quête , rechercher et entendre des témoins,' et
interroger le prévenu. Hus était malade dans sa
i prison : il demanda un avocat pour détendre sa
cause ; on le lui refusa , sous prétexte que le droit
canon ne permettait a personne de prendre le
parti d'un hérétique. Une commission, composée
son départ de ¥rag<ie, fat violé, a été bien souvent con-
troversée, et décidée diversement par les éciiradns pro-
testants et catholiques. Jean Hus, se rendant ù J<* citation
du concile, acceptait sans doute et reconnaissait sa, ju-
ridiction ; mais 41 y BHait librement, il devait être «-
bremeot entendu. CLeqiaqquoAs me le sauf aoiulfttt «Le
l'empereur était sans condition. Or ce sauf-conduit était
nn mensonge s'il ne devait pas garantir Hus de toute
contrainte , de toute violence , de toute atteinte à sa li-
berté, pon-seniement aar la route de Prague & Constance,
canine ou l'accorde , mats pendant son séjour daps cette
ville. Cependant qu'arrive-t-ll? Le lendemain do son ar-
rivée k Constance, Hus fait prévenir le pape, qui pro-
teste ne lot vouloir aucun nal«t r*lnvtte seulement A ne
pas prêcher : U obéit et demeure enfermé pendant trois
semaines dans sa chambre. Le 88 novembre il comparait
devant les cardinaux réunis en conciliabule : Il est inter-
rogé , et satisfait a leurs questions , et le jour jnême les
manœuvres de ses ennemis le font arrêter. JI est Jeté
en prison dans on lieu infect, séparé de ses amis, privé
de tout moyen de défense. N'est-ce pas la «ne violation
manifeste du saof-conduit de Sigismond , et n'a-t-m
pas le droit de dire qu'en fait les .cardinaux ne JLinrent
nul compte de l'invitation expresse que l'empereur
adressait aux princes ecclésiastiques et séculiers et dé-
chirèrent l'acte protecteur sons la foi duquel Jean ttus
avait quitté Prague? - Maintenant le concile pouvait-41
annuler les effets du sauf-conduit Impérial comme at-
tentatoire à la dignité et au salut de l'Église? C'est une
question .de métaphysique canonique. Heus n'ayons pft-s
à la traiter Ici. Antre chose peut-être est le droit na-
turel, autre chose le droit canon. Observons seule-
ment que le concile lui-même n'était pas très-assuré de
son droit, poisque après coup, et comme pour combier
une lacune de la jurisprudence ecclésiastique, JI dé-
créta à la fin de septembre 1415, c'est-à-dire plus
de deux mois après la mort de Hus, « que nul sauf-
condnit ne pouvait prévaloir contre 4a fol catholique » ,
et, revenant snr l'affaire de Jean {lus, et afin de ré-
pondre aux accusations de perfidie et de mauvaise foi
lancées contre l'empereur, qui avait , disait-on , sacrifié
Hus, an mépris de sa parole, ce qu'un pareil ennemi de
l'Église était indigne de recevoir un sauf-conduit quel-
conque, et que, selon le droit naturel, divin et humain, on
Ae devait Iqi tenir aucune parole au préjudice de la fol
catholique». Doctrine <qui rendait tout .sauf-conduit ajb-
solnmeni illusoire. En fait, le ?8 novembre, flus n'était .ni
jugé ni condamné : pour que Ifqmpqisonnement lût |è-
£Ul»e, pépie selon la doctrine du concile, ±1 eût fallu
qu'il suivit et non qu'il précédât l'instruction. Déclaré
hérétique, après un examen régulier et un' débat con-
•feçadictpire , j* usage «tait qu'il fût livré au bras séculier.
A -plusieurs reprises, Hus avait déclaré qu'il acceptai* Je
jugement du concile, quitte à en .appeler a>u juge su-
prême et infaillible. 11 Jouait donc sa tête •• M la perdit à
ce Jeu terrible. Sigismond laissa faire, moins par perfidie
que par scrupule religieux. En quittant Prague Hus nes-
jûéralt guère y revenir. S'il eût été livré au clergé catho-
lique de la Bohême , comme lui-même l'eût trouvé juste
( lettre 84 ), il n'eût pas été mieux traité , à moins que le
roi et ses disciples ne l'eussent arraché des mains de ses
ennemis les plus acharnés.
607
de cardinaux et de docteurs, dot examiner 8a doc-
trine. Etienne Paletz en faisait partie. On ne se
fit aucun scrupule de saisir les lettres qu'il écri-
vait à ses amis. Hus avait fort à faire à répondre
à toutes les allégations qu'on élevait contre lui.
Cependant il trouvait le temps d'écrire plusieurs
traités, qu'il adressait à ses gardiens, dont il avait
su capter la bienveillance, et qu'il faisait passer
en Bohême par leur entremise (1). Il comptait
sur l'empereur, et ne cessait de réclamer une
audience publique. « Voyez Sa Majesté, écrit-il
à Jean de Chlum, suppliez-la qu'elle me délivre
de mes fers , afin que je puisse disposer de moi-
même et venir à l'audience publique (2). » Et
dans une autre lettre au même : « Je m'étonne
que l'empereur m'ait oublié et ne me fasse rien
dire. Peut-être serai-je condamné avant de lui
avoir dit aucune parole ; c'est à lui de voir s'il
est de son honneur d'agir ainsi.... Que ne puis-
je lui parler une fois avant d'être condamné, car
je suis venu ici d'après son désir et avec la pro-
messe qu'il me serait permis de retourner sain
et sauf en Bohême (3). » 11 semblait que le procès
de Hus dût se terminer à huis clos (4). Sigis-
mond n'osait intervenir avec énergie, et la sup-
plique que Hus avait fait remettre au concile
pour être admis à répondre publiquement à ses
accusateurs restait sans réponse. Les interro-
gatoires se succédaient. Les docteurs de l'uni-
versité de 1 Paris, et Gerson à leur tête, arrivés
à Constance en février 1415, s'étaient ouverte-
mentdéclarés contre lui. L'évasion de Jean XXIII
( 20 mars) fit resserrer la captivité de Hus. Il
fut remis aux mains de l'évêque de Constance et
transféré par ses ordres dans la forteresse de
Gotleben sur le Rhin, où il demeura enchaîné
nuit et jour. Est-ii vrai que Jean Hus ait essayé
de prendre la fuite , et faut-il attribuer à cette
tentative l'excès de rigueur du concile (5) ? On ne
le saurait affirmer avec vraisemblance, surtout
en présence du silence des actes ; car on n'au-
rait pas manqué de tirer parti d'un semblable
événement. Il est probable que Reichental, qui
raconte cette histoire, a confondu Hus et son dis-
ciple Jérôme de Prague.
La fuite du pape , les embarras et les affaires
qu'elle suscita ajournèrent quelque temps le»
(i) De Matrimonio; — De Mandatis Domini et De
Oratione Dominica; - De Peccato mortali; — De Co-
ynitUme et Pilectione Dei; — De Tribu* Hottibus Ae-
minis et Septem PeccaUs mortalibus ; — De Pœnitentia ;
— De Coma Domini , etc.
(1) Hist. et Mon. /. Hus, epist. LUI, tom. I, fol. 7*(verso).
(8) Ibid epist. L1V, tom. I, fol. 7* ( rerso ).
(4) Volet à ce propos comment Bus s'exprime dans une
lettre à son ami Jean de Chlum : « Plutôt que (Titre ainsi
méchamment étouffé par tux. Je préfère que mon corps
soit consumé par le feu » ; et encore quelques lignes plus
bas : « Obi que nesuts-Je conduit au bûober plutôt que
d'être ainsi perfidement étouffé ; * Epist. xXXV, fol. 69.
(5) Lire sur ce point la discussion de J. Lenfant, His-
toire du Concile de Constance , tom. I, p. 88 et sulv. —
Le silence de plusieurs auteurs contemporains, CEneas
Sylvlus, Ni cm, Vrie, Léonard Arétin, Jacques Plcolo-
mint, est bien fort contre Tunique l<*inoign:ige de Het-
Cbental.
DUS 603
procès de Hus. Le 4 mai, dans sa huitième ses-
sion, le concile condamna solennellement la doc-
trine de Wycliffe, ramenée à quarante-cinq
chefs d'accusation, et résumée d'autre part
en deux cent soixante articles. L'homme était
mort depuis plus de trente ans ; on se contenta
de maudire sa mémoire et d'ordonner que ses
os fussent déterrés et jetés à la voirie. C'était
un prélude naturel à la condamnation de Hus,
qui avait soutenu par la plume et la parole quel-
ques-uns des articles déclarés scandaleux et hé-
rétiques.
Les lettres que Hus faisait passer en Bohême
tenaient éveillées les sympathies qu'on avait déjà
manifestées pour lui. Jérôme de Prague, son
disciple, malgré ses avertissements, s'était mis
en route pour aller défendre son maître ; mais
n'obtenant pas de sauf-conduit de l'empereur,
et se défiant de celui que le concile lui avait
proposé, et qui n'était autre chose qu'une citation,
il était reparti pour la Bohême, avait été arrêté
en chemin (25 avril ), ramené à Constance chargé
de chaînes et mis en prison. Vers le milieu do mots
de mai, les seigneurs de Bohême présentèrent
successivement deux mémoires au concile. Ils
protestaient de l'orthodoxie de Jean Hus, se plai-
gnaient des calomnies que ses ennemis employaient
pour le perdre, et offraient telle caution qu'on
voudrait pour son élargissement On leur ré-
pondit qu'il serait entendit le 5 juin, et que
l'examen auquel on le soumettrait ferait foi de
son orthodoxie prétendue et éclaircirait la na-
ture des accusations portées contre lui. U était
difficile d'enlever à Hus la satisfaction qu'il de-
mandait depuis si longtemps d'être entendu pu-
bliquement. Ses ennemis semblaient redouter le
grand jour de la discussion : « Qu'une audience
me soit accordée , avait-il écrit, afin que je ré-
ponde aux arguments par lesquels ils attaquent
les articles de mes traités : beaucoup de ceux
qui crient se tairaient. Mais que la volonté du
ciel soit faite (1) ». Aux nombreux articles que
les commissaires lui présentaient dans sa prison,
il avait constamment répondu « qu'il se soumet-
trait à la volonté du concile ». Il n'entendait
pas se soumettre aveuglément; mais , comme il
s'en expliquait à ses amis, il était prêt à se ré-
tracter quand on lui aurait montré qu'il avait
écrit, enseigné ou répandu quelque chose de con-
traire à la vérité (2). Michel de Causis et Paletx
essayèrent encore le 5 juin d'empêcher l'audience
publique ; mais l'empereur l'exigea, et Hus, trans-
féré le jour même de sa prison de Gotleben au
couvent des Franciscains, fat introduit. On roi
présenta ses ouvrages; il les reconnut On com-
mença la lecture des articles incriminés. Le pre-
mier article lu, avec les témoignages qui rac-
compagnaient, Hus se préparait à répondre,
lorsque des cris partis de tous cotés étouffèrent
sa voix. « Ils vociféraient tous, écrit-il, comme
(t) Hist. et Mon. J. Hus, epist. XXXVI, ton. I; fol. ».
(s) lbid., epist. XV, tom. I, fol. 61 (recto).
G09
HUS
610
les Juifs contre Jésus-Christ (1). » Toutes les
fois qu'un insUntdesilencelui permettait d'ouvrir
la bouche, il invoquait les Écritures et les témoi-
gnages des saints Pères ; et les membres du concile
se récriaient, disant : « Cela ne fait rien à la ques-
tion ». Et puis les uns lui lançaient des injures,
d'autres des sarcasmes* Vaincu par ces clameurs ,
il se tut, et ses ennemis, croyant avoir triomphé,
disaient : « Il se tait, il se tait : c'est un signe qu'il
se reconnaît coupable ». Enfin le tumulte et la
confusion furent tels que les plus modérés dé-
cidèrent de remettre l'audience au surlendemain.
Ce jour là ( 7 juin ) l'empereur était présent à
la séance. On accusa Hus dé soutenir qu'après
la consécration le pain matériel demeurait dans
le sacrement de l'Eucharistie. Il le nia formelle-
ment. D'Ailly, cardinal de Cambrai, mit la discus-
sion sur le sujet des universaux et essaya vai-
nement de l'embarrasser par un dilemme. Un
docteur anglais déclara que la question des uni-
versaux était étrangère au débat , et que l'opinion
de Hus sur la transsubstantiation était ortho-
doxe. On l'accusa d'avoir traité saint Grégoire
de bouffon : il le nia avec énergie. Le cardinal
de Florence lui opposa le grand nombre des té-
moins qui avaient déposé contre lui. « Quand ils
seraient beaucoup plus nombreux encore, dit
Hus, j'estime à un plus haut prix le témoignage
de ma conscience et de mon Dieu que les juge-
ments de mes adversaires. » — On l'accusa d'a-
voir défendu et enseigné en Bohème les articles
condamnés de Wyclifle ; il répondit qu'il n'avait
enseigné les erreurs de Wyclifle ni d'aucun autre ;
que, quand ces ouvrages avaient été condamnés
par Sbynko, il s'était fait un cas de conscience
d'adhérer à une condamnation aussi générale,
et à laquelle refusait de souscrire l'université de
Prague presque tout entière. Onl'accusa d'en avoir
appelé du pape à Jésus-Christ; il répondit qu'il
n'y avait pas d'appel plus efficace et plus légi-
time, le Christ étant le juge suprême et infail-
lible. On l'accusa d'avoir prêché la violence et
mis le fer à la main des populations pour la dé-
fense de sa doctrine ; il répondit qu'on avait faussé
sa pensée, qu'il n'avait parlé que du glaive spi-
rituel, qui est la parole de Dieu. On l'accusa
d'avoir divisé le clergé, brouillé l'université, et
obligé les Allemands à quitter Prague. Il se jus-
tifia. II quittait la salle; le cardinal de Cambrai
le retint , l'accusant d'avoir dit que s'il n'avait
pas voulu lui-même venir à Constance, ni le roi
de Bohême ni l'empereur n'auraient pu l'y
forcer : il l'avoua, attestant la puissante protec-
tion des seigneurs de la Bohême. Allors d'Ailly,
changeant de visage : « Voyez, dit-il , l'impu-
dence de cet homme. » Un murmure s'éleva.
Jean de Chlum, qui était présent, affirma que
Hus avait dit vrai. « Moi seul, si chétif en
comparaison des autres, dit-il, je pourrais le
défendre une année entière contre toutes les
(i) BUt. et Mon. J. iftu,epiat. XXXVI, 1. 1, fol. 6» (recto).
HOUV. BIOGR. GÉXÉR. — T. XXV.
forces de ces deux rois. » C'en est assez, dit
d'Ailly; et il engagea Hus à se soumettre à la
décision du concile, comme il l'avait promis
dans sa prison. Sigismond ajouta quelques pa-
roles dans le même sens, promettant à Hus ses
bons offices s'il se soumettait, et le menaçant,
s'il s'y refusait , de l'abandonner à la justice du
concile. « Jamais , dit-il, je ne soutiendrai tes
erreurs et ton obstination : bien plus, j'allume-
rais le feu de mes propres mains plutôt que de to-
lérer plus longtemps le coupable entêtement que
ta as montré jusqu'ici. » Ensuite Hus fut em-
mené hors de la salle.
Le lendemain il comparut de nouveau. On lui
lut trente-neuf articles qu'on disait tirés de ses
écrits et qu'on lui avait pour la plupart déjà pré-
sentés dans sa prison. Il répondit, comme il avait
déjà fait, reconnut les uns, expliqua les autres, en
désavoua plusieurs comme lui étant faussement
imputés. De ces trente-neuf articles, vingt-six
étaient extraits plus ou moins fidèlement de son
traité De l'Église, sept de sa réponse à Etienne
Paletz et six de sa réponse à Stanislas de Znoyma.
Ils portaient sur la définition qu'il avait donnée
de l'Église, sur la prédestination, l'institution
et l'autorité des papes, l'obéissance ecclésias-
tique, l'excommunication, l'interdit, les censures
de l'Église, l'indignité des prélats de tout ordre
en état de péché mortel (1). Après la lecture de
ces articles et la discussion qui s'engagea sur
chacun d'eux , le cardinal de Cambrai invita Hus
à se soumettre, lui promettant qu'en considé-
ration de Fempereur et du roi de Bohême , le
concile le traiterait avec douceur. Il devait en pre-
mier lieu confesser qu'il avait erré en soutenant les
articles qui avaient été allégués, et en demander
pardon; deuxièmement promettre avec serment
de ne les plus enseigner et de ne les plus tenir;
troisièmement, les rétracter tous en public. Hus
répondit qu'il ne pouvait abjurer les erreurs
qu'on lui attribuait faussement ; que pour les ar-
ticles qu'il avouait, il attendait pour les rétracter
qu'on lui montrât qu'il s'était trompé, et qu'on
lui enseignât quelque chose de meilleur. Sigis-
mond joignit ses sollicitations à celles de d'Ailly
et de plusieurs cardinaux ; mais ni ses instances
ni ses menaces ne purent ébranler la résolution
de Hus. Il recommanda sa cause à Dieu, et fut
reconduit en prison , exténué de corps et d'es-
prit. « S'il ne se rétracte, dit l'empereur quand
il fut sorti/mon sentiment est qu'il soit puni
du supplice du feu ( nisi igitur recantet Ma
omnia, ego censeo ut ignis supplicio affi-
ciatur ) ». Le 9 juin, on présenta à Hus un for-
ci) HUt. et Mon. J. Bu$ , tome I, fol. 18 et soir. Il y a
douze articles qui portent sur ce point. Plusieurs des ou-
▼rages de Hus avaient échappé aux investigations des
commissaires do concile. Hus semblait redouter qu'Us ne
tombassent entre leurs malnst et recommandait A ses
amis de les tenir cachés. « Je suis charmé, écrit-il
( epist. XXVII >, qui mon traité Contré un Adversaire
inconnu n'ait point été découvert non plus que quelques
autres. »
20
611
HUS
612
mulairede rétractation; ilne voulut pas l'accepter.
Vainement on vint dans sa prison pour l'engager
à plier devant Farret du concile. Il fol inftexinis.
« Ma dernière et ferme volonté , écrit-il le 21 jnm
à ses «mis, est que je refused'avouerpour erronés
les articles qui ont été véritablement extraite de
mes oeuvres, et que je refuse d'abjurer ceux qui
m'ont été attribués par de faux témoins (t) ».
Tentes les lettres qu'il écrivit dans ce» jours
suprêmes témoignent do calme iflSTéokfe de cette
âme, qui dans ses dernières épreuves avait dé-
pouillé tout ressentiment. Elfes sont enmralnftfs
d'une douceur et d'une onction vraiment évan-
gétiques (2). Le 24 jaln le concile condamna ses
livres au feu. Cette sentence, qui frappan Bradais
sa foi, tendant à effacer dé monde sa doctrine et
à mettre à néant ce qu'il croyait avoir laissé d'im-
périssable, réveilla un instant cette âme attière,
que la lutte , la prison et la maladie n'avaient pu
épuiser, et lui arracha nn dernier cri plein d'a-
mertume. « Mes chers amis, écrivit-il, à cette
occasion, à ses idéfe»* ne vous laissez pas
ébranler par l'arrêt de ceux qm ont condamné
mes livres au feu : souvenez-vous que les
Israélites ont brûlé les écrits dn prophète Jéré-
mie, sans cependant éviter le sort qui! leur avait
prédit.... J'ai cette confiance en Dieu que cette
école de l'Antéchrist vous redoutera un jour et
vous laissera en repos. Le concile de Constance
n'ira point en Bohême , et beaucoup de ceux qui
en font partie mourront avant d'avoir pu vous
arracher mes livres d'entre les mains. Et quand,
au sortir du concile, ils seront dispersés dans
le monde comme des cigogne» , ils connaîtront
à l'approche de l'hiver ce qu'ils auront fait en
été. Considérez qu'ils ont jugé digne de mort le
pape, leur chef, pour plusieurs crimes horribles.
Eh bien, répondez à cela, vous antres prédica-
teurs qui prêchez que le pape est Dieu sur la
terre; qu'il peut vénère à tort et à travers les
choses sacrées , eommef le disent les canonistes
(jurisperiti ) ; qu'il est la tête de toute la sainte
Église, qu'il l'administre saintement; qnil est le
cœur de l'Église et qu'il la vivtàe spirituellement;
qu'il est la source d'où émanent tente vertu et
toute bonté ;qtfil est le soleil delà sainte Église;
qu'il est le refuge le plus assuré où tout chré-
tien doit trouver un asile. VoHà cette tête tran- c
chée par le glaive, ce dieu terrestre enchaîné, ses
péchés mis au grand jour; voilà que cette source
est desséchée, ce soleil obscurci, ce cœur arra-
ché et jeté par terre... fte concile a ««damné
son ehef pour avoir vendu des indulgences, des
évêchés et d'antres chose» de lu même espèce.
Mais parmi ceux même dont la sentence l'a
condamné il en était plosieuts. qui les avalent
CD ma. et Mon. S. AW, epiat. XX, ton*. I, fol. Si
(recto).
<» Voir en parttctMef le* lettre» Xvrffc XXI, XXII et
XXX. Le calme d'une Une maîtresse d'elle-même, rési-
gnée, et crai porte sans aigreur et pretflue sans impatience
Tinjustke q«i l'aeoable, respire dansies dernières pages
sorties de la plume de flus.
achetées de loi, et en avaient bit à leur tour
trafic et marchandise:... Vendeurs, acheteurs
et entremetteurs de pareils contrats, soyez eon-
damnés, comme saint Pierre a condamné SisaM,
qui voulait acheter de lui la verts du Saint-
£eerit!... Ils est dît aeathème an vendeur, ik
Font condamné; eux \m acheteurs, eus. les
entremetteurs, us demeurent împunisU. Ah !
si Dieu leur avaft dit daiis ce contrites
da voua qui est sans péché prononce la sentence
contre le pape Jean , sans doute as seraient sortis
Funaprès Fautre. Pourquoi donc, avant sa choie,
MfftÉsstBemfciisie» genoux devant kriPPourquoi
baawient-ite ses pieds? Pourquoi le nommaient-
ils tressant ktrsqiriU le savaient être on hé-
rétique, un homicide, an pécheur endurci? car
c'est ainsi qu'ils pariaient déjà de lui en pu-
blic. Pourquoi tes cardinaux l'ont-ils fait pape,
lorsqu'ils savaient qu'il avait fait périr le trèa^amt
père (Alexandre Y); et depuis qu'il est pape,
pourquoi ont-ils souffert qu'il trafiquât des
choses saintes? He forment-ils pas son conseil
pour l'avertir de ce qui est juste, et ne sont4ts
pas aussi coupables que lui de ces crimes? Pour-
quoi personne n'a-t-il osé lai résister avant sa
fuite de Constance ? Ils le craignaient tous alors
comme leur père très-saint. Mais lorsque avec
la permission de Dieu le pouvoir séculier s'est
emparé de lui, alors ils ont conspiré, il* ont
tramé sa mort.... Oh ! combien je voudrais noav
voir dévoiler tontes les iniquités que je cannais,
afin que les fidèles serviteurs de Dieu se tmnaont
en garde contre elles. Mais j'espère que Dieu
enverra après moi des champions plus ▼igon-
« J'écris cette lettre le jour de Samft-Jean-»
Baptiste en prison et dans les chaînes, et je
songe que saint Jean fut décapité dans sa prison
pour la parole de Dieu (1). »
Le ton de cette lettre et les récriminations
dont elle est pleine disaient assez que Hua ne
pensait pas à se rétracter.
En effet ce fut en vain que des députations dn
concile et de l'empereur essayèrent de l'amener
à une rétractation. « Je donnerais par là, di-
sahVit, un grand scandale au peuple de Dieu qui
a écouté mes prédications, et il vaudrait mieux
qu'une meule de moaKn fat attachée à mon cou,
et que je fusse jeté an fond de ta mer. »
Le a juillet Hus fut amené an concile ( t &' ses-
sion) pour la dernière fiais. Jamais r maoma h i a t
n'avait été pins nombreuse. L'évêqne de Leiî
fit un sermon sur ces paroles de saint Paul:
afin que U corps eu péché toti détruit. On
donna lecture de trente nouveaux articles, Mas
ne pot obtenir de répondre sur chacun d'onx ni
particulier : on lut ensuite deux sentences, l'une
qui condamnait ses livres au feu, l'autre qui le
déclarait hérétique opiniâtre et mconiejble» * •*
condamnait a la dégradation ecclésiastique. Mas
61S
HUS
614
à geaaum m& (nasaié de protester et d'en appeler
à Die», qu'il priât en même temps de pardonner
à te» aocusateursat à aea juges. On procéda alors
à la dégradation : il fort revêtu de ton» les orne-
mente sacerdotaux, puis successivement dépooillé
de chacun d'eux avec de» paroleade malédiction^
Si loi, répandait à cesnuuédiotiuns en rappelant
les outrage* que le Cariât avait endurés dans sa
p jM É on . Le rasoir effaça sdr sa tête le» marque»
de la tonsure. On 1* coiffa ensuite d'une mitre
de papier sur laquelle étaient pemtes des figure»
de diable, et écrit ea grosses lettres, le mot héré-
siarque. Bai cet état, les prélats dévouèrent son
âme aux démon» de l'enfer, la déclarèrent laïqae
et le Kt iei ea * an bras séculier. Il marcha au
suppliée environné de soldats et d'une nmltitado
de peuple qui courait à son bûcher comme à un
spectacle. Il sourit en voyant brûler ses livre* an
pataia éfmcofaL Un poteau avait été dretsé dans
une prairie attenant au» faubourgs de la ville,
Hns y fut attaché, et te bote rot accumulé autour
de lui. L'électeur peJatia l'invite encore nue fois à
abjurer. Hua répan dit « qu'il signait avee joie de
sou sang- tact ce qu'Haïrait écrit et enseigné, ne
l'ayant fait que pour arracher les âmes d'entre
les mains de» démena et lea délivrer de la tyran-
nie àù péché ». On mit alers le feu au bûcher,
et oui put entendre du milieu des flammes la
voix de Hua, end disait s « Jeans Christ, fil» du
Dieu vivant, aie pitié de moi ». 11 fat bientôt
étouffé par nnummeet la fumée. Les bourreaux
déchirèrent lea parties de son corps que le feu
avait épargnées et les brûlèrent de nouveau ,
puis recueillirent les cendres de l'hérétique et les
jetèrent dans le Rhin.
Telle lut la fin de. celui en qui les protestants
saluent un confesseur et un martyr de la vérité,
les philosophes on défenseur des droits de la
raison, de la conscience et du libre examen,
les amis de l'humanité une victime des pas-
sions religieuse» d'une époque de fan ati s me.
Quand on lit les ouvrages de Ras on ne peut
s'empêcher de trouver que Luther, m siècle
plus tard, a moins innové qu'or* ne croit, et que
le protestantisme 1 est re tout entier dans son
principe et dan» ses doctrines fondamentale?.
A défaut des ceuvres de Uns , le» préfaces de
Luther (édrt. oV Nuremberg, 1666, en tète du
tome I 6 ') valent sur ce point toute» le» démons-
trations. L'enthousiasme q«/H y montre peur le
prédicateur de la Bohème, fthdigaatiov# qu'il
laisse éclater contre se» ennemi» disent assez
que H us fut avec WyeMfe le précurseur de m
réforme.
Ouvrage* de Bus. Les ottfvre» de Bas cem*
prennent des trahies dogmatiques* fie» ouvrages
de controverse, été polémique,, d'exégèse, (les
sermons et des lettres.
Ses Lettres forment deo* séries; il y en al
quatorze écrites é> tkt 1 a W% et efequante-sfe
éerrtes depuis son départ de Prague pour Cons-
tance jusqu'à sa mort.
Ses Sebmon» comprennent d'une part huit
sermons prêches à Prague : Conciones synodic&;
vingt-huit autres sons le titre De Antichristo
( Us n'ont pas dû êtye prêches sous cette forme ),
et deux autres que Ha» composa à Constance,
mais qu'il s'abstint de prononcer, Tau De Elu-
cidatione fiâei suée, l'autre De Pacé.'
Ses ouvrages d'exégèse sont : Historia Ges-
torum Christi ex quatuor Evangelistis in
unum collecta et secundum très annos prx-
dieationis ejus distincta; — Historia Pas-
stonis Christi, ea quatuor Evangelistis col-
lecta et schoiiis illustrata; — Essplicatio in
sept cm priera capita prunss Epis t. S. Pauli
ad Corinth.;~ Commentarii in Epis t. Apos-
toiorum canvnicas sept cm; — Enarratio
Psalm. 109-118.
Ses OUVRAGES DOGMATIQUES ET POLÉMIQUES
sont : De Ecclesia; — De Sanguine Christi
sub specU vini a laids sumendo (Jean Hus
adopta mais n'introduisît pas la communion sou*
l'espèce du vin; les Pères de Constance igno-
raient son opinion sur ce point; de là le silence
de» actes ) j— De Libris h&reticorum legendis ;
— De AbiationeBonùrum temporalium a cle-
ricis; — De Decimis; — De arguendo Clero
pro conctone? — De quinque O/ficiis Sacerdo-
lis; — Determinoti* quxstionis de omni
sanguine Christi glorijicato; — De Corpore
Christ*;— De Tribus Dubiisj ~ De Sex Er-
rerions ; ~ Quxstio de Credere; — Liber de
AnUchriêto et membrorum ejus Anatomia ;
— Liber de Megno, Populo, Vita, et Moribus
Antichristi ; — De Monaokorum et Sacerdo-
tumearnatsum Abvminaésone ; — De Corpore
Christi in saeramento altaris quod non créa-
tur neque incipiat esse; — De Adoratione
et contra imaginum adorationem; — Actus
pro Defensione libri Joannis Wycleff De Tri-
nitate; — Replica contra Anglicum J. Stokes;
— Defensio quorumdam articulorumJ. Wui-
clef; — Replicd contra occuttum Âdvcrsa-
rium; — Replica contra prxdicatorem
Plznensem; —Quœstio de Indulgentiis sive
de eruciatu papx Joannis XXIII; — Contra
Buliam pop» Joannis XXIII; — Responsio
ad ScriptaM. Stephani Paletz; — Responsio
ad Scripta M. Stanislai de Znoyma; — Re-
futatio Scripti Octo Doctorum. Outre ces ou-
vrages, l'édition de Nuremberg contient des frag-
menta divers,, tom. I, fol. 472-500.
11 y a deux éditions des œuvres complètes de
Hus. L'une est de Strasbourg eu 1525, donnée par
Q« Brunleby in-4°, avee fig. en bois ( très-rare);
l'autre est de Nuremberg 1558, et comprend
deux vol. hrfoliosou» ea titre : /. Mus et Hie~
remgmi Pragenm Historia et Monumenta.
Lea lettre» de J. Hns ont été traduites en fran-
co» par M. Emile de Beuaeebose avec la pré-
face de Luther y Pari», t846y i vol. in- 12.
B. Albé.
20.
HUS — HUSCHKE
615
rember*. J vol. lu-fol., 1BSS. - Fteory, Hist. de l'Église.
- labbe, Collection des ConciUs. - Jacques l'Enfant,
Concile de Constance, l vol. to-*°. - Us Histoires de
la Bohème, par Dubravlus , par OBneas Sjlvius , Plccolo-
mini et le Jctuite Balblnna. - Histoire de la Guerre
des Hussites par Jean Gocblee et par Theobaldus ( Thi-
bault, écrivain protesUnt ). -CoUectton du docteur Von
der Hardt, et tous les auteurs de VHistoire de VRglUe.
— M. Emile de Bonnecbose, Us Réformateurs avant
la Réformes Parti, 1 vol. In- il, MM.
bus (Adélaïde-Louise- Pauline), actrice
française, née à Rennes, le 30 mars 1734, morte
à Paris, le 18 octobre 1805. Elle débuta à la
Comédie-Française le 26 juillet 1751, par le rôle
de Zaïre. Elle fut toujours considérée comme
médiocre. Voltaire, parlant d'elle dans une lettre
à M. d'Argental, s'écrie : «Pauvres Parisiens,
vous n'avez que des Bus ! » Sa charmante figure
lui tenait lieu de talent, et pendant les vingt-sept
années qu'elle passa au théâtre elle lui dut d'y
être vue sans déplaisir. Rochon de Chabannes
Tut un des rares auteurs qui recoururent à ses
services ; il lui confia le rôle de M"* de Lisban,
dans Heureusement, et elle s'y distingua, moins
par son jeu que par l'esprit d'à-propos. Après
avoir longtemps ébloui et scandalisé tout Paris
de son faste et de ses prodigalités, cette actrice
entreprit de réformer sa conduite, et, abjurant
ses erreurs, elle épousa, le 8 octobre 1774, un
sieur Lelièvre, qui la rendit fort malheureuse.
Aussi, en septembre 1793, se hâta-t-elle d'in-
voquer le divorce. Elle s'était retirée du théâtre
en 1780, avec une pension de 1500 livres, et se
consacra tout entière à des actes de bienfaisance,
poussant môme si loin l'exercice de cette vertu,
qu'elle mourut dans un état voisin de la misère.
La mère de M Uc Hus, comédienne de cam-
pagne, est auteur d'une comédie intitulée : Plu-
tus rival de V Amour, jouée avec succès à la
Comédie-Italienne, le 2 septembre i758.
Ed. de Manne.
Correspondance de Grimm. - Id. de Foliaire. ~ De
Bachaumont, Mémoires, t. I«\ — De Mouhy, Annales
du Théâtre- Français. — Lemazurier, Galerie historique
du Théâtre-Français.
hus-desforges ( Pierre-Louis ), musicien
français, né à Toulon, en 1778, mort à Pont-le-
Voy^ le 20 janvier 1838. Élevé à La Rochelle par
Crouzet, maître de chapelle de la cathédrale, il
apprit de ce maître à jouer du violoncelle. A la
révolution, les écoles religieuses de chant furent
dispersées, et le jeune Hus-Desforges prit du
service dans la cavalerie. Il fit les campagnes de
Vendée sous Hoche et Westermann, passa à
l'armée d'Italie, et se distingua à Marengo, où
il reçut une blessure qui lui valut sa retraite et
une pension. Cette blessure retint longtemps le
jeune virtuose à l'hôpital, et c'est de là que
datent ses premières compositions. Lorsqu'il fut
guéri, il vint à Paris, où son talent fat apprécié.
En 1805, il fut appelé en Russie pour diriger
la musique du Théâtre-Impérial de Saint-Péters-
bourg. H publia successivement des œuvres im-
portantes pour son instrument, qui furent bien
accueillies, même à Paris. En 1812» la guerre dé-
610
clarée à la Russie par la France força Hus-Dea-
forges à quitter Saint-Pétersbourg. U emporta
son violoncelle, et rejoignit Tannée française;
mais en route il eut les pieds gelés. De retour
en France, il fut nommé dicectear du grand
théâtre de Bordeaux ; il y resta sept ans, compo-
sant de la musique dans ses loisirs. Revenu à
Paris, il devint chef d'orchestre du Vaudeville,
et plus tord, en 1828, du Gymnase, alors théâtre
de Madame. « Il donna quelques concerts, dit
la Biographie des Hommes du Jour, où son
talent de violoncelliste fat toujours applaudi. On
aimait le naturel et la vérité de son jeu, la grâce
et la variété de ses mélodies, et on le comparait
à Duport; si sa blessure à la main droite pa-
raissait nuire à l'énergie de l'archet, la qualité
des sons gardait sa pureté. Hus-Desforges a été
de ceux qui ont le plus contribué à populariser
ce riche instrument. » Hus-Desforges rendit un
autre service aux violoncellistes en publiant sa
Méthode pour le violoncelle, en 1828. Ensuite
il compléta cette méthode par des Exercices
pour le violoncelle y qui furent adoptés par le
Conservatoire. Forcé de donner sa démission de
sa place au Gymnase, il tomba dans une situa-
tion précaire, et accepta enfin la place de direc-
teur de l'enseignement musical à Poat-le-Voy,
où il termina sa carrière. Parmi ses productions
musicales, on remarquedes symphonies, desquin-
tettes, des concertos, des duos, des sonates, etc.,
pour le violoncelle et d'autres instruments. On
cite aussi des œuvres de chant, entre autres un
Regina cœli et une messe à grand orchestre
qui ont souvent été exécutés à réalisé Saint-
Roch. J- v -
Sarrut et Salnt-Edme, Biogr. des Hommes du Jour,
tome III, « e partie, p. i*s. - Fétte, Biogr. uni», des Mu-
siciens. — Nécrologie, dam le Moniteur, 1838, p. l».
husghke ( Emmanuel-Gottlieb), philo-
logue allemand , né à Greussen ( principauté de
Schwartebourg-Sondershausen), le8 janvier 1761,
mort le 18 février 1828. Après avoir étudié la
philologie à léna, il devint professeur de langues
anciennes à l'université de Leyde. En 1798, u
se rendit à Gœttingue, où il donna des leçons
particulières. En 1806, il fat nommé professeur
de langue et de littérature grecques et quatreans
après d'éloquence et de belles-lettres à l'unîver-
sité de Rostock, dont la bibliothèque fut aussi
plus tard confiée à ses soins. On a de lui : />«•
sertatio in qua Tibulli et Propertii qwedm
loca e grxcis/onlibus derivantur; léna, 1783,
in-4°; — Epistola ctitica in Propertiuma*
L. van Sauten; Amsterdam, 1792, in-4'; -
Analecta critiea in Philosophiam grxcm;
léna et Leipzig, 1800; — De Fabulis Arch^
chi; Altenbourg, 1803; - De Progrem^
manitatis Studiorumin Germania; Rowj
1810, in-8°; — De Inscriptione vascufi &
cris in Italia rtperti; Rostock, 1813, m-H.;
— Tibulli Elegi*, eum mimadverstomw*
Leipiig, 1319, 2 vol., in-*°; avant de doonei
617
HUSCHKE - HUSKISSON.
61*
cette excellente édition, Uuschke avait publié
dans divers programmes des remarques sur
plusieurs élégies de Tibulle; — De Cannio
Cimbro, LysidiciJilio;Roatock, 1824, in-4°;
— AnalectaLUteraria ; Leipzig, 1826, gr. in-*» ;
recueil contenant : Catulli Carmina sexpriora,
cum commentûriis Brunckhusu, Verburgii
et éditons; — M. T. Ciceronis Orationes pro
H. Tullio, cum commentants et excursioni-
bus;— Comment atio de TibulloetPropertio;
— Epistolx Virorum doctorum inédite. —
Hurschke avait travaillé pendant de longues
années à une édition de Properce, qu'il ne put
faire paraître avant sa mort. £. G.
Heue, Ferzeichnist gelcàrter Schwartiburger. —
Mlgemeine Schulzeitung (année 1828, n° 187). - Neuer
Necrolog der Teutschen (sixième année, 1. 1). — Ersch
et Gruber, Encyclopédie.
I hcschkb ( Georges-Philippe -Edouard),
jurisconsulte, historien et théologien allemand,
né à Hunden, le 26 juin 1801. H est professeur
de droit à Breslau. « M. Huschke, dit avec raison
M. Laboulaye, est un des érudits les plus ingé-
nieux de notre temps et un des hommes qui con-
naissent le mieux l'antiquité et la jurisprudence
romaine. » Il a publié, entre autres : De Pignore
nominis, ejus natura et effectu; Gœttingue,
1821, in-4°; — De Privilegiis Fecennix His-
palse senatusconsulto eoncessis; .Gœttingue,
1822, in-8°; — Studien des rômischen Rechts
(Études sur le Droit romain); Breslau, 1830,
in-8°; — Die Verfassung des Kônigs Servius
Tullius (La Constitution du roi Servius Tullius) ;
Heidelberg, 1838, in-8°: cet ouvrage, de la plus
haute importance pour l'histoire des institutions
romaines, rectifie sur beaucoup de points les opi-
nions deNiebuhr ; — Ad legem XII tabularum
de signo juncto Commentatio ; Breslau, 1839,
m-4° ; — Ueber den zur Zeit der Geburt Jesu
Christi gehaltenen Census (Sur le Recense-
ment fait lors de la naissance de Jésus-Christ ) ;
Breslau, 1840, in-8°; — Ueber dos Recht des
Nexum und dos dite rômische Schuldrecht
<Sur le Droit du nexum et sur l'ancien Droit
romain concernant les dettes); Leipzig, 1846,
m-8°; — Uber den Census und die Steuer-
verfassung derfruheren rômischen Kaiser
zeit (Sur le Census et l'état des impôts dans
les premiers temps de l'empire romain); Ber-
lin, 1847, in-8°; — Beitrœge zur Kritih des
Gains (Documents pour servir à la critique de
Gaius) ; Leipzig, 1855, in-8°. —-Huschke a aussi
publié avec des notes le document jusqu'alors
inédit : Flavii Syntrophi Instrumentum do*
nationis; Breslau, 1838, in-4°. £. G.
» Conversation*- Lewikon.
' huskisson (William) y célèbre économiste
et homme d'État anglais, né à Birch-Moreton
( comté de Worcester), lé 11 mars 1770, tué par
accident sur le chemin de fer de Liverpool , le
1 5 septembre i 830. Placé de très-bonne heure dans
une école publique, il n'avait encore que douze à
treize ans lorsqu'il fut confié aux soins d'un oncle
maternel, le docteur Gem (médecin de l'ambas-
sade anglaise à Paris), qui l'amena, ainsi que son
frère cadet, en France, où il résidait depuis 1763.
Le jeune William avait dix-neuf ans quand la
révolution éclata. L'ardeur de la jeunesse et l'en-
traînement d'un si grand spectacle le portèrent
à y prendre une certaine part. Lorsque, plus tard,
malgré la prudente hardiesse des réformes qu'il
introduisit dans le régime économique de son
pays, Huskisson eut soulevé contre lui des ini-
mitiés violentes, on lui reprocha beaucoup en
Angleterre d'avoir donné, en France, dans les
passions et les folies du jacobinisme. C'était à
tort ; jamais il ne fut affilié qu'au Club des Pa-
triotes de 89, réunion d'hommes généralement
éclairés et modérés. Ce fut là qu'il prononça, le
29 août 1790, on discours contre la création
d'assignats proposée par Mirabeau. Il produisit
une vive sensation : on s'étonna de voir sortir
de la bouche d'un si jeune homme des réflexions
pleines de prévoyance sur les dangers du, pa-
pier-monnaie. Quelques mots acerbes contre les
ennemis de la révolution terminaient cette ha-
rangue du futur ministre anglais. Mais si les
premiers triomphes de la liberté française
avaient excité son enthousiasme , les premiers
crimes excitèrent son indignation; les radicaux
comme les ultra-tories en ont eu la preuve
écrite, ce qui ne les a pas empêchés d'accuser
de palinodie un homme qui , dans Page mûr,
s'est montré, dans son pays, libéral sans exa-
gération et conservateur sans préjugés. Huskis-
son fut indiqué à.lord Gower, depuis marquis de
Stafford et alors ambassadeur en France, comme
un jeune homme plein de mérite, qui , possé-
dant le français comme sa langue maternelle
et suivant de près le mouvement des partis,
pouvait lui être utile : il devint son secrétaire
particulier, et retourna dans son pays avec l'am-
bassade , lorsque la guerre éclata en 1792. Re-
commandé par lord Gower, qui resta son ami
pour la vie, à M. Dundas, qui cherchait un chef
capable pour diriger le bureau des émigrés, il
fut choisi, et résolut dès lors de se consacrer ■
entièrement à la vie publique. Son père avait
aliéné, pour pourvoir à l'établissement des huit
enfants qu'il avait eus de ses deux mariages,
toute la partie non substituée du domaine d'Ox-
ley, William Huskisson fit dégager ce qui res-
tait des biens de la substitution, et le vendit pour
se procurer à Londres une existence en rapport
avec ses vues pour l'avenir.
Huskisson fut bientôt apprécié. Sa naissance
et sa fortune n'avaient rien d'éclatant. Cependant
il obtint cet avancement rapide que , malgré ou
plutôt à cause de sa constitution aristocratique,
l'Angleterre n'a jamais fait attendre, dans une cer-
taine limite, aux hommes décidément supérieurs.
Lié en quelque sorte à la fortune politique de
Pitt, il en suivit à peu près les phases. Passé de
Yalien-office au poste de sous-secrétaire d'État
de la guerre en 1795, il le garda jusqu'en 1801,
«f*
HUSKISSON
62#
époque de la retraite de Pitt. Ainsi que Cajuûng,
autre protégé de ce ministre, il voulut sortir avec
lui du gouvernement. Lors du second ministère
de Pitt, Huskisson devint l'un des deux secré-
taires de la trésorerie. Après sa mort, eu jan-
vier 1806, A sortit de nouveau de l'administra-
lion, pour y rentrer avec te due de Portlaad ,
en avril 1*07. En 1609, Canning «'étant retiré
par suite d'une mésinteiligenee avec lord Castle-
reagh < voy. Lomdow>bbrt), Huskisson crut de-
voir le suivre. En 1814, Canning ayant accepté
l'ambassade de Lisbonne, Huskisson revint aux
affaires , comme administrateur en chef des Fo-
rets , et membre du conseil privé. En 1822, s'é-
tant trouvé lui-même en opposition avec lord
Londenderry, H avait offert sa démission de
commissaire des Forêts, qui n'avait point été ac-
ceptée. Enfin, en janvier 18*3, après la mort de
tord Londonderry et son remplacement par Can-
ning, Huskisson parvint au poste de président
du bureau de commerce et 4e trésorier de la
«narine ; mais oe ne fut qu'au commencement de
l'automne de cette année qu'il eut entrée au ea-
irinet.
Depuis longtemps il siégeait au parlement', et
sa réputation de financier et d'administrateur y
était faite* Dès 1796, le bourg de Morpeth, sous
le patronage de lord Carliste, lui en avait ouvert
les portes. Depuis, il avait échoué à Douvres;
jnait, élu plus tard A Lisiceard, ensuite à Har-
*rfch, il représentait depuis 1812 les électeurs
indépendants de Chiehester, dont le suffrage ne
l'abandonna jamais, jusqu'au moment où Can-
ning le força d'accepter à sa place le glorieux
fardeau de la représentation de Liverpooi , qu'il
portait encore lors de l'événement fatal qui mit
.fin à sa vie. Ses débuts parlementaires avaient
été sans solennité et sans éclat. Harareflement
modeste, exempt de passions politiques, un peu
sceptique peut-être quant au* objets de l'ardente
polémique des partis (comme il arrive aux gens
calmes et qui ont beaucoup réfléchi), Huskisson
n'était point homme à parier pour le plaisir de
parler. L'hésitation , dont sa conduite publique
était plus d'une fois empreinte, et qu'on re-
trouvait dans ses habitudes physiques, où elle
lut la cause de sa fin déplorable, annonçait trop
de défiance de loi- même pour qu'on dût s'attendre
à lui voir aborder la carrière politique par un
de ces discours à fleurs de rhétorique, comme
ces jeunes gens qui espèrent continuer au parle*
ment leurs succès d'université. I| fallait qu'il se
sentit soutenu par l'éloquence des faits pour
demander la parole. Lié avec Canning dès l'ori-
gine de leur vie publique, on a supposé que,
laissant de dessein prémédité à cet esprit brillant,
hardi et redoutable, le domaine des passions,
qu'il savait si bien exciter et braver tour à tour,
Huskisson s'était voué aux études les plus pé-
nibles, aux questions les plus ardues, pour ar-
river à une supériorité incontestée par une route
où personne n'aurait le courage de le suivre.
Mail il parait clair, au contraire, qu'il obéissait
à une vocation invincible en se livrant avec ar-
deur à l'étude des détails de l'organisation finan-
cière, industrielle et commerciale de son pays.
L'un des premiers discours où les qualités de
son esprit se manifestèrent d'une manière frap-
pante fut celui par lequel il anéantit, en 1809,
une motion d'un certain colonel Wardle, qui,
dans une réunion populaire, avait avancé qu'il
était très-laeilede réaliser sur les dépenses pu-
bliques une économie de plus de 11 millions
sterling, et qu'il se faisait fort de le prouver.
Mis en demeure de s'expliquer à cet égard dans
le parlement, dont il était membre, Wardle re-
tarda tant qu'il put sa motion; mais enfin,
poussé à bout, il la développa, La réponse
d'Huskisson fut sévère et péremptoire. L'homme
positif soumit au plus cruel examen les asser-
tions hasardées du dédamateur populaire, et lui
fit sentir, en défendant les idées d'ordre et de
pouvoir, le poids de cette logique des faits qu'il
eut occasion d'employer plus tard au profit d'in-
novations libérales.
Quelque temps après, en 1410, Huskisson,
alors retiré de l'administration, publia une bro-
chure sur la question de la circulation monétaire
en Angleterre, qui obtint sept éditions coup sur
coup, et qui fut réimprimée plus tard toutes
les fois que la reprise des payements en espèces
par la Banque d'Angleterre fut remise en discus-
sion. Il y prouvait que le billet de banque n'é-
tait point une denrée susceptible, comme les
métaux précieux, de servir de mesure commune
et permanente à tontes les autres denrées ; que
ce billet n'était qu'une promesse de payer, sur
sa présentation, une quantité déterminée d'or an
titre légal ; que la reprise des payements en nu-
méraire était nécessaire, urgente , possible , et
•qu'il fanait sortir dans un «bref délai d'un état
de choses qui pouvait devenir très-dangereux.
Comme tout se tient dans ceê matières, le com-
merce des lingots, l'état du change entre l'An-
gleterre et les pays étrangers , et, par suite la
question de la balance du commerce , se trou-
vaient abordés dans cet écrit. Les solutions n'é-
taient pas nouvelles : c'étaient les principes d'A-
dam Smith, mais développés d'une manière nette
et bien appliquée aux circonstances ; c'était enfin
une intelligence parfaite de tous les détails d'un
sujet aussi important qu'épineux, et une pré-
voyance, que l'événement a justifié, des résul-
tats futurs de l'état où se trouvait en 1810 la
circulation en Angleterre, tant en métaux qu'en
papier. Cependant , malgré l'autorité de cet écrit
et les travaux d'Huskisson dans le comité des
lingots (bullion comitUe) de la chambre des
communes, la reprise des payements en espèces
fut encore ajournée, et le rat même successive-
ment jusqu'en 1818. La question s'étant repré-
sentée pendant cette période dans des moments
où Huskisson faisait partie de l'administration,
il n'abjura pas ses anciennes opinions; mais il
€31-
HUSKISSON
622
paraissait, il faut l'avouer, beaucoup plu» préoc-
cupé qu'il ne l'avait été jusque-là des difficulté*
de la transition.
Les rapports de la trésorerie avec la banque,
les dépenses de l'armée, la législation des grains,
occupèrent successivement Huskisson, tant aux
époques où il était en place qu'à celles on il
siégeait sur les bancs de l'opposition. Du reste,
sauf la nuance, toujours facile à reconnaître,
entre la parole de l'homme qui gouverne et celle
de l'homme qui critique ou au moins qui con-
trôle, ses opinions ne varièrent pas sensiblement
sur les questions de politique générale, et moins
encore sur les questions financières et commer-
ciales. Au pouvoir, il paraissait plus préoccupé
des besoins du service public; hors du pouvoir,
de l'urgence des économies; mais sans aucune
différence choquante de principes et de langage.
Favorable d'une manière constante à l'émanci-
pation catholique , à l'abolition de la traite des
noirs; partageant, en un mot, avec son ami
Ganning les opinions libérales de ce groupe
d'hommes publies qui, en dehors des whigs, fit
beaucoup pour l'avancement des principes dont
ceux-ci se portaient les champions exclusifs, il
parut peut-être moins décidé sur la question
des grains que sur les autres questions écono-
miques. Cependant, voulant à la fois faire de
son pays l'entrepôt du commerce du monde et
le foyer d'une production manufacturière de
plus en plus parfaite, les intérêts de l'ouvrier
devaient le préoccuper pins encore que ceux de
la propriété foncière. Cette dernière ne s'y mé-
prit pas et lui voua une défiance toujours crois-
sante.
Rendre aussi stable et aussi modéré que pos-
sible le prix d'une denrée d'une nécessité ab-
solue et dont les circonstances atmosphériques
doivent, dit-on , faire varier la valeur locale de
cent pour cent dans chaque période de cinq ans,
ce n'est pas un problème d'une solution facile»
De 168* à 1763, l'Angleterre avait vécu sous le
régime de la prohibition absolue des grains
étrangers ( sauf le cas d'extrême cherté ) et de
primes à l'exportation des blés indigènes. Son
agriculture était devenue, sous ce .régime, la
plus florissante de l'Europe; mais une popula-
tion plus dense, des manufactures plus nom-
brenses vinrent modifier l'état des choses. Les
exportations diminuèrent, les importations arri-
vèrent même à les surpasser, grâce à'des me-
sures momentanées. On en vint à introduire les
grains étrangers sans droit d'entrée, lorsque las
blés du pays s'élevaient à 48 shellings le quar-
ter, et à suspendre l'exportation lorsqu'il* en
valaient 44. Enfin, en 1823, le bill proposé par
Canning, d'après les études de Hnskisson, établit
le régime des droits gradués à l'importation,
d'après une échelle ascendante et descendante
en raison inverse du prix des c#éales indigènes.
Mais il existait d'autres questions sur les-
quelles Huskisson était destiné à exercer une
influence plus décisive et plus heureuse. Depuis
longtemps il avait reconnu que les relations
commerciales de peuple à peuple avaient changé
en Europe et tendaient à changer davantage en-
core ; que les colonies n'étaient pins à l'égard des
métropoles dans les mêmes conditions qu'autre-
fois, et que telle loi qui avait fondé , il y a un
siècle et demi, la prépondérance maritime et la
richesse industrielle de l'Angleterre, ne servait
désormais qu'à faire descendre œ pays de la
position élevée qu'elle l'avait aidé à atteindre.
Il y avait longtemps qu'il avait recommandé, à
sa patrie, dans ses discours parlementaires , de
ne pas exagérer le système prohibitif, de n'y pas
persister aveuglément , de ne pas donner aux
étrangers cet exemple qui deviendrait fatal à
l'Angleterre. Une fois ministre , il s'occupa sans
relâche de faire prévaloir dans la législation ces
nouveaux et importants principes, dent voki une
succincte analyse.
L'ancien système colonial n'admettait de re-
lations de commerce qu'entre la colonie et sa mé-
tropole : c'était une règle absolue. L'émancipa-
tion de l'Amérique anglaise et espagnole, la
séparation du Brésil de la couronne de Portugal
vinrent changer cet état de choses. Des ports,
jusque-là fermés, s'ouvrirent à tons les peuples ,
et le pavillon anglais fut des premiers à s'y mon-
trer. Huskisson voulut que les possessions qui
restaient à l'Angleterre pussent commercer di-
rectement avec les ports désormais ouverts des
anciennes colonies anglaises, espagnoles ou por-
tugaises. Elles devaient, disait-il, y gagner, et
la mère patrie ne devait pas y perdre. Il fallait
d'ailleurs rendre à la fois la production moins
chère dans les colonies anglaises des Indes oc-
cidentales et y améliorer le sort des noirs. La
production annuelle du sucre y était alors de
300,000 barriques. Les quatre cinquièmes seu-
lement de cette récolte se consommaient dans
la métropole. Comment placer sur les marchés
d'Europe les 60,000 barriques d'excédant, si les
colons anglais ne pouvaient lutter à armes égales
avec le Brésil et Cuba? Or, les lies à sucre, arec
leur système de culture , ne peuvent se passer
pour leur alimentation des produits des tégions
tempérées. Mais c'était à grands frais seulement
que l'Angleterre pouvait approvisionner ses ports
coloniaux de ces denrées de première aécessité.
Force était donc de les ouvrir à des fournisseurs
moins éloignés. Aussi, à plus d'une reprise, on
avait permis momentanément l'importation , des
États-Unis aux Antilles anglaisés, de ienrées
alimentaires indispensables. En 1822, le com-
merce direct entre ces deux régions par navires
américains avait été autorisé d'une manière
permanente. On avait étendu aux états d'Eu-
rope cette faculté de trafiquer directement avec
les colonies anglaises, mais par navires anglais
seulement. Cependant, peu reconnaissants des
avantages qu'on leur taisait et forts de leur heu-
reuse position, les États-Unis exigeaient que leurs
623
HUSKISSON
624
navires fassent reçus dans les colonies anglaises
sur le même pied qne ceux de la mère patrie,
et , sur le refus de l'Angleterre , ils avaient frappé
de droits excessifs les cargaisons apportées des
colonies britanniques chez eux par navires an-
glais. Huskisson était trop clairvoyant pour ne
pas reconnaître que la prépondérance des États*
Unis dans l'Amérique tropicale était une de ces
nécessités que le temps amène et contre les-
quelles le bon sens défend de se roidir; mais
l'Angleterre ne croyait pouvoir, sans abdiquer sa
dignité, acquiescer de prime abord à leurs pré-
tentions altières. Elle leur interdit rentrée de
ses Antilles, et en attendant que le différend rat
aplani , Huskisson la fit ouvrir aux navires de
toutes les nations; et, non content d'appeler les
pavillons étrangers au secours des colonies, il
accorda à ces dernières le droit de recevoir en
entrepôt toutes les denrées d'Europe destinées
soit à leur consommation, soit à être expédiées
plus tard dans les ports du continent des deux
Amériques. U assujettit seulement à un droit de
15 à 20 pour 100 les marchandises importées
dans les colonies pour y être consommées , afin
de leur créer un revenu qui devait être affecté
à des améliorations locales. L'ensemble de ces
mesures devait balancer, au profit des colonies
comme à celui de la métropole, l'influence exclu-
sive que les États-Unis menaçaient de prendre
dans tout le Nouveau Monde. Ces modifications
au régime colonial en entraînaient de corres-
pondantes dans le système de navigation de l'An-
gleterre : Huskisson les accomplit. On sait que
ce système avait pris naissance sous le protec?
torat de Cromwell ; l'acte de la douzième année
de Charles II l'avait porté à sa perfection. Hus-
kisson reconnaissait, avec tous les hommes d'État
de l'Angleterre que son pays lui avait dû en
grande partie le prodigieux accroissement de sa
puissance; mais, avant tous ceux de son épo-
que, il sut comprendre qu'à cet égard, comme
à tant d'autres , les temps étaient changés. Quand
ce régime fut établi, l'Angleterre n'avait pour
ainsi dire point d'industrie; elle exportait ses
grains , ses laines > et en général toutes ses ma-
tières premières. Elle n'avait que peu de navires,
et cependant une marine formidable était la pre-
mière condition du maintien de son indépen-
dance; celle de la Hollande menaçait à la fois
ses intérêts et sa sécurité. L'Europe continen-
tale, bien en arrière de ces deux pays quant à
la navigation , ne songeait pas à lutter contre
eux« Encourager aux dépens des autres nations
l'élan du peuple anglais vers les entreprises
maritimes, c'était une politique nationale, sage,
et profonde, dès que la chose était possible : le
régime ultra-protecteur et même exclusif en fa-
veur de la navigation anglaise avait donc été
consacré à juste titre au dix-septième siècle ; il
n'avait point éprouvé d'altération jusqu'à la paix
de 1783. La pêche, le cabotage, le commerce
avec l'Europe , celui des colonies , enfin le com-
merce extra-européen, voilà les~cmq chefs sous
lesquels on peut ranger la navigation d'un pays
de notre partie du monde. Les lois anglaises
avaient attribué aux bâtiments nationaux ex-
clusivement les deux premiers et les deux der-
niers. Quant au commerce avec l'Europe, la
règle générale était que l'importation en Angle-
terre pouvait avoir lieu de tous les ports euro-
péens par tous les navires appartenant à des na-
tions amies ; mais un droit différentiel atteignant
les bâtiments étrangers protégeait contre leur
concurrence ceux de l'Angleterre. De plus, la
règle avait deux exceptions, l'une dirigée contre
la Hollande, alors à bon droit redoutée des An-
glais , et qui ne pouvait apporter chez eux dans
ses navires que les produits de son propre terri-
toire, l'autre ayant pour but de réserver aux bâ-
timents anglais et à ceux du pays de production
l'importation de diverses espèces de marchan-
dises encombrantes (telles que les bois de cons-
truction ) , qui, au nombre de vingt-huit , étaient
connues dans le commerce sous le nom d'arti-
cles énumérés* Encore ici on retrouvait le droit
différentiel au profit des navires anglais. Ainsi
protégée, la navigation britannique était devenue
la plus florissante du globe; mais la rigueur du
système exclusif finit par exaspérer les colonies
de la Nouvelle-Angleterre, et contribua, autant
que les taxes arbitraires, à leur faire secouer le
joug. En effet, les ports anglais chicanaient ceux
de l'Amérique du Nord à l'égard de leurs moin-
dres expéditions; quant à l'Irlande, sa position
était telle que, si un navire anglais venant des
colonies échouait sur ses cotes, la cargaison,
qui s'y serait bien vendue, ne pouvait y être
introduite. Il fallait qu'un autre navire anglais
fut expédié d'Angleterre pour emmener cette car-
gaison , l'Irlande n'ayant pas le droit de commu-
niquer directement avec les colonies, et ne
pouvant recevoir leurs produits que par l'inter-
médiaire des caboteurs anglais.
Ces abus monstrueux avaient cessé déjà avant
le ministère d'Huskisson , qui en effaça les der-
nières traces. Mais ce n'était pas la seule at-
teinte que les lois de navigation eussent reçue
avant lui. Après la paix de 1783, il avait fallu
compter avec l'Amérique indépendante. En ad-
mettant ses navires dans les ports anglais , quoi-
que avec des droits inégaux , on avait violé la
règle relative au commerce extra-européen. Mais
dès 1787, s'inspirant du système anglais et l'ap-
pliquant à son profit , le congrès des États-Unis
avait frappé de droits différentiels les navires
étrangers admis dans leurs ports , ainsi que les
cargaisons. Le coup avait été rude pour l'Angle-
terre. Après avoir hésité entre un système de
primes et un système de représailles , elle s'était
résignée, en 1815, au régime de la réciprocité
d'admission avec droits égaux : nouvelle brèche
aux vieilles maUimes. Le Brésil , Saint-Domin-
gue, etc., avaient obtenu ensuite un pareil trai-
tement; mais la chose n'avait plus la même tm-
625
HUSKISSON
626
portance , ces pays étant sans marine. On en était
là lorsque Huskisson devînt président du bureau
du commerce. Des réformes avaient été prépa-
rées par M. Wallace, son prédécesseur; mais ii
lui était réservé de les effectuer, de les étendre,
de les faire prévaloir dans les esprits aussi bien
que dans les faits, par la manière dont il sut les
exposer et les défendre.
De 1822 à 1825, il fit voter parle parlement
des mesures dont le résultat fut : 1° d'admettre ,
soit en entrepôt pour la réexportation, soil im-
médiatement pour la consommation, dans tous
les ports de la Grande-Bretagne , les provenances
des États d'Europe comme des États extra-euro-
péens, par tous navires des nations amies aussi
bien que par navires anglais; 2° d'abolir tous
droits différentiels de douane sur ces provenances,
qu'elles fussent importées par navires anglais ou
par navires étrangers; 3° de traiter pour les
droits de navigation sur le pied d'une réciprocité
parfaite avec tontes les nations; 4° de laisser
amener en Angleterre la plupart des articles
énumérés par tous navires des pays où ils avaient
été , soit produits, soit introduits. La pèche, le
cabotage, le commerce direct entre la métropole
et les colonies et de colonie à colonie demeu-
raient, comme par le passé, exclusivement ré-
servés aux bâtiments anglais. Ces changements
n'excitèrent pas d'abord de grandes plaintes. La
fièvre de spéculation qui, en 1825, s'était emparée
de l'Angleterre y avait tellement exagéré le mou-
vement commercial et maritime que les proprié-
taires de navires ne pouvaient suffire aux de*
mandes : aussi , malgré l'emploi d'un grand nom-
bre de bâtiments étrangers, le fret était hors de
prix. L'année 1826 vint liquider les folles opé-
rations de sa devancière : aux espérances gigan-
tesques succédèrent les amers désappointements.
Atteints, quoique faiblement, par les résultats
funestes de la crise, les propriétaires de navires
jetèrent alors les hauts cris. Ce fut pour se dé-
fendre de leurs attaques passionnées que Hus-
kisson prononça, sur le sujet en question, ses
deux discours du 12 mai 1826 et du 6 mai
1827. Il demeura victorieux dans cette lutte, et
jamais triomphe ne fut mieux mérité. Le bon
sens , la logique, la connaissance la plus exacte
des faits , les sentiments élevés et généreux, cette
prévoyance de l'avenir qui caractérise un véri-
table homme d'État, tout se trouve dans ces dis-
cours, excepté les vains ornements qu'à coup
sot personne n'y regrette.
Huskisson reconnaissait hautement que le pre-
mier intérêt de sa patrie était celui de sa navi-
gation ; le commerce et l'industrie n'étaient que
le second, car les moyens de force et de conser-
vation doivent passer avant les moyens de ri-
chesse. Mais la navigation de la Grande-Bre-
tagne était-elle en décadence? Non; car, au lieu ,
de 16,000 matelots (pied de paix de sa marine
militaire en 1792), l'Angleterre en avait 30,000
pour 1826, sans compter la réserve à demi-solde;
sa marine marchande , à la même époque , occu-
pait encore (pour le commerce extérieur seule-
ment ) 1,800,000 tonneaux et 100,000 marins,
bien que le rétablissement de la paix en 1815,
l'abolition de la traite des noirs, la cessation de
la piraterie des barbaresques par suite du bom-
bardement d'Alger, la diminution des transports
militaires de l'Angleterre, fussent autant de
causes d'amoindrissement de la navigation an-
glaise ou d'accroissement de celle des nations
continentales. Le pavillon de l'Espagne, autre-
fois si puissante, avait disparu de l'Océan; la
France n'avait pas, en 1825, la moitié de son
tonnage de 1792 ; celui de la Hollande était aussi
fort diminué; l'Angleterre seule , en Europe, avait
grandi sous ce rapport dans l'énorme proportion
de 75 pour 100. Il est vrai qu'une puissance
nouvelle (les États-Unis) avait surgi dans l'in-
tervalle; mais c'était précisément cette rivalité
récente qui devait engager l'Angleterre à sortir
de ses anciens errements. Qu'avait voulu l'acte
de Charles II? Deux choses : d'abord conserver
au pays la plus grande part dans ses transports
maritimes , et ensuite diviser le reste entre les
autres nations , de telle sorte qu'aucune d'elles ne
devfnt prépondérante. Le premier objet était at-
teint sans doute; mais pour maintenir l'activité
de la navigation anglaise, les lois protectrices et
prohibitives ne suffisaient plus. Il fallait étendre
l'emploi de cette navigation en favorisant le com-
merce , accablé sous le monopole des possesseurs
de navires. Attirer, par la concurrence et l'abais-
sement du fret , dans les entrepôts de la Grande-
Bretagne une grande partie des denrées destinées
à la consommation du monde entier, c'était
servir ces deux intérêts à la fois. Concéder au
Danemark, à la Suède , à la Norvège, aux villes
anséatiques, le traitement de réciprocité pour
leurs navires , c'était donner à ces marines se-
condaires ce qu'on avait été forcé depuis long-
temps d'accorder à celle des États-Unis; c'était
faire librement pour le faible ce qu'on avait été
contraint de faire pour le fort. A défaut de l'hon-
neur et de la justice, la politique seule.l'eût com-
mandé ; car c'était l'unique moyen d'atténuer la
prépondérance américaine et de poursuivre ainsi
le second objet des anciennes lois de navigation.
D'ailleurs l'abandon des droits différentiels était
forcé , puisque l'Europe, jusque alors indifférente
à ses intérêts sous ce rapport, entrait à son
tour dans ce système. La Prusse avait donné
l'exemple. Si l'on persistait dans une lutte de
tarifs, qui y perdrait le plus en définitive? Évi-
demment le peuple le plus navigateur et par
cela même le plus vulnérable , puisque les droits
différentiels n'étaient autre chose qu'un impôt
levé sur son commerce et sa navigation par les
gouvernements étrangers. Si, pour protéger sa
propre navigation , à chaque puissance avait re-
cours aux droits différentiels , on en viendrait à
ce point que toute contrée exporterait ses pro-
duits par ses navires et recevrait les produits
627
HUSKISSON
628
de l'étranger par les bâtiments de l'étranger.
Tout le désavantage , sous le rapport de la navi-
gation , ne serait-il pas pour l'Angleterre, qui
n'exportait que des produits manufacturés et qui
recevait une énorme quantité de matières pre-
mières? Une pareille lutte ne tendait à rien
moins qu'à doubler, au détriment des consom-
mateurs de l'Europe entière , le prix du transport
par mer des denrées , en anéantissant les retours.
A ces raisonnements décisifs Huskisson joi-
gnait des preuves numériques accablantes pour
ses adversaires. Aux pétitionnaires des ports ,
qui affirmaient qu'en 1826 la navigation anglaise
périssait étouffée par la funeste extension de la
navigation étrangère, il démontrait que c'était
cette dernière qui perdait du terrain, puisqu'en
cette année désastreuse le tonnage britannique
n'avait diminué que de 1 1 pour 100 relativement
à 1825, année d'activité exagérée, tandis que le
tonnage étranger avait baissé de 29 pour 1 00. A
des plaintes sans fondement et sans mesure il
opposait ainsi des résultats palpables, qui accu-
saient ou l'ignorance ou la mauvaise foi de ses an-
tagonistes. Mais ce n'était pas tout que d'obtenir de
la navigation anglaise , si forte et si vivace, quel-
ques concessions en faveur des fabriques et du
commerce du pays, il fallait encore porter la main
sur les tarifs de douanes et les abaisser dans le
double intérêt du consommateur indigène et
de la production destinée pour le dehors , sans
dépasser la limite qu'imposaient d'une part le
soin du revenu public , de l'autre la protection
modérée à laquelle avait droit l'industrie natio-
nale.
Des diverses branches de cette industrie, les
unes produisaient trop chèrement à raison des
droits qui frappaient les matières premières à
leur entrée , les autres ne donnaient que des pro-
duits imparfaits, parce qu'elles n'avaient point à
redouter la concurrence étrangère. Une contre-
bande active , résultat obligé de ce régime , ti-
rait de la poche des consommateurs anglais une
prime qui, avec un système de droits modérés,
eut été perçue par le trésor. Les fluctuations
de ce commerce irrégulier faisaient varier à
chaque instant le, prix des marchandises an-
glaises de même nature, au grand dommage du
commerce lieite. Huskisson fit disparaître les
droits quasi-prohibitifs, qu'il regardait comme
un brevet de médiocrité pour les manufactures
de son pays ; 30 pour 100 de la valeur fut la li-
mite la plus élevée de ceux qu'il établit à l'im-
portation des objets fabriqués à l'étranger II
fixa de 10 à 20 pour 100 les droits d'entrée sur
les matières premières. Base nécessaire du prix
de revient des produits manufacturés dans le
pays, le taux d'achat de ces matières ne pouvait
être trop diminué si l'on voulait soutenir sur les
marchés du monde la concurrence de jour en jour
plus redoutable des autres contrées de l'Europe
et des États-Unis eux-mêmes, devenus manufac-
turiers. Ici l'intérêt fiscal devait être mis de
côté. L'agriculture et les mines delà Grande-Bre-
tagne avaient seules le droit d'être protégées, lors-
qu'il s'agissait de poser une limite à l'abaisse-
ment des droits dîmportation. Huskisson leur
fit des concessions suffisantes, trop grandes
peut-être à certains égards, mais qui ne di-
minuèrent pas leur irritation contre lui. Ce-
pendant, les maîtres de forge se montrèrent
conciliants : le droit qui frappait les fers de
Suède fut abaissé de leur aveu. Quant au cuivre,
le droit d'entrée ne put être réduit qu'à 27
pour 100, ce qui maintenait encore la denrée fa-
briquée à un prix trop haut pour lindustrie an-
glaise. Malgré leur supériorité Incontestée, les
étoffes de laine et de coton étaient protégées par
des droits dont quelques-uns s'élevaient jusqu'à
60 et 75 pour 100. Pour l'honneur de lindustrie
nationale , Huskisson les effaça du tarif anglais ,
et les remplaça par d'autres, qui variaient de 10
à 15. Les porcelaines de luxe, les gants français
donnaient lieu à une contrebande incessante : la
prohibition de ces articles fut levée; des droits
de 15 à 30 pour 100 la remplacèrent , avec profit
pour tout le monde , excepté pour les fraudeurs.
Ce régime fut généralisé, avec les modifications
nécessaires suivant les matières auxquelles on
l'appliquait; mais à l'égard des laines brutes et
des soieries , il donna lieu à l'opposition la plus
véhémente. La fabrication des étoffes de soie,
importée de France en Angleterre tors de la ré-
vocation de l'édit de Nantes , avait pour sièges
principaux Spitalfields , quartier de Londres ha-
bité par les descendants des réfugiés français,
Coventry, Maceiesfieidet Tttmton. Ses produits
étaient solides, mais chers, en étoffes unies;
leur infériorité à l'égard de ceux de Lyon était
extrême en tissus de goût et de luxe , dits
façonnés : aussi la contrebande se chargeaitelle
d'en approvisionner l'Angleterre. La prohibition
des soieries du continent n'avait pas garanti la
fabrique anglaise des épreuves les plus cruelles;
car en 1816 sa détresse était si grande que la
peste seule, dit-on , aurait pu donner l'idée de h
désolation et du silence qui régnait alors à Spi-
talfields. Après avoir échoué, en 1833, dans la
chambre des lords, un bill voté, an mois de
mars 1824, sur la motion d'Huskisson donna
entrée, à partir de juillet 1826, aux soieries
étrangères, avec le droit maximum de 30
p. 100. Au lieu d'employer ce délai à s'aguerrir
contre une concurrence légitime et nécessaire,
les fabricants el leurs représentants an parlement
s'épuisèrent en réclamations violentes, en pro-
phéties terribles, en intrigues de tous genres
pour faire rapporter la mesure. M. Baring, dé
puté de Taunton, qui avait prononcé d'éloquente
discours en faveur de la liberté du commerce,
abandonna Huskisson et se joignit aux alarmistes.
Mais le ministre tint bon, et le bill fat maintenu.
Les circonstances étaient des plus défavorables :
la crise commerciale était dans toute son inten-
sité; comme industrie de luxe, la fabrique des
629
HUSKISSON
630
soieries en souffrait beaucoup , et l'on attribuait
. aux eflets anticipés de la mesure ministérielle
une stagnation qui, du reste, était loin d'at-
teindre celle de i 816, Cependant tes droits sur les
soies grèges et organsinées furent abaissés ; les
soieries du continent furent admises en entrepôt
pour l'exportation, avec draw-beck payé à la
sortie, et après plusieurs assauts successive-
ment livrés à ces utiles réformas dans la chambre
des communes , Hostisson put prouver, en re-
poussant les derniers dans son discours du 14 fé-
vrier 1 £26 et dans ceux de U session de 1890, que
les fabriques de soieries 8'étaient relevées; que
la demande d'ouvriers était croissante ; que l'im-
portation des matières premières avait doublé;
que Bristol avait pour la première fois exporté
des soieries en Amérique; que Coventry appli-
quait la vapeur à ses métiers à rubans; que les
foulards de l'Inde , dont, avant les changements,
Hambourg inondait frauduleusement l'Angle-
terre, et qu'on avait déclares de tout temps ini-
mitables par l'industrie anglaise, étaient repro-
duits avec tant de succès qu'on en expédiait
jusque dans l'Inde; que Lyon et Zurich même,
si favorisée par le bas prix de ta main-d'œuvre,
s'inquiétaient de ces progrès; qu'il en était ainsi
dans d'antres branches d'industrie, dans la
ganterie» par exemple, oà, l'importation des
peaux augmentant rapidement, celle des gants
du continent avait diminué de 61,000 douzaines
à 36,000, du premier an second semestre de
1828. Enfin le revenu public s'améliorait et la
douane grossissait ses recettes des pertes qu'é-
prouvait la contrebande.
Tels furent les principaux changements que
Huekiseon flt adopter. Il en méditait d'autres sur
les laines, par exemple, que les vicissitudes po-
étiques l'empêchèrent de mener à fin. Accusé
d'abord, dans sa patrie, d'aller trop loin et trop
vite; traité de théoricien inflexible, sourd aux
cris de détresse que ses cruelles expériences arra-
chaient à des populations aux abois, il y a trouvé,
après le succes,idans les pnrs théoriciens , dans
les économistes radicaux, des appréciateurs non
moins passionnés , non moins injustes , qui l'ont
représenté comme un déserteur des principes ,
toujours prêt, soit par corruption, soit par igno-
rance, a pactiser avec le privilège et le mono-
pole. L'avenir, plus équitable, reconnaîtra en
lui un partisan éclairé de la liberté du commerce,
en tant qu'elle est compatible , pour chaque na-
tion, avec le soin de son indépendance, de sa
propre conservation. Huskisson subordonna tou-
jours à la raison d'État l'intérêt purement maté-
riel ; mais il ne voulut point immoler cet intérêt,
dans sa généralité, anx habitudes ou aux conve-
nances de certaines classes de producteurs.
Voyant l'Europe tendre à l'isolement commer-
cial et chaque puissance se barricader dans ses
lignes de douanes , avec la prétention déraison-
nable de vendre aux autres sans jamais rien leur
acheter, il pensa qu'il appartenait à l'Angleterre,
dont la culture et l'industrie étaient sans rivales,
d'entrer la première dans une voie plus large
et plus conciliante. Il ne tendit, quoi qu'on en
ait pu dire, aucun piège aux étrangers. Son sys- (
terne t qui n'eût point trouvé de contradicteurs
sérieux dans son pays si le continent avait ré-
pondu à ses avances , était encore le meilleur, le
continent persistant dans ses vues exclusives.
Toutes les mesures accessoires qui pouvaient
favoriser le commerce attirèrent l'attention de
Huskisson. Quinze cents lois de douanes, dont
quelques-unes remontaient jusqu'à Edouard I er ,
formaient un code inintelligible et barbare, qui ,
sous son ministère, fut corrigé et résumé en
onze lois. 11 prévit les catastrophes que prépa-
raient les spéculations désordonnées de 1825, et
engageait inutilement les banques de province à
ne pas seconder cette tendance fatale par des
avances imprudentes. Tant de travaux altérèrent
encore une 3anté déjà frêle; le repos lui devint
nécessaire. En 1825, il revit Paris , et descendit
chez son ami lord Granville (voy. ce nom), à
l'ambassasade d'Angleterre, dans ce même
hôtel où, trente-trois ans auparavant, il avait eu,
dit-on, le bonheur de sauver la vie au marquis de
Champcenetz, gouverneur des Tuileries, dans
la soirée du 10 août 1792. En 1827, toujours
souffrant, il visita de nouveau le continent. Il
avait laissé Ganning malade : un courrier, qui le
joignit dans le Tyrol, lui apporta la nouvelle de
sa mort. Aussitôt il regagna Paris , et ce fut là
qu'il consentit à entrer dans le ministère de lord
Goderich ( voy. Ripon ), comme chargé du dépar-
tement des colonies. Cette faible administration
s'étant dissoute à la fin de décembre 1827, le
duc de Wellington, sir R. Peel et leurs amis
formèrent un cabinet de coalition avec lord Pal-
merston, M. Grant et Huskisson, qu'on regar-
dait comme indispensable. Ce ministère n'avait
rien d'absolument incompatible avec les opinions
professées par Huskisson. Cependant telle est en
Angleterre la fidélité aux amitiés politiques, et
telles sont aussi, là comme ailleurs, les ran-
cunes profondes des partis , que Huskisson fut
amèrement blâmé de s'être joint à quelques
hommes que la famille de son ami Canning
regardait comme responsables de sa fin préma
turée, à eause de la violence de l'opposition
qu'ils lui avaient faite. A l'ouverture de la session,
Huskisson se justifia ; cette apologie fut accueil
lie très-froidement. La meilleure explication
de sa conduite était précisément celle qu'il ne
pouvait pas donner, c'est-à-dire le besoin que
des hommes engagés dans de grandes réformes
administratives et peu ardents sur les questions
de parti éprouvent de conserver le pouvoir tant
qu'ils le peuvent, afin de poursuivre le but au-
quel leur existence est vouée. Le triomphe des
catholiques , auquel Huskisson avait contribué,
vint donner de l'éclat au ministère. Mais bientôt
des divisions intérieures surgirent sur la législa-
tion des grains , sur l'abolition des bourgs pourris.
631
HUSKISSON — HUSSEIN
Huskisson n'avait jamais voulu de la réforme
parlementaire : il y voyait le prélude d'une
révolution. Mais le seul moyen d'éviter cette
grande et hasardeuse mesure, c'était de faire
disparaître les abus les plus criants. Il ne suf-
fisait pas, selon lui, d'ôter le droit d'élire à
quelques douzaines d'individus qui trafiquaient
notoirement de leurs votes : il fallait transporter
ce droit à de grandes villes que l'industrie mo-
derne avait élevées et qui n'avaient point de re-
présentants. Déjà, pendant la session de 1828, il
avait voté , dans la question du bourg d'East-
Retfort, contre la majorité du ministère; dans
celle de 1829, la question s'étant représentée j le
même vote se reproduisit. Rentré chez lui à
l'issue de la séance où des paroles piquantes
avaient été échangées avec quelques-uns de ses
collègues, Huskisson écrivit au duc de Wel-
lington un billet d'où celui-ci put inférer qu'il
donnait sa démission. Dans la journée, le duc
porta au roi ce billet et la nouvelle de la retraite
de Huskisson. « S'il s'en va, dit Georges IV, il
n'y a plus de ministère; et, en effet, l'adminis-
tration fut dissoute par la sortie de la portion
libérale du cabinet. Une longue correspondance
s'établit alors entre le duc et Huskisson, qui pré-
tendait avoir posé une question et non pas no-
tice un parti pris. Ces commentaires contradic-
toires de sa démarche se reproduisirent dans les
chambres, sans rien éclaircir. L'administration
se recompléta dans le sens tory, et Huskisson
sortit du pouvoir pour n'y plus rentrer.
La session de 1830 fut la dernière où sa voix
dut s'élever dans les conseils de son pays. Af-
fecté profondément des attaques furibondes dont
il avait été l'objet, ses derniers discours sem-
blèrent empreints d'une mélancolie prophétique.
Une excursion en Italie n'avait pas rétabli sa
santé délabrée; mais on avait remarqué que le
pape avait insisté pour voir et remercier en lui
un défenseur constant des catholiques irlandais.
Au commencement de septembre 1830, Huskis-
son, triste et languissant, se trouvait dans son
petit domaine d'Ëartham. Les whigs avaient
agité la question de savoir s'ils devaient faire
une démarche collective près de lui pour l'enga-
ger à se mettre à la tête de l'opposition qu'ils
préparaient pour l'hiver suivant contre le minis-
tère Wellington ; ils avaient ajourné la décision..
Ce fut alors qu'une députation de Liverpool , où
il avait été réélu sans que sa santé lui eût per-
mis d'y paraître , vint l'engager à assister à l'i-
nauguration du chemin de fer de cette ville à
Manchester. Il s'y rendit, accompagné de sa
femme , et fut reçu avec le plus vif empresse-
ment dans cette grande cité, qui ne vivait que
par la navigation, et qui justifiait par son ac-
cueil les mesures que l'ex-ministre avait fait
adopter, depuis sept ans , à l'égard de cette base
première delà puissance britannique. Le 15 sep-
tembre , il monta dans les wagons du premier
convoi qui devait parcourir le chemin de fer. Un
632
grand nombre de personnages distingués faisaient
le voyage, entre autres le duc de Wellington,
toujours premier ministre, et qui était Tenu re-
cevoir à Liverpool le droit de cité, honneur que
cette ville lui avait décerné. A moitié chemin,
le convoi fit halte : on descendit pour quelques
minutes. Huskisson cherchait à joindre le doc
pour lui tendre la main et lui prouver ainsi que
leur divorce politique l'avait laissé sans rancune
à son égard. Tout à coup on signale l'approche
d'une locomotive : chacun regagne précipitam-
ment sa place; Huskisson reste le dernier, hésite
une seconde, saisit la portière du wagon, qui
lui échappe, tombe à la renverse sur les rails,
et la locomotive lui passe sur le corps , en hn
brisant les os des cuisses. Un cri de douleur
retentit. Transporté au presbytère d'Ecoles,
Huskisson y rendit le dernier soupir le soir
même, après neuf heures des plus atroces
souffrances, supportées avec une résignation
admirable. Il réclama les secours religîeax de
son hôte, ajouta de sa main quelques mois à
son testament, et déclara qu'il avait vécu et
mourait exempt de haine pour qui que ee rot
La présence d'une épouse dévouée témoin d'un
aussi cruel spectacle, de quelques excellents
amis, tels que lord Granville, dut adoucir pour
lui ces moments terribles. La consternation de
ceux qui l'entouraient était sans bornes. Une
véritable stupeur régna dans Liverpool et Mans-
chester quand la nouvelle de ce fatal événement
s'y fut répandue.
Liverpool insista pour conserver les restes de
son illustre représentant, et, neuf jours pins tard,
ces débris mutilés furent inhumés dans le cime-
tière neuf de la ville. Huskisson était d'une taille
moyenne; il n'avait aucune des qualités phy-
siques qui attirent l'attention sur on orateur.
Ses manières étaient simples , son humeur était
égale. Sa vie privée fut irréprochable; marié,
en 1799, avec miss Milbanks, fille d'un amiral
de ce nom , cette union demeura stérile. Grâce
aux soins de sa veuve, les principaux discours
de Huskisson et son pamphlet sur la circulation
ont été recueillis et publiés sous ce titre :
Speaches oftheright hon. W. Huskisson f
with a Biographical Memoir; Londres, 1831,
3VOl. ïn-8°. [0. LAREVELUBRE-LBPEÀUXydanS
V Encyclopédie des Gens du Monde. ]
Biographical Memoir, dans les Speaches aftkmnaM
hon. W. Huskisson. — English Cyclopsedia {Biogra-
. phy)- — BlanquI aîné, Notice sur la vie et les travaux
de M. Huskisson, la h la séance annuelle des cinq Aca-
démies, le s mai 1840. — Joa. Garnier, dans le Dict. d'Eco-
nomie politique.
Hussein, schah de Perse de la dynastie des
Sons ou Sefewis, né vers 1186 de l'hégire (167 s
deJ.-C), régna de 1106 à 1135 (1694-1 722 ) t
et fut tué en 1 142 ( 1729). Il n'était que le second
fils du schah Soliman; mais les eunuques, à
qui son père avait laissé le choix de l'héritier
du trône, préférèrent l'indolent Hussein,, à son
frère Abbas-Mirza, qui paraissait en état de gou-
verner par lui-même. Le nouveau monarque
avait des vertus que sa faiblesse et son incapacité
rendirent inutiles. H abolit la peine de mort, qu'il
remplaça perdes peines pécuniaires. Pieux jusqu'à
la bigoterie, il confia les principales charges aux
mollahs, et fit de chaque établissement religieux
on asile inviolable, même pour les meurtriers.
Dès le lendemain de son avènement, il interdit l'u-
sage du vin , et fit répandre toutes les liqueurs
enivrantes et les essences qu'il trouva dans le
palais. Mais il ne tarda pas à violer lui-même
son décret, et s'adonna au vin avec tant d'excès
qu'il tomba dans l'abrutissement. Il abandonna
l'exercice de l'autorité à des eunuques, qui,
parleurs exactions, mécontentèrent la plupart
des gouverneurs de provinces. L'un d'eux,
Georges XII, roîde Géorgie, qui s'était révolté,
fat fait prisonnier et conduit à ïspahan, où il
obtint son pardon par l'entremise de sa sœur,
qui était femme du schah. Ayant embrassé
l'islamisme sous le nom de Gourghin-Khan,
il fut nommé gouverneur du Candahar. Les
Afghans Khildjis, qui occupaient cette province,
se montraient disposés à secouer le joug. Il les
traita avec la plus grande rigueur, et fit saisir
le calender ( magistrat ) de Candahar, Mir-
Weis, qu'il envoya à ïspahan (1707). Cet
homme habile profita de son séjour à la cour
pour gagner la faveur du schah , corrompre les
ministres et préparer la délivrance de sa tribu*
HUSSEIN 631
le gouverneur do Séistan se révolta, et l'imam de
Mascate occupa les lies du golfe Persique. Hus-
sein s'allia contre ce dernier, avec les Portu-
gais de Goa, dont la flotte fut défaite par les
Arabes. Il entretint des relations amicales
avec le sultan, dont l'ambassadeur, Dourri-
Efendi, se rendit à ïspahan en 1720 , et avec le
roi de France, qnî lui envoya Fabre (1706),
puis Michel, et qui accrédita deux consuls en
Perse, Gardanne, à ïspahan ( 1717) et Padery,
à Schiraz (1720). Un envoyé persan, Mehemet-
Mirza-Beg, conclut à Paris (1715) un traité
onéreux pour sa nation. Les armes d'Hussein
n'avaient pas pins de succès à l'intérieur que
sa politique à l'extérieur. Un corps de 30,000
hommes, qu'il opposa à Asad- Allah, chef des
Afdhalis, fut mis en.déroute , en 1132(1729).
D'un autre côté, Mir-Mahmoud conquit le Ker-
man, et marcha sur ïspahan. Son armée, grossie
d'une troupe de Guèbres, opprimés par les Per-
sans, s'élevait à 20,000 hommes lorsqu'elle
arriva à Goulnabad, à neuf lieues d'Ispahan.
Elle y vainquit un corps de 50,000 Persans.
Malgré cette victoire, le chef afghan hésitait à
pousser plus loin. Mais, apprenant que la capitale
était dans la consternation, il alla assiéger
Djoulfa. Ce faubourg d'Ispahan était occupé par
une florissante colonie d'Arméniens. Ses habi-
tants, ne recevant aucun secours des musulmans,
dorent capituler après s'être bravement dé-
Enll20(1708),8*étantrendnàLaMecquecomme j fendus. Au lieu de prendre des mesures éner-
nAIfflrin il /tlttinf cM>i<Àtamonf Aaa. rirwifonrs <mn_ mm-mo Ilnce<(in «a nnnfnnto /i'avm-ilaov» Iaq rvi»rvo.
pèlerin, il obtint secrètement des docteurs sun-
nites des décisions judiciaires qui l'autorisaient
à faire la guerre aux schiites, c'est-à-dire
aox Persans. U exploita habilement l'arrivée
d'un ambassadeur russe pour se faire rendre
la liberté. Comme cet envoyé se disait issu des
anciens rois d'Arménie, et se faisait suivre d'un
grand nombre d'Arméniens, Mir-Weis le repré-
senta comme un émissaire chargé de faire sou-
lever les chrétiens et de comploter avec Georges
pour rendre l'indépendance à l'Arménie et à la
Géorgie. Renvoyé en Candahar, afin de con-
trebalancer la puissance du redoutable gouver-
neur de ce pays, il le fit assassiner dans un fes-
tin, 1121 (1709), anéantit la garnison persane
de Candahar, et vainquit successivement le gou-
verneur du Khorassan , le nouveau wali de
Géorgie, Khosrou-Khan , 1125 (1713), enfin
Roostem-Khan, autre général géorgien. Il mou-
rut en 1127 (1715). Son frère et successeur Mir-
Abdallah offrit de reconnaître la suzeraineté du
schah, à condition de ne point payer tribut
Ce projet le rendit odieux aux Afghans; il rut
poignardé en 1130 ( 1717) par son neveu Mir-
Mahmoud, qui rompit les négociations avec le
schah. L'exemple des Afghans fut imité de plu-
sieurs autres nations voisines ou tributaires.
Les Courdes firentdes incursions jusqu'aux envi-
rons d'Ispahan ;les Afghans Afdhalis se rendirent
maîtres de Hérat et les Ousbeks, du Khorassan ;
tes Lesghis ravagèrent le Schirwanetla Géorgie ;
giques, Hussein se contenta d'expulser les pros-
tituées de sa capitale, de faire des processions
et d'implorer le secours du ciel. Ayant fait
des propositions de paix, qui furent repous-
sées , il chargea son fils Tahmasp , successeur
désigné, d'aller chercher des renforts dans les
provinces. Cependant Mahmoud ravagea les en-
virons d'Ispahan et cerna cette ville afin de la
prendre par la famine. Réduits à la plus grande
détresse, ses habitants demandèrent en vain à
être conduits contre l'ennemi ; ils périssaient
chaque jour par milliers. Enfin, au bout de
deux mois , le 22 octobre 1722, Hussein capitula
et obtint la vie sauve en cédant son trône au
vainqueur* Il fut relégué dans un petit palais ,
où il fut tué sept ans plus tard, lorsque les vic-
toires de Tahmasp et Thahmasp Cooli-Khan mi-
rent en péril le trône d'Aschraf , successeur de
Mahmoud. £. Beadvois.
Krastnskt , Mém.; Lemberg, 178». in-»». — Domtj, Hé-
lat., dans Maças. Encyclopéd.,*n. im, t. V.-Mobammed
AU-Hazin, Ltfe t trad. par Belfour ; Londres» 1880, in-8°. —
Corn. Le Bruyn, Voy. — Hanway, Hist. de Perse. —
La Mamye-Clairac, Hist. des Révol. de Perse depuis
te commencer*, de ce siècle; Paris. 1750, L 1, II.
HUSSÉih*-pacha , surnommé Koutchouk
( le petit), amiral turc, né en Géorgie, vers 1750,
mort à Constantinople, le 7 décembre 1803.
Vendu comme esclave dans son enfance, il fut
donné, comme page, au prince Sélim ( III 1 ), qui
était alors enfermé dans le sérail. A l'ayénement
de ce prince, dont il avait gagné la confiance, et
6S*
qui lai fit épouser use de ses cousine» , il fut
nommé eapitan-pacha ( grand-amiral ) v en
1789, et compléta les réformes commencées par
son prédécesseur Ghazi Hassan-Pacha. Des in-
génieurs français et suédois furent mis à la tête
de l'École de Marine fondée par le baron de
Xott, et chargés de la direction des arsenaux et
des chantiers. La Turquie eut bientôt une flotte
de vingt vaisseaux de ligne, Hussein fit exploiter
les mines et les foret» de l'Asie Mineure ; il en-
courage* le commerce des Grecs, et réprima les
excès des levantes ou marins ottomans. Cinq
cents artilleurs turcs, disciplinés par ses ordres,
se signalèrent au siège de Saint-Jean-d'Acre, 11
fut moins heureux comme général que comme
administrateur - Chargé de comprimer la rébel-
lion de Paswan-Oghlou, il ne put s'emparer de
Viddin (1798). Il prit, en 1800,1e commande-
ment de la flotte qui croisa sur les côtes d'E-
gypte, et signa, en 1801, le traité relatif à l'éva-
cuation de l'Egypte par les troupes françaises.
Comme il aimait la France, il disposa Selim III
à renouer des relations amicales avec cette puis-
sance. Apre» sa mort, ses projets de réforme furent
abandonnés. Hussein était passionné pour les
arts, éclairé^iuroain, généreux, et il affranchit un
grand nombre de ses esclaves. Son intégrité et
sa sévérité à l'égard des concussionnaires l'a-
vaient rendu cher au peuple. Beauvois.
Castettm, Lettres sur t* Gré». — Jachère» dé
Denis, Hist. de l'Empire Ottoman, t. 1,397; H, tôt. —
Moniteur universel* an xit, p. 501.
Husséin-PACHA, dernier dey [ou plutôt
. Doï, oui signifie missionnaire] d'Alger, né
à Srayrae vers 1773, mort à Alexandrie en
1838. Quoique issu de parents obscurs, il reçut
une assez bonne éducation, apprit à écrire le
turc et l'arabe, et fut plos tard considéré comme
l'un des hommes les ptas instruits de ses États*
Après avoir exercé le commerce, il entra dans
la milice algérienne, et devint ministre de
l'intérieur sous Ali-Pacha. Le 1 er mais 1818,
l'armée l'état pour succéder à ee dey, qui, selon
les uns, était mort de la peste , ou ojni , selon
d'autres, avait été assassiné pat Hussein. Le
nouveau dey établit sa résidence dan» la fer*
teresse appelée Casbah, oè il resta continuel-
lement enfermé et enHvré de ses troupes. Il
gouverna avec justice, se montra tolérant en
matière de religion et adoucit l'esclavage des
chrétiens. Il n'entreprit jamais d'expédition pour
piller ses sujets ou les tribu» de l'Algérie, et ne
donna que peu d'encouragements aux corsaires.
Aussi les différend» qu'il eut avec l'Espagne, la
Hollande et la France, eurent peur sujet, non
des acte» de piraterie, mais des affûta» nétu-
niaires. Dès les premières années de son règne,
il porta de 17,009 à 200,000 francs la somme
annuelle que kt France devait lui paye* pour les
Concession» d'Afrique (établissements su* M
côte de Barbarie) et peur la pèche du cesaR
dans te» eaux de m Régence* II réclama en
HUSSEIN 636
outre, à la même nation, quatorze millions,
comme créancier de deux Juifs algériens, Bacri
et Busnach, qui, sous la république, avaient
fourni des grains aux armées françaises d'E-
gypte et d'Italie. Par une transaction, du 28 oc-
tobre 1819 , cette somme fut réduite de moitié,
et il reçut en 1820 quatre millions et demi. Mais
le rente fut déposé à. la caisse des dépôts et con-
signations, à la requête de quelques Français,
créanciers des deux Israélites. Impatienté de la
lenteur des procédures , le dey fit éprouver di-
verses avanies aux commerçants français, et
écrivit à Charles X pour réclamer de lui le reste
des sept roiiUona. Après avoir vainement at-
tendu une r épo ns e , il demanda des explications
au consul De val, qui, dit-on, répliqua : « Mon
mettre ne> répond pas à un chien comme toi. » Ces
•Broies outrageantes rai firent oublier la qualité
de son interlocuteur ; il le frappa au visage d'an
coup de ehasee-mouche, s'adressant, comme il
rassura plus tard, non au fonctionnaire publie,
mais à l'homme priv^. Le gouvernement fran-
çais embrassa la cause de son agent, et fit blo-
quer les ports de la régence (1827 )- La flottille
employée à cet effet ne suffit pas pour anéantir le
commerce algérien ni à réduire le dey A lake des
excuses. Le blocus durait depuisdéux ans et avait
déjà coûté vingt millions , lorsque Charles X
chargea le comte de La Bretonnière d'entrer en
négociations avec Hussein (juillet 1829). Les
propositions de son eavoyé ayant été repoussées,
il résolut de tenter un grand coup, dans l'espoir
nue le succès de ses armes à l'extérieur ratier-
insrait son trône menacé à l'intérieur. Le vice-
amiral Duperré lut mis A la tète d'une flotte
de onze vaisseaux de ligne, vingt frégates et
soixante-dix autres embarcations, qui por-
taient 27,000 marins, et 41,000 soldats, com-
mandés par fe comte de Bourraont, ministre de
la guerre. Ces forces arrivèrent devant Alger le
13 juni 1830, et effectuèrent leur descente, dès le
lendemain, sur la prescpi'îlade Sidi-Ferrucb, à
cino; lieues à l'auutt d'Alger. Pendant que la
flotte canonnait la ville , l'armée de terra rem-
portait divers avantages sur les Arabes, fort su-
périeurs eu membre, et allait assiéger le Fort
P Empereur ( Sultanieh Calassi), qui protégeait
hr Casbah. Les Français étaient sur le point de
donner l'assaut, lorsque les assiégés firent
sauter le fort (4 juillet 1830). Le dey fit alors
des ouvertures aux commandants français, et,
te 5 juHlet, H livrai* capital stipulai pour kn
la faculté de quitter U régence avec sa famille,
et , pour se» troupes et ses sujets, la liberté de
culte et le respect des propriétés. On lui laissa
dix mittionade son trésor particulier. Aprèsavoir
visité Nantes, Lrvouvne, Paris, Fex-dey alla s'e-
tabtir a Smyvne, puteà Alexandrie, ou il passa
lé teste de sa ri#* E. B.
Moniteur universel, \tiÛ'-î8S6. - R«Mta?, i
dès- Contemporain», Snp^ém. — A. de Vartatette, Hiek
*•£»•» Jteifcmrrt, S* Mit., t. vjj» cb. vu - De la»
HUSSEIN — HUTCHESON
Bitt. de la C«Hr
637
tailler, OM*.*? Alger. - A,
quête d'Alger; Pari», i857Jn-8°.
«Hcssoar (Eugène- Alexandre), général et
sénateur français, né à Reims (Marne), le
19 mars 1786. II entra en 1803 à l'École Mili-
taire de Fontainebleau , et fc en sortit Tannée sui-
vante avec le brevet de sous-lieutenant dans le
25 e léger, quî faisait alors partie du camp de
Montrerai. Il fit les campagnes de 1805 à 1808
en Autriche , en Prusse , en Pologne et en Es-
pagne, et se signala à la prise de Michael-Berg,
devant tflm ; il était déjà adjudant-major lors-
qu'il fut fait prisonnier à la bataille de Baylen, le
19 juillet 1808. Transporté d'abord dans l'tle de
Cabrera, il fut ensuite jeté sur les pontons cTAn-
gleterre, où il subit une rude captivité de six ans.
Rentré en France après les événements de 1814,
il entra comme capitaine adjudant-major dans
le 1 er régiment d'infanterie légère, fit la cam-
pagne de 1815, et se signala au combat des
Quatre-Bras, où il fut blessé. La seconde res-
tauration le conserva dans les rangs de Tannée :
il fut nommé chef de bataillon le 19 mai 1819, et
fut désigné pour faire partie de la légion du
Loiret, fi quitta le service en 1822, et se distin-
gua dans les rangs du peuple durant les journées
de juillet 1830. Il rentra avec son grade dans le
57 e de ligne, devint successivement lieutenant-
colonel du 33 e de ligne le 25 avril 1832, colonel du
42 e le 1 er janvier 1838 et maréchal de camp le
20 avril 1845; il commanda le département de
l'Aube, jusqu'en 1848, époque à laquelle le gou-
vernement provisoire le mit à la retraite. Il fat
élu à l'Assemblée législative et élevé le 26 janvier
1 852 àtadignité de sénateur. M. Husson est grand-
officier de la Légion d'Honneur depuis 1854. Il a
publié : plusieurs petits Manuels à l'usage des
Sous-Officiers et Soldats (1819-1822); — Les
Maximes de guerre de Napoléon l* annotées
( 185Ô*), ouvrage traduit dans plusieurs langues;
— Pensées et Maximes de tempereur Napo-
léon (1852). SlCàBD,
Biographie des Menâtes Au Sénat ( f*»}. - L'Album
de la Semaine (Util).
;njussan (Jean-Boneré^Aarietide), sculp-
tear français, né à Patte le % juillet 1683. Élève
de David (d'Angara), il remporte en 1*27 le se-
cond grand nm, et ci 1830 te prenier prix;
le sujet da concours était Thésée vainqueur du
Affréteur*. A reupofitieB d* i*37 il reçut te
grande alésante d*r non» ua gratifie de Marbre
aussi remaiifejbto par Vei^ttett que par te
pensée : VAnge earééen offrant à Dieu un
pécheur repentant; ev bes* groupe est placé
au musse du Lmemtewrg. Pawâlesouvrages de
cet habile arttat** nées sigaatemi» î engrenée
iVAdam et Eve, lttt, a» «aisée 4* Saint-Omar ; ,
— Dante tt VirçiU, bas*reftef, au Musée de
Boulogne-ser-Mer ; — «ne Tête de Moine, 1836;
— tes statues de BaiUp et de Voltaire pour te
faeadederadtei deviHe de Paris; •— L'Été et
L'Automne, figures colossales pour Tune des fon-
taine» de te place de te Goac*urdt, lââft* — te
688
buste en marbre du roi Louis-Philippe pour
l'Académie de France à Rome , 1840; — te sta-
tue de Saint Bernard pour l'église de te Made-
leine, 1844 ; — tes bustes de Gouvum Saint-Cfr,
de Boissg d'Anglas et du Chancelier Dambrau
pour te chambre des pairs; — Saint Louis r
Marguerite de Provence t Philippe le Mardi
et te Maréchal Suehet peur te Musée de Ver-
gailtet; ~* Marguerite de Provence et Bus-
tache Lesueur, statues eu Marbre pour te jardin
du Luxembourg ; — te statue de Dugueselim ,
et oae Victoire poar tes funérailles de Napo-
léon 1 er , tftto, saisi que les Quatre Cariatides
do bateau catafalque et les quatre Trophées du
catafalque des Invalides ; — Deux Anges en
adoration poar Saint-Viucent-de-Paal, figures
en bois, 1844; ~~ B aidée, délicieuse statue de
marbre, 1650, placée au Musée de Grenoble ; —
CknHs pour Sainte-Ctotikte, 1851$ — pour te
Louvre trois statues en pierre . Eustaehe Le-
sueur , Jacques Sarraein et te Général Desaix.
H exécute en ce moment, 1856, un marbre co-
lossal du- célèbre physicien Coulomb pour te
Conservatoire des Arts et Métiers de Paris.
Doom, inédits.
■gtchksoh (Francis), célèbre philosophe
écossais, né dans te nord de l'Irlande, le 8 août
1694, mort en Ecosse, à Gtescow, en 1747. lient
poar père John Hutchesoa, ministre d'une con-
grégation dissidente (dissenters) ; et lui-même,
après des études commencées en Irlande, mais
achevées à l'université de Gtescow , allait être
installé en qualité de pasteur de cette congréga-
tion, lorsque, cédant à de pressantes sollicita-
tions, H se détermina à aller ouvrir une école à
Dublin. En 1729, c'est-à-dire à l'âge de trente-
âmq ans, il fut appelé à Glascow, pour y oc-
cuper te chaire de ptriteeophie morale, devenue
vacante par te mort de Gerscom Carmichael, le
savant éditeur de Puffendorf. Il y-rempfit pen-
dant dis-huit an» tes fonctions de professeur,
qui, après sa mort, arrivée en 1747, furent con-
fiées h f bossas. Craigie. il compta parmi ses
aaate Tateheveqoe Kiag , Vévêqae Synge,, le pri-
mat Bootter, et terd Metesworth. Il laissa un fils,
nommé Francis r ami publia celles des enivre*
de son aère ont étaient restées manuscrite*. On a
de HntcaesMi : Inquir* into the Original of
our ideasofBeauto mnd Yiriue; Uwires, 1725,
in*?, dedtt à lord Carteret, tord-lieutenant d'Ir-
lande, traÀ en français sur la 4 e édit. anglaise
par EHoas; Amsterdam, 174*, 2 vol. in-12; —
Bssag on the Nature and Conduct of the Pas-
siens and Affections, with ilèusùratkms on
the moral sensé; Lond., 1726, in-8°; - Phi-
leeophUt .meralis InstituHo eempendiaria;
Gtescow, 1742, in-12; — Metaphgsiex Synop-
sis ; Glaetour, 4742 f te-a° 5 — A Short Intro-
duction to moral Philosophy 9 in threebooks;
containing the éléments of ethics and the
law of nature, with the principes efeco-
639
HUTCHESON
640
nomics and politics; translatée from tke
original latin; Glascow, 1747, in-12 ; et 1764,
2 vol. in-8° ; — Réfections upon Laughter, and
remarks on thé fable of the bées; Glascow,
1750, in-12 ; — A System of moral Philosophy
in three books, towhich is prefixedan account
of the life, wtïiings* and charaeter of the au-
thor, bff W. Leechnusn, principal of the col-
lège of Glascow; Glascow, 1755, 2 Toi., in-4°.
Cet ouvrage fut publié par le fils de l'auteur,
d'après les manuscrits laissés par son père. Le
1 er livre traite de la constitution de la nature hu-
maine , le second de la félicité humaine, le troi-
sième de la société civile. Cet ouvrage est pré-
cédé d'une courte dédicace au révérend lord
évéque d'Elphin; trad. en français par Eidous,
1770 ; — Letters concerning the true Founda-
tion of Yirtue, or moral goodness; Glascow,
1772, in-8° : recueillies et publiées vingt-cinq
ans après la mort de l'auteur. 1
Dans ces différents écrits, nous rencontrons
une psychologie, une morale, une théodicée. La
psychologie de Hutcheson est éparse dans les di-
vers ouvrages qu'il a composés. Quelle solution
y apporte-t-il aux deux questions capitales de
cette science, celle des facultés de l'âme, et
celle de l'origine des idées? La même que Locke,
à chacune de ces deux questions. À l'exemple du
philosophe anglais, Hutcheson (1) admet deux
facultés générales, l'entendement et la volonté.
Il reconnaît comme fonctions de l'entendement
la perception extérieure ou sensation , la cons-
cience, le jugement, le raisonnement ; et, comme
fonctions de la volonté, le désir, l'aversion, le
plaisir, la peine. Toutefois, cette liste des fa-
cultés de l'âme n'est pas arrêtée chez Hutcheson
d'une manière tellement absolue, qu'il ne puisse
s'y trouver place encore pour quelques autres
fonctions. De ce genre sont le sens interne et le
sens moral , dont il n'a point parlé dans sa théo-
rie officielle des facultés , mais qu'il mentionne
pourtant dans ses Recherches sur V Origine
de nos Idées du Beau et du Bien , comme des
pouvoirs réels de l'âme. « Je désigne, dit-il (2) ,
par le nom de sens interne la faculté que nous
avons d'apercevoir la beauté qui résulte de la
régularité, de l'ordre, de l'harmonie , et par le
nom de sens moral cette détermination à ap-
prouver les affections, les actions ou les carac-
tères des êtres raisonnables qu'on nomme ver-
tueux. » On a beaucoup reproché à Hutcheson
ces dénominations de sens interne et de sens
moral. Assurément, plusieurs passages de ses
écrits où ces termes sont employés pourraient
avoir plus de clarté et de précision ; mais quand
on envisage l'ensemble, il devient évident
qu'Hutcheson ne les confond pas avec les sens
proprement dits, et qu'il les regarde comme de
véritables fonctions de l'entendement, au même
(i) Système de Philosophie morale. 1. I er , cb. !**• I
•cet. v. \
(l) Recherthes, etc., prêt, de la 4« édition. 1
sens que, chez les Latins;, les expressions de
sensus pulchri, sensus recti f sensus ho-
nesti. Disciple de Locke dans la question des fa-
cultés de l'âme, Hutcheson suit également les
traces du philosophe anglais dans la question de
l'origine des idées. Au début de son grand ou-
vrage, intitulé Système de Philosophie morale,
il distingue les idées en deux classes , lès unes
venant de la sensation et les autres de la cons-
cience. Sa doctrine est', en ce point , tout aussi
affirmative que celle de Locke. « Ces deux pou-
voirs, dit-il (1), la sensation et la conscience,
introduisent dans l'esprit tous les matériaux de
connaissances. Toutes nos idées ou notions pre-
mières dérivent de l'une ou l'autre de ces deox
sources. »
La . morale de Hutcheson est fondée tout en-
tière sur le principe de la bienveillance, qu'il parait
avoir emprunté a Richard Cumberland (voy. ce
nom). Toute action, que nous concevons comme
moralement bonne ou mauvaise, lui parait tou-
jours produite par quelque affection envers les
êtres doués de sensibilité. La tempérance ne lui
parait être un bien moral que parce qu'elle nous
rend plus propres au service du genre humain;
le courage proprement dit serait, à ses yeux., une
vertu d'insensé, s'il ne servait pas à défendre
l'innocent ; enfin la prudence ne lui paraîtrait pas
mériter le nom de vertu, si elle ne favorisait
que notre intérêt; et, quant à la justice, si elle
ne tendait au bonheur de l'homme, elle se-
rait une qualité beaucoup plus convenable à
la balance, son attribut ordinaire, qu'à on être
raisonnable. La morale individuelle et la morale
religieuse n'occupent l'une et l'autre qu'assez
peu de place dans la philosophie de Hutcheson.
Mais il n'en est pas de même de la morale so-
ciale. Nous la trouvons surtout traitée avec beau-
coup de développement au livre II et au livre m
de son Système de Philosophie morale. On
y rencontre une série de chapitres sur les no-
tions générales qui concernent les droits et les
lois, sur la nécessité de la vie sociale, sur les
contrats qui lient entre eux les membres de la
société civile, sur les motifs qui président à l'é-
tablissement des gouvernements. Ici, le traité
de Hutcheson prend un caractère plus politique
encore que social, et nous voyons ce philosophe
aborder la question des droits des gouvernants,
celle des différentes formes de gouvernement,
celle des avantages et des inconvénients attachés
à ces différentes formes. Après avoir partagé les
différents modes de gouvernement en deox ca-
tégories, d'une part les modes mixtes, qui peu-
vent être assez variés, et d'autre part les modes
simples, qui sont la monarchie, l'aristocratie, la
démocratie, Hutcheson estime qu'une forme
mixte, qui résulterait de la combinaison de ces
trois modes simples, neutraliserait les inconvé-
nients de chacun d'eux et maintiendrait leurs
fi) SfStèmê 4e Philosophie morale, h \ } e.i, teet 4.
641
HUTCHESON — HUTCHINSON
642
avantages. On reconnaît dans cette conclusion
l'optimisme habituel du citoyen anglais, invinci-
blement convaincu de l'excellence de la consti-
tution de son pays.
La théodicée de Hutcheson se rencontre plus
particulièrement dans son Système de Philo-
sophie morale. Le chapitre rx du livre I er de
cet ouvrage traite, avec de grands détails, des
justes notions que nous devons nous faire de la
nature de Dieu. Les preuves que le philosophe
écossais apporte de l'existence de Dieu sont ti-
rées : l°du plan général. de Trouvera; 2° de la
structure du corps des animaux; 3° de la pro-
pagation des animaux ; 4° des rapports du Soleil
et de l'atmosphère avec la Terre que nous ha-
bitons et avec le corps des animaux. Ces preu-
ves appartiennent exclusivement à l'ordre phy-
sique. Il est regrettable que sur ce point, comme
sur plusieurs autres déjà signalés, notre philo-
sophe se soit montré le trop fidèle imitateur de
Locke, et qu'il ait écarté les arguments méta-
physiques, ou, comme les appelle Fénelon, les
preuves tirées des idées intellectuelles. La ques-
tion de l'existence de Dieu est, dans Hutcheson,
suivie de celle de ses attributs. Celui sur lequel
il insiste plus spécialement est la bonté , qu'il
prouve par l'excellence du plan de l'univers.
Rencontrant sur sa route l'objection tirée de
l'existence du mal, il y répond, comme l'ont fait
saint Thomas et Leibnitz, par cette simple et
si judicieuse réflexion, que l'être tout-puissant
a permis l'existence de quelque mal pour faciliter
l'existence d'un plus grand bien. Cette question
de l'existence du mal, en tant que liée à ceHe
de la véritable fin de l'homme, sert de transition
an philosophe écossais pour aborder le problème
de l'immortalité de l'âme et de la vie future. Il
s'attache à démontrer : 1° que l'attente d'une
vie à venir est universelle ; 2° que la preuve du
contraire est impossible; 3* que l'âme se dis-
tingue du corps; 4° que la nécessité d'un état
futur se déduit directement de l'harmonie con-
çue par la raison entre la vertu et le bonheur et
de l'insuffisance de cet accord ici-bas.
Les qualités de Hutcheson comme écrivain
sont la clarté, l'élégance, l'abondance. La psy-
chologie , la morale, mais surtout la morale so-
ciale et politique tiennent la place la plus con-
sidérable dans ses écrits. A ce titre, Reid, Fer-
guson et Beattie sont ceux des philosophes, ses
compatriotes et ses successeurs, avec lesquels il
offre le plus d'analogie. Les traits qui caracté-
risent spécialement ces philosophes se trouvent,
par une heureuse alliance, réunis en Hutcheson,
et l'on ne saurait méconnaître en lui non-seule-
ment le fondateur, mais encore le représentant
le plus complet de l'école écossaise. C. Mallet.
Notice sur la Fie, les Écrits et le Caractère de V Auteur
(Hutcheson), annexée, en forme d'introduction, au Sys-
tème de Philosophie morale, par le révérend William
Lechman, professeur de théologie en l'université de
Gtascow (Glascow et Londres, 1755). — Notices bibliogra-
phiques sur l'École écossaise depuis Hutcheson jusqu'à
NOUV. BIOGB. GENSR. — T. XXV.
nos jours, par Joaffroy, daas sa traducUon des Œuvres
complètes de Reid, t. 1« p. CCXXV de rédlUon de 1835.
— Cours de F Histoire de la Philosophie morale au dix-
huitième siècle, par V. Cousin, école écossaise, publiés
par MM. Danton et Vacherot, leçons II et III; Paris, Il W. -
DicL des Sciences philosophiques, art. Hutcheson,
hutchins (John, archéologue anglais, né
en 1698, à Bradfort-Peverell ( comté de Dorset),
mort à Wareham en 1773. Il fut élevé au col-
lège Baliol à Oxford, entra dans les ordres, oc-
cupa successivement différentes fonctions ecclé-
siastiques, et finit par obtenir le rectorat de l'é-
glise de la Sainte-Trinité à Wareham, où il mou-
rut. 11 commença en 1737 à rassembler des maté-
riaux pour une histoire de son comté natal. Elle
parut après sa mort sous ce titre : The History
and Antiquities of the County of Dorset;
Londres , 1774,3 vol. in-fol.; et Londres, 1796-
1803, 4 vol., avec des planches et des articles
d'histoire naturelle fournis par le docteur Pul-
teney et d'autres savants. Z.
Chalmers, General Bioçraphical Dictionary.
hutchins (Thomas) , géographe des États-
Unis d'Amérique, né dans le comté de Monmouth
(New- Jersey), vers 1730, mort en 1789. H entra
dans l'armée anglaise, et se distingua contre les
Indiens dans la Floride occidentale. Il obtint un
régiment, mais il y renonça par attachement
aux intérêts de son pays. Se trouvant à Lon-
dres en 1779, et soupçonné d'entretenir une
correspondance avec Franklin, alors représentant
des États-Unis en France , il fut arrêté. Remis
en liberté peu après, il alla rejoindre l'armée {du
général Greene à Charlestown, et fut nommé
géographe général des États-Unis. On a de lui :
An historical Sketch of the Expédition of
Bouquet, against the Indians ofOhio in 1764»
publié en 1765 ; — A topographical Descrip-
tion of Virginia , Pensylvania, Maryland
andCarolina, withmaps; Londres, 1778; —
An historical Account and^topographical
Description of J/misiana, West-Florida and
Philadelphia ; 1 784. Z.
Rose;, New Gen. Biogr. Diction. — Cbaudon et De-
landine, Nouveau Diction. Hist., Soppl. (18U).
HUTCHI3SON (John), hébraïsant et natura-
liste anglais, auteur d'une interprétation mystique
et cabalistique de la Bible, né en 1674, à Spenni-
thorne (comté de York), mort le 28 août 1737.
Après avoir reçu à la maison paternelle une
excellente éducation, il devint à l'âge de dix-
neuf ans intendant de M. Batburst. Il passa en-
suite au service du duc de Somerset, qui lui donna
de nombreuses marques de confiance. Devenu
grand-écuyer de Georges 1, le duc de Somerset
le nomma son riding purveyor (intendant des
éeuries). Cette sinécure, qui rapportait deux
cents livres sterl. par an, permit àHutchinson de
cultiver ses deux sciences favorites, la minéra-
logie et l'histoire naturelle. Il rassembla une ri-
che collection de fossiles, et il la remit avec ses
propres observations auD r Woodwarth pour que
celui-ci. les arrangeât et les publiât. Woodwarth
ne s'acquitta pas de cette mission et la transmit
ai
643
HUTCHINSON
644
à l'université de Cambridge, à laquelle il légua la
collection. En 1754, Hutchinson publia la pre-
mière partie d'un curieux ouvrage intitulé Jfo-
seis Principia, dans lequel il tourna en ridicule
Y Histoire naturelle de la IferredeWoodwarth,
et tenta de réfuter la doctrine de la gravitation
établie dans les Principta de Newton. Dans k
geconde partie de cet ouvrage, publiée en 1727,
il continua ses attaques contre la philosophie
newtontehne, et soutint que l'existence du plein
était fondée sur l'autorité de l'Écriture. Depttis
cette époque jusqu'à sa mort, il fit paraître par
an un ou deux volumes écrits d'an style décousu
et incorrect, mais attestant, malgré beaucoup
d'erreurs, une connaissance profonde et étendue
des livres hébreux.
Suivant Hutchinson, 1* Ancien testament con-
tient un système complet d'histoire naturelle, de
théodicée et de religion. L'hébreu, ayant été le
moyen de communication entre Dieu et l'homme,
est une langue parfaite; comme langue parfaite,
elle s'étend à tous les objets de connaissance, et
ses termes signifient véritablement les objets
oiilis désignent, en expriment la réalité, et n'en
sont pas des signes représentatifs arbitraires.
Hutchinson, partant de ce principe, attacha une
extrême importance attxétymologieshébrafejues,
et soutint que l'Écriture ne devait pas être com-
prise et interprétée selon le sens littéral et ap-
parent, mais selon le sens plus profond que ré-
vélait la valeur des radicaux de la langue. H est
clair qu'avec un pareil système on peut trouver
dans la Bible tout ce que Ton veut, de là physi-
que, de la métaphysique aussi bien que de l'his-
toire et de la théologie. Voici, d*après les éditeurs
des œuvres de Hutchinson, un abrégé de la phi-
losophie qu'il crut y découvrir ? « Les Écritures
n'attribuent nulle part le mouvement au Soleil,
ni la stabilité à la Terre ; elles représentent le
système créé comme un plein (plénum) sans au-
cun vide (vacuum); elles rejettent l'assistance
de la gravitation, de l'attraction et de toute autre
qualité occulte pour accomplir les opérations de
la nature, qui sont exécutées par le mécanisme
des cieux dans leur triple état de feu, lumière et
esprit ou air, agents matériels mis en œuvre dès
le commencement des choses. Les cieux, ainsi
formés par la sagesse toute-puissante, sont l'em-
blème, le substitut visible de Jehovah Aleim, l'É-
ternel-Trois, la co-égale et co-adorable Trinité
dans l'Unité. L'unité de substance des cieux ex-
prime l'unité d'essence de la Divinité, et la dis-
tinction de leurs trois états, sa triple personnalité,
sans confondre les personnes ou diviser la sub-
stance. C'est parée qu'ils sont des emblèmes que
les cieux sont appelés en hébreu shemin, noms,
représentâtes, substituts, exprimant par leurs
noms qu'ils sont des emblèmes, et par leurs états
et offices de quelles choses ils sont les emblèmes. »
Voici un exemple de ce genre d'interprétation éty-
mologique : le mot berith, que les traducteurs
rendent par centrai, signifie suivant Hutchinson
celui ou ce qui purifie, le purificateur ou k
purification. De ces étymologies il tire la con-
clusion que tous les rites et cérémonies des Juifs
étaient des figures de Jésus-Chist, de ce qu'il de-
vait être, faire et souffrir, que les premiers Juifs
savaient que ces rites étaient en effet les figures
de ses actions et de ses souffrances , et qu'en les
accomplissant ainsi, ils étaient chrétiens par la foi
et la pratique. Une complète édition des œuvres
de Hutchinson parut sous ce titre ; Thephiloso-
phicaland theological Works ofthe latetruly
leqrned John Hutchinson ; 1748, 12 vol. in-8°.
Les vues philologiques et exégétiques de Hut-
chinson trouvèrent de nombreux partisans qui,
sans constituer un corps de doctrines, prirent le
nom de hutchinsoniens. Les plus éminents
sont l'évêque Horner et son biographe William
Jones, Romaine, Julius Bâtes, le lexicographe
Parkhurst, le D r Hodges,le D r Wetherell, maître
du collège de l'université à Oxford, Holioway, au-
teur de Letter and Spirit, et Lee, auteur de
Sophron, or nature'* characteristks oj truth.
Il existe encore un petit nombre de sectateurs
de la doctrine Hutchinsonienne, Z.
Ffoy, Btbliotheea Moçriphic*. vol- III. - Chaîner*,
General Biographioal Dtctiontfy. — Ençlùh Cycb-
psedia ( Biography ).
hutchinson ( Thomas ) , homme d'État
anglo-américain, né à Boston, en 1711 , mort le
3 juin 1780, Il fut élevé au collège de Harvard,
et y prit ses grades en 1727. Il suivit d'abord la
'carrière commerciale, ne réussit pas, et se tourna
du coté de la jurisprudence. La ville de Boston
l'envoya comme son agent à Londres en 1738,
et Hutchinson s'acquitta de cette mission avec
un succès qui le fit appeler à des places plus im-
portantes* Membre pendant dix ans de la chambre
coloniale du Massachusetts > il en fut le prési-
dent pendant trois ans» Il fit partie du conseil de
la colonie de 1749 a 1766, et fut lieutenant-gou-
verneur de 1758 a 1771. Dans l'intervalle il fut
nommé grand-juge (càief-justice), en 1.760. Hut-
chinson remplit ces fonctions politiques et ju-
diciaires à une époque difficile où le méconten-
tement toujours croissant de la colonie contre b
métropole menaçait d'aboutir à une rupture.
Soupçonné d'être favorable aux prétentions de
l'Angleterre et particulièrement au fameux acte
du timbre, il vit une populace furieuse assaillir
deux fois sa demeure. La seconde fois, le 26 août
1765, les portes de sa maison furent*forcées, son
argenterie et sa garde-robe pillées, ses meubles
brisés. Son impopularité le servit auprès du
ministère anglais, qui le nomma en 1770 gouver-
neur de Massachusetts. U n'hésita pas à con-
seiller à la métropole des mesures de violence.
Les lettres confidentielles où il exprimait cet avis
tombèrent entie les mains de Franklin, alors
agent de la colonie à Londres ; celui-ci les trans-
mit à ses compatriotes, qui demandèrent au roi
d'Angleterre la destitution do gouverneur. La
conduite de Hutchinson Tut approuvée par les
645
HUTCHINSON — HUTH
646
ministres, 'et H resta en place jusqu'à l'arrivée
du général Gage, le 13 mai 1774. U partit quel-
ques jours après pour l'Angleterre, ne reçut
qu'une modique pension, et alla mourir à Bromp-
ton, oublié du gouvernement, auquel il avait sa-
crifié les intérêts de sa patrie. On a de Hutchtn-
son : History of the Colony of Massachusetts
£ay,fromitsfirst seulement in 1628 to the
year 1750; 1760-1767, 2 vol. in-8°; — A Col-
lection of original Papers relative to the His*
tory of the Colony of Massachusets ; 1769»
in-8°. Z.
Cyclopadia of American Literature, t. I, p. 190. —
S parka. American Biography, t. H (Life of James Otis).
— Rose, New General Bioçraphical Diction.
hutchinson ( John-Hely ), jurisconsulte
anglais , né en Irlande, en 1715, mort en 1794.
11 s'éleva jusqu'au poste de secrétaire d'État, et
cumula beaucoup de sinécures lucratives. Son
avidité fit dire un jour au premier ministre, lord
North : « Si vous donniez à Hutchinson l'An-
gleterre et l'Irlande, il vous demanderait encore
l'île de Man pour en faire un jardin. » Z.
Rom, New General Biograpkical Dictionarp.
hutchinson {Richard- Hely), comte de
Donocgbmore, homme d'État anglais, fils aîné
du précédent, né à Dublin, le 29 janvier 1756,
mort à Londres , le 25 août 1825. 11 étudia le
droit à Oxford , et prit le grade de docteur
au collège de La Trinité, à Dublin, dont son père
était prévôt. Élu en 1779 représentant de la ville
de Cork, il défendit, mais avec réserve, les ca-
tholiques', et fut nommé en 178 i directeur des
douanes royales. En 1794 il leva un régiment, le
94 e , que commanda son frère John Hutchinson.
Lui-même eut, comme lieutenant-colonel du 1 1 2*,
à réprimer l'insurrection do comté de Cork, et
fl s'acquitta de cette tâche avec beaucoup de mo-
dération. Nommé en 1 800 comte deDonoughmore
et appelé à siéger dans le parlement anglais
comme un des trente pairs qui représentaient
l'Irlande, il continua d'être l'avocat des catho-
liques, et fit de l'opposition aux différents mi-
nistères qui se succédèrent de 1807 à 1820. A
cette dernière époque il se rapprocha du gouver-
nement à l'occasion du procès de la reine Caro-
line et fut créé pair du royaume uni en 1821.
Quoique devenu ministériel, il ne cessa pas d'être
partisan de l'émancipation des catholiques irlan-
dais, mais il mourut avant d'avoir vu le triomphe
de cette cause. Z.
EnglUh Peerage. - AHnualObUuaty.- CtmverêaHam
IjtaHkon.
hutchinson (John-Bely) t comte de Do-
moughmorb, général anglais, frère du précédent 1 ,
né le 15 mai 1757, mort en 1832. Après avoir
tait ses études au collège d'Eton, il entra au ser-
vice en 1774 eomme cornette , devint capitaine
en 1776, et fut élu, l'année suivante, membre du
parlement pour Cork. Il alla ensuite perfectionner
son éducation militaire sur le continent, et il >
se trouvait en France lors de l'invasion des Prus-
siens en 1792. De retour en Irlande, il s'unit à
son frère pour lever un régiment, et en fat nommé
colonel en 1794. Il fit la campagne de Flandre
contre les Français comme aide de camp de
sir Ralph Abercrombie, fut ensuite employé en
Irlande contre les insurgés , et commandait en
second à la bataille de Castlebar. En 1796 il ob-
tint le grade de major général, et en 1799 il se
distingua dans l'expédition du Helder. Général en
second dans la campagne d'Egypte, puis général
en chef après la mort de sir Ralph Abercrombie,
il força les Français à s'enfermer dans Alexandrie,
puis à capituler au mois de juillet 1801. Ce succès
lui valut une pairie avec le titre de baron Hut-
chinson d? Alexandrie et de Knocklofty. Moins
heureux ou moins habile comme diplomate, U
ne remplit pas au gré des ministres la mission
qui lui fut confiée en 1806 auprès du roi de
Prusse et de l'empereur de Russie. La demi-dis-
grâce qui suivit son ambassade le jeta dans
l'opposition. Ses attaques contre le ministère ne
l'empêchèrent pas d'être élevé au grade de gé-
néral en 1813. En 1620, envoyé à la reine Ca-
roline pour lui proposer un arrangement, il eut
une entrevue avec elle à Saint-Omer, et ne put
la décider à renoncer à ses droits. Devenu en
1825 comte de Donoughmore, il laissa en mou*,
rant son titre à son neveu Jotm-Hély Hutchin-
son, connu pour avoir pris part à l'évasion de
Lavalette. Z.
Rose, New Gênerai Bioçraphical Dictionarf. -Rabbe,
Biographie universelle des Contemporains. — Dupln,
Procès des trois Anglais Rob.-Thom, fTUson, John-Efy
Hutchinson et Mich. Bruce; Paris, 1816, l»-8*.
huth (Georges-Léonard), naturaliste et
médecin allemand, né à. Nuremberg, le 29 mars
1 705, mort en cette même ville, le 24 février 1 76 1 .
Il étudia à Leyde sous le célèbre Boerhaavc, et
collabora, depuis 1733, au Commercium littera-
rium ad rei medicx et scientiœ naturalls in-
crementum institutum. Il fut membre de l'Aca-
démie des Curieux de la Nature, sous le nom
A r ffygienus lî> et exerça la médecine à Nurera-
berg. On a de lui : Angenehmer und nuetzli-
cher Zertverlreibmît Betrachtung curieuser
Vorstellungen aller hand kriechender, flie-
gender und schwimmender Thiere, nach der
Natur gezeichnet gemalet und inKupferges-
tochen ( Passe-temps agréable et utile , accom-
pagné d'observations sur diverses espèces d'ani-
maux aquatiques,de reptiles et d'oiseaux, dessinés
et gravés d'après nature)'; ibid., 1748-1752,2 vol.
in-folio ; — Sammlung verschiedener auslaen-
discher und seltener Voegel, mit illuminirten
Abbildungen von Seligmann (Collection de diffé-
rents oiseaux exotiques et rares, avec des plan-
ches enluminées de Seligmann); Nuremberg, 1749,
in-folio; — ffortus nitidissimus omnem per
annum superbiens floribus , s. amœnissimo-
rum florum imagines quas magnis sumptibus
collegit Chr. -Jacob. Trew, ipso vero annuente
in eas incisas vivisque cotoribus pictas; Nu-
remberg, 1750. Les descriptions latines et al-
lemandes jusqu'à la lettre E appartiennent h
21.
647
HUTH — HUTTEN
€48
Huth; celles qui suivent et toute la seconde
partie ont été écrites par C.-J. Murr ;*— Pis-
cium, serpentum, insectorum, aliorumque
nonnullorum animalium, necnon plantarum
quarundam Imagines quas Mare. Catesby
descripsit ; additis vero imaginibus piscium
tam nostratium quant aliarum reçionum
auxerunt vivisque coloribus pictas ediderunt
Eisenberger et Lichtensteger ; Nuremberg,
1750, in-folio.; — un grand nombre de traduc-
tions de l'anglais et du français. R. L.
Binching, Handbuch. — Will, Nuremberg. Gelehrt.
Lex. — Ersch et Grnber, EncyMlopsedie.
* hutin (Charles) y peintre français, né à Paris,
le 4 juillet 1715, et mort à Dresde, le 29 juillet
1776. Élève de François Lemoine, il remporta
en 1736 le grand prix de peinture, et, pendant
son séjour à Rome, se livra à la sculpture, sous
la direction de Slodtz. Dix ans plus tard, il se
rendit à Dresde, où il s'établit définitivement , et
fut admis à l'Académie des Beaux- Arts ( 1747) ;
son morceau de réception fut un Coron en
marbre blanc. En 1768, il devint directeur de
cette compagnie. La plupart de ses oeuvres
sont disséminées à l'étranger; il cultivait le genre
et gravait aussi à ieau-forte. Nous citerons
parmi ses meilleurs tableaux : Jeune Fille te-
nant une lettre, au musée de Dresde; — Un
Homme conduisant du vin sur une charrette
et Une Femme allumant le feu , tous deux au
musée de Madrid ; — le tableau d'autel et le pla-
fond de la nouvelle église catholique de Dresde.
Le frère de cet artiste, Pierre Hotin, gra-
veur et sculpteur, élève de G. Goustou, a résidé
avec lui à Dresde, et y a laissé quelques-unes de
ses œuvres. P. L— -t.
Siret, Les Peintres de toutes les Écoles. — Dussteox,
Les Artistes français à l'étranger.
hutteau {François), jurisconsulte français,
né à Malesherbes (Beauce), en 1729, mort à
Paria le 27 juin 1807. Reçu avocat en 1757, il
s'abstint de paraître au barreau lors de l'exil
du parlement en 1771, et ne reprit l'exercice
de sa profession que lorsque Louis XVI eut
rétabli l'ancienne magistrature. En 1786, il fut
nommé membre de l'assemblée provinciale de la
généralité d'Orléans. En 1787, il présenta au roi
les doléances des six corps de Paris dont il était
l'avocat. Député de Paris aux états généraux, il
fut le seul de sa députation qui signa les pro-
testations de la minorité contre les décrets qui
anéantissaient le pouvoir monarchique. Il quitta
Paris la veille des massacres de septembre, et se
retira à Malesherbes. Santerre vint pour l'arrêter
en 1793; mais l'assemblée populaire déclara que
Hutteau était le père des malheureux, et on le
laissa libre. Cet avocat se faisait souvent remar-
quer au barreau par sa présence d'esprit et par
sa gaieté. Un jour il plaidait une question assez
aride, et les juges s'assoupissaient. Hutteau, qui
s'en aperçoit, frappe sur le- barreau en s'écriant :
« Oui, messieurs, prœscriptio eurrit inter dor-
mientes» ; et les magistrats, réveillés en sursaut,
prêtèrent en riant une oreille attentive à la plai-
doierie. Louis XVIII, voulant récompenser dans
les enfants de Hutteau le dévouement de leur
père, leur accorda des lettres de noblesse. La col-
lection de ses mémoires judiciaires forme 26 vo-
lumes in-4°. Guyot DE FÈRE.
Feller, Dictionn. Histor.
hutten ( Ulric de), célèbre promoteur du
protestantisme, naquit à Steckelberg, le'22 avril
i486, et mourut le 29 août 1523. Son père, appelé
également Ulric, était un digne gentilhomme qui
fit la guerre sous l'empereur Maximilien, notam-
ment contre les Turcs, et sa mère Ottilia ap-
partenait aune ancienne et noble famille, les
Eberstein. On a peu de détails sur son enfance;
seulement, il raconte lui-même qu'à l'âge de
onze ans ses parents le conduisirent au monas-
tère de Fulda dans l'intention de l'y faire élever
pour l'état ecclésiastique , et même dans l'espoir
de le voir revêtu un jour de la dignité d'abbé de
cet illustre établissement Jean II, qui occupait
alors cette position, étant lié d'amitié avec le
père d'Ulric de Hutten, qui dès lors annon-
çait des 'dispositions peu ordinaires, encoura-
geait cette ambition paternelle. U se présenta
un autre protecteur du jeune Ulric : c'était le
chevalier Eithelwolf de Stein. Grand amateur
des chefs-d'œuvre classiques, Eithelwolf encou-
rageait tous ceux chez qui il rencontrait le goût
des sérieuses études. Cependant à l'égard d'Ul-
ric , il ne pensait ni connue le père ni comme
l'abbé, et chercha à détourner le premier de
l'idée de vouer son fils à la carrière monas-
tique, et il reprocha à l'autre, en ces ternies que
l'histoire a recueillis, de vouloir égarer son élève
dans une vocation pour laquelle il n'était pas
fait : « Tu ne hoc ingenium, perderes », écri-
vait-il à l'abbé.
Eithelwolf de Stein avait deviné Hutten; cinq
ans plus tard, après avoir continué avec ardeur
ses études, ce dernier, trouvant trop étroit l'hori-
zon d'un monastère, quittait secrètement l'ab-
baye de Fulde, au grand regret de ses supérieurs
et de son père. Il se rendit à Erfurt, dont l'uni-
versité était alors très -florissante. Il s'y lia
avec la jeunesse ardente et avide de savoir qui s'y
trouvait : c'était Crotus Rubianus, l'homme qui
poursuivaitde sa mordante ironie les moines et les
savants; c'était Eoban Hesse, si renommé ensuite
comme poète latin; enfin Pierre Eberbach et
quelques autres devenus également célèbres. Hut-
ten poursuivit avec plus d'ardeur que jamais ses
études de la littérature antique, tandis que des
amis, des parents , entre autres le même Eithel-
wolf de Stein, son cousin Frobin et Louis de
Hutten pourvoyaient à ses besoins. Une maladie
pestilentielle, jusqu'alors inconnue dans l'Ancien
Monde, ayant éclaté à Erfurt, il quitta cette ville
en 1505 pour se rendre avec son ami Crotus à
Cologne, où les scolastiques tenaient encore le
seeptre universitaire. Les coryphées de cette
I secte étaient Ortuinus Gratius , Jacques Hog-
649
HUTTEN
650
straten, Arnold Tungern, tons ceux enfin que l'on
surnommait les obscurantistes (Dunkelmœn-
ner). Hutten s'escrima quelque temps sur le syl-
logisme ; mais il se dégoûta bientôt de ce labeur
stérile, et revint à l'étude des chefs-d'œuvre de
l'antiquité. Il devint le disciple de Jean Rhagius
qui, sous les auspices du comte Nuenaar, s'effor-
çait d'introduire à Cologne le goût des lettres an-
tiques et de la poésie. Il n'en fallut pas davan-
tage pour que ce maître fût accusé par les obs-
curantistes de pervertir la jeunesse. Comme il
arrive presque toujours, le parti de la routine et
des ténèbres l'emporta d'abord, et Rhagius dut
quitter Cologne. Il se rendit avec Hutten à l'uni-
versité, nouvellement créée, de Francfort-sur-l'O»
der. L'inauguration de cette grande institution,
qui eut lieu en 1506, inspira à Hutten son premier
essai poétique imprimé. Il sut répandre , à cette
occasion, sur un sujet assez prosaïque, l'éloge
de la Marche de Brandenbourg (Carmen in
laudem Marchiœ), un reflet de poésie. Hutten
fut nommé maître es arts à la nouvelle uni-
versité de Francfort, où il resta jusqu'en 1508.
A cette époque la contagion qui lui avait fait
fuir Erfurt l'atteignit encore; et les atteintes
de ce mal, dont il éprouva toujours les symp-
tômes toute sa vie, furent une des causes qui le
firent mourir prématurément. Ses souffrances
physiques ne ralentirent point son activité in-
tellectuelle, ni ne calmèrent sa soif d'appren-
dre. H se rendit dans l'Allemagne du nord, fit
naufrage sur la Baltique, et, dépouillé de tout,
arriva à Greifswald, où on l'inscrivit parmi les
étudiants, qui le connaissaient déjà comme poète.
D'abord accueilli dans la famille du bourgmestre
Loetz, il en rat ensuite, on ne sait pas précisé-
ment pour quel motif, indignement persécuté, à
tel point que les domestiques de la maison, s'é-
tant mis à sa poursuite, lui ravirent tout, papiers
et vêtements. Malade, réduit au dénûment, il
gagna cependant Rostock, où il rencontra des
amis et des protecteurs, entre autres le profes-
seur de philosophie Egbert Harlem. H s'occupa
alors d'enseignement, et expliqua à de jeunes
élèves les meilleurs auteurs latins.
Bientôt Hutten publia un ouvrage intitulé Rio-
gen gegen Loetz (1510, 2 vol. ), dans lequel il stig-
matisait l'indigne procédé de cette famille à son
égard. Ses amis, inquiets de son sort, apprirent
ainsi ce qu'il était devenu. Un de ceux qui lui mon-
trèrent le plus d'attachement, Crotus Rubianus,
alors professeur de langue latine à Fulda, lui fit
connaître les dispositions de son père à son
égard. « Ton père, écrivait-il à Hutten, a toute
la rase d'un Ulysse. Tout en ayant l'air de faire
peu de cas detpn instruction, il n'est pas fâché
d'entendre dire du bien de toi. Parfois il lui ar-
rive de reconnaître que. tu aurais fait un assez
mauvais moine, et alors il donne à entendre qu'il
voudrait te voir suivre en Italie les cours de droit
et de jurisprudence. » Hutten ne put pas d'abord
£# résoudre à renoncer fr {& vie Indépendante
qu'il menait. H alla à Wittemberg, et y publia en
1511 son Ars Versiftcatoria, puis il parcourut,
dans le plus pauvre équipage, sans sou ni maille,
vivant presque d'aumônes, la Bohême et la Mo-
ravie. Il rencontra cependant de nouveaux pro-
tecteurs, parmi lesquels on doit citer à Olmiitz
l'évêque Stanislas de Turzo, qui l'hébergea et lui
fit même présent d'un cheval et de l'argent né-
cessaire pour continuer sa route. A Vienne, où il
arriva en 1 5 1 1 , il rencontra un appréciateur éclairé
dans la personne de Vadian, qui admira telle-
ment un petit poème de Hutten, à l'adresse de
l'empereur Maximilien, que, secondé par des
amis, il le publia à l'insu du poète. Ce petit
poème est intitulé : Ad Maximilianum, Roma-
norum imperatorem, ut bellum in Venetos
cceptum prosequatur, Exhofiatorium. Enfin,
venuàPavie au mois d'avril 1512, Hutten résolut
de se conformer au vœu paternel, en se livrante
l'étude du droit. Mais les circonstances ne lui per-
mirent point d'accomplir ce projet. La ville ayant
été, trois mois plus tard, assiégée par les Suisses
au service du pape, Hutten eut maille à partir avec
les Français qui la défendaient à l'intérieur : ils
allèrent jusqu'à l'assiéger chez lui et à le menacer
de mort. C'est alors que, croyant son trépas pro-
chain, il composa sa propre épitaphe, qui ne
manque ni de sel ni d'élégance (1).
La prise de Pavie par les Suisses lui rendit la
liberté. Encore fut-il assez malmené par les vain-
queurs, qui, le croyant d'accord avec l'ennemi ,
lui ravirent tout ce qu'il possédait. C'est en cet
état qu'il put se rendre à Bologne pour y pour-
suivre ses études. Il eut dans cette ville à souf-
frir de la misère et de la maladie dont il avait
déjà ressenti deux fois les atteintes. Repoussé
de tous côtés, en particulier par le cardidinal
Gurk, auquel il s'était adressé, il fut réduit à
s'enrôler comme simple soldat dans l'armée
de Maximilien, et c'est ainsi qu'il assista au siège
dePadoue en 1513. L'année suivante il retourna
en Allemagne, et se rendit aux eaux d'Ems pour
y rétablir sa santé.
Un incident dramatique qui eut un long retentis-
sement en Allemagne, le meurtre de Jean de Hut-
ten par le duc Ulric de Wurtemberg, fit éclater
pour la première fois la verve agressive d'Ulric de
Hutten et montra son talent d'écrivain sous une face
toute nouvelle. On le proclama le Cicéronet leDé-
mosthène de l'Allemagne. Sa plume mordante ne
laissa nul repos au meurtrier. D'autres écrits sati-
riques, dirigés contre le duc, suivirent le premier.
Parmi ces écrits on remarque surtout le Phalaris-
mus, avec cette devise : Jacta est aléa, que Hut«
(1) Cette pièce est ainsi conçue :
Qui misère natos, misera bile transttt sérum,
Saepe malom terra, sepeque passus aqaa.
Hic jacet Hutte nos: Galil, ntl taie merenti,
lasootem gladlis eripoere aolmam.
Si fuit ex fato , ut tôt maie vlveret anoos,
Optatura est quod tam corruit il le ctto.
Ipse suas cotait mille ptr pericola musas.
Et quanti potuit carmlnls auctor erat.
651
HTJTTEN
652
ten garda toujours depuis. De ce jour sa renommée
était établie et populaire en Allemagne; en même
temps il se reconcilia avec sa famille. Hutten con-
tinua déprendre part aux controverses de toutes
natures, si vives alors, et il faut dire qu'il prit tou-
jours parti pour la tolérance. Cest ainsi qu'il sou-
tint Reuchlin, vivement attaqué par les ennemis de
toutes lumières dans la polémique soulevée à l'oc-
casion de Tordre subrepticement arraché à l'em-
pereur Maximilien, et aux termes duquel tous les
écrits des juifs devaient être livrés à la destruc-
tion. Reuchlin, nommé l'un des commissaires
chargés d'examiner le mérite des réclamations
des juifs contre cette barbare décision, déclara
qu'à son sens il ne convenait d'appliquer la me-
sure qu'aux ouvrages dans lesquels les juifs s'at-
taqueraient au christianisme. Les provocateurs
de l'édit, parmi lesquels un Israélite converti, du
nom de Jacques Peflerkorn, se révoltèrent contre
cette interprétation. Les amis de la raison et «les
lumières se mirent naturellement du côté de
Reuchlin. Ulric de Hutten écrivit en 1515 sou
Triumphus Capnionu (1). L'impression de l'ou-
vrage éprouva d'abord quelques difficultés ; le pru-
dent Érasme se montra opposé à cette publication,
qu'il chercha à reculer en disant qu'il était incon-
séquent de triompher avant la victoire. Toutefois
le poème parut en 1518. On a élevé quelques dou-
tes sur la question de savoir si l'œuvre devait
être véritablement attribuée à Hutten; mais ces
doutes disparaissent devant une lecture attentive.
Un ouvrage qui a plus d'importance, ce sont ses fa-
meuses lettres : Epistolx obscurorum virorum,
adressées à Ortuinus Gratius de Deventer et pu-
bliées à la fin de Tannée 1515 ou au commence-
ment de 1516. C'est une satire vigoureuse de
l'esprit pédantesque et stérile des hommes qu'il
attaquait. Hutten ne prit guère part qu'à la ré-
daction de la deuxième partie de cette œuvre, dont
Rubianus Crotus avait écrit la première.
Au mois d'octobre 1515, Hutten fit de nouveauté
voyage d'Italie dans le dessein d'y reprendre ses
études de droit et pour remplir ainsi les vues de
sa famille : il se rendit d'abord à Rome, qu'il dut
quitter bientôt après par suite d'une rixe entre lui
et cinq jeunes Français, à l'un desquels il donna la
mort. Il vint alors à Bologne, qu'il dut bientôt quit-
ter par un motif semblable, une de ces querelles
si fréquentes entre étudiants de différents pays,
cette fois entre les Italiens et les Allemands. Hutten
avait trop chaudement embrassé le parti de ses
compatriotes. Il visita Ferrareet Venise, et revint
ensuite en Allemagne. Arrivé à Augsbourg, il y
fut présenté par Conrad Peùtinger à l'empereur
Maximilien, qui l'arma chevalier et lui décerna de
sa main la couronne de laurier tressée par la
jeune Constance Pentinger. Retiré quelque temps
à Steckelberg, il poursuivit la lutte commencée
(1) Capnion, de xomvo; (fumée), par allusion an nom
de Reuchlin, qui vient du mot allemand Rauch ayant la
même signification.
contre Rome, et qui fit de lui comme le précur-
seur de la réformation. Après avoir préludé à ce
rôle par de mordantes épigrammes adressées an
pape Jules H, il se fit l'éditeur de l'ouvrage de
Laurent Valla, intitulé : De falso crédita et
ementita Donatione Constantini Afàgni;
y joignit une préface, dédiée à Léon X , où il
adjure ce pontife de pacifier PÉglise, d'honorer,
de récompenser Laurent Valla, l'ennemi des
tyrans, de ne point régner en empereur, mais
de soigner son troupeau en berger fidèle. Ce
pamphlet, publié dans Tannée même où Luther
parut sur la scène ( 1517), eut un immense reten-
tissement. Luther lui-même en fut ému, comme
en témoigne un passage d'une de ses lettres datée
de 1520 : « Habeo in manibus, écrit le célèbre
réformateur, Donationem Constantini a Lauren-
tio Valleno confutatam, per Huttenum éditant.
Deus bone, quantœ seu ténèbre, seu nequitix
Romanorum; et quod in judicio Dei mireris, per
tôt secula non modo durasse, sed etiam praeva-
luisse ac inter décrétâtes relata esse tam impura,
tam crassa, tam impudentia mendacia, inque
fidei articulorum... vicem suscepisse...».
En 1518, un an après son édition du livre de
Valla, et nonobstant cette publication, Hutten
trouva un protecteur, aussi puissant qu'éclairé,
dans la personne d'Albert, margrave de Bran-
debourg et archevêque de Mayence. Invité de-
puis à venir demeurer avec le prince de l'Église,
Tardent et généreux promoteur des idées nou-
velles accepta. Il crut servir les intérêts de son
pays en se plaçant sous cet éminent patronage.
Dans un chaleureux panégyrique, il invite son
protecteur à se mettre à la tête de l'Allemagne,
dont il pouvait seul réaliser la plus chère espé»
rance : la fusion de toutes ses parties en un
corps de nation. C'était, comme on voit, une
grande idée éclose au quinzième siècle , dans les
plus puissants esprits de cette époque, et qui, au-
jourd'hui encore, n'est pas arrivée à sa réalisa-
tion. A la diète d' Augsbourg, où il suivit Albert,
et dans laquelle ce moine, jusqu'alors* inconnu,
Luther, devait rendre compte de sa conduite,
Hutten chercha à lui rendre favorables quel*
ques-uns des puissants personnages qui de-
vaient figurer dans cette assemblée fameuse.
Hutten essaya aussi de décider les princes al-
lemands à faire la guerre aux Turcs. L'écrit
dans lequel il prêéhe cette croisade, publié à
Steckelberg en 1519, et intitulé : Ad principes
Germante, ut bellum Tureis invehani Bxh&r-
tatoria, a tous les caractères du plus vigoureux
pamphlet : il gourmande la cour de Rome, à la-
quelle il reproche de n'avoir jamais songé à
guerroyer contre les Turcs que pour avoir une
occasion de piller l'Allemagne; et quant aux
princes de ce pays, il les tance vertement, leur
dit qu'il est temps de mettre une trêve à leurs
festins, leurs tournois, leurs parties de chasse,
et à leurs guerres intestines, qui ne sont que
des brigandages, pour s'occuper enfin des intérêt»
653
HUTTEN
664
de l'Empire et s'unir avec son chef contre l'en-
nemi commun.
En même temps que ce pamphlet, Hutten
écrivit un Dialogue sur la vie des courtisans, où
ii donnait suite à ces attaques contre les habi-
tudes et les moeurs corrompues de la noblesse,
attaques violentes qui devaient lui susciter des
ennemis puissants. Bans une lettre en date du
6 novembre 151», adressée à Wllllbald Pir-
kheimer (i), il rend compte des motifs qui le
guident dans cette polémique : « Je fais peu de
cas, dit-il, de cette noblesse qui n'a sa raison
d'être que dans le hasard de la naissance; Je
veux une noblesse qui «oit mienne et pouvoir
enfin transmettre à mes descendants une illus-
tration qui ne me vienne pas uniquement de
mon père. » Puis répondant a l'invitation faite
par son ami de se consacrer au culte des Muses,
au lieu de se jeter dans les querelles du siècle,
il lui trace un tableau animé de l'état des choses
en Allemagne, alors le théâtre des exactions de
la noblesse, des violences même des paysans
vis-à-vis les uns des autres. « Et vous voudriez,
ajoute-t-.il, me condamner à demeurer spectateur
impassible et inactif d'une telle scène ! Enfin il
s'exalte à la vue du travail, du besoin de réno-
vation qui agite son époque. * O siècle , 6 scien-
ces! s'éerte-t4l,onse sent renaître et vivre , bien
que l'on ne puisse prendre aucun repos. Enfin!
renaissent, chez Willibald, les talents, les
sciences. Arrière antique barbarie 1 prends ton
bâton de voyage et cherche ailleurs quelque re-
fuge. »
Gomme Pirkheimer, Érasme prêchait à Hut-
ten le 'calme. Mais ce dernier ne suivit point
d'abord ce conseil de ses amis les plus éclairés.
En 1519, il quitta le margrave Albert pour en-
trer avec François de Siekingen dans la ligue
de Souabe dirigée contre Ulric de Wurtemberg,
son ennemi personnel. Cependant il fit bientôt
diversion à ses préoccupation» guerrières en
écrivant sur des matières qui n'avaient rien de
belliqueux. Conseillé par ses amis, et dans l'es-
poir de se débarrasser enfin d'une maladie d&-
venue chronique , il but des décoctions de bois de
gaïac, et, joignant à la pratique la théorie, il écrivit
son traité : De Guajaci Medicina et Môrbo
gallico. Cet ouvrage eut les honneurs de la tra-
duction en allemand par Thomas Marner, moine
déchaux et bien connu par ses écrits satiriques,
et en anglais par Thomas Pagnet, chanoine de
Marten*Abbey.
C'est encore vers cette époque, après la diète
d'Augsbourg, qu'il faut placer l'écrit satirique
de Hutten ayant ce singulier titreOTTIS (Nemo).
Seulement il fut composé au château de l'arche-
vêque de Mayence, duquel Hutten songea enfin
à se séparer définitivement. Leurs idées ne pou-
0) EUe est intitulée : Ad Bilibaldum Pirkheimer, pa-
triciutn Norimbergensêm, Epi$tol<h vitx suse rationem
erponens,- Augstxrarg, 1516.
valent plus se concilier ; celles de Hutten étaient
trop avancées pour le prélat.
Retiré, après la guerre de Souabe, qui suivit
cette séparation , au château paternel, Hutten
reprit sa polémique contre Rome, qui la lui rendit
en violentes représailles. Léon X demanda son*
extradition; poursuivi par des assassins, Hutten
èhercha un refuge dans le château de son ami
Sicklngen (1590). S» cet asile il lança en Alle-
magne de nombreux et vite pamphlets. De cette
époque datent ses Dialogue» et ses Exhorta*
Mon*, dont le style et la verve rappellent Lucien,
tl y fait appel aux hommes de toutes professions,
voire même aux lansquenets, parce que, selon lui,
le glaive seul peut trancher les grandes difficultés.
A cette époque aussi commence la liaison de
Hutten avec Luther. « Vive la liberté, écrit-il au
chef de la réforme (juin 1520). Si là bas où
vous êtes vous rencontrer strr votre vole, dans
l'œuvre que vous entreprenez, tant d'obstacles,
je m'en afflige assurément. Quant à moi, Je fais
ce que Je puis. Puisse le Christ être avec fions,
puisque nous tendons, vous avec une si grande
vigueur, moi dans la mesure de mes forces, à
rendre à la lumière sa doctrine obscurcie par
la papauté! »
Pour contribuer plus efficacement à cette
«uvre commune et pour vulgariser sa parole,
Hutten commença dès lors à écrire dans l'idiome
de son pays. Précédemment il avait fait paraître
en latin Téorit intitulé : Ai Carolum impera-
torem , advenus sibi intmtatam a Romanis
vint et injuriam Conguestio. Mais il traduisit
en allemand ( afin, comme fl le disait lui-même,
que chacun sentit que c'était la cause de tous
qu'il plaidait) la plainte adressée, dans la per-
sonne de l'électeur Frédéric de Saxe, à tous les
États de la nation allemande : Klagsohrtft an
aile Stœnde teutscher Nation. Au pamphlet
intitulé Bulles, qui vint ensuite, succéda le
poème allemand ayant pour titre : Plainte et
Avertissement contre lé pouvoir exorbitant et
antiehrétien du pape de Home, etc., toujours
Avec cette devise : Jacta est aléa. En même
temps il continuait sa vigoureuse et expressive
correspondance avec les coryphées de l'époque,
tels qu'Érasme et surtout Luther, correspondance
toute empreinte des controverses sur les sujets si
brûlants que l'on agitait alors. En 1521, Hutten
se décida, sur la demande de Charles-Quint, à ser-
vir l'Empire. Un traitement de 200 florins d'or lui
fut accordé à cet effet. Évidemment c'était son
silence que IV» voulait acheter, et Hutten ne de-
vait pas accepter longtemps un tel rôle : il fit,
avec les troupes de l'Empire, la triste campagne
de Lorraine, puis il revint retrouver son ami
ftickingen, après avoir abandonné à ses frères
son patrimoine, pour ne pas les envelopper
dans les embarras oh ses luttes incessantes pou-
vaient l'fifitralner. Mais l'asile que lui offrait si
généreusement Bickingen lut bientôt perdu pour
lui par suite de l'issue malheureuse des hostilités
655
HUTTEN — HUTTON
656
dirigées par ce protecteur contre Richard, arche-
vêque de Trêves. Hùtten se mit alors en route pour
la Suisse, où il comptait trouver un appui dans
Érasme. Malheureusement le caractère de ce philo-
sophe n'était pas de tons points à la hauteur de son
esprit : timide,flottantet d'une excessive prudence,
ainsi que le fait remarquer quelque part Luther, il
accueillit avec froideur le polémiste ardent. Il eut
même le tort de prévenir contre lui le conseil de
Zurich, ainsi qu'en témoigne une lettre en date du
10 août 1523. Hutten aborda enfin dans l'île
dUfenau, située dans le lac de Zurich. Épuisé
par tant de luttes et de longues souffrances, il
termina bientôt dans cette retraite, en face des
Alpes, sa carrière, si courte, si agitée et si rem-
plie par de généreuses aspirations. On peut consi-
dérer Hutten comme Pun des promoteurs les plus
désintéressés, les plus sincères dé la révolution
religieuse qui signala le seizième siècle. Il fit de
la poésie une arme de guerre, et ses satires sont
un modèle du genre. 11 se montra le défenseur
du juste et du bien, et ne poursuivit de sa verve
vraiment patriotique et ardente que la violence
et l'hypocrisie.
L'édition des œuvres ( Opéra omnia) dIJlric
de Hutten publiée à Berlin, 1821-1825, par Mu-
nich, 5 vol. in-8°, présente des inexactitudes
nombreuses» On a donné aussi un choix de ses
Œuvres, 1622-1824, 3 vol. Rosenwald.
Lutheri Epiit ; Iéna, 1556. - Gervlnos, Geseh, der
Deuts. nat. IÂU.\ 1885-1838. - Bayle, Dict. HUt. - Scbu-
bart, Leben und Character Ulric von Hutten; Leipzig,
1791 et 1816. — Wesltnger, Hutten** delarvatus. —
Borckbard . Commentarius de Fatis et Meritis Ulrici
HuUeni. — Mohnlcke, Ulric von Hutten" iJugendleben.
— Nicéron, Mérn,, t XV et XX — Mlchelet, La Reforme.
— Strauss, Ulric von Hutten, 1858. — Bev. Germanique,
mars 1858.
huttbe (Leonhard), théologien protestant, né
en 1563 àTJlm, où son père était ministre, et mort
à Wittemberg, le 23 octobre 1616. En 1596, on le
nomma professeur de théologie à Wittemberg ;
il remplit ces fonctions jusqu'à la fin de ses jours.
11 est connu surtout par le zèle qu'il déploya
pour l'orthodoxie luthérienne, zèle qu'il poussa
jusqu'à l'intolérance pour toutes les autres com-
munions chrétiennes. C'était un homme entier
dans ses opinions, incapable de supporter la con-
tradiction, d'un esprit tranchant et d'une exces-
sive roideur de caractère. De ses nombreux ou-
vrages, dont la plupart sont dirigés contre les ca-
tholiques ou contre les réformés, nous citerons les
suivants, qui sont les plus importants : De Volun-
tate Dei circa xternum prmdestinationis sal-
vandorumDecretum; Wittemberg, 1605, in-4°;
—Explicatio libri christianœ concordantte ;
Wittemberg , 1608 , in-8° ; deux autres édît. ; —
Compendiumlocorum theologicorum ex Sacra
Seriptura et libro Concordiez Collectum ; Wit-
temberg,.1610 , in-8°; souvent réédité. Cet ou-
vrage, fait sur l'invitation de l'électeur de Saxe,
était destiné à l'instruction religieuse de la jeunesse
des écoles; — Loei communes theologici, ex
Sactis Litteris diligenter eruti, veterumque
Patrum testimoniis passim roborati et confir-
mait, ad methodum Locorum Melanchthonis ;
Wittemberg, 1619, in-fol.; Francfort, 1661, in-
fol.; — Concordia Concors, sive de origine et
progressus formulée Concordix ecclesiarum
Augustanx Confessionis ; Wittemberg, 1614,
in-fol. Deux autres éditions, dont la dernière,
Francfort, 1690, in-4° , etc., a une préface de Val.
Alberti. Htitter composa cet ouvrage par ordre
de l'électeur de Saxe, pour réfuter le Concordia
Discors et YHistoria Sacmmentalis d'Uospi-
nius; — Calvinista Aulico-politicus ; Wit-
temberg, 1614, îh-8° : contre l'édit de tolérance
de Jean-Sigismond, électeur de Brandebourg; —
Irenicum vere christianum, sive tractatus
de synodo et unione evangelicorum non fu-
cata concilianda; Rostock, 1616, in-4°; autre
édit. de 1619, in-fol., contre le projet de réunion
des luthériens et des réformés , mis en avant
par Pareus, et surtout contre V Irenicum de ce
théologien. M. N.
J.-C. Erdmann, Lebensbeschreib. und Uterariteàe
Nachricht. von den Wittemb. Theologen seit 150t. bie
1801; Wittemberg, 1804. - Bayle, Diction, Histor.-
J.-G. Walch, Biblioth. Théologie* Selecta.
huttich (Jean), antiquaire et numismate
allemand, né à Mayence vers 1480, mort le
4 mars 1544. Après s'être fait recevoir maître en
philosophie dans sa ville natale , il se rendit à
Strasbourg, ou il fut naturalisé en 1525. Deux
ans après il devint chanoine à l'église de Saint-
Thomas, et en 1530 à la cathédrale. Il laissa
un legs considérable pour doter les filles pau-
vres qui n'épouseraient pas des soldats. On a
de lui : Collectanea Antiquitatum in urbe
atque agre Mpguntino repertarum ; Mayence,
chez Schœffer, 1 520, in-fol . , rare ; se trouve dans
le tome IH des Scriptores Historiœ Moguntinx
de Johannes; — Vitx Imperatorum, cum
iconibus et numismatibus ad vivum exprès-
sis; Strasbourg, 1525, 1534; Lyon, 1550 et
1554, iri-8 '; traduit en allemand, Strasbourg,
1526, n>8°; —. Collectio diversarum na-
vigationum etitinerum; Baie, 1536, in-fol. ; —
Elenchus consulum Romanorum , inséré dans
les Opéra de J. Sambucus. £. G.
Johannes, Scriptores Historiœ Moguntinas, t. III,
p. 8S1. — Hancklos, De RomanarumRerum Scriptoribus,
t. II. — Bandufl, Bibl. Numaria. — Brach et Gruber,
Mlgem. Encyclopédie.
hutton (James), célèbre géologue anglais,
né le 3 juin 1726 , à Edimbourg, mort dans la
même ville, le 26 mars 1797. Fils d'un marchand
d'Edimbourg, il acheva ses études à l'université
de cette ville. Eu 1743 il entra dans l'étude d'un
clerc au sceau du roi; mais comme, au lieu de
s'occuper delà transcription des actes, il amusait
ses camarades par des expériences de chimie, il
fut congédié. Il choisit alors la carrière médicale,
et, après avoir étudié la médecine à Edimbourg
pendant trois années, il vint à Paris, où il resta
deux ans; il partit ensuite pour les Pays-Bas,
et se fit recevoir docteur à Leyde au mois de sep-
tembre 1749. Arrivé à Londres à la fin de la
657
HUTTON
658
même aimée, Hutton résolut de s'y fixer, puis il
abandonna ce projet pour établir une fabrique de
sel ammoniac, qui réussit complètement. Il re-
tourna à Edimbourg en 1750. La connaissance
qu'il fit de l'agronome sir John Hall de Douglas
le poussa à s'occuper d'économie rurale. Il partit
donc pour le Norfolk, et s'installa chez un fer-
mier qui fut à la fois son hôte et son professeur.
Pendant son séjour dans ce pays , il se mit à
l'étude de la minéralogie, dans le but de se dis-
traire en route pendant les fréquentes excursions
qu'il faisait dans les différentes parties de l'An-
gleterre. De retour en) Ecosse, il hésita quelque
temps .dans le choix du lieu où il s'établirait
pour mettre en pratique ses connaissances agri-
coles. II finit par se décider pour sa propre ferme,
située dans le Berwickshire, et cette belle con-
trée lui doit aujourd'hui l'état florissant de sa
culture. Cependant la géologie , dont il avait
continué de s'occuper, lui offrait de plus en
plus d'attraits; il entreprit en 1764 un voyage
dans le nord de l'Ecosse, dans l'intérêt de cette
science, qui en 1768 devint sa passion dominante.
Il quitta donc sa ferme pour aller s'établir à
Edimbourg, où il se livra à des essais chimi-
ques, et découvrit l'alcali minéral contenu dans
le zéolithe. En 1777, il entreprit de prouver que
le coal d'Ecosse n'est pas de même espèce que
la culm d'Angleterre, et ne devait pas par con-
séquent être assujetti aux droits de transport, ce
qui finit par être accepté par le conseil privé, et
termina de vives discussions entre les proprié-
taires de mines et les officiers du fisc, qui voulaient
imposer cette matière comme la houille. Hutton
poursuivit pendant trente ans le cours de ses
études géologiques avant de se déterminer à pu-
blier sa théorie delà Terre, qui le plaça au rang des
premiers géologues. Les encouragements de la So»
ciétété Royale d'Edimbourg l'y décidèrent enfin.
Il fit paraître aussi dans le premier volume des
Transactions de cette société une théorie de la
pluie (TheoryqfRain), qui mérite d'être placée
parmi les bons ouvrages sur la météorologie.
La mort l'empêcha de publier ses Éléments
d'Agriculture, fruit de nombreux travaux et
d'une longue expérience.
Hutton s'est surtout rendu célèbre par sa
théorie de la Terre. « U attribue au feu , dit un
de ses biographes , la plupart des phénomènes
que Werner et d'autres géologues ont cherché
à expliquer par la solution aqueuse. Le docteur
Hutton combat également le système de De Luc,
et pense que les causes qui ont produit les
substances minérales et présidé à leur arrange-
ment et distribution sont les mêmes qui sont au-
jourd'hui en opération dans l'intérieur de la Terre
et au-dessous des mers. Il croit que les mon-
tagnes se forment lentement au fond de la mer,
que les révolutions du globe ne sont jamais gé-
nérales, et que le ealorique et les gaz comprimés
sont les agents les plus puissants des catas-
trophes partielles et plus ou moins soudaines-.
Depuis la publication du système du docteur
Hutton, de nouvelles expériences ont démontré
la possibilité de produire, au moyen d'une haute
température aidés d'une forte compression, une
foule de phénomènes minéralogiques qu'on suppo-
sait ne pouvoir s'expliquer que dans l'hypothèse
de la solution aqueuse de leurs éléments. Le
docteur Hutton, tout en admettant le calorique
comme l'agent principal des grandes opérations
de la nature, était loin d'adopter le système de la
fluidité primitive et ignée de notre globe, qu'il
croyait avoir toujours eu la même structure
qu'il a aujourd'hui, n'ayant éprouvé que des
changements partiels , successifs , et pour ainsi
dire périodiques. » On a de Hutton : Considéra-
tions on the nature, quality and distinctions
of Coal and Culm; 1777; — Theory of the
Earth; Edimbourg, 1795, 1796, 2 vol.; — Dis-
sertations on différent subjects in natural
Philosophy; 1792; — An Investigation of
the prindples of Knowledge, and of the pro-
gress of reason from sensé to science and phi-
losophy; 1794,3vol. in-4° ; — Dissertation
upon the Philosophy ofLight, Beat, and Fire;
1794,in-8°. L.L— t.
Playfalr, TheHuttonian Geology* daoslea Philosophical
Transactions of Eéinburgh, vol. V. — Chaînera, The
Gênerai Bioçraphicai Dictionary. — 4UM*e, 'VieUh de
Bolsjolin et Sainte-Preuve , Btogr. univ. et portât, des
Contemp.
HUTTOiff ( Guillaume ), archéologue anglais,
né à Derby, le 30 septembre 1723, mort le
20 septembre 1815. Fils d'un pauvre journalier,
il ne reçut aucune éducation , et dès l'âge de sept
ans il travailla dans un moulin à soie. A qua-
torze ans il entra en apprentissage chez son
oncle, fabricant de bas. Il apprit le métier de
relieur dans ses moments de loisir, et, en 1750,
il ouvrit une petite librairie et un cabinet de lec-
ture à Birmingham. U y joignit un commerce
de papier, et arriva à l'opulence. Devenu riche,
il cultiva les lettres. En 1791, dans les émeutes
de Birmingham, sa maison fut pillée, et il perdit
une partie de sa fortune. Laissant son com-
merce à son fils, il se retira à Bennet's-Hill près
de Birmingham. Hutton a été quelquefois ap-
pelé le Franklin de F Angleterre. On a de lui :
History of Birmingham, 1781, in-8°; — Jour-
ney to Tandon; 1784 , in-12 ; — The Court of
Requests ;|1784, in-8° ; — The Hundred Court ;
1788,in-8°; — History of Blachpool; 1788,
in- 8°; — Battle of Bosworth field; 1789,
in-8°; — History of Derby ; 1790, in-8°; —
The Barbers, a poem; 1793, in-8°; — Edgar
and JSlfrida, a poem; 1793, in-8°;— The
roman Wall; 1801 , in-8° — - Remarks upon
North Wales; 1801 , in-8°; — Tour to Scar-
borough; 1803 , in-8° ; — Poems, chiefly Ta-
ies ; 1804, in-8°; — Trip to Coatham ; 1808,
in-8°. Tous ces ouvrages sont oubliés, mais on
lit encore son autobiographie, publiée après sa
mort par sa fille Catherine Hutton, sous ce titre :
The Life cf William Hutton, stationer of
659
HUTTON
Birmingham, and the History of his fa-
mily, written by himself; Londres, 1816,
in-8°; réimprimée en 1841, dans English Mis-
cellanies de Knight. Catherine Hutton publia elle-
même on roman intitulé ; The Miser married;
1813, 3 vol. in» J 3. Z.
IA/e of fTilMam uutton. - SngUsk CyofefMNMa
(JWotfrapÀf).
hutton ( Charles ) , mathématicien anglais,
né à Newcastte-sur-Tyne , le 14 août 1737, mort
à Londres, le 37 janvier 1823. Il appartenait à
une famille de Westmoreland qui avait été alliée
à celle de Newton. Fils d'un inspecteur des
mines, il reçut une éducation fort incomplète, et
ne dut qu'à lui-même les connaissances multiples
qu'il acquit plus tard. Il manifesta de bonne
heure une grande prédilection pour les mathé-
matiques. A la mort de son père il avait à peine
dix-huit ans, et entra comme instituteur dans
l'école da village de Jesroond; quelques an*
nées après , son maître, qui était ecclésiastique ,
ayant été appelé à une cure, résigna son école
en faveur de Hotton. £n 1760, Hutton se maria
et vint s'établir à Newcastle. En 1771 , le pont
de Newcastle ayant été emporté par un déborde-
ment du fleuve, Hutton s'occupa des moyens de le
rétablir avec sécurité, et publia sur la construction
des ponts un petit ouvrage qui le fit aussitôt
connaître. £n 1773 il rat nommé professeur de
mathématiques à l'Académie royale de Wôol-
wich, à la suite d'un concours. Le 16 novem-
bre 1774 Hutton fut élu fellowde la Société ttoyale
de Londres, et après la nomination de John
Pringle* à la présidence, Hutton devint secré-
taire de la Société , chargé de la correspondance
étrangère, office qu'il remplit jusqu'en 1778,
époque à laquelle on exigea la résidence conti-
nuelle du secrétaire. En 1775, la Société Royale
fit faire, sous la direction du docteur Maskelyne,
une série d'expériences sur la montagne Schi-
ballien, dans le Perthshire, dans le but de déter-
miner la densité moyenne de la Terre; Hutton fut
chargé des calculs qu'entraînait cette opération.
En 1779 le titre de docteur en droit lui fut con-
féré par l'université d'Edimbourg. Attaqué d'une
maladie de poitrine en 1806, il quitta l'Aca-
démie militaire l'année suivante, et reçut en
récompense de ses services une pension de
500 livres steiling. Charles Hutton a pris part
à presque tous les perfectionnements introduits
de son tempe par les Anglais dans l'artillerie
et le génie. Ses principaux ouvrages sont : A
practical Treatise on Arithmetic and Book-
keepiny; 1764, plusieurs lois réimprimé; —
A Treatise on Mensuration, both in theory
and praetice; Londres, 1771, in-4 ; 1788,
in-8°; — Principles of Bridges, containing
the mathematical démonstration of the
properties of the arches, etc.; Newcastle,
1772, in-8°; Londres, 1801; — The diarian
Miscellany, containing ail the useful and
entertaining parts, both on mathematical
and practical subjects , extracted frotn the
Lady's diary , from the beginning of that
work in 1704 to 1773; with many additionnai
solutions and improvements ; Londres, 1776,
6 vol. in-12 ; — Tables of the Product and
powers of Numbers, with an introduction;
Londres, 1781, in-8°; — Mathematical Tables,
containing the common , hyper bolic and lo-
gUtic logarithms t also sinus, tangents, sécants
and versed sinus, both natural and logarith-
mic, etc., to which is prefixed a large and
original history of the disçoveries and wri-
tings relating to thèse subjects; Londres,
1785, nouv. édit,, 1811 ; — Tables of Interest
fromone pound to 500. millions for one day;
1786; — Compendious Measurer; being a
brief yet comprehensive treatise on mensu-
ration and practical geometry ; with an in-
troduction to décimal and duodécimal arith-
metic; Londres, 1786, in-12; — Tracts on
Mathematical and Philosophical Oubjects;
Londres, 1786, in-4°; 1812, 3 vol. în-8*; —
Eléments ofConic Sections; 1787, in-8* : c'est
son œuvre capitale; — A Mathematical and
Philosophical Dictionary , containing an ex-
planation ofthe terms and on account of the
several subjects comprised under theheads:
mathematics astronomy and philosopha,
both natural and expérimental; with an
historical account of the rise, progress and
présent state of thèse sciences ; also memoirs
of the lives and writings of the most emi-
nent authors, both ancient and modem, who
by their disçoveries or improvements hâve
contributed to the advancement of them;
Londres, 1795-1796* 2 vol, in-4°, avec pi.; nou-
velle édit, 1815 ; — A Course of Mathematics,
çomposed and more especially designed for
the use of the gentlemen cadets in the royal
military academy ofWoolwich; Londres, 1 798-
1801, 3 vol. ; — Select Amusements of Mathe-
matics and Phylosophy , traduit du français
de Dispian ; 1801, in-12;— Récréations in Ma-
thematics and natural Philosophy,first çom-
posed by M. Ozanam, lately recomposed and
greatly enlarged by M, Montucla, and now
translatée into english and improved with
many additions and observations ; Londres,
1803, 4 vol. ; — The Philosophical Transac-
tions of the Royal Society of T/mdon, abrid-
ged by Ch. Hutton, G, Shaw, et R. Pearson;
Londres, 1804-1809, 18 vol. in-4°; — Tracts
on many interesting parts of Mathematical
and Philosophical Sciences; Londres, 1812,
3 vol. Ch. Hutton a en outre donné une
nouvelle édition des Principles of Gunnery
de Bobina, corrigée et augmentée; 1805. II a
fourni aux Philosophical Transactions des
articles : sur un moyen prompt de rendre con-
vergentes les suites pour la rectification des
courbes; sur la poudre à canon ; sur la «densité
moyenne de la Terre, d'après les mesures du
661
HUTTON — HTJVIER
662
Schihallien ; sur le point de plus forte attrac-
tion à la surface d'une montagne ; et sur le projet
d'une nouvelle division des cadrans. On trouve
en outre de Hutton, dans les Transactions de
la Société Royale d'Edimbourg, un travail inti-
tulé : Âbstract of Experiments made to dé-
termine the true résistance of the air te the
surfaces ofbodies of varions figures and mo-
ved through in uiïth différent degrees of ve-
locity. Hutton a aussi contribué au Lady's
Diary, recueil périodique dont il fut même l'é-
diteur pendant quelques années. L. Loovet.
Watt, Bxblioth. BrtU, tome I. — Revus encyclopédi-
que, tome XVII, p. 688. — Bnglish Cyclopaedia (Biogra-
pày). ~ Erscti et Grabcis AUg. Encyklopmdie.
* huusman {Jean~Bmri) t voyageur danois,
né à Copenhague, en 1704, mort en 1774, a Hes-
trup, où il était pasteur. Nommé aumônier d'un
vaisseau de la Compagnie Asiatique de Dane-
mark , qui fut envoyé en Chine, il publia Bes*
krivelsë aver Skibet Kronprints Christian*
Rejse til ochfra China (Description du voyage
en Chine, exécuté par le navire Le Prince royal
Christian) \ Copenhague, 1733; traduction aile*
mande , Copenhague et Leipzig, 1 750. E. B.
JVyerup et Kraft, Litter.-Uv ,
piuvé (Jean- Jacques), architecte français,
né à BoinvilHers, près Mantes, en juin 1742,
mort à Versailles le 24 mai 1808. Fiis d'un
notaire , il fut envoyé à Paris pour y terminer
ses études. Ses liaisons avee de jeunes architec-
tes éveillèrent en loi le goût de» arts du dessin.
Il reçut des leçons du professeur Blondel. À l'âge
de vingt-deux ans il fut attaché comme inspec-
teur aux bâtiments de la Monnaie, et , en 1770,
remporta le grand prix de l'Académie royale.
Il visita ensuite l'Italie , la Calabre , la Sicile, la
Grèce, et rapporta en France une riche collec-
tion de dessins. U avait laissé sur l'Etna des
tracée de son passage, en construisant, pour le
prince Biscari , un pont remarquable par sa har-
diesse et sa solidité. Il revint à Paris en 1776, et
fut nommé , l'année suivante , un des inspecteurs
du château de Versailles. Il fut maire de cette ville
dans les premières années de la révolution.
G. oe F.
Daniel, Biofr. de* Hommes remarquables du dépar*
tentent de Seine et-Oise.
hutb (Jean- Jacques- Marie), architecte
français, fils du précédent, né à Versailles le
28 avril 1783, mort subitement à Paris, le 23 no-
vembre 1852. Entré au mois de messidor an iv
(1 796) à l'École centrale de Versailles, il y fit des
progrès rapides, et à l'âge de quatorze ans il don-
nait déjà des leçons particulières de mathéma-
tiques. Son père commença à l'initier aux élé-
ments de son art, puis il le plaça chez Percier.
Le jeune Huvé passa trois années auprès de ee
maître distingué , obtint cinq médailles à l'É-
cole des Beaux-Arts et fut admis deux fois à
concourir pour le grand prix de Rome. Lors-
qu'en 1808 l'empereur résolut de consacrer à la
gloire des armées le monument commencé sous
Louis XV, et qui fut depuis l'église de La Made*'
lelne, Vignon, qui en était devenu l'architecte, fit
nommer Huvé conducteur des travaux. Son zèle
et sa capacité lui valurent bientôt le titre de sous-
inspecteur. En 1814 il marcha avec la garde na-
tionale à la défense de la capitale contre l'étran-
ger ; mais l'année suivante il refusa de prêter
serment à l'acte additionnel, quoique ce refus
pût entraîner sa destitution , et que sa place fût
alors son unique moyen d'existence. En 1817
il était inspecteur en chef des travaux de La
Madeleine. Il succéda à Viel, architecte des
hôpitaux et hospices. En 1819, Huvé fut
chargé de l'achèvement du château de Saint-
Ouen. Louis XVIII le nomma ensuite archi-
tecte du château de Compiègne. En 1827 il
devint architecte de l'administration des postes.
Quelque temps après, la démolition de la salle
Feydeau ayant été résolue , un concours fut ou-
vert pour élever à la place Ventadour une nou-
velle salle de spectacle destinée à la remplacer
pour l'opéra-comique. Le projet de Huvé l'em-
porta sur ceux de ses concurrents. Vignon étant
mort, Hnvé le remplaça comme architecte de
La Madeleine, qu'il termina. En 1837 il fut
nommé membre honoraire du conseil des bâ-
timents civils, et quelques années après adjoint
au jury d'examen pour les concours d'architec-
ture à l'École des Beaux-Arts. A la mort de Per-
cier, son maître, en 1838, Huvé fut appelé à le
remplacer à l'institut, dans la section d'architec-
ture de l'Académie des Beaux-Arts. Depuis il de-
vint président de la Société libre des Beaux-Arts
et de la Société centrale des Architectes. Il a formé
dans son atelier un grand nombre d'élèves dis-
tingués , et il venait en aide à une mule de mal-
heureux. Un matin on le trouva mort dans son Ut ;
une bougie était allumée près de lui et un livre
placé à côté. « Artiste savant et consciencieux,
homme d'une probité exemplaire, et doué d'ail-
leurs d'un esprit fin et du caractère le pins bien-
veillant, il y avait, dit un de ses panégyristes,
double raison pour que l'on aimât avoir affairée
lui Aussi y a-t-il peu d'architectes de notre épo-
que qui aient eu une aussi belle clientèle pour les
travaux privés et qui en outre aient été chargés
de la construction de trois édifices capitaux : un
château , une salte de spectacle , et enfin une
grande église. Si, comme on le dit souvent, mais
ce qui n'arrive pas toujours , la simphci^ et la
modestie sont l'apanage et parfois une preuve
du vrai mérite, personne n'a mieux justifié ce
douteux adage que M. Huvé , et ses rares et
belles qualités ont certainement beaucoup con-
tribué à rehausser son talent et à en faire re-
chercher l'emploi. » L. Louvet.
Raoul Rochette, Disconrg lu par H. Carittle sur la
tombe de M. Huvé, au nom de l'Institut. — Delecluze,
Journal des Débats du S9 novembre 1883. — Charles Ro-
magny, Nécrologie, J.-J.-M.ffuvé, dans la Bévue Muni-
cipale, isst, p. ion.
* huvibh dbs FONTEWELtBs ( Pierre -
Marie-François ), littérateur français, né à
663
HUVIER — HUYDEGOPER
664
Coulommiero, en Brie, dans l'année 1757, mort le
21 octobre 1823. En sortant du collège de Juilly,
il entra dans la congrégation de l'Oratoire, qu'il
quitta en 1780. Destiné à succéder à son père,
bailli de Coulommiers, il le seconda quelqne
temps dans l'exercice de ses fonctions; mais à
l'époque de la révolution il renonça entièrement
aux affaires, et vécut dans la retraite, unique-
ment occupé de la culture des lettres. On a de
Huvier : Les Soirées amusantes, ou entretiens
sur les jeux à gages et autres; Paris, 1788;
nouvelle édit., 1796, in-12 ; inséré aussi dans la
66 e livraison de YEncyclopédie méthodique, qui
contient les jeux mathématiques et les jeux fa-
miliers; — La Targétude, tragédie un peu
bourgeoise, parodie de fAthalie de Racine;
Paris, 1791, in-8° : dirigée contre Target, rap-
porteur du comité de .révision de la constitu-
tion en 1791; — Les Remontrances du Par-
terre, etc., par Bellemure, ei-devant com-
missaire de police, réfutées par M. B. D.,
otage de Louis XVI; Paris, 1814, in-8°.
G. de F.
Fdler, Dicttonn. Bittor, - Quérard, La France Litté-
TOirtf.
HCXELLES. Voy. UXELLES.
* huxham ( Jean ), célèbre médecin anglais,
né à Halberton, dans le Devonshire, vers la fin
du dix-septième siècle, mort le 10 août 1768. Il
étudia sous Boerhaave à l'université de Leyde,
où il prit le degré de docteur en médecine. Re-
tourné en Angleterre, il s'établit à Plymouth, où
il exerça la médecine pendant une trentaine
d'années. « C'était un excellent observateur, dit
la Biographie Médicale. On lui doit la descrip-
tion d'une maladie assez peu connue, à laquelle
on donne encore le nom de fièvre lente ner-
veuse d'Huxham. H est du petit nombre de
ceux qui n'ont pas méconnu la nature inflamma-
toire des fièvres dans la plupart des cas, et c'est
en cela surtout que ses écrits ont beaucoup
moins vieilli que ceux d'un grand nombre d'au-
teurs aussi célèbres. » Le quinquina et le vin
étaient ses remèdes favoris, et comme sa répu-
tation était considérable de son vivant, il y a lieu
de croire que sa pratique était heureuse. Une
infusion del'écorceduPérou (Peruvian barh)
et d'autres aromates dans l'alcool, qu'il prescri-
vait souvent, a gardé jusqu'à présent le nom po-
pulaire de teinture de quinquina d'Huxham.
Ses principaux ouvrages sont : Observationes
de Aère et Morbis epidemicis ab anno 1728-
1752; Londres, 1744-1752, 2 vol., in-8° : son
fils a donné la suite; ibid., 1760, in-8°; — An
Essay on Fevers and Diseases; Londres, 1750,
in-8°; traduit en français, in-12; — Médical
and Chymical Observations upon Antimony ;
Londres, 1755, in-8° ; — Dissertation of the
malignant Vlcerous forethroat; Londres,
r767, in-8°. Reichel a réuni divers ouvrages
d'Huxham sous ce titre : Opéra Physico-Me-
dica ; Leipzig , 1 764, 3 vol. in-8°. J. V.
Polwhele, Hittory of Devonshiré , vo\. I, p. 826. —
fiées, Cyclopmdia. — Lysons, Mag. Brttan. — Chalmers,
General Bioçraphical Dictionary. — Jobo Gortoo, A
General Biograp. Dict. — Biographie Médicale.
hcydecopeb ( Balthasar), poète et philo-
logue hollandais, né en 1695, à Amsterdam, mort
le 24 septembre 1778. Il fut nommé écbevin de
sa ville natale et plus tard bailli du Texel. Ses
productions poétiques, excepté sa tragédie d'Ar-
sace, ont peu de valeur; mais il s'est fait re-
marquer comme un des plus habiles connais-
seurs de la langue hollandaise. On a de lui :
De triompheerende Standvastigheid of very-
dette Wraahzucht, Treurspel (La Constance
triomphante , ou la vengeance déçue ) ; Amster-
dam, 1717, in-8° ; — Edipus, Treurspel , uit-
het Pranschvan Corneille (Œdipe, tragédie
traduite du français de Corneille); Amster-
dam, 1720, in-8° ; — Arsases oft edelmoe-
dig Verraad (Arsace, on la trahison géné-
reuse); Amsterdam, 1722, in-8° ; — Békeldu
chten en Brieven van Boratius (Satires
et Épttres d'Horace ) ; Amsterdam , 1626, in-4* ;
ibid., 1737, in-4°, avec la traduction de Y Art
poétique; — Achilles, Treurspel (Achille,
tragédie); Amsterdam, 1728, in-8*; — Proeve
van Taal~en-Dichtkunde in vrymotdige Aan-
merhingen op Vondels vertaalde Herschep-
pingen van Ovidius (Essais philologiques et
poétiques, ou observations libres sur la traduc-
tion des Métamorphoses d'Ovide faite parVon-
del); Amsterdam, 1730, in-4°; Leyde, 1782-
1784, 2 vol., in-8°, avec des additions, parles
soins de Lelijveld ; ouvrage précieux qui contient,
outre d'excellentes remarques sur les littérateurs
hollandais, un trésor d'observations sur le génie
et l'histoire de l'idiome hollandais ; — PrivUc-
gien en Handvesten van Texel ( Privilèges et
Franchises du Texel ) ; Amsterdam, 1745, in-4°;
— Gemengen gedichten ( Poésies mêlées);
Amsterdam , 1788, in-4°. Huydecoper a aussi
édité : Reimchronijh van Melis Stoke, met
Bistorie-Oudheid en Taalhundige Aanmer-
hingen ( Chronique rimée de Melis Stoke, avec
des remarques historiques et philologiques)-,
Leyde, 1772, 3 vol. in-4° , excellent ouvrage à
consulter surtout pour l'histoire de la langue
hollandaise; — Brieven van Hooft (Lettres de
Hooft); Amsterdam, 1738, in-fol. — Enfin, Hoy-
decoper a inséré un Mémoire sur Vablatij ab-
solu dans le tome I er des Mémoires de la
Société de Philologie hollandaise de Leyde,
ainsi que De Pythagoras Kuâpcp, dans le tome VI
(partie II, p. 417) des Miscellaneae Observa-
tiones (voy, d'Oryille, Animadversiones ad
Charitonem, p. 609); dans cette dernière dis-
sertation il a voulu établir que le Ktioqux; dont
Pythagore ordonnait à ses disciples de s'abstenir,
n'était pas \&Jève, mais Vœuf. — Dans les De-
licix Poeticx de van Santen se trouvent dix
pièces de poésie latine de Huydecoper. £. 6. .
Su, OnmasUeon, uyi, p. ««. - Bracb et Grafccf ,
665
HUYDECOPER — HUYGENS
66e
Allgetn. Encgklopsedie. — Van Effen dans le Holltm-
dsche Spectator ( t IV, p. set ).
HUY6BNS ( Constantin) 9 seigneur de. Zuyli-
chem, homme d'État et littérateur hollandais, né
le 4 septembre 1596, à La Haye, mort le 28 mars
1687. Son grand-père Corneille Huygens, gentil-
homme de Brabant, était venu se fixer à An-
vers, où il épousa Suzanne Hafvaegele, d'une des
premières familles de cette ville. Christian Huy-
gens, fils de Corneille et père de Constantin, de-
vint d'abord secrétaire des commandements de
Guillaume le Taciturne et plus tard secrétaire
du conseil d'État de la république des Provinces-
Unies. Constantin Huygens fut nommé secrétaire
intime de Frédéric, prince d'Orange. Mais il rési-
gna bientôt son emploi , qu'il abandonna à son fils
aîné. Quelque temps après il se rendit, au nom du
stathouder, auprès de Louis XIV pour obtenir la
restitution de la ville d'Orange, laquelle lui fut ac-
cordée en 1665 après quatre ans de négociations.
Huygens était en relation suivie avec tous les
hommes distingués de son pays, tels que Hooft ,
les deux Heinsius, Vossius et antres, ainsi
qu'avec Descartes, Balzac et Corneille. Ses poé-
sies latines, trop vantées par ses contemporains,
ne méritent cependant pas d'être dépréciées,
comme elles l'ont été par Ménage et Chapelain.
Quant aux compositions poétiques qu'il a écrites
en hollandais, elles renferment de grandes beau-
tés; les nombreuses descriptions de la nature
de son pays qui s'y trouvent sont généralement
d'une perfection achevée. On y rencontre aussi
des observations fines et enjouées sur les mœurs
hollandaises de son époque. On a de Huygens :
Gebruyh en Ougebruyk van V Or gel (Usage et
Abus de l'Orgue), ouvrage qui a contribué a faire
admettre cet instrument dans le culte réformé
de la Hollande; — Monumenta desultoria;
Leyde, 1644, in-g»; La Haye , 1655, in-12: re-
cueil de poésies latines, contenant douze livres
d'épigrammes, un autre livre intitulé- Farrago,
composé de pièces diverses, et un dernier désigné
sous le nom à'OtiorumjuveniliumResegmina;
— De Ledige Vuren ( Heures de loisir ) ; Amster-
dam , 1644, in-8°; une seconde partie parut à
Schiedam, 1647, in-8°; — Korenblœmen
(Bluets); La Haye, 1653, in-4"; Amsterdam,
1672, 2 vol. in-4°; Leyde, 1824, 6 vol. in-8°,
avec des éclaircissements de Bilderdyk ; c'est le
recueil complet des poésies hollandaises de Huy-
gens; il contient entre autres sou Hoofwijh,
description de sa maison de campagne, ses Ze~
denprinten (Tableaux de mœurs), Batava
Tempe, et Vorhout van's Gravenhaye, satire
sur les mœurs dé la société de La Haye; ces
deux derniers ouvrages furent réimprimés en-
semble; Leuward, 1824, in-4°; un poème iné-
dit de Huygens a été publié à La Haye, 1842,
in-8°» par Jouckbloet. — Dans les Posthuma
de Franchis se trouvent quatre lettres de Huy-
gens, auquel sont adressées cinquante-deux
lettres de Hooft, publiées dans la correspondance
de ce dernier. E. 6. •
Bayle, Dictionnaire (an mot Zuylichem). — Bailler,
Jugements des Savants, t. IV. — Huygens, De fita pro-
pria Sennones (autobiographie traduite en hollandais
par Loosjes; Amsterdam, 1821, in-8°). — Bigdraçen tôt
de Kenniss van net karakter van C. Huygens ; La
Haye, 18MUn-8°. - Vries , Histoire de la Poésie hol-
landaise, t. 1, p. 177.
huygens, en latin Hugenius, van Zuylichem
( Christian ) (1) , célèbre physicien, géomètre
et astronome, frère de Constantin , naquit à la
Haye le 14 avril 1629, et mourut le 8 juillet
1C95. Il reçut sa première instruction de son
père, versé à la fois dans les lettres anciennes et
dans les mathématiques. A quinze ans il eut
pour maître un mathématicien d'Amsterdam,
nommé Stampiœn , dont Descartes ne nous a pas
laissé un témoignage très-favorable. A seize ans
il étudia le droit à l'université de Leyde, sous
le célèbre jurisconsulte Vinnius, qui lui dédia plus
tard son commentaire sur les Institutes. L'étude
du droit ne lui fit pas négliger celle des mathé-
matiques, qu'il continua sérieusement, de 1646 à
1648, à l'université de Breda , nouvellement
établie. Sous la direction habile de Fr. van Schoo-
ten, de J. Pell> le jeune Huygens fit de rapides pro-
grès, et ses premiers travaux de mathématiques
attirèrent sur lui l'attention de Descartes, dont
il n'eut point l'occasion, à son grand regret, de
faire la connaissance personnelle. Huygens dé-
buta dans la carrère scientifique par ses Théo-
remata de quadratura hyperboles, ellipsis et
circuli, exdato portionum gravitatis centro,
quibus subjùncta est êÇÉTaatç cyclometrix
Gregorii a S.- Vîncentio editœ, anno 1647,
Leyde, où il relève les erreurs du géomètre
Grégoire de Saint-Vincent, que les jésuites vou-
laient mettre au même rang que Descartes ;
cet ouvrage fut bientôt suivi de : De Circuli Ma-
gnitudine Inventanova;Md. t 1654. « Ce sont là,
dit Montucla, des essais de la jeunesse d'Huy-
gens : ils ne peuvent entrer-en comparaison
avec les inventions dont il enrichit depuis la géo-
métrie et l'analyse (2). » C'est à la même épo-
que qu'il faut faire remonter la composition de
plusieurs mémoires sur la dioptrique, (publiés
dans le recueil de ses œuvres posthumes. En
1655 Huygens vint pour, la première fois en
France, et fut reçu docteur en droit à la faculté
protestante d'Angers. A son retour en Hollande,
il se livra, assisté de son frère, à la fabrication
des lentilles de lunettes, une de ses occupations
favorites, etparvint à faire un instrument de dix
pieds (hollandais ) de distance focale, avec le-
quel il découvrit le premier satellite de Saturne (3).
(1) Plusieurs lettre» adressées par Hujgens a des «avants
français portent la signature Huygens; dans ses^ciits
latins, il s'appelle lui-même Hugenius. Dans les Philo-
sophical Transactions et dans d'autres ouvrages, ; son
nom s'écrit indifféremment Huyyhen», Hughaens ou H li-
chens.
(3 Montucla, Hist. des Mat h., nouvelle édit., t. II, p. 417.
(3) Voy. plus loin le récit détaillé de cette découverte,
qu'il communiqua d'abord aux astronomes soas forme
667
HUYGENS
66$
De 1681 à 1687, il fit un grand nombre de
'verres ayant plus de 100 pieds de distance fo-
cale ; il y en avait môme un de 170 et un autre de
210 pieds de foyer. De là des tuyaux qui devaient
ployer sous le poids de leur énorme longueur.
En 1656, Huygens publia sur le calcul des pro-
babilités, dont Pascal et Fermât avaient indiqué les
premiers traits, un mémoire, originairement écrit
en hollandais, et que Schooten traduisit en latin
( De Ratiociniis in ludo aleae), en le réimpri-
mant dans ses Exercitationes Mathematicx.
C'est à la même année que remonte l'invention
qui a le plus popularisé le nom de Huygens celle
des horloges à pendules. En voici l'origine. Un
instrument pour bien mesurer le temps est ab-
solument indispensable en astronomie. Les clep-
sydres et les sabliers étaient impropres à donner
des résultats exacts. Depuis que Galilée avait re-
connu Tisochronisme des oscillations du pendule,
les astronomes essayaient de s'en servir : un aide
comptait les oscillations fournies par une chat-
nette qu'il faisait mouvoir et à l'extrémité de la
quelle était suspendue un poids. C'était là un
moyen aussi pénible qu'ennuyeux. Pour y re-
médier, Huygens supprima d'abord l'aide-comp-
teur, et donna au rouage des horloges un mou-
vement régulier, uniforme, par le mécanisme
suivant : une tige de fer, au bas de laquelle est
suspendu un poids, et qui représente le pen-
dule, communique en haut un mouvement alter-
natif à un essieu garni de deux petites palettes
( le régulateur ) disposées de manière qu'à cha-
que oscillation elles ne laissent passer qu'une dent
de la roue avec laquelle elles s'engrènent. De là,
pour les roues de l'engrenage, Un mouvement
aussi uniforme que celui du pendule même.
Bien plus : la pression exercée par les dents de
la première roue contre les palettes du régulateur
communique au pendule à peu près la même quan-
tité de mouvement qu'il en perd à chaque os-
cillation par le frottement et la résistance
de l'air; l'horloge ne peut donc s'arrêter que
lorsque le poids ou le ressort a cessé d'agir (1). Tel
est le principe des horloges généralement connues
sous le nom de pendules. Huygens en présenta
la première aux états généraux de Hollande, le
1-6 juin 1657 , et leur demanda un brevet pour
son invention, qu'il a décrite dans son Horolo-
d'une énigme qoe voici : Admoxere ocuiis distantia si-
déra nostrls WVVVVVCCCMtHMBQXj c'était une
sorte d*anegramme qu*M avait même gravée, dit-on, «or
l'objectif de sa lunette. E» transposant les lettres, Il
l'expliqua lui-même ainsi s Saturno Luna suacircun-
ducitur dieàus sexdecim horis quatuor. Il corrigea pins
tard cette observation, os substituant à 16 Jours t heures
15 jours SS heures, durée de larévolution du satellite au-
tour de Saturne.
(1) Tav Toung Incline à penser que lbn. Ionnls avait
déjà, au dixième siècle, appliqué, cbea les Arabes, le pen-
dule à la détermination du temps. Mais c'est Sanctorius
qui, en lait, parait avoir le premier employé le pendule
comme modérateur du rouage d'une horloge. Voy. Tu.
Toung; Lectures on naturel PAUosophp, 1 1, p. 181. Sé-
dUlot, Mem. sur Us Instruments astronomiques çMet les
Ara**.- Humboldt, Cosmos, L il.
gium, petit traité de 10 pages, placé en tête du
1 er vol. de ses Opéra varia; Leyde, 1724 (van der
Aa).Huygen8 songea bientôt à perfectionner sou
invention. Il avait remarqué qu'il n'y a pas, con-
trairement aux assertions de Galilée, disochro-
nisme parfait entre les oscillations d'étendue iné-
gale. Craignant que les petites différencesaccumu-
lées ne fissent à lalongue une somme sensible, il
se proposa de rendre ces oscillations géométrique-
ment égales, quelle que fût leur amplitude. Ce
problème le porta à déterminer la courbe le long
de laquelle un corps doit rouler afin que, de
quelque point que sa chute commence, il mette
toujours le même temps pour arriver au plus
bas. Il trouva que cette courbe est celle que
tracerait en l'air le point d'une roue se mouvant
sur nn plan uni ; en un mot, c'était la cycloïde
qui jouissait de la propriété requise (1). Il lui
fallut donc inventer le moyen pour faire décrire
au poids du pendule une cycloïde. C'est là ce qui
le conduisit à la célèbre Théorie des Dévelop-
pées : il trouva que toute courbe pouvait être
décrite par le développement d'une autre, et
pour que, dans le cas particulier dont il s'agissait,
je centre du pendule décrivit une cycloïde, il fal-
lait déterminer cette autre coui be ( la développée )
et faire en sorte que le fil du pendule s'appliquât
sur elle dans ses mouvements. Or, cette courbe
était encore une cycloïde égale, mais posée
en sens contraire. En conséquence, il imagina un
mécanisme particulier pour faire exécuter les
oscillations du pendufe entre deux arcs de cy-
cloïde. Cependant, quelque ingénieux que soit ce
mécanisme, on s'aperçut bientôt qu'il était inutile
dans la pratique et qu'en faisant décrire au pen-
dule de très-petits arcs, on . obtenait une régu-
larité suffisante même pour les horloges les plus
sensibles. Huygens donna la description de l'hor-
loge à pendule cycloïdal dans VBorologium os-
cillatorium; Paris (Maguet ), 1673, in-foL; re-
produit, avec des additions , dans le 1. 1 de ses
Opéra varia, p. 29-2 48. C'est la troisième partie
de ce traité qui contient l'exposition de la Théo
rie des Développées, dont Huygens est l'auteur.
En voici l'idée t Que. l'on s'imagine une courbe
entourée d'un fil très-flexible et délié mais non
extensible; ce fil, en se déployant roide à l'une des
deux extrémités, tracera une courbe, pendant qu'à
l'autre extrémité il décrira une autre courbe. La
première s'appelle la développée, et la seconde la
courbedécrite par évolution ou développement Ces
courbes ont des propriétés particulières , appréciées
par les géomètres. Dans le cercle, la développée
est un point, car tous les rayons concourent au
centre. Dans l'ellipse, Iadéveloppée est une courbe
à quatre pointes, et qui , malgré la complication
(1) Ce genre de courbe a reçu depuis le nom de fonte-
chrone. La eyclolde est la courbe tautœhron» éaas le
vide et de» l'hypothèse de l'accélération uniforme des
graves et des directions parallèles. SI ces directions sont
convergentes vers un point, et que la pesanteur varie
comme la distance an centre, la tautochrone sera,
comme l'a ht premier observé Newton, VépUxcloUU.
669
HUYGENS
670
de son équation, est parfaitement ratifiante : elle
est égale à quatre fois le demi-paramètre du
petit axe. En poursuivant cette théorie, Huygens
découvrit que la développée de la cycloïde est elle-
même, pour le répéter, une cycloïde égale à la
première, mais posée en sens contraire; et en
appliquant le calcul* à la développée de la para-
bole ordinaire, il trouva que cette développée
était une des paraboles cubiques, savoir celle dont
l'équation est a 2 a?=^ 3 , x étant l'ordonnée, et y
l'abscisse. Enfin, il montra qu'il y a une infinité
de courbes absolument rectifiantes. Descartes,
dont Huygens avait l'un des premiers adopté les
principes géométriques , avait douté de la possi-
bilité d'en trouver une seule (1).
La quatrième partie de VHorologium oscilla-
torium traite du centre d'oscillation des pendu-
les. L'auteur y résolut tous les problèmes proposés
par le P. Mersenne, et qui avaient pendant trente
aos exercé l'esprit ded plus habiles géomètres;
il y démontre aussi plusieurs proposition* nou-
velles, et donne une Oèéthode certaine pour trouver
le centre d'oecillatiaji dans les lignes, dans les
surfaces et dans les corps solides. Huygens eut le
premier l'idée d'une mesure invariable et univer-
selle. A cet effet il propose d'employer un pen-
dule dont cbaqueosciUatioa soit exactement d'urne
seconde de temps selon le ■fceuvement moyen du
Soleil. Ainsi» peur faire savoir aux siècles à venir
quelle était le longueur do pied de roi dont on
se servait à Paris, on n'aura qu'à établir la pro-
portion suivante : la troisième partie de ce peu*
dule à secondes, que l'auteur appelle pied
Aoroérs, est au pied de Paris, comme 864 à
881. « Faute de cette mesure universelle, en a
perdu» ajoute-toi, ta connaissance de la véritable
grandeur des mesures dont se sont servis les
Hébreux, tes Grecs et les Romains (2). » Un
autre avantage, plus réel , qu'il retira de l'em-
ploi du pendule, ce fat la détermination plue
exacte de l'espace que parcourent les corps, en
TOtn de la pesantenr, dans un temps donné ,
comme celui d'une seconde, Il y avait été con-
tait pet «« célèbre théorème, d'après lequel
" le temps d'une neeWation ennère d'un poids
décrivant une cycloïde, est au temps qu'il em-
ploierait à tomber de te hauteur de l'axe de cette
cycloïde , tomme la «freonféreiiee est au dia»
mètre ». Or, d'après la théorie des développées,
l'axe de la eytietdè est la moitié de la tan-
neur du pendule; et comme cette longueur est
eomiuepour urie làtHmte donnée, on aura, par te
rapport du diamètre à teefoeonféreace, le tempe
(fuemettra en corps à tomber de la moitié de la Ion*
gueur indiquée. Bans cette même partiede Vfforo-
logiurn oscUlatorinm, Huygens résout lenremier
le problème des centres d'oscillation proposé
pu le P. Mersenne. Le P. Mersenne avait demandé
aux mathématiciens, vers 1646, de déterminer la
M roi. Moutucla, Hist. des Math,, t. tt, p. ISS et
sonr.
(*) Journal des Savants, année 1674, p. Me.
duréedes oscillations de plusieurs figures suspen-
dues de différentes manières et mues , soit en
plan, soit de côté; Descartes et Roberval furent
particulièrement invités à cette recherche. Le prin-
cipe fondamental de la théorie d'Huygens sur les
centres d'oscillation est celui-ci : « Si un pen-
dule, chargé de plusieurs poids, fait une partie
de vibration, et qu'alors ces poids , dégagés de
la verge qui les astreint à se mouvoir ensemble,
soient réfléchis perpendiculairement en haut
avec leurs vitesses acquises, leur centre de gra-
vité remontera précisément à la même hauteur
que celle d'où il est tombé. » A l'aide de ce prin-
cipe il détermina le centre d'oscillation d'un pen-
dule composé. Pour cela il suppose la longueur
du pendule simple et isochrone indéterminé,
et d'après cette supposition et les principes
connus de la mécanique , il calcule la hauteur
d'où tombe le centre de gravité durant une
demi- vibration-, et celle à laquelle ce centre
s'élèverait en supposant les poids libres et re-
montant avec leurs vitesses acquises. Cette
seconde hauteur, égalée à la première, lui donne
une équation qui détermine la longueur isochrone.
Il trouve, par ce procédé, que cette longueur
est celle qu'on aurait en faisant la somme des
produits de chaque poids par le carré de la
distance de l'axe de suspension, et divisant cette
somme par celui de tous ces poids multipliés par
la distance de leur centre de gravité à ce même
axe(l). — Ace travail se rattache son mémoire
De Motu Corporum expercussioneycomniuniqué
en 1669 a la Société Royale de Londres, et re-
produit dans ses Opuscula posthuma ( Amster-
dam, 172*, in-4 B ), t. II, p. 75-104. L'auteur
débute par quelques propositions générales,
( entre autres celle-ci : Corpus quodlibet semel
motum, si nihil obstat t pergere moveri eadem
perpétua celeritate et secundum lineam
rectam), pour arriver à la démonstration de ce
qu'il avance. Descartes avait pensé qu'il y avait
toujours la même quantité de mouvement avant
et après le choc. C'était là une erreur ; Huy-
gens montra, par une série d'expériences, « que
le centre de gravité commun ou est immobile
eu se meut avant et après le choc avec une
vitesse uniforme; que ce n'est donc point,
comme le prétendait Descartes, la quantité
absolue de mouvement qui reste invariable,
mais seulement la quantité de mouvement vers
un même côté (2) ». L'auteur ne se borne pas
même au cas de deux corps qui se choquent entre
eux , il fait voir que la même loi se vérifie
quelle que soit la manière dont les corps se
choquent et quel que soit leur nombre. Ces
expériences sur le choc des corps (3) lui firent
découvrir la loi de la conservation des forces
<i) roy. Montucla, Hitt. des ATA*»., t II , tk 417.
(i) ibtd., t. îr, p. sis.
(8) Ellea «talent faites avec des bâties en Ivoire en
en marbre (pour les corps élastiques) et en balles d'ar-
gile fraîche (pour les eorps mous >.
en
HUYGENS
672
vives (i) appelée aussi loi des forces ascen-
sionnelles (2) , d'après laquelle la somme des
produits de chaque masse par le carré de la
vitesse est la même avant et après le choc.
Huygens termine son travail par cette remarque
curieuse que voici : « Lorsqu'un corps en choque
un autre en repos, par l'entremise d'un tiers d'une
grandeur moyenne (3), il lui communique tou-
jours plus de mouvement que s'il frappait immé-
diatement, et ce mouvement est le plus grand
qu'il puisse être lorsque le corps intermédiaire est
moyen géométrique entre l'un et l'autre. Il y a
plus : ce mouvement sera encore plus grand si
le corps en question est choqué par l'en-
tremise de deux autres qui avec les deux ex-
trêmes fassent une proportion géométrique con-
tinue. Enfin, plus il y aura de moyens propor-
tionnels entre l'un et l'autre, plus grande sera
la vitesse du dernier comparée avec celle du
premier. Si l'on supposait, par exemple, 100 corps
en proportion double, le plus grand choquerait le
moindre par l'entremise de 98 autres, et lui impri-
merait une vitesse 2,338,492,188,000 fois plus
grande que la sienne; au lieu que s'il l'eût choqué
immédiatement , il ne lui aurait donné qu'une
vitesse un peu moindre que double.
Enfin, dans la cinquième et dernière partie ,
l'auteur propose l'application du ressort spécial
à régler le mouvement du balancier des montres.
Il fut, à cette occasion , vivement attaqué par
l'abbé d'Hautefeuille,qui réclamait injustement
la priorité de cette invention. (Voy. Haute-
feuille ).
De 1655 à 1663, Huygens fit plusieurs voyages
en France et en Angleterre, où il communiquait
à plusieurs personnes ses procédés à travailler le
verre pour la construction de ses lunettes. Ap-
pelé par Colbert, il vint en 1666 à Paris faire
partie de l'Académie des Sciences, nouvellement
fondée. Il était au nombre des savants les plus
célèbres pensionnés par Louis XIV, et avait
reçu un logement à la Bibliothèque du Roi.
Son séjour à Paris fut de quinze années à peu
près sans interruption. Dans cet intervalle il
communiqua à l'Académie des Sciences un grand
nombre de mémoires, dont quelques-uns , ense-
velis dans les archives de l'Institut, sont en-
core inédits; les autres, refondus par l'au-
teur (4), parurent à Leyde, en français, sous
le titre de Traité de la Lumière, où sont
expliquées les causes de ce gui lui arrive
dans la réflexion et dans la réfraction, et
(l) L'eipression de force vire est due à Leibnitc,
appelant force morte celle de la simple pression, qui
n'est que comme le produit de la masse par la rttesse
qu'elle aurait si le mouvement s'effectuait.
(t) On l'appelle ainsi parce que de cette égalité de
sommesventre les produits des masses par les carrés des
vitesses avant et après le choc , il suit que le centre
de gravité d'un système de corps a la puissance de re-
monter à la- même hauteur que celle d'où il est descendu.
(8) Vou. Montucla, Mis t. des Mathémat., t. Il, p. 413.
(4) Entre autres un mémoire Sur l'Aimant.
particulièrement dans Vêtrange réfraction
du cristal d'Islande, avec un Discours de la
Cause de la Pesanteur; 1690, in-4° (1). Cest
dans cet ouvrage que Huygens développe sa théo-
rie de l'ondulation, qui depuis a été universelle-
ment adoptée : « Comme on tient pour certain que
la sensation de la vue, dit-il, est excitée par l'im-
pression de quelque mouvement de la matière
qui agit sur les nerfs au fond de nos yeux ,
c'est encore une raison de croire que la lumière
consiste dans un mouvement de la matière qui
se trouve entre nous et le corps lumineux. De
plus, quand on considère l'extrême vitesse dent
la lumière s'étend de toutes parts , et que quand
il en vient de différents endroits, mesme de tout
opposés les rayons se traversent l'un l'autre sans
s'empescher, on comprend bien que quand nous
voyons un objet lumineux ce ne saurait être par le
transport d'une matière ^ qui depuis cet objet
s'en vient jusqu'à nous, ainsi qu'une balle ou
-une flèche traverse Pair ; car assurément cela
répugne trop à ces deux qualités de la lumière
et surtout à la dernière. C'est donc d'une autre
manière qu'elle s'étend, et ce qui nous peut con-
duire à la comprendre , c'est la connaissance que
nous avons del'extensiondu son dans l'air (2). »
j'après des expériences alors toutes nouvelles ,
Huygens estima la vitesse de la lumière 600,000
fois plus grande que celle du son. Quanta la cause
de la pesanteur, il la trouve dans le mouvement
« Car si parmi la matière fluide qui tourne dans
l'espace, il se rencontre des parties beaucoup
plus grosses que celles qui la composent, ou des
corps faits d'un amas de petites parties accro-
chées ensemble, et que ces corps ne suivent pas
le mouvement rapide de ladite matière, ils se-
ront nécessairement poussés vers le centre du
mouvement et y formeront le globe terrestre,
s'il y en a assez pour cela et supposé que U
Terre ne fût pas encore (3). ».— Les expériences
sur la différencede longueur du pendule à secondes
sous différentes latitudes, Huygens les expliquait
par l'action de la force centripète et de la force
centrifuge. Comme la Terre est un sphéroïde (4)
de révolution, ii faut raccourcir notre pendule
à secondes sous l'équateur et l'allonger sous
les pôles. Dans une Addition au Discours de
la Cause de la Pesanteur, il critique quelques
points du célèbre ouvrage de Newton ( Philoso-
phie naturalis Principia ) qui venait de paraî-
tre; il bat en brèche les tourbillons de Descartes, et
donne quelques applications de la courbe qu'-fl
appelle la logarithmique ou la logistique
(courbe infinie, qui a une droite pour asymptote).
Ce fut pendant son séjour à Paris, de 1666 à
1681, que Huygens voyait la célèbre Ninon et lui
(i) Ce traité a été ensuite traduit «n latin et reproduit
dans m» Opéra varia.
(S) Traité de la Lumière, p. 8.
(S) Discours de la Cause de la Pesanteur, à 1a fio du
Traité de la Lumière, p. 187.
(4) IMd., p. 1*8.
C73
HUYGENS
674
adressa même, dit-on, des vers. Gomme il était
protestant, il quitta la France lors de la révoca-
tion de Tédit de Nantes. On essaya en vain de le
retenir; et il cessa même toute correspondance
avec l'Académie des Sciences, tandis qu'il conti-
nuait d'envoyer des mémoires à la Société Royale
de Londres, dont il était aussi membre dès la créa-
tion de cet institut, rival de celui de France. Pen-
dant son séjour à Paris, il avait connu Leibnitz,
dont il ne voulut pas d'abord adopter le nouveau
calcul (calcul différentiel et intégral). lise ser-
vit de la méthode des anciens pour résoudre
les problèmes célèbres de la courbe aux appro-
ches égales , et de la chaînette : ces problèmes
renfermaient la double. difficulté de les mettre
en équation et de résoudre ensuite cette équa-
tion , qui ne pouvait se présenter d'abord sous
une forme finie, « La méthode de Descartes,
ajoute Gondorcet , était cependant devenue, entre
les mains de Wallis, un instrument plus simple
que celle des anciens; mais, quoique Huygens
la connût à fond, et que même il l'eût perfec-
tionnée, il a préféré la méthode des lignes, dont
une force de tête peu commune ne lui permettait
guère de sentir les inconvénients, et à laquelle
il tenait , soit par préjugé , soit parce que cette
méthode, agissant toujours sur les choses
mêmes, et. non sur des signes qui les représen-
tent, ait réellement l'avantage de satisfaire plus
pleinement l'esprit ( 1 ) » .
Mous venons de montrer sommairement tout
ce que Huygens avait fait pour la physique et la
géométrie; il nous reste à dire ce que lui doit
l'astronomie.
Les travaux astronomiques d'Huygens se
trouvent consignés dans les écrits intitulés :
Saturni Luna , observatio nova (daté de La
Haye, le 5 mars 1656; reproduit dans le t. m
de ses Opéra varia (Leyde, 1724), p. 523-526;
Systema Saturninunv, sive de causis mi-
randorum Saturni phxnomenon et comité
ejtis planeta novo; ibid., p. 529-595, avec des
planches;— Brevis Assertio Systematis Sa-
turnii sui, adressé au prince Léopold de Tos-
cane; ihjd.jp. 621-640 ; c'est une réponse à l'écrit
d'un savant italien (Eustachi de Diviniis Septem-
pedani ), intitulé : Brevis Annotatio in Systema
Saturninum Christ Hugenii; ibid., p. 599-
618;— Ko<*\uiïétùQoz, sive de Terris cœlestibus,
earumque ornatu, conjecture ad Constante
num Hugenium fratrem, Guilielmo III,
Magnx Britannix régis a secretis ; ibid. , p. 643-
722 (2). Parfaitement initié aux travaux de Co-
pernic, de Kepler et d'Hevelius, Huygens enri-
chit l'astronomie de plusieurs découvertes impor-
tantes, que nous lui laisserons, pour ajouter à
leur intérêt historique, raconter lui-même. « L'an
(1) Condoreet, Éloge d'Huygens.
(l) Le Oosmotfieorot^ c'est-à-dire Contemplation du
monde, a été. traduit en français par M. D. ( Dufoor),
aous le tttre emprunté à l'ouvrage, de Fontenelle : La
Pluralité des M ondes f Parla, 1701, io-lf.
NOCV. BIOCR. CÉNÉR. — T. XXV.
1655, le 25 marj , en regardant Saturne avec
un tube dioptrique (lunette de 12 pieds), j'a-
perçus , en dehors des anses ou bras (prseter
ansas sive brachia) de la planète, à l'occident
et à une distance d'environ trois scrupules (mi-
nutes ) une petite étoile ( stellulam), située à peu
près dans le plan des anses (anneau de Saturne).
Me doutant que ce pourrait bien être là un corps
dans le genre des quatre lunes de Jupiter, je
marquai la position respective de Saturne et de
cette petite étoile. Je ne m'étais pas trompé : le
lendemain, elle avait bougé, et je pus ainsi me-
surer les jours suivants son déplacement dans un
temps donné (1). » Ce satellite de Saturne, le pre-
mier dans l'ordre delà découverte, est le sixième
dans l'ordre de la distance à la planète; il a reçu
depuis le nom de Titan. Plus tard, Cassini décou-
vrit (dans l'intervalle de 1672 à 1684) quatre autres
satellites de Saturne (Japhet, le plus extérieur
de tous ; Rhéa, le cinquième dans l'ordre des dis-
tances ; Dioné, le quatrième ; Téthys, le troisième).
Plus de cent ans après Cassini, W. Herschel dé-
couvrit, en 1789, deux nouveaux satellites, Mimas
et Encelade, les plus voisins de la planète ; enfin,
de nos jours, en septembre 1848, Bond, à Cam-
bridge, et Lassel, aux États-Unis , découvrirent
presque simultanément un dernier satellite, Hy-
périon, le septième dans l'ordre des distances, en
sorte que le total des satellites de Saturne s'é-
lève aujourd'hui à huit. Condorcet et, d'après
lui, Arago ont pour ainsi dire reproché à
Huygens de n'avoir pas poussé plus loin ses
recherches sur les satellites de Saturne par respect
pour une vaine théorie. « Le même instrument
( avec lequel Huygens avait découvert le premier
satellite) aurait, dit Arago, pu servir à en aper-
cevoir d'autres. Mais Huygens ne les chercha
point : après son observation, le nombre des sa-
tellites se trouvait égal à celui des planètes de
notre système. Or, selon d'anciennes opinions,
à la domination desquelles le grand géomètre
n'avait pas su se soustraire, il n'était pas pos-
sible que le nombre des planètes principales fût
inférieur au nombre total des planètes secon-
daires. Des idées théoriques ont très-souvent
conduit à de brillantes découvertes : ici l'effet
fut diamétralement opposé (2) ». Cette assertion
manque de justesse. Si Huygens a fait, dans son
Systema Saturninum, un certain rapproche-
ment entre le nombre des six lunes (le satellite
de la Terre, celui de Saturne, et les quatre sa-
tellites de Jupiter) et le nombre de six planètes
alors connues (Vénus, Mercure, la Terre, Mars,
Jupiter, Saturne ), il n'y attachait aucune vue théo-
rique. Cela est si vrai, que revenant sur sa décou-
verte dans son Cosmotheoros, l'auteur s'ex-
prime ainsi : « M. Cassini nous a fait voiries troi-
sième et cinquième satellites (de Saturne) en 1672,
(1) De Saturni luna, t: III. Op. var. t p. BIS.
(*) Aragon Astronomie populaire, t. IV, p. 461; et Con-
dorcet, Éloge d'Huygens.
675
HtJYGEttB
676
et plusieurs fois depuis. H nous écrivit en 1684
qu'il Tenait de trouver le premier et le second
( dans Tordre des distances alors admises ) ; mais
on les aperçoit très-difficilement, et je n'oserais
assurer que je les aie vus jnsqu'à présent, non pas
qoe je fasse de la difficulté d'ajouter foi à cet
homme si célèbre et de les mettre au nombre
des compagnes de Saturne : on peut, an con-
traire, conjecturer avec raison qu'un ou plusieurs
de ces satellites sont encore cachés à nos yen*
( vêl unam vel plures latere suspicari licet
Hët deest ratio) ; car, comme il y a entre les
deux derniers un plus grand espace que n'exige
tattfoujrtiondes distances des autres, il se pour-
rait bien qu'un sixième satellite occupât cet es-
pace vide, ou même qu'an delà dn cinquième il
y en eût d'autres qui circuleraient autour de la
planète et qu'on n'a pn voir encore à causé 'de
leur peu d'éclat, puisqu'on n'aperçoit pas ce cin-
quième satellite et qu'il ne se fait jamais voir en
plein (1) ».
N'était-ce pas là laisser une belle marge aux
observateurs à venir? Évidemment si Hnygens
n'a découvert qu'un seul satellite de Saturne, c'est
qu'à l'aide de ses instruments il mi était impos-
sible d'en apercevoir d'autres. Et il faut, en effet,
de puissantes lunettes et des conditions très-fa-
vorables pouf voir les trois satellites découverts
plus récemment. — Huygens eut aussi le mé-
rite d'avoir le premier montré que cette espèce
d*armille mince et plate (anneau) qui entoure SMs
tutne n'est point, comme on le croyait depuis
Galilée, adhérente à la planète, qu'il y a au con-
traire entre celle-ci et l'anneau un intervalle
an moins égal à la largeur de cet anneau, et enfin
que cet anneau est incliné sur l'ëcliptique. Par une
habitude alors très-commune chez les savants, M
annonça cette découverte dans une espèce d'ana-
gramme ainsi disposée : aaaaaaa eècce d eeeee
g h iiiiUi llll thm nnnnnnnnH oooo pp q
rr s ttttt uuuu y ce qui, en mettant chaque
lettre à sa place, signfie : Annulo ângttur, te-
nui, piano f nusquam cçhaerente, ad eclip-
ttcam inclinato. Il proposa cette énigme en
1656, et comme personne n'avait pu la deviner,
il l'expliqua lui-même trois ans après, dans té
Systema Saturninum (2). — C'est Huygèns qm
vit aussi le premier la grande nébuleuse (encore
non résolue )d'Orion( autour de l'étoile marquée
8, près de la garde de Tépée). « Voici, dit-il; an
phénomène digne d'être rapporté, et qui n'a pas éfé
encore, que je sache, remarqué par personne (3).
Les astronomes comptent dans l'épée d'Orion
trois étoiles très-voisines l'unede l'autre. Lorsque
j'observais par hasard, à l'aide de mon tube dîop-
trique, celle du milieu , j'en vis douze, au lien
d'une (il en donne ici la figure). De ces étoiles,
(l) Cosmotheoros, llb. II, p. 697 (t. III, des Op. var. )
(8) p. 566. La dédicace, adressée au prince Léopold de
Toscane, porte la date dus Juillet 1889 (La Haye).
(3) Simon Marins avait déjà découvert en îet» ta nébu-
leuse d'Andromède.
il y en avait trois presque cotttiguës , et quatre
autres brillaient comme i travers un petit nuage
(veiut trans nebulam tilcebant), de telle
manière que l'espace qui les environnait parut
beaucoup plut lumineni que tout le reste dn
ciel {tnulto illustrWê épparefet relique muni
ûcelô ); et Comme celui-ci était parfaitement se-
rein et (Tira noir foncé, on attrait dit qu'on avait,
comme à travers une brèche du §ftnamedt, la per-
spective d'iine région pku lamineuèe {mlut hiatu
quûdam interruptutn videbatur, per que*
in plagafn magis tueidatn met prospectus);
et ce- phénomène prodigieux occupe apparem-
ment toujours la même placé (i). » On a lien
de s'étonne? que l'auteur ne soit pas, dans ses
autres écrits , revenu sur la question des nébu-
leuses.
C'est surtout dans le Cosmotheords que l'auteur
a donné libre carrière à la hardiesse de son génie.
Cet olivrage est particulièrement destiné à prou-
ver que toutes les planètes etmémetes étoiles sort
habitées 4 . Lès raisons qu'il en donne ont été son-
vent reproduites depuis : elles reposent presque
tontes sar l'analogie. Comme s'il avait préfnquVtt
pourrait manifester quelque surprise à le voir
s'occuper de pareilles choses, il répond d'avance :
« Si quelqu'un objecte que nous prenons one
peine inutile et que notre travail né sert de rien,
je dirai qu'on devrait par la même raison rejeter
toute l'étude de la physique, en ce <jn'eHe con-
siste à découvrir les causes de ce qui se passe
dans la nature, science oh c'est déjà se foire
beaucoup estimer que d'avoir découvert des
choses vraisemblables. Mais, pour disposer ses
conjectures avec art, il ne faut pas oublier qu'il
y a plusieurs degrés de vraisemblance et de pro-
babilité : c'est à en faire un juste discernerait
que consiste l'usage de la raison.... Cent ^re-
viennent de voyages lointains jugent d'ordinaire
pttts sainement de leur pays natal que ceux qoi
n'ont jamais quitté leurs foyers. De même aossi
celui qui réfléchit en lui-même à la pluralité des
Terrés semblables à la nôtre, ne regardera pas
comme de grandes merveilles ce qui se passe ici
dans l'esprit et le commerce dés hommes.-. . . . Noos
croirons donc qu'il y a dans les planètes des
corps qui se meuvent, qui se transportent d'an
lieu dans on autre, $ui ne sent en rien inférieurs
à ceux qni sont sur la Terré j éô ttn toot, qifil
y a des animaux et des plantée <fuî servent à h
hourrituTe de ceux qni les habitent. » Puis il
ajoute : « Ce qui m'oblige de croire qu'il y a dans
les planètes on animai raisonnable, c'est que
sans cela notre Terre aurait de trop grands «t**
tages (et cependant C'est une dés planètes tes ph«
petites), et serait trop élevée étf dignité (elfe
qni n'est ni la plus proche fti W ptos eïofgnée <to
Soleil) par-dessus les autres planètes si elle avait
un animal si fort étové. au-dessus de tons les
animaux.... Enfin, est-il bien fûmtuMe de peu-
(i) Systema Saê*rn. f ft. Ufc
C77
HUYGENS
678
ser que des corps célestes , parmi lesquels notre
Terre occupe un rang si infime, n'aient été créés
qu'afin que nous autres petits hommes puissions
jouir de leur lumière et contempler leur situa-
tion et iear mouvement. * — L'auteur ne se fait
pas d'ailleurs illusion sur la difficulté de ces pro-
blèmes» et il reconnaît que la différence phy-
sique qui existe entre la Terre et la Lune, l'une et
l'autre les plus accessibles à nos moyens d'inves-
tigation, loin de diminuer cette difficulté, l'aug-
mentent etioore. La description qu'il fait delà Lune
est d'une grande exactitude: « On voit, dit-il, dans
notre Lune, même en la regardant avec des lunet-
tes de trois eu quatre pieds seulement, plusieurs
chaînes de montagneset des dépressions indiquant
des plaines très-larges. Sa surface est donc rabo-
teuse : on voit les ombres des montagnes dn côté
opposé an soleil , puis des vallées plus ou moins
petites, renfermées dans les sommets presque cif *
culaires de ces montagnes* Au milieu de ces val-
lées s'élèvent encore des monticules. J)e la forme
arrondie de ees vallées , Kepler tirait Un argu-
ment pour admettre que c'était là d'immenses ter-
rassements exécutés par les habitants de la Lune.
Mais cela est absolument impossible , et à cause
de la grandeur de ces vallées , et parce que des
causes naturelles peuvent très-bien produire des
cavités drbiculaires du même genre. Je n'y trouve
rien non plus qui ressemble à des mers, con-
trairement à l'opinion de Kepler et de la plupart
des astronomes* Mais il y a d'immenses plaines ou
plateaux , beaucoup plus obscurs que lés mon-
tagnes; ce sont ces plateaux que l'on prend
communément pour des mers et que l'en décore
du nom d'océans. En me servant de lunettes pins
longues, j'y ai vu de petites cavités rondes, obs-
curcies par des ombres qui tombent au dedans,
ce qui ne convient point à la surface de la mer.
D'ailleurs ces mêmes plaines, si étendues, ne
présentent point une surface parfaitement unie
quand on les regarde attentivement C'est pour-
quoi ce ne sont point des mers Il est mani-
feste que la Lune n'est pas environnée d'une at-
mosphère semblable à celle qui entoure notre
Terre, parte que, s'il y en avait, on ne pourrait
pas apercevoir les bords de la Lune auçsi nette-
ment limités qu'on les voit dans les occultations
d'étoiles. S'il y avait Une atmosphère, la Lune à
sa circonférence serait plus faiblement éclairée
(evanidaquadamltice), et serait terminée comme
par un duvet (veîut lanugine finir et ur) (1). »
L'opinion de Huygens sur la non-existence de
mers et d'une atmosphère a été depuis généra-
lement adoptée. Cependant la question d'une at-
mosphère lunaire ne nous parait pas encore en-
tièrement tranchée (2).
(1) Cosmotheoros, 11b. U, p. 708-706.
(*) Cette q*stton , à notre avis , a toujours été jaque
ici mal posée.
En effet, si l'on considère d'une part, l'élévation dis-
proportionnée des montagnes lunaires ( puisqu'il y en
a qui dépassent les plus hautes montagnes de la Terré,
bien que celle-ci soit plus grande que la Lune), et de
Le second livre du Cosmotheoros, où l'auteur
fait assister le lecteur au spectacle du ciel, en le
transportant successivement au milieu des habi-
tants de toutes les planètes et de leurs satellites,
est du plus haut intérêt et éminemment propre
à faciliter l'étude de l'astronomie. Ainsi, les ha-
bitants de Mercure voient le Soleil trois fois plus
grand que nous ne le voyons, parce qu'ils en sont
trois fois plus près. Quant à la chaleur et à la lu-
mière, elies doivent être neuf fois plus intenses 1
une pareille chaleur nous serait insupportable,
et brûlerait les plantes de la nature de celles qui
croissent chez nous. Aux habitants de Vénus
le diamètre du Soleil paraîtra une lois et demi
aussi grand et sa surface plus de deux fois ; c'est
pourquoi cet astre leur fournira deux (ois plus de
chaleur et de lumière qu'à nous. Vénus est la pla-
nète qui approche le plus de la température de
la Terre. Notre planète doit paraître aux habitants
de Mars à peu près comme à nous Vénus, avec
des phases semblables à celles de la Lune, et elle
ne doit pas, pour eux, s'éloigner du Soleil de plus
de 48 degrés. Les lunes qui circulent autour de
Jupiter et de Saturne doivent procurer aux ha-
bitants de ces planètes des spectacles aussi beaux
que variés ; les Saturniens ont, en outre, la jouis-
sance de la vue de leur anneau. Mais ce sont
surtout les habitants de la Lune (s'il y en a)»
c'est-à-dire ceux de l'hémisphère perpétuellement
tourné vers nous, qui doivent jouir du spec-
tacle le plus étrange. D'abord la Terre se montre
à eux suspendue dans l'espace beaucoup plus
grande que ne nous parait la Lune; « ils la voient
jour et nuit, comme si elle était immobile , s'ar<
réter au même endroit du ciel. Les uns l'aper-
çoivent sur leur tété, et elle leur sert de zénith ,
pour les autres elle est à une certaine hauteur de
l'horizon, pour d'autres enfin, elle est placée dans
le plan même de l'horizon; ils la voient tournant
toujours autour de son axe et montrant, dans Tes*
pace de vingt-quatreheures, toutes les régions ter*
restres les unes après les autres, sans même excep-
ter les pôles, que nous-mêmes ne connaissons pas
encore bien. Ils la voient successivement croître,
pleine , diminuer et disparaître dans l'espace d'un
mois, exactement comme nous voyons la Lun<\
avec la différence qu'ils f eçoîvent de la Terre Hno
lumière quinze fois plus grande qtfê Cette <|un
nous envoie la Lune, si bien que dans l'hémis-
phère qui est tourné vers nous ils ont des ffttiH
fort claires... Le Soleil ne se lèvechéz eux qu'une
fois tous les mois 4 à les compter comme le*
nôtres, et lie s'y couche de même qu'une fate :
lis ont ainsi leurs jours et leurs nuits quinze fois
plus longs que nous, et toujours égaux par un
éqninoxe perpétuel (f). » S'H y a des astronomes
l'autre l'extrême raréfaction de notre atmosphère nu
sommet des pics neigeux, et qui probablement ne dépasse
pas dix fois la hauteur du ifoont-Blanc, on sera conduit
à admettre l'existence d'un atmosphère lunaire : seu-
lement, ce sera comme un océan qui ne baigne que lus
vallées ( P. B. )
(*) Cotmotheorà*, Ud. II, p. 708.
M.
679
HUYGENS
G80
dans la Lune , il leur faudra tout le génie de Co-
pernic, de Galilée, de Kepler, d'Huygens et de
Newton réunis, pour parvenir, an milieu de ces
apparences si extraordinaires à démêler la réalité
du mouvement des corps célestes. Hésiode, pour
déterminer la hauteur dn ciel et la profondeur
des Enfers, avait dit qu'une grosse enclume
mettrait neuf nyctémères (nnit et jour) à tom-
ber du ciel sur La terre, et le même espace de
temps à tomber de la terre dans les enfers.
Huygens, après avoir cité ce passage du poète
grec, ajoute : « Un boulet de canon , qui fait en*
viron 100 toises par seconde (d'après les expé-
riences du P. Mersenne), et qui conserverait tou-
jours la même vitesse, emploierait près de 25
ans pour aller de la Terre au Soleil. De sorte qu'il
lui faudrait 125 ans pour aller de Jupiter au So-
leil, et 250 de Saturne au Soleil. Oe calcul dépend
de la mesure du diamètre de la Terre , lequel ,
suivant les observations les pins exactes des
Français, est de 6,538,594 toises de Paris, en
comptant 57,060 toises pour un degré du cercle
le plus grand. Tout cela montre l'énorme gran-
deur de tous ces globes en comparaison de notre
petite Terre, sur laquelle nous entreprenons tant
de choses , tant de navigations , tant de guerres.
Plût à Dieu que nos monarques pussent y ré-
fléchir : ils apprendraient qu'ils se donnent
bien du mal à eux et à tant d'autres quand ils
emploient toutes leurs forces à occuper quelque
petit coin de la Terre (1). »
Pour terminer cet exposé succinct des travaux
et découvertes d'Huygens, nous ajouterons qu'il
inventa le micromètre (2) pour mesurer le diamè-
tre apparent des planètes , qu'il perfectionna la
machine pneumatique et le baromètre, qu'il
proposa le premier de mesurer les, hauteurs à
l'aide du baromètre, qu'il donna la vraie théorie
des lunettes (3), enfin qu'il construisit un Plané-
taire qui lui fit découvrir une propriété des
fractions continues, que Lagrange, dans ses ad-
ditions à l'Algèbre d'Euler, appelle « une des
principales découvertes de ce grand géomètre ».
(l) « Quod utinam discunt cogltentque reges et monar*
chae nostrt : ut sciant quantllla In re laborent cura de
angulo aliquo Terre occupa ndo totis virions, magno mul-
torummalo, contendunt. • ( Cosmotheoros, lib. Il, p. 711.)
(t) Ce micromètre, décrit dans le Systema Satuminnm,
consistait « à placer, au foyer commun de l'objectif et de
l'oculaire d'une lunette, une lame de cuivre triangulaire,
mobile eotre deux coulisses établies aux côtés opposés
du tube. En faisant glisser la lame, on cherchait dans
quelle partie elle couvrait exactement le diamètre de la
planète observée ; la largeur de la lame en ce point, com-
parée au diamètre de la pièce circulaire qui terminait le
champ, et dont la valeur en minutes et secondes était
déduite du temps du passage d'une étoile équatortale ,
faisait connaître le diamètre cherché. » ( Arago, Jstron.>
t. II, p. 48.)
(3) il établit, entre autres, que la grandeur de l'image
focale est proportionnelle à la longueur de la distance
focale de la lentille objective, et fit voir ainsi tous les
avantages attachés à la grande ouverture des lunettes et
A leur longueur; enfin il donna une règle très-simple, a
l'aide de laquelle le grossissement peut se déduire de la
valeur des distances focales de l'objectif et de l'oculaire,
auxquels il assigna leur précieux et véritable rôle.
En 1689 Huygens fit nn nouveau voyage en
Angleterre , principalement dans le but d'y faire
la connaissance personnelle de Newton. La fin
de sa vie fut troublée par des ennuis suscités
par des parents. « Peut-être sa famille, dit Con-
dorcet, eut-elle de la peine à lui pardonner d'avoir
renoncé à tous les avantages qui auraient- re-
jailli sur elle et fie n'avoir été, qu'un grand
homme. » Au commencement de l'année 1695,
Huygens perdit complètement ses facultés : il
avait déjà éprouvé un accident pareil pendant
son séjour à Paris; alors un voyage dans son
pays natal l'avait rétabli. Mais, après cette der-
nière redhute, il ne conserva que quelques ins-
tants lucides : il en profita pour transcrire ses
dernières volontés ; il légua à ses neveux (fils de
son troisième frère ) sa fortune, qui était consi-
dérable, et chargea les professeurs Buréherde
Volder à Leyde et Bernard Fullenà Franeker de la
publication de ses manuscrits. Peu de jours
après il mourut, à l'âge de soixante-six. ans et
trois mois. A l'exemple de ses illustres contem-
porains, Descartes, Leibnitz et Newton, Huygens
ne s'était point marié : il pouvait compter sur
ses œuvres peur perpétuer son nom. Appelé par
sa naissance et la fortune à vivre dans le grand
monde, il préféra la retraite, et passa la plus
grande partie de sa vie à la campagne, todt en-
tier au culte des sciences aux progrès desquelles
il a tant contribué.
S' Gravesande a réuni les écrits imprimés dn
vivantd'Huygens (1), et les a publiés sous le titre de
Ckristiani Hugenii Zulechemii, dura viveret
Zeleni toparchx, Opéra varia, 2 vol. en 4
tomes in-4° (la pagination se suit dans les tomes
réunis) ; Leyde (van der Aa), 1^24. Cette édition
est accompagnée d'une sorte de supplément :
Chris tiani Hugenii, etc., Opéra reliquat vol.
in-4° ; Amsterdam, 1728. — Les manuscrits lé-
gués par Huygens à deux de ses amis ( voy. plus
haut) avaient paru sous le titre d'Opéra pos-
thuma; 1700, in-4°; on y trouve Dioptrica,
où l'auteur donne la théorie complète du télescope
et du microscope ; — Commentatio deforrnandis
Vitris (originairement écrit en hollandais, et
trad. eu latin par Boerhaave) ; — - De Coronis et
Parhelis; — De Motu Corporum ex Pérou-
sione; —DeVi Centrifuga; — Automatipla-
netarii Description Enfin J. Uylembrock a
publié, d'après desmanuscrits de Leyde, Christ.
Hugenii aliorumque sxculi XVH viror.
celèbr. Exerdtationes Mathematicœ ; Leyde,
1833, in-4°. F. H.
Vita Hugenii, en tète du 1. 1 de ses Opéra varia. —
Journal des Savants, 1674. — Montucla . ffist. des Ma-
thématiques, t. II. — belambre, ffist. de C Astronomie
moderne, 1. 11. — Condorcet , Éloge d'Huygens* — Ersdt
et Gfuber, Allgent. Encyclop.
HTJYttHHS {Martin), latiniste étionandais ,
(l) * l'exception de treize mémoires publiés dans les'PM-
lotoph. Transactions de la Société Royale de Londres.
qui conserve, dit -on, encore plusieurs mémoires i
d'Huygens.
681
HUYGENS — HUYOT
• 682
mort en 1778. II était régent à l'école latine de
Dordrecht. On a de lui : P. Terentii Cartha-
giniensis Âfr. Comedix sex. Accédant Index
vocabulorum et phrasium absolutissimus et
Terentii lmitatio Plautina nunc primum
édita; Amsterdam, 1710, in-1 2. L— z— e.
i Paqoot , Mémoires, t. IV, p. 48.
huyot (Jean-Nicolas), architecte français,
né à Paris le 25 décembre 1780, mort à Paris
le 2 août 1840. Son père, qui était aussi archi-
tecte, dirigea de bonne heure ses études vers
sa profession. Il se préparait aux examens de
l'École Polytechnique lorsque les circonstances
le firent entrer dans l'atelier du peintre David.
Quelques années après il étudia l'architecture, sous
la direction de Peyre. En 1 807 il remporta le grand
prix d'architecture à l'École des Beaux-Arts et
partit pour Rome. 11 s'y occupa d'une restauration
du vaste temple de La Fortune à Préneste. Après
un séjour de six années en Italie, Huyot revint en
France en 1813. Bruyère, alors directeur des tra-
vaux publics, lui donna une place de sous-inspec-
teur dès travaux du gouvernement. Lorsque le
comte de Forbin ( voy. ce nom ) fit son voyage
dans le Levant, il emmena Huyot avec lui. Us
s'embarquèrent à Toulon en 1817 ; mais à peine
avaient-ils relâché à Milo, que Huyot, en visitant
les ruines de la ville antique, se cassa une jambe.
Il fut transporté à Smyrne, où stationnait la flotte,
et logé dans le couvent des capucins français.
Pendant une assez longue convalescence il s'oc-
cupa à tracer sur les cartes un projet de voyage
dans l'Asie Mineure , et fit les plans de divers
monuments pour la ville de Smyrne. Il visita en
outre les ruines de Tantal , où se trouvaient une
grande quantité de murs pélasgiques. Après avoir
exploré les constructions qui se trouvent sur
le mont Sipyle, Huyot dessina le plan de la ville
de Smyrne, bâtie par Alexandre sur la montagne
où est maintenant le château , et près de là le
fameux temple d'Esculape. Il reconnut les ruines
du monument élevé en l'honneur d'Homère, à
la source du Mélès. Il fit ensuite une première
excursion à Éphèse pour en étudier les rui-
nes, puis il se dirigea vers Constantinople. En
route il dessina les ruines d'Assos. A Constanti-
nople Huyot fit des projets pour l'achèvement
du palais de France et les plans d'un hôpital ,
dont la construction était très-avancée à son dé-
part pour l'Egypte, où il se rendit sur un bâti-
ment français. D'après les instructions de Dro-
vetti , il partit du Caire pour la haute Egypte,
se fixa à Thèbes , et dessina la plus grande
partie des monuments de cette cité antique. Il
remonta ensuite le Nil jusqu'à la seconde ca-
taracte, et esquissa tous les monuments de la
Nubie qui jusqu'alors étaient peu ou mal con-
nus. Il fit une étude particulière des car-
touches qui se trouvaient sur les édifices , les
copia, et parvint à classer chronologiquement
tous les monuments qu'il avait pu voir. De
retour au Caire, Huyot fut invité par le pacha
à donner son avis sur les travaux du canal
que ce prince faisait creuser du Nil à Alexan-
drie. Huyot parcourut toute la ligne du canal,
en vérifia le nivellement, et observa les di-
vers terrains qu'il traversait. Entre les lacs de
Mareotis et d' Aboutir, le travail était rendu dif-
ficile par une va3e mouvante qu'entretenait la
filtration des eaux des lacs : Huyot surmonta
cette difficulté en faisant établir sur les deux
rives du canal des ouvrages en If is et en maçon-
nerie qui par leur combinaison retinrent les
terres mouvantes et empêchèrent les eaux des
lacs de se répandre dans le canal. Il partit en-
suite d'Alexandrie pour Smyrne et entreprit un
voyage dans l'Asie Mineure en se dirigeant d'a-
bord vers Éphèse. Campé pendant plusieurs se-
maines au milieu des ruines de cette ville, il en
releva exactement le plan ainsi que les dessins
de ses nombreux monuments. Il explora ensuite
les villes de Prienne, de Gnide, d'Halicarnasse ,
de Milasso , de Stratonice , de Pergame , de Trai-
tes, etc., et enrichit ses portefeuilles des plans
de ces cités, de leurs édifices, et des détails de
leur construction. Après ce voyage pénible, Huyot
revint à Smyrne, d'où il s'embarqua pour i'At-
tique. Il passa une année à Athènes, levant le
plan de la ville, ainsi que de ses longues mu-
railles, de ses trois ports et des monuments de
la cité et de l'acropole. On lui dut quelques nou-
velles recherches sur le Parthénon,les Propylées
et le temple de Thésée. U entreprit sur les lieux
mêmes de faire la restauration de ces monuments
antiques. Il parcourut ensuite la Béotie et l'At-
tique, et se disposa à faire un voyage dans le
Péloponnèse. La révolution de Grèce vint à écla-
ter : Huyot s'embarqua sur un bâtiment italien.
En arrivant à Patras, il trouva la ville en feu;
tout ce qu'il y avait déposé de précieux fut dé-
truit. Il se réfugia alors à Larta, auprès du consul,
ne sauvant que se3 esquisses. Forcé de renoncer à
son voyage dans le Péloponnèse, il s'embarqua
pour Ancêne , où il mit ses dessins en ordre.
En sortant du lazaret, il prit la route de Rome,
où il resta un an, relevant aussi le plan général
de cette ville et de ses monuments.
De retour à Paris, Huyot fut chargé du cours
de l'histoire de l'architecture à l'École des
Beaux-Arts , chaire qui était devenue vacante
par la mort de Dufourny. Les dessins qu'il rap-
portait, les recherches qu'il avait faites, et l'é-
tude des monuments anciens qu'il avait poursui-
vie sur les lieux avec une grande persévérance,
lui permirent de faire un cours aussi instructif
qu'intéressant. En 1823, l'Académie des Beaux-
Arts l'appela dans son sein à la place de Heurtier,
dans la section d'architecture. Vers cette époque,
une ordonnance royale ayant prescrit la conti-
nuation des travaux de l'arc de triomphe de la
barrière de l'Étoile, que Louis XVIII voulait con-
sacrer à la mémoire des succès de l'armée d'Es-
pagne, le ministre de l'intérieur chargea Huyot
de lui présenter divers projets pour achever ce
6*8
HUYOT -
monument d'une maniève appropriée aux cir-
constances et en conservant toutefois les masses
existantes. Un des projets présentés fut adopté
par le conseil des bâtiments civils : il consistait
à ajouter quatre colonnes engagées surmontées
d'un attique aveo une inscription sur chaque
face. Le ministre Corbière préféra s'en tenir
aux plans de Chalgrin ; mais comme ces plans,
trop développés, en rendaient l'exéeutien presque
impossible, le ministre chargea une commission
de la surveillance des travaux. Le monument
était élevé jusqu'au grand are lorsque Martignao
en rendit la direction à Huyot en 1 829. Les travaux
étaient trop avancés pour revenir à son projet,
n continua donc celui de ses prédécesseurs, en
ajoutant toutefois de nombreuses modifications
aux parties qui restaient encore à exécuter,
comme les caissons de la grande voote, l'enta-
blement, l'attiqne et les parties supérieures du
monument. Après la révolution de juillet 1830,
d'Argout destitua Huyot, qui sous la restauration
avait encore établi le fameux Calvaire du mont
Vatérien. En outre il avait fait les projets d'une
église Saint-Charles à élever sur les terrains de
Belle-Chasse, à la place de laquelle on voit
aujourd'hui Samte-Clotilde, exécutée dans un
autre style et par d'autres architectes. Enfin
Huyot mt chargé en 1836 de dresser les plans
d'agrandissement du Palais de Justice. Ses plans,
maladroitement limités à l'origine, ont été adop-
tés plus tard et ont été continués depuis sa mort
avec quelques accroissements. L. L— t.
Sarrut et Saint-Edme, Biagr. des Hommes du Jour,
t. IV, a« partie, p. 809. — Rabbe , Vieilli de BoUJolln et
Sainte- Pieuve, Biogr. univ. et portât, des Contemp. —
E, J. Qél*Gli)»e 4 Jourmtl de* p#afc, 16 mars 1SM
huysman de Malin es, peintre belge , né à
Anvers , en 1648 , mort a Matines, le 1 er juin
1727. Il était fils d'un habile architecte, qui lui
donna les premières notions du dessin. Devenu
orphelin fort jeune, il'suivit successivement les
leçons de Gaspard de Wit et de Jacques van
Artois, et devint bon paysagiste. Van der Meulen,
le célèbre peintre des guerres de Louis XIV ,
fit les plus grands efforts pour l'attirer à Paris,
mais Huysman préféra se fixer à Matines, où il
mourut presque octogénaire.
« Huysman, dit Descamps, avait un grand
talent pour rendre les montagnes ; on croit y voir
■ la moqsse et les cailloux s'y détacher. Il a une
façon de mire toute particulière et ses premiers
plans ne peuvent se comparer, pour le coloris,
qu'à ceux de Rembrandt. » Ses principaux ouvra-
ges sont à Matines, où on remarque surtout dans
l'église collégiale de Notre-Dame : Les Disciples
d'Emaûs; on voit aussi des paysages de Huys-
man à Anvers, à Gand , à Bruxelles, à La Haye,
à Dresde et dans les grandes galeries de l'Europe.
A Paris, on possède de lui entre autres morceaux
une fort belle Vue du Mont* Roussel, près de
Louvain. Huysman a retouché plusieurs tableaux
de Minderhout, d'Acht. Schelling et de van Ar-
HUZARD 684
tels, auxquels il a tellement imprimé sa ma-
nière qu'ils ne peuvent se distinguer de se* créa-
tions; A« de L.
De*e*m\*,LmWéées Peintres heAla*de*$, l. n, p au,
M*. - Jacob Campo Weyerroao et Hpubrafett*. &e
SchUderfionst der Nederlanders, t. III, p. l?S,
huysum (Jean vam), peintre Mlandais, fils
du précédent, né à Amsterdam, en 1682, mort
dans la même ville, en, 1749, Élève de s<m père,
il s'adonna d'abord au paysage avec beaucoup de
succès ; mais plus tard il se consacra è la reproduc-
tion des fleurs et des fruits, et dans ce genre on
peut dire qu'il arriva à la perfection,, par le goût
le plus délicat , le pinceau le plus moelleux , un
fini précieux et une imitation parfaite. Il peignait
avec une égale vérité le velouté des fruits , l'éclat
des fleurs, le transparent de la rosée, le mou-
vement même des insectes, £e grand talent
d'Huysum contribua peut-être à gâter l'humeur
de l'artiste. 11 était orgueilleux , jaloux et d'une
humeur difficile, Sur la fin 4e ses jours des cha-
grins domestiques égarèrent son esprit : il s'a-
bandonna à la boisson, et tomba dans une- décré-
pitude anticipée. Cependant, quelques mois avant
sa mort, i] recouvra l'usage complet de ses facul-
tés^t s'en servit pour mettre ordre à ses affaires
et terminer plusieurs de ses œuvres, Ses dessins
sont fort recherchés ; pour ses tableaux, ils ne
se rencontrent que dans les principales galeries
Jean Van Huysum eut deux frères, qui se dis-
tinguèrent aussi dans la peinture :
Juste, mort à vingt-deux ans, tit qui peignait
avec succès les batailles.
Jacques , mort à Londres : il copiait avec un
talent supérieur les toiles de son frère Juste et
celles des grands maîtres hollandais.
PtUUngtoo, Dictionaryqf Pointer 9,
buzabd ( Jean- Baptiste ), célèbre agro-
nome français, né à Paris, le 3 novembre 1755,
d'une famille qui y exerçait la marécbalerie de-
puis plus d'un siècle, mort le 1 er décembre
1838. Il fit la plus grande partie de ses études
ehez les augustins réformés, appelés Petits-
Pères. Ce fut même d'après leurs conseils qu'en
1769, à l'âge de treize ans, il entra, au moment
de sa création , à l'École vétérinaire d'Alfert, où
il étudia sous les auspices de Bourgelat, et où,
bien jeune encore, en 1773, il fut lui-même
nommé professeur. Mais dès 1775 son père l'o
bligea de quitter l'enseignement vétérinaire et de
se consacrer exclusivement à la pratique qui de-
vait lui assurer une existence plus large. Malgré
cela, il concourut en 1779 pour le prix de pratique
fondée à Alfort par ordonnance royale , et il
remporta, le premier, la médaille d'or qui de»
rait être et qui fut une décoration permanente
pour le lauréat, plus précieuse à ses yeux que les
insignes qui lui furent conférés plus tard. Vers
cette époque, il travailla , en collaboration avec
Vicq-d'Azyr, à des rapports sur divers sujets
d'économie rurale et de médeeine vétérinaire,
685
HUZARD
adressés h la Société royale de Médecine dont il
était devenu membre, et gn lui confia le mn de
rédiger tous les articles de médecine vétérinaire
de l'Encyclopédie méthodique* En 1785, W fut
chargé par le tribunal des Juges et Marchands,
et ensuite par les divers tribunaux de Paris, 4e?
expertises relatives aux vices rédhibitoires. Il
exerça cette fonction jusqu'en 1824, et dans
cet intervalle de quarante années il réunit
douze volumes in-fol. de rapports et 4e procès-!
verbaux qui contiennent d'utiles matériaux sur
la jurisprudence vétérinaire, dont il a ainsi jeté
ses fondements. En 1792 il devint membre
du conseil vétérinaire et des remontes de l'ad-
ministration de la guerre, et deux ans après,
lorsque le gouvernement fut organisé en douze
commissions executives ou département» minis-
tériels, il entra à la commission d'agriculture et
des arts , qui forma ensuite le ministère de l'in-
térieur, sous les titres successifs d'agent, de
commissaire du gouvernement et enfin d'inspec-
teur générai des écoles vétérinaires, fonctions
qu'il exerçait encore dans sa quatre-vingt-unième
année, avec tonte la plénitude de ses facultés. Il
eut avec Tessier, Gilbert et surtout Danbenton,
beaucoup de part à l'introduction en France de
la précieuse race des mérinos d'Espagne, en fai-
sant insérer dans le traité de l'an m, conclu avec
cette puissance, l'article secret par lequel le gou-
vernement espagnol permettait l'exportation de
plus de cinq mille mérinos.
Vers la fin de l'empire, Eurard avait été
chargé de créer deux nouvelles écoles vétéri-
naires , l'une à Aix-la-Chapelle , l'autre à Zut-
phen. La marche des événements ne lui permit
pas de remplir toute sa mission ; mais le roi des
Pays-Bas utilisa les plans d'organisation pour
Zutphen,et cet établissement existe encore. Plus
heureux en 1829, Huzard mena à fin le travail de
création de l'école de Toulouse, qu'il a officielle-
ment ouverte à une nouvelle branche de l'ensei-
gnement, celle qui est toute spéciale à la connais-
sauce des maladies du grog bétail.. Membre du co-
mité de la vaccine, il contribua beaucoup à la pro-
pagation de cette importante découverte.
Huzard a appartenu à un grand nombre de
sociétés savantes, au développement ou à l'illus-
tration desquelles il a concouru par des travaux
qui portaient un cachet fout particulier; il a été
l'un des fondateurs de la Société d'Encouragement
pour l'Industrie nationale, et il était entré à l'A-
cadémie des Sciepces lors de la formation de
l'Institut, en 1795. Il était parvenu à créer une
bibliothèque spéciale de plus de quarante mille
volumes, dont il annota les plus rares. Il publia,
en outre, les ouvrages suivants : Almanach
vétérinaire , avec Chabert et Flandrin ; 1782 ,
in-12; — Essai sur les maux aux jambes des
chevaux; 1784,in-8°; — Instruction sur les
moyens de s'assurer de V existence de la morve
et d'en prévenir les effets; 1785, in-8°. Cet écrit
eut quatre éditions ; la dernière parut en 1 797 ; —
Instruction sur les soins à donner aux che-
vaux pour les conserver en santé sur les routes,
et dans les camps, imprimé par ordre du co-
mité de salut public, an n (1794), in-8°; nou-
velle édition, 1817 ; ce petit ouvrage, qui eut
un grand nombre d'éditions, fut tiré à plus de
60,000 exemplaires; —r Essai sur les Mala-
des qui affectent les Vaches laitières des
faubourgs et environs de Paris; 1794, iu-8*j
— Instruction sur l'MpMemw des Vaches , etc.;
J786, nv$°; -*- Instruction et nouveau Rap-
port imprimé* m France et en Allemagne et
relatifs à la Maladie des Bêtes à cornes <fui a
régné dans le département des Fortts; 1797,
in-8°j — Instruction sur les Maladies in-
flammatoires et épi&ootiques, et principale-
ment sur celle qui affecte les bêtes à cornes
des départements de Vest , d'une partie de
V Allemagne et des parcs d'approvisionne-
ment des armées de Sambre et Meuse et de
Rhin et Moselle, publiée par le conseil d'agri-
culture; 1797, in-8°; — • Mémoire sur la Péri-
pneumonie chronique, ou^phthisiepulmonaire
qui affecte les Vaches laitières de Paris et
des environs, avec les Moyens curatifs et
préservatifs de cette maladie, et des Obser-
vations sur Vusaqe du lait et de la viande
des vaches malades, an vm (1860), in-8 # ; —
Comptes-rendus à la Classe des Sciences ma-
thématiques et physiques de VJnstitut na-
tional de la vente des laines du troupeau de
Rambouillet pendant les années IX-XI
(1801-1803) (avec Tessier), in-4°; — Instruc-
tion sur t Amélioration des Chevaux en
France, destinée principalement aux culti-
vateurs; an x (1802), in-8°; — Compte-rendu^
à l'Institut national des améliorations qui
se font dans l'établissement rural de Ram- ,
bouillet, et principalement de celle des bêtes
à laine, et de la vente qui a eu lieu le 15prai-
rial an XI (1803) ; in-4°; — Notice biogra-
phique des différentes éditions du Théâtre
d'Agriculture d'Olivier de Serres , lue à la
Classe d'Histoire et de Littérature ancienne de
l'Institut de France, le 23 mai 1806 ; in-4°; —
Instructions et Observations sur les Mala-
dies des Animaux domestiques, avec les
moyens de les guérir, de les conserver en santé,
de les multiplier, de les élever avec avan-
tage, etc., publiées avec Chabert et Flandrin ,
1812 , 6 vol. in-8° ; les IV e , V e et VI e volumes
ont eu une 3 e édit. de 1812 à 1824; — Instruction
sommaire sur la Maladie des Bêtes à Laine,
appelée Pourriture ; avec Tessier, 1822, in-8°;
— Conjectures sur l'origine ou l'étymologie
du nom de la Maladie connue dans les che-
vaux sous le nom de Fourbure, auxquelles on
a ajoute des notes bibliographique» sur quel-
ques anciens ouvrages de vétérinaire; 1827,
in-8°; — Notes bibliographiques sur l'ou-
vrage aTffortensio Lando , intitulé : Sermoni
funebri de' vari autori nella morte di di-
687
HUZARD — HYBRÉAS
688
▼erai animali; 1835, in-8°; — Notes biblio-
graphiques concernant les ouvrages du duc
de JSardo (Bélisaire Aquaviva) sur la Vénerie
et la Fauconnerie; 1835, in 8°. Indépendam-
ment des ouvrages et opuscules mentionné» plus
haut, Huzard est auteur d'un grand nombre de
mémoires publiés dans divers recueils scientifi-
ques, tels que La Feuille du Cultivateur, ceux
de la Société centrale et royale d'Agriculture,
les Annales de V Agriculture française, etc.,
ainsi que de nombreux articles d'économie do-
mestiqueetruraleetd'art vétérinaire, insérés dans
le Dictionnaire d'Agriculture de la Section d'É-
conomie rurale de l'Académie des Sciences, qui a
eu deux éditions ; dans le nouveau Dictionnaire
d'Histoire naturelle, édité par DeterviUe. On
connaît encore de lui un Mémoire sur les causes
qui s'opposent à la guérison des fractures dans
les grands animaux , et sur quelques moyens
simples propres à contribuer à cette guérison ,
inséré dans les Mémoires de la Société Agraire
de Turin. Enfin, Huzard a été l'éditeur du Traité
des Haras et des Mulets, de Hartmann, 1788,
in-8°, et de plusieurs ouvrages de Bourgelat,
qu'il a enrichis de notes importantes.
E. Gayot.
Éloges de Huzard , par Bonafous , Pariset et Ralnard.
— Notices biographiques sur Huzard, par le baron Syl-
vestre, Mérat et Renault.
hvitfeld de Oddersberg (Arrild), homme
d'État et historien danois, naquit en 1549, à Ber-
gen (Norvège), où son père était commandant, et
mourut le 13 décembre 1 ($09. Après avoir voyagé,
il entra dans l'administration, fut nommé séna-
teur en 1586, et chancelier du royaume en
1595. Il se démit de ces fonctions quelque temps
avant sa mort. Il avait rempli diverses missions
diplomatiques en Angleterre (1597), en Hollande
et à Brème ( 1602 ). On a de lui : Danmarks Ri-
ges Krcenike, tilligemed Dispekrœnike (jGhro-
nique du royaume de Danemark, avec la chro-
nique épiscopale ) ; Copenhague , 1 596- 1 604 ,
10 vol. in-4°. L'édition de 1652, 2 vol. in-fol., est
moins correcteque la première, mais elle contient
en outre : Erkebiskops Jens Grands Historié
( Histoire de l'archevêque Jens Grand), qui a été
aussi publiée à part par Nœrmissom en 1636 et
en 1650, in-8°. La chronique de Hvitfeld s'arrête
en 1559. Le style en est assez pur, et les faits
y sont exposés avec clarté et simplicité. L'au-
teur, flatte la noblesse et le clergé. Il a commis
un assez grand nombre d'erreurs, quoique sa
haute position le mit à même de recourir aux
documents originaux et qu'il en ait inséré plu-
sieurs dans son ouvrage. Il travailla à la Chro-
nique de Frédéric 11 par Rcsen, et il édita :
Andrex Sunonis Versio legum provincialium
Scaniœ latina; Copenhague, 1590, in-4°; —
Den Pforske Hirdskraa (Le Droit aulique nor-
végien), traduit de l'aneien norvégien en da-
nois; Copenhague, 1594,.in-4°; —Jens Mor-
tensens norske Krœnike (Chronique norvé-
gienne de Jens Morten&en); ibid. ; — JElno-
thus, De Vita et passionibus sancti Canuti;
ibid., 1602, in-8°.
Un autre Hvitfeld ( Claus ) mit au pillage les
biens ecclésiastiques de la Norvège, lors de l'in-
troduction de la réforme dans ce pays en 1536.
E. Beauvois.
T. de Hofman, Portr. histor, des Hommes Illustres du
Danemark , part. I , p. 14-19. — P. T. Waodal , De
paa Jssgerspriis ved Mindestem hœdrede fortjente
Mstnds Levnetsbeskrivelser. — Wolf, Histor. Ordbog.,
VII, ftt-81. — Nyerup, Dansk-norsk. Litter.-Lex. et
Litterat. i Middelalderen, p. 155-195. — Baden, Dan-
marks Riges Hist. — Beramte Nordmœnd, publié par
Cb. Tœnsbtrg, 11V. VI ; CbrUtianla, 1854, in -fol.
■wiid (André-Christian), orientaliste da-
nois, né le 20 octobre 1749, à Copenhague, ou
son père était pasteur, mort le 3 mai 1788. Il
voyagea aux frais de l'Etat, de 1777 à 1780, étu-
dia à Gœttingue sous Michaelis et Heyne, et se
rendit ensuite en Italie , où il fut protégé par
plusieurs cardinaux, quoique luthérien. A son
retour, il fut nommé aumônier, et professeur au
collège de la Régence. On a de lui : Spécimen
inédit» Versionis Arabico-Samaritanx Pen-
tateuchi ; Rome, 1780, in-4°. H wiid ignorait que
ce fragment eût déjà été publié et traduit par
Durell, à Oxford, en 1763 ; — LibeUus criticus
deindole codicis mss. N. T. bibliotkecx Cx-
sareo-Vindobonensis ; Copenhague, 1785; —
Udtog af en Dagbog holden i Aarene 1777-
1780 (Extrait d'un Journal de Voyage en Alle-
magne, en Italie, en France et en Hollande, tenu
de 1777 à 1780 ); Copenhague, 1787, avec un
appendice, 1788, in-8*; — des lettres dans
Briejwechsel de Schlœzer, livr. 39 ; — des noti-
ces dans OrientalischeBibliothek de Michaelis,
t. X, XVH, XXÏ, et dans Minerva, 1786-1788.
• E. B.
Minerva, 1788, t. H, p. *61 ; t. IV, p. 7, 288, - I.alide,
Mindesmserker paa Assistentskirkegaarden ved Eja-
benhatm, llvr. Il, avec port. — Nyerop et Kraft, Dansk-
norsk Litteraturlex,
htbbéas ( T6ptaç ), de Mylasa, en • Carie ,
orateur grec, vivait dans le premier siècle avant
J.-C. Son père lui laissa pour tout héritage une
mule et un chariot. Il gagna quelque temps sa
vie à voiturer du bois. Il alla ensuite suivre les
leçons du rhéteur Diotréphès à Antioche, et fut
nommé à son retour inspecteur des marchés
( àyop*v6[ioç ) de sa ville natale. En remplissant
ces fonctions, il acquit quelque fortune , s'ap-
pliqua aux affaires publiques, et devint le per-
sonnage le plus influent de Mylasa. Il était, sui-
vant Strabon , le plus grand orateur de son
temps. On cite de lui un mot àEuthydème, autre
orateur, qui avait eu aussi une très-grande in-
fluence sur la ville de Mylasa, et qui en avait
fait un usage tyrannique. . « Euthydème, dit-il,
tu es un mal nécessaire dans l'État, car nous ne
pouvons ni vivre avec toi, ni sans toi. » Lorsque
Antoine pillait l'Asie en 41, après la Bataille de
Philippes,Hybréas obtint que Mylasa ne payerait
pas une double contribution comme l'exigeait le
689
HYBRUÀS r- HYDE
triumvir : « Si tu veux, lui dit-il, que nous
payions deux tributs dans un an, donne-nous
deux étés et deux automnes dans la même' an-
née. » L'invasion de l'Asie Mineure par les Par-
thés, sous les ordres de Labienus et de Pacorus,
ne rencontra de résistance sérieuse qu'à Lao-
dicée et à Mylasa. Hybréas, qui dirigea la dé-
fense de cette dernière ville, se réfugia à Rhodes
pour se soustraire à la colère de Labienus. Sa
maison et ses biens furent mis au pillage. Il
rentra à Mylasa après l'expulsion des Parthes.
Tous ses ouvrages sont perdus, et on ne con-
naît de lui ique deux ou trois passages cités par
Sénèque. Y.
Plutarque.Vnton., 24. — Strabon, XIII, p. 680; IX1V,
p, 659, 660. — Westermann, Gesch.d. GrUck. BerêdUam-
keit, 86, n° 80.
hybrias (T6ptac), de Crète, poëte lyrique
grec, d'une époque incertaine, mais probablement
antérieure de plusieurs siècles à l'ère chrétienne.
On a de lui une chanson on scolie militaire qui
nous a été conservée par Athénée (XV, p. 695-6)",
par Eustathe (ad Odyss., p. 276, .47) et dans
Y Anthologie Grecque (Brunck, Analec., vol. I,
p. 159); en voici la traduction : « J'ai pour ri-
chesse une grande, lance, et une épée, et un bon
bouclier de peau, défense du corps. Avec cela je
laboure, je moissonne, je presse le doux vin de
la vigne, je me fais appeler maître. Et ceux qui
n'osent pas porter lance et bon bouclier de peau,
tous ceux-là tombent à genoux devant moi,
m'adorent comme leur seigneur et me traitent
de grand roi. » Y.
Jacobs, Anthol. Gretca., t. I, p. 91; t. VI, p. SOT..- II-
gen, Scholia seu Carmina Conviv. grseca, p. 10».
hyde ( Anne ) , première femme • du duc
d'York, frère de Charles II, roi d'Angleterre,
dont il fut le successeur sous le nom de Jac-
ques II. Elle naquit en 1637, et mourut en 1671.
Anne était fille d'Edouard Hyde, comte de Cla-
rendon, chancelier de l'échiquier sous Charles I er ,
grand-chancelier sous Charles II, et de Françoise
Ailesbury. Lord Hyde avait suivi Charles II sur
le continent et partagé sa mauvaise fortune pen-
dant le protectorat. En 1659, tandis que le par-
lement anglais agitait la question du rétablis-
sement de la monarchie, la famille royale se
trouvait à La Haye. Anne Hyde était alors fille
d'honneur de la princesse d'Orange , sœur de
Charles et de Jacques. Anne n'était pas jolie ;
dans plusieurs mémoires de son temps elle est
même dépeintecomme fort laide; mais sa grande
courtoisie faisait oublier qu'elle avait la bouche
extraordinairement fendue, et les yeux fort
êraillés. D'ailleurs elle avait une assez belle
taille, beaucoup d'esprit et un grand air. Ces
agréments-là séduisirent le prince Jacques. Anne
eut l'habileté d'obtenir de lui une promesse de
mariage qui tranquillisa sa conscience sur leur
liaison secrète, dont les suites devinrent bientôt
si apparentes que le jeune prince se détermina
à épouser clandestinement sa maltresse. Ce nou-
vel en gagera emeat eut [lieu en Angleterre peu
après la restauration des Stuarts sur le trône ,
en 1660. Mais la grande difficulté était de faire
accepter l'union légitime des deux amants par la
famille royale. Néanmoins, Charles H, bien qu'il
apprit cette mésalliance avec beaucoup de dé-
plaisir, ne résista pas longtemps aux instances
de son frère pour lui faire reconnaître la validité
de son mariage. Les princesses ne devaient passe
montrer aussi accommodantes. Prévoyant sans
doute leur opposition , le père de l'épouse du duc
d'York, feignant d'être indigné de la conduite de
sa fille, conseille au roi de la faire enfermer à la
Tour, et n'ayant pas réussi à attirer sur la tête
d'Anne la colère d'un prince naturellement dé-
bonnaire, il séquestra la jeune femme dans son
appartement, où, en apparence à son insu, Jac-
ques trouva moyen d'avoir accès. Pour récom-
penser Hyde de cette petite comédie dont pro-
bablement il ne fut pas dupe, mais qui témoignait,
à la vue du public, de son respect pour ses maî-
tres, Charles éleva ce courtisan bien appris aux
honneurs de la pairie, et lui fit un présent de
20,000 livres sterling. Anne, cependant, avait en-
core bien des obstacles à vaincre pour parvenir
à se faire accorder le rang et le titre de duchesse
d'York. La princesse d'Orange, qui se trouvait
alors à Londres , déclara qu'elle ne souffrirait
jamais qu'une femme qui s'était tenue debout
derrière son fauteuil, comme une domestique,
eût sur elle le droit de préséance dont devait
jouir à la cour l'épouse du frère du roi. La reine
mère, Henriette de France, vint à son tour si-
gnifier son opposition à une alliance qu'elle re-
gardait comme un déshonneur pour les deux
maisons de Stuart et de Bourbon. Les ennemis
politiques de Hyde agirent ensuite avec une au-
dacieuse malice, qui faillit effectuer la rupture
des engagements contractés par le duc d'York
avec Anne. Sous leur pression, plusieurs sei-
gneurs de la cour attestèrent son inconduite
antérieurement à son mariage. Un d'entre eux,
Charles Berkeley, affirma avec serment qu'elle
avait été autrefois sa maltresse, et il y eut des
théologiens et des légistes qui soutinrent, en pré-
sence du duc, que le mariage d'un prince du
sang n'était pas valide s'il n'avait pas préala-
blement reçu la sanction dif souverain. Ces
résistances et ces machinations finirent par
ébranler la confiance qu'avait Jacques en son
épouse. H cessa d'aller la voir, et assura la fa-
mille royale qu'il ne considérait plus Anne comme
sa femme légitime. Mais, peu de temps après,
Anne ayant donné le jour à un fils, la tendresse
du duc pour elle se réveilla; les protestations
d'innocence de cette jeune mère, corroborées par
la rétractation de ses accusateurs, chassèrent de
l'esprit de Jacques les doutes qu'on y avait fait
naître. La reine douairière consentit à appeler
Anne sa fille; la princesse d'Orange, qu'on eût
moins aisément décidée à la traiter de sœur,
mourut ; et la duchesse d'York, heureuse (foccu-
per enfin à la cour d'Angleterre et dans la famille
mi
loyale le haut rang qu'elle s'était tu si àpre-
ment disputer, eut la générosité de pardonner à
ses calomniateurs. Depuis lors jusqu'à sa mort
Anne jouit d'un très-grand ascendant sur son
mari ; elle jui fit partager sa prédilection pour
la religion catholique romaine , dans le giron de
laquelle elle entra environ un an ayant sa mort.
Son père, le comte de Clarendon, qui depuis
trois ans vivait dans Fexil , s'était vainement ef-
forcé, dans ses lettres, de la rattacher au culte
anglican. La duchesse fut administrée, à son lit
de mort, par un franciscain. L'évoque d'Oxford,
son confesseur protestant, fut aussi admis en
sa présence & ses derniers moments; mais le
duc l'ayant informé du changement de religion
de son épouse , jl se borna à lui adresser quel-
ques paroles de consolation. Les convictions re-
ligieuses d'Anne étaient sincères : elle eut raison
de suivre l'impulsion qu'elle en recevait en ce
qui la concernait personnellement; mais son
zèle pieux ne s'arrêta pas là, et le prosélytisme
qu'elle exerça avec succès sur l'esprit de son
mari doit être regardé comme la cause première
d(H* dissensions qui troublèrent l'Angleterre sous
le règne de Jacques 1J, et qui finirent par dépos-
séder ce prince du trône dont il avait hérité de
son frère. Anne avait eu huit enfants, dont deux
seulement lui survécurent. Ce furent Marie,
princesse d'Orange, et Anne, princesse de Da-
nemark f qui succédèrent, l'une après l'autre , à
leur père détrôné. Camille Lebrun.
Kennet, Megister. *- Graramopt, Mémoires. — Claren-
don, Papert. — Moncones, Journal, — Lingard, History
of England. — Home, History of England.
htde ( Thomas ), célèbre orientaliste anglais,
né à Billingsley ( comté d'York ), |e 16 mai 1636,
et mort à Oxford, le 18 février 1703. Après avoir
reçu de son père, ministre à Billingsley, les pre-
miers principes des langues orientales , il fut
admis au collège du roi à Cambridge, en 1652.
Wheelock, qui y enseignait l'arabe, lui inspira
un goût particulier pour le persan, qu'il étudia
avec autant d'ardeur que de succès. La connais*
sance qu'il acquit de cette langue le fit juger
propre, malgré sa jeunesse, à prendre part à la
publication de la Bible polyglotte de Londres.
En 1653 il se rendit à Londres dans ce but. I|
transcrivit en caractères persans la traduction en
cette langue du Pentateugue t faite par Jacob hen
Joseph de Tus (Corazan) et imprimée en 1546,
à Constantinople, en caractères hébreux ; il en fit
4a traduction latine qui accompagne le texte
persan q>ns cette polyglotte, et il fut chargé en
même temps du soin de surveiller l'impression
des textes arabe, syriaque et persan. En 1653
il entra, comme agrégé, au collège de la reine
à Oxford , et bientôt après il fut nommé pro-
fesseur d'hébreu. Il succéda en 1691- à Pococke
dans la chaire d'arabe. Nommé vers 1659 conser-
vateur adjoint de la Bibliothèque Bodleyenne,
en remplacement de Stubbé , il en devint plus
tard conservateur en chef. Sous les règnes de
HTDE
69*
Charles II, de Jacques II et de Guillaume 1)1, il
remplit les fonctions de secrétaire interprète, tt
eut À traduire une foule de pièces envoyées au
gouvernement anglais par )es divers États mu-
sulmans de l'Afrique et de l'Asie. Ses travaux
furent récompensés, en 1660, par un caaonicat de
l'église de Salisbury, et en 167$ par l'arçhidia-
conat de Gloceater.
On a déjà, vu qu'à la culture des langues sémi-
tiques Hyde joignit celle du persan, encore peu
étudié. 11 profita de la présence en Angleterre
d'un jeune Chinois amené en Europe par les jé-
suites, pour apprendre la langue chinoise. Les
langues classiques lui étaient familières, Enfin, il
possédait une érudition étendue et solide. Une
aussi rare réunion de connaissances le mit en
état d'étendre le cercle, jusqu'alors assez restreint,
des travaux des orientalistes. Tandis qu'avant
lui ils avaient concentré presque exclusivement
leurs recherches sur les langues , les littératures
et l'histoire des peuples sémitiques, Hyde leur
ouvrit un champ plus vaste, celui de la religion
et de l'histoire des grands empires qui avaient
autrefois occupé le centre de l'Asie. Que l'essai
qu'il fit lui-même sur ces matières n'ait pas été
heureux, c'est ce qui ne doit pas étonner, puisque
le premier il s'aventurait sur un terrain nouveau ;
mais il eut du moins le mérite d'appeler l'atten-
tion et les investigations des savants sur àes
sujets qui peut-être sans lui seraient restes long-
temps négligés, et dont la connaissance est ce-
pendant d'une si grande nécessité pour l'histoire
de l'antiquité.
On a cje flyde : fabulx longitudinumet Latu
tudinum Stellarum fixarum ex observatione
prindpis TJlugh-Beiglii; occesserunt Moham-
med Tmni Tabulm Declinationum et recta-
rum Ascensionum, arab. et lat, y cum commen-
tants; Oxford, 1665, in-4°. Le, catalogue des
étoiles fixes, dressé par Ouloug-Bey, petit-fils de
Tamerlan, avait' déjà été publié; mais les notes
de Hyde, surtout celles dans lesquelles il com-
pare les divers noms des étoiles chez les Grecs,
donnent un nouveau prix à l'ouvrage original; —
Catalogua impressorum Librorum Biblio-
thecse Bodleyanae; Oxford, 1674, in-fol. Il ré-
digea le catalogue pendant qu'il était conserva-
teur de eette célèbre bibliothèque ; — Quatuor
Evangelia et Acta Apostolorwn lingua m-
laica caracteribus europœis; Oxford, 1677,
in-4°f — Epistola de Mfnsuris et Ppnderibus
Sérum sive Sinensium, À la suite du traité de
Hyde Bernard : De Mensufis et Ponderibus
antiquis; Oxford, 1688, îiH*f — Abraham
Peritsol flinera Mundï, id est cosmographia t
hxbr. et lat. t cum commentants ; occesserunt
annotadones in traetatum Alb. Pobovti De
Turcarum Uturgia, pcregrinatione necessa-
ria, circumcisione, etc., necnon castigatio in
Angelum a S.-Josepha ; Oxford, 1691, in-4°. Les
notes du traducteur font le principal mérite de ce
livre. La réponse au P. Ange de Saint-Joseph,
693
HVPE
694
qui est à la fin de ce volume, est une refotatioo
de la critique que ce Père avait faite, dans la
préface de sa Pharmaeapœa Persica ( Paris;
16gt, in»**), de la version persane des Évangiles
dans la Polyglotte de Londres que Hyde avait re-
vue et qu'il avait traduite en latin ; —De Jeudis
orientalibus Libri II, quorum prior historiam
Schahiludii continué, cum pralegomenis / al-
ler historiam cseterorum Orientis ludorum
exhibet ; Otford, ifiUé, 31 vol. »-*•, fig.; %' édij;.,
1702, iui8 . Dans le premier livre, consacré au
j eu des échecs, il recherche l'origine et je$ diverses
modifications qu'il a subies en Orient et en Eu»
rope. A la suite de ces recherches , qu trpuve le
texte hébreu et une traduction latine de deu*
petits poèmes sur $e jeu , l'on d'Abraham ippr,
Essa et l'autre de Bousemiorrilw-Zacbjia, *aj)bin
né dans le midi de la France, Le deuxième livre
traite des autres jeu* usités dans l'Ûrjent. ïlyde les
compare avec des jeux analogues en usage parmi
les Grecs, les Latins et même daes l'Europe mo-
derne. Lacroze reproche £ l'auteur de cet ou-
vrage d'avoir fait de trop nombreux emprunts
à Saumaise, sans même le nommer; «- Jfisr
toria Religionis veterum Persarum, neenon
eorum Magorum liber Sad-der, Çoroastris
prmeepla, seu religionis canones continent,
persieo latine versus , cum appendice j Oxford,
1700,û>4 o , fig.; 9 e édit. revue et augm,, due 4
Hunt età Costar, sous ce nouveau titre : Veterum;
Persarum, Parthorum et Medorum Relfc
gionis Bistoria; Londres, 1700, in»4°, planches.
C'est l'ouvrage capital de Jlydç, On ne neuf
nier qu'il n'ait su tirer parti de ce qu'on trouve
sur la religion des Perses dans les anciens écri-
vains grecs et dans quelques auteurs persans
postérieurs à l'hégire. Mais, privé des documents
les plus essentiels, entre autres des livres sacrés
des anciens Perses, que l'Europe ne possédait
pas encore, il dut nécessairement se faire de
cette religion des idées fort erronées. C'est ajn&i
qu'il assure que le monothéisme régna d'abord
parmi les Perses; qu'il s'altéra plus tard en se
mêlant au sahéisme; qu'Abraham I0 ramena à
sa pureté primitive, et qu'il s'altéra de nouveau
par un second mélange avec le culte des astres*
Au commencement du dix-huitième siècle on n'é-
tait pas encore en mesure de relever ces singut-
lières erreurs. L'érudition de l'auteur fit illusion,
et, plein de confiance en un savant qui, an jugement
même de Herder ( 1 ), s'était pénétré profondément
de l'esprit de l'Orient, on reçut son ouvrage avec
faveur, et on crut qu'il présentait un tableau fidèle
de l'ancienne religion des Perses, Cette opinion
tomba plus tard, d'abord devant les critiques de
l'abbé Foucher, qui en 1759 commença de publier,
dans les Mémoires de V Académie des Inscrip-
tions et Belles» Lettres, une série d'articles sur
cette religion, et ensuite devant celles d'Anqnetil
(1) Herder, Adrastea, ton». VI, pag. 6* de t'édtt. de
Leipzig, ISS».
Duperroq, qui avait apporté en France les livres
sacrés des Perses, et qui avait sur ce sujet des
notions beaucoup plus près de la vérité que
celles de Hyde H de l'abbé Foucher, — Les di-
vers ouvrages de Hyde, sauf sou Histoire de la
religion des Perses, ont été réunis et publiés avec
quelques opuscules inédits qu'il avait laissés,
sous ce Utre : $yntagtnq pisser tationum guqs
olim Th. flyde separatim edidWf Oxoniae,
1767, 2 vo). jn-4°. Cette publication est due à
Gr, Sharp. Las opuscules inédits qu'elle contient
son! ; tipeçimen Maimonûlis more nevochin
Hnguq çttanutterib. arabfàs cum interpré-
tation* Mina et nofis; — Spécimen Historiée
Timuri f arabiçe, persice et latine: — Spé-
cimen çantmprimi dmnippetœ hafiz; —
Qratiod* {Àngmç Àrqbicp fflfiyuUale, Prx-
sfanttyet ttilitate^im^r» prononcé par Hyde
je J8 mai J093 en «umpiençant ses leçons d'a-
rabe ; — ÇommerçiHm Epittolicum, recueil
de trente lettres frites et reçues par Hyde; —
enpu un essai de Gr, Sbarp sous ce titre : Ap-
pen&x de UnqW Sinensi aliisjue Hnguis
orientalibus. Michel Nicolas.
Qioçraph. Jnfl. f tom. }?. — Préface de Waiton h ta
Bible polyglotte de Lendra. — Diseouneur lestwtncip.
édition* du Bibies P9t*jalf>ttêts ftrb, \m . M»" 1 *- ~
Wpyer, Gescti. der #Ar$/frr#<W%
flYDK de kepyille [Jean- Guillaume ,
baron), homme politique français, né. à La Cha-
rité-surr J^oire, te 24 janvier t77ô, mort à Paris,
le 28 maj 18^7, Son père, Anglais d'origine, pro-
priétaire de Ja terre de Neuville, acheta en 1788
une belle manufacture ; la révolution le ruina. Le
jeune Hyde de Neuville, él£ve du collège du car-
dinal bempine ; ne voulut pas y rester lorsque son
professeur, qui avait refusé le serment à la cons-
titution, fut remplacé par un prêtre assermenté.
Jl acheva ses études par les soins particuliers
du professeur démissionnaire. A peine âgé de
sei?e ans, il se. mêla à la politique, et, lors du
procès de Louis XVI, il servit d'escorte à Mates-
herbes, et c'est en s'appuyant sur son bras que le
défenseur du monarque déebu quitta pour la der-
nière fois la barre de la Convention. Op dit même
qu'il avait écrit à un membre de la Convention
pour s'offrir £ défendre le roi ; mais il n'avait
pas dû tarder h comprendre que s'il pouvait
y avoir quelque courage dans cette démarche ,
elle ne manquait pas non plus de présomption.
Revenu auprès de sa mère, il se concilia l'estime
des gens de bien dans la Nièvre, en plaidant pour
UU père de famille accusé d'avoir mal parlé de
}a république, et qu'il réussit à tirer de danger,
feu de temps après, il enleva de vive force quel-
ques prisonniers qu'il sauva. Les princes pros-
crits entrèrent alors eu relation avec ce jeune
partisan de leur cause ; ruais Hyde fut enfin ar-
rêté a Cogne, Mis eu liberté provisoire, il vint à
Paris, d'où, sous le faux nom de Paul Berry, il
entretint une correspondance suivie avec le
comte d'Artois. Il devint un des principaux agents
de ce prince, fit plusieurs voyages en Angleterre, et
695
HYDE
696
servit souvent d'intermédiaire entre la famille
royale et le ministre Pitt. Il se mit en rapport
avec les députés royalistes du club de Clichy,
auquel appartenait son beau-frère Delarue; mais
il fut assez habile pour ne pas être compris dans
la liste des proscrits du 18 fructidor. Rentré
dans fa Nièvre après cette journée, et investi du
titre de commissaire du roi, il ne tarda pas à
être poursuivi pour avoir frappé un agent du
gouvernement. Il se réfugia de nouveau à Paris,
et échappa aux poursuites dirigées contre lui,
grâce à la protection du ministre Lambrechts.
Les menées royalistes continuaient dans l'ouest
et à Paris avec vigueur. Le 18 brumaire vint
les interrompre. Hyde de Neuville et le cheva-
lier deCoigny, commissaire secret de Louis XVIII,
gagnèrent à leur cause plusieurs écrivains de ta-
lent, et répandirent avec profusion des brochures
dans lesquelles étaient expliqués les principes
de la légitimité. Hyde de Neuville ne s'arrêta
' pas là. Il eut, sous le nom 4e Xavier, avec le
général Bonaparte, une entrevue au palais du
Luxembourg, dans laquelle il lui proposa de ré-
tablir la maison de Bourbon sur le trône. Le
premier consul refusa. Dès lors Hyde de Neu-
ville dut être considéré comme un ennemi dan-
gereux du nouvel ordre de choses. La police de
Fouché signala le royaliste de la Nièvre dans
tous ses rapports sur les complots contre le
gouvernement, et notamment dans celui qu'il fit à
l'occasion de l'explosion de la machine infernale,
le 3 nivôse an rv. Un rapport de Fouché l'ayant
désigné comme un des principaux auteurs de
cette entreprise, Hyde de Neuville imprima un
mémoire pour se disculper, et, tout en repous-
sant cette accusation, il ne craignit pas de faire
profession publique de dévouement à la cause
du roi. « Comme royaliste, disait-il dans cet
écrit,- je réclame le bénéfice de la 'dernière
pacification des royalistes négociée par moi;
comme accusé d'avoir pris part à l'attentat du
3 nivôse, je réclame des juges. » Le premier
consul, à qui le général; Duroc remit le mémoire
de Efyde de Neuville , demanda au ministre de
la police un second rapport, à la suite duquel
son nom fut rayé de la liste des conjurés et de
la procédure. Fouché a souvent déclaré depuis
qu'une erreur de signalement lui avait fait porter
le nom de Hyde de Neuville dans son premier
rapport sur l'affaire du 3 nivôse. Après ces évé-
nements, Hyde de Neuville se retira à Lyon, et
vécut quelques années caché dans une maison
sur les bords de la Saône, où, sous le nom de
docteur Rolland, il obtint une médaille pour la
propagation de la vaccine. M me Hyde de Neu-
ville, à force de démarehes, avait obtenu de Fou-
ché la promesse que si son mari faisait acte de
soumission au gouvernement impérial, il obtien-
drait sa tranquillité et la levée du séquestre qui
avait été mis sur ses biens; Napoléon se montra
plus exigeant, et parla d'un acte de fidélité : Hyde
de Neuville se refusa à signer cet acte, et pour se
soustraire à toute poursuite, il se réfugia en
Suisse. Napoléon promit enfin la levée du sé-
questre si le proscrit consentait à se rendre en
Allemagne ou en Italie, afin de s'embarquer pour
l'Amérique. Des passeports lui furent offerts en
conséquence. Hyde de Neuville accepta; mais il
tint à reparaître publiquement et à traverser os-
tensiblement la France, afin qu'il fût constaté
que si le royaliste était exilé, le prétendu com-
plice du 3 nivôse était justifié. En accordant
cette permission, Napoléon répondit : « C'est
bien; cela est loyal, c'est français! » Hyde de
Neuville traversa donc la France, séjourna quel-
ques jours à Lyon, rejoignit en Espagne un bâ-
timent qui le transporta en Amérique, où il
acheta une habitation près de New- York, près
de celle où résidait le général Moréas, qui la
quitta comme on sait pour venir mourir en Eu-
rope. En apprenant cette.fin malheureuse, Hyde
de Neuville fit paraître un éloge du héros de
Hohenlinden. Quelque temps après, il sut que
le duc d'Angoulême s'était réuni à l'armée an-
glaise en Espagne; il fit aussitôt ses préparatifs
pour venir se mettre à la disposition des Bour-
bons.
1 La restauration avait eu lieu lorsque Hyde de
Neuville débarqua en France , où il fut parfaite-
ment reçu à la cour. On lui confia diverses mis-
sions diplomatiques, et il fut envoyé en Angle-
terre chargé d'une intervention amicale pour
amener la paix entre cette puissance et les États-
Unis. Il réussit complètement. A son retour de
Londres, il partit pour l'Italie, ayant mission sé-
crète d'y préparer les moyens de transport de
Napoléon pour les États-Unis et de faire agréer
au souverain de l'Ile d'Elbe ce nouveau change-
ment de fortune. Hyde de Neuville eut de fré-
quentes entrevues avec un des membres dé la
famille impériale, et il espérait réussir lorsqu'il
crut prudent de ne pas aller plus loin sans être
muni de lettres patentes garantissant le résultat
des négociations. Il vint donc à Paris demander
au roi des pleins pouvoirs ; mais le gouvernement
laissa* traîner les choses en longueur, et 'l'em-
pereur, averti, débarqua tout à coup en France,
et arriva aux Tuileries. Hyde de Neuville accom-
pagna d'abord la famille royale à Gand, puis il
revint à Paris porteur de lettres patentes -de
Louis XVÏII pour la nomination d'un gouverne-
ment provisoire. Ces brevets étaient, dit-on, en
blanc. Hyde de Neuville se mit en rapport avec
le maréchal Macdonald , chez lequel se réunis-
saient les sommités royalistes de l'armée, et,
après la bataille de Waterloo, il n'eut pas de
peine À en rallier plusieurs au roi. A sa rentrée,
Louis XVIII nomma Hyde de Neuville officier
de la Légion d'Honneur. D'un autre coté, lès
électeurs de la Nièvre le choisirent pour député
à la ehambre introuvable. Il y prit place «au
côté droit, et sanctionna de sa parole et de son
vote toutes les mesures réactionnaires. La ma-
jorité lui avait témoigné sa confianse en le nom-
69.7
HYDE
698
niant secrétaire de la chambre. Il était plus mo-
déré pourtant dans ses actions, et on prétend
qu'il empêcha l'exil du maréchal Massena, en de-
mandant le renvoi an ministre de la guerre de
la proposition que plusieurs députés avaient
faite pour l'exclure de la loi d'amnistie. En 1816
Hyde de Neuville fut nommé ambassadeur aux'
États-Unis, où il négocia un traité de- commerce
entre ce pays et la France. Les officiers que la loi
avait proscrits n'eurent qu'à se lQuer de ses pro-
cédés. En arrivant aux États-Unis il avait trouvé
à l'ambassade un magnifique portrait de Napo-
léon peint par Gérard ; il prit sur lui de l'envoyer
à Joseph Bonaparte. On voulut incriminer cette
conduite auprès du roi : « Cela est bien! dit
Louis XVIII en retournant le mot de Napoléon,
cela est chevalier, cela est français ! » Pendant que
Hyde de Neuville était aux États-Unis, le roi le
créa baron. Rappelé en 1821, et réélu dans la
Nièvre, il refusa l'ambassade de Gonstantinople,
pour remplir son mandat à la chambre, où il se fit
remarquer par son zèle monarchique, notamment
en demandant avec insistance l'expulsion de
son collègue Manuel. Appelé à l'ambassade de
Portugal , il se trouvait à Lisbonne lors de la
révolte de palais qui faillit enlever la couronne
an roi Jean VI au profit de la reine sa femme ou
de dom Miguel. Hyde de Neuville vint courageu-
sement à la tête du corps diplomatique apporter
son secours au feible et malheureux monarque,
qui le nomma comte de Bemposta. Élu de nou-
veau dans la Nièvre (1824), il sollicita et obtint
un congé, qui lui permit de siéger à la chambre,
où il- blâma des actes relatifs à la guerre d'Es-
pagne , défendit la Grèce et l'Irlande , et attaqua
l'agiotage de la bourse et du syndicat. Dans la
discussion relative à l'indemnité des émigrés, il
demanda que les rentiers de l'État ruinés par la
révolution fussent admis à l'indemnité. Son am-
bassadefut supprimée, et il se trouva mis en dispo-
nibilité. Il déplut encore au ministère par ses révé-
lations sur les marchés Ouvrard et sur les énor-
mes dépenses de l'expédition d'Espagne. On lui en-
leva son traitement. Il fut réélu en 1827 à là
chambre , après avoir ainsi résumé son opinion :
« Nous désirons que la France évite tous les excès ,
qu'elle ne soit ni révolutionnaire ni mystique, mais
religieuse, mais monarchique , mais amie sincère
de toutes les libertés. » A la ehute du ministère
Villèle, il reçut le portefeuille de ta marine dans
le ministère Martignac ( mars 1828). Cependant ,
comme le dit Chateaubriand , ses opinions libérales
étaient antipathiques à Charles X. Hyde de Neu-
ville signala son administration de la marine par
d'utiles améliorations dans le système colonial
de la France ; il s'éleva avec force contre ce qu'il
appelait l'infâme trafic de la chair humaine, et
poursuivit avec vigueur l'accomplissement des
mesures prises contre les négriers; il prit aussi
une part active à l'émancipation de la Grèce.
Après l'avènement du ministère Polignac, il re-
prit à la ehambre son rôle de défenseur de la
charte, et soutint dans une brochure les droits de
la reine dona Maria au trône de Portugal en at-
taquant la protection accordée à dom Miguel.
En 1830 Hyde de Neuville ne faillit point à la
cause royale, et seul, entre tous les députés de
la droite, il osa se rendre le vendredi 30 juillet à la
chambre des. députés pour y plaider la cause du
duc de Bordeaux. Il n'y trouva pas d'écho, quoi-
que plus d'un député de la gauche sympathisât
secrètement avec lui. Jusqu'au 9 août, Hyde de
Neuville crut devoir remplir son mandat et venir
à toutes les séances protester à peu près tout seul
contre le vide des bancs de l'extrême droite et
prendre la parole dans les vérifications des pou-
voirs en faveur des députés légitimistes dont
l'élection était contestée. Pensant que ses pou-
voirs étaient expirés le jour où un nouveau roi
fut proclamé, il ne parut pas à la séance royale ;
le 11 août il envoya sa démission et rentra dans
la vie privée. En 1832 Hyde de Neuville fut
compris dans les poursuites intentées par M. Per-
sil contre Chateaubriand. . En 1833 il adressa
aux chambres une pétition pour demander l'a-
bolition de la loi qui prescrivait le serment
politique aux députés, rappelant qu'en 181 fi il
avait proclamé cette doctrine « qu'aucun pou-
voir dans l'État n'avait le droit d'imposer un
serment politique, et qu'un député pouvait se
refuser à prêter un pareil serment sans rien
perdre de son caractère. « Un serment politique ,
ajoutait-il, ne mène à rien qu'à blesser la morale,
qu'à gêner les consciences, et qu'à faire tôt ou
tard rougir plus d'un homme de bien. Quarante
années d'expérience attestent assez cette affli-
geante vérité. » Cette pétition fut vivement re-
poussée. La discussion du traité avec l'Amé-
rique lui fit encore prendre la plume, et il fit
paraître un mémoire sur cette question. Retiré
dans sa terre de L'Étang, près de Sancerre, où il
se livrait tout entier à des travaux agricoles, il
vit tomber, en février 1848-, le, gouvernement de
Juillet. 11 ne rentra pas dans l'arène politique;
cependant en 1849 il fut porté comme can-
didat aux élections générales pour l'assem-
blée législative par le. comité royaliste de la rue
Duphot, mais il n'obtint qu'un nombre de voix
insuffisant. Au mois d'octobre 1851, on le re-
trouva encore dans les rangs des défenseurs de
l'ordre à Sancerre. On a de lui : Réponse de
J. -Guillaume Hyde de Neuville, habitant de
Paris, à toutes les calomnies dirigées contre
lui, à Vatroce et absurde accusation d'avoir
pris part à V attentat du 3 nivôse, avec
V exposé de sa conduite politique; Paris, 1801 >
in-8° ; — Éloge historique du général Moreau;
New- York, 1814, in-8°; — Les Amis de la Li-
berté de la Presse : Des Inconséquences Mi-
nistérielles; Paris, 1827, in-8° ; — De la Ques-
tion Portugaise; Paris, 1830, in-8°; —Lettre
au Journal des Débats, en réponse à deux ar-
ticles intitulés : Le Pour et le Contre, ou la ré-
volution et la contre-révolution ; dans Le Mont-
699
HYDE — HYDER
700
teur, 1830, p. 735; — Pétition aux Chambres
pour demander P abolition du ferment poli-
tique; Paris, 1833, ia-8°; — Observation» à
joindre au Précisée M. Hératd tontre M. le
minitire des finances ; 1887, ta-4°j — Nouvel
Exposé à joindre au Précis pour M. Hératd
contre M. le mihittré déë finances et ausc
Observations de M. le baron Hydé de Neu-
ville, ancien ministre de tu marine ; 1*87,
m-4°; — Pétition au* àhambreê en faveur
des indigent» de la classe Agricole ; 1*46,
in-8°* L» L— tt
Sarrdt etSalnt-Bdme, Biàçf. éêè Hôtothei dit, Jëér,
tome 11, i r ° parti* , p. es. — H. de vatlme«fili< ftfde de
Neuville, notice extrait© 4a CorreipomUtnt, 1857, tn-8°.
— Rabbe , Vleilh de Bolsjoltn et Sainte-Preuve, Biogr.
univ. et portât, des Contetnp. -" tlf. Kisatd, dans le
Dict. dé la Conversation. - Qéèfatd, Là Fronce iMtè-
roire. — Bourquetot,, Aa LUtér. franc, centemp,
hyde. Voy. Clarkudon,
HYDBft-NAlK 00 HTfJBR'ALMlllAN-tfâHA-
uoub, daïva (logent) do Mysore, soubuh
(vice-roi) de Sirra, nabab de Blngalore; Bel-
tapoor et Bassapatnam^ radjah (roi) des Ca-
nari ns et des Corgaes , suzerain de la} oôfë de
Malabar et des lies Maldives* né en 1 139 «te l'hé-
gire (1717 de J.-Ch.), à Dinaveill (Bangalore),
mort à Tchitor, le 3 éefer 1190 (7 décembre
1 782 ). Il se prétendait issu de la tribu de Qoréfeeh,
à laquelle appartenait Mahoinêt. Ters 1076
(1665), un de ses ancêtres quitta Baghdad pour
aller s'établir dans te Pendjab. Son père, Feth-
Mohaxnmed~Nedlm-Sa1>1b; fut lieutenant gétiéral
dans Famée du sonbâh de betkan ^ Nifaafn«>al-
Moulk, après la ffloft duquel il devint premier
général du radjah de Mysore* et obtint le fief de
Bangalore. Hyder vécut jusqu'à l'âge dé trente-
trois ans dans tes domaines de sa famille* sans
rien faire d'important/ fin 1750, chargé de con-
duire contre leà Mahrattes » (|ui avaient envahi
la eôte de Corotnaftdel,- un ewps de «50 hommes,
il combattit de concert aveu tes Français , et visita
Pondichéry, où il admira les produits.de .l'indus-
trie européenne. De retour dans le Bangalore , il
conseilla S son frère , Ismaïl Sahib , qui avait suc-
cédé à leur père , de discipliner ses troupes et lie
faire Venir de Bombay des canonsjdes mousquets
et des baïonnettes. Ett il 52* ayant reçn ordre de
mener 1,600 cavaliet§ aK secours de Tchanda-
Sahib, à qui Mobàhiméd^Atl*Khan, fils de l'u-
surpateur Anwer ed-t>tof KlWrt, disputait le titre
de nabab d'Arcot, 11 agit dé concert avec Du-
pleix, gouverneur" de Potidiehéry, et se distingua
à la bataille de Tritchinofrtffl ( 17 août 1754).
En 1756 Hyder hérite des charges et des fiefs
de son frère , qui était Mort sans laisser d'en-
fants maies. Quotcfu'il n'eût que 15,000 librairies
de troupes, la popularité dont il jouissait porta
ombrage au bfahnUne fcandth-Rao * qui atait
usurpé sur Nadd-Badjàtf, frère du roi, la
dignité de daïva de Mfsoré. Aitaqtlé par les
Mahrattes , que son ëfiftèmi avait appelés, il ne
put leur résister, et se replia sur Seringapatam,
capitale 'du royaume. Au lieu de lui ouvrir la
porte de la ville, le daïva fit tirer sur lui, et or-
'. donna à l'armée de le mettre dans les fers.
Hyder s'échappa à la faveur des ténèbres, et alla
s'enfermet daris la forteresse de Bangalore , ou
il fat rejoint par ose partie de ses troupes. Il fit
avec snecee la guerre aux Mahrattes, et pot même
envayeruncorpft auxiliaire de 7,000 hommes à de
Lallyj qui était assiégé dans Pondichéry par les
Anglais. Lors 4* la prise de cette ville (1761), 300
cavaliers français et d'habile» armuriers passèrent
m Service de Hyder, Ge renfort le mit en état
de punir lé dalva* Ayant fait une trêve avec les
Mahrattes, il invita tous les chefs du Mysore à se
i joindre à lui pour déposer Kandih-Rao et res-
taurer Nand -Radjah. La plupart se rendirent à cet
appel* et rarrhéemèmei qnilui était opposée vint
se ranger sotfé ses étendards* Lee habitants de la
capitale forcèrent le radjah à destituer Kandih-Rao
et à Mi donner Hydér pour successeur (1762). Le
daïva fat mis en jugement et condamné à mort
par des juges dé sa religion. Cette peine ayant
été commuée en celle de la détention, le cou-
pable fut enfermé dans uns eage de fer» au mi-
Ked de la plate de Bangalore , où il mourut,
deux ans pins tard. Hyder accepta le titre que
lai avait décerné le peuple de Seringapatam,
et il indemnisa Nand'Aadjah en lui donnant en
fief la forteresse de Mysore. Nouveau maire, do
pelais sous des rois fainéants , il mit Tordre
dans les finances^ réduisit plusieurs petits chefs
ont décapaient diverses places du Mysore,
cl reprit au roi de Ganaraet aux Mahrattes les
provinces qu'ils avaient usurpées* Ces derniers
l'ayant attaqué aVëe une grande armée, il fail-
lit être tué dans une bataille où* la victoire
resta indécise (1763), Il conclut avec eux une
trêve de trois ans et conéêrva Mark sirra , Mag-
ghefH, Baéeapatnam et le royaume deBisnager,
moyennant une indemnité pécuniaire qu'il paya
«0* Mahrattes» Les nababs afghans de Canour,
de Garpa et dé Senotir avaient refusé de resti-
tuer tes villes qni'fl avait réclamées d'eux : il leur
déclara" la gtfetfgf et les vainquit tons à la fois
prés de Sanonr; Ayant aidé Bazalet-Djeng,
frère dtf senbah de Dektaa* à se rendre indé-
pendant* il reçut dé lui lé viUe de Sirra et son ter-
ritoire j et fut institué seubah de ce pays par
lé grand -mogol de Dehli, à qui il avait envoyé
de riches présents (1763)* Vers la même époque,
Il prit sués sa protection le jeune radjah de Ca-
nara, qui j arrivé à & majorité * revendiquait le
trône paternel. La mère de ce prince ayant re-
fuséde se dessaisir' de là régence, Hyder envahit
le Canara à la tête de «0,000 hommes. Le jeune
radjah | rétabli dansées droits, reconnut son
protecteur pour suzerain , et lui céda le port de
Mangalore et les pays qui séparaient cette place
iln Mtsor* (1763). Bientôt,* poussé par sa mère,
il forma le projet d'assassiner Hyder. La décou-
verte de ce complot coûta la vie à la reine et la
liberté an radjah, qui fut détenu à Maggneni
701
HYDER
701
Hyder réunit à ses possessions le royaume de
Canara, qui renferme non-seulement des mines
d'or, de diamants et de pierres précieuses, mais
qui est en outre le grenier de l'Inde. Il changea
le nom de Bidnor en celai de Hyder-Nagor, et
en fit la capitale de tous ses États. 11 attaqua les
Portugais de Goa, pour leur reprendre cer-
taines places qui avaient fait partie du Canara.
Le pays de Carvar et la forteresse d'Opir étant
tombés entre ses mains, il n'était plu3 séparé
de Goa qne par la forteresse de Rama. Comme
les artilleurs francais-refusaient de faire le siège
de cette place /il couda! la paix avec les Portu-
gais et conserva ses conquêtes. Là côte de Ma-
labar, oii il se trouvait alors, renferme on assez
grand nombre de musulmans originaire^ dd sud
de F Arabie, et connus sous le nom de mapelets.
Cette 1 population, active et intelligente, s'était en-
richie par îe commette, et avait prêté des
sommes considérables aux naïres ou princes in-
digènes, qui sont brahmafristes. Ne pouvant se
faire rembourser, ils réclamèrent l'appui du
prince qui avait, le premier, fondé une dy-
nastie musulmane dans le sud de l'Inde. Hyder
s'empressa de répondre à leur appel , et choisit
pour amiral le mapelet Ali, qui était devenu, par
mariage, radjah de Caaanore. Il acheta ou
fit construire des vaisseaux, et au commence-
ment de la bette saison sa flotte fit la conquête
des lies Maldives (1764). Ali fut destitué pour
avoir /ait crever les yeux au roi des Maldives,
et fut remplacé par l'Anglais Stanet. Les naïres,
importunés des- demandes de leurs creanciers,ten-
tèrent de les exterminer en masse, et réussirent
à en faire massacrer 12,000. Ce crime ne resta
point impuni. Hyder envahit la côte de Malabar
à la tête de 34,000 hommes. Quoique l'armée
ennemie fût cinq fois plus nombreuse, il la mit
en déroute, et s'empara de Calicut, dont le roi
on zamorin se brola dans son propre palais. Il
réunit cet État aux siens , et réduisit les autres
naïres à la condition de princes tributaires (1765).
Dès que le retour des pluies annuelles l'eut forcé
d'évacuer le pays , les vaincus se soulevèrent
partout, et pressèrent vigoureusement les gar-
nisons étrangères. Hyder se remit aussitôt en
campagne avec 13,000 hommes, qu'iLfit dépouil-
ler de tout vêtement ; 300 Européens , qui refu-
saient de se soumettre à cette prescription et
qui étaient pourvus de parapluies, souffrirent
beaucoup de la dyssenterie. Ils combattirent
néanmoins avec tant de furie qne l'armée en-
nemie dut abandonner son retranchement de
Pondiaghari. Les naïres restèrent alors à la
merci du vainqueur : ils furent dépouillés de tous
leurs privilèges et privés du droit de porter les
amies. Leur caste , qui était la seconde, fut pla-
cée après celle des brahmesj il n'y eut d'excep-
tion que pour ceux d'entre eux qui embrassèrent
l'islamisme. Hyder se préparait à poursuivre ,
dans le royaume de Travaneore, les débris de
l'armée vaincue, lorsqu'il apprit que les Anglais
formaient une coalition contre lui. Il se hâta de
retournera Seringa patam, où il entra en triompha-
teur, et découvrit bientôt que le nombre de ses
ennemis était plus grand qu'il ne l'avait cm.
Son propre cousin , Mirza-Ali-Khan, gouverneur
de Sirra, craignant d'avoir à rendre compte des
sommes qu'il avait follement dissipées, s'était
jeté dans les bras des Mahrattes. A l'expiration de
la trêve triennale de 1763, kpeuchwah ( chef de
la confédération mahratte), Madhou-Kao, envahit
le Mysore pour lever le .tribut que ses prédé-
cesseurs s'étaient fait concéder par le grand-
mogol Aurengzeb , et qui équivalait au septième
des revenus de l'Inde méridionale. Il fut rejoint
à Cenapatam par l'armée de Nitzam-Ali , seubah
duDekkan. Hyder, incapable de résister en pleine
campagne à cette armée de 250,000 hommes,
s'enferma dans Seringapatam, et fit ravager .tout
le pays à 120 kilomètres à la ronde. Les habitante
de cette contrée se réfugièrent dans la capitale
du Mysore, après avoir brûlé tout ce qu'ils ne
pouvaient emporter. Grâce à ces mesures , les
assiégés vécurent dans l'abondance, tandis que
les assiégeants étaient en proie à la famine. Les
Mahrattes furent obligés de conclure une nou-
velle trêve de trois ans ; ils restituèrent la for-
teresse de Sirra, et gardèrent le pays qui en dé-
pendait (1767). Nitzan>Ali, réduit à l'impuis-
sance par la retraite de ses alliés, conclut égale-
ment un traité, dont un tiers fit tous les frais. Il
fut convenu que Moliammed-Ali-Khan, reconnu
nabab d'Arcot par les Anglais j serait dépouillé
de cette principauté, et que le prince légitime,
Mahfouz-Khan , frère aîné de Mohammed , ma-
rierait sa fille an fils de Hyder, Tippo-Sahib, à
qui il céderait tous ses droits. Nitzam-Ali s'enga-
gea à fournir 50,000 hommes pour exécuter cette
entreprise. Quoique l'armée de Hyder ne comprit
pas moins de 200,000 hommes, il n'en put porter
que le quart sur le théâtre de la guerre. Son
adversaire avait pourallié les Anglais de Madras,
qui pouvaient mettre en campagne 5,000 Euro-
péens et 25,000 indigènes. Le général anglais
Smith qui avait le commandement de ces troupes,
était plus habile tacticien que Hyder; mais il
manquait de cavalerie, et se voyait sans cesse
dérangé dans ses plans par le conseil de Madras.
Hyder conduisit cette guerre avec beaucoup
d'habileté» il était toujours exactement informé
des mouvements de l'ennemi, à qui il savait
dérober la connaissance des stens. Il s'empara
de Caveripatam, remporta une victoire à Sin-
gueman, et mit son fils Tippo^Samb à la tele
d'un corps de cavalerie qni se présenta aux
portes de Madras et ftimt prendre le gouverneur
de cette ville. Les Anglais ayant remporté en
petit avantagé à Trinconwrfëy (Tirmale) en
1767, Mteam-Ali, qni avait le plus sontïett dans
et combat* retourna dans ses États, et signa avec
te» Anglais vit traité par lequel il leur cédait
une partie de son territoire et reconnaissait Mo-
hammed-Ali pour nëbab d'Arcot. Hyder É'eacon-
TOS
HYDEft
704
tinua pas moins la guerre. Ayant appris que des
troupes anglaises de Bombay s'étaient emparées
de Mangalore , sur la côte de Malabar, il marcha
sur cette Tille , d'où son fils chassa les agres-
seurs. Il se hâta de retourner sur la côte de Go-
romande! , pour secourir la ville de Bangalore ,
que les généraux anglais! avaient investie
(1768). Les ayant repoussés jusqu'à Madras, H
signa la paix aux portes de cette ville, le
15 avril 1769. Les parties contractantes échangè-
rent leurs prisonniers, et promirent de s'assister
réciproquement contre leurs ennemis. Ce fut
Mohammed-Ali-Khan qui paya les frais de la
guerre. Par un traité signé le même jour, il céda
à Hyder ta ville d'Oscote , avec l'artillerie et les
munitions qui s'y trouvaient; s'il conserva le
reste de la principauté d'Arcot, il dut s'engager
à payer un tribut annuel de six lacs de roupies.
A peine la trêve de 1767 était-elle expirée , que
les Mahrattes vinrent de nouveau réclamer le tri-
but. Ne pouvant faire le siège de Seringapatam,
où Hyder s'était enfermé , ils se dirigèrent sur
Bangalore. L'armée du Mysore fut enveloppée
et mise en déroute. Hyder n'obtint la paix
qu'en faisant de grands sacrifices pécuniaires
(juillet 1770). L'année suivante, à l'occasion
des nouvelles incursions des Mahrattes, la
compagnie des Indes fut mise en demeure de
fournir les secours qu'elle avait promis par le
traité de 1769. Mais elle se borna à offrir sa mé-
diation. Hyder dut payer une grosse somme
I our les contributions de guerre, et céda une
partie de son territoire. Les dissensions des
Mahrattes lui permirent bientôt de recouvrer
ce qu'il avait perdu. Il reprit Sirra et battit, le
5 janvier 1778, un corps de 50,000 Mahrattes ,
qui avaient envabi Carnatic-Belaghat. La guerre
recommença en cette année entre la France et
l'Angleterre. Lorque les Anglais se disposèrent
à assiéger Mahé, la dernière ville qui restât
aux Français dans l'Inde , il leur fit des re-
montrances, et menaça d'envahir le Carnatic.
II ne put secourir Mahé, parce qu'il était en-
gagé dans une guerre contre les radjahs de Gouti,
de Carnaul et de Condapah. Mais sitôt qu'il
eut fait les préparatifs nécessaires , il descendit
sur la côte de Coromandel et marcha sur Ma-
dras (1780). Après avoir tout saccagé sur son
passage, il s'empara deTchitor, et alla assiéger
Arcot, dont il s'empara au tout de six semaines.
La victoire qu'il remporta à Condjeveram, le
10 septembre 1780, fut signalée par les cruautés
des soldats indigènes, à qui les officiers français
arrachèrent un assez grand nombre de victimes.
Le 1 er juin 1781, il fut battu à Cuddalore, par
te général Eyre Coote. La guerre se prolongea,
avec des succès divers , jusqu'à la fin de son rè-
gne, et occupa même les deux premières années
du règne de son successeur, Tippo-Sahib. Hyder
était de taille élevée; il avait les traits prononcés
et le teint, foncé. Quoiqu'il ne sut ni lire ni
écrire, il était fort éclairé. Tous les Français qui
se rendaient dans ses Etats étaient sûrs d'y
trouver un bon accueil. Vers la fin de sa vie, il
avait 20,000hommes disciplinés à la prussienne,
et commandés par des officiers européens , qui
donnaient leurs ordres en français. Il était juste,
affable, et ménageait la vie de ses sujets et de
ses soldats. E. Beau vois.
Mlr-FIimeln- Ali-Khan -Klrmani,' The Hist. of Hydur
Naik, trad. par le col. W. Mlles ; Londres, 1848, io-8°. -
M. M. D. L. T. I Maître De U Tour] général de 10,000 h.
de l'empire mogol, Hist. d'Hayder- Ali Khan; Paris, 1783,
« vol. tn-lî.— Fr. Robson, The Life of Hyder -/il y-khan,
Londres, 178«, ln-8», trad. en français ; Paris, 1787, in-is.
— Gb. Stewart, Not. sur Hyder- Ali; dans A descriptive
Catalogue of the oriental Library of sultan Tipeo.;
Cambridge, 1809, ln-4°. — Memoirs of the late Wer tn
Mia,from 1780 ton»*, publié par Murray; Londres, ïim,
ln-8*. -Wilks, Historical Sketcltts of the South oflndia;
Londres 1817, 8 vol. in-*». - Le P. Melcb. Carpaoi, Me-
morte sopra la Fita d* Hyder- Ali-Khan ; Bassano, 1734,
in-8«. - J. MM, Hlst. of BritiihIndia,A*ém^w
Wilson; Londres, 1840, L III, IV. — Thorntoo, Hist. of
British India; 1841-1848, t. I, II. — GrantDufl, HisUof
the Mahrattas, t. II.
hyi>eii-mirza-doghlat, prince mongol de
la race de Gengis-Khan, et historien persan, né
dans le Khorassan, vers 906 de l'hégire (1500
de J.-C), assassiné dans le Kaschmir, en 958
(1551). Fils de Mohammed-Hosséin-Mira-Do- •
vghlat, (jui, après une vie agitée, fut tué en 914
I i(l 508), par ordre deSchéibani, khan des Oazbeks,
il fut conduit dans le Caboul , à la cour de son
cousin Baber, qui le traita comme un fils. En 918
( 1 5 1 2), il s'attacha Saïd-Khan, sultande Kaschgar,
prit part à la guerre contre les Oazbeks, et fit,
en 935 (15331), une expédition dans le Kaschmir,
pour protéger l'une des factions qui s'y dispu-
taient le pouvoir. Il conquit ce pays, mais ne pat
s'y maintenir. Pltfs tard, Hyder entra au service
de Kamram , fils de Baber, et souverain de Ca-
boul et du Pendjab , qui lui confia le gouverne-
ment de Lahore, durant son expédition de Can-
dahar. Voyant que la conduite i m politique de ce
prince mettait en danger les possessions mon-
goles de l'Inde, il l'abandonna pour se joindre à
Houmayoun, qu'il accompagna dans sa faite,
en 947 (15*40). Il conseilla à l'empereur fugitif
de s'emparer du Kaschmir, afin d'en faire la
base de ses futures opérations contre les Af-
ghans. Appelé par une partie des Kaschmiriens,
il réunit un corps de 4,000 hommes*; il franchit
des montagnes réputées inaccessibles, et se ren-
dit maître de Srinager et de toute la vallée de
Kaschmir. Ce fut vainement que la faction ri-
vale essaya de l'expulser ; il se maintint dix ans,
et gouverna d'abord au nom de Nazouk-Schah,
radjah indigène, ensuite comme lieutenant de
Houmayoun. Il conquit Radjouri , Pakheli, le
grand et' le petit Thibet. Tous ces États prospé-
rèrent sous son administration : il encourageait le
commerce, l'agriculture, l'industrie, et appela
des ouvriers étrangers, qui élevèrent un- grand
nombre cTédifices. Il protégeait et cultivait les
lettres. On a de lui : Tarihh i ffaïderi ou
Taiïkh i Raschidi , excellente histoire, divisée
en quatre livres, dont les deux premiers traitent
705
HYDER — HYGINUS
706
avec détails des fchans du Moghulistan et des
émirs de Kaschgar, à partir de 764 (1353). Les
deux derniers renferment on récit pittoresque et
animé des événements dont l'auteur fat témoin
dans Flndoustan ou en Kaschmir.
£• Bëauvois.
W. Erakine, A Hist. af India under Baber and «u-
mayun, t. I, il. — Quatremère, dans Not. et extr. de*
Mss., t. XIV, p. 486, 488, 489, 818. - Elliot, Bibliogra-
phical index tho the Historians ofmuhammedan India,
1. 1, 7, 106, 117.
htgin (Saint), pape, mort le 8 janvier 142.
11 succéda à saint Télesphore, le 6 janvier 138. On
croit qu'il était Grec de nation, etl'on rapporte qu'il
chercha à maintenir le bon ordre et qu'il établit
la distinction des rangs dans le clergé de Rome.
On cite son zèle et sa vigilance contre les hérésies
de son temps ; et cependant il usa d'indulgence
envers Cerdon et Valentin. Il mourut après quatre
ans et trois jours de pontificat. Saint Pie lui
succéda. Les modernes lui donnent la qualité de
martyr, quoique les anciens ne disent pas qu'il
ait souffert pour la foi. Les deux épttres décré-
tâtes qu'on attribue à saint Hygin sont suppo-
sées. J. V.
Eusèbe, CAron. — Père Papebroch, Acta Sanctorum.
— Père Pagi , Crit.'histor. chron. in Ann. Ecoles. — Til-
lemont ,'Mém. pour servir à VHist. ecclés. des six pre-
miers siècles. — Baillet, ries des Saints. — Dupto, Bi-
blioth. des Auteurs ecclésiastiques des trois premiers
Mècles. — Richard et Giraud, Biblioth. Sacrée.
HYGINUS OU HIGUIUS ( CaiUS - JullUS ) ,
grammairien latin, vivait dans le premier siècle
avant l'ère chrétienne. Il ne nous est connu que
par une courte notice de Suétone. « C.-J. Hygi-
nus , affranchi d'Auguste , était Espagnol , dit ce
biographe , quoique certains auteurs le fassent
naître à Alexandrie, d'où César l'avait, disent-ils,
amené à Rome dans son enfance. Il suivit avec
ardeur et imita Cornélius Alexandre, grammai-
rien grec , que , pour sa profonde science de
l'antiquité, beaucoup d'auteurs ont surnommé
Polyhistor. Il administra la Bibliothèque du Pa-
lais, ce qui ne l'empêcha pas de donner des le-
çons à beaucoup d'élèves. 11 fut intimement lié
avec le poète Ovide et l'historien Caias Licinius,
personnage consulaire. Il raconte que Hyginus
mourut pauvre et n'avait vécu que de ses libéra-
lités. » Pline, Aulu-Gelle, Servais » Macrobe et
d'autres auteurs anciens citent sous le nom d'Hy-
ginus et de Caius-Julius Higinus plusieurs ou-
vrages aujourd'hui perdus et dont voici les titres :
Zte Urbibus Italicis ou De Situ Urbium Itali-
carum, en deux livres au moins ; — De Proprié-
té* tibus Deorum ; — De Dits Penatibus ; — De
Virgilio ou Commentaria in Virgilium, en cinq
Jivres au moins ; — De Familiis Trojanis ; — De
Agricultura, en deux livres au moins ; — Cinnx
J>ropempticon;—De VitaRebusquelllustrvum
Virorum, en six livres au moins ; — Exempta ;
— DeArte Militari. Il ne reste de ces divers écrits
que des fragments insignifiants ; mais on a sous
le nom d'Hygînus deux ouvrages à peu près en-
tiers, savoir : Fabularum liber : c'est une suite
BOUT. B10GR. GÉNÉR. — T. XXV.
de deux cent soixante-dix-sept légendes mytholo-
giques, avec une généalogie des dieux comme in-
troduction. Bien que la plupart de ces histoires
fabuleuses soient empruntées à des sources con-
nues, l'auteur les présente quelquefois avec des
circonstances nouvelles qui leur donnent un cer-
tain prix pour les mytbographes; — Poetictm
Astronomicon Libri IV, adressés à' un certain
M. Fabius. Le premier livre, intitulé De Mundi
ac Sphxree ac utriusque partium Déclara-
tione, commence par une esquisse générale du
plan de l'auteur et par une définition des tennes|
techniques Mundus, Sphaera, Centrum, Axis,
Polus, etc.; le second livre, De SignorumCce-
lestium Historiis, comprend une exposition des
légendes relatives à quarante et une des princi-
pales constellations , avec une notice des cinq
planètes et de la voie lactée ; le troisième livre, De
Descriptionibus Formarum Cœlestium , con-
tient le compte détaillé du nombre et des arran-
gements des étoiles dans les constellations ; le
quatrième livre, De quinque Circulorum inter
corpora cœlestia Notatione et Planetis, traite
des cercles de la sphère céleste , des cours du
Soleil et de la Lune , et du mouvement des pla-
nètes. Ces deux ouvrages témoignent d'une telle
ignorance et sont écrits* d'un style si négligé et si
barbare qu'on ne peut les regarder, dans leur
forme actuelle, comme l'œuvre de l'époque la
plus florissante de la littérature romaine. On a
tour à tour placé l'auteur sous Domitien, sous
les Antonins, dans les derniers jours de l'empire.
D'après la conjecture la plus vraisemblable, ces
deux productions sont des extraits de deux ou-
vrages plus anciens aujourd'hui perdus. Ces deux
extraits sont du- quatrième ou du cinquième
siècle. Les Astronomica parurent d'abord à Ve-
nise, 1475, itt-4-°, et furent réimprimées quatre
fois à Venise avant la fin du quinzième siècle.
L'édition princeps des Fabulx est de Bâle,
1535, in-fol., dans un volume qui contenait aussi
les Astronomica, Palaephatus Phornutus, Ful-
gentius , etc. Les deux ouvrages ont été réim-
primés dans les Mythographi latini de Munc-
ker, Amsterdam, 1681, in-8°, et dans les My-
thographi latini de van Staveren ; Leyde et '
Amsterdam, 1742, in-4°. La meilleure édition sé-
parée des Fabulx est celle de Schefer, Ham-
bourg, 1674, in-8°.
11 existe sous le nom d'Hyginus ou Uygenus
divers fragments relatifs à la Qromatique, ou
arpentage, dans les recueils des Agrimensores de
Turnèbe, de Rigault, de Goesius,et dans les
Gromatici veteres de F. Blume (voy. pour plus,
de détails sur les Agrimensores l'article Fron-
tin ). On a encore d'Hyginus un traité De Cas-
trametatione, publié avec d'autres ouvrages sur
l'art militaire par Scriverius ; Anvers, 1607, 162 1,
in-4°. R. H. Scheel en donna une seconde édition
sous ce titre : Hygini Gromatici et Polybii
Megalopolitani de Cas tris romanis qux ex-
stant, cum notis et animadversionibus , qui*
23
707
HYGINUS — HYLARET
708
bus accedunt dissertationes aliquot de re «a?"
dem mUUari; Amsterdam, 1660, in-4°. On
trouve œ traité dans le Thésaurus Ant. Rom,
de GflBrios, vol. X, p. 599. Il n'est pas probable
que l'auteur des traités gromatiques et de la Cas-
tramétation soit le même que le mytbograpbe, et
on ne saurait les identifier ni Ton ni l'autre avec
l'affranchi d'Auguste. Y.
Suétone, De Rltut. Gramm* m. — Honoré d'Anton,
De PhiL Mundi. - Raphaël de Volterra, Comment., XVI.
- Scallger, Ad Manil., I, p. 8* ; ad Euseb. Chron., 10. —
Sauroalse, fie Annie climac., p. B94. — Blâme , dans le
Rheinischés Muséum fur Jurisprudeni , vol. VU, p. 117.
— Zeiss, dans le Zeitschrift fur Alterthumswissens-
chaft, pour 1M0. — Smith, Dictionary cf Greek and
Homo* Btoçraphy. — Bonté. DUsert. de Cum. /. Hygini,
Augutti liberti,rua et ScriptU; Narboorg, 1SM, In-*».
hylander (André) $ orientaliste suédois,
né le 23 février 1750, à Tunhem (diocèse de
Skara), où son père était pasteur, mort le
1 er juillet 1830. H fut nommé en 1776 docens
de langues orientales et de grec, et, en 1798, pro-
fesseur de théologie à l'université de Lund. Parmi
ses ouvrages il suffit de citer ; Spécimen operis
cosmographici Jbn el Vardi ; Lund, 1 784- 18 1 2 ;
32 parties in-4° , réunies par le fils de l'auteur,
ibtd., 1823, contenant le texte arabe et une tra-
duction latine de l'introduction et des cinq pre-
miers chapitres du Kharidet-al-Adjaïb; —
Samling af Tal och Predikningar hallne vid
oliha tillfœllen (Recueils de Discours et de Ser-
mons prononcés en diverses occasions) ; ibid.,
1791-1804, 3 part.
Son fils unique, Sven Hylander, né le 5 dé-
cembre 1797, mort le 19 avril 1825, devint en
1818 docens d'histoire littéraire à l'université
de Lund, et fit plusieurs excursions scientifiques
en Suède, en Danemark, en Normandie. On a
de lui : De literarum in Suecia Studiis sx-
culo V, part. I; Lund, 1818; — Catalogus re-
liquiarum sanctorum in ecclesia Lundensi;
ib., 1820; —Acta, Literx et ObservtUiones ad
Historiam Scandinavicam medii xvi et recen-
Horis œvi;ib., 1821. Beauvois.
W. Faxe, Tal vid A. HyUmdert jordfœitning, avec
une not. Mograph. par H. Reuterdahl.; Lund, 1831. —
A Lfdbek et H. Reuterdahl. Minne af Sv. Hylander;
Luid, 18*0.
hylabbt (Maurice ), théologien et prédica-
teur français , né à Angouléme le 5 septembre
1539, mort à Orléans à la fin de décembre 1591.
Fils d'un marchand de sa ville natale , il entra
en 1551 dans l'ordre des Cordelière, et fit profes-
sion Tannée suivante. Peu après il vint à Paris,
où il acheva ses études. En 1557 il retourna à
Angouléme, où il fut ordonné prêtre. De retour à
Paris , il suivit un cours de théologie ; en 1562 il
professa la philosophie et ensuite la théologie,
qu'il enseigna jusqu'en 1571. En 1566, se trou-
vant au chapitre provincial de son ordre qui se
tenait àCbâteaudun, il disputa publiquement avec
le ministre calviniste Godet. En 1568» il vint
s'asseoir sur les bancs de la Sorbonne, et fut reçu
docteur deux ans après. Il s'appliqua dès lors
plus spécialement à la prédication, La réputation
qui! acquit dans ce ministère le fit appeler en
1572 à Orléans, où il se fixa. Lui-même nous ap-
prend qu'il prêcha dans cette ville onze carêmes,
ce qui nerempêcha pas de prêcher dans plusieurs
autres cathédrales du royaume. « Pendant les
troubles qui agitèrent le royaume de son temps,
il se laissa entraîner, dit Nteéron, à l'esprit de
faction qui animait alors la plupart des moines et
des prédicateurs. Il fut même un des pins ardents
promoteurs de la Ligue par ses sermons séditieux
et par les confréries du Nom de Jésus et do
Cordon de saint François, instituées pour atta-
cher davantage le peuple à ses intérêts, dans les-
quels il fit entrer tes personnes les plus considé-
rables de la ville d'Orléans. » L'Étoile, en annon-
çant la mortd'Hylaret, dit : « En ce temps mourut
Hylaret , eordelier à Orléans , lequel séduisait le
peuple par ses séditieuses prédications contre
le roi , à cause de quoi les Ligueurs et principa-
i lement ceux du petit Cordon en faisoient un
1 saint et compagnon de saint Paul en paradis , et
vinrent à (telle impudence que de dire que ce
beau Père faisoit dans le ciel la Trinité seconde
avec les Guises. » Ses ouvrages sont : Sacra?
Décades quinque partit**, conçûmes quadra-
gesimales atque Paschalcs, numéro quinqua-
ginta, varia et rara rerum ac verborum
suppellectile apparatas instructasque corn-
plectentes ; Lyon, 1591, 2 vol. fn-8*. « Ces ser-
mons, dit Moréri, sont un précis de ceux qu'Hy-
laret avoit prêches pendant vingt-cinq ans. Os
sont en forme d'homélies , et donnent une fort
mauvaise idée du goût, du jugement et des lu-
mières de l'auteur. On y trouve beaucoup d'his-
toires apocryphes et ridicules et des traits dln-
décence. On en a une traduction sous ce titre :
Sermons catholiques pour tous les Jours du
Carême et fêtes de Pâques, composés en latin
par frère Maurice Hylaret ; nouvellement
mis en français par Jean Moynet, avocat au
siège présidial d'Orléans; Paris, 1589, a vol.
in-8° ; — Concionum per adventum Snneades
sacres quatuor, homilias triginta sex corn-
plectentes, e quibus viginti septem priores
Joelem prophetam explicant, novem vero
posteriores Evangelia adventus et festorum
per id tempus occurentium expUcant; Paris,
1591, in-8°; — Homili* in Evangelia do-
minicalia per totum anmrni; Paris, 1604,
2 vol. in-8*. Du Pin donne à Hylaret les deux
traités suivants : De non conveniendo cum
hmreticis et De non in eundo cum hœrettc*
a virç catholico conjugio; Orléans, 1587.
« Nous ignorons si ces deux traités ont été com-
posés en latin, dit Moréri ; ils ne sont cités qu'en
françois dans le catalogue de la bibliothèque
de Couet , chanoine de l'église de Paris , sous ce
titre : Opuscules où il est montré que la fré-
quentation avec les hérétiques et le mariage
avec une huguenote est interdit aux catho-
liques; par frère M, Hylaret; Orléans, 1587,
in-8°. J. V.
709
HYLARET — fiYPATIE
710
Jean dû Bdoet, Fie de Hylaret, en tête des Sacras Dé-
cades. — Nlcéron, Mém, pour servir à l'hist. des Hommes
lit. dans la républ des lettres, tome XVlll, p. î68. -
Du Pin, Table des Auteurs ecclésiastiques. — Moréri,
Grand Met. Histor. — CI». Saune?, Annales Seclesiee
siureUauensis. - H. Willot, Attenm SodaUUi Francis-
canié — Lac Wadding, Scriptores Ordinis S. Francisa,
— 1,. Bail, Sapiéntia forts prœdicans.
hypatie (ritat(a), célèbre femme philo*
sopbe, née à Alexandrie, 8oas le règne de Va*
lens, entre les années 370 et 3*0 de l'ère chré-
tienne, et morte au moi* de mars 415. Fille de
Théon, mathématicien distingué, commenta*
teur d'Eudide et de Ptolémée, Hypatie reçut
ses premières leçons de son père, qui cul-
tiva de bonne heure ses heureuses dispositions
et lui apprit les mathématiques et l'astronomie.
Elle s'appliqua surtout à la géométrie. Damas*
cius se sert pour la caractériser du terme y**>-
(Aexptxif]. On sait te mot de Platon sur son école :
« Nul n'entre ici qui n'est géomètre. » Ce mot resta
vrai pour ses successeurs immédiats , et aussi
pour les néoplatoniciens. La géométrie fut pour
Hypatie l'initiation naturelle à la philosophie.
Depuis la mort de Julien ( en 363) et la réaction
contre l'entreprise de l'empereur philosophe, Té»
cole d'Alexandrie,- qui s'était compromise en as-
sociant sa destinée à celle du polythéisme, était,
de la part d'une population naturellement sédi-
tieuse et fanatique, l'objet de défiances et de
haines qu'on de prenait plus la peine de dissimu-
ler. Entraînée par la force des choses, plus encore
peut-être que par la politique, hors de son sanc-
tuaire, et mise au service d'une cause perdue d'a-
vance, cette école semblait avoir épuisé dans
cette courte lutte toute sa vitalité; quand elle
voulut rentrer sur le terrain de la spéculation
pure, et continuer les traditions pacifiques de ses
premiers fondateurs, elle avait perdu sa foi en
elle-même et son inspiration. Le mouvement phi*
losophiqne commençait dès lors à se déplacer.
C'est à Athènes, à la fin du quatrième siècle, que
le néoplatonisme va chercher un asile suprême
et essayer de se retremper aux sources antiques*
Hypatie entendit peut-être le sophiste Probe-
résius à Alexandrie; puis elle se rendit à Athènes
et y séjourna quelque temps. Plutarque le jeune
y enseignait alors, commentant pour la foule
Aristote et Platon, et expliquant à un petit
cercle de disciples choisis les Oracles chaldéens
et les secrets de la théurgie. Hypatie partagea-
t-elle avec Syrianus le privilège de cet enseigne-
ment ésotérique? Plutarque la reçut-il dans
cetle société d'initiés où régnait sa fille Asclépii
génie ? On ne saurait le dire avec certitude ; mais
peut-être est-il permis de le conjecturer d'un
passage d'une lettre de Synésius, où, parlant
d' Hypatie , il se loue d'avoir été, avec son ami
Herculéius, spectateur et auditeur de la véritable
initiatrice des mystères de la philosophie (1).
(1) Aurômai y<*0 ™ * al a.ùvi\toot Yeyovapiêv
rf;; YV7i?îaç xaOyjyejxovo; twv çiXocoçia; opy^v.
( Synesius, éd. Pétau, ijetVre 1S6, p, 17t. )
Quoi qu'il en soit, Hypatie acquit à Athènes une
certaine célébrité. De retour à Alexandrie , elle
ne tarda pas à s'y faire connaître. Son éloquence,
la pénétration de son esprit, ses mâles talents,
joints aux grâces et aux vertus de son sexe, atti-
rèrent datoutes parts les yeux sur elle. On nous la
représente allant couverte du manteau de philo-
sophe, insouciante de sa beauté, se mêlant fa-
milièrement aux hommes les plus distingués , et
s'entretenant avec eux , sans que le moindre
soupçon l'effleurât, tant elle portait de dignité
dans sa conduite et de gravité dans ses discours !
Une phrase mal entendue de Damascius a fait
croire à quelques critiques qu'elle avait épousé
le philosophe Isidore. Damascius ne dit rien de
semblable ; bien plus * il cite une certaine Domna
comme la femme d'Isidore. Synésius, qui lui écrit
familièrement et la prie de saluer leurs amis
communs, ne fait nulle mention de son mari. Il est
donc permis de croire qu'Hypatie se souvint que
les Muses étaient vierges. Sa naissance et les tra-
ditions de ses maîtres l'attachaient au paganisme :
elle y demeura fidèle, moins peut-être par con-
viction que parce qu'elle pensait avec Thémistius
et les païens éclairés de cette époque « que les
cultes, n'étant que des formes extérieures et des
expressions particulières du sentiment de la di-
vinité, sont indifférents par eux-mêmes; qu'il y a
plusieurs voies qui mènent l'âme à Dieu , et que
chacun est libre de choisir celle qui lui plaît (1) ».
De plus, au moment où l'empereur Arcadius re«
nouvelait les sévères ordonnances de son père
contre Jes adorateurs de Jupiter et de Sérapis ,
au moment où ces derniers étaient pourchassés
jusqu'au fond des campagnes , il n'était pas pru-
dent d'élever autel contre autel. Au reste, le seul
fait de lui avoir attribué la pensée de se faire
chrétienne prouve qu'elle appartenait à ce paga-
nisme épuré où la religion nouvelle avait recruté
plus d'un de ses docteurs , et qui pouvait asse2
aisément s'accommoder avec les croyances chré-
tiennes (2).
L'enseignement philosophique languissait à
Alexandrie : la chaîne sacrée des maîtres sem-
blait rompue ; Hypatie la renoua, et, soit par la
curiosité, soit par l'éclat de sa parole, ramena
autour d'elle les auditeurs dispersés. Il n'est resté
aucune trace dans les auteurs anciens de sa mé-
thode ni de sa doctrine. Nous savons seulement
qu'elle était écoutée avec une vive admiration.
Suidas raconte qu'un de ses auditeurs s'éprit
pour elle d'une violente passion. Le moyen un
peu brutal dont elle se servit pour la guérir, s'il
(t) Themtotius, Orat. consul, ad Jovian, Orat. ad Va-
lentem.
(t) C'est sur une prétendue lettre d'Hypatle t saint
Cyrille qu'on s'est appuyé pour prêter à Hypatie ildée
d'embrasser le christianisme. Cette lettre , qu'on Ht sous
son nom, dans la Nouvelle Collection des Conciles d'É~
tienne de Baluie, tom. I, p. ttfl, et où perce effectivement
un esprit de bienveillance à rendrait de la religion chré-
tienne, est évidemment apocryphe. Il y est question de la
condamnation de Nestorlus qui eut lieu selie ans après
la mort d'Hypatle.
23.
711
HYPATIÊ
712
faut en croire l'anecdote» témoigne qu'elle faisait
assez bon marché des délicatesses de la pu-
deur (1).
Synésius de Cyrène fut élève d'Hypatie, et
garda toute sa vie pour elle les sentiments d'une
tendre reconnaissance. L'évéquede Ptolémaisse
consolait des malheurs de sa patrie en corres-
pondant arec elle , et en épanchant dans son
sein ses tristesses iutimes. « Si je recevais de tes
nouvelles , lui écrit-il , si j'apprenais que tu es,
comme je l'espère, plus heureuse que moi, je ne
serais malheureux qu'à demi (2) »... « Mes en-
fants , mes amismanquent à mon cœur, et sur-
tout ton âme divine, qui pourrait mieux que
tout le reste adoucir pour moi les rigueurs de la
fortune (3). » — « O ma mère, ma sœur, ma
maîtresse, ma bienfaitrice, mon âme est ac-
cablée d'affliction : le souvenir de mes enfants ,
que j'ai perdus, me tue (4). » Et ailleurs : «■ A
toi seule, lui dit-il, je sacrifierais ma patrie; pour
toi je quitterais ces lieux, si j'en avais le loisir (5). »
Dans une autre lettre , il lui parle des critiques
dont il est l'objet de la part de ceux qui l'accu-
sent d'aimer et de rechercher à l'excès les grâces
du langage : il lui envoie avec son Dion, et son
livre sur Y Astrolabe, un Traité des Songes
qu'il a composé en une nuit , et en appelle à son
goût. « Si tu penses qu'il mérite de voir le jour,
je le proposerai en même temps aux orateurs et
aux philosophes; s'il te parait indigne des oreil-
les grecques, et qu'avec Aristote tu places la
vérité au-dessus de l'amitié , il restera enseveli
dans l'obscurité. Tu me liras la première, car
ces pages n'ont pas encore .vu le jour (6). »
De la correspondance d'Hypatie et de Synésius
il ne nous reste que sept lettres de ce dernier, et
qui malheureusement n'ontpasgrand intérêt (7).
Les réponses d'Hypatie ne sont pas venues jus-
qu'à nous. Ces sept lettres attestent le respect,
la haute estime que l'évêque de Ptolémaïs pro-
fessait pour la philosophe , comme il l'appelle,
et peuvent nous donner une idée de la considéra-
tion dont elle jouissait parmi les païens. On pour-
rait s'étonner de ne pas rencontrer,! dans ces
lettres de Synésius à Hypatie, un seul mot tou-
chant le christianisme, si Ton ignorait que
(l) « Cum de auditoribus quidam eam deperlret, pannos
mensibus fœdatos llli ostendisse dicitar, et dlxlsse ; « Hoc
qaldem adatnas, o adolescens»; et sic aniroum ejus sa-
nasse, » Soldas, Lexic.
(t) Synésius, Lettre 10, p. 170.
(Si Ibld.
(*) Synés., Lettre 16 , p. 173.
(5) ld M Lettre m, p. mo. ,
(6) Id., hettre 155, p. 190.
(7) Dans one de ces lettres, Synésius demande à
Hypatie un Instrument dont 11 lui décrit avec exactitnde
la forme et l'usage. Cet Instrument n'est autre chose, à
ce qu'il semble, que notre aéromètre ou bydroscope. Il
est probable qu'il y avait peu de temps qu'on l'avait
Inventé, car il n'en est fait mention nulle part avant
cette époque. Mais il semble difficile d'en attribuer l'in-
vention à Hypatie. Synésius eu effet en parle comme d'un
objet nouveau et peu connu de celle à laquelle 11 s'a-
dresse. Ce point curieux d'histoire scientifique avait
déjà ûxé l'attention de Fermât. ( Voir l'art. Fermât. )
sius est encore plus philosophé peut-être que
chrétien, et que Plotin n'eût pas désavoué la
théologie qui remplit ses hymnes.
Hypatie eut le sort commun des grandes in-
telligences ; elle excita l'envie. Saint Cyrille, ar-
chevêque d'Alexandrie, ne put, dit-on, se dé-
fendre d'un mouvement de jalousie, en passant
un jour devant sa maison , et en voyant la foule
empressée qui assiégeait sa porte (1). On la
savait en commerce intime avec les personnages
les plus considérables de la ville , consultée des
magistrats, liée d'amitié avec le préfet d'Alexan-
drie Oreste. Ce dernier s'entendait mal avec
l'archevêque: tous deux s'accusaient à l'envi
d'empiéter sur leur juridiction. La ville était di-
visée et en proie à la violence des partis. En
414 les juifs, vexés par les Chrétiens, exercèrent
contre eux de sanglantes représailles : saint
Cyrille les châtia en les chassant d'Alexandrie,
après avoir pris de vive force et pillé leurs syna-
gogues. Oreste écrivit à l'empereur pour se
plaindre de cet abus d'autorité, et saint Cyrille
écrivit de son côté pour se justifier. Dans une
autre circonstance, Oreste avait fait arrêter au
théâtre un certain maître d'école du nom d'Hié-
rax, fougueux partisan de l'archevêque, qu'on
accusait de semer des haines et de pousser
aux dernières violences ,' et l'avait fait battre de
verges, au mépris des protestations de l'ar-
chevêque. Les esprits étaient montés au plus
haut point. Des moines fanatiques, descendus
des montagnes voisines et accourus en armes à
la défense du chef de l'Église d'Alexandrie, in-
sultent le préfet, lui lancent des pierres et le
blessent. Un conflit a lieu : force reste à la loi;
un moine est saisi et appliqué à la torture. Saint
Cyrille ne craint pas d'en faire l'apologie dans
un discours public. De nouvelles lettres vont
porter à l'empereur les griefs du préfet et de
l'archevêque et dénoncer les empiétements et les
outrages dont ils s'accusent l'un l'autre. Les em-
barras d'une minorité empêchant l'autorité
centrale d'intervenir, saint Cyrille essaye de se
rapprocher d'Oreste , et vient même un jour
avec les saints Évangiles pour jurer la réconcilia-
tion. Cette tentative d'accommodement échoue.
Hypatie, l'amie et la conseillère d'Oreste, était,
disait- on , le seul obstacle à la paix entre les
deux adversaires. L'exaspération contre le parti
païen se réveilla à cette occasion. Les plus fu-
rieux d'entre les chrétiens, conduits par un lec-
teur nommé Pierre, se mirent en embuscade, ar-
rachèrent Hypatie de sa voiture au moment où elle
sortait de chez elle, la traînèrent à l'église Césa-
rienne, la dépouillèrent de ses vêtements et la
lapidèrent. Son corps fut mis en pièces et ses
membres palpitants indignement traînés par les
rues de la ville, puis ramassés et brûlés en un
lieu appelé Cinaron. Il est difficile de croire que
saint Cyrille ne trempa pas les mains dans cette
(S) Damasclos, cité par Suidas, Uxic.
713
HYPATIE — HYPERECHIUS
714
sanglante tragédie. L'historien Socrate, qui nous
en raconte les détails, ajoute « que cette action
couvrit d'infamie non- seulement Cyrille, mais
toute l'Église d'Alexandrie ». La dissertation de
l'abbé Goujet, qui a essayé de le disculper (dans
la Continuation des Mémoires dé Littérature
et d'Histoire du P. Desmolets, tom. V, pre-
mière partie) ne nous parait pas très-concluante.
D'autre part, c'est raisonner d'une étrange
manière que de prétendre avec Cave ( Hist,
Littér., p. 251) que Damattcius, qui le pre-
mier a chargé saint Cyrille de cette accusation» ne
mérite point d'être cru, étant un ennemi de la
religion chrétienne , et que le caractère bien
connu de saint Cyrille suffit à le laver d'une
pareille tache.
Hypatie est sans contredit la plus illustre de
cette pléiade de femmes qui, comme Asclépigé-
nie , Edésie , Sosipatra, honorèrent la philoso-
phie grecque au cinquième siècle, par leurs ta-
lents et leur vertu. Paul Florus, surnommé le
Silentiaire, a composé en l'honneur d'Hypathie
une épigramme qu'on trouve dans V Anthologie,
Grotius Ta traduite en latin.
Il ne nous reste aucun ouvrage d'Hypatie , si
ce n'est peut-être un Canon ou Table astrono-
mique, insérée dans les Tables manuelles at-
tribuées à Théon. Suidas cite d'elle deux autres
traités de mathématiques qui sont- perdus: un
Commentaire sur Diophante et un Commen-
taire sur les Coniques d'Apollonius de Perga.
' Synésios, édit. de Petau ; Paris, 16X8, Lettres à Hypatie,
pages 170, 17* 178, 178, iî8,t60, 190. — Socrate, Hist.
Ecries., VII, cb. 14, 15. — PhoUus, fragna. — Damasclus,
Suidas, Hésychius, art. Hypatie. — Niceph., Ecclet.
Hist., XIV, 16. — Etienne de Baluze, Nova Collect. Con-
cil.,, tom. I. p. 9*6. — Ménage , Hist. Mut. philos., p. si
et suiv. — Tillemont, Mém.pour servir à l'Hitt. Eccl,
tom. XII, p. 501-51»; tom. XIV, p. rtk. - Continuât, des
Mém. de TAU. et d'Hist. du P. Desmolets, tom. V
et VI.— Woll, Math. Grœc. Fragmenta,— Schmled, Dia-
tria, de Hipp. Theon atqm Hypatia. - Tolaod, n° 8
de son Tetradymus, — Wernadorf, Quatre Dissert, sur
Hypatie.
* hypatodoRE frrcaToôtopoç), statuaire thé-
bain, vivait dans la 102 e olympiade, 372 ans avant
J.-C. Il était contemporain du premier Polyclès,
du premier Géphisodote et de Léocharès. Il fit
avec Aristogiton les statues des chefs argiens
qui combattirent avec Polynice contre Thèbes.
Il fit aussi une statue d'Athénée, pour Aliphera
en Arcadie. Polybe, qui looe magnifiquement
cette statue, dit qu'elle était l'œuvre de Héca-
todore et de H. Sostrate. Comme on ne con-
naît pas d'ailleurs cet Hécatodore, on suppose
que c'est le même que Hypatodore. Y.
Pline, Hist. Nat., XXXI V, 8. - Pausanlas , VIII , 86.
— Polybe, IV, 78. — Boekh, Corp. lnscrfpt., n» 25. —
O. Millier, Archœol. d. Kunst., 870j n° ».
* H ypatus , médecin grec dont le véritable
nom était Georges Sanginatic , vivait dans le
quinzième siècle. 11 fut médecin du pape Nicolas V,
qui le créa comte de Latran et consul. 11 prit
de cette vaine dignité le nom grec û'Hypatus,
qui signifie consul. On a de lui un petit traité en
vers politiques intitulé : 'Ëppuiveta r.tçù tc5v toù
aâpotToç {juEpâv, publié pour la première fois
par Etienne Le Moyne dans ses Varia sacra, I,
513, réédité par Jean-Ét. Bernard; Leyde, 1744,
in-8% avec un traité d'anatomie d'un anonyme
grec. Y.
Fabrlcun, BibUotheea Grrnea, vol. XII. — Bernard»
préface de son édit. — Sax, Onomasticon, t. II, p. 439.
HYPERBOLUS ( e r7tep6oXoç), démagogue athé-
nien , né vers 450 avant J.-C, mort vers 410.
Aucun homme d'État grec, si l'on en excepte
Cléon, ne fut l'objet d'autant de sarcasmes et
peut-être de calomnies. On lui contesta sa na-
tionalité ; on prétendit qu'il était Lydien, Phrygien,
Syrien, que son père était un esclave public
qui travaillait dans les mines. On ne peut rien
tirer de certain de ces assertions contradictoires
sur la naissance d'Hyperbolus , et pour sa vie
on est réduit à de rares indications, dispersées
dans les scoliastes d'Aristophane. Ce poète, qui
réservait toutes ses forces contre Cléon , n'at-
taqua Hyperbolus qu'en passant, et l'abandonna
à ses confrères. Eupolis, dans son Maricas et
dans ses Villes, Hermippus dans ses Vendeuses
de pain , Platon le comique dans son Hyper-
bolus , Polyzelus et Gratinus dans plusieurs de
leurs pièces , accablèrent le démagogue de rail-
leries et d'invectives. Mais ces attaques exces-
sives que tolérait la liberté athénienne étaient
devenues trop habituelles pour avoir beaucoup
d'influence sur le sort d'un homme d'État. Si
Hyperbolus succomba plus tard , ce ne fut pas
sous les coups des poètes comiques ; il fut victime
d'une sorte de réaction qui suivit la mort de
Cléon. Il essaya de le remplacer à la tête du
parti démocratique, lutta quelque temps contre
Nicias et Alcibiade, et, pour se débarrasser de
ces deux rivaux, proposa l'ostracisme. Mais les
deux hommes d'État menacés se coalisèrent, et
firent appliquer la mesure à Hyperbolus, qui fut
banni vers 415 et se retira à Samos. Il y fut
mis à mort quelques années après par le parti
oligarchique, sans forme de jugement Cette fin
tragique parait avoir été aussi imméritée qu'il-
légale; les poètes et les historiens qui disent le
plus de mal d'Hyperbolus ne citent aucun fait
positif à sa charge. Y.
Thucydide, VIII, 7*. — Plutarqae, Arist. % 7; Aie.,
13; Nie., 11. — Aristophane, Poe., 681; Equités, 1801,
1360; Fespse, 5*9-660, 1007; Nubes, 87*. 1065; Thesmoph.,
847; Ran., 577; Plut., 1087, avec les «colles. — Lucien,
Tim. 80, avec les scolles. — Meineke , Qusest. scen., II ,
p. *6. — Grote, History ofancient Greece, t. VII et VIII.
4 hypereghivs ( TircpéxioO t grammairien
grec, vivait à Alexandrie sous le règne de l'em-
pereur Marcien (450-457 après J.-C). Il fut
banni par l'empereur Léon I er , successeur de Mar-
cien. Il composa plusieurs ouvrages de gram-
maire dont on n'a que les titres, savoir : Téxvrj
YpanjjiaTixYi ; — Ilepi ôvopàxtov ; — nepi p%axo;
xal ôpÔoYpaçia;. Y.
Suidas, aux mots Alwv ôMaxéMï);; Tnepéxio;. -*
Fabrlclus, Bibliot, Grspca, vol. VI^ p. 370.
715
HYPÉRIDE
716
htpébide ('riupeifivK <m Ticip^c) , célèbre
orateur athénien, fils de Glaucippus, né dans le
dèroe deCollytus, vers 395 avant J.-C,misà mort
en 322. Après avoir roçudlaocratedes laçons d'é-
loquence, il se dévoua au parti démocratique et le
servit courageusement à travers tous las dangers,
et malgré les catastrophes qui abaissèrent suc-
cessivement Athènes sons Philippe, Alexandre
et Antipater. Cet inaltérable attachement à une
grande cause provenait peut-être plus de la liaison
d'Hypéride avec les chefs du parti patriotique,
Lycurgue et Démosthène, que de son propre ca-
ractère, qui semble avoir été assez léger. Ses
mœurs n'étaient pas irréprochables, bien qu'il eût
étudié la philosophie à l'école de Platon. Il dé-
buta dans la carrière oratoire eh soutenant les
poursuites intentées par d'autres. On a peu de
détails sur sa vie privée. On raconte qu'amant
de Phryné, il lui sauva la jie lorsque, accusée
d'impiété, elle comparut devant le tribunal des
héliastes. Voyant que ses paroles faisaient peu
d'impression sur les juges, il découvrit le sein de sa
cliente et leur demanda s'ils oseraient condamner
la prétresse favorite de Vénus. Sa vie publique
est un peu mieux connue. Toutes les actions que
l'on rapporte de lui sont des traits de dévoue-
ment patriotique. En 358, dans l'expédition contre
l'Ile d'Eubée, il équipa deux trirèmes à ses dé-
pens; en 346 il s'associa à Démosthène pour at-
taquer le traître Philocrate. Après la bataille de
Chéronée, en 338, dans un but de résistance déses-
pérée, il proposa de faire sortir d'Athènes les
femmes, les enfants, et de les mettre à l'abri dans
le Pirée, d'affranchir les esclaves, de donner les
droits politiques aux étrangers domiciliés, etdeles
rendre aux citoyens qui en avaient été privés. Les
événements empêchèrent les Athéniens d'exé-
cuter ce plan vigoureux. La mort de Philippe ra-
nima l'espoir du parti patriotique, et Hypéride
fut, quoique l'histoire n'en dise rien, un des plus
ardents à pousser les Grec3 à la guerre contre la
Macédoine, puisqu'il se trouva au nombre des
orateurs qu'Alexandre voulut se faire livrer par
les Athéniens (voy. Dehade et Démosthène). Ce
danger qu'il évita ne le rendit pas plus prudent.
Presque aussitôt après il demanda que les Athé-
niens n'envoyassent pas de vaisseaux auxiliaires
aux Macédoniens contre la Perse. La nullité po-
litique où Athènes tomba pendant le règne d'A-
lexandre ne laissa plus de place à l'éloquence
de la tribune, et dans cette période Hypé-
rideVeut qu'une occasion de se signaler ; ce
fut contre son ancien ami Démosthène. Il sou-
tint l'accusation intentée au grand orateur au
sujet des trésors d'Harpalus. On ignore quelles
causes amenèrent une [rupture entre deux ora-
teurs si longtemps unis, et que des espérances
communes, un même malheur allaient bientôt
rapprocher de nouveau. A la mort d'Alexandre,
Hypéride, que l'exil de Démosthène laissait à la
tête du parti démocratique, prit l'initiative d'un
soulèvement contre la Macédoine. Il proposa,
dit-on, mais le fait est très-douteux, de décerner
une couronne d'or à lolas, empoisonneur sup-
posé d'Alexandre. 11 eut une part décisive aux
actes qui amenèrent la guerre lamiaque, et après
la mort de Leosthène,il prononça l'oraison fu-
nèbre de ce général. Les premiers succès des
Athéniens ne se soutinrent pas, et la défaite de
Cranon, en 322, força les chefs do parti démo-
cratique a quitter Athènes. Hypéride se retira à
Égine. Il y rencontra Démosthène et s'excusa
auprès de lui de sa conduite dans l'affaire d'Har-
palus. Son dessein était d'aller chercher un an-
tre lieu de sûreté, lorsqu'il fut arrêté par Archias,
émissaire d' Antipater, dans le temple de Nep-
tune, dont il embrassait la statue. On le conduisit
à Corinthe, où se trouvait Antipater, qui lui fit
donner la question pour l'obliger à révéler des
secrets d'État Hypéride supporta héroïquement
la torture, et se coupa, dit-on, la langue pour se
forcer au silence. Il mourut dans les tourments.
Son fils, nommé Glaucippus, fut aussi orateur.
« J'ai lu, dit Photius, tous tes discoursd'Hypéride.
Il y en a cinquante-deux que l'on croit être vé-
ritablement de lui, et vingt-cinq dont on doute;
ce qui fait en tout soixante-dix-sept. La compo-
sition de cet orateur est. si excellente, que quel-
ques-uns n'oseraient décider si Démosthène est
au-dessus d'Hypéride ou Hypéride au-dessus de
Démosthène. » Cet éloge est à la fois vague et
exagéré. Quintilien a dit avec plus de précision
et d'exactitude : « Le caractère d'Hypéride est
la douceur mêlée de finesse; mais son style est
plus approprié aux petites causes. » Quelque fût
le mérite de cet orateur, il avait été jusqu'ici dif-
ficile d'en juger par les fragmente, en général fort
courts, qui nous restaient de lui. Plus d'une fois
on avait, il est vrai, entretenu l'espoir de recou-
vrer quelques-uns ou même la totalité de ses
discours. J. A. Brassicanus (Prxf. ad Salvia-
num) prétendit au commencement du dix-sep-
tième siècle en avoir vu un manuscrit complet
avec de nombreuses scolies dans la bibliothèque
de Mathias Corvin à Ofen, Taylor (Prxf. ad De-
mos th., vol. m) déclara aussi avoir vu un ma-
nuscrit qui contenait plusieurs discours d'Hypé-
ride. Ces deux assertions n'étaient probablement
fondées que sur des méprises, et il a été impos-
sible de les vérifier. Mais une découverte plus
réelle nous a rendu récemment une faible parue
des œuvres de l'orateur attique : on trouva dans
un papyrus rapporté d'Egypte des fragments du
discours contre Démosthène, et on les publia en
1848. Par un hasard singulier, un voyageur an-
glais acheta en 1848 aussi à des Arabes deQooro
(près des ruines de Thèbes, en Egypte, des feuil-
lets qui appartenaient au même papyrus et con-
tenaient deux discours du même orateur, l'on
complet, l'autre avec des lacunes. Ces deux
discours, qui se rapportent à des causes privées,
à de petites causes, n'ont pas un grand intérêt
historique ; mais ils contiennent des détails dont
l'érudition peut tirer parti, et Us confirment le
717
jugement de Quintilien sur Hypéride. Ces deux
discours Pour Euasenippe contre Polyeucte;
( Tnèp EôÇevfanou slaaYYtMaç àmokoyla itpôç Uo-
àueuxtov); Pour Lycophron ('Ticsp Avxàppovoç),
publiés d'abord par Churchill Babington, Cam-
bridge, 1852, in-fol., ont été réédités avec des
corrections et des notes par Schneidewin ; Gœt-
tingue, 1853, in-8°. M. Babington a donné , d'a-
près le même papyrus, l'oraison funèbre presque
entière d'Hypéride sur Léosmène et ses compa-
gnons d'armes tués dans la guerre lamiaque ;
Londres, 1858, in-fol. On connaissait déjà par
Stobée {Floril.t CXXIV, 36) un important pas-
sage de ce discours, la péroraison, qu'a traduite
M. Yillemain, dans son Essai sur V Oraison fu-
nèbre. M. Dehèque a publié le discours sur Léos-
thène, avec une traduction française; Paris,
1868. Tous les discours et fragments d'Hypé-
ride font partie des Oratores Aitici publiés par
C. Mùller dans la Bibl. grecq. de A.-F. Didot;
Paris, 1848-1*58, 2 vol. gr. in-8°. Quelques criti-
ques attribuent à Hypéride, d'après l'autorité de
Libanius, un discours Sur les Traités avec
Alexandre (Htpi rôv irpàç 'AXé&xvSpov auvfoixûv)
qui est inséré dans les œuvres de Démosthène ;
cette supposition n'est appuyée par aucun des
fragments découverts jusqu'à présent.
L. Joubert.
Plotarque, Fitse dteem Orat. ; Alexan., 77 ; Phocion,
13, *9; Demos., J8. — Démosthène, De Corona,; in Mi-
diatn; De falsa Légat, fcant. Aristoçr., II. — Lycurgue,
Contra Leocratem. — Diogèoe Laerce, III, 46.— Athénée,
VIII, p. 84S; XIII, p. 590. - Photius, Bibl., cod, S60-
«65. — Arrien, Anab., I. 1© ; VII, «7. — Lucien, Encom.
Demost. - Justin, XIII, 5.— DIodore de Sicile, XVIII, a.
— Denys d'Hallcarnasae, Dinar., 17.- Longtn, De Su-
blim., XXXIV. i. — Cicéron, Brut., 81, 8* ; Orat., Si ; De
Orot. t 'JUI.~- Qaintlllen, XII, 10. — Hermogène, De Form.
Orat., II, il. - Alcipbron, Eplst., 81-81. — Westennann,
Gesch. d. Grieeh Btredtsamt, p. 807. — Mém. de VAcad.
des Inscript, et Belles- Lettres^. VIII, p. 188. - Kiess-
Hng, De Hypéride orat. attico comment., II; Hiidbarg-
bamcn ; 1787, ln-4», — Droysen, Gesch. des Hellenism.,
toI. I. — Grote, Hittory ofancient Greece, t. XI et XII.
htpebius (André Gerhard), un des plus
remarquables théologiens protestants du sei-
zième siècle, né le 16 mai 1511, à Ypres, et mort
à Marbourg, le 1 er février 1564. Son nom est pro-
prement Gerhard; mais il est généralement
connu sous celui d'Hyperius, qui indique le lieu
de sa naissance. Son père, homme instruit et
avocat distingué, lui fit donner une éducation
soignée : Hyperius étudia ensuite de 1528 à 1535,
à l'université de Paria, et, pendant cet espace de
temps, il employa les vacances à visiter le midi de
la France et la Lomhardie. Après un court séjour
à Louvain, il parcourut les Pays-Bas et plus tard
l'Allemagne. Ce dernier voyage le fit suspecter
d'hérésie et le priva de la collection d'un bénéfice
qu'on avait obtenu pour lui. U avait en effet em-
brassé la cause de la réformation. Il passa alors
en Angleterre, où il vécut pendant quatre ans au-
près du fils de Guillaume Mountjoy, qui avait été
un des amis d'Érasme. La persécution qui s'ap-
pesantit en 1540 sur les protestants, en Angle-
terre, le força de quitter ce pays. Il avait formé
HYPÉRIDE — HYPERIUS
718
le dessein de se rendre à Strasbourg, attiré
par la réputation deBucer, quand, en passant i\
Marbourg , il fut retenu par Geldenhauer, pro-
fesseur en théologie, qui était un de ses amis et
auquel il succéda en 1542.
Hyperius joignait à une érudition solide et
étendue une rare intelligence, et un caractère
plein de droiture et de douceur. Supérieur à son
temps , il eut sur la méthode à suivre dans les
études et les travaux théologiques et principale-
ment sur les principes qui doivent diriger l'in-
terprète des livres saints, des vues dont la jus-
tesse et la profondeur forment le plus grand
contraste avec les procédés arbitraires des exé-
gètes du seizième siècle et avec les conceptions
scolastiques des théologiens de cette époque, et
qui sont devenues la base des sciences théolo-
giques modernes. Il sç fit aussi de la prédication
une idée beaucoup plus saine que les prédica-
teurs do son temps qui, au lieu d'exposer à leurs
auditeurs la religion chrétienne au point de vue
de l'édification, n'apportaient en chaire que des
discussions abstraites ou des controverses irri-
tantes.
On a d'Hyperius : Deformandis Concionibus
sacris y seu de interpretatione Scripturarum
populari Libri II ;Dortmund, 1555, in-8° : plu-
sieurs éditions, dont ladernière avec des additions
et une vie de l'auteur, est de Halle, 1781, in-8°.
C'est le premier ouvrage complet et en même
temps un des meilleurs sur l'art de la chaire ; —
De Theologo, seu de ratione studii theologici,
LibrilV; Bâle,1556, in-8*; plus.édit. : excellent
traité qui aurait pu produire les plus heureux ef-
fets dans les études théologiques, si la largeur
des vues et les opinions zwingliennes d'Hyperius
sur la sainte Cène ne l'avaient pas mis en sus-
picion auprès des luthériens orthodoxes. Laur.
Yillavincentius, docteur de Louvain, mit à con-
tribution cet ouvrage ainsi que le précédent, ou,
pour mieux dire, il les fit réimprimer sous son
nom, presque mot à mot, en en retranchant
seulement ce qui sentait trop le protestantisme,
dans un écrit qu'il publia à Anvers en 1565 ; —
Elément a christianœ Religionis; Baie, 1563,
in-8°; — Topica theologica; Wittemberg,
1565, in-8°; et Bâle, 1573, in-8°; — Methodi
Theologte, sive prœcipuorum christianœ re-
ligionis ïocorumcommunium, Libri III; Bâle,
1566, et 1568 in-8°. Cet ouvrage devait avoir trois
autres livres qu'Hyperius ne jugea pas conve-
nable de composer ; — Opuscula Theologica
varia; Bâle, 1570, 2 vol. in-8° : c'est la col-
lection de divers petits écrits qu'il avait pu-
bliés séparément; — De Saerœ Scripturœ
Lectione et Meditalione; Bâle, 1581 , in-8° ; —
Comment, in Epistolas ad Timoth., Titum et
Pkilem.; Zurich, 1582, in-fol.; — Comment, in
Pauli Epistolas ; Zurich, 1 583, in-fol.; — Corn -
ment, in Epistol. ad Hebrœos; Zurich, 1585,
in-fol. Ces trois derniers écrits furent publiés,
après sa mort , par les soins de son fils, Lau-
719
HYPERIUS — HYRCAH
72ft
rent Hyperius; — De Catechesi, réimprimé
par les soins de J. And. Schmidt à Helmstœdt,
1704, in-8°. Micb ,1 Nicolas.
Wlg/ Orthti Oratto funebris de vita et ebitu A, Hy-
perii; dans l'édlt. de Halle, 1781, du Deformandi» Concio-
nibus sacris. — Boinard, Icônes Firorum IUtutrium,
pan III. — Melch. Adam, Fitse Germanorwn Theolo-
gorum. — Bayle. Dict. Hist. — J. M. Schrœci, Leben-
sbeschreib. berûhmter Getehrten, 1. 1, et Kirchengesch.
seU der Reformât., L Y.
hypsiclès ("TdftxXjfc ), mathématicien grec,
d'une époque incertaine. Il était d'Alexandrie, ou,
selon quelques écrivains arabes, d'Ascalon : deux
assertions qu'il est facile de concilier en suppo-
sant que Hypsiclès, natif d'Ascalon, étudia et pro-
fessa à Alexandrie. Suidas prétend qu'Isidore,
maître d'Hypsiclès, « philosophait sous les frè-
res ». Sur cette autorité on place généralement
la vie d'Hypsiclès sous les frères impériaux
(divis fratribus) MarcAurèleetVerus,yers 165
après J.-C. Mais comme Isidore est inconnu , et
que l'expression « sous les frères » est extrê-
mement Tague, le champ est ouvert aux hypo-
thèses, et M. de Morgan donne de bonnes raisons
pour fixer la date d'Hypsiclès vers le milieu du
sixième siècle après J.-C. Quant à l'opinion qui
faisait vivre ce mathématicien avant l'ère chré-
tienne,sous Ptolémée Physcon, elle est générale-
ment abandonnée. Achille TdUuscited'Hypsiclès
un traité sur le mouvement harmonieux des
planètes ( Hepl tyjç èvap^ovCou xiv^rewç ), et Ca-
siri mentionne de lui, d'après les écrivains ara-
bes, un ouvrage sur les grandeurs et les distances
des corps célestes. Il ne nous reste d'Hypsiclès
qu'un traité astronomique sur l'ascension droite
des constellations zodiacales (Hept -oj; tûv
ÇcoÔtav àvatpopaç), publié en grec et en latin par
Jac. Mentel ; Paris, 1657, in-4°, et avec les Op-
tiques d'Héliodore, par Erasme Bartholîn , Paris,
1680, in-4°. Cet ouvrage, qui a été édité en arabe
par Costha ben Luca , servait chez les Grecs
aussi bien que chez les Arabes d'étude prépara-
toire à la Syn taxis de Ptolémée. «Ce livre, dît
Delambre, ne renferme que six propositions, et
même les trois premières ne sont que.des lemmes
qui démontrent trois propriétés des progressions
arithmétiques ; ainsi l'ouvrage ne consiste véri-
tablement qu'en trois propositions, dans lesquelles
Hypsiclès donne une méthode pour calculer en
combien de temps se lève chaque degré de l'é-
cliptique ; cette méthode n'est qu'approximative ;
elle aurait pu avoir quelque mérite avant la dé-
couverte de la trigonométrie. » On s'étonne que
Hypsiclès vivant, selon toute probabilité, plu-
sieurs siècles après Hipparque, ait ignoré ou dé-
daigné la méthode créée par ce grand géomètre,
et on s'étonne encore plus qu'un livre sans va-
leur scientifique aitjservi d'introduction à l'étude
de Ptolémée.
Le quatorzième et le quinzième livre des Élé-
ments d'Euclide, qui ont pour objet le dodécaè-
dre et Vicosaèdre, passent pour être d'Hypsiclès,
bien que Casiri prétende, d'après les écrivains
arabes, qu'il n'avait fait que les corriger, et que
les anciennes traductions arabes ne mentionnent
pas son nom ; mais Hypsiclès a pour lui l'auto-
rité des manuscrits d'Euclide. Y.
Suidas, Lez. — Fabrlctas, Bibliotheca Grseea. iv. m.
— Montocla, Histoire des Mathématiques, 1. 1, p. sis. -
Delambre, Histoire de t Astronomie ancienne, L I, p. 1*6.
— Gartz, De fttierpret. Euclidis Avoine. — A. de Mor-
gan, article Hypsiclès dans le Diction, of Greek and Ro-
man Biography de Smith.
htpsicrate (*r^txpdtTY|; ), historien grec,
d'une époque incertaine. II écrivit en phénicien
une histoire de la Phénicie, qui fut traduite en
grec par un certain Asitus ( *A<titoç ) ou Laetus
( ÀaïToç) (Tatien, Orat. ad Gent., 58*, Eusèbe
Prœp. Evang., X,p. 289).
Lucien parle d'un autre historien Htpsicrate,
natif d'Amèse, et qui vécut jusqu'à quatre-vingt*
douze ans et se distingua par son savoir (Lucien,
Macrob. , 22 ; Strabon, vn, p. 479 ; XI, p. 769).
On cite encore deux écrivains de ce nom,
l'un mentionné par Diogène Laerce comme ac-
teur d'un traité Hept tcivoxcov ( Diog. Laer.,
VU, 188) ; l'autre grammairien latin, contem-
porain de Marcus Terentius Varron et cité
par ce dernier ( De Ling, Lat. 9 V, 88 ); par
Etienne de Byzance ( au mot Al8£o<{/); et par
Aulu-Gelle ( XVI, 12 ) qui lui attribue « libres
sane nobiles super his quae a Graecis accepta
sunt ». Y.
C. Huiler, Fragmenta Histor. Grœcorum, t. III, p. ils.
HYPS1LANTIS. Voy. YPSILANTI.
ht ne an ( Tpxavo;, Jean ), prince et grand-
prêtre des Juifs, troisième fils de* Simon Ma-
chabée, régna depuis 135 avant J.-C. jusqu'en
106. En 137 Antiochus VII, rétabli sur le trône
de Syrie après la défaite et la mort de Tryphon,
voulut réduire la Judée à son ancienne condi-
tion de puissance tributaire, et confia cette mis-
sion à Gendebeus, un de ses généraux. Simon
Machabée opposa aux envahisseurs ses deux
fils Judas et Jean Hyrcan, qui défirent Cende-
beus et le chassèrent de la Judée. Simon ne
jouit pas longtemps de sa victoire; il fut traîtreu-
sement saisi et égorgé par son gendre Ptolémée,
gouverneur de Jéricho, en 135. Deux de ses fils
périrent avec lui; mais Hyrcan, échappant au fer
des assassins, courut à Jérusalem, s'y fit pro-
clamer grand-prètre, et marcha avec une armé*
contre Ptolémée, qui s'enferma dans la forteresse
de Dagon. Le meurtre de Simon avait été pro-
bablement concerté avec Antiochus Sidétès, roi
de Syrie ; ce prince en profita du moins pour
envahir la Judée. Hyrcan, trop faible pour tenir
campagne, s'enferma dans Jérusalem, et fut forcé,
après un long siège, de subir des conditions qui
replacèrent de nouveau la Judée sous la dépen-
dance de la Syrie, en 133. Quatre ans après,
Hyrcan accompagna Antiochus dans l'expédi-
tion contre les Parthes, prit part aux premiers
suceès des Syriens, et par un prompt retour à
Jérusalem, dès l'entrée de l'hiver, il échappa aa
désastre qui enveloppa le roi de Syrie et son
721
HYRCAN
722
armée. II saisit l'occasion de s'émanciper de la
suzeraineté syrienne, conquit plusieurs villes
sur les confins de la Judée , entre autres Si-
chem dans la Samarie, et détruisit le temple du
mont Gerizim. Il subjugua ensuite les Iduméens
et les força d'adopter les lois et. les coutumes
des Juifs. Pour se mettre à l'abri du côté de la
Syrie, il envoya une ambassade à Rome, et ob-
tint la confirmation du traité conclu par son
père avec le sénat. Les troubles de la Syrie ne
le servirent pas moins que la protection romaine.
Démétrius II, à peine remonté sur le trône des
Séleucides, en fut précipité par une mort violente,
en 1 25. Hyrcan s'allia avec un des prétendante
au trône, Alexandre Zebina; mais il ne parait pas
lui avoir prêté un appui efficace , car il avait in-
térêt à prolonger la guerre civile en Syrie. En
110 il profita de la faiblesse toujours croissante
de l'empire des Séleucides pour assiéger Samarie,
qui était depuis des siècles la rivale et l'ennemie
de Jérusalem. Les Samaritains appelèrent en
vain à leur secours Antiochus de Cyzique. Ce
prince fut vaincu par les deux fils d'Hyrcan ,
Antigone et Aristobule ; ses généraux Épicrate
et Callimander furent également malheureux, et
Samarie finit par succomber. Hyrcan fit raser
jusqu'aux fondements cette ville détestée. Les
disputes des deux puissantes sectes, les Phari-
siens et les Sadducéens, que Hyrcan favorisa
Tune après l'autre , semblent avoir troublé la
tranquillité de ses dernières années , sans pro-
duire cependant aucune révolte. Hyrcan finit en
paix, son glorieux règne. Sa mémoire resta chère
aux Juifs. On disait dans le peuple qu'il avait
des révélations divines et prédisait l'avenir. Il
laissa cinq fils : Aristobule, Antigone, Alexandre
J année, un quatrième dont le nom est inconnu,
et Absalon. D'après son testament, sa femme
devait gouverner à sa place; mais Aristobule
s'empara du pouvoir, et prit le titre de roi au
lieu de celui de prince ( nasi ), dont Hyrcan s'é-
tait contenté. Y.
Bible, Mac., XV, XVI. - Joaèpbe, Antiq., Xlll, 7, 8, 9,
10; Bel. Jud., l, s. — Dlodore de Sicile, Excerpt.,
XXXIV, 1. - Justin, XXXVI, 1.
hyrcan il, grand-prêtre et roi des Juifs, fils
d'Alexandre Jannée et petit-fils du précédent,
né vers HO avant J.-C, mort en 30 avant J.-C.
A la mort d'Alexandre, en 78, l'autorité royale
passa à sa femme, la reine Alexandra , qui nomma
aussitôt Hyrcan grand-prêtre, et donna le com-
mandement des troupes à son second fils Aris-
tobule. Pendant les neuf ans du règne de sa
mère, Hyrcan se montra fils soumis, et se dé-
voua au parti des pharisiens, qu'elle favorisait.
Il lui succéda en 69; mais, aussitôt après, il fut
attaqué par Aristobule, qui le vainquit à Jéricho,
l'assiégea dans Jérusalem et le força d'abdiquer.
Hyrcan, modeste et sans ambition, se serait con-
tenté d'une position privée si les intrigues de
l'tduméen Antipas ou Antipater ne l'avaient
inquiété pour sa sûreté. Il s'enfuit de Jérusalem,
et se réfugia à la cour d'Arétas, roi de l'Arabie
Pétrée, en 65. Arétas envahit la Judée, défit
Aristobule, et le força de s'enfermer dans le
temple, tandis que Hyrcan était maître du reste
de la ville. L'intervention de M. iEmilius Scaurus,
lieutenant de Pompée, obligea le roi d'Arabie et
son protégé à évacuer la Judée. L'année sui-
vante Pompée vint lui-même régler les affaires
des deux princes juifs. Aristobule en rejeta l'ar-
bitrage, et le général romain n'occupa Jérusalem
qu'après un long siège, en 63. Il rendit à Hyr-
can la grande-prêtrise et sinon l'autorité, du
moins le titre de roi. La protection des Romains
etl'habUetéd'Antipaterne purent assureràHyrcan
un règnetranquille. Alexandre, fils d'Aristobule,
et Aristobule lui-même, s'échappant de Rome,
excitèrent dans la Judée des insurrections que ré-
prima le proconsul Gabinius. Fatigué de soutenir
un prince qui ne savait pas se défendre, le gou-
verneur romain lui retira l'autorité suprême, et le
confia à cinq conseils provinciaux ou sanhédrins.
Le grand-prêtre, privé du pouvoir, royal, eut le
chagrin de voir Grassus, successeur de Gabinius,
enlever les richesses du temple. Pendant la
guerre civile, César encouragea Aristobule à
faire valoir ses droits au trône; mais ce danger,
qui menaçait les faibles restes du pouvoir d'Hyr-
can , fut conjuré par les partisans de Pompée ,
qui empoisonnèrent Aristobule, et par Scipion,
qui fit tuer Alexandre à Antioche. Après la ba-
taille de Pharsale, Hyrcan, ou plutôt Antipater,
rendit des services si importants à César pen-
dant la guerre alexandrine, que le dictateur, à
son retour d'Egypte, le rétablitdans l'autorité su-
prême ; mais Hyrcan n'eut encore que l'appa-
rence du pouvoir, qui appartenait en réalité à
Antipater et à ses deux fils, Phasael et Hérode.
Celui-ci fut traduit devant le grand sanhédrin,
pour des actes arbitraires commis dans son gou-
vernement de Galilée, et il allait être condamné
lorsque Hyrcan le fit prévenir de s'enfuir : il
obéit, et bientôt, grâce à la protection des Ro-
mains , il se trouva plus puissant que jamais.
Hyrcan ne fut plus que le jouet des deux partis
qui se disputaient le pouvoir. 11 permit à Malien
d'empoisonner Antipater, et laissa Hérode tirer
de ce crime une terrible vengeance. Il n'eut dè3
lors rien à refuser au jeune prince, et lui donna
en mariage sa petite-fille, la belle Mariamne.
Après la bataille de Philippes, en 42, Hyrcan et
Hérode obtinrent la confirmation de leur pou-
voir; mais ils furent bientôt forcés de fuir devant
l'invasion des Parthes, qui ramenaient avec eux
Antigone, fils d'Aristobule. Phasael et Hyrcan,
ayant eu l'imprudence de se laisser attirer dans
une entrevue, tombèrent entre les mains des Par-
thes. Antigone fit couper les oreilles à son oncle
Hyrcan, afin de l'exclure à. jamais du pontificat,
car aucun prêtre ayant un défaut corporel ne pou-
vait approcher de l'autel. Le malheureux prince
rut emmené par les Parthes, qui le laissèrent vi-
vre librement à Babylone. Voyant Hérode ré-
723
HYRCAJS — HYSTASPE
724
tabli sur le trône, il ne pot résister an désir de
revenir en Judée, en 38. Il y reçut d'abord on ex*
cellent accueil de la pari de son gendre; mais,
devenu encore plus faible avec l'âge, il se laissa
entraîner pas sa fiHe Àlexandra dans des intri-
gues contre Hérode, qui le lit mettre à mort.
Avec Hyrean finit la race des Macbabéca. .Y.
Joaèphe, Antiq. Jud. t Xll\, 16; XIV. 1-4, It, 18; XV, i,
6; Bel. Jud . 1, 5-S, 11, 11, 18, M.- Dloo Cattitif, XXXVII,
il, 16 1 XXXVUI.M. - Dtodor* <U «telle, Emcvrft*
/'ot, XL. ~ Orose, M, «.
HTBMENTRUDB. Voy. EftlUNTftUDE.
■vaiTACÈNH. Voy. Théodore.
HTSTA8PB (TotéçinK en grec, Gaktasp,
Gustasp, Histasp on Wiitasp en persan), fils
d'Arsaine et père de Darius I' r , chef de la fa-
mole royale des Achéménides, vivait dans le
sixième siècle avant J.-C. Satrape de Perse sous
Cambyse et probablement aussi sous Cyrus, il
accompagna ce prince dans son expédition contre
les Massagètes. Mais il reçut Tordre de revenir
surveiller son fila aîné Darius, que Cyrus soup-
çonnait de trahison* Il avait deux autres fils, Ar-
taban et Artane. Ammien Marcellin fait de lui ua
chef des mages, et prétend qu'il avait étudié dans
l'Inde sous les brahmes. On a lu son nom sur les
inscriptions de Peraépous. Y.
Hérodote, I, *», Î10; III, 70; IV, 83; VII, «S* - A»-
mlea MarcelMn, XXIII, 6. - Grotefend, Mêtrwge mt Bm-
M, ministre de l'empereur Chun, vivait an
vingt -troisième siècle avant notre ère. Une
grande famine s'étant déclarée à la suite de l'é-
coulement des eaux diluviennes, et les grains
Tenant à manquer dans toutes les campagnes,
Yu le Grand ( voy. ce nom ) chargea le ministre I
de pourvoir aux moyens d'assurer la subsistance
du peuple. Le ministre s'acquitta habilement de
cette mission, et enseigna l'art de lâchasse aux
populations de l'empire. H inventa aussi les filets
et d'autres instruments destinés à la pèche et à
l'agriculture. P. B.
Chou-Kino, Ifrre canonique 4m Annales. — Ttmne-
kien-Jumg+um ( Miroir général 4e l'Histoire de la China ).
- Histoire générale de la Chine, trad. par MoyrUc de
Mailla, tora. 1««\
* i-pori, chef japonais du paysde Yamato, vi-
vait au milieu du septième siècle avant notre ère.
I-Fori fut un des chefs qui s'opposèrent le plus
rigoureusement à rétablissement de Sin-mou
(voy. ce nom), le premier empereur et souve-
rain spirituel du Japon. Il s'était établi sur le
cap Nagaye-no-oka-saki. On le désignait sous le
nom de Tsoutsi-goumo , c'est-à-dire araignée
de terre, parce qu'il n'avait point de demeure
fixe et qu'il vivait dans des antres et dans des
souterrains. Il finit par être vaincu par tes troupes
de Sin-mou. P. B.
Klaprotb, dans les Annales des Empereurs 4m Japon
deTiUiag, In-**.
UBLorsKi. Voy. Jàblotokt.
iacaïa. VoyesYscAlA.
iacoub. Voyez Yakovb.
IAGOU9CHIICSKI. Voy. JkGOUttMKY\(P<lUl).
ianaki, volvode de Moldavie, tué à la fin de
l'année 1730. Une insurrection des janissaires
força le sultan Ahmed d'abdiquer en faveur de
son neveu Mahmoud au mois d'octobre 1730.
Par suite de cet événement, des mutations eurent
lieu dans tous les grands emplois. Grégoire Ghica,
qui venait d'être nommé voivode de Molda-
vie, fut révoqué et remplacé par un boucher
grec nommé Ianaki , lequel acheta cette place
moyennant cinq cents bourses à Chalil-Patrona,
simple janissaire dont l'insurrection avait fait un
des personnages les plus importants de l'empire.
En vain le grand- vizir représentait que le prince
Ghica venait d'être confirmé dans sa dignité
par le nouveau sultan : « Allez trouver le sultan,
répondit le janissaire, et songes avant tout à faire
la volonté de Patrona. » Le boucher grec fut donc
installé sur le trône à la grande indignation des
Moldaves. Un mois et demi plus tard Chalil-Pa-
725
troua succomba à Constantinople, et Ianaki fut
aussitôt destitué et décapité. Z.
Bngel, Histoire dé la Valachit % t. 1t. - De Hammer,
Histoire êê r Empiré Ottoman, 1 . LXV1.
iajtowski. Voy. Ybhisb.
* iasos, sculpteur athénien* H prit part à
l'exécution d'nn dea plus beaux monuments d*
l'architecture grecque, en travaillant aux bas-
reliefs du temple de Minerve Polyade. Une ins-
cription attique en a conservé le nom. G. B.
Baonl-Rocbette, Lettre é M. Schom, supplément an
Catalogue dot Artiste» de F Antiquité, p. $86.
iatbako, l'un des chefs de l'insurrection
grecque, né en Morée, vers 1770. Il montra dès
son enfance un goût particulier pour la méde-
cine. Sans avoir étudié dans aucune faculté, une
longue pratique lui avait acquis une grande expé-
rience et une certaine science : de là son surnom
de latpoxo (le Médecin), que lui donnèrent ses
compatriotes. Les Turcs eux-mêmes, prenant
en considération son savoir, lui avaient accor-
dé de grands privilèges, l'avaient exempté d'im-
pôts, et lui permettaient de porter des armes alors
qu'aucun autre rajah n'en devait avoir en sa
possession. Néanmoins, Tatrako fut l'un des
premiers à appeler ses compatriotes à l'indépen-
dance, et, semblable à quelques-uns des héros
de V Iliade, après avoir vigoureusement combattu,
il pansait lui-même ses soldats blessés. Il fut,
après Kolokotroni, celui qui amena le plus de Pâli-
tares devant Tripolitxa, et prit une part importante
à la prise de cette ville ( 1621 ). On a mis cepen-
dant en doute sa valeur et ses talents militaires.
Il disparut de la scène active peu après 1828.
Peut-être fut-il tué dans un des combats quoti-
diens que les Hellènes livraient alors aux Os-
manli». A. de L.
Itibbe et VielUi de Bolsjolla, Biographie portative du
Contemporains»
ibakra (Joaquin), imprimeur espagnol,
né à Saragosse en 1725, mort à Madrid le
23 novembre 1785. Il monta àMadrid une impri-
merie dont les productions sont encore recher-
chées des bibliophiles, et porta la perfection de son
art à un point inconnu jusqu'alors dans la pénin-
sule hispanique. Il inventa une encre d'une ex-
cellente qualité, et le premier il fit connaître à
sçs compatriotes le moyen de lisser le papier im-
primé pour en faire disparaître les plis et le fou-
lage occasionné par la pression sur les caractères,
et lui donner une égalité , un luisant agréable à
l'œil, lbarra ne dut ses inventions qu'à lui-même,
car jamais il ne sortit de son pays. Parmi les ou-
726
727
IBARRA — IBN-AL-ABBAR
728
▼rages sortis de ses presses, on cite surtout de
belles éditions de la Bible, du Missel mozarabe,
de la Historia de Hispana de Mariana , de Don
Quùrcfe, Madrid, 1780,4to1. in-4°, et 1782,4 vol.
in-8°, et surtout sa superbe édition du Salluste
espagnol, traduit par l'infant don Gabriele, Ma-
drid, 1772, in-fol. : les exemplaires de ce dernier
ouvrage sont presque introuvables ailleurs que
dans les bibliothèques princières. L— z— e.
ChaodoD et Delandtne, Dictionnaire universel ( édit
de 1810).
ibas, évêque d'Édesse en Syrie, mort vers
457. Il était évêque depuis plusieurs années,
lorsque quatre prêtres de son diocèse l'accu-
sèrent de l'hérésie nestorienne auprès des ar-
chevêques d'Antioche et de Constantinople.
L'empereur le renvoya devant une commission
composée des évêques Uranius d'ffîmère, Pho-
tius de Tyr, Eustathe de*Béryte, et du préfet
Damasce. Cette commission tint deux synodes,
en 448, l'un à Tyr, l'autre à Béryte, et prononça
l'absolution d'ibas, qui n'en fut pas moins déposé
l'année suivante par le fameux concile d'Éphèse et
expulsé de son diocèse. 11 appela de cette déci-
sion au concile de Chalcédoine, qui le rétablit
sur son siège en 451. Longtemps après sa mort,
en 553, le cinquième concile général de Constan-
tinople le condamna comme nestorien, malgré
l'opposition du pape Vigile. Le principal argu-
ment contre Ibas était une lettre à un Persan
nommé Maris, dans laquelle il blâmait Rabulas,
son prédécesseur, d'avoir condamné Théodore
de Mopsueste. La plus grande partie de cette
lettre a été insérée dans le Recueil des Conciles,
t. IV, p. 661. Y,
Baronius, Annales, an. U8, U», 4SI, 855.- Daptn, Bi-
bliothèque ecclés. du cinquième siècle. - Cave, Hist. Ut.
* ibbetson ( Agnès Thompson, mistress),
femme savante anglaise, née en 1 7 57, à Londres ,
morte en 1823, à Exmouth. Mariée à un avocat
qui la laissa veuve, elle porta de bonne heure
son activité sur l'étude de l'astronomie, de la
géologie et de la botanique, et acquit, dans cette
dernière science, une connaissance approfondie
4e la physiologie des plantes. Dooée d'un esprit
ingénieux et observateur, elle fit, à l'aide du mi-
croscope, une série de recherches sur la structure
des végétaux, qui ont été insérées dans lesiin-
nales of^Philosophy et autres recueils scienti-
fiques. P. L— Y.
Boue, New gênerai Bioçraphieal Dictionary , t. VIII.
— filauQder, Bioçraphieal Treasury, 1847.
ibbot (Benjamin), théologien anglais, né
en 1680, à Beachamwell (comté de Norfolk),
mort en 1725, Après avoir fait ses études à
Cambridge , il devint le bibliothécaire de l'ar-
chevêque Tenison , qui le nomma peu après son
chapelain et lui donna en 1708 la place de tré-
sorier de la cathédrale de Wells, et ensuite
celle de recteur des paroisses unies de Saint- Ve-
dast, Foster-Lane et Saint-Michael-le-Querne à
Londres. En 1713 et 1714, il fit le cours religieux
fondé par Boyle, fut nommé chapelain de
Georges I er en 1716, et prétendais de Westmins-
ter en 1724. Les Boyle 1 s Lectures furent pu-
bliées en 1727, in-8°. Le docteur Clarke, son
ami, fit un choix parmi ses sermons manuscrits,
et le publia au profit de sa veuve, sous ce titre :
Thirty Discourses on practical subjects ; 1726,
2 vol. in-8°. Ibbot publia aussi une traduction
du traité de Puffendorf De Habitu Religionis
christianx ad Vitam civilem, 1719, et on a
quelques vers de lui dans la collection deDods-
ley. Z.
» Cbalmers, General Bioçraphieal Dictionary.
ibbk (Melik Moezz ed-Din). Voyez AÏbek.
1BERV1LLE. Voyez LEHOINE d'iBERVILLE.
* ibi (Sinibaldo), peintre de l'école romaine,
plus connu sous le nom de Sinibaldo de Pérouse,
né dans cette ville, vivait de 1505 à 1528.
Assez bon élève du Pérugin , il travailla surtout
à Gubbio où dans la cathédrale, à la chapelle,
Bentivoglio, on admire son meilleur ouvrage, une
Madone assise sur un trône , portant cette inscrip-
tion, qui malheureusement ne nous apprend pas
l'année de l'exécution du tableau, que la plupart
des auteurs fixent à 1505 : Hyeronimus Benti-
volius P. Pauli et Magdalenœ sorori suœ Si-
nibaldus Perusinus pinxit hoc opus sexto ka-
lendàs octobris.
Sinibaldo eut pour élève Benedetto Nucci, avec
lequel il peignit pour la confrérie de Santa Maria
de' laici de Gubbio une belle bannière, qui y existe
encore dans la riche galerie du comte Ranghias&i
Brancaleoni. £. B— n.
LanzL, Storia delta Pittura. — Tkcozsi, IMsionario.
— Guaiandi, Memorte originali di Belle Art*.
ibn.al-abbar (Le hafitz Abou-Jibdallak
Mohammed ben- Ahmed), biographe et poète
arabe, né à Valence (^spagne), brûlé à Tunis,
en moharrem 658 de l'hég. (janvier 1260 de J.-C.).
Il fut secrétaire du prince almohade de Valence
Abou-Abdallah et de son fils Abou-ZéM , qu'il
accompagna chez les chrétiens. Lorsque ce der-
nier embrassa le christianisme , il le quitta, et
passa au service de Zian Ibn-Merdenisch, usur-
pateur du trône de Valence. Chargé d'aller im-
plorer le secours d'Abou-Zakariah, émir bafside
de Tunis en 235 (1638), il exposa en vers le
sujet de son ambassade, et obtint une flotte, qui
tenta en vain de pénétrer dans le port de Va-
lence. Après la prise de cette ville par don
Jayme, roi d'Aragon en 636 ( 1238), il retourna
à Tunis, et fut nommé garde du paraphe du sul-
tan. Son caractère irascible et son esprit satirique
le rendirent odieux aux courtisans, qui le firent
exiler à Bougie. Ayant obtenu sa grâce, il eut
l'imprudence de faire des vers contre lémir
Mostanser, successeur d'Abou-Zakariah, et fut
brûlé avec sa bibliothèque , ses œuvres et ses
poésies. On a de lui : Tehmilet-li kitab as-
silet ( complément du livre de Ibn Baschkoual,
intitulé Don ),. qui a été édité dans la livr. IV
des Ouvrages arabes publiés par Dozy, et dont
Casrri a traduit des extraits dans le t. II, p. l?i,
730
IBN-ÀL-ÀBBÀR — IBN-ÀL-ATSIR
730
de Bibtiotheca Arabico-ffispana; — AUhollet
as-siyara (Manteau de soie), contenant la vie
éludes extraits des œuvres des princes et des no*
blés musulmans d'Afrique et d'Espagne qui se
sont occupés de poésie. Cette anthologie, com-
posée avec critique, jette beaucoup de jour sur
l'histoire littéraire des Arabes occidentaux. Dozy,
qui se propose de la publier intégralement, en
a donné un long extrait dans Scriptorum Ara-
bum Loci de Abbadidis; Leyde, t. II, 1852,
in-4°, p. 47-123. Casiri en a traduit des passages
(t. n, p. 30); — Moadjem (Dictionnaire des
Auteurs arabes d'Espagne) ; — Tohfet al-Cadim
(Don à rorrivant), anthologie et notice des poètes
arabes, dent Casiri a extrait la liste de 102 poètes
(t. H, p. 94). E. B.
lbn-Khaldoan,l Hitt. des Berbères, trad. par Mac-
Cucklo de Slane, t. il, p. 307-812, 847-850. — P. de Gayan-
Ros, Append. à Makkari, t. I, VIS; t. II, p. 828. —
Hadjl-Khalfah, Lex. bibliogr., t. II, n« 2168, 2642. — Ca-
siri, Bibl., t. I, p. 94; t. H„p. 16,180, 121, 129, 168, 198. —
Dozy, De Abbadidis, t. II, p. 46, et Recherches sur l'His-
toire politique et littéraire de l'Espagne, t. I, p. 868-
181. — De Ha ramer, Literaturgeschichte der Araber,
t. VII, p. 725.
ibn-abi-osaïbiah ( Le schéikh Mowaffik
edDin Abou'l-Abbas Ahmed ben-Abïl-Kasim
al-Khazradji), médecin arabe, né à Damas,
vers 600 de l'hégire ( 1203 de J.-C. ) , mort en
Djouraada premier 668 (janvier 1270). Après
âfoir étudié la médecine sous son père et un de
ses oncles, il se rendit au Caire, où il fut attaché
à un hôpital, en 634 ( 1234), et passa ensuite en
Syrie, auprès de lzz ed-Din Eidemir, comman-
dant de Sarkhad, dont il devint premier méde-
cin. Il était lié avec Ibn-Beithar et Abdallathif.
On a de lui : Oyoun al-anba fi thabacat al-
athibba (Source de Renseignements sur les
classes des Médecins), en dix-sept chapitres. Il y
traite d'abord de l'origine de la médecine , et
donne ensuite des détails biographiques et bi-
bliographiques sur les anciens médecins grecs,
les médecins chrétiens d'Alexandrie, les médecins
syno-nestoriens des Abbassides, les premiers mé-
decins arabes , les médecins postérieurs classés
par contrées, enfin les médecins persans et hin-
dous. On en trouve des fragments édités ou tra-
duits dans Analecta Medica de Dietz, Leipzig,
1833, îq-8°; dans Scriptorum Arabum de
Rébus Indicis Loci et Opuscula inedita par
Gildemeister, Bonn, 1838, in-8°; The Jour-
nal of the R. Asiatic Society of Great-Bri-
tain and Ireland, t. VI, 1841 ; — dans Les
Classes des Médecins, publié par Sprenger; —
enfin M. Sanguinetti a traduit les passages rela-
tifs à l'origine de la médecine, à Esculape, aux
premiers médecins arabes, aux médecins syriens
dans Journal Asiatique de Paris, 1834, 1855,
1856, t. II. Ibn-Ali-Osaïbiah écrivit aussi un
traité de médecine pratique , une histoire des
philosophes et des mathématiciens, et des pièces
de poésie. E. B.
Ibn-Abl-OsaTblah, Oyoun-alAnba. — Hadji-Khalfah,
1er. Bibliogr.,, t. IV, 7883, 8640. — Relske, Opuscula
inedita ex monumeniis Arabum et Ebrxorum, édité
par Grunér, p. 85. — Sacy, Relat. de VÊgyptêpar Ab-
dallatif, p. 495, 549. - Wustenfeld, Gesbh. der arabi-
schen sErzte und Naturforscher ; Gœttingue, 1880, in-8°.
— Sanguinetti, dans Journ. Asiat., 1854, 1, p. 1M.
IBN-ABI-ZERA-AL-FASI ( AbouH - Hassan
Ali ben- Abdallah ), historien arabe, vivait à Fez
(Maroc) au huitième siècle dé l'hégire ( quator-
zième de J.-C. ). Tout ce que Ton sait de lui,
c'est qu'il est auteur de : Al-Anis Al-Mothrib
bi raudh Al-Carthas fi tarikh medinet
Fas t histoire de Fez et de cinq dynasties mu-
sulmanes qui ont possédé cette ville, savoir
les Édrissides , les Zénètes ou Zéirides , les Mo-
rabites (Almoravides) ou Lemtounes , les Mo-
wahhids (Almohades),' enfin les Merinides.
Cette chronique, qui commence en 145 (762 ),
est exacte et très-estimée en Maroc. On en a
deux rédactions, l'une appelée Carthas Saghir
(Le petit Carthas, ou petit papier), a été traduite
ou plutôt analysée en allemand par Fr. de Dom-
bay : Geschichte der mauritanischen Kœnige,
avec des notes ; Agram , 1794-1797, 2 vol. in-8°;
traduite assez fidèlement en portugais , sous le
titre de Historia dos Soberanos mohametanos
dos primeiras quatro dynastias, e da parte
da quint a y que reinardo na Mauritania , Lis-
bonne, 1828, in-4°, par le Fr. Jozè de Santo-
Antonio-Moura, qui omit les citations de vers, et
attribua cet ouvrage à Abu-Mohammed Assa-
leh ben-abd-el-Halim. Cli. J. Tornberg a donné
le texte arabe et une traduction latine accompa-
gnée de variantes et de notes sous le titre de :
Annales Regum Mauritanie , ab Abul-Hasan-
Ali-ben-Abd- Allah Ibn-abi-Zer' Fesano, vel,
utalii malunt, Âbu-Muhammed-Salih Ion
Abd-el-Halim Grenatensi. Fr. Pétisde la Croix
en avait fait une traduction française, qui est
restée manuscrite , et qui se trouve à la Biblio-
thèque impériale de Paris et àUpsal. Le Carthas
Kebir (Grand Carthas ) n'est point connu en Eu-
rope, à moins que ce ne soit l'ouvrage traduit
par Moura, Tornberg et Pétis, lequel est en effet
plus détaillé que celui de Dombay. Ë. B.
Hadjl Khalfefa, Lex. Bibliog., n<> i458.-Slivestrè de Sacy,
Notices dans Magasin Encyclopédique, «• année, t. Il,
p. 49, 174, 880, 514 ; t. V, p. 58, et dans Journal des Sav.,
1883, p. 658-660. — Tornberg , dans Nova acta regise so-
cietatis scientiarum Ûpsaliensis, t. XI, 1889, ln-<°. -
E. Quatremère, Not. dans Journ. des Sav., 1847, p. 474-485.
ibn-al-atsir (Le schéikh Izz ed-Din
Abou'l-Hassan Ali-bm-Mohammed-al-Djeze-
ri),|le meilleur des historiens arabes, né à Djezi-
reh-beni-Omar, le 4 djoumada premier, 555de l'h.
(mai 1160 de J.-C.),mortàMossoul en 630(1233).
Après avoir fait ses études à Mossoul, à Jérusalem
et à Damas, il combattit contre les chrétiens dans
l'armée de Saladin, et fut chargé, par les princes
de Mossoul, de diverses missions diplomatiques,
spécialement auprès des khalifes de Baghdad. Sa
maison était le lieu de réunion des hommes les plus
distingués qui habitaient ou visitaient Mossoul.
Il comptait Ibn : Kballikan au nombre de ses amis.
Il était non moins versé dans l'histoire religieuse
que dans l'histoire profane. On a de lui : KamU»
781
IBN-AL-ATSIR — IBN-ALATYR
735
at-tewarikh (Chronique complète), en 12 vol.,
dont les deux derniers ont été édités sons le
titre de Ibn-étrAthéri Chronicon, t XI (an-
nées 527-683); TJpsal, 18&l,in-8°; t XII (584-
628), ib., 1853, in-s°, par Tornberg, qui a éga-
lement traduit en suédois le t. Xi : Ibn */•
Athir>& Chrœnika; Lund, 1*51-1858, 2* partie,
in-8°. On trouve aussi des extraits de cet ou*
vrage traduits dans Bibliographie des Croi-
sades de Michaud, t. II, p. 390-547; dans Re-
cueil des Historiens des Croisades f publié par
l'Académie des Inscriptions, 1 1, qui est sou»
presse ; enfin à la suite de Histoire de V Afrique
sous la dynastie alghlabide par Ibn Khal-
doun 9 traduite par M. Noël Desvergers; Paris,
1841, in-8°.L'auteur commence par un discours
sur la dignité de l'histoire, et, après avoir ex*
posé les ères des divers peuples, il rapporte en
abrégé l'histoire des Juifs, des Perses, des an-
ciens Arabes, des Romains et du christianisme
primitif. A partir de Mahomet, il donne, année
par année, un récit détaillé de tout ce qui s'est
passé de remarquable dans le monde musulman
et de courtes notices des principaux personnages
qui y sont morts jusqu'en 628 ( 1230), n'inter-
rompant l'ordre chronologique que pour indiquer
les causes et les conséquences des grands événe-
ments. Quoiqu'il manque souvent de critique et
se contente parfois de copier servilement ses
prédécesseurs, et particulièrement Thabari, on
peut le considérer comme le pins excellent des
chroniqueurs musulmans on chrétiens du moyen
âge; — Histoire des Atabeks de Syrie, publiée
sous le titre de AbulhasanAli-Aaeddin, Ges-
chichte der Atabekiden in Syrien , Hildburg-
hausen, 1793, in-4°, et analysée par de Gui-
gnes , dans le U I" des Notices et Extraits des
Manuscrits de la Bibliothèque du Roi. Cette
histoire est moins détaillée que la partie corres-
pondante du Kamil-at-Tewarikh;-- Kitab-al*
Lobab (Livre de ce qu'il y a de plus pur, rela-
tif à la vérification des origines ), abrégé en
3 vol. des Généalogies de Seroani, qui en conte-
naient tl. Wûstenfeld en a édité une partie:
Spécimen el-Lobabi 9 sive Genealogiarum, quas
conscriptas ab Abu Sad Samanense, abbre*
viavit et emendavit Ibn el-Athir ; Goettingue,
1835, in -4°. Soyouthi fit un abrégé du Lobab,
qui a été édité par P. J» Vtth; — Asad al-Gha-
bet, notices de 7,500 compagnons de Mahomet,
dont Ibn-Hadjr a tait une nouvelle édition qui a
été publiée; - Kitab al-Djihad (Livre delà
Guerre sainte) , où il exhorte les musulmans à
faire la guerre anx ehrétiens. B. Beauvois.
Itm-KhallikaB, Biograph. DlctUm., t II, p. «S. -
Hadtt-Kbatrih, Le*. BiMogr., t I, n« «*7, totti, «Ba-
il, «SI, t»". 3919; IV, 8071; V, 97U, IQOtft. - Kœbicr,
Repertortom fur MbliscHe Hier., t. II, p. 8t, - Amarl,
Storia 4ei <Mvtulmoni ai Sicilla, t. I, Florence, 1M*,
in-ft», pr«f., p. m. - De Hsmaer, Uteraturçmk MU ê
der Jraber, t. VIT, p. 710.
ffBN-ALATTR ( Bit ed-Din-AH ) , écrivain
arabe fort distingué, de la fin du douzième siècle
et du commencement du treizième de notre ère.
Ibn-Alatyr naquit dans la ville de'Djéziré, sur
les bords du Tigre, l'an 1160 de J.-C.; il était
fils d'un émir attaché successivement an ser-
vice de Zenghi, prince de Moussoul et'd'Alep,
et de celui des fils de Zenghi qui hérita de b
principauté de Moussoul. Jeune encore, il alla se
fixer dans cette dernière cité. On était alors an
plus fort des guerres des croisades , au moment
delà lutte engagée entre le grand Saladin et les
colonies chrétiennes de Syrie. Saladin eut l'art
de faire de sa cause particulière l'affaire de la
religion musulmane; et bientôt cette guerre reli-
gieuse entraîna dans sa querelle tops les princes
mahométans de Syrie et de Mésopotamie. Ihn-
Alatyr prit, avec les troupes de Monssonl, une
part active à cette guerre , et partagea les périls
et les succès de l'islamisme. Il nous apprend
lui-même qu'il fut témoin des victoires de Sala-
din et des événements qui, à partir de Tannée
1182, remirent la plus grande partie des colo-
nies chrétiennes sous les lois de l'Akoran. Un de
ses frères servit la même cause avec zèle, et,
plus tard , rat chargé de gouverner la principauté
de Damas sous le fils aîné de Saladin. Ibn-Alatyr
s'était toujours montré avide d'apprendre. Dans
ses voyages précédents et dans les diverses
fonctions qu'il eut à remplir, il n'avait négHgé
aucune occasion d'accroître la masse de ses con-
naissances; à son retour à Moussoul, il s'entoura
de livres , et fit de sa maison le rendez-vous des
curieux de la ville et des étrangers qui aimaient
à s'instruire. Il mourut en 1233, peu de temps
après la croisade de l'empereur Frédéric II.
Il existe deux ouvrages historiques dTJn-Alatyr
à la Bibliothèque impériale de Paris. Le premier
est une Histoire des Atabeks , maison des princes
qui, s'élevant vers les commencements des croi-
sades, s'emparèrent successivement de Moussoul,
d'Alep, de Damas, et qui, partagés m plu-
sieurs branches, se maintinrent avec pinson
moins d'éclat Jusqu'au treizième siècle; le se-
cond ouvrage est une histoire universelle, de-
puis la création do monde jusqu'à l'année 1231.
V Histoire des Atabeks renferme des détails
précieux sur l'origine et le développement de la
puissance de ces princes. On trouve une notice
de cet ouvrage, par de Guignes, dans le recueil
des Notices et Extraits des Manuscrits de
la Bibliothèque du Roi (t. I, p. 542-578); mais
cette notice n'est pas toujours exacte. Les Ata-
beks sont ainsi appelés de deux mots turcs qiri
signifient père, seigneur. Ils jouissaient de toute
la plénitude de l'autorité souveraine, et pourtant
fis se disaient les vassaux et les ministres' d'an
fantôme de prince de la maison des sultans
seldjouddes de Perse. Comme le père dlbn-
Alatyr occupait un emploi auprès de l'un des
Atabeks, le fils s'est étendu avec complaisance
sur tout ce qui pouvait augmenter la gloire de
cette maison; mais, arrivé à Tan 1173, lorsque
Saladin, qui avait , lui et sa famille , les plus
733
IBN-ALATYR — IBN-ALDJAUZ1
7Ô4
grandes obligations à la même maison, s'empara
sur elle de Damas et de toute la Syrie, il ne
peut contenir son indignation, et il déclare qu'il
n'aura pas la force de retracer des événements
aussi déplorables. Dès ce moment, l'ouvrage
n'est presque plus qu'une table chronologique, et
cesse d'offrir de l'intérêt Du reste , Y Histoire
des Atabeks parait avoir été le début de l'auteur.
Les laits ne sont pas toujours bien classés. Des
lacunes considérables interrompent la liaison
des événements. Quelquefois le récit se borne à
des phrases emphatiques et a de grands mots
vides de sans.
A l'égard de l'Histoire générale, c'est le récit,
année par année et sous forme de chronique, de
tout ce que la muse de l'histoire avait conservé
de notable chez les musulmans; c'est peut-être
en son genre l'ouvrage le plus remarquable
qu'ait produit la littérature arabe. L'auteur a
intitulé son livre Chronique complète ( Kamel-
altévaryhh). On y trouve non-seulement les
événements de quelque importance, mais les
détails qui servent à les mettre sous un plus
grand jour; on voit, en le lisant, que l'auteur a
recueilli les notions historiques éparses dans
une foule de chroniques, qu'il a lu les mémoires
particuliers, et qu'il a eu communication des
correspondances politiques de Saladin et des
autres souverains de la même époque. If aile
part peut-être on ne trouverait un tableau plus
exact et plus complet des événements qui signa-
lèrent l'élévation de la dynastie des sulthans
Seldjoucides de Perse, et qui en amenèrent plus
tard la ruine. Cet esprit de recherches, cet
amour de la vérité, ont acquis à Ibn-Alatyr la
plus grande réputation en Orient. Les écrivains
arabes sont unanimes dans l'éloge qu'ils font de
son érudition; et Aboul-Féda (voy. ce nom)
n'a pas craint d'avouer qu'il lui avait emprunté
la meilleure partie de son récit.
Jusqu'à ces dernières années, la France ne
possédait que quelques volumes dépareillés de
cette Histoire générale; maintenant l'on en
trouve un exemplaire complet à la Biblio-
thèque impériale. L'auteur de cet article , qui ,
en 1829, avait publié en français de nombreux
fragments des deux ouvrages historiques dlbn-
Alatyr, à la suite de Y Histoire des Croisades
de Michaud , fait imprimer en ce moment des
fragments beaucoup plus étendus en arabe, en
français et avec notes , dans le Recueil des His-
toriens des Croisades que publie l'Académie des
Inscription* et Belles-Lettres. D'un autre côté,
M. le docteur Tornberg, professeur de langues
orientales à l'université de Lund, en Suède, a
commencé l'impression de la partie de l'ouvrage
qui se trouve à la bibliothèque d'Upsal. Il a
paru deux volumes du texte renfermant la der-
nière partie de l'ouvrage, c'est-à-dire Fes-
paee compris entre les années 527 et «28 de
l'hégire; Upsal, 1851 et 1853,in-8°. L'éditeur
s'est servi, pour plusieurs passages, des ma-
nuscrits de la Bibliothèque impériale de Paris.
Ibn«Alatyr est encore auteur de plusieurs ou
vrages (inédits) sur les généalogies des familles
arabes , les compagnons de Mahomet, etc.
Reinaud.
Dictionnaire Biographique d'Ibn-KbalikaD ( la Bio-
graphie particulière d' Ibn-Alatyr ). — Extrait» des his-
toriens arabes des guerres des croisades , par l'auteur
de «et article.
IRN-AL-DJAUZI ( Le schéikh Abou'l-Faradj
Abdarrahman-ben-Ali al-Koréischi at-Taïmi
aUBekri), jurisconsulte hanbalite et historien
arabe , né à Baghdad, en 608 de l'hégire ( 1 1 14 de
J.-C.) ou 510(1116), mort dans la même ville, le
12 ramadhan597 (1201). n faisait remonter son
origine au khalife Abou-Bekr, Il passait pour le
meilleur traditionniste et prédicateur de son siècle,
et était versé en théologie, en jurisprudence, en
histoire, en médecine, en hippiatrique. Parmi
ses ouvrages, qui sont au nombre de plus de
quatre-vingts, il suffit de citer : Akbar al-Bcr-
amïket (Histoire des Barmécides); — Àm-
mar al-Ayan (Vie des Personnages illustres qui
ont vécu plus de dix ans et moins de mille); —
Al-Dzeheb al-Mesbouh (Or liquéfié), biographie
des rois ; — Sehodzour-al-Ocoud fi tarikh al-
Okoud (Parcelles des Colliers, ou histoire des
siècles);— Al-we/aft fadhaïl al-Monthefa,
traitant de Mahomet et des autres prophètes;
— Al'Monletzem ft tarik al-Omam (Livre
bien disposé , relatif à l'histoire des peuples ) ;
chronique commençant à la création et se ter-
minant au règne du khalife Mostadhf ; — Zad
al-masirfi ilm al-tafsir (Provisions de Voyage,
sur la science de l'interprétation du Corao) en
4 vol.; — Telkihfohoum ahl al-atsret (Fruc-
tification de l'intelligence des Amateurs d'his-
toire), ouvrage sur le plan du Kitab al-Maarif
de Ibn-Côtéibah, contenant l'histoire de Ma-
homet, de ses compagnons et de leurs disciples.
Mohi ed-Din, fils d'Ibnal-Djauzi, s'éleva par son
éloquence au poste de grand-chambellan du
khalife, et fut tué, lors de la prise de Baghdad,
par Houlagou, en 658 (1260). £. B.
Ibn-KhalUkan, Biogr. Diction., X. II, p. 98. - Hadji-
Khalfah, Lexic. bibliogr., environ 100 art. - Zettschrift
derdeutsehen moiyehUend. Geêêlhchaft, t. VII, p. 67«-
Wi ; VI 11, 6BM56. — De Hammer, Ut.-Getch. ter Ara-
ber, t.VII,p.si9, 703.
ibn-al-djauzi - ( Schems ed-Vin AbouH
Motzaffer Yousouf ben-Couzoghli ou Kizo-
ghli, plus connu sous le nom de Sibth lbn-aî-
Djauzi [ petit-fils de Ibn-al-Djauzi J ou simple-
ment de ) , jurisconsulte hanefite et historien
arabe, né à Baghdad, en 582 de l'hégire M 186 de
J.-C), mort en dzou'l-hiddjeh 654 (janvier
1257). Sa mère était fille du précédent et son
père était mamlouk (esclave ) du vizir Aun ed-
Din Yahyaben-Hobéïrah, qui le fit instruire et
lui donna la liberté. Après avoir voyagé eu di-
verses contrées pour recueillir des traditions, il
enseigna et prêcha à Baghdad, puisa Damas. Sa
science et son éloquence lui méritèrent la faveur
des princes, et surtout de Melik Moatzem Isa.
735
IBN-ÀL-DJÀUZI — IBN-FÀREDH
736
Ses principaux ouvrages sont : Commentaire du
Coran, en 30 vol.; — Tedzkiret aUKhawassi,
histoire d'Ali et des onze autres imams , qui se
trouve à Leyde; — Meadin al-Ibriz ( Mines
d'Or de la tradition ) ; en 10 vol.; — Menakib
abi-Hanifah (Éloge d'abou-Hanifah); — Mirai
az-zeman fi tarikh al-ayan (Miroir du Temps,
ou histoire des hommes illustres); en 40 vol.
Dzehebi dit que Fauteur n'est pas toujours exact,
et qu'il favorise les Rafedhites (hérétiques), ce
qui ne l'a pas empêché de copier le Mirât az-
zeman. Cet ouvrage a été continué^ par Kothb
ed-Din Mousa ben-Mohammedal-Balbelrî, qui
mourut en 726 (1325). E. B.
Ibn-Khallikao, Biogr. Diction., 1 1, p. 499. — Abou'l-
• Jiahasen, dans Hist. des MamUmks dtÊgvpte, trad. par
Quatremère, 1. 1, p. 64. — Abon'1-Péda, Ann.\Mu4lemici„
t. IV, p. 666. - Ibn-Habib, dans Orientalia, t. Il, p. 171,
175,840. — HadJI-Khalfata, Lez. Biblioçr., 1. 1, n" 1896,
1816; II, 8168, 8t8S, 890». 8986 ; V, 10988, 11117, 11401, 11796,
19888, 11198; V, 18118, 14089. - De Hammer. Ltteratur-
geschichie der Araber, t. VII, p. 717.
ibn-bessam ( A bou'l- Hassan Alias-Schan-
tarini) , historien arabe, né à Santarem (Es*
pagne ), mort en 442 de l'hégire (1147 de J.-C).
Il était médecin, et fréquenta la cour de diffé-
rents princes. On a de Jui : Dzekhiret fi ma-
hassin Ahl-al-Djeziret (Trésor ou qualités des
habitants de la péninsule ), contenant des notices
des écrivains arabes d'Espagne et des extraits
de leurs œuvres. .C'est le plus ancien ouvrage
où il soit parlé du Cid. Le passage relajtif à ce
personnage célèbre a été édité et traduit dans
Recherche* sur V Histoire politique et litté-
raire de V Espagne pendant le moyen dge;
Leyde, 1849, in-8°, 1. 1, p. 330-362, par R. P. A.
Dozy, qui a aussi édité un long fragment du
Dzekhéret dans Scriptorum Arabum Loci de
Abbadidis; Leyde, 1846, in -4°, 1. 1, p. 220-381.
Ibn-Bessam écrivit sept autres ouvrages. Hadji-
Khalfah l'a confondu avec Bessami ou Ibn-Bes-
sam ( AbouH - Hassan -ait - ben - Mohammed ),
mort en 303 (914), poète satirique qui n'épar-
gnait ni les princes , ni les grands, ni même ses
proches. Le khalife Motadid essaya de se le rendre
favorable en le nommant directeur de la poste
aux chevaux et receveur général des douanes
dans les Awassim ( frontière de l'Asie Mineure ).
Bessami écrivit Ahhbar Omar -ben- Rebia (His-
toire de Omar-ben-Rebia) ; — Histoire de Dja-
far-at-Ahwas, ancien chef arabe ; — Monaki-
dat as-Schoarà (Contradictions des poètes);
— Des lettres ; — Makamat ( Séances ) au
nombre de trente. E. B.
Ibn.KhalIlkan, Bioçr. Diction., t. H. - Hadjl-Khalfàh,
Lex. Bibliogr., 1. 1, n°* 180, 109 ; III, 8764, 6799; V, 11704.
— Aboo'l-Féda, Ann, Musl, t. II, p. 817. - Dozy, De
Abbadidis, 1. 1, p. 198-119. - Makkari, The Hist. of the
Moh. Dynast. in Spain, 1. 1, p. 193, 370, 471 ; t. II, p. 164-
818. — De Hammer, JAteratnrgescMehte der Araber,
t. VII.
ibn-cotuibih (Abou-Mohammed Abdal-
lah-ben-Moslim-ad- Dineweri-al-Merwezi ),
historien et philologue arabe, né à Merw ou à
Baghdad, en 213 de l'hégire (829 de J.-C. ), mort
dans cette dernière ville en 270 (883) ou 296
( 905). Après avoir étudié sons les plus célèbres
maîtres, il enseigna les traditions à Baghdad et
se distingua par l'exactitude de ses renseigne-
ments. Il fut quelque temps cadhi à Dinawer,
et il écrivit sur la jurisprudence, la grammaire,
la mécanique, l'histoire naturelle, la météoro-
logie. Parmi les quarante ouvrages dont il
est auteur, il suffit de citer : Kitab al-Maarif
fi Tarikh ( Livre de Notices sur l'Histoire), con-
tenant l'histoire et les généalogies des Arabes,
jusqu'en 256 ( 870 ). Ce n'est qu'une sèche éna-
mération de dates et de faits pouf les vingt-
six dernières années. Cet ouvrage a été édité par
Sprenger, dans Bibliotheca Indica, Calcutta,
t. XI, et à la même époque par Wustenfeld, sous
le titre de Ibn-Coteibah's Handbuch der Gts-
chichte ; Gœttingue, 1850, in-4° ; — Oyoun al-
Akhbar (Sources de Renseignements ), divisées
dix chapitres et traitant de politique, de morale,
de science; — Thabacat as-Schoara (Classes
des Poètes ), dont J. de Hammer s'est servi pour
son Histoire de la Li ttérature Arabe ; — Edtb-
al-Katib (Instruction de l'Écrivain), traité d'or-
thographe, de synonymie, de grammaire, dont
Sprenger a traduit un fragment dans The Journal
ofthe Asiatic Society of Bengal f 1848, t XVII,
part. II, p. 659-681 ; — Ahadïts al-Itnamat
(Traditions sur le Principat j, dont Amari a édité
deux fragments dans Bibliotheca Arabo-Sicula;
Leipzig, 1855-56, p. 163, et dont P. de Gayangos
a traduit plusieurs extraits dans The Historg
ofthe Mohammedan Dynasties in Spain, de
Makkari, 1840, t. I, append., p. 50.
Ë. Beauvob.
Ibn-Khallikan, Bioçr aph. Diction., t. II. p. M. -
Abou'l-Mataasen. Menhel as-Safi. - Hadjl-Khalbh, La.
Biblioçr., t I, n" 854, 814. 888, 815 ; II, SSS8. 3447, MM,
4886; III, 47M, 61*9; IV, 7901, 8458} V, 9846, 9911, 10*71,
10834,10560,12096,11199.— Eicchorn , fiionumenta H m-
torix Arabum ; Gotha, 1775, ln-8° ; et Mines de rOrient,
t. Il, p. 889-874; III, p. 11-40; VI, 2*1-139. — Kœhkr,
Bepertoriumfûr biblische und morgenUend. Literatv,
t. I,p. 65-69. — Abou'I-Féda, Ann. Muslem^ édlt. Reiskf,
t. H, p, 883, 865, 88t. — Hamaker, Spécimen, p. 6. -De
Hammer, LtteraturgescMchte der Araber, t. IV, p. 4»,
454.
IBN-FAREDH OU 1BIÏ-AL-FÀRIDH (Schcrtf
ed-Din Abou-Hafs Omar ben- Ali) , célèbre
poëte mystique arabe , né au Caire, en 577 de
l'hégire (1181 de J.-C.), mort en 632 (1234).
Après avoir étudié sous Beha ed-Din Iba-Asakir,
il se consacra à la vie dévote, et se retira dans
la mosquée Al-Azhar, quoiqu'il eût pu brilla
dans le monde par ses talents et par les grâces
de sa personne. Le sultan d'Egypte al-Méfit
al-Kamil tenta de l'attirer à sa cour; il lui en-
voya mille pièces d'or et lui offrit la place de
cadhi al-codhat (-juge suprême) d'Egypte.
lbn-Faredh ne voulut rien accepter. Il était su>t
aux extases, et restait souvent plusieurs jour
sans prendre d'aliments et sans voir ni entendre
ce qui se passait autour de lui. C'est dans cet
état d'exaltation qu'il composa la plupart de ses
poésies. Ses disciples n'ont point manqué Je
737 IBN-FAREDH
lui attribuer le don des miracles. Quelques pieux
musulmans, scandalisée de la nudité des tableaux
qu'il offre aux yeux des lecteurs, ou choqués de
la crudité des expressions arec lesquelles il dé-
peint l'amour divin , le considèrent comme un
infidèle ou un hérétique. Ibn-Faredh n'en est pas
moins le plus grand poète arabe de la secte des
sofis. On peut le mettre au même rang que Férid
ed-Din Atthar, Djelal ed-Din Rouroi, Hafitz,
Djami. Ses principaux poèmes sont : Khamriyet
(Sur leVin ), trad. par de Hammer, dans le Mer-
cure de Wieland, et par Grangeret deLagrange,
dans Anthologie Grammaticale ; Paris , 1878,
in-8° (avec texte) ; — Le grand Taiyet (poème ri-
mant en T), en 760 distiq., édité avec luxe et trad.
par de Hammer, sous le titre de Bas arabische
Hohe Lied der Liebe, die Ibnol-Faridh's TaU
jet; Vienne, 1854, pet. in-4° ; — Le petit Taiyet ;
— le poème rimant en H, édité parG.-A. Wallin :
Carmen elegiacum Ibnu-l-Faridhi, cum corn-
mentario Abdu-l-Ghanii ; Helsingfors, 1850,
in-8°. Toutes ces pièces et d'autres moins con-
nues furent réunies en diwan (recueil) par les
soins d'Ali, petit-fils du poète, en 885 (1480).
Ce diwan contient 1,7.00 distiques. Il a été litho-
graphie à Damas en 1841, et imprimé sous le
titre de Diwan du Cheikh Orner Ibn el Fa-
ridh, accompagné du commentaire du cheikh
Hassan el-Bouriny, pour le sens littéral, et
de celui du cheikh Abd el-Ghany en Na-
blousy pour le sens mystique, édité par le
cheikh Rochaid ed-Dedah; Paris, 1855, gr.
in-8°. £. Beauvois.
AU, v-ie de son aTeu!, en tête du Diwan. — Abd al-
ghani Nabloust , Relut, de Foy.\ dans Sitzungsberichte
de l'Académie de Vienne, t. V, p. 817. - Hadji-Klialfah ,
Lex. Bibliogr., L II, n" 1784, «03*, 1033; IV, 9513; VI,
14448. — SUvestre de Sacy, Chrestomathie Arabe. —
Rousseau, Parnasse Oriental. — De Hammer, LUeratur-
geschichte der Araber, t. VII, p. 405-410, 916-918.
IBN-FERAT OU 1BN-AL- FORAT (Le SChéikh
Nasir ed-Din Mohammed ben-Abdarrahim-
Misri) historien arabe, né en Egypte, en 733 de
l'hégire ( 1333 de J.-C. ), mort en 807 ( 1404). Il
était jurisconsulte du rite de Abou-Hanifah. Il
écrivit une chronique (Tarikh) en 25 vol., ren-
fermant l'histoire des nations musulmanes du-
rant les huit premiers siècles de rhégire. La
Bibliothèque impériale de Vienne en possède
9 vol. (années 501 à 799= 1108 à 1397), qui
offrent de nombreuses lacunes. Cet ouvrage ayant
été apporté à Paris, à la suite de la conquête de
Vienne par Napoléon, Jourdain en traduisit tout
ce| qui a rapport aux Croisades. Des fragments
de ce* travail ont été insérés dans la Biblio-
graphie des Croisades de Michaud, t. II, p. 765-
8 1 . On en trouve aussi oes extraits dans lés Mé-
moires sur l'Egypte par Quatremère. Ibn-al-
Forat se contente souvent de transcrire tous les
écrivains qui ont parlé d'un même fait, sans
s'inquiéter de concilier leurs contradictions on
de les critiquer les uns par les autres. — Son fils
Izz ed-Din Abdarrahim ben-Mohammed Ibn al-
NOUV. BIOGR. GÉRER . — T. XXV.
IBN-HABIB
738
Forât Cahiri, né en 759 de l'hégire ( 1358 de
J.-C. ), mort en 861 (1447 ), était juge ; il écrivit
sur le droit hanéfite. £. B.
Abou'IMabasen, Manhel as sq/l.- Hadji-Khalfab, Lex.
Bibliogr., t. Il, 1104. — Jourdain, Lettre sur la Chron,
d'/bn-al-Forat ; dans Mines de f Orient, 1814, t. IV,
p. 808.
IBN-HABIB (AboU'Djafar Mohammed ben-
Djoléib al-Haschimi), généalogiste et philo-
logue arabe de Baghdad, mort à Samara, en 245
de l'hégire (859 de J.-C. ), ou, selon Ibn-abi-Ya-
coub al-Werrak, en 213 (828). Il eut pour maître
Ihnal-Asabi et Abou-Obéidah. Il est auteur de :
Ansab as-schoara (Généalogie des Poètes ) , le
premier ouvrage de ce genre qui ait été écrit en
arabe,; — Al-mokhtelif we al-motelif fi asma
al-cabaïl (Ressemblances et Dissemblances dans
les Noms des Tribus) contenant 600 généalogies.
Cet ouvrage a été revu par Makrizi et édité par
Ferd. Wùstenfeld, sous le titre de Muhammed
ben- Habib ûber die Oleichheit und Vers-
chiedenheit der arabischen Stœmmenamen ;
Gœttingue, 1850, gr. in«8°; — Histoire des
khalifes. Il fut l'un des premiers qui donnèrent
des histoires critiques. £. B.
Ibn-Kballikan, W e/ayat al- Ayan, édlt. Wùstenfeld,
n° 868. — HadJI-Khalfah , Lex. JiibUogr., t. I, n<" 1155,
1349; V, 11685.— Not. en tête de Ouvrages arabes, publiés
par R.-P.-A. Dozy. — De Hammer, LiteraturgeschiclUe
der Araber, t. III, p. 195; IV, p. 98, 447, 4SI.
ibii-habib ( Bedr ed-Din Hassan ben-
Omar) f historien arabe, né à Alep, en 709 de
Thégire (1309 de J.-C. ), mort dans la même
ville, le 21 rebi second 779 ( 15 juillet 1377 ). Il
voyagea en Syrie, en Egypte et en Arabie. Il fit des
vers sur la fameuse peste noire. On a de lui :
Maaniahlal-beyan min wefayàt al-ayan (Sens
des Hommes éloquents, tiré des vies des hommes
illustres ), notices de 237 littérateurs, avec des
spécimens de leurs œuvres poétiques et histo-
riques; — Histoire de la Révolte de VÉmir
Béibagharous ; — Biographie du Cadhi al-
Codhat Sobki (Taki ed-Din Abou'1-Hassan-Ali ) ;
— Akhbar ad-Dowel (Histoire des Dynasties),
abrégé en vers; — Dorret al-aslakfi dewlet
al-Atrak ( Perle des Colliers , concernant la dy-
nastie des Turcs), annales d'Egypte et de Syrie
et des pays voisins de l'empire mamelouk. Cette
chronique embrasse les années 648-776 (1250-
1375); elle a été continuée jusqu'en 802 (1399)
par le fils de l'auteur, Izz ed-Din Tzahir, qui
mourut en 808 (1405). S'étant astreints mal à
propos à écrire en prose cadencée et rimée , ces
deux historiens ont plus d'une fois sacrifié la
vérité aux exigences de la rime. Leurs phrases
boursouflées renferment beaucoup de mots, mais
peu de faits. Ils donnent de courtes notices des
principaux personnages qui sont décédés dans
le courant de chaque année. Meursinge et Wei-
jers ont publié dans Orientalia (Amsterdam,
t. II, 1846, p. 222-489) un extrait des principaux
feits politiques et des treize cent vingt et une
biographies contenues dans le Dorret.
E. Beauvois.
24
789
IBtf-HABIB — IBN-KHALDOUN
740
Abou'l-Malusio, Manjul as-Safi. — Ahmed Askalani,
Chron. - Hadjl-Kbalfah, Lex. Biblioçr., t. 1, n« 198 ; ni.
*»15; IV, 767», 8041, 8088; V, 1078*. 10888, 11718, 117*»;
VI, 10810, 1MII. — BifeoaeQutremére. Appeod. de
PHist. des Mamelouks par MakrtU, 1. 1, part. Il, p. 10*-
109. - OrieniaUa, recueil édité par Juynboll, T. Roorda,
Weljers, t. 11.
ibh-ha ucal ( Abou'l-Kassm Mohammed ),
voyageur arabe, écrivait vers 866 de l'hégire
( 076 de J.-C. ). Il quitta Baghdad pour faire le
commerce , en 331 (942), et parcourut dorant
vingt-huit ans la plupart deg contrées soumises
a l'islamisme, depuis l'océan Atlantique jusqu'à
1 Indus. Il rencontra Istakhri sur le bord de ce
fleuve. Les deux voyageurs se communiqué*
rent leurs notes et les corrigèrent réciproquement.
lbn-Haucal portait toujours avec lui les ouvrages
de Ibn-Khordadbeh, de Kodamet et de Moham-
med at-Djéïhani. C'était un bon observateur;
ayant recueilli de nombreuses données sor la
géographie physique et politique, l'histoire, le
commerce , les produits , les impôts, les distances
itinéraires, les mœurs des habitants des pays
musulmans, il composa Al-Mesalik we al-Me-
malik ( Les Routes et les Royaumes ). Il y ajouta
des cartes ; mais il négligea de mentionner la posi-
tion des lieux et de fixer l'orthographe des noms
propres. Diverses parties de cet ouvrage ont été
éditées ou traduites par Uylenbrock : Disser-
tatio de Ibn ffaucalo geographo , née non
Iracse Persicx descriptio; Leyde, 1822, in-4° ;
— par Fraehn dans De Cha&aris; Saint- Péters-
hourg, 1822, in-4°; — par Gildemeister, dans
Scriptorum Arabum de Rébus Indicis Loci et
Opuscula; Bonn, 1838, in-8°; — par Mac-
Guckin de Slane : Afrique, dans Journal Asia-
tique; 1842, 1. 1; — par Amari, dans Journal
Asiatique, 1845, 1. 1, et dans BibUotheca arabo-
Sicula; — par Sprenger, Sind, Sedjestan, Kho-
rassan , dans Journal de la Société Asiatique
de Bengale, 1852, 1853 (texte, traduction et
carte ). Ouseley publia, sous ' le titre de The
Oriental Geography of Ibn-Haucal, Londres,
1800, in-4°, une version anglaise pen exacte de
la traduction persane abrégée du âfesalik.
E. Beautois.
Ujlenbrok, De ItmmHaukalo. — Sacy, trot, dam Ma-
gasin encyclopédique, année 7, t. VI, et dans Journal
dot Savants, 1813. — Relnaud , Mém. fiist. et géograph.
sur rinde, 1849, in-*", et Introduct. à la Géographie
d'jébau'l-Féda, p. 81-87, M8.
lBN-HATAJf (L'imam Abau-Merwan Hauan
ben-Khalef), historien arabe, né à Cordoue, en
377 de l'hégire ( 987 de J.-C. ), mort le 27 rebi
premier 469 (octobre 1076). Il savait les langues •
torque et abyssinienne , et il écrivit plus de cin-
quante traités et commentaires philologiques 014
théologiques, et trois ouvrages historiques, sa-
voir : Kitab al-Moktebis fi tarikh al-Anda-
lous ( Livre de celui qui désire des Renseigne-
ments sur l'Histoire d'Espagne), traitant des
temps anciens , en dix volumes, dont il ne reste
plus que le troisième, qui se trouve à Oxford ; —
Kitab al-Mobin (Livre qui rend évident), en
60 vol., ren/ermant le récit des événements con-
| temporains. Jl.-P.-A. Poiy, qui appelle cet ou-
vrage Kitab (il-tfatin, en a édité et traduit des
fragments qui nous ont été conservés par Ibn-Bes-
ssm, dans Scriptorum Arabum Loci de Abba-
4idis, t. I; ~ Tarikh Foçaha Corthobah
( Histoire des Jurisconsultes. (Je Cordoue ). L'au-
teur se, distingua non moins par sa critique et
son exactitude que par ses talents littéraires.
E. B.
Ibp-KhaUlkan, mogr. JH<*.« % h p. H. — Maktari, The
Uist. qf the Ma+ammedan Dynasties in Spaim, L 1.
p. 183, 187, 810, 46*, 764. - Uadjf-Kbalfab, Lex. Bibiiogr^
t V, n* HUI; VI, 11780. - Dozy, De AbbadMUs, t. I,
p. 117418. - De BM»«M», Wer.Ctseh. der Araber,
L VI, p. 578.
IBV-fcBALBOUlC (Valy-$d-Din Abcu-Zéyd
Abd-Alratma* ), écrivain arabe de la fin do
quatorzième siècle de notre ère, et dont le non
a acquis depuis quelques années une grande cé-
lébrité en Europe. Ibn-Khaldoun était issu d'une
des nombreuses familles arabes qui, peu d'an-
nées après la mort de Mahomet, quittèrent leur
patrie pour se répandre en Afrique et en Es-
pagne. On lui donne les surnoms de tfatf Arany,
c'est-à-dire originaire de la province d'Arabie
appelée Hadramaouth , et de Ascbhyly, ou origi-
naire de géville. Il naquit à Tunis, l'an 1332 de
J.-C, et étudia dflns sa patrie, auprès de son
père et des hommes les plus habiles 4e la con-
trée, l'Alcpran, les traditions du prophète, la
grammaire, la poésie et la jurisprudence, il fit
ensuite un voyage en Espagne , et séjourna pen-
dant quelques années à Grenade , ville qni jetait
alors le plus grand éclat. Il composa pour le roi
de Grenade, Abpul-hedjaoj-Joussoqf, un traité
de logique. H rédigea également un traité de re-
ligion musulmane , dont la copie autographe se
trouve aujourd'hui à la bibliothèque de l'Escu-
rial. De plus , il donna cours à son goût pour la j
poésie, et composa un grand nombre devers.
De retour dans sa patrie, jl s'attacha au service
de son souverain,. L'emploi d'Itui-Kbaldoun cou-
sistait à écrire en gros caractères , sur les actes '
du gouvernement, la devise du prince, qui se I
composait de ces mots : Lowwg* à Dieu , et \
actions, de grâces à Dieu. i
Au milieu des troubles qui désolaient l'Afrique,
IbnrKhaldoun passa au service du souverain de
Fea. Enfin» l'an 1382, il quitta pour toujours
les région* occidentales, et, après avoir fait le
pèlerinage de La Mecque, il établit sa résidence
au Caire, ou il se livra à l'enseignement dans
divers collèges. Au bout de deux ans, on k
nomma cfref de* cadis d'Egypte pour les mu-
sulmans de la secte de Malefe. Son intégrité dans
l'exercice de ses fonctions Un flt des ennemis
auprès des hommes puissants j d'un autre côte,
son mérite incontestable forçait de recourir à lui*
Il fut plusieurs fois déposé, et toujours réintègre
dans ses fonctions.
Cependant le fameux Timour avait fini «le
subjuguer les contrées situées aux environs de
l'Oxus, ainsi que la Perse et la Mésopotamie, il
741
IBN-KHALDOUN
742
&e disposait a envahir la Syrie, l'Asie Mineure et
l'Egypte même. Le sultan d'Egypte et de Syrie
s'étaot rend a dans cette dernière contrée pour
repousser les efforts du conquérant tatare, ïbn-
Khaldoqn accompagna son souverain. Quand
Tiroour se fut rendu maître de Damas, Ibn-Khal-
doun se fit présenter à lui, et lui plut beau-
coup par l'agrément de sa conversation. Après
le départ de Timour, il retourna lui-même au
Caire (1400). Si on en croit l'historien arabe
Ibn-Arab-Chah, Ibn-Khaldoun, qui avait fait as*
ses bassement sa cour au conquérant et n'avait
rien négligé pour se le rendre favorable, avait
obtenu de lui la permission d'aller chercher sa
famille et ses livres an Caire, et de venir le re-
trouver. Quoi qu'il en soit, à son retour an Caire,
il rat de-nouveau investi des fonctions de grand-
cadi des Malékites, et mourut en 1406, âgé
d'environ soixantcquatorze ans.
Le principal ouvrage d Ibn-Khaldoun, et celui
qui parait destiné à lui assurer une réputation
durable, porte le titre de Kitab alibar oua
divan almobtada oua alkhabar, etc., c'est
à-dire Livre des Exemples instructifs et Re-
cueil du Sujet et de T Attribut, concernant
V Histoire de» Arabes , des Persans, des Ber-
bers et des Nations qui ent habité avec eux
sur la terre. Dans ce titre, les mots Recueil du
Sujet et de l'Attribut renferment un de ces
jeux de meta qui sent si familiers aux Orien-
taux. On peut y voir une allusion grammaticale ;
et e'est comme si l'auteur avait dit que son
ouvrage est complet, et quûj de même qu'une
proposition grammaticale est parfaite quand
elle réunit un inchoatif ou sujet à un énonciatif
ou attribut, de même cet ouvrage dispense de
recourir à tout autre. Il est encore possible que
l'auteur ait voulu dire que l'ouvrage contenait
l'histoire des origines des nations et celle des
événements qui en ont signalé l'existence dans la
suite des siècles.
L'ouvrage d'fbn-Khaldoun se compose de
trois ou plutôt de quatre parties bien distinctes.
La première, qui souvent est considérée comme
un traité à part et que l'on rencontre plus faci-
lement, porte communément le titre de Mocad-
dama, c'est-à-dire Prolégomènes. La seconde
est un tableau du monde ancien, particulière-
ment des Arabes , depuis la création du monde
jusqu'à l'apparition de Mahomet. La troisième
est une histoire de rétablissement des Arabes
en Afrique et en Espagne, et un tableau des
tribus berbères depuis les plus anciens temps
jusqu'au quatorzième siècle. Enfin, la quatrième
partie est le tableau des nombreuses dynasties
musulmanes répandues dans les diverses par-
ties du monde, notamment dans l'Egypte et
l'Asie.
L.a première partie, c'est-à-dire les Prolégo-
mènes, ne se trouve dans les bibliothèques
chrétiennes d'Europe que depuis le commence-
ment de ce siècle ; les autres parties ne nous
sont connues que depuis ces dernières années.
L'attention se portant de toutes parts sur cette
riche mine de renseignements, nous croyons
devoir fttir* connaître l'ouvrage avec quelques
détails. '
Le Motadd&ma est précédé d'une espèce
de préface, consistant dans quelques considéra-
tions générales sur l'utilité de l'histoire et sur
la manière de l'écrite. L'auteur indique les di-
verses sources des erreurs dans lesquelles tom-
bent ceux qui se vouent à ce genre de travail.
Le traité eommenoe ensuite par des observa-
tions générales sur le genre de société qui est
naturel à l'homme. A ces observations succè-
dent une description sueelncte dn globe et des
réflexions sur l'influence physique et morale du
climat et de la diète sur l'espèce humaine.
Cette première section se termine par un long
chapitre sur les diverses manières de connaître
les choses secrètes on futures, sur les révéla-
tions, les visions, les songes, les sorts, etc.
Dans la deuxième et la troisième section, l'auteur
examine la vie nomade, particulièrement chez les
Arabes bédouins, dans ses rapports avec la civi-
lisation de la société en général ; 11 y est parlé du
passage de la société de la famille à la formation
des tribus et à l'établissement d'un gouverne-
ment fédératif. On y voit aussi que l'esprit de
conquête est inhérent à cette situation poli-
tique. L'auteur parcourt ensuite les différentes
parties de l'administration , la cour, la justice ,
la religion, les finances, la guerre, le com-
merce, etc. Puis il traite des vices qui s'intro-
duisent à la longue dans cette forme de gouver-
nement, des remèdes qu'on y peut apporter et
de la ruine qui est la fin de toutes choses. La
quatrième section est consacrée à l'état de la ci-
vilisation et de la société en général chez les
hommes réunis dans les villes. Là prospèrent le
luxe et les arts ; là de grandes richesses se ras-
semblent. Cet état est le dernier degré dans
l'ordre de la civilisation \ il est suivi de la déca-
dence et de la ruina des empires. Dans la cin-
quième section, l'auteur s'occupe du travail con-
sidéré comme moyen pour l'homme de pourvoira
sa subsistance, des diverses professions libérales
ou mécaniques, telles que la culture des sciences,
les fonctions de la religion, de la magistrature,
de l'administration, le commerce, l 'architecture,
le métier de copiste, la médecine, la musique, etc.
Enfin , dans la sixième section , qui forme plus
du tiers du traité, Ibn-Khaldoun parcourt le do-
maine de la science et ses division» ; il en présente
lt système et b distribution.
Tel est l'ensemble des prolégomènes d 'Ibn-
Khaldoun. L'auteur n a pas toujours su s'affran-
chir des préjugés de son siècle et de sa nation.
La manière dont il parle de l'astrologie et des
divers genres de divination prouve qu'il n'était
pas éloigné de croire à la réalité de ces chi-
mères. Les chapitres dont l'ouvrage se compose
sont entremêlés d'une multitude de faits curieux
24.
743
IBN-KHÀLDOUN
744
et d'exemples pris chez les Arabes, les Persans,
les Berbers, et chez les autres nations an-
ciennes et modernes. Mais on voit que l'auteur
n'avait pas assez mûri son travail ; en quelques
endroits il attribue à une époque ou à un pays
ce qui appartient à un autre pays ou à une autre
époque. D'autres fois, il se laisse entraîner par
une idée exclusive; et il met sur le compte
d'une seule cause ce qui a été le résultat du
concours de plusieurs causes différentes. Une
autre circonstance qui, même en Orient, a
beaucoup nui au succès de l'ouvrage, c'est le
style dans lequel il est écrit : ce style, comme
celui de tous les écrits dlbn-Khaldoun que
nous connaissons, est à la fois concis et diffus.
L'auteur reproduit quelquefois la même idée
sous plusieurs formes différentes; en même
temps , il oublie les* liaisons les plus indispen-
sables. Il affecte les mots nouveaux ou des
mots détournés de leur signification ordinaire.
Enfin, certaines considérations manquent des
développements convenables. Néanmoins, ce
traité, quand il parut pour la première fois, pro-
duisit la plus grande sensation. Voici le jugement
qu'en porte le célèbre Makrizi, qui avait été l'é-
lève d'Ibn-Khaldoun : « Jamais ouvrage pareil
ne fut fait, et jamais Ton n'en fera de semblable.
C'est la crème du savoir, le fruit d'un sain ju-
gement, le produit d'une intelligence qui a pé-
nétré dans l'essence des choses et qui a saisi le
véritable caractère des événements. » Il existe
une traduction de l'ouvrage en turc. L'auteur
de cette traduction est Mohammed Pirizadé,
qui vivait à Constantinople il y a un peu plus
d'un siècle, sous le règne du sultan Ahmed III.,
Voulant faire disparaître, autant. qu'il était en
lui, les difficultés qui l'arrêtaient dans la lecture
de l'ouvrage, il s'attacha à employer un style
naturel et facile ; il rétablit les liaisons qui man-
quaient dans l'original; il suppléa même aux
développements dont certaines considérations
avaient besoin. Le livre , dans l'état où l'a mis
le traducteur, est regardé par les Turcs comme
le manuel le plus propre à former des hommes
d'État. D'un autre côté, c'est à la version origi-
nale que Hadji-Khalfah a emprunté les tableaux
qui, dans son Dictionnaire Bibliographique
arabe, persan et turc, précèdent chaque science.
La sensation que ce traité a faite à son ap-
parition dans l'Europe chrétienne a été presque
générale. On était habitué à voir dans les
récits des Orientaux des faits dépouillés des
circonstances qui les avaient amena ou qui les
avaient suivis ; ou bien c'était souvent une suite
de phrases dépourvues de sens. On rencontrait
enfin un esprit qui avait médité sur la nature
des choses, et qui, sans 'résoudre toutes les
questions de la manière la plus convenable, avait
le mérite de les soulever. Jusqu'à présent,
les Prologomènes d'Ibn-Khaldoun nous étaient
surtout connus par les fragments que l'illustre
Silvestre de Sacy avait insérés dans sa Chresto-
mathie Arabe et dans les notes qui accompa-
gnent sa traduction d'Abd-AUatif. Le texte entier
vient de paraître, par les soins de M. £. Qua-
tremère, dans les tomes XVI e , XVIT et
XVIII e du recueil des Notices et Extraits des
Manuscrits de la Bibliothèque impériale;
d'un autre côté, M. de Slane est chargé par l'Aca-
démie des Inscriptions d'en préparer une tra-
duction française.
Nous avons dit que la deuxième partie do
grand ouvrage d'tbbn-Khaldoun était une es-
pèce d'histoire universelle depuis la création do
monde jusqu'à l'apparition de Mahomet. L'au-
teur ne s'est pas borné, comme la plupart des
écrivains de sa nation, à recueillir les traditions
qui avaient cours de son temps : il a soumis
ces traditions à une critique sévère, et il a sou-
vent mis en lumière des résultats aussi cer-
tains qu'intéressants. Cette partie est surtout
utile pour l'histoire des anciens Arabes, histoire
si importante et connue jusqu'ici d'une manière
si imparfaite.
Feu M. l'abbé Arri , membre de l'Académie de
Turin , avait commencé , sous les auspices do
roi de Sardaigne, l'impression du texte de cette
deuxième partie, accompagnée d'une version
italienne et de notes. Il serait à désirer que ce
travail fût repris par un homme suffisamment
préparé.
La troisième partie, consacrée aux tribus in-
digènes de l'Afrique et aux Arabes établis en
Afrique et en Espagne , est à elle seule aussi
considérable que les deux premières : elle forme
deux gros volumes in-4°. Les Arabes, lorsqu'ils
envahirent l'Afrique, dans la dernière moitié du
septième siècle de notre ère, soumirent, après
quelque résistance, les tribus berbères, la plu-
part nomades 1 , qui occupaient la chaîne de l'A-
tlas depuis l'océan Atlantique jusqu'aux fron-
tières de l'Egypte. Ces tribus, quoique parlant
en général un langage particulier, et bien qu'ayant
conservé pendant plusieurs siècles leurs croyan-
ces et leurs pratiques religieuses , s* enrôlèrent
de bonne heure dans les armées musulmanes,
et contribuèrent puissamment à la conquête de
de l'Espagne, du midi de la France et de l'I-
talie. Plus tard, il se forma des dynasties ber-
bères en Afrique et en Espagne. Il était donc
du plus haut intérêt pour nous de connaître l'o-
rigine de ces tribus, leurs rapports entre elles,
les guerres qu'elles soutinrent sur leur propre
territoire et sur le territoire étranger. Ces détails
étaient même indispensables pour connaître
l'histoire des peuplades arabes avec lesquelles
les Berbères se trouvaient souvent mêlés. Mal*
heureusement, lorsque Ibn-Khaldoun vint au
monde, les traditions étaient en partie effacées,
et il n'était plus au pouvoir de personne de re-
nouer de tous points la chaîne des temps. Les
écrivains grecs et romains n'ont jamais eo
qu'une idée vague de l'origine respective des po-
pulations indigènes de l'Afrique. Ils rappor-
745
IBN-KHÀLDOUN
746
lent les noms d'un certain nombre de tribus ;
mais ces noms sont souvent altérés, et, comme
la plupart des noms véritables oot changé dans
l'intervalle, il était devenu bien difficile d'établir
une concordance. De leur côté , les indigènes
n'ont pas eu d'historien, et ils sont hors d'état
de suppléer à ce qui nous manque. Les Arabes
seuls auraient pu nous fixer à cet égard ; mais
pendant longtemps les Arabes songèrent plutôt
à bien faire qu'à bien dire; et, pour cette époque
d'enthousiasme et de gloire, les annales arabes
elles-mêmes sont très-incomplètes. Les Berbères
commencèrent à recueillir des documents sur
leur origine, à partir du dixième siècle de
notre ère, précisément à l'instant où les Arabes
songèrent à arracher à l'oubli leurs propres
exploits; mais, dès cette époque, les souvenirs
étaient très-affaiblis ; et différentes eau ses agirent
fatalement sur la direction à donner aux re-
cherches. Déjà, au dixième siècle, si certaines
tribus avaient grandi en puissance et en gloire,
il y en avait qui étaient déchues; pour celles-
ci, la situation était d'autant plus pénible, que,
d'une part, elles étaient traitées sans ménage*
ment par le gouvernement, et que, de l'autre,
chose qui leur était peut-être encore plus sen-
sible , elles avaient à subir les sarcasmes des
tribus voisines. Il arriva de là ce qui arrive tou-
jours quand une autorité supérieure n'est pas là
pour maintenir le bon ordre : c'est que les tri-
bus cherchèrent à se relever au détriment les
unes des autres. On vit alors apparaître les pré-
tentions les plus étranges. Il eut été naturel que
les populations qui avaient résisté avec le plus
de succès aux armes des Carthaginois et des
Romains fissent valoir leurs anciens exploits ;
mais le souvenir de ces exploits était perdu.
On se tourna donc du côté des Arabes, qui
étaient devenus les maîtres du pays et qui
lui avaient imposé leur religion et une partie
de leurs idées. Certains généalogistes, qui vou-
laient rendre hommage à la nouvelle religion,
imaginèrent de rattacher leur tribu aux propres
ancêtres du prophète des Arabes. Abjurant les
idées bibliques qui de bonne heure avaient pé-
nétré parmi les indigènes et qui faisaient re-
monter la nation berbère à Cham, fils de Noé,
et afin de s'affranchir de tout lien avec un mal-
heureux qui avait encouru (a malédiction de son
père, ils adoptèrent pour origine, Sera, fils aîné
de Noé ; ils rangèrent au nombre de leurs aïeux
Abraham et son fils Ismael, et se présentèrent
hardiment comme les cousins du plus illustre
des rejetons d'Ismael, Mahomet. D'autres gé-
néalogistes, qui visaient surtout à la gloire pro-
fane, cherchèrent des ancêtres parmi certains
rois fabuleux de l'Arabie Heureuse. H faut sa-
voir que les Arabes, qui pendant longtemps
eurent peu de souci des héros qui, dans les pre-
miers siècles de l'islamisme, avaient porté si haut
le nom de leur race, se sont montrés fiers des
prétendus exploits des rois du Yémen, qui, plu-
sieurs siècles avant l'hégire, auraient soumis
tout l'ancien monde à leurs lois, sans excepter
l'intérieur de l'Afrique. D'après de nombreux
auteurs, ce fut un de ces rois, nommé Ifricus
ou plutôt Africu8 , lequel , d'après leur propre
récit, aurait vécu quelques années seulement
avant l'ère chrétienne, qui, après avoir subju-
gué l'Afrique, y laissa des colonies consi-
dérables et lui imposa son nom. A toutes les
causes d'embarras, il faut ajouter ce mélange
d'émigrés venus de tous les points de l'horizon,
les Phéniciens, les Égyptiens, les Grecs, les Ro-
mains, les Vandales, ainsi que les Nègres qui, de
tous temps, ont afflué de l'intérieur sur les côtes.
Ces divers points de vue sont discutés dans un
mémoire auquel travaille Fauteur de cet article,
et qui est intitulé : Mémoire sur les Populations
de V Afrique septentrionale, leur Langage,
leurs Croyances, et leur État Social aux dif-
férentes époques de Vhistoire.
La partie de l'ouvrage dlbn-Khaldoun qui
est consacrée spécialement à la nation berbère
renferme le résumé des opinions qui ont été
émises à cet égard, et supplée pour nous aux
traités originaux qui ne sont point parvenus en
Europe. L'auteur a écrit un peu vite et quelque-
fois de mémoire ; ses aperçus manquent, dans
certains endroits , de netteté , et les noms pro-
pres ne sont pas toujours marqués exactement ;
mais, en rapprochant les différents passages qui
se rapportent aux mêmes matières, et en recou-
rant discrètement à une source où Ibn-Khal-
doun n'était pas en état de puiser, les écrits des
Grecs et des Romains, on arrivera probablement
à rétablir la vérité.
Quoi qu'il en soit, V Histoire des Berbères d'Ibn-
Khaldoun ne pouvait manquer d'attirer l'atten-
tion du gouvernement français. Avec l'établisse-
ment des Français en Algérie sont survenues des
relations de chaque jour, des rapports d'amitié
et de guerre entre eux. et les tribus qui occu-
pent l'intérieur des terres. M. de Slane a publié
en 1847 et 1851, sous les auspices du ministère
de la guerre, le texte arabe de cette histoire;
Alger, deux volumes in-4°. Quelques années
après, il a paru une traduction française du texte,
par le même savant, 1852-1856, quatre volumes
in-8°. La quatrième et dernière partie traite des
dynasties musulmanes de l'Egypte et de l'Asie.
Cette portion forme aussi 'deux vol. in-4°. Pour
cette section, à en juger par les chapitres que
nous avons lus, l'auteur donne un extrait des
meilleures chroniques qui existaient de son
temps, notamment de celle d'Ibn-Alatyr ( voy.
ce nom. On peut juger de cette partie par les
deux chapitres que M. Noël des Vergers en a
publiés, sous le titre de : Histoire de l'Afri-
que sous la dynastie des Aghlabites , et de la
Sicile sous la domination musulmane; texte
arabe, accompagné d'une traduction française et
dénotes; Paris, 1841, m-8°. Voyez aussi les
passages relatifs aux guerres des croisades, que
747
IBN-KHALDOUN - IBN-KHALLIKAN
748
M* Toraberg a publiés dans le tome Xll des
Mémoires de V Académie d'Upsai, texte arabe,
traduction latine et notes*
flous avons dit que le grand ouvrage d'Ibn-
Khaldonn n'est connu de l'Europe savante que
depuis quelques années. Il s'en trouve des
exemplaires à Paris, à Leyde, en Angleterre,
ainsi qu'à Constantinople) mais ce sont de sim-
ples volumes dépareillés; aucune bibliothèque
accessible pour nous ne renferme d'exemplaire
écrit de la même main et dont tons les volumes
se suivent. Ainsi, il n'est pas sûr que nous pos-
sédions l'ouvrage tout entier. Un pareil recueil
devrait se trouver en Afrique» patrie de l'au-
teur ; et jusqu'à présent on n'y a rencontré que
des fragments. Il y a dans ee fait de la faute de
l'auteur : que n'employait-îl un style qui lui per-
mit d'être In par toute personne Instruite ? Il y a
aussi de la faute du pays et de l'état de déca-
dence où les habitants se trouvent. Un ouvrage
de cette étendue exige beaucoup de temps pour
être copié j par conséquent» un exemplaire, même
d'une exécution médiocre, coûterait un prix
élevé ; d'ailleurs, par les matières dont il traite,
il exige un lecteur exercé et instruit, et les es-
prits de cette trempe sont maintenant rares chex
les musulmans. On trouve chez eux des théolo-
giens et des juristes! parce que la jurisprudence
et la théologie donnent un rang dans le monde :
la pure littérature ne menant ordinairement à
rien, il n'existe plus ni élèves ni maîtres. Cette
situation déplorable rend pins sensibles les res-
sources dont l'Europe savante dispose en ce mo-
ment. Le temps n'est pas loin où l'on pourra
étudier à ses véritables sources l'histoire des
nations musulmanes, de ces nations que l'on
ne connaissait guère que par des chroniques
maigres et décharnées, et qui cependant ont
longtemps occupé avec gloire les plus belles con-
trées de la terre. Reihauo.
Autobiographie flbn-Khaldoun, traduite de l'arabe
en français, par M. de Slane, et publiée dans le Journal
Asiatique de tannée 16U. — Extrait du mémoire de
M. Reloaud cite dans l'article ( extrait qui a .été inséré
dans les Nouvelles Annales des Voyages du mois de
février 1M8).
IBN-EHALLUUN (Chems-ed-Din- Aboul-
Abbas-Ahmed) , écrivain arabe de la dernière
moitié du treizième siècle de notre ère , était issu
de l'illustre famille des Barmeky (Barmécides),
qui joua un si grand rôle sous les premiers kha-
lifes de Bagdad. Il reçut le surnom d'Ibn-Kha*-
likan à cause de son bisaïeul , qui était ainsi ap-
pelé. Il naquit à Arbèles, à l'orient du Tigre,
l'an 1211 de J.-C. La langue arabe, la littéra-
ture, l'histoire et la jurisprudence lui devinrent
de bonne heure familières ; il connaissait parfai-
tement l'histoire musulmane , réussissait très-
bien à faire des vers, et savait par coeur les
morceaux de poésie qui avaient le plus de cours
de son temps. Les hommes les plus habiles de
la Mésopotamie et de la Syrie , particulièrement
Boha-ed-Din, historien du grand Saladin, et Ihn
Alatyr (voy. ces noms) , qui avaient été lès amis
de son père, concoururent à son instruction.
Ibn-Khalllkan séjourna pendant quelque temps
en Syrie; puis il passa en Egypte, où il fut re-
vêtu des fonctions de substitut du grancf-cadi du
Caire. En 1261 , le sultan Bibars le nomma
grand-cadl de Damas. Ibn-Khallikan s'acquitta
de ses fonctions avec autant d'intégrité que de
talent. Destitué en 1270, il retourna en Egypte,
où il se chargea de professer dans un des collè-
ges du Caire. En 1277, le sultan lui confia de
nouveau le rôle de grartd-cadi de Damas. A son
approche , une partie des habitants s'avança à sa
rencontre, et tan grand nombre de poètes loi
adressèrent des vers de fêticitation. Il perdit de
nouveau cette charge en 1281 , et mourut
l'année suivante , dans on état peu éloigné de la
misère.
Ibn-Khallikan est l'auteur d'un assez grand
nombre d'ouvrages, sans compter une Histoire
générale, dont il n'eut pas le temps d'achever la
rédaction. Le principal des ouvrages dont on lui
est redevable est un Dictionnaire biographique
des Hommes Illustres de V Islamisme. Dans l'o-
rigine , ce dictionnaire devait traiter spécialement
de l'époque précise oh chacun de ces personnages
était mort : il devait servir de table alphabétique
à une foule de recueils arabes où Ton a enre-
gistré, année par année, le décès des princes,
des généraux , des magistrats , des docteurs 3 des
poètes, etc., accompagnée d'une notice! plus on
moins étendue. L'auteur avait naturellement com-
pris dans son plan les personnages dont la mort
était récente et qui s'étaient distingués d'une
manière quelconque. Il se contenta d'exclure les
compagnons de Mahomet et les khalifes , dont
l'instoire était suffisamment connue. De plus , la
nature de son plan lui interdit les hommes célè-
bres dont on ignorait l'année de la mort. L'ou-
vrage est intitulé : Vefayat alayan otta anba
abna al&eman , c'est-à-dire Les Décès des Per-
sonnages Éminents et les Histoires des Hom-
mes de ce Siècle. Ce rat en 1256 que Ibn-Kha!
likan, alors au Caire, commença à mettre en
ordre les matériaux qu'il avait rassemblés. I!
ne cessa pas de corriger et d'étendre l'ouvrage
dans le cours de ses voyages ; au moment de sa
mort, il renfermait environ 865 articles.
Ges articles, comme ceux de toutes espèces de
dictionnaires , ne sont pas également importants ;
tous ne sont pas rédigés avec le même soin.
Quelquefois l'article consiste en partie en discus-
sions sur le mois et le quantième du mois où un
événement s'est passé. La généalogie des per-
sonnages , sujet qui intéresse au plus haut point
les Arabes , n'a pas le même intérêt pour des
Européens. Les morceaux de vers qui accom-
pagnent la plupart des notices, et qui y jettent
une grande variété , sont souvent privés d'éclair-
cissements indispensables pour nous. D'ailleurs,
l'auteur partageait le mauvais goût qui a presque
749 IBN-KHALL1KAJS
toujours dominé en Orient; et quelquefois il cite
comme des pièces admirables des morceaux qui
n'ont d'autre mérite que leur singularité.
Ajoutez à cela que le récit se ressent plus d'une
Ibis du désordre occasionné pat des additions
faites après coup et à de longs intervalles les unes
des autres. Néanmoins, le DiotiohUaire d'Ibn-
Khallikah a toujours été considéré comme étant
d'une importance capitale. D'ailleurs, une partie
des défauts que rioUS reprochons à Ibn-Khallikan
n'en sont pas pour sa nation. Dans tous les Cas,
ou ne petit pas lui contester son immense érudi-
tion historique, bibliographique et littéraire,
son esprit de critique, son talent merveilleux
pour fixer l'époque des événements. Le célèbre
William Jones a comparé les notices d'Ibn-Khal-
likan aux vies de PlutàrVJue. Ce rapprochement
pris dans son ensemble, est loin d'être exact;
mais si , parmi les huit ceiit soixante-cinq per-
sonnages dont fiarle Ibn-Khallikan , on choisit
ceux Qu'il avait cdtiiiUs persotiitellfement ou ceux
sur le compte desquels il avait obtenu des rën-
seigrtements particuliers; le fuirâllèle n'a rien
d'étrange. Qu'ôh lise lea articles Djafor et
fridl, dé la famille de* Barmécides, l'article de
Koukbôilrtj , prince d'Arbèles , et l'on sera aussi
surpris que charmé dti tact avec lequel Îbn-Khal-
likan, au moyeu d'anecdote* bien choisies, a
fait ressortir le caractère et la situation particu-
lière de ces personnages.
La variété des matières traitées dans le Dic-
tionnaire d'Ibn-KhallikaU, les fragments de poésie
isoîé3 de ce ijUi devait en faciliter l'intelligence,
enfin, la raretéet même la grande divergence des
manuscrits, qui , indépendamment des additions
de l'auteur, ont subi quelquefois des interpola-
tions considérables, avaient empêché jusqu'ici
d'en donner une édition. Ces obstacles sont tom-
bés devant les progrès qu'a faits la littérature
arabe dans ces dernières années ; et il en a été
entrepris deux éditions à la fois. L'une est auto-
graphiée, et a paru à Ctaettingue par les soins de
M. Wiîstenfeld. L'antre, qui était dirigée par
M. dé Slane, et qui s'imprimait à Paris, devait
former deux volumes in-4°. Le premier volume,
renfermant un pett plus de la moitié de l'ouvrage,
parut en 1841 M. de Slane profita de son accès
auprès de l'immense dépôt de la Bibliothèque
royale pour puiser en grande partie aux sources
mêmes où avait puisé Ibn-Khallikan ; il rétablit
certaiUs passages qui avaient été défigurés par
les copistes. De plus , M. de Slane commença
à Paris une version anglaise aux frais du comité
oriental de Londres. Cette traduction était ac-
compagnée des nombreux éclaircissements qu'exi-
geait un texte si difficile, et devait former 4 vol.
ih-4°. Lefïremier volume parut en 1842, et le
deuxième en 1843. Il n'a plus été imprimé que
la première moitié du troisième volume. Il est
à désirer que M. de Slane puisse achever sa
double publication. REiiutro.
En attendant la notice âéUUlée qfte M. de Slane à an-
— IBN-MOCLAH
7S0
noncée , voyez l'Introduction que ce savant a plaeéfe en
tête du premier volume de sa version anglaise.
ibn-khordadbeh ( Abou't-Kasxm Obéid-
Allah ben- Ahmed), géographe arabe, morten 300
de l'hégire (912 de i.-C. ). Petit-fils d'un Guèbre,
qui avait embrassé l'islamisme, il fut directeur
de la poste et de la police dans ïepjebal (Médie),
et vécut ensuite à la cour du khalife Motémid.
Il écrivit huit ouvrages , et notamment le Kitab
al-Mesalik we al-Memalik ( Livres des Routes
et des Royaumes ), qui se trouve à Oxford. C'est
un recueil d'itinéraires , qui, malgré sa séche-
resse, renferme de précieux renseignements sur
le commerce Mes différentes contrées musul-
manes , et sur les impôts dans les vallées du
Tigre et de l'Euphrate. v E. B.
Ibn-abt-Yacoub Al-Werrak, Fihrist, t. 1, fol. 800. —
itadjl-Khalfâh , Lex. Bibliogr., t. Il, n° Î088; V, U878. -
Reinaud, Introd. à la Céogr. d'Abou'l-F4da, p. 87-89. —
De Hamroer, Lit. -Ge se h. der Araber> t. IV, p. 828.
ibn-moclah (Abou-Ali Mohammed ben-
AU), homme d'État et calligraphe arabe, né à
Baghdad,en272 de l'hégire (885 deJ.-C.),mortle
1 1 sehawal 328 ( 20 juillet 940 ) ou en 330 (941).
Il était collecteur d'impôts dans le Fars, lorsque
le khalife Moctadir le nomma grand-vizir, en
316 (929). Il ne conserva que deux ans la direc-
tion des affaires. Ayant été réintégré dans ces
fonctions, mais destitué peu de temps après par
le khalife Gahir-Billah , en 321 (933), il contribua
par ses menées à accélérer la chute de ce prince.
A l'avènement de Radhi-Billah, il acheta 500,000
dinars le titre de grand-vizir. Il fit mettre à
mort le sectaire Schalmagani, et expulsa de Mos-
soul, en 323(935), Nassir ed-Daulab, fondateur
de la dynastie des Hamdanides. Son adminis-
tration fut de peu de durée. Cédant aux instiga-
tions de Ibn-Yacout , le khalife le priva de sa
charge , le fit mettre à la torture, et lui extorqua
un million de dinars. Ces disgrâces ne calmè-
rent point l'humeur ambitieuse de Ibn-Mo-
clah. Dans l'espoir de se rendre nécessaire, il
engagea le khalife à se débarrasser de lbn-Raïk,
qui, sous le nom d'émir al-omera (prince des
princes ) , s'était arrogé une autorité presque ab-
solue. Il fut replacé à la tête des affaires en 32f
(938). Mais le faible Radhi-Billah ne tarda guère
a dévoiler à lbn-Raïk le projet de son ministre.
Ibn-Moclah fut emprisonné et condamné à avoir
la main droite coupée. 11 n'en continua pas moins
à écrire avec le moignon du bras pour montrer
qu'il était encore capable de remplir les fonctions
de secrétaire du khalife. Son ennemi lui fit alors
couper la langue, et le laissa mourir de faim et
de misère. Ibn-Moclah ne manquait point de ta-
lents poétiques, et il se fit une grande réputation
comme calligraphe. Il perfectionna le caractère
neskhi; mais c'est à tort qu'on a prétendu qu'il
l'eût inventé. On a retrouvé des pièces écrites
avec ce caractère en 133 (750 de J.-C. ), c'est-à-
dire plus d'un siècle avant la naissance d 'Ibn-
Moclah. E. B.
Ibn-Khallikan , TTefayat al-ayan, édlt. Wiistenfeld.
n°7i8. - G. Weil, Giseh. der Chalif*h t »• M. ~ De-
751
frémery, Ment, sur les Émirs Al-Omera; dans Metn.
prétentés par divers savants à fAcad. des Inscript.,
1881, série I» t II. — De Hammer, LUeraturgeschichte
deriAraber, t. IV, p. 78, 441. — SUveslre de Sacy, Journal
des Sav., août I8ts.
ibn-al-mokaffa ( Abou- Mohammed Ab-
dallah), écrivain arabe, né à Hour, dans le Fars,
assassiné en 142 de l'hégire ( 759 de J.-C. )
ou en 137 (754) ou en 145 (762), à l'âge de trente-
six ans. Fils d'un Guèbre , qui était collecteur
d'impôts, il embrassa l'islamisme, et changea
son nom persan de Ronzbeh en celui d'Abou-
Mohammed Abdallah. Mais comme il conti-
nuait à s'occuper de l'histoire de ses ancê-
tres , et qu'il tentait d'imiter, dans ses écrits,
le style du Coran , on douta de la sincérité de
sa conversion. Il était secrétaire du prince Isa ben-
Ali, oncle du khalife abbasside Al-Mansour.
Ayant été chargé de rédiger un acte d'amnistie
en faveur du prince Abdallah, qui s'était révolté,
il mit tant de zèle à sauvegarder les intérêts de
ce dernier, qu'il s'attira la haine du khalife.
Soffian , gouverneur de Bassora, reçut ordre de
punir Ibn-al-Mokaffa. Irrité depuis longtemps
contre cet écrivain, qui l'avait outragé dans ses
vers, il l'attira secrètement dans sa mai-
son, et le fit jeter dans un four ardent, après
lui avoir fait couper les membres. lbn-al-Mo-
kaffa est auteur de Dorret Yetimet ( Perle pré-
cieuse ) , traité de la vie spirituelle et notice des
saints. Il fit un abrégé des catégories d'Aristote,
et traduisit du pehlwi en arabe le Khodaï-
Nameji (Livre des Rois ) de Danischwer. Sa tra-
duction, intitulée Sier al-Molouh, fut l'une des
sources où puisa Firdousi ; — La Vie de Khos-
rou Nouschirwan ; — Calilah et Dimnah, ou
les Fables de Bidpaï; sa traduction a été éditée
en partie par Schultens, Leyde, 1786, et intégra-
lement par Silv. de Sacy, Paris, 1816, in-4°.
Elle fut mise en vers arabes et traduite en persan
par Hos&éin-Waïtz en syriaque, en turc par
Wasi Ali-Tchelebi, en grec, en latin, en espa-
gnol , en italien , en vieux français , en allemand»
E. B.
Ibn-Abl-Yakoub al-Werrak, Fihrist al-Oloum. — Ibn-
KhalUkan, Biogr. Dict., t.l, p. 431. - Hadjt-Khalfab,
Lex. Bibliogr., t. III, n° 4980; IV, 7410; VI, «819. - Sil-
vectre de Sacy, Estai sur l'origine indienne de Cailla
et Ûimna, en tête de son cdlt. de cet ouvrage, et dans
JYot. et Extr. des Manuscrits de la Bibl. du Roi, t. X,
p. 184, 166. — De Hammer, LUeraturgeschichte der
Araber, t. III.
1RN AS-SCHINEH OU IBN-SCHOHNAH
( Zéin ed-din Abou'l-Welid Mohammed ben-
Mohammed Halebi ), historien arabe et juris-
consulte hanéfite, né à Alep, mort en 815 de
l'hégire (1412 de Jésus-Christ). Il fut cadhi
al-codhat (juge suprême) à Alep et au Caire.
Après la bataille d'Âlep et la prise de cette ville
par Tamerian, en 802 (1400), il fut conduit devant
le conquérant, etrépondit avec habileté à plusieurs
questions délicates qui lui furent adressées. II
écrivit plusieurs ouvrages de droit, et les his-
toires suivantes : Raudh ahMonatzir fi ilm
al-awaïl we al-awakhir ( Jardin des Aspects,
IBN-MOCLAH — IBN-THOFÉIL
752
ou la 'Science des principes et des fins) , en trois
parties, dont la première contient l'Histoire des
Perses, des Pharaons , des anciens Arabe*», des
Juifs; la deuxième l'Histoire des Musulmans jus-
qu'en 806 (1403) ; la troisième traite de la Fin du
Monde d'après les traditions prophétiques. Erd-
mann en a publié un fragment pour compléter la Vk
de Tamerian par Ahmed Ibn-Arabschah, sous
le titre de Arabsiaden ex manuscripto ignoto
Ibn-Schohnah supplevit et emendavit; Casas,
1823, in-8°; — Al~Mobtegha 9 abrégé de l'ou-
vrage précédent; — continuât, du Mohhtasarfi
Akhbar al-baschar (Abrégé de l'Histoire du
Genre humain, ou annales d'Abou'1-Féda ) ; —
Dort al-Montekheb fi tarihh Haleb ( Perles
choisies, ou histoire d'Alep ), que Hadji-Khalfah
attribue à Ibn-al-Khathib an-Nasiriyet ( Abou'l-
Hassan Ali ben-Mohammed Djibrini ), mort en
843 (1439). C'est une continuation du Boghtet
at-ThaUb de Kemaled-Din Halebi. A. Kremer en
a traduit des documents sur la géographie de la
Syrie septentrionale, dans Denhsckriften ( Mé-
moires ) de l'Académie des Sciences de Vienne ,
1852, t. III, et la description des édifices d'Alep,
dans Sitzungsberichte ( Comptes-rendus des
séances de la même académie ) , 1850, t. IV:
Son fils Ibn-às-Schibnbh (Mohibb ed-Din
Abou'l-Fadhl Mohammed ben-Abïl-Wélid),
mort en 890 (1485), était aussi cadhi al-codhat
Il écrivit en vers des ouvrages de jurisprudence,
et amplifia le Raudh al-Monatzir. Cette nou-
velle édition est intitulée Nozhet an-Newatzir
(Délices du Spectateur): Il y ajouta un appendice
pour le neuvième siècle de l'hégire. — Son fils, le
cadhi al-codhat Ibn-as-Schihneh ( Abd-al-Berr
ben-Mohammed), mort en 921 (1515) écrivit
sur le droit. £. Beauvois.
Ahmed Ibn-Arabschah, Fie de Tamerian. — De Ham-
mer, tiist. de VEmp. Ottoman, I- VII. — Hadji-Khalfah,
Lex. Biblioçr., t. III, n° 6601; V, 11093, 11616; VI, »190,
13195, 1SS03, 13785. — Krafft, Catai. des Manuscrits
orientaux de l'Acad. orient, de Vienne.
IBN-THOFÉIL (Abou-Bekr ou Abou-Djafar
Mohammed ben-Abdalmélik al-Kaïsï al-
Berschani ), philosophe arabe, né à Berschan
( Purchena), dans les environs d'A(meria( Es-
pagne), mort à Maroc, en 581 de l'hégire (1 188 de
J.-C. ). Il fut médecin et secrétaire du gouver-
neur de Grenade, puis du sultan almohade
Abd-al-Moumin. U était versé en physique , en
astronomie , en mathématiques, en philosophie,
et composa une cassidet ( élégie ) sur la prise
de la ville de Kafsa, événement qui arriva en
556 (1161). On a de lui : Bai Ibn-Yokdhan,
roman philosophique, dont le héros, abandonné
à sa naissance dans une île déserte, et nourri
par une chèvre , s'élève successivement à la con-
naissance des plus hautes vérités , par la seule
réflexion, et par la contemplation de soi-même
et de la nature. C'est leRobinson des Orientaux.
Ibn-Thoféil prouve l'existence de Dieu par di-
vers arguments qui ne seraient point désavoués
des philosophes de nos jours. Son ouvrage a été
IBN-THOFÉIL — IBN-ZÉIDOUN
traduit en persan, en hébreu, en latin, par
Ed. Pococke, sous le titre de Philosophus au-
todidactes, sive epistola Abi Jaafar Ebn
Tophàil de Haï Ebn Yokdhan ( avec le texte ) ;
Oxford, 1671 et 1700, m-4°; en anglais par
S. Ockley; Londres, 1708 et 1731,in-8°; en
allemand, par J.-G. P. (Prilius); Francfort,
1726, in-8°, et par J.-G. Eichhorn; Berlin,
1782, in-8°. K. Beacvois.
Abd-al-Wahld Marekoschi, Hist. des Almohaves, édll.
par Dozy,jp. 178-175.'.- MaHcarl, Hist. ofthe Moham. Dy-
nasties in Spain, trad. par de Goyangos,t. 1, Î35, 885,864.
— Léon l'Africain, dans Biblioth. Grseca de Fabricius,
t. XIII. - Badjl-Khalfah, Lex. BMiogr., 1. 1, n« 645; III,
eus. — Not. sur Haï Kbn-Yokbdhan, dans Magasin En-
cyclopéd., 1806, t. II, p. 818-847. - Doiy, Scriptorum
Arabum Loei de AbbadidU, t. Il, p. 171. - De Hammer,
LiteraturgeschieMe der Araber, U VII, p. 44î, 771; 854.
- Zenker, Bibl. Orient., n°» 1814-1818.
ibn-al-wardi ( L'imam Zéin ed-Dln
Abou-Hass Omar ben-Motzaffer al-Marri al-
Halebi), jurisconsulte schaféite, historien et géo-
graphe arabe, mort à Alep, en 749 ou 750 de l'hé-
gire ( 1348 ou 1349 de J.-C. ), à l'âge d'environ
soixante ans. H fut naïb du cadhi ( substitut
du juge) de plusieurs villes, et notamment
d'Alep , où il enseigna aussi le droit. Il fit des
vers sur la fameuse peste noire , dont il fut l'une
des victimes^ et écrivit en vers des traités juris-
prudence et de grammaire. Ses ouvrages les plus
connus sont : Al-Mokhtasar fi ahhbar al-bas~
char ( Abrégé de l'Histoire du Genre humain ),.
extrait de la chronique d'Abou'1-Féda, qu'il
continua jusqu'à l'année de sa mort ; — Khe-
ridet al-Adjaïb we feridet al-Gharaïb
( Pierre précieuse des Merveilles et Perle des
Choses mémorables), traité abrégé de géographie
physique et d'histoire naturelle , qu'il composa
pour servir d'explication à un planisphère cons-
truit par lui. Hadji-Khalfah estimait peu cet ou-
vrage, qui, disait-il, est rempli d'erreurs, et
dont les cartes sont inexactes. Il avoue néan-
moins que peu de livres étaient plus populaires
et plus répandus. Le Kkeridet al-Adjaïb est
l'un des ouvrages dont les orientalistes se sont
le plus occupés. De Guignes en a donné une
analyse détaillée dans le t. II des Notices
et Extraits des Manuscrits, de la Biblio-
thèque du Roi. Les fragments suivants ont
été édités ou traduits en latin par Aurivilius :
De Pa/ma;Upsal, 1745; --par Eœhler : Syrie,
à la fin de Prodidagmata ad Hagji Chaltfx
librum; Leipzig, 1766, in-4 e ; — par A. Hy-
lander : Spécimen Operis cosmographici Ibn
el-Vardi (texte et trad. de la préf. et des
chap. 1-5 ) ; Lund, 1784-1812 , réuni par Sv. Hy-
Iander,ibid., 1823; — par Fraehn : JBgyptus,
auctore lbn al-Vardi (text. et trad.); Hall,
1804, in-8°; — par C. J. Tornberg , Fragmen-
tumlibriMargarita mirabilium ;Upsal, 1835-
1839, 2 part. in-8°, avec la carte générale; —
par S* Freund : De Rébus die resurrectionis
eventuris ; Breslau, 1853, in-8°. E. B.
Aboo'I-Mahasen, Manhal as-Safl, t. IV. - lbn-Hablb,
dans OrientaUa II, 890. - Hadjl-Khalfah, Lex., t. I,
754
n«« 1148, 1146, 1152; H, Î689, 8886; III, 4379,' 4688, 64*6 ;
V, 14058, 11170, 14616, 11917 ; VI, 1Î873, 13188, 18987. - Dozy,
Cat. des Manuscrits orientaux de Leyde, t. H, p. 78. -
Relnaud, Introd. à la Géog. d'Atwu'l-Féda, p. 154.
* ibn-ykmin fbryoumendi ( L'émir Mah-
moud ), poète persan, né à Féryomnend, mort
en 745 de l'hégire (1344 de J.-C.). H était fils
de Ibn-Yemin Ala-ed-Din Thoghraï, grand-vizir
del'Ilkhan Khodabendeh (Oldjaïtou). Au lieu
d'imiter son frère, qui tenta de se rendre indé-
pendant dans une province, et qui périt sans
réussir, il se retira dans ses domaines, pour y
mener- une vie privée, et se livra tout entier à
la culture des lettres. U consigna ses réflexions
philosophiques sur les vicissitudes des choses
humaines , dans une Lettre poétique à son père,
dont le baron Ott* de Schlechta-Wssehrd a
traduit à peu près la moitié sous le titre de Ibn-
Yemin's Bruchstucke (Fragments); Vienne,
1852,in-8«. E. B.
Louthf All-Beg, Atesch kedah. - De Hammer. Gesch.
derschônen RedekHnste Persiens, p.M4. - Schlechta-
Wssehrd , Préf. de sa trad.
ibn-zéidoun ( Abou'l-ivélid Ahmed ben-
Abdallah al-Màkhzoumi al-Andalousi al-
Corthobi ) , poëte arabe , né à Cordoue, en 397
de l'hégire( 1007 de J.-C), mort à Séville, en 463
(1071). Fils de l'un des premiers jurisconsultes
de sa ville natale, il se distingua de bonne heure
par ses talents poétiques, et brilla à la cour du
khalife ommiade de Cordoue Mohammed III
Mostakfi. La fille de ce t prince, la belle Wel-
ladet, commença dès lors à le remarquer, et
lorsque, après la mort de son père, elle se fut
soustraite à la réclusion du harem pour aller
vivre au milieu des poètes et des beaux-esprits,
elle préféra Ibn-Zéidoun à tous les grands per-
sonnages qui se; disputaient ses bonnes grâces.
L'un de ces derniers, le vizir Ibn-Abdous, ca-
lomnia son heureux rival auprès d'Ibn-Djehwer,
président du sénat après la chute des Ommiades.
Jeté en prison, Ibn-Zéidoun s'échappa au bout
de quelque temps, et se réfugia à Valence , puis
à Séville, où il devint vizir du. prince abba-
dide Motadhid-Billah, en 441 (1049), puis de son
fils Motemid. Dans son exil, il entretint une
correspondance avec Welladet, et écrivit au
nom de cette princesse la célèbre lettre contre
Ibn-Abdous, qui a été publiée en arabe et en latin
parReiske: Abil WalidilbnZeiduniRisalet,
seu epistolium; Leipzig, 1755, in-4°. Cepoëme
est très-difficHe à entendre à cause de la bour-
souflure du style et des allusions historiques dont
il est rempli* Parmi les nombreux commentaires
dont il a été l'objet, le plus connu est celui de
Ibn-Nobatah (mort en 768-1366), dont une tra-
duction turque a été éditée sous le titre de Terd-
joumet scherh\ al-Oyoun; Constantinople,
1257 (1841), gr. in-8°. On en trouve des frag-
ments en arabe et en latin dans Additamenta
ad Historiam Arabum ante Jslamismum par
J.-L. Rasmussen ; Copenhague , 1821 , in-4°. Ibn-
Zéidoun écrivit une autre lettre à Ibn-Djewher,
755
IBN-ZEIDOUN — IBRAHIM
756
tandis qu'il était eu prison. Son fils Abou-Bekr
fut vizir de Motimid Ibn-Abbad, et périt lors
delà prise de Sentie par les Aimoravides, en 484
(1091). £. B.
lbn-Betttm, DtakMHt - Iin-Basehkoa*l, SUet. -
Ibo-Khalukao, Bioeruph. Mct. t t. 1, p. ut. - Spécimen
critieum exibeni locos Ibn-khoconis de lbn-Zeiduno ,
«dit. par ft.-B. vVelJersj Lefde, 1131, fa •**. — Proleço-
tHena ad MttioftMH dkbrum Itm-Zeiduni Bpistotarum
et commentariorxm. luibus ub IbnUobata et Sçtfadio
sinçula illustratà sunt, edit. par H. S. WeQers; Leyde,
1834, in 8°. — Ibn fcobàU et Satadi , passages «or Ibn-
Eéldoirà, dan* Catâl: Codé. OilenUUium bibl. AcademUe
Lu^duno-Batwm de Doiy, t.l, p. ttl-itt. - Hadjl-tvhal-
tab, Lex. Biblioçr., t. Il, n° t098 ; III, 5981. - Hlrt, fragm.
dans Chrestomathie Arabe; léna, irro. — De Sacy,
Poème d'Ibn-Zeidoun, eitr. des CoUiert d'Or de Ibn-
Kbacao, et trad. dan» /ourn. Atiat^ 181», II, p. M0-S18.
ibh-abd-ar-rbbbibi ( Abov-Omar Ahmed
ben- Mohammed). Voy. Abmbb Ibn-Abdab-
Rebbihi.
IBff.ARABSCHAM. V09. AHMBD IbH-AbAB-
SCHAH.
IBN-BADJEH. Voy. ABBMPACB.
lBK-BATBOtTTAB. Voy. MoÉAatMBD.
IBN-BATRIK. Voy. ËOTTCHIUS.
IBM-BBITHAB. Voy. ÀBEN-BétTHÀft.
ibn-dOreid ( Abou-Bekr Mohammed ).
Voy. Doréid.
IBN-RBACAN. Voy. Al-FATH IbR-KHAGAN.
1BH-ROSCBD. Voy. AVERBHOÈS.
iBN-SAlo (Nour ed-DinAbou'l). Voy. Au
Ibn-Saïb.
1BA-SIHA. Voy. AVlCENIfE.
IBN-TAGRi BB*Dl. Voy. ABOU'L-MAfiAS8BN.
iBN-tocMs ou iBA-TOVNdfl (Aboiïl- Has-
san Ali ). Voy. Au Ibn-Yocms.
ibn-zarcaL (Ibrahim Ibn-Abd ar-Rah*
man ). Voy. Arzacbel.
ibn-zohb. Voy. AberZoab.
Ibrahim (Abou-ishah) , khalife abbasside,
né le 1 er dzou'l-cadeh 162 de l'hégire (juillet 779
de J.-C. ), mort à Samarra (Irak), le 7 rama-
idhan 224 (juillet 839). Il était frère de Haroon
ar-Raschid et fils du khalife Mahdi et d'une né-
gresse. Son neveu Matnoun, désirant mettre fin
'aux guerres civiles qui désolaient l'empire de-
puis l'avènement d'Ali , résolut de rendre le trône
à la famille. de ce dernier, et désigna pour son
successeur l'imam Ali ar-Ridha , fils de Mousa.
Ces dispositions mécontentèrent la plupart des
partisans de la dynastie régnante, et les habitants
de Baghdad déclarèrent le khalife déchu. Ibrahim
fut proclamé à sa place, sous le nom de Moba-
reh ( béni ) , le 5 rdoharrem 202 ( 24 juillet 817).
Ne pouvant satisfaire aux exigences de ses trou-
pes, il leur permit de piller quelques villages.
Cet acte impolitique lui fit perdre sa popularité.
\ Comme il ignorait entièrement l'art de la guerre,
il laissa le commandement de l'armée à Isa beti-
: Mohammed , qui fut vaincu à Wasit par Hassan
ben-Sehl , et trahit les intérêts de son parti. Ce-
• pendant Mamoun , voyant l'impossibilité de faire
triompher son projet , l'avait abandonné , et avait,
dit-on , fait empoisonner l'imam ar-Ridha. Lors-
qu'il quitta le Khorassan pour rentrer à Baghdad,
Ibrahim abdiqua en dzou'l-hiddjeb 203 (juin
819); il se déguisa en femme, et réussit à se
soustraire pendant longtemps à toutes les recher-
ches des émissaires de son neveu. Ayant été dé-
couvert en 210, il fut conduit en présence de
Mamoun , qui lui pardonna, et se contenta de le
faire surveiller par deux soldats. Ses talents de
société lui concilièrent bientôt l'affection de ce
prince , qui en fit le compagnon ordinaire de ses
plaisirs. Ibrahim passait pour le meilleur musi-
cien et chanteur de son temps. Comme poète,
il n'eut point d'égal parmi les princes de sa
famille. Ê. B.
Tbabarl, Ann. - Ibn«dl-AtMr, KmmU ae-Yevmkk.-
Ibn-ghalllian, Btoçr. Dictio*.; t. I, p. 19. - Le faox
Fakhr-ed-Dln , dëns le Journal AHat., îftw, I, »9, Ut
SU. — Aventures tf'Ibrablfcr, dans les AneUemta Araiica
ië Humbert - About-Féda, Ann. Muilem., C II. - Wett,
GetcKderChalifen, X. II, p. ti\ Ht, 17t. - De Hammer,
Ltteratnrgeichichtè ûér Araber, t. lit, p. Si.
Ibrahim , sultan ottoman , né le 12 schawal
1024 de l'an 46 (4 novembre iôl5 de J.-C),
étranglé le 28 redjeb 1058 (18 août 1648). De tous
les princes de la famille impériale, il fut le seul
qu'épargna la cruauté de son frère Mourad IV. A la
mort de ce dernier, qui ne laissa point de posté-
rité, il fut placé sur le trône en 1049 0640). Pour
prévenir l'extinction de la dynastie ottomane, la
mère et les vizirs du nouveau sultan se firent
un devoir défavoriser ses penchants voluptueux.
Chaque semaine, on lui offrait une nouvelle con-
cubine. Ibrahim se livra à la luxure avec tant
d'excès qu'il tomba au plus bas degré de l'abru-
tissement. Incapable de s'occuper des soins du
gouvernement, il laissa l'exercice du pouvoir,
d'abord au grand -vizir Cara-Mustafa, ensuite
à sa mère Kœsera, à son favori Sultanzadeh-
Moharamed , à son écuyer Yousouf et à son pré-
cepteur Djindji. En 1641 la paix fut conclue avec
l'Autriche, et une armée turque alla assiéger la
ville d'Azof, dont les Cosaques s'étaient emparés
cinq ans auparavant. Cette expédition échoua;
mais l'année suivante les Cosaques évacuèrent
la viHe après l'avoir réduite en cendres. En 1642,
Hosséin Nassouhzadeh se révolta à Àlep et mar-
cha sur Constantinople. Arrivé à Scutari, il hési-
tait à attaquer la capitale; en présence de cette
hésitation, ses officiers l'abandonnèrent; H fat
pris et mis à mort au milieu des tortures. £0
1055 (1645), les Vénitiens de Crète ayant fourni
des provisions à des corsaires maltais qui ve-
naient de capturer quelques navires du grand-
seigneur, une armée turque , portée par quatre-
vingts galères, alla mettre le siège devant LaCa-
née, dont les habitants capitulèrent et obtinrent
la faculté de se retirer. Ibrahim , mécontent de
ce que l'on eût épargné des infidèles , fit mettre
à mort le oapitan- pacha Yousouf, dont les pré-
tendus trésors excitèrent sa convoitise. Appre-
nant que les Vénitiens avaient fait une descente
en Morée, il ordonna un massacre général des
chrétiens dans tout l'empire. On eut beaucoup
757
IBRAHIM
758
de peine à lui faire rétracter cet ordre, qui con-
cernait pJol de la moitié de ses sujets. Ibrahim
ne ménageait pas davantage la vie , l'honneur et
la fortune des musulmans. Il dilapidait les fi-
nances et assignait à chacun* de ses favorites lés
retenus d'une ou de plusieurs provinces. Sa ty-
rannie occasionna plusieurs révoltes, et notam-
ment celle de Wartlar-Ali* gouverneur de fciWas,
à qui le sultan voulut faire enlever la fiancée
d'Jpsir-Paeha. Wàrdar* Ali périt dans cette entre-
prise ; mais les janissaires vengèrent sa mort et
celle de tant d'autres Vleimés. Le sultan fût dé-
posé le 1 8 redjeb lOôS ( S août 1648 ) , et étranglé
dix jours après. Il etrt pour successeur son fils
Mohammed IYi E. B.
De A*mi*et f HMi *e t'BmiHrê Ottoman, brtd. Hdtert,
t. IX, p. 3S«j*,*M*ti
ibba Viftl-ftat , chef des mamelouks , né ëff
Circassie* vers 1781» mort en 1817, à Dongolah
en Nubie. Amené dans sori enfance comme esclave
en Egypte, il fut enrôlé dans les mamelouks de
Mohammed Abou+Dahab * qui plus tard l'affran-
chit , lui donna le titre de bey» et le chargea de
l'administration du Caire, en partant pour soti
expédition de Syrie en 1776; A la mort de Mo-
hammed , Ibrahim voulut s'emparer dn pouvoir
wpréme ; Mourad- Bey {voy. ce nom ) y préten-
tait aussi : ils partagèrent ensemble l'autorité,
et Ibrahim, qui était le plus âgé , obtint le titre
le cheyk-él-Ulad (chef du pays), ce qui lui
permettait de résider ordinairement au Caire.
\es deux beys eurent de fréquentes querelles;
nais l'intérêt les rapprochait souvent; ils se
léfendirent ensemble contre les beys Ismael et
ïaçan, commirent de nombreuses exactions,
ie révoltèrent contre la Porte, et résistèrent à
'expédition entreprise contre eux par le oapitan-
tacha Gasi-Haçari, en 1786 et 1787 : ils ne crai-
firent pas de Vexer les négociants français éta*
►lis en Egypte. « Au premier bruit de l'appdri*
ion de l'armée française enÉgftrté, en 1798, dit
Ludiflret, Ibrahim reprocha à Mourad d'avoir
ro roqué cette guerre par. ses indignes procédés,
t il le laissa s'occuper sënl des moyens de dé-
aïs*. Préférant les voies pacifiques, il seconda
•é. femme, qui, respectée au Caire pour ses terttië,
t parée qu'elle était issue du législateur dés mo-
ulmans , usait de son crédit pour sauver de la
ireur populaire le* négociante français, dont elle
'établit gardienne dans un palais ou elle les
rait fait renfermer avec leurs épouses. Ibrahim,
e concert avec le pacha titulaire d'Egypte, se
isposait à envoyer un de ces négociants pour
arleroenter aveo Bonaparte \ mais il le retint en
^prenant l'issue de la bataille des Pyramides.
andis que Mourad et Mohammed-Elfl-Bey, soti
vori , qu'il avait rappelé dé la province du
harkieh, Où il faisait la guerre aux Arabes ,
>utenaient avec un rare courage une lutte iné-
tie et malheureuse contre les Français, Ibrahim,
tmpé sur la rive gauche du Nil, incendiait la
?i£îlJe des mamelouks, pour qu'elle ne tombât
paâ>au pouvoir des vainqueurs, et se retira en-
suite en Syrie avec ses troupes et ses effets les
plus précieux , se bornant à soutenir des com-
bats partiels et à fomenter l'insurrection.... Après
la rupture du traité d'ÊI-Arisch pour l'évacua-
tion de l'Egypte eh janvier 1800, Ibrahim, ren-
forcé par un grand nombre de mamelouks qui
avaient abandonné Mourad , se joignit à l'armée
du grand-visir JOùssouf. Pendant la bataille
d'fléliopotis, dont il n'attendit j)as l'issue, il alla
surprendre Le Caire, qu'il fit insurger contre les
Français ; Mais les cruautés exercées sur eux et
sur leurs partisans furent l'ouvrage du féroce Nas-
souf-Pacha. La résistance du château donna le
temps à fcleber et â son armée victorieuse de
rentrer au Caire... Ibrahim, reconduit avec ses
troupes Jusqu'aux frontières cte Syrie , ne rentra
étî Egypte qu'après l'assassinat de Kleber et le
débarquement de la flotte anglo-tUrqùe. Les pro-
positions pacifiques qu'il transmit de la part du
grand- visir à Mourad, et que celui-ci lit présenter
par Osman-Bey Bardissi â Menou, successeur
de Kleber, ayant été rejetées par cet imprudent
général, la bataillé d'Alexandrie décida du sort
de l'Egypte. Ibrahim n'y assista pas; mais il se-
conda par ses hostilités les opérations du grand-
visir, du Capitan-pacha et des Anglais , et con-
tribua aux succès qui amenèrent les capitulations
dés divers corps de l'armée française. » Après
l 'évacuation de rËgy pie par les troupes françaises,
la Porte voulut disperser les mamelouks. Ibrahim
fut arrêté au Caire avec quelques autres chefs, mais
lé général anglais Èaird les fit relâcher. Ibrahim
se retira â Djizeh, où campaient les mamelouks.
Muharrimed-Khosrou-Pacha, à peine installé dans
lé gouvernement de l'Egypte (lévrier 1802 ) , en-
voya des forces contre les mamelouks réfugiés
dans le Sàïd. * Attaqués par les Turcs et se •
fiant péti âlrt Anglais , Ibrahim et Osman-Bey
Bardissi, successeur de Mourad, malgré les
avantagea qu'ils avaient obtenus, tournèrent
leurs regards vers la Frarice, et envoyèrent à
Livourné un agent avec une lettre pour Bona-
parte, dont ils réclamaient le secours en échange
de letir soumission, aux conditions qu'il lui plai-
rait d'Imposer. L'arrivée à Paris d'un ambassa-
deur ottoman rendit cette démarche inutile ; on
craignit de mettre obstacle à la paix qui allait
se conclure aVec la forte. » Après le départ de
l'escadre anglaise venue de l'Inde, le pacha en-
leva en personne tijizeh aux mamelouks. Ibrahim
se retira dans le désert. Une révolution ramena
les mamelouks dans la basse Egypte. Taher-
Pacha, qui les avait combattus à la tète des Al-
banais ou ArnaUtes,et qui commandait en second
sotis Khosrou, se révolta contre ce pacha, le
força de se retirer à Damiette, et s'empara du
Caire. Ses extorsions et seseruautés l'ayant rendu
odieux , il fut assassiné par les Osmanlis. Son
neveu Méhémet-Ali (voy. ce nom) continua sa
politique et resta (fabord uni aux mamelouks.
Ibrahim reprit la police et Fadministratiott du
759
IBRAHIM
760
Caire. La désunion s'étant mise parmi les chefs <
mamelouks, Méhémet-Ali fit attaquer Osman
Bardissi et Ibrahim dans la ville du Caire , où ils
s'étaient fait détester par leurs exactions. Ils
curent beaucoup de peine à sortir de la ville ,
perdirent plusieurs de leurs hommes, et leurs
maisons furent pillées. Méhémet-Ali se fit pro-
clamer pacha. En 1805, il feignit de se rappro-
cher des mamelouks, et en massacra un certain
nombre qui s'étaient laissé attirer dans la ville,
pendant qu'Ibrahim et son fils Marzouk-Bey
taillaient en pièces 1,500 hommes que Méhémet-
Ali avait envoyés contre eux. Retirés dans la
haute Egypte, les beys s'emparèrent de Syout ,
entrèrent dans leFayoum et poussèrent en 1806
leurs incursions jusqu'aux environs du Caire.
Méhémet-Ali chercha à les gagner en leur offrant
des apanages; mais ils (ne purent s'entendre.
Leur armée se renforçait par la désertion d'une
partie des troupes du vice-roi. Cependant les
Anglais avaient obtenu du divan de Constanti-
nople le rétablissement de l'autorité des beys ; le
capitan-pacha arriva à Alexandrie le 1 er juillet
1806; mais la jalousie des différents chefs em-
pêcha l'élévation d'Elfi , que les Anglais proté-
geaient particulièrement. L'envoyé de la Porte
se décida à laisser le pouvoir à Méhémet-Ali.
Chahin, successeur d'Osman-Bardissi et de Mo-
hammed-Elfi, le lui disputa, mais Ibrahim se retira
bientôt dans le Fayoum. Le vice-roi lui renvoya
sa femme , un de ses fils et son petit-fils. Mar-
zouk-,Bey, fils d'Ibrahim, se soumit en 1808 au
pacha, qui avait cédé le Fayoum à Chahin. D'au-
tres beys se rapprochèrent encore du pacha, qui
leur imposait le séjour du Caire. Ibrahim refusa
de faire sa paix. Méhémet-Ali voulut le contraindre,
et envoya contre lui une flottille et une armée,
qui furent battues dans la nuit du 13 au 14 juillet
1810 par les mamelouks. Enfin, le 1 er mars 1811,
Méhémet-Ali mit à exécution le projet qu'il mé-
ditait depuis longtemps : il fit massacrer un
millier de mamelouks avec plusieurs beys , tant
au Caire que dans les provinces. Ibrahim, Osman
Haçan et les autres beys qui échappèrent à cette
boucherie abandonnèrent Djizeh et se retirèrent
avec leurs troupes dans le Saïd. Ils y furent at-
taqués en 1812 par les troupes du vice-roi ; plu-
sieurs d'entre eux furent pris et décapités, et
les autres se réfugièrent en Nubie , jusqu'à Don-
golah dont ils soumirent les souverains. C'est
là que moururent les deux chefs. Quatre ans
après, une expédition, conduite en Nubie par Is-
raaïl-Pacha, fils de Méhémet-Ali, acheva de dis-
perser les mamelouks. Brave, religieux, juste et
pacifique, sobre et prudent, Ibrahim était malheu-
reusement timide dans le conseil, et ne sut ni ral-
lier ni maintenir les autres ehefs, qui n'avaient ni
sa droiture ni son expérience. Ses contemporains
l'avaient surnommé El Kébir (le Grand).
L. L— t.
Audlffret, dans VBncyclop. des Gens du Monde, article
Màmxxauks.
Ibrahim-pacha, prince égyptien, né en
1789 à Cavalla, petite ville de la Roumélie,
mort au Caire le 9 novembre 1848. H passait
généralement pour être le fils de Méhémet-Ali, et
suivant M. Clot-Bey il était en effet le fils aîné
du vice-roi d'Egypte; mais d'autres prétendent
qu'il n'était que son fils adoptif : ceux-ci ne s'ac-
cordent pas même sur l'époque de cette adop-
tion ; les uns disent qu'elle eut lieu lorsque Ibra-
him n'avait que trois ans ; selon les autres, Mé-
hémet-Ali ne l'aurait aftpté qu'après la mort de
Toussoun, son fils chéri, qui mourut en 1818.
Ce qu'il y a de certain, c'est que Méhémet-Ali a
toujours traité Ibrahim comme un fils. L'Arabie
fut le théâtre des premiers exploits militaires
d Ibrahim. Les Wahabites occupaient une grande
partie de cette contrée et étaient maîtres des
villes saintes. Après l'avènement de leur chef,
Abd-Allah ben-Souhoud en 1814, la Porte or-
donna au vice-roi d'Egypte de détruire ces héré-
tiques. Méhémet-Ali s'empressa d'expédier une
aimée dont il donna le commandement à son
fils Toussoun. La campagne fut mal conduite.
Méhémet alla lui-même se mettre à la tète de
ses troupes et obtint quelques succès ; mais il
fut contraint de revenir au Caire, et en son ab-
sence Toussoun conclut la paix avec les Waha-
bites. Méhémet refusa de ratifier ce traité , et
donna la conduite de l'armée à Ibrahim-Pacha
(1816). Celui-ci se rendit d'abord à Médine, où
il fit avec éclat ses dévotions au tombeau du
Prophète, y laissa de riches présents et répandit
d'abondantes aumônes. Il commença ensuite les
opérations militaires, et s'avança rapidement vers
le Nedjed , province de l'Arabie centrale, où les
Wahabites avaient été refoulés par Toussoun
et Méhémet. A l'origine , Ibrahim essuya quel-
ques revers ; il ne put s'emparer d'El-Bass, pre-
mière place des Wahabites qu'il rencontra sur
son passage. Après un siège inutile de quatre
mois , il prit le parti de laisser cette ville derrière'
lui et de pénétrer rapidement au cœur du pa\s.
Cette manœuvre hardie fut couronnée de succès.
Ibrahim enleva successivement plusieurs villes
fortes aux rebelles et parvint jusque sous le>
murs de Derrayeh, leur capitale. Le siège de
cette ville, défendue par Abd-Allah, fut long et
meurtrier. Un incendie qui éclata dans le camp
égyptien mit Ibrahim dans la position la plu*
critique en consumant ses provisions ; mais, sans
attendre les renforts que lui envoyait Méhémet-
Ali, il tenta un effort désespéré et se rendit maître
de la place. Abd-Allah , fait prisonnier, fut envoyé
au Caire et de là à Constantinople, où il eut la
tête tranchée en décembre 1818. La prise de
Derrayeh amena la soumission de tout le pa}>,
qui fut saccagé et dévasté. Ibrahim, décoré par
la Porte du titre de pacha des villes saintes, ra-
mena son armée en Egypte, et fit une entrée
triomphale au Caire le 11 décembre 1819.
Après le retour d'Ibrahim, Méhémet-Ali vou-
lut créer une armée régulière exercée à 1 V -
761
IBRAHIM
762
ne. Ibrahim seconda avec ardeur ce
projet. Quelques officiers français, parmi les-
quels se distinguait le colonel Sèves, depuis
connu sous le nom de Soliman-Pacha, lui ensei-
gnèrent la tactique européenne et le maniement
d'armes. Ibrahim fit l'exercice comme un simple
soldat, placé même d'après sa taille à la queue
in peloton. Son exemple et ses efforts contri-
buèrent puissamment à faire adopter aux Orien-
taux une innovation si contraire à leurs idées
et à leurs habitudes. Sur ces entrefaites, l'insur-
rection des Grecs prit un caractère si alarmant
que le sultan appela à son aide le pacha d'Egypte.
Vléhémet-Ali envoya Ibrahim en Grèce, en 1824,
ï la tète de forces imposantes. Ibrahim s'empara
3'abord de l'île de Candie , et livra sur mer plu-
sieurs combats à l'amiral grec Miaulis. En fé-
vrier 1825, il débarqua à Modon à la tête de
10,000 hommes. Il s'empara d'abord de Navarin,
qu'il attaqua à la fois par terre et par mer, prit en-
suite Maniati, Arcadia, Calamata, Cytries, Tripo-
litza, et s'avança jusqu'aux portes de Nauplie, alors
capitale de la Grèce. Repoussé par D. Ypsijanti,
Ibrahim dut se replier surTripolitza. Enfin au mois
de décembre , cédant aux instantes prières du sé-
raskierReschid-Pacha, qui désespérait de s'em-
parer seul de Missolonghi, il vint mettre le siège
deyant cette ville. La chute héroïque de cette place
fut plutôt une défaite qu'une victoire pour les as-
siégeants. Cependant Ibrahim continua à tenir la
campagne pendant les années 1826 et 1827 sans
remporter des avantages bien marqués, mais
aussi sans perdre de terrain. La bataille de Na-
varin et l'expédition française en Grèce le for-
cèrent à quitter la Morée. Ibrahim n'était pas du
reste à Navarin lorsque les alliés détruisirent sa
flotte : il y arriva quatre jours après. Bloqué dans
le Péloponnèse, il dut se procurer des vivres de
gré ou de force dans l'intérieur des terres, et à
toute demande d'évacuation que lui faisaient les
commissaires des puissance alliées, il répondait
qu'il ne céderait qu'aux ordres de la Porte ou
du vice^roi, son père. Il se trouvait encore à la
Jête de 20,000 hommes et pouvait prolonger la
lotte lorsqu'il reçut de Méhémet-Ali l'autorisation
de traiter pour l'évacuation de la Morée. Il con-
clut alors avec les amiraux de Rigny et Hey-
«en, le commodore anglais Campbell et le ma-
réchal Maison, une capitulation honorable, en
vertu de laquelle il se mit à évacuer la Grèce le
16 septembre 1828. Il partit avec le dernier con-
voi » et arriva devant le Caire le 10 octobre. Sa
campagne de Morée lui valut de la part de l'Eu-
*>pe philhellène la qualification de tigre altéré
«e sang. Plus tard , par une réaction dont l'his-
toire contemporaine offre plus d'un exemple,
quelques écrivains, justement épris d'ailleurs des
grandes qualités d'Ibrahim, ont cherché à réha-
to'rter sa conduite en Grèce et à le représenter
^ûme un vainqueur clément et généreux. Le
fait est qu'il fit la guerre contre tea giaourô en
^i musulman, sans ménager le faible, sans
épargner le vaincu; car à cette époque, ses pré-
jugés contre les chrétiens étaient encore dans
toute leur force.
Ce qu'Ibrahim avait vu des troupes françaises
en Morée avait augmenté son admiration pour
la tactique européenne. Frappé surtout de -la
supériorité de la cavalerie régulière, il s'occupa,
aussitôt après son retour en Egypte d'organiser
des régiments de cavalerie des différentes armes
usitées en Europe. Bientôt Méhémet-Ali posséda
une armée disciplinée, pendant que les désastres
de la flotte égyptienne à Navarin étaient réparés
par les soins d'un ingénieur français, M. de Cé-
risy. A la même époque une tentative d'insurrec-
tion eut lieu en Arabie ; Ahmed-Pacha, un des
généraux du vice-roi, la réprima vivement. Quoi-
que Ibrahim n'eût pris aucune part à cette
guerre , ce fut à cette occasion que le sultan
Mahmoud lui décerna le titre d'émir de La Mec-
que, peut-être dans l'espérance de jeter la dé-
sunion entre lui et Méhémet ; mais Ibrahim, quoi-
que élevé ainsi à une dignité presque égale à
celle de son père, n'en resta pas moins on fils
soumis et respectueux. Depuis longtemps Mé-
hémet-Ali convoitait la Syrie. Un différend qu'il
eut avec Abdallah, pacha de Saint-Jean-d'Acre, à
l'occasion de 6,000 fellahs qui avaient quitté l'E-
gypte et qu'Abdallah refusait de rendre, fut pour
le vice-roi un prétexte d'envahir ce pachalik.
Ibrahim reçut la mission de s'emparer de
Saint-Jean-d'Acre. Au moment où il allait se
mettre, en mouvement, le choléra éclata en
Egypte et fit d'horribles ravages dans son ar-
mée ; cinq mille de ses soldats périrent du fléau.
Les préparatifs de l'expédition furent suspendus,
et l'armée ne put partir que le 2 novembre 1831 ;
elle s'empara aisément des villes de Gaza, Jaffa
et Kaïffa. Ibrahim se rendit en Syrie par mer et
vint prendre, à Kaïffa , le commandement des
troupes. Le 26 novembre, il était en vue d'Acre,
où Abdallah avait concentré toutes ses forces.
Attaqués par terre et par mer avec la plus
grande vigueur, les 3,000 défenseurs de cette
ville résistèrent avec un courage héroïque aux
efforts de l'armée égyptienne. La longueur du
siège et les rigueurs de l'hiver jetèrent le dé-
couragement dans l'année d'Ibrahim, qui fit
lui-même des prodiges de valeur personnelle
pour ranimer l'ardeur de ses troupes. Au mo-
ment de tenter un assaut décisif, il apprend que
les pachas d'Alep, de Kaïssarieh et de Maaden
marchent au secours d'Abdallah. Il change à
l'instant le siège en blocus, et part avec ses meil-
leures troupes à la rencontre de ces nouveaux
ennemis, qu'il défait complètement non loin de
Tripoli. Cette victoire retrempe le courage des
Égyptiens ; Ibrahim les ramène sous les murs
d'Acre, et reprend avec une nouvelle ardeur les
opérations du siège, habilement régularisées par
un officier du génie, M. Rozet. Le 27 mai 1832,
le signal de l'attaque est enfin donné : les Égyp-
tiens montent à l'assaut au son de bruyantes
763
IBRAHIM
764
fanfare*. La brèche est attaquée et défendue
avec un égal acharnement ; Ibrahim voit la vic-
toire indécise, et, payant de aa personne, s'é-
lance lui-même a la téta de aet soldats, qui,
électrisés par se* exemple, aqrmontent tous les
obstacles et emportent le* derniers retranche*
ments. Le siège avait duré m mais. Abdallah»
fait prisonnier, fut envoyé en ftgypte, où Blé*
hémet-Ali lui fit bon accueil et le complimenta
même, dit-on, sur sa belle défense. Le suent*
d'Ibrahim donna la plue haute idée de les Ut
lents militaires, et amena la soumission de Da,
mas, la tille la plus importent* de l'intérieur des
terres.
Cependant la Porto, voyait dans l'oceupetien
de la Syrie un acte flagrant de rébellion de le
part du vice-roi, avait prononcé, le 23 avril, se
déchéance et celle de' son fils* Une armée nom»
hreuse et disciplinée aussi a l'européenne fut
envoyée à la rencontre d'Jprahimi Husséin-Pa?
(ha, ancien aga des janissaires, la commandait.
Mais les intrigues du vieux séreskier Khosron ,
qui voyait d'un œil d'envie la faveur que le sul-
tan accordait à Hussein , ne réussirent que trop
bien à contrarier tous les plana de ce général et
à lui faire perdre la confiance des soldats. Met
hémet-Pacha, qui commandait sous lui les trou-
pes régulières , se crut ainsi en droit de déso-
béir à son chef, et, contre les ordres positifs de
Hussein , marcha sur Homs à la rencontre d'I-
brahim. C'était la première fois que deux ar*
mées orientales organisées l'une et l'autre I
l'européenne se trouvaient en présence ** la vie?
toire fut longuement et bravement disputée j
une charge à la baïonnette, exécutée avec impér
tuosité par l'infanterie égyptienne, décida du
sort de le bataille. Lee Turcs laissèrent sur le
terrain 2,000 morts, 3,000 prisonniers, leurs
tentes et tout leur bagage. La soumission d'A-
lep et celle de presque toute la Êyne furent les
fruits du combat de Homs ( Emesa ), qui eut
lieu le 19 juillet 1832, Après avoir laissé garni-
son à Alep, le généralissime égyptien refoula les
Turcs jusqu'aux monts Taurus. Husséin-Pacha,
à qui la défaite de Homs avait enlevé la meil*
leure partie de ses troupes, essaya en vain d'ar-
rêter les Égyptiens aux défilée de Beyian-Bo-
ghasi (Portes Syriennes), les retranchements
furent encore enlevés à la baïonnette par l'infan-
terie égyptienne, habilement secondée par l'ar-
tillerie et la cavalerie, qui poursuivit les fuyards,
et fit 2,000 priaapniers. Maître des défilés du
Taurus, Ibrahim s'avauea rapidement dans l'A*
aie Mineure. Un autre général turc, le grand?
visir ftesehid~Paoha, reçut le mission d'arrêter
ta marche du conquérant victorieux, qui seul*
blait déjà menacer ConstanthMpie. Quoiqu'une
armée formidable , bien fournie de vivres et de
munitions, et un grand matériel d'artillerie
fussent mis à la disposition de Resehid, le vieux
Khosrou , jaloux de voir encore le sultan confier
à un autre que lui le commandement des ar-
mées, sut de nouveau! par de sourdes menées
paralyser les efforts du grand-viair. Forcé d'o
béir à Tordre formel qu'il reçut du divan, et
quoique convaincu lui-même du désavantage de
sa position, Reechidjivra bataille aux Égyptiens
à Konieh, le «0 décembre 1832, et, dans cette
journée, Ibrahim défit si complètement l'armée
turque qu'il mit en cause l'existence même
de l'Empire Ottoman, Il eût été facile alors
au fila de Méharnet-Ali de marefoer sur la capi-
tale de l'empire i mais, soumis aux volontés
de son père, il a'errftta. Lee puissances de
l'Europe intervinrent i «t le traité de Kutahieh,
conclu le 14 mal 1833, sauva l'empire Ottoman
de sa ruine, qui semblait imminente.
Par ee traité la Forte consentait a aban-
donner an vice-roi d'Egypte la Syrie, et cédait
fr titre de fief le cercle d'Adana à Ibrahim per-
sonnellement, Gouverneur de la. Syrie en nom
de son père, il organise ce pays avec habileté,
tout en lui faisant sentir le poids, d'une autorité
ferme jusqu'à l'oppression. De fréquentes ré-
voltes éclatèrent dans les. montagnes du Liban
et envahirent parfois même le littoral. Ibrahim,
puissamment aidé par le vieux émir Béchir,
prince des Druses, parvint fe soumettre les re-
belles et à les contraindre de payer les contri-
butions et de fournir leur contingent d'hommes
au* armées du vice-roi. L'msurrecfonde 1*3*,
plus formidable que les, précédentes, faillit déjà
soustraire laSyriefr la. dorowMiop égyptienne. Les
Druses et les Naplousains, excités à> révolte par
la Porte, se soulevèrent en ruasse et bravèrent
longtemps le* armes d'Ibrahim. « fl tut obligé
cette fois, dit M, UW* de recourir à une ex-
trême rigueur. Up grand nombre de rebelles
furent mis à mort» plusieurs villages furent in-
cendiés, et la population entière soumise à un
énorme irapo* de guerre. » fce sultan essayas*
eore une fois en 1839 de ramener à. l'obéissance
le redoutable Méhémet-Ali. Pans ce but le divan
ordonna au aéfgsJiier HafU-Pacfoa de franchir
l'Euphrate, et Mébémet vjt dans cette marche
une infraction au traité de Kutabieh. En consé-
quence, Ibrahim reçut l'ordre de iuarcheroantre
les Turcs* Les deu* armées en vinrent au
mains à Néiib, le 24 juin 1*39. Grâce aux ha-
biles manœuvres d'Ibrahim et de poiranan (Sel-
ves), l'armée turque , malgré sa défense opi-
niâtre, fut complètement mise en déroute. Va
immense butin resta eu pouvoir du vajuquesr.
Cependant I|irahim.< obéissant aveuglément,
selon sa coutume, au* ordres de sop père qui
lui forent apportés « quelques jours après la
bataille, par le capitaine Caillé, aide de canna 4a
maréchal 0uult (alors président dp conseil des
ministres) envoyé en ÉfifPte ave© une nussioa
partieol^re, s'arrêta, enmme à, Konieh, an stia
de la victoire.
Les grandes puissances de l'Europe se mê-
lèrent aussitôt du différend. Toutes manife*
tèrent le désir de maintenir l'intégrité de l'Em*
76* IBRAHIM
pire Ottoman. Mais on était loin de s'entendre
sur les moyens, pendant qu'on discutait en Eu-
rope, une insurrection éclata dans le Liban. Enfin
le 16 juillet 1840, contre l'avis et sans la parti-
cipation de la France, un traité fut conclu à Lo&*
dres entre l'Angleterre, l'Autriche, la Prusse et
ja Russie, pour foncer Méhémet-Ali à accepter
les conditions que lui faisait la Porte de l'hé-
rédité de l'Egypte, avec le commandement de la
forteresse de Saint- Jean d'Acre sa vie durant,
sous le titre de pacha d'Acre, et l'administration
de la partie méridionale de la Syrie, à la condi-
tion d'accepter ces offres dans les dix jours de
la notification et de quitter aussitôt l'Arabie, les
villes saintes, 111e de Candie, le district d'A*
dana et toutes les parties de l'empire non corn*
prises dans le pachalik d'Aere. En cas de refus,
les flottes anglaise et autrichienne devaient d'à*
bord aider les populations qui désiraient rem
trer sous la puissance du sultan. Les Anglais
livrèrent des armes aux insurgés. Lelt sep-
tembre, après neuf jours de bombardement,
Beyrouth fut évacué par les Égyptiens. L'in*
surrection s'était étendue. Bidon ne résista pas,
et Saint-Jean-d'Acre ne put tenir plus de trois
heures contre le feu de l'escadre de siège. Bien-
tôt les Égyptiens furent chassés des positions
qu'ils occupaient sur la cote. L'émir Béchir avait
abandonné la cause du vice-roi et s'était rendu
aux alliés. Ibrahim s'était retiré avec son armée
sur Damas , ou il ne pouvait guère tenir. Le Com-
modore Napter s'apprêtait à commencer le siège
d'Alexandrie quand le vice-roi Be décida à ac-
cepter, le 27 novembre, l'ultimatum qu'on lui
présentait et à signer une convention provisoire
par laquelle il s'engageait à évacuer la Syrie et
à restituer la flotte ottomane que lui avait livrée
le capitan-paeha au commencement des hosti-
lités , dès que la résolution de la Porte de le main-
tenir dans le gouvernement de l'Egypte lui serait
notifiée sous la garantie des grandes puissances*
Tout cela ayant été accordé, Ibrahim-PacHa ac«
complit sa retraite vers l'Egypte. H opéra ce mou-
vement avec des difficultés et des pertes incalcu-
lables, et en marchant sur trois colonnes à travers
le désert. Depuis cette époque, Ibrahim, qui par
suite des conventions faites entre son père et la
Porte était désigné pour son successeur, sem-
bla se retirer des affaires publiques et s'occupa
surtout d'encourager l'agriculture dans ses do-
maines. H possédait dans la plaine d'Héliopolis de
grandes propriétés, oh l'on vit les plus belles plan-
tations de l'Egypte. Il les fit couvrir de cotons
niers et d'oliviers. La culture de ces derniers
avait été abandonnée dans ce pays. Ibrahim en
fit planter à lui seul plus de 80,000, rangés symé-
triquement; dans les intervalles, il fit semer de
l'orge, des fèves et du blé. Ce ne fut qu'en 1844,
à l'occasion de la résolution aussitôt abandonnée
que prise par Méhémet-Ali de quitter le pouvoir
et daller vivre à La Mecque, qcton vit Ibrahim
reparaître sur la scène potilique. Mais déjà ilres-
— IBYCUS 766
sentait les premières atteintes du mal auquel j|
devait succomber. Les médecins lui conseillèrent
un voyage dans le midi de l'Europe. En 1845
Ibrahim arriva en Toscane, od il prit les bains
de San Giuliano, et parut à Florence, accompagné
du docteur Lallemand , qui lui témoignait une
grande affection et lui conseilla les eaux du Vernet
dans les Pyrénées. Ibrahim se rendit d'abord
Gènes, puis à Toulon , au Vernet, à Toulouse , ^
Bordeaux, et enfin à Paris. Partout il fut accueilli
aveoraveur. Logea l'Elysée Bourfrm» il passa un
mois en fêtes, bals, festins et revues. H visifa
ensuite l'Angleterre , et revint à Alexandrie au
mois d'août 1846, après avoir relâché ? Cadix,
Lisbonne, Gibraltar et Malte. Son séjour en,
Europe et la vue de la civilisation occidentale
avaient encore agrandi ses idées politiques, ainsi
qu'il le prouva à son retour par de certaines me?
sures de tolérance. Méhémet-Ali, accablé de vieil-
lesse, dut lui laisser prendre plus de pouvoir;
mais son mal s'aggravait. Atteint d'qpe dyssen-
terie violente, il quitta Le Caire en 1847, pour re-
venir à Alexandrie, où il sentit du mieux. On
lui conseilla encore de changer de climat. Il
parut à Malte, passa l'hiver en Italie et retourna
en Egypte. Les facultés de Méhéinet-Ali bais?
saient sensiblement. Au mois de juillet 1848,
Ibrahim alla à. Gonatantinople, pu il futcpnprmé
dans la dignité de vice-roi d'Egypte ; mais il mou-
rut peu de temps après son, retour et quelques
mois avant Méhémet-Ali-
M. Clot-Bey a fait d'Ibrahim le portrait sui-
vant i « Il est d'une taille peu élevée (environ cinq
pieds deux pouces) ; il est fbjrtementconstitué ; les
fatigues de la guerre ont finit blanchir de bonne
heure ses cheveux et sa barbe, qui étaient aupa-
ravant d'un blond ardent. Sa figure est allopgée,
son nei long et effilé ; il a les yeux gris et le visage
gravé de la petite vérole. Son tempérament est
sanguin-bilieux \ il est naturellement sérieux,
quoiqu'il se livre parfois fr l'hilarité. Sa voix
est forte. 11 n'a pas l'amabilité de manières qui
distingue son père ; son abord , sans être dur
ni désagréable, intimide, v Un peu gros de corps,
sa physionomie était noble et imposante, spu œil
était vif et pénétrant ; son regard fixe, hardi et
digne. Il s'hahillait simplement et portait ordi-
nairement le fès, une veste égyptienne brune, et
s'entourait le corps d'un cachemire. Son courage
était à toute épreuve, et M. Label le comparait
à un sabre vivant.
S— F— OetL. *>rrT.
Clot-Bey, aperçu généra s*r l' Egypte. — l^bat, UÉ-
%Wte ancienne fit moderne. — Cadalvène et E. Barrault,
Histoire de la Guerre de Jffehémeô-Jti contre ta
Porte Ottomane en Syrie et en Asie Mineure ( latt-
is**), et Doux Années de V Histoire d'Orient < im-nw^
— SchCBRefeldt dans \'Encyc\. des Qens du monde. —
Dictionnaire de la Conversation. — Rabbe, V»eHh
de Bolsjolln et Sainte-Preuve, fHogr. tente, et portât.
ibycus ('16fao< ), poète lyrique grec, le cin-
quième sur lajiste ou canon des Alexandrins, n^
à Rhegium, à l'extrémité méridionale de l'Italie,
767
IBYCUS - ICARD
76S
vivait vers le milieu du sixième siècle avant
J.-C. La population de Rhegium était un mélange
d'Ioniens de Chalcis et deDoriens du Péloponnèse
ou Messéniens, qui avaient quitté leur patrie à la
suite delà seconde guerre de Messénie. Ibycus,
qui appartenait sans doute à la race dorienne, a
été appelé quelquefois Messénien. On croit que son
père se nommait Phytius, bien que certains auteurs
l'appellent Polyzelus, Cerdas, Eclidas. Comme
plusieurs autres poète» lyriques, Ibycus eut
une vie errante. Il en passa une partie à la cour
de Polycrate, tyran de Samos, vers la soixantième
olympiade, 540 avant J.-C. Suidas le place par
erreur vingt ans plus tôt, du temps de Crésus et
sons le père du tyran. On n'a pas d'autres détails
de sa vie , excepté la tragique aventure qui la
termina. Un jour qu'il traversait un endroit dé-
sert près de Corinthe, il fut assailli par des vo-
leurs qui le blessèrent mortellement. Avant
d'expirer, il prit à témoin du meurtre une troupe
de grues qui vinrent à passer au-dessus de sa
tête, et les adjura de venger sa mort. Peu de temps
après, comme le peuple de Corinthe était as-
semblé au théâtre, des grues planèrent sur les
spectateurs, et un des assassins, qui se trouvait
présent, s'écria : « Voilà les vengeurs d'Ibycus. »
Cette parole amena la découverte des meur-
triers, qui furent punis de mort : de là le pro-
verbe grec « les grues d'Ibycus. » ( al *Iêuxou
■yépavoi). Schneidewin a contesté la réalité de
ce fait, où l'on peut sans doute ne voir qu'une
belle légende ; mais son objection, fondée sur
l'existence du tombeau du poète à Rhegium, ne
prouve rien, car on sait que les Grecs élevaient
des tombeaux ou cénotaphes à ceux de leurs il-
lustres concitoyens dont ils ne possédaient pas
la dépouille mortelle.
Il ne reste d'Ibycus qu'un très-petit nombre
de fragments. Eu les combinant avec les divers
passages des anciens où il est question de lui,
on peut à peine se faire une idée de son génie et
de sa manière. Son langage était l'ionien épique,
avec des locutions particulières au dialecte de
Rhegium. Les critiques anciens le rapprochent
de Stésichore. Comme ce poète, il transporta
dans l'ode les sujets de l'épopée, et chanta la
guerre de Troie, l'expédition des Argonautes. Il
dut surtout sa célébrité à des compositions eroti-
ques aussi remarquables par l'impureté que par le
talent de Fauteur. Cicéron a dit de lui: « Maxime
veroomnium flagrasse amore puerorum Rheginum
Ibycum apparet ex scriptis ». Cette accusation
ne paraît pas invraisemblable lorsqu'on songe aux
mœurs voluptueuses de la cour de Polycrate où
Ibycus avait longtemps vécu. Cependant comme
les témoignages contre lui viennent d'écrivains
qui vivaient plusieurs sièclesaprès sa mort, on peut
supposer que ces écrivains ont mal interprété ses
poésies et oublié dans quelles circonstances elles
avaient été composées. Ses odes ne ressemblent
pointa des poésies intimes ; la longueur des stro-
phes, la structure artificielle des vers prouvent
qu'elles étaient chantées par des chœurs , dans cer-
taines solennités. Un anniversaire de naissance,
ou toute autre fête de famille, une victoire au
gymnase étaient des occasions pour le poëte'de
venir avec un chœur dans la cour de la maison du
jeune homme objet de ses chants, et de le célé-
brer avec toute la pompe lyrique. Sur beaucoup
de vases peints, trouvés dans la grande Grèce,
patrie d'Ibycus, on voit représentées des scènes
de gymnase avec cette inscription : « Il est beau
l'enfant » ( KaXo; à naïç ). Nous croyons avec
Ot. Muller que les odes erotiques d'Ibycus cé-
lébraient les faits représentés sur les vases
peints. Il est vrai qu'à travers l'appareil lyrique,
les sentiments intimes du poète pouvaient se
faire jour par la bouche du chœur. Les plus beaux
vers qui nous restent de lui appartiennent évi-
demment à l'inspiration personnelle. On en ju-
gera par les deux fragments suivants : « Au
printemps les cognassiers fleurissent arrosés par
les sources courantes dans le jardin intact des
vierges ; les grappes croissent sous le verdoyant
ombrage des tendrons de la vigne; mais pour
moi l'amour ne s'apaise en aucune saison :
comme le vent de Thrace brûlant sous les éclairs,
l'amour s'élançant de Cypris avec ses ardeurs
insensées, sombre, indomptable, possède vio-
lemment mon âme dès l'enfance. » — « De nouveau
l'amour, sous ses noirs sourcils, me regardant de
ses yeux qui fendent l'âme, m'attire par toutes
sortes de doux appels, dans les filets sans fin
de Cypris. Je tremble à son approche, comme
le cheval qui a remporté le prix dans les cour-
ses, tremble lorsque près de la vieillesse il loi
faut reprendre le harnais et entrer en lice avec
les rapides attelages. » — Dans ses odes erotiques
Ibycus introduisit les légendes qui se rappor-
taient à ce genre d'inspiration; ainsi, dans une
ode à Gorgias, il raconta l'enlèvement de Gany-
mède et de Tithon. Les Fragments d'Ibycus
ont été recueillis par Schneidewin : Ibyci Car-
minum Reliquise, avec une préface de Ot Mill-
ier; Gœttingue, 1833, in-8°. On les trouve aussi
dans le Delectus Poes. Eleg. de Schneidewin,
et dans les Fragm. Poet. lyr. Grsec. de Bergk.
L. J.
Soldas, Lex. — Anttpater de Sldon, Epigr. 73, dans
les Anal, de Brunck, vol. II, p. Vt. — Plutarque, de Car-
ral. t p, 610.— Cicéron, Tu seul, VI, 83. — Dranck.'^na/.,
vol. III, p. 16S. — BOttiger, Amatthea, I, p. ». — Her-
mann, dans les Jnn. de Jabn, IX, 871. — Welcler, Bkein.
Mus., 1882, vol. III, p. 401 ; Kleine Schri/ten, vol. I,
p. 100. - Ot. MttlIeT-, Dorier, vol. II, p. 850. — Hist. of
Lit. of ancient Greeee, ch. XIV,
icard (Charles), ministre protestant français,
né à Saint-Hippolyte (Languedoc) en février 1636,
et mort à Brème, le 9 juin 17 1 5, des suites de l'opé-
ration de la taille. Après avoir fait ses études clas-
siques à Anduze, Orange et Nîmes, où il suivit
quelques cours de théologie, il alla a Genève en
1655, et à la fin de ses études théologiques, il
se rendit à Pari3 (1659). Admis au ministère
évangélique par le synode provincial d'Ay, il
(ht nommé pasteur à LaNorville. En Î66S, dans
76fr
ICABD — ICELUS
770
un voyage qu'il fit pour visiter sa famille, il prê-
cha à Nîmes avec succès. On lai offrit une place
de pasteur dans cette ville ; il l'accepta. Cepen-
dant les vexations de tous genres dont les pro-
testants étaient les victimes redoublaient à me-
sure que Ton approchait de l'époque qui devait
être témoin de la révocation de l'édit de Nantes.
Le besoin d'une commune défense fit créer,
sur la proposition de Claude Brousson, un co-
mité directeur des affaires protestantes. Icard,
qui s'était fait connaître par sa fermeté, en fut
nommé membre pour le synode du bas Langue-
doc, réuni àUzès en 1682. Sur ces entrefaites,
quelques populations du Vivarais et du bas Lan-
guedoc, exaspérées par la persécution', pri-
rent les armes ; l'insurrection fut étouffée dans
le sang, et les ministres qui faisaient: partie du
comité directeur furent regardés comme les
auteurs du soulèvement et poursuivis avec la der-
nière rigueur. Icard réussit à se sauver à Ge-
nève. Ne s'y croyant pas en sûreté, il se retira à
Neufchâtel. En se rendant dans cette ville, il
apprit, à Yverdun, qu'il avait été jugé par
contumace et condamné, le 26 juin 1682, à périr
sur la roue. Nommé pasteur à Neufchâtel, il y
resta jusqu'en 1688. Il fut alors appelé à Brème,
où il desservit l'église française jusqu'à la fin de
ses jours. On a de lui deux Sermons, dont un lui
attira un procès devant la chambre de l'édrf de
Castres ; — un Avis salutaire aux Églises ré-
formées de France; Amsterd., 1685, in- 12, pour
exhorter ses coreligionnaires à ne pas céder à la
persécution ; — une édition des Institutions de
Calvin, dont il rajeunit le style ( les deux pre-
miers livres, Brème, 1696-97, in-4°, et le tout,
Brème, 17 13, in-fol. ) ;— une édition des Entre-
tiens d'un Père et de son Fils sur le Change-
ment de Religion, parJosué de La Place, dont
il eut le tort de retoucher le style, qui n'avait rien
de suranné. Michel Nicolas.
Détail abrégé delà Fie de Ch. Icard, par Hotsal (son
gendre ); dam l'Histoire critiqué de la République des
Lettres} 1717, tom. XIV, p. 183-301. - MM. Haag. La France
protest,
* icaeius, poète et administrateur romain,
vivait vers la fin du quatrième siècle de l'ère
chrétienne. Il était fils du notaire Théodore, qui
fut mis à mort avee plusieurs autres personnes
à Antioche, en 371, sous le règne de Valens, pour
avoir cherché à découvrir par des arts magiques
quel devait être le successeur de l'empereur. H
se distingua par ses talents littéraires. Tillemont
voudrait l'identifier avec un rhéteur du même
nom mentionné dans les Confessions de saint
Augustin; mais cette conjecture ne parait pas
fondée. 11 écrivit un poème en l'honneur de
Théodose. Cette composition, dont il ne reste
rien, lui valut la dignité de comte d'Orient. H
entra en charge en 384. Antioehe souffrait alors
de la famine ; Icarius crut remédier au mal en
taxant le prix du pain. Cette mesure, qui obligea
les boulangers à s'enfuir, ne fit qu'aggraver le
fléau. Elle fut rapportée, sur les instances de
WODV. BIOGR. Gémfe. — T. 1XV.
Libanius , que le comte traitait avec un respect
filial ; mais Icarius revint bientôt à ses procédés
arbitraires, et donna carrière à son caractère
soupçonneux. On croit qu'il était païen. Libanius
lui adressa trois harangues , dont deux invec-
tives. La seconde invective, omise dans l'édition
des ouvrages de Libanius par Morel , a été insé-
rée dans l'édition de Reiske. Ces trois harangues
et un discours de Libanius Sur sa vie ( Ilepl Tïfc
loturoû ttixTK )• Y.
Tillemont, Histoire des Empereurs, vol. V, p. 1108, *17.
* iccius, philosophe romain, amidUorace (1),
vivait vers 30 avant J.-C. Horace lui adressa
une ode et une épttre. L'ode fut écrite en 25
avant J.-C., lorsque lcoius se préparait à accom-
pagner JEWxa Gallus dans l'expédition d'Arabie.
Le poète dissuade son ami de quitter, pour des
profits douteux et des périls certains, le repos
et l'étude de la philosophie. On ne sait si cette
ode produisit de l'effet sur Iccius, mais dix ans
plus tard on le retrouve trésorier de Vipsanius
Agrippa en Sicile , toujours étudiant la philoso-
phie, et n'ayant pas encore appris la modération,
puisque son ami Horace est forcé de lui rappeler
que le bonheur n'est pas dans les richesses, et
de lui dire, avec un bon sens un peu prosaïque :
SI rentri bene, si lateri est pedlbusque tais, nll
Dlvltiae poterant regales addere majos.
Jaoobs a défendu Iccius contre l'imputation d'a-
varice. Y.
Horace, Carm. $ I, *>; Epit. y I, lt. — Jacobs, dans le
Rhein, Mus., II, 1; Ferm. Schr. t V, p. 1-30.
* iccus ("Ixxoç), athlète et professeur de gym-
nastique de Tarente, vivait vers la 77 e olymp.,
470 avant J.-C. Pausanias te regarde comme le
meilleur gymnaste de son temps, et Platon le
mentionne aussi avec grand éloge. Il regardait la
tempérance comme le fruit des exercices gym-
nastiques. Jamblique l'appelle un philosophe py-
thagoricien, et, suivant Themistius, Platon le
comptait au nombre des sophistes. Y.
Pausanias, VI, 10. — Platon, De Letfb., VIII, p. 840;
Protag., p. 316. — Laden , Quomodo hist. sit conscrit?.,
31. - Élleo, Far. Hi$t. y XI, 3. - Jamblique, Vita
Pythag., 3fi. - Themistius, Oral, XXIIÏ, p. 360. édtt.
Dlndorf.
* icelus maecianus, affranchi de Galba,
mis à mort en 68 après J.-C. Arrêté par l'ordre
de Néron, à la première nouvelle de la défection
de Galba, il fut relâché lorsque la révolte eut ga-
gné Rome. Il rendit le corps de Néron à ses af-
franchis, et se hâta d'aller annoncer à Galba, alors
à Clunia dans l'Espagne Tarragonaise, que l'ar-
mée et le sénat venaient de lui décerner l'em-
pire. Le nouvel empereur le récompensa de son
zèle en lui donnant le titre de chevalier et le nom
de Marcianvs. Icelus fut un des plus puissants et
(i> On connaît encore deux reclus. — ledus, noble de
Reims dans la Gaule Belgique. Il fut mis à la tête d'une
députatlon de ses concitoyens qui, en 89, allèrent placer
leur État sous la protection de César et lui demandèrent
son assistance contre les autres tribus belglqnes. ( cé-
sar. Bel. Gai., II, S, 6 ). — Iccius nommé préteur de Si-
cile par Mare-Antoine, en novembre 44.
771
1CELUS — ICILIUS
m
des plus rapaces parmi les affranchis et les fa-
voris de Galba. Dans le dissentiment qui parta-
geait les conseillers de l'empereur, il se rangea
du coté du préfet du prétoire, Cornélius Laco,
et s'opposa à l'élection d'Otbon. Après la mort
de Galba, tcelus fut exécuté comme un affranchi,
et sans aucun égard pour sa nouvelle dignité
Y.
Tacite, HUt., 1, 1», 88, 87, 48 ; II, 9*. - Suétone, Néron,
49 ; Galba, 14,lt. — Plutarque, Galb., 7. — tHon Coté**,
LX1V, I.
icBfift ( Pierre) , médecin et helléniste fran-
çais , né à Montpellier, le il janvier l«5«, mort
dans la même ville, le 22 mai 1713. San pè»
était procureur de la tfeamtoe des compte*.
Icher fit ses études dans sa ville natale; et comme
sa famille était protestante , il ftrt envoyé an*
prendre les sciences physiques à Genève, n se
décida à suivre là carrière de ta médecine, et se
fit recevoir docteur en 1680. Il Tevint dans toa
patrie, embrassa le cathoUcfsme, et avait déjà
une belle clientèle lorsqu'une affection ue tv tw»
le força de renoncer à la pratique. K là formatiez
de la Société royale des Sciences de Montpcftie* v
Icher fut appelé à en faire partie comme physi-
cien, et fit de nombreux Rapports à cette société
savante, n a laissé d'Importantes Remarques sur
Aristophane et sur le dialecte attiqoe. L— z— e.
Ganteras, Éloge de P. Ictusr* daûs les Élopes dm dca-
démiciens de Montpellier, p. S. — R, Desgenettes, dans
- la Biographie médicale.
ichon {Pierre-Jjouis), nomme politique
français, né fin Gascogne, vers 1756, mort à
Thouars, le 5 janvier 1839. D entra fort jeune dans
les ordres, et devint supérieur de la maison de
l'Oratoire à Condom. Il accepta les idées libérales,
et fut nommé, en 1791, membre 4e l'Assemblée
législative par les électeurs d« Gers. 14 se plaça
dans les rangs de l'opposition (côté gauche), et
s'éleva constamment contre les prêtres qui re-
fusaient le serment oonrôtotionael ( prêtres ré-
fractaires). Le 22 mai 1792 il prononça contre
eux un discours des plus énergiques, demandant
que « puisqu'ils ne voulaient point reconnaître
les lois acceptées par leur pays, le pays ne fut
pas obligé de payer leurs émoluments ». par un
amendement assez singulier, il proposa ensuite
de leur continuer leur traitement intégral , mais
à la condition qu'ils sortiraient aussitôt de France :
« C'était, disait-il , se débarrasser encore 4 -bon
marché de ferments de discorde. » Comme ec-
clésiastique, il se prétendait compétent dans la
cause; néanmoins, soniimendement n'ayant pas
été adopté, 11 vota pour la déportation pure et
simple des récalcitrants. Réém à la Convention ,
il siégea au sommet de >la Montagne, et fut un de
ceux qui à la Société des Jacobins, dont il était
membre influent, 'provoquèrent la mise en ac-
cusation de Louis XVI. Il vota sans appel ni sursis
la mort de ce monarque. Envoyé, quelque temps
après , avec Dartygoyte en mission dans la Gi-
ronde , il se montra surtout le persécuteur des
prêtres non- assermentés, n fut arrêté a Bor-
deaux à la nouvelle des évâteMettfe <to si mai;
mais les autorités le firent mettre et liberté, et
il revint à Paris. Ses eottègues IWroyèreotdâas
le Loiret pour y organiser des remontes de ca-
valerie. Pour un et-abbé, la mission peut sembler
étrange. Barrère attaqua tes opérations d'fcfanà
l'occasion de la conduite d'un 4e ses délégués,
nommé Foorniet ; celte fcottosatien n'est pas de
sufte. Sous Napoléon, fchon devint inspecteur*
| la loterie à Sentis , mais 11 fut 4estftié es ISIS,
: et expulsé de France comme régicide. II te revit
sa patrie qu'après ta tévotoflen de «30, et ne*
! rut dans la retraite. H. Leboedr.
j Le MvniUtor gentr*, kb a, «• vto, m, ne; ni n
; n* *7S. - Armlt, Jay, J<*j et Jtorrtu» BioçrtpHe
; nouvelle des Contemporain».
i iciar ( Juan dc ), grammairien et calligraphe
j espagnol , né à Durango, en 1550. 11 était profes-
; seur de langues et dessinait fort bien. On a de
j lui : Ortoçrafia practica, ou or te deescribir;
| Saragosse, i575. Cet ouvrage, très-rare et très-
estiraé, contient une série d'ornements do goût le
4>lus pur, et tous dessinés par l'auteur. 11 a été
j .gravé sur bois par Juan Vingles. L— z-e.
QtiUlet, Dictionnaire des Peintres espagnol*.
iciLiirs (Spurius), membre de la maison
plébéienne des Icilius (Tcitia gens) , distinguée
dès les premiers temps de la république par son
opposition aux patriciens , vivaft an commeux-
ment du cinquième siècle avant 5.-C. II fat m
des trois envoyés que les plébéiens, après leur
sécession sur le mont Sacré, chargèrent de traiter
avec le sénat, en 494. Il ne parait pas avoir été
élu aux premières élections trîbùnitiennes en 493,
mais seulement à celles de l'année suivante. Pen-
dant sa magistrature il attaqua violemment le
sénat à cause de la cherté des subsistances, et il
proposa que les tribuns fussent autorisés à cotto-
quer des assemblées. Cette loi portait : « Dans te
assemblées du peuple tenues par les tribuns, que
personne ne les contredise ni ne les hfterrompe.
Si quelqu'un enfreint cette loi, il donnera caution
atrx tribuns de se présenter quand il sera cité, et
de payer l'amende à laquelle il* sera condamné.
Que celui qui refusera de le faire soit mis à mort,
et que ses biens soient consacrés aux dieux. SU
arrive des contestations au sujet de l'amende, que
le peuple soit juge du différend. «Niebubrremarqoe
que cette loi n'a pas pu passer avant la loi Pu-
blilia, en 471, qui transféra Télection des tribuns
des comices par centuries (c&mitiacimtvriats),
aux comices par tribus (camftia tr&>&a),&P
donna à ces magistrats le droit de proposera
mesures dans les comices par tribus, droit <p%
ne possédaient pas dans les comices par conv-
ries. Il suppose donc que la loi Icilrâ passa a
471, sous le tribunat d'un autre ïcinus. Il est pro-
bable en effet que la loi ne fut votée qu'eu 471,
mais rien ne s'oppose à ce que Sp. ïrilios, tribun
en 471, fat le même flue l'IciKus tribun en 493.
Pendant son premier tribunat, Sp. Icilius fotéta
édile, et prit une part active aox pouTstrite? di-
rigées contre Coriolan. Y-
773
1CIUU5 — IDA
774
Tlte LlFfi, II, «, M. — Denjji d'HaUcarn*s«e, VI, 88;
VU, u, 17, î6, 55; IX, l. - Cicéron, Pro Settlo, 87. -
Ktebuhr, Histoire Romaine, trad. de Golbéry.
icilius (Lucius), fils de C. Icilius Ruga,
mentionné par Denys d'Halicarnasse comme un
des cinq premiers tribuns du peuple élus après
l'étabtissement de cette magistrature en 493,
vivait dans le cinquième siècle avant J.-C. Pen-
dant «on premier tribunat, es 466, il réclama
pour les tribuns le droit de convoquer Je sénat
Il fit passer aussi , malgré l'opposition furieuse
du sénat et des patriciens, une loi relative au
mont Aventio, Cette colline faisait partie du do-
maine public.; mais les patriciens y avaient cons-
truit des maisons, et exigeaient des plébéiens
des droits de location. La loi Jutia indemnisa les
patriciens pour leurs bâtiments , et attribua 4e
mont Aventin aux plébéiens. Cette mesure, qui
«enlevait le quartier populaire à l'influence des
patriciens, avait une grande importance politique.
L'année suivante, Icilius et ses collègues, réélus
tribuns, proposèrent une loi agraire dont les pa-
triciens n'empêchèrent le vote que par la force
ouverte. Six ans plus tard, en 449, Icilius fut un
des chefs de l'insurrection contre les décemvirs.
Virginie, fille de L. Virginius, lui avait été pro-
mise en mariage. Le décemvir Appius Claudius ,
qui avait conçu une vive passion pour cette jeune
fille , essaya de l'enlever, en la livrant, par un
abus de son pouvoir judiciaire, à C. Claudius, un
de ses clients. En l'absence de Virginius, retenu
à l'armée, Icilius défendit courageusement sa
fiancée, obtint que la sentence serait remise au
lendemain , et donna à Virgfnius le temps d'ac-
courir. Le récit des événements qui suivirent
jusqu'à la mort de Virginie n'appartient pas à cet
article. Aussitôt après la cataatnaphe, tandis que
Virginius soulevait l'armée domaine du mont
Algide et l'entraînait sur l'Aventùi , John** se
rendit auprès des troupes campées dans la Sa-
bine, et les décida à se tourner contre les décem-
virs. Les deux années insurgeai s'établirent sur
le mont Sacré, forcèrent les décemirirs à résigner
leur pouvoir et obtinrent le rétablissement du
tribunat. Élevé pour la troisième lois à cette ma-
gistrature, Icinus fit passer un plébiscite oui
assurait l'impunité aux insurgés, et poursuivit
M. Claudius, le client du décemvir. Il obtint aussi
du peuple, et malgré le sénat, les honneurs du
triomphe pour les consuls L. Vaterius et M. Ho-
ratius. Y.
Tlte Lire, III, si, U-54, 68. - Denys dTTalIcarnassc ,
X, si-M; XI, 18, »6. - Nlebuhr, Hiit. Romaine, trad. de
Golbéry.
Icomcs. Voy. Goetz.
* ictinus ( 'Ixtîvo; ), le plus célèbre architecte
du siècle de Périclès (cinquièmeavant J.-C. ). Par
«ne rare fortune , sur trois des monuments qu'il
construisit, deux sont encore debout et permet-
tent à la postérité d'admirer le génie dictions.
En 444, il commence le Parthénon , aidé par l'ar-
chitecte Callicrate et sous la direction de Phidias,
qui présidait à toutes les entreprises de Périclès.
Le temple fut achevé en cinq ans, et la rapidité ne
nuisit en rien à son inimitable perfection. Ictinus
appliqua à sa construction la science la pins raf-
finée des proportions. Les modernes yjennent seu-
lement de s'apercevoir, il y a quelques années, que
les lignes courbes avaient été partout substituées
aux lignes droites, a6n.de donner à l'architecture
un caractère pins doux, puis harmonieux. Proba-
blement Ictinus avait consigné tous les éléments
de ces curieux problèmes dans un traité sur le
Parthénon, qu'il éemjt de concert avec un cer-
tain Garpion. Yitruve a «onnu ce précieux ou-
vrage, qui est nwftanreusement perdu pour la
postérité.
letinus fut changé encore par Périclès de nous-
truire la <raste enceinte destinée aux initiés d'E-
leusis <p.u<mx0c oipoc). Cet édifiée, dont on
retrouvera probablement le *4an en déblayant
Éieasis, était immense et pouvait nantenk autant
de personnes qu'un théâtre.
L'amitié qui liait Ictinus a Phidias lui fit sans
doute prendre Athènes en dégoét quand le grand
sculpteur dut s'expatrier pour échapper aux per-
sécutions de ses concitoyens. Pendant que Phi-
dias ornait le temple d'Olympie, Ictinus, non
loin de là, sur les sommets des montagnes d'Ar-
cadie, construisait son temple d'Apollon Epi-
courios. La situation admirable du monument
ajoute encore à la beauté des ruines. Il est d'ordre
dorique , comme le Parthénon; mais l'ordre inté-
rieur est ionique et les colonnes sont engagées
dans des saillies du mur. Un architecte français,
M. Lebouteux, a mesuré et dessiné le temple
de Phigalie avec plus de soin et d'exactitude
que n'avait pu le faire Blouet pendant l'expédi-
tion de Morée. De même les travaux de M. Pac-
card sur le Parthénon sont justement renommés.
Le temple de Phigalie dut être construit avant
la guerre du Péloponnèse, quelques années après
l'achèvement du Parlhénon. Pendant l'absence
d'Ictinus, les Propylées furent bâtis : c'est pour
cette raison, sans doute, que Périclès, n'ayant
plus Ictinus sous la main, chargea Mnésiclès
d'exécuter ce nouveau .chef-d'œuvre. JSeulé.
Pawanin, vtH, 41. - Strpbon, IX, p. m, 896. -
Nutarque, Périclès, U- *- Vlt/av/c, vu, Proœm. - <B£tfJé,
Acropole d'Athènes. - Expédition dé Morée.
ida, première ahbesse du couvent d'Argon -
soles, morte en 1226. Lorsque la comtesse de
Champagne, Blanche, fonda ce monastère, ette
appela pour la gouverner cette religieuse, qui
avait acquis en Hollande une grande réputation
de vertu et de savoir. Un moine de l'ordre de
Ctteaux, Philippe, écrivit sa vie, qui est restée
inédite. Thomas de Cantimpré raconte, dans
son Livre des Abeilles ,' qu'Ida discutait avec
«ne rare inteHigenoe les questions les plus ar-
dues de la théologie ; il ajoute, circonstance con-
testable sans doute, qu'elle demanda et obtint
la grâce de mourir en remplacement de la
comtesse Blanche. Un pareil vœu n'avait guère
25.
775
IDA — IDÀNTHYRSE
776
d'exemple et n'a pas trouvé beaucoup d'imita-
teurs. G. B.
Histoire Littéraire de la France, t. XVIII, p. 5*1.
idace, surnommé Clar us on V Illustre, prélat
espagnol, né dans la première moitié du qua-
trième siècle, mort vers Tan 392. Devenu
évéque de Merida, il se signala par l'ardeur
avec laquelle il poursuivit, en commun avec
Ithace, évoque d'Ossobona, l'hérésiarque Priscil-
lien (voy. ce nom) et les adhérents de ce der-
nier, contre les doctrines duquel il écrivit, sous
le titre d'Apologeticus, un ouvrage aujourd'hui
perdu. En 388, après la mort de l'empereur
Maxime, qui avait encouragé les persécutions di-
rigées contre les priscillianistes, Idace se démit
d'abord spontanément de sonévêché; mais, ayant
bientôt après cherché a s'y faire rétablir, il fut
envoyé en exil, où il mourut. Au dire de Sulpice
Sévère, la conduite dldace fut jugée par ses
contemporains comme bien moins coupable que
celle d' Ithace (voy. ce nom). £. 6.
<Sulpltias ScTcros, Historia Sacra. — I§More de Sé-
Yllle, De Scrtptoribus Bcelesiasticis. — Antonio, Biblio-
theca Hispana vêtue, 1. 1, p. 17t.
idace, chroniqueur espagnol, né vers la fin
du quatrième siècle, à Lamego, en Galice, mort
après 468. Après avoir visité. l'Orient, où il
entra en relations avec saint Jérôme, Jean de
Jérusalem et autres pieux solitaires, il fut
promu, vers 427, à l'évêché de Chiaves, petite
ville du Portugal (d'autres disent à celui de La-
mego). Il rat envoyé en 431 auprès du général
Aétius , pour réclamer des secours contre les
Suèves. Plus tard il fut chargé par le pape saint
Léon de prendre des mesures pour s'opposer à
la propagation de l'hérésie priscillianiste. £n
461 les Suèves le déposèrent de son évèché, et
le tinrent prisonnier pendant trois mois. A
partir de ce moment on n'a plus de renseigne-
ments sur lui. Idace est auteur d'un Chronicon,
qui commence à l'an 379 et finit à l'an 468. A
partir de 427 cette chronique, écrite dans un
style barbare, devient une source importante
pour l'histoire des invasions des Goths et des
Suèves; elle a été continuée jusqu'en l'an 1100
par quatre auteurs différents. Imprimée pour
la première fois, d'après un manuscrit fautif et
incomplet, par Canisius, dans le tome II de ses
Antiqux Lectiones, et reproduite sans correc-
tions par Scaliger dans la première édition de son
Thésaurus Temporum, ainsi que par Linden-
brog et Sandoval , elle fut enfin publiée avec exac-
titude et dans son intégrité par Sirmond, Paris,
1619, in-8°; le texte donné par Sirmond parât
ensuite dans le tome II des Opéra de cet éru-
dit; dans la seconde édition du Thésaurus
de Scaliger; dans la Bibliotheca maxima Pa-
trum, t. VII; dans le t. X de la Bibliotheca
Patrum de Galland ; la meilleure édition fut
donnée par Roncalli dans le Vetustiora latino-
rum Scriptorum Chronica, Padoue, 1787, et
ensuite par Rœsler dans les Chronica Medii jEvi ,
Tubingue, 1798. Sirmond trouva dans un ma-
nuscrit, à la suite du Chronicon dldace, des
Fasti consulares, commençant à Tan 245 de
Rome, et s'arrêtant à l'an 468 de notre ère; on
y rencontre des faits historiques concernant les
quatrième et cinquième siècles, rapportés dans
un style qui ressemble à celui du Chronicon.
Cette ressemblance a porté Sirmond et plusieurs
autres savants à attribuer ces Fasti à Idace,
opinion qui n'a pas été admise généralement. Quoi
qu'il en soit, ces Fasti se trouvent ajoutés aux
éditions du Chronicon postérieures à celle de
Sirmond, ainsi que dans la Nova Bibliotheca
Manuscriptorutn de Labbe , et dans le tome XI
du Thésaurus Antiquitatum Bomanarum de
Grœvius. E. G.
Roncalli , Dissertatio de Idatio ( en tête de «on édition
da Chronicon). - Rosier, Dissertatio de Idatio (en tète
de son édition da Chronicon ). — Bsehr, Geschichte der
rômischen Literatur (supplément, § 45). — Smttb, Diction-
nary of Greek and Roman Btographf. — Le Nain 4e
TUIemont, Histoire des Empereurs, t. VI. — Antonio,
Bibliotheca Hispana vêtus, 1. 1.
idace, théologien, vivait à Naples au milieu
du cinquième siècle. On n'a aucun détail sur sa
vie. U a écrit : Libri adversus Varimadum
diaconum arianum : cet ouvrage» qui se trouve
dans le Antidoton adversus Bxreses de Sichard ,
dans la ffaeresiologia de J. Herold , dans le
tome IV de la Bibliotheca Patrum , ainsi que
dans les Opéra de Vigile, évéque de Tapsus,
publiés par Chifflet, est attribué faussement par
ce dernier à Vigile; — Libri VIII de Sancta
Trinitate , ouvrage qui a été recueilli dans les
éditions des œuvres de saint Athanase, qui eo
a souvent été considéré comme l'auteur. E. G.
J. Anthelmlus, Ditqùisitio de Symbolo Jthantuiano.
— Montfaucon , Athanasii Opéra, t. III, p. 605. - Fa-
bricius, Bibliotheca latina Media et Infimx jEtatis. *
idace, évéque d'Ossobona. Voy. Ithace.
* IDANTHYRJE (ItevOupaoç), roi des Scythes,
vivait probablement dans le septième siècle
avant J.-C. Suivant Strabon, il commandait la
horde scythique qui envahit l'Asie et s'avança
jusqu'en Egypte. La date et les événements de
cette invasion ne sont pas connus, à moins qu'on
ne l'identifie avec l'incursion mentionnée par Hé-
rodote, laquelle établit pendant vingt-huit ans h
puissance des Scythes en Asie et se termina par
leur expulsion, sous Cyaxare, en 607. Hérodote
donne au roi qui commandait cette expédition
le nom de Madyas. D'après Strabon, Madyas
était un roi des Cimmériens. Justin parle d'une
invasion des Scythes jusque sur les frontières
de l'Egypte, mais il le fait en termes obscurs
et qui ne peuvent éclaircir le passage de Stra-
bon. Y.
Strabon, XV, p. «87. - Hérodote, I, 11,103, lot; IV,
il, lt, «7; V|l, M. - Justln^l, 3. -Clinton, Fast. HeU. %
vol. l.
*idakthyR8E, roi des Scythes, vivait dans
le sixième siècle avant J.-C. Il était fils de San-
lius, frère et meurtrier d'Anacharais. Quand Da-
rius, fils d'Hystaspe, envahit la Scythie, vers 508,
les Scythes se retirèrent devant lui. II envoya
alors un message à Idantliyrse pour le t
777
IDANTHYRSE — IDELER
778
de combattre ou de se soumettre. Le roi des
Scythes répondit que s'il fuyait devant les Perses,
ce n'était pas par crainte, et que cette vie er-
rante était dans ses habitudes. S'il ne combattait
pas, c'est qu'il n'avait ni villes ni champs cul-
tivés à défendre contre les envahisseurs. Que
les Perses s'avançassent jusqu'aux sépultures
des Scythes, et ils verraient si ceux-ci auraient
le courage de combattre pour les tombeaux de
leurs pères. Quant à se soumettre, les Scythes
ne reconnaissaient d'autres maîtres que leurs
dieux; au lieu du don de la terre et de l'eau que
réclamait Darius, il lui envoyait des dons plus
convenables. Ces présents, qui consistaient en un
oiseau, un rat, une grenouille et cinq flèches ,
exercèrent la sagacité des Perses. Darius y vit
un symbole de soumission ; Gobryas les inter-
préta tout différemment-, et l'événement prouva
qu'il avait raison. Selon lui, les présents dl-
danthyrse signifiaient qne si les Perses ne s'en-
volaient pas dans l'air comme des oiseaux , s'ils
ne se cachaient sous terre comme des rats, ou
dans l'eau comme des grenouilles , ils n'échap-
peraient pas aux flèches des Scythes. Y.
Hérodote, IV, 76, «0, 117, 131, in. — Plutarque, Beg.
et lmp. Apophth. — Justin, 11,8,5; VII, s.— Paul
Or ose, II; S.
idb ( La bienheureuse ), comtesse de Boulogne,
née vers l'an 1040, morte le 13 avril 1113. Elle
était fillede Godefroi IV dit le Grand, le Hardiei
le Barbu, duc de Lothier (basse Lorraine), et de
Gode, Dode ou Ode, l'un et l'autre appartenant
à la branche carlovingienne allemande. A l'âge
de dix-sept ans, Ide épousa Eustache II, comte
de Boulogne, dont elle eut le célèbre Godefroy
de Bouillon (1), créé marquis <? Anvers (par
l'empereur Henri IV, en 1076) , puis duc de
Lothier et de Brabant , ensuite chef des croisés
(1096), et élu roi de Jérusalem (23 juillet 1099) ;
Eustache 111, qui succéda à son père vers 1093 ,
et Beaudoin, comte d'Édesse, et ensuite roi de
Jérusalem après son frère Godefroy (1100) (2).
Ide se fit toujours remarquer par une extrême
piété et une grande sagesse. Devenue veuve en
1070, elle vendit une partie de son domaine par-
ti) Selon les auteurs de VArt de vérifier les dates , U
était fils aine, d 'Eustache II, et non puîné comme le pré-
tendent les Bollandistes. La plupart des chroniqueurs se
taisent à cet égard ou ne se prononcent pas d'une ma-
nière formelle. Le Tasse, dans a* Jérusalem délivrée,
fait de Godefroy l'afné de sa famille.
(S) 1 de ne nom me que ces trots enfants dans une charte de
Tan 1096 : on ne sait pourquoi Guillaume de Tyr, suivi
en cela par l'auteur de la Chronique de Saint- Médard
et par Guillaume de Nangis, mit parmi les chefs de la
première croisade (Ltb., IX, cap. xxn) un Guillaume
qu'il dit expressément frère de Godefroi de Bouillon et
par conséquent fils d'Eustache II. fioémond 1**, prince
d'Antiocbe, dans une lettre à Roger, son frère, rapportée
par Baronlus ( ad an. 10M, n° 14 ), donne également à Go-
defroy de Bouillon un autre frère nommé Hugues : Godo-
fridui et Hugo Bollionii Fratres, dit-il. SI ces deux en*
fants d'Eustache II sont réels, leur naissance ne paraît
pas légitime. Ordéric Vital donne en outre'à Eustache II
deux filles : Adélaïde on Agnes, femme de l'empereur
Henri IV, et Ide, mariée à un comte allemand nommé
Conon.
ticulierpour fonaer des églises et des monastères.
Les principales de ces fondations furent Saint-
Wulmer à Boulogne, Sainl-Wast (depuis Vascon-
villiers), Saint- Wulmer-aux-Bois (aujourd'hui
Saumer ou Samer) et Notre-Dame-de-la-Cha
pelle. Ide mourut plus que septuagénaire, et futen-
terréedans l'abbaye de Saint- Wast. « Cependant,
disent les auteurs de la Bibliothèque sacrée,
Ton prétendait avoir son corps dans l'église des
Filles du Saint-Sacrement de la rue Cassette, à
Paris, où Ton célébrait tous les ans sa fête, le
13 avril, comme d'une sainte canonisée, quoi-
qu'elle ne le soit pas. » A. L.
Henschenius, Fit» Sanctorwn, 15 avril. — Baillet , le
iLéme Jour, dans les Fies des Saints. — Richard et Gl-
raud, Bibliothèque Sacrée. — Le Mire, Opp. Diplom.,
t. I, p. 76. — Dom Bouquet, t. XII, p. 88*.
* ideler (Chrétien- Louis), chronologiste al-
lemand^ le 21 septembre 1766, mort le 10 août
1846. Après avoir été employé par le gouverne-
ment prussien pour le calcul des annuaires astro-
nomiques, il devint en 1816 précepteur de deux
princes de la famille royale, et en 1821 professeur
a l'université de Berlin. Il fit partie de l'Académie
de cette ville, et fut nommé en 1839 membre ho-
noraire de l'Institut de France. On a de lui :
Historische Untersuchungen uber die astro-
nomischen Beobachtungen der Alten (Études
historiques sur les Observations astronomiques
desanciens); Leipzig, 1806;— Untersuchung
ûber den Ursprung und die Bedeutung der
Sternnamen (Examen de l'Origine et de la Si-
gnification des Noms des Étoiles) ; Berlin, 1809 ;
— Handbuch der mathematischen und tech-
nischen Chronologie (.Manuel de Chronologie
mathématique et technique) ; Berlin, 1825-1826,
2 vol., in-8°; une seconde édition, refondue, pa-
rut sous le titre de Lehrbuch der Chronologie
(Manuel de Chronologie) ; Berlin, 1831 : c'est un
ouvrage excellent; — Die Zeitrechnung der
Chines en (La Chronologie des Chinois); Berlin,
1839. — Ideler a publié en commun avec Nolte :
Handbuch der franzosischen Sprache und
Uteratur (Manuel de la Langue et de la Litté-
rature françaises); Berlin, en 3 vol., qui ont
eu de nombreuses éditions; — Handbuch der
englischen Sprache und Literatvr (Manuel de
la Langue et de la Littérature anglaise.) ; 2 vol. :
plusieurs fois réimprimés. — Ideler a fait
aussi paraître plusieurs dissertations remarqua-
bles , parmi lesquelles nous citerons : Ueber
den Kalender des Ptolemaus (Sur le Calen-
drier de Ptoîémée); — Uber die.Wegmaase
der Alten (Sur les Mesures de Routes des an-
ciens ) ; — Uber dos Alter der Runenialen
der (Sur l'Age des Calendriers runiques). E. G.
CotwersationS'LexOon.
ideler (Jules-Louis), érudit allemand, fils
du précédent, né à Berlin, le 3 septembre 1809,
mort le 17 juillet 1842. Après avoir étudié la
médecine, il enseigna cette science à l'univer-
sité de Berlin, en qualité de privat-dooent. On.
a de lui : Meteorologia veterum Greecorum
770
IDELER —
et Romanorum; BerKn, 1832; — Die Sage
von dem Schuss des Tell ( La Légende de Tell ) ;
Berlin, 1736; — Bermapion, rive rudimenta
hieroglyphicx veterum Mgyptivrum Utero-
turœ; Leipzig, 1841, ï vol., in- 8° , — Geschichtc
der altfranzôsischen National- Literatur bis
au/ Franz I ( Histoire de l'ancienne Littérature
française jusqu'aux temps de François I e ' ) ; Ber-
lin, 1 842, in-8°. — Ideler s'est aussi fait remarquer
comme éditeur; en cette qualité, il a publié :
Aristotelis Meteorologia ; Leipzig , 1824-1836,
2 vol. ; Psalterium Copticumt Berlin! 1837;
— Physici et Medici Grœci minores; Berlin,
184M842, 2 roi* E, G,
CoMféTMItions- LêtiMôn.
' IbKLFCmso ott 8Arf-cAftLO ( P. ), érudit
espagnol , né an 1709» mort à Rome, le 30 no-
vembre 1790. 11 appartenait à Tordre des Pia-
ristes, et passa la plus grande partie de sa vie
à Rome, où il devint précepteur de Charles-
Edouard , prince de Galles , surnommé le Pré-
tendant , et de son frère le cardinal Smart* duc
d'York, tous deux fila de Jacques III, prétendu
roi d'Angleterre» Idelfonso de San-Çarlo possé-
dait une très-vaste érudition, et occupa les prin-
cipaux emplois de son ordre. Il traduisit en latin,
par ordre de Benoît XIV, lea Édits, Notifica-
tions et Lettres pastorales A* ce pape» pour l'e*
dition complète de set oeuvres ; Rome en 1748.
A.L.
Chaud** et Deiandtne, Dictionnaire Historique*
ides ( Bverard-Isbrants) t voyageur alle-
mand, néà Glukstadt ( Holstein)* vers 1660, mort
vers 1700. Il était d'origine hollandaise; il se
rendit en Russie, et y monta une maison de
commerce* qui devint bientôt florissante. Le taar
Pierre I er remarqua l'intelligence de Ides, et en fit
un de ses conseillers. En 1692, il te chargea
d'aller à Péking conclure un traité de commerce
avec l'empereur Khang~hi , et de faire détermi-
ner les limites des deux empires, oontigus depuis
1651. Ides partit de Moscou le 14 mars, traversa
la Tartane, franchit la fameuse muraille chinoise
le 27 octobre, et le 3 novembre entra dans la
capitale du Céleste E^npfre. Il fut fort bien ac-
cueilli par Khang-hi, et, malgré l'opposition de
plusieurs mandarins importants, réussit complè-
tement dans son ambassade. 11 fut, au surplus, très-
bien secondé par les missionnaires jésuites, en-
tre autres par le P. Gerbillon ( voy. ce nom ), qui
lui servit d'interprète, et l'initia aux mystères et
aux cérémonies de la cour chinoise. Il y eut des
conférencôôd'asseï longue durée et dans lesquelles
le ministre russe déploya un luxe inouï de ri-
chesses. Enfin, ou convint de prendre pour fron-
tière commune la rivière de Gorbitsa. Ides quitta
Péking le 19 février 1693, et ne rentra à Moscou
que le 19 janvier 1694, après avoir couru de
grands dangers en Tartane et en Sibérie. Le tzar
le nomma conseiller impérial du commerce, et
l'envoya explorer Àrkangeiet la Russie Blanche,
ides mourut peu après son retour. Ses fatigues
IDOMÉNÉE 780
passées et la rigueur du climat avancèrent ses
jours. Il avait publié une relation de sa aatsskm
en hollandais, et sous ce titre ; Voyage de l'am-
bassadeur moscovite E.-l. Ides, de Moscou
à la Chine, fait par terre par la grande
Oustiga, la Striante, la Permie, lu Sibérie, la
Daourie et la grande Tartarie, et gui a duré
trois an s y contenant la description des mœurs
des peuples , etc. ; et enrichi d'une carte et de
beaucoup de figures dessinées par l'ambaaaadeur,
en outre d'une Description de la Chine i écrite
par un Chinois dans sa langue, et traduite pour
la première fois en hollandais avec des Remar-
ques; publié par les soins de Nicolas Witsen,
bourgmestre et géographe d'Amsterdam ; Ams-
terdam , 1704, in-4*. Quelques bibliographes font
mention d'une première édition qui aurait paru
dès 1696. Le Voyage de Ides a été traduit en an-
glais, Londres, 1706, in-4°; en allemand, Franc-
fort, 1707, in-4° ; en français, dans le t. Vlil du
Recueil des Voyages au Nord* Avant te publi-
cation de cet ouvrage, Ad. Brand, natif de Lu-
beck, et qui avait accompagné Ides dans son am-
bassade, en fit imprimer une relation en allemand,
Hambourg, 1698, in- 12 ; trad. en français, sous Iô
titre de : Relation du Voyage de M. Everard
Ysbrantz, ambassadeur de S. M. Tzarienne
à la Chine en 1692, 1693, 1694; Amsterdam,
1699, in- 12 ; et traduit en latin par LeHmitz dans
ses Novissima Sinica; 1697, m-12. Cet ouvrage,
au point de vue géographique, est encore plus
incomplet que eelui d'Ides ; cependant on trouve
dans l'un et dans l'autre des renseignements cu-
rieux sur les mœurs des Tartares, des Sibériens,
et des Chinois. A. de Lacaze.
Gazette littéraire de Leipzig, anD. ntt. - Voltaire,
Histoire de Pierre le Grand. - De Mailla, Histoire çé-
« nérate de la Chine, t. XI et X. — fesbeau et Cheaecbot,
Histoire 4» Russie, L IV, p. M-M.
IDIOT OU LB SAVAftT IDIOT. VOy> JORBAH
(Raymond).
iDMâif (Nicolas), philologue suédois du
dix -huitième siècle. Il n'est connu que par un
ouvrage très-curieux publié d'abord en suédois,
mais traduit en français par Edmond-C. Genest,
sous le titre de : Recherches sur le Peuple Fi-
nois 9 d'après les rapports de la langue finoise
avecla langue grecque ; Strasbourg, 1 776, în-8° ;
c'est par erreur que les auteurs de la Êiographie
Moderne ont attribué cette traduction à Edme-
Jacques Genest. L— *— e.
GezentU, Biosraf. Lextc. - QoérArd, La France lit-
téraire.
MdOMAnéB (l&oufveuc), historien grec, né
à Lampsaque, vivait vers 300 avant J.-C. Ami
et disciple dUlpicure, il se maria avec Bâtis,
sœur de Métrodore de Lampsaque, qui tut aussi
l'élève de ce philosophe. H occupa une haute di-
gnité dans sa patrie, peut-être la tyrannie, et
montra le désir. d'une vaine gloire, le faste, le
luxe et d'autres passions qui accompagnent sou-
vent le pouvoir suprême. Épicure fot obligé de
rappeler son disciple à de meilleurs sentiments.
781
IDOMÉNÉE
Ses ouvrages, que Ton ne connaît plus que par
de vagues mentions, semblent avoir eu pour
objet la vie privée des hommes illustres de la
Grèce, plutarque, qui les cite, ne leur accorde
pas une grande valeur historique. Voici les ti-
tres connus des ouvrages dldoménée : Histoire
de Samothrace flçTopta tc5v xaxà Eoc{i.o6pàx7îv),
et Sur les Socratiques (lïepi tôv StoxpatixâSv ).
Divers passages relatifs à Pisistrate, à Thémîs-
tocle , h Aristide , à Périclès , à Démosthène, à
Eschine, à Hypéride, à Phocion, ne peuvent
appartenir à aucun de ces deux ouvrages, bien
que Sintenis les revendique pour les Socrati-
ques. L'œuvre dont Ils faisaient partie s'intitulait,
suivant Jonsius ; Sur les Hommes illustres (lïepi
év&ôfr>v àvSpôv), et selon Luaac, Sur le Luxe des
Hommes illustres (Iîspl tf]ç tôv êv86|u>v xpu-
çyfc); mais M. Sauppe paraît en avoir découvert
le véritable titre dans un passage corrompu des
Anecdota de Bekker (p. 249). D'après la cor-
rection qu'il propose, le titre de l'ouvrage d'Ido-
ménée était : lïepi fiyniaywYûv (Sur les Démago-
gues ou plutôt Sur les Hommes politiques). Les
fragments trop peu nombreux d'idoménée ont été
recueillis par M. Millier, dans ses Fragmenta
Historicorum Grxcorum, t. II, p. 489. Y.
Diogéne Laerce, X, 88, ». — Strabon , XIII, p. 589. —
Athénée, VII, p. f79. — Suidas, au mot ÎBoftevetiç. —
Voisins, De Hist. Grstcis, p. tos, édlt. Westermann. -
Stntenis, cinquième Rxcwrsus sur le Périclès de Piutar*-
i;ue. — Jonsius, Hist. Script. Philos., II. — Heerep, p«
Font. Fit. Plut., p. 98. — Luzac, Leet. M tic, p. lis. -
Sauppe , Rheinisches Muséum , année 18*3 , p. MO.
IDRIB0S OQ BIDEIECS fMpieOç OU c Iôp.), roi
ou dynaste de Carie , mort en 344 avant J.-C.
Second fils d'Hécatomnus, il monta sur le trône
à la mort d'Artémise, veuve dé son frère Mau-
sole, en 351. Peu après son avènement il reçut
du roi des Perses Àrtaxerxès Ochus la demande
d'un corps auxiliaire contre l'Ile de Cypre.
Idrfens fournit une flotte de quarante trirèmes et
une année de 8,000 mercenaires, qu'il plaça sous
le commandement d'Évagoras et du général
athénien Phocion. Il ne resta pas longtemps
l'allié des Perses ; mais sa rupture avec eux ne
nuisît en rien à la prospérité de son rtyawne.
Isocrate parle de lut comme d'un des plus ri-
ches et des plus puissants princes de l'Asie, et
Démosthène dit qu'il ajouta à ses domaines
héréditaires, Chios, Cos et Rhodes. Il mourut
après un règne de sept ans, laissant le trône à sa
sœur Ada, qu'il avait épousée suivant la coutume
orientale. Y.
iefrbmopf, voyageur russe, né vers 1744,
mort à Saint-Pétersbourg, après 1809. Il entra
fort jeune dans la carrière militaire, et était sous-
officier lorsqu'en 1774 il fut fait prisonnier par
les Kaisacks ou Krrghiz de la grande horde , aux
environs d'Orenbourg, sur ta droite de l'Oural.
Il devint l'esclave d'un chef boukhare, qui l'af-
franchit, et lui confia un commandement. Iefre-
moff se trouva ainsi en relations avec lesTadjiks,
les Usbeks, les Turcomans et autres peuples avoi-
— IENICHEN 782
sinant la mer Caspienne. De son temps le kha-
nat de Boukbarie (ancienne Sogdiane) contenait
environ 2,500,000 habit., qui pouvaient mettre
sous les armes 300,000 cavaliers. Les principales
villes étaient Boukhara, Karakoul, Kermina, Min-
ka], Samarcand, Juzzek, Karchi, Labiak et Balk.
Tefremoff prit part à plusieurs expéditions contre
les Khiviens, les Merviens et quelques autres
populations tartares. Il profita de la liberté dont
il jouissait pour chercher à revoir sa patrie. Il
atteignit d'abord Khokhand(t); puis, traversant
leTurkestan chinois, il s'arrêta successivement à
Marghylan(où il vit un drapeau rouge qui avait ap-
partenu, disait-on, à l'armée d'Alexandre le Grand)
à Kachgar, à Hiarkand. 11 pénétra ensuite dans
leThibet, séjourna près d'un moisà Tohangamrinf,
franchit, malgré de nombreux dangers, l'Himalaya,
descenditdansrindoustan, visita Delhi,et, gagnant
la côte occidentale de la presqu'île gangénique, il
prit passage sur un navire anglais. Ce ne fut
qu'en 1782, après huit années d'absence, qu'il
débarqua, à Saint-Pétersbourg. Les documents
nouveaux et précieux qu'il rapporta sur les cen-
trées qu'A avait visitées le firent bien accueillir du
gouvernement russe, qui lui accorda même la
noblesse et le titre de conseiller aulique. Iefre-
moff a publié ses 'aventures sous le titre de :
Voyages en Boukharie, à Khiva, en Perse et
dans Vlnde; Saint-Pétersbourg, 1786. A. de L.
piodore , XVI, «, 48, 69. - Strabon, XIV, p. 686. —
An-ten, Anab., I, 33. — Isocrate, Philipp., p. lOî. — Dé-
moftfrène, J># face.
iftiflcuBH (Gottlob-frédéric), philologue et
philosophe allemand, né le 36 mars 1680, à Eu-
teritsch, près de Leipzig, mort le 17 septembre
1 735. Son père, Georges Ienichen, auteur de quel-
ques opusoulea, était ministre protestant. Après
s'être fait recevoir, en 1699, maître en philosophie
à Leipzig, Ienichen fit un voyage en Allemagne,
en Hollande et en Angleterre. De retour à Leipzig
en 1706, il devint assesseur de la faculté de philo-
sophie, et six ans après professeur de morale et de
politique. On a de lui : De Genesimantia ; Leipzig,
1699, in-4 Q ; - De Cultu Heroinarum sagp
vel toga illustrium; 1700, in-4°; — Historia
Spinosïsmi Leenhosiani ; 1707, in-4°; — De
Democrito Philosopha; Leipzig, 1720, in-4°;
— In Funere J.-B. Menkenii; Leipzig, 1732,
in-fol. ; — In Funere L. Chr. Crellii ; Leip-
zig, 1733, in-fol,; — In Funere Griebneri;
Leipzig, 1734, in-fol. Ienichen a encore publié
plusieurs autres opuscules, parmi lesquels nous
citerons : Deeo quod JustuwekJ)eeorum est
circa jocos etfacetias. Il a aussi donné une édi-
tion des Opéra Philosophica et de VArs Critica
deLeclerc. £. Gv
Kappe , Programma in funere Jenicheni ; Leipxte,
1735, in-fol. — Acta Eruélitorum IApsiensia, année 1736X
p. 91. — Jdcher. Allg. Gel. Lex.
(1) Ville de la Ta r tarte indépendante, située par *0« «'
long, est, et 64 e 14' de lat. nord. Elle a été la principale
résidence de Gengte-Khan et de Tamerlan. lefremoff y
compta plus de 400 mosquées.
7S3
1EN1CHEN - IERMAN
784
IBNICHBM {Gottlob- Auguste), jurisconsulte,
bibliographe, historien et biographe allemand,
neveu du précédent , né à Leipzig, le 9 juillet
1709, mort le 1 er avril 1759. Après s'être fait
recevoir en 1730 docteur en droit à l'université
de Leipzig, il entra an barreau. En 1747 il de-
vint professeur de droit à Giessen. On a de lui :
Epistola singularia de viris doctis conti-
nent; Leipzig, 1729, in-4°; — Commentarius
de Doctis qui extra patriam patriom in-
venere /Leipzig , 1729 , in-4°; — Spécimen Bi-
bliothecx Eruditorum longœvorum; Leipzig,
1730, in-4* ; — De spuriis advocatorum Privi-
légia; Leipzig, 1733, in-4°; — De Prisco
Javoleno jurisconsulte ; Leipzig, 1734, in-4°;
— De C. Afrania; Leipzig, 1734, in-4°; —
Conjecturas de Testamenti ad pias causai
Origine; Leipzig, 1734, in-4°; — Juristischer
Buehersaal oder grùndliche Nachricht von
den besten juristischen Bûchern (Bibliothèque
Juridique, ou compte-rendu étendu des meilleurs
ouvrages de jurisprudence) ; Leipzig, 1737-1739,
2 vol. in-8°, sans nom d'auteur; — Continua-
tio Notitte Auctorum Juridicorum Beyeri;
Leipzig, 1738, in-8° ; — Allerneueste Nachri-
ehten von juristischen Bûchern (Compte-
rendu des Ouvrages Juridiques les plus ré-
cents); Francfort et Leipzig, 1739-1747, rà-8°,
sans nom d'auteur ; — Vnpartheische Nachri-
chten von dem Leben und Schriften der
jetztlebenden Rechtsgelehrten in Deutschland
( Notices impartiales sur les Jurisconsultes vi-
vants de l'Allemagne) ; Leipzig, 1739, in- 8° ; —
Singularia de Callistrato jurisconsulte ;
Leipzig, 1742, in-4°; — Besondere Anmer-
kungen von den durch die deutschen Ge-
setze eingeschrœnhten Verlôbniss-und Hoch-
zeitmahlen (Remarques particulières sur les
Repas de Noces et de Fiançailles restreints par
les lois allemandes ); Iéna, 1746, in-4° ; — Éls-
torische und rechtiiche Abhandlung von Be-
gràbniss-Hahlzeiten (Dissertation historique
et juridique sur les Repas de Funérailles); Leip-
zig, 1747, in-4° ; — Thésaurus Furis Feudalis ;
Francfort, 1750-1755, 3 vol. in-4° ; recueil de
cent -soixante-dix opuscules et dissertations
écrites par divers auteurs sur des matières féo-
dales; — De Secta Compendiariorum et Per-
fectionistarum ; Giessen, 1852, in-4°; — Elo-
giumJo.-R. Engau; Giessen, 1756, in-4°; —
Observationes criminelles de Tabaco; Giessen,
1756, in-4 # ; — Observationes de S. Paner a-
tio; Giessen, 1757 -, in-4°; — Vom dem
Rechte der ersten Bitte einer romischen Kai-
serinn (Sur le Droit de première Demande ap-
partenant à l'impératrice romaine); Giessen,
1757, in-4°. On doit aussi à Ienichen les édi-
tions des ouvrages suivants : Majansii Epis-
tolarum IÀbri IV; Leipzig, 1734, in-4 e ; il s'y
trouve huit lettres de Ienichen; — Lipenii Bi-
bliotheca realis juridica, post F, Struvii
curas jrecensuit opus, innumeros errores sus* ,
tulit t ultra dimidiam partem auxit Je»t-
chen; Leipzig, 1738-1743, 4 vol. in-fol.; —
Mylii Opusoula academica.; Leyde, 1738,
in-8° ; — BrunquelU De Retractionibus Ju-
risconsultorum ; Leyde, 1738, in-4»; — Lu-
nigs BibliothecaDeduclionum; Leipzig, 1745,
2 vol. in-8° ; — Leyseri Meditationes ad Pan-
dectas, vol. XI et ultimum edidU t et opus-
cula nonnulla sua adjecit Ienichen ; Viol-
fenbuttel, 1748, in-4°; — et plusieurs disserta-
tions sur des matières juridiques.
£. G.
WeldDch, Naehriehten von jetztlebenden Rechtsoe-
lehrten, partie II, p. 806. - Strieder, Hestische Celehr-
ten-Gétchichte.t. Vf. — Àdelung , Supplément à Jô-
cher. — Hirschlng, Histor. titter. Handbuch. — Ench et
Gruber, Mlgem, Encyklopxdie.
* ieblbf {Alexis- Ivanovitch) y écrivait russe,
vivait au milieu du dix-septième siècle. 11 était
secrétaire du tzar Alexis Mikhaïlovitsch, et
fut adjoint, en 1650, au boyard Xolstchaninof
pour aller en ambassade chez le tzar d'Iméritie
Alexandre; il rédigea le Journal de cette am-
bassade, qui se conserve à la Bibliothèque syno-
dale de Moscou. F* A. G — h.
Documents inédits.
iermak (lïmoféef), ataman kosaque, au-
quel la Russie est redevable de la possession de
la Sibérie, mourut le 6 août 1584. Effrayé par la
conquête de Kasan (1552), le khan de Sibérie
Iédiguer s'était reconnu tributaire divan IV (1);
mais ce khan nogaïs ayant été chassé par Kout-
choum , d'origine kirguize , moins pacifique qu'Ié-
diguer, le tzar, occupé ailleurs, fut obligé de
renoncer à étendre sa puissance, et confia aux
marchands Strogonof le soin de garder ses fron-
tières asiatiques. Ces Médicis du Nord appelèrent
à leur aide leurs voisins les Kosaques du Don,
dont la licence n'était pas sans danger pour
eux, et formèrent avec leur chef Iermak, sans
l'agrément d'Ivan, le projet non-seulement de
repousser les Tatars , mais encore de les sub-
juguer. Iermak avait 540 hommes, les Strogonof
en avaient 300 : c'est avec cette faible troupe
d'une moralité plus que suspecte qu'lermak se
lança, à travers d'incalculables périls , à la con-
quête de ces immenses et glaciales provinces,
dont la Russie tire son principal bien-être. Après
avoir défait à plusieurs reprises des hordes in-
nombrables, il livra une bataille sanglante à
Koutchoum, près de l'Irtich, fit prisonnier son
fils Mametkoul et entra triomphant en 1581 , à
la tête d'une bande réduite à 400 individus , dans
Isker ou Sibir, situé à seize verstes de la capi-
tale actuelle de la Sibérie. A peine vainqueur, à
force de ruse et de vaillance , il dépêcha son lieu-
tenant Ivan Koltzo auprès du tzar pour lui de-
mander grâce et lui offrir tout le profit de sa vic-
toire. Koltzo ) condamné peu auparavant à être
écartelé, fut accueilli au Kremlin comme Pen-
(l) Ce qui Indique que cette partie du inonde était bien
découverte avant 1563, quoi qu'en dise Voltaire, Histoire
de f Empire de Russie sous Pierre le Grand.
785
IERMAK — IFFLAND
786
voyé d'ail souverain, et retourna près de son an-
cien compagnon de désordre, comblé de récom-
penses et de présents. Cependant l'étoile d'Iermak
devait bientôt pâlir. Assiégé par Karatcha,
mouzza de Koutchoum, il parvint à lui échap-
per et à détruire des miniers de Tatars et d'Os-
tiaks ; mais, surpris une nuit par Koutchoum
lui-même sur les bords resserrés du Vagaï, où
il l'avait perfidement attiré , Iermak finit par plier
sons le nombre de ses agresseurs, et le pied lui
ayant manqué en sautant sur une nacelle peu éloi-
gnée du rivage, gêné parle poids d'une splendide
armure qu'il portait par respect pour le tzar qui
la lui avait envoyée , il périt dans les flots dn
Vagaï. Lévesque rapporte, dans son Histoire de
Russie (Paris, 1782, 5 vol. in-12), qu'Iermak avait
dans son armée un moine fugitif et trois popes
qui célébraient régulièrement le service divin,
auquel il faisait assister ses Kosaques. Ce chef
de brigands, qui se faisait un jeu du meurtre
et du pillage, craignant que les péchés contre la
pureté n'attirassent sur lui la colère divine, fai-
sait plonger dans l'eau ceux de sa troupe qui
s'en rendaient coupables, et ensuite il les faisait
mettre dans les fers pour trois jours. Avant de
s'emparer de Sibir, il prescrivit un jeûne de qua-
rante jours pour appeler la bénédiction du ciel sur
son entreprise. Ces détails peignent les mœurs de
la race hère et étrange que le courage dlermak
a illustrée. Un grand nombre de légendes ont
conservé parmi le peuple russe le souvenir des
exploits de cet étonnant aventurier, auquel l'i-
magination prête une taille gigantesque. Un des
meilleurs poètes actuels de Moscou, Khomiakof,
en a fait le héros d'une tragédie nationale et es-
timée. P* e A. Galitzin.
Miller, Opisanie sibirskaço tzarstra; Saint-Pétersb.,
1750. — JmerUie lioudi Strogonovi; Saint-Pétersb., 1841.
— Bousskaia litoria oustrialova.
■ iezdedjeed i er , ii , ni , rois de Perse. Voy.
Yezdedjerd.
iézid. Voy. Yézid.
IÉZ1ERSKI. Voy. JÉZIERSKI.
ierzmanowski (François). Voy. Jerz-
MANOWSKI.
iffland (Auguste-Guillaume), acteur et
poète dramatique allemand, né le 19 avril 1759,
à Hanovre, mort à Berlin, le 22 septembre 1814.
A l'âge de six ans, il assistait un jour à une repré-
sentation théâtrale : l'impression qu'il éprouva fut
si vive que la carrière qu'il a suivie se rattache
certainement à cette soirée. De retour chez lui,
cet enfant, rempli d'imagination , essaya de re-
produire avec un zèle naïf ce qu'il avait vu et
entendu. Son père, pour étouffer dans son germe
cette passion naissante, n'épargna ni les repro-
ches ni les punitions; il conduisit son fils plus
fréquemment au service divin, et Iffland raconte
dans ses Mémoires (1) qu'il essaya en vain de
Ci) Meine theàtralische Laufbahn ( Ma Carrière dra-
matique ) , t. l* r de ses Œuvres complètes.
retrouver en (ace de la chaire les brûlantes émo-
tions du théâtre. « L'orateur ne parlait pas comme
tout le monde ; il psalmodiait sur un ton lugubre
et larmoyant. Personne n'entamait une conver-
sation aveclui; plus d'un auditeur s'était endormi.
Ah I quand je songeais à ces belles figures , inon-
dées de lumière, qui parlaient, qui agissaient
comme nous, que mon imagination était alors
éveillée , électrisée ! » Cet aven caractérise bien
l'acteur futur. Quelques années plus tard, Iffland
assiste à la représentation de Sara Sampson ,
de Leasing. « Jusqu'ici (c'est encore lui qui parle)
je ne connaissais les souffrances des hommes que
par les histoires bibliques de Hubner, ou par les
pauvres qui demandent l'aumône dans la rue;
je n'avais aucune idée d'une pareille langue,
d'une histoire aussi douloureuse... A partir de
ce moment, le théâtre devint pour moi une
école de sagesse et de nobles sentiments. » Mais
son père le contrariait de plus en plus dans son
goût théâtral. Le 21 février 1777, le jeune Iffland
assistait à la représentation d'une comédie de
Gotter, probablement à l'insu de ses parents ;
tout à coup arrive au parterre une missive qui
lui ordonne de rentrer au logis. Irrité par les
reproches, sans doute fort sensés, qu'on lui
adressait, humilié, blessé au vif, il oublie tout,
son devoir filial , le bonheur de la maison pater-
nelle, la fortune qui l'attendait; il ne voit plus
que l'art, sa religion à lui; il n'entend que la
voix de cette irrésistible passion du théâtre qui
l'avait saisi au sortir du berceau , pour ne l'a-
bandonner que la veille de sa mort; il part, il
s'enfuit, et se fait acteur. Le 15 mars 1777, il
monte pour la première fois sur les planches, à
Gotha, dans une comédie d'Engel, où il rem-
plit le rôle d'un vieux juif. Le public , devinant
en lui le grand comédien , l'accueillit avec faveur*
Après la mort du directeur Eckhoff, Iffland se
rendit de Gotha à Manheim, où son remarquable
talent se développa avec rapidité, et où il com-
mença à écrire lui-même des pièces pour le
théâtre. L'Allemagne n'oubliera jamais que c'est
à Iffland qu'elle doit Schiller. Sur la fin de 1781,
un jeune homme inconnu vint présenter à Iffland
le manuscrit d'une tragédie intitulée : Les' Bri-
gands , et, le 13 janvier 1782, Iffland créa le
rôle de Franz Moor. De 1784 à 1785, il composa
Le Crime par ambition, La Pupille, Les Chas-
seurs , et obtint par ces drames un grand succès
comme auteur dramatique , après avoir échoué
dans quelques essais antérieurs (Albert de
Thurneisen, en 1781 ). Attaché à la cour élec-
torale, qui le traitait avec distinction, Iffland
refusa les offres qui lui arrivaient de Vienne , de
Berlin, et , au plus fort de la tourmente révolu-
tionnaire , pendant les sièges que Manheim eut
à soutenir, il ne désespéra jamais de sa position
comme directeur: il tint bon jusqu'en 1796, où
des querelles désagréables avec le baron de Dal-
berg lui firent désirer un changement de position.
Appelé à la direction du théâtre national de Ber-
787
IFFLAND — IGELSTROM
788
lia, il quitta Manheim, le cœur brisé. Des succès
éclatants l'attendaient dans la capitale de la Prusse,
dont il releva le théâtre. En 1800, il fut saisi
d'une douleur patriotique à la tue des loges
remplies de Français qui ne pouvaient compren-
dre que son jeu muet ; aux ordres qu'on lui in-
tima de faire représenter sur le théâtre berlinois
des pièces blessantes pour l'honneur national de
la Prusse , il opposa une noble résistance , et
plus d'une fois il fut sur le point d'être arrêté
et déporté en France. En 1807, à la rentrée du
roi Frédéric-Guillaume m , il fut décoré de l'Ai-
gle Rouge. En 1811, sa santé, épuisée par les
fatigues de la composition et du théâtre, com-
mença à donner des inquiétudes à ses amis';
Iffland fit un voyage dans les villes qui avaient
été témoins de ses premiers succès : il revit
Manheim , et ce fut pour la dernière fois. Ne
consentant jamais à se soumettre aux avis des
médecins , qui lui ordonnaient de renoncer à la
scène, il hâta le terme de sa carrière.
Les contemporains dlffland parlent tous de
. son talent d'acteur avec admiration et enthou-
siasme. Il saisissait merveilleusement l'ensemble
d'un rôle, le dominait, et savait éviter toute
routine théâtrale. Par des études constantes sur
l'art qu'il exerçait et par une sagacité instinc-
tive , Iffland avait atteint la perfection. Rien n'é-
galait le naturel avec lequel il jouait les pères
nobles; il excellait dans le haut comique; mais,
dans la dernière partie de sa vie , son embon-
point ne lui permettait plus de jouer la tragédie.
Il était d'une taille assez petite, et ressemblait un
peu à Garrick ; son œil était noir et brillant, et son
jeu très-souvent se concentrait dans son regard.
Comme tous les grands artistes , il produisait les
plus grands effets par les moyens les plus sim-
ples; jamais le jeu de sa physionomie n'allait
jusqu'à la charge. Quelquefois il improvisait avec
une heureuse assurance , et suppléait avec une
grande présence d'esprit à une disposition scé-
nique défectueuse et au manque de mémoire de
ses camarades.
Comme auteur dramatique , Iffland n'a pas eu
moins de vogue. Ses drames offrent de bons ta-
bleaux d'intérieur et des caractères vrais, em-
pruntés à la vie bourgeoise. Une sentimentalité
un peu monotone fait le fond de toutes ses pièces,
qui manquent d'ailleurs de cette force comique ,
de cette ironie mordante et misanthrope qui cons-
titue la véritable comédie. Iffland n'avait point ,
dans son imagination, l'élan créateur qui fait le
grand poète. Il a introduit sur la scène allemande
le genre larmoyant que Kotzebuë et ses imita-
teurs ont singulièrement outré. Aussi Schiller,
dans une de ses épigrammes intitulée VOmbre
de Shakspeare , se moque-t-il un peu de cette
piteuse cohue de colonels de hussards , de con-
seillers de justice et d'épiciers, qui sont venus
chasser les dieux et les héros, et de cette justice
distributive qui , pour ménager la sensibilité des
femmes, punit uniformément le vice et convie, à
la fin du cinquième acte , la vertu à un festin
splendide. Les personnages d'Ifflarjd moralisent
toujours, et malheureusement ils expriment
leurs sentiments dans une prose traînante et
raboteuse.
Ce jugement, un peu sévère, n'est applicable
d'ailleurs qu'à la généralité des drames et des co-
médies dlffland. Dans le nombre , il y a des
pièces vraiment distinguées : nous ne citerons
que Les Chasseurs, les Soldats, Les Céliba-
taires, La Journée d* Automne, La Dot, Le
Joueur, Le Magnétisme, Les Avocats, etc.
Le mérite des pièces d'MDand est dans le con-
traste entre les mœurs des villes et celles de la
campagne, dans la peinture fidèle de H classe
moyenne à la fin du dix-huitième siècle. Iffland
peint à merveille le bonheur domestique, la na-
ture morale de l'homme , et fait vibrer des cordes
dans tous les cœurs "bien nés. Sa vie privée était
exemplaire; marié depuis 1796, 11 ne souffrit
jamais que sa femme s'engageât au théâtre. On
a faussement accusé Iffland d'an orgueil excessif:
il était réservé , mais il n'avait pas même la va-
nité permise à un artiste. II aimait l'art d'une
façon vraiment désintéressée.
Iffland a écrit des traités remarquables sar
l'art théâtral, qu'il a consignés dans VAlmanach
dramatique de Berlin (1807-1809) (1). Ha lui-
même publié ses Œuvres dramatiques àLeipzi»,
en dix-hnit vol., 1798-1809. Un choix de ses ou-
vrages dramatiques a paru à Leipzig, en onze vol.
in* 18, 1827-1828. Il existe aussi quatre volumes de
traductions et de piècesarrangées ( Berlin, 1808-
1812). [L. Spach, dans YEncyc. des G. du M.]
Iffland, autobiographie; dans le premier vol. de ses Œu-
vres dramatiques. — L. Funck, Brinntrunçen ans éem
Leben zweier Schauspieler ; Leipzig, 1858, — Mémoires
d' Iffland avec une notice sur ses ouvrages ( Paris, 18*3),
trad. par Picard.
* igelstrom ( Le comte Joseph ), général
livonien, mort en 1817, joua un rôle important
en Pologne en 1764, sous les ordres du fameux
prince Repnin. C'est lui qui mit la main sur
Gaétan Soltyk , évêque de Cracovie, et le fit pri-
sonnier avec les principaux seigneurs qui s'op-
posaient aux vues de l'impératrice Catherine.
Lié avec la maltresse du faible Poniatowski, il
savait par celle-ci les secrets d'État et les com-
muniquait à son chef. Igelstrom se conduisit
mieux en Turquie dans l'armée do prince Gali-
tzin (1769) : il assiégea et prit Akerman; dis-
tingué par le prince Potemkin , à la suite de ce
fait d'armes, il devint successivement général
gouverneur de Simbirsk (1784), de Pskof (1792),
et de Kief (1793). Les devoirs, de cette charge
le ramenèrent en Pologne au moment où ce pays
se soulevait contre ses puissants voisins (17&):
ce fut à grand'peine qu'il parvint à se faire jour
avec 300 hommes à travers les rues ensanglan-
tées de Varsovie. Il perdit alors la faveur de
(i) Cet ouvrage a été traduit en français ( Berlin, MM»
in-16).
789
1GELSTR0M — IGNACE
790
l'impératrice. L'empereur Paul, à son avène-
ment au trône (1796), lui confia le gouvernement
d'Orembourg, mais l'en priva deux ans après. Par
suite de cette seconde disgrâce, lgelstrom se
retira en Livonie aveè beaucoup de décorations
sur sa poitrine et quelques remords peut-être
sous ces hochets. P ce A. G.
Banticb-Kamenskl , Slovar doshpamiainikh lioitdêi
nmsêhoi zetnli. — Àuhlière , Anarchie éé la Pologne*
- Kértllo , Histoire de la Owerrt entre lé Rmtêie et ta
Turquie; Saint-Pétcrsbourgj 1778.
IGNACE ( Saint) OU 1GNATIUS ( *Iyvdtio; ),
d'Antioche, un des pères apostoliques, appelé
aussi Theophorus ou Deifér ( 6 6eo?opo< ),
vivait dans le premier siècle dé l'ère chré-
tienne (1). On ignore le lieu de sa naissance (2)*
Suivant saint Chrysostome, il conversa avec les
apôtres et fut nommé par eux évéque d'Antioche*
Théodoret ajoute que l'apotre Pierre lui imposa
les mains ; mais cette assertion ne s'accorde pas
avec le récit d'Eusèbe, qui place l'ordination d'I-
gnace en 69 après J.-C., c'est-à-dire après la
mort de saint Pierre et de plusieurs des apô-
tres. On sait peu de chose sur l'épiscopat de
saint Ignace. Les Actes de son martyre ( Mar-
tyrium Ignatii ) le montrent plein de zèle et
de fermeté pour son troupeau pendant la per-
sécution de Domitien, laquelle passa sans faire
beaucoup de mal à l'église d'Antioche. Une
épreuve plus difficile était réservée à cette Église,
fcn 107 Trajan visita Antioche, et commença
immédiatement une violente persécution contre
les chrétiens. Ignace s'offrit au martyre pour
sauver son troupeau, et se présenta devant l'em-
pereur. Après un court entretien rapporté dans
e Martyrium , Trajan ordonna que saint Ignace
ut conduit à Rome et jeté aux bêtes féroces
ta eirque pour le plaisir du peuple (ut sitpastus
f erarum 9 ad dêlectationem populi ). Pendant
ette longue route » saint Ignace eut la permission
le communiquer avec les chrétiens des villes qu'il
raversait. Il fut exposé dans l'amphithéâtre ro-
nain à la fête du treizième ( Vj Tpiaxai&exary) ) ,
'est-à-dire le treizième avant les calendes de
mvier ou le 20 décembre : c'était une des sa-
urnales. Les amis du martyr, recueillant ce qui
estait de son corps, rapportèrent ces débris à
ntioche, et les ensevelirent hors de la ville.
fi) Saint Ignace, datit sa conversation avec Trajan, ««»
ique cette épUhètc flâna le aen» de « celui qnt a le CM*
in» «on cœur ». De» autours grecs, lai donnant un moi
nsH , la rendent par « celai qui est porté par Dieu »,
pposant que Ignace était -le petit enfant que le Set*
iear prit dans ses bras ( saint Hlarc, IX, se ). Cette m-
rprétatlon, loin d'être appuyée sur aucun témoignage,
t contredite pat saint Chrysostome, qui affirme en passant
le satnt Ignace ne vit Jamais Jésua-Chriat ( In S.fynaL
•mil. ). Si saint Jérôme prétend le contraire ( De rt*
tut., o. t6), c'est d'après un passage mal compris d'Eu-
be.
t) On avait cru trouver dans Abulfarage ( fHst. Dy*
$t.. VII, p. il, édit. Poeock; Oxford, îees ) que saint
aace était né à Nura , et on supposait que cette ville
ut Nura en Sardaigne ou Nora en Cappadoce. Mais
dernières recherches de M. Cureton montrent que
mou d'Abulfarage ne se rapportent pas au Ueu natal
saint Ignace,
Plus tard l'empereur Théodose il les fit trans-
porter dans la ville même et placer dans une
église qui avait été le temple de la Fortune. L'É-
glise romaine célèbre le martyre de saint Ignace le
1 er février, et l'Église grecque plus exactement
le 20 décembre. On a beaucoup disputé sur la
date de la mort de saint Ignace. Les meilleures '
autorités la placent en 107, tandis que quelques
critiques la reportent jusqu'à l'année 116.
Le fait que saint Ignace, évéque d'Antioche,
écrivit des épltres à différentes communautés
chrétiennes peu de temps avant son martyre
est suffisamment attesté. Elles sont mentionnées
par des auteurs respectables du second et du
troisième siècle, saint Poly carpe, saint Irénée,
Théophile d'Antioche et Origène, qui citent trois
épltres, sans indiquer qu'il en existait d'autres»
t)ans le quatrième siècle, cependant, Eusèbe
mentionne sept épltres qui de son temps cou-
raient sous le nom de saint Ignace.; mais il en
parie avec une réserve qui prouve qu'il n'était
pas parfaitement sûr de leur authenticité. Il re-
marque que les Épttres aux Romains et à Po-
lycarpe avaient été mentionnées par d'anciens
écrivains ecclésiastiques; il aurait pu y ajouter
le témoignage d'Origène en ce qui concerne VÉ-
pitre aux Êphésiens. Mais ni lui ni aucun
autre ne citent de témoignage en faveur des
Épttres aux Magnésiens , aux Tralliens, aux
Philadelphiens , aux Smyr nient. Nous igno-
rons si Èusèbe, outre les sept épltres qu'il cite, en
connaissait d'autres ; mais aujourd'hui nous pos-
sédons sous le nom de saint Ignace quinze Épt-
tres , dont douze en grec et trois en latin. Sui-
tes douze en grec, sept passent pour authenti-
ques, savoir : Aux Êphésiens ( llpo; 'Eçg'aiovç ) ;
— Aux Magnésiens ( Ma-rvYidieudiv ) ; — Aux
Tralliens ( TpaXXtavoî; ) • — Aux ' Romains
( îlpnç 'Pw|AaCouç); — Aux Philadelphiens
( fciXac^pewiv ) ; — Aux Smyrniens (I|ivp-
vatoiç); — A Poly carpe (IIpô; IIoXuxapTtov );
On a deux recensions du texte grec de ces Épl-
tres, Tune plus courte et qui passe pour à peu
près authentique, l'autre plus longue et qui a
dû être très-interpolée. Il existe deux anciennes
traductions latines qui correspondent assez exac-
tement aux deux recensions, et dont la plus
étendue est la traduction vulgate; l'autre ver-
sion fut découverte et publiée par l'archevêque
Usher. Les cinq autres épttres grecques pas-
sent pour apocryphes; en voici les titres : A
Marie, à Nèapolis, près du Zarbus ( npôç Ma-
piav et; NeontoXiv rjv irpoc xG> Zapé$) OU à
Marie Cassobolite (IIpoc Mapiav Kaaaoêo-
Xittjv ) ; — Aux habitants de Tarse ( IIpo; toù«
èv Tap<Tq>); -^ Aux habitants # Antioche
(Iïpoc Avrioxeîç); — ■ A Héron, diacre d'An-
tioche ( Ilpèç "Hpcova, Siàxovov AvrioxeCaç ); —
Aux habitants de Philippe ( np6ç q>iXitctoi-
atouç). Il existe deux traductions latines de
quatre de ces épltres , la version commune ou
vulgate et la nouvelle version publiée par Usher.
791
IGNACE
792
Pour YÉpttre aux habitants de Philippes f
on n'a que la traduction vulgate. Outre les douze
épltres grecques, on en possède trois autres,
fort courtes et en latin seulement : Sancti Joannx
JBvangelistx ; — Ad Eundem; — Beatee Vir-
gini ; la Lettre à la Vierge est suivie d'une
' réponse deceHe-ci (Beat a Virgo Ignatio).T)e
la collection épistolaire de saint Ignace , les trois
lettres latines avec la réponse de la Vierge paru-
rent les premières à Paris, 1495, in-4*. Le Ferre
d'Étaples publia la traduction latine des onze
lettres grecques (celle de Marie Cassobolite était
omise ) à la suite des œuvres de Denys i'Àréo-
pagite; Paris, 1498, in-fol. Ces onze épltres fo-
rent réimprimées à Venise en 1502, à Paris en
1515, à Baie en 1520, à Strasbourg en 1527;
Symp. Cbamperius les réunit aux trois lettres
latines, y ajouta YÉpttre à Marie, et donna an
public la collection complète, sous forme latine,
des épltres de saint Ignace; Paris, 1516, in-4*;
souvent réimprimée dans le cours du seizième
siècle. Le texte des douze épltres grecques parut
par les soins de Yalentin Paceus , Dillingen, 1 557,
m-8° ; réimprimé à Paris, 1558, in-8° ; publié
de nouveau, par André Gesner, avec une traduc-
tion latine de Jean Brunner, Zurich, 1559, in- 8°.
Quoique les éditions de Dillingen et de Zurich
aient été faites sur des manuscrits différents,
elles donnent l'une et l'autre le texte des sept
premières épltres dans la forme la plus étendue.
La récension la plus courte n'avait pas encore
été découverte. On commençait déjà à discuter
l'authenticité des épltres. Les auteurs des Cen-
turies de Magdebourg exprimèrent les premiers
des doutes; Calvin déclara toute fa collection
apocryphe. Ce fut pour les catholiques un motif
d'en maintenir l'authenticité. Yedel, professeur
à Genève, n'admit comme véritables que les
sept premières épltres, et, dans celles-ci, il es-
saya de faire la part des interpolations ( Sancti
tgnatii qux exstant omnia; Genèye, 1623,
in-4°). La controverse en était là^lorsque l'ar-
chevêque Usher lui fournit une base plus solide
par son édition intitulée : Polycarpi et lgnatii
Epistolœ, una cum vetere vulgata interpréta-
tione latina 9 ex trium manuscriptorum codd.
collatione, integritati suée restitutae. Accessit
et 1 Ignatiarum Bpistolarum versio antiqua
alia, ex duobus manuscriptis in Anglia re-
pertis, nunc primum in lucem édita. Quibus
prxfixa est non de lgnatii solum et Polycarpi
script is f sed etiam de apostolicis constitution
nibuset canonibus démenti Romano tributis
Jacobi UsseriDissertatio; Oxford, 1644, in-4°.
Vossius donna presque aussitôt la plus courte
récension de six épltres d'après un manuscrit de
la bibliothèque Médicis à Florence; Amsterdam ,
1646, in-4 . La plus courte récension de YÉpître
aux Romains manquait dans le manuscrit de
Florence, et fut publiée plus tard par Leclerc,
sur un manuscrit de la bibliothèque de Colbert.
Usher profita de l'édition de Vossius pour ajouter
un appendice à la sienne : Appendix Igna-
tiana, in qua continentur sancti Tgnatii épis-
tolx géminée, a posterioris interpclatoris
assumentis liber» , ex grseco Medicxo exem-
, plari expresses et nova versione latma expli-
catx; lgnatii Martyrium; a Philone, Âga-
thopode et aliis, qui passioni Ulius inter-
fueranty descriptum ex duobus antiquisla-
Unis ejusdem versionibus, nunc primtm in
lucem editum In lgnatii..» acta,at-
que in Epistolas, etiam Ignatio perperam
adscripta, annotationes ; Londres, 1647, in-4 9 .
Lorsque les travaux de Usher et de Vossius
eurent fixé le texte des épltres, le protestant
français Daillé dirigea contre leur authenticité
l'attaque la plus redoutable, en 1666. Pearson
lui répondit, en 1672, dans ses Vindicte Igna-
tianss, qui épuisèrent la question ; et cette longue
controverse aboutit à reconnaître l'authenticité
des sept épltres dans leur forme la plus courte,
et sauf quelques interpolations. Les épttres de
saint Ignace se distinguent par la simplicité des
pensées et la ferveur des sentiments religieux.
On y remarque surtout l'ardeur avec laquelle
le saint se précipite vers la mort, et réclame
la couronne du martyre. Des citations peuvent
seules donner une idée de ce prodigieux amour
de la mort. Voici des passages de YEpttre aui
Romains : « Je vous écris vivant et désirant
passionnément mourir ( êpûv wv àitoOaveTv ).
Mon amour ( des choses mondaines ) est cru-
cifié , et il n'y a pas en moi de feu ami de b
matière ; mais l'eau vivant et parlant en moi
( TEsprit-Saint ) me dit intérieurement :*« Tiens
au Père. » Je n'ai plus goût à la nourriture cor-
ruptible et aux plaisirs de cette vie. Je veux le
pain de Dieu, le pain céleste, le pain de vie
qui est la chair de Jésus-Christ ; je veux la boisson
de Dieu, son sang, qui est l'agape incorrup-
tible, et la vie éternelle. » — « J'écris aux églises
et je tous mande à tous que volontiers je meurs
pour Dieu, si vous ne m'en empêchez pas. Jp
tous adjure de ne pas montrer pour moi une
bienveillance ; intempestive. Laissez-moi être la
nourriture des bêtes féroces par lesquelles il
est donné d'arriver à Dieu. Je suis le froment de
Dieu, et les dents des bêtes me moudront afia
que je sois trouvé le pain pur du Christ Ca-
ressez plutôt les bêtes, afin qu'elles me soient in
tombeau, et que rien ne reste de mon corpi
Alors je serai vraiment disciple du Christ, lorsque
le monde ne verra plus moncorps. » — « Laisses
moi jouir des bêtes féroces ( 'OvaC^v tôW (bjpt»»)
qui me sont préparées ; je voudrais les rencontrer
bientôt. Je les caresserai pour qu'elles me man-
gent promptement, et ne reculent pas enrayées
sans me toucher; si elles ne veulent pas medt-
vorer, je les y forcerai. Laissez-moi faire, je
sais ce qui m'est profitable. Que rien dans les
choses visibles et invisibles ne m'empêche de
posséder Jésus-Christ. Feu et croix, troupeau*
de bêtes féroces, instruments qui tranchent
793
IGNACE
794
et déchirent, fractures des os, amputation des
membres, broiement de tout le corps, atroces
tortures du diable; que tout vienne fondre sur
moi, pourvu que j'obtienne Jésus-Christ. » On
a blâmé quelquefois ce désir insatiable du mar-
tyre ; il faut blâmer surtout les magistrats ro-
mains qui n'en comprenaient pas la grandeur
morale, et qui, avant de le satisfaire par des
supplices, l'avaient fait naître par leur intolé-
rance.
Les épîtres de saint Ignace et les actes de
son martyre ( Martyrium Ignatii ) ont été re-
cueillis dans les diverses collections des Pères
apostoliques , parmi lesquelles nous citerons les
Patres Apostolici de Cotelier, seconde édition,
par Leclerc , Amsterdam , 1724, 2 vol. in-fol.,
et les Patrum Apostolicorum Opéra deC.-J. He-
fele ( quatrième édition ) ; Tubingue , 1855, in -8°.
M. Jacobson en a donné une bonne édition , Ox-
ford, 1838, 2 vol. in-8°, et M. Petermannen a
publié une récension nouvelle avec des notes;
Leipzig, 1849, in-8°. Le Martyrium Ignatii,
donné d'abord en latin par Usher, fut publié pour
la première fois en grec par Ruinart dans ses
Acta Martyrum sincera; Paris, 1689, in-4°.
L'authenticité de ce précieux document est gé-
néralement reconnue , mais on suppose qu'il a
subi des interpolations. Un fragment considé-
rable d'une ancienne traduction syriaque du
martyre de saint Ignace a été publié par M. Cu-
reton.
Une découverte récente a ranimé la contro-
verse sur les épîtres de saint Ignace en lui
fournissant de nouveaux éléments. Beaucoup de
critiques pensaient que même les lettres authen-
tiques étaient interpolées. La découverte d'une
ancienne traduction syriaque des Epttres à Po-
ly carpe, aux Éphésiens, aux Romains, leur
a donné raison. Cette traduction, trouvée dans
des manuscrits syriaques rapportés d'un couvent
du désert de Nitrie en Egypte et déposés aux
British Muséum de Londres , a été publiée par
le R. W. Cureton , sous ce titre : The ancient
syrtac version ofthe Epistles of saint Jgna*
tius; Londres, 1845, in-8». La traduction sy-
riaque, qui remonte lu sixième siècle pour VE~
pitre à Polycarpe , au septième ou au huitième
siècle pour les Epttres aux Romains et aux
Éphésiens, est plus courte que la plus courte
récension grecque et représente plus fidèlement,
suivant M. Cureton, les lettres primitives de
saint Ignace. Le savant éditeur, remarquant que
les passages omis sont destinés à renforcer l'au-
torité cléricale et épiscopale, ou à défendre la
divinité de Jésus-Christ, pense que ce sont des
interpolations faites au quatrième siècle. L'im-
portance de cette question a décidé M. Cureton
a reprendre son premier travail dans une pu-
blication plus étendue qui a pour titre : Corpus
Ignatianum : a complète collection of the
l'jnatian Epistles, genuine, interpolated,
andspurious together, with numerous ex-
tracts from them , as quoted by ecclesiasticql
writers down to the tenth century ; in sy-
riac, greék, and latin; anenglish transla-
tion of the syriac text , copions notes, and
introduction; Londres, 1849, in-8°. L. J.
Cave, Hist. Hteraria. — Oudin , De Script. Ecries. —
DalUé, De Scriptit quœ sub DionysU Areopagitse et
Ignatii Antiocheni rumine circnmf. IAbri duo; Genève,
1666, in-4». — Pearson, Vindicte Ignatiante ; Cambridge,
167*, ln-4<>. — Leclerc, Dissertàtiode IgnaUanis Epistolis,
dans son édition des Epttres. — Lardner, Credibility; —
Galland, Bibliotheca Patrum; vol. I , Proleg., c. 7, 8. —
Beyer, Dissertationet II de IgnaUo, veritatit conf essore
et martyre; Leipzig, 17H, ln-4°.— Dom Cet Hier, Histoire
des Auteurs sacrés, vol. I, p. 610. — W. Cureton, Vin-
dicte Ignatianae, or the genuine writings of saint lgna-
tias as exhibiied in the ancient syriac version vindicated
from the charge of heresy; Londres, 18 W,' in- 8°. —
Smith, Diction, of Greék and Roman Biography. —
Edinburgh Review, Juillet 1949.
Ignace de Constantinople , le Diacre ou
Magister, prélat et hagiographe grec, vivait au
commencement du neuvième siècle. Il fut diacre
et scevophylax, ou gardien des vases sacrés
dans la grande église de Constantinople, sous
les patriarcats de Tarasius (784-806) et de Ni-
céphore (806-815),*etil semble avoir été lié avec
ces deux prélats comme disciple et comme ami.
H apprit de Tarasius la composition poétique.
On ne sait plus rien de sa vie, sinon qu'il devint
archevêque de Nicée. On a de lui : Bto; TapaaCou
tov 7caTptdpxov> KwvffravTivowréXew; (Vie de Ta-
rasius, patriarche de Constantinople); le texte
grec est resté inédit ; il en a été publié une tra-
duction latine dans le De probatis Sanctorum
Vitis de Surius et dans les Acta Sanctorum des
Bollandistes, 25 février, vol. Ut, p. 576; — Bto;
•cou &yio\) Ntxiflpopou, «aTp;dpxou Kwvor. (Vie de
saint Nicéphore, patriarche de Constantinople);
le texte grec est donné dans les Acta Sancto-
rum, 13 mars, vol. Il; Appendix, p. 704; et
une traduction latine a été insérée dans le même
volume , p. 294. Ignace composa encore d'autres
ouvrages, entre autres un abrégé de cinquante-
trois fablesde Babrius en vers ïambiques. Chaque
fable n'a que quatre vers. Ces quatrains furent
d'abord publiés sous le nom de Gabrias , Gabrius
ou Babrius, dans V Ésope de Aide, Venise, 1505 ;
ils parurent sous le nom de leur véritable auteur
(Ignatius Magister) dans le Phèdre de Ritterhu-
sius; dans la Mythologia Msopïca de Neve-
let (1). Y.
(i)On connatt plusieurs antres Ignace byzantins, parmi
lesquels on remarque t
ignacb (Iconomaque), contemporain de Théodore
Studlta ( commencement du neuvième siècle) et auteur
de quelques vers acrostiches contre le culte des Images,
publies, avec la réfutation de Théodore Studlta, dans les
Opéra varia de Slrmond, vol. V, p. 169 ( voy. Fabrlcius,
B. G., vol. VII, p. 48; Smith, Dict. of G. and R. Biog.).
*givace de Sélybrle, d'une époque Incertaine, auteur
d'un Commmtarius in ArtstoteUs scripta togica, en
manuscrit dans la bibliothèque Saint-Mare à Venise, et
d'un B(oc xal icoXiteCa t6>v AyCojv OeoaréîiTwv pe-
Y&ttv {tanXéwv xat t<jairo<rr6Xcov Ktovaravrivov
xal 'EXévrK (Vie et conversation des très-nsaints et
«grands souverains apostoliques Constantin et Hélène )•
Voy. Fabrlcius, B. G., vol. III. p. «10 j vol. VII, p. 44.
T35
IGNACE
796
r Soldas, M mot Ivvâttoc. - Patate*», BiblMut*
(*mco, toL I, p.**; VI, p. S7S; VII.p. MjX, p.efT,*».
i«magb (Saint), patriarche de Constant*»
nonle, né en 7*t, mortes 23 octobre 876, était
le pins jeune 6k de Michel Rangabéet daPreeo*
]>ia, fille de l'empereur Nice>ner#. Il te nom-
mait Nicétas ayant d'être moine. Inhumefaeasent
mutilé par Léon V Arménien, pour lui 6ter tonte
chance au trdae, que oe l n i ei avait usurpé* tan
j>ère, il se consacra à Dieu dès Page de qua-
torze ans, dans le monastère de Satyre, dont
ne tarda pas à être éra afaaé. Appelé au «ftéeede
Coostantinople par les vœux unanimes du dergé
et du peuple, il en prit possession le 4 JDUJtf
846. Vénéré même par ias hétérodoxe* , car ses
moindres actions, selon Texpressiond'iin feiste-
rien russe (1), n'étaient inspirées que par la'
charité, il employa paisiblement les premières
années 4e son patriarcat à de grandes œuvres;
mais, ayant refusé la communion à Bardas,
parce qu'il vivait publiquement avec sa belle-
fiUe, et son ministère à l'empereur Michel, qui
avait violenté sa mère Tbéodora, 3 fut arraché
de son siège en 857, relégué dans 111e de Téré-
biathe, et les évèques grecs, joués par Bardas,
mirent a sa place le premier écuyer de l'empe-
reur, Photos, qui en six jours passa par tous
les degrés de l'échelle hiérarchique. Pour con-
solider une élévation aussi rapide, dont les
annales ecclésiastiques n'offrent pas un second
exemple, Photius sentait qu'elle devait être
régularisée par la démission d'Ignace et la con-
firmation <du pontife suprême. 11 commença par
user de ruse àl'egard d'Ignace; mais bientôt, après
l'avoir enfermé sans aliments et vêtements dans
une étable à chèvres et l'avoir transporté de là
dans une prison obscure ou des soldats se re-
layaient pour le inaftraHer, il poussa la cruauté
jusqu'à le suspendre en l'air, le brûler avec
des fers chauds et des lames ardentes , le faire
monter, de grosses pierres aux pieds , sur Je
tombeau de Constantin Copronyme, formé en
voûte et de marbre taillé en pointe , et de
le précipiter du haul de ce monument. Toutes
ces oruautés ne purent ébranler Ignace. Alors
Photius recourut à Rome, et adressa la plus
humble Mies requêtes à Nicolas I er (1% S'A ne
réussit pas à surprendre sa bonne foi; du moins
il parvint à corrompre ses légats à Constan-
tinople; *nais , dès que le ,pape eut connais-
sance de la* vérité, il déclara «p'Jgnaee alanait
jamais -été déposé, ne l'ayant été que "par ceux
qui n'avaient aucun fouvoir, et îl condamna
son bourreau ooBMiie un intrus. Toutefois, -ne ne
<i) Natch«l*0léTzei*ovji<»l, Istortt Jfnoh&tto.
(S) M. A. MouravieUav<uacé(J>r^tfax54ten4ltf jtor-
kvi; S.-Rg'i **"» p. «jsj^ue ie* Reroalua avouent la
Dûn-£Xistence de cette lettre de Pbotius. Mais id son
érudition lui fait déraift .- citée par Wp9los«nriiii- ma-
nuscrit du Vatican, cette lettre « trouve tant «caHare
dans un ouvrage imprimé en 1708 en Valaoble, fntitnié :
T6{ioç Xaçâç, qu'on peut eonnutter à la
impériale de Paria.
fut qu'après la fi» tragique de Bardas (29 avril
666), et celle de Michel (24 sept £67) , et après
un martyre de neuf ans qu'il fat donné au digne
successeur de saint Cbrysostome d'être réin-
tégré dans ses droits et d'en jouir encore onze
ans. Le premier usage que saint Ignace fit de sa
liberté fut de prier Adrien a de convoquer un
cou cite pour remédier aux maux dont l'Église avait
été affligée. Ce concile, qui est te quatrième
de Constantinople et le huitième œcuménique,
entièrement composé d'evéques orientaux, à
l'exception des représentants de ta papauté,
«ans rien changer anx dogmes , ne les discuta
même sas, pur la saison qu'il ne s'agissait pas
de doctrine à cette époque, mais simplement
de crime* ecclésiastique» et civil». C'est I*É-
tjisn gpoaqne à eue tonte seule qui forma ce
concile, et c'est aujourd'hui 4te toute seule qui
ranatnrtanatiae, jaaoiane, par une louante incon-
séquence, etteeofc d'accord avec l'Église univer-
selle pour célébrer, le 22 octobre, la mémoire de
son héros. Bratant de zèle pour la foi, saint
Ignace aurera des docteur» évangétiques jusqu'à
Kiefi «e sait est «connu par Karamzin (1), et
preuve «ne fois de pins que c'est a la source la
plus pure que les Busses doivent les premières
lueurs de leur foi. Ignace, dit un docte et cous
«Sencieux historiographe de ne* jour» (2) # est un
des fAus noble* caractères «toi aient para sur le
siège de Censtanënople. Il a fourni l'exemple
des plus grandes vertus comme des plus grands
malheurs , si toutefois on doit appeler malheurs
des persécutions essuyées avec la constance la
plus feéroïque, pour une cause si légitime. On
avait vu toriller en lui «ne piété «iacère, une
chasteté angékque , unegnande fermeté de ca-
ractère, me mstruotion solide et mm attachement
faviolaMe anx devoirs de «a lignite. Une seule
faute peut lui être reprochée, c'«at non obstina-
tion 4 exercer «a iaridintio* *ur la Bulgarie,
malgrétedéfease des panes, en^uoi il a fait voir
«•nribienéj étaitdu^le j^ patrie*^ à* Coas-
tantmople, dansai nosiaien élevée on ils se trou-
vaient, de se rsnfmner dans le cercle de leurs
droits et defeure devoirs. Mais Ignace n'a point
été fertile an aaiutrsiégé, il en reconnaissait la
primauté? il mettait de la lenteur à en «xécoler
les ordres, punie qu$ croyait défendre les droits
de son Église, et il est à pnésnmer qu'il aurait
eédé à 4a dernière inevitio*, sitodnortne l'avait
point eawpfis avant de l'avoir reçue. Ce qui est
«eifen, c'est *quM «et mont dans la commanioii
de rÉntise; 1e ckè et ia terre se sont déclares es
sa faveur : le «iei par les nombreux roirades
opérés à son toauèaau;4a tan» par le culte re-
tigieuxque lnieat décerné l'une et l'autre ÉgU*e. *
,(t) Jl, c IV. r<*. aussi .- VU. Basil. Maced., nom. XC, VI,
p. m, inter. BUt. Byzant. script, post Theopmn.; Pari
«lis, 1SSS.
(i) M. l'*à*J*sv,tiiM*ir<$4e.Pk(*Àm. U vu.
797
IGNACE
798
D*Ttd tTOsétrt, T\è de saint Ignace; ti>gt>ïrt*dt , MO*,
In-**. — BttMiiiit, simules. — Batliet et G©4escard,
fées des Sainte. — Miéalatzçptof, PravoslaynobafoUt'
càeskoi vostotchnoi Tzerkvi.
* image, voyagsur et moine rusae, natil de
Smofenak, vivait àkk^ qftatorrième siècle.
Il a accompagn* «a 1389 ée métropolite Pimeri
à Oonstaitfeopte, et a lait une relation très-dé*
taitiée 4e ce voyage, da couronnement de l'em-
pereur Manuel, auquel â a assisté, et des saint»
lieux, qu'il a visités : Taticttobef en faisait grand
cas* et l'a insérée dans le 4 e tome de son His-
toire de Rmsie. P°« A, G— m.
Slovar, PUateUnkh ëouTAmmapo TvMm *r.-rw».
Tzerkvi.
i6fi Ace me uoveiA ( Saint), célèbre «m-
dateur de la Compagnie de Jésus, né en 1491
au château de Loyola (Guipuscoa), mort à Rome
le 31 juillet 1556. Il était le onzième enfant de
Bertran Jagnez et de Marina Saez y Balde, fun
et l'autre de noblesse biscaïenne. A peine âgé
de quatorze ans, Ignace fut envoyé à la cour du
roi de CastHle, Ferdinand V, qui rattacha à sa
personne en qualité de page. Il suivit son souve-
rain dans «es guerres coatredes Portugais, con-
tre les Navarrais, contre 'tes Français et surtout
contre les Sarrasins. Partout il se distingua par
use valeur «bevalereftaue. S'<il faut en croire ses
biographes, -ses «xptofts «en amour 'égalèrent «eeux
des champs de bataille. En 1521 , en défendant
Pampelune , <u* «édat 4e tanharde le blessa si
grièvement à la jambe d*e*te , <qaSl «en resta
boiteux. Cette difformité arrêtait forcément sa
carrière militaire et galante ; il touxna alors ses
pensées vers la rengion;et,4uTant «a longue
convalescence, ïa lecture de quelques hvres de
piété enflammn son iœa£Hia&ifiv il y puisa une
dévotion particulière «pour 4a mère de 4'Homwe-
Bieu. îl se.déciara chevalier de ïa Vierge, et vou-
lut se battre avec un Maure qui avait contesté
la virgiarté de Manie O 1 }* £«* usions, «aosées
sans doute par la fièvre, WS montrèrent fésoset
Satan se disputant .le monde ; enrôlant les âmes
et les divisant ten deux o bm ooc jeMeunesyenive
lesquelles se déciderait., •pour Fétcrnitë, la grande
lutte de la Aumièce^coutca les ténèbres. Ignace se
rangea sous é'étendaud 4e 4a Cvoûc : il se «rat
appelée due mission jproVWeifften> dontle snecès
assurerait <à jaaoais Ja .gloire'ae Dieu et le bon-
heur des créature*, *e* îles. «vissant «toutes «par
'un lien sacré : celui du •euthetirtsme. 41 entra
dans cette voie par un pèlerinage a Notre-Dame
,deMoot^errat,en<Cfttakîgnô.,La maladie vint 4e
•saisir de nouveau : « ^ personne *dev*nt si ridl-
rcule et si affreuse, que, dès qu'il paraissait dans
•une ville, les enfants ieduontraieùt auiloigt, lui
'jetaient des pierres et le suivaient avec de
, grandes huées (2). » 71 se réfugia dans l'hôpital
I de Manresa, puis dans une-caverne «hors la *iUe.
(l) Le P. Booboors, Vie Os saint Ignace.
(s) Fleuri, Hittotrt Ecclésiastique, «ont.
Ce lut dans cette caverne qull arrêta le plan de
de son livre des Exercices spirituels. A peu
près guéri , il se dirigea sut Barcelone, où il
s'embarqua pour la Terre Suinte» B arriva à Jé-
rusalem le 4 septembre 1523. Le contraste de
son ignorance avec la grandeur de ses vues le fit
mal accueftHr par les franciscains , auxquels îl
s'adressa ; mais cet échec fat pour lui une leçon
utile. Il vit que motus exercices extérieurs et
plus d'études le conduiraient mieux a son but :
ri échangea donc son costume de pèlerin contre
un ptns convenable, et revint à Barcelone, ou il
n'hésita pas, quoiqu'il eut trente-deux ans, à se
mettre sur les bancs desécohers. ItaHa ensuite étu-
dier la philosophie à Alcala et à Seiatnanque. Il
commença dès lors à catéchiser. V Imitation de
Jésus-Christ était surtout le texte qu'il dévelop*
paitde préférence; mais ce thème -s! simple était
peu goûté des professeurs espagnols ; et les ora-
teurs ecclésiastiques eux-mêmes en trouvaient
l'application prématurée. Fatigué des contra-
riétés qu'il éprouvait dans «a patrie, Ignace
vint à Paris a» commencement de lévrier *526.
fl recommença ses humanités au collège Mon-
taigu , fît de nouveau sa philosophie à celui de
Sahrte-Bafbe , et enfin sa théologie chez les ja-
cobins. H fut reçu -maître es arts en 1534.
Dans ce moment IHsIamismefavait vers l'Afrique
et l'Orient devant Pépée des Espagnols, des Po-
lonais, des Hongrois, tandis que le judaïsme
disparaissait dans les prisons ou sur les bûchers
delInquisHion ; mais la réforme triomphante ve-
nait do Nord attaquer le cathoKcisme. De toutes
parts en Allemagne, en Hollande, en Angleterre,
en France, tm proclamait la doctrine du libre exa-
men ; on agitait les questions fondamentales de
la religion, et chacun était ébranlé dans sa foi.
Ignace comprit qu'il fallait, sans perdre de temps,
opposer une forte digue au torrent qui menaçait
de faire disparaître à jamais les croyances ultra-
montraines. C'était chose difficile; car l'es-
prit du siècle se prêtait peu aux associations
religieuses. Toutefois, après une longue résistance,
PierreLeFèvre, pauvre prêtre savoyard, se laissa
gagner; François-Xavier, gentilhomme navar-
rais, qui professait la rjhilosophie au collège de
Beauvais, esprit léger et ami des plaisirs, se ren-
dit à ses instances ; les Espagnols Jahnelainez,
Alfonse Salmeron, Nicolas BobadHIa, et le Por-
tugais ftodriguez d'Azevedo, tous étudiants dis-
tingués , écoutèrent également ses propositions.
Le 15 août 1534, jour de l'Assomption, Ignace et
ses amis se rendirent au couvent des religieuses
de Montmartre. Le Fèvre leur dit la messe dans
une chapelle souterraine ; puis ils s'engagèrent,
par un serment solennel, à consacrer leur exis-
tence au service de la religion, à se contenter
pour eux-mêmes du strict nécessaire et à faite
ensemble le pèlerinage de Jérusalem pour y tra-
vailler à la conversion des infidèles. Le but véri-
table de l'association n'était pas encore avoué ;
mais ses membres devaient se réunir tous les
799
IGNACE
800
ans au même jour. Ignace leur donna rendez-vous
à Venise pour 1536. Tous furent exacts, et leur
nombre s'y accrut de trois nouveaux adeptes,
dont deux Français. La guerre avec les Turcs fer-
mant aux pèlerins missionnaires les routes de la
Terre Sainte, Ignace les décida, pour accomplir
leur vœu, à se mettre à la discrétion du pape, afin
que le saint-père disposât de leur personne pour
la défense de la foi catholique. Comme ils quit-
taient Sienne pour se rendre à leur nouvelle des-
tination, Ignace eut une vision dans laquelle
Jésus le fortifiait dans sa résolution par ces mots :
« Je vous serai propice à Rome (1). »
Cependant, avant de se présenter devant le
souverain pontife, Ignace prit le soin d'envoyer
Le Fèvre et François-Xavier à Rome pour se
faire des partisans à la cour papale. Il dispersa
ses autres compagnons, dans le même but, à
Bologne, à Ferrare, à Padoue, à Sienne, dans
les grands centres universitaires. * Ils prê-
chaient sur la place publique, rapporte le
P. Fabre ; et, comme ils avaient la mine étrangère
et qu'ils pariaient mal italien, le peuple; qui les
prenait pour des tabarins et des saltimbanques,
s'assemblait en foule autour d'eux. » Ils furent
souvent accusés d'erreur ; et les augustins, entre
autres, attaquèrent vivement leur enseignement.
Néanmoins, Ignace se rendit à Rome, et le 15 avril
1538 il soumit les bases de sa Société à l'ap-
probation de Paul III. Mais, sur l'opposition du
cardinal Guidiccioni, il fut décidé qu'il n'y avait
aucune urgence de créer un ordre nouveau. Ce
refus ne découragea pas Loyola; il fit présenter
au pape , par le cardinal Contarini, un projet de
statuts qui expliquait plus complètement le but
de l'association qu'il voulait fonder. Outre les
vœux ordinaires de pauvreté, de chasteté , les
membres de la nouvelle congrégation promet-
taient « de servir Dieu et son vicaire sous la
bannière de la Croix; de travailler au perfection-
nement des âmes par la prédication et la confes-
sion ; d'instruire la jeunesse et de propager la
foi ». Mais ce qui les distinguait des autres
ordres religieux était «qu'au chef du nouvel or-
dre appartenait seul le droit d'employer comme
il l'entendrait tous les membres de la Société, de
faire, d'après les conseils de ses compagnons, qui
n'ôteraientrien à son pouvoir absolu, tels règle-
ments qu'il jugerait convenables; enfin d'accepter,
malgré le vœu de pauvreté strictement obliga-
toire pour les membres de l'ordre, toutes les do-
nations en rentes ou biens-fonds destinés à l'ex-
tension de la Compagnie et à la prospérité de ses
établissements ». L'homologation de ce projet
rencontra une vive opposition dans le collège des
cardinaux; mais Paul m, en face des dangers que
^ courait le trône de saint Pierre , ne crut pas de-
voir refuser les secours que lui apportaient ces
(l) Cotte vision aurait en Heu a la Storta, village assez
voisin de Rome et où on l'a représentée dans une église
bâtie en souvenir.
dévoués auxiliaires. 11 leur accorda d'abord une
église consacrée sous le vocable de Giesu (Jésus ),
d'où la Compagnie prit, en 1539, le nom de Jé-
suites, puis leur confia des missions dans di-
verses villes d'Italie. Enfin, le roi de Portugal,
Jo&o ni, ayant demandé six de ces nouveaux
apôtres, parmi lesquels François-Xavier, pour
prêcher la foi dans les Indes, Paul M ne résista
plus, et, le 27 septembre 1540, par sa bulle Se-
gimirU militantis Ecclesix, il approuva le nou-
vel institut, sous la dénomination de Société de
Jésus. Ignace fut proclamé général de l'ordre
pour trois ans, le 22 avril 1541, et en rédigea
immédiatement les constitutions avec le grave
Jacques Lainez, qui fut avec Loyala le génie
organisateur de la grande Compagnie des Jé-
suites (1),
(l) Solvant Horeri, le P. Cajetan aurait prouvé, dans soa
F index Benedictormn,qae saint Ignace avait pris sa. rè-
gle sur celle de Saint-Benoit D'après ce code, que le
cardinal de Richelieu considérait comme on chef-d'œuvre
à la fols politique et religieux , le général exerce «ne ao-
'torité à peu près absolue sur tous les membres de la So-
ciété. II reçoit et exclut qui 11 veut, nomme à tous les
emplois, à l'exception de deux , convoque et préside ks
congrégations ou assemblées générales. Dans le cas oa
l'âge ou les Infirmités le rendraient incapable de remplir
les devoirs de sa charge, l'ordre, avec la sanction da
pape , lui nomme un vicaire général, lequel doit lui «ac-
céder. Cinq assistants composent le conseU secret du gé-
néral, . et dirigent, sous ses ordres, les affaires de la société
dans les cinq principales nations théâtre de ses travaux:
l'Italie, l'Allemagne ,1a France , l'Espagne et le Portugal.
Ils pourraient convoquer une assemblée générale pour
déposer le chef lui-même , s'il menait une vie scandaleuse
ou dissipait les revenus de l'ordre. Ils sont nommes par
la congrégation assemblée , comme l'est aussi Fadraoni-
teur, conseiller intime chargé d'avertir en secret le gé-
néral de ce qu'il 'pourrait remarquer dlirégutter dans
sa conduite. L'ordre est divisé en provinces, dont ks
chefs, dits provinciaux, choisissent; moyennant la sanc-
tion du général, les supérieurs des malsons professes et
des noviciats, les recteurs des collèges, et une foule
d'officiers Inférieurs qui se partagent les différentes
branches du service. La question da la fortune de l'ordre
est confiée, à Borne, à un procureur général, et dam
chaque province,* un procureur particulier. Les maisons
de prof es ne peuvent posséder d'immeubles : les collèges
ont ce droit, et ils viennent en aide aux premières.
Les Jésuites sont partagés en cinq classes. Les ecclé-
siastiques qui veulent faire partie de l'ordre doivent d'a-
bord passer deux ans dans celle des novices. Ce temps
d'épreuve est consacré à les former à l'obéissance et à
l'abnégation la plus absolue. De cette classe'. Us passes*
d'abord dans celle des écoliers approuvés , où Ha se lient
par des vœux secrets, puis dans celle des coadjoteun
spirituels, où ils font des vœux publics , qnt sont reçus
par le supérieur an nom da général. Ces deux classes
sont plus particulièrement chargées de l'instruction ds
de la Jeunesse, de la prédication, de la direction' da
consciences. Pour entrer dans celle des profès , 11 fint
avoir atteint l'âge de trente-trois ans et ajouter aax
trois vœux ordinaires de pauvreté, de chasteté et d>
bélssance celui d'un entier dévouement aux ordres da
paps en tout ce qui concerne les missions. Les profs*
peuvent être regardés comme les patriciens de l'ordre.
C'est à eux que sont dévolues les fonctions dunettes de
supérieurs des missions, de directeurs spirituels da
princes. Seuls Ils ont voix dans l'élection da général, et
peuvent remplir ks hautes charges de l'ordre. La cin-
quième classe, tout à fait en dehors de la hiérarchie
dont nous venons de présenter le tableau , est ceUe des
coadjnteurs temporels. Ce sont des laïques qui ne pren-
nent d'autre engagement que celui de servir l'ordre.
801
IGNACE
802
Quoique la bulle papale limitât le nombre des
jésuites à soixante proies, Tordre se* développa
avec une merveilleuse rapidité. « Il n'eut, comme
l'a dit. le cardinal de Bausset, ni enfance ni vieil-
lesse. » Ses membres, au lieu de cacher au fond
des cloîtres d'inutiles austérités, se jetèrent au mi*
heu du monde pour mieux le gouverner. Polis et
savants, habiles d'ailleurs à se plier aux cir-
constances, ils ne tardèrent pas à prendre dans
la confiance des fidèles la place qu'avaient occu-
pée* avant eux les franciscains et les sombres
donûnieains. lisse donnèrent aussitôt pour tache
l'instruction des enfants, la récolte des aumônes,
la conversion des et celle des courtisanes.
Bientôt ils abandonnèrent les juifs, qui offraient
peu de chances de succès et de recette ; ils aban-
donnèrent également les courtisanes, dont la con-
version donnait lieu à de nombreuses tentations
et à des accusations continuelles. Les efforts que
les bons Pères faisaient pour empêcher les jeunes
filles de se perdre donnant prise à des calom-
nies, Ignace s'en tint ai sa première mission, celle
de convertir les infidèles. Déjà'Rodriguez avait
été associé par Jofto III à la direction morale du
royaume de Portugal, et, malgré l'opposition du
peuple et de la noblesse, il augmentait chaque
jour l'influence de sa Compagnie, à laquelle il fai-
sait bâtir un superbe collège à Coïmbre. Ignace
envoya Brouet et Salmeron en Irlande pour dé-
fendre cette Ile contre les prétentions théologiques
de Henri VIII; mais le zèle excessif de ces mis-
sionnaires les fit expulser. Le Fèvre, Le Jay et
Alonzo Bobadilla furent plus prudents et plus
heureux en Allemagne. Le premier arrêta la ré-
forme à Cologne ; le second obtint une chaire à
Ingolstadt, et Bobadilla devint le conseiller par-
ticulier de l'empereur. En 1540, seize compagnons
d'Ignace s'étaient rendus à Paris pour y suivre
des .cours. Guillaume Duprat, évêque de Cler-
mont, se déclara leur protecteur ; et l'ordre en-
tier, le 14 mars 1543, obtint une étendue illi-
mitée et le pouvoir de changer ou compléter ses
En dekors de l'ordre proprement dit il existe on assez
grand nombre de personnes que l'on regarde comme ses
affiliés et auxquelles on a donné le nom te jésuites dérobe
courte. Une correspondance régulière et directe avec
le général concourt A donner de l'unité; à ce corps im-
mense.
Les Jésuites n'ont point, à proprement parler, de cos-
tume dlsttnctif. lia prennent de préférence celui que
portaient les prêtres à l'époque de la fonda lion de
l'ordre; mais 11 leor est loisible de le modifier selon les
pays et les temps. Afin que rien ne détournât ses dis-
ciples de leur mission spéciale, Loyola voulut qu'ils re-
nonçassent aux dignités de l'Eglise ; et en effet Sun Jé-
suite ne peut accepter l'éptecopat; mais, en fermant ainsi
à l'ambition de ses disciples une carrière légitime , le
fondateur ouvrit la voie à ses empiétements dans toutes
les antres carrières, qol ont créé contre eux tant de Ja-
lousie et de naine, nous ajouterons que la règle de saint
Ignace Introduisit dans l'Église catholique une forme
entièrement nouvelle d'association monastique ; elle af-
franchit tout membre de l'ordre de l'obligation de réciter
l'office liturgique en commun , chose Inouïe Jusqu'alors.
De plus, elle substitua {'action à la grâce comme but
principal.
HOCV. B10GR* GÉWÉR. — 1. XXV. '
statuts sans avoir besoin de l'approbation du che*
de l'Église.
Cette concession obtenue , les jésuites déployè-
rent une nouvelle activité, Xavier avait fondé à
Goa sa principale station pour la propagation du
christianisme. Il songeait à convertir les peuples
de Çochin, de Ceylan, de Malacca : on lui envoya
des compagnons ; et bientôt l'Europe retentit des
succès qu'obtenaient les missionnaires jésuites
aux Indes orientales, au Japon, en Chine, en
Abyssinie, au Brésil, et au Paraguay. Mais ce
qui importait davantage à la Compagnie, c'était
de s'assurer un rôle important en Europe. Il lui
/allait pour cela l'influence que donne le sacer-
doce. Ignace, A 1545, obtint la faculté pour les
membres de la Société « d'exercer les fonctions
du ministère sacré en tous lieux et dans toutes
les églises ». Ce privilège a été depuis accordé à
toutes les corporations appelées au droit cano-
nique de nullius, c'est-à-dire relevant direc-
tement du saint-siége.
Le concile de Trente allait s'ouvrir ;~et "il ne
s'agissait pas seulement de repousser le protes-
tantisme, mais de combattre cette tendance, alors
si répandue,' de réformer l'Église dans son chef
et dans ses membres. — Soutenir l'ancien édifice
contre les plaintes des princes les plus puissants
et contre un certain nombre de prélats savants
et vertueux, c'était une tache difficile, Lainez,
Salmeron et Le Jay en furent chargés. lisse pré-
sentèrent comme avocats de la papauté au con-
cile de Trente, et se montrèrent constamment à
la hauteur de leur mission pendant cette longue
et solennelle révision des doctrines et des insti-
tutions de l'Église catholique (1545-1562). Ils
gagnèrent la cause papale; et, il faut le remar-
quer, depuis lors le protestantisme fit peu de pro-
grès. Toutefois, le catholicisme, de son côté, ne
gagna guère de prosélytes sous la bannière mi-
litante des jésuites; mais ils arrêtèrent, ils re-
foulèrent même sur quelques points d'Allemagne,
de Suisse et de France l'élément réformateur.
Quant aux services que les compagnons d'Ignace,
que les jésuites rendirent à la civilisation, à
l'humanité en Asie, en Afrique, en Amérique, ils
sont incontestables : ces services continuent en-
core ; et chaque nouvelle étape de leurs mission-
naires est sanctifiée par le martyre.
D'immenses progrès dans l'esprit général fu-
rent les résultats de leurs travaux, accomplis
partout avec un égal dévouement, une égale ha-
bileté. En 1550, Henri II, sur la recommandation
du pape et par l'entremise des Guise, les auto-
risa à s'établir à Paris et à y professer ; mais le
parlement refusa d'enregistrer les lettres royales.
Persévérant dans leur volonté , les jésuites ob-
tinrent de nouvelles lettres. Guillaume Duprat
était mort, leur laissant des collèges à Billom,
et à Mauriac; un hôtel, rue Saint-Jacques ( c'est
aujourd'hui le collège Louis-le-Grand), à Paris,
et 36,000 écus de rente. Le parlement renvoya,
le 3 août 1554, la question d'enseignement de-
26
803
IGNACE
m
vaut l'évéque de Paris, Eustaché du Bellay, et
devant le doyen de la faculté de théologie. Totis
deux se prononcèrent contre les Jésuites; le
prélat parisien , statuant même sur la baie pa-
pale , déclara « qu'elle contenait des cette» en
opposition arec la raison et qui ne détalent être
tolérées ni reçues en ta religion chrétienne»». La
Sorbonne déclara qoe la Société paraJieait « dan-
gereuse pour la foi , perturbatrice de la pain dé
PÉglise et plus propre à détruire qu'à édifier »«
On leur accorda cependant le professorat à 011-
lom.
Ignace, auquel le P. Brouet, supérieur des je*
suites de Paris, rendit comptede l'affaire, l'exhorta
à se soumettre et à attendre. « Dans certaines
causes, lui écrivit-il , il vaut mieux se taire que
de parler; et l'on n'a pas besoin de se venger «h
de se défendre par la plume quand la vérité se
venge et se défend elle-même. Quelque grande
que soit l'autorité des théologiens qui nous eon*
damnent, elle ne doit point nous faire peur r Dieu
est notre défense. Mettons notre cause entre
ses mains et nous triompherons de la calomnie. *
Ignace fut prophète; car, avant sa mort, le par-
lement consentit à l'établissement des Jésuites en
France, parce que cette Société lui parut la plus
propre à combattre les protestants.
Cependant, Eustache dn Bellay ayant interdit
aux jésuites toute fonction ecclésiastique dans
son diocèse, ils prirent le parti de se soustraire
à son autorité en allant s'établir dans le quartier
qui était sous la juridiction de l'abbé de Saint-
Germain-des-Prés : c'était rester dans Paris, mats
sans blesser les droits de l'évéque. An surplus ,
les faveurs de la cour romaine dédommageaient
amplement Loyola de l'opposition que lui mani-
festait une grande partie du clergé gallican. Non-
seulement les pontifes Paul III et Jules III avaient
accordé à leur pieuse milice tous les privilèges
des autres ordres, mais ils en avaient créé d'ex-
ceptionnels. C'est ainsi qu'ils avalent reconnu
au nouvel institut le pouvoir de conférer tons
les degrés académiques ; et ces degrés devaient
taire jouir ceux qui les avaient obtenus de
droits égaux à ceux des gradués des aniversi~
tés. En 1545, Jules TU accorda au* jésuites la
faculté d'exercer le ministère sacré dans tontes
les églises de la chrétienté, inémé pendant un
interdit, et de donner l'absolution pour les cas,
même réservés au saini+siégef ils étaient
d'ailleurs affranchis de tonte juridiction locale.
Certes, Ignace de Loyola , qui avait obtenu
tant de concessions des papes , qui avait triom-
phé si hautement de la répulsion des monarques
et des peuples, n'était pas un homme ordinaire,
en dépit de quelques écrivains, qui n'ont voulu
voir en lui qu'un instrument. Ignace de Loyola
était une des individualités les plus caractérisées
de son époque. Nous pouvons croire, sans trop
de présomption /qu'il entrevoyait à sa mort ftm-
men.se succès de son œuvre, congrégation moitié
ecclésiastique moitié laïque, toujours «Mitante, .
toujours conquérante; car dé}»* m 1*56, Tordre,
quoique repoussé en France, comptait don»
province* an Europe, trois en Amérique , une en
Afrique , et une an Asie. Déjà dan» plus de ceo|
eettége» niile urigréganjatea ptupageaisat bai»
tentant «es principe» dana Je monde entier-
11 ne conviant pas è notre cadre de fiujm dam
se* dév elonpnmwta la Société fondé* par Ignwe
de Loyola, JDane la netitiqn* elle fut «s qu'elle
devait être selon le formule 0é«< ut wn*, aui
mou $int > adoptée pa# km premiers fondateurs:
le trkihieiiedeUGorapee^
eenl but oeebadnn.de sesroeœbres ; mais il foui
reconnaître que les jésuites ont rendu de grandi
services à J^ufeanité dan» H wtr action, dans il
linguistique, dan» le» science* et surtout dan»
le» nusaiens* qui leur ont fourni l'occasion de
répandre la lumière dans de nombreuses cen-
trée» et de servir, an qn*lqnesart»,4» trait d'u-
nion entra la ejvilisatian et l'état sauvage,
Penl V béatifia igneee de Loyoie, en 1607, et
Grégoire XV letononja», en m%\ Urbain VIII
intreduistt son nom dan» le martyrologe romain.
êoneorps avait été inhumé dans l'église de Jésus
de Rome. Sa fête est célébrée H) 31 juillet. On
connaît d'Ignace de Loyola le» ouvrages suivants :
IÂbro de In» Ctmstitueioms de l& Compania
de IBS., trad. en latin par le P, Juan Polaneo,
Rome 1558 et 1569, in* 9 j Prague» 1567, in-foL;
— Formula /fiatifeft/ octobre U*ûi —, Carte,
de la religUua Obediencia, adreaaée fc ses as-
sociés de Portugal ; avril 1653 ; — Caria de la
Perfeccte* retigitsa, au% mio* espagnols;
9 mars 1547 j — Eçeroicioê fiipirituales , trad.
en latin par André Frueius ; souvent retpriprimés;
trad. en franoai» par Dronet de Maupertqo» i c'est
an recueil de méditations qui renferme une ins-
truction particulière pour la réformation des
mestirs ; on en a souvent discuté le» principes.
A. la.
P. Alegambe, Èibliatheca SockéatU Jësn. — ftiba*
nelra, PUa de 3. Mgnmeéo, Madrid \W, ta-S°, - Gtor.
Pietro Mafféi, De Vita et Moribus S. Ignatii Lopolx,
Rome, In-*». — Stetn, rita Ignatii Loyolee ; 159*.
In-f9l. - Gretaer, Apologies pro Flta S. Ignatii,- in«o.
tfadt, ISW-IW*. lfl-8». — te F* lotriiMirt, Vite 49 ***
Ignace, fondateur delà Compagnie 4e Jésus, w gartiwl.
tjist. de la Soc. de Jésus. — Ptetro-Patito lombiD», rm
S. Ignatii; Naples, Mil, in-*». - Mtehté W*lpole, IMe
of S. IgnatiuS. -± NUsolto AtttonU), MMtotSW» Hu
pana nova, t. III, p. 6H. - Le Cardinal de Bau&srî.
Histoire Se Fënehn, t. I. p. !•>«. - b. 4e Guawan.
Historié dé fis* JHistionest Mute* i*u,l vot> te -Col. -
Baillet, ries des Saints, Si Juillet. ~ Q«*e)lt . Ute
des Tieiligen IgHattus von Loyola ; laspraak, ssta, lu r.
- Crétineau-Jolv, Histoire de» JéMHtss.~ LeCtuvr, Ut*
du Collège RoUtn.
*IGNACB, deuxième patriarche russe tfo
commencement du dts-septième siècle, partis*
du faux Dmitri, jeté dan» un couvent par Basft
Chouiski; les historiens eentemporainn s' Accor-
dent à dire qu'il était catholique. P" A. G—»
Document relatif m Pmtriareot m*s*qv#*i Par*
Techener, 1SW.
* ignagb ( torlévitch), abbé russe du A\\
805 IGNACE —
septième siècle, protesta centre la «entente du
clergé de Moscou, réuni en lftftft, au concile
qui condamna le célèbre patriarche Nikon (voy. ce
nom) à être dégradé et emprisonné pour Je reste
de ses jours. Il émit «a faveur de ce patriarche
calomnié on vota toegnerneiat motivé (Qolos),
qui a été conservé. On a aussi de mi des Ha-
rangues qu'a a adressés» eu tsar Alexis et à
divers grands seigneurs. P ce A. G — n.
Drernaja, RouitJutia BWioteca* V 111.
iqnacb ra si»m , missionnaire italien du
dix*septième siècle. H appartenait à Tordre des
Carmes déchaussés, et alla prêcher l'Évangile en
Turquie, dans l'Asie Mineure, en Arménie et
jusqu'en Perse, où !1 séjourna longtemps. Il s'ef-
força surtout de ramener à la mi catholique les
sectaires dits de saint Jean ( en oriental Men-
éaï). Il revint à Rome vers 165o. Ses princi-
paux ouvrages sont : Narrntief Origiitis È\-
tttwn et Errorum CkrisHanotum sancti Joan-
nis, Rome, 1*52, in-a»; réimprimé dans fè
Recueil des Voyages de Thévenoi On apprend
dans cette relation de nombreux détails sur l'o-
rigine et les coutumes des sehismatiques de Syrie ;
— Qrammatic* Lingues Persicx ; Rome, i 66 i ,
in-4°. A. L.
teurnml dis SavëttU, ana. 16M. — «tefcard et Glraurf,
BibUothé^tê seteréé.
* icn acm (Âir*sM'KorsaMof), métropolite
deTobolsk, mort à Moscou, le 13 mal 1701. Il
était stolnik ( offtrier de table ) <m ttar Alex*
avant d'embrasser la vie eéaobrtique, en 1677, M
SoloTetzk. fl est oeqHtt par son lèle à étouffe*
les nombreuses sectes qui minent depuis long-
temps l'Église russe, et par les oèmges suivants
que ee sèle lui a inspirés $ un, Rapport sur
les sectaires de Kostrom&j -* un Sommaire
de V Histoire de Russie / ces deux travaux sont
conservés en manuscrit à la bibliothèque de
l'Académie des Sciences taSafet-Petêrshourg ; —
des Éfitres fort curieuses ( Bible patriarcale de
Moscou ) et un Hècit de la Vie et des Prodiges
du Bh. Siméon , qui doit être enfoui m me*
nastère de Verkhotoursk. P e4> A. O^-a.
Slovar , PUateltakh Awkhovnago TôMfia grekotoijUs-
koi Pzerkvi. - Drevn, ttots. MitHot., t t XIV et XVI.
IGNACE D* JB8US-JIAHU. Vo$. 8\HBOÎt
(Jacques),
IGSACB DK 8AINT-AHTOWB. Vûf. ïtMJOH»
( Antoine).
ICLNACH D« RHEINPBL9. Vty. E©€».
lesiARBA (Nicolas), antiquaire italien, né
à Pietra-Bianca, le 21 septembre 1728, mort à
Naples, le 6 août 1808. Après avoir étudié les
langues et les littératures anciennes an collège
fondé à Naples par le cardinal Spinelli , il fut
chargé, a l'âge de vingt ans, d'enseigner le grée a
ce môme collège, Son ardeur pour l'étude le fit
remarquer par le célèbre Maztfochi , avec lequel
il se lia intimement et qu'il fut appelé en 1763
à remplacer comme professeur de l'interpréta-
tion de l'Écriture Sainte» emploi dont il Ait
IGOLINO &06
chargé définit** ement e» 1771, après la mort de
Maazochi. Nommé en 1755 membre de l'Aca-
démie Hereulanèse, il devint en 1782 directeur
de rimprimerlé royale, et deux ans après pré-
cepteur du prince héréditaire. Ayant refusé d'ac-
cepter Vévècbé deReg^e, il fut promu en 1794
à un canonicat de la cathédrale de Naples. Quatre
ans après- tt perdit entièrement la mémoire. On
a de lui i VeHstèton gpitframma in tnarmore
repertum; Naples, 1759, ta-4° r transcription
en distiques latins d'une inscription grecque
trouvée près de TésjTrse des frères de la Mission,
et explication savante du bas- refief auquel se
trouvait jointe éette inscription ; — Jbe Pales-
tre neapotitema; aâeertitur de Buthysix
agone puleùlano; Naples, 1770, te-4°; dans
cet «mage, plein d'érudition, Ignarra établit
qu'une inscription grecque, découverte près de
la Porta Noiana, s'était trouvée primitivement
dans le gymnase de Naples; — Doctissimi
Mazzecki Vita; Naples, t77t, in-8*j — Ùe
Pkratrils neapolitanis ; Naples, 1797, in-4«;
l'anteu> y démontre , eontre FopiHion générale
des antie^naires d'alors, que les associations,
connues sous 14 nom de Pkratrix, tt étalent pas
à Naples des confréries religieuses, mais de* so-
ciétés pofftiqUès | à la fin de l'ouvrage se trouve
tme dissertation sur le mot Pausilyppe; —
Opustoli; Naples, f807, in-4 : ce recueil, pu-
blié par lés soins de Vin. Orsmo, contient des
dtesertatfor/a sur l'antiquité sacrée et profane,
des poésies 1 latines, des lettres, etc. E G.
Oasfatdl; îgnarrse Vita; en tête des Opuscot) d'Ignarra,
— Biographia degli U-ornini illustri del Reqno\di Napoli,
t. I. ~ TipaMo, Biogr<tfa(toiK haiwnt W**m, ». IV.
* WNATnur ( A ndré), voyageur rues*, aumfc-
nier du comte Toiatoï , ambassadeur dé Pierre I e *
à Cotstantinople en 1209, est auteur crn»
Voyage* Jérusalem, dont la famille des comtes*
Tofctoï possède le manuscrit. P°* A. G—*.
Boe. partie.
me»É,iNO de Montecatini, médecin îtalîen,
né v«^ 1348, à Montecatini, dans la vallée de
Ntevole en Toscane, mort vers 1425. Hproftssa
^«ridant vlngt-cii«| ans la médecine à l'université
de Pise. Lorsque cette ville passa sous la do-
mination de Jean Gâteaztto, duc de Milan , ît se
démit de sa place, et se rendit à Jacques, où if
ftit accueilli par Paul Guinigi. il entra ensuite au
service de Malatesta, seigneur de Pesaro, avec
une pension' de cinq cents florins d'or. D'après
une inscriptiod sépulcrale qui se Hsait dans
l'église de Santa-Maria-Novella, à Florence, on
pense qo'JgoHno mourut dans cette ville en
142S. Il écrivit le premier sur les bams de Pîse.
Son traité, èomposé vers 1410, est resté manus-
crit; mais Bondhii en a donné une notice en
1789. On a encore d'fgolino : De Balneornm
Halte Preprietatious ac Virêutibus , dans la
collection De Balneis, publiée par les Giontis,
à Venise, 1553. Z.
BttMiiil, Aottoe sur IgeUno.
26.
«07
IGOLMO — 1BRE
808
IGOR I", grand-duo de Moeoovte, né Yen
875, mort en 945, était l'unique fils de Rurik,
fondateur de la monarchie russe. Enfant à la
mort de son père ( 879 ), il necommença à régner
qu'après celle, de .son tuteur, Oleg (912). Il
réussit à soumettre lesDrevliens et les Ougtitohs,
et à surprendre, en 941, Byzance sans défense ;
mais, après avoir ravagé ses environs durant
trois mois, surpris à son tour par une armée
que le patrice Bardas s'était hâté de rallier,
poursuivi en mer par Théophane, qui détruisit
presque toutes ses barques par un feu qui avait
des ailes , dirent les Russes à leur retour,
Igor paya cher cette folle entreprise, sans
toutefois se laisser abattre. En 944 il ras-
sembla une nouvelle armée, prit à sa solde les
farouches Petchénègues, et marcha de nouveau
sur la Grèce par terre et par eau; mais l'usur-
pateur qui occupait alors le trône de Constantin
lui ayant* offert de lui donner le même tribut
qu'Oleg avait imposé à ses prédécesseurs , Igor
consentit à rebrousser chemin et à renouveler le
traité que son sage tuteur avait avantageuse-
ment conclu trente-cinq ans auparavant Pour se
dédommager du riche butin qui leur échap-
pait, les lieutenants et les soldats d'Igor l'obli-
gèrent à aller lever de nouveaux impôts chez les
Drevliens. Cette injuste expédition lui coûta la
vie. Tombé dans une embuscade, Igor rat at-
taché à deux arbres et mis en pièces par ces
tributaires exaspérés. Igor avait pour épouse
sainte Olga. P ce Augustin Gautzdt.
Chronique de Nestor. - Histoire de Russie de SotoTief
et d'Oastrialof.
iooe il, Olegowitch, grand-prince de Russie,
massacré en 1147. Il succéda en 1147 à son frère
Vsérolof n, au détriment des enfants de ce der-
nier, et par les intrigues de la puissante famille
des Monomaques. En reconnaissant Igor II, le
peuple de Kief lui fit jurer sur la croix de sup-
primer une partie des impôts vexatoires que son
prédécesseur avait établis et d'exiger à l'avenir
« que les juges se contentassent de l'impôt légal,
au lieu de surcharger les accusés de contributions
arbitraires ». Pour tenir cette promesse, il fallait
qu'Igor mécontentât les boyards, qui faisaient de
la justice une véritable spéculation. Le choix
était difficile pour un prince plus amoureux dn
pouvoir que de l'équité. Il se décida pour la
continuation des abus, et bientôt le peuple, poussé
à bout, ne voulut plus d'un parjure pour sou-
verain. Ysiaslaf(n) Mstislavitch, prince de Péréas-
lavle, profita de ces dispositions à la révolte : il
réunit une armée formidable sur le Dnieper, et
s'avança vers Kief. Igor marcha à sa rencontre;
mais une partie de ses troupes l'abandonna , et
le reste rat massacré; lui-même tomba dans
un marais, d'où il ne fut lire que pour être con-
duit, chargé de chaînes, au couvent de Saint- Jean
à Péréaslavle, où il ne tarda pas à entrer dans les
ordres; il obtint à cette condition d'être transféré
au couvent de Saint-Théodore à Kief. Son frère
dévoué, Sviatoslaf, se retira àNovgorod-Séversky,
d'où il continua une rude guerre contre Ysiaslaf
et les Kiéviens. Ceux-ci, regardant Ivor comme la
cause de leurs malheurs, l'arrachèrent du pied
des autels/et malgré l'opposition feinte ou réelle
de Vladimir, frère de Ysiaslaf II, le massacrèrent
et firent mille outrages à son cadavre. Le règne
d'Igor avait duré environ six semaines.)
A. d'E— p— c.
Le?e«que, Histoire de Russie; t. I. — Kanmsln,
Histoire de Russie, tnd. pur P. de Dfwofr, U if, *. us-
868. — j. Esneaui, Histoire politique et philosophique de
Russie, t. II, p. 1 à 79.
ihrb (Jean), savant suédois, né à Lund, le
3 mars 1707, mort le 1 er décembre 1780. Dès
l'Âge de douze ans il savait le grec. Après avoir
étudié dans sa patrie et voyagé en Danemark, en
Allemagne, en Angleterre (1730-1733), il fut
nommé en 1737 professeur de belles-lettres à
l'université d'Upsal. Les théologiens lui •suscitè-
rent de grands embarras à l'occasion d'une disser-
tation latine où il démontrait l'alliance de la foi
et de la raison. L'autorité refusa de sévir contre
le professeur inculpé , et invita les deux parties
à exposer leurs arguments réciproques dans un
colloque public qui eut lieu le 13 octobre 1743.
Ihre se fit une grande réputation par sa défense.
On a de lui : Uthast till annuerkningar œf-
ver svenslsa sprdket (Essai et Remarques sur h
Langue Suédoise); Upsal, 1745, Stockholm, 1751 :
ouvrage rempli d'observations judicieuses sur
l'orthographe, les flexions, l'étymologie de la
langue suédoise, alors très-pauvre et presque in-
culte ; — Vetustus Catalogus Regum Suiogo-
thorum; Upsal, 1752-1755, 5 part; — Brtf
om Wetenskapens TUlstând i Sverge under
hedend&ms och pàfvedoms tiden (Lettre sur
l'état des Sciences en» Suède, sous le paganisme
et le catholicisme); ib., 1759; — Svenskt dia-
lect-Lexicon (Dictionnaire des dialectes de la
Suède); ib., 1766, ouvrage utile, mais incomplet,
et composé, sans grande critique, d'après des
vocabulaires recueillis par des étudiants de
chaque province ; — Vlphilas illustrâtes ; ib.,
1752-1755,^6 part.; — Fragmenta versionis
Ulphilanœ ; ib. , 1763, 2 part. ; réimprimés en
1773„par Buschmg, sous le titre de Scriptarer-
sionem UlphUanam et linguam nueso-gothi-
eam illustrantia, avec des changements et
additions par l'auteur; — Annuerhningar rx-
rande Codex Argenteus (Remarques sur le
Codex'Argenteus d'Upsal) ; Stockholm, 1767, et
dans le t. II de K. Bibliothekets Mningàt
Gjœrwel : tous ces travaux sur Ulphâas sont
encore estimés ; — Glossariutn Suio-Crothicum ;
Upsal, 1769, 2 vol. in-8° : ouvrage capital, pour
Fimpression duquel l'auteur reçut des étals une
subvention de 10,000 darter-silbermynt; on y trouve
l'explication et l'étymologie de tons les mots
suédois; — Bref till Lagerbring rœrande
then islœndska Jfftfrfa (Lettre sur l'Edda ), 1772,
enfermant des aperçus nouveaux ; — Upsalia
809
IHRE — ILBERNAZ
810
itlustrata; ih., 1762-1772,8 part.; — livH
Bistoriarum libri CXI Fragtnentum , cum
notis criticis ; ib., nouvelle édition améliorée
des fragments découverts et publiés à Rome
par Bran; — des discours, des éloges funè-
bres , de 453 dissertations académiques et des
Mémoires dans Vetenskaps akademiens ffand-
lingar et Nova acta R. Societatis Upsa-
liensis, dont Dire était membre et secrétaire.
Son père, Thomas Ihrb, né à Wisby, dans
rtlede Gottland, le 3 septembre 1659, mort
le i 1 mars 1720, à Linkœping, où il était pasteur,
enseigna la théologie à Upsal (1692) et à Lund
(1693-1717). Il publia neuf dissertations et une
grammaire latine intitulée Roma in nuce; Ros-
tock, 1680; Lund, 1706; Upsal, 1759 et 1780.
£. B.
Sur le père : J.-L. Torner, Post fanera virtus et fama
tnanet Th. Ihre ; Linkœping, tfto. — T. Radeen, Ltkpre-
dika; lbid. — Sur le fils : V loâervs, Parent *Uo ; Upsal.,
1781.— Sotberg, Éloge, dans VUterhets Akademiens hand-
Unçar, t, IV. — Nordin, Éloge, dans Svenska Ahademiens
Jiandltoaar, U VI. — Svenskt Panthéon, lWr. 16. -
Gezelins; Lex. - BiographUkt Lex., i. VI, p. S51-M1.
ikek (Conrad), hébraîsant et théologien al-
lemand, né à Brème, le 2 5 'décembre 1689, et
mort dans la même ville, le 30 juin 1753. H rat
professeur de théologie au gymnase réformé et
premier prédicateur de Saint-Étienne à Brème.
On a de lui : AntiquUates Hebraicx secundum
triplicem Judeorum statum, ecclesiasticum ,
politicum, et œconomicwn; Brème, 1730, in-4°.
Quatre antres édit., dont la dernière, Utrecht,
1810, in*8°, est annotée par J.-H. Schacht; —
Thésaurus novus theolog.-philolog. Disserta-
ttonumexegeticarum ex Musxo Th. Hasxiet
Conr.Ikenii; Leyde, 1732, 2 vol. in-foL; — De
tempore célébrât* ultinus Camx paschalis
Christ i ; Brème, 1735 et 1739, in-8% contre G. F.
Gudius, ainsi que le suivant; — Dissertatio
qux contra Gudium demonstratur Cœnam
Christi <*ravp6><Tt|Aov vere paschalem fuisse;
Brème, 1742, in-8° ;— Tractatus Talmudicus
de*Cultu quotidiano Templi, quem versione
latina donatum et notis illustratum erudi-
torum examinisubjicit Conr. Ikenius; Brème,
1736, û>4 ; — Symbolx litterarix ad incre-
mentum scientiarum omnis generis , a variis
amicis collaU; Brème, 1744-1749, 3 vol. in-8° ;
— Harmonia historié perpessionumJ. Christi;
Brème, 1743, in-4°; 2 e édit., Utrecht, 1758, in-4° ;
— Dissertations philoL-theolog. in diversa
sacra codicis utriusque instrumentalia loca ;
Leyde, 1749, in-4°; 2 e édit. augmentée d'une se-
conde partie, et due à J. H. Schacht , Utrecht,
1770, 2 part, in-4»; — De Institutis et Cserimo-
niisLegis Mosaicx ante Mosen; Brème, 1752,
2 part in-4°.
* iken, (Henri-Frédéric), parent du précé-
dent, né àNeuenkirchen,le 11 février 1791, et
pasteur à Grœpelingen, près de Brème, depuis
1820, s'est fait connaître par la réfutation d'un
ouvrage que J.-And. Brennecke publia en 1819,
pour prouver que Jésus-Christ, après sa résur-
rection, avait passé vingt-sept ans sur la terre,
et par quelques livres d'édification, parmi les-
quels on remarque particulièrement ; Trostbi-
bel fur kranke und Leidende (Bible de Conso-
lation pour les malades et les affligés, extraite des
psaumes, et accompagnée d'explications) ; Ham-
bourg, 1827, in-8° ; 2 e édit., Brème, 1835, in-8°.
M. N.
J.G. Walchi, BWioth. Tfuotooiea teiceta. - Wtrna,
Handbuch der theolog. Literatur.
*i-mang, célèbre princesse chinoise, mourut
en l'an 701 avant l'ère chrétienne. Elle avait
épousé Siouen-Koung, prince de Wei, et lui avait
donné un fils nommé Et, lequel, en qualité d'en-
fant d'épouse légitime, devait succéder à son
père. Mais Siouen-Koung étant devenu amou-
reux de la fille du prince de Tsi, donna à cette
princesse le premier rang qui appartenait de droit
à I -Kiang. De cette façon Ki cessa d'être prince
héréditaire, et Chéou, fils de la princesse de Tsi,
fut proclamé à sa place. — I-Kiang se plaignit
amèrement de l'injustice dont elle et son fils
étaient l'objet de la part du prince de Wei, son
époux; et comme celui-ci ne fit point attention
à ses plaintes, elle se pendit de désespoir, la
dix-neuvième année du règne de Houan-Wang
(701 avant notre ère); Cet événement rat le début
d'un sanglant drame, dont on trouvera le récit
au nom du prince Ki ( voy. ce nom). R. F.
Tottûg-Klen-Kang-Mou, Hist. de la Chine. —Mailla,
Histoire générale de la Chine, vol. II.
* ikmalios, artiste grec de l'âge homérique;
il est cité dans Y Odyssée (XIX, 56) comme ayant
fabriqué le siège orné d'ivoire et d'argent qui
servait à Pénélope. G. B.
Raoul-Rochette, Lettre à M. Sehorn, Supplément au
Catalogue des Artistes de f Antiquité, p. 336.
* ilbernaz (Francisco de Faria), explo-
rateur brésilien, né à Saint-Paul, vivait dans la
première moitié du dix-huitième siècle. Il dé-
couvrit les riches lavages d'or situés au pied
du pic escarpé iïltabira, dont le nom signifie la
pierre qui brille. Il résidait, vers l'année 1720,
dans les mines d'Itambé, lorsqu'il se décida, ac-
compagné de ses frères, à entreprendre de nou-
velles explorations, qui devaient le conduire vers
une montagne pyramidale, que l'on avait remar-
quée à dix lieues au nord de sa résidence. Il ar-
riva au bord d'une fontaine qui roulait dans
ses eaux des pépites de couleur argentine (fonte
da plata). C'était de l'or et non de l'argent
qullbernaz venait de trouver en si grande
abondance, et bientôt une exploitation régulière
démontra quelle était l'importance de ce gi-
sement. Des maisons s'établirent sur les bords
de ce ruisseau, une chapelle s'y éleva, et ainsi
fut fondée Tune des bourgades les plus riches
du pays de Minas. Quant à Ilbernaz et à ses
compagnons, après avoir exploité les portions
aurifères les plus opulentes de leur nouvelle dé*
811 1LPEENAZ —
couverte, ils vendirent aux nouveau -venus
« les vastes possessions qu'ils avaieat acquises
par le droit du premier occupant, et ils se reti-
rèrent dans la province de Goya* et à Saint-
Paul, leur patrie ». On ne connaît guère la
biographie de ces hommes intrépides que par ta
date, bien récente encore, ae leurs décou-
vertes. Ce qui peut donner une idée de la richesse
prodigieuse dd territoire d'Itabina lors de l'ou-
verture de l'exploitation , c'est qu'on y trouva,
sous là direction d'Ubernaz lui-même, un fil
d'or d'une detnf'totse de longueur et qui adhé-
rait, dit un savant naturaliste, au minerai de
fer pierreux dont se compose la roche. Une
seule bateà (c'est le nom qu'on donne aux
grandes sébiles propres à exécuter le lavage)
t fourni plus récemment vingt-Huit marcs d'or.
F.D.
Documents particuliers.- Aug. Saint-tillalre, Voyage
ûmtu les ptevintoi de MëAe Jtoieirc et ae Mhas
Cernes» t. 1, p. fit.
lliPHFOftSB (Saint)) archevêque espagnol, né
à Tolède, en 607, mort le 23 février 660. U ap^
partenait à une des plus illustres tonifies de la
CastOle (1), et eut pour précepteur saint IsU
dore, evêque de fié ville. A la mort de ee prélat,
Ildefonse revint à Tolède, et entra dans le odtt*
yen! des Saint- Côtoie* et -Daffiien, ou Hellade,
évéque de Tolède, lui conféra les ordres sacrés.
p passa ensuite au monastère d'Agali> dont il
devint abbé après Adéodati U assista au neu-
vième concile tenu à Tolède en décembre 653,
où le roi Récesuiuthe fit sa profession, et où il fût
décidé, par cinquante-deux évêquei présents, que
désormais l'élection des rois d'Espagne se ferait
dans l'endroit où le prédécesseur serait mort, et
que cette élection serait faite par les évéques qui
s'y trouveraient présents et par les grands-offr
ciers du royaume* Les douze canons adoptés
dans ce concile ne furent guère observés; leur
rédaction est d'un style si diffus et si figuré qu'on
doit croire quTldefonse, alors abbé seulement, et
dont les écrits concis et sentencieux témoignent
d'un certain mérite, n'y prit aucune part. Saint
Eugène III» oncle maternel d'Ildefonse, gouver-
nait à cette époque l'église de Tolède ; ce prélat
étant mort à la fin de 657 Ou en janvier 658, son
neveu fut élu pour lui succéder, et vécut encore
neuf ans* U fut enterré dans l'église de Sainte-,
Léocadie de Tolède* On ne sait s'il fut canonisé
d'une manière régulière) toutefois l'Espagne
l'honore comme un de ses patrons, Je 23 jan-
vier. La vie de saint Ildefonse a été écrite par
Cixila et par Julien, qui furent Vue et l'autre ses
successeurs et lui attribuent plusieurs miracles,
entre autres d'avoir retrouvé le lieu ou gisait le
corps de sainte Léocadie et d'avoir reçu une cha-
suble des mains de U Vierge (2).
(1) Nicolas Antonio en donne la généalogie dans sa
BWiotheca ( vêtus ) Hispana, t. 1, lib. V, cap. vu, p. 897.
(2) Dieu, rapporte CUila, sensible ans prières d'Ildefonse,
permit qu'à la vue de tous les assistants la tombe du se-
ILDEFONSE
8(2
Les écrits de saint Ildefonse sont, nombreux,
mais plusieurs lui sont contestés. Voici les
noms, de ceux que les bagiograpbes lui accordent
généralement : De Viris illustrions Scriptorï-
ous eccle&asticis, pour servir de continuation à
l'ouvrage de saint Isidore. Les notices de saint
Ildefonse sont au nombre de quatorze. On les
trouve ordinairement à la suite des catalogues de
saint Jérôme et de Gennade; — Librum Pro-
sopopxix , imbecillitatis proprie , aujourd'hui
perdu \ — De Viryinitate S. Marue § contra très
infidèles , édité d'après Mich. Alph. Carrants;
Valence, i55ô,in-8 d ; Bàle, 1657, in- 8° $ Loufaio,
1569, in-8°: d'après Jérôme Welaeous; Paris,
1 576, in-8°; Douai, 1625, in-4°; et dans tes diver-
ses Bibliothèques des Pères. Les trois infidèles
sont Jovinien, Helvidius, et le Juif, perfide et incré-
dule. L'auteur établit contre Jovinien « que Marie
a conservé sa virginité dans son enfantement » ;
contre Helvidius, « qu'elle est demeurée vierge
après avoir mis Jésus-Christ au monde » ; et con-
tre lee Juifs , « qu'elle a conçu sans perdre sa vir-
ginité » ; — De Proprietate personarum Patris
et PîliietSpiritusSancti; — Libriduo adno-
tationum de Çognitione baptismi, et de iti-
nere deserti quo pergitur post baptismum;
(lads les Miscellan, de Baluie, t. IV, p. 5 et
104 ; — (Spistolx du* ad Quiricïum (ou Cy-
ricium) t episcop. Barcilonensem, dans lëSpi-
çilége de dom d'Aeuerr, t. II j ces lettres ont en-
core pour objet la virginité perpétuelle de Marie.
Les ouvrage* attribués à saint Ildefonse sont
pillera Ht la sainte* que Iritate hommes n'auraient pas pu
soulever, s'élevât d'elle-même et que la glorieuse Léecadie
se montrât aux yeux de tous. Saint Ildefonse , pénétré
d'une faveur si signalée, embrassa la sainte avec respect et
humilité, et le roi flécesulathe, qui était présent, tffa sa da-
gue et coupa an morceau du voile de la bienheureuse. »
Ce fut la seule relique que l'on, put avoir de aainle Leo-
oddie; et depuis ion on expose à là vénération des fidèles
le morceau de voile et la digue dans la métropole de
Tolède. »
Ci* lia s'exprime ainsi t « Le 18 de décembre, fête de
l'Ahfldnclatlon, salrit Ildefonse se leva de grand matin
pour aller prier à J'égHse , et se fit accompagner de quel-
ques ecclésiastiques avec des flambeaux, parce qu'il ne
faisait pas clair. Arrivé à l'église, les portes s'ouvrirent
d'elles-mêmes, et l'intérieur en parut éclairé d'une cé-
leste lumière. Ildefonse, enhardi par cette confiance que
donne la pureté de çenscleneè, entra dans l'église, mais
ceux qui le suivaient n'osèrent l'y suivre. Le saint évé-
que aperçut sur la chaire d'où U avait coutume de
donner sa bénédletlon la relue des anges, assise et en-
vironnée du chœur des vierges qui chantaient dea motets.
La sainte mère de Jésus-Christ le fit approcher, et lui
présenta un Vêtement sacré, lui disant qu'elle Iè Ini ap-
portait des trésors de son Sis, en récompense des ou-
vrages qu'il avait faits enaon honneur» afin que dès cette
vie il fût revêtu des habits de la gloire. » Après qu'elle
eut achevé ces mots, elle disparut avec tout son auguste
collège. Ferreras* qui rapporte lé version de Cixila,
ajoute : a L'habillement que la sainte Vierge donna A
saint Ildefonse fut une chasuble, que l'on garde encore
dans l'église d'Oviedo, â ce que l'on prétend, quoique je
doute fort que personne l'ait vue. A l'égard dé la pierre
où la sainte Vierge a posé les pieds, on la conserva dans
la métropole de Tolède, où Je l'ai vénérée pluateunjeis.
Aucun archevêque n'a osé depuis s'asseoir sur la chaire
qui a servi de siège â Notre-Dame, excepté le malheu-
reux Sisbert. »
813 ILDEFONSE
principalement i un Mer MpbMwm, qui est
évidemment l'eauvr* de plusieurs personnes de-
meurées inconnues; ■— » de» Miâito de* Hymni
en l'honneur de le bienheureuse Vierge Marie;
— dee Epiiephia et des £j»fr<)m*Httaj -
des QfMOf Annun$iatton*$, et».; — enfin
neuf flerfttertti ou homéHtej «avoir t ait sa»
l'Assomption* deux sur le Nativité» on sur la
Purification, que Manillon, d'Acherit Pozzft et
CeiUier attribuent au bénédictin Paatihase Ratbert
ou à un auteur plus récent. Cette opinion a ce*
pendant été combattue par le eomte Andreeazi de
Saint- André, dans un ouvrage intitulé : Vindicte
Sermonis MHcH \Mtftmsi, archiepispopi To*
letanii de perpétua vifginiêaêë m partuH-
tione Deigëhitrict* Mar iœ. f etc. ; Kome, 174»,
in- 8°. Los oeuvres complètes de saint tldefonse,
aTec celles qui lui ont été attribuées, recueiliiee
par du F. Feuddent de l'Ordre des Frères Mineurs,
ont paru à Paria, en 1676, et depuis dans les Bi-
bliothèques des Père». ; A* L.
Julien Pomerie, FUa llde/omi; daneSurius, FitœSarui-
torum, au 17 jauvlér, p. W7. -»■ CM fa, Pita Ildefonsi;
et la méttte &ftf italien, laris lèa Atta Sanètorum (Anvers),
t. II, p. tas et M4' *- fireÉoflo Miyina, *W<i de S. Il-
de/omo. orzobupQ de lu saxtia içlesiade Toledo ; Va-
lence, I7*r, ln-li.' -~ tfhrithème et Bellarmln, ÛeSctip-
tcribut tètètéHëétici*. «-Le Mire, ÉiètMkeca Ëcclei. -
rwwtin, Aptmahu wMr.-> BèttQt»**4tffiri«J«f, owt
667, n°« •<«. — Wqwl De Hi$t. Latin.*- Mariana, Hispa-
nia ïllustrata, t. IX. - Fabrictus, Sibtiothecâ îâtina
Médite et tnfttMe ÂttUto, toi. Illj p. W8-770. - »u
Pin, Bibl. BtxUtiaitèQëëiteptMme slêofc. **» Baillet* P*es
des Saints, M janvier. — Morérl, Le Grand Dictionnaire
Historique. — Jtian de Ferreras, trad. de d'HérollIy, His-
toire générale d'Êspaofic, i: il, p. S«Mtt.- «* tablas An-
tonio, BWietheeu («rtna* Httpanà), t t* p. SM-Wt. -
Dom CeiUier» Histoire des Auteurs Sacrés et Ecriés,,
t. XVII, p. 7Uetsoiv.- Richard et Giraud, Bibliothèque
Sacrée. - Histoire impaire détèFranèè, t. M, p. wo
états.
^îutratracuff» poète ruai* «ontemnorain.
Il tient une boutique d'épicerie» dattsun village
des enriwmade Saint-Pétersbourg, et a oomposé
dea poésies pastorales qui ont été couronnées
par l'Académie impériale de naint-Pétérsbourg.
P ce A. G— n.
Notice sur ta* plus remareuaelee PoHe* de Im ttussie,
par le prince Eitm Metchertkl.
imcino* poète italien. Voy. Glicino.
*ilin (Nicolas- Jvanovitch), auteur drama-
tique russe contemporain. On lui doit plusieurs
traductions de comédies françaises en russe, et la
fondation de VAmi des Enfants, journal qui pa-
rait à Moscou depuis 1809, et qui lui a valu
le titre de Berquin russe. P ce A. G— n.
Doc. partie.
*imeiski (/van), philologue russe, morte
Saint-Pétersbourg en 1735, a enseigné la littéra-
ture russe att prince AntioChus Kahtémir, connu
par ses satires, et a traduit du latin l'ouvrage de
ce dernier sur la religion mahométane.
P* A. G-w.
Doc. partie.
* ixrrcimrçki , poète rusée, mort en 1837.
Ami de Poucbkin, il a composé des épigramrnes
pie : nés de verve-
— 1LLIERS
0U
EUm Melcher&\,Nottoswr les pitutvmariiuables Poètes
de la Russie.
t lit fi (Jacob), controversiste anglais, né
vers 1710, mort en 1763. Il tenait à la fois une
fonderie de caractères et une imprimerie. Il pu-
blia en 1733 tin discoure destiné à prouver la plu-
ralité des mondes. ïl y prétendait que la Terre est
utt enfer , et que lés âfnes des Hommes sont des
anges tombéi Avaiit d'ifflprlmef son ouvrage, il
efl avait lait de* lectures publiques, et après sa
publication, il Continua, stir* des 1 sujets analogue*,
des prédications fort peu orthodoxe*. Dans la
même année dé 1733 parut tin second volume,
Intitulé : A Dialogue ùëtween dûùtor ofthe
Churèh of Ênpland aMd Mi Jacob tlive upon
the sûbjecl of thë àrdtiàtt. En 1751 U| publia
Une prétendue traduction du Livre de Jasher
{The bbvk of Jasher) , ouvrage qu'il attribuait
à un certain Alcuin de Bretagne, et dont il était
l'auteur. Un nouveau pamphlet, intitulé Modest
Êemafhs on bishàp SherlMk's Sêhhon*,ïm
valut détix ans de prison. Il profita de son séjour
forcé à Cièrkenwell Bridewell, potir publier :
Reasons 6/fêred fur the reformation of thé
tiouse of correction in Cièrkenwell. Au milieu
de toutes ces production* bizarre* et hétérodoxes,
ÎHve fendit Un véritable service aux études bl-
bliqtiès eri irripriifialitla seconde édition des Con-
cûfdaiitiS Hacrvrûm BibliorWm de Calasto;
tondra, 1W,Ï Vol. hvfol. Z.
&émgtt, BnUsh fopographf, *- WUsoft , met. ofdis-
smttng Churokés. - ChaUnefâ, <Sen. Biog. DicHonary.
*IM*GE1¥ (Christian-Frédéric) , théologien
protestant allemand, né à Cbemnitz» le 16 septem-
bre (786, et mort à Leipzig, en décembre 1844* Il
fut d'abord professeur de philosophie à l'université
de Leipzig depuis 1818. En 1823 il fut nommé
^rofeseeur de théologie. Il est surtout connu
par l'excellent' journal qu'il publia à Leipzig
depuis 1832 jusqu'à sa mort, avec le concours
de plusieurs théologiens érudits, et qui parait
encore, sous la direction de M. Ch. W. Niedner.
OU a d'IUgen : Ueber den Werth der christli-
chen Dogmengeschichle (De la Valeur de l'His-
toire des Dogmes chrétiens )v Leipzig, 1817,
in-8°; — Histor. theol. Abhandlungen (Mé-
moires historice-théologiqttes); Leipzig, 1818-
1824, 3 vol. in-8°, publiés par la société formée
à Leipzig pour l'étude de la théologie historique ;
-s- Die Verklxrung des irdischen Lebens durch
dos Evangetium (La Transfiguration de la vie
terrestre par l'Évangile) j Leipzig, 1823, in-8°;
— Vïta Lœlii Sodini; Leipzig, 1814, in-8°; —
Symholae ad Vitam et Doctrinam tœlii Socini
Mustrandum; Leipzig, 1826, 2 part in-4°; —
Memoria utriitsque cdlechismi Lutheri ; Leip*
zig, 1829-1830, 4 part. in-4°; — Historia Col-
legii PhiloMblici; Leipzig, 1836-1837, 2 part
in-4°. M. N-
Conv.-Lex.
*illiêrs (t) (Florent b'), capitaine fran-
11) IlKers» chef-lieu de canton, arrondissement de Char-
tres , est une vieille petite ville, située sur les confins du
S1&
ILLIERS - ILLUS
816
çais, né vers 1400, mort le|10 aont 1475. 11 était
capitaine de Châteaudun, lorsqu'en 1428 et 1429
les Anglais vinrent attaquer, an cœur de ses do-
maines , le duc d'Orléans, seigneur du comté
de Chartres, qui comprenait le Dunois, dont
Châteaudun était la capitale. Le 28 avril 1429,
F. dllliers arma dans Orléans à la tète de quatre
cents chevaliers, servis chacun par plusieurs
écuyers ou auxiliaires. prit une part considé-
rable à toutes les opérations du siège qui fut
soutenu par cette ville, et qui se termina, comme
on sait, par la déroute des Anglais. Florent y
combattit parmi les plus braves, à coté de la
Pucelle, en compagnie du bâtard d'Orléans , de
Lattre, etc. Aussitôt que le saint de la ville fut
assuré, le 7 mai 1429, il prit congé de ses com-
pagnons d'armes et retourna en toute hâte à son
poste de Châteaudun.
Florent d'IUiers ne tarda pas toutefois à re-
paraître dans Orléans, et sortit de nouveau, le
11 juin 1429, de cette ville, pour accompagner
la Pucelle an siège de Gergeau. £^1432, vers le
mois d'avril, il pénétra, par un coup de main
hardi, dans la vule de Chartres', où il rétablit
l'autorité de Charles VII (1). La même année,
avec La Hire, il défendit Louviers contre les
Anglais. En- 1435 il se signala par la prise de
Meulan. En 1449 s'ouvrit la campagne de Nor-
mandie, à laquelle Florent d'IUiers participa
d'une manière importante. Le 20 juillet de cette
année il rat ehargé d'assiéger la tour de Ver-
neuil (2). H contribua spécialement à expulser
les Anglais des comtés de Chartres, de Dunois,
du Vendômois, ainsi que du Perche, et prit sur
eux Neubonrg , Beaumesnil et Verneuil.
Florent d'IUiers s'était trouvé, dès sa jeunesse,
en contact et en rapport de fonctions avec le cé-
lèbre bâtard d'Orléans , plus connu sous le nom
de comte de Dunois. Simon de Phares , astrolo-
gue de Charles VIII, et natif de Châteaudun,
rapporte dans ses mémoires que cet illustre ca-
pitaine faisait le plus grand cas de Florent d'il-
hers,»« par le conseil duquel il se gouvernoit,
dit-il, en ses hautes entreprises, par espécial es
conquestes de Normandie et Guyenne (3) ».
Charles VII, par lettres-patentes du 2 novembre
pays chartralfl et du Perche. On y voyait encore, au
temps de Louis XIV, un château très-ancien, mouvant,
pour la Juridiction féodale, de la grosse tour de Chartres. .
Les seigneurs d'Illlers-étaient au nombre des plus anciens
barons de ce comté. On les regardait comme Issus des
puînés de la maison de Blols. Florent d'IUiers, lus aîné
de Pierre , appartenait à cette mce.
\%\ Par lettres données à Selles en Berry, le 10 août 1*81,
le roi fit présent d'un coursier acheté au prix de cinq
cents moutons d'or à« son amé et féal chevalier et cham-
bellan Florent d'IUiers ». (Original, parchemin; ca-
binet des titres.)
(s) Le cabinet des titras renferme une quittance origi-
nale sur parchemin signée Fleurentin d'IUiers en auto-
graphe. FU d'IUiers, capitaine de Châteaudun, reconnaît
avoir reçu 10 livres tournois, qu'il a dépensées pour la solde
de ses francs-archers, à VerneuU.
(9) Autobiographie de Simon de Phares, Fo*, Histoire
de V Instruction publique, 1849, tn-4«, page 87».
1457, le nomma bailli et gouverneur de Chartres.
Il disparut de la scène après la fin de ce prince,
mort le 22 juillet 1461 (1).
Florent d'IUiers avait épousé Jeanne de Contes,
petite-fille de Jean Le Mercier, grand-maître de
France, sons le roi Charles VI. 11 en eut sept
fils. Milon ou Miles d'IUiers (2), frère de Florent,
par le crédit de ce dernier et à la recommanda-
tion de Jean, comte de Dunois, rat nommé
évèque de Chartres le 8 septembre 1459. Ce pré-
lat mourut en 1492 (3). Il eut pour successeur
l'un de ses neveux, René d'IUiers, fils de Flo-
rent, qui occupa le siège de Chartres jusqu'en
1507 (4). Vàllet de Vrnrviu.K.
Godefroy, Histoire de Charles Fil » Paria, ltftl, in-folio,
pages 849 et suivantes. — Chronique de Jean Chartier . édi-
tion clzévirienne, 18», ln-16, tome I« r , pages ?*. 141,
168, et II, page 81.- Qutcberat, Procès de la Pucelle, à la
table : Mien. — Mémoires de Laisné, prieur de Mon-
donville, ms.de la Bibliot. impériale, vol. I, fol. 3*. —
De Lépinoy, Histoire de Chartres; 1858, in-8«, tome IL
* illvs, général byzantin, dont le nom est
écrit différemment TXX6ç, "RXouc, TXXoc, et*RXoûc
par les Grecs , tUus, Ellus, et ffyUus par les
Latins, mis à mort en 488. 11 était Isaurien. On
ignore la date et le heu de sa naissance. Il rem-
plit des fonctions élevées sous l'empereur
Léon I er (457-472 ), et se lia intimement avec
son compatriote Zénon.*L'avénement de Zenon
au trône impérial mit fin à leur amitié, nius, in-
digné des vices et de l'incapacité du nouvel em-
pereur, se joignit à l'impératrice douairière Ye>
rina et à BasUicus, frère de celle-ci, pour le chasser
de Constantinople en 475. U fut chargé avec son
frère Trocondus de le poursuivre en Isanrie où
il s'était réfugié. Les deux frères défirent l'em-
pereur fugitif en. juillet 476, et l'assiégèrent sur
une colline appelée Constantinople. Pendant le
blocus, Illus et Trocondus, à l'instigation du sénat
qui détestait Basilicns , mécontents eux-mêmes
de l'usurpateur et séduits par les promesses de
Zenon, se déclarèrent brusquement pour ce der-
nier, unirent leurs forces aux siennes^et mar-
chèrent sur Constantinople. ANicée, en Bithynie,
ils rencontrèrent les troupes de Basilicns, com-
mandées par son neveu Harmatus. Ce général ne
fut pas plus fidèle que les autres, et une nouvelle
trahison précipita Basilicus du trône en 477.
Illus fut seul consul en 478 et 479. U réprima b
révolte de Marcien, et usa de son influence en
faveur des sciences et des lettres. Parmi ses
protégés se trouvait un Pamprépius, natif d'É-
(1) Flenrentln d'IUiers, seigneur de Maisoncetles prés
Le Maos, reçut, en 1481, 1488, 1466 et 1467, divers hommage*
(cabinet des titres). U paraîtrait pas que ce seigneur de
Maisoncetles est le même que le personnage objet de
cet article»
(l) En 1488 et 1484, Mlles d'IUiers, doyen de l'égHse de
Chartres et conseiller du roi, fat chargé par ce prisée
(Charles VII) de tenir an nom dn souverain les assises
ou échiquier de Rouen, au terme de Pâques ( Cabinet des
titres).
(S) Voyez Documents relatifs à la biographie de Jcen
comte de Dunois dans le Cabinet historique, revue men-
suelle, 1857, in-8% page 116, note 9.
(4) Les armcsd'Illiers sont d'or, à six anneaux de gueules.
817
ILLUS - IMAD ED-DIN
618
gypte, poète et grammairien distingué, mais
païen déclaré et connu surtout par l'art de pré-
dire l'avenir. Pamprépius prit une grande in-
fluence sur Bios, qui, élevé à la dignité de patrice
et de maître des offices , se voyait exposé à la
jalousie de l'empereur et avait eu même à re-
pousser plusieurs tentatives d'assassinat nius,
irrité de voir ses services si mal récompensés,
quitta la cour avec son ami Pamprépius, se saisit
du commandement en chef des troupes d'Asie,
et proclama empereur le patrice Léonce en 484.
Zenon opposa aux rebelles une armée composée
de Macédoniens* et de Scythes (Huns et Ostro-
goths), sous les ordres de Jean le Scythe et de
Théodoric. Léonce, Illus et son frère Trocondus
furent complètement défaits près de Séleucie en
Isaurie, en 485, et forcés de s'enfermer dans le
château fort de Papyrius. Dans les premiers
temps du siège, Trocondus essaya de percer la
ligne de blocus et de«tenterune diversion, mais
il tomba entre les mains des ennemis, nui lui
tranchèrent la tète. Gomme les assiégés igno-
raient cet événement, Pamprépius les amusait
par. ses prédictions, leur promettant chaque jour
que Trocondus allait arriver avec du secours.
Enfin, après trois ans de siège, Léonce et Illus,
à bout de vivres, comprirent que leur prophète
était un imposteur, et lui firent couper la tète.
Quelques jours après, la trahison d'un beau-frère
de Trocondus livra le fort aux assiégeants. Illus
et Léonce eurent la tète tranchée (488). Tillemont
et Le Beau regardent la révolte dUlus comme
une tentative pour rétablir le paganisme; mais
rien ne prouve que le général isaurien poursuivit
un but aussi important et aussi lointain : il pa-
raît n'avoir eu d'autres mobiles que son ambi-
tion et le soin de sa sûreté. Y.
Suidas, aux mots Ztqvo>v, IIau.ftpfaiOç. — Zooaras,
XIV. 1. — Théophane, Chronog., p. 108, édlt. du Loutre.
- BvagThis, Hist. eeeles., M, 8, 16, It, 86, 17. - Candi-
dldus, dans la Bibl. de Photlos, cod. 79. — Malchus, dans *
la Bibt. de Photlos, 78. - Damascias, dans la Bibl. de
Pbotius, cod. lia. - Proeope, Bel. Vand., 1, 7. — Mar-
celttnns, Chronicon. — Victor de Tunes, Chronicon. —
Théodoret, HisL Ecries., I, 87; II, 8, *. — Jornandes,
De Heg. sueeess., c. 47. — Cedrenos , Compendium. — U>
beratns Dtaconns, Breviarixtm Causses Nestorianorum
et Eutychianorum, c. 16, 17, dans la Bibl. Petrum de
GaUand, vol. X. — TillemoQt, Histoire des Empereurs,
▼ol. VI. - Le Beau, Hist. du Bas-Empire, 1. XXXV,
XXXVI.
illyrictjs (Flaccus). Voy. Francowitz.
* ilmoki (Immanuel), médecin finlandais,
né à Nummis, le 29 mars 1797, mort à Helsing-
fors, le 14 avril 1856. Après avoir étudié à Abo
et à Stockholm, et voyagé de 1828 à 1832, il
fut nommé professeur de médecine à l'univer-
sité d'Helsingfors (1834). On a de lui : Physio-
logia Systematis Ossium; 1825-1826, 2 part.;
— Bidrag till Nordens sjukdoms his toria (Do-
cuments pour l'Histoire Nosologique du Nord );
Helsingfors, 1846-1833, 3 vol. in-8°; le 4 e est
resté inachevé, etc. £. B.
Vnsere ZeiU 1887, p. 410. — L. B. Tœrnoth, Notice dans
Finska vetenshaps soeietetent Handlingar, t. V, 1888.
imad eo-datjlah( Abou'l-Bassan Ali-ben-
Bouyah ou Boweih), fondateur delà dynastie
des Bouides, né dans leDaïlem, vers 281 de
l'hégire (994 de J.-G. ), mort le 16 djoumada pre-
mier 338 (novembre 949). Il faisait remonter
son origine aux rois sassanides de Perse. Son
père, Aboo-Schodja-Booyah, était, selon les uns,
un pitavre pécheur, selon les autres, un puissant
général au service des Sassanides. Quoi qu'il en
soit, les trois fils d'Abou-Schodja se mirent à la
solde de Merdawidj, prince de Ghilan et de Tha-
baristan. L'ainé Abou'1-Hassan-Ali rat nommé
gouverneur de Karadj, et se rendit maître d'Ispa-
han, où Motzaffer-Ibn-Yacouth commandait au
nom du khaKfe de Bagdad, Quoiqu'il n'eût alors
aous ses ordres qu'environ 1,000 hommes, ses
succès portèrent ombrage à Merdawidj, qui le
dépouilla de sa nouvelle conquête. Forcé de cher-
cher fortune ailleurs , il se jeta sur Arrendjan,
d'où il chassa Motzaffer, en 320 (932) , puis sur
la province de Fars, dont le chef-lieu, Schiraz,
tomba en son pouvoir, en 322 (934). Il sauva
cette ville du pillage, afin d'en faire la capitale de
ses États, et prit le nom de Imad ed-Daulah
(Soutie* de l'Etat). Après la mort de Merdawidj, "
il reconquit Ispahan, et chargea ses frères Abou-
Ali-Hassan (plus tard Rokn ed-Daulah) et Abou'l-
Hassan- Ahmed ( plus tard Moïzz ed-Daulah ) de
réduire l'Irak et le Kerman. Avant fait occuper
Bagdad, il s'arrogea, sinon la dignité, du moins
Fautorité khahïale. Imad ed-Daulah était un
prince juste, humain et fort aimé de ses sujets.
Comme il mourut sans laisser d'entants, il eut
pour successeur son frère Rokn ed-Daulah, gou-
verneur de Bagdad. £. Bbàuvois.
Ibn-KBanikao, BioçrapMcal DicUonarf, trad. par Mao
Onekln de SUne.t. II,p..si*. - Harodallah-Mostaafl ,
Tarifai Guaideh. - Mirkkood, Gesehichte der Sultane
aus dem GescMechte Buj«h, texte et trad; par Vr. Wil-
keo; Berlin, 1888, in-4», p. 60-68. —G. Well, GeschicMe
des Ch&lifen, t. II, 111. - Price, Chronological Rétro-
speetj or memoirs o/the principal events ofmohamme-
dan history, t. II, p. 888 et sut?.
imad ed-din (Mohammed), secrétaire par-
ticulier du grand Saladin , et désigné souvent par
le titre de aUKdteb, ou le secrétaire ; naquit à Is-
pahan, dans la Perse, Tan 1 1 25 de l'ère chrétienne
(518 de l'hégire), et mourut en 1201 (597del'h.),
à Damas. Son vrai nom est Mohammed : Imad
ed-Din n'est qu'un titre, qui signifie en arabe
colonne de la religion , et qui, à l'exemple des
autres titres que prenaient alors les hommes
de plume et d'épée, témoignait, dans un temps
où les religions chrétienne et musulmane étaient
en présence, d'un zèle ardent pour l'islamisme.
On était alors au plus fort de l'excitation des
guerres des croisades, et ces guerres avaient à
la fois pour théâtre l'Asie Mineure, la Syrie, la
Mésopotamie, l'Egypte, ainsi que l'Afrique et
l'Espagne. t
imad ed-Din étudia successivement dans le lieu
de sa naissance et à Bagdad. Son goût pour la
littérature se montra debonneheure, et ne le quitta
pas jusqu'à sa mort; en même temps il cherchait
819
IMAD ED-DIN
830
à donner à set eotuiatssaaees littéraire» une ap-
plication pratique, Apre» evoir parcouru la Mé»
sopotamie et l'ajiotenne Gbaldée, mitant Isa
gens de lettres et tânbant de se tendre compta
des intérêts poétique* des prisées qui dorais
Baient surce» contrées* il passa en ^yrie, et devint
le secrétaire dç Jiour ed-Din, «tors maître de De*
mas et d'Àlep* * la mort de Nour ed-Din» les
troubles qui agitèrent le pays le privèrent de
son emploi ; mais ao bout de quelque temps mv»
ladln, qni régnait sur l'Egypte, soumit toute la
ftyrie et mémo une partie de la Mésopotamie a
ses loti. Imad uâ«Bfat se rendit auprès de lui et
servit de secrétaire an sultan jusqu'à sa mortj
Oe fut lui 4ui rédigea ea grande partie la eor~
respondanoe do Baladin trèfle khalife de Baodad
et les autre* souverains de son temps» SeMin
étadt hiort* il renpnoa k la politique j et ne,
s'ooenpa plus que de la composition dpscs ou*»
▼rages*
Imad ed*Din paraît avoir en un caractère
noble et généreux. Dans une des expéditions de
Soladin «outre faft ohrétiens, Je suit** af ant fait
plusieurs prisonnteray endonna de lenr couper la
tète) il voulut même que les nommes pieu* et
dévots de son armée se chargeassent de eettfl
eléeutioni. Pour imad ed-ONn* ainsi qu'il bous ftp*
prend luMBéme* il Refusa de souiller ainsi ses
maint) il se contenta de demander in plus jeune
des prisonniers, qu'il éleva auprès de lui*
. Oïl est redevable à Imad ed-£Ufi de quatre ou-»
vrages. Les deiin premiers sont rdatift an» ait*
ploits de Saladin centre les chrétiens. I/un est
intitulé AUBate al*»thmny (éclair de fiyrie),
et a pour sujet les conquêtes, du salades dans la
Syrie, la Palestine et la Phéniete$ H n'est point
parvenu en Europe , et nous ne le connaissons
que par les extraits qui en ont été laits par les
écrivains postérieurs. L'autre , dont l'objet est
analogue, porte le titre de KitQb àl-fath al-
Kossy fylfath al-Kêdêy, ou livre de l'éloquence;
deKoss relativement à la conquête de- Jérusalem
(sur les croisés)» £**« est le nom d'un évêque
arabe qui vivait au temps de Mahomet» et qui.
passait pour l'homme le plus éloquent de l'é-
poque; c'est comme si l'auteur eut dît : « Ou-
vrage qui, par son élégance» rappelle la gloire
des anciens temps. » En effet Imad ed-Dio n'a
lien négligé pour mériter sous oe rapport le suf-
frage de ses contemporains. L'ouvrage, par son
objet, était digne de la plus grande attention.
Il commence aux préparatifs de Saladin contre
la ville sainte , et se termine à. la mort du sultan
et au partage de ses États entre ses enfants)
malheureusement le goût n'a presque jamais été
bien pur en Orient* «t H ne l'était guère à une
époque d'ailleurs remarquable par les souve*
nirs qu'elle a laissés. L'auteur s'occupe plus des
mots que des choses, plus de la forme que du
fond-, naturellement le récit est en prose, mais
cette prose est découpée en membres qui se ter-
minent par les mêmes lettres et ce style factice
a nécessité l'emploi de termes d'un usage rare
et de tournures extraordinaires. C'est la manière
de Hariri* dans le récit des aventures romanes-
ques d'Abou-Zéid * maja ici » bien qu'il s'agisse
de faits réels « l'exagération dépasse toutes les
bornes. La grandeur des événement* n'a pas suffi
pour maintenir te narrateur dans des limites
quelconques t tout occupé de la forme, il ne
prend pas les faite au sérieux, de manière
qu'un livre quj, par l'importance, du sujet et la
position de f écrivain « était susceptible du plus
haut intérêt, tombe sans cesse des mains, et ne
laisse que le pagret de tant de sojas inutiles. Oa
peut juger de* bizarreries du style du livre par
l'extrait qu'Albert gohultens en a publié à la suit*
de la vie de Saladin par Bob* ed-Din , avec texte
arabe et traduction latine.
Letroisiéme ouvrage d'Imad ed-Din, qui en lui-
même était susceptible de la même importance,
et qui .est dépare par les mêmes défauts , est une
histoire de lé dynastie des Sel6*joukides, depuis la
première arrivée de oes princes en perse jusqu'au
temps de l'auteur* Le titre du livre est flîos rti
*&tré ont* etffref fU'Athré ( Secours contre
la langueur» et refuge pour l'activité d'esprit).
La Bibliothèque Impériale possède $ la fois l'ou-
vrage et un îlbrené de l'ouvrage qui fut lait peu
de temps après Ta mort de l'auteur par un de
ses compatriotes appelé Fath-sl-Boadary . Le but
de Bondery * été de dégager les faits des images
outrées sous lesquelles ils étaient comme étouffe.
Bondary avait entrepris le même travail pour IX
clair de Syrie s malheureusement cet abrégé ne
nous est point parvenu*
La quatrième ouvrage dlmad ed-Din me parait
être le plus intéressent de tous. C'est une suite
de notices'de poètes , ©lasses par pays 4 avec des
échantillons de leurs poésies. Le titre est Khe-
ridet cd^ctur oua djeridet al-atr ( La Perle
du Palais et la Palhle do Temps ), Plusieurs re-
cueils analogues avalent précédé celui-ci , notam-
ment le. Yetimet-al-Dahr de tsalebi; aussi
Imad ed-Din n'a commencé que là où ses devan-
ciers finissent , c'est-à-dire aux premières années
du sixième siècle de l'hégire , douzième siècle
de l'ère chrétienne. Ici Imad ed-Din, qui tonte
sa Vie s'était Occupé de littérature, et qui dans
ses écrits avait toujours visé au style relevé,
se trouvait dans son élément* Personne d'ail-
leurs n'était mieux placé que lui pour donner
à un recueil de ce genre le développement dont
il était susceptible, il avait dès son jeune Age
beaucoup voyagé , et, dans ses voyages, il ne
manquait pas de visiter les gens de lettres, qni
tous alors n'auraient pas cru mériter ce nom
s'ils ne s'étaient pas exercés plus ou moins dans
la. poésie. De plus, sa position élevée l'avait mis
en rapport avec les plus grandes notabilités de
ce temps. On pourra juger du parti qu'il est pos-
sible de tirer de ce recueil pour l'histoire litté-
raire de l'époque à laquelle il est consacré , par
la notice de Hariri, qui est placée en tête du
821
IMAD ED-DIN — IMBERT
»22
deuxième volume de l'édition des Séances de
Hariri par MM. Reinattd et Derenbourg.
La Bibliothèque impériale |>ossède plusieurs
volumes àtx Khêridé, botatnrttettt Ceux qui trai-
tent des poètes de la Mésopotamie, clé l'Ëspagttë
et de ia Sicile. D'autres portions existent dans
d'autres bibliothèques. On trouvera la série
complète des notices dont se Compose Ce recueil
dans le deuxième volume du catalogue des ma-
nuscrits orientaux je la bibliothèque de Leyde,
par M. fceinhafl-ftoty, pag. 208 et suiv.
tniàd ed-Din latèsa aussi un recueil de lettres
et un recueil de poésies. Ni l'un ni l'autre né
nous sont parvenus. Les lettres» sont probable-
ment celles qu'il a*ttft successivement rédigées
par ordre de tfoùr ed-Din et de Saladln. Plu-
sieurs dé ces lettrés ont été fapbortées dans led
traités historiques Consacrés a la partie corres-
pondante des annales musulmanes. Comme toutes
celles qui sortent des chancelier les arabes, per-
sanes ex turques, elles sont écrites dans un style
boursouflé et emphatique, au milieu duquel il est
très-difficile de démêler les faits qui y ont donné
lieu. ftfei&Àtjn.
bictionnàifè èibgfaphiquè fllbri-RhalUkàh, tradlictidfl
anglaiatf 46 M. «é Aiaiit, W*. Ht, Pag. Ml et Mit, **
EstruiU *$ HHtyctoM #r»«f tf« GwrVH *** Oral*
$ades, par M. fieiaaud; Paris» 18*8,
; ijmbe&dis (André), historien et magistrat
français, né vers 1810, à Ambert (Puy-de-Dôme).
Reçu avocat après là révolution de Juillet» il
porta la parole dans plusieurs procès politiques
dirigés contrôle parti républicain, notamment
dans celui des accusés d'avril. 1835. et fat pen-
dant longtemps attaché au barreau ae Clermont-
Ferrand. Depuis 184g f il occupe un siège de
conseiller à la cour impériale d'Alger , et c'est en
qualité de président des assises d'Oran qu'au
mois de novembre 1857 il a dirigé, avec beau-
coup de fermeté, les longs et pénibles débats re-
latifs à l'assassinat d'un chef arabe, et (Jui eut pour
résultat la condamnation à mort du principal
accusé, le capitaine français Doineau» 1|. Imberdis
a d'abord écrit un recueil de poésies et quelques
romans i mais nous citerons de préférence ses
travaux historiques, entra autres < Histoire des
Guerres religieuses en Auvergne pendant tes
seizième et dix-septième siècles; 1840-1841 ,
2 vol. in-8° : couronnée en 1839 par l'Académie
des Belles-Lettres de Clermont-Ferrand, et réim-
primée en 184e, avec beaucoup d'additions; —
Z,' Auvergne historique depuis tes Gaulois jus-
qu'au dix-huitième siècle: 1851, in-8 è ; — et
une curieuse étude de psycnologie morale inti-
tulée : Les Nuits d'un Criminel; 1844, 2 vol.
ïn-8°» P. L— y.
littérature français* contemporains. — V Auvergne
-pittoresque. — Journal de la Librairie.
imbert ( Pierre), troubadour du treizième
siècle. On sait peu sur son compte. Il est resté
de lai une chanson où il invoque l'amour. G. B.
Bajnouard, Choix de Poésies des Troubadours, t. V,
p; 817.
imbert, fou de Henri IV, connu aussi sous
le nom tfÂngoulevent ou d'Engoulevent. Voy.
JouBERf (Ificolas).
imbert (Jean), jurisconsulte français, né à La;
rtochelle, vers 1 522, mort à Fontenà'y-le-Cohite, k
la fin du seizième siècle. Après avoir étudié le droit
à Poitiers, Il s'établît à Fontenay-ie-Comte, où if
èXerçâ pendant trente ans, et avec une grande
distinction, là profession d'avocat. Il était par-
venu à Uti âge avancé lorsqu'il devint lieutenant
criminel an siège royal de la môme ville , fonc-
tions qu'il remplissait encore au moment de sa
mort. Ofl a de lui : ÎHStitutiônum Porensium
èttllias, pêne totius quœ moribus regltitr,
cbfhmunium tibri quatuor, etc.; Lyon, 1542,
ih-8*. L'auteur en publia une traduction inti-
tulée: tnstituttones Porëfises, oti Practiqueju-
ÂMairè, translatée de latin en françois; Paris,
1548, 1534, 1560, ln-8*; Poitiers, 1563, ln-4 tt ;
Parts, im, 1604, léife-, itel et 1727, in-4% avec
les commentaires de P. GUenoisetdeB. Automne.
Solvdrtt preux du Radier, Une seconde traduction
est due & Guillaume. Lymandas. Fontanon en a
donné une 1 accompagnée de notes; Paris, 1577
et 1 3&1 , in-4 b . Cet ouvrage, tort estimé, renferme,
dans la partie relative au droit criminel, le pre-
mier commentaire dès. ordonnances de 1536 et
de 1539. On doit encore à Imbert un livre inti-
tulé : Ënthitidton Juris Scripti, Gallise mo-
ribui et tonsuèttidlne ftequentiore usitati,
itêthque âbrôgàtl, Lyon, 1^58, ln-8*; traduit
eH français et augmenté par Tnévenau, Poi-
tiers, 1559, ln-4 6 . Guebois eh a donné une nou-
velle édition* Paris, 1603, ln-4 tt . Imbert était un
savant jurisconsulte dont Cujas a dit : QUo ad
triturant fbtMsm nutlus melior. È. Rëgnard.
F Dreux dd Ràdlef, ÊibllotkèqUe historique et critique
dé Poitou. » tittpltti Lettres sis* tm profession tTdtio-
c*t, par. Camus* #• édlu, tem. II, p. lit, - Ch. Menar-
dière, Essai sur les Jurisconsultes poitevins antérieurs
aH Cvéè Civil; Poitiers, is*é, ln-8». - Catalogue de la
BtiMotHiQUèTli m Cour dé C*sihtiBn.
IMBRRT ( Éenêtt ), poète latin moderne, né
en Auvergne, en mars 1630, mort au PUy, le
16 décembre 1696. Il entra datte la Société des
Jésuites le lo septembre 1645, et après avoir
enseigné plusieurs années la rhétorique et ia
philosophie , il se consacra & là prédication. On
a de lui : L'arme* keroicutn Armando de Be-
lAitftft, tpîmpo Anieiensis Le Puy* 1668,
h*4»j ~* V&Më* adventorium et Ode pane-
gyticà fff/wHMh» de serroni, urchiepiscopo
Atbienêi; Toulouse, 1678, tn-4 d ;^ Secix Ced-
vinian* in Qallia Jam tota mtholica Tu-
mulm; Valence, 1686, in-4°} — Car bien sœ-
culare meharvsticum éontullbus urHs Ane-
ciensiS) etc.* Le Puy, 1669, in-4°j/- Pttro,
cardinab Bonzi f «iïàMepimpo Narbmnensl,
Carmen , in->4°. A» or L,
Le P. Oadtn, daas U grand tHetionsuate universel àe
Morért. — Augustin et Afols de Baeker, Biàliothéque
des Écrivain* de la Compagnie de Jésus.
imbert (Le F. Joseph-Gabriel), peintre
français, né à Marseille, en 1654,' mort à Ville-
833
IMBERT
824
neuve-lès-Avignon, en 1740. Il eut pour maître,
dans sa patrie, un artiste habile, mais peu
connu , Serre; il vint ensuite à Paris, et se per-
fectionna sous les inspirations de Charles
Le Bran et de van der Meulen. H prit chez le
maître français de la correction dans le dessin
et de la vigueur dans l'exécution, et chez le
maître flamand une beHe couleur et l'art de
la perspective. Sa réputation était établie lors-
que, dans un voyage qu'il fit en 1688 dans sa
Tille natale , il entra tout à coup dans Tordre
de Saint-Bruno. Un amour malheureux et la
trahison d'un ami le décidèrent, dit-on. L'art
le consola et lui aida à supporter la vie mo-
notone du chartreux. Ses supérieurs, gens
éclairés, lui facilitèrent, d'ailleurs, les moyens
d'exercer ses talents, mais il ne travailla plus
que pour les maisons de son ordre. Imbert dé-
cora ainsi plusieurs chartreuses , surtout celles
de Villeneuve-lès-Avignon et de Marseille :
c'est dans cette dernière que se trouvait son chef-
d'œuvre : Le Calvaire y qu'on admirait au mattre-
autel. Ses Pèlerine tfEmaûs, qu'a acheva quand
il était déjà plus qu'octogénaire, mirent le sceau
à sa réputation. A. de L.
ChaodoD et Delandlne, IWct. JHist. — Le Bas, ZHct. en-
cycl. de la France.
imbbbt ( Barthélemi ), poète français, né à
Nîmes, en 1747, mort à Paris, le 23 août 1790.
Il fit ses études dans sa ville natale, puis, à.l'age
de vingt ans, il vint à Paris, et y prit rang
parmi les jeunes poètes qui, enviant les succès
de Dorât, cherchaient à imiter sa manière. Im-
bert y réussit mieux qu'un autre, et par son Ju-
gement de Péris il se plaça d'un seul coup à côté
du maître , si même il ne le dépassa pas. « Ce
poème, écrit Desessarts, fut une espèce de phé-
nomène. Ce trait de la fable, si rebattu dans la
poésie ancienne, si souvent et si faiblement
traité dans la poésie moderne, parut rajeuni sous
la plume dlmbert, et enrichi d'une invention
plus piquante, et d'un nouveau ressort qui pro-
duit le plus grand effet. Sans s'assujettir aux tra-
ditions de la mythologie, le génie dlmbert créa
son héros, et le caractère qu'il lui donna est des
mieux imaginés et des mieux soutenus. Rien de
plus ingénieux et de plus simple que le plan de
ce poème. Les trois déesses y sont représentées
sous des couleurs riantes ettrès-distinctes, selon
les attributs que la fable leur a départis. L'élé-
gance, le naturel, l'aménité répandent sur les
détails un air de vie qui égayé l'imagination, la
fixe sur tous les objets et les lui rend sensi-
bles. » Après cet éloge, on peu trop bienveil-
lant, Desessarts est forcé de convenir que l'œu-
vre d'Imbert contient beaucoup de longueurs,
des discours interminables et des incorrections
fâcheuses. Imbert avait une prodigieuse facilité,
qui l'égara souvent; les succès faciles, les petits
triomphes de société le flattèrent et l'empê-
chèrent' d'en chercher de plus durables. 11 es-
saya tous les genres. Très-médiocre dans le tra-
gique , il réussit mieux dans le comique et dans
la poésie légère ; mais, malgré sa fécondité et sa
facilité, il n'a rien fait qui soit supérieur à son pre-
mier ouvrage. Imbert avait un caractère aimable,
généreux jusqu'à l'excès; il avait peu d'aptitude
pour les affaires, ce qui nuisit à ses intérêts. De
la littérature, recherché et bien accueilli dans le
monde, il mena une existence brillante; la dou-
ceur et la bonté de son caractère lui avaient attiré
beaucoup d'amis auxquels il était très-attaché.
On a de lui : Pdnsinet et Molière, dialogue;
1770, in-8°; — Thérèse d'Anet à Euphémie;
1771, in-8°; — Le Jugement de Paris, poème
en quatre chants; Amsterdam, Paris, 1772, 1774,
1777, l'édition de 1772 est la plus recherchée. Cet
ouvrage a été réimprimé dans des recueils; —
Œuvres diverses ; 1772, in-8°; — Élégie sur la
mort de Piron; 1773, in-8°; — Fables nou-
velles ; Amsterdam, 1773,in-8° ; — Historiettes
ou Nouvelles en vers; Londres, 1774 ; Amster-
dam, Paris, 1774, in-8 # ; — Lettre d'une Reli-
gieuse à la Reine; 1774, in-8°; — Le Gâteau
des Rois, comédie en vers avec prologue ; 1775,
ûv8*; — Les Bienfaits du Sommeil, ou les
quatre rêves accomplis; 1776, in-8° avecfig.;
— Les Égarements de l'amour, ou lettres de
Fannyet de Mïlfort; Paris, 1776, 2 vol. in-8°;
1793, 3 vol. in-12. Ce roman est plein d'intérêt
et écrit avec pureté; — Rêveries philosophi-
ques ; La Haye, 17T7, in-8° ; — Œuvres poé-
tiques ; La Haye , 1777 , 2 vol. in-12 ; — Ga-
brielle de Passy , parodie de Gabrielle de
Vergy (avec Dussieux); 1777, in-8°; — Les
Deux Frères , ou la famille comme il y en
a tant ; Amsterdam, 1779, in-8°; — Le Lord
et le Chevalier français, comédie en vers
libres; Paris, 1780, in-8*; — Les Deux Syl-
phes, comédie en vers libres, mêlée d'arriettes;
Paris, 1781, in-8° ; — Le Jaloux sans amour,
comédie en cinq actes et en vers libres ; Paris,
1781, 1785, in-8°;nouv. édit., Paris, 1819,
in-8° ; — V Inauguration du Théâtre-Fran-
çais, drame en vers libres ; Paris, 1782, in-S* ;
— Lectures du matin, ou nouvelles histori-
ques; Paris, 1782, in-8°; — Lectures du soir,
ou nouvelles historiques; Paris, 1783, in-8*;
— Lectures variées, ou bigarrures littéraires;
Paris, 1783, in-8°; — Choix c? anciens fa-
bliaux, mis en vers; Paris, 1788, 2 vol. in-12;
— La Fausse Apparence, ou le jaloux malgré
lui, comédie entrais actes et en vers ; 1789, in-8°;
— Marie de Brabant, reine de France, tra-
gédie en cinq actes; Paris, 1790,.in-8°. — On a
publié ses Œuvres poétiques; La Haye, 1777,
2 vol. in-12; — ses Œuvres diverses; 1782,
in-8° ; — ses Œuvres choisies en vers ; Paris,
an V (1797), ^4 vol. in-8°. Imbert a rédigé
pendant quelques années l'article Spectacle àws,
le Mercure, et fournissait dans le même temps
des pièces a d'autres recueils et journaux, tels
que VAlmanach des Muses, la Bibliothèque
universelle des Romans, etc.; enfin il fut co-
825
HUBERT
éditeur des Annales Poétiques, recueil intéres-
sant. À. Jadm.
Desseanrts, Les Siècles littéraires de la France, —
Qoérard, La France Littéraire.
imbbrt de boudraux (Guillaume),
littérateur français, né à Limoges, en 1744, mort
à Paris , le 19 mai 1803. Sa famille le força à
entrer dans Tordre des Bénédictins : aussi ne
cessa-t-il de protester contre cette violence et
quitta-t-il le couvent; aussitôt qu'il le put. Il se
livra alors à ses goûts pour la critique politique
et littéraire, et fit paraître des recueils périodi-
ques qui le firent mettre trois fois à la Bastille.
Redoutant de nouveaux emprisonnements, il
alla habiter Neuwied ( Prusse rhénane ). Il re-
vint pourtant dans sa patrie vers 1790 et y ter-
mina ses jours. On a de lui : État présent de
V Espagne et de la Nation espagnole, trad. de
l'anglais, de Clarke; 1770, 2 vol. in- 12. Ce li-
vre fut défendu en France et en Espagne dès son
apparition; — - Dissertation sur l'Origine de
F Imprimerie en Angleterre, trad. de l'anglais
de Gonyers Middleton; Londres et Paris, 1775,
tn-8°. L'auteur y établit que Caxton apporta le
premier à Westminster les procédés de cet art,
et repousse l'opinion qui place le berceau de
l'imprimerie anglaise à Oxford, où elle aurait été
introduite par un étranger; — Correspondance
littéraire secrète , publiée chaque semaine, du
4 juin 1 774 à octobre 1785. Une grande partie de
ces feuilles hebdomadaires ont été réimprimées
sous la rubrique de Londres, de 1787 à 1790,
en 18 vol. in-12 et continuées à Neuwied jus-
qu'aux 7 mars 1793 par Beaunoir ; — La Philo-
sophie de la Guerre, extrait des Mémoires du
général Henri Lloyd, trad. par un officier
français (Romance, marquis de Mesmon);
1790, in-12; — Anecdotes du dix-huitième
Siècle; Londres, 1783-1785, 2 vol. in-8° : Im-
bert eut plusieurs collaborateurs pour cet ou-
vrage;— La Chronique scandaleuse, ou mé-
moires pour servir à V histoire des mœurs de
la génération présente; Paris, 1783, in-12 ;
1785, 2 vol. in-12; 1785 et 1791, 5 vol. in-12 ; —
Mémoire politique et militaire sur la Défense
et V Invasion de la Grande-Bretagne, trad.
de l'anglais du général H. Lloyd; Limoges et
Paris, an ix ( 1801), in-8°, avec carte et plan.
Cet ouvrage fut réfuté par le général Jacques-
François-Louis Grobert, dans ses* Observations
sur le Mémoire du général Lloyd concernant
r Invasion et la Défense de la Grande-Bre-
tagne; Paris, 1803, in-8°. Une réplique dlmbert
fut défendue par le gouvernement. H. Lesceur.
Barbier, Examen critique des Dictionnaires. —
Quérard, La France Littéraire. — Desesaarts, Les Siè-
cles Littéraires de la Frottes. — Boucher de La Richar-
derie, Bibliothèque des rouages, III, p.f891.
imbbrt-golombs (Jacques ), homme po-
litique français, né à Lyon, en 1 725, mort à Bath,
en 1809. Issu d'une riche famille de commer-
çants, il se faisait remarquer par son goût pour
les sciences et surtout pour la chimie, lorsque
ses concitoyens le choisirent pour leur premier
échevin. Imbert-Colomès occupait cette magis-
trature au moment de la disette et du froid ri-
goureux qui affligèrent la France en 1788. U
rendit alors de grands services à ses administrés,
en faisant arriver de toutes parts des vivres et
des combustibles et en dirigeant la distribution
de ces secours d'une manière équitable et intelli-
gente. Eu février 1790, il se trouvait encore à la
tète de la municipalité lyonnaise lorsque le peuple
se révolta au nom de la liberté. Imbert-Colo-
mès essaya d'avèter le mouvement et se déclara
hautement partisan du régime monarchique; il
perdit aussitôt sa popularité, vit sa maison as-
saillie et fut obligé de s'enfuir à Bourg. U passa
de là en Suisse, puis en Piémont, en Allemagne,
en Russie, et devint l'un des agents les plus ac-
tifs de la branche aînée des Bourbons. Il ne
craignit pas de rentrer à Lyon en 1797, et sut
se faire nommer, en avril 1797, député du
Rhône au Conseil des Cinq Cents. Il se fit rayer
de la liste des émigrés , mais se Ka avec les Cli-
chyens, et ne cessa de seconder les projets du
parti royaliste en attaquant sans cesse le Direc-
toire. Compris dans la liste de déportation du
19 fructidor an V (5 septembre 1797), il fut
réintégré sur la liste des émigrés^ et put gagner
l'Allemagne , mais ne fut pas amnistié par le
gouvernement consulaire; au contraire, en
juillet 1801, sur la réquisition de Bonaparte, il
fut arrêté à Bayreuth par les autorités prus-
siennes. Rendu à la liberté en 1809, il alla re-
joindre Louis XVm, et mourut quelques mois
après. Le gouvernement français fit imprimer
les papiers saisis chez Imbert-Colomès sous le
titre de Papiers saisis à Bayreuth et à Mende.
H. Lesueca.
Moniteur universel, an 1789, n« 102; an 1790, n» 48;
an V. 169, 176, «80, 80*, M J, 3*9, 850, 881, 886. -
Galerie historique des Contemporains ,• BraxeUca , 1819.
— Arnaalt, Jay, Jouy et Ronrlna, Biogr. nouv. des
Contemp,; 1818.
imbbrt-dblokkàs, médecin français, né
à Yaqueiras (comtat d'Avignon), vers 1745,
mort à Paris, en 1820. Reçu docteur à la faculté
de médecine de Caen, il fut chirurgien particu-
lier du duc d'Orléans. Pendant les troubles de
la révolution, il vécut dans la retraite à Mont-
geron , près de Paris, et ne fut appelé qu'après
le 9 thermidor an n au service supérieur des
armées, où il remplit les fonctions de chirurgien
en chef de divers corps. On a de lui : Traité
de VUydrocéU et de plusieurs Maladies des
Parties de la Génération de V homme; Paris,
1785, in-4° ; 2 e édit, 1791 , in-8° : il place le
siège de l'hydrocèle non dans la tunique vagi-
nale, mais dans la tunique albuginée; — Pro-
grès de la Chirurgie en France guéris par
les opérations modernes sur la fin du
dix-huitième siècle : publié par ordre et aux
frais du gouvernement; Paris, an viii, in-8°;
— Opération courte, facile et sans danger
pour guérir entièrement VHydrecele; corn»
817
paraison de cette découverte avee le traite-
ment çle cette maladie par les injections;
Avignon, an xi, in-8°; cet opuscule fait suite an
Hvre précédent; — jfouvellês Considérations
sur le Cautère actuel; apologie de ee puis-
sant remède comparé aveu les causti-
ques, etc. ; Paris, i«tî, in-8* aw flg;. 0. ne F.
narjavel, Dictionnaire hlstor. du Dép. de FcHutMH. -
biographie Mti4iê*tèé
ihuohati (Le P. don» C*rto*QtUieppé),
biographe italien , né à Milan, mort à Rome
«près 1606. Il appartenait à la jBngFégation rt
formée de 8aintBer«jml*de4a*ra»iteiMe 9 at M
l'élève tt le compagne» d'études du P. GM»
Bartolocd de Celleno. Imbonati aida beaatfOBp
Bartotoeoî dans aa Bibliatheem matna BodlM*
frica,dont il acheva même smI le quatrième
volume. On lai doit en outre t BibliothoUa 16-
tina-Hebraiom; Rome, 108A, 3 vol. kHfll. Cto
«rand ouvrage contient lea notice» des auteurs
qui ont parlé des Hébreux tt de ee qui se rap-
porte à leur histoire j — Ohrmk** tntéiiUi*,
sîve de êventibUê tragtiis prinoipum; Rome,
l696,in~4f li+-*-*a.
Journal dw Snvonts, année i«t, a. «Vf o\ «il. - ai*
chard et Giraud, Bibliothèque Sacrée, - fifetfofluair*
Historique (m%;.
* imbrei (Catus-Licinius) , ancien poète
comique latin, vivait vers 200 avant J. C. Aulu-
Gelle et Festus le citent; Vulcatius Sedlgitus loi
assignait fa quatrième place sur la liste des poètes
comiques latins. II ne reste rien de ses pièces,
dont Tune était intitulée JSeœra. Vosslus sup-
pose que Licinius Imbrex est le même que le
Licinius Tégula mentionné par Tite Live , puis-
que imbrex (tuile) est une espèce de tegula;
mais Festus donne au premier le prénom de
Caius , tandis que Tite Live appelle le second
Publius L. T. Y.
Festin, aux mots imbremet Ob$titvm y ^ 4ult»-Çelle,
XIII, si; XV, t*. - Voattnf , Qt hmtis lmtinto t p. s.
imhof (Jacques-Guillaume dé), généalo-
giste allemand, tié à Nuremberg, le 8 mars *951,
mort le 20 décembre 1728. Après avoir étndié
à ^université d'Altorf, il parconnit l'AH*-
magne, visita tes Pays-Bas, la France et l'I-
talie. De retour dans sa ville natale en 1673, A
y occupa plusieurs platie» dans l'administration
publique; mais.il ne voulût jamais, comme en
l'en sollicitait, entrer au conseil supérieur, aftn
de pouvoir se vouer librement anx recherches
généalogiques, pouf lesquelles Boeder et Spener,
dont il avait fait la connaissance pendant ses
voyages, lui avaient inspiré un goèt fnarqué.
Ses travaux sur ces matière* attestent one rare
érudition, et on les consulte encore aujourd'hui
pour ce qui s'y trouve rapporté stor la noblesse
de l'Allemagne; quant aux ouvrages d'Imhof
concernant les familles des autres pays, lia n'ont
pas la rriérùfc autorité. On à de lui : Bpicilegium
Rilterhusianum ; Tubiogue, 1683-1685, 6 vol.,
in -fol.; cet ouvrage contient soixante-dix tables
généalogiques nouvelles , qui forment on sop-
IMBERT — fMHOFF
828
plément au livre de fcitteriit«; — WotUia
S. R. G. Imperii procerum, tam ecclesiasti-
corum quam secularium hlstorico-héraldico-
genealooica: Tulfague, 1684, 2 val,, in-8 # ;
ibid., tô^.uH*; ib>d„ 1693 et 1699, lu-fol.;
une cinquième édition, augmentée, fut donnée
par gçeler , TuWR2««, 1732-1734, 2 yo|. in-fol.,
avec là planches d'armoiries, j c'est l'ouvrage le
plus important d'jmhof ; ,- ÊaxeUentium in
Ga\lia Famitiaritm Gèntaloqix\ Nuremberg,
1687, in-fol. j îj s'y trouve. 157 tables généalo-
giques de» maisons nphïea de Frappe : — Gène-
Jogix familiariipi ttellomaneriœ t çlaromon-
lanx, de Gallerande et Memmi$; Nuremberg,
1688, in-fpl.; — Regum Parrumaue Magmc
$r\tanntx fiisioriç, aenealogica ; ftureraberg,
169Q-1691, 2 vol. in-fol.; — Genealogicx Ris-
forUe epsarearurh, reglarum etfrincipaiium
famidarum j qu% in terris Europxis post
romanx extifictiohem monarchies hucusaue
imperqrunt; Francfort et Leipzig, 1701, in-fol. :
c'est une édition frès-ajigmentée et corrigée îles
Tables Généalogiques <îe Lohmeier, à la pre-
mière édition desquelles Imhof avait déjà col-
laboré; — Historia italix et Hispanùe qe-
r\ealogica x exhibent iifatat prodromi stem ma
jpesiderianum ; Nuremberg, 1701, in-fol.; -~
Corpus Bistofix gènealogicœ Italix et Mis-
fanix; Nuremberg, 1702, hi-fol.j — Rechercha
istorigues et généalogiques des Grands
d'Espagne; Amsterdam, 1707, in-12; -
Sfemma Hegiym lusitanicuïn;; Amsterdam,
170$, in-fol.; ^- Qenealogix XX illustrhm
in Ùalia familiarum; Amsterdam, 1718,
in-fol.; — éenealogiœ XX Hlustriùm in His-
pantq famitiavum; Leîpzjg # 171?, in-fol.; —
Genealogia Ruthenory.m Çomitùm\ de Domi-
nqrum in Plauen ; jSuremherg , 1715, in-fol. ;
— Àlbanefisis Famjllœ Ârbor genealagica t il-
tustrata hiMoriçarcMione; Nuremberg, 1725,
ip-fol. E 5 G.
K celer, Lebentge$ch\çhte ImHùf's ((fans le tome 11 âH
mitértuÀe Mimèëehuii9**9** 4e Kttter). — WîO,
Encpclop<ï<ty. — tUrgchtqg ^Uistor. littér. ffandbuck.
IMHOFF ( CfUstave-Guillaumej baron »*},
gouverneur général des Indes hollandaise*, né
en 17Q5, à Lier (Ôst-Frise), <f'une famille <tia-
tlnguéed'Amsterdajrt^ort àBatavia, le 1 er no-
vembre 17âl. Son grand-père avait été Fun des
directeurs de la Compagnie hollandaise des
Indes orientâtes; il s'engagea au service de la
même Compagnie, et arrivai Batavia ei» 1725, ea
qualité de sons-CoTnmis. L'année suivante , fi
rot tait commfs , §t successivement secrétaire
4» ift r^Aoe «t ûs«4 de» eaux (1730) , co&-
seiitoi axtiacifdnire dt»Ind«B (1799), et gou-
verneur de Oeyfcm (1736) en remplacement <fe
Doemtmtg. Entre autres bons effets de son ad-
mimstratiori dans cette Ha, on fit sortir de lin-
pfimerfe qu'il y avait établie plusieurs livres de
piété , ta Bible et les quatre évangétistes ne
caractères cbingnlais, potrrFnistruction des to
899
iMHOf* — IMÔIiA
suIaireS: ï! fit urt nouveau traité tivtfe FOmpereur
de Càndy, et partit pour la Hollande, où il fut
élevé à la dignité dé conseiller ordinaire. Dès
1740 il était de retour à Batavia. Il frrit une part
active dans l'affreux massacra des Chinois a
Batavia, (9 octobre 1740) où dix mille de ces
malheureux perdirent la vie. « On enfonça leurs
portes, dit Du Bois, on les arracha de leurs
maisons ; et le carnage «a fut &i grand, que le
sang, répandu dans tes rues à l* hauteur de la
cheville du pied, ruiaaeioit dans. lia canaux, et
dans la rivière. Ce qu'il y eut de remarquable,
c'est que ces gens , malgré leur nombre et la
quantité de leurs armes , se ; paissaient tuer et
poignarder sans résistance comme des moutons
à la boucherie. » Après vue pareille Saint*B*r-
thélemy, les Hollandais n'ont plus rien a repro-
cher aux massacreurs, de la Ligue» Ce drame
sanglant est complété par ces lignes de l'histo-
rien hollandais ; « Il n'échappa en ce jour à la
fureur commune que ceux qui se sauvèrent
sur les toits de leurs maisons , pour éviter la
présence d'une foule d'Européens, la plupart
matelots, moins acharnés au massacre qu'au
pillage. >» Le tort des Chinois était à nette époque
d'être trop actifs, trop riches, et Irop nom-
breux; ils menaçaient les Hollandais da les
exproprier de leur colonie i ceux-ci jugèrent
convenable da les prévenir. Imhoff fomenta e&-
suitg une opposition contré Je gévvemur gé-
néral , Adrien Walkmaer, qui le. fit arrêter
et te déporta en Hollande} là Imhoff, arrivant
comme prisonmerv reçut à son débarquement
la nouvelle de sa promotion au gouvernement
générât des Indes , décidée dès le -2 décembre
1740. Les directeurs de la Compagnie front
mémo construire un navire nouveau, Her-
steller ( le Restaurateur ) pouf le reconduire
à Batavia. H y eontihua nne gnerre d'exter-
mination contre les Chinois ; et , s'il parvint
ainsi à préserver la suprématie hollandaise, du
moins priva-t-il là colonie de son élément le
plus fécond; En février 1745, ïmhofT soumit le
prince de Màdura, révolté par les exigences de
fa Compagnie ; iteut, lès années suivantes, à sou-
tenir de grands démêlés contre les Français, les
Espagnols et les Anglais r 11 sût les terminer ou
du moins en atténueï l'effet Sous son adminis-
tration , la colonie arriva à : oti degré de prospé-
rité qu'elfe n'avait jamais atteint. II mourut
comme on meurt à Batavia, encore jeune d'années,
mais considéré par* ses compatriotes comme tfn
de leurs grands hommes.
Alfred de Lacjjzb.
Do Bols, Pies des Gouverneurs kôilànéaU, p. Mtots.
1MILCON. Voy. HlMILCON.
iMMEHMAifN (Charles), poète* allemand,
né à Magdebourg, le 24 avril 1796, mort à Dus-
seldorf ,' le 25 aoot 1840. 11 fit Ses études au
collège de sa ville natale et à l'université de
Halle, et assista à la campagne de 1815. 00 re-
tour à Halle , il s'opposa à l'esprit d'indépen-
dance qui s* manifestait à eétte «>>qé# dans la
jeunesse allemande, et écrivit à ee sujet Une
brochure : Vêbet die StMtigheitêH dèr Mu-
direnden zu Halle (Dos Querelles parmi les
Étudiants de Halle) ) Leipcig, 4817, qui fut so-
lennellement brûlée par les étudiants assemblé;
en 1817 sur la Wartbourg. Bientôt après Immev-
mann obtint une plaé* de référendaire au tri-
bunal de Magdebourg. H passa de là à Munster,
et de cette dernière ville, en 1827, à Dusse]-
dorf, ou it eterça pendant plusieurs années Mb
fonctions de conseiller du tribunal. Dans l'in-
tention de former une troupfc docteurs modèles,
il se chargea de la direction dn théâtre de ÎJtis-
seldorf. Ses efforts échouèrent contre l'Indiffé-
rence du public.
M. Juliau Scbmidt , dans son ouvrage sur (a
littérature du dix-neuvième siècle, dit d'Immet-
mann : « C'est un artiste trës-raisônnable, qui ré-
fléchit mûrement sur ce qui peut causer la pltié\
la peur, la frayeur ; mais la naïveté lui manqué ;
il n'a pas la puissance dé créer lé tragique, et il
ne sait peindre que ce qui inspire là terreur et
même le dégoût. *<&e*' principaux ouvrages
sont ; Die Printen von Syrakw ( Les Princes
de Syracuse), comédie) 1881 y -~ Da* TfuUwn
Roneeval (La Vaftée ie Roaeevaui), tragédie;
1822; — R&nig Pwiander (Roi Periander),
tragédie^ 1823; -~ Da* Ange der Liebe (L'Œil
de l'Amour), spirituelle eomédie; 1024; *~ Gê-
dtehté (Poésies) j Hamm, 1826; ~- Cardenio
und Oelindê (1828)^ tragédie; ~* Dom Tramr-
wpiel in Tirôl (La Tragédie dans h» \Tyrol),
célèbre poème dramatique) 4828.) **• Frie-
drich II, tragédie; 1828;— DU Verkltèdun-
gm (Les Déguisements), comédie; 1828;** Die
Sefiute der Frommen ( L'Éooledes Dévots ), co-
médie ; 1829 ; <*- Der ton IrrçùrUn der Metrik
vmhertaumelnde Cattotter (Le Cavalier chan-
celant dans le labyrinthe de la Métrique ), comé-
die aristophanique , dam isqaeite immermatn
se moque des prétentions du poète Platée (voir
ce nom); Hambourg, 1829) -r- Nëue Gtdichte
(Nouvelles Poésies); Stattgard, mO;^Ttill-
fantchen , conte drolatique ; Munster, 1830 ; —
Alexis, grand poème dramatique; l$32j —
Merlin, poëme mythique; 1832;— Reise jour-
nal (Journal d'un Voyageur)) Dussotdorf,
1833-183»; ^ EpigônènttowBn; DusseMorf,
1836, 9 vol.) •— MûWS hhuusen , roman <n-
tniquo; DusseldOrf, 1838*143(1, 4 vol.) 2 e éJu-
! tien, 1841 ; — GhUmmdd oéer di# Opfrr des
Schwelgens (Ghtsmoftda, ou les Victimes du
silence), tragédie; f 88*. Us* Œubres etw»-
plèteê d'Immefraann cet été réunies tdans une
édition qui a paru è Dusseldorf ; 1884*1846,
14 vol. Ri ■LiimÀtrv
Conversations - Lexttâ'n dèr àeaèmvaft. — Jui.
Bcfemldt , Genthièkte der déutioken lÂUtVtur im le teii
Jahrh., r édit.; Leipzig, 1395, vol. Il, p. *3S-9t6.
1MOLA ( Domenico da ). Voy. Ferhettï ( Giù-
vmn*Domenico).
831
IMOLA — IMPERIAL!
m
moi* (Innoemaio »a). Voy. Fbamcucci
(Innocensio). v.
îMwimATO (Francesco), peintre italien , né
à tfaptes, vers 1530, vivait en 1565. Après
avoir étudié les principes de son art sous Gian-
filippo Criscnolo , il passa à Venise dans l'école
du Titien, dont il parvint à imiter le style avec
assez de bonheur. De retour dans sa patrie, il
peignit divers tableaux, parmi lesquels un Saint
Pierre martyr, pour l'église consacrée à ce saint,
tableau justement vanté par Carracciolo et Do-
minid. E. B— h.
DoiDlalcl, VUe eW Ptttori Napotetani. - UnsJ, Sto-
ria délia Pittura. — Tlooul, Dizionario»
impaeato ( Girolamo\ peintre, fils du pré-
cédent, mort vers 1620. Elève de son père, il
parcourut comme lui l'Italie , pour se perfec-
tionner par l'étude des maîtres modénais, lom-
bards et vénitiens. H peignit pour les églises de
Naples un assez grand nombre de tableaux qui
lui -valurent une certaine renommée, inférieure
toutefois à* celle de son père. £. B— n.
DomiDici, VUe de' PUtori Napoletani. - Camporl,
Gli'ArUsU negli Stati BsteneL - Lancl, Storim delta
Pittura. — Tkcozst, JHUonario,
îatPBftATO ( Ferrante), naturaliste italien,
vivait dans le seizième siècle. Pharmacien à
Naples, il fonda un jardin botanique, et rassem-
bla une collection de minéraux. Il était en cor-
respondance avec les plus célèbres naturalistes
de son temps , tels que Guilandini, Meranta, qui
lui dédia son Traité de la Thériaque, et Aldro-
vande, qui le cite dans ses ouvrages. On a de lui :
DelV Istoria naturale Libri XXVIII; Naples,
1599, in-fol. : c'est moins une histoire naturelle,
qu'on catalogue raisonné et descriptif de
plantes, de minéraux et de pierres précieuses.
Cet ouvrage n'a pas une grande valeur ; on pré-
tendit cependant qu'Imperato l'avait acheté,pour
cent ducats à Nicolas Stelliola. Toppi et Nico-
demo ont rejeté cette accusation, qui , suivant
Tiraboschi, ne manque pas de vraisemblance.
U Istoria naturale dlmperato fut réimprimée
à Venise; 1672, in-fol. ; elle a été traduite en
latin et publiée à Cologne; 1695,in-4°. Z.
Placctus, Theatrum Anonrnmorum, sis. — Toppi, Bi-
bliotheca Napoletana , avec les additions de Nlcodcmo.
- Tiraboschi, Storia delta Utterat. ItaL, t VII, p. Il,
p. 17.
mro&i alk ( Françoù), poète espagnol, d'o-
rigine italienne, vivait au commencement du
quinzième siècle. Il était né à Gènes ; mais, con-
duit' jeune en Espagne et vivant à Se ville, il
devint tout à fait Espagnol par le langage, et
figura avec honneur dans la brillante et artifi-
cielle école poétique dont les noms les plus con-
nus sont, après Impériale, Villasandino, Diego de
Valencia, Baéna, Fernan Perez de Guzman et
Ferrant-Manuel de Lando. Le principal de ses
poèmes célèbre la naissance du roi Jean en 1405.
Parmi ses autres compositions poétiques, presque
toutes consacrées à des circonstances sans inté-
rêt, il en est une fort curieuse. Tamerlan avait
envoyé du fond de l'Orient une (3e ses captives
au roi Henri Ifl de CaetiUe. La singulière des-
tinée de cette femme inspira à François Impé-
riale des vers touchants et gracieux. Plusieurs
poésies d'Impériale ont été insérées dans la JK- j
bliottca Bspanola de Castro, 1. 1, siglo XI
Z.
Saocbex; Poeskn CasUUanas, t I, p. IX, va, etc. -
Argote de Molina , Nobleia del AndaluiÀa, et dans la
préfsce de sa PJda del Gran Tomorlan. -Tlcàuor,
Mistorw of Spanish lÂUrature, 1. 1, p. Si».
iMPEftiàUC. Voy. Lecaai. j
iM*niAiA (Jean-Vincent), poète italien, né !
à Gènes vers 1570, mort dans la même Tille
vers 1645. Fils de Jean Imperiali, nommé dop
en 1617, il fut envoyé en ambassade auprès do
roi d'Espagne Philippe IV, qui l'accaeillit avec
faveur et le chargea d'une mission pour le duc
de Mantoue et la cour de Rome. H ent à soc
retour un commandement naval, et l'exerça arec
fermeté dans plusieurs occasions, particulière-
ment dans le port de Messine, où il défendit le
pavillon génois contre les prétentions de l'ordre i
de Malte. U débarrassa le littoral génois des pi- |
rates qui l'infestaient, et contribua beweoup ;
aux embellissements de la ville. Malgré ses ser-
vices, il fut banni à un âge déjà avancé. Hmon-
rut peu après son rappel. On a de lui : U Staio
RutticOy poème en vers scialti&ur l'agriculture;
Gènes, 161 1 ; Venise, 1613, in-12 : « Ce poème,
- dit Tiraboschi, fut reçu avec beaucoup d'applau-
dissements, bien qu'il ne poisse soutenir la com-
paraison avec la Coltivazione d'Alamanni >;
et plusieurs autres ouvrages peu importants. Il
écrivit des Arguments pour la Gerusalemnt
conquistata du Tasse; Gènes, 1604, in-12, et
publia les Opère Spirituali du chanoine Bap-
tiste Vemacia, de Gènes. Z.
Soprani , ScrUtori JÀguri. - TItiJmwcM, Storie étOt
UUerat. Itattana,t. VIII, p. ST9.
impbaiali (Jean-Baptiste), médecin ita-
lien, de la noble famille génoise des Imperiali,
né à Vicence, en 1568, mort dans la même ville,
le 26 mai 1623. Il étudia la médecine à Bologne
et à Padoue. De retour dans sa patrie, il pnbhi
son premier ouvrage, pour défendre Alexandre-
Masaria, son compatriote et l'un de ses maîtres,
contre les critiques d'Horace Augène, médecin
alors célèbre. Lui-même se fit un nom par sa
pratique médicale, et surtout par des poésies la-
tines où Ton trouva qu'il imitait fort heureuse-
ment Catulle. Venise, Messine et Padoue es-
sayèrent vainement de l'attirer; il resta fidèle à
aa ville natale. Son principal ouvrage est intitulé :
Exotericarum Lectionum Libri duo; Venise,
1603, in-4°. Z.
Moréri , Grand Diction. Historique. - Éloy, Du***-
historique de la Médecine.
ihpk&iali (Jean) y médecin italien, fils do
précédent, né à Vicence, en 1602, mort dans b
même ville vers 1664. H étudia la médecine à
Padoue, et la pratiqua avec succès dans sa pa-
trie. On a de lui : Pestis anni 1630 Descript*
JêistoriCQ-medica; Vicence, 1631, ta-4°; -
833
IMPEMAL1 — INA
834
Muséum historicum et physicum. In primo
illustrium litteris virorum imagines ad vi-
vum expressx continentur, additis elogiis
eorum vitas ac mores notantibus. In secundo
animorum imagines, sive ingeniorum naturx
perpenduntur ; Venise, 1640, in-4°. La première
partie de cet ouvrage a été réimprimée à la suite
desApes urdona? d'ADatius, Hambourg, 1711,
in«4°; elle renferme cinquante-quatre éloges.
« La seconde parjtie est extrêmement remar-
quable, dit la Biographie Médicale, et mérite
d'être signalée aujourd'hui qu'on examine la
biologie sons un point de vue plus philosophique.
L'auteur, à la suite d'observations sur le caractère
des hommes célèbres dont il a donné les éloges
dans la première partie, se livre à des réflexions
curieuses sur l'influence que les circonstances
physiques au milieu desquelles ils vivaient ont
pu exercer à l'égard du développement de leurs
dispositions naturelles. » ; — Le Notte Bar-
berine 9 ovvero discorsi fisici, medici, etc* ; Ve-
nise, 1663, in-4°. Z.
Kceniff, Bibliotheca vêtus et nova. — Papadopoli, His-
toria Gymnasii Patavini, t. Il, 1. s, p. 808.
imperiali (Joseph-René), prélat italien, de
la famille génoise de ce nom, né à Oria, dans la
terre d'Otrante, le 26 avril 1651, mort à Rome,
le 15 janvier 1737. Fils de Michel de Francavilla,
marquis d'Oria et de Brigitte Grimaldi de Mo-
naco, neveu du cardinal Laurent Imperiali, il
entra dans les ordres et parvint rapidement aux
dignités ecclésiastiques. Clerc de la chambre
apostolique sous Clément X, trésorier général
de la même chambre sous Innocent XI, il fut
nommé cardinal le 13 février 1690, et chargé la
même année de la légation de Ferrare, où il se
montra administrateur éclairé et bienveillant.
En 1711 il alla à Milan en qualité de légat a
latere reconnaître Charles VI comme empereur
et eomme roi d'Espagne. Bans le conclave de
1730, il ne lui manqua, le 21 mars, qu'une voix
pour être élu pape,'; et comme son parti augmen-
tait chaque jour, il aurait été élu si le cardinal
Bentivoglio ne lui eût appliqué l'exclusion au nom
de la cour d'Espagne. Imperiali était fort géné-
reux : il protégeait les gens de lettres, et leur ou-
vrait son palais, où il avait rassemblé une ma-
gnifique bibliothèque, dont Montfaucon a fait
l'éloge dans son Diarium Italicum % et dont Fon-
tanini publia le catalogue, Rome, 1711, in-fol.
JJ chargea par son testament son neveu et léga-
taire le prince de Francavilla de faire disposer
sa bibliothèque dans un local ouvert au public,
et légua une somme pour l'entretien et l'accrois-
sement de cette collection. Un second catalogue
de la bibliothèque d'Imperiali fut publié à Rome,
1793, 2 vol. in-8«. Z.
G. Chlapponi, Legazionedel tard. Gius.-Ren. Impe-
riali a Carlo M, rè délie Spagne, Vanno 1711 ; Rome,
nu, in-V». — Mercure de France» mars 1787. — Morérl,
Grand Diction. Historique. — Tlpaldo, Biografia degli
Ualiani iUtutri, t. VIII.
imperiali (L'). Voy. Fernandi (Francesco).
MOUT. BIOCR. GÉRER. — T. XXV.
impiccati (Andréa decu). Hoy. Castagno
(Andréa dei).
*in-kyô ten-wô, vingtième mikado ou em-
pereur japonais, né en 375 de notre ère, mort en
453. Il fut le successeur du mikado Fan-Syô Ten-
wô; mais ce ne fut que plus d'un an après la
mort de ce prince qu'il consentit à prendre les
rênes du gouvernement. C'est à ce souverain que
l'on doit l'introduction des noms de famille et
des surnoms chez les Japonais et la révision des
titres de famille des sujets de son empire. In-Tok
Ten-wô eut pour maltresse une sœur de sa femme,
appelée So-Towori Fimé (voy. ce nom) : les
poésies que cette princesse composa pour son
amant ont été conservées; plusieurs d'entre elles
passent pour être très-remarquables. In-Tok
Ten-wô mourut à l'âge de soixante-dix-huit
ans , laissant le trône à son fils An~K6 Ten-
wô: L. Léon de Rosny. !
Nippon-tcô dai~itti-ran (Coup d'oeil sur les Dynastie!
des Empereurs Japonais, 11 v. in-4°.- Wa-nen-Kei, édtt.
de Ko-Tctalng-Tchang, avec trad. de J. Hoffmann. —
TitsiDgh et Klaprotb, Annale* des Empereurs du Japon.
in-to-tse , nom chinois du père Prosper
Intoratta, missionnaire sicilien en Chine. Voy. In-
TORATTA.
* in-youen, appelé au Japon In-Gen Zen-Si,
célèbre bonze chinois, né à Foû-Thsing (dé-
partement de Foû-Tcheou-Fou ), dans le Foù-Kien,
en 1592, mort en 1673. Le 6 du septième mois
de Tannée 1654, il arriva de Chine à Nagasaki
pour réformer la religion bouddhique et réunir
les nombreuses dissidences qui s'étaient formées
parmi les sectateurs du culte de Çakya-Mouni.
L'empereur Go-Kwô Myô-In , qui régnait alors
au Japon, le reçut avec les plus grands égards et
lui donna pour demeure un temple situé sur la
montagne Wô-Bak, près de Myako. In-Youen a
joué un rôle très-important dans les annales re-
ligieuses du Japon. L. de R.
Klaprotb, Suppl. aux Annales des'Dalri de Tettlngh.,
in-4».
ina, roi du royaume anglo-saxon de Wessex
de 689 à 729. H succéda à Ceadwalla, et surpassa
tous ses prédécesseurs par sa sagesse et son
habileté. Dans la cinquième année de son règne,
il réunit un witenagemot, et de l'avis de cette
assemblée il publia un code en soixante-dix-
neuf lois , qui réglait l'administration de la jus-
tice, fixait le taux de la compensation pour
les crimes, limitait les haines héréditaires , et
punissait les fraudes dans les transactions com-
merciales et les mutations de propriété. Ina pour-
suivit, comme ses aïeux, le projet de soumettre
tous les Bretons à la domination saxonne. 11
ajouta successivement plusieurs districts aux pro-
vinces occidentales de son royaume , et , après de
longues guerres, il parvint à conquérir la Cor-
nouailles sur le prince gallois Gerwent. Moins
heureux contre Ceolred,roi de Mercie, au-
quel il livra la bataille indécise de Wodnesbury
en 715, il renonça à ses plans d'agrandissement,
et s'efforça de rétablie la paix dans ses États
27
8S5
INÀ — INCHBALD
836
troublés par les prétentions de ses feudataires.
Deux noues saxons, CeHulf, et Eadbyrht, essayè-
rent de s'emparer du trône, ina les vainquit;
mais, langue de ces troubles continuels, il abdi-
qua. Quelque temps après, il partit pour Rome
avec sa femme Ethelburge, et alla prier sur les
tombeaux des apôtres Pierre et Paul. Dans sa
pieuse ardeur, il voulut vivre confondu avec les
pauvres. 11 refusa de se faire raser la tète ou de
prendre l'habit monastique, s'entretint du travail
de ses mains, et accomplit ses dévotions sous le
costume d'un pauvre pèlerin inconnu à tous. Il
mourut avant la fin de Tannée. Z.
Chronicon Saxonicum. — Guillaume de Maimestary,
Gesta Begum Anetontw\ % eêkL 4e Londres, 1840. — Lin-
gard, Histoire drjmkterre (trad. far ftoqjoo*),t I,
c. III.
*iMAftU8 (Ivopwç), prince égyptien, vivait
dans le cinquième siècle avant J.-C. Chef de
quelques tribus libyques situées à l'ouest de
l'Egypte , il se révolta en 461 contre les Perses
qui étaient alors maîtres de ce pays. L'insurrec-
tion, partie de l'extrémité occidentale du Delta,
s'étendit bientôt sur toute l'Egypte, (narus ap-
pela à son secoure les Athéniens, qui avaient alors
près de nie de Cypre une flotte de deux cents
galères. La flotte athénienne remonta le Mil, et
mit le siège devant Memphis. Inarus avec ses
alliés remporta sur les Perses une grande vic-
toire, dans laquelle Achéménès, frère du roi Ar-
taxerxès, périt par la main même du chef des
révoltés. Mais celui-ci fut moins heureux contre
le nouveau général perse Mégabyse. Après une
défaite complète, il tomba, suivant Thucydide, au
pouvoir des vainqueurs qui le firent mettre en
croix. Ctésias donne plus de détails sur cet évé-
nement. D'après lui, Inarus, voyant l'Egypte re-
conquise, se retira dans la ville de Byblos , où il
capitula à condition qu'il aurait la vie sauve. !
Mégabyse le conduisit à la cour d'Artaxerxès, !
qui, pendant cinq ans, respecta la convention de j
Byblos, mais qui enfin, cédant aux instances \
d'Amytis, sa mère et la mère d'Achémènes, fit !
mourir Inarus sur la croix. Mégabyse, indigné, se !
révolta. Au rapport d'Hérodote, quoique Inarus
eût fait plus de mal aux Perses qu'aucun homme
avant lui, son fils conserva le gouvernement des
tribus libyques. Y.
Hérodote, III, iS, li ; VU, 7. - MoAore, XJ, ft. -
Thucydide, I, 104, 110. — Ctésias, Frag^ Si.
IMGA MKNDRZ T SOTOMATOB (Don Ber-
nardo ), calligraphe espagnol , vivait à Cordoue
en 1709. Il était allié aux plus anciennes familles
d'Espagne et comptait parmi ses ancêtres un des
derniers membres de la famille royale péru-
vienne ; fl excellait dans le dessin à la plume. On
cite surtout de lui les portraits de Samuel Scott
et de Paul Romain, qui sont des modèles de
ressemblance et de correction. A. de L.
QuUltet, DictUmmakre des Peintres espagnols.
inchbald (Elisabeth Simpson, mistress),
actrice et femme de lettres anglaise, née à Stan-
ningfield, près de Bury Saint-£dmunds, dans le
comté de Snffolk, le 15 octobre 1753, morte le
1" août 1821. Elle était fille d'un fermier nommé
Simpson. Son père, fermier aisé, mourut quand
elle avait à peine dix-huit ans , laissant une fa-
mille nombreuse ; la jeune Elisabeth, affligée d'un
défaut de prononciation dont elle ne se corrigea
que difficilement par la suite, fuyait le monde et
les plaisirs de son âge pour dévorer des romans
et des pièces de théâtre. Elle copiait désistes, tes
apprenait par cœur, et s'exerçait à les déclamer.
L'exemple d'on frère qui se fit acteur acheva de
lui tourner la tète. D'humeur indépendante, vive,
un pen coquette, mais résolue et maltresse
d'elle-même, la voilà courant de Stanningfietd à
Londres , et adressant à tous les directeurs des
sollicitations que ses dix-huit ans et sa joue
figure rendaient fort dangereuses ; mais partout
elle rencontrait plus d'hommages que d'encou-
ragements, et, pour sortir de cette position équi-
voque, elle s'estima heureuse d'accorder sa main
à l'acteur Inchbald, l'un des plus murs et des
plus honnêtes de ses soupirants. Cet événement
eut lieu à Londres en 1772. Peu de temps après,
les deux époux partirent pour Bristol, où mis-
tress Inchbald débuta dans le rôle de Cornelia
du Roi Lear. Elle n'obtint pas, à cette première
épreuve, tout le succès qui fut depuis la récom-
pense de ses efforts. Sa beauté, son Intelligence
prévenaient le public en sa faveur; mais la len-
teur qu'elle était obligée de mettre dans son dé-
bit pour articuler distinctement nuisait à l'effet
dramatique. Nous ne la suivrons pas à Edim-
bourg, à Glasgow, à Ljverpool, etc., Tilles où efle
s'exerça dans la tragédie, dans la comédie, quel-
quefois même dans la pantomime. Après une
comte excursion en France, elle revint à Londres
en 1777. La perte de son mari, qui suivit de
près , lui fit plus que jamais une nécessité de
tirer parti de ses talents. Elle contracta un en-
gagement de plusieurs années à Covent-Garden.
En même temps , elle se mit à arranger pour le
théâtre des farces et des comédies tirées le plus
souvent de l'allemand et du français. Plusieurs
de ces pièces, te Conte mogol, Je vous le di-
rai, V Heure de Minuit, Chacun a ses Défauts,
eurent du succès, et lui attirèrent des offres
avantageuses de la part des libraires. Elle atta-
cha son nom à plusieurs collections de pièces de
théâtre qu'elle enrichit de préfaces et de notes.
Mais son roman, Simple ffistoire, traduit à
son apparition dans toutes les langues de l'Eu-
rope, et vingt fols réimprimé depuis , restera
comme une de ces créations qui se confondes*
dans nos souvenirs avec les impressions de h
vie réelle. Miss Mflner, Sandford, lord Ebiswood
sont des types familiers à toutes les mémoires.
Cest un phénomène littéraire assez curfeux'qi*
cette œuvre si pure et si naïve, écrite au fond
des coulisses , par une femme de théâtre sans
éducation, mais qui avait beaucoup vécu* par
l'imagination et par le cœur. Ses autres remaas :
Lady Mathilde, suite de Simple Histoire,*
837
INCHBALD — 1NCH0FER
888
Lm Nature et F Art, sans avoir la fraîcheur
d'une première inspiration ni l'éclat d'un premier
succès , vinrent ajouter de nouveaux titres à la
réputation littéraire de l'auteur. Mistress Inch-
b'ald, retirée du théâtre depuis 1789, portait dans
la société le charme qui s'attachait à la plupart
de ses écrits. Mais dans les dernières années de
sa vie, sans rien perdre de la vivacité de son
esprit, elle était revenue à des penchants de
solitude, de frugalité et même de dévotion (elle
était catholique) qui ne l'avaient jamais aban-
donnée à travers les vicissitudes de sa vie aven-
tureuse. La presque totalité de ses revenus était
affectée an soulagement de sa famille et à des
actes de charité. Voici les titres des ouvrages
dramatiques de mistress Inchbald :A mogu l Taie,
drame; 1784, non imprimé; '— Appearence is
against them, farce; 1785, in-8°; — VU tell
you what, comédie; 1786, in-8 6 ; — Widow's
Vow , farce; 1786, in-8 B ; — AU on a summer's
Day, comédie; 1787, non imprimée ; — Animal
Magnelism, farce; 1788, non imprimée; — The
Child oj Nature, drame; 1788, in-8 ;— Mid-
night Hour, comédie; 1788, in-8° ; — Such
thinga are, pièce; 1788, in-8; — Married
Man, comédie; 1789, in-8°; — The Bue and
JEry ,fw»} 1791, non imp.;— Neat Door
Neighhmrs, coméd.; 1791, in-8° ; — Young
Men and old Women, farce; 1792, nonimp.;
— Mvery one has his fault, comédie; 1793,
iorê° ; ~ The Wedding Day, corn.; 1794,in-8°;
— Wmes a$ they urne, and Maid$ as they
are, eon.; 1797, ia*8«; -—Loves'r Vows, pièce;
1798, in-»°; — Wise Han ofthe East, pièce;
1799, in-fl°; *~ To Marryor not to M arr y, co-
médie; i80é, ûv§°. On a de plus de mistress In-
chbald j A Simple Stofy, roman} 1791, 4 vol.
in- 12 ; traduit en français par Deschamps, Paris,
1791, 4 voi. in- 18 et in-8°; — Nature and
Art, roman, 1796, 2 vol. in- 12 ; tari, en fran-
çais par Desehamps, Paris, 1796, 2 vol. in- 18
et 1 vol. in-8 9 '; et par Paquis , Paris , 1830,
2 vol., in-12, Mistrees* Inchbald a publié aussi,
avec de» remarques critiques et biographiques :
The Britiêh Théâtre, collection de pièces;
1806-1809, 2$ vol ; — The Modem Théâtre;
1809, 10 vol» ; et une collection de Farces , en
7 vol. Elle avait écrit un récit de sa vie; elle le
refusa à un éditeur qui lui en offrait 1,000 1. st.,
et par son testament elle ordonna qu'il fût dé-
truit Mais on a conservé son journal, et d'après
ce document et sa correspondance M* Boaden
rédigea les Mémoires de Mistress Inchbald.
[M, Ràthbby, dans Vtincyc. des G> du M., avec
«ddjt* parZ.}
Botta), Mémo/Un af Mittnm IneMalé; 173». ~ Bio-
grapbia Dramatise.
l*GMOV*m(Mêkhior), savant jésuite alle-
mand, né à Vienne, en i 584, mort le 28 septembre
1648. Après avoir étudié h Home la jurispru-
dence , il entra à l'âge de vingt-trois ans dans
Tordre des Jésuites, et fut envoyé par ses supé-
rieurs quelques années après à Messine, pour y
professer la théologie et les mathématiques. Cité
en 1630 devant ta congrégation de Y Index, pour
avoir publié un commentaire sur nne lettre apo-
cryphe de la Vierge aux Messinois, il se rendit à
Rome, où il se concilia l'indulgence de ses juges,
n'ayant péché que par une trop grande crédulité.
Après être retourné en Sicile en 1634, il revint
à Rome, deux ans après, pour y travailler à un
grand ouvrage sur le Martyrologe Romain, dont
plusieurs manuscrits, conserves à l'abbaye de
Saint-Sauveur de Messine, lui avaient donné
l'idée. Mais ayant improuvé par écrit le genre
de mutilation auquel on soumettait alors des en-
fants pour leur faire obtenir une voix agréable,
il s'attira le ressentiment de ceux qui défendaient
cette coutume; cela, joint à diverses tracasseries
auxquelles il fut en butte, lui fit quitter Rome en
1647. Il partit pour Macerata, où il eut à diriger
le collège que son ordre avait dans cette ville.
Quelque temps après il se rendit à Milan pour
y consulter un manuscrit contenant plusieurs
vies des saints ; mais à peine arrivé, il y mourut
épuisé par le travail et les veilles. Inchofer avait
beaucoup d'érudition; mais il manquait de cri-
tique. On a de lui : Epistolm B. Marias ad Mes-
sanenses Veritas vindicata; Messine, 1629,
in -fol., très-rare; d'après nne décision de la
congrégation de V Index, cet ouvrage fut mo-
difié par Inchofer, et parut alors sous le nou-
veau titre de : De Epistola B. Virginis ad
Messanenses Conjectatio; Vlterbe, 1632, in-fol.;
le vrai lieu d'impression était Rome ; •— Trac-
tatus syUepticus, in quo quid de Terras So-
lisque motu vel statione secundum Sacram
Scripturam sentiendum ostenditur; Rome,
1633, in-4° : ouvrage écrit pour combattre le sys-
tème de Kopernic; — ffistoria sacrœ Latinita-
tis, hoc est de variis linguas laiinœ mysteriis;
Messine, 1635, in-4° ; Munich , 1638, in- 8° ; —
Grammaticus Pœdicus , sive pueriîis.; 1638,
in- 12 : écrit dirigé contre Scioppius et publié sous
le pseudonyme d'Eugène Lavanda, ainsi que le
suivant : Grammaticus Palœphatius , sive
nugivendus, hoc est 4 in très consultationes
Scioppii De Rattene Studiorum notationes;
1639, in-12; — Annales ecclesiastici regni
Hungariae, tomus I; Rome , 1644, in-fol. ; cet
ouvrage, qui est resté inachevé, s'étend jusqu'à
l'an 1059; — De Eunuchismo, inséré dans les
Symmista d'AUatius. — Inchofer .a encore pu-
blié divers opuscules sur des matières de théo-
logie et d'astronomie ; enfin il a laissé en manuscrit
plusieurs ouvrages , entre autres le Martyro-
logium Romanum, auquel il travailla pendant
une grande partie de sa vie. On a faussement
attribué à Inchofer une satire violente contre
les jésuites, publiée sous le titre de ; Lucii Cor-
nelii Europxi Monarehia SoUpsorum; Venise,
1645, in-12; cet écrit est d'un autre jésuite,
nommé Jules Scotti(t>oy. ce nom). E. G.
AkgjuBlM, Bibltothee* icript. Soc. Jesu. - u AUatkw ,
839 IIVCHOFER — rNDTBILIS
Ape$ urbana. — Bayle, Dictionnaire. — Nicéron, Mé-
moires, t. XXXV. -Cfaanffepté, IfoweaulDietion, HUU
ingledon (Benjamin-Charles), chanteur
anglais, né vers 1764, àSaint-Keveran(comtéde
Cornouailles,raort à Worcester, en 1826. A l'âge
de hait ans, il fut confié an compositeur Jackson
d'Oxford, et passa sept ans sons sa direction,
comme choriste de la cathédrale ô"Exeter. 11
quitta son maître en 1779, et s'embarqua comme
matelotà bord du Formidable. Il y resta cinq ans,
et fit le voyage des Indes, occidentales. À son re-
tour, il s'essaya sur les théâtres de Southampton
et de Bath, et fut engagé au mois d'octobre 1790
à Covent-Garden. H devint bientôt et resta jusqu'à
sa mort un des chanteurs les plus populaires de
l'Angleterre. Z.
Rose, New gênerai Bioçraphical Dictionary.
* ISDA.CO (Jacopo de Florence, dit L' ), peintre
de l'école florentine, vivait en 1534, et mou-
rut à Rome, à l'âge de'soixante-huit ans. Élève de
Domenico Ghirlandajo, il travailla à Rome avec
Pinturicchio, et fut lié d'amitié avec Michel- Ange,
qui venait chercher dans sa conversation un re-
pos à ses fatigues du corps et de l'esprit. L'Iu-
daco était appelé à tenir un rang distingué dans
son école; mais, malheureusement, il détestait
le travail autant qu'il aimait le plaisir, et ses ou-
vrages s'en ressentirent. On y trouve cependant
une vérité qui fait regretter d'autant plus l'ab-
sence des autres qualités qu'il eût pu acquérir
par un peu d'étude. E. B— n.
Vasari, Vite. — Bottari, Nette aile ViU tel Vatari, —
Lanzl, Storia délia Pittûra. — Ticozzi, Dizionario. -
Guida dl relterra.
HP *iWDàco (Francesco, dit V), peintre de l'école
florentine, frère du précédent, vivait en 1536. H
fut, comme son frère, élève de Domenico Ghirlan-
dajo. Il était bon dessinateur, et modelait en stuc
et en terre avec habileté. Vasari le qualifie de pein-
tre éminent, tout en lui reprochant, comme à Ja-
copo , une paresse qui nuisit à ses progrès. Mal-
heureusement les fresques qu'il avait peintes à
Monte-Pulciano, à Arezzo et à Florence ont toutes
disparu. E. B— n.
Vasari, Vite. — Orlandl, Abbecedario. — Lanii, Storia
délia Pittura. — Ticozzi, Dizionario.
*india (Tullio), dit V ancien y peintre de
l'école vénitienne, né à Vérone, florissaiten 1545.
Il fut habile peintre à fresque , excellent copiste,
et ne réussit pas moins dans l'art du portrait. Il
jouit de son vivant d'une grande réputation, et
l'on peut voir, par une curieuse lettre de cet ar-
tiste , publiée par Gualandi , que les plus grands
, seigneurs cherchaient à l'attacher à leur service,
mais qu'il préféra toujours son indépendance,
quelque dorées que fussent les chaînes qui lui
étaient offertes. Peu de ses nombreuses fresques
sont parvenues jusqu'à nous; on voit cependant
encore avec plaisir de jolis enfants dans des rin-
ceaux formant la frise du palais Miniscalchi de
Vérone. E. B— n.
Pozzo, Vite dé* Pittori.Scultorie ArchitetU Feronesi.
— Vasari, rite* - Lanxi, storia delta Pittura. — 6e-
840
nantit!, Guida di Ferma. -Gualandi, Simone orty-
nali di Belle-Arti.
MroiA ( Bernardino ) , peintre de l'école vé-
nitienne, fils du précédent, né à Vérone, virait
de 1572 à 1584. Après avoir reçu de son père
les premiers principes de son art, il entra à l'é-
cole que Jules Romain avait ouverte à Man-
toue; on trouve dans ses ouvrages une vi-
sible imitation de la force de l'illustre élève de
Raphaël, qualité qui n'exclut pas le charme et la
grâce. Les peintures delndiasont nombreuses à
Vérone; parmi les fresques, les principales sont
les plafonds des palais Giuliari et Canossa et la
façade du palais Murari ; parmi les tableaux, Its
plus importants sont à S.-Bernardino, la Nati-
vité de Nôtre-Seigneur, portant la date de 1572,
et La Vierge entre saint Roch et saint Sébut-
tien ; à S.-Zeno-Maggiore, La Vierge etpliakm
saints ; à Samt-Nazaire-et-Saint-Celse, la Conver-
sion de saint Paul, peinte en 1584. E. B-ir.
vasari, rite. — Orettl, Memorie. — Unzi, Storia Mê
Pittura. — Ticozzi, Dizionario. — Benassott, Guidé H
Verona.
indibilis ('Av8o6<SXvk dans Polybe, 'Hi-
êiXtç dans Appien), prince espagnol, tué en 205
avant J.-C. Il était roi ou chef de la tribu des
Ilergètes, qui prit une grande part à la lutte des
Carthaginois contre les Romains dans la seconde
gnerre punique. Il est mentionné pour la pre-
mière fois en 218. Commandant les auxiliaires
espagnols au service de Hannon, gouverneur des
provinces situées au bord de l'Erré, il fut vainco
avec ce général par Cneius Scipion, et fait prison-
nier. On ignore par quels moyens il recouvra sa
liberté ; mais Tannée suivante on le retrouve avec
son frère dévastant le territoire des tribus soo-
mises aux Romains. 11 fut repoussé, et les soc
ces des deux Scipions le forcèrent au repos. Ea
212 il conduisit 7,500 hommes au secours du
général carthaginois Asdrubal, et ce fat en vou-
lant intercepter ce corps d'armée que P. Scipion
périt. La victoire des Carthaginois amena le ré-
tablissement d'Indibilis et de Mandonius dans
leurs Etats, d'où les Romains les avaient chassés;
mais le hautain et violent Adsdrubal s'aliéna
bientôt les deux chefs espagnols en leur impo-
sant une contribution de guerre et en exigeant
comme otages la femme de Mandonius et les filles
dlndibilis. Publius Scipion le jeune s'empara A*
ces otages à la prise de Carthagène, et les traita
avec une distinction qui gagna le cœur des dew
frères. Indibilis et Mandonius vinrent avec toute
leurs forces se joindre à Scipion au printemps
de 209, et firent sous ses ordres la campagaequi
se termina par la victoire de Bœcula. Us Matè-
rent fidèles à l'alliance romaine tant que Scipion
fut prêt d'eux ; mais sur le faux bruit de sa morf,
en 206, ils se soulevèrent et firent révolter te
tribus celtibériennes voisines. Scipion accourant
les rejeta dans leurs États, les y poursuivit et te
força d'implorer un pardon qu'il leur accorda ao
prix d'une contribution de guerre. Sa M* ***
fut mal reconnue par les deux frères, qui aussi»»
841
IND1BILIS — INEZ
842:
après son départ, en 205, recommencèrent la
guerre avec 30,000 fantassins et 4,000 cavaliers.
Les .lieutenants de Scipion L. Lentulus etL. Man-
lius Acidinos marchèrent contre les insurgés et
les vainquirent après une lutte acharnée. Indi-
bilis périt sur le champ de bataille. Mandonins
s'échappa avec les restes de son armée ; mais ses
compagnons d'armes le livrèrent aux généraux
romains, qui le firent tuer immédiatement. Y.
Potjbe, III, 7« ; IX, 11 ; X, 18, Si, 18, 40 ; XI, tt, î», S1-3S.
— Tite-Ltve, XXII, Il $ XXV, S* j XXVI, 49; XXVII, 17,
19; XXVIII, 14, 18, 31-84; XXIX, 1-1. - Dlodore de Si-
cile, XXVI, Excerp. Fat. — Applen, HUpan,, 37, 58. —
Zonaras, rx, 10.
ihdobtàs, prince espagnol, tué en 232 avant
J.-C. H était chef d'une des tribus celtibériennes
situées dans le voisinage de rÈbre. Après la dé-
faîte d'Istolatius par le général carthaginois Amil-
car Barca, Indortès, qui le remplaça dans le
commandement des Celtibériens, n'osa pas, mal-
gré le nombre de ses soldats ( 50,000, au rapport
deDiodore), engager une bataille contre les- Car-
thaginois, et se retira sur une hauteur où Amil-
car l'assiégea. Il tenta alors de s'échapper pen-
dant la nuit ; mais il tomba au pouvoir du général
carthaginois, qui le fit mettre «n croix après lui
avoir infligé diverses tortures. Y.
Dlodore de Sicile, XXV, 10.
indulf, roi d'Ecosse, régna de 959 à 969. 11
succéda à Malcolm. Les premières années de son
règne furent paisibles ; mais vers 967 les Danois,
irrités de son alliance avec les Anglais, firent des
incursions dans ses États. Une bande de ces pi-
rates ayant débarqué au nord de l'Ecosse, Indulf
marcha contre eux, et les força de regagner leurs
vaisseaux. Comme il les poursuivait avec trop
d'ardeur, il fut tné d'un coup de flèche. Y.
Bucbanan, Hlstoria Scotlca,
£ikduko (Dominique), peintre italien, né
à Milan en 1815. Il fréquenta les cours de l'A-
cadémie royale de cette ville ainsi que l'atelier
de M. Hayez, et remporta en 1837 un grand prix
de peinture, distinction qui lui permit d'aller
passer plusieurs années à Rome aux frais du gou-
vernement autrichien. Cet artiste, qui réside à
Milan, se distingue par de sérieuses qualités de
composition, et a obtenu une médaille d'honneur
à l'exposition de Gènes ( 1852) et une mention
honorable à celle de Paris ( 1855 ). On cite parmi
ses toiles d'histoire et de genre : Samuel et Da-
vid, qui se trouve au musée de Vienne; —
Les Contrebandiers ; — Pain et Larmes ; — La
Douleur du Soldat;— Le Village incendié; —
La Quête, etc. P. L— y.
Siret, Livrets des Salons.
indutumare (Indutiomarus ou Indu-
ciomarus ), un des chefs des Trévires ( habitants
de Trêves ) , mort en 54 avant J.-C. Quand Cé-
sar pénétra sur le territoire des Trévires, Indu-
tiomare, qui était à la tète du parti opposé aux
Romains , leva des troupes et se prépara vigou-
reusement à la guerre. Mais lorsqu'il vit les
principaux de l'État, entraînés par Cingétorix, chef
du parti romain, se rendre auprès de César, il lui
envoya aussi des députés. César accepta ses
excuses et exigea de lui deux cents otages; en
même temps il engagea fortement les chefs tré-
vires à se rallier autour de Cingétorix. Exaspéré
de l'atteinte portée à son influence, Indutiomare
attendit avec impatience l'occasion de se venger
des Romains. Elle se présenta plus tôt qu'il ne l'es-
pérait César fut obligé, par la rareté des vivres,
de mettre ses troupes dans des quartiers d'hiver
éloignés les uns des autres. Indutiomare décida
Ambiorix et Cativolcus, chefs des Éburons, à
attaquer les légions romaines stationnées dans
leur pays, et marcha contre Labienus, qui cam-
pait chez les Rèmes sur la frontière des Trévires.
La nouvelle de la victoire de César sur les Ner-
viens l'obligea momentanément à la retraite. U
renforça son armée, et marcha une seconde fois
contre Labienus, dont il entoura le camp. Une
soudaine sortie des Romains mit ses troupes en
fuite, et lui-même fut tué dans la déroute en pas-
sant une rivière (peut-être la Meuse). Y.
César, Bel. Gai., V, », 16,53, 55, 58. - Bion Casstns, XL,
II, 81.
USEZ de Castro (Dona ) , reine célèbre du
Portugal, née dans la Galice espagnole, vers les
premières années du quatorzième siècle, morte
assassinée, le 7 janvier 1355. Il y a dans la vie de
cette princesse deux parties bien distinctes, la lé-
gende, qui a transmis son nom parmi tous les
peuples, et qui la fait revivre après cinq cents
ans; l'histoire réelle, que toutes les investiga-
tions de l'école moderne n'ont pu encore élucider
complètement : ce sera la réalité des faits que
nous tenterons de découvrir. — On ignore com-
plètement l'époque précise de la naissance dînez,
et l'on ne sait pas d'une manière plus certaine
en quel lieu elle vint au monde. Son père ap-
partenait à l'une des plus anciennes familles de
la Galice (1), et se nommait don Pedro Fernandéz
de Castro; il était seigneur deSarria e Lemos et
grand-majordome du roi de Castille Alphonse XI;
sa mère s'appelait dona Aldonça Soares de Val-
ladares, et elle était fille de Lourenço Soares de
Valladares, garde des frontières (fronteiré
mor) de la province de Entre- Douro-e-Minho.
L'union de cette grande dame avec le père. d'Inez
n'avait pas été ratifiée par un mariage valable, et
ses enfants passaient pour bâtards (2) ; peut-être
le grand seigneur galicien, qui comptait des rois
parmi ses aïeux, aspirait-il à une alliance royale ,
et ne voulut-il pas compromettre sa situation en
épousantdona Aldonça (3). Parmi les grands noms
(1) A en Juger par ses armes, la famille des Castro re-
montait aux époques antiques, où les peuples gaels se
confondaient avec les Ibères; les castros.ne sont antre
chose qoe des enceintes circulaire» de pierre, servant an
culte druidique. Voy. O panorama Jornal literarlo,
t VJI, p. M9. Os eastros em trot os montes.
(î) Le JVobilario du comte de Barcellos renferme ce-
pendant les détails les plus précis sur le mariage dont
sortirent Inez et ses frères.
(8) Voy. Inventaire général du royaume d'Espagne,
manuscrit de la Blbl, imp. de Paris. 1
848
INEZ
844
historiques qui avaient illustré leur maison, les
Castro nommaient avec orgueil Laïn Calvo : ils
Taisaient remonter leur généalogie Jusqu'à Gras-
tinius , ce Romain valeureux qui, à la bataille de
Pharsale, alla le premier attaquer Pompée.
Les poètes de la péninsule ont épuisé toutes
les formes d'une admiration hyperbolique pour
nous donner une idée de la beauté d'Inez, et
leurs portraits sont si variés, qu'il est difficile
d'y voir un écho de la tradition. Le surnom que
lui donne l'histoire sert à faire comprendre la
grâce indicible qui charma ses contemporains et
lui donna une réputation populaire de beauté qui
retentit encore dans le Romancero. La belle Edith
s'appelait Swanêë Haie» (coude cygne) ; on avait
surnommé Inès Collo de 4tors4( soude héron).
Les femmes de sa race avaient une grande réputa-
tion de beauté, de discrétion et de oourage. Le
poète admiré d'Érasme, Gll-Vicente ( 1), a dit ;
Ai mulheret de Cratto tao de pôuca/alla.
Formatât e firmes como Saberêti
et, se trouvant à Coïmbre, dans le lieu même où
périt la victime d'Alfonse, il ajoute, comme un
hommage à la beauté célèbre qu'il veut désigner :
Pola triste morte de Dona Inès,
A quai de Gouttante morreo n'esta Sala.
Nous ne savons absolument rien sur les pre-
mières années de la fille de don Fernandezde Cas-
tro ; mais nous pouvons supposer qu'à la petite cour
chrétienne où elle vivait, pale reflet des fastueuses
cours arabes, cette jeune fille relevait sa beauté
naturelle de toutes les recherches du luxe oriental,
qu'on ignorait alors dans les cours du Nord. Des
miniatures (2) du treizième siècle, peintes pour or-
ner les poésies d'Alfonse X, sont aujourd'hui des
témoins irrécusables de la grâce vraiment ori-
ginale, du mélange de splendeur orientale et d'é-
légance qui du harem des Musulmans avaient
passé dans les châteaux des grands feudataires
de la Castille et de l' Aragon. Un petit-fils de
saint Ferdinand, Don Juan Manuel, dnc de Pe-
nafiel et marquis de Villena, l'un des hommes
les plus spirituels et (es plus instruits de son
siècle, tenait alors une de ces cours semi-chré-
tiennes semi-orientales dans la capitale de la Ga-
lice. Ce fut dans le palais de ce prince qu'Inez
dut être élevée ; eHe parait avoir vécu dès l'ori-
gine avec Dona Constança Manuel, fille du duc,
dont elle était la cousine (3), et qui, ayant refusé
(1) Obrat de GU-Vicente, eomedia tebre m divisa da
ctdade de Coimora, V II, p. 1M.
(t) Et surtout ie Livre des ÊchecsJ&n reproduisant comme
il le fait en ce moment ces précieuses miniatures dans
son Iconographie etpognole, M. Vatentin Cardercra Jette
on Jour inattendu sur l'histoire des morars chrétiennes
daos la péninsule. Ces odaliaquea revêtues de vêtements
diaphanes, qui environnent le fils d'un roi canonisé par
l'Église en lui offrant des parfums, nous disent aises ce
que devaient être ces cours voluptueuses, trop voisines de
celles de Gordene et de Grenade pour n'en point refléter
les usages.
(3) D. Juan Manuel l'avait eue de son premier ma-
riage avec Dona Constanea , aile de Jayme, roi d'A-
ragon.
plusieurs fois des têtes couronnées, s'était dé-
cidés à épouser D. Pedro, infant de Poilu-
gai (1). Les deux jeunes filles quittèrent ensemble
la petite cour de Penafiel en 134Q, et Inez de
Castro vint demeurer à Lisbonne on à Coïmbre,
en qualité de dame parente. Ses frères l'avaient
probablement accompagnée, et la tradition ajoute
que tout aussitôt son arrivée à la cour d'Al-
, fonse IV, elle excita une vive passion dans le
coeur de D. Pedro.
Les moeurs des musulmans, il faut bien le dire,
s'étaient' introduites peu à peu dans les cours
des princes chrétiens; rien n'était si commun
alors et rien n'était si toléré que la coutume
d'honorer, comme une seconde épouse, ce que
les Espagnols appelaient la barragana et les
Portugais la barragdo (2). Inez de Castro,
aimée passionnément par. l'héritier du trône du
vivant de l'épouse légitime, était d'un trop noble
lignage pour prendre ostensiblement un titre
pareil; mais on comprend que la cour d'Al-
fonse TV ait vu sans étonnement une union que
légitimaient, pour ainsi dire , les habitudes du
quatorzième siècle, Il est bien, certain, néan-
moins, que les amours d'Inez et de don Pedro ex-
citèrent au plus haut degré la jalousie de la fille
du duc de Penafiel. S'il en eût été autrement,
une légende, qui s'est conservée jusqu'à nos jours,
à Coïmbre, et que Faria y Souza nous a trans-
mise, n'aurait pas été adoptée comme elle le fut
par le peuple durant le dix-septième siècle. Lors-
qu'on visite à Coïmbre le jardin délicieux connu
sous le nom de Quinta dos Laç rimas, on vous
montre La Fontaine des Amours; si l'on en
croit M. Kinsey, ce parc aurait appartenu aux
ancêtres d'Inez. Nous ignorons sur quelles au-
torités ce voyageur anglais se fonde; mais on
prétend que lorsque les deux amants voulaient
correspondre , un message écrit par don i :dro
était confié an ruisseau qui s'échappait de la
fontaine, et était transmis par ces eaux limpides
à celle qui le devait recevoir (3). S'il en était
ainsi, Inez ne demeurait pas sous le môme toit
que dona Constança. Nous savons que don
Pedro ne résidait pas toujours à Coïmbre dans
le commencement de son mariage; car le pre-
mier enfant qu'il eut de son épouse légitime na-
quit à Evora, le 6 avril 1342. Trois ans plus
tard, la malheureuse dona Constança mourut des
suites de ses couches ( le 13 novembre 1345).
{1) M. de Pdlbusqde a donné sur cette petite cour tent
les renseignement* désirables dans son eiceUeate intro-
duction au Comte Lucanor, livre très-curieux, dent le
duo Juan Manuel est l'auteur.
(l) Ou Barregaa. foy.lt signification réelle de ce mot
dans ï'Etucidario depàlawat antigut de Santa-Rosa de
Vlterbo. Les entants qui procédaient de ces unions to-
lérées par la société, mais non admises par l'église, pre-
naient la dénomination de gvança, ganta on ganhadia.
(B) foy. sur cette légende peu connue les notes de Fa-
rta y Souza, dans les Rimas de Camoens,* partie^bhfoL,
page 87. F~oy. aussi les Mémoires de M— la duchesse
d'Àbrantès, souvenirs d'une ambassade, t. II, p. »♦
et 109.
845
IREZ
816
A partir de cette époque, les liens qui s'étaient
formés entre Inez et l'infant dorent prendre un
caractère fort différent de ce qu'ils étaient do-
rant la vie de l'épouse légitime. Don Pedro eut
plusieurs enfants dînez ; mais on ignore la date
de lenr naissance , et il est bien certain que les
premiers de ces enfants naquirent ayant qu'une
union longtemps projetée se réalisât, si jamais
elle eut lieu. Vers 1354, neuf ans après la mort
de dona Constança, don Pedro épousa à Bra~
ganee, en présence de révoque de Guarda et de
quelques serviteurs, celle qui avait été durant si
longtemps sa maîtresse; mais une circonstance
fort singulière marque ce changement subit
dans la position de la malheureuse Inez : le ma-
riage fut béni, et nul acte valable ne le rappela;
rien ne spécifia les droits qui étaient dévolus à la
nouvelle épouse et à ses enfants ; aucun des té-
moins du mariage et le prince lui-même quand
il tut devenu roi ne purent assigner une date pré-
cise à ee mariage clandestin, qui, par la suite,
devait donner une reine au Portugal. Quand on a
sous les yeux les documents historiques de l'é-
poque, on comprend parfaitement comment l'ha-
bile jurisconsulte Jean de Regras put contester,
en 1385, avec tant de succès, la validité d'une
union d'où devaient résulter tant de changements
politiques (1).
En 1345, Tinfantdon Pedro n'avait que vingt-
cinq ans, et le roi lui proposa plusieurs alliances ;
elles furent toutes refusées. Don Pedro, quit-
tant. la cour, se retira dès lors à Santa-CIara de
Coïmbre , dans un palais fondé par sainte Eli-
sabeth, la femme du roi Diniz. Là il reçut divers
messages du roi tendant tous à obtenir de lui
une décision définitive. Âlfonse IV affirma qu'à
plusieurs reprises il avait prié l'infant ou de con-
tracter une union avec une princesse royale, on
de faire d'Inez sa femme légitime. Les indécisions
de cette àme énergique et violente devaient
amener les plus funestes résultats.
Rien dans les chroniques contemporaines ne
prouve qu'une femme jeune, belle, dont toutes
les actions dénotent une véritable élévation
d'âme et une grande tendresse pour ses enfants,
ait jamais provoqué la haine du peuple; elle* ap-
paraît, au contraire, dans les vieilles ronfances,
revêtue du plus touchant caractère ; sa mort fut
le résultat d'une lutte orageuse qui s'éleva entre
quelques rades chevaliers.
En 1355, Alfonse IV avait transporté sa cour
à Monte-mor-o-Velho, lorsque plusieurs per-
sonnages influents, ennemis de la famille que re-
présentait alors avec éclat Pedro Fernandez de
Castro, persuadèrent au monarque qu'il fallait
diminuer les prétentions de cette maison puis-
t (i) Voyez à ce sujet : Catatogo das Rainhas de Por-
tugal por p. Jazè Barbota; Liab., 1777. On y présente
dans son étendue l'argumentation hostile de J. das Re-
gras. D. Pedro avait cependant joré solennellement à
Castanbede , en 1861, qu'il était uni légitimement â
Inez.
santé, qui se faisait presque autant redouter en
Espagne qu'en Portugal, et que le plus sur
moyen de rabaisser était d'ôter la vie à une
jeune femme prête à monter sur le trône ; les
principaux instigateurs de cet attentat furent
trois seigneurs ennemis de Pedro Fernandez :
AlvaroTSonçalves (meirînho mor du royaume ),
Pedro Coelho, et Diogo Lopes Pacheco, seigneur
de Ferreira. Selon Femand Lopez, le grand his-
torien auquel on a imposé le surnom de Froig-
sart portugais, et qui avait eu, dans sa jeunesse ,
des rapports avec quelques-uns des hommes qui
jouèrent un rôle dans ce drame, ce ne fut
pas sans bien des combats intérieurs que le roi
se décida à accomplir cette action détestable.
« D'une part, il voyait le péril de son petit-fils,
premier né, et la destruction du royaume; de
l'autre, il considérait combien ce serait une ac-
tion cruelle de faire mourir une femme, et une
femme innocente, pour une faute qui lui était
étrangère, et cela au moment où il était au som-
met de la vie , alors qu'il devait se rendre Dieu
propice et ne pas tacher ses mains par le sang
d'un meurtre que beaucoup regarderaient comme
un parricide. »
Quoi qu'il en soit, le vieux roi profita d'un mo-
ment où D. Pedro avait organisé une de ces
grandes chasses où les princes du moyen âge
retrouvaient une image de la guerre, et il.se ren-
dit secrètement au palais que l'infant occupait à
Coïmbre. Nous aHons laisser parler encore le
vieil historien. « Quand dona Inez sut la venue
du roi et les intentions qu'il avait contre elle,
transportée de la douleur où elle était de ne
pouvoir se sauver par aucun moyen, elle vint le
recevoir à la porte avec un visage de femme
qui voyait la mort présente; et pour s'assurer
si elle trouverait dans le roi quelque pitié, elle
amenait avec elle les trois innocents princes ses
fils, enfants de peu d'âge et très-beaux. Avec eux
donc, et employant beaucoup de larmes et de pa-
roles touchantes, elle demanda pardon et misé-
ricorde. Quoique dur de son naturel et rendu
plus rigoureux encore par la persuasion des
siens, le roi, voyant le spectable déplorable d'une
femme si belle et si innocente qu'embrassaient
de si beaux enfants, qu'elle prenait pour bouclier
et pour défense, le roi, dis-je, s'en allait déjà
et lui laissait la vie ; mais quelques chevaliers,
qui venaient avec lui pour être présents à la
mort, principalement Alvaro Gonçalvez, huis-
sier major, Pero Coelho et Diogo Lopez Pa-
checo, seigneur de Ferreira, ne pensèrent pas
ainsi. Quand ils virent le roi sortir comme,
ayant révoqué la sentence, ils le supplièrent de
les envoyer tuer Inez ; car, disaient-ils, ils se
trouvaient compromis, en raison de la détermi-
nation publique à la suite de laquelle il les avait
amenés, et se voyaient en butte dorénavant au
péril que leur faisait courir la forte hafne de
l'infant D. Pedro. Quelques-uns d'entre eux donc,
entrant où elle était, la tuèrent cFueilement
847
INEZ
comme des bouchers (1). Cette action fut re-
prochée au roi, comme une grande cruauté, par
les gens en qui il y avait quelque humanité et
quelque bon sens ; car ils disaient qu'on aurait
dû attendre les événements qui étaient à venir et
encore incertains, au lieu de se jeter dans le péché.
Us ajoutaient qu'on avait évité un inconvénient
pour tomber dans un plus grand encore, celui
de tuer une innocente, à laquelle il ne manquait,
de Tavis de tous, pour mériter d'être reine, que
le mariage de son père avec sa mère ; car par le
lignage, par les qualités qui étaient en elle, elle
le devait être certainement. »
Le corps d'Inez fut inhumé immédiatement à
Santa-Clara. Mais le vieux chroniqueur, si bien
au fait des moindres circonstances de ce drame
sanglant, et qui nous racontera avec tant
de pompe les funérailles de celle qui ne fut
reine qu'après sa mort, comme disent les anciens
dramatiques espagnols, Fernand Lopez, se tait
complètement sur l'exhumation d'Inez et sur la
cérémonie fantastique admise par la tradition*
Sur ce fait important, il laisse le champ ouvert
aux conjectures, et nous avouerons que si on
ne peut complètement l'admettre, un antique
usage, renouvelé de nos jours, et qui exi-
geait en Portugal qu'on vint baiser la main du
souverain glacée par la mort, tendrait à y faire
croire ; dans ce cas, cette cérémonie aurait été pas-
sée sous silence par le vieil historien uniquement
parce qu'il avait été naturel qu'elle s'accomplit,
comme étant trop conforme à la coutume éta-
blie pour qu'on dût s'en préoccuper. Une au-
tre circonstance, d'ailleurs, a bien pu donner
naissance à la légende si dramatique adoptée
par quelques historiens, et qui a fourni le sujet
d'un si beau tableau à M. Saint-Evre. Au qua-
torzième, au quinzième et au seizième siècle,
les effigies des princes, moulées en cire et co-
loriées avec habileté , étaient toujours portées
au-dessus du cercueil du grand personnage dont
on célébrait les funérailles. Il est possible que
bien des années après la mort d'Inez , et lors-
qu'on lui fît des obsèques qui effacèrent tout
ce que l'on avait vu en ce genre dans la Pénin-
sule, le roi ait exigé qu'on rendit à l'effigie de
celle qu'il honorait comme une épouse légitime
l'hommage qu'on lui eût rendu à elle-même le
lendemain de sa mort*
Ce que Fernand Lopez raconte longuement, ce
sont les excès de la vengeance, les fureurs de l'in-
fant, commedit un autre vieil historien. Ce prince,
que son siècle a surnommé le Cruel et le Justicier,
et que le peuple a caractérisé en disant « qu'un
tel souverain n'eût dû jamais naître ou n'eût dû
jamais mourir », ce prince,disons*nous, commença
(1) A. coups de poignard, selon divers historiens. Le livre
de la nonne de Santa-Crnz (o livra da noa de Sanla-
Crnz), qui remonte à cette période historique, dit, en fixant
la date de cet assassinat : Era MCCCXCIU diejanuarii
décolleta fuit donna Brmes per mandatum régis Alfon-
sii IF. U s'agit Ici de l'ère espagnole.
848
son règne fécond et terrible à dater de la mort
d'Inez;; il se révolta ouvertement contre l'auto-
rité de son père, et il ne fallut rien moins que les
supplications d'une mère et l'intervention d'un
saint prélat pour l'apaiser après des mois de
lutte. En consentant à la paix, il garda du vi-
vant d'Alfonse IV une partie de l'autorité royale.
Le vieux roi comprit si bien que des idées de
vengeance inassouvie obsédaient cette âme de
feu, qu!il fat le premier à faire sortir du royaume
les complices de la mort d'Inez, qull allait bien-
tôt ne plus pouvoir protéger. Ceux-ci se réfu-
gièrent en Castille, et ils y étaient à la fin de mai
1357, au moment où D. Pedro se voyait par la
mort d'Alfonse investi de l'autorité entière. L'asile
était mal choisi, car c'était Pierre le Cruel,
propre neveu de Pierre le Justicier, qui régnait
dans cette partie de la péninsule. L'accord fat
promptement résolu ; les deux monarques avaient
à se venger tous les deux : les réfugiés furent li-
vrés. Un seul des trois coupables échappa; c'é-
tait Diogo Lopez, qu'un mendiant, reconnaissant
d'anciens bienfaits, sut faire évader, et qui par-
vint à gagner la France (1) ; quanta Pedro Coelho
et à Facheco , ils furent immédiatement conduits
à Santarem, où les attendait une mort épouvan-
table. Conduits à l'échafaud, qu'on avait dressé
devant la salle où dînait le roi, celui-ci les fit
mettre à la géhenne en sa présence, voulant
avoir la satisfaction de leur faire avouer leur
forfait. Comme ils niaient leur culpabilité, D. Pe-
dro s'emporta jusqu'au point de frapper avec
son fouet Coelho au visage ; et celui-ci ayant
répondu ,par des injures à cette violence , le roi
ajouta aux coups d'horribles railleries qui allaient
devenir le signal du supplice. « Apportez-moi du
sel, des oignons et du vinaigre, dit-il : il nous
faut assaisonner ce lapin » ; affreux jeu de mots
qui roulait, .comme on le voit, sur le nom de
la victime, puisque Coelho signifie lapin en por-
tugais. Le supplice et les paroles qui l'avaient
accompagné excitèrent, à ce qu'il parait,- dans le
public une certaine horreur; carie vieil historien
avoue qu'il cache encore bien des détails' qu'on
doit celer pour l'honneur du monarque; ce
qu'il raconte longuement, en revanche, ce sont
les honneurs rendus à la mémoire d'Inez. Pour
en donner une idée en peu de mots, nous dirons
que de Coïmbre au couvent d'Alcobaca on ne
compte pas moins de dix-sept lieues, et que ce-
pendant des hommes armés de torches se
voyaient échelonnés le long de la route pour
éclairer le cortège. Plusieurs milliers d'indivi-
dus avaient été requis, nous dit Pedro de Mariz,
pour former cette haie funèbre.
Inez de Castro fut déposée à Alcobaça, sous
la nef, du coté de l'épttre, dans une tombe de
marbre blanc, portant une effigie couronnée,
(1) il est fort curieux de voir par la suite ce person-
nage reparaître sur la scène politique , et quoique extrê-
mement vieux s'attacher au parti d'un fils d'Inez, l'in-
fant D. Dinlz.
849
INEZ
850
que D. Pedro avait fait préparer à l'avance, et
près de laquelle il avait fait dresser sa propre
sépulture. Ce beau monument de la statuaire du
quatorzième siècle ne nous est malheureusement
pas parvenu intact. Une curiosité presque sacri-
lège, une violence brutale, plus coupable encore,
l'ont tour à tour endommagé (1).
La postérité d'Inez ne monta pas directement
sur le trône, mais elle s'allia à toutes les têtes
couronnées de l'Europe; il semble néanmoins
qu'une cruelle fatalité ait pesé sur toute cette
famille. L'aîné, D. Alfonse, mourut en bas âge;
D. Jofio, qni eût pu prétendre à la couronne, se
souilla d'an crime abominable pour l'obtenir (2),
et excitant plus tard les craintes de l'Espagne,
qui l'avait d'abord accueilli, il succomba en capti-
(i) Ce tombeau a été figuré pour la première fols dans
le voyage pittoresque en Espagne publié par M. le baron
Taylor ; c*est de ce livre que le Maçask* pittoresque et
l'Univers ont tiré leurs gravures. L'Infortuné priuoe
LichnovjBk.1 en a donné une description très-complète.
Las premières traces de dommages faits au monument
remontent au seizième siècle, lorsque D. Sébastien fit
ouvrir la plupart des tombes d'Alcobaça (voy. dans
cette. Biographie au mot Fallâ). Il parait que les ouvriers
rencontrèrent alors une telle .résistance, qu'on ne put
satisfaire la curiosité du Jeune roi; les choses se passé-
rent'à peu près de même en 1704, lorsque l'empereur
Charles VI, venu en Portugal sous lé nom de Carlos III,
roi d'Espagne, eut la même fantaisie. Durant l'invasion
française, en 1810, ie bruit se répandit malheureusement
lue de grands trésors étaient renfermés dans cette tombe.
Cette fois la sépulture fut ouverte et la statue mutilée ;
a soldatesque lui brisa le nez. On dépouilla le cadavre
le sa belle chevelure blonde ; mais tout ne fut pas 4é-
-obé par les Français. Nous avons entre les mains
ine lettre du marquis de Rezende qui raconte comment
a plus grande partie de ces cheveux ayant été apportés
i Rio-de-Janeiro, un coup de vent violent les enleva au
nomen{ où Us étaient offerts à Jean VI par le comte de
JobareS, sans qu'on pût les retrouver: Une petite mèche
•rorenant de la même chevelure, que nous avions vue
adis dans le cabinet de Denon, est conservée aujour-
llraLdans un reliquaire de la collection du comte Pour-
aJés. Si l'on s'en rapporte à une autre lettre écrite
'Alcobaça, le 8o avril 1811, par J. Teixelra Duarte, qui
ssista pour ainsi dire aux dévastations odieuses corn-
lises dans le couvent, ces cheveux étaient à peu près
>ut ce qu'il restait d'une beauté dont le souvenir est
ocore vivant dans la mémoire du peuple. Le squelette
lait complètement brisé (o corpo estava todo despeda-
ido).Ce futie 16 septembre, avant l'affaire de But-
ico, qu'eut lieu.cette profanation. 11 est inutile de dire
ne le portrait conservé au dix-huitième siècle par le
rate de Bedondo, et qui a été successivement repren-
ait dans les Metratos et dans Kinsey, n'offre » aucune
ira d lie de ressemblance : sa date, ne remonte pas au
ela du dix-septième siècle.
(•S) Dans l'espérance d'épouser la fiUe de D. Fernando,
rot refînant, 11 poignarda sa femme légitime, la belle
aria Telles de Menezès. 11 en avait eu un fils que l'on
>pela D. Fernando de Eça ( D. Fernand du Cercueil),
il fixa sa résidence en Galice : ce personnage pourrait
en être , soit dit en passant , le type du D. Juan espa-
ioI. Bne vieille chronique s'ezprlree en ces termes à
n sujet. « 11 eut une ample génération, car il avait une
nsetence si large qu'il se mariait a toutes les femmes
t vivant les unes des autres.» Fernando de Eça, le petlt-
i d'Inez, n'eut pas moins de quarante-deux enfants,
ot fils que filles, tant légitimes que bâtards. C'était de
JoAo que descendait ce fameux marquis de Gascaès
mt il est question dans les historiettes de Tallemant des
aux, et qui, nommé ambassadeur auprès de Louis XIV,
fiant, étonna la cour de France par son faste. Voy. la
lie édition ln-8° donnée par M. Paulin Paris.
vite. Enfin D. Diniz, errant sans cesse d'Angleterre
en Flandre, et prenant vainement le titre de roi,
passa par les plus funestes aventures avant
d'épouser dona Joanna, fille naturelle du roi de
Castille. Enfin un neveu de cette femme mal-
heureuse, pour expier tant de maux, se voua
à la plus rude pénitence durant quarante-quatre
ans dans les montagnes d'Arrabida, après avoir
été un chevalier sans reproche. La fille seule
d'Inez fit une exception heureuse à cette série
de mésaventures bien ignorées aujourd'hui; elle
s'appelait dona Britez, et, après avoir épousé
D. Sancho, comte d'Albuquerque, fils illégitime
d'Alfonse XI, elle eut de lui une nombreuse des-
cendance, et mena, disent les chroniques contem-
poraines, la vie la plus sainte*
C'est d'Alvaro Pires de Castro , comte d'Ar-
rayolos , grand-alcaide de Lisbonne et premier
connétable du royaume, que descend, en ligne
directe, la maison régnante actuelle de Portugal :
D. Alvaro était le propre frère d'Inez.
Il est très-vrai, et nous nous sommes assuré
de ce fait purement bibliographique, qu'en ras-
semblant tous les ouvrages qui ont été écrits
sur Inez, et en en donnant une analyse succincte,
on ferait un volume. A l'exception cependant
du récit énergique et parfois grandiose de Fer-
nand Lopez, del'admirable épisode de Camoens,
d'un sonnet de Boccage, et de la noble tragédie
d'Antonio Ferreira, il reste de tous ces livres
peu de chose à conserver. Nous aimons à rap-
peler ici que la première pièce régulière donnée
en Europe après la SophonUbe a étéJT/nez de
Castro que nous venons de signaler ; ce fut bien
plutôt une étude heureuse du théâtre antique
qu'une pièce originale. M. Patin l'a signalée
comme une véritable émanation du théâtre grec,
et en a restitué l'honneur aux Portugais. M. Mar-
tinez de la Rosa a prouvé qu'un faux patriotisme
ne devait plus égarer la critique.
En France , c'est aussi un drame qui a po-
pularisé le nom d'Inez ; la pièce de Lamotte fut
représentée le 6 avril 1723. Voltaire a dit, à pro-
pos de cette tragédie, un mot qui rappelle assez
bien l'effet qu'elle produisit alors : « J'allai hier
à Inez : la pièce me fit rire, mais le cinquième
acte me fit pleurer. Je crois qu'elle sera tou-
jours au nombre de ces pièces médiocres et mal
écrites qui subsistent par l'intérêt. »
Ferdinand Denis.
NobiUario do eonde de Barcellos, éditions de Farla
y Souza et de Lavanha ; voy. aussi le ms. de la Bib. iœp.
Fernand Lopes, voy. le t. IV de ta Collecçdo de livros
inédites da historia Portugueza , Chroniea de4 iïey
D. Pedro, pub. par Pereira Bayam, en 1788. — Pedro
de Marti, Dialogos de varia historia. — D. Luiz de Sa-
laz y Castro, HisU Genealoçiea de la cran Casa de Cas-
tro} Mad:, 1685, Ûg.—Lusiadas de Luis de Camoes. prin-
cipe de los poetas de.Bspaha t eommentadas por Manuel
de Fartai Souza; 1689, 8 vol. ln-fol. — Docteur AnL Fer-
reira, Poemas Ituttanos; Lisbonne, 177 i, s voL, ln-ao. C'est
dans cette deuxième édition que se trouve contenue la Cas-
tro; elle avait paru d'abord dans le vol. intitulé Comedku
famosas dos Doctores de S* de Mirandc Ant. Ferreira ;
1618, tn-4*. — Théâtre européen, Inez de Castro* tragédie
en cinq actes, par Ant Ferreira, trad. par Ferdinand Denis.
851
INEZ — INFANTADO
855
Voy. dana la mène volume Notice sur Inex de Castro,
iuivie d'un extrait de» chronique» portugaise» tur
D. Pedro. — Primeras tragedias espanolas, nise lau-
reada,nise lastimosa, que bajo el nombre de Antonio de
Sylra publlco Oeronine Barmudei} ma. ~ Lope de Vega,
Dona Inez dé Cmstro. ~ MeiU de Lacards, Z*ma Inez
de Castro,- — Vêlez, Reynar despues de tnorir. — M a (os,
fer y créer, segundaparte de Reynar, Despues demorir.
— Dona /pus d> OaMro de Hieotae Lab. — Dona Igné*
de Castro, a tragedy, from the pertugueae of Nicolas
Luiz, by John Adamson . New-CasUe, 1M8. — Manoel de
Aievedo, Saudades de Dona Igné* de Castro; CaTmbre,
17M, in-st. - Domingo dot Rate Qulta, Castro. — tgnez
de Castro, a tragedy in three aets, wrltten by 0. Quita,
translated by BcqJ. Thompson ; 1800. — régnés de Cas-
tro, a tragedy, wiltten by a rounglodr (M", Cath.,
afterward M" Coekborna ); Londreaj tête. - M». ftebn,
The History of Agnes de Castro. — filvtra, • tragedy,
wrltten by Mallet, 1778. — Saudades dos serenissimos
rets de Portugal D, Pedro i* e D. Aléa de Castro, Méri-
tas por D. Maria de Lara e Menezèa. » M u « 9. B. de
Briilac, Agnès de Castro, nouvelle portugaise; îess, et
Amsterdam, 1710, ln-li. — Juan Soarez de Alarcon, La
Infante coronada, per el Rey D. Pedro; Lisbonne. 1006
( poème). - Histoire sYInez; dans Jcs Amusements his-
torique* s 17W, — D. Jozé Barbota , Catalogo dos Rain-
has de Portugal; 1717. — Histoire d'Agnes de Castro,
trad. de l'anglais (de M"« Behn); Amsterdam, 1701
fait partie d'nn volune inutulé Romans traduits de Van-
glais ). - L'abbé Guyot Deafontainea , Inez de Castro,
ou histoire de Pierre de Portugal, On a du même :
Histoire de D. Juan de Portugal, /Us de D. Pedro et
dflnoz de Castro ; Paria, 171* ( tn-ii. » Berthe de Boor-
ntslen, D. Pedro é Jnez de Castro, heroide ; 1788, tn-ia.
— D. Francisco Manoel de Mello, Collecfào de Sonetos a
morte de D. Inez de Castro ; Lyon, 1M5. — leronymo
Petaoto do Sylva, rida de D. Inez de Castro» — Ré-
ponse aux paradoxe» de Taebé Desfontaines contre
Inez de Castro, par M. de Boone?al, 17 la, in-8». — Voy.
afla même époque, dans le Mercure du mois d'octobre
1718, une Infinité d'écrits et de parodies, entre autres
Agnes de ChaUlot, imprtm. A Ja suite de la représentation
de la tragédie de Lamothc. - Retratos e Elogios dos Va-
roens illustres ;1817. — M. Louis Dubois, Recherches
historiques sur Ine% de Castre et sur D. Pedro. — Inex.
de Castro, tragédie de Ferrelra , trad. en ang. par Mus-
grave ; 1815. — J. Baptlsta Gomez Junior, Nova Castro ;
llsb., 1817 ; S« édlt, 1880. - Manuel de Flguelredo, Inez
de Castro, tragedia. — Joaejulm José Sabine, Nova Cas-
tro. - Davlde Bertoletti, Inez de Castro, tragedia ,• Mt-
lano, 18M. — M M de Genlls, Les Tableaux de M. de
Forbin ; in-8*.— Inez de Castro, noveta sacada de la his-
toria de Portugal per madama dé Genli» ( par Moura ) ;
Paris, 1818, 1 vol. in-18. - Jgiologio Lusitàno , t. I,
p. 167. -Alexis Collotde JsvlUlet, Horœ subscecivse ; Lis-
bonne, 1679, ln-ll. - J. X. de Matos, Rimas ; Lisb., 1800,
8 vol. in-8°. — Retratos et biographias de personnagen»
illustres de Portugal; lisb., 18+b, lo-fol. -Kinsey, Por-
tugal illustrated, p. 401. — Adolphe de Pulbusque, Le
comte de Lueanor ; 1884.— Ferdinand Denis, Chronique»
chevaleresques de VEspagne et du Portugal, L I".
infant ADO ( iV.... due be ), homme d'État
espagnol , né en 1773, mort à Madrid le 28 no-
vembre 1841. H appartenait à l'illustre famille
de Silva, en faveur de laquelle un duché fut érigé
en 1475, et affectéà une seigneurie de la Castille,
qui prit le nom d'Infantado parce qu'elle avait
-été auparavant un apanage des infants d'Espagne.
H fut élevé en France sous les yeux de sa mère,
qui était une princesse de Salm-Salm. Dans la
guerre de 1793, il leva an régiment à ses frais,
et fit la campagne de Catalogne. Après la con-
clusion de la paix de Bâle avec la république
française , le jeune duc se livra avec ardeur à des
entreprises utiles. Il établit en Catalogne des fila-
tures de coton, qui prospérèrent sous la direction
de chefs habiles appelés d'Angleterre. Il fit la
campagne de 1800 contre le Portugal, tous les
ordres de Godci, et visita Lisbonne apife la paix.
« Plus instruit que la plupart des seigneurs es-
pagnols, dit la Biographie Rabbe, et d'nn ca-
ractère doux et albble, il devint très-popnlaire.
Sa hante naissance, des revenus très-considéra-
bles, et surtout le bon usage qu'il faisait de a
fortune firent pendant quelques aimé» croire
qu'il deviendrait le régénérateur de son pays,
et le public vit de bon œil l'intimité qui s'établit
bientôt entre le prince des Astories, depià Fer-
dinand VII, et le duc de Infantado. » Cependant
cette liaison ayant donné de l'ombrage an prince
de la Paix et à la renie, le duc reçut Mit de
quitter Madrid en 1905. Malgré stm exil, il con-
tinua d'entretenir des relations avec l'héritier h
trône; et lorsque celui-ci fut arrêté, en 1807, on
trouva' dans ses papiers la nomination du duc
de Infantado à la place de généralissime des ar-
mées espagnoles. Impliqué dans le précis 4e
l'Escortai , le duc de Infantado allait en même
temps qu'Escoaquiz être condamné à mort, lors-
que les sentiments connus du peuple et l'inter-
vention de l'ambassadeur de Franeeempêchèrat
que cette sentence ne fltt en effet prononcée. En
1808, le duc de Infantado accompagna Ferdi-
nand VII à Bayonne; il signa, le 7 juillet IMS,
la constitution que Napoléon avait préparée pour
l'Espagne , et la proclamation des notables espa-
gnols réunis à Bayonne, engageant lenn compa-
triotes à reconnaître Joseph Bonaparte pour sou-
verain. De plus il entra comme colonel dans la
garde du nouveau roi. Mais il se démit de ses
places après la capitulation de Baylen, et appela
la nation aux armes contre la Frasée. Napoléon
le proscrivit comme traître', dans on décret do
12 novembre. Placé en 1809 à la tête ta corps
d'armée espagnol, le due d'Infantado fut battu
deux fois sous les murs de Saint-Sébastieo, et
malgré sa bravoure, il perdit son commandement
avec la confiance de la junte supérieure. Il se retira
alors à Séville. En 1811 les cortès le nommè-
rent président du conseil d'Espagne et des Indes,
et le ebargèrent d'une mission extraordinaire
auprès du prince régent d'Angleterre. En juin
1812 il revint à Cadix, et en 1813, après Né-
part des Français, il se rendit à Madrid; mai*
la junte lui intima Tordre de quitter la capitale
comme un des cbefs du parti des serviles. Fff
dinand VII l'appela alors auprès de lui, le nomo»
président du conseil de Castille et le traita aw
une faveur toute particulière. Après le rétaWis-
sement de la constitution en 1820, le duc de In
rantado résigna ses fonctions et se retira dam»
terre, près de Madrid, d'où il fut exilé à Ma-
jorque. En 1823, il fut appelé à la présidence^
la régence instituée à Madrid par les Fracas
pendant la guerre ; et au mots d'août , eonj^
ment avec son collègue le prélat Victor SaeM
remit, à Puerto Santa«Maria,le gouveniema* a
roi, qui le nomma membre de son wn8e "7v
duc conçut alors le plan d'organisation des rq?'
853
INFÀNTÀDO — INGE
854
ments des gardes, et il employa son crédit à
trouver la somme dont Ferdinand VII avait be-
soin pour faire en 1824 le voyage d'Aranjuez.
L'année suivante* il remplaça Zea Berraudez
comme chef do ministère. Il transforma la junte
délibérative de son prédécesseur en un conseil
l'État; mais ayant à lutter contre les intrigues
incessantes du parti apostolique , il ne put réa-
liser ses projets de réforme, et se vit obligé, en
1826, de rentrer dans la vie privée. Il vécut de-
puis à Madrid en simple particulier, mais tou-
ours sévèrement surveillé; on ne lui permit
néme pas en 1830 de partir pour l'Italie. Ce-
rclant, après la mort de Ferdinand VII» il quitta
'Espagne et se rendit en France. Il rentra en-
mite en Espagne, et y vécut dans la retraite jus-
|o'à sa mort, J. V.
ftabbe, ViaUb do BoUJoUo «t Sainte Prouve, ffojr.
miv. et portât, des Contemp. — Encyclopédie des Gens
lu Monde. — DU*, de ta Conversation. — Conversa-
tons-Lexiton.
* infante (Jodo), navigateur portugais,
rivait au quinzième siècle. Il commandait le se-
tond navire faisant partie de la célèbre expédition
onfiée, en 1496, à Barthélémy Dias ; 11 avait pour
illotes Àlvaro Martins et. maître Jean le Grec,
t s'était acquis de la réputation comme marin,
le même que ses deux compagnons. Le navire
ions ses ordres s'appelait le Saint-Pantalécn ;
'équipage devait en être à peu près aussi const
lérable que celui de Dias, et il est à présumer
tue Joâo Infante eut à résister, comme ce hardi
lavigateur, aux injonctions de son équipage, qui
emsait d'avancer plus loin. Arrivé par les
12° 80' à vingt-cinq lieues de l'îlot da Cruz, In-
ante fut le premier qui débarqua sur la côte ; de
à vient qu'on donna son nom au fleuve qui se jette
i la mer en cet endroit. V infant héritier de
a couronne, comme en le peut voir, n'est pour
ien dans cette dénomination. On a cependant
tien à tort affirmé le contraire. Après une na-
igation de seize mois et dix-sept jours, Infante
evint avec Dias en 1487 ; il avait pris part à une
xploration de trois cent cinquante lieues. F. D.
Gomez Eannez de Azurara , Conquistade Guiné
* infessura ( Stephano), historien italien,
ivait à la fin du quinzième siècle. D'abord juge
Orta, ensuite chancelier du pape, il parait
voir été un personnage de quelque importance;
i imita l'exemple de Burchardt ( voy. ce nom ),
n consignant sur le papier les faits dont il était
émoin, et il a laissé un Diarium urbis Romx,
crit partie en latin, partie en italien, et allant
e Tan 1371 à l'an 1494; ce journal a été im-
rimé dans le Corpus Scriptorum Medii JSvi
'Eccard, t. II, p. 1863, et dans Muratori, Re-
um Italicarum Scriptores, t. IÏI, p. 1109;
lais il faut observer que, dans ce dernier recueil,
» passages où l'historien .retrace les scandales
onnés par Alexandre VI sont retranchés , cir-
onstance qui a été relevée avec raison, en Aile-
nagne, par Schelhorn, dans les Âcta lenensia,
t. IV, et par Saxe , Quxstiones Littéraux et
Eistoricx. G. B.
Schelhorn, Jeta lenensia, t. IV.
*ixeA*NATi (Pietro Degl'), peintre de
l'école vénitienne, vivait dans la première moitié
du seizième siècle. On ne possède aucun rensei-
gnement sur cet artiste , dont on ne connaît
qu'un «Mil tableau, une Madone et plusieurs
saints, an musée de Berlin. Dans ce tableau ,
signé Pêtrusde Ingannatis, on reconnaît un
élève ou au moins un imitateur de Jean Bel-
liai. E. B— n.
Sïret, DioHonntHre historique De* Peintres.
INGE ou 1NGOH, roi de Suède, fils de Stenkil,
vivait au commencement du douzième siècle.
Son long règne n'est guère connu que par le
Supplément du Bervara. Voici un résumé de
cette saga : Inge était bon chrétien ; il abolit les
sacrifices offerts aux dieux dans le Suithiod et
ordonna à tout le peuple de se faire baptiser.
Mais les Suédois tenaient à leurs idoles. Dans
un thing ( assemblée ), ils proposèrent à lnge de
maintenir l'ancien culte ou d'abandonner le pou-
voir. Ingerenisa de quitter sa croyance; alors
les Suédois lui lancèrent des pierres et le chas-
sèrent du thing. Il se réfugia en Vestrogothie ,
pendant que Sven, son beau-frère, régnait à sa
place. Au bout de trois hivers, il revint avec une
armée et attaqua à l'improviste Sven, qui fut
vaincu et tué. Il reprit le pouvoir, rétablit le
christianisme et gouverna tranquillement jusqu'à
sa mort. Inge eut deux filles, Marguerite,. sur-
nommée FHdkulla ( Vierge de la paix ), qui
épousa Magnus Barfbt, roi de Norvège, et Chris-
tin a y qui fut fiancée au grand-duc de Russie.
Gomme il ne laissa pas d'enfant mâle, la couronne
passa à son frère Halstan. Celui-ci eut pour
successeur ses deux fils , Philippe et Inge. Le
premier mourut en -1118. La date de la mort
du second est incertaine, mais il ne vivait plus
en 1129. 11 fut empoisonné. Avec lui finit la
maison de Stenkil. Z.
Snorro Sturleson, Konûnga* SÔgur. — Geyer, Histoire
de Suéde { traduite par LundbJad ), c. III.
inge ou ingon I er , roi de Norvège, fils de
Harald Gillichrist , régna de 1135 à 1161. A la
mort d'Harald, en 1135, ses trois fils Sigurd
Bronch, Egstein et Ingon se partagèrent ses États.
Tandis que Sigurd prenait, en qualité d'aîné, le
titre de roi, Inge eut pour fief la Norvège mé-
ridionale. La mort de Sigurd, en 1155 amena
entre Ingon, son frère Egstein et son neveu
Haquin Berdebred, qui se disputaient le pouvoir
suprême, de longues querelles, terminées à la
bataille d'Opsols (3 février 1161) par la défaite
et la mort delngen. Sous le règne de ce prince, le
cardinal Nicolas Brekespeare ( depuis Adrien IV)
fut envoyé en mission en Norvège par le pape
Eugène III, et fonda l'évôché de Drontheim.
On voit encore figurer dans la série des rois de
Norvège un Inge ou Ingon II, dont le règne
855
INGE — IN GELBURGE
856
obscur, de 1207 à 1217, mérite à peine une men-
tion ( voy. Haquin V et VI ). Z.
Tortetu, Hittoria Rer. Norvinç,, i. III. — Snorro
SlnrtaoB, Nareçt KonUnga Sôçur. — G. Scnœaniiig,
fforges Rigtt Historié. i
iiffiBLBUAGE, reine de France, née en Da-
nemark, en 1176, morte à Corbeil , le 20 juillet
1236. Elle était fille de Waldemar le Grand, roi
de Danemark, et sœur de Canut VI, qui régnait
en oe pays, lorsque, en 1193, Philippe-Auguste,
veuf depuis trois ans, fit demander la main de
•cette princesse. Aucun motif politique n'avait in-
fluencé le jeune monarque français dans le choix
de sa seconde épouse. La réputation de beauté
d'Ingelburge avait apparemment enflammé l'ima-
gination de ce prince, dont les passions étaient ar-
dentes. Sa proposition d'alliance fut acceptée par
le roi de Danemark, et Ingelburge ayant été con-
duite à Amiens, ou* Philippe était allé l'attendre ,
la double cérémonie du mariage et du couron-
nement de la princesse danoise eut aussitôt lieu
en cette ville. Mais le lendemain matin, au grand
étonnement et au grand scandale des seigneurs
français, non moins que des personnes de la
suite de la nouvelle reine, Philippe déclara sa
résolution de la répudier et de la renvoyer en
Danemark. La plupart des historiens, ne sachant
à quoi attribuer ce caprice du roi de France, ont
présumé qu'îngelburge avait quelque défaut phy-
sique ou quelque infirmité qui inspirait du dé-
goût pour elle à Philippe; d'autres, imbus des
superstitions de l'époque à laquelle ils écrivaient,
supposent que l'aversion instantanée du roi pour
une jeune femme dont la grâce naïve donnait à
sa beauté un charme de plus, fut l'effet d'un
maléfice. La France tout entière ressentit les
funestes conséquences de la conduite de son
souverain en cette occasion. Philippe, fondant
sa demande de divorce sur une prétendue pa-
renté entre Ingelburge et Isabelle de Hainaut,
sa première (épouse, convoqua à Compiègne une
assemblée d 'évoques, présidée par l'archevêque
de Reims. Ingelburge assista à cette procédure
dont elle connaissait le but, mais dont elle ne
comprit pas un mot , car elle ne savait pas le
français. Son mariage avec le roi fut déclaré
nul; lorsqu'on signifia cette sentence à la prin-
cesse , elle ne put que s'écrier en entrecoupant
ses paroles de sanglots et de larmes : Maie
France! Maie France!.... Rome! Rome! » —
C'était du pouvoir pontifical qu'elle attendait la
réparation de l'affront qu'on lui faisait. Néan-
moins , on l'engagea à retourner en Danemark ;
elle y consentit d'abord , puis, appréhendant que
sa soumission ne fat considérée comme une adhé-
sion au jugement prononcé par les évéques, elle
demeura en France. Le roi Canut porta plainte
pour sa sœur au pape Célestin III ; ses récla-
mations furent à peine écoutées. Comme l'affaire
restait ainsi en suspens à Rome, Philippe, se
croyant suffisamment autorisé par la décision
des prélats de son royaume à contracter de nou-
veaux liens, épousa, en 1196, Agnès de Me-
ranie. Cependant les instances de- Canot, sou-
tenues par la réfutation que, d'après ses ordres,
son ministre avait dressée de la généalogie qui
établissait un degré prohibé d'affinité entre les
deux époux , déterminèrent Célestin à envoyer à
Paris des légats .chargés d'examiner de nouveau
cette affaire; ceux-ci la trouvèrent si épineuse
qu'ils n'osèrent pas se prononcer positivement
contre le roi de France. Biais Innocent III ayant
succédé à Célestin, la procédure fut encore re-
prise par un concile que ce pape réunit à Lyon,
cité alors libre, et gouvernée par ses archefè-
ques : la volonté du monarque français ne pou-
vait pas y exercer autant d'influence que dans
les autres villes du royaume. Cette fois , Ingel-
burge gagna sa cause; Philippe fut condamné
à quitter Agnès, et à reconnaître la princesse
danoise pour son épouse légitime, sous peine
d'excommunication et d'interdit. Philippe n'arait
pas moins d'amour pour Agnès que d'aversion
pour Ingelburge; il s'efforça de résister à la
puissance papale; mais Innocent m, homme
sévère, impérieux, et qui ( remarque un his-
torien) traitait les princes couronnés comme
les souverains traitent leurs vassaux , lança
les foudres de l'Église sur le roi et sur ses su-
jets. Les annalistes des siècles où le saint-siégp
sévissait sur des millions d'innocents pour châ-
tier un prince coupable ou réputé tel, ont tracé
à diverses époques le lugubre tableau de la
désolation qu'un interdit pontifical répandait
sur tout un royaume. Philippe, exaspéré, mais
non vaincu, fit arracher Ingelburge du couvent
dans 'lequel elle s'était retirée à Soissons, et la
princesse fut enfermée dans le château d'ttam-
pes, où on la traita très-rigoureusement Enfin,
le roi, cédant aux clameurs de ses sujets et aux
conseils de deux autres légats qui arrivèrent en
France, se décida à se séparer d'Agnès et à tirer
Ingelburge de sa prison royale ; toutefois, au bout
de cinq semaines la princesse danoise se vit
obligée de retourner dans un couvent à Soissons.
Philippe parut ensuite devant le concile assemblé
en cette ville, à sa demande, au mois de mars
1201. Il s'y présenta accompagné de canonistts.
Le roi de Danemark, de son côté , y avait en-
voyé des jurisconsultes. Tout à coup , le roi,
vraisemblablement las d'une si pénible lutte arec
Rome , résolut d'en brusquer le dénoûmenL fl
quitte l'assemblée au moment où la discussion
est le pins animée; il va trouver Ingelburge, iti
dit qu'il reconnaît la validité de leur mariage,
l'emmène hors du couvent , la fait asseoir en
croupe sur son propre cheval , ordonne qn'oo
aille avertir les évéques de cette issue inopinée,
et part avec la' princesse pour Paris. Ainsi se
terminèrent les nombreuses péripéties de l'exis-
tence dlngelburge. Néanmoins , malgré sa posi-
tion dès lors reconnue de reine de France , eue
vécut longtemps encore délaissée par son mari;
ils ne furent véritablement réconciliés que quel-
857
INGELBTÎRGE — INGELGER
858
ques années après leur réunion. Camille Lebrun.
Mgori , Histoire de Philippe- Auguste. — De Thou,
Histoire universelle, — Daniel, Histoire de France, —
Roger Hoveden , Chronique. — Mézeral, Histoire.
irgegn ERI (Angiolo), littérateur italien,
né à Venise en 1550, mort vers 1613. On ne sait
rien des premières années de sa vie. En 1572 il
traduisit en vers italiens le Remedium amoris
d'Ovide , et dédia au [comte de Villachiara cet
ouvrage qui parut à Avignon quatre ans plus
tard. Se tronvant à Turin en 1578, il recueillit le
Tasse fugitif, qu'il avait beaucoup connu à Venise,
et le conduisit au palais du marquis Philippe
d'Esté. II alla ensuite à Parme, et pendant que
le Tasse était détenu dans un hôpital de fous , il
publia sa Jérusalem délivrée , d'après une copie
authentique faite sur un manuscrit corrigé de
la main du poète. Il en donna deux éditions
dans la même année (1581), Tune à Parme,
l'autre à Casalmaggiore. Il séjourna encore plu-
sieurs années à la cour de Parme, et y composa
en 1583 une pastorale intitulée la Danza Ui Vé-
nère. Cette pièce, commencée à la demande de
l'Académie Olympique de Vicence dont il était
membre, fut achevée sur les encouragements de
la marquise de Soragna, et la fille de la mar-
quise, Camilla Lupi , jeune personne d'une grande
beauté, y joua le principal rôle. La Danza di
Venere parut à Vicence en 1584, in-8°, avec une
dédicace à la jeune Camilla qui avait joué le rôle
d'Àmarilli. Le poète, dans son épttre dédicatoire,
se plaint du mauvais état de ses affaires et im-
plore le patronage de la marquise et de sa fille.
On ne sait si Ingegneri dut à la protection des
belles dames de la cour d'être appelé à Guas-
tatla en 1585 par le duc Ferrante II de Gonzague,
non pour composer des pastorales, mais pour
fabriquer du savon. Le fait est assez bizarre
pour que Tiraboschi, en le publiant lepremier,
ait cru devoir citer comme preuves des lettres
du duc et d'Ingegneri tirées des archives de Guas-
talla. Le duc, dans une lettre adressée à son se-
crétaire Marliani, recommande d'achever la cons-
truction d'une maison pour y loger Ingegneri avec
les instruments du métier, entre autres deux
chaudières fabriquées à Mantoue , d'acheter pour
lui à Venise du savon pour quatre cents écus;
enfin, de lui faire compter cent écus pour son
voyage et celui de sa famille. Malgré les bons
offices du duc Ferrante, Ingegneri ne s'enrichit
pas ; il fit même des dettes , fut obligé de se cons-
tituer prisonnier en 1587, et ne dut la conser-
vation de son mobilier qu'à l'intervention du
duc. Dégoûté de l'industrie, il revint aux lettres,
et alla chercher fortune à Rome. Il entra au ser-
vice du cardinal Cinthio Aldobrandini , généreux
protecteur du Tasse, et renoua son ancienne
liaison avec ce poète. Il devinU'éditeur de la Je-
rusalem Conquise comme il l'avait été delà Jé-
rusalem Délivrée, et conserva le poème des
Sept Journées. « Il était en ce moment plus
assidu que jamais auprès du Tasse, dit Ginguené,
et recueillait avec autant de prestesse que d'exac-
titude tous les vers que le poète allait sans cesse,
ou récitant de vive voix , ou écrivant en abrégé
sur de petits papiers, précaution heureuse, et
sans laquelle une grande partie de ce poème,
imparfait encore, mais, tel qu'il est, l'un des
fruits les plus précieux des derniers temps de
l'auteur, aurait infailliblement péri. » Du service
du cardinal Aldobrandini, Ingegneri passa en
1598 à celui du duc dTJrbin. Celui-ci l'envoya,
en 1599, tenir en son nom un enfant du duc de
Modène , marque de faveur dont Ingegneri ne tira
point parti pour sa fortune. On le retrouve en
1608 à la cour de Turin, toujours pauvre, et
forcé de recourir à la générosité du duc de Guas-
talla. On l'entrevoit une dernière fois en 1613 à
Venise, où il fit imprimer des poèmes en idiome
vénitien, et on ignore le lieu et la date de sa
mort. Un malheur si constant, sans cause connue,
et malgré le bon vouloir de plusieurs protecteurs,
a fait penser à Ginguené que Ingegneri avait en
lui-même la cause de son infortune, qu'il était
ou dissipateur incorrigible, ou de cette insou-
ciance qui nuit quelquefois autant que la prodi-
galité. On a de lui : Ovidio, de 1 Remedj contra
Vamore, fatto volgare e ridetto in ottava
rima; Avignon, 1576, in-4°; Gènes, 1583, in-16;
Bergame , 1604, in-4° ; — La Danza di Venere;
Vicence, 1585, in-8° : la scène de cette pastorale
est en Sicile, dans une vallée près du mont Erga ;
l'intrigue, plus compliquée que celle de YAminta,
en est une imitation ; le style, assez peu poétique, a
le mérite d'une certaine simplicité, et la pièce
en somme ne manque pas d'intérêt; elle est plus
décente et moins maniérée que les autres pas-
torales de cette époque; — Del Buon Segre- .
tario Libri tre; Rome, 1594, in-4°; Venfee,
1595, in-8° : ouvrage d'une morale assez com-
mune, mais d'un bon style; — Discorso délia
Poesia rappresentativa ; Ferrare, 1595, in-8° :
dans ce petit traité il est surtout question des
pièces pastorales, et l'auteur se montre fort dur
à l'égard du Pastor fido; — Tomiri, tragédie;
Naples, 1602 , 1607, in-4°; — Ver si alla vene*
ziana, zoè canzone, satire, lettere amorose,
mâtine, canzonette in ajerè moderne, cône
altrecose belle, opéra del signor Anzolo In-
zegner ed altri bellissimi spiriti; Venise,
1613, in-12. Quadrio cite encore de Ingegneri
un traité en vers contre l'alchimie, intitulé : Pa-
linodia délV Argonautica; enfin ce poète a
donné une édition des Rime de Curzio de Gon-
zage; Vicence, 1585. Z.
Quadrio , Storia e Ragione d'ogni Poesia, t. Vf, p. 7S.
— Apostolo Zeno, Note al Fontanini, 1. 1, p. 157. —
Tiraboschi, Storia délia Letteratura Italiana, t. VU,
par. 8, p. 810. - Ginguené, Histoire Littéraire d'Italie,
t VI, p. 871.
iNGEGffo (L'). Voy, Am&i (Andréa*').
* ingelgbr, premier comte héréditaire
d'Anjou, mort en 888. Il était fils de Tertulle,
sénéchal de Gâtinais, et petit-fils de Torquat,
un des forestiers d'Anjou, descendant de ces
859 [INGELGER -
Bretons chasse» d'Armorique par la conquête
romaine. Un gracieuse légende raconte qu'Adèle,
dame de Château- Landon, allait périr condamnée
pour crime d'adultère, quand Ingelger, qui était
son filleul, s'offrit pour champion de la dame et
tua en champ clos l'accusateur, convaincu d'im-
posture. Ce fut le commencement de sa fortune.
Adèle, en demandant an roi, juge du combat,
l'autorisation de se retirer dans un monastère,
le pria de permettre qu'une partie de ses biens
passât à son défenseur, au détriment de parents
qui n'avaient pas daigné la protéger, Ingelger, à
peine âgé de seize ans , se trouva ainsi héritier
tout au moins d'une partis du Gâtinais , où sa
famille possédait déjà des bénéfices importants.
Sa parenté avec Hugues l'Abbé, doc de Bour-
gogne , le désignait d'ailleurs d'assez près à la
faveur royale. Charles le Chauve lui confia
bientôt la vicomte d'Orléans et la sénéehaoaée
de Tours, où il épousa Aélinde, d'une des plus
puissantes familles du pays. Ce mariage lui ap-
porta en patrimoine Buzancais, ChàtUlon, Am-
boise, dont le roi se chargea de faire relever les
ruines , et bientôt, grâce à l'influence de sa nou-
velle famille, il obtint celui des deux comtés d'An-
jou, qui avait pour principale ville Angers, ^alors
partie intégrante du duché de France. Il tenait
ainsi .comme le remarque* plus tard Foulques
Réchin, « tout son fief directement du roi, non
pas.d'un roi de la descendance d'un usurpateur,
mais bien de la race de Charles le Chauve, qui
fut fils de Louis, fils de Charles le Grand, » et se
trouvait placé à l'extrême frontière, en face des
Normands et des Bretons, que les barons ses
voisins, las de guerres, lui laissèrent volon-
tiers prendre seul à partie. Mais le fait saillant
de la vie d'Ingelger, celui qui le signala à l'ad-
miration des chroniqueurs ecclésiastiques, c'est
là campagne qu'il entreprit pour faire restituer
à l'église de Tours le corps de saint Martin,
mis en dépôt pendant les guerres normandes
à Auxerre, et injustement détenu par l'évoque.
Le roi refusant d'intervenir, Ingelger, sollicité
par l'archevêque de Tours, par les évèques
d'Orléans et d'Angers et par la voix des peuples,
rassembla plusieurs milliers d'hommes , et, ac-
compagné d'un nombreux cortège de clercs et de
clianaines, s'en alla quérir le précieux dépôt,
qui fut rapporté en triomphe , aux chants des
hymnes et des psaumes» h travers les popula-
tions accourues de toutes parts pour se proster-
ner sur le passage du grand saint. Les chanoines
de Tours, pour récompenser le zèle d'Ingelger,
lui donnèrent un fragment des reliques , et en
outre, à perpétuité, une prébende dans leur église
dont ses successeurs s'honorèrent toujours de
porter le titre, avec le droit d'arborer, en toutes
leurs guerres, l'étendard ou chappe de saint Mar-
tin contre tous leurs ennemis, le roi* de France
excepté. Ingelger était beau de visage, généreux
de cœur, affable , éloquent. Foulques Réchin dé-
clare ignorer même le lieu de sa sépulture. Au
INGELRAMNE 860
rapport du moine Jean, postérieur pourtant en-
core d'un siècle, mais plus à portée des sources
historiques, il fut inhumé à Saint-Martin de
Châteauneuf près Tours. — Le fils. d'Ingelger
lui succéda ; c'est Foulques le Roux.
Célestin Port.
Chroniques 4* Anjou, publiée» p»r U) Société de l'His-
toire de France. - Chroniques de Touraine, publiées
par Salmon, p. 101-108.
INfiKLMAH (C.-G,), poôte suédois, né en
1788, mort en 1S45, Il était attaché à un minis-
tère. On a de lui < Skaldefwsœk ( Essais poé-
tiques); Stockholm, mê et suiv,; et Valia
Skalde/œrsœk (Essais poétiques choisis)-, in.,
1843 * ouvrages bien écrits et remplis de jolies
description» | — Helgê de Œhlenschl&çer,
traduit an suédois; ib.> 1830, in-8\ E, 6.
Leiutrœm, Svens** Poutaw historié p. 704.
* UfGELBAMïf E , évêque de Metz, mort en
791. Élève des écoles monastiques de Gorze et
de Saint- Avold, Ingelramne était à la fois re-
commandé par sa naissance et par son mérite,
quand, en l'année 768 r Charlemagne lui conféra
le double titre d'évêque de Metz et d'archi-cha-
pelain du palais. Nous le voyons vers le même
temps abbé de Senones-en- Vosges. Cette accumu-
lation de charges et de revenus sur une seule
tète était un fait ordinaire au huitième siècle. Il
parait toutefois que les moines de Senones se
révoltèrent contre cette coutume, qu'ils osèrent
considérer comme un abus. Pour les apaiser,
Ingelramne leur envoya le corps de saint Siméoa,
évèque de Metz. La possession d'une sainte re-
lique procurant dès lors de grands profits, la
générosité du prélat devait, pensait-il, faire
oublier l'irrégularité de l'abbé. Mais il se trom-
pait. Pour témoigner qu'ils étaient avant tout
jaloux de leur indépendance, les religieux de
Senones allèrent même jusqu'à fermer les portes
de leur église aux restes vénérables de l'évoque
Siméon. N'espérant plus alors vaincre leur ré-
sistance, Ingelramne abdiqua le gouvernement
de l'abbaye rebelle, et l'attribua, par voie de
transmission, suivant un usage déjà consacré, à
son ancien maître, Nargaud, moine de Gorze.
L'épiscopat d'Ingelramne n'a pas laissé de traces
nombreuses dans les fastes de l'église de Metz.
Ses fonctions auliques ne lui permirent pas sans
doute de consacrer beaucoup de temps aux af-
faires de son évêché. L'archi-chapelain de Char-
lemagne l'accompagnait , en effet» dans tous les
lieux où l'appelaient les nécessités de l'Empire oo
les fantaisies de son caractère, vif, inquiet, impa-
tient de tout repos. Ainsi la mort vint sur-
prendre Ingelramne dans la ville de Chunisberg,
ou de Commeberg, lorsqu'il se rendait à U
suite de Charlemagne dans les lointaines re
traites de Huns» C'est à sa prière que Paul
Warnefried composa V Histoire des É vécues de
Meti. On doit, en outre, à Ingelrarome un*'
collection de canons, qu'il envoya au pape
SOI
INGELRAMNE — INGEMANN
Adrien pour justifier quelque actes de m» admi-
nistration. B. HauiuUv.
Gatti* CàrUt., t XII, ool. TO.
* inableamiib, surnommé te Sage, abbé
de Saint-Riquier, né dans le bourg même de
Saint-Riquier, mort le 9 décembre 1045. Il Ait
admis dès son enfance parmi les religieux de
l'abbaye, et distingué de bonne heure par son
mérite. Aussi toutes las voix rappelèrent-elles à
la première dignité de cette illustre maison, lors-
qu'il s'agit de donner un euccesseur à Ingelard.
Ingelramne refusa d'abord le titre que lui décer-
naient ses confrères, et courut se cacher dans
une forêt voisine. Mais le roi Robert, qui le con-
naissait et l'aimait, le fit arracher à cette retraite.
On raconte que vers la fin de sa vie il retint la
crosse en ses mains défaillantes avec autant d'ar-
deur qull avait mis autrefois d'obstination à la
repousser. Comme il était atteint de paralysie et
ne pouvait plus convenablement remplir tous les
devoirs de sa charge, le roi Henri lui avait donné
pour successeur un moine nommé Foulques.
Celui-ci venant prendre possession , Ingelramne
ne consentit pas à céder la place; bien plus :
se faisant transporter auprès du roi , il lui re-
procha vivement sa conduite, et obtint l'éloi-
gnement de l'abbé désigné. Sous le gouverne-
ment <nngelramne, Vécole de Saint-Riquier fut
très-florissante : on en vît alors sortir Guy, qui
devint évèque d'Amiens , et Drogon futur pas-
teur de r église de Térouane. Il avait un goût
très-vif pour les lettres, et donnait tous ses
soins à l'instruction de ses moines ; mais s'il a
lui-même beaucoup écrit, il n'a jamais été qu'un
poète médiocre. On a cependant conservé une
partie de ses œuvres. Le plus considérable des
différents poèmes qui lui sont attribués est une
Vie de saint Riquier dont Mabillon a publié seu-
lement le premier et le dernier livre, Act'a
SS. Ord. S. Ben., t. H, p. 201. B. H.
CenttU. Chronicon, dans le tome IV du Spicileffium de
d'Achery. — Hist. Littér. de la France, t. VII, p. «81,-
Gallia Christiana, t X. ocL 194t.
J ingemaîiîi (Bernhard-Severin), poète et
romancier danois , né le 28 mai 1789, à Torkilds-
trup (Ile de Falster), où son père était pasteur.
En 1818 et 1819, il voyagea, aux frais de PÉtat,
en Allemagne, en France, en Suisse, en Italie,
et se lia intimement avec le poète Tieck.
Nommé, en 1822, lecteur de langue et de litté-
rature danoises à l'Académie de Sorcae, il devint,
en 1842, directeur de cet établissement. C'est
l'un des écrivains danois les plus féconds. Il di-
vise lui-même sa vie littéraire en trois périodes ,
dont la première (1611-1814) est caractérisée
par un excès de romantisme et de sentimen-
talité, et la seconde par des tendances presque
exclusivement dramatiques. Dans la troisième
{à partir de 1821) ses meilleures productions
sont des poèmes et des romans historiques,
à l'imitation de Walter Scott, et des nouvelles
dans le «eût germanique. Ses romans, qui font
assez bien connaître les mœurs de* Danois du
moyen âge, sont beaucoup lus du peuple. Voici
le titre de ses principales œuvres ; Dicte ( Poé-
sies); Copenhague, 1811-1812; 2 e édit, 1817,
in- 12; — Procne, recueil de poésies, 1813; —
Ungdomsdigte ( Poésies de jeunesse, 1813-1818),
3 vol. in-8°; 3 e édit., 1845 ; — De Sorte Riddere
(Les Chevaliers Noirs), épopée romantique en
neuf chants, 1814; 2 e édit,, 1845;— Masaniello,
tragédie; 1815; —Blanca, tragédie, 1515; trad.
en vers allemands par D. W. Lewetzow , Co-
penhague, 1815; ~ Rcesten i Œrkenen (La
Voix dans le désert) , drame biblique; 1815 ; —
Hyrden af Tolosa ( Le Pasteur de Tolosa ) ,
tragédie, 1816; trad. en allemand par Hell,dans
Bûhne ans Aus.lssnder, Dresde, 1819, et par
L. H. Scholtz, Schleswig, 1820; — lœverid-
deren (Le Chevalier du Lion), ibid., 1816 ; trad.
envers aUem. par Fr. M. Lange, Attona, 1825 ;
— Tassas Sefrielse ( La Délivrance du Tasse ) ,
poème dramatique , 1819; traduit trois fofo en
altan., et notamment par Oarfhausen , Leipzig,
1820; — Kampenfor Valhal ( Bataille pour la
possession du Valhal), tragédie, 1621; —Ma-
gnetismen i Barbterstuen ( Le Magnétisme dans
la boutkfuedu barbier ), comédie en cinq actes ;
1821 ; — De Underjordiske ( Les Êtres souter-
rains), tradition de l'Ile de Bornholm; 1817 ; —
JSventyr og Fortxllinger (Contes et Récits),
i 821 ; — Reiselyren ( Lyre de Voyage ) ; 1820,
deux part.; 2 e édit, 1845;— Psalmer (Psaumes),
1825; 3 e édit., 1845; — Waldemar den store
og hans Mxnd (Waldemar le Grand et ses
compagnons ), 1824; 3 e édit., 1847 : poème his-
torique en dix chants, qui est le chef-d'œuvre de
l'auteur; — Waldemar Seier ( Waldemar vain-
queur), roman en quatre part., 1826; 6 e édit., 1855;
trad. en allemand et en anglais; ~ fioveller;
1827; — Erik Menveds Barndom (Jeunesse de
Erik Menved ), roman eu trois part., 1828; 5 e édit.,
1857; trad. en allemand, en anglais et en fran-
çais par M. Duckett, Paris, 1843, 2 vol. in-8°;
autre édit., 1845; — Stnaadigte og Reisemin-
der ( Poésies détachées et Souvenirs de voyages);
1832 ; — Kong Erik og de Fredlœse ( Le Roi
Brik og de Fredlœse ( Le Roi Erik et les Pros-
crits), roman, deux part., 1833; 4 e édit, 1851; —
Prinds Otto af Danmark og hans Samtid
( Le Prince Otton de Danemark et son siècle),
roman, 1835; 4 e édit, 1851 ; — Dronning Mar-
gareta (La Reine Marguerite), poème en dix
chants; 1836; 4 e édit, 1866;— Holger Danske
(Ogier le Danois), 1837 ; 3* édit, 1847 : poème
national, dont lé héros, suivant les traditions
populaires, apparaît dans toutes les circons-
tances difficiles pour sauver le Danemark ; —
Renegaten (Le Renégat), poème dramatique;
1838 ; — Salomons'Ring (L'Anneau de Salo-
mon), poème dramat; 1839; — Kunnukog
Naja, ou las Groenlandais, nouvelle, 1842; —
Blandede Digte (Poésies diverses), 1842;
4 e édit, 1846; — A/msverus et poésies déta-
86*
INGEMANN — 1NGHIRAMI
864
tachées; 1846;— De Flre Rubiner (Les Quatre
Rubis) , conte ; 1849 ; — Den stumme Frœken
(La Demoiselle muette), nouvelle; 1850; —
Lansbybarnene ( Les Enfants de Village) , ro-
man, en quatre part. ; 1 852; — Tanhebrevefra en
Àfdœd ( Lettres d'un décédé ), poème; 1855 ;—
Guldxblet ( La Pomme d'Or) , conte en vers, en
douze cliants ; 1856. Tous ces ouvrages ont été
réunis sous le titre de Samlede Skrifter, -en
quatre séries :l.Œuvres dramatiques, 1853,6 vol.;
IIJ Poèmes et Romans historiques, 1847-1855,
12 vol.; IU, Contes et Nouvelles, 1847-1853,
12|voi.; IV, Romances, Poésies, Contes en vers,
1845-1856, 9 vol. £. B.
Holbach , Dansk-poetisk anthologie . t. IV, p. m-lflQ.
-.P.-L. Mœller, DanskPantheon m -~x.MaraAa % LUterat.
«candi». — Vf. et H. Howltt, The Littérature and Ro~
nuance of northem Europe,' Londres , îsif, t. II, p. 186-
106. — Brtlew, Forfatter-Lex.
* ingen (Willem van), peintre hollandais,
né en 1651 ou 1657, mort à Amsterdam. Il fut
d'abord élève d'Antoine Grebber, et se rendit
ensuite en Italie (.1670), où il se perfectionna
sous les leçons du célèbre Carlo Maratti, qui lui
procura de grands ouvrages dans plusieurs
églises de Rome. Il résida quelque temps à Ve-
nise, puis à Naples, où il fut très-occupé. De re-
tour dans sa patrie, il se fixa à Amsterdam. Ses
tableaux, devenus rares, renferment de très-
belles parties, mais le dessin y laisse beaucoup à
désirer. Le meilleur élève dlngen fut Albert
Spiers. A. de L.
Descamps, La VU des Peintres hollandais , -t. II»
p. SII-SI3. — PUklngton, Dictionary of Pointers. —
Jakob Campo Weyerman , De Schilderkonst der Neder-
landers, t. III, p. i»-im.
ingenhocsz (Jean), naturaliste et chimiste
hollandais, né à Bréda, en 1730, mort à Bowood
(Angleterre), le 7 septembre 1799. Reçu docteur,
il exerça pendant quelque temps la médecine
dans sa ville natale. Venu ensuite en Angleterre, il
s'y fit remarquer par son talent médical. Il fut
surtout apprécié par Pringle, président delà So-
ciété royale de Londres, qui le désigna à Marie-
Thérèse, lorsque cette princesse, désespérée d'a-
voir perdu deux de ses enfants, victimes de la
petite vérole, demandait un médecin habile
pour opérer l'inoculation de la famille impériale.
Ingenhousz partit aussitôt pour Vienne, où il
vaccina plusieurs princes et princesses. En ré-
compense de ses services en cette occasion , il
devint conseiller aulique et médecin de la fa-
mille impériale. Il fut estimé de Joseph II, qui
aimait à le visiter dans son cabinet, et se plai-
sait à faire avec lui des expériences de physique.
Quelques années plus tard, Ingenhousz retourna
eu Hollande; puis il visita la France et l'Alle-
magne. Il mourut dans une maison de campagne
appartenant au marquis de Lansdown, chez
lequel il était venu s'établir en dernier lieu.
On doit à Ingenhousz l'emploi des plateaux de
verre dans la construction des machines élec-
triques dont Ramsden s'était attribué l'invention.
H a fait aussi d'importantes recherches sur la
différence de vitesse avec laquelle la chaleur se
propage dans des métaux différents, et confirma
les expériences de Thomas Percivaltsur la nutri-
tion dés plantes ; enfin il a démontré que les végé-
taux «vivants exposés à la lumière émettent de
l'oxygène, tandis qu'a l'ombre ils exhalent de
l'acide carbonique. C'est Ingenhousz qui , le
premier, introduisit dans la médecine l'usage du
dernier gai. On a de lui : Expérimente on ve-
getables discovering their .gréai power of
pufifying the common air in suns-hine , but
injuring it in the shadeornight, 1779 ; tra-
duit de l'anglais en allemand; Vienne, 1786; —
Nouvelles Expériences et observations sur
divers objets de physique; ouvrage écrit pri-
mitivement en anglais; — une traduction latine
du Traité du Calcul, du Scorbut et de la Goutte j
par Hukne ; Leyde, 1778, in-8° ; — de nombreux
Mémoires, insérés dans les Transactions Phi- i
losophiques f et dans les Actes de l'Académie ■
des Sciences de Rotterdam. V. R.
Biographie Médicale. - Rose , NewlBioçr. Diet. \
ingenuus, un des usurpateurs énumérés par
Trebellius Pollion, sous le titre des trente tyrans,
tué vers 260 après J.-C. Il était gouverneur de i
la Pannonie, lorsque l'empereur Valérien partit
pour son expédition de Perse, laissant le gou- ,
vernement à son fils Gallien. Plein de mépris
pour ce prince dissolu, et redoutant peut-être sa
cruauté, Ingenuus prit la pourpre impériale. Mais |
Gallien, qui en cette circonstance montra beau-
coup d'activité et de résolution, traversa rapide-
ment llllyrie, et rencontra l'usurpateur à Mursia.
Les rebelles furent complètement défaits, et
Ingenuus périt dans l'action ou, selon d'autres
récits , se tua pour éviter de tomber vivant an
pouvoir du vainqueur. Suivant Pollion, l'insur-
rection dlngenuus éclata sous le consulat de
Fuscus (ou plutôt Tuscus) et de Bassas, c'est-
à-dire en 258 , l'année même du départ de Valé-
rien pour la Perse. Aurelius Victor, au contraire,
place cet événement deux ou trois ans plus tard,
après la défaite de Vajentinien. Y.
TrebeUtus Pollion , Triginta Tyranni.— àorelias Vic-
tor, De Cms., XXXIII. - Zonaras, XII, fit.
ingenuus , sculpteur romain, auquel on at-
tribue une statue 4e Mercure conservée au mu-
sée du Vatican, et dont la plinthe porte en gros
caractères le mot : INGENVI. G. B.
Raool-Rochette, Lettre à M. Schorn, p. St*. - VJs-
coati, MuseoPio-Oementino, t. III, p. «5.
inghieami ( Tommaso, surnommé Fedra),
humaniste italien, né à Volterraen 1470, mort le
6 septembre 1516. Après avoir été conduit à Flo-
rence dès l'âge de deux ans, il se rendit en 1483 à
Rome, où il se livra avec ardeur à l'étude des au-
teurs de l'antiquité. Ayant joué avec le plus grand
succès le rôle de Phèdre.dans la tragédie de Sé-
nèque, que le cardinal Rafaël de San-Giorgio fit
représenter dans son palais, il en reçut le sur-
nom de Fedra, qui a été considéré par plusieurs
de ses biographes, tels que Vossius et Bayle,
comme son nom de famille. Ses discours loi
865
mGHIRAMI
866
firent, to rapport d'Erasme, donner le surnom de
Cicéron de son époque. En 1493, accompagnant
le cardinal Carvajal, nonce du pape auprès de
l'empereur Maximilien, Inghirami prononça de-
vant ce dernier un discours d'apparat, dontje style
élégant lui fit obtenir la couronne poétique et le
titre de comte palatin. De retour à Rome, il devint
chanoine du Latran; vers la fin du quinzième
siècle, il fut nommé professeur d'éloquence. Sous
Jules II il fut appelé aux fonctions de clerc de
la chapelle papale, de conservateur de la biblio-
thèque du Vatican et de garde des archives sé-
crètes du château Saint-Ange. Sa réputation,
attestée par les éloges que lui donnent les litté-
rateurs les plus célèbres de son temps, tels que
Bembo et Sadolet, allait toujours en croissant,
lorsqu'il mourut par suite d'une chute. Voici le
jugement que porte sur lui Érasme : Ibidem
( Borna) cognovi et amavi Th. Phxdrum, lin-
gua vertus quam calamo célébrera; mira erat
in dicendo tam copia quam autoritas. On a
de lui ; Oratio in Funere cardinalis Lud. de
Podocataro ;— Oratio in Laudem Ferdinandi,
Hispanix régis ; — Oratio in Laudem Pétri di
Vicezia, episcopi Cesenatensis ; ces trois dis-
cours ont été publiés par Galetti dans les Aned-
doti letterarji di Roma d'Amaduzzi; — Ora-
tiones dux in Funere Galeotti Franciotti,
cardinalis vice-cancellarii; altéra item fu-
nebris pro Julio II; Rome, 1777, in-8° : ces
discours furent découverts par Galetti dan3 la
bibliothèque de Guarnacci, dans laquelle il
s'en trouvait beaucoup d'autres, ainsi que des
lettres et des poèmes d'Inghirami. Celui-ci a
laissé en manuscrit : Apologia Ciceronis in ob-
trectatores; — Annalium Breviarium; — Ad
Plautum Quxstiones ; — In Horatii Poe ticam
Comment aria; — In Bhetoricam Introductio,
c'est à tort que Vossitfs et d'autres ont attri-
bué à Inghirami la Chronique étrusque apo-
cryphe publiée par Curzio Inghirami. £. G.
Bayle, Diction, (an mot Phèdre). - Eloçj d'niustri
Toscani. t II, p. M7. — Galetti, Eloçio d'Inghirami
(dam le tome III des jdneddoti d'Amaduzzi). — Tiraboa-
ehl. Storia délia Letteratura Italiana, t. VII, parte III.
— Brseh et Ornber, Encyklùpxdie.
inghirami (Curzio), érudit italien de la
même Camille que le précédent, né le 29 dé-
cembre 1614, à Volterra, mort le 23 décembre
1655. Pendant toute sa vie, il s'occupa de l'étude
de l'antiquité, et s'acquit un certain renom parmi
les archéologues de son pays ; mais il eut le
malheur de croire à l'authenticité d'une Chro-
nique étrusque apocryphe, écrite soit-disant en
l'an 700 de Rome par un certain Prosper Fesu-
lanus, mais fabriquée évidemment par quelque
faussaire peu de temps avant qu'elle ne vint dans
les mains d'Inghirami, qui s'empressa de la pu-
blier sous le titre de : Ethruscarum Antiqui-
tatum Fragmenta, quitus urbis Borna alia-
rumque gentium primordial mores et res
gestx indicantur; Florence, 1636; Francfort,
1637, in-fol. Henri Ernst attaqua le premier,
NOUV. BIOGft. CÉNÉR. — T. XXV.
dans ses Varia Observationes adAntiquitates
Ethruscas, l'authenticité de ces fragments d'his-
toire ; mais ce fut surtout Léon Allatius qui prouva
dans ses In Antiquttatum Etruscarum Frag-
menta Animadverstones , Paris, 1640, in-4°,
qu'Inghirami avait été la dupe d'une supposition
aussi audacieuse que mal déguisée. Le malheu-
reux éditeur fit paraître pour sa défense un Dis-
corso sopra Vopposizioni fatte al antichità
Toscane y Florence, 1645, in-4° ; mais il avoua
bientôt lui-même qu'il s'en était laissé imposer.
Quant à sa bonne foi, il y a des raisons suffisantes
pour ne pas en douter. L'auteur de cette super-
cherie n'a jamais pu être découvert; c'est à tort
qu'on en a accusé Th. Fedra Inghirami. E. G.
Eloçj deçli Toscani Illustré, t. III. — Ttraboschl. .Mo-
rte (faite Letter. Italiana, t VIII. - Placcius, Theatrum
Jnonymorum» — Cltusical Journal (&nnéc 1817). — Ersch
et Gruber, Encyldopsedie.
* inghirami (François), célèbre archéo-
logue italien, descendant du précédent, né en
1772, à Volterra, mort à Florence, le 17 mai 1846.
Destiné à la marine par son père, il se rendit en
1785 à Naples, où il entra à l'École militaire. Il
y fréquenta beaucoup la maison de son oncle
Domenico Venuti , directeur de la fabrique de
porcelaine et du Museo Borbonico, ce qui lui
donna l'occasion de se familiariser avec les chefs-
d'œuvre de l'art antique et à entrer en relation
avec des artistes et des antiquaires. Après quel-
que résistance, son père l'autorisa à quitter la
carrière militaire et à se livrer entièrement à son
goût pour les arts. Inghirami se rendit à Florence,
où il apprit à fond le dessin, et où il étudia l'ar-
chéologie sous la direction du célèbre Lanzi.
En 1799, il alla rejoindre à Pise son ami Phil.
Hackert (voy. ce nom), et s'exerça auprès de
lui dans la peinture du paysage et dans l'art de
graver. De retour à Volterra, où il avait pré-
cédemment donné une impulsion nouvelle à
l'exploitation de l'albâtre, il y fut nommé con-
servateur de la bibliothèque publique, dans la-
quelle se trouvait placée une collection consi-
dérable d'antiquités étrusques. La faire connaître
au monde savant, tel fut dès lors son but cons-
tant. Par un procédé optique particulier, il des-
sina avec une exactitude complète le» objets de
cette collection, qu'il suivit en 1811 à Florence,
lorsqu'elle y fut transportée. Après avoir rempli
pendant quelque temps les fonctions de biblio-
thécaire à la bibliothèque Marcelliane, il alla en-
suite établir avec plusieurs élèves qu'il avait
formés, une imprimerie et un atelier de gravure
dans l'ancienne abbaye de Fiesole, établissement
auquel il donna le nom de Poligrafia Fiesolana.
C'est là qu'il publia son grand ouvrage sur les
Monumenti Btruschi, par lequel il réhabilita le
nom d'Inghirami, que la mésaventure de son
aïeul avait décrédité. Le reste de sa vie fut con-
sacré à des travaux d'archéologie et d'histoire,
dont plusieurs ont une grande importance. On
a d'Inghirami : Dichiarazione délie Pitture
di un servito di tavola; Naples, 1790; —
28
867
INGHIRAMI — INGLES
868
Relazione affriole délie lmprese faite dalV
armi Volierrane nel Moral* toscane; U-
vourne, 1799; —OsservatUmi topra i Manu*
menti antichi, insérées en appendice a l'édi-
tion donnée par Inghirami de YJtalia avanti
il dominio dei Romani deMicatt; Florence)
1811; — Estratto del libro intitoiato ; De
Pateris antiquorum , ce* aggiunto di oseer*
vazioni e note; Gènes, 1829; — DescrUtione
del Palazzo dei Pitti; Florence, 1«19; —
Hagionamento sopra una Patêra Mtrusca; j
Gènes, 1819; — Monument* Btrusehi o 4i
etruscho nome; Poligrafia Fiesolana, 1 820-1 W*
10 vol., in 4°, en soixante*srx hvraisons, dont
chacune contient don» planches; — Ragionm*
mento suit' Influente Lunari; ibidem, 1830;
— Viaggioalla Valtombrosa ; Florence, 1823;
— Osservazioni suit Antichitàdi Selinunte;
Florence, r825; — Qalleria Omeriaa, o rac~
colta di monumenti antichi esibita per ser*
vire allô studio delF Iliade e deH 1 Odissea;
Florence, 1827-1838, 3 vol., in-g% ouvrage
de luxe, qui contient près de quatre cents
planches; — Lettere di B trusta BrmdùOone;
Florence, 1828 et 1839; — Pittute dei Vati
fittili per servire di studio alla mltologia
ed alla storia degli antichi popoli; Flo-
rence, 1831-1837, 4 vol., in-4°, avec quatre
cents planches; — Memorie storiche per ser-
vire di guida ail' osservatore in Fiesole;
Poligrafia Fiesolana, 1839; — Storia délia
Toscana, compilata ed in sette epoche distrP-
butta; Florence, 1841-1845, 16 vol. : ouvrage
inachevé. — Inghirami a aussi édité tes Notitkc
délia Scutturadegli Antichi, ouvrage de Lanal,
en tète duquel il a publié une biographie de Fan»
teur; — Nuova Colleitone di OpuscoUe m*
tiiie di scienze, lettere ed or lit Poligrana
Fiesolana, 1820-1823, 4 vol., 1*4°. Enfin il a
pris une part active à la publication du Musée
etruscho- cÀituino; Florence , 1833, 4 toi.,
avec deux cent seise planches» E. Ô.
Brandes, Litteraritche ÊtHtUnff (Berlin, année 18*6,
n» 80). - Gewdorf, Leipsiçer RepertoHum , aott** îst*.
— Brtcb et Grnber, £ncyJUofMNlfc.
UHHALD ILLBADA, roi du SultMode OU
d'Upsala (Suède), fils d'Anund et dernier prince
de la famille dlfnglinga, vivait dans Je septième
siècle après J.-C. Il appartient à la période lé*
gendaire de la Suède, et ne nous est connu que par
la Saga d'Ynglinga. Nous résumerons oe récit
poétique qui doit être fondé sur des faits réels,
mais qui contient sans doute aussi une large
part de fiction. Le royaome de Suithiode s'était
subdivisé entre plusieurs branches de la famille
royale, et IngiaM n'hérita que d'une principauté
très-bornée. Pour célébrer son avènement, il fit
construire une grande salle qu'il appela la salie
des Sep t Rois, et invita à un banquet les rois du
Suithiode, et les jatte. Six rois se rendirent à
son invitation. Pendant le repas, il juta de re-
culer au loin les bornes de l'héritage paternel,
et, le soir même, il fit périr tes lin rois an milieu
des flammes. Après cet événement* resté célèbre
sous le nom d'incendie d'Upsala, Ingiaid demi
sit par trahison doute rois , et mérita le surnom
à'illrada (féroce )» On raconte que dam mm en-
fance il avait mangé le cour d'un loup, oeqoU'i»
vaitrendocratl. Asa, sa fille, paitageasmerasatei
et son surnom. Mariée à Gudrod, roi de lente,
eue tua: son époux, et revint auprès de son stot.
Indigné de tant de crimes, un neveu de Godmd,
Ivaf Widfamne, rassembla Une armée, et mardi
contre Ingiald. A son approche, le roi d'Upsala
et ai Alto ne se sentant pas aasef torts pourra
sister, donnèrent un banquet a lents fidèles,
s'enivrèrent avee eu*, et, incendiant le stfc
royale, périrent consumés aven tons tours en-
vivea. La mort dlngiak) rat le signal dW ré-
volte générale contre ta famille d*Yngftiigft, qn'
fat partout dépouillée du potrvotr, La pnolérké
dlngiald se réfugia dans m Norvège, qu*nfi è>
ses descendants, Harald tiarfagir, érty» phts
tard en royaume. z.
s*em #rMM*a j du» te Km tm tt f sm* de wtm
Starlcsmi. — Gcjwit WHMf * Suéde { (rat per Uat
blad ),cL
* UKH.Bg (Le maître Sorpé), peintre e»p-
gnol, vivait dans le quinzième siècle. Il se dis-
tingua dans l'histoire et le portrait II teste
assez de belles fresques de cet artiste pour qu'on
puisse expliquer le surnom de maitre que ses
contemporains lui avaient donné, il décors à Gre-
nade, en 1454, le grand autel et les parties laté-
rales de l'église de Buitrago. Il y peiajût plusieurs
des membres de la famille de* Santiilane, fonda-
teur* de cet établissement, un Saint Georsu,
un Saint Jacques^ et un Saint Sébastien, Ls
couleur et le dessin en sont irréprochabKS,
mais la composition laisse à désirer : eUe est
lourde ; l'air et la lumière circulent mal dans
des espaces trop remplis. C'est d'ailleurs le dé-
faut de l'école et de l'époque de ce peintre, hm-
coup d'établissements religieux on de charité «le
P Aragon possèdent des œuvres du maître .fonte
Ihgtes. Quelques-uns dé ses portraits ont ete
gravés habilement par dom Peraaod Salma*
A. M L.
ftaefam, Los ComêtUërU* M Im Pin****. •» QattA
Dictionnaire des Peintres espagnols.
* ingles (Don José), peintre espagnol, né à
Valence, en 1718, mort dans la même ville, es
1780. Il était élève de don Antonio fticharte, fi
en fit un excellent coloriste. Il peignait très-ton
le portrait et montrait une rare habileté daosU
peinture à fresque. Quoiqu'il ait exécuté île
nombreux morceaux» ses sujets sont toujour»
variés et d'une composition nouvelle. Il fut
sous-directeur de l'Académie de Valence. Ses
principales productions se remarquent dans si
ville natale (qu'il quitta peu ), au couvent de ls
Merced, dans l'église de Saint-Augustin et dsoi
la paroisse du Campanar. A. de L.
Philippe de Gaevarra, Ijss Cmuntarios de laPiwtor*.
publiés par Antonio Pons; Madrid, 1788. - Lu Cm-
860
tttvclones 9 Jetas del Aeademia de Valence. — Qutl-
llet, Dictionnaire des Peintres espagnols.
inglis (Esther). Voy. English.
ixglis (Henri-David) , littérateur anglais,
né en 1795, en Ecosse, raort en 1835. Passionné
pour les voyages, il profita du rétablissement de
la paix pour visiter la plupart des contrées de
l'Europe; sa vie se passa presque tout entière
sur les grands chemins. Au milieu de ces fatigues
continuelles, il fut atteint d'une affection de poi-
trine qui le mit rapidement au tombeau. Ses
principales relations de voyages, écrites avec une
agréable facilité, sont : The Taies qf Ardennes,
solitary walhs through many lands; — Tra-
tels in Aorway and Sweden ; Spain in 1830;
— the iVeto Gil Blas; — Ireland in 1834, sa
dernière production. Cet auteur a signé ses pre-
miers ouvrages du pseudonyme de Dérivent
Conway. P. L— t.
Rose, Biographlcal Dictionary. — Gentleman Maga-
%lne, 1836.
* inglis (Sir Robert-Harry), homme poli-
tique anglais, né en 1786, mort le 8 mai 1855.
Avocat , membre du conseil du collège royal ,
directeur d'une société d'assurances sur la vie
et membre du parlement, y siégea parmi les
conservateurs, et vota pour la protection de l'a-
griculture en 1846. Il siégea à la chambre des
communes pour«Dundalk de 1824 à 1826, et
pour Ripon de 1826 à 1828. Depuis cette époque
il représenta l'université d'Oxford , qui l'élut à
la place de sir Robert Peel lorsque celui-ci crut
devoir donner sa démission pour mettre ses
commettants en état de se prononcer sur son
changement de conduite relativement à l'éman-
cipation des catholiques. J. V.
Parliamentary Compunion.
*ixgoli (Matteo) , architecte et peintre de
l'école vénitienne , né à Ravenne, en 1587, mort
de la peste, en 1631. II fut élève à Venise de
L. Benfatti dal Friso ; mais il s'appliqua surtout
à imiter les ouvrages de Paul Véronèse et du
Palma, se formant un style plus solide qu'a-
gréable. Ses principaux tableaux sont, à Venise,
une Cène, dans l'église des Saints- Apôtres, et six
sujets de la vie de la Vierge, dans celle de Saint-
Sebastien . Ingoli s'occupa aussi d'architecture;
mais sa mort prématurée ne lui permit de lais-
ser aucun monument de quelque importance.
Ê. B-n.
Boschini, Car ta del Navegar pittoresco. — Orlandf ,
Abbecedario. — EUdolQ, Vite deçli lllustri PUtori e
dello stato. — Lanzl, Storia délia Pittnra. — Ticozzi,
Dizionario. — Quadri, Otto Giorni in Fenetia.
* IXGOM4R, hagiographe et historien breton,
vivait dans le onzième siècle , sous Geoffroi I er
et Alain III. Il avait composé divers ouvrages
dont on ne possède aujourd'hui que des frag-
ments, savoir : une Généalogie des Princes de
la Domnonée, fondue dans la Chronique de
Saint- Brieuc (D. Morice, Pr., 1. 1, col. 7-102),
dans l'Histoire de L. Raud et dans la Vie des
Saints de D. Lobineau ; — une Vie de saint Jud-
wal, citée par D. Lobineau; — une Vie de
1NGLES — INGOUF 870
saint Judikhael; et une Vie de saint Win-
noch (De Morice, Pr., t. I,col. 204-206 et 211-
215). La légende de saint Winnoch , écrite dans
le huitième siècle par un auteur anonyme , re-
touchée et augmentée par Ingomar, a été aussi
publiée par Surius, au 6 novembre; par Mabil-
lon, dans Âcta ord. s. Benedict. et surtout par
Ghisquière, bollandiste, avec des notes, dans les
Acta Sanctorum Belgii, t. VI, imprimés à l'ab-
baye de Tongerloo, en 1794. Ingomar, dont Su-
rius relève le mérite, écrivait avec plus de goût
et de discernement que les autres légendaires ses
contemporains. P. Levot.
D. morice, Histoire de Bretagne. — D. Lobineau, Vie
des Saints, etc. — Surtu», rit* Sanctorum, etc.
1NGON. Voy. IlfOB.
MrteoNi (Donino), sculpteur modénais,
mort en 1604. Il travailla beaucoup pour le roi
de France et le vice-roi de Naples , et revint finir
ses jours dans sa patrie combié d'honneurs et de
présents. E. B— ».
Vidrlanl, rite de? PUtori, Scuttori ed Architetti Mode-
nesi. — OrlandI, Abbecedario.
*ingoni ou JUGQNi ( Giovanni- Battis ta ) ,
peintre de l'école de Modène, né dans cette ville,
vers 1528, mort en 1608.11 fut, selon Vasari, l'é-
mule de Niccold dell' Abbate, et travailla heau-
coup à Rome , à Pérou se et à Modène. Cependant
on connaît peu de tableaux de ce maître ; mais
dans le petit nombre de ceux que l'on possède ,
on trouve un coloris agréable, dea poses de bon
goût et des figures pleines d'expressions
E; B-N.
Vidrlanl, rite de PUtori, Scuttori eê Architetti Mo-
denesi. — Vasari, F ite. — Tlraboscht, Notizie degli Ar-
tefci Modenesi. — Lanzl, Storia délia Pittura.
ingoiîf (Pierre- Char les) , graveur français,
né à Paris, en 1746, mort vers 1800. Il apprit la
gravure sous J.-J. Flipart. Il a gravé avec goût
différents morceaux d'après divers maîtres. On
remarque entre autres : Quatre têtes, pleines
d'expression, d'après Greuze; — La Paix dit
ménage , d'après le même; — La bonne Édu-
cation, d'après le même; — Jeune Fille sé-
duite qui caresse un chien ou VInnocence
trompée consoléeparV Amitié, d'après le môme ;
— Portrait de Jean-Georges Wille; — une
Scène de Tome Jones (acte I, scène III ), d'après
P.-A. Wille; — La Mère contente, d'après le
même; — La Mère en courroux, d'après le
même , etc. A. de L.
Notizie d*Qli Intaaliatori, par G. Gori Gandellinl, con-
tinuation de l'abbé Lulgl de' Angelis, t. II, p. 197 198.
ingouf ( François- Robert) , graveur fran-
çais, frère du précédent, né à Paris, en, 1747,
mort le 18 juin 1812.11 fut aussi élève de J.-J. Fli-
part. On a de lui un grand nombre d'estampes,
parmi lesquelles on distingue : Les Canadiens
pleurant surlatombe de leur enfant, d'après
Lebarbier; — La Nativité, d'après Raphaël ; —la
même, d'après Ribera; ces deux gravures se
trouvent dans le Recueil du Muséum de Laurent;
— un Buste de Jean- Jacques-Rousseau ; — •
28.*
871 INGOUF —
Gérard Dow jouant du violon ; — le Portrait
d'Armand- Jérôme Blgnon , maître des cérémo-
nies, d'après Drouais ; — Le Soldat en semestre,
d'après Freudenberg; — Le Négociant ambu-
lant, d'après le môme; — Le Retour du La-
boureur, d'après Benezech ; —plusieurs planches
du Voyage de Cassas et du grand ouvrage
de la commission d'Egypte.
L'abbé Lulgi d'Ange», Notizie degli Intaçliatori (con-
tinuation de G. Corl GandineM), t. II, p. 196-197.
ingaam ( Robert), théologien anglais, né en
1727, à Beverley ( Yorkshire) , et mort en 1804.
Il étudia à l'université de Cambridge, y fut chargé
de L'enseignement théologique, et administra suc-
cessivement plusieurs paroisses des comtés de
Kent, de Nottingham et d'Essex. Il a laissé beau-
coup de commentaires sur le texte des Écritures
Saintes , dont il tirait parfois les interprétations
les plus étranges ; nous rappellerons entre autres :
A View of the great events of the seventh
plague; — Account of the ten Tribes of Is>
rael being in America , publié dans l'origine
par Manassé ben Israël ; — Explanation of the
Prophecy of the seven vials oftorath, etc.
P. L— Y.
Rose, Biographieal Dictionary. ;
ixgrand ( François- Pierre), homme poli-
tique français, né à Usseault (Poitou), le 9 no-
vembre 1756, mort à Paris, le 21 juillet 1831. II
était d'une famille protestante ruinée lors de la
révocation de l'édit de Nantes.. Il exerçait la pro-
fession d'avocat au commencement de la révolu-
tion, et en accepta les principes avec une grande
ardeur. En 1790, il fut nommé l'un des adminis-
trateurs de son département, qui le députa à l'As-
semblée législative, puis à la Convention natio-
nale. Le 17 décembre 1792, il fit décréter l'an-
nihilation des procédures relatives aux troubles
de Copet et de Saint-Étienne. En janvier 179.1,
Ingrand était membre du comité de sûreté géné-
rale. Il vota la mort de Louis XVI sans appel ni
sursis. Il fut ensuite chargé de missions dans la
Vienne et la Vendée, et déploya dans ces dépar-
tements une grande sévérité; aussi, après le 9 ther-
v midor, fut-il accusé d'avoir exercé des rigueurs
inutiles et excessives. Thrbaudeau l'accusa môme
d'avoir fait arrêter arbitrairement son père. In-
grand prouva qu'il n'avait fait qu'exécuter les
ordres des comités. 11 prit plusieurs autres fois
Fa parole sur la nécessité de rendre aux patriotes
'eur énergie et d'imposer silence aux aristocrates,
ît dénonça les progrès que faisaient les contre-
révolutionnaires dans les départements de l'ouest.
Après la session conventionnelle, il devint
membre du Conseil des Cinq Cents, d'où il sortit
en 1797. Nommé inspecteur forestier à Beauvais,
puis à Château-Thierry, il se fit remarquer par
son intégrité. Frappé en février 1815 par la loi
contre les régicides, il dut se retirer à Bruxelles,
où il vécut fort malheureux. La révolution de
juillet 1830 lui permit de venir mourir dans sa
patrie. H. Lesduhi.
ItfGRASSU
872
Le Moniteur général, an 17M, n° S54; an I e », n*» 3,
15, 138; an H, n«« m, 357 ; an ni, n» 6. — Biographie
Moderne (1W6 ). — Arnault. Jay, Jouy et Norvius, Biogra-
phie nouvelle des Contemporains (1823J.
ingrand de SAïNT-M kVK, chef de chouans,
né vers 1775. Il ne figura dans la guerre civile
qu'en 1799, et se mit à la tête des bandes qui,
sous le prétexte de royalisme, désolèrent le dé-
partement de l'Eure. Il s'acquit une certaine ré-
putation de bravoure par plusieurs combats sou-
tenus contre les troupes. Il fut l'un des derniers
à accepter l'amnistie accordée par le gouverne-
ment, et ne déposa les armes que lorsqu'il se
vit traqué de toutes parts. Il se trouvait à Paris
lors de l'explosion de la machine infernale ( 3 ni-
vôse an rx = 24 décembre 1801), et fut in-
carcéré au Temple. Sa participation active ne put
être prouvée; néanmoins il fut transféré à la
citadelle de Besançon, d'où il ne sortit qu'en 1805
pour être mis en surveillance dans le départe-
ment des Côtes-du-Nord. Il ne reparut plus sur la
scène politique. H. L.
Biographie Moderne (180S). — Arnault, Jay, Jouy et
Horvlni, Biographie des Contemporains ( 1823).
ingrassia ou ingrassias (Giovanni-Fe-
lippe), médecin sicilien, né à Palerme,en 1510,
mort dans la même ville, le 6 novembre 1580 (I).
Il fit ses études à Padoue, où il fut reçu docteur en
médecine en 1537. Il enseigna avec un grand
succès à Naples. Ses critiques anatomîques sur
Galien sont remarquables par la justesse de ses
observations sur les os. Ha donné une description
exacte du sphénoïde et de l'ethmoïde; il con-
naissait les sinus sphénoïdaux , et les irons
arbitraires antérieur et postérieur. Il paraît
être le premier qui ait parlé de Vétrier (2). Co-
lombo, il est vrai, s'en est arrogé la découverte;
mais Ingrassia l'a constamment traité de pla-
giaire. Fallope, moins avide de gloire que jaloux de
la vérité, renonça au mérite de cette découverte
qu'il croyait, lui-même, avoir faite, pour l'attri-
buer à Ingrassia. Coiter, qui vivait en même
temps, et qui était disciple de Fallope, l'attribue
aussi à Ingrassia. A son tour Eustachi dé-
crivit Vétrier, et soutiut que le premier il l'a-
vait reconnu. Éloy ne doute pas que la décou-
verte n'appartienne à Ingrassia , et Portai ajoute
« qu'fngrassias parle aussi fort au long de la ca-
vité du tympan ; qu'il a connu les fenêtres rondt
et ovale , le cordon du tambour, qui traverse
cette cavité, la plupart des éminences qui s'y trou-
vent, le limaçon et les canaux demi-circulai-
res, les cellules mastoïdiennes ; et, si l'onenjuge
par une des planches de son ouvrage , il a coiun
aussi le muscle du marteau, dont on acconk
généralement ladécouvertc à Eustachi. «En 1563,
Philippe II, roi d'Espagne, nomma Ingrassia proto-
médecin de la Sicile. L'ardeur avec laquelle il sou-
tint l'honneur de sa profession le fit passer pour
un homme dur et sévère ; mais il ramena vers
(1) Selon d'autres biographe», 11 «eralt né aux rmlrcm
d« Païenne, ou môme à U»rkersbiiur|? ( basse stjrir).
(i; Petit oê de 1 Intérieur (Je l oreille Interne.
873
INGRASSIA — INGRES
874
lui l'affection générale pendant la peste qui déso-
lait Païenne en 1575. Malgré son âge avancé, on
le vit se multiplier, braver la fatigue et l'épidémie,
secourir les malades, rassurer les valides et
donner des ordres si sages que le fléau s'arrêta
bientôt. Toute la ville lui décerna le titre d'iftp-
pocrate sicilien, et lui vota une pension an-
nuelle de 3,000 écus d'or. Il consacra cette somme
à l'ornement et à l'entretien d'une chapelle sous
le vocable de Sainte-Barbe dans le cloître des
Dominicains de Païenne, où il y rat enterré. On
a de lui : Iatropologia. Liber quo multa ad-
venus barbaros tnedicos disputantur; Ve-
nise, 1544, 1558, in-8°; — Scholia in latro-
pologiam; Naples, 1549, in-8°; — De Tumo-
ribus praeter naturam; Naples, 1553, in-fol.;
— RaggionamenU) fatto sopra Vinfermita
epidemica delV anno 1558, suivi d'un Trat-
tato di due Mostri nati in Palermo in diversi
tempi ; Païenne, 1560, in-4° ; — Consiitutiones
et Capitula, neenon juridictiones regii Proto-
Medicatus o/ficii, cum Pandectis ejusdem re-
formaiis ; Païenne, 1564, 1575, in-4°; — De
Purgatione per medicamentum, atqueobiter
etiam de sanguinis missione, etc.; Venise,
1568, in-4°; — Galeni Ars medica; Venise,
1573, in-fol. Le traducteur y a joint beaucoup' de
commentaires , — De frigido Potu post me-
dicamentum purgans ; Venise, 1575, in-4°;
Milan, J586, in-4°; — Informatione del Pes-
ti/ero e contaggioso Morbo il quale afflige
e hâve affLito la città di Palermo e moite
altre città e terre del regno di Sicilia nelV
anno 1575 e 1576; Païenne, 1576, in-4°;trad.
en latin par Joachim Camerarius, sous le titre
de : Methodus curandi pest\ferum conta*
gium; Nuremberg, 1583, in-8°; — Methodus
dandi relationes pro mutilatis torquendis,
ante a tortura excusandis, pro déformions
venenatisque judicandis; pro elephantiacis
extra urbem propulsandis , sive intus urbem
sequestrandis , vel fortassis publiée conser-
vât* dimit tendis ; Venise, 1578-1637, in-fol.; —
In Galeni librum de ossibus doctissima et
expertissima Comment aria; Messine, 1603,
in-fol.; Venise, 1604, in-fol. Cet ouvrage, plein
d'érudition, est divisé en vingt-quatre livres : les
figures sont gravées d'après les dessins de Vé-
sale. L— Z— e.
Éloy, Dictionnaire historique de la Médecine. — Bio-
graphie Médicale.
J ingres (Jean- Auguste-Dominique), cé-
lèbre peintre français , est né à Montauban en
1780. Son père, peintre et musicien distingué,
professait le dessin dans cette ville. M. Ingres
eut à choisir entre les deux arts; d'abord il les
cultiva tous deux avec une égale ardeur; mais
la peinture prit le dessus. Cet enfant, qui préfé-
rait un crayon à tous les jouets de son âge, montra
bientôt les plus heureuses dispositions , copiant
les gravures du temps, copiant la nature, et,
ce qui fait l'éloge de son instinct d'artiste , com-
mençant dès lors à démêler le bon dn mauvais,
et préférant Raphaël et Nicolas Poussin aux pein-
tres à la mode , Boucher, Fragonard et Vanloo.
Les premières années de M. Ingres furent stu-
dieuses, mais sans contrainte et sans ennui. Le
père de M. Ingres , voulant mettre à profit la
brillante organisation de son fils, le conduisit,
encore enfant, à Toulouse, et le confia aux soins
d'un de ses collègues de l'Académie de Peinture,
M. Roques. Ce professeur habile avait séjourné
en Italie, et dans un temps où l'on ne jurait, en
province surtout où le retour de David vers
l'antique était encore ignoré, que par Vanloo et
Fragonard, il étudiait Raphaël avec goût et in-
telligence. Une belle copie de la Madone alla
seggiola, que M. Roques avait rapportée de
Florence, révéla d'un seul coup à M. Ingres ces
grandes vérités de l'art qu'il n'avait fait qu'entre-
voir. Raphaël devint son modèle de prédilection
et presque son idéal. Sous la direction de M. Ro-
ques , les progrès du jeune artiste furent rapides,
et dès lors il n'hésita plus sur sa vocation. A
onze ans il obtint à l'Académie de Toulouse le
grand prix de dessin et les honneurs de l'ova-
tion du Capitole. A seize ans, M. Ingres était
maître de son crayon, et dessinait avec une vé-
rité et une précision peu communes. C'est alors
qu'il vint à Paris, et, comme le patronage aca-
démique de l'école était indispensable pour ob-
tenir les prix qui conduisent à Rome , il entra à
l'atelier de David, malgré de secrètes répugnances ;
c'était, je crois, en 1796. Le peintre de Socrate,
des Boraces et de Bé lis aire, revenu du déplo-
rable enivrement de la terreur, reprenait ses
pinceaux. Derrière les préceptes rigoureux et
conventionnels du maître, derrière cette étude
abstraite du dessin anatomique , astreint à cer-
taines règles mathématiques , M. Ingres entre-
voyait toujours Raphaël et sa ligne si vraie , si
souple, si correcte dans sa grandeur. Raphaël
pour le jeune artiste, soumis momentanément à
la discipline de l'école régnante, c'était la na-
ture dans toute sa grâce et sa perfection ; c'était
presque la liberté.
Cependant, M. Ingres, élève de David, débuta
comme tons les artistes du temps par la repro-
duction conventionnelle du bas-relief et de la
statue. Achille recevant dans sa tente les dé-
putés d'Agamemnon , et Antiochus renvoyant
à Scipion V Africain son fils fait prisonnier
sur mer , sont ses deux premiers tableaux. VAn-
tiochus obtint le second prix de peinture en
1799, et Y Achille le grand prix en 1802. On as-
sure que Flaxman répétait que le tableau de ce dé-
butant était ce qu'il avait vu de mieux en France.
Quoiqu'il eût obtenu le grand prix dès 1802,
M. Ingres ne se rendit cependant en Italie que
vers 1804. L'Académie avait été supprimée de-
puis 1793; et le voyage à Rome était remplacé
par une pension de mille francs. A l'Académie de
Rome , M. Ingres rencontra Guérin, Granger et
Menjaud, pensionnaires comme lui, mais dont il
875
INGRES
876
se distingua aussitôt par sa manière originale.
Ces premières velléités d'indépendance et ce re-
tour vers la réalité se manifestent surtout dans le
tableau d* Œdipe expliquant Fénigme, que
M. Ingres exposa en 1808, au sortir de l'École
de Rome. La tète de l'Œdipe se distingue essen-
tiellement de ces types de beauté conventionnelle
que reproduisaient tous les artistes du temps;
aussi l'accusa-t-on de laideur et de vulgarité.
Les nouvelles tendances de l'artiste apparaissent
également dans le naturel parfait de la pose, dans
la netteté du contour que l'on qualifia de séche-
resse; elles se montrent encore dans la fermeté
du dessin musculaire et dans cette extrême sim- ,
plieité d'exécution qui s'écartait singulièrement
du genre gréco-fleuri de l'époque. A Rome M. In-
gres exécuta, dans les salles du palais de Monte-
Cavallo, des fresques dont l'histoire romaine et
les poèmes d'Ossian avaient fourni le sujet : Le
Triomphe de Romulus, vainqueur d*Acron ,
roi des Cédniens, vaste peinture qui a été
exécutée en détrempe ; Le Sommeil d'Ossian ,'
plafond peint à l'huile. Pendant son séjour en'
Italie, outre ses peintures du palais de Monte»
Cavallo, M. Ingres composa un certain nombre
de tableaux , dont quelques-uns seulement nous
sont connus. C'est de cette époque que datent La
Chapelle Sixtine t Raphaël et la Fornarina^
Francesca da Rvmini, Le cardinal Bibiena
fiançant sa nièce à Raphaël , Virgile lisant ton
poème devant Auguste, etc. M. Ingres, à cette
époque de sa vie , eut à soutenir une lutte pénible'
avec le besoin , et dut faire un grand effort de vo-
lonté pour ne pas s'écarter de cette ligne rigou-
reuse qui ne pouvait le conduire que bien len-
tement à la fortune et à ce qu'il ambitionnait phi»
encore, à la gloire. M. Ingres persista; se refu-
sant à toute concession au goût du moment , il
entreprit de régenter ses critiques : joignant les
œuvres à la prédication, il voulut leur montrer
comment l'étude de la nature et l'étude de l'an-
tique pouvaient se combiner : il composa La
grande Odalisque. A son apparition au salon
de 1819, ce tableau causa dans l'école alors en
vogue une sorte de soulèvement. On cria au
mauvais goût, à la barbarie. Landon, dans son
Salon de Peinture de 1 819, et M. deKératry dans
son Annuaire du même salon le condamnèrent
sans rémission. Cependant, le coloris de L'Otfa-
lisque doit à l'empâtement des ombres une soli-
dité qu'on rencontre rarement dans les peintures
de la même époque (1819), dont les ombres,
indiquées par quelques glacis de bitume, man-
quent de fermeté , et dont les clairs même sont
à peine empâtés. Aussi , après moins de trente
années, la plupart de ces tableaux se sont-Us
désaccordés, tandis qu'au contraire le coloris de
VOdalisque a gagné et gagnera encore, le temps
ne pouvant qu'harmoniser des tableaux dont
toutes les parties sont exécutées avec le même
soin consciencieux , la même horreur de l'à-peu-
près.
Cette période de lutte, qui comprend près de
quinte années, de 18tû à 1825, fut favorable au
talent de M. Ingres; la critique a pu lui arra-
cher des cris de douleur ou éé colère, elle ne l'a
jamais accablé. Cette loi , qui veut que la résis-
tance seule amène le complet déploiement des
forces, est surtout applicable aux beaux-arts.
Pendant la seconde partie de son séjour en Italie,
M. Ingres, mis au ban de l'École, et que les
commandes importantes n'allaient pas chercher,
ne produisit guère, outre des portraits, que des
compositions de petite dimension. La Chapelle
Sixtine, Raphaël et la Fomarina, Francesca
da RtoniniJLe maréchal de Berwtck, L'Arétin,
Les deux tableaux de Henri IV, la Mort de
Léonard de Vinci, Roger et Angélique, et
V Entré» de Charles V â Paris, furent exécutés
durant la période dont noue parlons.
Vers 1824, M. Ingres, décidé à revenir en
France voulut préparer son retour par un coup
d'éclat. Il exposa au salon de cette année trois
tableaux et plusieurs portraits ; l'un de ces ta-
bleaux, Le Vœu de Louis XIII, était le plus
important que M. Ingres eût encore composé;
et c'est un de ses meilleurs ouvrages. L'effet fut
grand et répondit à l'attente de l'artiste. La cri-
tique ne désarma pas; elle accusa le peintre de
réminiscence; c'était couvrir sa retraite : cinq ans
plus tôt on eût crié au plagiat. La Madone de
Saint-Sixte de Raphaël avait, disait-on, fourni
à l'artiste le motif de sa composition. L'obser-
vation était fondée ; mais les reproches auxquels
elle servait de prétexte n'étaient pas mérités.
Se pénétrer du grand sentiment do Raphaël,
rappeler un de ses chefs-d'œuvre en restant ori-
ginal, n'est pas un mérite si commun. Imiter
ainsi, c'est créer. On loua généralement l'ordon-
nance à la fois simple et majestueuse de la com-
position, et l'on accorda même au peintre une
qualité que jusqu'alors on lui avait refusée, le
mérite de l'exécution. Cette composition ouvrit
à M. Ingres les portes de l'Institut. De retour
en France, M* Ingres, dont la foi avait grandi
dans son exil volontaire, fut aussitôt entouré d'a-
deptes fervents. L'époque de l'enseignement,
nous dirions presque de l'apostolat, commençait.
Raphaël était le dieu que révélait le disciple fidèle.
Une gravure de la Madone de Saint-Sixte ou
de la Tranfiguralion servait de texte à sa pré-
dication. H fallait entendre avec quelle verve ar-
dente et convaincue l'apôtre exaltait son dieu, et
lançait l'anathéme contre ceux qui l'avaient ou
méconnu ou renié. C'est vers ce temps -que
M. Ingres peignit son Apothéose d'Homère.
Cette composition, la plus vaste que M. Ingres
ait produite, et ceUe que ses admirateurs procla-
ment son chef-d'œuvre par excellence, le montre
sous une face imprévue. La figure d'Homère,
malgré son extrême décrépitude et son attitude
contrainte, et, en quelque sorte , égyptienne, an-
nonce admirablement cette forte et féconde vieil-
lesse, commencement de l'immortalité. Les deux
877
INGRES
878
figures allégorique* de l'Iliade et de l'Odyssée,
assises sur les degrés du sanctuaire, rappellent
les plus heureuses inspirations de l'art grec con-
tinué par le génie italien ; mais le coloris de leurs
ajustements n'est-il pas d'une Vivacité par trop
primitive?
Vers le même temps, M. Ingres, fatigué de
s'entendre reprocher l'imitation exclusive des
qualités secondaires de Raphaël, conçut le «ta*
bleau de Sain* Symphorien. Cette composition,
où domine le style florentin dans toute sa vigou-
reuse êpreté, rappelle, dans quelques* unes de
ses parties , et principalement dans l'étude si ac-
centuée des membres nus des personnages de la
droite et dans le geste énergique de la mère du
saint, la manière grandiose et violente de Michel-
Ange. La saillie des muscles des bourreaux est
extraordinaire : leur relief, poussé jusqu'à la
dureté, et la singularité des attitudes, accusent
un souvenir distinct de la manière du peintre
de la chapelle Siitine. La figure du saint et par-
ticulièrement l'expression si sublime du regard
appartiennent entièrement à M. Ingres, et suffi-
raient pour constituer l'originalité de l'œuvre. Il
n'y a là ni imitation de Raphaël ni réminiscence
de Michel-Ange. Ce regard exprime une série de
pensées particulières de notre époque, qui,
croyante à sa manière, a remplacé les cruelles
superstitions du quatorzième siècle par une reli-
gion plus consolante et plus sublime. Le tableau
du Martyre de saint Symphorien fut exposé au
salon de 1834. G'est le dernier ouvrage de M. In-
gres qui ait figuré dans nos expositions annuelles.
D'inconvenantes manifestations de la part de»
quelques enfants perdus des écoles dissidentes,
et, il fout le dire , la froideur et la surprise avec
lesquelles la majeure partie du public avait ac-
cueilli son oeuvre de prédilection , déterminèrent
l'artiste à prendre une de ces résolutions ex-
trêmes que dicte l'amour-propre. Grâce au ciel,
M. Ingres ne brisa pas 6es pinceaux ; mais s'il
continua à produire, il se refusa à cette publi-
cité sans réserve des expositions du Louvre. En
1835 M. Ingres se rendit à Rome comme direc-
teur de l'Académie de France, Sa direction fut
su itou t signalée par l'ardeur qu'il mit à rallier
les fidèles et à les discipliner. Cette préoeen-
l>ation un peu exclusive porta même ombrage à
l'Institut, qui crut de son devoir de protester.
M. Ingres laissa dire, endoctrina, catéchisa, et,
chose singulière , ces cinq années de retraite
et d'éloignement , de 1835 à 1840, furent aussi
favorables aux progrès de son école que les dix
années qu'il avait passées autrefois à Rome et à
Florence avaient été profitables à sa renommée.
Il nous reste maintenant à parler de M, Ingres
comme peintre de portraits. C'est moins sa vo-
cation que la nécessité qui l'engagea à cultiver
cette branche si importante de l'art. A l'étran-
ger, les grandes commandes n'arrivaient pas ,
et les petits tableaux se plaçaient difficilement.
Faites des portraits, disaitron à l'artiste dans le
besoin. « Mais cela est bien difficile », répondait*
il , comme ce peintre du dernier siècle dont nous
parle Diderot. Néanmoins , comme il fallait vi-
vre, il luttait contre la difficulté et faisait des
portraits. Ceux qu'il a composés dans sa pre-
mière manière trahissent de singulières velléités
archaïques et manquent parfois de modelé. Ceux
qu'il a produits dans ses dernières années, et,
dans le nombre, les portraits de M. Mole, de
M. Berlin, de Cherubini^ en dernier lieu le por-
trait de M** d'ffauisonvitle, sont exécutes dans
un tout autre système et dénotent une imitation
plus rigoureuse de la nature.
Ici se présente cette importante question ;
« quelle a été l'action de M. Ingres sur l'école
française. Son influence sera-t-elle stérile ou
féconde? » A peine revenu en France, après un
long séjour en Italie, M. Ingres vit de nom-
breux élèves se presser dans son atelier. La
nouveauté de sa manière comparativement à ce
qui se faisait alors, ses prédilections si tranchées,
l'éloquence avec laquelle il exposait ses principes
et combattait ses adversaires, quelque chose d'ab-
solu et de paternel à la fois dans la façon dont
il imposait ses croyances, et par-dessus tout cette
foi exclusive de chef d'école, lui acquirent aussi-
tôt une influence sans bornes sur l'esprit de la
plupart de ses élèves. Son autorité fut d'autant
plus grande, qu'il l'exerçait sympathiquement et
cherchait moins à dominer qu'à convaincre. Nul
homme, en effet, n'est plus exempt que M. Ingres
de cette vulgaire ambition qui fait aimer la domi-
nation pour elle-même. Le pouvoir pour lui
n'est qu'un moyen de répandre ses doctrines.
M. Ingres ne dit pas ; Obéissez-moi; mais :
Croyex-moi. Et on croit en lui, et on lui obrit.
M. Ingres n'a pas seulement des disciples, il a
des fanatiques qui ont poussé jusqu'à leurs con-
séquences les plus extrêmes les doctrines qu'il
professe, et qui ont exagéré sa manière jusqu'à
la rendre méconnaissable. Les uns ont renversé
l'autel du divin Raphaël sous les yeux de son
apêtre; remontant aux premières époques de
l'art, ils ont copié Cimabué et Giotto, et se sont
livrés à toutes sortes de folies archaïques dont
M. Ingres lui-même doit être le premier à sou-
rire. Les autres, péchant par excès de fidélité,
s'en sont tenus à une imitation littérale de la
manière du peintre d'Homère, et ont fait abné-
gation de toute personnalité. Les plus sages , et
dans le nombre MM. Mettez, Lehmann et
Flandrin, ont su, en n'abdiquant pas complète-
ment leur indépendance, dégager des leçons du
maître des conséquences pras fécondes.
L'influence de M. Ingres ne s'est pas seulement
exercée dans l'atelier, et au moyen du professo-
rat ; elle s'est rapidement étendue de proche en
proche, et s'est surtout manifestée par les mo
difications que la plupart des artistes ont appor-
tées à leurs manières. Des élèves de Gros et do
Gérard sont devenus dessinateurs , ont cherche
la ligne précise» le modèle sculptural, et mettant
879
INGRES — ING-TSOUNG
du blanc dans leurs ombres et du gris dans leurs
lumières, ont amorti ce que leur coloris avait de
trop diaphane on de trop ardent. Les maîtres eux-
mêmes, tels que MM. Paul Deiaroche et Schef-
fer, n'ont pas échappé à cette influence; fatale
peut-être à ce dernier, elle a, sans nul doute,
été profitable au peintre de Henri M, à' Eli-
sabeth et de Richelieu, dont elle a évidemment
agrandi la manière. Cette transformation est
surtout sensible dans la vaste composition qui
décore l'hémicycle du palais des Beaux-Arts.
Entre le plafond d'Homère et cette peinture, qui
en est en quelque sorte la magnifique paraphrase,
l'analogie est frappante. L'influence de M. In-
gres s'est également étendue sur les écoles
étrangères. Les Allemands l'ont acceptée avec
cette docilité bienveillante qu'ils montrent à l'é-
gard de toute autorité légitime et non contestée;
les Italiens, avec la passion qu'ils apportent dans
toute chose. La jeune école italienne jure au-
jourd'hui par M. Ingres, comme Bossi, Camuc-
cini et Benvenuti juraient naguère par David.
En dehors des écoles, il existe certain nombre
d'esprits indépendants et aventureux qui tien-
nent avant tout à leur individualité : chacun de
ces esprits cherche à s'ouvrir une route qui lui
soit propre. L'influence de l'illustre chef d'école
sur ces artistes indépendants n'aura pas été si
stérile qu'on se platt à le répéter et qu'eux-mê-
mes le pensent; elle s'exercera négativement,
c'est-à-dire, que, si elle ne multiplie pas les chefs-
d'œuvre, elle empêchera beaucoup de mal. A
la suite de tant de révolutions successives,
quand le trouble était dans les esprits et qu'à
la faveur de la confusion les barbares s'effor-
çaient de pénétrer dans le sanctuaire, il est heu-
reux qu'un homme d'un goût sûr et d'une volonté
énergique se soit résolument décidé à leur tenir
tête. Par les barbares , nous n'entendons pas
désigner ces esprits vigoureux et naturels qui
ont tenté pour le coloris une révolution analogue
à celle que M. Ingres a opérée pour la forme.
MM. Eugène Delacroix et Decamps, par exem-
ple, nous paraissent, chacun dans son genre, des
peintres d'un ordre fort relevé. La barbarie,
pour nons , c'est la banalité facile et féconde ,
l'à-peu-près qui se satisfait à si peu de frais, la
naïveté prétentieuse, le mauvais goût grossier,
l'imitation aveugle etservile, en un mot la mé-
diocrité sous toutes ses formes. Les barbares,
comme on voit, sont bien nombreux , et M. In-
gres aura grandement à faire pour les mettre à la
raison. Nous sommes certain du moins que la
volonté et le courage ne lui feront pas défaut.
Parvenu à l'âge où tant d'autres se retirent
de la lice par prudence ou par épuisement,
M. Ingres a, en effet, conservé toute la verdeur
de la jeunesse , toute l'énergie de sa volonté ,
toute la puissance de son talent , et ce même
amour de l'art qui , dès sa première enfance , a
été le mobile de toutes ses actions. 11 semble
même qu'à l'exemple de certaines natures cal-
mes et fortes, il ait réservé sa fécondité pour
Farrière-saison. M. Ingres , en effet , dans ces
dernières années s'est plu à multiplier ses œu-
vres en imprimant à chacune d'elles un cachet
de grâce, de force et de variété, toujours frappant
et toujours nouveau.
Nous ne pouvons même.énumérer ici tous ces
ouvrages; nous nous contenterons de citer les
plus éminents, tels que ['Apothéose de Napo-
léon, pour l'hôtel de ville, cette vaste et abs-
traite composition qui relève de l'art antique le
plus élevé; la Jeanne d'Arc; La Vierge à
V Hostie; la Vénus Anadyomène et La Source,
les deux plus charmants ouvrages du maître et
dont le dernier semble un Chant de Moschus ou
de Théocrite; et tout récemment Molière et
Louis XIV, et Jésus au milieu des docteurs,
composition distinguée à laquelle l'artiste n'a
pas mis encore la dernière main. A cette liste
nous pourrions ajouter de nombreux portraits,
parmi lesquels nous distinguerons ceux de
jfme la duchesse de Broglie et de M. Ingres
lui-même. On voit que si la nature favorise
M. Ingres en lui ménageant une de ces vastes et
vigoureuses vieillesses qu'elle accorda autrefois
aux Michel-Ange, aux Titien, l'illustre artiste a
su tirer de cette faveur un glorieux parti pour
garder la place que depuis plus d'un tiers de
siècle il occupe à la tête de l'école française.
de Mercey.
Livrets des Salons. — Documents particuliers.
1N6-TSOCWG, empereur de la Chine, de la
dynastie des Ming , né en 1427, mort en 1465. Il
était fils atné de l'empereur Siouen-tsoung, au-
quel il succéda le premier mois de l'année 1436.
Comme il n'avait que huit ans à la mort de
son père, l'impératrice Tchang-chi, sa grand'-
mère, se fit déclarer régente. Toutefois, l'autorité
passa bientôt entre les mains de l'eunuque Wang-
tching, favori astucieux du jeune empereur, qui,
après avoir encouru la haine de la régente, sut
captiver l'esprit de cette princesse , et devenir
le maître réel , sinon le chef nominal de l'em-
pire. A la mort de l'impératrice ( 1443 ) , le jeune
empereur se mit à la tête du gouvernement. Quant
à l'eunuque Wang-tching, il ne perdit rien à ce
changement; sa puissance, de nouveau reconnue,
se maintint en dépit des murmures des grands
et du peuple. Peu d'années après, ce même
eunuque attira de grands malheurs à l'empereur
Ing-tsoung et à ses sujets. Yésien (voy. ce nom),
chef des Tartares , à la tête de troupes for-
midables, parcourait alors les frontières de la
Chine qu'il menaçaitde franchir. L'empereur en fut
informé ; mais l'eunuque Wang-tching n'ayant
point jugé convenable de tenir compte de ces
avis, Yésien put continuer tranquillement ses
préparatifs menaçants contre la Chine. A l'exemple
de son père, Yésien avait envoyé (1450) de-
mander en mariage une des filles de l'empereur;
Wang-tching fit entendre que cette demande
était accordée. En conséquence, le chef des Tar-
881
ING-TSOUNG — INGULF
882
ta res dépêcha une nombreuse ambassade pour of-
frir à la cour ses présents de noces et demander
la fille de l'empereur. Wang-tching reçut les pré-
sents comme un tribut; et, comme l'empereur
ignorait la promesse qu'il avait faite en son nom,
il ne craignit point de renier sa parole et de ren-
voyer dédaigneusement les Tartares sans leur re-
mettre la princesse. Yésien, irrité à cette nouvelle,
jura d'en tirer vengeance, et, dès la septième
lune de la même année ( 1450 ), il fit invasion
sur le territoire chinois, et parut se diriger sur
Péking. Wang-tching engagea l'empereur Ing-
tsoung à se mettre à la tête de l'armée destinée
à arrêter la marche envahissante des Tartares.
Cette armée, composée d'environ cinq cent mille
hommes, fut bientôt décimée par la faim et les
maladies, contre lesquelles cet eunuque ignorant
n'avait su prendre aucune précaution. Ce misé-
rable favori, jaloux de diriger par lui-même cette
difficile expédition, et sourd aux représentations
des généraux chinois les plus expérimentés , fit
camper les troupes impérialesdans une si fâcheuse
position, qu'elles furent investies par les Tartares,
et perdirent tout espoir de se défendre. Attaqués
brusquement par les forces de Yésien , les Chi-
nois perdirent cent mille hommes , deux géné-
raux , trois ministres et une foule d'autres man-
darins de tous les grades. Ing-tsoung lui-même
fut fait prisonnier et conduit dans l'intérieur de
la Tartarie. L'impératrice mère et l'impératrice
régnante envoyèrent tous leurs bijoux pour payer
sa rançon : ces présents furent acceptés ; mais
le chef des Tartares, les jugeant d'une valeur
insuffisante pour la rançon d'un aussi illustre
prisonnier, déclara qu'il ne serait point rendu
à ce prix. Tchu-kien-tchin, fils de l'empereur
captif, fut déclaré prince héréditaire; mais,
comme il n'avait alors que deux ans, Tching-
wang , frère puîné de Ing-tsoung fut chargé de
gouverner par intérim. Le neuvième mois de l'an-
née 1450, il fut proclamé empereur, sous le nom
de King-ti, bien qu'alors Yésien offrit de rendre
son prisonnier moyennant une nouvelle rançon.
King-ti conserva le trône jusqu'en 1457, époque
à laquelle il fut frappé d'une maladie mortelle
qui devait l'emporter deux ans plus tard ( 1459).
Ing-tsoung reprit les rênes du gouverne-
ment ( 1458), et donna aux années de son règne
l'épi thète de tïen-chun. Il récompensa tout d'a-
bord ceux qui avaient travaillé à son rétablisse-
ment, et fit charger de chaînes et emprisonner
ceux qui lui avaient été hostiles. Plusieurs d'entre
ces derniers perdirent la vie. Ing-tsoung mourut
à l'âge de trente-huit ans et trois mois , laissant
le trône à son fils Tchu-kien-chin, qui régna sous
le nom de Hien-tsoung (1). L. Léon de Rosny.
Sources originales : Ming-sse : Annales des Historiens
de la Dynastie des Ming ( dans la grande Collection
des Historiens de la Chine). — Histoire du premier
(l) Ce prince avait déjà pris en main les affaires , à
caunedela maladie dcson père. Cf. Ming-sse ( Collect. des
Hist. de ta Chine), Kiouen XIf î 9 7, v°.
Règne de Ing-tsoung (Tsien-kl), llvr. X. — Histoire de
la Restauration de Ing-tsoung ( Heou-ki), lirr. XII. ( \x
livre XI e renferme l'Histoire de la Chine durant la
captivité de Ing-tsoung, sous le gouvernement de
King-ti }. — Li-tal ti-wang nien-piao, ( Chronolo-
gie des Empereurs de la Chine ), dynast. des Ming,
fol. 8, v* et sq. — Toung - kien - kang-mou (Miroir
de l'Histoire de la Chine ). — Cf. Mailla, Hist. genér. de
la Chine, vol. X).
*WGmOMER (Inguiomerus), prince ger-
main , frère de Sigiraer et oncle d'Arminius, vi-
vait au commencement de l'ère chrétienne. Il
avait été longtemps attaché aux Romains; mais,
après la révolte victorieuse de son neveu , il prit
parti contre eux, et fut un des principaux chefs
des Chérusques révoltés. Lorsque Germanicus,
en l'an 16 après J.-C, pénétra jusque dans la
plaine d'Idastavisus, entre le Weser ( Visurgis )
et les montagnes voisines , Àrminius voulait at-
tendre la sortie des Romains hors de leur camp
et les attaquer dans leur marche au milieu des
marais et des bois ; Inguiomer, au contraire, fut
d'avis d'assaillir les Romains dans leur camp. Ce
conseil téméraire coûta cher aux Chérusques, qui
furent complètement défaits. Inguiomer échappa
avec peine au carnage. L'année suivante, jaloux
de la puissance d'Arminius , il abandonna la con-
fédération chérusque, et passa avec tous ses clients
du côté de Marobodus , roi des Suèves. M arobo-
dus et son nouvel allié furent vaincus par Ar-
minius. Y.
Tacite, Annales, I, 60; H, 17, 21, *S, 46.
ingulf ou ingclphus, chroniqueur an-
glais , né vers 1030, mort en 1109. Il obtint la
faveur de Guillaume le Conquérant, qui le choisit
pour scribe ou secrétaire. Il visita ensuite Jéru-
salem, devint moine, puis prieur de Fontenelle,
sous l'abbé Gerbert, et fut rappelé dans son pays
natal par le roi Guillaume, qui le nomma abbé
de Croyland ou Crowland, dans le comté de Lin-
coln, à la place d'Ulfketel, privé de sa dignité par
les Normands en 1075. Ingulf mourut après avoir
gouverné cet ancien et célèbre monastère pendant
près de trente-cinq ans, à une époquede troubles.
Ces faits sont empruntés à Orderic Vital , qui
connaissait bien l'histoire de l'abbaye de Croy-
land, et qui parait y avoir résidé trois ans après
la mort d' Ingulf. On peut donc les regarder
comme certains ; mais il n'en est pas de même
d'un récit bien plus détaillé , qui se trouve dans
Y-Histoire du Monastère de Croyland, publiée
sous le nom d'Ingulf. L'auteur raconte que ses
parents étaient des bourgeois de Londres, qui
l'envoyèrent à l'école de Westminster et de là à
l'université d'Oxford. « Quand j'eus, dit- il, plus
profité dans Aristote que beaucoup d'enfants de
mon âge, j'étudiai aussi profondément le premier
et le second livre de la Rhétorique de Tuilius. »
A mesure qu'il grandit , Ingulf devint honteux
de l'humble condition de ses parents, et les aban-
donna pour fréquenter la cour, où son goût du
luxe et de la pompe s'accrut chaque jour. Il se
trouvait à la cour lorsque le duc Guillaume de
Normandie vint visiter le roi d'Angleterre, eii 1051.
8ftS
INGULF — INGUIMBERT
884
Le duc emmena Ingulf en qualité de scribe , et
lai accorda bientôt une confiance qui excita la
jalousie des autres courtisans. En 1034, Ingulf se
joignit à une troupe de sept mille pèlerins qui se
rendaient en Terre Sainte. En passant à Cofts-
tantinople il salua V empereur Alexis (Alexis ne
monta sur le trône qu'en 1081 ) ; et, après avoir
été attaqué et pillé en Lycie, il arriva à Jérusalem,
où il fut recueilli par le patriarche Sophronius.
De retour en Normandie, il devint moine de Fon-
tanelle. Ce récit fait partie, comme nous l'avons
dit, d'une Histoire du Monastère de Croyland.
Henry Wharton, Hicks et d'autres critiques
avaient déjà émis des doutes sur l'authenticité
de oc document, lorsque sir Francis Palgrave dé-
montra que la prétendue Histoire de Croyland
était une aorte de fiction historique, an histo-
rical novéty composée par quelque moine au
troisième ou au quatorzième siècle. On y trouve
beaucoup de faits intéressants et probablement
vrais , mais elle contient aussi un grand nombre
de chartes évidemment fabriquées , d'erreurs et
d'anachronisme*. La vie dlngulf est une amplifi-
cation malheureuse du récit d'Orderic Vital , et
les détails de son éducation se rapportent au trei-
zième et au quatorzième siècle beaucoup plus
qu'au onzième. Nous avons déjà signalé l'ana-
chronjame relatif à l'empereur Alexis : Ingulf ne
l'eût point commis; mais un compilateur, voyant
les noms de l'empereur Alexis dans tous les ré-
cits de la première croisade, a imaginé de faire
intervenir ce prince dans le pèlerinage dlngulf.
Enfin ni Orderic Vital, qui avait visité Croyland,
et qui recherchait avec soin les documents his-
toriques, ni Guillaume de Croyland, qui, dans sa
Vie du comte Waltheof, mentionne plusieurs
fois Ingulf, ne parlent de cette histoire de Croy-
land. il parait donc prouvé qu'elle fut rédigée
longtemps après le onzième siècle ( au treizième ou
au quatorzième), bien qu'elle contienne peut-être
des passages écrits par Ingulf .lui-môme. Il y est
question d'une Vie de saint Guthlac par Ingulf,
laquelle n'est mentionnée nulle part ailleurs, et
dont on ne connaît aucun manuscrit. VHistoria
Monasterii Croylandensis fut publiée pour la
première fois, mais incomplètement, dans les Re~
rum Anglioarum Scriptorespost Bedam pra*
cipui désir Henri Savile, Londres, 1596, in-fol.,
Francfort, 1601, in-fol., p. 850-916; elle fut pu-
bliée entièrement et avec la continuation de Pierre
de Bkris dans le Rerum Anglicarum Scripto-
rum veterum Tomus prknus, de Gale , Oxford,
1384, in-fol., p. 1-107. Une traduction anglaise
de V Histoire attribuée à Ingulf et de la conti-
nuation de Pierre de Blois par T.-H. Riley forme
un volume de VAntiquarian IÀbrary de Bonn.
Z.
Orderic Vtttl , BOtoria Itettt., i. IV, p. 187-s»», de
i'édlt. Le Prévost - Guillaume de Croyland, Fit a et
Passio tPaldêvi comtois ; dans les Chroniques Jnglo-
Normandes, vol. ri, p. 101, 118, 4M. — H. Wbatton,
Origines Sritannicœ. - Francis Palgrave, dans le Quar-
Lerly Jievicw, juin 1826, n° 67, u° stf. — Lappenberg,
Gesehickts von EnjUrnd, t r», p. Ltttl, LT1V. - Bn~
QUskCyelojméUUBiôçraphth
îNGUlMBERt (Le P. Joseph d' ), connu aussi
sous le nom de doin MalacMe, prélat français,
né à Carpentras, le 2e août 1683, mort dans
cette ville, le 6 septembre 175?» Âpres avoir ter-
miné ses humanités au collège des jésuites de
Carpentras, il prit en 1698 l'habit de dominicain,
passa à Rome» et devint professeur de théologie
à Pise. Son noviciat terminé, il fut envoyé par
ses supérieurs à Aix en Provence. Bientôt , en-
traîné par son goût vers la vie solitaire, il em-
brassa la réforme de ta Trappe, introduite dans
l'abbaye de Notre-Dame di buon Sollazzo, située
à quelques lieues de Florence. Il prit en entrant
dans cette maison le nom de dom Matachie, qu'A
a continué à porter depuis. Malgré la règle, il
fut autorisé à s'occuper de travaux de cabinet ,
et il v composa quelques ouvrages ascétiques qui
l'obligèrent d'aller quelquefois à Florence, sur-
tout pour y consulter les dépôts littéraires et
les savants. L'évéque de Pistoie l'établit pendant
quelque temps supérieur de son séminaire. Plus
tord , le cardinal-camerlingue Annibal Albani ,
neveu de Clément XI, ayant demandé au grand-
duc des religieux de 1 abbaye di buon Sollazzo,
pour introduire la réforme dans celte de Caza-
mari , Inguimbert fut choisi pour être le chef
de cette pieuse colonie. Le pape t'appela deux
fois auprès de sa personne pour prendre des con-
seils sur les affaires qui agitaient alors l'Église
de France. Après la mort de Clément XI (1721),
il fut chargé par Albani d'écrire la vie de ce
pontife, et, pour cet objet, reçut la permission
de se fixer à Rome , en Conservant le titre et
la pension de théologien que lui faisait le grand-
duc. Mais, au bout de six ans, la mésintelligence
qui se mit entre le cardinal et lui l'empêcha de
terminer la tâche qu'il avait entreprise. Albani
t'accusait d'avoir communiqué à la cour de
France et au P. Quesnel des pièces relatives à
la bulle Vnigenitus ; il lui fit donner l'ordre de
retourner sur-le-champ à son monastère. Toute-
fois, Inguimbert trouva de puissants protecteurs
auprès de Benoit XQl ; la princesse de Piombino
le fit placer chez le cardinal Corsini, qui l'admit
dans son palais et le nomma son bibliothécaire
(1727). Il dressa le catalogue de sa riche col-
lection de livres, qu'il contribua à rendre pu-
blique à Rome. Ce prélat, élevé à la papauté en
1730, sous le nom de Clément XII, lui accorda
les plus amples privilèges ; il le fit consulteur
du saint-office et prélat domestique, lui donna
plusieurs bénéfices et l'archevêché titulaire de
Théodosie. Enfin, dom Malachie devint, vers
la fin de ses jours , évêque de Carpentras, sa
ville natale. C'est lut qui fit construire l'hôpital
de Carpentras. Ayant acheté, au prix de 40,000
livres, la précieuse bibliothèque du président-de
Mazaugues, il en dota sa ville natale, en l'aug-
mentant de 4,000 volumes qu'il avait rapportés
de Rome, et il consacra les revenus d'un capi-
885 INGUIMBERT
tal de 60 t ooo fr. à l'entretien de cette biblio-
thèque(t). Ses principaux ouvrages sont : mcolai
Baccettii, Florentini,ex ordine Cisterciensi,
abbatis SepUmianx Historié libri VIU, avec
préface, note* et observations j Rome, 1724,
in-8* i ~ Vita d% D. Armando-Giovanni le
Bouthilier di Rance , abbate regolare e rç~
formatore del monastero délia Trappa 9 etc. ;
Rome, 17*6, 2 vol. in-4» : la bibliothèque de
Garpentras possède un manuscrit non autographe
de cet ouvrage; — la Teologia del Chiostro,
overo la santUà e la obligations délia vita
monastiWt etc.; Rome, 1731, 3 vol, in-folio ; —
Trattato teologico delV Autorita ed Jn/ailli-
bila del Papi, etc.; Rome, 1731» in-fol., avec
le portrait du pape Clément XJi, La bibliothèque
Corsini , à Rome , possède plusieurs manuscrits
d'inguimbert, entre autres la Vie de Clément XI
Gitïot de Fèrb.
Olivier vlUlto, Xotice Histor. sur la Fie de MalacMe
d'inguimbert; Carpentras, 181», in-V», avec le portrait
de ce prélat. — Annuaire de Faucluse, ISS*. — Mil-
lin, Voyage dans te Midi de la France, — BarJaTol,
Dictionnaire Mstor- de Faueluse,
imGO(Jean Collet, plus connu sous le nom
d'), graveur anglais, d'origine espagnole, né
vers 1720, mort à Londres en 1780. On n'a pas
de détails sur sa vie, mais on connaît de lui deux
gravures très*remarquables dans le genre d'Ho-
garth et de Cailot, savoir : Antiquarian Smsl-
ling to the chamberpot of gueen Boadicea ;
— A Monkey pointing to a very dark Gicture
of Moses stricking the rock. On s'étonne qu'un
artiste capable de deux ouvrages aussi distin-
gués n'en ait pas fait un plus grand nombre.
z.
Strutt, Biographical Dictionary of Ençraven,
INNB8 ou innés (Louis), historien écossais,
vivait dans le dix-septième siècle. Issu d'une
noble famille d'Ecosse, il fut élevé en France,
entra dans les ordres, et devint principal du
collège des Écossais. Jacques II, roi d'Angleterre,
se réfugia en France après la révolution de 1688 ;
il choisit Innés pour secrétaire, et le nomma
aumônier de sa femme , la reine Marie.. Barbier
attribue à Innés les Mémoires de Jacques II
qui furent publiés par le docteur Clarke, Lon-
dres, 1816,2 vol. in-4° ; il donna sur ce curieux ou-
vrage les renseignements suivants ; « Le cheva-
lier de Saint-Georges, fils de Jacques II, l'a revu
et corrigé. Toutes les phrases que Ton y trouve
en lettres italiques sont de son écriture. Cet
ouvrage, formant quatre volumes, a été soigeuse-
ment conservé par tous les princes de la famille
des Stuarts, jusqu'à ce que la mort du dernier
d'entre eux le fit tomber dans les mains de sa
femme, la comtesse d'Albany. Celle-ci en mou-
rant le légua à l'abbé Waters, procureur général
(1) Une délibération du eonseil municipal, en 1833, a
donné le non d'inguimbert a une nouvelle place de la
ville. Son portrait est placé dans une des salles de l'hô-
pital qu'il a fondé, et une copie orne la salle du con-
seil de l'hôtel de ville.
— INNOCENT
886
des bénédictins anglais à Rome , lequel le céda
au prince régent d'Angleterre (depuis Georges IV),
pour une pension. Le manuscrit fut remis au
docteur Clarke, qui le fit imprimer après un tra-
vail de plusieurs années. » — Ces Mémoires sont
précieux parce qu'ils sont extraits des papiers
de Jacques II , collection fort intéressante que
oe prince avait déposée au collège des Écossais,
et qui fut détruite pendant la révolution française ;
ils ont été traduits en français par Cohen; Paris,
4 vol, in-$°. Z,
Barbier, Examen critique des Dictionnaires histori-
ques.
1NNBS ou innés (Thomas), historien écos-
sais, frère du précédent, né en 1662, mort le
9 février 1744. Il fil: ses études au collège
de Navarre, embrassa l'état ecclésiastique, et
remplaça son frère dans les fonctions de prin-
cipal du collège des Écossais. Malgré quelques
persécutions que lui attirèrent ses opinions jan-
sénistes , il resta jusqu'à sa mort à la tète de
cet établissement. On a de lui ! A oritical Essay
on the andent Inhabitant» of the northern
parts of Britain; Londres, 1729 , 2 vol.in-8° ,
ouvrage dans lequel il réfute les assertions de
la Chronique de Fordun relatives à l'histoire
ancienne de l'Ecosse. Z.
Barbier, Examen critique des Dictionnaires historié
ques. ~ Journal des Savants, année m*, ~ Rose, Gen
Biographical Dictionary.
innocent 1 er (Saint), quarante-deuxième
pape, successeur d'Anastase I* r , né à Albano, près
de Rome, élu le 27 avril 402, mort le 12 mars
417 (le 28 juillet, suivant Baronius ). Saint Jean-
Chrysostoroe venait d'être chassé de Constan-
tinople ; son zèle contre l'arianisme , ses atta-
ques contre l'impératrice Eudoxie l'avaient fait
exiler en Bifhynie, Innocent I er prit hautement
sa défense; il voulut d'ahord renvoyer l'examen
de cette affaire à un concile où seraient réunis les
évéques d'Orient et d'Occident ; il chercha ensuite
à négocier avec l'empereur, mais ses députés
furent maltraités et durent regagner l'Italie sans
avoir rien obtenu. Saint Jean - Chrysostome
mourut sur ces entrefaites ; sa mort ne termina
pas cette lutte entre les églises d'Orient et (^Oc-
cident ; Innocent résolut de n'avoir avec Cons-
tantinople aucun rapport tant que la mémoire
du saint n'aurait pas été réhabilitée. Mais l'Oc-
cident lui-même était loin d'être tranquille : en
Afrique l'Église était divisée par la secte des
donatistes : le concile de Carthage ( 23 août 405)
les condamne; à Rome le savant Vigilance se
déclare énergiqUement contre les abus introduits
dans la religion ; il blâme le célibat ecclésiastique,
le culte des reliques et la vie monastique.
Mais une terrible nouvelle vient étouffer cette
voix : Alaric, à la tête des Goths, s'avançait sur
Rome. Les chrétiens effrayés courent dans les
temples implorer la protection du ciel, et In-
nocent accorde aux païens l'autorisation d'offrir
des sacrifices à leurs dieux. Prières et sacrifices
furent inutiles; il fallut négocier avec Alaric, et
887
INNOCENT
le pape, pour payer la rançon de Rome, ordonna
de dépouiller les temples de ees idoles qui s'é-
taient montrées sourdes anx prières, et de fondre
toutes les statues d'or et d'argent. Le roi des
Goths consent donc à lever le siège; il gagne
Rimini pour être plus à même de régler avec
l'empereur les conditions de la paix ; mais ils ne
parviennent point à s'entendre. Innocent se rend
lui-même à Ravenne, auprès d'Honorius. Alaric
revient sur Rome, s'en empare ( 24 août 410),
et la livre au pillage; l'année suivante cette ville
est pillée une seconde fois par Astolffe, beau-frère
d'Alaric. Quand l'ennemi a disparu, Innocent
revient; il trouve les chrétiens désolés et réduits
à la plus affreuse misère ; il s'efforce de calmer
leurs maux. Son zèle le fit chérir des Romains,
et rapprocha du christianisme beaucoup d'ido-
lâtres. Les dernières années de son pontificat s'é-
coulèrent sans trouble, et ne furent marquées que
par la condamnation du pélagianisme, qui niait
la doctrine du péché originel, la corruption de
la nature humaine et la nécessité de la grâce.
Condamné à Rome par Innocent, Pelage passe
en Palestine, où il justifie sa doctrine devant le
concile de Diospolis (415 ), qui l'absout.; il est
de nouveau anathématisé par le concile de
Carthage ( 416) et par celui de Milène ( 417 ) au-
quel Innocent, consulté par saint Augustin, en-
voie trois lettres dirigées contre le pélagianisme.
Innocent se montra toujours fort jaloux de la
grandeur de l'Église et fort attaché à ses droits;
il écrivait facilement, mais son style est loin
d'être un modèle d'élégance. Les Conciles de
Labbe, t. II, p. 1245 à 1308, contiennent trente
lettres de ce pape. Gennadio , De Scriptoribus
Ecclesiasticis, chap. III, lui attribue : Decretum
occidentalium et orient aliumeccles us adver-
sus pelagianos datum, qui fut publié par
Zosime I er , successeur d'Innocent.
Alfred Franklin.
Zosime, Histoire Romaine, livre V, trad. da président
Cousin, In-*», p. 918. - Brays , Histoire des Papes, 1735,
6 v. in-4» ; t. I e ', p. 160. — Labbe et Cossart, Sacrosancta
Concilia, 1671» 15 v. in -fol ; t. II, p. 12*1 à 1588. — Ba-
ronius, Annales Ecclesiasticœ , 17S«, 9 v. in-fol.; t. VI,
p. 401 à 681: VII, l à 95. - Fleury, Histoire Ecclésiastique,
1787, 87 v. in-*°; llv. V, en. u. — Voulus , Histor. Pe-
lag., passlm. — Sozomene, Histoire Ecclésiast., trad.
Cousin, I. vin, en. 36. — H. de Norls ( Norlslus ), Histoire
du Pélagianisme. - Alletz, Hist. des Papes , 1778, s t.
in-is ; t. I er , p. 96. - Anastase le Bibliothécaire, Vite
Roman. Pontificunij Rome, 1718, k y. in-fol.; t. I« r , p. î78.
- Ciaconlus, F.itœ et ResgestssPonti/tcum Romanorum,
Rome, 1718, k v. In-fol. ; t: I er , p. 68.
innocent il (Grégoire), cent soixante-
dixième pape , successeur d'Honorius H, né à
Rome, élu le 14 février 1130, mort le 13
septembre 1143. Pour prévenir les désordres
qui accompagnaient les élections , tous les car-
dinaux s'étaient engagés à s'assembler dans
l'église Saint -Marc , pour nommer un nouveau
pape, dès que la mort d'Honorius serait connue.
Honorius meurt ; les cardinaux qui l'approchaient
de plus près cachent cette nouvelle, se réunis-
sent à Saint-Jean-de-Latran, et élisent Grégoire
qui prend le nom d'Innocent II. Le soir même,
les autres oardinaux se rendent, suivant leur
convention, à Saint-Marc, et nomment Pierre de
Léon, qui Ait appelé Anaclet. Grégoire avait été
moine à Saint-Jean-de-Latran, puis abbé du
monastère de Saint- Nicolas ; Urbain II l'avait fait
cardinal et Calixte II l'avait envoyé comme
légat en France (1124) avec Pierre de Léon.
Celui-ci était le petit -fils d'un juif converti
par Léon IX, qui lui avait donné son nom; il
avait étudié à Paris ; Pascal II l'avait rappelé à
Rome et nommé cardinal. Grégoire jouissait de
l'estime générale ; il était affable, doux, éloquent,
et dix-sept cardinaux avaient concouru à son
élection. Pierre avait , au contraire , mené, pen-
dant son séjour en France, une vie scandaleuse;
suivant Arnoul de Lisieux (t. II, p. 336), il eut
des enfants de sa propre soeur. Mais il possédait
d'immenses richesses, et gagna le peuple romain
par ses libéralités. Innocent et les cardinaux de
son parti durent se réfugier dans les maisons
fortifiées des Frangipani,et bientôt après quitter
Rome. Les négociations commencèrent et n'a-
boutirent à rien. Anaclet écrit de tous côtés
pour soutenir ses droits ; sa lettre à Lothaire,
roi des Romains, est contresignée par vingt-sept
cardinaux ; celle qu'il adresse au roi de France
( Louis VI ) est portée par le légat Otton , qui
a ordre de respecter tous les principes de l'Église
gallicane. L'Orient reste indécis entre les deux
papes; mais l'Italie entière reconnaît Anaclet.
Innocent, de son côté, avait traversé Pise et la
Toscane, la Provence et l'Auvergne , et s'était
réfugié chez les moines de Cluny. Pendant ce
voyage, Louis le Gros avait réuni un concile à
Étampes, et saint Bernard, choisi comme
arbitre, s'était déclaré en faveur d'Innocent. Le
roi vint donc jusqu'à Saint-Benoît-sur-Loire au-
devant du pape, se prosterna à ses pieds, et lui
offrit ses services pour lui et pour l'Église. Pen-
dant que saint Bernard en Angleterre et Gauthier
de Ravenne en Allemagne font reconnaître In-
nocent , celui-ci parcourt la France, visitant les
monastères. Le 19 avril 1131, il était à Saint-
Denis, où il célébra la fête de Pâques avec la
plus grande magnificence. L'abbé Suger vint au-
devant de lui; le pape, monté sur un cheval
blanc richement caparaçonné, était coiffé d'une
tiare brodée et ornée d'un cercle d'or ; les barons
et les vassaux de l'abbaye marchaient autour
du pontife ; les nobles précédaient le cortège,
et écartaient le peuple en lui jetant de l'argent
Innocent passa en France toute l'année 1 131 ;
les monastères qu'il visitait subvenaient à ses
besoins , de gré ou de force d'ailleurs. Brors
(t. II, p. 636) l'accuse d'avoir ravagé les plus
riches églises de France ; car le pape ne pouvait
rien tirer alors des revenus du saint-siége. Le
18 octobre, il convoque à Reims un concile, où il
fait approuver son élection, et excommunie
Anaclet ; il célèbre à Cluny la fête de la Purifi-
cation, et y reçoit les lettres d'obédience de
889
INNOCENT
890
Guillaume, patriarche de Jérusalem. Il reprend
enfin, accompagné de saint Bernard, la route
d'Italie, traverse la Lombardie, tient un concile
à Plaisance , et réconcilie les Pisans et les Génois
(bulle du 19 mars 1133, dans Ughelli , t. IV,
p. 1 187 ). Le roi Lothaire vient le rejoindre à la
iôte d'une armée; ils marchent sur Rome et y
entrent le 1 er mai 1133. Lothaire reçoit des mains
d'Innocent la couronne impériale à Saint- Jean-
de-Latran ( 4 juin 1133 ). Anaclet était maître
de l'église Saint-Pierre, du château Saint- Ange
et de quelques forteresses d'où il maltraitait la
petite armée de son rival. Lothaire dut retourner
en Allemagne. Innocent, ne se croyant plus en
sûreté dans Rome, se retira à pise ; là il as-
sembla un concile, où Pierre de Léon fut encore
excommunié. Lothaire repassa les Alpes avec
une nombreuse armée , et saint Bernard entre-
prit un nouveau voyage en Italie. Lothaire prit
plusieurs villes sur Roger, protecteur de l'anti-
pape , pendant que saint Bernard cherchait à ga-
gner des défenseurs à la cause d'Innocent. Ana-
clet meurt sur ces entrefaites (7 janvier 1138);
les cardinaux de son parti élisent , au mois de
mars suivant, Grégoire, prêtre-cardinal, qu'ils
nomment Victor; leur intention était d'ailleurs
moins de perpétuer le schisme que de gagner
du temps pour se réconcilier plus avantageuse-
ment avec Innocent. Aussi, deux mois après
son élection, Victor alta se jeter aux pieds du pape,
et le schisme fut terminé le 29 mai 1138. In-
nocent reprit toute l'autorité dans Rome; il
rétablit le culte , fit faire des processions solen-
nelles, repeupla les colonies désertes et rappela
les exilés. Enfin le 8 avril 1 139 s'ouvrit le concile
général de Latran (deuxième deLatran, dixième
oecuménique) ; plus de mille évéques s'y trou-*
Taient. Les ordinations faites par Pierre de Léon et
les autres schismatiques furent déclarées nulles ;
puislnnocent appela chacun des évêques ordonnés
pendant le schisme, et, après leur avoir reproché
leur conduite avec indignation, il leur arracha
la crosse, l'anneau et le paJlium. Saint Bernard
blâma cet excès de rigueur, surtout envers
Pierre de Pise, à qui le pape avait déjà pardonné.
Roger, roi de Sicile, apprend que le concile Ta
excommunié ; il arrive à Saleme le 7 mai, et
soumet toute la Pouille. Innocent veut résister :
il est fait prisonnier, et doit, en échange de la
liberté, accorder la Sicile à Roger, confirmant
ainsi le titre donné par Anaclet. Saint Bernard
avait regagné la France; jaloux des succès d'A-
beilard , il saisit avec empressement l'occasion
qui se présenta de l'accuser d'hérésie. Au con-
cile de Sens (2 juin 1140), en présence du roi de
France et d'un grand nombre de prélats , il dé-
nonce comme hérétiques treize propositions
extraites des ouvrages d'Abeilard. Celui-ci en
appelle au saint-siége, qui, circonvenu par saint
Bernard, condamne l'accusé sans l'entendre.
L'année suivante ( 1 141 ), Albéric, archevêque de
Bourges, meurt ; Innocent le remplace par Pierre
de La Châtre. Louis Je Jeune, irrité de cette no-
mination, jure que, lui vivant, Pierre ne sera ja-
mais archevêque de Bourges. Pierre va à Rome et
se fait sacrer par le pape, qui met toute la Fiance
en interdit. Thibaud , comte de Champagne ,
prend parti pour le nouvel évêque; le roi porte la
guerre en Champagne et brûle Vitry-le-Français.
Saint Bernard se chargea de négocier la récon-
ciliation entre le roi et le pape ; le saint avait
perdu déjà beaucoup de son influence au-
près d'Innocent, qui ne pouvait lui pardonner
de se mêler à toutes les affaires de l'Église et
de parler trop souvent en maître. L'Italie n'était
pas tranquille : Innocent avait depuis longtemps
excommunié les Tiburtinset tenait leur ville as-
siégée ; il les contraignit enfin ( 1 143 ) à se rendre,
et leur pardonna. (Mais les Romains, souvent
battus par eux, exigèrent que le pape fit abattre
leurs muraiHes. innocent refuse ; les Romains
s'assemblent au Capitole, rétablissent le sénat
et commencent la guerre. Le pape ne put sup-
porter cette dernière épreuve, il tomba malade
et mourut après un pontificat de treize ans et
sept mois. On trouve quarante-trois lettres d'In-
nocent dans les Conciles de Labbe, t. X, p. 946
à 971 ; Ughelli en a reproduit une, dans son Ita-
lia Sacra, t. IV, p. 456. Innocent II eut Céles-
tin II pour successeur. Alfred Franklin.
Labbe, t. X, p. 944 à 1084. — Bruys, t. il, p. 627. -
Baronius.t. XVIII, p. 417 à 614. - Fleury, liv. XIV,
ch. 68. — AUetz, t. !•', p. 48S. — Ughelli, Italia Sacra;
Venise, 17n-M,10v. in-fol.; t. IV, p. 4M- Velly, Villaret
et Garnier, Histoire de France, 1770 , 15 v. in -4» ; t. II ,
p. 18. — PlaUna, lstoria délie Vite de i S uni mi Ponteflci ,
Venise, 1613, in-4», p. 146. — De Potier, Esprit de
V Eglise; Paris, 1811. 8 v. in-8»; t. VI, p. 114. — Ar-
taud de Montor, Histoire des Souv. Pontifes romains;
1847-49, 8 y. to-8° ; t. II, p. 164. — A. du Chesne, Hist.
des Papes , 1683 , l v. in-fol. ; t II, p. 94. — D. Dclannes.
Hist. du Pontificat d'Innocent II ; 1781, in-li. — Suger,
V ie de Louis le Gros, — De ViUefore, Vie de saint Ber-
nard. — Ciaconius, t. 1 er , p. 971. — Arnulphus Lexiovlen-
sis ( Arnoul de Lisieux ), Tractatus de Schismate orto
pott Honorii il papa decessum ; dans le Spicilëge
d'Acbéry, 1687, io-4»; t. H, p. 336. — Vita Innocenta
papa il ex ms Bern. Guidonis ; Vita ejusdem ex car-
dinall Aragonio , dans Muratorl, Rerum ltalicarum
Scriptores , Milan, 1738, 17 v. in-fol. ; t. 111 , p. 433 et a.
— J. Hartmann, Vita Innocenta II, pont\ficis romani ;
1744, in- 4°.
innocent m, cent soixante-onzième pape,
né à Rome, vers Fan 1160, mort à Pérouse, le
16 juillet 1216. Son père, qui se nommait le comte
Trasmondo, appartenait à l'illustre maison des
Conti ; Claricia, sa mère, était de celle des Scotti.
Il reçut en naissant, sur les fonts baptismaux, le
nom de Lothaire. Dès sa jeunesse, Lothaire fut
voué à l'église. Trois de ses proches parents
étaient cardinaux, et quoique l'Église romaine ait
toujours condamné le népotisme, il n'a jamais été
tout à fait indifférent, dans l'Église romaine, d'être
ou de n'être pas bien parenté : les principes ont
leurs droits , mais la faiblesse humaine a les siens.
Il n'y avait pas, vers la fin du douzième siècle,
une autre école de théologie que celle de Paris. En-
voyé dans cette ville, Lothaire y eut pour maître
Pierre de Corbeil, pour condisciple Robert de
801
INNOCENT
892
Courçon. On le vit ensuite étudier le droit ca-
nonique à l'école de Bologne. Ses études ache-
vées, ii revint à Rome. C'est alors que son onde
maternel, Paulin Scolaro, fut élevé sur le trône
pontifical, sons le nom de Clément ni, le 20 dé*
cembre 1187. Quelques années après, en 1190,
Clément nomma Lothaire cardinal ^diacre, an
titre de Saint-Serge et de Saint-Baccb. Ce fut,
pendant longtemps, le pins jeune des cardinaux.
Si Clément l'avait appelé trop tôt à une aussi
haute dignité , et avait confié de trop graves af-
faires à son active inexpérience, Célestin III,
succédant à Clément m, l'éloigna trop da ses
conseils : Lothaire se sentit offensé par cette
marque de défiance, quitta Rome, se retira dans
une terre de sa famille , à Anagni, et composa
dans cette retraite un traité : De Contemplu
Mundi, sive de miseriis humanx condilionis.
Célestin m mourut le 8 janvier 1198. Le jour
même de sa mort, les cardinaux réunis lui don-
nèrent Lothaire pour successeur. 11 prit alors le
nom d'Innocent III.
Le pontificat d'Innocent III a été la matière
de déclamations contradictoires. Tous les histo-
riens se sont accordés à louer les qualités de
l'homme, l'austérité de ses mœurs , sa vigilance
assidue , sa constante sérénité , la rare fermeté
de son caractère, et son goût passionné pour
la grandeur. Mais on a diversement apprécié
l'usage qu'il a fait de ces brillantes qualités. Il a
été pour les uns l'héroïque vengeur de tous les
droits méconnus; pour les autres, un ambitieux
sans frein, un effronté violateur de tous les
pactes. En d'autres termes, les jugements que
les historiens ont portés sur Innocent III ont
varié selon leurs sentiments favorables ou con-
traires à la papauté. Le temps n'est-il donc pas
enfin venu de juger avec un parfait désintéres-
sement le rôle joué par la papauté durant le
moyen âge ? Nous n'éprouvons, ponr notre part,
aucun embarras à concilier ces deux opinions :
Tune, que les peuples ne doivent aujourd'hui
tolérer en aucune manière l'intervention du pape
dans le règlement de leurs affaires civiles;
l'autre, que les papes furent vraiment au moyen
âge, en présence de tant d'empereurs, de rois,
d'exarques, de princes, de seigneurs, d'usur-
pateurs ou de tyrans barbares, les organes tem-
poraires de l'éternelle justice. Qu'on se soulève
contre des prétentions posthumes, soit! Mais,
d'autre part, qu'on accorde le témoignage d'une
équitable reconnaissance aux. grands papes qui
ont été pour les peuples opprimés de si se-
courantes patrons. Les plus grands ne se sont
pas toujours , il est vrai , montrés assez mo-
destes. L'orgueil est le vice commun des hom-
mes. Mats encore ont-ils eu moins d'orgueil que
d'ambition, et l'ambition est un sentiment qui
n'est jamais sans noblesse. Il y a d'ailleurs beau-
coup à dire pour excuser l'ambition des papes.
Us n'auraient pu sans doute exercer efficacement
leur bienfaisant patronage, si la papauté, telle-
ment faible à son origine, alors pourvue par des
décrets équivoques d'une autorité tellement pré-
caire, n'avait pas avec le temps acquis assez de
force pour faire valoir sa juridiction, et créer au
moins des difficultés à ceux qui prétendaient s'y
soustraire. Condamnons donc librement, même
au moyen âge, les mauvais papes, ceux qui
n'ont été que des turbulents et ont invoqué de
grands principes pour servir de médiocres inté-
rêts; mais ayons de l'indulgence même pour les
faiblesses des ambitieux qui , avec plus d'intelli-
gence et de droiture, ont travaillé de si grand
cœur à l'accroissement de l'autorité qu'ils ont
ensuite vaillamment exercée. Innocent III fut
un de ceux-ci. Qu'il ait eu de l'ambition, cela
n'est pat contestable : n'est-il permis qu'aux
fils des rois d'aspirer a l'éclat d'une grande re-
nommée ? 11 se trompa quelquefois, et ne servit
pas toujours la meilleure cause. Ce sont de re-
grettables erreurs; mais que l'on trouve dans
son temps un prince animé d'intentions plus
loyales que les siennes, plus habile à discerner
le bien du mai et moins souvent abusé par son
intérêt personnel. Il ne reconnut pas de bornes
à l'exercice de son influence, et prétendit donner
son avis sur tontes les affaires agitées dans le
monde chrétien; mais nous sommes à la fin du
douzième siècle : tous les rois chrétiens sont
des rois absolus; on ne peut leur parler de jus-
tice sans invoquer les prescriptions de la justice
divine ; et qni a ee droit, si ce n'est le pape ? Re-
marquons, d'ailleurs, qu'en montant sur le trône
pontifical, il voit, partout où se promènent ses
regards, l'anarchie, la guerre, tous les princes,
tous les peuples armés , les plaines , les villes
dévastées par mille incendies, et qu'il ne va
prétendre à cette universelle influence qu'au
preât dea nations impitoyablement traitées par
leurs maîtres, au profit de la paix.
Il y avait de grands désordres dans l'adminis-
tration temporelle de la ville de Rome et de grands
abus dans la comptabilité fiscale de la cour romaine.
C'est par là que le nouveau pape commence ses
réformes. Avant d'entreprendre la correction des
autres, il faut se corriger soi-même. Cette mé-
thode est à tous les points de vue la meilleure.
Qui s'est montré d'abord sévère pour ses propres
vices, sera mieux écouté faisant ensuite des re-
montrances à son prochain. De Rome la sollici-
tude d'Innocent II î se porte bientôt sur la pro-
vince romaine , de la province romaine sur les
villes italiennes, arrachées en divers temps an
domaine de saint Pierre, et possédées sans titre
par des vassaux de l'Empire , la plupart alle-
mands. Innocent commande à ces étrangers de
quitter le territoire latin , écrase ceux qui refu-
sent, déjoue les ruses de ceux qui diffèrent d'o-
béir, et repousse même hautement les obsé-
quieuses soumissions de ceux qui offrent de l'or,
demandant qu'on veuille bien à ce prix agréer
leurs hommages. La première année de son pon-
tificat n'était pas achevée, qu'Innocent III avait
S93
INNOCENT
mi
recoovré dans les marches Ancône , Fermo, Fano,
Osimo, Sinigaglia, Jesi , Cesena ; dans le duché
de Spolette, Assise, Spolette, Rieti, Foligno,
RucerajTodi; et, en outre, Sabine, Pérouse,
tout ie comté de Bénévent* Enfin, mettant a pro-
fit les embarras où se trouvait Constance, reine
de Sicile, non-seulement il exige d'elle la recon-
naissance de la suzeraineté romaine, mais il ne
lui renouvelle l'investiture qu'après l'avoir con-
trainte à condamner publiquement les usurpa-
tions qu'elle avait faites sur les droits de l'É-
glise. Ainsi fut assurée pour quelque temps la
paix de l'Italie. An centre, au nord, au midi» il
n'y eut plus qu'Ain souverain, représenté par des
préfets plus ou moins télés ou des vassaux plus
ou moins dociles*
La nomenclature des actes d'Innocent lit, la
simple mention des lettres, des diplômes qui
portent son nom occuperait un fort volume.
Pas une question n'a de son temps profondé-
ment agité les esprits qui ne lui ait été sou-
mise, ou qu'il n'ait évoquée. Nous ne pouvons
donc relater ici que les principaux événements
d'une vie si occupée. Quels sont donc ceux qui
nous intéressent davantage ? Ceux-là même que
l'on a le plus souvent discutés , et que Ton dis-
cutera le plus souvent encore.
Voici l'Empire d'Allemagne que se disputent
deux compétiteurs , Othon, comte de Poitou, et
Philippe , duc de Souabe. Si tous les électeurs
avaient fait le même choix, l'Allemagne serait
en paix; mais les suffrages s'étant partagés,
on se prépare à la guerre. Le pape n'a pas été
consulté sur cette question» et il n'a pas mani-
festé de préférence : il importe de le remarquer.
A l'origine de ce grave débat, la personne du
pape est absente ; on ne peut donc l'accuser de
l'avoir provoqué. Mais dès que les adhérents de
l'un et de l'autre candidat se séparent courrou-
cés, s'adressant de mutuelles menaces, dès que
l'on court aux armes, qu'on lève des troupes, et
que le clairon des batailles fait retentir en tous
lieux, ses provocations homicides , Innocent n'a-
t-il pas le droit de se jeter entre les deux partis,
et de proposer une solution pacifique au diffé-
rend qui va tout à l'heure ensanglanter l'Europe
entière? Séparons-nous du temps présent pour
juger sainement le temps passé. Aujourd'hui les
grandes affaires internationales sont portées de-
vant des congrès, qui les décident d'une manière
souveraine. Mais la pratique de ces congrès est
toute récente. Au moyen âge, à défaut de con-
grès, U n'y avait que le glaive ou le pape pour
terminer une controverse entre deux princes
souverains > entre deux rois» Si donc Innocent
intervient entre Othon et Philippe, et, pour épar-
gner à l'Europe les malheurs qu'on redoute, as-
signe tes deux parties devant son tribunal , il
n'exercera qu'un droit reconnu. Mais il n'a pas
besoin d'envoyer cette assignation; il n'a pas
besoin de courir au-devant des armées, et de
prononcer aux oreâles des prétendants la me-
nace des vengeances divines. Othon envoie le
premier des ambassadeurs au pontife romain,
et, pour obtenir une décision qui le favorise, il
prodigue les promesses. Philippe, dit-il, est un
impie ; sa conduite passée témoigne trop qu'il
n'entend respecter aucune des franchises ecclé-
siastiques. Othon proclamé, sacré par le pape,
Rome aura sur le trône impérial le plus fidèle ,
le plus soumis des clients. Quelle est, pendant
ce temps, la conduite de Philippe? Comme s'il
ne reconnaissait pas même à ï'évèque de Home
le droit de consacrer l'empereur des Romains, il
ne lui fait pas savoir que des suffrages plus on
moins nombreux ont décerné la couronne impé-
riale à l'héritier des ducs de Souabe. En ce mo-
ment il n'y a donc pour innocent qu'un élu :
c'est le Comte de Poitou. Cependant, sa prudence
lui conseille d'ajourner un choix qu'il n'est pas
encore obligé de faire. L'Allemagne est évidem-
ment partagée. Se prononcer aussitôt pour tel ou
tel prétendant, c'est peut-être s'attacher au parti
qui, les glaives tirés, se trouvera le moins valide,
et succombera. Mieux vaut attendre, et disposer
encore les esprits à la conciliation. Enfin le duc
Philippe, sentant qu'il ne peut rien sans l'appui
du pape , le sollicite. Ainsi la force des choses
établit Innocent arbitre de l'élection. Dès que
cet arbitrage lui est enfin proposé par les deux
parties, innocent ne l'accepte pas seulement, U est
vrai , comme un devoir ; il va l'exercer encore
comme un des privilèges de la tiare papale. C'est
ce qu'il déclare dans les termes les moins ambi-
gus aux envoyés mêmes de Philippe. Cependant,
cette déclaration faite, il suspend encore l'arrêt
qu'on; lui demande. Les armées s'ébranlent, le
fer et la flamme commencent leurs ravages. In-
nocent négocie toujours un accommodement.
N'est-ce pas déjà trop temporiser? Ce n'est pas,
du moins , usurper avec un impétueuse violence
une autorité contestable et contestée. Innocent
ne se prononça pour Othon qu'en l'année 1201,
toutes les tentatives de conciliation ayant échoué.
Si la division continua, si l'Allemagne fut, après
la déclaration du pape, de plus en plus troublée,
qu'on ne rejette donc pas sur lui la responsabilité
de ces déchirements. Que l'on accuse de tant de
malheurs celui des deux compétiteurs qui osa
s'inscrire contre l'arrêt de l'arbitre et maintenir
des prétentions condamnées; que Ton accuse
surtout les prélats, les abbés allemands, les
archevêques de Magdebourg, de Brème, de Salz-
bourg, et tant d'autres, qui, désertant la cause
de l'Église pour servir leurs proprés Intérêts,
restèrent aux côtés du duc de Souabe, et conti-
nuèrent à fomenter la discorde. Cela dura sept
années. Après sept années de luttes presque
sans trêve, le parti d'Othon se trouva le plus af-
faibli ; on put même croire que sa cause était
désespérée. Que fit alors Innocent lit ? Qu'on le
remarque bien, caf c'est un des actes de Son
pontificat qui l'honorent le plus. Pendant sept
années, il a, disons-nous, servi les intérêts d'O-
895
INNOCENT
89S
thon. Enfin celui-ci se trouve réduit à de telles
extrémités que le patronage d'Innocent est dé-
sormais tout ce qui lai reste. Innocent craint
alors d'être considéré comme un obstacle à la
paix. Wavaît-il pas contre Philippe des griefs
considérables ? Oui sans doute ; mais il les ou-
blie. Philippe à ces griefs anciens avait, pendant
sept années , joint une foule d'outrages contre le
pape, contre la papauté. Innocent fera taire ses
rancunes. Pour donner le repos à l'Allemagne,
à la chrétienté , il se tourne vers Philippe , lui
envoie des ambassadeurs, et traite avec lui. Les
clauses de ce traité allaient être rendues publi-
ques, quand un de ces vigoureux bandits que
Philippe avait pour commensaux , Othon, duc
de Bourgogne, le frappe d'un coup d'épée pour
venger une injure privée, et termine d'une autre
manière la querelle de l'Empire. Le comte de
Poitou fut alors proclamé par toutes les voix.
Même en de telles circonstances, cet heureux
résultat n'était guère prévu, tant les esprits
étaient divisés par la contrariété des intérêts;
mais les actives démarches d'Innocent, sa facilité
naturelle à pardonner toutes les injures, l'auto-
rité de ses promesses, la certitude où chacun
était qu'elles seraient sanctionnées par toutes les
parties, préparèrent, achevèrent enfin la récon-
ciliation générale, qui rat signée, le 11 novembre
1208, dans la ville de Francfort. Othon rat en-
suite couronné roi des Romains dans la basilique
de Saint-Pierre, le 4 octobre 1209.
Mais Othon, revêtu des insignes impériaux, ne
se montra pas moins zélé pour les prétentions
de l'Empire que Philippe de Souabe aurait pu
l'être. Or c'était le sentiment de tous les princes
enrôlés sous ses drapeaux, que l'empereur, héri-
tier des césars, devait toujours aspirer à recons-
tituer leur ancien domaine, qu'au pape, chef spi-
rituel de l'Église, n'appartenait aucune juridic-
tion temporelle, et que les Latins, comme les
Siciliens et les Lombards, étalent les sujets ré-
voltés des Germains. Ces Germains assistaient
en grand nombre à la cérémonie du couronne-
ment : telle fut alors leur conduite dans la cam-
pagne, dans la ville même de Rome , que le
peuple prit les armes pour leur donner une le-
çon de modestie et de politesse. Elle fut san-
glante. Othon, forcé de quitter Rome avec les
débris de son armée, se promit une vengeance.
S'emparant donc de toutes les villes qu'il traversa
dans sa retraite , il répondit du* admonitions
du pape qu'il reprenait un bien usurpé. Il fit en-
suite, poursuivant les conséquences du même
principe, une expédition dans le royaume de Si-
cile, et accueillit avec d'autres sarcasmes les
nouvelles remontrances d'Innocent. Mous enten-
dons des historiens modernes qui applaudissent
à ces sarcasmes. Eh bien, ils se trompent, s'ils
pensent qu'on n'est plus philosophe dès qu'on
refuse d'y applaudir avec eux. Dans les jugements
qu'elle porte sur les faits historiques, la sage phi-
losophie tient compte des temps ainsi que des
lieux. Oui, sans doute, l'étrange doctrine de l'em-
pereur Othon offre l'apparence d'un syllogisme
régulier : qui doit, en effet, être le maître de
Rome, si ce n'est le roi des Romains? Mais la
philosophie ne consacre pas légèrement un syl-
logisme qni porte dans ses flancs d'aussi formi-
dables tempêtes. Encore une fois nous sommes
à la fin du douzième siècle , et quand alors In-
nocent eût laissé déposséder la papauté de toute
souveraineté temporelle, assurément ni la Franc*,
ni l'Angleterre , ni l'Espagne n'eussent ratifié
cette abdication. C'était donc une guerre engagée
entre tontes les autres puissances chrétiennes
et l'Allemagne. Innocent ne manqua pas de pa-
tience. Mais quand il dut être persuadé qu'O-
thon avait fermement résolu de ne pas recaler,
il l'excommunia , réclama la protection de la
France, et invita les électeurs de l'Empire à faire
choix d'un autre empereur. ;
Ce qui est bien remarquable en cette affaire,
ce qui prouve, de la manière la plus convaincante,
quel était alors l'ascendant de la papauté, et
quelle était la fragilité des pouvoirs civils, c'est
qu'on vit, à la simple requête d'Innocent m,
les électeurs se réunir, déposer Othon, et loi
donner Frédéric pour successeur. Mais accose-
t-on Innocent d'avoir abusé de cet ascendant?
Dépossédé de toutes ses villes, tout à l'heure
assiégé dans Rome même, il prit enfin le parti •
de se défendre. Où est l'abus? Il se défendit en
usant du glaive pontifical , l'excommunication.
Serait-il immédiatement excusé s'il avait d'abord
invoqué l'autre glaive ? Corrigeons-nous donc de
cette faiblesse pour le meurtre et les meurtriers.
Ce qui est regrettable, ce n'est pas qu'Otboo
excommunié ait été si vite destitué de son titre
par les électeurs de l'Empire; c'est bien plutôt
qu'il ait encore , après l'élection de Frédéric, con-
servé trop d'amis. Il ne désespéra pas , en effet,
de rétablir ses affaires , resta sous les armes, et
bientôt engagea le combat. Le dernier coup lui
fut porté par Philippe-Auguste dans les champs
de Bouvines.
Les affaires d'Allemagne furent assurément
celles qui inquiétèrent le plus Innocent III. Ses
démêlés avec le roi de France occupent ensuite
la place la plus importante dans l'histoire de son
pontificat. Nous venons de nommer ce roi de
France , Philippe-Auguste , tour à tour allié do
pape contre Jean d'Angleterre et contre l'empe-
reur Othon. Ce n'était pas sans doute un allié
désintéressé; mais les intérêts de Philippe et cem
d'Innocent se trouvaient le plus souvent d'ac-
cord. Innocent n'avait d'ailleurs à redouter de
Philippe aucune fourberie. La loyauté était me
de ses rares vertus. Puisque le souverain pon-
tife , destitué de toute force militaire, devait être
l'ami d'un roi qui fat toujours en mesure de lai
prêter main forte , Innocent devait pratiquer cette
alliance avec Philippe : il n'aurait pas trouvé
mieux. Cependant jamais Innocent ne s'inclina
devant cette nécessité, au point de tout per-
897
INNOCENT
898
mettre à son allié , afin de conserver son appui.
Il lui donna même plus d'une leçon. Nous rap-
pellerons simplement l'affaire du divorce.
Le divorce de Philippe avec Ingelburge était
une des questions les plus difficiles que Cèles-
tin III eût transmises à son successeur. Nous ne
voulons pas dire que le droit de chacun fût dans
cette question , incertain, équivoque. Le roi Phi-
lippe avait juré, comme le plus humble de ses
sujets, d'observer ponctuellement les lois de l'É-
glise en ce qui regarde le sacrement du mariage
et les autres sacrements : or, en chassant du lit
nuptial sa femme légitime, Ingelburge, en n'al-
léguant pour justifier cette brutalité que les plus
indécents et les plus ridicules prétextes , il avait
manifestement provoqué, mérité la sentence déjà
rendue contre lui par Célestm m. Le mariage
n'était-il pas alors un contrat religieux, fait devant
Dieu représenté par ses ministres? Qui donc
pouvait le rompre sans leur assentiment? Et
cet assentiment solennellement refusé, n'était-ce
pas sortir soi-même de l'Église, s'exiler volon-
tairement de la société chrétienne , que de main-
tenir en fait ce qui n'existait pas en droit? Rien
de plus clair assurément; Mais une brouille avec
la France pouvait être bien funeste à la papauté ,
déjà Menacée du côté dé l'Allemagne. L'intérêt
bien entendu conseillait à Innocent d'abandonner
à son triste veuvage cette femme venue des rives
glacées de la Baltique, dont l'injure ne touchait
qu'un prince impuissant. Cependant , le devoir
lui conseillait une autre conduite. Innocent n'hé-
sita pas à suivre l'inspiration du devoir. Dès son
installation sur le siège de saint Pierre, il écrit à
Philippe, que, « protecteur des faibles, des femmes
opprimées , il ne peut voir avec indifférence le
coupable abandon dlngelbufge; que préposé par
Dieu même à la police de la société chrétienne ,
il ne peut admettre qu'un prince donne l'exemple
d'un si grand scandale , et , sous les yeux de ses
peuples , place une concubine dans le lit de l'é-
pouse légitime ». Philippe n'entend pas encore ce
langage. C'est un homme plus prompt à com-
mander qu'à obéir. Innocent renouvelle ses
plaintes , et y ajoute des menaces. Les menaces
sont aussi vaines que les prières. Un concile
est convoqué pour le 6 décembre 1199, et Phi-
lippe est sommé d'y comparaître. Il fait jeter
hors de son palais les deux abbés qui viennent
loi porter cet ordre. Cependant le concile s'as-
semble , et , après sept jours employés à déli-
bérer sur cette si grave et si triste affaire , le con-
cile, où siégeaient la plupart des évêques fran-
çais , met l'interdit sur le royaume de France.
Telle est la loi religieuse. La loi civile réserve
à la bigamie d'autres châtiments. L'Église se con-
tente de proclamer qu'on roi bigame n'est plus
un roi chrétien. On dit que Philippe, ayant
vainement essayé de fléchir le pape , s'écria dans
son impatience : « Je veux me faire infidèle.
Heureux Saladin ! il n'avait point de pape t »
Ce jeu d'esprit n'est pas heureux : la religion de
KOOV. BIOGR. CÉWÉR. — T. XXV.
Saladin , en lui permettant la polygamie, l'assu-
jettissait à d'autres règles. « Heureux Philippe 1
aurait pu dire Saladin : il n'a pas de muphti
pour lui interdire la douce ivresse qu'on trouve,
au fond d'une coupe de Syracuse 1 » La so-
ciété, la religion se protègent elles-mêmes par
des lois que nul ne peut enfreindre sans encourir
la peine qu'elles prononcent. Philippe finit par
le comprendre, et son arrogance est ébranlée.
Les évêques du royaume se sont déclarés contre
lui; il convoque les barons. Les barons font la
même réponse que les évêques. Les parents de
Philippe s'éloignent eux-mêmes à son approche.
La nation entière contemple avec un morne ef-
froi le ciel voilé de lugubres ténèbres. Philippe
ne rit plus alors des menaces du pape; il le sup-
plie d'apprécier sans colère d'humbles objections,
de croire d'abord à sa parfaite bonne foi dans
toute cette affaire, et de considérer ensuite que
la rupture du second mariage aura de plus graves
conséquences quecelle du premier. La belle Agnès
de Méranie, l'imprudente complice du royal
adultère, joint ses larmes aux prières de Phi-
lippe, et parle pour elle-même, pour ses jeunes
enfants , en des termes qui nous émeuvent en-
core aujourd'hui, tant il y a d'éloquence dans
leur sincérité! Innocent ni est .inexorable,
comme la loi. Philippe doit céder : il cède enfin.
Agnès, écartée , meurt peu de temps après. Phi-
lippe prie du moins le pape de légitimer ses en-
fants. Pourquoi l'Église n'eût-elle pas souscrit à
ce vœu? Innocenttaccorda ce qui lui était de- *
mandé. Quelques seigneurs français, suivant Ri-
gord, murmurèrent contre cette faiblesse. Elle
les surprit chez un tel pape : c'est qu'ils ne l'a-
vaienUipas compris usant de sa force. Innocent
a châtié l'époux coupable; mais il lui convient
de se montrer ensuite plein de commisération
pour le père malheureux.
Est-ce l'Angleterre qui proteste contre les nom-
breux diplômes d'Innocent HI qui concernent
son église et ses rois ?
Innocent est prié, dès la première année de
son pontificat, de tourner ses regards vers l'An-
gleterre. C'est le roi Richard qui fait un appel à
la justice du pape. Les ducs de Souabe et d'Au-
triche ont pris Richard dans une embûche , l'ont
jeté captif dans une prison , et ne l'ont ensuite af-
franchi de cette dure captivité qu'après avoir reçu
le prix de sa rançon. C'est ainsi que des princes
chrétiens ont traité le chef d'une armée chrétienne,
au retour d'une expédition malheureuse contre les
infidèles» Richard réclame, du moins, la resti-
tution des sommes que ces traîtres lui ont ex-
torquées. Aussitôt Innocent se charge de sa cause,
la plaide aveciénergie, et déclare au duc d'Au-
triche aussi bien qu'au duc de Souabe , récent
empereur d'Allemagne, que s'ils n'offrent pas à
RicharcTnine ^prompte satisfaction, ils seront,
comme l'équité l'ordonne , excommuniés.
Ce Richard est d'ailleurs pour le roi de France
un voisin incommode. Des griefs réciproques
29
899
INNOCENT
000
les animent Ton contre l'autre, et ils sont cons-
tamment aux prises. Ce ne sont que combats ,
incendies et pillages. La rivalité des deux rois
cause aux deux peuples des maux infinis. Inno-
cent, ami de Richard, brouillé avec Philippe,
ne va-t-ît pas s'interposer entre les combattants,
adopter, appuyer les griefs de l'Angleterre, et
commander à la France de céder? Cette conduite
eût été celle d'un pape moins sage. Innocent ne
veut pas aigrir le débat en s'y mêlant. Mais
parmi les intérêts engagés dans cette question ,
quel est le plus sérieux ? Celui des peuples que
ruine la guerre. Le cardinal Pierre de Capoue ,
envoyé par Innocent , va négocier la paix, et,
comme résultat des plus laborieux efforts, il ob-
tient du moins une trêve de cinq ans.
Après la mort de Richard , Jean occdpe sa
place. Les mœurs de Jean sont celles de son
frère. Rien ne doit résister à l'emportement de
ses brutales passions, et il n'a pas, comme Ri-
chard , le goût des nobles aventures. Par l'assas-
sinat d'Arthur, son neveu, il met le comble à ses
crimes. On accuse Innocent d'avoir voulu les
ignorer. C'est une accusation contre laquelle il
est, en effet, assez difficile de le défendre. Ce-
pendant s'il abandonnait Jean , il fortifiait son
rival , le roi de France , et tout accroissement de
territoire, de puissance pour celui-ci , tournait
contre le parti qu'Innocent favorisait alors en
Allemagne. Ainsi tous ses efforts étaient décon*
certes. On doit croire qu'Innocent entendit plus
d'une fois sa conscience protester contre les
bienveillantes missives qu'il adressait au meur-
trier d'Arthur. Mais il ne pouvait créer les chefs
des nations , il ne lui était pas permis de refuser
ceux que la loi du sang lui présentait. Et de
quel prince eût-il accepté le concours , s'il n'a-
vait voulu serrer d'autres mains que des mains
pures? Les nécessités de la politique imposèrent
donc à Innocent de fâcheuses indulgences.
Remarquons toutefois qu'après avoir trop long-
temps ménagé l'indigne successeur de l'intré-
pide Richard , il se montra d'autant plus sévère
à son égard quand les plaintes de l'Église oppri-
mée éveillèrent enfin sa justice. La défense de
l'Église était un devoir avec lequel il ne pouvait
transiger.
On le vit bien dans l'affaire de l'archevêché de
Cantorbéry. Après deux ans de troubles, une
élection, longtemps contrariée par des rivalités
ecclésiastiques et plus encore par les intrigues et
les violences du roi , avait enfin appelé sur te
siège de Cantorbéry un des plus érudits des clercs
anglais , Etienne Langthon. Jean ne voulut pas
accepter le résultat du scrutin, et ses persécu-
tions allèrent chercher à la fois l'élu , les élec-
teurs, séculiers et réguliers. Les évêques de
Londres, d'Ély , de Winchester se rendirent au-
près de Jean , lui parlèrent des libertés ecclésias-
tiques , et lui firent entrevoir quels dommages
pouvait lui causer le ressentiment du pape. Jean
répondit à leurs supplications par les plus véhé-
mentes menaces. Que le pape ose interdire son
royaume, il fera saisir archevêques, évêques,
clercs et moines, et les transportera tous sur le
continent les yeux crevés , le nez coupé , les
chargeant d'aller apprendre au pape quel cas un
roi d'Angleterre fait de son autorité. L'interdit
prononcé, Jean frémit de colère, exile les évê-
ques, les religieux, saisit leurs biens, met les
scellés sur leurs granges, et fait vendre leow
meubles à l'encan. La lutte qu'Innocent avait
voulu prévenir est donc engagée. Se demande-
t-on où est la justice ? Si, comme trop d'historiens
l'ont prétendu , tout ce qui s'accorde le mieux
avec l'intérêt des rois est légitime , les torts peu-
vent être imputés à Innocent III; mais si, sous
l'empire des gouvernements les plus despotiques,
il reste quelques droits aux sujets, assurément
les clercs de Cantorbéry pouvaient , d'accord avec
le pape, leur chef spirituel, préférer pour ar-
chevêque un cardinal anglais , homme de grande
maison et de grand savoir, an candidat que le
roi Jean avait choisi parmi ses familiers ; et, leur
élection faite , ils pouvaient encore la maintenir.
C'est là du reste ce que Jean lui-même ne tarda
pas trop à reconnaître : après avoir commis de
grandes violences, il fit, du moins, paraître un
grand repentir, et offrit lui-même au pape une
réparation qui fut d'abord jugée suffisante. Mais
il ne voulait en réalité qu'apaiser le pape irrité.
Aussitôt qu'il crut avoir atteint ce résultat, il
s'abandonna à de nouveaux excès. La persécu-
tion recommença contre les ecclésiastiques, contre
les étudiants, traînés devant les juges laïcs. Un
grand nombre d'évéques ne purent se soustraire
à la fureur du roi que par l'exil. Alors Innocent
fit succéder à l'interdit l'excommunication per.
sonnette. Mais personne n'osa publier cette nou-
velle sentence, et Jean, continuant ses prouesses,
accumula crimes sur crimes, jusqu'au jour où
les barons anglais» se conjurant enfin contre
cette peste publique r offrirent eux-mêmes la cou-
ronne d'Angleterre au roi de France, le suppliant
au plus tôt de mettre fin à un règne exécré. Innocent
ratifia cette offre , et une croisade fut proclamée.
Il connaissait Jean plus brutal qqe brave , et es-
pérait le faire changer de conduite par une me-
nace énergique. En effet, à la nouvelle des ar-
mements préparés contre lui» Jean manifeste un
profond désespoir, et demande au pape à quel
prix lui seront pardonnes les méfaits dont il
reconnaît que sa conscience est chargée. Une
négociation est commencée, mais elle est bientôt
interrompue* Il est nn principe que Jean ne veut
pas accepter ; c'est l'indépendance de l'Église.
Les menaces d'Innocent deviennent alors ploi
vives, et le châtiment parait plus proche. Jean
s'incline enfin , et plus bas même qu'il ne lai
était commandé de le faire. Il dépose sa cou-
ronne entre les mains des messagers aposto-
liques, déclare qu'il ne sera plus roi que par la
grâce du pape , et , cette grâce lui étant accordée,
il rend au pape l'hommage prosterné d'un vassal
901
INNOCENT
902
pénitent. Il y a peu d'exemples d'an abaisse-
ment pareil. Est-il donc fait pour nous inspirer
du moins quelque pitié? Les barons d'Angleterre,
d'abord soulevés contre les iniquités du roi,
s'indignèrent ensuite de sa lâcheté. Cette indigna-
tion est encore le sentiment que l'on éprouve
en racontant l'histoire d'une si honteuse dé-
chéance.
En Sicile, Constance étant morte, le Germain
Markwald» déjà chassé des Marches par Inno-
cent, arrive à la tète de quelques partisans, et ré-
clame, au nom de l'empereur, la tutelle du jeune
roi. Celui-ci répond que le pape lui a été donné
pour tuteur par sa mère, qu'il n'en veut pas ac-
cepter un autre, et somme Markwald de s'é-
loigner » Mais, en donnant cet ordre , le fils de
Constance suit les conseils du parti national , des
seigneurs italiens. Or le royaume de Sicile est
plein d'Allemands dont l'entreprise de Markwald
flatte les cupides espérance» : il s'agit pour ces
étrangers de dominer en Sicile et d'en usurper les
plus beaux domaines. Se ralliant donc autour de
Markwald, ils l'encouragent .à tout oser; et voici
qu'une armée de Normands» de Germains, d'a-
venturiers envahit* pille les champs voisins du
mont Cassin,. occupe la ville de San-Germano,
enveloppe l'antique monastère, et en fait le siège.
Que dirait-on d'un tuteur qui, dans ces extré-
mités, eût abandonné Son pupille? Innocent fait
pénétrer quelques troupes dand l'État de Sicile,
et appelle aux armes les comtes, les barons, tes
bourgeois, tout le peuplé de Capoue, de l'Apn-
lie, de la Calabre ; une croisade est préchée contre
l'étranger, le sacrilège dévastateur des domaines
ecclésiastiques, le fléau de la noblesse Sicilienne,
le farouche bourreau des clercs et des moines.
Celui-ci promet au pape, s'il Vent simplement
détourner ses regards de la Sicile^ l'hommage fu-
tur d'une loyale soumission, et par avance offre
20,000 onces d'or au trésor pontifical, jurant
d'envoyer bientôt une plus forte somme. Quelle
opinion aurait-on d'Innocent acceptant cet or, et
pactisant avec L'usurpation germaine? Il repousse
les présents, déjoue les perfidies de Markwald,
le force à quitter le continent et le poursuit en*
core dans l'île de Sicile. Une sorte de paix est
ensuite conclue. Mais les partisans de Markwald
n'y trouvent pas leur compte. La guerre leur of-
fre, en effet, les profits quotidiens du pillage.
La paix est donc rompue, une armée de Sarra*
sins vient se ranger sous les enseignes de Mark-
wald, et des bandes allemandes, sarrasines par-
courent dans tods les sens l'Ile de Sicile, dévas*
tant les bourgs et les ville», n'épargnant pas pin*
les lieux saints que les profanes. Innocent est
de nouveau contraint de porter secours à son
pupille. L'armée royale et l'armée rebelle se
rencontrent sous les murs de Palerme, et Mark-
wald est vaincu. Markwald mort, l'état des af-
faires n'est pas meilleur dans le royaume de Si-
cile. D'autres factions se forment, prennent des
gages, aspirent et travaillent à dominer. Le jeune
roi, entouré d'ambitieux et de traîtres, ne com-
mande plus à personne; les fermiers de ses
.douanes versent en des mains ennemies le pro-
duit des impôts; on vend même ses domaines,
et on les vend en son nom, sans lui en donner
le prix. Seul Innocent le protège encore, et lui
envoie des conseils, des soldats, des écus. Enfin,
en 1208, après dix années d*efrorts, Innocent
parvient à rétablir le bon ordre dans ce pays,
si longtemps affligé, et» le parcourant en tuteur
fidèle, envigUant pontife, il y recueille les hom-
mages dus à sa persévérante loyauté»
Nous voyons dans le même temps les mes-
sagers pacifiques d'Innocent parcourir l'Espagne,
le Portugal, la . Pologne, le Danemark, la Hon-
grie, Constantinople, te Bulgarie ; sur toute
contrée de l'Europe, durant dix-huit années,
s'étendit la main puissante de ce grand pape.
On peut même remarquer qu'aux froides limites
du monde chrétien, en Norvège , son interven-
tion ne fut pas moins active, moins efficace que
dans les pays dont les frontières étaient celles
du domaine pontifical. La Norvège se trouvait
depuis longtemps en proie à de sanglantes dis-
cordes. Swerrer le Grand, arrogant parvenu,
dont l'ambition égalait le courage, opprimait et
l'État et l'Église, n'admettant personne au par-
tage du pouvoir qu'il avait conquis;par ses heu-
reux efforts. Cependant il y avait chez cet homme
entreprenant, inflexible, qui faisait tout céder à
son caprice, quelques traits de ressemblance
avec les grands réformateurs : s'il avait peu
d'égards pour les anciens privilèges de la no-
blesse et pour les droits assez mal définis de
l'Église norvégienne, il savait du moins écouter»
entendre te voix du peuple, et le peuple ratifiait
volontiers les décrets de sa pleine ptûssanee.
L'Église et la noblesse adressèrent leurs plaintes
au pape. Célestin occupait encore le siège pon-
tifical. Il voulut, avant de se prononcer, mieux
connaître l'état des choses, et par ses ordres un
cardinal se rendit en Norvège* Mais il était im-
possible de composer avec Swerrer. Le cardinal,
d'abord enclin à le favoriser, se vit bientôt forcé
de l'abandonner* Alors les violences et les frau-
des de Swerrer n+ respectèrent plus rien : pour
comprimer toutes tes plaintes, il ne se contenta
pas démultiplier les confiscations, les supplices;
Û alla jusqu'à fabriquer des lettres papales, or-
nées d'un sceau frauduleux, à'ia faveur des-
quelles il promulgua lui-même l'approbation de
ses crimes, Tout cela devait-il être supporté?
En alléguant te principe moderne de l'autone»
mie nationale, de l'indépendance individuelle
des nations, cm pourra sans doute soutenir qu'il*
nocent n'avait point affaire de savoir comment
Swerrer |le Grand se comportait en Norvège,
Mais c'est lui-même qui par ses ambassadeurs in-
terrogea le saint-père sur sa conduite, réclamant
son intervention contre des évêques, contre des
vassaux révoltés; et le saint-père interrogé le
condamna, déclara son usurpation criminelle,
29.
908
INNOCENT
904
exhorta te peuple norvégien à secouer le joug
de ce faussaire, de ce tyran.
L'ambition d'Innocent III fut donc d'établir
en tous lieux la liberté de l'Église à l'égard des
rois, et la paix entre les peuples. C'est le dou-
ble but qu'il poursuivit avec la plus constante
énergie. Tous les moyens lui semblèrent-ils bons
pour l'atteindre I C'est une question qui doit être
posée.
Jus et fas raoltos feetant; Ptolemee, noeentet...
La grande politique recherche l'utile et méprise
le juste. C'est la maxime de Photin et de plu-
sieurs autres conseillers de semblables tyrans.
Elle est exécrable, et nous n'hésitons pas à croire
qu'Innocent l'eût condamnée. Cependant il fant
reconnaître qu'il n'eut pas toujours, dans la
pratique des affaires, cette horreur de l'intrigue,
des moyens détournés, des suggestions ingé-
nieusement perfides, qui est à bon droit consi-
dérée comme la marque des grands cœurs et des
grands esprits. Mais il faut encore ici tenir
compte des temps, n est, en effet, certain que la
conscience humaine s'est beaucoup anoblie de-
puis le douzième siècle. Chez aucun des con-
temporains d'Innocent m vous ne trouverez
l'idée du juste et de l'honnête, telle que notre
intelligence la conçoit et la définit. Si donc aujour-
d'hui nous ne pouvons approuver tous les moyens
employés par Innocent pour atteindre les résultats
que nous estimons louables, nous ne lui reproche-
rons pas toutefois avec une excessive sévérité
de n'avoir pas scrupuleusement observé la règle
qu'il connaissait mal.
Une autre remarque à faire sur la série des
lettres'et diplômes d'Innocent m, c'est que son
intervention dans les affaires des Églises s'é-
tend bien plus loin que son intervention dans
les affaires des États. En ce qui regarde les Églises
même les plus lointaines, il n'y a pas de si mi-
sérable débat dont Une s'occupe, quand il en est
prié : comme pasteur de tous les fidèles, comme
administrateur suprême de la grande famille
ecclésiastique, il se doit à tous et à chacun, il est
le serviteur de quiconque lui demande un ser-
vice. Mais il ne touche ordinairement qu'aux
plus hautes questions de l'ordre civil, à celles
qui préoccupent à la fois l'Église et l'État, ou
bien encore à celles où se trouvent engagés les
premiers intérêts des nations; alors même, en
effet, qu'elles sont purement civiles, ces ques-
tions peuvent encore* être appelées sociales, et
elles doivent être résolues suivant les principes
de la justice par un arbitre désintéressé. In-
nocent parait avoir entendu que le gouverne-
ment intérieur des États appartenait aux rois et
ne devait leur être disputé qu'en de rares occa-
sions. Ajoutons même que lorsqu'il a cru devoir,
soit au nom d'un droit équivoque, soit à la re-
quête des parties, déclarer son propre senti-
ment sur les contestations agitées entre les rois
et leurs peuples, il ne l'a pas toujours fait avec
bonheur. Il s'est, par exemple, gravement trompé
dans l'affaire de la grande charte d'Angleterre,
lorsqu'il s'est prononcé contre les justes récla-
mations des barons. En ces circonstances, il su-
bordonnait volontiers le droit des peuples, dont
il se souciait peu, aux intérêts présents de la pa-
pauté, dont alors il se souciait trop.
Ceci nous conduit à dire que l'histoire, lors-
qu'elle considère la papauté comme ayant, du-
rant le moyen fige, servi la cause des peuples
en donnant des leçons aux rois, ne doit pas ce-
pendant attribuer aux papes des intentions qu'ils
n'ont point eues. Us ont heureusement contenu
le despotisme farouche des hommes d'épée ; ils
ont fait prévaloir l'autorité de rintelligence sur
la force matérielle, et ils ont ainsi facilité cette
émancipation graduelle des âmes qui a en pour
conséquence ultérieure l'essor des peuples vers
la liberté. Mais jamais ils tfont poursuivi, ja-
mais ils n'ont entrevu ce résultat. Le but qu'ils
ont recherché, bien différent de celui vers le-
quel ont ensuite tendu les vœux des nations, a
été la liberté de l'Église à l'égard des rois, de
l'Église servilement docile à l'autorité des papes.
Chaque siècle doit sa part d'efforts à une œu-
vre dont Dieu seul connaît la fin. Ne soyons pas
trop exigeants à l'égard du passé, puisque notre
présent aura l'avenir pour juge. Voilà ce qu'il
suffit de comprendre, pour apprécier à leur vraie
mesure les services rendus à la société moderne
par Grégoire VII, par Innocent III, par les papes
animés du même esprit. Us n'ont pas tout fait,
ils ne pouvaient tout faire. Us ont été les ouvriers
de leur heure; d'autres devaient venir et sont
venus après eux.
Considérons maintenant sous une antre face
le pontificat d'Innocent III. Tous les gouverne-
ments ont à lutter contre deux partis t celui qui
veut les rappeler en arrière, et celui qui prétend
les pousser trop vite en avant. L'histoire est
toujours dure pour le premier de ces partis;
elle applaudit même sans aucune pitié à tous
ses désastres. Pour le second, au contraire, elle
professe de publiques sympathies, et, forcée d'en-
registrer ses échecs, ne pouvant même se défen-
dre de les regarder comme inévitables, elle les
déplore néanmoins. S'il est, en effet, téméraire
de réclamer plus qu'il ne peut être accordé, cette
témérité prend son origine dans un élan géné-
reux. Qu'il nous soit donc permis de manifester
un vif intérêt pour ces novateurs inconsidérés
qu'Innocent III sacrifia sans aucun scrupule au
seul intérêt qu'il comprit et put comprendre,
l'unité de l'Église, et dont plus tard, à cette autre
heure qu'on ne sait pas assez attendre , les om-
bres vengeresses sont venues assiéger le chevet
de Léon X.
Innocent n'avait pas de haine contre les infi-
dèles. Une mit autant d'ardeur à précipiter l'Eu-
rope sur l'Asie que pour affranchir le tombeau
du Christ. Bien des prélats, bien des seigneurs
chrétiens se sont croisés pour exterminer des
musulmans, pour mettre à sac des cités k mu-
9ÔS
INNOCENT
906
sulmanes : ce sont de tout autres sentiments
que respirent les lettres d'Innocent m prêchant
la croisade contre les conquérants de la Pales-
tine. A l'entendre , c'est une question d'honneur
pour tous les chrétiens que de posséder les lieux
où est né , où a souffert, où est mort le divin
auteur de leur religion; mais il ne conseille pas
l'extermination ou le pillage des infidèles. En-
tendons-le maintenant parler des juifs. On est
généralement persuadé que, durant le moyen
âge, la cour de Rome inspira toutes les violences
qui furent commises contre les enfants d'Israël.
Partout les rois les persécutent, les seigneurs
les rançonnent,' les peuples les lapident. Mais
écoutez Innocent : c'est d'une voix attendrie
qu'il entreprend leur défense, et les arguments
qu'il invoque en faveur de ces 'infortunés sont
presque ceux de nos derniers philosophes : « Si les
juifs ont fermé leur cœur à la grâce ; du moins
ils pratiquent la loi* A ce titre, ils ont déjà droit
à la considération des chrétiens. » Mais un prin-
cipe supérieur les protège encore. Ce principe,
Innocent in ose en être l'éloquent interprète,
c'est le respect des consciences. Si les juifs s'obs-
tinent à refuser le baptême, c'est leur affaire,
non celle des chrétiens, « il n'est permis, écrit-
il , à aucun chrétien de forcer un juif à rece-
voir le baptême. » Et aussitôt il suspend la
menace de l'excommunication sur la tête des
gens qui prétendraient exercer sur eux cette bar-
bare contrainte. Mais voici le secret de cette
charité pour les juifs. N'appartenant pas à la
famille chrétienne, ils étaient pour Innocent des
étrangers, des étrangers dont la faiblesse ne
pouvait lui inspirer aucune crainte. Mais com-
bien son langage et sa conduite diffèrent lors-
qu'il s'agit des albigeois !
Les albigeois ou patarins , répandus dans le
midi de la France, depuis Béziers jusqu'à Bor-
deaux, professaient une doctrine religieuse qui,
sur beaucoup de points, était peu conforme à la
doctrine romaine. Aussi avaient-ils en horreur
le nom de Rome. De plus , il s'était produit
parmi eux beaucoup de beaux esprits, gais trou-
badours, logiciens érudits, théologiens auda-
cieux, qui, élevant leur séparation de l'Église
romaine à la hauteur d'un système, prétendaient
que la liberté des consciences est un droit supé-
rieur à tous les décrets des conciles et des papes.
Non-seulement Innocent leur envoya des mis-
sionnaires apostoliques chargés de réfuter leurs
erreurs; mais ces missionnaires faisant peu de
prosélytes', Innocent fit un appel au bras sécu-
lier. On connaît la suite. Les albigeois, poursuivis
de ville en ville, de retraite en retraite, furent
tous massacrés. Le souvenir de ce drame sanglant
consterne la pensée. Vers la fin de la guerre, In-
nocent protesta contre la rapacité des meurtriers ,
cela est vrai ; mais auparavant il avait prêché
le meurtre. Il lavait, hélas ! prêché sans aucune
hésitation , sans aucun trouble. L'unité de l'É-
glise était menacée; donc il fallait la défendre.
Que Bourges, Bordeaux, Poitiers se déclarent
aujourd'hui séparées de la nation française,
qu'elles se donnent un gouvernement, un code-à
part, qu'elles refusent à Tannée française leurs
soldats, au trésor national leurs écus : ces villes
seront considérées comme rebelles, et il semblera
légitime de les réduire par la force. Voflà ce
qu'un jour peut-être on appellera le préjugé de
notre temps. Eh bien 1 le préjugé du moyen âge
était Vunité de V Église. Terminant l'éloge de
Philippe-Auguste, Condillac s'exprime en ces
termes : « Je ne lui reproche pas la guerre qu'il
fit aux albigeois ; ce reproche tomberait plus
sur son siècle que sur lui. » Que cette excuse
ne soit pas moins valable pour Innocent m que
pour Philippe-Auguste! L'un et l'autre ont eu les
idées, les passions de leur siècle, et ils n'ont
pu soupçonner les scrupules du^nôtre.
H nous reste à mentionner les ouvrages d'In-
nocent III. Un très - grand nombre de ses
Lettres avaient été puhliées par Baluze, en 16*2,
en 2 vol. in-fol., sous le titre de : Epistolarum
Innocenta 111, romani pontifias, Libri XL
Mais cette collection considérable était encore
bien incomplète. MM. de Bréquigny et La Porte
du Theil ayant fait copier à Rome, par les ordres
du gouvernement français, une longue suite
d'autres lettrés pontificales, ajoutèrent, en 1791,
à la collection de Baluze, deux volumes in-fol.
Quant à ses traités théologiques, on en connaît
plusieurs éditions : de Cologne, 1552, 1575 ; de
Venise, 1578. B. Hauréau.
Frédéric Hurter, Hist du Pape Innocent III. —
M. Léop. Dellsle, Itinéraire d'Innocent III. - Artaud
de Montor, Hist. de» Souverains Pontifes romains, t IL
— Fleury, Hist. Ecclésiast. — La Porte du TheU, Notices
et Extraits des Manuscrits. — Baronlus, Annales, pas-
sim. ~ Pagi, BreviartumHistorico^hroMtogico-criti-
cum.
innocent it ( Sinibalde de Fiesqce), cent-
quatre-vingt-sixième pape, successeur de Cèles-
tin IV, né à Gênes, élu à Anagni, le 24 juin
1243, mort à Naples le 10 décembre 1254. Cé-
lestin IV mourut dix-huit jours après son exal-
tation; c'est donc au pontificat de Grégoire IX
que se relient les événements qui amenèrent
Innocent IV sur le trône pontifical. Frédéric n
retenait encore prisonniers les deux cardinaux
qu'il avait pris sur mer ; les autres ne pouvaient
s'entendre : chacun voulait la tiare pour soi; ils
se dispersèrent donc en différentes villes, espé-
rant qu'en retardant l'élection, la mort éclairci-
rait les rangs des prétendants. L'empereur et le
roi de France les prient en vain de faire cesser
une vacance qui durait depuis dix-huit mois.
Pour ôter tout nouveau prétexte de retard, Fré-
déric met en liberté les deux cardinaux qu'il
retenait; puis, voyant l'inutilité de cette mesure,
il- marche sur Rome (avril 1243), met les car-
dinaux au ban de l'Empire, et permet à ses troupes
de ravager leurs terres et celles de l'Église; les
gibelins profitent de cette autorisation pour pil-
ler et détruire, Les cardinaux se rendent enfin
et élisent Sinibaldfi de Fieague, qui prend (e nom
4'lawMWVt IV. On Pavait cboiii à. causa d* IV
initié que lui portait Frédéric ; mai* celui-ci, plus
pénétrant que ses flatteurs, leur répandit d'un
air affligé que cette élection « lui ferait perdra l'a-
mitié d'un cardinal et lui attirerait la bain* d'un
papa ». Il était temps de conclure la paix avec la
aaintaiéga; l'empereur s'engagea a Tendre toutes
ta* terras qui avaient appartenu aux papes avant
la guerre, 4e réparer ton* les torts fa»> aux
prélata qui avaient 4tt prisonniers, et d'obéir en
tout au papa, lans préjudice, du l'Empire, Ces
articles furent jurée soiennellenient à Borne,
Mai* Frédéric aa repentit bientôt de ses conces-
sions, et fit savoir a. Innocent qu'il n'exécuterait
la traité qu'après avoir reçu dès lettrée d'absu*
luttai, le pape tredoute une nouvelle guerre et
s'enfuit à Qeaaa; de fo il écrit aux rois de
Brencft, d'Aragon et d'Angleterre pour leur de-
mander un aaile. Us refusèrent tous les trois,
et innocent dut se réfugier i Lion (W), ville
neutre qui appartenait à. son archevêque, Fré-
déric est alors excommunié pour la cinquième
fais* mais cela ne tuffit P°iut au pape. Suivant
las traees de Gre^oir* IX, tt ^semble un concile
général (premier de I^yon. troisième œcumé-
nique), y accusa l'empereur de parjure, de sa*
çrilége. et d'nérésie, («es. ambassadeurs de Fré-
déric, la juêti&eqt avec énergie, et reprochent
au pape se* usures, ses taxes sur le clergé et
d'autre* abua, Mais l'empereur était condamné
d'avance t aa déposition fut solennellement pro-
noncée. Frédéric était à Turin quand il apprit
cette nouvelle) il envoie aussitôt son tils Conrad
en Allemagne, et écrit à saint Louis pour se
plaindre de l'audace du pape, qui, de son côté,
pressait les princes allemands d'élire un autre
empereur. Saint Louis était loin d'approuver la
cnndujta d'innoeant; il eut avec lui quelques
entrevues à Clunj (U45 et 1246), mais sans
pouvoir réconcilier les deux ennemis, Pendant
que las arcbevéquea de Mayence et de Cologne
élisent roi des Romains Henri, landgrave de Tbu-
ringa, la pape excommunie Sancbe II, roi de forr
tugal et Jacques I er , roi d'Aragon. Cedernier avait
fait couper la langue l l'évèque de Qûrope pour
le punir d'avoir révélé la confession royale.
Saint Louis venait de partir pour I*. Terre Sainte ;
mais la croisade que la pape ptfcbait contre
Frédério nuisit beaucoup > celle du roi de France ;
car Innocent accordait pour toutes deux les
mêmes indulgence*. {^'Allemagne, divisée entre
|e pape et l'empereur, était en feu* les évêques
s'excommuniaient réciproquement : Frédéric re-
prend alors la route d'flaUa. Bans Ja. fouille, un
médecin, gagné par Innocent, tente del'empoison-
par (ltttu) ; il offre enfin la paix au pape, et meurt
la 13 décembre 1250. Aussitôt Innocent écrit en
Allemagne pour y maintenir la révolte, et en
Sicile pour tâcher d'usurper les droits de l'em-
pereur sur cette contrée. Une telle conduite lui
aliène tous les partis} il en est réduit à offrir le
INNOCENT 90»
trône d'Allemagne à, HaquJn, roide Jforvte, qui
répond publiquement qu'il veut bien combattre
les ennemis de l'Église, mais non ceux du pape.
Alors Innocent fulmine une nouvelle excommu-
nication contre la mémoire de Frédéric et contre
Conrad, son ûla, publie une croisade contre ce
dernier, et quitte Lyon le 19 avril 1251, pour
regagner Htaue. Conrad, débarqué à Pesai»,
allait» aidé des Vénitiens, prendre possession du
royaume da ftcjle, quand |j meurt (21 mai 1254),
laissant pour successeur Conradin, on enfant de
deux ans, dont Mainfrol, fils naturel de Frédéric,
obtient la tutelle, Mainfroi se soumit d'abord à
toutes les exigences du pape ; mais Innocent n'a-
vait pas renoncé à ses prétentions sur la Sicile.
Mainfroi s'en aperçut à temps; il se jette dans
tyocéra babitée par des Sarrasins, se met à leur
tète et bat les troupes pontificales dans plusieurs
rencontres. Innocent IV mourut sur ces entre-
faites. Son instruction, ses grandes connaissances
en droit, ne peuvent faire oublier son avarice
insatiable, son caractère bautain et inflexible,
son ambition démesurée, se* entreprises insen-
sées sur les droits des souverains , et surtout
les guerres sanglantes qu'il alluma et entretint
pendant les onge années de soq pontificat. On
prétend que c'est lui qui le Premier donna le cha-
peau rouge, aux cardinaux, Il a laissé : Appara-
tu* super (fccrçfales, in-fol., souvent réim-
primé* -r- JtePQtettate EccUs,\astieQ et Jurv-
4icti<we JmpçrHj — Qffkiufli in octavisfesti
fiativitatii £. tfax%#; ^ Interpretatianes
in Vetm Tetfamentuw. On trouve dix-neuf
lettres de ce papa dans les Conciles de Labbe,
t, XI, p, 59a à, 632; quarante-butt dans Yltqlïa
Sqçth d'Ugbelli, passim ; cinq dans X^Historix
de Duchesne, t. V, p. 4t? et 861. — Innocent IV
gut Alexandre JY pour successeur.
Alfred Franklin.
Labbe et Coatirt, Sacrosuncia Concilia, U7i, is toi.
Vp-fol. ; \. XI, p. «97 à 716. - UghelU, Jfqlia Sacrai
Venise, 1717, 10 vol. lu-fol. — Duchesne, Historiés Fran-
corum Scriptores, 1717, 5 vol. In-fol. ; t. V. — Brnys,
Uist. des Papes, 1789, 8 voL in-**; t. 111, p. ISS. -
n«;n«l01i ContinMOtion de florflRiw» Lucanes. 174T,
18 vol. In-fol. ; t. |I, p. «86 à S18. - Àlleti, Hist. des
Papes, 1776, a voL in-ll ; t. !•», p. 185. — Flenry, ma.
Ecclésiastique, 1767, 17 vol. in-4«;l. XVII, cb. uxm,
rr JoiaviMe, Mémoires, cpltect. PetltoÈ, l>« série, t. Il,
p. 78 à 111. — fit a Innocenta papœ IV, ex ms. Bern.
Guidonis ; Vitâ ejusdem scripta a /ratre Nicolao de
Ourpia; dais Muralovi, Berum italicansm Scriptores;
Milan, 17.S3, «7 vol. tn-fpl. ; t. H|, p. 689 cl M*. - J, Hart-
paapq, Pisjertatia, de Vita Innocenta ff,- 1788, ln-4». -
Ph. de Mornay, Hist. de la Papauté. l«lt, in-h, p. S7€
à 404.— CUoontiH, fitm et Mes gett» PQ»ttfcum Borna-
norwnitwa*) i<rn, T val. bi-IoLii,.)^ p. «S. — Paojo
Panza, r\ta del qrm Pçntefiçe Innocenzio Quarto;
Naples, 1601, tn-4°.
iifNOÇEBiTY (f «Tr€ PP CnA»AGNi ou de
Champ agmuco ) , cent quatre -vingt -onzième
pape, successeur de Grégoire X, pé à Moustier
en Savqie, en 1525.., élu le 20 janvier 1270, mprt
à Rome le 22 juin 1276. Pierre de Champagni
entra très-jeune dans l'ordre des Frères Prê-
cheurs, où il acquit bientôt une grande réputa-
909
HWOCKNT
910
tion sous le nom de Pierre de Tarentaise; il
succéda à saint Thomas d'Âquin dans l'ensei-
gnement de la théologie à l'université de Paris,
passa en 1272 sur le trône archiépiscopal de
Lyon , puis fut nommé évéque d'Ostie et grand
pénitencier. Élu pape dix jours après la mort de
Grégoire X, il se rendit aussitôt a Rome, et fut
couronné dans l'église Saint-Pierre, le 23 février
1276. Son premier soin fut de rétablir la paix
en Italie; il releva les Florentins des censures
prononcées contre eux par son prédécesseur, et
envoya en Toscane deux légats qui , unis aux
ambassadeurs de Charles de Sicile, parvinrent
à réconcilier les Lucquois et les Pisans. Enfin,
il était sur le point de décider Michel Paléologue
à confirmer l'acte de réunion fait au concile de
Lyon, quand la mort l'emporta après un ponti-
ficat de cinq mois et deux jours. Innocent V,
qu'on avait surnommé fantosmimus doctor,
a laissé des commentaires i Saper IV libros
Senfentiantm ; Toulouse, 1652, 3 vol., in-fol, ;
— Super Pentateuchum ; super Lucam; su-
per Epistolas PûuH* Cologne, 1478; Anvers,
1617, in-fol. — Divers traités : De Unitate
Formée ; — De Materia Cœlij — De Mternitdte
Mundi; — De Intellectu et Volttntate; et
quelques autres ouvrages manuscrits dont on
trouve les titres dans Quétif , Scriptores Ordi-
nis Prœdicatorum ; Paris, 1719, 2 vol., in*
fol. ; t. I er , p. 350. A. F.
Labbe, t. XI, p. 1007. - Bruys, t. III, p. tes. - Claco-
nlus, t. II, p. 203. - Raynaldi, t. III, p. 8OT * *0î. - Al-
letz, t. il, p, n. — Fleury, Hv. XVllI, cb. lxxxyi. —
A. du Chesue, Hist. des papes, 1653, 8 vol., In fol. ; t. If,
p. 808. — J.-B. de Glen, Hist. pontificale, Liège, 1600,
lu -4° ; p. 789. — Plfittna, Morte delta vite de i pontejùi „•
Venise , 1618, In-**, p. 174. — F Ha Innocenta pupse V,
ex ms. Bernardi Guidonis; dans Muratorl, t. III, p. 605.
ixxocfeHT vi (Etienne Acbér), deux cent-
troisième pape, successeur de Clément VI, et
résidant à Avignon, né an village dn Mont,
près de Pompadour (Limousin), érale 18 dé-
cembre 1352, mort le 12 septembre 1361 Ao-
ber avait professé le droit civil à Toulouse;
appelé successivement à l'évéché de Noyon et
à celui de Clermont, il fut créé cardinal en
1342, et devint deux ans après évéque d'Ostie
et grand -pénitencier. Après là mort de Clé-
ment TI, les cardinaux, craignant que son suc-
cesseur ne réprimât les abus ecclésiastiques,
rédigèrent un règlement qui, à cet égard, Hait
les mains du futur pape, et que tons jurèrent de
respecter. Le premier soin d'Innocent, après son
élection, fut d'annuler cet acte, qui restreignait
son autorité en la soumettant, sur certains points,
à la sanction des cardinaux ; puis H opéra trae
partie des réformes qu'exigeait depuis si long-
temps l'Église. Il obligea à la résidence les prélats
et les bénéficiera, révoqua les commandes, sus-
pendit les réserves qu'avait établies son prédé-
cesseur, mit nn terme k l'impunité que le meurtre
trouvait, à prix d'argent, auprès des officiers ec-
clésiastiques, et assigna des revenus aux audi-
teurs de la Rote pour laisser sur eux moins de
prise à la corruption ; enfin, il réduisit le luxe
de la cour pontificale et le faste des cardinaux*
L'état de l'Italie ne réclamait pas moins impé*
rieusement l'attention et l'énergie du pape : des
tyrans dominaient presque toutes les villes sou-
mises au saint-siége; Rome était le théâtre des
plus grands désordres; l'anarchie y régnait. Pour
ramener le pays à son obéissance, Innocent y
envoya, en qualité de légat, le cardinal Gilles
d'Albornos, accompagné de Nicolas Laurent, qui,
sous le pontificat précédent, avait exercé à Rome
une dictature éphémère. Le légat chercha d'a-
bord à réduire Jean de Vico, qui, s'intitulant pré-
fet de Rome, s'était emparé de quelques villes du
patrimoine de Saint-Pierre; excommunié par
Jean XXII et par Clément VI, il méprisait les
censures ecclésiastiques. Albornos l'excommunia
de nouveau et lui enleva la ville de Toscanelle.
Les Romains, à la nouvelle de ce succès, traitèrent
avec le légat, invoquèrent sa protection, et
Laurent reprit son ancienne autorité sous ie titre
de sénateur. Vers cette époque, Charles IV, em-
pereur d'Allemagne, sacré à Aix-la-Chapelle,
négocia avec lé pape pour être couronné à Milan
et à Rome, selon l'usage. Innocent y consentit,
mais en exigeant de lui la promesse de quitter
Rome le jour même de ta cérémonie. Charles IV
se sonmit à cette condition humiliante. Aussitôt
après son couronnement, il prétexta une partie de
châsse, et alla coucher à Saint-Laurent hors de»
murs. Cette condescendance lui fut amèrement
reprochée par le poète Pétrarque qui, dans une
lettre très-violente, l'accusa d'avoir abaissé sa
dignité d'empereur. La même année, Jean Pa-
léologue offrit au pape de soumettre l'Église
grecque à l'autorité du saint-siége ; pour prix
de son concours, il demandait des secours contre
Mathieu Cantacuzène ; mais cette condition, qu'In-
nocent ne put remplir, fit échouer la proposition.
Le saint-siége eut d'ailleurs bientôt besoin de
concentrer autour d'Avignon tontes ses forces
disponibles. Après la bataille de Poitiers, une
partie des troupes françaises se débanda, et, sous
la conduite d'Arnaud de Cervole, gentilhomme
du Périgord, se répandit dans la Provence, qu'elle
saccagea; les licenciements qu'amena la paix
de Brétlgnv grossirent encore leur troupe, qui
étendit ses dévastations et pilla la vine de Saint-
Esprit, située sur le Rhône, à sept lieues d'Avi-
gnon. Le pape, effrayé, prêche aussitôt une croi-
sade, mais sans succès; car le mauvais état des
finances empêchait de soutenir les fidèles autre-
ment que par des indulgences. Innocent VI mou-
rut à Avignon après tin pontificat de dix années;
les historiens louent sa droiture, sa charité et la
protection qu'il accordait aux gens de lettres.
Sous son pontificat, les Fratricelles, qui persis-
taient à attaquer l'autorité du saint-siége, su-
birent de nouvelles persécutions et deux d'entre
eux furent brûlés à Montpellier. Un frère mineur,
nommé Jean de Rochetaillade, eut le même sort
à Avignon, pour avoir prêché contre ka abus eo
ait
INNOCENT
912
clésiastiques et les envahissements de la papauté.
On a une lettre d'Innocent dans les Conciles de
Labbe, t XI, p. 1930 ; quatre dans YltaliaSacra
d'Ughelli, et deux cent chiquante dans le Thé-
saurus de D. Martène, t. II, p. 843 à 1072. —
Innocent VI eut pour successeur Urbain Y.
A. F.
Labbe, t. XI, P. 1MI à IMS. — Broya, t III, p. 464. —
Allets, t. II, p: »8. - A. du Chesne, t. II, p. Ml. — Rey-
naldl, t. VI, p. 871 à 688; VII, 1 à 77. — Flenry, lir. XX,
ch. ucxxxvi. — PiatJna, p. 1M. — De Glen, p. 819. —
VeUy, VUlaret et Oarnltr, t. IX, p. 49. - Martène, Thé-
saurus novus Jnecdotorvm; Paris, 1717, s vol. In-foL;
t H, p. 848. — ststnondl, Uist. des Français» 1844, 81 t.
in 8°; t. X, p. 897 à 886.
MHoeBHT ¥ii (Corne Meuorati), deux
cent dixième pape, successeur de Boniface IX ,
néà Sulmone,dans PAbruzze, en 1336, élu à Rome
le 17 octobre 1404, mort dans cette ville le
6 novembre 1406. On était au milieu du grand
schisme d'Occident; la lutte continuait entre les
papes.de, Rome et ceux d'Avignon; A la mort de
Grégoire XI (1378), les Romains, Irrités de voir
les papes tixrer la ville sainte au désordre et à la
misère pour aller voluptueusement s'ensevelir
dans les délices de la cour d'Avignon, avaient
réclamé avec. menaces un pontife italien; les car-
dinaux nomment le Napolitain Urbain iVI. Mais
bientôt, fatigués , eux aussi , du séjour de Rome,
ils déclarent que cette élection leur a été arrachée
par la violence; ils somment le nouveau pape
d'abdiquer, et, sur son refus, ils le remplacent par
Robert de Genève, qui prend le nom de Clé-
ment VII. L'Europe se partage entre les rivaux,
qui s'excommunient réciproquement, et une lutte
terrible commenee. Urbain meurt. Boniface IX
prend sa place; Clément VII meurt, Benoit XIII
lui succède, et la guerre continue. La France
et l'Angleterre, impatientes de mettre fin au
schisme, se réunissent, et, au nom de la paix,
supplient les deux papes d'abdiquer la tiare.
Ceux-ci se cramponnent au saint-siège; mais un
violent accès de colère emporte Boniface IX. Les
cardinaux s'assemblent et jurent sur l'Évan-
gile que celui d'entre eux qui sera élu emploiera
aussitôt tous les moyens propres à rendre la
paix à l'Église, sans excepter même l'abdication.
Les suffrages se portent sur Cosme Meliorati qui
prend le nom d'Innocent YII. C'était un bon
choix. Innocent avait passé par tous les grades
de l'état ecclésiastique, et avait successivement
occupé les sièges de Ravenne et de Bologne;
enfin , ce qui valait mieux dans les circonstances
où se trouvait l'Église , il était doux, affable,
rompu aux affaires et d'uneconduiteirréprochable.
Innocent notifia son élection à tous les princes
de l'Europe dans des lettres qui respirent le plus
ardent désir de la paix ; Benoit XIII y répond
en accusant son concurrent de parjure, et la fac-
tion, de Benoit excite à Rome des séditions si
violentes qu'Innocent doit se sauver à Viterbe,
après. avoir plus d'une fois couru le risque d'être
massacré. Les deux papes recommencent leurs
protestations en faveur de la paix, et s'accu-
sent i^proquement de mettre leur propre in-
térêt au-dessus des intérêts';de l'Église. Inno-
cent peut enfin rentrer à Rome devenue plus
tranquille. Il y mourut, d'apoplexie suivant tes
uns, par le poison suivant les autres, après m
pontificat de deux années. Les cardinaux se réu-
nirent , et chacun s'engagea solennellement, s'A
était élu, à renoncer à son droit aussitôt qoe
Benoit XIII renoncerait au sien; le choix se
porta sur Grégoire XII; on a vu (t XXI,
page 822 ) de quelle manière il tint son serment
On trouve une lettre d'Innocent Vil dans Yltaha
Sacra d'Ughelli, t. I er , p. 1381; on a en encore
de lui Oratio de Ecclesiastica Unione; — ip-
probatto régula fratrum et sororum depm-
tentia ordinis S. Dominici. A. F.
Labbe, t. XI, p. 9089. — Bruys, t. III, p. 688.— BayuMi,
L VIII, p. 119 à 166. - Fleury, lir. XX, ch, 99. - a. du
Cbesne, t. II, p. 998. - J.-B. de Glen , p. 880 — AOetz,
t II, p. 198. — Platlna, p. 906. — Sismondi , L XU,
p. Ml. - Santo-Domingo, Esprit des Papes; 1889, tu-*;
p. 178. - Malmbonrg, Hlst. du grand Schisme d'Oc-
cident. - Martène, Thésaurus, t. II. — Léoaard
Aréttn ( Bruni d'Arezzo ), De Rébus ItaUeis et Bpislolx
famiiiares. — Jnvénat dea Uralns; Bist, de Charles rn.
— Ciaconins , t. II, p. 71t. - Lenfant, Hist. du Concile
dePise.
isnocKsrriu (Jean-Baptiste Cmo) y deux
cent vingt-deuxième pape, successeur de Sixte IV,
né à Gênes en 1432 , élu le 24 août 1484 , mort
le 25 juillet 1492. La famille d'Innocent était
originaire delà Grèce ; son père s'appelait Aaroo;
lui-même était resté longtemps au service d'Aï-
fonse d'Aragon, roi de Naples. Paul II 1m
donna l'évèché de Savone et Sixte IV celui de
Melfe , et il fut fait cardinal en 1453. Sa con-
duite avait été fort déréglée; il avait eu sept
enfants de différentes femmes; il était d'ailleurs
marié avant son entrée dans les ordres. Des
troubles sérieux suivirent la mort de Sixte IV,
et l'élection du nouveau pape fut loin d'être
édifiante. A la tête des intrigants qui agitaient
le conclave était le chancelier Borgia, si hon-
teusement célèbre depuis sous le nom d'A-
lexandre VI ; ses brigues en faveur de Cibo réus-
sirent. Innocent VIII acheta la tiare moyennant
des bénéfices, des légations, des palais et des
sommes considérables ; c'est donc par allusion
plutôt à son .nom qu'à sa conduite» qu'il prit
pour devise ces paroles du psaume 25 : Ego
autem in innocentia mea ingressus sum. Son
premier soin fut de travailler à réconcilier les
princes italiens et à rapprocher du saint-siége
ceux que son prédécesseur en avait éloignés. Mais
Bajazet, à la tête des Turcs, poursuivait ses
conquêtes, et ses nouveaux préparatifs sem-
blaient menacer l'Italie. Le pape, alarmé, écrit à
tous les princes chrétiens, et les invite à terminer
leurs différends, pour s'opposer à l'ennemi com-
mun du christianisme , et à envoyer de l'argent
s'ils ne sont pas en mesure de lever des trou-
pes. Des sommes immenses furent ainsi recueil-
lies par le saint-siége, qui n'entreprit rien contre
les Turcs, sous prétexte que l'on ne pouvait ar-
013
INNOCENT
914
rôter l'ennemi sans la participation des princes al-
lemands ; et les guerres qui divisaient Mathias, roi
de Hongrie, et l'empereur Frédéric, Albert de Bran-
debourg et Othon de Bavière, ne leur permettaient
pas de prendre part à la croisade. C'est contre le
roi de Naples que ces richesses furent employées :
Ferdinand I er refusait de payer au pape le tribut
accoutumé de quarante mille écus d'or, soute-
nant que la reine Jeanne n'avait cédé au saint-
siège le comtat d'Avignon que pour remplacer
cette redevance. Ferdinand commence par apaiser
les seigneurs de son royaume ; il s'efforce en-
suite d'engager Innocent dans une guerre civile;
il met tout en œuvre pour soulever le peuple et
les cardinaux contre le pontife et faire déclarer
son élection irrégulière. Innocent place son
armée sous le commandement de San-Severino ;
mais déjà les environs de Rome ont été saccagés,
Florence et Milan tiennent pour Ferdinand,
Venise et Gènes pour le pape ; l'Italie est en feu.
La paix se conclut enfin, mais le roi de Naples
refuse d'exécuter les clauses du traité* Innocent
l'excommunie et le déclare privé de son royaume
au profit du roi de France (Charles VIII), qui
prétendait y avoir des droits. Ferdinand se rit
de cette sentence, arme le roi de Hongrie contre
le pape, et fait égorger, après un repas, quel-
ques seigneurs romains. Innocent prononce
contre lui deux nouvelles sentences d'excom-
munication ; puis, ne pouvant réussira organiser
une croisade pour soutenir le saint-siége dans
cette lutte, il presse Charles VUI de venir prendre
possession du royaume de Naples, et Ferdinand
se soumet en apprenant les préparatifs faits dans
ce but par le roi de France:
Les Turcs étaient toujours menaçants. Zizim,
pour fuir la colère de Bajazet, son frère, avait
dû se réfugier à Rhodes, et le grand maître
(d'Aubusson) le faisait garder en France. La
plupart des princes désiraient avoir Zizim en
leur pouvoir; d'Aubusson le livra au pape,
contre le chapeau de cardinal. Zizim fut pré-
senté au pontife dans un consistoire public par
l'ambassadeur de France, mais on ne put le
décider à baiser les pieds du pape. Une fois
maître de Zizim, Innocent déclare qu'il est résolu
à une guerre acharnée contre les Turcs ; tous
les princes chrétiens sont prévenus : on convient
que chacun contribuera à cette sainte croisade
contre l'infidèle en envoyant des troupes, des
armes , ou de l'argent, et que le pape pourra
partout lever les annates et les décimes. Sur
ces entrefaites, on arrêta à Rome un misérable
nommé Macrin, qui avoua être envoyé de Constan-
tinople par Bajazet pour tuer Innocent et Zizim ;
par ordre du pape , Macrin fut déchiré avec
des tenailles rougies au feu. Bajazet ne re-
nonça point à ses projets contre son frère; il
dépêcha un ambassadeur à Innocent pour lui
proposer une alliance et lui offrir cent vingt
mille écus d'or s'il veut retenir Zizim en prison.
L'ambassadeur turc est reçu à Rome en grande
pompe ; des officiers du saint-siége vont au-devant
de lui ; il est admis en audience publique en '
présence de tout le sacré collège. Innocent ac-
cepte l'indigne marché qu'on lui offre, et en
reçoit le prix , conduite d'autant plus odieuse
que le Soudan d'Egypte venait de demander
Zizim pour le mettre à la tête de l'armée qui
marchait contre Bajazet ; il proposait, en échange,
de rendre Jérusalem aux chrétiens, et de re-
mettre au pape toutes les conquêtes que l'on
ferait sur les Turcs. Bajazet, du reste, se montra
généreux envers son complice : le 29 mai 1492
il lui envoya le fer de la lance dont on avait
percé le flanc de Jésus-Christ sur la croix ; il
provenait des trésors que Mahomet II avait re-
cueillis après la prise de Constantinople. Tout
le clergé alla en grande cérémonie recevoir cette
relique, qui était en Europe la troisième de son
espèce ; car l'empereur d'Allemagne croyait l'avoir
à Nuremberg et le roi de France à la Sainte-Cha-
pelle. En 1491, Innocent, à la suite d'une attaque
d'apoplexie, avait perdu beaucoup de sa liberté
d'esprit; il eut dès lors un pressentiment
de sa fin prochaine. Il se prépara à la mort
avec résignation et se reprocha les immenses
richesses qu'il avait accumulées sur ses enfants
légitimes et naturels. — Innocent VIII avait con-
firmé (1485) l'institut des religieuses de la Con-
ception, que Béatrix de Sylva avait fondé à
Tolède. Il canonisa (1485) Léopold d'Autriche, ~
mort au douzième siècle en odeur de sainteté;
il condamna les thèses de Jean Pic de La Miran-
dole (1487) , autorisa la réunion à la couronne
d'Espagne des trois ordres militaires de Cala-
trava, de Saint- Jacques, et d'Alcantara( 1488) ; il
consentit, sur la demanded'Henri VII, à diminuer
les privilèges du droitd'asile en Angleterre (1488) ;
il approuva la Confrérie de la Miséricorde, insti-
tuée à Rome pour assister les criminels con-
damnés à mort et avoir soin de leur sépulture
( 1490 ). On a deux lettres de ce pape dans
Vltalia Sacra d'Ughelli, t. I, p. 710 ; V, 948.
Innocent VIII eut Alexandre VI pour successeur.
Alfred Franklin.
Labbe, t. XIII, p. 1*61. — Braysj t IV, p. t«s. -
Raynaldlj € XI, p. 98 à 107. - Fleury, liv. XXIII,
cb. xv. — A. Ducheane , t. II, p. 350. — J.-B. de Glen,
p. 85S — AUetz, t. 11, p. 186. — Santo- Domingo, p. soo.
— Sismondl, t. XIV, p. 60»; XV, 8. — Ciaconius, t. lir,
p. 90. — Ph. de Mornay , p. 609. - F. Serdonatl, Fita
e Fatti d'innocenzo FUI s Milan, 1819, tn-8°. — Léger,
Hist. des Églises vaudoUe$> t. H. — De Prades, Abrégé
de rBist. ecclésiastique, Berne (Berlin ), 1766. t t. in-12;
t. H, p. 193. — F.-M. Vlalardo, Istoria délie Vite de* Som-
mi Ponteftcii Innocenzo FUI....,; 1618,ln-fol. - De
Potter, Esprit de l'Église, îsit, 8 v. ln-8« ; t. iv, p. 183.
— Macquer et Lacombe, Abrégé de l'Hist. ecclé$. % 1757,
îv. tn-8°; t. H, p. «98. — Comlnei, H émoiret, llv. vu,
en. I".
innocent ix ( Jean- Antoine F kCBnuBm),
deux cent trente-neuvième pape, successeur de
Grégoire XIV, né à Bologne en 1519, élu le
30 octobre 1591 , mort le 30 décembre de la
même année. Le court pontificat d'Innocent IX
fut employé tout entier en réformes intérieures ;
915
INNOCENT
916
le nouveau pape se conduisit avec tant de pru-
dence qu'il sut contenter en même temps la
noblesse, le peuple et les ministres étrangers.
Rempli d'un ardent désir de soulager la misère
des Romains , il tint après son couronnement un
consistoire où il exposa les desseins qu'il avait
conçus dans ce but. Il voulut qu'on établit une
caisse de secours pour subvenir aux besoins du
peuple et du saint-siége, qu'on diminuât les im-
pôts et qu'on prit toutes les mesures néces-
saires pour faire renaître l'abondance ; il exprima
l'intention de faire nettoyer le port d'Aucune
pour faciliter la navigation , et de creuser un
canal près du château Saint- Ange, afin de mettre
la ville de Rome à l'abri des fréquentes inonda-
tions du Tibre. Malheureusement la mort le sur-
prit avant qu'il eût eu le temps de mettre ces
projets à exécution. Innocent IX, quoique d'un
extérieur grave et sévère, était doux et affable ; ses
mœurs étaient très-pures et sa sobriété extrême.
Il eut Clément VIII pour successeur. A. F.
Lskbbe, t. XV, p. UM. ~- Brajs t, V, p. 100. - AUetx,
t. II. p. 3SS. — Du Chesne» t. II, p. 4M. - De Gieo, p. 888.
- FÎeury, Hv. XXVI, ch. 179. — Slsmondl, t. XXI, p. 1**.
— ClacoDius, t. IV, p. S9S. — Ranke, Hlêt. de la Papauté
pendant le seizième et le dix-septième siècle, traduction
de J.-B.HaUer, 1838, fi vol. in 8°; t. 111. p. «78. -Palma-
Cayet, Chronologie Novenaire et Journal de l'Estoile;
dans la Collection Pet» tôt, t. XL, p. 343; XLVI, «00. -
B. JusUntani, OraHo habita infunere Innoeentii IX;
Rome, 1598, Uh4°.
innocent x ( Jean - Baptiste P/ucnu),
deux cent quarante-cinquième pape, successeur
d'Urbain VIII, né à Rome, en 1579, élu le 15 sep-
tembre 1644, mort le 7 janvier 1655. Le conclave
qui porta InnoeentX au trône pontifical fut fort
agité : les Barberini, neveux d'Urbain VIII, pres-
saient l'élection de Sachetti ; sur l'opposition du
parti espagnol, ils présentent Ferenzola, car-
dinal de Saint-Clément ; le parti français le re-
poussa parce qu'il était connu comme ennemi de
Maiarin. Grâce à cette double exclusion , Panfili
put être élu ; il avait été successivement avoeat
consistorial, auditeur de la Rote , nonce à Naples,
dataire dans la légation de François Barberini
en France et en Espagne ; enfin Urbain VIII l'a-
vait créé cardinal en 1629. Les historiens sont
loin d'être d'accord sur la personne et le carac-
tère d'Innocent X ; les ans le représentent comme
un homme de haute stature, d'un regard impo-
sant, d'une démarche grave et majestueuse , unis
à un naturel hardi , à une âme élevée , à une pé-
nétration merveilleuse; les autres disent qu'il
était laid , difforme, faux, artificieux , ignorant,
et qu'il contrefaisait admirablement en public
Une dévotion qu'il raillait en secret. Quoi qu'il
en soit, Innocent X , ennemi déclaré du cardinal
Mazarin , ne tarda pas à rompre la paix que la
France avait négociée entre le saint-siége et le
duc de Parme; l'occasion se présenta d'elle-
même. Innocent X nomme à Vévêché de Castro
un évêque dont Rainuce II, duc de Parme, avait
eu à se plaindre ; celui-ci prie le pape de faire un
autre choix, l'évêque nommé appuie lui-même
cette demande, Innocent X n'a aucun égard à ces
représentations ; l'évêque est sacré , et il allait
prendre possession de son siège quand il meurt
assassiné» Ce crime avait été commis avec de
telles précautions que le coupable ne put être
découvert. Innocent en accuse Rainuce , fait dé-
molir la ville de Castro et élève sur son empla-
cement une pyramide portant cette inscription :
Qui fit Castro; en même temps le duc est dé-
claré déchu de son trône. Innocent montra la
même énergie vis-à-vis des Barberini, qui avalent
appuyé son élection ; irrités de voir le pape dis-
penser à ses neveux des grâces et des fonctions
auxquelles ils croyaient que leur dévouement
leur avait donné droit , ils se plaignirent haute-
ment ; le pape répondit en les accusant de con-
cussions et en dirigeant contre eux des pour-
suites. Le cardinal Antoine Barberini, plus exposé
que les autres en cette circonstance à cause de
ses fonctions de camerlingue, implora l'appui
du cardinal Mazarin, et se réfugia en France, on
il rat reçu avec distinction ; il gagna même si
bien la cour qu'il fut pins tard (1653) nommé
archevêque de Reims. Mais Innocent fit aussitôt
saisir ses biens , et distribua ses titres et ses
charges à de nouveaux favoris. François Barbe-
rini n'avait pas tardé à rejoindre son frère en
France ; Innocent publia contre eux une bulle
terrible (21 février 1646): elle déclarait que les
cardinaux qui s'éloigneraient sans autorisation
verraient tous leurs biens confisqués ; s'ils n'é-
taient pas revenus six mois après la publication
de la bulle, ils seraient dépouillés de leurs bé-
néfices, de leurs emplois, et l'entrée des églises
leur serait interdite; enfin, s'ils persistaient dans
la désobéissance, ils seraient privés du chapeau
de cardinal , et le sacré-collége lui-même ne pour-
rait le leur rendre. Tous les cardinaux alors ab-
sents de l'État ecclésiastique se trouvaient at-
teints par cette bulle, qui dérogeait à tous les
canons , à toutes les constitutions apostoliques et
à toutes les décisions des conciles. Innocent
avait ainsi trouvé moyen d'attaquer à la fois les
Barberini et leur protecteur le cardinal Mazarin,
qui ne se souciait nullement d'aller vivre à Rome
en simple particulier; il montra d'ailleurs qu'il
était assez fort pour braver de tels coups. Le par-
lement de Paris fut saisi de cette bulle par suite d'un
appel comme d'abus, et M. Talon, avocat général ,
la signala comme nulle et abusive. Aussitôt un
arrêt du conseil défend d'envoyer désormais de
l'argent à Rome pour l'expédition des bulles , et
on menace le pape de lui enlever Avignon. Quel-
ques préparatifs ont lieu dans ce but ; Innocent
change alors de ton , cherche à se réconcilier avec
les Barberini, et notifie bientôt, qu'à la considéra-
tion du roi très-chrétien qui les avait honorés de
sa protection , il leur rend leurs biens et leurs
dignités.
Le soulèvement de l'Italie méridionale fournit
à Innocent X une nouvelle occasion de s'incliner
devant la puissancede Mazarin. L'Espagne, ruinée
91T
WN0CKNT
018
par la guerre, mit dû Obliger les vice-roi» de
Naples et de Sicile à surcharger le peuple d'im-
pôts; une révolte éclate à Naptes et à Palerme ;
Henri If, duc de Guise, était alors a Rome, où il
sollicitait la cassation de son mariage avec la
comtesse de Bossu, afin de pouvoir épouser ma*
(lemoisalle de Pons. Henri de Guise, descen-
dant du roi fiené par les femmes, avait des droits
sur )« royaume de Naples; les Napolitains rap-
pellent à leur secours et s'offrent h lui, Innocent,
espérant plaire h 1% France , engage vivement le
jeune prince à tenter l'expédition ; elle échoue
par la volonté de Mazarin, qui refuse de la sou-
tenir, Innocent donne alors le chapeau à pierre
Mazarin, archevêque d'Aix et (rare du cardinal-
inini^ti'cçpmptantparsonînflnencefaire restituer
pjqjntrino au mince fcudovisio, son neveu, Mar
zarjn se montra fort peu sensible & une faveur
qu'on lui avait fait trop longtemps attendre; il
remercia h peine le pape, et ne fit rien en faveur
de Ludovtsio. Il est temps de parler d'une femme
qui joua un grand rôle squs le pontificat d'Inno-
cent X : la liaison de dona Olympia Maldacbjni
avec le pape, son beau-frère, datait de loin ; cette
femme avait su prendre sqr lui un ascendant qui
grandit encore avec le temps. Bruys (t. V,
p. 202 ) dit qu'elle lui avait appris l'art de tout
dissimuler, sauf l'amour qu'il avait pour elle.
Les choses en vinrent au point que dona Olympia
sembla occuper seule le trône pontifical; elle
recevait les placées et entendait les plaintes du
peuple, donnait audience, faisait et abrogeai \
des règlements- D'une avarice sordide, elle se
servait, pour satisfaire cette passion, de l'empire
qu'elle avait sur l'esprit du pape , et vendait au
plus offrant les charges civiles et ecclésiastiques.
Olympia fut bientôt l'objet de la haine publique;
en 1649, les satires et les pamphlets dirigés contre
le pape et sa belle-sœur devinrent si nombreux
et virulents , qu'Innocent dut se résoudre à la
renvoyer ; mais il la remplaça presque aussitôt
par la princesse de Rossano, sa nièce, et les sa-
tires recommencèrent. Cette nouvelle favorite
activa la pomination au cardinalat du chef de la
Fronde, Paul de Retz, coadjuteur de Paris (1652).
Marçarjn, irrité, fait enfermer le nouveau cardinal
au château de Vincennes; le pape envoie à Paris
l'arphevêque de Lyon pour exiger que le juge-
ment du prisonnier soit réservé au saint-siége;
mais le prélat trouva à Lyon une défense de
passer outre. L'archevêque de Paris mourut
sur ces entrefaites, et sa mort fit naître une
autre contestation : le pape et le cardinal Ma-
zarin prétendaient tous deux au droit de pour-
voir au gouvernement du diocèse ; on convint
que le premier choisirait pour grand vicaire
un des sujets que proposerait le second. Une
lutte plus grave se préparait : la fameuse dis-
pute sur la grâce, entre les jésuites et les jan-
sénistes, se compliquait chaque jour. Dès 1650,
Habert, évéque de Vabres, avait dénoncé au
pape cinq propositions attribuées à Jansenius,
et qui, l'année précédante, avaient été déférées
à la faculté de théologie ; Innocent établit pour
les examiner une congrégation particulière qui
tint sa première séance le 20 avril 1651 ; de
Saint-Amour et quelques autres docteurs, que
les jansénistes avaient envoyés à Rome, furent
entendus le 19 mai 1653. Mais le P. Annat, jé-
suite, nous apprend que la décision était déjà prise
et rédigée, Enfin le 30 mai Innocent donna une
bulle (Cum occasione) pour la condamnation
des cinq propositions, qui y sont qualifiées cha-
cune en particulier et déclarées fausses , héré-
tiques , scandaleuses , impies , et blasphématoi-
res. Louis XIV, par lettres patentes du 4 juillet,
autorisa la réception de cette bulle en France;
le H les évoques présents à Paris l'acceptèrent
à l'unanimité, et dressèrent le formulaire d'ac-
ceptation, qui fut envoyé à tous les prélats du
royaume. Innocent X ne survécut pas longtemps
à la conclusion de cette affaire. Accablé de vieil-
lesse, tourmenté par de violentes attaques de
goutte, incapable de se tenir debout, il rappela
auprès de lui dona Olympia, qui eut bientôt re-
pris sur lui toHt l'empire qu'elle avait eu précé-
demment; elle sut lui inspirer la crainte que des
ennemis ne cherchassent à l'empoisonner, et dès
lors il se confia tout entier à elle. Dona Olympia lui
donnait à manger, prenait ses repas auprès du lit
du vieillard, et défendit qu'on l'approchât en son
absence. A la fin de décembre, les médecins le
condamnèrent; personne n'osant lui annoncer
son état, le cardinal Azzolina en chargea un
théatin, confesseur du pape. Cette nouvelle
sembla réveiller Innocent de sa torpeur; il donna
sa bénédiction à ses neveux et nièces, puis aper-
cevant près de son Ut le cardinal Sforce, 4 il lui
dit : « Vous voyez où vont aboutir toutes les
grandeurs pontificales. » Il ordonna ensuite qu'on
laissât ouvertes pendant trois jours les portes du
palais, afin que tout le monde pût approcher de
son corps. 11 mourut dans la nuit du 6 au 7 jan-
vier, âgé de plus de quatre-vingts ans. U avait fait
bâtir a Rome deux magnifiques églises, et laissa
des trésors immenses, qui furent d'un grand se-
cours à Alexandre VII, son successeur. On a im-
primé à Paris : Décret du pape Innocent X qui
condamne, cette proposition : Saint Pierre et
saint Paul sont deux chefs de V Église qui
n'en font qu'un ; 1647, in-4°; — Bulle d'In-
nocent Xoii sont définies et déterminées cinq
propositions en matière de foi , avec la décla-
ration de S, M* pour l'exécution de la bulle;
1653, hH*. Alfred Franklin.
Bruyfl, t. V, p. «M. — A. Du Cbesne, t. II, p. 83*. —
Aanke, t. IV, p. fis. - Alletz, t, II. p. 899. — De Prades,
i. II, p. atû. - De Polter, t. IV, p. Ml. - Ciaconius,
t. IV, p. 64*. - Slsmondl, t XXIV, p. 78. - Relation des
Délibérations du clergé de France sur la Constitution
et sur le Bref de If. S. P. le pape Innocent X ; Paris, îew,
ia-fol. - De Latane, Défense de les Constitution du pape
Innocent X et de la Foi de l'Église; 1688, in-4°. - De
Electione.lnnoeentii X; Helmeataedt, 1651, in-4°. — An-
érsa TaurelH, De novistima Elections Innocenta X ,-
Bologne, 1M4, la-fol. — Fie de madame Oiyyipe Mal'
daçHni, qui a gouverné l'Église pendant le pontilcat
919
INNOCENT
920
d'Innocent X; AmterJam, Mil, ta-ia, - Mémoires de
Fontmaw-Mareuil; dut ta Collection Petïtot, i* série,
L U, p. tlO à SSl. — O. Talon, Mémoires, 17*1, 8 vol.
in-8° ; t. III, p. «M à M9 ; IV, i à 4t. - Aubéry. Hist. du
cardinal Mazarln , livre II. — Mémoires du cardinal de
Bel*, llrre III. - De Harrey, Hist. de Louis XI r. - Mé-
moires d'Henri de Guise; Paria, 1671, in-ii, livre 1". —
L. de Saint-Amour, Journal de ce qui s'est fait à Rome
dans l'affaire des cinq propositions; Paria, 1661, tn-fol.
- J.-C Botsteaacher, Historia Innocenta X ; 1676, in-*».
innocent xi ( Benoit Odescàixhi ) , deux
cent quarante-neuvième pape, successeur de
Clément X, né à Corne, dans le Milanais, en 161 1 ,
élu le 10 septembre 1676, mort le 21 août 1689.
Odescalchi avait failli être élu au conclave précé-
dent ; l'austérité de ses mœurs, sa sévérité avaient
seules effrayé les cardinaux, qui lui préférèrent
Clément IX. La famille d'Innocent XI s'était en-
richie dans le commerce; lui-même, après avoir
fait ses études chez les jésuites, avait suivi
quelque temps la carrière des armes ; à la suite
d'une blessure assez dangereuse, il se fixa à
Rome, et entra dans les ordres. Urbain Vin le
fit successivement protonotaire apostolique, pré-
sident de la chambre, commissaire de la pro-
vince de la Marche et gouverneur de Macerata,
Innocent X le créa cardinal en 1647, nomination
due à l'influence de dona Olympia ( voy. Inno-
cent X). Pendant les premières années de son pon-
tificat, Innocent XI s'efforça de rétablir la discipline
ecclésiastique, de corriger les abus qui s'étaient
glissés dans l'Église, de faire revivre chez le
clergé la science et la vertu ; il défendit sévère-
ment l'us.ure aux juifs ; il renvoya dans leurs
diocèses tous les évêques qui habitaient Rome;
il pourvut libéralement aux besoins des pauvres,
et assijma une pension considérable à la reine
Christine , qui s'était réfugiée au pied du Va-
tican; enfin il envoya des nonces en Espagne , en
Portugal et en France pour engager ces États à
la paix. A l'égard du dernier, l'exhortation eut
peu de succès; le pontificat d'Innocent XI fut
presque exclusivement rempli par des démêlés
avec la France, et le caractère hautain du pon-
tife dut plus d'une fois s'humilier devant le fier
despotisme de Louis XIV. Les querelles com-
mencèrent à l'occasion des franchises : à Rome
les palais des ambassadeurs ne jouissaient pas
seuls de l'inviolabilité; ce droit s'étendait encore
sur toutes les places et rues qui les entouraient;
aucun officier de police ne pouvait s'y montrer.
Plusieurs papes avaient vainement tenté de ré-
former cet abus; les bulles rendues à cet égard
par Jules II, Pie IV, Grégoire XIII et Sixte V
étaient restées sans exécution. Alexandre VII
ayant laissé violer les franchises, Louis XIV
saisit Avignon , et força le pape à céder. Inno-
cent XI, inflexible dans ses volontés , osa rallu-
mer la querelle : il publia une déclaration qui
abolissait les franchises et autorisait les gens
chargés de la police à pénétrer partout pour
exercer leurs fonctions. Louis XIV déclara qu'il
ne renoncerait jamais à aucun droit de sa cou-
ronne; les autres nations promirent de céder dès
que la France leur en donnerait l'exemple ; la que-
relle s'assoupit cependant , mais pour se réveiller
plus vive encore dix ans plus tard. Un nouveau
démêlé venait de naître. On sait que la régale
était , entre les mains du roi , le droit de toucher
les revenus des évêchés du royaume , et de con-
férer, pendant la vacance des sièges, les bénéfices
qui n'ont point charge d'âmes. Louis XIV en 1673
avait rendu un édit pour étendre le droit de ré-
gale dans les provincesdeLanguedoc, de Guyenne,
de Provence et de Dauphiné, qui jusque-là en
avaient été exemptes; cet édit ayant soulevé
quelque opposition, Louis XIV en donna un se-
cond en 1675; cette fois les évêques d'Alet (Pa-
villon) et de Pamiers (Cauiet) protestèrent
seuls; le roi fit saisir les revenus de leurs évê-
chés , et nomma", par droit de régale , aux béné-
fices vacants dans leurs diocèses ; les deux évê-
ques excommunient les nouveaux benéficiers et
portent plainte à Innocent XI. Le pape prend
parti pour les évêques, et envoie au roi un bref
(27 décembre 1679) dans lequel il Y exhorte à
rétracter et abolir V ordonnance et tout et
qui a été fait contre la liberté et les droits
de V Église; autrement, le pape craint très-fort
que le roi n'encoure l'indignation céleste.
Louis XTV n'en tint aucun compte. La mort des
évêques d'Ales et de Pamiers ne termina pas le
différend : le chapitre et les grands vicaires ré-
sistaient toujours; de son coté l'archevêque de
Toulouse, métropolitain de Pamiers, nomme on
vicaire général qui défend le droit de régale, et
le parlement de Toulouse fait le procès au Père
Cèle, qui se disait grand-vicaire du. diocèse de
Pamiers ; du fond de sa prison , Cèle casse tontes
les sentences de l'archevêque , et excommunie le
grand-vicaire et le promoteur nouvellement nom-
més. Deux brefs du pape viennent encore sou-
tenir les anti-royalistes et envenimer la querelle.
Le clergé de France demandait un concile géné-
ral pour maintenir les droits de l'Église gallicane
et de l'État; le roi convoque une assemblée gé-
nérale. L'assemblée déclara ( 3 février 1682)
qu'elle approuvait l'extension du droit de régale;
qu'elle approuvait l'édit du roi. L'assemblée dé-
cida qu'elle écrirait à Innocent, au nom de tout
le clergé de France, pour lui faire connaître cette
décision. En attendant la réponse de Rome, l'as-
semblée continua ses séances ; résolue à mettre
un terme aux empiétements du saint-siége et à
fixer d'une manière solennelle la doctrine de l'É-
glise gallicane sur la puissance temporelle des
papes , leur infaillibilité et l'indépendance du roi,
elle rendit ( 16 mars) la fameuse déclaration de
1682 , dont l'article 1 er met les conciles généraux
au-dessDsdUpape; l'article 2 établit que le tem-
porel des rois ne peut être atteint par les pontifes
ni les sujets déliés par eux du serment de fidélité ;
l'article 3 limite la puissance papale par l'autorité
des canons apostoliques ; l'article 4 nie TiiifaiUi-
bilité du pape et reconnaît celle des conciles
œcuméniuues. Louis XIV défend d'enseigner en
921
INNOCENT
922
Franee toute antre doctrine. A cette nonrelle, In-
nocent XI tient un consistoire solennel, condamne
les évêques et fait brûler ignominieusement les
quatre propositions; puis il adresse à rassem-
blée ( 1 1 avril 1682.) un bref qui annule toutes les
décisions qu'elle a prises. En même temps Inno-
cent refuse d'accorder ces bulles aux ecclésias-
tiques de second ordre qui avaient assisté à ras-
semblée et qui venaient d'être nommés évêques.
Louis XIV, de son côté, fait défendre de se pour-
voir en cour de Rome pour avoir des bulles, et
déclare en appeler au prochain concile à l'égard
de tout ce que le pape pourrait entreprendre
contre les droits de la couronne de France. Les
années suivantes furent marquées par la révo-
cation de l'édit de filantes et les dragonnades
contre les protestants , par la condamnation pro-
noncée à Paris contre le dominicain François Ma-
lagola, qui , dans une thèse , avait affirmé la sou-
veraineté temporelle et spirituelle du pape , enfin
par les lois somptuaires d'Innocent, qui, sous
peine d'excommunication, ordonna aux femmes
de se couvrir le sein et les épaules jusqu'au cou,
et les bras jusqu'au poignet. Le 12 mai 1687,
le pape rallume la querelle des franchises par un
bref qui les abolit de nouveau et excommunie
ceux qui prétendaient les conserver. Louis XIV
ordonne au marquis de Lavardin , son ambassa-
deur, de ne pas céder, et le marquis fait son
entrée à Rome ( 16 novembre 1687) en homme
bien résolu d'exécuter les ordres de son maître;
il avait un cortège de huit cents personnes armées ;
les douaniers se présentent pour visiter les ba-
gages de Son Excellence : on les menace de leur
couper le nez et les oreilles. Innocent, voyant
qu'on bravait son autorité jusque dans Rome, pré-
tendit que, en vertu du bref, Lavardin était notoi-
rement excommunié et résolut de le traitercomme
tel. Lavardin demande une audience an pape,
qui la refuse ; il annonce l'intention d'aller à Saint-
Jean-de-Latran : le pape donne ordre de cesser
le service ; l'ambassadeur entre le jour de Noël dans
l'église Saint-Louis, paroisse des Français : le pape
interdit l'église et le clergé (26 décembre 1687).
L'ambassadeur proteste contre cette sentence :
Louis XIV, irrité, renvoie l'examen de l'affaire au
parlement, qui reçoit l'avocat général appelant
comme d'abus contre la bulle du pape , et supplie
le roi de tenir un concile national , afin d'aviser
aux moyens de faire cesser les désordres pro-
duits par la situation de plusieurs évêchés aux
titulaires desquels le pape refusait des bulles.
Les archevêques et évêques présents à Paris
s'assemblèrent et se prononcèrent en faveur de
l'appel au. prochain concile; le clergé de Paris et
l'université se joignirent à eux et soutinrent
énergiquement les intérêts et lesdroitsde l'Église
gallicane. On s'assura de la personne du nonce,
et Louis XIV saisit le comtat d'Avignon; Inno-
cent, toujours inflexible, cherche à mortifier le roi
en refusant l'archevêché de Cologne au cardinal
de Furstemberg,qui était soutenu par la France.
Cette querelle se prolongea pendant tout le reste
du pontificat d'Innocent XI, et ne se termina
que sous Innocent XII. L'année précédente, lo
pape avait condamné le quiétisme dans la per-
sonne de Michel Molinos, prêtre espagnol du
diocèse de Saragosse. Molinos comptait à Rome
un grand nombre de disciples; il avait déve-
loppé sa doctrine dans La Guide spirituelle ,
ouvrage qui fit longtemps l'admiration des per-
sonnes les plus pieuses ; des plaintes arrivèrent
pourtant jusqu'à l'oreille du pontife, qui aban-
donna Molinos au tribunal du saint-office; son
procès fut instruit : il se vit condamné à faire
abjuration publique de ses erreurs. La cérémonie
eut lieu le 3 septembre 1687, dans l'église de
Sainte-Marie-de - la- Minerve, en présence des
cardinaux , des prélats de la cour de Rome et
du peuple, a qui l'on avait promis des indulgences,
s'il s'y trouvait; Molinos fut ensuite enfermé
pour le reste de ses jours dans les cachots de
l'inquisition. Quant à sa doctrine, le tribunal
avait condamné soixante-huit propositions de
Molinos comme hérétiques, scandaleuses, détrui-
sant la monarchie chrétienne, etc., et le pape
confirma par une bulle la sentence de l'inquisi-
tion. Rappelons qu'à la fin de 1676 Innocent
avait défendu aux jésuites de recevoir des no-
vices ; ces Pères prétendirent que le pape était
janséniste et firent faire des prières pour sa con-
version. Innocent XI était tourmenté depuis
longtemps par des humeurs catarrheuses; ses
médecins crurent le soulager en lui faisant des
incisions aux jambes; mais le pontife, accablé
d'infirmités et de vieillesse,*ne put supporter ce
remède; le 8 août 1689, la fièvre devint si vio-
lente qu'on désespéra de sa vie. Innocent, se
voyant près de sa fin, fit appeler son neveu Livio
et lui recommanda de se retirer dans ses terres,
et de ne pas se mêler aux intrigues qu'il pré-
voyait devoir éclater dans le prochain conclave ;
il voulut ensuite que les généraux et deux reli-
gieux de tous les ordres vinssent lui donner leur
bénédiction, et fussent présents à sa mort, qui
arriva le 12 août, à quatre heures du soir. On a
de ce pape deux lettres dans VItalia Sacra d'U-
ghelli, t. IV, p. 51 3 ; X, 53. On a publié à Paris :
Brève ad Frandscum episcopum Apamien-
sem; in-4°; — Decretumde sacrx commu-
niants Usu datum; 1679, in-4°; — Différents
brefs touchant les évêques d'Alet, de Pa-
miers et autres; in-4°; — Bref pour la con-
firmation des chapitres généraux de V ordre
de Citeaux des années- 1672 et 1683; in-4°.
Innocent XI eut pour successeur Alexandre VIII.
Alfred Franklin.
Ughelll, italia Sacra; Venise, 1717-M, 10 ? oh -la-fol. -
Ranke, t. IV, p. 488. — Macquer et Lacombe, p. 661. —
Slsmon<H,t. XXV, p. Ml et s. —De Prades, t. II, p. 232.
— Santo-Domingo, p. 18*. — Brnys, t, V, p. 860. — Alletz,
t. II, p. 43*. - J.-A. Coita (R. Simon ) , Hist. de l'Origine
des Revenus ecclésiastiques, Francfort, 1684; In- il,
p. lie à 177. — De La Fayette, Mémoires de la Cour de
France pendant les années 1688 et 1689. — M. Mlsson,
Nouveau foyage d'Italie; 17M, 8 vol. in-li. — De Lar-
928
INNOCEHT
924
roque, Nmnmu Traité de te Béêmie ; IMS, Ift-ll. - Biyle,
Nouvelles de la République des Lettres, année 1686. —
Heidegger, Historia Papatut ; Amsterdam, 1698. in-4«,
fl« parUe* - Mémoires de M. de M—; dans la Collection
PstUot, I e série, t. LIX, p. B19. — De U Ltuerne, Sur
la Déclaration de V assemblé* du clergé de France en
16»; Paris, istf, io-8». — P. Macedo, PaneçyrUus Inno-
eentio xi i 1STT, Jn-fol. - P. ftuonimldt, De Ma et Rebui
gestii Innocenta XI g Rome, irr6,JB-6*.
INNOGBRT *U( Antoine Pighatblli), deux
cent cinquante et unième pape , successeur d'A-
lexandre VIII, né à Naples,le 13 mars 1616, élu
le la juillet 1091, mort le 7 septembre 1700. Le
conclave qui suivit la mort d'Alexandre Vin fut
troublé par des brigues qui le firent durer plus
de cinq mois; aussi l'élection dePignatelli lut-
elle accueillie dans Rome avec une grande fa-
veur. Le nouveau pape avait été élevé dans un
séminaire ; Urbain VIII l'avait nommé vice-légat
du duché dTJrbin; Innocent X,<grand-inquisiteur
de Malte , gouverneur de Viterbe et nonee à
Florence; Alexandre VII, nonce en Pologne et à
Vienne; Clément X évéque de Lucques , secré-
taire de la Congrégation des Évéques et des Ré-
guliers ; Innocent XI l'avait fait cardinal et nommé
évéque de Faenza, légat de Bologne, puis ar»>
chevéqne de Naples. Ce rot par reconnaissance
pour ce pape qu'il prit le nom d'Innocent XII.
Aussitôt après son élection, il s'efforça de faire
cesser les désordres qu'avait causés la longue
vacance du saint-siége , et ne voulut donner à
ses parents aucun bénéfice; en revanche, son
affection pour les pauvres était si grande, qu'il
les appelait ses neveux , et répandait sur eux
tous les biens que la plupart de ses prédéces-
seurs prodiguaient à leurs favoris. Le 23 Juillet,
dans son premier consistoire, il déclara qu'A
voulait travailler uniquement à la gloire de Dieu
et de l'Église , qu'il ne donnerait les emplois
qu'aux hommes de mérite, sans avoir égard à la
naissance , à l'amitié ni à là parenté ; il défen-
dit sévèrement aux officiers de justice d'accepter
aucun présent. Alexandre VIII avait endetté le
saint-siège de cinquante millions d'éeus; Inno-
cent supprima toutes les charges Inutiles, écono-
misant ainsi quatre-vingt mille écus par an à la
chambre apostolique. Il apporta la même par-
cimonie dans l'organisation de son palais , et
ordonna qu'on ne dépensât, four son dtnet, ja-
mais plus d'un teston (environ un franc cin-
quante centimes de France). Un mois après son
élection , il commença à donner Chaque lundi
audience publique à tons ceux qui voulaient le
consulter ; un accident le força A abandonner cette
sage coutume. Mais il continua à s'occuper ac-
tivement de Tordre, de la police et de FÉgllse;
il força les curés de Rome à s'assembler tous
les mercredis pour discuter des cas de cons-
cience, leur défendit de porter perruque, et leur
recommanda d'être modestes et convenables
dans leurs sermons; il interdit tous les jeux de
hasard. Par son ordre, un duc qui avait insulté
un prélat fut enfermé au château Saint-Ange , et
nn cavalier, pour le même fait, fut banni de la
ville t il avait pour oncle un cardinal, qui iut*
céda vainement en sa faveur. Innocent s'efforça
de réformer la vie licencieuse que menaient les
moines réguliers. Puis il tourna tes regards vers
la France, où ses prédécesseurs avaient laissé
plusieurs querelles à terminer. La question des
franchises et celle de la régale (twyea luira»
obNt XI) se présentaient les premières; il y
avait alors en France plus de trente prélat»
auxquels le pape avait refusé des nulles.
Louis XIV avait déjà rendu Avignon; il aban-
donna le droit de franohise, et Innocent, de son
coté, accepta tacitement les édita du roi sur la
régale. U restait à s'entendre sut le* prélats qui
avaient assisté h l'assemblée de lott et sur tes
quatre articles de l'Église gallicane. Innocent,!
l'égard des prélats , exigeait un acte de soumis-
sion ; ils s'y décidèrent, et écrivirent an pape
une lettre d'excuse ; ils y déclaraient que leur
dessein n'avait pas été de supprimer des droits
àl^serOTname^rtq^flleaartrcleSpouVaiait
être interprétée comme portant préjudice à ta
puissance ecclésiastique et à l'autorité des papes,
il les ingardaient comme non avenus. Cette lettre,
longuement discutée, et qui subit trois rédac-
tions consécutives, fut assez sévèrement jugée
en France : on accusa avec raison les prâats
d'avoir compromis la dignité et les droits de
l'Église gallicane ; car les termes dans lesquels
cette lettreétatt conçue pouvaient la faire re-
garder comme une révocation de ce qui s'était
fait dam l'awemttée. Il est pourtant juste de
reconnaître que les prélats prouver eut bien par
la suite qu'ils n'avaient jamais «m la pensée de
rétracter la déclaration de 16*2. Quoi qull ea
«oit, cette lettre fut reçue a Rome avec la pins
grande joie; Innocent Xtl pardonna tout et en-
voya dee*bulle« aux prélats- L'affaire du qvU~
tante reparut alors; cette doctrine avait fait de
grands progrès en Italie, et Bossuet amas*
Fénelon de l'avoir favorisée dan» ton ouvrage
intitulé s Explication des Maxime* des Sainti
sur la vie intérieure, qui avait été publié et
1697. Bossuet défère le livre à Rome*, Inno-
cent nomme une congrégation pour l'examiner;
les deux partit produisirent plusieurs mémoires.
L'affaire resta longtemps en suspens; le pape
prononça enfin, par on décret du H mars 17»
sur le livre en général, et en partfeotter sur
vingt-trois propositions accusées de tendre I
établir la réalité d'un état on l'on aime ie*t*
Dieu seulement pour hû'ftidme, et eYeudm
ainsi les motift de crainte et d'MfJt^nsKe, le dé-
sir d«reœmpensé»ét de la béatitude, un blet
fit connaître ce décret m roi de France. Féne-
lon publia aussitôt un mandement pu* lequel i
se soumettait k ht déetston du pontife , et déc*n
dans un synode , null tint à cette occasion, eue
le roi serait supplié d'ordonner par lettres pa-
tentes que les ouvrages faits pour défendre Y Ex-
plication des Maxime* des Sdiritefaemâ sup-
primée. Innocent Xfl ne survécut que quelques
925
INNOCENT
926
mois à la conclusion de ce différend. On a pu-
blié h Paris ; Bref {.portant suspension de
tontes indulgences pendant Vannée du jubilé
1700; 1699, in-4°; — Actes et délibérations
concernant la Constitution deN.S. P. le pape
Innocent XI 1 portant la condamnation du
livre de Fénelon; 1700, in-4°. Innocent XII
eut Clément XI pour successeur. A. F.
Bruys, t. V, p. 454. - AUetz, t. II, p. 899. - Ranke,
t. IV, p. 464. — Slsmondi, t. XXVI, p. 69. - Mâcquer et
Lacorobe, t. It, p. 871. - De Prade», t. H, p. 888. -
N. P. Qlannetaslo, Panegyricuê infmn innocenta XII;
Naple.s, 1700, in-8°.
innocent xiii ( Michel-Ange Conti ),deux
cent cinquante-troisième pape, successeur de
ClémentjXJ, né à Rome, le 16 mai 1655, élu le
s mai 1721, mort le 7 mars 1724. Cinquante-
cinq cardinaux composaient le conclave qui sui-
vit la mort de Clément XI ; une seule voix man-
qua au nouveau pape : ce fut la sienne, qu'il avait
donnée au cardinal Tanara, doyen du sacré col-
lège. La famille des Conti était une des plus
illustres de Rome; elle avait déjà fourni huit
papes à la chrétienté. Michel- Ange Conti avait été
nommé gouverneur de Viterbe en 1693, arche-
vêque de Tarse en 1695, nonce à Lisbonne en
1698, cardinal en 1707, légat de Ferrareen 1709,
évéque de Viterbe en 1712. Les discussions re-
latives à la constitution Unigenitus étaient loin
d'être terminées. Le 9 juin 1721 sept évêques de
France écrivirent à Innocent pour lui représen-
ter que cette constitution soutenait les mauvais
principes qui s'étaient introduits pendant le
siècle précédent, et qu'il était de l'honneur du
saint-siége de la révoquer. Le cardinal d'Althan,
au nom de l'empereur d'Allemagne , se plaignit
également des troubles que la constitution sou-
levait dans l'Empire. Le pape reçut assez bien
les observations de l'empereur ; mais, choqué de
le voir entrer dans cette dispute, il pressa le
tribunal de l'inquisition, qui publia un décret
contre la lettre des sept évoques français; eue
fut déclarée schismatique et contenant des pro-
positions injurieuses à la mémoire de Clément XI
et au saint-siége. Des discussions relatives aux
États de Parme et de Plaisance occupèrent en-
suite Innocent : l'Espagne, par l'entremise de la
France, venait de demander à l'empereur l'in-
vestiture de ces trois États; Innocent soutint
avec chaleur qu'ils devaient être considérés
comme fiefs immédiats du saint-siége; ses récla-
mations restèrent inutiles. En 1723, Innocent
termina l'affaire du cardinal Alberoni, qui s'était
retiré à Rome après sa diftgrêce. Dans le consis-
toire du 20 décembre, il déclara que les crimes
dont Alberoni avait été accusé n'étant point
prouvés, il devait continuer à jouir de tous les
droits attachés à sa dignité de cardinal. Le pon-
tificat d'Innocent XIII serait presque sans re-
proche si Ton pouvait passer sous silence la
promotion de Dubois au cardinalat; les détails
de ce marché sont trop connus pour que nous
les rappellions ici; disons cependant que Dubois
fut {présenté comme candidat au chapeau par
l'ambassadeur de France, au nom du régent,
et que les mille fils de l'intrigue nouée à cette
occasion ont pu tromper le pape. Innocent, qui
avait renouvelé la défense faite aux jésuites de
recevoir des novices , allait dissoudre cette com-
pagnie quand il mourut. 6a mort fit naître d'in-
jurieux soupçons d'empoisonnement : on ou-
bliait que le pape , depuis son avènement au
pontificat, avait toujours été tourmenté par
plusieurs maladies* Innocent était peu capable,
mais plein de piété , de désintéressement et d'a-
mour pour la paix. Son successeur Ait Benoit IX.
Alfred Franklin,
Bhiy», t. V, p. 489. - Allsti, t. il, p. 4M. - Slsmondi,
t. XXVII, p. 442, - Ultnde, f ofCK/c d'un Français en
Italie pendant les années 1765 et 1766, 1786, 9 vol. ln-12.
— Mongez, Vie privée au cardinal Dubois; Londres,
1789, ln-8°. — De PiOftieM, M«motr& Os la Régence au
d*c d'Orleant / 1741, 8 vol. la-li. - A. Trtetud, Relatim
de la Mort d'Innocent XIII; Nancy, 17*4, tn-is.
* innocent , jurisconsulte romain, contem-
porain de Constantin. Entre autres ouvrages, il
en avait composé un sur les règles relatives à
la mesure des terres et sur les contestations
qui pouvaient s'élever à cet égard; cet écrit
était divisé en douze livres au moins ; il ne
s'en est conservé que quelques extraits dans la
collection des Gromatici ou auteurs qui se
sont occupés de cette matière .( voir p. 220 de
l'édition de Goes.) G. B.
Baehr, Geschichte der ràmttohm Uteratur, S M9. -
Bacn., Historia Atrisprudentiœ Romanœ, p. 542.
* innocent ( Gi sci), prélat russe, naquit
dans la Pologne prussienne, de parents luthé-
riens, au commencement du dix-septième siècle,
et mourut à Kief, le 24 février 1684. Il embrassa
fort jeune la religion grecque, et l'état monas-
tique , et fut appelé par le métropolite Pierre Mo-
hila à fonder une chaire d'éloquence latine à Kief.
Ses talents lui méritèrent, après avoir passé par
différents grades, d'être placé à la tête de la grande
Laure de Kief; ses vertus lui valurent une Orai-
son funèbre d'un de ses disciples que l'Église
russe a canonisé, Dmitri de Rostof. Il existe trois
ouvrages d'Innocent Gtzel : — un livre intitulé :
De la Paix entre Dieu et V homme, Kief,
1669, qu'un oukace du synode de 1766 a mis à
l'index ;— un Sommaire ( Synopsis) de l'Histoire
russe y depuis V origine de la nation slave
jusqu'au règne de Théodore Alexiévitch
[1676]; Kief, 1674 : lequel a été douze fois
réimprimé, parce que c'est le seul livre historique
qu'eurent les écoles jusqu'à Lomonosof; —
des Instructions sur le sacrement de la Pé-
nitence; Kief, 1671. La Bibliothèque synodale
de Moscou possède, en outre, un manuscrit po-
lonais intitulé : Prawdziva Weeira (La Foi
véritable), dans lequel ce moine essaye vai-
nement de réfuter un livre Sur ta Suprématie
de saint Pierre et la Procession du Saint-
Esprit, que le P. Benoit Boym ( voy. ce nom )
venait de publier à Vilna en 1663. P cc A. G— n.
927
INNOCENT — INTHIEMA
< Greteh, SlovarpisaUliaXh doukhomagotchtna greto-
roêjiiêkoi Tzerkvi.
* innocent, prélat russe, né en 1800, à
Sievsk , gouvernement d'Orel, mort à Odessa ,
le 6 mai 1857. Un discours qu'il prononça au
séminaire deKief sur la mort d'un de ses cama-
rades révéla de bonne heure son talent oratoire.
Il prit à vingt-quatre ans l'habit de Saint-Basile;
deux ans après, il; était inspecteur de l'aca-
démie théologique de Saint-Pétersbourg, et rec-
teur de celle de Kief en 1830* Sacré évêque en
1836 , il continua de demeurer quatre ans
comme vicaire dans cet antique berceau du
christianisme, passa de là huit mois à Vo-
logda, sept ans à Kharkof , fut appelé au siège
de Kherson en 1848, et désigné membre du
saint Synode en 1856. Ses principaux ouvrages
sont : Les derniers Jours delà vie terrestre
de Christ; 1828; — La Vie du saint apôtre
Paul ; ibid. ;— Discours et Sermons, 3 1., 1 843 :
M* Stourdza en a traduit une partie ;*- Sermons
prononcés à Vologda; — La Prière de saint
Éphrem ; — Du Péché et de ses conséquences;
1844; —Dieu est avec nous! 1845;— Sermons
prononcés à Kharkof, 3 1.; 1847 ; — une traduc-
tion de l'admirable Doctrine chrétienne de
S. Augustin;— De la Chute d'Adam , etc., etc.
Plusieurs de ces travaux sont dignes d'être
connus en Occident, et un lecteur quelque peu
attentif y découvrirait sans peine qu'il n'y a
qu'un cheveu, en quelque sorte, qui s'oppose à
cette réunion des deux Églises qui transformerait
aussitôt et avantageusement la face du monde.
P ce Augustin Galitzin.
RoussJtaia Khrestomatia Galakhova. - Journal
d'Odessa du 80 mai 1887.
INTAPHERNB. Voy. DARIUS.
interiano ( Giorgio), voyageur génois du
quinzième siècle, a résidé plusieurs années, vers
1450, en Circassie, et a décrit les mœurs de
ses habitants. Son récit, intitulé : Delta Vita de 1
Zychi, altrimente Circxsi; Venezia, apud
Aldum Manutium; 1502, in-8°, n'a été repro-
duit que par Ramusio,U, 196. Pce A. G— n.
Storia delV antica Liguria e di Genova del Mar-
chese Serra ; Tarin, 1884, IV, m*.. — Adelung, Ûber-
sicht der Reisendenin Russlatid, bis 1770.
interiano (Paul), historien et astronome
italien, né à Gênes, vivait dans le seizième siècle.
On a de lui : Ristretto délie Istorie Genovesi;
Gènes, 1506, in-8°; Lucques, 1551, in-4°; —
Invenzione del Corso délia Longitudine , col
ristretto délia s/era; Lucques, 1551, in-8°.
« Dans ce traité, dit Tiraboschi, Interiano s'ef-
força, mais avee peu de succès , si on le compare
aux autres astronomes, de fixer les degrés de
longitude. » z.
Tlraboscbl, Storia délia Letteratura ltaliana, t. VII,
part. I, p. 484; II, p. 888.
t interiano de ATA la (Juan), littérateur
espagnol , né en 1656, mort à Madrid, le 20 oc-
tobre 1730. Il faisait partie de l'ordre royal et
militaire de la Sainte-Vierge de la Rédemption
des Captifs, autrement dit de la Merci. «Il était,
928
rapporte Moréri, poète, historien, critique,
théologien, traducteur, et n'a cessé d'écrire
qu'avec la vie. La poésie du P. Interiano est fa-
cile et naturelle, mais souvent trop prosaïque.
Il prenait les titres de théologien de son ordre,
et professeur jubilé de l'université de Sala-
manque , prédicateur et théologien de Sa Majesté
le roi d'Espagne, etc. » U était en relation avec
les savants les plus connus de son temps. Le
plus grand nombre de ses ouvrages est en langue
espagnole, et écrit avec pureté et élégance ; on
connaît entre autres : Relation des Actions pu-
bliques et des Réjouissances faites par Vuni-
versité de Salamanque, pour célébrer l'heu-
reuse naissance du prince Louis , premier de
ce nom en Espagne; Salamanque, 1707, in-4°;
— Examen sérieux de la Vérité : Démons-
tration historique de l'état religieux de saint
Pierre Pascal de Valence, évêque feJaën, etc.,
en réponse à un écrit de don Juan Ferreras ;
Madrid, 1721, in-4°. Après avoir lu l'ouvrage
d'Interiano Ferreras il déclara qu'il s'était
trompé au sujet de S. P. Pascal; — Sermons
prêches en différentes occasions; Madrid,
trois parties, 1720-1722, in-4° ;— Relation
des Cérémonies observées aux obsèques de
Louis /",' roi d'Espagne, réitérées pour les
funérailles de Jean-Emmanuel- Fernandez
Pacheco, marquis de Vilna, premier insti-
tuteur et directeur de l'Académie d'Espagne;
Madrid, 1725; Valence, 2 vol. in-8° ;— Pictor
christianus eruditus; Madrid, 1730, in-foL
L'auteur y relève les erreurs dans laquelle
tombent la plupart des peintres de tableaux de
piété ; —Humaniores atque amamiores ad Mu-
sas Excursus, siveopusculapoetica. L— z— e.
Grégoire de -Mayans, Epistolss ( Valence, 1783, ln-4«),
p. 108-814.— Moréri, ts grand Dictionnaire Historique.
* intharatcba, souverain siamois, mort en
l'an 780 du chunlasakkarat, ou petite ère de
soixante ans (1418 de J.-C). Bien que ce prince
appartint à la famille royale de Siam , il ne
parvint au trône qu'en s'en emparant de vive
force. Après s'être rendu maître de Youthia, ville
célèbre qui fut longtemps la plus importante cité
du royaume de Siam, il y établit sa résidence.
Il envoya ensuite ses trois fils dans la province
septentrionale dont il les fit gouverneurs : Chao-
sam fut roi dans la ville de Thâinat, Ghao-Aï à
Soup'an, Chao-Yi à P'rèksiratcha. A la mort de
leur père, ces deux derniers princes se rendirent
à Youthia, dans le dessein de s'emparer du
trône. S'étant rencontrés , au milieu d'un pont,
montés sur des éléphants, ils s'élancèrent Pua
contre l'autre, et leurs armes après s'être entre-
choqués leur tranchèrent la tète à tous deux.
Chao-sam, couronné sous le nom de BàrÔmma-
ticahathirat , resta ainsi seul et tranquille héri-
tier du trône dlrôiaratcha. L. Léon de Roskt.
P*ong-sa va dan ( Annales de Siam ), 8* partie (en da-
nois ). — Pallegoix, dans sa Gramm. Hngt&at ( Bangkok.
1850,ln-4«). ^^
inthiema ( Feico de ), littérateur hollandais,
929
INTHIEMÀ — INTIERI
930
né vers 1650, à Coudem (Geesterland), mort
après 1 605. Ses parents, quoique d'origine noble,
cultivaient eux-mêmes leurs champs, et Fré-
déric d'Inthieraa conduisit lui-même la charrue*
Ce fut contre le gré de sa famille qu'il entra an
collège et étudia la jurisprudence à Louvain, où
il prit le grade de licencié en l'un et l'autre
droit. II exerça ensuite la profession d'avocat à
Worcum, dont il devint bourgmestre. Plus tard,
il alla s'établir à Leuwarde, où il épousa Mar-
guerite de Hesling, dont il-eut six garçons. Les
guerres qui dévastaient la Frise l'obligèrent de
fuir en Hollande. Le comte Jean d'Embden l'ac-
cueillit et le fixa près de lui dans la petite ville
de Lier. On a d'Inthiema : Querella Batavo-
rum; — Carmen de Nativitate, Sepultura,
et Resurrectione Christi; — De Arcis Lyn-
ganx Deditionis Causa ejusdemque in pas-
terum evilandx cautela , et de conseqttentia
probabile, etc.; — De Malorum Regum Gu-
bernatione libri très ; — Consilia Juris. Pa-
quot croit que ces deux derniers ouvrages sont
restés manuscrits. L— z— e.
Suffred. Pétri, Décade XVI, n. 8, p. 454-M6. —
VriemoSt, MAén. Fris., p. 888. — Paqnot, Mémoire» pour
servir à l'Histoire Littéraire des Pays-Bas, t. VI, p. M9-
831.
inthiema (ffero de), jurisconsulte et poète
hollandais, fils du précédent, né dans l'Ost-
Frise en 1576, mort à Franeker, en novembre
1623. Il fit ses études à Franeker, où il fut reçu
docteur, le 28 juillet 1593. Il retourna dans sa
province, qu'il quitta pour exercer l'emploi de
censor militaris (grand-prévôt -, juge mili-
taire) dans les troupes du comte de Nassau,
gouverneur de Frise. En 1618, il devint biblio-
thécaire et secrétaire de l'université de Frane-
ker. 11 exerça ces fonctions jusqu'en 1621.
Suivant Paquot, c'était un médiocre écrivain. On
a de lui : Circa gentilitias Jamiliarum Domos,
earumque appendentes prxrogativas mascu-
las, et defunctorum supremas super iisdem
voluntates, malxque fidei possessorum ma-
chinatUmes, etc.; Leuwarde, 1619, in-4°; —
JHsceptatio juridica super esse inter comi-
tem Frisix orientalis Ennonem et Frideri~
cum, liberum baronem in Schwartzenborch ;
Leuwarde, 1619, in-4°; — Censura, Judi-
ciwn, sive opinio super C*** et contra atro-
cissimos EvangelH implacabiUs , insatia-
bles et hostes belligerandi fides, quam Er-
nestusy princeps et cornes Mansveldix, et
ChristianusBrunswicensis prsestiterunt, etc.;
1621, in-4°; — - Elegia 9 in qua ex causis pro-
babilièus, per inconsideratam Bergopzom&
factam obsidionem f regni Hispanici pério-
des prœdicitur ; 1 62 1 , in-4°. L— z— e.
Valère André, Biblioth. Belgica, p. 388. — Vrtemofit,
uithen. Fris., p. 888-888. — Paquot. Mém, pour servir
d VHis. lAtt. des Pays-Bas, t. V, p. 831.
in-ti , second et dernier empereur de Chine
de la dynastie des Han postérieurs , élu en 948,
mort en 950 de notre ère. Il succéda à son père,
NO0V. BIOCR. GÉNÉR. — T. XXV,
Kao-tson, fondateur de la seconde dynastie des
Han. Avant de monter sur le trône, In-ti s'appe-
lait Lieou-tching-yeou. Sous son règne les eu-
nuques recouvrèrent toute leur puissance dans
le palais impérial ; le caractère faible de In-ti le
fit tomber de faute en faute. Ayant donné ordre
de mettre à mort Kouo-weï, général qui avait
contribué à placer son père sur le trône, et qui
lui avait rendu de signalés services, ce général
marcha avec ses troupes vers la capitale, et mit
en fuite l'armée impériale; de sorte que In-ti,
resté presque seul, dut se sauver dans un vil-
lage, où il fut tué avant d'avoir été reconnu.
L'empire passa dès lors entre les mains de Kouo-
weï, qui fonda, sous le titre de Taï-tsou, la dy-
nastie des Tcheou postérieurs. R. F<
Mailla, Histoire générale de la Chine, tome VII.
intieri (Barthélémy), économiste et mé-
canicien italien, né à Pistoie , dans la Toscane,
vers 1676, mort à Naples, le 21 février 1757. Il
vint très-jeune à Naples y étudia particulière-
ment la philosophie et les mathématiques , et
enseigna ensuite ces deux sciences. La famille
Corsinilui confia la direction de vastes domaines
dontil doubla rapidement le revenu; le grand-duc
de Toscane voulut aussi l'avoir pour intendant des
propriétés qu'il possédait dans le royaume de
Naples, et la maison Rinuccino de Florence le
chargea de surveiller ses intérêts dans le même
pays. Ces occupations multiples familiarisèrent
Intieri avec les faits qui servent de base à l'éco-
nomie politique ; en même temps, les profits consi-
dérables qu'il en retira lui permirent de consacrer
une partie de sa fortune aux progrès de cette
science* Il établit à Naples une école de com-
merce. H introduisit la méthode d'emmaganiser
les blés dans les silos, et imagina l'étuve à blé,
machine destinée à préserver les grains en les
privant par la dessiccation de leur faculté germi-
native. Il perfectionna le paloreis, ancienne-
ment employé par les habitants d'Amalfi et de
Vico pour transporter le bois du sommet des
montagnes au bord de la mer; il rendit cette
machine plus commode et plus puissante. H
trouva une manière d'imprimer les billets de
loterie qui rendit la contrefaçon impossible et
produisit, pour le trésor royal, si l'on en croit 6a-
lanti, une économie de quatre mille ducats par
an. Enfin il fonda à ses frais, en 1754, dans l'uni-
versité de Naples, une chaire de. commerce (ou
d'économie politique ), dont le premier titulaire
fut son ami le P. Genovesi. On a d'Intieri : Délia
perfetta Conservazione del Grano;, Naples ,
1754, in-fol. ; on a quelquefois attribué à Galiani
cet ouvrage dont Intieri aurait fourni l'idée et
la matière. On a prétendu aussi qu'Intieri et le
marquis de Rinuccini avaient fourni h GaRani
les matériaux de son traité Sur la Monnaie. Z.
Genovesi, Discorso sopra il Fine délie Sciente. — Ga-
lant!, Elogio storico deiV ab. Genovesi ( troisième édtt.);
Florence, 1781, p. 161. - ViUarosa. MtraM, p. 168, -
80
931
WTlEftl
Tlpsléo, ato*
Bioçra/la u nè— rf te ( tdtt, M Venue ).
§mfia4U0li JtaUm «***, 1 1, p. 78.
utroftOKTTA (1) (Le père Prosper), missic**
naire sicilien en Chine , de la Compagnie de Jésus,
né à Piazza , en 1626, mort le 3 octobre 1696.
A l'âge de seize ans, il s'échappa du collège de
Gitane, et abandonna l'étude du droit pour aller
auprès des jésuites de Messine leur faire part
de sa vocation arrêtée pour les missions chré*
tiennes. Apres avoir acquis des connaissances
suffisantes en théologie , il partit pour la Chine
avec seize autres jésuites, (ntorcetta prononça
*e* vœux à Macao, et pénétra, dans le cou-
rant de la seizième année du règne de Çbun«
tcbt (1669), dans la province de Kiang-si, où
il s'établit 11 y construisit une église , et un
grand nombre de Chinois furent baptisés par ses
soins. Dénoncé au vice-roi de la province , il
eut son> église rasée et dut se cacher pour éviter
le péril qui le menaçait. En 1664, il fut con-
damné à la bastonnade et à l'exil ; mais cette per-
sécution fut réduite à un emprisonnement a
Macao. Un autre missionnaire s'étant offert h
sa place, il put se rendre à Rome pour exposer
au général de son ordre la triste condition des
chrétiens dans l'empire chinois. De retour en
Chine, il y retrouva ses compagnons de captivité
libérés. lU'établit ensuite à Hang-teheou, capitale
du Tche-kiang. Lors de la persécution de 1690,
il comparut devant divers tribunaux chinois
érigés contre les missionnaires chrétiens : il y fit
preuve d'une grande énergie, qui lut valut l'ad-
miration même de ses juges. On a du père
Prosper Intorcetta les ouvrages suivants , pour
la plupart extrêmement rares en Europe ; Tav-
hio ( ou La grande Étude de Confuoius et de
son disciple Tseu-sse ), texte original avec une
traduction latine par le père Ignace de Costa ,
jésuite portugais, édition xylographique im-
primée à Kien-tchang-fou ( province du Kiang-
si) en 1662; — Tchoung-young (ou Tin varia-
bilité dans le milieu, l'un des quatre Livres de
Contactas et de son école); édition imprimée,
partie xylographiquement a Canton, partie ty-
pographiquement a Goa, en 1669, petit in-fol.
Cet ouvrage, extrêmement rare, est précédé
d'un Confucii Vita. La réimpression de oe livre
à Goa (1611, m-8° ), citée par Pinèlo, est in-
connue jusqu'à présent des bibliophiles ; — Lun*
yu( Le Livre des Discussions philosophiques de
Confucius), sans heu ni date, 1 vol. petit in-fol.
( rarisime ) ; — Testirnonium de Cultu Sinensi i
Lyon, 1700, in-8°; — Compendiosa Narra-
tione dello Stato délia Missione Cinese, co-
nxtociando dalV anno 1581 sino al 1669, o/~
ferta in Borna ait Em. Sign. Card. délia
sqcr. Congregat. de Propag. Fid. ;Rome, 1671
on 1672 (?) , in-8°. 11 reste du père Prosper In-
torcetta une paraphrase complète et inédite des
livres de Confucius communément désignés sous
(i) Le nom Intorcetta est écrit en chinois M-to4t#
( prononciation mandarine ).
- ION M2
le nom de Les Çiiatr*£*iw (en chinois : Sse-
chou). P. F.
Itêutmma Mékmgm aeiattimê, nw A bel Mnmsat
(t<upeU);Ui-^~/f<*ofr*0**raJe de Ut Chine, par
le père Mojriac de Mailla ( tomeX); In-*». - CemelH
Careri, totn. IV, p. ut. - Ching-tiao-tin ecAin* (Ho-
ttoe su fts nteaioaaairtft «ft»«tt«n«en CUm ) ; ln-i» , en
mvRUBs ( Augustin) > historien sicilien, né
à Sojacoa en 1595, mort à Paiera* au mois d'a-
vril 1677» 11 embrassa l'état ecclésiastique et
passa quelque temps dans la société de Jésus, où
il enseigna la philosophie et la théologie. 11 «n
sortit pour se consacrer tout entier à l'étude des
Pères de l'Égjssa et fc des recherches sur l'histoire
de la Sicile. La riche bibliothèque de Fr. Schia-
fani, prêtre de Païenne, lui fournit une grande
quantité de matériaux, dont il tira habilement
parti. On a de lui : Palermo Antico, parte
prima degli Annali délia felice città di Pa-
lermo, prima stdia, eorona del re e capo
del regnç di SUMia; Pakrma, 1649, in-fol.;
cet ouvrage» estimé et rare* a été inséré dans le
Thésaurus Antiquitatum SieUim deBurmann,
t X; — Palermo S&rot deuxième parti** des
Annali... di Palermoi Païenne, 1650, ta-fo*. ;
— Palermo mbile, troisième partie de* An*
nalii 1651, in-fol. ; — La Carthagine Sici-
liana, hisloria delta città di Caccamo, di-
visa in Ubri dui; Palerme, 1651, în-4° : le
troisième livre parut après la mort de fauteur,
par les soins d'Aman* ; Païenne, 1708 j Burmann
a inséré cet ouvrage dans son Thésaurus Anti-
quitatum Sicilix, t. X; — Historia Sacra
Paradm terrestris et S. S. Innocentix status;
Pajerme, 1661, in-4°. Inveges laissa plusieurs
ouvrages inédits, entre autres des Annales Regni
Siçilix en 4 vol. in-fol„ dont l'introduction seule
a été publiée par le P. Michel de Giudice, sous
ce titre : Ad annales siculos prœliminaris Ap-
paratus; Païenne, 1709, in-4*. Z.
Mongltore, Bibliotheca Sicula, t. I, p. 87. - Nlcéron,
Mémoires pour servir à FBtstoire* det Bommes /Ifto-
trêt, t. XI.
*ioh ('Itov), poète et historien grec, né à
CMos, vers la 74« olympiade (4844*1 avant J.-C.X
mort vers la 89 e olympiade (421-424 av. J. C. ).
U était fll* d'Orthomène, Les Athénien* le sur-
nommèrent fils de Xuthus, par auusion m my-
thologique Ion (1). Il vint jeune à Athènee* comme
oftle voit par sa liaison familier* avec d'ffluetrui
habitant» de cette ville, beaucoup plus âfcés que
lui. Dans ses Souvenirs , dont H ne ieate *»***
heureusement que de rare» fragments, il race**
tait ses conversations avee Citton, dont il était
l'admirateur, avec Eschyle, dont il fût l'ami in-
time et qui lui enseigna l'art dramatique* Il
connut aussi Périclès, se brouilla avec lui peur
une rivalité d'amour, et ne lui pardonna jamais.
Il fit jouer sa première tragédie dans la «2 e orynv
(1) Ion, le fabuleux ancêtre «les Ioniens, était, solvant les
mytbographes, fils d»Apollon et de Creuse, fille d'Breen-
tkée et femme de Xuthus. La légende d'Ion S fourni le
sujet (fane des plus belles pièces (TBwrtpWo.
ION - 10PHON
934
piade ( 452 avant J.-C. ). Gimon mourut peu
après, et Periciès devint tout-puissant : ce fût
pour Ion un double motif de quitter Athènes. II
retint à Cbios, où en 440 il eut l'occasion de
dîner avec le poète Sophocle, qui allait prendre
le commandement de l'expédition de Samoa.
Le récit de ce banquet avèe tes propos enjoués
des confire* et lé badmege hardi de Sophocle,
se lit dans une charmante page des Souvenirs
conservée par Athénée; On ne sait combien se
prolongea le séjour d'Ion à Chu»; mais en 489
il était de retour à Athènes, et faisait jouer une
tragédie en compétition avec Euripide et lopnon.
Il mourut avant 421, puisque Aristophane^ dans
sa comédie de £n Palti, jouée cette année même,
le place an nombre des nommes devenus astres
après leur mort
Ion remporta use fois le prix de la* tragédie,
et comme il avait gagné en même temps celui
du dithyrambe * il manifesta sa roconnajesanee
pour les Athéniens en leur faisant distribuer à
chacun une croche de vin de Objosj Une pareHle
munificence prouve qu'Ion était riche. Les cri-
tiques portent diversement le nombre de ses
tragédies a donne > à trente et à qua rente, Mous
avons les titrée et quelques fragments de dix
tragédies : 'At**^****, 'Atapfrnii 'Action M*r«
Apdpra, $po\joo< , $*m$ J} Katysâç* $otvi£ m*~
Tepo;, Ttùnpoc* EupttiSai* Abépm, et d'un drame
satirique 'Ojuçatow Longin traite très-sévèrement
les tragédies d'Ion. Il n'y voit qu'élégance sans
vigueur, et estime que toutes ensemble elles ne
valent pas Œdipe de Sophocle. Les contempo-
rains d'Ion et les critiques d'Alexandrie sem-
blent en avoir jugé autrement* puisque les uns
le couronnèrent, et les autres le placèrent sur le
canon des cinq poètes tragiques athéniens. }J
eut pour commentateurs Areésilaùs , Batton de
Sinope, Pidyme, Épigeneet même Aristarque,
Le scoliaste d'Aristophane dit que, outre ses
tragédies, Ion composa des poèmes lyriques,
des comédies * des épigrammes , des peins , des
hymnes , des scolies et des élégies. Quant aux
comédies , comme il n'en est pas question ail-
leurs, le scoliaste peut avoir fait une confusion
entre comédie et tragédie * bien que son asser-
tion n'ait rien d'improbable en égard à la fécon-
dité d'ion. Il reste de ses élégies quelques frag*
ments recueillis par Brandi ( Analeçta,v*\. l t
p. 161 ). Le même scoliaste cite d'Jtoa les ou-
vrages en prose stUvant* » Uterôtumov ; ^
KTidiç;— Ko<rpofoYtxéç * — TirdprtiJiMrrf , et
quelques antres qu'il ne* spécifie pus. On ne sait
ce que pouvait être le premier de ces ouvrages?
qui parut supposé même aux anciens ; le titre
complet du second était Ktidiç Xt«u : histoire de
Chics écrite dans le dialecte ionien et dans le
genre, sinon à l'imitation d'Hérodote. &effom.ot
fccnrtxoq devait être un ouvrage de ptnlosefftie)
probablement le même que le Iptorruife on
Tpt«Y(jio{ attribué aussi a Ion t et qai expliquait
la formation du monde suivant la théorie or*
phique ou pythagoricienne des triades. Nous
avons déjà parlé des *Y7to\kvi\\kaxa ( Souvenirs ),
que certains critiques identifient avec un autre
de ses ouvrages intitulé : 'EKi$v)|jiai ou *£k&v)(ui-
tntéç, lequel contenait soit le récit de ses propres
voyages , soit la relation des visites faites à Ghios
par d'illustres personnages. On a souvent con-
fondu Ion de Chios aveo Ion d'Éphèse , rapsode
.du temps de floeraie* et qui a donné son nom à
un des dialogues de Platon; Bentley a démontré
clairement que c'était une erreur* Les fragments
de Ion ont été recueillis par G, Meberding t Aie
tonti Ohii Féto, Moribus et 8$udm4oetrin*>
Leipzig, I0d6? par Kopke : De lente poète Vièk
et Fraermntis, Berlin t 1836 < et dans le £eiti*
chrift fur Alterth*mmi$sên**haft t tftM,
p. 689-605" ;' les restes d* ses tragédie* ont été
insérés dans les Fragment* Trapicotum Qret-
cerum de Wagner ( BM. Qt*e* de A. F. Didot),
et les fragments de aes Ouvragés en prose déris
le» Fragmenta metorieûrtm Gréearum de
G. MiiUer* t. II, p. 44 ( même eoUedÎM h Ii» J.
Strabon , XlV, .p. èii. — éntdàa, feudocie, ttarpocra-
tlon, âii itiot *l6iv. - PlÙtanjaB, c'fwiOrt, t, 0, 16; t*erl-
ctes, %, *»j M hitfèd. m ritt., » fc iï. «-. ÀttMbpUdftë,
î)e root, )M ( ateala note** nolliite. *• âtueflésj 1 4 XI,
XIII, XIV. - Mogèfie Utrce. IV, 11. - Farcira, MM.
Grxca, vol. II, p. 807. - Bentley. Epistold àa Joli. Mu-
Htèm CHïeîtlco JfaHMs MuteW iUBjUnctè, Oifard,
tm t et dans se» Opmteêtài - Hltirah, *V>fct\ oé Plot.
Ion. - Welcker, 0fa Grtiph. Iraq., p. M8-9IS. - ftayter,
tiistoria criticd Trag. Gràc.; GœtUoguç, 18*3, p". ilB
199.
* iophox # poète tragique athénien, fils de
Sophocle et de Nicostrate * vivait vers 490 avant
J.-G« Il fit jouet des tragédies du vivant de son
père, et l'on prétend même qu'il lutta contre
lui. Il eut le second pria e*-499* dan» un con-
cours où Euripide fut le premier et ion le troi-
sième. Il remporta, on ignore à quelle époque»
une brillante victoire ( é*mn<ts lotpnpAi, dit le
scoliaste). On n'a point d'autres détails sur sa rie»
mais l'on sait qu'a vivait encore en 401* Pans ses
Qrenùuilteêi, représentées à cette date y Aristo-
phane parle de lui comme do seul bon poêle
tragique qui reste au» Athéniens ; mais il defife
que, privé de son pèf^iqui venait de mourir h
il puisse maintenir sa réputation t donnant par
là h entendre que les tragédies dn fils étaient
retouchées > peut-être composées par le pèf*«
lies anciens en connaissaient cinquante; dontlen
suivantes sent mentionnées pat Suidas i 'Agtfr
XtéQ, T^efKK^'Atfrawv* 'itfev rfletria, Ae&Efictâfc
Bâqtat; netfràc i Un deui derniers titres appn#»
tienneiit évidemment à la même pièce, Pent-étr*
faut-il ajouter à eettfi lista un drame sétyriqtf*
intitulé Aàhp&ol , mentionné par Clément d*A*
lexandrie ( StrematM f I ). Ces pièces, dont il
né reste presque rienjont moins contribué à faire
éoiinattre loahtin que le procès qu'il intenta à
euh père < dey» Seraotius ). ilse réconcilia avec
lui » et inscrivit sur Sa tombé ttne épitaphe on fl
était questioti do VŒdipe à Colone, tragédie
30.
935 IOPHON — 1PHICRATE
qui avait en tant d'influence sur la décision des
jugea. Y.
Soldas, aux mots loçffiv» EoçoxXîJç» — Aristophane,
Hanse, 78-18, avee les Scoliet.— Valère Mailme, Vlll,7.
— Welcker, Die Griech. Trag, t p, t78-«T7. — Kajraer,
UUt. criL Troc. Grmc. % p. 78-7*.
936
iousoup. Voy. Yousour.
iphicrate ftyxpoforK), général athénien,
né en 419 avant-J.-C, mort vers 350 avant J;-C.
Il était fils d'un cordonnier nommé, à ce que Ton
croit, Timothée. Il se distingua d'abord à une ba-
taille navale (peut-être celle de Cnide, en 394 )
où il s'empara d'un vaisseau ennemi. Cet exploit
hit valut, malgré sa jeunesse, le commandement
des troupes envoyé» au secours des Béotiens
après leur défaite a Coronée. L'année suivante ,
il conduisit un corps de mercenaires à la défense
de Gorinthe; il ne put pas empêcher le général
Praxitas de vaincre les forces réunies des Corin-
thiens, des Argiens, des Béotiens et des Athé-
niens, mais l'empêcha de profiter de sa victoire.
Comprenant que dans l'état de lassitude où se
trouvaient les divers peuples de la Grèce, une
bataille rangée n'était pas probable, et que les
parties belligérantes s'en tiendraient à une guerre
d'escarmouches, d'incursions et de ravages, il
modifia dans cette prévision l'organisation de
ses soldats, et leur donna plus de légèreté. An
lourd bouclier il en substitua un plus petit,
remplaça la vieille cotte de mailles par une cui-
rasse en toile, et fit porter à ses soldats une lé-
gère chaussure, qui fut appelée de son nom iphi-
cratides ( Itnxpatfôec). H leur donna en même
temps des épées et des piques plus longues. Avec
ces troupes, devenues plus mobiles sans avoir
perdu de leur solidité, il se porta rapidement
sur le territoire de Pblius , en Arcadie , et obligea
les Spartiates d'envoyer leurs forces de ce côté.
Il vint ensuite au printemps de 392 tenir gar-
nison av«c ses peltastes ( soldats armés du petit
bouclier ) à Peirasum , sur le territoire de Co-
rinthe. Cette ville, menacée par Agé&ilas, appela
à son secours Iphiorate. Le mouvement d'Agé-
8ilas était une feinte. Il en voulait réellement à
Peiraeum, et il s'empara de cette forteresse aus-
sitôt qu'elle eut été abandonnée par le général
athénien. Celui-ci prit une éclatante revanche en
détruisant près de Corinthe un détachement
Spartiate. Il profita de ce succès pour reprendre
Sidas et Crommyon, qui avaient été conquis par
Praxitas , et pour enlever à Agésilas la ville
d'Œnoé. Il aurait probablement forcé le roi Spar-
tiate, si les Argiens, qui redoutaient son ambi-
tion, n'avaient obtenu son rappel. Les Athéniens
l'envoyèrent en 389 dans lUellespont contre Ana-
nibius, qui fut vaincu et tué. Iphicrate fût en-
core une fois arrêté au milieu de ses succès par
la pacification générale connue sous le nom de
traité dïAntalcidas ( 3»7 ). Au lien de revenir à
Athènes, il offrit ses services à Senthers, roi des
Odrysses, et le rétablit sur le trône, puis à Cotys,
qui lui donna sa fille en mariage et lui fournit les
moyens de bâtir la ville de Drus. En 377 les Athé-
niens l'envoyèrent avec vingt mille mercenaires à
Pharnabaze, qui se préparait à envahir l'Egypte
insurgée. Les préparatifs de l'expédition durè-
rent plusieurs années, et, dès les débuts de la
compagne, il s'éleva un désaccord entre Iphi-
crate, qui aurait voulu attaquer immédiatement
Memphis, et le satrape, qui temporisa, laissa
passer le moment et rat forcé de se retirer de-
vant l'inondation. Iphicrate, se rappelant com-
ment les Perses avaient traité Canon, et crai-
gnant pour sa sûreté personnelle, s'enfuit à
Athènes en 374. Pharnabaze rejeta sur lui le mau-
vais succès de l'expédition et demanda qu'il fut
mis en jugement; les Athéniens le poursuivi-
rent , mais les circonstances ne leur permettaient
pas de se priver de ses secours. La guerre s'é-
tait rallumée entre eux et les Spartiates. Iphi-
crate, avec une flotte réunie à la hâte en 373, fit
voile pour Corcyre , battit les renforts que Denys
de Syracuse envoyait aux Lacédémoniens, et
poussa les opérations avec une vigueur qui hâta
la conclusion de la paix, en 371.
Lors de l'invasion du Péloponnèse par Épami-
nondas, en 369, Iphicrate commanda les troupes
envoyées par Athènes au secours de Sparte. Il
ne put, ou ne voulut rien faire, et laissa les Thé-
bains opérer tranquillement leur retraite à tra-
vers l'isthme de Corinthe. H partit ensuite pour
Amphipolis dont les Athéniens méditaient Je
siège. Ne pouvant rien entreprendre contre cette
ville avec le faible corps qui lui était confié, il
s'occupa des affaires de la Macédoine. Eurydice,
veuve d'Amyntas H, vint implorer son secours
contre le prétendant Pausanias. Plaçant ses denx
fils Perdiccas et Philippe sur les genoux du gé-
néral athénien, et lui rappelant qu'Amyntns Pa-
vait autrefois adopté pour fils, elle le conjura
de défendre deux enfants qui étaient ses frères
d'adoption. Iphicrate chassa en effet Pausanias,
et Ptolémée d'Alorus, qui passait pour être l'a-
mant d'Eurydice, devint régent de Macédoine.
Le nouveau régent montra peu de reconnaissance
aux Athéniens , et s'opposa à leurs projets sur
Amphipolis. Iphicrate n'en parvint pas moins avec
le secours de l'aventurier Charidème à réduire
cette ville à l'extrémité, et il allait s'en emparer
lorsque Timothée le remplaça dans son com-
mandement. Ses liaisons avec les barbares l'a-
vaient rendu suspect aux Athéniens, qui ne vou-
laient pas le laisser à la tête de leurs troupes
lorsqu'ils étaient en guerre avec son beau-père
Cotys. Timothée insistait même pour qulphi-
erate fut privé par un jugement de ses droits de
citoyen. Iphicrate échappa a cette condamna-
tion, et se retira d'abord à Antissa , puis dans sa
ville de Drus. Les Athéniens le rappelèrent après
la mort de Chabrias, et lui donnèrent un com-
mandement dans la guerre sociale. U avait pour
collègues Timothée, Ménesfhée et Charès. Celui-
ci, voyant ses plans contrariés par les autres gé-
néraux, les accusa devant le peuple, et obtint leur
937
IPHICRATE — IRALA
938
mise en jugement. Iphicrate et Ménesthée furent
* quittés, en 355; Timothée seul fut condamné à
une forte amende, en 354. On ne connaît rien
des dernières années d'Iphicrate, mais on sait
qu'il ne vivait plus à l'époque où Bémosthène
prononça son discours contre Midias, en 346.
Iphicrate appartient, comme Chabrias et Cha-
rès, à cette classe de hardis hommes de guerre qui
maintinrent au quatrième siècle la puissance d'A-
thènes , mais qui n'eurent pas les qualités na-
tionales des Cimon , des Aristide et des Péri-
clès. Chefs de mercenaires , employés à des ex-
péditions lointaines , ils ne Tenaient guère à
Athènes que pour recevoir des récompenses ou
répondre à des accusations, et prenaient à peine
part aux affaires publiques. Ils avaient soin de se
ménager l'appui de quelques orateurs célèbres, et
Iphicrate fut particulièrement lié avec Lysias.
— Iphicrate, fils du précédent, fut un des ambas-
sadeurs envoyés de Grèce à Darius Codoman.
Ses collègues et lui tombèrent après la bataille
d'Issus, en 333, entre les mains des Macédoniens.
Alexandre, qui se rappelait les rapports de la fa-
mille royale avec Iphicrate le père, traita le fils
avec beaucoup d'égards. Celui-ci mourut peu
après , et ses os furent rapportés à ses parents.
y.
Cornélius Népos*, IpMcraUs. — Suidas, aux mots Kdt-
pavoç, Eevtxpv, A pu;, Iqptxp^TVK. — Harpocratioa,
aux mots Eevtx6v et Apyç. — Plutarque, jépoph.; Pe-
lot»* «î JtgesU., n ; fite decem orat. Lysias. — Arts-
tote, Rhet., 1,7, 9; II, 13; III, 10. — Démosthène, Phi-
lip., I ; cent. Arist., cont. Timot., cont. Mêid. — Sco-
llaste sur le Piutus d'Aristophane, 17S. — Dtodore de
Sicile, XIV, 86, 91, M; XV, 99, 41-48, 47 ; XVI, 87. - Po-
lyen, I. 9; III, 9. - Xéoophon, Hellen., IV, 4, s, 8; VI,
s. S. — Platon, Menen. — Andoclde, De Pace. — Strabon,
VTir, p. 889. - Pausanlas, III, 10. — Athénée, IV, p. 181.
— Isée, De Harred. MenecU — /Eachlne, De falsa Léga-
tions. — Denys d'Halicarnasse, De Lysia. — Dlnarque,
Cont. Philocl. - QulDtlllen , V, 10. — Arrlen, Anabasis,
II, 18. - Qulnte-Curce, III, 10.-- Rendant! , Fitse Iphi-
cratis, Chabrias, Tlmotkei Athen.; Berlin, 1848, in-*».
— G.' Grote, Bistory o/AncUmt Creece, t. IX et X.
irailh (Augustin-Simon), historien et lit-
térateur français , naquit au Puy-en-Velay, le
16 juin 1719, et mourut au mois de mars 1794.
Ayant embrassé l'état ecclésiastique, il devint
chanoine de l'église collégiale de Monistrol , et
ensuite prieur-curé de Saint-Vincent dans le dio-
cèse de Cahors. S'il faut s'en rapporter à une
indication donnée par l'abbé Sabatier de Castres,
il Ait chargé de l'éducation d'un des petits neveux
de Voltaire, ce qui expliquerait, selon ce cri-
tique, l'espèce de partialité avec laquelle l'abbé
Irailh a rendu compte des démêlés de l'auteur de
LaHenriade avec l'abbé Desfontaines, J*-J. Rous-
seau et Maupertuis, dans son principal ouvrage,
recherché encore aujourd'hui, et qui a pour
titie : Querelles littéraires, ou mémoires pour
servir à V histoire des révolutions de la ré-
publique des lettres , depuis Homère jusqu'à
nos jours;. Paris, 1761, 4 vol. in- 12, avec
cette épigraphe, Tantxne animis cœlêstibus
ir.de l Ces Mémoires sont divisés en trois par-
ties distinctes; la première traite des querelles
d'auteur à auteur; la seconde, des querelles gé-
nérales, ou sur de grands sujets; la «troisième,
de querelles des corps contre d'autres corps, ou
même contre un seul particulier. L'intérêt que
l'auteur a su répandre sur l'exposé des divers
incidents de ces tournois littéraires, les anecdotes
singulières ou piquantes dont il est semé, expli-
quent suffisamment le succès du livre , qui a de
plus le mérite d'être si bien écrit qu'il rat d'abord
attribué à Raynal et ensuite à Voltaire. L'abbé
Sabatier assure même « qu'on n'y peut mécon-
« naître en plusieurs endroits la touche et les
« idées de l'historien du siècle de Louis XIV;
« c'est sa manière d'écrire, sa tournure d'esprit
« et sa façon de penser ». On aurait pu sans
doute grossir le livre d'un plus grand nombre de
démêlés littéraires, ayant eu plus ou moins de
retentissement ; mais l'auteur nous semble s'être
maintenu dans des limites fort sages, en se bor-
nant au choix qu'il a fait parmi tant de maté-
riaux que l'esprit d'hostilité scientifique ou U||eV
raire mettait à sa disposition. On doit i 1'albé
Irailh un autre ouvrage également intéressant par
son objet, et qui a mérité la même estime; c'est
V Histoire de la Réunion de la Bretagne à la
France, où Von trouve des anecdotes sur la
princesse Anne, fille de François II, duc de
Bretagne ; Paris, Durand , 1764, 2 vol. in-12.
La France littéraire de 1778 mentionne comme
ayant été composée par lui, mais sans en faire
connaître la date ni le format, une tragédie en
cinq actes et en prose, intitulée : Henri le Grand
et la marquise de Verneuil, ou le triomphe
de r héroïsme, accompagnée de notes ainsi
que de plusieurs lettres de Henri IV à la
marquise. 11 y a lieu de croire que cette espèce
de drame n'a pas été imprimé ; car on en cherche
vainement le titre dans plusieurs collections dra-
matiques , et notamment dans celle de M. de So-
leinne , la plus complète et la plus étendue de
celles qui aient été formées. On a aussi attribué
à l'abbé Irailh Y Histoire de miss Honora, ou
le vice dupe de lui-même, 1766, 4 parties,
in-12 ; mais elle est de Lefèvre de Beauvray, qui,
dans une lettre écrite aux auteurs du Journal
Encyclopédique, a prétendu avoir dicté ce roman
« à un galant homme de ses amfs » (l'abbé Iraim),
qui s'en fit « ensuite l'éditeur et le vendeur ».
C'est un trait qui aurait pu servir de complément
à la nomenclature des querelles littéraires.
J. Lamouredx.
Quérard, La France Littéraire. — Docum. partie.
irala tuso (Fra Mathias - Antonio) ,
peintre et graveur espagnol , né à Madrid Je
25 février 1680, mort dans la même ville le 1 6 dé-
cembre 1753. Il appartenait à une riche famille du
Guipuscoa,et montra dès sa jeunesse de grandes
dispositions pour le dessin et la peinture. Des mo-
tifs, restés inconnus, le déterminèrent, le 22 mars
1704, à entrer chez les franciscains de Madrid, et,
durant quarante-huit années, il professa ou pra-
990 ÏRALA
tiqua dans aa cellule l'art qui fit s* réputation.
Irala ¥oao a formé du bons élève*. Parmi ses
meilleurs tekseaox on distingue à Madrid, $aint
François de Paul» distribuant des plante*
médiatnasn à des malades et plusieurs autres
taaits de la via <ki même saint; h Alqala de H^
nafèi , total Thomas (TAquin. H a beaucoup
gravé, et les musée» de Madrid et (ta l'Escurial
possèdent pue grande .quantité de se* esquisses,
, file, À. a*; L,
aneratra, Lêê ComenSmtU» de la fHmSv rm. «• Uq»
— QuUtyetf Q\çt&nxx*ri fat Peintreg espaçnols.
, IEAI.A. Vou. Ybaju,
itBLAHD ( Samuel), demain et graveur an-
glais, aé à Londres, ver» |760, mort en 1800.
D'abord ouvrier tisserand à Spftalfields, il devint
marchand de curiosités dan* le Strand. Il sayait
passablement dessiner et graver. Pour tirer parti
de oa talent, il écrivit des voyages avec des vues
gravées principalement à Vaquatinta des en.-
drutts qu'il avait visités* U débuta par un, Taitr
thMtgh Bolland, Qrabant, and a part of
France, mode la the autuwn of 1739, \Uu$-
tPated wtthprimti; Londres, 1790, 2 vol. in-8°.
Hasuite parurent s fiioturesque View* on tfo
rimer Thame*; 1798, 3 ¥Ol. in-8°; — Pictu,-*
resque Vieux on the river Me4v>ay; 1793,
in*g«; — Graphie illustrations of Hoçarthi
17*4^1798, • voL in-8° ; — ficturesque Views
on the Upper or WaruMtehire Avon; 1795,
îft-8*. D eut le malheur de devenir le complice
involontaire d'une fraude littéraire de son fils
(Dey. Samuel- Wil.-Hen. Irslajd) ; le regret qu'il
en ressentit hâta, dit-on, sa mort. On a encore
de lui : Piosuresque Views and an historical
aeetxunt of the Inns of Court in Lontfon and
Westminster; 1800, hv8°. Ces ouvrages ont
peu de valeur; cependant ils sont encore utiles
à consulter pour l'histoire de certaines localités
qui ont beaucoup changé depuis le siècle der-
nier. £.
, Chaînée*, Gcnmml Bioçraphical Dictiomn.
lULâHD (Samuel-William-Henry) t litté-
rateur anglais, fils du précédent, né à Londres,
dans le Strand, en 1777, mort la 17 avril 1835. Il
fat élevé dans une école privée en France. En
1795, il accompagna son père dans un voyage à
Stratford<8ur-Avon. Voyant que celui-ci, plein
d'enthousiasme pour âhakspeare, ne désirait rien
tant que d'en trouver quelque retique, U imagina
d'en fabriquer une. U lui présenta un autographe
de Shakspeare, et déclara l'avoir trouvé parmi de
vieux papiers. Émerveillé d'une si belle décou-
verte, Ireland encourage* son fils à continuer ses
recherches. Le jeune faussaire continua en effet,
et il en résulta une masse de manuscrits qui, étalés
dans la maison de Samuel Ireland, trompèrent la
crédulité publique. Entre autres productions se
trouvait une tragédie de Yortigern, t que Sheridan
acheta pour le théâtre et fit jouer devant une
satte comble et très-disposée a applaudir. Mais
— IRÈNE 940
toute la bienveillance de l'auditoire ne pot tenir
contre cette détestable rnpsodie, où Ton cherchait
en vain quelque trait digne de Shakspeare. Aussi
quand l'acteur Kérnhle prononça ce vers de son
rôle;
Et maintenant c'po f»t tait de cette solennelle moquerie,
la tempête éclata, et U fallut baisser le rideau.
Vortigern disparut pour toujours du théâtre.
En même temps les attaques de Malone et d'an-
tres critiques éveillèrent les soupçons d'Ireland
père, qui interrogea son fils, en obtint Vayeu de
la fraude, et reconnut pubUquexpent son erreur.
Samuel William Ireland quitta la maison pater-
nelle, et vécut des nombreux produits de sa
plume. A la fin de 1796, il publia un opuscule où
il se reconnaissait fauteur des manuscrits qu'il
avait produits sous le nom de Shakspeare. ce
petit ouvrage reparut, fort augmenté, avec le titre
de Confessions, en 1805. Ireland écrivit aussi des
romans : The Abbess; 1799, 4 vol.;— Gandez
the Monh; 1004* 4 vo).; - The Womn of
feeling» 4 vol.; et un poème : ffeglected Genius;
1812. Toutes ces productions ne valaient pas
mieux que les prétendus manuscrits de Shak-
speare, et attirèrent infiniment moins l'attention.
Jusqu'à la un de sa vie, il continua d'écrire pour
les libraires. Parmi ses derniers ouvrages le plus
important est la partie descriptive d'une His-
toire illustrée du Comté, de Kent, en 4 vol. Z.
Gentleman' t Magazine, 1796-7. — Monthlty Review,
▼oL XII, XX, XXI|, XXVII, XXXV. - Malone, Inquiry.
— Owlmers. Apology for tfc beUevert. - Brigiùh 6>
cloptedia ( Bioçraphy ).
iufiLANu (John), amateur anglais, né vers
1730, aux environs de Wrem (comté de Salop),
et mort en 1808. Adopté dans son enfance par
la veuve de Wycherly, auteur dramatique dis-
tingué, il manifesta pour les beaux-arts un goût
très-vif, qui devint la passion dominante de toute
sa vie. Après avoir fait une excursion malheu-
reuse dans la carrière commerciale , il s'occupa
de tableaux, d'estampes et de Kvres, et devint
en ces matières un des amateur* les plue éclairés
de son temps. On a de loi deux monographies es-
timées, l'une sur l'acteur Heuderson : life and
letters of Benderson; Londres, 1786, 2 vol.;
— et l'autre sur le pesntie Hegarth ; JU§arth
ilèustrated; Londres, 179 M m, a ici, grand
in-18,avec 1*3 planches? réhaprinséo eu 1793 et
en 1804. P* I*— i.
Ko«e, New J*>ft#ftf*feeJ Pfoffeftfr y. - «wnel, *«-
mtel de tAtnaUur de Uvrm,
IRBNJBCS. Voy. GlESELER.
iRàtfB (Elf^vq), Impératrice de Oonstanti-
nople, née à Athènes, vers 752 1 morte dans l'Ile
de Lesbos, le 15 août 803. On ne sait rien de
ses premières années. L'éclat de sa beauté et de
son génie attira Fattentîon de l'empereur Cons-
tantin Gopronyme, qui la destina à son fils et
héritier présomptif, Léon. Irène fit son entrée à
Constantinople le 1 er septembre 769, au milieu
d'un magnifique cortège. Les fiançailles furent
célébrées dans la chapelle du palais deux jours
941
IRÈNE
942
après, et le mariage s'accomplit te 17 décembre.
La princesse reçut le même jour le titre d'aw-
gits (a . Léon,avant et après *onevénement,en 775,
lui témoigna beaucoup de tendresse; mais un
motif religieux amena nue rupture entre les deux
époux. Irène* élevée dan» le cuite des images,
avait dn y renoncer solennellement pour se con-
former anx opinions de Constantin et de Léon »
tous deux gelés iconoclastes» Cependant elle avait
gardé, peut-être par inattention * deux images
dans sa chambre, L'empereur les découvrit, entra
dans une violenta colère « et rompit tout com-
merce arec l'impératrice. Il aurait même pris à
son égard des résolutions plus rigoureuses , s'il
n'était mort presque aussitôt après, le 8 septembre
780, laissant le trône à son fils Constantin VI,
Porpbyrogéoète» alors à peine âgé de dix ans.
Irène, régente de l'empire* gouverna avec une vi-
gueur qui alla jusqu'à la cruauté* Les principaux
actes de son administration ont été racontés à
l'article Constantin VI ; nous n'insisterons ici que
sur les faits qui se rapportent directement à elle-
même. Elle se.oontenta d'abord de suspendre les
poursuites contre les orthodoxes (adorateurs des
images) et de les favoriser secrètement ; mais,
en 786, elle convoqua un concile a Constantinonle
pour rétablir le culte des images dans tout l'em-
pire. Las soldats de la garde « peut-être par
haine contre l'impératrice et son favori l'eunuque
Stauratius» étaient très-attachés aux opinions
iconoclastes; Us se soulevèrent et dispersèrent
les prélats du concile. Irène dissimula son indi-
gnation , fit passer les soldats en Asie sous pré-
texte d'une expédition contre les Sarrasins, les
licencia , et les remplaça par une antre garde
composée de Thraces et commandée par Staura-
tius. L'année suivante * elle rassembla è Nlcée un
nouveau coneile (le septième général) qui s'ou-
vrit le 24 septembre et se termina le 2fl octobre,
Le concile rétablit le culte des images, déclara
faux et hérétique le conoUe tenu sous Constantin
Copronyme, frappa d'anathème les prélats ico-
noclastes , et donna au jeune empereur le titre de
nouveau Constantin , et à Irène celui de nouvelle
Hélène* Les décisions du concile excitèrent de
nombreux mécontentements, que Constantin es-
saya plus tard d'exploiter pour se dérober à la
tutelle de sa mère. Ses tentatives, plusieurs fois
renouvelées, ne réussirent jamais complètement,
et finirent, par amener sa déposition et sa mort,
en 797. Irène» qui avait été l'âme du complot et
qui n'avait pas hésité à faire crever les yeux à
son fils, resta seule maîtresse de l'empire. Elle
gouverna avec toute la fermeté dont eue avait
toujours (ait preuve et en général avec une mo-
dération que l'on ne pouvait guère attendre d'elle.
Cependant la raison d'État lui fit commettre des
actes de cruauté en usage à la cour de Byzanee.
Les quatre fils de Constantin Copronyme, dont
l'un, Nicéphore, avait eu les yeux crevés, tandis
» qu'on avait coupé la langue aux trois autres, vou-
lurent revendiquer le trône;; mais fis furent fa-
ottement arrêtés et exilés à Athènes. Une seconde
tentative ne leur réussit pas mieux. Irène leur fit
crever les yeux à tous, et les transféra à Panorme,
dans la Macédoine. Tout pliait sous son ascendant,
et les échecs de ses armes contre les Sarrasios
dans l'Asie Mineure ne portèrent pas-atteinte à son
pouvoir intérieur. Le lundi de Pâques de l'année
799 elle se rendit à l'église des Saints-Apôtres,
dans un char enrichi d'or et attelé de quatre che-
vaux blancs. Quatre patrices des plus éminente
tenaient les guides. L'impératrice, magnifique-
ment vêtue, la couronne sur la tête, le sceptre et
le globe à la main , s'avança au milieu des accla-
mations populaires. Les intrigues de Stauratius
et d'un autre favori, nommé Aétius, qui se jalou-
saient et cherchaient à se renverser, créèrent des
difficultés à Irène, et auraient peut-être amené la
guerre civile si Stauratius n'était mort à propos,
en 800. Vers la même époque, des négociations se
renouèrent entre la cour de Constantinople et
celle d'Aix-la-Chapelle. Si l'on en croit les nia*
toriens grecs, Irène offrit sa main à Charlemagne,
et ce prince agréa ou même conçut le premier
le projet d'une union qui aurait reconstitué rem-
pire romain ; Aétius fit manquer ce plan gran-
diose. Le silence des Occidentaux et surtout d'É-
ginhard rend bien douteuse l'assertion des chro-
niqueurs byzantins* Irène continua de gouverner
l'empire avec autant d'habileté que d'énergie ,
sans pouvoir faire oublier le crime auquel elle
devait le trône. Elle prodigua au peuple le trésor
impérial»; elle fonda <ks hôpitaux pour les vieil'
lards, pour les étrangers, pour les pauvres; elle
fit une remise générale des dettes du fisc, et di*
minua les charges publiques. Ces bienfaits n'a-
joutèrent rien à la stabilité de son pouvoir. Malgré
sa prudence, elle se laissa tromper par les pro-
testations de dévouement du grand-logothète
(trésorier) Nicéphore, ambitieux qui joignait à
une avarice sordide l'ingratitude et l'hypocrisie.
Sept eunuques, commandants de la garde et hauts
dignitaires du palais, s'associèrent à ses projets.
Le 31 octobre 802, tandis qu'Irène était retenue
par une maladie au fond du palais d'Éleuthère,
les conjurés, usant de leur autorité sur la garde,
se saisirent de l'impératrice, qu'ils enfermèrent -
dans le grand palais. Le lendemain Micéphore,
après s'être fait couronner par le patriarche inti-
midé, alla rendre visite à Irène, et obtint qu'elle
lui livrerait ses trésors. II promettait à ce prix
de la laisser en possession du palais d'Éleuthère ;
mais il s'inquiéta peu détenir sa parole : il la re-
légua dans Vile des Princes, où elle avait fondé
un mouaetàfe. et la fit conduire peu après à Mi-
tylène,dans Ille de Lesbos. Par haine et par
avarice, il la laissa manquer même du nécessaire,
et cette princesse, autrefoiasi magnifique, fut ré-
duite à filer pour gagner sa vie. Elle survécut
moins de dix mois à sa chute. EHe était âgée d'en-
viron cinquante ans, Les Grecs* oubliant son
crime et ne se rappelant que la protection accor-
dée au culte d*es images, l'ont placée au* nombre
94*
IRÈNE — IRÉNÉE
944
des saintes. Ils célèbrent sa fête le 15 août, jour
supposé de sa mort. L. J.
Cédrene, Chron., p. Vît, etc., édlt. du Louvre.- — Théo-
phane, p. S99, etc.. éd. da L.— Zonaras, toI. u, p. i», e tc^
éd. du L. — Glycas, p. tSl, éd. do L. — Vincent Mlgnot
Histoire de V Impératrice Irène; Amsterdam, 1761. —
Le Beau, Histoire du Bas-Bmpire, 1. LXV et LXVI. —
Gibbon, Historf of Décline and FaU of Roman Empire,
U . — Scbiosaer, GescMchte der bilderstUrmenden
Kaiser des Oit. Romischen Reiches.
inÈH E; jeune Grecque célèbre par sa beauté.
Voy. Mahomet IL
iftÉRÉB (Saint), Etpnvatoç, second évêque de
Lyon et martyr, naquit dans l'Asie Mineure, à
Smyrne ou dans les environs, à une époque sur
laquelle les historiens de l'Église ne sont pas par-
faitement d'accord (1), mais qu'il semble légitime
de fixer entre les années 135 et 145 de J.-C, et
mourut vers 202, pendant la persécution ordonnée
par Séptime Sévère. Tout ce qui concerne l'ori-
gine d'Irénée, la condition de ses parents, leur
religion, les premières années de sa vie estcouvert
d'une profonde obscurité. Tout au plus peut-on
dire qu'il était Grec; on sait au moins que c'est
dans cette langue qu'il a composé ses ouvrages.
Une lettre qu'il adressait à Florinus, un de ses
condisciples, et dont Eusèbe nous a conservé un
fragment, nous apprend qu'il vit et entendit saint
Polycarpe. H était à peine sorti de l'enfance ( en
watç ôv), et l'enseignement du saint vieillard fit
une si profonde impression sur lui qu'arrivé lui*
mèmeà une vieillesse avancée, il se souvenait non-
seulement de ses discours, mais se représentait
fort distinctement le lieu où il réunissait ses dis-
ciples et les moindres particularités de sa vie et
de ses habitudes. Indépendamment de saint Po-
lycarpe, il eut encore pour maître saint Papius,
évoque d'Hiérapolis. On peut donc dire qu'il puisa
la foi chrétienne aux sources primitives de la
pure doctrine apostolique.
Irénée joignit à la méditation des Saintes Écri-
tures l'étude approfondie des sciences profanes.
Son âme était ardente et curieuse de tontes les
connaissances humaines. Tertultien l'appelle om-
nium doctrinarvm curiosissimus explorator.
Dans un temps où le christianisme avait à se dé-
fendre non-seulement contre les attaques vio-
lentes de ses ennemis, mais encore contre les
dangereuses nouveautés de partisans téméraires;
quand il fallait répondre aux critiques des écri-
vains païens et en même temps combattre les
(1) Dora CellUer et Lenaln de Tillemont placent la nais-
sance d'Irénée vers i*>; Dnpln la recale jusqu'en 140;
Massaet, dans la vie d'Irénée qui précède l'édition qu'il a
dônneeide ses œuvres, a adopté cette dernière date, et de
même -Mœlher, dans sa patrologte. Saint Polycarpe est
mort entre 164 et 168; Irénée raconte loi-même qu'étant
encore enfant 11 a entendu le saint martyr, déjà parvenu
à l'extrême vleUlease (ndvu ynpaXeoç). Si on suppose
qn'Irénée est né en lto et qu'il a reçu les leçons de Po-
lycarpe à douze ou quatorze ans, il se sera écoulé trente-
quatre ou trente-six ans entre cette époque où Polycarpe,
d'après le témoignage même d'Irénée , était déjà très-
vieux, et sa mort , ce qui semble très-difflcile à admettre,
il parait plus légitime de placer la naissance d'Irénée entre
las années 115 et us.
entreprises et les tendances dangereuses de cer-
tains chrétiens, fourvoyés dans le mysticisme
oriental , il était nécessaire , pour entrer dans l'a-
rène , d'être armé de toutes pièces , de connaître
le fort et le faible de chaque doctrine, et par con-
séquent de les avoir toutes examinées, môme les
plus superstitieuses et les plus fausses. Le com-
merce des philosophes et des poètes de la Grèce,
sans refroidir sa ferveur, communiqua à l'esprit
d'Irénée une clarté, une élégance, une grâce que
les premiers apologistes de l'Église ont trop sou-
vent dédaignées, et à son raisonnement une
souplesse et une force remarquables. Cest une
question de savoir combien de temps Irénée de-
meura en Asie, ce qu'il y fit et s'il y fut revêtu
des fonctions sacerdotales. Les auteurs anciens
se taisent sur tous ces points. Grégoire de Tours
rapporte qu'il fut envoyé dans les Gaules par
saint Polycarpe (1). Cette mission, dont on ignore
le motif immédiat, n'est pas douteuse, mais il
est vraisemblable que, quand H en rat chargé,
son ancien maître avait cessé d'exister.
Saint Photin, évéque de Lyon, le reçut et l'at-
tacha à son église en qualité de prêtre. H ne
tarda pas à se faire connaître, et fut apparemment
un des adversaires les plus actifs de la secte de
Montanus, qui, chassée de Rome, essayait de s'in-
troduire en Gaule et d'y recruter des partisans.
Le rôle qu'il joua dans cette occasion le désigna
sans doute aux martyrs de Lyon, qui, écrivant au
pape Éleuthère au sujet de l'hérésie montaniste,
le chargèrent de porter leur lettre à Rome :
« Nous avons, disaient-ils, prié notre très-cher
frère et collègue Irénée de te remettre cette lettre ;
nous te le recommandons, et nous te prions de
le regarder comme un homme brûlant de zèle
pour l'Évangile de Jésus-Christ. Si nous pensions
que son mérite pût être relevé par sa dignité,
nous te le recommanderions très-particolière-
ment en qualité de prêtre (2). »
Pendant le séjour d'Irénée à Rome, le sang
des chrétiens coulait en Gaule. Photin ayant reçu
la couronne du martyre, Irénée rat élu à sa place
évêque de Lyon (178).
Le fardeau de l'épiscopat était alors lourd à
porter : aux maux permanents d'une persécu-
tion que la résignation des martyrs ne pouvait
lasser s'ajoutaient, au sein même de l'Église, des
divisions et des dangers domestiques. Le gnos-
ticisme, avec ses subtilités panthéistiques, son
piérâme et ses interminables générations d'éons,
compromettait gravement la profonde simplicité
de là métaphysique chrétienne; les sectateurs
de Montanus, avec leurs extases, leur dédain
excessif de la nature, et leurs aspirations vers
une perfection outrée qui captivait les âmes con-
templatives, tendaient à éloigner les faibles, en
leur proposant un idéal inaccessible, et en rom-
pant en visière avec les conditions les plus natu-
(i) Greg. Toron., Hist. Franc*, U «o.
(J) Eusèbe, Ut. V, en. rv.
945
IRÉNÉE
946
relies de la vie; d'antre part, l'époque de la
célébration de la Pâque divisait les évoques d'O-
rient et d'Occident. La conférence de saint Po-
1) carpe et du pape Anicet sur ce point avait
plutôt ajourné que terminé le différend. Outre
ces difficultés générales, la situation particulière
du christianisme dans les Gaules exigeait d'Iré-
née un zèle infatigable; car la religion nouvelle
n'avait pas encore de fortes racines dans ce
pays, et, avant de pacifier et d'unir, il fallait ga-
gner des âmes à la foi. Irénée se donna tout en-
tier à cette œuvre, et avec un succès auquel
Grégoire de Tours rend témoignage en disant
que par sa prédication il parvint, dans un court
espace de temps, à faire de Lyon une ville chré-
tienne. En même temps il étendait et propageait
la foi par des missions apostoliques à Valence et
à Besançon, et combattait les hérétiques dans
des livres où il dévoilait et réfutait leurs doc-
trines. Les trois premiers livres de son traité
contre les hérésies furent écrits sous le pontificat
d'Éleuthère.
Le débat qui divisait les Églises d'Orient et d'Oc-
cident sur le jour où l'on devait célébrer la Pâque
menaçait de tourner en schisme. Des deux côtés
on invoquait la tradition apostolique. Le pape
Anicet, sur le conseil de Polycarpe, et pour éviter
tout déchirement, avait laissé les églises suivre
librement leur usage sur un point où la foi n'é-
tait pas intéressée. Le pape Victor entreprit de
rétablir l'unité; mais il rencontra une vive op-
position de la part des évêques de l'Asie Mineure
et particulièrement de Polycrate d'Éphèse. La
résistance l'irrita. Irénée s'entremit, et lui per-
suada de suivre la politique sage et modérée de
ses prédécesseurs, en lui représentant avec une
respectueuse fermeté les embarras dans lesquels
il engagerait l'Église. Grâce à son intervention ,
la question fut encore réservée. Ce fut seulement
le concile de Nicée (325) qui fixa le jour de la
Pâque au dimanche qui suivait la pleine lune la
plus rapprochée de l'équinoxe du printemps.
C'est ainsi, dit Eusèbe, qu'lrénée, remplissant
toute la signification de son nom, se montra vé-
ritablement amateur de la paix par la douceur
de ses mœurs, par la modération de sa conduite,
et par les mouvements qu'il se donna pour la
procurer à l'Église (i).
Irénée fut une des nombreuses victimes de la
persécution de Septime Sévère. Les actes de son
martyre n'existent plus : du temps de Grégoire
le Grand, ils étaient déjà introuvables.
La liste des ouvrages de saint Irénée est
longue, et prouve mieux que tous les discours
son zèle et son activité. Par malheur, à l'excep-
tion de son grand traité Contre les Hérésies et
de quelques rares fragments conservés par Eu-
sèbe, nous avons tout perdu. Saint Jérôme cite
expressément une Épitre au pape Victor sur
la célébration de la Pdque. Nous possédons
(1) Eusèbe, 11?. V, ch. xv.
encore un passage de cette lettre; — une Épitre
contre Bios tus, itepl <3yi <J V ja * i- G* Blastus pa-
rait avoir été un chrétien judaïsant. 11 s'agissait
probablement dans cette lettre du débat au sujet
de la Pâque; — deux Épttres à Florinus, l'une
Sur la Monarchie, ou sur cette question Que
Dieu n'est pas V auteur du mal; l'autre Sur
VOgdoade, où il combattait l'erreur valentinienne
sur le nombre de huit ; — une Épitre à son frère
Martin sur la tradition apostolique (Ifepi tou
'AnooxoXixoO xyjpvyimctoç ; — un Livre contre
les Grecs, ou Sur la science (np&ç "EXXnva;
4j wepi ëici<rnQ|j.vrc; — un Recueil de traités de
différents genres (BCGXiov ôiaXéÇewv Siapépcov) ;
— ■ Eusèbe fait entendre clairement qu'lrénée avait
écrit contre Marcion, et Irénée lui-même, dans
sa réfutation des hérésies, marque plusieurs fois
l'intention d'en parler. Saint Maxime cite d'ïré-
née un traité De Fide, Les fragments en latin
d'un ouvrage qui porte ce titre, que Feuardent
a donnés, ne paraissent pas pouvoir lui être lé-
gitimement attribués; il en faut dire autant
d'autres fragments découverts dans un manus-
crit de la bibliothèque de Turin. Le débat qui
s'est élevé à ce sujet entre le chancelier Pfaff de
Tubingue et Soipion Maffei n'a rien éclairci (1).
Le seul ouvrage d'Irénée qui soit venu jusqu'à
nous est incontestablement le plus considérable
de tous ceux qu'il a composés. Son titre exact
est celui-ci : Exposition et réfutation des
Mensonges de la Gnose ('EXevxoc **î àvaorpoç^
Tîjç ^ eu $a)v\>{AOu Yva>aeu>0* O n le désigne plus
communément sous le titre de Traité contre
les Hérésies. Ce traité forme un des plus longs
ouvrages de polémique de l'antiquité chrétienne.
Il se divise en cinq livres. Le texte grec a péri,
sauf quelques fragments assez étendus ; mais la
traduction latine que nous en avons est très-an-
cienne et peut-être contemporaine d'Irénée. Au
reste, elle est fort barbare, hérissée d'heHénismes
et souvent d'une intelligence très-difficile. Les
objections que Semler a élevées contre l'authen-
ticité de cet ouvrage sont peu sérieuses et ne
valent pas la peine qu'on s'y arrête. Le premier
livre est consacré à mettre dans tout son jour
tes mystères du gnosticisme valentinien. Irénée
y expose cette théologie bizarre où la théorie pan-
théiste des émanations s'allie au dualisme orien-
tal : il décrit la génération des éons , leur rapport
avec Dieu et avec le monde, opposant les varia-
tions et les contradictions de cette doctrine à la
simplicité de la tradition apostolique , une et
invariable; puis il rapporte l'origine du gnosti-
cisme à Simon le Magicien, et le suit dans ses di-
verses transformations jusqu'à ses derniers par-
tisans. Le deuxième livre est employé à réfuter la
doctrine gnostique. L'hypothèse de la formation
du monde par une volonté et une puissance autres
que celles de Dieu est inadmissible et contradic-
toire : Irénée montre le danger des interpréta-
(1) Mœlher, Patrotogie, tom. I, pag. 387 et suif.
947
IHÉNÉE
948
tions téméraires des Saintes Écritures, et les con-
séquences morales de l'anthropologie des gnos-
tiques. Dans le troisième livre, irénée pose la
question sur le terrain de l'histoire et de la tradi-
tion positives. 11 fait Toir que les hérétiques ne
sauraient se prévaloir de l'autorité de la tradition
dans l'établissement de leurs dogmes. Pans l'E-
glise chrétienne, la tradition se perpétue par les
docteurs et les évêques qui se la transmettent»
pour ainsi dire, de main en main sans interrup-
tion. Ensuite il expose cette tradition elle-même
et ses immuables enseignements sur les rap-
ports du Père et du Fils, et démontre cette doc-
trine par l'autorité des quatre Évangiles et les
décisions des Apôtres. Les raisons que donne
Irénée pour établir qu'il n'y a que quatre Évan-
giles, ni plus ni moins, ne paraissent pas très-
frappantes; il ne semble pas qu'on puisse con-
clure rien de semblable « de ce qu'il y a quatre
régions du monde dans lequel nous vivons, et
quatre points cardinaux ». Dans le quatrième
livre, Irénée marque le rapport étroit de la
théologie de l'Ancien Testament avec celle qui
se trouve dans le Nouveau. La loi nouvelle, bien
que supérieure à l'ancienne, loin de la contre-
dire , la complète et l'achève- La Loi mosaïque
n'avait d'autre but que de dompter l'opiniâ-
treté du peuple juif, d'en réprimer les passions
sauvages et de préparer les âmes à l'avènement
du Christ , au règne de la charité. Aussi la Loi
nouvelle a-t-elle été donnée, non pas aux seuls
Juifs, mais à toutes les nations. Ce livre se ter*
mine par une défense du libre arbitre contre
les sectes gnostiques et par quelques considé-
rations qui se rattachent à cette question. Le
cinquième et dernier livre a pour objet d'ex*
pliquer les effets de la rédemption, et d'établir
sur des preuves solides la résurrection des
corps. Irénée insiste longuement sur ce dernier
point. La doctrine de la résurrection des corps
était une de celles qui avaient suscité le plus
d'objections contre le christianisme, de la part
des philosophes et de celle des hérétiques. Un
philosophe chrétien, contemporain d'Irénée,
Athénagore, venait récemment de composer un
traité dans lequel il prétendait démontrer la ré-
surrection des corps par les seules lumières de'
la raison. Irénée entreprend de prouver que le
dogme de la résurrection de la chair est intime-
ment lié au dogme de l'incarnation. Dans la
dernière partie de ce livre, on trouve l'opinion
d'Irénée sur le millénaire ou règne de mille ans,
auquel il croyait comme son maître Papias et
comme saint Justin, son contemporain. C'est sur
ce point seulement qulrénée pourrait être taxé
d'hétérodoxie. Sa doctrine même est assez bi-
zarre : il prétend que les Ames des justes ne
parviennent pas immédiatement après leur mort
à la contemplation de Dieu; mais que, comme
Jésus-Christ , qui, avant de monter au eiel, a
passé trois jours aux enfers, elles doivent tra-
verser différents états intermédiaires. Le premier
est celui où elles attendent la résurrection de
leur corps, dans une bienheureuse communica-
tion avec Jésus~Chriat. Le second celui où, ressus-
cites, ils doivent régner arec Jésua-Christ aur la
terre au milieu de toutes les jouissances. Le
troisième enfin est celui où ils sont admis à la
contemplation de Dieu. Cette tache, qu'on peut
justement reprocher à Irénée, disparaît du reste
dans l'ensemble do son exposition de la doctrine
chrétienne.
Nous avons un grand nombre d'éditions des œu-
vres d'Irénée ; Érasme donna la première, à Baie,
en 1620, Elle fut réimprimée plusieurs fia» jus-
qu'en UGQ, tant à Baie qu'à Paris, ia-foL etin-8°,
en 1563, Les protestants Nicolas GaUaakia et
Grynœus en donnèrent une nouvelle édition, l'un à
Genève en 1570, l'autre à Bâte en 1571, ia-fol.
Feuardent, frère mineur et professeur de V univer-
sité de Paria* «tanna ta troisième édition * mcn su-
périeure aux précédente*, à Parie, I6â9et it7*,
in-fol. Ernest Grau* est l'auteur dé la quatrième
édition, publiée à Oxford en 1702. Cette éâffion est
très-reroarquablapour l^Xéwtion typographique.
Enfin Massuet, bénédictin de Saint-Maur * publia
en 1700 à Paris, et en 1734 à Vienne, in-fol.,
son excellente édition. Ce travail, dit Mmlher,
offre le parfait modèle d'une édition critique.
On y trouve tous les fragmenta d'Irénée, mène
ceux de Pfaff et la polémique de ce dernier avec
Scipion Maffei, . B. Aub*.
Œuvre* d'Irénée, édit» de Haatvet, Parte, itw. -
Tertullien. - Saint Jérôme, De F iris Ulustribus. -Grc
gotre de Tours, I, 10. — Eosébe. Misé. JSccl., V, *. -
nom ftcny Oetllter, hist gênés: été Jut. Satfrés et Ke-
ciù„ tom. II. - Uaain de Tlltonoo*, HWoir. ttcte-,
tom. III. - Fleury, Hist. Ecclés., tom.. IV, — Mœther,
Patrologie, tom. II, et toutes tes histoire* de l'Église.
irénée (Saint), martyr en toscane, en 275.
Solvant les hagiographes, il fut arrêté lors de la
persécution ordonnée contré les chrétiens par
l'empereur Anrélien. Le préteur de la Toscane,
Turclus, le fit conduire à Chlusi. « 11 ordonna,
rapporte Baillet , qu'on l'étendlt Sur le chevalet,
qu'on lui déchirât les ooles avec des ongles de
fer, qu'on lui appliquât des torches ardentes sur
les flancs. » Irénée mourut au milieu de ces
cruels supplices; 11 avait pour compagne de mar-
tyre une dame nommée Mostiole, qui succomba
sous des coups de fouet plombé. Tillemont re-
connaît que les actes de ces saints « quoique
graves, ne sont pas originaux » ; cependant, l'É-
glise les honore le 3 juillet. A. L.
Tttfetnont, Mémoires Bccl-ëfiasMqms, t. IV. - Batllrt,
Fies des Saints, t. Il, S )HUet. - Richard et Glraad , Bi
bliothèqw Sacrée,
wAnéb ( Saint), martyr, décapité le 25 mars
ou le 6 avril 304, à Sirmicb, en Pannonie (au-
jourd'hui la Hongrie). Il était éveque de Sirmicb,
lorsque Probus, gouverneur de la Pannonie, le
fit sommer de renoncer à la religion chrétienne.
Probus agissait en vertu des ordres des empe-
reurs Dioctétien et Maxknien. Il offrît à Irénée
divers moyens de transiger avec les lois ro-
maines; mais le saint prélat ne daigna pas même
949
loi répondra Aprë* »^Qir subi diverses tortures,
Irénée eut la tête coupée. Vhi&toire de 00a mar-
tyre semble authentique. L'Église l'honore le
26 mars. A, L.
poro RulRavt, f'iUp Sanfitarup. *> TUleijiont, Mé-
moires Ecclésiastiques, t. V. - Bail le t, fies des Saints,
t. il, SB mars. — Richard et Glraud, -Bibliothèque Sacrée*
minée, évêque de Tyr, vivait dans la pre-
mière moitié du cinquième siècle. D'abord comte
de Pempire, il représenta ^empereur Théodose II
au concile d'Éphèse en 431, et prît parti pour
les nestoriens. A la fin du concile il se rendit
en toute hâte à Coustantineple pour combattre
dans l'esprit de IViupereur l'influence du parti
contraire. Il y reuss.it pendant quelque temps;
mais Théodose, après de longues hésitations , se
déclara contre le* nestoriens, et bannit Irénée
de la cour, vers 435. tes évoques orientaux, qui
partageaient ses opinions religieuses, t'élurent
évêque de Tyr en 44 4., Un décret impérial or-
donna de le dépoter de Vépiscopat et de le
priver du caractère ecclésiastique. La sentence
fut exécutée en 448. Irénée écrivit dans sa re-
traite une histoire de la controverse nestorienne,
sous ce titre ; Tragœdia, seu commentant de
rébus m$gnQtlaEphe$ix ac in Oriente gestis.
Le texte grec de cet ouvrage est perdu ; mais il
reste des fragments étendus d'une vieille traduc-
tion latine publiée par Christian Lupus sous le
titre fort inexact de : Variorum Patrum Epis-
toi ce ad coneUium Bphesium pertinentes;
Louvain, 1683, Y,
Manst, Satr. Cancil. «e* Colket., ▼«!. V, p. Ml, 7».
— TU le mont, Mém. Ecclés., vol. XIV. — Cave, Hist, Lit-
leraria.
irénée, grammairien grec, dont les Latins
raduisirent le nom. en celui de Pacatus. On
nanque de détails sur sa vie, mai» on sait miU
rivait sous les Ptolémées et qu'il était établi à
Alexandrie; il s'occupa surtout de recherche»
nr le dialecte de l'Attique et sur celui d'Alexan-
Irie. Suidas mentionne plusieurs ouvrages d'I*
énée sur différente sujets de grammaire; Us
ont aujourd'hui perdus. Il avait aussi écrit un
ommeutaire sur Apollonius, cité à diverses re-
prises dans les scolies qui nous sont parvenues
ur ce poëte. G. B.
Suidas. Lexicon, t, II, p. M, édtt. de Kaater. — Ffcbrl-
«u, Mibliotheea Qrmca; 1 VI, a>. 17t.
xbAaéb, surnommé le Référendaire, prêtre
rec, qui parait avoir été contemporain de Justi-
ieu ; il reste de lui trois pièces dn genre erotique ;
lies ont été insérées dans Y Anthologie. G. B.
^jnthologiu, édtt. de Jaoota, t. III, p. Ml et XIII, sos.
* ibénék ( Klementievski), théologien russe,
* en 1 7â3, à Klementief ( gouvernement de Via-
noir), mort à Saint-Pétersbourg, le 24 avril 1818,
ait un moine fort érudit, qui fut évêque de
irar et archevêque de Pskof. Il a écrit des
»¥Yimentaires sur les douze petits prophètes ,
ti- les Épttres de saint Paul aux Romains et
l-x Hébreux, et a prononcé des sermons à la
ur, imorimés à Saint-Pétersbourg en 1794, \\
IRÉNÉE — IRETON 050
a, en outre , traduit en russe, soit du grec, soit
du latin, plusieurs traités de différents Pères de
l'Église, ainsi que les commentaires sur les
psaumes du cardinal Bellarmin; Moscou, 1807,
2 vol. in-4°» et deux opuscules ascétiques de ce
célèbre théologien, P" A. G— a.
Slovor pUatélioW doukhovmço tchina greko-rossiis-
koi Tzerkvi,
*i*énAe (faltovski), prélat russe, né le
28 mal 17 62, mort le 29 avril 1823, était fils
d'un pauvre curé de campagne. Non content
de posséder l'hébreu , le latin, le français et l'al-
lemand, il alla en Hongrie étudier la philosophie,
l'histoire et les mathématiques. Le mérite seul
l'éleva à l'épiscopat, dont les prêtres mariés
sent exclue en Russie. On a de lui : Chro-
n*lo§iê ecclésiastique) Moscou, lT97;f!—
Christian* çrthodaMX dagmatm-polemicas
Thêologi* Oosnpmdivm; Moscou, 1802, t. JI,
in-s° 5 — cl des commentaires sur les Épttres de
saint Paul m» Romains et aux Galate*» Kief,
1800, x t in-8 Q . p çe A, G— m.
De ft» TlUttortÊ ému VÉQlimrm**» par le p. Qngarin ;
Paris, iafï, p, <*,
i*BTO?f (Henïy), homme politique et géné-
ral anglais, né à Attente*, dans le comté de Not-
tingham, en lftlû, mort le 15 novembre 1651,
Il recul son édnestion au collège de lia Trinité h
Oxford, et il étudiait encore le droit a Middle
Temple lorsque éclata la guerre civile. U se dé*
elara avec ardeur peur la cause du parlement,
et montra des talents nriUtairee. On prétend même
que Çromwell apprit de kù les premiers élé-
ments de Part de la guerre. En 1646 Ireton
épousa Bridget, fille aînée de OromwéU, et reçut
bientôt après une commission de capitaine, de
cavalerie, pois de colonel. Il fut peut-être l'auteur
le pins direct de la mort de Chartes 1 er . Les par-
lementaires négociaient avec ce prince, et Crom-
well ne repoussait pas Vidée d'un accommode-
ment, lorsque Ireton intercepta une lettre du
roi. Cette missive prouvait que Charles n'était
pas sincère et qu'au lieu des honneurs au'il
promettait aux chefs révolutionnaires, il leur
réservait les plus rigoureux châtiments. Ire-
ton et CromweM, destinés les premiers à la ven-
geance royale, ne voulurent plus entendre par-
ler de conciliation , et poussèrent impitoyable-
ment an jugement, a la condamnation et au sup-
plice de Charles I er , Après l'établissement de la
république, Ireton se rendit en Irlande , comme
premier lieutenant de Cromwell, et au départ de
ce général » il le remplaça, dans le gouvernement
de l'Ile. Sa réputation de vigueur ramena presque
toute l'Irlande à l'obéissance sans coup férir, li
était au comble du succès lorsqu'il fut atteint
devant Umerick d'une maladie contagieuse qui
l'enleva à. l'âge de quarante et un ans. Ses enne-
mis le représentent comme cruel dans la guerre,
dissimulé, traître, hypocrite en politique. Pour
son parti, au contraire, il fut un grand général ,
un homme d'État et un saint. Ses talents sont in-
061
IRETON — IRMINON
952
contestables , la sincérité de ses opinions est
plus douteuse; mais s'il montra une ambition peu
scrupuleuse sur les moyens, il fit du moins
preuve de désintéressement : il refusa une rente
annuelle de 2,000 livres sur les propriétés con-
fisquées du duc de Buckingham ; le parlement
la conféra après sa mort à sa veuve et à ses cinq
enfants (un fils nommé Henri et quatre filles).
Son corps, enseveli dans la chapelle de Henri VII,
dans l'abbaye de Westminster, lut exhumé après
la Restauration, attaché au gibet et brûlé à Ty-
burn. Z.
Biographie Britannica. — Graoger, Biographieal
Historu of England. - Guteot, Histoire de là Révolution
d'Angleterre.
ieiaetb (Ignacio) , habile paysagiste espa-
gnol, né à Aicoitia (Guipuscoa), en 1620, mort
à Séville après 1669. Il étudia la peinture dans
l'atelier de Herrera le Vieux ( 1642), et prit le goût
et la couleur de ce maître; cependant il ne put
réussir à représenter la figure. Il se consacra donc
au paysage, et se plaça bientôt au premier rang
dans ce genre. Murillo , longtemps son ami et
son admirateur , exécutait les personnages de
ses compositions : celles-là sont les plus pré-
denses. La jalousie brouilla ces deux artistes, et
depuis lors Iriarte n'anima plus ses toiles. 11 fut
l'un des fondateurs de l'académie de Séville,
dont il fut le premier secrétaire (4 janvier 1660).
Les paysages d'Iriarte se font admirer par la lé-
gèreté du feuillage, le naturel vigoureux des
arbres,la profondeur de l'horizon, l'heureux choix
des sites, la transparence des ciels, la l'impidité
des eaux , l'entente du clair-obscur, enfin par
une harmonie générale; aussi les tableaux de
ce maître quoique nombreux ont-ils conservé un
prix élevé. A: de L.
Lot Constitutiones y Jetas de la Aeaiewka de Séville.
— Raphaël Mengs, Las Obras, etc. ; Madrid, 1780. — Gac-
▼arra, Los. Cotnmentarios de la Pintura. — QalUlet,
Dictionnaire des Peintres espagnols.
iriarte. Voy. Yriarte.
irico (L'abbé Jean-André), érudit italien,
né à Trino, près de Verceil, le 6 juin 1704, mort
dans la même ville; le 2 mars 1782. Il fit ses étu-
des sous la direction de son oncle, chanoine de
Casai, entra dans les ordres, et fut nommé cha-
noine à Livorno, dans le comté de Verceil. Ses
travaux sur les annales de la Lombardie le mi-
rent en relation avec plusieurs savants de Milan
qui l'attirèrent dans cette viHe. Il fut nommé en
1748 un des préfets de la bibliothèque arabro-
sienne. Il quitta cette position en 1764 pour aller
occuper dans sa ville natale la dignité de prévôt
et de curé de l'église paroissiale qu'il conserva
jusqu'à sa mort. Ses principaux ouvrages sont :
Rerumpatirx Libri très, ab anno urbis œternx
154, ad annum Christi 1672, ubi Montfer-
rati principum , episcoporum , aliorumque
virorum gesta ex monumentis plurimis nunc
primum editis fecensentur; accedit disser-
tatio de sancto Oglerio, Locediensis mo-
nasteril abbate, cum figuris et indicibus;
Milan, 1.745, in-fol.; — Codex Bvangeliorum
sancti Busebii Magni, episcopi et martgrU,
manu exaratum ex autographo Basilic*
Vercellensis , ad unguem exhïbitus * nunc
primum in tucem prédit. ; Milan, 174S, 2 vol.
in-4°. Irénée fournit beaucoup de matériaux à
Irico pour sa Bibliotheca Scriptorum Medvo-
lanensium 9 et laissa un grand nombre de ma-
nuscrits parmi lesquels on distingue : Le Anii-
chità ecclesiastiche, in oppositions a quelle
delV Inglese Bingam. Z.
De Gregory, Storia délia Letteratura rereelUs*.—TL
paldo, Biographia degti Jtaliani Ulustri, voL V,p. 109.
iblahd (Robert) , jurisconsulte écossais, né
vers 1475, mort le 15 février 1561. D'une des
plus anciennes familles d'Ecosse, il préféra la
carrière des lettres à celle des armes; après
avoir étudié la philosophie dans son pays, il vint
en France, vers 1496, et se fit recevoir docteur
en droit à Poitiers , où il obtint une chaire en
1502. Il eut pour élèves le célèbre Baro , qui lm
dédia son JSconomia Pandectarum , Roaiden,
Chiverny, chancelier de France, Achille de jHar-
lay, Christophe de Thon, Brisson, Pibracet
autres hommes distingués, qui manifestèrent
toujours à leur savant maître la plus grande
considération. * £. G.
Dreux do Radier, Histoire Littéraire dm Poitou.
i*UMD(Bonaventure) 9 jurisconsulte fran-
çais, fils du précédent, né à Poitiers, en 1551,
mort vers 1612. 11 étudia la philosophie sous la
direction du célèbre Ramus ; quant à la juris-
prudence, il eut pour maîtres son père et Du-
moulin. Ses grandes capacités sont attestées
par une lettre de Scaliger, dans laquelle le cé-
lèbre savant, répondant à diverses questions de
droit et de littérature que lui avait adressées Ir-
land, alors à peine âgé de vingt ans, fait le plus
grand éloge de la science précoce de son jeune
correspondant. Irland, nommé en 1579 professeur
de droit à Poitiers;, joignit deux ans après à cet
emploi celui de conseiller au présidial, charge
qui lui était léguée par le don d'Aubertson onde
maternel. On a d'Irland : Remontrances au roi
Henri III, au nom du pays de Poitou; Poi-
tiers, sans date, in-8°; — De Emphasi et Hy-
postasi ad recte judicandi rationem Considt-
ratio; Poitiers, 1599, in-8° : dans cet ouvrage,
l'auteur se propose d'enseigner les moyens de
se garantir de l'influenee des préjugés et autres
erreurs spécieuses, surtout en matière de droit
et de religion; — Pubticx Laetitia Auncta/ia
ob natum delphinum; Poitiers, 1605, in- 12.
E. G.
Irland, Epittola dedicatoria ad Ph. Muraldum (en
tête un traité De Emphasi et Hypostasi d'Irland). -
Dreux du Radier, Hist. IÀttér. du Poitou.
* lRMiNôN,abbé de Saint-Germain-des-Prés,
au commencement du neuvième siècle. Sa signa-
ture se trouve après le testament de Charie-
magne, et divers actes de son monastère le
mentionnent en 812 et en 817. On lui doit un re-
cueil bien précieux : le Polyptyque , ou livre
953 IRMINOW
censier de Pabbaye de Saint-Germain au neu-
vième siècle. M. Benjamin Guérard Fa publié,
avec des notes et nne préface, qui est elle-même
un des plus beaux monuments de l'érudition con-
temporaine. B. H.
HUt. litt. de la France.
ibnemus (1), célèbre jurisconsulte ita-
lien (2), né à Bologne , dans la seconde moitié
du 'onzième siècle, mort après 1118. Il devint
d'abord maître es arts , et enseigna pendant
quelque temps dans sa ville natale le trivium
et le quadrivium. Consulté un jour par un
professeur de théologie sur les significations du
mot as chez les Romains, il fut conduit à faire
des recherches dans les textes du droit romain,
qu'il se.mit ensuite à étudier avec ardeur, tout
seul, sans professeur ni gaide. Ce droit, sur le-
quel quelque temps auparavant des juristes de
Ravenne d'abord et ensuite un certain Pepo de
Bologne avaient essayé de faire des leçons,
n'était plus alors l'objet d'aucun enseignement.
Irnerius, étant arrivé peu à peu à s'initier aux
principes de la législation romaine , se mit, vers
la fin du onzième siècle, à l'expliquer dans des
cours publics. Son entreprise fut couronnée de
succès et les élèves affluèrent autour de sa
chaire. C'est ainsi qulrnerius devint le rénova-
teur de l'étude du droit romain en Occident, fait
qui eut une immense influence sur la marche de
la civilisation. Il acquit bientôt une grande ré-
putation, et fut appelé aux fonctions de juge. En
1118 l'empereur Henri V l'envoya à Rome pour
y faire hâter l'élection du pape. A partir de cette
année, on n'a plus de renseignements sur Ime-
rius; mais un passage du Chronicon Usper-
gense fait croire qu'il vécut encore quelque temps.
De l'école de droit fondée par lui sortirent les
fameux quatre docteurs, qu'on a même déclaré
plusieurs fois, quoique probablement à tort, être
ses disciples immédiats; cette école enfin fut le
fondement de la célèbre université de Bologne.
Irnerius a écrit : Glossx : remarques sur les di-
verses parties du droit romain ; elles sont de deux
sorteâ : interlinéaires et marginales. Les pre-
mières, intercalées dans le texte, ne sont qu'une
explication succincte de ce texte, et sont impri-
mées dans toutes les éditions glosées du Corpus
Juris (3). Les secondes, qui contiennent une
interprétation plus approfondie des difficultés du
texte, à la marge duquel elles se trouvent dans
les manuscrits , n'ont pas encore été publiées ;
on en rencontre dans divers manuscrits, dont
Savigny a donné l'indication dans le t IV de son
(l) C'est le nom sons lequel II est le pins généralement
connu ; dans les documents où U figure comme témoin,
11 est désigné tantôt par Warnerius* tantôt par Gerne-
rius; mats dé)a au douzième siècle des auteurs rappellent
Ymerius, eu Irnerius.
(t) Son nom germanique a faltjdlre à plusieurs de ses
biographes qu'Irnerlus était d'origine allemande ; cela
est complètement Inexact.
(S) On a souTent prétendu, mais à tort, que tonte la
glose interlinéaire était due à Irnerius; U n'en» a rédigé
que la plus grando partie.
— IRSON
954
Histoire du Droit Romain au moyen âge, et qui
se conservent la plupart à ta Bibliothèque impé-
riale de Paris. Dans les gloses d'Irnerius, qu'on
distingue de celles des autres commentateurs
par les sigles G., Y. ou J, qui les accompagnent,
se remarque une dialectique serrée, résultat des
premières études philosophiques de l'auteur. Ce-
lui-ci fait preuve d'unegrandesagacitécritique en
cherchant à plusieurs reprises à épurer les textes
qu'il a devant lui. Reconnaissons donc avec Sa-
vigny tout le mérite d'Irnerius, qui,* par les
seules ressources de son intelligence, inventa
pour l'interprétation du droit romain une mé-
thode entièrement nouvelle et féconde en résul-
tats. Ses autres ouvrages sont : Authenticx;
extraits des nouvelles de Justinien, qu'on trouve
intercalés'dansle texte des Instituteset dans celui
des neuf premiers livres du Code de Justinien;
d'après les recherches de Savigny, il est hors de
doute que c'est à Irnerius qu'est due la majeure
partie de ces extraits, qui sont imprimés dans
beaucoup d'éditions du Corpus Juris ( voy. sur
ce point : Bynkershœk, De Auctore Authenti-
carum, et Biener, Historia Authenticarum);
— Formularium Tabellionum, ouvrage perdu
dès la fin du treizième siècle; — Quxstiones,
écrit également perdu, de même qu'un traité De
Actionibus. Notons en dernier lieu que c'est
Irnerius qui inventa le nom d y Infor tiatum, par
lequel on désignait au moyen âge la partie des
Pandectes qui commence au troisième titre du
livre XX1Y et qui va jusqu'au livre XXXIX.
irnerius n'eut d'abord à sa disposition que le
Digestum novum, qui va du premier livre au
troisième titre du livre XXIV, le Digestum
vêtus, ou les onze derniers livres des Pandectes,
les Institutes et les neuf premiers livres du
Code; les autres parties du Corpus Juris étaient
restées à Ravenne. Mais quelque temps après on
transporta de là à Bologne ce qui manquait
pour compléter les Pandectes, sauf un dernier
morceau qui, commençant par les mots Très
partes, par lesquels on les désigne, ne rat dé-
couvert que plus tard. C'est alors qn'Irnerius
proposa pour la seconde partie des Pandectes le
nom* d' In fortiatum t indiquant que cette partie
venait d'être renforcée ou augmentée. Bientôt
après enfin on reçut à Bologne les trois derniers
livres du Code et les Novelles* £. G.
Trltbemlos, Dé Scriptoritms EcclestasticU. — Dlplo-
vataccius, De Prxstantia Doctorum. — B. Nihustus,
Irnerius; Cologne, 1C4S, in-8«. -tSartl, De Claris Archi-
gymasii Bononiensis Professoribus ; pars I, p. il. ( L'ar-
ticle qui concerne Irnerius est réimprimé dans : Biga /#-
bellorum authenUcos lillustrantium de Ztpernik). —
Fantuzzl, Scrittori Botognesi, t IV. - Savigny Histoire
du Droit Romain au moyen âge , t. IV.
irson ( Claude ), grammairien et mathéma-
ticien français, né en Bourgogne*, au dix-septième
siècle. « Claude Irson parait, dit Barbier, avoir
tenu une des petites écoles de Paris pendant une
grande partie de sa vie. Il aimait cet état, et l'on,
voit, par ses épi très dédicatoires, qu'il cherchait
96*
IRSOJS — 1RVINO
m
des protecteur*, pouf n'être point troublé dans
set fonctions par des envieux. Vers 1678, il dé-
tint juré teneur de litres de compte, par lettres
patentes du rot. » On a de loi : Nouvelle Méthode
pour apprendre facilement let Principes et
la Pureté de la Langue Française; Paris,
1656, in-8*; 2 e édit., augmentée, 166* : la pre*
mière édition est dédiée à Sentent , la seconde à
Gandin; toutes deux contiennent une liste pré-
cieuse des auteurs les plus célèbres dé notre
langue, avec de courts jugements sur leurs ou-
trages ; — Méthode abrégée et familière pour
apprendre à lire; Paris, 1667, in-12; —
Arithmétique universelle} Paris, 1674, in<4+;
4 e , édition sous ce titre : Arithmétique pratique
et raisonnée; Paris, 1692, in-4°; il en a parti
un abrégé en 1695, in-12 ; — Méthode pour bien
apprendre toutes sortes de Comptes, composée
par ordre de Colvert; Parla, 1679, in-fol.; —
Traité des Changes étrangers; Paris, 1686, ;
in-4° : r auteur a donné un abrégé de ce traité en
1694, in-12. a L'abbé Papillon a eu tort, dit Bar-
bier, d'attribuer à un fils de notre grammairien
V Arithmétique universelle et autres outrages
de ce genre. Les différents cataloguée Insérés
par Claude Irson à la suite de plusieurs de ses
outrages prouvent qu'il a composé ceux qui re-
gardent la grammaire et ceux, qui concernent les
J. V.
Papillon, Biàliothéqu* U ÊoutyOtfté- - Ooujct, Bi-
kliotk. franc. - BarMftr, Mammem erU. et eompl. en
Dict.HUtor,
l lEYine ( Washington), littérateur améri-
cain, né à New-York, le 3 avril 1763. Le nom de
M. Irting jouit aux États-Unis d'une brillante
renommée, et il est presque aussi populaire en
Angleterre môme. C'est , en effet f un des écri-
vains les pins gracieux et le» pins ingénieux que
présente la première moitié du siècle. Il a tou-
ché à plusieurs genres, les essais de mœufs,
les voyages et l'histoire, sinon ntèt la même
supériorité, du moins avec un rare talent de
penseur et d'artiste. Son père était Écossais d'o-
rigine et négociant à New- York, Son éducation
fat principalement dirigée par ses frères aînés,
qui, tout en s'occupent de commerce, étaient
remarquables par leur intelligence et leur goét
pour les lettres. Sa santé étant un peu délicate,
on loi laissa toute liberté de parcourir les sites
pittoresques de l'Ile de Manhattan ; et c'est dans'
ees excursions, où il observait à la fois les pay-
sages et les mœurs, qu'il recueillît une foule de
vieilles traditions , de traits singuliers et amu-
sants qu'il introduisit dans ses ouvrages» U dé-
buta par des essais sur les théatf es, les mœurs
de la tille et sujets de ce genre, clans le Mor-
ning- Chronicle, journal pnblié par un de ses
frères, essais qu'il sigfla d'un flom emprunté ,
Jonathan Oldstyle. K l'âge de tïflgt ans, quel-
ques signes de consomption s*étant manifestés,
H fut entoyé dans le midi de la France, résida
ensuite à Gènes, visita la Sicile, Naples, Rome,
et, traversant toute l'Italie et la Suisse, tint
passer plusieurs mois à Paris. De là, use rendit
en Angleterre, après avoir visité avec soin ta
Hollande. U recueillit ainsi une foule de mtes
et d'observations qui plus tard ont servi de
base à plusieurs de ses essais les plus ingéniera»
Sa santé étant tout à fait rétablie, il revint à
New-York, après une absence d'environ trois ans
(1806). U reprit l'étude du droit, qu'il ataitinter-
rdtnpde, se fit recevoir au barreau , mais et
réalité ne pratiqua jamais comme avocat. Bien-
tôt 11 commença avec tin de ses amis, M. PauJ-
ding, une espèce de revue , Salmagundi, pa-
raissant tous les quinze jours, et retraçant avec
beaucoup à'humor et de piquant les ridicules,
les mœurs, les personnages excentriques du
jour. Ce recueil obtint aussitôt une grande popu-
larité. Quelques difficultés avec l'éditeur tinrent
llnterrompfe brusquement après une année de
succès (1808). En décembre 1809, il publia
VBistoire de New-York par tHedrich Knic-
herboher. Cest nne histoire comique , assai-
sonnée de beaticocty dé saillies, d'exagérations
bouffonnes, de fictions enjouées , de la colonie
hollandaise de Nèvt-ttork. les anciennes fa-
milles qui en descendaient furent d'abord cho-
quées de voir traiter àtec cette irrévérence tes
mœurs et les souvenirs de leurs ancêtres; mais
la majorité des lecteur* y trouva Uni d'esprit
et d'amusement, que dès" Ce moment M. Irrïng
devint un des auteurs les" (dus populaires. Le
nom de Kniekerbockèr se propagea rapide-
ment ; et on le trouvé aujourd'hui appliqué à mie
foule d'hôtels, de bateaux à tapeur et d'étabfas-
ments. En 1810 deux de ses frères qui étaient dans
les affaires, l'un chef dé là maison" de Aetr-York,
et l'autre à Liverpool , lui donnèrent un intérêt,
mais en lui laissant la liberté de ftoursuivre ses
travaux littéraires. Pendant îà pierre avec l'An-
gleterre (181M814 ), partageant les èêùtimenis
patriotiques dé f époque, it publia, dans l'Ana-
lectiô Magazine, des biographies éloquentes des
principatfx capitaine*? de marine africains, et
fut nommé aide fa èamp du général tompkins,
gouverneur de ftew-York, avec fe titre de co-
lonel. La paix ne tarda pas à éfre rétablie; et,
abandonnant son titre et la carrière militaire,
il fit toile podr fiiterpooî(iSi5). Il parcourut
tes parties agrestes du* pays de Galles, les ptos
beaux comtés d'Angleterre, et les highlands,
l'Ecosse. Son întèntiôfl était de faire on autre
forage SoY le 4 continent, lorsque des désastres,
résultat de la britëqde transition de fa guerre i
la paix, tinrent frapper la maison de commerce
de see frères et changer sa position et ses pro-
jets. Il eut recours à sa plume, et comme consola-
tion et comme ressource. Mettant en œuvre la
observations qu'il avait faites sur la tie rurale et
(es mtôurs, fi commença â écrire les essais de
son célèbre Sketch Book (Litre d'Esquisses),
et le» enteya à New-York , où ils obtinrent on
grand succès. Le premier Volume étant parvenu
957
IRVïIfO
964
en Angleterre, de nombreux extraits en furent
publiés dans un journal hebdomadaire en re-
nom, la Uterary Gazette, dirigée par Jerdan,
et furent extrêmement goûtés (1819). M. Irvtag
résolut atorç d'en faire une édition anglaise.
Malgré les démarches amicales de Walter Scott,
qui peu d'années auparavant ratait tfès-graeieu-
sement reçu à Abbotsford, fl ne réassit pas à s'en-*
tendre avec un libraire, et il se hasarda à le pu*
blier à ses propres frais. C'est ainsi que parut le
premier volume en Angleterre ( i820), Mais sur-
vint bientôt un fâcheux incident. Au bout d'un
mois, l'éditeur auquel il avait été confié fit faillite,
et la vente fut suspendue. Dans cette perplexité,
M» Irving s'adressa encore à Walter Scott ; et ce-
lui-ci» étant venu à Londres, entama des négocia-
tion? avec le célèbre libraire Murray, qui consentit
à s'en charger. Dès lors M. Irving eut pour ses
autres ouvrages un éditeur assuré, et qui dans
toutes ses relations montra l'esprit le plus li-
béral. Murray lui accorda 200 livres sterling
( 5,000 fr. ) pour ses droits d'auteur, et l'ouvrage
ayant obtenu le plus brillant succès, il lui en-
voya sans aucune promesse antérieure une autre
somme de 200 liv. sterling. M. Irving devint
aussi célébrée» Angleterre qu'il l'était aux États-
Unis. On admira généralement l'esprit de bon
aloi* la grâce piquante, la douce sensibilité, et le
style addiwnien qui distinguent ces charmants
easais* LMiêtoUrê de Rip Van Winkte eut en par-
ticulier une immense popularité.
Après avoir résidé cinq ans en Angleterre,
M. Irving vint se fixer à Paris (1820), et c'est
là qu'il fit la connaissance du poète Moore et
qu'il écrivit Braeebridge Hall, or tke tfumou-
rists , qui présente une suite d'esquisses de ta
vie rurale en Angleterre, et qui ajouta encore à
sa réputation (1822). Il passa l'hiver suivant à
Dresde, revint à Paris en 1 823, et à la fin de
1 824 il publia : Taies qfa Traveller (Contes d'un
Voyageur ), dont il avait glané l'idée première
dans ses nombreux voyages , et qu'il développa
avec autant d'esprit que d'imagination. Moore
nous dit dans son Journal que pour cet ouvrage
Murray lui donna 1,500 liv. sterl., et qu'il aurait
pu en avoir 2,000. 11 passa l'hiver de 1825 dans
le midi de la France , et c'est alors qu'il fut
invité par Alex. Everett , alors ministre des
États-Unis en Espagne, à venir à Madrid pour
examiner des documents nouveaux relatifs
aux voyages de Colomb, qui avaient été recueil-
lis par Navarette. Le ministre pensait qu'on
pouvait en faire une traduction intéressante.
M. Irving se rendit à Madrid au printemps sui-
vant, et, après examen , se convainquit qu'au lieu
de les traduire, il était infiniment préférable de
s'en servir pour une histoire nouvelle de l'il-
lustre amiral. Il se mit donc avec ardeur à la
besogne ; et, comme les archives espagnoles lui
étaient libéralement ouvertes , il put mettre à
profit beaucoup de documents aussi nouveaux
qu'intéressants. De là son ouvrage History of
the lÀfé and Voyage* of ChrUtophe Colum-
bus (Histoire de la Vie et des Ouvrages de
C. Colomb ), qui parut en 1 828 , et fut suivi, en
1831, par un autre qui en était le complément,
Voyages and Discoveties of the Companion*
ofGoliMbus* Sa résidence en Espagne, ses re-
cherches historiques, le spectacle des débris
encore magnifiques des monuments arabes lui
inspirèrent ua très-vif intérêt pour les Maures
de Grenade, et le résultat de se» travaux fut
une espèce de roman historique intitulé : a
OhroMcèë of the Conque* ( of Grenada, by
Fray Antbnio àgapyia ( 1829). De nouvelles
études > des exoursions dans les vieilles cités
d'Espagne et un séjour de quelques mois dans
l'ancien palais de Grenade lui fournirent une
série d'esquissée qu'il publia en 1832 sous le
titre de Aihambra; plus tard, de retour en
Amérique , il donna ses Legends qf the Con-
qnest of Spain (1835), qui avec Mahomet
and his iuceessors ( 1849-1850) complètent la
série des sujets espagnols et maures, qu'il a
traités avec l'éclat d'une imagination orientale.
Dans l'été de 1829* il quitta l'Espagne pour
l'Angleterre, où il avait été nommé secrétaire
de la légation américaine, poste qu'il remplit
deux ans. Il était une des célébrités de l'époque,
et recherché dans les meilleures sociétés. En
1830 , il reçut une des deux médailles d'or de la
Société royale de Littérature, l'autre ayant été
décernée à l'historien M. fiatlain. Au printemps
de 1832, il retourna en Amérique, après une
absence de dix-sept ans, et fut rëçtl h Nety-
York et ailleurs avec les témoignages lès ptos
Qatteurs d'estime et d'enthousiasme. Afâig il rie
resta pas longtemps dans sa Ville natale. Jùs*
qu'ici il n'avait traité que des sujets européens.
Il saisit avec empressement l'occasion d'Accom-
pagner M. Ellsworth, un des commissaires
pour les affaires indiennes, afin de voir de ses
yeux le Far West, d'étudier cette nature sauvage
et les mœurs des tribus. Il en résulta on Volume
qui fut publié sous le titre de : Tant on the
Prairies (1835). Cet ouvrage fut suivi pâl-
ies souvenirs à 1 Abbotsford et de V Abbaye de
Newstead. L'année suivante, 1838, il donna
Astoria, qui retrace l'expédition hardie en-
treprise vingt-cinq ans auparavant pour fran-
chir les Montagnes Rocheuses et pénétrer dans
la Colombie (aujourd'hui Orégon); et en 1837,
Adventures of Captain Bonneville, in the
Rocky-Mountains and the Far-West, dont
les manuscrits lui avaient été confiés, mais
dont il fit un ouvrage original par le talent de
composition et de style. On peut considérer ces
travaux comme son tribut de reconnaissance à
l'Amérique et un moyen de soutenir sa popula-
rité. Les critiques ne pouvaient plus dire qu'il
avait négligé entièrement les sujets nationaux.
En 1842 il fut nommé, sans aucune sollicita-
tion, ministre des États-Unis en Espagne. Ce
choix fut très-bien accueilli à Madrid, où sa
959
IRVING - IRW1N
résidence* antérieure et sa Ffe de Colomb loi
avaient fait de nombreux amis. Il occupa ce
poste quatre ans, et donna sa démission lorsque
Je candidat du parti démocratique, James Polk,
arriva à la présidence (1846). H revint aux
États-Unis, et s'établit dans une charmante
maison de campagne, sur les bords de l'Hodson,
h vingt-cinq milles de New-York, et qu'il avait
préparée et embellie d'avance comme l'asile de ses
vieux jours. Il lui a donné le nom poétique de
Sunnyside, qui est tout à fait justifié par sa belle
exposition. Malgré l'âge avancé .et le charme
du repos, après tant de voyages et de travaux
littéraires, il n'y resta pas inactif. Il commença
une nouvelle édition de ses œuvres complètes ,
auxquelles il ajouta des préfaces et des améliora-
tions notables. De 1849 à 1850, il publia, comme
nous l'avons déjà indiqué , son ouvrage de Ma-
homet et ses Successeurs , et plus tard, une
biographie étendue d'Olivier Goldsmith. En
1855, il donna un volume d'esquisses, dont
quelques-unes avaient paru dans les Magazines
de New York, sous le titre de Chronicles of
Woolferfs Boost and other paper*, qui rap-
pellent le style élégant et ingénieux, Y humour
et la force qui avaient donné tant d'éclat an
Sketch-Book.
Un dernier ouvrage , du plus vif intérêt pour
les Américains, est en voie de publication. On
savait que , même avant son ambassade en Es-
pagne, M. Irving recueillait les matériaux pour
une nouvelle biographie de Washington» et que
c'était le sujet par lequel il voulait clore tous ses
travaux littéraires. Le premier volume a paru
en 1855 , deux autres ont suivi et un quatrième
est annoncé. Le récit en est remarquable par
l'élégance et l'excellent style ; mais l'auteur
ne vise ni à la profondeur ni aux vues philoso-
phiques. H se distingue par beaucoup d'im-
partialité, tout en rendant pleine justice aux
qualités morales et aux talents du héros, et en
exprimant une vive sympathie pour sa noble en-
treprise, la fondation d'un pays et d'un peuple
libre. "*
Nous avons évité de faire avec détails une
appréciation critique des divers ouvrages de
M. Irving ; l'espace ne le permettait pas. C'est
surtout comme essayiste qu'il arrivera à la pos-
térité; car c'est dans ses divers essais qoe bril-
lent au plus haut degré les qualités qui le tison -
guent, la finesse d'observation, la morale saoe ,
la peinture fidèle de mœurs ou de paysages,
Y humour et l'esprit ingénieux , et surtout la
forme artistique et l'élégance exquise de style.
J. Chahut.
Qfdopsedia of American IÂterature. — Englsk
Cvclopsedia ( Bioçrapky ). - Men of the Time. -
Documents particuliers.
IBWW (Byles ), poète anglais, né à Calcutta,
en 1748, mort à Clifton, le 14 octobre 1817. Ra-
mené tout enfant en Angleterre, il fut élevé à
ChisWick, et revint dans l'Inde en 1767 comme
employé civil. Il fut suspendu de ses fonctions
en 1777, à cause de son attachement à lord Pigot,
et résolut d'aller demander justice à la coût des
directeurs à Londres. Son voyage, marqué de
nombreux incidents, ne dura pas moins de onze
mois. Il obtint facilement sa réintégration , et se
hâta d'aller reprendre son poste à Madras. Dans
l'état de crise où se trouvaient les possessions an-
glaises par suite de la guerre de l'Angleterre avec
la France, il rendit à la Compagnie des services
importants, et se plaignit d'être mal récompensé.
Rappelé en 1785 , il fut rétabli en 1792 dans les
fonctions[cle surintendant des affaires de la Com-
pagnie à la Chine. Il revint en Angleterre deux ou
trois ans après, et, malgré ses démarobes, H n'ob-
tint plus d'emploi dans la Compagnie. On a de lui :
Adventures during a voyage up the Red Seo,
and a journey across the désert; Londres,
1780, in-8° ; — Inquiry into the feasibiiUy of
Buonaparte's Expédition to the East; 1798 ,
in-8* ; et beaucoup de petits de poèmes intitulés :
Thomas** Mount; 1771, in-4°; — Bedekah,
an indian pastoral; 1776, in -4°; — Eastem
Bclogues; 1780, in-8°; — Ode on theDeath oj
Hyder AU; 1784; — Buonaparte in Egypt;
1798, in-8°; — Nilus , an elegy on the vie-
tory of admirai Nelson; 1798; — Elegy on
the Fait 6/Saragossa; 1809 ; — - Napoléon, or
the vanity of human wishes; 1814, in-4». Z.
Annual Biography % - Rose, New gênerai Biographe
cal Dictionary.
FIN DU VIKGT-CINQCIBME TOLUMK.
20
This book should be réturned to
the Library on or before the last date
stamped below.
A fine of five cents aday is incurred
by retajning it beyond the specified
time.
Please returii promptly.