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Full text of "Nouvelle biographie générale depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, avec les renseignements bibliographiques et l'indication des sources à consulter;"

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COLLEGE 
LIBRARY 



NOUVELLE 

BIOGRAPHIE GÉNÉRALE 

DEPUIS 

LES TEMPS LES PLUS RECULÉS 
JUSQU'A NOS JOURS. 



TOME VINGT-CINQUIÈME. 



Holst. — Irwin. 



l'ARIS. — -nt'OCIUl'IlIC DE FIIININ DIDOT FR ÈR ES , Fll« ET C. ir , RUE JACOB, 56. 



NOUVELLE 

BIOGRAPHIE GÉNÉRALE 

DEPUIS 

LES TEMPS LES PLUS RECULÉS 

JUSQU'A NOS JOURS, 

AVEC LES RENSEIGNEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES 

KT l/lNDICATION DKS SOUIUKS A CONStH.TKK ; 

PUBLIÉE PAR 

Mil. FIR1IN DIDOT FRÈRES, 

SOUS LA IIIHKCTION 

DE M. LE D r HOEFER. 

fcomt ttingt-Cmqmèmc. 



PARIS, 



FIRMIN DIDOT FRÈRES, FILS ET C' B , ÉDITEURS, 

IMPRIMKURS-LIBRAIRKS UK L INSTITUT |>K FRANCK, 
RUE JACOB, 5(>. 

M DGCC LVÏII. 
Le» éditeur» se réservent le droil de traduction et de reproduction * I VI ranger. 



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NOUVELLE 

BIOGRAPHIE 

GÉNÉRALE 

DEPUIS LES TEMPS LES PLUS RECULÉS JUSQU'À KOS JOUIS. 



H 



; holst (Hans- Peter), poète danois, né à 
Copenhague, le 22 octobre 1 8 1 1 . Il est maître de 
danois à l'Académie des Cadets de terre à Copen- 
hague, depuis 1836. On a de lui plusieurs ou- 
vrages qui se distinguent par l'élégance du style; 
les plus connus sont : Fsedrenelandske Roman- 
cer (Romances patriotiques) ; Copenhague, 1832, 
in-8° ; 2 e édit., 1840 ; — Digtninger (Poésies) ; 
il)., 1833, in-8°;— Noveller (Nouvelles), au nom- 
bre de trois;ib., 1834,in-8 ; — Digte (Poésies), 
premier recueil, 1840, l re et 2 e édit. ; deuxième 
recueil, 1850, in-8°; — Farvel (Adieu); ib., 
1840 : ce poème a été traduit dans les princi- 
pales langues de l'Europe; — Ude og hjemme 
(Au dehors et au dedans), en prose et en vers; 
ib., 1843, l re et 2 e édit. ; souvenirs d'un voyage 
en Allemagne, en France, en Italie et en Sicile 
(1840-1842) \— Gioacchino, drame ; ib., 1844, 
io-8°; — Albert Thorwaldsen, discours en 
vers; ib., 1844; —Adam Œhlenschteger, 
poème et discours; 1850, in-8°; — Den Utle 
Hornblseser (Le Petit Trompette), chants patrio- 
tiques relatifs à la guerre du Slesvig-Holstein ; 
1851, in-8°; — Sicilianske Skizzer og Noveller 
(Esquisses et Nouvelles siciliennes); ib., 1853, 
in-8°. H a traduit de l'allemand et du français 
plusieurs drames et vaudevilles, et édité : Ny- 
taarsgave fra danske Digtere (Étrennes delà 
partdes poètes danois) ; MV, 1835-1838, in-12; 
— Eros, poésies lyriques, 1857, jn-8°. E. B. 

P.-L. MOlier. not. dans Dansk Panthéon. - Damk Kon- 
vers.-Lex. 

* holstein, nom d'une maison princière al- 
lemande, alliée à la plupart des dynasties euro- 
péennes. Parmi les membres de cette maison qui 
jouèrent un rôle dans l'histoire, on remarque : 

Adolphe l« de Scbaumbourg. En 1110 il fut 
nommé comte de Holstein et deStormarn. 

Adolphe II, son fils, lui succéda en 1130; il 
réunit au Holstein la Wagrie. D'abord dépouillé 

KOUV. BIOCU. CÉNÉR. — T. XXV. 



de ses États par le duc de Saxe, Albert l'Ours, il 
y rentra après la victoire remportée sur ce der- 
nier par Henri le Superbe, devenu à son tour 
duc de Saxe. A partir de 1142, le Holstein, le 
Stormarn et la Wagrie ne formèrent plus qu'un 
État, sous le nom générique de Holstein. 

Adolphe II f, fils du précédent. Vaincu par 
Walderaar de Slesvig, fils du roi de Danemark, 
et fait prisonnier, il ne recouvra la liberté qu'en 
abandonnant ses Etats au vainqueur. LerHolstein 
passa au Danemark, et resta pendant vingt-cinq 
ans sous sa domination. 

Adolphe IV, fils du précédent, mort en 1261. 
Une bataille livrée le 22 juin 1227 contre le même 
Waldemar de Danemark, et où la victoire* se 
prononça pour Adolphe, mit fin à la domination 
danoise pour le Holstein. En 1239 Adolphe IV 
abdiqua pour se retirer dans un cloître. A sa 
mort, ses États furent partagés entre ses deux 
fils, Jean I er et Gerhard I er , et après eux les comtes 
de Holstein donnèrent naissance aux deux lignes 
wagrienne et de Rendsbourg. La première s'é- 
teignit en 1315, l'autre continua seule de régner 
en Holstein. 

Gerhard IV, mort en 1404. Il réunit au titre 
de comte de Holstein cehii de duc de Slesvig 
(15 août 1386). Il périt dans une bataille contre 
les Dithmarses (4 août 1404). 

Adolphe VIII, mort le 4 décembre 1459. Il 
demeura seul souverain du Slesvig et du Hol- 
stein. Dans la personne de ce prince s'éteignit la 
famille de Scbaumbourg. Son neveu Christian , 
fils de sa sœur et destiné à lui succéder, dé- 
clara, après de longs démêlés avec le Danemark, 
que, dans le cas où il deviendrait roi de ce pays, 
le Slesvig ne serait jamais réuni à ce royaume. 
Adolphe Vin fut regretté de ses sujets. Lorsque, 
après sa mort, le Holstein se trouva en proie aux 
troubles civils, on s'écriait: « Ah ! ce n'est plus 
maintenant comme au tec ps d'Adolphe. » 

1 



3 



HOLSTEIN — HOLSTEMUS 



Christian I er d'Oldenbourg, mort le 22 mai 
1481. Déjà roi de Danemark, de Suède et de Nor- 
vège, il fut élu duc de Slesvig et comte de 
Holstein et de Atorifitro pér lei étais provin- 
ciaux, toutefois à la Condition de la perpétuelle 
séparation des duchés d'avec le Danemark. En 
effet, les 6 mars et 5 août 1460, Christian pro- 
clama cette séparation dans deux Freiheitsbriefe 
( lettres d'affranchissement) (voy. Christian I er , 
roi de Danemark ). 

Jean et Frédéric ï v , élus conjointement ducs 
de Slesvig et de Holstein ('voy. Jean et Frédé- 
ric 1 er de Danemark). 

Christian ou Chrétien II, roi de Danemark 
{voy. ce nom). 
Frédéric I er (voy. ce nom ). 
Christian III (voy. ce nom). II fut élu duc de 
Slesvig et de Holstein avant de ceindre la cou- 
ronne de Danemark. Il fonda, avec son frère 
Adolphe, mort en 1586, les deux principales 
lignes de la maison de Holstein, savoir : 1° la 
ligne royale, avec ses branches collatérales de 
Holstein-Sonderburg, Augustenburg et Holstein- 
Sonderburg-Beck ( appelée depuis 1826 Holstein- 
Sonderburg- GluckBburg); 2° la ligne ducale 
dite de Holstein-Gottorp , souche de la maison 
actuelle de Russie et de la maison ducale d'Ol- 
denbourg (voy. ce nom). 

Frédéric II, roi de Danemark, duc de Sles- 
vig-Holstein (voy. Frédéric II). Il gouverna les 
duchés conjointement avec Jean le Vieux et 
Adolphe, ses deux oncles. 

Christian IV, roi de Danemark (voyez ce 
nom) .11 gouverna les duchés conjointement avec le 
duc Jean- Adolphe, qui, en 1608, établit pour le 
trône ducal le droit de primogéniture. 

Frédéric III (voy, ce nom), fils de Jean- 
Adolphe. 

Frédéric /F, fils de Chrétien-Albert. 11 eut de 
violents démêlés avec le roi Frédéric IV, qu'il' 
vainquit, et auquel il imposa une nouvelle recon- 
naissance de ses droits , en vertu du traité de 
paix du 18 août 1700. 

Charles-Frédéric de Holstein-Gottorp, fils | 
du précédent, mort en 1739. Dépouillé d'abord i 
de sa part héréditaire par le roi de Danemark i 
Frédéric IV, il recouvra plus tard ses droits 
sur le Holstein; mais depuis 1714 la maison 
ducale ne rentra jamais dans le gouvernement 
collectif des deux duchés. En 1725 Charles- 
Frédéric épousa l'aînée des filles de Pierre le i 
Grand.' \ 

Chartes-Pierre'- Vlric (voyez Pierre IU, empe- 
reur de Russie) et Frédéric V,roi de Danemark 
(voy. oe nom). 

Christian Vit, roi de Danemark ( voy. ce nom). 
Il obtint du grand-duc Paul de Russie en échange 
des comtés d'Oldenbourg et de Delmenhorst, la 
renonciation de ce prince au Slesvig et la ces- 
sion du Holstein-Gottorpien, avec sa part et ses 
droits dans les « arrondissements commune ». 
Tels sont les termes du traité deKiel (16nov. 



1773). [A partir de ce moment, l'histoire des 
princes de Holstein se confond avec celle des rois 
de Danemark. V. R. 

ErtcH ftt GiUbei-, Enepkl. — Uslaure, Btudes sur le 
Schttwif -Holstein. — Conttrsat. LeaOk. 

tfoLsTKiN (Jeên-Louis), comte de Lethra- 
bofg, homme d'État danois, né à Liibtz (Mec- 
klembourg), le 7 septembre 1694, mort le 29 jan- 
vier 1763. Après avoir étudié à Hambourg, sous 
| J.^Alb. Fabricius, puis à Utrecht, il voyagea en 
! France et en Angleterre. Nommé en 1724 grand- 
chambellan de Christian VI, il devint après l'a- 
I vénement de ce prince grand-bailli de Séeland 
! (1730), et président de la chancellerie ou pre- 
mier ministre (1735). Il fut créé comte en 1750. 
! L'Académie des Sciences de Danemark , dont il 
! fat l'un des fondateurs, l'élut pour président, le 
13 novembre 1742. Il était versé en histoire, en 
droit, en théologie et dans les sciences naturelles. II 
laissa en manuscrit une traduction de Tacite et 
des mémoires, en français, sur sa vie jusqu'en 
1727, et sur celle de son père. Membre du Col- 
lège des Missions, le comte de Holstein établit 
des écoles de missionnaires, à Copenhague pour 
le Groenland, et à Trondhjem, pour la Laponie. 
11 avait réuni dans son château de Lethraborg 
une galerie de tableaux, une collection de cartes 
et de médailles, et une grande bibliothèque. Le 
parc environnant était orné de nombreuses sta- 
tues et de monuments couverts d'inscriptions. 

Un membre d'une branche collatérale, Fré- 
déric-Adolphe, comte de Holstein, né le 18 oc- 
tobre 1784, mort le 21 mai 1836, s'est distingué 
comme promoteur de l'agriculture et de l'in- 
dustrie. Il fonda en 1810, dans son comté de 
Holsteinborg, la première caisse d'épargne qui 
ait existé en Danemark. On a de lui : Nogle Be- 
traglinger over Landmandens og isœr Gods- 
eierens nœrvœrende Stilling (Considérations 
sur la position actuelle de l'habitant de la cam- 
pagne et principalement du propriétaire); Co- 
penhague, 1834, in- 8* ; — Bidrag til Danmarks 
Krœnike (Documents pour l'histoire du Dane- 
mark en 1828); Slagelsc, 1829, in-8°; — Om de 
danske raadgivende Provindsial-Slœnders 
Vœsen og Vœrd (Sur les États provinciaux con- 
sultatifs en Danemark, leur essence et leur im- 
portance ) ; ib. , 1 83 1 ; 2 e édit. ; Copenhague, 1 832 ; 
trad. en allemand par N. Falck; Slesvig, 1833, 
in-8\ Dès l'établissement de ces états, il y siégea 
comme député (1835). Beau vois. 

Kofod Ancher, Cursus vitx Holsteinianœ ; in fol. — 
HJelmatJerna, fœvtule; Copenh. 1766. - Chr. Molbech, 
Det K. danske ndenskabernes Selskabs. hist.,- Copenh., 
18». — J. Holm, Fr. Ad. Grève af Holstein ,• Copenh., 
1844 (840 p.) gr. tn-8°; -Œst., Materialier, n" 78, 10*.— 
Eralew, Forfatter- Lexicon. 

holstenics (Luc ou Lucas), non latinisé 
de Luhas Holstë, érndit allemand, né à Ham- 
bourg, en 1596, mort à Rome, le 2 février 1661. 
Après avoir achevé ses études dans sa ville natale, 
il se rendit à Leyde, où professaient alors Vos- 
sius, Meurtius, Heinsius. 11 fut l'élève et bientôt 
l'ami de ces illustres philologues, et se lia par- 



HOLSTENIUS 



6 



ticulièrenient avec le géographe Clu vier, qu'il ac- 
compagna en Italie et en Sicile, vers 1618. Au 
retour de ce voyage, il passa quelque temps à 
Leyde, et sollicita vainement une chaire dans le 
gymnase de Hambourg. Irrité de cet injuste 
échec, il résolut déporter son érudition dans des 
pays plus capables de l'apprécier, et se rendit 
d'abord en Angleterre (1622), où il passa deux 
ans, puis en France, où la protection des frères 
Dnpoy lai procura la place de bibliothécaire du 
président de Mesmes. Pendant son séjour à Paris, 
Holstenius, qui avait été élevé dans la foi pro- 
testante, se convertit au catholicisme. On a fait 
honneur aux jésuites , et particulièrement au 
P. Sirmond, deoe changement dereligion,et on l'a 
attribué à des motifs intéressés. Holstenius, dans 
une lettre à Peiresc, déclare que la lectare des 
philosophes platoniciens le conduisit à l'étude 
des Pères de l'Église, et que l'étude des Pères de 
l'Église l'amena dans la communion catholique» 
S'il eut des raisons d'un autre genre, nous l'igno- 
rons; mais il faut remarquer à sa louange qu'il 
montra toujours une tolérance rare chet les con- 
vertis. Peiresc, avec lequel il était en correspon- 
dance, le recommanda au nonce apostolique, le 
le cardinal François Barberini,qui se l'attacha. 
En 1627 il suivit le cardinal en Italie, vécut dans 
sa maison, devint son bibliothécaire en 1636, et 
obtint par son intercession cinq ou six bénéfices 
en Allemagne. Mais la guerre de Trente Ans rendit 
les revenus de ses bénéfices fort incertains. 
En 1629 il fut chargé de porter le chapeau de 
cardinal au nonce Santa-Croce à Varsovie; en 
1637 il travailla à la conversion de Frédéric, 
landgrave de Darmstadt, et plus tard il alla re- 
cevoir à Inspruck l'abjuration de la reine Christine* 
Le pape Innocent X le nomma btbtiothéeaire du 
Vatican ; on prétend môme qu'il voulait lui don- 
ner le chapeau de cardinal. 11 ne réalisa pas cette 
intention, et Alexandre VU, qui traita aussi 
Holstenius avec beaucoup de faveur, ne t'éleva 
pas non plus à la dignité de prinoe de l'Église. 
Holstenius mourut à l'âge de soixante-cinq ans, 
et légua ses biens au cardinal Barberini, qui lui 
fit élever un tombeau dans l'église de Sainte- 
Marie delt' Anima. Luc Holstenius joignait à 
un savoir étendu une critique ferme et pénétrante, 
une latinité nette et correcte. Mais, trop ami de 
la perfection pour être satisfait de ses travaux, 
il forma de grands projets littéraires, amassa 
beaucoup de matériaux, et ne laissa que des notes 
et des dissertations, dont la plupart ne parurent 
qu'après sa mort. Baisse, qui appréciait son ta- 
lent, s'est plaint, dans une lettre à l'abbé Bou- 
chard, qu'il n'en ftt pas jouir le public ; « Je ne 
doute point, dit-il, des grandes richesses de 
M. Holstenius; je me plains seulement de son 
bon ménage, Que sert l'abondance sans la libéra- 
lité?... Il faudrait qu'il possédât moins, ou qu'il 
donnât davantage. Et quoique je sache qu'il 
amasse pour la postérité, et qu'il enrichira nos 
neveux, il semble qu'il ne devrait pas cependant 



nous déshériter ni garder la meilleure partie de 
sa gloire pour un avenir qu'il ne verra point. » 
On a de lui : Endecasyllabi in nuptias Thad- 
dxi Barberini et Annx Columnx; Rome, 
1627, in-4* ; — Emendationes in Eusebii li- 
brum contra Hieroclem, dans l'édition de la 
Démonstration évangélique d'Eusèbe, 1628, 
in-fol.; — Porphyrii liber de Vita Pythagorx, 
nec non sententix ad intelligibilia ducentes, 
et de Antro Nympharum in Odyssea Des- 
criptio, grœce tt latine. Interprète et notatore 
Lucca Holstenio, qui Dissertationem de vita 
Porphyrii et scriptis adjecit; Rome 1630, 
in -8°; Cambridge, 1655, m-8°. Les notes 
d'Holstenius sont savantes , mais elles ne vont 
que jusqu'à la page 175 ; la Vie de Porphyre est, 
suivant Ruhnkenjus « un modèle de la manière 
d'écrire la biographie savante » ; elle a été réim- 
primée : dans la Bibliotheca Grxcaôe Fabricius, 
t. IV; Demophili, Démocratie, et Secundi 
Sententix morales, grœce et latine, Holstenio 
interprète, cum notis; Rome, 1638, in-8°; 
Leyde , 1639 , in - 12 ; dans les Opuscula 
Ethiea et Moralia de Gale, Cambridge, 1670, 
in-8 , et dans les Opuscula Grxca de Conrad 
Orelli, Leipzig, 1819, in-8°; — Note in Sallus- 
tium philosophum de Dits et Mundo , dans 
l'édition de ce philosophe par Léo Allatius; 
Rome, 1638, in*8°; — Note in Âpollonu 
Argonautica, dans l'édition des Argonautiques ; 
Leyde > 1641 , in-8°; — Arriani de Venatione, 
grœce et latine , interprète Luca ffolster.io ; 
Paris, 1644,in-4°; — ChrUtiani Ranzovii ad 
GeorgiumCalixtum Epistola, qua sui ad Ec- 
clcsiamcatholicam accès sus rationes exponit ; 
Rome, 1651, in-8°. Luc Holstenius, qui avait 
beaucoup travaillé à la conversion de Ranzau , 
publia et probablement rédigea cette lettre ; — 
Lucx Holstenii Testimonium adversus Gerse- 
nistas pro Thoma a Kempis, publié par 
Gabriel Naudé dans son Testimonium adversus 
Gersenistas triplex ; Paris, 1652 , in-8° ; — De 
A&yssinorum Communione sub unica specie; 
de Sabbatho fiumine, dans les Symmicta d'Aï* 
latius ; — Codex Regularum quas SS. Patres 
monachis et virginibus sanctimonkilibus ser* 
vandas prxscripsere, collectus olim a S. Be~ 
nedicto Anianensi; L. Hoi. in très partes 
digestum auctumque edidit, cum appendice 
in qua S» S. Patrum exhortationes ad wio- 
nachos et virgines de observantia vitk re- 
ligiosx; la mort empêcha Holstenius d'ajouter à 
cet ouvrage, comme il se le proposait, des notes, 
dès préfaces et un glossaire; on y suppléa par 
quelques remarques trouvées dans ses papiers ; 
— Collectio Romana bipartita veterum aliquot 
Historiée ecclesiasticx Monumentorum : cette 
collection, commencée par Holstenius, ne parut 
qu'après sa mort ; Rome, 1662, in-8° ; — Pas- 
sio SS. Perpetux et Felicitatis et Boni/acii 
romani, nec non actaSS. Tavachi , Probi et 
Andronici, cum notis et animadversis ad 

1. 



HOLSTENIUS — HOLT; 



Baronii Martyrologium Romanum; Rome, 
1663; Paris, 1 664, in-8° ; — Annotationes in Geo- 
graphiam sacram Caroli a S. Paulo, Italiam 
antiquam Cluverii et Thesaurum Geogra- 
phicum Ortellii; quitus accedit Dissertatio 
duplex de Sacramento Conftrmationis apud 
Grxcos; Rome, 1666, in-8°. Les notes sur la 
Géographie sacrée de Charles de Saint-Paul 
furent réimprimées avec le texte de cet ouvrage ; 
Amsterdam , 1704, in-fol. ; — Theodoti An* 
cyrani Expositio in Symbolum JSicœnum, 
adversus Nestorium, primum édita, avec 
une trad. latine de L. Holstenius ; Rome, 1669, 
in-8° ;— Diss. de EpistolasynodicaAlexandri, 
episcopi Alexandrini, et de episcopatu Synesii ; 
dans Tédit. de Vffist. Eccl. de Théodoret et 
dlfragrepar Henri de Valois, Paris, 1673, in-fol.; 
— Dissertationes epistolicx; dans les Antiqui- 
taies Ecoles, orient, de Richard Simon ; — 
Hotx et Castigationes in Stephani Byzantini 
EOvtxà publiées par Th. Rycke ; Leyde , 1684 , 
in-fol. L'éditeur a joint aux notes de Holstenius 
des fragments inédits du poème géographique 
de Scyronos de Ghios, avec la trad. latine de 
Holstenius et quatre opuscules ; savoir : Comm. 
in veterem picturam Nymphxumreferentem ; 
De Pila Stqffilari; De Milliario aureo ; Laus 
Bore»; les trois premiers ont été insérés dans 
les Antiquit. Rom. de Grœvius ; le dernier est 
un Éloge du vent Borée que Holstenius corn» 
posa pour l'Académie des Humoristes. « II y a 
bien de l'esprit et delà lecture dans cette pièce, 
dit Bayle, mais franchement elle est plus digne 
d'un écolier que d'un homme grave, qui parlait 
devant plusieurs cardinaux. » — EpistoL ad 
F.-C. Barberinum de Fulcris seu Verubus 
simulacri Dianse Ephesiœ; dans la Symbolica 
Dianx Ephesiœ Statua de C. Ménestrier et 
dans les Anliq. Grxc. de Gronovius ; — Epis- 
tolx XXII ad Petrum Lambecium scriptx ; 
Iéna, 1 708, in-8°. Larobecius, neveu de Holstenius, 
eut envers lui des torts graves, et en fut déshérité. 
Les lettres que son oncle lui adressa ont été 
réimprimées dans un Recueil de Lettres d? Hols- 
tenius publié par fioissonade; Paris, 1817, in-8°. 
En 1627 Holstenius traduisit, pour l'édition de 
saint Athanase, sept homélies inédites attribuées 
à ce saint. Il avait l'intention de publier un 
recueil des anciens géographes grecs. Ce projet, 
auquel il attachait avec raison beaucoup d'im- 
portance, dont il parle souvent dans ses lettres, 
et qu'il n'accomplit pas, a été repris par Hudson, 
par Gail, par Bernhardy, qui l'ont réalisé impar- 
faitement, et par M. Mûller, qui a beaucoup 
étendu le plan d'Holstenius et donné la première 
édition complète des Geographi Graeci minores, 
dans la Bibliothèque grecque de A. F. Didot. 

Z. 

L. Allatlus, Alpes vrbonse. - pupln, Bibliothèq. 
eeeiés. ( (Ux-icptlème alècle). — Nicéroo, Mémoires, voL 
XXXI. - Cbauffeplé. Nouveau Dict. hitt. - Bayle, Nou- 
vel Ut de la République aes Lettres, Juillet 168*. — Sax, 
Onoti/iaticon, t. IV. - Wilken*, Lsben des gelehrten 



8 

Holler, 



Lut» IJolstenii; Hambourg, l7iS, in-*»; 
Cimbriatttterata. 

holstetn (Kornelis), peintre hollandais, 
né à Harlem, en 1553, mort vers 1583. Il 
reçut les premières leçons de son père, qui 
peignait à gouache et sur verre ; mais il quitta 
ces genres pour se consacrer à l'histoire. II 
mourut à la fleur de l'âge, et si subitement, que 
Ton suppose que sa mort ne fut pas naturelle. 
Parmi ses productions on cite deux tableaux qui 
suffisent pour sa gloire : Le Triomphe de Bac- 
chus et Lycurgue instituant son neveu héritier 
de ses biens. A. de L. 

Jakob-Campo Weyerroan et Uoubraken, De Sckilder- 
honst der Nederlanden, t. III, p. 168. — Descaraps, La 
Fie des Peintres hollandais, t. H, p.jw. — PUklngton, 
Dictionarv qf Pointers. 

* holt ( Sir John) , jurisconsulte anglais, né 
à Tbames (comté d'Oxford), en 1642, mort 
en mars 1710. II fut envoyé à l'âge de seize 
ans au collège Oriel, à Oxford ;. mais, au lieu 
de s'appliquer à l'étude, il se livra à toutes 
sortes de dissipations. Il se montra si peu scru- 
puleux dans le choix de ses camarades qu'on a 
pu raconter avec vraisemblance l'anecdote sui- 
vante. Quarante ans après sa sortie de l'univer- 
sité, il reconnut dans un accusé conduit devarit 
son tribunal un de ses anciens compagnons. 
II lui demanda ce qu'étaient devenus tel et tel de 
leurs amis. « De notre société, répondit l'ac- 
cusé, il ne reste que votre seigneurie et moi : 
tous les autres ont été pendus. » Vraie ou fausse, 
cette anecdote est caractéristique ; celle qui suit 
est encore plus curieuse. Pendant une de ses es- 
capades, Holt se trouva dans une petite au- 
berge, sans argent La fille de l'hôtesse souffrait 
d'un accès de fièvre qui avait résisté à l'art d'un 
médecin de campagne. Holt proposa de la guérir 
au moyen d'un talisman, et écrivit quelques mots 
grecs sur un parchemin qu'il roula autour du 
bras de la malade. Celle-ci guérit, et le jeune 
voyageur fut dispensé de payer son écot. Près 
d'un demi-siècle plus tard, une vieille femme fut 
amenée devant le grand-juge sous l'inculpation de 
sorcellerie. On l'accusait de posséder un charme . 
Holt se fit présenter cette pièce de conviction et 
reconnut le parchemin qu'il avait donné autre- 
fois à son hôtesse. L'accusée fut mise en liberté, 
et Ton assure que cette bizarre aventure contri- 
bua beaucoup à faire cesser les absurdes procès 
de sorcellerie qui déshonorèrent les annales ju- 
diciaires de l'Angleterre jusque dans les pre- 
mières années du dix-huitième siècle. 

Holt débuta au barreau en 1663. Quatorze 
ans se passèrent sans qu'il sortit de l'obscurité. 
A partir de 1676 il fut employé dans tous les 
procès importants, mais sans jamais acquérir 
une grande réputation d'éloquence. Apres la ré- 
volution de 1688, il fut élu membre de la Con- 
vention et élevé à la dignité de grand-juge (lord 
chief-justice) du Banc du Roi. Guillaume III 
l'admit dans son conseil privé, et voulut lui con- 
fier le grand-sceau en 1700. Holt refusa d'être 



9 



HOLT — HOLWELL 



10 



chancelier, et resta jusqu'à sa mort à la tète du 
Banc du Roi. Il laissa la réputation d'un magis- 
trat instruit , intègre et qui n'asservit jamais ses 
jugements aux passions politiques. « Depuis son 
élévation comme magistrat , dit lord Campbell, 
il surpassa les hautes espérances que Ton avait 
conçues de lui , et pendant la longue période de 
vingt-deux ans il grandit constamment dans 
l'admiration et l'estime de ses concitoyens. A 
une intégrité exempte de toute souillure, à une 
fière indépendance, il joignait la combinaison 
rare d'un profond savoir en jurisprudence avec 
un bon sens exquis.... 11 avait le génie de la ma- 
gistrature, comme Milion avait celui de la poé- 
sie, Wilkie celui de la peinture. » L'amour de 
la justice fut pour Holt une passion à laquelle il 
sacrifia tout, amusements sociaux, distractions 
littéraires, intérêts de parti. Il consacra toutes 
ses facultés à un unique objet, et il mérita de 
devenir en Angleterre le type du juge intègre et 
éclairé : « The model on which in England the 
judicial character has been formed, » dit lord 
Campbell. 

Rien ne fait plus d'honneur à Holt que sa 
conduite impartiale et humaine dans les procès 
publics. « Interrompez-moi autant qu'il vous 
plaira, disait-il à lord Preston, si vous pensez 
que mon résumé n'est pas exact. » « Quel que soit 
mon sort , je ne puis que reconnaître que j'ai été 
honnêtement jugé, » disait un complice de lord 
Preston, Ashton, qui fut ainsi que lui condamné 
à mort pour haute trahison. Ce jnge si traitable 
pour les accusés l'était beaucoup moins pour les 
grands pouvoirs de l'État. Il résista à la chambre 
des pairs, qui voulait lui faire rendre compte d'un 
de ses jugements. Dans une autre circonstance , 
il sembla empiéter sur les prérogatives de la 
chambre des communes et menaça même, dit-on, 
le président (speaker) de la chambre de l'en- 
voyer à Newgate. La prorogation du parlement 
mit fin à cette collision. On cite encore un 
exemple remarquable de l'indépendance de Holt. 
Une abominable pratique, qui consistait à enlever 
des jeunes gens des deux sexes, pour les trans- 
porter aux colonies, avait lieu sans que le gou- 
vernement y mit obstacle. La populace, exas- 
pérée, voulut détruire la maison où les recruteurs 
renfermaient provisoirement leurs victimes. 
Aussitôt une compagnie des gardes fut envoyée 
contre l'émeute. L'officier qui la commandait 
réclama l'assistance du grand-juge. — « Supposez, 
dit Holt, que la foule ne se disperse pas, que ferez- 
vous?— J'ai ordre de faire feu, » répondit l'officier. 
— Faites, répliqua le grand-juge; mais je vous 
préviens que si un seul homme est tué, et que 
vous soyez mis en jugement pour meurtre , je 
vous ferai pendre , vous et vos soldats. » Holt se 
rendit ensuite avec quelques constantes sur le 
lieu du tumulte, et promit qu'il serait fait justice 
des recruteurs. La foule se dispersa tranquille- 
ment. On a de Holt : A Report of divers cases 
in pleas of the crown, adjudged and détermi- 



née in the reign o/the laie king Charles the 
Second; 1708, in-fol. Z. 

Ufe of tir John Holt s Londres, 1764, to-8*. — Btogra- 
phia Britannica.- Wetaby» Lices ofEminent Judgts. - 
Lord Campbell , The lAves of the Chie/s-Justice of En- 
gland . t II. 

holt (/o/m), grammairien anglais, vivait à 
la fin du quinzième siècle. Il enseigna à Oxford 
la grammaire et les rudiments des belles-lettres 
avec zèle et habileté. Il mit au jour un traité 
destiné à guider les études des commençants, et 
il l'intitula : Lac Puerorum, or mylkejbr chil- 
dren (Lait pour les Enfants), imprimé par 
Winkin de TVorde , in-4°, sans date. On ne con- 
naît, à ce qu'il parait , qu'un seul exemplaire de 
ce volume; il faisait partie de l'immense collec- 
tion d'Heber. Les bibliographes ne mentionnent 
également, circonstance singulière, qu'un seul 
exemplaire (dans la bibliothèque Grenville) d'une 
autre édition imprimée chez Richar Pynson, 
sans date, in-4°. G. fi. 

Wood, Athênse Oxonienses, vol. I, col. 18. — Dlbdln, 
Tf/poçraphical ÀntiquiOet , vol. Il, p. 380, et lÀbrary 
Companion, p. su. - BMiotheca Grenviliana, p. ttt. 
; holtei (Charles de), littérateur allemand, 
né à Breslau, le 24 janvier 1797. Il servit d'a- 
bord comme volontaire dans l'armée prussienne, 
débuta ensuite comme acteur aux théâtres de 
Breslau et de Dresde. Il vécut longtemps à Berlin, 
et dirigea en 1837 le théâtre de Riga. Holtei a 
introduit le vaudeville sur le théâtre allemand. 
Ses principaux travaux sont : Gedichte (Poésies ) ; 
Berlin, 1826; — Jahrbuch deutscher Bûhnen- 
spiele (Annales de la scène allemande); Berlin, 
1829-1831, 3 vol.; — Schlesische Gedichte 
( Poésies en dialecte silésien) ; Berlin , 1830 et 
1850; — Deutsche Lieder (Chansons alleman- 
des) ; Schleusingen, 1834 et 1836; — Vierzig 
Jahre (Quarante Années), mémoires de Holtei; 
Berlin, 1843-1850, 8 vol.; — Stimmen des 
Waldes ( Voix de Forêt) ; Breslau, 1848 et 1854 ; 
— Die Vagabunden (Les Vagabonds ) , roman ; 
Breslau, 1852, 4 vol. ; — JSin Mord in Riga ( Un 
Meurtre à Riga), idem ; Prague, 1855. R. L. 

Conv.'Lez — Plerer, ffnieerjaf.Lex, Suppléai. — Jul. 
Schmldt, Getchichte der deutxchen lAtteratur dêt XIX*** 
Jahrh., 1« édlt.; Leipzig, 185». 

HOLTT. Voy. HOELTT. 

holwell (John Zephaniah), administra- 
teur et écrivain anglais, né à Dublin, le 7 sep- 
tembre 1711, mort à Pinner (comté de Mid 
dlesex), le 5 novembre 1778. Son père, qui 
était marchand de bois de construction , le des- 
tina au commerce, et renvoya apprendre le fran- 
çais et le hollandais dans une ville des Pays- 
Bas. De retour en Angleterre , il fut placé comme 
élève chez un chirurgien. En 1732 il se rendit 
au Bengale en qualité de clerc au service de 
la Compagnie anglaise des Indes orientales, et 
s'éleva par degrés jusqu'au rang de membre du 
conseil du Williamfort en 1756. A cette époque 
Surajah Dowlah, nabab du Bengale, vint mettre 
le siège devant Calcutta; le gouverneur anglais 
et les plus anciens membres du conseil s'en- 



11 



HOLWELL — HOLYDÀY 



12 



fuirent 9 et tout le soin d'une défense impossible 
retomba sur Holwell. Après d'énergiques efforts, 
il capitula, et obtint la promesse que la vie des 
prisonniers serait respectée. Cette convention 
fut horriblement violée par les soldats du nabab, 
qui entassèrent les cent quarante-six Anglais 
dans un réduit de dix-huit pieds carrés appelé 
le Trou noir (Black-Hole). On était alors au 
temps des plus fortes chaleurs (12 juin), et un 
seul homme aurait eu beaucoup à souffrir dans 
un pareil cachot mal aéré; ce que cent quarante- 
six personnes souffrirent pendant toute une nuit 
serait impossible à imaginer, si Holwell, qui survé- 
cu taux tortures de cette effroyable prison, ne l'eût 
raconté. Lorsque à six heures du matin on ou- 
vrit aux prisonniers, on en trouva vingt-trois 
qui respiraient encore sur les cadavres de leurs 
compagnons. Rendu à la liberté au bout de quel- 
ques mois, Holwell alla rétablir sa santé en An- 
gleterre , puis il revint prendre en 1758 sa place 
dans le conseil du fort William. Clive lui remit 
en 1759 le gouvernement du Bengale; mais la 
Compagnie ne le maintint pas dans ces hautes 
fonctions, qu'elle confia à Yansittar en 1769, et 
Holwell, se plaignant que ses services fussent 
méconnus, retourna en Angleterre jouir d'une 
grande fortune légitimement acquise. Il fut le 
premier Européen qui étudia les antiquités in- 
diennes ; et bien qu'il ait commis à ce sujet un 
grand nombre d'erreurs, à cause de son igno- 
rance du sanscrit, il eut le mérite de frayer la 
route à des études plus profondes. Il était membre 
de la Société royale. On a de Holwell : Narra- 
tive of the Sufferings endured in the Black 
H oie of Calcutta; Londres, 1757, in-8°; — . 
India Tracts; 1763,in-4°; — Interesting his- 
torical Events relative to Bengal and Indos- 
tan; as also the Mythology of theGentoos; 
and a Dissertation on the Metempsychosis ; 
Londres, 1765-1766-1771, 3 vol. in-8°. Les deux 
premiers volumes ont été traduits en français ; 
Paris, 1768, 2 vol. in-8° : cet ouvrage contient, 
outre une histoire de l'Inde depuis Aurengzeb, 
un Essai sur la Mythologie des Hindous. L'auteur 
parle avec une admiration particulière àtsShas- 
tras des Gentous, qu'il représente comme le 
plus ancien code religieux qui existe, et la 
source de la cosmogonie et de la mythologie des 
Égyptiens, des Grecs et des Romains. Il incline 
même à regarder ces institutions comme d'ori- 
gine divine, opinion singulière qu'il maintint plus 
explicitement dans le dernier de ses ouvrages; — 
An Account of the manner of inoculating 
for the small pox in India; Londres, 1767, 
in-8° ; — A new Experiment for the Prévention 
of Crimes; Londres, 1786, in-8 ;— Disserta- 
tions on the Origin, Nature and Pursuits of 
intelligent Beings, and on divine Providence, 
religions worship ; Londres, 1788, in- 8°. L'idée 
que les hommes sont des anges tombés, condam- 
nés a souffrir dans des corps mortels, est le prin- 
cipe fondamental de cet ouvrage, qui, comme les 



autres productions de l'auteur, contient, au mi- 
lieu de beaucoup de bizarreries, des témoignages 
d'un cœur bienveillant et d'une pensée indépen- 
dante. Z. 

Atiatic annual Register, 1. 1. — Chalmers, General 
biographical Dictionary. 

I holtimann (Adolphe), archéologue al* 
lemand, né en 1810, à Karlsruhe. Il étudia à 
Berlin, a Munich et à Paris, où il eut pour maître 
Eugène Burnouf. De retour en Allemagne, il de* 
vint précepteur du prince de Bade , et fut nommé 
en 1852 professeur de la littérature allemande à 
l'université de Heildeberg. On a de lui : Ueber 
den griechischen Vrsprung des indischen 
Thierkreises (De l'Origine grecque du zodiaque 
grec); Karlsruhe, 1844; — Untersuchungen 
ueber dos Nibelungenlied (Recherches sur le 
poëme des Nibelungen); Stultgard, 1854; — - 
Rama, poëme indien d'après Walmiki; Karls- 
ruhe, 2 e édit., 1843;— Indische Sagen (Mythes 
indiens); ibid., 1845-1847, 3 vol.; — Beitrxge 
zur Erklœrung der persischen Beilinschriften 
(Études pour servir à l'interprétation des inscrip- 
tions cunéiformes persanes); ibid., 1845. R. L. 

Plerer, Univertal-Lexik , Supplément. — Conv.~Lex r 

holyday (Barten), poète et traducteur 
anglais, né à Oxford, en 1593, mort à Ilsley, 
près d'Oxford, en octobre 1661. Il lit ses 
études dans sa ville natale, et entra dans les 
ordres. En 1618, il accompagna comme chape- 
lain sir P. Stewart en Espagne et, à son retour, 
il fût nommé archidiacre d'Oxford , puis chape- 
lain du roi. Il perdit ces deux place» pendant 
la révolution, et se tint caché pendant quelque 
temps ; il finit cependant par se rapprocher du 
pouvoir républicain qui lui donna la cure de 
Chilton, dans le comté de Berk. La restauration 
lui rendit ses anciennes places , mais ne l'éleva 
pas aux dignités ecclésiastiques qu'il espérait. 
Son ouvrage le plus connu est une traduction de 
Perse et Juvénal, dont la meilleure édition est 
celle d'Oxford, 1673, in- fol. Cette traduction 
manque absolument d'élégance et de poésie, 
mais elle est fidèle. « Si nous nous étions pro- 
posé, dit Dryden, de rendre exactement et 
presque vers par vers le sens de ees deux au- 
teurs, Holyday l'a déjà fait pour nous, et à l'aide 
de ses savantes notes on peut comprendre non 
seulement Perse et Juvénal, mais même, ce qui 
est plus difficile, les vers du traducteur. » Dryden 
dit encore de cette traduction : « Holyday a 
voulu être littéral ; il a saisi le sens et laissé 
échapper la poésie ». Les autres ouvrages de 
Holyday sont : Technogamia, ou te mariage 
des arts, pièce jouée devant Jacques I e * à Christ- 
Church, en 1617, et publiée en 1630; — Phi- 
losophie polito-barbarge Spécimen, in quo 
de anima et ejus habitibus intellectualistes 
quœstiones aliquot libris duobus illustran- 
tur; 1633, in-4°; — • Cornes jucundus in Via; 
1658; — Survey of the World, poème en dix 
livres; 1661, in-8°. Z. 

Mhenx Oxonienseï, t. II. - Dryden, V<w**, t. IV, 



ts HOLYDÀY 

p. t«6, «S ( édlt. «te Malone). - CtaUnew, General Mo- 
graphical JHctionary. 

EiOLYOAKE ( Francis ), connu aussi sous le 
nom latinisé de Francisât* de Sacra-Quercu, 
philologue anglais, né en 1567, à Nether Whi- 
tacre (comté de Warwick), mort le 13 no» 
vembre 1653. Après avoir fait ses études h 
Oxford, il fut maître d'école dans cette ville, et 
devint recteur de Southam en 1603. H fit partie 
de l'assemblée du clergé dans la première année 
du règne de Charles I er , et pendant les guerres 
civiles il eut beaucoup a souffrir pour la cause 
royale. On a de lui : Etymological Diction ar y 
of Latin Words; 1606,in-4°. Z. 

Wood, Athente Ovonienses. t. II. — Biographia Dra- 
matica. 

holyoa&e ( Thomas), fils du précédent, né 
à Southam en 1616, mort le 10 juin 1675. Il 
était chapelain du Collège de la Reine à Oxford 
lorsque la guerre civile éclata. Il entra alors au 
service du roi, et obtint une commission de capi- 
taine. Après la défaite du parti royaliste, il pra- 
tiqua la médecine jusqu'au retour des Stuarts, 
qui récompensèrent sa fidélité par plusieurs bé- 
néfices. Il compila un dictionnaire sur le même 
plan que celui de son père, mais dans des pro- 
portions plus vastes. Cet ouvrage parut après sa 
mort; 1677, in-fol. Z. 

Chalmers, Gêner, Biogr. Pictionary. 

* holzbauer ( Jgnace), musicien allemand, 
né a Vienne, en 1711,mortàManheim, le? avril 
1783. Il voyagea en Italie pour se perfectionner 
dans son art, et devint maître de la chapelle du 
duc de Wurtemberg et de l'électeur palatin. 
Vers la fin de sa vie il fut atteint de surdité* 
Voici le jugement que porte sur lui Mozart ; 
« Holzbauer écrit bien; il a un non style, fait 
bien accorder la partie vocale avec l'instrumen- 
tale, et compose de très-belles fugues » (Bio- 
graphie de Mozart de G.-N. de Nissan, p. 323). 
On a de Holzbauer : Isacco, oratorio; — Betu- 
lia libsrata, oratorio ; —vingt-six Messes à qua- 
tre voix, avec orchestre ; — trente-sept Motets , 
avec orchestre; —un Miserere, avec orchestre; 

— // Figlio délie Selve, opéra; Schwetzingen, 
1753; — Issifile, opéra représenté pour la pre- 
mière fois à Mannheim en 1753; — Don Chis- 
ciotte, opéra; — Nitteti, opéra représenté pour 
la première fois au théâtre de Turin en 1757 ; 

— Alessandro nelV Jndie, opéra représenté 
pour la première fois au théâtre de Milan en 
1759; — Ippolitoed Aricia, opéra représenté 
pour la première fois au théâtre de Manheim en 
1768; —Adriano in Siria; 1772; — Gunther 
de Schwartzbourg, opéra allemand, représenté 



HOLZSCHUHER 14 

tuors pour deux violons, alto et basse ; — Treize 
Concertos pour divers instrumente. R. L. 

FétU, Biographie univ. des M usiciens. — Musicalu- 
che Correspondenz, octobre, 1790, — Erscb et Gruber, 
Allgem. Encwktopeedie. 

holzer (Jean- Rodolphe), historien suisse, 
mort à Berne en 1736, où il avait exercé pen- 
dant longtemps les fonctions de membre du 
conseil , s'«st fait connaître par l'ouvrage : Die 
Bûndnisse und Vertrœge der Helvetischen 
Nation, welche theils die untersehiedenen 
Stsedte, und Republiken mit einander, theils 
aile insgesammt mit auswœrtigen Potentaten 
haben ( Les Alliances et Contrats des Villes et 
Républiques suisses entre elles, et de toute la 
Suisse avee les puissances étrangères); Berne, 
1737, in-4«. V-u. 

Adelunf , Suppl. à Jôeher. 

■olzhauskr (Barthélémy), fondateur de 
la congrégation des Barthélemytes , né à Langnau, 
en 1613, mort h Bingen,en 1658. Il renonça à 
la profession de son père, qui était cordonnier, 
pour étudier et s'adonner aux pratiques reli- 
gieuses. Il vécut d'abord en allant chanter des 
hymnes sur les routes; plus tard, grâce à la re- 
commandation dequelques personnes charitables, 
il entra à Neubourg dans un établissement des- 
tiné aux étudiants pauvres; puis il fut admis 
chez les jésuites d'Ingolstadt, qui lui enseignèrent 
la philosophie. Reçu prêtre en 1639, il conçut le 
projet de rendre aux hommes voués comme lui 
au sacerdoce la vie en commun des premiers 
âges de l'Église. Secondé par d'autres ecclésias- 
tiques, il fonda à Tittmoningen une maison des- 
tinée à réaliser ce dessein, et pour que cette ins- 
titution portât tous ses fruits, il ouvrit, en 1640, 
à Salzbourg, un séminaire préparatoire. Holz* 
bauser fut successivement curé à Tittmoningen, 
à Leoggenthal et à Bingen, où il mourut. Son zèle 
et les pratiques de dévotion auxquelles il se livrait 
le portaient à la rêverie, à l'exaltation, même à 
des visions. Dans telle localité, il fit des prédic- 
tions; dans telle autre il crut avoir des révéla- 
tions. C'est ainsi, dit-on, que, visité par Charles U v 
alors fugitif, il prédit à ce prince un avenir meil- 
leur, Holzhauser a publié : Constitutions cum 
exereitiis clericorum sxcularium in corn* 
muni vivantium; Cologne, 1662 et années 
suivantes. En 1680, ces Constitutions furent 
confirmées par la cour de Rome; — De ffumi- 
litate, publié en même temps qu'un traité De 
V Amour de Dieu; Mayence, 1663; — Opuscu- 
lum visionum variarum. Il s'y trouve des 
prédictions où l'on a voulu voir divers événe- 
ments survenus depuis. V. R. 

Pocbfelder, Lebentgeschiehte des ehrwuerdigen Bart. 



en 1776; *- Der Tod der Dido (La Mort de 
Didon), mélodrame; 1779;— Le ISozze d*A- 
rianna et di Bacco, opéra; — Tancredi, opéra 
représenté pour la première fois au théâtre de 
Munich en 1782; — Cent quatre-vingt-seize 
Symphonies pour orchestre; — Pix-buit Qua- 



pour la première fois au théâtre de Mannheim, 4 Holzhauser; Munich, i8J7, m-*». - Biog. nneraw. 

r r . - - - * Bart. Holzhauseri, etc.; Bamberg, 178t. — Vlguier, Vé- 

ritable Prophétie du vénérable (Barth.) Holzhauser. 
— Ersch et Gruber, Allgem. Encjfklopœdie. 



* iiolzschuher (Eucharie-Charles), ar- 
chitecte allemand, vivait au commencement du 
dix -septième siècle. I) éleva dans le style an- 
tique, imité de la renaissance italienne, l'hôtel 



HOLZSCHUHER — HOMfiËRG 



16 



de ville de Nuremberg, commencé en 1616 et 
achevé en 1619. C'est on monument imposant 
de 86 mètres de longueur, qui s'élève en deux 
étages de chacun trente-six fenêtres. Au centre 
et aux extrémités se voient des attiques en forme 
de pavillon , qui donnent de l'élégance et de la 
légèreté à l'édifice. Le porche d'entrée à voûtes 
d'arête, reposant sur trois piliers, a un effet de 
solidité et de force que l'architecte a obtenu par 
des moyens ingénieux et fort simples. La cour 
carrée de l'intérieur est belle aussi; mais ses 
galeries à jour ne sont terminées que de trois 
cotés, les travaux ayant été suspendus et la 
guerre de Trente Ans ayant empêché l'exécution 
de la quatrième face avec les arrière-bâtiments 
projetés. La conception du plan et de la façade 
de l'hôtel de ville de Nuremberg prouve que 
Holzschuher était un architecte détalent. 11 des- 
cendait d'une ancienne famille patricienne. D. R. 

Beschreibung der vornehmsten Merkwûrdigkeiten 
der Reicfustadt Nûrnberg, par G. G. de Murr*; grand 
In- 8°; Sulzbach, 1801. — Nachricht sur dlteren und 
neueren GeschicMe der Reicfustadt Nûrnberg, par 
J.-C.-F. Kiefhaben ; Noremberg, 1803. 

HOMAi (Ljéhérazad ou Tchéréhazad) , 
surnommée Schemiran, reine de Perse, de la 
dynastie des Kéianides, régna de 388 ou 386 à 
356 avant J.-C. Son père, Ardeschir Bahman 
(Artaxerxès Longue-Main) l'épousa, et mourut 
peu de temps après, la laissant enceinte. Quoi- 
qu'il eût un fils, il disposa du trotte en faveur de 
l'enfant dont sa fille accoucherait. Homaï, ayant 
donné le jour à un fils, l'exposa sur l'Euphrate, 
de peur d'être obligée de lui céder plus tard le 
pouvoir suprême. Elle gouverna de manière à 
mériter l'affection de tous ses sujets. Cependant 
l'enfant royal, recueilli par un paysan et élevé 
conformément à la condition de son père adoptif , 
s'engagea dans l'armée, se distingua dans les 
guerres contre les Grecs, et devint général. Il 
fut alors reconnu par sa mère, qui abdiqua en sa 
faveur au bout de trente-deux ans de règne. Il 
prit, à son avènement, le nom de Darabl er . Homaï 
avait choisi pour capitale la ville de Balkh. Elle 
mourut dans la province de Fars. On prétend 
que les palais de Hézar-Sitoun (Mille Colonnes) 
à Istakhar (Persépolis) et de Tchéhel Minar 
(Quarante Colonnes) furent construits par ses 
ordres. Quelques auteurs disent qu'elle était 
fille deHarets, roi d'Egypte, femme de Bahman ; 
d'autres, qu'elle était sœur deDarab. Homaï pa- 
rait être la Parysatis (Perizadeh, fille de fée) 
des Grecs. Cette dernière était en effet fille d'Ar- 
taxerxès, femme et sœur de Darius Nothus le 
Bâtard , qui régna de 423 à 404 avant J.-C, qui 
fit, comme Darab, la guerre en Asie Mineure. Elle 
jouit d'un grand pouvoir sous le règne de son 
mari et de son fils Artaxerxès Mnémon , mort 
en 358. Des historiens mal renseignés auront 
pu facilement la prendre pour souveraine, tandis 
qu'elle n'était que femme ou mère du roi. Les 
Orientaux semblent confondre Homaï, surnommée 
Schemiran, avec la fameuse Sémirarais. Ces 



deux reines ont en effet plusieurs traits de res- 
semblance; toutes deux régnèrent avec gloire 
dans les mêmes pays ; toutes deux elles usur- 
pèrent le pouvoir sur leur propre fils ; toutes 
deux elles firent de grandes constructions; mais 
l'une vivait au quatrième, l'autre au vingtième 
siècle avant J.-C. E. Beauvois. 

Modjmel at-Uwarikh, trad. par M. Mohl; dans le 
Journ. Asiate, mi, 1. 1, p. 168, sir. - Flrdoosl, History 
of the eariy Kings of Persia, trad. par Atktnsoo; 
Lond., 188î',in-8°, p. 48S-M. — Hamzah Isfafaanl, An- 
nalium Libri X, texte et trad. par Cottwaldt, p. S7. — 
Mlrkhond, Hist. ofihe early Kings of Persia, trad. par 
D. Shea, 355-357. — Anquetli du Perron, Les Medes et 
les Perses comparés aux Kéaniens ; dans les a ne. Mém. 
de l'Acad. des Inscriptions, t. XI.. - Malcolm, flirt.; 
of Persia; Londres, 1815 in-t», 1. 1, 68-33&-4Q. 

homa! dah. Voy. homéidah. 

homann (Jean- Baptiste), géographe alle- 
mand, né le 20 mars 1663, à Kamlach (Ba- 
vière), mort à Nuremberg, le 1 er juillet 1724. 
Ses parents l'avaient destiné à la vie monastique. 
Voulant se soustraire à cette carrière, pour la- 
quelle il ne se sentait pas de goût, il quitta la 
maison paternelle, et se rendit à Nuremberg, où 
il embrassa la religion protestante. En 1687, 
J.-B. Homann devint notaire, mais il s'occupa 
préférablement de la gravure en cuivre et de la 
confection de cartes géographiques. Ce genre 
de travail , dont on sentait alors tout le besoin , 
l'intéressa vivement, et son ardeur s'accrut avec 
les succès qu'il y obtint. En 1702 il fonda une 
maison pour le commerce de ces cartes, et il en 
publia successivement près de deux cents, qui se 
distinguèrent généralement par leur bon marché. 
11 confectionna aussi des sphères armillaires et 
des globes portatifs, ainsi que d'autres objets 
mécaniques d'art. L'Académie des Sciences de 
Berlin l'admit au nombre de ses membres; l'em- 
pereur d'Allemagne le décora d'une chaîne d'hon- 
neur en or, et Pierre le Grand le nomma son 
agent en Allemagne. Homann mourut après avoir 
élevé à une grande prospérité son établissement, 
qui contribua aux progrès qu'a faits en Alle- 
magne l'étude de la géographie, et qui lui survé- 
cut. Son fils, Jean-Christophe Homann, né en 
1703, mort en 1730, le dirigea pendant quel- 
ques années en commun avec son ami le géo- 
graphe Jean- Michel Franz. Plus tard il devint 
la propriété de Christophe-François Fembo. Les 
principaux travaux de J.-B. Homann sont : 
Atlas du Monde entier, en 126 cartes in-folio; 
Nuremberg, 1716; —Atlas methodicus ex- 
plorandis juvenum prqfectibus in studio 
geographico, ad methodum ffubuerianum oc- 
comodatus; ibid., 1719, in-folio. Cet Atlas, 
composé de 18 cartes, est précédé d'une intro- 
duction en 4 feuilles. V-c. 

Kyrlng, Litterar. Almanach : GeschicMe der Ho- 
mann'schen (ïfficin, p. M. — Gaspart et Bcrtuch, Geo- 
araph. Ephemeriden vom Jakre, 1801 ; livr. IX. — Ban- 
der, Gelehrtes Baiern, t. !, p. 518. - Encyclop. des Gens 
du Monde. - Wlll, Nûrnberg. Gelekert. LexiMon. 

homberg (Guillaume), chimiste hollan- 
dais, né le 8 janvier 1652 à Batavia (Java), mort 



17 



HOMBERG 



18 



le 24 septembre 1715 à Paris. Son père, gen- 
tilhomme saxon ruiné par la guerre, s'était 
mis au service de la Compagnie hollandaise des 
Indes orientales. En quittant les Indes, il vint 
avec sa famille à Amsterdam, où il séjourna 
plusieurs années. Le jeune Guillaume Homberg, 
qui n'avait presque rien appris aux Indes, se 
mit avec ardeur à l'étude, et rattrapa le temps 
perdu. Il suivit des cours de droit à Iéna et à 
Leipzig, et se fit recevoir avocat à Magdebourg 
en 1674. En même temps, l'étude de la nature 
excitait sa curiosité ; il herborisait le jour et ob- 
servait les astres la nuit. « Il devenoit ainsi 
botaniste et astronome par lui-même, et en 
quelque sorte malgré lui, dit Fontenelle; car il 
s'engageoit toujours plus qu'il ne vouloit. Il 
poussa assez loin son étude des plantes, et dans 
le même temps il se fit un globe céleste creux 
en façon d.e grande lanterne, ou, à la faveur d'une 
petite lumière placée au dedans, on voyoit les 
principales étoiles fixes emportées du même mou- 
vement dont elles paroissent l'être dans le ciel. » 
Les travaux de Otto de Guéricke attirèrent 
l'attention de Homberg, qui s'attacha à lui pour 
s'instruire dans la physique expérimentale, « et 
cet habile homme, quoique fort mystérieux, ajoute 
Fontenelle, ou lui révéla ses secrets en faveur de 
son génie , ou ne les put dérober à sa pénétra- 
tion ». Ses amis, voyant Homberg s'éloigner 
de plus en plus du barreau , s'imaginèrent de 
chercher à le marier, pour le rappeler à sa pro- 
fession par les nécessités de la vie; mais pour 
rester plus maître de lui-même, il s'éloigna de 
son pays et alla en Italie. Il s'arrêta un an à 
Padoue, où il s'appliqua à la médecine, à l'a- 
natomie et à la botanique. A Bologne, il tra- 
vailla sur la pierre phosphorescente qui porte le 
nom de cette ville ; il parvint à lui rendre sa 
lumière, dont le secret s'était presque perdu ; à 
Rome il se lia particulièrement avec Marc-Antoine 
Celeo , gentilhomme romain qui réussissait fort 
bien à faire de grands verres de lunette : il s'y ap- 
pliqua avec lui, et réussit. Homberg vint ensuite 
en France ; de là il passa en Angleterre, où il tra- 
vailla quelque temps avec Boyle. Il retourna 
alors en Hollande , où il se perfectionna encore 
en anatomie sous Graff, et enfin il revint à 
Quedlimbourg retrouver sa famille. Peu de 
temps après il se fit recevoir docteur en méde- 
cine à Wittemberg. Ses parents voulaient qu'il 
s'adonnât à la pratique de son art; mais lui, 
toujours désireux d'apprendre, partit pour vi- 
siter les pays du Nord. Les phosphores faisaient 
alors du bruit. Balduin et Kunkel avaient trouvé 
chacun un phosphore. Homberg vit d'abord Bal- 
duin, et trouva celui de ce chimiste très-beau et de 
la nature de la pierre de Bologne, quoiqu'un peu 
plus faible en lumière; il en obtint le secret en 
échange de quelques autres. Il alla trouver Kunkel 
à Berlin , et il obtint son secret pour celui du 
petit homme qui se cache dans un tuyau quand 
le temps doit être pluvieux et en sort quand il 



doit faire beau : c'était le vrai phosphore, ex- 
trait de l'urine. Homberg alla voir les mines de 
Saxe , de Bohême, de Hongrie et de Suède. A 
Stockholm il travailla avec Hierna dans le nouveau 
laboratoire de chimie que le roi de Suède ve- 
nait de créer, et contribua aux premiers succès 
de cet établissement. « On s'adressoit souvent 
à lui , dit Nicéron, ou pour lui demander des dé- 
cisions sur des difficultés qui partageoient les 
plus habiles, ou pour l'engager à des recherches 
qu'ils n'osoient entreprendre, et les journaux de 
Hambourg de ces temps-là, imprimés en alle- 
mand , sont pleins de mémoires qui venoient de 
lui. » — « Dans tous ses voyages, dit Fontenelle, il 
s'instruisoit des singularités de l'histoire naturelle 
des pays et observoit les industries particulières 
des arts qui s'y pratiquent; car les arts fournis- 
sent une infinité d'expériences très-dignes d'at- 
tention inventées quelquefois par d'habiles gens 
inconnus, et assez souvent par de gros artisans 
ne songeant qu'à leur utilité ou à leur commo- 
dité , et non à découvrir des phénomènes de 
physique , en ont découvert de rares et de mer- 
veilleux dont ilsnes'apercevoientpas. Ainsi il se 
composoit une physique toute de faits singuliers 
et peu connus, à peu près comme ceux qui, pour 
apprendre l'histoire au vrai, iraient chercher les 
pièces originales cachées dans des archives. » 
Sur les instances de son père, Homberg revint 
en Hollande; mais au lieu de s'y fixer il retourna 
à Paris. Son père le rappelait encore, et il allait 
partir lorsque Colbert l'envoya chercher de la 
part du roi. Ce ministre lui fit des offres avan- 
tageuses, et, après quelques jours de réflexion, 
Homberg consentit à rester. « Sa plus puissante 
raison étoit, dit Fontenelle , que la pratique fa- 
milière aux protestants de lire tous les jours un 
chapitre de l'Écriture Sainte lui avoit rendu fort 
suspecte l'Église protestante, dans laquelle il étoit 
né, et qu'il se sentoit fort ébranlé pour rentrer 
dans l'Eglise catholique , ce qu'il fit en 1682. » 
Chauffepié ne croit pas que ce soit là le vrai 
motif de la conversion de Homberg, qui se sera, 
dit-il, laissé éblouir par la grandeur des offres 
que lui fit Colbert, et se sera flatté d'une haute 
fortune. Quoi qu'il en soit, Homberg perdit Col- 
bert l'année suivante, et son père l'ayant déshé- 
rité pour avoir changé de religion, il se trouva 
dans une grande gêne. Il se lia avec l'abbé de 
Chalucet, qui fut depuis évéque de Toulon, et 
qui était fort curieux de chimie. Homberg était 
trop habile pour croire à la pierre philosephale; 
mais un autre chimiste, qui travaillait aussi avec 
le prélat, lui donna, pour vaincre son incrédulité, 
un lingot d'or qu'il prétendait avoir obtenu par 
transmutation, et qui valait bien 400 fr. Hom- 
berg accepta, et par prudence s'en retourna à 
Rome, en 1685. Il se livra dans cette ville à la 
pratique de la médecine, et avec assez de succès : 
« II ne vantoit ni ses remèdes, ni sa capacité, 
dit Fontenelle; il n'osoit dire plus qu'il ne savoit, 
ni donner le vraisemblable pour assuré, et par 



19 



HOMBEBG 



20 



là il ne pouvait guère être le médecin que de 
malades assez raisonnables. 11 se faisoit même 
peu d'honneur des succès , et renvoyoit à la na- 
ture la plus grande partie de la gloire; mais au 
lieu de l'art de se faire valoir, il avoit celui de 
découvrir assez juste par des raisonnements fins 
la cause de la maladie et le remède qui conve* 
Doit » De retour à Paris au bout de quelques 
années, il y marqua sa place parmi les plus sa* 
vants par ses vastes connaissances, ses expé- 
riences, ses découvertes, par une machine pneu* 
matique de son invention plus parfaite que celles 
de Guérickeet de Boyle, par des microscopes de 
sa façon, très-simples, très-commodes et donnant 
d'assez bons résultats. Dès que l'abbé Pignon eut 
en 1691 la direction de l'Académie des Sciences, il 
y fit entrer Homberg et Tournefort. Il donna aussi 
à Homberg le laboratoire de l'Académie. Hom- 
berg donna une nouvelle vie à ce corps savant 
par ses communications intéressantes et nom- 
breuses. Le duo d'Orléans, voulant apprendre 
la chimie et la physique expérimentales, s'adressa 
à Homberg, sur l'indication de l'abbé Dubois, le 
prit auprès de lui en 1702, lui donna une pension 
et un laboratoire parfaitement fourni, ou le duc 
venait chaque jour assister à des expériences 
et en faire lui-même. Ce prince ayant aussi fait 
venir d'Allemagne la même année un grand mi- 
roir ardent, Homberg s'en servit pour faire un 
grand nombre d'expériences nouvelles sur la 
fusibilité et la volatilité des métaux. En 1704 
on vint offrir à Homberg de grands avantages 
delà part de l'électeur palatin; mais l'attache- 
ment qu'il avait pour le duc d'Orléans ne lui 
permit pas d'accepter. Il fut donc nommé pre- 
mier médecin de ce prince à la fin de 1704 ; mais 
toute charge qui exigeait résidence hors de Paris 
étant incompatible avec le titre d'académicien 
pensionnaire, aux termes du règlement de l'Aca- 
démie, Homberg déclara que s'il fallait opter, 
il se déterminerait pour l'Académie. Le roi le 
jugea digne d'une exception, et Homberg garda 
les deux places. En 1708 il se maria à la fille du 
médecin Dodart, laquelle aimait tant la chimie 
qu'elle servait souvent à son mari d'aide et de 
préparateur intelligent. Quelques années après 
il devint sujet à une légère dyssenterie qu'il se 
guérissait et qui revenait de temps en temps. Le 
mal prit bientôt plus de force et finit par Tenir 
porter. Peu de jours avant sa mort, il écrivit au 
duc d'Orléans, devenu régent, pour lui recom- 
mander tout ce qu'il avait le plus aimé, sa veuve 
et l'Académie des Sciences. 

« Quoiqu'il fût d'une complexion faible, dit 
Fontenelle , il était fort laborieux et d'un cou- 
rage qui lui tenoit lieu de force. Son caractère 
d'esprit est marqué dans tout ce qu'on a de lui, 
une attention ingénieuse surtout, qui lui faisoit 
naître des observations où les autres ne voient 
rien, une adresse extrême pour démêler les 
routes qui mènent aux découvertes, des tours 
d'expérience singuliers et qui seroient trop artifi- 



cieux si on avait tort de s'obstiner à les connoitre, 
une finesse sensée et une solidité délicate, une 
exactitude qui, quoique scrupuleuse, sçavoit 
écarter toutjfinutile; toujours un génie de nou- 
veauté pourqui les sujets les plus usez ne Té- 
taient point... Il donnoit de bonne grâce ce qu'il 
savait; il laissoit aux gens à sentir le prix de ce 
qu'il leur avoit donné. Sa manière de s'expliquer 
était tout à fait simple, mais méthodique, précise 
et sans superfluité... Jamais on n'a eu des 
mœurs plus douces ni plus sociables ; il était 
même homme de plaisir... Une philosophie saine 
et paisible le disposoit à recevoir sans trouble 
les différents événements de la vie, et le ren- 
doit incapable de ces agitations dont on a, 
quand on ▼eut, tant de sujets, o 

Homberg a fait connaître en France la décou- 
verte du phosphore , dont il a donné, d'après 
Kunfcel, une description détaillée, Il étudia un 
des premiers les propriétés de ce nouveau corps, 
et essaya de démontrer que la flamme du phos- 
phore est plus intense que celle du feu ordinaire. 
Le phosphore était , selon lui , « la partie la plus 
grasse de l'urine concentrée dans une terrô fort 
inflammable ». Homberg dfvisait les phosphores 
en deux espèces : la première comprenant ceux; 
qui luisent jour et nuit , sans qu'il soit besoin de 
les allumer, pourvu seulement qu'on ne les tienne 
pas dans un air trop froid , comme sont tous 
ceux que l'on fait d'urine et de sang humain, 
c'est-à-dire le phosphore proprement dit; la se- 
conde renfermant ceux qui, pour paraître lumi- 
neux, ont seulement besoin d'être exposés au 
grand jour, sans qu'il soit nécessaire de se mettre 
en peine si Pair dans lequel on les expose est froid 
ou chaud ; tels sont la pierre de Bologne et le 
phosphore de Balduin , ce que l'on appelle au • 
jourd'hui des sels pyrophoriques , substances 
que l'on avait confondues primitivement avec le 
vrai phosphore. A propos de la préparation du 
phosphore de la première espèce, Homberg re- 
marque que toutes les urines ne donnent pas 
du phosphore ; qu'il faut qu'elles proviennent de 
personnes qui boivent de la bière; celles qui 
viennent du vin en donnent à peine. « Cette ob- 
servation fort curieuse, ajoute M. Hoefer, ne pa- 
rait pas dénuée de fondement quand on songe que 
l'orge, qui entre dans la composition de la bière , 
est, comme tous les grains des céréales, riche en 
phosphates, dont le vin est presque entièrement 
dépourvu. L'auteur raconte que la découverte du 
phosphore appelé phosphore de Homberg est due 
au hasard. Voulant un jour calciner un mélange 
de sel ammoniac et de chaux vive, il fut surpris 
de voir que ces deux substances produisaient , 
en fondant, une masse blanche qui avait la 
propriété de devenir lumineuse à chaque coup 
de pilon. Voici comment il enseigne à préparer 
son phosphore : Prenez une partie de sel am- 
moniac en poudre , et deux parties de chaux 
vive; mêlez-les exactement , remplissez-en un 
creuset et mettez-le à un petit feu de tante. 



ai 



HOMBERG 



32 



On voit d'après cela que le phosphore de Hom- 
berg est du chlorure de calcium. Dans un autre 
mémoire il indique une méthode pour faire l'ar- 
bre de Diane; qui ne diffère pas beaucoup de la 
méthode d*Eck de Sulzbach, dont il ne parait pas 
avoir eu connaissance. Dans un mémoire sur la 
glace, il s'attache à prouver que si l'eau aug- 
mente de volume en se congelant , c'est parce 
qu'il y a dans ses pores beaucoup plus d'air ren- 
fermé que dans ceux de tous les autres liquides ; 
que lorsqu'on fait congeler l'eau dans le vide , et 
qu'elle est bien purgée d'air, elle n'a rien de par- 
ticulier dans sa congélation ; qu'en un mot la 
glace formée dans le vide a, conformément à la 
loi générale , moins de volume que n'en avait 
l'eau avant d'être congelée. Homberg attribuait 
Tévaporationde l'eau dans le vide» non pas à la 
diminution de la pression de l'air, mais au mou- 
vement de la matière éthérée , qu'il suppose éga- 
lement jouer un grand rôle dans les phénomènes 
de la lumière. « « Mais les plus importants de tous 
les mémoires de Homberg, ajoute encore M. Hoe- 
fer, sont ceux qui traitent de la saturation des aci- 
des par les alcalis, ou réciproquement. On y trouve 
les premiers jalons de la grande loi des propor- 
tions définies dans lesquelles s'effectuent les com- 
binaisons des acides et des bases. La force des 
acides , dit l'auteur, consiste à pouvoir dis- 
soudre, celle des alcalis consiste à être dis- 
solubles; et plus ils le sont t plus ils sont 
parfaits dans leur genre. Substituez aux roots 
dissoudre et dissolubles, neutraliser et neu- 
tralisables , et vous aurez la définition des aci- 
des et des bases , telle qu'on la donne aujourd'hui. 
Pour démontrer que le même alcali (potasse) 
se combine avec des proportions différentes 
d'acides différents , Homberg traitait une quan- 
tité déterminée (une once) de sel de tartre cal- 
ciné (potasse) avec de l'esprit de nitre en excès 
( acide nitrique concentré). Après avoir fait éva- 
porer jusqu'à siccité , il pesait le résidu , et Yaug- 
mentatioH du poids du sel indiquait la quan- 
tité d'acide absorbée. Il avait ainsi dressé une 
table des différentes proportions d'acides volatils 
( susceptibles d'être chassés par l'évaporation ) 
se combinant avec la même quantité de base. 
Dans un second mémoire, il revient sur le même 
sujet, et s'attache de plus en plus à démontrer 
que la quantité d'ua acide que prend un alcali 
est la mesure de la force passive de cet alcali. 
Enfin il fait voir dans ce même travail que la 
chaux éteinte (carbonatée) dissout la même 
quantité d'acide que la chaux vive. Cette expé- 
rience lui servit d'argument pour renverser la 
théorie de quelques chimistes, d'après laquelle 
la chaux devait perdre sa force alcaline par la 
calcination. Enfin dans une Notice sur les huiles 
des plantes , il signale l'imperfection des pro- 
cédés employés par les distillateurs et les phar- 
maciens dans la préparation des essences. Il dit 
qoe pour retirer des plantes (des roses par 
exemple) toute leur huile essentielle, il faut les 



laisser macérer pendant quinze jours dans de l'eau 
acidulée par de l'esprit de vitriol. » — Homberg 
a attaché son nom à l'acide borique, qui reçut 
d'abord le nom de sel sédatif de Homberg. 
Homberg n'a pas publié de corps d'ouvrage; 
ses recherches sont consignées dans les mémoires 
suivants, imprimés dans V Histoire de V Académie 
des Sciences : Manière de faire le Phosphore 
brûlant de Kunkel; 1692; — diverses Expé- 
riences du Phosphore; ibid.; — Réflexions 
sur différentes végétations métalliques; ibid.; 
— Manière d'extraire un sel volatil minéral 
en forme sèche; ibid. ; — Réflexions sur l'ex- 
périence des lames de verre qui se brisent 
dans le vuide; ibid.; — Expériences sur la 
glace dans le vuide; 1693; —, Expériences 
du ressort de Voir dans le vuide; ibid.; — 
Expérience de V évaporât ion de Veau dans 
le vuide , avec des réflexions; ibid.; — Ex* 
périences sur la germination des plantes; 
ibid. ; — Observations de la différence du 
poids de certains corps dans Vair libre et 
dans le vuide; ibid. ; — Observation curieuse 
sur une infusion d'antimoine; ibid.; — Ré- 
flexions sur un fait extraordinaire arrivé 
dans une coupelle d'or; ibid. ; — Nouveau 
Phosphore; ibid.; — Observations sur des 
étincelles de lumière et sur les couleurs 
telles qu'on les voit dans le vuide; 1694; — 
Dissertation sur la diversité des parties des 
huiles des plantes ; 1695 ; — Dissertation sur 
l'origine et la nature des esprits acides; 
ibid. ; — Observations sur la diverse pesan- 
teur du même air , selon la variété des degrés 
de chaleur; 1696; — . Observation sur la 
quantité exacte des sels volatils acides 
contenus dans les différents esprits acides; 
1699 ; — Essais pour examiner les sels des 
plantes; ibid. ; — Observations sur cette sorte 
d'insectes qui s'appellent ordinairement de- 
moiselles; ibid.; — Essais sur les injections 
anatomiques; ibid.; — Observations sur la 
quantité des acides absorbez par les alcalis 
terreux; 1700; ^ Observations sur les dis- 
solvons du mercure ; ibid. ; — Observations 
sur les huiles des plantes ; ibid. ; — Sur Va- 
cide de l'antimoine; ibid.; — Observations 
sur le raffinage de l'argent; 1701; — Obser- 
vations sur quelques effets des fermentations ; 
ibid.; — - Observations sur les analyses des 
plantes; ibid.; — Observations sur les sels 
volatils des plantes; ibid. ; — Essais de Chi- 
mie; 1702; — • Observations faites par le 
moyen du verre ardent; ibid.; — Essai de 
l'analyse du soufre commun ; 1703; — Obser- 
vations sur un battement de veines semblable 
au battement des artères; 1704; — Suite des 
Essais de Chimie, article 3 : Du Souphre prin- 
cipe ; 1705 ; — Observation sur une dissolution 
de l'argent; 1706; — Observations sur le fer 
au verre ardent; ibid.; — Suite de l'article 
des Essais de Chimie : Du Souphre principe ; 



23 



HOMBERG — HOME 



24 



îbid. ; — Eclaircissement touchant la Vitri- 
fication de VOr au verre ardent; 1707; — 
Observations sur les Araignées; ibid. ; — Mé- 
moire touchant les Acides et les alcalis; 
1708; —Suite des Essais de Chimie, article 4 : 
Du Mercure; 1709; — Observations touchant 
l'effet de certains acides sur les alcalis vo- 
latils; Ma.;— Observations sur les matières 
sulphureuses et sur la facilité de les changer 
d*une espèce de soufre en une autre; 1710; 

— Mémoire touchant les Végétations arti- 
ficielles; ibid.; — Observations sur la Ma- 
tière fécale; 1711; — Phosphore nouveau, 
ou suite des observations sur la matière fé- 
cale; ibid.; — Observations sur V Acide qui 
se trouve dans le sang et dans les autres par- 
ties des animaux, deux mémoires; 1712; — 
Manière de copier sur le verre coloré les 
pierres gravées; ibid.; — Observation sur 
une séparation de Vor avec V argent par la 
fonte; 1713; — Observation sur une subli- 
mation du mercure; ibid. ; — Observations 
sur des matières gui pénètrent et qui tra- 
versent les métaux sans les fondre; ibid.; 

— Mémoire touchant la volatilisation des 
sels fixes des plantes; 1714. Homberg donna 
aussi le secret de faire de beau carmin ; on trouve 
encore de lui diverses expériences sur le noufre 
d'antimoine, la préparation d'une sorte d'or po- 
table, etc. L. Louvet. 

Fontenelle, Éloge de G. Homberg. — Chauffcplé, Nouv. 
Dict. hist. et crit. — Nlcéroo, Mémoire» pour servir à 
l'hitt. des hommes illustres dans ta rép. des lettres, 
t XIV, p. 151. - Duhamel, Regiœ Scient. Jcad. Hist. — 
F. Hoefer, Histoire de la Chimie, U 11, p. 807 et saiv. 

* hombres-firmas (Louis-Augustin, ba- 
ron D f ), naturaliste et agronome français, né vers 
1785, à Âlais (Gard ), mort dans cette ville, le 
5 mars 1857. Il était petit-neveu des savants 
Boissier et Sauvages. En 1812 il fut nommé 
membre du conseil d'arrondissement d 'Alais, 
fonctions qu'il conserva pendant vingt ans. En 
1818 il fut appelé à celles de maire de sa ville na- 
tale, et les exerça jusqu'en 1826. Ses travaux 
scientifiques lui méritèrent, en 1836, la nomina- 
tion de correspondant de l'Académie des Sciences. 
11 fit des voyages scientifiques en Suisse, en Ba- 
vière, en Belgique, en Hollande, en Angleterre, en 
Italie. On a de lui : Mémoire sur VArrosement 
dans les Cévennes; 1809, in-8° ;— Recueil de 
Proverbes météorologiques et agronomiques 
des Cévennes, suivi des Pronostics des pay- 
sans languedociens sur les changements de 
temps ;in•8• ; — Nivellement barométrique des 
Cévennes; 1832, in-8° : la Société royale de 
Géographie décerna une médaille d'or à ce mé- 
moire ; — Mémoire sur quelques végétaux qui 
croissent spontanément dans le département 
du Gard; 1834, in-8°; — Recherches sur les 
baromètres vivants; 1838, in-8°; — Mémoire 
sur le Mûrier des Philippines; 18.., in -8°; — 
Recueil de Mémoires et d'Observations de phy- 
sique 9 de météorologie, d'agriculture et d'hit* 



toire naturelle; Nîmes, 1839-1847, 6 vol. 
in-8°; l'auteur a réuni dans ce recueil les diffé- 
rents mémoires qu'il avait précédemment publiés. 
Le tome XXVIII de la Société royale d'Agricul- 
ture contient de M. dHombres un Mémoire sur 
le Châtaignier, et Ton trouve de lui quelques 
notices dans le Recueil de V Académie du Gard* 
Des essais qu'il a faits sur les différentes variétés 
de la pomme de terre lui valurent une médaille de 
la Société royale d'Agriculture. Parmi plusieurs 
communications qu'il fit à l'Académie royale des 
Sciences, on remarque : une Description de la 
Nerinée gigantesque , qui fut insérée dans le 
compte-rendu de cette académie (année 1 838 ) ; — 
une Note sur la collection géologique des Cé- 
vennes, qu'il avait formée à Alais (1839) ;— le Ré- 
sumé des Observations métérologiques faites 
à Alais pendant trente-cinq ans (ibid.);— une 
Note sur les fossiles des environs d 1 Alais 
(1740), etc. Il fit don au Muséum d'Histoire na- 
turelle de Paris des fragments d'os fossiles dé- 
couverts dans les Cévennes. Guyot de Fere. 

Discours de M. de Retz, sur la tombe d'Hombres de 
Firroa». — Renseignements particuliers. 

home (David), controversiste écossais, 
vivait dans la première moitié du dix-septième 
siècle. Il descendait d'une famille considérable 
d'Ecosse. Il passa la plus grande partie de sa 
vie en France, où il fut pasteur de Gergeau. Jac- 
ques I er remploya à concilier Tilenus et Du Mou- 
lin , et même à réunir, s'il était possible , toutes 
les sectes protestantes dans une même profes- 
sion de foi : projet qui fut reconnu impraticable. 
On ignore la date de la mort de Home. On a de 
lui: De Unione Insulas Britannica Tractatus; 
Londres, 1605, in-4°; — Lus us poetici; Lon- 
dres, 1605, in-4°; — Le C ontr assassin ; Ge- 
nève, 1612, in-8°; — Lettres et Traitez chr es- 
tiens; Berg, 1613, in-12; — V Assassinat du 
Roy, ou maximes du Vieil de la Montagne va- 
ticane et de ses assassins , practiquées en la 
personne de deffunct Henry le Grand; in- 8° ; 
— Régi suo Scotix Gratulatio ; Edimbourg , 
1617, in-4° ; — Apologia basilica , seu Machia- 
velli ingenium examinatum in libro quem 
« Princeps >» inscripsit; Paris, 1626, in-4°; — 
Pœmata; Paris, 1639, in-4*. Les poésies latines 
de Home ont été réimprimées en partie dans 
les Deliciœ Poetarum Scotorum; Amsterdam , 
1637, 2 vol. in-12. On attribue à Home une 
General HistoryofScotland; Edimbourg, 1617, 
in-fol. Z. 

Prosper Marchand, Diction, historique. — Eag. et Ém. 
Haag, La France protestante. 

home (Henri), lord Kames, jurisconsulte 
et philosophe écossais, né en 1696, à Kames, dans 
le comté deBerwick, mort le 27 décembre 1782. 
Il étudia le droit à l'université d'Edimbourg, et 
fut reçu avocat en 1724. Diverses publications 
sur des sujets de jurisprudence lui valurent d'a- 
bord une nombreuse clientèle; puis, en 1752, la 
place de juge de la cour de session, avec le titre 
de lord Kames, et enfin en 1763 la dignité de 



2& 



HOME 



26 



lord du Justicier, c'est-à-dire du suprême tri- 
banal criminel d'Ecosse. Les soins de l'agricul- 
ture et les méditations métaphysiques furent 
pour lui un délassement de ses travaux judi- 
ciaires, et donnèrent lieu à quelques-uns de ses 
meilleurs ouvrages. Ses écrits, qui sont nombreux 
et variés, attestent un esprit solide, instruit, in- 
dépendant, qui mettait de la clarté et de l'agré- 
ment dans les sujets les plus abstraits. On a de 
lui : Remarkable Décisions in the Court of Ses- 
sions ; 1728, in-fol. : ouvrage que l'auteur aug- 
menta et arrangea plus tard sous forme de dic- 
tionnaire; 1741, 2 vol. in-fol.; — Essays on 
several Subjects in law; 1732, in-8° ; - - Essays 
on several Subjects concerning British Antique 
lies; 1747, in-8°; -~ Essays on the Principles 
ofMorality andnatural Religion; 1751,in-8°. 
Henri Home avait eu dès sa jeunesse beaucoup 
de goût pour les discussions métaphysiques , et 
il avait entretenu une correspondance sur des 
sujets de philosophie avec Berkeley, Butler, le 
docteur Glarke et d'autres éminents logiciens. 
Enhardi par l'exemple de son ami David Hume, 
dont il prétendait combattre le scepticisme , il 
tenta de prouver, dans ses Essais sur les Prin- 
cipes de la Moralité et de la Religion natu- 
relle, que les lois qui président à la conduite 
de l'homme ont leur fondement dans la consti- 
tution de l'être humain , et sont aussi certaines, 
anssi immuables que les lois physiques qui rè- 
glent tout le système du monde. Une doctrine 
aussi fortement empreinte de fatalisme souleva 
beaucoup de réclamations dans le clergé, et Home 
crut prudent d'adoucir quelques passages dans 
la seconde édition; — Thestatute Law ofScot- 
land abridged, with historical Notes; 1757, 
in-8° ; — Historical Law Tracts ; 1759, in-8° ; 

— Principles ofEquity; 1760, in-fol.; — In- 
troduction to the Art of Thinking; 1761 , in-1 2 : 
compilation bien faite et destinée à la jeunesse; 

— Eléments of Criticism; 1762, 3 vol. in-8°. 
Cet ouvrage, où Home essaya de rattacher la cri- 
tique littéraire aux principes philosophiques , 
fut très-admiré, et il a encore des lecteurs; — 
Sketches ofthe History of Mon; 1773, 2 vol. 
in-4°; — The Gentleman Former, being an 
attempt to improve agriculture by subjec- 
ting it to the test of rational principles; 
1777, in-8°; — Loose Hints upon Education, 
chiefly concerning the Culture ofthe Heart; 
1781, in 8°. Z. 

Woodfaouselee, Memotrs of the IÂfe and Writings of 
hon. Henry Home of Kames ; t vol. in-4». — Cbalmen, 
General Biographical Dictionary. 

ho aie ( Francis ), médecin anglais, vivait au 
dix-huitième siècle. Il pratiqua la médecine à 
Edimbourg, et fut professeur de matière médi- 
cale à l'université de cette ville. On a de lui : 
De Febre rémittente; Edimbourg, 1750, in-8°; 

— On the Contents and Virtues ofthe Dance- 
spaw; ibid., 1751, in-8°; — Principia Medi- 
cinœ; ibid., 1758, in-8° ; traduit en français par 



Gastellier, Paris, 1771, in-8°; — The Princi- 
ples of Agriculture and Végétation ; Edim- 
bourg, 1758, in-8°; — Médical Facts and Ex- 
periments; Londres, 1758, in-8°; — Inquiry 
into Nature, Cause and Cure of the Croup; 
1765, in-fol. — Clinical Experiments, histo- 
riés and dissections; Lond., 1781, in-8*. Z. 
Biographie médicale. 

home ou hume (John), auteur dramatique 
écossais, né près d'Ancrum, dans le comté de 
Roxburgh, en 1724, mort le 4 septembre 1808. 
Destiné à la carrière ecclésiastique, il achevait 
ses études à Edimbourg lorsque éclata la révolte 
jacobite de 1745. 11 entra comme volontaire dans 
l'armée royale, fut fait prisonnier au combat de 
Falkirk, et ne recouvra la liberté qu'après la 
bataille de Culleden. Il revint à ses études, et 
fut nommé, en 1750, ministre de Athelstaneford, 
dans l'£ast-Lothian. Tandis qu'il remplissait ces 
fonctions ecclésiastiques, il fit jouer au théâtre 
delà Canongate, à Édimboorg, en décembre 1756, 
sa tragédie de Douglas. Cette production, par- 
faitement innocente d'ailleurs, était une pièce de 
théâtre : ce fut assez peur soulever le clergé 
écossais, au point que Home dut abandonner sa 
paroisse, et quitta même l'Ecosse. Cette persé- 
cution ne nuisit en rien à ses succès littéraires. 
David Hume, son ami et peut-être son parent, 
le loua « de posséder le véritable génie théâtral 
de Shakspeare et d'Otway, purifié de la barbarie 
de l'un et delà licence de l'autre ». Avec cette 
recommandation, Home présenta, au mois de 
mars 1757, son Douglas au public de Covent- 
Garden, qui l'applaudit médiocrement. Cependant 
cette tragédie intéressante et bien écrite triom- 
pha de la froideur du public, et finit par rester 
au répertoire. Malheureusement pour sa ré- 
putation , Home fit suivre sa première pièce de 
cinq tragédies qui ne la valaient pas à beaucoup 
près, et dont voici les titres : Agis; 1758; — 
The Siège of Aquileia; 1760; — The fatal 
Discovery; 1769; — Alonzo ; 1773, in-8°; — 
Alfred; 1778, in-8°. Alfred n'eut que trois re- 
présentations. A la suite de cet échec Home re- 
vint en Ecosse. Depuis 1762, il avait reçu une 
pension de lord Bute. Son dernier ouvrage in- 
titulé : History of the Rébellion in Scotland 
in 1755-6, in-8°, n'eut aucun succès. Home pro- 
tégea le mérite littéraire autant que le lui per- 
mettait la médiocrité de sa fortune; il encouragea 
les premiers essais de Macpherson , alors simple 
maître d'école, et lui fournit de quoi visiter les 
montagnes de l'Ecosse et recueillir les poésies 
gaéliques, dont Macpherson publia la traduction 
sous le nom de Poèmes ffOssian. Macpherson, 
comme témoignage de reconnaissance, légua en 
mourant 2,000 I. s. à Home. Z. 

Baker, Biographia dramatica. — Centleman's Maga- 
zine, LXXVIII. 

home (Sir Everard), chirurgien anglais, 

né en 1756, à Greenlaw-Castle , dans le comté 

* de Berwick (Ecosse), mort à Chelsea, le 31 août 



27 



HOME — HOMEM 



28 



1832. Après avoir étudié sous le célèbre John 
Hunter, son beau-frère, il se rendit à Londres, 
où il pratiqua- la médecine avec le plus grand 
succès pendant plus de quarante ans. En 1813 
Georges IV l'éleva à la dignité de baronet. Il pré* 
sida pendant un grand nombre d'années le Col- 
lège royal des Chirurgiens. Il était chirurgien de 
l'hôpital de Chelsea , professeur d'anatomie et 
de chirurgie au Collège royal , et membre de la 
Société royale de Londres. On a de lui, outre 
un grand nombre de mémoires publiés dans les 
Philosophical Transactions : a Dissertation 
on the propriétés of pus; Londres, 1788, 
in-4° ; — Practical Observations on the Treat* 
ment of Stricture in the Vrethra and in the 
Œsophagus; ibid., 1795-1803, 3 vol. in-8°; — 
Practical Observations on the Treatment of 
Ulcers on the Legs, considered as a branch of 
military surgery; ibid., 1797, în-8°; — Prac- 
tical Observations on the Diseasesofthe Pros- 
tate Gland; ibid., 181l,in-8°; — Lectures on 
comparative Anatomy; Londres, 1814, 2 vol. 
in-4°. Z. 

Rose, New gênerai Biographical Victionary. — Bio- 
graphie médicale. 

Homéidhah, schérif de La Mecque, de la 
dynastie des Catadides, assassiné en 719 de 
l'hégire (1319 de J.-C. ). Second fils du schérif 
Abou-Nami, qui mourut en 701 (1302), il dis- 
puta le gouvernement de La Mecque à ses frères 
Roméitsah, Abou'l-Ghéits , et Othéifah, et resta 
maître de la ville , conjointement avec son frère 
atné Roméitsah. S'étant déclarés indépendants 
du sultan d'Egypte, Nasser Mohammed, les 
deux princes furent saisis et détenus au Caire , 
jusqu'à l'époque de leur évasion, en 704 (1304)» 
Abou'l-Ghéits avait été investi du schérifat du- 
rant leur captivité; ils le chassèrent, et régnè- 
rent quatre ans ensemble. Ils se firent ensuite la 
guerre. Homéidhah, resté unique possesseur 
de la succession paternelle, fut attaqué en 713 
(1313) par une armée égyptienne , dont le cé- 
lèbre Abou'l-Féda commandait un détachement. 
Il évacua se capitale ; mais lorsque les troupes 
ennemies se furent retirées, il rentra à La Mecque, 
s'empara de Abou'l-Ghéits, qui avait été rétabli, 
et le fit mettre a mort. L'année suivante, ses 
États furent envahis de nouveau et son armée 
vaincue par Roméitsah , assisté de 200 cavaliers 
égyptiens, en 715 (1315). Assiégé dans une for- 
teresse, où il s'était réfugié, il s'échappa secrè- 
tement, laissant entre les mains de l'ennemi s* 
famille et ses trésors. Il alla implorer le secours 
de Oldjaïtou , ilkhan de Perse , et en obtint un 
grand corps de troupes. Mais à la nouvelle de la 
mort d'Oldjaïtou (716-1316), cette armée se 
dispersa, et Homéidhah faillit tomber entre les 
mains d'un chef arabe des environs de Baghdad. 
Ayant perdu l'espoir de rétablir ses affaires et 
d'enlever La Mecque à son frère Othéifah, il était 
sur le point d'aller se rendre aux Égyptiens, lors- 



qu'il fut assassiné par trois Mamlouks trans- 
fuges, qu'il avait pris sous sa protection. £. B. 
Abou'l-Péda, Annales Mutlemlci, êdit. de Reiskc, 
t. V, p. 181, 10», ttS, 297, 311, 818, 848. - MlkHst, Hist. 
des Mamlouks, trad. par M. Quatremére, t li, part. Il, 
p. 191, 827, 242, 282. 

* romem (Francisco), poète portugais, vi- 
vait au seizième siècle ; il était fils de Pedro 
Homem et grand-écuycr (estribeiro môr) du 
roi Emmanuel. Ses œuvres ont été données dans 
le Cancioneiro de Resende, qui , publié in-fol., 
1516, par Hernando de Campos, vient d'être 
réimprimé par la Société des Bibliophiles de 
Stuttgard , 4 vol. in-8°. Les œuvres du père , 
également poète, se trouvent dans le même 
Cancioneiro. F. D. 

Barbosa Machado, Bibliotheca Lusitana. 

* homem de ANDtUDE (Jozé), chimiste 
portugais, né à Lisbonne, le 24 novembre 1658, 
mort le 17 mai 1716. 11 exploitait à Lisbonne 
une boutique de pharmacie, et il a laissé un 
grand nombre d'ouvrages manuscrits sur la 
science qu'il cultivait. Ses ouvrages imprimés 
sont : Apologia pharmacexitica pela verda- 
deira trituracdo do Jalapa e dos Aromaticos 
discutientes que entrâo na composicdo da 
Senedicla, etc.; Lisbonne, 1691 ; — Segunda 
parte ; 1695, in-4 8 . F.D. 

Barbosa Machado, Bibliotheca Lusitana. 
homem ( Fr. -Manoel ), théologien et his- 
torien portugais, né à Lisbonne, le 29 décembre 
1599, mort le 7 octobre 1662. Il était le con- 
fesseur d'un descendant d'Inès de Castro, du 
marquis de Cascaes , chargé d aller représenter 
Joâo 1Y à la cour de France. Tallemant des 
Réaux nous a tenu au courant des excentrici- 
tés du seigneur portugais. Manoel Homem fit le 
récit de la pompeuse ambassade du marquis. 
En recevant solennellement le marquis, au mo- 
ment où il remettait ses lettres de créance au 
roi enfant, Marie de Médicis lui fit observer 
gracieusement qu'il y avait des liens de parenté 
entre elle et la maison de Castro. Alvaro Perez 
de Castro, marquis de Cascaes, devenu le repré- 
sentant de cette grande famille, était trop flatté 
d'un pareil rapprochement, pour ne pas en 
instruire les deux cours, et il nous est permis 
de supposer que la remarque de la reine ne fut 
pas étrangère à la publication de Manoel Ho- 
mem. Son livre a pour titre : Discripçao da Jor- 
nada $ Bmbaixada extraordinaiia que fez 
a França D. Alvaro- Pires de Castro, conde 
de Monsanto e marquez de Cascaes; Paris, 
1644, pet. in-4°. La seconde partie, qui suivit 
de près oette publication, fut imprimée en Bre- 
tagne;— Relaçao secunda dos grandezas do 
marquez de Cascaes e de sua Chegada a ci* 
dadede Nantes e assistencia nella até partit 
para Portugal; Nantes, 1645, pet. h>4°. Après 
avoir fait imprimer ces deux opuscules, devenus 
très- rares, Manoel Homem profita de son voyage 
à Nantes pour éditer sous un nom supposé 
l'ouvrage suivant : Resurreiçào de Portugal e 



20 HOMEM 

Morte fatal de Castella>per Fernam Homem 
de Figueiredo. Guillaume Le Monnier publia 
cet ouvrage sans date et sans nom de lieu ; il 
parut in -4°. C'est à la même époque que fut 
également imprimé en France un ouvrage du 
même auteur d'une nature bien différente; il est 
intitulé : Averdade do Ante-Christo contra a 
mentira inventada, dedicado à Mademoiselle 
(sic) filha do duque de Orléans, Tiro dé 
Luiz XIV; Paris et Lisbonne. Nous n'avons ja- 
mais rencontré ce volume. Nous connaissons en- 
core de Manoel Homem : Kalendario qua- 
driennal conformé ù estylo da orâem do* 
pregadores. Resolucâo de algumas duvidas 
graves pertenentes ao of/icio divino : confe~ 
rencia rubrical de arïibos os breviarios velho 
etnovo t etc., etc.; Lisbonne, Paul Craesbeeck, 
1643, in-8 .— Manoel Homem n'était jamais resté 
étranger à la politique de son époque, et il est 
permis de supposer qu'il fut tout autant con- 
seiller d'ambassade que simple confesseur du 
marquis excentrique qu'il accompagnait. Retiré 
dans le couvent de son ordre à Lisbonne, il 
n'abandonna pas la question qu'il avait abordée 
jadis , et il publia : Memoria da disposiedo dos 
armas Castelhanas que injustamente inva- 
desdo o reino de Portugal no anno de 1580. 
Despertadora ao valor Portuguez para ndo 
temer; do prudencia e conselho para ordenaf 
o présente; daprevencâoe cautelapara dis- 
por ofuturo; Lisbonne, 1655, în-4°. Manoel 
Homem a laissé un grand nombre de manuscrits, 
dont on trouve la liste dans la Bibliotheca Lu* 
sitana de B. Machado. Ferdinand Denis. 

Échard, Scriptores Ord. Prœd., t. II, p. 881. — F. Pedro 
Monteiro, Ctaustr. dominlù., t. 111, p. sfto. — Barbosa 
Machado, Bibliotheca Luiit. — Tallemant des Réaui, His- 
toriettes. 

HOMÈRfi (*Ou.ijpoc ), le plus grand des poètes 
grecs , vivait entre le onzième et le huitième 
siècle avant J»-C. Les renseignements biographi- 
ques nombreux que l'antiquité nous a transmis 
sur lui n'ont aucune autorité historique (1); 
mais ils sont intéressants, parce qu'ils représen- 
tent Homère tel que les anciens l'avaient ima- 
giné , tel que les modernes l'ont généralement 
accepté. Avant de discuter la date et la valeur 
de ces documents , nous résumerons rapidement 

(1) « On ne sait rien de ia vie d'Homère, dit Letronne, 
car 11 ne faat pas compter les détails contenus dans le« 
deux petits écrits qu'on attribue a Hérodote , à Plntar- 
que, et dans quelques autres , sortis de la plume de com- 
mentateurs obscurs; tons sont remplis de contes Inven- 
tés après coup, parmi lesquels sont les plus extravagant* 
qu'aucun commentateur ait imaginés. De là cette pré- 
tention de tant de lieux qui se disputaient l'honneur de 
lui avoir donné naissance. Dans ce conflit chacun se for- 
mait une opinion différente , selon ses préjugés, la tra- 
dition qu'il suivait de préférence ou son goût pour le 

merveilleux On était allé Jusqu'à le croire Campa - 

nien , Lucanlen , Romain , Syrien , Égyptien ou même 
Indien •, opinion extravagante, dont Lucien se moque 
avec esprit dans son Histoire véritable (I), M). Aussi 
l'rocius, à la vue de cette prodigieuse diversité, disait, en 
raillant , qu'il serait plus simple d'appeler Homère le 
citoyen do monde. 



— HOMÈRE 30 

le plus accrédité , la Vie $ Homère faussement 
attribuée à Hérodote. D'après cette fiction, Ho- 
mère naquit à Smyrne, d'une femme originaire 
de Cyme et nommée Crithéis. Sa mère , sur- 
prise par les douleurs de l'enfantement pendant 
une fête, le mit au jour aux bonis du fleuve Mê- 
lés , et il dut à cette circonstance son premier 
nom de Mélésigène. Élevé par les soins de Phé- 
mius, qui tenait une école de belles-lettres et de 
musique, il lut succéda dans cette profession, et 
fit bientôt l'admiration des habitants de Smyrne 
et des étrangers qui affluaient dans cette tille. 
Un patron de vaisseau, appelé Mentes , lui pro- 
posa de le suivre dans ses voyages. Homère, 
qui méditait Y Iliade et qui désirait, voir les lieux 
dont il aurait à parler, accepta; et, s'embarquant 
avec Mentes, il visita l'Egypte, la Libye, l'Es- 
pagne, l'Italie. Arrivé à Ithaque, il fut atteint d'un 
mal d'yeux. Mentes, pressé d'aller jusqu'à Leu- 
cade, le laissa chez. Mentor, un des principaux 
habitants d'Ithaque. Homère apprit là sur Ulysse 
beaucoup de détails dont il profita pour son 
Odyssée. Il repartit ensuite avec Mentes, et vi- 
sita les côtes du Péloponnèse ; mais, arrivé à Co- 
phon, il fut encore pris de son mal d'yeux, qui 
l'obligea à retourner à Smyrne , où il termina 
V Iliade. Sa cécité, devenue bientôt complète, lui 
fit donner le nom d'Homère, 'Ou,yjpoç, qui si- 
gnifie aveugle dans le dialecte de Cyme. La pau- 
vreté le força de quitter Smyrne et d'aller cher- 
cher des ressources à Cyme, puis à Phocée, où 
ses poèmes lui furent dérobés par Thestoridès, 
qui alla les débiter comme siens à Chios. Ho- 
mère l'y suivit. Abandonné sur le rivage par les 
pécheurs qui l'avaient transporté, il fat recueilli 
par un berger nommé Glaucus, qui le conduisit 
dans la petite ville de Bolissus. De là 11 se rendit 
à Chios, où il ouvrit une école, et composa son 
Odyssée. Le désir de réciter ses poèmes devant 
un public plus nombreux le décida à parcourir 
la Grèce ; mais il ne put dépasser les Sporades, 
et mourut dans 111e d'ios. Tel est l'Homère tra- 
ditionnel. Jusqu'à quel point doit-on le regarder 
comme réel ? C'est une question qui ne peut être 
résolue que par une étude approfondie sur la 
nature des poèmes qui portent son nom , et sur 
la date de leur composition. Lorsque, six siè- 
cles environ avant l'ère chrétienne, les Grecs 
commencèrent à fixer dans des récits en prose 
les vagues souvenirs de leur passé , ils possé- 
daient un grand nombre de poèmes, divisés en 
deux classes : les uns , consacrés aux généalo- 
gies des dieux et des héros , étaient attribués à 
Hésiode; les autres, destinés à célébrer les ex- 
ploits des héros , et comprenant une vingtaine 
d'épopées , dont l'ensemble forma plus tard le 
cycle épique, étaient presque tous placés sous 
le nom d'Homère. Le plus ancien texte relatif à 
Homère le désigne comme l'auteur de la Thé» 
baïde (1). La première fois qu'il est question de 

(1) (Tétait l'opinion du poète Caillnus, qui vivait 6*0 av. 
J.-C. j opinion rapportée par Pausanias, IX, 9, 8. 



31 



poèmes homériques (Opqpcta I*yj), il s'agit en- 
core de la Thébaïde que Clisthène, tyraii de Si- 
cyone, défendit aux rapsodes de réciter, parce 
qu'elle chantait la gloire d'Adraste et des Ar- 
giens (1). Jusqu'au temps des Alexandrins , la 
plus grande partie du cycle épique, des hymnes 
et plusieurs compositions satiriques furent re- 
gardés comme l'œuvre d'Homère. Mais dès le 
sixième siècle ayant J.-C, Y Iliade et l'Odyssée 
durent à leur beauté plus éclatante de se déta- 
cher de ce vaste ensemble , et d'attirer plus par- 
ticulièrement l'admiration. Ces deux poèmes 
devinrent l'objet d'études persévérantes, et don- 
nèrent lieu à des discussions qui ont été reprises 
par les modernes. Certains critiques revendi- 
quèrent Y Iliade et YOdyssée pour deux au- 
teurs différents ; d'autres nièrent que ces deux 
poèmes eussent été primitivement écrits ; d'au- 
tres enfin prétendirent que Y Iliade avait été 
composée par portions détachées (2), qui furent 
plus tard réunies sous Pisistrate, de manière 
à former un tout. Ces discussions, dont Sénèque 
parle avec mépris (3), auraient peu laissé à faire 
aux modernes si elles avaient été conduites avec 
une méthode rigoureuse, si la décadence, puis 
le moyen âge n'y eussent mis tin et n'en avaient 
détruit ou enseveli pour des siècles tous les 
monuments. La Renaissance eut pour mission 
d'exhumer les chefs-d'œuvre de l'antiquité et 
non de les soumettre à un contrôle sévère. 
Cette tâche était réservée à l'érudition moderne. 
Longtemps avant que Wolf niât, vers la fin du 
dix-huitième siècle, l'unité de composition de 

Y Iliade et de l' Odyssée , et mit en doute jus- 
qu'à l'existence du poète auquel on les attri- 
buait, divers critiques émirent des idées analo- 
gues. Wolf déclare avoir trouvé dans Casaubon 
des indices de son opinion. Hédelin d'Aubignac 
fut plus explicite. Dans un ouvrage présenté 
sous le titre modeste de Conjectures académi- 
ques, \\ prétendit que les poèmes homériques, 

Y Iliade en particulier, contiennent une infinité 
de choses qui ne peuvent raisonnablement être 
l'œuvre du même poète; qu'il est vraisemblable 
qu'Homère n'a jamais existé ; que Y Iliade et 
YOdyssée ne sont qu'un assemblage , une com- 
pilation de divers poèmes ou de vieilles tragé- 
dies qui se chantaient anciennement dans la 
Grèce; que cette compilation, faite d'abord par 
Lycnrgue, fut refaite avec plus de soin par l'or- 
dre de Pisistrate et de son fils Hipparque. Les 
Conjectures académiques, composées vers 1674, 
n'obtinrent pa3 immédiatement le visa de la 

(l) Hérodote, V, 67. M. Grote a très-bien montré que 
dans ce passage il ne peut être question qoe de la Thé- 
6*Me,etnoo de V Iliade, (History qf Greece, U II, c. si.} 

(S) « U n'écrivit pas V Iliade d'ensemble , dit Suidas, et 
jnrec cette suite qui existe aujourd'hui; mais, après avoir 
eotupoeé Mûrement chacune de ses rapsodies, Il les dé- 
bitait «par gagner sa vie dans les villes où 11 séjournait, 
et le» y laissait. » 

(S) Sénèque, De Brevitate Fltœ, XIII : « Grscornm Me 
morbus fuitquaererc... prier scriptaesset 1 lias an Odjasea, 
prrctcrea an ejusdena esset anctoris. » 



HOMÈRE 32 

censure, et ne parurent qu'en 1715; mais Bail- 
let consigna dans ses Jugemens des Savons , 
en 1685, une opinion peu différente. Voici ce 
curieux passage : « J'ai ouï dire à un homme de 
lettres des pays étrangers qu'on travaille en Al- 
lemagne à faire voir qu'il n'y a jamais eu d'Ho- 
mère , et que les poèmes qui portent son nom 
ne sont que des rapsodies ou des compilations 
que les critiques ont composées de diverses 
pièces de vers ou chansons détachées à qui on 
a donné la liaison et la suite que nous voyons 
aujourd'hui (1). » Ce que Baillet annonçait se 
réalisa cent dix ans plus tard. Dès 1693 Per- 
rault, qui connaissait le livre de Baillet et 
le manuscrit de d'Aubignac , en reproduisit les 
arguments et les conclusions dans ses Paral- 
lèles des Anciens et des Modernes ( 1. 111, 
p. 36). Boileau, dans sa polémique contre Per- 
rault, repoussa le paradoxe de d'Aubignac avec 
un extrême dédain (2). Bentley, au contraire, 
en 1713, se rencontra presque avec l'auteur 
des Conjectures académiques. Sans contester 
l'existence d'Homère, il souleva et résolut né- 
gativement la question capitale de l'unité de 
composition. « Homère , dit-il , écrivit une suite 
de chansons et de rapsodies destinées à être 
chantées par lui-même pour un petit salaire et 
un bon repas , aux fêtes publiques et aux au- 
tres jours de réjouissances. Il composa Y Iliade 
pour les hommes, et YOdyssée pour l'autre 
sexe. Ces chansons détachées ne furent ras- 
semblées dans la forme d'un poème épique 
qu'au temps de Pisistrate, environ cinq cents 
ans après (3) ». Ce n'était qu'une boutade jetée 
en passant. En 1725, un écrivain bien inférieur 
à Bentley pour l'érudition, mais au moins son 
égal pour l'originalité et l'étendue de la pensée, 
Yico, aborda la même question , et la traita avec 
une supériorité de vues qui n'a pas été surpas- 
sée. Vico écarte d'abord l'Homère factice, fabri- 
qué par les rhéteurs et les sophistes , cet Ho- 
mère savant philosophe, profond moraliste, 
enveloppant de sages préceptes sous de poéti- 
ques allégories , et se proposant d'adoucir les 
mœurs du peuple. Loin de là, dit-il , Homère 
reproduit fidèlement des mœurs violentes et 
grossières. Ses héros sont féroces , mobiles , 
obstinés, déraisonnables. Ses dieux ne Talent 
pas mieux que ses héros. Les caractères et les 
mœurs des personnages homériques , loin d'être 
l'œuvre d'un philosophe, n'ont pu être conçus 
que par des êtres à l'esprit faible , à l'imagina- 
tion vigoureuse, aux passions violentes; ils 
sont l'œuvre de tout un peuple à cette époque 
de barbarie où les peuples n'ont d'autre histoire 
que la poésie. V Iliade et YOdyssée ne furent 
pas d'abord écrites , et les chants ou rapsodies 



(1) Voy. Jugemens des Savons, t. III, p. M. 

(t) ///» Réflexion critique, a la suite de la traduction do 
Traité du Sublime de Longin. 

(S) rnilelentberus Llpsensls, Remar ks vpon a late dis- 
course o/free thinking, vu. 



33 



HOMÈRE 



34 



dont elles se composent ne furent réunis que 
bien plus tard, sous les Pisistratides. Ainsi s'ex- 
pliquent lc3 différences et les contradictions qui 
abondent dans ces deux poèmes. Œuvre mul- 
tiple de beaucoup de générations, l'épopée ho- 
mérique, commencée dans le jeune âge de la 
Grèce héroïque et achevée dans sa vieillesse, 
représente, sous les deux formes différentes de 

Y Iliade et de Y Odyssée, et par les caractères 
opposés d'Achille et d'Ulysse, une période bis- 
torique de plus de quatre cents ans. Le poète 

.auquel on l'attribue est comme la guerre de 
Troie, qui fournit à l'histoire une précieuse épo- 
que chronologique et qui pourtant n'a jamais eu 
lieu. Homère est la personnification, le type des 
Grecs qui parcouraient le pays en chantant les 
aventures des héros. Sa cécité et sa pauvreté 
représentent la misérable condition des rapso- 
des. Tant de villes de la Grèce se disputèrent 
l'honneur de lui avoir donné naissance, parce 
que les peuples de ces villes étaient bien réelle- 
ment eux-mêmes des Homères, les véritables 
auteurs de Y Iliade et de YOdyssée (1). Cette 
magnifique intuition de Vico, malheureusement 
compromise par la barbarie du style et par de 
singulières erreurs de détail, passa inaperçue. 
En 1769, Thomas Wood, sans prendre la ques- 
tion d'aussi haut, toucha un côté que Vico 
n'avait qu'effleuré, et soutint que les poèmes 
homériques n'avaient pas été primitivement 
écrits (2). Cette opinion , assez répandue chez 
les anciens, négligée par les modernes, rencon- 
tra des partisans, entre autres J.-J. Rousseau (3) 
et Mérian (4); plus tard elle frappa vivement 
Wolf, que ses études avaient déjà conduit à dou- 
ter de l'authenticité de certains chants de l'I- 
liade. Ce doute, d'abord partiel , s'étendit peu à 
peu à l'ensemble des deux poèmes. Wolf hési- 
tait encore lorsque la publication, en 1788, des 
Scolies sur V Iliade découvertes à Venise par 
Dansse de Villoison, confirma ses doutes. Les 
Scolies de Venise prouvaient que les plus grands 
critiques anciens , Zénodote , Aristarque , Cratès, 
avaient tenu pour suspects et même pour apo- 
cryphes des vers et des passages entiers de 

Y Iliade et de YOdyssée; elles attestaient le 
travail qui avait réuni et coordonné les membres 
épars et incohérents de chaque épopée. Ces té- 
moignages anciens, se joignant aux conjectures 
de Casaubon, de d'Aubignac, de Bentley, de 
Wood ( Wolf ne connut Vico que plus tard ), 
achevèrent de porter la conviction dans l'esprit 
du philologue allemand, qui publia, en 1795, ses 
célèbres Prolégomènes (5). Ses conclusions sont, 

(1) Vico!, Scienza nuova, 1. III, De la Découverte du 
véritable Homère. 

(*) Wood, An Essay on the original Genius and Wri- 
ting$ of Borner; Londres, lo-*°. 

(S) Sur r Origine des Langues. 

(*) Dissertation; dans les Mémoires de F Académie de 
Berlin, an. 1788-1789. 

(8) Prologomena ad Homerum, sive de operum home' 
ricorum prisca et genuina forma variisque mutatio- 
nibus ; Halle, 1785, in-8°. 

ÏSOUV. B10CR. GÊNER. — T. XXV. 



au fond, les mêmes que celles de d'Aubignac; 
mais l'étendue de son savoir, la vigueur, l'en- 
chaînement et la portée de ses arguments , met- 
tent entre lui et le critique français l'immense 
intervalle qui sépare une hypothèse féconde d'un 
paradoxe stérile. Les Prolégomènes furent le 
signal d'une controverse qui dure encore. On a 
très-peu ajouté depuis aux objections que Wolf 
proposa contre l'unité de composition des 
poèmes homériques , et ses arguments sont à 
peu près les seuls que nous aurons à examiner. 
La question de l'écriture est le centre de l'ar- 
gumentation de Wolf. Suivant l'opinion com- 
mune des anciens , l'écriture fut apportée aux 
Grecs par les Phéniciens. A quelle époque? On 
l'ignore. On ne sait pas mieux combien il fallut 
de temps pour approprier l'alphabet phénicien à 
la langue grecque de manière à ce qu'il pût servir 
à la transcription de poèmes aussi longs que 17- 
liade et YOdyssée. En supposant même l'alpha- 
bet grec constitué à une époque très-reculée, il 
fallait, pour l'appliquer à des œuvres étendues, 
des instruments de transcription qui manquaient 
aux Grecs, réduits, avant l'importation du pa- 
pyrus égyptien vers 630 avant J.-C, à écrire 
sur des tables de bois et de pierre, sur des feuilles 
de métal, et plus tard sur des peaux de chèvre 
et de mouton, matériaux peu commodes, qui de- 
vaient singulièrement limiter l'emploi de récri- 
ture. Ceux qui s'obstineraient à faire remonter 
au delà du huitième siècle l'usage de l'écriture 
auraient à répondre aux questions suivantes : 
1° La forme de la prose est inhérente à l'em- 
ploi de l'écriture. Pourquoi , si l'écriture était 
en usage dès le dixième siècle ( date pro- 
bable de la composition des poèmes homéri- 
ques), la prose ne s'est-elle formée que cinq 
siècles plus tard? 2° On emploie d'abord l'écri- 
ture à graver sur des monuments certains faits 
dont on veut conserver le souvenir. Pourquoi 
si l'écriture était en usage dès le dixième siècle, 
les plus anciennes inscriptions ne remontent- 
elles pas au delà du septième, et pourquoi 
sont-elles en caractères informes qui attestent 
l'enfance de l'art d'écrire? 3° L'écriture sert sur- 
tout aux transactions sociales. Pourquoi si elle 
existait, les Grecs me l'employèrentils pas à la 
transcription de leurs lois , et pourquoi faut-il 
descendre jusqu'au septième siècle ponr trouver 
une législation écrite (1)? Ces difficultés avaient 
déjà frappé les anciens, et les avaient conduits 
à nier l'usage de l'écriture du temps d'Homère. 
« Tardivement , dit Josèphe (2), les Grecs con- 
nurent la nature des lettres On prétend 

même qu'Homère ne laissa point ses.poémes 
par écrit, mais que, transmis par la mémoire, 
ils furent plus tard formés par l'assemblage de 
chants séparés, et que c'est pour cela qu'on y 
trouve tant de discordances. » Ce témoignage 

(l ) Les lois de Zaleucus, chez les Locricna Épfeéphyrlens, 
M 6 olymp., 664 avant J.-C. 
(f) Contra Jpionem, 1, f. 



85 

est fortement, corroboré par l'examen des deux 
poèmes. Nulle part H n'est question d'écriture. 
Un seul passage semble faire exception. Le poète, 
racontant l'histoire de Bellérophon, dit que Prœtus 
« l'envoya en Lycie, et lui remit des signes fu- 
nestes (o^ata Xuypoî), ayant gravé (ypà+aç) 
sur une tablette pliée ( èv ufvaxi 7rruxTcî> ) des 
choses mortelles, et lui ordonna de les montrer 
à son beau-père (1) ». On ne sait pas bien ce 
que veulent dire ces signes funestes que le poète 
appelle pins loin un signe mauvais (<rij(&<x *a- 
xâv); le sens des mots que nous avons traduits 
par tablette pliée n'est pas plus clair, et la si- 
gnification de Ypotyaç ( ayant inscrit ) est tout 
aussi incertaine. Ce serait forcer le texte contre 
toute vraisemblance que d'y voir une lettre 
écrite en caractères alphabétiques. Des signes 
convenus entre Prœtus et son beau-père suffi- 
saient pour indiquer à celui-ci que le porteur 
de la tablette devait être mis à mort. Si ce pas- 
sage prouve quelque chose, c'est contre l'exis- 
tence de l'écriture alphabétique du temps d'Ho- 
mère; car, comment ce poète, si précis dans ses 
descriptions , eût-il parié d'une manière si vague, 
si inintelligible, d'un art qu'il aurait connu? Il 
en est de même d'un autre passage souvent 
cité (2). Neuf héros grecs tirent au sort à qui 
combattra contre Hector. Chaque héros jette 
dans un casque son sort, sur lequel il a tracé 
un signe , non pas son nom ou la première 
lettre de son nom, ce qui eût été intelligible 
pour tous, mais un signe, que celui-là seul qui 
l'a tracé peut reconnaître : preuve naïve que 
les héros grecs ne savaient pas écrire. Pas plus 
dans Y Odyssée que dans V Iliade il n'est fait 
mention d'épitaphe, ni d'inscription. Au hui- 
tième livre de VOdyssée (3), Euryale, voulant 
humilier Ulysse, le compare au commandant 
d'un vaisseau marchand , qui a pour fonctions 
de se souvenir de la cargaison (çoprov hv^jmov). 
Si l'écriture eût existé , le moindre registre au- 
rait dispensé le conducteur du vaisseau de cet 
effort de mémoire. Enfin la versification même 
des deux poèmes atteste qu'ils ne furent pas 
primitivement écrits. La mesure de beaucoup 
de vers de Y Iliade et de VOdyssée ne s'ex- 
plique qu'à la condition d'admettre dans un très- 
grand nombre de mots une ftttre, le digamma, 
qui se prononçait incontestablement du temps 
d'Homère, mais qui n'a jamais figuré dans au- 
cun manuscrit de ce poète. « Si Homère écrivit 
ses poèmes, dit Porson, il serait intéressant de 
montrer comment cinquante ou soixante mille 
digammas purent disparaître ( dans les trans- 
criptions postérieures ), sans qu'on s'en aper- 
çût (4). ^ Pour rendre raison de ce phénomène, 



(l) Iliade, I. VI, 166, etc. 
(S) Iliade, 1. VII, 178, etc. 

(3) Odyssée, 1. VIII, 168, etc. 

(4) Porson, Examen de VEssay on tfye Greek Alphabet, 
bu R. PayneKnight, dans le Monthly Review, laurier et 
avril 179* 



HOMÈRE 36 

il fout absolument supposer entre la composi- 
tion de Y Iliade et de VOdyssée et leur première 
transcription un très-long intervalle durant le- 
quel le digamma tomba en désuétude chez les 
Ioniens, qui firent les premiers manuscrits 
d'Homère, et qui ne tinrent pas compte d'une 
lettre qu'ils ne prononçaient plus (1). 

En accordant à Wolf que les poèmes homéri- 
ques n'ont pas été primitivement écrits, faut-il 
conclure avec lui qu'ils ont été composés par por- 
tions détachées et sans vue d'ensemble? Les 
poètes privés de l'écriture doivent-ils se borner 
à des productions de courte étendue, telles que les 
romances espagnoles ou les chants populaires de 
la Servie ? En limitant ainsi l'essor de la poésie 
primitive, Wolf a méconnu les prodiges dont la 
mémoire est capable lorsque l'absence de l'art d'é- 
crire l'oblige à déployer toutes ses ressources (2). 
L'argument tiré de l'impossibilité absolue de 
composer et de conserver de mémoire des poè- 
mes aussi longs que Y Iliade et VOdyssée ne se 
peut soutenir, et doit faire place à une objection 
d'une plus grande portée. Sans le secours de 
l'écriture, la récitation est le seul moyen de pu- 
blier un poème. Les aèdes et les rapsodes ré- 
citaient leurs vers dans les banquets, dans les 
fêtes, où ils ne pouvaient faire entendre que des 
chants d'une courte étendue. Pourquoi au- 
raient-ils composé d'ensemble un poème dont ils 
ne pouvaient réciter que des portions détachées, 
comme un mécanicien qui monterait à grand'peine 
une machine dont on ne pourrait faire usage qu'à 
la condition de la démonter. Il faut le reconnaî- 
tre, si V Iliade et l'Odyssée ne pouvaient pas être 
révélées au public dans leur ensemble, Homère 
n'a pu avoir l'idée de cet ensemble, et Wolf a 
eu raison de nier l'unité de composition des poè- 
mes homériques; mais cette nouvelle impossi- 
bilité est aussi peu démontrée que la précédente. 
Si des banquets, des fêtes particulières ne suffi- 
saient pas à l'audition de tout un poème, il 
existait des fêtes nationales, des luttes poétiques 
où se pressaient des milliers d'auditeurs animés 
d'une infatigable curiosité. Suivant la remarque 
d'Ot. Mùller (3), « les Grecs écoutaient plus tard 
dans une seule fête environ neuf tragédies, trois 
drames satiriques, et trois comédies, sans penser 
qu'il vaudrait mieux répartir cette puissance in- 
tellectuelle entre plusieurs journées; pourquoi 
les Grecs du temps d'Homère n'auraient-ils pas 
pu entendre dans un seul jour Ylliade ou l'G- 
dyssée, moins longues, après tout, que trois tétra- 

(1) Voy. Gieae, Veber den jEolisehen Dialekt, aect. 
14, p. 160. 

(S) Wolf lui-même a constaté cette puissance de la 
mémoire : « stupes fortasse ad tantam capacltatem mé- 
morise, quae totum Homerum coiuplectt potuerlt. Mlbi 
vero Id etiam paruin videtur, mulloque plura nonnun- 
quara bonos rapsodos tenu Use susplcor. » ( Proiegom, 
p. CI.) César nous apprend (B. 6\,VI, 13) qu'à une époque 
où le* Gaulois connaissaient récriture, leurs poCmes conti- 
nuaient d'être confiés exclusivement a la mémoire des 
druides. 

(S) History of Literature of ancien* Greecef. •*• 



37 HOMÈRE 

logies tragiques et tarif comédies ? » L'attention, 
comme la mémoire» a dû atteindre dans certai- 
nes circonstances un degré dont nous n'avons 
plus idée aujourd'hui. Les grandes fêtes populai- 
res n'étaient pas les seules occasions qu'eut le 
poète de faire connaître un poème dans son en- 
semble : il le récitait aux banquets des princes, 
et la récitation pouvait alors être partagée en 
plusieurs journées, puisque les mêmes auditeurs 
y assistaient. L'Arioste dans son Orlando se re- 
présente lisant ses vers à une réunion de sei- 
gneurs. A certains endroits de son récit, il s'ar- 
rête, et remet la suite à un autre jour. Cet arti- 
fice du poète italien était une réalité pour les 
rapsodes aussi bien que pour les trouvères aux- 
quels l'Arioste l'emprunte. Rien ne s'opposant à 
ce que de longs poèmes fussent récités dans leur 
ensemble, on comprend qu'un génie sublime ait 
eu l'idée de substituer aux chants courts et iso- 
lés des aèdes une composition vaste et suivie. 
Ainsi tombent les objections tirées de l'ignorance 
de récriture. Aucune preuve extérieure n'existe 
contre l'unité des poèmes homériques, et c'est 
en définitive à ces poèmes mêmes qu'il faut de- 
mander s'ils ont été composés suivant une vue 
d'ensemble, où sllsne sont qu'un assemblage de 
chants détachés. 

Dans cette seconde partie de la discussion, 
Wolf s'est particulièrement attaché à Y Iliade, 
où l'unité est en effet moins sensible. Nous pen- 
sons avec M. Grote que le procédé inverse est 
plus légitime. Puisqu'il s'agit de démontrer que, 
dès le temps d'Homère, on a pu composer de 
longs poèmes , il convient d'examiner d'abord 
YOdyssée dont l'unité est plus manifeste. Un 
plan conçu d'avance a présidé à l'ensemble du 
poème. Un seul personnage dont l'attention ne 
s'écarte jamais en est le héros. Un seul fait es- 
sentiel en est le sujet : posé dès le début, pour- 
suivi à travers les épisodes, il n'a son dénoû- 
ment qu'à la fin du poème. Dans ce plan si ar- 
tistement tracé on n'a relevé qu'une contradic- 
tion. Le voyage de Télémaque ne concorde pas 
avec celui d'Ulysse, à moins qu'on ne suppose 
que le jeune prince, malgré son désir de retour- 
ner à Ithaque et son refus de s'arrêter à Sparte, 
passe trente jours dans le palais de Ménélas. Il 
y a là un oubli de la part de l'auteur de YOdys- 
sée ; mais cette inadvertance, qui s'explique si 
facilement parla nature de la poésie populaire (1), 
n'autorisait nullement Wolf, W. Millier et 
Thiersch à regarder les quatre premiers livres de 
YOdyssée et le commencement du cinquième 
comme un poème séparé. Les aventures de Té- 
lémaque intéressent surtout par leur rapport 
avec celles d'Ulysse ; elles concourent à un en- 
semble dont elles sont une partie essentielle. Les 
voyages d'Ulysse pouvaient donner lieu à des 
chants séparés ; mais tels que le poète les ra- 

(1) Fby. Nltzsch,f>ton und Gang der Odyssée p. xuii, 
dut le second volume de son Commentaire sur l'Odys- 
sée, et Payne Knlght, Prolegom., c, xxin. 



M 



conte Us forment les parties constitutives d'une 
action où tout s'enchaîne et a sa place marquée 
dans un plan préconçu. L'unité évidente de YOdys- 
séemA une présomption en faveur del'unité moins 
apparente de Y Iliade, Ce poème a pour sujet le 
ressentimentd'Achille, qui, outragé par Agaroem- 
non, cesse de prendre part à la guerre., et aban- 
donne les Grecs à leurs propres forces. Ceux-ci, 
après des alternatives de victoire et de défaite , 
vont être jetés à la mer lorsque Achille consent 
à envoyer à leur secours son ami Patrocle, qui 
succombe dans un combat contre Hector. Achille, 
chez qui l'ardeur de venger ton ami domine le 
ressentiment, rentre dans la lutte et tue Hector. 
Ainsi présentée, dans une vue sommaire, Y Iliade 
offre bien un plan d'ensemble. Tous les grands 
incidents se rattachent l'un à l'autre, et tous 
sortent du fait essentiel qui est le sujet du poème. 
Achille quitte le champ de bataille parce qu'il est 
irrité contre Agamemnon ; les Grecs sont vain- 
cus parce que Achille s'est retiré; Patrocle inter- 
vient parce qu'ils sont réduits aux dernières 
extrémités , et il meurt pour les défendre; Achille 
rentre dans la lutte pour venger un ami , et il 
le venge en tuant Hector. Le poème finit lorsque 
l'événement capital qui lui a servi de point de 
départ a produit tous ses effets , c'est-à-dire 
qu'il finit juste au moment où l'art le plus 
consommé en aurait marqué le dénoùment. 11 
est bien difficile de prétendre qu'un pareil en- 
semble a été formé après coup avec des éléments 
qui n'avaient pas été primitivement destinés à 
ce but. Wolf lui-même ne s'y résigne qu'avec 
beaucoup de peine, et il est au fond bien moins 
aftirmatif que d'Aubignac et que Vico (1). Mais 
enfin, il cède, dit-il à un examen plus appro- 
fondi du poème et aux témoignages des anciens. 
On ne peut nier, en effet, qu'un examen attentif 
ne soit défavorable à l'unité de composition de 
Y Iliade. Outre des contradictions de détail assez 
nombreuses, certaines parties semblent avoir été 
ajoutées après coup à la construction primitive. 
Les six livres compris entre le I er et le "VIII e , loin 
de concourir au but du poème, le font oublier 
ou le contredisent. Qu'Agamemnon ait attendu 
la dixième année de la guerre pour passer la 
revue de ses troupes et pour les mettre en or- 
dre, le fait, quoique étrange, ne répugne pas aux 

(1) Rien n'est plus significatif et pins éloquent que ce 
beau passage où Wolf s'étonne et s'Irrite ae sa propre 
audace ;« Nune qooque usu evenit mthi nonunqnam. 
quod non dabltoeventuriim Item multls esse, ut, quotlca 
abducto ab blstoricls arguments anlmo , redeo ad contl- 
neotem Ho merl lectlonem et Interpretatlonem,... atquc 
Ita penltus immergor lu Ulum yelutl prono et llquldo alveo 
decurrentem tenorera actionum et narraUouain ; quotlen 
animadverto ac reputo mecum, quam in unlversum ses- 
ttmantl anus hls car minibus lnsit color, aut certe quam 
egregle carmlnl utriqae suus color constet, quam apte 
unique tempora rebns, res temporibus, allquot locl adeo 
slbl aliudentes, congruant et constent, quam denlquc 
œqaabiliter In primartts pereonis eadem linéaments 
serventur et Ingenlorum et antroorum : vlx roihi quU- 
qnam Irascl et succensere gratins poterlt, quam Ipae fa- 
do mini, m {Pref. de ledit, de VIlj Halle, 1794, p. xxil 



39 

procédés de la poésie populaire ; mais on com- 
prend moins que le combat singulier entre Paris 
et Ménélas n'ait lieu aussi qu'après neuf ans. 
Hélène, du haut des remparts, signale les princi- 
paux chefs grecs à Priam, qui depuis neuf ans 
les voit combattre et qui démit les connaître; 
elle s'inquiète de ne pas voir ses frères, et se 
demande s'ils sont morts, ou s'ils se cachent à 
cause d'elle; depuis neuf ans que dure la guerre, 
elle aurait pu s'en informer. Au premier livre, 
Zeus promet de venger Achille; il ne tient pas 
sa promesse dans léss livres suivants jusqu'au 
huitième, et au quatrième il l'a si bien oubliée, 
qu'il règle sa conduite d'après des considérations 
toutes différentes. Le neuvième chant est rem- 
pli par l'ambassade envoyée à Achille, fait ca- 
pital , complètement oublié dès le onzième. Le 
dixième livre, tout entier épisodique, avait for* 
tement éveillé les soupçons des anciens (1). A 
partir du onzième jusqu'au vingt-deuxième in- 
clusivement, on ne sort plus du sujet; les deux 
derniers chants s'y rattachent aussi sans en être 
une suite nécessaire. Ainsi huit ou neuf chants 
ne concourent pas à l'ensemble du poème. Un 
pareil résultat est tout à fait inexplicable si l'on 
suppose que Y Iliade a été composée et écrite 
dans les mêmes conditions que d'autres poèmes, 
tels que V Enéide ou Le Paradis perdu. Il fout 
absolument passer de cette opinion à une autre 
manière de concevoir la composition de Y Iliade. 
Les diverses hypothèses proposées à ce sujet 
peuvent se réduire à trois. Nous examinerons 
d'abord la plus ancienne, celle qui a été adoptée 
par d'Aubignac, Bentley, Vico; celle à laquelle 
Wolf a attaché son nom, 1 et que William Mûl- 
ler (2), B. Thiersch (3) et Lachmann (4) ont 
présentée sous la forme la plus précise et la plus 
rigoureuse. 

Wolf et son école supposent que les poèmes 
homériques sont un assemblage de chants exé- 
cutés d'abord séparément et sans aucune vue 
d'ensemble. Lachmann a décomposé Y Iliade en 
dix-huit pièces qui ne sont peut-être pas, dit-il, 
d'autant de poètes différents, mais qui forment 
en tous cas autant de poèmes distincts et indé- 
pendants. M. Grotefend a proposé une autre 
combinaison. Mais tous les critiques de cette 
école prétendent que Y Iliade et Y Odyssée (5) 



(l)« Les anciens, dit Ensuite, prétendent qne cette 
rapsodle lot composée par Homère comme nn poème 
séparé, qu'elle ne faisait pas partie de l'Iliade, et qne 
Plslstrate l'y Introduisit. » Bust., p. 78S. 

(S) W. Millier, Homerische Forschule , seconde édi- 
tion; Leipzig, 1886, avec une introduction et des notes par 
Baomgarten Cruslus. 

(5) Thiersch, Ueber dos Seitalter und Faterland de* 
Borner; Halbersladt, 1SU. 

(4) Uchmann, Fermeté Betrachtunçen ûber die Iîias; 
dans tes Mémoires de V Académie de Berlin, 1841, sect. 
xxvi, xxvin, xxix. 

(6) Wolf cependant reconnaît l'unité de l'Odyssée : 
« Odyssea, cujus admirabllis summa et compages pro prsc- 
clarlssuno mooumento grsscl Ingenll habenda est. » (Pro- 
leçom., p. exvn-icxx). Mais 11 prétend qu'elle n'est pas 
de l'époque d'Homère. 



HOMÈRE 40 

sont une réunion de petits poèmes originairement 
distincts, rapprochés par la similitude des sujets 
et de l'inspiration, fondus par le travail de plu- 
sieurs générations de rapsodes , et enfin consti- 
tués définitivement par la compilation des Pisis- 
tratides. Que la poésie populaire et primitive pro- 
cède par chants détachés, c'est un fait dont on 
trouve des exemples dans des littératures plus 
rapprochées de nous que la littérature grecque. 
La vie et les exploits du Cid ont été chez les Cas- 
tillans l'objet de chants séparés ou romances (1); 
Marco, le héros servien, a été célébré dans dea 
ballades ou chants de courte étendue (2). H est 
possible et même probable qu'il en rat de même 
pour Achille et pour Ulysse, et que leurs ex- 
ploits devinrent l'objet de chants populaires ; 
mais il ne s'en suit pas que Y Iliade et Y Odyssée 
soient un recueil de ces chants populaires. 
Chacun de ces poèmes est le développement d'un 
seul sujet, d'un point central qui s'épanouit en 
une vaste circonférence. Cette unité de compo- 
sition, évidente dans Y Odyssée , reconnaissable 
même dans Ylliade, malgré les interpolations, 
ne saurait être le résultat d'une simple juxta- 
position de pièces séparées. Nous pensons que 
Wolf a beaucoup exagéré l'importance du travail 
des Pisistratides ; mais leur œuvre, quelle qu'en 
soit la valeur, ne fut en définitive qu'un arran- 
gement , et il est impossible qu'un simple arran- 
gement de chants séparés ait produit la plus 
admirable des formes littéraires, celle que les 
plus grands poètes des âges suivants ont imitée 
sans jamais l'égaler. Que l'on fosse par la pensée 
sur les Romances du Cid ou sur les Ballades de 
Marco le travail attribué aux Pisistratides , et 
l'on aura une série d'événements qui se succé- 
deront sans nécessité logique, et qui embrasse- 
ront la vie entière du héros; on n'aura pas le 
développement suivi, au milieu d'une grande di- 
versité d'épisodes, d'un fait unique, tel que la 
colère d'Achille, ou le retour d'Ulysse dans son 
palais envahi par les prétendants. Pour trans- 
former les chants populaires de la Grèce en 
épopée homérique » il ne fallait pas moins qu'un , 
très-grand poète; les Pisistratides y auraient 
perdu leur temps, ou plutôt n'en auraient pas 
même eu l'idée. Nous croyons donc que l'hypo- 
thèse qui nie l'unité de composition de Ylliade 
et de V Odyssée soulève beaucoup de difficultés et 
n'en résout aucune. 

God. Hermanh (3) a proposé une secondé hy- 
pothèse, qui selon lui explique à la fois, dans les 
poèmes homériques, l'unité de l'ensemble et les 
contradictions de détails. Il suppose l'existence 
de deux poèmes primitifs, une Iliade et une 



(1) Voê. Le Romancero , édit de Depping et Galiano; 
Leipzig, 1844. 

(s) Wuk Stephanowitscb, Danitza, ou Chante popu- 
laires des Serviens, traduit en français par M" Bllsa 
Volart; Paris, 1884, 1 vol. 1d-8«. 

(8) God. Hermann, Prmjf. ad Odysseam; Lelpiig, 1888, 
et sa dissertation Ueber Homer und Sappho, dans ses 
Opwcula, voLV, p.74. 



41 

Odyssée dont Homère ou tout autre poète était 
l'auteur et qui n'avaient qu'une médiocre étendue. 
Cette Iliade et cette Odyssée primitives furent 
successivement développées par (une série de 
poètes qui agrandirent l'œuvre de leurs prédé- 
cesseurs , jusqu'à ce qu'elle formât un ensemble 
capable de satisfaire la curiosité des auditeurs. 
Cette hypothèse trouve, comme la première, des 
précédents dans la poésie épique des différents 
peuples. Plusieurs épopées françaises du moyen 
âge sont, dans leur forme actuelle, le développe- 
ment de poèmes primitifs assez courts. Mais là 
encore l'exemple détruit la supposition qu'il 
devrait étayer. Dans les œuvres ainsi développées 
il y a entre le chant primitif et les additions suc- 
cessives une disproportion choquante que l'on 
ne trouve point dans les poèmes homériques, 
dont l'ensemble est empreint du même carac- 
tère et du même génie. Deux jets primitifs indé- 
finiment étendus n'auraient pas conservé cette 
vigueur, cette harmonie. 

Les difficultés de l'hypothèse d'Hermann n'ont 
pas échappé à M. Grote, qui en a proposé une 
nouvelle. 11 laisse de côté YOdyssée, qu'il regarde 
comme l'ouvrage d'un seul auteur. Dans ï Iliade 
il trouve deux poèmes : une Achilléide, des- 
tinée à célébrer la colère d'Achille, et à laquelle 
appartiennent le 1 er chant, le VIII e et tous les 
autres depuis le XI e jusqu'au XXII e inclusive- 
ment. Les deux derniers le XXIII e et, le XXIV e 
sont une addition qui ne sort pas du sujet; mais 
les chants du II* au VII e inclusivement et le X e ap- 
partiennent à un autre sujet : ils se rapportent 
plus directement à la lutte contre Ilion, et for- 
ment une Iliade proprement dite. Le IX e livre 
est une addition faite à YAchilléide et une ad- 
dition malheureuse ; car elle est en contradiction 
avec le reste du poème. Cette ingénieuse hypo- 
thèse rend bien compte des incohérences qoe 
présente Ylliade, mais elle est elle-même su- 
jette à de graves objections. Deux poèmes juxta- 
posés offriraient dans le style, dans les caractères 
des personnages, dans les événements, des dis- 
cordances bien plus fortes que celles qui nous 
frappent dans les divers chants de Y Iliade, où 
les faits, sans doute, ne concordent pas toujours 
entre eux, mais où les caractères sont admira- 
blement suivis, et dont le style offre une par- 
faite unité. Si Ton réalisait la supposition de 
M. Grote, si l'on retranchait de Y Iliade ou 
Achilléide tout ce qui selon lui n'en faisait pas 
primitivement partie, on aurait un poème plus 
régulier peut-être, mais infiniment moins inté- 
ressant. L'admirable caractère d'Hector ne trou- 
verait plus à se développer dans les belles scènes 
avec Paris, avec AndromaqueetHécube. Achille 
lui-même y perdrait. Les exploits de Diomède, 
d'Ulysse, d'Ajax rehaussent les siens , puisque 
en définitive tous ces héros, malgré leur cou- 
rage, succombent à une tâche que seul il peut 
accomplir. L'attention ne se détourne un mo- 
ment d'Achille que pour se reporter sur lui avec 



HOMÈRE 42 

un redoublement d'intensité. D'ailleurs on peut 
affirmer qu'il y avait dans le cœur du poète une 
sorte de combat entre ses propres sentiments 
et les nécessités de son sujet Forcé de montrer 
les Grecs vaincus, il retarde autant que possible 
l'événement inévitable, et il sème d'exploits écla- 
tants la route qui conduit à la défaite. Cette 
inspiration patriotique, qui répondait pleinement 
aux sentiments des auditeurs, fait comprendre 
que le chantre d'Achille ait longuement développé 
les combats des autres héros, et qu'il ait laissé 
les épisodes empiéter sur l'action principale. 
Quant aux incohérences, elles s'expliquent par 
les circonstances de la composition et de la trans- 
mission de Y Iliade. Des chants très-nombreux, 
reproduisant sous une forme rhythmique les 
légendes populaires et en créant de nouvelles, 
avaient cours chez les Grecs, et formaient toute 
l'histoire d'un peuple qui ne connaissait pas en- 
core l'écriture. Un poète choisit une de ces lé- 
gendes et la développa en y rattachant une foule 
de personnages et d'événements célébrés dans 
d'autres légendes. Cette idée neuve et féconde, 
conçue et réalisée par un puissant génie, donna 
naissance à la plus grande des formes littéraires. 
Les Grecs eurent des poèmes oui par l'ensemble 
se détachaient des chants populaires et qui par 
les détails y touchaient de toutes parts. Si pendant 
des siècles de transmission orale les poèmes en 
rapport perpétuel avec les chants populaires leur 
firent de fréquents emprunts, si Y Iliade surtout 
reçut des additions qui troublèrent la liaison du 
récit, l'ensemble resta intact. Une preuve très- 
forte que bien avant les Pisistratides , Y Iliade et 
YOdyssée embrassaient les mêmes sujets qu'au- 
jourd'hui et formaient déjà un tout complet, ar- 
rêté, c'est que les poètes cycliques qui versifiè- 
rent le cercle entier des légendes de la guerre 
de Troie ne touchèrent jamais aux faits célébrés 
dans les poèmes homériques : réserve d'autant 
plus significative qu'ils n'eurent pas les mêmes 
scrupules à l'égard les uns des autres. Wolf, il 
est vrai, a cru trouver dans les poètes cycliques 
mêmes un argument contre l'unité de compo- 
sition de Ylliade et de YOdyssée. Si l'unité gé- 
nérale d'action que l'on remarque aujourd'hui 
dans ces deux poèmes avait existé dès le temps 
des cycliques, pourquoi, dit-il, nel'auraient*ilspas 
imitée? Mais d'abord les poèmes cycliques sont 
perdus , et nous ne pouvons pas vérifier s'ils 
différaient de Ylliade et de YOdyssée autant que 
le suppose Wolf; puis, si les poètes cycliques 
n'observèrent pas exactement la forme homé- 
rique, c'est que, venus longtemps après Homère 
et n'ayant pas hérité de son génie, ils ne purent 
pas accepter la partie la plus glorieuse, mais la'plus 
difficile de son héritage. Les plus nobles formes 
litténires s'altèrent, et toujours l'épopée dégénère 
en chronique versifiée. 

Ainsi, il n'existe point d'argument décisif contre 
l'unité de composition de Ylliade et de YO- 
dyssée. L'opinion qui attribue chacun de ces 



48 



HOMÈRE 



44 



poèmes à un seul auteur, sauf les mterpolations 
plus ou moins nombreuses, est la plus vraisem- 
blable, la seule qui résiste à la discussion. Mais 
les deux poèmes sont-ils du même auteur? Plu- 
sieurs anciens l'ont nié par des motifs bien futiles ; 
les modernes, qui ont adopté cette manière de voir, 
ont trouvé des raisons plus solides ou du moins 
plus spécieuses. L'état social parait plus avancé, 
plus raffiné dans V Iliade que dans YOdyssée : 
différence qu'explique suffisamment la diversité 
des sujets. Les magnifiques palais de Ménélas et 
d'Àlcinous , les fêtes pacifiques des Phéaciens 
ne pouvaient trouver place dans le camp des 
Grecs devant Troie. On remarque, il est vrai, 
une différence plus essentielle dans les notions 
relatives aux divinités. Dans Y Iliade les hommes 
sont meilleurs que les dieux, dans Y Odyssée tes 
dieux sont meilleurs que les hommes. Dans 1*0- 
dyssée aucun mortel n'ose résister à un dieu ; 
encore moins ose-t-il l'attaquer ou le blesser. 
L'Olympe ne retentit plus des querelles des 
dieux et des déesses. Athéné consulte humble- 
ment la volonté de Zeus, et craint d'offenser Po* 
séidon, son oncle, en venant au secours d'Ulysse. 
Un dieu n'inflige un châtiment ou n'accorde 
sa protection que dans un but moral , et non 
par caprice. Dans Y Iliade, Zeus envoie "Oveipoç 
( Le Songe) pour tromper Agamemnon. Athéné, 
après avoir pris conseil des dieux, pousse Pan- 
darus à la trahison et à l'assassinat. Paris, viola- 
teur des lois de l'hospitalité, n'est pas puni de 
son crime, tandis que dans Y Odyssée les dieux 
châtient les mortels qui ne respectent pas les 
lois de Zeus hospitalier. Les dieux de Y Iliade 
vivent sur le mont Olympe, ceux de Y Odyssée 
habitent le ciel vide, bien au-dessus àe& régions 
terrestres. Dans le premier de ces poèmes , ils 
sont visibles à chaque mortel, excepté quand ils 
s'enveloppent eux-mêmes d'un nuage, tandis que 
dans le second ils sont habituellement invi- 
sibles» excepté quand ils revêtent la forme hu- 
maine. En somme, selon la remarque de Benja- 
min Constant, H y a plus de mythologie dans 17- 
liade et plus de religion dans Y Odyssée (I). Si 
à ces différences générales on ajoute d'assez 
fortes divergences de détails (S) , on reconnaîtra 
que les deux poèmes ne sont pas contemporains, 
que Y Odyssée est postérieure à Y Iliade et 
qu'elle en est séparée par un intervalle assez 
long. Cet intervalle est-il tel qu'il n'ait pu être 
rempli par la vie d'un seul homme? Noos ne le 
croyons pas. A coté des ffifférences il faut si- 
gnaler les analogies, qui ne sont pas moins no- 
tables. La religion est au fond la même dans les 
deux poèmes et bien distincte de la religion d'Hé- 



(l) Benjamin Constant, fie la Jtettfton, t. III. 

(i) Ma est te messagère des dteoi 4ms l7tta<f#_tHer- 
mes est lenr messager dans l'Odyssée ; Éole, dam VO- 
dyuée, est le dispensateur et le maître des Vents, qni 
dans Mimée sont des divinités Indépendantes; au 
huitième fcfrre de rod§me Aphrodite est ta femme 
d'Héptestos, «ai dans V Iliade est marié à l'une des 
Grâces. 



siode. Les con n aissa nc es géographiques (l) sont 
aussi incertaines et presque aussi limitées dans 

Y Odyssée que dans Y Iliade; les arts ne sont pas 
plus avancés (2). Le cuivre (ou le bronze) est 
toujours la matière dont se fabriquent les armes 
défensives et offensives. L'emploi du fer pour 
cet usage ne commence qu'avec Hésiode. Bien 
au-dessus de ces analogies s'élève la similitude 
générale des idées, du style, du génie, qui em- 
pêchera toujours de rapporter les deux poèmes 
à des siècles et à des pays différents. Mais que 
dans le même siècle et dans le même pays aient 
vécu deux poètes d'un génie incomparable, telle- 
ment semblables qu'on les a confondus, so« 
périeurs à tous les antres et égaux entre eux, 
c'est là un fait si étrange que pour l'admettre il 
faudrait qu'il n'y eût aucun autre moyen d'ex- 
pliquer les disparates qui existent entre Y Iliade 
et Y Odyssée. Or, nous n'en sommes pas réduits 
à cette unique hypothèse. Longin (3), pour rendre 
compte de la différence des deux poèmes, pré- 
tend que Y Iliade fut composée par Homère à 
la fleur de l'âge, et Y Odyssée par le même poète, 
que la vieillesse avait refroidi. « Homère, dans 

Y Odyssée t peut être comparé, dit-il, au soleil 
couchant qui, sans avoir la même force, garde la 
même grandeur. » Vico s'est moqué de cette 
affirmation que Longin aurait dû donner comme 
une simple supposition. A ce titre elle a du 
prix, et si on la complète par certaines notions 
accessoires, elle peut expliquer les disparates 
des deux épopées. Homère jeune, s'ouvrant une 
carrière où nul ne l'avait précédé, s'attacha plus 
étroitement aux anciennes traditions, aux chants 
populaires qui représentaient les Grecs dans 
toute la rudesse des temps héroïques. Homère 
vieux, plus sûr de son génie, plus maître de ses 
inspirations, substitua aux idées violentes et 
grossières des anciens temps les idées plus éle- 
vées , plus pacifiques que lui suggéraient son 
propre génie et la vue d'une société où le com- 
merce avait déjà développé le bien-être et la ri- 
chesse. Ce n'est là qu'une hypothèse sans doute, 
mais plus vraisemblable que la supposition em- 
pruntée par des critiques modernes aux chari- 
zontes (4) de l'antiquité. 

(1) Ln géographie d'Homère est peu étendue et em- 
preinte d'un caractère fabuleux. La plupart des régions 
visitées par Ulysse soot imaginaires, et on a Men vaine- 
ment essayé de les identifier avec des paysrérts. Le potut 
connaissait la Grèce continentale et les Iles grecque» 
situées à l'ouest do continent, la Crète et les principales 
Iles de la mer Egée, la Tnrace, la Troade, PHeitespont et 
l'Asie Mineure , entre la Paphîngonle an nnrd et la Lyctn 
an s«d ; M ne mentionne jamais te PnnUEuxln ; Il con- 
naissait aussi, mais vaguement, la Libye, l'Egypte, la Pné- 
nicle. Les Slkèie» et ta Sicante sont nommés dans TO- 
dyssée; mais rien ne prouve une le pott* connut ritaste. 
Foy. Vaicker, HemerUche Geo§r«pAie % ch. ixz, sect. 
5S-63 (ouvrage savant, mais qui manque de critique); 
Dkert, HomerUeàe Geooraphie, et surtout Vois, yiUe 
rreHkunde, dans ses Krittehe Btdtter; Stittlgnrd, fa», 
I. Il» p. SU. 

(S) Munn, Minéralogie homérique. 

(8) Longin, De Subi., IX, 18. 



45 

Les résultats de eette longue controverse sur 
la nature des poèmes homériques, en établissant 
l'unité de composition de V Iliade et de YOdyt- 
sée et l'nnité d'auteur pour les deux poèmes, 
nous fournissent les moyens de chercher à 
quelle époque a vécu cet auteur. Les deux 
grandes épopées reconquises par une première 
discussion serviront de point de départ à la se- 
conde. 

L' Iliade et V Odyssée sont toute la poésie et 
toute Thistoire d'une des plus longues et des 
plus mémorables périodes de la Grèce antique. 
En dehors des poèmes d'Homère nous ne pos- 
sédons sur l'âge héroïque qu'un amas de légendes 
et de traditions, qu'on a essayé bien vainement 
de dépouiller de leur caractère fabuleux et poé- 
tique, pour les ramener à la réalité. La période 
où vécut Homère n'a donc point d'histoire, et 
doit rester à jamais plongée dans un crépuscule, 
qui permet tout au plus de distinguer quelques 
grandes masses d'événements, et seulement dans 
leur forme générale. Ainsi, en partant du huitième 
siècle avant J.-C, on les Grecs placent les dou- 
teux commencements de leur chronologie (1), 
et en remontant vers des temps plus anciens, on 
trouve que quatre ou cinq siècles avant l'ère des 
Olympiades, les Achéens, établis principalement 
dans le Péloponnèse et ayant à leur tète la 
grande famille des Pélopides, occupaient la pre- 
mière place parmi les tribus grecques, et exer- 
çaient sur elles une sorte de suzeraineté. On 
▼oit aussi que les Achéens engagèrent une lutte 
contre des peuples asiatiques, dont le centre 
était la ville dllion, qu'ils sortirent de la lutte 
victorieux et épuisés, que des dissensions intes- 
tines dont les Pélopides furent les plus célè- 
bres victimes désorganisèrent la confédération 
acbéenne déjà bien affaiblie ; que les peuplades 
vassales s'émancipèrent; que d'autres peuplades, 
grecques d'origine, mais restées plus près de la 
barbarie dans les montagnes du nord-ouest, en- 
vahirent successivement la Thessalie, la Béotie 
et le Péloponnèse. Cette période d'invasion, qui 
commença vers la fin du douzième siècle et s'a- 
cheva au neuvième, eut pour résultat de substi- 
tuer les Hellènes aux Achéens comme race domi- 
nante, et de remplacer par une civilisation et une 
religion à certains égards très-différentes la civili- 
sation et la religion que représentent les poèmes 
homériques. V Iliade et Y Odyssée appartiennent 

YOifsiéêk deux auteors «fièrent» s 'appelaient les chvrU 
zonte» ( oï x^pitovreO, *** aéparateBrs. Voy. Grauert, 
Veber die homerlschen Choriwnten; dans le Rheinisch- 
Muséum, l«7. P. m, p. m. 

(I) Podf les deux premiers stèetea qui totteot Père de» 
Olympiades, 776 avant J,-C, la chronologie grecque est 
encore très-incertaine; pour ceux qui précèdent, elle 
n'existe pas. Ce que ton appelle de ce nom, ee sont dea 
dates de convention destinées à servir de points de repère 
dans des espaces illtmttés.Entre les divers système* ebroBO- 
logiqaes aussi pea fondés les uns que les antres, nous 
adoptons celui d'Ératosthéne : prise de Troie, lias avant 
J.-C; retenr des Iféraettdes (ou Invasion dortenae;, 
no* ; émtfrattM ienienno» M* s fondation de Cm»,, 
fttt; fondation de Sroyrne, 1015. 



HOMÈRE 46 

certainement à cette période intermédiaire. Con- 
sacrées à la gloire et au triomphe des Achéens , 
mais pleines du récit de leurs malheurs et du 
vague pressentiment de malheurs plus grands 
encore, elles forent composées lorsque la confé- 
dération achéenne en décadence, et près d'une 
ruine complète, s'attachait à la mémoire de sa 
grandeur passée, et lorsque les souvenirs de la 
guerre de Troie s'étalent déjà transformés en 
poésie populaire, ce qui n'a guère pu avoir lieu 
avant le onzième siècle. D'un autre côté les deux 
épopées ne peuvent pas avoir été composées 
après le neuvième siècle ; car, dès le huitième, 
Homère se serait trouvé dans un état de choses 
si différent de celui qu'il a chanté que, pour 
peindre une époque complètement disparue, il 
aurait dû faire un effort archéologique tout à fait 
incompatible avec le caractère naïf et spontané 
de sa poésie. Cest donc entre 1 100 et 800, et plus 
près de la première date que de la seconde, qu'il 
faut placer l'existence d'Homère. 

Si Y Iliade et Y Odyssée, interrogées avec soin 
sur l'époque où vivait leur auteur, ne nous don- 
nent qu'une vague approximation , elles nous 
fournissent sur sa nationalité des détails nom- 
breux mais contradictoires. Beaucoup de ces 
détails feraient croire que le poète était Euro- 
péen. Sa mythologie s'est évidemment formée 
en Europe. Elle est l'œuvre des aèdes thraces 
qui vivaient soit en thessalie autour du mont 
Olympe, soit en Béotie près de l'Hélicon, et qui 
coordonnèrent les diverses légendes locales en 
un vaste système mythologique. Il semble que 
Homère asiatique aurait choisi pour la demeure 
de ses dieux quelque montagne de l'Asie Mi- 
neure, rida et le Gargaros plutôt que l'Olympe 
thessalien, et qu'il n'aurait pas comparé Nau- 
sicaa à Artémis marchant sur la Taygète ou l'É- 
rymanthe. En général lorsque Homère parle des 
localités d'Europe , il est plus précis , plus mi- 
nutieusement exact que pour les localités d'Asie. 
Cependant on peut, en faveur de l'origine asia- 
tique des poèmes homériques faire valoir la tra- 
dition très-répandue qui place en Asie la nais- 
sance d'Homère, et la langue de ses poèmes, qui 
est l'ionien, c'est-à-dire un dialecte d'Asie. Si on 
veut préciser davantage la question de nationa- 
lité, et chercher à quelle tribu grecque apparte- 
nait Homère, on rencontre les mêmes contradic- 
tions. Dans les deux poèmes les premiers rôles 
sont donnés à des Éoliens, à Achille, à Ulysse , la 
plus grande partie des légendes est d'origine 
achéo-éolienne, et beaucoup d'usages particuliers 
aux Éoliens y sont rapportés -, mais il serait diffi- 
cile de contester l'origine ionienne, peut-être 
même athénienne de la légende d'Hélène. D'au- 
tres faits plus concluants attestent que, se- 
lon l'expression d'Aristarque, un cœur ionien 
battait dans la poitrine d'Homère. Partout le 
poète montre pour les divinités ioniennes, 
Athéné, Poséidon, un respect significatif. Les 
institutions politiques auxquelles il fait allusion 



47 



HOMÈRE 



48 



sont ioniennes, tandis qu'il ne mentionne jamais 
les autres institutions que les Doriens répan- 
dirent parmi les Grecs. Si ses connaissances géo- 
graphiques en ce qui concerne l'Asie sont géné- 
ralement vagues, il parle avec une singulière pré- 
cision des pays situés au nord de l'Ionie et dans 
le voisinage de la Maeonie. Suivant la remarque 
d'Ot. Mùller, « la prairie d'Asius, le fleuve du 
Caystre avec ses cygnes, le lac Gygès , le mont 
Tmolus avec le rocher de Sipyle, d'où coulait 
rAchéloiis, semblent lui être connus par des sou- 
venirs d'enfance ». Telles sont les données con- 
tradictoires que Ton recueille dans l'Iliade et 
Y Odyssée, et sur lesquelles il faut asseoir la 
biographie d'Homère. Les témoignages des an- 
ciens à son sujet ne méritent confiance qu'au- 
tant qu'ils nous aident à résoudre ces difficultés, 
à concilier ces contradictions. 

Ces témoignages sont innombrables ; car il 
n'est pour ainsi dire pas un auteur grec ou latin 
qui n'ait parlé d'Homère. Déjà les anciens 
avaient senti le besoin de rassembler ces no- 
tions dispersées et d'en former une vie d'Ho- 
mère. Nous possédons huit de ces vies, en y 
comprenant une fiction intitulée Joute d'Ho- 
mère et d'Hésiode. (*AY<&v'Oprfjpou xocrHatofiou). 
Quatre sont anonymes, les quatre autres portent 
les noms d'Hérodote, de Plutarque, de Proclus, 
de Suidas. Suidas vivait au onzième siècle de l'ère 
chrétienne, Proclos ( différent du philosophe de 
ce nom) au deuxième, Plutarque au deuxième 
aussi. La Vie qui nous est venue sous le nom 
d'Hérodote serait inappréciable si elle était au- 
thentique. Mais le moindre examen démontre 
que c'est une fiction fabriquée un siècle tout au 
plus avant J.-C, afin de répondre aux questions 
que soulevaient déjà l'origine et la transmission 
des poèmes homériques. Les Vies anonymes 
sont encore plus récentes. Ces biographies, dont 
la plus ancienne est postérieure à Homère d'un 
millier d'années, n'ont aucun prix à titre de 
documents originaux ; elles ne valent que par les 
renseignements qu'elles renferment. Elles nous 
font connaître les noms de cinquante auteurs 
environ qui, spécialement ou en passant, s'étaient 
occupés de la patrie et de l'époque d'Homère. 
La plupart de ces auteurs n'ont fait que répé- 
ter ce que d'autres avaient dit avant eux. Si 
l'on s'en tient aux écrivains qui ont constaté des 
traditions anciennes et émis des opinions origi- 
nales, on n'a plus devant soi qu'un petit nom- 
bre de témoignages dont les contradictions ne 
sont paa inconciliables. Mais ces témoignages 
mêmes ne sauraient dans aucun cas avoir l'au- 
torité de notions positives qui manquaient aux 
anciens aussi bien qu'à nous. Ce sont des tradi- 
tions, des conjectures, rien de plus. Entre la 
composition des poèmes homériques et les plus 
anciens historiens grecs, il s'écoula au moins 
quatre siècles. C'est un vide qu'il sera toujours 
impossible de combler. 

Les diverses dates assignées aux poèmes ho- 



mériques diffèrent de près de quatre cents ans. 
D'après Cratès et Ératosthène, Homère vivait 
dans le premier siècle après la guerre de Troie. 
Aristote et Aristarque le font vivre du temps de 
l'émigration ionienne, 140 ans après cette guerre; 
Apollodore le chronologiste , 240 après; Por- 
phyre, 270 après ; les marbres deParos, 277 après ; 
Hérodote, 350 après. Non-seulement septailles, 
comme on le dit, mais dix-sept villes et même 
dix-neuf revendiquèrent l'honneur d'être la pa- 
trie d'Homère. Entre ces prétentions dont la 
plupart n'ont aucun fondement, il faut distinguer 
celles de Cyme, soutenues par l'historien Éphore, 
celles de Colophon défendues par Nicandre, et 
surtout celles de Smyrne et de Chios. Smyrne 
a pour elle Pindare, Scylax et Stésimbrote. Chios 
s'autorisedes témoignages de Simonide, d'Acusi- 
laus , d'Hellanicus, de Thucydide , et du fait qu'il 
avait existé à Chios une famille d'Homérides et 
que Homère y était l'objet d'un culte. Si à l'aide 
des poèmes homériques on essaye dechoisir entre 
ces assertions contraires, on écartera d'abord les 
dates extrêmes d'Éralosthène et d'Hérodote, et 
entre les autres on s'arrêtera àcelled'Aristute et 
d'Aristarque, parce qu'elle coïncide avec un fait 
historique dont l'influence sur la poésie homé- 
rique a été capitale : nous parlons de l'émigration 
ionienne. L'invasion des Doriens fit refluer beau- 
coup de Grecs, Ioniens et Éoliens sur les riva- 
ges de l'Asie, où ils fondèrent des colonies floris- 
santes. Les Ioniens et les Éoliens, séparés par- 
tout ailleurs, se trouvèrent, par suite d'événements 
douteux, réunis à Smyrne. Cette union des deux 
tribus ne fut pas de longue durée. Les Éoliens 
expulsèrent les Ioniens, qui se réfugièrent à Co- 
lophon, à Chios et dans d'autres établissements 
de leur race. Plus tard la fortune changea. Les 
Ioniens, partis de Colophon, reprirent Smyrne, qui 
fut dès lors une des principales villes de leur 
confédération. Si l'on place, avec Aristote et Aris- 
tarque, la vie d'Homère à Smyrne, dans la pé- 
riode qui suivit l'émigration ionienne, 140 ans 
après la prise de Troie, les principales difficultés 
qui nous frappent dans ses poèmes se trouvent 
résolues. Les Éoliens, partis d'Europe, établis 
d'abord à Cyme, comptant parmi leurs tribus la 
grande race des Achéens, et se vantant d'avoir 
pour chefs des princes de la famille d'Agamem- 
non, apportaient en Asie un fonds inépuisable 
de légendes et de chants nés dans la Grèce d'Eu- 
rope, en retraçant avec précision les principaux 
sites, et profondément empreints de la mytho- 
logie qui s'y était développée. Au contact de la 
terre d'Asie, théâtre des exploits de leurs ancê- 
tres, à la vue des campagnes 4e la Troade, où 
leurs héros populaires avaient eombattu et trouvé 
une mort glorieuse ou une victoire éclatante, les 
Éoliens sentirent redoubler leur intérêt pour les 
légendes , les ehants de la guerre de Troie, qui 
depuis plus d'un siècle déjà les charmaient et les 
exaltaient. Us portèrent dans Smyrne l'enthou- 
siasme dont les remplissait le souvenir de la 



-*9 



HOMÈRE 



50 



grande lutte des héros achéens contre la famiUe 
de Priam; Us y trouvèrent, gouvernée par des prin- 
ces athéniens qui prétendaient descendre de Nes- 
tor, la race ionienne, qui, pour la civilisation et 
la culture intellectuelle, devança toujours les 
autres tribus grecques, et qui, moins originale, 
moins poétique, devait, par sa vive intelligence, 
son sentiment exquis de Fart, son esprit progres- 
sif , les éclipser toutes un jour. Les Éoliens et 
les Ioniens, réunis par le hasard de rémigration, 
confondirent leurs légendes. Un poète, Ionien 
d'origine (son langage, son génie brillant et fa- 
cile l'attesteraient au défaut de la tradition) eut 
l'idée de rassembler les légendes poétiques des 
aèdes et de les grouper autour d'une légende 
principale qui leur servit de centre. De cette idée' 
féconde naquirent V Iliade et Y Odyssée, ces poè- 
mes qui sont à la fois l'œuvre de tout un peuple 
et d'un seul homme, dont le fond appartient à la 
Grèce d'Europe, et qui ont pris leur forme en 
Asie, qui sont éoliens et ioniens, que toutes les 
villes grecques revendiquent à bon droit, et 
qu'une seule ville, Smyrne, a vus naître. Un des 
procédés les plus familiers à certaines époques, 
c'est de symboliser dans un nom, dans une 
légende , toute une période historique. Ainsi, 
les traditions relatives à Homère nous re- 
présentent, non l'histoire réelle du poète, mais 
l'histoire de l'origine et de la transmission de 
ses poèmes. Si on l'a fait naître à Cyme, c'est que 
dans cette première colonie asiatique des Éoliens, 
les légendes des héros achéens s'étaient ranimées, 
avaient pris une vie nouvelle et dès lors im- 
mortelle. Si on l'a fait naître à Chios et à Colo- 
phon, c'est que les Ioniens, expulsés de Smyrne, 
se réfugièrent à Chios et a Golophon, y portant 
avec eux les chants que, à défaut de l'écriture, 
la mémoire des rapsodes conservait fidèlement. 
Si l'on tient compte de la tradition qui repré- 
sente Homère venant après de longs voyages se 
fixer à Chios, si l'on songe que dans cette tleflo- 
rissait une famille des Homérides et que le 
poète y était l'objet d'un culte, on admettra 
comme vraisemblable que Homère» chassé de 
Smyrne avec les autres Ioniens, trouva un asile 
à Chios, peut-être même qu'il y composa son 
Odyssée : supposition qui expliquerait pourquoi 
les légendes achéennes tiennent moins de place 
dans ce poème, pourquoi les divinités ioniennes 
y sont particulièrement vénérées, et pourquoi 
aussi on y sent une civilisation plus avancée, 
un état social moins violent, plus propice aux 
jouissances physiques et intellectuelles. Ces con- 
jectures, nous le répétons, ne sont pas des faits 
historiques, mais elles montrent que, pour ex- 
pliquer l'origine et la composition de Y Iliade et 
de Y Odyssée, on n'a pas besoin de recourir à 
l'hypothèse paradoxale de Wolf ; il est plus sim- 
ple et plus raisonnable de s'en tenir à l'opi- 
nion générale, mieux comprise et judicieusement 
amendée. 
L Iliade et Y Odyssée furent la base et comme 



le centre d'un développement poétique qui em- 
brassa toutes les légendes de la guerre de Troie, 
comprit les exploits des héros argiens devant 
Thèbes, et s'enfonça même plus avant jus- 
qu'aux origines mythiques de la race grecque. 
Tandis que les Homérides de Chios se transmet- 
taient fidèlement, de génération en génération, les 
chants du poète dont ils portaient le nom, d'au- 
tres rapsodes, en récitant les mêmes œuvres, 
entreprirent de les compléter par des composi- 
tions analogues sur des sujets qu'Homère avait 
laissés de côté, ou qu'il avait touchés en passant. 
Les plus importantes de ces productions se 
conservèrent chez les anciens, et formèrent ce 
qu'on appela le Cycle épique. Ce vaste recueil, 
qui commençait au mariage d'Uranus et de Gaea 
et finissait au meurtre d'Ulysse par son fils 
Télégonus, comprenait un grand nombre de 
poèmes aujourd'hui perdus dont les titres même 
sont imparfaitement connus et dont les auteurs 
sont incertains (1). La Titanomachie (2) (Trra- 
vopiaxCa); La Danaïde (Àavaic); VAtthide 
('AxOîc); ou l'expédition des Amazones (3); 
VŒdipodie (4) ('OiStwoSeia); La Thébaïde (5) 
(Ov)6aïç) 1 ou l'expédition d'Amphiaraiis; Les 
Épigones ('£7rrrovoi), ou VAlcméonide (6) ('AXx- 
jtaiwvCç) ; La Minyade (Mivvàç),ou la Phocaïde 
(4>wxak); Xa Prise d'Mchalée (7) (OtxaXiaç 
4XaxTi;); Les Chants cypriaques (8) (Ta 
Kûirpia) (9); VÉthiopide (10) (Al0toict;); La 
Petite Iliade (1 1) ('IXidu; (uxpd), La Destruction 
de Troie (12) ( 'IXCov rcépmç ) ; Les Retours des 
Héros (13) (Noa-cot) (14); La Télégonie (15) 
( TyiXefoveCa ) : toutes ces épopées se rattachent 
étroitement aux poèmes homériques ; mais, quoi- 
que formées des mêmes matériaux et animées 
des mêmes sentiments, elles n'offraient pas, au 
jugement des anciens , la même puissance de gé- 
nie, le même art de composition. 

Les hymnes qui portent le nom d'Homère ne 
lui appartiennent que pour avoir été longtemps 
liés à la récitation de ses poèmes. Les anciens don- 
naient à ces compositions, souvent très-courtes, 
parfois assez étendues , le titre d'ouvertures ou 



a) Procïus, dans no passage de sa Chrestomathie, cité 
par Photius (cod. JS9) , a donné une courte analyse du 
Cycle épique. Foy. sur ce sujet Welcker, Der Epische 
Kyklus; Duntzer, Fragmenta Bpicorum Grxcorum ,•' 
Wtllluer, De Cyclo epico ; Leutsch, Thebaidos cycliae 
Reliquiae; Lange, Uberdie Kyklischen Dichter. 

(3) Attribuée h Eumelus de Corlntbe et a Arctinus 
(S) Att. a Hégésinus. 

(4) Att. à Cinétbon. 

(5) Att. à Arcttnus, et plus souvent à Homère. 

(6) AU. à Homère. 

(7) Att à Créopbyle de Samos et à Homère. 
(8} Att. à Staslnus et à Leschès. 

(9) Après les Cfumtt cypriaques venait dans le Cycle 
Y Iliade d'Homère. 
* (10) Attribuée à Arcttnus. 

f (il) Att. à Homère, a Thestoridès, à Cinétbon, à uiodore 
d'Erythrée et plus souvent à Lescbès. 

(19) Att. à Arctinus. 

(18) Att. à Hagias de Trézène. 

(14) Après les Retours venait VOdystée d'Homère. 

(15) Att. * Eugammon de Cyrène et A Cinétbon. 



51 



HOMÈRE 



52 



de préludes (tcpootuia), On les attribue aux 
rapsodes , qui les chantaient comme préludes à 
leur récitation épique. Les productions de ce 
genre qui nous restent offrent une telle diversité 
de ton et de langage qu'il faut y voir des débris 
d'hymnes composés dans un laps de plusieurs 
siècles, depuis le temps d'Homère jusqu'à là 
guerre médique. Parmi les trente-quatre hymnes 
homériques Tenus jusqu'à nous, plusieurs ont 
peu de valeur; mais il en est six qui méritent 
une attention particulière, soit à cause de leur 
étendue, soit pour leur couleur mythologique; 
ce sont les hymnes adressés à Apollon Délien, 
à Apollon Pythien (I), à Hermès, à Aphrodite, 
à Démêler et à Dionysos. L'auteur de Y Hymne 
à Apollon Délien est m homéride qui s'appelle 
lui-même « le poète aveugle qui habite la rocail- 
leuse Chios ». Thucydide l'identifie avec l'auteur 
de Y Iliade, et c'est peut-être d'après ce rapsode 
aveugle que les anciens se formèrent l'idée 
d'Homère. V Hymne à Apollon Pythien contient 
l'histoire de l'établissement dn sanctuaire pythien 
par le dieu qui tua l'hydre (ty&totiva) et qui, sous 
la forme d'un dauphin, conduisit les Cretois à 
Crissa, où ils furent les prêtres de son temple. 
V Hymne à Hermès, qui ne peut être antérieur 
à la trentième olympiade, puisqu'il y est fait men- 
tion delà lyre à sept cordes, invention de Ter- 
pandre, est le récit des ruses d'Hermès. Le dieu 
nouveau-né quitte son berceau et dérobe les trou- 
peaux d'Apollon dans les pâturages de Piérie. Il 
façonne la lyre à sept cordes avec une écaille de 
tortue , et lorsque son larcin est découvert , il 
apaise la colère d'Apollon en lui donnant ce 
mélodieux instrument. VHymne à Aphrodite 
célèbre la naissance d'Énée, et se rattache in- 
timement à Y Iliade. VHymne à Déméter est 
consacré au séjour de ta déesse dans la demeure 
de Céléus à Eleusis. Déméter, irritée de l'enlè- 
vement de sa fille Perséphoné , se réfugia chez 
les Éleusiniens, et y resta cachée, privant les 
mortels de ses bienfaits, jusqu'à ce que Zeus 
consentit à lui rendre sa fille. Cet hymne, 
œuvre évidente d'un poète attique, appartient 
à une période religieuse que Y Iliade et Y Odys- 
sée font à peine pressentir. Le» idées qui ont 
inspiré Y Hymne à Dionysos sont encore plus 
éloignées de l'âge homérique. Le dieu, sem- 
blable à un jeune homme, avec sa noire che- 
velure flottante et un manteau de pourpre sur 
les épaules, se tenait aux bords de la mer lors- 
que des pirates tyrrhéniens l'enlevèrent, et le 
portèrent sur leur vaisseau. Bientôt divers pro- 
diges manifestent la présence du dieu. Le vin 
ruisselle sur le navire, une vigne chargée de rai- 
sins se suspend à la voile, le lierre sombre, avec 
ses grappes éclatantes, s'entrelace autour du mât. 
Dionysos prend la forme d'un bon, une ourse 
apparaît près de lui, et les pirates épouvantés 



(1) Dans les édition* d'Homère , ces «feai bymaes n'eu 
forment généralemeut qu'an sent. 



seprécipitent dans la mer, oii ils sont changés en 
dauphins. Ces fictions signafent dans la poésie 
grecque l'invasion d'un élément religieux (l'é- 
lément mystique et orgiaque), tout à fait étranger 
à la mythologie d'Homère. 

Outre les poemesdu cycle épique et les hymne* , 
on attribue à Homère des productions d'un genre 
tout différant, et qui sont même la parodie de 
la poésie héroïque : le Margitès, Les Cereopes, 
La Batrachomyomachie, etc. Le Margitès, 
qu'Aristote plaçait incontestablement au nombre 
des œuvres d'Homère, et qu'il regardait comme 
la source de la comédie, au même titre que 
Y Iliade et Y Odyssée étaient la source de la tra- 
gédie, est perdu. Cette perte est fort regrettable. 
H serait curieux de voir les formes majestueuses 
de l'épopée appliquées à des peintures comique* 
de mesura, à des tableaux satiriques. Le héroe 
du MargÙes était un sot qui avait une haute 
idée de son intelligence « qui savait beaucoup 
de choses, mais 'qui les savait toutes mal ». 
« Les dieux, dit le poète , ne l'avaient fait ni ter- 
rassier, ni laboureur, ni habile à quoi que ce fut : 
il manquait de toute industrie *. Selon quel- 
ques critiques grecs, Pigrès, frère d'Artéimse 
et contemporain des guerres médiqnes, était 
l'auteur du Margitès (1), mais il est pro- 
bable qu'il ne fit qu'interpoler un poème ptas 
ancien ; et sans faire remonter le Margitès jus- 
qu'à Homère, on peut l'attribuer à un rapsode 
homérique. Les Cereopes, ces malicieux petits 
génies qu'Hercule emprisonna pour se venger de 
leurs méchants tours, et qui lui échappèrent par 
de nouveaux stratagèmes, formaient le sujet 
d'un poème, aujourd'hui perdu, destiné à égayer 
les auditeurs attristés par les infortunes de* 
héros épiques. Dans le même but furent com- 
posées d'autres petites pièces , telles que : Lm 
Chèvre sept fois tondue (At( ènxântxtoç); La 
Chanson des ÉpieichUdes ('EmxixXC&ç), dont 
nous ne connaissons que (es titres ; Le Four ou 
la Cruche (K6(uvqc 4) Kspauic), où l'appareil 
mythologique et poétique est appliqué aux plus 
humbles objets de la vie commune, etXa Batra- 
chomyomathie ( Bottp^ou.v©u«xC« ). L'auteur 
de ce petit poème, probablement Pigrès, raconte, 
dans un style emprunté à Y Iliade, les combats 
des rats et des grenouilles. Ces productions, que 
les anciens ne craignaient pas de placer sous le 
nom d'Homère, appartiennent en effet à ta poésie 
homérique : elles en marquent l'extrême déca- 
dence. 

Tandis que le grand mouvement poétique, 
suscité par Y Iliade et Y Odyssée, aboutissait à 
des parodies, les deux poèmes confiés si long- 
temps à la mémoire des rapsodes trouvaient 
enfin dans récriture un moyen de transmission 
plus exact et plus durable (3). Vers 630 &\wî 

ff) rof. SoM», m not IUyovk- 

(S) Héraclide du Pont prétend (Hist. Grtec. fruym., 
«dit. Didot, t. II, p. sio ), que Lycurgue apporta dans le 
Nfoponnète tee poèmes d'Homère, Jcnquje-tar taeettitus 



o3 HOMÈRE 

J.-C, sous le règne dePsammétik, l'Egypte fat 
ouverte aux marchand* grecs, quien rapportèrent 
le papyrus ou bibias. L'importation de cette 
matière légère, peu coûteuse» admirablement 
appropriée à l'écriture, eut chez les anciens des 
effets presque analogues à l'invention de l'im- 
primerie chez les modernes : elle hâta la diffusion 
et assura la durée des œuvres littéraires (1). 
Mais les difficultés qui s'opposaient à la trans- 
cription d'ouvrages aussi étendus que Y Iliade et 
Y Odyssée furent lentes à écarter. Les rapsodes, 
jusque-là détenteurs principaux, peut-être uni- 
ques, des deux poèmes, répugnaient à se dessaisir 
d'un privilège auquel ils devaient toute leur im- 
portance. La masse du public, habituée h con- 
naître les poètes par la récitation des rapsodes, ne 
réclamait pas des manuscrits qu'elle n'aurait 
pas su déchiffrer. Mais à partir d'Archiloque 
une classe de lecteurs s'était formée cultivant la 
poésie, désireuse d'en posséder tes monuments, 
n'ayant pas le loisir de les graver dans sa 
mémoire. Pour cette classe, qui s'accrut peu à 
peu, se firent les premières copies de l 1 Iliade et 
de Y Odyssée, bien incomplètes sans doute, mais 
permettant de contrôler la récitation des rapsodes, 
qui continuaient de débiter à la cour des princes 
et aux fêtes publiques des morceaux plus ou 
moins longs des épopées homériques, choisis 
selon leurs convenances particulières on celles 
de leurs auditeurs. Ce mode de récitation tron- 
quée et arbitraire avait fait disparaître l'unité 
primitive des deux poèmes, et facilitait les plus 
larges interpolations. Solon, d'après Diogène 
Laeree, porta remède au mal en ordonnant aux 
rapsodes de suivre dans leur récitation le plan du 
poêle (2). Pisistrate, suivant de nombreux témoi- 
gnages (3), fit un pat plus décisif vers laconsti- 

hors de ri ont e. Mais tout ce qui concerne Lycurgue est 
trop incertain, r époque de «on existence est trop dou- 
teuse poar qu'on tienne compte ée l'assertion d'Héra- 
cllde, répétée par Plutarque. 

(1) M. Egger, Histoire de la critique chez les Gr$cs t 
p. 48*. 

(S) litogène Laeree, Un • Ta & 'Oojqpov il fecofoXvJc 

IXçgev, IxetOev ajpx e<T ^ ai xov àpX^Ufivov. L'auteur du 
Dialogue d'Hipparque, attribué à Platon, fait honneur de 
ce règlement au ils de Pisistrate. On ne saurait dire 
quelle était l'obttgatton que Solon on Htpparqne im- 
posèrent aux rapsodes; le sens de l'expresston , é£ 
CmoêoXTfc, ê£ VKùkrr\it(j>ç t dont se servent Diogène et le 
Pseudo-Platon, est incertain. {Voy. Rermann, Opnscula % 

t. v, p. a»; t. vu, p. <«, 161.) 

(3) Wolf dit, dans ses Proleyomea*, p. cxui : « Vox 
totius antlquitatis. et si summam spectes, consentons 
rama testator Piststratiim carmin a Homeri prhnuro con- 
signasse IHterto, et In enm online» redegtste qoo mine 
ieguntur » ; mats il ne cite que huit autorités : Clcéron 
(Oc OraU. III. 84) ; Pansants*, VIL,SS ; Joseph*, C. jipiotu, 
I, 2; Élten, V. H , XIII, 14 ; Llbanius , Ptateg. i» /ni., 
t. I, p. no, «dit. de Belsk . Bustathe, p. S; et un anonyme 
dans L. AllattuSjDe Pat. Hom. On remarquera qne le pins 
ancien deeea témoignages est celui de Clcéron, qui vivait 
cinq siècles après Pisistrate. On remarquera aassj, et ceci 
est plus grave , que dans lea seolles de Venise , qui résu- 
ment les travau de» Alexandrins sur Homère, et qui 
citent plusieurs éditions de ce poêle , il n'est Jamais 
parlé de la récession, de Pisistrate. On a expliqué de dif- 
férentes manières oe silence étonnant {va*. ftuacJul, 



54 

tution du texte homérique. 11 rassembla en un 
tout les parties séparées de chaque poème. On a 
longtemps ignoré les noms des amis ( fraipot, dit 
Pausaniaa) de Pisistrate qui l'assistèrent dans 
cette entreprise. Une scolie sur Plaute (1), 
récemment découverte, nous en fait connaître 
quatre : Conchylus (ce mot est douteux) (2), 
Onomacrite d'Athènes, Zopyre d'Héraclée et 
Orphée de Crotone. Tels sont les noms des pre- 
miers éditeurs connus d'Homère, de ceux qui, 
suivant une opinion générale, firent un tout de 
ses membres dispersés. En accomplissant une 
tache aussi difficile, ils durent commettre in- 
volontairement et volontairement bien des er- 
reurs. Us semblent avoir rattaché à Y Iliade des 
épisodes qui n'appartenaient pas à ce poème (3). 
Ils introduisirent certains passages pour flatter 
l'orgueil des Athéniens ou pour servir les des- 
seins politiques de Pisistrate. Onomacrite, banni 
plus tard pour avoir fabriqué des vers qu'il at- 
tribuait à Musée , est particulièrement suspect. 
Ces infidélités reprochées aux éditeurs (4) de 
Pisistrate sont peu de chose en comparaison des 
interpolations probables desrapsodes. En suppo- 
sant avec vraisemblance qu'ils apportèrent peu 
de critique dans leur récension, il est sûr qu'ils ne 
purent pas altérer essentiellement les deux poème» 
qu'ils reconstituaient ; car ces poèmes étaient géné- 
ralement connus par la récitation des rapsodes, etil 
en existait certainement déjà des manuscrits. Le 
grand méritede leur œuvre fut de servir de base à 
d'autres éditions qui se succédèrent rapidement. 
L'auteur du Dialogue d'Hipparque attribue une 
récension nouvelle au fils de Pisistrate, Hip- 
parque, qui eut pour collaborateurs les poètes 
Simonide et Anacréon. Les villes grecques lea 
plus florissantes, rivalisant avec Athènes, firent 
faire de Y Iliade et de Y Odyssée des transcrip- 
tions dont le texte, pour ainsi dire officiel, servit 
aux récitations solennelles des fêtes publiques, 
et à la récitation libre et journalière des rap- 
sodes. On connaît six de ces recensions politi- 
ques (ou des villes ), comme les appellent les 
Alexandrins, celles de Marseille» de Chics, d'Ar- 
gos, de Sinope, de Cypre et de Crète. A Athènes 
les copies d'Homère devinrent assez communes 
pour qu'Alcmiade souffletât un maître d'école 



Me Mexandrtnischê Bibliothek, p 59, et Welcker, Der 
Bpiseke Xykhts, p. 88* ) ; il n'en pronve pas motos que 
les Alexandrins n'attachaient pas à l'édition de Pisistrate 
l'importance énorme qne lui ont accordée Wolf et son 
école. 

(t) Voy. Mtscbl, CoreUarium dispmtationis de MMfctf ne» 
cis alexandrinis deque Pisistrati curis homericiSf 
Bonn, 1840. Cette scolie confirme pleinement l'opinion 
de Wolf sur l'édition de Pisistrate. 

(*) Foy. sur cette leçon, Duntzer, Borner und der 
eplsche Kyklo$ y p. 88. 

(S) Par exemple la Dolonéa, qui forme le dixième chant 
de V Iliade ( voy. le passage d'Eustathe cité plus haut). 
Aristophane de Byzaoce et Aristarque rejetaient comme 
apocryphes lea cinq cents derniers vers de l'Odyssée. 

(t) On croit que tes Alexandrins font allusion è ce* 
é(Uteojrsk»squ'UaparLentdesaUa<A^mute«ou arrangeurs 
d'Homère. 



55 



HOMÈRE 



56 



qui n'en possédait pas une. Ces transcriptions 
successives épuraient, mais bien imparfaitement, 
le texte altéré des poèmes homériques. On n'é- 
tudiait pas encore V Iliade et Y Odyssée à un 
point de Tue critique. Comme ces deux épopées 
étaient le fondement de toute éducation li- 
bérale et exerçaient une immense influence sur 
les esprits, les philosophes furent naturellement 
conduits à exposer, à recommander ou à réfuter 
les principes moraux et les doctrines religieuses 
qu'elles contenaient. Pythagore, Xénophane, 
Heraclite condamnèrent Homère comme un ar- 
tisan de mensonges qui avilissait la majesté des 
dieux, tandis que Théagène, Métrodore, Anaxa* 
gore, Stésimbrote dévoilèrent la profonde sa- 
gesse que le poète avait cachée sous des fables 
amusantes. A ces derniers remonte l'absurde 
manie de voir dans les chants populaires de la 
Grèce primitive des allégories morales. Cette 
plate et extravagante interprétation dont Socrate 
se moquait, que Platon réfutait, qu'Aristarque 
contredisait de toute la force de son savoir et 
de son bon sens, resta pourtant en faveur chez 
les rhéteurs et les grammairiens anciens; elle a 
été longtemps en honneur parmi les modernes, 
et peut-être en trouverait-on des traces même au- 
jourd'hui. 

Les sophistes du temps de Périclès, Prodi- 
cus, Protagoras, Hippias, s'occupèrent d'Homère 
d'une manière plus utile , et frayèrent la route 
aux Alexandrins. Sous leur influence parurent 
des éditions nouvelles, fruits de la comparaison 
de différents manuscrits, et l'on fit encore quel- 
ques pas vers le rétablissement du texte homé- 
rique. Mais cette tâche offrait des difficultés que 
l'application raisonnée de la critique pouvait seule 
surmonter. Les manuscrits, déjà nombreux, of- 
fraient de grandes divergences, et Ton avait peine 
à se reconnaître au milieu de tant de passages 
omis, transposés, ajoutés, tronqués (1). Parmi 
les éditions qui devancèrent et préparèrent celles 
d'Alexandrie on en signale deux, l'une du poète 
Antimaque deColophon, l'autre d'Aristote, qui 
fut, dit-on, assisté de Callisthène et d'Anaxar- 
que (2). Celle-ci reçut le nom d'édition de la cas- 
sette ( V) ix toO vàpfapioç ) , parce qu'Alexandre 
avait l'habitude de la porter avec lui dans une 
magnifique cassette provenant du trésor de Da- 
rius: On cite encore deux autres recensions qui 
se rattachent aux éditions politiques : Yéolique 
( atoXixrj), ainsi nommée sans doute parce qu'elle 
-avait été faite dans quelque ville éolienne, et la 
cyclique ( KuxXwrij ) , qui faisait apparemment 

(1) Beaucoup de vers d'Homère cités par les auteurs de 
cette époque, Arlstote entre autres, ne se retrouTcot pas 
dans le texte actuel. Un passage de la Poétique semble 
même démontrer qu'un long épisode de V Odyssée man- 
quait aui manuscrits de ce poème qu'Arlstote aTatt sous 
les yeux. ( Foy. liRger, HUt, de la Crit., p, 508. ) 

(1) Arlstote avait aussi composé des Problèmes Home' 
riqms ( discussions exégétiques et grammaticales ), au- 
jourd'hui perdus, mais qui nous sont en partie connus 
par les scottes de Venise. ( Voy. Egger, HUt. de la Crit., 
p. 118.) 



partie de la collection des poèmes cycliques. 
Ces éditions n'étaient que des préparations au 
grand travail de critique qui commença avec Zé- 
nodote d'Alexandrie. Le moment était venu de 
constituer définitivement le texte d'Homère. La 
période créatrice de la littérature grecque était 
close. Il ne restait plus aux lettrés de.ia cour 
des Ptolémées qu'à recueillir pieusement , à 
classer, à conserver avec vigilance, à épurer les 
grandes oeuvres du passé , dont la bibliothèque 
d'Alexandrie leur offrait le plus riche dépôt; à 
les commenter, à expliquer ce qui, n'étant plus 
lié à des mœurs, à des institutions vivantes, de- 
venait intelligible pour tous, excepté pour les 
savants. Trois écrivains placés entre eux dans 
des rapports de maître à élève furent à la tète 
d'une nombreuse éeole qui, occasionnellement ou 
exclusivement, s'occupa des poèmes homériques. 
Zénodote (1) posa les fondements de la critique 
systématique en établissant deux règles pour 
épurer le texte corrompu. H rejeta 1° ce qui était 
en contradiction avec l'ensemble de l'ouvrage; 
2° ce qui paraissait indigne du génie de l'auteur. 
A ces deux règles Aristophane et Aristarque en 
ajoutèrent deux de plus. Ils rejetèrent : 3° ce qui 
était contraire ou étranger aux coutumes de l'âge 
homérique; 4° tout ce qui ne concordait pas avec 
le langage et la versification épiques. Zénodote, 
qui ouvrit la voie à la véritable critique, resta 
loin de la perfection. Il retrancha de longs passa- 
ges, en altéra et en transposa d'autres arbitrai- 
rement; enfin, il agit avec les poèmes d'Homère 
comme il eût fait avec son propre ouvrage. St 
témérité aurait porté une atteinte irréparable 
aux poèmes qu'il prétendait restaurer, si elle 
n'avait trouvé des correctifs dans la méthode 
prudente d'Aristophane, et d'Aristarque. Le pre- 
mier (2) rétablit dans son édition beaucoup de 
vers exclus par Zénodote, et commença ce que 
le second acheva si heureusement. La réputation 
d'Aristarque (3) était immense chez les anciens; 
mais avant la publication des scolies de Venise 
on pouvait difficilement se rendre compte de son 
mérite. Ces précieuses scolies, en jetant un jour 
inattendu sur l'origine des poèmes homériques 
permirent aussi d'apprécier le grand critique 
qui leur donna le premier une forme définitive. 
Les scolies de Venise dérivent de quatre sources 
principales aujourd'hui perdues, savoir : 1° le 
traité d'Ari8tonicus sur les signes critiques em- 
ployés par Aristarque dans son édition de Y Iliade 
et de Y Odyssée (4) ; 2° celui de Didyme sur 
l'édition d'Aristarque (5) ; 3° la Prosodie home- 

(1) Foy. DOntser, De Zenodoti Studiis Homericii, 
Gœttlngue, 1848. 

(S) Foy. Nauk, Aristophanis Byxantii Fragmenta; 
Halle, 1848. 

(8) Foy. Lchrs, De Aristarchi Studiis Homericls, Kc- 
ntgsberg, 1888, et Egger, Aristarque, dans la Bévue des 
Deux Mondes, I" férrier 1846. 

(4) F oy.Frtedlauder , Aristonicus, Ilepl £i)(u{i0v tt* 
•JDudtèoc ; Gcetttngue, 1888. 

(5) Foy. Sebnildt , Didymus Chalcenterus, Fragmenta, 
Lelpstg , 1884, et l'article Didyme dans cette Biographie, 



57 

rique d'Hérodien (1) \ 4° le traité de Nicanor sur 
la ponctuation de V Iliade (2). Les extraits de 
ces quatre ouvrages cités dans les scolies de Ye^ 
nise nous font suffisamment connaître les pro- 
cédés d'Aristarque. Les obèles ou signes criti- 
ques, inventés par Aristophane, lui servirent à 
noter les vers qu'il trouvait indignes du reste du 
poème, mais qu'il n'osait pas rejeter, dans l'im- 
possibilité où il était de décider s'il fallait les im- 
puter à une défaillance accidentelle de l'auteur 
ou aux interpolations des rapsodes. Quant aux 
vers qui , selon lui, étaient évidemment apocry- 
phes , il les rejeta , et son jugement fit loi. 
Wolf n'en comptait pas moins de quarante ab- 
sents pour cette cause du manuscrit de Venise , 
et Plutarque nous en a conservé quatre que les 
éditeurs modernes ont fait rentrer dans le texte 
d'où Aristarque les avait bannis (3). Le grand 
critique alexandrin poussa peut-être la rigueur 
trop loin; mais, grâce à ses travaux, le texte, si 
longtemps incertain, fut fixé avec tin degré de 
précision qui n'existe pour aucun autre auteur 
grec, et auquel les siècles ont apporté moins de 
changements qu'on ne l'a prétendu. D'après 
Schoell (4), « ce fut surtout par les soins des 
grammairiens d'Alexandrie des troisième et qua- 
trième siècles après J.-C. que le texte des poèmes 
d'Homère prit définitivement la forme sous la- 
quelle ils nous ont été transmis ». « Le travail 
d'Apion/grammairien du temps de Tibère, devint 
la base d'une dernière révision, qui fut faite dans 
les troisième et quatrième siècles après J.-C. par 
des grammairiens pour ainsi dire éclectiques, qui 
choisirent presque au hasard des leçons de di- 
verses éditions. » « C'est cette dernière édition 
qui seule nous est parvenue, et qui constitue 
notre texte vulgate. » Ces assertions, qui portent 
atteinte à l'autorité du texte homérique, sont exa- 
gérées. Le texte d'Aristarque a été beaucoup 
plus respecté que ne le croit Schoell. On a trouvé 
récemment en Egypte des papyrus du deuxième 
siècle avant J.-C., contenant des passages d'Ho- 
mère, et on a constaté une identité complète 
entre le texte des papyrus et celui du manus- 
crit de Venise publié par Villoison (5). 

Le texte homérique une fois constitué fournis- 
sait une large hase à l'interprétation. Sur ce point 
encore, Aristarque, partisan du sens positif, en- 
nemi dés explications allégoriques, avait donné 
un excellent exemple, qui ne fut pas assez suivi. 
De son vivant même il eut pour contradicteur 
Cratès de Malles , qui fonda l'école grammaticale 
de Pergame, et eut le mérite d'introduire à Rome 



(i) Le mot prosodie, dans le sens que lot donne Héro- 
dlen, s'étend aax règles de l'accentuation, de la contrac- 
tion, des esprits. 

(î) Fou. Frlediander, Nicanor, Hepi 'JXtoowj; oriYpfc; 
Kœnlgsberg, 1860. 

(S) Plutarque, De audiendis Poetis. Les vers supprimés 
par Aristarque sont dans le IX* livre, 45846t. 

(*) Histoire de la littérature grecque, 1. 1, LU, ch.jlV. 

(8) Fou. deux articles de M. A, de Longpérter dans le 
Bulletin archéologique, 1865, p. 61, 1846, p 40. 



HOMÈRE 58 

l'étude de la littérature grecque. Du temps d'Au • 
guste, Didyme écrivit sur Homère des commen- 
taires très-étendus , où il résuma les immenses 
travaux des critiques alexandrins. A sa suite 
vinrent Apollonius, auteur d'un Lexique <$ Ho- 
mère (1), et Apion, à qui on a donné une place 
beaucoup trop élevée dans l'histoire de la cri» 
tique homérique. Longin et Porphyre (2) eurent 
peut-être plus d'importance, mais en général la 
seconde école d'Alexandrie se perdit dans les 
vaines subtilités de l'interprétation allégorique. 
Les scolies, fruits de tant de travaux, sont dis- 
persées dans divers manuscrits; il n'en existe 
pas de collection complète. Les plus utiles sur 
l'Iliade sont celles que Villoison publia d'après 
un manuscrit du dixième siècle de la bibliothè- 
que Saint-Marc à Venise; 1788, in-fol. Elles ont 
été réimprimées avec des additions par I. Bek- 
ker; Berlin, 1825-26, 3 vol. in-4*. Bacchmann 
y a fait un petit nombre d'additions dans ses 
Scholia ad H orner i Iliadem ; Leipzig, 1835. 
Les meilleures scolies sur X Odyssée ont été pu- 
bliées par Buttmann, Berlin, 1821; elles sont 
principalement empruntées aux scolies données 
en 1819 par Ang. Mai d'après un manuscrit de 
Milan. Le commentaire d'Eustathe, compilation 
dénuée de jugement et de goût, contient beau- 
coup d'informations précieuses puisées à des 
sources aujourd'hui perdues. Exécuté au douzième 
siècle par un Byzantin, ce volumineux travail, 
dernier mot de l'antiquité sur Homère, ne pré- 
céda que de trois siècles l'époque où l'imprimerie 
livra le texte des poèmes homériques à la cri- 
tique et à l'admiration des modernes. 

La première édition des Œuvres d'Homère 
fut publiée par Démétrius Chalcondyle; Flo- 
rence, 1488, 2 vol. in-fol. : elle est belle et assez 
correcte. Les exemplaires n'en sont pas extrê- 
mement rares ; mais il est difficile d'en trouver 
un dans un état irréprochable; ils se payent 
alors de 600 à 2,000 fr. On connaît trois exem- 
plaires sur vélin, tous trois en Italie (à Venise , 
à Florence et à Naples ). Un exemplaire non 
rogné (circonstance unique pour un livre aussi 
ancien) fut acheté, en 1806, au prix de 3,600 fr. 
pour la Bibliothèque impériale de Paris. La se- 
conde édition parut chez Aide, Venise, 1504, 
2 vol. in-8°; la seconde édition aldine (Venise, 
1517, 2 vol. in-8°) rat reproduite à Florence en 
1519, à Louvain 1523. Bientôt de nombreuses 
éditions se succédèrent à Strasbourg, à Baie, à 
Venise , à Rome, mais sans aucun profit pour le 
texte. L'édition donnée par Henri Estienne dans 
ses Poetx Graeci principes (Paris, 1566, in-fol., 
t. I er ), quoique exécutée avec trop de précipita- 
tion, fait époque dans l'histoire critique du texte 



(i) Publié par Villoison d'après nn manoserit du 
dixième stècle; Paris, 1778,1 vol. in-foL; Leipzig, 1773, 
1 vol. in-*». 

(s) Fou. une bibliographie des travaux de Porphyre sur 
Homère dans la thèse de M. Val. Parisot Intitulée ; De 
PorphyriOy tria tmewuOa; Parts, 1841. 



59 



HOMÈRE 



60 



homérique; elle fut reproduite pur de nombreux 
éditeurs pendant près d'un siècle. L'édition des 
Elzevier (Amsterdam, 1656, 2 vol. in-4°), soi- 
gnée par Cor. Schrevelius, n'est remarquable 
que par sa beauté typographique; celle de Wet- 
sten (Amsterdam, 1707, 2 vol. in-12) est plus 
jolie que correcte. Barnes publia à Cambridge 
( 1711, 2 vol. in-4°) une bonne édition avec un 
texte revu sur plusieurs manuscrits et un com- 
mentaire perpétuel ; l'impression en est fort belle : 
ce dernier mérite et celui de la correction recom- 
mandent l'édition d'Oxford ( 1714, 2 vol. in-8°) ; 
mais elles furent surpassées l'une et l'autre par 
celle de Clarke (Londres, 1729-1740, 4 vol. 
in-4°). Clarke améliora sur plusieurs points le 
texte de Barnes, et ses notes, quoique bien sur* 
passées depuis, sont encore estimées. L'édition 
d'Ernesti, Leipzig, 1759-1764, 5 vol. in-8°, re- 
production très-améliorée de celle de Clarke, 
mérite beaucoup d'estime; elle a été réimprimée 
à Glascow en 1814, avec les Prolegomena de 
Wolf, et à Leipzig en 1824. Nous citerons encore 
une édition de luxe publiée aux frais de quelques 
seigneurs anglais; Oxford, 1800, 4 vol. in-4°. 
Les exemplaires sur grand papier se payent de 
50 à 100 1. st. Une nouvelle période critique 
commence avec la seconde édition de Wolf (dans 
la première édition, il avait reproduit le texte 
vulgate ) : Homeii et Homeridarum Opéra et 
Reliquiœ, ex veterum criticorum notationi- 
bus , optimorumque exemplariumfide; Halle, 
1794, in -8° ; 1. 1 et II, contenant les Prolegomena 
dont il a été si souvent question dans cet article, 
et le texte de V Iliade. Une troisième édition de 
Wolf, comprenant V Iliade et Y Odyssée , parut 
à Leipzig, 1804-1807, 4 vol. in- 8°. Wolf avait 
aussi commencé une édition de luxe, Leipzig, 
1806, in -fol., qui n'alla pas au delà du premier 
volume (contenant les douze premiers livres de 
Y Iliade). En dégageant le texte d'Homère des 
altérations successives qu'il avait subies , en le 
ramenant à la pureté de la récension d'Aristar- 
que, Wolf a fait preuve d'un savoir, d'une déci- 
sion, d'un goût admirables ; mais on regrette qu'il 
n'ait ajouté à son texte ni commentaires ni notes 
critiques, de sorte que, dans beaucoup de cas, 
il est impossible de savoir pour quels motifs il 
adopta des leçons différentes de la vulgate. Parmi 
les éditions postérieures, il faut citer, du moins 
à titre de curiosité, celle de Richard Payne 
Kniglit , qui d'abord, dans de nouveaux Prole- 
gomena ad Homerum (1814), puis dans sa ré* 
cension du texte ( Londres, 1820,in-4°), prétendit 
revenir, non pas comme Wolf à l'Homère des 
Alexandrins, non pas même à celui de Pisistrate, 
mais à l'Homère primitif. Pour atteindre ce ré- 
sultat, il débarrassa le texte d'une foule de pas- 
sages qui lui paraissaient des interpolations, et 
il l'augmenta par compensation de plusieurs 
milliers de digammas. Cette ridicule tentative, où 
l'auteur gaspilla un savoir réel, est une preuve 
de plus que la critique moderne doit borner son 



ambition à restaurer le texte d'Aristarque. De- 
puis Wolf les principales éditions d'Homère sont : 
l'éd. de Boissonade ; Paria, 1823/4 vol. in-32 ; — 
de 6. Hermann; Leipzig, 1825, 2 vol, m-8°; — 
de 6. Dindorf; Leipzig, 1826-1828,3 vol. in-12 
(la quatrième édit. de G. Dindorf a paru à Leip- 
zig, 1865, 2 vol. in-T et in-12 (1); — de Bothe; 
Leipzig, 1832-35, 6 vol. in-8° : une des meil- 
leures pour le texte, et des plus utiles pour le com- 
mentaire, qui offre un choix judicieux des scolies 
grecques et un bon résumé des travaux des com- 
mentateurs. Tous les ouvrages attribués à Ho- 
mère, avec les fragments des poètes cycliques, 
sont rassemblés dans un volume (Paris, 1837, 
ûv8° ) , qui fait partie de la Bibliothèque grec- 
que de A.-F. Didot, et qui offre, avec un texte 
soigneusement revu par G. Dindorf, une traduc- 
tion latine littérale. Une des meilleures recensions 
du texte est celle d'Im. Bekker; Berlin, 1843. 

Parmi les éditions séparées de Y Iliade, on dis- 
tingue celle d'Adrien Turnèbe ; Paris, 1 554, in-8° ; 
—- celle de Cambridge ; 1689, in*4° ; — celle de 
Glascow ; 1747, 2 vol. in-8°; — celle queDansse 
de Villoison donna à Venise; 1788, in -fol., 
d'après un manuscrit de la bibliothèque Saint- 
Marc, avec d'anciennes scolies du plus grand 
prix pour l'histoire du texte homérique ; — celle 
d'Alter ; Vienne, 1789-1790, 2 vol. in-8° : d'après 
un manuscrit défectueux , mais qui offre quel- 
ques bonnes leçons nouvelles ; — celle de Heyne ; 
Leipzig, 1802, 8 vol. in-8° (un 9 e volume, con- 
tenant les tables a été ajouté par Graefenhan en 
1822) : immense travail, qui, sans égaler pour la 
pureté du texte l'édition de Wolf, est très-pré- 
cieux pour le commentaire, et constitue une 
sorte d'encyclopédie homérique ; —celle de Lam- 
berti, remarquable comme édition de luxe; 
Parme (chez Bodoni), 1808, 3 vol. in-fol.; — 
celle de Weichert ; Meissen, 1818, 3 vol. in-8*; — 
et enfin l'excellente édition deSpitzner; Gotha, 
1832-1636, 2 vol. in-8" : dans la Bibliotheca 
Grxca de Jacobs et Rost. L'Iliade, avec la pa- 
raphrase grecque de Théodore Gaza, fut publiée 
à Florence; 1811-1812, 4 vol. in-8°. AngeloMai 
donna : Iliadis Fragmenta antiçuissima, cum 
picturis; Milan, 1819, in-fol. Ce volume repro- 
duit en 68 planches les miniatures qui décorent 
un manuscrit très-ancien de la bibliothèque Am- 
breisienne ; il contient aussi des scolies médites 
surYOdyssée. Coray avait entrepris, sous le titre 
à? Édition de Bolissa ( "Exfanc poXiwrta ), une 
édition de Y Iliade avec un commentaire grec, 
destinée spécialement à ses compatriotes ; il n'en 
fit paraître que quatre chants ; Paris, 1811-1820, 
4 vol. in- 8°. Enfin les deux premiers chanta ont 
été publiés par Freytag ( Saint-Pétersbourg, 1837, 
in-8°), avec un commentaire savant mais diffus. 

Les éditions séparées de YOdyssée méritent 
peu d'être signalées ; mais il faut citer l'excel- 

(l) L'édition d'Homère publiée par Ptckertng ( Londres, 
1880, 9 vol. ln-48 ) est d'une trèa-JoHe exécution ; tt existe 
des exemplaire» sur papier de Chine et « 



01 



HOMERE 



62 



lent commentaire allemand de NHzsch sur l'O- 
dyssée; Hanovre, 1826, etc. : les trois volumes 
publiés jusqu'ici ne dépassent pas le douzième 
chant 

L'édition princeps delà Batrachomyomachie 
est un petit in -4° , sans lieu ni date , avec une 
double traduction latine, Tune intercalaire, l'antre 
en vers. Ce livre, que Ton croit imprimé à Ve- 
nise, est d'une rareté excessive {voy. Dibdin, 
Bïbliotheca Spenseriana, t. II); l'édition de 
Venise, 1486, in -4* , dont les lignes sont alterna- 
tivement imprimées en rouge et en noir, est très- 
recherchée. Celle de Paris, 1507, in-4°, passe 
pour être le second livre grec imprimé à Paris. 
Les éditions de Wittemberg, 1513, de Paris, 
1542, 1562, in-4°, n'ont d'autre mérite que leur 
rareté , et c'est aussi à titre de curiosité biblio- 
graphique que Ton estime celle de Maittaire; 
Londres, 1721, gr. in-8°. La Batrachomyoma- 
chie, avec la traduction en grec vulgaire de Démé- 
triusZeni, fut publiée par Ilgen dans une savante 
édition des Hymni homerici cum reliquis Car- 
minibus minoribus Homero tribui solitis; 
Halle, 1791, in-6*. Les Carmina minora ont 
été aussi édités par Matthiae, Leipzig, 1805, 
in-8° ; et par Franke, Leipzig, 1828, in-12. Her- 
mann a donné une bonne édition des Hymnes, 
Leipzig, 1806, in-8° , avec une lettre à Ilgen sur 
la date et les interpolations des Hymnes. V Hymne 
à Véméter (Hymnus in Cererem), découvert 
par Matthsei dans la bibliothèque de Moscou en 
1778 , fut publié pour la première fois par D. 
Ruhnken; Leyde, 1780, in-8°, et 1782 (avec 
deux lettres critiques). Mitscherlich en donna 
une édition annotée ; Leipzig, 1787. in-8° (réim- 
primée avec des additions; Leyde, 1808), et 
Bodoni en fit paraître une édition de luxe; Parme, 
1805, très-grand in-fol. 

Les traductions d'Homère dans presque toutes 
les langues modernes sont extrêmement nom- 
breuses; on en trouvera dans la Bibliographis- 
ches Lexikon de Hoffmann la liste très-longue 
bien qu'incomplète : la reproduire ici , même en 
l'abrégeant, serait aussi fastidieux qu'inutile ; car 
aucun traducteur (Voss peut-être excepté) n'a 
rendu cette incomparable vérité dans la peinture 
du monde physique et du monde moral , cette 
grandeur naïve qui distinguent l'original ; aucun 
n'a approché de ce langage simple et riche, har- 
monieux sans recherche , et naturellement pitto 
resque. 11 suffira d'indiquer les noms de quelques 
traducteurs ; ce sont, en français : Jean Samson 
(153Q), Hugues Salel (1542-1574), Amadis Ja- 
myn (1580, 1584, 1605),Salomon Certon (1605), 
La Valterie (1681), M roo Dacier (1709), G. de 
Rochefort (1766-1770), Lebrun (1776-1819), 
Bïtaubé (1780-1785), Aignan (1809), Bignan 
(1830), Dttgas-Montbel ( 1815-1818, 4 vol. in-8°). 
La traduction de Dugas-Montbel reparut avec des 
améliorations fort importantes, dues en grande 
partie à la révision d'Ambr. Firmin Didot, qui la 
destinait à la grande collection des auteurs grecs 



traduits en français qu'il avait entreprise ; Paris, 
1828-1834, 9 vol. in-8°, dont trois volumes de 
notes (1). Cliapman , Pope et Cowper ont donné 
des traductions d'Homère en vers anglais; la 
première se distingue par l'énergie , la seconde 
par une admirable versification, la troisième 
par un véritable sentiment de la poésie homé- 
rique ; mais toutes trois sont, en somme, peu 
dignes de l'original. La traduction en vers alle- 
mands de Voss, Altona, 1793, 4 vol. in-8°, 
rend avec bonheur la naïveté , la grandeur, la 
simplicité d'Homère, mais elle n'en a ni la gra- 
cieuse facilité , ni l'harmonie. 

Salvini, Monti, Pindemonte, qui ont traduit 
en vers italiens, le premier tous les poèmes 
d'Homère , le second Y Iliade , le troisième l'O- 
dyssée , n'ont pas mieux réussi que les traduc- 
teurs anglais et français. Il existe beaucoup de 
versions de la Batrachomyomachie ; et si quel- 
ques-unes ont du prix , c'est seulement comme 
raretés bibliographiques. V Hymne à Déméter 
a été traduit en vers italiens par Pindemonte , et 
en vers allemands par Voss, dont la version est 
accompagnée de bonnes notes explicatives; Hei- 
delberg, 1826. A ces travaux (commentaires et 
traductions) destinés à l'interprétation des poè- 
mes homériques il faut ajouter le Lexicon no~ 
vum homericum et pindaricum de Damm , 
ouvrage d'une critique peu profonde , utile ce- 
pendant à consulter dans l'édition très-améliorée 
de Rost, Leipzig, 1836, in-4°; le Lexicologus 
de Buttmann; Berlin, 1825-1837 , très-supérieur 
à tous égards, et YHomerisches Glossarium 
de Dœrierlein , Erlangen, 1850-1853, 2 vol. gr. 
in-8°. 

Pendant que l'érudition épurait et expliquait 
le texte des poèmes homériques , la critique lit- 
téraire s'efforçait d'apprécier et quelquefois tâ- 
chait de rabaisser le génie de leur auteur. A la 
fin du dix-septième siècle et au commencement 
dn dix-huitième, la réputation du grand poète 
grec donna lieu à une guerre de plume des plus 
vives (2). Nous ne reviendrons pas sur ces 
discussions stériles d'où la gloire d'Homère est 
toujours sortie intacte et rajeunie. L'auteur de 
V Iliade et de Y Odyssée est aujourd'hui, comme 
au temps de Lucrèce, le « toujours florissant 
Homère (3) » , et l'on peut dire avec M. J. Ché- 
nier: 

Trois mille ans ont passé sur là cendre d'Homère , 
Et depuis trois mille ans Homère, respecté, 
Kst Jeune eneor de gloire et d'immortalité. 

En racontant dans quelles circonstances ont 

» 

(l) Voy. sur les traductions françaises d'Homère deux 
articles de M. Egger dans la Nouvelle Revue encyclopé 
dique, n" 4 et 8. Voy. aussi, dans la Revue des Deux 
Mondes ,\* traduction du 1" livre de V Iliade, en fran 
çats du treizième siècle, par M. fi. Llttré. 

(1) Voy. Rlgaalf, Querelle des Anciens et des Modernes,- 
Paris, 1856. 
(8) Inde mini specles semper florentis Horoeri 
£ioriens, visa est lacpyroas effundere salsas 
Coeplsst, et reram natnram expandere dtetls. 

Lacr., De /fat. Rer., 1. 1, ▼. m. 



63 

été composées Y Iliade et Y Odyssée y nous avons 
donné implicitement les raisons de leur immor- 
telle jeunesse. Ces deux grandes épopées naqui- 
rent chez un peuple doué au plus haut degré 
du goût du beau , à une époque où , la science 
et l'histoire n'existant pas encore, tout dans 
le domaine de l'intelligence était poésie; où le 
seul moyen de connaissance était l'observation 
immédiate de la nature physique et morale. Les 
poèmes homériques, dont tous les éléments, pen- 
sées, sentiments , expressions , images , ont été 
puisés directement à cette source, gardent un ca- 
ractère de vérité complète et naïve , inimitable 
parce qu'elle est spontanée, et que les plus 
heureux efforts de l'art ne peuvent retrouver. 
De pareilles circonstances ne se sont pas ren- 
contrées depuis les vieux âges de la Grèce, et 
après trente siècles Y Iliade et Y Odyssée restent 
la plus grande création poétique de l'esprit hu- 
main. Léo Jodbert. 

VU* Homeri (i), dans les BiOYpâqpot de Westermann ; 
Brnnswick, 1845. — Maxlmllten Sengebusch , deux Dis- 
sertations placées en tète de l'Iliade et de l'Odyssée , 
édit, Dlndorf ; Leipzig, 1855 ( c'est une discussion critique 
de toutes les sources anciennes relatives à Homère ). — 
Blackwell, An Enquiry into the Life and Writings of 
Homer; Londres, 1785. — Nitzscb, avait, homericantm 
Spec, I, 1884; Qusestio homeriea If, sive indagandm 
per Odysseam interpolationit prœparaU, 1818 ; Historiée 
crUicœ Homeri Initia qusedam, 1819; De Historia Ho- 
meri, maximeque de scriptorum carminum setate 
meUtemata, 1890, 85, 87 ; De Aristotele contra Wolfla- 
nos, issi ; Sententiœ veterum de Homeri patria ; article 
Odyssée dans VEncyclop. de Ersch et Gruber. — Lacb- 
mann, BetracMungen ûber d. Mas, mit. Zusdtzen von 
M. Zumpt; Berlin. 1847. — Lauer, Geschichte der Ho- 
merisehen Poésie; Berlin, 1851. — Sainte-Croix , Réfuta- 
tion d'un paradoxe de Wolf; Paris, 1798. - F. Schtegel, 
Veber die Homerisehe Poésie , mit Rucksicht auf die 
Wolfschen Untersuchungen ; Berlin , 1796. — Franceson, 
Essai sur la question : si Homère a connu l'usage de 
récriture, et si les deux poèmes de niiade ePde l'Odys- 
sée sont en entier de lui ; Berlin, 1818. - Lange, Ver- 
such die poeUsche Binheit der Iliade zubestimmen , ein 
sendtchrieiben an Goethe ; Darmstadt, 18î6. — Dugas- 
Montbel, Histoire des Poésies homériques ; Paris, 1881. 

— Hermann, Briefe ueber Homer und Hesiod; Heidel- 
berg, 1817, in-8°. — Kaiser, De diversa Homericorum 
Carminum Origine ,-HeUitlberg, 1885, ln*8°. — Havet, De 
Homer ic. Poem. Origine; Paris, 1848. — Bernbardj, Epi- 
crisis disputationis WolAanœ de Carminibus Homeri; 
1848, in-8°. — Baeumlln, De Compositions Iliadis et Odys- 
sées; Stuttgard, 1847, u>8*. - Genelll, 48 Umrisse xum 
Homer mit Erlaûterungen von S. Forster; Stuttgard, 
184*. — Geppert, Veber den Vrsprung der Homeris- 
chen Gesânge; Leipzig r 1840. - A.-G. Scblegel, De Ceo- 
çraphia Homeri Gomment»; Hanovre, 1788. — Camme- 
rer, Ueber die Weltkunde des Homer os im AUgemeinen; 
Kempten, 1888. — Bryant, A Dissertation concerning 
the War of trou as described by Homer; Londres, 1796. 

— Wakeficld, A Letter to J. Bryant concerning his Dis- 
sertation in the War ofTroy; Londres, 1797. — Le Che- 
valier, Tableau de la Plaine de Troye; 1791. — J. Ren- 
nel, Observations on the typography of the plain of 
Trou; Londres, 1814. — Spohn, De Agro Trojano in Ho- 
meri carminibus descript. ; Leipzig, 1815. — Niebuhr, 
Die Sikeler in der Odyssée* dans le Rheinischen Mu- 
séum, 1817, p. 145. - Welcker, Die homer. Phàaken u 
die Insein der seligen, dans le Neuen Rhein. Mus. 
Jahrg., I, p. 119. — Terpstra, Anliquitas Homeriea; 

(1) Les principaux ouvrages à consulter sur Homère 
ont été mentionués dans le courant de l'article ; nous ne 
répéterons pas ces Indications, excepté pour quelques ou- 
vrages généraux sur 1a littérature et l'histoire grecques. 



HOMÈRE — HOMMAÏRE DE HELL 



64 

Leyde, 1881. - F. Tascher, Lttters illustraUng the ana- 
tomieal and médicinal Knowledge of Homer; Londres, 
1798. — Malgatgne, Études sur.PAnatomie et la Physio- 
logie d? Homère, dans le, Bulletin de VAcad. de Méde- 
cine de Paris, 1841. — Nagelsbach, Die Homerisehe 
Théologie in ihrem Zusammenhange dargesteltt; Nu- 
remberg, 1840. — Lebrs, Quxstiones epiess ; Kœnigtberg, 
1837. - Fabriclus, Bibliotheca Grssca, t. I er , p. 317, édlt. 
de Harles. — Scboell, Histoire de la Littérature grecque, 
1. 1", p. 101-165. — Ulrlcl, Geschichte der hellenischen 
Poésie, 1. 1. - Bode, Geschichte der hellenischen Dicht- 
kunst. - OL Muller, Geschichte der griech. Uteratttr. 

— W. Mure, Critical Account of the Language and lAte- 
rature of ancient Gréece. — Bernbardj. Grundriss der 
griech Utteratur, — Thtrlwall, History of Greece, t. I e ' 
append. — Grote, History of ancient Greece, t. H. — 
Grotefend, article Homer., dans ÏEncyklop. de Ersch et 
Gruber. — Gulgnlaut, art. Homère* dans V Encyclopédie 
des Gens du Monde. — American quarterty Review, 
décembre 1817. — North American Review, octobre 
1888. — Quaterly Review, janvier 1881. — Letronne, 
dans le Journal des Savants, 1819, 1880. — Edinburgh 
Review, février 1848, octobre 1846, octobre 1850. — Fau 
rlel, Cours sur V Épopée homérique, résumé par M. Egger 
en douze articles dans le Journal de r Instruction pu- 
blique de 1886. — Westminster Review, Janvier 1847. — 
A. Plctet, Les Poèmes homériques, dans la Bibliothèque 
de Genève, 1855. 1856. — Jacob, Veber die Bntstehung 
der Ilias und der Odyssée; Berlin, 1856. - Lud. Frled- 
lander, Die homerisehe Kritik von Wolf bis Grote, 
1856. - H. Netto, Bibliotheca Homeriea; Halle, 1837, 
ln-4*. 

bomâre, grammairien et poetetragique grec, 
né à Byzance, vivait vers 280 avant J.-C, sous 
le règne de Ptolémée Philadelphe. Il était fils du 
grammairien Andromaque et de la poétesse 
Myro. Il fut un des sept poètes qui formèrent la 
pléiade tragique d'Alexandrie. Les anciens lui 
attribuent diversement 45, 47 et 57 pièces, dont 
il ne reste rien , excepté le titre tfEurypyleia. 
La statue de ce poète était dans le gymnase de 
Zeuxippe à Byzance. 

Un autre grammairien, portant le même nom, 
et surnommé Sellius, composa des hymnes et 
d'antres poésies, un traité en prose Sur les 
Masques comiques (Ilepl tûv xopuxûv 7tpo<no- 
itcov), et des Sommaires (HepioxaC) des comédies 
de Ménandre. Y. 

Suidas, aux mots "OuYjpoc, Mvpto et SiXXto;. — 
Tzetzés, Chil, XII, 109, ad Lycophr., p. 164, édit. de 
Millier. — Dlogène Laerce, IX, 113. - Chrlstodore, 
Ecphrasis, 407-418 ; dans les Anal, de Brunck, voL 11, 
p. 471. — Fabridus, Btbliot. Grseca, voL II, p. 307, 451. 

- Welcker, Die Griech. Tragôd., p. 1151. 
hommairê de hell ( Ignace-Xavier Mo- 
rand), géologue et voyageur français, né à 
Altkirch (Haut-Rhin), le 24 novembre 1812, 
mort à Ispahan (Perse), le 29 août 1848. Sorti 
de l'École des Mineurs de Saint-Étienne en 1833, 
il s'embarqua deux ans après ( le 2 octobre 1 835) 
pour Constantmople. Son but principal était de 
reconnaître la constitution géognostique de la 
Crimée et celle des steppes de la Nouvelle- 
Russie, afin de résoudre la grande question de 
la rupture du Bosphore et de l'ancienne com- 
munication de la mer Noire et de la mer Cas- 
pienne. Après avoir exploré les environs de 
Constantinople, il se rendit dans la Russie mé- 
ridionale, qu'il parcourut en tons sens. La cour de 
Saint-Pétersbourg lui confia plusieurs missions 
scientifiques et industrielles, et lui dut la décou- 



65 



HOMMAIRE DE BELL — HOMMEL 



6tf 



verte de mines de fer sur les bords du Dnieper. 
Forcé par sa mauvaise santé de rentrer dans sa 
patrie, il vint à Paris vers la fin de 1842, et 
soumit à l'Académie des Sciences un mémoire 
Sur la différence de niveau entre la mer 
Caspienne et la mer o?Azow 9 qui fut inséré 
dans les comptes-rendus des séances. An mois 
d'avril 1844, la Société de Géographie loi décerna 
son prix annuel pour un ouvrage intitulé : Ré- 
sumé d'un Voyage à la mer Caspienne et No- 
tice sur la carte de la Russie méridionale. 
L'année suivante le gouvernement français le 
chargea d'explorer les pays avoisinant la mer 
Noire et la mer Caspienne au triple point de 
vue de la géologie, de la géographie et de l'his- 
toire. H se rendit de nouveau à Constantinople, 
et le 25 novembre 1847 il adressait à M. Etie 
de Beaumont le résultat d'expériences minu- 
tieuses sar la force et la direction des courants 
du Bosphore ( Comptes-rendus de l'Académie 
des Sciences, 1848, t. XXVI, p. 143). Quelques 
mois auparavant (29 mai), Le Courrier de Cons- 
tantinople avait publié un mémoire présenté 
par loi au grand-vizir, sur l'antique projet de 
canalisation entre le golfe de Nicomédie et' la 
mer Noire. A la fin de cette année, il se dirigea 
vers la Perse, et le 9 février 1848 atteignit Té- 
héran. Il offrit ses services au schah, qui se pro- 
posait d'amener dans cette capitale les eaux de 
la rivière de Chahroud; puis se porta sur les 
bords de la mer Caspienne, y demeura quelques 
jours, et reprit ses explorations dans l'intérieur 
de la Perse, où le froid, la fatigue, les maladies 
contagieuses et des travaux incessants ne tar- 
dèrent pas à lui faire trouver la mort. Membre 
des Sociétés de Géologie et de Géographie, che- 
valier de la Légion d'Honneur, il reçut encore des 
distinctions particulières des cours de Russie, de 
Sardaigne et de Turquie. Les nombreux échan- 
tillons de roches recueillis par lui ont été achetés 
par le Muséum d'Histoire naturelle, et sont au- 
jourd'hui catalogués et mis à la disposition du 
public. U a laissé trois volumes contenant la Re- 
lation de ses voyages. Les deux premiers, plus 
pittoresques que scientifiques, consacrés à la 
description des lieux et aux usages des peuples 
visités, sont dus à la plume de M lle Jeanne 
Hériot, femme d'Hommaire de Hell, qui fat du- 
rant douze années la compagne de ses fatigues 
et de ses périls. Le troisième comprend toute 
la partie scientifique, et jette une vive lumière 
sur la géogno8ie, l'histoire et la géographie des 
contrées que baignent les mers Moire et Cas- 
pienne. L'ouvrage est, en outre, accompagné de 
vingt-cinq planches et d'une carte. Louis Lacour. 

Bulletin de la Société de Géographie, câbler de Juillet 
1880. — Bulletin de la Société Géologique de France, 
*• série, t. VII, p. 4M. 

hommbl (Charles-Ferdinand), juriscon- 
sulte allemand/ né à Leipzig, le 6 janvier 1722, 
mort le 16 mai 1781. H étudia à Halle, et devint 
plus tard professeur de droit à l'université de 

MOT. B10CR. GÉNÉR. — T. XXV. 



Leipzig. Homme! rat un des premiera en Alle- 
magne à propager les idées de Beccaria. Très- 
versé dans la connaissance de l'antiquité, il 
publia des travaux remarquables sur le droit ro- 
main. Ses principaux ouvrages sont : De Apol- 
line juris perito; Leipzig, 1748, in-4° : dans 
cette dissertation Homme! prouve que les oracles 
étaient souvent consultés pour la décision des 
procès; — Grammaticarum observalionum 
Jus civile illustrantium Spécimen; Leipzig, 
1749, in-4°; — Obleetamenta Juris feuda- 
lis, seu grammaticx observatUmes jus rei 
cUentetaris et antiquitates germanieas varie 
illustrantes; Leipzig, 1755, in-4°; — De 
singulari Jmperatorum in legibus novis con- 
dendis Modestia; ibid., 1759, in-4° ; — Ef- 
figies Jurisconsultorum; ibid., 1760, in-8°; 
— Litteratura Juris; ibid., 1761, in- 8°; ibid., 
1779, in-8°, avec beaucoup d'additions; — Bi- 
bliotheca Juris rabbinica et Saracenorum 
arabica; Leipzig, 1762, in-8°;, — Jurispru- 
dentia numismatibus illustrata 9 nec non 
sigillis, gemmis, aliisque picturis vetustis 
varie exornata; Leipzig, 1763, in-8°; — De 
ordinariis Facullatis Juridicx Lipsiensis; 
Leipzig, 1763,in-4°,'et 1767, in-8° ; — De Forma 
Tribunalis et Majestate Prxtoris; Leipzig, 
1763, in-4° : inséré dans quelques éditions des 
Antiquitates Romanx de Nyerup ;— Deutscher 
Flavius (Flavius allemand,); Baireuth, 1763, 
1766, 1767, in-8° : cet ouvrage contient des ins- 
tructions sur la rédaction des sentences et des 
requêtes; — Rhapsodia Quœstionum in for o 
quotidie obvenientium, neque tamen legibus 
decisarum; Leipzig, 1764-1781, in-4°. Cette 
première édition parut par programmes déta- 
chés; en 1766, Hommel commença à les réunir 
en volumes; il en publia une troisième édition 
à Baireuth, 1769-1779, 5 vol. in-4°; une qua- 
trième fut donnée par son gendre Rôssig , Bai- 
reuth, 1782-1787, 7 vol. in-4°. Ce recueil, qui 
contient des observations snr plus de neuf cents 
cas juridiques, a eu une Heureuse influence sur 
la jurisprudence des tribunaux allemands; — 
Electores Saxonix Legislatores ; Leipzig, 1765, 
û>4°; — Palingenesia librorum Juris vête- 
rum 9 seu Pandectarum locà intégra ad mo- 
dum indicis Labitti et Wielingi exposita et 
ab exemplari Florentino descripta; Leipzig, 
1767-1768, 3 vol. in-8°. Dans cet ouvrage Hom- 
me! a cherché à recomposer les ouvrages des 
jurisconsultes romains, dont les fragments se 
trouvent disséminés dans le Digeste. Les diffi- 
cultés de ce travail, entrepris pour la première 
fois par Hommel, étaient nombreuses» L'auteur 
a su en vaincre une grande partie; mais les dé- 
fectuosités de son ouvrage, qui est estimé encore 
aujourd'hui, ne méritaient pas une censure aussi 
acrimonieuse que celle qui en fut faite par Roch 
(voy. ce nom); — Epitome Juris canonid; 
Leipzig, 1768, uv8° : publié d'abord sous le 
pseudonymede Curtius Antonius, et ensuiteavec 

8 



67 



HOMMEI/— HOMPESCH 



le nom de Hommel; Leipzig, 1777» in-8°;— • 
Erklarung des goldenen Horns aus der nor- 
dischen Théologie (Explication de la Corne 
d'Or, d'après la théologie du Nord); Leipzig, 
1769, in-8°; — Vber Belohnung und Strafe 
nach tùrkischen Gesetzen (Sur les Récom- 
penses et les Peines, d'après les lois turques); 
Balreuth, 1770 et 1772, in-8°, sons le pseudo- 
nyme d'Alex, de Joch (voy. un examen détaillé 
de cet ouvrage, remarquable pour l'époque où il 
fut publié, dans les Philosophische Aufsàtxe 
de Jérusalem); — Monurchomachi et Ma- 
chiavellus in concordiatà adducti; Leipzig, 
1775, in-4°; — Ariadne Jurisdictionum con- 
currentiutn; Leipzig, 1779, in-8°; — Philo- 
sophische Gedanken iïber dos Criminalrecht 
( Pensées philosophiques sur le Droit criminel ) ; 
Breslau, 1784, in-8° : les idées fondamentales de 
cet ouvrage se trouvaient déjà exprimées dans 
une préface de Hommel qui fut mise en tête de 
la traduction du Traité des Peines de Beccaria, 
publiée à Breslau en 1778. £. G. 

Wetdllch, Zuverlâstige Nachrichten von den jetitle- 
benden Rechtsgelehrten, p. 94» (autobiographie). — Er- 
nest! , Hommelii Memoria (dans les Opuscula orat. 
philol. d'Ernesti et dans lé tome VII des Rhapsodies de 
Hommel). — Rosslg, rit a Hommelii ( dans le tome VII 
des Rhapsodiœ de Hommel). 

* homme Y (Jacques ), historien et publiciste 
français, né en 1643, à Séez, en Normandie, mort 
à Angers, le 18 octobre 1713. Il entra de bonne 
heure chez les Augustins de la province de Saint- 
Guillaume, et publia bientôt après le Millelo- 
quium sancti Gregorii; Lyon, 1683, in-fol. 
L'année suivante il fit paraître un supplément 
des Pères, en glanant après Ondin (Paris, in-8°). 
Ces deux ouvrages le mirent en honneur auprès 
des savants du temps; mais celui qui lui donna 
le plus de réputation et aussi le plus d'ennemis 
fut une espèce de gazette historique qu'il publia 
sous le titre de Diarium Europxum historico- 
litterarium, ou suivant une autre édition, 
F asti annui, in quibus res poliiicâs insi- 
gniores, ecclesiasticœ litterariœque per uni- 
versum orbem primo sœculi XVIII anno 
breviter et dictim narrantur. C'est une façon 
de journal qui eut à peine assez de durée pour 
causer de grands embarras à l'auteur. Amelot 
de La Houssaye avait été mis à la Bastille pour 
avoir retracé l'histoire du gouvernement de Ve- 
nise; l'ambassadeur de Venise prétendait cette 
fois que le P. Hommey avait, dans ses récits, 
exagéré la réparation faite au roi de-France par 
lasérénissime république en 1701, et exigea l'exil 
de l'écrivain à Bar-le-Duc. Le P. Hommey en 
prit son parti, et, par une lettre de soumission 
respectueuse, il apaisa le ressentiment de l'am- 
bassadeur, et obtint la levée de son bannisse- 
ment le 2 août 1704. Le père Hommey passa à 
Angers les dernières années de sa vie. Il avait, 
publié en 1696 une édition nouvelle, avec notes, 
de.rouvrage de Gordien Fulgence Liber absque 
litteris de Mtatibus mundi et hominis. H a 



laissé manuscrits un MilUloquiumsaneti Chry- 
sostomi et une ffUteire de Louis XIII, réfu- 
tation de l'ouvrage de Levassor. Célestin Port. 

Morétl, floutelUt de te Mépuètiqtiê des Lettres, avril 
Ilot, p. «68. - tourn. des Sav. t tl août 1684. — Poeq. de 
Uvonnlère, Notes manuscrites A la biblioth. d'Angers. 

hompbsgh ( Ferdinand , baron de ), dernier 
grand-maltre de l'ordre de Saint-Jean-de-Jéru- 
salem, né à Dusseldorf le 9 novembre 1744, 
mort à Montpellier au commencement de 1803. 
Il appartenait à une ancienne famille noble, au- 
jourd'hui décorée du titre de comte, dans le du- 
ché de Juliers, où elle possède la grande-maî- 
trise héréditaire des chasses. Fils d'un conseiller 
de l'électeur palatin, Jean-Guillaume de Hom- 
pesch, il vint à Malte à l'âge de douze ans, fut d'a- 
bord page du grand-maltre Rohan, et s'éleva suc- 
cessivement jusqu'au rang de grand'croix, par la 
protection de l'Autriche, dont il fut pendant vingt- 
cinq ans le représentant près de l'ordre de Malte. 
Après la révolution de 1789, l'influence de la lan- 
gue de Bavière devint prépondérante à Malte sur 
les langues de France, et à la mort de Rohan, en 
1797, Hompesch fut nommé grand-maltre à sa 
place. C'était le premier Allemand qui eût été re- 
vêtu de cette dignité. Le 10 juin i 798, la flotte de 
Bonaparte, qui se rendait en Egypte, se présenta 
devant Malte. Hompesch disposait seulement de 
quatre cents chevaliers, d'un régiment d'infan- 
terie de cinq cents hommes, et de la milice levée 
sur une population de 10,000 âmes, qui toutefois 
ne montrait pas un grand attachement pour le 
gouvernement qu'elle avait eu jusqu'alors. Les 
Français débarquèrent sur {plusieurs points de 
l'Ile. Le 12 ils s'emparent du fort de La Valette, 
et le lendemain la ville de Malte se soumet par 
une capitulation pour laquelle le grand-maltre 
ne fut pas même consulté. L'effet de la surprise, 
la mollesse et l'inexpérience des chevaliers, la 
connivence de quelques-uns, la faiblesse de ca- 
ractère du grand-maltre, l'insurrection fomentée 
parmi les habitants, toutes ces causes rendirent 
la défense presque nulle» Par cette honteuse ca- 
pitulation, l'ordre livrait à Bonaparte 1,200 bou- 
ches à feu avec une prodigieuse quantité de 
munitions et un trésor évalué à trois millions. Le 
vainqueur traita le grand-maltre avec peu d'é- 
gards. Hompesch écrivit au général Bonaparte qu'il 
eût mis un grand empressement à aller lui offrir 
l'expression de sa reconnaissance, si, par une 
délicatesse qui avait pour objet de ne rien faire 
qui pût rappeler aux Maltais sa personne et leur 
ancien gouvernement, il ne se fût déterminé à 
éviter toute occasion de se montrer en publié. 
On détruisit dans son palais et sons ses yeux 
les armes et les signes de son ordre et de sa 
puissance, et lui-même fut embarqué pour 
Trieste trois jours après la reddition delà place. 
On lui compta cent mille écns pour prix de son 
argenterie, qui fut portée à bord des vaisseaux 
français, et on lui promit une rente de pareille 
somme, qu'il us toucha jamais. Arrivé à Trieste, 



69 



HOMPESCH — HONDEKOETER 



70 



Hompesch protesta contre une capitulation qu'il i 
n'avait ni stipulée ni ratifiée , et quelques mois I 
après il abdiqua en faveur de Paul I er , empereur | 
de Russie, qui lui fit une pension. Après la mort ! 
de l'empereur Paul, la Russie ayant cessé de lui 
payer sa pension, Hompesch tomba dans de 
grands embarras d'argent. Pressé par ses créan- 
ciers, il se rendit à Montpellier pour réclamer du 
gouvernement français une pension qui lui avait 
été promise, mais qu'il avait d'abord refusée et 
dont il avait en quelque sorte dégagé ce gouver- 
nement par sa protestation. Il venait d'obtenir 
avec beaucoup de peine un secours de 15,000 fr., 
lorsqu'il mourut subitement. L. L--t. 

Arnanlt, Jay, Jouy et Norvlns, Biogr. nouv., des Con- 
temp.— Rabbe, Vleilh de Bois) o lin et Sainte-Preuve, 
Biogr. univ. et portât, de» Contemp. — Cùnvert&Uons- 
Lexikon. 

* honberg ( Wernher, comte de] Homburg 
ou), minnesinger du quatorzième siècle. Le ma- 
noir féodal, berceau de sa famille, s'élevait 
jadis non loin de Wagenstetten, dans l'évéché 
de Baie, dont les seigneurs de Honberg étaient les 
avoyers. Le père de notre poète était mort en 
1289, laissant trois fils, Wernher, Rodolphe et 
Ludolphe, et sa veuve dut aliéner une partie de 
se» vastes domaines ; le produit de cette vente 
ne suffît pas pour tirer de la gène la famille 
obérée, et les orphelins furent obligés plusieurs 
fois encore de recourir au même expédient. 
C'est dans un acte de cette nature passé en 1304 
entre les trois frères et le couvent de Wormes- 
bach que le nom de Wernher de Honberg parait 
pour la première fois. Mai3 bientôt le jeune 
comte révèle son existence autrement que par 
de pacifiques contrats. Héritier de l'humeur 
batailleuse de son père, il s'empare de la cita- 
delle de Greinau; puis il se brouille avec l'em- 
pereur Albert, et prend les armes en faveur des 
Suisses. L'avènement d'un nouveau césar, 
Henri VII, le ramène sous la bannière impériale; 
il la suit en Italie, et se distingue tellement au 
siège de Brescia que l'empereur le nomme ca- 
pitaine général de la ligue lombarde. Rien de 
plus flatteur que les termes dans lesquels cette 
nomination fut notifiée à la confédération gi- 
beline : De nobilitate sanguinis* armorum* 
que strenuitate et expertentia, née non 
fide, circumspectione et industriel, nobilis 
viri Wernheri, eomitis de Honberg , fidelù 
dilecti nostri, concipientes fiducicm spe- 
cialem, ipsum in capitaneum generaletn 
ordinavvmus Ligx confédération^ , etc. » 
Tschudil, 259. La confiance d'Henri VII ne fut 
pas trompée. Une histoire entière ne suffirait 
pas, dit Albert de Strasbourg, pour raconter les 
victoires incroyables, incredibiles victorias, 
que le comte Wernher remporta en Lombardie. 
Les chroniques italiennes elles-mêmes sont i 
pleines de ses hauts faits , et s'accordent mieux : 
sur sa bravoure que sur son nom, qu'elles dé- j 
figurent toutes plus ou moins, L'appelant Guar- 
nerius (je Ocrnborc ou simplement Warneriue \ 



Teutonicus, Warner l'Allemand. En quelques 
semaines, il réduisit presque toute la Lombardie, 
battit les Crémonais près* Asti, prit d'assaut 
Soncino et Camizana, brûla Lozzo, etc., mais 
des dissentiments survenus entre lui et le gou- 
verneur de Milan, l'astucieux Maffeo Viseonti, 
arrêtèrent le cours de ses succès, et le bouillant 
chevalier reprit furieux le chemin de ses foyers. 
En 1315 nous le retrouvons à Mergarten, com- 
battant dans les rangs des impériaux contre les 
Suisses, ses anciens alliés. En 1316 il embrasse 
la cause de l'anti-césar Frédéric le Beau contre 
Louis de Bavière , et est fait prisonnier à la ba- 
taille d'Ësslingen. En 1320 il retourne en Italie 
au secours des gibelins, et assiège Gênes inutile- 
ment. Il ne survécut pas beaucoup à cet échec, 
et périt à peu de temps de là, sans doute les 
armes à laraain. Les poètes et les historiens, qui 
nous ont laissé ignorer comment et quand il 
mourut, n'ont pas négligé du moins de déplorer 
son trépas. Un minnesinger associe à l'éloge du 
fameux Jean de Brabant celui du comte de 
Honberg « qui brisa tant de lances en l'honneur 
des belles, 

Der manig hundert tûsent speff 
Durch m inné hat tentechen »; 

Un autre, auteur d'un poème sur les couleurs , 
prétend avoir appris leur signification du brave 
Wernher de Honberg. Avait-il dans des vers 
aujourd'hui perdus commenté le langage emblé- 
matique du bleu et du rose, c'est ce que nous 
ne pouvons dire. 11 ne nous reste de lui que 
sept chansons , mélancoliques adieux que le 
guerrier-poëte dut adresser à sa belle en partant 
pour ses lointaines expéditions. Les rimes en 
sont riches et les strophes harmonieusement 
rhythmées ; elles nous ont été conservées par ie 
manuscrit Manesse. A. Pey. 

HaRfcn, Minnesinger. - Bodmcr, Sammlung von Min* 
nesingern. — Docen, Muséum fur altdeusehe Uteratvr 
und Kunst. — Tschudt, Chroniques de la Suisse; Baie, 
1733. — E&cher, dans l'Encyclopédie universelle d'Brsch 
et Gruber. 

bondekoeter (Gillis), peintre hollandais, 
né à Utrecht en 1583, mort vers 1626. Il ne 
quitta jamais sa patrie, et sa vie n'ofîre aucun 
fait intéressant. « 11 peignait, rapporte Houbra- 
ken, le paysage avec un style admirable, et les 
fleurs avec une exactitude et un naturel pré- 
cieux. » Ses nombreux ouvrages ont conservé 
un prix élevé. Rares en France, ils sont plus 
répandus en Angleterre et surtout en Hollande. 

A. de L. 
Jatob Carapo Veyérman, De Schllderkonst der neder- 
landers, tom. 11, p. 887. - Pilklogton, Dictionarf of 
Pointers* 

hondekoetbe ( Melchior ), peintre hol- 
landais, petit-fils dn précédent, né à Utrecht, en 
1636, mort dans la même ville, en 1695. H était 
fils et élève de Gisbrecbt Hondekoeter, et apprit 
de lui à peindre avec exactitude toutes sortes 
d'animaux, particulièrement tes oiseaux. 11 su** 
vit ensuite les avis de Jean-Baptiste Weeniio, 

ft. 



71 



HONDEKOETER — HONDT 



72 



son oncle, paysagiste distingué. Dans sa jeu- 
nesse il était fort religieux , et prononça même 
dans l'église de Safnt-Jean dTJtrecht un sermon 
qui édifia tous ses auditeurs et le fit solliciter 
d'entrer dans le ministère évangélique. « Qui le 
croirait? s'écrie Descamps , cette vie réglée et 
pieuse se changea en une crapule abominable ; 
11 eut le malheur d'épouser une méchante femme 
dont les sœurs ne valaient guère mieux. Il em- 
ploya d'abord la douceur pour les ramener et 
toute sa raison pour leur résister, mais il ne 
put vaincre leur humeur insociable; et, ne trou- 
vant d'autre asile contre leur fureur que le ca- 
baret, et d'autre consolation que dans la dé- 
bauche, il s'y livra tout entier: le plus sobre et 
le plus sage de tous les hommes en devint, 
par la persécution de sa femme , le plus intem- 
pérant et le plus déréglé. » Ses excès abrégè- 
rent ses jours. Presque tous les tableaux de ce 
peintre représentent des oiseaux, la plupart vi- 
vants; personne n'avait jusqu'à lui mieux peint 
des poules, des coqs, des paons, dont il re- 
présentait parfaitement les plumes. Il avait 
accoutumé un coq à se tenir près de son che- 
valet aussi longtemps et de telle façon qu'il le 
voulait. La touche de Hondekoeter est ferme et 
large, son pinceau onctueux, sa couleur bonne. 
H ornait ses fonds de paysage, bien finis et bien 
harmonies avec ses sujets. Ses tableaux, presque 
tous restés en Hollande, se vendent fort cher. 
L'Angleterre en possède cependant un certain 
nombre, qui ont figuré avec honneur à l'exposi- 
tion de Manchester (1857). On voit encore de 
ce maître dans la galerie de Vienne trois ta- 
bleaux représentant des Oiseaux de basse- 
cour; — à Rotterdam, galerie Léers , Plusieurs 
Coqs qui se battent ; — galerie Bisschop, des Oi- 
seaux de rivière dans un beau paysage; — 
au Louvre de Paris : V Entrée des Animaux 
dans V Arche;— Le Concert discordant, exé- 
cuté par des oiseaux de diverses espèces; — 
Combat entre un Coq et un Poulet d'Inde, en 
présence d'un paon, d'un pélican, d'un poulet 
et d'autres animaux; — deux Perdrix mortes. 
Alfred de Lacaze. 
Jakob Campo Weyerman, De SeMlderKonst der Ne» 
derlanders, t. II, p. 887-389. — Pllktngton , Dictionary 
ùj Painters. — Descamps , La Fie des Peintres hollan- 
dais, etc., t. Il, p. no-m. 

hoivdt ou hondius , famille d'artistes fla- 
mands dont les principaux membres sont : 

hondt (Josse), graveur, né en 1546, à Wac- 
kene, petit bourg de la Flandre, mort à Londres, 
le 16 février 1611. « il fut, dit Moréri, mené à 
Gand par ses parents dès l'âge de deux ans , et 
commença à huit à dessiner et à graver sur le 
enivre et sur l'ivoire, sans avoir eu aucun maître. 
H fit de si grands progrès dans cet art , qu'il fut 
regardé comme l'un des plus célèbres ouvriers 
de son siècle, et passait pour un des plus ha- 
biles pour fondre des caractères d'imprimerie. » 
11 était en même temps bon mathématicien et 
cosmographe intelligent 11 se retira en Angle- 



terre pendant la lutte de sa patrie contre les 
Espagnols, et porta à Londres les produits de son 
talent. Ses travaux y forent appréciés et juste- 
ment récompensés. Plus tard il vint se fixer à 
Amsterdam, et s'adonna à la gravure géogra- 
phique. On connaît de lui : Orbis terrarum 
Descriptio geographica; 1597;— Atlas de 
Gérard Mercator, nouvelle édition revue et aug- 
mentée d'un tiers; il donna un abrégé du même 
ouvrage sous le titre d'Atlas minor, in-4° 
oblong, très-souvent réimprimé; — Italix ho» 
diernx Descriptio; —les Cartes du Voyage 
à la Guyane par Walter Raleigh; Nuremberg, 
1599, in-4°; — une édition du traité d'Isaac 
Pontanus Des Globes et de leur usage, avec 
observations et planches; — les Cartes et 
planches des Voyages de Drake et de Caven- 
disk. — Moréri lui attribue un Theatrum Artis 
scribendi, et fait son éloge comme littérateur. 

Moréri, Grand Dictionnaire. — Basait. Dictionnaire 
des Graveurs — GandelUni, NoUzUdegV Intagliatori, 
t. X-XI, p. 144. — Notices sur les Graveurs; Besançon, 
1807, i vol. ln-8». 

W hondt ( Henri de), dit le vieux , graveur 
flamand, fils du précédent, né à Gand, en 1573, 
mort à La Haye en 1610. Il fut élève de Jan 
Wierix et de son père, dont il apprit la gravure 
géographique. Son plus grand ouvrage consiste 
en une suite de portraits de cent quarante- 
quatre artistes, flamands pour la plupart. Ses 
autres estampes sont en assez petit nombre, 
s'étant occupé à graver des cartes géographi- 
ques. On connaît de lui |les portraits de Cor- 
neille Cort, graveur d'Anvers; — d'Henri de 
Clèves , peintre anversois ; — de Gilles Coninx- 
loo, autre peintre anversois ; — de Jean Bugen- 
hagen, réformateur allemand (1599) ; — de Phi- 
lippe Melanchthon, réformateur allemand ; —de 
John Wiclef, réformateur anglais; — de Bans 
Holbein , peintre balois; — de John Cnoxe, ré- 
formateur écossais ; — de Jean Calvin, réfor- 
mateur français; — de Girolamo Savonarola, 
réformateur italien; — Le Jugement de Salo- 
mon, d'après Karl van Mander; — La Femme 
surprise en adultère, d'après le même; — Ré- 
créations flamandes , d'après P. Breughel;— . 
Manière comique de guérison établie à Meu- 
lebeci le jour de la Saint- Jean , en cinq es- 
tampes; — Les Neuf Muses sur le Parnasse, 
d'après Th. Zucchero. Le monogramme de Henri 
de Hondt se compose d'un h minuscule appuyée 
sur un H majuscule. A. de L. 

Gandcllini, Notizie degF Intagliatori, t. X-XI, p. 140- 
141.— Haber, Manuel, t. V, fol. S46. — Baron d'Helneke, 
Idée, etc., fol. 204.— Basan, Dictionnaire des Graveurs. 

hondt ( Henri de), dit le jeune, frère du 
précédent, graveur et technographe flamand , né 
à Londres, vers 1580, mort à Amsterdam, vers 
1650. Les biographes le citent comme le meil- 
leur graveur de sa famille. Élève dé son père, 
il termina la plupart des cartes que celui-ci avait 
laissées inachevées. De retour dans sa^atrie en 



73 



HONDT — HONE 



74 



1620, Hondt le jeune grava un nombre consi- 
dérable de portraits , de paysages et de sujets 
historiques, exécutés d'un style ferme et avec 
beaucoup de facilité. Ses estampes sont recher- 
chées ; parmi les meilleures on cite : les por- 
traits de Bernard, duc de Saxe-Weimar; — 
de la reine Elisabeth d'Angleterre; — de 
Jacques I«r, roi d'Angleterre (1608); — de 
Ferdinand I er , empereur o7 Allemagne (1634); 

— de Guillaume, prince d'Orange (1641); 

— de Francis Drake, amiral anglais; — Les 
Quatre Saisons, d'après PaulBril ; — les mêmes, 
d'après P. Stefani, en quatre pièces ; — Les Douze 
Mois, douze pièces; — Paysans et Paysannes 
avinés, d'après P. Breughel,deux pièces (1642) ; 
— Musiciens grotesques, deux pièces originales ; 

— Jésus-Christ et les Disciples oVEmmaûs, 
d'après Giles Mostaert; — Saint Paul jeté par 
la tempête sur Vile de Malte, d'après le même ; 

— Le jeune Tobie , accompagné d'un ange, 
péchant un poisson dans le Tigre, d'après 
Giles de Saen; — Saint Jean-Baptiste prê- 
chant dans le désert, d'après le même; — 
Vue de La Haye , d'après le même, etc. Les 
fonds et paysages de toutes ces estampes sont su- 
périeurement traités. Le monogramme de Hondt 
le jeune fut quelquefois celui de son frère, seu- 
lement Y h minuscule est plus évasée par le bas ; 
d'autres fois, et c'est le plus souvent , il signait 
d'une H majuscule traversée par un /. Comme 
écrivain, Hondt le jeune a laissé d'excellents 
écrits sur les arts figuratifs : Prxstantissimo- 
rum aliquot Theologorumprotestantium Bf- 
Jigies «ri incisa; La Haye, 1602, in-fol.; — 
Theatrum Honoris, in quo pictorum Belgii 
insigniorum imagines, etc.; Amsterdam, 
1618, in-fol.; — Pompa funebris Caroli V, 
tonp.y Bruxellis celebrata; La Haye, 1619, 
in-fol.; — L'Institution de la Perspective ( en 
flamand ),trad. en français; La Haye, 1625. 

A. de L. 

- Gandellinl, Notizie degV Intagliatori, t. XI, p. 14S-148. 

— Basan, Dictionnaire des Graveurs. 

hondt (Guillaume), graveur flamand, frère 
du précédent, né à La Haye, en 1601 , mort à 
Dantzig. H fut élève de son père, et apprit sous 
ses leçons à manier le burin avec beaucoup de 
goût. Gandellini l'appelle famosissimo inta- 
gliatore e maestro di loggan inglese. Parmi 
ses nombreuses estampes on cite : son portrait, 
d'après van Dick; — ceux de François Franck 
le jeune, peintre flamand ; — du prince Mau- 
rice d'Autriche (1623) , excellente gravure ori- 
ginale; — Ladislas IV, roi de Pologne, id.; 

— Bernard, duc de Saxe-Weimar ;— Jean- 
Casimir, roi de Pologne, d'après G. Schulze; 

— Charles, prince de Pologne, évêque de 
Breslaw, d'après le même; — Luisa-Maria 
Gonzaga, reine de Pologne, d'après Juste d'£g- 
mont. Le monogramme de Willem Hondt est 
un G enlacé à mi-corps dans le premier jambage 
d'une H. A. de L. 



Gandellinl, NoUtie degV IntaQliatori, t. XI, p. 19». - 
Basai), Dictionnaire des Graveurs. 

hondt ( Abraham), peintreet graveur hol- 
landais, parent des précédents, né à Rotterdam, en 
1638, mort à Londres, en 1691. {Suivant Weyer- 
man , la vie de cet artiste distingué fut une suite 
de libertinage et de débauches dont il se complaît 
à rapporter certains épisodes. Les mauvaises 
mœurs de Hondt nuisirent à sa réputation et 
à sa fortune. Il dut quitter sa patrie, et passa en 
Angleterre, où il eut une grande vogue : néan- 
moins, il y mourut misérable. Ses ouvrages se 
distinguent par une entente supérieure de -com- 
position : « Jamais, dit Descamps, il ne fut mé- ' 
diocre; il est quelquefois supérieur et souvent 
égale les meilleurs maîtres. » Ses tableaux/d'une 
grande variété de genres, sont peu connus en 
France. Parmi les principaux on cite : L'Incen- 
die de Troie; on y admire la disposition des 
figures , la correction du dessin , une touche libre 
et hardie; — Le Marché aux Chiens à Am$~ 
ter dam : le peintre, a représenté près de trente 
espèces de chiens caractérisés avec beaucoup 
de vérité; — à Anvers, L'Entrée des Animaux 
dans l'Arche, qui décèle de grandes connaissan- 
ces en histoire naturelle. Hondt a laissé encore 
d'excellents Paysages , des Chasses , un Promé* 
thée déchiré par le vautour; au fond est une 
vue de V enfer. Gomme graveur à l'eau-forte, on 
aune suite de chasses à divers animaux. A. de L* 

Jakob Campo Weyerman, De Schilderkonst dcrNeer- 
landers, L III, p. 187-159. - Descamos, La VU des 
Peintres hollandais, i. II, p. 854. - PUUngton, Dietio- 
nary of Painters. — Gandellinl. Notizie degV Intaglia- 
tori, t X-XI, p. 188. — Basan, Dictionnaire des Graveurs, 

honb ( William), libraire et pamphlétaire 
anglais, né à Barth, en 1779, mort à Tottenham, 
le 6 novembre 1842. Il appartenait à une famille 
de dissidents. Il fut d'abord destiné au barreau, 
et passa quelque temps chez un procureur; mais 
il quitta bientôt cette carrière, se maria en 1800, 
et ouvrit une librairie. Plusieurs opérations in- 
dustrielles qu'il tenta en même temps tournèrent 
mal ; ses affaires de librairie ne réussirent pas 
mieux, et il fit faillite. Il ne se releva que pour 
retomber, et demanda aux lettres des moyens 
d'existence pour lui et pour sa nombreuse fa- 
mille. Il écrivit dans le Critical Review, dans le 
British Lady's Magazine, publia en 1815 le Tra- 
veller, et en 1816 un recueil hebdomadaire inti- 
tulé : The Reformist's Register; qui cessa bientôt 
de paraître. En 1817, il publia des pamphlets 
qui eurent un immense succès, dû en partie à 
leur mérite littéraire, en partie aux illustrations 
humoristiques de Georges Cruikshank, et surtout 
à leur tendance politique, hardiment libérale. 
Hone osa même parodier, contre le ministère et 
ses partisans dans le clergé, le Book ofcommon 
Prayers, hardiesse qui le fit traduire en justice. 
Il fut acquitté. Le produit de ses pamphlets et 
d'une souscription faite à son profit après son 
procès lui aurait donné de quoi vivre s'il n'avait 
de nouveau compromis sa fortune dans le corn- 



76 



HONE — HONIGBERGER 



76 



merce des livres. Trois ans de résidence forcée 
dans une prison pour dettes furent te résultat de 
cette imprudence. Tant de déceptions ramenè- 
rent Hone aux idées religieuses, sans le rappro- 
cher de l'Église officielle. 11 rentra dans la secte 
des dissidents , et devint prédicateur d'une de 
leurs chapelles. Ses dernières années se partagè- 
rent entre les fonctions évangéliques et des tra- 
vaux pour les Revues et les Magazines : travaux 
incessants et Ingrats qui ne contribuèrent pas à 
sa réputation et ne le mirent pas même à l'abri 
dn besoin. On a de lui une édition du Gardener 
de Shah; 1806; — The political House that 
Jack built (1816); — A Slap at Slop (1816); 
— Ancient Mysteries described, especially 
the english miracle plays founded on the 
apocryphal New Testament story, extant 
among the unpuôlished Mss. in the British 
Muséum (1823) ; — Every Day Book, en 2 vol. ; 
Table Book; — Year Book; — Sports and 
Pastimes of the en g lis h ; 1838, in-8°. Z. 

Barly Lift and Conversion of William Hone, anar* 
rativê witten b* Uimset. - Bnglish Cyclopadia ( Bio- 
graphy ). 

HOlfElN BRN-ISHAK AL-ABADI ( AboU- 

zéid ), médecin arabe nestorien, de la tribu des 
Abadites, né dans les environs de Hirah, en 176 
de l'hégire (792 de J.-C.) ou plutôt en 194 
(809), mort en 260 (873) ou 264 (877). Il étudia 
d'abord sous Yahya lbn Messueh ; mais, blessé 
de ce que son maître le dédaignait comme 61s 
d'un marchand d'aromates , il quitta sa patrie et 
se rendit dans l'empire grec, où il recueillit 
un grand nombre de manuscrits. De retour à 
Baghdad , il s'attacha au célèbre Gabriel , fils de 
Bakhtischou, et finit par gagner l'estime de Yahya. 
Le khalife Motewekkel l'ayant choisi pour mé- 
decin , le mit à l'épreuve en lui ordonnant de 
composer un poison. Sur son refus, il le fit jeter 
en prison et l'y retint toute une année. Après 
s'être convaincu de la probité de son médecin, il 
le mit en liberté , et lui accorda toute sa con- 
fiance. Sur la fin de sa vie Honéin fut anathéma- 
tisé parle patriarche nestorien Sergius, parce 
qu'il condamnait le culte des images. Il en fut, 
dit-on , si vivement affligé , qu'il s'empoisonna. 
Comme il était président de la commission que 
le khalife avait chargée de traduire les ouvrages 
scientifiques des Grecs , on lui attribua un grand 
nombre de traductions qui sont de son fils Ishak, 
ou de son neveu Hobéiseh , ou de ses disciples. 
Il traduisit en syriaque et en arabe des ouvrages 
d'Hippocrate, de Galien, d'Euelide, de Platon, 
de Paul d'Égine, de Themistius, de Nicolas, et 
écrivit plus de vingt traités originaux sur les ma- 
ladies des yeux, l'agriculture, la physique, l'his- 
toire, la philologie. On lui doit également une 
grammaire syriaque et un dictionnaire syria- 
que-arabe, le premier qui ait été composé. 
E. Beauvois. 
Ibn Khalllkan, Biogrùphical Diction., trad. par M. Mac- 
Gucktn de Slaae, t. I, p. 478. — Ibn Âbl Osalbiah, Hist. 
Ou Médecins. — Abou'l-Faradj, Uistoria Dynastiarum, 



p. 171, 173; Cnronica Syriaca, p. 170. — Had)l Khalfah, 
Lex. BUflioçraph. et Encyclop.— Asscmanl, fiibl. Orient., 
U II, p. J70, 488; t. III, «part. II,fp. 168. - Casiri, Biblio- 
theea Arabieo-Hispana Escurialensis, t. II, p. 1*6. — 
Wiistenfeld, Geschichte der arabischen Aerzte, p. «6-19. 
— Journal Asiatique, 1854, II, p. 196 su. - De Ham- 
mer, L'iteraturgeschtchte der Araber, IV, 388-845. — 
Gart, De InUrpretibus et explanatoribus Euclidis ara- 
bicit ; Halle, 1813. 

honbstb ( Saint ) était né à Nîmes, et rivait 
dans le troisième siècle. Il fut disciple de saint 
Saturnin, premier évéque de Toulouse, qui lui 
imposa la prêtrise et l'envoya prêcher dans la 
Navarre et la Biscaye. Sa vie est peu connue. 
Là, comme presque toujours , il reste un grand 
doute parmi les hagiographes; les uns le met- 
tent au rang des martyrs, d'autres le considè- 
rent comme simple confesseur. Suivant les 
PP. Richard et Giraud , la principale partie de 
son corps se conserve à l'église dTères (Seine-et- 
Oise), où l'on célèbre sa fête le 16 février. Quel* 
eues autres- établissements religieux , mais sans 
aucune preuve, prétendent également posséder 
d'importantes reliques de saint Honeste. A. L. 

Bailtet, Fies des Saints, t. m, 18 septembre et 80 oc- 
tobre. — Richard et Giraud, Bibliothèque sacrée. 

* HOHESTis ( Christophe de ), médecin itar 
lien, né à Florence vers 1320, mort en 1393, à 
Bologne, où il était professeur; il a laissé un ou- 
vrage fort justement 7 délaissé aujourd'hui, mais 
qui au quinzième siècle jouissait de quelque au- 
torité. Son Expositio super Antidotarium Mê* 
sue, imprimé à Bologne en 1488, in-folio, fut 
réimprimé à tterrare et joint à l'édition donnée 
en 1661 des œuvres de Mesué. G* B. 

Negrl. SerUtori Fiorentini, p. 189. - AJfdo*»l f . Boto- 
onesi Dottori, p. 185. - Kealner, MedidnUokes Gt- 
lehrten-Lexikon, p. 418. 

^hosigbbbgbb (Martin), médecin et voya- 
geur allemand, né en 1795, à Cronstadt (Tran- 
sylvanie ). Après avoir étudié la médecine , il se 
rendit au Caire, en 1815, et obtint un emploi 
dans la pharmacie de Mohammed- Ali. En 1821, 
pour se soustraire aux atteintes de la peste, 
qui ravageait l'Egypte, il passa en Syrie, et par- 
courut ce pays durant huit ans, trouvant par- 
tout un favorable accueil , à cause de ses con- 
naissances médicales* Il se rendit ensuite à 
Lahore, dans le Pendjab, et fut nommé médecin 
du maharadjah Rendjit-Singh, et directeur d'une 
fabrique de poudre. Ayant formé un jeune mu- 
sulman de qui U pût se faire remplacer, il re- 
vint en Europe ( 1832 ), exerça la médecine ho- 
mœopathique à Constantinople (1837-1838), 
puis retourna à Lahore, où il y reprit ses an- 
ciennes fonctions. La Compagnie des Indes lui 
accorda une pension en 1849, à l'époque où le 
Pendjab fut annexé aux possessions britanni- 
ques. Après avoir passé quelques années en Eu- 
rope, il est allé s'établir dans le Kaschmir, en 
1852. Honigberger a rendu de grands services à 
la botanique, à l'archéologie et à la numismati- 
que. Les plantes qu'il recueillit dans l'État de 
Caboul ont été décrites par Jacquin, sous le titre 



77 



HOMGBERGER — HONORAT 



78 



de Sertum Cabulicum; Vienne, 1832. Les fouil- 
les exécutées sous sa direction dans les Topes on 
tours massives de l'Afghanistan et les médailles 
qu'il y trouva ont été décrites avec détail par 
£. Jacquet, dans le Journal Asiatique de Paris, 
1836, t. II; 1837, II; 1838, 1; 1839, 1. On a de 
Honigberger : Relation d'un Voyage de Dereh 
Ghaiihhan à Caboul, en 1832, dam Journal qf 
the Âsiatic Society ofBengal, t. III ; — Frû- 
chte aus dem Morgenlande > on aventures de 
voyages, suivies d'expériences médicales, et d'un 
dictionnaire des termes médicaux en turc, en 
arabe, en persan, en kaschmirien et eu quatre lan- 
gues européennes ; Vienne, 1851, in-8°. Beauvois* 

Honigberger, Retat. ; Journ. Asiat., istfl. — Vivien de 
Salnl-Martin, Découverte* géographiques en Afghanistan, 
dans Nouv. Annales des Voyages, 1847, t. IV, 18V8, 1. 1. 

s HONIGBR, HŒNIGBB et HONIBJGEB ( jVt- 

colas), littérateur allemand, né à Kœnigshofen, ; 
en Franconie , mort vers 1598. On ne sait de sa 
vie que ses travaux, dont les principaux sont : 
Historische Erzaehlung der otlomanischen 
Pforte ( Histoire de la Porte Ottomane ) ; Baie, 
1573 ; — Hofhaltung des Tùrkischen Kaysers 
und des ottomanischen Reichs Beschreibung 
( Description de la Cour du Grand-Turc et de 
l'Empire Ottoman), traduit de l'ouvrage de Geuf- 
froi; Bâle, 1577; — traduction allemande de 
Cxlii secundi Curionis Descriptio de Bello 
Melitensi a Turcis gesto Historia Nova; — 
Bâle, 1580, in-fol. ; — traduction allemande de 
lnnoc. Gentiletti Examen Consilii Tridentini; 
ibid., 1587, in-4° ; — Der neuven Welt unndt 
Indianischen Koenigsreichs Neuve unndt 
grùndlïche Bistori von allen Geschichten, 
jffandlung und Thaten der Hispanier unndt 
anderer Voelker (Nouvelle Histoire détaillée du 
Nouveau Monde et du Royaume Indien, traitant 
des Espagnols et d'autres peuples ), fait d'après 
les Res Brasilianorum de Jérôme Benzoni; 
Bâle, 1579, in-fol.; ibid., 1582, in-fol. Cet ou- 
vrage fait partie de la Collection des Grands 
Voyages publiée par Isaac et Théodore de Bry, 

V-u. 

Erseb et Grober, Aîlçemeine Encyklopedie. - Zedler, 
Grosses Oniversai-Lexiton. — JOclier, Allgem. Gelehr- 
Un-Lexikon. 

' ; HONNORAT ( S. -S.)» archéologue français, 
né à Digne, vers 1795. fl étudia la médecine, 
obtint en 1817 le diplôme de docteur, et alla s'é- 
tablir dans sa ville natale. On a de lui : Dic- 
tionnaire Provençal-Français; Digne, 1845- 
1847, 3 vol. in-4°; ce répertoire de la langue 
d'Oc ancienne et moderne contient plus de 
90,000 mots de différents dialectes, leur pro- 
nonciation figurée, leurs synonymes, définitions, 
étymologie, radicaux, équivalents en langues 
modernes, les origines des principales coutumes 
et institutions, une grammaire, plusieurs traités 
et une table bibliographique des ouvrages pro- 
vençaux imprimés depuis le seizième siècle. 
L'auteur a complété son grand dictionnaire par 



un Vocabulaire Fronçais-Provençal; Digne, 
1849, in-4°. P. L— t. 

Louandre et Bonrquelot, Ut Littér. française contem- 
poraine. 

honorât (Saint), archevêque d'Arles, né, 
suivant Baillet, dans la Gaule Belgique, sur les 
confins de la Champagne et de la Lorraine, dans 
la seconde moitié du quatrième siècle, mort, 
suivant tous les légendaires, le 14 ou le 15 jan- 
vier 429. Il était d'une famille consulaire, qui 
était restée fidèle aux anciens dieux. Aussi laissa- 
t-il ses parents, sa patrie, dès qu'il eut embrassé 
la religion des chrétiens. Son frère Venantius 
ayant imité son exemple, ils partirent ensemble, 
sous la conduite d'un saint homme, nommé 
Caprasius, et parcoururent d'abord l'Achaïe. 
Mais Venantius étant mort durant ce voyage, 
dans la ville de Méthone , Honorât et son guide, 
renonçant à pousser plus loin leur pèlerinage, 
reprirent le chemin des Gaules, et s'arrêtèrent 
dans la mer de Provence, en vue de Cannes, 
dans l'Ile sauvage de Lérins, où ils fondèrent 
un monastère qui a joui plus tard d'une grande 
et juste célébrité. C'est, en effet, de ce monas- 
tère que sont sortis , durant les cinquième et 
sixième siècles , les plus fameux docteurs , les 
évéques les plus lettrés de la Gaule méridionale. 
Léonce, évêque de Fréjus, qui aimait Honorât, 
l'avait aidé dans l'exécution de sa pieuse entre- 
prise. On a coutume de faire remonter la fondation 
du monastère de Lérins à l'année 410 ; mais cette 
date est fort incertaine. Quoi qu'il en soit, Pa- 
trocle, archevêque d'Arles, ayant été massacré 
par un soldat barbare en l'année 426, suivant la 
chronique de Prosper, Honorât fut appelé de 
Lérins par les suffrages de l'église d'Arles et 
placé sur le siège vacant. Mais la mort vint bientôt 
l'y trouver, et les actes de son court pontificat 
sont demeurés inconnus. La fondation de Lérins 
est ce qui a le plus contribué à rendre son nom 
célèbre ; aussi, vers Tannée 1391, ses restes mor- 
tels forent-ils transportés dans cette lie. Cassien 
lui a dédié dix-sept de ses Conférences. 

Tous les écrits de saint Honorât sont perdus* 
Au milieu du cinquième siècle , dans les actes du 
concile d'Arles, il est fait mention de la règle qu'il 
avait imposée aux religieux de Lérins. Mais 
cette règle n'est pas non plus parvenue jusqu'à 
nous. B. H. 

Gallia Christiana, 1 1, col. M7. — nta 5. Honorât* 
ab IMario conscripta , \a Appendice Opervm S. Leo- 
nis. — vioceoUas Berralts, Chronologia Lirinensis. 

honorât ( Saint), évêque de Marseille, né 
dans la première moitié du cinquième siècle, 
mourut après l'année 492, puisqu'il compta lé 
pape Gélase I er parmi ses admirateurs. On a 
lieu de supposer que cet illustre docteur avait 
fréquenté dans sa jeunesse l'école de Lérins. 
Suivant Lenain de Tillemont, son épiscopat 
commence à Tannée 475. C'est une date conjec- 
turale. Cependant cette conjecture, admise par 
les auteurs duGallia Christiana, parait beau- 
1 coup mieux fondée que les assertions du Pi Le- 



79 

cointe au sujet des évoques Dalmatios et Anto- 
ninus. De tous les anciens annalistes Gennadios , 
ou le continuateur de Gennadius, est celui qui a 
le plus amplement parlé de saint Honorât , évêque 
de Marseille. Il loue la facilité de son éloquence, 
et la variété de son savoir, comparant sa bouche 
à une bibliothèque, Os suum quasi armarium 
scripturarum aperit. Enfin, après avoir parlé 
de ses Homélies fort goûtées par le pape Gélase, 
l'historien, qui est un contemporain , raconte 
que le saint évêque emploie présentement ses 
loisirs à composer une vie de saint Hilaire d'Arles. 
N'est-ce pas cette Vie de saint Hilaire qui a été 
publiée par Vincent Barrai dans sa Chronologie 
de Lérins? On peut le croire. Plusieurs criti- 
ques attribuent pourtant le même ouvrage à 
l'évéque Viventius. B. H. 

Gallia Christtana. L I, coL 636. — Bartbius, Advert., 
Ut. 88. cli. 8. 

* honorâtes ANTONINUS, écrivain ecclé- 
siastique latin, vivait dans la première partie du 
cinquième siècle. Il était évêque de Constantia en 
Afrique pendant la persécution des catholiques 
par le Vandale Genséric. On a de lui une noble 
et touchante lettre (Epistola ad labores pro 
Christo fer endos exhortatoria) , écrite vers 
437-440, et adressée à un Espagnol nommé Ar- 
cadius, qui avait été banni pour sa foi. L'évéque 
l'encourage à supporter de plus rudes épreuves 
encore pour la cause de la vérité. La lettre d*Ho- 
noratus, publiée d'abord par J. Sichardus dans 
son Antidot. contraomnes hxreses ,Bâle, 1528, 
in-fol., a été insérée dans la Magna BibL Pa- 
trum , Cologne, 1618, in-fol., vol. V, p. 1 1 1 ; dans 
laBiW. Pat; Paris, 1644 et 1654, vol. IU; dans 
la Bibliot. Patr. Max. ; Lyon, 1677, in-fol.; 
vol. VIH, p. 665. Y. 

Bulnart, Hittoria Persecutlonis Vandalicœ; Parte, 
1694, par. II, C. 4, p. 483. 

honoré ou honorius, scolastique de l'é- 
glise d'Autun , naquit plutôt en France qu'en Al- 
lemagne , malgré les dires de l'abbé Lebeuf , et 
mourut en un lieu inconnu, après l'année 1130. 
On possède en général peu de renseignements sur 
la vie des écrivains qui ont paru dans le douzième 
siècle ; il n'y en a peut-être pas un autre sur le- 
quel on en ait moins conservé que sur Honoré 
d'Autun. C'est un reproche qu'on peut adresser 
à sa modestie. Il a, en effet, parlé de lui-même 
dans son catalogue des Flambeaux de V Église 
(DeLuminaribus Ecclesix ) ; mais il l'a fait avec 
tant de concision et de sobriété, qu'on lit seule- 
ment dans ce passage les titres de quelques-uns 
de ses livres , et le nom du prince sous lequel 
il a vécu. Honoré d'Autun occupe cependant , 
par le nombre et la diversité de ses ouvrages , 
une place considérable dans l'histoire littéraire 
du douzième siècle. En voici la liste : 

Elucidarium. Cet ouvrage, tour à tour at- 
tribué à saint Anselme de Cantorbéry, à saint 
Augustin, à Guibert de Nogent, à Pierre Abélard 
lui-même, parait devoir être désormais maintenu 
sans contestation au scolastique d'Autun. C'est 



HONORAT — HONORÉ 



80 

un traité sommaire de théologie , dans lequel ont 
a remarqué quelques opinions paradoxales. Ce- 
pendant il a eu longtemps une grande renommée, 
et on l'a traduit plusieurs fois en français et en 
allemand. Il a été publié sous le nom ide saint 
Anselme, à Paris, en 1560, in-8°, par les soins 
de Claude d'Espence; — In Cantica Cantico- 
rum et Sigillum Marix, écrits de même nature, 
qu'il faut joindre l'un à l'autre, et qui ont été 
imprimés pour la première fois à Cologne en 
1540, in-8°; — Jnevitabilis , ou Dialogus de 
gratia et liber o arbitrio, dans les Biblio- 
thèques des Pères; — Spéculum Ecclesiœ, 
recueil de sermons , publié à Cologne en 1531 et 
à Baie en 1544; — Gemma Animas, somme li- 
turgique souvent imprimée séparément et dans 
les Bibliothèques des Pères; — Sacramehta- 
rius, autre opuscule liturgique , inséré dans les 
Anecdota de B. Pez, t. II, col. 249; — Hexa- 
meron, dissertation sur l'ouvrage des Six Jours, 
que Bernard Pez a publiée dans le même tome 
de ses Anecdota, col. 70; — Eucharisticon 9 
exposition de la croyance de l'Église sur l'eucha- 
ristie , dans le même volume du même recueil , 
col. 348 ; -— Tractatus de 3eo et Vita eeterna, 
dialogue attribué plus d'une fois à saint Augus- 
tin, et imprimé dans l'appendice de la dernière 
collection de ses Œuvres, t. VI, p. 169; — 
Imago Mundi 9 abrégé de cosmographie et d'his- 
toire, qui a été longtemps dans toutes les mains. 
Les exemplaires manuscrits en sont,, en effet, 
très-nombreux, et l'on en compte sept éditions ; — 
De Apostolico et Augusto , traité de la puissance 
du pape comparée à celle des rois, dans les Anec- 
dota de B. Pez, t. H, p. 180. Honoré s'y montre 
partisan extrême des droits du saint-siége. Qu'il 
conteste aux rois le droit de conférer les dignités 
ecclésiastiques , on ne peut s'en étonner : depuis 
le concordat de François I er , et sous le régime des 
contrats analogues , qui , plaçant l'Église dans 
l'État , ont fait de l'épiscopat une fonction civile, 
c'est, en effet, au prince séculier qu'appartient la 
collation des titres ecclésiastiques : mais cet état 
de choses n'est certainement pas régulier. La lo- 
gique d'Honoré est plus téméraire lorsqu'il ré- 
clame pour les papes le droit de choisir, de nom- 
mer et d'instituer les rois. C'est ce qu'ils n'ont ja- 
mais fait sans encourir le reproche d'usurpation; 

— Scala Cœli, publié par B. Pez, Anecdota, 
t. D, p. 157 ; — Elucidatio Psalterii, dans le 
même tome du même recueil , p. 96 ; — De Lu- 
minaribus Ecclesiœ, compilation bibliogra- 
phique, en quatre parties, dont la dernière, la 
plus originale, est aussi la plus intéressante. Ce 
catalogue, qui a été souvent imprimé, se trouve no- 
tamment dans la Bibliothèque des Pères, t. XX 
de l'édition de Lyon; — De Solis Affectibus, 
dans le même recueil, col. 1020 du tome XX; 

— De Hœresibus, même volume, col. 138; — 
Summa duodecim Quaesllonum, dans les 
Anecdota de B. Pez, t, 11, p. 201 ; — Dialogus 
inter Magistrum et JHscipulum, même vo- 



81 HONORÉ 

lume, p. 215 ; — De RxUio et Palria Animx, 
même volume, p. 224; — De Libero Arbitrio, 
ibid., p. 237; — De Vita Claustri, même 
volume. Telle est la liste complète des ou- 
vrages d'Honoré d'Autun qui ont été reproduits 
par l'impression. Les auteurs de Y Histoire lit' 
ter aire ajoutent à ce catalogue le traité De Phi* 
losophia Mundi, publié sous le nom d'Honoré 
dans la Bibliothèque des Pères, une Liste chro- 
nologique des papes , et un Commentaire sur les 
Proverbes eXYBcclésiaste. Les deux premiers de 
ces écrits ne doivent pas être séparés ; ce sont 
deux parties d'un même ouvrage. Mais cet ou- 
vrage n'est aucunement de la plume d'Honoré. 
Nous en avons déjà nommé l'auteur : c'est Guil- 
laume de Conches (voir son article). Quant au 
Commentaire sur les Proverbes, c'est un plagiat, 
et on ne prouve pas d'une manière suffisante que 
ce plagiat ait été réellement commis par Honoré 
d'Autun. Les auteurs de Y Histoire littéraire 
nous ont, en outre, donné un long catalogue 
d'ouvrages inédits que divers bibliographes étran- 
gers ont attribués à Honoré d'Autun. Il est re- 
grettable que ce catalogue n'ait pas encore subi 
l'épreuve d'un contrôle scrupuleux , car il peut 
contenir diverses erreurs. Dès à présent nous en 
signalerons une : il s'agit des Gloses sur Platon. 
Ces Gloses, mentionnées dans le De Philosophia 
Mundi, ne sont pas d'Honoré d'Autun, mais de 
Guillaume de Conches. Ajoutons qu'après avoir 
été longtemps profondément ensevelies, comme 
le disent les auteurs de Y Histoire littéraire, 
elles ont été retrouvées de nos jours. B. H. 

Cas. OadlD, De Script. Ecoles. — Lebeaf, Dls&rt.; 1. 1, 
p. S5*. - Hist. imér. de la France, t XII, p. 165. 

* honoré I er , prince de Monaco, mort en 1 581 . 
H succéda à son père Lucien, assassiné en 1525 
par Bartolomeo Doria, marquis de Dolce-Aqua. 
Fort jeune encore, il fut placé sous la protection 
de l'empereur Charles-Quint, et le servit utile- 
ment dans ses guerres. Il se distingua surtout à 
la prise du fort de La Goulette et à celle de Tunis, 
en 1535. 11 signala également sa valeur à la tête 
de ses galères contre les Turcs, à la bataille de Lé- 
pante ( 7 octobre 1571 ). 11 avait épousé, en 1545, 
sa cousine IsabeEa Grimaldi, dont il eut sept ou 
huit enfants. Son fils Charles 11 lui succéda. 

* honoré il , prince de Monaco, petit-fils du 
précédent, né en 1599, mort le 10 janvier 1662. Il 
succéda en 1604, sous la tutelle de son oncle Fré- 
déric Lando, à son père Hercule, troisième fils 
d'Honoré F r . Pendant son gouvernement, Lando 
consentit à recevoir une garnison impériale dans 
Monaco ; mais Honoré devenu majeur crut que les 
véritables intérêts de son pays étaientde s'appuyer 
sur la France ; aussi se plaça-t-il sous la protec- 
tion de Louis XIII par un traité conclu à Péronne. 
le 17 septembre 1641. Pour indemniser Ho- 
noré n de ses domaines situés dans le duché 
de Milan et le royaume de Naples , domaines 
qui ne devaient pas manquer dtètre confis- 
qués par les Espagnols aussitôt le traité connu, 



82 
le roi de France lui donna en propriété pour 
lai et ses descendants, avec titre de pairie, le 
duché de Valentinois, la baronnie de Buis en 
Dauphiné, la seigneurie de Calvinet en Au- 
vergne, et le comté de Cardaler en Lyonnais. 
En 1642, Honoré, au milieu de la nuit, attaqua 
la garnison espagnole de Monaco, et l'obligea à 
évacuer sa capitale. Depuis lors il se montra fi- 
dèle allié de la France, qui le maintint dans sa 
puissance et sa liberté. Honoré n avait épousé 
Ippolita Trivulce, à laquelle Louis XIV adressa 
ses hommages avant de les fixer sur madame de 
Montespan. Honoré H eut de ce mariage Hercule, 
mort en 1651, et trois filles, dont la seconde, Te- 
resa-Maria, épousa, en 1672 , Francisco-Sigis- 
mondo,duc d'Est. Ce futLouis Grimaldi,fils d'Her- 
cule, qui succéda à son grand-père Honoré H. 

* honoré m ( Camille-Léonor), prince de 
Monaco, né le 10 septembre 1720, mort en 1780. 
Il succéda, le 29 décembre 1731, à sa mère Louise- 
Hippolyte, sous la tutelle de Jacques-François- 
Léonor de Goyon-Matignon, comte deThorigny, 
son père. H entra au service de la France, et en 
1746 it fut dangereusement blessé à la bataille 
de Rocoux. A Lawfeld (2 juillet 1747), son che- 
val fut tué sous lui par un boulet. Le 23 avril 
1751 il devint possesseur du duché de Valenti- 
nois par la mort de son père. En 1757 il épousa 
Marie-Catherine de Brignole, nièce d'un doge 
de Gênes. En novembre 1760, il termina la con- 
testation de territoire qui subsistait depuis 
plusieurs siècles entre la communauté de la Tur- 
bie (comté de Nice) et celle de Monaco, par un 
traité conclu avec Charles-Emmanuel IH, roi de 
Sardaigne. Il laissa deux fils, dont l'aîné, Joseph- 
Marie- Jérôme- Honoré, lui succéda. 

* honoré iv ( Charles-Maurice- Anne ), 
prince de Monaco , duc de Valentinois , né le 
17 mai 1758, mort en 1819. Après un règne pai- 
sible, il vit, le 14 février 1793, sa principauté 
réunie à la république française. Il épousa > le 
14 juin 1777, Louise-Félicité-Victoire d'Aumont, 
dont il eut deux fils, Honoré-Gabriel et Tan- 
crède-Florestan-Hoger -Louis , qui, l'un après 
l'autre , lui succédèrent. 

* honoré v (Gabriel), prince de Monaco, 
duc de Valentinois, né en 1778, mort en 1841. n 
fut nommé pair de France le 4 juin 1814, et après 
te traité de Paris il rentra dans l'héritage paternel. 
Mais le 20 novembre 1815 sa principauté fut 
placée sous la protection de la Sardaigne. Par sa 
déclaration du 8 novembre 1817, le roi Emma- 
nuel I er reconnut la souveraineté d'Honoré V, en 
8eréservantcependantledroit de l'occuper mili- 
tairement. Honoré V se fit surtout connaître par 
une monnaie de bitlon représentant 5 et 10 cen- 
times, et qui pendant quelque temps inonda la 
France. Cette monnaie, débitée avec prime, pré- 
occupa assez le gouvernement de Louis-Philippe 
pour qu'il crût devoir en interdire la circulation. 
Honoré V est auteur d'un ouvrage Sur le Paupé- 
risme en France et les moyens d'y remédier; 



as 

Paris, 1939. H mourut i 



HONORÉ — 



ï enfants, et eut pour 
successeur son frère ïlorestan 1 er . 

Mémoires historiques de Louis X/f% t. IF, p. Mo. — 
Slsmondf, Histoire des Français, L XXV, p, 170. — Dic- 
tionnaire de la Conversation. 

honoré. Voy. Honorius. 

HOSOAÉ PB SAIBTB-MARIB (Le P. BlaiSÔ 

Vauxfxlb, en religion), théologien français, né 
à Limoges, le 4 juillet lôôl, mort à Lille, en 1729. 
11 entra dans Tordre des Carmes, à Toulouse, en 
1671, et fut envoyé comme missionnaire dans le 
Levant De retour en France, au bout de quel- 
ques années, il remplit les postes de prieur, de 
provincial et de visiteur général des trois pro- 
vinces. On a de lui : Expositio Symboli Aposto- 
lorum dogmatioa y hsstorico-hxretica, histo- 
rico-positiva, et scholastica, etc.; Perpignan 
1689; — Dissertation apolégétique sur la 
Théologie mystique; Bordeaux, 1701, in-12. 
Cette dissertation n'était que le prélude de Fou* 
vrage suivant : Traditions des Pères et auteurs 
ecclésiastiques sur la Contemplation; Paris, 
1706, 2 vol. in-8% livre qui a été traduit en ita- 
lien et en espagnol ; l'auteur y ajouta en 1701 un 
3 e volume sous ce titre : Des Motifs et de la 
Pratique de f amour de Dieu; Paris, 1713, 
in-8° ; — Traité des Indulgences et du Jubilé; 
Bordeaux, 1701, in-12; 3*édit, Malines, 1735, 
in-12; — Réflexions sur les règles et sur Vu- 
sage de la critique touchant l'histoire de l'É- 
glise, les ouvrages des Pères, les actes des 
martyrs, les vies des saints, etc.; Paris et 
Lyon, 1713-1720, 3 vol. in-8»; cet ouvrage est 
rempli de recherches et d'observations curieuses 
et savantes, la plupart sur des points impor- 
tants ; mais l'auteur manque parfois de critique, 
quoiqu'il donne de bonnes règles sur la critique 
elle-même, principalement dans son premier vo- 
lume, le plus estimé ; — Dissertation histor. et 
critique sur la Chevalerie ancienne et moderne, 
séculière et régulière; Paris, 1718, in-4% avec 
fig.j — Vie de saint Jean de la Croix; Tour* 
nay, 1724; — Observations sur l'Histoire ec- 
clésiastique de Fleury; Malines, 1726-1729. 
La critique porte principalement sur ce que 
Fleury dit de l'Église romaine , de la dignité et 
de l'autorité des papes, de la déposition des 
évéques , des appels au souverain pontife , de la 
soumission due aux canons, etc. Le P. Honoré 
de Sainte-Marie prit une part active aux querelles 
religieuses de son temps. Il défendit la bulle 
Vnigenitus dans des écrits intitulés : D\fficul~ 
tés proposées à l'auteur de l'Examen théolo- 
gique, etc.; Paris, 1714, in-8*; — Dissertation 
sur la constitution Unigenitus; Bruxelles, 
1727, in-4°. Il fit paraître aussi des Observations 
dogmatiques , histor. et critiques sur les ou- 
vrages de Jansenius, de Saint- Cyran, d'Ar» 
nault, du P. Quesnel et de Petitpied;Ypres, 
1724, in-4°. Guyot de Fehe. 

Le P. Martial, Biblioth. Seriptorum vtriusqwcongre- 
gationis et sessus CarmeUtarwn excalceatorum. 



HONORIUS 84 

HONORIA. Voy. GlATÀ, 

honorius ( Flavius-Augustus ) , empereur 
d'Occident, second fils de Théodose par sa pre- 
mière femme $li* Flacilja, né à Constantinople, 
le 9 septembre 384, mort à Ravenne, le 27 août 
423. Il fut décoré du consulat k l'âge de deux ans, 
et reçut à la même époque le titre de césar. En 
389 U accompagna son frère à Rome, et en 393 
il fut déclaré auguste. En 394, consul pour la 
seconde fois, il alla rejoindre à Milan ( qu à Rome, 
selon Zosime) son père, qui le proclama solen- 
nellement empereur d'Occident et lui donna en 
partage l'Italie, les Gaules (avec l'Espagne et la 
Bretagne), l'Afrique et l'Illyrie occidentale. Il le 
plaça en môme temps sous la tutelle énergique de 
Stilicon, qui, par son mariage avec Serena ( 1 ) , nièce 
de Théodose, était cousin du jeune empereur. 
Théodose mourut peu après cet arrangement, 
le 17 janvier 395. Honorius, qui n'avait pas en- 
core onze ans , et qui joignait à son extrême 
jeunesse beaucoup d'apathie, ne pouvait être 
empereur que de titre. Tout le pouvoir apparte- 
nait à Stilicon, qui en fit vigoureusement usage 
contre les barbares. Honorius résida à Milan, où 
il fut consul pour la troisième fois en 396 et pour 
la quatrième en 398. Dans cette môme année il 
épousa sa cousine Maria, fille de Stilicon et de 
Serena. Ce mariage de pure forme fut célébré par 
Claudien ( De Nuptiis ffonorii et Mariœ, et 
Fescennina in Nuptias Honor. et Mar.), qui 
prédit aux jeunes époux une brillante postérité. 
Le vœu du poète ne se réalisa pas, et Maria mou- 
rut quelques années après, sans que le mariage 
eût été consommé. Des voyages de l'empereur à 
Ravenne, à Brescia, à Vérone, à Padoue, à 
Altinum , et surtout un redoublement de persé- 
cution contre les païens marquèrent l'année 399. 
Depuis la conversion de Constantin le paganisme, 
abandonné par les empereurs, avait rapidement 
décliné malgré le patronage du sénat romain. Au 
lieu de le laisser s'éteindre tranquillement, Gra- 
tien et Théodose résolurent de précipiter sa ruine 
par des ordonnances qui atteignaient les prêtres 
païens dans leur fortune et leur sûreté. Arcadius 
entra avec ardeur dans la môme voie d'intolé- 
rance, et Honorius l'y suivit. Par une loi datée 
de Rome le 29 janvier 399, il confisqua les reve- 
nus des temples au profit de l'armée, ordonna 
la destraction des statues et de tous les objets 
du culte païen; les temples eux-mêmes furent 
convertis en églises ou en édifices d'utilité pu- 
blique. Enfin tous les rites païens furent prohi- 
bés. Cet édit, qui consommait la ruine du paga- 
nisme, froissait trop d'intérêts et de croyances 
pour ne pas rencontrer de l'opposition. Il souleva 
un mécontentement qui produisit des révoltes , 



(l) Serena était fille d*an frère de Théodoae nommé Ho- 
norius et mort ayant 8*1. Honortna laissa outre Serena une 
autre fille, appelée TbermantU, qui fut mariée i un offi- 
cier dont le nom est Inconnu {voy. Zosime. V, *,) ; Clan- 
dlen, Laus Serense ,• Du Cange, FamiL Bytant., p. 75 ; TU" 
lemont, Histoire des empereurs, vol. V. t p. iso. 



85 



HONORIUS 



86 



facilita les invasions des barbares et hâta la ruine 
de l'empire. 

En 400 les Visigoths, sous le commandement 
d'Alaric,et peut-être à l'instigation des ministres 
d'Arcadius, traversèrent les Alpes Juliennes et 
mirent le siège devant Aquilée. En 402 ils rava- 
gèrent la Vénétie et la Ligurie. Rome s'alarma et 
répara ses murailles ruinées. L'empereur, qui 
avait d'abord songé à s'enfuir en Gaule, trouva 
plus sûr de s'enfermer dans Ravenne, qui devint 
dès lors la résidence de la cour d'Occident. L'em- 
pire fut momentanément sauvé par la victoire 
de Stilicon à Pollentia (Polenza sur le Tanaro, 
dans le Piémont), le 29 mars 403. Pendant ces 
années de crise l'histoire ne trouve rien à dire 
d'Honorius, sinon qu'il fut consul pour la cin- 
quième fois en 402, et pour la sixième en 404, 
et que dans son séjour à Rome en 404 il supprima 
les combats de gladiateurs. Cet acte, inspiré 
par le christianisme, fait honneur à Honorius ; 
malheureusement, la douceur habituelle de son 
caractère tenait à sa pusillanimité et à son iner- 
tie. La terrible invasion des Goths, qui envahirent 
l'Italie en 405, au nombre de 200,000 hommes, 
et sous le commandement de Radagaise, ne le tira 
pas de son apathie. Renfermé dans Ravenne, il 
laissa Stilicon vaincre les Goths à Fésules en 406. 
La patt qui suivit la victoire de Fésules permit 
à Honorius d'intervenir à Constantinople en fa- 
veur de saint Chrysostome, et à Stilicon de né- 
gocier avec Alaric afin d'enlever l'Illyrie à l'em- 
pire d'Orient. Pendant que l'empereur et le 
ministre s'occupaient à des objets secondaires , 
la Gaule était affreusement ravagée par les bar- 
bares. Les Alains, les Suèves et les Vandales 
s'étaient déjà avancés jusqu'au cœur de ce pays ; 
les Alemanes et les Bourguignons passèrent le 
Rhin à leur tour. Les Alemanes s'établirent sur 
les bords du fleuve depuis Bâle jusqu'à Mayence. 
Les Bourguignons, sous la conduite de leur roi 
Gondicaire, se rendirent mattres de l'Helvétie, et 
se répandirent dans le pays des Séquaniens et 
des Éduens, jusqu'à la Loire et à l'Yonne. Les 
troupes romaines de la Grande-Bretagne, ne comp- 
tant plus sur le faible monarque qui régnait à 
Ravenne, se donnèrent pour empereur un officier 
nommé Marc, dont ils se défirent au bout de 
quelques mois, puis Gratien, qui eut le même 
sort, et enfin Constantin, un simple soldat, plein 
de courage et de talent. Cet usurpateur conçut 
l'idée hardie de mettre sous sa domination tout 
l'empire d'Occident. TJ reconquit rapidement la 
plus grande partie de la Gaule sur les barbares, en 
408, et envoya son fils Constant s'emparer de l'Es- 
pagne. L'homme le plus capable de défendre l'em- 
pire venait de succomber à une intrigue de palais. 
Un officier de la maison impériale, nommé Olym- 
pius, exploitant avec habileté le mécontentement 
de farinée et la crainte que causait à Honorius 
l'ambition effrénée de Stilicon, obtint du faible 
empereur l'ordre de tuer le grand général qui 
deux fois avait sauvé l'Italie. Stilicon eut la tête 



tranchée le 23 août 408 (1). Cette exécution n'a- 
jouta rien à l'autorité d'Honorius, et ouvrit l'I- 
talie aux barbares. Tandis que le lâche prince 
s'abritait derrière les murs de Ravenne, Alaric 
mit Rome à rançon en 408, s'en empara en 
409, et plaça Attale sur le trône. La cour de Ra- 
venne était un théâtre d'intrigues et de meurtres . 
L'assassin de Stilicon, Olympius, était supplanté 
par Jovius, qui faisait bientôt place à Eusèbe, le- 
quel ne tardait pas à être mis à mort à l'insti- 
gation d'AUobichus. Des hasards heureux sau- 
vèrent Honorius d'une ruine complète. La fidélité 
d'Héraclien lui conserva l'Afrique. Quatre mille 
auxiliaires venus de Constantinople défendirent 
Ravenne contre les Visigoths. Alaric, mécontent 
d' Attale, lui enleva la pourpre impériale en 410, 
et ne la lui rendit que pour l'en dépouiller en- 
core. Il marcha ensuite sur Rome, dont il s'em- 
para pour la seconde fois, et qu'il mit au pillage. 
Il survécut peu à sa victoire, et son frère Ataulphe 
conduisit les Visigoths hors de l'Italie. L'usur- 
pateur Constantin, qu'Honorius avait été forcé 
de reconnaître, pénétra jusqu'à Vérone; puis, 
effrayé de l'exécution d'AUobichus, avec lequel il 
était en correspondance, il rentra en Gaule, fut 
assiégé dans Arles par le général Constance, et 
se rendit en 411, à condition qu'il aurait la vie 
sauve. A peine arrivé en Italie, il fut égorgé par 
l'ordre d'Honorius. 

La défaite de Constantin plaça Constance au 
premier rang. Aspirant à la main de Galla Pla- 
cidia, sœur de l'empereur, il défendit vaillamment 
un trône dont il se regardait comme le futur 
possesseur. Un certain Jovinug, qui commandait 
une forteresse sur le Rhin, se révolta, eut des 
succès éphémères, et fut tué en 412 ou 413. 
Héraclien, devenu rebelle à son tour, eut le même 
sort. Ataulphe, qui avait proclamé Attale empe- 
reur pour effrayer Honorius, abandonna bientôt 
sa créature, et épousa Galla Placrdia. Il désirait 
la paix ; mais Constance, voyant dans Ataulphe 
un rival redoutable , le chassa de la Gaule et le 
rejeta en Espagne, où le roi visigoth fut assas- 
siné peu après, en 415. Attale tomba entre les 
mains du vainqueur, et Honorius se contenta 
d'exiler l'empereur déchu. Une amnistie générale 
rassura les complices, désormais soumis, des di- 
vers usurpateurs. Honorius fut consul en 407, 
409, 411 (ou 412), 415,417. Le mariage de 
Constance avec Galla Placidia en 4 i 7, le douzième 
consulat d'Honorius en 418, le traité qui céda 
aux Visigoths la Gaule méridionale avec Tou- 
louse pourcapitale, l'occupation de ta rive gauche 
du bas Rhin par les Franks, l'émancipation de 
PArmorique, l'obscure usurpation (418-422 ) de 
Maxime dans l'Espagne , ravagée par les Suèves , 
les Alains, tes Vandales et les Visigoths, l'as- 



ti) Sa fille Thermantta qa'Honortos Tenait d'épouser 
fttt aussitôt répudiée et mourut sept ans après. Sa femme 
Sertna , reléguée a Rome , y fat mise à mort pendant le 
siège de cette ville par Marie, sous prétexte qu'elle cor- 
respondait avec les Goths. 



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sociation de Constance à l'empire en 421 , sa 

mort peu de mois après, le treizième consulat 
d'Honorius en 422, la brouîllerie de l'empereur 
et de Placidia Galla, qui s'enfuit à Constanti- 
nople avec ses deux enfants, Valentimen et Ho- 
noria, en 423, tels sont les seuls faits notables 
que présentent les dernières années d'Honorius. 
Il mourut d'hydropisie à l'âge de trente-neuf 
ans, après vingt-huit ans et huit mois d'un règne 
désastreux. On montre encore à Ravenne son 
mausolée que l'on suppose avoir été bâti par 
l'ordre de sa sœur Placidia , et l'on pense qu'il 
fut enseveli dans cette ville, bien qu'on ait 
cru avoir découvert en 1542 son corps, avec 
ceux de ses deux femmes Maria et Thermantia, % 
dans l'église de Saint-Pierre à Rome. Le long 
règne d'Honorius est remarquable par le dé- 
membrement .de l'empire d'Occident. Dans cette 
crise terrible, au milieu des hardis aventu- 
riers Stilicon, Alaric, Constantin, Constance, 
qui protégèrent ou attaquèrent les débris 'de la 
puissance romaine , on distingue à peine l'insi- 
gnifiante figure de l'indigne fils de Théodose. 
Timide sans bonté, cruel même quelquefois par 
lâcheté, Honorius resta un enfant jusqu'à la fin 
de sa vie, et peut-être dut-il à sa faiblesse de 
mourir sur le trône. Les eunuques et les aven- 
turiers militaires qui se partageaient ou se dis- 
putaient le pouvoir dédaignèrent de briser un 
prince imbécile, qui fut toujours leur jouet et 
leur instrument. Y. 

Zoslme, V, 68, 59; Vî. - Orose, VII, 86-W. — Olym- 
piodore, dans la Biblioth. de Photius, cod. 80. -Claadien, 
Opéra. — Mareellin, Chron. — Idace, Fasti et Chroni- 
con. — Prosper d'Aquitaine, Chron. — Prosper Ttron, 
Chr. — Cassiodore, Chron, — Chronicon Paschale, 
Toi. I, p. 868-579, édit. de Bonn. — Procope , De Bello 
Fandalico, 1, 1-3. — Jornandès, Dé Reb. Get. t c. 19-82. — 
Socrate , Hist. Ecoles., VI, 1 ; VII, 10. - Sozomène, Hist. 
Eccl., VIII, i ; IX. *, 6-16. - Théodoret, Hitt. Eccl., V, 86. 
— Tkéophane, Chronog., p. 116-130, «dit. de Bonn. — Zo- 
naras, XIII, si. — Godefroy, Chronol. Cod. Theodos. — 
Tillemont, Histoire des Empereurs, vol. V. — Gibbon, 
History of Décline and Fall of Roman Empire , ch. S9, 
80, 81, 88. — Eckhel, Doctrina Fummorum, vol. vin, 
p. 171. — . On Cange , Fam. Byzantines. — Le Beau , His- 
toire du Bas-Empire , t. V, édlt. de Saint-Martin. 

honorius julius, géographe latin, d'une 
époque incertaine. On a sous son nom un court 
traité géographique publié pour la première fois 
par J. Gronovius, dans son édition de Pompo- 
niusMela;Leyde, 1685, d'après un manuscrit 
imparfait de la Bibliothèque royale de Paris. 
Dans ce petit traité, qui porte le titre de Julii 
Honorii oratoris Excerpta qu& adcosmogra- 
phiam pertinent, le monde se divise en quatre 
océans : l'oriental , l'occidental , le septentrional, 
le méridional (Oceanus orientalis, occidentale , 
septentrionalis, meridianus). On y trouve un 
catalogue des mers, lies, montagnes, provinces, 
villes, rivières, nations contenues dans chacune 
de ces régions. Ce catalogue est une simple énu- 
mération, excepté pour les rivières, dont la 
source, l'embouchure et quelquefois la longueur 
sont spécifiées. On ne sait rien de Julius Hono- 
rius, qui parait être le même que le Julius Ora- 



HONORIUS 88 

tor mentionné par Cassiodore (JWt>* £ec*.,c. 25). 
Sa Cosmographie servit de base à une compi- 
lation qui, successivement agrandie, devint la 
Cosmographie d'Éthicus (voy. ce nom). Y. 
Wesseling, Préface de son édition des Itinéraires ro- 
mains; Amsterdam, 1786, in-* . — Brandis, Das geo- 
graphische Lehrbuch des Julius Honorius, dans le Bhein. 
JtftU.,1858, L IX, p. 198. 

honorius I er , soixante -neuvième pape, 
originaire de la Campanie et fils du consul Pé- 
trone, successeur de Boniface V, élu le 14 mai 
626, mort le 12 octobre 638. L'Église était 
alors divisée par l'hérésie des monothélites, 
dont Sergius, patriarche de Constantinople, était 
le chef. H soutenait qu'on ne devait reconnaître 
à Jésus-Christ qu'une seule opération et qu'une 
seule volonté, conséquence de l'unité de per- 
sonne; c'était nier que le Christ eût été réelle- 
ment homme, puisqu'on supposait ainsi son 
incarnation opérée sans volonté. Sergius avait 
déjà mis dans ses intérêts l'empereur Heraclius; 
il résolut de gagner Honorius. Dans sa lettre, 
il s'efforça de prouver que plusieurs Pères de 
l'Église avaient enseigné une seule opération, et 
qu'aucun n'avait parlé de deux ; il ajouta qu'a- 
près tout il n'y avait rien à craindre en cette 
occasion, et beaucoup à gagner ; car une franche 
déclaration de principes en ce sens ferait ren- 
trer les eutychéens dans le sein de l'Église. Ho- 
norius, trop confiant, repoussa les avis de So- 
phrone qui combattait le monothélisme, et 
répondit en ces termes : « Nous confessons une 
seule volonté en Jésus-Christ, parce que la Di- 
vinité a pris, non pas notre péché, mais notre 
nature telle qu'elle a été créée avant que le 
péché l'eut corrompue..». Nous devons rejeter 
ce3 mots nouveaux qui scandalisent les églises, 
de peur que les simples, choqués de l'expres- 
sion des deux opérations, ne nous croient nes- 
toriens , ou ne nous croient eutychéens si nous 
ne reconnaissons en Jésus-Christ qu'une seule 
opération. » Dans sa treizième session , tenue 
le 28 mars 681, le concile de Constantinople 
revint sur cette décision, et Honorius, malgré 
son infaillibilité, fut, quarante- trois ans après sa 
mort, solennellement excommunié. Voici les 
termes même de la sentence : « Avec eux (Ser- 
gius et ses adhérents) nous croyons devoir 
chasser de l'Eglise et anathématiser Honorius, 
jadis pape de l'ancienne Rome, parce que nous 
avons trouvé dans sa lettre à Sergius, qu'il suit 
en tout son erreur, et autorise sa doctrine im- 
pie. » Déjà pourtant, Jean IV (641 ) tout en 
condamnant VEcthèse (Exposition) d'Héraclius, 
qui soutenait le monothélisme, avait cherché à 
défendre Honorius; et saint Maxime (660), éga- 
lement opposé à cette doctrine, avait entrepris 
la même apologie. Honorius envoya en An- 
gleterre saint Birn, qui convertit Cinegiste, roi 
des Saxons; il fit de grandes réparations à plu- 
sieurs églises , et renouvela tous les vases de 
Saint -Pierre. Il eut pour successeur Se vé- 
rin. On a d'Honorius huit lettres dans les Con- 



89 



HONORIUS 



90 



ciles de Labbe, t. V, pi 1681 à 1685 ; deux dans 
Yltalia sacra dlJghelli,t. IV, p. 1085, et une 
épigramme de vingt-cinq vers dans la Biblio- 
thèque des Pères de M. de LaBigne, t. VIII, 
p. 538. Alfred Franklin. 

Labbe, Sacrotancta Concilia; Paris, 1671, 15 yol. In- 
fo!.; L V, p. îrn à 17B3. — Ughelll, Iialia sacra; Venise , 
1717 -w, 10 roi. in-fol. — M. de La Digne, Bibliothèque 
des Pires ; Cologne, 1618, 15 vol. In-fol. — Bruys, Hist. 
des Papes; La Haye, 175*, S voL in-*»; 1. 1. p. fil. - Mer* 
lin, Examen exact et détaillé du fait d'Honorius; 1788, 
In- 11. — Fr. Marchesius,CIf peut Fortium, $ive vindicte 
Honorii papa; Rome, 1680, in-4°. 

honorivs n (Lambert de Fagnan), cent- 
soixantième pape, successeur de Calixte n, né 
dans le comté de Bologne, élu le 21 décembre 
1 1 24, mort au monastère de Saint-André, le 14 fé- 
vrier 1130. Après la mort de Calixte n, les car- 
dinaux élurent Thibaut, cardinal du titre de 
Sainte-Anastasie , qui prit le nom de Célestin; 
mais pendant qu'on chantait le Te Deum destiné 
à remercier Dieu de cette élection, la faction de 
Robert Frangipani proclame Honorius aux cris 
de Lambert, évéque d'Os&e , pape! Thibaut, 
pour apaiser les troubles, renonce volontaire- 
ment au pontificat, et Honorius ceint la tiare. 
Quand il se vit bien affermi sur le trône, il son- 
gea à faire régulariser son élection. A cet effet il 
se dépouille des marques de sa dignité et se pré- 
sente au conclave. Les cardinaux, considérant 
avant tout la paix de l'Église, confirment la 
nomination de Lambert. Roger, comte de Si- 
cile, duc de Ponille et de Calabre, refuse de de- 
mander l'investiture à Honorius qui lui, dé- 
clare la guerre; battu partout, le pape dut bien- 
tôt accepter la paix. En France , le clergé, 
irrité de quelques réformes entreprises par 
Louis VI, se soulève, et Etienne, évéque de Paris, 
excommunie le roi. Honorius déclare l'excom- 
munication abusive; mais saint Bernard prend 
le parti de l'évéque, et écrit au pape lettres sur 
lettres. Louis VI y est traité de persécuteur, 
d'impie, de second Hérode qui cherche à 
étouffer non plus Jésus naissant dans une 
crèche, mais triomphant dans son Église 
(Epist. 49). L'évéque, si bien soutenu, finit par 
l'emporter. Honorius, à la prière de Boleslas, 
duc de Pologne, envoya en Poméranie saint 
Othon, évéque de Bamberg, qui y prêcha la foi 
chrétienne; un siège épiscopal fut établi à VaHis. 
Le concile de ïroyes (13 janvier 1128) donna une 
règle à l'ordre des Templiers, qui avait commencé 
de s'organiser à Jérusalem en 1 1 18. Honorius fut 
enterré à Saint-Jean-de-Latran, et eut pour suc- 
cesseur Innocent HI. On a d'Honorius onze lettres 
dans les Conciles de Labbe, t. X, p. 908 à 912; 
deux bulles et quelques fragments dans Yltalia 
sacra dTghelli, passim. A F. 

Labbe, t. X, p. 908 à 944. - Broya, t II, p. eu. — 
Saint Bernard, Opéra omnia ; Paris, 1690, s vol. In-fol. ; 
EpistoUe 13, 14, 49 ad Honorium — H. Martin , Histoire 
de France; Paris, 18B7 ; t. III. - J.-A. Hartmann, Fit» 
Pontiftcorum Romanorum Fictoris III..» Honorii It..; 
Marbourg, 1789. — Vita Honorii papse //, ex ms. Pan- 
dulfi, Pisani; Fila ejusdemex cardinali Jragonio;àiue 



Muratorl, Rerum Italicarum Scriptores; Milan, 1788» 
87 vol. in-fol.; t. III, p. 480. 

honorius m (Cencio Savelli), cent- 
soixante-quatorzième pape, successeur d'Inno- 
cent III, né à Rome, élu le 18 juillet 1216, mort 
le 18 mars 1227. Les événements qui remplissent 
le pontificat d'Honorius peuvent se ranger sous 
trois titres : intervention en faveur d'Henri III 
d'Angleterre, préparatifs contre la Palestine, 
croisade contre les Albigeois. Jean Sans-Terre 
ayant refusé de reconnaître un archevêque de 
Cantorbéry nommé par Innocent HI, celui-ci 
déclare le trône d'Angleterre vacant, et l'offre 
au fils de Philippe-Auguste, qui accepte. Jean 
effrayé se soumet et donne son royaume au pape; 
ordre au roi de France de renoncer à l'Angle- 
terre. Mais , en dépit du saint-siége, les barons 
anglais chassent Jean, et défèrent la couronne à 
Louis, fils de Philippe-Auguste, dont la femme, 
Blanche de Castille , était petite-fille d'un roi 
d'Angleterre. Louis et son père, quoique excom- 
muniés , continuent leurs armements. Après la 
mort de Jean, les barons reviennent sur leur déci- 
sion, et couronnent Henri HI, son fils. Honorius 
le soutient contre la France. « Qu'on ne nous dise 
pas, écrit-il fièrement, que ce n'est pas à nous 
à prendre la défense de ce roi, sous prétexte 
qu'il s'agit de choses féodales; il a été dit à Jé- 
rémie : Je t'ai établi sur les peuples et les 
royaumes pour arracher et détruire, édifier et 
planter. » Philippe, menacé d'une seconde 
excommunication, soutient pins timidement son 
fils, qui, battu à Lincoln, doit revenir en France. 
Honorius, le lendemain de son sacre, avait écrit 
au roi de Jérusalem pour l'assurer de son zèle 
en faveur des croisés; en effet, il presse le dé- 
part des évêques français, et demande le con- 
cours du roi de Hongrie; puis, voulant donner à 
la croisade un chef puissant , il jette les yeux sur 
Frédéric, roi de Sicile ( voy. Frédéric H ) ; il le cou- 
ronne empereur d'Allemagne, et lui fait prendre 
l'engagement solennel de se transporter en Pa- 
lestine avant deux ans. On sait quels furent, 
sous les pontificats de Grégoire IX et d'Inno- 
cent IV, les suites de cette promesse. En atten- 
dant, Honorius s'occupe des Albigeois; il pro- 
tège la maison de Montfort, et excite contre 
les comtes de Toulouse Philippe -Auguste et 
Louis VJH. En 1226, un légat excommunie Rai- 
mond , et confirme au roi de France le droit sur 
les terres de ce comte. — Honorius, le premier, 
accorda des indulgences dans la canonisation des 
saints. Par une décrétale, il défendit à l'univer- 
sité de Paris d'enseigner le droit civil; mais Ri- 
gord, médecin et historien de Philippe-Auguste , 
nous apprend qu'on n'eut point égard à cette dé- 
fense. Honorius m, on le voit, marcha sur les 
traces d'Innocent III, mais il n'avait ni la même 
ardeur, ni la même capacité; aussi l'autorité su- 
prême qu'il prétendait s'attribuer sur les sou- 
verains reçut-elle quelques atteintes; en Dane- 
mark, par exemple, le comte de Schwerin 



91 



HONORIUS — BONTHEIM 



99 



s'empara du roi Waldemar II et le retint trois 
mois en prison , malgré les instances et les me- 
naces du pape. Honorius mourut après un pon- 
tificat de dix ans et huit mois; il eut pour suc- 
cesseur Grégoire IX. On trouve six lettres 
d'Honorius Iil dans les Conciles de Labbe, 
t. XI, p. 242 à 245, vingt-sept dans Yltalia 
sacra d'Ugheili, passim; dix-neuf dans les His- 
toriés de Duchesne, t. V, p. 861, et quelques 
autres dans les recueils de D. Martêne, de Ba- 
luze, de d'Àchéry, de Waddlng; presque toutes 
d'ailleurs ont été réunies dans l'ouvrage d'Inno- 
cent Ciron, Compilatio Epistolarum décréta- 
lium Honorii 111; Toulouse, 1645, in-fol. On a 
publié sous son nom : S. D. Honorii papm ïtl 
adversus tenebrarum principem et ejus ange- 
los Conjurationes, extractœ ex originali Romse 
servato, anno 1629 : médiocre compilation, 
plusieurs fois réimprimée avec le titre Orimore 
d'Honorius. A. F. 

Labbe, t. XI, p. SW-S09. - Claconl, Hist Pontifie- - 
H» Martin , t. IV. — Dochesne , Historiés Francorum 
ficriptores. — Rigord, Getta Philippi-Augusti. — On- 
chesoe, Histoire des Papes et souverains chefs de FÉ~ 
çlise; t. H, p. 1306. — Fita Honorii papas ///, ex ms. 
Bern. Guidonis ; Fit* ejusdem ex altero ms. bibliothec* 
Ambrosiana ; dans Muratori, Berum Italicarum Scrtp- 
tores, t. III, p. S68 et 670. 

honorius it (Jacques Savelli), cent- 
quatre-vingt-sixième pape, successeur de Mar- 
tin IV, né à Rome, élu le 2 avril 1285, mort le 
3 avril 1287. Honorius IV avait étudié à l'uni- 
versité de Paris, et avait été chanoine de Châ- 
lons- sur- Marne. La goutte qui paralysait set 
pieds et ses mains lui rendait fort difficile la cé- 
lébration de la messe. Le roi de Sicile, Char- 
les II, neveu de saint Louis, était tenu en prison 
par Pierre d'Aragon, qui, à la suite des Vêpres 
siciliennes, avait envahi le royaume; Honorius, 
comme son prédécesseur, soutint la France 
dans cette guerre désastreuse, et n'épargna point 
les excommunications contre le parti d'Aragon. 
Il profita d'ailleurs de ce protectorat pour donner 
à la Sicile une nouvelle constitution très-favo- 
rable au clergé. Honorius mourut à Rome, dans 
le palais qu'il avait fait bâtir près de Sainte-Sa- 
bine, et eut pour successeur Nicolas IV. On repro- 
chée Honorius IV d'avoir trop favorisé l'élévation 
de sa famille. On a de ce pape une lettre dans 17- 
toitajocra d'Ugheili, h VIII, p. 636, et quelques 
fragments dans les Annales de Wadding. 
Alfred Franklin. 

Labbe, t. XI, p. 11S7 i ttt». - Bfuys, t. III, p. 189. 
— Ducbesne, 1. 11. p. l Ml. — Mézerav, Abrégé chrono- 
logique; t. III, p 17 à 37. - Platlna, Hist. Pontif. — Cia- 
coni, Hist Pontifie. 

hoiitan (De La). Voy. LaHontah. 

iiontbeim ( Jean-Nicolas m ), plus connu 
sous le pseudonyme de Justinus Febronius, 
jurisconsulte allemand, naquit à Trêves, le 
27 janvier 1701, d'une famille patricienne, et 
mourut le 3 septembre 1790. Il étudia la juris- 
prudence, fut reçu docteur, embrassa ensuite 
l'état ecclésiastique, et fit un voyage à Rome 



pour s'affermir dans sa nouvelle vocation. Mais 
en lui fournissant l'occasion de pénétrer dans les 
replis de la politique sacerdotale, ce voyage de- 
vait faire de lui l'antagoniste de la curie ro- 
maine. En 1732, le jeune Hontheim occupa une 
chaire de droit civil dans sa tille natale, et ht 
paraître plusieurs traités de jurisprudence. Neuf 
ans plus tard, nommé conseiller intime de l'élec- 
teur-archevéque de Trêves, il fut initié aux af- 
faires politiques et ecclésiastiques les plus im- 
portantes ; il assista successivement à l'élection 
de l'empereur Charles VII et à celle de Fran- 
çois I er , et défendit à la diète les libertés de 
l'Église nationale allemande. En 1748, il fut sa- 
cré évêque ( in partibus ) de Myriophis, et son 
prince le nomma suffragant du 6iége de Trêves, 
dignité qui! remplit sous trois électeurs succes- 
sifs (Frédéric-Georges, Jean-Philippe et Clément 
Wenceslas ). 

Ce n'est pas toutefois cette haute charge qui 
fit connaître Hontheim à l'Europe savante. Déjà, 
lors de son retour d'Italie, il avait pris la réso- 
lution d'écrire l'histoire dé sa patrie. Son His- 
toria Trevirensi$,diplomatioa et pragmatica, 
parut en 1750 ( 3 voh in-fol. ), et, en 1767, il j 
ajouta un savant Prodromus (2 vol. in-fol. ). 
Dans le premier de ces ouvrages , où sont en- 
tassés 1,365 documents, la constitution politique 
et ecclésiastique de Trêves est développée avec 
lucidité ; dans le second , l'auteur passe en re- 
vue toutes les sources de son histoire. Enfin, en 
1763, Hontheim publia, sous le pseudonyme du 
jurisconsulte Justinius Febronius, son fameux ou- 
vrage sur l'État de l'Église, dont voici le titre 
complet : De Statu Ecclesix et légitima Po- 
testate Romani Pontificis Liber singularis t 
ad reuniendos dissidentes in rcligione chris- 
tiana compositus; Bullioni (apud Guillelmum 
Evrard» ), 1763, in-4°. A ce premier volume, 
imprimé de fait à Francfort, étiez Esslinger, 
vinrent se joindre quatre volumes supplémen- 
taires. La rumeur qu'excita cette publicatioa 
hardie d'un esprit indépendant fut immense: 
des l'année 1765» on en fit une édition nou- 
velle, augmentée par l'auteur; un extrait alle- 
mand en avait été donné en 1764, et un autre, 
en latin, parut en 1777 ; des traductions le pro- 
pagèrent dans toms les pays de l'Europe (i). 
Partout on en entreprit la réfutation , et la vé- 
ritable consécration de sa célébrité arriva de 
Rome même : le pape Clément XUI fit mettre 
ce livre à l'index, malgré la dédicace, qui 
était adressée au pontife lui-même. En effet, 
la cour de Rome ne pouvait se faire la moindre 
illusion sur la tendance de cet ouvrage, où 

(1) La traduction française. Intitulée: De l'État de VÊ- 
glise et de la Puissance légitime du Pontife romain, par 
Rcmacle Llssotre; Wwrzbourg (Sedan), 1766, 2 vol. in-iî, 
n'est pas complète et renferme des additions do traduc- 
teur. 11 en parât une seconde : Traité du Gouvernement 
de l'Église et delà Puissance du Pape par rapport à 
ee gouvernement ; FenUe (Paris), 1766, ln-*«; et 1767, 
8 vol. ta-ia. 



93 



HONTHEIM — HOO 



94 



Febronios Hontheim s'est appliqué à établir la 
ligne de démarcation entre la puissance spiri- 
tuelle du pape et la puissance ecclésiastique de 
ia cour de Rome. « Sans tomber dans le pro- 
testantisme , a-t-ti l'air de dire à ses compa- 
triotes, vous pouvez fort bien tous opposer aux 
envahissements et aux abus de la cour pontifi- 
cale. » La constitution de l'Église primitive , le 
caractère représentatif des conciles généraux, 
la base toute humaine sur laquelle repose la 
primauté de l'évêque de Rome , l'influence fu- 
neste des décrétales du faux Isidore, les ten- 
dances d'envahissement des nonces, t'influence 
illégale des ordres mendiants, rétablissement 
des mandats et des réserves , qui dépossédè- 
rent, au douzième siècle , les évêques du droit 
de conférer les prébendes, le monopole des élec- 
tions épiscopales exercé par les chapitres, au 
détriment du bas clergé et du peuple, telles sont 
les principales questions traitées parle savant 
conseiller de Trêves. Or, comme les principes 
émis par lui reposaient sur le terrain historique; 
comme son livre, au lieu de déclamations, n'of- 
frait guère que de nombreuses citations em- 
pruntées aux Pères de .l'Église , il exerça une 
grande influence. Dans les années qui suivirent 
la publication de ce fameux livre, la puissance 
papale fut effectivement limitée dans beaucoup 
d'Etats. Aussi, dès qu'on eut découvert le véri- 
table auteur de De Statu Ecclesiœ, les persé- 
cutions commencèrent. Le pape Pie VI se montra 
très-acharné contre Hontheim. L'ex -jésuite Beck, 
conseiller intime de l'électeur Clément- Wences- 
las, ne se borna pas à des reproches et à des me- 
naces contre le pseudo-Febronius : il les fit peser 
aussi sur ses nombreux parents, qui tous occu- 
paient des charges dans l'électorat de Trêves. 
Le malheureux vieillard ( Hontheim était alors 
âgé de soixante-dix-neuf ans), obsédé, fatigué, 
terrifié peut-être, finit par se soumettre au saint- 
siége. Lorsque sa déclaration de rétractation ar- 
riva (en 1778) à Rome, Pie VI tint un consistoire 
spécial pour faire part au monde catholique de 
cet heureux événement ; mais plusieurs gouver- 
nements catholiques s'opposèrent à la publica- 
tion, dans leurs Étals,des actes de ce consistoire. 
D'ailleurs le retentissement de cette polémique 
avait été trop grand , trop général , pour qu'une 
tardive manifestation de repentir eût pu neu- 
traliser les effets déjà produits par l'ouvrage. 
Voici ce que l'auteur écrivit à ce sujet à l'un de* 
ses amis : « J'ai cédé, comme a fait Fénelon, 
pour échapper à des tracasseries continuelles. 
Ma rétractation ne saurait nuire à la religion 
chrétienne ; elle ne profitera point à la cour de 
Rome. Le monde penseur a lu mes thèses et les 
a acceptées. » En 1788, Hontheim se démit de 
ses charges, et passa les dernières années de sa 
vie dans sa terre de Monquentin. 11 légua sa 
vaste bibliothèque à sa ville natale. Outre l'ou- 
vrage cité, on a de lui : Decas Legum Mut- 
trium; Trêves, 1736, in-fol.; — HistoriaTrevi» 
remis, dogmatica et practica, etc., ab anno 



418 ad annutn 1745; Weithem , 1750 , 3 vol. 
in-fol. ; Augsbourg, 1757, 2 vol. in-fol. ( Spach, 
dans YEnc. des G. du M., avec add. ) 

SchUcbtegroll, Necroloç., 1791. 

honthoest ( Gérard), peintre hollandais, 
né à Utrecht, en 1592, mort à La Haye, en 1660. 
Il suivit les leçons d'Abraham Rloemaert, et se 
rendit à Rome, où il rat fort occupé par le haut 
clergé et la noblesse. Il passa ensuite en Angle- 
terre, et peignit plusieurs tableaux pour le roi 
Charles I er . Sa réputation se répandit dans le 
reste de l'Europe, et divers souverains l'appelè- 
rent à leur cour : c'est ainsi qu'il fit les portraits 
des enfants de la reine de Bohême; ceux dn 
prince Robert; de V électeur Palatin, de là 
reine de France Marie de Médias; du roi et 
de la reine de Danemark, de plusieurs autres 
princes ou personnages considérables. Ses prin- 
cipaux tableaux d'histoire sont : à Paris, une 
Judith ; — à Dresde , V Enfant prodigue parmi 
les prostituées ; — - à Gand , dans la cathédrale \ 
Saint Sébastien ; le Christ mort , snr les ge- 
noux de sa mère ; — à Rome, église de la Ma* 
donna délia Scala, La Décollation de saint 
Jean. Ces morceaux sont d'une belle manière et 
d'un dessin correct. Le meilleur des élèves de 
Honthorstfut Joachim Sandrart. 

Son frère, Vilhem, mort à Berlin en 1683, était 
un peintre de portrait fort estimé,. 

A. t>B L. 

Jakob Carapo Weyerman et Honbraken, De Schilder- 
konst der Ned&rlanders, t I, p. 379-380. — Deicaraps, 
La rie de* Peintres hollandais, L I, p. m, 936. ~ 
PiJklngton, Dictionary of Painters. 

*aoo (Thomas), Anglais de naissance (proba- 
blement du Bedfordshire) , capitaine et diplomate, 
fut nommé, le 1 er octobre 1435 , chancelier de 
France, au nom d'Henri VI, roi de France et 
d'Angleterre. En 1436, il commandait les forces 
anglaises en Normandie, dan6 le pays de Caux, et 
y causa de grands ravages. Le roi d'Angleterre 
lui accorda , en 1442, une pension de quarante 
livres sterling 'sur le comté de Norfolk. Tho- 
mas devint ensuite baron de Hoo et de Hastiug, 
et rat créé chevalier de l'ordre de la Jarretière, 
distinction qui ne s'accordait et ne s'accorde en- 
core qu'aux personnages les plus éminents, nés 
Anglais on alliés de l'Angleterre* La même an- 
née, 1442, Thomas Hoo était capitaine de Man- 
tes, sous les ordres du duc d'York, lieutenant 
généra], avec 50 hommes d'armes à cheval, 
20 hommes d'armes à pied, 210 archers, etc. 
Il l'était encore an 1 er octobre 1449 , époque où 
il cessa de porter le titre de chancelier de France. 
En 1443, le chevalier Thomas Hoo, fut un des 
ambassadeurs députés par le roi d'Angleterre 
vers le gouvernement français , à Vendôme et à 
Tours. Le double résultat de ces négociations fut 
la conclusion d'une trêve entre les deux pays et 
le mariage d'Henri VI, roi d'Angleterre, avec Mar- 
guerite d'Anjou. En 1446, Thomas Hoo servit . 
de nouveau comme diplomate on commissaire, 
pour arrêter les trêves qui furent de nouveau 



95 



HOO — HOOD 



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conclues le 15 décembre de cette année, au 
prieuré deJulIiers, entre Mantes et Meulan. Il né- 
gocia, au même titre, le 29 octobre 1449,1a 
reddition de Rouen, lors du recouvrement de la 
Normandie par Charles VII. Il mourut après le 
12 février 1450, date de son testament 

VàLLET DE VlRIVlLLE. 
Dugdale, Baronagium Jnglicanutn.— An*elme,Grands 
Officiers de la Couronne , au 78 e chancelier. — Mm. Ba- 
laie 9087; 7. fol., ts à 158. - Bibliothèque de V École des 
Chartes, 1* série, t. III, page 185. - Daniel, Histoire de 
ta Milice française, L I, pag. ne. 

hood (Lord Samuel ) , baron de Cathering- 
ton, célèbre amiral anglais, né le 24 décembre 
1735, à Butleigh (Somersetshire), mort à Bath, 
le 27 janvier 1816. Son père était ministre pro- 
testant; mais Hood préféra la carrière maritime 
à celle ecclésiastique, et dès l'âge de seize ans 
(1751) il s'embarqua comme garde-marine. En 
1756 il était déjà capitaine de la frégate de 32 
Vestal. Il signala son courage et ses talents en 
diverses occasions, sous les ordres des amiraux 
Holmes et Saunders : au bombardement inutile 
du Havre; pendant trois ans dans la Méditer- 
ranée, et le 13 février 1759, où, après un com- 
bat d'une demi-journée, il fit amener pavillon 
à la frégate française La Bellone. En 1768, il 
fut nommé au commandement de Boston, et de- 
vint quelques années après commissaire de l'ar- 
senal de Portsmouth , avec le titre de baronet 
En 1778 il portait, comme contre-amiral, son 
pavillon à bord du Bar fleur, vaisseau de 64, 
et commandait la station de Boston. Il recueillit, 
le 30 juin, à Sandy-Hood, les débris des Anglais 
obligés d'évacuer Philadelphie. Le 12 août 1780, 
s'étant réuni à de Grave , il attaqua le comte de 
Grasse dans la baie de Chesapeak, mais il dut 
battre en retraite , et le 29 avril 1781 reçut avec 
Drake un nouvel échec devant La Martinique. Le 
26 janvier 1782 de Grasse et le marquis de Bouille 
vinrent à leur tour assaillir Hood devant Saint- 
Christophe. Par une manœuvre hardie ( renou- 
velée depuis par Nelson à Trafalgar), Hood 
sépara les deux escadres françaises, et repoussa 
de Grasse, mais il ne put empêcher Bouille de 
s'emparer de 111e. Le 9 avril 1782 il comman- 
dait, sous les ordres de Rodney, l'avant-garde de 
la flotte anglaise qui cherchait la flotte française. , 
Il la rencontra au delà de La Dominique, et ayant 
voulu l'arrêter dans le canal Sainte-Lucie, il fut 
fort maltraité; mais le 12 il prit une brillante 
revanche devant Les Saintes, perça le centre de 
la ligne française, et fit prisonnier le comte de 
Grasse, qui montait La Ville de Paris ( de 120 ), 
après avoir échangé quatre-vingts bordées avec 
ce vaisseau. Il s'empara ensuite, au passage de 
Mona, le 29 avril, de deux vaisseaux et de deux 
frégates. A la paix de 1783, il fut créé pair d'Ir- 
lande et baron de Catherington. En 1784 les 
électeurs de Westminster le choisirent pour leur 
représentant au parlement, et lui continuèrent 
leur confiance en 1790, après sa nomination I 
aux fonctions de lord commissaire de l'amirauté. ' 



11 était alors amiral de Portsmouth. En août 1793, 
à la tête d'une flotte immense, unie à celle d'Es- 
pagne et de Naples,ilse présenta devant Marseille 
et somma les habitants de reconnaître Louis XVU 
et la constitution de 1791; les Marseillais refu- 
sèrent Hood réussit mieux «auprès des Toulo- 
nais, qui arborèrent le drapeau blanc dans la 
nuit du 27 au 28 août, et lui livrèrent leur rade 
et leurs forts. Dès le 30 l'armée républicaine se 
présentait devant la ville, et le 19 décembre, 
après un siège acharné, Hood fuyait abandon- 
nant les révoltés française la vengeance de leurs 
compatriotes, emmenant ou brûlant les Tais- 
seaux (1) qui se trouvaient en rade, dévastant 
ou incendiant les magasins et les arsenaux. Ce 
fait est une tache dans la vie, glorieuse du reste, 
de Hood. Le 20 septembre 1793, il avait débarqué 
en Corse et secondé l'insurrection de Paoli ; mais ce 
mouvement fut bientôt comprimé Jl bloqua alors le 
port de Gênes, força le grand-duc de Toscane à 
éconduire l'ambassadeur français, et échoua dans 
une attaque contre l'île d'Elbe. En 1796, il re- 
vint en Angleterre» Nommé gouverneur de l'hô- 
pital de Greenwich et vicomte, il devint amiral du 
pavillon rouge, grand'croix du Bain, etc« 

Alfred deLacaze. 
Loodge, Portraits of illustrions Personages, t. VIII. — 
Biographie étrangère. — Bnglisch Cyclopsedia ( Bio- 
graphe ). 

hood (Thomas), poète et humoriste anglais, 
né à Londres, en 1798, mort en mai 1845. Fils 
d'un des associés d'une maison de librairie à 
Londres, il fut élevé pour le commerce, et placé 
très-jeune dans le comptoir d'un marchand. Mais 
sa santé délicate et son esprit vif ne conve- 
naient pas à ce genre d'occupation. Son père 
l'envoya alors à Dundee, où résidait une partie 
de sa famille. Pendant un séjour prolongé , sa 
santé se rétablit, et en même temps se développa 
en lui un goût très-vif pour la littérature. Il se 
mit à écrire des articles pour les journaux de la 
localité, et pour le Magazine de Dundee, qui 
avait alors beaucoup de réputation. De retour 
à Londres, il témoigna le désir d'étudier le des- ' 
sin et l'art du graveur. Il fut en conséquence 
placé chez un de ses oncles qui suivait cette pro- , 
fession. Il y acquit un certain talent d'artiste, 
et s'en servit avec avantage pour illustrer ses 
œuvres poétiques. La nature l'avait fait poète; 
une bonne partie de son temps était employée à 
faire des vers. Ses essais furent insérés dans le 
Magazine de Londres, et attirèrent aussitôt l'at- 
tention. Vers 1821 il embrassa définitivement la 
littérature comme carrière, et fut admis comme 
sous-éditeur au Magazine. Le directeur en chef 
était John Scott, qui l'avait fondé et rendu flo- 
rissant par ses talents. Cette prospérité fut in- 
terrompue par une mort prématurée, à la suite 
d'un duel. Le Magazine cessa bientôt de pa- 



rt) Ce fat sir Sldncy Smith qat rot chargé de cette i 
cuttoo: on comptait dlx-»cpt vaisseaux de ligne, autant 
de frégate». 



97 



HOOD — HOOFT 



9d 



raitre, et Hood fat obligé de travailler à d'autres 
revues. Pendant quelque temps, il fut directeur 
du New Monthly Magazine, puis d'un autre 
Magazine qui portait son nom. Un travail trop 
assidu et le découragement amenèrent une sé- 
rieuse maladie. Des amis influents obtinrent du 
gouvernement une petite pension en sa faveur. 
Hood traîna quelque temps encore une existence 
pénible, et mourut à quarante-sept ans, laissant 
une veuve et de jeunes enfants presque sans res- 
sources. Ses amis littéraires contribuèrent li- 
béralement pour le soutien de sa famille. Ses 
divers ouvrages ont presque tous un cachet 
original et supérieur. Deux traits saillants le dis- 
tinguent, l'humeur enjouée et comique, le sé- 
rieux et le pathétique. H semblerait que l'un 
dût exclure l'autre; mais cette humeur en- 
jouée n'avait pas sa source dans la vivacité 
d'esprit; elle venait plutôt de l'observation et de 
pensées profondes. Les sujets qui lui convenaient 
le mieux et vers lesquels il penchait étaient de 
couleur sérieuse et sombre. Un autre trait re- 
marquable, c'est que même dans ses esquisses 
comiques et satiriques domine un esprit de 
bienveillance, de bonté, de générosité. On y sent 
que ce n'est pas pour humilier ou faire rire 
qu'il retrace les faiblesses, les ridicules, les bi- 
zarreries et les défauts de l'humanité , mais pour 
la corriger et la porter au bien. Son premier 
ouvrage, Whims and Oddities (Fantaisies et 
Singularités), eut une grande popularité. En 1827, 
il essaya une suite de National Taies ( Contes 
nationaux) ; mais sa prose parut avoir moins 
d'attraits que ses vers. Un roman en forme, 
Tylney-Hall, eut un médiocre succès. L'ou- 
vrage qui a pour titre The plea of Midsummer 
Fairies est d'une imagination brillante et su- 
périeur à ses autres productions. Il étendit sa 
réputation en publiant pendant plusieurs années 
des Comte Annuals, et dans Up the Rhine re- 
traça avec une verve satirique les manies des 
voyageurs anglais. En 1843, il publia, sous le 
litre de Whimsicalities, les articles et les es- 
quisses qu'il avait donnés autrefois au New 
Monthly Magazine. Une de ses dernières pro- 
ductions fut la pièce célèbre qui a pour titre 
Song of the Shirt (la Chanson de la Chemise). 
Il suppose que c'est le chant d'une de ces pau- 
vres couturières (classe nombreuse à Londres) 
qui, pour avoir le pain de chaque jour, travaillent 
de l'aiguille dix-huit à vingt heures, et jeunes 
encore, mais épuisées, finissent par succomber 
à cette lutte mortelle. Jamais on n'avait tracé un 
tableau aussi pathétique. La sensation fut im- 
mense, et excita dans le public une vive sym- 
pathie pour les souffrances et la misère de cette 
classe malheureuse. Ce qui est assez curieux, 
c'est que cette pièce parut pour la première fois 
dans le journal charivarique le Punch. J. c. 

Cyclopxdia of Bnglish literature. 

hooft (Pierre), poète et littérateur hollan- 

KOUV. BIOCR. GÉNÉR, — T. XXV* 



dais, né à Amsterdam, le 16 mars 1581, mort à 
La Haye, le 21. mai 1647. Fils du bourgmestre 
Cornelis Hooft, l'un des nobles qui, en 1587, 
résistèrent, au péril de leur vie, à la tyrannie de 
Leicester, il se forma par l'étude des classiques 
de l'antiquité et par des voyages en Italie. Après 
son retour, il remplit, depuis 1609 jusqu'à l'é- 
poque de sa mort, les fonctions de grand-bailli 
de Muiden et de juge de Gooiland, sans aspirer 
jamais à de plus hautes fonctions auxquelles sa 
naissance, son savoir et ses richesses pouvaient 
pourtant lui permettre de prétendre. Tacite, 
qu'il traduisit en hollandais, était son modèle 
comme historien , et il s'efforça de l'imiter dans 
ses propres compositions historiques. Sa réputa- 
tion se fonde principalement sur ses tragédies et 
ses poésies erotiques. Ses lettres méritent aussi 
d'être étudiées. Créateur du dialecte classique hol- 
landais, en poésie comme en prose , Pierre Hooft 
a été surnommé pour cette raison l'Homère et 
le Tacite hollandais. « Malgré les tentatives de 
la Chambre de Rhétorique d'Amsterdam pour 
soustraire, dit M. van Kampen, le hollandais de 
la dépendance du français et du latin, dans la» 
quelle la maison de Bourgogne et les chambres 
flamandes le tenaient par un nombre infini de mots 
et de phrases étrangères, cette langue était tou- 
jours rude et inflexible ; sa littérature, pauvre, n'a- 
vait pas encore d'histoire, pas d'épttres suppor- 
tables, pas de poésies légères, encore moins de 
poésies erotiques, pas de drames, si ce n'est 
quelques imitations des mystères français. Tout 
cela lui fut donné par un homme qui avait reçu 
sa première instruction au sein de cette Société, 
et qui était l'ami de la plupart de ses membres. 
A l'âge de dix-sept ans Pierre Hooft alla en 
Italie, et en rapporta le goût de la douceur, de 
la rondeur et de la plénitude dans l'expression 
poétique, qualités qu'il chercha à mtrodnire dans 
sa langue maternelle. La Hollande lui doit ses 
premières poésies erotiques , qui portent le ca- 
chet d'une grâce et d'une douceur dont personne 
encore n'avait donné l'exemple dans son pays, 
et qui ne sont défigurées que par quelques jeux 
de mots fades, par des concetti et par un lan- 
gage d'amour conventionnel emprunté à l'Italie 
et à l'Espagne. Hooft s'est aussi essayé avec 
succès dans le genre dramatique. 11 rejeta en- 
tièrement sa tragédie d'Achille et Polyxène, 
composée avant son voyage en Italie, et publia 
une idylle dans le goût du Pastor Fido, et deux 
tragédies, dont Tune, Bato, appartient aux temps 
fabuleux de la Hollande, et dont l'autre, Gérard 
de Velzen, est tirée de l'histoire nationale. A 
part les duretés, les invraisemblances et la pe- 
santeur des constructions, ces compositions 
sont pleines de force et de vie, surtout Bato, ou 
le poète, comme dans Gérard , introduisit, à 
l'exemple des rhétoriciens ( Bederijkers), des 
personnages mythologiques. On y trouve aussi, 
comme dans les premières compositions trafi- 
ques des Grecs, des personnages allégoriques, 



99 



HOOFT — HOOGE 



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tels que la Forée, le Pouvoir, etc. Mais Hooft ne 
développa pas seulement le style poétique, il 
rendit des services plus grands encore à la prose- 
Son Histoire de Henri IV, celle de la Maison 
de Médicis, plus abrégée, et surtout Y Histoire 
détaillée de la Lutte pour V Indépendance des 
Pays-Bas, de 1555 à 1587, sont rédigées dans 
un style fleuri, souvent tita-près de la poésie, 
mais en même temps énergique et nerveux , qui 
ne sacrifie rien à 1* vérité, et qui brille surtout 
par la description des hauts faits et la peinture 
des caractères. Cependant Hooft, traducteur de 
Tacite, imita trop servilement son modèle. Les 
, lettres que nous avons de lui sont trop défigu- 
rées par ces mêmes jeux de mots qui occupent 
tant de place dans ses chants erotiques. D'un 
autre côté, il y manifeste si bien son noble 
cœur, son amour de la vérité et sa sagacité poé- 
tique, qu'on lui pardonne volontiers le tribut 
qu'il paye au mauvais goût de son siècle. » On 
a de Pierre Hooft : Het Leven van Koning Hen~ 
drih IV ( La Vie du roi Henri IV) ; Amsterdam, 
1626, in-fol.; 1638, in-4°, 1652, in-12; — De 
Aederlandsche Historien (Histoire de Néer- 
lande) ; ibid., 1642-1654, 2 vol. in-fol, ; nouv, 
édit., 1820-1823. Son Histoire de la Maison de 
Médicis parut à Amsterdam, 1649, in-4°. On a 
imprimé les Anciennes pièces du théâtre de 
Hooft à Leyde, en 1739. Ses autres ouvrages en 
vers ont été recueillis avec ses pièces de théâtre, 
sous le titre de Poésies mêlées , par Jacques 
Van der Burg, en 1636, in- 12. Ses lettres ont été 
publiées par Huydecooper en 1738, et sa tra- 
duction de Tacite par Brandt en 1684. Son éloge 
ayant été mis au concours , le prix fut remporté 
par Jean de Kruyff. J, V. 

Karl Bernhardt, dans VMlg. Encyktopxdie d'Erach et 
Graber. — Van Kampen, dans la même Encyclopédie^ 
article HollwndUche Sprache und LUeratur. — Conver- 
satiotis-Uxikon. — Siegenbeek, Beknopte Geschiedenit 
der Nederlandsche Letterhunde. — A. Ypey, Beknopte 
Geschiedenis der Nederlandsche Taie. — Witte, Dior, 
- Barlseus . EpUL - Acta Brvdit., 1709. - Sedler, Uni- 
vénal- Lexikon. 

hooft (Nicolas), peintre hollandais, né à 
L,a Haye, en 1664, mort le 21 janvier 1748. Il fui 
successivement élève de Daniel Mytens, de Vil- 
lem Doudyns et d'Augustin Terwesten. Il pei- 
gnait très-bien l'histoire et devint directeur de 
l'Académie des Artistes de sa ville natale. Riche 
par sa famille, il produisit peu, quoiqu'il mourut 
plus qu'octogénaire. Ses ouvrages sont tous 
restés dans sa patrie, A. de L- 

Oampo Weyermaa, De Sehilderkonst der Ned erh m 
dert, t. iv. - Deacamp», La Vifi des peintres hoUon* 
dais, t. UI, p. 83. 

hooft ou hoofft (Gérard), littérateur 
Hollandais, mort prématurément le 18 décembre 
1768. Il appartenait à une famille patricienne 
d'Amsterdam , et devint secrétaire de sa ville 
natale. Des sa jeunesse il se voua aux muses 
latines , sous la direction de Pierre Barman le 
second. En 1767 il publia, avec Henri Coudera, 



Van Santen et Lambert Schepper, un recueil de 
Juvenilia, et en 1770 Jérôme de Bosch a pu- 
blié les poésies posthumes de Hooft, à Amster- 
dam, in-8«. J. V. 

J. de Bosch, Notice en tête des Poésies posthumes de 
Gérard de Hooft. 

■oooe ( Pieter de), peintre hollandais, né 
▼ers 1643. H fut l'un des meilleurs élèves du cé- 
lèbre Nicolas Van Haerlem dit Btrghem, et ses 
premiers tableaux ont la manière de cette grande 
école. Plus tard , il travailla dans le goet de 
Metzu, de Mierls, de Cloques, de Slingelandt, 
mais sans atteindre le fini précieux de ces il- 
lustres artistes. La touche de Hooge est large, 
son coloris vrai, son dessin correct et de bon 
goût; tout son faire est d'une grande facilité , lé- 
ger, mais plein de force et de naturel. Ses sujets 
sont bien choisis et les détails traités avec agré- 
ment. On cite de lui : à La Haye, un Souper; à 
Amsterdam, un Intérieur} à Paris, un Corps 
de garde. A. de L. 

Pllkington, Dictionary of Pointers. — Jakob Campo 
WeyermaB et Houbraken, De Sehilderkonst der Nedev- 
landert. t, II, p. m. •«- Des«aapa, lan*d*t PetMtret 
hoiutndou, %, il, p. m-%n- 

hooge (Romeyn de), graveur hollandais, 
né à La Haye, vers 1650, mort vers 172a. H *é- 
cut longtemps à Paris, où il semble avoir été 
attiré par Van der Meuten; il repassa ensuite 
dans sa patrie et y termina ses jours. Sa vie est 
moins connue que son talent L'on trouve 
dans ses ouvrages beaucoup d'imagination et de 
facilité; « mais, dit Basan, comme il s'est laissé 
souvent emporter à la fougue de son génie, Ton 
rencontre dans la plupart de ses compositions 
des idée» singulières et gigantesques et peu de 
correction de dessin : ces défauts se trouvent sur- 
tout dans les sujets allégoriques qu'il a composés 
sur les affaires de son temps, où d'ailleurs il a 
fait entrer une satire triviale et exagérée. » 
Ses principaux ouvrages sont : L'Entrée de 
Louis XIV dans Dunkerque en 1646, d'après 
Van der Meulen ; — Charles II, roi d'Espagne, 
descendant de son carrosse pour rendre hom- 
mage au Saint-Sacrement; — Le Massacre 
des deux frères de Witt; -r- Les Excès et 
les Cruautés commises par les Français en 
Hollande durant la campagne de 1672, suite 
de huit estampes fort estimées que l'on rencontre 
dans un livre rare intitulé t Avis fidèle an» 
véritables Hollandais touchant ce gui s'est 
passé dans les villages de Bodegrave et 
Swammerdam ; tô73, in-4° ; — La Foire d'Arn* 
heim ; — La Synagogue des Juifs portugais à 
Amsterdam; — Les ligures de l'Histoire du 
Nouveau Testament de Basnage; Rotterdam, 
1699 et 1704, 2 vol. in-fol.; — de V Académie 
de l'Art de la Lutte (en hollandais) ; 1674 ; trad. 
en français, 1712, in*4 p ; — de la Bible en hol- 
landais ; 1721 ; — des Hiéroglyphes des Égyp- 
tiens; Amsterdam, 1735, petit in-fol.; — des 
Contes de LA Fontaine; 1635, 2 vol. ia*8'; — 



101 



HOOGE - HOOGSTRAATEN 



102 



du Déeaméron de Boecace; 1695, 2 vol. in-8 # ; 
— de VHeptaméron; 1698, 2 vol. in-8°; — 
des Cent Nouvelles nouvelles; 1701, 2 vol. 
in»8*. Toutes ces gravures sont fort recher- 
chées, même séparées du texte. A. w L. 

P. Basan, Dictionnaire des Graveurs. — G. Gaadellini, 
Notiti* deir Intaçliatori, -» Jakab Campo Weyennaii , 
Z>* SchUdertonst der Ifederlandert; U 111, p. J14-117, 

HOOGEE8 (Gosvin), pobliciste et poète hol- 
landais, né en 1636, mort le 14 avril 1676. Après 
avoir visité les principaux pays de l'Europe et 
s'être arrêté quelques mois à Caen , où il se lia 
avec Bochartet Huet,il succéda, en 1661, à 
Gnevius comme professeur de droit, d'histoire 
et d'éloquence à l'Académie de Deventer. Quel- 
que temps après, il rut élu bourgmestre de cette 
ville ; mais ses opinions politiques à la fois très- 
hostiles aux Anglais et libérales à l'excès, ame- 
nèrent sa destitution. On a de lui : Oratio de Ju- 
lio Cxsare tyranno, jointe, ainsi que ses Adhor- 
tationes ad Cives de libertate tuenda, à 
l'édition qu'il donna de la Libertas publica et 
du traité De Jure Imperii de son ami H.-R, 
Schele ; Amsterdam, 1666, in-12 ; — Orationes II 
ad sennatum Daventriensem, quarum prima 
de Patriafortiter defendendapost acceptam 
cladem 9 amo 1664 ; altéra de pace Batavorum 
et Britannorum, anno 1667 con/ecta; Ams- 
terdam, 1669, in-12; —* Poemata juvenilia; 
Amsterdam, 1682, in-12; dans ce même vo- 
lume se trouvent réunis les trois discours ci* 
tés de Hoogers, les Poemata de son frère Jean 
Hoogebs, ministre protestant, le Funus de Sau- 
maise et Vlter suecicum de Huet 

Sai, OiuMHBjtfcon, L V, a. lit, 

hooge yen ( Henri), philologue hollandais , 
né à Leyde, en janvier 1712, mort en 1791. 
Son père, peu fortuné, fit les plus grands sa- 
crifices pour lui faire donner une éducation clas- 
sique, et l'envoya au gymnase de Leyde. Le jeune 
Hoogeven resta pendant plus d'un an toujours 
le dernier de sa classe, à cause des brosqueries 
de son professeur Torrenius. Mais dès qu'il n'eut 
plus à souffrir des incartades de ce dernier, il se 
mit bientôt au niveau de ses condisciples, et il 
n'y eut que Pierre Burmann , l'un d'eux , qui le 
dépassa. Sorti du collège en 1729, il commença 
l'étude de la théologie ; mais il ne l'acheva pas. 
En 1732, sa position précaire le força d'accepter 
les fonctions de co-recteur au gymnase de Go- 
rinchem. L'année suivante il devint recteur du col- 
lège de Woerden , qui venait dvétre nouvellement 
créé; en 1738 il se rendit en la même qualité à 
Culenbourg. En 1745 il fut appelé à diriger le col- 
lège de Bréda; en 1761 il devint recteur de 
celui de Dordrecht, et en 1764 de celui de Delft. 
H eut toujours pour but d'améliorer l'instruc- 
tion secondaire et de faciliter aux jeunes gens 
les moyens d'acquérir un fonds solide de con- 
naissances. Ses ouvrages sur la langue grecque 
prouvent qu'H l'avait étudiée jusque dans ses 



moindres détails. On * de lui i iV. figera pe 
praecipuisGrxcx dictionis Jdiotismiê libellus, 
perpétuas animodverswnibus Ulustratus et 
guam plurimis idiotismis auctus; Leyde, 
1743, in-8°$ ibid., 1762 et 1766, M*-8°, tvec des 
adjonctions} en 1777, Zeune publia une nouvelle 
édition de cet ouvrage de Yiger, ainsi trans- 
formé par Hoogeven, en y joignant diverses re- 
marques • qui n'eurent pas l'approbation de ce 
dernier, qui y répondit par : ZeuniiAmmadver- 
siones in Vigerii libellum ad justam exa- 
minis lancem revocatœ; 1781, in-8 ; — Doc- 
trina Particularum Linguas Grœcœ; Delft, 
1769, 2 vol. in-4°; Schutz en a donné un abrégé, 
publié à Dessau, 1782, in- 8° ; selon Wolf , cet 
ouvrage pèche par le manque de philosophie et 
de finesse grammaticale; mais il est très-pré- 
deux à cause de la quantité d'exemples qui s'y 
trouvent rassemblés. Hoogeven a aussi publié 
en latin plusieurs discours et pièces de poésie 
dont l'indication se trouve dans YOnomasticon 
de Sax, t. Vffl, p. 47. E. G. 

Harlest, Vitm Philoltyorum, t. IV, p. il*. — Strodl- 
maon , Neuet çeUhrtes Europe partie XU, p. 1041. — 
fflracfelng, His&r. LUter, fiandimch. «. Rrach et Gra- 
ber, Encpklopvdie. 

* uboquesuwêlb (Bans), peintre alle- 
mand, né vers 1500, mort à Mannes, en 1544. 
Il composait et peignait bien l'histoire. Plusieurs 
églises de Belgique conservent de ses ouvrages. 
Son tableau capital est V Entrée de Vempereur 
Benri VI dans Bologne. A. »* L- 

Descamps, La Fie des Peintres allemand*, 1 1, p. 58. 

* hoogsta ad (Qérart van), peintre belge, né 
à Bruxelles, vivait en 1661 : il peignit d'abord le 
portrait avec succès ; ayant acquis dans ce genre 
une belle fortune, il se mita peindre l'histoire, 
et y réussit. Ses compositions sont ingénieuses, 
son dessin est correct -.plusieurs grands tableaux 
d'autel à Bruxelles et dans quelques autres villes 
du Brabant témoignent de son talent. Cest sur- 
font dans les sujets religieux qu'il s'est fait re- 
marquer. On connaît de lui plusieurs traits delà 
Passion de Jésus-Christ; des martyrs, des 
saints, etc. A. de L. 

JakoJ) Campa WeycrJffM et HoaJtorakftii, De Sekilder- 
konstder Nederlanders , \. II, p, 118. — Deacamps^ la 
rie des Peintres flamands, etc., t. II, p. lSt, 

VQO68TEAATE9 (Jacques vam) , domini- 
cain hollandais, natif de la ville dont il porta 
le nom» mourut a Cologne, le 21 janvier 1527, 
Reçu maître es arts à Louvain en 1485, il devint 
prieur des Dominicains de Cologne. La Réforma- 
tion trouva en lui un fougueux adversaire» M 
s'attaqua surtout à Reuchlin, qui ne le ménagea 
guère, malgré les conseils de modération d'É- 
rasme que Hoogstraaten n'écouta pas non plus, 
et dont il reçut fort mal les avis. 

Les principaux ouvrages de ce polémiste, au- 
jourd'hui oubliés, sont : Defensorium Fratrum 
mendkantium contra Curatos, etc.; Cologne, 



103 



HOOGSTRAATEN — HOOGZAAT 



104 



1507, in-4°; —Defensio scholastica principum 
Alemani» in eo quod sceleratos detinent in- 
sepultos in ligne contra Petrum Ravenna- 
tem; Cologne, 1508, et 1511, in-4»; — Ad 
X. D. Philippum S. Ecclesix Coloniensis ar* 
chiepiscopum Tractatus magistralis décla- 
rons quam graviter peccent quxrentes auxi- 
lium a maleftciis; Cologne, 1510, in-4°; — 
Epitome de Fide et Operibus adversus chimœ- 
ricam illam atque monstrosam Martini Lu- 
theri libertatem falso ab eo christianam 
appellatam ; Cologne, 1 525, in-4°. V. R. 

Échard, Scriptoree Ordinis Prœdicator. — Foppeos, 
BibL Belg. 

hoogstraatbn (Dire*), peintre belge, 
né à Anvers, en 1596, mort à Dort, le 20 dé- 
cembre 1640. débuta par être apprenti orfèvre, 
et apprit ainsi le dessin et la gravure. Fort 
jeune encore, il grava an Ecce Homo dont les 
épreuves sont aujourd'hui fort recherchées. Il 
s'adonna aussi à la dorure sur argent, et fit 
faire quelques progrèsàcettepartiederorfévrerie. 
Hoogstraaten parcourut ensuite PAllemagne, et 
y reçut les leçons de plusieurs bons maîtres. 
De retour dans sa patrie, il se consacra à la 
peinture; ses œuvres sont rares. Le dessin en 
est bon, la couleur franche; la nature y est re- 
produite avec vérité et intelligence. A. de L. 

Arnold Honbraken, De Schilderionst der Nederlan- 
ders y t. 1. p. S86-3SB. — Samuel Hoogstraaten, Fie des 
Peintres (en hollandais). — Descamp», La Fie des Peintres 
Flamande, etc., 1 1, p. 148, ta. - PlUungton, Dictlo- 
nary o/ Painters. 

hoogstraaten (Samuel van) peintre et 
littérateur hollandais, fils du précédent, né à 
Dordrecht, en 1627, mort dans la même ville, le 
19 octobre 1678. Son père l'initia aux prin- 
cipes de la peinture, et le plaça ensuite dans 
l'atelier de Rembrandt Samuel ne survit pas 
absolument la manière forte et brune de son 
maître ; et, livré à lui-même, il peignit avec un 
égal talent L'histoire, le portrait, le paysage, 
les animaux, les fleurs, les fruits et même les 
sujets inanimés. Il eut en ce dernier genre de 
grands suecès à Vienne, où l'empereur Ferdi- 
nand III essaya vainement de l'attacher à sa 
cour. De là il se rendit à Rome, où il se perfec- 
tionna dans le haut style. Il passa ensuite en 
Angleterre, et y travailla très-liicrativement 
Après avoir séjourné quelque temps à La Haye, 
il revint jouir de sa fortune dans sa ville natale, 
où ii forma un grand nombre de bons élèves. 
Houbraken, qui fut de ce nombre, juge ainsi 
son maître : « Il peignit bien dans chaque genre; 
il ordonnait avec jugement ; son dessin était assez 
correct, et d'une grande fraîcheur; il tomba 
cependant dans un défaut qu'il condamnait dans 
ses leçons et ses écrits ; c'est celui de peindre 
«rnment, et ses couleurs vives sentaient trop la 
palette. » Ses portraits sont ressemblants et ses 
tableaux d'histoire composés avec intelligence 
et une belle entente de lumière; on en trouve 



dans presque toutes les grandes galeries de 
l'Europe. 

Samuel Hoogstraaten était un des hommes 
les plus' lettrés de son temps : son Traité sur 
la Peinture est encore recherché ainsi que deux 
autres ouvrages intitulés : Le Monde Éclairé et 
le Monde Aveugle, Il a laissé en outre la re- 
lation de son Voyage en Italie; plusieurs pièces 
de vers, etc. 

Son frère Jan 'suivit Samuel dans son 
voyage, et mourut fort jeune, à Vienne : il pei- 
gnait fort bien l'histoire, et avait été reçu 
menribre de l'Académie de Peinture de Dor- 
drecht, en 1649. A. de Lacaze. 

Houbraken, De Schilderiorut der Nederiandcrt, t If, 
p. tso-ttt. - Pllkltigton, Dictienary of Painters. — Des- 
carops, La Fie des Peintres Hollandais, t. II, p. 1*1, us, 
ISS. 

hoogstraatbh ( David van), philologue 
hollandais, né à Rotterdam, le 14 mars 1658, 
mort à Amsterdam, le 21 novembre 1724. Fils 
d'un libraire, il étudia à Leyde les langues an- 
ciennes, puis la médecine ; et, après avoir été 
reçu docteur, il vint exercer son art à Dordrecht. 
Son goût pour la littérature lui fit accepter une 
place à l'Ecole Latine d'Amsterdam , où j\ fut 
plus tard co-recteur, fonctions qu'il résigna en 
1722, parce qu'il était devenu sourd. Il mourut 
des suites d'une chute qu'il fit dans un des canaux 
d'Amsterdam. David Hoogstraaten a donné des 
éditions de Phèdre, de Térence et de Cornélius 
Népos. On a en outre de lui : Dissertatio de 
hodierno Medicinx Statu ad Nicolaum Van 
der Kappen; Dordrecht, 1683, in-8°; — 
Woordenboek der Nederlandsche en latyn- 
sche taal( Dictionnaire Hollandais -Latin); Am- 
sterdam, 1684, in-4°; — Poemaium Libri XI ; 
Rotterdam, 1710; Amsterdam, 1729. Il avait 
commencé avec Schuer le Groot Allgemeen 
Histor. - Qeogr. - Geneal. en oordeelkundig 
Woordenboek (Grand Dictionnaire universel 
Historique, Géographique, Généalogique et Criti- 
que ), d'après Moréri, Bayle, Budée et autres ; 
Amsterdam, 1723, 8 vol. in-fol. : la mort le 
surprit avant que le second volume fut imprimé. 

J. V. 
Sax, Onomast., t. V, p. 6S6. - Moréri, Grand Dict. 
Historique, — Convers.-Lexikon. — Biogr. Médicale. 

hoogzaat (Jan) t peintre hollandais , né à 
Amsterdam, le 12 mars 1664, mort en 1712. H 
fut le plus habile des élèves de Gérard de Lai- 
resse, qui le fit travailler à plusieurs de ses 
propres ouvrages. Hoogzaat décora seul pour 
Guillaume III, roi d'Angleterre, le château de 
Loo, et peignit le plafond de la Salle Bourgeoise 
de l'hôtel de ville d'Amsterdam. Ici on lui re- 
proche d'avoir trop fini son œuvre, qui perd 
beaucoup de ses détails par l'élévation de la 
salle. Hoogzaat a exécuté aussi plusieurs grands 
tableaux pour la municipalité d'Ast 

A. de Lacaze. 

Jakob Campo Weyerman et Houbraken , De Schilder- 
konst der Nederlandert, 1. 111, p. ro-m. - Deacanpa 



105 



La FU des Peintres Hollandais, 1 U, p. 875. -PUking- 
ton , Dietionary qf Pointers. 

hook ( Théodore - Edward ), romancier, 
journaliste et auteur dramatique anglais , né à 
Londres, le 22 septembre 1788, mort le 24 août 
1841. Peu de mots peuvent résumer sa vie. 
Beaucoup d'esprit., et de talent , une phase 
brillante de jeunesse, une faute grave dans un 
emploi public, bien des années remplies de 
chagrin et d'amertume, malgré leur éclat exté-* 
rieur, l'habitude de la prodigalité , une mort 
prématurée , et rien que la misère pour sa fa- 
mille , tels en sont les principaux traits. Son 
père était un compositeur, assez célèbre dans 
son temps; sa mère, une personne distinguée 
par la beauté, l'esprit et le mérite. A peine âgé 
de quatorze ans, il perdit cette mère tendre et 
prudente. Ce rot un grand malheur pour lui : 
tout son avenir s'en ressentit. Son père se re- 
maria bientôt; mais cette seconde femme ne 
fat point pour l'enfant une seconde mère. Le 
jeune Théodore était depuis quelques années au 
célèbre collège d'Harrow. Le vieux Hook se 
laissa facilement persuader qu'il était inutile de 
l'y maintenir plus longtemps. U était fier de son 
fils, qui annonçait les plus brillantes dispositions 
d'intelligence; et d'ailleurs il espérait tirer parti 
de ses talents précoces. Après des études assez 
imparfaites, Théodore, ayant au plus seize ans, 
fat admis comme associé dans ses affaires. En- 
touré de musique dès son berceau, il était déjà 
pianiste exercé; il avait la voix juste et belle, 
et chantait à ravir la romance pathétique et la 
chansonnette légère. Il était la merveille, l'idole 
des amis de la maison, musiciens de tous âges 
et de tous sexes acteurs et actrices. De là au 
théâtre il n'y avait qu'un pas , et bientôt il en 
devint un des habitués. Les idées de vaudeville 
et de drame fermentaient dans sa jeune tête. 
En 1805 il débuta par un opéra-comique, inti- 
tulé Le Retour du Soldat ( The Soldier's Re- 
turn), qui eut beaucoup de succès. L'ouverture 
et la musique étaient de Hook le père, qui se fit 
nommer, tandis que son fils voulut rester in- 
connu; mais le secret ne fut pas gardé long- 
temps. Cette Muette le mit en rapport avec Ma- 
thews et Liston , deux célébrités dramatiques 
du temps. L'année suivante il composa pour 
eux 'une autre pièce, le Prenne qui pourra 
(Catch him who can), où leurs qualités oppo- 
sées, le sang-froid comique de l'un, l'extrême 
vivacité et les ressources mimiques de l'autre , 
trouvèrent amplement à se déployer. Le succès 
en fut encore plus brillant. D'autres pièces sui- 
virent dans une rapide succession : La Fille In- 
visible, — La Folle Musique, — V Enquête 
par Jury y — La Forteresse , — Tekeli, etc., 
qui accrurent sa popularité , et dont quelques- 
unes sont restées au théâtre. Malgré leurs dé- 
fauts , elles témoignaient dans le jeune auteur 
( il n'avait pas encore vingt ans), d'une vive in- 
telligence de l'art dramatique, et d'un talent re- 
marquable comme écrivain et compositeur. 



HOOGZAAT — HOOK. 106 

Ces succès le firent rechercher dans la société. 
Il y apportait tout ce qui pouvait plaire et éblouir, 
beaucoup de gaieté et de saillies, une causerie 
brillante, un talent merveilleux d'improviser, 
paroles et musique, les chansons les plus spi- 
rituelles sur les visiteurs ou les incidents de la 
soirée. «En Angleterre, rapporte M* Mathews, 
où ce talent est fort rare, on n'avait jamais vu 
improviser ainsi. C'était un jeu pour Théo- 
dore Hook que de s'asseoir au piano, et sur 
des airs qu'il composait à mesure , de chanter 
un opéra bouffe complètement inédit Pour 
ne point laisser de doute sur la réalité d'im- 
provisation, il se laissait volontiers imposer 
un sujet, ou, pins volontiers encore, il le 
prenait dans les propos qui venaient d'être 
tenus, dans les incidents qui avaient marqué 
la soirée. On commença à parler de lui dans 
la société aristocratique, où il n'avait pas en- 
core pénétré. La marquise de Hertford rat 
curieuse de l'entendre, et elle en rat charmée. 
L'éloge de ses talents comme causeur et musi- 
cien arriva jusqu'au prince régent (depuis 
Georges IV), et il fut invité à un souper donné 
dans Manchester-Square. Hook contait qu'il fut 
d'abord très-ému et intimidé de se trouver avec 
un aussi grand personnage. Biais la bienveil- 
lance du prince le mit bientôt à son aise , et, le 
Champagne aidant, il redevint lui-même, et 
charma tellement la société , que le régent lui 
dit à son départ : « Monsieur Hook, j'espère 
bien vous revoir et vous entendre encore. » Ce 
désir obligeant fut satisfait; et, de plus en plus 
charmé , à quelques soupers de là; on entendit 
le prince déclarer que, puisque Hook n'avait ni 
fortune indépendante ni profession assurée, il fal- 
lait faire quelque chose pour lui. Chacun applau- 
dit à ce bienveillant intérêt dans le nouveau 
monde où vivait Hook, et où il était devenu en 
quelques mois le favori de tous. On ignore si 
quelque influence secrète ne rat pas mise enjeu, 
ou si on avait présenté sous leur vrai jour à S. 
A. R. les antécédents et la jeunesse de Hook; 
mais, vers la fin de 1812, on le promut à un em- 
ploi plus brillant et plus lucratif qu'il n'aurait pu 
raisonnablement l'espérer ; il fut nommé receveur 
général et trésorier de l'Ile Maurice, avec des ap- 
pointements de près de 2,000 liv. sterling par an 
(50,000 fr.). » Les devoirs de ce poste n'exigeant 
qu'une partie de son temps, il ne s'occupa que de 
ses plaisirs. Cette existence délicieuse dura cinq 
ans; mais un jour vint qui brisa ce beau songe ! 
Vers la fin de 1817, le gouverneur de l'Ile, sirFar- 
quhar, fut forcé, par l'état de sa santé, d'aller 
passer quelque temps en Angleterre, et le major 
général Gage John Hall prêta serment comme vice- 
gouverneur provisoire. Avant de partir, le gou- 
verneur nomma une commission de oinqmembres 
qui devait vérifier tous les comptes de la tréso- 
rerie et constater la situation financière avant que 
la responsabilité passât en d'autres mains. Cet 
examen eut lieu ; le rapport des commissaires , 



107 



HOOK 



108 



en dite dn io novembre ^ atteste qnllt avalent 
trouvé les livres et la caisse en règle : et sir 
R; Farqnhar mit à la voile. Dean mois après, le 
16 Janvier 1818, le vice-gouverneur reçut d'un 
des commis de la trésorerie, une lettre qui, mal- 
gré le rapport des commissaires, avançait qu'une 
erreur grave existait dans les comptes au pré- 
judice du gouvernement. Il s'agissait d'une 
somme de 37,000 dollars, payée à la trésorerie 
quinze mois auparavant * et qui n'avait Jamais 
figuré au crédit de l'administration. Le général 
Hall nomma sur-le-champ, après avoir instruit 
Hook de ce qui se passait* une nouvelle commis- 
sion chargée d'etaminer à nouveau les comptes 
do trésorier et l'état de la caisse. L'enquête dura 
un mois , et le résultat fut la découverte de 
plusieurs Irrégularités > d'omissions nombreuses 
et de différences inexplicables dans les livres de 
la trésorerie. Le 9 mars, à once heures du soir» 
Théodore Hook» qui soupait chez un de «es 
amis , Ait arrêté par ordre du gouverneur, et 
tramé» à la lueur des torches , sous les yeux de 
la foule qu'avait attirée ce spectacle, jusqu'à la 
prison commune; Peu de jours après, il fut livré 
aux mains d'un détachement de soldats qu'on 
embarquait pour l'Angleterre * et envoyé oomme 
prévenu devant la justice criminelle de son pays. 
Avant son départ) tout ce qu'il possédait (même 
ses meubles les plus insignifiants ) fut saisi et 
vendu an compte de l'administration. Sa tra- 
versée fut longue et même dangereuse; il n'ar- 
riva à Portsmouth qu'en janvier 1819. Le décret 
d'arrestation et les autres documente officiels 
fUrent envoyés à Londres , et passèrent sous les 
yeux des magistrats. D'après leur examen, 
Pattomey général déclara que, sans juger les 
fautes officielles de Hook, et l'équité qu'il y au- 
rait à le poursuivre an civil, il n'y avait pas lien 
de considérer l'affaire comme criminelle. L'ac- 
cusé fut en conséquence relâché , et rentra dans 
Londres* n'ayant au monde que deux pièces 
d'or. Mais il n'en restait pas moins sous le coup 
de la suspicion légale, et dès ce moment il eut 
à subir les interrogatoires de la commission ap- 
pelée audit footo% et cinq longues années s'é- 
coulèrent avant qu'on eût statué sur cette af- 
faire > qui intéressait son existence autant que 
son honneur. Pendant ces interminables délais, 
un autre que lui serait mort de faim et de dou- 
leur ; mais, grâce à son caractère léger, il résista 
et s'appliqua à se créer des ressources par sa 
plume. Il essaya d'établir un Magazine; il ne 
réussit point. Il fit jouer une petite pièce composée 
à l'Ile Maurice ; elle ne produisit aucune sensation. 
Un incident le poussa dans le journalisme poli- 
tique. En avril 1820, il fit à Londres chez un ami 
la connaissance de Walter Scott, et à la fois le 
ebârma par son esprit et lui inspira un vif intérêt 
pour sa fâcheuse position. H arriva que deux pu 
trois Jours après Walter Scott rat consulté par un 
noble de ses amis, qui lui demanda si l'on ne 
pourrait pas trouver à Edimbourg quelque 



homme do talent pour diriger en province un 
journal anti-démocratiqoe. W. Scott recom- 
manda Hook. Quelque temps après, à l'étonne- 
ment général , commença le John Bull. Dans 
le cours de 1820, les incidents du procès de la 
reine Caroline avaient excité l'opinion et irrité 
les esprits à on point extraordinaire. Georges IV 
était en butte à une impopularité extrême. John 
Bull prit audacieusement en main sa défense, 
ainsi que celle des principes de la haute aristo- 
cratie. Chaque semaine, C'était un feu roulant 
d'articles étincelants d'esprit, d'allusions mor- 
dantes, de persiflage hardi , d'invectives pleines 
de verve. îl semblait, dit une revue, qu'une lé- 
gion de démons à sarcasmes avait été recrutée 
pour la rédaction. Il parait positif pourtant que 
Hook seul, mais dans le plus grand secret, 
fournissait tout. Aucune des personnes soup- 
çonnées de collaboration n'y écrivit en réalité 
une ligne. Le journal était soigné dans toutes 
ses parties. Aussi obtint-il tout d'abord et cou* 
serva-t-ll durant plusieurs années une circula- 
tion très-étendue. Après la mort de Hook, on 
sut par ses manuscrits que ses bénéfices per- 
sonnels, provenant du John Bull, montèrent 
pendant quelque temps à plus de 2,000 liv. par 
an (50,000 fr. ); plus tard, les circonstances 
étent changées, il n f eh retirait plus en quelque 
sorte qu'une bagatelle. Georges IV dut beaucoup 
au John Bull. Mettacée par un aussi virulent et 
redoutable antagoniste, l'aristocratie vrhig n'osa 
plus soutenir la reine Caroline. Les grandes 
dames du parti s'en éloignèrent peu à peu , et 
leur retraite fil penser aux gens réfléchis de la 
classe moyenne que s! la conduite du monar- 
que envers sa femme était, dans le principe, 
impossible à justifier, celle-ci n'était pas restée 
à rabri du reproche, tl y eut dans l'opinion pu- 
blique , et cela grâce à John Bull, un revire- 
ment, un refroidissement presque complet. — 
Les poursuites de Y audit board avaient traîné ' 
en longueur. En 1823, elles arrivèrent enfin à 
terme. Il fut établi que les livres avaient été 
tenus avec beaucoup d'irrégularité et de négli- 
gence ; que si Hook n'avait pas détourné lui- 
même, il avait laissé voler, et en conclusion, 
le rapport le déclara définitivement débiteur de 
la couronne pour une somme de 12,000 liv. st. 
(300,000 fr.). En même temps , il fut arrêté de 
nouveau et conduit dans une de ces prisons 
pour dettes nommées spunging-houses. Bien 
qu'il y pût recevoir encore quelques amis, ce 
fut une triste et pénible captivité. Sa santé s'y 
altéra. Au bout d'un an, il fut transféré dans 
une autre prison ( lé Domaine du Banc du 
roi). Là, grâce à certaines tolérances passées 
en usage, il pouvait de temps en temps sortir 
de sa prison et diner ches un ami, ou passer 
une journée dans les champs ; mais il ne profi- 
tait guère de cette demi-liberté. Tout son temps 
était consacré au travail. John Bull, peu à peu 
revenu de ces habitudes agressives qui l'avaient 



14)9 



HOOK 



110 



rendu célèbre, mais conservant la supériorité 
réelle de l'esprit et du zèle, avait pris un rang 
élevé dans la presse du parti conservateur* 
Nonobstant les soins qu'il exigeait , Hook, dé- 
barrassé de Vaudit bourd et de sa correspon- 
dance litigieuse f débutai dès 1824» dans la car- 
rière des romans, et prit aussitôt le premier 
rang parmi les coryphées du genre} Walter 
Scott excepté. Il obtint des succès lucratifs : 
ses trois premiers volumes (Sayinge and 
Doings, l re série) lui rapportèrent plus de 
2,000 liv. »t»; la seconde série parut au prin- 
temps de 1826» et justement à cette époque la 
liberté lai fut rendue , mais avec cette déclara- 
tion formelle que la couronne réservait tous ses 
droits sur la dette de l'Ile Maurice. Il alla aus- 
sitôt s'établir à Putney, dans un cottage, au 
bord de la Tamise : c'était une résidence qu'il 
avait toujours aimée; et on peut dire que. dès 
lors il reprit son rang dans le monde , bien que 
pendant deux ou trois ans il ne vit que peu de 
personnel» Il poursuivit alors avec autant d'ac- 
tivité que d'ardeur ses travaux littéraires, et 
de nombreux ouvrages remplissent cette der- 
nière période de 1826 à 1841. Sans parler des 
Réminiscences de Michael Kelly, son ancien 
ami, dont il rédigea d'une manière très-piquante 
les notes à peine lisibles, il publia successive- 
ment la troisième série des Sayings and Doings, 
( 1828); Maxwell (1830); la Vie de Sir David 
Baird (1832); la Fille du Curé, et Amour et 
Orgueil (1833). Chacun de ces ouvrages était 
en trois volumes. En 1836, il devint rédacteur 
en chef du New Monthly Magazine , et ce fut 
là que parurent par chapitres Ùilbert Gurney 
et Gurney marié, publiés depuis en 6 volumes; 
puis Jack Êrag ( 1837) ; — Naissances, Morts, 
Mariages (1839) ; — Les Préceptes et la Pra- 
tique ; — Les Pères et les Fils (1840); enfin, peu 
après sa mort, Peregrine Bunce, dont une bonne 
partie ne semble pas sortie de sa plume, car on 
y cherche en vain ces rapides esquisses de ca- 
ractères et cette vive intelligence de la vie qui 
distinguent ses autres productions. Qu'on ajoute 
a ces trente-huit volumes publiés en seize ans les 
travaux et la direction d'un journal hebdomadaire 
et celle d'une revue mensuelle, et on verra 
qu'il n'encourut jamais le reproche qui s'attache 
à une existence oisive. Mais, sous un autre rap- 
port, il eut des torts plus graves. Avant d'être 
arrêté en 1823, il avait formé une liaison avec 
une jeune femme, jusqu'alors irréprochable , et 
dont le dévouement ne lui manqua jamais dans 
les crises qui suivirent, mais qui appartenait à 
une classe tout à fait inférieure. Cette première 
faute eut de tristes conséquences ; elle mit Hook, 
honnête homme au fond, et dominé par sa 
conscience, dans l'impossibilité de contracter 
un mariage convenable. D'un autre côté , bien 
qu'il eût souvent pensé à réparer ses torts et à 
légitimer l'existence de ses enfants par un ma- 
riage légitime , il n'eut jamais le courage de 



pousser aussi loin le sacrifice. De là, mille 
soucis et bien des malheurs. En outre, il parut 
oublier entièrement la dette qui pesait sur 
lui. Il avait toujours reconnu qu'il était dûment 
responsable d'une somme de 9,000 livres sterl. 
(225,000 fr. ), bien que les commissaires chargés 
de l'examen eussent déclaré le déficit être 
de 12,000 liv.; mais pa3 un sou ne fut payé. 
Et, lorsqu'avec son talent et sa facilité de 
travail , il gagna pendant des années bien au delà 
d'un honnête entretien pour lui et les siens, 
avait-il le droit de disposer d'une seule guinée 
en dehors de ses dépenses légitimes? Six ans 
d'économie, durant la prospérité de John 
Bull, l'auraient mis en état de régler à peu près 
ses comptes avec la trésorerie. Il parut n'en 
avoir jamais le moindre souci , et cette tache 
qu'il laissa volontairement sur sa vie lui ôta mille 
favorables chances , en écartant de lui le patro- 
nage de l'administration. Après avoir séjourné 
deux ans à Putney ,où son établissement avait beau* 
coup de comfort plutôt que du luxe, il quitta tout 
à coup cette résidence, en 1827, pour prendre une 
vaste et belle maison sur la lisière du quartier 
le plus fashionable de Londres. Là, ses dé- 
penses augmentèrent considérablement. Il eut 
voiture, hospitalité fastueuse, et les relations 
d'un homme riche. 11 se fit recevoir à plusieurs 
clubs , et y passait souvent la soirée à des dî- 
ners recherchés ou au jeu. Il fut invité de toutes 
parts dans les familles de l'aristocratie, et peu à 
peu il s'engagea dans une vie de grand luxe et 
un courant d'habitudes et de rapports où s'ab- 
sorbait le temps précieux qu'il aurait dû passer 
à son bureau , et dans des dépenses de nature à 
absorber et au-delà les profits de sa plume. 
De nouvelles dettes s'accumulèrent rapidement 
dans de telles proportions, qu'il fut obligé, vers 
1831, de quitter son brillant hôtel de Saint- James 
pour une maison plus modeste, près de la Tamise. 
C'est là qu'il résida jusqu'à la fin de sa vie, n'ad- 
mettant guère dans son intérieur qu'un petit 
nombre d'amis ou de collaborateurs; mais il n'en 
continua pas moins ses relations avec le grand 
monde. Les lettres et les cartes arrivaient en 
foule à l'un ou l'autre des clubs dont il était 
membre. D était le lion des assemblées fashio- 
nables, Y étoile de ces réunions qui ont lieu à 
Noël ou à Pâques dans les châteaux aristocra- 
tiques d'Angleterre. 11 vivait dans un tourbillon 
de fêtes, de dîners et de soirées splendides. En 
apparence, c'était une vie de plaisirs et bien des 
jouissances d'orgueil ; mais, au fond, c'était une 
vie fiévreuse et constamment troublée. Son 
Journal manuscrit porte bien souvent la trace 
des pensées amères, des chagrins, des anxiétés 
qui le dévoraient secrètement, tandis qu'au mi- 

; Heu de ces fêtes riantes où , assis à table à côté 
d'un duc et pair, les traits épanouis par le sou- 

! rire , il se livrait à une gaieté extérieure et à une 
conversation étincelante. Malgré lui , il songeait 
aux trois ou quatre créanciers courroucés chez 



m HOOK 

lesquels il fondrait aller, le lendemain matin, sol- 
liciter quelque répit nécessaire. On retrouve des 
allusions constantes à cet étrange contraste dans 
les romans qu'il écrirait alors.* En voici un 
passage : « Les cruelles agitations qu'entraîne 
après elle la gêne d'argent compensent, et bien 
an delà, les joies troublées d'un luxe coupable. 
Pensez-vous qu'un alderman savourât de bon 
cœur sa soupe à la tortue, s'il lui fallait la 
manger assis sur la corde roide? Répondez à 
cette question, et je voua dirai ensuite ce 
qu'est la splendide misère d'un homme qui dé- 
pense le double de son revenu, devant à son 
orfèvre, à son tailleur, à son carrossier, non- 
seulement son argenterie, ses habits et ses 
voitures, mais encore le privilège de s'en ser- 
vir à sa guise. » Ailleurs, et sans doute après 
une journée où les usuriers delà Cité, les mena- 
çants attorneys, les besoins impérieux de quel- 
ques dettes de jeu avaient épuisé sa patience, il 
mettait dans le cœur d'un de ses héros « cette 
sensation morbide, cette angoisse morale qu'é- 
prouve tôt ou tard un dissipateur insensé ». II le 
peignait abattu, découragé par les conversations 
de son avocat et de son banquier, tout prêt à 
se ranger, à mettre de l'ordre dans ses dépenses : 
« Mais tout à coup la pensée que *** se réjoui- 
rait de le voir malheureux, et que*** triomphe- 
rait à son club, traversait comme un éclair sa 
pensée ; aussitôt il prenait la résolution de com- 
battre encore, et rêvait vaguement un avenir 
meilleur. » 

Peut-être comptait-il, pour sortir de tous ses 
embarras, sur le patronage des puissants amis 
qu'il avait dans le parti conservateur; mais le 
résultat le plus clair de tous les sacrifices qu'il 
était obligé de faire pour vivre dans leur intimité 
fut une vague réhabilitation des soupçons d'im- 
probité que l'affaire de Ffle Maurice avait lait 
peser sur lui. L'opinion l'acquittait sur ce point : 
par malheur l'accusation de négligence subsistait 
encore et suffisait pour lui fermer la carrière des 
emplois publics. Il continua donc à travailler et 
à espérer, mais sans réformer ses habitudes de 
dissipation. Sa santé, ses facultés s'épuisèrent 
peu à peu sons le poids des anxiétés et du tra- 
vail. Un passage de son journal , en date du 
14 juillet 1841, donnera l'idée du triste état où il 
était arrivé. H devait dîner chez un de ses amis 
intimes; mais il n'arriva qu'au dessert, et ne 
mangea que quelques fruits arrosés d'un mé- 
lange d'eau-de-vie et de Champagne, auquel il 
ajoutait quelques pincées d'une poudre chimique. 
On voyait qu'il eût voulu paraître gai comme à 
l'ordinaire, mais sa volonté n'y suffisait plus. On 
avait passé au salon; et comme il se tenait de- 
bout, une tasse de café à la main, il se tourna 
tout à coup vers une glace, et dit : « Oui , j'ai 
vraiment l'air de ce que je suis, un homme 
épuisé de bourse, d'esprit et de corps! » Il 
avait , au vrai, la figure d'un fantôme. Aucune 
des personnes présentes à cette scène ne le Fevit 



m 



ensuite. Il mourut le mois suivant (24 août) sans 
souffrance apparente, entouré de quelques amis, 
dont aucun ne s'aperçut qu'il expirait. Il n'avait 
pas encore cinquante-trois ans accomplis. Cet 
homme d'esprit et de talent, si fêté pendant sa 
vie, eut des funérailles tristes et solitaires. Aucun 
des représentants de l'aristocratie, qu'il avait 
défendue avec tant de zèle et de dévouement, ne 
vint apporter sur sa tombe un dernier témoi- 
gnage de sympathie. Ses exécuteurs testamen- 
taires n'eurent à constater qu'une insolvabilité 
sans remède. Ses livres et ses meubles produi- 
sirent 2,500 liv. sterl., dont la couronne , créan- 
cier privilégié, s'empara tout aussitôt. On espé- 
rait que les lords de la trésorerie renonceraient 
à tout ou partie de cette rentrée, en faveur des 
cinq enfants que sa mort laissait absolument 
sans ressources. Cet espoir ne fut pas réalisé', 
et il fallut recourir à une souscription publique 
pour soutenir cette famille désolée. On vit alors 
jusqu'où va la reconnaissance des partis. Les 
hommes politiques qui avaient profité de la 
plume et des talents de Hook, ou qui l'avaient 
tant recherché et fêté pour les charmes de son 
esprit, se tinrent à l'écart. Quelques vieux amis, 
quelques généreux parents apportèrent seuls un 
tribut libéral. Il y eut cependant une exception; 
le roi de Hanovre parut se souvenir des services 
rendus à sa famille, et envoya 500 livres. Mal- 
gré tous les efforts , la souscription n'atteignit 
qu'un chiffre peu élevé et insuffisant pour les 
infortunes à soulager. — Peut-être, on trouvera 
que nous avons exposé un peu au long la vie de 
Théodore Hook, qui ne renferme pas de grands 
événements. Mais cette vie nous a paru un en- 
seignement;' elle met en relief deux principes de 
conduite et de morale qu'on est très-porté à 
oublier : l'un, que la vie a, dans toutes les con- 
ditions , des devoirs sérieux qu'il est fatal de né- 
gliger ; l'autre , qu'une première faute est comme 
un boulet que l'on traîne jusqu'à là tombe, si 
tous les efforts , toute l'énergie possible ne sont 
pas consacrés à s'en affranchir, quand la faute 
est réparable, et qu'en matière d'argent , Tordre, 
l'économie, les privations sont le moyen le plus 
assuré de réparation et d'indépendance. C'est là 
notre excuse pour le développement que nous 
avons donné. Le nom de Théodore Hook res- 
tera. Ses chansons et ses facéties politiques ont 
sans doute beaucoup perdu de leur piquant et de 
leur importance, mais elles sont de nature à 
éclairer les pages sérieuses de l'histoire. Parmi 
ses romans, ceux qu'il n'a pas tout à fait gâtés 
par les exagérations extravagantes dont il avait 
pris l'habitude au théâtre demeureront, avec les 
ouvrages de miss Edgeworth et de miss Austin, 
l'expression la plus vraie de la société anglaise 
contemporaine. Hook n'est pas comparable à ces 
deux écrivains pour l'art de composer une fable 
et de soigner un à un les détails d'un livre. Il 
travaillait trop vite pour arriver an même fini ; 
en revanche, la verve pittoresque, le bonheur 



113 



HOOK 



114 



de certaines : esquisses , la perspicacité sati- 
rique, la connaissance approfondie de Londres 
et de ses moindres types, mâles ou femelles, 
donnent à ses fictions quelque chose de plus 
original , un caractère plus tranché. Parmi tes 
romanciers de nos jours, en un mot, nous ne 
voyons que deux peintres exarts de la vie réelle : 
Théodore Hook pour la classe élevée et la classe 
moyenne; Charles Dickens pour les classes po- 
pulaires. Humoriste à la façon de Smollett et de 
Foote , Hook les dépasse par le coloris magique 
de sa phrase. Comme eux, il laisse percer dans 
ses plus folles esquisses un fond de véritable 
philosophie; comme eux enfin, et comme tous 
les vrais humoristes , à la seule exception de 
Swift, il ne dut rien à l'art, rien à l'érudition, et 
trouva toutes ses ressources dans les instincts 
mêmes de sa nature. J. Chahut. 

Chain bery. CpclopedUa of English Literature.—London 
Quaterlv Geview, 184». 

hookb (Robert), mathématicien, astro- 
nome et mécanicien anglais, né le 16 juil- 
let 1638, à Freshwater, dans l'île de Wight, 
mort le 3 mars 1703. Fils de ministre, il reçut 
un commencement d'éducation sous le toit pa- 
ternel; devenu orphelin, en 1648, faible de cons- 
titution, contrefait (.bossu), d'une santé débile, 
sans fortune, il passa les premières années 
de sa jeunesse dans la gène et les souffrances, 
et à l'âge de quinze ans (1653) il s'estima heu- 
reux, pour compléter ses études, d'entrer au 
collège de Christ-Carch , à Oxford, en qualité 
d'écolier servant, de goodman. Dans cette re- 
traite savante, son génie trouva toutes les faci- 
lités, tous les moyens de développement qu'il 
pouvait souhaiter; aussi fit-il des progrès ra- 
pides dans les mathématiques et les diverses 
branches des connaissances humaines qui en 
dépendent. Toutefois, il résulte des inventions et 
découvertes qu'on lui attribue ou dont il se di- 
sait l'auteur, qu'il était plus encyclopédique que 
profond : sachant un peu de tout, en géométrie, 
astronomie, physique, mécanique; il était en 
outre maître es arts; docteur médecin, et ar- 
chitecte. 

Une fois maître de ses actions, il se livra, s'il 
faut l'en croire, à la recherche d'inventions plus 
folles, plus extravagantes les unes que les autres, 
telles que l'art de voler et de se soutenir dans 
l'air à l'imitation de la colombe d'Architas! La 
fabrication de muscles artificiels pour suppléera 
l'incapacité de ceux que la nature nous a donnés 
pour faire mouvoir des ailes d'une étendue suf- 
fisante et rivaliser ainsi avec les oiseaux ; ces 
muscles, pour le dire en passant, auraient exigé 
une force d'au moins 12,000 chevaux de vapeur, 
L'âge et l'expérience l'ayant rendu plus raison- 
nable, il s'occupa d'études et de découvertes 
utiles, sérieuses et approuvées par le bon sens. 
S'étant assuré que la marche des horloges réglées 
par un balancier éprouvait sans cesse des va- 
riations, et se rappelant que Galilée et d'autres 



physiciens avaient proposé \e pendule comme 
mesure exacte du temps, il eut l'idée de rem- 
placer le balancier par cette machine. C'est 
ce qui résulte des écrits qu'il publia contre Huy- 
gens quand celui-ci fit paraître son horloge à 
pendule (1857). 

L'application d'un ressort au balancier des 
montres, pour en régler le mouvement, dont on 
attribue communément l'invention à Hoygens, 
avait été déjà, à ce qu'il paraît, l'objet des médita- 
tions de plusieurs mécaniciens en horlogerie : on 
trouve en effet dans Y Histoire de la Sociétéroyale 
de Londres (1868), parmi les titres d'écrits pré- 
sentés à cette société, des mémoires où il est 
question de cette application. Hooke dit qu'il en 
eut l'idée dès l'année 1880, et qu'il la commu- 
niqua à MM. Brouncker et Morai , comme l'é- 
chantillon de certaines inventions an moyen 
desquelles il espérait résoudre le fameux pro- 
blème du calcul des longitudes par des horloges. 

Ce ne fat qu'en 1675 que Huygens fit faire des 
montres dont le balancier était réglé par un res- . 
sort contourné en spirale (coquille d'escargot); 
le docteur Hooke en fut profondément affecté : 
il intenta à Oldenbourg, secrétaire de la So- 
ciété royale de Londres, un procès en forme, 
l'accusant d'avoir communiqué à des savants 
étrangers des découvertes dont les registres de la 
Société royale étaient dépositaires. Il fut très- 
facile à Oldenbourg de se justifier : car Y Histoire 
de la Société royale, qui vient d'être eitée, avait 
paru en français dès 1669. 

Vers la même époque, l'abbé Hautefeuille pré- 
tendit aussi avoir eu, le premier, l'idée d'un res- 
sort régulateur appliqué aux balanciers des 
montres; il intenta même, à ce sujet, un pro- 
cès sérieux à Huygens. En examinant de bonne 
foi les témoignages des écrivains contemporains 
qui, dans leurs ouvrages , s'occupent de cette 
grave question, on reste convaincu que Hooke 
Ait le premier qui fit l'application d'un ressort 
modérateur aux balanciers des montres, mais 
que ce ressort était droit; par un de ses bouts, 
il était fixé sur la platine de la montre ; l'autre 
extrémité, en quelque sorte libre, était obligée 
de se conformer aux oscilliations du balancier. 
Le régulateur de l'abbé de Hautefeuille était 
aussi un ressort droit : le P. Alexandre le dit 
formellement dans son Traité des Horloges. 
L'inventeur en fit part à l'Académie des Sciences 
en 1674, seulement de vive voix. A cette époque, 
Huygens était à Paris, et l'on serait porté à 
croire, d'après un rapport de LaHire fait à l'A- 
cadémie, que ce fut le succès de l'abbé mécani- 
cien qui lui fit prendre la résolution de chercher 
pour les montres un régulateur comparable à 
celui dont il avait si heureusement doté les hor- 
loges à poids. « Aussitôt, ajoute de LaHire, il fit, à 
ce qu'il disait, des expériences avec des pincettes 
à ressort dont on se sert pour le feu ; et ayant 
remarqué que les vibrations ou mouvement des * 
branches étaient assez égales, il fit construire une 



116 



HOOK 



116 



montre avec un ressort en spiraie. » Pour cou- 
per court à tonte discussion, ne serait-il pas 
permis d'avancer que les trois prétendants à l'in- 
vention eurent, à peu près dons le même temps, 
]a même idée , chacun de son coté , mais que le 
système de Huygens a prévalu , comme le plus 
avantageux ? — Hooke publia en 1 675 un éohappe- 
ment nouveau à deux balanciers. La propriété 
remarquable de cet échappement était que des 
secousses subites ne dérangeaient point les vi- 
brations du régulateur ainsi composé; c'était bien 
là un perfectionnement ; mais des inconvénients 
qui lui étaient inhérents le firent abandonner. 
Quelque temps après que les horloges à pendule 
furent connues, on inventa un nouvel échappe- 
ment» dans le but de supprimer la cycloïde, 
dont l'application était accompagnée de beaucoup 
de difficultés et d'inconvénients inévitables 
{voy. Hutoens). Le nouvel échappement s'ap- 
pela à rocket ou à ancre. Hooke passe com- 
munément pour en avoir été l'inventeur : on l'ap- 
pliqua pour la première fois, à Londres, vers 
1680, sans que l'on sût positivement à qui en ap- 
partenait l'invention} mais Smith, horloger de 
Londres, dans un écrit qu'il publia, en fit hon- 
neur à Clément, aussi horloger de Londres. De 
son coté, Hooke assurait qu'il en avait eu l'idée 
plusieurs années auparavant, et que peu après 
l'incendie de Londres (1666) il avait présenté à 
la Société royale une pendule réglée par cet 
échappement. L'échappement à ancre est au- 
jourd'hui appliqué aux horloges en bois dites 
coucous ; il règle aussi les pendules de luxe qu'on 
place sur les cheminées. Hooke, tout semble 
le prouver, inventa aussi le pendule circulaire : 
on en trouve la description et celle de tout ce qui 
l'accompagne dans les Lectiones Cutlerianx; et 
malgré cela Huygens s'attribua encore cette in- 
vention. Est-ce à tort ou à raison? On ne le sait; 
mais ce qui est bien certain, c'est que la théorie des 
oscillations isochrones dé ce régulateur ne peut 
appartenir qu'à Huygens. Hooke, suivant Mon- 
tucla , n'était pas assez profond géomètre pour 
calculer les propriétés de la cycloïde. 

On doit aussi à Hooke le baromètre à cadran. 
H s'occupa aussi des rapports des vibrations des 
cordes tendues avec les tons qu'elles rendent sui- 
vant leurs longueurs. Àuzoutet Picard ayant fait 
•paraître un micromètre de leur invention, Hooke 
ne manqua pas de s'associer à cet honneur, assu- 
rant dans ses lettres que, dès l'année 1665, il avait 
fait part à Hovel (Hévelius) d'un projet qu'il avait 
formé d'appliquer un télescope aux grands instru- 
ments d'astronomie : ses raisons manquant de 
preuves suffisantes, il ne fut pas écouté. 11 est pré- 
sumable qu'il eut le premier l'idée de V octant 
pour prendre les hauteurs en mer malgré les 
mouvements du vaisseau, dont il publia la des- 
cription en 1674 , dans ses remarques sur la 
Machine céleste cPHovel. Il inventa encore, 
ce qui n'était pas bien difficile, un instrument 
pour tracer mécaniquement toutes sortes de ca- 



drans solaires. Hooké, devenu justement célèbre 
par ses découvertes, jouissait de l'estime parti- 
culière des fondateurs de la Société royale de 
Londres, dans laquelle il fut admis en 1M1. 
Le chevalier Cutler se proposant de fonder 
une chaire publique dans laquelle on enseigne- 
rait les théories et les pratiques de la mécani- 
que, engagea le docteur Hooke à la remplir 
moyennant certains honoraires; de là est venu 
le nom de Lectiones Cutlerianee que porte le 
recueil des leçons excellentes qu'il donna dans 
cette chaire. 

Hooke professa aussi l'astronomie au collège de 
Gresham ( Londres ). Si, comme il a été dit ci- 
devant , la plupart des découvertes de ce savant 
manquent d'intérêt et de gravité, il en est quel- 
ques-unes qui décèlent en lui une puissance de 
génie du premier ordre ; et, par exemple, on ne 
voit nulle part le principe de la gravitation uni- 
verselle aussi clairement énoncé et mieux déve- 
loppé, avant Newton, que dans le livre ou il 
traite des Preuves du Mouvement de la Terre. 
« J'expliquerai , dit-il , un système du monde 
différent à bien des égards de tous les autres et 
qui est fondé sur les trois suppositions suivantes : 
1° Que tous les corps célestes ont non-seule- 
ment une attraction ou une gravitation sur leur 
propre centre, mais qu'ils s'attirent mutuellement 
les uns les autres, dans leurs sphères d'activité; 
2° Que tous les corps qui ont un mouvement 
simple et direct continueraient à se mouvoir en 
ligne droite, si quelque force ne les en détournait 
sans cesse et ne les contraignait à décrire un cercle, 
une ellipse ou quelque autre courbe plus compo- 
sée; 3° Que l'attraction est d'autant plus puissante 
que le corps attirant est plus voisin. » Il ajoutait 
qu'à l'égard de la loi suivant laquelle décroît cette 
force, il ne l'avait pas encore examinée; mais 
que c'était une idée qui méritait d'être suivie, 
conjecture prophétique, et qui se vérifia d'une 
manière si brillante dans les travaux de Newton. 
Hooke fit plusieurs expériences pour donner 
quelque certitude aux conjectures qui viennent 
d'être exposées : il suspendit une boule à un til 
trè8-long,et, après lui avoir imprimé un mouve- 
ment de va-et-vient, il lui en fit prendre un autre 
dont la direction formait un angle avec le pré- 
cédent : ainsi donc la boule obéissait à deux im- 
pulsions ; et il remarqua qu'elle décrivait une el- 
lipse. Hooke imagina aussi unsystèmede signaux; 
un appareil pour lever l'eau par le moyen du feu ; 
un instrument qui, lancé dans la mer, remontait 
spontanément à la surface , apportant un échan- 
tillon de la vase qu'il avait touchée. Il entreprit, 
en 1660, la solution de la parallaxe des étoiles, 
et la détermina d'une manière plus sûre que 
celle que Galilée avait proposée : il fixa, pour cet 
effet, dans une situation perpendiculaire un té- 
lescope de douze mètres ; et il observa pendant 
plusieurs années la Zfn/fcmtedelatêtedu Dragon 
passant par le méridien fort près de son zénith : 
il trouva constamment que dans le solstice d'hiver 



117 



HOOK — HOOKE 



118 



elle en était plus proche de 27 à 30 secondes que 
dans Tété» Il publia ces observations en 1 674, et les 
donna comme une démonstration sans réplique du 
mouvement de la Terre f ce qui serait vrai ai la 
parallaxe était sensible.. Il y a» au reste, d'autres 
raisons qui ne permettent pas de considérer ces 
observations comme concluantes. 

Lorsqu'il fut question de rétablir la ville de 
Londres, détruite en très-grande partie parle 
feu (1666), Hooke ne manqua pas de saisir cette 
occasion pour ajouter un nouveau titre à la con- 
sidération dont il jouissait déjà. Le plan de re- 
construction et d'amélioration qu'il proposa fut 
trouvé supérieur à celui que les architectes of- 
ficiels de la ville avaient dressé; il eut donc la 
satisfaction d'être nommé, par acte du parlement, 
un des intendants chargés d'assigner aux incen- 
diés les emplacements auxquels Us pouvaient 
avoir des droits , de régler et juger les contesta- 
tions oui s'élevaient entre eux. 

£nfin| Hoôk a attaché son nom au perfectionne- 
ment du microscope. 

Ce savant universel était d'un caractère iras- 
cible, orgueilleux, -envieux, ne doutant de rien, 
toujours prêt a soutenir que les inventions de 
ses contemporains étaient des plagiats des 
siennes. 

Ûooke succéda à Oldenbourg comme secrétaire 
de la Société royale. Les livres ou mémoires 
qu'il a laissés sont très -nombreux : voici 
les titres des principaux t Micrographia, or 
philosophical descriptions oj minute bodies, 
made by magnifying glosses, with observa- 
tions and inauiries; Londres» 1666, in-fol»; 
avec 38 planches, reproduites par Baker, en 
1745; — LectioneS Cutlerianœ / 1678-1679, 
in-4°. Ses Œuvres posthumes ont été publiées en 
1701, in-fol., sous la direction de Richard Walker, 
secrétaire de la Société royale de Londres. 
Tetssèdrb. 

Le P. Aleiandre , Traité des Horloges. — Montucla, 
Histoire des Mathématiques. — Smith, Entretien sur 
r Horlogerie. — Ferdinand Berthoad, Histoire de la 
Mesure du Temps." Walker, yu et Œuvres potthtttnes 
du docteur Hooke. 

HOOKE (Nathaiiiei). historien anglais, né 
vers 1690, mort le 19 juillet 1763. On a très- 
peu de détails sur sa vie. On voit pat une lettre 
de lui, adressée à lord Oxford et datée du 17 oc- 
tobre 1722, que, « saisi de la maladie épidémi- 
que de devenir riche ^ , il se lança dans les spé- 
culations de la Compagnie de ta Mer du Sud et 
s'y ruina complètement. Il fut ensuite recottV 
mandé à Sarah, duchesse de Marlboroùgh, qui lui 
fît une donation de 5,000 liv. st., à condition 
qu'il l'aiderait à rédiger ses Mémoires. Cet ou- 
vrage parut sous le titre de AU Àtcount ofthe 
Conduct of the dowager duchess of Marlbo- 
roùgh; Londres, 1742, in-8*. La duchesse ne 
tarda pas à se brouiller avec lui , « parce que, 
disait-elle , Hooke, ne lui trouvant aucune reli- 
gion, avait voulu la convertir au papisme. » Hooke 



était, en effet, catholique, et grand partisan du 
quiétisme de Fénelon. Il amena un prêtre pour 
entendre la confession de Pope mourant , et ex- 
cita par son zèle la colère de Bolingbroke. On a 
de Hooke : The Roman Historyjrom the buil- 
ding of Rome to the ruin of the common- 
wealth; Londres, 1733-1771,4 vol. in-4°. Cette 
histoire, qui a bien peu de valeur aujourd'hui, a 
été plusieurs fois réimprimée. L'auteur s'y dé- 
clare pour le parti démocratique avec autant de 
partialité que Middleton en avait mis à soutenir 
le parti aristocratique dans sa Vie de Cicéron ; 
— Observations on Jour pièces upon the roman 
Sénate; 1758, in-8°*. Hooke répond principa- 
lement aux traités de Middleton et de Chapman 
«tir le même sujet. Les Discourt et Réflexions 
critiques qu'il à Insérés dans son histoire ont 
été traduits en français par son fils Joseph Hooke. 
<— Hooke a traduit du français, de Ramsay, la 
fiedePénelon, 1723,in-l2, et les Voyages de 
Cyrus, 1739, în-4». t, 

Chalmers, General ÈidgrapMcàt Dtctionarg. 
ttodftfe ( Luce- Joseph ), théologien français, 
d'origine anglaise, fils du précédent, né vers 1716, 
mort à Saint-Cloud, en 1796. tl fit ses études au 
séminaire dé Saint-Nicolasdu-Chardonnet, fut 
reçu docteur de Sorbonne, et nommé professeur de 
théologie en 1750. L'année suivante il présida 
à la thèse de l'abbé de Prades ( voy. ce nom ). 
Là discussion publique de cette thèse prouva 
qu'elle contenait une foule de propositions hété- 
rodoxes ; Hooke,- qui avait eu le tort de la signer 
sans l'examiner, essaya vainement de conjurer 
l'orage en dénonçant lui-même les principes ir- 
réligieux de l'abbé de Prades. Le cardinal de 
Tencin obtint contre lui, le 9 mai 1752, une 
lettre de cachet qui déclarait vacante la chaire 
de théologie qui lui était confiée, et enjoignait à 
la Sorbonne de le remplacer immédiatement. Le 
prieur et les professeurs de Sorbonne ainsi que 
les professeurs du collège de Navarre intervin- 
rent en faveur de Hooke , et obtinrent la révoca- 
tion de la lettre de cachet: Le parlement rendit 
même, en 1762, un arrêt pour maintenir Hooke 
en possession de sa chaire ; mais l'archevêque 
défendit aux jeunes séminaristes de suivre les 
cours de ce docteur. Hooke répondit à cette me- 
sure par une Lettre adressée à l'archevêque, 
1763, in-12, dans laquelle il se plaignit avec di- 
gnité d'une persécution que rien ne justifiait 
Cette lettre est accompagnée de pièces justifica- 
tives qui avaient déjà para en 1754, in-4°. Au 
commencement delà révolution, Hooke était con- 
servateur de la bibliothèque Mazarine. Il fut 
destitué en 1791, pour cause de refus de ser- 
ment, et remplacé par l'abbé Le blond. Il se re- 
tira à Saint-Cloud, où il mourut. On a de lui : 
Religionis naturalis révélât» et catholicx 
Prineipia, in usum Academim juventutis; 
Paris, 1754, 2 vol. in-8°; seconde édition cor- 
rigée et augmentée par dom Brewer; Paris, 
1774, 3 vol. in-8°; —Discours et Réflexions 



119 



HOOKE — HOOKER 



120 



critiques sur V Histoire et le gouvernement de 
V Ancienne Rome; Paris , 1770-84, 4 vol. in-12 : 
traduction d'un ouvrage anglais de son père; — 
Principe sur la Nature et V Essence du Pou- 
voir de l'Église; Paris, 1791, in-8°. L'abbé 
Hook est l'éditeur des Mémoires du maréchal 
de Berwich ; Paris , 1778, 2 Toi. in-12. Z. 

Barbier, Examen critique des Dictionnaires histori- 
ques, i 

hookbR' ou to well ( John ) , historien 
anglais, né à Exeter, vers 1524, mort dans la 
même Tille, en 1601. 11 fit ses études à Oxford, 
et voyages ensuite en Allemagne. Il résida à Co- 
logne et à Strasbourg. De retour en Angleterre, il 
rat chargé d'une mission en Irlande. Il représenta 
ensuite la ville d'Exeter an parlement de 1571..0n 
a de lui : The Orderand Usage o/Keeping ofthe 
Parliaments in JBngland; Londres, 1572, in-4°; 
— The JSvents of Cornets, or blasing stars, 
mode upon the sight of the cornet Pagania, 
which appeared in november and december 
1577; Londres, 1577,inr4°; — The Description 
ofthe Citie of Excester t in-4°; — A Pam- 
phlet of the Offices and Duties of everie par- 
ticular Sworne Officer of the citie of Ex- 
cet ter - f Londres, 1584, in-4°; — A Catalogue 
of the Bishops of Excester; Londres, 1584, 
uv4°. Ces trois derniers ouvrages furent réim- 
primés à Exeter, 1765, in-4°. Hooker fut aussi 
le principal éditeur des Chronicles d'Holinshed, 
qu'il augmenta considérablement , surtout en ce 
qui concerne l'Irlande, et auxquelles il ajouta 
une traduction de Geraldus Cambrensis. Z. 

prince, WortMes of Devon. — Wood , Mhetue Oxo- 



hookbr ( Richard ) , théologien anglais , ne- 
veu du précédent, né à Heavitrée, près d'Exeter, 
vers 1554, mort le 2 novembre 1600: Ses pré- 
cocesdispositions frappèrent l'évêque Jewell, qui 
renvoya au collège de CorpusChristi (Oxford). 
Eu 1577 il fut nommé agrégé de ce collège, et 
devint, deux ans plus tard, professeur d'hébreu. 
Il entra dans les ordres en 1581, et contracta 
peu après un mariage des plus malheureux. Sa 
femme, une vraie Xantlppe, dit Wood, fit le 
tourment de sa studieuse existence. H vé- 
géta plusieurs années dans la petite cure de 
Drayton-Beauchamp (comté de Buckingham) : 
l'évêque Sandys l'en tira pour le faire nom- 
mer maître du Temple. Là il engagea une 
vive controverse avec Walter Travers, un des 
prédicateurs du Temple, qui soutenait la disci- 
pline et les doctrines de Genève. H publia à ce 
sujet un traité qui devint le germe de son cé- 
lèbre ouvrage intitulé The Laws ofecclesias- 
tical Polity. Pour travailler plus tranquillement 
à cette oeuvre de prédilection, il échangea sa maî- 
trise du Temple contre la cure de Boscomb 
(Wiltshire). Il termina à Boscomb quatre 
livres de son ouvrage, qui parurent en 1594. 
L'année suivante, la reine Elisabeth le nomma 



recteur de Bishopsbourne, dans le comté de 
Kent, où il passa le reste de sa vie. Le cinquième 
livre de ses Laws of ecclesiastical Polity parut 
en 1597, et Hooker composa encore trois livres 
qui furent publiés après sa mort. On a aussi 
de lui divers traités religieux. Le docteur Gau- 
den donna une éditieu des ouvrages de Hooker 
avec sa Vie; 1662, inrfol.; une seconde édition 
avec la Vie de Hooker par Walton parut en 
1666, in-fol., et fut réimprimée en 1675, 1682, 
1723, 1820, 1830. La dernière édition est celle 
d'Oxford , 1838, 3 vol. in-8°. Y. 

Bioçraphia Britannica. — Chalmen, Général Bio- 
çraphical DicUonary. — .Mlddleton, Evangelieal Bto- 
çraphp, t. II. 

* hooker ( Thomas ), théologien américain, 
né en 1586, à Marfield,en Angleterre, et mort le 
7 juillet 1647, à Hartford ( Connecticut). En quit- 
tant l'université de Cambridge, où il fut successive- 
ment étudiant et professeur, il alla prêcher quel- 
que temps à Londres , puis a Chelmsford ; frappé 
d'interdit en 1630 par l'évêque Laud, pour avoir 
attaqué les privilèges de l'Église établie, il se re- 
tira en Hollande, et de là dans la Nouvelle- An- 
gleterre (1633). Après avoir exercé à Cambridge 
les fonctions dé son ministère , il se mit à la tête 
d'une centaine de fidèles, et fonda, an milieu des 
solitudes du Connecticut, la ville de Hartford, 
dont il fut le pasteur jusqu'à sa mort. On a de 
lui : An Exposition of the Lord's Prayer; 
Londres, 1645, in-4°; — The Sain f s Guide; 
ibid., 1545, in-12; — A Survey of the summe 
ofChurch Discipline; ibid., 1648, in-4°; — 
The Saints Dignity and Duty ; ibid., t651, 
in-4° ;— The Poor Doubting Christian, 7 e édit, 
1743. Th. Hooker s'était fait une grande répu- 
tation comme prédicateur; sur les deux cent* 
sermons manuscrits qu'il fit passer en Angleterre 
au docteur Higginson, près d'une centaine furent 
imprimés par les soins de ce dernier. 

P. L— Y. 

D. Neal, History of New England, 1710, f vol. — 
Bodleianand BriUsh Muséum Catalogues.— Allen, Bio- 
graphical American DicUonary, 

J hooker ( Sir William-Jackson ), bota- 
niste anglais, né à Norwich, en 1785. Il était des- 
tiné au commerce; mais son goût pour la bota- 
nique le porta de bonne heure à entreprendre un 
voyage en Islande, dans le but d'en étudier l'his- 
toire naturelle. Malheureusement,il perdit tous les 
objets qu'il avait réunis, ce qui ne l'empêcha 
pas de publier, en 1809, une relation de son 
voyage, dans laquelle il décrit les plantes de cette 
lie. Voué dès lors tout entier à la botanique, il 
publia un grand nombre d'ouvragés importants 
sur les différentes parties de cette science. 
En 1815, il épousa la fille de Dawson Turner, 
savant botaniste et archéologue, et hérita de la 
fortune assez considérable de son cousin William 
Jackson, de Canterhury. Vers la même époque 
il accepta la chaire de botanique que lui offrit 
l'université de Glasgow. Il quitta cette chaire 



121 



HOOKER 



122 



yers 1840, pour devenir directeur du jardin 
royal de Kew, place qu'il occupe encore actuel- 
lement. « Depuis que ce jardin a été placé sons 
sa direction, dit VEnglish Cyclopxdia, une 
foule d'améliorations ont été introduites dans 
cet établissement, qui n'a pas aujourd'hui de 
rival dans le monde pour la variété et la beauté 
de ses collections de plantes vivantes. Sous 
l'administration de sir "W. Hooker, de vastes 
serres et d'autres bâtiments ont été érigés. Le 
muséum des produits usuels du règne végétal a 
été commencé , et une nouvelle construction a 
été élevée en 1856 pour cette collection vrai- 
ment nationale. Les facilités d'accès ont été aussi 
augmentées , et ces jardins sont destinés à de- 
venir un grand établissement d'éducation pour 
la diffusion parmi le peuple des connaissances 
de rhi3toire naturelle du règne végétal. » Créé 
en 1836 baronet, sir W. Hooker est du petit 
nombre des hommes de l'Angleterre qui ont 
reçu cette distinction en récompense de leurs 
travaux scientifiques. Il a été pendant plusieurs 
années un des vice-présidents de la Société Ljn- 
néenne, et associé de la Société royale. En 1855, 
il a été décoré de la Légion d'Honneur. On a de 
loi : A Tour in Iceland; 1809, 2* édition, 
1813; — Monograph on the British Junger- 
mannix; 1812-1816; •=- Muscologia Britan- 
nica; 1818 (avec le docteur Taylor); 2* édit, 
1833 : on y trouve la première description com- 
plète des mousses de la Grande-Bretagne; — 
Musci exotici; 1818 ; — Flora Scotica; 1821 ; 
— Exotic Flora ; 1823-1827, 3 vol. : l'auteur 
donne la figure et la description des plantes exo- 
tiques nouvelles, rares ou intéressantes à d'autres 
titres, et principalement de celles qu'il serait 
désirable de voir cultiver en Angleterre ; un grand 
nombre de plantes y sont décrites et figurées pour 
la première fois ; — Flora Borealis Americana ; 
1833-1840, 2 vol. ; — The British Flora; 1830, 
5 vol. ; 5 e édition, 1842 : cet ouvrage renferme 
une description complète des plantes de la 
Grande-Bretagne , classées, dans les premières 
éditions, suivant le système artificiel de Linné; 
mais, à la cinquième édition, la méthode natu- 
relle a été adoptée ; — Icônes Plantarum, or 
figures with brief descriptive characters and 
remarks of new and rare plants , selected 
from the author's herbarium; 1837; — Spe- 
cies Fîlicum; 1846-1863; — 4 Centuryofor- 
chidaceous Plants; 1846; — Kew Gardens, 
or a popular guide to the royal botanic Gar- 
dens at Kew; 1847 ; — On the Victoria regia; 
1851. En 1816, sir W, Hooker entreprit la con- 
tinuation de la Flora Londinensis de Curtis, 
dans laquelle il a décrit plusieurs plantes 
nouvelles. Il fit aussi paraître une continuation 
du Botanical Magazine, fondé en 1787 par 
Curtis; et de 1828 à 1833 il publia le Bo- 
tanical Miscellany, recueil qui contient la 
description et la figure d'un grand nombre de 
plantes, particulièrement de celles qui sont en 



usage dans les arts, la médecine on l'économie 
domestique. Cette œuvre a été poursuivie dans 
le Journal of Botany t dont il est directeur. De 
1826 à 1837 sir W. Hooker publia, avec le doc- 
teur Greville, d'Edimbourg, Y Icônes Filicum, 
contenant la figure et la description des fougères. 
Aidé de M. J. Berkeley, il donna une continua- 
tion de VEnglish Flora de Smith, comprenant 
les champignons. Sir W. Hooker est en outre 
un des rédacteurs des Annals and Magazine 
of Natural History. L. L— t. 

The EnglUhCfclopadia ( Btography ). — ^Conversa- 
tUmt-Laritom. 

; hooker (Joseph-Dalton), botaniste et 
médecin anglais, fils du précédent, né en 1816. 
Élevé pour la profession médicale, il prit le 
grade de docteur en médecine , et quitta bientôt 
la pratique de cet art pour suivre la carrière dans 
laquelle son père s'était distingué. En 1839, il 
fut attaché comme chirurgien assistant à l'expé- 
dition que sir James Ross devait diriger dans 
l'océan Antarctique. Il s'embarqua à nord de 
VÉrèbe. Quoique nommé chirurgien, l'objet 
réel de ses investigations était la botanique des 
contrées que l'expédition visitait : ses recherches 
furent généreusement encouragées par le com- 
mandant de l'escadre. Le résultat rot la publi- 
cation delà Flora Antarctica 9 1845-1848, 2 vol., 
ouvrage dans lequel il a décrit et figuré un grand 
nombre de plantes nouvelles; et par la com- 
paraison des espèces obtenues dans ce voyage 
avec celles des autres parties du monde, il a 
grandement contribué à faire avancer la connais- 
sance des lois qui gouvernent la distribution des 
plantes sur la surface de la terre. En 1848, le 
docteur Hooker partit pour une autre expédi- 
tion scientifique : ses investigations s'étaient por- 
tées la première fois sur les plantes des climats 
froids et tempérés; il ne put rester en repos qu'il 
ne connût aussi celles des climats tropicaux. Il 
avait à choisir entre les Andes et l'Himalaya; 
il préféra cette dernière chaîne de montagnes. 
Sa route fut tracée à travers des districts non 
soumis à l'autorité britannique. Il eut de nom- 
breuses aventures , et se trouva même parfois 
dans une position dangereuse; c'est ainsi qu'il 
fut pendant quelque temps retenu prisonnier 
par le gouverneur d'un district dans le Sikkim- 
Himalaya. De retour en Angleterre en 1852, il 
publia son Himalayan Journals f en deux vo- 
lumes. C'est un des pins intéressants voyages 
scientifiques qui aient été publiés dans ce siècle. 
Il ne donne cependant qu'une idée imparfaite 
des travaux de l'auteur. Ses collections de 
plantes et le premier volume de son grand ou- 
vrage intitulé Flora Indka montrent mieux 
encore l'intelligence qu'il dut déployer durant 
ses trois années de voyages et de fatigue dans le 
Sikkim et le Népal himalayens. Quelques-unes 
de ses importations botaniques sont pins connues 
pourtant que sa Flora Indica; ainsi, en 1851, 
peu de temps avant son retour, il surprit le pu- 



128 



HOOKER - HOORN 



124 



blic par renvoi de dessins et de descriptions 
d'un grand nombre de nouvelles espèces de 
rhododendrons du Sikkim-Himalaya i plusieurs 
de ces espèces ont été depuis introduites en 
Angleterre et font 1* gloire des expositions an- 
nuelles de rhododendrons. Dans ses voyages, le 
docteur Hooker reçut l'assistance morale du gou* 
vernement; mais la plus grande partie de ses 
dépenses fut défrayée par ses propre* ressour- 
ces. Avant son voyage dans l'Himalaya, le doc- 
teur Hooker était attaché au Mnséum de Géologie 
économique, et il enrichit te second volume des 
Transactions de cette institution d'an remar- 
quable mémoire ayant pour titre : On the Végé- 
tation of thecarbon\ferous period, as eonu 
parte wilh that ofthê présent day. A son 
retour de l'Himalaya, le docteur Hooker se 
maria à la fille araée du rev. W. Henslow, pro- 
fesseur de botanique à l'université de Cambridge. 
H est un des examinateurs des candidats pour 
le service médical des Indes orientales, associé 
de la Société royale et membre du conseil de la 
Société Linnéenne. Outre les ouvrages déjà cités, 
on a encore de M. J. Dalton Hooker : The Rho- 
dodendrons of the Sikkim-Himalaya; 1849- 
1851 ; — et Flora NovK-Zelandix; 1853. 
L. L— t. 
The EngHih Cjfclopmâta ( Mographf ). - Cenverun 

■oolb ( John ), poète dramatique anglais, né 
à Londres, en 1727, mort prèsdeDorking 9 en 1803. 
A l'âge de dix-sept ans, connaissant passablement 
le latin et le français et sachant un peu de grec, il 
entra dans les bureaux de la Compagnie des Indes 
orientales. H consacra ses loisirs aux lettres, et 
s'adonna particulièrement à l'étude de l'italien. 
Passionné pour l'Arioste, 11 commença une tra- 
duction du Roland Furieux; Il le laissa quel- 
que temps de côté et traduisit la Jérusalem 
délivrée du Tasse. Cette œuvre parut en 1763, 
2 vol. in-8° , avec une dédicace à la reine, écrite 
par Johnson. Encouragé par le succès, il donna 
une traduction de six pièces de Métastase, 1767, 
2 vol. in-8*, auxquelles il en ajouta douze au- 
tres, dans une nouvelle édition; 1800, 3 vol. 
in-8°. Il fit représenter trois tragédies : Cyrus, 
1768, Timanthes, 1770, et Cléenice, 1775. Le 
premier volume de sa traduction du Roland 
Furieux parut en 1773 ; mais sa nomination à 
la place d'auditeur de la Compagnie des Indes 
apporta do retard dans ses travaux littéraires, 
et les derniers volumes ne parurent qu'en 1783. 
L'ouvrage entier forme cinq volumes m-8°. En 
1763 Hoole résigna ses fonctions d'auditeur, et 
se retira dans une maison de campagne près de 
Dorking, ou H mourut. Hoole lut un des amis de 
Johnson et l'assista dans sa dernière maladie, 
dont il a laissé un journal intéressant. Z. 

IHoçrapkia DrammHca. — Gmtteman's MagmwhM n 
vol. Uttlll. 

■ootBB, ■»»«■> ou hovmhi (Jean), pré- 
lat anglais et un des martyrs de la réforme an- 



glicane, né dans le comté de Somerset en 1495, 
brûlé vif le 9 lévrier 1555. Il adopta les doc- 
trines protestantes à l'université d'Oxford. Sa 
conversion l'obligea à quitter l'université, puis 
l'Angleterre en 1540. H passa une partie de son 
exil à Zurich et s'y fortifia dans ses opinions 
religieuses. De retour en Angleterre, à l'avéne- 
ment d'Edouard VI, Q prêcha à Londres avec 
un grand succès. Il fut promu en 1550 à l'évéché 
de Gk>uce8ter. Mais sa répugnance à revêtir les 
habits sacerdotaux l'empêcha d'abord d'occuper 
cette dignité, et il subit même à ce sujet un em- 
prisonnement de quelques mois. Q accepta 
enfin, et travailla avec beaucoup d'ardeur à l'é- 
tablissement de la réforme. Son zèle le désignait 
à la persécution. Arrêté de nouveau, peu après 
l'avènement de Marie, fl refusa d'abjorei le pro- 
testantisme, et fut condamné à être brftlé vif, 
supplice qu'il subit avec un rare courage. Parmi 
ses ouvrages on remarque : A Déclaration of 
Christ and his Office; 1547, in-8°; — tesson 
ofthe Incarnation of Christ; 1549, in-8°; — 
Twelve Lectures on the Creed; 1581 , ln-8". 
Plusieurs lettres de Hopper sont conservées dans 
les archives de Zurich. Z. 

Wood, Àthens Oxonisnses, t. h - Foi, Martin. — 
Bumet , Histont ofRtform. — Mlddleton , EvançeUeal 



■oopbu (Georges ), théologien anglais , né 
à Grimley (comté de Worcester), en 1640, 
mort à Barkley (comté de Somerset ), en 
1727. Après avoir fait ses études à Oxford, il 
devint chapelain de Morley, évêque de Win- 
chester, fut attaché en la même qualité à l'ar- 
ohevéque Sheldon, qui lui donna la cure de Lam- 
beth, et fut nommé en 1677 aumônier de In 
princesse d'Orange. En 1686 il assista le due 
de Monmouth, condamné à mort. La princesse 
d'Orange, devenue reine d'Angleterre, le nomma 
en 1691 doyen de Cantorbéry, et le choisit pour 
chapelain. Il fut élevé en 1703 à la dignité épis- 
eopale de 8aiut-Asaph et transféré au mois de 
mars suivant à l'évéché de Bath et Wells. Ses 
principaux ouvrages sont : Âfair and metho- 
dical Discussion of the first and great Con- 
troversy between the Church of England 
and the Church of Rome, concerning the In- 
fallible Guide; 1687;— De Valentinianorutn 
Hmesi Conjectures, quibus illius origo ex 
JSgyptiaea theologia deducitur; 1711; — 
An Inquiry into the Ancient Measures , the 
attic, the roman, and especially the jewisti, 
with an appendix concerning ourold english 
money and mesures of content; 1721 . %. 

Todd, Uves ofthe Deans «/ Canterbwrg. ~ CJulmet», 
General BtoçrapMeal Dicttonam. 

HOOBir TAU tlooswtck ( Pierre» W- 
colas , baron de ) , antiquaire hollandais , né h 
Amsterdam, le 27 mars 1742, mort à Paris» Je 
5 janvier 1809. Son amour de l'art lui fit aban- 
donner de bonne heure la Hollande pour aller 
visiter les pays étrangers. Il se rendit en Italie, 



125 



HOORN — HOPE 



m 



s'aiTêta à Rome et à Florence. H se trouva alors 
en rapport avec des connaisseurs renommés, tels 
que Pickler, Mengs, les cardinaux Borgia et Al- 
bani; en même temps il sut mériter la bien* 
veillance du grand duc Léopold, H était par* 
venu à rassembler une collection de pierres 
rares et précieuses , quand, au mois d'octobre 
1789, elle lui fut dérobée par son valet de 
chambre. Il poursuivit le voleur, l'atteignit è 
Amsterdam; mais il était trop tard : deux cents 
pièces de oe trésor en avaient disparu. Hooru se 
contenta de racheter ces reliques sans chercher 
autrement k se venger du voleur. Mais l'impres- 
sion produite, par ce vol lui fut funeste. JI 
mourut dans un voyage qu'il fit h Paris pour y 
compléter ses collections. Hoorn était un collec- 
tionneur infatigable , sinon des plus érudits et 
des plus fins; seulement il protégea de son 
mieux les arts et ceux qui les cultivaient. Le 
catalogue des curiosités amassées par Hoorn et 
des pierres et camées qu'il possédait a été dressé 
par Lebrun et Dubois, V. R. 

Brsch et Gruber, Mlg. Encyc. 

hoqrne (Jean de), anatomiste hollandais, 
né à Amsterdam, en 1021, mort à Leyde, te 13 jan- 
vier 1670. Après avoir terminé son cours de 
philosophie, il étudia la médecine à Utrecht. 
Au bout de quelques années, il fit un voyage en 
Italie, et à peine arrivé dans ce pays, il prit 
du service dans les troupes de la république de 
Venise. Il renonça bientôt à l'art militaire, et 
suivit les cours des principales universités d'I- 
talie, de Baie et de Montpellier. Reçu docteur à 
Baie, il revint à Amsterdam, où Ton ne tarda pas 
à lui confier une chaire d'anatomie et de chirur- 
gie ; il la quitta en 1643, pour en aller occuper 
une semblable à Leyde. « Hoorne jouissait, dit 
Jourdan, parmi ses contemporains, d'une grande 
réputation que le temps a ternie, parce qu'elle 
tenait moins à son mérite réel qu'à son adresse 
et à son savoir-faire. Il y aurait cependant de 
l'injustice à ne pas convenir que l'anatomie lui 
doit quelques progrès , et qu'il contribua beau- 
coup à répandre le goût de cette science , que 
lui-même avait puisé dans les leçons du célèbre 
Swammerdam. On peut lui reprocher de s'être 
arrogé plusieurs découvertes dont l'honneur ap- 
partenait à d'autres. C'est ainsi, par exemple, 
qu'il voulut disputer à Pecquet celle du canal 
thoracique , quoique tout son mérite , sous ce 
p rapport , se borne à être Pus des premiers qui 
l'ont décrit dans l'homme. » Ses principaux ou- 
vrages sont : Epistola de Anevrysmate ; Pa- 
ïenne, 1644, in-8«; — Bxereitdtiones anato- 
mïex I et II ad Observation*! Fallopii ana- 
tomicas et earumdem examen per Vesalium, 
addita ubique epicrisi ; Leyde, 1649,in-4°;~- 
ffovus Ductus chyliferus, nunc primum de- 
lineatus, descriptus et eruditorum examini 
propositut; Leyde, 1 652, in-4° ; ~-De Ductibus 
Salivalibus Disputationes ; Leyde, 1656-1657, 
in-4 9 : Hoorne y décrit le canal dont la découverte 



a été depuis attribuée à Warthon; — Dtotrtatio. 
de Nutritione ; Leyde, 1658, in-4°; — Bisser-, 
tatio de JEgilope ; 1669, in-4° ; — Stenonio dé 
Glandulis oris disputanti; Leyde, 1661, in-4° ; 
— M icrocosmus , seu brevis manuductio ad 
historiam corporis humant, in gratiam dis- 
cipulorum édita; Leyde, 1660, 1662, 1665 « 
in* 12; Leipzig, 1675, in-12; trad. en français, 
Genève, 1675, in-12, « Ce manuel, quoique 
très-court, dit Jourdan, fut fort estimé dans le 
temps, à cause de la clarté et de la précision qui 
y régnent partout. On y trouve peu de détails 
originaux ; mais l'état de la science est repré- 
senté avec beaucoup d'ordre et d'une manière 
très-lumineuse » ; — Microtechne, id est brevis- 
sima chirurgix methodus ; Leyde, 1663, 1668, 
in-12; Leipzig, 1675, in-12; — Dissertationis 
anatomicQ-medicx pars prior de partibus in 
ore contentis ; Leyde, 1666, ln-4°; — Prodro- 
mus observationum suarum drca partes gé- 
nitales in utroque sexu; Leyde, 1668, in-12; 
1672, in-4*; — Qbservationes anatomico-me- 
dicœ, annotationibus recentiorum in anato- 
micis pariter ac chirurgicis industriam pa- 
tefacientibus adductœ; Amsterdam, 1676, 
in-12; publié par Just Schrader. Hoorne a donné 
une édition des œuvres de Botaffi , Leyde, 1660, 
in-8o, et du traité De Ossibus de Galien, 
Leyde, 1665, in- (2. Pauii a fait paraître une 
collection des œuvres de Hoorne sous ce titre : a 
Qpuscula Anatomico- Chirurgien; Leipzig, * 
1707, in-8*». J. V. 

Jôcher, Gelehrten-Urtbon. — Joardao, Biographie 
médicale. - Bracb «I Gruber, AUg. gnc*Mlapa$die. 

hope (Jean), baron Nnwiv et comte Ho- 
petoun, général anglais, né le 17 août 1766, 
mort le 27 août 1823. Entré au service en 1784, 
il fut nommé lieutenant-colonel en 1793, se dis* 
ttegua aux Antilles en 1795 et 1796, et obtint le 
grade d'adjudant général. De retour en Europe, 
il représenta le comté deLinlithgon à la chambre 
des communes. En 1799 il fit partie de l'expé- 
dition anglaise envoyée en Hollande, et reçut une 
grave blessure au Helder, L'année suivante, il fit 
la campagne d'Egypte, et fut blessé au siège du 
Caire. Le grade de major général et la place de 
gouverneur de Portsmouth furent la récompense; 
de ses services. Il quitta ce poste pour être em* 
ployé d'abord sous lord Cathcnrt, puis comme 
lieutenant général sous John Moore. Lorsque ce 
général eut été tué à la bataille de La Corogne, le 
16 janvier 1809, Hope prit le commandement dé 
l'armée anglaise, et parvint à effectuer l'embaiv 
quement de ses troupes en présence de l'armée 
française, supérieure en nombre et victorieuse. 
Cette belle manœuvre valut à Hope la décor*, 
lion de l'ordre du Bain. {1 commanda une divi- 
sion à Walcheren , et obtint des succès dans 
cette campagne désastreuse pour l'Angleterre. Il 
alla ensuite à l'armée d'Espagne , qu'il quitta 
bientôt pour devenir commandant en chef des 
forces d'Irlande. E» 1813 il revint en Espagne, 



ni 



HOPE — HOPK1NS 



128 



«a moment où les Français, sons les ordres du 
maréchal Soult, défendaient la ligne des Pyrénées 
contre les troupes de Wellington. Il commanda 
Taile gauche à la bataille de Nivelle, et après la 
victoire H fut chargé de bloquer Bayonne. Cette 
place, défendue par le général Thouvenot, tenait 
encore quinze jours après la prise de Paris. Le 
14 anil les assiégés firent une sortie dans la- 
quelle le général Hope fut fait prisonnier. La 
nouvelle de la paix lui rendit la liberté. Il fut 
créé pair, avec le titre de baron Nidry, le 3 mai 
1814, et en 1816, par suitede la mort de son frère, 
il hérita du titre de comte Hopetoun. Il mourut 
à Paris, qui était sa résidence de prédilection. Z. 

Anmua Biographe mi ObUwtrp (M** )• - Napter, 
Fminsular Wqt. 

bopb (Thomas), archéologue anglais, né 
en 1774, mort le 3 février 1835. Il était parent 
des Hope d'Amsterdam, et descendait comme eux 
de la famille écossaise des Hope de Craig-Hall. 
11 nous apprend que dès l'enfance l'architecture 
fut son amusement de prédilection. Devenu 
maître de sa fortune à l'âge de dix-huit ans, et 
ne trouvant pas dans les livrés des aliments 
suffisants pour ses goûts archéologiques , il cher- 
cha dans les voyages de quoi satisfaire sa passion 
favorite : elle le conduisit dans les pays où l'ar- 
chitecture avait fleuri , et jusque dans ces régions 
d'où la civilisation s'était retirée. Les monuments 
* égyptiens sur les bords du Nil , ceux de l'Ionie , 
de la Grèce septentrionale, du Péloponnèse, de 
la Sicile ; les édifices du style tartare et du style 
persan en Turquie et en Syrie; les monuments 
moresques et arabes sur les côtes d'Afrique et 
en Espagne; ceux des Étrusques et des Lom- 
bards en Italie , et enfin les édifices gothiques de 
la France, de l'Allemagne, de l'Espagne et du 
Portugal , furent pendant huit ans l'objet de ses 
recherches. De retour en Angleterre, il consacra 
ses loisirs et ses revenus à agrandir sur un plan 
nouveau sa maison de Fortland-Place. Cette 
somptueuse demeure, dans laquelle il disposa 
des galeries d'antiques, de sculpture et de pein- 
ture, lui fournit le sujet de sa première publica- 
tion Household Furniture (1805, in-fol., avec 
soixante planches) , qui, malgré les railleries de 
la Revue d'Edimbourg , exerça une grande in- 
fluence sur le goût public. Ses Costume of the 
Ancients, publiés en 1809, contribuèrent à 
mettre à la mode l'imitation des anciens. Il donna 
la même année un Essai sur V Architecture des 
Théâtres , dans la Review of Publications of 
Art de J. Landseer. Il découvrit et patronna le 
premier le talent de Thorwaldsen , qui exécuta 
pour lui son Jason en marbre. La protection 
de Hope ne s'adressa pas toujours aussi heureu- 
sement. Un artiste français nommé Dubost dont 
il avait acheté fort cher un ouvrage, mais avec 
qui il avait fini par se brouiller, exposa pour se 
venger un tableau intitulé La Belle et la Bête 
(Beauty and the Beast), où il avait représenté 
M. Hope et sa femme. Ce scandaleux tableau, 



que le public était admis à Toir moyennant un 
prix d'entrée, avait déjà rapporté beaucoup d'ar- 
gent au peintre , lorsqu'un frère de M 1 ** Hope 
creva la toile à coups de canne. Dubost lui intenta 
un procès , et demanda mille livres sterling de 
dommages-intérêts ; le jury lui en alloua cinq. 
Cette aventure rendit Hope plus réservé dans 
ses relations avec les artistes. A l'exception d'un 
petit ouvrage sur les Costumes modernes ( en 
1812), il ne fit rien paraître jusqu'en 1819, où il 
publia, sous le voile de l'anonyme, Anastasius, 
or memoirs of a modem greek at the close 
of the eighteenth century. Ce roman, qui eut 
un moment l'honneur d'être attribué à lord By- 
ron, dut son succès aux circonstances politiques 
au moins autant qu'à son mérite. Les faits re- 
cueillis par Fauteur sont nombreux, exacts, bien 
choisis, mais le cadre où il les a placés a peu 
de prix. Bon observateur, écrivain agréable, 
Hope est un romancier médiocre. VAnastase a 
été traduit en français par Defauconpret , Paras, 
1820, 2 vol. in-8° ; nouvelle édition avec une 
notice de Buchon, Paris, 1844, in-12. Les deux 
derniers ouvrages de Hope ne parurent qu'après 
sa mort: le premier, intitulé On the Origin and 
Prospectus of Mon , Londres, 1831, in-8°, con- 
tient des spéculations téméraires, aussi opposées 
à la vraie philosophie qu'à la vraie physique, 
fort peu orthodoxes, et souvent inintelligibles. 
VHistoricalBssay on Architecture, publié en 
1835, et traduit en français par A. Baron, 
Bruxelles et Paris, 1839, 2 vol. in-8° , vaut 
beaucoup mieux, bien qu'il n'ait pas reçu les 
derniers soins de l'auteur, et qu'il ne soit vers 
la fin qu'une suite de fragments et de notes 
prises à la hâte. Z. 

English Cyclopmdia {Biography }. 

■opital (L'). Voy. L'HOPITAL. 

hopkins ( Ézékiel ), prélat anglais, né à Sand- 
ford ( Devonshire ) en 1633, mort à Aldermanbury 
en 1690. Fils d'un vicaire , il entra dans les or- 
dres, et après avoir été chapelain du collège de la 
Madeleine à Oxford , puis prédicateur puritain à 
Londres, il suivit en Irlande lord Robartes ( de- 
puis lord Truro), dont il avait épousé la fille 
Araminta , et qui le nomma doyen de Raphoe. 
U devint évoque de Raphoe en 1671, et fut trans- 
féré en 1681 sur le siège épiscopal de London- 
derry. Le grand mouvement catholique de l'Ir- 
lande en 1689 le força de se réfugier à Londres, 
où il fut élu ministre d'Alderoanbury et où il 
mourut peu après. On a de lui : Exposition qf 
the LoroVs Frayer ; 1691 ; — An Exposition 
ofthe Ten Commandements; 1692, in-4\ Ces 
deux ouvrages avec cinq sermons furent re- 
cueillis en 1710, in-fol. Chalmers cite une édition 
plus récente dont il n'indique pas la date , 4 vol. 
in-8°. Z. 

Wood, Attente Oxoniensêt, t H. — Prince, Worthies 
«/ Devon. — Chalmers , General Biogr, Dictionary. 

HaPKiirs (Charles), poète anglais, fils du 
précédent, né en 1664, à Exeter, mort en 1699. 



129 



HOPKINS - HOPPERS 



130 



11 venait d'achever ses études à Cambridge 
lorsque l'Irlande s'insurgea contre Guillaume m. 
Hopkins s'engagea dans les troupes de ce prince,, 
et alla guerroyer contre les catholiques. De re- 
tour en Angleterre, il se lia avec les plus spiri- 
tuels écrivains de son temps , Dryden entre au- 
tres , et obtint le patronage du comte de Dorset. 
L'abus des plaisirs abrégea ses jours. On a de 
. loi : Epistolary Poems and Translations , 
1694, inséré dans la Select Collection de Ni- 
chols; — Pyrrhus king of Pirus, tragédie; 
1695 ; — Art of Love; — Boadicea, queen of 
Britain, tragédie; 1697; — Friendship im~ 
proved, tragédie; 1700, in-4°, Z. 

Baker, Biographia DramaUca. — Chalmen, General 
Biographiccl Dietionary. 

hopkins (John) t poète anglais, frère du 
précédent, né le 1 er janvier 1675, mort au com- 
mencement du dix-huitième siècle. Comme son 
frère, il cultiva la poésie , et Ton croit qu'il mou- 
rut aussi prématurément que lui. On a de Hop- 
kins : The Triumphs ofPeace, or the glories 
of Nassau; a pindaric poem; 1698; — The 
Victory of Death, or the fait of beauty; a 
visionary pindaric poem; 1698, in-8°; — 
Amasia, or the works of the muses, a collec- 
tion of poems; 1700, 3 vol. Z. 

NichoU, Poems. - Oulmeri, Gênerai Biographieal 
Dictionary. 

hopkins (Samuel), théologien américain, 
né le 17 septembre 1721, à Waterbury (Con- 
necticut), et mort le 20 décembre 1803 à Nev*- 
port (Rhode-Island). H fut élevé au collège 
d'Yak, embrassa, en 1743, l'état ecclésiastique, 
et présida, de 1770 à 1780, une congrégation de 
Newport. C'était un homme pieux, zélé, plein 
d'enthousiasme, au dire de Channing qui fit de 
lui un bel éloge; mais ses opinions religieuses 
donnèrent lieu a une vive controverse. Ceux 
qui les adoptèrent prirent le nom d'hopkin- 
sians; ce sont les puritains du calvinisme. On 
a de lui : Dialogue concerning the Slavery 
of the Africans, 1776, où il prouvait que le 
devoir aussi bien que l'intérêt des États-Unis 
était d'affranchir les esclaves; — System of 
Doctrines containedin divine relation; 1793, 
contenant l'ensemble de ses croyances particu- 
lières sur le souverain bien, le péché, etc.; — 
plusieurs dissertations théologiques, dont un 
Traité sur le Millenium, etc. P. L— y. 

Whlttier, Old Portraits and modem Sketches; 19*0, — 
Channlog, Moral Argument against calvinism,- 1W0. — 
Allen, Biographieal American Dictionary, i« édlt. 

hoppbr (Marc), jurisconsulte suisse, mort 
en 1565. Reçu maître es arts, il professa ensuite 
le grec, la logique, la physique et les Institutes 
de Justinien. 11 mourut de la peste. On a de lui : 
Lexicon Latino-Gr&cum; Baie, 1563, in-fol.; 
— Opéra Grxco-Lalina — 11 donna aussi une 
édition des Opuscula d'iEneas Silvius (Pie II), 
qu'il fit précéder d'une introduction de sa façon. 

Sedler, Univers.- Lex. 

hoppbrs (Joachim), en latin Hopperus, 

NOUV. BIOGR. GÉNÉR. — T. XXV. 



jurisconsulte belge, né à Sneeck (Frise;, le 
11 novembre 1523, mort à Madrid, le 15 dé- 
cembre 1576. Après avoir fait ses premières 
études à Harlem, il commença à Louvain, sous 
Gabriel Mudée, dont il fut l'un des élèves fa- 
voris, un cours de droit qu'il alla terminer 4 
Paris et à Orléans. De retour à Louvain en 1549, 
il y obtint le grade de licencié, et fut pourvu 
d'une chaire de droit à l'université de cette ville. 
U reçut en 1553 le bonnet de docteur , et l'année 
suivante il renonça à la carrière de l'enseigne- 
ment pour occuper une place de membre du 
grand conseil de Malines. Lorsque le gouver- 
nement espagnol créa une université à Douay, 
Hoppers fut chargé de sa formation. Appelé à 
Madrid en 1566, il devint membre du conseil 
privé de Philippe II , et chancelier pour les af- 
faires des Pays-Bas. Aux lumières du juriscon- 
sulte il joignait celles du philosophe et de l'his- 
torien. Ses liaisons d'amitié avec Viglius lui 
avaient ouvert la carrière politique, dans laquelle, 
malgré sa modération et son attachement à son 
pays , il ne fut pas toujours sans reproche. 

Voici la liste de ses principaux ouvrages : De 
Juris Arie Libfï III; Louvain* 1553, in-fol.; 
—Ad Justinianum de Obligationïbus iretOavâv 
Ubri V; Louvain, 1553, in-fol.; — Dispositio 
in libros IV Institutionum; Cologne, 1557, 
in-8°; — Dispositio in libros Pandectarum; 
Cologne, 1558, in-8° ; — Isagoge in veram Ju- 
risprudentiam Ubri VIII. Priores quatuor 
continent peratitla juris civilis : posteriores 
elementajuris , sive principiajusti et injusti; 
Cologne, 1580, in-8° ; — Ferdinandus; sive de 
institutions principis liber I; Anvers, 1590, 
in-fol. ; — Seduardus , sive de vera jurispru- 
dentia; Anvers, 1590, in-fol., publié par les fils 
de l'auteur, et réuni à l'ouvrage précédent et à 
un autre qui a pour titre : Themis hyperborea, 
sive de tabula regum FrisUe. H. Conring a 
donné une nouvelle édition de ces trois écrits 
à Brunswick; 1656, in-4°. Le Recueil et Mé- 
morial des Troubles des Pays-Bas du roy 9 
opuscule écrit en français par Hoppers , mais 
désigné par le P. Lelong'sous le titre latin de 
Commentarius de Tumultibus Belgicis, a été 
inséré par Hoynek van Papendrecht dans la se- 
conde partie du tome II de ses Analecta Bel" 
gica; La Haye, 1743, in-4°. Il existe à la bi- 
bliothèque royale de Madrid une traduction es- 
pagnole du mémoire d'Hôppers. La bibliothèque 
royale de Bruxelles conserve une collection de 
lettres manuscrites d'Hôppers, et la bibliothèque 
de l'université de Giessen possède un manuscrit 
contenant quatre cent quatre-vingt-six lettres de 
cet homme d'État. De Nélis , évèque d'Anvers, 
en a publié deux cent vingt dans le recueil in- 
titulé : Joaehimi Hopperi Epistolx ad Viglium 
ab Aytta Zuichemum, sanctioris consilii 
prxsidem, Louvain, 1765 ; ou, avec un autre 
titre, Utrecht, 1802,Jn-4°. On en trouve aussi 
quelques-unes dans les Illustrium Virorum 



13! 



HOPPERS — HOHA€£ 



192 



Epistolm ÈètetttorM , vei a Btlgis, vtl ad Beh 
gas scriptœ, Leyde, 1617, in-4% et dans le 
tome IX du Compte+rendu dès sé&nces fa la 
Commission royale d'Histoire (de Belgique)* 
Enfin ) le Sylloge de Barman* en contient a»; et 
M. Hameft {Oûtalogus lâorirum uunweripta* 
rum, p. 17) «le cette» que l'on conserve à Bfr 
sançon. E. RegrAku. 

Vater* Antre, BiètMhea* Belçic*. - ftt» AoriMtfH 
Bopperi, en tête du tom. II, seconde partie, des AnaUcta 
tielgtca de Hoynëkvan Papeodrechi. — Siàliothecd tiut- 
themiana, tom. IV, a*» SS,80S et tt JOt. - J. Britt , COéê 
04 F Ancien Droit de Belgique. 

boppueb ( Henri-Parktns), navigateur an- 
glais, né en 1795, mort le 22 déeembre 1833* 
Quoique son père fût peintre esses distingué, il 
préféra ta carrière maritime, et débuta en 1808* 
sous les ordres de l'amiral Moore, dans les eaux 
de l'Espagne et do Portugal. Il fit ensuite partie 
des escadres de ta Manche et de l'Amérique 
septentrionale. En 1816, il accompagna en Chine 
lord Amherst, plénipotentiaire auprès dn Céleste 
Empire. En 1818, il prit dn service comme se- 
cond sur le brick Alexander, commandé par 
Parry, qui suivait alors Ross dans les mers po- 
laires. En 1819 il fit le même voyage sur 1e 
Griper, dépassa le 110* de longitude ouest, et 
obtint un prix du parlement. En mai 1821, il fit 
partie, comme lieutenant dé YSecla (capitaine 
Lyon), de l'expédition dirigée par Parry, et en 1824 
il suivit de nouveau Ross dans son voyage de dé- 
couvertes an pôle nord. Il commandait alors ta 
Furie, qui se perdit dans les glaces. Les souf- 
frances qu'il endura furent telles que depuis cette 
époque sa vie ne fat qu'une tante agonie. Cet 
intrépide navigateur mourut à peine âgé de 
trente- huit ans. 

Le récit des voyages auxquels il avait pris part 
se trouvant rapporté adx notices de Parry et de 
Ross {voy. ces noms), ce serait faire double em- 
ploi que de le reproduire ici. A. de L. 

Vf alkenaSr, Collection dêê Relattom do Vv§ageu 

hobacb (Quinius-HoratiusFlaccus), cé- 
lèbre poète latin, né à Venusiom le 8 décembre 
an de Rome 689 (65 avant J.-C), mort à Rome 
le 27 novembre 746 (8 «vaut J.-C.), Il est né 
sous le consulat de L. Aurelius Cdtta et de 
L. Maniius Tofquatus , a l'époque où César, 
compromis par la première conjuration de Cati* 
lina, rêvait déjà la èhute de la république (1). 
L'enfance du poète fat troublée par lé nrdit 
des guerres civiles. Tout jeune il porta les armes 
lors des sanglantes représailles exercées par 
Octave contre les meurtriers du dictateur. Plus 
tard il devint l'ami de Mécène ; et ses dernières 
années s'écoulèrent auprès du conseiller d'un 
prince qui réorganisait le monde. Chacune de ces 
époques lui é suggéré de nobles pensées et inspiré 
de sublimes accents. Il a aimé la liberté quand 

(1) Cotta et ManUos dénient être Mussloét m Ca- 
pitule le Jour de leur installation. Suétone dit qne Géaar 
était do. complot foy. Sallusté , CatU,, t XVIII, et 
Suétone, C'a?*., § IX. 



elle émit possible} puis il a, prêter* l'unité du 
pouvoir à l'anarchie, et n'a, du moins, célébré 
oe pouvoir que quand fl était devenu modéré, 
réparateur et tetétaire* L'histoire de ses poésies 
est celle de Rome pendant le long enfantemenl 
de l'empire, torique ta siècle pactfiqae et lit- 
téraire, qu'on appelle ta ttàrie d'Auguste, sue* 
eédait è des tempe de troubles et de discordes. 
La revolutiofl ojut s'accomplit alors, et qui il 
passer ta puissance souveraine des mains du 
peuple dans celles d'un empereur, était une 
révolution seetata. La vieille soeiété romaine se 
mourait d'un mal dont elle ne pouvait guérir 
qu'eu changeant de forme, et tas circonstances 
de ta vie dn poète résument oe changement. 
Elles nous reflètent toutes ees transformation», 
ces hésitations , ces croyances nouvelles, ces 
fortunes subites, ces positions conquise* ou per- 
dues Ad tempe M les Roulante éenan^èfett M 
vie agitée du forum et lés terribles étttotionS de 
ta démocratie contre un fepes qtfilë payaient dé 
leur liberté. Horace, qui« par sa naissance* feu» 
ehait à ta classe dèé affranchis, et pif sue 
amitiés' , Aux conseillers du ptrace et au prince 
rm-méiné, représente lé mondé romain dans tous 
les degrés de sa hiérarchie; il nous initie à m 
vie littéraire comme à ta vie de la haute société 
patricienne. Poète, il réunit les goûts délicats 
que lui a inspirés son séjour en Grèce â l'allure 
indépendante de l'esprit itatiote, et, tout en 
imitant les formes grecques dans* ses vers, il 
n'offensé jamais la musé latine dans ce qu'elle 
a d'archaïque et de pur. il traite dés genres" 
divers, qu'il marque de son caractère aimable , 
de ses mœurs polies, dé sa dignité personnelle s 
de sa tolérance, qui n'est pas dé ta mollesse» 
S'il cède aux coutumes raffinées de là grande 
ville dont il est l'hôte depuis tant d'années, c'est 
en gardant l'empreinte dé ta aère énergie des 
montagnes de la Pouille, oh il à pris naissance, 
tous les nommés illustres de son temps sont 
Ses amis, et en le prenant pouf guide nous serons 
admis avec lui dans leur intimité la plus fami- 
lière. Mécène, Agrippa, Auguste lui-même. 
Virgile , Varius, les Pisons, sont les principaux 
membres de cette illustre pléiade* Suivre le 
poète dans sa vie et dans ses œuvres , c'est pé- 
nétrer au vif dans le siècle d'Auguste, le plus 
beau que puissent vanter les lettres latines. 

Legrand poète romain naquit, pour le répéter, 
à Yenusinm, dans ta paya des Saoïnites < sur 
les confins de i'Apulie et de ta Lucarne, on a 
Cru longtemps que son père, qui n'était qtrtin 
afrranchi, avait appartenu à quelque membre «m 
ri Irostre famille des Hotaues, dent» selon l'an- 
tique usage, il avait pria ta nom en montant m 
liberté; puis, lorsque de récentes reoheimmt 
eut tes monuments éplgraphiqoea du royaume 
dé ftfples eurent mit connaître lé nom on t* 
tribu romaine dans laquelle étalent inscrits tan 
habitants de Venusium qui faisaient partie de la 
trita JTornftnj on supposa quota père do poète 



133 



HORACE 



134 



avait reçu son nom comme affranchi de la Tille 
à laquelle il avait appartenu en qualité àeser* 
vus publiais. Quoi qu'il en soit, après avoir 
conquis sa liberté, il exerça dans son pays les 
fonctions de receveur Ou collecteur pour les 
ventes à l'enchère , fonctions qui né valaient du 
titulaire qu'une assez mince considération, mais 
qoe les confiscations amenées par la réaction 
des partis, en temps de guerres civiles, pou- 
vaient quelquefois rendre lucratives. Aussi avait* 
il fait l'acquisition d'une petite propriété sur les 
bords de l'Aufidns (Vofanto des modernes), à 
quelques milles de Veousium. C'est là qu'Horace 
a passé son enfance et que ses yeux s'ouvrirent 
au grand spectacle des scènes de la nature ; c'est 
là qu'il parcourait les montagnes * sans autre 
protection que celle des divinités aimables dont 
la mythologie romaine peuplait les valions et les 
forêts; c'est là qu'il reçut du ciel une première 
faveur, qui faisait présager sa destinée de poète 
et qu'il à pris soin de raconter dans ses vers» 
« J'étais encore bien jeune, dit-il, et j.e m'étais 
endormi , fatigué de mes jeux, sur les pentes 
du Vultur, qui descend vers la Lucanie. Des 
colombes vinrent me couvrir d'un vert feuil- 
lage. Les habitants d'Acheruntia, suspendue 
comme un nid d'aigle, ceux de la forêt de 
Bantium et du vallon fertile de Ferente , me 
virent avec surprise dormir en sûreté parmi 
les ours et les noires vipères, sans autre abri 
que des branches de myrthe et de laurier* Les 
dieux seuls inspiraient tant d'audace à un en- 
fant (1): » 

Au milieu des distractions d'une vie champêtre, 
dans un beau pays et sous un ciel pur, Horace 
atteignit l'âge où les soins de l'éducation doivent 
remplacer les jeux de l'enfance. Il est probable 
que cette enfance annonçait déjà le génie du 
poète et lui promettait un glorieux avenir. Du 
moins le père d'Horace, qui comprenait sa tâche, 
sut-il s'imposer de pénibles sacrifices pour déve- 
lopper, par une brillante culture, l'heureux na- 
turel de son fils. Pauvre du mince revenu d'un 
champ peu fertile, macro pauper agello , il ne 
voulut point envoyer le jeune Horace à l'école de 
Flavius, qui, pour un salaire mensuel, rassem- 
blait à Venusium les riches enfants des nobles 
centurions, apportant chaque matin sur l'épaule 
gauche et leurs jetons et leur ardoise (2). Il le 
conduisit à Borne pour y recevoir l'éducation li- 
bérale qu'on y donnait aux fils des chevaliers ou 
des sénateurs. « A me voir fendre la foule, vêtu 
richement et suivi de plusieures valets, ajoute le 
poète reconnaissant, on aurait pu croire que 
les revenus d'un vaste patrimoine défrayaient 
la dépense de tout eet équipage. Mon père lui- 
même, incorruptible gardien de ma jeunesse» 
me suivait chez tous mes maîtres. Que dirai-je 
de plus 1 Veillant sur les actions et les paroles* 



fl) Voy. Carmlnum Lib. lit, ode iv, v. 9-JO. 
(i) Sermonum Lib /, sat. vi, v. 11-7* 



il sut préserver de toute flétrissure cette fleur 
d'innocence aussi fragile que précieuse, bravant 
les reproches qu'on aurait pu lui faire, si tant 
de soins et de dépenses ne m'avaient conduit 
qu'à quelque emploi modeste tel que celui qu'il 
avait exercé. Et certes ce n'est pas moi qui 
m'en serais jamais plaint I Grâces lui soient 
rendues , et puisse ma reconnaissance égaler 
ses bienfaits I Tant que ma raison sera d'ftccord 
avec mon cœur) je m'applaudirai d'être son flli. 
Loin de m'exoUser comme tant d'autres de tttott 
humble naissance, en disant qu'il ne m'a {ras 
été donné de placer mon berceau dans quelque 
noble famille , j'aurais à recommencer ma vie , Je 
pourrais naitte parmi les faisceaux et la pourpre 
que je ne choisirais pas un autre père (1). * 0e 
tels sentiments j conçus et exprimés à l'époque 
où les différentes classes de là société romaine 
étaient séparées par des barrières presque in- 
francbissabte&t font à la fols l'étage d'Horace et 
de son père, l'un présidant avec tant de sèle et 
d'intelligence à une éducation qu'il regarde 
comme rhérjtaa* le plut précieux pour son fils, 
l'autre proclamant bien haut son humble origine 
pour rapportera soit père ta mérite de sa propre 
élévation. 

Horace noue a laissé de soft éducation d'antres 
souvenirs qui, sans doute, excitaient moins sa 
reconnaissance. Il a immortalisé dans ses vers 
Orbilius et son martinet, OrbiUum plagosum (2), 
ainsi qu'il l'appelle > et Suétone a confirmé la 
justesse de l'épithète en nous apprenant que ce 
grammairien déchirait ses rivaux par ses dis- 
cours et ses élèves avec ta fouet (3). C'est à l'aide 
de cette méthode qu'il Initiait Horace aux vers 
déjà vieillis d* Andronicus et à la poésie d'Homère, 
toujours jeune. « j'ai au le bonheur d'être élevé 
à Rome, dit Horace dans une de ses épltres, 
et d'y apprendre tout ce que les Grecs avaient 
souffert de la colère d'Achille* Plus tard je 
devais visiter la docte Athènes et me mettre 
à la recherche du vrai dans les jardins d'A- 
cadémns (4), * Ce voyage de la Grèce était alors 
et fut encore longtemps le complément de toute 
éducation patricienne. Horace y trouva des jeunes 
gens de son âge appartenant aux premières 
familles de Rome; Bibultts, Acidinus, Mes- 
sak, le fils de Cieéreu. H fréquenta sans doute 
les mêmes écoles, suivit les leçons des mêmes 
maîtres , et, devenant l'ami de ses condisciples, 
grâce à son aimable caractère, grâce à l'in- 
souciance du jeune âge, il renversa cette 
barrière puissante que la naissance élevait entre 
le fils de l'affreneni et ceux des nobles pa- 
triciens. C'est là, sur cette terre où l'art semble 
le fruit du sol et du climat , qu'Horace a com- 
posé ses premiers veré, et Ce fut en grec qu'il 
voulut d'abord écrire, u nous l'a dit t « Né de 

W Sëfimnttm lib. 1, iafc vi, V 78-98. 
(S) Epistolarum Lib. lt, ëp. i, v. ÎO-71. 
(i) De MwtribusGramfnttticlt , ffix. 
(*) Epistolarum Lib. Il, ep. il, v. W-M 



135 



HORACE 



136 



l'autre côté de la Méditerranée, je roulais ce- 
pendant écrire mes vers dans l'idiome d'Ho- 
mère ; mais Qairinus m'apparot après minait, 
à l'heure où les songes ne mentent pas. — Si ta 
portais du bois à la forêt, m'a-t-il dit, tu ne 
serais pas plus insensé qu'en voulant grossir 
la foule des poètes de la Grèce (1). » Horace 
échappait ainsi aux dangers d'une imitation ser- 
vile et improductive qui l'aurait relégué à un 
rang secondaire. Il imita les Grecs sans doute, 
mais comme des modèles qui l'avertissaient de 
son propre génie et provoquaient en lui l'ému- 
lation libre , hardie , féconde. H est l'un des 
exemples les plus purs de l'imitation originale , 
la seule qui vive de sa propre vie et trace à 
chaque littérature la voie qui lui est propre. 

Si Horace a fait le voyage d'Athènes à vingt 
ans, vers l'an de Rome 709 (av. J.-C. 45), trois 
ans s'étaient écoulés depuis la bataille de Phar- 
sale , et le monde romain se trouvait alors dans 
cette période de calme pendant laquelle la dicta- 
ture de César servit d'entr'acte aux deux guer- 
res civiles .qui préparèrent la chute.de la repu* 
Nique. Mais, dès l'année suivante, César tom- 
bait sous le poignard de Brutus, et la retraite du 
meurtrier à Athènes venait interrompre, par les 
préoccupations d'une guerre imminente, les 
paisibles .études d'Horace. Entraîné par la jeu- 
nesse et par l'exemple de ses compagnons 
d'étude, le jeune Horace dut quitter les doctes 
entretiens des jardins d'Académus pour entrer 
dans la vie militante et se mêler aux luttes 
sanglantes des partis. Plutasque nous apprend 
qu'en arrivant à Athènes Brutus, accueilli, par 
de vives acclamations et entouré de toute la 
jeunesse patricienne , avait affecté de se livrer à 
des études philosophiques ou littéraires. Chaque 
jour il allait entendre le philosophe académicien 
Théomnestus on Cratippe, de la secte du 
Lycée (2)» Cest là, sans doute, qu'il connut 
Horace, dont le caractère à la fois fin et naïf, 
la justesse de pensée, la précision de langage ne 
pouvaient manquer de lui plaire. Aussi, lorsqu'il 
partit pour rassembler l'armée qu'il allait op- 
poser aux soldats d'Octave et d'Antoine, le fils 
de l'affranchi, Horace, le suivait comme le sui- 
vaient le fils de Cicéron , celui de Caton, Mes- 
sala et tant d'antres jeunes gens, l'espoir des 
grandes familles de l'aristocratie romaine. 

Maintenant devons-nous croire que ce jeune 
homme de vingt-deux ans, occupé jusqu'alors 
de ses études, fils d'un père qui avait été es- 
clave, sans antécédents militaires d'aucune sorte, 
sans goût véritable pour une profession qu'il 
abandonna au premier revers (3), ait été tribun 

(Il Sermonum IAb. /, ut. x, y. M-M. 

(i) Voy. Plut, Brut., f xxit. 
(B) Horace semble se reconnaître pea propre au métier 
des armes lorsqu'il se déclare imàeiUt dans la première 
épode, on 11 propose i Mécène de prendre part à côté de 
loi au dangers de la guerre acuaqoe-: 
Regei tanin labora qaid javrai smo 
ImbcUi» se armas pâma } 



dans l'armée de Brutus, alors entouré de l'élite 
de la société patricienne? Et cependant Horace • 
l'a dit : « Revenons à moi, Mécène, à moi le 
fils d'un affranchi, à qui chacun jette ce nom 
comme un reproche aujourd'hui, parce que je 
suis devenu votre commensal , autrefois parce 
que, tribun militaire, je commandais à une lé- 
gion romaine (1). » 

Des critiques modernes ont pensé que lesjhautes 
fonctions du tribunat étaient incompatibles avec 
la condition servile d'un jeune homme pris sur 
les bancs dé l'école, et que les nécessités de la 
guerre civile ne suffisaient pas pour justifier une 
telle infraction aux habitudes de la hiérarchie 
militaire sous la république. Ils ont donc supposé 
au passage d'Horace un sens ironique tout diffé- 
rent du sens absolu j de telle sorte qu'Horace au- 
rait dit à Mécène : « Parce que tu me témoignes 
quelque amitié , les envieux ( dans leur exagéra- 
tion maligne) font de moi, pauvre fils d'affranchi, 
ton commensal habituel ; et parce que je servais * 
à Philippes , ils vont jusqu'à dire que j'y com- 
mandais comme tribun une légion romaine! » 
Noos avons exprimé ailleurs quelle est notre 
opinion sur les conditions du tribunat militaire 
et sur les modifications qu'il a subies aux diffé- 
rentes époques de la puissance romaine. Nous 
avons dit pour quelles raisons il nous semble que 
l'on doit accepter les vers d'Horace comme ex- 
primant une des circonstances importantes de sa 
vie et le compter au nombre des tribuns mili- 
taires ayant secondé Brutus dans cette campagne 
brillamment ouverte, qui commença par des 
triomphes et finit à Philippes par la défaite com- 
plète du parti de la république (2). Du reste le 
grade qu'il occupait a fait peser sur sa mémoire 
une responsabilité plus grande. « Tous deux pré- 
sents à Philippes, écrit-il à Pompeius Varus, 
nous cherchâmes notre salut dans une fuite ra- 
pide, et j'eus le tort d'abandonner mon bou- 
clier : » 

Tecnm PhiHppos et celerem fngam 
Sensl, rellctrnon bene parmnta (8). 

Il n'a pas manqué de commentateurs et de bio- 
graphes excusant Horace, et voyant plutôt dans 
sa plainte naïve l'imitation du poète gret Alcée, 
que l'aveu d'un manque de courage peu hono- 
rable pour un jeune homme que la confiance du 
chef avait appelé à un poste élevé dont sa nais- 
sance Péloignait. Leasing, Wieland, Benjamin 
Constant, Walkenaèr, Millman, ont pensé qu'il 
ne fallait pas s'empresser de conclure, du bon 
mot d'un vaincu rappelantle sort d'un autre poète, 
qu'il avait vu succomber sa cause sans regret et 
sans combat. Nous le pensons aussi. Horace n'é- 
tait pas un guerrier, mais il était jeune et plein d'en- 
thousiasme ; il combattit et rat vaincu avec son 



(I) Sermonum Lit. /, sat vz, t. 4S-46. 

(s)r - - -- 



roy. la vie d'Horace mise en tête de r édition elac- 
virieone des enivres de oe poète donnée par H 
Dldot en 18SS. 
(V Carminum IM>. il, ode vn, v. •, io. 



137 



HORACE 



13$ 



parti tout entier. La république avait fait son 
temps. Si Horace n'alla pas se réfugier avec Pom- 
peius Varas sur les vaisseaux de Sextus Pompée 
pour recommencer la guerre, il n'alla pas se ran- 
ger sou8les drapeaux du vainqueur, à l'exemple 
de Messala et de Lamia, ses compagnons d'ar- 
mes; il revint à Rome, où nous le retrouverons 
poète : c'était là sa vocation. 

Tandis que le flot de la guerre civile emportait 
Horace et le déposait vaincu au rivage d'Italie, 
le petit champ de Venusium avait été confisqué 
au profit des vétérans. Désormais il ne pouvait 
plus offrir au jeune tribun l'asile ou il aurait ou- 
blié, peut-être, ces luttes sanglantes qui défen- 
daient le repos. Appien nous apprend que Venuse 
avait été choisie pour devenir une de ces colonies 
partagées au soldat, dit-il , comme l'auraient été 
des terres conquises sur l'ennemi (1). C'est donc 
à Rome que se rendit Horace , pauvre , inconnu , 
semblable, comme il le dit lui-même, à un oi- 
seau dont on a coupé les ailes ; mais il était jeune, 
il se sentait poète, et l'avenir était à lui : 

Paupertas Impulit audax 

Ut 



« C'est l'audace de la pauvreté qui me fit faire 
des vers (2). » Ces vers, toutefois, n'étaient pas 
écrits pour flatter le parti vainqueur : le soldat 
de Brutus ne devint pas tout à coup le courtisan 
de Mécène. La bataille de PhUippes avait été 
perdue par la république en l'an de Rome 712, 
et c'est en 715 qu'Horace fut présenté au ministre 
d'Auguste : on a vu depuis des conversions plus 
rapides. Quelques-unes des compositions du 
poète écrites vers cette époque respirent le regret 
du passé et le ressentiment de ces luttes stériles 
, engagées par l'ambition des chefs. La guerre de 
Pérouse et les cruautés dont fut souillée la prise 
de cette malheureuse ville avaient excité l'indi- 
gnation d'Horace quand il écrivit la XVI" épode : 
« Les voilà donc revenues les discordes san- 
glantes! Rome va périr sous les efforts de ses 
enfants. Ni le Bfarse ni le Toscan n'avaient rien 
pu contre elle; il était réservé à notre génération 
impie de l'anéantir de ses propres mains. Point 
d'autre remède que d'imiter les Phocéens fuyant 
leur ville après l'avoir maudite, et laissant pour 
asile aux loups ravisseurs leurs champs, leurs 
temples et le foyer paternel. » Quittant le style 
lyrique pour la satire, Horace composait en- 
core vers le même temps la seconde satire du 
livre I er , où , n'osant pas écrire contre Octave et 
César, il flétrissait les compagnons de leurs plai- 
sirs ou de leurs débauches. Crispas Sallustius, 
Galba, Vilhus, Cupiennius, Tigellius le chanteur 
sont, tour à tour, et sous prétexte de morale, 
immolés à ses rancunes politiques. S'il fallait en 
croire le commentateur Acron, Mécène lui-même, 
sous le nom de Maltinus, aurait été compris 
dans cette vengeance du poète (3). Mais Horace 

(1) Appien, De Bell. ctoiL, Ilb. IV, f S. 
. (t) BpUtolarum £16. //, 1, t. Il-Sl. 
(3) SermommlÀb. /, sat, n, t. SB. Foi* Braonbardt» 



était jeune , amoureux , et bientôt l'amour fit tort 
à la politique. Ses poésies Pavaient fait connaître, 
elles le firent aimer. Ce fut le temps des Néère, 
des Pyrrha , des Chloé , des Galathée, des Colo- 
ris. Horace chantait ses amours et ses amitiés; 
car il avait déjà pour amis Varius et Virgile : 
Virgile, chassé comme lui du champ paternel, 
trop voisin de Mantoue; Varius, l'élève chéri de 
Catulle (1), le poète tragique le plus éminent de 
l'époque : esprits charmants tous deux, cœurs 
purs et dévoués. 

Est-ce le dévouement de ses amis ou quelques 
débris échappés au naufrage de sa fortune qui 
permirent à Horace d'acheter une charge de 
scribe des questeurs? Nous l'ignorons. Nous n'a- 
vons sur cette circonstance de la vie du poète 
que trois mots de Suétone : Scriptum qiuc$* 
torium comparavit, il acheta une place de scribe 
à la questure (2). » Pour un ancien tribun c'était 
déchoir, peut-être, mais moins que ne l'ont sup- 
posé en général les biographes ou les commen- 
tateurs, faute de connaître la nature des fonctions 
que quelques inscriptions récemment découvertes 
permettent maintenant de mieux étudier (3). 

yoL m, p. ti. OreUI ne croît pu qu'Horace ait voulu 
faire allusion à Mécène , poisqu'en supposant qne l'esprit 
de parti ait alors excité le partisan de Brutus à écrire 
contre le ministre d'Octave, Il aurait probablement sup- 
primé on modifié le vers qui pouvait le blesser lorsque, 
devenu son ami, il flt paraître le premier livre des Satires. 
rof. l'Horace édité par Oreltt, L II, p. 18, M. 

(1) rof. CatulL, X, 1, et Weicbert, De Ludo Varia y 
p. 18. 

(t) vie d'Horace. 

(S) Nous croyons qu'il s'agit ici des scribm quëtstorU 
sexprimi, attachés au questeur urbain chargé du trésor 
publie avant qu'Auguste, puis Néron, y eussent appelé, 
l'un les préteurs, l'autre un préfet nommé prsêfectm 
mrarii. Les tcribœ qiutstorii texprtmi, formant un col- 
lège et par conséquent nommes à rie, i moins qu'ils ne 
résignassent leur emploi , étalent chargés des registres 
de la comptabilité publique, Cest en y apposant leur si- 
gnature qu'ils donnaient i ces documents l'authenticité 
nécessaire. Voilà du moins ce que l'on peut conclure d'un 
passage de Clcéron où il dit : « T a-t-il plus habile faus- 
saire que L. Alenus? Il a transcrit les registres publics et 
y a contrefait la signature dès sezprtml ( De Natwra 
Deontm, Ub. III, | 80). » Déjà une Inscription de Tivoli 
nous avait fait connaître un Titus Sabldlus Mailmuv, 
scribe du questeur, auquel les Tlburttns avalent élevé un 
monument funéraire, par décret du sénat , en reconnais- 
sance de ce qu'il avait été le patron de cet Important mu- 
nidpe. Nous pouvions en conclure que la charge de scribe 
à la questure n'était pas incompatible avec la position 
hiérarchique que les habitant» d'une ville exigeaient de 
celui dont Ils faisaient choix pour les protéger et veiller 
i leurs intérêts. Une Inscription nouvelle (voy. Journal 
de Borne, 185», n* lff , p. 6M ) vient de confirmer cette 
conjecture; elle offre ce rapprochement remarquable 
que le personnage auquel elle est consacrée , Manlus 
Valerius Bassus, a été, comme Horace, tribun militaire et 
scribe du questeur. Notre poète pouvait donc porter 
Panneau d'or : 

Tu, cum projectls Insigntbus, anulo equestri ; 
Romanoque babttu, prodls ex Judice Dama. 

(Sermon, Ub. II, sat. vn, v. 63, st.) 
fréquenter la hante société romaine, devenir l'ami de Mé- 
cène et rester un modeste employé dn trésor : 
De re commun! scribae magna atque nova te 
Orabant hodie memlntsses, Quinte, reverti. 

« Les scribes te prient de revenir aujourd'hui, Quintus ; 
vous avez à délibérer ensemble d'une Importante a(- 



139 



HORACE 



140 



Content de peu, sans ambition, sans intrigue 
Horace devait à ses premières publications un 
nom qui ne lui permettait plus de rester obs- 
cur. C'était une conquête à mire que celle de ce 
jeune homme dont les mordants ïambes prenaient 
une si belle place dans l'histoire naissante des 
lettres latines. Cette conquête, Mécène la fit. Ho- 
race lui rat présenté par deux, autres poètes , 
Virgfle et Varies. Conduit par eux, il franchit le 
seuil du palais où demeurait ce conseiller d'Au- 
guste, cet esprit fin et délié dont m haute intel- 
ligence politique, la douceur, les goûts littéraires 
semblaient si propres à calmer l'Italie encore tout 
agitée de ses longues discordes. C'est à Horace 
que nous devons l'histoire d'une entrevue qui 
toutefois ne décida pas encore de son avenir, ffeuf 
mois s'écoulèrent entre cette première démarche 
et le jour où il prit rang parmi les amfB de Mé- 
cène, auquel il a rendu en gloire plus qe'ti n'en 
a reçu en bienfaits. Void comme il s'exprime : 
« Votre amitié, Mécène, ne s'obtient pas en la 
briguant. U fout la mériter, et voua ne l'accor- 
dez qu'à eeui qui s'en rendent dignes. Aussi 
n'est-ce pas le hasard qui m'a valu cette amitié 
précieuse. Virgile , l'excellent Virgile , et Varius 
après lui , vous avaient parlé de moi. Je parus 
devant vous; je balbutiai quelques mots comme 
un enfant timide. J'étais incapable d'en dire da- 
vantage. Je ne me vantai pas d'une illustre ori- 
gine; je ne prétendis pas que je parcourais mes 
domaines monté sur un coursier de noble race. 
Je vous ai dit ce que j'étais. Vous m'avez fait 
une courte réponse, selon votre habitude, et je 
me retirai. Mais, neuf mois après, vous m'avez 
rappelé pour me faire prendre place au nombre 
de vos amis. J'en suis fier, car j'ai su plaire à 
celui qui juge les nommes d'après leur vraie 
noblesse , la noblesse du coeur (1). » 

Horace resta toujours ce qu'il avait été dans 
(cette première visite à Mécène. Au milieu de la 
foule inquiète des courtisans, des ambitieux, des 
solliciteurs s'agjtant autour de l'ami du prince, 
de ce conseiller favori qui avait le crédit et la 
puissance, il fut simple, vrai, affectueux, don- 
nant à sajoqange, toujours pure et délicate, un 
eertaia tour familier qui rétablissait , malgré la 
différence des rangs, cette égalité nécessaire pour 
(jue r.amitfé subsiste* Aussi dura-t-elle longtemps. 
Pendant vingt ans» jusqu'à la mort qui les frappa 
tous deux à quelques mois de distance, ils vé- 
curent presque, toujours ensemble, sans que l'af- 
fection d'Horace pour Mécène se soit fatiguée un 
seul instant du poids de la reconnaissance, il lui 
devait son indépendance, ses loisirs, et aimait 
à le redire sans cesse ; mais il sut les défendre 
contre les exigences de l'amitié quand elles me- 
naçaient de devenir quelque peu tyranniques. Ni 
flatterie, ni servilité, ni inconstance dans cet 

faire, » dttltaraoe en parlant des occupations de toutes 
sortes qui le priyent à Rome de sa liberté. (Serm,IAb. Il, 
$at. vi, y. 53 -6*. ) 
(i) Sermonum Ub. /, sat. vi, v. 54-64. 



échange de bienveillant patronage et de tendro 
gratitude. Il y avait alors des clients et des para- 
sites t cela s'est vu de tous temps ; mata à la cour 
d'Auguste on avouait son titre. Horae* n'a ja- 
mais été le parasite 4e Mécène ; il a toujours été 
son ami. 

Au printemps de l'année 717, Mécène partit 
pour Blindes, chargé par Auguste de traiter 
avec Antoine, qui, a la ttte d'une flotte nom- 
breuse, se dirigeait vers les Bûtes d'Italie. Danois 
un an déjà Hontes était admis dans l'intimité de 
Mécène; il Ait do voyage, et nous en a laissé le 
récit. A vecun mérite littéraire inférieure d'autre* 
compositions du poète, la satire du voyage à 
Brindes (1) n'en a pas moins un grand intérêt 
pour la biographie d'Horace et pour l'histoire de 
la vie familière des riches patriciens dans leurs 
fréquentes excursions hors de Home. Horace suit 
la voie Appia, que des fouillas nouvelles vien- 
nent de découvrir entièrement, avec sa longue 
avenue de tombeaux et son pavé basaltique, où 
les roues du char qui portait te poète ont aidé 
à creuser le sillon qu'on y voit tracé. A seize 
milles de Rome il se repose à Aricie , là où der- 
nièrement on a retrouvé , sur les bords de la 
voie antique, tes ruines d'un'4toer«orttf*i dont 
les voûtes recelaient encore quelques vases con- 
tenant forge destinée au* montures des voya- 
geurs; c'est Vhospitium modieum qui rut le 
terme de sa première journée. Le second jour il 
arrive au forum d'Appiue, station des marais 
Pontras connue seulement par son voyage et par 
celui de saint Paul. C'est là que ce dernier s'em- 
barque, au milieu du tumulte causé par les 
bruyants mariniers et les hôteliers fripons; c'est 
là que, dans le silence et le myBtère, quelques chré- 
tiens de Rome viendront bientôt au-devant de l'A* 
notre pour le conduire dans la ville éternelle, à 
laquelle il apporte un empire plus durable que 
celui des Césars (2). Le canal sur lequel s'em- 
barquait le poète conduit encore aujourd'hui 
jusqu'à la mer les eaux du Nymphseus, sorti du 
pied de la montagne au haut de laquelle s'élè- 
vent les remparts pélasglques de Korba. Les 
moustiques y pullulent toujours, les grenouilles 
y coassent ; mais on n'entend plus le matelot et 
le voyageur chanter pendant la nuit leur mai- 
tresse absente. Vers le matin Horace débarque 
à Feronia ,et trois milles plus loin il retrouve à 
Terracine Méeène, Cocceius Nerva et Fonteius 
Capito. Ce sont les ministres accrédités pour con- 
clure un de ces traités par lesquels les triumvirs 
se partageaient l'empire du monde quand ils 
étaient las de se le disputer lés armes à la main. 
A Fondi t ces nobles patriciens , qui vont déci- 
der de la paix ou de la guerre, s'amusent des 
prétentions d'un magistrat de village; puis, à 



(1) Sermonum Ub. /, sat v. 

(i) m Nos frères de Rome vinrent an-devant de nous 
Jusqu'au forum d'Appius. Paul les ayant vus rendit grâces 
à Dieu et fat rempli d'une nouvelle confiance. »Acte$ des 
Jpôtres, en. xxvxn. 



141 



HORACE 



142 



Smuessa, Horace cal rejoint par *trgn>, ▼a- 
rius et M. Plotius Tueea, « les âmes les plue 
candides qui forent Jamais, dit-il , €t mes amis 
les phis chers. Quels embrasseraente , quels 
transports de joie! Tant que j'aurai ma raison 
il n'est rien que je compara à un aimable 
ami. » A Capoue, Mécène, malgré ses hâta- 
tndes efféminées , se délassé 4» voyage en jouant 
à la paume; Horace et Virgjle vont dormir. Le 
premier nous apprend qull souffre das yena, 
son mal habituel; le second * déjà cette santé 
débile qui doit trop tôt Venlove» aux lettres : 
Lusumtt Mscenas, dormttutn ego VlrflHuaquej 
ftamqae plia UepU IpUsltum et Indef* cnMto. 
Des hommes d'État illustres pat leur aafa> 
sanoe, consommés dans les affaires, 4es postas 
qui vivront à jamais dans l'avenf* et seront la 
cloiro littéraire du siècle 4'Auguste, voilà les 
types de cette société d'élite an milieu de la- 
queHe Horace est désormais *?•«*• à wHrra. B y 
a bien aussi dans *a troupe voyageuse 0ea Pa- 
rasites, des beuffitms complaisants. Aflapene!, 
Messius et Sameatas font assaut da plaisants* 
ries pour divertir les voyageurs. Mais si notre 
poète fait, à limitation de Lucinus (I), «n réeit 
enjoué du voyage, tfl «*<»** a»«c nna douce 
eaieté les inconvénient» delà route pan frayée 
qn'» partir de Béaévent * éoène pcéstra à la 
grande voie Àpfaa, r*$f*a ttfarta», il est «as* 
tant par son récit même qu'il est l'ami et non 
le complaisant da teut-puissant ministre. Il lut 
vendra désonmais en nommages, an louanges 
fines et sincères, «eayfl doit à ses friraanoaa 
affectueuses, et il garda» aa dignité. De Brindns, 
on Horace prend aongéda son ieateur, il snifit 
«ans doute Mécène à Tarante, C'est là qn'O* 
taveet Antoine, signant un traité qui datait etm 
fcientét rompu,, prorogèrent tour triumvint 9 
dont te temps venait d'expirer j Horace ï *m* 
posa peut-être eette oaejftm «areatèr» sombra * 
mélancolique où l'ombre da phëaeaph* tarent* 
Areuvtas demande è an nanteniar la pieuse au- 
mône d'un peu de paHMièra (3). Horace montrait 
ainsi, dans deux compositions d^un genre aussi 
opposé que cette «da et la satin» du voyage à 
Blindas , une «exittaté de talent dont U aimait 
à se vanter. * Le raètnt d'Arcbaoïroe, a-*41 dit, 
se mêle dans mes vers à cakii da la mate Sapbo, 
à celui d'Alcoe. Traiter toujours des sujets nou- 
veaux, passer aous les yeux et dans les mains 
de nobles lecteurs, vnilà la gtoirequa j'aima, v 
Tempérât hs efe*eeM masejn P*** maaeulâ Sapbo. 
Tempérât aiceu* ......... »t , . . . 

(1) Porphyrton dit à propos de cette satire ; tortll um 
Itac saBra *m&wr mraiivt iter sww a Rima m«* 
ad Brmdisium de$cf*bens; primwn a fiotna Cqywm 
usque, et inde/rctvm Siciliens*. 

(î) Kirchner { QwesL Qorat. ) et WalcJumaBr ont sup- 
posé qu'Horace ayalt dû composer cette ode pendant «on 
vojage à Tareote, en se fondant sur ce lait que le poète 
y menttoone plusieurs localités de la Calabre et y parle 
des flots de l'Adriatique; en sorte que tout y atteste la 
présence de l'auteur dans l'Italie méridionale, et que rien 
n'y rappelle le séjour délions*. 



I ingenois ocnUsque legt , maritasejie tenait (1). 
j De retour à Rome , Horace continua d'y pu- 
! Mier les dix satires de son premier livre. C'est 
; entre la publication de ce premier livre et l'a- 
I chèvement du second qu'il faut placer le don que 
1 lai fit Mécène d'une ferme dans la Sabine (2). 
Jamais présent ne fut reçu avec plus de recon- 
naissance, jamais bienfait ne valut à son auteur 
une renommée plus durable. En devenant l'ami 
de Virgile et d'Horace, en mettant ce dernier 
au-dessus des soins ordinaires de la fortune, en 
lui rendant doux et facile ce recueillement de 
la solitude si favorable au développement des 
beautés littéraires, Mécène a fait de son nom un 
titre d'honneur pour ceux qui donnent aux let- 
tres f appui généreux de la richesse et de la 
puissance. Horace, de son côté, loin des exi- 
gences de la ville et des rivalités bruyantes, de- 
vait a la libéralité de Mécène cette indépendance, 
cette liberté d'esprit qui lui permirent de peindre 
la soçjété romaine avec ses ridicules ou ses vices, 
sans la calomnier jamais , sans jamais la flatter, 
la jugeant telle qu'il la vit avec sa douce phi- 
losophie : 

Et mini res, non me rébus sobjungere conor (8). 
peureux dans son domaine , Horace l'a chanté 
souvent, et se plaisait à en décrire le site pitto- 
resque au milieu des montagnes de la Sabine. 
Pics élevés, vallée profonde, source voisine de 
l'habitation, torrent impétueux emportant quel- 
quefois dans ses crues rapides l'espoir du labou- 
reur, chaque accident de terrain est retracé dans 
ses vers avec cet accent de vérité , cette pro- 
priété d'expressions qui n'appartiennent qu'aux 
poètes vraiment dignes de ce nom. Dès la re- 
naissance des lettres , l'intérêt qui s'attachait à 
Horace fit chercher avec ardeur l'emplacement 
4e sa villa; et, malgré les détails nets et préeis 
de sa description, on a cherché longtemps. Nous 
avons constaté ailleurs quels avaient été les tra- 
vaux entrepris à ce sujet ( Vie d'Horace, édition 
elzevirienne de MM. Didot, ch.IV). Nous avons 
dit comment Cluvier fut le premier, vers le com- 
mencement dudix-seplième siècle, qui reconnut 
dans Je bourg moderne de Vicovaro l'antique Va- 
ria, oh se rendaient les colons cultivant le champ 
d'Horace (4) : 

Qulnque bonos sontum Variam diœitterre patres (s) ; 
comment Holstenius, l'ami de Cluvier, son com- 
pagnon de voyage et sou habile annotateur, fit 
faire à la question un pas da plus; comment 
i} détermina le nom du torrent moderne de Li- 
canza, qui se jette dans TAnio à deux milles de 
Vicovaro, et retrouva dans «a cours d'eau la 
pigenfia dont Horace avait ditt 

(t) V<*V- faute* Biogr. $w fforace eu tôle de l'édition 
«isevirfcnne d'Horace publiée par Uty. flrmiu Didot, 
(9) EpUtolmrum W>. I, *, ▼. 1». 
(A) Cluv., Ital. ant., p. 785. 
(5) EpUtoh lab. I, xiv, v. *> 



148 



HORACE 



144 



Mé quottcs reflett gettdvs Bigentia rivua, 
Qnem Mandela Mbit (l) 

puis, comment dans Rocca Giovane, petit vil- 
lage placé sur le sommet d'an pic aigu, à quatre 
milles de Licenza, il reconnut le Fanum putre 
VacurtXy ce temple de Vacuna qui déjà tombait 
en ruines au temps d'Horace , et qui fut rétabli 
par les soins de Vespasien, ainsi que le prouve 
une inscription où on lit que cet empereur répara 
le temple de la Victoire : Mdem Victortx resti- 
tua. Bientôt deux antiquaires, guidés par ces 
diverses indications, crurent retrouver dans 
quelques ruines romaines situées sur la rive 
droite de la Digentia, à quatre milles environ 
de Bardella, en remontant la vallée , et à un ki- 
lomètre environ du petit village de Licenza, 
le site précis de la villa donnée à Horace par 
Mécène. 

Des travaux récents semblent devoir modifier 
cette opinion, et reporter sur un autre point de 
la vallée de la Digentia le site de la villa d'Ho- 
race (2). 

C'est au delà du village moderne de Rocca 
Giovane, en suivant la voie antique qui se déta- 
chait de la via Valeria pour se rendre de Tibur 
an temple de Vacuna, qu'après avoir dépassé ce 
temple on parvient, en s'élevant toujours, à 
une colline nommée dans le pays Colle del Poe- 
tello, au delà de laquelle on observe un terras- 
sement artificiel régulier, maintenant en culture, 
et qui toutefois a évidemment servi d'aire à on 
édifice. Des briques rompues par le soc de la 
charrue et mêlées à la terre du champ sont les 
seuls débris de construction ancienne restés sur 
le terrain; mais la forme du terrassement, son 
aplanissement, la régularité de ses angles, in- 
diquent le travail de l'homme et présentent la 
disposition des villas romaines dont les pentes 
des monts Albains offrent, aux environs de Tus- 
culum, d'Albano, de Lanuvium, un si grand 
nombre d'exemples. C'est un plateau élevé : in 
arcem ex urbe removi ; et toutefois ce plateau 
est parfaitement abrité à l'orient par le monte 
délia Costa, au midi par le monte del Corgna- 
leto, dont les cimes se rapprochent, défendant 
le plateau contre l'ardeur du soleiKou les pluies 
qu'apporte le vent d'est dans cette partie du lit- 
toral de la Méditerranée. « Souvent le dieu 
Faunns abandonne le mont Lycée pour le mont 



(1) EpUtolarum Lib. 1, xvm, lot, 105. 

(i; MM. Firmln Dldot , désirant que la nouvelle édition 
des Œuvres S Horace qu'ils se préparaient à publier 
conUnt les détails les plus précis sur les lieu qu'avait 
habiles le poète, Je me rendis, en 1854, dans la vallée de 
la Digentia. Voulant en faire dresser une carte exacte, 
j'avais pris pour compagnon de voyage l'habile architecte 
M. Pletro Rosa, auquel l'Institut archéologique de Rome 
doit le tracé de la via Appla, la découverte du diverso- 
rtum de l'Arlda, et qui nous donnera bientôt une pré- 
cieuse carte A grande échelle dn Latlum, et des voles 
anUques qui le sillonnaient. Ses études sur les lieux 
mêmes l'ont amené à reconnaître, derrière le peUt vil- 
lage de Rocca Giovane, l'emplacement désigné sur la 
carte Jointe à l'édition elzevlrlenne de MM. Dldot comme 
celui de la villa d'Horace, 



Loorétile, et vient protéger mes chèvres contre 
les vents pluvieux et les feux de Tété (1). » 

Que le Corgnaletos soit précisément lé Lucré- 
tile, nous en trouvons la preuve dans un pas- 
sage d'Anastase le Bibliothécaire. Rendant compte, 
dans la vie du pape saint Sylvestre, des dona- 
tions faites par l'empereur Constantin à l'église 
de Saint-Pierre-et-Saint-Marcellin sur la via La- 
bicana, Anestase cite un fonds de terre dans la 
Sabine appelé Ad duos Casas et placé sous le 
mont Lucretius (2). Clavier avait déjà reconnu 
que le mont Lucretius de l'auteur du Liber Pon- 
t\ficalis ne pouvait être que le Lucrétile chanté 
par Horace (S) ; mais, trompé par quelques rap- 
ports de nom, il croyait le reconnaître à Monte 
Libretti , près de Cures , où il supposait qu'a- 
vait dû s'élever la villa donnée par Mécène. Ce- 
pendant, une pièce d'archives annexée au registre 
du cadastre dressé pour la vallée de la Digentia 
fait mention du Fundus ad duos Casas, sur le 
sol duquel s'élève maintenant une petite église 
construite vers le seizième siècle, et devenue, 
par une transformation de nom qui constate son 
origine, la M adonna dette Case. C'est donc bien 
véritablement la cime du Lucrétile qui domine 
et abrite ce terrassement artificiel sur lequel de- 
vait s'élever la villa du poète. Si les soins de la 
culture pendant un grand nombre de siècles ont 
adouci les traits du tableau; si le noyer, le châ- 
taignier, le figuier ont remplacé le chêne et 
l'yeuse, quercus et ilex; si les moissons et la 
vigne croissent où croissaient la prunelle et le 
cornouiller (4), c'est l'effet du travail de l'homme ; 
mais' les reliefs du terrain, les grands traits de 
géographie physique ne changent pas, et ils sont 
encore dans la petite vallée de la Digentia ce 
qu'ils étaient an siècle d'Auguste. On doit s'at- 
tendre à retrouver auprès de la villa d'Horace 
cette limpide fontaine dont il a célébré l'abon- 
dance et les bienfaisantes qualités en homme 
qui n'avait à offrir à ses hôtes que le vin âpre 
de la Sabine, et encore dans de petites coupes : 

Vile potabls modieto Sablnum 

Cantbarls (S). 

En effet, à quelques minutes du terrassement 
artificiel que nous croyons avoir servi d'aire à la 
maison d'Horace, tout auprès de l'églisede la Ma- 
donna délie Case, au pied d'un roc, à l'ombre 
d'un immense figuier, on voit une source dont 
l'eau fraîche et pure sort du rocher assez abon- 
dante pour former déjà un ruisseau qui va 3e 
jeter dans la Digentia, offrant cette circonstance, 
remarquable que la Digentia, aujourd'hui la 

(1) Carmin. LAb. h xvn, v. 1-*. 
(l) Possesslo In terrltorlo Sablnensi, quaecognomlnatiir 
Ad dwu Casas., sub monte Lacretio. (Anast, dans Mu- 
rat, Script Rer. Ital., t III, p. 110.) 

(3) Haud dublo mon» Lucretius Idem est qui LucreWis 
dlcttur ab Horatto. ( Ou t., Ital. Ant. f p. «71. - 
(*) ... Rublcunda benlgnl 
Corna vêpres et pruna feront 

(EpUtolarum Lib. /,XVI, v. 8-9.) 

(») Carminutn Lto. 1, ode xx, v. I, t. 



145 



HORACE 



14ft 



LiceMOf ne porte ce dernier nom qu'à partir 
du point où elle reçoit cet affinent. Jusque-là 
on rappelle simplement il Sivo. Font etiam 
vivo dare nomen idoneus, a dit Horace dans 
son épître à Quinctias (i). Il faut ajouter que 
cette fontaine aimée do poète porte dans le pays 
le nom de Fonte delY Oratini, et que nous 
avons parlé tout à l'heure du Colle del Poetello. 
Sans doute il ne fout pas exagérer la valeur qu'on 
peut donner à de tels rapprochements de noms; 
ainsi c'est à tort queFlavio Biondo croyait trou- 
ver à Vaccone, non loin de Rieti, le temple de 
la déesse Vacuna; c'est à tort aussi qu'on à 
voulu placer une villa d'Horace à Pnêneste, 
parce qu'il s'y trouve un domaine appelé la Te- 
nuta di Campo-Orasto. Cependant on sait avec 
quelle ténacité certains noms se conservent à 
travers les âges, et si Vaceone, par exemple, ne 
nous indique pas le temple chanté par Horace, 
ne peut-il pas indiquer les bois de Vacuna, si- 
tués aussi près de Rieti, et dont parle Pline en fai- 
sant la description de la quatrième région de l'Ita- 
lie^)? 

La fontaine de l'Oratini, voisine de la mai- 
son du poète, doit-elle être identifiée avec la 
fontaine Bandusie, splendidior vitro, à laquelle 
il a adressé une ode si gracieuse (3)? Il y a de 
fortes raisons d'en douter. Ce nom de Fons 
Bandusia, Horace ne l'a écrit qu'une fois ; c'est 
dans l'ode qu'il lui consacre, et rien n'y indique 
qu'elle soit située près de sa maison de campagne. 
Il est probable que c'est un souvenir de Yenusia, 
sa patrie. Du moins peut-on citer à l'appui de 
cette opinion un passage du Bullaire romain. 
Une bulle du pape Pascal II, datée de l'an 1103, 
parle non-seulement d'un bourg Bandusium., 
placé près de Venouse, mais encore d'une église 
de Saint-Gervais-et-Saint-Protais qui s'élève dans 
le même lieu, sur les bords de la fontaine de 
Bandusie (4). On peut supposer, il est vrai, que, 
par souvenir, Horace avait appelé ces eaux lim- 
pides, qui donnaient tant de charme à son habi- 
tation, du nom de la fontaine à laquelle il allait 
rafraîchir ses lèvres pendant les jeux de son 
enfance ; mais ce'n'est qu'une conjecture, puis- 
que, partout où il a parlé de la fontaine voisine 
de son toit, tecto vicinus aquxfons, il ne lui a 
pas donné de nom. 

Quoi qu'il en soit, si aucun des rapprochements 
que l'on peut faire entre les descriptions d'Ho- 
race et l'aspect des lieux n'est parfaitement con- 
cluant par lui-même pour déterminer le site précis 
de sa villa, il parait résulter de cet ensemble de 
témoignages une forte présomption en faveur de 
l'emplacement indiqué sur la carte nouvelle. — 



(I) Bpittolarvm Lib. /, xvi, ▼. H. 

(l) H. N„ LUk III, | XTit (xii). 

(3) Carminum Lib. III, ode xin. 

(*) Ecclesiam S. Sateatoris, cum aliis ecclesiit de 
Cattello BanduH. Item EccUsiam SS. MM. Gervaêi et 
Protasi in bandusino fonte apud renurtwn ( Pascal II, 
an nos, Bullar. Jtom., t, II, p, 1»). 



Distance à partir du temple de Vacuna,— abri 
des montagnes, — position élevée, — identité 
du Lucrétile avec le Corgnaleto, — voisinage 
d'une source dont l'abondance et la fraîcheur se 
rencontrent rarement dans ce massif de l'Apen- 
nin , — noms conservant à travers les siècles le 
souvenir d'Horace , — tout semble réunir sur ce 
point de la vallée de la Digentia tes chances tes 
plus favorables pour y reconnaître l'emplacement 
de cette maison modeste, longtemps la seule pos- 
session du poète, qui s'y trouvait si heureux : 
Sttb beattu unlcto SaMnta (1). 
Nous devons à la libéralité de Mécène cette pi- 
quante variété des poésies d'Horace, qui nous 
trace de si gracieux tableaux de la vie des champs, 
en même temps qu'il nous peint les tracas de la 
ville, les embarras de la foule, les intrigues, les 
agitations, les loisirs de la société romaine. Rome, 
dès les premiers temps de sa fondation, avait 
eu deux passions : la guerre et l'agriculture; 
'étendre son territoire et le fertiliser. Elle allait 
prendre ses généraux à leur charrue, et les ré- 
compensait après la victoire par le don de quel- 
ques arpents de terre. Caton, le vieux Romain, 
composait un traité d'agronomie, et le poème le 
plus accompli delà muse latine est celui. où Virgile 
a décrit l'aimable diversité des travaux delà cam- 
pagne. Horace aime et fait aimer cette vie calme 
de la Sabine, où il semble retremper dans l'air 
pur des montagnes la vigueur de son esprit. S'il 
faut se rendre à Rome, c'est à regret qu'il quitte 
la vallée de la Digentia ; mais du moins il nous 
promène avec lui dans la grande ville. Avec lui 
nous allons du champ de Mars à la voie Sacrée, 
du Quirinal au mont Aventfn. Dès le matin tout 
s'éveille : les affaires ou la cupidité amènent sur la 
place publique le peuple des plaideurs, des solli- 
citeurs, des parasites. Il faut fendre la foule et que- 
reller les oisifs, au risque de s'entendre dire : « Qu'a 
donc cet insensé, qui renverse tout en courant chez 
son Mécène (2) !» Les chars, roulant pesamment 
sur le pavé de lave, heurtent contre un cortège 
funèbre. L'entrepreneur, suivi de ses mulets et 
de ses manœuvres, se hâte d'aller ruiner par de 
folles constructions quelque nouvel enrichi ; des 
poutres, hissées par des machines, menacent de 
retomber sur les passants. Ici le candidat, averti 
par ses nomenclateurs, va serrer la main de tout 
électeur influent dans sa tribu (3) ; là c'est un 
chasseur traversant le Forum avec une meute, 
des pieux et des toiles, pour rapporter, le soir, 
un sanglier acheté au marché voisin. Un poète 
cherche des auditeurs et poursuit les passants 
de ses vers. Puis viennent les fâcheux, désireux 
d'exploiter le crédit qu'ils supposent à Horace. 
Et cependant que lui dit Mécène quand ils sont 
tète à tête dans une litière ? Il lui parle du gladia- 
teur Syrus ou se plaint du froid des premières 

(1) Carminum Lib. II, ode xvm, ▼. H. 
(l) Sermonum lAb. Il, sat vx, ▼. 19-81. 
(9) Epistolarum Lib. i, vx, M. 



147 



HORACE 



148 



matinées d'automne (1). Aussi quel plaisir tort* 
que, échappé de la ville, le poète ae réfugie dans 
les montagnes 1 Sans ambition, à l'abri des ma* 
lignes influences qu'apportent les derniers mois 
de Tannée, qu'a*t-il de mieux à Caire que d'ai* 
griser les traits de la satire (9)T 

Dès les premiers vers du second livre, bous 
voyons l'effet que produisirent à Rome les Satins 
d'Horace. « Si j'en crois certaines gens, dit-il, ma 
verve est trop mordante, et je passe toutes 
les bornes; d'autres disent que mes écrits sont 
sans nerf, et qu'on pourrait aligner en un 
jour mille vers comme les miens (3). * Sans 
le bruit qui se faisait autour de lui à chaque 
composition nouvelle, Horace ne se serait pas 
ainsi mis eu scène. Four avoir le droit de parler 
de lui-même;, il avait dft reconnaître! avec sa 
pénétration et son tact si parfait, l'impression 
produite sur le public par les traits acérés ou 
plaisants de cette comédie un pen triste que lui 
donnait la société romaine. C'est qu'alors ,• 
comme a^rès toutes les révolutions , la satire 
avait à faire, à Rome, une ample moisson de 
vices et de ridicules, d'anarchie et la terreur 
avaient achevé leur rôle i les haines de parti 
s'adoucissaient, sans doute, mais l'influence des 
discordes civiles avaient amené dans l'ordre so« 
cial des transformations, des métamorphoses 
dont on se sentait blessé et qu'où attaquait par 
l'ironie , a défaut d'armes plus puissantes. Les 
classes de la société, si longtemps séparées, 
avaient été en partie confondues. Les proscrip- 
tions avaient déplacé les fortunes ; ceux-ci étaient 
ruinés , ceux-là riches au delà de leurs espé- 
rances, et l'argent donnait la fantaisie de deve- 
nir homme d'Etat. De là l'importance des par- 
venus, fiers des suffrages qu'Us avaient achetés \ 
de là le désir de courir à la fortune par toutes 
les voies , la chasse aux héritages , les rapines 
de l'usure, la prodigalité des uns, l'avarice des 
autres. De là aussi cette verve satirique du poète 
qui met en scène,, quelquefois sous leur propre 
nom, l'avare et le prodigue, l'ambitieux, l'ama- 
teur de bonne chère, le coureur d'aventures 
galantes, La satire était devenue la comédie de 
l'époque; elle remplaçait le théâtre et consolait 
les vaincus en les faisant rire anx dépens de ceux 
qui profitaient delà victoire. Mais bientôt la toute- 
puissance d'Auguste, légitimant les changements 
survenus pendant la lutte des partis, fit taire l'es- 
prit d'opposition jusque dans son expression la 
plus détournée, et sut imposer aux plus grands 
poètes de son temps les complaisants mensonges 
du panégyrique et de l'apothéose. 
Nous trouvons, dans la sixième satire du so- 
ft) Sermonum Lib, //, sat. vi, t. tt-45, 
(I) Ergo abl me In montes et In arcem ex orbe removi, 
Quld prias illustrera satiris musaqae pedestrt? 
Nec mala me ambitio perdit, nec plumbeas Aaster 
Aatamnnsque gravis, Llbltin» quœstus acerlwp. 
( Sermonum Uh. U r sat. vz, 
(S) Sérmmwm 14*. //, ait. i, v. 1-4. 



oond livre, un renseignemeiit préeteira pour 
fixer l'ordre chronologique des poésies d*Horaoe. 
« Il y aura bientôt huit ans, dit-il, que Mécène 
« m'admit au nombre de ses amis (l). » Puis- 
que l'intimité du grand seigneur et du poète 
avait commencé en l'an de Rome 716, c'est donc 
de l'année 723 que pourrait dater la composition 
de cette pièce, où l'auteur adresse ses remerot- 
ments à Mécène pour le don de la villa qui 
comblait ses vesux e Ao* erat in votis (2). Quel- 
ques-unes des épodes appartiennent à la même 
époque. Mécène allait partir pour accompagner 
Octave dans la guerre actiaque et braver sur 
les légers vaisseaux des Liburnes les citadelles 
flottantes ou s'abritait Antoine : alta navium 
propugnacula (3). Horace aurait voulu enivre 
son ami i c'est le sujet de la première épode. 
Puis, dans la neuvième, éclate le chant de 
triomphe pour la victoire d'Actium : « fo triitm- 
phel Ou sont les chars dorés et les pures 
victimes 1 Ni le vainqueur de Jugurtfca, ni ce- 
rai de Oarthage n'ont obtenu tant de gloire. 
L'ennemi a échangé sa pourpre contre des 
vêtements de deuil. Tenez, esclaves; Tenez 
élans de larges coupes les vins de Ohio et de 
Lesfees : nous n'avons pms à craindre pour 
la fortune de Oésar. » Ainsi commence cette 
période de la vie littéraire d'Horace, où l'ode 
devint l'expression de ses sentiments politiques, 
amoureux, religieux ou philosophiques. Pendant 
près de huit années, de trente-six à quarante- 
quatre ans , il a publié les trois premiers livres 
des (Mes, et il a donné à la littérature latine ce 
qu'elle n'avait pas eu encore , ce qu'elle n'a pas 
eu depuis , un poète lyrique. Horace répond-il 
complètement à l'idée qu'on se fait de l'inspi- 
ration lyrique? son enthousiasme est-il réel? 
croit-il toujours à ce qu'il chante? Nous ne 
le pensons pas. Le temps du vrai lyrisme n'é- 
tait déjà plus. Le sentiment religieux dans 
toute sa ferveur, la passion de la liberté, l'élan 
de tout un peuple , traduit par la voix d'un 
chantre inspiré, peuvent seuls le produire. 
C'est la forme naturelle de la poésie dans les 
cantiques des prophètes, les chants de Tyr- 
tée, quelques chœurs de la tragédie grecque. 
Déjà Pindare, célébrant les vainqueurs d'O- 
lympie,de Delphes ou de Corinthe, n'atteint 
plus au sublime de ces premiers modèles , et 
crée, à force d'art, une poésie que des courses 
de chars et l'appareil d'une fête ne sauraient 
lui ipepirer. Horace a dû célébrer aussi cette 
fête de la naissance de Rome, ces jeux séculaires 
dans lesquels on remerciait ies dieux du Capi- 
tale d'avoir donné l'empire du monde au peuple 
romain.; sujet plein de grandeur, pour lequel 
le poète n'a pas trouvé de ces aeeents pas- 
sionnés qui émeuvent une nation. Le Carmen 

(i) Sêrmthnm LUk /f, sàl i, t. 4*. 
(l) Smwumtm Lib. il, sat. vi, ▼. 1. Voyez, pour la date 
précise 4e cette satire, ta note l de la page Si. 
$)Epodon Lib., carm. I, v. 1,1. 



149 



HORACE 



no 



sœculare n'est qu'une élégante prière adressée 
par ua chœur 4e jeunes gens et de jeunes filles 
à des dieux auxquels i|s ne er»ieat plus, 

Ce qu'on trouvera dans les odes d'Horace» è 
défaut de fol religieuse ou politique, c'est l'gx» 
pression des sentiments intimes du coeur. ï*e 
poète est beureu* de £e livrer au charme d'une 
société d'élite qui l'accueille ayac foveur, U est 
heureux d'aimer) heureux de voir le calme suc- 
céderai orages, fces Partbes ont perdu les aigle* 
enlevas à Crassps \ jEJius Gallus pénètre jw> 
que dans Je Térnen ; la Hliéta, 1a Vindélieie, la 
Norique sont conquises; les Cantabres , les Bre- 
tons sont soumis, Qcfcve a reçu le nom d'4w« 
$w<*. H tonne aux {tomaiPfti pavr le» eonapier 
de Jgur liberté perdue, le gloire des armée et 
celle dos arts. Succès militaires, affaires pu- 
bliques» affections privées, moeurs 4e le ville i 
occupations do 1a campagne, incidents familial 
d'une vie littéraire pesées dans 1* culte de* 
Muses et le fréquentation d'une cour polie, tel» 
sont les sujets de eee petite poemee, *ù, eepi 
atteindre à le poésie lyrique des anciens jour*, 
Horace met le eberme de son eepHt et l'élé- 
vation de sa pensée, II sait trouver dans les 
maximes de k morale et dans les principes d'une 
douce philosophie, tout aussi pian que dans lee 
faiblesses 4» ccepr, de? motifs heureusement 
choisis pour transporter dans Ja langue latine ce 
qui, che» les lyriques grec*, peut paraître avec 
avantage sens la toge romaine. Pour le vérité des 
sentiments, pour la vivacité des images, les pièces 
les pins intimée eont les pins saisissantes, 
et le Jtenec (fratu* eram t%H (l), cette ode ai 
fine et ai vrais, qu'elle soft ou non rjuuitetjou 
d'une ode de la Grèce, remportera toujours sur 
ces odes, quelque peu officielles, où le poète aé« 
lèbre eu vers magnifiques les gleiree de l'empire* 
On a déployé toutes lee ressource* de l'éru- 
dition pour assigner ua ordn» cbroaoiogujne è 
chacune de ces eomposi ftona charmantes j pieu 
pan', cependant, portent en elles mêmes nue 
date certaine, et l'avantage de le connaître n'ar 
joute guère eu plaisir qu'on éprouve en la lisant. 
Il est probable d'ailleurs, pu plutôt il résulte 
d'un examen attenW, que chacun des livrée 
à" Odes contient des pièces écrites. 4 différentes 
époques de la vie d'Horace. Tout en qu'on peut 
espérer, c'est de déterminer dans quelles oroitee 
de temps ils ont été écrite, et par conséquent 
quelles Déifications ce tempe g dû apporter 
aux talents du poète, à, #ee goûta on à ceux da 
son public (2). 

Vers la un de Tan de Home 733, Horace $t 
paraître un recueil des poésies qu'il avait com- 
posées jusqu'alors, c'est-à-diredeux livrée des £o> 
tires, les trois premiers livres des Odes et le pre- 
mier livre des lettres. La vingtième épitre, espèce 
d'envoi qu'il adresse è son oeuvre, nous est pré- 

(i) Carmimm, Ub. m, ode ix. 
(S) Voyez à la fin la note sur l'ordre chronologique 
des poéaios. 



pause par les renseignemeutsqa'il y donne sur sa 
personne et sur l'âge qu'il avait alors, * Si Ton 
t'interroge sur mou compte, dit-il è oe livre 
qui va paraître pour la première fois aux éta- 
lages des libraires, réponds que, pé sans forr 
tune et d'un père affranchi, j'ai déployé bore 
de mon humble nid une eue ambitieuse. Cet 
aveu m'enlève toute prétention à le noblesse , 
«M» j'y gagnerai en mérite et en gloire, Dis 
aussi que j'ai su plaire , dans Rome, à ee que 
le tege et l'épée y comptent de plus illustre, 
Ajoute, pour ceuit qui veulent tout savoir, 
que je euie un petit nomme, ami du soleil, 
facile è s'emporter, a'apaiaaat de même, et 
voyant passer sur se tète blanchie le que* 
rontfequatrième Mfif. aujourd'hui que noua 
avons pour éeuauis bépide et son collègue 
lioHiue (l). » 

Si lee odeud'Horece ne rappelle** en rien, par 
l'ordre dans laquai allée «ont disposées, l'époque 
de leur ceiuateitioa» cet ordre, oepandaat, ne 
doitpee être l'effet d'un simple cepriet ; et le poète 
sembla avoir eu pour but principal d'exciter 
l'attention du lecteur par la variété des sujets 
qui l'inspirent. La première ode, adressée à 
Mécène, eeUieKe eon suffrage. « gi tu me pro- 
clames un poète lyrique, hû dit-il, ma tète 
ira toucher lee deux (2)» » La seconde s'a- 
dresse è Auguste, la troisième au vaisseau da 
Virgile, (4e prince qui adonné lapât* an monde, 
le ministre auquel Horace doit ses loisirs, le 
grand poète qui fut eon guide et sou ami ont 
lee premier? tournages de sa muse dans la car- 
rière nouvelle qu'elle va parcourir. Pois vien- 
nent l'ode philosophique è Sestiusj la chanson 
d'amour è Pyrrha ç le chaut de guerre où, tout 
en s'excusent d> monter sa lyre è la hauteur 
des exploite d'Agrippé, il la fait vibrer avec 
lent d'énergie j l'éloge qu'il fait à Plancus des 
fraîches campagnes où l'An» précipite ses ondes. 
Pt non-seulement les sujets s'entremêlent ainsi, 
tour è tour philosophiques, descriptifs ou 
amoureux , appelant è leur aide le sentiment , la 
morale ou l'image; mais la métrique iy varie 
de telle sorte que lee neuf premières pièces du 
recueil sont composées chacune dans un mode 
différent, preuve du talent flexible avec lequel 
Horace savait adapter è la poésie latine les 
mètres divers employés par les poètes lyriques 
de le Grèce, C'est qu'il avait un secret merveil- 
leux pour pliera la pensée le génie de sa langue, 
pour eu démêler et en assembler les nuances. 
« «Jamais homme, dit Fénelon, n'a donné uu 
tour plus heureux è la parole pour lui taire 
signifier un beau sens avec brièveté et délica- 
tesse (3). » Sans doute Horace avait trouvé la 
langue latine assouplie par lestravanx des poètes 
qui Pavaient précédé; depuis longtemps déjà elle 
avait perdu sa rudesse , et l'affreux vers satur 

(1) Êpistolarum Ub. /, xx, v. *û-iB. 
(«) Carmirwm Ub. /, orf. 1, v. 38-39. 
(9) Vénéloo, Dialogue d'Horoce et ae rirgilt. 



151 



HORACE 



152 



Bien, comme iP rappelle, avait fait place à 
l'hexamètre des Grecs (1). Lucrèce et Catulle 
avaient habitué l'oreille à ira rhythme plus sa- 
vant, plus harmonieux et plus flexible. Cepen- 
dant Orbilius dictait encore à Horace enfant 
ies poésies surannées de Livius Andronicug, et, 
pour arriver au développement complet de l'art 
d'écrire des vers, pour élever une poésie d'i- 
mitation , et pour ainsi dire de traduction, telle 
qu'Orbilius l'admirait chez ses poètes favoris, 
jusqu'à la maturité du goût qui a fait des écrits 
du siècle d'Auguste la plus haute expression de la 
littérature latine, il fallait réunir cette finesse de 
sentiment, ce tact parlait, cette verre d'exprès* 
sions , cette richesse de pensées qui sont l'a- 
panage de quelques rares génies dont Horace est 
pour nous l'un des meilleurs modèles. 

La maigre biographie attribuée à Suétone, 
seul document authentique que l'antiquité nous 
ait légué sur la vie d'Horace, est aux Jeux 
tiers remplie par le récit des rapports d'amitié 
qui existèrent entre le poète et l'empereur. 
Auguste avait compris quelle peut être la puis- 
sance des lettres à une époque où,, par un tra- 
vail successif, la littérature d'un pays est ar- 
rivée à son plus haut point de perfection et par 
conséquent d'autorité; or, ce temps était venu. 
De quelle année, cependant, devons-nous dater 
les premiers rapports qui s'établirent entre 
Auguste et Horace? Suétone n'en dit rien. D'a- 
près une ancienne vie du poète tirée d'un ma- 
nuscrit originaire de la Vaticarie et publiée pour 
la première fois par M. Vanderbourg (2), Horace 
aurait été présenté à l'empereur au début de sa 
carrière littéraire. L'auteur anonyme dit en effet : 
« Horace fut introduit auprès d'Auguste par 
Mécène et PollionJ Après cette présentation, 
Mécène l'invita à transporter dans la langue 
latine les mètres variés inventés par les Grecs et 
encore inconnus aux Romains (3). » D'abord, 
il est peu probable que ce soit Mécène qui ait 
inspiré à Horace le désir de reproduire dans sa 
propre langue les mètres d'Archiloque , d'Ateée 
ou de Sapho ; le poète n'a reçu, sous ce rap- 
port, d'inspiration que de lui-même. U nous l'a 
dit : « Quiconque croit en soi guide les autres et 
marche en tète de l'essaim (4). Puis, en 
supposant que , dès les premiers temps de son 
séjour à Rome, Horace, sous le patronage de 
Polhon et de Mécène, ait été présenté à Octave, 
il parait certain que les rapports plus intimes 
qui s'établirent entre eux sont postérieurs de 
plusieurs années à la bataille d'Aetium. Le poète 
a passé à Praneste l'été de l'an de Rome 727, 

(1) HorridnsUle 

Deflmlt numéros Saturnins. 

(Bpistolarvm Lib. Il, h y. m-iW.) 
(t) Paris, 1811, 1. 1, p. x.Y-iYn. 
(S) MmeenaUs vero et Potllonù intervent*, in gratiam 
J*êuM récent* e$L Dein, a Mmeenate roçatus est 
trm&rre varietates wutromm Lntinit incognito* 
ftur mpmd Crarcet tarant* fuermnt. 
<*)£** 14». /.XOC, V.tl,t3. 



pendant lequel, 'ainsi qu'il nous l'apprend, il 
relisait les poèmes d'Homère (Bpist. £.11, v. 1, 2). 
Prœneste était , d'après Suétone, un des séjours 
favoris d'Auguste, n est donc possible que de 
cette époque date la liaison qui se forma entre le 
chef de l'empire et l'ami de Mécène; du moins 
l'éloge du prince revient dès lors plus souvent 
sous la plume du poète. 

Il aurait été difficile que, trompé dans les 
espérances de sa jeunesse, frappé des maux de 
la guerre civile, heureux d'y échapper, Horace 
résistât aux séductions qui l'entourèrent Quel 
prince d'ailleurs a jamais possédé mieux qu'Au- 
guste l'art de n'exiger de ses sujets que te sacrifice 
de la portion d'indépendance qui pouvait gêner 
son pouvoir! Les formes républicaines vouaient 
encore ce qu'il y avait d'absolu et de complète- 
ment monarchique dans le gouvernement : voile 
transparent sans doute, et ne cachant la vérité 
qu'à ceux qui mettaient quelque bonne volonté 
à ne pas là découvrir, mais suffisant, toutefois, 
à justifier la capitulation des consciences faciles. 
H n'est donc pas étonnant que l'esprit conciliant 
et délicat d'Horace , rendant justice à ce qu'il y 
eut de réparateurdans le gouvernement d'Auguste 
après la victoire, se soit laissé entraîner par ces 
flatteuses avances , cette familiarité des grands 
qui jettent dans une ivresse si douce des âmes 
même fortement trempées; car Auguste fit les 
avances. H voulut avoir Horace près de sa per- 
sonne et écrivit à Mécène : « Jusqu'ici j'adres- 
sais à mes amis des lettres écrites de ma main; 
mais je suis accablé d'affaires et ma santé n'est 
pas bonne : amenez-moi notre Horace, afin qa*Q 
puisse m'aider (1). » Le poète refusa d'aliéner 
son indépendance, et, loin de lui en vouloir de 
son refus, Auguste lui répondit : « Notre cher 
Septimius pourra vous dire quel souvenir je 
conserve de vous; l'occasion s'est offerte de 
m'exprimer devant lui sur votre compte. Si voos 
avez cru devoir mépriser mon amitié , je ne vous 
paye pas du même mépris (2). » Et puis encore : 
« Usez des droits que vous avez sur moi, comme 
si vous étiez mon commensal. Et ne le series- 
vous pas, ainsi que je le désirais, si votre santé 
l'eût permis (3)! » Le moyen de résister à ces 
aimables cajoleries , à ces rôles intervertis , à cet 
empereur qui se fait le courtisan du poète ! Horace 
pouvait-il refuser de dédier quelqu'une de ses 
poésies au prince qui lui écrivait : « Sachez que 
je suis faehé contre vous de ce que vous ne vous 
adressez pas à moi dans vos épttres. Craignez- 
vous de vous Caire tort auprès delà postérité en M 
faisant connaître que vous avez été mon ami (4) ? » 
A une plainte si aimable, le poète ne pouvait faire 
moins que de répondre :« Ce que je crains, Ce- 



(1) Suétone, rie d'Horace, 

(t) Suétone , rie d'Horace, traduction de M. Patin, 
dans son étude sur Virgile et Horace, collection des clas- 
siques de M. D. flisard. 

(S) Snétone, VU d'Hormce. 

(*) Suétone, rie d'Home*. 



15S 



HORACE 



154 



sar,en vous voyant soutenir seul le fardeau d'un 
vaste empire, défendre l'Italie par vos armes, ré- 
former ses mœurs et lui donner des lois, ce que 
je crains, c'est de dérober au peuple, par de longs 
discours, le temps que vous consacrez à son bon» 
heur (1). » Jusque-là la louange n'était que jus- 
tice. Auguste avait donné à Rome la gloire au de- 
hors, Tordre au dedans-, et son pouvoir était la 
condition nécessaire d'un repos durable. Mais 
quand le poète accuse de démence le vertueux La- 
béon ; quand Virgile efface l'éloge de Gallus, parce 
qu'ils ont encouru la disgrâce du maître, ils dépas- 
sent la mesure. Nous regrettons alors que ces 
grands esprits, si ingénieux et même si sincères 
dans l'expression de leur enthousiasme, se soient 
aveuglés sur certains excès de la toute-puissance, 
et qu'ils semblent avoir obéi plus encore à l'ins- 
piration de leur gratitude qu'à celle de leur patrio- 
tisme. C'est à la demande d'Auguste qu'Horace, 
revenant à la poésie lyrique qu'il avait abandonnée 
pendant quelques années, composa le quatrième 
livre de ses Odes. L'empereur fondait sa dynastie 
et voulait que Drusus et Tibère, alors en Ger- 
manie, eussent leur part dans ces vers qui consa- 
craient la gloire militaire et popularisaient le pou- 
voir (2). Ce fut encore à la demandedu prince que 
le poète, en 737, célébra les Jeux Séculaires ; il 
était devenu le chantre de tous les succès, de 
toutes les fêtes, et savait, par l'élévation des pen- 
sées , la pureté du goût, la variété des formes , 
sauver ce qu'il y avait d'officiel dansées panégyri- 
ques de l'empire. Pendant les dernières aimées de 
sa vie, Horace se trouva ainsi rapproché, par l'af- 
fection du prince et par celle de Mécène, de ce que 
Rome comptait de plus illustre parmi ses citoyens. 
Le talent du poète était admiré de tous ; sa vie était 
facile , ses rapports aimables , son amitié désirée. 
S'il avait été ambitieux d'honneurs ou de riches- 
ses , il aurait pu tout obtenir ; mais il ne deman- 
dait à ces hommes puissants qui l'entouraient 
que l'échange d'une douce familiarité, d'une 
élégante causerie. A la ville , il habitait sans doute 
près du vaste palais que Mécène avait fait cons- 
truire sur le haut du mont Esquilin. Du moins, 
dans l'épttre ou il s'adresse à son livre, il lui 
dit : Fuge quo descendere gestis (3). A la 
campagne , il commençait à préférer le séjour 
de Tibur, dont la température était plus douce, 
aux âpres montagnes de la Sabine. Nous lisons 
dans Porphyrion qu'à l'époque où il écrivait le 
quatrième livre de ses odes il passait à Tibur 
tous ses moments de loisir (4). C'est que déjà 
sa santé n'était plus aussi bonne. Dans la quin- 
zième épltre du livre premier, il, interroge Num- 
mkis Vala sur le climat et les productions de 
Salerne et de Veliœ. Il a besoin de passer au 



(1) Bpi$tolarum, LU. Il , i, y. 1-4. 

(l; K bf. la ♦• ode du livre IV et U 14» du même livre. 

(8) Epùtolarum Lib. /, xx, ▼. S. 

(4) Tiburi erUm fere otium suum confirebat, ibique 
carmina conscribtbat. {Foy. Braonliardat., I , aect II, 
p. SS8, IS4.) 



milieu d'un air tiède la saison des frimas. Le 
médecin d'Auguste, Musa, lui défend les eaux 
de Baïa, et ne lui a pas rendu la santé en le 
faisant plonger dans l'eau glacée en plein hiver. 
Plus tard il se plaint à Celsus Albinovanus d'un 
malaise général , d'une inquiétude d'esprit qui ne 
lui permet . pas le repos. 11 ne veut rien faire , 
dit-il , de ce qui pourrait guérir son mal ; il évite 
ce qui lui serait salutaire, pour ne rechercher 
que ce qui peut lui nuire. S'il est à Rome il re- 
grette Tibur, s'il est à Tibur il veut revenir à 
Rome (1). L'habitation qu'il avait alors sur les 
bords de l'Anio, il la devait sans doute à la li- 
béralité d'Auguste ; du moins Suétone nous dit 
qu'à deux reprises le prince, par ses dons , aug- 
menta la fortune du poète (2). Horace prouvait 
sa reconnaissance à ses nobles amis en ne s'é- 
loignant d'eux que le moins possible, et en leur 
consacrant sa personne comme ses vers. Le siècle 
d'Auguste, ce grand siècle littéraire, a commencé 
avec Virgile et devait finir avec Ovide, qui ne fit 
qu'entrevoir l'auteur de V Enéide (Virgilium 
vidi tantum). Vers l'époque à laquelle nous som- 
mes parvenus, Virgile, Properce, Tibulle, Gallus, 
Varius étaient morts ; Ovide avait à peine écrit 
quelques élégies. Horace seul brillait de tout l'éclat 
de son talent. Comme s'il eût prévu que l'on tou- 
chait à cette décadence qui souvent suit de bien 
près, dans les lettres ou dans les armes, l'apogée 
de la gloire , le poète consacra les dernières ins- 
pirations de sa muse à composer son épltre aux 
Pisons; espèce de testament littéraire qui, dès le 
temps de Quiritilien, était appelé Y Art Poétique. 
Maître dans l'art d'écrire, Horace se faisait le 
législateur du bon goût ; par ses préceptes, il 
fixait avec l'autorité de son génie les règles de 
cette poésie latine qu'il avait faite si belle et 
rendue si nationale. Les conseils qu'il donne 
aux Pisons, dans Pépitre qu'il leur adresse, ré- 
sument ce qu'il devait à lui-même , à l'étude pro- 
fonde des poètes grecs , à celle de sa propre 
langue et des mœurs de la société romaine; car, ' 
avant tout , Horace a été un poète romain. S'il 
a emprunté à la Grèce quelques rhythmes, quel- 
ques images , il s'est gardé de toute imitation 
servile; ce sont les mêmes formes peut-être, 
mais ce n'est pas le même langage , ce n'est plus 
le même esprit. Odes , satires , épttres ont la 
sève et la vigueur de leur originalité native. Un 
certain tour sérieux et moral jusque dans l'iro- 
nie de la satire , une urbanité sans apprêt , mais 
non sans dignité, une plus grande solidité de 
pensées et de style compensent la richesse d'i- 
magination des Grecs, leur élégance plus facile, 
leur harmonie plus cadencée. Horace n'oublie 
jamais qu'il parle à un peuple-roi, dont la gra- 
vité et le génie pratique ont survécu à la perte 

(I) BpUtolanun IAb. 1, vin, v. s-it. 

(S) Prmterea teepe eum inier altot joeos « purittimum 

pewm » et « homuneionem hpidisHmum • appellat, 
unaque et altéra liberalitaêe locuptetavU. ( Suétone, Fie 
& Horace. ) 



155 



HORACE 



1*6 



de ses libertés Ainsi la lecture des poésies qu'il 
nous a laissées, empreintes de l'esprit de son 
siècle > est-elle pllis utile à quiconque vent coin 
naître la société romaine que les pins heureuses 
découvertes de l'archéologie* 

Ce fut dans l'été de 746 que Mécène, sentant 
sa fin prochaine) légua à Auguste le soin de té 
remplacer près d'Horace* « 8ouvénet>vous d'Hd* 
race comme de moi-même* éorrfhVil à Tempe» 
reur : Horatii Flteci) ut met* este menur^ 
Ce dernier vœtt d'une affection si longue et à 
▼raie aurait été exaucé sans doute \ mais Horace 
ne devait pas survivre à son ami* H l'avait dit : 
« Le même coup nous frappera tons deux» Je Pal 
juré , je le jure encore : dès que tu me montreras 
le chemin, je serai prêt. Nous iront, oui, nous 
irons ensemble à notre dernier asifo s 
.... tlle êtes tittamqae 
Daeet raina»* N«n ego perfMua 
Dixi sacrameotnm : tblmus, lbimas, 
tJtcuroque procèdes, uupretoain 
Carpere iter* comité* parât! (i) t 

Le 5 des calendes de décembre, c'est-à-dire 
le 27 novembre de ta même aimée , Horace mou- 
rut après une courte maladie, et la violence dû 
inal ne lui ayant pas permis de signer un testa- 
ment , il déclara devant témoins que l'empereur 
était son héritier. Auguste accepta l'héritage du 
poète, et* ne Voulant pas séparer dans la mort 
ceux qui avaient été si unis dans la vie , il lit 
enterrer le poète à l'extrémité des Esquilles , 
auprès du tombeau de Mécène (2). Horace, fié 
le 8 décembre 689, était sur le jxrfrit d'accomplir 
la cinquante- septième année de sort âge. Onie 
jours manquaient encore pour qu'elle rat écou- 
lée; mais il faut se rappeler que, dans cet inter- 
valle i Joies César avait réformé le calendrief. 
Or, l'année 708, pendant laquelle il opéra cette 
réforme, avait été prolongée de deux mois in- 
tercalaires ) de telle sorte qu'elle avait eu quatre 
cent quarante-cinq jours de durée. Il en résulté 
que, de fait, Horace a vécu cinquante-sept arts 
deux mois et quelques jours. 11 était petit et re- 
plet, nous dit Suétone j breviê ûtqne obesti*. 
Auguste, le remerciant de l'envoi de ses livres, 
et faisant allusion à la forme des manuscrits qui, 
chex les anciens , étaient roulés , lui disait avec 
plus de familiarité que de goût *. « Vous parais^ 
sez craindre que vos livres né soient plus grands 
que vous; mais si la taille Vous manque, vous 
ne manquez pas de rotondité. Tâchez-donc, si 
vos volumes ne sont pas plus hauts qu'une 
chopine {sextariolum), qu'ils aient du moins 
l'honnête ampleur de votre ventre. » Ses yeux 
étaient noirs ; il avait un front ombragé par des 
cheveux de la même couleur qui blanchirent 
avant l'âge. Il tirait quelque vanité de la frai* 
cheur de son teint et du sourire qui Séiait si bien 
à sa jeunesse (3). Des médaillons conformâtes 

<i) e*mfrtft*t vu** //, ode xm, v. s-i* 
(1) Suétone, ru d'Horace. 

(S) Reddea 

Forte Utiu , nlgros anguita fronte ctpttlos ; 



portant le nom A'HûtaHUê Semblent, malgré 
leur exécution incorrecte et barbare , se rap* 
porter an portrait que le poète a tracé de lui- 
même dans ses vers* 

81 les monuments iconographiques sont rares 
et insuffisants pour ceux qui aimeraient à con- 
templer les traita d'Horace , l'homme intérieur, 
le philosophe aimable sont péntê dans ses œu- 
vres avec autant de vérité que de détails, et 
peu d'auteurs se sont livrés au publié avec plus 
d'abandon. Cependant m l'a jugé longtemps 
d'une manière bien diverse. Les une l'ont admiré 
comme ua moraliste sévère et un homme pro- 
fondément religieux (i) \ d'autres l'ont traité de 
joyeux épicurien et d'habile courtisan (2). il a 
été tour à tour un parasité discret, un adroit 
esclave (3) , eii un modèle dé bravoure et de 
chasteté (4). Chacun l'appréciait sur quelque 
partie de ses «sevrée, sans en embrasser res- 
semble, sans tenir compte du temps en fl avait 
vécu» Les travaux de Wmlaad, de Leasing, d« 
Wetxel, en Allemagne * de Milman en Angle- 
terre, le livre de M. Walekenaër, l'étude sur 
Virgile et Horace, par M, Patin, ont éclairé 
d'un jour nouveau son caractère , sa vie et son 
époque. Us ont prouvé que cette fois encore la 
vérité se trouve entré les extrêmes. Horace, on ne 
saurait le nier, a pratiqué cette facile morale qui 
enseigne non lé sacrifice, mais le bon «sage des 
biens de la vie. Lorsque l'avènement do pouvoir 
absolu at chercher dans la philosophie une ex- 
cuse pour se retirer des «flaires publiques oa 
une consolatiOfl de s'en voir éloigné * Horace se 
fit disciple d'ÊpîcurC; Les esprits énergiques et 
sévères s'étaient réfugiés dans le stoïcisme. Ren- 
fermés en eux-mêmes* ils avaient voulu m 
créer une liberté quelle qu'elle fût, et ils l'a- 
vaient placée datte le fond du cœur comme dans 
un sanctuaire» se tendant indépendants des 
événements par ht pensée, et se consolant de 
ne plus commander aux autres en ee «omman- 
dant à euXometnee. Lés hommes d'une nature 
plus délicate et plus fine, aimant la poésie et 
les arts , oubliaient, en se livrant au charme da 
repos, au commerce ai doux d'une société élé- 
gante, le temps glorieux où le Forum était ouvert 
à la généreuse ambition de leur jeunesse; C'est 
parmi ces derniers qu'il nous faut placer Ho- 
race ; mais peut-être était-il supérieur à tous par 
cette constante étude de soi-même et des antres 
à l'aide de laquelle H travaille sans cesse à se 
corriger; par tant de réflexions profondes et 
mélancoliques qu'il rend plus saisissantes en les 
jetant dans la Joie des festins; enfin, par cette 
modération , médiocrité cf or, comme il l'ae- 

Reddes dulce loqnl, reddes ridere décorum. 
{BpiOolarltm Lib, /, vn, t. SS-«7.) 
Me plnguem et hitldmn, befte coratt date vises. 
C Bpistolmim ZM. /, tv, ▼. il ) 
(1) Dacier. 
(I) Sanadoft. 
(8) Voltaire. 
(*) Polnsinet de Slvrr. 



*57 HORAGE 

peUe, qui rejoigne de tous les excès. Sans doute 
sa morale n'est pas la stricte morale du devoir, 
sa raison n'est pas sans faiblesse , sa sagesse est 
la sagesse du motràe; mais elles préservent du 
*ice et conseillent la vertu. Leur voie est large , 
mais elle est droite. Si l'on n'y trouve aucune de 
ces yérités sublimes qui doivent plus tard chan- 
ger le monde ancien et renouveler les sociétés 
vieillies, elles sont d'une application journalière 
dans tes mœurs polies et faciles du siècle d'Au- 
guste. Elles touchent même par cent points di- 
vers à là société moderne, téhioin ces citations 
empruntées à chaque instant à ses écrits pour 
donner autorité à la sagesse usuelle de notre 
temps, S est peu d'esprits cultivés qui ne trou- 
vent , sans la chercher, l'occasion d'invoquer Ho- 
race comme un conseil présent; qui ne répè- 
tent, pour en avoir éprouvé l'utilité pratiqué, 
les maximes de sa douce philosophie; et qui 
ne pensent de ce poète charmant ce que Voltaire 
a si bien su lui aire : 



AvS* toi ta» éfttitend I Wdffrif Htidlgencë, 
A jouir sagement S'uJM bottnétê opulence, 
A vivre avec sol- mène, a servir ses amis, 
A se nwquer qo peu de ses sots enneseto , 
A sortir d'une vie ou triste on fortunée 
fin rènfiaiit grâce aux dieux de nous l'avoir donnée. 
tfowL BE8 Vergers^ 

des traductions, de» écrits destiné» à ^explication 
des œuvtei tTHortéë, nous noué bornerons I un 
résumé sommaire présentant les indication» princi- 
pales (•)* du regarde comme l'édition primitive 
des ouvres d'Horace un volume in4«,de 497 feuil- 
let», imprimé efa lettres rondes, d'une forme peu 
gracieuse, et qui ne porte rii date ni nom de typo- 
graphe. On ignore même quel fut cet imprimeur. 
Quoique peu correcte, cette édition a fourni de 
bonnes leçons, on en connaît deux ou trois exem- 
plaires en Angleterre, oè eue a été payée jusqu'à 
» livres sterling < 4K0 franc* environ )» mais en 
France elle ne s'est jamais, nous le croyons du 
moins, montrée en venté publique. Une antre édi- 
tion, également sans lieu, sans date et satts nom 
d'impriméter, forme Utt volume itt-4» detZ* feuil- 
lets, en caractères rond», assez beauï, et qui ont 
de la ressemblance avec ceux dont Philippe de 
Lavagniâ taisait usage vers 1475. Ce volume est fort 
rare et fort cher. tJn bel exemplaire se conserve 
dans la bibliothèque de lord speflser. Laissant de 
côté une on deux édition» fort anciennes dont 
l'existence est douteuse, notia arrivons à celle don- 
née S Saples en 1474, îtt-l", pa* Àmauld de Bruxel- 
les î il y a 1611 feuillets dans l'exemplaire, Unique 
jusqu'à présent, que possède lord Spenser ; le texte 
présente quelque bonnes leçon». L'édition de Milan, 
Àht Zarotus, 1474, in-4», n'a été achevée qu'après 
celle de Naples; elle est moins rare; on en connaît 
en Angleterre quatre ou cinq exemplaires. tJn vo- 

(1) ou ttoitSfi êe plu* amples détails dans le Manuel 
du lÀbraire de M» 4.-<L Bruset, *• édition, t. Il, ». ei9> 
SU, et dans le Cutmtoçue de h» Bibiiotnèqtu de 
M. Fralckenaêr, Parts, 1858, p. 84,-W. Bn 1771 on pu- 
blia à Leipzig une Èibliotheca Horatiana> tive tylia- 
toi* eiUidttwn HordtU, interpretationum, versionum,- 
mais eé tra? ail est aujourd'hui bled arriéré. Vt>W aussi 
Qoérard, La France Littéraire, t. IV, p. isi-iss. 



158 

lume imprimé à Ferrare, en 44T4, ne contient que 
les Épitrei et les Ode» $ c'est Un in-4« de 106 feuil- 
lets, et rexemplalre dépesé dans la Mibliotheca 
Spenseriana passe pour le seul qui existe encore. 
Citons ensuite comme conservant de la valeur les 
deux éditions données! Milan par Philippe de LaVa- 
gnia, U78 et 44T7 ( cette derrière bien incorrecte), 
et les trois éditions de Venise, pet PMUppum 
Qohddm P*tH> 447*-447a\ et 4M. tJne édition 
in-folio* sans nom de lieu* mais qu'on croit impri- 
mée a Venise* et qui est datée de isélfest là pre- 
mière avee daté qui renferme le commentaire d'A- 
crdn sué toutes les ouvres d'Horace. L'édition de 
Milan, AntOniO Misccmini, 1482, in-folio, est la 
première qui ait donné le commentaire du Flo- 
rentin Christophe Landinl, souvent réimprimée à 
la fin du (Jaiiiiieme Siècle ; il en a été de même de 
l'édition de ténise, Arrivé béni, 1490, itt-folio, qui 
se recommandé par une nouvelle révision du tette. 
L'édition in-folio publiée à Strasbourg ett 449g, par 
Jacques Loencr, a h) mérite de présenter un tette 
établi d'après des manuscrits trouvés en Allemagne ; 
eue est ornée de figures gravée» sur boi» représentant 
des sujets tiré» des oeuvre* d'Horace. Dibdin ( Si- 
bliotheca Bpent&iana, u il,) a reproduit neuf de ces 
figures; les critiques les plus habiles ont reconnu le 
mérite littéraire de cette édition \ elle n'est pas fort 
rare, mai» peu d'exemplaires sont en bon état, fin 
4804, Aide publia I Venise le premier Horace d'un 
format portatif* è'est un MM* de 149 feuillets 
treifctaro et MtHJcherené de» bibliophiles * son 
prix va toujours en augmentant : 11 s'est élevé 
jusqu'à 800 et jusqu'à 4*099 fraftes tttttt ventes ré- 
centes de Rattouardet deBeàrzi L'édition de Phi- 
lippe Junte, Florence, 4009 * im*, presque aussi 
rare que celle d'Aide, est infiniment moins chère. 
La même année oh mit au jour a Pâti», itt-folio , 
uae édition* avec le commentaire, plusieurs 4 fois 
réimprimée de JosseBade. fin 450», Aide donna une 
édition nouvelle d'Horace * elle est plu» correcte 
que Celle de 45 et, et quoique augmentée de quelques 
notés, son prix est moindre ; il en est de même des 
réimpressions (lui sortirent en 494Ôetéh 452? de 
l'imprimerie AWihé ; celle de 4985 présente une re- 
cension nouvelle faite par Muret d après Uh manus- 
crit. On peut Citer à caUse de l*exiguîté insolite deson 
format et de là bisarrerie des caractères employés 
l'édition d'Alexandre Paganinl; Venise, 4S24 , in-24.Le 
Volume édité a Bâle en 4555 par Georges tfàbricius, 
in-folio, est estimée à causé de la réunion de notes 
d'un grand nombre de commentateurs ; il a reparu eu 
4970 et en 4580. un des biussavants et des plus judi- 
cieux commentateurs d'Horace, Dents Lambin, pu- 
bliai Lyon, ett 4964, un travail fréquemment réim- 
primé { l'édition de Vehisè, Pâttl Manuce, 4S66, in-4*, 
est la plu» reenerchée des bibliophiles • celle de Paris, 
48*9, in-folio, est là plu» complète. C'est de même, 
à Cause de» commentaire», qu'on estime les éditions 
deLeyde, 4997 (et 4é44 ), in-4*, avec lès notes dé 
Cruquius, et d'Anvers, t608, ln-4°, avec celles 3e 
Lasvinus Torrentius, Les Éstientte ont plusieurs fois 
réimprimé Horace ; mais les éditions qu'ils en ont 
données ne sont pas très-recherchées ; nous nous 
bornerons à citer celle publiée par Henri Êstienne, 
en 4937, in-8° , OÙ le texte a été habilement revu 
d'après des manuscrits. Nous trouvons au dix-sen- 
ttème siècle l'édition dé Sedan. 1627, in-52, rcmar. 
quable en raison de l'extrême finesse des caractères 
employés t ce petit volume est rare et fort cher, 
lorsqttil est d'une belle condition. L'édition ehevi- 
rienue, Leyde, 4629, 5 tomes petit ifl-lâ, est jolie : 



159 



HORACE 



160 



les amateurs tiennent à la posséder ; mais elle n'a 
aucnn mérité littéraire spécial. L'Horace de Da- 
niel Elaevier, Amsterdam, 1676, petit in-12, est d'une 
exécution typographique très-soignée ; et quoique 
le texte laisse à désirer pour la correction , ce vo- 
lume est très-recntrcbét de beaux exemplaires se 
sont payés au delà de 100 francs dans les fentes pu- 
bliques, et un exemplaire , avec toutes les marges, 
est monté à 280 francs à la vente Bérard. Cette 
édition renferme le commentaire de ^'Anglais John 
Bond, pubf* pour la première fois en 1600, et très- 
fréquemment réimprimé , quoique assez médiocre ; 
mais ces notes courtes et multipliées, tout en lais- 
sant intactes beaucoup de difficultés, en expliquent 
un grand nombre, conduisent le lecteur comme 
par la main, et rendent de très-grands services aux 
étudiants; aussi le travail de Bond est-il devenu po- 
pulaire : plus savant il eût été moins répandu. L'édi- 
tion de Leyde, 4670, in-8°, fait partie de la collection 
Fariorum ; elle est due à Corneille Schrevelius, phi- 
lologue médiocre : les beaux exemplaires sont rares 
et recherchés. L'édition ad usum Delphmi est peu 
commune ; elle contient le commentaire assez mé- 
diocre de Louis Desprez : ce travail, malgré ton 
faible mérite, a été fort goûté en Angleterre, où il a 
été réimprimé au moins vingt fois, de 1664 à 4622. 
On signale comme torrecte une assez belle édition 
donnée par J. Talbot à Cambridge, en 1689, in-4». 
Nous arrivons au travail de Bentley, qui se recom- 
mande par une grande sagacité critique, mais au- 
quel on peut reprocher la hardiesse des conjectures 
du très-savant éditeur. Publiée en 4741, cette édi- 
tion fut réimprimée a Amsterdam, 1745, 2 tomes 
in-4°; elle ne s'écoula pas rapidement, car eu 4728 
on crut devoir en rajeunir le titre. De nombreux 
auteurs attaquèrent la façon téméraire dont Bentley 
avait modifié les passages qu'il regardait comme 
corrompus. Pierre Burmaun reproduisit ce texte 
en 4745, à Utrecht, en élaguant toutefois les correc- 
tions trop hasardées du philologue anglais. L'édi- 
tion deCunningham, La Haye, 1724, 2 vol. pe- 
tit in-8«, a été entreprise dans le but de faire op- 
position au travail de Bentley : il est suivi pas à pas 
et combattu avec chaleur. On autre Anglais, William 
Baxter, avait, dès 4701, donné une édition qui a été 
réimprimée en 4725 et vantée par les bibliographes 
britanniques ; elle n'a cependant guère été remarquée 
sur le continent Nous passerons rapidement sur 
les éditions de Londres ( J. Pine ), 1733-1757 ( en- 
tièrement gravée et ornée de jolies vignettes ) ; de 
Paris, 4755, in -24 ( caractères d'une finesse et cPune 
netteté remarquables ) : de Glascow, 4744 ( annoncée 
• comme exempte de toute faute typographique, ce 
qui n'est pas exact ) ; nous en laissons de côté bien 
d'autres qui ne pourraient être mentionnées que 
dans une bibliographie spéciale i nous citerons ce- 
pendantle volume imprimé par Baskervilleà Birming- 
ham, en 4762, in-42, et dont l'exécution est fort 
dégante. Le même imprimeur a aussi donné en 4770 
un bel Horace, in-4*. Cest un autre genre de mé- 
rite qui fait rechercher les éditions donnée* en Al- 
lemagne, par Jani ( Leipzig, 4778-82, 2 vol. in-8° ; 
les Odes seulement), et par Gesner, 4788 ( réimpri- 
mée en 1802 ) : tes travaux de ces éditeurs jouissent 
d'une juste réputation. L'in-4* publié à Strasbourg, 
en 1788, par Oberlin, ne donne que le texte nu; c'est 
un beau livre et correct, mais oublié. Il en est de 
même du grand in-folio imprimé à Parme, en 4790, 
chez Bodoni : sa somptueuse exécution typographi- 
que ne le fait pas sortir de la classe des livres pas- 
sés de mode. Deusin-4* édités à Londres, en 479*95, 



par H. Homer et C. Combe, tout bien moins splen- 
dides; mais le commentaire, formé d'un choix d* 
notes des éditeurs antérieurs, est utile. L'édition 
de G. Waketteld, Londres, 4794, 2 vol. petit in-* , 
est soignée et correcte ; celle de C. F. Wetzel, Li- 
gnitz, 4799, 2 tomes in-8°, est d'une exécution fort 
disgracieuse , mais l'étendue de ses tables la recom- 
mande aux travailleurs. Pierre Didot l'afné mit 
au jour, en 4799, un très-bel Horace, grand in-foëo, 
orné de douze jolies vignettes dessinées parPer- 
cier. Ce livre est un digne rival du aomptueox 
volume de Bodoni ; et les charmante» vignettes gra- 
vées par Cirardet lui conservent une grande valeur. 
Un érudit fort distingué, C.-G. àfitscoertich, 
voulait publier un Horace complet; il n'adonné 
que les Odes (Leipzig, 4800, 2 voL in-8> ) ; mais 
son commentaire est d'an très-grand prix. On a 
fait peu d'attention en France à l'édition de Pra- 
dicow ( Wittemberg, 4806 in-8°); eue est digne 
d'être signalée par suite de la hardiesse avec laquelle 
le texte a été réformé. C. Fea donna à Borne, 
en 4812, 2 vol. in-8% une édition dans laquelle il 
s'attacha aux manuscrits du Vatican et à ceux 
d'autres bibliothèques dltalie restés hors de U 
portée des érudits anglais et allemands. Les correc- 
tions qu'il introduisit aussi dans le texte n'ont pas 
toutes reçu l'approbation des critiques. On peut 
regarder comme un élégant bijou l'édition de 
Pickering, Londres, 4820, in-48 ; U en a été tiré des 
exemplaires sur papier de Chine et sur peau véfin, 
La même année, J.-H. Bothe publia à Heidelberg 
deux volumes in-8° dans lesquels il suivait, en le rec- 
tifiant, le travail de Fea. En 4829, on réimprima à 
Leipzig, 2 voL in-8», l'édition de G.-J. Dosring, qui, à 
partir de 4803, avait paru en volumes Isolés, publiés 
à part; le choix éclairé des leçons, la science solide 
répandue avec une habile sobriété dans les notes . 
mettent ce travail au premier rang. Il a été réim- 
primé arec élégance à Oxford en 4854. L'édition en 
4 vol. in-8*, Londres, 4825, qui fait partie de la nou- 
velle collection des ad usum publiée par Valpy, est 
niédiocrementestimée ; celle en trois volumes (Paris, 
4829 ) qui figure dans la collection des classiques 
de Lemaire a pour base le travail de Dosring. On 
doit mentionner comme objet de curiosité le vo- 
lume in-64, publié en 1828 avec les caractères mi- 
croscopiques d*H. Didot : il a le mérite d'être en- 
core plus Uliputùn que les éditions de Janon à 
Sedan et de Pickering à Londres. Le travail de 
G. Braunhard, Leipzig, 4854-55, 4 tomes in-8% 
offre les résultats de longues et patientes recher- 
ches. Nous voici arrivés à une édition qui fit quel- 
que bruit dans le monde savant, à celle de P. Hof- 
man Peerlkampf, Harlem, 1854, in-8°. Le savant 
Hollandais voulut établir que les poésies lyriques 
d'Horace avaient été défigurées par des interpola- 
tions téméraires; il rejette desodes entières ; U con- 
damne dans les odes et dans les épodes 644 vers ; il 
attribue à des moines du moyen âge la sixième 
partie environ de ee qu'on est habitué à regarder 
dans les Carmina du poète latin comme l'œuvre 
d'Horace. M Peerlkampf a fait imprimer en itali- 
que tous les vers qu'il regarde comme supposés, ce 
qui donne, tout d'abord, à son volume un aspect 
singulier. Les juges les plus compétents ont re- 
connu dans l'introduction où l'éditeur développe 
ses vues, des aperçus sagaces et des observations ju- 
dicieuses au milieu de beaucoup de sophismes qui 
n'ont pu soutenir un système exagéré {voir la Bi- 
bliothèque universelle de Genève, tome LVIIL, un 
article de 11. Berger de Xivrey dans le Journal des 



161 



HORACE 



162 



£>ébats t 9 août 1838, etc.). L'édition d'Orelli, Zurich, 
* 857, 2 Toi. in-8° (réimprimée en 1845 ), est regardée 
comme une des meilleures productions de la critique 
moderne ; le savant auquel on la doit avait lu tout 
ce qui avait été écrit sur Horace, et il a fort habi- 
lement trié, amendé, disposé ce qu'avaient dit de 
bon les commentateurs qui l'avaient précédé, dans 
une troisième édition, publiée en 1850; le travail 
d'Orelli a reçu de notables améliorations soit pour 
la constitution du texte, soit pour les notes. L'é- 
dition de Dillenburger (Bonn, 1848) est estimée, 
sans être destinée aux érudits de profession; elle a 
été réimprimée en 1851 et en 1854. En 1855, J. Ritter 
a publié à Leipzig une édition (2 vol. in-8° ) d' Horace 
sur des manuscrits du neuvième et du dixième siècle, 
et accompagnée d'excellentes notes. C'est jusqu'à 
présent la meilleure édition. Laissant de côté d'au- 
tres publications, nous mentionnerons la charmante 
édition publiée par MM. Firmin Didot, 1855, in-48; 
elle est ornée de vignettes dessinées par Barrias, et 
donne un texte soigneusement revu par M. Dubner, 
dont le commentaire perpétuel est bien supérieur, 
à celui que Jean Bond avait donné dans l'édition 
si renommée des Elsevier ; elle est précédé d'une 
Tie du poète par M. Noël des Vergers (4). 

Parmi les éditions séparées % de quelques por- 
tions des œuvres d'Horace nous citerons l'édition 
de luxe de la cinquième satire du premier livre, 
imprimée à Rome,! 4816, in-folio, avec une tra- 
duction italienne, dont les trois éditions successives 
sont ornées de gravures qui diffèrent dans chacune 
d'elles. Ce rat une grande dame anglaise, la duchesse 
de Devonshire, qui se passa cette fantaisie typogra- 
phique et artistique. Les Epistolœ commentants 
uberrimisinstructa % par S. Obbarius, Leipzig, 4847, 
in-8°, ont été louées dans quelques journaux alle- 
mands. Deux éditions de XArt poétique avec des 
notes étendues, l'une par Schelle, Leipzig, 4806, 
in-8*, l'antre par Streuber, Bâle, 4839, méritent 
d'être consultées. 

Traductions en français : Habert publia en 4549 
envers français les Semons satyriques, qui repa- 
rurent en 4554 avec des augmentations; Petetier 
avait mis au jour XArt poétique ; on, y joignit les 
poésies lyriques traduites par de La Porte, les Épi- 
ires par deux écrivains qui ne se nommèrent pas, 
et le tout, imprimé à Paris en 4584, forme 2 vol. 
petit in-12, qui n'ont guère d'autre mérite que leur 
rareté. On trouve plus de fidélité dans la traduction 
en vers français faite par les deux frères Le Cheva- 
lier d'Agneaux, lesquels s'exercèrent également sur 
Virgile ; elle parut en 4588, petit u>8°. Laissant de 
côté des tentatives sans portée faites au dix-sèptièine 
siècle, nous arrivons à la traduction d'André Dacier, 
dont la première édition parut de 4684 à 1689, et qui 
a été plusieurs fois réimprimée (Paris, 1709, 10 vol. 
in-12, 1714, 4729* 1753). Cette version, fidèle mais dé- 
pourvue d'élégance, ne rend nullement le charme 
des vers d'Horace ; si elle conserve encore sa place 
dans quelques bibliothèques, elle la doit aux notes 
qui l'accompagnent, et qui, dans chaque édition suc- 
cessive, gagnaient en étendue. On a laissé tomber 
dans un juste oubli* la version du père Tarteron, 
Paris, 1760, in-42, qui, faute d'une meilleure, fut 
souvent réimprimée dans la première moitié du dix- 
huitième siècle. La traduction du père Sanadon, pu- 
| bliée à Paris, en 1728, 2 vol. in-4°, est mieux écrite 
que celle de Dacier, mais elle rend moins exacte- 



(i) Voir dans Le Moniteur du 3 décembre 18W un ar- 
ticle de H. Sainte-Beuve sur cette édition. 

IfOUT. BIOGR. GÉNÉR. — T. XX*. 



ment le sens de l'original; les notes sont intéres- 
santes. Le traducteur avait adopté une orthographe 
bizarre et rangé les écrits d'Horace dans l'ordre où 
il pensait qu'ils avaient été composés. On est sage- 
ment revenu au classement habituel et à l'orthogra- 
phe usuelle dans l'édition d'Amsterdam (Paris), 4756, 
8 voL in-42. Il faut d'ailleurs convenir que ce n'est 
pas à un moine qu'il faut s'adresser pour avoir 
une bonne traduction d'Horace. La belle édition 
d'Amsterdam, 1735, 8 vol. in-12, offre un choix des 
traductions et des notes de Dacier et de Sanadon. 
La traduction de Batteux, 4750, eut du succès; elle 
est accompagnée de notes succinctes , et elle a été 
réimprimée plusieurs fois, notamment en 4823, 2 voL 
in-8°, avec un commentaire par N.-L. Achaintre. 
Le travail de Binet, 4783, a été loué sous le rapport 
de la fidélité ; il a obtenu en 4827 une sixième édi- 
tion, 2 vol. in-42. Il y a bien plus d'élégance dans 
la traduction en vers'.de M. Daru, publiée d'abord en 
4798, 2 vol. in-8°, et qui reparut, avec des correc- 
tions heureuses, en 4804, 4 vol. in-8°; la septième 
édition est de 1826, et ce travail , quoique n'attei- 
gnant pas sans doute la perfection , est digne du 
succès qu'il a obtenu. En 1824, Campenon et Des- 
prei publièrent une traduction d'Horace en prose ; 
elle est une des meilleures de celles que possède la 
langue française. S'attachant moins que Binet à la 
rigueur du texte, ces deux littérateurs l'emportent 
grandement pour l'élégance du style; ils ont joint 
à leur travail des extraits du commentaire que 
l'abbé napolitain Galiani avait composé sur le 
poète latin. Ce commentaire, vanté à l'avance, tant 
qu'il était resté inédit, signalé comme fort spirituel, 
fort piquant, et peu ressemblant aux élucubrations 
pesantes des annotateurs habituels, n'a pas répondu 
à l'attente qu'avaient excitée des éloges exagérés. 

M. Panckoucke mit au jour, en 4832, les Œuvres 
d'Horace , traduites par dix-huit littérateurs diffé- 
rents (MM. Amar, Andrieux, Arnault, etc.). Cette 
publication est d'un mérite très-inégal; à côté 
de très-bonnes pages, on en rencontre de fort mé- 
diocres. Citons aussi les traductions en vers de 
MM. Ragon, 1831-32, 4 vol. in- 18; L. Duchemin, 
4839 et 4846, 2 vol. in-8°; Cabaret-Dupaty, 4857, 
2 vol. ; Goupy, 4844, 2 vol, in-8°; 4847 et 4857, 
in-18; D. Frion, 4843, 2 vol. in-8*; J. Collet, 4845, 
in-18. Une version en prose, dont les diverses par- 
ties sont dues à MM. Chevriau, Génin, GuiardetNi- 
sard, fait partie de la collection des auteurs latins 
avec une version française publiée sous la direc- 
tion de M. Nisard; ce volume, mis au jour en 4839, 
est précédé d'une notice sur Horace par M. Patin. 

Les tentatives faites par divers auteurs pour tra- 
duire telle ou telle partie des œuvres d'Horace sont 
extrêmement nombreuses; en ce qui touche les 
poésies lyriques, nous mentionnerons les Cinq Li- 
vres des Odes d'Horace Flace, traduits en vers 
français par J. Mondot, Paris, 4579 (la plus an- 
cienne version de ce genre qui ait paru dans notre 
langue); — l'Essai de traduction de quelques Odes 
et de VArt poétique , par l'abbé Le Febvre de La 
Roche ; Paris, 4788, gr. in-8» (volume tiré à petit 
nombre et qui n'a pas été mis dans le commerce); 
— les Odes traduites en vers, revues pour le texte 
sur dix-huit manuscrits, par Ch. Vanderbourg; 
Paris, 4812-13, 5 vol. in-8° : travail estimable, sur- 
tout à cause du commentaire ; mais Vanderbourg 
s'était volontairement imposé le joug d'un système 
qui a rendu Horace méconnaissable : il a voulu 
rendre le texte vers pour vers, strophe pour stro- 
phe, en calquant le français sur lo latin; il s'est 

6 



163 



HORACE 



164 



ainsi donné beaucoup de peine afin de ne pas réussir. 

On a loué sous certains rapports (a traduc- 
tion en vers de M. de Wailly et celle de M. Léon Ha- 
lévy. On peut citer aussi celles de M. Lenoir (1822), 
Worras de Romilly (1826), Stievenart (1808), Mon- 
tigny (1836), Dupont (1856), P. Neveu '1842), 
Ruffy (1844), J. Lacroix (1848). Tout récemment on 
a vu paraître celle de M. G. de Nattes, Paris, 1896, 
2 vol. in-8° (le second volume est en entier occupé 
par les notes); celle de M. Goupy a été souvent 
réimprimée. 

N'oublions pas un livret sans aucun mérite, mais 
cnii doit à sa rareté l'honneur d'enflammer toutes 
les convoitises des bibiiomanes : les Odes d? Horace, 
envers burlesques (par H. Picou) ; Leyde, J. Sam- 
bix (Elzevier), 1655, petit in-12. Voilà un de ces vo- 
lumes qu'une demi-douzaine d'amateurs seulement 
ont la bonne fortune de posséder ; ses heureux pro- 
priétaires se gardent bien de le lire, mais ils le cou- 
vrent de maroquin et de dorures ; on a vu des exem- 
plaires ayant toutes leurs marges (circonstance 
inappréciable pour un bibliophile) s'adjuger récem- 
ment à 140 et 153 fr. aux ventes Monturan et Ber- 
tin. 

La traduction en vers des Satires par M. Raoul , 
Tournay, 1818, in-8°, n'est pas sans mérite. Celle 
des Épttres et des Satires par M. Bon Le Camus , 
Paris, 1842, in-8°, a reçu des éloges. VArt poétique 
a été traduit en vers par Cornette, 1802; par Ché- 
nier, 1815 ;par Baudouin, 1834; par Bon Le Camus, 
1841. M. Gonod en a donné une version accom- 
pagnée du texte, d'un commentaire et d'une intro- 
duction; le tout forme un gros volume publié à 
Clermond-Ferrand en 1841. 

Les œuvres complètes d'Horace ont été traduites 
en Italien par J. BorgianeHi; Venise, 1736, 4 vol. 
ïn-8° (plusieurs fois réimprimées); par G. Solari, 
Gênes, 1811; par T. Gargallo, Paterme, 1809-41, 
2 vol. in-4° (cette dernière traduction a obtenu un 
grand succès ; une cinquième édition a vu le jour 
à Sienne, 1825, 4 vol. in-18). La traduction des 
poésies lyriques par Pallavicini, Leipzig, 1756 , Ve- 
nise, 1743, est estimée; nous ne nous arrêterons 
pas à un grand nombre de traductions italiennes 
de diverses parties des oeuvres d'Horace, nous men- 
tionnerons seulement comme singularités une ver- 
sion en argot de la cinquième épitre dans les Rime 
burlesche de Ferrari (Venise, 1570), et VArt poétique 
en dialecte milanais, Milan, 1832. L'Espagne peut 
montrer la traduction en prose d'UrbanoCampos, 
1682 (il en existe plusieurs éditions) ; et celle en vers 
de Xaveriode Burgos, Madrid, 1820-23, 4 vol. in-8°, 
rémprimée à Paris, en 1841. Un poète estimé, Th. 
de Triarte, a mis en vers Y Art poétique. Les tra- 
ductions anglaises de Creech et de Smart sont ou- 
bliées ; mais celles de D. Watson, 1740, et de Ph. 
Francis ont de la réputation et ont été fréquem- 
ment réimprimées. En Allemagne nous trouvons 
une traduction complète due à C.- J. Preiss ; Leipzig 
1805-1808, 4 vol. in-8°. Rosenhuyn (Kœnigsberg, 
1818) et Voss (Brunswick, 1820) se sont exercés de 
la même manière. 

Les Odes ont été traduites et accompagnées de 
notes par Ramier et par von der Decken ; Wieland 
en a fait autant pour les Satires et pour les Épttres, 
Gûnlber s'est attaché aux poésies lyriques (Leipzig, 
1822). Plusieurs musiciens du seizième siècle es- 
sayèrent de mettre en musique des vers d'Horace, 
et, depuis, cet exemple a trouvé quelques imitateurs; 
Philidor s'exerça de cette façon sur le Carmen 
sœculare, et son travail vit le jour à Paris en 1780. 



Le Manuel du Libraire, t. II, p. 640, cite ces ten- 
tatives, auxquelles on peut ajouter celles de Bene- 
dlctus Ducis, qui publia à Ulm, en 4559, des Odes 
d'Horace à trois et quatre parties. G. Brunet. 

Suétone, Vita Horatii, dans presque toutes les édi- 
tions du po^te , et publiée d part par RicbLer ; Zwlckau, 
1890, in-4°. — Massorijftta Horatii, ordine chronologico 
delineata ,■ Ltjàc, 1708, in-8*. — Grotefend, article Ho- 
race dans V Encyclopédie d'Bfsch et Gruber, sect. H, 
t. X. p, 487*476. — Van Ovtinerem, Horax ait Mensch 
tfrttf Mrger vonMom (trt4nlt du hollandais par Walet}} 
Lelpiig, 1801, in-8<\ - Arnaud, Essai sur la rie 4' Horace, 
d'après AlparotU (dans ses Variétés littéraires).— 4. 
Wetchert, De Ç. Horatii Obtrectatoribus ; Griouna, 
18*1, in-4«. - C. Francke, Patti Horatlani ; Berlin, 1889, 
ln-t». - j. toute), Horace, revue Historique et littéraire 
(en allemand) ; Tubingue, 18U, U-*\ ~ J. Murrs y, Ort- 
ginal fPiews o/ th* passait in V* Life and IPriMnai 
af Horace y Dublin, tau» Ib-8°. — Boa. Salvertc, h** 
race et l'empereur Auguste g Paris, 18M, uv*«. - 
Schoell, Histoire de la Littérature romaine, i. 1. — Du- 
saulx, Les Satiriques latins; Mémoire sur Horace, dans 
les Mémoires de l'Académie des inscriptions, t. XLIlt, 
p. 117. - Kœted, De ru* et Moribus Horatii; Copenha- 
gue, 1780, in-a«.- SeiU, Ueraliu* Placent, naoh seine* 
Lebenund seinen Dicktungen, biographwhe Aehemd- 
lung ; Nuremberg, 1818, in-.8<\ — G,- J. Grotefead, IHe 
schrifttteUerische Laufbahn des HoratiuSj Hanovre, 
mo,ln-8°.- J. Jacob, Horai und seine Freunde ,- Berlin, 
1858, in-8». _ WalckenaëY, Histoire de ta Fie et des Poé- 
sie* d'Horace ; Parla, 1840, 1 vol. tn-8* (1). - Vf. Teaffel, 
article Horace dans la Mêal'BncpihpeJàie der olaseis* 
ohen AUherthmmsuHêsenoha/t de Pauly, t. 111» p. lut- 
148s. — Ernestl, Parerga Horatiana t - Haie, 1818. 

La maison donnée au poBte par Mécène a été l'objet 
de quelques travaux spéciaux : Capmartin de Chanpy, 
Découverte de la Maison d Horace ; Rome, 1767, 3 vol. 
in- 8». — D. de Sanetts, DissertnzUme sopra la Villa di 
Orasio Ftaceo; Rome, 1T81, la*4°. *- Clem. Vamettl, 
Sopra la rW* du lui dipinta di Q. Horatio *Jlaeco\ 
Roveredo, 1780, in-8°. — Campeoon , Cntertuchwujsn 
ueber dos Landhaus des Horaz -, Leipzig, 1826, in-8°. 

En tait de discussions littéraires sur le talent et sur les 
écrits d'Horace, on peut mentionner C.-D. Janl, De In- 
génia Horatii ; Haie, 1775, ln-4«.— Sulzer, Théorie der 
sohânen Ktinste, t. Il, p. 68l-«i7. -* Fsbrtchis, HMiotheca 
Latina, 1. 1, p. S*M*4. — fieraherdt, Esquisse de ta titté- 
rature latine (ta aUeuMOd), p. I69~at*. - Baebr, GeseU- 
chte der Rom. Liter., p. 88-848, et p. 68-33Tde la seconde 
édition, 163t.— Fuerstenau, De Carminum aliquot Hora- 
tianontm Chronologia; Hersfeld,1838,ln-8°. — Streuber, 
Chronologie der Dichtungen des Horaz\ Bâte, 1843, ln-8°. 
— DUlenburger, Qussstiones Horatiana; Bonn,t64l, ln-8°. 
~%\xcnwr,Qu**tienes Horatiana, Leipzig, 1884, in-4°; 
et Novœ Quxstiones, 1647. - H. Croft, Horace éctairci 
par la Ponctuation t fari», 1810, ln-8°. — Duentter, Mri- 
m von Horaz ; Brunswick, 1841-46, 3 vol. to-8°. — j. Tate, 
Horatius restitutus, or the books of Horace arranged 
in chronological order ; Londres. 1837 (le Quarterly Re- 
vient, n° 124, consacre un arttcle à cet ouvrage, et en fait 
l'éloge,». — Ernestl, Clavis Horatiana ; Berlin, 18W-1804, S 
vol. in-8». — Dœderleto, Leetionum ItorattanarwH De- 
çà» ; Krlangen, 1818. — Matthiœ, De Leeis nonnullis Ho- 
ratii t Altenbourg, 1818. — Martin, De aliquet Horatii 
Carminibus Commentatio critica; Posen, 1844. 

Les travaux particuliers sur telle ou telle portion des 
écrits d'Horace sont fort nombreux ; nous nous borne- 
rons i mentionner quelques-uns des principaux : Dis- 
sertation critique sur l'Art poétique d'Horace (par le 
marquis de Sévigné) ; Paris, 1808, petit ln-lt.— T. H. van 
Reenen, Disquisitio de Horatii Flacci Epistolaad Piso- 
nesf Amsterdam, 1806, in-8°. — Mittermayer, Ueher den 
Brie/ an die Pisonen; Ascha/fenburg. i887,in-4«. - B. 
Feys, VArt poétique d'Horace considéré dans son or- 
donnance; Paris, 1886, in-8«. — D. Ulrich, De Satyra Ho- 
ratiana; Breslau, 1817, ta-4». - J.-A. Estienne, Étude 
morale et politique sut les Épitres d'Horace; Paris, 
in -8°. — C. Morgenstern, De Satirœ atque Epistolas Ho- 

(t) Voir quatre articlea de M, Patin «ir' cet ouvrage, dans It 
Joumml des Savants, 1841 et 184a. 



165 



HORACE — HORAPOLLON 



166 



ratiamm Discrimine; Leipiig, 1801, in«4°. — «Schmelskopf, 
De Horatiano Carminé sœculari; Leipzig, 1838. 

On trouve aussi quelques monographies relatives à cer- 
tains points de vue sous lesquels on peut envisager le 
poëte latin : D.-G. Btdermann, De Horatio Musico; Prêt- 
berg, 1768, in- 8°. - Waliin, De Heratio Lyrico; Upsal, 
1804, ln*8«. - Berger, Hermlng, Nora:us. Benner, Pflu- 
ger et Brleyleb ont écrit des traités De Philosophia 
Horatii. 

horaces (Les trois), personnages d'une 
des pins célèbres légendes romaines. Sous le 
règne de Tullus Hostiiius, septième siècle avant 
J.-C, Albe et Rome se disputaient la suprématie. 
On convint de remettre la décision de la querelle 
à un combat singulier. Chacune des deux ar- 
mées possédait trois frères, du même âge en- 
viron et de la même force. Les trois Romains 
s'appelaient Horaces , les trois Albains Curiaces ; 
c'est ainsi du moins que' les partage la tradition 
la plus générale , car certains récits font des Cu- 
riaces les champions de Rome et des Horaces 
les défenseurs d'Albe. La narration de Tite-Live 
et la tragédie de Corneille ont rendu populaire 
cet héroïque combat, qui eut pour dénoûment 
la mort de deux Horaces et des trois Curiaces. 
Lorsque le seul Horace survivant rentra vain- 
queur dans Rome, orné des dépouilles des 
vaincus, sa sœur Horatia, fiancée à l'un des 
Curiaces , poussa des cris plaintifs. Ses lamen- 
tations excitèrent la colère d'Horace, qui la tua 
en s'écriant : « Ainsi périsse tonte Romaine qui 
pleurera un ennemi. » Le roi nomma des duum- 
virs pour juger le fratricide ; ils le condamnèrent. 
Déjà, selon la terrible formule de la loi (lexJior- 
rendï carminis ), Horace, la tète couverte d'un 
voile, allait être battu de verges , pour être en- 
suite suspendu à l'arbre fatal ( infelici arbori ) , 
lorsque, de l'avis du roi Hostiiius* , il en appela 
au peuple. Son père le déclara non coupable, 
ajoutant que, dans le cas contraire, il l'aurait puni 
lui-même en vertu de ses pouvoirs paternels. 
Le peuple acquitta Horace. « Cependant, dit 
Tite-Live, pour qu'un crime aussi éclatant ne 
restât pas sans expiation , on obligea le père à 
racheter son fils en payant une amende. Après 
quelques sacrifices expiatoires, dont la maison 
des Horaces ( gens Horatia ) (i) conserva de- 
puis la tradition , le vieillard plaça en travers de 
la rue un poteau, espèce de joug, sous lequel 
il fit passer son fils, la tête voilée. Ce poteau, 
conservé et entretenu à perpétuité par les soins 
de la république, existe encore aujourd'hui. On 
rappelle le poteau de la sœur (tigillum soro* 
rîum ). On éleva un tombeau en pierre détaille 
à l'endroit où celle-ci reçut le coup mortel. » 

Le récit de Tite-Live n'a aucune autorité his- 
torique; c'est Une légende dont le fond peut 



(1) Ancienne maison patricienne appartenant à la troi- 
sième tribu , celle de Luceres , et faisant remonter son 
origine au héros Horatlus, auquel un bois de chênes était 
consacré. D'après les rapports des Horaces avec les Cu- 
riaces d'Albe, on pense qu'ils étaient de race latine. Les 
frurnomsde la cent Horatia sont Barbatus, Codes, 
Pulvillus. 



être réel , mais dont le développement appartient 
à la poésie populaire. Y. 

Denya d'Halicarnasse , III. 15 M, 81. — Tite-Live, I, 
84-86. - Valèrc Maxime, VI, s. — Florus , I, 8. — Ci- 
céron, Pro Mil., 8 ( Schol. Bob. in Milon., p. 877, édlt. 
Orelli); De Invent., H, fo. — Festus, an mot Soror. 
TigilL, p. NT, édlt. de MnUer. - Plutarque , Paraît. 
Jlfin., 16, - Aurellus Victor, De FUr. illust., 4. — Zo- 
naras, VII, 6. 

horanyi (François-Joseph-Alexis), his- 
torien hongrois, né à Ofen, le 15 février 1736, 
mort le 1 1 septembre 1809. Entré de bonne heure 
dans l'ordre des piaristes , il s'y fit remarquer 
par son amour des lettres et les efforts qu'il fit 
pour leur progrès dans son pays. Afin de mieux 
atteindre ce double but, il séjourna long- 
temps à Rome et à Venise, visita l'Angleterre, 
la Hollande et d'autres contrées. Horanyi resta 
dévoué jusqu'à la fin de ses jours aux intérêts 
de son ordre. Il se fit connaître par ses tra- 
vaux historiques , relatifs surtout au passé de la 
Hongrie. On a de lui : Memoria Hungarorum 
et Provincialium seriptis editis notorum; 
Vienne, 1775-1777, 3 v. in-8*; — Nova Me- 
moria Hungarorum, etc.; Pesth, 1792 ; 1 vol. 
in-8°. C'est une continuation jusqu'à la lettre C 
de l'ouvrage précédent; — Scriptores piarum 
scholarum liber aliumque artium magistri; 
Bude, 1808, 2 vol. in-8°; — Joa. Bethlenii Bis- . 
toria Rerum Transylvanicarum, ab an. 1662 
ad a. i&73 9 productaetconcinnata. Pluribus 
mendis sublatis recognovit , et prxfatvone de 
progenie, vita et inpenii monumentis ejus- « 
dem scriptoris auxtt A. Horanyi; Vienne, 
1782, 2 vol.; — M. Simonis de Keza Chro- 
nicon Hungaricarum, ex cod. membranaceo 
éd.; Vienne, 1782, in-8 6 ; — F. Forgacs, epis- 
copi Varqdinensis et cancellarii Ferdinand /, 
Rerum Hungarix sui temporis Commentant, 
lib. XII; Presbourg, 1788, in-8°. V. R. 

Wallasky, Conspettus Republ. literar. in Hungaria. 
— Ersch et Gruber, Allg. Encyklopesdie. 

HORAPOLLON OU HORUS APOLLO ('Ûpa- 

nâXXojv). Nous avons sous ce nom un petit 
traité grec en deux livres , intitulé Hierogly- 
phica, le seul ouvrage ancien qui nous soit 
parvenu sur l'interprétation des hiéroglyphes, 
mais dont l'origine et l'autorité ont été l'objet 
d'opinions très-diverses. Si l'on s'en rapporte au 
titre qui se lit sur les manuscrits , cet ouvrage 
aurait été composé en égyptien par Horus Apol- 
lon ou Horapollon Nih'aque , et traduit en grec 
par un certain Philippe, inconnu d'ailleurs. Mais, 
d'abord , cet Horus est-il le fils d'Osiris , divi- 
nité que les Grecs d'Egypte assimilaient à leur 
'Apollon et à laquelle on pourrait avoir attribué 
un livre sur les hiéroglyphes , de même que les 
prêtres mettaient sons le nom de Thot ou Her- 
mès leurs ouvrages de science et de philosophie? 
Est-ce simplement un nom d'homme? Suidas 
cite un grammairien distingué, de Phœneby tis en 
Egypte, nommé Horapollon, qui enseigna à 
Alexandrie, puis à Constantinople, sous l'em- 
pereur Théodose, et écrivit des commentaires 



167 



HORAPOLLON 



168 



sur Sophocle, Alcée, Homère, et un ouvrage 
séparé intitulé Tejievixài ou T«(Aéw) ( les Tem- 
ples ). On connaît encore un autre Horapollon , 
natif d'Egypte, et qui vivait sous l'empereur 
Zenon. Auquel de ces deux auteurs doit-on at- 
tribuer les Hïeroglyphica ? On penche pour le 
premier, sans pouvoir former à ce sujet autre 
chose que des conjectures. D'après la nature de 
son ouvrage, on peut affirmer qu'il était Égyp- 
tien. Il vivait probablement vers le commence- 
ment du cinquième siècle. Le traducteur grec 
est tout à fait inconnu. Il paraît avoir vécu à 
une époque bien postérieure , peut-être au quin- 
zième siècle, et sa prétendue traduction se ré- 
duisit sans doute à des interpolations. Les Hié- 
roglyphiques contiennent deux livres , dont le 
second, bien inférieur au premier, a dû subir des 
remaniements et des additions. On remarque dans 
tout l'ouvrage beaucoup d'idées qui semblent 
étrangères à l'antiquité égyptienne et paraissent 
plutôt empruntées à des récits merveilleux d'his- 
toire naturelle, comme on en lit dans Élien, aux 
superstitions des gnostiques ou aux explications 
de songes, comme les Oneirocritica d'Achmet et 
d'Artémidore. Le style dénote aussi une époque 
à laquelle les traditions du sacerdoce égyp- 
tien devaient être perdues. Ces critiques, émises 
par F.-A. Wolf et Wyttenbach , avaient fait suc- 
céder un discrédit complet à l'aveugle confiance 
qu'on avait longtemps accordée au livre d'Ho- 
rapollon, lorsque Champollion, initié déjà par 
l'étude de la pierre de Rosette aux principes de 
l'écriture hiéroglyphique, soumit ce livre à un 
nonvel examen, et y puisa quelques indications 
précieuses. Toutefois, sur une trentaine d'hié- 
roglyphes expliqués par Horapollon et qui se 
retrouvent sur les monuments, il n'y en eut 
d'abord que treize dont l'interprétation lui parut 
pleinement confirmée par l'étude des textes, 
savoir : le croissant renversé de la lune , le sca- 
rabée, le vautour, les parties antérieures du 
lion, les trois vases, le lièvre, l'ibis, l'encrier, 
le roseau , le taureau, l'oie cbénalopex , la tête 
de Koncoupha et l'abeille. Champollion reconnut 
aussi qu'il fallait chercher les applications de 
ce livre non-seulement dans l'écriture hiérogly- 
phique proprement dite , mais dans les sculp- 
tures sacrées qui concourent à la décoration 
symbolique des monuments. « La plupart des 
images symboliques indiquées dans tout le livre 
premier d'Horapollon, dit Champollion,, et dans 
la partie du deuxième qui parait la plus authen- 
tique, se retrouvent dans des tableaux sculptés 
ou peints , soit sur les murs des temples et des 
palais, sur les parois des tombeaux, soit dans 
les manuscrits , sur les enveloppes et cercueils 
des momies, sur les amulettes; etc., peintures 
et tableaux sculptés qui ne retracent point des 
scènes de la vie publique ou privée, ni des 
cérémonies religieuses , mais qui sont des com- 
positions extraordinaires où des êtres fantasti- 
ques, soit même des êtres réels qui n'ont entre 



eux aucune relation dans la nature, sont cepen- 
dant unis , rapprochés et mis en action. Ces 
bas-reliefs, purement allégoriques ou symboli- 
ques, qui abondent sur les constructions égyp- 
tiennes , furent particulièrement désignés par les 
anciens sous le nom d'anaglyphcs. Cette dis- 
tinction établie, il est aisé de voir que l'ouvrage 
d'Horapollon se rapporte bien plus spécialement 
à l'explication des images dont se composaient 
les anaglyphes qu'aux éléments on caractères 
de l'écriture hiéroglyphique proprement dite : le 
titre si vague de ce livre Hiéroglyphiques 
( Sculpture sacrée ou gravure sacrée} est la seule 
cause de la méprise (1). » Un savant très- 
versé dans la langue copte, M. de Goulianof, a 
fait grand usage d'Horapollon pour appuyer son 
système. Selon lui, les hiéroglyphes d'Horapol- 
lon doivent s'expliquer uniquement par des rap- 
ports de son entre le nom de l'objet représenté 
et celui que les prêtres voulaient indiquer à leurs 
adeptes. C'est ce qu'il nomme paronomases, et 
que Haproth désignait par le terme d'hiérogly- 
phes acrologiques , parce que ce prétendu rap- 
port n'existe souvent qu'entre les lettres initiales. 
M. de Goulianof, en admettant les interpréta- 
tions d'Horapollon, suppose que les explications 
symboliques qui les accompagnent souvent sont 
un artifice des prêtres égyptiens pour empêcher 
les profanes de pénétrer les vrais principes de 
l'écriture sacrée, réservée, selon lui, aux seuls 
initiés. Sans admettre cette intention captieuse 
dans l'ouvrage d'Horapollon, nous ne sommes 
pas éloignés de penser que la plupart des exégèses 
qui suivent l'énoncé de chaque hiéroglyphe ont 
été ajoutées par des Grecs qui ont donné cours 
à leur imagination ou à leur savoir, à défaut 
d'une exacte connaissance du système hiérogly- 
phique. 

Les Hiéroglyphiques furent publiés pour la 
première fois par Aide dans sa Collection des 
Fabulistes grecs; Venise, 1505, in-fol. ; ils paru- 
rent séparément avec une traduction latine de 
Bernardin Trébatius de Vicence; Paris, 1521, 
in-8°. La traduction de Trébatius avait d'abord 
paru à Augsbourg, 1515, elle fut réimprimée par 
Froben, Baie, 1518, in-4°; par Robert Estienne, 
Paris, 1530, in-8°, et à Baie, 1534, in-8°. Une 
autre traduction latine, par Phasianini, parut à 
Bologne; 1517, in-4°. Mercier donna une édition 
d'Horapollon avec une nouvelle traduction latine 
et des notes, Paris , 1548, in-4° ; cette édition 
fut réimprimée avec des corrections de Morel , 
Paris, 1551, in-8°. D. Hoeschel profita de ces 
divers travaux pour son édition publiée à Augs- 
bourg, 1595, in-4°; 1605, in-4°; Lyon, 1626, 
in-fol. N. Caussin l'inséra dans son Syntagma 
Electorum Symbolorum; Paris, 1616, in-4°. 
Cor. Paw reproduisit les notes de . Mercier, 
d'Hoeschel, de Cassin, dans son édition {Utreeht, 



(i) Hoeschel pense que les Hiéroglyphiques faisaient 
partie du traité d'Horapollon Sur les Temples. 



169 



HORÀPOLLON — HORLEMÀN 



170 



1727, in-4°), restée longtemps la meilleure, mais 
bien surpassée par celle de Conrad Leemans ; 
Leyde, 1835, 'grand in-8*. Le texte à été re- 
censé a l'aide de plusieurs manuscrits et éclaira 
par de nombreux rapprochements tirés des au- 
teurs grecs et latins. Des planches Hthographiées 
reproduisent les hiéroglyphes d'Horapollon dont 
la valeur a été reconnue sur les monuments. 
Les Hiéroglyphiques ont élé traduits en fran- 
çais par Jac. Kerver, Paris, 154a, in- 8° ; 1553, 
in-l2;et par Requier, Paris, 1779, in-12; en 
italien par P. Vasolli da Fivizzano , Venise, 1548, 
in-8°; en allemand (traduction attribuée à Hol- 
bein), Bâlé, 1554, in-fol. [ Wladimir Brunet de 
Prestes, dans VEncyc. des Gens du Monde, 
avec des additions par Y j. 

Suidas, au mot 'ûpairéXtav. — Etienne de Byzanee, 
au mot gcvtôqOlc. - PnoUos, Bibl. % cod., 179, p. |M V 
éd. BekJker. -EusUthe, Comm.inOdy. - D'OnrlUe, 
Excerpta qxuedam Censurarum in Horapollinem, dans 
leFannus crttica; Amsterdam, 1788, in-8», p. 548-886. - 
L. Bachmann, Farise Lectiones in Horapollinems, dans 
ses jénecdota ,*ol II, p: 406. — ChampollioD, Précis du 
Système Hiéroglyphique des anciens Égyptiens, p. 847 
et sutr. — Goullanof, Essai sur les Hiéroglyphes d'Ho- 
rapollon ; Paris, 1817, ln-4°. — Lenormant, Recherches 
sur rOriçine et r Utilité actuelle dés Hiéroglyphes d*Ho- 
rapollon; Paris, 1888, ln-8°. — A. S. Corey, The Hiero- 
glyphies o/Horapollo; Londres, 1840, in -8°. — Bunsen , 
jSgyptens SteUe in der fTeltgcsch., vol. I, p. 401. 

HORÂTIUS COCLÀS. Voy. COCLÈS. 

hordal ( Jean ), jurisconsulte lorrain, vi- 
vait dans la première moitié du dix-septième 
siècle. Il descendait de Pierre Darc, troisième 
frère de la Pucelle d'Orléans, dont il devint 
l'historien. Cet ouvrage ne fait que résumer ce qui 
avait été écrit avant lui sur Jeanne Darc. H est 
intitulé : Heroinx nobiUssimx Joannx d'Arc 
Lotharingie, vulgo Aurelianensis Puellx, His- 
toria, ex variis gravissimx aique incorrup- 
tissimœ ftdei scriptoribus excerpta. Ejusdem 
mavortix virginis ilnnocentia a calumniis 
vindicata; Pont-à-Mousson, 1612. in-4°. 
i O. Calniet, Bibl. lorraine. 

horebout ( Guérard ) 'peintre flamand , 
du quinzième siècle, né à Gand , mort en An- 
gleterre. H jouissait d'une grande réputation, et 
peignit dans l'église de Saint-Jean de Gand' deux 
Tolets qui renfermaient un retable d'autel en 
sculpture. Sur l'un de ces volets il a peint la 
Flagellation du Christ , sur l'autre la Des- 
cente de Croix. On conserve dans les galeries 
de Gand quelques autres bons tableaux de Ho- 
rebout Henri VIII, roi d'Angleterre), appela cet 
artiste à sa cour, et le nomma son premier 
peintre. Horebout exécuta de nombreux mor- 
ceaux pour son protecteur et pour les princi- 
paux seigneurs anglais. Il mourut riche dans 
son pays d'adoption. A. de L. 

Descamps , La Fie des Peintres hollandais, 1. 1, p. 4*. 

horfelin (Antonio de) , peintre espagnol, 
né à Saragosse, en 1597, mort dans la même 
Tille en 1660. Tl fut élève de son père, Horfelin 
de Poultier, qui peignait passablement le portrait 
et qui, reconnaissant les dispositions de son 



fils , l'envoya à Rome. A son retour, le jeune 
Antonio se fit une belle réputation, non-seulement 
comme portraitiste, mais comme peintre d'his- 
toire. On cite de lui un grand tableau qu'il fit 
pour la confrérie des charpentiers de Saragosse 
et plusieurs bonnes toiles dans des églises de la 
même ville. Il possédait à un haut degré la pureté 
du dessin et l'harmonie du coloris. 

A. de L. 
Viaçe arUstico à parias pueblos de Espana, etc.; Ma- 
drid, 1804. — Cean Bermadez, Dictionario artistico, etc. 
— Qûtittet, Dictionnaire des Peintres espagnols. 

* horioolo (Bartolomeo), poète italien", 
né à Trévise, vivait au milieu du seizième siècle. 
L'épopée chevaleresque, mise à la mode par 
Berni et Ariosto, était alors ce que le public 
demandait aux libraires, ce que les libraires de- 
mandaient aux auteurs. Horioolo, comme bien 
d'autres, s'essaya en ce genre , avec assez peu 
de succès. Son Ruggero 9 publié à Venise en 
1543, fut réimprimé en 1544, en 1545 et en 1618. 
Se moquant lui-même des héros qu'il avait en- 
trepris de chanter, Horioolo publia en patois de 
Trévise une parodie burlesque de ces romans 
qui devaient plus tard troubler la cervelle de 
don Quiehotte : Le Semplicita over go/ferie 
de 7 cavalieri erranti , sans lieu ni date (vers 
1558), est un mince volume qui, n'ayant été 
imprimé qu'une seule fois , est devenu extrê- 
mement rare ; le petit poème qu'il renferme est 
accompagné de quelques capitoli où la décence 
n'est pas fort respectée. G. B. 

Melzl, Bibliograjla dei Romanzi, 1888, p. 800. — J. C. 
Brunet, Manuel du Libraire, t. II, p. 648. 

horlEman , ou plutôt harlbman ( Char- 
les , baron) , architecte et écrivain suédois, né 
à Stockholm, le 27 août 1700, mort le 9 février 
1753. Fils d'un intendant des jardins du roi , il 
vint étudier les beaux-arts en France , en Hol- 
lande et en Italie (1721-1727), et fut, à son 
retour, nommé intendant de la cour (1728), et 
chargé de continuer le palais royal de Stockholm, 
qui ne fut achevé qu'en 1753. Il traça le plan 
d'un grand nombre d'autres édifices publics, 
tels que la cathédrale de Calmar, l'observatoire 
de Stockholm. Ses constructions sont plus élé- 
gantes que grandioses. On le considère comme 
l'un des plus grands architectes de la Suède. Il 
avait une prédilection exagérée pour le style 
italien , et l'employait même lorsqu'il avait à ré- 
parer des édifices gothiques. Membre de la cham- 
bre des nobles par droit de naissance, il joua 
un certain rôle à la diète et dans les affaires po- 
litiques. Le titre de sénateur (Riksrdd) lui fut 
offert en 1746; mais il le refusa. Horleman était 
membre des Académies des Sciences et des Beaux- 
Arts de Stockholm. On a de lui : Dagbok œfver 
en îfràn Stockholm genom atskilliga Rikets 
landskaper gjord resa (Journal d'un voyage 
dans différentes contrées du royaume en 1749); 
Stockholm, 1749, in-8°, traduit en allemand; 
Leipzig, 1751 ; — Breff 9 etc. (Lettre au comte 
Piper sur ses autres voyages en Suède) ; Stock- 



171 



HORLEMAN — HORMAYR 



172 



hoir», 1751 , arec une continuation, 1753, m-8°; 
ces relations renfermentd'intéressantes remarques 
sur le sol, les rivières, les mines de la Suède; 
— Tal ont utlssndska resor (Discours sur ses 
Toyages à l'étranger); iWd., 1746. 

E. Beautois. 
C. G. Teasln, JBraninme (éloge); Stockholm, 17M, 
trad. en allem. par Dttbnert, GreiiiwaJd. 1*58. - Klein, 
Stockholm*- Magazin., t. I. p. 71-9S. — Rosenhane, An- 
teckningar. — Biographiskt-Lexicon, VI, 2W-30S. 

hormann ( Guillaume ) , littérateur anglais, 
né à Salisbury vers l'an 1470, mort en 1635; il 
fut vice-prévôt du collège d'Etal, et se distingua 
par l'étendue de ses connaissances dans les lan- 
gues classiques. Entre autres ouvrages de sa 
composition, on peut citer sa réplique en vers 
latins à une satire que le grammairien Lilly 
avait dirigée contre lui, et un volume intitulé 
Vulgaria, qui n'est pas sans intérêt pour la con- 
naissance des mœurs de l'époque , et qui a ob- 
tenu deux éditions, l'une et l'autre très-rares 
(Londres, 1519 et 1530). G. B. 

Bibliotksca grmvUkmm, p. 848. - Biogr. Britannica. 

* hormayr ( Joseph , baron de ) , historien 
allemand, né à Inspriïck, le 20 janvier 1781, 
mort le 5 novembre 1848. Il était le petit-fils de 
Joseph Hormayr, chancelier du Tyrol , qui au 
dix-huitième siècle avait su ranimer dans ce 
pays la culture intellectuelle (voy. Ersch et 
Gruber, Encyklopœdie). Le jeune Hormayr 
montra de très-bonne heure un goût marqué 
pour l'histoire; dès l'âge de treize ans il fit pa- 
raître sa Geschichte der Herzôge von Meran 
(Histoire des ducs de Méran). Mais son père lni 
imposa l'obligation de se consacrer à l'étude de 
la jurisprudence. Après avoir suivi de 1794 à 
1797 les cours de droit à l'Académie dlnsprùck , 
Hormayr entra en 1799 dans la landwehr tyro- 
lienne , et il obtint bientôt le grade de major. En 
1802 il fut placé à Vienne au ministère des af- 
faires étrangères , et il y rat peu de temps après 
mis à la tète des archives secrètes. Il accompagna 
en 1805 le prince de Lichtenstein au congres de 
Presbourg. Quatre ans après il se fendit en 
Tyrol , pour y préparer une révolte générale 
contre les Bavarois. Son entreprise eut un succès 
presque complet ; sauf la forteresse de Kufstein, 
les envahisseurs perdirent tout le Tyrol. Pendant 
la guerre qui s'ensuivit (voy. Hofer) , Hormayr 
resta chargé du gouvernement de ce pays , ex- 
cepté ce qui concernait les opérations militaires ; 
son esprit inventif lui fit trouver des ressources 
inespérées. Après l'armistice de Znaïm, Hor- 
mayr retourna à Vienne, où il se Uvra à des 
travaux historiques. En 1813 il fut incarcéré 
pendant quelque temps avec plusieurs autres 
habitants du Tyrol. Deux ans après il fut nommé 
historiographe de l'Empire et de la famille impé- 
riale. Il vécut à Vienne jusqu'en t828, époque où 
il accepta les fonctions de conseiller ministériel 
au département de l'extérieur et de référendaire 
pour les affaires féodales et ecclésiastiques, que 
lui conféra le roi Louis de Bavière. Il fut aussi 



, chargé des rapports à taire sur les archives et 
1 les collections d'objets d'art et d'antiquité. Eo 
1832, il devint ministre résident auprès de la 
cour de Hanovre; de 1839 à 1846 il occupa les 
mêmes fonctions auprès des villes hanséatiques. 
Depuis il fut mis à la tète des archives du 
royaume de Bavière. Hormayr a éclairoi de nom- 
breux points difficiles de l'histoire de l'Autriche 
et de la Bavière. C'est en grande partie grâce à 
lui que les derniers volumes des Monumenta 
Boica ont été publiés avec beaucoup de soins et 
d'habileté critique, ce qu'on ne peut pas dire 
de ceux qui les ont immédiatement précédés. 
Cependant, il faut remarquer que Hormayr n'est 
pas toujours impartial dans ses appréciations 
historiques, et que son style est souvent ampoulé. 
On a de lui : Kritisch-diplomatische Beitràge 
zur Geschichte Tirols im Mittelalter ( Maté- 
riaux critico-diplomatiques pour servir à l'his- 
toire du Tyrol dans le moyen âge) ; lnsprûck, 
1802-1803, et Vienne, 1805, 2 vol. in-8° ; — 
Geschichte der gefursteten Grafschaft Tirol 
( Histoire du comté de Tyrol ) ; Tubingue, 1806- 
1808 ; — Œstreichischer Plutarch oder Leben 
und Bildnisse aller Regenten des ôstreichi* 
schen Kaiserstaats (Plutarque autrichien, ou 
vies et portraits de tous les princes de la maison 
d'Autriche); Vienne, 1807-1820, 20 vol.; — 
Mistorisch-statistisches Archiv/ûr SudDeut- 
sehland ( Archives historiques et statistiques 
pour l'Allemagne du Sud ) ; Vienne, 1808, 2 vol.; 
— Archiv fur Geschichte y Statistik, Litte- 
ratur und Kunst (Archives d'Histoire, de Sta- 
tistique, de Littérature et des Beaux-Arts); 
Vienne, 1810-1828, 16 vol. in-4°;— Taschen- 
buch/Ur die vaterlandriche Geschichte (Re- 
cueil annuel pour l'histoire de la patrie) ; Vienne, 
18(M848, 27 vol. ; les volumes publiés de 1820 
à 1829 ont été rédigés avec la collaboration de 
Mednyanski; — Allgemeine Geschichte der 
neuesten Zeit vom Tode Friedrichs des Gros- 
sen bis zum zweiten Pariser Frieden (His- 
toire générale des temps modernes depuis la 
mort de Frédéric le Grand jusqu'à la seconde 
paix de Paris) ; Vienne, 1817-1819, 3 vol. ; ibid., 
1832; — Geschichte Andr. Hofer s (Histoire 
d'André Hofer); Leipzig, 1817, in-8°; — Wien, 
seine Geschichte und Denkwûrdigkeitcn 
( Vienne, son Histoire et ses Curiosités ) ; Vienne, 
1823-1825, 9 vol., avec planches : cet ouvrage 
contient près de quatre cents documents con- 
cernant la constitution municipale, l'industrie 
et les arts de l'Allemagne du moyen âge; — 
Kleinehistorische Schriften und Gedachtniss- 
reden ( Petits Écrits historiques et Discours com- 
raémoratifs ) ; Munich, 1832; — Lebensbilder 
aus dem Be/reiungskriege (Scènes des guerres 
dedélivrance) ; Iéna, 1842-1844, 3 vol. ; — Ane- 
monen aus dem Tagebuche eines alten PU- 
germannes (Anémones tirés du journal d'un 
vieux Pèlerin) ; Iéna, 1845-1847, 4 vol. ; — Dus 
Béer von Innerôstreich im Jùiege von tsci) 



HZ 



HORMISDAS 



t74 



( 1/ Armée de l'Autriche intérieur© dan* la guerre 
de 1 «69 ) $ Leipzig, 1348. Hormayr a aussi édité : 
Die gokUne Chronik va» Mohe/ischwangau 
( La Chronique dorée de Hoaeuschwangau); 
Munich, 1943. E. G. 

Gonv.-Léx. - IfeiurfftiMog. der Deutschen, t. XX vi. 

hormisdas I er (en pehlwi, Okhromazdii en 
parti, Àonrhmazdaï * en persan* faurmouzd et 
Jformouz; en arménien, Ormtot ; en arabe, Hor- 
inizdan)> Schakinschah (roi des rois) de 
Perse, le troisième de la dynastie des Sassa- 
nide* , régna de 271 à 272. Sa mère était fille de 
Mahree, roi de l'une des contrées de la Perse, 
au temps des Artacides. Durant le règne de 
son père Schabour I er (Saper), il gouverna 
avec gloire la province de Khorassan. Avant 
appris que les envieux l'accusaient d'aspirer au 
trône, il coupa Tune de ses mains, afin d'ôter 
toute inquiétude au roi. Les historiens musul- 
mans qui rapportent ce fait prétendent que 
les princes mutilés étalent exclus du trône; ils 
disent pourtant qn'Horraisda* succéda à son père. 
Ce monarque régna un an dix mois selon Hanv 
zah isfahani; un an dix jours selon Mirkhond* 
11 annula la sentence d'exil prononcée contre 
Manès, lui permit de prêcher ses doctrines en 
Perse, et lui assigna pour résidence le château 
de Deskerah , en Sedjestan. Il fonda la ville de 
Ram Hormouz. Son fils Behram I er lui succéda. 

£. BfiAUVOIS. 

Modjmet at*tmvaribh, fragm. trad. par M. &Iohl, dans 
le Journ. Àsiat., 18M, t. 1, p. 160. — Harazab Isfahani. 
Ann.> texte et trad. par Gottwildt. — lbn-al-Atslr, R a - 
mil aUtewarihh. — Eutychius, Jnn, 884. — Aboul- Fa- 
rad), Hist. Dynast., 82. — Flrdoust, Schah-Nameh. — 
Mlrkhood, Hist. des Sassanides, à la suite de Mém. sur 
les Antiq. de Perse, par SllYestre de Sacy ; 179S, ln-4«, 
p. 290. - Agathias, Chr&n., 180. — Moritman, Etktserung 
der Mûnzen mit Pehlwi Legenden; dans le Journ. Àsiat. 
ullem., t. VIII, p. 37. - De Longptrter, Essai sur les mé- 
dailles des rois de Perse de la dynastie des Sassanides: 
Parte, 18*0, ln-4<>. 

HO*Mi6DAs il, surnommé Kouhida, hui- 
tième roi sassanide, régna sept ans cinq mois, 
de 300 à 308, ou de 303 à 311. Il succéda à 
son père, Narsi ou Narsès , qui avait abdiqué 
pour se consacrer exclusivement aux exercices 
de piété. Ayant obtenu la main d'une fille du roi 
de Caboul , il la fit mettre à mort , parce qu'elle 
refusait de l'accepter pour mari. C'est la seule 
•action violente qu'on ait à lui reprocher. Il fit 
construire un grand nombre d'édifices et fonda 
.la ville de Vehesch-Hormouz : son fils pos- 
thume Schabour II Dzou'l-Actaf lui succéda. 
Il avait trois autres fils : Ardeschir, qui régna 
après son frère; Narsès, que Schabour tenta 
de faire roi d'Arménie, et Hormisdas. Ce der- 
nier prince , qui était l'ainé , fut exclu du trône , 
parce qu'il avait mécontenté les grands. Il 
s'enfuit en Arménie, passa ensuite à Cons- 
tantinople, et embrassa le christianisme. Les 
empereurs l'accueillirent avec distinction et l'em- 
ployèrent à faire la guerre contre sa patrie. Lûrs 
de son expédition en Perse (363), Julien lui confia 



le commandement jde la cavalerie et d'une partie 
de l'armée. E. B. 

Tliéophane, Chronographie. — Tillemont, Hist. des 
Empereurs, t. IV, 196-198, 888, et les sources citées a l'ar- 
ticle précédent. 

HORMISDAS ill y dix-septième roi sassanide, 
succéda à son père Yeadeàjerd III en 457, et 
régna jusqu'en 458, ou 460, ou 464. Le Modjmel 
et Hamsah Isfahani ne font pas mention de lui. 
Quelques historiens le représentent comme un 
prince juste et libéral. D'autres disent qu'il se 
livra à l'iniquité. Son frère atné Firouz, mécontent 
de n'avoir eu en partage que le Sedjestan , se re- 
tira chez les Huns Ephtalites, et promit de leur 
céder la ville de Termedz et une partie du Kho- 
rassan , s'ils l'aidaient à s'emparer de la Perse. 
Ayant obtenu une armée de 30,000 hommes, il 
vainquit Hormisdas* et se plaça sur le trône. On 
ne sait pas avec certitude s'il fit massacrer son 
frère ou s'il lui laissa la vie. K. B. 

Môme» sources que pour Hormidas I". 
houmisdas IT, vingt-troisième roi sassa- 
nide, fils et successeur de Chosroès I er (Khosrou 
Anouschirwan ) , régna dé 579 à 590. Sa mère, 
fille du khacan des Turcs, était la principale 
femme du roi. C'est à cette circonstance qu'il 
dut la préférence qui lui fut accordée au détri- 
ment de ses frères aînés. Il eut pour maître 
l'excellent ministre Bouzourdj-Mihir. Ce dernier 
ayant , dit-on , secrètement embrassé le chris- 
tianisme, s'efforça d'en inculquer les principes 
à son élève. Hormisdas ne tira aucun profit de 
ces enseignements. Il favorisa pourtant les chré- 
tiens, et traita avec distinction les patriarches 
nestoriens Ézéchiel et Jesujabus. Avant son 
avènement, il s'était signalé dans des expéditions 
militaires, et il gouverna d'abord avec assez de 
sagesse- Mais ayant perdu son précepteur, au 
bout de dix-huit mois de règne , il se livra à 
ses mauvais penchants. Un de ses premiers actes 
avait été de rompre les négociations de paix en- 
tamées entre son père et les ambassadeurs de 
Tibère, empereur d'Orient. Ce dernier prince, 
désirant vivement mettre fin à la guerre qui du- 
rait depuis huit ans , renvoya au Schahinschah 
( grand-roi ) , un grand nombre de prisonniers 
perses. Hormisdas, qui attribuait cette conduite 
conciliante à la crainte et à la faiblesse , n'en 
devint que plus exigeant. Il refusa de céder la 
forteresse de Dara en Mésopotamie , et réclama 
l'arriéré du tribut que ses prédécesseurs avaient 
imposé aux Grecs, tl traita avec mépris les ambas- 
sadeurs grecs, et les fit reconduire à la frontière 

; par les chemins les plus impraticables. Cependant 
Tibère n'avait pas négligé de tenir ses troupes sur 
un pied respectable. Aussitôt qu'il eut appris la 
rupture des conférences, il ordonna à ses généraux, 
Maurice et Narsès l'Arménien, de passer le Tigre et 

. de ravager la Médie. En 580 l'armée persane ayant 
été mise en déroute a Callinicus , Hormisdas se 
prêta plus facilement à la reprise des négocia- 
tions. Mais ses prétentions exagérées rendirent 

, tout accord impossible. Maurice se remit en cam- 



175 



HORMISDAS 



176 



et vainquit, en 681, dans la plaine de 
Constantine, une armée commandée par Tam- 
chosroès ou Tenkhosrou. Lorsqu'il retourna à 
Constantinople pour prendre possession du trône, 
resté vacant par la mort de son beau-père Ti- 
bère, il laissa le commandement de Tannée à 
Jean de Mystacon. Ce général perdit la bataille 
d'Amid , en 582 ; mais son successeur Philippique 
répara cet échec, et remporta, en 586, la ba- 
taille de Solacon en Mésopotamie, où périt la 
moitié de l'armée ennemie. Plus tard les Perses 
furent encore vaincus à Martyropolis , en 588. 
Pendant que ces événements se passaient dans 
la partie occidentale de l'empire , les khazares 
avaient franchi le Caucase et ravagé l'Arménie 
et l'Adherbaïdjan. D'un autre côté, le Khacan 
des Turcs , Saweh , oncle maternel d'Hormisdas, 
avait envahi le Khorassan, à la tète de trois à 
quatre cent mille hommes, protestant que son 
unique désir était d'obtenir un passage pour aller 
attaquer les Grecs. Le célèbre Behram Tchou- 
bin, gouverneur de l'Arménie, rat chargé de 
tenir tète à cette masse indisciplinée. Il n'emmena 
avec lui que 12,000 hommes d'élite; ce corps 
aguerri défit les Turcs dans une bataille où périt 
leur' roi. Behram traversa ensuite le Djihoun 
et mit le siège devant la place d'Avrizeh , où s'é- 
tait enfermé le fils et successeur de Saweh; S'é- 
tant rendu maître de la personne de ce prince, 
il l'envoya à Madain, capitale des Sassanides. 
Le khacan fut traité avec ménagement, et obtint 
la paix à condition de reconnaître la suzeraineté 
du roi de Perse. Hormisdas , jaloux de la gloire 
de son général , et le soupçonnant d'avoir dé- 
tourné à son profit une grande partie des dé- 
pouilles de l'ennemi , lui envoya les insignes du 
déshonneur , des chaînes et un fuseau. Behram 
se suspendit les unes au cou , et s'attacha l'autre 
à la poitrine. Dans cet accoutrement , il se pré- 
senta à ses troupes , et les excita à se mettre en 
insurrection contre l'autorité royale. Indignée 
de l'outrage fait à son chef, l'armée entière jura 
de le venger, et se porta sur Nisibe. Elle fut 
rejointe par les troupes de Behram Nikhordès , 
fils de Siawesch, qui, à la suite d'une défaite es- 
suyée en Albanie (590) , avait éprouvé un traite- 
ment analogue à celui de Behram Tchoubin. Ce 
n'étaient pas les seuls mécontents qu'eût faits Hor- 
misdas: Ce monarque avare et tyrannique s'était 
également attiré la haine du peuple.Aulieu d'imiter 
son père, qui était facilement accessible, il vivait 
loin des regards de ses sujets , et ne paraissait 
en public qu'orné des emblèmes de la royauté. 
On lui avait donné le sobriquet de Tadj Dar 
(porte -couronne). Il voulait juger lui-même, 
et prononçait la peine de mort pour les plus 
minces délits. Inquiété d'une prédiction portant 
qu'il serait détrôné par des rebelles, il fit périr 
un grand nombre de personnages de distinction, 
parmi lesquels on cite le mobedan mobed (granoT- 
prêtre). On évalue à treize mille personnes le 
nombre des victimes de sa cruauté. Se défiant 



même de son fils Khosroa Parwiz , que Behram 
Tchoubin avait proclamé roi, il résolut de le 
faire enfermer. Mais Khosrou se réfugia à Ar- 
debil, dans rAtropatène, et ses oncles maternels 
Bestam Kestehem et Bindouieh firent soulever 
les habitants de Madaïn. Hormisdas tomba entre 
les mains des révoltés et fut jeté dans un ca- 
chot. Ayant convoqué le peuple, il offrit d'abdi- 
quer en faveur de son plus jeune fils. Cet 
enfant fut égorgé, sa mère sciée par le milieu 
du corps, et Hormisdas eut les yeux crevés. 
Khosroès fut invité à venir prendre possession 
du trône. Ce prince rentra, en effet, dans sa 
capitale; mais il désavoua les persécuteurs de 
son père, et le réinstalla dans le palais. Hor- 
misdas , adouci par l'adversité, se borna à de- 
mander qu'on mit auprès de lui un homme ins- 
truit, capable de l'entretenir et de lui faire des 
lectures. Il pria aussi son fils de disgracier ses 
deux oncles. Mais Khosroès refusa, de peur 
d'augmenter le nombre de ses ennemis. N'ayant 
pu s'accorder avec Behram Tchoubin, il lui livra 
bataille à Neharwan , et fût complètement vaincu. 
Réduit à quitter la Perse, il se rendit, par le 
conseil de son père, dans les possessions des 
Grecs , pour implorer leur secours. Ses oncles 
raccompagnèrent jusqu'à une certaine distance; 
mais ils retournèrent à son insu dans la capi- 
tale. Hormisdas fut massacré par eux , en 591, 
dix mois après qu'il eut été privé de la vue. 
E. Beauvois. 

Outre les sources citées à Hormldas 1 er : Menander Pro- 
tector, dans Fragm. Histor. Grœcorum, de Ch. Millier; 
Paris, 1861, t. IV, p. S56. - Éragre, Hist. Ecclésiast., 
t VI, ch. 15. — Théophylactc Simocatta, Historiée Reruma 
" Mauritio gestarum, I. III. ch. 18 ; 1. IV. ch. s. — Assemanl, 
Bxblioth. Orient., t. III, part. 1, p. 810. — Caussln de Per- 
cerai, Hist. des Arabes, t II. — Not, des Manuscr., t. H. 

hormisdas, cinquante-unième pape, suc- 
cesseur de Symmaque, né à Frosinone, dans la 
campagne 1 de Rome, élu le 26 juillet ou le 28 no- 
vembre 514, mort le 6 août 523-. Anastase, qui 
régnait alors en Orient, soutenait l'hérésie d'Eu- 
tychès ; Yitalien, son compétiteur à l'empire, pro- 
tégeait le catholicisme. Yitalien s'approche de 
Rome à la tête d'une armée de catholiques ré- 
voltés par la persécution, et Anastase, effrayé, se 
décide à des concessions; feignant de vouloir se 
réunir à l'Église romaine, il demande au pape 
qu'un concile soit rassemblé à Héraclée. Hor- 
misdas envoie des légats (515) qui posent comme 
conditions que les Eutychéens accepteront le 
concile de Calcédoine tenu contre eux en 451, et 
qu'ils prononceront la condamnation d'Acace, 
patriarche de Constantinople et le plus ardent 
protecteur de l'hérésie; les légats revinrent à 
Rome sans avoir rien obtenu. En 517, seconde 
ambassade aussi inutile que la première: l'em- 
pereur repousse le formulaire de réunion et 
renvoie deux cents évéques venus pour le con- 
cjle d 'Héraclée. Anastase meurt (518) ; Justin, 
son successeur, se montre plus favorable aux 
idées d'Hormisdas, et le 15 juillet Jean, pa- 



177 

triarche de Constantinople, fait annoncer la cé- 
lébration du concile de Calcédoine. Une troisième 
légation, en 519, fit enfin cesser le schisme qui, 
depuis la condamnation d'Acace, séparait l'Église 
de Constantinople de celle de Rome. Le pa- 
triarche Jean signe le formulaire apporté par les 
légats. Il contenait, entre autres conditions, 
qu'on rayerait des dyptiques, par conséquent de 
la communion des fidèles, le nom d'Acace, celui 
de ses successeurs jusqu'à Jean, et ceux des 
empereurs Zenon et Anastase. On a beaucoup 
blâmé la disposition relative àEuphèmeet Macé- 
donius, qui, comme successeurs d'Acace, durent 
être rayés des dyptiques; ces deux patriarches, 
dont la vie avait été exemplaire, n'avaient eu 
d'autre tort que d'obéir à la nécessité de ne point 
troubler la tranquillité de l'Orient et de préférer 
d'être séparés 'de l'Église romaine plutôt que de 
condamner la mémoire d'Acace, que l'opinion 
publique protégeait. Le zèle et l'activité d'Hor- 
misdas s'étendirent également en occident : il 
envoya d'excellentes instructions à saint A vit de 
Vienne pour la Gaule Narbonnaise, à Jean de 
Taragone et à Salluste de Séville pour l'Es- 
pagne. A Rome, il s'occupa surtout des formes 
extérieures de la religion, et propagea dans le 
clergé l'étude de la psalmodie. Û eut Jean I er 
pour successeur. On ad'Hormisdas quatre-vingts 
lettres dans le recueil des Conciles deLabbe, t. IV, 
p. 1420. Alfred Franklin. 

Labbe, Sacroscmcta Concilia; t. IV, p. 1415 à imi. 
- Bruys, Histoire des Papes; 1. 1", p. 183. — Barontas, 
Annales Eeclesiaiticx ; t IX, p. 14». - Alletz, Histoire 
des Papes, t I e ', p. 15t. — Eleary, Histoire EccUsias- 
tique, t. VII, p. 18 à 88. 

HOMt, BORNE OU HORNBS (Philippe 11 

de MoNTMORENCY-NrvELLE, comte de), noble 
brabançon, célèbre par son supplice, né en 1522, 
décapité à Bruxelles, le 5 juin 1568. Fils aîné de 
Joseph de Montmorency, seigneur de Nivelle, et 
d'Anne d'Egmont, il perdit son père à l'âge de 
huit ans. Sa mère épousa en secondes noces 
Jean, comte de Horn, qui descendait de Jacques, 
grand-veneur héréditaire du Brabant, en faveur 
duquel l'empereur Frédéric ni avait érigé, en 
1.450, la terre de Horn (dans l'ancien territoire 
de Liège) en comté. Jean, n'ayant pas eu d'en- 
fants de sa femme, adopta ceux du premier Ut, et 
leur laissa toute sa fortune, à la condition de porter 
son nom. En conséquence Philippe de Nivelle prit 
le titre de comte de Horn. Attaché de bonne 
heure à Charles-Quint, il obtint de cet empereur 
le gouvernement de la Gueldre, le collier de la 
Toison d'Or et la charge de capitaine général de 
la mer. Sous Philippe II, il devint chef des 
finances des Pays-Bas, et on assure qu'il vendit 
pour plus de 300,000 écus de son bien afin de 
subvenir aux besoins du trésor public. Ainsi 
que le comte Lamoral d'Egmont (voy. ce nom), 
son parent, dont il partageait les idées de tolé- 
rance religieuse, il s'était signalé aux batailles 
de Saint-Quentin et de Gravelines; mais sa liai- 
son avec le prince d'Orange, sa haute naissance 



HORMISDAS — HORN 



178 



et son crédit devaient amener sa perte. En 1565, 
il s'était joint à ses deux amis pour avertir la 
gouvernante, Marguerite de Parme, des dangers 
qu'entraîneraient la persécution des hérétiques 
et l'introduction de l'inquisition dans les Pays- 
Bas, en suscitant une effroyable guerre civile. 
L'année suivante, Marguerite, voyant un soulève- 
ment imminent, voulut négocier une paix qu'elle 
se réservait sans doute de rompre quand elle 
trouverait le moment favorable. Elle chargea le 
prince d'Orange, le comte d'Egmont et le comte 
de Horn de négocier en son nom avec les con- 
fédérés, et en effet un acte fut signé le 23 août 
1566, par lequel elle promettait de suspendre 
l'inquisition et de permettre les prêches par- 
tout où les protestants étaient déjà maîtres des 
églises, mais cela seulement jusqu'à ce qu'elle 
connût la volonté du roi son frère. Malgré Tin- 
exécution de ces promesses fallacieuses, les 
comtes d'Egmont- et de Horn refusèrent de se 
joindre à la confédération des Gueux, à la tête 
desquels se trouvait le prince d'Orange. Enfin 
l'impitoyable Philippe H ordonna de noyer l'hé- 
résie dans le sang. Le 16 février 1568, le con- 
seil de l'inquisition avait prononcé une sentence 
contre les peuples des Pays-Bas. Le duc d'Albe 
érigea un tribunal d'exception, qu'il nomma le 
conseil des troubles , mais que le peuple et les 
soldats espagnols eux-mêmes nommèrent le tri- 
bunal du sang (el tribunal de la sangre) : 
il était composé de douze juges espagnols , et 
présidé par le duc lui- même ou par Vargas. 
Dix-huit mille personnes périrent, trente mille 
émigrèrent La mort ne suffisait pas aux persé- 
cuteurs; on prolongeait les supplices par des raf- 
finements atroces. Quoique le comte d'Egmont 
et le comte de Horn n'eussent jamais renoneé 
au culte catholique, il leur suffit d'avoir repoussé 
le joug de l'inquisition pour être livrés au tri- 
bunal de sang. Le duc d'Albe les fit arrêter tous 
* deux par surprise à Bruxelles en 1567, et or- 
donna de procéder contre eux. Condamnés à la 
décapitation, ils périrent ensemble de la main 
du bourreau. Le tombeau du comte de Horn a 
été découvert en 1839, dans l'église Saint-Martin 
de Weert. 

Le frère du comte de Horn, Floris de Mont- 
morency, seigneur de Montigny, retenu prisonnier 
en Espagne, subit le même sort ou mourut em- 
poisonné en 1570, à Simancas. En lui s'éteignit 
la branche des sires de Nivelle de la maison de 
Montmorency. Le territoire de Horn fut alors 
réuni à l'évéché de Liège. Plusieurs autres 
branches de l'antique maison de Horn conti- 
nuèrent cependant de fleurir, entre autres celle 
de Beaucignies, à laquelle appartenait Eugène- 
Maximxlien, comte de Horn et de Beaucignies» 
lieutenant général et grand d'Espagne, gouver- 
neur de la Gueldre, qui fut élevé à la dignité de 
prince par Charles H, roi d'Espagne, le 19 oc- 
tobre 1677. La branche masculine s'est éteinte 
en 1763, et la fétaiûineen 1826. L. L— t. 



179 



HORtt 



180 



Procès des comtes d'Eomont et de Horn,' Amsterdam 
(Bruxelles), 1719, 1 vol. In-lt, servant de supplément a 
la traduction de Strada, par On Ryer. — La Déduction 
de l'Innocence de mesure Philippe de Montmorencu, 
comte de Homes, sans nom d'auteur ni de lieu d'Impres- 
sion (sept. 1888, selon Relffenberg ). — Strada, De bello 
Belgico. — La Poplinlère, Fraie et entière Histoire des 
Derniers Troubles advenus tant en France qu'en 
Flandre depuis 156t. — BentUoglio, Guerre di Flandra. 
— De Tbou, Hist. sui temp. — Mlnana, Historia de Es- 
paha. ~ Laderché, Annal. Ecoles., tem. XXIII, p. 180 
et sulv. — Ferreras, Synopsis de Espana, — W a taon, 
Hist. de Philippe IL — Sismondt, Hist. des Français, 
tome XVIII, p. 449, MO, 483-48*; tome XIX, p. il. — Relf- 
fenberg, dans le Dict, de la Conversation, 

horn (Georges), en latin Hornius, historien 
é et géographe allemand, né bGreussen (princi- 
pauté de Schwareburg-Sondershausen), en 1620, 
mort à Leyde, en 1670. Il fit ses études dans &a 
ville natale. La guerre le força de passer dans 
le Brandebourg, puis en Hollande. A La Haye, 
il devint gouverneur d'un jeune Anglais, Thomas 
Morgan, qu'il suivit à Londres. Durant le séjour 
qu'il fit dans les Iles Britanniques, Horn se dé- 
clara formellement pour le presbytérianisme. II 
fut rappelé en Hollande pour occuper à Harder- 
wick les chaires d'histoire, de politique, et de 
géographie, d'où il passa à Leyde comme profes- 
seur d'histoire. C'était vers* 164a. En 1659, Horn 
eut une dispute assez vive avec Isaac Voss sur 
l'âge du monde. Ce fut Horn qui la commença 
par son De Vera sEtate Mundi, Leyde, in-4° , 
en attaquant la dissertation publiée par Voss, et 
dans laquelle ce dernier prétendait prouver que 
la naissance du monde était plus ancienne de 
mille quatre cent quarante ans que ne le porte 
l'ère vulgaire. Voss maintint son opinion dans 
ses Castigationes ; La Haye, 1659, in-4°. 
Horn répliqua par Auctarium defensionis pro 
VeraMtate Mundi; Leyde, in-4°. Suivant Mo* 
réri , « Horn étoit un homme d'une grande lec- 
ture ; mais comme il se boit quelquefois trop à 
sa mémoire, il est tombé dans plusieurs fautes 
assez considérables. 11 avoit le talent de propo- 
ser les choses brièvement et avec netteté : son 
esprit s'égaroit néanmoins de temps en temps 
jusqu'à l'extravagance, et l'on croit que cet ac- 
cident venoit d'une perte de cinq mille florins 
qu'il fit avec un alchimiste de La Haye. » Il 
mourut fou à l'âge de cinquante ans. 

Ses principaux ouvrages sont : Rerum Britan- 
nicarum Libri VIU quibus res in An g lia, Scotia 
et Hibernia, anm«,1645, 1646,1647, bello gestœ 
exponuntur; Leyde, 1648, in -8°; — De Origù 
nïbus Américains làbri IV; La Haye, 1652, 
in- 12 ; l'auteur prétend que l'Amérique a été peu- 
plée successivement par les Phéniciens, les Can- 
tabres, puis par les Chinois, les Huns, etc. Une 
pareille supposition ne supporte plus la critique. 
L'auteur base surtout son opinion sur quelques 
usages bizarres ou cruels qui se retrouvent chez 
les habitants de l'ancien continent. Cela prouve 
seulement que l'homme est comme prédestiné à 
commettre les mêmes erreurs dans quelque ré- 
gion qu'il habite, parce que les mêmes passions, 



les mêmes besoins engendrent les mêmes effets. 
L'ignorance complète dans laquelle les Espagnols 
trouvèrent les Américains au point de vue des 
sciences, des arts, et même de l'expression et 
de la reproduction des idées, prouve suffisam- 
ment que les Péruviens et les Mexicains étaient 
des réunions d'hommes assez modernes, des 
peuples à l'état d'enfance qui n'avaient reçu au- 
cune idée du dehors. Si les Phéniciens, les Can- 
tabres, les Chinois avaient abordé en Amérique 
et, comme le prétend Horn, y eussent laissé leurs 
superstitions et leurs vices , ils y auraient laissé 
aussi quelque tracedc leur civilisation : ce qui n'é- 
tait pas. Us seraient venus par mer, et les Indiens 
que trouvèrent les Castillans n'avaient pas même 
l'idée d'un bâtiment capable d'affronter la mer. 
Horn, dans son livre, a beaucoup trop accepté les 
récits fabuleux de Garcilasso de Vega et des 
premiers chroniqueurs espagnols. — Une édition 
de Septime-Sévère avec des Notes ; Leyde, 1654, 
in-8°; — Historié Philosophiez Libri VII; 
quitus de origine, sectis et vita philosopha- 
rum ab orbe condito ad noslram eetatem 
agitur; Leyde, 1655, in-4°; — Dissertations 
Historié* et Politicx ; Leyde, 1655, in-12; — 
Historia Ecclesiastica et Politica, depuis la 
création du monde, avec une introduction à l'his- 
toire universelle politique ; la première édition 
de l' Historia Ecclesiastica est de Leyde, 1665, 
in-12; avec continuations, Leyde, 1687} et 
Francfort, 1704; trad. en français, Rotterdam, 
1699-1700, 2 vol. in-12; ~» Aroa Nox, site 
historia imperiorum et regnorum a condito 
orbe ad nos ira tempora; Leyde, 1666, In-12; 
~ Accuratissima Orbis Delineatio, sive geo- 
graphia vêtus, sacra et prophana, exhibens 
guidquid imperiorum, regnorum, principa- 
tuum, rerumpublicarum ab initio rerum ad 
présentent usque mundi statum; Leyde, 
1667, in-fol.; — Orbis polilious imperiorum, 
regnorum, principatuum, rerumpublica- 
rum, cum memorabilium hist or iis et geo- 
g raphia veteri ac recenti; Leyde, 1668, 1669, 
in-12; c'est une suite historique et géographique 
de l'arec Nox ; •— Orbis imperans, seu trac- 
tatus de XIII orbis imperiis, animadversio- 
nifrus Ulustratus, etc.; Leyde, 1668, in-J2; 
—Arca Mosis, sive historia mundi, quas corn* 
plectitur primordia rerum naturalium, om- 
nium artium et scientiarum; Leyde, 1668, 
in-8°. Selon l'auteur l'on trouve dans la Genèse 
les prolégomènes de toutes les sciences. Son livre 
est fort ingénieux et témoigne d'une grande érudi- 
tion, mais ne souffre pas un examen sérieux ; — 
Une traduction latine de l'ambassade hollandaise 
en Chine ; Amsterdam, 1668, in-fol. avec fig. ; — 
Ulyssea, sive studiosus peregrinus omnia 
lustrons littora; Leyde, 1671, in-12 : ouvrage 
posthume qui reproduit de curieux documents ; 
— Des traités politiques insérés dans divers 
recueils ; — Observatioim sur les institutions 
politiques de Boxhorn. On lui attribue un coin- 



181 



HORN 



183 



mentaire latin sur l'état présent des Églises en 
Angleterre, publié sous le nom à'Honorius Rêg- 
gius, avec un Appendis contenant les décrets 
donnés dans le synode de Glascow contre les 
évêques en 1647, in-4*. L— z— e. 

Wttten , Dtar. - Strare, Ad. litter. - Grandltn ,Otia. 

hobn (Antoine- Joseph, comte de), assassin 
belge, né en 1698, roué vif à Paris, le 26 mars 1720. 
Fils cadet de Philippe-Emmanuel, prince deHorn, 
il appartenait à l'ancienne et illustre famille de 
ce nom. Son père avait servi avec distinction 
dans les dernières guerres de Louis XIV, et reçu 
sept coups de feu à la bataille de Ramillies. Sa 
mère était une princesse de Ligne. Entré de 
bonne heure au service autrichien , il dut à sa 
naissance d'arriver jusqu'au grade de capitaine; 
mais sa mauvaise conduite l'avait bientôt fait 
réformer. Pendant un séjour de deux mois à 
Paris, il se livra à tant d'excès de tous genres , 
que &a mère', veuve alors , inquiète de ce qui 
pouvait en résulter, envoya un agent pour payer 
ses dettes, et en même temps solliciter du régent 
une lettre de cachet qui l'expulsât de France. Cet 
agent n'arriva que le samedi saint : la veille, le 
comte de Horn avait été arrêté; voici dans 
quelles circonstances. On était alors dans toute I 
la fureur de l'agiotage surexcitée par le système 
de Law (voy. ce nom). Le 22 mars 1720, le 
comte de Uorn , sous le prétexte d'un achat de 
100,000 écus d'actions, avait donné rendez- 



aanter la honte qui rejaf Uirejtd'un tel jugement sur 
uu grand nombre de familles nobles* On lui pro- 
posa de faire déclarer fou le comte de Horn et 
de le faire enfermer pour le restant de ses jours 
aux Petites-Maisons , où un de ses oncles était 
déjà. Le régent fut inflexible et voulut que la 
justice eût son cours. « Quand j'ai du mauvais 
sang, je me fais saigner, » répondit-Il aux solli- 
citeurs. « D'ailleurs, ajouta-t-il, j'en partagerai 
la honte avec vous. » L'instruction du procès se 
fit avec une rapidité telle, que le 26 mars 1720, 
six jours après la perpétration do crime, le comte 
de Horn et son complice expiraient sur la roue 
en place de Grève* Sismondi , loin d'attribuer 
l'énergie de cette répression au régent, pense 
qu'elle eut lien, au contraire, par son apathie. 
Seton lui , le régent avait promis d'épargner an 
jeune comte au moins l'ignominie et les douleurs 
atroces du supplice de la roue; sa mort suffi- 
sait pour expier son crime, et personne n'avait à 
gagnera l'opprobre du supplice; « mais Dubois 
et Law ne songeoient qu'à rassurer les agioteurs, 
ajoute-t-il , et le régent , qui ne vivoit plus que 
pour les plaisirs des sens , qui repoussait loin de 
lui les fatigues de penser et de vouloir, qui 
chaque jonr manquoit à quelqu'une des pro- 
messes qu'il avoit faites la veille, après s'être en- 
gagé à sauver au comte de Horn ces dernières 
lrorreors , le laissa périr sur la roue avec son 
complice. » Après cet événement, le gouverne- 



vous à un courtier dans un cabaret de la petite | nient ne von hit pas que le marché des effets publics 



rue de Venise, qui allait de la rue Quincampoix 
à la rue Saint-Martin. Le courtier vint au rendez- 
vous , et entra dans un cabinet particulier où se 
trouvait déjà le comte de Horn avec deux indivi- 
dus qu'il disait ses amis : l'un se nommait d'Es- 
tampe ou d'Étampes, l'autre était un prétendu 
capitaine réformé piémontais du nom de Laurent 
de Mille. Après les premiers compliments et à un 
signal convenu, tous trois se jetèrent sur l'homme 
aux actions ; le comte de Horn lui porta plu- 
sieurs coups de poignard et s'empara de son 
portefeuille. Laurent de Mille voyant que le cour- 
tier vivait encore, l'acheva. Mais en se débattant 
la victime avait fait du bruit ; un garçon du ca- 
baret ent'rouvrit la porte du cabinet, et, voyant 
un homme plein de sang , il ferma cette porte à la 
clef et donna l'alarme en eriant à l'assassin. Se 
voyant découverts, les meurtriers sautèrent par la 
fenêtre. Le comte de Horn fut arrêté au moment 
où il se laissait tomber dans la rue ; de Mille 
parvint à s'échapper dans la foule qui encom- 
brait lame Quincampoix, mais on put suivre sa 
trace, et il fnt arrêté à la hauteur des Halles. 
D'Estampe seul réussit à s'évader. Les deux as- 
sassins pris en flagrant délit furent conduits à la 
Conciergerie et livrés à la justice ordinaire. Le 
principal coupable était allié aux plus grandes fa- 
milles de France, et même au régent par sa mère. 
Le public pouvait croireque l'autorité s'efforcerait 
d'étouffer l'affaire. De hauts personnages inter- 
cédèrent auprès du duc d'Orléans pour lui repré- 



oontinaàt plus longtemps dans la rue Quincam- 
poix, qui ne paraissait pas assez sûre ; il le trans- 
porta sur la place Vendôme, qu'on appela le Camp 
de Condé, parce que le ducde Bourbon-Condés'y 
faisait remarquer comme le plus riche, le plus 
avide et le moins scrupuleux des agioteurs. 
L. Louvet. 
Satnt»8imoa, Mémoires. — Dangtav, Mémoires. - Ou- 
clot. Mémoire* secrets. — Mar mortel, Histoire de Jet 
Régence. - Lacretelle , Hist. du Dix-Huitième Siècle. — 
Marquise de Créqoy, Souvenirs. - Sismondi , Hist, des 
Français, tome XXVII, p. 418-41». 

horn, famille suédoise, qui a produit plu- 
sieurs hommes remarquables, descend de 8ig* 
mund Horne , noble brabançon, qui s'établit en 
Suède vers le milieu du quatorzième siècle. 

HOftN ( Clas-Christersson), amiral suédois, 
né vers 1520, mort le 19 septembre 1558, au 
presbytère de Aby, en Œstergoethland. Il remplit 
d'abord des fonctions administratives, entra 
ensuite dans l'armée, et eut le commandement 
suprême dans plusieurs expéditions. Il vainquit 
dans quelques rencontres les Russes et les Da- 
nois. Mais c'est principalement comme marin 
qu'il se distingua. Nommé amiral en 1564, il 
défit les Danois près du rocher de Klippro, au 
nord- du Sund de Kalraar. L'année suivante, il 
croisa dans la Baltique avec une escadre de 
quinze vaisseaux de guerre, la plus considérable 
que la Suède eût encore équippée, et remporta 
l'avantage dans cinq combats qu'il livra à la flotte * 
danoise, combinée avec celle de Lubeck. Son plus 



ISS 



HORN 



184 



beau fait d'armes est la victoire qu'il gagna, en 
1 566, près de Hled'ŒIand, ayant sous ses ordres 
soixante-huit navires. C'était Tan des meilleurs 
conseillers du roi Éric XIV, dont il calma sou- 
vent la fureur sanguinaire. £. B. 

TegeJl, Brie XIV, M*. - Nordin, JSremHme. - Ad- 
lenparre, tHstortika SamUngar., t. U, p. 10 et saiv. - 
TJMMUBW, SvmuM Plutarch. - Bioçraphitkt Lex.. t. -VI. 

horn (Gustave-Carlsson), général suédois, 
né à Œrbybus (Upland), le 23 octobre 1592, 
mort à Skara, le 16 mai 1657.11 était petit-cou- 
sin du précédent, et fils de Caii-Henrkson, 
général distingué. Après avoir étudié aux uni- 
versités de Rostock, Iéna, Tubingue (1608- 
. 1612), il fit ses premières armes, en Finlande, 
sous son frère Ewert, et se rendit ensuite en 
Hollande, pour se perfectionner dans l'art mili- 
taire sous Maurice d'Orange. Rentré dans sa 
patrie en 1618, il fut employé à diverses missions 
diplomatiques, devint sénateur (1624), fit plu- 
sieurs campagnes en Livonie et en Allemagne. 
La ville de Colberg (Poméranie) tomba entre 
ses mains en 1629. A la bataille de Leipzig (1631), 
il commandait l'aile gauche de Tannée suédoise. 
Gustave-Adolphe, qui l'appelait son bras droit, 
le chargea de conquérir quelques provinces ri- 
veraines du Rhin. Horn se rendit maître de Co- 
blentz, des pays de Trier et de Bade, de l'Al- 
sace, de la Souabe. En 1634, il fut fait prisonnier 
à la bataille de Nordlingen, livrée, malgré ses 
avis, par le ducBernhard de Saxe-Weimar. Les 
Impériaux . le traitèrent avec les plus grands 
égards , mais ils le tinrent captif durant sept ans, 
à Ingolstadt et à Burghausen, £n 1642, échangé 
contre trois généraux , au nombre desquels se 
trouvait le fameux Jean de Werth, il retourna 
en Suède par la Suisse, la France et la Hollande, 
et fut accueilli partout sur son passage avec 
les plus grands honneurs. La république de Ve- 
nise lui offrit le commandement général de ses 
troupes; mais il aima mieux rentrer dans sa pa- 
trie, qui avait besoin de ses services et qui sa- 
vait apprécier son mérite. En 1644 il envahit la 
Scanie, qui appartenait alors au Danemark, s'em- 
para dUelsingœr, de Landskrona et de Laholro; 
mais il échoua devant la place de Malmœ, défen- 
due par le roi de Danemark en personne. Le 
traité de Brœmsebro mit fin à la guerre en 1645. 
Horn fut créé comte de Bjœrneborg en 1651, 
nommé grand-maréchal et ministre de la guerre 
en 1652. Les soldats ne l'aimaient pas, parce 
qu'il réprimait leurs désordres; mais les peuples 
conquis l'avaient surnommé l'Humain et le Ma- 
gnanime. Il était fort instruit, parlait plusieurs 
langues, et écrivit,* durant sa captivité : Ducis 
perfecti Munus. On lui attribue un mémoire 
sur la bataille de Leipzig. E. Beau vois. 

Bmporagrlos, Concio Funébrti; Stockholm, 1660-, in-4°. 

— Florander, Encomium Militiœ Homianse ; Upsal, 1948. 

— Berch, Lefnadsbeskr. - GJœrwel, Sv. Biblioth., part. II 
p. «M, e* Hist. Archiv, part. V, p. 58. — X. F. af Lund- 
fetad, Svensk Plutarch, I8t», In-8», lWr. I. - Fryxell, 
BeraetUlser ur Svetuka Historien, t. VI-VIII. — Tret- 
tiâriga krigels nwrkvaerdigasto Personer, notices par 



A.-J. ArwtdMOD, portrtttt par Sàbaton, la-foL — Biogra* 

phiiht LtXik., X. VI, p. S4S-S47. 

horn (Arvid-Bernhard, comte db), homme 
d'État suédois, né le 6 avril 1664, à Wuorentaka 
(Finlande ), mort à Ekebyholm , le 17 avril 1742. 
Entré au service de l'empereur d'Allemagne en 
1682, il fit la campagne de Hongrie, combattit à 
Mohacz, et servit ensuite dans Tannée hollan- 
daise (1690-1695). De retour dans sa patrie, il 
devint major général de cavalerie (1700), et fut 
accrédité comme ambassadeur auprès de Sta- 
nislas, roi de Pologne (1704). Le rang de comte 
lui fut donné en 1706, avec les fonctions de 
gouverneur du duc de flolstein, neveu du roi. 
En 1710 il succéda à Nils Gyldenstolpe comme 
président de la chancellerie (premier ministre). 
Au lieu de soutenir les intérêts du prince confié 
à ses soins, il prépara la voie du trône à Chique- 
Éléonore, sœur de Charles XH. Cette princesse 
fut, en effet, élue pour succéder à son frère ; mais 
elle dut renoncer à plusieurs prérogatives de ses 
prédécesseurs. Horn, qui avait beaucoup contri- 
bué à/aire réduire le pouvoir royal, s'arrogea une 
telle autorité, que la reine lui ordonna de quitter 
son poste, le 20 mai 1719. Mais la diète affec- 
tant de le considérer comme un homme indis- 
pensable, il fut replacé à la tête des affaires en 
1720, et gouverna avec assez de sagesse, s'effor- 
çant de maintenir la paix. Renversé en 1738, 
par le parti des chapeaux, qui fit déclarer 
la guerre, à la Russie, il vécut assez pour voir 
les suites malheureuses de la politique de ses 
successeurs. Le comte de Lynar, ambassadeur du 
roi de Danemark, le caractérise en ces termes : 
« Le comte de Horn a beaucoup de pénétration, 
une grande routine dans les affaires, cette jus- 
tesse d'esprit qu'il faut à un premier ministre et 
avec cela de la fermeté et un parfait désintéres- 
sement.... C'est dommage que tant de belles 
qualités aient, en quelque façon, été ternies par 
une ambition démesurée et vindicative dont le 
baron de Gœrtz fut la victime. Ses ennemis l'ac- 
cusent d'avoir utilement employé le masque de 
l'hypocrisie pour gagner le clergé et en imposer 
aux esprits faibles. Cependant il a toujours té- 
moigné de la noblesse dans ses sentiments et 
choisi d'ordinaire les moyens les plus honnêtes 
pour parvenir à ses fins. » E. B, 

Berch, Le/nadsbeskrifn, part. 8. — Geijcr, Teckninçar 
af Prihetstiden. — Crasenstolpe , Politiska âsigter; 
Stockh., 1818. — Thomaas, Sventk Plutarch. — Biogra- 
phUkt Ux., VI, 24S-S47. - Gust. Horn, A.-Bi Horn. 
Notice suivie de sa correspondance avec Charles XII et 
antres personnages ; Stockholm, 18M( SOS p. ), in-8*. 

horn (Frédéric, comte de ), général suédois, 
descendant de Clas-Christersson Horn, né en 
1725, à Husby (Sœdermanland), mort le 1 er janvier 
1796. Il servit d'abord dans l'armée suédoise, ob- 
tint un congé à la paix d'Abo ( 1743) , et entra 
dans un régiment français. Il se distingua dans 
les guerres d'Allemagne et prit sa retraite en 
1749, avec le grade de colonel. Lors de la guerre 
de Sept Ans, il fut attaché, en qualité d'aide de 
camp général, à la division du maréchal d'Es- 



185 



HORN — HORNE-TOOKE 



186 



tréea, et déploya autan? de courage que d'habileté 
à la bàtailled'HastenbecManô le Hanovre (1757). 
Rappelé dans sa patrie en 1760, il prit part an 
coup d'État de 1772, et fut rondes membres du 
comité chargé de réviser la constitution. Son 
dévouement à la cause du roi lui valut le titre de 
comte (1772) et le grade de lieutenant général 
(1778). Cinq ou six ans avant sa mort, son roya- 
lisme exalté se changea en haine contre Gus- 
tave III, parce que le commandement de la garde 
royale lui avait été retiré. £. B. 

J.-G. Oxenstjerna, Amminnelsctal i Frimurertloçen ; 
Stockholm, 1796. — Rlatell, jénecd. otn Gustav lit, 
p. 115, 1*3, 191. - Biographiskt Lez., t. VI, p. lS8-iS6. 

horn (Frédéric, comte de), fils dn précè- 
dent, homme politique suédois, né en 1763, mort 
à Copenhague, en 1823. Dans sa jeunesse, il 
brilla à la cour de Gustave 1H, dont il était le fa- 
vori. Mais, irrité de la disgrâce de son père, il 
prit part au complot contre la vie du roi. Son 
château de Hnfvudsta était le lieu de réunion 
des conjurés. Apres le meurtre de Gustave ni, 
il montra beaucoup de faiblesse, et demanda sa 
grâce; il fut condamné à la peine capitale, à la 
dégration et à la confiscation de ses biens. Cette 
peine ayant été commuée en bannissement per- 
pétue], il se retira en Danemark, et fut traité avec 
de grands égards par le ministre Bernstorf. Quoi- 
qu'il eût combattu avec les Danois contre les An- 
glais (1800), il rat plus tard expulsé du Danemark 
sur les instances de Gustave IV, et se retira en 
Allemagne. En 1813 il rentra en Danemark, après 
s'être fait naturaliser. On a de lui des Poésies lé' 
gères (Sina Skaldestycken); Copenhague, 1816, 
que Rahbek n'a pas dédaigné de traduire (Copen- 
hague, 1824). Sonfûseias-Frédéric, né le 1 1 mars 
1791, fit, en 1814, la campagne de Norvège; il 
a assisté à plusieurs diètes. £. B. 

Thaarnp, Nekrotog., Hf r. 8, p. 194-196. — BiograpMskt 
Lex.. VI, sss-tss. — Brslew, Forf.-Lex. 

HOftif (Jean tan), médecin suédois, né en 
1662, à Stockholm, de parents hollandais, mort 
dans cette ville en 1724. Après avoir étudié l'obs- 
tétrique à Paris et à Leyde, où il rat reçu doc- 
teur en médecine (1690), il retourna dans sa 
patrie (1691), fut chargé d'un cours d'anatomie, 
et devint premier médecin du roi Frédéric (1724). 
BJne faut pas le confondre avec Jean van Hoorne, 
professeur d'anatomie à Leyde. On a de loi : 
De Partu Prxternaturali; Leyde, 1690.; — 
Svensia vxlœfvade Jordegumina (L'Accou- 
cheuse exercée); Stockholm, 1697, in- 8°; 
2 e édit, 1715. On en fit une traduction alle- 
mande qui fut imprimée plusieurs fois, notam- 
ment à Stockholm, 1765, in-8°; — Anatomes 
publiée, anno 1705, Stockholmim habita lec- 
Ho tertia, ouvrage posthume. E. B. 

GezeUas, Dkt. Biogr. suédois. — Adetang, SuppL à 



HOftif (François -Christophe), littérateur 
allemand, né à Brunswick, le 30 juillet 1781, 
mort à Berlin le 19 juillet 1837. Jl étudia .le 
Droit à Iéna et à Leipzig, et obtint en 1803 une 



place de professeur au Grçue Kloster, l'un des 
collèges de Berlin. Des raisons de santé l'o- 
bligèrent à renoncer dès 1807 à renseignement 
public. Le meilleur travail de Hora est sa cri- 
tique de Shakespeare, Shakespeares Schaus- 
piele ( les Œuvres Dramatiques de Shakes- 
peare); Leipzig, 1823-1831 , 5 vol. ; résultat de 
vingt annéesde recherches. On lui doit en outre : 
Guiscardo, roman; Leipzig, 1801 et 1817 ;—Die 
Dichter (Les Poètes), roman; Berlin, 1801, 
3 vol. et 1817 ; — Kampfund Sieg (Combat et 
Victoire), roman; Brème, 1811; — IÀebeund 
Lhe ( Amour et Mariage), roman; Berlin, 1811 ; 
—Novellen; ibid., 1819-1820, 2 vol. ;—Umri$se 
sur Geschichte und Kritik der schanen LLte- 
ratur Deutschlands von 1790-1818 (Études 
historiques et critiques sur la Littérature alle- 
mande depuis 1790 jusqu'à 1818); Berlin, 1819 
et 1821 ; — Geschichte und Kritik der Poésie 
und Beredsamkeit der Deutschen von Lu- 
ther s Zeit bis zur Gegenwart (Histoire Cri- 
tique delà Poésie et de l'Éloquence des Allemands 
depuis Luther jusqu'à nos jours); Berlin, 1822- 
1829, 4 vol.; — Un choix des écrits posthumes 
de Horn fut publié par Schwab et Foerster : 
Psyché; Leipzig, 1841, 3 vol., etc. B. L. 

Franz Hora, BiographUches Denkmal; Leipzig, 1899. 
; HOftN (Henri-Maurice), poète allemand , 
né * Chemnitz, le 14 novembre 1814. Il fit ses 
études à l'université de Leipzig, et revint plus 
tard à sa ville natale où il demeure encore au- 
jourd'hui. On a de lui : Die Pilgerfahrt der 
Rose ( Le Pèlerinage de la rose ) ; Leipzig, 2 e édit, 
1853;-— Die Lilie vom See (Le Lys du Lac); 
ibid., 1853; — Magdala, ibid., 1855;— Die 
Dorfgrossmutter (La Grand'Mère Villageoise), 
1856; — Christoph Columbus, ibid.; 1856. 

B. L. 

Plerer, Universal-Lexican, Supplément. 

borne ( D.-R. de ), médecin, français, né vers 
1740, mort à la fin du dix-huitième siècle. Il rat 
successivement premier médecin de l'hôpital 
militaire de Metz,médecin ordinairede la comtesse 
d'Artois, et médecin consultant du duc d'Orléans, 
On a de lui, entre autres ouvrages : Examen des 
Principales Méthodes d? administrer le Mer- 
cure pour la Guérisondes Maladies Vénérien'' 
nés; Paris, 1769; — Observations faites par 
ordre du gouvernement de Différentes Métho- 
des d'administrer le Mercure dans les Mala- 
dies Vénériennes; Paris, 1779, 2 vol. in-8°; — 
Mémoires sur Quelques Objets qui intéressent 
plus particulièrement la Salubrité de la Ville 
de Paris; Paris, 1788, in-4°. lia publié aussi 
des articles dans la partie médicale de V Ency- 
clopédie méthodique. J. V. 

Des BuarU, Lés Siècles Littéraires de la France. - 
Qaérard, La France Littéraire. 

HOftHB-TOO&E ( John), publiciste et philo- 
logue anglais, né à Westminster, le 25 juin 1736, 
mort le 18 mars 1812. Il était fils d'un mar- 
chand de volailles nommé Home. Il tut élevé à 



187 



HORNE-TOOKE — HORNEMAN 



188 



Westminster et à Etqn , et acheva ses études à 
Cambridge. Au sortir de l'université, il entra dans 
les ordres pour plaire à ses parents, et obtint 
une cure dans le comté de Kent, en 1760. Mais il 
remplissait à contre-cœur les devoirs de sa pro- 
fession, et il s'empressa de s'en affranchir, en 
accompagnant sur le continent (1765) le fils d'un 
gentilhomme du voisinage. Il rencontra à Paris 
Wilkes, et se Ha avec ce fameux agitateur. 6e 
retour en Angleterre, il prit une part active aux 
débats politiques, et contribua beaucoup à l'élec- 
tion de Wilkes comme représentant du comté de 
Middlesex en 1768. L'année suivante il fonda, 
pour soutenir la même cause, la société pour le 
maintien du bill des droits; mais , s'apercevant 
que la société s'occupait moins du bien public 
que du payement des dettes de Wilkes, il rompit 
avec cet immoral aventurier en 1770, et perdit 
une grande partie de sa popularité. Junius lança 
contre lui à cette occasion des sarcasmes aux- 
quels Home répondit avec une énergie qui mit 
le public de son coté. Cette vie bruyante de pu- 
bliciste était si contraire à ses devoirs ecclésias- 
tiques, qu'il résigna son bénéfice, et résolut d'é- 
tudier le droit. Quatre de ses amis lui en four- 
nirent le moyen en lui assurant une rente de 
400 livres par an, jusqu'à l'époque de ses débats 
au barreau. Dans le cours de ses études de 
droit, il eut l'occasion de rendre service à un 
propriétaire nommé Tooke, qui était en procès. 
Tooke, en récompense, légua toute sa fortune à 
l'étudiant, qui prit le nom de son bienfaiteur. Hor- 
ne-Tooke, fidèle à ses habitudes d'opposition , se 
déclara fortement contre la conduite du minis- 
tère dans les affaires d'Amérique, et ouvrit une 
souscription pour les veuves et les orphelins des 
« Anglais massacrés, disait-il, par les troupes 
du roi à Lexington et à Concorde ». Le ministère 
poursuivit cette proposition comme un libelle» et 
fit condamner Horne Tooke à 200 1. ster. d'amende 
et à douze mois de prison. Certaines expressions 
de l'acte d'accusation le conduisirent à s'occuper 
du rôle des particules ( prépositions et conjonc- 
tions) dans la langue anglaise. Il en fit le sujet 
d'une Lettre û Dunning, écrite lorsqu'il était 
prisonnier, et publiée en 1778. £n sortant de 
prison» il demanda à praJkraer comme avocat, et 
fut rejeté du barreau à cause de sa profession 
ecclésiastique. Voyant se fermer devant lui une 
carrière où il se promettait d'éclatants succès , il 
se retira dans un domaine du comté de Hun- 
tiogdon. Mais il ne put tenir à la vie paisible 
des champs, et il revint à Londres se plonger 
dans les tracas politiques. Il embrassa la cause 
de la réforme électorale, trouva un auxiliaire 
dans le jeune Pitt , et se prononça avec sa 
fougue et son imprévoyance habituelles en faveur 
du jeune politique qui devait tromper si vite les 
espérances réformistes. En 1*790, Horne-Tooke, 
redevenu plus que jamais un membre ardent de 
l'opposition , se présenta -aux électeurs de West- 
minster, et il n'eut que dix-sept cents voix, fin 



1794, il rat arrêté sous l'inculpation de hante 
trahison, à cause de ses rapports avec la Société 
constitutionnelle. On ne put rien prouver contre 
lui, et après des débats où il montra beau- 
coup de calme, d'intrépidité, de présence d'es- 
prit, il fut acquitté. Il se représenta devant 
les électeurs de Westminster, et eut deux mille 
huit cents voix. Il finit cependant par obtenir un 
siège au parlement, mais d'une manière peu 
digne de ce vigoureux avocat de la réforme par- 
lementaire. Lord Camelford le fit nommer re- 
présentant pour le bourg de Old Sarum. La 
chambre l'admit pour toute la durée de la session, 
et décida qu'à l'avenir aucun ecclésiastique ne 
ferait partie de la chambre des communes. 
Horne-Tooke renonça enfin à la politique, et se 
retira à Wimbledon, ou il passa ses dernières 
années. Son principal ouvrage est intitulé r'Eraa 
7tTepoévTa, or Diversions of Purley ; 1786,in-8°; 
1798-1805, 2 vol. in-4° : c'est on développement 
de sa Lettre à Dunning. Les deux volumes com- 
prennent dix-huit chapitres qui traitent des su- 
jets suivants : Division et Distribution du Lan- 
gage; Quelques Considérations de V Essai sur 
l'Entendement Humain de Locke ; des Parties 
du Discours, le Nom, l'Article et l'Interjection ; Sur 
le Mot That ; Les Conjonctions ; Étyraologie des 
Conjonctions anglaises; Adverbes; proits de 
l'Homme; de l'AbstraGtion ; des Adjectifs et des 
Participes. Cet ouvrage, surtout dans l'édition 
de Richard Taylor, Londres, 1840, est encore 
utile ou du moins curieux. L'auteur est ingé- 
nieux, et, au milieu d'une foule d'hypothèses 
hasardées, il rencontre parfois des idées fines et 
fécondes; malheureusement il n'a aucune notion 
de la philologiecomparée. H savait, outre sa langue 
mère, le français, l'italien, un peu le latin et le 
grec, et avait étudié avec soin l'anglo-saxon. Il 
composa quelques pamphlets politiques dont le 
meilleur, Two Pairs of Portraits, fut publié 
en 1788. L'auteur y établit un parallèle contrasté 
entre lord Chatham et lord ftoUand ; entre Pitt 
et Fox. Z. 

Bngllth Cfctop. (Biêgraphp). - Haslitt, SpirU qf th* 
A*. 

hornbol (Ottocar ni), chroniqueur alle- 
mand , voyez Ottocar. 

*BOftKEMAN (JênS'Wilken), botaniste danois, 
né le 6 mars 1770, à Marstal , dans l'Ile d'^Ercs, 
où son père était pasteur, mort le 30 juillet 
1841. Après avoir voyagé en Allemagne, en 
.France, en Angjeterre( 1798-1 800 ), il fut nommé 
en 1801 lecteur au Jardin Botanique de Copen- 
hague, et en 1808 professeur de botanique à l'u- 
niversité. U fut de* 18.03 à 1817 secrétaire de la 
Société d'Économie rurale. Chargé, en 1805, de 
continuer la publication de la Flora Danica, il fit 
de nombreuses excursions en Danemark et dans 
une partie de la Norvège. On a de lui : Forsœg 
til en Dansk atcononomisk Plantetere (Essai 
de Botanique économique pour le Danemark ) ; Co- 
penhague, 1796, m-8°; 3 e édit., augmentée d'une 



189 



HORNEMAN - HORNER 



190 



Description des Plantes de la Norvège et du 
Hotstetn; ib., 1621*1638, 2 toi. in-8«; — Flora 
Qanica: icônes plantarumtponte nascenUum 
in regniê Dunia et Norvegix, in dueatibus 
Slesvici et Holsati» et in comitatibus Oiden- 
burgi et DelmenhûTste», t VUI-XH1; ib., 18064 
1840, in-fol. Ce magnifique ouvrage, en 14 vol. in* 
fol. , est l'œuvre de huit naturalistes danois. Il eon* 
tient 2680 planches accompagnées d'un texte ex- 
plicatif en latin, en danois et en allemand; -~ 
Enumeratio Plantarum Sorti Botanici Haf- 
niensis ; fb., 1807, in*8°, avec supplém.; 1809, 
3 e part.; — Hortus Regius Botanicus Haf* 
niensis; ib., 1813*1814, 2* part. in*6 9 ,avec un 
supplém., 1 819-1822, 3 e part., —De Indole Plan- 
tarum Guineemtotn; ib., 1819, m-4°; *-* No» 
menclatura Florm DanicœEmendata;ib+ 1 827» 
Il a fourni des mémoires à plusieurs recueils , 
parmi lesquels il suffit de citer Tidsskrift for 
iVaturvidenskaberne (Revue d'Histoire Natu- 
relle), t. I~V, 1822-1828; — Naturhistorisk 
Tidsskrift de Kro?yer, t. Mil} — Vidensto» 
bernes Selshabs Afhandlinger (Traités de l'A* 
cadémie des Sciences ); 1821. 

Son fils Claus*Jacob-Émile Hoimun, né 
le 19 avril 1810, à Copenhague, où iiexftrea la 
médecine, a publié : Maandàog i Stethosko- 
pien (Manuel de Stétfcoseopie), ib., 1842, in«8 j 
— Beretning otn Sundkedscommissions Vir* 
ksomhed ( Rapport sur l'activité de la commis*»* 
de salubrité); ib., 1852, ûv8°. fi. B. 

J. W. HorneoMn, »atot>iogr. dans Gtnefllog, QçBi?gi\ 
Archivât. 1, 31S-320, - Tidsskrift for mtçraturog ktrnst. 
VI. 238-248. — Conv. Lex. der neuesten Zeil. — Ërsfew, 
Forfatter-Lean. 

■OBSBMAJiff (Frîedrick-Konrad), voyageur 
allemand, né à Hildesheim, en octobre 1772, 
mort en Afrique, après le 7 avril 1800. Il était 
fils d'un ministre luthérien , et reçut sa première 
instruction par tes soins de son oncle Crome, 
recteur de l'école de Lvnebourg, chez lequel il 
vint demeurer en 1788. De 1791 à 1794 il étudia 
la théologie à Gcsttmgue; en 1795 il fut nommé 
maître adjoint à la grande école de Hanovre. 
Mais la passion des voyages et l'amour de l'in- 
connu le préoccupaient constamment. Ayant ap- 
pris qu'il existait à Londres une société qui en- 
voyait à ses frais des voyageurs en Afrique pour 
y faire des découvertes, il s'adressa, par rentre- 
mise du conseiller Blumenbach de Gœttingue, à 
cette société, et lui proposa un plan au moyen 
duquel il espérait pénétrer dans l'intérieur de 
l'Afrique. Ce plan Ait adopté : Homemann se 
rendit alors à Gœttingue, et s'instruisit des lan» 4 
gués et des usages des peuples de l'Afrique, de' 
la nature, du climat, de û manière de déter- 
miner la position géographique des . tieux , et ac- 
quit quelques connaissances eu. médecine. En 
février 1797 il se rendit à Londres. Reçu avec 
cordialité par la Société Africaine, on ielaissa libre 
sur les moyens d'exécuter son voyage, et le budget 
ouvert pour ses dépenses fut illimité. Le 29 juin 
1797 U quitta l'Angleterre, vint à Paris, où La- 



lande le présenta à l'Institut; un sauf-conduit 
lui rat aceordé, et le consul général du Rociu; (c 
recommanda par lettre à un riche commervant 
de Tripoli , Hadji-Kassan ben Hassan, qui lui «ut 
plus tard de la plus grande utilité. Le 1 1 août 
Hornemann s'embarqua pour Alexandrie, où il 
arriva le 13 septembre 1797. Bien accueilli par 
le consul anglais, il remonta le Mil par Rosette, 
en compagnie d'un moine allemand qui allait se 
fixer au Caire, où Ils arrivèrent le 27 septembre; 
Hornemann y trouva deux autres de ses com- 
patriote*, le major Schwarz et Joseph Freuden- 
burg ( natif de Cologne ), qui lui donnèrent beau* 
coup de renseignements utiles. Freudenburg avait 
embrassé depuis douze années la religion maho* 
métane, avait fait trois fois le voyage de La 
Mecque , et parlait avec facilité les divers dia- 
lectes usuels taras et arabes. Il consentit à ac- 
compagner, comme interprète , Hornemann dans 
son voyagede découverte». L'armée française s'em- 
parait alorg de l'Egypte; le voyageur allemand fut 
présenté à Bonaparte, qui, à la recommandation 
des savants de l'expédition, lui délivra des. passer- 
ports et lui offrit tout ce dont il pourrait avoir 
besoin. Hornemann quitta Le Caire le 4 septembre 
1798; il visita d'abord les ruines du fameux 
temple de Jupiter- Amioon (aujourd'hui l'oasis 
de Siouah ), puis la ville de Sirah, où, pris pour 
un espion français , il courut de grands dangers 
et ne dut son salut qu'à son sang-froid et à un 
exemplaire du Koran trouvé dans le pillage de 
son bagage. Le 17 novembre 1798 il entrait à 
Murzuck, capitale du Fezzan. Il y perdit son 
àdèie compagnon Joseph Freudenburg, et lui» 
-même rat longtemps indisposé d'une fièvre en- 
démique. A peine convalescent, il se dirigea vers 
Tripeèi, et fort bien reçu par le pacha, il put 
faire partir pour Londres le récit de ses décou- 
vertes. Le 1 er décembre 1799 il reprit son iti- 
-né*ai*e,*t le 20 janvier 1860 il rentra à Bfurxack, 
d'où il écrivit encore à la Société Africaine de 
Londres pour lui annoncer la continuation de son 
voyage. Le 7 avril *800il partit avec une cara- 
vane pour Boornou ; depuis lors, on n'a plus 
entendu parler de loi. 

Le journal de ses voyages, écrit par lui-même 
en allemand et adressée la Société Africaine, 
fut publié simultanément à Londres, età Weknar, 
par les soins de Gû, Kônift 1 802, in^ i laçebuck 
einer Beise vom Caira mach Munuck; il a 
été traduit en français par Griffet de La Baume : 
Voyage dans V Afrique Septentrionale depuis 
JLe Caire jusqu'à Mour&ouk; capitale du 
royaume du Fea&an ; suivi d } Éclaircissements 
sur la Géographie de l'Afrique, par BenaeJI, 
augmenté de Notes et d'un Mémoire sur Us 
OaiiSy etc., par L. Langlèa, Paris, an xi (1803), 
2 part. in-8°, avec 2 cartes. Alfred es Lao&xb. 

Zeitgenosseti> n» 111, ■*-» Btftraenbach,'.£e* te Naekrtclk 
V9tn Tode Uornmnmam •( Danp le raterléwéUoh*s 
Archiev de Spiel \. 

IHMlWBR (Jftdfecte), homme politique ai»- 



191 



HORNER — HORREBOV 



192 



glais, né à Edimbourg, le 12 août 1778, mort à 
Pige, le 8 février 1817. Il fit ses études à l'uni- 
versité d'Edimbourg, où il se lia avec Henri 
Brongham, et débuta ensuite au barreau sans 
négliger aucune branche de la science et de la 
littérature. En 1802 il contribua à la fondation 
de la Revue d'Edimbourg; et en 1803 il alla 
s'établir à Londres. Des membres éminents du 
parti v*hig, Àbercrombie, James Mackintosh, 
Samuel Romilly l'accueillirent avec faveur; et à 
l'avènement de ce parti aux affaires, en 1806, le 
jeune avocat écossais eut une place dans la com- 
mission nommée par la Compagnie des Indes 
orientales pour la liquidation des dettes du na- 
bab d'Arcot. Au mois de novembre 1806 il 
fut envoyé au parlement par le bourg de Saint- 
Joes, grâce à l'intervention de lord Henry Petty. 
11 ne siégea pas longtemps dans cette assemblée. 
Le ministère whig fut renvoyé par le roi le 24 
mars 1807, et le parlement dissous le 27 avril. 
Horner échoua aux élections générales, et dut un 
siège parlementaire à la protection de lord Car- 
rington. Lorsqu'en 1812 lord Grenville et lecomte 
Grey furent chargés de former un ministère, ils 
offrirent une des places de secrétaire de la tré- 
sorerie à Horner, qui refusa. En 1813 et 1814 
il prit une grande part aux débats parlemen- 
taires , et devint un des chefs de l'opposition. 
Le 25 juin 1816 il parla en faveur des droits 
des catholiques , et contre l'administration op- 
pressive qui pesait sur l'Irlande; ce fut Son der- 
nier discours. Des symptômes de phthisie pul- 
monaire le forcèrent d'aller passer l'hiver en 
Italie, où il succomba au bout de quelques mois. 
Son corps fut enseveli dans le cimetière protes- 
tant deLivonrne; sa statue en marbre, par Chan- 
trey, est placée dans l'abbaye de Westminster. 
On a de Horner d'assez nombreux articles in- 
sérés dans la Revue d'Edimbourg. 

Son frère puîné Léonard Horner, minéralo- 
giste distingué et membre de la Société royale, 
s'est fait connaître par d'excellents articles dans 
le Mineral-Kingdom et dans le Penny-Maga- 
%ine. Il: a publié en 1843 d'intéressants mé- 
moires sur la vie de son frère. Z. 

L. Borner. Memoirt and Corretpondenee of Franck 
Horner, - BnglUh Cpctopœdia (MoprapAy ). 

HOBKIUS. Voy. HORH. 

HOBOLoeics ou HOROLoei. Voy. Dondi. 
~ horbbboy ou horhebob( Pto-re), astro- 
nome danois, né à Lœkstcer ( Jutland ), le 14 mai 
1679, mort le 15 avril 1764. Fils d'un pécheur, 
fl ne commença ses études qu'à dix-huit ans. 
Entré à l'université en 1703, il eut pour maître 
l'astronome Olof Résiner, dont il développa les 
découvertes. S'étant fait connaître par un tra- 
vail sur la géométrie d'Euelide, il fut nommé 
professeur de hautes mathématiques ou astro- 
nomie à l'université de Copenhague, et con- 
serva cette chaire près de quarante ans, jusqu'à 
l'époque où il se démit en faveur de son fils 
Christian (1753). En 1716, dorant son séjour à 



Copenhague /Pierre le Grand rechercha la so- 
ciété d'Horrebov, et lui offrit une place avanta- 
geuse à Saint-Pétersbourg. Ce savant étajt 
membre des Sociétés royales de Copenhague , 
de Londres, de Berlin, et correspondant de 
l'Académie des Sciences de Paris. Il inventa une 
méthode que Bernoulli regardait comme admi- 
rable, savoir de trouver la hauteur du pôle 
par le moyen de deux étoiles qui soient situées 
l'une au nord et l'autre au sud et qui aient à peu 
près la même déclinaison. Horrebov était grand 
partisan du système des tourbillons de Descartes. 
Oh a de lui : Décades X Paradoxorum mis- 
cellaneorum; Copenhague, 1704, in-4 p ; — De 
jEquinoctiorumPrxcessione;\b. f 1706;— Pro- 
dromus Géométrie; ib., 1714; — Détermina- 
tio Apparentis Diametri Solis; ib., 1716; — 
Decas ObservaUonum Medicarum, ib., 1725; 

— Clavis Astronomie, part. I, 1725; II, m, 
1740-1741, où il détermina la parallaxe du Soleil ; 

— Copernicus Triumphans, sive de paraUaxi 
orbis annui; ib., 1727, in-4°. H y décrit unins- 
trument astronomique perfectionné par lui y le 
Triduum; — Ars interpolandi: ib., 1731; 

— Atrium Astronomie, sive tractatatus de 
inveniendis refractionibus , obliquitate ec- 
cliptice atque élévation» poli; ibid., '3 e part., 
in-4°;— Basis Astronomie; 1734-1735, 3* part., 
in-4° : ouvrage contenant, outre la vie de Rœ- 
mer, une méthode ingénieuse pour détermi- 
ner le temps de l'équinoxe , sans connaître ni 
la hauteur du pôle , ni le temps vrai, ni la ré- 
fraction : — Consilium de Novo Methodo Pas- 
cali; 1735-1738; 3 e part. — TheoriateUuris; ib., 
1739; — Computus Ecclesiasticus; ib., 1742; 

— Nova Theoria Motuum Lunarium; ib., 
1743; — Nove Physiees capita Ylll de Den- 
sUateStratorum et Altitudine Atmosphère; 
ib., 1749; — Danske Skathammer (Le Trésor 
Danois) ,trwtantde géométrie et de navigation; ib., 
1745, in-4°, avec append., 1746;— Opéra Ma- 
thematico-Physica, 1740-1741, 3 vol. in-4° : 
recueil des écrits de Horrebov, contenant ses 
écrits publiés de 1725 à 1739 et quelques trai- 
tés inédits; — des Mémoires dans Videnska- 
bernesSelshabs Skrifter (Recueil del' Académie 
des Sciences), t. HI-V. B. 

Wolf , Hitt Ordbog., VU, p. m-lM. - Bernoulli. 
Notwellet Uttér., formant le t IV do Recueil pour le» 
AtitronomeS{*ér\\n, 1T77, ln-8°, part. 8, p. 61-71. — rCyerup, 
UniversUwts AnnaUn, et Utteratur-Lextk. 

Hoa&BBOY (Christian), l'un des vingt 
enfants du précédent, astronome danois, né à 
. Copenhague, le 15 avril 1718, mort le 19 sep- 
" tembre 1776. Il succéda à son père comme pro- 
fesseur d'astronomie, en 1753. On a de lui : Re- 
petitaParallaxeos OrbisAnnuiDemonstratio; 
Copenhague, 1744-1746, 3 e part.; — De Parai- 
laxiFixarumannua; ib., 1747 ; — De JEqua- 
tione gênerait Sectionum Conicarum; ib., 
1748; — De Excentricitate Solis vel Terre; 
ib., 1749-1750, 2 e part.;— DeSemita quamin 
Soledtscripsit Venus die ejunii 1761; tb, 1761; 



193 



HORREBOV — HORSBURGH 



194 



— Eleînenta Astronomie Sphericse; ib., 1762, 
in-8°;2 6 édit, 1783, etc. 

Son frère Pierre Horrebov, né en 1728, 
mort en 1812, fit, en 1761, un voyage au Nord- 
land, pour observer le passage de Vénus sur 
le soleil, et publia : De Transite Veneris per 
discum Solis; Copenhague, 1761; — Tracta- 
tus Meteorologius , continens observationes 
26 annorum, in observatorio Hafniensi fac- 
fcw;ib., 1780, in-4°, etc. E. B. 

Nyerup et Kraft, Datuknorsk Litteratur-Lex. 

horrebov (Nicolas), voyageur danois, 
frère des précédents, né à Copenhague, le 17 
septembre 1712, mort en 17160. Après avoir 
passé l'examen de docteur en droit ( 1740), il 
devint assesseur à la haute cour (1744), et rem- 
plit ces fonctions jusqu'en 1747. Le roi le char- 
gea de visiter l'Islande (1750-1751), et d'y faire 
des observations astronomiques et physiques, et 
de rechercher ce que le gouvernement pouvait 
faire pour le bien-être de cette lie. Horrebov re- 
connut que l'Islande était placée plus à l'est 
qu'on ne le supposait, et qu'il y avait quatre degrés 
de différence entre sa position réelle et celle que 
lui donnaient les géographes. A son retour il 
publia : Ttllforladelige Efterretninger om Is- 
land ( Renseignements authentiques sur l'Is- 
lande); Copenhague, 1752; traduit en anglais, 
1758, in -fol.; en allemand, 1753, in- 8°; et en 
français, d'après l'allemand , sous le titre de 
Nouvelle Description , historique , civile et 
politique, de V Islande; Paris, 1764, 2 vol. 
in- 12. Cette relation est exacte, mais mal écrite 
et remplie de plaisanteries déplacées et d'injures 
contre Anderson , qui avait publié un mauvais 
ouvrage sur l'Islande. • E. B. 

Bosching. Nachrichten, t. I, 47-68, 988-569. - Mol- 
bech, Det Kongel. Danske Vi&enskabernet Selskabi 
Hist.; Copenhague, 1848 , ln-8°, p. 14t. —Nyerup, Lit- 
ter.-Lex. 

horrocksou horrox (Jérémie), astro- 
nome anglais, né à Toxteh, près de Liverpool, vers 
1619, mort le 3 janvier 1641 (vieux style). Placé 
par son frère au collège Emanuel à Cambridge en 
1633, il tourna bientôt son attention du coté de 
l'astronomie. Lui-même a raconté quelles diffi- 
cultés il éprouva pour savoir les auteurs qu'il 
devait consulter. Un traité de Gelliljrand l'indui- 
sit à acheter les écrite de Lansberg, et il regretta 
plus tard le temps qu'il avait perdu à les étudier. 
Ensuite il connut les ouvrages de Tycho-Brahé 
et de Kepler. Au moment où la cour et le par- 
lement étaient engagés dans des discussions qui 
aboutirent à la guerre civile, quatre jeunes gens 
oubliaient la politique pour perfectionner l'astro- 
nomie. Les travaux de Horrocks ont jeté de l'é- 
clat sur cette petite société, où il avait pour com- 
pagnons W. Crabtree, W. Milbourn, W. Gas- 
coygne. Horrocks doit surtout sa réputation à 
deux observations : H vit le premier la pla<- 
nète de Vénus sur le disque du Soleil; le pre- 
mier aussi il remarqua que les mouvements de 
la Lune peuvent être représentés par une orbite 

NOUV. BIOGR. GENER. — T. XXV. 



elliptique, pourvu qu'on admette la variation 
de l'excentricité de l'ellipse et qu'on donne un 
mouvement oscillatoire à la ligne des apsides. 
Newton, qui plus tard montra que ces deux sup- 
positions étaient les conséquences de la théorie 
de la gravitation, attribua à Halley ce qui appar- 
tenait en réalité à Horrocks. 

L'observation du passage de Vénus sur le 
disque du Soleil (Venus in Sole Visa ), faite le 24 
novembre 1639, fut publiée par Hevelius à la fin 
de son Mer curius in Sole Visus; Dantzig, 1662. 
Les autres ouvrages de Horroks parurent sous 
le titre de Jerem. Horrocdi Âstronomia Ke- 
pleriana defensa et promota, praedpue adver- 
sus Lansbergium et Hortensium. Ejusdem 
Bpistolas et Observationes cœlestes Jo. Flam- 
steedii De Inœqualitate DierumsolariumDis- 
sertatio astronomica, Tabulée Solares. Novss 
Théorise Lunaris ab Horroccio primum adin- 
ventx Explicatio. Ab eodem Flam. item iV«- 
meri Lunares, et Calculus eidem Théorise 
innixus; Londres, 1672, in-4°. Ce volume pa- 
rut avec deux autres titres : Excerpta ex Epis» 
tolis Jet. fforroccii ad Gui. Crabtrium et 
Opéra posthuma, avec la date de 1673, 1678. 
Les travaux de Horrocks sont peu nombreux ; 
mais il ne faut pas oublier, en les jugeant, que 
cet astronome mourut à vingt-deux ans. Z. 

Blrch, History ofthe. Royal Society. — Chaînera,' 
General Biographical Diction. — English Cpclopsedia 
(Biography). — Lalande, Bibliographie Attronomique. 

horsburgh (Jacques), hydrographe anglais, 
né le 23 septembre 1762, à Elin, petit village du 
comté de Fife, en Ecosse, mort le 14 avril 1836. 
Élevé au milieu des rudes travaux de la campa- 
gne, il fit pressentir de bonne heure un caractère 
résolu, audacieux même. Son intelligence se dé- 
veloppa aux écoles de son village, où il apprit 
assez de mathématiques pour parvenir, quand il 
s'embarqua comme mousse à seize ans, à pos- 
séder la théorie de la navigation. Il courait les 
mers depuis sept ans lorsqu'un bâtiment sur le- 
quel il était embarqué comme premier officier 
marinier se perdit, le 30 mai 1785, sur la petite 
lie de Diego Garcia ou Chago , située dans la 
mer des Indes, entre l'Ile Maurice et les Maldives. 
Ce sinistre, causé par la défectuosité des cartes 
qui lui avaient été remises, lui fit sentir la né- 
cessité de faire des observations nautiques et 
d'en constater les résultats. Celles qu'il fit dans 
plusieurs voyages successifs à la Chine, à Bom- 
bay, à Calcutta, à Batavia, à la Nouvelle-Guinée, 
l'amenèrent, concurremment avec la lecture des 
voyages et des livres d'astronomie, à dessiner et 
à graver des cartes ou à construire des globes. 
Ses premières cartes, retraçant le détroit de Ma- 
cassar, la côte ouest des Philippines et le détroit de 
Dam pierre par la passe de Pitt, furent remarquées, 
ainsi que le mémoire qui les accompagnait, d'un 
de ses anciens capitaines qu'il eut occasion de 
rencontrera Canton. Ce capitaine ayant commu- 
niqué ces travaux à plusieurs de ses collègues 

7 



195 B0RJ8BU&GH 

et au vénérable de la loge anglaise, ceux-cj les 
transmirent à A. Dalrjmple, hydrographe de ja 
Compagnie des iodes, à Londres, lequel fit pu- 
blier et obtint des directeurs une petite sqmme 
d'argent que Horsburgh employa à acheter à>s 
instruments. Stimulé par les encouragements 
qu'il avait reçus, Horsburgh continua d> flavj- 
jiiier, et étendit la sphère de ses travaux. Avant 
ton retour à Londres, eu 1805, sur la goejette 
Anna, qu'il commandait, \\ avajt consigné fla^s 
un mémoire qui fut communiqué par sir Heqrj 
Cavendish à la Société Royale de Londres, les 
observations météorologiques qu'il avait £utes 
depuis plusieurs années, celles surtout auxquelles 
il s'était livré, à des intervalles de quatre beureq, 
du mois d'avril 1802 au mois, de février J8Q4t *t 
qui Pavaient conduit à constater un fait non, re- 
marqué jusqu'à lui, les modifications que ('at- 
mosphère éprouve deux fois par jour entre les 
parallèles de 26° de lat. nord et 4e 26° de lat. 
sud. Dans cet écrit, dont un extrait fut jnséré dans 
les Transactions Philosophiques, de Londres, il 
exposa les causes et les effets des oscillations 
du baromètre dans les régions tropicales. Hors- 
burgh, élu membre de la Société Royale en 1806, 
succéda, Tannée suivante, à Dalrymple,qui venait 
de courir. Depuis ce moment jusqu'à sa mort, 
causée par l'excès du travail, i\ se consacra 
jour et nuit, pour ainsi dire, à l'accomplissement 
àes travaux que lui imposaient ses nouvelles, fonc- 
tions. 

Ûq lui doit, indépendamment d'un, nombre 
considérable de cartes hydrographiques, les ou- 
vrages suivants, qui ont rendu d'inapprécrçWçs 
services à la navigation, le premier surtout, coq- 
sidéré avec raison comineun guide infailjpe dans 
les mers de l'Inde : Directions fox Sailing to and 
fromthe East Indies, China, etc. Sixoditions.de 
cet ouvrage, successivement augmenté et amé- 
lioré par l'auteur, qui le corrigeait encore, à 
son lit de mort, ont paru de 1809|£ 1852. Il a 
été traduit partiellement ou dans sou entier : par 
M. Gallois, dans : Introduction à Vouvxagt 
d*Jfforsburgh sur les Navigations de l'Inde 
(Annales Maritimes de 1824, t. 23, p. 65-127 ); 
par M. Nonay, dans : Instructions Nautiques 
sur le canal de Mozambique, et sur Us Iles e( 
les Dangers dans les nord et nord-est de tifada- 
ga%ear; Paris, Imp. roy., 1824, in-8° ; et §om le 
second titre de ; Instructions Nautiques sur le. 
Port de Bombay et ses Environs , les Iles La- 
çuedives et Maldives, la Rivièrede Calcutta 
et une Partie de la Maie du Bengale; Paris, 
Imp. roy. , 1827, in-8°; -7 par M. Leprédour, dan,s : 
Instructions Nautiques sur Iq Navigation de 
la Mer de Chine, tirées et traduites, etc. Paris, 
Imp. roy.,1824, in-8° et 1837, !&39,en 5 vol. u>8°; 
— ■ par M. B. Darondeau, dans : Instructions Nau- 
tiques sur la Mer de Chine, etc., 3 e édition re- 
vue sur la 5 e édition, anglaise de 1843, et augr 
mentée de documents récents empruntés àdi* 
verses publications françaises et étrangères; 



— H0RSLEY 



1W 



Pari*, 1851et 1853, hv4°. On, a, encore deÇors*- 
burgh : Registre Météorologique dfitfivjf à in- 
diquer les fempfttesen; IÇer; Londres, 1816;— 
Extrait du traité de ifackensie sur (es relève- 
ments à la Mer$ — Remarq\^es sur Plusieurs 
jpançsde Glace qui pnjç élfi rencontrés dans 
r hémisphère austra\ (dans les Transactions 
Philosophiques <teJft3Q), H y attribua l'appari- 
tion en J828 de cinq b,âncs de glace qui furent 
remarqués par 37° 31 de lat sud et 18°17' de laj. 
est du méridien o> ^flrei à, l'existence d'une 
grande étendue de terre auprès dq cercla po- 
laire antarctique entre le méridien, de foudres 
et le 2u* degré de long, est, et il explique la de*- 
oente de ces glaces,, jus.qu.0 alors sans exemn)e, 
soit par quelque viplent secousse pu trejnjile- 
ment de lerre, soit par j'action 4'un volcan qui 
les aurait brisées ou détachées du point où. ellçs 
s'étaient formées. Très~9élé partisan tfe l'Église 
anglicane dont il suivait les préceptes avec une 
rigoureuse exactitude, il levait défendue dan* 
les deux ouvrage suivants : Apologie, du fro,iié 
de saint Cmw m r-ffuff*: de f Église 
(s.d.) ; in-8 a ;r- 4mtai« de VÉalisfi Natio- 
nal*; Londres, 183$, fa-â°. P. Lçvp:r. 

annales Maritimes et, coloniale^ —Fraye* Littéraire. 
— Rose, New. Dietiohary. 

HOftSCH ( PhiHppe-Joseph ). médecin alle- 
mand, né en 1772, mort le 22 janvier 1820. II 
fut médecin du roi de Bavière, et professa la 
science médicale à Wortzbôurg. Il a publié di- 
vers ouvrages estimés; les principaux sont : 
Annales de V École clinique de Wurtibourg; 
1809-1810, in-8° ; — Manuel de Thérapeutique 
générale; ibid, 1811, in-8»;— Introduction à 
ta Cl\niqùe; ibid., 1817, in-8^; — Manuel de 
Pathologie spéciale et de Médecine; 1819, 
M, in-8°. V, R. 

horset (Jérôme), diplomate anglais, vivait 
dans la deuxième moitié du seizième siècle. Il 
fut envoyé en 1584 et 1590 en Russie \m la 
reine Elisabeth, s'y trouva au couronnement 
dn successeur divan le Henaçant, et a laissé 
par écrit ce qu'il y a vu et observé. Ses mé- 
moires, au nombre de trois, sp»t : Ihe Jfosf 
solemne and maanificent Coromtion of PJte~ 
dor Ivanovich, emperot ofiRussm , the tentb 
of june in the yeav t584; -* Trwfae of 
Russia, and the Northern Régions; — 4 
Discourse of the second and third em&oy- 
ment ofM. Jérôme Morse» mq», S4*te jrom 
her Majesty to th* emperox of Ru&sw; — 
les deux premier» se trouvent dans Mahhty* 1 * 
Collection et dans Puvcbfl* Pilgvimasfi; — le 
troisième, encore inédit, se conserve an BritisJk 
Muséum. F* A, Gt— «. 

Adelang, VbersioM ter ReUenâcu *» AuafcHUL tff 
|700. 

HORS^ey (Joh#) t archéologue anglais, n^ 
dans le^or^umbexlan,^ en 1685, mort au mois 
<)e de^JeauV^ ^73lt. fl était pasteuv 4'une con- 
tféga.tion, d> dvssji^eAts i Morj)et,h , et membre 



197 



HORSLEY ~ HORST 



198 



de la Société Royale* Versé dans les mathénu* 
tiques et l'histoire naturelle, il se distingua sur- 
tout par sa profonde connaissance des antiquités 
de son pays. Il donna des preuves de son savoir 
archéologique dans des lettres adressées à Ro- 
ger Gale sous la date de 1729, et insérées dans 
la View of Northumberland de Hutchinson. 
Son grand ouvrage, intitulé Britannia Romana, 
ne parut qu'en 1732, après sa mort. C'est une 
étude sur les traces que les Romains ont laissées 
dans la Bretagne. £e I er livre donne l'histoire 
de la domination romaine dans cette lie, la liste 
de leurs légions et de leurs forces auxiliaires, la 
description de leurs stations fortifiées; le II* livre 
contient les inscriptions et les sculptures romaines 
découvertes en Bretagne ; le III e est consacré à la 
géographie de l'Ile, d'après Ptolémée, Y Itinéraire 
d'Adrien, UAotitia, Y Anonyme de Ravenne, 
la Table de Peutinger. Z. 

Cbalmers, General Biogr. Diction. 

Borslet (Samuel), prélat anglais, né en 
1733, mort le 4 octobre 1806, Il fit ses études 
à Cambridge, entra dans les ordres, et devint 
vicaire de son père, recteur de Hewington. En 
1767 H™* membre de la Société Royale, et Tan- 
née suivante il alla à l'université d'Oxford ser- 
vir de précepteur à Hencage, comte d'Aylesbury, 
alors lord Guernsey. La protection de ce sei- 
gneur lui valut en 1774 la place de recteur d'Ay- 
lesbury. Il était déjà, depuis 1773, secrétaire de la 
Société Royale-. Ses publications scientifiques et 
le zèle avec lequel il défendit le christianisme le 
désignèrent à la protection de Lowth, évoque 
de Londres et du chancelier Thurlow, qui le 
nomma, en 1790, évèque de Saint- David.Horaley 
fut transféré, en 1793, sur le siège épiscopal de 
Rochester, et, en 1802, sur celui de Saint- Asapb. 
Ce prélat était un travailleur infatigable» et il joi- 
gnait à on savoir profond une grande vigueur 
intellectuelle. On lui reproche d'avoir eu quelque 
chose de dictatorial dans les manières, et de 
n'avoir pas su s'entendre avec ses collègues de 
la Société Royale. Ses principaux ouvrages sont : 
Apollonn Pergzi lnclinatiqnum libri dm; 
Oxford, 177Q; — Remarhs on the Observa- 
tions mode in the voyage towards the North 
Pôle for determining the accélération of the 
pendulum in latitude 79** 61'; in a Letter 
to the hon. Constantine-John Phipps; 1774, 
in-4° ; — une édition des œuvres de Newton, 
1785, 5 vol. in-4 Q ; — Animadversions on the 
History oftheCorrupUons oj Chris tianity by 
Dr Priestley ; 1783: ces remarques donnèrent 
lieu à une réponse de Priestley, et Horsley, ré- 
pliqua: On the Propriétés of the Greek 
and Latin Languages ; 1796, in-8°; — Hosea 
translated from the hebrew, with notes ex- 
planatory and critical ; 1801, in-4°; réim- 
primée avec des additions, 1804, et en 1844 
sous le titre de Biblical Critieism; — Euclidis 
Elément or um Libri priores XII, ex Corn- 
mandini et Gregorn versionibus latinis; 



glaiSj 



Oxford, 1802, in-8°j — Euclidis Datorum 
Liber, cum additamentis nec non tractatus 
alii ad geometriam pertinentes ; Oxford, 1803, 
in-8°; — Sermons; 1810, 1812, 3 vol. in-8°; 
— Tracts in controversy with Dr Priestley 
upon the historical question of the beliefof 
the first âges in Our-Lord's divinity ; 1812, 
in-8° ; — The Speeches in Parliament; 1813, 
in-8». 
Chalmen, Général Biogr. Diction. 

"■OR8LBY (John Callcott), peintre an- 
is, né à Brompton, en 1817. Après avoir fait 
ses études dans les écoles de l'Académie royale, 
il débuta, vers l'âge de dix-sept ans, par des ta- 
bleaux qui attirèrent l'attention de Wilkie; de* 
puis ce temps il a exposé, d'abord à l'Institut 
Britannique, puis à l'Académie royale, de nom» 
breux tableaux de chevalet. En 1842 il délaissa 
le genre pour l'histoire, et la peinture à l'huile 
pour la fresque. A la suite du concours ouvert 
pour la décoration des salies du Parlement , il 
fut chargé d'exécuter deux fresques : La Prière 
et La Paix, puis Satan inspirant de mau- 
vaises pensées à la femme. Un carton repré- 
sentant La Religion lui valut en 1845 une ré- 
compense de 400 livres, et il en reçut une se- 
conde de 200 livres pour son tableau oV&enri, 
prince de Galles, Horsley est un des peintres 
qui, dans ces dernières années, ont lutté avec 
le plus de persévérance et de talent pour ffire 
adapter la peinture historique à la décoration 
des édifices publics, et spécialement des églises; 
car, suivant lui, des peintures religieuses orne- 
raient mieux, instruiraient autant, et ne distrai- 
raient pas plus que les versets et les textes de 
l'Écriture que l'on inscrit actuellement sur les 
murs. Mais ses efforts n'ont pu triompher du 
goôt anglais. Perdant courage, il est retourné à 
ses tableaux de genre, qui lui sont achetés à prix 
d'or. Les qualités que lui reconnaissent ses 
compatriotes sont l'éclat du coloris, la vérité du 
dessin , l'effet du clair-obscur, et le fini qu'il 
donne parfois à ses ouvrages. Ses tableaux les 
plus renommés sont : Le Madrigal; Henri, 
prince de Galles; Une Scène tirée de don 
Quichotte, etc. M. Horsley est membre de l'A- 
cadémie royale depuis 1845. Cinq tableaux de 
cet artiste figuraient à l'exposition universelle 
de Paris : Jeunesse et Vieillesse ; — Lady Jane 
Grey et Roger Ascham; — Le Madrigal ; — 
Le Fidèle Ami; — V Allegro et le Penseroso. 
E. Cottenet. 
The> Art Journal, 1887. 

borst ( Nicolas van der), peintre belge; 
né à Anvers, mort à Bruxelles, en 1646. Il était 
élève de Rubens. Il peignait déjà parfaitement 
le portrait et l'histoire lorsqu'il parcourut l'Alle- 
magne, la France et l'Italie. Il se fixa à Bruxelles, 
on l'archiduc Albert l'attacha à sa personne. Van 
der Horst a beaucoup travaillé pour les libraires 
et les graveurs. Ses dessins sont moins rares que 

7. 



199 



HORST — HORTEMELS 



20O 



ses tableaux. Remarquables par leur finesse et 
leur correction, ils sont très-recherchés. 

A. deL. 

Descamps, La Fie des Peintre» flamands, t. 1, p. 267. 

HOfiST (Grégoire), médecin allemand, né à 
Torgau,en 1578, mort à Ulm, le 9 août 1636. En 
1608 il fut premier médecin du landgrave de 
Hesse, se retira en 1622 à Ulm, et s'acquit le 
surnom à'Esculape de V Allemagne. Ses princi- 
paux écrits sont : De Somno et Somniis ; ibid., 
1606, in-4° ; — De Elémentis et Temperamen- 
tis ; ibid., 1606 , in-4° ; — De Naturali Conser- 
vatione et Cruentatione Cadaverum; ibid., 
1606, in-8° ; — De Partibus Humant Corporis 
et earum actionibus; ibid., 1606, in-8°; — 
Scepsis an Corpus Humanum post mortem 
durare possit colore floridum et incorrup- 
tum etanjluxus sanguinis cadaveris humant 
occisi prœsentiam interfectoris indicet? ibid., 
1606, in-8° ; — De Morbis eorumque Cousis; 
Giessen, 1612, in-4°; Marbourg, 1629, 
in-4° ; — De tuenda Sanitate Studiosorum et 
litteratorum Libri duo; Giessen, 1615, in-8°; 
1617, in-12; Marbourg, 1628, h>8°; 1648, 
in-12; — Anatome Corporis Humant; Gies- 
ner, 1617, in-fol. ; — De Natura Motus Ani- 
malis et Voluntarii; Giessen, 1617, in-4«; — 
Conciliator Enucleatus, seu Pétri Aponen- 
nensis differentiarum philosophorum et me- 
d9torum Compendium; Giessen ,1621, in-8° ; 

— Febrium Continuarum et Malignarum 
Prognosis ; ibid., 1622, in-4° ; — Observatio- 
num Medicarum singularium Libri quatuor 
priores; accessit Epistolarum et consultation 
num liber; Ulm, 1645, in-4°, Nuremberg, 
1652, in-4° ; — Centuria Problematum Medi- 
corum? accedit Consultationum et epistola- 
rum Medicinalium liber tertius ; Ulm, 1636, 
in-4° ; — Herbarium Horstianum, seu de se- 
lectis plantis et radicibus libri duo; Mar- 
bourg, 1630, in-8°; — Institutionum Physi- 
carum Libri duo; Nuremberg, 1637, in-4°. 

D r L. 
Ersch et Grnber, Ailgemeine BncyKlopœdie. - WÏtte, 
Mémorise Medicorum.— Biographie Médicale. — Freher, 
Tfieatrum Eruditorum. — Bayle, Dict. Hist. — Van der 
Linden, De Scriptoritms Medicii. 

horts ( Jean- Daniel ) , fils atné du précé- 
dent et médecin comme lui, né en 1620 à Gies- 
sen, mort le 27 janvier 1685 à Francfort-sur-le- 
Mein. Il enseigna la médecine à Marbourg et à 
Giessen, devint médecin particulier du land- 
grave de Hesse-Darmstadt , et se retira sur la 
fin de ses jours à Francfort On a de lui : Posi- 
tionum Anatomicarum Décades decem; Mar- 
bourg, 1638, in-4 ; — Anatome Corporis Hu- 
mant tabulis comprehensa ; ibid., 1639, in-4°; 

— Anatomia Oculi; Marbourg, 1641, in-4°; — 
Compendium Physicae Hippœraticx ; Mar- 
bourg, 1646,in-8°;Darmstadt, 1662, in-4 ;, — 
Manuductio ad Medicinam; Marbourg, 1648, 
m-8°; 1657, in-12 ; Ulm, 1660, in-12 ; — Phar- 
macopœa Galeno-Chymica Catholica , post 



Renodxum, Quercetanum, aliosque hujus 
generis oeleberrimos utriusque medicinœ 
doctores practicos adomata ; Francfort, 1651, 
in-fol. , 1665, in-12 ; — Physica Hippocratea 
Tackenii, Helmontii, Cartesii, Espagnet , 
Baylxi, etc., aliorumque recentiorum corn- 
mentis illustr. ; Francfort, 1682, in- 8°. 

D r L. 
Witte, Diarium Bioçraphicum. - Bayle, Dict. Hist. 

— Ersch et Grnber, Allgemeine EncyJdopssdie. — Ju- 
cher, Allgem. Gel.-Lexikon. 

borst (Grégoire), frère du précédent, né 
à Ulm le 20 décembre 1626, mort le 31 mai 
1661. Il fut professeur au collège d'Ulm, publia 
une édition de Marcellus Donatus et du Traité 
des Animaux de Conr. Gesner, et écrivit lai- 
même : Dissertatio de Mania; Giessen, 1677, 
in-4°; —Spécimen Anatomix Practicx in 
Academia Giessena aliquot philiatris exhù 
bitum. Adjecta sunt quœdam de Moxa; 
Giessen, 1678,in-4°. D r L. 

Freher, Theatrum Eruditorum.— Bayle, Dist. Hist. — 
Biographie Médicale» 

horstius. Voy. Merler (Jacques), 
hortemels (Frédéric), graveur français, 
hé à Paris vers 1688. Il se fit remarquer par la 
teinte douce ( morbidesza ) qu'il donna à ses 
œuvres; mais il n'a pas su éviter l'excès de 
mollesse, et souvent ses personnages, trop lour- 
dement ponctués de noir dans leurs chairs, res- 
semblent à des lépreux. Son dessin est du reste 
correct. Ses meilleurs ouvrages sont les gra- 
vures qu'il a exécutées pour le Recueil deCrozat, 
parmi lesquelles se font surtout remarquer Jésus 
portant la Croix, d'après le Giorgione ; — UA- 
doration des Rois, d'apr*ès PaoloVéronèse; — 
La Naissance de saint Jean-Baptiste, d'après 
le Tintoret; — Le- Mariage de sainte Cathe- 
rine, d'après le Veronèse; — La Mort a"Abel y 
d'après Andréa Sacchi ; — La Vierge en médi- 
tation , autrement dit L'Intérieur de la Vierge, 
d'après Domenico Féti; — Jésus et la Sama- 
ritaine; d'après B. Garofalo; — La Pente- 
côte, d'après Gaudenzio Ferrari; — diverses 
pièces d'après N. Bertin et d'autres maîtres, 
entre autres le portrait de Philippe d'Orléans, 
d'après J.-B. Santerre. A. de L. 

Giovanni Gori Gandelll ni, Notizie degli Intagliatori. 

— Basan, Dictionnaire' des Graveurs. 

hortemels ( Marie- Madeleine ) , dame 
Cochin, fille du précédent, femme graveur fran- 
çaise, née à Paris, vers 1690, morte dans la même 
ville, en 1777 (1). Élèvede son père, elle montra 
fort jeune beaucoup de goût pour la gravure. 
Elle épousa Nicolas Cochin, qui cultiva ses dis- 
positions. Sa principale occupation fut de ter- 
miner au burin les sujets que son mari disposait 
à l'eau-forte : elle en conservait avec tant d'in- 



(1) Basan dans sa seconde édition la fait naître, on ne 
tait pourquoi , à Utrecht, en 1687, et mourir dans les gale- 
ries du Louvre en 1787. Il la désigne comme cousine de 
Frédéric Hortemels et comme femme de Charles-Nicolas 
Cocbin qui, selon Watelet et Gandelllni, fut son flls. 



201 



HORTEMELS — HORTENSIUS 



202 



telligencelegoût et le pittoresque, que les ama- 
teurs recherchent particulièrement ceux des ou- 
vrages de Nicolas Cochin où son épouse a rais la 
dernière main. On reconnaît à Marie Hortemels 
une touche spirituelle, hardie et cependant moel- 
leuse. On remarque de cette artiste ; Mercure 
annonçant la Paix aux Muses, d'après la 
fresque de Michel Corneille fils, peinte sur la 
Tonte de la salle de la Reine an château de Ver- 
sailles; — Pénélope travaillant au milieu de 
ses femmes, d'aprè3 le même; — Aspasie dis- 
cutant au milieu de philosophes grecs; — 
d'après le même ; — Saint Philippe baptisant 
V Eunuque de la reine Candace, d'après Ni- 
colas Bertin ; — Le Triomphe de Flore, d'a- 
près le Poussin ; — Jphigénie sauvée, avec cette 
devise : « Tantum religio potuit; » original; — 
La Franche- Comté conduise, d'après Charles 
Le Brun; — Don Quichotte, d'après le dessin 
de Charles-Nicolas Cochin; — Le Chanteur de 
Cantiques, d'après le même; — le Portrait 
du cardinal Henri de Thiard de Bissy, évé- 
que de Meaux, et celui du cardinal de Ro~ 
han de Soubise, évêque de Strasbourg, tons 
deux d'après Bigaud , etc. À. de L. 

HORTENSE EUGÉNIE DE BEAUHARNAIS. 

Voy. Napoléon (Louis). 

borto ou ab Horto (Gardas de). Foy. 
Orta. 

hortensia, dame romaine, fille de l'orateur 
Hortensius, vivait vers 50 avant J.-C; Héritière 
de l'éloquence de son père, elle plaida devant les 
triumvirs la cause des dames romaines qui avaient 
été frappées d'une contribution pour subvenir 
aux frais de la guerre contre Brutus et Cassais. 
Son discours, qui nous a été conservé par Ap- 
pien, déplut aux triumvirs, mais charma le peu- 
ple , et la taxe fut diminuée. Y. 

Valère Maxime, VIII, 3. - Quintilien, I, 1, — Appicn, 
Bel. cto., IV, 92. 

hortensius (Maison des), Bortensiagens, 
maison plébéienne dont les membres historiques 
sont ; 

hortensius (Quintus), tribun du peuple en 
4 19 avant J.-C. Il accusa C. Sempronius, consul 
l'année précédente, d'avoir mal conduit la guerre 
des Volsques ; mais il retira son accusation sur 
les instances de quatre de ses collègues. 

Tite Ltve, IV, 4». - Valère Maxime, VI, 5, s. 

hortensius (Quintus), dictateur vers 286. 
Le peuple, accablé de dettes, s'était soulevé et re- 
tiré sur le Janicule. Hortensius , créé dictateur 
pour remédier au mal, remit en vigueur la loi Ho- 
ratia Valeria (de l'année 446 avant J.-C.) et la loi 
Publilia (de l'année 336), qui déclarait que les 
décisions du peuple obligeaient tous les citoyens 
(ut quodplebs jussisset omnes quirites tene- 
ret). Par une autre loi il établit que les nundinee 
(jours de marché) seraient des jours d'audience 
( diesfasti) et que l'espace de trois marchés (tri- 
nundinum) serait le terme nécessaire entre la 



proposition d'une loi votée par 'centuries ( lex 
centuriata») et sa promulgation. 

Pline, Hist. Nat., XVI, 37. - Tite Live, Eptt., XI. - 
Smltb, DioUonary of Antiquities, au mot Nundinx. 

hortensias (Lucius), préteur en 171 avant 
J.-C. Il succéda à C. Lucretius dans le comman- 
dement de la flotte pendant la guerre contre 
Persée, et imita les déprédations et les violences 
de son prédécesseur. Û réclama de la ville d'Ab- 
dère 100,000 deniers et 50,000 boisseaux de 
blé. Irrité de ce que les Abdéritains s'étaient 
placés sous la protection du consul Mancinus et 
du sénat, il mit leur ville au pillage, fit trancher 
la tête aux principaux citoyens , et vendit les 
autres comme esclaves. Le sénat se contenta de 
déclarer l'acte injuste, et de faire mettre en li- . 
berté les Abdéritains vendus. Hortensius con- 
tinua ses brigandages, et fut de nouveau répri- 
mandé par le sénat pour sa conduite à l'égard 
des Chalcidiens ; mais il ne fut ni rappelé ni 
puni. 

Tite Llve, XLUI, 8, *, 7. 8. 

hortensius ( Lucius ) , père de l'orateur, 
et préteur en Sicile en 97 avant J.-C. Il laissa 
la réputation d'un administrateur juste et hon- 
nête. 11 épousa Sempronia, fille de C. Sempro- 
nius Tuditanus. 

OcéroD, C. ?err. t 16; ad AU., XIII, 8, 80, Si. 

hortensius ( Quintus ), célèbre orateur, 
né en 114 avant J.-C, mort en 50 avant J.-C. 
A l'âge de dix-neuf ans, en 95, il parut au 
forum. Son premier discours mérita les applau- 
dissements des consuls L. Crassus et Q. Scœ- 
vola, qui étaient l'un le plus grand orateur, 
l'autre le plus grand jurisconsulte de ce siècle. Il 
plaida ensuite pour Nicomède, roi de Bithynie, 
qui avait été expulsé par son frère Chrestus, et 
obtint sa réintégration. Ces débuts éclatants l'a- 
vaient déjà placé au premier rang des orateurs 
judiciaires, lorsque les dissensions civiles inter- 
rompirent sa carrière. Il servit pendant la guerre 
Sociale (91,90), d'abord comme simple légion- 
naire, puis comme tribun militaire. En 86, il dé- 
fendit le jeune Cn. Pompée accusé de s'être ap- 
proprié une partie du butin pris à Asculum. Les 
troubles des années suivantes ne laissèrent pas 
de place à l'éloquence ; et, lorsque la dictature de 
Sylla eut rétabli un peu d'ordre, Hortensius se 
trouva à la tête du barreau (rexjudiciorum) i 
Crassus était mort avant le retour de Marins, 
Antonius, Catulus et d'autres orateurs avaient 
péri dans les proscriptions. Hortensius régna sans 
rival jusqu'à l'avènement d'un talent encore plus 
grand que le sien, celui de Cicéron. Il s'attacha 
fortement au parti aristocratique (optimates), 
investi du pouvoir suprême par la législation de 
Sylla. Ses principaux plaidoyers furent consacrés 
à défendre des membres de ce parti, accusés de 
mauvaise administration ou de corruption. Tant 
que la justice resta entre les mains du sénat, 
Hortensius triompha sans peine des accusateurs. 
La partialité et très-souvent la vénalité des juges 
lui répondaient du succès. Cette période de sa 



30B 



HORTENSIUS 



204 



vie dora plus de dit ans, pendant lesquels sa for* 
tune et sa réputation ne firent que croître. 
Questeur en 81, il se distingua par son intégrité; 
édile en 75, il donna des jeux d'une splendeur 
extraordinaire; préteur urbain en 72, il dut ju- 
ger ces mêmes nobles qu'il avait défendus jus- 
que là ; enfin, en 69 il fut élu consul avec Q. Cce- 
cilius Afetellus. Après son consulat, il obtint 
pour province l'Ile de Crète ; mais il 1 abandonna 
à son collègue* 

Dans Tannée qui précéda son consulat, il dé- 
fendit Verres contre Cicéron. Ce procès si re- 
marquable par le talent des avocats, Tétait en- 
core plus par son importance politique. Deux 
grands partis, la haute aristocratie (optimates) 
et la classe moyenne, se disputaient le pouvoir, 
le droit de juger, l'administration des provinces; 
Tissue du procès de Verres devait avoir une in- 
fluence décisive sur ces prétentions rivales. L'ac- 
cusé n'échappa à une condamnation que par 
un exil volontaire, qui fut une victoire pour l'ac- 
cusateur et le commencement d'une longue sé- 
rie d'échecs pour l'aristocratie. Hortensius em- 
ploya inutilement non éloquence à la défense de 
ce parti; il s'opposa à la loi Gabinia, qui inves- 
tissait Pompée ( le général favori de la classe 
moyenne ) d'un pouvoir absolu sur la Méditer- 
ranée, et à la loi Manilia, qui transférait deLu- 
cullus, Tami de Sylla, à Pompée la conduite do 
la guerre contre Mithridate. Dans ces débats po- 
litiques il eut encore Cicéron pour adversaire. 
Mais l'apparition d'un nouveau parti plus violent, 
composé de la plèbe et de quelques patriciens 
ruinés et ambitieux, amena un rapprochement 
entre Hortensius et Cicéron. Celui-ci défendit 
avec Hortensius le vieux sénateur C. Rabirius,^ 
et Hortensius mit dans ses poursuites contre 
Clodius un acharnement qui faillit lui coûter 
la vie. Cette tardive union fut inutile. Pompée, 
revenu de la guerre contre Mithridate, refiisa de 
s'y associer, et s'entendit avec César et Crassus, 
les deux chefs du parti démocratique. Horten- 
sius comprit qu'il était impossible de lutter contre 
eette coalition. Tout en restant fidèle à son parti, 
il renonça à la politique et se renferma dans ses 
devoirs d'avocat. 11 plaida avec succès la cause 
de Flaccus, accusé de prévarications , celle de 
P. Lentulus Spinther, de Sextius , de Valerius 
Messala et enfin d'App. Claudius. Il mourut 
avant le commencement de la guerre civile. 

Depuis plusieurs années déjà,* il n'était plus, 
dit M. Rinn, que Tombre de ce qu'il avait été 
dans sa jeunesse. Cette décadence, au jugement 
de Cicéron, tenait surtout à la nature de son 
éloquence. Depuis que Rome avait profité de 
Tart des Grecs pour perfectionner le talent, d'a- 
bord brut et grossier, mais énergique , de ses 
orateurs, elle avait pris surtout ses modèles chez 
les Athéniens, dont le goût sévère et l'esprit 
caustique faisaient bonne justice de tout ce qui 
ressemblait à Tenflure et à l'afféterie. Horten- 
sius introduisit à Rome l'éloquence asiatique, 



que l'on peut caractériser en deux mots : l'em- 
phase et le trait Lorsqu'il débuta, dans 6a jeu- 
nesse, avec une élocution rapide et vive, pleine 
de chaleur et d'éclat, un tour de phrase har- 
monieux et qui faisait ressortir la pensée, une 
voix sonore et douce, un geste trop savant peut- 
être pour un orateur, mais que les Romains, 
accoutumés à la mimique expressive de leurs 
théâtres, lui pardonnaient aisément, il plut à la 
fois par un mérite réel et par la nouveauté de 
son talent. Il avait une mémoire prodigieuse, 
qui laissait à sa disposition, non-seulement toutes 
les idées importantes pour sa cause, mais les 
paroles même de son adversaire. Il avait intro- 
duit le premier l'usage d'exposer avec une bonne 
fol apparente, au commencement de son discours, 
la division qu'il se proposait de suivre, et de ré- 
sumer avec une exactitude extérieure et perfide 
les arguments de son adversaire. Tout cela sé- 
duisait la foule et même les habiles ; mais quel- 
ques-uns de ses vieux devanciers exhalaient leur 
humeur en railleries et en boutades, quand Us 
voyaient cette abondance facile, souvent dépour- 
vue de dignité, ces traits brillants, ces pensées 
plus éclatantes qu'utiles au développement des 
raisonnements et des faite. Et quand la vieillesse 
vint, cette manière, qui avait quelque chose de 
séduisant dans un jeune homme» parut manquer 
de gravité chez un consulaire. A ces traits que 
nous a laissés Cicéron, il est impossible de ne 
pas reconnaître en grande parGe les déclamateurs 
des siècles suivants, à cela presque ces derniers 
s'exerçaient sur des causes imaginaires, où aucun 
intérêt réel ne les forçait de modérer les écarts 
de leur talent. Si nous avions les discours d'Hor- 
tensius, nous verrions assurément remonter jus- 
qu'au plus beau temps de l'éloquence latine ce 
mal venu de l'Asie, et que Pétrone signale dans 
le langage des déclamateurs. Quintilien trouve 
que ce qui restait d'Hortensius ne répondait pas 
à sa haute réputation. Cet orateur cultivait les 
lettres, mais d'une manière beaucoup moins sé- 
rieuse que Cicéron. Il connaissait peu l'histoire 
et dédaignait la philosophie. Cicéron se flattait 
cependant de Tavoir converti sous ce rapport, 
et lui avait dédié son traité sur l'importance et 
l'intérêt de la philosophie. Il composait des poé- 
sies légères; il était lié avec Catulle, dont les 
œuvres contiennent quelques pièces qui lui sont 
adressées. » 

Hortensius fut un épicurien aimable. H devait 
à son talent une immense fortune dont il jouis- 
sait avec magnificence. Il eut peu d'ambition, et 
au milieu de la corruption presque générale il 
garda une honnêteté relative. Il fut fidèle à son 
parti et ne trahit pas ses amis. Cicéron, il est 
vrai, pendant son exil et dans ses lettres à At- 
tiras, accuse Hortensius déjouer double jeu, de 
proposer tout haut son rappel, et d'intriguer 
pour qu'on le laisse hors de l'Italie. IMen ne jus- 
tifie ces imputations. Hortensius n'était pas un 
grandcaractère, maie il avait d'aimablesqualites; 



205 aofttÊfWltJS 

et 11 Hé Semblé pas iraé la mpdfté fût att 
nombre de ses! âêfttitt. Les auteurs anciens pur- 
lent souvent de son Wxët fia înâlsod'dtt mont 
Palatin devint plift tard !ft «effleure d'Autiste. 
Il posséTJait trois vill&S; l*Hfiè à B&ffl, l'autre à 
TUsculurn ; la troisième; et lé tiltis htagh1tiq.u€t è 
Lauretuni. Il ferait le gtfflt bu plutôt ta folie des 
arbre*. 11 arrosait Iftl-ftiehie ses plâtades avec 
du fin: et l'on rapporte (ftl'àjant à plaider ave* 
Cieêrdii, il lé pria de le laisser parler fe È>re- 
irlfëh, pai+Jë qu'il avait tfcsolh d'aller à sa hialson 
o^îuscuKnll ttbiilf Arroser uMptotatie. 8a pas- 
sion* t^bilr lès poissons de fcéè vivi«rs fl'ëtatt pal 
mollis extraordinaire. Tftrrdn reporté qa'Htir*- 
terffeltife en agissait ateè ses poissons cfcmtté les 
aVMfës avec lëtir àfgent : fl fl'tfsâlt pas y tbb- 
cher. Quand ils étaient malades; il les soifcttaU 
avec" autant de sollteltbdë que slls eussent étft 
des homme*: Il pièïira la mort d'une trititeûè. 

' HdHétiHii* eut m filé de sa première tëasm 
LutatW, m de Gàtaïtrii AfrrSs la ttoYt de Ltt- 
tâHàj il époutô MâKHè, fmm Ae caton. By eut 
à eè sujet entre" les déttx illustre* Romain* ttrt 
ctMétisë tràftsacUën dent on ttwlve dans Ph> 
tar^ëfâmrisatliHo1t(!). T. 

Cicérbh { ttéêrôri Ht la pfînfcfpkiè' Itfùfce poW ta vtà 
tfltertëiisittl ). ^dfr. dttf VOrumtutieon TvlHemmm 
d'Orelil l'tndlcattçp des passages relatifs à Hortenslua. 

- QBintiilen, 1. IV, c. 5; X, 6; XI. I, *: XII, 1. io*. - 
Veflèluâ F'àtercttitts, ti, lé, 86, W. - ValereiMiiiHe,' 
VIII, 10 ; IX, 4. - Aubi-Gelle, I, S ; XIX, 9. — Pline, HisU 
Ifati, IX, H ; X, 13 ; XXXV, 40, — Vairon, De Be JUu- 
tica, lll, 17. — l'iutarqiic, CM. min., *B. — Mèmàtrès de 
i'Jbhd. déi Inscripilbni et Belle* ■ Lettre*, l VI, p. tod. 

- hûikt , Spétimin Histbried-JHHdêciim de Q. Har- 
teitsio orat. Cxceroni œmntof Levde , 1810, to-8» — Lia- 
sen, Dissertatio de hortensia orcùore; Abo, 18B, in-W. 

- Rlnh, dans rtncgcl. des tiètii du Moitié. 

ttëfttEftsIus (QuiHtU&'Rotèdliis), fila du 
précédent, mort eh 42 avant J.-C. H mené d'a- 
bord une vie fort déréglée. Sofa éducation dèmblé 
àtdir été peu stirvêlllée par son (>erè, et Cfcéron; 
tjui en 50 le rencontrft Vivant avec des &éd\à- 
ièurs et dans H plus b*sSe société, attribue sa 
inauvaise conduite à l'influence pernlcieiis> d'un 
affranchi nommé Salvius. Son père M m Iè 



il) HdueMta4 avait beaucoup d'estime pour Gaton et 
désirait devenir son parent: il lof demanda la main de sa 
fine Pdrd4, déjà mariée a àltrakis, dùtii elle Aiiii èa àëtit 
éiltèdts. a A cotise Uer là fKftiir*, dlt-tt, il était nul 
honnête que profitable à la réBQbilqne qu'une femme 
belle, à la fleur de l'ftge. ne restât pas Inutile, en lais- 
&Ûi ffftsiër Hgë d'imi; dès enfants, et qu'elle tié fût 
fH Héii pldft à chargé I «OU tttfrl; et né l'appartnit pas 
cil ,1b! ddnmiat plus d'enfants qn'H ne voulait en avoir : 
qu'en communiquant ainsi les femmes arix citoyens bon- 
riêrés*, la vertu se' multiplierait, et deviendrait cdtnmunè 
dafls lèl faonHes. » « 91 Bibulus, djontait-il, vent absora> 
nient conserver sa fenime, )e la lui rendrai dés qu'elle 
sera devenue inére, et que par cette communauté d'en- 
fabts je me «erat pins étroitement ont à Caton et A Bibn- 
las. » Otttfa ne p^rnt pas tr<rp surpris du raisonnement;. 
mais 11 objecta rattachement de fttbuli» prônt Poreia. 
« Alors Hortenslus, changeant de langage, dit Plutarque, 
ne cralgnft p'a« de âèrnàhder ouvertement à talon sa 
femme Mare»*, qui étitt efaeôre en âge d'avoir des en- 
fants, et en avait dopné suffisamment à Caton. Caton, 
voyant la passion d'Hortenslus et son désir extrême d'a- 
voir Marcîa porfr femme, ne refusa pas dé là Inl céder. » 



-t HORVATH! 306 

point de le déshériter; quelques auteurs préten- 
dent qu'il accomplit ce projet et laissa ses 
biens à Marcia. Cependant Hortensius recueillit 
une partie de l'héritage paternel. La guerre civile 
lui offrit uhe occasion de relever sa fortune. Il 
rejoignit César dans la Gaule Cisalpine» et fut 
chargé d'occuper Ariminium. Ii eut ensuite le 
commaudenient d'une escadre dans l'Adriatique, 
et, pendant une croisière, il débarqua à Cumes et 
rendit visite à Cicéron, à qui il offrit ses bons 
services. H était gouverneur de la Macédoine en 
44, et Brutes devait lui succéder. Après le 
meurtre de César, Marc Atitorae donna cette 
province à son frère Calas. Mais Brutus en 
avait déjà pris possession avec l'assistance d'Hor- 
tensius. Celui-ci porté par Antoine sar la liste 
dé proscription, se vengea eu ordonnant la mort 
de Calas Àntbnitis, qui était tombé entre ses 
mains. Fait prisonnier à son tour ft la bataille 
de Philippe*; il lut immolé sur le tombeau de 
GalUS: Y. 

ClCëron, Ad Ml; Vf, 8; VU, 8| X, ii, 16-18; Phi- 
lippe X, 6< 11. » Platarqoe, Cas., U. — Suétone, 
Jut. Ca?«.,Sl. 

hortensius (M. Èoriaius), fils du pré- 
cédent, vivait an commencement de l'ère chré- 
tienne, fl était si pauvre, que f'èmperetir Àugdste 
fut obligé de venir à son secours. Sous Tioèrè', on 
le voit avec quatre enfants, plus pauvre 4be ja- 
mais, et implorant encore la bienfaisance im- 
périale. t t. 

Tacite, Jhn., if; 87,88. - Suétone, Au$. il, — blbn 
Casaius 4 XVI t. 

ftûftTErtilttt ( Lambert ), philologue néer- 
landais 1 , hé àMôntfOTt, eti 1501, mort vers 1575. 
9à vie est peu cohnue : or> ignore josqyà soh 
ôdm ; et ii n'est désigné que par son surnom de 
fiortènshis (fils de jardinier). Préfet du col- 
lège de N&tfden lots de la prise de cette ville 
par lès Espagnols etl 1572, il courut tes plus 
gratid* dangers et vit massacrer son fils. On a 
dé lui : Secessionumcivilhifn Ultrajectinarum 
et Béllorum àb atinô 1 524 usque ad transla- 
tibriëm epiicopatus ad Èurgundos Libri Vtt; 
Baie, 1546, rtf-fel.; — tk Titmutiîbus Anabap- 
tistarttrti ; Baie, 1548, m-4°; — De Bello Ger- 
manicô; Bâlè, i3ê0, in-4°j — BnarraHones 
in firgilH jÈHeida ; BA\e, 1567, 1577, iff-fbl.; 
— Ëxplictitionèi in lucttrîi Pharsaliam ;Bffle, 
i 578; iif-fbl. Z. 

FftppénsV èMlCttttêta Belçtcu. 

J HonvATH ( Michel ), historien' hongrois, né 
fe 30 octohte 1809, à Stèntes. Il fut destiné à 
la* carrière ecclésiastique^ obtint en 1844 à Vienne 
Une chaire de tangue et littérature hongroises, et 
hit nommé en mars 1848 évèque de Czanéd. 
Membre de la chambre des seigneurs de la Hon- 
grie, il vota en faveur de l'indépendance" de sa 
patrie, et devint ministre de Pinstràetion pu- 
blique et des cultes. Après Fhrtervention de la 
Hussie en Autriche, 11 s'exila , et tut condamné 
par contumace à la peine de mort. On a de lui : 
Az ipar es Kereshedés tôrténetê Magyaror- 



207 



HORVATH 



szagban ai utolsô hôrom.szà&ad alatt (His- 
toire du Commerce et de l'Industrie de la Hongrie 
durant les trois derniers siècles); Ofen, 1840; 
— ii 1 MagyaroW tôrténete ( Histoire des Hon- 
grois ) ; Papa, 1842-1846, 4 vol; texte allemand, 
Pesth, 1850-1852. R. L. 

Conv.'Ltx. — Pierer, Cniversal-Lex. Supplément 

horwitz, famille juive qui, pendant plu- 
sieurs générations , a compté dans son sein des 
écriyain8 estimés, dont les plus connus sont : 

Horwitz ( Sabbatai Scheftel), Ha-Levi ben- 
Akiba, chef de la synagogue à Prague au com- 
mencement du seizième siècle. On a de lui les 
ouvrages suivants, écrits en hébreu : Pelakh 
harimonim (Moitié des Grenades) ; Kerez, 1793, 
in-4°. C'est une explication du Bassis Rimonim 
(Jus des Grenades) de Sal. Galicho; — Niche- 
math Ch'abbtaï ffalevi (Souffle ou Essence des 
Sabbats de Levi); Prague, 1616, in-4° : traité 
sur Famé , sous la forme de dialogue entre un 
maître et son élève ; — Chéphah Toi ( Abondance 
de Rosée); Hanau, 1612, in-fol., deux autres 
éditions. Écrit sur la Cabbale , donnant une clef 
du Jetzirahy du Zohar et des principaux livres 
cabbalistiques. 

: Horwitz (Abraham), fils du précédent et 
connu aussi sous le nom de Scheftélés, né a 
Prague dans la première moitié du seizième 
siècle. On a de lui les ouvrages suivants, écrits en 
hébreu : Brith Abraham (Alliance d'Abra- 
ham); Cracovie, 1602, in-4°; plusieurs autres 
éditions : traités sur la pénitence. — Khesed La" 
bratiam (Grâce faite à Abraham); Cracovie, 
1577, in-fol. ; réimprimé avec le précédent et 
dans plusieurs éditions du Talmud. C'est un 
commentaire sur l'Introduction de Maîmonide 
au livre talmudique Aboth; —Jesch Nokhalin 
( ce sont ceux qui se confient à l'Éternel) ; Pra- 
gue, 1615, nv4°, avec des remarques dues à 
son fils Isaie Horwitz et à son petit- fils Scheftel 
Horwitz. C'est une instruction morale , adressée 
à ses enfants ; — Hemek Bracah ( Vallée de 
Bénédiction) ; Cracovie, 1597, in-4°, avec des 
notes de son fils Isaie Horwitz; réimprimé plu- 
sieurs fois avec des ouvrages semblables. Ce 
sont des remarques sur les bénédictions. 

Horwitz (Isaïe), fils du précédent, né à 
Prague, vers 1550, et mort à Tibériade, en 1629. 
11 est le plus célèbre de toute sa famille. Il fut, 
au commencement du dix-septième siècle, rabbin, 
d'abord à Francfort, pois à Posen, ensuite à 
Cracovie et enfin à Prague. En 1622, il partit 
pour Jérusalem ; divers désagréments le for- 
cèrent de quitter cette ville et de se retirer à 
Tibériade. On a de lui les ouvrages suivants, 
écrits en hébreu : Schné Loukhoth habbrith 
(Les deux Tables de l'Alliance); Amsterdam, 
1649, in-fol.; plusieurs édit. Cet ouvrage jouit 
d'une grande réputation parmi les juifs. Il se di- 
vise en deux parties : la première traite de 
l'existence de Dieu, de la Loi, des Prérogatives 
du peuple d'Israël , des Attributs de Dieu, du 



— HOSAGK. 208 

Sanctuaire, du Jugement/ du Libre Arbitre, du 
Messie, du Culte, des Cérémonies et des Fêtes; la 
deuxième Jpartie se compose de dix traités sur 
six cent treize préceptes , la Loi Orale, etc. Il a 
été fait de cet ouvrage trois abrégés, l'un par 
Jech. Mich. Eppstein, rabbin à Prossnitz ; Ams- 
terdam, 1663, in-4°; -plusieurs autres éditions; 
le second par Sam. Zoref Ha-Levi ; Francfort, 
1681, in-4° ; et le troisième par Sam. Dav. Œtt- 
ling ben-Jechia ; Venise, 1705, in-8°; — Bigdei 
Jeschah (Vêtements de Salut ). Cet écrit, qui est 
on commentaire sur le livre de Bfardoché, n'a 
été imprimé qu'en partie d'abord avec le Seder 
Mohed (Ordre de l'Assemblée)» ensuite à part; 
Amsterdam, 1757, in-4° ; Zolkiew, 1826, in-fol., 
et plus souvent encore, soit avec le livre de Mar- 
doché, soit dans des éditions du Talmud; — 
Haggahoth Csépher hemek Bracah (Réflexions 
sur le livre la Vallée de Bénédiction), imprimé 
avec la Vallée de Bénédiction, ouvrage de son 
père, Cracovie, 1597, in-4°, ainsi que dans les 
deux éditions de l'ouvrage précédent; — Scha- 
har Baschamajim (Porte desCieux); Ams- 
terdam, 1717, in-4°, avec une préface et des 
gloses d'un de ses arrière-petits-fils, Abraham 
Horwitz; commentaire cabbalistique sur les 
psaumes et sur les prières. Ce même volume 
renferme le Sépher Brith Abraham ( Livre de 
l'Alliance .d'Abraham ), de son père , Abraham 
Horwitz. 

Horwitz (Sabbatai Scheftel ), fils du précé- 
dent, mort à Vienne en 1658 ou 1650. Il fut rab- 
bin d'abord à Posen, ensuite à Francfort, et enfin 
à Vienne. On a de lui les trois ouvrages suivants , 
écrits en hébreu : Sepher vavei hahamoudim 
(Livre des Clous des Colonnes) : traité de morale 
ascétique, en six sections, et servant d'introduc- 
tion au livre de son père : Les deux Tables de 
V Alliance, avec lequel il fut imprimé, Ams- 
terdam, 1649, in-fol. ; plusieurs autres éditions; 
— Tsavahah (Testament), imprimé avec le 
petit écrit de son grand-père : Jesch Nokhalin; 
Amsterdam, 1717, in -4° : instruction morale 
adressée à ses enfants, auxquels il le laisse 
comme son testament ; — Khidouschei massé- 
pher Bracoth ( Explication du Livre des Bé- 
nédictions), imprimée avec la Vallée de Béné- 
diction de son grand-père; Amsterdam, 1757, 
in-4°,et Zolkiew, 1826, in-fol. 

Horwitz (Isaïe ) ben Jacob, neveu du précé- 
dent et petit-fils d'Isaie Horwitz, né en Pologne, 
où il mourut, en 1695. On a de lui : Beth halévi 
(Maison de Lé vi ); Venise , 1663, in-4"; com- 
mentaires sur quelques passages du Talmud, 
relatifs à la jurisprudence juive. Mich. Nicolas. 

J. Boïtorf, Mabbinica Bibliotheca. — WolU BMioth. 
Hebraica. — Rossl , Dizion. degli jéutori. Ebrei. — J. 
Font, BMioth. Judaica. 

* hosagk (David), médecin américain, né 
le 31 août 1769, à New- York, et mort dans la 
même ville, le 23 décembre 1835. Après avoir 
reçu en 1791, à Philadelphie, le diplôme de doc- 



209 HOSACK 

leur, il visita les écoles spéciales d'Edimbourg 
et de Londres, prit part aux travaux de la So- 
ciété Royale de cette ville, et, de retour à New- 
York, occupa la chaire de botanique et de ma- 
tière médicale au collège de la Colombie. De 
1820 à 1828 il a présidé la Société Historique de 
New-York ; vers la même époque il collabora 
activement à la publication du Médical and Phi- 
îosophical Register. On a de lui : Médical 
Essays; 1824-1830, 3 vol. ; — System of Prac- 
tical Nosology; 1819; 2 e édit., 1821 ; — The 
Practice ofPhysic; 1838 : ouvrage posthume 
édité par un de ses élèves ; etc. P. L— y. 

Memoir of D. HosacJc, by J.-W. Francis, in JPtf- 
liams's American Médical Biographe . 

* hosidius (Cn. Geta), propréteur deNu- 
midie sous l'empereur Claudius, en 42 après 
J.-C. II vainquit et poursuivit dans le désert 
un chef maure nommé Sabalus. Ses troupes 
eurent beaucoup à souffrir de la soif; et il son* 
geait déjà à la retraite, lorsqu'un Numide lui ré- 
véla certains artifices magiques pour obtenir de 
la pluie. Hosidius les employa avec succès , et 
son armée, rafraîchie, 'allait continuer la pour- 
suite, lorsque Sabalns, effrayé, se rendit. Hosidius 
fut ensuite lieutenant de À. Plautius en Bretagne, 
et remporta une victoire si éclatante, que, malgré 
sa position secondaire, il obtint les ornements 
du triomphe. H fut consul suppléant en 49. Y. 

. Dion Cassius, LX, 9, SO. 

HOSIDIUS GETA. Voy. G ET A. 

HOSIUS ("Oatoc, le Saint) ou OSICS, écri- 
vain ecclésiastique espagnol dont la vie embrasse 
tout un siècle (257-357). H est douteux qu'il soit 
né en Espagne et surtout à Cordoue; mais il est 
sûr qu'il fut pendant soixante ans environ 
évéque de cette ville. Il assista en cette qualité 
au concile dlliberi ou Eliberi, près de Grenade, 
dont la date est diversement fixée à 300 et à 305. 
Il souffrit pour sa foi (confessus sum, dit-il dans 
sa lettre à Constance) pendant la persécution 
de Dioctétien et de Maximien. Sa fermeté chré- 
tienne lui valut la faveur de Constantin , qui 
l'envoya à Alexandrie, en 324, avec mission d'a- 
paiser la querelle de l'évêque Alexandre et du 
prêtre Arius. Il devait en même temps calmer, 
s'il était possible les disputes élevées au sujet 
de l'observation de la fête de Pâques. Il échoua 
dans cette œuvre de conciliation, et n'en conserva 
pas moins toute la confiance de l'empereur. 
L'année suivante il parut au concile de Nicée. 
Baronius prétend qu'il le présida comme légat 
du pape, assertion peu fondée, au jugement de 
Tillemont , et qui ne s'autorise du témoignage 
d'aucun ancien historien ecclésiastique. Hosius 
souscrivit le premier les actes du concile, pré- 
sida habituellement cette assemblée , et pro- 
nonça (èÇéfieTo) ou rédigea (d'après Tillemont) 
le symbole ou profession de foi de Nicée. En 347, 
il tint le concile de Sardique. En 355, pressé par 
l'empereur Constance de participer à la coar 
damnation d'Athanase, il refusa dans une lettre 



— HOSIUS 



310 



touchante, où il rappelait ses souffrances pour la 
foi.. Une seconde tentative de Constance, qui ap- 
pela Hosius près de lui à Milan, ne fut pas plus 
heureuse; une troisième réussit mieux. Le vieil- 
lard, presque centenaire, ne put résister aux me- 
nacés et peut-être aux violences de l'empereur; il 
consentit à communier avec deux prélats ariens, 
Yalens et Ursacius, mais sans souscrire à la 
condamnation d'Athanase. Il mourut peu après. 
Saint Athanase et saint Augustin louent hau- 
tement sa vertu et excusent sa faiblesse. Z. 

Saint Athanase, Histor. Arian. ad Monach., c 41, 
44. — Saint Augustin, Cent. Epistolam Permeniani, I, 7. 
- Ensèbe, De Fit. Constantini, il, 68; III, 7. - Socrato, 
Hist. Eccl. t I, 7, 8; II, SO, t9, 81. -r- Soiomène, I, 10, 16, 
17 ; III, il. - Tillemont, Mémoires pour servir à VHisU 
Ecclés., vol. VU, p. 800. - CetlUer, Auteurs sacrés, 
vol; IV, p. 811. <- Nicolas Antonio, Bibliot. F et. Hisp., 
L II, c. l. - Baronius. Ann. Bceles. — GaJIand, Bibl. 
Patrum, toI. v ; Proleg., c. VIII. 

hosius (Stanislas), prélat polonais, né à 
Cracovie, le 5 mai 1504, mort à Caprarola, près 
de Rome, le 5 août 1579. H commença ses études 
à l'académie de sa ville natale et les termina à 
Padoue et à Bologne, où il se fit recevoir doc- 
teur en droit. Il retourna ensuite en Pologne, où 
le roi Sigismond I er l'avait nommé son secré- 
taire. Ce prince l'avança dans la chancellerie, 
et l'employa dans les affaires les plus im- 
portantes du royaume. Hosius s'étant engagé 
dans les ordres sacrés, fut pourvu d'un eano- 
nicat à Cracovie, puis de l'évêché de Kulm par 
le roi Sigismond-Auguste. Il eut ensuite l'é- 
vêché d'Ermeland. il attaqua avec énergie la ré- 
forme protestante, qui commençait à se répandre 
en Pologne. Lors du synode tenu à Piotrkrowo, 
en 1551. il publia une confession de la foi ca- 
tholique, qui fut traduite dans presque toutes les 
langues de l'Europe. Appelé à Rome par le pape, 
et envoyé ensuite en mission auprès de l'empe- 
reur Ferdinand I er , il réussit à obtenir la pro- 
longation du concile de Trente, dans lequel il 
figura parmi les plus savants prélats et fit preuve 
du zèle le plus ardent poifr le maintien de la 
hiérarchie. On assure que l'empereur, en lui ac- 
cordant ce qu'il demandait relativement à la con- 
tinuation du concile, lui dit qu'il ne pouvait pas 
résister à un homme dont la bouche était un 
temple et la langue un oracle du Saint-Esprit. 
Le pape le chargea d'assister au concile en qua- 
lité de légat, et Hosius le présida. En 1561 il 
obtint le chapeau de cardinal. De retour dans son 
diocèse, il se montra infatigable non moins 
qu'habile dans ses efforts pour y étouffer le pro- 
testantisme , notamment dans la Prusse occi- 
dentale. Les protestants l'appelaient ordinaire- 
ment le Dieu des Polonais, et donnaient à la foi 
orthodoxe le nom de/ot hosienne. En 1564, 
il fonda à Brunsberg le premier collège que les 
jésuites aient eu en Pologne et que plus tard le 
gouvernement transforma en gymnase acadé- 
mique. Hosius rendit de grands services au roi 
de Pologne Sigismond-Auguste dans ses négo- 
ciations avec la Prusse. Le pape Grégoire XIII 



2ii 



H0S1US *- 



le rappela à Rome, et le lit grand-pénitencier de 
l'Église. Il mourut aux environade cette Tille, dont 
le séjour paraissait contraire à sa santé. Les sou- 
verains pontifes et les éori vains de son temps l'ont 
appelé colonne dé V Église, V Augustin de son 
siècle, etc. Parmi ses écrits on cite i Genfessio 
CathOliCû Pidei Christian*, sive explicatio 
con/essionis apatribusfactx in synodoprovin- 
ciali habita Petneovix % anrio 1651 ) Mayence, 
1557 , in-fol. Ses œuvres ont été publiées sons 
le titre de Opéra ùmnia; Cologne, 1684, 2 vol. 
in-fol. On y trouve : De Communione sub utra- 
que Specie ; — De Sacerdotvm Conjugio ;—De 
Missa vulgari lingua celebranda, etc., qui 
avaient été imprimés à Paris en 1561. J. V. 

ftcsclus, Fita Hotii. — Oldobl, Athènes RbM. — Sta- 
râvolsciiis f Deseriptot. Polon. — GétièbtatA, Chron. — 
Sponde, Annal. — Fra Paolo, Istoria dèl Concilio dt 
Trento. - Scarpi, Histor. Concil. Trident. — frehtf, 
Tketttr. — Schrttokb, Kirclienfetch. teit. der B^fotma- 
tion. - Palavicini , UiH. Concilii Trident., liv.II, ch. *. 
• — De Tbou, Hist. sui temp. - fooréri, Grand Dict. Histor. 

— Ersch et Gr&bet, Àltg. EnqfOopMie. *- Bayle, DM. 
Ont. « tiiàor. 

ifosl»l!fifi* (Jtdn)i proprement Wirth, 
philologue 3uissé, né en 1515, à Steifl (canton 
de Zurich), mort à Bâlé, le 7 juin 1575. Après 
avoir terminé ses études à l'Université de Ta- 
bingue, il vint en 1543 à Baie, où il enseigna la 
rhétorique et la logique. On a de lui : Quxstio- 
nttm Diatecticarum Libri VI; 1543 et 1557; 

— Urbatii Bellufiensis Inêtitutionum Grdm- 
maticaruth Lib. II; 1546; — De SylloQismi 
catégoriel Modis; 1560; — De MOdis Figura- 
rutn utilibus in logica; 1560; — AHstotelis 
Organi Correctio; 1573, 2 vol.; — Controverse 
Dialeclicx ; 1576. R. L. 

fiûdatu , Ttittltatal., p. ko. - HeJweclto, Antiquit. 
Gostar. — Ryde , Bibl. Bodlei. 

flOffiPiftiEif ( Rodolphe ), théologien protes- 
tant suisse, né le 7 novembre 1547, à Altdorf, 
mort à Zurich, le 11 mars 1626. Plusieurs de 
ses parehts avaient été mis à mort pour avoir 
propagé la religion réformée ; Rodolphe Hospi- 
nien fat élevé par Jean Wolphius, son oncle ma- 
ternel, et par Rodolphe Gdalterus, son parrain. Il 
passa quelques années au» universités de Mar- 
bourg et de fieidelberg, et de retour en sa patrie, 
obtint successivement différents emplois ec- 
clésiastiques. A l'âge de soixante-seize ans il 
tomba en enfance, et il ne sortit de ce triste état 
que par la mort. Dupiri dit de* kû dans sa Bi- 
bliothèque des Auteurs séparés de la commu- 
nion romaine* du seizième et du dix-sep- 
tième siècle; Paris, 1718 : « Personne n'a 
mieux que loi démêlé ni détaillé l'histoire des 
différends qui ont été entre les sectes séparées 
de l'Église romaine; et en cela, sans y penser, 
, il a rendu service a l'Église catholique, les varia- 
tions et l'opposition de la doctrine de ces sectes 
: faisant voir combien elles ont en tort de se sé- 
parer de l'Église romaine, puisqu'elles ne peu- 
vent pas s'accorder entre elles. Hospinien était 
! outré sacramentaire et grand ennemi des lu- 



HOSP1NIEN 212 

i thériens et des uMquitaires, avec lesquels il 
croyait que Ton ne devait point avoir 4e société 
ni de communion. Le style de cet auteur est 
simple , très -intelligible et composé de, termes 
ordinaires assez latins. » 

On a de Hospinien i î)e Templis, hoc est de 
origine^ progrès su, usu et abusu templorum, 
ac omnino rerum omnium ad templa pertinen- 
ft«m/ Zurich, 1567, in-fol., l rë édit< : sic emen- 
data, aucta, looupletaia^ eum integris ca- 
pitibus tum responsionibus ad Roberii Bellay- 
mini, Cses. BaronH, cardinaliunUeisociorum 
eorum, sophismata et argumenta* quibus ido- 
latriam Romanam defendere conantur, ut 
pro nova mérita haberi possitf Zurich, 1602, 
in-folio.; — De Monachis, hoc est de origine 
et progressu monachatus et ordinum mo- 
nasticorum equitumque militarium omnium, 
Libri sex; Zurich , 1588, in-fol., 2 e édit., aug- 
mentée, ibid., 1609, in-fol» ; — De Festis chris- 
tianorum, hoc est de origine, progressu, 
cesrimoniis et riUbusfestorum dierum chris- 
tianorum Liber unusf in quo ostenditur ex 
probatis auctoribus, veramprimitivam Eccle- 
siam paueissima habuisse /esta, progressu 
autem temporis prodigiose a superstitionis 
hominibus numerum eorum accumula lum 
et multipliées errores in observatione Mo- 
rum introductos esse, adeoque a ver a anti- 
quitatis veneranda simplicitate ac vestigiis 
Ecclesiam hac etiam in parte longissime ré- 
cépissé; Zurich, 1593* in-fol.; 2 e édit., aug- 
mentée, ibid., 1612, in-Jbl. Les additions de la 
seconde«édition répondent aux elyections du car- 
dinal Bellarrain et du jésuite Jacques Gretser; 
— De Festis Judœorum et Ethnicorum , hoc 
est de origine, progressu, cserimoniis et ri- 
tibus Jestorum dierum Judxorum, Grœco- 
rum, Romanorum, Turcarum, Indéanorum, 
IÀbri très; Zurich, 1592, in-fol.; 2 e édit. aug- 
mentée, ibid., 1611, in-fol.) —Bistoria Sacra- 
mentaria, hoc est libri quinque de Cœnx 
Dominiez prima ihstitutione ejusque veto 
usu et abusu in primitiva Ecclesia ; tum de 
origine) progressu, cserimoniis et ritibus 
missœ, transubstantiationis et aliorum p&ne 
infinitorum errorum quibus Cœnx prima 
instUutio horribiliter in papatu poilu la et 
pro/anata est; Zurich, 1598, in-fol.; — De 
Origine et Progressu Controversiœ Sacramen- 
tarirn de Cœna Domini inter Luther anos, 
Ubiquistas et Orthodoxos quos Zuingliano* 
seu Calvinistas vocant; Zurich, 1602, in-fol. 
Les luthériens, qu'Hospmien attaquait très-vi- 
vement en eet ouvrage, y répondirent dans un 
livre allemand que l'on attribue à Léonard 
Hutter. Hospinien travailla à une réplique; mate 
son ouvrage ne fut pas terminé; — Concordia 
Discors ; de origine et progressu formula 
Concordi» Bergensis liber unus; in quo ejus 
errores et/alsa dogmata, Sacrse Seripturx, 
orthodoxis symboles, toti atUiquUaH puriori. 



213 

et ipsi etiam Augustanm Confession* répu- 
gnant ia t etc.; Zurich, 1609, in-fol. Cet ouvrage 
fut une nouvelle cause de controverse religieuse. 
L'électeur palatin Frédéric IV, qui cherchait 
alors à concilier les -luthériens et les calvinistes, 
blâma beaucoup Hospinien de l'avoir fait pa- 
raître. Hutter y répondit dans l'écrit : Con* 
cordia eoncors ; seu de origine et progressu 
formula concordia Eotlesiarum confessionie 
Angustanse; Wittemberg, 1614, in-fol. Hospi* 
nien voulut répondre à ce livre, qui était extrê- 
mement emporté* Il y renonça cependant pour 
ménager les princes luthériens et pour ne pas 
fournir de nouvelles matières aux railleries des 
catholiques qui te divertissaient de ces dis- 
putes; — Historia Jesuitica; de origine , ra- 
gulïs , eonstitutionibus, privilegiis, incre* 
mentis, progressu, et propagatione ordinis 
Jesuitarum, etc.; Zurich, 1619, in-fol.? — An 
Anima sit in toto corpore sùnul? De /m- 
mortalitate ejus; Zurich, 1586, in-4°$ — De 
Origine et Progressu RituumetCxrimoniarum 
ecclesiasticarum; Zurich, 1585. Une édition 
complète des Œuvres d'Hospinien a paru à 
Genève, en 7 vol. in-fol., 1669 à 1661. R. L. 

Job. Henr. Heidegger, Bospinianm rééêvivuj, se* 
historia vite et obitus Rodolpki Hotpimani; dans l'é- 
dition des Opéra omnia tiosplniani. — Bayltf, Dict. — 
Crenius, Jnimadvers. PhUotog., P, IV, p. tw-lM. - 
J. Fabrtoliu, Historia Bibl., P. I, p. U9, MO * P. Ii, p. HO, 
511 ; P. UI, p. 87-88. - Sax, Onomast. Liter. 

hospital. Voy. L'Hospital. 

hosschius (Sidronius), nom latinisé de 
Sidron Hossch, poète latin moderne, né à Merck- 
hein , près de Dreinunde en Flandre en 1596, 
mort à Tongres en 1653. Fils d'un berger, il 
garda lui-même les troupeaux dans son enfance. 
Il reçut cependant quelque éducation et entra 
chez les jésaites à l'âge de vingt ans. D'abord pro- 
fesseur d'humanités , puis directeur des novices , 
il cultiva la poésie latine comme un délassement 
Quatre élégies de lui publiées en 1635 attirèrent 
l'attention du gouverneur des Pays-Bas, Léo- 
pold-Guillaume, qui le nomma précepteur de ses 
pages, et ensuite de ses enfants. Hosschius 
quitta ces fonctions au bout de deux ans, et se 
retira chez les jésuites de Tongres, où il mourut. 
Ses poésies latines furent publiées par son col- 
lègue Jacques Wallins sous ce titre : Elegiarum 
Libri VI, de Cursu Vite Humanx, de Christ o 
Patiente, de Lacrymis 5. Pétri, deque aliis 
arguments; Anvers, 1656, in- 12 ; elles ont été 
souvent réimprimées, entre autres dans la col- 
lection Barbou; Paris, 1723, 2 vol. in- 12. Les 
Élégies sur la Passion de Jésus-Christ ont été 
traduites en vers français par Lancelot Des- 
landes; Paris, 1756, in-8°. « C'est par nécessité, 
dit Baillet, plutôt que par bienséance, que j'ai 
cru devoir marquer le temps de la naissance et 
de la mort, aussi bien que la qualité et le pays 
de Sidronius Hosschius, de peur qu'on ne s'y 
trompât en le croyant né aux siècles les plus 
heureux de Borne florissante, sous prétexte qu'il 



HOSPINJEU — HOSSÉIN 



314 

égale les premiers d'entre tes anciens poètes la- 
tins qu'elle a prodoits, et que ses écrits semblent 
nous porter a le confondre avec eux. » Cet éloge 
est fort exagéré. Les poésies de Hosschius sont 
dé bonnes compositions de collège, des amplifi- 
cations purement et élégamment versifiées, mais 
elles n'ont rien qui rappelle, même de loin, les 
chefs-d'œuvre du siècle d'Auguste. On lui a élevé 
eh 1844, au lieu de sa naissance, une fontaine 
monumentale surmontée de son buste. Z. 

Foppens, Êibliotheca Belgita. — Paquot, Mémoires 
pour servir à l'ffUUHre bitt. de* Pays-Bas, t II. — Bail- 
let* Jugements Ses Bâtants. — Van Hulst, Revue du Payé 
de Liège, an. 184*. 

HOBséiK, second fils d'Ali, et troisième imam 
des «chiites ( chef spirituel des dissidents ), né en 
l'an 4 de l'hégire (625 de J.-C. ), tué à Kerbelah 
en Irak* te 10 mobarrem de l'an 61 ( 10 octobre 
680). Plus belliqueux que son frère Hassan, il 
l'engagea à défendre courageusement son trône. 
Lui ayant «accédé» comme imam» en*49 ( 669 ) , 
il prétendit que' te khalifat ( pouvoir temporel 
«t spirituel) devait rentrer dans la famille d'Ali 
après la mort de Moawiab. 11 fut néanmoins 
forcé de reconnaître pour héritier présomptif de 
Moavriah, Yézid, fils de ce dernier* Lors de IV 
Ténement de Yézid, en 60 (679 ), il quitta Mé- 
dine, où il résidait habituellement, et se rendit à 
La Mecque pour faire valoir ses prétentions. Les 
habitants de la grande ville de Koufahj qui étaient 
toujours disposés à la révolte , lui promirent je 
te proclamer khalife s'il voulait se rendre au 
milieu d'eux. Hosséin , chargea son cousin Mos- 
lim Ibn~Akil d'aller traiter avec les koufites, et» 
sans attendre te retour de son messager, il se 
mit en route avec tonte sa maison. Il se trou- 
vait à Kadesiah lorsqu'il apprit que MosHm avait 
été mis à mort A cette nouvelle les Arabes qui 
lui servaient d'escorte se dispersèrent. Resté 
seul avec 72 cavaliers de sa famille, il voulait 
retourner sur ses pas ; mais la retraite lui ayant 
été fermée par un détachement de 4,000 nommes, 
il offrit de céder à Yézid tous ses droits au 
khalifat et de se rendre auprès de ce prince, ou 
d'aller combattre les infidèles. Ces propositions 
furent rejetées par Amrou Ibn-Sad , comman- 
dant du corps ennemi. Les 72 cavaliers furent 
tués l'un après Faofre dans divers combats 
singuliers. Hosséin périt le dernier. Il fat in- 
humé à Mesched, où te prince bouide Adhad 
ed-Daulah lui fit plus tard élever on magnifique 
tombeau, qui est visité par un grand nombre 
de pèlerins. Les schiites le révèrent comme on 
martyr et célèbrent en son honneur ( le 10 mo- 
harrem ) des fêtes pompeuses, où l'on joue des 
espèces de mystères et de passions. Hosséin est 
le héros d'une foute de légendes pieuses. Il eut 
pour successeur son fils Ali Zein al-Abkhn, qui 
échappa seul avec les femmes au massacre de 
Kerbelah. E. Bbautois. 

Tabarf, Ckron. — Abon'I-Féda , Jnn. Muslem, édit. 
Relake, 1, 10S, 8S3, SSS, m. - HaMarl, Séances, trad. de 
Fbindoustani, par l'abbé Bertrand j Parts, 1SM, in-8*. - 



215 



HUSSEIN 



216 



Mrt Meer Haiao-All, Observations en the Muisulmant 
of Indiak Leadres, lftft, 1. 1. — Quatr«mère, Mém. sur 
la Fie d'Abdallah ben-Z obéir; dans Journ. Asiat., 183», 
t. I,.p. 818-880. — Price, Chronolog. Retrospect., I, 870, 
890, «06 et sulv. — Weil, Gesch. der Chalifen, t. 1. — Be 
Hammer, LUeratur CeschicMe der Araber, 1. 1, 806 ; 
H, 168. 

HOSSÉIN BEN-MAKSOCR (Abolt'l-MoghUs), 

surnommé Al-Helladj, mystique musulman de 
Perse, né en Khorassan, ou à fieidah (Fars), 
martyrisé à Baghdad , le 23 dzou'l-cadeh 309 
(mars 922 ). Il avait pour aïeul un guèbre, qui 
s'était converti à l'islamisme. Après avoir étudié 
sous les plus célèbres sofis, et notamment sons 
Djonéid , qui lui prescrivit, durant deux ans, la 
retraite et le silence, il parcourut le Khorassan, 
le Marwaraannahar, le Sedjestan, l'Hindoustan 
et même une partie de la Chine, prêchant, écri- 
vant et convertissant un grand nombre d'ido- 
lâtres. Les uns lui attribuaient le don des mi- 
racles , les autres le traitaient d'imposteur et de 
magicien. Il émit, en matière 1 de religion et de 
morale, plusieurs opinions nouvelles, qui ne s'ac- 
cordaient pas toujours entre elles ou avec sa 
manière de vivre : tantôt il pratiquait scrupu- 
leusement les préceptes de l'islamisme, tantôt 
il enseignait que les bonnes œuvres étaient plus 
méritoires que les exercices de dévotion. Au 
reste , ses mœurs étaient irréprochables, et il vi- 
vait avec la plus grande simplicité. Il profes- 
sait la doctrine du panthéisme, qu'il résumait en 
cos roots : Je suis Dieu et tout est Dieu. Ghaz- 
zali et d'autres philosophes ont tenté de le dis- 
culper d'hérésie, en interprétant mystiquement 
ces paroles. Mais les imans et les schéikhs de 
Baghdad prononcèrent contre Hosséin une sen- 
tence de mort, et le déférèrent au bras sécu- 
lier. Jeté en prison par ordre du wizir Ali ben- 
Assa, il en fut tiré au bout d'un an et demi pour 
être mis à la torture. Loin de murmurer, il pria 
pour ses persécuteurs. Son cadavre fut brûlé, 
et les cendres en furent jetées dans le Tigre. Il 
avait écrit une trentaine d'ouvrages théologi- 
ques et mystiques. E. B. 

Ibo Khalllian, Biograph. Diction., ï, 423. — Aboirl- 
Féda, Arm. Mntlem., II, 389.- Ferid ed-Din Atthar, Tedz- 
hiret al-Bwliga ( Mémoire des Saints), fragm. trad. dans 
Bliltfiensammlung ausder morgenltendischen Mystik, 
par Tholuck ; Berlin, 1825, tn-8°, p. 310 827. 

hosséin ben-Masoud nl-Ferraal-Baghewi 
( Mohyi as-Sonnet Abou-Mohammed ), juris- 
consulte arabe de la secte de Schaféi, né à Ba- 
gischwer ( Khorassan ), mort en 510 de l'hé- 
gire (1116 de J.-C. ) ou 516 (1122). On a de 
lui plusieurs traités dont le plus eonnu est 
Messabih as-Sonnet ( Lumières de la Sunna ), 
abrégé des six grands recueils de traditions re- 
latives à Mahomet et contenant 4484 traditions. 
Cet ouvrage, qui a eu plus de vingt-cinq com- 
mentateurs, a été refondu en 737 (1336) par 
Wali ed-Din Abou-Abdallah Mohammed ben- Ab- 
dallah sous le titre de Mischkat al-Messabih 
( Niche des lumières ). Cette nouvelle rédaction 
a été traduite en anglais par le capitaine Mat- 
thews; et le texte arabe, accompagné d'une 



explication, a été tithographié à Calcutta vers 
1854. E. B. 

Ibn-KbaUlkan, BiograpMcal Diction., t. I.d. M9.- 
Abou'1-Féda, ^tm. Muslem., t III, p. 389. — Hadjl-Khal- 
fab, Uxic. Bibliogr., édlt. Fluegei, 1. 1, n« BU. 1423; 
t. II, 2908, 3789, 4172,; t. IV, 7319; V, 991*. 10796, 19128, 
12812. — De Hammer, LiteraturgescMcMe der Araber, 

t. VI, p. 2*3. 

hosséin wirka-baIkara ( Abou'l-ghaù 
Bahadour-khan ), sultan du Khorassan, né à 
Hérat, en moharrem 842 de l'hégire ( juin 1438 
de J.-C. ),*mort en Dzou'l-hiddjeh 911 ( avril 
1506.) Son père, Ghéiats ed-Din Mansour ben- 
Baïkara, n'avait point de principauté, quoique 
fût arrière-petit-fils de Tamerlan. Dès sa jeu- 
nesse, Hosséin se distingua par son habileté dans 
les exercices militaires. Enfermé par ordre de 
Abou-Saïd , sultan de Samarkand, à l'occasion 
de la révolte de son parent Mîrza-Sultan Weis, 
en 856 (1442), il fut ensuite mis en liberté, et 
se retira à Hérat, auprès de Baber, puis auprès de 
Mirza-Sindjar, prince de Merw Schahdjihan, qui 
lui donna une de ses filles en mariage. Le gou- 
vernement de Merw Schahdjihan lui ayant été 
confié durant l'absence de son beau-père, il 
tenta d'usurper l'autorité suprême; mais le re- 
tour du prince légitime fit échouer cette entre- 
prise. Hosséin s'enfuit dans le désert, se mit à 
la tête de quelques cavaliers, et réussit à en- 
lever aux Turcomans la viHe d'Asterabad et les 
provinces de Mazandéran et de Djordjan, en 862 
(1458). H se fit aimer de ses sujets par sa jus- 
tice, et envahit l'empire du sultan Abou-Saïd, 
qui lui réclamait quelques territoires (864-1459). 
Mais, repoussé et poursuivi jusque dans ses pro- 
pres États, il se réfugia enKharizm et n'en sortit 
que pour aller assiéger Hérat , capitale de son 
ennemi. Ne pouvant s'en rendre maître , il s'a- 
vança à la rencontre d' Abou-Saïd, qui était en 
expédition. L'indiscipline de son armée le ré- 
duisit de nouveau à la nécessité de s'enfuir en 
Eharizm. Après la mort de son adversaire, il 
s'empara de Hérat, 8 ramadban 873 (21 mars 
1469 ), de Thous, de Nischabouret de tout le 
Khorassan. Mais le trône lui fut disputé par un 
arrière-petit-fils de Schah-Rokh , Mirza Yadig- 
hiar Mohammed ben-Baïsanghor, qui était sou- 
tenu par Ouzoun- Hassan et par les anciens of- 
ficiers de Abou-Saïd. Il se vit enlever le Kho- 
rassan, et perdit, par suite de la défection de 
ses troupes, les avantages que lui avait donnés 
la victoire de Derbend Schakhan ( 874-1469 ). 
Son rival entra à Hérat le 9 moharrem 875 
(7 juillet 1470) et se livra aux plaisirs, tandis 
que ses officiers tyrannisaient les habitants delà 
ville et leur faisaient regretter le gouvernement 
de Hosséin. Ce dernier avait demandé asile aux 
Turcs Erlauts de Méimenah. Quoique la plu- 
part de ses officiers l'eussent abandonné succes- 
sivement, il parvint à réunir un corps de 850 
hommes d'élite et marcha sur Hérat. Telle fut la 
rapidité de sa marche et l'insouciance de ses en- 
nemis, qu'il pénétra dans son ancienne eapitaic, 



217 HOSSÉIN 

à l'insu de Yadighiar, et le saisit dans son pa- 
lais sans éprouver la moindre résistance. 
L'ayant fait mettre à mort, en safar 875 ( août 
1470), il accorda une amnistie générale à tous 
ses sujets et permit aux Turcomans de retour- 
ner dans leur pays. Après avoir reconquis ses 
anciennes possessions : le Kharizm, le Djordjan, 
le Mazandéran et le Khorassan, il attaqua Mah- 
moud-Mirza,fils d'Abou-Saïd et prince deHissar- 
Schadouman, qui se préparait à envahir le Kho- 
rassan. Il le vainquit à Tchekman-Séraï , près 
d'Andekhond, en 876 (1471), et s'empara de 
Balkh. Un autre fils d'Abou-Saïd , le prince de 
Badakhschan, Aboubekr, ayant été vaincu par 
son frère Mahmoud, se retira auprès d'Hosséin- 
Mirza, qui lui fit épouser une de ses filles. Mais 
ce prince ne tarda pas à prendre les armes contre 
son beau-père-, il fut battu à Merw, et, après 
avoir longtemps erré, tomba entre les mains de 
Hosséin , qui le priva de la vie, en 879 (1475). 
Ce ne fut pas le seul rebelle que le sultan de 
Khorassan trouva dans sa propre famille. En 
902 (1496), son fils aîné Hosséin-Badi ez-Zeman, 
jaloux de la préférence accordée à son frère 
Motzaffer, se révolta dans son gouvernement de 
Balkh; mais il fut vaincu près d' Asterabad , et 
son fils Moumin, ayant été fait prisonnier, fut 
mis à mort, en 903 (1497). Badi ez-Zeman alla 
se mettre sous la protection de Dzoulnoun, gou- 
verneur rebelle du Candahar , avec l'aide du- 
quel il fut sur le point de s'emparer de Hérat. 
Hosséin, qui était en guerre avec un autre de 
ses fils, obtint la paix, en restituant Balkh à son 
fils, et en cédant le Séistan à un frère deDzoul- 
noun, en 904 (i\$&). Dans la dernière année de 
sa vie, il fut attaqué par le puissant khan des 
Ouzbeks, Schéibani ou Schahi-Beg. Trop faible 
pour résister, et devenu impotent de corps et 
d'esprit, il demanda au Mogol Baber des se- 
cours, qui n'arrivèrent qu'après sa mort. Hos- 
séin fut, avec Schah-Rokh, le plus puissant des 
descendants de Tamerlan. Il fit de sa capitale la 
ville la plus florissante de l'Asie musulmane 
et l'embellit de superbes édifices. Sa cour était 
peut-être, à celte époque, la plus brillante et la 
plus polie du monde entier. Elle renfermait un 
grand nombre d'hommes distingués, tels que le 
wizir Ali-Schir, le poète Djami, le moraliste 
Hosséin-Waitz-Kaschéfi. Hosséin-Mirza faisait 
instruire aux frais de l'État environ douze mille 
jeunes gens. Non content de protéger les lettres, 
il les cultivait lui-même. On a de lui des vers en 
turc tchagataïen, et un ouvrage mystique en 
persan, intitulé : Medjalis al-Oschak ( Assem- 
blées des Amants ) , contenant des notices de 
soixante- quinze personnages célèbres , tels que 
Djafar as-Sadik, Hosséin ben-Mansour al-Hel- 
ladj, Ferid ed-Din Atthar, Omar Iba-Faredh, 
Djelal ed-Din Roumi, Hafitz, Djami, Baber et 
l'auteur lui-même. E. B. 

Kbondemlr, K Masse t- al- Jkhbar, trad. librem. dans 
Chronological Retrospect de Price, t. 111, p. 695-608, 



218 

et*, 62S-M0,669.— DJaml, Tedzkiret; fragment trad. par 
de Sacy, dans flot, des Manu ter., t. IV. p. MS-269. — 
Sam-Mirza, Tedikiret, t, I.— Baber, Mémoirs, trad. par 
Erskfne. — Er&kine, Hist. of India, 1. 1. — De Ha ramer, 
Gesch. der sehœnen Redehûnste Persitns, 299. — Gore 
Ouseley, Biographe Notices o/Persian Poets, 247 281. 

hossein-badi-ez-zem an , fils atné du pré- 
cédent, mort à Constantinople , en 926 (1520). 
Après la mort de son père, il régna conjointe- 
ment avec son* frère Motzaffer. Leur incapacité 
et leurs discordes firent une si mauvaise impres- 
sion sur Baber, qu'il se hâta de s'en retourner 
avec les troupes auxiliaires qu'il avait amenées à 
leur secours. Ils furent vaincus i>ar Schéibani, 
khan des Ouzbeks , qui se rendit maître de leur 
capitale, en moharrem 913 (mai 1507). Mot- 
zaffer mourut la même année, et Badi ez-Zeman 
se retira auprès de Schah-Ismaïl, sofi , qui lui 
donna la ville de Réi. II tenta de recouvrer ses 
États, assiégea Asterabad , et fut mis en fuite. 
Après avoir erré, près d'un an, dans l'Hindous- 
tan , il alla retrouver Schah-Ismaïl , qui venait 
d'envahir le Khorassan. Il le suivit ensuite à 
. Tébriz. Lors de la prise de cette ville, en 1514, 
il tomba entre les mains du sultan Selim I, et fut 
emmené à Constantinople, où il passa ses der- 
nière années. Un de ses fils, Mohammed-Ze- 
mari'Mirza, se retira dans l'Hindoustan , à la 
cour du grand-mogol Baber, qui lui donna une 
de ses filles en mariage et le nomma gouverneur 
du Behar. Lors de l'avènement de son beau-frère 
Houmayoun, en 937 (1530), il lui disputa le 
trône ; mais il fut jeté en prison. S'étant échappé, 
il se rendit dans le Goudjerate, à la cour de Ba- 
hadour-Schah, après la mort duquel il fut re- 
connu roi du pays par la reine mère et les 
Portugais de Diu (943-1537). Mais il fut expulsé 
au bout de quelques mois de règne par un cou- 
sin du feu roi, et se réconcilia avec Houmayoun, 
qui le fit gouverneur de Djouanpour. Il périt en 
combattant pour ce prince à Tchoupah-Ghat, 
sur le Gange, le 9 sefer 946 (27 mai 1539 ). 

Le dernier prince Timouridedu Khorassan fut 
Féridoun, fils de Hosséin-Mirza-Baïkara , qui 
s'était rendu maître de Asterabad, Dameghan et 
Kerret , et qui fut tué par les Ouzbeks, en 915 
(1509). E. Beauvoïs. 

Sam. Mirza, TedzkireV; dans Not. des Mss., t. IV, 
p. 278.- Price, Chronofqg. Retrospect., t. III. - Ersklae 
Bist. of India, t. 1, II. 

hosséin Ben-Ali ( Mewlana Kemal-ed- 
Din), surnommé al-Waitz al Heravi, al-Kaschefi 
(le Prédicateur de Hérat, le Commentateur), cé- 
lèbre écrivain persan, né à Beihac, mort en 900 
de l'hégire ( 1494 de J.-C. ), ou plutôt en 910 
(1504). Il résidait à Hérat ( Khorassan ), capi- 
tale de Hosséin-Mirza, et jouissait de la faveur 
du wizir Ali-Schir. Il était aussi savant qu'élo- 
quent. On a de lui : Akhlac % Mohsini ( Mœurs « 
du Bienfaisant), ouvrage dédié àAbou'l-AToAsin, 
fils du sultan Hosséin-Mirza; il a été édité par- 
tiellement dans Persian Sélections de Lums- 
den, Calcutta, 1811; à Hertford, 1823, m-8° 
(13 chapitres); et parl.-W.-D. Ouseley, ibid., 



219 



HOSSÉIN — HOSTE 



220 



1850, in-8° ( 20 chap. ). H. G, Keçne en a 
traduit 12 chap.; ib., 1851, in-8*. Il en a été pu- 
blié une version en hindoustani, intitulée Oendj i 
Kfiouni ( Trésor de Borfté); GaJcutta, 2 e édit, 
.1*48, in-8°, VAkhlac i MoWni est uq traité de 
morale adressé aux roisj il est divisé eu qua- 
rante sections, sous chacune desquelles l'auteur 
expose up précepte appuyé d'exemples, d'anec- 
iîûtes et de citations empruntées au Coran, aux 
tradition» prophétique et aux meilleurs poètes. 
On y trouve de noble* sentences, des pensées 
ingénieuses, de» réflexions profondes exprimées 
avec une élégante simplicité. L'auteur P45te pour 
le Montaigne et le La. Bruyère des Persans; — 
Anwar i Sahaifr ( Lumière* Canoniques ), dé- 
dié au wiiir Scuéjih-Ahmed-SoAgïk et édité à 
Hertford, 1805; à Calcutta, |S16, in-fol,;1824, 
ù>4°; 1834, 2 vol, in<8°i * »Bompaj, 1823; a 
Londres, 1827, in-4°, par j. Michaej enfin à 
Ilertforçl, 1851, in-4°, par J.*W.-D. Ouseley. 
C'est un recueil de fobles originaires de l'Inde, 
et dont la première rédaction paraît avoir été le 
Pantchatantra, qui fut traduit successivement du 
sanscrit en peblvi par Barzouïeb, du petuvi en 
arabe par ibnal-Mokaffa, sous le titre de Kalil- 
ah et Dmnafr, et de l'arabe en persan par 
Abou'l-Meali-NasraUah. Cette version était par- 
semée de termes arabes et de locutions surannées. 
Hussein la retoucha, et substitua au style simple 
de son prédécesseur des périodes cadencées et 
rimées, des expressions pompeuses , des méta- 
phores hyperbolique^. Il relia plu* étroitement 
entre eux les divers épisodes , eu omit quel- 
ques-uns, et ajouta, une préface, où U raconte 
l'histoire du livre de Çalilafr étPimnah. §a tra- 
duction fut rajeunie sous le titre de Eyar i Ha* 
nisch (Pierre de TQuctie de la Science), par 
Abou'l-Fadhl, voir ÀftAWw EUe a été mise en 
turc, sous le titre de fiaumayoun- tfanwh 
(Livre Auguste)» par Wa>ib-Ali-Tschélépi, en 
tundou&tani ; eu géorgien, par WaHtaug VI et 
Soulkhan-Saba-Orbelian; enfin en [anglais par 
Ch. Stewart : An Introduction to the Anxvari 
Qoohyly of Hussein Vaiz Kashify , contenant 
le texte et la traduction des sept premiers chapi- 
tres, Londres, 1821, in-4°; et parE.-B. Eastwick : 
Anvari Suhaiti, Hertford, 1854, in-8°; — 
Raudhet as Schoada (Jardin des Martyrs ). Cet 
ouvrage, divisé en dix chapitres, traite de la vie et 
de la mort de Mahomet, de Fathime, d'Ali, d'Has- 
san, le martyre d'Hosséiu, de Moslim, d'Ocaïl , 
du sort de la famille de Mahomet. Jl a été abrégé, 
sous le titre de Deh Medjalis (Dix Assemblées), 
d'où l'on a extrait la vie de Mahomet, qui a été tra- 
duite dans les Mines de l'Orient, 181 1, t. II; dans 
New Asiatic Miscellany, Calcutta, 1790, m-4°, 
* t. I ( avec la vie de Fathime ), et dans Asiatic 
Journal and Monthly Register, 1. 1, Londres, 
1816, in-8°; — Makhzan al Inscha (Magasin 
de l'Art Épistolaire ) ; — Djewahir at-Tefsir 
( Perles de l'Exégèse ), commentaire de la 2 e et 
delà 3 e sourate du Coran; — Commentaire 



du Metsnewi de Bjelal édùin Raumit -~ 
Traité d } Alchimie et d'Astrologie. 

E. BEàUVOIS. 
KhoDdçnir, #a*è «hffwr. - U^l, Khatiwh Qendj. 

- H*dji fHialfQb, U*\c. BMioqrwh.* t.i, n° «83; n, 

8159, 4T74; III. 6648; V, 10855, 11*77, 11369. 11841, 11730. 

— SUvMtre de Saoy, préf. 4tt Cali\* et Dimnm, ou fa- 
ftfef de MMw* en crabe. m Rrowot, «t. «Un» Bullrt. 
Ssiêntif, 4e \?4cad. de$Sç. de Saint-Pétersàourg, t. V, 
1889. — Dorn, Catal. des Mss. Orient, de la BibUoth. de 
Saint-Pétersbourg, p. 14T4VI, 40t. 

HoasÉuf-.KBA«. Voy. Mm Gholàm Ho«r 
anm RiUM. 

BtMBBlff-tACBA, HOSSÉD^SCHAH. VOfOS 

Housséi*. 
PQ8T ( Qeorgius ), voyageur danois. Voyez 



bost ( Nicolas»Thcmmi ), botaniste autri- 
chien, né en 1763, mort le |3 janvier 1834. 11 
fut directeur du jardin de Schœqbrunn pendant 
quarante ans et premier médecin de l'empereur. 
Il se |it surtout connaître par ses ouvrages de 
botanique. On a de lui : leones et Descriptio 
Graminum Ausêriaeorum, 4 vol. in-tol.; — 
Flora Austviaca; 1897, 3 vol. in«g*. C'est le re- 
cueil de ses observations durant sa direction du 
Jardin de Schœnbruna; — une Monographie 
du Saule. On y trouve la description et les 
Êgures de plus de cent espèces. V. A. 

GaUlien, MedieinUehes SchrifUUlè*r-&xik. 

H08TV ( Le P. Paul), mathématicien français, 
né en 1659, à Pom%de.Veyle ( Bresse ), mort à 
Toulon, le 13 février 1900. Il entra dans la con- 
grégation des Jésuites, et enseigna tes mathéma- 
tiques dans plusieurs collèges de son ordre. Ses 
goûts l'ayant porté à l'étude spéciale des mathé- 
matiques appliquées à la navigation, il eut oc- 
casion de se foire remarquer du due de Morte- 
mart et des maréchaux d'Ëstrées et de Tourville 
quHl suivit, pendant doute ans, dans leurs diver- 
ses expéditions, en qualité de chapelain. Lors- 
qu'il mourut, il était professeur au séminaire 
royal de Toulon. On a de loi les ouvrages suivante : 
Traité des Évolutions Navales, eomposé sur 
les Mémoire» de Tourville (tig.); 1691,m-fol., 
manuscrit ; — Tr*ité dés Signaux et Évolutions 
Navales, qui tonHent des règles utiles aux 
officiers généraux et particuliers dhine ar- 
mée navale, sous la dictée du maréêhal de 
Tourville; Toulon, 1696, in-4% avec 32 pi. 
coloriées. Ces deux ouvrages existent à la bi- 
bliothèque du dépôt général des cartes, et plans 
de la marine, à Paris ; — l'Art des Armées Na- 
vales, ou traité des évolutions navales, etc. 
(pi.) ; Lyon, 1697, et 1727, in-rol. Le P. Hoste 
ne se borne pas à exposer dans cet ouvrage les 
principes de la tactique navale, il eu fait l'ap- 
plication à la bataille de Lépante et à eelles qui 
furent livrées sous le règne de Louis XIV ; — 
Théorie de la Construction des Vaisseaux 
(pi.); Lyon, 1697, m-fol. Indépendamment des 
deux mémoires déjà cités , la bibliothèque du 
dépôt général des cartes et plans en possède une 
troisième copie sur les mémoires du P. Hoste, et 



S»l no#rE - 

intitulé iAtcJiiteotuiv Navûle, ou pratique de 
la construction des vaisseaux. Avant de pu- 
blier sa Tàéarie de la Construction des Vais- 
seaux , le P. Hoste l'a? ait soumise à Tourville, 
qui n^vait pas approuvé toutes les vues de 
l'auteur. Les deux adversaires, os pouvant s'enr 
tendre, convinrent que deq* vaisseau* seraient 
construits sur las plans de chacun d'eux} 
le résultat de cette joute fut défavorable au 
P. Hoste, qui s'empmaa de le reconnaître; — 
Recueil des Traités de Mathématique (sic) 
qui peuvent être nécessaires à tin gentilhomme 
pour servir par mer au pat terre} Paris» 1692, 
3 vol. in-12; -r Observation, de Vtçlipse du 
Soleil du il juillet 1684, faite à Lyon dans 
le grand collège des Jésuites ( dans le Journal 
des Savants y 1684, p. 200.) P. Lçvpr. 

Mémoires ée Trêvoujx. — Journal des Savants, -r 
Catalogue général tes MtoUotMque* de <» Mqrtnç. 

HOBTK ( William ), marin anglais, né en 
1780, mort le 6 décembre 1828. Il entra fort 
jeune dans la marine royale, et débuta sur Je 
vaisseau Minerva, que commandait l'illustre 
Nelson, alors commodore. Ge grand marin prit 
W. Hoste en amitié et lui apprit son métier. Sous 
un pareil professeur, Hoste devint facilement un 
habile officier. Il suivit Nelson lorsqu'il attaqua 
vainement le* lies Canaries et fut repoussé de- 
vant Ténériffe. fl se distingua au combat de Saint- 
Vincent, on les Anglais, quoique inférieurs en 
forces, battirent les Espagnols ( 14 février 1797 ) , 
et passa sur Thesea 9 cap. Ra|p. Miller.Nelson ne 
tarda pas à le rappeler dans son escadre, et il put 
prendre une part active aux divers combats livres 
sur les côtes d'Egypte. De 1809 à 1813 M com- 
mandait VAmphion,, et on le voit sans cesse dans 
la Méditerranée, bataillant contre les Français : ses 
succès furent divers; tantôt vainqueur, tantôt re- 
poussé, il sut maintenir haut le pavillon britannique 
deyant tapies (mai 1809), devant Lissa (i 3 mars 
181 1), sur les cotes de l'Jstrie et de la Dalmatie 
en 1811 et 1812 j à la pris* deFiume,de Raguse, 
des bouches, du Cattaro, et de, Parga, en 1813, . 
1S14. En 181a il fut créé baronet et comman- 
deur de l'ordre du Rai*. Il mourut a quarante- 
huit an» ; les Anglais l'honoraient du surnom de 
Nelson le jeune* 

Son frère, Thmas $dm*d, né en. 1794, mqrt , 
le as juillet 1834, le- suivit dans, la plupart cjeses 
expéditions. Ilétajt&i cfcéttf lorsqu'il voulut pren- 
dre ta carrière mittaJKk, qu'il se glissa furtive- 
ment à bord du bâtiment que commandait son 
frère, sftcacbaaau* un porte-.voix, et ne se montra 
que loin en mer. Il avait alors treize ans; après 
la pacification de 1814, Uparcourut les mers d'A- 
mérique et d'Irlande, et reçut le grade de com- 
modore. en 1825. Alfred de Lacaz?. 

Annyal OfiUuwu, 

; ft<*$T*Ui (Uippoiute >; littérateur fonçais , 
né vera 1812. Ha été curateur <j u Théâtre-His- 
torique, de l'Ambigu Comique, et dirige aujour- 
d'hui le théâtre de la Gaîté. Membre de la Légion 



HOST1US 999 

d'Honneur depuis 1856 , il a publié ; Versailles 
Pittoresque et anecdotique ; 1837, grand in- 18, 
avec 74 pi.; — If s Contes Bleusde ma Nourrice; 
1842, in- 18 ; — François les Bas-Bleus y ou la 
France et le Salon, 1842, in- 18 ; — Les Trois 
Vertus de la Jeunesse; 1842, in-18; — Bon-: 
jour et Bonsoir, contes pour les enfants ; 1844, 
in-8°. — Les Enfants d'aujourd'hui, 1844, 
in* ; — Béforme Théâtrale, suivie de YEsr 
puisse d'un projet de Loi sur les Th4dtres[f 
1848, in-8°; «r- U* Amis #e V Enfance i 1848, 
in-8° avec vignettes ; — Tableau synoptique 
des. Nerfs encéphaliques , d'après les cours, et 
sous les veux du facteur Calma-Grand^ 
1834 , iu-plano T II a placé un Cours de Bâta-, 
nique Élément**** en. tète de la Flore des. 
Dames ; 1839, in-18. \\ est auteur du texte expji-. 
catif de Paris,-Qr léan*,, parcours phtto.res.que 
du chemin de fer de Paris à Orléans ,• 1843. 
in-4°. G. de F. 

Renseignement* particulier t. 

hosyimew (<?. Valent NostHianus %esi 
sius Quintus), empereur romain, fils de Ter*, 
pereur Dechis et d'Herennia Etrusoilla , mort 
▼ers 252 de l'ère çbfétianne. Après la mort 
de Decius et d'£trusous , il fut revêtu de la 
pourpre avec Itebonianus Salins, et périt peu 
après, soit de la peste qui ravageait l'empire, soit 
par les embûches de son collègue. Les récits de 
cette époque sont assez incertains pour que 
l'on, ait pu douter si qostUien était le fUs, le 
gendre ou le neveu de Decius. ; mais la question 
semblerésolue par Zetsiroe. Savant cet historien, 
Decius avait, outre Etruscus,un second fils qui 
fut associé avec Trebonianus à la dignité im- 
périale, y. 

Aur. Vi«t«r,0e <*«., 80 ; Episl, 80. - Entrope, |X, 5. 
— ZoaUnè, |, *S8. — Zooaras, vol. I, p. 625, édit. du 
Louvre. — Côdréne, p. 451, é&it. de Boni}. — 'Ttyleirionï, 
Histoire des Empereurs, vol. fil. 

POSTILIUS TULLCS. f*oy % TULLUS. 

* hostilius, poète latin, d'une époque incer- 
taine. H écrivit des mimes. Il n'est mentionné 
que par Tertullien dans le passage suivant : 
« Quand vous voyez jouer les pièces bouffonnes 
des Lentulus. et des Hostilius , dites-moi si ce 
sont vos farceurs ou vos dieux qui excitent les 
risées que vous faites ! » On sait que Lentulus 
vivait sous Domitten, et Hostilius doit apparte- 
nir à la même époque. I! est dès lors impossible 
de l'identifier avec un autre Hostilius qui vivait 
au moins deux, siècles plus tôt, si on en juge par 
ce vers que cite de lui Priscien ( le 719 e de l'édit. 
Putsch») : 

Saspe grçges pecuum ex tiibçrnis paslobu'pulsl. 

AjVeicUert, parune conjecture probable mais que 
n'autorise aucun manuscrit, pense qu'il faut 
ljre, dans Priscien, Hostius ( voy. ce nom } au 
lien d'Hostittus. Y. 

TertuUtien, aqoI. % 15. — Weicbert, Poet. Latin. ReligyUe; 
Leipzig, 1880, p. 17. 

* hostius, poëte latin, vivait dans le second 
siècle avant J.-C. Festus, Macrojbe, Scrvius 



923 



HOSTIUS — HOTHBY 



224 



citent plusieurs vers (six en tout) du premier et 
du second livre du Bellum "Histricum de Hos- 
tias. Ces fragments , le titre de l'ouvrage et les 
expressions des grammairiens nous apprennent 
que le Bèllum Histricum était un poème en 
vers hexamètres sur la guerre d'Ulyrie , qui eut 
lieu sous le consulat de A. Manlius Vulso et de 
M arcus Juniusfirutus, en 178, événement raconté 
dans le quarante-unième livre de l'histoire de 
Tite Live, et que le poète vivait avant Virgile; 
mais comme aucun auteur ancien ne donne sur 
lui le moindre renseignement biographique, on 
ignore la date précise de sa vie. Des critiques 
ont essayé de suppléer par des conjectures au 
silence des anciens. Ainsi on trouve dans l'A- 
pologie d'Apulée que le véritable nom de la 
Cinthia de Properce était Hostia, et Properce 
nous dit que Cinthia avait un grand-père célèbre 
par son savoir : : 

Est tibl forma potens, suât caste Palladis artes, 
Splendtdaque a docto sœpe rcfulget avo. 

Ce grand-père de Hostia devait s'appeler Hostius, 
et vivre vers le temps des Gracques. On peut 
sans invraisemblance le regarder comme l'au- 
teur du 1 Bellum histricum, qui , si l'on en 
juge par la rudesse de la versification et du 
langage, doit remonter au deuxième siècle avant 
J.-C. Y. 

Festus, aux mots Tesca, Scseva. — Macrobe, VI, 3, s. 

— Servtus, ad Tirgil. y£neid., XII, m. — Welcbert, 
Poet. -Lot. Reliq., p. i-18. 

*HOSTfiESHAM (Nicolas), médecin anglais, 
vivait au milieu du quinzième siècle. On manque 
de détails sur sa vie. On sait seulement qu'il est 
auteur de quelques ouvrages restés inédits : De 
ModoconficiendietdispensandiMedicamenta; 
et Antidotarius. 6. B. 

Fabricius, Bibliotheca Latina Médit jEvi, t. V, p. 34*. 

— Kestner, Medicinisches Celehrten-Lexikon, p. 416. 

* hostrup ( Christophe ), l'un des meilleurs 
poètes comiques danois, né en 1819. Q était étu- 
diant en théologie lorsqu'il fit jouer Les Voisins, 
d'abord dans la société des étudiants , puis sur 
le théâtre royal de Copenhague (1845). Encou- 
ragé par le brillant accueil qu'obtint cette pièce, 
il composa , en moins de dix ans , un grand 
nombre de comédies, de vaudevilles ,' de farces 
et d'opéras. Devenu pasteur de Silkeborg en Jut- 
land (18S4), M. Hostrup n'écrit plus pour le 
théâtre. Ses pièces ont été réunies sous le titre 
de Poetiske Skri/ter ( Œuvres Poétiques ) ; 
Copenhague, 1852 , 4 vol. in-8°. Elles sont en 
prose, mais entremêlées de nombreux couplets. 
Les plus remarquables sont : Gjenbœrne 
(Les Voisins de Face); — Intrigerne (Les 
Intrigues ) ; — Fodreiise Eventyr ( Inci- 
dents d'un Voyage à Pied); — Spurven (Le 
Moineau ) ; — Tordeiiveir (L'Orage ) ; — Mœs- 
ter og Lxrling ( Le Maître et le Disciple). Il a 
aussi publié, sous le pseudonyme de Jeus Chris- 
trup, un recueil de chants pour les étudiants* 

E. B. 
r P. L. Môller, Det nyere Lystspil % Danmark of Fran- 
torig; Copenhague, 1858, in-it 



hotbam (Henri); amiral anglais, né le 
19 février 1776, mort à Malte, le 19 avril 1833. 
Dès l'âge de dix-huit ans, il commandait le sloop 
Arrow, et en 1800 il était capitaine de frégate. 
Hotham se distingua dans divers engagements 
contre les Français. En 1804 il était sur les côtes 
du Portugal, en 1805 dans les Indes; en 1809 il 
combattait sur les côtes de La Rochelle, et l'année 
suivante sur celles d'Espagne. En 1812, capi- 
taine à bord du vaisseau Northumberland et 
suivi du Grumbler, il forçait, après un rude com- 
bat, deux frégates françaises à s'échouera l'entrée 
de Lorient; en 1813, il était colonel de marine, 
en 1814 contre-amiral, en 1815 commandeur de 
l'ordre du Bain. Cette même année; il bloquait 
les côtes de France, et Napoléon, vaincu, chercha 
un refuge à son bord : il demandait à être 
traité en hôte ; on sait l'hospitalité que lui donna 
l'Angleterre. Notham fut en 1818 nommé com- 
missaire de l'amirauté. En 1831 il passa vice- 
amiral, et, chargé de la croisière dans la Méditer- 
ranée, il mourut dans l'exercice de ses fonctions. 

A. ne L. 
Biog. Brit.— FicL et Conquêtes des*Français, t. VII. 

* hothby (Jean) t moine anglais, vivait dans 
la seconde moitié du quatorzième siècle. Il ap- 
partenait à l'ordre des Carmélites, et paraît avoir 
passé la plus grande partie de son existence en 
Italie. Hothby n'était connu jusqu'à présent que 
par deux traités de musique qui existent , l'un 
à la Bibliothèque impériale de Paris, sous le 
n° 7369, intitulé : Hothby 9 anglicl 9 Proportions 
Musicx , l'autre à la bibliothèque Se l'Institut 
de Bologne, sous le titre de : P. Jo. Hothobi, 
carmelitx, De Proportionibus et Canto Figu- 
rato, de Contrapuncto , de Monocordo. 
MM. Danjou et Morelot ont découvert récemment 
en Italie un autre ouvrage de Hothby, dont ils 
ont rencontré deux manuscrits, le premier à la 
bibliothèque Magliabeochiana de Florence, le 
second à celle de Saint-Marc à Venise , et qui 
a pour titre : La Caliopia Légale, reducta in 
brevita, per maestro Giovanni- Angelico Octobi, 
carmelita. Bien que ce traité ne porte aucune 
division de matière, il se compose néanmoins 
de quatre parties distinctes. Dans la première, le 
savant religieux s'occupe des sons et de la sol- 
misation par muances. La seconde partie est re- 
lative aux mouvements des sons ou de la voix: 
c'est la partie la plus importante du traité au 
point de vue de la notation et du rapport des 
neumes avec les notes carrées ; elle démontre la 
relation qui ' existait au moyen âge entre les 
neumes et la notation noire qui les a remplacées, 
tant dans le plain-chant que dans la musique 
figurée. La troisième partie concerne les diverses 
proportions de durée des sons. Enfin, la qua- 
trième partie traite des intervalles en usage dans 
le plain-chant. Dans son excellent ouvrage sur 
V Histoire de V Harmonie au Moyen Age, M. de 
Coussemaker a publié, avec la traduction 
française en regard, ce traité de Hothby, qui est 



225 



HOTHBY — HOTMAN 



226 



un des plus précieux documents sur la situation 
de l'art à cette époque. Dieud. Denne-Baron. 

De Coussemaker, Histoire de l'Harmonie au Moyen 
Age % p. S9B ; Paris, 1861. in-4<>. — Fétto, Biographie 
universelle des Musiciens. 

J motho ( Henri-Gustave), littérateur alle- 
mand, né à Berlin, le 22 mai 1802. Il visita la 
France. l'Angleterre , les Pays-Bas et l'Italie, 
où il recueillit les principaux documents pour 
son ouvrage sur la peinture , et obtint en 1829 
la chaire de philosophie à l'université de Berlin. 
H était un des principaux représentants de 
l'école philosophique de Hegel. On a de lui : 
Vorstudien fur Leben und Kunst (Études 
préliminaires sur la Vie et sur l'Art) ; Stuttgartd, 
1835; — Geschichte der Deutschen undNieder- 
tendischen Malerei (Histoire de la Peinture de 
l'Allemagne et des Pays-Bas) ; Berlin, 1840-1843, 
2 vol. M. Hotho publia aussi les Leçons oVEsthé- 
tique de Hegel ( Vorlesungen ueber Msthetik); 
Berlin, 1835-1838, 3 vol., et collabora, avec 
Schulze, Marnheineke , Gans, Henning, Miche- 
let et Foerster, à l'édition des Œuvres com- 
plètes du célèbre philosophe. R. L. 

Convert.-Lex. der Gegenwart. — Jul. Scbmidt, Ges- 
chichte der Deutschen Literatur Un XIXten Jahrh ; 
#> édtt.; Leipzig, 1855, vol. Il, p, 484. 

hotmau ( François) % célèbre jurisconsulte 
et pubticiste français, né à Pari3, le 23 août 1524, 
mort le 12 février 1590, à Baie. A l'âge de quinze 
ans il se rendit à l'université d'Orléans pour y 
étudier la jurisprudence; il y suivit les cours de 
Pierre L'Estoile. De retour à Paris, il exerça d'a- 
bord la profession d'avocat plaidant. Abandonnant 
bientôt la pratique des affaires, il commença en 
1546 un cours libre de droit romain à l'univer- 
sité de Paris. L'année suivante il embrassa la ré- 
forme, et se retira à Lyon, parce qu'il craignait 
surtout la sévérité de son père, catholique très- 
zèlé. Peu de temps après il partit pour Lausanne, 
où il venait d'être nommé professeur de belles- 
lettres et d'histoire , sur la recommandation de 
Calvin , avec lequel il se lia intimement. En 1555 
il se rendit à Strasbourg, où les instances de 
Sturm lui firent accorder des lettres de bourgeoisie 
et la permission de faire un cours de droit. Il 
y trouva, comme professeur en titre de droit 
civil, son ami Baudoin, auquel il rendit bientôt 
le séjour de Strasbourg insupportable par les 
calomnies qu'il répandait contre lui. Baudoin 
ayant quitté cette ville, Hotman fut nommé à sa 
place en 1556. Son talent d'exposer avec clarté 
et son grand savoir attirèrent beaucoup d'étu- 
diants autour de sa chaire. Plusieurs princes de 
l'Allemagne ainsi qu'Elisabeth, reine d'Angle- 
terre , l'engagèrent à venir professer dans leurs 
universités. Mais il refusa leurs offres, afin de 
rester plus près de la France, où il désirait avec 
ardeur voir triompher la réforme. Après avoir 
accompagné, en 1556, Calvin au synode de Franc- 
fort, il devint en 1560 un des principaux instiga- 
teurs de la conspiration d'Amboise. On hésitait 

NOUV. BIOGR. GÉNÉR. — T. XXV. 



encore à l'en accuser; mais aujourd'hui le doute 
n'est plus possible, après la publication que 
M .Dareste a faite d'une lettre de Sturm (Biblio- 
thèque de V École des Chartes, année 1854), où 
celui-ci fait connaître la conduite tenue à cette 
occasion par Hotman. Ayant fait partie d'une 
ambassade envoyée parla ville de Strasbourg au- 
près de l'électeur palatin , Hotman parvint à se 
faire passer auprès de ce dernier pour le confi- 
dent des chefs du parti huguenot de France, 
avec lesquels il n'avait eu' aucune relation jus- 
qu'alors. L'électeur le nomma son conseiller et 
l'envoya en mission auprès de Condé , qui, de 
peur de se compromettre, ne reçut pas Hotman, 
mais traita avec lui par internfédiaire. De retour 
à Strasbourg, Hotman se mit à divulguer des par- 
ticularités vraies et fausses sur la marche du 
complot, dont il annonçait aussi le but réel, 
qui était de ne pas laisser vivant un seul membre 
de la famille des Guise. L'entreprise ayant 
échoué, il accusa d'abord Rascalon, ensuite Coli- 
gny et enfin Sturm, son bienfaiteur, d'avoir fait 
connaître aux Guise la conjuration. C'est alors 
que Sturm écrivit la lettre mentionnée, laquelle 
nous apprend que le libelle publié alors contre 
le cardinal de Lorraine sous le titre de : Epistre 
envoyée au tygre de la France, émane bien 
de la plume de Hotman , ainsi qu'on l'avait déjà 
conjecturé. En septembre 1560 Hotman se ren- 
dit à Nérac, auprès d'Antoine de Navarre, qui 
l'accueillit avec fort peu de bienveillance, mais qui 
le rappela bientôt après en France, pour lui con- 
férer les fonctions de maître des requêtes dans 
son conseil. Hotman fut ensuite envoyé par An- 
tome en Allemagne pour engager les'princes pro- 
testants à promettre aux huguenots le secours 
de leurs armes en cas d'une guerre civile. De 
retour en France, en 1562, il suivit d'abord 
Condé à Orléans, puis il retourna en Allemagne 
pour y justifier la prise d'armes des calvinistes. 
Il prononça dans ce but un discours violent à la 
diète de Francfort, à laquelle ilfit en même temps 
connaître les fameuses lettres de Catherine de 
Médicis, où elle implorait l'aide de Condé contre 
les Guise. Après la paix il accompagna en 1563 
Condé à la cour; il y fit la connaissance de 
Montluc, évêque de Valence, qui lui confia une 
chaire de droit à l'université de cette ville. Grâce 
aux efforts de Hotman et de Bonnefoi^ cet éta- 
blissement, alors en pleine décadence, se releva 
bientôt; et les étudiants y affluèrent de nouveau, 
surtout lorsque Hotman eut obtenu la suppression 
de l'université de Grenoble. Au commencement 
de l'année 1567 Hotman fut appelé à Bourges, 
pour y occuper la chaire de droit devenue vacante 
par le départ de Cujas. Cinq mois après son ar- 
rivée dans cette ville, sa bibliothèque et ses meu- 
bles furent pillés par le peuple, soulevé contre 
lut, probablement à eause de quelques expres- 
sions imprudentes qui hii étaient échappées sur 
la religion catholique. Il s'enfuit à Paris , où le 
chancelier L'Hôpitalle fit nommer historiographe 

8 



trr 



HOTMAN 



228 



du roi. Pariant la seconde guerre civile il aida 
de ses conseils lea chût* de son parti , qui l'en- 
voyèrent, an I56S, comme commissaire à Blois, 
dont ils s'étaient emparés. Après la rupture de 
la paix de Longjumeau, il se réfugia avec sa 
femme et ses enfants à Baneerre , et il assista au 
premier siège de cette ville , pendant lequel il 
eempoea sa Oensolatio e Sacri* Littêri». Bq 
1670 il alla reprendre à Bourges ses fonctions 
de professeur. Deux ans après, dès qu'il eut 
connaissance de la blessure de Ooligay, il se ca« 
cha dans les environs de Bourges,etpanrinttosuit9 
à gagner Genève, où il devint en 1673 professant 
de droit romain. La même année le landgrave de 
Hesse obtint que les biens d'Hotman qui avalent 
été confisqués en France lui fussent restitués, 
à l'exception de sa bibliothèque, qui avait été une 
seconde (lois pillée. En 1579 il se rendit à Paie, 
sur les instances de ses enfants, qui craignaient 
la prise de Genève par les armées du duc de 
Savoie; l'année suivante il rot nommé conseiller 
d'État par Henri IV, alors roi de Navarre, et 
chargé de traiter avec les cantons suisses pour 
l'envoi de troupes à la solde des huguenots. En 
1584 il quitta de nouveau Bâle, où il avait été 
appelé en 1591 à (aire partie du collège des ju» 
risconsultes, et ii alla retrouver à Genève ses 
anciens amis. 

Dans ses moments de loisir il se voua à 1* rt* 
cherche de la pierre philosophai, qui l'avait 
déjà préoccupé autrefois. Il y dépensa tout le 
reste de sa fortune, et se mit dès lors plu* que 
jamais à trafiquer de ses épttres dédfcatûirea et 
à solliciter des gratifications, ce que lui reprochent 
avec raison les auteurs de La Franoe.prot€stawte. 
Hôiman finit par tasser ses aneiens protecteur», 
les princes protestants de l'Allemagne, et ae 
trouva bientôt sans ressources, il résolut alors de 
retourner à Bâle. Peu de temps après son arri- 
vée dans cette ville, il mourut, avant d'avoir pu 
entièrement achever la révision de ses ouvrages, 
qui l'occupait alors. Il fut enterré avec pompe 
dans la cathédrale. 

Gomme jurisconsulte, Hotman a )oué,dit M . fia- 
reste, après Gujas et Dooeau, mais à coté de Bau- 
douin et de Duaren, un grand rote dans la révolu- 
tion scientifique qui s'opéra au seizième siècle 
dans la jurisprudence. D'accord avec la non» 
velle école, dont il rot un des principaux sou* 
tiens, Hotman recommandait aux légistes l'étude 
approfondie de l'histoire dea lettres et de la phi- 
losophie, entièrement négligée par leabartholistea, 
et il appuyait ce conseil par son propre exempte. 
Mais le caractère particulier qui le distingue 
des autres grands jurisconsultes de cette époque, 
c'est qu'il fut surtout philologue et antiquaire» 
« Ses travaux de critique, dit M. Dareste, 
et ses recherchée sur les antiquités romaines 
sont ses principaux titres à la reconnaissance des 
savants. » Sa qualité d'érudit ne l'empêcha pas 
de proposer à ses contemporains un nouveau 
système de législation pratique et approprié à 



leurs mœurs comme à leurs besoins. Loin de 
s'engouer outre mesure du droit romain , il en 
critiqua la plupart des dispositions, et insista 
pour qui] fût remplacé par un code unique pour 
toute la France, dans lequel seraient fondues les 
diverses coutumes. 

L'indépendance et l'originalité de sop esprit se 
se retrouvent aussi dans son fameux ouvrage sur 
le droit public français. « Quelque éloigné que soit 
de la vérité historique le système du jurisconsulte 
protestant, dit Augustin Thierry dans ses Consi- 
dérations sur V Histoire de la France, on doit 
lut reconnaître le mérite de n'avoir pas eu de 
modèle et d'avoir été construit tout entier sur 
des textes originaux, sans le secours d'aucun 
ouvrage de seeonde raafn. En 1574 11 n'en exis- 
tait pas encore de ce genre. » La Franco-Qallia % 
daps laquelle Hotman fait preuve d'une éru- 
dition saine et la plus forte qu'il rat possible 
d'avoir alors sur le fond de l'histoire de France, 
eut une influence Immense sur lea esprits. 
« Cet ouvrage a été, dit M. Dareste, la pre» 
mière tentative sérieuse faite par le parti protes- 
tant peur fixer ses idées et déterminer nettement 
oe quHl voulait, ce qu'il ferait , s'il armait au 
pouvoir. Oe fut comme une nouvelle voie ou- 
verte, dans laquelle on se précipita à Tenvi. » 
Vers la fin du seizième siècle les principes poli- 
tiques énoncés par Hotman (Virent, il est vrai, 
abandonnés par les huguenots ; mais ils ont été 
alors repris en grande partie par les ligueurs. 
Kn somme, la Franco- Qallia a eu au sei- 
zième siècle une importance presque aussi 
grande que le Contrat Social au dix-huitième. 
Ces deux écrits, malgré certains airs de con- 
formité, poursuivaient cependant des buts entiè- 
rement différents : le premier vantait la pré- 
pondérance de l'aristocratie ; tandis que le second 
préconisait le règne des masses. 

« La latinité de Hotman est pleine de rapi- 
dité, de clarté, et d'élégance, » dit avec raison 
M. Sayous. Ces mêmes qualités se retrouvent dans 
le style des écrits qu'il a composés en français. » 
On ne s'étonnera done pas si M. Dareste pro- 
clame Hotman un de nos prosateurs les plus re- 
marquables du seizième siècle. La netteté de ses 
vues, la vivacité de ses passions faisaient que chez 
lui le tissu du discours était nerveux et serré, tan- 
dis que les phrases dea autres écrivains ses con- 
temporains sont généralement lourdes et traî- 
nantes. D'un autre coté, Hotman est bien de son 
siècle, en se servant continuellement des injures 
les plus outrageantes dans ses ouvrages de po- 
lémique, soit religieuse, soit politique, et soit 
même scientifique. — On a de Hotman i DeGm- 
dlbus Cognationis et Adfinttatis ; Paris, 154A; 
— De Actionibus; Lyon, 1548, et Bâle, 1559, 
in-8°; — V Apologie de Socrate, traduite en 
français; 1549, in-8% — De Usuris et Fœ- 
nore; Lyon, 1551, in-8*; — De Statu Primi- 
tive Ecclesix ejusque Sacerdotiis, de Ponti- 
fieis Romani Potestate atqut Amplitudine; 



190 



HOTMAN 



280 



Genève, 1563, in-8° ; réimprimé à Strasbourg, 
en 1555» in-fol., avec le livre du cardinal Pôle : 
Pro Ecclesiasticx Unitatis Defensione, ainsi 
que dans le tome IV des Œuvres de Dumoulin : 
cet ouvrage, qui porte pour nom d'auteur Fr. Vi- 
Herius, est dirigé contre la réfutation du Com- 
mentaire sur l'Édit des Petites Dates de 
Dumoulin, publiée par Raymond Leroux; — 
Commeniarii in XXV Ciceronis nobiliores 
Orationes , eas maxime gua quastionem ali- 
quam juris civilis insignem continent, una 
cum Notis ad Asconium Pedianum ; une pre- 
mière partie, comprenant un commentaire sur 
treize discours, parut à Paris, 1554, in-fol.; le 
tout fut publié à Baie, 1594, in-fol.; cet ouvrage 
fut un premier et déjà excellent essai de l'emploi 
du droit romain pour l'explication des plaidoyers 
de Cicéron ; — Commentarius de Verbis Juris, 
Antiquitatum Romanarum Elementis ampli" 
ficatus;B*k 9 155» et 1563, in-fol.; Paris, 1558 
et Lyon, 1569, in-fol.; — Epistre envoyée au 
Tygre de la France, sans nom de lieu ni date, 
in- 8°, imprimée a Strasbourg: il est maintenant 
hors de doute qu'on doit attribuer à Hotman ce 
pamphlet virulent dirigé contre le cardinal de 
Lorraine un peu après la conspiration d'Am- 
boise; le cardinal mit tout en œuvre pour en 
découvrir l'auteur, « qui, s'il eût été appréhendé, 
dit Brantôme, quand il eût eu cent mille vies 9 
les eût toutes perdues ». Le libraire L'Hommet» 
citez lequel on trouva quelques exemplaires de 
V Epistre, fut condamné à mort et exécuté. 
M. G. Brunet possède le seul exemplaire de ce 
libelle qui soit parvenu jusqu'à nous ; — Juriscon- 
sulte, sive de optimo génère juris interparer 
tandi ; Baie, 1 559, in-8° i cet ouvrage se compose 
de deux parties ; la première a été réimprimée 
à Lyon, 1566 et 1569, in-16; la seconde a paru 
de nouveau, avec beaucoup d'additions, à Lyon, 
1564, in-4°; — Commentarius in IV Imt* 
tutionum libros; Baie, 1560 et 1569, in-fol.; 
Venise, 1569 et 1588 ; Lyon, 1565, 1567, et 1688, 
in-foL; — PartiHenes Juris Civilis elemen- 
tari»; Baie, 1560, in-8°; Genève, 1589, in-16, 
avec adjonctions; — Commentarius in Epis- 
tolam Ciceronis ad Quintumjratrem de pro» 
vincia recte administranda; Lyon, 1564, 
in-4°; Baie, 1591, in-8°; — Corpus institu- 
tionum Juris inJustinianilib. IV, Ulpianil 
et Cau II. concinnatum; Lyon, 1566» in-16; 
— Modesta et moderata de Sacramento Eu* 
charistix Sententia; Lyon, 1 566, in-8°; pubtiéde 
nouveau, sons le titre de : De Sacramento Camss 
Christian* modesta Disputatio; La Haye, 
1635, in -8»; — UAnti-Tribonian, ou discours 
sur Vestude des loix; Paris, 1567, 1603 et 
1609, inr8°; traduit en latin, Hambourg, 1647, 
înf-8°; Leipzig, 1704, hv8°, et 1718, in-4% à la 
suite de VHistoria Juris Romani de Hoffmann: 
ce livre fut écrit pour recommander les réformes 
que le chancelier L'Hôpital avait le projet de 
faire dans la législation civile de la France et 



qui consistaient surtout à ramener à l'unité le» 
coutumes de la France. « Pour faire comprendre 
l'utilité d'une pareille réforme , dit M. Dareste , 
Hotman entreprend la critique du droit romain , 
qui alors était, avec le droit canonique, seul en- 
seigné publiquement en France , à l'exclusion du 
<■ droit françai8.Rien n'est plus vif, plus spirituel et, 
malgré certaines exagérations , plus sensé que 
cette attaque dirigée par un professeur de droit 
romain contre la science qu'il enseigne. 11 montra 
que sur une foule de pointa les dispositions de 
ce droit ont cessé d'être en vigueur et n'ont 
plus d'intérêt pratique. » — De Tribus' Quar- 
to*, Fakidiana t Legiiimaria et Pegasiana; 
Lyon, 1569, in-fol.j — Qussstionum illustrium 
Liber; Genève, 1573, 1576, in-8°; très- 
augmenté, ibid., 1578; Lyon, 1679 et 1585, 
in-8°; Hanovre, 1620, in-12; — Commentatio 
Tripartita ad Libros Feudorum; Lyon, 1573, 
in-fol. ; Cologne, 1574, in-12 ; le premier* Hot- 
man ramena ici la féodalité à son origine germa- 
nique; avant lui on la mettait constamment en 
rapport avec le droit romain ; — Franco-€tallia , 
seu traetatus isagogicus de rcgimine regum 
Gallix et de jure successionis ; Genève, 1573, 
in-8° et in-12 ; réimprimé avec des changements, 
sous ce titre : IÀbellus statum veteris reipu- 
blicx QallicaBy deinde a Francis occupâtes, 
describens ; Cologne, 1574, in-8° : augmenté d'un 
18 e livre , Cologne, 1576, in-8° ; augmenté de six 
nouveaux chapitres, Francfort; 1686, h>*% et 
1666, in-8°; Londres, 1721, in-8*, traduit en. 
français par S. Goulart, sous le titre de Gaule 
tronque; Cologne, 1574, in-8°; réimprimé dans 
le tome H des Mémoires de ? Estai de France 
sous Charles IX; traduit en anglais, Londres, 
1711, in*8°; nous avons déjà mentionné les 
qualités générales et l'importance de ce livre, dont 
nous allons donner ici on aperçu succinct. La 
Franco-Gallàa est le manifeste politique d'un 
parti, déguisé sous la forme d'une thèse d'his- 
toire. « 11 est aisé de se figurer, dit Augustin 
Thierry, par quel abus de méthode fauteur, 
imposant à l'histoire ses idées préconçues, ar- 
rive à montrer que de tout temps en France la 
souveraineté fut exercée par un grand conseil 
national, maître d'élite et de déposer les rois, 
de faire la paix et la guerre, de voter les lois , 
de nommer aux offices et de décider en dernier 
ressort de toutes les affaires de l'État. En dépit 
des différences d'époque, de mœurs, d'origine 
et d'attributions , il rapproche et confond en* 
semble sous un même nom, comme choses de 
même nature, les états généraux des Valois, 
les parlements des barons des premiers rois de 
la troisième race, les assemblées politico-ecclé- 
siastiques, les revues militaires et les plaids 
de la seconde, et enfin les assemblées des 
tribus germaniques, telles que Tacite les dé- 
crit. Le point de départ de cette prétendue nar* 
ration est l'hypothèse d'une hostilité constante 
des indigènes de la Gaule contre le gouverne* 

8. 



231 



HÙTMAN 



232 



ment romain: L'auteur suppose entre les Gaulois 
et les peuples germaniques voisins du Rhin 
une sorte de ligue perpétuelle pour la vengeance 
ou le maintien de la liberté commune. Les ban- 
des franques victorieuses et les Gaulois affran- 
chis, formant au cinquième siècle une seule na- 
tion, fondèrent le royaume de la Gaule franque, 
dont le premier roi Hilerik , fils de Mérowig» fut 
élu par le suffrage commun des deux peuples 
réunis. » La monarchie continua à rester élec- 
tive et non héréditaire, dit ensuite Hotman; le 
peuple (ce qui, dans le langage de l'époque ne 
désigne pas l'ensemble de la nation, mais les 
états assemblés par ordre), garda le droit de 
déposer les rois et de surveiller toutes les me- 
sures d'intérêt général. Hetman s'efforce de cons- 
tater ainsi chez nous l'existence de ce que nous 
appelons le gouvernement représentatif, qui est, 
selon lui, le meilleur des gouvernements. « Hot- 
man, dans lequel on a voulu voir un républicain, 
dit M. Baudrillart dans son ouvrage sur Bodin 
et son Temps , ne parle de l'Angleterre qu'avec 
admiration ; il partage son culte entre ce pays 
et la prétendue démocratie royale de nos ancê- 
tres. Mais on doit se demander si c'est bien l'é- 
quilibre entre les trois pouvoirs (royal, aristo- 
cratique et populaire), que poursuit le juriscon- 
sulte pamphlétaire. Il en est un qu'il traite fort 
durement , un autre qu'il semble favoriser d'une 
particulière affection. Pour un publiciste consti- 
tutionnel il parle de la royauté avec trop d'a- 
mertume et d'emportement, et paraît porter à 
l'aristocratie un intérêt bien exclusif. Il n'aime 
pas ^autorité bourgeoise du parlement, qu'il ap- 
pelle « usurpateur de la souveraineté des états et 
de la puissance des grands comme des rois. » Au 
fond , ce que veut Hotman , on n'en peut douter, 
c'est le triomphe de l'aristocratie » ; — De Fu- 
roribus Gallicis , korrenda et indigna ami- 
ralli Castillioni nobilium atque illustrium 
virorum cœde; Edimbourg, 1573, in-12; réim- 
primé dans V Histoire des Troubles de Belgi- 
que; La Haye, 1619, in-8°; traduit en français ; 
Baie, 1573, in-12 : ce livre, publié sous le pseu- 
donyme tfErnestus Varamundus , contient un 
récit de la Saint-Barthélémy, suivi de pièces 
justificatives; — Institutiones Dialecticx, ex 
fontibusphilosophorum ; Genève, 1573 et 1593, 
in-8° ; — De Statibus Veteris Ecclesix Gallias; 
Cologne, 1574, in-8° ; — Nota Renovatm in Cœ- 
saris Commentaria; Lyon, 1574, in-fol.; Franc- 
fort, 1-606, in-fol., avec fig. , — G. Colinii Cas- 
tellioniiy magni quondam Francise amiraHH, 
Fi*a;l575 et 1579; Utrecht, 1644;— Ad Ti- 
tulum codicis de Pactis et Transactionibus ; 
Bâle et Genève, 1575, in-8°; — Matagonis de 
Matagonibus decretorum baccalaurei Monx- 
toriale adversus Italo-GaHiamsiveAnti-Fran- 
co-Galliam A. Matharellialvernogeni ; 1575, 
in-8° ; Paris, 1577, in-8° ; réimprimé avec l'ou- 
vrage suivant, 1578, 1584 et 1593, in-8°; ré- 
ponse satirique, en latin macaronique, à une 



réfutation de la Franco-Gallia , entreprise par 
Matharel dans le but surtout de défendre les 
droits des reines mères à la régence, droits en- 
tièrement contestés par Hotman. Papire Masson 
ayant répliqué à ce dernier pour soutenir les 
idées de Matharel, Hotman écrivit une nouvelle 
diatribe encore plus violente et plus injurieuse 
que la première, sous le litre de : Strigilis Fa- 
pirii Massoniy sive remediale charitativum 
contra rabiosam frenesim Pap. Massoni , je- 
suitœ excucullati , per Matagonidem de Ma- 
tagonibus , baccalaureum formatum in jure 
canonico, et inmedicina si voluisset; 1-575, 
1576 et 1578, in-8° ; — Ad titulum Codicis de 
Judiciis; Bâle, 1576, in-8 6 ; — Ad Titulum Co- 
dicis de Vsufructu; Bâle, 1576, in-8° ; — Ad 
Titulum Codicis de Pignorïbus et Hypothecis ; 
Bâle, 1576, in-8°; — Consiliorum Volumen; 
Genève, 1578 et 1586, in-fol.; — Nullitatis 
Protestationes adversus Formulam Concor- 
dix Orthodoxarum Ecclesiarum nuper ins- 
titutam a guibusdam doctoribus ubiqui- 
tariis; 1579, in-8° ; pamphlet théologique, plein 
d'invectives contre les luthériens, rédigé en deux 
jours et demi , et publié sous le pseudonyme de 
Joh. Palmerius; André Pouhen ayant répondu 
à Hotman, celui-ci répliqna par un nouveau 
pamphlet intitulé : In virulentam planeque 
sophisticam A. Pouhenii Criminationem ad 
versus Palmerii Protestationes ; Genève, 1580, 
in-12 ; sous le pseudonyme d'Aspastes Salas- 
sus; — Disputatio de Aureo Justinianeo; 
Bâle, 1584, in-8°; Genève, 1585, in-8°, avec 
l'ouvrage précédent; — Antiquitatum Roma- 
narum Libri V; Bâle, 1584 ; Paris et Genève, 
1585, in-8°: cet excellent ouvrage contient des 
recherches étendues, la plupart confirmées par 
la science moderne , sur la constitution romaine ; 
—De Castis Incestisve Nuptiis 9 et de Spuriis 
et Légitimât ione; Genève, 1585, in-8°; Lyon, 
1593, et Francfort, 1619, in-8? ; — Brutum Fui- 
men papse Sixti V adversus Henricumregem 
Navarree; 1585, in-8°; Leyde, 1585, 1602 et 
1603, in-S°; inséré dans le tome ni de De 
Monarchia Romani Imperiiàe Goldast; pam- 
phlet injurieux contre la papauté, traduit en 
français, 1585 et 1587, in-8°; — De Controver- 
sia Patrui et Nepotis in Successione regni ; 
Francfort, 1585, in-8°; Genève, 1586, in-fol. : 
écrit dirigé contre les prétentions à la couronne 
du cardinal de Bourbon , lesquelles avaient trouvé 
un défenseur dans Antoine Hotman , le frère de 
François ; — Observationumet Emendationum 
Libri XIII; Genève, 1586 et 1589, in-fol.; plu- 
sieurs parties de ce recueil avaient déjà paru sé- 
parément; on y trouve les Amicabiles Respon- 
siones ad Cujadum, réimprimées à Hanau, 
1601, in-8°, et 1611, in-12, critique des plus 
acerbes de quelques opinions de Cojas ; — De 
JureSuccessxonis Regise in regno Franccrum 
leges aliquot ex probatis autoribus collecte; 
1588, in-8° : cet écrit, dans lequel Hotman dé- 



233 



HOTMAN 



234 



fcud les droits de Henri IV à la couronne de 
France , n'est pas en contradiction aussi directe 
avec la Franco Galiia que Labitte Ta prétendu 
dans ses Prédicateurs de la Ligue. Mais Hot- 
man s'y montre cependant tout autrement sou- 
cieux des droits de la royauté qu'auparavant: 
en la dépouillant du caractère électif, il considère 
la royauté comme entièrement héréditaire selon 
une loi de succession immuable, qu'il place même 
au-dessus des états généraux ; —Ad Tractatum 
M: Zampini de Successione Prorogative 
primi principis Francise Responsio : cet ou- 
vrage, écrit aussi pour soutenir les droits de 
Henri IV , parut en 1588, sous l'anonyme, sans 
lieu ni date ; il y a des raisons plausibles pour 
l'attribuer à Hotman ; —Disputatio de Dotions ; 
Cologne, 1591, in-8°; dans un recueil sur cette 
matière ; — Scholx in duos titulos Digestorum 
de Testamentis et de Uberis Hseredes insti- 
tuendisvel exhasredandis ; Genève, 1 593, in-8°; 
Francfort, 1665, in-4°;— De Donationibus VIII 
Libri Codicis; Genève, 1593, in-8° ; — Consola- 
tio e Sacris IÀtteris; Lyon, 1593, in-8° ; Hano- 
vre, 1613, in-12; dans ce livre, écrit pendant le 
siège de Sancerre, l'auteur réunit « tous les traits 
choisis par lui dans l'Ancien Testament qui 
montraient la main et le secours de Dieu inter- 
venant pour consoler son peuple d'élection, pour 
le relever et le venger de ses ennemis. Le sen- 
timent de vengeance, était violent dans l'âme de 
Hotman ; et on le voit toujours y céder sans re- 
mords, parce que de bonne foi il croit ne voir 
dans ses ennemis que les ennemis de Dieu. » 
C'est ainsi que s'exprime M. Sayous au sujet de 
la Consolaiio; — Scholx in duos titulos Di- 
gestorum dePactis et Transactionibus ; Ge- 
nève, 1594, in-8<> ; — De Eo quod interest et 
de Mora; Hanovre, 1599, in-8°; — la presque 
totalité des ouvrages de Hotman fut réunie dans 
ses Opéra, 3 vol. in-fol., Genève, 1599-1601, 
qui contiennent en outre quelques écrits restés 
jusque alors inédits, tels que : De Sponsalibus; 
De RUu Nuptiarum et Jure Matrimonio- 
rum , etc. ; — une partie des lettres de Hotman 
a été publiée dans le recueil suivant : Francisci 
et Joannis Hotomannorum patris et filii et 
clarorum virorum ad eos Bpistote;Amtiterdaxu, 
1700, in-4° ; La Haye, 1730, in-4° , ainsi que dans 
\esCelebrium Virorum Bpistolx de Hummel, 
et dans les Bpistolx Reformatoribus scriptm 
de Fuesli. Mais le plus grand nombre de ces let- 
tres est encore inédit , et on en trouve dans les 
bibliothèques de Strasbourg, de Baie, de Zurich, 
de Genève, de Gotha, au British-Muséum et 
surtout à la bibliothèque impériale de Paris (an- 
cien fonds latin, n° 8585, 8586 , collect. Dupuy, 
n° 268; suppl. latin, n° 1297); douze de ces 
lettres ont été publiées par M. Dareste dans la 
Revue historique du Droit Français (année 
1855). Ernest Grégoire. 

Herelet, Pita Hotomanni (en tête des Opéra de Hot- 
«a* et dan» Ulbfcer, fit* JwritconsuUorum). ~ Scé- 



▼oie de Sainte-Marthe, Blogia, t IV. - Bayle, Diction. 

— Nlcéron, Mémoires» t. XI. — nareste, Estai sur Fr. 
Hotman; Paris, 1860. — Haag, La France Protestante. 

— Sayous, Études littéraires sur les Écrivains français 
de la Réformation, t. II. 

hotman (Antoine), jurisconsulte français , 
frère du précédent , né vers 1525, mort en 1596. 
Après avoir étudié la jurisprudence , il entra 
au barreau du parlement de Paris. Resté 
catholique, il soutint par plusieurs écrits les 
droits à la couronne du cardinal de Bourbon. 
IX fut nommé avocat général près du parle- 
ment de Paris , après la journée des Barricades. 
En 1593 il y conclut, au péril de sa vie , en fa- 
veur de la loi salique, lors du fameux arrêt qui 
détruisit les espérances de Philippe H. Après 
l'entrée de Henri IV dans Paris, Hotman reprit 
la profession d'avocat. Dans son Dialogue des 
Avocats, Loisel le représente comme un homme 
aussi judicieux que savant On a d'A. Hotman : 
Traité de la Dissolution du Mariage par 
l'impuissance et la froideur de V homme ou 
de la femme; Paris, 1581, 1595, 1610, in-8°; 
dans cet ouvrage, écrit avec une grande liberté 
d'expression , Hotman se déclare contre le con- 
grès; — Les Droits de l'Oncle contre le Neveu , 
en faveur du cardinal de Bourbon; 1585, 
in-8°; — Pogonia, sive dialogus de barba; 
Anvers, 1586; Rostock, 1624, in-4°; inséré dans 
VAmphitheatrum de Dornavius et dans le 
tome I er des Opéra de François Hotman, auquel 
cette facétie a été souvent attribuée; — Avertis- 
sement sur les lettres octroyées a M. le car- 
dinal de Bourbon , oit Von réfute les préten» 
lions du roi de Navarre; 1588, in-8°; — 
Traité sur la Déclaration où Von prétend 
prouver que M. le cardinal de Bourbon est 
appelé à la succession du royaume; Paris, 
1588, in-8° ; — Traité de la Loi Salique; 1593, 
in-4°; inséré dans les Opuscules françoises 
des Hotmans ; — Traité des Droits et Libertés 
de V Église gallicane; souvent réimprimé, 
entre autres à Paris, 1639. £. G. 

Ersch et Gruber, EncyJdopxdie. 

hotman (Jean), diplomate et écrivain fran- 
çais, fils de François Hotman, né à Lausanne en 
1552, mort le 26 janvier 1636. Après avoir étudié 
la jurisprudence, il passa en Angleterre, où il 
resta pendant cinq ans au service du comte de 
JLeicester. Lorsqu'il fut de retour en France, le 
roi de Navarre le nomma , en 1585, maître des 
requêtes de son hôtel , et l'envoya ensuite en 
Allemagne pour y négocier avec les princes pro- 
testants, mission dont Hotman fut aussi chargé 
sous Louis X1I1, et dont il s'acquitta à la pleine 
satisfaction de ces souverains. Sans se convertir, 
lors de l'abjuration de Henri IV, Hotman tenta 
de nombreux efforts pour amener la réunion des 
catholiques et des protestants. On a de lui : An- 
tichoppinus, imo potius epistola congratula- 
toriaM. NicodemiTurlupini de Turlupinis 
ad Bercatum Choppinum de Choppinis, 
S. Vnionis Bispanitano-Gallicx advocatum 



235 



HOTMAN ~ HOTT1JNGER 



236 



incomparabilissimum; Chartres , 1590, in-8*; 
réimprimé avec le Monitoriale et le Strlgilis 
de François Hotmail et YEpitre de Passavant 
de Bèze; Villiorban, 1593, in-8°; — De la 
Charge et Dignité de V Ambassadeur ; Paris, 
1 604, in-8° ; troisième édition augmentée , Franc* 
fort, 1613, in- 12 ; réimprimé dans les Opuscules 
françaises des Hotmans; — Anti-Colazon f 
ouvrage attribué à Hotmail par Bayle , dans le- 
quel l'auteur se défend d'avoir été, dans le traité 
précité , le plagiaire de Ch. Pascal ; — Opus- 
cules françaises des Hotmans; Paris, 1616, 
in-8° : ce recueil contient, outre VAnti-Tribonian 
de Fr. Hotman et quelques ouvrages de son 
frère Antoine, les écrits suivants de Jean, son 
fils : La Version du Don royal du roi de la 
Grande-Bretagne (Jacques I er ) j— De la Pro- 
vidence ;—Du Progrès de VAme raisonnable ; 
— Le Philosophe, ou l'advis sur les diverses 
occupations de V homme; — La Version de 
la préface de De Thou sur son Histoire; — 
Deux Advis par Souhait pour la Paix de VÉ- 
glise et du Royaume. — Quelques lettres de 
Hotman se trouvent dans le recueil qui contient 
celles de son père; il y en a une trentaine d'i- 
nédites ao British-Muséum et d'autres à la Bi- 
bliothèque impériale de Paris (Ane. fonds latin, 
û° 8585 et 8586). E. G. 

Haag, La France Protestante. 

*hotot (Guillaume de ), moine français, 
né dans la seconde moitié du quatorzième siècle, 
mort évéque de Sentis, le 6 mai 1434. Vers 
Tannée 1411, nous le voyons abbé de Gormery, 
en Tonraine. Il ocoupait cette abbaye depuis 
quelques mois, lorsque arrivèrent des bandes 
anglaises , qui le rançonnèrent d'abord , et s'é- 
tablirent ensuite dans son logis. Chassé de Cor- 
mery, Guillaume de Hotot assiste, en 1416, au 
concile de Constance. En 1417, le pape le nomme 
abbé de Corbie. Cependant ce fut une nomination 
presque vaine. En effet , un compétiteur élu par 
les moines , soutenu par le roi , lui contesta vi- 
vement la possession de cette abbaye. Il repa- 
raît à Cormery en 1423» En 1433, au mois de 
février, le pape le choisit évoque de Sentis. Ho- 
tot conserve néanmoins encommende le monas- 
tère de Cormery, et* réclame en outre devant 
les tribunaux le prix auquel il a cédé , par voie 
de concordat, ses droits équivoques à la pos- 
session de Corbie. 

Guillaume de Hotot prononça, dans le concile 
de Constance, un discours sur les neuf propo- 
sitions de Jean Petit; Oratio de novem Arti- 
culas Joannis Parvi, que nous a conservé le 
numéro 1485 des manuscrits du Roi, t. H, p. 236. 
Mais c'est à tort que le catalogue de ces manus- 
crits lui attribue, sous le num. 5264, un Ca- 
lendaHum commencé à Rome en 1372, et fini 
dans la même ville en 1382. Comme le déclare 
la préface même de ce Calendarium , c'est L'ou- 
vrage d'un certain Guillaume , né dans le dio- 
cèse de Cahors , qui ne fut pas abbé de Saint- 



Paul de Cormery, mais de Saint-Paul à Rome, 
Abbas B. Pauli aima urbis. B. H. 

Gallia Christiana, t. X, col. lis», 1454, et ton. XIV, 
col. 167, 188. 

■ottm&br, ancienne famille suisse, dans 
laquelle on compte plusieurs générations d'éru- 
dits et d'écrivains, dont voici les principaux. 

BOTTINSER ( Jean-Henri ), orientaliste et 
théologien réformé, né a Zurich, le 10 mars 1620, 
et mort dans les environs de cette ville, le 5 juin 
1667. Porté par ses goûts à l'étude des langues, 
il se perfectionna à Groningue dans la connais- 
sance de l'hébreu sons H. Alting, et dans celle 
de l'arabe sous Matth. Pasov. En 1639 on lui 
proposa d'être précepteur des enfants de Jacq. 
Golius; il accepta avec empressement cette po- 
sition, qui lui permit de vivre dans l'intimité du 
plus savant arabisant de cette époque. Golius 
lui donna d'utiles conseils pour ses études et 
lui ouvrit sa riche bibliothèque. Rappelé à Zu- 
rich au moment où II venait de trouver l'occa- 
sion de faire un voyage en Orient, Hottinger re- 
tourna dans sa patrie pour occuper la chaire 
d'histoire ecclésiastique, à laquelle il ajonta, en 
1643, celle des langues orientales. En 1655, à la 
demande de l'électeur palatin , le sénat de Zu- 
rich lui accorda un congé pour aller enseigner la 
théologie et les langues orientales à l'université 
d'Heidelberg. Hottinger resta à Heidelberg jns- 
qu'en 1661. Il se rendit alors aux vœux de sa 
ville natale, qui réclamait ses services. En 1 667 
les états de Hollande le nommèrent profes- 
seur à Leyde. II se préparait à aller s'établir dans 
cette ville quand il se noya dans le Limmat, 
avec deux de ses enfants et un de s«s amis, en 
se rendant à une maison de campagne qoll 
avait dans les environs de Zurich. 

Hottinger a une place distinguée parmi -les 
philologues qui ao dix-septième siècle ont tra- 
vaillé à répandre la connaissance des langues 
sémitiques, connaissance qui a rendu de si 
grands services à la théologie biblique. On a 
été plus sévère que juste en lui reprochant de 
n'avoir pas assez mûri ses ouvrages et de les 
avoir composés avec précipitation. On petit l'ac- 
cuser avec plus de raison de manquer de mé- 
thode; mais ce défaut lui est commun avec tons 
les écrivains de son temps. Un des premiers il fit 
connaître un grand nombre d'écrivains syria- 
ques et arabes , non-seulement par des notices 
biographiques et bibliographiques, mais encore 
par des extraits de leurs ouvrages. Enfin, on ne 
peut oublier qu'il contribua aux progrès des 
études orientales, en établissant à ses frais 
une imprimerie arabe à Heidelberg, pendant 
qu'il était professeur dans cette ville. 

Ses principaux ouvrages sont : Exercita- 
tiones Anti-Morinianstde Pentateucho Sama- 
ritano; Zurich, 1644, in-4°. Cet écrit a pour bat 
de prouver que la recension hébraïque du Pen- 
tateuque est préférable à la recension samari- 
taine, contre le P. Morin, qui avait soutenu Yo- 



287 



HOTTINGER 



288 



pinioa contraire dan» ses Evmreitatione* in 
utrumque Samaritanorum Pentattuchum. U 
y a autant d'exagération dan* le sentiment d'Hot- 
tiuger que dans ©«lui de boa adversaire ; — The- 
sauna Philologieus^ te* Clavis Scriptural Zu- 
rich, 1649, io-8 1 deux fois réimprimé : ©'est une 
espèce d'introduction il l'étude de l'Ancien et du 
Nouveau Testament) -»• fiistoria Orientant, 
qum ex variée orientalium monutnentis col* 
leota agitt Zurioh, 1661, in-4°j 2 e édit. augm., 
Zurtah, 1660, in-4° : ouvrage remarquable pour 
l'époque où il fat fiait, mais dépassé par les tra- 
vaux, plus profond* et plus solides, des orienta- 
listes postérieurs ) -*- Historié EeeUsiasticse 
Met» Testament* Enneas; Zurich, 1061-166?, 
9 vol* pet* in»* ; réimprimée a Hanau, 1666*1667. 
Cette histoire ecclésiastique, qui «'étend du com- 
mencement de l'ère chrétienne au seizième 
siècle, renferme des recherches savantes; mais 
ette cet écrite sans méthode; — Grammatica 
ChaUtxo*&tfriae0i Ubri Ji, cum triptioe ao- 
pendiee chal4ea t syrm et rabbinied; Zurich, 
1652, iu*8°; — Émeçma Orientale sordibus 
bitrbarisaU eontemptui prmértim iintfua- 
rum orientalium oppositumt Heidelberg, 1668, 
in-4°. Recueil des huit dissertations sur l'u* 
Uiité et l'usage des langues sémitiques dans 
tes éludes théologiquee : on retrouve dans ia 
plupart d'entre eUee k dessein bien marqué 1 
de mettre en relief les rapports mutuels des dia- 
lectes sémitiques -, — Promptuarium, site bi- 
bliotheea orienialis exhibera catatogum iive 
centurias aliquot tam auctorum quam ti- 
brorum hebraicwum, iyriacorum, arabi- 
contm, œyyptéacorum ; Heidelberg, 1658, in-4°; 
en outre des noms des écrivains et des titres 
de plusieurs de leurs ouvrages , on trouve dans 
cette bibliothèque des extraits de ces ouvrages . 
propres à donner une idée de leur contenu. A 
une époque où il n'y avait que trés-peu d'écrits 
arabes et syriaques imprimés et où les copies ma- 
nuscrites étaient rares et chères, ce recueil dut être 
d'une grande utilité; — Grammatica Quatuor 
Linguarurh, Hebraiciï, Chaldeœ, Syriacœ et 
Arabie» , Harmonica ut ad linguam hebrai- 
cam, tanquam matrem exterarum, accommo- 
dentur prœcepta-cui accedit Technologia Lin- 
gux Arabica historico-theotogica; Heidel- 
berg, 1659, in-4°; ouvrage remarquable^ non-seu- 
lement par sa concision, mais encore par l'exac- 
titude avec laquelle sont indiqués les caractères 
essentiels de chacune de ces quatre langues : on 
cite surtout le chapitre intitulé : De Vsu hujus 
Grammatie» harmonicas in analysi contextuè 
sacrij-*- Etymologicum Orientale, sive texi- 
con harmonicum heptaglotton ; Francfort., 
1661, in-4°. Les sept langues sont l'hébreu, le 
chatdéen, le syriaque, l'arabe, le samaritain, 
l'éthiopien et le rabbinique, quoique ne compre- 
nant que tes racines. Cet ouvrage, complément 
de la Grammatica Harmonica, a été très-utile 
à l'étude comparée des langues sémitiques. Es- 



timé pendant longtemps, il a été depuis remplacé 
avec avantage par le Lexicon Heptaglotton dé 
Castelli; — Cippi Hebraici, sive ffebrœorum 
tam veterunv quam recentiorum monumenta; 
Heidelberg, 1669 , in- 8° ; 2 e édit., augm. ,ibid., 
1662, in-8° ; '—Enneas Dissertationumphilol*- 
theolog,; Zurich, 1662, in-4°. Michel Nicolas. 

Ji*Hi Heidegger, ffittôria Vits et Obitus J.-H. Uot- 
Ungeri ,• fturich, 1SB7, ln-ll. - Bayle , Dictiotmaire histo- 
rique. — Nicèron, Mémoires, tofn. Vlll. — Leonh, Mëls- 
téF, Èêrûkmié Éurbher, tort». 11; *- Mejer, GêtthieMè 
der Sc*rtf*r*h> iorai 1IM 



ItOtTlMBft {Jeari-Jâcqides ), fils du pré- 
cédent, historien et théologien , dé à Zurich, en 
1692, et mort dallé Dette ville, le 1» décembre 
1735. Il fut f>rtrfesséur de théologie dafli sa ps> 
tiltf. De ses nombreux écrit» il faut citer t 
Sfotm Pûlmteinus inftlix CôticilH Tridën- 

tm mdéximtm, i«go, in-4* ; — %<x Èxer- 

ciMtonum Bistotico-Thêoiogicanm de Pa* 

nimtia prmnt)*, née nm ntmnnm socle- 

sise; Zurich, 1706, in-4 ; — BëtietMhe Kir- 
chèngmhtohte ( Histoire Eëcléslàéfkfiie dé la 
Stdtfsé},' fettricty 1)08-1729, 4 toi. u*a% ouvrage 
encetfe wmèi-*tHOmèë mt0rie+>ThMogioa 
qua prxdestinationem et Godêëchdlci pieu- 
dohmmi advèrëdftortêm yfatiattommmta 
essê êernêhiir'atUti Z*tr\&i ili^ m4*) — 
PèhtM DUééTiattohum BtoUoo-Theohgiaa- 
r%7»» îtètW, 17*3, in*l*j -»*Fata Dottrinm 
de PméèëtiMtioM et Gtatia De* sahâairi, 
sëeUn&a et d&veïsâ, indê a bèati Aposto* 
lâfUni ëœâêSiti ad hac %isque tempord in dn- 
naiê§ digma f Zurich, 1787* nV4 a . M, if< 

^àtcfcldi, Éiôiiùth. theotj. iéleàttt, fort. I, If éi ift, 



HOTTiNtiÊR ( î)aM ) , rlWmistïiaté, pdH-Ûte 
de Jean-Henri Hottinger ( n° 1 ), né à Zurich, et 
mort dads cette ville, en 1736. Une chaire d'his- 
toire ayant été créée à Zurich, il fut le premier 
h la remplir. Il s'occupa principalement des mé- 
dailles et des anciennes monnaies de son pays. 
On a de lui : Deftummis Bracteatis Tigutirtts; 
Zurich, 1702, in-4 6 . 

hottinger ( Jeàil - tienr i ) y tMrfogien, 
frère du précédent, né à Zurich, le 5 décembre 
1681, et mort à Heidelberg le 7 avril 1750. Àprè* 
avoir étudié la théologie dan? sa ville natale, à 
Genève et à Amsterdam, il fut, en 1704, riofnmé 
professeur de philosophie à Marboûrg. L'année 
suivante il fut chargé dé renseignement des an- 
tiquités hébraïques, et eh 17 (0 de celui de la théo- 
logie. A des opinions calvinistes rigides il ajouta 
la plupart des principes de Cocceius , et il exposa la 
doctrine formée de ce mélange, dans on manuel 
de dogmatique intitulé : Typus Doctrine Chrïs- 
tianae; tfrancfort-sur-Mein, 1714, hi-Ô*. Cet ou- 
vrage souleva des tempêtes : otiacctrsaJf.*H. Hot- 
tinger de corrompre /a jeunesse par des prfftcTftes 
mystiques, et en 1717 îl fut forcé de donner sa 
démission. Il Se retira alors à Frankenthal, où il 
devint pasteur de l'Église réformée. En 1721 il fut 



239 



HOTTTNGER — HOUÀRD 



240 



appelé à une chaire de théologie à l'université 
dUeidelberg. II l'occupa jusqu'à la fin de ses 
jours. Outre l'ouvrage déjà indiqué, il publia 
quelques autres écrits, parmi lesquels les deux 
suivants méritent d'être remarqués : Disqui- 
sitio de Revelationibus extraordinariis in 
génère et de quibusdam kodiernis vulgo dic- 
tis inspiratis in specie; 1717, in-8°. Il s'agit 
dans ce livre des prophètes des Cévennes, qui, 
après avoir (ait du bruit en Angleterre, com- 
mençaient d'attirer l'attention en Allemagne; — 
Typas Pastoris Evangelxci; Baie, 1741, in- 8°. 

hottinger (J*an-/7enri), cousin germain 
des deux précédents et comme eux petit-fils de 
Jean-Henri Hottinger ( n° 1 ), né à Zurich, en 
1680, et mort dans cette ville, en 1756. U était, 
médecin ; U se livra surtout à l'étude des sciences 
naturelles. On a de lui . une dissertation sur les 
cristaux , une description des glaciers et quelques 
opuscules insérés dans les Miscellan. Acajde- 
mix JSaturst Curiosorum. 

HOTTUiesi( Jean- Conrad), théologien, de 
la même familleVrae les précédents, auteur d'un . 
traité De Decimis Judxorum Exercitatio, 
Leyde, 1713, in-4°. 

bottinger ( Jean- Jacques) , philologue, 
littérateur et théologien, petit-fils du théolo-, 
gien aux mêmes prénoms , né à Zurich, en 1750, 
et mort dans cette ville, le 4 février 1819. II. 
professa dans sa ville natale les littératures 
grecque et latine depuis 1789, et le grec et la 
philosophie à partir de 1796. Il prit une part 
considérable au Nouveau Musée Attique ( Neues 
AUisckes Musœum), Zurich et Leipzig, 1805 à 
1809, que publiait Wieland. Il avait auparavant 
fait paraître une revue de théologie, de phi- 
losophie et de littérature, sous le titre de Biblio- 
thek der neuesten theologischen , phiioso- 
phischen und schœnen Literatur; Zurich, 
1784-1786, 3 vol. in-8°. On lui doit en outre un 
assez grand nombre d'ouvrages qui prouvent 
ses connaissances variées et étendues; voici les 
titres des principaux : Diatribe philos, theolog. 
de Miraculis , cui adjectus est Excursus Phi- 
losophicus ad Doctrinam Bon net ; Zurich, 1 770, 
in-go. __ Versuch einer Vergleichung der 
deutschen Dichter mit den Griechen und 
Rœmern (Essai d'une Comparaison des Poètes 
Allemands avec les Grecs et les Romains); 
Mannheim, 1789, in-8°; — Veber Bodmer (De 
Bodmer); Zurieh, 1785, in-8°; — Veber SaL 
Gessner (De Sal. Gessner); Zurich, 1796, 
in-8°;— Opuscula Oratorio; Zurich 1816, 
in-8° ; — Opuscula Philologica , critica atque 
hermeneutica ;Lepzig, 1817, in-8°. 

hottinger ( Jean- Jacques ) , neveu du 
précédent, né à Zurich, en 1783. On a de lui 
quelques écrits, parmi lesquels on cite surtout 
Huld. Zwingli und seine Zeit, dargesteUt 
fur das Volk ( Histoire d'Huld. Zwingle et de 
son Temps, écrite pour le peuple) ; Zurich, 1841, 
in-8°. Il a publié, avec M. H.-H. Vœgeli, Y His- 



toire de la Réformation deBullinger, à Fraoen- 
feld; 1838,3 vol. in-8°. 

Erttb et Gruber, Allgem. Bncyttopmdie. 

hotze ( David tan ) , général autrichien 
d'origine suisse, né à Richtenswgl , près de Zu- 
rich , vers 1740, tué à la bataille de Zurich, le 
25 septembre 1799. Fils d'un paysan qui exer- 
çait la médecine , il fréquenta le gymnase de 
Zurich , embrassa la carrière militaire, et entra 
au service du Wurtemberg, où il devint capi- 
taine de cavalerie. En 1771 il passa an service 
de la Rnssie , et se distingua dans la guerre contre 
les Turcs. En 1773, le grand-duc Paul le nomma 
adjudant major au régiment de ses gardes. Ce- 
pendant Hotze quitta la Russie et vint en Au- 
triche, où l'empereur Joseph II le créacolonel. Il 
fit encore la guerre contre la Turquie. Joseph II lui 
conféra le commandement de Jassy, etle chargea 
de l'instruction militaire de son neveu François. 
A son avènement an trône , celui-ci l'éleva au 
grade de général major. En 1793, Hotze servit 
sous Wurmser contre les Français, et se distingua 
à la pri^e des lignes de Weissembourg. En 1795 
il couvrit la retraite du comte de Wartensleben, 
et rut nommé feld-maréchal lieutenant. Deux 
ans après il commandait le centre de l'armée au- 
trichieune au combat de Noresheim , puis il 
s'empara de Kitzingen, et marcha sur Wurtz- 
bourg, où, sous les ordres de l'archiduc Charles, 
il remporta de nouveaux avantages. Les Suisses 
l'appelèrent au commandement en chef de leurs 
troupes; mais en arrivant à Zurich il apprit 
que Berne était au pouvoir de l'ennemi , et il 
retourna à Vienne. En 1799 il occupa les Gri- 
sons , et rejoignit l'armée de l'archiduc Charles, 
qui s'empara de Zurich. Opposé à Massena sur 
la frontière, dans la campagne suivante , il rem- 
porta quelques succès, et finit par reprendre Zu- 
rich ; mais il essaya vainement de soulever ses 
compatriotes contre les Français. Bientôt l'oc- 
cupation de la Suisse fut abandonnée aux Russes. 
Hotze y resta avec 25,000 hommes pour attendre 
l'arrivée de Souvarof, pendant que l'archiduc 
Charles se retirait sur le Rhin. Une nouvelle ba- 
taille ayant eu lieu devant Zurich, les 25 et 26 
septembre 1799, Hotze y périt. J. V. 

J. C. Faesl , Kurxe Lebensbeschreibung des K. K. ge- 
ner al- feldmarschall- lieutenant $ D. Hotze; Zurich , 17W 
et 1800, in-*®. 

houard (David), jurisconsulte français, né 
à Dieppe, le 26 février 1725, mort à Abbevilie, 
le 15 décembre 1802. Il étudia le droit, fut reçu 
en 1747 avocat au parlement de Normandie, 
exerça sa profession à Dieppe, et devint conseil- 
ler échevin de cette ville. Il fit une étude appro- 
fondie des origines du droit normand. Nommé 
d'abord correspondant, puis, en 1785, membre 
associé de l'Académie des Inscriptions et Belles- 
lettres , il vint habiter Paris, où il fut tout à la 
fois avocat au Parlement et censeur royal. I! se 
retira en 1789 dans sa ville natale, qu'il quitta 
plus tard pour se fixer à Abbevilie. On a de lui : 



241 



HOUARD ~ HOUBIGANT 



242 



Anciennes Lois des François conservées dans 
les coutumes angloises, recueillies par lAUle- 
ton, avec des Observations historiques et 
critiques, etc.; Rouen, 1766, 2 vol. in-4° ; nouv. 
édit., Rouen et Paris, 1779, 2 vol. in-4°; — 
Traités sur Us Coutumes Anglo-Normandes, 
publiées en Angleterre, depuis le onzième 
jusqu'au quatorzième siècle, avec des re- 
marques sur les principaux points de V his- 
toire et de la Jurisprudence française anté- 
rieures aux Etablissements de saint Louis; 
Rouen et Paris, 1776, 4 vol. in-4°; le premier 
volume contient des extraits du Domesday-Book, 
rôle des propriétés foncières de l'Angleterre, 
dressé de 1080 à 1086 par Tordre de Guillaume 
le Conquérant; — Dictionnaire analytique, 
historique , étymologique, critique et inter- 
prétatif de la Coutume de Normandie ; Rouen, 
1780-1782, 4 vol. in-4° : on trouve dans le Sup- 
plément, placé à la fin du dernier volume, Y An- 
cien Coutumier en vers , production singulière 
du treizième siècle, dont l'auteur, selon Houard, 
se nommait Richard Dourbault. Mercier, abbé 
de Saint-Léger, a combattu cette opinion dans 
une Lettre à M. Dupuy, sur Fauteur de la 
Coutume de Normandie en vers , insérée au 
Journal des Savants du mois d'août 1785. 
Houard est auteur d'un Mémoire sur les Anti- 
quités galloises, imprimé dans le tome I ,r des 
Mémoires de V Académie des Inscriptions. 
E. Régna rd. 
Note sur la Fie et les Ouvrage» de M. Houard; dans 
tes Mém. de V Académie det Inscriptions, tom. I, p. m. 
— Guilbert , Mémoires biographiques et- littéraires det 
Grands Hommes du Départementde la Seine- Inférieure. 
houbigant (Charles- François), célèbre 
commentateur biblique, né à Paris, en 1686, et 
mort dans la même ville, le 31 octobre 1783. 
Entré en 1704 dans la Congrégation de l'Oratoire, 
il enseigna successivement les belles-lettres à 
Juilly, la rhétorique à Marseille et la philosophie 
à Soissons. H était supérieur du collège de Ven- 
dôme quand il fut appelé à Paris, en 1722, pour^ 
faire les conférences de Saint-Magloire, confé- 
rences qui étaient publiques et qui portaient sur 
les points les plus importants de l'antiquité et de 
la discipline ecclésiastiques. L'excès de travail 
auquel il se livra pour se préparer convenable- 
ment à ces exercices lui causa une maladie dan- 
gereuse , à la suite de laquelle il resta frappé 
d'une surdité complète. Condamné par cette in- 
firmité à une vie retirée , il se voua tout entier 
à l'étude, et principalement à la culture des lan- 
gues orientales. Vers la fin de sa longue vie, il 
perdit ses facultés intellectuelles à la suite d'une 
chute. Le P. Houbigant n'était pas moins distin- 
gué par les qualités du cœur que par celles de 
l'esprit. On loue surtout sa bienveillance et sa 
douceur, qui ne s'altérèrent jamais dans l'isole- 
ment auquel le força son infirmité. Douze ans 
avant sa mort , il fonda dans le village d'Avilly, 
auprès duquel il avait une maison de campagne, 
une école de filles à laquelle il légua une rente 



annuelle de 175 livres. Une de ses plus agréables 
distractions était de composer et d'imprimer lui- 
même ses propres ouvrages ; il avait dans ce but 
établi une petite imprimerie dans sa maison de 
campagne, où il avait l'habitude d'aller passer les 
vacances. On a de lui : Racines delà Langue 
Hébraïque; Paris, 1732, in-8°; cet ouvrage est 
en vers, à l'imitation des racines grecques de 
Port-Royal ; dans la préface, il défend le système 
de Masclef, qu'il avait adopté,, et il s'efforce de 
montrer, non pas seulement là nouveauté des 
points- voyelles, mais encore leur inutilité et 
même leurs inconvénients pour l'étude de l'hé- 
breu; — Prolegomena in Scripturam Sa- 
crant; Paris, 1746, in-4°. Dans cet ouvrage, où 
il suit les traces de L. Cappel, il cherche d'abord 
à établir qu'il s'est glissé dans le. texte original 
de l'Ancien Testament des fautes qui, sans at- 
teindre les points de dogme et de morale, défi- 
gurent cependant les Livras Saints, y produisent 
des obscurités ou en affaiblissent l'énergie; il 
donne ensuite les règles d'après lesquelles on 
peut découvrir^ corriger ces fautes, qui sont dues 
principalement à la négligence des copistes; — 
Conférences de Metz, sans indication de lieu 
et sans date. Houbigant y exposa d'une manière 
populaire les principes de critique développés 
dans l'ouvrage précédent; — Psalmi Hebraici 
menais quam plurimis expurgati (Leyde); 
1 748, in- 1 6. Cet ouvrage est surtout remarquable 
en ce que l'auteur a inséré dans le texte même 
les corrections faites d'après les principes posés 
dans ses Prolegomena. C'était un essai de l'é- 
dition qu'il se proposait de publier de UAncien 
Testament dans le texte original; — Biblia 
Hebraica cum notis criticis et versione la- 
tina ad notas criticas facta. Accedunt libri 
grxci qui deutero-canonici vocantur, in très 
classes distribua ; Paris, 1753 et 1754, 4 vol. 
in-fol. : cet ouvrage , fruit d'un travail de vingt 
ans, fut publié aux frais de la Congrégation de 
l'Oratoire, à laquelle il coûta quarante mille francs. 
L'exécution typographique est soignée. Les ca- 
ractères furent gravés exprès par Fournier le 
jeune. H est imprimé en deux colonnes, dont l'une 
contient le texte et l'autre la traduction. L'hé- 
breu, qui n'a pas de points-voyelles, n'est que la 
reproduction de l'édition de van der Hooght de 
1705. Les corrections proposées par Houbigant, 
qui ne tient aucun compte du kri et du ktib des 
massorèthes, sont, soit à la marge, soit en forme 
de tables à la fin de chaque volume. Elles sont 
de quatre espèces différentes. Celles du Penta- 
teuque sont prises en général du Code samaritain, 
auquel, avec le P. Morin, il donna une valeur 
exagérée; d'autres sont prises de divers manus-, 
crits, qu'il ne décrit pas avec assez de précision 
et qui appartenaient soit à la Congrégation de 
l'Oratoire, soit à la Bibliothèque royale de Paris ; 
d'autres encore sont prises des anciennes versions ; 
enfin un grand nombre sont purement conjectu- 
rales et dressées d'après les principes critiques ex- 



243 



HOUBIGANT — HOUBRAKEN 



244 



posés dans ses Prolegomena. Cette révision du 
texte de l'Ancien Testament n'a pas obtenu tes 
suffrages des hommes compétents. On a reproché 
à Houbigant de ne s'être pas fait des idées justes 
de la valeur des documents dont il s'est servi, 
de n'avoir pas eu une connaissance assez profonde 
de la langue hébraïque, et d'avoir procédé trop 
arbitrairement dans ses conjectures. On a fait re- 
marquer qu'A avait laissé passer sans les rele- 
ver des leçons suspectes ou décidément vfcfieusea, 
tandis qu'il remplace des leçons fort correctes 
par des conjectures qui ne sont pas même d'ac- 
cord arec la grammaire. On peut voir, au reste, 
sur les mérites et les dètauts de ce travail les 
écrits de Meyer et de Sebald Ran, dont nous 
donnons les titres parmi les ouvrages à consulter. 
En outre du texte hébreu, des corrections propo- 
sées, de la version latine et des apocryphes grecs 
de l'Ancien Testament, ces quatre volume* ren- 
ferment les Prolegomena Imprimés déjà en 
1746, des notés critiques destinées à justifier les 
variantes, soit dans le texte, soit dans les traduc- 
tions, et quelques introductions critiques ou pré- 
faces, placées en tête de quelques livres de la Bible 
et consacrées à en défendre l'authenticité et à en 
expliquer les principales difficultés. Latradoctiou 
latine fut imprimée à part sous oe titre : Vêteris 
Testamenti Versio nota; Paris* 1753, 3 vol. 
in-8°. Les notes critiques et les Prolégomènes ont 
aussi été réimprimés a part, sous ce titre t Nota 
Criticse in univêrsôs Vêteris Testamenti Hbros, 
cum hebraicê tum Grèeeeécriptos, cum integrts 
Prolegomeniê , ad exempter Patisiense denuo 
recensas; Francfort-sur-Mem, 1777, 1 vol. in-4*; — 
On a encore du P. Houbigant quelques traductions 
d'ouvrages anglais; — on Examen du Psautier 
français des R P. Capucins; La Haye (Paris), 
1764, h>8°;— une traduction latine des ^rot^rte* 
et de YEcclésiaste ; 1763, in-12 ; — un fragment 
intitnlé Introduction, et devant servir de pré- 
face à on livre qui n'a jamais paru. — Houbigant 
laissa un grand nombre de manuscrits, parmi les- 
quels on cite une grammaire hébraïque en latin ; — 
une traduction de l'ouvrage d'Origènecontre Celse 
qui se perdit par la négligence de l'abbé Chevreuil, 
censeur royal, chargé de l'examiner ; — une Vie du 
Cardinal de JJértiMe, fondateur de la Congréga- 
tion de rOratoire, qui était prête à être mise sous 
presse quand Londet , censeur royal , exigea des 
suppressions et des changements dans plusieurs 
passages qui lui parurent hostiles aux Jésuites , 
modifications qneleP. Houbigant refusa; — une 
traduction française de sa version latine de la 
Bible, dont la publication ftit empêchée par 1 abbé 
RibalHer, qui ne voulut pas donner son approba- 
tion, sous te prétexte que, selon l'archevêque 
de Paris , % fl y avait déjà un nombre suffisant de 
traductions semblables ; — un Traité de la Venue 
tfÉlie, destiné à prouver qu'elle n'est pas aussi 
prochaine que certaines personnes le pensaient à 
cette époque ; — des Remarques sur le livre d'As- 
truc intitulé : Conjectures sur les Mémoires Ori- 



I ginaux dont il parait que Moïse s'est servi 
I pour composer le livre de la Genèse. —Enfin, 
1 il avait entrepris un ouvrage sur la manière d'é- 
I tudier et d'enseigner les belles-lettres, quand la 
publication du Traité des Études de fiollin le 
fit renoncer à un travail détonna» inutile. 
Michel Nicolas. 
Notice eut lit ru et le» Ouvrage» du P. Houbigant, par 
Cadryj Uns Le Magasin Encyclopédique, mai 1806. — 
Sebaldus Ratio», Spécimen Obsetvationwn aa_ C.-Pr. 
Houbigantii Prolegamend in Script. Sacrât* ; Trêve*, 
Ml, 10-4° j réimprimé à Uyde en 178$, son» le litre : 
E»ereitation«t Philologie» ad C-Fr. Houbigantii Pro- 
legomena. - G. W Meyer, Gètch. der SchrtfterkUer., 
tome ÎV, p. ist-iM, M4-*M, tes et 4M. 

notTBHAKE« {Arnold), peintre, biographe et 
poète hollandais, né à Dort, le 28 mars 16604 
mort à Amsterdam, le 14 octobre 1719, D'une fa- 
mille aisée, il fit de bonne* études, et préféra 
la peinture à toute antre carrière. Guillaume 
Drillenbourg, Jacques Laveoq et Samuel Hoag- 
straten furent successivement ses maître». Apre» 
avoir exercé quelque tempe son art dan» an ville 
natale, il se rendit a Amsterdam, et de la en An- 
gleterre, où il dessina le» portrait» des principaux 
personnagesdu pays pour un historiographe qui ne 
le paya point. Houbraken revint à-Amsterdam qu'il 
ne quitta plus. Il y exécuta un grand nombre de 
tableaux et y composa plusieurs ouvrage» litté- 
raire» qui eurent du succès II était considéré 
comme un des bons poètes de son temps, et 
sa Vie des Peintres hollandais suffirait seule 
pour loi assurer la réputation d'un historien éru- 
dit et d'un critique consciencieux. Houbraken eut 
l'avantage de voir les tableaux dont il a fait la 
description et de connaître beaucoup des maîtres 
dont 11 a écrit l'histoire} cependant on désirerait 
qu'il se ftrt plu» étendu en quelque» endroits et 
resserré en d'autre». Puis se» dates sont placées 
confusément, sans aucun ordre chronologique. 
Néanmoins, sans ce travail la biographie et les 
œuvres des anciens peintre» de Flandre et de Hol- 
lande seraient aujourd'hui .presque inconnu»». Le 
Jnériteo? Houbraken comme artiste eatpftn» con- 
testable. Selon Descampsj * il dessinait assez bien ; 
ses compositions sont d'un nommé d'esprit, son 
pinceau est délicat; mais sa couleur est outrée, 
souvent trop rouge et en général peu vraie. Se» 
draneriea, pliéee avec noblesse, présentent mie 
variété de tons qui fatigue l'ati- Cependant se» 
fond» sont riches, et il règne un bon goût dan» 
son architecture, » Ses principaux tableaux sont s 
à l'Hôtel de la Monnaie de Dort, les portraits en 
pied de tous le» personnage» tenant les premier» 
emplois de cette ville; — à La Haye, V Histoire 
ffOreste et de Pylade; — la Continence de Sci- 
pton ; — à Paris, Le Sacrifice d'Jphigénie. 

A. ha h. 
Jatob Cftttpo Weyermad, De JchUdorkofut der Ne- 
dsHmdere. 

HOVBRAftEH (Jacob), graveur hollandais, 
fils du précédent, né à Amsterdam, en 1685, mort 
vers 1746. Il apprit le dessin sous la direction 
de son père, qu'il aida dans la composition de la 



345 



HOUBRAKEK — HOUDÀN-DESLÀNDES 



346 



Vie des Peintres hollanaais, dont il grava lis 
Portrait*. On cite de lui j le Sacrifice de Ma* 
noach, d'après Rembrandt, et beaucoup d'autres 
estampes remarquables par l'expression et vue 
finesse de burin peu commune; tels sont ses por- 
traits : da Czar Pierre le Grand; •— de Geor- 
ge P r , roi d'Angleterre) — de Guillaume M % 
prince d'Orange ; — de Jean Kugper ;—deJa* 
cob van Boom. Parmi les pins rares sont ceu* i 
de Guillaume VIU landgrave de Hesse-Cas* 
sel; — de Glasey; — de Albert S*ba;+- de 
John Taylor ; «— de Mieris / de. Verkolje ;— de 
S.-k. de Bruine; etc. à.nL. 

F. Baaan, Dicttonnoin des Greeenrt* 

Houçéui. Voyez Hossé» et Hussein, 
bocchard (Jean-Nicolas) % général Iran* 
cals, né à Forbach ( Moselle), en 1740, guillotiné 
le 17 novembre 1793. Il quitta à quinte ans la 
maison paternelle pour s'engager dans le régi- 
ment de Roy al- Allemand, cavalerie; il parvint an 
grade de capitaine dans celui de Bourbon-dra- 
gons, et fit, en cette qualité, la plus grande partie 
de la guerre de Sept Ans, en Allemagne* plus 
tard il. suivit son régiment dans la Corse, où U 
reçut à la joue une blessure dont U conserva tonte 
sa vie U cicatrioe. Il était, au moment où la ré* 
volution éclata, lieutenant-colonel d'un régiment 
de dragons. Employé dans l'armée de Cnstine , il 
parvint promptement an grade de général de divi* 
sion,et fut chargé du commandement de l'armée de 
la Moselle. Il avait reçu du comité de salut public 
l'ordre de combiner ses opérations avec celles de 
Beauharnais ( qui avait succédé à Custine dans 
le commandement de l'armée du Rbin) pour 
délivrer Mayence, réduite alors à la dernière ex- 
trémité ; mais ces deux généraux mirent de telles 
hésitations dans l'exécution de cet ordre , que la 
garnison de la ville assiégée , désespérant d'être 
secourue , se vit forcée de se' rendre. Houchard 
passa ensuite au commandement de l'armée du 
nord. Les Anglais venaient de pénétrer sur le 
territoire français. Tandis que le duc de Cobourg 
observait les Français de son camp de Herni et 
faisait poursuivre le siège du Quesnoy, le duc 
d'York porta ses troupes devant Dunkerque. A 
cette nouvelle, le comité de salut public écrivit à 
Houchard ; a U faut absolument préserver Dun- 
kerque et empêcher l'ennemi d'avoir une place 
de communication et de sûreté sur un point aussi 
important : le salut de la république est là ». Et 
en même temps il ordonna aux généraux des 
différentes armées de lui envoyer en toute hâte 
les renforts dont il avait besoin. Bientôt le mo- 
ment d'attaquer l'ennemi arriva, et Houcliard 
montra encore sa lenteur, sa mollesse ordinaires; 
cependant, forcé d'agir par les représentants du 
peuple Delbrel , Bentabolle et Levasseur de la 
Sarthe , qui se trouvaient alors en mission près 
de lui , il gagna, le 8 septembre 1793, la bataille 
d'Hondschoote , dont les conséquences furent la 
levée da siège de Dunkerque et la reprise de 
Fumes et deMenin. Les alliés perdirent dans ce 



combat environ 3,000 hommes tués, blessés ou 
laits prisonniers. La perte des Français rat à peu 
près égale. Cette victoire, outre qu'elle déga- 
gea Dunkerque, fut surtout importante par 
reflet moral qu'elle produisit. Néanmoins, avec 
on antre général que Houchard, les résultats 
eussent été bien plus considérables. Si le 8 il eût 
donné l'ordre de poursuivre les vaincus, il leur 
eût facilement coupé toute communication avec 
Furnes,et, enfermant l'armée anglaise qui as- 
siégeait Dunkerque , il ne lui eût laissé d'autre 
moyen de salut que celui de capituler. Cette se- 
conde faute était beaucoup moins pardonnable 
que la première. Arrêté et conduit à Paris, Hou- 
chard fut traduit devant le tribunal révolution- 
naire, sont l'accusation 1* d'avoir Denise sa 
coopération au plan discuté I Bltche entre les 
générant et les représentants du peuple pour la 
délivrance de Mayence, et d'avoir ordonné la 
retraite de son armée) Y d'avoir, en recevant 
Fouira de faire lever le siège de Dunkerque, 
Changé le plan d'attaque qui lui avait été envoyé 
par le comité de salut public , de telle sorte que , 
pouvant envelopper les ennemis de manière à 
n'en pas laisser échapper un sent , Il leur avait, 
par de mauvaises dispositions, donné les moyens 
de se soustraire à une défaite complète. Il se 
contenta de nier les faits qui lui étaient reprochés 
etde protester deson dévouement a la république. 
Condamné à mort à l'unanimité, il tenta de se sui- 
cider dans sa prison; mais fut secouru à temps. 
Cet événement donna Heu an décret de confis- 
cation des suicides condamnés. Il rat exécuté le 
lendemain 17 novembre 1793. H. Lbsobur. 

Lé Moniteur mni—rêêt, ait 1791 n*Mli-l4#j an r», 
n«» 5, ne, Mi, t*8, t»6 i an u, n»» «69, te, il. - Thiara, 
Uistoire de la Révolution Français*, t. v. — Lamartine,* 
Histoire des Girondins, t. VU. - THsot, Histoire dé la 
RewoluUo*. — La Bai , Dictionnaire BHcfeiopédiqm. 

HOCDAifDBSLAJiDBS (Frarrçois-Sulvai* 
Denis) y littérateur français, né le 6 janvier 
1754, à Vernou, près de Tours, mort subitement 
le 28 juin 1807. Elève de l'École militaire , il en- 
tra comme sons-lieutenant dans le régiment de 
Bretagne, avec lequel il fit le siège de Gibraltar 
en 1782. An moment de la révolution, il était 
capitaine, et, sans en adopter les principes, il 
resta, cependant à l'armée jusqu'au moment où 
un décret de la Convention en éloigna les nobles. 
La retraite de chef de brigade lui ayant été no- 
cordée, il vînt s'établir près de Chinon avec sa 
famille, et consacra son temps à l'étude. On a de 
lui nu* Histoire du Siège de Gibraltar; Lyon, 
1783, in* : cette relation, écrite par un témoin 
oculaire, est suivie d'une Ode sur la Prime du 
Fort Saint* Philippe, «*» laquelle rabatteur 
chante son régiment, q»i*t distingua à l'amant 
de cette forteresse. Houdan-Deslandes avait laissé 
un poème mfitnlé: la Nature sauvage et pu. 
toresque, qui lut imprimé en 1808, in»8°, poème 
didactique en trois chants, où l'on trouve «Quel- 
ques béantes poétique» à enté d'taeoroctaons 
graves. 



J. V. 



247 



HOUDAN-DESLANDES — HOUDETOT 



248 



Chalmd, Bioçr. de la T<mraêne.—Qpéxu& f IaFromce 
Mtérain. 

houdaed. Voy. Lamotte. 

houoâtbr (Julien), théologien français, 
né à Noyen (Maine), en 1562, mort au Mans, 
le 28 novembre 1619. Il avait été nommé rec- 
teur de la Sorbonnele 10 octobre 1595. Il fat 
dans la suite chanoine de la cathédrale du Mans, 
curé de Saint-Nicolas dans la même ville , puis 
supérieur du séminaire diocésain. Son épitaphe 
nous apprend qu'il avait recueilli de nombreux 
documents sur l'histoire du Maine; mais nous ne 
connaissons de lui que l'écrit suivant : Du De- 
voir des Curés ,* Le Mans , 1612, in- 12. B. H. 

Mortel. Dic/fonn. -B. Haaréau, Hist. Littér. du 
Maine, t. II. p. 85t. 

hocdetot ( Robert, sire de ), capitaine fran- 
çais, mort en 1358. Il était d'une famille consi- 
dérable parmi les Normands : dès les premiers 
temps de leur établissement dans la Neustrie, en 
1034, un de Houdetot accompagnait Robert, duc 
de Normandie, dans son pèlerinage à Jérusalem. 
Un chevalier du môme nom se trouvait parmi 
les seigneurs normands que Guillaume le Con- 
quérant conduisit en Angleterre. Deux Houdetot 
étaient à la première croisade. Un autre faisait 
partie de l'expédition qui, en 1070, conquit Naples 
et la Sicile. Robert de Houdetot commença à figu- 
rer dans les guerres de Flandre en 1323, d'abord 
sous le maréchal de Trie, puis sous Raoul, 
comte d'Eu, connétable de France. En 1342 il 
était sénéchal de la province d'Agenois. Deux ans 
après, le roi Philippe de Valois le fit grand-maître 
des arbalétriers de France. Toute sa vie se passa 
à la guerre, et on lit son nom dans toutes les 
listes des capitaines qui combattirent les Anglais 
sous le règne de Philippe de Valois et les pre- 
mières années du roi Jean. La famille de Robert 
d'Houdetot se divisa en plusieurs branches, qui 
continuèrent à tenir un rang distingué en Nor- 
mandie, de B. 

Le P. Anselme. - Moréri, Dict. hist. 

houdetot (Claude -Constance -César, 
comte de), général français, né en 1724, mort 
en 1806. Il se distingua dans les guerres du règne 
de Louis XV. Il se trouva à Fontenoy et sur 
d'autres champs de bataille, et devint lieutenant 
général. Il avait épousé, en 1748, Elisabeth- 
Françoise-Sophie de La Live de Bellegarde 
( voyez ci-après ). 

houdetot ( Élisabeth-Françoise-Sophie, 
comtesse de), née vers 1730, morte le 22 janvier 
1813. Si le nom de la comtesse de Houdetot se 
trouve placé dans un dictionnaire historique, ce 
n'est pas qu'elle ait jamais prétendu à cette illus- 
tration. Sa vie n'était point destinée à la publicité. 
Elle fut une femme aimable, spirituelle, d'un ca- 
ractère plein de charme et de, bonté, d'un com- 
merce agréable et doux. Elle aimait la société des 
gens d'esprit; il lui arrivait parfois de faire des 
vers qui avaient un cachet de grâce, de finesse et 
de sentiment. S'ils étaient connus et répétés au 
delà du, cercle de ses amis, c'était contre son gré; 



elle craignait de passer pour une femme auteur. 
Bien qu'à cette époque réunir dans son salon 
des hommes d'esprit et des littérateurs fut de- 
venu un titre à la renommée, madame de Hou- 
detot n'aurait sans doute laissé de souvenirs que 
dans sa famille et dans la société où elle avait 
vécu, et son nom ne serait pas ajouté à ceux de 
madame du Défiant et de madame Geoffrin. Hais 
Rousseau, en lui donnant place dans ses Con- 
fessions, a fait d'elle une héroïne de roman. 
Lorsque, dans tes derniers temps de sa vie, il 
écrivit ses souvenirs, l'imagination se mêlait 
sans cesse à la mémoire : ce n'est point la vé- 
rité des récits qui donne du charme à son livre. 
Ceux qui ont [été comparés à des témoignages 
exacte et sincères, et particulièrement ceux qui 
se rapportent à M me de Houdetot ont été ramenés 
à une réalité qui ne ressemble pas aux impres- 
sions passionnées et rêveuses que lui donnaient 
ses retours vers le passé : lui-même semble con- 
fondre la passion qu'il éprouva pour elle avec 
celle qu'il ressentait' pour le personnage imagi- 
naire de Julie dans la Nouvelle Èéloïse. Les Con* 
fessions ne sont pas une histoire consciencieu- 
sement racontée, mais Fépanchement d'une âme 
orgueilleuse, malveillante et mélancolique; son 
imagination lui représente sous une couleur idéale 
les faits qui reparaissent dans son souvenir et 
les émotions qu'il avait autrefois éprouvées. 
M me de Houdetot parlait peu de l'époque où Rous- 
seau lui avait témoigné cette passion qu'il a re- 
présentée comme si vive; elle disait simplement 
que beaucoup d'exagération s'était mêlée aux 
souvenirs de Rousseau et en avait altéré l'exac- 
titude, et que si la vérité manquait à ses Con- 
fessions, elle était plus altérée encore lorsqull 
faisait la confession des autres. Sa relation avec 
Saint-Lambert, dont Rousseau avait eu l'indiscré- 
tion de parler, n'était nullement cachée; elle 
dura pendant près de cinquante ans, et dans les 
mœurs du temps elle put être considérée comme 
respectable ; il vivait dans l'intérieur de M** de 
Houdetot comme un vieil ami de la maison , et 
lorsque son intelligence fut troublée et son carac- 
tère aigri, elle redoubla de soins pour lui. Elle 
lui ' survécut dix ans, et conserva jusqu'à son 
dernier jour sa bonté, son goût pour les plaisirs 
de l'esprit et de l'imagination et sa bienveillance 
attentive pour tous ceux qui l'entouraient. De 
temps en temps elle faisait encore des vers ; un 
an avant sa mort, elle disait à propos du ma- 
riage d'une de ses petites-filles : 

Pour célébrer en vers cette heureuse journée, 
Je sens que Je ferais des efforts superflus. 
Mais je bénis ma destinée ; 
Car J'aime encor si je ne chante plus. 

DE B. 

houdetot ( César- Ange, comte de), fils des 
précédents, naquit en 1750; il servit dans l'Inde 
pendant la guerre de 1778, et fut commandant 
de l'Ile de France et de La Martinique pendant les 
guerres de la révolution et de l'empire. H fut 



'249 



HOUDETOT 



260 



lieutenant générai, ainsi que Payait été son 
père. Il avait épousé en premières noces ma- 
demoiselle de Fognes, qui mourut d'une ma- 
ladie de poitrine , jeune encore. C'était elle qui 
répondait lorsqu'on lui demandait : « A quoi 
rêvez-vous ? — Je me regrette. » On a imprimé 
en quelques pages ses Poésies, publiées en 1782 
avec une notice écrite par le cardinal de Brienne, 
archevêque de Sens. Db B. 

De Conrcelles, DicU des Généraux fronçait. 

; houdbtot ( Frédéric-Christophe , comte 
de ), fils du premier mariage du précédent , na- 
quit le 16 mai 1778. Il rat, en l'absence de son 
père, retenu aux colonies par son service, élevé 
par les soins de son grand-père. Atteint par la 
conscription en 1798 , il servit comme canon- 
mer pendant quelque temps. Son goût pour les 
arts le conduisit dans l'atelier de Regnault, et 
bientôt après dans . celui de David. Il vivait 
chez sa grand'mère, parmi des hommes d'esprit 
et des gens de lettres. Le plaisir de la conver- 
sation, devenu alors plus sérieux, portait sur 
de plus graves sujets que le mérite ou Je succès 
des ouvrages littéraires. Nourri à cette école, il ac- 
quit une appréciation fine et juste des personnes et 
des événements, un esprit bienveillant et modéré 
qui le rendaitagréaWedans les relations sociales et 
apte à la conduite des affaires. Nommé, en 1806, 
auditeur au conseil d'État en même temps que 
M. Mole , son parent et son intime ami , il fut en- 
suite appelé en Prusse, après la conquête qui suivit 
la victoire d'Iéna, et fut placé à la tête de l'ad- 
ministration des contributions indirectes. Afin de 
tirer un meilleur parti de l'occupation des États 
prussiens , Napoléon avait autant que possible 
conservé le mécanisme de l'administration, en 
plaçant les subalternes sous la direction d'un 
administrateur français; en même temps il avait 
pensé que déjeunes auditeurs destinés à exercer 
des fonctions civiles et à y apporter la justice, 
la régularité et les ménagements dus à leurs con- 
citoyens, auraient autant que possible les mêmes 
égards pour les vaincus, ce qu'on ne pouvait 
espérer des administrateurs militaires. Ce n'en 
était pas moins une triste mission à remplir; 
M. de Houdetot sut se faire estimer et aimer 
dans la société de Berlin, et maintint l'ordre 
dans une administration qu'avait dirigée avant 
lui le baron deStein. A son retour en France, à 
la fin de 1807, il fut nommé sous-préfet à Château- 
Salins, puis appelé à l'importante préfecture du 
Gard. En 1809, la descente d'une armée anglaise 
à Flessingue et l'urgente nécessité de défendre 
une côte où rien n'avait été disposé pour s'op- 
poser à cette invasion , mirent en évidence ses 
talents et son zèle, et il seconda les mesures 
prises par le maréchal Bernadotte : le 12 mars 
1813 il fut nommé préfet de Bruxelles. Mais 
bientôt sa position devint triste et difficile. La 
bataille de Leipzig et la retraite de l'armée en 
France laissaient la Belgique sans défense. Le 
général Maison sut avec un très-faible corps 



d'armée se maintenir pendant quelque temps 
à Bruxelles, et l'administration conserva en- 
core assez d'autorité et d'influence, pour main- 
tenir le bon ordre et prévenir tout mouvement 
de révolte parmi une population, qui, n'appar- 
tenant pas à la patrie française aurait pu regarder 
la conquête comme unedélivrance.M.de Houdetot 
rentra en France lorsque Bruxelles lut évacué 
par le général Maison. Après la Restauration, il 
eût été , s'il l'eût voulu, placé dans une grande 
préfecture; il préféra son loisir, sa liberté et 
son atelier. L'année suivante, après les Cent- 
Jours, il accepta pour quelque temps la préfec- 
ture du Calvados ; c'était un dévouement méri- 
ritoire : à peine pouvait-il espérer d'alléger 
les maux qui pesaient sur sa province , oc- 
cupée par un corps prussien. Il avait à lutter 
contre l'ardeur de haine et de vengeance des 
vaincus de 1806 : ils étaient exigeants et mena- 
çants ; déjà plusieurs préfets avaient été enlevés 
et emmenés prisonniers. M. de Houdetot sut ré- 
sister, et n'accorda rien que ce qui était autorisé 
parle gouvernement du roi. Aucune contribution 
de guerre ne fut imposée, aucune réquisitionna 
fut exigée* les établissements publics furent res- 
pectés. En même temps il eut a se garantir contre 
d'autres violences : une réunion de royalistes 
s'était formée, et avait pris les armes pour la 
défense d'une cause qui ne courait plus aucun 
danger. Elle ne voulait reconnaître aucune auto- 
rité constituée; au point que quelques-uns de 
ces volontaires royaux avaient pu venir dans le 
cabinet du préfet lui signifier leurs volontés. Ils 
furent désavoués par le duc d'Aumont, leur 
chef; mais, pour suivre cette ligne d'impartiale 
modération, pour résister à l'esprit de réaction , 
un préfet avait besoind'étre approuvé et soutenu 
par le ministère. Telle n'était point la disposition 
de M. deVaublanc, qui venait d'être appelé au 
ministère de l'intérieur. M. de Houdetot donna 
sa démission. Avant de quitter ses fonctions, il 
avait eu l'heureuse occasion de sauver le général 
Grouchy, en le faisant avertir que l'ordre était 
donné de l'arrêter. Au mois de mars 1819 il fut 
nommé pair de France; en 1849 le. départe- 
ment du Calvados l'élut député à l'Assemblée 
législative. Depuis 1852 il n'a pas cessé de siéger 
au corps législatif. Il est aussi depuis longtemps 
membre du conseil général, qu'il a constamment 
présidé. Depuis 1841 il est membre libre.de 
l'Institut , Académie des Beaux-Arts. De B. 

Docum. partie. 

; houdetot ( Charles - Ile - de - France , 
comte de ), général français, né à l'Ile-de-France, 
le 6 juillet 1786. Il était fils du général comman- 
dant de l'Ile-de-France , qui revint avec sa fa- 
mille en France. A quinze ans il entra dans la 
marine, comme novice, et il se trouva à plusieurs 
combats de la flottille de Boulogne; il était sur 
le vaisseau UAlgésiras, à la bataille du 21 juillet 
1805,aucap Finistère, etle 21 octobre à Trafalgar, 
où il fut dangereusement blessé. En 1809, il passa 



251 



HOUDETOT ~ 4 HOUD1N 



252 



dans l'armée de terre comme lieutenant au 
1 er régiment de chasseurs à cheval ; il fit la cam- 
pagne de Wagram , puis il prit part comme capi- 
taine à la campagne de Rassie, soos le maréchal 
prince d'Eckmùhl , dont il devint aide-de«camp t 
une action d'éclat lui valut le grade de chef d'es- 
cadron et la croix de la Légion d'Honneur. U 
resta attaché au maréchal pendant la campagne 
de 1813 et la défense de Hambourg, et rentra 
avec lui en France; en 1816 il le suivit à l'ar- 
mée de la Loire. Âpres avoir été plusieurs an- 
nées sans activité, il fut compris dans le 
corps royal d'état-major et reçut la croix de 
Saint-Louis. En 1823 il servit en Espagne son» 
les ordres du maréchal Lauristao, et devint lieu- 
tenant-colonel et officier de la Légion d'Hon- 
neur. En 1826 il entra comme aide de camp 
dans la maison du roi Louis-PbUJpne, alors 
duo d'Orléans; il est resté attaché à ce prince 
pendant tout son règne et jusqu'à sa mort, 11 fut 
nommé colonel en 1830, maréchaMe-camp en 
1836, et grand-officier de la Légion d'Honneur en 
1840 : il avait fait avec distinction plusieurs cain* 
pagnes en Afrique, et y avait commandé une di- 
vision. En 1842 il devint lieutenant général. 
Quelque temps auparavant il avait été chargé de 
la formation des chasseurs à pied* Se* idées sur 
l'habillement, l'armement et les manoeuvre* de 
ce corps furent accueillies avec une approbation 
unanime; et l'essai réussit si bien, que la créa- 
tion de dix bataillons, sous le nom de chat" 
seurs d'Orléans, fut immédiatement décidée; ce 
nombre fut plus tard porté à vingt. Plusieurs des 
innovations dont on avait éprouvé les avantages 
furent adoptées pour toute l'infanterie française, 
et ont passé dans les année* étrangères. En 
1837 il fut élu député par l'arrondissement de 
Bayeux, et il a siégé à 1* chambre jusqu'à la 
révolution de 1848. Il fut mi» a. la retraite par le 
gouvernement de la république* depuis, il n'a 
point désiré reprendre du service, restant attaché 
et dévoué à la Camille d'Orléans* 

Deux des frères du général de Hondetot, 
fienrie&Aurèle, ont trouvé la mort sur le champ 
de bataille avant l'âge de vingt ans ; Henri périt 
en 1810 à l'armée d'Aragon; il avait déjà mérité 
la croix de la Légion d'Honneur, et le maréchal 
Suchet, dans un rapport qui frit fendu public, 
parle de sa mort en termes honorables. Aurèle 
fut blessé mortellement à la bataille de Leipzig. 
On iguora d'abord qull eût succombé à ses bles- 
sures et la croix de la Légion d'Honneur lui fut dé- 
cernée après sa mort Ds fl. 

Doc. particHliert. 

; nouDETOT ( César- François -Adolphe, 
comte n'), autre petit- fils de M* e d'Houdetot, est 
né en 1799. Il a servi dans l'armée de 181& à 1*3Q. 
Entré dans le» finances, il est fixé depuis long- 
temps au Havre dans l'emploi de receveur par- 
ticulier; c'est dans cette ville que ses livres 
ont été composés avec ses propres souvenirs* 
M. Adolphe d'Houdetot a publié en 1860 un 



récit du départ du roi Louis-Philippe, ayant 
pour titre Honfleur et Le Havre > ou huit jours 
d'une royale infortune. Il avait préparé et di- 
rigé jusqu'à leur accomplissement les mesures 
nécessaires pour rembarquement du roi et de la 
reine ; et il le fit connaître le lendemain au com- 
missaire de marine. On a encore de M. d'Hou- 
detot : Le Chasseur rustique, qui retrace la 
chasse ordinaire avec tout le charme et la cou- 
leur que lea paysages peuvent inspirer ; — La 
petite Vénerie i in-8°j -* Les Chassée excep- 
tionnelle*, sont composées d'épisodes de chasse 
dont le caractàre est aussi animé que spirituel ; 
— >Dix Épine* pour une Fleuri œuvre qui semble 
animée par la souffle de Vauvenargues. F. 

Doc. parti* ~ Afetittfvr «u * Juillet i*fit. 

* aïooDiH ( Robert ), mécanicien , physicien 
et prestidigitateur français, né à Blois (Loir-et- 
Cher ), le 6 décembre 1*0*. Fils d'un horloger 
de Btofe, il fit se* études au collège d'Orléans, et 
fut placé comme ckfc chei un notaire de cam- 
pagne ; mais, se sentant une vocation décidée pour 
l'escamotage, il vint à Paris, oùil suivit avec ar- 
deur les séances des meilleurs escamoteurs, et tt 
les devina ai vite que bientôt ce fut lui qui leur 
fournit Jeun meilleures pièces, Poursuivant ses 
étude» Mécaniques, il obtint des succès qui 
lui valurent des médailles dn jury national pour 
ses merveilleux automates. H commença par 
s'essayer dans des soirées d'amateurs, et y 
réussit, par la finesse de son jeu et par ses 
ssJIHe» ; bientôt les premiers salons de Paris se 
le disputèrent. M. R. Boudin fit une révolu- 
tion dans l'art de la prestidigitation ; ce n'était 
ptos le vieil escamotage avec les gobelets, les 
boites à double fond et les compères; c'était un 
homme du monde, vêtu oomme tous les assis- 
tants, et qui, sans tout cet attira* des sorciers en 
robe, sans baguette et sans gobelets, émerveil- 
lait les spectateurs par son adresma et son es- 
prit. En 1845 il ouvrit au PaJais-iVoyai ces 
Soirées fantastique» qui attirèrent la meilleure 
société de Paris. Se» automates , Aurttf t La VoL 
tigeur, VOremper, Le PéUissier, La BouteiUe 
inépuisable, excitèrent une admiration générale. 
Au bout de dix ans il céda son établissement à 
son élève et beau-frère M* HanaitteuU). Aujowr- 

(1) Votet sa estante «e U putoMoce «t 4e l'utilité 
d'un prestidigitateur. Ou sait combien les marabouts sont 
hostiles en Afrique à la civilisation française. En iSSY, le 
gouvernement français pensa qa*tt pouvait, grijce a* 
talent te M. notert Hoadto, détruire l'toSuençe exercée 
par eea dernier» sur les indigènes. On annonça aux 
Arabes l'arrivée d'un homme extraordinaire, opérait 
des miracles. Lorsque font fat disposé pair le* expé- 
riences, les marabouts ne furent pas les «oins emprea- 
sé> à a»j rendre. La» efforts qu'ils firent ponr discréditer 
dans l'esprit de leurs dupes ce redoutable concurrent 
devaient faire ressentir davantage tes choses anjprmaalus 
qui allaient confondre leur raison. 11 fallait frapper Juste 
et fort sardes Imaginations grossières et sur des esprits 
prévenus. Robert Boudin étudia les hommes devant les- 
quels il était appelé à déployer les ressources dn anst 
talent, et il opéra sar eu une fascination telle. , one 
leurs facultés mentale* forent plus d'une fols ébranlées* 



253 HOUDÏN *■ 

dlim M; Robert Houdln rit retiré dans sa ville 
natale, et s'y occupe de travaux de mécanique, 
d'électricité et de la publication des Confidence 
(?<un Prestidigitateur, ouvrage en 2 vol,, qui 
doit paraître vers la fin de 1*66. A. Jadm. 

flatta, MoberiHoudin.ta vie, ses œuvrai, ion thi&v*. 
- Monitmir, octobre, lftftT, — tfooMnsnt* fartfoiiJfef* 

e( que pendant quelques instants plusieurs «t'entre enx 
parurent privés de la raison. Nous ne citerons que quel- 
ques-unes de ees curieuses eipérlenœs. Un des moyens 
employés par les marabout» pour se grandir aux yeux 
des Arabes et établir sur eux leur domination , c'était de 
faire croire en leur invulnérabilité. L'un d'eux faisait 
charger une arme à feu qu'on tirai! sur 1*1 pune eonttsr 
dvtanee. Impassible, le marabout prononçait quelques, 
paroles cabalistique?, et le coup ne partait pas. Uu, 
premier coup d'œtl, Robert Houdln comprit le mys- 
tère. Il démontra que le fusil ne faisait point explosion 
parce que le marabout avait habilement bouché la Jn« 
miere. Furieux do se voir ainsi dépouillé de son auréole « 
le thaumaturge laissa éclater sa colère. Le prestidigita- 
teur ne s'en émut aucunement, et ne vit là qu'une occasion 
d'établir sa supériorité. « Tu peux te venger, djWl ft« 
marabout; prends un pistolet, celui que tu voudras, 
charge- le toi-même. Voie! des balles, mets-en dans lé 
canon $ mais auparavant, afin de la reconnaître, fâls-y 
une marqpe av«o ton couteau, » L'Arabe suivit de pqlnt en 

ÏDint ces prescriptions. « Tu es bien sûr maintenant , dit 
obert Houdln, que ton arme est chargée et que lç 
coup partira ; dls->mol n'éprouvea*tu aucune peine do me 
tuer ainat, quoique Je l'y autorise? —.Tu es mon en» 
nerai, répondit froidement l'Arabe, ]e te tuerai. » Sans 
répliquer, Robert Houdln piqua une pomme sur la 
peinte d*on couteau; puis,eatme et souriant, il alla se 
piaee* devant l'Arabe et lui commanda de faire feu. Le 
coup partit , la pomme alla voler au loin , et k sa place 
apparut Axée sur la pointe du couteau la balle marquée 
par l'Arabe. Tout le monde eetinatt le tour delà boe> 
teUte Inépuisable j devant les Avattes, en fut du eafé qae 
l'pablle physicien Ht venir de la sorte, mais la. plupart 
refusèrent d'en boire , croyant ce breuvage sorti des otf- 
ieinea du diable. Une autif expérience frappa plus Ibrte*- 
meat l'eaprit des indigènes. Houdln, eonnalaaant le 
culte qu'ont ces hommes pour la force physique, leur 
dit qui! avait te pouvoir de les énerver, de les priver de 
leur forée) et pour le prouver M fit apporter un ooffâe 
de petite dimension, et qu'un enfant eut pu aoqlayqr 
avec un doigt. On sait qu'à la volonté du prestidigitateur 
ee coffre devient si lourd qu'il semble être rivé au soi, 
et que les hommes les plus robustes ne peuvent l'en ar- 
racher. Quand les marabouts, se virent dans l'impos- 
sibilité de soulever un objet d'un aussi mince volume, ijs 
furent anéantis et ne mirent pas en doute qu'il n'eût le 
pouvoir de les énerver à sa fantaisie. Ils manifestèrent 
cette opinion devant Robert Houdln, qui leur répondit 
aussitôt : « Eh bien» oui, J'ai le pouvoir de vous anéantir; 
et si l'un de voua veut se prêtera mon eipérienee, Je 
le ferai évanouir en fumée. a Le nombre des curtarix 
était grand* Le Jour fixé pour cette expérience* «m ma- 
rabout fanatique avait consenti à se livrer au sorcier ; 
on le Ht monter sur une table et on le revêtit d*one gaie 
transparente; puis Robert HunHa et une autre personne 
soulevèrent la table par las deux bouts et l'on vit l'Arabe 
disparaître au milieu d'un nuage de fumée, A cette vue tous 
lés spectateurs s'enfuirent tumultueusement de la salte. 
Bu proie à «ne terreur Inimaginable, poussant des cla- 
meurs insensées, se livrant à des démonstrtttops inspirées 
par la démence, ils parcoururent ainsi une grande dis- 
tance. Enfin l'un d'eux, moins terrifié, arrêta ses cama- 
rades, et leur dit qu'il fallait voir ce qQ'étatfc devenu le 
marabout. \U revinrent sur leurs pas, et ne furent pas 
peu surpris de le retrouver sain et sauf près de la salle 
où l'expérience avait eu Heu. Pressé de questions, il leur 
dit qu'il était semblable à un homme ivre, ne pouvant 
rien se rappeler et Ignorant cornaient il se trouvait en 
eet endroit. Ces faits singuliers ont porté une grave at- 
teinte à la suprématie des marabout», et ont fait du 
eesèbre prestidigitateur «q objet d'admiration parmi les 



HOUDiON 254 

eUHJDOif (Je^ Antoine)* statuaire fran- 
çais , né à Versailles , en 1740, mort le 16 juil- 
let 1828. A cette époque, beaucoup de comman- 
de» monumentale*, suite et complément de* 
grand* travaux de Louis XIV, avaient été ache- 
vées successivement dans les résidences royales 
et dans la magnifique enceinte des Tuileries ; 
mais leurs auteurs n'existaient plu», ou ils étaient 
arrivés a l'âge du repos; en sorte que le jeune 
artiste, privé pour lui-môme d'un de ces maîtres 
qui servent de guide au talent novice, semblait 
s'instruire en étudiant la sculpture faite par le* 
autres plutôt qu'en la pratiquant lui-même. Néan- 
moins, le mécanisme de l'art lui fui; enseigné par 
Michel- Ange ôlodta, et, plus tard, il reçut des 
conseils de Pigate. Mais la nature l'avait fait sculpo 
teur. Élève laborieux, et distingué de l'École de* 
Beaux-Arts, il remporta le grand prix de sculpr 
ture à dix-neuf ans , et partit pour Rome. H était 
en Italie lorsque les villes d'Herculanum , de 
Stables et de Pompéi reparurent à la lumière 
du oiel et que le sol rendit inopinément aux arts 
et aux science* le dépôt qu'il avait reciré dans 
son sein pendant tout de siècles. A 1* voix de 
Wmckelmann, interprète chaleureux de l'anti- 
quité et vivement secondé par. les efforts de Ra- 
phaël Mengs pour «a raviver le sentiment , l'I- 
talie se ranimât Un jeune homme plein de feu et 
d'émulation ne pouvait être spectateur indiffè- 
rent de ce réveil. Houdon pas** dix ans sur la 
terre classique à cette époque d'enthousiasme , 
et de. plus, il fut chargé à, Rome d'un travail qui 
fixa sur lui l'attention publique. Il n'était pas 
rare alors de voir les Romains confier a nos lau- 
réats académiques d'importantes . commandes. 
SlodU avait (ait , pour U basique de Saint- 
Pierre, un groupe 4e saint Rruno, fondateur dp 
Tordre des Chartreux, au moment où celui-ci 
refuse la mitre qui lui qst "apportée par uq ange. 
Houdon exécuta en marbre la, statue colossale du 
mémo saint, qu'on admire so^us le porche de 
l'église de Saiote^arie-des-Aages : inspiration 
de Le Sueur, elle donne Vidée la plus fidèle <fe 
l'humilité et de la ferveur claustrales. Mais nul 
éloge ne dut flatter plus l'auteur que celui qu'en 
fit le pape Clément XIV» «- Si te règle de son 
ordre, dit le spirituel pontife, ne lui prescrivait 
pas le silence, elle parlerajt. » De retour en 
France, Houdon esquissa le petit modèle en plâ- 
tre d'un Morphte, qui,, exposé au salon de 
1771, valut à l'artiste sou agrégation à l'Académie 
de Peinture et Sculpture; quatre ans. après, tra- 
duite en marbre de grandeur naturelle, cette 
figure le fit recevoir académicien. Elle ne fut 
pas sans influence sur l'heureuse réaction qui 
s'opérait dans la marche de l'art. Mn^. Vestale , 
servant de lampe de nuit, offrit un exemple de 
l'ingénieux et poétique système d'ornementation 
appliqué par les Grecs à leur industrie. Une Mi- 
nerve, médaillon en marbre, compléta pour l'ar- 
tiste une exposition toute mythologique* Acadé- 
mjciea» Houdon crut» sa pouvoir, mieux payer 



255 HOUDON 

son tribut an corps enseignant que par un de ces 
ouvrages propres à former des dessinateurs, et 
qui finissent par devenir, dans l'école, l'expres- 
sion consacrée de la structure musculaire du 
corps humain, un Écorché. Cette étude, haute 
de cinq pieds et demi (dimensions convenables 
à l'amphithéâtre), est fort estimée. Pour l'ins- 
truction élémentaire, elle est rationnellement 
préférable à ces moulages sur préparations ana- 
tomiques qui , ne donnant que la nature morte, 
peuvent conduire l'élève à de graves erreurs. 
L'auteur en fit lui-même, pour l'usage privé, 
une réduction , reconnue supérieure à l'original 
en grand. Mais la preuve que ces deux résultats 
furent on double service rendu à l'art , c'est que 
les reproductions s'en répandirent bientôt dans 
tous les ateliers de peinture et de sculpture. 
V Écorché deHoudon fut partout regardé comme 
le meilleur rudiment du dessin. 

Déjà la réputation de l'artiste avait franchi les 
mers. L'assemblée générale des États-Unis ayant 
décerné une statue à Washington, Houdon fut 
appelé en Amérique pour l'exécution du monu- 
ment; il y fut conduit par Franklin. A Philadel- 
phie, il résida dans la maison même du libéra- 
teur. Là , pouvant observer à loisir la physio- 
nomie de son hôte , il modela le buste , qu'il 
rapporta en France. C'est à Paris et d'après ce 
modèle, frappant de ressemblance, qu'il fit la 
statue en marbre inaugurée dans la salle de 
l'État de Virginie. De cette image dérivent pres- 
que tous les portraits, peinture, sculpture ou 
gravure , du guerrier-citoyen. Les études de Hou- 
don en Italie avaient favorisé chez lui l'aecord de 
la vérité de nature avec un faire large et facile, 
qui convenait bien au portrait. Sans négliger ces 
riens qui contribuent tant à la ressemblance , il 
savait faire un choix dans les détails, et con- 
server au style de la grandeur. Ce n'est pourtant 
pas ce grand goût des anciens, qui manifeste toute 
l'âme du modèle par la simple et énergique ex- 
pression de quelques traits du visage ; mais c'en 
est un reflet satisfaisant. En 1773, les bustes de 
Catherine 11, impératrice de Russie, du prince 
Galitzin et de Diderot; en 1775, ceux de Tur- 
got, le nom le plus populaire de France à cette 
époque; de Gluck, le plus grand artiste de l'Eu- 
rope; de Sophie Arnould, actrice aimée du pu- 
blic et toujours sûre de lui plaire, représentée 
dans le rôle à'Iphigénie , eurent un succès im- 
mense. Mais nous devons ajouter que l'artiste 
avait exposé en même temps un petit bas-relief 
en marbre figurant une Grive suspendue par la 
patte, chef-d'œuvre de vérité et de naïveté. O 
vanité des gloires humaines ! la sublime image 
de Gluck , où respire le génie , eut probablement 
moins de part à la vogue que l'oiseau mort. 
Houdon dut songer en riant à la caille de Pro- 
togène. On attendait l'artiste au salon de 1781 : 
il devait y produire la figure de Diane, com- 
mandée par l'impératrice de Russie; la statue 
àtTourviUe, dans des proportions colossales, 



256 
pour la Collection des Français illustre» que 
Louis XVI faisait exécuter ; enfin la statue de 
Voltaire assis : ces trois objets en marbre. Le 
parti pris de représenter Diane entièrement nue 
est un oubli de toutes les convenances mytho- 
logiques ; il fit refuser à l'ouvrage les honneurs 
du salon. Dans le fait, cette détermination de 
l'artiste est inexplicable. Un poète seul pouvait 
s'écrier en la voyant : Oui, c'est Diane! En 
dépit de l'exclamation de Rulhière , nous n'y pou- 
vons voir qu'une suivante de Vénus; ce qui 
n'empêche pas que l'arrêt d'exclusion ne nous 
semble trop rigoureux. Ce bannissement était si 
peu prescrit par les bienséances de l'art, que la 
répétition de la même figure en bronze s'est vue 
longtemps au milieu de la principale cour de la 
Bibliothèque du Roi, et se voit encore au Louvre, 
dans le Musée d'Angoulême. La difficulté de sa- 
tisfaire par le costume moderne aux exigences 
sculpturales a été la seule cause de l'espèce de 
recherche qu'on a pu reprendre dans l'amiral 
Tourville, où l'auteur, privé des moyens de 
donner à la simple pose un caractère monu- 
mental, a tâché de faire concevoir un marin 
luttant à la fois contre les ennemis et les élé- 
ment conjurés. Il se trouvait plus à Taise pour 
la statue de Voltaire. Fidèle aux doctrines grec- 
ques bien entendues , et averti par le triste essai 
d'une figure nue tenté par Pigale, il habilla le 
personnage; mais l'ajustement fut une simple 
draperie. Ce marbre présenta au public parisien 
une image aussi noble que vraie de son poète 
et de son philosophe favori. La statue; pleine 
de vie, ne fut critiquée que sur la manière dont 
elle était vêtue, c'est-à-dire qu'elle renouvela, 
comme on devait s'y attendre, l'éternel débat sur 
b question du costume dans les statues monu- 
mentales érigées aux contemporains; mais le 
système grec triompha. Elle fut offerte par 
M me Denis à l'Académie Française; de là elle 
passa au Théâtre-Français, dont elle décore le 
vestibule. 

Le buste de Molière, pour le foyer du même 
théâtre, fut aussi l'ouvrage de Houdon, qui en- 
richit encore du buste de Voltaire ce brillant 
local. A chaque exposition du Louvre, l'artiste 
produisait des portraits nombreux et toujours 
bien accueillis. Telle était sa fécondité que quel- 
quefois son contingent occupait seul autant de 
place que celui de tous ses confrères. La popu- 
larité s'attacha à son talent, et il fut pendant 
assez longtemps le sculpteur de son époque. 
Louis XVI, le comte de Provence, Mesdames 
de France , Adélaïde et Victoire; le prince 
Henri de Prusse; /.-/. Rousseau, dont le sta- 
tuaire alla mouler le masque en toute hâte à 
Ermenonville, aussitôt qu'on eut appris la catas- 
trophe de sa mort ; Suffren, le héros de l'Inde; 
deux des jeunes officiers français qui avaient pris 
part à la guerre de l'indépendance américaine, 
La Fayette et Bouille; Franklin, et D'Alem- 
bert, la princesse Daschkof, comme directeur 



257 



HOUDON — HOUKL 



268 



de l'Académie des Sciences à Saint-Pétersbourg; 
Buffon, de qui le buste, commandé par l'impéra- 
trice de Russie , est peut-être le chef-d'œuvre de 
son auteur; Le lieutenant de police Lenoir; 
Sacchini, Gerbier, Mentelle, Vabbé Barthé- 
lémy, Mirabeau ; Mirabeau, dont le nom, comme 
un tonnerre lointain, annonce l'orage qui va 
fondre sur la France. Quel cortège de célébrités ! 
L'artiste avait connu presque tous ses modèles; 
bien venu de chacun, il fut admis dans l'intimité 
de plusieurs; et, comme il était du commerce 
le plus affable, comme sa spirituelle bonhomie 
avait beaucoup de charme, il était devenu l'ami 
de presque tous ; en sorte que c'était un plaisir 
de lui entendre raconter ses souvenirs, ce qu'il 
faisait avec une naïveté pleine d'intérêt. La naï- 
veté était dans l'homme. Quand on rapproche 
les uns des autres ses ouvrages dans divers 
genres et de différentes époques , on reconnaît 
que cette qualité y est constante et qu'elle forme 
le caractère prédominant de tous. La pratique du 
portrait devait la rendre durable , et l'on peut 
dire qu'il s'est peint dans ses œuvres. Ses têtes 
de jeunes filles sont comparables aux plus char- 
mantes études sorties du pinceau de Greuze, 
avec qui elles rivalisent d'ingénuité , d'innocence 
et de grâce. La jolie figure de La Frileuse, trop 
connue pour avoir besoin d'être décrite, est 
un type de naïveté. 
* La révolution venait d'éclater. H était difficile 
à Houdon d'échapper au danger de sa renommée. 
A défaut de toute commande publique ou privée, 
et pour occuper ses loisirs , ayant eu l'impru- 
dence de reprendre une vieille statue de sainte 
Scolastique , abandonnée depuis plus de trente 
ans dans un coin de son atelier, il fut dénoncé à 
la tribune de la Convention. Mais un membre 
de l'assemblée prit sa défense ; il eut la présence 
d'esprit de faire de la sainte une statue de la 
Philosophie , et l'artiste , qui avait exécuté les 
portraits des plus grands philosophes , fut hono- 
rablement acquitté. D'ailleurs , plus de travaux 
brillants! une jeune génération d'artistes s'en 
empare, et cet empressement des ambitions 
nouvelles est justifié par une meilleure direction 
dans la marche* de l'art , direction à laquelle 
Houdon avait contribué lui-même par ses exem- 
ples. H fut encore chargé d'une statue en pied 
de Cicéron , pour l'escalier du Sénat conserva- 
teur, et de plusieurs sculptures colossales pour 
la colonne monumentale de la grande armée à 
Boulogne-sur-Mer. Mais l'âge de la retraite était 
arrivé pour lui. Il avait atteint la vieillesse sans 
infirmités. Sa tête , presque entièrement chauve, 
avait pris un caractère si vénérable que Gérard, 
dans son tableau de V Entrée de Henri IV à 
Paris , peignit d'après lui un des magistrats qui 
présentent au roi les clefs de la ville. Il finit par 
perdre la mémoire. Revenu à l'état d'enfance, 
après avoir parcouru le plus grand cercle de la 
vie humaine, et toujours préoccupé de son art, 
alors même qu'il n'y pouvait plus réfléchir, il 

NOUV. BIOGR. GÉNÉR. — T. XXV. 



croyait voir une sculpture dans un caillou , et 
il le ramassait ; le soir, on trouvait les poches 
du vieillard lestées de ces chefs-d'œuvre. Mal- 
gré l'absence de sa raison , il continua d'être 
assidu aux séances de l'Institut et aux repré- 
sentations du Théâtre-Français. Ses dernières 
années forent un assoupissement presque con- 
tinuel ; le dieu du sommeil , qui avait eu le pre- 
mier hommage de son talent, semblait lui avoir 
réservé ce bienfait , pour lui épargner les an- 
goisses qui rendent si pénible la fin de l'exis- 
tence. Agrégé à l'Académie de Peinture et Sculp- 
ture en 1774, académicien et professeur en 1778; 
membre de l'Institut et de la Légion d'Honneur 
dès l'origine de ces institutions , professeur actif, 
puis honoraire, puis émérite, à l'École Royale 
des Beaux-Arts, il n'a manqué à Houdon aucune 
de ces distinctions personnelles auxquelles l'o- 
pinion publique attache du prix. [ Miel , dans 
VEnc. des G. du M.] 
Nouvelle Biogr. des Contemp. - Archiv. du Mutée, 

* HOUDON ( Mârie-Ange-Cécile Langlois, 
M me ), femme du précédent, née en 1748, morte à 
Paris, le 22 février 1823. On a d'elle : Belmour, 
par M™* Dymmer (miss Damer ), roman tra- 
duit de l'anglais par M»*H-n; Paris, 1804, 
2 vol. in-12. Ersch attribue à tort cetle traduc- 
tion à M me G.... Houdin. 

Beuchot , Bibliogr. de la France ; 1818, p. 787. - Ha- 
ïra), Annuaire Nécrologique; 1818; - Qu'rard, La\France 
Littéraire. 

hoc dry ( Vincent), écrivain religieux fran- 
çais, né à Tours, le 22 janvier 1631, mort à Paris, 
le 29 mars 1729. Ses études achevées, il entra 
chez les jésuites de Paris en 1644, et fit ses vœux 
en 1665. Il professa pendant quelques années 
dans les établissements de sa Société, et se livra 
ensuite pendant trente ans à la prédication; 
enfin il ne s'occupa plus que des travaux de com- 
position dans son cabinet. On a de lui : Sermons 
sur tous les sujets de la Morale chrétienne, 
par le P. ***, de la Compagnie de Jésus; 
Paris, 1696 et ann. suiv., 20 vol. in-12; — 
Traité de la manière d'imiter les bons prédi- 
cateurs, avec les tables pour les différents 
usages qu'on peut faire des sermons sur tous 
les sujets de la morale chrétienne; Paris, 
1702, in-12 ;— Bibliothèque des Prédicateurs, 
contenant les principaux sujets de la morale 
chrétienne; Paris, 1712, et ann. suiv., 23 vol. 
in-4°; Liège, 1716, 4 vol. in-fol. L'auteur a mis 
à contribution pour cette compilation les ser- 
monnaires anciens et modernes. Houdry a en 
outre composé des poésies latines , parmi les- 
quelles on cite : Ars Typographica, carmen; 
et une pièce de vers sur la Collation, où il fait 
de fort jolies descriptions de la fraise, de la 
crème et du melon.- J. V. 

Mémoire* de Trévoux, janvier I7î8 et avril 1746. — 
Chaudon et Delandine, Dict. univ.'.Hist^ Crit. et Bibliogr. 
— Quérard, La France Littéraire, i 

* houel (Nicolas), philanthrope français, 
du seizième siècle, était né à Paris, où il excr- 

9 



959 



HOUEL — 



çait la profession d'apothicaire. Soutenu par 
Henri III, par la reine et par d'autres personnages 
distingués, il fonda au faubourg Saint-Marceau 
un établissement qu'il appela Maison de la 
Charité chrétienne* On y trouvait une chapelle, 
un enclos nommé Jardin des Simples, où Ton 
cultivait des plantes médicinales , -une apothi- 
cairerie complète, une école pour les jeunes or- 
phelins et un hôpital coatigu. Les jeunes or* 
phelins y étaient initiés aux lettres et instruite 
dans la matière médicale. Ils étaient chargée 
d'administrer aux pauvres honteux de la ville et 
des faubourgs les médicaments qui leur étaient 
nécessaires. L'hôpital était mue sorte d'hôtel 
pour les voyageurs indigents. Après la mort 
d'Honel le roi ordonna que les soldats et gentils- 
hommes pauvres blessés à la guerre seraient 
traités et médicamentés gratuitement dans cet 
établissement, ainsi que les pauvres honteux; 
puis les soldats invalides furent logés gratuite- 
ment à cet hôpital, à l'exclusion des voyageurs; 
enfin tout l'établissement fut attribué aux sol- 
dats blessés , et ce fut le premier essai d'un hô- 
tel des invalides en France. On a deHouel : Aver- 
tissement et déclaration de l'Institution de 
la Charité Chrétienne , établie es fauxbourg 
Saint-Marcel en 1578; Paris, 1580,in-8°. J. V. 

Paulin Paris, Catalogue des Manuscrits Français M 
la Biblioth. Royale. - i\ Ulong, £M. Bistor. de la 
France, 

houel ( Jean - Pierre - Louis - Laurent ), 
graveur français, né à Rouen, en juin 1735, 
mort le 14 novembre 1813. Il étudia à Paris la 
peinture chez Casanova et la gravure chez 
Lebas et Lemire. Il reçut du roi une pension 
pour qu'il achevât ses études à Rome, où il pei- 
gnit un assez grand nombre de gouaches. A son 
retour, il fut accueilli par d'Azincourt, riche 
amateur, dans les collections duquel il trouva un 
grand nombre de modèles précieux. Après avoir 
vendu beaucoup de copies de ses gouaches, il 
entreprit, en 1776, un nouveau voyage, et se 
rendit en Sicile, à Lipari, à Malte, où il copia 
des monuments et des ruines pendant plusieurs 
années. Revenu avec ces matériaux, il en com- 
posa un ouvrage en 4 volumes in-folio, avec 
264 planches toutes gravées par lui au lavis, et 
qu'il publia sous ce titre ; Voyage Pittoresque 
des Iles de la Sicile, de Malte et de Lipari; 
Paris, 1782-87. Les descriptions fidèles de cet 
ouvrage offrent d'autant plus d'intérêt, aujour- 
d'hui encore, que les tremblements du sol , les 
ravages des volcans, les guerres et les révolu- 
tions ont détruit une partie des chefs-d'œuvre 
qu'a reproduits Houel. L'impératrice Catherine n 
fit acheter les dessins de cet ouvrage ainsi que 
plusieurs peintures de l'auteur. Depuis son retour 
en France, Houel était agréé à l'Académie royale 
de Peinture, qui l'avait pris pour son graveur. 
Admis aux réunions dé madame Geoftrin, il se 
lia avec Diderot, D'Alembert, Marraontel, Vien, 
Boucher, avec J.-J. Rousseau lui-même. Il 



HOUGHTON 260 

a publié une Histoire des Éléphants de la Mé- 
nagerie nalienale, avec la relation de leur 
voyage à Paris, 1798» in-8°; et il avait com- 
mencé une Histoire Naturelle des Deux Élé- 
phants , mdle et femelle, venus de Hollande 
en France en Van Vit ia t re livraison parut en 
1808, gr. in*é°. 0. us F. 

Notice de Le Carpentter sur Houel f Rouen, 1815, !»-»•. 
Motion (John), prélat anglais, né dans le 
Middlesex, en 1651, mort en 1743. Élevé à l'u- 
niversité d'Oxford, au collège de La Magdelèae, il 
en devint membre agrégé (Jellow), et en fut 
élu président en 1687. Jacques IT, qui cherchait 
à faire prévaloir le catholicisme dans l'université, 
cassa l'élection de Hough, et substitua à ce doc- 
teur, Parker, évêque d'Oxford. Cet acte arbitraire 
causa de violents débats, au milieu desquels Hongh 
montra autant de modération que de dignité. 
A l'approche de Guillaume d'Orange, Jacques 
se hâta de rendre au collège de La Magdelène ses 
privilèges et son président, concession tardive et 
forcée, qui ne réconcilia pas l'université avec 
les Stuarts. En 1690 Guillaume 111 nomma ce 
fidèle champion du protestantisme évoque d'Ox- 
ford. En 1699 Hough fut transféré sur le siège 
épiscopal de Lichfield, et en 1717 sur celui de 
Worcester, qu'il occupa Jusqu'à sa mort. On a 
de lui des Lettres, qui ont été insérées dans sa 
Vie par Wilraot. Z. 

Chalmers, General Biograph. DictUmary, 

hocghton (***** ), voyageur anglais, né 
vers 1750, mort a Tarra (Afrique) , après 1793, 
Dès le début de sa carrière, il fit partie de la lé- 
gation anglaise dans le Maroc. En 1779, nommé 
sous-gouverneur (major) de Gorée, il offrit à 
la Société Africaine de Londres de déterminer le 
cours du Niger et de visiter les grandes villes que 
l'on suppose exister au delà du désert. Son but 
était Tombouctou. Il mit à la voile le 16 octobre 
1790, et mouilla le 16 novembre à Gillifrie ( em- 
bouchure de la Gambie). Il remonta ce fleuve l'es- 
pace d'environ trois cents lieues; il traversa par 
terre le reste de la Sénégambie, et s'arrêta à Mé- 
dina, capitale du royaume de Woulli; il y fut 
bien reçu du roi Jatta, qui lui conseilla de ne pas 
aller plus loin dans l'intérieur de l'Afrique. 
Houghton ne tint aucun compte de ces conseils 
et pénétra dans le Bondouj le roi Alroani, 
moitié maure moitié païen, se conduisit à son 
égard avec une grande perfidie, et lui vola la plus 
grande partie de son bagage. Quittant les Fou- 
lahs , Houghton entra sur le territoire des Sera- 
woullisou Seracolets\ par les royaumes de 
Kajaaga ou Galam et de Kasson ; il séjourna à 
Tïésie, et reçut l'hospitalité de Tiggjty-Sego, frère 
de Sego-Jalla, roi de ftas&on; il y fut l'objet de 
quelques fêtes, et dans les repas auxquels il était 
invité les mets se composaient surtout de rats, 
de taupes, d'écureuils , de serpents, de sauterel- 
les, etc. Il remarqua que les femmes n'avaient 
pas le droit de manger des œufs. Il supposa que 



261 



HOUGHTON — HOULAGOU 



262 



» cette coutume avait été inventée par quelque 
vieux et rusé Intrschreen (prêtre) qui aimait 
beaucoup les garder pour lui ». Houghton entra 
ensuite dansleKasson, fut bien accueilli par Sego- 
Jalla, qui lui fit présent d'un cheval blanc. U pé- 
nétra ensuite dans le Kaarta, et, s'avançant vers le 
nord, il s'arrêta à Simbing, petite ville frontière 
du royaume de Ludamar. Ce fut de là qu'il écri- 
vit au crayon la dernière lettre que le docteur 
Laidley reçut de lui» Abandonné de ses servi- 
teurs nègres, il s'avança néanmoins jusqu'à Jarra, 
ville du Ladamar, et se joignit à une caravane de 
marchands maures qui allaient acheter du sel à 
Tischet, ville située près des marais salants du 
grand désert. « Après deux jours de marche, rap- 
porte Mungo-Park, devinant les mauvaise* inten- 
tions de ses compagnons de route» Houghton de- 
manda à retourner à Jarra i les Maures essayèrent 
d'abord de le dissuader ; mais quand ils virent 
qu'il persistait dans cette résolution, ils lui prirent 
tout ce qu'il avait et s'entourent aux grands pas 
de leurs chameaux. Le malheureux major, se 
voyant aussi lâchement trahi , retourna à pied 
à Tarra , un endroit où Ton trouve de l'eau et 
qui appartient aux. Maures, Tl avait, été déjà 
quelques jours sans prendre aucun aliment, et 
les Maures refusaient de lui en donner. On ne 
sait pas précisément s'il périt de faim où s'il Ait 
massacre par les barbares mahométans : son 
corps fut traîné dans les bois, et l'on me montra 
de loin l'endroit où on le laissa sans sépulture. » 
Tels sont les renseignements recueillis par 
Mungo-Park sur Houghton, dont le sort loi était 
réservé à lui-même quelques années plus tard. 

La catastrophe qui termina les jours de Hough- 
ton et le pillage de ses papiers rendirent presque 
nul pour la science son courageux dévoue- 
ment; cependant ses Lettres furent recueillies et 
publiées dans les t. II et ITI des Mémoires de la 
Société Africaine, Londres, 1792-1798, in-4°j; 
trad. en français par Lallemand , sous ce titre : 
Voyages et Découvertes dans Vintérieur de 
l'Afrique, par le major Houghton et Mungo- 
Park ; Paris, an vi, in-8°. Alfred de Lacaze. 

William Smith, Collection, de Voyages autour du 
if onde, t. IX, p. 1, 1*; 88, 48. — Hoefer, Afrique Cen- 
trale. — WalkenaCr, Bibliothèque des Voyages, t. VII. 

houlagou , le premier des ilhhans ou rois 
mongols de Perse, né en 614 de l'hégire (1217 
de J.-C), mort le 19 rebi second 663 (février 
1265), dans son campement d'hiver, sur les 
bords du Zerrineh ou Tchogatou ( Adherbaïdjan ). 
Petit-fils de Gengiskhan et quatrième fils de 
Toulouï, il fut, à l'avènement de son frère aîné le 
grand-khan ( empereur) Mangou,en 649 (1251), 
chargé d'achever la conquête de la Perse. L'ar- 
mée qoi fut mise sous ses ordres se composait de 
70,000 cavaliers et de 1 ,000 ingénieurs chinois. 
Précédé d'une avant-garde de 12,000 hommes, 
il partit de Mongolie en 651 (1253) et n'arriva 
à Samarcand qu'en 653 (1255). Il réclama des 
troupes auxiliaires de tous les princes de l'Asie, 



de ceux môme qui avaient jusqu'alors conservé 
leur indépendance. Le sultan d'Icône, l'atabek 
de Fars, le roi de Géorgie, les seigneurs du Kho- 
rassan, de l' Adherbaïdjan , du Schirwan, de 
l'Irak se hâtèrent d'obtempérer à ses ordres. Le 
schéikh des Ismaéliens ou Assassins, Rokn ed- 
Din Khour-Schab, fut invité à se rendre au camp 
d'Houlagou. Il refusa, mais il offrit de payer 
tribut aux Mongols et de leur livrer toutes ses 
forteresses à l'exception d'Alamout, de Lems- 
cher et de Lai. Après quelques négociations peu 
sincères, Houlagou prit le parti de ravir par 
force ce qu'il ne pouvait se faire livrer par ruse. 
Il fit envahir de plusieurs côtés le pays des Is- 
maéliens, et se présenta lui-môme, devant leur 
capitale Meimoun-Diz, à la tète de 10,000 hom- 
mes. Rokn ed-Din fut forcé de se rendre avec son 
fils et ses principaux officiers, le 19 schawal 654 
(9 novembre 1256). Après avoir fait démolir 
toutes ses forteresses , au nombre de plus de 
cent, il fut envoyé à la cour de Mangou, et as- 
sassiné à son retour par ordre d'Houlagou. Ce 
dernier fit ensuite massacrer toutes les popula- 
tions ismaéliennes, sans en excepter les enfants 
au berceau. U n'épargna que quelques savants, 
qu'il prit à son service, comme l'astronome 
Nassir ed-Din Thoussi et le médecin Mowaftek 
ed-Doulah, aïeul de l'historien Raschid ed-Diq. 
Pendant que son général Baïdjou portait la 
guerre en Asie Mineure, où deux frères se dis- 
putaient le trône d'Icône, Houlagou se préparait 
à envahir l'Irak, dernier débris du khalifat de 
Baghdad. Motassem occupait alors le siège pon- 
tifical C'était un prince bon et pieux, mais fort 
incapable. Trahi par ses ministres, dont les uns 
voulaient le déposer et dont les autres étaient 
d'intelligence avec les Mongols, il ne prenait 
aucune mesure pour la défense de sa capitale. 
Cependant l'ennemi approchait. Houlagou hési- 
tait à attaquer une ville qui ne comptait pas 
moins d'un million d'âmes, et des troupes qui 
avaient plus d'une fois vaincu les généraux mon- 
gols; son astrologue Hossam ed-Din, qui était 
sunnite , lui annonça les plus grands malheurs 
s'il offensait le successeur de Mahomet. Mais 
le schiite Nassir ed-Din et les prêtres boud- 
dhistes lui promirent le succès le plus com- 
plet. Rassuré par ces derniers, il rejeta les offres 
de Motassem, qui consentait à payer tribut. 
Après avoir défait l'armée ennemie, il alla in- 
vestir Baghdad, et y fit lancer des billets, par 
lesquels il s'engageait à ne faire aucun mal aux 
personnes inoffensives, aux ministres du culte et 
aux juges, aux savants et aux descendants d'Ali. 
Au bout d'une quinzaine de jours, le 4 safar 
656 (10 février 1258), le khalife sortit pour im- 
plorer la clémence d'Houlagou. Il fut d'abord 
traité avec égards, et ordonna à ses sujets de 
déposer les armea. La ville fut mise au pillage ; 
il y périt environ 800,000 personnes; les chré- 
tiens , qui s'étaient enfermés dans une église 
sur l'invitation des Mongols , furent seuls épar- 

9. 



2G3 



HOULAGOU. — HOULLIER 



264 



gnés. Après avoir fait mettre à mort le khalife 
et son fils aîné , 15 safar (21 février), Houla- 
gou s'éloigna des ruines de Baghdad , à cause 
de la corruption de l'air produite par la dé- 
composition des cadavres. Il soumit successi- 
vement plusieurs villes de Mésopotamie, Nisibe, 
Harran, Roha, Biret, et se dirigea ensuite sur 
Damas. Le souverain de cette ville, Nassir Salah 
ed-Din Yousouf, arrière-petit-fils de Saladin, 
avait envoyé de riches présents à l'empereur 
Mangou, et en avait obtenu une lettre de sauve- 
garde. Mais il avait négligé de fournir des troupes 
à Houlagou, et ses possessions étaient trop à 
la convenance de ce prince pour ne pas exciter 
sa convoitise. Ne s'occupant que de poésies, il 
n'inspirait aucune confiance à ses troupes, qui 
tentèrent de le détrôner. Il consumait en dis- 
putes avec des princes ses voisins le temps qu'il 
aurait dû consacrer à des préparatifs de défense. 
A la nouvelle de l'approche des Mongols, il se 
retira vers l'Egypte avec une partie de ses su- 
jets, espérant obtenir an asile ou des secours du 
sultan des Mamlouks. Houlagou s'étant rendu 
maître d'Alep, après un siège de cinq jours 
(658-1260), fit 100,000 prisonniers qui furent 
vendus comme esclaves. Les places de Hamat 
et de Damas se soumirent spontanément pour 
se donner des titres à la clémence du vainqueur. 
Les musulmans de ces villes n'eurent à souffrir 
que les représailles des chrétiens exaspérés par 
plusieurs siècles d'oppression. Vers la même 
époque, Houlagou interrompit sa marche victo- 
rieuse, pour aller briguer, en Mongolie, le trône 
suprême, resté vacant par la mort de Mangou. 
Mais il n'était qu'à Tebriz, lorsqu'il apprit l'é- 
lection de son frère Goubilaï. Ses généraux con- 
tinuèrent à soumettre la Syrie, s'avancèrent jus- 
qu'à Ghazah, et menacèrent l'Egypte. Le sultan 
mamlouk Cottouz s'avança contre eux à la tête 
de 1 2,000 hommes , et rencontra à A in Djalouth 
(source de Goliath), entre Naplous et Baïssan, 
le général Kitouboca, qui fut vaincu et périt 
dans la bataille, le 25 ramadhan 658 (3 septembre 
1260)-. C'était le premier avantage important 
que les musulmans remportaient sur. les Mon- 
gols, depuis l'époque de Djelal ed-din Kha- 
rizm Schah. A la suite de cet échec, les vaincus 
évacuèrent toute la Syrie, et n'y rentrèrent qu'à 
la nouvelle du meurtre de Cottouz. Mais 6,000 
d'entre eux furent encore battus par 1400 musul- 
mans. Ils furent plus heureux contre le nouveau 
khalife Mostansir, qui, après avoir été reconnu 
en Egypte, s'avançait à la tête de 3,000 hommes 
pour reconquérir les États de ses prédécesseurs. 
Ce prince fut tué à Anbar, près de l'Euphrate. 
Les projets de vengeance que conçut Houlagou 
furent ajournés à l'occasion de ses querelles avec 
son cousin Bercaï, khan de Descht Kiptschak. 
Ce dernier, qui avait embrassé l'islamisme, dé- 
testait Houlagou à cause de sa cruauté à l'égard 
du khalife et des musulmans. Il envahit le Schir- 
wan, sous prétexte que cette province et l'Ad« 



herbaïdjan faisaient partie du lot attribué à son 
père Djoutchi. Repoussé au delà du Caucase, il 
surprit l'armée d'Houlagou et la détruisit en 
partie. Plus tard il se mit en relations avec le 
sultan mamlouk d'Egypte, qui lui avait envoyé 
une ambassade. Houlagou se vengea de sa dé- 
faite, en faisant massacrer tous les sujets de 
Bercaï qui se trouvaient en Perse. Peu de temps 
avant sa mort, il maria son fils Mangou-Ti- 
mouravec Ouns-Khathoun, princesse du Fars, 
et réunit ce pays tributaire à ses domaines im- 
médiats. Cet ilkhan ne jouissait pas d'une com- 
plète indépendance : il reconnaissait, comme 
les autres princes mongols, la suzeraineté du 
grand-khan, représentant de Gengiskhan. Ses 
possessions étaient comprises entre l'Oxus, le 
Caucase, l'Euphrate, le golfe d'Oman, llndus. 
Il eut sept filles et quatorze fils, dont deux ré- 
gnèrent après lui , Abaka et Takoudar-Ahmed. 
Sa mère, Sioorkoukiti-Beighi, et sa principale 
femme Docouz-Khathoun, Tune nièce, l'autre 
petite -fille de Oang-Khan, roi des Kéraïtes, 
étaient chrétiennes, de la secte des nestoriens. 
Elles ne négligèfent jamais les intérêts de leurs 
coreligionnaires, dont un grand nombre durent 
la vie à leur intercession. Houlagou avait pour 
alliés les Géorgiens et les Arméniens; il reçut 
en 1260 une lettre du pape Alexandre IV, qui 
l'exhortait à embrasser le christianisme. S'il 
ne jugea pas à propos de se rendre à ce vœu, 
il accorda du moins de grandes immunités aux 
couvents et aux ecclésiastiques. Ce prince avait 
le goût des constructions ; le palais d'Alatag, le 
temple d'idole de Khoî et l'observatoire de Me- 
ragha furent élevés par ses ordres. La protection 
qu'il donnait aux sciences n'était pas toujours 
éclairée; ainsi il préférait l'astrologie à l'astro- 
nomie, et consacrait des sommes considérables 
à des expériences d'alchimie. On peut lui. re- 
procher d'avoir été plus cruel que ses intérêts 
ne l'exigeaient et d'avoir fait massacrer plus d'un 
million de ses semblables. £. Beauvois. 

• Raschtd ed-Di n , Hist. des Mongols de Perse, trad. par 
Quatremère, t. I. — Wassaf , Cfiron. — Abonl-Faradj, 
Hist. Dynast. — Le faux Fakhr ed-Dtn, fragm. dans 
Chrestom. Arabe de Sacy, t. I. — Abou'1-Féda, jinn m 
Muslem., t. IV, V. - Makrizt, Hist. des Mamlouks d'E- 
gypte, trad. par Quatremère. — HaTthon, Hist. Orient. 

— Tchamtchlan, Hist. d'Armén., t. III. — firosaet, Hist. 
de Géorgie, t. 1, et Ad dit. à VHist. de Géorgie. — Rela- 
tion du voy. d'Houlagou en Tartarfe, trad du chinois , 
dans le Journ. Asiat., 18», II, 283. — Priée, Chronoloçical 
Retrospect, t-. II. — D'Ousson, Hist. des Mongols, t. II. 

— De Haromer, Geschichte der Ilchane, t. I. — Abc! 
Rémusat, Sur lesRelat. des Chrétiens avec les Mongols; 
dans les Mém. de l'Acad. des Inscr., t. VI (18M). 

hoitllier (Jacques), médecin français, 
dont le nom latinisé est ffollerius, né à Étampes, 
mort en 1562. Beçu docteur à la faculté de 
Paris, il en fut doyen en 1546 et 1547. Il cultiva 
la médecine et la chirurgie avec un égal succès. 
« Gomme il étoit riche, dit Éioy, et qu'il ne se 
soucioit pas du gain, il donnoit à ses malades 
tant d'assiduité, de temps et de réflexion, que 



265 



HOULLIER — HOUMAYOUN 



266 



souvent il réussissoit à guérir les maux que les 
autres médecins regardoieut comme désespérés. 
11 n'en fallut pas davantage pour établir solide- 
ment sa réputation; le public, qui apprécie les 
talents par les succès, le regarda bientôt comme 
un des plus habiles praticiens de Paris. Houllier 
sa voit tirer parti de tout ; et comme il étoit per- 
suadé que la joie est le meilleur de tous les 
remèdea, celui qui fait l'effet le plus prompt et 
le plus assuré, il travailloit non-seulement à 
guérir le corps par ses médicaments, mais il ta- 
choit encore de divertir l'esprit par sa conversa- 
tion enjouée et ses discours agréables. » « Malgré 
les soins pénibles d'une pratique étendue, dit 
Jourdan, il ne négligea pas la littérature médi- 
cale, dans laquelle son nom est devenu célèbre. 
Son principal mérite fut de travailler assidû- 
ment à ramener aux principes d'Hippocrate les 
esprits courbés sous le joug de l'école galéno- 
arabique. Cependant, s'il repousse les subtilités 
et les discussions oiseuses, s'il bannit les inutiles 
recherches sur les causes prochaines des mala- 
dies, il ne sut pas. apprécier la noble simplicité 
de la thérapeutique d'Hippocrate, et adopta en 
grande partie les remèdes favoris et la polyphar- 
macie dégoûtante des Arabes. » C'est à Houllier 
qu'on doit le mode actuel d'application du séton ; 
auparavant on l'appliquait au moyen d'un fer 
chaud. Une maladie qui l'emporta rapidement 
ne lui permit pas d'achever ses nombreux ou- 
vrages; aucun ne fut publié par lui-même; ceux 
qui parurent pendant sa vie furent imprimés 
d'après les cahiers de ses disciples, écrits sous 
sa dictée, suivant l'usage adopté dans les écoles 
à cette époque. On a de lui : Ad libros Galeni 
de Compositions Medicamentorum secundum 
locos, Periochxacto ; Paris, 1543, in- 16 ; Franc- 
fort, 1589, 1603, in-12 ; — De Materia Chirur- 
gicaLibri très; Paris, 1544, in- fol. ; 1552, 1571, 
in-8°; 1610, in-fol.; Lyon, 1547, 1588, in-8°; 
Francfort, 1589, 1603, in-12; — De Morborum 
Curatione; De Febribus ; De Peste ; Paris, 1 565, 
in-8° ; publiés par les soins de Didier Jacot; — 
DeMorbis Internis Libri duo, authoris scho- 
liis et observationibus illustrait ; Paris, 1571, 
in-8°; 1611, in-4°; Venise, 1572, in-8°; Lyon, 
1578, in-8°; Francfort, 1589, 1603, in-12; — 
Magni Hippocratis coaca Prxsagia; Lyon, 
1576, in-fol. Cette édition grecque et latine a 
été publiée par D. Jacot. « Elle a le mérite, dit 
Jourdan, d'une savante critique du texte, et elle 
est accompagnée d'excellentes remarques. » — 
In Aphorismos Hippocratis Commentarii sep- 
tem; Paris, 1579, 1583, in-8°; Leipzig, 1597, 
in-8° ; Francfort, 1597, in-16 ; 1604, in-8° ; Lyon, 
1620, iu-8°; Genève, 1646, 1675, in-8° : ce com- 
mentaire est aussi célèbre que l'édition d'Hippo- 
crate que nous venons de citer. A l'exception 
des deux derniers, les ouvrages de Houllier ont 
été réunis sous le titre à' Opéra practica ; Paris, 
1612, in-4°; Genève, 1623, 1635, in : 4°; Paris, 
1674, uv-fol. Le principal éditeur de cette collec- 



tion fut Cnartier. On y trouve aussi des notes de 
Duret, élève de Houllier, des remarques d'An- 
toine Valet, des commentaires de J. Hautin, et 
la thérapeutique des femmes en couches par 
J. Lebon. J. V. 

Éloy, Dict. hUt. de la Méd., anc. et mod. [— Jourdan, 
dans la Biogr.- Médicale. 

houmatoun ( Nassîr ed-Din Mohammed), 
padischah ( empereur) de l'Hindoustan, le se- 
cond de la dynastie des Grands-Mongols, né 
dans la citadelle de Caboul, le 4 dzou'lcadeh 913 
de l'hégire (6 mars 1508 de J.-C), mort à 
Delhi, le 11 rebi premier 963 (24 janvier 1556). 
Il était fils aîné de Baber, qui ne possédait alors 
que les contrées situées entre l'Helmend , le 
Djihoun, l'Indus et le Béloutchistan. Nommé 
gouverneur de Badakhschan, lors de la conquête 
de ce pays en 926 (1520), il y résida jusqu'en 932 
(1526), époque où il conduisit dans l'Inde un 
corps auxiliaire. H se signala par divers exploits, 
s'empara d'Agra, et commanda l'aile gauche à la 
bataille de Kanwab, en 933 (1527). Sa bravoure 
et son affabilité lui concilièrent l'affection de 
son père, qui le désigna pour son successeur. 
H monta sur le trône le 9 djoumada 1 er de l'an 
937 (29 décembre 1530). Son empire, dont la 
capitale était Agra, se composait de provinces 
nouvellement réunies par la force des armes et 
différant entre elles par la langue et la religion. 
La possession lui en fut disputée par le prince 
afghan Mahmoud Lodi, dont le frère Ibrahim 
avait été dépouillé par Baber du trône de Delhi. 
Houmayoun défit à la bataille de Dourah, sur le 
Gange ( mai 1531 ), l'armée de ce prétendant, qui 
alla mourir obscurément dans le Bengale. Mais 
il lui restait à l'intérieur des rivaux non moins 
redoutables, ses frères et ses cousins. Doué d'un 
caractère conciliant, il s'était efforcé de prévenir 
les révoltes, en satisfaisant toutes les ambitions. 
Dès les premiers jours de son règne, il avait 
donné à son frère Kamran le Caboul et le Can- 
dahar, à Askéri la province de Sambhal, à Hin- 
dal le Mewat ou Alwar, et avait reconnu son 
cousin Soliman, gouverneur de Badakhschan, ne 
se réservant qu'un droit de suzeraineté sur ces 
provinces et la possession immédiate de l'Hin- 
doustan et du Pendjab*. Quelque temps après, 
il céda même cette dernière province à Kamran, 
qui s'en était emparé, et y ajouta de son propre 
mouvement le pays d'Hissar-Firouzah. Deux 
petits» fils de Hosséin-Mirza Baïkara, qui vivaient 
à sa cour, Mohammed-Sultan-Mirza et Moham- 
med-Zéman-Mirza, gendre de Baber, s'étant 
révoltés, furent jetés en prison, 940 (1533). Le 
premier fut privé de la vue. Le second s'échappa, 
et se retira auprès de Bahader, roi de Goudjé- 
rate et de Malwah. Houmayoun , irrité de ce 
que Behader donnait asile à tous ses ennemis, 
envahit le Malwah, s'empara de Mandou, (942 
1535), et conquit ensuite le Goudjérate, dont 
le roi se réfugia dans l'île de Diu, qu'il céda 
"aux Portugais. Après s'être rendu maître de la 



267 



HOILMA^OUIN 



26S 



forteresse de Tchampanîr, l'empereur .se livra 
aux plaisirs, et permit à ses troupes de l'i- 
miter. Pendant ce temps, les Afghans envahis- 
saient le Béhar, les princes indigènes do Malwah 
recouvraient leur indépendance, et Mohamraed- 
Sultan-Mirza se révoltait à Canoudi. Askéri- 
Mirza, frère de Houmayoun, qui l'avait fait gou- 
verneur du Goudjérate, ayant été expulsé de ce 
pays par les habitants, se dirigea sur Agra, pour 
se faire proclamer empereur (943,1536). Mais 
avant d'avoir exécuté son projet il rentra dans 
le devoir, et se joignit à l'armée impériale pour 
faire la guerre aux Afghans. Depuis la mort du 
prince Tatar-Khan-Lodi, qui avait péri en com- 
battant contre les Mongols, en 941 (1534), les 
Afghans reconnaissaient pour chef Schir-Khan, 
qui s'était élevé d'un rang inférieur à la dignité 
de premier ministre du roi de Béhar, et avait 
fini par usurper la couronne. Alarmé des progrès 
de ce général, et désireux de remplacer par de 
nouvelles conquêtes celles qu'il venait de perdre, 
Houmayoun entra dans le Béhar, en 944 (1537), 
s'empara de la forteresse de Tchounar, après 
six mois de siège, et pénétra jusqu'en Bengale. 
Mais lorsqu'il voulut rentrer dans ses États, au 
bout de six mois, 11 vit que la retraite lui était 
fermée par les Afghans. Arrivé en présence de 
l'armée ennemie, il se fortifia dans son camp, et 
perdit trois mois en escarmouches meurtrières. 
Il ne pouvait attendre aucun secours de ses 
frères Kamran et Hindal-Mlrza, qui s'étaient ré- 
voltés à Agra. Livré à ses seules ressources, il 
entra en négociations avec Schir-Khan, et il était 
sur le point de signer la paix, lorsque les Afghans 
l'attaquèrent à l'improviste et détruisirent son 
armée à Tchonsa, au confluent du Gange et du 
Karamnassa, le 9 sefer 945 (27 juin 1539). H 
s'enfuit presque seul. Rentré dans sa capitale, il 
jugea à propos de se réconcilier avec ses frères, 
et d'amnistier tous les rebelles. H leva une nou- 
velle armée de 90,000 hommes, que les défec- 
tions réduisirent de moitié. Quoique les Afghans 
ne fussent qu'au nombre de 10,000, ils le vain- 
quirent de nouveau à- Canoudj, le 10 moharrem 
947 (17 mai 1540), et le poursuivirent jusqu'au 
Setledj. Houmayoun ne put obtenir un asile dans 
les États de Kamran. Il fut rejoint par deux cent 
mille Mongols, que les vainqueurs avaient 
expulsés de l'Hindoustan, et entreprit de con- 
quérir le royaume du Sind et le pays des Radj- 
pontes , pour en faire la base de ses futures 
opérations contre Schir-Khan. Abandonné de 
son immense armée, qu'il ne pouvait entretenir, 
il persista néanmoins dans son dessein, et fut par- 
tout repoussé. Après avoir erré deux ans dans le 
Sind et le Radjpôutana , il passa dans le Séistan, 
qui dépendait du roi de Perse Schah-Tahmasp. 
Ce monarque l'appela dans sa. capitale, à Kazwin, 
et lui rendit de grands honneurs, qu'il lui fit 
payer par beaucoup d'humiliations. Zélé schiite, 
il menaça son hâte de le faire brûler, comme 
hérétique, s'il ne reniait tes doctrines sunnites. 



I Mais sa sœur Sullannm-Khanum tempéra cette 
! ferveur de prosélytisme; il fournit à Hou- 
I mayoun 14,000 hommes pour conquérir le Ba- 
i dakhschan, le Caboul et le Candahar, se réser- 
vant, en retour, la possession de cette dernière 
province. Le prince mongol s'étant emparé de 
la forteresse de Blst, puis de la ville de Can- 
dahar (952, 1545), vit accourir sous ses drapeaux 
une grande partie des troupes de Kamran; 
il occupa Caboul et le pays de Badakhscban, 
mais il tomba dangereusement malade. Le bruit 
de sa mort s'étant répandu, les prétendants à la 
couronne commencèrent à relever la tête. Kam- 
ran recouvra Caboul, avec les secours qu'il avait 
obtenus de son beau-père Schah Hosséin-Ar- 
ghoun, roi du Sind. Assiégé dans Caboul, il s'en 
échappa secrètement, et se retira chez les Oua- 
beks. II fut rejoint par un ministre de Hou- 
mayoun, Keratbha, qui avait déserté avec 3,000 
hommes à la suite d'une discussion. Mais, ne pou- 
vant compter sur les Oazbeks, eunemiade sa na- 
tion, il fit en 955 (1548) la paix avec son frère, 
qui lui donna le gouvernement de la province du 
Koulab ou Khoutblan, située au nord dn Dji- 
houn. Houmayoun envahit ensuite le Khanat de 
Balkh, possédé par les Ouzbeks ; nais, craignant 
une trahison de Kamran, qui n'amenait pas le 
contingent stipulé, il retourna à Caboul, et perdit 
dans cette retraite presque toute son armée. Le 
revers éprouvé par l'empereur rot pour Kamran 
une nouvelle occasion de révolte. Il s'empara du 
Badakhschan, et surprit à Aschterkeram, en 
956 (1550), l'année impériale qu'il mit en dé- 
route. Mais vaincu à Schouterguerden, en 957 
(1551), il éprouva une dernière défaite en 959 
(1552). Il chercha refuge auprès de Selim-Schah, 
roi de Delhi, qui le traita avec dédain, mais le 
retînt prisonnier pour s'en faire un instrument 
contre Houmayoun. Ayant effectué son évasion, 
il se retira dans la tribu des Oakers, qui le li- 
vrèrent à l'empereur en 960 (1553). Jusque alors 
Houmayoun, suivant les conseils que son père 
lui avait donnés au lit de mort, s'était gardé de 
tremper les mains dans le sang de ses frères; il 
avait toujours traité avec indulgence ces princes 
indignes. Il s'était contenté d'exiler à La Mecque, 
en 957 (1551), Askéri-Mirza, qui l'avait tant 
de -fois trahi. Kamran fût privé de la vue, et 
alla mourir à La Mecque, en 964 (1557). Hihdal- 
Mirza avait été tué en 1551, en combattant pour 
Houmayoun contre Kamran. Ces divers événe- 
ments débarrassèrent enfin l'empereur de tous 
ses rivaux, n se prépara alors à reconquérir 
l'Hindoustan. Ce pays, après avoir été gouverné 
avec habileté par Schir-Khan, puis par Sélim, 
était actuellement en proie aux discordes civiles. 
Mohammed-Schah avait usurpé le trône en 960 
(1553), après avoir mis à mort son neveu Firouz- 
Schah, fils et successeur de Sélim. Mais il ne 
jouit point paisiblement du fruit de son crime. 
Ses beaux-frères et cousins , Ibrahim-Khan et 
Sekander-Schah, avaient pris les armes contre 



269 



HomMAYmm — hourcastremé 



2T0 



lui, lorsque Houmayoun envahit le Pendjab. An 
lieu de se rallier centre l'ennemi commun, le* 
princes afghans firent ce qu'avalent fait les 
princes mogols, ils continuèrent à se disputer un 
trône chancelant A la faveur de ces discordes, 
Béhraro»Khan, premier ministre de Houmayoun, 
défit à Matchiwara, sur le Setledj, un corps de 
40,000 cavaliers, en 961 (1554). L'empereur lui- 
môme, à la tète de ft,ooo hommes seulement, 
remporta une grande victoire à Sirhend, sur 
îoo^ooo Afehans, le * sehiban 962 (21 juin 1566). 
Entrée Delhi quelques mois plus tard, il se proposa 
de diviser flfindonstan en six gouvernements, 
dont chacun aurait une administration et une ar- 
mée séparée. Il pensait qu'une armée de 13,000 
hommes lui aurait suffi pour maintenir dans la 
dépendance les diverses parties de son empire. 
Mais ces projetsn'eurant pas desnite. Étant tombé 
du haut d'une plateforme, où il faisait des ob- 
servations astrologiques* il mourut de sa chute 
au bout de quelques jours. Ses officiers cachèrent 
sa mort durant deux semaines; ils n'en laissèrent 
circuler la nouvelle qu'après avoir averti le prince 
Akbar, qui a* trouvait dans le Pendjab» Ho»» 
ronyoun était affable, «eoértux, humain, brave. 
Il ne Ht jamais le mal par principe, et ménagea 
toujours tes peuples vataftug. Mais son incons- 
tanea et sa légèreté ueutraUsaient toutes ses 
bonnes qualités; et sa faiblesse fut la source du 
la plupart des révoltas qui troublèrent son règne. 
Il était versé dans les mathématiques et surtout 
dans l'astronomie» Doué d'un esprit brillant, il 
s'adonnait avec passion à la culture des lettres 
et composa an Diw*n 011 recueil de poésies* 
£. Bbauvois. 

Joober (DJauber), Teikertk Mivakiat, or private me~ 
moirs of Humayoon, trad. par Ch. Steffart ; Londres, 
18S2, in-4<>. — Nitzam ed-DIn Ahmed, Tlrtkh. — HaMer 
Mirza Doiiglilat, Tarikh % Raschidi. - Abd el-Kader, Ba- 
daooni, Tarikh. — Abou'l-Fadbl, Akbar-Nameh. — Khafi- 
Kan, Tarikh. - Ferlahtah, Hist. o/tàe RiseoftheMa- 
homedan Power in India, trad. par Brigg», t. II. — 
Neamet Ullah , tiist of the Afghane, trad. par Dora, 
1889, in-*», 1. 1. - Sandja* Ma! Mou»**!, Khokusët <&~ 
tewarikh. — Sam Mirza, Tedzkiret. — Prlce , Chrono- 
log. Retrospect, t. III. — W. Ersklnfe, Hist. of tnûia 
under the two fint fovertigruof the Houte ef Tuïmtmr, 
Baber an4 ffttmayun ; Loodrw, 1W*, t vol, in-8<>, tout 
le t. II. 

HOrjNG-WOU. Foy.TcHOU-YotJAN-TCHAKG. 

HomcASTREMÉ (Pierre), littérateur fran- 
çais, né à Navarreins (Béarn), le 24 décembre 
1742, mort vers 1815. Placé dans le commerce 
au sortir de l'école , il lisait avec avidité tous les 
livres qu'il pouvait rencontrer, et se mit à com- 
poser de petits vers à la Bernis, en même 
temps qu'il apprenait seul le dessin et la mu- 
sique. Ses parents l'envoyèrent alors à Paris, 
où il se fit recevoir avocat. Il revint exercer sa 
profession dans sa ville natale ; mais la capitale 
l'attirait, et, en 1767, il offrit à Louis XV des 
dessins à la plume de sa composition. Trois ans 
après il adressa des vers à Voltaire, qui lui 
répondit : 

. ... Je vong cède ma lyre ; 

Vos doigte sont faite pour l'animer. 



En 1773 Hourca8tremé réunit ses premières pro- 
ductions poétiques, et fit imprimer en tète les 
stances de Voltaire. Cependant, comme il avait 
négligé dans ses vers les règles élémentaires de la 
versification, qull ignorait peut-être , il s'avisa de 
rassembler dans une préface les vers de Voltaire 
qui lui paraissaient défectueux, pour couvrir en 
quelque sorte ses propres négligences , et ne 
craignit pas de dire que Voltaire avait souvent 
ckwillé ses vers, pour plus de solidité sans 
doute. Deux ans après il présenta à l'Opéra un 
drame lyrique en cinq actes, intitulé Marins et 
Àrtste* On le lui renvoya pour y joindre un 
divertissement; il en fut piqué et garda son 
drame. L'Académie de Marseille ayant mis au 
concours l'éloge eu vers de Christophe Colomb, 
il y envoya une pièce qui n'eut pas le prix. Re- 
tirée Oraville en 1784, il s'occupait de mathé- 
matiques, cherchant la solution des problèmes 
de la quadrature du cercle , de la trisection de 
l'angle et de la duplication du cube, lorsque la 
révolution éclata. Il vint alors à Paris et entra 
en correspondance avec les hommes les plus 
notables des états généraux, et leur adressa ses 
vues sur les moyens de régénérer la France. A 
la pince on avait été la Bastille il voulait qu'on 
élevât nn immense bâtiment qui aurait pu con- 
tenir l'assemblée nationale , les académies , etc. 
En 1789, il envoya à l'Assemblée constituante 
un projet d'organisation des tribunaux, où il 
exposait le plan de bureaux de conciliation. Il 
envoya ses autres ouvrages à la même assem- 
blée; et comme l'un d'eux contenait un nouveau 
système d'éducation, il fut peiné devoir qu'on 
n'avait pas songé à le choisir pour précepteur 
du dauphin» La chute de la monarchie ne lui 
présageant rien de bon, il s'en retourna pru- 
demment à Oraville , et y resta tout le temps de 
forage. Il avait mis au commencement d'un de 
ses livres son portrait avec cette inscription : 
Jtr simplex et reclus. Le comité révolution- 
naire du Havre lui demanda l'explication de 
cette devise ; il en donna une qui parut satis- 
faisante, et ne fut plus inquiété. En 1795, il 
adressa à la commission chargée de la révision 
de la constitution de 1793 un projet qui lui 
paraissait propre à prévenir les révolutions. Non 
compris dans la liste des écrivains secourus par 
la Convention, il s'offensa de cette injustice et 
attribua son déboire à Chénier, qu'il appelait le 
plus incorrect et le plus faible des versifica- 
teurs. Revenu à Paris en 1796, il travailla au 
Courrier lyrique et aux Étrennes de Mné- 
mosyne. De nouveaux ouvrages d'Hourcastremé 
n'eurent point de succès, et il tomba ensuite 
complètement dans l'oubli. Dans un de ces 
livres il nie la rotation de la Lune sur son axe 
et le mouvement de la Terre autour du Soleil; 
il explique un instrument nommé trisecteur, 
qu'il a imaginé pour couper un angle en trois 
parties égales; enfin, il donne l'histoire na- 
turelle de mollusques qu'il appelle Beroé, le 



27.1 



HOURCASTREMÉ - HOUSSAYE! 



272 



Peigne et la Meuse. On a de lui : Poésies et 
Œuvres diverses, en vers et en prose ; Londres 
(Rouen), 1773, 2 vol. in- 12 : le premier volume 
renferme une comédie en trois actes et en prose 
intitulée : La N&uvelle Eve; — Catéchisme du 
Chrétien, par le seul raisonnement ; Toulouse» 
1789, m-8°; — Aventures de messire Ansel- 
me, chevalier des Lois; Paris, 1790, 2 vol. 
in-12; 1796, 4 vol. ra-8°. On trouve dans le 
1 er volume de cette seconde édition la Métope 
de Voltaire mise en prose, et dans le 2 e le .drame 
lyrique de Marins et Arisbe; — Essai sur la 
Faculté de Penser et de réfléchir ', dans lequel 
Vinstinct se trouve caractérisé et mis à sa 
véritable place; Paris, 1805, in-8°; — Essais 
d'un Apprenti Philosophe sur quelques an- 
ciens problèmes de physique, d'astronomie, 
de géométrie, de métaphysique et de morale, 
l rc partie, 1805, in-8°; — Solution du Pro- 
blème de la Trisection géométrique de V Angle, 
suivie de celles de la Quintisection, Septisec- 
Uon, etc.; Rouen, 1812, û>8°. En 1773, Hour- 
castremé avait annoncé un Traité sur le Com- 
merce, et plus tard un extrait du Dictionnaire 
Philosophique, dans lequel il prétendait avoir 
donné à tous les arts et à toutes les sciences 
sans exception le plus haut degré de perfection 
possible. J. V. 

Hourcastremé , Aventurts de messire Anselme, — 
Quérard, La France littéraire. 

hocrelle ( Pierre-François ), médecin 
français, né à Reims, au mois d'avril 1758, mort 
dans la même ville, le 15 mai 1832, à la suite 
d'une attaque de choléra. On a de lui : Disser- 
tation sur VEmpyème et les différentes es- 
pèces d*épanchements qui peuvent se faire 
dans la capacité de V estomac; Strasbourg, 
1808, in-4°; — Remarques topographiques , 
médicales et politiques sur la Fille de Reims 
et son territoire; Reims, 1810, in-4°. Il avait 
travaillé à un ouvrage sur les différentes épidé- 
mies qui ont affligé son pays. J. Y. 

Bourqnelot, La Littér. franc, contemp. 

houssay. (Frère Jean du), religieux her- 
mite du Mont-Valérien près Paris , né à Chail- 
lot, en 1539, mort au Mont-Valérien, le 3 août 
1609. Les religieux au milieu desquels vivait 
Jean du Houssay formaient une communauté 
particulière qui ne dépendait d'aucune autre. 
Ils ne prononçaient que les vœux simples de 
pauvreté , de chasteté et d'obéissance : leur but 
en se réunissant avait été de marcher sur les 
traces des anciens hermites. Ils se soumettaient 
au travail des mains, à l'abstinence et quelque- 
fois à la réclusion perpétuelle. C'est comme 
reclus que se fit connaître Jean du Houssay; 
il ne vécut pendant quarante-huit ans que de 
pain grossier, de racines crues , et ne but que 
de l'eau ; encore ne fut-ce qu'une fois par jour 
et après le coucher du soleil. Henri m, 
Henri IV, les reines Marguerite de Valois et 
Marie de Médicis lui vinrent faire visite dans 



sa retraité. Les Frères Hermites habitaient le 
Mont-Valérien depuis un temps immémorial 
lorsque» vers le milieu du dix-septième siècle, on 
les força à quitter leur monastère pour le céder 
à une communauté de prêtres; mais un arrêt 
du parlement, qu'ils obtinrent le 30 juillet 1664, 
les réintégra dans leurs droits. Depuis lors jus- 
qu'à la fin du siècle suivant ils ne furent plus 
inquiétés. Leurs statuts ont été publiés en 1776 
sous ce titre : Règle et Constitutions des Frères 
Hermites du Mont-Valérien près Paris, sur 
le modèle des anciens solitaires ; Paris , in-12 . 
On y trouvera un beau portrait de Frère Jean 
du Houssay; ce livre est intéressant à cause 
de la singularité de certaines règles. Le sui- 
vant, qui ne l'est pas moins, contient le même 
portrait : Livre d'Église et Cérémonial des 
Hermites du Mont-Valérien, à Paris; 1786, 
gr. in -8°. Louis Làcooit. 

Règle et Consumions des frères Hermites, Avcrttsse- 



; houssayb (Arsène), littérateur français, 
né à Bruyères, près de Laon, le 28 mars 1815. 
Son père, qui s'occupait d'agriculture, s'opposa 
d'abord au goût du fils pour la littérature ; mais 
en 1832 le jeune Houssaye partit de sa ville na- 
tale et vint à Paris, où il se lia avec Hégésippe 
Moreau et Paul van del Heyl. Il rencontra 
M. Théophile Gautier dans les salons du Louvre, 
et bientôt il fit connaissance avec Gérard de 
Nerval, Ourliac, MM. Roger de Beauvoir, Clé- 
singer, Célestin Nanteuil, Marilhat, Alphonse Es- 
quiros, etc. Cet essaim d'artistes vint se loger 
dans une même demeure, rue du Doyenné, et, 
pendant plusieurs années, ils vécurent en com- 
mun; cette époque, M. Houssaye l'a caractérisée 
ainsi lui-même : 

Obt le beau temps passé ! nous avions la science , 
La science de vivre avec insouciance. 
La galté rayonnait en nos esprits moqueurs 
Et l'amour écrivait des livres dans nos cœurs. 

Chacun finit cependant par trouver sa voie par- 
ticulière. M. Houssaye ressuscita en vers et en 
prose le style du siècle de Louis XV. « Le 
jeune romancier, dit M. Alpb. Esquiros , avait 
rencontré dans sa nature une fleur d'origi- 
nalité. Dans un temps où l'influence du drame 
s'étendait à toute la littérature, où le poison 
jouait un si grand rôle à la scène et dans les 
journaux, où le sang débordait de la coupe, 
M. Houssaye osa se faire un horizon à part, 
avec des églantiers à ses pieds, une verte et 
savoureuse forêt dans le lointain. Les livres 
de cet écrivain respirent tous un mélancolique 
sentiment du paysage. Dans les descriptions 
agrestes, M. Houssaye n'est pas seulement 
artiste , il est poète. Amant de la nature , il ne 
la voit pas seulement avec les yeux , mais avec 
le cœur. A mesure que le talent de l'auteur 
mûrissait, sa main, plus ferme et f>lus hardie, 
jetait çà et là des traits critiques, des caractères 
neufs, des passions sauvages qui variaient le 



273 H013SSAYE 

fond du tableau, mais sans jamais en altérer la laissa cm fils. 

grâce première. » D'un autre côté, on lui reproche 

un style parfois maniéré, prétentieux; il a du 

trait et des mots fins, trop de concettis, des 

négligences, des inexactitudes; mais de la verve, 

de l'imagination, du sentiment, delà poésie. <* Son 

talent, a dit M. Philarète Chasles, c'est un sourire 

tempéré par une larme, un trait d'esprit mouillé 

par un trait de sentiment. » M. Jules Janin, plus 

sévère, l'a appelé « l'Hérodote du dix-huitième 

siècle malade », et Théophile Gautier a dit dans 

Le Moniteur que ses Portraits du Dix-huitième 

siècle « sont autant de petits chefs-d'œuvre qui 

resteront » 

Après s'être essayé par quelques articles dans 
les journaux , M. Arsène Houssaye publia sa 
première œuvre importante,' La Couronne de 
Bluets, qui eut du succès; la seconde, intitulée 
La Pécheresse, acheva de le poser dans ce monde 
de la littérature facile, qui se plaît surtout à la 
peinture des mœurs légères. Depuis Jprs, il a pu- 
blié bon nombre de romans, quelques-uns avec 
M. Jules Sandeau. Plus tard il fit imprimer des 
vers, et, en 1840, il fit un voyage en Hollande 
pour y étudier l'école de peinture hollandaise. 
De 1838 à 1843, il rendit compte des expositions 
des beaux-arts dans la Revue de Paris. De 1844 
à 1849 il dirigea le journal L'Artiste, qui avait été 
créé par Achille Ricourt en 1831, mais qui était 
loin de prospérer, M. Houssaye y appela ses an- 
ciens amis, et le journal prit un essor brillant. Il y 
a donné bon nombre d'articles sous le nom de lord 
PUgrim. M. Arsène Houssaye n'en continua pas 
moins de travailler pour la Revue de Paris, où il 
commença sa Galerie de Portraits du Dix-hui- 
tième Siècle. Bientôt M. Véron l'appela au Cons- 
titutionnel. A la suite d'un second voyage en 
Hollande, M. Houssaye publia une Histoire de la 
Peinture flamande, qu'on adapta aux planches 
gravées de l'ancienne Galerie Lebrun. 

£n 1847, sur le point d'être nommé profes- 
seur d'esthétique au collège de France, il prit part 
aux banquets réformistes en présidant un banquet 
d'étudiants. Après la révolution de février 1848, 
il fonda un club, et se présenta contre Odilon 
Barrot, aux électeurs de son département. Au 
mois de novembre 1849, grâce à l'influence de 
M lle Rachel, il fut nommé administrateur de la 
Comédie Française. A cette époque il quitta la 
direction de L'Artiste. Son administration du 
Théâtre-Français, d'abord mal accueillie par les 
artistes, qui voulaient rester en république, lut 
pourtant très-heureuse; il sut retenir M Ue Ra- 
chel , sans négliger d'autres éléments de succès; 
de nouveaux talents d'écrivains se produisirent 
sur notre première scène, et les recettes géné- 
tales doublèrent.. Au mois de décembre 1851, 
M. Arsène Houssaye accrut, dit-on, sa fortune 
personnelle par d'heureuses spéculations. L'année 
suivante, il composa pour M Ue Raehel des vers 
pour saluer l'empire renaissant. En 1854, il per- 
dit sa femme, qui était fort distinguée et qui lui 



274 



Le 30 janvier 1856 il a été rem- 
placé par M. Empis comme administrateur du 
Théâtre-Français , et nommé inspecteur-général 
des œuvres d'arts et des musées des départe- 
ments, position créée pour lui par l'empereur. 
On a de lui : La Couronne de Bluets , ro- 
man; Paris, 1836, in-8°; — La Pécheresse; 
Paris, 1836, 2 vol. in-8°: ce roman a été réim- 
primé sous le titre de Le Ciel et la Terre, his- 
toire panthéiste, dans les Romans , Contes et 
Voyages; —Les Aventures galantes de Mar- 
got; Paris, 1837, in-8° : quelques exemplaires 
de la troisième édition ont paru sous le titre de : 
Les Galanteries de Margot, substitué par l'é- 
diteur au titre primitif, que l'auteur fit rétablir 
par autorité de justice; — Le Serpent sous 
VHerbe; Paris, 1838, 2 vol. in-8° ; — La Belle 
au Bois dormant; Paris, 1838, 2 vol. in-8°; — 
Les Revenants (avec M. Jules Sandeau) ; Paris, 
1839, 2 vol. in-8° ; — Fanny; Paris, 1840, 
in-8° : la couverture porte Romans sentvmen- 
tals, tome I er ; le tome H contient Les Aven- 
tures galantes de Margot , et le tome Hl La 
Couronne de Bluets; — Les onze Mattresses 
délaissées; Paris, 1840, 2 vol. in-8 ô ; —Poé- 
sies, les Sentiers perdus; Paris, 1841 , in-iî; 
— Madame de Vandeuil (avec M. Jules San- 
deau); Paris, 1842, in-8° : l'héroïne de ce ro- 
man n'est pas la fille de Diderot; — Mademoi- 
selle de Kerouare (avec le même); Paris, 
1842, in-8°; — Études sur le Dix-huitième 
Siècle : le Café de la Régence; Paris, 1842, 
2 vol. in-8*; — Milla (avec M. J. Sandeau); 
Paris, 1842, in-8°; — Marie (avec le même); 
Paris, 1843, in-8'; — Madame deFavières; 
Paris, 1844, 2 vol. in-8°; •— La Vertu de Ro- 
sine; Bruxelles, 1844, in- 18 : d'abord publié 
dans Le Constitutionnel; — Les Caprices de 
la Marquise, comédie en un acte , jouée au 
théâtre de l'Odéonle 12 mai 1844; Paris, 1844, 
in-12; — Revue du Salon de 1844 ; Paris, 1844, 
in-4°; — La Poésie dans les Bois; Paris, 1845, 
in-18; — Romans, Contes et Voyages; Paris, 
1846, 1847, in-12; — Histoire de la Peinture 
flamande et hollandaise /Paris, 1846, in-fol. 
avec 100 gravures sur cuivre; 2 e édit., 1847, 
2 vol. in-8°; nouv. édit, 1857,*in-18; — Les 
trois Sœurs; Paris, 1847, 2 vol. in-8° : ce ro- 
man avait d'abord paru en feuilletons dans Le 
Constitutionnel; — Voyage à Venise; Paris, 
1849, in-12 : c'est le troisième volume des Ro- 
mans, Contes et Voyages ;— Critique accom- 
pagnant la suite de V Histoire du cheva- 
lier Desgrieux et de Manon Lescaut ( avec 
MM. Sainte-Beuve et J. Janin); Paris, 1847, 
in-16; — Au Peuple des campagnes (23 arti- 
cles composant la profession de foi. du candidat 
à l'Assemblée nationale) ; Paris» 1848, in-8°; — 
Galerie de Portraits du Dix-huitième Siècle, 
4 e édition, revue et corrigée , l r ® et 2 e série ; 
Paris, 1848, in-12; 6 e édition, Paris, 1857, 
5 vol. in-18, contenant : Poètes et Philosophes; 



275 



HOUSSAYE — HOUSTON 



276 



Peintres et Musiciens; la Cour; le Théâtre; 
— Poésies complètes; Péris, 1849, in- 12 : ce 
volume renferme : Les Sentiers perdus, Cécile, 
Silvia, Ninon, La Poésie dans les Bois, poèmes 
antiques; — Philosophes et Comédiennes; 
Paria, 1860, in-12; 4* édit, 1857, in-18 ; c'est 
la 3 e série de la Galerie de Portraits du Dix* 
huitième Siècle; — Fresques et Bas-Reliefs, 
poèmes antiques ; Paris, 1851, in-18 \ — Le Re- 
pentir de Marion; Paris, 1851, in-8°; — La 
Comédie à la Fenêtre t écrite le matin pour 
être jouée le soir; Paris, 1652, in-12; — 
V Empire, c'est la Paix! stances dites par 
M 11 * Racbel devant S. A. I. Louis-Napoléon 
Bonaparte, le 28 octobre 1852; Paris, 1852, 
in- 8°, en couleur; in4blR>; — Histoire du 
41 e Fauteuil de V Académie Française ; Paris, 
1855, in-8* ; 4 e édit, considérablement aug- 
mentée; Paris, 1857) in-18; — La Pantoufle 
de Cendrillon , illustrée de cent vignettes; 
Paris, 1855, in-8°; — Histoire de l'Art en 
France; recueil raisonné et annoté de tout 
ce qui a été écrit et imprimé sur la peinture, 
la sculpture, l'architecture et la gravure 
françaises, depuis leur origine jusqu'à nos 
jours; Paris, 1856, in-8 ;— Les Femmes 
comme elles sont; Paris, 1857, in-18; — Voya- 
ges humoristiques; Amsterdam , Paris, Ve- 
nise; Voyage à ma Fenêtre ;Paris, 1857, in-18; 

— Lo Violon de Franjole : romans , contes, 
nouvelles; 5 e édit., 1857, in-18; — Œuvres 
Poétiques : Les Romans de la Vie; Le Musée 
des Poètes ; Le Paradis perdu ; La Poésie dans 
les Rois , poèmes antiques , contes et légen- 
des; nouv. édit, Paris, 1857, in-18; — Galerie 
flamande et hollandaise, texte, in-fol.; 1857, 
avec 32 planches gravées. 

M. Arsène Houssaye a rédigé avec MM. Théo- 

5 bile Gautier et Paul Mantz le texte de Les 
Peintres Vivants. On cite encore de lui dans 
divers recueils ; Mathilde; Marie de Joysel; 
Cornille Schut ; le Joueur de Violon ; Lom- 
proz et Marguerite; Rachel et Lucy ^L'Arbre 
de la Science ( sous le nom de Voltaire) , etc. 
Parmi les articles de L'Artiste , on remarque : 
Prudhon, Voltaire. Il a travaillé au recueil in- 
titulé Le Foyer de V Opéra : Les Coustou; la 
Philosophie des arts; — au Fruit Défendu; 

— à la Revue des Deux Mondes, où dl a donné 
les Vanloo ( 1 er août 1842) ; Jacques Callot 
( 15 septembre 1842) ; Boucher et la Peinture 
sous Louis XV ( I e ' juillet 1843); Chamfort 
(1 er juillet 1848); — à la Revue Démocrati- 
que, en 1840, et a divers autres journaux. — On 
trouve de lui dans la Bibliothèque des Feuil- 
letons : L'Abbé Prévost et Manon Lescaut 
(t. VII);— La Fontaine aux Loups (t. VIII) ; 

— Mademoiselle de Marivaux ( tome XI ). — 
Enfin, il a fait paraître au Moniteur : La Re- 
cherche du Bonheur; et des lettres sur les 
Musées de Province. Enfin il vient de publier 
Le Roi Voltaire, un volume in-8°. C'est un pa- 



radoxe historique comme l'Histoire du ki e fau- 
teuil. L. Locvet. 

Ch. RofciB, Galerie du Gens de Jjettres au Dix-neu- 
vième Siècle. — Bug. de Mlrecotirt, Le$ Contemporains ; 
Arsène Houssaye. — Diet. de ta Conversation. — Boor- 
quelol, La Ut ter. franc, eoniemp. — 4. Janln tournai 
dès Débats dei M et M tout im. - Théodore de Ban- 
ville, Gâterie du Dix-neuvième tiède. 

HOUSSAYB. Fop. An BU*. 

HOU88RAU (Etienne), historien français né 
au Mans dans les première* années du dix- 
huitième siècle, mort le 6 octobre 1763. H ap- 
partenait à la congrégation de Saint Maur, et il 
a travaillé an tome XI des Mistoriens de 
France. Mais ce qui est son titre principal à la 
reconnaissance des érudits , c'est cet immense 
recueil de pièces sur la Touraine , le Maine et 
l'Anjou, qui, rassemblées sons sa direction , for- 
ment aujourd'hui une des meilleures collec- 
tions historiques delà Bibliothèque impériale. Les 
diplômes occupant les neuf premiers volumes 
du recueil; viennent ensuite de simples extraits 
de oartulairts, un dictionnaire topographique, 
une histoire des archevêques de Tours , une his- 
toire des évoques d'Angers, une histoire de Tou- 
raine, des dissertations, des -notes, etc. B. H. 
B. taureau, Hist. tUUr. tu Mains, t. IV, p. ttt. 

Housséix. Voyez Hossém et Hussein. 

J hovston ( Samuel) t général, sénateur du 
Texas au Congres, ancien président do Texas, 
naquit dans le comté de Rockbridge ( Virginie), 
en mars 1793. La vie de ce général est associée à 
des événements qui resteront dans l'histoire, et 
cependant ce n'est pas un homme supérieur; 
mais c'est un type très-remarquable de ces 
hommes de l'ouest, hardis, aventureux , am- 
bitieux de renommée et de popularité, pleins 
de ressources, et menant de front les aventures, 
le roman et le progrès de la civilisation. Fort 
jeune, il perdit son père, et sa mère alla s'établir 
avec sa famille sur les rives dn Tennessee , alors 
la limite de la civilisation dans l'ouest. Là , le 
Mur sénateur ne put recevoir qu'une mince 
éducation. Il passa quelques années parmi les 
Indiens Cherokees , et y puisa des goûts et des 
habitudes qui donnent a son caractère une cou- 
leur originale. Au fond , il se sent bien plus 
heureux au milieu des vastes forêts et des 
prairies qu'au sein de la civilisation. Il débuta 
par être commis d'un petit marchand , puis il 
ouvrit une école. Ces occupations pacifiques ne 
lui allaient pas. Il s'engagea dans l'armée, et 
servit sous le général Jackson dans la guerre 
contre les Creeks. Il s'y distingua beaucoup, et 
à la fin des hostilités il était lieutenant. Cette 
carrière fermée, il en essaya une autre. Il étu- 
dia le droit et s'étabHt comme avocat à Nashe- 
ville. C'est vers ee temps que commence sa vie 
politique. Après avoir occupé plusieurs places 
peu importantes dans l'État de Tennessee , il fut 
en 1823 nommé représentant an congrès, et con- 
tinua à y siéger jusqu'en 1827, année où il fut élu 



J77 HOUSTON — HOUTMAJî 

gouverneur de l'État En 1829, avant la fin 
même du terme de sa place, il donna sa démis- 
sion, et alla s'établir an milieu des Cherokees, 
dans l'État à demi sauvage d'Arkanaas. Pen- 
dant sa résidence au milieu dea Indiens, il put 
voir de prêt les fraudes de tous genres dont 
osaient les agents du gouvernement à l'égard 
des pauvres Indiens. Il en foi ému de pitié et 
d'indignation , et te rendit à Washington pour 
les exposer et en obtenir justice. Sa mission gé- 
néreuse eut peu de succès. Ses attaques contre 
les coupables lui suscitèrent plusieurs procès en 
calomnie. De dégoût, Il quitta la place et re- 
tourna auprès de ses amis indiens. 

Dans une visite qu'à fit au Texas, on lui de- 
manda la permission d'user de son nom pour 
une convention qui allait se former, afin de ré- 
diger une constitution pour le Texas avant son 
admission dans l'Union mexicaine. II y consen- 
tit, et rat élu membre de l'assemblée à l'unani* 
mité, lia constitution proposée fut rejetée par 
Santa-Anna, qui avait alors le pouvoir. Le mé- 
contentement des Texiens fut porté au comble, 
quand on leuv demanda de livrer leurs armes» 
Ils résolurent de résister. Une milice fut orga- 
nisée, et Austin, le fondateur de la colonie» fut 

nommé général en chef, poste où il fut bientôt 

remplacé par Houston. 

Ce général improvisé conduisit la guerre avec 
vigueur et habileté, et la termina glorieusement 

par la victoire de San-Jacintho (avril 183a), 

Les Mexicains furent mis en déroute complète, 

avec une perte de 700 hommes, tandis que lea 

Texiens n'en eurent» dit-on, que 7 tués et 30 

blessés» Santa-Anna lui-même tomba au pou- 
voir des vainqueurs, et ses récentes cruautés à 

la prise de la forteresse d'Alamo, défendue par 

les Américains, avaient produit une si grande 

irritation» qu'on eut bien de la peine a le sous- 
traire à une vengeance sommaire. La même 

année , l'indépendance du Texas fut reconnue 

par le Mexique , et le général Houston inauguré 

comme premier président de la nouvelle répu- 
blique. A l'expiration de ces fonctions, comme la 

loi interdisait une réélection immédiate, il devint 

membre du congrès. En 1&41 il fut nommé de 

nouveau président. Son projet favori était de 

faire admettre le Texas dans l'Union Américaine ; 

mais, malgré ses efforts , il acheva le temps de 

son administration sans y avoir réussi. Ce ne 

fut qu'en 1844, et après de vives discussions au 

sein du congrès, que le Texas fut admis comme 

État de l'Union. Le général Houston fut élu sé- 
nateur, dignité dont il jouit encore. Deux on 

trois fois, ses amis l'ont mis en avant comme 

candidat à la présidence. Mais bien qu'il soit un 

des chefs du parti démocratique qui est en pos- 
session du pouvoir et de la popularité depuis 

vingt-cinq ans, que lui-même soit populaire, sa 

candidature n'a pas eu beaucoup de succès. 
J. Chamjt. 
American, Biographe* — Notés particulières 



278 
houstouh ou HoesTOM ( William ), bo- 
taniste anglais , né vers 1695, mort en Amérique 
en 1733. il partit fort jeune comme chirurgien 
de marine, et parcourut diverses contrées de TA* 
mérique. De retour en 1728, il se rendit à Leyde 
et y suivit les cours de Boerhaave. De concert 
avec van gwieten, il commença une série d'ex- 
périences anatomiques, et reconnut que les ani- 
maux ne peuvent plus vivre lorsque l'air pé- 
nètre dans les cavités des plèvres. Houstoun fut 
reçu membre de la Société royale de Londres 
en 1739 ; il repartit presque immédiatement pour 
le nouveau continent, et s'y livra à la botanique. 
On lui doit la première description authentique 
de la plante qui fournit la contra-yerva. On a 
de lui Reliqui» Motutonianim, seu Planta* 
rum in America meridionali çollectarum 
Icônes s Londres, 1761, in-4". Cet ouvrage, orné 
de 25 planches, a été édité par J. Banks. Il contient 
les caractères de quinie genres et de onze espèces 
originaires des environs de Venezuela. Grono- 
vius a donné le nom de hwsionia à un genre 
de rubiaoées dont toutes les espèces sont des ar- 
bustes de la Caroline, delà Virfuûeetdu Mexique; 
ce genre portait déjà un nom : o'était le bow 
verdia de Saliab, A. pn L. 

• MUnraphiê mMfeiUi. 

boutbeim ( Ubêrt), poète latin belge, né à 
Toogres, au commencement du seizième siècle, 
mort en 15ÔJ. Entré de bonne heure dans la 
congrégation des Hiéronoymites, il enseigna d'a» 
bord les belles-lettres à Mon* , au Colleginm 
Mondamm; plus tard il devint prieur dn cou- 
vent de son ordre établi à Liège. On a de lui : 
Ethiea ViteRatio; Liège, l673,in-4°; — Thea* 
trurn Vitehumanx, comédie; Liège, 1574, 
in-4°; — Gedeon, tragi-comédie; Liège» 1575, 
in*4°;~*r Oratio in NatalemChrisli, vertu 
heroico; Anvers, 1577, in-^; — KautoYsitvia, 
seu de mala vicinla; Mons, 1580, in-8°; — - 
Compendivm de Versibusfaciendis. £. G. 

Foppens, BiblUXheca Belgica. 

HOUTMAïf (Corneille), navigateur hollan- 
dais, né à Alkmar (1), 'vers 1560, mort dans le 
royaume d'Achem, vers 1605. Ses compatriotes 
le considèrent à juste titre comme le fondateur 
de leur commerce direct avec les Indes ; du moins 
est-il constant que, le premier, il fit flotter le pa- 
villon néerlandais dans ces contrées lointaines. 
Jusqu'à lui les Hollandais étaient véritablement , 
pour le trafic des épices et des autres produc- 
tions hindoues ou malaises, tributaires des Es- 
pagnols et des Portugais ; les persécutions qu'ils 
éprouvèrent dans les ports de la Péninsule , soit 
de la part des gouverneurs royaux, soit de l'in- 
quisition, les décidèrent à s'ouvrir des relations 
avec les pays de production. Ils cherchèrent 
vainement un passage au Cathay par le nord-est; 
d'un autre coté , les caravanes par la Tartarie et 



(1) Plusieurs biographe* français le font naître à Gouda; 
nous avons préféré la version des auteurs hollandais. 



279 



HOUTMAN 



280 



la Moscovie présentaient tant de dangers et 
étaient soumises à tant d'avanies de la part des 
nombreux princes dont il fallait traverser les 
possessions, que le commerce devenait impos- 
sible. Houtman résolut de faire cesser cet état 
de choses : ses affairesl'ayant appelé à Lisbonne, 
il s'y informa soigneusement de tout ce qui con- 
cernait le commerce des Indes et des routes 
qu'une longue expérience avaient rendues fami- 
lières aux Portugais. Sa curiosité parut indiscrète 
aux autorités , dans un pays où il était sévère- 
ment défendu aux étrangers de demander ou 
recevoir des renseignements sur les pays trans- 
atlantiques. Houtman fut jeté en prison et con- 
damné à paver une amende fort au-dessus de sa 
fortune , et qui n'avait ^té prononcée que pour 
rendre sa délivrance impossible. La nécessité lui 
inspira l'idée de s'adresser aux principaux mar- 
chands d'Amsterdam , leur promettant pour prix 
de sa liberté qu'il leur donnerait les moyens de 
se frayer une route vers les Indes. Sa proposi- 
tion fut acceptée et sa rançon soldée. En 1594, 
de retour dans sa patrie , il ne pensa qu'à l'exé- 
cution de sa promesse, sons le triple mobile de 
l'intérêt, de la vengeance et de la reconnaissance. 
Après avoir écouté ses rapports, les marchands 
d'Amsterdam résolurent de former une société 
sous le nom vague de Compagnie des Pays 
Lointains, Les premiers directeurs (1) firent ar- 
mer quatre bâtiments : le Maurice, La Hol- 
lande , V Amsterdam et Le Pigeonneau , por- 
tant ensemble 247 hommes d'équipage et 100 
pièces de canon ou pierriers ; les capitaines étaient 
Jan Jansz de Molenaâr, Jan Dignumsz, Jan Ja- 
cobsz Schellinger et Simon Lambertsz Man. 
Houtman dirigeait la flotte comme commis du 
commerce ou subrécargue. La flottille mit à la 
voile du Texel le 2 avril 1595. Le 16 on relâcha à 
l'Ile de Maïo (lies du cap Vert), le 2 août près 
du cap des Aiguilles, le 3 septembre à Sainte- 
Marie de Madagascar, où les Hollandais durent 
plusieurs fois combattre les naturels ; ils y sé- 
journèrent jusqu'au 15 février 1596 : leur séjour 
y fut marqué par de nombreux incidents. L'hos- 
tilité des habitants et la mort de plusieurs de ses 
compagnons décidèrent Houtman à se diriger 
sur les Maldives, et le 1 er juin il était en vue de 
Sumatra. Le 23 juin il entra dans le port 
de Bentam, et ce même jour il fut reconnu 
pour capitaine major de l'expédition. Il fut fort 
bien reçu, du moins en apparence , par l'empe- 
reur Raïa Dauma et ses principaux officiers ; car 
ceux-ci, excités par les Portugais, tendirent di- 
verses embûches aux Hollandais, que la vigilance 
de leur chef empêcha seule d'être massacrés. 
Cependant, le 28 août, Houtman ayant eu l'im- 
prudence de se rendre avec sept hommes seule- 



■ (1) Us étaient an nombre de dix: leurs noms méritent 
d'être conservés : c'étaient Henri Hudde, Renier Paaw, 
Pierre Hasselaar, Jean Jansz, Carel de Oude, Jean Pop- 
pen, Henri Buyk, Dlrk van Os, Syvert Pletersi Sem, et 
Arent van Grooteohuyze, . ■ ; ^. 



ment chez lesabandar (gouverneur) de la viiie, 
il fut aussitôt arrêté. Ses compagnons ayant 
vainement réclamé sa mise en liberté vinrent 
mouiller devant Bentam , prirent ou brûlèrent 
les bâtiments qui s'y trouvaient, et commen- 
cèrent à canonner la place. Houtman, menacé de 
mort, supplia ses compatriotes de cesser les 
hostilités : ils y consentirent à regret; cependant, 
le 22 octobre, ils obtinrent la mise en liberté 
du capitaine major moyennant une rançon de 
deux mille réaies de huit. La guerre recommença 
presque aussitôt, et dura jusqu'au 6 décembre, 
où Houtman, voyant qu'il n'y avait ni honneur 
ni profit à espérer dans ces parages, se dirigea 
sur Jacatra. Là, les insulaires, après quelques 
pourparlers, attaquèrent traîtreusement la pi- 
nasse Le Pigeonneau, assassinèrent le capi- 
taine Jan-Jacobsz Schellinger et une partie de son 
équipage. Les Hollandais eurent un vif combat à 
soutenir pour repousser leurs ennemis, auxquels 
ils tuèrent plus de cent cinquante hommes; mais, 
trop faibles pour tirer vengeance des Jacatrans, 
ils levèrent l'ancre durant la nuit et atterrirent à 
Madure. Le roi de cette lie et le chérif (chef de la 
religion) demandèrent aux voyageurs la per- 
mission de venir à bord; elle leur fut accordée, 
et ces deux chefs s'y rendaient avec environ 
trois cents des principaux seigneurs, leurs 
femmes et leurs enfants, lorsque les Hollandais, 

f craignant encore une trahison, ouvrirent tout à 
coup un feu terrible sur les pirogues indiennes, 
qui furent broyées en un instant; le roi, le 
chérif furent au nombre des morts ainsi que la 
plus grande partie de leurs familles. Vingt et an 
Madurois échappèrent seuls au carnage. Houtman 

? reconnut bientôt que ses hommes avaient agi avec 
trop de précipitation: il relâcha les prisonniers; 
mais, comprenant qu'il lui serait impossible de 
renouer des relations commerciales après un pa- 
reil massacre, le 11 il toucha à Laboc (la petite 
Madure). Le 25 décembre Jan de Molenaâr, capi- 
taine du vaisseau le Maurice, et qui avait corn* 
mandé l'expédition jusqu'à Bentam , mourut su- 
bitement; l'autopsie de son cadavre prouva qu'il 
avait succombé au poison. Houtman, qui avait 
été continuellement en querelle avec Molenaâr, 
et qui même s'était battu avec lui, fut hautement 
aceusé de ce crime* Une révolte s'ensuivit, et 
le 27 le capitaine major fut mis aux fers par l'é- 
quipage de son propre vaisseau ; néanmoins, le 30 
il fut absous par le conseil des officiers supérieurs, 
et réintégré dans son commandement. Le 11 jan- 
vier 1595 il reconnut que le nombre des matelots 
était devenu insuffisant pour le servicedes quatre 
navires, et fit brûler Limiter dam comme difficile 
à manœuvrer. Le 18, il fit aiguade à Bali,et fut 
parfaitement aecueilli du foi et des habitants. Le 
26 février Houtman reprit la mer, et ne s'arrêta 
plus que le 10 août sur les côtes de Hollande, 
après un voyage de vingt-neuf. mois. Les équi- 
pages réunis ne comptaient plus que quatre- 
vingt-neuf hommes, encore la plupart scorbu- 



281 



HOUTMAN 



282 



tiques. On le voit, cette expédition était loin 
d'avoir rapporté à la Société des Pays Lointains 
les bénéfices qu'elle avait espérés ; mais c'était 
le premier pas fait dans une nouvelle carrière ; 
désormais la voie des Indes était ouverte aux 
Hollandais : ils ne l'abandonnèrent plus. Dès 
l'année suivante les négociants de Middelbourg 
armèrent deux vaisseaux,£e Lion et La Lionne, 
dont ils donnèrent le commandement à Hout- 
man. Cette seconde expédition fut encore plus 
désastreuse que la première, et son chef ne pa- 
rut pas avoir profité des leçons qu'il avait reçues 
dans les Maldives. On lui donna pour pilote l'ha- 
bile Anglais John Davis (vgy. ce nom) : ils 
mirent à la voile le 15 mars 1798, et leur navi- 
gation fut rapide et heureuse jusqu'à Madagascar, 
où ils firent aiguade; ils visitèrent ensuite les 
Comores, les Maldives, la Cochinchine, et le 
21 juin 1799 mouillèrent en rade d'Àchem (fie 
de Sumatra;). Ils se chargèrent assez facilement 
de poivre et d'autres épiées ; mais, au moment de 
leur départ, le roi ayant invité Houtman à une 
fête d'adieu , ses gardes apostés se ruèrent sur 
les Hollandais, en tuèrent plusieurs et firent 
prisonnier le commandant, son frère Frédéric 
et* neuf de leurs compatriotes. Les équipages des 
deux vaisseaux zélandais, privés d'nne partie de 
leurs officiers, et craignant une attaque imminente, 
levèrent l'ancre aussitôt et s'enfuirent àMalacca ; 
ils touchèrent aux lies Nicoban et à Ceylan, et 
rentrèrent à Middelbourg le 29 juillet 1600. Le 
29 décembre suivant, le général Paul van Carden 
et le subrécargue Adam Vlaming , trafiquant en 
rade d'Àchem, virent arriver cinq des Zélandais 
prisonniers : ces hommes venaient de s'échapper 
de la forteresse de Pédir, où étaient encore dé- 
tenus Houtman et quelques autres. Le 31 Hout- 
man vint lui-même à bord avec trois Hollandais. 
Vlaming obtint facilement du roi la liberté des 
fugitifs; mais, à l'instigation d'un prêtre espa- 
gnol, le monarque revint sur sa parole; il fit 
enlever de nouveau Houtman, et le fit transpor- 
ter dans l'intérieur des terres ainsi qu'un nommé 
Hans Decker, qui servait d'interprète. Van Car- 
den essaya vainement de se faire rendre par la 
force ces deux malheureux. H s'empara de tous 
les bâtiments qui se trouvaient dans le port , et 
offrit de les échanger contre les prisonniers : le 
roi préféra les laisser brûler. Depuis lors on 
n'entendit plus parler de Houtman, et on ignore 
l'époque et le genre de sa mort. Durant sa cap- 
tivité il s'était occupé d'observations astrono- 
miques il les remit à Vlaming. Il signalait no- 
tamment plus de treize cents nouvelles étoiles 
qui/dans la suite, furent groupées en treize cons- 
tellations nouvelles. 

La relation du premier voyage d'Houtman a 
été publiée en hollandais à Amsterdam et à Mid- 
delbourg, 1598, in-fol. Elle fut traduite en latin 
sous le titre de JHarium nauticum Itineris 
Batavorum in Indiam Orientaient, annis 
1595, 1597, Amsterdam, in-fol. ;Arnheim, in-4°, 



fig.; en français, Premier Livre de V Histoire de 
la Navigation aux Indes Orientales par les 
Hollandais et des choses à eux advenues, 
Amsterdam, 1606, in-fol., fig. et cartes. Elle fait 
partie du recueil hollandais intitulé : Histoire 
du Commencement et des Progrès de la Corn- 
pagnie des Indes des Provinces-Unies des 
Pays-Bas, contenant les principaux voyages; 
Amsterdam , 1646, in-fol., ou 2 vol. in-4°, avec 
fig. Cet ouvrage a été souvent traduit en fran- 
çais, et donne des notions fort curieuses sur les 
premières expéditions des Hollandais et sur les 
pays qu'ils visitèrent. Alfred de Lacaze. 

Recueil des Voyages qui ont servi à l'Établissement et 
aux Progrez de la Compagnie des Indes orientales for- 
mée dans les Provinccs-Vniet des Pays-Bas ( Rouen , 
17*8, 10 vol. ln-8», avec cartes et flg.}, t. I««\ p. «3-436; 
t. Il; p. 1-158, t. III. Voyage de P. van Carden, etc., 
p. 176-196. — J.-P.-J*. Du Bois, fies des Gouverneurs gé- 
néraux aux Indes Orientales; La Haye, 1768, ln-t°,flg. 
et cartes; Introduction, p. 4-6. — Raynal, Histoire 
Philosophique des deux Indes . t. II, p. 14 et 15. — Gro- 
tfus, Historia, I. XI. - Histoire de ta Conquête des Mo- 
luaues, t. III, p. 86. 

houtman ( Frédéric ), navigateur hollandais, 
frère du précédent, né vers 1570, mortvers 1613. 
Il suivit la carrière du commerce et de la navi- 
gation , et accompagna son frère dans son se- 
cond voyage aux Indes orientales de 1598 à 1600. 
Il fut pris avec lui par le roi d'Achem et en* 
fermé dans la citadelle de Pédir. 11 s'enfuit avec 
son frère, et vint trouver Paul van Carden dans 
la rade d'Achem le 31 décembre 1600; mais 
comme il était fort malade, il refusa de retour- 
ner à terre et évita ainsi une longue captivité. 
Il occupa divers emplois au service de la Com- 
pagnie des Indes, et le 12 novembre 1619 (1) 
fut nommé gouverneur d'Amboine. Ce fut sous 
son gouvernement qu'eut lieu la conquête défi- 
nitive des Moluques par les Hollandais et mal- 
gré l'opposition armée des Anglais. Frédéric 
Houtman contribua beaucoup à la pacification 
de ces lies. Il parait avoir succombé, jeune en- 
core, à l'influence pernicieuse du climat, car dès 
1624 van Speult gouvernait à Amboine. Hout- 
man a laissé une bonne description d'Amboine; 

— quelques observations astronomiques f 

— et Spraakende woord-boek in de ma- 
leische ende madagarschetalen met vêle ara- 

(l) Et non en l607,cotnme l'écrit Eyriès dans la Biogra- 
phie universelle de Mlchand. Houtman fut nommé par le 
gouverneur général, Jean Pietersz Coen, en remplace- 
ment de van den Brocek, qui se plaignit amèrement de 
ce changement. Coen lui écrivit la singulière lettre qui 
suit : « Je sais surpris que vous vous formalisiez si fort 
de l'arrivée de M. Houtman auprès de vous, et que vous 
vous oubliiez en quelque façon vous-même. Vous de- 
vriez user de plus de réflexion , et considérer qu'il sied 
mieux au subalterne de plier qu'an supérieur. La lune 
domine bien sur la nuit ; cependant lorsque le soleil se 
montre, n'est-elle pas obligée de céder? Bn reste-t-elle 
moins la même! Bile ne perd rien de sa dignité; mais 
elle attend son temps el ne cherche point à troubler 
l'ordre de la nature. Le paysan cède an gentilhomme , 
le gentilhomme au comte, le comte au duc, le duc au 
roi, le roi à l'empereur, l'empereur à Dieu, et Dieu A 
toutes choses avec une certaine harmonie et nn certain 
ordre. Jacatra, >8 novembre 1619.> 



283 



HOIJTMAN — HOVE 



284 



bische en turksche woorden; Amsterdam, 
1603, in-4* : c'est un dictionnaire des langues 
malaie et malgache. A. de L. 

Recueil des reloges qui ont ont servi à rétablissement 
des Hollandais dan* les Indes, etc.; t III , Voyage de 
P. van Carden , p. 181. — Dubois, Fie des Gouverneurs 
généraux hollandais aux Indes Orientale» ; Introduction* 
p. 6 et M. 

houtteyillb ( Alexandre-Claude- Fran- 
çois) , littérateur français, né en 1686, à Paris, où 
il mourut le a novembre 1742. Il entra dans la 
congrégation de l'Oratoire, qu'il quitta pour être 
attaché comme secrétaire au cardinal Dubois, 
Le succès qu'il avait obtenu dans des confé- 
rences tenues à Tours sur divers points de l'His- 
toire Sainte, lui donna l'idée d'un ouvrage qu'il 
publia en 1722 sous le titre ; La Vérité de la 
Religion Chrétienne prouvée par les faits , 
précédé d'un Discours historique et critique 
sur la méthode des principaux auteurs qui 
ont écrit pour ou contre le Christianisme de- 
puis son origine; ln-4°. Cet ouvrage, auquel 
le Journal de Trévoux (t. V) donna de grands 
éloges , eut d'abord beaucoup de succès ; mais il 
souleva bientôt de nombreuses critiques, qui lui 
reprochaient le défaut de méthode, des inexacti- 
tudes sur divers points de doctrine, des omissions 
graves, des arguments trop faibles contre les rai- 
sonnements des incrédules présentés avec trop de 
force; une élocution maniérée, pleine de néolo- 
gismes et de chutes visant à l'épigramme. V. Four- 
mont et Souchay l'attaquèrent, le premier dans 
sa Lettre d*lsmael Ben Abraham Juif converti, 
l'autre dans la Bibliothèque Française (t. It, 
2 e partie ), où il fit insérer une lettre toute com- 
posée, des expressions singulières qu'avait em- 
ployées l'auteur. Mais la critique la plus impor- 
tante fut celle de l'abbé Desfontaines, dans vingt 
Lettres à Vabbé Houtteville. Celui-ci répondit 
par une Lettre à M*** au sujet de quelques 
difficultés sur le livre de « La Religion Chré- 
tienne prouvée par les faits, » 18 mars 1722. 
Du reste , toutes ces critiques n'empêchèrent 
point l'Académie Française d'admettre Houttê- 
ville au nombre de ses membres, le 23 février 
1723, et de le nommer son secrétaire perpétuel 
le 27 février 1742. A la fin de l'année 1723 il fut 
aussi nommé abbé de Saint-Vincent du Bourg- 
en-mer, diocèse de Bordeaux. Il profita des cri- 
tique* qui lui parurent fondées lorsqu'il donna 
une seconde édition, en 1740, 3 vol. in-4*. 
Ainsi on lui avait reproché d'avoir défendu les* 
faits contenus dans les Évangiles avant d'avoir 
prouvé l'authenticité des Évangiles eux-mêmes; 
et il consacra cinq nouveaux chapitres à cette 
controverse. L'ouvrage fut réimprimé en 1749 
et 1765, en 4 vol. in-12, sous ce titre : La Reli- 
gion Chrétienne prouvée par les faits, ete. 
Houtteville est, en outre, auteur d'un Essai 
philosophique sur la Providence; 1728, in-12. 
Houtteville a donné aux mémoires de littérature 
du P.Desmolets une Dissertation sur la préfé- 
rence à donner à Hérodote sur C testas, et 



une autre Sur la Religion de Chalcidius, conti- 
nuateur de Timée, et une réponse à'ia réfuta- 
tion qu'on avait faite de cette dissertation. Enfin, 
on a de lui quelques discours académiques, 
entre autres les Éloges de Bossuet et du maré- 
chal de Villars. . , G. ne F. 

Son Éloge par Marivaux, Recuett.des Harangues pro 
noncèes par les membres de l'Académie française, t V 

— Morérl, Dictionnaire Historique, — Sabatier, Troi- 
sième Siècle Littéraire. - Jaurnal de Trévoux* Jotn et 
août 1711. 

tiQUWALD ( Christophe- Ernest, baron de), 
poète dramatique allemand, né à Straupitz (basse 
Lusace), le 29 novembre 1778, mort le 28 jan- 
vier 1845. II étudia à Halle, où il se lia avec 
Contessa. Au sorte de l'université, il prit part 
aux affaires de sa province; puis, en 1815, par 
suite de la nouvelle organisation de la basse Lu- 
sace, il se retira complètement de la vie officielle. 
Néanmoins, il fut nommé, en 1822, syndic de ta 
province j il alla demeurer alors à Lûbben , où 11 
mourut. 11 cultivait depuis longtemps la poésie. 
Après avoir publié dans les journaux quelques 
essais poétique! sons, lé pseudonyme d'Ernest 
de Wa\hy4o (anagramme , de son nom ). D 
fit paraître : Momantische Accài'de (Accords ro- 
mantiques), 2 vol. \ Berlin, l$l?; — Die Frets- 
tatt {La Ville libre); — m Heimhehr (Le 
Retour) ; 1821 i — Dos Bild ( Le Portrait) ; - 
Fluch und Segen ( Bénédiction et Malédiction) ; 

— Der Fiirst und der Burger (Le Prince et le 
Bourgeois) ; Leipsig, 1623; — DieFeinde (Les 
Ennemis ) ; Leipzig, 1825 ; — Die Ràuber ( Les 
Brigands).} Leipzig t 1830; — Vermischte 
Schriften (Écrite mêlés) ; Leipzig, 1825 ; —BU- 
derfiir die Jugend ( Portraits pour la Jeunesse) ; 
Leipzig, 1829-1892 et 1839. ' V. R. 

Cmv.-Lemit. 

hovb ( Antoine vàn ) , en latin Antonius 
JJovsaus, poète latin et historien hollandais, né à 
Sgtnond (Nord-Hollande) (1), vers 1505, mort 
dans l'abbaye d'Epternacb, le 8 octobre 1568 (2). 
Il ât profession chez les Bénédictins du lieu de 
sa naissance, et se livra avec assiduité aux tra- 
vaux historiques et littéraires. Philippe II le 
nomma abbé d'Epteroacb (Luxembourg), en 
1583. Hove mourut dans cette dignité. Quel- 
ques heures avant d'expirer, il composa lui- 
même son épitapbe (3) : 

On a de lui : Zuermondius, vel de temporis 
nostri statu, ac conditione dialogus, for- 
tasse obamabilem rerum vatietatem non in- 
jucundus; Leyde, 1£63, in-12. L'auteur y rap- 
porte un entretien qu'ils eurent lui et son frère 

(l) C'ett à tort que Jacquet de ta Torre le fait naître 
à Wurmer. Van Hove dans le titre de placeurs de ses 
ouvrages ajoute à son nom Hstcmundanus. 

(t) C'eut la date Inscrite aur son tombeau ; on ne sait 
pourquoi Sweert Je fait mourir le f septembre. 
(S) fille est ainsi conçue : 

Hic Jacet excelsl pneceptor amoris Horaras, 
Exspeetaqoe sut Judlela ora Del. 
Urna ferait flores, ▼ entent atque omaia dreua : 
Corpoa uumt eubltet, mena cotet alta polos. 



285 



HOVE — HOVEL 



286 



Théodore avec un philosophe chrétien nommé 
Pierre Zuennend, la veille de la mort, de ce 
dernier, il prête à Zuermond des discours assez 
disparates sur la Providence divine, l'immorta- 
lité de rame , les hérésies du seizième siècle , 
les grands hommes du temps , etc. On trouve 
dans cet ouvrage quelques documents utiles 
pour la biographie et l'histoire générale; — De 
Arte amandi Deum : accessit Odarum, Hym- 
norumac Precum Liber; Cologne, 1566, in-lft* 
—-Historié van de édile welrqeboreneHeereth 
ende Graven van Egmond^etc. (Histoire des 
Seigneureet des Comtes d'Egmond) ; 1630, in-12, 
goth. ; seconde édition, augmentée d'un Cota* 
logue des Abbés d'Egmond, avec leurs Vm 
en abrégé, et quelques Épitaphes des anciens 
comtes de Hollande, etc. ; Harlem, 1664, in-4° ; 
— plusieurs Chronologies de maisons nobles des 
Pays-Bas et diverses poésies latines. A. L. 

Préface de Zuermondius , feuillets i, xxxvm et 
xxxix. — Sweert, Rer. Belgie. Annal, p. 1M,1M. — 
Val. André, Bibliatkeea Belçica, p. 67-68. - Foppens, 
BibliotheÔa Belgica, p. 79*80. — Van Heussen, Historia 
Episc. Harlem., p. 76. — Jacques de LaTorre. 

hovbdrn ( Roger de), historien anglais, né 
dans le comté d'York, vivait vers la fin du dou- 
zième siècle; il fut chapelain d'Henri H, et rem- 
plit auprès de ce monarque d'importantes fonc- 
tions diplomatiques. Ses Annales Rerum Angli- 
carum forment une continuation de l'histoire 
ecclésiastique de Bède, et s'étendent de l'an 731 
à l'an 1202 ; cette production a de l'importance, 
surtout lorsque, vers la fin de son œuvre, l'écri- 
vain parle d'événements qu'il a dû bien con- 
naître ; an commencement il ne fait guère que 
copier d'autres chroniqueurs. Ces Annales se 
trouvent dans les Rerum Anglicarum Scrip- 
tores, édités par Sa vile; Londres, 1596, p. 230- 
471. H s'en rencontre des extraits dans les 
Scriptores Brunsvicenses, édités par Leibnitz, 
t. I, p. 846-880. 6. B. 

Vosstos, De HUtortcii laUMs, H, M. - Cave . Scrip- 
iore* ecclaiattici. L II, p. «s, - Fabriclus, biblioth. 
Latina MediijEvi, 1. 111. p. Wt.~ Recueil de» Historien» 
des Gantes, t. XI, p. LXXX ; t XIII, p. M. 

HOTEL, BÔVBLRE(l), en latin Hevblius, 
célèbre astronome allemand , né à Dantzig, le 
28 janvier 1611, mort le 28 janvier 1687. Fils 
d'un riche brasseur, il fut d'abord destiné au 
commerce; plus tard, sur le conseil de quelques 
amis de sa famille, il étudia le droit ; mais bien- 
tôt il sentit se développer en lui une véritable 
passion pour les mathématiques. Il y était en- 
couragé encore par son maître, P. Krùger, qu'il 
aidait dans ses observations astronomiques. H 
s'occupait aussi à tailler et à polir le verre, et 
à faire, pour son propre usage, des instruments 
de précision. Désireux de se perfectionner dam) 
ses études et de se mettre en relation avec les 



(1) Moml et aon dirtoatil Hovelke soit les Trait 
noms du célèbre astronome, ainsi que l'attestent la si- 
gnature de ses lettres écrites en allemand. 



\ savants de son temps, il visita les principales 
i contrées de l'Europe j il séjourna une année à 
Londres, et suivit les cours de J. Wallis, de 
Jacques Usher, de J. Hartlieben, et d'autres 
fondateurs futurs de la Société royale de Londres. 
A Paris, il se lia d'amitié avec le P. Mersenne, 
avec Gassendi et Bouillaud, comme le témoigne 
sa correspondance. Le P. Kircher, qu'il connut 
à Avignon, devint aussi un de ses amis et corres- 
pondants» Ces voyages lui fournirent en même 
temps l'occasion de quelques observations 
d'éclipsés de Soleil. En quittant la France, 
il se disposait à visiter l'Italie, où il désirait faire 
connaissance avec Galilée, lorsque ses parents 
le rappelèrent auprès d'eux. Hovel fut de retour & 
Danùig en 1634, après quatre a îs d'absence. 
Seul survivant de ses frères, il géra la brasserie 
de son père, fort âgé, devint un des magistrats 
de sa ville , et épousa, à vingt-quatre ans, la 
fille d'un riche négociant, Catherine Rebaschke, 
dont il n'eut point .d'enfants. Sur le conseil de 
son maître mourant,' il consacra tous ses loisirs 
à l'étude de l'astronomie, et débuta le l« r juin 
1639 par une observation soignée d'une éclipse 
de Soleil. Ce phénomène lui donna l'idée de se 
vouer particulièrement à l'étude de la Lune et à 
dresser les premières cartes sélénographiques. 
Il avait pour cela toutes les qualités requises : une 
vue excellente, une main habile au dessin et à 
la gravure, une patience à toute épreuve et une 
grande dextérité à travailler le verre. Son talent 
d'opticien le mit» en outre, à même de se fabriquer 
pour son usage d'abord deux lunettes, l'une de 
six et l'autre de douze pieds de longueur, qu'il lui 
aurait été alors impossible de se procurer à prix 
d'argent. Mais à la nouvelle que Gassendi, son ami, 
avait aussi le projet de faire des cartes lunaires, 
Hovel voulut renoncer à son travail : ce ne fut 
qu'à la prière de Gassendi, lui assurant qu'il 
abandonnait son projet, que Hovel reprit sa sé- 
lénographie. U agrandit le plan qu'il s'était d'a- 
bord tracé : au lieu de se borner à une carte de 
la pleine Lune, il dessina toutes les phases lu- 
naires. Ce travail l'occupait nuit et jour : Les 
observations qu'il avait faites la nuit, il les gra- 
vait le jour au burin sur cuivre. Lus planches 
ainsi obtenues sont remarquables de netteté ; la 
gravure à l'eau -forte, plus expéditive, n'aurait 
pas donné le même résultat. Après cinq ans de 
veilles laborieuses et patientes, il publia, à ses 
frais, l'important ouvrage : Selenographia, sive 
Lunas descriptif, atque accurata tam ma- 
culorum ejus quant motuum diversorum 
aliarumque omnium vicissitudinum pha- 
siumque, telescopii ope deprehensarum , de- 
Uneatio ; Dantzig (Gedani), 1647, in-fol. Dans 
les deux premiers chapitres, l'auteur traite de 
la fabrication des verres (lentilles); il insiste 
sur la nécessité de se procurer un verre très- 
pur, bien homogène, exempt de bulles et de rai- 
nures, et sur lequel les lentilles (convexes) doivent 
être d'une épaisseur égale aux bords. « On en 



287 



HOVEL' 



288 



reconnaît, dit-il, le.défaut, lorsque les centres ne 
se correspondent pas parallèlement des deux 
cotés (centra ab utroque latere non sibi 
icopaXX^Xœç correspondent), et un télescope, 
fait avec de pareils verres, ne peut être d'aucun 
usage. » Ce que Hovel appelle télescope (teles- 
copium) était un instrument dioptrique, une 
Traie lunette, où le Terre concave était tourné 
vers l'œil et le Terre convexe vers l'objet. Son 
polémoscope, ainsi appelé parce qu'il le croyait 
utile pour des reconnaissances militaires, était une 
lunette catadioptrique, dont le tube est, au-delà 
du milieu, coudé à angle droit ; dans cet angle 
est placé un miroir incliné de manière à recevoir 
l'image des objets par la plus longue portion du 
tube et à la réfléchir par la portion la plus pe- 
tite, où elle est reçue par une lunette. Les deux 
premiers chapitres de la sélénographie sont d'un 
grand intérêt pour l'histoire de l'optique. Les 
suivants sont consacrés aux observations que 
l'auteur a faites avec ses télescopes sur les étoi- 
les, la voie lactée, les planètes, le Soleil et parti- 
culièrement sur la Lune (pag. 109-495), qui était 
le principal but de son travail. Hovel augmenta, 
le premier après Galilée, le catalogue des 
étoiles, surtout de celles qui sont situées dans le 
zodiaque. De ce que les étoiles ne sont pas gros- 
sies par le télescope, il en déduisit leur éloigne- 
ment excessif, comparativement à celui des 
planètes. Leur scintillation ou ce qu'il appelait le 
tremblotement des rayons adventices (tremulus 
motus radiorum adventitiorum) lui semblait 
montrer que leur lumière n'est pas empruntée 
du Soleil, comme l'est celle des planètes, mais 
que c'est une lumière propre, native (lumen 
proprium, a Deo nativum ). Quant à l'exagé- 
ration dn diamètre des étoiles, due à leur scintil- 
lation, il croyait y remédier ou du moins rendre 
leurs disques plus nets et bien arrondis, en 
plaçant devant l'objectif un diaphragme percé 
d'un trou rond de très-petit diamètre ; ce qu'il 
gagnait ainsi en exactitude par l'affaiblissement 
de la lumière des étoiles , surpassait de beau- 
coup ce que lui faisait perdre l'inflexion 1 des 
rayon3 aux bords du trou circulaire du dia- 
phragme. Hovel trouva ainsi pour le diamètre de 
Sirius, 6"3 et pour celui de la Chèvre, 6''; 
valeurs angulaires qui donneraient à ces astres 
au moins 228 millions de lieues de diamètre, en 
supposant qu'à la distance des étoiles les plus 
voisines de nous une seconde de diamètre cor- 
respondrait au moins à 38 millions de lieues 
(valeur du second grand axe de l'orbite terrestre). 
Or, ces grandeurs sont évidemment exagérées, 
comme le prouvent les observations des pa- 
rallaxes, dans lesquelles les diamètres apparents 
ne joHent plus aucun rôle. — Hovel observa 
le premier les phases de Mercure; Galilée n'a- 
vait pu voir, avec ses lunettes, que les phases 
de Vénus. L'astronome allemand observa, le 
3 mai 1661, le passage de Mercure sur le disque 
du Soleil, phénomène qui intéresse particulière- 



ment les astronomes, parce qu'il leur permet de 
calculer avec une très-grande approximation l'or- 
bite de la planète. Comme, d'après les tables de 
Longomontanus, ce passage devait avoir lieu le 
1 er mai, d'après les tables Rudolphines le 3 mai, 
et d'après les Alphonsines le 11, il* s'imposa la 
tâche d'observer tous les jours le Soleil depuis le 
1 er jusqu'au 11 mai; et il trouva que les tables 
Rudolphines avaient indiqué le passage de Mer- 
cure de H heures trop tôt. C'était le troisième 
passage arrivé depuis l'invention des lunettes : ie 
premier avait été observé le 7 novembre 1631, à 
Paris, par Gassendi, qui recevait l'image solaire 
sur une feuille de papier blanc, dans une cham- 
bre obscure, d'après le procédé employé par 
Scheiner pour suivre les taches du Soleil ; on se 
rappelle ce que disait à cette occasion le célèbre 
philosophe : « J'ai vu ce que les alchimistes 
cherchent depuis si longtemps en vain : j'ai tu 
Mercure dans le Soleil » ( le soleil étant l'or et le 
mercure le métal qui porte encore ce nom). La 
seconde observation de ce phénomène est due à 
Skakerœus, en 1631, qui avait fait pour cela le 
voyage de Surate dans l'Inde. Hovel, au lieu de 
viser directement à l'astre, se contentait, comme 
Gassendi, d'examiner l'image agrandie du Soleil 
dans une chambre obscure. Les satellites de Ju- 
piter furent soumis par lui à des observations 
nouvelles et plus exactes que celles de Galilée et 
de Marins. Quant aux cinq nouveaux satellites 
que le P. Antoine deRheita prétendait avoir dé- 
couverts le 29 décembre 1642 (ce qui en aurait 
porté le total à neuf), il les mit avec raison sur le 
compte de quelques étoiles du voisinage. Dans 
une observation rapportée à 1647, l'astronome de 
Dantzig vit Jupiter sans bandes. Cette absence 
intermittente de bandes fut depuis constatée par 
d'autres astronomes, notamment par Herccnel 
en 1793. Saturne fut pour Hovel comme pour 
Galilée une véritable pierre d'achoppement. Vers 
1640 il déelara qu'il ne comprenait rien aux phé- 
nomènes que cette planète lui présentait. Plus 
tard, elle lui paraissait composée de trois parties: 
d'une partie centrale, elliptique, et de deux parties 
latérales, plus petites, simulant des espèces d'an- 
ses (brachiola), en forme de lunules, ou de crois- 
sants attachés par leurs pointes au corps central, 
dont un intervalle vide les séparait : il expli- 
quait la phase ronde de la planète en supposant 
que les deux lunules qui raccompagnent ont été 
transportées, par un mouvement de rotation, l'un 
devant, l'autre derrière son disque. — De 1642 
à 1645, Hovel observa assidûment les taches du 
Soleil, ce qui lui permit d'estimer la rotation du 
Soleil autour de son axe à 27 jours. L'astre cen- 
tral était selon lui un glohe incandescent, en- 
touré d'une atmosphère analogue à celle de la 
Terre, et les tâches proviendraient de la conden- 
sation des vapeurs dans cette atmosphère. 

La lune fut, pour le répéter, l'objet principal des 
travaux d'Hovel. Ses cartes, offrant jour par jour 
toutes les phases croissantes et décroissantes, 



289 



HOVEL 



290 



sont un modèle d'exactitude (i). Galilée avait le 
premier remarqué que les sommets des plus hautes 
montagnes delà Lune se dessinent, particulière- 
mentaux quadratures,comme des points lumineux 
détachés du bord éclairé; et, pour une hauteur 
d'environ 8,900 mètres il évalua à un vingtième 
du diamètre du disque l'intervalle obscur qui sé- 
pare ces points lumineux du bord éclairé. Hovel 
le réduisit à un vingt-sixième, ce qui porte les plus 
hautes montagnes à environ 5,200 mètres (2). 
II crut aussi avoir remarqué que la phase dé- 
croissante de la Lune .est moins éclatante que sa 
phase croissante, ce qui semblerait indiquer 
que la partie occidentale du disque lunaire est 
plus propre à réfléchir la lumière du Soleil que 
la partie orientale. Hovel décrivit très-bien les 
causes de la libration optique, en vertu de la- 
quelle les taches lunaires voisines du bord s'en 
éloignent, disparaissent et reviennent dans l'hé- 
misphère visible. Pour expliquer ce phénomène, 
il faut se rappeler que c'est seulement au centre 
de la Terre que la Lune présente toujours la 
même face , et que c'est de la surface du globe 
terrestre que nous l'observons; les contours lu- 
naires différeront donc plus ou moins, suivant 
que les lignes menées au centre de la Terre et à 
un point de sa surface formeront entre elles des 
angles plus ou moins grands. Hovel voulut d'a- 
bord donner aux montagnes delà Lune les noms 
des philosophes et astronomes célèbres (ce que 
fit plus tard Riccioli); mais il renonça bientôt à 
cette idée, dans l'appréhension de provoquer des 
sentiments d'envie et d'inimitié plutôt que de 
reconnaissance: Videbar facile fieri posse ut, 
cum ista nomenclatura gratiamcolligere vel- 
lem, invidiam atque inimïcitiam mihi fore 
conflarem (3). C'est cependant la nomenclature 
de Riccioli qui fut définitivement adoptée depuis. 
Hovel admet qu'indépendamment de la lu- 
mière réfléchie du Soleil , la Lune a une lumière 
propre, quoique très-faible : « Ce qui le prouve, 
dit-il, c'est que pendant les éclipses qui ont 
lieu à l'apogée , lorsque l'ombre de la Terre , 
étant plus éloignée du Soleil, est plus poin- 
tue (acutior), la Lune parait plus nettement 
rouge (rubicundior aliquantulumque luci- 
dior) que durant une éclipse au périgée, où 
elle parait plus obscure ( obscurior subnigrior- 
que) (4) ». Il croit, comme Galilée, que la Lune 
est propre à être habitée , mais par des animaux 
et des plantes entièrement différents des nôtres 



(t) Noos avons pu nons-méme vérifier l'exactitude asses 
grande des cartes sélénographiques d'Hovel a l'aide d'une 
excellente lunette ( grossissant 90 fois), sortie des ateliers 
du successeur de Frauenhofer, et qui a figuré à l'Exposi- 
tion universelle de 1886. 

(1) Les taches circulaires dont la Lune est'parsemée, et 
qui paraissent comme des coquillages ronds incrustés 
dans une pâte blancbe, sont, suivant Hovel, des vallées 
qui ne paraissent aussi régulières qu'à cause de leur 
grand éloignement , qui nous empêche d'en voir les irré- 
gularités, i 

(S) Selenoçraphia, p. M«. 

(4)/Md. t p. 116. 

WOUY. BlOCa. GÉNÉR. — T* XXV. 



en grandeur et en qualités. « Parce que, ajoute- 
t-il, nous n'y apercevons aucun être, il ne -s'en- 
suit pas qu'il n'y en ait point. Un homme élevé 
'dans une forêt, au milieu d'oiseaux et de qua- 
drupèdes, pourrait-il se faire une idée de l'eau 
et des animaux sans pieds qui y vivent (1) » ? — 
Par une singulière loi du développement de l'es* 
prit humain que nous avons souvent signalée , 
l'homme croit d'abord ce qu'il imagine; puis il 
],ne veut plus croire ce qu'il ne voit point. 

Encouragé par l'accueil fait à son œuvre, Hovel 
continua avec plus d'ardeur encore son étude du 
ciel, malgré ses fonctions de syndic de sa ville na- 
tale, qu'il remplissait depuis 1641. Pour aug- 
menter le pouvoir amplificatif de ses instruments; 
il ne trouva malheureusement d'autre moyen 
que de faire des lentilles d'oculaire dont la dis- 
tance focale dépassait celle des objectifs ; de là 
' des tuyaux d'une longueur telle ( il y en avait de 
150 pieds), qu'il lui fut presque impossible de les 
empêcher de se plier et de les monter convena- 
blement. La renommée de l'astronome de Dant- 
zig se répandit dans toute l'Europe. Les sa- 
vants, les ambassadeurs et les princes étaient 
curieux de visiter son observatoire. Au premier 
rang des savants qui firent tout exprès le voyage 
à Dantzig figurent Halley et Is. fiouillaud. En 
1660 il reçut aussi la visite de Jean Casimir, roi 
de Pologne , auquel il offrit une horloge à pen- 
dule , qu'il avait lui-même construite, sans avoir 
eu connaissance de l'invention de Huygens. 

En 1677 Hovel obtint de Jean HI Sobieski, qui 
était également venu le voir, une pension an- 
nuelle de 1,000 florins et l'exemption des rede- 
vances qu'il payait au fisc-, comme proprié- 
taire de brasseries. Par reconnaissance, l'as- 
tronome plaça les armoiries de son royal bien- 
faiteur au ciel : c'est la constellation désignée 
sous le nom é'écu de Sobieski. Hovel fut aussi 
inscrit, en 1664, sur la liste des savants euro- 
péens pensionnés par Louis XIV; mais il ne 
toucha que sept annuités, et reçut deux fois des 
cadeaux. En retour, il envoya au roi tous ses 
ouvrages, et lui en dédia une partie. Membre de 
la Société royale de Londres presque dès sa 
fondation, il entretenait une vaste correspon- 
dance (2) avec les principaux savants de la 
France, de l'Angleterre et de l'Italie. Parmi ces 
savants nous citerons : Gassendi, Bouillaud, Ro- 
berval,le P. Messenne, Desnoyers Linemann, etc. 

En 1664, la joie du savant fut troublée par un 
malheur domestique : Hovel perdit sa femme 
après vingt-sept ans d'un mariage stérile. Un 
an après il épousa une jeune fille de seize ans, 
Elisabeth Koopmann ; il en eut une fille, qui 



(1) Galilée, dans son Syitema Mundi, avait déjà Indi- 
qué cet argument 

(t) Une faible partie seulement de cette correspondance 
a été imprimée; la plus grande partie est restée inédite : 
la Bibliothèque impériale de Paris en possède trois gros 
volumes ln-fol. ( n° s des manuscrits). Il serait utile pour 
l'histoire des sciences de la publier. 

10 



291 



HOVEL 



292 



mourut en bas âge, et deux fils qui lui survé- 
curent. Cette seconde femme l'aida, comme sa 
première , dans ses observations. 

Après s'être occupé de la Lune, il reprit ses 
recherches sur les comètes et publia sa Corne' 
tographia, Dantzig, 1668, 800 p. in-fol., ou- 
vrage dédié à Louis XIV. )Le I er livre contient 
la description de la comète de 1652, qu'il aperçut 
lo 50 décembre, près deRigel (Orion) : « La tête 
était ronde et son diamètre un peu moindre de 
celui de la pleine Lune ; la barbe avait 6 à 7 de- 
grés de longueur. » Il considère les nébulosités 
cométaires comme des exhalaisons des planètes, 
tandis que les noyaux ou lunules seraient des 
exhalaisons du Soleil. La courbure des queues, 
que Galilée et Gassendi voulaient expliquer par 
des effets de réfraction atmosphérique, Hovel 
en cherchait la cause dans les différences des 
nébulosités qui les composent. Il pense que la 
queue d'une comète pourrait envelopper la 
Terre sans que l'on s'en aperçût autrement 
que par un affaiblissement considérable de 
la lumière du jour, et il n'est pas éloigné de 
croire que les ténèbres qui accompagnèrent 
la mort de Jésus -Christ eurent cette ori- 
gine. Hovel annonça, en outre, que les nébu- 
losités augmentent à mesuré que les comètes 
s'éloignent du Soleil. Newton admet ce fait, et 
lui assigne une cause physique en disant que 
« les têtes des comètes doivent s'appauvrir ou 
diminuer de volume en s'approchant du Soleil , 
puisque c'est à leurs dépens que s'engendrent 
les queues; et réciproquement lorsque, après le 
passage au périhélie, les nébulosités n'ont plus 
à pourvoir à la formation des queues déjà par- 
venues à leur maximum d'étendue, elles gran- 
dissent nécessairement. » Les observations ré- 
centes de la comète d'Encke ( à courte période ) 
ont mis l'importante remarque d'Hovel au 
nombre des vérités scientifiques les mieux éta- 
blies (1). Quant à leur mouvement, les comètes 
suivent, ajoute Hovel, des paraboles, comme des 
corps projetés avec force à la surface de la Terré. 
On s'est emparé de ces paroles pour contester à 
Newton la priorité de sa découverte. La courbe 
que décrivent les comètes dans leur mouvement 
autour du Soleil est en effet une parabole ; mais, 
comme l'a fait remarquer Moritucla, il y a 
entre la théorie de Newton et celle d'Hovel une 
différence profonde : suivant le premier, Ta co- 
mète décrit une courbe parabolique dont le So- 
leil occupe le foyer par un effet de la gravitation 
universelle, tandis que, dans l'idée d'Hovel, le 
Soleil n'est pas plus au foyer de l'orbite para- 
bolique de la comète que la Terre n'est au foyer 
de la parabole du corps projeté d'un point de 
la surface du sol (2). La Cométographie souleva 
une vive pojémjque à laquelle prirent surtout 

(t) Arago, Agronomie, t. II, p. 889. 

(1) Montucta, Hïsi. des Math., L II. ~ C'est à Darfel 
( voy. ce nom ) que paratt revenir l'honneur de ta décou- 
verte de l'orbite parabolique des comètes. 



part deux mathématiciens français, Petit et 
Auzout. 

Dès J641 Hovel travailla à un nouveau cata- 
logue des fixes. Kepler f avec les observations 
de Tycho-Brahé , avait déterminé les positions 
de 1,000 étoiles : (Hovel entreprit d'en porter le 
nombre à 3,000. Mais ici il rencontra des dif- 
ficultés très-grandes : comme les télescopes ne 
grossissent pas les étoiles , il se servit, pour les 
observer ou viser, de simples pinnules (diop- 
tres), comme l'avait fait Tycho, et il perfec- 
tionna même ces instruments (1). Dans l'idée 
d'obtenir une plus grande précision, il donna à 
ses quarts de cercle et à ses sextants des di- 
mensions jusqu'alors inusitées ( de 6 à 9 pieds 
de rayon ), et au Heu de les faire en bois re- 
couvert de lames métalliques, il les fit faire 
cntîèremenf en laiton. Dans ces travaux, il se fit 
d'abord aidef par un jeune homme, nommé 
Ketzner, qui mourut au bout de trois ans ; 
pois, après avoir 'perdu successivement encore 
trois de ses aides , il se fit assister par ses do- 
mestiques, et surtout par sa femme, qui lui était 
d'un grand secours. Ne reculant devant aucun 
sacrifice , il avait fait agrandir, à grands frais , 
son observatoire, en unissant par une plate- 
forme trois de ses maisons contiguês : un 
atelier de graveur, une imprimerie et une bi- 
bliothèque complétaient cette construction, qui 
dominait de tous côtés un vaste horizon. Armé 
de tous ces moyens, Hovel recommença ses obser- 
vations dès 1657, et fit paraître, en 1673, la pre- 
mière partie de sa Machina Cœlestis , qui con- 
tient la description de ses observations et de ses 
instruments , la manière de les manier et les . 
moyens de travailler le verre. L'auteur nous y 
apprend aussi qu'il avait entre ses mains tous les 
manuscrits de Kepler et sa correspondance iné- 
dite. Les principaux savants de l'Europe reçurent 
chacun un exemplaire de cette première partie 
de\& Machina Cœlestis. Robert Hooke, que l'au- 
teur avait oublié dans la liste des favorisés , at- 
taqua l'ouvragé avec violence. Taxant d'erronées 
toutes les observations de l'astronome allemand, 
il soutenait qu'avec l'emploi combiné (qu'Hovel 
s'obëtinait à rejeter) dq télescope et du sextant 
on pouvait atteindre des observations quarante à 
soixante fois plus précises. C'était dire assez clai- 
rement que les observationsti'Hovel n'étaient cer- 
taines qu'à une minute près (2>. Ces attaques du 

(i) Les plus anciennes pinnules étaient de simples Ian*ps 
percées de trous ronds; plus tard on leur donna la forme 
de tnbes cylindriques, dont le bout tourné vers l'oeil 
était percé d'un trou circulaire très-petit ( oculaire). On 
employa ensuite des pinnules fendues longltudlnalement. 
Tycho plaçait au centre un cylindre, et sa plnnule avait 
deux fentes parallèles et éloignées d'un diamètre du 
cylindre. Hovel imagina une vis pour élargir et rétrécir 
la Assure ; les deux côtés de chaque piaaule étalent gar- 
nis de verniers,de manière à pouvoir lire quatre on cinq 
fois l'observation et s'assurer de l'exactitude des divisions, 
foy. Delambre, Hist. de F Astronomie moderne, t 11 . 
p. Mi. 

(t) S'il y a des erreurs dans les observations d'Hovel, 
elles viennent inoins de l'emploi de simples pinnules 



393 



HOVEL — HOVERLANT 



294 



savant anglais irritèrent extrêmement Hovel, déjà 
naturellement irascible. A cela il faut ajouter 
que, le 26 septembre 1679, un incendie causé 
par la vengeance d'un domestique mit en cen- 
dresl'observatoired'HQvel, avec ses instruments, 
sa bibliothèque, la plupart de ses manuscrits (1) 
et l'édition presque entière de la seconde partie de 
la Machina Cœlestis, volume de 1286 pages, où 
il avait consigné tous ses travaux astronomiques ; 
on n'en sauva que sept exemplaires , dont cinq 
étaient entre les mains du relieur. Heureusement 
que l'auteur avait déjà envoyé cette seconde partie 
de son ouvrage aux savants qui avaient reçu, six 
ans auparavant, la première (2). Ce malheur, qui 
fut aussi une grande perte pour l'astronomie, ac- 
cabla Hovel, déjà avancé en âge, et hâta sa mort 
Ses papiers fripent dispersés par ses héritiers ; 
l'un d'eux fit convertir le cuivre qui avait servi 
à la gravure de la grande carte de la Lune en 
une boite à thé, et les autres plaques furent fon- 
dues dans un atelier 4'orfèyre. 

Outre les ouvrages cités , on a de Hovel : 
Eclipsis Solis observata (le 4 nov. 1649); 
Dantzig, in-4°; reproduit dans la Machina 
Cœlestis, t. H, p. 17 ; — Qbservatio Eclipsée* 
Solaris (le 8 avril 1652 ) ; ibid.; — Epistpla de 
Motu Itunœ libratorio in certas tabulas re* 
daclo, adressée à Riccioli; Dantzig, 1654; — 
Mercurius in Sole visas ( le 3 mai 1661 ); 
Dantzig, 1662, in-fol.; — < Historiola miras 
Stellse in collo Ceti; Dantzig, 1662; on y 
lit l'histoire des observations de l'étoile pé- 
riodique o de la Baleine (appelée depuis Y Ad- 
mirable) y te 1648 à 1662 : dans cet intervalle 
l'étoile fut plusieurs fois de troisième grandeur et 
plusieurs fois invisible^ — » Annus Climatericus, 
seu rerum uranicarum observationum annus 
quadragesimus nonus ; Dantzig, 1685, in-fol.; 
— Prodromus Astronomie exhibens funda- 
menta, etc.; ibid., 1690, in-fol. ( ouvrage post- 
hume ); — Firmamentum Sobiescianum, sive 
uranographia, etc.; ibid., 1690, in-fol. ( ouvr. 
posth.). On trouve des lettres d'Hovel impri- 
mées dans \e$Philosaph. TransacL, t. I-XVI; 
dans les Âcta Erudit. Ups., an. 1682-84 ; dans 
Lubienietrki , Theatrum Cameticum, t. I; 



combinées avec d'énormes sextants, que de la réfraction 
supposée trop faible,' ainsi que de l'aberration et de la 
natation, que Hovel Ignorait comme Flarasteed. 

(1) Les manuscrits de Kepler, que Hovel avait achetés 
d'un fils de ce grand astronome , furent heureusement 
sauvés. Hovel eut l'intention de les publier. Après sa 
mort, ton gendre, Lange, le* vendit, en itot, à 0. Hansch 
pour loo florins. Celui-ci publia une partie des lettres 
et mit le reste en gage pour ùoe somme de 8S8 florins à 
Francfort; ces papteas tarent, en 177*, transportés à 
Satnt-Petersboniff par Mwr et v endos pour J,000 roubles. 

(2) Le sombre des exemplaires ainsi envoyés était de 
90. comme Hgvel ledit lui-même ( Sylloge nova Epitt., 
t. IV, p. 160). C'est ce qui eiplique ta rareté extrême de 
cet ouvrage. Les bibliothèques de Paris ont été les plus 
favorisées: elles possèdent presque toutes un on même 
plusieurs exemplaires de la Machina Cœlestis, Pars pos- 
ttrior, légués par les savants français auxquels l'auteur 
«s avait envoyés. Poy. Zach, Bphémérides, 1. 1, p.. 939. 



dans P. Gassendi, Opéra; dans Sylloge nova, 
Epist varii argumenti, Nuremberg, 1760-66; 
dans Murr, Journal pour VHist. des Arts , 
t. XVII, et dans Zach , Monat. Correspond., 
t. Vf II. Le recueil des lettres adressées par les 
savants de tous les pays à Hovel , avec les ré- 
ponses de ce dernier, formant ensemble 16 vo- 
lumes manuscrits in-folio, fut vendu en 1760, 
par un* fies héritiers, pour 100 ducats à un des 
frères De l'Isle, se rendant à Saint-Pétersbourg. 
A la mort de De l'Isle, ce précieux recueil fut 
acquis par Godin, qui mourut en Espagne. Plu- 
sieurs de ces volumes furent, vers la lin du dix- 
huitième siècle, achetés par le gouvernement 
français, et se trouvent aujourd'hui dans divers 
dépôts publics, où 'ils attendront peut-être encore 
longtemps un éditeur. , F. H. 

Hutton, Math, and Philos. Diçt, artlcl. Hevellus. — 
Lalande, astronomie, t. I. — Montucla, Hist. des Math., 
t. Il, p. 6*8-640. — Delarabre, Hist. dé l'Astron. mo- 
derne,*. II, p. 485-485. — IL Westpbafen, Leden, Studien 
und Schrtften des Astr. J. Hevelius ,• Kœnigsberg, 1820, 
in-8°. — Zach, Monatliche Correspond., t. VIII. — 
Brsch et Gruber, Attgemeine Encyklopxdie. 

HOYBRLAAJT DR RK ACWELACRE (Adrien- 

Alexandre- Marie) t écrivain belge, né à Tour- 
nay, le 9 mars 1758, mort dans, la même ville, le 
18 septembre 1840. D'abord avocat , il fut en 
1790 élaptré de Tournay, et nommé député aux 
états généraux. Il accompagna, en cette der- 
nière qualité , la division du général Kochlar 
4ans sa retraite sur Mons, lors de la déroute des 
patriotes. En 1795 il accepta Ja place de juge 
de paix à Tournay, et deux an» plus tard il fut 
envoyé par son département au Conseil des 
Cinq Cents. Après lu chute du Directoire, Ho- 
verlant redevint avocat dans sa ville natale. Ce 
fut alors qu'il s'occupa, mais sans succès, de la 
composition de nombreux ouvrages, parmi les- 
quels nous citerons : Exposition succincte des 
Constitutions de la province de Tournay, de- 
puis Jules César jusqu'à nos jours , etc. ; 
Tournay, 1814, in-8°; •— Mémoire sur VÉtat 
de la Servitude au Royaume des Pays-Bas, 
couronné par l'Académie royale des Sciences et 
des belles-Lettres de DcuxeUes, en sa séance du 
7 mai 1818; Courtray, 1819, 2 vol. in-8°. En 
couronnant cet écrit, d'une indigeste érudition, 
l'Académie avait déclaré qu'il ne serait imprimé 
dans ses Mémoires qu'après avoir subi les 
changements et les corrections qu'elle jugerait 
convenable». Loin de se conformer à cette déci- 
sion, Hoverlant publia son travail à ses frais, 
en y ajoutant un second volume de notes, plus 
fort que le premier ; — Essai Chronologique 
pour servir à V Histoire de Tournay ; Tournay 
et Lille, an xm ( 1805); 1834, 102 tom. qni se 
divisent en 114 vol. in- 12, plus 3 vol. de table, 
et un atlas in-fol. : c'est un recueil, sans ordre 
et sans plan, de documents connus ou sans in- 
térêt; l'auteur y répand une foule de calomnies et 
d'injures contre un grand nombre de ses coin- 

10. 



295 



HOVERLANT — HOWARD 



29C 



patriotes. Les exemplaires complets de ce bizarre 
ouvrage sont devenus très-rares. £. Regnard. 

Mercure belge, tom. VI, p. 576. — Auteurs excentrl- 
quei. Messire Huverlant de Beauwelaere ; dans le Bi- 
bliophile belge, t. III, p. Wî. — tiiogr. gén. de* Belges, 

howard (Catherine), reine d'Angleterre, 
née vers 1520, décapitée le 13 février 1542. 
Elle était fille d'Edmond Howard et de Joie 
Colpepper de Hallingbarn. Edmond Howard 
était le troisième fils de Thomas Howard, 
duc de Norfolk. Catherine fut élevée sous les 
yeux de son aïeule, la duchesse douanière de 
Norfolk. A un banquet donné par l'évêque de 
Winchester au roi Henri VIH, ce prince re- 
marqua pour la première fois Catherine Howard. 
Elle avait une très -jolie figure, une taille bien 
proportionnée et un aimable caractère. Henri 
venait d'épouser Anne de Clèves, dont ses en- 
voyés auprès du duc son frère avaient eu la 
maladresse de lui faire un portrait beaucoup 
trop flatté. Anne était disgracieuse et vulgaire; 
la comparaison que le roi établit entre elle et 
Catherine contribua à changer en aversion l'é- 
loignement que la princesse allemande lui avait 
inspiré dès le premier coup d'ceftl. Six mois 
après l'arrivée d'Anne en Angleterre , son ma- 
riage avec Henri VTII fut déclaré nul. Cette 
union était à peine dissoute , que les lords du 
parlement , parmi lesquels se trouvait le duc de 
Norfolk, oncle de Catherine Howard, supplièrent 
« humblement le roi, au nom et dans l'intérêt de 
son peuple, dont il affermirait le bonheur en aug- 
mentant, avec la grâce de Dieu, le nombre de ses 
héritiers, » de contracter un cinquième mariage. 
Henri accéda promptement à cette demande; 
son divoree avec Anne de Clèves avait été pro- 
noncé le 9 juillet 1540; son union avec Ca- 
therine Howard eut lieu le 8 août de la même 
année. Le roi parut d'abord enchanté de sa nou- 
velle épouse ; il lui donna toute l'affection que 
son cœur était capable de ressentir; et, comme 
témoignage public de sa satisfaction, il fit com- 
poser par son confesseur, l'évêque de Lincoln, 
un hymne d'action de grâces pour remercier le 
ciel de la félicité dont il jouissait. Bien que 
Henri Vin, en se faisant proclamer par le par- 
lement chef (te l'Église anglaise , se fût séparé 
de l'Église romaine , il n'en était pas moins de- 
meuré catholique sur presque tous les autres 
points, entre autres sur celui de la confession 
auriculaire. De son côté, la jeune reine témoi- 
gnait à son seigneur et maître ( her lord and 
master) la plus vive tendresse; cependant, 
<c les jours aimables de ce monarque, dit un 
historien, étaient depuis longtemps passés ». 
Sa corpulence avait atteint un. degré extraordi- 
naire, et les traits de son visage, autrefois très- 
beaux, avaient pris une expression morose qui 
était le reflet de son caractère. Probablement 
Catherine s'était laissé plutôt éblouir par le 
rayonnement de la puissance suprême du tyran 
qui la plaçait sur le trône, que fasciner par l'in- l 



constant amour de l'homme qui avait fait périr 
sur l'échaiaud celle de ses quatre précédentes 
épouses dont il s'était montré le plus passionné- 
ment épris. 

Il y avait quinze mois que Catherine était 
reine d'Angleterre et que Henri Vfll lui prodi- 
guait les marques de son affection, lorsque le 
roi fit avec elle un voyage à York. 1 Ce voyage 
eut des conséquences funestes pour la reine. 
Pendant son absence de Londres, un homme de 
basse extraction, nommé Lascelles, se présenta à 
Cranmer, archevêque de Canterbury et primat 
d'Angleterre, pour lui communiquer les confiden- 
ces que lui avait faites sa sœur, ancienne do- 
mestique dans la maison de Norfolk. D'après ce 
rapport, Catherine aurait eu pour amants, avant 
son mariage, Dereham et'Mannock, deux gen- 
tilshommes au service de sa grand'-mère. Après 
avoir consulté le chancelier et le comte d'Hert- 
ford, ses amis, Cranmer se décida à transmettre 
cette révélation au roi dès son retour. Il eutt en 
effet , la hardiesse d'écrire à Henri une lettre 
dans laquelle il -lui dévoilait l'inconduite passée 
de Catherine. Avec un prince sanguinaire comme 
l'était Henri, une telle inculpation devait amener 
la perte de l'accusateur ou de l'accusée; aussi, 
pour la hasarder, fallait-il un mobile plus puis- 
sant que le prétendu .devoir d'ouvrir les yeux 
du roi sur l'indignité de son épouse. Lingard, qui 
s'attache à rechercher les causes secrètes des 
événements historiques, r présume que Catherine 
Howard fut victime d'un complot tramé contre 
elle par le parti de la réforme, qui avait compté 
se relever lors du mariage d'Henri avec une 
princesse allemande; au lieu de cela, il s'était vu 
écraser par le succès des intrigues de la maison 
de Norfolk. Le duc de ce nom était, avec l'évêque 
Gardiner, à la tête du parti qui s'efforçait de dé- 
terminer une réaction en faveur de l'Église ro- 
maine ; mais Henri VIII, également opposé aux 
luthériens et aux papistes, condamnait et faisait 
exécuter ensemble les principaux adhérents de 
l'une et de l'autre religion. Ainsi avait péri Tho- 
mas Cromwell, longtemps ministre favori du roi 
et ami de Cranmer, qui n'avait pas oséMe discul- 
per de l'accusation d'hérésie et de haute trahi- 
son. Pour que la pusillanimité de l'archevêque ne 
l'eût pas retenu de dénoncer la reine au roi lui- 
même et sur des témoignages aussi suspecta que 
ceux dont l'histoire fait mention, il fallait qu'il 
se sentit soutenu par les nombreux adversaires 
des Howard. Suivant Hume, Catherine, avant 
d'être devenue reine , avait puissamment con- 
tribué, à l'instigation du duc de Norfolk, À perdre 
Cromwell dans l'esprit de Henri VHI par d'as- 
tucieuses insinuations. D'un autre coté, et à ren- 
contre de cette assertion , on trouve dans les 
Mémoires (Records) de Burnet, une lettre de 
Norfolk dans laquelle ce seigneur dit que, malgré 
leur proche parenté, Catherine Howard est son 
ennemie; mais cette allégation n'était sans 
doute fondée que sur quelque mésintelligence 



297 



HOWARD 



29S 



passagère entre le duc et sa nièce; car on n'en 
troave point de trace nulle autre part. Hume, 
qui admet comme réelle la dissolution de 
mœurs de Catherine, dit que le roi ne voulut pas 
d'abord ajouter foi à l'accusation lancée par le 
primat contre la reine ; mais la méfiance suc- 
céda bientôt dans son esprit à l'incrédulité. Par 
son ordre Dereham et Mannock furent arrêtés 
et interrogés; tous deux reconnurent la vérité 
des faits reprochés à Catherine, ce qui parait 
d'autant plus extraordinaire que cet aveu en- 
traînait leur propre condamnation. La reine , 
citée devant le Conseil des Lords, répondit à ces 
imputations par une dénégation formelle; mais 
dans la même soirée; elle céda aux suggestions 
de Cranmer, se reconnut coupable, et signa sa 
confession. Cependant l'aveu de fautes com- 
mises avant son mariage ne suffisait pas pour 
motiver une sentence de divorce ou une accu- 
sation de haute trahison. On se livra aux plus 
minutieuses recherches sur sa conduite depuis 
qu'elle avait épousé le roi. Il fut prouvé que la 
reine avait pris à son service un de ses an- 
ciens amants, Dereham ; et Ton prétendit 
qu'elle avait admis une nuit, dans sa chambre, 
pendant plusieurs heures, sans autre témoin que 
lady Rochford, un gentilhomme de la chambre, 
nommé Thomas Culpepper, son parent du côté 
maternel,- et à qui elle avait été promise autre- 
fois en mariage. Sur ces indices , Culpepper et 
Dereham furent mis en jugement, condamnés et 
exécutés, comme coupables de haute trahison ; 
leur procès n'avait duré que quelques jours. 
Celui de la reine se prolongea pendant près de 
deux mois, soit parce qu'il y eut, à ce sujet, de 
grandes divisions dans le Conseil, soit que Henri 
fût retombé dans ses premières incertitudes. 
Suivant la coutume de ce temps, où Ton tendait 
aux accusés toutes sortes de pièges pour les 
forcer, par la lassitude de la persécution ou par 
l'espoir du pardon, à se reconnaître coupables 
de crimes dont souvent ils étaient innocents, 
Catherine se vit fortement pressée par les lords 
du Conseil de parler sans feinte et sans appré- 
hension; car la loi était juste et le roi miséri- 
cordieux. La reine renouvela donc ses précé- 
dents aveux, reconnaissant qu'elle avait offensé 
Dieu, le roi et la nation. Évidemment, ces 
aveux n'avaient rapport qu'aux irrégularités de 
sa conduite avant son mariage, et au tort qu'elle 
avait eu de les cacher au roi. En effet, lorsque, 
en exécution de l'arrêt qui la condamnait à la 
peine capitale, Catherine monta sur l'échafaud, 
elle déplora de nouveau les désordres de sa vie, 
en affirmant néanmoins, sur son espérance de 
salut éternel , qu'elle ne s'était jamais rendue 
coupable d'infidélité envers son seigneur et 
maître. Plusieurs membres de la famille Ho- 
ward et des personnes attachées à son service 
avaient été poursuivis et jugés comme nonrévé- 
lateurs de complot. Lady Rochford, convaincue 
d'Avoir ûcilité à la reine un adultère dont, ce- 



pendant, il n'y avait pas de preuves, eut la tête 
tranchée en même temps que sa maîtresse. 
Camille Lebrun. 
Burnet, Records. — Lords* s Journals. — Hume, His- 
tory of Engkmd. — LJngard , Hittory of Engiand. — 
Lytteltoo, History of Engiand. 

howaed ( Charles lord Effingh&si ), comte 
de Nottingham, amiral anglais, fils de lord Wil- 
liam Howard d'Ëffingham , lord grand-amiral , et 
petit-fils de Thomas, second duc de Norfolk, né 
en 1536, moitié 14 décembre 1624. En 1559 i! 
alla, comme ambassadeur, complimenter Char- 
les IX sur son avènement. A son retour, il rat 
nommé député pour le comté de Surrey. Il servit 
comme général de cavalerie dans l'armée conduite 
par le comte de Warwick contre Insurrection 
des comtes de Northuniberland et de Westmo- 
reland en 1560, et commanda, l'année suivante, 
une escadre dans la Manche. Il succéda en 1573 
à son père dans le titre de lord Effingham et 
dansie poste de lord chambellan de la maison 
de la reine; et en 1585 il rat élevé au grade de 
grand-amiral. Les immenses préparatifs que 
faisait Philippe pour envahir l'Angleterre don- 
naient à la place de commandant de la flotte 
anglaise une' grande importance. Il avait sous 
ses ordres les premiers marins du temps : •- 
Drake, Hawkins, Frobisher, et plus de deux \* 
cents vaisseaux. L'invincible Armada, comman- ? 
dée par le duc de Médina Sidonia, sortit du Tage 
le 29 mai 1588. Assaillie par une violente tem- 
pête, elle se réfugia dans le port de La Oerogne, 
et le bruit courut que le projet d'invasion était 
abandonné. Elisabeth voulait, par économie, 
que le grand -amiral licenciât une partie de ses 
équipages. Howard, prévoyant que le danger s'é- 
tait que retardé, refusa d'obéir. L'événement 
donna raison à ses prévisions. Le 20 juillet l'Ar- 
mada arriva en vue des côtes d'Angleterre, et 
manœuvra pour gagner la Flandre. Lord Howard, 
la laissant s'engager dans la Manche, s'attacha à 
sa poursuite, et lui enleva plusieurs vaisseaux. 
Quelques iours après, les Espagnols jetèrent 
l'ancre devant Calais ; mais des brûlots anglais 
lancés sûr l'Armada y portèrent un tel désordre, 
que le duc de Medina-Sidonia prit le parti de 
retourner en Espagne. Des tempêtes lui firent 
perdre une grande partie de sa flotte; et il ra- 
mena moins de soixante vaisseaux dans le port 
de Santander. Les Anglais n'avaient perdu 
qu'un seul vaisseau. En 1596 Elisabeth envoya 
contre les côtes d'Espagne une flotte^de cent 
cinquante voiles , montée par quatorze mille 
hommes de troupes de débarquement. Lord Ho- 
ward eut le commandement de la flotte, et le 
comte d'Essex celui de l'armée. La flotte an- 
glaise entra dans la baie de Cadix , et malgré la 
prudence de lord Howard, qui n'aurait pas voulu 
brusquer l'attaque, Essex mit immédiatement le 
siège devant Cadix, qui capitula. Essex voulait 
garder sa conquête ; mais lord Howard s'y op- 
posa, e{ se contenta d'incendier la ville et d'en 



299 



HOWARD 



300 



raser les fortifications. Au retour de cette expé- 
dition, où il ne s'était distingué que par sa pru- 
dence, il fut créé comte de Nottingham. Jaloux 
de la faveur du comte d'Essex, il quitta la cour, 
et n'y revint qu'après la disgrâce du comte. 
Lorsque Essex en vint à une révolte ouverte, 
Howard l'assiégea dans sa maison» le fit prison- 
nier, et, quoique son ennemi, le traita' avec ci- 
vilité. Quoiqu'il eut été un des juges, de Marie 
Stuart, il figura officiellement au couronnement 
de Jacques I er , qui le confirma; dans ses emplois. 
En 1605, il fut chargé d'aller, ratifier la paix avec 
le. roi d'Espagne Philippe ttl. <U céda, en jôle; sa 
dignité d'amiral à VUliers»eomtede Buekingham v 
et reçut en échange une pension de 1,000 livres 
sterling et une indemnité de près du double de 
cette somme. Z. 

.BitySàïMa Britannica,- Llofd, Stat* wmNU*. - 
Hnme, Historf qf Englan4. — Loyde, Portraits _of II- 
lustrions Personnages, t. Ul. . . 

howabd (Françoise), comtesse d'E$sbx> 
puis comtesse ns Somïebsbt, femme célèbre par 
le rôle dramatique qu'elle remplit dans les in* 
trigues de cour qui agitèrent le règne de Jac- 
ques I er t roi d'Angleterre. Françoise était fille 
de lord Howard, comte de Suffolk; née en 1594, 
elle mourut en 1632. A l'âge de treize ans elle 
fut mariée au comte d'Essex, qui n'avait pas plus 
de quatorze ans. immédiatement après la céré- 
monie religieuse, les jeunes époux se séparè- 
rent; le comte entra à l'université , d'où, ses 
études achevées, il partit pour le continent ; la 
comtesse fut remise à la garde de sa mère, qui, 
dit-on , s'appliqua plus à développer sa beauté 
et son esprit, qu'à faire naître ou à cultiver les 
qualités de son âme. Bientôt, la jeune lady Essex 
devint l'ornement de la cour; sa supériorité 
physique et intellectuelle la mettait au-dessus 
de toute rivalité. Parmi ses nombreux admira- 
teurs , on distinguait le prince Henry, fils aine 
de Jacques, et le vicomte de Rochester, alors 
favori du roi. Henry mourut à l'âge de dix-huit 
ans, en 1612 ; mais il parait que, de son vivant, 
et quoiqu'il fût l'héritier présomptif de la cou- 
ronne , Robert Carr, vicomte de Rochester, lui 
avait été préféré par lady Essex. Robert Carr 
était un Écossais dont la famille avait donné de 
grandes preuves d'attachement à Marie .Stuart: 
cette circonstance, jointe à un accident qui lui 
arriva sous les yeux de Jacques I er en remplis- 
sant son service d'ecuyer de lord Hay, lui valut 
d'abord des marques d'intérêt de la part de ce 
monarque. Les agréments de sa- personne et de 
son caractère, le soin extrême avec lequel il 
cherchait tout ce qui pouvait plaire à son royal 
maître, le firent rapidement monter en faveur. 
Jacques le combla de biens et de distinctions ; 
les présents des solliciteurs de grâces ajoutés 
aux dons du souverain lui procurèrent bientôt 
une fortune princière. D'abord créé baron de 
Branspeth, puis chevalier de la Jarretière, il avait 
obtenu, en 1612, le titre de vicomte de Rochester. 



Sans occuper aucune place dans le gouvernement, 
il était tout-puissant à la cour, et l'influence des 
deux frères Howard (le comte de Suffolk et le 
comte de Northanipton, le premier, lord cham- 
bellan, le second, lord du sceau privé ) balan- 
çait à peine l'ascendant du simple courtisan. Une 
lutte de pouvoir était engagée entre la maison 
Howard et le parvenu écossais, lorsque ce der- 
nier s'attacha k> la Jœlle et coquette Françoise 
Howard de Suffolk. dUeur intimité était déjà 
établie lorsque le comte d'Essex revint en An- 
gleterre et réclama ses droits d'époux sur la 
comtesse: elle ne lui répondit que par des dé- 
dains. Il se plaignit et s'irrita; elle pleura et 
récrimina. Pendant ce temps, la liaison secrète 
de Françoise et de Rochester subsistait toujours; 
dans une de leurs entrevues furtives, ils convin- 
rent entre eux que la comtesse demanderait et ob- 
tiendrait le divorce, afin de pouvoir épouser eon 
amant. Ge projet, favorable aux intérêts des Ho- 
ward, qui devaient ainsi trouver un aUié dans 
leur compétiteur au. pouvoir, obtint leur appro- 
bation. Le toi lui-même en parut satisfait, l'an- 
tagonisme permanent qui existait entre ses mi- 
nistres et son favori lui ayant suscité plus d'une 
fois des embarras. Mais une opposition inat- 
tendue vint à la traverse de ce mariage : sir 
Thomas Overbury, l'ancien ami et le conseiller 
intime de Rochester, trouvait trop hien son 
compte à la durée de cette mésintelligence pour 
ne pas chercher à l'entretenir : le public, sachant 
qu'à avait l'oreille du favori du roi, achetait fort 
cher sa protection. Quand Rochester lui com- 
muniqua ses intentions, il s'emporta jusqu'à 
qualifier d'infâme un mariage avec une femme 
aussi vile... Une telle hardiesse de la part d'un 
homme qui avait de nombreuses obligations à 
l'amant de cette femme prouve la déconsidéra- 
tion personnelle de lady Essex, non moins que 
l'insolence d'Overbury. Celui-ci, voyant son pa- 
tron inébranlable dans sa résolution , finit par 
lui déclarer qu'il avait la volonté et le moyen 
de mettre un obstacle insurmontable à leur 
union. Probablement ces moyens étalent la di- 
vulgation des amours illicites de Rochestei et 
de lady Essex; depuis un an, ainsi que du véri- 
table but du procès en séparation intenté par 
la comtesse à son mari. Rochester rapporta à sa 
maîtresse son entretien avec Overbury. Fran- 
çoise, furieuse contre celui-ci, promit une 
somme de mille livres sterling à sir John Wood, 
sous la condition de provoquer et de tuer en 
duel sir Thomas. Mais les amis de la maison 
Howard lui firent abandonner ce projet violent. 
On essaya d'abord d'éloigner Overbury; en le 
nommant à une ambassade; puis, on interpréta 
son refus d'accepter cette mission comme une 
insnlte au souverain qui la lui offrait ; en consé- 
quence, l'âme, le confident, le conseiller intime 
de lord Rochester fut enfermé dans la prison 
de la Tour de Londres, dont on changea le gou- 
verneur, pour donner cette place, ainsi que 



301 



HOWARD 



302 



celle de geôlier, a des créatures des Howard. 
Dès que ceux-ci se furent débarrassés de la pré- 
sence de cet opiniâtre adversaire, on commença 
à instruire devant une cour judiciaire la procé- 
dure du divorce du comte et de la comtesse 
d'Essex. Pendant la durée de ce procès, basé 
sur l'impuissance du mari, Jacques montra {xmr 
la cause de lady Essex une singulière partialité : 
elle est explicable par ce fait que Rochester 
ayant un jour* mandé chez lui M trésorier du 
roi, lui avait remis la clef de sa propre cassette, 
en lui disant cty prendre tout ce* Qu'elle conte- 
nait {>our l'usagé de son maître ; il y avait virigt- 
cinq initie livres sterling, eu ot. Aucun présent 
ne pouvait être {rtus ojïfrortùh : làcâssette royale 
était à sec. Grâce aux mouvements que se 
donna Jacques podr aplanir les difficultés de ce 
divorce, un jugement i donnant gain de cause à 
Françoise Howard fut rendu à une majorité de 
sept voix contre cititf. La veillé de ce jour de 
triomphe pour là comtesse, Ovérbury mourut 
subitement dans sa prison. A freine Françoise 
Howard se vit-elle juridiquement dégagée de 
ses premiers tiens, (ju'èUë épousa Son amant, 
créé â cette occasion comté de Somerset. La 
cérémonie tiuptialè eut lietj dans la chapelle du 
palais, et la rtëriëe partit , lés cheveux épars, 
en boucles, stir ses épaulés, distinction réservée 
aux épousées vierges. Jacques hondra de sa 
présence les tioèés du ëoratè de Somerset et de 
Françoise Howard ; elles fiireht suivies de fêles 
somptuetises pour lesquelles la cour et la ville 
rivdlisërërit de luxé et de prodigalité : « attestant 
ainsi, disent les chroniqueurs, la servilité des 
hommes, qui, pour gagner les bonnes grâces du 
favori du sotiveralri, Célébraient par des ré- 
jouissances publiques un mariage qu'en par- 
ticulier ils stygmatisa'ieht comme illégal et 
adultéré ». Gé mariage, en confondant les 
intérêts de la maison Howard avec ceux du 
nouveau comte de Somerset , fit cesser les dis- 
sensions qui troublaient le conseil royal. Lady 
Somerset devint la femme la plus adulée de la 
cour d'Angleterre, comme elle était la plus belle, 
« et, ajoute là chronique ,• la plus dissolue de 
son temps ». Pendant environ quinze mois, son 
orgueil et sa cupidité furent complètement satis- 
faits: les grâces royales pleuvaient sur elle; les 
courtisans mendiaient ~sa protection , les hauts 
fonctionnaires la lui payaient. Mais tout a coup 
s'éleva un nouveau favori, dans la personne de 
Georges Villiers, qui, dans la suite, fût créé duc 
de Buckingham. Jacques I er , avons-nous dit, 
était fort obéré*, pour alimenter la source à peu 
près tarie de ses revenus, on eut recours à la 
vénalité des charges. Villiers ayant acheté la 
place d'échanson du roi, acquit promptement, par 
ses qualités brillantes , la bienveillance de son 
maître. Les ennemis secrets de lord et de lady 
Somerset, et ils en avaient beaucoup parmi leurs 
partisans apparents, se liguèrent alors contre 
eux. La mort soudaine d'Overbury, dont nul 



n'avait osé jusqu'à ce moment éclaircir la 
cause , devint le sujet de bruits sourds, de se- 
crètes recherches, qui aboutirent à la conviction 
générale que cette mort était l'œuvre de la com- 
tesse de Somerset. Le parti qui voulait perdre 
l'afncieri favori de Jacques fit adroitement par- 
venir ces rameurs à l'oreille du roi ; et celui-ci, 
appréhendant, avec sa timidité naturelle, qu'une 
partie de l'infamie de ce Crime ne retombât sur le 
protecteur an coupable , chargea le procureur 
général, sh* Edouard Coke, d'instruire et de pour- 
suivre cette affaire. Aptes un long examen et de 
nombreux interrogatoires , Françoise Howard 
fut déclarée coupable d'avoir recouru à la sor- 
cellerie pour s'aliéner l'affection de son mari, le 
comte d'Essex; et pour captiver l'amour de Ro- 
chester ; de s'être concertée avec le comte de 
Northampton, son oncle, décédé depuis lors, 
pour se débarrasser d'Overbury ; enfin de s'être 
procuré, par le moyen d'une femme, sa confi- 
dente; trofe sortes de poisons qui avaient été 
remis au geôlier Weston et administrés par ce 
dernier à Ovérbury, de complicité avec le gou- 
verneur Elwes. Heureusement pour lady So- 
merset et pour son mari^ l'amitié du roi pour 
ce dernier se ranima à l'issue de cette procé- 
dure; Somerset avait été arrêté en même temps 
que sa femme , sous l'inculpation de complicité 
avec elle. Jacques lui fit conseillera plusieurs 
reprises de s'avouer coupable, en lui promettant 
que sa vie et sa fortune seraient sauvées. « Qu'est- 
ce que la vie et la fortune, quand l'honneur est 
perdu ? » répondit le comte, qui, à la barre, pro- 
testa toujours hautement et fermement de son 
innocence. 11 est très-probable que, en effet, il 
n'avait pas participé au crime de sa femme. 
Celle-ci, cédant aux exhortations du ministre 
Whiting, avoua son crime : elle fut condamnée 
k mort ; mais peu de jours après elle reçut sa 
grâce, ainsi que Somerset, qui avait été déclaré 
coupable malgré ses dénégations. Les quatre 
complices de lady Somerset avaient été jugés 
avant elle, condamnés et exécutés. 

Camille Lebrun. 

Howell, State triais. — "Bacon, Werk$. — Butler, Me- 
moirs. — HdWe, Chrmicle. - Ltafard, History of En- 
gland. 

HOWARD (Sir Robert) y poète et historien 
anglais, AI» de Thomas, comte de Berkshire, né 
en 1626, mort en 1608. Il fut élevé au collège de 
La Magdeleine à Cambridge. Pendant la guerre 
civile, il souffrit avec sa famille pour la cause 
royale, et à la restauration il fut élu membre du 
parlement pour Stockbridge dans le Hampshire. 
Nommé député à la Convention en 1688, il se 
montra sélé partisan de la révolution. Son ar- 
deur et ses prétentions littéraires lui attirèrent 
les railleries de ses adversaires. Shadwell le 
tourna en ridicule dans sa comédie des Sullen 
ZoverSf sons le nom de Sir Positive A t-all. On 
a de lui : une traduction du quatrième livre de 
Y Enéide de Virgile; 1660, in-8°; — une traduc- 



aOS HOWARD 

tion de YAchilléide de Stace; 1660, in-8°; — 
Blind Lady, comédie; 1660, in- 8°; — Sur* 
prisai, comédie, 1665, in-fol. ; — Committee, 
comédie; 1665, in-fol.;— Vestal Virgin , tra- 
gédie; 1665, in-fol.; — Indian Queen, tragédie; 
1665, in-fol. ; — Great Favourite or the Duke 
o/Lerma, trag. ; 1668, in-4° ; — The History 
qf the Reigns of Edward II and Richard II, 
with refiections and characters of their chief 
ministers and favourites ; also a comparise of 
thèse princes with Edward I and III; 1690, 
h>8° ; — A Letter to M. Samuel Johnson , 
occasioned by a scurriUms pamphlet entitled 
Animadversions on M. Johnson' s Answer to 
Jovian ; 1692, in-8°; — The History of Reli- 
gion ;1694, in-8°. 

Edouard Howard, frère de sir Robert, s'ex- 
posa à la sévérité des satiriques en écrivant de 
mauvaises pièces, dont on trouve les titres dans 
la Biographia Dramatica. 

James Howard, qui appartenait probablement 
à la même famille, fit jouer vers le même temps 
deux comédies, AU Mistaken et The English 
Monsieur, qui eurent un moment de succès et 
qui sont aujourd'hui oubliées. Z. 



304 



Cibber, Lives. — Baker,* Biographia Britannica. — 
— Chalmers, General Biographical Dictionary. 

howabd (Charles), comte de Carlisle, 
diplomate anglais, né en 1629, mort en 1686. Il 
coMourut activement à la restauration de Char- 
les II, et fut chargé peu après d'une mission en 
Russie. Depuis la découverte de l'emplacement 
d'Arkangel par Chancellor (voy, ce nom), vers le 
milieu du seizième siècle, les Anglais jouissaient 
en Russie de privilèges commerciaux fort im- 
portants, que le tzar Alexis leur retira pendant 
les troubles de leur révolution. Une tentative que 
fit Gromwell pour renouer des relations commer- 
ciales avec la Moscovie n'eut aucun succès. Char- 
les H, rétabli sur le trône de son père, reçut une 
ambassade qui lui apportait les félicitations du 
tzar, et saisit cette occasion pour demander le 
rétablissement des privilèges abolis. Il résolut 
donc d'envoyer un ambassadeur à Moscou, et fit 
choix de Charles, comte de Carlisle, vicomte Ho- 
ward de Morpeth,undes plus brillants seigneurs 
de la cour' d'Angleterre. « Outre qu'il étoit bien 
fait, dit la Relation de son ambassade, d'une 
taille fort avantageuse et d'un port très-majes- 
tueux, il avoit une grâce d'esprit et une vivacité 
particulière en ses discours, et dans toutes ses 
actions il affectoit une promptitude et une diligence 
extraordinaires. » Il devait, après avoir terminé sa 
mission en Russie, passer en Suède et en Dane- 
mark pour remercier les souverains de ces royau- 
mes des ambassades qu'ils avaient envoyées au 
roi d'Angleterre. Le 15 juillet 1663, l'ambassa- 
deur, sa femme, son fils aîné et uue.partie de 
leur suite, s'embarquèrent sur. un vaisseau de 
guerre de cinquante canons qui atteignit Arkan- 
gel le 19 août; mais là il dut attendre jusqu'au 



5 septembre un second vaisseau qui portait le 
reste de sa suite. A peine eut-il mis le pied sur le 
sol russe que de légères difficultés d'étiquette lui 
en présagèrent de plus graves pour l'avenir. L'am- 
bassade anglaise, partie d'Arkangel le 12 septem- 
bre, remonta la Dwina, puis la Soukhona jusqu'à 
Vologda, sur des barques halées par trois cents 
bateliers. Arrivée à Vologda le 17 octobre, elle 
s'y arrêta trois mois pour attendre les commis- 
saires impériaux et le tramage, qui s'établit très- 
tard cette année. Enfin, en janvier 1664 elle 
quitta Vologda. Les bagages et une partie de la 
suite, formant un convoi de soixante traîneaux, 
furent envoyés en avant le 7 janvier. Le comte 
de Carlisle avec ce qu'il lui restait de monde se 
mit en marche le 15. Ce second convoi se com- 
posait de cent quarante traîneaux. Ce voyage, 
dans un pays peu habité , à travers d'immenses 
plaines de neige, dura trois semaines, et mit aux 
plus rudes épreuves la patience de l'ambassadeur. 
L'accueil qu'on lui fit à Moscou fut loin de le 
dédommager. Le mauvais vouloir des commis- 
saires retarda son entrée, qui eut lieu le 6 fé- 
vrier au soir. Quelques jours après, le 1 1 février, 
le comte de Carlisle fut reçu par le tzar en au- 
dience solennelle. L'éclat de cette cour orientale 
éblouit les gentilshommes anglais. « U nous ar- 
riva alors, dit la Relation , comme à ceux qui 
sont éblouis parla lueur du soleil d'or dès qu'ils 
sortent des ténèbres ; car à peine pûmes-nous 
souffrir d'abord cette splendeur qui se présenta 
à nous dès que nous fûmes entrés dans la salle 
d'audience. L'éclat des pierres précieuses y 
sembloit disputer l'avantage avec la clarté du 
soleil , de sorte que nous nous perdîmes parmi 
cette confusion de lumière et de gloire. »' Le tzar 
était assis sur un trône- très-élevé; et, « comme 
un soleil brillant, dardoit partout des rayons 
d'une lumière précieuse ». Environ deux cents 
boyards, couverts de vestes de drap d'or, d'ar- 
gent ou de velours semés de pierreries, et assis 
autour de lui sur des bancs tapissés « estoient 
autantde rayonsde ce soleil, élevé comme dans son 
char de triomphe ». — « La majesté du prince, 
la grande pompe de sa cour, ne ravirent pas seu- 
lement les uns en admiration , mais donnèrent 
même d'abord à quelques autres de la crainte, 
comme si c'eust été une assemblée non pas 
d'hommes, mais de dieux. » Mais, si la cour de 
Moscou avaitla magnificence d'une cour asiatique, 
elle en avait aussi l'étiquette pompeuse et hu- 
miliante. Ainsi, dans un dîner qu'Alexis donna à 
l'ambassade anglaise lord Howard ne fut pas ad- 
mis à la table du tzar, pas même à celle des 
principaux boyards. Comme on était en carême, 
on ae servit pas de viandes. « Gela n'empescha 
pas pourtant qu'il n'y eust près de cinq cents 
plats qui estoient assez proprement accommo- 
dés, n'eust été que la vaisselle estoit si noirastre, 
qu'elle sembloit estre plustost de plomb que 

d'argent Nous n'eûmes point de serviettes, 

et la nappe estoit d'ailleurs si estroite qu'à peine 



305 



HOWARD 



30G 



estoit-elle de la largeur de la table. Les assiettes 
estaient aussi si rares, que pendant tout le repas 
il n'y eut qu'à chacun la sienne. » Les discus- 
sions relatives aux privilèges commerciaux traî- 
nèrent en longueur et aboutirent à un refus peu 
déguisé delà part du tzar. Lord Howard, impa- 
tienté, quitta Moscou le 24 juin 1664, et se dirigea 
vers la Livonie, qui appartenait alors à la Suède. 
Il s'embarqua à Riga le 13 août, et visita les 
cours de Stockholm et de Copenhague ; et, quoique 
accueilli avec plus d'égards, il ne réussit pas 
mieux. II revint en Angleterre par le Holstein, 
la Westphalie , la Belgique et Calais. Il fut pré- 
cédé à Londres par un gentilhomme russe, Michel 
Golovin, qui venait de la part du tzar se plaindre 
de sa conduite. Lord Howard reçut l'ordre de se 
justifier par écrit des griefs qu'on lui imputait, 
et rédigea une apologie qui fut remise à l'envoyé 
du tzar. Charles II le nomma ensuite gouverneur 
de la Jamaïque. La relation des trois ambas- 
sades de lord Howard, rédigée par son secrétaire, 
parut d'abord en anglais : Relation of Charl. 
Howard '$ three Embassies from Charles II 
to the courts of Muscouy, Sueden and Den- 
mark, 1663 and 1664; Londres, 1669, in-8°; 
elle a été insérée dans la Collection des Voyages 
de Harris. Gny Miège traduisit ou plutôt refit cet 
ouvrage en français sous le titre de : La Relation 
de trois Ambassades de monseigneur le comte 
de Carliste, de la part du sérénissime très-, 
puissant prince Charles II, royde la Grande- 
Bretagne, vers leurs séréntssismes majestés* 
Alexey Michailovitz, czar et grand-duc de, 
Moscovie, Charles, roy de Suède, et Frédé-, 
rie III, roy de Danemarc et de Norwège, en 
Van 1663 et finie en 1665; Amsterdam, 1670, 
in- 12. Miège en donna une édition corrigée et 
augmentée, Amsterdam, 1672; réimprimée à 
Amsterdam, 1700; et traduite en allemand, 
Francfort, 170i,inrt2. Cette Relation a été pu- 
bliée de nouveau, avec un savant Préambule, par 
le prince Augustin Galitzin, Paris, 1857; dans la 
Bibliothèqueelzevirienne. « Excepté peut-être les 
célèbres voyages d'Olearius et deMeyerberg, dit 
le baron Korf, aucun des nombreux ouvrages que 
les étrangers nous fournissent sur la Russie du 
dix-septième siècle n'a un aussi puissant intérêt 
que la relation des trois missions du comte de 
Carlisle.... Elle contient le récit des voyages de 
l'ambassadeur...., le compte-rendu presque jour 
par jour de la marche des négociations, et enfin 
une description géographique et surtout ethno- 
graphique de la Moscovie de cette époque. Pleine 
de données essentielles pour l'intelligence de 
l'histoire du commerce européen , cette relation 
fait connaître la situation, l'hospitalité, l'éti- 
quette de la cour de Russie. Tout cela est rendu 
par une plume spirituelle et habile, et semé 
d'observations justes et solides, quoique le ton 
de la narration tourne souvent h l'ironie et au 
sarcasme. » Z. 

Le baron Korf, article traduit au rosse par le Pr, Au- 



gastln, Galitzin; dana le Bulkt. du Blblloph. d'arrU 1887, 
et en tête de son édtt. de la Relation (Biblioth. Blzevir). 

Howard (John), célèbre philanthrope an- 
glais, né en 1726, à Hackney, mort à Cherson en 
Russie, le 20 janvier 1790. Fils d'un tapissier qui 
s'était retiré des affaires avec une belle foYtnne, il 
perdit son père de bonne heure, et, renonçant au 
commerce, il fit un voyage en France et en Italie. 
De retour en Angleterre en 1752, il &e maria, et 
devint veuf au bout de trois ans. Admis vers le 
même temps dans la Société royale de Londres, 
il s'embarqua pour aller constater les effets du 
tremblement de terre de Lisbonne. Son vaisseau 
fut pris par un armateur, et Howard, retenu en 
France comme prisonnier de guerre, eut beau- 
coup à souffrir pendant sa captivité. Ses souf- 
frances personnelles, celles dont il fut témoin, 
tournèrent ses pensées du côté des prisonniers, et 
décidèrent du reste de sa vie, qu'il consacra en- 
tièrement à la philanthropie. Rendu à la liberté, 
Howard se remaria presque aussitôt après. Il 
eut le malheur de perdre sa seconde femme, et, 
quittant sa demeure de Lymington, il s'établit à 
Bedford, où l'attirait une congrégation de dissi- 
dents. Il était fort attaché à leurs opinions et 
assistait à leurs assemblées. Nommé en 1773 
sheriffâu comté de Bedford, il remplit pendant 
plusieurs années des fonctions qui le mirent à 
portée, dit-il lui-même, « de prendre une con- 
naissance exacte de la détresse à laquelle les 
prisonniers sont quelquefois exposés, et de vi- 
siter les maisons de détention dans toute l'étendue 
du royaume ». 

Howard soumit les résultats de ses recherches à 
la chambre des communes, qui lui vota des re- 
merclments. Encouragé par l'approbation pu- * 
blique, il poussa ses explorations sur le continent 
en 1775 et 1776, voyagea dans le même but en 
Ecosse et en Irlande, et revit les prisons de l'An- 
gleterre. Puis, après avoir fait part au public 
des faits qu'il avait recueillis et des améliorations 
possibles dans l'état des prisonniers, il reprit ses 
voyages. Le Danemark, la Suède, la Russie, la 
Pologne, l'Espagne, le Portugal le virent succes- 
sivement poursuivre avec un infatigable dévoue* 
ment son but philanthropique. Au retour de 
chaque excursion, il ajoutait un appendice à son 
grand ouvrage. En 1785 il visita les principaux 
lazarets de l'Europe le long des côtes de la Mé- 
diterranée, et, à son retour, passant par Vienne, 
il fut reçu avec distinction par l'empereur Jo- 
seph. Il arriva en Angleterre en 1787, et après 
un court repos il recommença sa revue des pri- 
sons d'Irlande et d'Ecosse. Dans l'été de 1789 il 
repartit avec l'intention de pénétrer plus avant 
dans l'Asie, et passa par la Russie. Arrivé à 
Cherson en Crimée, il fut atteint d'une fièvre 
pernicieuse et mourut chez le banquier Markus. 
Howard ne laissa qu'un fils, qui mourut fou 
neuf ans après son père. Une statue fut élevée à 
Howard dans l'église de Saint-Paul, et de brillants 
témoignages d'admiration furent payés à sa me- 



307 



HOWARD — HOWE 



308 



moire par Barke et par Delille, qui, dans son 
poëme de La Pitié, lui consacra un beau passage, 
dont nous citerons quelques vers : 

Ton âme le connut ce noble et tendre lêle, 
Howard 1 dont le nom seul console les prisons. 
Qu'on ne me vante plus les malheurs vagabonds 
De ce roi voyageur, père deTélémaque, 
Cherchant pendant dix ans son Invisible Itbaqne. 
Avec un but plus noble, on tœnr pins coucageox. 
Sur les monts escarpés, sur les flots orageux, 
Dans les sables brûlants, vers la zone Inféconde 
Où languit la nature aux limites du monde , 
Aux lieux où du croissant on adore les lois. 
Aux lieux où triompha l'étendard de la croiit 
Partout où Ton connaît le malheur eties larmes 
Suivant d'un doux penchant les invincibles charmes, 
Le magnanime Howard parcourt trente climats. 

Devant loi la mort fait, la donlënr se retire, 
Ht l'ange affreux dn mai io ma*dit et l'admire. 

Reviens, Il en est temps, reviens cœur généreux ; 
Le bonheur appartient à qui fait des heureux. 
• Reviens dans ta patrie, en une paix profonde, 
Goûter la liberté que ta donnais au monde i 
Ton œii chez aucun peuple, au palais d'aucun roi , 
N'a rien vu d'aussi rare et d'aussi grand que toi. 

On a de Howard : The State of the Prisons 
in England and Wales , with preliminary 
observations and an account of some foreign 
prisons; 1777, in-4°; 1 er Appendix, 1780, 
in-4° ; .2 e Append., 1784, in-4°. Cet ouvrage a 
été traduit en français par M lle de Keralio; 
Paris, 1788,2 part. in-8°; — An Account o/the 
principal Lazarettos in Europe, with varions 
Papers relative to thePlague; together with 
further observations on some foreign prisons 
and hospitals; with additional remarks on 
the présent state of chose in Great-Britain 
andlreland, 1789, in-4° ; traduit en français 
par. Th. Bertin , Paris, 1801, in-8°. Z. 

Alkin, V iew o/the Cliaracter and public Services of 
the late John Howard ; 1791, in-8°. — Gentleman** Ma- 
gazine, vol. LX, LX11I, LXIX. - Dlxon, Life of Howard. 
— firown, Me/noirs of the public and private Life of 
John Howard; Londres, 1818, in-4«. 

HOWARD {Georg. -Edmond) , poète et écrivain 
politique anglais, né vers 1725, mort en 1786. 
II fut élevé à l'école du docteur Sheridan , ami 
de Swift, et au collège de La Trinité à Dublin. 
Après avoir été clerc, soldat et procureur, et 
tout en écrivant dans tous les genres, depuis la 
poésie jusqu'à la jurisprudence, il se fit entre- i 
preneur de bâtiments. Il contribua aux embellis- 
sements de Dublin, et ramassa une fortune d'en- 
viron 60,000 liv. sterl. Ses écrits forment quinze 
vol., dont quatre in-4° et onze in-8° ; les principaux 
sont : Treatises on the Law andEquity Side of ' 
the Exchequer, 4 vol. in-4°; et trois tragédies 
intitulées : Almeyda, or the rival hings ; 1769, 
in-8°; — The Siège ofTamor; 1773,[in-8 ; — 
The Fethale Gamester; 1778, in-12. Z. 

IHograpMa Dramatica. 

HOWARD {Henry), peintre anglais, né le 

31 janvier 1769, mort à Bath, le 5 octobre 1847. \ 

Élève de Philippe Reinagle, il fut admis comme i 

étudiant a l'Académie royale en 1 788, reçut en 1 790 ' 

la première médaille d'argent ( prix de dessin ) et | 



la médaille d'or (prix de peinture), et partit 
pour l'Italie Tannée suivante. De Rome il envoya, 
en 1794, à l'exposition de l' Académie royale, son 
premier tableau, \&Mort deCaïn. Dé retour en 
Angleterre, il exposa en 1795: Puck; Ariel; Sa- 
tan s' éveillant sur le lac enflammé; et un 
portrait : — en i J96 : Énée et Anchise; etZes 
Planètes tirant leur Lumière du Soleil; — En 
1797 : Le Péché et la Mort passant par 
les Constellations ; Éorée ètOrythie; Bylas 
et les Naïades; La Visite des trois Marie au 
Sépulcre; Éole convoquant lès Zéphyrs. Il 
serait trop long d'ériumërër les ouvrages que, 
dans un espace de cinquante-trois ans ( 1794 à 
1847), Howard ne cessa d'afaësser à l'Académie 
royale. Une pareille assiduité au travail est un fait 
très-rare chez un artiste- mais elle ne tourne pas à 
la gloire dû peintre. Parmi tant; d'oeuvres, aucune 
n'est supérieure, quèlbjufes-uhes seulement s'é- 
lèvent au-dessus du médiocre; là meilleure ap- 
partient an genre mythologique :' c'est la Nais- 
sance de Véntis, peinte en 1829. Associé de 
l'Académie royale en 1801, il en hit nommé 
membre en 1808 et secrétaire en l»ii . Cette 
place, que Howard remplit avec beaucoup de 
zèle, contribua à le maintenir dans Yéé traditions 
strictement classiques. « Le principal mérite de 
ses peintures, dit YAthehéèum, est de d'avoir ja- 
mais rien qui choque l'œil : ïl est classiquement 
froid. Telle partie de ses fléaux est jolie, telle 
autre est habilement touchée, et votis trouvez çà 
et là une certaine grâce qui rappelle l'antique. 
Cependant vous passez sans être ému de ce que 
tous avez vu, et par conséquent Vous l'avez bien 
vite oublié. Howard était toujours sur le point 
de faire de grandes choses ; mais, comme beau- 
coup d'autres, il ne dépassa jamais là ligne qui 
sépare l'imitation de la supériorité personnelle. 
Sa place dans l'histoire de l'art ne séra<ni émi- 
nente ni stable, et dans vingt ails on né connaîtra 
peut-être Howard que comme l*anii de Flax- 
man. » Z. 

Athenœwfn % octobre et 13 novembre 18*7. — English 
Gyciopœdia( Biographe). 

HOWARD, faty. CAhiisLE, Norfolk, Nor- 

THAMPTON, et iSiftiREt. 

Howe (John), théologien hôn-ébnrortniste 
anglais, né le 17 mai 1630, à Longborough 
(comté dé Leicestér), mort à tôndrfes, le 2 avril 
1705. Après avoir fait ses études à Cambridge 
et à Oxford, Il fut ordonné prêtre non-confor- 
miste, et devint ministre de Great-Torrington 
(Devonshire). Il se maria en 1654, et fiât choisi 
ensuite pour chapelain domestique de CromwelL 
Il garda cette position sous Richard Cromwell, 
et après la déposition de celui-ci il revînt à Great- 
Torrington. En 1675, il accepta la place de nû- 
nistre d'une congrégation de Londres; mais la 
persécution le décida à suivre, en 1685, lord 
Wharton sur le continent. La déclaration de li- 
berté de conscience de Jacques H le ramena en 
Angleterre. Howe fut un des puritains les plus 



309 



HOWE 



310 



éminents du dix-septième siècle. Il joignait à un 
grand savoir théologique la connaissance des 
langues classiques et de l'hébreu: Ses principaux 
ouvrages sont : A Tteatise on Deligkting in 
God; 1674, in-* 4 ;— TheWving ïbmple, oï ade- 
signed impnovement of tlmt notion thaï a 
good man îs thJèOkmptë of God; 1674, in-8°. 
Ses Œuvres feomplèie* furent publiées en 1724, 
in-fol., avec sa Vie par le docteur Calkrhy ; elles ont 
été réimprimées à Lonitréfr, 1810^16, 8vol.in-8°} 
et Londres, 1848; 3 vol. in^8°, avec one Vie de l'au- 
teur par le révérend Hewlett. • Z. 

H. Roger», lÀfè of John kawetxeUh an MnaiysU o/ï 
hit fTritings ; Londres, ia$6, io>48. . . 

howe [Jean), homme politique anglais, né 
dans le comte de Nottingjiajn , vers. 1 660, mort 
en 1721. Élu membre, de là Convention pa,r le 
bourg de Circcster, il fit, comme représentant 
de ce bourg on du, comté de Gloucester, partie 
des trois derniers parlements de. Guillaume lit 
et des trois premiers de la reine Anne, Partisan 
déclaré de la révolution de 1688, il fut nommé 
chambellan de Ja reine Marie; mais un jpéçon^ 
tentement particulier le jeta dans l'opposition , 
et il se montra surtout l'ennemi des, Hollandais 
qui entouraient le roi. En 1699, quand l'armée 
fut. réduite, Howe obtint de la chambre qu'on 
payerait la demi-solde, aux officiers licenciés. 
Dans la discussion relative au traité de partage 
conclu entre Louis XIV et Guillaume III, Howe 
s'éleva avec tant de vivacité contre les auteurs 
de cette transaction, que le roi regretta que l'i- 
négalité des rangs ne lui permît pas de deman- 
der raison de cette insulte. A l'avènement de la 
reine Anne, Howe fut nommé membre du con- 
seil privé, vice-amiral du comté de Gloucester et 
payeur général des gardes et garnisons. Il garda 
cette place jusqu'à l'avènement de Georges 1 er , en 
septembre 17 14, et eut Walpole pour successeur. 
Il se retira dans sa terre de Howell, où il mourut, 
laissant un Panégyrique du roi Guillaume ///, 
des Chansons et d'autres Poésies. Il contribua 
puissamment à relever la Compagnie des, Indes 
orientales et à préparer sa future grandeur. Z. 

lAtrd Macaqlay, History of England, t. J1I et IV. — 
Lord Mahon, Éitt. of England, 1. 1. —Rose, New General 
BiograpMcal Victionary. 

howe (Lord Richard), amiral anglais, né 
à Londres, en 1725, mort dans la même ville, 
le 5 août 1799. Il fit ses études à Wesmins- 
ter-Sehool, entra an service dès l'âge de qua- 
torze ans comme midshipman à bord du Setiern, 
et fit une première campagne sous les ordres du 
commodore Anson, dans les eaux de l'Amérique 
du Sud. Ite 1743 à 1745, il servit comme lieu- 
tenant de la frégate Cornet /dans les Antilles, 
et se distingua à Curaçao et à Saint-Eustache 
contre les Français. A son retour en Angleterre, 
il fut promu au grade de capitaine, et retourna 
immédiatement prendre rang dans 1a station de 
la Jamaïque ; il eut part à de sanglantes actions, 
entre autres à celle de La Havane ( 2 octobre 
1748). En 1751, trois bâtiments de guerre 



lui tarent confiés pour protéger le commerce 
britannique sur les côtes de la Barbarie; il 
s'acquitta honorablement de cette mission.' 
En 1755 il commandait The Dunkirk (de 
60 canons), qui faisait partie de la flotte de l'ami- 
ral Bdscaven, et fut occupe spécialement de la 
défense dés côtes septentrionales de l'Angleterre. 
Eh 1757; sobs l'amiral Hawke, les Anglais, ayant 
repris l'offensive, attaquèrent successivement 
Fffe d*Aia; Cherbourg et Saint- Cast. Howe se 
conduisit avec courage dans ces différentes af- 
faires, ou le : succès ne répondait pas toujours à 
sdn audace. En 1758, son frère aine ayant été tué 
an Canada; Richard Howe lui succéda dans le 
titre de IMrofr d'Irlande:' 5 Eri 1770 il devînt 
contre^amiral âè' Fescadré bleue: et commanda 
lés forces! a^gfïfisé , s dans la Méditerranée. Vice- 
âmirai en 1776, il fut envoyé sur les côtes de 
l'Amérique septentrionale, et fut riommé , avec 
sbn Irèrè le major général William Howe, com- 
missaire pour rétablir là paix dans les- colonies 
anglo-américaines. Quoiqu'ils assurassent le par- 
don à fous les sujets rebelles qui le méritaient, 
aucun colôfi ne voulut se reiidrë sur une pro- 
niesse aussi vague, et les hostilités continuè- 
rent. Richard Howe joignit encore inutilement 
ses efforts à ceux de son frère pour dé- 
fendre Bostoù. 11 détruisit le 18 octobre Fal- 
riipùlth, ville maritine du Massachusetts. Cette 
rigoureuse mesure décida les Américains à 
iàttcer des lettres de marque contre leurs en- 
nemis. Le 7 mars 1776, les Anglais furent obligés 
d'eVacuet Boston : ils se retirèrent à Halifax, 
dans laNouvelle-Écosse. Philadelphie succomba 
également le 18 juin 1778, et sa garnison fut 
conduite à grand'peinë à New-York. Howe re- 
prit alors la mer : l'amiral français d'Estaing 
venait de se présenter devant Rhode-Island, et 
dé forcer les Anglais à brûler quelques frégates 
et à en couler deux autres pour en éviter la 
prisé. Howe accourut aussitôt : une tempête af- 
freuse sépara les deux flottes. Les Français al- 
lèrent se réparer à Bdstdn ; Howe les y suivit, 
mais, ne trouvant pas le moyen de les attaquer 
avec avantage, il rentra à New-York, et re- 
mit le commandement de la flotte au commo- 
dore Byron, et partit pour l'Angleterre, où il resta 
dans le repos jusqu'en 1782. Au mois de septembre 
de cette année, chargé de ravitailler Gibraltar, 
pressé par les Français et les Espagnols, il partit 
de Plymouth avec trente-quatre vaisseaux deligne, 
des frégates , des brûlots et un grand nombre de 
bâtiments de transport; et, quoique les assiégeants 
lui fussent supérieurs, il accomplit sa mission 
du 11 au 21 octobre, et rentra heureusement en 
Angleterre : ses compatriotes déclarèrent qu'ils 
lui devaient la conservation de Gibraltar. Lors 
de l'avènement dePitt au pouvoir (19 décembre 
1783), Howe entra au ministère comme premier 
lord de l'amirauté*; il conserva cette position 
jusqu'en 1788, où il fut créé comte de la Grande- 
Bretagne. Malgré son grand âge, en 1793, le roi 



311 



HOWE — HOWEL 



31* 



le nomma amiral ofthe white Jlag , et, en cette 
qualité /il dut défendre les côtes britanniques et 
le canal de la Manche. U bloqua quelque temps 
le port de Brest, et, le 28 mai 1794, rencontra la 
flotte française devant Ouessant, sur les cotes 
nord-ouest de Bretagne : les Français avaient 
vingt-six vaisseaux de ligne; les Anglais vingt- 
cinq. Mais, on doit le reconnaître, les équipages 
de Howe étaient composés de marins expérimen- 
tés, tandis que les vaisseaux français n'étaient 
montés que par des volontaires républicains, qui 
voyaient la mer et le feu pour la première 
fois ; les officiers capables étaient peu nombreux, 
la plus grande partie des états-majors de la ma- 
rine ayant émigré. Après quelques affaires par- 
tielles qui eurent lien le 29, l'amiral anglais, par 
ses manœuvres habiles, gagna l'avantage du vent. 
On se battit le 1 er juin : l'action dura longtemps 
et fut opiniâtre; enfin, six vaisseaux français fu- 
rent pris, un autre, coulé à fond : ce fut Le Pen- 
seur, d'héroïque mémoire; l'escadre anglaise 
souffrit beaucoup , mais ne perdit aucun bâti- 
ment. Ce combat glorieux valut à Howe et à 
ses marins les remerciements du parlement bri- 
tannique. L'amiral reçut un épée d'or et une 
médaille de la main du roi ; qui le créa en même 
temps chevalier de la Jarretière et le nomma gé- 
néral des troupes de marine. En 1797 il quitta le 
service; cependant,en l799,lorsqu'éclata la grande 
et dangereuse révolte des équipages des flottes de 
Portsmouth et de Plymouth, il ne craignit pas 
de se rendre au milieu des révoltés, et contri- 
bua à les ramener dans le devoir. Il était d'ail- 
leurs fort aimé <Jes matelots, qui l'avaient sur- 
nommé Dick blach à cause de son teint basané. 
Il survécut peu à cet événement, et mourut d'un 
accès de goutte remontée. L'Angleterre le mit 
justement au premier rang de ses hommes de. 
guerre. Howe brilla moins comme orateur : sui- 
vant ses biographes, « il s'exprimait au parle-, 
ment, dont il était membre, d'une manière si obs- 
cure et si ambiguë, qu'il était presque impossible 
de comprendre ce qu'il voulait dire ». A. de L. 

Narrative ofthe Proceedings ofhis majesty Fleet un- 
der the command of earl Richard How from the 
i A of mayto î d of june 1795; Londres 1799, in-4°. — 
Collini, Peeraçe. — Biog. Navalis. — Edmond Lodge , 
Portraits of illustrieus. Personnages of Great-BrUain, 
L VIII, p. 109-192. — Jobn Gorton, A gênerai Biogra- 
phical Dictionary. — Biographie Étrangère; Paris, 
1819. — Jobn Barrow, lÀfe of lord Richard Howi % admi- 
rai of the British fleet; Londres, 1888, in -8°. 

howe (William 9 baron), général anglais, 
frère du précédent, né en 1725, mort en 1814. 
Il entra fort jeune dans l'armée britannique et. 
parvint rapidement aux grades supérieurs. En 
1775, il fut envoyé en Amérique, et le 25 mai.il 
descendit à Boston avec des forces considérables. 
Les généraux Clinton et Bourgoyne l'accompa- 
gnaient : ils attaquèrent, le 17 juin, les retranche- 
ments élevés par les Américains à Bunkershill, 
et les enlevèrent, mais avec de grandes pertes. En 
octobre suivant, le général Gage s'embarqua pour 
l'Angleterre,confiant le commandement supérieur 



à William Howe,alors major général.Howeeswya 
vainement de pacifier les colonies révoltées; ses 
promesses et son amnistie n'abusèrent pas les in- 
surgés, qui n'y virent qu'un moyen de les frap- 
per sûrement après leur avoir fait déposer tes 
armes. Le 17 mars 1776; How fut contraint 
d'évacuer Boston, y laissant une grande quan- 
tité d'artillerie et de munitions. Washington y 
entra aussitôt ; How se retira à Halifax. Le 
22 août, ayant été rejoint par Clinton et Cornwal- 
lis, il débarqua avec trente-cinq mille hommes 
à Long-Island, en avant de New- York, et le 27 U 
battit les Américains, qui perdirent beaucoup de 
monde, tout en se retirant en bon ordre. Après 
cette victoire, Howe proposa encore une récon- 
ciliation; mais il fut impossible de s'entendre 
même sur les bases. Le 15 septembre les An- 
glais occupèrent New- York, et le 20 la plus 
grande partie de la ville fut incendiée. Les deux 
partis s'accusèrent mutuellement de cet acte 
odieux. Howe tourna ensuite les Américains, 
afin de les couper des provinces de l'Est. Le 
28 octobre il força le passage de la Brunx, et le 
1 er octobre il s'empara du camp de Washington, 
qui, refusant une bataille, évacua le New-Jersey. 
Ces succès furent sans résultat pour les Anglais. 
Dès le 2 janvier 1777 Wasingthon attaquait lord 
Cornvallis à Trenton, et délogeait ses troupes 
de Princetown. Le printemps et l'été se pas- 
sèrent dans une observation mutuelle, Wa- 
shington évitant toujours une action générale et 
décimant ses ennemis dans des escarmouches 
quotidiennes. Le 23 juillet, Howe fit embarquer 
une partie de son armée sur la flotte de son 
frère, et descendit le 25 août dans la baie de 
Chesapeak, d'où il s'avança sur Philadelphie. Wa- 
shington -fit mine de vouloir défendra cette 
ville, mais il ne persévéra pas dans ce dessein. 
Le 11 les Américains furent battus sur la Bran- 
dy wine, et le 26 ils évacuèrent Philadelphie. 
Howe détruisit alors tous les forts américains 
élevés sur les rives de la Delaware. Attaqué à 
Timproviste le 4 octobre, à Germantown, par l'in- 
fatigable Washington, il ne repoussa les assail- 
lants que par des prodiges de valeur et après 
de grandes pertes. Néanmoins il se maintint 
dans Philadelphie jusqu'au 8 mai 1778, où il s'em- 
barqua pour l'Angleterre, laissant à Clinton une 
armée démoralisée et des positions fort com- 
promises. Depuis cette époque, William Howe 
n'exerça plus aucun commandement. A. dx L. 

John Corny, Life of gênerai Washington ; Londres, 
1800, in-8°. — Fr. Gulzot, Vie du général Georges Wa- 
shington', Paris, 1859, in-8° ; - Spark, American Bio- 
graphy, 1. 1! p. 395 ; III, M. — Le même, WrUinçs of 
Washington. — Biographie Étrangère. 

bowel Dda, ou le Bon, qui prenait le titre 
de Mab Cadfill, Brenin Cymru, c'est-à-dire 
de fils de Cadell, brenin ou chef des pays des 
Kymris, mort en 948, réunissait sous son pouvoir, 
dès les premières années du dixième siècle, les 
trois régions principales du pays de Galles 
ou de la Cambrie, désignées avant la conquête 



dis 



HOWEL — HOWELL 



314 



de ce pays par les Anglo-Saxons, au huitième 
siècle, sous les noms de Gwynned , Powis et 
Dehembarth. Quoiqu'il ne semble pas avoir eu 
sur les petits rois ou brenins inférieurs plus 
d'autorité que ses prédécesseurs, son habileté, 
sa sagesse et ses vertus lui donnèrent sur la 
nation cambrienne un ascendant dont il profita 
pour élever un monument législatif d'une exécu- 
tion aussi difficile que méritoire, en codifiant, 
à l'aide des usages et des traditions orales qui 
avaient cours de son temps, les coutumes qui, 
depuis des siècles, régissaient la Cambrie. Ac- 
ceptées, après mûre délibération, par l'assemblée 
du pays, composée des principaux seigneurs, 
des chefs de clan , des représentants de chaque 
clan, des anciens , sans l'assentiment desquels 
aucune loi ne pouvait être établie, modifiée ou 
abrogée, les lois de Howel furent sanctionnées 
d'abord par le peuple, ensuite parle papeAnas- 
tase , près duquel il se rendit en personne en 
913. Ces lois apportèrent de grands adoucisse- 
ments à la législation pénale antérieure. Entre 
autres améliorations, on y remarque la substitu- 
tion de la preuve testimoniale et l'affirmation 
sans serment aux épreuves et aux combats ju- 
diciaires; elles devancèrent ainsi de plus de trois 
siècles l'abolition par saint Louis du duel judi- 
ciaire dans ses domaines. Ce n'est pas sous ce 
rapport seulement que les lois de Howel sont 
à consulter ; c'est à elles qu'il. faut recourir pour 
se faire une idée nette et précise de la compo- 
sition de la société kymrique au dixième siècle, 
des droits respectifs du brenin et de ses infé- 
rieurs, de la condition légale de la femme, du 
partage des terres, de la manière dont se ré- 
glaient les successions, des usages agricoles, de 
l'administration delà justice, etc., toutes choses 
rassemblées par Owen sous le titre de lois 
dHowel, dans trois compilations distinctes, 
analysées avec une rare sagacité par M. de La 
Borderie, à qui nous empruntons la presque to- 
talité des détails qui précèdent. La dissertation 
de M™ e Du Chàtellier sur le même sujet con- 
tribue à faire apprécier la haute portée du mo- 
nument du à Howel. Après la mort de ce prince, 
le pays de Galles, retombé dans une série de 
guerres et de dissensions intestines dont sa sa- 
gesse l'avait préservé, fut le théâtre des incur- 
sions et des ravages, tantôt des Angles; tantôt 
des pirates danois. P. Levot. 

Notice historique sut tes Loi* d' Howel le Bon, par 
A. de La Borderie ; Rennes, io-8°. — Des Lois d'Howei- 
Dda, Mab Caàell, Brenin Cymru (fils de Càdell, chef 
au pats desKymris), par A. Du Ckltelller; Paris, ln-8°. 

howel (Laurence), théologien anglais, né 
vers 1660, mort en 1720. Élève de l'université de 
Cambridge , il entra dans les ordres, et, fidèle à 
la cause des Stuarts, il refusa de prêter serment 
à GuillaumelU, à la reine Anne et à Georges 1 er . 
D se fermait ainsi l'accès des dignités ecclésias- 
tiques, et se plaçait vis-à-vis du pouvoir dans 
une position d'hostilité pleine de dangers. 11 ne 
tarda pas à en faire l'expérience. Ponr on pam- 



phlet intitulé : The Case o/Schism in the Church 
of England truly stàted, destiné à prouver 
la légitimité du refus de serment, il fut condamné 
à cinq ans de prison et à cinq cents livres st. 
d'ameude. Howel mourut dans la prison de 
Newgate. On a de lui : Synopsis Canonum 
SS. Apostolorum et Conciliorum Œcumeni* 
eorum et Provtncialhtm ab Ecclesia Grxca 
receptorum; 1708, in-tol.; — Synopsis Cano- 
num Ecclesise Latinœ; 1710-1715, in-fol.; — 
The View of the Pontiftcate, from Us sup- 
posée begining to the end of the Council of 
Trent; 1712; — History o/the Bible; 3 vol. 
in-8*. Z. 

Hittorical Rcgitter for 1717 et I7f». — Chalmers, Ge- 
neral Bioçraphical Dictionary. , 

howell ( William), historien anglais, né 
vers 1630, mort en 1683. Professeur dans l'uni- 
versité d'Oxford, il se fit connaître par une 
History offhe World from the earliest times 
to the ruin o/the Roman Empire %n the 
west; J680, 4 vol. in-fol., ouvrage dont Gibbon 
a fait l'éloge. On a encore de lui : Elementa 
Historié Civilis; Oxford, 1660. D'après Chal- 
mers, W. Howell est l'auteur d'un abrégé de 
l'histoire d'Angleterre intitulé Medulla Historié 
Anglicanes, et attribué à Laurence Howel. Z. 

Chalmers, General Bioeraphteal Dictionary. 
howell (/âmes), historien anglais, né 
vers 1596, à Brecknock, dans le comté de Caer- 
marthen (pays de Galles), mort en no- 
vembre 1666. Il fnt élevé an collège de Jésus 
à Oxford, et quitta l'université en 1613, sans 
avoir pris d'autre grade que celui de bachelier. 
Son père, chargé de famille, ne pouvant lui fournir 
de quoi continuer ses études, il -accepta la place 
de surveillant d'une manufacture de verre, et 
fit en 1619. un voyage sur le continent pour le 
compte des fondateurs de cet établissement. 11 
visita la Hollande, la Flandre, la France, l'Es- 
pagne et l'Italie. De retour en Angleterre en 
1621, il fut agrégé au collège de Jésus. Il voyagea 
bientôt après avec un jeune gentilhomme , et alla 
ensuite négocier à Madrid la restitution d'un 
vaisseau marchand anglais qui avait été confis- 
qué. Son activité et son habileté le firent choisir 
pour secrétaire par lord Scropeen 1626. L'année 
suivante, le bourg de Richmond l'envoya à la 
chambre des communes. En 1632 il alla en Da- 
nemark comme secrétaire; d'une ambassade 
extraordinaire, et à son setour il fut employé au 
même titre par Strafford en Irlande. La chute 
de Strafford et la guerre civile lui enlevèrent . 
ses emplois; il fut même arrêté en 1643, et dé- 
tenu jusqu'après la mort du roi. Il chercha à se 
rapprocher de Cromwell, et lui adressa un dis- 
cours flatteur. Charles U, rétabli sur le trône, 
oublia cette légère infidélité à la cause royale, et 
créa pour Howell la place d'historiographe. 
Ses ouvrages sont nombreux ; le plus connu est 
sa correspondance intitulée : Epistolw Ho- 
welianœ; familiar letters, domtsiic and tih 



81* 



HOWELL - HOWITT 



316 



reign, partly historicat, partly political, and 
partly philosophical ; 1645-1655, 4 vol. cor- 
respondance souvent réimprimée. Z. 

Blooraphia Britannica. — Athenm Oxonienus, io\. II. 
— Cb^lmer^ General Dioçraphical Dictionary. 

howick ( Charles Grey, vicomte). Voy. 
Grev. 

î bowitt ( W illiaj»), poète, romancier et 
voyageur anglais, né es 1795, à Heanor (comté 
de Derby )* Comme toute sa famille, il est 
membre de la Société des Amis. De bonne 
heure, il montra une avidité extrême d'ins- 
truction. Après avoir achevé les études ordi- 
naires, il se mit à apprendre la chimie, la physi- 
que, la philosophie, à lire les meilleurs écrivains 
d'Angleterre, (f Italie et de France , et plus tard 
acquit une connaissance complète de l'allemand. 
Son goût pour la poésie se développa et s'agran- 
dit au milieu de séjours prolongés à la cam- 
pagne, dont les beautés et les jouissances avaient 
pour lui le plus vif attrait. A l'âge de vingt-huit 
ans il épousa une jeune fille appartenant comme 
loi à la Société des Amis , miss Mary Botham, 
dont les goûts et les talents étaient en parfaite 
harmonie avec les siens : leur» noms ont été 
si longtemps et si intimement associés dans des 
œuvres diverses, qu'A est difficile de les séparer. 
Leur premier ouvrage, Le Ménestrel de la 
Forêt parut, en 1*23, et porte en *itr»feurs 
deux noms. 11 fut accueilli avec beaucoup, de 
faveur par les critiques de la presse, et, ce qui 
est à remarquer, par plusieurs poètes du temps 
d'une réputation reconnue. Us ajoutèrent à Féelat 
de ee premier succès par beaucoup de poésies 
lyriques, qui parurent dans les Animais feshifr- 
nables du temps. Peu api& la publication du Mé- 
.nestrel, ils entreprirent un voyage à pied en 
Ecosse, recueillant les images et les traditions, 
«'enivrant des beautés des lacs, des paysages y de 
la nature cultivée ou sauvage, et parcoururent 
ainsi plus de 500 milles. On dit qu'en passant, 
ris firent une courte visite a Gretaa-Green , et 
que le vieux forgeron, voyant leur jeunesse et le 
•bonheur qui rayonnait sur leur figure , les prit 
pour des amoureux qui avaient besoin de son 
ministère : il fut un peu étonné quand il apprit 
que le nœud conjugal était déjà bel et .bien 
formé. En 1827 ils publièrent un poème plein 
d'intérêt, fondé sur le-véûitfdes ravages de la 
peste à Eyam par le révci-William Mompesson, 
et y ajoutèrent d'autres-poésies d'un mérite 
remarquable. En 1831 M. Howitt donna au 
monde littéraire Le Livre des Saisons, mi fies 
ouvrages les plus agréables et les plus instruc- 
tifs qui aient paru en ce genre. On dit qu'il fut 
offert à six éditeurs au moins, et rejeta par 
tous : on n'en voulait à aucun prix. Il y airait 
de quoi décourager. L'auteur fut pris d'un tel 
dégoût et pour les éditeurs et pour son livre 
malencontreux, qu'il pria ufe> ami, qui s'était 
chargé des négociations; détacher une pierre 
au manuscrit et de le lancer dans la Tamise. Get 



ami pourtant, honnie judicieux, pensa qu'il va- 
lait mieux avoir quelque chose que rien du tout, 
et finit par vendre le manuscrit à Colburn et 
Bentley pour 75 liv. sterling. Ce fut une petite 
mine d'or pour les heureux libraires ! L'ouvrap* 
à- cjénassé la vingtième édition. Mais hélas! 
qu'y gagna l'auteur ? La gloire sans doute d'être 
reproduit des milliers de fois; mais pas une 
parcelle de cet or récolté largement par les 
éditeurs ne vint paver cette gloire. 

Libéral prononce en politique, M. Howitt 
tourna, malgré les conseils de ses amis, ses 
idées vers la politique. A cette époque , tous 
ceux qui dénonçaient les abus du pouvoir royal, 
du clergé et du barreau étaient regardés comme 
des hommes dangereux. Telle était l'énergie de 
conviction chez M. Howitt , et en même temps 
son courage , qu'il n'hésita point à publier son 
History of Priesicrâft (Histoire de la Politique 
sacerdotale ) , qui était de nature à soulever 
contre lui de nombreux et puissants ennemis. 
Toutes les sectes religieuses ou prétendues re- 
ligieuses y étaient passées en revue, et les arti- 
fices, les abus et 14, politique astucieuse de cha- 
cune dévoilés et jugés avec une critique indépen- 
dante et sévère; ce fut, dit un écrivain anglais, 
comme une Recharge de canons à la-Paixhans 
contre les superstitions anciennes et modernes. 
L'ouvrage produisit une grande sensation. Il eut 
beaucoup de succès,' et d'année en année les 
éditions se renouvelèrent. Ceux même qui n'ap- 
prouvaient pas l'extrême sévérité des jugements 
et }a tendance générale du livre , reconnaissaient 
la droiture et le courage de l'auteur. Peu après 
icette publication, il fut nommé alderman de Not- 
tingham, où il résidait alors. M. Howitt y devint 
très-populaire, comme champion des droits po- 
pulaires, et plus d'une fois ^ reçut des présents 
publies comme témoignage, de cette estime. 
Mais il s'aperçut bientôt que la vie politique a 
de rudes exigences. Il fallait en toute occasion 
faire des discours dans les meetings , répondre à 
des adversaires passionnés, appliquer son temps 
et ses facultés \ des devoirs jugés indispensa- 
bles, et peu ûVtW^s lin* restaient pour les pro- 
ductions plus attrayantes du cabinet. Il quitta 
donc tyottingharo et l'arène politique pour se 
retirer dans le beau village d'EsheJr, et c'est là 
qu'il, composa , au sein d'une retraite paisible 
et occupée , l'un de ses ouvrages les plus popu- 
laires, The Rural Life in England, 2 vol. 
( La Vie Rurale en Angleterre )i description fidèle 
et gracieuse des plaisirs, amusements, coutumes 
et occujpjations. de la campagne dans rjfkerxy En- 
gland( la joyeuse Angleterre); « On y respire, dit 
un critique , un, parMn d'aubépine en fleur et 
de foin nouvellement fauché qui pénètre d'une 
douce ivresse, et dont l'attrait est bien de na- 
ture à faire déserter la ville, cet amas de bri- 
ques, pour les bois riants et les fraîches vallées 
de la campagne. » D'autres ouvrages suivirent : 
Colonisation et Christianisme, où il expose 



317 



HOWITT - HOWITZ 



318 



comment leg nations de l'Europe ont traité les 
indigènes dans leurs colonies ; — Visits to Remar- 
kable Places, Old Halls, andBattle Fields, 
and sçenejs illustrative of striking passar 
ges in English Bis tory. Bien que d'un prix 
élevé, ce dernier ouvrage fut rapidement en- 
levé et plusieurs fois réimprimé. 

Après une résidence de trois ans à Esher, 
H. et M™* Howjtt allèrent s'établir à Heidelberg, 
pour l'éducation de leurs enfants. Ils s'y per- 
fectionnèrent dans l'allemand, et recueillirent des 
matériaux, nombreux pour d'autres ouvrages. 
Pendant son séjour à Heidelberg, M. Howitt pu- 
blia, en 1841, La Vie des Étudiants en Alle- 
magne. Le livre fut attaqué avec une grande 
virulence par la pressé anglaise. Le goût national 
était-il choqué par cette peinture fidèle de l'é- 
tudiant avee son air fanfaron , son visage pâle 
et rêveur et son éternelle pipe? Quoi qu'il en 
soit, le succès de l'ouvrage fut médiocre. L'année 
suivante, il donna : La Vie Rurale et Domes- 
tique en Allemagne; et, après avoir quitté 
le pays, Expériences en Allemagne, où il 
voulait retracer l'esprit de chicane et de rapa- 
cité parmi les Allemands et certains ridicules 
de la société. Les journaux allemands attaquè- 
rent ces critiques comme d'indignes satires. 
En 1846 parut V Aristocratie d'Angleterre, 
qui est 'un manifeste énergique de réforme, et 
où il exposé que Tes cinq sixièmes des places^, 
pension^ , dignités 1 dans' ta marine , l'armée et le 
clergé totat ^otosîtëment réservés à l'àristo»- 
cratie. B' avait condensé 1 en tnV seul foyer' ces 
faits qui défrayent d'usage lés attaques des jour- 
naux : vrais à des degrés différents, ils forment 
une redoutable machine de guerre. 

En 1 847 parurent par séries deux volumes il- 
lustrés intitulés iHaunts and Homes ofSritish 
Poets. C'est avec un vif* intérêt qu'on recherche 
les souvenirs et les anecdotes qui ont rapport 
à der -poètes célèbres, aux choses et anx lieux 
que letrr talent a en quelque sorte consacrés. 
M. Howitt avait eu des relations d'amitié avec 
la plupart d'entre eux et visité réellement les 
lieux qu'il décrit ; aussi cet ouvrage fut-il ac- 
cueilli avec beaucoup de faveur. Quelques ou- 
vrages de fiction, quelques livres pleins de sens 
et d'imagination pour la jeunesse échappèrent de 
sa plume féconde et infatigable dans les années 
qui suivirent o Hâtons-nous d'arriver à deux 
entreprises qui ont .eu, beaucoup d'influence sur 
sa vie. 

En 1846 M. Howitt était devenu co-proprié- 
taire et un des directeurs du Journal du Peuple. 
Ses talents, son expérience et sa réputation au- 
raient dû lui en assurer la direction absolue. Mal- 
heureusement il n'en fut pas ainsi. Les discus- 
sions devinrent bientôt de querelles. Les associés 
se séparèrent au bout d'un an, dans des circons- 
tances qui entraînèrent une perte considérable 
pour M. Howitt. Se croyant libre de tout enga- 
gement, il publia le Journal d f Howitt, ce qui 



était le Journal du Peuple avec un titre diffé- 
rent. Mais ne pouvant retirer son capital de ce 
dernier, il s'ensuivit des procès dispendieux. Le 
nouveau journal fut arrêté dans son succès, et 
les pertes d'argent furent sérieuses. 

En 1852 M. Howitt partit pour l'Australie. 
Toutes les imaginations étaient alors exaltées 
par la découverte des mines d'or. Son intention 
n'était pas de s'établir mineur ou colon ; mais, 
dominé par l'esprit d'aventure et de recherche, 
il voulait étudier de près le caractère et les res- 
sources de cette colonie. Le résultat fut un ou- 
vrage du plus grand intérêt, land, Labour, 
and Gold , or two years in Victoria. 

Parti d'Angleterre en juin 1852 avec ses deux 
fils , M. Howitt n'arriva à Melbourne qu'après 
un voyage de trois mois et demi. Ses expériëïÊ 
ces du pays commencèrent au sortir du na- 
vire. On lui demandai liv. sterling. (loofiv) 
pour le seul transport de son bagage à Mel- 
bourne. Dans cette ville, tout se vendait à 300 
pour J00 du prix d'achat. Deux petites cham- 
bres, avec un mobilier mesquin, prix 6 liv. 
( 150 fr. ) par sçpiaine, et le reste à l'avenant. 
M. Howitt avait un frère établi depuis plusieurs 
années comme médecin à Melbourne; ce fut 
pour lui une source précieuse de renseignements, 
dont il a tiré bon parti. J[I se rendit aux mi- 
nes , e| les visita sqceessivement. Mais c'est dans 
.son ouvrage . qu'il faut lire ses. aventures , ses 
dangers, ses observations sur le climat, la ri- 
chesse <fes mineurs , le système qui gouverne leur 
exploitation et la vente des terres. Après un 
séjour de deux ans dans ce pays , ou il avait 
tout observé de ses yeux et recueilli les rensei- 
gnements les plus exacts, il songea à revenir en 
Angleterre yers la fin de 1854. L'ouvrage qu'il 
donna l'année suivante est non-seulement le ta- 
bleau le meilleur et le plus 1 complet de cette flo- 
rissante colonie, mais un des livres les plus in- 
téressants de voyage qui aient été publiés. 
J. Chanut. 
Men o/the lime. 

howitz (Frajiz-Gothard), médecin da- 
nois, né a Copenhague, le 25 décembre 1789, 
mort le)3 avril 1826. Après avoir été reçu doc- 
teur en médecine (1815), il voyagea à l'étranger 
(1815-1818), et fut nommé professeur de phar- 
macologie à l'université de Copenhague (1819), 
et médecin de divers établissements publics. On 
a de lui : Om Afsindigfiedog tilregnehe (Sur la 
Démence et rimpuiabjlité), dans Juridisk Tids- 
skrtft de CErsted, t. VHI ; et à part, Copenhague, 
1824, in-8°. Cet écrit, où il nie la liberté de la vo- 
lonté humaine, futréfutépar J.-L.Heiberg,P. Hort 
et A. S. CErsted; — Determinismen eller Hume 
mod Kant ( Le Déterminisme, ou Hume contre 
Kant), ibid., 1824, in- 8°; et Ultimatum sur le 
Déterminisme, ib., 1825; où il soutint avec 
beaucoup de talent les opinions qu'il avait émises 
dans son premier ouvrage; — Pharmacopgea 
inpraxipubUca a medicis danicis sequenda; 



S19 



îb., 1828, in-12 ; — des Mémoires àènsActa So- 
cietatis Medicm Hafniensis, t. VI, VJf, et dans 
Bibliothek for Lxger ( Bibliothèque pour les 
Médecins), 1821. B. 

BOOiothek for Lxger, t. VII, p. 184-148. - Dansk IA- 
teraturtidende, 1886, n« 19. — Neuer Nekrotog der 
Deutschen; llmenu, 1886. p. 848-848. - Brslew, For- 
fatter-Lex. 

howman ( Jean ), surnommé Jean de Feo 
kenham, du lieu de sa naissance, dans le comté de 
Worcester, né vers 1516, mort au château de 
Wisbeach (lie d'Ely), en 1585. Il était fils de pau- 
vres paysans; mais son intelligence et ses goûts 
studieux le firent accueillir par les bénédictins 
d'Evesham, qui l'envoyèrent achever ses études 
au collège de Glocester à Oxford. Après avoir 
reçu les ordres, il devint chapelain de l'évêque 
de Worcester, puis de Bonner,' évoque de Lon- 
dres, qui tous deux s'opposèrent avec vigueur aux 
progrès de la réforme en Angleterre. En 1549, 
le zèle catholique d'Howman le fit emprisonner 
à la tour de Londres ; il y demeura jusqu'à IV 
vénement de la reine Marie (1553), qui l'attacha 
à sa personne. Elle le chargea de convertir Jane 
Grey lorsque la mort de cette infortunée prin- 
cesse eut été résolue, et le nomma peu après 
abbé de Westminster. Dans la prospérité How- 
man se montra beaucoup plus tolérant: il com- 
battit les mesures cruelles prises contre les 
protestants, et sauva probablement la vie à la 
princesse Elisabeth, par ses prières et ses re- 
montrances à la reine Marie, alors que cette 
reine avait résolu la mort de sa sœur. Elisabeth 
étant montée sur le trône voulut se montrer re- 
connaissante : elle offrit à Howman l'archevêché 
de Cantorbéry, pourvu qu'il embrassât la ré- 
forme. Jl refusa formellement , et de plus, dans 
la chambre des lords, où il siégeait comme abbé 
mitre, il s'opposa à toutes les mesures qui pou- 
vaient favoriser la religion réformée. Elisabeth 
crut vaincre cette obstination en lefaisantconduire 
à la tour en 1560. Howman y resta jusqu'en 1563, 
où l'éveque de Winchester obtint son élargisse- 
ment. Mais au bout de quelques mois il fut arrêté 
de nouveau. Le reste de sa vie se passa dans une 
alternative de captivité et de liberté précaire. De- 
venu septuagénaire, il termina enfin ses jours 
sous les verrous, au château de Wisbeach. Ca- 
tholiques et protestants s'accordent à reconnaître 
Howman comme un prélat aussi savant que libéral 
et charitable. On a de lui : le récit de sa Confé- 
rence avec Jane Grey; Londres, 1554, in-8°, 
et 1626, in-4 a ; — des Oraisons; — des Ser- 
mons , — et quelques écrits de controverse. 

A. L. 

Wood, Athenœ Oxonienses. 

iiotee (Anna,née OwEN),illuminée allemande, 
née à Eiderstadt, en 1584, morte en 1656. En 
1599 elle épousa un noble du pays , appelé Her- 
mann de Hoyer, après la mort duquel elle se 
retira sur une terre qu'elle possédait, pour s'y 
adonner à la culture des lettres et de la poésie. 
Visitée par un alchimiste, du nom de Tetînguis, 



HOWITZ — HOYER 320 

dont elle avait réclamé les soins pendant une 
maladie, elle s'associa aux rêveries de cet homme, 
qui demeura dans sa maison et qu'elle considéra 
comme un prophète. Puis elle prit parti pour les 
anabaptistes, et se crut elle-même inspirée. Son 
ardeur à faire des prosélytes lui occasionna des 
dépenses qui compromirent sa fortune. Elle dut 
quitter son pays pour aller en Suède, où elle vécut 
sur un domaine dont la reine Christine l'avait 
gratifiée. On dit que, sentant sa fin s'approcher, 
elle se rendit inaccessible pour n'avoir point de 
témoins de sa mort. Elle avait des habitudes sin- 
gulières, celle, par exemple, de ne manger que 
du poisson pourri. Ses œuvres, parmi lesquelles 
des poésies sacrées dirigées contre le3 luthériens, 
ont été publiées à Amterdam en 1650. Y. R. 

Colberg, Platomitch-Hermetisch, Christentkum. — 
Holberg, Dœn und Norw. Staats-und Aeichshistorie. - 
Sedler, Univ.-Uxic. 

hoyer {Michel), poète latin moderne, né 
à Hesdin (Artois), en 1593, mort à Lille, le 14 juin 
1650. Il reçut la prêtrise, et enseigna plusieurs 
années les belles-lettres au collège de Saint-Pierre, 
à Lille. Plus tard il fit profession chez les er- 
mitesde Saint Augustin, à Ypres.ll fut régent de 
poésie et de rhétorique dans plusieurs établisse- 
ments de son ordre. II était préfet des études à 
Lille lorsqu'il mourut. On a de lui : Flammulœ 
Amorti s. JP. Augustini versibus et iconïbus 
exornatx; Anvers, 1629 et 1639, in-16; — 
Theatrum Castitatis,sive Susannaet Gamma, 
tragœdix; attaque poemata; Tournay, 1631, 
in-12; — Oratio encomiastica , de Sancti- 
taie Vitœ et Divina Sapientia Joannis 
Duns Scott, doctoris Mariant et subtilis; 
Douay, 1640,in-4° ;— Vitœ Religiosx ldea t seu 
Vita S. Patris Ephrxm Syri, scriptoris an- 
tiquissimi et religiosissimi ; Douay, 1640, 
in-16; — S. Theodoray virgo et martyr An- 
tiochena, tragœdia : aliaque poemata ; Anvers, 
1641, in-12; — Epïcedion in Obitum eximii 
patris Benrici Lancilotti, S. Thi doctoris Lo- 
vaniensis; Anvers, 1643, in-4°; — Historiés 
tragicx, sacras et prof an», Décades dux; 
Cologne, 1647, in-12; Bruxelles, 1652, in-16; 
ces histoires sont entremêlées de vers et écrites 
avec élégance. A. L. 

Valère André, Bibliotheea Belgica. p. 678-674. - Le 
P. Pbil. ElMtus, Encomiasticon Augustinlan., p. 490. - 
Paquot, Mémoires pour servtr à r Histoire littéraire des 
Pays-Bas, t. 1, p. 157-159. 

hoyer (Jean-Godefroi de), écrivain militaire 
allemand , né à Dresde, le 9 mai 1 767, mort à Halle, 
le 7 mars 1848. 11 servit avec distinction dans 
les armées saxonne, russe et prussienne, et fut 
nommé inspecteur des forteresses delà Poméranie 
et de la province de Prusse. Ses principaux 
travaux sont : Pragmatische Geschichte der 
sxchsischen Truppen (Histoire pragmatique des 
Troupes saxonnes) ; Leipzig, 1791 ; —Bandbuch 
der Pontonnier wissenschaft (Manuel de la 
Science du Pontonnier); Leipzig, 1793-1794, 
2 vol.; 2 e édit.", 1830; —Geschkhteder.Kriegs- 



321 



HOYER — HOZIER 



322 



kunst (Histoire de l'Art de la Guerre); Gcet- 
tingue, 1797-1800, 2 vol. ;— Allgemeines Wœr- 
terbuch der Artillerie (Dictionnaire universel de 
l'Artillerie); Tubingue, 1804-1831, 3 vol.; — Al- 
lgemeines Wœrterbuch der Kriegsbaukunst 
(Dictionnaire universel de l'art des fortifica- 
tions ) ; Berlin, 1815, 3 vol. ; — Lehrbuch der 
Kriegsbaukunst (Traité de l'Art des Fortifica- 
tions); Berlin, 1817-1818, 2 vol; — Lehrbuch 
fur den Elementarunterricht in den Kriegs- 
wissenschaften (Traité élémentaire des Sciences 
militaires ) ; Berlin, 1827, 2 vol. ; — System der 
Brandraketen nach Congreve und andern 
( Système des Fusées de guerre d'après Congreve 
et autres), avec un supplément sur les canons à 
vapeur de Perkins ; Leipzig 1827, en trois plan- 
ches. L'auteur, après avoir tait J'historique des 
fusées, entre dans l'examen des procédés techni- 
ques de fabrication et de l'application de ces 
pièces d'artifice à la guerre; enfin, il conclut 
qu'elles peuvent être un utile supplément à 
l'artillerie. — Literatur der Kriegswissens- 
ehaften und Kriegsgeschichte (Liste des Ou- 
vrages sur les Sciences et l'Histoire militaires) ; 
Berlin, 1831-1840 ; — Franz Sforza I Visconti ; 
Magdebourg, 1841, 2 vol. R. L. 

Conv.~Lex.-Bev. Bneyc, 18*8, 

hoynck tan papendrecht (Corneille- 
Paul), historien hollandais, né à Dordrecht, le 
1 er janvier 1686, mort à Malines, le 13 décembre 
1753. Issu d'une ancienne et noble famille de Hol- 
lande, il fit ses premières études à Malines et à 
Paderborn. Il suivit un cours de théologie, d 'abord 
chez les jésuites de Malines, pais à l'uni- 
versité de Louvain, où il fit son droit, et devint 
licencié en 1713. Ordonné prêtre, il fut envoyé 
comme vicaire à La Haye ; mais Thomas-Philippe 
d'Alsace, ayant été nommé archevêque de Ma- 
lines, le choisit pour secrétaire, et s'en fit ac- 
compagaer dans un voyage à Rome, pendant 
loquet on résolut d'imposer au clergé la bulle 
Vnigenitus. En 1717 Hoynck van Papendrecht 
obtint une prébendedu chapitre de Saint-Rombaut 
de Malines; il fut peu de temps après nommé 
vicaire général. Marie-Elisabeth , gouvernante 
des Pays-Bas, voulant lui témoigner sa satis- 
faction pour le zèle qu'il avait montré contre les 
jansénistes, fit frapper une médaille d'or des- 
tinée à rappeler le souvenir de ses services. En 
1731 il fut appelé à une prébende de chanoine, 
gradué de la faculté de droit à Saint-Rombaut-, 
et, l'année suivante, il fut nommé archiprêtre. Il 
rédigea, vers 1735, avec le père Wouters, un 
nouveau catalogue des livres défendus, qu'ils 
espéraient faire autoriser sous le gouvernement 
de Marie-Elisabeth. Ce catalogue fut, en effet, 
publié par un édit impérial; mais le conseil de 
Brabant s'y opposa énergiquement le 12 jan- 
vier 1736. Hoynck van Papendrecht consacrait 
ses moments de loisir à des travaux sur l'his- 
toire des Pays-Bas, lorsqu'il mourut à l'âge de 
soixante-sept ans. Son portrait a été fait par 

NOGV. 1I0GR. CÉNÉR. — T. XXV. 



le peintre Smeyers. Ses principaux écrits ont pour 
titres : ffistoria Bcclesix Ultrajectinx, a tem- 
pore mutatx religionis in Fœderato Belgio, 
in qua ostenditur ordinaria sedis archiépis- 
copales et capituli jura intercédasse , etc. ; 
Malines, 1725, in-fol. : une traduction flamande 
en a été publiée à Malines, 1728, in-fol. ; — 
Analecta Belgica ad historiam scissi Belgii 
potissimum attinentia ; La Haye, 1743, 3 vol., 
en 6 parties in-4°. Sur l'une des feuilles de garde 
de son exemplaire de cet ouvrage, aujourd'hui 
conservé à la Bibliothèque royale de Bruxelles, 
le savant bibliophile van Hulthem a consigné le 
jugement suivant: « L'auteur, chanoine de Ma- 
lines , a bien mérité delà patrie en publiant ces 
morceaux précieux, qui, presque tous, paraissent 
pour la première fois. H y a ajouté des notes sa- 
vantes, judicieuses, et très-bien écrites en latin. 
Plot à Dieu que nous eussions beaucoup de cha- 
noines pareils I » Hoynck van Papendrecht a 
aidé Foppens dans la composition de sa Biblio- 
theca Belgica. E. Recnaju>. 

Foppeos, Bibliotheca Belgica, Préface, p. ni. — Bt- 
bltetheca Hvltàêmiana, t. IV, n° W,i49. - Gœthils, 
Histoire des Lettr$t 9 des Sciences et des Arts en Belgique 
et dans les pays limitrophes , 1. 1. 

ho vos (Gaspar de), peintre espagnol, né 
vers 1540. 11 étudia la peinture à Madrid, dans 
les ateliers de l'habile Gaspar Becerra, et acquit 
bientôt un talent assez distingué. En 1569 il fut 
chargé, avec Gaspar y Palencia, de Valladolid, 
de l'ornementation du grand maltre-autel de la 
cathédrale d'Astorga, dont Becerra avait peint le 
tableau capital. On voit d'Hoyos plusieurs bons 
tableaux dans divers couvents. A. de L. 

QaUllet, Dictionnaire des Peintres espagnols. 

* boz (Juan de La), poète dramatique espa- 
gnol, né à Madrid, vers 1620; il devint chevalier 
de Saint- Jacques en 1653, regidor de Burgos en 
1657 ; il vivait encore en 1689. Il ne nous reste 
qu'un fort petit nombre de ses comédies ; Bl Cas- 
tigo de la Miseria est une des meilleures du 
théâtre espagnol ; elle mérite d'être placée immé- 
diatement après V Avare de Molière, ce qui est 
déjà un rang fort honorable. L'avare est retracé 
avec verve et gaieté, et l'intrigue, quoiqu'un peu 
compliquée, est bien conduite. Hoz prit le sujet 
dans une des Nouvelles de Marie de Zayas, fort 
goûtée à cette époque, mais il y introduisit des 
changements considérables. El Castigo de la 
Miseria a été inséré dans le premier volume du 
Teatro Espanol, publié par Huerta, et dans le cin- 
quième volume du Tesoro del Teatro Espanol; 
Paris, 1838. Une production d'un autre genre, El 
Montanez Juan Pascual y primer Asistenle de 
Sevilla , met en scène avec habileté un trait de 
la vie du roi Pèdre le Justicier. G. B. 

Slsmondl, Histoire de la Littérature du Midi, t. IV, 
p. 186. — Tteknor,:25ristory ofSpanish Literatur*, II. 417.; 
— Von Schacb, Geschichte des dramatisehen Literatur 
<»5pa*tfan, t. III,p.Mi. 

*uozibr (Etienne d'), poète et chroniqueur 
français, né à Salon, le 18 octobre 1547, mortà Aix 
en 1611. Gentilhomme provençal, il devint capi- 

11 



323 



HOZIER 



324 



taine de la ville de Saloa en 1&80. Pendant qu'il 
occupait cette charge, il mit en ordre les archives 
de l'hôtel de Tille et en inventoria les titres, qui 
étaient dans une grande confusion. Son goût pour 
les vieilles chartes passa dans sa famille. Il vint 
plusieurs fois à la cour, et suivit, en 1 589, la prin- 
cesse Christine de Lorraine en Toscane, où ette 
allait épouser le grand-duc Ferdinand de Médicis. 
On a de lui quelques pièces devers imprimées de 
son temps, tant en français qu'en provençal ; mais 
il avait surtout un goût décidé pour l'étude de l'hia* 
toire. tl avait composé des Chroniques qui avaient 
pour titre: Épitome des Événements du Mande 
dès sa création. César Nostradamus, qui était 
son cousin, le cite à la dernière page de son Hi$+ 
toire de Provence comme un de ceux qui lui 
avaient fourni des matériaux pour la composi- 
tion de cet ouvrage. J. V. 

Nostradamus, Mist de Provence. — Dictionnaire des 
Hommes Illustres de la Pqgventfe, — lf orérl , le Gran$ 
Dictionnaire Historique. 

hozier (Pierre d'), seigneur ne La Garde, 
en Provence, célèbre généalogiste français, fils 
du précédent, hé à Marseille, le. \Q juillet 1592, 
mort à Paris, le 1 er décembre 1660. Son père lui 
fit donner une excellente éducation. Il entra, 
dès qu'il eut perdu son père, dans la compagnie 
de chevau-légers du maréchal de Créqui, qui re- 
cherchait alors sa généalogie. D'Hozier s'offrit à 
ce seigneur pour l'aider dans ce travail, et com- 
posa en effet la généalogie de cette illustre maison/ 
L'ouvrage eut tant de succès, qu'il entreprit ensuite 
la recherche générale des généalogies des autres 
familles nobles du royaume ; et il s'acquit dans ce 
genre une telle réputation, que Louis XIII le fit, en 
1620, l'un des cent gentilshommes de l'ancienne 
bande de sa maison, le décora de l'ordre de Saint- 
Michel en 1628, lui accorda en 1629 une pension^ 
et en 1641 la charge de juge d'armes de France, 
sur la démission du vicomte de Saint-Maurice ,' 
qui l'indiqua lui-môme au roi pour son succes- 
seur (1). La réputation d'Hozier augmentant 
chaque jour, le roi le fit en 1642 l'un de ses. 
maîtres d'hôtel. Louis XIV lui conserva les 
mêmes emplois, le commit pour lui certifier la 
noblesse des éouyers et des pages de ses écu- 
ries, et lui donna un brevet dé conseiller d'État 
en 1654. « De véritables grands hommes, dît 
Voltaire, ont été bien moins récompensés : leurs 
travaux n'étaient pas si nécessaires à la vanité 
humaine. » Pierre d'Hozier fut consulté de toute 
la France et de plusieurs endroits de l'Europe. 
« Il a voit une mémoire si prodigieuse, dit l'abbé 
Ladvocat, qu'il citoit sur-le-champ et sans se 
tromper, les dates des contrats, les noms, les 
surnoms et les armes de chaque famille qu'il 
avoit une fois étudiée. Ce qui fit dire au célè- 
bre d'Ablancourt, en parlant de, M. 4'Hozjer, 

(1) Cette charge avait été créée, à la sollicitation des 
états généraux, par édtt du moto de Juin 1611, et con- 
férée la même année à françols de Chevriers de Saint- 
Maurice, seigneur de Salagny, d'une ancienne maison 
du Méconnais. 



qu'il falloit qu'il eût assisté à tons les mariages 
et à tous les baptêmes de l'univers. » Il était 
d'une probité irréprochable. « On Ta peint, dit 
Chaudon, comme un homme qui allioit les ver- 
tus morales avec les vérins chrétiennes, ami 
fidèle et officieux, d'une société douce et d'une 
conversation agréable. » Lié avec fhéopbraste 
Renaodot (voy. ce nom), il coopéra, en 1631, à 
la fondation de la Gazette de France, et en as- 
sura le succès en lui fournissant des nouvelle* 
tirées de la vaste correspondance qu'il s'était 
établie. Ses principaux ouvrage» sont ; Recueil 
Armoriai , contenant , par ordre alphabé- 
tique, les Armes et Blasons des ancienne* Mai- 
son* de Bretagne} Paris, 1638, m-fol.; — Les 
Noms, Surnoms , Qualités, Armes et Blasions 
de tous les Chevalière de VQrdre- du Saint- 
Esprit; Paris, 1643, h>fol.; — Remarques 
sommaires sur ta Généalogie de la Afai- 
son de Gondi', Paris, 1652, in-fo>.; — Généalo- 
gie de la Maison de La Rockefeucauèd ; Paris, 
1654, in-4'; — Généalogie de la Maison de 
Bournonville;Vwn&,ib8T, m-fol. — La Gé- 
néalogie de la Maison d'Amante; Dijon, 1A69» 
in-fol. — Table Généalogique pour faire voir 
que la Maison de Saint-Simon descend par 
femmes de la maison de France, justifiées par 
titres et preuves ; Paris, 1638, m-fbl. Il a laissé 
en manuscrits Généalogie des Principales Fa- 
milles de France, 150vol. in-fol. ; conservés à 
la Bibliothèque impériale. J. V. 

Dict. des Hommes Ut. de la Provence. — Morért, Grand 
Met. Mittor. - AkW Robert, État de Uk Provence dans 
$d Nooletfie. *r Lelong, WMoth Jfist.. <fe te France, - 
Ladvocat, D\ct. Historique portatif. — Chaudon et 
Delandlne, Dict. Vtittx. hist. t crU. et bibHôgr. — Le fias, 
Dict. eneyetop. de la France». •* Saint Prosper, dans le 
Dict. 4f la, C<wuk*«> 

* hozib» (Louisr Roger a'), généalogiste fran- 
çais, fils aîné du précédent, né à Paris, le 7 janvier 
1634, mort le 29 juin 1708. Juge d'armes de 
la noblesse de France, gentilhomme ordinaire 
de la chambre du roi en 1658 , et chevalier de 
samt*Mioh£l en 165Û, il devint aveugle en 1675, 
et la roi lui fit une pension. J. V. 

Morért, Grand Dict. Hisiar. 
hozibr (Charles-René n*}, généalogiste 
français, frère du précédent, né à Paris , le 24 
février 1640, mort à Paris, le 13 février 1732. 
Juge d'armes de la noblesse de France à Paris, 
et chevalier de Tordre de SainfcMaurice de Sa- 
voie, il se fit remarquer par l'étendue do ses 
connaissances dans l'art héraldique et par plu* 
sieurs ouvrages qu'il composa par ordre de 
Louis XIV. On a de loi : Remarquée sur Vais* 
toire de Charles iX, ôVVarillas, dan» l'édi- 
tion de Paris, 1686, a vol. in-4».; — Recherche» 
de la Noblesse de Champagne.; Châlons, 1673, 
2 vol. in-fol. : faites par ordre de Louis XIV, 
sous la direction de Caumarnn. 11 a aussi com- 
posé la Généalogie de la Maison de Confiant 
Châlons, in-fol.; et la Généalogie de. la Maison 
de La Fart; Montpellier, 1695, in-fol. lia laissé 



as* 



HOZIER 



326 



en manuscrit le» Mecherches des Armoiries de 
Bourgogne. J. V. 

Uorfrt, Grand D^çL tiistor. -P. Leloog, Mttotk. 
Hist. de la France. - Chaudon et Uelandinc, Dict. Univ. t 
MsL, crU. et bibUogr. - Le Bas, Dict. encyclop. de la 
Franc*. — Salnt-Prosper, dans le Met. de la Couver*. 

hozibr (Zoufe-Péerre »'), généalogiste fran. 
çaut, ne? eu du précédent, et ils aîné de Louis- 
Roger d'Hozier, né à Parte, le 90 novembre 1 685 ; 
mort dans la même ville, le 25 septembre 1767. 
Il suoeédaà son oncle dans la charge de juge d'ar- 
mes, devint conseiller du roi en ses conseils 
et ehevaher de l'ordre de Samt-Mkhel, dont il 
devint le doyen. C'est pendant son exercice 
qu'a paru l' Armoriai général de ta France, ou 
registre de la noblesse de France; Paris, 
1736-1768, 10 vol. in-fol., avec fig. (avec Ant. 
M. d'floziefdeSérigny ils), « ouvrage recherché, 
dit M. Quérard, dont les exemplaires complets 
ne sont pas communs; ils doivent contenir six 
registres. » On lui doit en outre Lettre en forme 
de défi littéraire signifié au corps entier de 
la littérature} 1756, in-12. J. V. 

MorérI, Grand Met. Histor.-K Leloog, sUbUoth. Hist. 
de la France. — Chaud oo et Delandjne, Dict. Univ, /»«£., 
crU. et biblioçr. — Quérard, La France Littéraire. - 
Salnt-Prpsper, dans le Dict. de la Couvert . 

H021EH de 8ER1GNY {Antoine- Marie d'), 
généalogiste français, fils du. précédent, né à Pa- 
ris,^ 28 août 1721, mort vers 1810. Il succéda 
à son père dans la charge de juge d'armes, 
qu'il perdit à la révolution. Il avait composé 
un mémoire sur Ja maison de Baint-Remy de 
Valois, issue de Henri n par bâtardise, et dé- 
livra un certificat à la comtesse de Lamotte 
(voy. ce nom), qui prétendait descendre de cette 
maison, et qui a inséré ce certificat & la suite du 
mémoire qu'elle publia pour sa défense. Il re- 
prit plus tard la suite de Y Armoriai publié par son 
père, et le discontinua, « pour ne pas s'exposer, 
dit Chaudon, à mortifier la vanité de certains 
nobles ou à trahir la vérité ». H est auteur des 
troisième et quatrième registres de Y Armoriai 
général de France ainsi que de V Histoire Généa- 
logique de la Maison de Çhastelard; Paris, 
1756, in-fol. J. V. 

Cbaudon et Delaûdtne , Dict. Univ., hist, cHt. et bi- 
blioçr. — Quérard, La France Littéraire, - Salnt-Pros- 
per, dans le Dict. de la Convere, 

* noziEft ( Ambreise-Louis-Marie d'), gé- 
néalogiste français, neveu du précédent, fils afné 
de Denys-Louis d'Hozier, président en la chambre 
des comptes de Rouen, né en 1764, mort vers 
1830. Peu favorable à la cause de la révolution, 
Ambroise d'Hozier s'était retiré & Chartres pour 
échapper aux dangers qui le menaçaient dans la 
capitale; il y fut inearcéré pendant la terreur, et 
jouit d'une grande tranquillité sous le Directoire. 
Impliqué en 1803 dans l'affaire de Georges Ca< 
doudal, Pichegru et Moreau, il fut arrêté de 
nouveau, et ne sortit de prison, après leur con- 
damnation, que pour être envoyé en exil. De re- 
tour en France à la première rentrée du roi en 
1814, il remplit, au lieu de sa charge de juge 



d'armes, qui ne fut point rétablie, celle de vérifi- 
cateur des armoiries de France près le conseil du 
sceau des titres. Les papiers des d'Hozier, qui 
avaient été déposés aux Archives, lui furent 
rendus, et la noblesse française, que la révolu- 
tion avait dépouillée de la plupart des titres né- 
cessaires pour régler des intérêts de famille, fut 
fort heureuse de retrouver dans son cabinet des 
titres originaux et un grand nombre de minutes 
et d'extraits de titres. Plus tard ces papiers ont 
été vend us, et on doit regretter leur absence aux ar- 
chives. On a d'Ambroised'Hozier : l'indicateur 
Nobiliaire, ou table alphabétique des noms des 
familles nobles susceptibles d'être enregistrées 
dans V Armoriai général de feu M. d'Hozier; 
Paris, 1818, in-8° : ce travail devaitavoir douze 
cahiers, le premier seul a paru ; — Armo- 
riai général de la France, registre 1 er et re- 
gistre II ; Paris, 1823, 2 vol. in-8° -, c'est une 
nouvelle édition du travail de Louis-Pierre 
d'Hozier auquel il avait contribué; on a publié 
sous son nom le registre VII, vol. XI, de Y Ar- 
moriai général d'Hozier, ou registres de la 
noblesse de France continués par M. le prési- 
dent d'Hozier, ancien juge d'armes de France 
et vérificateur des armoiries près le conseil 
du sceau et M. le comte Charles d'Hozier, son 
frère; Paris, 1847-1848, in-8°, avec des portraits 
etarmes. M. Stadler a pris part à' cette publica- 
tion. J.V. 

Rabbe, Vlellh de Botsjolin et Sainte-Preuve, Biog. 
univ. et portât, des Contemp. — Arhault, Jay, Jouy et 
Norvtns, Biogr. nouv. des Contemp. — Quérard, La 
France Littéraire. — Bourquelot, La Littérature franc, 
contemp. 

* hozier ( Abraham-Charles- Auguste d'), 
officier français, frère du précédent, né à Paris, 
en 1775, mort à Versailles, le 24 août 1846. 
Chevalier de Malte et page du roi, il ne se sé- 
para de Louis XVI que le 10 août 1792, et passa, 
comme son frère, dans les prisons des Chartres 
tout le temps de la terreur. Rendu à la liberté, 
il prit du service dans les troupes royales de 
l'ouest, ne voulut point concourir à la pa- 
cification, et reprit les armes en 1799, sous 
Limoëlan, dont il avait toute la confiance. La 
pacification de 1800 le trouva revêtu du grade 
de colonel d'état-major. Il se fixa à cette épo- 
que à Rennes, pour liquider les dettes de la divi- 
sion du chevalier de La Prévalaye,démissionnaire, 
et prit de nouveaux engagements avec le général 
Georges Cadoudal. Lors de l'explosion de la ma- 
chine infernale, le 3 nivôse an rx, un mandat 
d'arrêt fut lancé contre Charles d'Hozier par 
le ministre de la police. Il devait être arrêté 
à la sortie du spectacle, mais l'actrice Richard i, 
qui le savait , le fit évader par les derrières 
du théâtre. De retour à Paris, par ordre de 
son chef, d'Hozier rendit les plus grands ser- 
vices aux royalistes : se mettant à la tête d'un 
manège et d'un établissement de voitures pu- 
bliques , il brava ainsi toutes les recherches de 
la police. Rappelé en Angleterre par son gêné- 

11. 



327 



HOZIER — HROTSVITHA 



328 



rai, il y concerta tous les projets qui se ira- y 
maient alors contre le premier consul, et revint 
à la fin de 1802 pour préparer les logements et 
faire tous les approvisionnements d'armes et de 
poudre nécessaires à leur exécution. Ce fut lui 
qui, dans les premiers jours d'août 1803, con- 
duisit, habillé en cocher, la voiture dans laquelle 
Georges Gadoudal fut introduit de Saint- Leu à 
Paris. Ce fut encore lui qui, dans cette ville, servit 
d'intermédiaire entre ce général et ses officiers. 
Arrêté et mis en jugement dans les mois d'avril 
et de mai 1804, avec Georges Cadoudal, Pi- 
chegru, Moreau, etc., il fut condamné à mort; 
mais cette peine fut commuée en une détention 
perpétuelle* Du chAteaudeLourdesilpassaen 1805 
au château d'If, d'où il sortit le 14 avril 1814, 
après la restauration. U reparut à la cour avec 
le titre d'écuyer cavalcadour du comte d'Artois, 
et fut nommé colonel de cavalerie, chevalier 
de Saint-Louis, etc. Après la révolution de 
Juillet, il se retira à Versailles, où il vécut dans 
la retraite. J. V. 

Rabbe, Vtellta deBolsJoltn et Sainte- Preuve, Bioç. univ, 
et portât, des Contemp.— àrnauld, Jay, Jouy et Norvtns, 
Bioç. nouv. des Contemp. 

* hrafnkel, surnommé Freysgode ( prêtre 
de Frey, parce qu'il avait élevé un temple à ce 
dieu ), l'un des colonisateurs de l'Islande, vivait 
au dixième siècle de J.-C. Né en Norvège , il alla 
avec son père Halfred s'établir dans la partie 
orientale de l'Islande, et défricha la vallée d'A- 
delsbol. Ses nombreux vassaux le 'nommèrent 
juge du district. Il soutint un grand nombre de 
duels, et ne paya jamais d'amendes aux parents 
de ses victimes. Mais ayant tué un de ses ber- 
gers, il fut privé de sa charge et expulsé de ses 
domaines, après avoir vu brûler le temple de son 
dieu ; Hrafnkel colonisa une autre vallée -et re- 
couvra bientôt son ancienne puissance et son 
premier domaine, où il mourut paisiblement. 
La Saga ( histoire ) qui contient le récit de ces 
événements est l'une de celles qui jettent le plus 
de jour sur la colonisation de l'Islande , les 
mœurs de ses habitants sous le paganisme, et 
leurs institutions judiciaires et religieuses. Elle 
a été publiée sous le titre de Hrafnkel Freys- 
godes Saga, texte par K. Gislason , trad. par 
N.-L. Westergaard, Copenhague, 1848, in-8°, et 
forme le 1. 1 des Nordiste Oldskrifter. 

£. B. 

Landnamaboh.- Millier, Sagabibliothek, 1. 1, p. 108- 
108: 

hrotsvitha, religieuse et auteur drama- 
tique allemande , vivait probablement dans la 
dernière moitié du dixième siècle (1). On a peu 

(l) La date de sa naissance et celle de sa mort sont 
également incertaines; on croit seulement qu'elle poussa 
sa carrière fort au-delà de l'aa 968, puisque le fragment 
qui subsiste de son Panégyrique des Othons comprend 
les événements de cette année, et que postérieurement 
à ce poème elle en composa un autre relatif à la fonda- 
tion du monastère de Gandershelm. Hrotsvitha fut son 
nom, on plutôt-, li semble, son surnom. U serait difficile 
de donner d'une manière positive et sans objection 



de détailsi sur la vie de Hrotsvitha avant son 
entrée dans l'abbaye de Gandersheim. Mais ses 
écrits témoignent d'une certaine expérience du 
monde et des passions. Quant à sa carrière mo- 
nastique, elle en fait connaître elle-même quel- 
ques particularités. Retirée au monastère de 
Gandersheim, peu de temps après Gerberge, 
avant 959, vers l'âge d'environ vingt-trois ans, 
elle y perfectionna son éducation. Ainsi que cela 
se pratiquait dans tontes les maisons de l'ordre 
de Saint-Benoit, elle passait de l'étude des 
Livres Saints à celle des oeuvres classiques. A 
ces goûts studieux elle joignait des qualités 
rares, entre autres la modestie. Dans la pré- 
face en prose de tes légendes , composée vers 
l'an 960, elle s'excuse sur la solitude du cloître 
et son âge, encore éloigné de la maturité , des 
fautes de prosodie et de grammaire qui ont pu 
lui échapper. « En écrivant ses vers, elle n'a eu, 
dit-elle, d'autre but, que d'empêcher le' faible 
génie que lui a départi le ciel de croupir dans 
son sein et de se rouiller par la négligence; elle 
a voulu le forcer, sous le marteau de sa dévo- 
tion, à rendre un faible son à la louange de 
Dieu. » Dans V Histoire de la Nativité de la 
Sainte Vierge, elle supplie dès le début la 
mère de Dieu d'opérer en sa faveur le miracle 
qui délia la langue de l'anesse de Balaam. Elle 
eut pour institutrice une religieuse du nom de 
Rikkarde et la jeune abbesse Gerberge. Elle 
les aima, et surpassa l'une et l'autre. On a pré- 
tendu, sans preuve bien concluante, qu'à son ta- 
lent comme écrivain Hrotsvitha joignait celui de 
compositeur de musique. L'auteur de cette asser- 
tion (1) se sera laissé induire en erreur par ces 
mots de modulari, comporter e, d'un emploi fré- 
quent dans les écrits de Hotsvitha. Quant à la 
personne de la célèbre abbesse de Gandersheim, on 
ne la connaît guère que par la belle gravure sur 
bois qui se trouve à la tête de la première édition 
des œuvres de Hrotsvitha, donnée par Conrad 
Celtes. Elle représente l'illustre femme dans 
l'habit de son ordre, offrant à genoux ses poésies 
au vieil empereur Othon I er . Si la ressemblance 
n'est peut-être pas exacte, elle est certainement 
plus probable que celle du portrait fourni par 
Fréd. Seidel , l'auteur des Icônes et Elogia Vi~ 
rorum aiiquot prxstantium , celui-là même 



possible, le sens de ce mot. Stgntfie-t-U, comme le pense 
Jacob Grlmm et après lui M. Magnin, «'appuyant l'un et 
l'autre sur un passage de Hrotsvitha elle-même, etgnifle- 
t-U la voix forte, la voix retentissante (clamor vali- 
dtu)? « Ego clamor validas Gandesheimensis », dit quelque 
part la docte abbesse. Ou bien fant-il traduire , avec 
Gottsched, Hrotsvitha par Rose blanche? Cette dernière 
Interprétation n'est pas dénuée de vraisemblance. On 
sens absolument Improbable est celui fourni par Seidel, 
qui prétend que le nom de Hrotsvitha cachait, moyen- 
nant la suppression de l'H Initiale, celui de Helena a 
Rossow, qui ferait remonter l'origine de la savante reli- 
gieuse à une ancienne famille saxonne mentionnée dans 
b chronique d'Knzelt. 

(l) Gust. SehUUng, Univ. LexQc. der Tonkttn$t'.« On 
a encore d'elle (de Hrotsvitha), dlt-ll', le martyre d'une 
sainte mis en vers et en î 



329 



HROTSVITHA 



330 



qui propose de lire Helena a Rossow pour 
Hrotsvitha. Quelques auteurs, Schurzfleisch, eu 
son édition des œuvres de Hrotswitha, 1717, 
hv4°, et Wieiand, dans le Neue deûtsche Merkur 
(avril 1803), ont reproduit cette gravure, si peu 
authentique, de Seidel. 

Des détails biographiques qui précèdent il 
convient de passer à l'examen des œuvres mê- 
mes de Hrosvitha. Écrites en latin, elles ont eu 
d'abord deux éditions , la première imprimée à 
Nuremberg, en 1 501 , en un volume petit in-folio, 
par les soins de Conrad Celtes ; la seconde don- 
née à Wittemberg en 1717 (1) par Schurzflefech, 
et qui est la reproduction de la-précédente, avec 
des éclaircissements. L'édition de Celtes est la 
transcription d'un manuscrit de la fin du dixième 
ou du commencement du onzième siècle, décou- 
vert dans un monastère de l'ordre de Saint-Be- 
noit. Du couvent de Saint-Emmeran de Ratis- 
bonne ce manuscrit est passé dans la Bibliothè- 
que royale de Munich , où il se trouve encore. H 
est divisé en trois livres ou parties. Le premier 
contient huit poèmes ou légendes; le second, 
des comédies en prose rimée. Le tout est suivi 
du poème ou fragment de poème intitulé : Pa- 
négyrique des Othons. Telle est la division 
première et originale, renversée ensuite par 
Celtes. Dans le premier livre du manuscrit se 
trouvent les huit récits suivants : L'Histoire 
de la Nativité de V immaculée Vierge Marie 
mère de JHeu, tirée du Protévangile de saint 
Jacques , en 859 vers hexamètres léonins ; — 
L'Histoire de V Ascension de Notre- Seigneur, 
en 150 hexamètres, également léonins, et sur un 
récit traduit de grec en latin par Jean L'Évéque; 
— La Passion de saint Gandolfe, martyr, en 
564 vers élégiaques. Ce saint Gandolfe fut en 
effet martyr d'une méchante épouse, appelée 
Ganea, qui, après l'avoir trompé, le fit assassiner 
à Varennes en Bourgogne. Il y eut des miracles 
sur la tombe de Gandolfe; et, ce qui peint sa 
femme, c'est la réponse qu'elle fit quand on les 
lui raconta. Elle s'en souciait, disait-elle (ici 
nous n'oserions traduire) « non secus ut ventris 
crepitum ». Cette réponse méritait un châti- 
ment : il fut analogue à sa faute. Nous ne pou- 
vons encore citer que le texte : « In pœnae per- 
fidiam ( in parnam perfidix? ) venter illi 
quoad viveret perpetuo crepabat. » Tel est le 
sujet quelque peu scabreux sur lequel porte ce 
troisième récit de Hrotsvitha ; — Le Martyre 
de saint Pelage à Cordoue, en 401 hexamètres, 
d'après une relation orale que l'auteur tenait 
d'un Espagnol : c'est ce qui explique certains 
hispani8mes de cette pièce, tels que rostrum pour 
faciès ; — La Chute et la Conversion de 
Théophile, vidante ou archidiacre d'Adona en 
Cilicie et non en Sicile , comme on le trouve 
à tort dans les éditions de Celtes et de Schurz- 
fleîsch. Le sujet de ce récit est l'histoire as- 
ti) Et non 1707, comme le porte le titre. 



sez commune d'un clerc qui, vers 538, se voua 
pa/ dépit ou par ambition au culte du diable; 
—L'Histoire de la Conversion d'un jeune Es- 
clave, exorcisé par saint Basile. Cette fois 
c'est par amour que le héros de ce récit, qui 
contient 249 vers, se voue à Satan; — L'His- 
toire de la Passion de saint Denis* Ce poème, 
en 266 vers hexamètres, est calqué sur la lé- 
gende placée par les Bollandistes sous la date 
du 9 octobre : il y a de la poésie véritable et de 
la grandeur dans la relation que donne Hrots- 
vitha du voyage du saint décapité; — L'His- 
toire de la Passion de sainte Agnès, vierge 
et martyre. Cette histoire est empruntée à 
saint Arabroise. Ne pouvant se faire aimer d'A- 
gnès, qui, devenue chrétienne, a fait vœu de 
chasteté, le fils du préfet Sempronius tombe dans 
une mélancolie qui inspire des craintes pour ses 
jours. Le père s'irrite et menace, mais en vain, 
la jeune vierge. En même temps elle refuse 
d'adorer, dans le temple de Testa, le feu sacré. 
Conduite alors dans un lieu de prostitution et 
dépouillée de ses vêtements, elle voit croître 
miraculeusement ses cheveux, qui couvrent sa 
nudité comme d'un voile. Le fils de Sempro- 
nius la suit et tombe mort au moment où il 
porte la main sur elle. Accusée de magie par le 
préfet, Agnès obtient du ciel la résurrection du 
jeune insensé, qui se fait chrétien ainsi que son 
père. Poursuivie néanmoins par les prêtres 
païens , Agnès meutf de la main du bourreau et 
prend place dans le chœur céleste des vierges 
martyres. 

Le second livre contient six comédies , com- 
posées, selon l'expression même de l'auteur, à 
l'imitation de Térenee. Elles sont intitulées, Gai' 
licanus; Dulcilius; Callimaque; Abraham; 
Paphnuce; Sapience, ou foi, espérance et 
charité. Célébrer le triomphe de la chasteté, tel 
est, en général, le but que se propose la nonne 
de Gander^heim et pour y atteindre elle ne 
craint pas d'imaginer des drames dont les moyens 
sont bien souvent étranges, surtout sous une telle 
plume. Pour en citer deux exemples, les saints 
ermites Abraham et Paphnuce, ne craignent pas 
pour retirer, le premier sa nièce, l'autre la cour* 
tisane Thaïs, des lieux de perdition où elles 
sont allées se corrompre, d'y pénétrer sous un dé- 
guisement. Quant à la trame des œuvres théâ- 
trales de Hrotsvitha , elle est assez mince et 
souvent invraisemblable. C'est ainsi que d'une 
phrase à une autre un miracle s'accomplit. Et ce 
miracle, on le devine, c'est presque toujours, la 
conversion de la jeune pécheresse. 

La première de ces pièces, Gallicanus, est 
tirée de deux légendes, et l'action n'en dure 
pas moins de vingt-cinq ans. « C'est une pièce 
libre, dit M. Yillemain, écrite dans une prose 
assez correcte, et où il y a un sentiment vrai de 
l'histoire. » 

Duleitius, qui vient ensuite, est la plus gaie, 
la plus comique du répertoire de Hrotsvitha. 



331 



HROTSVITHA — HUALCOPO-DUCHICELA 



333 



« Elle prouve jusqu'à L'évidence, dit M. Magnin, 
que les pièces de Hrotsvitha n'étaient pas seu- 
lement destinées à être lues, comme l'ont avancé 
quelques critiques , notamment M. Price, mais 
qu'elles ont dû être représentées. En effet , tout 
le mérite comique de ce petit drame consiste en 
une suite de jeux de théâtre qui s'adressent bien 
plus aux yeux qu'à l'esprit. » Voici par exemple 
un trait qui n'a rien que de plaisant. Dnlcitius, 
amoureux des trois vierges chrétiennes, héroïnes 
de la pièce, et que l'on veut forcer à adorer les 
dieux, s'introduit dans une cuisine voisine de 
l'endroit où elles sont retenues : ses sens s'éga- 
rent, et, croyant adresser ses caresses aux jeunes 
filles qu'il convoite, il se jette sur la vaisselle 
qui garnit l'office. « Tantôt, dit une des vierges 
(Irène) qui a jeté ses regards à travers les fentes 
de la porte, tantôt il presse tendrement des 
marmites sur son sein, tantôt il embrasse des 
chaudrons et des poêles à frire et leur donne 
d'amoureux baisers... Déjà, ajoute-t-elle, son vi- 
sage, ses mains, ses vêtements, sont tellement 
salis et noircis, qu'il ressemble tout à fait à un 
Éthiopien. » 

Callimaque, la troisième pièce du théâtre de 
Hrotsvitha , est peut-être ce qu'elle a écrit de 
plus dramatique. On n'y rencontre d'ailleurs 
point les situations, parfois étranges , qui sur- 
prennent dans les autres pièces. Il s'agit ici de 
la passion effrénée d'un païen pour; une jeune 
femme chrétienne, qui, craignant les surprises de 
son propre cœur, demande à Dieu de la faire 
mourir. Sa prière est exaucée, et Callimaque, 
qui l'a si fort aimée, ose, comme Romeo (1), 
violer sa tombe à peine fermée. Nous avons déjà 
indiqué les sujets des quatrième et cinquième 
pièces du recueil dramatique de la nonne de 
Gandersheim. Là sixième et dernière , intitulée 
Sapience, ou foi, espérance et charité, est 
encore empruntée aux légendes. L'action a moins 
de, mouvement que dans les autres drames : 
ce sont trois vierges qui refusent d'obéir à 
l'ordre que leur intime l'empereur Adrien d'a- 
dorer le3 idoles. Elles résistent aux tortures, 
puis elles périssent par le fer. Après avoir ras- 
semblé et enterré leurs restes à trois milles de 
Rome, la mère des jeunes martyres élève son 
âme vers le ciel et exhale sa vie dans une aspi- 
ration suprême. 

La dernière partie du manuscrit de Munich 
contient un fragment poétique, de 837 vers, inti- 
tulé: Panegyris,sivehistoria, Oddonum.Enûn, 
on a imprimé, d'après une copie plus récente, une 
chronique, en 837 hexamètres, ayant pour titre : 
Carmen de Constructione, sive de primordiis, 
Cœnobii Gandesheimensis. On a attribué à tort 
à Hrotsvitha un ouvrage intitulé : De la Chasteté 
des Nonnes, Cette erreur vient d'une phrase j 
mal interprétée due à Henri Bodo. On a pris ! 

(i) Ce rapprochement est fait par M. Magnin, à qui nous j 
devons une si judicieuse étude du théâtre et de la vie de j 
Hrotsvitha. 



pour un titre ce qui était de la part flë l'auteur 
une appréciation des œuvres mêmes de l'abbesse 
de Gandersheim. 

M. Magnin, qui a donné, avec le texte en re- 
gard, une traduction du théâtre de Hrotsvitha, 
après avoir raconté comment il avait été amené 
à entreprendre cette œuvre, fait remarquer qu'à 
la suite des comédies on trouve dans le ma* 
nuscrlt de l'auteur deux fragments, l'un de tretaé 
Vers élégiaques, l'autre de trente-cinq vers hexâ* 
mètres., tl a paru à Nuremberg (1857), par les 
soins de M. Barrak, une édition complète des 
Œuvres de Èrolsvitha. Enfin , on vient de pu- 
blier (1858) Die Nonne ton Gandtrsheini (L& 
Nonne de Gandersheim ), par Dauber. 

V. RoSËltWALD. 

Henri Bodo, Sf/niàgm. dé Écclet. Gandesh., ap. Letbn 
(Script. Ser. Brungvie. ). — jéèta Sanct. — Seidei, lames 
et Eiog. Firor. aliguot prmskmt. ; 1670, in-fol. — Sax, 
Onomast. JAter. — ba Gange, Index Script, med. et inf. 
Latin. — vilietoatn , Tabl. de ta Lltt. dii moyen égë. ~ 
Magnin, Théâtre de Hrotsvttha. — Fabrtcius» BilH. med. 
♦i Inf. jEUxtis. 

hua (Eustache- Antoine), magistrat et légis- 
lateur français, né en janvier 1759, à Mantes 
( Ile-de-France ), mort le 29 mars i836. En 
1789 H était avocat au Parlement de Paris. Il 
fut nommé en 1791 député à l'Assemblée légis- 
lative, où il siégea parmi les modérés. Lors de la 
dissolution de l'Assemblée législative, il fut obligé, 
pour se soustraire aux poursuites dont il était 
menacé, de chercher un asile chez un de ses 
beaux-frères. En 1815 il fut nommé avocat gé- 
néral près la cour royale de Paris. Il eut à por- 
ter la parole dans un grand nombre de procès 
politiques. Dans l'affaire de Lavalette, il con- 
clut à la mort, et demanda la condamnation des 
trois Anglais qui avaient favorisé l'évasion de 
cette victime de la justice des partis. II porta 
toujours aussi des conclusions sévères dans les 
procès relatifs à la presse, et entrait ainsi dans 
les vues du procureur général Bellart auquel il 
avait dû son entrée au parquet. Son dévouement 
le fit nommer, en 1 81 8, avocat général à la cour de 
cassation. En 1823 il devint conseiller à la même 
cour. Il avait, en outre , été nommé inspecteur 
général des écoles de droit, fonctions qui lui fu- 
rent retirées après la révolution de 1830. Hua 
est auteur d'un Projet de Réjbrmation de la Lé~ 
§i$lation Hypothécaire /Paris, 1842,in-8°, ainsi 
que de plusieurs articles dans le Nouveau Reper* 
toire de législation de Favard de Langlade. On 
lui a attribué un Commentaire sur la Loi du 
1 1 brumaire an Vil et des Conférences sur le 
Code Civil : ces deux ouvrages sont de Hua 
Bellebat, son parent et beau-frère. Il a laissé de 
nombreux manuscrits sur des matières de lé- 
gislation et de politique, et des Mémoires de sa 
vie. Guyot DE FÈRE. 

Rab'be, Biog. des Cont. - Documents particuliers. 
Hualcopo-ducbicela, quatorzième sou- 
verain ou scyri du royaume de Quito, né dans 
les premières années du quinzième siècle, mort 
vers 1463. Le royaume de Quito, soumis vers la 



S$3 



HUALCOPO-DUCHICELA — HUÀRTE 



334 



tin da dixième siècle par la race des Oarans et 
reconnaissant pour son souverain législateur le 
roi Quitu, offrait une organisation sociale dif- 
férente de «elle que l'on observait à Cuve*. 
Vainqueur* d'an peuple déjà eiviteé, les Oarans 
scyris professaient une sorte de sabéismei qui 
prédomina bientôt dan» lertr empire.fo fameux 
temple dû Soleil qui s'élevait jadis sur 1* hau- 
teur du PanecMlet et dont plusieurs écrivains 
ont peut-être trop protnptemënt nié l'existence, 
recevait le scvri* et c'était là qu'on lui confé- 
rait sotannetienient les insignes dd pouvoir, 
lorsqu'il avait été accepté par tes chefs. Antacai 
Duchiceia, après un règne de soixante ans; avait 
laissé le pouvoir à son ftlt Gualieaj mâf»aelui>«i, 
disent les anciennes chroniques* montra des in- 
clinations si perverse», que les chefs réunis en 
assemblée générale lui substituèrent son jeune 
frèr«> Hualcopo-Duchtcela, qui monta sur le 
trône en 1430. C'était un prince ami de la paix, 
auquel on attribue IWeétteh de grands monu- 
ments j mais le dburième inca du Pérou, Topa 
Yupangui, profita de son indolence pour l'atta- 
quer, et la perte de «on royaume eut été plue 
prompte, si son second frère, Epidaohhna n'eût 
pas pris courageusement le commandement de 
son armée. Pendant les premiers temps de l'in- 
vasion, Hnaleopo se retira dan» Liribamba, ca- 
pitale du Poruhua, et il semble qu'il ait été do- 
miné exclusivement alors par l'amour conjugal, 
car il fit construire de magnifiques bâtiments 
dans un b'eu reculé, pour nue son épouse pût 
y faire ses couches à l'abri de toute inquiétude. 
Il marcha ensuite à l'ennemi; mais l'intrépide 
Epielachima ayant été tué dans une bataille qu'il 
regardait lui-même comme décisive, il ne resta . 
au malheureux scyri d'autre ressource que de ' 
se retirer de nouveau dans Liribamba. Il était 
là dans une position" inexpugnable, et il s'y main- 
tint durant quelques années, grâce au courage 
et à l'habileté de son neveu Oalfcuchima, qui se 
montrai dit-on, dans cette lutte extrême supé- 
rieur encore à son pore. Quoi qu'il en soit, 
l'empire des scyris était démembré, finca vic- 
torieux s'était retiré triomphant à Cusco , lors- 
que les descendants de Qutiu sentirent que In 
domination péruvienne allait l'emporter; Huat- 
copo mourut bientôt, accablé de chagrin, et lais- 
sant l'empire à Cacha, son fils aîné, qui* maigre 
ses talent* et son courage, vit finir en lui la dy- 
nastie des scyris. Ferdinand Dams. 

U. Juan de Velaaco, ttUtôrfù dêl RHnû de Çtittà m M 
jémeriea méridional, eto ; Quito, ms, s yol. lot*. — 
Collection Ternaux Comparu, Histoire du Royqume de 
Quito, trad. abrégée de l'ouvrage précédent. — Sàlazza, 
Histoire manuscrite d* R09aume.de Quito. 

mjabtb n avarro {Juan de Dtos), médecin 
et philosophe espagnol, né à Saint-Jean-Pied«de- 
Port, dans la basse Navarre, entre les années 
1530 et 1535, mort à la fin do seizième siècle. 
Les biographes n'ont fait que répéter sur ce pen- 
seur ce qu'ont écrit Bayle et Baillet , et c'est à 
tort qu'on le fait naître en 1520. Il fut envoyé fort 



jeune à l'université de Hoésea , et ce fut la qu'il 
fit des études tout à la fois profondes et variées. 
Après avoir terminé ses humanités , il se fit re- 
cevoir médecin, puis voyagea dans toute l'Es- 
pagne. Satisfait, en vrai philosophe, de cette simple 
exploration, il se retira dans la ville universi- 
taire ou il avait pris ses degré», et il exerça la 
médecine, s'il ne se contenta même du titre de 
docteur sans voir des malades. Ces renseigne- 
ments sont bien restreinte, ils contiennent ce- 
pendant tbut ce que m critique moderne a pu 
découvrir sur l'un des penseurs les plus origi- 
naux du seizième siècle. Bordeu ajouté qu'au 
dix-huitième Siècle la mémoire de Huarte aussi 
bien qae sa famille vivaient encore dans sa pa- 
trie ; mais on peut supposer que le célèbre mé- 
decin use Ici d'une de ces phrasés banales 
comme en renferment la plupart des éloges, car 
Feijoo , qui était si bien fait, par l'originalité de 
sa pensée, pour apprécier Haarte , se feùhtenta de 
lé lire dans une traduction latine , h'ayant fra 
même lé lire eh espagnol. Un savant afîèrhand , 
qui l'a traduit , et qui avait voyagé dans la Pé- 
ninsule - 9 avoue qflll he put se procurer autan 
renseignement sut lui-, et qu'à réfute en II gou- 
vernait l'Espagne sa trlémoiré y ëtait compfete- 
mént ignorée. Le livre ne l'est pas, et les derniers 
travaux philosophiques du siècle mi dut donné 
une juste célébrité. Huarte « établit sur les bases 
de la physiologie l'influencé du physique sur le 
moral ». 

Le traité que nous signalons ici est intitulé, avec 
une simplicité bien concise et bien rare ponrl'é- 
rJbtpie : Éxàtiien de Ingénies , para las scien- 
citts donde de tnuestra la différencia de 
habilidades que hay en los hombres, y el ge- 
nerode letrai qbecadatano responde en parti- 
cular qfllcina plantiniatia ; 1593, pet. in-8°; 
Ëaerça 1675; et Pampelune, 1578. Cet ouvrage 
rat réimprimé en diverses villes de la Péninsule, 
en 1580,1594, 1607,11640, 16&2; traduit en latin, 
par Théodore Arctogonius , Strasbourg, 1612, et 
par Joachim Csssar, caché sous le nom à'Ms- 
ehàclhs Major, luio, 1B21, 1622, 1661, 1663. 
Camille Camilli le fit passer en italien , 1582, 
1586, 1590; Chappuys en donna une version 
française, Lyon, 1580, et Paris, 158&; Vion 
Dalibray en fit paraître une autre, Paris, 1645, 
1658, 1661 et 1675; Savinier d'Alquié s'exerça 
aussi de la même manière, Amsterdam, 1672, 
Leasing mit au jour en 1752 une traduction alle- 
mande, qui reparut en 1785, avec des additions. 
V Examen fut de même, en 1594, en 1616, en 
1698, mis à la portée des lecteurs anglais. Toutes 
ces réimpressions, toutes ces traductions attes- 
tent que c'était un livre d'une portée véritable. 
Parmi des théories fort hasardées , telles qu'un 
système sur la génération, qui peut servir de base 
aux systèmes absurdes qui enseignent l'art de 
créer à volonté des hommes de génie ou de pro- 
créer tel ou tel sexe, on trouve chez Huarte des 
vues hardies et qui devancent l'époque où eUes 



335 



HUARTE — HUASCAR 



336 



furent émises, 8e rapprochant parfois du système 
phrénologiqae du docteur Gall. On reconnaît 
qu'elles sont dues à un esprit ferme et curieux, à 
un observateur attentif, qui a de l'originalité 
dans les pensées et dans l'expression. La méta- 
physique et la physiologie de Y Examen ne sau- 
raient plu&étre admises aujourd'hui ; mais l'œuvre 
n'en reste pas moins remarquable , et elle se ter- 
mine par d'excellents préceptes hygiéniques pour 
l'éducation physique et intellectuelle des enfants. 
Huarte avait une érudition étendue, mais souvent 
il manque de critique, reproche auquel n'échappa 
d'ailleurs aucun de ses contemporains. Il dédia 
son livre à Philippe II, et, chose remarquable, la 
redoutable inquisition espagnole, si prompte à 
s'alarmer, ne parut rien y trouver à redire, bien 
qu'à coup sûr elle eût pu se formaliser de plus 
d'un passage. Les théories du docteur navarrais 
trouvèrent des défenseurs et des antagonistes ; 
un médecin français, Jourdain Guibelet, établi à 
Évreux, lui opposa, en 1631, V Examen de V Exa- 
men des Esprits, volume complètement oublié 
aujourd'hui, mais dans lequel un éclairé critique 
a signalé des vues ingénieuses et des faits cu- 
rieux présentés avec verve, avec esprit, et d'une 
façon attachante. L'Examen a trouvé dans ces 
derniers temps un ingénieux interprète et un ap- 
préciateur très-impartial dans M. J. M. Guardia, 
qui a publié un travail étendu sous le titre d'Es- 
sai sur l'ouvrage de /. Huarte : Examen 
des Aptitudes diverses pour les Sciences; Pa- 
ris, 1855, in-8°. La dernière édition espagnole, 
publiée à Madrid en 1846, par D. Ildefonso Mar- 
tinez y Fernandez, pèche fort du côté de la cor* 
rection, mais on y donne une bibliographie éten- 
due de cet écrivain. 

Ferdinand Denis et G. B. 

Antonio, Bibliotheca Hispana nova, t. I, p. 5*8. — 
Struve, Bibliotheca Philosophica, t. II, p. 98. — Ticknor, 
History of Spanish Littérature, t. III, p. 18t. — Re~ 
vista de Madrid, 1889. — Du Rourc, Analecta Biblion, 
t II, p. W-57. — Réveillé* Parlse, Gazette Médicale. 1«* jan- 
vier 1841, et Recueil des Travaux de Ut Société du dépar- 
tement de F Eure; 1848, p. 188. — Bayle, Dictionnaire 
Critique. — Bordeu, Recherches sur l'Hist de la Méde- 
cine, — Ad. Baillet, Jugements des Savants. — Moréri, 
Dict. Edlt. 

htjascar (Inti Cusi Huallpa), incaou souve- 
verain péruvien , né à Cuzco , mort en 152 (1). 
Il naquit à Quito , et fut le fils atné de Huayna- 
Capac. Le nom sous lequel il est connu dans 
l'histoire, nom si fréquemment altéré, signifie 
la chaîne d'or. Selon la tradition , dans la joie 
que l'Inca ressentit de la naissance d'un fils, 
il ordonna qu'on fabriquât cette chaîne com- 
mémorative, dont chaque chaînon était gros 
comme le poignet d'un homme, et qui n'avait pas 
moins de 700 pieds de long. Zarate nous apprend 
qu'elle tenait deux cotés de la grande place de 

' (1) Ovtedo lui donne le nom de Gaascara. Voy. la nou- 
velle édit. de Wistoria Natural y Moral de las Indias, 
publiée en 1855, sous les auspices de l'Académie d'Histoire 
par M. Amador de Los Ries, p. 168. Oo donne également à 
ce prinoe le nom de Guaynacalva et de Cmco. Anello 
OMv* l'appelle Tupa Intirvsi Palpa ou Vascar. ; 



Cuzco et que, plus tard, on la jeta dans la lagune 
de Urcos. Selon Ànetto Oliva, elle avait été fabri- 
quée avec l'énorme quantité d'or que les chefs 
avaient apportée en présent an successeur du 
trône , lors de la solennité qui lui promettait 
l'empire. 

Dès que Huayna-Capac rat mort , Huascar fut 
investi du pouvoir suprême , et alla habiter te 
palais des incas a Cusco, avec sa mère l'im- 
périeuse Rava-ŒIlo. En vertu des dernières dis- 
positions de l'empereur, Atahualpa hérita du 
royaume des scyris, et établit sa résidence royale 
à Quito. Il est faux que les rivalités qui ensan- 
glantèrent ces deux règnes, à leur début, aient 
commencé lors du partage de l'empire. Du- 
rant plus de quatre ans, .les deux frères vé- 
curent en bonne intelligence. Ce fut à la mort du 
chef qui gouvernait la vaste province de Caâar 
que les dissentiments éclatèrent. Vers le milieu 
de 1529, le fils de Chamba, chef puissant sous 
Huayna-Capac, s'étant rendu pour ainsi dire 
feudâtaire du souverain de Cusco, Atahualpa, 
fort de son droit, réclama, et une guerre vio- 
lente éclata. Excité par sa mère, l'ambitieuse 
Rava-ŒHlo , car par lui-même il était dépourvu 
de cette énergie qui conduit aux conquêtes ou qui 
maintient les empires, Huascar leva une armée 
puissante, s'empara de Tumi-Bamba, dans le 
pays de Canar. De son côté, Atahualpa leva des 
troupes , se rendit dans la contrée qu'on lui dis- 
putait, et dans une première campagne fut vaincu 
par Tannée de Huascar. 

Fait prisonnier et gardé avec négligence par 
les guerriers du souverain de Cusco, l'héritier 
des scyris parvint à s'échapper de sa prison et 
rentra dans Quito (1). Il prit alors des mesures 
pour rentrer en possession de la province de 
Canar, et marcha en 1530 contre Tumi-Bamba, 
à la tète d'une armée puissante, dont un général 
célèbre dans les fastes péruviens , Ruminahui , 
commandait l'arrière -garde. Dès lors l'étoile 
de; Huascar commença à pâlir; non-seulement 
il fut victime de l'impéritie de ses généraux , 
mais ayant perdu Rava-ŒIlo, dont la force 
d'âme soutenait sa faiblesse, il ne sut pas com- 
prendre que son frère l'emportait sur lui en 
puissance réelle et en habileté. Enfin il eut 
l'imprudence de refuser tout accommodement» 
et, s'étant mis à la tête d'une armée de 
150,000 hommes, il marcha centre le souverain 
de Quito ; son impéritie ou plutôt son amour 
pour un puéril divertissement fut cause de sa 
perte. S'étant écarté du gros de son armée avec 
800 hommes seulement pour prendre le plaisir 
de la chasse, il tomba au pouvoir de son frère, et 
en 1532 ses troupes, malgré leur nombre, furent 
taillées en pièces. 

Velasco affirme que Huascar inea ne fut pas 
traité indignement, comme plusieurs historiens 

(li II fit accroire alors au peuple qu'un dieu l'avait 
changé en serpent et que sous cette forme 11 avait pu 
échapper à la captivité. 



337 



HUASCAR — HUATNA-CAPAC 



333 



le prétendent, et il dit même qu'il fut environné 
de respect; on ne l'en enferma pas moins dans 
une forteresse de la province de Xauxa, et 
bientôt il pot avoir la triste certitude qu'il avait 
cessé de régner, que son frère était proclamé 
empereur du Pérou à Caxamarca. 

Atahualpa n'accepta pas d'abord la souverai- 
neté h laquelle les peuples l'appelaient; il fit 
même des propositions d'arrangement à son frère, 
et jamais, dit l'historien qui parait le mieux in- 
formé, Huascar ne voulut faire une réponse caté- 
gorique qui lui eut laissé une partie de l'empire. H 
attendit en vain que son parti, encore puissant, le 
délivrât de sacaptivité ; il mourut neuf mois après 
sa défaite dans la forteresse de Xauxa ; et il est 
probable , bien que Velasco n'en dise rien , que 
ce fut de mort violente. Tous les historiens sont 
àj peu près d'accord pour nous le représenter 
comme un prince faible et d'un esprit médiocre. 
Il est hors de doute que 'les dissentiments qui 
éclatèrent entre son frère et lui aplanirent les 
difficultés de la conquête et contribuèrent an 
succès prodigieux des armes de Pizarre. 
Ferdinand Denis. 

Fr. Marco* de NI», Conquista de la Provinci* de 
Quito, manusc qui a terri de base a VHistoria de Go- 
nutra. — Xerè», Histoire de la Conquête. - Cavello Bal- 
boa, Histoire du Pérou; dans la collection Ternaux Cou- 
pant. — Velasco, HUtoria det Reino de Quito. — 
rescott, HUfaru o/Peru. 

huayha-capac, surnommé fe Conquérant, 
empereur du Pérou, né dans la seconde moitié 
du quinzième siècle, mort ao mois de décembre 
1525. Quoiqu'il fût le fils aîné de Topa-Inca, 
qui l'avait eu de sa sœur, ce prince ne devait 
pas succéder à l'empire. Capac-Guari, fils d'une 
simple concubine, aurait été désigné par le 
vieux souverain, mort en 1493, pour ceindre le 
bandeau impérial. Le début du règne de Huayna- 
Capac fut ensanglanté par une épouvantable tra- 
gédie. Il était trop jeune pour réclamer ses droits ; 
celle qui lui avait donné le jour ne se contenta 
pas d'aller invoquer devant les grands les lois 
de l'empire, elle accusa ouvertement Mama- 
Chiqui-Oello, mère de l'héritier présomptif, d'a- 
voir empoisonné Topa-Inca. Celle-ci fut mise à 
mort, son fils s'en alla en exil, et Huayna-Capac 
fut couronné à Cosco. 

Le jeune souverain sortait à peine de l'enfance; 
lorsqu'on lui donna pour le diriger un cousin de 
son père; mais Apoc-Gualpaya prétendit bientôt 
user du pouvoir temporaire que les grands lui 
avaient confié pour monter sur le trône. Sa tra- 
hison fut découverte : on l'enferma; son procès 
lni fut fait régulièrement, et il périt avec les 
hommes de sa race. Selon Anello Oliva, qui 
parait si bien informé et que n'a pu consulter 
l'habile Prescott , Huayna-Capac avait seize ans 
lorsqu'il commença à gouverner; on lui adjoignit 
pour conseiller Auqui-Topa-Inca , et quelques 
mois après il épousa sa sœur Mama-Cusirimay. 
Ce fut d'une sœur plus belle et plus jeune 
qu'il eut Huascar-Inea. Lors de son mariage 



politique, des fêtes magnifiques eurent lieu, 
auxquelles succédèrent des solennités funéraires 
d'une pompe inexprimable; elles étaient desti- 
nées à célébrer la mémoire de Topa-Yupanqui 
et de Mama-Oello : cette espèce d'apothéose eut 
lieu dans tout l'empire, c'est-à-dire sur une éten- 
due de mille lieues, aux frais du trésor public 
de Cusco. Huayna-Capac alla pleurer solennel- 
lement à Caxamarca son père et sa mère, puis 
il revint dans sa capitale. 

Alors commencèrent une série de conquêtes 
et de travaux qui font de?ce règne l'époque la 
plus brillante de l'histoire du Pérou. Après avoir 
détrôné, en 1487, le dernier scyri du royaume 
de Quito, il se prit tout aussitôt à couvrir 
l'empire d'édifices utiles, qui malheureuse- 
ment n'ont pu résister aux efforts destructeurs 
des conquérants espagnols. Il ouvrit des routes 
gigantesques et donna une impulsion aux arts dont 
plusieurs siècles n'ont pu encore effacer les ves- 
tiges. Le propre frère de l'inca, Sinchi-Ruca, 
se présente ici comme l'ordonnateur de ces 
constructions architectoniques, qui frappèrent 
les étrangers d'étonnement lors de la conquête de 
Cusco (1). Avant de commencer ses conquêtes, 
Huayna-Capac voulut visiter son empire et même 
le royaume de Quito, qui conservait une sorte 
d'indépendance ; à Quito même il s'éprit d'une 
passion violente pour la belle Vay ara, la fille du 
scyri qui commandait naguère à ces régions, 
dont la civilisation parait avoir eu un caractère 
bien différent de celle qui se développait à 
Cusco. Il en eut un fils; mais cette princesse vé- 
cut peu de temps, et le jeune Atahualpa la rem- 
plaça dans le cœur du jeune souverain. Lorsque 
Huayna-Capac songea à porter ses armes jusqu'au 
Chili, il laissa dans Cuzco Huascar-Inca (2) 
.pour lui succéder, et il pourvut à tous les évé- 
nements que son absence aurait pu amener. 

Huayna-Capac, empereur et pontife à la fois, 

(i) Cavello Balboa , dont l'histoire est fort détaillée, 
prétend, an contraire, que ce fut le Jeune Huascar dont 
l'inca ae fit accompagner durant aea pérégrination* 
guerrière* : la critique la plus exercée échoue, il faut 
bien le dire , pour découvrir la vérité de* fait* devant 
tant de documenta contradictoires. 

(i) Comme les peuples de l*Anahuac, les Péruviens, di- 
visés en deux races bien distinctes, faisaient reposer les 
.principes de leur art sur une civilisation dont tt ne res- 
tait plus que des traditions et des vestiges à l'époque 
de.la conquête. Les ruines deTtnauanaco, de Catiar, ete, 
dont on admire encore aujourd'hui l'étrange soli- 
dité et respect vraiment grandiose, n'ont rien qui te 
cède à celles d*Uxmal et de Palenqué. SI ce que Je 
P. Calancha nous rapporte du temple de Pachacamae 
n'est pas exagéré, ce sanctuaire, comparativement mo- 
derne , avec les constructions qui en dépendaient et 
qui n'occupaient pas moins d'un quart de lieue de tour, 
pouvaient entrer aussi en comparaison avec l'art le plus 
grandiose des Mexicains. Alclde d'Orblgnv et après lui 
MM. Rlvero et Tsohudi ont donné récemment d'intéres- 
sants documents sur l'art monumental des Péruviens. 
Nous savons de science certaine qu'un voyageur cons- 
ciencieux est allé dans ces derniers temps mesurer sur tes 
lieux mêmes les grands monuments aymara représentés 
Jusqu'ici par des vues exécutées approximativement; le 
travail de M. Angrand sera une vraie révélation pour 
l'histoire de Fart américain. 



HUAYWA-CAPAC 



340 



était, par son intelligence et par «on courage , 
l'homme le plus éminent des vastes États qu'il 
gouvernait. A diverses reprises, et sans qu'il soit 
possible aujourd'hui de spécifier ses expédi- 
tions militaires dans un ordre chronologique 
très-précis, il quitta les délices de Cusco pour 
aller porter la civilisation dans les régions du 
sud, A peine ce prince avait-il édifié, dans Tumi- 
Bamba, le Mullucancha, le palais magnifique 
consacré à Maraa-Oello, sa mère, quo les Caran- 
guis et leurs alliés se révoltèrent : une expédi- 
tion fut dirigée contre eux. Selon Velasco, cette 
levée de boucliers amena une bataille à. la suite 
de laquelle périrent plus de 20,000 Caranguis ; 
selon d'autres, elle conduisit les armées péru- 
viennes dans des contrées ignorées , où, après 
des succès , elles éprouvèrent d'épouvantables 
revers. Cunti-Mollo, le chef aimé de l'inca, y 
périt. Huayna-Capac prit alors le commande- 
ment de son armée, et il vengea vaillamment le 
désastre qui avait décimé ses soldats. On voit 
encore la Pucara ou forteresse qu'il édifia avant 
de retourner à Tumi-Bamba. L'année suivante 
fut marquée par sa deuxième campagne contre 
les Caranguis, campagne durant laquelle nombre 
de nations furent soumises, sans que Ton pût 
dompter le peuple rebelle qui l'avait motivée et 
qui mit en fuite même les Orejones, les guerriers 
compagnons immédiats de l'inca. Un des résul- 
tats de ces expéditions militaires, c'est qu'il n'y 
en eut pas une seule qui ne répandit la civilisa- 
tion péruvienne et qui ne substituât ses lois, 
comparativement humaines * aux coutumes de 
peuples primitifs \ livrés depuis longtemps aux 
horreurs de l'anthropophagie. Partout l'idiome 
harmonieux des Incas, le quichua , était sub- 
stitué au langage des peuples sauvages, si bien 
qu'au milieu du seizième siècle les mission- 
naires qui s'avaneèrent jusqu'aux frontières 
du Chili furent surpris de pouvoir se faire en- 
tendre dans la langue parlée à Cusco (1). Cer- 
taines constructions civiles et militaires, des 
routes, des tambos ou caravansérails, des for- 
teresses , qu'il ne faut pas confondre avec les 
grandes constructions théocratiques d'un autre 
âge, attestent encore aujourd'hui quelles furent 
les prévisions du conquérant civilisateur dont 
le Pérou se glorifie. 

Un fait remarquable caractérise aussi l'admi- 
nistration de l'inca. ce fui l'abaissement tem- 
poraire de cette classe aristocratique que les 
Castillans désignèrent sous le nom d'orejones , 
et la réhabilitation des yanaeonas ou du peuple, 
que les guerriers opprimaient. Le règne de 
Huayna-Capac, n'ayant pas duré moins de cin- 
quante ans et le territoire que ce prince gouver- 



,'l) Dès te temps de Huayna-Capac, a les lois des Incas 
étaient reconnues, d'un côté,jusqu'à la ligne, à Quito, de 
l'autre Jusqu'au 36p>« degré de latitude sud, au Rlo-Maule, 
toujours sur les montagnes; car jamais elles ne régnèrent 
an sein des plaines chaudes situées à l'est des Andes. » 
' AJcide (TOrblgny, V Homme américain. ) 



nait «'étendant Bar ai degrés et demi du norJ 
au sud, il faudrait, pour marquer chronologi- 
quement les grands faits qui s'accomplirent alors 
au Pérou, un espace qu'on n'a pu consacrer 
ici qu'aux souverain» renommés qui ont changé 
la face de l'ancien monde. Mou» constaterons 
seulement, d'après Velasco» qu'on ne ren- 
contra jamais sous ce règne on pauvre, ou un 
mendiant, ee qui établissait un contraste frap- 
pant entre le Pérou proprement dit et le royautae 
subjugué de Quito» qu'un autre mode d'adminis- 
tration régissait. 

Huayna-Capac résidait de préférence à Quito, 
dont l'admirable climat le séduisait* fer lé fin de sa 
vie , ayant confié le gouvernement des nouvelles 
conquêtes à Atahualpa* il se mit en route , accom- 
pagné de aa cour et d'une brillante armée, pour se 
pendre à Cusco. Il avait quitté le magnifique palais 
d'Atun-Canar et il venait de pénétrer dans la 
province de Tumi-Bamba, lorsqu'une nouvelle 
formidable lui parvint; il apprit par un courrier) 
venude'la cote de Las Eameraldas* que deux gran- 
des embarcations , désignées sous te nom de 
huamfms , amenaient deux cents étrangers en- 
viron, d'une race toute différente de celle qu'il 
gouvernait. Plus tard , on vint lui dire que ces 
liémmes étaient si complètement couverts de 
barbe, qu'on les comparait aux lamas, et qu'ils 
venaient de débarquer à Afocamès* Huayna- 
Capac, selon la tradition» devint eJars profondé- 
ment taciturne, et se retira dans la solitude. 
Supérieur à la plupart des hommes de son 
temps et surtout à ceux de sa race* le législateur 
péruvien comprenait en quel péril se trouvait le 
pays. Une prédiction, d'ailleurs, fort accréditée, 
et qui datait de Viracocha-Inca> lui annonçait 
une funeste catastrophe : il ne fit plus qu'un 
court séjour à Tumi-Bamba et donna des or- 
dres pour qu'on le ramenât dans les monta- 
gnes. Rentré dans son palais de Quito, rien ne 
put dissiper la mélancolie profonde où il était 
plongé , et, bientôt il expira. 

Au moment de mourir, Huayna-Capac avait 
fait venir les quippo-camayo^ les hommes 
chargés d'expliquer ces aide-mémoire en cor- 
delettes que l'on désignait sous le nom de quip- 
pos (1); il leur avait dicté ses dernières vo- 
lontés. Par ces dispositions, finca Huascar de- 
vint héritier de l'ancien empire du Pérou avec 
tons les trésors qu'il renfermait; Atahualp* de- 
vait occuper Je trône des anciens scyris du 
royaume de Quito. Quelle que soit l'habileté dont 
on s'est plu parfois à revêtir les quippbs-ca- 
mayo* ils n'ont pu répandre une lumière suffi- 
sante sur cette période; le moyen employé par 



(1) Ces quippos n'étaient pas toujours composées «le 
cordelettes aux couleurs variées. Un vieil historien pré- 
tend que les dispositions testamentaires de l'inca furent 
recueillies sur des bâtons destinés à recevoir des espèces 
de runes. Cavello Baiboa va beaucoup plus loin ;il pré- 
tend que l'écriture avait été connut: Jadis dés peuples d» 
Pérou. 



341 



HUAYNÀ-CÀPÀC — HUBER 



342 



eux pour la transmission des faits était si im- 
parfait, qu'on ne connaît pas même d'une ma- 
nière absolue là date de la mort de Huayna- 
Capac. Ce qu'il y a de certain , c'est que son 
corps fut embaume, ainsi ô^i'll l'avait ordonné 
par son testament, él ses funérailles furent 
célébrées avec une solennité qui laisse bien loin 
d'elle tout ce (ju'on nous raconte des pompes 
du même genre. Plus de mille Victimes s'im- 
molèrent volontairement pour aller servir, dans 
le inonde mystérieux dont leur parlaient les 
Cushipatas , te souverain magannime que deux 
empires pleuraient également. Velasco affirme 
que « le corps embaumé resta vingt jours ex- 
posé sur son trône (1), et que les populations 
accoururent en foule l'adorer, comme une divi- 
nité. » Le sage et puissant Huayna-Capac, qui par 
la force de son intelligence était sorti des té- 
nèbres de l'idolâtrie ou d'un sabéisme grossier, 
eût été le premier, s'il eût vécu , à repousser 
ces honneurs sacrilèges. Ferdinand Denis. 

• Niza, Las dos Lineas. — Ltravit, AnUouedadei del. 
Peru. — AcosU, HUtoria Natural y Moral. — Calan- 
cha, Coronica Moralitada; ta-fol. - ArriagB, Idoia- 
tria del Peru. — Juan de Velasco, Historia del Reino 
de Quito; Paris, 1841, t vol. manuscrits dans la Collect. 
des Voyages, Relations et Mémoires publiée par Ternatix, 
Carapans. — À-fteilo Oltva , ftekMort dû Pèrou^ ptiMWë 
parle même. — Rivero et Tschtidl , Antifvedû&es dei 
Peru,- in -4°, avec aU.; In fol. obi. 

hubb (Jean- Michel)) physicien polonais, né 
à Thorb, le l* r octobre 1737, mort à Varsovie, le 
16 juillet 1807. Il fit ses études à Leipzig et 
à (kettingue, et devint, en 1782* professeur des 
sciences physiques et mathématiques et directeur 
de l'école militaire de Varsovie. Après le partagé 
de la Pologne, il quitta Varsovie., H se retiré dans 
le village de Potyczy* auprès de eette ville. On a 
de lui : Vtrsuch einer analytischen Abhand- 
lung von Kegelschnitten (Essai d'une Disserta- 
tion analytique sur les Sections Coniques) ; Goet- 
tingue, 1 769 ; — De Figura Telîuris ; ibid ., 1 76 1 * 
in -4° ; — De Telîuris Forma; Varsovie, 1780; 

(1) An commencement du dix-septième sièele on 
exhuma cette momie vénérée* * Le corps de tluayna- 
Capaç, nous disent MM. Rivero et îschudt, fut transféré 
de PataltacU * Totaiicba, où Vmi fonda ta paroisse de 
San-filas ; il était en état si parfait de conservation que 
le monarque paraissait vivant. Les yeux avaient été 
remplacés par une petite lame d'or, adaptée si bien, 
qu'on eût dit de vrais yeux. Tout le corps avait été pré- 
paré avec une sorte de bitume; on remarquait à la tête 
une cicatrice, venant d'un coup de pierre qu'on lui avait 
lancée à ta guerre. Cette tète conservait toute sa cheve- 
lure, fort épaisse et dans son intégrité. H y avait ^ 
quatre-vingts an* environ cependant que le monarque 
étail mort. Lé licencié Polo Ahdegardo apporta cette 
momie, avec d'autres momies d'incas, de Cusco à Lima. 
C'était sous le vice-roi D. àntfrès. Hurtado de Mendoza, 
deuxième marquis de Cafiete-Garcilasso, ajoute que les 
corps pesaient si peu de chose que le premier Indien 
venu les portait dans ses bras ou sur ses épaules, â la 
maison de chaque cabailero qui demandait a les voit*. 
On les transportait ainsi , couverts de blanches couver- 
tures, par les rues et les places de la ville, et l'on voyait 
alors les Indiens, tout en larmes, poussant des gémisse- 
ments et se Jetant à genoux par respect. » Finalement 
ces restés mortels furent enterrés dans un corral ( on 
simple enclos) de Saint-Andréa à Lima. 



— Réflexions sur V Architecture >• Kœnigsberg 
et Leipzig, 1765; — Von den Kometen (Des 
Comètes); Thorn, 1769; — Der Landwirth, 
Oder Entwichelung der allgemeinen Grund- 
sœtzè des Âckerbaus durch Naturlehre und 
vleljeèhrige Beobachtung (L'Agriculteur, ou 
développement des principes généraux de l'a- 
griculture basés sur la science et l'expérience ) ; 
Varsovie, 1779-1?82, 2 vol. ; — Ueberdie Aus- 
duensïung unà ihre Wirkungen in der At- 
mosphère (Des Exhalaisons et des Effets qu'elles 
produisent dans l'Atmosphère); Leipzig, 1790; 

— Vollsîœndigpr und deutlicher Unterricht 
in der Naturlehre (Traité des Sciences Phy- 
siques) ; Leipzig. 1793, 3 vol.) 2 e édit. 1801, 
4 vol. : cet excellent ouvrage, qui a été comparé 
aux Lettres d'Euler à une Princesse alle- 
mande, traite de la physique, de la géographie, 
dé l'optique , de l'astronomie» de la statique, de 
la mécanique et de l'acoustique. R. L. 

Meusel, Gelehrtes feutsehland. — Golâbeck, Literar. 
Nachrtchiefivon Preutsèn, vol. 1, p. 58; vol. II, p. 37. 

— HAlMche UPtrûriScke Eekuna ( 1807 , /nfeftl£*ns- 
blatt, etc., «8 )$ - Der Çioeraph, voh UI> p. 496, 

hubbb (Ulric), jurisconsulte et pubticiste 
frison, né à Dorkum, le 13 mars 1636, mort 
le 8 novembre 1694. Son grand-père, Henri 
Huber, originaire de Zurich, était venu servir 
dans les troupes hollandaises lors de la guerre 
des Provinces-Unies avec Philippe II, et s'était 
ensuite établi en Frise. Le jeune Ulric étudia à 
Franeker, à Utrecht et à Marbourg, se lit re- 
cevoir eh 1657 docteur en droit à Heidelberg, 
et la même année fut nommé professeur d'élo- 
quence à Franeker. En 1670 il refusa d'accéder 
aux instances que faisait auprès de lui l'Aca- 
démie de Leyde pour l'attirer dans son sein ; 
lés états de la Frise augmentèrent peu de temps 
après ses appointements, et le nommèrent d'a- 
bord professeur de droit public, et en 1679 
membre du tribunal suprême de leur pays 
siégeant à Leuwarde. Outre ses querelles avec 
Duker et Perizonius , dont il sera question plus 
loin, Huber entra aussi en discussion avec les 
ministres de Leuwarde, contre l'avis desquels il 
soutint qu'il est non-seulement permis mais 
même nécessaire aux étudiants en théologie d'ap- 
prendre à danser, afin qu'ils acquièrent dans la 
tenue et dans les gestes une aisance qui les dis- 
tingue du vulgaire. Il avait épousé en premières 
noces la petite-fille du célèbre jurisconsulte Jean 
Althusen; il en eut un fils nommé Zachariae, 
qui devint professeur de droit à Franeker, et qui 
a publié plusieurs ouvrages juridiques concer- 
nant le droit frison, ain'si que Dissertationes 
Juridicœet Philologicx; Franeker 1703, et 
Amsterdam, 1721, in-4° : ouvrage dans lequel il 
fait preuve, selon Maubold, d'une connaissance 
approfondie de l'ancien droit romain. (Pour 
plus de détails, voy. Vriemoet, Athenx Frisicx, 
et Ersch et Gruber, Encyklopâdie). On a de Hu- 
ber : De Genuina MtateAssyriorum et Regno 
Medorum; Franeker, 1662, ù>8°: dans cet 



343 



HUBER 



344 



ouvrage Huber défend l'opinion commune sur 
la durée de Tempire des Assyriens contre les at- 
taques d'Usserius et de'quelques autres érudits ; 
1688 et 1696, in-4°; Amsterdam, 1721, in-4°; 

— De Jure Civitatis; Franeker, 1672, 1684, 
1692, 1698, in-4° ; Francfort, 1708 , in-4° ; avec 
des remarques de Chr. Tbomasius , léna, 1752, 
in-4° : dans cet ouvrage , écrit pour combattre 
les doctrines absolutistes de Hobbes , Rousseau 
puisa une partie des principes fondamentaux de 
son Contrat Social; il emprunta les autres à 
Wolf : son mérite se borne donc a avoir mis en 
excellent français des maximes politiques jus- 
qu'alors enfouies dans de gros traités rédigés en 
latin; cependant il est exagéré de prétendre, 
comme l'ont fait certains critiques, que Rous- 
seau a copié mot à mot le De Jure Civitatis de 
Huber. Le premier volume parut à Franeker, en 
1677, in-4°; le second avec une nouvelle édition 
du premier, ibid., 1688 ; une dernière édition des 
deux fut donnée par Zacb. Huber; Franeker, 
1696, in-4 a ; — Prxlectiones civiles ad Insti- 
tutiones, una cum Positionibus ad Institu- 
tiones etPandectas; Franeker, 1678, in-4°; 
augmenté de : Prxlectiones ad Pandectas, 
ibid., 1686 ; 1699, avec des notes de Thomasius , 
Leipzig, 1708; avec des Notes de Mencken et de 
Gebaucer, ibid., 1735; ibid., 1749; toutes ces 
éditions sont in-4 a ; — PositUmes Juris f con- 
tracta secundum Institut ione s et Pandectas; 
Franeker, 1682, Leipzig, 1685 (avec des remar- 
ques de Thomasius), et Amsterdam, 1728, in-8°; 
dans cet ouvrage Huber exposa une nouvelle 
méthode pour renseignement du droit, laquelle, 
répandue bientôt après par les écrits de Beyer, 
remplaça dans les universités de l'Allemagne 
la méthode ramistiqne ; — Auspicia Domestic*, 
orationes XII; Franeker 1682 , in-8°. Dans ce 
recueil de discours on remarque le quatrième, 
De Frisix Jurisconsulte, et le dixième , De 
Pœdantismo; — Heedendeyse Rechtsgeleer- 
theyt soo elders als in Frieslandt gebraikeliik 
( Jurisprudence moderne et ancienne de la Frise) ; 
Franeker, 1684, Leuwarde, 1699, în-4°; — 
Positiones Juridico-Theologicx ; Franeker, 
1686, in-4* : ouvrage écrit pour contester l'opi- 
nion de Duker, lequel avait soutenu que la 
divinité des Écritures pouvait être prouvée par 
les seules lumières de la raison. Huber prétendait, 
au contraire , que la vérité de la révélation ne 
pouvait entrer dans la persuasion de l'homme 
qne par le témoignage intérieur du Saint-Esprit; 

— De Concursu Rationis et Scripturx; Fra- 
neker, 1687, in-8» ; — Spécimen Philosophie 
Civilis; Franeker, 1686, m-8°; — Disserta- 
tions Juridico-Theologicx VII, deFœderibus 
et Testamentis una cum Libro singulari de 
Prxtorio; Franeker, 1688 et 1698, in-8°: dans 
ce recueil Huber contestait la signification at- 
tribuée par Perizonius au mot prxtorium dans 
un passage deYÉpttre à Philippe de saint Paul. 
Perizonius (voy. ce nom ) répondit avec aigreur; 



— De Jure popularis, optimatum et regalis 
imperii; Franeker, 1689, h>8°; — Institu- 
tiones Historiés Civilis; Franeker, 1692, in-8*; 
ibid., 1703, 3 vol. in-4°: cet ouvrage ayant été 
attaqué avec violence par Perizonius, Huber 
répondit à ce dernier dans une brochure pleine 
d'invectives, intitulée : De Calumnia centum et 
viginti errorum J. Perizonii ; Franeker, 1693, 
in-8°. Perizonius répliqua par une critique 
encore plus acerbe ; — Eunomia Romana, site 
censura censurx juris Justiniani; Franeker, 
1700, in-4° : ouvrage écrit pour justifier lesdis- 

Ejsitions des lois romaines. Huber a encore pu- 
lié plusieurs ouvrages et dissertations sur des 
matières juridiques; la majeure partie en a été re- 
cueillie dans les Opéra minora Hubert, publies 
en 2 vol.; Utrecht, 1746, in-4°, par les soins de 
Wieling. t. G. 

Camp. Vitrtaga, Oratio funebrit in Hubert exsequiis ; 
Franeker, 1694, ln-fol.; réimprimé dans Y Eunomia de 
Huber. — Chàuffeplé, Nouv. DicU Hixtor. — Vriemoet, 
' Athenee Frisicœ, p. 444. - Benthem, Holldnd. Kirchen 
and Schulen-Staat , t. 11. — JOcher, Allgem. Gel.- 
Lexikon. — Haubold, Inttitutiones Juris Romani Itite- 
rartm, n« ni. — Hugo, LOtrbuch der juristischen gê- 
Uhrten CeschicfUê. - Nettelbladt, HaUische BeUràge, 
t. XI, p. t4. 

huber (Jean- Rodolphe), peintre suisse, 
surnommé le Tïntoretde VHelvétie, né à Bâle, 
en 1668, mort en 1748. Il puisa les principes de 
son art à l'école de Manne- Wetich, qui peignait 
sur verre; puis il se forma et se perfectionna 

* sous deux artistes renommés, C. Mayer et Joseph 
Vernet. A dix-neuf ans il fit le voyage d'Italie. A 
Mantoue il rechercha et étudia particulièrement les 
œuvres du Titien, et, détail remarquable, à Rome 
il admira bien plus les tableaux de €. Maratteqne 
ceux de Raphaël. Il se rendit ensuite en France, 
d'où il vint se fixer à Baie. Les portraits qu'il y 
peignit le mirent en renom ; et en 1696 il fut 
appelé à la cour de Wurtemberg, où il resta jus- 
qu'à 1700. A la peinture du portrait il ajouta 

f dès lors celle de l'histoire. Quelques-uns de ses 

* tableaux , assez nombreux, ont été gravés par 
B. Audran, C. Drevet, J. Houbracken , Thur- 
neisser, etc. Huber peignait vite et avec feu. 
Il s'attachait surtout à donner à ses peintures 
un brillant coloris. Quoique surnommé le Tin- 
toret suisse, il ne soutenait guère la comparaison 
avec le grand peintre italien. 11 aimait le faste, 
et dépensa une partie de sa fortune en tableaux, 

: gravures et autres curiosités. Il laissa quelques 

* dessins d'un trait ferme et hardi. V. R. 

Nagler, fleues AUg. Kùnstl.-Lexik. 
huber ( Marie), théologienne protestante 
suisse, née à Genève, en 1695, morte à Lyon, 
le 13 juin 1753. Sa famille était originaire de 
Schaffhouse. « Sa beauté, dit l'abbé Pernetti, lai 
fit craindre, dès l'âge de dix-sept ans, les dangers 
dont elle est si souvent la source : elle se livra 
alors à une retraite austère et à la pratique des 
bonnes œuvres, qu'elle n'a jamais interrompue, 
sous quelque prétexte que ce pût être. La seule 
liberté qu'elle se donnoitétoit d'écrire, n'ayant 



345 HUBER 

jamais eu de maître que son génie, et n'ayant 
jamais lu d'autre livre que la Bible. » — • « Elle 
avoil l'esprit vif et pénétrant , dit Senebier ; elle 
disoit avec franchise qu'elle avoit toujours aimé 
la vérité avec passion, et qu'elle favoit recher- 
chée avec chaleur.... On s'occupe souvent de 
ses ouvrages avec intérêt; ils peignent son cœur 
de la manière la plus touchante; ils étonnent 
par l'étendue et la profondeur des connoissances 
qu'ils annoncent; ils entraînent par la mé- 
thode qui y règne et le coloris qui les caracté- 
rise. Mais ce qu'il y a de plus surprenant, c'est 
que, comme en lisant ses écrits, on ne sauroit la 
prendre pour une femme, de même ceux qui ont 
vécu avec elle disent qu'en l'écoutant on ne Tauroit 
jamais prise pour un auteur. » On a de M Ue Hu- 
her : Le Système des Anciens et des Modernes f 
concilié par l'exposition des sentiments dif- 
férents de quelques théologiens sur l'État des 
âmes séparées des corps, en quatorze lettres; 
Londres, 1731, 1733, 1739, 1757, deux parties 
in-12; avec une Suite du livre des quatorze 
Lettres sur V État des Ames séparées des Corps 9 
servant dé réponse au livre du professeur R. 
(Ruchat); Londres, 1739, 1757, in-12; —Le 
Monde Fol préféré au Monde Sage, en vingt- 
quatre promenades ; Amsterdam, 1731, 1733, 
1744, 2 vol. in-12; — Lettres sur la Religion 
essentielle à Vhomme, distinguée de ce qui 
n'en est que V accessoire; Amsterdam, 1738, 
deux parties, 1739, 1754; nouv. édit., Londres, 
1756, cinq parties in-8° : ontrouvedans la dernière 
édition les Œuvres posthumes de M u ° Huber; 
ce sont diverses pièces qui servent de supplé- 
ment anx Lettres sur la Religion essentielle 
à V homme; — • Réduction du Spectateur an- 
glais à ce qu'il renferme de meilleur, de plus 
utile et de plus agréable, avec nombre d'inser- 
tions dans le texte, des additUmsconsidérables 
et quantité de notes; Paris, 1753, six parties, 
in-12. Senebierlui attribue Y Histoire d*Abassay 9 
1753, in-8°, que beaucoup de bibliographes don- 
nent à M Ue Fauque. J. V. 

Peniettl, Les Lyonnais dignes de mémoire, X, II, 
p. »S9. - La France Littéraire de 176*. - Senebier, 
Histoire Littéraire de Genève, tome III, p. 84. — 
MM. Haag, La France Protestante. 

hubek (Jean- Jacques), botaniste et ana- 
tomiste suisse, né à Bâle, le 11 septembre 1707, 
mort à Casse! , le 6 juillet 1778. Il fit ses études 
à Berne et Strasbourg et vint en 1736 à Gœt- 
tingne, où Albrecht de Haller, son ancien profes- 
seur, lui fit donner une chaire à la faculté de 
médecine. Six ans plus tard il fut appelé à Cassel, 
où il enseigna jusqu'à sa mort l'anatomie et la 
chirurgie. Haller s'est servi des travaux de Huber 
pour la rédaction de sa Flore de l'Helvétie. Il 
était membre des Académies de Londres et de 
Berlin. Ses principaux travaux sont : Positiones 
Anatomico-Botanicœ; Baie, 1733, in-4°; — De 
Medulla Spinali ; Gœttingiie , 1739, in-4°; — 
De Medulla Spinali, speciatim de Nervis ab 
ea provenientibus ; Gœttingue, 1641, in-4°; — 



346 
T Cogitationes tumultarise de Aereatque Electro 
(Economie animait famulantUms et impe- 
rantibus; Cesse! , 1747, in-4°; — Observa- 
tiones ac Cogitotiones nonnullx de Monstris; 
Cassel, 1748, in-4° ; — Observationes nonnullx 
circa Morbos nuperorum; Cassel, 1755, in-4°; 
— Observationes aliquot Anatomicx; Cassel, 
1760, in-4 # ; — Animadversiones nonnullx 
Anatomicx; Cassel, 1763, in4°; — DeSrroribus 
aliquot Rei Médiat popularibus ;Cswel, 1767, 
in-4° ; — De Chirurgi» cum Unatome Nexu; 
Cassel, 1 767, in-4°. IK. L. 

F. Boerner, NachrUhten von jetzt lebendin géUhrten 
Arzten. — ■■ Putter, Geschisckte der Gœtting. Univer- 
sitsst. - Erjch et Graber, Allgem. BncyJOopxdie. 

huber ( Jean ), peintre suisse, né à Genève, 
en 1722, mort dans la même ville, en 1790. Il 
manifesta dès son enfance un goût très- vif pour 
les arts du dessin, et s'adonna à un genre frivole 
dans lequel il n'avait pas du moins à craindre 
de nombreux rivaux : la silhouette découpée. 
Si l'on en croit la Biographie Rabbe , « il décou- 
pait un profil sans regarder ce qu'il faisait, ou en 
déchirant une carte et les mains derrière le dos ». 
Le portrait de Voltaire était celui qu'il reprodui- 
sait le plus heureusement. Il avait poussé l'a- 
dresse jusqu'à faire découper ce visage par son 
chat, en lui présentant un morceau de fromage. 
Les éloges que lui valut sa dextérité dans les dé- 
coupages l'engagèrent à se livrer à la peinture, 
qu'il apprit sans maître et sans conseils. Il com- 
posa quelques tableaux pleins de vérité, mais 
dont on a singulièrement exagéré la valeur en les 
comparant à ceux de van Dyck et de Greuze. 
Huber entreprit aussi de peindre plusieurs scènes 
domestiques de la vie de Voltaire, près duquel il 
avait demeuré vingt ans. L'impératrice Cathe- 
rine H ayant été instruite de ce projet , écrivit à 
l'artiste qu'elle retenait tous ses tableaux. Huber 
en composa quelques-uns, et Senebier assure que 
cette suite a été gravée. « Mais l'exposé d'un 
de ces tableaux fera connaître la manière d'Huber, 
et laissera moins de regrets , dit la Biographie 
Rabbe, aux curieux qui la cherchent vainement 
Voltaire y est représenté sortant do lit et pas- 
sant ses culottes ; dans cette position , il présente 
son derrière à D'Alembert et à Fréron, l'un le 
baise et l'autre le fesse. » Huber passa de l'é- 
tude de la peinture à celle des aérostats , et pu- 
blia ses aperçus sur le vol des oiseaux. H divisa 
les oiseaux de proie en rameurs et en voiliers; 
dans la première classe, il range le gerfaut, le 
sacre, le faucon, et il appelle ces oiseaux de 
haute volée; dans la seconde classe, qui com- 
prend les oiseaux de basse volée , il met l'autour, 
l'épervier, l'aigle et le vautour. Il avait établi 
cette division d'après la conformation des ailes; 
fl soutenait que la queue ne sert point de gou- 
vernail à l'oiseau , et que son seul usage est de 
l'aider quand il monte ou quand il descend. Les 
tentatives pour mettre sa théorie en pratique et 
imiter le vol des oiseaux dans les airs ont ton- 



347 



HUBER 



348 



jours été infructueuses. Huber s'en tint pm- 
déminent à la discussion doctrinale et ne tenta 
jamais delà réaliser. H était entré en 1752 dans 
le conseil des Deox Cents de Genève. La plupart 
de ses découpures, exécutées sur vélin, se trou- 
vent en Angleterre dans les eabinetsdes curieux. 
On a délai : Note sur la Manière de diriger les 
Ballons fondée sur h vol des oiseaux de 
proie; dans le Mercure dé fr&nse du 13 dé- 
cembre 17&3 ; — Observations sur le Vol des 
Oiseaux de Proie; Genève, 1784, in-4% avec sept 
planches dessinées par Fauteur. J. V. 

Seoebier, Hist. lUUfr. de Genève, (oqie III p. 328. - 
M»« d'OberUrch, Mémoires. _ Ra&be, Biofr. univ. .et 
port, des Contemp.— MM, Haag, La France Prçtestante. 

huber {François), naturaliste genevois, fils du 
précédent, né à Genève, le 2 juillet 1750, mort à 
Lausanne, le 22 octobre 1 83Q. fl suivait les cours de 
physique de Saussure, lorsque, à l'âge de quinze 
ans, sa santé s'étant altérée, il fut conduit à Paris 
pour consulter un médecin, qui lui conseilla d'ha- 
biter la campagne et de se livrer aux travaux rusti- 
ques. Il se retira dans un village près de Paris, où, 
quelques années après, il épousa M tl- LuJlm, qui 
lui donna des preuves de dévouement lorsqu'il 
fut devenu aveugle. Aidé par elle et par un ser- 
viteur intelligent nommé Burnens , il parvint 4 
rendre de grands services $i la science. Ses étude£ 
sur les abeilles ont révélé; des faits nouveaux; \\ 
fit connaître les mystères de fécondité de la reine 
de chaque ruche ; il détermina le sjége et la 
puissance des sens, chez ces insectes, leurs pro- 
cédés de travail, l'organisation de leur société , 
leurs mœurs, les meilleurs procédés pour l'ex- 
ploitation des ruches ? etc. Plus tard, de concert 
avec Senebier, jl fit des observations sûr la 
germination. Ces travaux ont été publiés flanc 
les deux ouvrages, intitulés : Nouvelles Obser- 
vations sur les Abeilles, ? e édif. ; Paris, 1796» 
in 8°; la l re édition 'avait paru à Genève. Ces 
observations ont été données aussi dans la Bi- 
bliothèque bvitar\mq,ufi % \. 3UY> spjis ^ titre 
de Mémoire sur l'Origine de la Cire; et 
t. XXVII, sous celui de lettres à M. Pictet; 
~ Mémoire sur l'influence de l'Air et des di: 
perses Substances Gazeuses dans la Germina- 
tion des différentes fiantes ,• Çeiiève, f8Qi f 
in-8°. pour sa correspondance, JBJuber avait 
une sorte dlroprimerie ; ^ composait avec des. 
caractères mobiles disopsés çjajjs. des cases j 
quand ces caractères élajent. rrçunîs, H les endui- 
sait de noir avec pue. feujljç de papier couverte 
d'une encre particulière, et imprimait ensuite. 

Son fils, Pierre sjvws* W l'avait aidé dans ses 
travaux et qui est jnort en janvier 1841, est au- 
teur de travaux sur divers sujets de zoojogie, 
parmj lesquels on remarqqe une histoire fa 
Mceur*dft fourmis indigènes, e.t des Observa* 
lions su* tes pourrons. 

Gcïof de Fèb,e. 

Rubbe, fliopr., Supptëjppitf.— Qenrion, Annuaire Dio- 
grap — Documents particuliers. 
huber (Michel), littérateur et traducteur - 



français, d'origine allemande, né à Frontenhausen 
(bavière), en 1727, mort à Leipzig, le 15 avril 
1804. Venu fort jeune à Paris, il se lia avec plu- 
sieurs hommes de lettres distingués, et fournit 
beaucoup d'articles au/ la littérature allemande 
au Journal Étranger dont Arnault et Suard 
avaient entrepria la continuation. En 1766, il fut 
appelé à l'université de Leipzig pour y enseigner 
la langue française , et fendit de grands services 
aux deux nations, dont il possédait la langue, par 
ses traductions de l'ajlewand en français. On a 
de lui : Mémoires pour servir à V Histoire de 
la fie et des Ouvrages de Winckelmann; sans 
date, in-a° ; — Vie. de MansteiH; en tête des 
Mémoires historiques, politiques, et militaires 
sur la Russie par le général Mansteôt, 1772, 

2 vol. in-8 ; ~r- lettre de M. Winçtelmanu 
sur les Découvertes iïBervulanum, à M. U 
comte de Bruàl, traduite de l'allemand ; Paris, 
1764, in-4 a ; réimprimée dans le Bectyeil a> 
Lettres, etc., publié par jansen, 17&4, in-g°; — 
la Mort oVAM, poème en, cinq chants,, tradoU 
^e l'allemand de, tysm* * HfU, M° i très-sou- 
vent fétmnrttné depuis ; — Idylles , au poèmes 
champêtres de Ge$sr\er, traduits de FaUemand 
pour la première fois; 1762, iu-8°: on attribue 
au ministre. Turgpt la, plus grande partie de cette 
traduction} — - Paphnis et le Premier Naviga- 
teur, traduit de l'allemand dc Gessner; Wk, 
in-8 tf : oea traductions $ont reproduites dans les 
diverses éditions 4es. Couvres, de Gessner en 
français; — Choix 4* Polies allemandes; 
J766, 4 vol. «via* ~r WUhelmine, poème de 
Thummel, traduit de l'allemand ; 069, in-g° ; — 
lettres Choisies de Gellext, traduites de l'alle- 
mand, avec l'éloge de, l'autour ; 1770, jn-8° ; — 
Méfierions sm la &in$u,ve+ par M. Hagedorn 4 
traduites de l'allemand ; 177&, 9 tawtfs in-8° ; — 
Histoire de VArt de VAntiquitt % o& \Vincke^ 
mann, traduite de l'allemand; Leipzig, 1781, 

3 vol. in-4° ; — lettres philosophâmes, #or la 
Suisse, par Meiners, traduite* de l'allemand; 
1786, 2 vol. in-8°; — Notice générale des 
Graveurs, divisés par nations, et des Peimtrts 
rangés par écoles, précédée de l % Histoirt de la 
Peinture et de la Gravure; Leipzig, J7S7, 
in-8 ; nouv. édition, refondue en partie, avec 
Ç.-C.-H. Rosjt 4 sous te titre de Mmuét (2*6 Cu- 
rieux et des Amateurs de faxt, contenant «m* 
Notice abrégée, des. Graveur* #tvi*# par na- 
tions, etc.; ïuwJi, 1791 et &m>, ft voj, in-*° -, 
un »* vol. a été publié en ltyfts -~ U nouveau 
#obins<m, t^uitdel'aMema^4eÇairipei 1794 
8 vol. in* ; — Catalogue du. Cabinet d'Es- 
tampes de Brandes ; Leipzig, 1703-1796, 2 vol. 
in-8« ; — Catalogue du Cabinet oie Winckler ; 
1802, 8 vol. in~8°. Huber a revu (a traduction 
française de la Méthode naturelle. a?instructm 
propre à accélérer, sans traduction, Vintelr 
Ugenee des mots de chaque langue étrangère, 
par Wolke; 1782-1788, 2 vol. in-8°. L, L— * 

Râbbe, vietlh do BolaJoUa et 8aioCe-FrcaT« v moçr. 



349 



HUBER 



S50 



univ. et portât. des Contemp. — Qaérard, La France 
Littéraire. 

* h user (Pierre-François-Antoine, baron), 
général français d'origine allemande, né à Saint- 
Vendel (Prusse), le 20 décembre 1775, mort le 
25 avril 1832. Son pays natal ayant été réuni à 
la France, il s'enrôla dans un régiment de chas- 
seurs à cheval, en 1793, et fit les campagnes de 
Tan il à Fan v à l'armée de Sambre et Meuse. 
11 passa ensuite à l'armée du Rhin , se distingua 
à la bataille de Hohenlinden ainsi que dans plu- 
sieurs autres affaires , et rat blessé plusieurs fois. 
Envoyé plus tard au eamp de Bruges, il fit les 
campagnes d'Autriche, de Prusse, de Pologne, 
d'Espagne, de Portugal et de Russie,' où il reçut 
encore une blessure. Colonel en 1 81 3 et créé baron, 
il fit la guerre d'Allemagne et la campagne de 
France. Promu général debrigadele 15 mars 1814» 
il fut mis en non activité le 1 er septembre, puis 
nommé inspecteur adjoint de cavalerie le mois 
suivant. Apres le retour de nie d'Elbe, Napoléon 
lui confia le commandement dHine brigade de ca- 
valerie dans l'armée du nord, avec laquelle Huber 
fit la campagne de Waterloo. A la seconde restau- 
ration il reprit sa position de non activité, puis 
il fut appelé dans lés inspections, et enfin chargé 
du commandement d'une brigade de l'armée des 
Pyrénées qui fit la campagne d'Espagne en 1823 
pour rétablir Ferdinand Vil sur le trône. Nommé 
lieutenant général le 8 août , il rentra en France 
en 1824; mis en disponibilité, il fat admis à la 
retraite deux ans après. Son nom figure sur l'arc 
de triomphe de l'Etoile. 3. V. 

C. Maillé, Bioçr. des Célébrités militaires des armées 
de Terre et de Mer de 178* A 1810. 

j huber ( Victor- Aimé), littérateur allemand, 
est né à Stuttgard, en 1800. Il étudia la médecine 
aux universités de Wuiizbourget de Gœttingue, 
visita ensuite la France , l'Espagne , le Portugal , 
l'Angleterre et l'Ecosse, et revint, en 1823, en Al- 
lemagne. 11 renonça bientôt à la pratique de la 
médecine pour se consacrer aux travaux litté- 
raires. On a de lui : Skiizen aus Spanien (Es- 
quisses sur l'Espagne ) ; Çœttingue, 1828-1835, 
4 vol.; 2 e édit , 1845; — J»e Geschichte des Cid 
(Histoire du Cid) ; Brème, 1829 ; — Chronica del 
Cid ; Marbourg, 1^44; — Die neuromanische 
Poésie in Franhreich (ta Poésfe' néoronau- 
tique en France); Leipzig, 1833; — Die en- 
glischen UniversÙabten (Les Universités an- 
glaises) ; Cassel, 1839-1840,2 vol.; —Die con* 
servative Parteï (Le pajtlConservateur ); Halle, 
1841; — Die Opposition (L'Opposition), ibid., 
1842 ; — Suum cuique ; Berlin, 1 849 ; — Shizzen 
aus Irland (Esquisses sur ^Irlande); Berlin, 
1850; — Berlin, Brfurtund Paris; Berlin, 
1850. Ueber die Arbeiter-association in En- 
gland (De l'Association des Ouvriers en Angle- 
terre) ; Berlin, 1852 ; — Veber spanischfi Natio- 
nalïtœtund Kunst im 1 6<«» und 17 fe » Jahrhun- 
dert ( De la Nationalité et de l'Art espagnol aux 
seizième et dix- septième siècles ) ; Berlin, 1852 ; 



— Reisebr\efe aus Belgien, Franhreich, En- 
gland, fm Sommer 1854 (Lettres sur un voyage 
en Belgique, en France et en Angleterre, exécuté 
dans Tété 1854) ; Hambourg, 1855, 2 vol.; — Shiz- 
zen aus der Vendée und Bretagne (Esquisses de 
la Vendée et de la Bretagne) ; Bertm, 1853. M. Hu- 
ber est le fondateur de la revue Janus, qu'il a di- 
rigée depuis 1845. R. L. 
Conv.-Lex. — Ktrchhoff, fferséfeAnfes. 
* huber (louis ou Aloysius) y conspirateur 
français, né à Wasselonne ( Bas-Rhin), en 1812. 
Çorroyeur de son état; il prit part à l'insurrection 
de juillet 1 830, et demanda, dit-on, la république à 
la commission municipale- installée après la vic- 
toire à l'hôtel de ville de Paris. Il entra ensuite 
dans la Société des Droits de f Homme, et, com- 
promis dans l'affaire dite du complot de Neuilly, 
il fut condamné à cinq ans de prison. Il dut sa 
liberté à l'amnistie du 11 mai 1837. Placé néan- 
moins sou9 la surveillance de la haute police, il 
resta quelque temps dans la capitale, et partit 
pour Londres. En revenant en France , le 8 dé- 
cembre 1 837 , il perdit son portefeuille à Boulogne, 
au moment où il débarquait ; un employé de la 
douane le ramassa et le remit aux autorités. 
On y trouva des pièces compromettantes et un 
plan de machine infernale. Ffubef fat arrêté à son 
hôtel et traduit devant la cour d'assises de la 
Seine, avec M M# Grouvelle (voy. ce nom), 
Steuble, Leproux, Anat et d'autres. Huber tut 
condamné à la déportation pour complot contre 
la vie du roi. Irritable et récalcitrant, il subit une 
prison rigoureuse, qui altéra sa santé. La révo- 
lution de Février le remit en liberté. Le 13 mai 
1$48 il fut nommé gouverneur du Raincy. Membre 
du comité central de la nouvelle Société des Droits 
de l'Homme et président du comité centralisateur 
qui avait remplacé le Club des Clubs , il présida 
à l'organisation de la manifestation du 15 mai. Il 
rédigea un manifeste, fixa le jour, l'heure et le 
Heu de la réunisn, et" convoqua les clubs et les 
corporations ouvrières pour aller porter en masse 
une pétition en faveur de la Pologne à l'Assemblée 
nationale. Huber fit publier sa convocation par les 
journaux et par des affiches , disant que la ma- 
nifestation devait être pacifique et que Ton devait 
se présenter sans armes ; cependant il avait fait 
décider à la fin que, si on était attaqué, on se dé- 
fendrait et qu'on irait chercher ses armes. Au 
iourindiqné, Huber partit de la place de la Bastille, 
| a iaïtéte de la manifestation, entouré des bannières 
I et des délégués des clubs. Arrivé à la place de U 
; Concorde, il se détacha du cortège, et une deroi- 
: heure avant l'ouverture de la séance de l'Assem- 
blée, il pénétra dans la salle; le secrétaire géné- 
ral le fit sertir ; mais Hnber s'y trouvait encore au 
moment où la séance commençait. Invité de nou- 
| veau à se retirer, il déclara que, « si on laissait lire 
! la pétition dont il était porteur, tout se passe- 
I rait bien; majs que si on s'y rerasait, il y aurait 
! du désordre ». Cependant la salle fut bientôt efl- 
' vahie , la pétition fut lue , et Blanqui \ 



351 



HUBKR — HUBERT 



352 



un discours. Huber monta ensuite à la tribune, et 
demanda que le peuple pût défiler devant l'As- 
semblée. Epuisé, il s'évanouit. Le tumulte con- 
tinua; revenu à lui , Huber s'élança de nouveau 
à la tribune, menaça le président; et, après une 
nouvelle discussion , il déclara l'Assemblée dis- 
soute: il y avait plus de trois heures que la lutte 
durait. Le bureau du président fut envahi. M. Bû- 
chez se leva et se laissa jeter à la porte. Presque 
tons les membres de l'Assemblée quittèrent alors 
leur banc et se séparèrent Le président avait 
donné Tordre de battre le rappel, puis l'avait re- 
tiré, pendant que la garde nationale se réunissait 
de tous les cotés. Au milieu de cet inexprimable 
tumulte, quelques insurgés se détachèrent de la 
bande pour proclamer à l'hôtel de ville un gou- 
vernement provisoire. Huber voulut annoncer la 
dissolution de l'Assemblée constituante à la garde 
nationale de service ; mais il fut arrêté : réclamé 
par la foule , il redevint libre. Arrêté de nou- 
veau vers six heures du soir et conduit $ la 
mairie du quatrième arrondissement, il recouvra 
sa liberté par l'intervention du maire. Huber 
entra alors chez un de ses amis , se fit raser et 
s'enfuit à Londres. Mis en jugement pour sa par- 
ticipation au complot du 15 mai contre la repré- 
sentation nationale, il ne se trouvait pas parmi 
les accusés présents devant Ta haute cour siégeant 
à Bourges. Là un témoin qui avait été secrétaire 
de la préfecture de police sous Caussidière, 
M. Monier, déclara qu'il avait vu dans les ar- 
chives de cette préfecture un rapport au préfet 
Gabriel Delessert, relativement à l'affaire Grou- 
velle, précédé de deux lettres signées Huber. 
En apprenant cette déposition, Huber quitta 
Londres et vint se constituer prisonnier. Les dé- 
bats étaient avancés ; son affaire resta disjointe, 
et il ne put comparaître que devant la haute cour 
siégeant à Versailles le 10 octobre 1849 (1). Le té- 
moin Monier développa longuement son dire. Hu- 
ber le démentit avec véhémence, prétendant que 
c'était une invention de Raspail, de Blanqui et de 
Caussidière pour se sauver en perdant un absent. 
Défendu par M* Buvignier, et reeonnu coupable 
par le haut jury, Huber fut condamné à la dé- 
portation le 12 octobre 1849. Après le rétablisse- 



(l) Huber demanda d'abord inutilement la comparution 
de Blanqui et de Raapail. M. Bâchez, appelé comme té- 
moin, avoua qu'à trois heures et demie li avait aperçu 
Huber et lui avait dit : « Voua n'êtes pas l'ennemi de la ré» 
publique ni de l'Assemblée nationale : eb bien, vous pour 
vez me rendre un grand service: faites vos efforts pour 
faire sortir les gens qui sont Ici, afin que l'Assemblée 
puisse délibérer; et si vous n'y réussissez pas, tâchez de 
me faire mettre A la porte. » M. Bûche» eipliquait qu'il 
n'avait pas demandé la dissolution de l'Assemblée, mais 
une mesure qui le forçât à quitter son siège, afin de sauver 
r Assemblée et d'évité* une lutte qui aurait pu coûter la 
vie à plusieurs de ses membres. 11 comptait aussitôt la 
réunir ailleurs, au Luxembourg par exemple. Huber dé- 
clara» qu'il n'avait pas compris cela; mais qu'apprenant 
que la garde nationale convoquée arrivait, et que le prési- 
dent ne voulant pas permettre le défilé, il ne trouva d'autre 
moyen pour sortir de cette situation que de prononcer la 
dtMolutkm de l'Assemblée ». 



ment de l'empire,, il déclara renoncer à la poli- 
tique, et recouvra 'sa liberté. L. Locvet. 

Moniteur, 1838, 18W, 1849. 

Hubert (Saint), apôtre des Ardennes, mort 
en 727. Les règnes de Clotaire III, de Childé- 
ric II, de Thierry III et de Dagobert II ont été, 
pour la France, des époques terribles de déchire- 
ments et de meurtres. Grimoald, Ébroïn, saint 
Léger, tour à tour enfermés, rasés, puis repla- 
cés sur les marches du trône, se vengeaient, à 
chaque revirement favorable de la fortune, des 
revers qu'ils avaient essuyés, en jetant leur rival 
au fond d'un cloître, en égorgeant ses partisans, 
et surtout en le dépouillant de ses biens, de ses 
dignités et de ses trésors. A cette époque d'a- 
narchie, le peuple, devenu presque insensible 
aux luttes de la Neustrie et de l'Austrasie, ou 
plutôt aux rivalités des maires du palais , lais- 
sait passer les événements politiques avec use 
sorte d'indifférence, et donnait toute son atten- 
tion à des événements d'un autre ordre, dont le 
succès intéressait plus vivement sa foi religieuse. 
Ce qui lui importait, c'était de savoir les travaux 
de saint Éloi (voy. ce nom) , les miracles de saint 
Goer, les souffrances de sainte Audeberte, les fon- 
dations pieuses de sainte Bathilde, les prodiges 
opérés aux tombeaux des bienheureux. Assuré- 
ment il était beau, lorsque les chefs de l'État s'en- 
tr'égorgeaient pour étendre ou pour conserver 
leur puissance, de voir des hommes généreux, 
dévoués au salut de leurs frères, entreprendre, 
dans le seul but de convertir quelques pauvres 
âmes, des voyages lointains et périlleux, braver 
la colère et les menaces des grands, et jeter au 
milieu d'une vaste solitude les fondements de 
quelque monastère, retraite paisible au pied de 
laquelle venaient se briser en mugissant les tem- 
pêtes politiques. Saint-Hubert est un des hommes 
en qui se personnifient le plus exactement les 
habitudes de vie et les instincts religieux de son 
siècle. Dans un temps où il valait mieux agir 
que méditer, il laissa de côté l'ascétisme, prit 
en main le bâton du voyageur, et s'achemina 
vers les populations qui n'avaient pas reçu ou qui 
avaient oublié la parole de Dieu. 

Saint Hubert était issu de la race royale; il 
descendait de Clovis par son père Bertram ou 
Bertrand, duc d'Aquitaine, et par sa mère Hug- 
berne. Sa naissance, d'après les renseignements 
les plus certains, peut être fixée à l'an 656. Les 
premières années de sa vie sont enveloppées 
d'obscurité; tout ce qu'on en sait, c'est que son 
éducation , un peu négligée par ses parents, fut 
dirigée par une de ses tantes, nommée Oda, et 
qu'il épousa, étant encore jeune, une dame de 
distinction appelée Floribane, dont il eut un Gis 
qui lui succéda dans l'épiscopat. Hubert était 
habile dans les arts libéraux et dans le métier 
des armes ; il avait été revêtu de la dignité de 
comte du palais. La jeunesse d'Hubert se passa 
dans la dissipation et dans les plaisirs. Vers l'an 
674, fuyant la tyrannie d'Ébroïn, il se réfugia 



353 



HUBERT 



354 



à la cour du roi d'Austrasie , auprès de Pépin, 
dit d'Héristall, son parent. Il y fut investi d'un 
emploi émineot, et y demeura jusqu'à l'époque de 
sa conversion, conversion toute miraculeuse sui- 
vant quelques-uns de ses biographes, et qui pa- 
rait avoir eu lieu en 683. Hubert chassait un 
jour dans la forêt des Ardennes : tout à coup, 
au milieu du chemin, un cerf lui apparut, portant 
entre ses bois un crucifix rayonnant. Hubert en- 
tendit distinctement une voix qui loi disait : 
« Si ta ne te convertis, si tu ne changes pas de 
conduite , tu descendras bientôt en enfer. » A 
ces paroles, Hubert descendit de cheval, se pros- 
terna et dit : « Seigneur, que voulez-vous que je 
« fasse ? — Va trouver Lambert : il t'instruira de 
mes volontés. » Hubert obéit. Lambert était 
alors évèque de Maëstricht; sa réputation de 
sainteté s'était répandue au loin. Il avait été , 
comme Hubert, victime de la tyrannie ôTÉbroîn. 
II accueillit le néophyte avec bienveillance, l'ins- 
truisit, lui donna la cléricature, et se fit aider 
par lui dans ses bonnes œuvres. Quelques chro- 
niques racontent avec de curieux détails un 
voyage que fit Hubert à Rome, par les conseils 
de saint Lambert. Le jour de son entrée dans la 
ville sainte, le pape Serge eut une vision, dans 
laquelle lui fut révélé le martyre de saint Lam- 
bert et l'arrivée de son disciple. Dieu ordonnait 
à Serge de revêtir Hubert de l'épiscopat et de 
le sacrer évêque de Tongres, en remplacement 
de saint Lambert ; ce qui fut exécuté. C'est pen- 
dant la cérémonie de son sacre qu'il reçut de la 
sainte Vierge l'étole (1), et de saint Pierre la clef 
dont il devait faire usage pour laguérisondes en- 
ragés, des fous, des possédés, etc. Hubert revint 
ensuite à Maëstricht, et y exerça les fonctions 
épiscopales. Par ses soins, le corps de son 
maître chéri, saint Lambert, fut transféré à Liège 
( Leodium), qui n'était alors qu'un petit village, 
et où il fixa lui-même sa résidence en prenant le 
titre d'évêque de Liège. La religion chrétienne 
avait déjà été prêchée dans les Ardennes par 
Euchaire, Valère, Materne, Paulin, Servais, Re- 
macle et autres ; mais la population de cette con- 
trée sauvage et barbare n'avait pas brisé toutes 
ses idoles. Hubert en renversa un grand nombre 
par ses prédications. Il mourut dans un lieu ap- 
pelé Vur ou Vuren (Fura ), près de Bruxelles. 
Son corps fut enterré dans l'église de Saint-Pierre, 
à Liège, et les miracles innombrables qui s'y firent 
rendirent son tombeau célèbre. Cène fut qu'en- 
viron un siècle après la mort d'Hubert que ses 
restes furent transportés (825) au monastère 
d'Andain on d'Andaye, qui prit dés lors le nom 
ft Abbaye de Saint- Hubert, en Ardennes, sous 
lequel il jouit d'une haute célébrité pendant tout 



(1) Cette étale éUit de sole et d'or ; il y a environ mille 
ans qu'on en emploie des parcelles pour la guérison des 
malades. Selon le témoignage du P. Robertl, qui écrivait 
vers 1021, on a usé de cette étole 17 pieds romains et 
s doigts; et cependant elle est toujours intacte et delà 
longueur a'une étole ordinaire. 

WOUV. BIOCR. GÉNÉR. — T. XXV. 



le moyen âge. [ J.-B. Hubert, de Charleville, dans 
YEncycl des Gens du Monde.] 

Batllet, Fie des Saints. 

Hubert ( Etienne ) , médecin et orientaliste 
français, né à Orléans, vers 1568, mort dans 
cette ville, en 1614. Il fit ses études à Paris, où il 
fut reçu docteur en médecine. H s'y appliqua 
aussi à l'étude de l'hébreu et de l'arabe, et en- 
treprit à ses frais un voyage en Afrique, afin de se 
renseigner, sur les lieux mêmes, des découvertes 
que les Arabes avaient faites autrefois dans la 
science médicale. A son retour, il fut nommé 
professeur d'arabe au Collège Royal (Collège de 
France ), et devint premier médecin de Henri IV, 
qui l'envoya auprès de Muley, empereur du Ma- 
roc, pour y traiter de la délivrance des captifs 
français et conclure des conventions politiques et 
commerciales. Hubert réussit dans cette double 
mission ; et, après un séjour de près d'une année 
dans les principales villes marocaines, il rapporta 
en France plusieurs livres arabes curieux , entre 
autres une version du Coran dont il fit pré- 
sent à Scaliger. Il reprit ses leçons publiques, 
mais , ne pouvant faire payer ses émoluments 
parles trésoriers, il quitta 1600, sa chaire, et se 
retira à Orléans, où il pratiquait là médecine , 
lorsqu'une mort prématurée vint le frapper. Hu- 
bert a été enterré dans l'église de Saint-Samson, 
où l'on voyait son épitaphe en hébreu, arabe, grec 
et latin. L — z— e. 

Josepu-Scallgeri, Epitt.— Dora Géron, Bibliothèque des 
Écrivains de Tourratne, 1 1, p. S38. — Charles Brainne, 
dans Les Hommes illustres de r Orléanais, t. I, p. 280- 
181. — isaac Casaunon, ÊpistoUe; Rotterdam, 1709, 
ln-K - Éloy, Dictionnaire historique de la Médecine. 

* hubbrt, moine brabançon, au milieu du 
onzième siècle. Il a écrit , après l'année 1047 , 
une Vie de saint Gudule, que Bollandus a pu- 
bliée dans ses Acta Sanctorum, à la date du 
8 janvier. Baillet juge que le récit d'Hubert a 
peu d'autorité. Les auteurs de Y Histoire litté- 
raire en ont meilleure opinion. B. H. 

Hist. Littér., t. VU, p. tt». 

* hubbrt (Léonard) (i), théologien belge , 
vivait vers l'année 1490. Il fut d'abord religieux 
carme, évéque de Darie, suiïragantdeFévéquede 
Liège, puis inquisiteur à Liège. Sixte de Sienne at- 
teste,en outre,qu'il professa pendant quelque temps 
la théologie dans les écoles de Paris. Le cata- 
logue de ses ouvrages nous est offert par Jean de 
Tritenheim : In Evangelium Lucœ; — De Be- 
gimine Principum ;— De Jmmunitate Eccle- 
siastica;— Contra ffxreticos Mvellenses; — 
De GenealogiaNobilium Francorum;— Ser- 
mones. B. H. 

Fabricius, Bibiioth. Met. JEtat. — Slxtna Senensis, J». 
blioth. Sancta, llb. IV. 

hubbrt ( Nicolas ), sculpteur français , né à 
Orléans, mort dans la même ville, en 1670. Cet 
artiste , qui ne voulut jamais quitter sa ville na- 
tale malgré les efforts de Colbert, fut d'une pro- 
digieuse fécondité, et il n'était guère, à Orléans, de 

(f) Alègre deCasanate lui donne le prénom de Bernard. 

12 



HUBERT 



356 



mouumcut public ou particulier, religieux, ou pro- 
fane, qui ne possédât avant la révolution quelque 
morceau dû à son ciseau. On citait chez les Filles 
de la Visitation de Sainte-Marie (Visitandines).i 
les figures en pierre des Douze Apôtres y dont on ad- 
mirait les attitudes variées et le beau caractère ; — 
chez tes Chartreux , Saint Bruno ; — chez les Mi- 
îiimes, Saint François de Paule; — au por- 
tereau Tudelle, la Croix nommée LeMortiuà Iq 
Vif; — sur l'ancien pont au-dessus du peut fort 
des Tourelles, ta Vierge tenant l'Enfant Jé- 
sus, etc. M. de Buzonnière, tout en rendant justice 
à la rapidité d'exécution de Hubert, trouvé que \i 
mérite de cet artiste est au-dessous de sa réputa- 
tion. « Chez hubert, dit-il, la pensée artistique 
est vulgaire ; son style est commun et son ciseau 
manque d'originalité. Ses statues pouvaient servir 
à deux fins ; on voyait jadis dans les apparte- 
ments de révêché deux statues païennes qui 
furent converties ail christianisme par l'addition 
' de certains emblèmes : la Vérité, qui sans 
doute n'était pas dans son costume allégorique, 
était devenue Sainte Hélène; un philosophe 
arec avait été transformé en Saint Pierre, à 
l'aide d'un trousseau de vraies clefs attachées à 
son bras. Eh revanche, lorsqu'on fit de l'église 
Saint-Michel une salle de spectacle, l'architecte, 
pour tirer parti des vrais saints jadis sculptés par 
Hubert, eu fit dès cariatides à l'aide de masques 
et d'attributs du paganisme. » À. de LacIze. 
M. de Buzonuière, Histoire Architecturale d'Orléans. 

— Charles Brainoe, Les Hommes illustres de l'Orléa- 
nais, t. 1, p. 20-21. 

* hubert (Franfoise)i femme poète fran- 
çaise, née à Nogent-le-Rotrou , à la fin* du 
seizième siècle. Sœur de Florent Hubert, bailli 
de Nogent-le-Rotrou, elle «épousa Robert Garnier, 
juge criminel du Maine j qui cultiva la poésie 
tragique avec succès. Il est fait mention d'elle 
dmsVAlmanach des Dames Savantes depuis le 
commencement de la monarthie; Paris, 1728. 
Elle vivait encore en 1634. Ses Œuvres n'ont pas 
été imprimées. A. R— r (de Chartres). 

D. Llroo, Manuscrit de la Bibliothèque de Chartres. 

— Janvier, Additions manuscrites ù ta Bibliothèque pu- 
blique de Chartres. 

hubert (Matthieu), prédicateur français, 
né en 1640, à ChàtUlon-sur-Colmont, près de 
Mayenne, mort à Paris* le 22 mars 1717. Élève 
de Mascaron au collège du Mans, Matthieu Hu- 
bert acheva ses études chez les otatoriens de 
Paris, et sortit de leur maison pour aller en 
d'autres collèges enseigner les belles-lettres. Ses 
Sermons > qui avaient eu du succès, furent re- 
cueillis après sa mort, et publiés par les soins de 
sa congrégation. Ils parurent en 1725, en 5 vol. 
in-12. B.H. 

De Monteull, Notice sur Hubert, en tête des Sermons. 
- B. Hauréau, Hist. litt. du Maine, t. III, p. 288. 

hubert (François), graveur français, né à 
Abbeville en 1744, mort en 1809. Il était élève de 
Jacques Beauvarlet, et s'est fait connaître par un 
grand nombre d'estampes parmi lesquelles on 



cite : La Nouvelle Héloïse, d'après tétëbure; 

— Honnysoit qui mal y pense, d'après le même ; 

— Bonny soit qui mal y voit, d'après L. Ca- 
resme; — Le Retour de la Nourrice, d'après 
Greuze (17B7) ; — Le Cordonnier, d'après G.-M. 
Kraus; —Une Suite de Costumes militaires, d'a- 
près Graincourt ; — une Suite de Vues de Suisse ; 

— les portraits dd Maréchal de tourville ; — du 
Maréchal de fabonrie; — de Y Amiral de Châ- 
teau- Regnaûlt ; — dd idarécnal buquesne; ' 
du Comte de Forbin; — de L.-F.-G. à 1 Or- 
léans de Là Motte i, évègû'e d'Amiens ; — de 
Marie-Atïtoinetie (^Autriche, dauphine de 
France, d'aérés foàvéïié; — de Hue de MÏro- 
mesnil, garde dès sceaux de France, d'après 
Méon ; — du Comte de Toulouse ; — du Duc 
de Brézé; -r dii Diic de Beau fort: — de Jean 
Bàrt; — du Chevalier de ta Roche-Saint' 
André, etc. A. de t. 

F. Basan , Dictionnaire des G'raveuts anciens et mo- 
dernes. — D r O.-R.. Nagler, If eues allgemeines Kûnst- 
ter Lexikon. 

*HUfeEnf [Ïean-Èapti&te), ingénieur fran- 
çais, né à Chauhy (Picardie), le t* r mai 1781, mort 
âRochefoft, en septembre 1 1845. i>lacé,àsasortie 
de l'École Polytechnique, en 1799, dans le ser- 
vice des constructions navales, il fut attaché , 
deux ans plus tard, au port dé Rochefort. Grâce 
à lui, de tous tés arsenaux de France celui de 
hochemrt fut le premier (wurvu des machines 
les plus propres à perfectionner et à sim- 
plifier le traVail des ateliers. Hubert n'avait guère 
ijue vingt -cinq ans lorsqu'il construisit son 
moulin à dragUer i'fehtfée des bassins, moulin 
employé depuis au tàmïtiage du plomb et à la 

Préparation de la peinture, et dont le méca- 
isme, aussi simple qu'ingénieux, est une con- 
ception des plus heureusfes. Non loin de ce 
moulin, il en établit un de sciage. Travaillant 
habituellement environ dix-huit heures par 
jour, et appliquant toutes ses facultés à l'étude 
de la mécanique appliquée aux arts , il inventa 
en outre diverses machines d'Un emploi spécial 
et économique. Telles sont : l° la machine à 
tourner les vis de pointage de caronade en fer ; 
i à là machiné à mortaiser lés caisses de poulie^ ; 
3* la machine a encastrer les dés de réas de pou- 
lies, portée dès le premier essai à son plus haut 
degré de perfectionnement; 4 b l'insaisissable 
machine à tourner les gournablés coniques , en 
bois de fil droit ou tors, au moyen d'un burin 
annulaire brisé, s'ouvrant à tous diamètres dans 
son mouvement longitudinal sur une génératrice 
soulevée elle-même par une pédale. Ces diverses 
machines furent le sujet de deux rapports pré- 
sentés, le 5 février 1816 et te 23 novembre 1818, 
par MM. Sané, Molard, de Prony et Gh. Dupin, 
à l'Académie des Sciences, qui s'empressa d'ad- 
mettre Hubert au nombre de ses correspondants . 
Depuis longtemps préoccupé du désir d'amélio- 
rer les procédés de commutage employés dans les 
corderies de la marine , il rut envoyé à Brest 



357 



HUBERT — HUBNER 



358 



pour y combiner ses • projets avec eeak de 
M. Lair, directeur des constructions navales de 
ce port; et de la raaion de leurs idées ré- 
ciproques résulta l'adoption d'une machine 
qui, tout en diminuant la- consommation du 
chanvre, apporta dans la confection du cordage 
le perfectionnement le pluB' essentiel, la solution 
de l'important problème fie l'égale tension des fil* 
de caret dans les torons, solution due à i'étan 
blissement d'un crible de projection accélérant 
et régularisant la marche de )& machine. Hu- 
bert a particulièrement fait ressortir les avan- 
tages de remploi de la vapétfr dans lés cons- 
tructions nivales», (jar la conetrattion d'Utt grand 
nombre de batiiheiits qui > touB j ont justifie 7 la; 
supériorité de -m» talents et démontré qu'à» Utt 
esprit d'invention trètwemarquabte il joignait 
on jugement presque InfcHlible, attesté par te 
te perfection qu'ont obtenue de prime («bord 
tontes se» inve**tens. Le ptemieif il construisit 
des navires à Valeur «his&iit la solidité de M 
striiclore! à lai supériorité, de ta mafcbe ? et dès 
1830, éclairé par'l'etpériéntt du sphinx^ ba- 
teau à vapeur fie 160 chevaux, «proposa det 
améliorations «sfcéé&'sives qui eurent pour ré* 
sultat principal 'de rendre plue' èffteàce la comW 
naison des forcfeâ de» la vapeur et du vêtit. TéHW 
l'objet de son tiîpport sut 16 *toW»*R*r*> dé B90 
ehevaux. I^^aVéuxl^irtUgfftf^Wm^d'ffn*^ 
sur ces matières Sont : Ktippàh sW tes Mtailsé'è 
ConstruétiM tiéà Maàkitth m-bâtèdu é'Wfc 
peur L*S\\mx;dé 46b èhete<il& ;4o«m y ll&aèj 
m-fol., saitt dé JW# et d'une MMMVbn*ùr 
la Conduite et PSntfëtieh dé* tèttehtote ti toi* 
peur marines , par Mi ÛantpoMnûc (p. 69-7*7 
etl-ltf); ^ Rapport *ur lèàivénkages fuê 
présentent lès Maéhthesà bûsêb pression sut 
ceMs i #pres4ldhtànl>èu èleUe, du Von ferait 
usage deiadètente'\Ann. mûrit. : Sciences et 
Arts, t. LX1V, p. lfrîDiOn doit enéotfe à Hut 
bert le travail suivant exécuté de concert avec te 
général d'artflïerie Barbé : fablt de Proportions 
des Càplês en 1 Fer et des ustensiles pour ser± 
vir à Uikr installation et à leur manœuvré} 
Paris, Im^. roy., f825,ih-4° avec fcianeheB. 

P. LfetOT. 

annales Matit. ie 18ié, lêis/lg^o, 1837, ÏSS8. fct 4è4». 
— Notice Nécrologique* par MM. de trtéurt «t NosWe^i. 

HUBERT t>E li'ÈÎslPl*» , voyageur IrariÇaM 
Voy. L'Espiné: • ,!V " 

flUBfefcTfftt ttteCASAL.T(^.CASALl>t^RA*N. 

COLAS. ' : K ' ! '' ' n 

HuttiîT {Jean-Hubert), litteVatèWf belgeVBé 
n Hny, le 16 jûiHet 1764, mort --à- Bruxelles,' le 
12 février 1831 11 était agent général et èoti- 
sjeiilér désordre vlé Malte dans lès Fays-ftas, 
et consacrait a la culture des lettres et de là 
musique ses rares moments de loisir /fl de»- 
vint membre de \A Société dé Littérature de 
«rtrxellesét'librrespondantdelà «fwsiété d*Ému- 
latîon de Liège. On a de luî : LuHti et 'Victor, 
nouvelle; Bruxelles, il&ïfi&'lS* ;-± Étéonore 



et Monval, nouvelle; Bruxelles, an n, h>18 ♦." 
ces deux ouvrages ont été publiés sous les ini- 
tiales J. H. H.; ^- Euménie, roman moral; 
suivi de La Journée Sentimentale; Bruxelles 
et Paris, an ix, in-18; 2'édit., Bruxelles, 
1801, in-i*j •=— Coup (VŒil sur Êruxelles; 
Bruxelles, 1809, in- 12 : c'est une description de 
cette ville; — L'Amante romanesque, comé- 
die^ mêlée d'ariéttes, saàs tftoni de lieu ni date, 
in-32; — PoVêies dUMèest Bruxelles, 181';, 
in- 12. Le neveu de HuMn a publié, en y joignant 
une notice su? l'auteur : Pbêàies choisies de J.-ff. 
Hubin ^BHi*eHé8|l«95,ifri8. N. L. 

• imité tir tête Ma PbeHes CHoitiki dèj.-dufrin. 

■Obubr {Jean ), géographe et historien alle- 
mand,^ né à ettfaU; le i? mars 1668, mort à 
Hambourg, lé 6i mars- 1731; Il fit ses études à 
Leipzig^ et devint ; «tt 3094 , recteur du»éollége 
de Metfsbourg, et eh 1711 recteur du JOhan* 
neum de Mambodrg. If à écrit beaucoup d'On^- 
vtages destines à l'usage des écoles. Son Hvre : 
Fragen ans der ûlten und nèuen Géographie 
(Questions de Géogrtphié ancienne et moderne ) -, 
liéiprig, 1693, iil-12,' eut, dans Tés^ace de quel- 
^Ueà années, trente-six éditions. Parmi ses autres 
travaux noué citerons : Pragen tins derpolitis* 
ehtà Bistbrte (Questions d'Histoire politique) ; 
Lèî^tig, 1 70t-l 721;—. Eintèilting in die po- 
litisent Hïstôtie ( Introduction à Pttistoire po- 
litique), ibid., 1722, 1 vol;— Zweiràal 52 bi- 
àische Historien (Cent Quatre histoires bibli- 
ques), centième édition corrigée, publiée far D.-J. 
Lindttfer ç Leipzig, 1826;— Genenlogische Ta- 
beilen (tableaux Généalogiques) ; Leipzig, 1 1 708- 
1733. 4 Vol.; — GeneâtbgÛche Pragen (Ques- 
tions Généalogiques) ; ibid., 1719-1737, 4 vol ; — 
Bibliotheca Historica, publiée avec Fâbricius et 
Richey; Leipzig, 1715-1729,, 10 vol; — Ce fut 
Hiibner qui donna au géographe Homann (voy. 
ce nom) lldée d'enluminer les cartes géogra- 
phiques. 

Son fils Jean HnBNka, mort à Hambourg, éfi 
1753, continua quelques-uns des ouvragés dé 
son père, et publia : Muséum Geographicum ; 
Ham" bourg, 1746;— Bibltotheeâ Geneatogica ; 
Hambourg, 1729 ;~ Voltslœ'ndige Géographie 
fGedgraphie tJni veréellë ) ; Hambourg 1 730 , 
S vol.; etc. R.L. 

ï. A. Fàbrteiai, Ëttfg. MàhèrH; flàfl» les Mémo*. iTûfitl- 
6W0fe,t.vliL p. *i«. t-ActaptvMàr.) Sa^pleto., t X.^- 
bnt|iaer»,^i#^. Gdlhrt. Usç. - S*i,Onoma$tic?n 

> - : l iitôTTÊtt \RoAotpke- Jules- Èrnno), jiein- 
tfèd'hîsto^fe allemand, né à Œls (Silésîe)en 
1806. ïî commença l'étude de son art à Berlin, 
feh i&21, sô'ûl? la' direction deW.Schadow,et sui- 
vît son mâttre à Dusseldorf en 1827, avec Hil- 
«ebrandt, Lessing et Sohn. L'année suivante, îl 
ê^iposà a Berlin son tableau Les Pécheurs, d'après 
la ballade de Goethe. Ce tableau attira l'ai te n- 
Ifon sur sou auteur, 5 quî fit ensuite un voyage en 
Italie. 1 A son retour en Allemagne, rlubner finit 
par s'établir à Dresde, en 1839 ; deux ans après 11 

12. 



359 



HUBNER — HUBSCH 



360 



fut nommé professeur de dessina l'académie de 
cette ville. 1J obtint une grande médaille d'or 
à l'exposition de Bruxelles en 1851. « Hiibner, 
dit la Conversations- Lexikon , est un artiste 
remarquable par une grande pureté de formes et 
par la beauté de son coloris, quoiqu'on lui ait 
reproché d'avoir trop prodigué l'azur dans ses 
premiers tableaux. Si l'on peut désirer ça et la 
plus de profondeur, plus de vigueur dans le co- 
loris et plus d'énergie dans l'expression, le spec- 
tateur ne peut jamais se soustraire à l'impression 
harmonique de l'ensemble, à la beauté des tons 
et à la grâce de l'expression qui dominent dans 
les tableaux de Hûbner. » Parmi ses tableaux 
on cite: Booz et Ruth; — Roland délivrant 
la princesse Isabelle de la caverne des bri- 
gands ; — Le Départ de JVoémi (1833);— Sam- 
son ébranlant les colonnes du Temple; — 
Le Christ et les Évangélistes ( 1835) : tableau 
d'autel à l'église de Meseritz; — Lès Deux 
Amants du Cantique des Cantiques; — L'Âge 
d y Or; Le Christ à la colonne; — Enfants 
dormant dans la forêt sous la protection de 
leur ange gardien; etc. On lui doit en outre 
une suite de bons portraits. La Félicité et Le 
Sommeil, d'après VOctavien de Tieck, est une 
oeuvre de la plus grande délicatesse. La gravure 
et la lithographie ont multiplié a l'infini sa figure 
de L'Allemagne, qu'il avait dessinée pour l'album 
du roi Louis de Bavière. A l'exposition univer- 
selle de 1855, à Paris, on voyait de lui : Charles- 
Quint lisant son bréviaire au couvent de 
Saint-Just, et des cartons de vitraux pour l'é- 
glise des Dominicains à Cracovie et pour la cha- 
pelle de la Vigne du feu roi de Saxe Frédéric- 
Auguste. L. L— t. 
Conversations- Lexikon. 

* hûbner (Joseph-Alexandre de), diplo- 
mate autrichien, né à Vienne , le 26 novembre 
1811. Entré dans la chancellerie impériale d'É- 
tat en 1833, il fut successivement chargé, en 1835 
et en 1837, de deux missions à la cour du roi 
des Français Louis-Philippe. A la fin de 1838 il 
se trouvait à Milan, où il décrivit par ordre les 
cérémonies du couronnement del'empereur d'Au- 
triche. Attaché comme secrétaire à la légation 
de Lisbonne en 1841, il devint en 1844 consul 
général d'Autriche à Leipzig et chargé d'affaires 
auprès de diverses petites puissances allemandes. 
Les incidents diplomatiques soulevés par l'insur- 
rection de Cracovie et la prise de possession de 
cette ville libre par l'Autriche l'appelèrent un 
moment à Paris en 1846; mais il retourna peu 
de temps après à son poste. H se trouvait à Mi- 
lan, retenu par des affaires privées, lorsque éclata 
la révolution de Février. Chargé d'une nouvelle 
mission à Paris en 1849, il y fut élevé, vers la 
fin de la même année, au poste de chargé d'af- 
Xaires. Le U janvier 1853 il fut nommé con- 
seiller privé et accrédité par le gouvernement 
autrichien comme ministre plénipotentiaire- au- 
près de l'empereur des Français. Il figura en cette 



qualité dans ie congrès qui signa, en mars 1856, 
le traité de Paris, lequel mit fin a la guerre d'O- 
rient. Au mois de mai suivant il fut élevé an 
rang d'ambassadeur. Quelque temps après U fit 
un voyage à Naples, dans le but supposé d'in- 
viter le roi des Deux-SicUes à faire des conces- 
sions à l'Angleterre et à la France, qui avaient 
rompu leurs relations diplomatiques avec cette 
puissance. 11 revint ensuite à Paris, où il a repris 
ses fonctions. . J. V. 

Courte BioçrapHe, pur Ordre alphabétise, detovs les 
Généraux, Ministres, Ambassadeurs, etc., quiamtMuré 
dans les affaires d'Orient, dans YlUustratien n* en. 

I fltJBSCH (Henri), architecte allemand, né 
à Weinheim (grand-duché de Bade), en 1795. 
U fit ses études à Heidelberg, sons la direction de 
Wembrenner. Fatigué, comme beaucoup de ses 
contemporains, du vieux style académique, et 
pensant que les formes architectoniques de la 
Grèce et de Rome étaient insuffisantes à .satis- 
faire aux exigences de rarchitecture des temps 
modernes, il se voua avec zèle à l'étude de rar- 
chitecture du moyen âge, glorifiée à cette époque 
par le plus grand nombre des poètes et des ar- 
chéologues. De Tannée 1817e 1819 il entreprit un 
voyage en Italie et en Grèce ; et à la vue des mono- 
mente qu'il visita, il modifia et mûrit ses idées. H ac- 
quit la conviction qu'il y avait à créer une nouvelle 
architecture monumentale,inspiréerdu styleàplein 
cintre pratiqué an douzième siècle en Europe, et 
dont le but et la construction devaient se lier avec 
clarté dans la forme et l'ornementation. Après 
s'être appliqué à l'étude des monuments romans 
des bords du Rhin, à la suite d'un second voyage 
d'Italie en 1822, il fut nommé en 1824 profes- 
seur d'architecture à l'Institut de Stadel, fondé à 
Francfort-sur-le-Mein,et destinée former des artis- 
tes et des constructeurs. Ce fut là qu'il étudia son 
Projet d'un Théâtre avec Charpente en Fer; 
Heidelberg, 1825, in-folio, avec six planches ; — 
&& Plans pour F Église de Barmen (1825-1829); 
— la Maison.des Orphelins de Francfort- sur- 
le-Mein (4826-1829). En 1827 il fut nommé ar- 
chitecte et inspecteur des travaux de construction 
à Carlsruhe. C'est dans son ouvrage intitulé: Dans 
quel Style devons-nous bâtir? qu'il exposa ses 
principes sur l'architecture. Selon sa théorie, le 
style roman ne doit pas offrir un type absolu 
pour, les temps modernes; il ne doit être que le 
vêtement dans lequel se produisent les exi- 
gences architectoniques de l'époque actuelle. Il 
critique et voue au ridicule les pastiches du style 
ogival comme des œuvres hors de saison, nul- 
lement en rapport avec nos idées et nos mœurs. 
Hûbsch, depuis son séjour à Carlsruhe, éleva 
dans cette ville, dans le duché de Bade et aux 
alentours, une suite de monuments dans le style 
roman, qui, par ses soins et ceux de ses confrères 
Lanaur» et Gartner, s'étendit très an loin. Parmi 
ses œuvres les plus considérables nous citerons le 
Palais de la Chancellerie des Finances et VÊ- 
cote des Filles à Carlsruhe (de 1828-1830); 



361 



HUBSCH - HUC 



362 



dans la niême ville, Y École Polytechnique, com- 
mencée en 1832 et achevée en 1836; les Églises 
de Zaisenhausen d'Epfenbach, de Stagen, 
de Mulhausen, près Pforzheira. V église de 
Bulach, près Carlsruhe, commencée en 1837, 
est une de ses œuvres capitales ; elle est du style 
roman. Il a encore bâti les églises de Rottweil, de 
Bauschlott, de Waitzen, de Dûrrheim; enfin 
le grand et beau Musée de Carlsruhe, commencé 
en 1837 et achevé quelques années plus tard. 

Ses ouvrages sur son art ont pour titre : Ve- 
ber griechische Architectur (De l'Architecture) ; 
Heidelberg, 1822, in-4°; — Entwurfzu einem 
T/îea^erlProjetd'unThé&^^eidelberg 1825, 
in-folio; — In welchem Stile sollen wir bauen 
(Dans quel Style devons-nous bâtir) ? Carlsruhe, 
1828 ; —Bauwerke (Monuments d'Architecture) 
Carlsruhe et Bade, 1838 ;—Die Architectur und 
ihr Verhxltniss, zur heutigen Malerei und 
Sculptur (L'Architecture et ses Rapports avec la 
Peinture et la Sculpture du jour); Stuttgard et 
Tnbiogue, 1847. 

D. Ramée et R. L. 

C<mvtrsat.-Lex' — Fûnli, Zurich und die wicktigs- 
ten Stâdte am Rhein ; Leipzig, 1846. 

hitby (Le P. Vincent) , théologien français, 
né à Hennebon (Bretagne) le 15 mai 1608, 
mort le 24 mars 1693. II entra en 1643 dans 
l'Ordre des Jésuites, où il prononça ses vœux, et 
professa la théologie à Orléans, puis à Vannes. 
Son zèle religieux le fit nommer directeur 
des retraites, dont il avait été l'un des fonda- 
teurs. Il s'attachait à inventer ou à propager 
tous les moyens qui lui semblaient propres à 
exciter la dévotion. Émule de Marie Alacoque, 
il créait ou répandait l'adoration du Sacré-Coeur 
de Jésus, l'adoration perpétuelle du Saint-Sacre- 
ment; il multipliait les congrégations en l'hon- 
neur de la Vierge, dont les adeptes portaient une 
croix blanche sur la manche ; il distribuait des 
médailles, des chapelets bénits, de petits livres, 
des images qui se colportaient de toutes parts. 
Il exaltait tellement la foi des fidèles, qu'on loi 
attribua môme quelques miracles. Il a écrit : une 
Retraite Spirituelle;— LesMotifs d'aimer Dieu 
pour chaque jour au mois;— La Pratique de 
V Amour divin, et d'autres œuvres ascétiques 
qui ont été recueillies, revues et corrigées par 
l'abbé Lenoir-Duparc , et publiées sous le titre 
d' Œuvres spirituelles du P. Vincent Huby; 
Paris, 1753, 1761, 1769; Lyon et Paris, 1827, 
in-12. L'abbé Baudrand en a donné une édition 
avec changements; Paris, 1767, in-12. On a publié 
aussi, en 1824, des Conversations propres à 
faire naître et à entretenir V Amour divin 
dans nos cœurs, extraites des œuvres du 
i>. Jïttty;in-24. G. de F. 

D. Lobineau, Histoire des Saints de Bretagne, — Pierre 
Pbonamic (Champion), rie des saints Fondateurs des 
Retraites. 

J huc (E.)> missionnaire français , de la con- 
grégation de Saint-Lazare, né à Toulouse, le 
1 er août 1813. H partit en 1839 pour la Chine, 



en qualité de missionnaire apostolique. Dans Tau 
tomne de 1844 il se mit en route avec M. Gabet , 
pour explorer les déserts de la Tartarie et se 
rendre delà au TKibet, où, suivant les instruc- 
tions qui leur avaient été données par le vicaire 
apostolique de Mongolie, ils devaient chercher à 
propager le christianisme et entreprendre des 
conversions. Accompagnés d'un jeune lama et 
revêtu» du costume sacré de ces prêtres, ils sur- 
montent tous les périls du désert, et ce n'est que 
par hasard qu'ifs reçoivent l'hospitalité généreuse 
de Tatares nomades. Arrivés àKounboun, célèbre 
couvent lamaîqne, ils y étudient la langue thibé- 
taine. .Vers la fin de septembre de l'année 1845 
ils se mirent à la suite de la caravane thibétaine 
qui Tenait de porter le tribut à l'empereur de 
la Chine, pour se rendre à Lhassa, capitale du 
Thibet. Ils y arrivèrent vers la fin de décembre, et 
s'y établirent dans une modeste demeure. Bientôt 
ils furent soumis à plusieurs interrogatoires par 
les autorités locales. Sur leur déclaration qu'ils 
venaient seulement prêcher la religion de Jésus- 
Christ, ils furent traités avec égards et logés aux 
frais du régent. Malgré tes bonnes intentions 
du régent, l'ambassadeur chinois leur intima 
l'ordre de quitter le thibet; et bien qu'Us mani- 
festassent alors le désir de se rendre de ce pays 
à Calcutta, ils furent contraints de reprendre 
la longue route de la Tartarie et de la Chine. Au 
mois d'octobre 1846 Us étaient de retour à Ma- 
cao. L'abbé Huc a consigné les diverses circons- 
tances de son voyage dans un livre intitulé : Sou- 
venirs d'un Voyage dans la Tartarie, le Thibet 
et la Chine, pendant les années 1844, 1845 
et 1846; Paris, 1.850, 2 vol. in-8°, avec une carte. 
Ce livre eut un grand succès : plusieurs éditions 
et des traductions en diverses langues se succé- 
dèrent rapidement. Ce succès est dû à la fois à la 
description du pays, si peu connu jusqu'alors, au 
style aussi varié qu'élégant, et au grand nombre 
d'épisodes curieux dont l'auteur a su habilement 
parsemer son récit. La description des parties de 
la Chine visitées par l'abbé Huc lui a suggéré la 
rédaction d'un ouvrage qui fut publié par ordre 
de l'empereur à l'Imprimerie impériale, sous le 
titre de : V Empire Chinois, faisant suite à 
V ouvrage intitulé : Souvenir d'un Voyage dans 
la Tartarie et le Thibet; Paris , 1854, 2 voh 
in- 8°. Il en existe plusieurs éditions et unç tra- 
duction anglaise. Cette description a été cou- 
ronnée par l'Académie Française. Enfin, à une 
époque toute récente M. Huc a fait paraître un 
ouvrage intitulé : Le Christianisme en Chine , 
en Tartarie et au Thibet; Paris, 1857, 3 vo- 
lumes in-8°, avec carte. Cet écrit contient un 
grand nombre de renseignements historiques ; 
mais la question de la propagande catholique en 
Chine en est le mobile et le but. M. Huc pense 
que « l'Évangile remplacera bientôt en Asie lo 
« philosophisme de Confucius, les traditions boud- 
« dhiques et les interminables légendes des Védas ; 
« enfin que Brahms , Bouddha et Mahomet dis- 



«63 HUC — HUCBALD 

« trontpour faire place au vrai Dieu, etc. (ï). » 
Le troisième volume du Christianisme en 
Chine, le dernier publié, s'arrête en 1722, à la 
mort de l'empereur Khang-hi. J. K. 

Documents particuliers. - Souvenirs d* vn Voyage en 
Tartarié,de Pabbé Hue. - L'Empire Chinois, do même 
auteur. 



364 



hvcbald on HtfeBÀLI» (S), moine de Baint- 
Amand, au diocèse de Tôuriiay. Le» biographes 
ne s'accordent point sur te lieti de' Isa naissance; 
les uns en font un Français, les autres un Belge. 
Selon l'opinion la plus généralement admise, il 
serait né en 840, et serait' mort le 20 juin93o, à 
Tâge de quatre-vmgt*dix ans. ïfeveo du célèbre 
Mflon, directeur de l'école de l'abbaye de Sâlht- 
Amand, ce rat à ce monastère et sous la protection 
de son onde que Huebald fit set premières étu- 
des. Les progrès du jeune ho vite dams les lettres, 
'dans les sciences et surtout dans la tnusique fu- 
renttellemént rapides qu'ils excitèrent bientôt la 
jalousie de son propre maître. Huebald avâft 
composé et noté le étant d'un office pour ta Wte de 
Saint-André; cet outrage lui ayant attiré des 
ifloges justement mérité*, Milott éfcfat si irrite 
qu'il défendît l'entrée 1 de l èon éc^e h son nevea, 
en lui reprochant de vtttttafr Briller àsësdépens. 
Huebald avaftafors vtn$;ans * cliâssé dé son mo- 
nastère, il se retira à Nevert , où il ouvrit eue école 
dans laquelle il enseigna !à musique; ce fut là 
6^1'il composa des chants : en l'honneur de sainte 
Cilinlé, dont il a éçrît'ausst la vie. Mais le dé- 
sir d'augmenter ses connafssances le décida peu 
de temps après à se rendre à Sàfat-Genriain 
d'Àuxerre pour y' suivre les leçons de Héric, 
un des hommes les plus savants qu'il y eût alors. 
■Ce faisons la direction de ce moine, qui comp- 
tait fteroi an nombre de.ses disciples, que Huc- 
îtold compléta ses études littéraires et musi- 
cale?. Il ne tarda pas cependant à se reconcifîér 
avec son oncfe,et revint àSaint-Amand, rappor- 
tant avec lui les reliques de saint Cyr et de 
sainte Julitte; et à la mort de Milon, en 872, il 
lui succéda dans la direction de son école. Quel- 
ques années plus tard il lui vint à l'idée d'é- 
crire un poème à la louange des chauves, qu'il 
dédia au roi Charles le Chauve. Ce singulier 
poème, composé de cent trente-six vers latins 
dont tous les mots commencent pafnn C, a été 
imprimé plusieurs fois air* seizième et dix-sep- 
tième siècles. En voici le premier vers : 
Carmina clarisonœ calvis cantate Camœnse. 
En 883, Huebald ayant été invité par Ro- 
dulfe, abbé de Saint-Bertin, à venir diriger l'é- 
cole de ce monastère, il se rendit à son désir. Ro- 
dulfe fut tellement satisfait de ses services qu'il 

(l) Tome 111, à la fin de la préface. 

(î) L'orthographe de ce nom varie dans les auteurs la- 
tins du moyen âge : le» ans écrivent Vbaldus, Hubal- 
dus ou Hubolduf ; les autres Hucbaldus, ffugbaldus ou 
Hucboldus. Nous avons adopté, avec M. de Coussema- 
ker, Torthographe Êncbald ou Hugbald , qui semble la 
plus conforme à l'origine tcutonique de ce nom, qui se 
compose de fine ou ffuç , intelligent, et de bald, hardi. i 



lui fit présent, *«a, témoignage de sa reconnais- 
sance, déterres considérables situées dans le 
yermandpjsjinajs Huebald, entièrement livré à 
l'étude et aux exercices de piété, attachait peu 
de prix aux rieuses; aussi ne les accepta-t-il 
aju'à )f) condition d'en faire don aux moines de 
J.abbaye de Saint-^ertin- Le bruit de sa renom- 
mée parvint Jusqu'à Foulques, archevêque de 
P.Çimsj ce prélat, ayan{; résolu 4e rétablir les 
deux ecqjes existant anciennement dans son 
église, appela, auprfà.de Juj, m 893, Hue- 
bald et Beny 4'Auxerrle, auxquels il confia la 
(hrection de ces (Mes, qui, J)ientot florisianlês , 
produisirent une foule de savants formés par les 
.soins des deux cèdres maîtres, HucbalcJ n'était 
pas seulement connu dans lœ inonastèijes ; son 
savoir et son caractère 4ui avaient attiré l'essaie 
de la cour; j| parait même qu'il y jouissait d'im 
certain crédit et que ce /ut à sa prière que Foul- 
ques pjtfint de Charles Je Simple, en 899, le 
tjtre de chancelier <}u sàyauws, car on fttles 
mots suivants à la fin d'un diplôme quj confère 
ce titre h l'archevêque de Reims : Impetratum 
Mt .mediante fiucbaldv mcmacà(K Aprfcs la 
mort de Foulques, au mois de juin de l'année 
«tfante, Huebald retourna à Saint-Àmand, où 
il passa paisiblement tetoste de ses jours -dans 
te silence du clottre et au milieu de ses travaux 
littéraires. On pense que ce fut à cette époque 
<prtl rédigea ses. principaux traités de musique. 
11 était âgé dequatre-Tingt-dix ans, comme nous 
l'avons dit phis haut, lorsqu'il cessa de vivre; 
son <sorp S fut déposé <fanB le tombeau érigé à la 
mémoire de son oncle Milori, dans l'église Saint- 
Pierre, à Saint- Amand. 

Au milieu de la barbarie des neuvième et 
dixième isieclés, HucbaM fut dn nombre de ces 
hommes laborieux dont les efforts et les lu- 
mières sauvèrent d'un complet anéantissement 
les lettres, les sciences et les arts, réftigiés au 
lotïd des monastères. Il était lié avec la plupart 
des» «avants de son époque, qui tous lui accor- 
dent lesplus grands éloges pour ses connaissances 
dans les lettres et dans la musique. Frodoard, 
Sigebert de Oemblours, qui ont Vécu peu de 
temps après lui, Trithème, Moianus et d'autres 
historiens en parlent dams les mêmes tennes. 
Huebald a écrit en ltttinla Vie de plusieurs saints 
personnages : celle de saint Lebuin ou Le bwin 9 
patron de Devénter, recueillie par Martène ; ceiles 
de sainte Rictrude, de sainte Aldegonde , de 
sainte Malabérte;—Xkm Histoire desàinleCï- 
linie, mère de saint Rémi'; ~ les Actes de 
saint Cyr et de sainïe Julitte, sa mère: ces 
actes ont été recueillis par les Bollandtstes; — 
une Vie de saint Pierre, laissée imparfaite; — 
un Commentaire latin sur la règle de Saint-Be- 
noit; — un petit poèirie latin , De Laude Calvo- 
rum, dédié à Charlet le Chauve, publié à Bade 
en 1516 et en 1519,in-4°, et en 1547, in-3°; ce 
poëme a été inséré par Dornan dans son Am- 
phitheatrumSapïentiœ Soçraftcxf et par Gas- 



865 



HUCB4JLP 



pard Barthius dans ses Adversaria ; — une 
épître en vers latins à Charles le Chauve; — 
Trithème cite de lui des lettres écrites à divers 
savants de son temps. Les traités de magi- 
que de Hucbald , après être restés longtemps en 
manuscrits, ont été publiés par Gerbert, ahbé 
de Saint-Biaise, dans lé'premier volume de son Ba- 
cueildes Écrivains ecclésiastiques. Le premier 
de ces traités, qui semble appartenir à la jeu- 
nesse de l'auteur, est intitulé Liber Ubaldi, pe- 
ritissimi music\, de Barmonica Institutione. 
Malgré son titre,' cet ouvrage, qui est basé sur 
le système musical des Grecs, né traite nullement 
de l'harmonie ; il n v y est question, au contraire, 
que des sons, des intervalles, des consonnances, 
des tétracordes et de la * notation ; c'est une 
sorte de commentaire du Traité de Béginon de 
Prum, écrit au neuvième siècle sous le même 
titre, et qui a aussi pour objet les neumes ou 
signés de notation des antiennes et des répons. 
Quelques auteurs doutent au'il soit de Hucbald ; 
Gerbèrt annonce qu'il l'a tiré d'un manuscrit de 
la bibliothèque dé Strasbourg, conféré avec un 
autre manuscrit provenant de la bibliothèque 
Malatestina,de Césène. Vient après; sous le titre 
de Alia Musicci, un traité ou fragment de traité 
qui contient principalement une exposition des 
huit tons du plain-chant ; on trouve à la suite 
plusieurs extraits de musique qui ne se lient 
point entre eux, et dans lesquels il est ques- 
tion des dimensions des tuyaux d'orgue, du 
poids des cymbales , des modes et des con- 
sonnances. Ces divers fragments, tirés des 
manuscrit* des bibliothèque? de Strasbourg et 
de Saint-Émeran de Batisbonne, mut attribué» 
à Hucbald par les mots explicii Musiça Uw- 
baldi, qui se lisent à Ja fin. Mais l'ouvrage le pjn* 
important (Je ce moine, et dont il est incontesta- 
blement l'auteur, est celui qui a pour titre fluc- 
baldi, monachi Elnonensis, Mu$icm BncWi- 
dion ; il en existe des manuscrits en France, en 
Italie et en Allemagne; tous «ont anonymes, 
excepté deux : celui de la bibliothèque Maglia- 
becctiiaiia, de Florence, en tête duquel on Ut En- 
eàiridiou Uckaèalçli Francigenx t et celui de 
la Bibliothèque impériale de Paris, »° 7202, 
qui est intitulé EMkiridion Mu$icx, outhore 
Uekabaldo , Francïgenx. C'est un traité de mu- 
sique élémentaire suivant les principes des Grecs 
exposés par Boèce, avec l'explication d'un sys- 
tème <je notation particulière qui parait appar- 
tenir à Hucbald. Au moyen de dix-huit carac- 
tère» diversement tournés ou inclinés, la nota- 
tion de Hucbald peut représenter les sons d'une 
échelle composée de quatre tétracordes désignés 
sons les dénominations de graves , finales, su- 
periores, excellentes, et auxquels on a ajouté 
deux sons plus aigus, ce qui fait en tout dix- 
huit sons. Les caractères de cette notation ré- 
pondent aux lettres suivantes et aux noms des 
notes modernes, que nous avons placés au-des- 
sous de ces lettres : 



r ABC 

toi, la, si, ut. 
Graves. 



DE F G 

ri,md,fa,sol, 



a b c d 

ta, si, ut, ré, 
Superiores. 



e f g a 

mi, fa, sol, la, 
Excellentes. 



366 

bc. 
bc. 



A la suite des dix-neuf chapitres dont l'ou- 
vrage se compose, Hucbald en a fait un ample 
comnieptaire dialogué entre un élève et son 
maître. Ce commentaire se divise en trois par* 
ties; la seconde partie contient des détails qui 
n'existent point dans le traité précédent, sur la 
diaphonie ou harmonie ecclésiastique, dont 
Isidore de Séville avait parlé près de deux siè- 
cles auparavant; mais Hucbald entre dans beau- 
coup plus de développements, et ses définirons, 
remarquables par leur clarté pour le temps où 
il vivait, sont appuyées de nombreux exemples 
de cette harmonie barbare composée de suites de 
quartes, de quintes et d'octaves, qui était alors 
en usage. — Le dernier traité de Hucbald, pu- 
blié par Gerbert, est intitulé : Oommemoratio 
brevis de Tonis et Psalmis modutandis. Cet 
ouvrage, quoique ne renfermant que les règles 
relatives au chant ecclésiastique, offre un grand 
intérêt pour l'histoire de la musique, en raison 
des fragments de psaumes et d'antiennes qu'il 
contient, et où se rencontrent des intonations 
différentes de l'ancienne tradition des églises 
ditalie. Dans son édition, Gerbert a placé à la 
fin de c$ traité un tableau des huit tons du plain- 
chant notés à la fois avec des nëûmes et avec les 
caractères inventés par Hucbald. Ce tableau, 
l'un des plus précieux monuments de l'époque; 
en ce qu'if donne la clé d'une partie des neumes 
en usage au neuvième siècle, a été reproduit 
par Gerbert d'une manière inexacte j M. de Cous- 
semaker, dans la traduction qu'il a donnée de ce 
traité dans son Mémoire sur Hucbald, page 89, 
a rectifié ce tableau d'après celui que contient 
le manuscrit n° 7212 de la Bibliothèque impé- 
riale de Paris. 

Les traités de Hucbald, antérieurs de plus d'un 
siècle à ceux de Gui d'Arezzo, prouvent que 
<fest avec raison que l'on a contesté plusieurs 
inventions attribuées à ce dernier. En effet, 
ïîucbald se sert déjà dans ses exemples de la 
lettre grecque appelée gamma, que ■ différents 
auteurs ont dît avoir été ajoutée par Gui d'Arezzo 
à l'ancienne formule grégorienne, A,B,C,D,E,F, 
pour désigner la note la plus grave de l'échelle 
musicale, et dont il aurait tiré le nom de 
gamme. Hucbald dispose aussi les caractères de 
sa notation entre des lignes qui ne forment pas, 
11 est vrai, des portées distinctes, mais qui déter- 
minent lé plus ou moins d'élévation des sons; 
on employait également le bémol et le bécarre 
avant Gui d'Arezzo, en sorte qu'il ne resterait 
réellement de ce moine que l'application des 
syllabes ut, ré, mi, fa, sol, la, pour désigner 
les six premières notes de la gamme, et peut- 
être aussi l'usage des clés de/a et dW, qui dé- 
terminent la portée des voix dans l'étendue de 
l'échelle générale. 



S67 HUCBÀLD 

Hucbald ne fut pas seulement célèbre par ses 
ouvrages sur la théorie musicale ; les anciens 
auteurs lui accordent encore les plus grands 
éloges pour les chants pleins d'une mélodie douce 
et régulière qu'il composa, disent-ils, en l'hon- 
neur de plusieurs saints. Manillon cite un office 
de nuit destiné à être chanté à la solennité de 
la fête de saint Thierri ; la musique de ces 
hymnes, notée suivant la manière de Hucbald , 
parait être perdue. Dieudonné Demie-Baron. 

Histoire Littéraire de la France, par les Bénédictins, 
t. VI. — Mabillon, Acta Sanetorum. — Gerbert, Scrip- 
tores Bcclosiastici, de Musioa Sacra. — FéUs, Biogra- 
phie universelle des Musiciens. - De Coussemaker, 
Mémoire sur Hucbald et sur ses Traites de Musique; 
Paris, 18*1, io-4*. - Le même, Histoire de l'Harmonie 
au moyen âge; Paris, 18*2, ln-4*. 

Huçéuf. Voy. HosséiNET Hussein. 

HUCHTBNBURG OU HUGTEHBUBCH ( JaC- 

gués van), peintre hollandais, né à Harlem en 
1639, mort à Rome en 1669. Élève de Nicolas 
Berghem, il partit tout jeune pour Rome, où il 
travailla avec un grand succès. L. L— t. 

Descamps, La Fie des Peintres flamands et hollandais. 
— Pinkerton, Diet. of Pointers. 

HUCHTENBURGH OUHUGTBNBU&CH (Jean 

van)» peintre et graveur hollandais, né à Harlem 
en 1646, mort à Amsterdam, en 1733. Plusieurs au- 
teurs affirment qu'il apprit les premiers éléments 
de son art,sous la direction de son père,qui était un 
artiste distingué ; d'autres pensent qu'il reçut 
des leçons de Jean Wyck. Son frère Jacques, qui 
vivait à Rome, l'appela près de lui vers 1665 et 
lui donna des conseils. Jacques van Huchten- 
burgh étant mort prématurément, Jean se décida 
à venir à Paris, où il entra chez van der Meu- 
len; mais il étudia surtout les ouvrages de 
Wouwermans, qu'il prit pour modèle. En 1670 
Huchtenburgh retourna en Hollande, et devint le 
peintre du prince Eugène de Savoie, qui estimait 
beaucoup son talent et lui envoyait les plans 
exacts de ses sièges et de ses batailles pour 
qu'il pût les représenter avec fidélité. Huchten- 
burgh peignit ainsi les batailles que le prince Eu- 
gène livra en 1708 et 1709; elles ont été gravées 
en un vol. in- fol., à La Haye, en 1725. En 1711 
Huchtenburgh se rendit à la cour de l'électeur pa- 
latin, où , reçu avec honneur, il fit plusieurs ta- 
bleaux. Il passa presque toute sa vieillesse à La 
Haye. Huchtenburgh surpassait van der Meulenet 
approchait de Wouwermans pour la délicatesse 
de la touche, pour l'expression et même pour la 
perspective aérienne. Son habileté à caractéri- 
ser les diverses passions, les individus et les peu- 
ples excitait À bon droit l'admiration de ses con- 
temporains. Ses eaux-fortes et ses gravures en 
taille-douce ont aussi beaucoup de mérite. lie 
musée du Louvre possède de Jean Huchten- 
burgh : Choc de Cavalerie ;— Vue d'une Ville 
de Guerre avec les Apprêts d'un Siège. 

L. L-t. 

Descamps, La Fie des Peintres flamands, allemands et 
hollandais. — Pinkerton, DUt. of Pointers: — Fréd. 
Villot, Notice des Tableaux exposés dans les galeries du 



- HUDDE 36* 

Musée imp. du Louvre; !• partie t écoles aUemaade, fla- 
mande et hollandaise. — Convers^-Lexilen. 

huddart ( Joseph ), géographe anglais , né à 
Allenby (duché de Gumberland), en 1741, mort 
en 181 6 . Son père était cordonnier, et l'élevapour 
l'état ecclésiastique; mais le voisinage du golfe 
de Fprth l'entraîna vers la carrière maritime. 11 
se fit d'abord pécheur, puis sur ses propres éco- 
nomies il se fit construire un brik sur lequel il 
exécuta des explorations géographiques dans le 
canal Saint-Georges, dont il dressa une carte 
restée estimée. Durant ce temps (de 1768 à 
1773) il étudia l'astronomie, apprit le dessin, et 
devint bon géographe. En 1774, il partit pour les 
Indes, et releva toute la cote occidentale de Su- 
matra. 11 s'engagea au service de la Compagnie 
des Indes, comnte capitaine, fit quatre voyages 
d'Europe en Asie, et dressa les cartes entières de 
la péninsule gangénique, depuis Bombay jusqu'à 
Coringo. En 1788 il devint l'un -des directeurs 
de la Compagnie, retourna en Europe, et, en- 
traîné par l'amour de la science qu'il possédait 
si bien, il dressa la carte des Iles occidentales 
de l'Ecosse. Il s'appliqua aussi à la fabrication 
de câbles et de cordages mieux confectionnés 
que ceux jusque alors en usage dans la marine. Il 
éleva une corderie à Mary-Port, et vit ses mo- 
dèles acceptés par l'Amirauté. Outre un grand 
nombre de cartes, il a laissé une esquisse du dé- 
troit de Gaspar, passage entre les lies de Banca 
de Billiton et de nombreux mémoires dans les 
Philosophical Transactions. A. de L. 
jinnual Begistér. 

hudbb ( Jean ), seigneur de Waweren, ma- 
thématicien hollandais, né à Amsterdam en 1633, 
mort dans la même ville, le 16 avril 1704. Il 
étudia le droit et surtout les mathématiques dans 
sa patrie; il visita ensuite la France, et s'arrêta 
à Saumur ( 1 3 janvier 1 659 ) pour s'y perfectionner 
dans la jurisprudence. De retour à Amsterdam, 
il occupa successivement les charges d'échevin, 
de trésorier et de bourgmestre, de 1668 à 1693. 
Il était fort lié avec Descartes et Schooten. 
De très-bonne heure il s'occupa de mathéma- 
tiques et de mécanique; plusieurs inventions 
faites par lui dans sa jeunesse se trouvent 
rapportées dans Ylntroductio in Geometriam 
Cartesii de Fr. Schooten. En 1672 il dirigea les 
travaux entrepris pour inonder la Hollande, 
à l'effet d'empêcher l'armée française de s'a- 
vancer. En 1689 il inventa une machine propre 
à purifier l'eau des canaux d'Amsterdam. Dans 
son Commercium Epistolicum, Leibnitz, qui 
était lié avec Hudde, nous apprend que celui-ci 
avait le premier résolu la quadrature de l'hy- 
perbole ainsi que le problème de déterminer 
l'équation d'une courbe qu'où ferait passer par 
autant de points qu'on voudrait, et qu'il avait 
aussi écrit des traités remarquables sur les 
rentes viagères et les probabilités de la vie hu- 
maine. Hudde avait entrepris un grand ouvrage 
intitulé : De Natura, Reductione 9 Détermina- 



369 



HUDDE — HUDSON 



370 



tione,Resolutione atque Tnventione Mquatio- 
num; il ne le publia pas, et en légua le manuscrit 
à un de ses neveux. Des fragments en furent 
mis au jour à la suite de Ylntroductio de Schoo- 
ten (Amsterdam, 1659, in-4°, t. I, 402-507), 
sous le titre de : Huddenii de Deductione 
Equationum (juillet 1657 et avril 1658) et De 
Ma&tmis et Minimis Epistolae II; il y sim- 
plifiait beaucoup la méthode des tangentes de 
Descartes. Cet ouvrage a été traduit en fran- 
çais : Méthode des Tangentes ;dans le Journal 
Littéraire, n oa de juillet et d'août 1713. On doit 
aussi à Hudde une règle pour déterminer si une 
équation a des racines égales et pour trouver 
ces racines, laquelle a conservé son nom. Dans 
son Traité tf Architecture Navale, Nicwitsen 
a communiqué des calculs de Hudde sur le jau- 
geage des vaisseaux. L— z— s et E. G. 

Moréri, Le Grand Diet. Historique. — Paquot, Mém. 
pour servir à VHist. des Pats-Bas, t VII, p. 814-S17. — 
Acta Eruditorum; 1704, p. 186. - MontQcla, Histoire 
des Mathématiques, t. II, p. 149 et 1U. 

bitdson (Henri), navigateur anglais 1 , né 
vers le milieu du seizième siècle, mort en 1611, 
doit sa célébrité aux divers voyages qu'il a faits 
pour trouver un passage qui abrégeât la route 
d'Europe aux Indes orientales par le nord, le 
nord-est, ouïe nord-ouest. Les tentatives isolées 
entreprises dans ce but jusqu'en 1607 ayant été 
infructueuses , des négociants anglais s'associè- 
rent alors pour faire les frais d'une nouvelle ex- 
péditioD, dont ils confièrent le commandement à 
Hudson , marin expérimenté et homme résolu. 
Parti de Gravesend le l* r mai 1607, il reconnut 
le 13 juin, par 73°, une terre faisant vraisem- 
blablement partie de la côte orientale du Groen- 
land. Parvenu, le 14 juillet, sur la côte du Spitz- 
berg, par 80° 23', il y trouva des traces de bes- 
tiaux, des animaux aquatiques et deux ruisseaux 
d'eau douce et chaude. Poursuivant sa route le 
long de la côte orientale du Groenland , il attei- 
gnit , a-ton dit, le 82° de latitude , mais plus 
vraisemblablement le 81° seulement on les extré- 
mités les plus reculées du Spitzberg. Arrêté par 
des murailles de glace, il continua de pousser 
au nord-ouest, avec l'intention de revenir par le 
détroit de Davis; mais les glaces lui fermèrent 
de nouveau le passage , et il dut alors revenir en 
Angleterre, où il arriva le 15 septembre. Reparti 
le M avril de Tannée suivante, il essaya de 
passer entre le Spitzberg et la Nouvelle-Zemble, 
dont il avait reconnu les côtes l'année précé- 
dente. Encore empêché par les glaces de trouver 
un autre passage que celui connu sous le nom 
de détroit de Waigatz, il se dirigea vers le nord- 
ouest, du côté du golfe de Lomley; mais, recon- 
naissant bientôt que la saison était trop avancée, 
il revint encore sur ses pas, et rentra le 26 août 
dans le port de Gravesend. L'insuecès de ees 
deux tentatives découragea la compagnie anglaise, 
qui renonça à courir les chances d'une troi- 
sième, n n'en fut pas de même de Hudson. Sti- 
mulé par l'espoir d'être plus heureux, il ac- 



cepta ou provoqua les offres d'une compagnie 
de négociants hollandais , qui lui fournirent, en 
1609, un navire bien approvisionné, et le char- 
gèrent de chercher un passage par le nord-est 
ou le nord-ouest Ayant appareillé du Texel le 
6 avril , il doubla le cap Nord le 5 mai , prolon- 
gea les côtes septentrionales de la Nouvelle- 
Zemble, et rencontra encore des bancs de glaee 
qui lai firent perdre tout espoir d'arriver, par 
cette mer, au passage qu'il cherchait. Son équi- 
page, composé d'Anglais et de Hollandais, vi- 
vant fort mal ensemble, habitués d'ailleurs, pour 
la plupart, à la seule navigation des mers orien- 
tales, déclara ne pouvoir supporter la rigueur 
du froid. Hudson lui proposa alors d'aller à la 
recherche du passage , soit vers le détroit de 
Davis, soit vers la côte de Virginie, où il devait 
en exister un, par les 40° environ , suivant des 
cartes et mémoires qu'il avait reçus du capi- 
taine Smith, de cette colonie. La première de ces 
propositions ayant été acceptée, le capitaine an- 
glais s'avança jusqu'aux l)es /de Feroë, et por- 
tant ensuite le cap au sud, il relâcha, le 18 juil- 
let, à la côte d'Amérique, afin de s'y procurer 
un mât de misaine. Il s'y occupait d'échanges 
quand ses matelots, redoutant l'animositédes na- 
turels, qu'ils s'étaient aliénés, le contraignirent à 
remettre à la voile, le 26 du même mois. Parvenu, 
le 3 août, à 37° 45' de latitude, il y prit terre, 
puis, rangeant la côte jusqu'à 40° 30', il découvrit 
entre deux lies une grande baie, qu'il nomma 
Baie tf Hudson, et qu'il remonta en canot sur 
une étendue d'environ 50 lieues. Les vivres'me- 
naçant de lui manquer, il tint conseil avec son 
équipage sur la route à suivre. Le contre-maître 
du navire, qui était Hollandais, voulait qu'on hi- 
vernât à Terre-Neuve, d'où l'on se serait ensuite 
remis à la recherche du passage parle nord-ouest. 
Hudson , que son équipage avait déjà menacé, 
craignait qu'il ne se mutinât de nouveau et que 
la difficulté de se procurer des vivres ne le mit 
hors d'état de reprendre sa navigation. Il proposa 
donc d'aller passer l'hiver en Islande. Tout son 
monde avait semblé y consentir ; mais les Anglais 
ayant changé d'opinion à mesure qu'ils se rap- 
prochaient de leur pays, il se décida à rentrer, 
le 7 novembre, dans le port de Darmouth. Le 
seul fruit que Hudson recueillit de cette expé- 
dition, ce fut la cession de son droit de décou- 
verte aux Hollandais, qui fondèrent, sous le nom 
de Nouvelle- Belgique , l'établissement colonial 
dont Robert Carre s'empara en 1664 , et qui, 
depuis cette époque, a pris le nom de Nouvelle- 
York. Dégagé de ses obligations envers la com- 
pagnie hollandaise par le refus des conditions 
qu'il mettait à un troisième voyage, il renoua tf vec 
l'ancienne compagnie anglaise. Celle-ci, malheu- 
reusement , exigea qu'il fût assisté d'un marin 
expérimenté, nommé Colebrune, qu'elle jugeait 
propre à le guider, mais dont l'adjonction exerça 
une fâcheuse influence sur les actes de Hudson 
et sur fe conduite ultérieure de son équipage. 



*71 



HUDSON 



372 



Parti de Blackwal le 17 avril H\Q 9 il n'était 
pas encore sorti de la Tamise, que, saisissant 
un prétexte pour se délivrer de Colebrune, il le 
renvoya à Londres avec une lettre dans laquelle 
il s'efforçait de justifier cet étrange procédé. 
Arrivé, vers la fin du mois de mai suivant/ à 
un port de la côte ouest d'Islande, il eut a. y 
déjouer un complot <)e son équipage, complot 
motivé sur le renvoi de Colebrune. Ayant remisa 
la voile le l* r juin» il reconnut, le 1§, la terre que 
Davis avait nominée la pésolation , entra le 24 
dans le détroit etlegolfequj, depuis, ont pris son 
nom, visita la côte ouest du golfe ainsi que 
d.f*utres parties de ce golfe, pénétra dans une baie 
au sud-ouest, qu'il appela Sptwf-#icàeJ,parcequ'il 
l'avait (Jjécouverfe le 29 septembre, et se trouva 
bientôt arrêté par les glaces. . Les, vjyres embar- 
qués a Londres étaient consommés, et la stérilité 
du pays n'offrait aucune 'perspective de pouvoir 
les renouveler. Les ojs.eaux que l'on tua préser- 
vèrent bien, il est yraf, l'équipage des derniers 
excès de la fajin; mais cette ressource manqua 
au printemps, et Hudsou, après huit jours passés 
inutilement à chercher des. vivres , regagna son 
vaisseau, alors dégagé des glaces. Résolu à re- 
tourner en Angleterre, il semblait néanmoins 
avoir Je pressentiment qu'il n'y aborderait pas. 
Préoccupé de cette triste pensée, il distribua à 
l'équipage le peu de biscuit qui restait , régla la 
solde ,de chacun, et accompagna chaque dé- 
compte d'un certificat de services. Ces témoi- 
gnages de sollicitude qu'il donnait en pleurant à 
ses matelots ne firent aucune impression sur 
eux. Déjà ils lui en voulaient d'avqir privé de 
son emploi son contre-maître Yyett, coupable de 
les avoir excités à la révolte. Au moment du 
départ (21 juin 1611), les complices de ce contre- 
maître exécutèrent leur projet. A leur tête se 
trouvait un nommé Henri Green, à qui Hudson 
avait sauvé la vie à Londres, en lui donnant asile 
d'abord dans sa maison, puis sur son navire, où 
il l'avait recueilli àl'insu des armateurs. Tous se 
saisirent de Hudson, de son fils, encore enfant, 
de James Woodhouse, mathématicien, embarqué 
comme volontaire , du charpentier et de cinq 
autres matelots. Les jetant sans provisions, sans 
armes , dans la chaloupe du vaisseau, ils les 
abandonnèrent à leur triste sort. On a toujours 
ignoré ce que devinrent ces infortunés, qui, vrai- 
semblablement , moururent de faim ou furent 
massacrés par les sauvages, pet acte de cruauté 
ne resta pas complètement impuni. Green et 
deux de ses complices périrent dans une ren- 
contre qu'ils firent des sauvages , et le principal 
auteur de la rébellion, Yvett, qui avait déjà fait 
plusieurs voyages avec Hudson, mourut miséra- 
blement à bord. Quand les débris de l'équipage, 
maltraité par la faim et les maladies , arrivèrent 
en Angleterre au mois de septembre, Habacuc 
Pricket , écrivain du vaisseau , donna tous les 
détails de la rébellion. On conjectura bien qu'il 
y avait participé; mais il écarta toute poursuite 



par j'adresse qu'il eut de se rendre nécessaire 
en donnant des renseignements desquels il ré- 
sultait qu'il y avait un passage au nord-ouest 
vers le 60°. La compagnie arma alors les navires 
La Résolution et La Découverte t ^onte\\e confia 
le commandement aux capitaines Button et In- 
gram, avec mission d'aller s'assurer de l'existence 
du passage indigné par Pripket, qui s'embarqua 
avec eux, efde recueillir, s'il en était temps en- 
core, ^ud&on et ses malheureux compagnons. 
La nouvelle expédition n'eut aucun résultat; on 
ne trouva ni le passage signalé par Pricket ni 
les victimes de la révolte. Comme Hudson n'a- 
vait pas fait acte de prise fie possession de sa 
découverte, a. u nom de l'Angleterre, un Canadien 
français, nommé £our4pn, fint envoyé en 1656 
pour l'assurer à la France. Cette prise de pos- 
session fut renouvelé^ ensuite plusieurs fois, 
notamment en 16? J, par le P. Albanel , jésuite, 
qui, accompagné de Denis de Saint-Simon , pé- 
nétra dans la baie 4'ffu(Json par une route qui 
n'avait pas encore été suivie. Mais ces divers 
a«t«s isolés, non sanctionnés par l'intervention 
du gouvernement français, restèrent sans effet 
par suite de la création de (a célèbre Compa- 
gnie de fa baie d'Hudson, que Charles II autorisa, 
en 1672, à s'établir au suit de cette baie, où le 
commerce des fourrures |ui $ procuré de grandes 
richesses. P. Lnvor. 

Recueil 4e Porpbap, \. IV. — Petits Powge* de De- 
bry, t X et XI. — pescriptio açDel^neqUo Geoçraphica 
Detectionis Freti, sive transita* ad occasum, skpra ter- 
ras americanas in Chinam atque Japoniam ducturi, 
recens investigati, « M. Henrica Hudsono, Jngto. etc.; 
Amsterdam, 16 1 3, in-4». — Histoire générale des Papaçes, 
par l'abbé Prévost, t. XIV et XV. - ro'yage de ta Baie 
d'Hudton, etc., traduit d'EHls, 1 vol. in-lt. - John 
Christ. Adelung, GescMctOe der Scktffatrte* ; Halle. 
1768, p. 286. 

BCDSpN (Jean), philologue anglais, né à 
Widehope ( Cumberland ), en Jft52, mort à Ox- 
ford, le 27 novembre 1719. Après avoir fiait ses 
premières études sous Jérôme fiecbstetter, il 
entra en 167(3 au collège de Ja Jlejne à Oxford , 
comme éjève servjtenr. Il prit le grade de ba- 
cjielier es arts le 4 juif Jet i$81, celui de' maître 
le. 12 février 1 684, et se Ht ensuite recevoir doc- 
teur en théologie. Au mois de mars 1686 il fut 
élu membre du collège de l'Université. En 1701 
i) succéda au docteur Thomas Hyde dans la 
charge de bibliothécaire de la bibliothèque Bod- 
lynne à Qxford, place qull remplit jusqu'à sa 
mort, et en 1 7 1 2 U fut nommé principal de Sainte- 
Affarie-Hall. Des* études trop assidues et <Jes hahi- 
tudes trop sédentaires abrégèrent sa vie.. On a 
de Hudson : Jntrodifctio ad Çhronographiam , 
sive ars chronologica in epitomen redacta ; 
Oxford, 1691, in-8°; — une édition de Velleius 
Paterculus; Oxford, 1693, in-S° préimprimée 
en 1711 : la première édition contient les An- 
nales • Velleiani de Henri Dodwell, qui ont été 
rétranchées à la seconde; — uneédit. de Thu- 
cydide j Oxtord, 1696, in-fol.; — Geographiœ 
Veteris Scriptores Grasci minores, graece et la- 



373 HUDSOM 

ttye, cum JHssertatioftibus et Annotation^ 
bus ffenrici Dodwell : accedunt Gepgraphicq 
Arabièq t cum notis; Oxford, 1698, 1703, 1712, 
3 vol., in-8°. Cette collection, enrichie des. dis- 
sertations instructives mais diffuses de Pod^yell, 
était restée jusqu'à nos jours |e recueil je plus 
complet des Geographi fir$çi minores^ et elle 
devait à cette circonstance plus qu'à son mérite 
d'être très-recherchée: mais, ty. Ç. Muller enâ 
donné, dans la Biblioifihgue Grecgup de A. -F. 
Didot, une collection bien plus complète, ei 
très-supérieure pour la puret^ et l'interprétation 
du texte; — piomsii Salicarnassensis Qpeffi 
omnia, gfxee et latine^ Cfim Annotaiionibuf z 
Oxford, 170.4, 2 yol. m-fol.; — Dionys\\ Içnr 
gini de Sublimitaie t\belïus t cûmprsefatiqn^ 
de VitaetScïiptis Lpngini; notis, etc.; Oxfgr/J, 
1710, in-4°; l'718, inr6°; — offris 4fli^sta t 
De Voclbus Atiicis. et îfellen'icls '; Greqprtys 
Martinus, pe Grxcarunï titerarun^ Pronon- 
ciations ; Oxford, 1712. (tiré ; première édi- 
tion du glossaire de Mœrjs; — Fabularyty 
AZsopicarUnit Colfèctio ,' quôtguot grxce repe- 
riuntur; acçedit Interprefatio ïqiina'; 'px,- 
ford, 17J8, ïp T 8*; — flavii JfpsevfiïÔperq 
qux reperlr} potueïurit ottinia. 4 a. cod. ms$, 
diligentèr reçenstài, nova versipne' fonayi't 
et notis lïlusïrqvit /. Û.; Oxford J* J720, 
2 vol. in-fol. Cette excellente édition, imprimée, 
en grande partie du vivant d'Hudson. parjat a^rès 
sa mort par les soin$ d'Antoine ttaîl. Z. ,, 

Hall , préfacé à l*édilt. de Josèphe. — Wôod , Athense 
Qxonieniet, vol. II. — Bêographia Brititrïnica. - £baur- 

HUP9Q*(3 r ^. a «)f P«iûtre anglai*,ftt.s!i 
1701, dans le Pevonsbire,ejt mort en 1779. Élève 
de Bichardson, dont il épousa ^ filte, il fut, après 
la mort de son maître, le peintre favori (Ju grand 
monde , et amassa upe fortune c©nsjdéraji>Je, q^j 
lui permit 4e réunjr $ sa vi|Ja de Tyyickerçfoara 
une belle collection de tableaux et d'estampe^ 
Constamment heureux durant $a longue c#j?rière, 
il n'eut d'autre rival, dans la peinture de. por- 
traits , que le fameux Reynplq* , a qui jl avait 
donné des leçons. Son dessin est correct, mais 
froid; jl rendait exactement le module, mai» 
on lui reproche de ft'avnjr pa**u varier les poses' 
et le costume. On cite, comme ses meilleures 
pièces, les portraits 4e Çh^rks f 4u€ fa Marié*,, 
rotigh, de JJxndel, Je seul, dit-on, que l'jom con- 
naisse de ce compositeur, et de l'archevêque 
Potter. La plupart de ces ouvrages ont été gra- 
vés par John Faher le jeune. P. L— y. 

Cyclopsedia of Qiograpfry, t. II. 

hldsON (William), naturaliste anglais, né 
dans le Westmoreland,vers 1730, mort en 1793. 
Jt fut d'abord apprenti chez un pharmacien au- 
quel il succéda plus tard. Sa profession lui per- 
mit de se livrer à son goût pour l'étude des 
plantes, et il devint un des plus habiles bota- 
nistes de son temps. Il fut en correspondance 
avec Linné, Haller et d'autres naturalistes, et po- 
pularisa le premier en Angleterre ja classification 



— HUE 



874 



(lu botaniste suédois, En ftffy un inc/noMe qui 
détruisit, avec son magasin, son herbier et sa ppl- 
faction d'insectes, le décida à quitter les affaires. 
Il était membre de la Société royale et attaché ( on 
ignore à quel titre) au British-Museum. On a 
jfa luj une Flora Anglica , 1762, in-s°, avec une 
préface latine par son ami Benjamin Stiilingfleet. 
<M ouvrage, où les plantes sont arrangées selon 
le système de Linné, contribua beaucoup à faire 
pféritorr ce système en Angleterre. Hudson, qui 
avait particulièrement étudié les insectes et les 
mollusque*, méditait une Pùkn& britannique; 
Inais lés matériaux recueillis à cet effet furent 
détruits dans l'ineendie de 1763: Z. 

Ityjteney,' Skêtchê* of Botany. — Chalmers, Gênerai 
ptogrtPhiea* fHdUm- . » . 

î HlWgogi ( Henri* Norwm ), littérateur amé- 
rwsjn, né le 38 janvier 1*14, h Gornwsll ( État de 
Yermpnt). il fut d'abord ouvrier carrossier, et 
ne songea qu'assez tard à compléter ses études 
en suivant, de 1835 à 1840, les cours du collège 
de Mlddlebury. Après avoir pris ses grades 
universitaires , : il parcourut les grandes villes de 
l*tJnion, en faisant des lectures sur Shakspeare, 
son auteur favori, dont il commença en 1850 
une édition complète \ Shahspêqre's Works f 
Boston, 1850-1855, il vol., d'après celle pu- 
bliée en 182o à ChisWlck. En 1849 il fut or- 
donné prêtre de la secte congrégâtionaliste, et 
dirigea pepdant (Jeux ans (1853-1854) lé Church- 
Ùah f feuiïle ré|ïgieuse de New-York. On a de 
tili un grand nombre d'articles dé critique et de 
littérature insérés dans le vemocràtic Review 
(Ï84&), le Church Review et 1! American Whig 
tfeyiew. ' ' ' ''P. t-r-v. 

A 'fhé'Cyctop»d\aef Xmèrîcàn LiUràture t t. H. 

* IfttfbsoN LOWE(Slr)' Voyez Lowfij 

• * BtJB, trouvère français, quï vivait aii trei- 
iîième siècle ; fl ne reste de éës" diverses produc- 
tions que deux chansons contenues dans des 
manuscrits de la Bibliothèque Impériale. La se- 
conde nous apprend qu'il s'était croisé : il se 
qualifie de châtelain d'Arras. 6. B. 

r DlneâuK, Trouvères dti nari dé la France. — His- 
toire UMralrt 4e la firence, tu XXIJ1, p. «|6. 

i|ij« op |^aijb-$elv^, trouvère fran- 
çais fui trei^v^oe ^èclp; U ae reste de lui qu'un 
fragment 4e chanson que , d'après, le roman de 
Guillaume ,<jls Dôle> l'empereur Conrad com- 
manda ^ ce ménestrel dans. une cour qu'il tint 
à Mayeùce, G. B. 

Histoire Littéraire de la France, t. XXIII, p. W8. 

W^tje de la p'ERTÉ , châtelain et trouvère 
français, qui vivait au treizième siècle et sur 
lequel on n'a que de vagues renseignements. Il 
prit une part fort active à la querelle des grands 
feudataires contre la régence de Blanche de Cas- 
tille ; il reste de lui trois sirventois, qui le mon- 
trent comme un ennemi redoutable de la mère 
de saint Louis ; il y attaque vivement le clergé 
et le iiomte de Champagne Thibaut. Ces pièces, 
au jugement de M. Paulin Paris, sont remar- 
quables parla netteté de l'expression, la régula- 



375 



HUE 



376 



rite des vers et l'énergie, sinon la sincérité, de 
l'accusation. Elles ont été insérées dans le Ro- 
mancero français publié par M. Paris en 1833 
et dans le Recueil de Chants historiques édité 
M. Leroux de Lincy. G. B. 

Hittoire Littéraire de la Frmnee, t. XXIII, p. 618- 
6SJ. 

* hub du taillis (Pierre- Paul ), juriscon- 
sulte français, né à Chartres, le 19 mars 1743, 
mort dans la môme ville, en 1784. Avocat «a par- 
lement de Paris, il s'est distingué par son rare 
dévouement pour les malheureux. On a de lui : 
Lettre du 25 décembre 1776 en faveur des 
Quatre Innocents inculpés du vol des meubles 
et vases sacrés du château des Faures , près 
Ablis; » — Lettre en faveur de Cirasse , 
chirurgien au Gué de Longroi , et consorts ; 
— Mémoire pour de BiontbaUly et sa femme; 
1771. R— a( de Chartres). 

Gazette des Trib., 1777, t. II, p. 44. - Doyen, Histoire 
de Chartres^ t. II, p. 461. 

hue (François) t Français connu par son 
dévouement à la famille royale, né à Fontaine- 
bleau, en 1757, mort à Paris, le 17 janvier 1810. 
Il appartenait à une famille de magistrats, et ac- 
quit, en 1787, la charge d'huissier de la chambre 
du roi. En 1791 il fut nommé premier valet de 
chambre du dauphin. Dans la journée du 20 juin 
1792 il se plaça près de la reine et du jeune prince 
pour les protéger. Le 10 août il était resté aux Tui- 
leries après le départ du roi ; il dut s'échapper du 
château par une fenêtre, sauta dans le jardin et 
s'enfuit à travers les coups de fusil jusqu'à la 
rivière, où il gagna à la nage un bateau qui le 
tira de danger. Le lendemain il pénétra aux 
Feuillants, et reprit son service auprès du roi. 
Après la translation de Louis XVI au Temple, 
qui eut lieu le 14 , Hue fut compris au nombre 
des personnes désignées par le roi pour le service 
des princes, et choisi pour celui du dauphin. 
Dans la nuit du 19 août, il fut conduit à l'hôtel 
de ville avec les autres personnes de service, 
interrogé et réintégré dans la Tour, où il resta 
seul attaché au roi et à la famille royale. Un 
peu avant le 2 septembre, il rat arrêté de nouveau 
et conduit à l'hôtel de ville, d'où Billaud-Va- 
rennes voulait le faire partir pour l'Abbaye ; mais 
Tallien le fit retenir à la commune. Hue resta 
ainsi enfermé dans un cachot de l'hôtel de ville 
pendant tout le temps du massacre des prisons. 
Depuis ce moment les portes du Temple lui furent 
fermées. Mais son zèle lui suggéra les moyens de 
faire encore parvenir des renseignements utiles 
à ses anciens maîtres. Un jour qu'il écrivait à la 
reine pour lui rendre compte d'une commission 
dont elle l'avait chargé, il fut surpris par des 
commissaires des comités révolutionnaires qui 
venaient visiter ses papiers ; il n'eut que le temps 
de mettre sa lettre dans sa bouche et de l'ava- 
ler. Dans son testament , Louis XVI se souvint 
de la fidélité de ce loyal serviteur. « Je croirais 
calomnier les sentiments de la nation , y dit-il , 
si je ne recommandais ouvertement à mon fils 



MM. de Chamilly et Hue, que leur 1 véritable 
attachement pour mot avait portés à s'enfermer 
avec moi dans oe triste séjour, et qui ont pensé 
en être les malheureuses victimes. » Après la 
mort du roi, Hue continua de correspondre avec la 
reine, et se hasarda à pénétrer dans la Concier- 
gerie pour la voir. Arrêté de nouveau, il passa de 
la prison de La Force dans une maison d'arrêt 
du faubourg Saint-Antoine, et de celle-ci à l'ab- 
baye de Port-Royal, puis enfin à la maison de 
détention du Luxembourg. Le 9 thermidor loi 
rendit la liberté. Lorsqu'on décembre 1795, le 
Directoire consentit à l'échange de la fille de 
Louis XVI avec les députés français détenus eo 
Autriche, Hue, sur la demande de la princesse, 
obtint la permission de l'accompagner; il resta 
auprès d'elle pendant les trois ans de séjour 
qu'elle fit en Autriche ; et, lorsqu'elle en partit 
pour aller à Mittau épouser le duc d'Angouléme, 
il la suivit, et fut attaché au service dn roi et 
qualité de commissaire général de sa maison. En 
1806, il vint en Angleterre pour faire imprimer 
un livre qu'il avait composé dès 1794 sor la fia 
du règne de Louis XVI. Au moment de retour- 
ner à Mittau, il reçut de Louis XVUI Tordre de 
se rendre à Hambourg pour remplir auprès du 
sénat de cette ville les fonctions d'agent confiden- 
tiel du roi ; mais il ne put remplir cette mission : 
les autorités de Hambourg lui enjoignirent de 
se constituer prisonnier dans une forteresse ou 
de sortir immédiatement du territoire; il pré- 
féra se cacher dans la ville et y resta neuf mois, 
à la faveur d'un passeport que lui délivra Bour- 
rienne, ministre de l'empereur. Cette position 
n'était pourtant pas sans danger ; Hue se déter- 
mina à quitter Hambourg sur une simple barque, 
et regagna la Hollande; de là il revint en Angle- 
terre, et se rendit à Mittau. En 1814, il rentra en 
France à la suite de Louis XVIII, et donna ses 
premiers soins à la réimpression de l'ouvrage qn'il 
avait publié en Angleterre. Lorsque Louis XVUI 
dut quitter la France au retour de Napoléon en 
1815, Hue reçut la périlleuse commission de re- 
tirer du trésor de la liste civile les diamants de 
la couronne, et d'en accompagner le transport 
hors du royaume, ainsi que celui d'autres valeurs 
en numéraire. A la seconde restauration , Hue 
reprit les fonctions de premier valet de chambre 
du roi et de trésorier général de sa maison mili- 
taire et de son domaine , emplois que le roi lui 
avait confiés déjà à sa première rentrée. H en jouit 
peu de temps. On a de lui : Dernières Années 
du Règne et de la Vie de Louis XVI; Londres, 
1806, in-8°; Paris, 18l4,in-8* ; Paris, 18l6,m-6° : 
les éditions françaises ont été revues par Gence. 
M. Chavard a publié : M. Hue peint par lui- 
même, ou lettres autographes de ce modèle 
de la fidélité, avec des remarques sur des 
sujets politiques à Vordre du jour; Paris, 
1824, in-8°. 

Son fils, le baron André-Marie Htns, né en 
1786, mort le 16 septembre 1854, dans sa pro- 



377 



HUE — HUEMATZIN 



378 



priété de Saint-Sauveur, près de Bray (Seine-et- 
Marne), servit en 1804, comme sous-lieutenant, 
dans le régiment de Dillon, à la solde de l'An- 
gleterre, fit plusieurs campagnes à Malte., en 
Sicile et en Espagne. Revenu en France en 1814, 
il fut nommé brigadier dans la l re compagnie 
des mousquetaires et suivit Louis XVUI à Gand. 
Devenu, à la seconde restauration, capitaine et 
aide de camp du duc de Feltre, il succéda à 
son père dans sa charge de premier valet de 
chambre du roi. U remplit les mêmes fonctions 
auprès de Charles X, et après la révolution de 
Juillet, il se retira dans sa propriété de Saint- 
Sauveur, où il vécut dans la plus grande retraite 
jusqu'à* sa mort. L. L— t. 

Geoee, dans U Bioçr. des rivants. — Arasait. Jay, 
Joay et Norvins, Bioçr. nouv. des Contemp. — llabbe, 
Miogr. vnic. et portaU des Contemp. 

X HUE (Anatole François), marquis de Ca- 
ligny, le dernier représentant de cette famille, 
naquit à Valogne, le 31 mai 1811 ; il est l'auteur 
de plusieurs inventions hydrauliques et d'un mé- 
moire sur l'hydrodynamique, couronné par l'Ins- 
titut en 1839. H a reçu une médaille de première 
classe à l'exposition universelle de 1855 ( section 
d'Agriculture). 

Doeum. partie. 

■CE DE CALIGNY. Vop. CàUGNT. 

hubl (Joseph-Nicolas), philosophe français, 
né à Mattaincourt, le 17 juin 1690, mort àRomeux, 
le 3 septembre 1769. Après avoir fait ses études 
à Paris, il rat nommé curé de Romeux. Ayant 
connu l'abbé de Saint-Pierre, il lui emprunta son 
goût pour les projets et les réformes tendant ai* 
bien public. Il provoqua les décrets qui ordonnè- 
rent que les grandes routes de la Lorraine rossent 
plantées d'arbres; il étudia le plan d'un canal de 
jonction entre la Méditerrannée et la mer du Nord ; 
il obtint qu'un synode se prononçât contre le 
danger des inhumations précipitées. Un Essai 
philosophique sur la Crainte de la Mort lui est 
attribué par Barbier (Dic(ionnaire l des Anony- 
mes ) ; cet ouvrage est demeuré peu connu. Tou- 
chant à des questions délicates, Huel voulut 
réformer les maisons de religieuses et les mettre 
en mesure de rendre à la société d'importants 
services. Il fit imprimer, en 1750, sans y mettre 
son nom, un livre intitulé : Moyen de rendre 
nos religieuses utiles et de nous exempter 
des dots qu'elles exigent. Faisant table rase 
de treize cents couvents de filles qu'il suppo- 
sait exister en France, Huel demandait qu'on 
les rebâtit sur un plan plus modeste, et que 
les trente mille religieuses qu'ils renfermaient 
lussent réparties dans deux mille cinq cents 
maisons groupées en cinquante districts, et char- 
gées de l'éducation publique. Les maisons nou- 
velles devaient, suivant l'importance des villes 
où elles auraient été élevées , contenir cinquante, 
vingt-cinq ou dix religieuses. Une administration 
centrale aurait régi avec économie les ressources 
des anciens couvents. Ces idées n'étaient point 
dénuées de justice mais elles étaient alors impra- 



ticables. La cour souveraine de Nancy décréta 
la suppression du livre qui les développait; Huel 
se fit connaître, et l'affaire n'eut pas de suite ; 
onze ans plus tard, son écrit fut réimprimé avec 
quelques changements sans importance, mais il 
passa inaperçu. Des bibliographes ont signalé , 
mais à tort, une troisième édition. G. B. 

Durival, Description de la Lorraine et du Uarrots. — * 
Michel, Dictionnaire historique des Hommes Marquants 
de l'ancienne province de Lorraine, 18». - V. vuic- 
mtn, Biographie Fosgienne .«■ 184*. — Clesse, Remarque* 
bibliographiques sur Huel ,• dana les Mémoires de VA- 
cadémie de Nancy, 1856, p. Ml. 

huklya (Alonsb-Sanchez), navigateur es- 
pagnol, vivait à la fin du quinzième et au com- 
mencement du seizième siècle. On lui attribue la 
découverte du Nouveau Monde. H était de cette 
petite ville de Huefva qui fait partie du comté 
de Niebla et qui compte parmi ses anciens ha- 
bitants tant de marins célèbres. On a prétendu 
que ce personnage , jeté par le hasard des tem- 
pêtes sur les côtes de l'Amérique méridionale, en 
serait revenu avec trois ou quatre de ses com- 
pagnons, et qu'il aurait abordé à nie de Madère ; 
puis on a ajouté qu'ayant recueilli ces marins, 
Colomb en obtint les premiers renseignements 
qui le guidèrent ; on a fait le même conte à pro- 
pos de Pereetrello, son beau-père. Georges Horn, 
Laet, Aldejpete, Jozé de Acosta, Grotius lui-même, 
rapportent cette tradition, plus ou moins alté- 
rée; Mariana affirme même le débarquement de 
Huelva à Madère ; Garcilasso, qui était néà Cusco, 
mais qui vivait à Cordoue, l'accueillit; enfin elle 
est très-sérieusement admise par fray Jerommo 
de La Conception,- dans son livre intitulé Cadiz 
Ilustrada. Les prétentions des Espagnols sont 
aujourd'hui rejetées. F. D. 

Ocios de Bsp a fioles ewiiorados, t. VI, p. itl. 

*BI7BMATZ1N, savant mexicain, vivait à 
Tezcuco au septième siècle, et passait pour le 
docteur par excellence de cette Athènes du Nou- 
veau Monde. On lui attribue la composition du 
Teoamaxtli ou Teomaxtli (le livre divin) (1), 
Cette espèce d'encyclopédie faisait connaître, 
dit-on, les émigrations de la race aztèque de- 
puis son départ des rivages de l'Asie jusqu'à 
son arrivée sur le plateau de l'Anahuac; elle 
spécifiait les haltes diverses que dut faire la 
nation envahissante sur les bords du Rio Gila. 
On affirme que le Teomaxtli faisait partie de 
ces monceaux de livres aztèques, condamnés 
au feu sans examen par l'évèque de Mexico, 
Zumarraga. Peut-être a-t-on exagéré l'impor- 
tance de ce recueil hiéroglyphique, au point 
de vue de la mythologie et de l'histoire; c'était 
néanmoins une source précieuse, dont l'ab- 
sence se fera longtemps sentir. Nous ne pou- 
vons nous figurer aisément aujourd'hui l'étendue 
des pertes littéraires que fit alors le Mexique. 
Peut-être que si l'œuvre de Huematzin fût 

(1) Selon les derniers documente palliés par M. l'abbe 
Brasseur de Bourbon rg, ce Htre célèbre aurait «ne ori- 
gine plus ancienne encore. 



379 HUEMATZIN 

parvenue jusqu'à nous, on aurait maintenant dès 
renseignements pour établit la signification réelle 
des hiéroglyphes mexicains. Lorsqu'on se rap- 
pelle que le palais de Tezcttco renfermait dans 
son sein certaines divisions intérieures destinée* 
aux docteurs qui s'occupaient spécialement de 
certaines sciences ; quand on a présent an souve- 
nir ce qui nous est raconté des vastes ménage- 
ries, des jardins délioieux consacrés à. l'étude 
de l'histoire naturelle , et qtil e*4staient simultt- 
nément à Mexico et à* Tezcuœ , il est difficile 
de borner le rôle de Hueraatzjn à celui d'un 
simple théoricien développant des traditions 
barbares et purement fantastiques (1). Ce savant 
aztèque, sur lequel nous, ajons des renseigne- 
ments si peu précis, paraissait avoir fondé* son en- 
seignement sur des, o^Kervalfons très«multipliéest 
En 1626 il n'y avait peu,t-étre pas en Europe un 
seul édifice consacré à la culture des sciences 
que l'on sût comparer 'aux vastes établissements 
que nous venons de citer m\ dont Cortez décrit 
minutieusement jui-méme le pins important, 
Ferdinand Demis. 

Torqocwada, Monarchia Indiaw. fr Pus ta ma nie» 
Chroniea Mexicana; Mexico, un, in-8°. ~ Prescott, 
History of Mexico, t. 1, p. 86. — L'Abbé Brassettr de 
Bourg, Histoire des Nattons civHitéeèdWMaritue et dm 
V Amérique centrale, t. I. .. , . ■ 

UUBN (Nicole hf). Voy* Le BÎuiîn. .", 

huerne ms pommjkcse (L.-F)y écono- 
miste français, né à Paris, en i 7 65» mort le 
25 juin 1840. Élu par le département de Seine- 



et-Marne membre de la chambre des députés» où 
il siégea de 1615 à 1816 et de 1820 à 1827, il 
s'y occupa des questions d'économie publique, 
dont quelques-unes furent l'objet de notices dont 
voici les principales .Des Canaux navigables 
considérés d'une manière- générale , avec, de $ 
Recherches comparatives sur. la Navigation 
intérieure nie ila France et 4e V Angleterre ; 
1822, in-4% avecatlas.de U pi.; — Des Colo- 
nies agricoles et de leurs avantages, pour 
assurer des secoure à l'honnête indigence^ 
extirper la mendicité , réprimer les malfai- 
teurs et donner., une, existence rassurante 
aux forçats libertés , tout en accroissant la 
prospérité de, V agriculture \ja sécurité pu- 
blique, la richesse deJÉUtft avec des re- 
cherches comparatives- <tvr Us divers modes 
de secours publies § , de atfanisajtèon et de ré- 
pression des, délits i ain$h*m,*ur les moyens 
d'établir avec succès. des* colonies, agricoles 
en France et ia t nécessité :d y. recourir ; con- 
tenant plusieurs tableaux statistiques, etc.; 
■Paris, 1832, in** * .-ajrecviâ tableaux; — Re- 
cherches sur un Moyen spécial de Crédit pu- 
blic pour terminer prompiement les Canaux 
entrepris* par VÉtui*. sans emprunt et en al- 
légeant tes ithaDg es actuelles des contribua» 

- <l)ll «st évidejtf que le» ToUèquct on le* peuples de 
race iaconnue qui ont occupé le Guatemala et le Yucatan i 
étaient supérieurs aux Aztèques. Peut-être Iluemaûl'n 
éUlt-11 simplement le dépositaire de leur doctrine. 



HUET 380 

blés ; Paris, 1832, in-8* ; — Observations gé 
nérales sur les Causes de l'existence des Ma- 
rais et sur les moyens de les assainir ; Parts, 
1834} in-8* (Extrait de la 18*lr?r. de La Maison 
Rustique dû dix-neuvième siècle ) ; — Ques- 
tions et réponses sur les moyens d'établir 
en France des colonies agricoles de divers 
genres et étyfbrfner une société de bienfai- 
sance propre à eh assurer te succès, etc. ; 
Paris, 1838, iri-8°. îtuerne de Pomtnetise a tra- 
vaillé aux Annales des Ponts et Chaussées, an 
Journal de ? industrie, à la MaAsbn Rusti- 
que, etc. ' • ' G. tra F. 

Joutridl dt Us tibrdirle. t«fe, lftil, 189*. — Nôtict 
sur les TrsSaué de M. Huerne de Pomsneutey Parti, 
in-8». 

ttfrfeRTA (LA). Vày.hk Huêrta. 
niiEsçAR et D'ifttttè ( rMa Mariana de 
Silva-Bazajs y SiBMiENTo, duchesse de), peintre 
espagnole, morte h Madrid, le 17 janvier 1784. 
Elle montra beaucoup de talent dans le dessin 
et la peinture, et mérita d'être reçue membre de 
l'Académie iîé San-Férharido, Te 20 janvier 1766. 
Plus tard elle fut élevée à la vice-présidence de 
cette assemblée. Elle a laissé plusieurs bons ta- 
bleaux qui se trouvent dans les salles de l'Acadé- 
mie; mais un, puis grand nombre appartiennent 
à des, gajerias particulières. Dena Maria de SiJva- 
Bazàn avait été veuve deux fois ; elle futenterrée à 
Saa*$alvadoYi auprès dn duc d'Arcos l son dernier 
mari. On leur a érigé un. élégant cénotaphe, sur 
, lequel figurent leurs bustes sculptés par les Mi- 
! «bel; - A. SB 1. 

QntUet) Dict, de* PeiStru espagnols, — Las Constitu- 
tiones u Jetas de la* Academia de S dn- Fernando de 
lâdria: 

HfcEir { Pierre- Ùâniel)\ évoque o^Avraiicnës, 
un dés hômthes les pfflft savants tfe Ffânoe , na- 
quit à Càen, te 8 févrieï iô40, & mourut à Paris; 
le ^janvier mi, dans la h^afsdh t>rofesgeiïeS 
Jésûftes, où il s'était retiré. Son J*rt*, faitie! 
Huet, conseille! 4 du roi et secrétaire eà là cour de 
S. M., avait épflusë uneftouehnaise, plus jeune 
que lui, Isabelle ftlloh de Berferaville , dont il 
eut deux fils eltotiàfré filles. Il lYffltmit dé bonne 
heure, et ïaissM a sa fetrime fa tutelle de ses en- 
fants. Pierre-Daniel, élevé d'abord sons les yeux 
de sa mère, apprît à cinq ans les premiers élé- 
ments delà langue, qui lui furent enseignes par 
un prêtre do voisinage. 11 perdit Mentor cette 
mère dévouée dont on vanttît'tes grâces & Tes* 
prit. Recueilli par une de ses tantes, épouse de 
Gilles Macé, mathématicien renommé, qui plus 
tard lui légua sa bibliothèque, il fit ses premières 
études dans le 'monastère des PP. Croisieis , puis 
chez les Jésuites du collège dn Mont, oh il acheva 
ses humanités. Il y avait compté parmi nés con- 
disciples Bernard GigauH de Belle/ont, qai de- 
vînt en 1 66Q maréchal de France, et qui avait en 
pour précepteur Brébêuf, te traducteur de La 
Pharsale. Une éducation sagement dirigée dé- 
veloppa à la fois les facultés infellectaefles et» la 
constitution physique du jeune Huet, habile dans 



381 



HUET 



382 



tous les exercices du corps. A treize ans, il étudia 
les belles-lettres, sous Antoine Halley, habile 
professeur et poëte latin distingué, et la philoso- 
phie sous le P. Mambrun , qui lui inspira un goût 
très-vif pour les mathématiques et particulière- 
ment poiir la géométrie. A seize ans, il commen- 
çait l'étude do droit; lorsque la lecture de la Géo- 
graphie sacrée de Bochart lui inspira une nou- 
velle ardeur f>oùr lès recherches de l'érudition, et 
lui fit sentir la nécessité, pour acquérir une con- 
naissance approfondie de l'antiquité, d'étudier sé- 
rieusement le grec et l'hébreu. Il se passionna 
pour cette double étude* et il nous apprend lui- 
même qu'il lut pendant sa vie vingt-quatre fois 
le texte hébreu des Écritures. Lié bientôt avec 
Bochart, avec les deux Cahaignes, dont l'un a 
écrit la vie Abrégée des Hommes illustres de 
Caen, Avëd Thouroude et Grentemesnil, savants 
hellénistes, Daniel Huet avait dès l'âge de vingt 
ans pris tin raiig-distlngué dans la science et dans 
le monde. A Paris, où l'appela le désir d'aller 
puiser l'instruction dans son plus brillant foyer, il 
rechercha tous tes hommes d'élite dont le com- 
merce pouvait lui être de quelque secours dans 
ses aspirations encyclopédiques : les PP. Sirmond 
et Pétau , auxquels il a écrit plusieurs lettres la- 
tines; les poètes latins Rapin, Guyet et Com- 
mire$- les laborieux .et érudits commentateurs 
Philippe Labbe, Coeaari, Gârnier et les deux 
frères Dupuy. Grand amateur des curiosités bi- 
bliographiques, il se lia aussi avec te conserva- 
teur de la Bibubthôque MazarinL, Gabriel Naudé» 
qui lui donna d'utiles conseils pour former la 
sienne. Il était âgé de vingt-deux ans, en 1652, 
lorsque la reine Christine appela à sa cour, sur 
la recommandation de Vossius, l'illustre Bochart, 
qui invita son jeune ami Huet à l'accompagner 
dans ce voyage. Son absence ne fut pas longue. 
Lorsqu'après s'être arrêté quelque temps à Co- 
penhague , où il admira* dans le Collège Royal* 
le globe d'airain fabriqué par Tychotftrahé, il 
fut arrivé à Stockholm , la -reine de Suède avait 
déjà perdu une partie de son ardeur pour la 
conversation» deSigens érudiU, et son premier 
médecin venait d'obtenir d'elle qu'elle suspen- 
drait , dans l'intérêt de sa santé^ les études vers 
lesquelles l'entraînait une ardetur trop passionnée. 
Huet trouva à k Bibliothèque loyale de Stock- 
holm un manuscrit qui contenait quelques frag- 
ments des Commentaires 4 } Qw&m sur saint 
Matthieu ; et cette décnûvçrte' lui inspira la pre- 
mière idée de l'édition qu'il donna plus tard de 
cet ouvrage- L'hiver approchait, et, se hâtant 
de prendre congé de la reine, il se dirigea vers 
la France, en passant par Leyde, où il salua 
Minsius, et par Amsterdam, où il visita Alexan- 
dre Morus, Isaac Vossius et le rabbin Manassé- 
Ben- Israël. De retdur dans sa ville natale, il se 
vit arec plaisir associé, ainsi que Bochart, à la 
nouvelle ACatfémi* que -tenaient d'y fonder plu- 
sieurs hommes de lettres , réunis par Jacques 
Moysant de Brieux, ancien conseiller au parle- 



ment de Met?,, et dont Segrais, Halley et Mé- 
nage faisaient partie. 

A cette époque commencèrent ses démêlés 
avec Bochart, auquel il s'était empressé de com- 
muniquer son manuscrit des Commentaires 
d'Origène. Bochart, ayant voulu lire le fameux 
passage controversé sur l'Eucharistie, vit avec' 
surprise que Huet y avait omis une dernière 
ligne , et aussitôt il le dénonça au monde savant 
comme s'étant rendu coupable de mauvaise foi. 
Il n'en fallait pas davantage pour les brouiller. 
Huet ne s'en livra pas avec moins d'ardeur à sou 
travail favori, et n'employa pas moins de dix 
années pour l'achever. f Son ancien professeur, 
Antoine Halley, et Jean- Baptiste Coteiier, l'aidè- 
rent de leurs. avis, pour une publication faite par 
lui avec le plus grand soin. De nouvelles liaisons 
avec les savants et les littérateurs vinrent étendre 
le cercle de ses études, il se mit alors en rapport 
avec Chapelain, dont i) prit plus d'une fois la 
défense contre des critiques, exagérées sans 
doute quand elles s'adressaient au savant, et lé- 
gitimes quand elles condamnaient le poëte ; avec 
Etienne te Moyne, ie, pasteur Morin, et Baille- 
hache , savants hellénistes ou orientalistes ; avec 
le duc de Longueville, gouverneur de Normandie, 
qui l'invita plus d'une, fois à faire sa partie d'é- 
checs; avec la belle et savante abbesse de l'ab- 
baye aux Dames de Caen, Mariè-Éleonore de 
Rohan , qui a tracé, selon là mode de l'époque , 
un portrait de Huet, âgé d'environ Vingt-huit 
ans, portrait que l'on trouve imprimé, en 1659, 
à la suite des Mémoires de M? 1 * de Môptperisier,, 
avec celui de la spirituelle abbesse, qu'il avait 
composé lui-même. Les Mémoires defluet nous 
le montrent, en 1659, fixé à Paris, après avoir 
refusé d'aller à Rome auprès de la reine Christine, 
qui l'y avait appelé. On lui avait aussi propose 
de se charger de l'éducation de* Charles-Gustave, 
héritier de cette princesse au trône dé Suède. H 
ne put se résoudre à quitter la France. 

Huet prenait,, à cette époque, parti en faveur 
des anciens contre ses nouveaux amis fresmarets , 
Sairit-Sorlin et Charles Perràuty, grands partisans' 
des modernes, qui auraient, disait-iîj pensé tout 
autrement, s'ils eussent été plus versés dans la 
connaissance de l'antiquité. Il fréquentait Pélisson 
etConrart. Il dit du premierjque la nature lui avait 
donné les grâces de»l'esprit pour le dédommager 
des imperfections du corps; et*Jù second, Çu'jl 
était étranger à la littérature ancienne-, mais 
qu'il passait pour être versé dans les lettrés mo- 
dernes. Santeuil et Charles Dupérrier étaient 
deux poètes latins estimés, rien de plus ^ ajoute- 
t-il. Les grands travaux de Huygens le rappelè- 
rent à l'étude de l'astronomie. Son goût pour les 
études scientifiques se réveilla, et, se trouvant à 
Caen, en 1662, il y fonda une Académie à^s 
Sciences, qui correspondit bientôt avec la Société* 
royale de Londres, et qui, subventionnée par Col- 
bert, compta parmi ses membres le duc de Beau- 
villiers de Saint- Aignan, membre de l'Académie 



383 



HUET 



384 



Française. Il se mit à étudier l'anatomie, et, quoi- 
que myope et malade des yeux, « il disséqua , dit- 
il , plus de hait cents yeux de divers animaux, 
pour comparer cet organe, à longue ou à courte 
vue, chez les différents oiseaux ». A l'aide des 
instruments astronomiques de Gilles Macé, il ob- 
serva le passage de la comète de 1664, dont il 
indiqua le parcours à ses amis. Il cultiva aussi 
la chimie, et le résultat de ses études en cette 
partie fut la composition d'un poème sur le sel, 
qu'il dédia, en 1670, au duc de Montausier, qu'il 
avait connu, lorsque, fréquentant l'hôtel de Ram- 
bouillet, il se laissait aller aux séductions du 
bel esprit, et se déclarait l'admirateur de Ma- 
deleine de Scudéry, l'illustre Sapho, «t de Julie 
d'Angennes, pour laquelle le doc, qui l'épousa 
après une cour assidue de quinze ans, fit com- 
poser la fameuse Guirlande de Julie. Au mi- 
lien d'études si variées, il ne négligeait pas les 
beaux-arts; il connaissait Le Brun, et ce fut à 
sa prière' que celui-ci peignit le tableau du Bap- 
tême de Jésus-Christ, destiné à l'église de Saint- 
Jean, dans laquelle Huet avait été baptisé. Le 
jésuite Parvilliers , qui avait enseigné à Damas 
la littérature arabe, se trouvant à Gaen, renou- 
vela son zèle pour l'étude de l'arabe et du sy- 
riaque. C'est pendant le séjour qu'il fit à Caen, 
queBochart, au milieu d'une discussion soutenue 
contre lui sur l'origine de quelques médailles es- 
pagnoles, mourut subitement, le 16 mai 1667, 
d'une attaque d'apoplexie. 

Huet, qui avait, dans sa jeunesse, traduit en 
latin les Pastorales de Longus et composé un 
roman médiocre, Diane de Castro , ou le /aux 
inca, ouvrage tout rempli des fadeurs et des 
galanteries mises à la mode par l'hôtel de Ram- 
bouillet, écrivit en 1670 son Essai sur l'Origine 
des Romans. Il y soutenait, avec l'auteur de 
Télémaque et l'évêque Camus, que les com- 
positions romanesques peuvent êtres lues avec 
profit, pourvu qu'elles aient un but moral. Son 
travail rat imprimé en tète du roman de Zaîde, 
par madame de La Fayette, qui lui disait plai- 
samment à ce sujet : « Nous avons marié nos 
enfants; » L'année précédente, il avait composé 
une hymne latine dédiée à Notre-Dame de la 
Délivrance, que l'évêque deBayeux avait adoptée 
et consacrée parmi les chants d'église. Aucun 
genre ne lui était étranger. iS mort de Picart de 
Perigny, ayant laissé vacante, en 1670, la place 
de précepteur du dauphin, fils de Louis XTV, le 
duc de Montausier proposa au choix du roi Mé- 
nage, Bossuet ou Huet. Le roi choisit Bossuet pour 
précepteur et Huet pour sous-précepteur. Ins- 
tallé à la cour, Huet continua à mener de front les 
travaux les plus divers. Il dirigeait pour son royal 
élève cette belle édition des classiques ad usttm 
delphini, qu'il enrichissait de notes et d'expli- 
cations, et pour laquelle il avait appelé à son 
aide plusieurs savants, parmi lesquels il cite avec 
honneur Anne Lefêvre, plus connue sous le nom 
de madame Dacier. Il continuait à préparer son. 



édition d'Origène, et il publia un de ses plus 
importants ouvrages, sa Démonstration évan- 
gélique. Il fut en 1674 élu membre de l'Aca- 
démie Française; et ce fut Flécbier qui répondit 
au discours du récipiendaire. 

Pendant qu'il travaillait à la Démonstration 
évangélique, de sérieuses réflexions sur la vie 
un peu mondaine qu'il avait menée jusque-là 
le fortifièrent dans son projet d'entrer dans les 
ordres ecclésiastiques, et il se prépara peu à 
peu au changement d'existence que devaient lui 
imposer ses nouveaux devoirs. « Je changeai 
d'abord la forme de mes habits , dit-il, dans ses 
Mémoires. Je m'étais vêtu à la mode des gens 
de cour, on, pour ainsi dire, à la mode des 
hommes d'épée ; je modifiai graduellement mon 
costume, et je fis en sorte que l'on s'aperçût à 
peine du changement opéré dans ma manière de 
me vêtir. » Il avait été admis par l'évêque de 
Bayeux, François deNesmond, à entrer dans 
les ordres mineurs. Le souverain pontife l'auto- 
risa à abréger tes délais d'usage; et, après s'être 
livré pendant trois jours consécutifs à de pieux 
exercices, il fut ordonné prêtre, en 1676, par 
Claude Auvry, évêque de Coutances , près du 
tombeau de sainte Geneviève. En 1678 il reçut 
du roi l'abbaye d'Aunay, vacante par la mort de 
Charles Fournier, et il en prit possession au 
mariage du dauphin, en 1680. Bien que son sé- 
jour dans cette riante abbaye, située aux bords 
de l'Orne, et qu'il appelait son Tempe, lui causât 
plus d'un embarras, par suite des discussions 
qu'il eut à soutenir, et qu'il soutint en proprié- 
taire normand , peu disposé à faire l'abandon 
de ses droits oontre les moines, qui coupaient 
ses bois et vendaient son poiré et son cidre, ce 
rat là cependant qu'il put se livrer avec le plus 
d'abandon et de charme à ses études favorites. 
Il y composa ses Questions d'Aunay, sur VAc- 
eord delà Foi et delà Raison; sa Critique 
de la Philosophie de Descartes; les Mémoires 
pour servir à V Histoire du Cartésianisme; 
sa Dissertation sur la Situation du Paradis 
terrestre; ses notes sur l'Anthologie Grecque, 
ses Origines de Caen; il y donna une édition 
de ses poèmes grecs et latins. En 1685 il eut à 
soutenir contre Boileau une vive discussion, ?ui 
le passage du Traité du Sublime, où Longin rap- 
pelle le Fiat lux de la Genèse , dans lequel Huet 
ne trouvait de sublime que la merveille racontée. 
La même année, Louis XIV l'appela à l'évêché 
de Soissons; mais, après avoir attendu pendant 
qnatre ans les bulles pontificales, Huet se décida 
à permuter avec Brùlart de Sillery et à accepter 
en échange l'évêché d'Avranches , où il ne fut 
installé qu'en l'année 1692. Sa passion pour l'é- 
tude ne l'abandonna pas au sein de ses fonc- 
tions épiscopales , « malgré les plaintes des pay- 
sans des environs, que ses gens renvoyèrent plus 
d'une fois en leur disant: Monseigneur étudie, 
etqui protestaient, en se retirant, qu'ils deman- 
deraient au roi un évêque qui aurait* fini ses 



385 



HUÊT 



386 



études. » Après avoir pendant dix ans exercé ses 
fonctions épiscopales, il s'en démit, en 1699, 
avec la permission du roi, qui, par forme de 
compensation , le nomma abbé de Fontenay. U 
était là tout auprès de sa Tille natale; mais il 
ne reçut pas de ses compatriotes la haute con- 
sidération et les égards auxquels il avait droit 
Il y fat inondé, dit-il, d'une pluie de procès, et 
il avoue lui-même, du reste, dans sa correspon- 
dance inédite avec son neveu de Char signé de 
Piédoue , qui fournit sur sa vie et sor son ca- 
ractère des révélations précieuses, qu'il sou- 
tint parfois ses droits avec une ftpreté qui sou- 
leva contre lui l'opinion publique. Huet se dé- 
goûta de son abbaye, et prit avec les jésuites 
de Paris des arrangements par suite desquels il 
trouva dans leur maison de la rue Saint-An- 
toine un logement où il s'établit toutes les fois 
que ses affaires rappelaient dans la capitale, et 
où il finit par s'installer tout à fait. 

Sa vieillesse n'avait ni altéré ses facultés mo- 
rales, ni affaibli sa robuste constitution, qu'il 
avait toujours soutenue avec le plus grand soin 
à l'aide de l'excellent régime auquel il s'assujettit 
dès l'âge de quarante ans. « Il ne soupoit jamais, 
dit l'abbé d'OIivet, dlnoit sobrement, et prenoit 
le soir le bouillon rouge du médecin Détonne. » Il 
a, dans un poème sur le thé, qu'il envoyait à 
Graevius, en 1687, signalé les services que lui 
avait rendus cette plante et l'heureuse influence 
qu'elle exerçait sur sa bonne humeur, sa santé 
et ses forces. Il se délassait de ses travaux d'é- 
rudition en composant des vers grecs et latins, 
des églogues, des épigrammes, et au milieu de 
toutes ses occupations de savant et de littéra- 
teur il trouvait encore assez de temps pour écrire 
de longues lettres d'affaires, avec cette écriture 
fine, nette et serrée qui frappe tous ceux qui 
ont pu lire ses manuscrits. C'est d'une main 
ferme et sûre qu'à l'âge de quatre-vingt-six ans 
il rédigea, en double expédition, le 16 mai 1716, 
son testament olographe, retrouvé, en 1825, 
avec une foule de papiers précieux, dans un gre- 
nier de la maison de Caen, située Cour du 
Grand Manoir, testament curieux à plus d'un 
titre , et dans lequel on peut signaler plus d'un 
trait de son caractère et de son esprit (1). Cet 



(1) Ces papiers, qui sont aujourd'hui entré les mains 
de M. Abcl Vautler, de Caen, membre du corps législatif 
sont : 1° deux liasses de lettres écrites par Huet à son 
neveu Piédoue deCnarsigné, procureur général au bu- 
reau des finances de Caen , depuis le 10 mars 1706 jus- 
qu'en l'année 1714 IncloslTement II y est question prin- 
cipalement des abbajes d'Ânnay et de Fontenay ; *° une 
assez longue correspondance entre l'abbé Piédoue de 
l'Aunay, aumônier et secrétaire d'Huet, avec Piédoue de 
Cbarslgné, son frère ; J° nn diplôme de membre de l'A- 
cadémie française, déllTré à Huet en 1074; 4° le manus- 
crit autographe du Faux Inca, composé par Huet à l'âge 
de vingt-cinq ans, et publié seulement sept ans après sa 
mort ; 5° enfin le double du testament olographe de Huet, 
portant la date du 16 mai 1716. Ce dernier document a 
«té publié en 1853, par M. Charma , professeur à la fa- 
culté de Caen, dans le Bulletin de la Langue, de l'His- 
toire et des Arts de la France, 1. 1", p. 186. U BlbUo- 

MOOV. BlOGRo GÉNÉR. — T. XXV. 



acte atteste dans son auteur une singulière ap- 
titude pour les affaires, une mémoire prodi- 
gieuse , un rare esprit de détails , une circons- 
pection extrême : il ferait honneur au plus ha- 
bile juriste et au notaire le plus exercé. 

Il est peu de noms aussi célèbre dans l'histoire 
desletti^squeceluidusavantévèqued'Avranches. 
Poète, philosophe, théologien, astronome, physi- 
cien, chimiste, géomètre, helléniste, hébraïsant de 
premier ordre, il n'est aucune des sciences hu- 
maines dans lesquelles, il n'ait pris une place émi- 
nente>Une sorte d'impétuosité et de fougue le 
poussa dès son enfance vers l'étude, qui devint pour 
lui l'objet d'une passion insatiable. A là ville, à la 
campagne, à la cour, tout le temps fut donné au 
travail ; il y sacrifia une partie du temps consacré 
au sommeil; il lut ou se fit lire pendant ses re- 
pas, dans ses promenades, dans ses voyages, 
et grâce à sa prodigieuse mémoire, il put con- 
server tout ce qu'il avait appris : ce fut donc 
surtout par l'érudition qu'il se distingua dans 
tous les genres auxquels il appliqua son intelli- 
gence, fortement investigatrice. Dans sa Lettre h 
Segrais sur l'origine des romans, il fit l'apologie 
de ce genre de composition plutôt en antiquaire 
qu'en homme de goût. Nous avons fait remar- 
quer qu'une de ses œuvres les plus médiocres 
rat cette Diane de Castro, ou ce Faux Inca, 
qu'il composa dans l'âge des passions , et qui 
n'atteste chez lui qu'une imagination peu active 
et une médiocre sensibilité. Sa Correspondance 
inédite nous apprend qu'il faisait peu de cas lui- 
même de ses poésies françaises; il estimait, avec 
raison, davantage ses vers grecs et latins. H ma- 
niait avec assez d'habileté l'épigramme, et le 
Huetiana en conserve pins d'une à l'adresse de 
ses compatriotes, peu disposés, comme c'est l'u- 
sage, à reconnaître son mérite. M écrivait, le 
27 septembre 1708, à son neveu : « Outre trente 
particuliers dont j'ai fait la fortune à Caen , j'ai 
servy votre compagnie et le présidial. Par re- 
connoissance , quand je vais à Caen, j'y trouve 
envie, haine, médisance et mépris. Dieu soit 
béni! c'a esté le sort de Notre-Seigneur, qui doit 
nous servir d'exemple et nous consoler. » Son 
traité de la traduction, De Interpretatione, fort 
estimé de Segrais et dédié à André Graindorge de 
Prémont, est un long dialogue entre IsaacCa- 
sanbon , de Thon , et le jésuite Honton le Duc , 
conçu à la manière des anciens. On y passe en 
revue les plus célèbres traducteurs et interprètes, 
et on y expose quelques-unes des règles qui 
leur sont imposées. Le recueil de ses dissertations 
diverses, publié par l'abbé Tilladet, en 2 volumes 
in- 12, et le Huetiana attestent l'immense variété 
de ses connaissances. Il y aborde, ainsi que dans 
ses lettres latines et françaises, une infinité de 
sujets, sur lesquels il rassemble toujours des ren- 

tbèque impériale possède un recueil de lettres de Huet 
adressées au P. Martin, franciscain de Caen, et M. Sainte- 
Beuve fait espérer la publication d'une autre correspon- 
dance, pins étendue, avec Ménage, de 1660 a 1691. 

13 



887 



HUET 



388 



geignements nombreux et puisés aux sources, il 
écrit sur VOrigine de la Rime, sur l'Antiquité 
des Jets d'eau , sur les Progrès de la Chimie, 
sur YOrigtoiede la Rougeole et de la Petite Vé- 
role, sur ta Manière d'expliquer ta Sainte 
Écriture, sur la Pourpre, sur la Rosée, sur la 
Salamandres sur la Nature des Comètes^ ete. 
Ses travaux géographiques et historiques ont 
plus de valeur et d'importance. Il est te digne 
émule de Bocnarù, dans son Traité sur ia Si- 
tuation du Paradis terrestre^ sujet sur lequel 
le ministre de Caten ataH commencé un travail 
analogue, qui n*a pas été publié, et qu'on accusa 
à tort Huet d'avoir copié. Voltaire estimait* pour 
tes documents considérables qu'elle réunit, son 
Histoire du Commerce et de ia* Navigation 
des anciens, ouvrage que Ton peut consulter, 
même après celui dlîeeren. Les Origines de 
Caen complètent VBistoire de Caen par «Je 
Bras, et ont servi beaucoup à l'ouvrage, plus ré- 
cent, de l'abbé de La Rue, dont les Essais sur 
ta Ville de Caen ont le tort* comme les deux 
ouvrages précédents, de donner plutôt l'histoire 
des monuments que celle des hommes. Voilà 
bien des livres pour un homme qui a dit, non 
sans quelque raison j « que tout ce qui a été 
écrit depuis que le monde est monde tiendrait 
dans quelques in-folio si chaque chose n'avait 
été dite qu'une fois ». C'est à ses ouvrages philo- 
sophiques que l'évêque d'Avranches doit princi- 
palement sa célébrité. L'esprit dans lequel ils 
sont conçus l'a fait ranger jusqu'à présent parmi 
les écrivains qui se proposent de ramener 
l'homme à la foi par les sentiers du doute -, et 
qui obscurcissent l'éclat des lumières naturelles 
afin que l'âme, ne comptant plus sur l'appui delà 
raison , ne reconnaisse d'autre autorité que celle 
de la révélation. Pascal avait employé cette mé- 
thode périlleuse avec une amertume éloquente, 
et avait été lui-même effrayé des attaques qu'il 
dirigeait contre la raison humaine immolée au 
pied de-la croix. Huet reprit son argumentation 
avec plus d'ordre et surtout d'érudition, il se 
plut, dans ta démonstration évangélique, à 
signaler les vains efforts de la raison pour s'é- 
tablir dans ta ferme possession du vrai. La foi 
seule , selon' lui , peut mettre un terme aux agi- 
tations de Pesprit, et c'est précisément pour 
faire sentir tout le prix de cette grâce surnatu- 
relle que Dieu a donné à tfaomme des facultés -si 
débiles. Dans les Questions U'Aunay, et la Cri- 
tique de la PhiUtsoptoe.èmrtésienne, il fut plus 
explicite encore : il prend un à un les arguments 
du père de la philosophie moderne : il soutient 
qu'une fois engagé dans son doute méthodique, 
Descartes n'en peut régulièrement sortir; que la 
notion de l'existence personnete n'est pas la 
première qui se présente à l'esprit; il nie que 
l'évidence soit la marque de la vérité, que l'âme 
soit mieux que le corps, qu'elle ait une no- 
tion directe de l'infini, notion qui n'est, au coà- 
traire, dit-il, conçue que comme négation du 



fini, et ne peut fournir aucune démonstration 
solide de l'existence de Dieu. Il condamne donc 
sans ménagement un système de philosophie 
qu'il considère comme offensant la religion, puis- 
qu'il met l'autorité de l'évidence sur la même 
ligne que celle de la foi. 

Mais c'est surtout dans son Traité de la Jftti- 
blesse de V Esprit humain qu'il semble avoir 
voulu faire servir le pyrrhonisme philosophique 
Au triomphe de la foi. Dans son premier livre, il 
cherche à démontrer, par treize motifs, que la 
vérité ne peut. être connue de l'entendement 
par le secours de la raison* avec une pleine et 
entière certitude* dans le second, il tait con- 
naître j usqu'à quel point, à défaut d'une eertitede 
complète >, l'esprit humain peut atteindre à 11 vé- 
rité. Tout ce qu'il en sait ne peut être considéré 
que comme ayant pour base une sorte de vrai- 
semblante et de probabilités qui suffisent pour 
lui faire croire qttU n'est pas dans un continuel 
égarement. 11 conclut enfin dans le troisième 
livre que tes vérités premières v H même les 
propositions telles que peètes-ei : l'homme est 
composé d'au corps et d'une èmci l'homme sent 
et vit, ete.fr qui n'étaient que probables ou humai- 
nement certaines quand ettes étaient simptetoent 
admises sur te témo&age de la raison» de- 
viennent* par ta foi, certaine» d'une certitude 
absolve et<nvwe.i£ grand Arnauld avait, en t«92, 
condamné les attaques de Huet contre le carte- 
siamstoe; le Journal de Trévoux-, en 172-% 
voulut prouver cjne te fruité de la faiblesse 
de V Esprit toummn né pouvait être de l'évêque 
ri'Avranet*». Il fallut que l'abbé d'etivtt, l'édi- 
tent idu balte, ainsi que des mtetiana-, pro- 
duis* le mamwerit et te soumit à l'Académie 
Française* qui le fit examiner par ferivhi et La 
Montioyfe. ^ Journal de Tnév&ux nes'ttaitpas 
contenfé de hier l' au fl mitfcit é de l'ouvrage , il 
en avait essayé ta réfutation. Huet fat dé- 
fendu parte père fiait», et crithtuéen 1733 par 
Crbuzafc} dans «an Examen du Pyrrhonisme 
ancien et moderne. D'autres écrivains, Voltaire 
et Brttckfer entre autres, ont étendu le scepti- 
cisme de Huet jusqu'à ses croyances religieuses 
et mis eh oMttte ta sincérité de sa foi. On com- 
poserait unfe bibliothèque des écrits auxquels de 
semblables discussions ont donné lieu. La ques- 
tion a été agitée tout récemment encore dans 
les deux sens par deux écrivains très-versés 
dans les tirades philosophiques^ M. Christian 
Bartbolomess, <jùï considère ïiuet comme pyr- 
rhonien en philosophie, et M. l'abbé Flottes, 
qui soutient que c'est calomnier l'évoque d'A- 
vranches que de lui donner ce titre. Il est cer- 
tain, et tout le monde en convient, que Huet 
s'est, dans tous ses ouvrages de pbitosophte, at- 
taché à soutenir que la philosophie qdî s'abstient 
de tout assentiment dogmatique est celle qui est 
la plus favorable au christianisme, et une ses 
principaux arguments consistent à mettre ia 
raison aux prises avec elhvméme, en déveAop- 



389 



HUET 



290 



pant les preuves dont m servent les sceptiques 
pour répondre aux philosophes dogmatiques, 
afin que, sa faiblesse étant constatée , elle sente 
la nécessité de la foi. Il nous semble qu'il est 
difficile de ne pas voir dans Huet le représen- 
tant du scepticisme thééfogique qui a été déve- 
loppé de nos jours avec tant d'éclat par l'abbé de 
La Meonais. 

Huet légua à la maison professe «tes jésuites 
de Paris ses précieux manuscrits et sa belle bi- 
bliothèque, qui, après la destitution de l'Ordre 
des Jésuites, en 17*4, allait être rendue avec 
celle des religieux, lorsque le légataire de Huet 
mit opposition a ia vente , et obtint gain de 
cause, en vertu d'un arrêt du conseil du roi. 
L'impératrice de Russie en offrit 80,040 écus ; 
mais elle fut achetée par Louis XV, qui en enri- 
chit la Bibliothèque royate>, en assurant a» neveu 
de Huet une rente de 1176e ovre» au capital 
de 35,000 flvMftt fiai» tannée même oti il rédi- 
geait ce testament*, Muet publia sa remarquable 
Histoire du Commerce et de la Navigation des 
Anciens, il conserva presque toutes ses facultés 
pendant les dernières années de sa vie* qu'il 
consacra en grande partie * la composition de 
ses Mémoires % conuneneés en 1742 à la seHt- 
eitation de ses amis, et qui sont connue sous le 
titre de Commentarius de 8ébu* ad eum per- 
tinèntièw, ouvragé dont M. Gh. Nisârd a ré- 
cemment donné ia traduction, et qui est pour 
la biographie du célèbre éveqûe d'Avranohes le 
point de départ le pins exact et 1e plus sûr. C'est 
à Page de quatre-vingt-onze ans qu'il termina 
sa vie, si longue et si bien remplie. Il était doyen 
de l'Académie Française. Ses principaux ouvrages 
sont: DelnterpretattonefAifridiu); Paris, 1661, 
in-4°; -\Or%genis Vommentària in Sacram 
Scripturam; Rouen, 1668, 2 Vol. in-fol.; — De 
VOrigfne des Roman* s Paris, 167ôv in-12; — 
Animadversiones in Mam&ium et 8caligeri 
notas ;'ûné. y 1679, in-4° ;- Demonstratio Evan- 
§eliea; ib., 1679, in-ftd: ; — Cénsttra Pkiloso- 
phim Cartesiànm; nV., 1689, in-12ç — - Quaes- 
tiones Alnetanx de Cortcordia tiatiànis et 
Fidei;$b., 1690, in-4°j — Nouveaux Mémoires 
pour servir à l'histoire du Cartièrianismeï 
ib., 1692, in-12 ; — Dissertations sïir diverses 
matières de religion et de philosophie; ibid., 
1712, in-12; — HisttAre du Commerce et de 
la Navigation des Anciens ; ib\è: y 1716, m-12; 
— Commentarius de 'Rébus ad eum p ert i nent 
tibus; Amsterdam^ 1718, m-ifr; fca plupart de 
ces ouvrages ont eu plusieurs éditions. On a 
publié le HHetiam à Parte en I7fcâ C'est m 
même année aussi qu'à été publié à Paris, par 
l'abbé d'OMvet, celui die tous les ouvrages de 
Haet qui à soulevé le plus d'oppdsition et sus- 
cite' les plus vives controverses ; c'est te Traité 
de la Faiblesse de VEsprït humain, dont l'au- 
teur avait fait une traduction latine, impri- 
mée à Amsterdam , en 1730$ 1 vol. in-12. 
C. Hippeau*. 



Commentarius de Rébus ad eum pertinentibus / ma, 
I in- 8°, publiés par M. de Saliengre ; traduits en anglais 
| par John Aikin, Londres, 1736; et en français par M.Nl- 
; sard, Paris, 1858, ln-8°. — Tittadet, Recueil de Disser- 
tations sur diverses matières de religion et de phi- 
| lologie- Paris. 1712, lo-li; La Haye, 171 4 et 17*0, 5 vol. 
i in-12. — Huetiana - D'Alembert, Histoire des Membres 
de V Académie Française : éloge de Huet. - Nouveaux 
Mémoires de l'abbé d'Artigny, t. IL - Bibliothèque uni- 
verselle de Leolerc, t. XV. — Journal Littéraire de La 
Haye, t. IL — Du pin, Bibliothèque des Auteurs ecclé- 
siastiques, dix-septième siècle, t. V. — Mémoires de Lit- 
térature, par le P. Desmolets, t. il. —Œuvres &Ar~ 
nauld, t. III. ~ LejbniU, Opéra emnia, t. V, éd. de Du- 
tens. — Crouzaz, Examen du Pyrrhonisme ancien et 
Moderne. — Journal de Trévoux, 17S5. — Brucker, 
Historia crttica PhilosophUe, t. V. — De Gerando, 
Histoire comparée des S y sternes de Philosophie, t. III. - 
factionnaire des Sciences Philosophiques. — Christian 
Bartho tomes*, Huét et son Système théologique, — Étude 
sur Daniel Huet, évéeue d'Avranches, par M. de Godr- 
nav, dans les Mémoires de l'Académie de Caen, 1854. — 
Etude sur Daniel Huet, évèque d'Avranches, par l'abbé 
Flottes; Montpellier, 1187. 

HUET db guerville ( Paul), de la famille 
do précédent, hé à Caeh, le 31 juillet 1777, mort 
en 1854. Maire de Sedan pendant l'occupation de 
cette vHle par l'armée prussienne sous les ordres 
du comte de Zietben ■> il parvint à établir une 
correspondance au péril de sa vie avec le baron 
de Choisy, commandant le château, et put par ce 
mot en conserver au roi le fort de Sedan jusqu'au 
16 septembre , sauvant ainsi sept à huit millions 
de projectiles que ce fort renfermait. Pendant 
les Cent Jours il resta à la tête de l'administra- 
tion, par ordre de M. le baron de Fremont* préfet, 
et de M. Bedoch, commissaire pour l'empereur, 
bien qu'il ait donné trois fois sa démission et 
qu'il "ait refusé de signer l'acte additionnel. 
Louis XVIII le nomma maire le 5 juin 1816. La 
ville de Sedan lui doit l'érection de la statue 
du maréchal de Tttrenne, la construction de 
l'hôtel de ville, du palais de justice et de la salle 
de spectacle. Ayant pris une part très-active aux 
luttes électorales de 1890, il donna sa démission 
après la révolution de Juillet, et se retira au châ- 
teau de Laviot ( Belgique), ou il mourut. 

•Documents particulière inédits; Correspondance 
manuscrite, et Testament olographe de Huet. 

ï muet Mt GtJEftviLL* ( Paui- Edmond) , 
petit-fih du précédent, né à Sedan, en 1&22, col- 
laborateur à divers recueils périodiques , est le 
descendant et représentent direct de cette famille. 

■cet DE fbo«erviI;Le ( Claude- Jean- 
Baptiste), écrivain et législateur français, né à 
Romoràntin, en Sologne, lé ô octobre 1752, mort 
à Orléans, en 1838. En 1791 , connu dans son 
département par quelques écrits sur tés affaires 
publiques, il fut élu dépoté du Loiret à l'Assem- 
blée législative , ou il se montra partisan de la 
monarchie constitutionnelle. Il obtint- des amé- 
liorations dans l'administration forestière de son 
département, une indemnité de 50,000 fr. pour 
les pertes éprouvées dans l'Orléanais , et il en fit 
réduire les contributions. L'année suivante , en 
voyant les calamités qui menaçaient la France, il 
revint dans son département. Il y futtraité comme 
suspect et deux fols incarcéré. Depuis il se tint 

13. 



391 



HUET 



392 



éloigné des affaires publiques pour se livrer à la 
culture des lettres. 11 fut un des fondateurs de 
l'académie d'Orléans, dont il devint le secrétaire 
perpétuel et qui lui doit quelques travaux. 11 a 
publié : Description plaisante d'une Fête 
donnée à V occasion de la paix de Grenelle 
(dans le Courrier de l'Europe , 5 novembre 
1779) ; — Essai sur la Topographie d'Olivet; 
1784, in-8°; —Notice sur la Vie et les Ouvrages 
de Louis Pulci, avec un extrait de son poème 
intitulé :Morgmte Maggiore (Esprit des Jour- 
naux, ann. 1784); — Dissertation critique 
sur deux ouvrages intitulés : Chroniques de 
Turpin; Orléans, 1785, in- 12, et dans le t. m 
des Mélanges de MiHin; — Éloge de Pilaire 
des Roziers; Orléans et Paris, 1785, in-12; — 
Recherches sur VOrigine de la Gabelle en 
France (Esprit des Journaux, 1788) ; — Ré' 
quête du tiers-état au roi; 1788, in-8°; — 
Vues générales sur VÉtat de V Agriculture 
dans la Sologne et sur les moyens de V amé- 
liorer ; Orléans et Paris, 1788, m-8° : ce tra- 
vail était demandé par rassemblée provinciale ; 
— Réflexions d'un Citoyen sur les Pouvoirs 
législatif, exécutif et judiciaire et sur V appel 
au peuple; Orléans, 1789, in-8°; — Avis im- 
portant sur la Manière de délibérer aux 
États généraux, 1789, in-8°; — Catéchisme 
des Trois Ordres, pour les assemblées d'élec- 
tion (sous la rubrique deUn Gentilhomme fran- 
çais ) ; 1789, in-8° ; — Des articles de politi- 
que et de littérature dans le Journal de Paris, 
dans V Esprit des Journaux et dans la Chro- 
nique de Paris. G. de F. 

Vergnand-Romagnesi, Notice historique et biogr. tur 
C.-J.-B. Huet de Frobervitle; 1889. 

huet de froberville (Barthélémy), 
historien français, frère du précédent, né le 22 
janvier 1761, à Romorantin, en Sologne, mort le 
î2 février 1835. Après avoir fait ses études , il 
partit comme officier dans le régiment de l'Ile-de- 
France, et arriva dans cette colonie en 1778. Il 
commanda, en 1781 , un détachement qui fit 
partie de l'escadre du bailli de Suffren pour 
l'expédition de l'Inde, et se distingua surtout 
à l'affaire de Goudelour, sur la côte de Coro- 
mandel. Les Français étant rentrés en pos- 
session de Pondiehéry, Huet y fut envoyé. 
Lorsque les troupes françaises en furent 
retirées, il revint à l'Ile-de-France, et bientôt 
quitta le service pour se fixer dans cette colonie. 
L'estime dont il jouissait le fit appeler à remplir 
quelques fonctions publiques, qu'il abandonna 
bientôt pour s'occuper de plusieurs ouvrages 
qu'il méditait sur l'histoire, les mœurs et la 
langue des Malgaches. Il a publié à l'Ile-de- 
France les ouvrages suivants,: Grand Diction* 
naire Malgache; 2 vol. in-fol. : Dumont-Dur- 
ville en a donné un abrégé dans son Voyage sur 
V Astrolabe, partie philosophique ; — Traduc- 
tion des Saintes Écritures en malgache, 
idiome du sud, 2 vol. in-fol. ; — Collection 



des Voyages de Mayeur, interprète de Be- 
niowsky à Madagascar; 10 vol. in-fol.; — 
Histoire de Ratsimilaho, roi de Foulepointe, 
d'après la tradition des Malgaches ; in-fol. ; — 
Essai sur les Malgaches : cet ouvrage, qui de- 
vait être imprimé à Londres, a été égaré ; «— Le 
Cimetière de Port-louis, scènes historiques; 
2 vol. in-8°; — Sydner, ou les dangers de 
Vimagination, roman; — Journal tenu pen- 
dant la guerre de Vlnde, de 1781 à 1783, 
in-fol. On lui attribue un poème burlesque in- 
titulé : La Culpaïde. Il a rédigé le Journal des 
iles -de-France et de Bourbon. Une nouvelle 
édition de Y Histoire de Vile de Madagascar, 
par Etienne de Flacourt , commencée par Huet, 
est restée inachevée. , G. de F. 

Louandre, l/s Littérature front, contemporaine. — 
Renseignements particuliers. 

huet de COETL18AN ( Jean-Baptiste- 
Claude Reghàult), administrateur français, né 
à Nantes, le 9 juin 1769, mort le 12 décembre 
1823, à Savenay. 11 appartenait à une famille 
distinguée dans la magistrature, fit ses études 
chez les Oratoriens de sa ville natale, et fut reçu 
avocat à Rennes en 1790. Partisan de la révo- 
lution, il écrivit d'abord dans la Chronique du 
Département de la Loire- Inférieure, rédigée 
par une société de patriotes. H assista comme 
délégué de la garde nationale de Nantes à la Fé- 
dération générale qui eut lieu auChamp-de-Mars 
de Paris le 14 juillet 1790. En 1792 il fut 
membre du conseil communal de Nantes , et 
commanda en second un des bataillons de la 
garde nationale de cette ville. En correspondance 
avec les fédéralistes du Calvados, il se réfugia 
dans l'armée des Pyrénées orientales après la 
chute des girondins ; quartier-maître dans les 
compagnies franches, il se distingua comme ca- 
pitaine d'état-major pendant le siège de Roses, 
et à la prise de Figuières , sous les ordres du 
général Pérignon. AMe de camp du général Du- 
gommier, il fat chargé d'apporter à la Convention 
des drapeaux pris sur l'ennemi. Huet quitta 
bientôt le service militaire, et revint à Nantes, où 
il fut nommé secrétaire général de l'administra- 
tion centrale du département de la Loire-In- 
férieure à la fin de 1795. En cette qualité, il 
prit une part active à la création de l'école cen- 
trale, et fut un des fondateurs de l'Institut dé- 
partemental des Sciences et des Arts. Cette so- 
ciété ayant reçu du gouvernement consulaire la 
mission de s'occuper d'une statistique du dépar- 
tement, Huet s'empressa d'envoyer sur cet objet 
un manuscrit qui fut imprimé par ordre du 
ministre. Sous le Directoire, Huet avait été pro- 
posé pour remplir le ministère de la justice ; mais, 
préférant rester à Nantes, il refusa. Nommé en 
1802 membre du Tribunat, il ne voulut pas non 
plus accepter; ce qui n'empêcha pas Napoléon 
d'être indisposé contre lui, parce qu'il avait été 
élu avant Lucien Bonaparte, son compétiteur. U 
était depuis 1800 secrétaire général de la préfeo- 



393 



HUET 



394 



tare delà Loire-Inférieure. Impliqué, en 1806, 
avec le receveur général du département, dans un 
procès criminel, Huet resta vingt mois à la pri- 
son de La Force à Paris. Le receveur général rat 
condamné à huit ans de fers et à la flétrissure 
pour faux en écriture publique et surcharges sur 
ses registres. Huet fut solennellement acquitté ; 
mais, au moment où il allait sortir de prison, un 
ordre du gouvernement l'y retint. Belleville, in- 
tendant général du Hanovre et ancien préfet 
de la Loire-Inférieure obtint enfin sa liberté.Huet 
revint à Nantes, et rat nommé, en 1J809, sous- 
préfet à Bazas. H y était à peine arrivé, qu'il 
se fit remarquer par son intrépidité, en ar- 
rêtant avec quelques gardes nationaux l'insu- 
bordination d'un régiment de lanciers polonais 
qu'on envoyait en Espagne. Destitué à la pre- 
mière restauration, Huet revint à Paris, et bien- 
tôt il fut appelé aux fonctions de chef de la pre- 
mière division au ministère de l'intérieur, la- 
quelle rat réunie au ministère de la police gé- 
nérale après le retour de Napoléon. L'arrondis- 
sement de Chftteaubriant le choisit pour député 
à la chambre des représentants. A la seconde 
restauration, il prit un passeport pour l'Angle- 
terre; mais, arrêté au premier relai, il rat amené 
à la Conciergerieetmisau secret. Il resta en pri- 
son du 1 er mai 1816 au 8 mars 1817. Le I er janvier 
sa fille avait obtenu sa liberté; mais Huet refusa 
d'en profiter, et attendit encore trois mois un 
jugement : il finit par se décider à sortir de sa 
prison, sans avoir été interrogé et sans qu'on 
lui eût fait connaître les motifs de sa détention. - 
Ses habits avaient été entièrement défaits pour 
s'assurer qu'il n'emportait aucune correspon- 
dance. Plus tard, Huet rat chargé de rédiger la 
partie politique du Journal du Commerce, en 
opposition avec le ministère Yillèle. Poursuivi 
devant le tribunal de police correctionnelle, en 
novembre 1822, pour attaque contre le gouver- 
nement, il rat condamné, malgré la défense de 
M' Barthe. Après cette affaire, Huet retourna 
dans son département, et se retira à Savenay. 
« Huet se distingua surtout, dit M. Armand Gué- 
raud, comme publiciste habile et administrateur 
éclairé, puis comme statisticien consciencieux , 
digne du titre qui lui avait été donné de premier 
statisticien de son temps. » On ade lui : Statisti- 
que du Département de la Loire-Inférieure, 
publiée par ordre du ministre de V intérieur ; 
Paris, 1802, in-8°; nouv. édition, revue et aug- 
mentée, sous ce titre: Recherches économiques 
et statistiques sur le Département de la 
Loire- Inférieure, Annuaire de l'an XI; Nantes, 
an xn, in-4°; — Mémoire pour J.-B. Huet, 
secrétaire général de la préfecture et membre 
du collège électoral du département de la 
Loire*Infétïeure; Paris, 1806, in-4°; —De 
l'organisation de la puissance civile dans 
Vintérét monarchique, ou de la nécessité 
d'instituer les administrations départemen- 
tales et municipales en agences collectives ; 



Paris, 1820, in-8°. Huet de Coetlisan a laissé 
plusieurs manuscrits inachevés. Membre de l'A- 
cadémie Celtique, il avait rédigé des notes sur les 
Pierres de Carnac. Il a fait insérer divers ar- 
ticles dans la Revue Encyclopédique et dans 
d'autres recueils. Son Histoire des Courtisans 
de Rome, écrite en latin, et ses Recherches sur 
l'Économie politique des Anciens, sur les* 
moyens qu'ils mettaient en usage pour faire 
vivre leurs armées et transporter leur maté- 
riel decampagne n'ont pas encore été publiées. 

J. V. 

Mahul, Annuaire NécroL, 18M.T- Dngast Matifeux, 
Bibliographie révolutionnaire de Nantes, — Le Ly- 
cée armoricain, t. III, p, 167. — Gucpin, Histoire de 
Nantes. — Armand Guérand, Notice sur Huet de CoetU- 
san t dans la Biographie Bretonne, — Aabbe', Vielh de 
BoUjolin et Sainte-Preuve, Biogr. univ. et port, des Con- 
temp. Notice biographique, dans la Revue Bncyctop., 
1893, t. XX, p 701. — Quérard, La France Littéraire. 

ÎHtJBT (Paul), peintre français, né à Paris, 
en 1804. Il étudia la peinture sous Gros et Pierre 
Guérin, et se consacra au paysage, où il s'est dis- 
tingué par l'aspect poétique de ses sites et par 
une couleur harmonieuse et fine. Ses tableaux 
ont paru à presque tous les Salons successifs , 
depuis celui de 1827. On peut citer, entre autres : 
Inondation de Saint-Cloud (1832) ; —Soleil 
couchant (id. ); — Vue des Environs d'An- 
tibes ( id.) ; — Fourré de forêt (id. ) ; — Soirée 
d'Automne ( 1833 ) ; — Vue d'Avignon (id. ) ; — 
Vue duChdteaueTBu (M*);— Une Matinée de 
printemps (1835 );—Un Coup de Vent, souve- 
nir tf Auvergne (1838 ) ; — Paysage composé, 
soleil couchant ( 1839 ) ; — Intérieur de Forêt 
(1841);— Vue du Port et de la Rade de Nice 
(id.) ; — Vue d'Avignon et du Château des Papes 
(1843); — Paysage, scène tirée de VArioste 
( 1848) ; — Vue prise aux environs du col de 
Tende ( 1849 ) ; — Les Rives enchantées ( 1850 ) ; 
•— Le Calme du Matin ( 1852) ; — Les Marais 
salants, aux environs de Saint-Valéry -sur- 
Somme ( 1854). M. Huet a exposé aussi, à dif- 
férents Salons, des paysages gravés à l'eau- 
forte. H a reçu une médaille de première classe en 
1848 et 1855 et la croix de la Légion d'Honneur 
en 1851> G. de F. 

Documents particuliers. 

J huet ( François), philosophe et publiciste 
français, né le 26 décembre 1814, à Villeau ( ^ure- 
et-Loir). Issu d'une famille de cultivateurs, il 
devint à l'âge de vingt ans professeur suppléant 
d'histoire au collège Rollin à Paris, et fut nommé 
en 1835 professeur de philosophie à Gand; il 
y resta en cette qualité jusqu'en 1850, époque 
où il donna sa démission. On a de lui : Étude 
sur ffenri de Gand; 1838; — Éléments de 
Philosophie pure et appliquée; 1848 : dans cet 
ouvrage, dont l'auteur prépare une édition plus 
complète, il a pour but de restaurer et de com- 
pléter les doctrines de Descartes, de Platon et de 
Leibnitz, en partant du double principe de l'indé- 
pendance de la raison et de son accord nécessaire 
avec la foi chrétienne; — Le Règne social du 



395 HUET . 

Christianisme; 1853 : ouvrage mis a Yinçiw} 
— Essais sur la Réforme catholique; tttfi : 
en collaboration avec M. Qordas-pejXfflulini lat 
innovations à faire dans le sein dû caibotiotiUMi 
proposées par M. Hue t dans cet onwage consta- 
tent à laisser participer les fidèles m gouverner 
ment de l'Église , sans supprimer peur pela ft>** 
- 'dre hiérarchique. — M. Hoet est encore auteur 
d'un Discours sur lu Réforma de fa PMteso- 
paie, qui sert d'introduction au Cartésianisme 
de M. Bprdas-Demouiin. A, I^hûbut. 

Documents particuliers. 

hvbtb (Jaume i>e), poète espagnol, natif 
<je l'^rajpu, vivait au commencement du sei- 
zième siècle. Il est l'auteur de deux comedias , 
intitulées, l'une Vidrwna x in-b Q ,&k 18 feuilleta, 
et Vautre ^«ortna^n-^, eq 15 feuillets; tontes 
deux, imprimées sans date et sans nom de ville, 
$ont excessivement rare*. Dans |'«ne et dans 
l'autre , il y a dix interlocuteurs., et il s'agit $\ 
mouro qui se dénouent par un beureux mariage- 
Elles offrent la singularité qu'elles se terminent 
par quelques mauvais vers, latiqa, oji fauteur 
s'excuse de n'avoir pas mjenx. fajt. L'inquisition 
castillane, qui mettait alors beaucoup c|e livres 
dans son Me* ex#w&Qtorius , plaça la Te$a*< 
rina sous. Urufcriquede YaUadolifl, 1559. P, fl. 

Tickpor, History ofSpa^h Mtferqture, \. II, p,£8, 

qrjBT^IM* (ps L4). Vqv. hh Hubtçbjg. 

* HfJBTTB (louis ), opticien français, né à Ren^ 
née* le 21 octobre 1756, mqrtàNan|ôs,|e 2 septem- 
bre 1805, ébaucha sa première éducation, chez Je* 
frères de la Doctrine chrétjeimé, en même tejnps, 
qu'il travaillait cbez son p£re, tourneur en t>pjs; 
mais, tourmenté du désir d> trpuyer dans les 
voyage* lointains m aljmeni & son imagiqatjqn. 
ardente, il quitta, à quinze ans la. maison pater- 
nelle. Ce fut en Jlojlaude qu'il puisa, les. prer 
mières notions de l'art de l'opticien, dans lequel 
il devait plus tard acquérir une légitime répu- 
tation. Il vjsita ensuite la Prusse , la Pologne et 
la Russie , puis il consacra près de cinq ans fr 
parcourir l'Italie. La yue et l'étude des monu- 
ments. d« ce pays ne {prent qu'accroître son avi- 
dité de connaître. Dans le but de la satisfaire, 
il se rendit en Orient. Après quelques excursions 
dans presque toutes les villes de l'Archipel et 
une partie de la Grèce continentale, excursions 
suivies d'un assez long séjour à Constantinople, 
il gagna Alexandrie, d'où il pénétra p>ns. la 
haute Egypte , en Arabie et eu Syrie. Revenu en 
France, après quinze ans d'absence, il consacra 
deux années à se perfectionner dans son art, la 
première à Paris, la seconde à Londres,. Revenu 
à Rennes en 1788, il s'y maria, et vint s'établir b 
Nantes en 1793. Partageant désormais son temps 
entre les travaux intellectuels et les occupa- 
tions manuelles destinées à subvenir aux besoins 
de sa famille , Huette enrichit l'optique de quel- 
ques inventions ou procédés utiles. En 1794 il 
appliqua les lentilles achromatiques à des mi- 
croscopes qu'il avait lui-même fabriqués , lenlil- 



- HUEZ 396 

les qui remplissaient parCtfomentle* conditions 
exigées de grossjsaeraent et de netteté , dans des 
dimensions restreintes, entre % et 3 altimètres de 
diamètre et une distance toile cor ropondiutie* 
L'un des fondateurs, en 1798, a> l'Inclut dé- 
partemental de le Lpûertpfewu!*, aujourd'hui 
Soeiélé académique, il soumit * nette société, en 
1802, un Menmre sur fr* Amusements aalva- 
nvm&. En 1803 4 luicomwùqua la. ^ctfpltûA 
d'un aoM^eïof^H^^/içMqu^avaitexéçnté, 
Cet instrument , fart exwt, et d'un, transport fa* 
cile , renfermait en tow^rne son niveau a Mie 
d'air, propre a. donner la ligne boriaontafe en 
tous sens. Qn t'emploie avantageusement dans les 
observations d'astronomie nautique et poux, la 
détermination à terre de toute espèce de plan hor 
riaonta). La même année il présenta à l'Institut 
des verres, plans à faces parallèles de 8 à 10 cenr, 
timètres de diamètre, qui, soumis à des épreuves 
rigoureuses, forent reconnus d'une précision ir- 
réprochable. Deux ans plus tard il mit sous les 
yeux du même oorpa savaut un objectif achro- 
matique de 0,50 e de tfomètre sur 0^,70° de 
foyer, construit ayeo du fÙnt-rglass français, dont 
l'eiimJlot affranchissait 1$ Fraqee du tribut qu'elle 
*Y*Jt JUWue-là payé à l'Angleterre pour ce proh 
dui( VesprH proCo^démenl observateur de 
Huette av Mt eorççu l'idée de. cet instrument à la 
YUe d'qu v*rrç en çrj»t»l provenant de la ma- 
nufactuxe <Ju ÇJreu&o.t, Le poids, de ce verre l'avait 
conduit } Caire Je. calcul des, courbures en rap- 
port avec le pouvoir ^iapersif d> cette matière, 
pqqp i'a^hro<matis.e* avec le verre de Paris. Le 
aucjtès justifia «es. calculs, et cet objectif, ap- 
pliqué k une excellente tapette de John PoUoud, 
^PPPPrta avantageusement la, comparaison avec 
l'objectif de l'opticien anglais, sans aucune ré- 
duction d'ouverture. Indépendamment de ces, 
travaux, Huette a lais.se en mapuscrit ; fies Mé- 
moires, sur ï tfgypte e( lq Syrie , qu| offrent 
d> l'intérêt, mê^ne a,près }e voyage de Volney; 
— Relation $un Voyage à Jérusalem et au» 
Liww Maints; — Ascens&n <w Cratère $u 
mont Eti\a. P, Levo-t, 

Annales et Procès-verbc^v des séances publiques de 
la Société Académique de Nantes et de la boire-tnfè- 
vieùre. — Documents inédite. 

h va? a (Dona Bavbm-Marta de), peintre es- 
pagnole , née à Madrid , en 1733. Ses charmants 
tableaux de genre lui firent onvrir, par une hono- 
rable exception, les portas de l'Académie de 
San- Fernando, «a 1752. Ltgoftt et la délicatesse 
dont sont empreinte» sea nombreuses productions 
les font rechercher des amateure. A. ne L. 
Las OonstUuHonet f Aeta* de lq Aeademtm de San- 
Fernando, de Madrid, -r Q^tel, Dictionnaire des 
Peintres espagnols. 

huez (Claude) y magistrat français, né à 
Troyes, le 3 avril J724, massacré dans la même 
ville, le 9 septembre \ 7 89. Il fut successivement 
conseiller au bailliage et présidial de sa ville na- 
tale, assesseur civil, lieutenant criminel, et enfin 
maire de Troyes ( 29 juillet 1786 ). En 1787, il 



Ml HUEZ — HUFELAND 

siégea à l'assemblée provinciale de Chàlons. 
Huex, en 1789, vint à Paris et révéla aux {che* 
yins de son. pays les intrigue* qui se passaient 
sans ses yeux pour excita» des troubles à Paris 
et daps tes previnees. Ses lettrée furent sous- 
traites à la poste, et dès Ions il fut dévoué à la 
haine des ennemis du nouvel ordre de choses, qui, 
sous le masque du patriotisme, le dénoncèrent à 
ses concitoyens seron* on accapareur, tin ennemi 
de Keefcer, delà liberté, etc. On Paeeqs* même d'a- 
voir empoisonné des Marines vendues aux boulan- 
gers (le ïtttyea. )) était alors, prewdeat du haU? 
liage de cette ville et de la chambre de police, 
il siégeait lorsque la salle fut envahie par une 
troupe fie forieux i arraché de wm itégê, tt M 
traîné dans, te cour, de Pfco{e| de vXb une corde au. 
cou ; une (emme lui crev,a. les yeux avec des ci- 
seau.*, pendant qu'il respirait encore, et d'hor- 
ribles, mutilation* furent exercées sur son 
corps. (0- fl- UfW»*- 

Moderne (ISM.- Arnau^t, Jay. Jo^yet^rv^ns, Biogra- 
phie nouvelle des Contemporains. 

HUFEL41ID (GotUieb), jurisconsulte allemand, 
né à Dantzig, le 19 octobre 1760, mort £ Halle, 
le 25 février 1817." fl fit ses études à Leipzig et 
à Gœttinguè, visita l'Allemagne, la France et les 
Peys-ïjas, et enseigna le droit aux universités de 
Iéna, de Wwrtzbourg, de Laidsbut et 4e palle. 
Oe fut lui qui, en commun avec Ersch, eut l'idée 
de publier la grande encyclopédie allemande 
connue sous le nom dÏAllgemeines Èncyklopae- 
die ôVErsch et Gruber. Il céda ses droits à Gruber 
(voir ce nom). Les principaux ouvrages de Hufe- 
land sont : De Legum in Pandectis interprétant 
darum Subsldio, ex earum nexu et çonsecu- 
tione petendo ; Iéna, 1785 in-4° ; — Ueber den 
Grundsatz des Naturrechts (Du Principe du 
Droit naturel) \ Leipzig, 1785; — Ueber einige 
Rechte protestantischer Fur sien (De quel- 
ques Droits des Princes protestants) ; Iéna, 1788 ; 
— Lehrbuch des Naturrechts (Traité du Droit 
naturel) ; |éna ? 1790; 2 e édit., 1795;— Beitrœgè 
zur Berichttgung der positiven Rechtswissens- | 
chaft (Matériaux pour rectifier quelques erreurs | 
de la Science du Droit positif) ; Iéna, 1 792 ; —Ein- I 
leitur\g In die Wissenschaft des teutseken | 
Privatrechts (Introduction à la Science du Droit ( 
privé allemand); Iéna, 1 796; — Lehrbuch der j 
Geschichte und Encyklopxdie aller in Teuts- ! 
chland geltenden positiven Rechte (Histoire et j 
Encyclopédie de tous les Droits positifs ayant 
valeur en Allemagne) ; Iéna, 1796. Get ouvrage, 

(1) Ce cripe ne resta pas Impuni : le 27 novembre sui- 
vant, la cour prévôtaïe de Tïoyes condamna les nommés 
Claude- Augustin Picard , Jean Albert , ChrUtppbe Harlot 
et Jacques Tous^iqt à a voie « bras, jambes, cuisses et* 
reins rompus vifs », qprés avoir fait amende honorable 
nus en chemise , la corde an col et tenant en main une 
torche de cire ardente ; la femme Marguerite Vilain , 
femme Joannes , fut également condamnée , après avoir 
de même fait amende honorable, à être pendue et étran- 
glée. Ce Jugement fut exécuté dans toute sa Juste sévé- 
rité. {Moniteur du î* décembre 1789.) 



398 
dont la première partie seule a paru, traite de 
l'histoire du droit romain ; — Abriss der Wis- 
senschaftskundeund Méthodologie der Rechts 
gelehrsamkeit ( Éléments de la Science et 
de la Méthodologie de la Jurisprudence ) ; Iéna, 
1797 ; — Insti&uMonen des gesammten po- 
sitiven Rechts (Institution du Droit positif en- 
tier); Iéna, 17tt*;à*édit., 1803;— Ueber den 
eigenthumlichen Geisi des roemischen Rechts, 
in Allgemeinen uhd in Minaelnen (De l'Esprit 
particulier dn Droit romain en général et en par- 
ticulier); Giesaen, 18t5-1817, 2 vol. R. L. 

Bioçr. de Hnfeiand, en tète de ta thèse de K.-F. Walcb, - 
Reliquim G<9ti$0ver&s inter Bvtgarvm 4e Bulgarit et 
Afart,wym ÇQfiam (fa pr#?tatym?daÉw;Iéna, 1785. 

HUFKUaw (Ghrtsfaphe-GuUlaume), méde- 
cin allemand, né le 13 août 1762, à Langensalza 
(Tkuriuge), mort à Berlin, le 26 août 1836. 
Fils d'un médechi, il étudia lui-même la. mé- 
decine à Iéna, et à Gœttinguè, et obtint en 1783 
le grade de docteur, il exerça ensuite l'art de 
guérir à Weiroar, occupa en 1793 une chaire 
à l'université de Jéna, et vint en 1798 a Berlin, 
où il fut chargé de la direction du Collegium 
Medicum et de la surveillance de l'hôpital public 
La Charité. Le roi de Prusse le nomma son 
médecin particulier, et l'Académie des Sciences 
le reçut parmi ses membres, pepuis la fondation 
de l'université de Berlin (1809), il y enseigna la 
patholofie spéciale et la thérapie. Hufeland a 
joui d'une grande réputation comme médecin 
pratique et comme professeur. Ses nombreux 
ouvrages ont été souvent réimprimés en Alle- 
magne; plusieurs furent traduits en français. 
Voici les principaux : fiemerkungen %eber die 
hunstlichen und natiir lichen Rlattern, zu 
Weimar in Jahre J788 ( Observations sur la 
Petite Vérole artificielle et naturelle qui régna 
à Weimar daqs Fan 1788); Leipzig, 1789, 1793, 
1798, uvr8°; -r- Neutre Annalen der fran- 
zçesisehen Arzneykunde (Annales de Médecine 
française) ; Leipzig, 179H8QQ, t-I-HI; — Ueber 
die Vngewissheit des Todes uud das ein- 
zigeuntntegliche Mitfel sichvan seiner Wir- 
kliçhkeit zu ueberzeugen und das Lebendig- 
begraben unmaegHçh zp, mqcfyen (De l'Incer- 
titude dans, l'Apparence de la mort et du seul 
moyen de se convaincre de sa réalité et d'cna- 
péçher l'enterrement à>n vivant); Weimar, 
1791, in-8R; Graet*, 179| et J834, in-8°; — 
Aufklaei^ngen der Arzneyivissenscbaft ans 
den neuesten Mntdeçhungen ffer Physik und 
Cheptiï (Explications touchant la Médecine, 
d'après, fes dernières Couvertes de physique 
et de chïimej; W**" 1 **» 1793-1794, in-8°; — 
VQllstaçftdwe parsteùung der Kraefte und 
des Gefrrauchs, (fer salzsauern Schu)ererde 
in Çmnkheilen (Exposition complète des 
ver-tys et de l'usage 0u Wfuriate 4e Baryte) \ Ber- 
lin, 1794, in-8°; — Çrinnçrungen an aile 
Muetter denen die Gesundfie\t ihrer Kinder 
am Berzen hegt (Avis aux Mères touchant la 



399 



HUEELAND — HUGEL 



Santé de leurs Enfants); Bietefeld, 1794: -Ge- 
meinnûtzige Aufsaetze zur Be/œrderung der 
sundheït, des Wohlseyns und vernûnftiger 
GemedicinischenErfahrung (Dissertations po- 
pulaires sur la Santé, sa conservation, etc.) ; Leip- 
zig, 1794,in-8°; — Ideenueber Pathogenie, 
oder Einfiuss der Lebenskraft ouf Bntste- 
hung und Form der Krankheiten (Idées sur 
la Pathogénie, ou de l'influence de la force vitale 
sur l'origine et la forme des maladies); Iéna, 
1795, in-8° ; — Ueber die Ursachen, Brkcnnt- 
niss und ffeilung der Skrofelkrankheit (Traité 
de la Maladie scrophuleuse) ; Berlin, 1785, in-8°; 
3 e édit, Berlin, 1819 : ouvrage couronné par 
l'Académie impériale des Curieux de la Nature; 
traduit en français sur la 3 e édition allemande 
(1819) et accompagné de notes, par J.-B. Bous- 
quet; Paris, 1821;— Makrobiotik, oder die 
Kunstdas menschliche Leben zuvertoengern 
(Macrobiotique, ou l'art de prolonger la vie hu- 
maine) ; Iéna, 1796 ; 6* édit, Berlin, 1842 : ouvrage 
célèbre, qui a été traduit de tontes les langues 
européennes. On en a des traductions françaises 
dU. Duvau, Iéna, 1798,2 vol. in-8°; Coblcntz, 
1799, 2 vol.; Lausanne et Lyon, 1809; Ham- 
bourg, 1805; Paris, 1810; d'À.-J.-L. Jourdan, 
Paris, 1824 ; — Bemerhungen ueber dos Ner- 
venfieber und seine Complieationen in den 
Jahren 1796, 1797, et 1798 (Observations sur 
la Fièvre nerveuse et ses complications pendant 
les années 1796, 1797 et 1798) ; Iéna, 1799, in-8° ; 
_ Rinrichtung und Gesetze des medici- 
nischen Instituts zu Iéna (De l'Établissement 
et des Lois de l'Institut médical de Iéna) ; Iéna, 
1798, in-8°; —Pathologie; Iéna, 1798,in-8°; 

— Guter Rath an Mûtter ueber die wichtigs- 
ten Punkte der physischen Erziehung der 
Kinder in den ersten Jahren (Avis aux Mères 
•nr les points les plus importants de l'Éducation 
physique des Enfants dans les premières années) ; 
Berlin, 1799, 1803, in-8°, 5 e édit, 1844; trad. 
en français, Francfort-sur-le-Mein, 1800; — 
System der praktischen Heilkunde (Système 
de Médecine pratique); Iéna et Leipzig, 1800- 
1805, 2 vol.; — Ueber die Vergiftung durch 
Branntwein (De l'Empoisonnement par l'Eau- 
de-vie); Berlin, 1802, in-8°; — Ueber lau- 
warme Boeder (Des Bains tièdes); Francfort, 
1802, in- 12; trad. française, Mannheim, 1803; 

— Der Schlaf und die Schlafzimmer in Be- 
ziehung auf die Gesundheit mit einem An- 
hange ûber die Kunst dos Leben zu verlaen- 
gern (Le Sommeil et les chambres à coucher et 
leurs rapports avec la santé, avec un supplément 
sur l'art de prolonger la vie) ; Vienne, 1803, in-8°; 

— Bemerhungen ueber das in Jahre 1806 
und 1807 in Preussen herrschende Nerven- 
fieber (Observations sur la Fièvre nerveuse qui 
a régné en Prusse en 1806 et 1807) ; Berlin, 1807, 
in-8* ; trad. en français par Yaidy , Berlin, 1808 ; 

— Arnienpharmaeopœa (Pharmacie des Pau- 
vres) ; Berlin, 1810 ; — Gesehichte der Gesund- 



heit nebst einer physischen Charakteristik 
. des jetzigen Zeitalters (Histoire de la Santé, et 
Caractéristique physique de notre époque) ; Berlin, 
1812, in-8°; — Ueber die Eriegspest alter 
und neuer Zeiten (De la Peste causée par la 
guerre dans les temps anciens et modernes ) ; Ber- 
lin, 1814, in-8°i — Praktische Uebersicht der 
vorzuglichsten Heilquellen Deutschlands 
(Aperçu pratique des meilleures Eaux minérales de 
r Allemagne); Berlin, 1815,in-8°;4 e édit., 1840;-. 
Aufforderung an aile Aerzte Deutschlands 
und ties Auslandes fur die Beibehaltung der 
û/ficinellen Natnen der Heilmittel (Adresse 
à tous les médecins sur la nécessité de conser- 
ver les noms officinale des médicaments) ; Berlin, 
1815; trad. française, Berlin, 1821; — En- 
chiridion Medicum, oder Anleitung zur me* 
dieinischen Praxis , Vermaechtniss einer 
bOjaehrigen Erfahrung (Enchiridion Medi- 
cum, ou introduction à la pratique de la médecine, 
résultat d'une expérience de chiquante ans) ; Ber- 
lin,! 836 ; 9 e édit., 1851 ; — Kîeineremediciniscke 
Schrtften (Opuscules de Médecine) ; Berlin, 1822- 
1834, 5 vol. — Ce fut Hufeland qui fonda le 
Journal der praktischen Heilkunde (Journal 
de Médecine pratique), 1795, qui existe encore 
aujourd'hui. D r . L. 

Augustin (P.-L), Hu/elands Leben tend ïFirUnfir 
JTissenschaft, Staatund Menschheit ; Postdam, 1837 ; - 
StourdJa( Alexandre de). Hufeland, Esquisse de sa vie 
et de sa mort; Berlin 1887. — Cons.-Lex. 
UÛFffAGÉL. Voy. HGEFNjEGEL. 

hug (Jean-Léonard), théologien allemand, 
né à Constance, le 1 er juin 1765, mort à Fri- 
bourg, le 1 1 mars 1846. 11 fut professeur de théo- 
logie à l'université de Fribourg. On a de lui : 
Die Erfindung der Buchstabenschrift , ihr 
Zustand und frûhester Gebrauch im Alter' 
thume (L'Invention de l'Écriture en caractères, 
son état et son usage dans l'antiquité); Ulm, 
1801 ; — Einleitung in die Schri/ten des 
Neuen Testaments (Introduction aux écrits du 
Nouveau Testament) ; Stuttgard, 1808, 2 vol.; 
4 e édit, 1847 : ouvrage qui a été traduit en fran- 
çais et en anglais; — Untersuchungen ûber 
den Mythus der beruhmtesten Voelker der 
alten Welt (Recherches sur le mythe des prin- 
cipaux peuples de l'antiquité); Fribourg, 1812; 
— Katechismus (Catéchisme); ibid., 1836; — 
Gutachten ûber das Leben Jesu von D.-F. 
Strauss (Critique de La vie de Jésus par D.-F. 
Strauss ) ; ibid., 1840-1844, 2 vol. V— u. 
ConversaL'Lex. 

J uugel ( Charles - Alexandre - Anselme , 
baron de), voyageur allemand, né à Ratisbonne, 
le 25 avril 1796. Il fit ses études à l'univer- 
sité de Heidelberg, entra en 1814 dans l'armée 
autrichienne, et assista comme capitaine à la der- 
nière guerre contre Napoléon I er . Après 1830 il 
visita la Grèce, l'Egypte, l'Indoustan, et péné- 
tra jusqu'au Thibot. U a publié : Enumerafto 
Plant arum quas in Novx Hollandix oraaus- 
trooccidentali, ad fiuvium Cygnomm et in 



401 



HUGEL — HUGO 



402 



sinu Régis Georgii, de Buegel collegit; Vienne, 
1837; — Fische von Kaschmir (Poissons do 
Kaschmir); Vienne, 1838; —Kaschmir und 
dos Reich der Sikhs (Cachemire et l'empire 
des Sikhs); Stuttgard, 1840-1842, 4 vol.; — 
Dos Becken von Kabul ( Le Bassin de Kaboul ) ; 
Vienne, 1851-1862, 2 vol. ; — une relation ra- 
pide du voyage , et qui a été faite par M. Hu- 
gel même , se trouve dans les comptes-rendus 
officiels de l'Assemblée des Naturalistes alle- 
mands; Prague, 1838, et Graetz, 1843. R. L. 

Conv.- Lex. der Gegenwart. 

hugfort (Ignace), peintre de l'école flo- 
rentine, né à Florence, d'un père anglais, en 1703, 
mort en 1778. Quelques petits tableaux, qui fu- 
rent jugés dignes de figurer dans la galerie de 
Florence, lui firent une réputation que ne lui eus- 
sent pas acquise ses ouvrages de plus grande 
proportion. Parmi ces derniers, assez nombreux 
dans les églises de Florence , un seul obtint un 
succès qui a été en partie confirmé par la posté- 
rité : c'est un tableau de l'église Sainte-Félicité 
représentant V Archange Raphaël et le jeune 
Tobie rendant la Vue à son Père. A Pistoja 
on voit de ce maître une Sainte Thérèse, dans 
l'église del Carminé, et la Réception des Reli- 
ques de saint Jacques, à Saint- Barthélémy. 
Hugfort était très-habile connaisseur en peinture, 
et savait reconnaître au premier coup d'œil les 
ouvrages non-seulement des maîtres , mais en- 
core de leurs élèves. 

Hugfort eut un frère nommé Henri , né en 
1695, religieux de l'Ordre de Vallombreuse, qui 
excella dans l'art de peindre la scagliole, et mou- 
rut en 1771. E. B— n. 
Orlandi, Abbecedario. — Laazl, Storia delta Pittura. 

— Tlcozzl, Dizionario. — Fantozzf, Guida dï Firenze. 

— Toloroei, Guida di Pistoja. - Valéry, Voyages Mito- 
' riques et littéraire» en Italie. 

hcghes (John), poète anglais, né à Mari- 
borcMigh (Wiltshire), en 1677, mort le 17 fé- 
vrier 1720. Il fut élevé à Londres, dans l'Aca- 
démie des dissidents. La poésie , la musique et 
le dessin l'attirèrent également, et dans chacun 
de ces arts il fut un amateur distingué et non 
un talent original. Sa poésie, qu'il mit au service 
du parti whig, lui valut la place lucrative de se- 
crétaire des commissaires de paix. 11 mourut le 
soir même de la première représentation du Siège 
de Damas. Ses œuvres, parmi lesquelles on re- 
marque un poème sur la paix de Ryswick , The 
Court of Neptune, Pindaric Ode on the Bouse 
of Nassau, et plusieurs pièces de théâtre, furent 
publiées en 1735, 2 vol. in- 12. Il traduisit les Dia- 
logues des Morts, de Fontenelle; les Révolu- 
tions du Portugal, de Vertot; les Lettres 
d'Abélard et d'Héloïse. Il fournit des articles 
au Tatler, an Spectator, au Guardian, et pu- 
blia une édition des Œuvres deSpenser; 1715, 
6 vol. in- 12. Z. 

Jobnson, Lines of the English Poets. — Biographia 
Britannica. — Biographia Dramatica. 

hcghes (Jabez), traducteur anglais, frère 



du précédent, né en 1685, mort le 17 janvier 
173f. Il traduisit V Enlèvement de Proserpine, 
de Claudien, et l'épisode de Sextus et Eric» 
thon, dans la Pharsale de Lucain; 1714, 
in-8*; — les Vies des Césars, de Suétone, 
1717 ; — des Nouvelles de Cervantes , dans la 
Select. Collection of Novels and Historiés; 
1729. On publia de lui après sa mort Miscel- 
lanies in verse and prose; 1737, in-8 . Z. 

Chatoiera, General Biographical Dietionary. 

hughes (John), philologue anglais , né en 
1682, mort en 1710. Il était membre du collège 
de Jésus à Cambridge. On a de lui une bonne 
édition du traité Sur le Sacerdoce (H«pl lepu- 
<TWTic) de saint Chrysostome; 1710, in-8°; 
réimprimée en 1 7 1 2. Z. 

Chalmen, General Biog. Met. 

hughes ( Griffith ) , naturaliste anglais , vi- 
vait au dix-huitième siècle. Il était ministre de 
la paroisse de Lacy, dans 111e de La Barbade, où 
il résida pendant douze ans. A son retour il pu- 
blia Natural History of Barbadoes ; Londres, 
1750, in-fol., avec vingt-quatre planches ; réim- 
primé en 1760 , in-fol., avec vingt-neuf planches. 
Hughes était membre de la Société royale de 
Londres, et il inséra dans les Philosophical 
Transactions un mémoire sur les zoophytes des 
côtes des lies Barbades. Z. 

Wats, Bibliotheea Britannica. - Clément de Genève, 
Cinq pennées littéraires. 

J hugi (François-Joseph), naturaliste 
suisse, est né en 1795, à Grenchen (canton 
de Soleure). Il étudia les sciences naturelles à 
Landsbut et à Vienne, visita une partie de l'Al- 
lemagne et de la Hongrie, et fonda, de retour 
en sa patrie, un musée d'histoire naturelle que 
lui acheta en 1830 la ville de Soleure. Hugi 
s'est surtout fait connaître par ses travaux 
sur les glaciers, sur la formation desquels il émet 
des théories particulières. Ses principaux ou- 
vrages sont : NaturhUtorische Alpenreisen 
(Voyages scientifiques dans les Alpes); Soleure, 
1830; — Die Erde als Organismus (La Terre 
considérée comme un Organisme) ; ibid., 1841 : 
cet ouvrage est le fruit d'un voyage que M. Hugi 
entreprit en 1835 dans le nord de l'Afrique , en 
Sicile et en Italie; — Ueber dos Wesen der 
Gletscher (De la Nature des Glaciers); Stutt- 
gart, 1842; — Die Gletscher und die erra* 
tischen Blôcke (Les Glaciers et les Blocs erra- 
tiques); Soleure, 1843. M. Hugi est aussi le 
fondateur du jardin botanique de Soleure. R. L. 
Conv.-Lex. 

hugo (fferman), érudit belge, né à Bruxelles, 
en 1588 , mort à Rhinberg, le 1 1 septembre 1629. 
Sa famille était originaire de la Bourgogne. 11 
entra comme novice chez les jésuites de Tournay 
en 1605, professa les humanités à Anvers, et de- 
vint préfet des études à Bruxelles. Il suivit en 
Espagne le duc d'Arschot, dont il était le confes- 
seur, et de retour en Flandre, Ambroise Spi- 
nola le prit pour son aumônier. Hugo suivit 



409 

Spinola sur les champs de bataille, et déploya au 
milieu des combats on grand sang-froid. La 
peste s'étant déclarée dans le camp espagnol, 
Hugo y succomba. On a de lui : De prima 
Seribendi Origine, et univers» rei litterarim 
antiquitate; Anvers, Piantin, 1617, in-8° ; réim- 
primé avec additions de C.-H. Trotz, Trêves, 
1738, in-8° ; trad. en français, sous le titre de : 
Dissertation historique sur l'Invention des 
Lettres et des caractères d'écriture, et sur 
les instruments dont les anciens se sont ser- 
vis pour écrire; Paris, 1774, in-12 ; — De Vera 
Fidecapessenda ad Neo-Eyangelicanam Syno- 
dum Dordracenam Apologetici Librï très, 



HUGO , 404 

nova f en cinq hvres, dédiés à Philippe IV ; An- 
vers, Piantin, 1628 et 1630, in-fol. Selon l'opi- 
nion de quelques bibliographes, toutes les gra- 
vures de ce livre, le titre excepté, seraient de 
Gallot; — Vita P. Carol\ Spinolœ, Societatis 
Jesu, pro christiana rehigione in Japonia 
mortui, trad. de l'italien <lu P. Fabio-Amhxo&ia 
Spinola; Anvers, Piantin, 1630, in- 8°, avec 
portrait; — VitaJohannis Bfirchmanni Flan- 
dro-Belgse religiosi Societatis Jesu, trad. de 
l'italien du P. Yirgilio Çepario ; Anvers, Pian- 
tin, 1630, in-8°, avec portrait. Le P. Hugo a 
laissé en manuscrit une Bistoria Bruxellx et 
trois tomes Contra Alkeos. C'est à tort que 



adversus Balthasarem Meisnerum fathera- \ Cbaudon et Delandine lui onj attribué la traduc- 



num et Henricum Brandiumcalvinistum,Qtc.; 
Anvers, Piantin, 1620, in-8° ; Baltfcasar Meisner 
répondit a cet ouvrage par Xl\ Dispuktftimes ; 
Strasbourg, 1623, in-8° ;— Pia Qetideria, ëm- 
blematis, elegiis etaffectibus SS. Patrum il- 
lustrala; Anvers, 1624, in-8°, avec de jolies 
figures sur cuivre de Poetius a Bolowert; et 
1628, in-12, aveefig. sur bois. Ce recueil, réim- 
primé fort souvent, est divisé en trois livres ; le 
premier a pour titre: GemitusAnimx peniten- 
tis;h second Vota Animas sanctae ; le troisième 
Suspiria Animae amant U. Ce sont de longues 
paraphrases, en vers élégiaques, de passages choi- 
sis de l'Écriture Sainte. Hugo, a délayé dans une 
soixantaine de vers chacun des versets qu'il a 
pris ponr texte, et a substitué à la simplicité su- 
blime de ses modèles de froides amplifications; 
il versifie, du veste, asseï bien ; il est même quel- 
quefois poète, mais il n'a jamais été inspiré par 
la musc de David. Les pia Desideria ont été 
traduits en français par Boèce de Bolowert, 
Anvers et Paris, 1627, in-8°; une autre édition 
a para sous le titre de F Ame amante de son 
Dieu, Cologne, 1717, et Paris, 1790, in-12, 
avec 60 fig. Plusieurs éditions ont aussi été pu- 
bliées en anglais , par Edmond Arwaker, Lon- 
dres, 1686, m-8°,47 grav. ; en allemand, par Karl 
Stengel , Augsbourg, 1628, in-12 , et Wesel, 1706, 
' in-16; en espagnol, par le P. Pedro de Salas; 
enfin en hollandais , en italien ; — Qbsidio Bre- 
dana armis Philippi IV, auspiciis Isabelte, 
ductu Ambr. SpinoUe, prxfecta; Anvers, 
Piantin, 1626 et t§29, in-fol. Le P. Hugo avait 
été présent à ce siège, et sa relation peut être 
consultée avec fruit; elle a été traduite en espa- 
gnol par Emanuel Sueyro : Sitia de Breda ren- 
dida a las armas del reu don Phelippe IV, a 
la virtud de la infante dona Isabel, al va- 
lor del marques Ambr. Spinola, etc. , Anvers, 
Piantin, 1627, in-fol.; en français, par Philippe 
Chifuet : Le Siège de la ville de Breda con- 
quise par les armes du roy Philippe IV, par 
la direction de Vinfdnte Isabelle-Ci.- Eugé- 
nie, par la valeur du marquis Ambr. Spi- 
nola , Anvers, Piantin, 1631, in-fol., avec cart. ; 
en anglais; et enfin en italien , Milan, 1627, in-8°, 
très-rare ; — De Militia equestvi antiqua et 



tion française du Voyage astronomique et géo- 
graphique dans VIS tôt de F Église pour me- 
surer deux fayré* 4u méridien, par les 
PP. Maire et Poscovish» Paris, $770, uv4°. 

A. L. 

Sotwel, De Scxiptorifius Qocietatis Jesu. — Goethals, 
Histoire des Lettres en Belgique, t. II. — Cbaudon et 
Delandine, Dictionnaire Universel. — Aiofs et Augustin 
de Bâcher, Bibliothèque des Écrfrakns de la Cempaçnie 
de Jétu*. 

HUGQ ( Charles-Louis ) , historien français , 
né à Saint-Mihieï (Lorraine), en mars 1667, 
mort à Etival, le 2 août 1739. Il entra en 1683 
dans l'ordre des Prémontrés réformés de Lor- 
raine, et fit profession en 1687. Après avoir ob- 
tenu à Bourges Je grade de docteur, il professa 
la théologie à Jand'heurs en 1691 , et à Étirai 
en 1693. Coadjuteur c|e l'abbé d'Çtivalen 1710, 
il devint l'année suivante abbé de Fontaine- An- 
dré. Enfin, il obtint l'abbaye cfÉtîval en 1722, 
et fut nommé évêque de Ptolémaïde en 1728. 
Ses travaux les plus importants sont : Vie de 
saint Norbert , archevêque de Magdebourg et 
fondateur de V Ordre des Chanoines réguliers 
Prémontrés; Luxembourg, 1704, in-4»;* — 
Traité historique et critique sur V Origine de 
la Maison de Lorraine; Berlin (Nancy) , 1711, 
in-8° : cet écrit, publié sous le pseudonyme de 
Balireourt, fut condamné par le parlement de 
Paris, le 17 décembre 1712, en même temps 
que l'ouvrage suivant : — Réflexions sur deux 
ouvrages nouvellement imprimés , concernant 
V histoire de la Maison de Lorraine (Nancy ), 
1712, in-12 : ces deux ouvrages sont : La Lor- 
raine ancienne et moderne de Jean Mussey , et 
le Supplément de V Histoire de la Maison de 
Lorraine, par le P. Benoît Picard , capucin ; — 
Ifistoire de la Maison des Sales, originaire 
de Béarn; Nancy, 1716, in-fol. ; — Sacrm An- 
tiquitatis Monumenta historica , dogmatica , 
diplomatica, cum notis; 1725-1731, 2 Toi. 
in-fol. : le premier est imprimé à Eh val, et le 
second à Saint-Dié ; — Sacri et canonici Or- 
dinis Praemonstratensis Annales. Par s prima, 
monasterologiam , sive singulorum ordinis 
monasteriorum singularem historiam com- 
pleetens; Nancy, 1734-1736, 2 vol. in-fol. : la 
seconde partie devait contenir l'histoire générale 



405 



HUGO 



406 



de l'Ordre de* Prémontrés. Le P. Blampain , 
prémontré dT^tival, a publié sur ce travail : fur 
gement des Écrits de M. Hugo, abfréd'Ééival, 
historiographe de l'ordre des Prémontrés 
(Nancy), \73$ tl ift-8 , Op attribue à; Hugo la 
Défense de ta Lorraine contre les prétentions 
de la FWHCf, etc., par Jean-Pierre-Louia P. P*. ; 
La Haye, 1697, in-13. Hugo, qui n'a mis son 
nom à aucun de seg outragea, a laissé manua-î 
crite une 8\sto\re de fywraine jusqu'à pré- 
&n( (4718). Ç. Rbonaju). 

Ooœ faltuet, MMfotAégin £Qrroiw. — Mqréi% Grand 
Dictionnaire Historique. — J. teloog, Biblioth. hist. fo, 
la Franep, édit. de Fcvrçt de Fontette. — Barbier, Dic~ 
tionnair* de* Ouvrage* Anonyme.— Quéraçé, ha Franee 
Littéraire. 

huqo (Gusfaw), jurisconsulte allemand, 
né le 23 novembre 1764, à Loerrach (Bade), 
mort à Gcpttiqgue, le 16 septembre 1844. Qepuis 
1788 il enseigna le droit à l'université de Gcet- 
tingue. Conformément aux conseils donnés par 
Leibniz et Putter, il fut un des premiers pro- 
fesseurs qui enseignèrent le droit romain suivant 
l'ordre naturel des matières, et non d'après la 
suite des titres adoptés dans le* In&titutes ou les 
Pandeetes. Jl distribua l'histoire dq droit romain 
dans des époques, déterminées, et appliqua la 
philosophie du droit positif à l'étude du droit 
civil. lié principal ouvrage (te Hugo, lekrbuch 
des çivilistischen Cursits (Cours de Droit 
civil), embrassa les traités suivants : 1° Lehr- 
buch (fer juristisfihçn Encyclopédie (En- 
cyclopédie du Droit); Berlin; 1811; 8 e édit., 
1835 ; 2° lehvbuch des JSaturreohts, als etoer 
Philosophie des posïtiven jtechts ( Traité du 
Droit naturel, considéré comme philosophie 
du Droit positif); Berlin, 1809; 4 e édit., 1819) 
3° JLehrbuch der Geschichte des roemis- 
chen Mçchts bu au/ Justinian t Histoire du 
Droit romain jusqu'à l'empereur Justinien); 
Berlin, 1810; 11 e édit., 1832; 4° Haudbuek 
des rwmisçhm Mwhts (Manuel du Droit 
romain ) ; ibid.; V édit., 1826 ; — Chrestema* 
thie von Bewisstellen fuer das keutige 
roemisçbe Recht (Chrestomathie d'Argument* 
en faveur du Droit romain d'aujourd'hui); Badin, 
1807 : Supplément; Gcettingue, 1812; 3 e édit., 
1820 i — Lehrpuch der Qescfàfihte. $e$. Çwhts 
seit Justinian ( Jtfstojre du Droit depuis l'em- 
pereur Justinien ) ; Berlin, 1812 ; 3 e édit., 1&3Q ; 
— Lehrbuch der JHgesten (Traité des Di- 
gestes) ; ibid., 1822 et 1828; une partie de ces 
ouvrages remarquables a été traduite en français 
par Jourdain et revue par F. Poncelet : B%s r 
totre du Droit romain; Paris^ 1821, a vol. 
in-8°; — Fragmenta d'Ulpien; Gcettingue, 
1788; — Civilistisches Magasin (Magasin du 
Droit civil) ; Berlin, 1814-1837, 6 vol.; — Bei- 
traege zur civilistichen pùcher - Kenntniss 
der letzten vierzig Jahre ( Matériaux pour la 
Bibliographie du Droit civil des dernières années); 
Berlin, 1828-1845, 8 vol. V — u. 

Conv. Le». 



HUGO (Joseph'Léopold-Sigisbert, comte), 
général français, né à Nancy, en 1774, mort à 
Paris, le 30 janvier 1828. Engagé comme simple 
soldat à quatorze ans, il était officier en 1790, 
et parcourut de la manière la plus brillante la 
série des guerres de la révolution. « Il signala 
de bonne heure, dit la BiographieR&bbe, ses ta- 
lents et son courage, soit dans la Vendée, soit 
suri les bords du Bhjn, soit enfin sur ceux dn 
Dairahe. A la bataille de Vihiers, dans la Vendée, 
à la tête seulement de cinquante nommes, il arrêta 
plusieurs milliers de Vendéens; et quelques an- 
nées plus tard, en Italie, an fameux combat de 
Caldiepo, où l'armée française fut un moment 
repoussas, Hugo, alors chef de bataillon, en en- 
levant ce village et en s'y maintenant pendant 
quatre heures, malgré les efforts de l'ennemi, 
sauva l'armée française de la nécessité de repas- 
ser l'Adige, et lui prépara la victoire qui suc- 
céda à sa défaite momentanée. Passé au service 
du roi de Naples, Joseph Bonaparte, et sur la de- 
mande de ce prince, qui l'avait connu aux con- 
férences de Lnnéville, auxquelles, malgré sa 
grande jeunesse, Hugo avait assisté en sa qualité 
de commandant de place, ce rat lui qui extirpa de 
ce royaume le fléau du brigandage, en détruisant 
les bandes dn chef redoutable connu sous le nom 
de Fra Diavolo (voy. ce nom). » Nommé en 
récompense de ses services colonel, maréchal du 
palais, et chef militaire de la province d'Aveline, 
Hugo acquit de nouveaux droits à l'estime du 
roi Joseph, qui Remmena en Espagne, lorsqu'il 
changea de couronne. £n Espagne, Hugo fut 
chargé de la formation et du commandement du 
régiment royal étranger, et bientôt le roi ajouta 
à ces fonetien» l'inspection de tous les corps 
fpnoés ou à former dans le royaume. A trente- 
quatre ans, Hngo était général et gouverneur 
des provinces d'Avila, de Ségovie, de Soria, 
puis de Gnadalaxara, de Siguienia et de Molina 
d'Aragon. U guerroya pendant trois ans contre 
le fameux Ëmpecinado ( voy. ce nom), et le battit 
en trente-deux rencontres. Par sou activité, 
Hugo réussit à délivrer des guérillas tout le 
cours du Tage, et à rétablir les communications 
entre les corps français. On a estimé à plus de 
30 millions de réaux la valeur des convois qu'il 
enleva aux insurgés de 1809 à 1811. A Qcana, 
il arrêta le corps de Balleateros , et opéra des 
diversions importantes pour l'armée française. En 
1812 il fut nommé au commandement de la 
place de Madrid, et il commanda l'arrière-garée, 
lorsque, peu de temps après, les Français forent 
obligés d'évacuer cette capitale. Dans cette retraite 
précipitée^ et désastreuse, il sauva l'armée et le 
roi Joseph* lui-même, en arrêtant les Anglais à la 
hauteur d'Alegria. Rentré en France en 1813, 
le général Hugo fat immédiatement appelé par 
l'empereur Napoléon au commandement de 
Thionviile. Les places de guerre de l'intérieur 
avaient été assez mal entretenues sous l'empire. 
Hugo défendit Thionviile, à peu près dépourvue 



407 



HUGO 



408 



de munitions de guerre, ouverte de toutes parts, 
et avec une faible garnison, pendant quatre-vingt- 
huit jours d'un blocus très-serré. Foroé de l'a- 
bandonner par suite de la déchéance de Napoléon, 
il alla la défendre encore, pendant les Cent-Jours, 
contre les alliés, qui, à leur retour, voulaient la 
démanteler et emporter son matériel. La se- 
conde restauration lui rendit le repos. H se re- 
tira à Blois , où il s'occupa de la composition 
de divers ouvrages. En 1824 , il fut compris 
dans l'ordonnance qui mit d'un coup cent cin- 
quante généraux de l'ancienne armée à la retraite. 
Revenu plus tard à Paris, il fut emporté par 
une attaque d'apoplexie foudroyante. « Le ca- 
ractère du général Hugo était, dit la Biographie 
Rabbe, un heureux mélange de candeur, de 
franchise et de bienveillance. 11 était homme d'es- 
prit, et sa conversation, pleine de souvenirs in- 
téressants , était aussi instructive qu'elle était 
agréable. » On a de lui : Coup d'oeil mi- 
litaire sur la manière d'escorter, d'attaquer 
et de défendre les convois, et sur les moyens 
de diminuer la fréquence des convois et d'en 
assurer la marche; suivi d'un mot sur le 
pillage; Paris, 1796, in-12; — Mémoire sur 
les moyens de suppléer à la traite des nè- 
gres par des individus libres, et d'une ma* 
nière qui garantisse pour l'avenir la sûreté 
des colons et la dépendance des colonies 
(sous le pseudonyme de Genty) ; Blois, 1818, 
in-8°; — Journal historique du Blocus de 
Thionville en 1814, et de Thionville, Sierck 
et Rodemack en 1815, contenant quelques dé- 
tails sur le siège de Longwy; rédigé sur des 
rapports et mémoires communiqués par 
M. À. -À. M*** (pseudonyme), ancien officier 
d? état-major au gouvernement de Madrid; 
Blois, 1819, in-8° > — Mémoires du général 
Hugo; Paris, 1825, 2 vol. in-8° : on retrouve à 
la suite le Journal historique du blocus de 
Thionville; — L'Aventure tyrolienne, par Si- 
gisbert (un des prénoms de l'auteur), roman; 
Paris, 1826, 3 vol. in- 12. « Le général Hugo s'oc- 
cupait depuis longtemps,dit la Biographie Rabbe, 
d'un grand traité de la défense des places fortes. 
On assnre qu'un gouvernement étranger, ayant eu 
connaissance de l'importance et du mérite de ce 
travail, chercha à se l'approprier en offrant une 
somme considérable au général Hugo, qui eut le 
patriotisme de la refuser. Cependant le manus- 
crit, dont le gouvernement français avait demandé 
la communication, resta enfoui dans les cartons 
du ministère, soit par suite de l'inertie de l'ad- 
ministration, soit que les moyens indiqués par 
l'auteur ne lui parussent pas répondre à son 
attente. Le général Hugo proposa en 1827 son 
ouvrage par souscription ; mais il n'eut que le 
temps d'en publier le prospectus, qui a paru sous 
ce titre : Prospectus de l'ouvrage intitulé : 
Des grands moyens accessoires de défense 
et de conservation aujourd'hui indispensa- 
bles aux places fortes, aux armées, aux co- 



lonies et aux États qui les possèdent ; Paris, 
1827, in-8». » L. L— t. 

Araault, Jay, Jouy et Norvins, Diogr. nom. des Con- 
temp. — Babbe , Vieilli de Botsjolln et Saiote-Prenve , 
Bioçr. univ. et portât, des Contemp. — . C. Multté, Bioer. 
des Célébrité* militaires des armées de terre et de 
mer de m» h isso. 

*hugo (J.-Abel), littérateur français, fils 
aîné du précédent, né vers 1798, mort en 
1855. Il avait rejoint son père en Espagne et 
était officier dans l'armée du roi Joseph lors- 
qu'il revint en France avec sa mère. Après la 
restauration, il se fit homme de lettres, travailla 
pour le théâtre et les petits journaux, et pro- 
duisit quelques ouvrages plus importants. On a 
de lui : Traité du Mélodrame, par MM. A! 
Al A! (avec Armand Malitourne et J. Ader); 
Paris, 1817, in-8° ; — La Vengeance de la Ma- 
done, fragment traduit de l'italien; Paris ,1822, 
in-8° ; — Romances historiques , traduites de 
l'espagnol; Paris, 1822, in-8°; —L'Heure de la 
Mort; Paris, 1822, in-8*; — Les Français en 
Espagne, à- propos-vaudeville en un acte (avec 
Alph. Vulpian); Paris, 1823, in- 8°; — Précis 
historique des Événements qui ont conduit 
Joseph Napoléon sur le trône d'Espagne, ex- 
trait des Mémoires du général Hugo; Paris, 
1823, in-8 9 : tiré à 60 exemplaires ; — Pierre 
et Thomas Corneille, à-propos en un acte et 
en prose; Paris, 1823, in-8° ;. publié sons le 
pseudonyme de Monnières, avec Romieu; 
— Histoire de la Campagne d'Espagne en 

1823, ornée de gravures par Couché fils; Paris, 

1824, 2 vol. in-8°; —Les Tombeaux de Saint- 
Denis, ou description historique de cette 
abbaye célèbre, des monuments qui y sont 
renfermés et de son riche trésor; suivie du 
récit de la violation des tombeaux en 1793, 
de détails sur la restauration de Féglise en 
1806, et depuis en 1814; de notices sur les 
rois et les grands hommes qui y ont été en- 
terrés et sur les cérémonies usitées aux ob- 
sèques des rois de France, et de la relation 
des funérailles de Louis XVIII; Paris, 1824, 
in-18; — Vie anecdotique de Monsieur, comte 
d'Artois, aujourd'hui 5. M. Charles X, roi 
de France et de Navarre , depuis sa nais- 
sance jusqu'à ce jour; Paris, 1824, in-18; — 
Histoire de l'empereur Napoléon; Paris, 
1833, in-8°; — France pittoresque, ou des- 
cription pittoresque, topographique et sta- 
tistique des départements et colonies de la 
France, offrant en résumé, pour choque 
département et colonie , Vhistoire, les anti- 
quités, la topographie, etc.; Paris, 1833, 
3 vol. in- 4° ; — France militaire, histoire des 
armées françaises de terre et de mer, de 
1792 à 1833; ouvrage rédigé par une société 
de militaires et de gens de lettres d'après 
les bulletins des armées, Le Moniteur, les 
documents officiels, les notes, mémoires, 
rapports et ouvrages militaires de l'empereur 
Napoléon, des maréchaux, amiraux et gé- 



409 



HUGO 



410 



néraux en chef, etc., rem et publié par A. 
Hugo; Paris, 1834, 5vol. gr. in-4° ; — France 
historique et monumentale, histoire générale 
de France depuis les temps les plus reculés 
jusqu'à nos jours, illustrée et expliquée par 
les monuments de toutes les époques édifiés, 
sculptés, peints, coloriés, etc.; Paris, 1836- 
1843, 5 toI. in-4% avec cartes et planches. 
Ainsi que ses frères Victor et Eugène, Abel 
Hugo coopéra an Conservateur Littéraire et 
aux Annales de la Littérature. Une ode de lui 
sur la Bataille de Denain fut couronnée , en 
1 822, par la Société d'Émulation de Cambrai. La 
même année il donna une édition du Romancero 
historia del re de Espana don Rodrigo; 
Tannée suivante il commença la publication des 
Tablettes Romantiques. Il avait annoncé , en 
1821, une collection intitulée : Le Génie du 
Théâtre espagnol, ou traductions et ana- 
lyses des meilleures pièces de Lopez de Vega; 
P. Calderon et autres auteurs dramatiques, 
depuis le milieu du seizième siècle jusqu'à 
la fin du dix-huitième ; mais cet ouvrage n'a 
pas paru. Abel Hugo a en outre publié : Le 
Conteur, recueil de contes de tous les temps 
et de tous les pays , paraissant mensuelle- 
ment; Paris, 1833, in- 12. Vice-président de la 
Société orientale, il a donné des articles à la Re- 
vue de V Orient, fondée en 1841. Il est Fauteur 
de deux articles : Souvenirs et Mémoires sur 
Joseph Bonaparte, qui ont paru dans la Revue 
des Deux Mondes, 15 février et 15 avril 1833. 

L. L-t. 
Quérard, £a France Littéraire. — Bourquelot, La 
Littér. franc, contemporaine. 

hugo (Eugène), poète français, frère du 
précédent , né vers 1801 , mort à la maison de 
Chareuton, au mois de mars 1837. Camarade d'é- 
tude de son frère Victor, il s'enthousiasma 
comme lui pour la poésie, et créa avec lui Le 
Conservateur Littéraire, dans lequel il écrivit 
quelques articles de critique. On lui doit en 
outre une Ode sur la Mort du duc d 9 Enghien, 
qui lui valut un prix à l'Académie des Jeux Flo- 
raux ; et on trouve de lui, en tète des Œuvres en 
prose d'André Chénier, une notice extraite du 
Conservateur Littéraire, que M. V. Hugo a re- 
produite dans ses œuvres. Exalté, solitaire, cha- 
griné, dit-on , par une passion malheureuse , il 
perdit l'esprit, et fut d'abord confié aux soins du 
docteur Esquirol, qui nepnt le guérir. J. V. 

Bourquelot, La Littér. franc, contemporaine. . 

* hugo (Victor-Marie, vicomte), célèbre 
poète et romancier français, frère des deux 
précédents et second fils dn général Hugo, né à 
Besançon, le 26 février 1802. Son père avait été 
un des premiers volontaires de la république; 
sa mère, Sophie Trébuehet, fille d'un armateur 
de Nantes, Bretonne de naissance, royaliste de 
cœur, avait partagé les dangers de l'insurrec- 
tion vendéenne. 11 trouva ainsi dans, les sym- 
pathies contradictoires de ses parents deux 



sources opposées d'inspiration qui devaient suc- 
cessivement animer ses œuvres. Il eut une en- 
fance errante, aventureuse, singulièrement 
propre à développer en lui le génie poétique. 
Suivant son expression, il parcourut l'Europe 
« avant la vie ». Il avait à peine six semaines, 
lorsque sa famille quitta Besançon pour l'île 
d'Elbe. Après avoir passé trois ans dans cette 
lie, que devait rendre célèbre le premier exil 
de Napoléon, il habita pendant deux ans Paris 
avec sa mère. Celle-ci l'emmena ensuite en Ita- 
lie dans la province d'Avellino (royaume de 
Naples), dont le colonel Hugo était gouverneur. 
Le futur poète joua au pied du Vésuve , vit 
« ces bords embaumés où le printemps s'arrête », 
et tressaillit peut-être au récit dea aventures 
de Fra Diavolo, le fameux bandit que son père 
poursuivait à travers les montagnes des Ab- 
bruzzes. En 1809, sa mère le ramena à Paris. 
Ce nouveau séjour, qui dura deux ans , laissa 
dans l'âme du poète de doux souvenirs , sou- 
vent célébrés par lui. M me Hugo, avec ses fils, 
occupait une maison solitaire du faubourg 
Saint-Jacques, impasse des Feuillantines. Un 
vieux prêtre marié, M. de La Rivière, venait don- 
ner des leçons de grec et de latin aux enfants, 
dont l'intelligence se développa rapidement 
dans cette vie retirée et libre. « J'eus, dit 
M. V. 



J'eus, dam ma blonde enfance, bêlas! trop éphémère, 
Trois maîtres : un jardin, un vieux prêtre et ma mère : 
Ainsi Je grandissais sous ce tripie rayon. 

Un dramatique incident troubla cette stu- 
dieuse et poétique existence. Le général La Horie, 
ancien lieutenant de Moreau , suspect à la police 
impériale, était venu demander asile à M me Hugo, 
et occupait une petite chambre dans cette de- 
meure écartée. « La plus douce occupation du 
guerrier philosophe , au milieu de cette inaction 
prolongée qui le dévorait, était de s'entretenir 
avec le jeune Victor, de le prendre sur ses ge- 
noux, de lui lire Polvbe en français... de lui 
faire expliquer Tacite en latin (1). » La police 
finit par découvrir l'asile de La Horie. Le gé- 
néral, jeté en prison, n'en sortit que pour s'as- 
socier à la tentative de Mallet et tomber à ses 
cotés, fusillé dans la plaine de Grenelle. « On 
sent quelle impression profonde et amère du- 
rent jeter dans l'âme ardente du jeune enfant les 
discours du mécontent et le suppliée de la vic- 
time : cela le préparait dès lors à son royalisme 
de 1814 (1). » Quelques jours après l'arrestation 
de La Horie, au printemps de 1811, M me Hugo, 
avec ses fils, partit pour l'Espagne, où son mari 
était devenu général et premier majordome du 
palais du roi Joseph. Le jeune Victor fut mis au 
séminaire des Nobles, où il resta un an. Il devait 
entrer dans les pages du roi Joseph; mais les 
événements devinrent bientôt si menaçants pour 



(1) Article Hugo dans la Bioçr. de Banne, soppl. 
(S) loid. 



411 



HUGO 



4\î 



cette nouvelle royauté, que M™* Hugo ramena 4 
Paris ses deux fils cadets Eugène et Victor. Elle re- 
prit son logement des Feuillantines, et fit achever 
à ses enfants leur éducation classique sous le vieu* 
M. de La Rivière. «Les idées religieuses tenaient 
très-peu de place dans cette forte et chaste dis- 
cipline. Le fond de la philosophie de leur mère 
était le voltairianisme, et, femme positive qu'elle 
était , elle ne s'inquiéta pas d'y substituer une 
croyance pour ses fils. Tous deux, le jeune 
Victor surtout, avaient rapporté dé l'Espagne - 9 
outre la connaissance pratique et l'accent gut- 
tural de cette belle langue, quelque chose de la 
tenue castillane, un redoublement de sérieux, 
une tournure d'esprit haute et arrêtée, un Sen- 
timent supérieur et confiant, propice aux grandeà 
choses ; ce soleil de la Sierra , en bronzant leur 
caractère avait aussi doré leur imagination. Victor 
commença à treize ans, an hasard, ses premiers 
vers; il s'agissait de Roland et de chevalerie (1). » 
La chute de l'empire et la première restauration 
arrivèrent avant la fin de ses études. Vers le 
même temps des dissentiments domestiques, 
aigris par la dissidence de leurs opinions poli- 
tiques, amenèrent une séparation entre le gé- 
néral Hugo et sa femme. Le général, usant 
de ses droits de père, et destinant ses deux 
fils à l'École Polytechnique, les plaça à la pen- 
sion Cordier, où ils restèrent jusqu'en 1818. fls 
suivirent de là les cours de philosophie, de 
physique et de mathématiques au collège Louis- 
le-Grand. Victor montrait une singulière apti- 
tude pour les mathématiques; mais il 'préférait 
la poésie, à laquelle il réservait ses loisirs. Dans 
la première ferveur du royalisme qu'il avait 
puisé auprès de sa mère, il composa une tragé- 
die classique , intitulée îrtavnène, où il célébrait, 
sous des noms égyptiens , là restauration des 
Bourbons. 11 en commença une autre sons le 
titre de Athélie, ou les Scandinaves, qu'il ne 
poussa pas au delà des trois premiers actes. 
Une pièce devers qu'il adressa, en 1817, à l'A- 
cadémie Sur les Avantages de V Étude , sujet 
mis au concours, attira vivement l'attentionné* 
juges. Ils l'auraient même couronnée, dit-on , si 
elle ne s'était terminée par ces vers : 

Moi qui, toujours fuyant les cités et les (tours, 
De trois lustres à peine M va finir le cours. 

Ces vers, si l'on en croit ti biographie de Rabbé, 
parurent une mystification ail*, académiciens, qui 
se contentèrent d'accorder Ûné mention hono- 
rable à l'auteur. « Si véritablement il n'a que 
cet âge, dît M. Ray nouât»! dans son rapport 
sur le Concours, l'Académie a dû un encoura- 
gement au jeune poète qui a fâît les vers sui- 
vants ; » et il citait quelques vers tout classiques 
par la forme et la pensée. 

En 1818, Victor Hugo obtint de son père là 
permission de ne pas se présenter à l'École 
Polytechnique, et dès lors il s'adonna entièrement 

(f ) Art. Hugo dans la Biographie de Rabbe, sappl. 



aux lettres. Une ode sur la Statue d'Henri IV; 
une autre sur Les Vierges de Verdun ; une troi- 
sième intitulée : Moïse suf le mt, furent couron- 
nées par l'Académie des Jeux Moraux de Tou- 
louse ; la troisième lui valut le grade de maître es 
jeux floraux. Ces débuts académiques sont assez 
singuliers pour le futur chef dé Véébte roman- 
tique ; mars il Avait à péihe dix -huit ans, et son 
originalité poétique ne s'était J&s encore dégagée. 
Cette partie de là vie dé M. Victor Jatfgo à été 
peinte d'après de* relèvements intimes par 
l'auteur anonyme (M. Sainte-Beuve) de l'ar- 
ticle Hugo dans la Èi&grùfihîcteVbe. ftous em- 
pruntons à cette notice une* fcâgé empreinte 
d'exagération, mais qui représente arec vivacité 
fan formation du vigoureux talent de M. Hugo. 
« Les années 1819 et 1820 furent sans doute les 
plus remplies, les plus laborieuses, lés plus arden- 
tes, les plus décisives de sa vie. Amour, politique, 
indépendance , chevalerie et religion, pauvreté 
et gloire, étude opiniâtre, lutte contre le sort en 
vertu d'une Volonté de fer, tout èta lui apparut et 
grandit à la fois à" ce degré dé hauteur qui 
constitue le génie. îbrit s'êtiibrasa , se tordit , 
se fondit Intimement dans son être au feu des 
passions, sous le soleil de la plus âpre jeunesse, 
et il en sortit cette nature d'un alliage mystérieux 
où la lave bouillonne sonè le granit, cette armure 
brûlante et sonde, à là poignée éblouissante de 
perles , à la lame brune et sombre , vraie ar- 
mure de géant trempée eux lacs volcaniques. Sa 
passion pour la jeune fille qu'il aimait avait' fini 
par devenir trop claire aux deux familles, qui, 
répugnant à unir un couple de cet âge et sans 
fortune, s'entendirent pour ne plus se voir 
momentanément. Il à consacré cette douleur de 
l'absence dans une pièce intitulée : Premier 
soupir : une tristesse douce et fière y est em- 
preinte..... ffand 1 Istande 1 (\iï\ lé" croirait? com- 
mencé dès 1820. Han eTftftwtfe, qti'il fie publia, 
par suite d'obstacles matériels, qu'en 1823, de- 
vait être à l'origine et dans la conception première 
un tendre message d'amour destiné à tromper les 
argus, à n'être IWtthément compris tyfee d'une 
seule jeune ntle*...'. IKrr&nt ce même temps Vic- 
tor Hugo eomftosàit «dn premier volume d'odes 
royalistes et religieuses. On sait comment son 
royalisme lui était venu. Quant à fa féngion; elle 
lui était entrée dans le cœur pat ITmàginàfion 
et rmtettigencé; M y voyait avant tout la pllis 
haute forme de la pensée huraàtae, la jpïufc do- 
minante des perspectives poétiques* Le genre 
de monde qui! fréquentait alors, et qui raceueil- 
lait ave? toutes sortes dé caresses, entretenait 
journellement l'espèce d'illusion quH se Taisait 
à lui-même sur ses croyances. Mais la fond de 
sa doctrine politique était toujours rtttdépenâanee 
personnelle; et le philosophisme positif de sa 
première éducation, quoique recouvert des*syrn- 
botes catholiques , persistait obscurément des- 
sous. » Ainsi préparé à la poésie pur ta passfcm 
et l'étude, M. Victor Hugo commença, en 1822, la 



113 



HUGO 



414 



série de pnblioations qui le portèrent rapidement 
au premier rang des écrivains de son époque. 
Avant d'apprécier ces œuvres nombreuse*, nous 
donnerons encore quelques faits de la vie domes- 
tique du poète. H perdit sa mère en 1821 , et cet 
événement douloureux relâcha un peu les liens 
qui le rattachaient au parti royaliste. Au mois 
d'octobre 1822, il épousa une beUe jeune fille, 
M elle Foucher, qu'il aimait depuis l'enfance d'une 
passion vainement traversée par les calculs des 
deux familles. En 1823 il reçut une pension de 
Louis XVUI. Il n'avait rien fait pour appeler sur 
lui cette faveur; il avait chanté les Bourbons , 
comme on poète ému aux souvenirs du passé* 
touché de l'antiquité vénérable et glorieuse des 
fleurs de lis; comme un artiste désintéressé » et 
non comme un homme de parti. On raconte qu* 
ce ne fut pas seulement la lecture des Odes et 
Ballades qui détermina Louis XV1IT à lui ac- 
corder cette pension. Un camarade de M. Victor 
Hugo, Delon, condamné à mort après 1a cons- 
piration de Saumur, se cachait à Paris et cou- 
rait risque à chaque instant d'être découvert. 
M. Victor Hugo avait alors deux modestes loge- 
ments sous son nom $ il écrivit à la m£re de Delon 
pour lui en offrir un : son fils s'y cacherait) « et» 
ajoutait-il, je suis trop royaliste pour, qu'on s'a- 
vise de venir. le chercher dans ma chambre »> 
Cette lettre » arrêtée par la police , fut déta- 
chetée et mise soqs les yeux du roi avant de 
parvenir à sa destination* Louis XVIII* après 
l'avoir lue , dit : « Je connais ce jeune homme; 
il se conduit en ceci avec honneur. Je hti 
donne la prochaine pension qui vaquera. » La 
pension vint, en effet, à M.Victor Hugo -, qui fut 
deux ans sans en connaître l'origine. Pour Dektet 
il n'avait pas, heureusement, répondu à une offre 
qui lui aurait été fatale, et s'était réfugié dans un 
lieu sur. 

Quelques années avant, M. Hugo écrivait dans 
Le Conservateur Littéraire, fondé par 6es frères 
et par lui. Les articles qu'il y inséra, et qu'il a 
recueillis plus tard en les jugeant sévèrement» 
ne sont pas sans intérêt, ils prouvent du moins 
que de seize à vingt ans l'auteur ne nourrissait 
aucun projet de révolution littéraire j il n'admet- 
tait même qu'avec réserve les innovations mo- 
dérées de M. de Lamartine. Les ÈéditaUons lui 
paraissaient « un livre singulier, danp lequel il re- 
connaissait un poète, malgré les négligences, les 
néologismes, les répétitions et l'obscurité ». Les 
premières odes de M. Hugo ne dénotent pas une 
tendance beaucoup plus vive vers de nouvelles 
formes de poésie. Le moule en est tout classique» 
les idées et les sentiments n'ont rien d'imprévu. 
Un certain éclat d'imagination, une grande 
habileté à manier la langue et la grandeur des 
événements qui l'inspirent distinguent seuls ces 
premières odes de tant de productions lyriques, 
aujourd'hui oubliées. M. Hugo , on pouvait l'af- 
firmer même d'après des essais aussi imparfaits, 
était un vrai poète lyrique , et le propre du poëte 



lyrique, c'est moins de trouver des idées nou- 
velles que de donner une forme brillante et 
sonore aux idées des autres. Jeune, il accepta 
les idées du monde où it vivait. Il fut royaliste 
et religieux à la manière de Chateaubriand. 11 
déclara (Préface de son recueil à' Odes de 1822) 
que « l'histoire des hommes ne présente de 
poésie que jugée du haut des idées monarchiques 
et des croyances religieuses ». Son but était de 
réaliser le programme du Génie du Christia- 
nisme^ «i en substituant aux couleurs usées et 
fausses de la mythologie païenne les couleurs 
neuves et vraies de la théogonie chrétienne » ; 
en faisant parler à l'ode « ce langage austère, 
consolant et religieux, dont a besoin une vieille 
société qui sort encore toute chancelante des 
saturnales de l'athéisme et de l'anarchie ». Ce 
fut là d'abord tout le romantisme de M. Hugo; 
il y était encore fidèle daûs son recueil de 1824, 
bien que le royaliste en lui eût déjà perdu dé 
son âpreté et qu'il commençât à faire écho aux 
chants populaires qui célébraient une gloire d'a- 
bord l'objet de tous ses anathèmes, la gloire de 
Napoléon. 

A côté de l'école monarchique et religieuse* 
qui comptait dans ses rangs , avec des nuances 
très- diverses» Chateaubriand, Bonald, de 
Maistre, Lamennais, Lamartine, s'élevait une 
autre école, moindre peut-être par le talent , 
mais supérieure en savoir, l'école de M me de 
Staël. Les disciples de cette femme célèbre, 
préoccupés surtout de la vérité des idées et des 
sentiments, de leur enchaînement logique, du 
rapport exact entre la pensée et l'expression, 
protestaient contre ce qu'il y avait d'étroit, de 
factice, dans les règles que s'étaient imposées les 
poète» français et particulièrement les auteurs 
dramatiques; ils cherchaient dans les littératures 
étrangères, en Espagne, en Allemagne et surtout 
en Angleterre, des modèles capables de développer 
le goût français et de l'affranchir des conventions 
académiques. Cette école, qui eut, à partir de 
1826, dans le journal Le Globe un organe très- 
répandu, exerça sur les esprits une influence à 
laquelle M. Hogo n'échappa point. Dans la 
préface de son recueil de 1826, il déclara ne 
rien comprendre à la distinction des genres. « Il 
lui semble, dit-il, que ce qui est réellement beau 
et vrai est beau et vrai partout.... La pensée 
est une terre vierge et féconde dont les produc- 
tions veulent croître librement, et, pour ainsi 
dire, au hasard.... En littérature comme en 
politique, l'ordre se concilie merveilleusement 
avec la liberté; il en est même le résultat. H faut 
bien se garder de confondre l'ordre avec la régu- 
larité. La régularité ne s'attache qu'à la forme 
extérieure; l'ordre résulte du, fond même des 
choses, de la disposition intelligente des éléments 
intimes d'un sujet. La régularité est une com- 
binaison matérielle et purement humaine ; l'ordre 
est pour ainsi dire divin.... Le poète ne doit 
avoir qu'un modèle, la nature ; qu'un guide, la 



415 



HUGO 



416 



vérité. D ne doit (As écrire avec ce qui a été 
écrit, mais avec son âme et avec son cœur. De 
tous les livres qui circulent entre les mains des 
hommes, deux seuls doivent être étudiés par 
lui , Homère et ta Bible. » A ces deux grands 
maîtres M. Hugo en ajouta un troisième, 
Shakspeare. Jusque-là il n'avait composé que 
des odes , de petites pièces lyriques qu'il ap- 
pelait ballades, et où il essayait de reproduire 
les contes fantastiques et les superstitieuses 
légendes du moyen âge, et deux romans Non 
d'Islande et Bug-Jargal. Dans ces derniers 
ouvrages, d'une valeur poétique très-médiocre, 
on remarque la tendance de l'auteur à trans- 
porter dans les compositions narratives les pft>- 
cédés antithétiques de l'ode. Han d'Islande est 
une espèce d'ogre anthropophage qui « boit 
l'eau des mers et le sang des hommes »: Il a 
pour digne pendant le nain Habibrah ; et ces 
deux hideuses figures semblent inventées pour 
faire ressortir les créations idéales à' Et fiel, 
d'Ordener et de Marie. Vu contraste aussi vio- 
lent produit de l'effet, mais il est peu conforme 
à la vérité ; cependant Fauteur l'appliqua bientôt 
au genre qui, avec le roman, exige le plus de 
vérité, au drame. 

Le plus fort de la lutte entre les innovateurs 
et les partisans des formes classiques était au 
théâtre. M. Hugo, empressé de se signaler dans la 
mêlée, courut sur ce nouveau terrain. H arrivait 
avec Cromwell, drame de sept mille vers, et une 
préface proportionnée au drame. Cette préface 
est un étonnant amalgame de vrai et de faux, 
beaucoup plus original par la forme que par le 
fond. L'auteur ne fait guère que colorer et exa- 
gérer les idées du Globe, mais il les exagère au 
point de les dénaturer, et donne aux choses les 
plus simples une apparence étrange. Il distingue 
trois âges dans l'humanité : les temps primitifs, 
qui vont jusqu'à Homère ; les temps antiques, 
qui vont depuis Homère jusqu'à Jésus-Christ, et 
enfin l'âge moderne, qui s'étend depuis Jésus- 
Christ jusqu'à nous. La poésie dans le premier 
âge est lyrique, épique dans le second, drama- 
tique dans le troisième. L'ode, l'épopée, le 
drame, telles sont les formes successives dont 
chacune caractérise presque exclusivement 
chaque âge de l'humanité. Cette théorie peut 
donner lieu à de belles phrases , mais elle s'ac- 
corde assez mal avec les faits. Dans la Bible la 
partie épique ( Genèse ) est beaucoup plus an- 
cienne que les parties lyriques (cantiques, psau- 
mes, prophéties) ; en Grèce la poésie lyrique ne 
commence qu'avec Archiloque, plusieurs siècles 
après Homère. Enfin, pour refusera la littérature 
grecque la poésie dramatique, il faut donner à ce 
mot un sens tout particulier. « Le caractère du 
drame , dit-il, est le réel ; le réel résulte de la 
combinaison toute naturelle de deux types, le 
sublime et le grotesque , qui se croisent dans le 
drame comme ils se croisent dans la vie et dans 
la création. Tout ce qui est dans la nature est 



dans l'art. » Comme les anciens, selon lui, n'a- 
vaient étudié la nature que sous une seule face , 
rejetant sans pitié ce qui ne se rapportait pas à 
un certain type du beau , ils ne connurent pas le 
drame. Mais, ajoute M. Hugo, « le christianisme 
amène la vérité. Comme lui , la muse moderne 
verra les choses d'un coup d'oeil plus haut et plus 
large. Elle sentira que tout dans la création n'est 
pas humainement beau , que le laid y existe à 
côté du beau, le difforme près du gracieux, le 
grotesque au revers du sublime , le mal avec le 
bien, l'ombre avec la lumière. Elle demandera si 
la raison étroite et relative de l'artiste doit avoir 
gain de cause sur la raison absolue du Créateur, 
si c'est à l'homme à rectifier Dieu ; si une nature 
mutilée en sera plus belle ; si l'art a le droit de 
dédoubler, pour ainsi dire, l'homme, la vie, la 
création ; si chaque chose marchera mieux quand 
on lui aura été son muscle et son ressort ; si enfin 
c'est le moyen d'être harmonieux que d'être in- 
complet. C'est alors que, l'œil, fixé sur des évé- 
nements tout à la fois visibles et formidables , 
et sous l'influence de cet esprit de mélancolie 
chrétienne et de critique philosophique que nous 
observions tout à l'heure , la poésie fera un grand 
'pas, un pas décisif, un pas qui, pareil à la se- 
cousse d'un tremblement de terre, changera 
toute la face du monde intellectuel. Elle se mettra 
à mire comme la nature, à mêler dans ses créa- 
tions, sans pourtant les confondre, l'ombre à la 
lumière, le grotesque au sublime, en d'autres 
termes le corps à l'âme, la bête à l'esprit. » Sous 
l'emphase de ces paroles, destinées à être le mot 
d'ordre d'une révolution littéraire se cachaient 
beaucoup d'erreurs et quelques vérités qui n'é- 
taient pas neuves. Il n'est pas exact que les Grecs 
aient ignoré le grotesque ; les poètes attiques dé 
l'ancienne comédie l'ont, aa contraire, employé 
avec une audace inconnue des modernes, fl n'est 
pas vrai non plus qu'ils aient rejeté le mélange des 
genres, comme le prouve leur drame satyrique ; 
mais il est vrai que, dans leur tragédie du moins, 
ils ne visèrent jamais à une reproduction exacte 
de la nature. Au lieu de la copier servilement, il 
l'interprétaient. M. Hugo avait raison de vouloir 
se rapprocher de la réalité et de prétendre à une 
reproduction plus exacte et surtout plus com- 
plète de la vie humaine et de l'histoire; il avait 
raison aussi de voir dans Shakspeare le poète 
dramatique par excellence; mais il avait fort de 
croire que l'union systématique et contrastée du 
grotesque et du sublime est la condition d'une 
fidèle peinture de la vie humaine, et que le génie 
de Shakspeare consiste à avoir réuni ces deux 
éléments. Ce n'est pas ici le lieu d'apprécier en 
quoi consiste réellement le génie de Shakspeare, 
mais nous pouvons affirmer qu'il n'y a pas, en 
bien comme en mal, le moindre rapport entre 
les drames de M. Hugo et ceux du poète anglais. 
Cromwell est une chronique dialoguée, sans vé- 
rité poétique, sans réalité historique, et'où le 
talent de l'auteur est aussi grand que mal'em- 



417 



HUGO 



418 



ployé. M. Hugo s'est efforcé consciencieusement 
de réaliser les théories de ses amis du Globe 
sur le drame historique ; et» s'il n'a pas réussi, 
c'est que ces théories étaient en contradiction 
complète avec son génie lyrique. Il avait trop 
d'imagination pour s'asservir à l'histoire; et 
Jonque, deux ans plus tard, il revint au drame, 
il se mit peu en peine d'observer les préceptes 
de la préface de Cromwell, ou du moins il ne 
fut fidèle qu'à une seule de ses théories, à l'an- 
tithèse du sublime ef du grotesque. La préface de 
Cromwell, malgré ses défauts, peut être à cause 
même de ses défauts, devint le point de rallie- 
ment, l'étendard d'une nouvelle école, héritière 
tumultueuse et émancipée de Chateaubriand et 
de M™ de Staël, demandant à grands cris l'abo- 
lition du vieux code classique, et promettant à 
ce prix des chefs-d'œuvre. Les principaux re- 
présentants de la nouvelle école se groupèrent 
autour de M. Hugo , et formèrent un petit cercle 
qui se décora du nom mystique de cénacle, et 
se voua avec une ferveur religieuse à la promul- 
gation* de la loi nouvelle. Ce cénacle, où bril- 
laient autour du maître MM. de Vigny, Emile 
Deschamps, Sainte-Beuve, Louis Boulanger, 
David d'Angers, a été l'objet de beaucoup de 
railleries, et il est difficile aujourd'hui de ne pas 
sourire en lisant , dans les Poésies de Joseph 
Delorme et dans les Consolations , les pièces 
singulières ou M. Sainte-Beuve célèbre, en style 
biblique, les apôtres du romantisme. Cependant, 
il serait injuste de méconnaître que le cénacle 
se composait d'écrivains et d'artistes très-distin- 
gués. Si M. Hugo ne trouvait pas en eux des 
juges sévères de ses défauts, il y rencontrait de 
fins appréciateurs de ses qualités ; s'il exerça sur 
- eux une grande influence, il ne resta pas insen- 
sible à l'action de ces esprits délicats, et son ta- 
lent y gagna. Dans cette période de 1828 à 1831 
il produisit ses œuvres les plus éminentes, Les 
Orientales; Mario'n Delorme, Hernani, Notre- 
Dame de Paris, et Les Feuilles d'Automne. 
Les Orientales, où M. Victor Hugo donna 
libre carrière à sa faculté dominante, l'imagina- 
tion, sont le plus parfait de ses ouvrages au 
point de vue de la forme. Jamais le côté matériel 
et extérieur des choses n'avait été rendu avec 
autant de relief et de couleur, jamais la versifi- 
cation française n'avait atteint ce degré de ri- 
chesse pittoresque, d'harmonie savante, d'am- 
pleur mélodieuse. L'admiration ne saurait man- 
quer à une œuvre aussi puissante, bien qu'on 
reproche au poète d'avoir sacrifié à la magnifi- 
cence descriptive ce qui constitue le fond de la 
poésie, c'est-à-dire les sentiments, les passions 
et les idées, et d'avoir peint un Orient imagi- 
naire, l'Orient créé par sa rêverie ardente et ca- 
pricieuse, plutôt que l'Orient réel et historique. 
Le dernier Jour a?un condamné, analyse mi- 
nutieuse et déchirante <je la situation la plus dé- 
sespérée où puisse se trouver l'âme humaine» 
est encore une œuvre d'imagination et de rêve- 

NOUY. BIOCR. CéNÉR. — T. XXV. 



rie, bien plus que d'observation* Comme plai- 
doyer contre la peine de mort, Le dernier Jour 
d'un Condamné a peu d'importance ; mais il res- 
tera comme une étude psychologique d'une éton- 
nante vigueur. Marion Delorme restera aussi 
comme une œuvre dramatique véritable, bien que 
beaucoup trop lyrique encore. L'élément lyrique 
déborde dans Bernant et enlève aux personnages 
toute réalité, et même toute vraisemblance. Non- 
seulement Charles-Quint, Hernani, don Ruy 
Gomez ne sont pas historiques, ils ne sont 
même pas vrais, et appartiennent à un monde fan- 
tastique. Les beaux vers , les traits énergiques , 
les magnifiques tirades ne manquent pas dans 
Hernani; mais de belles odes ne font pas un 
drame, ou du moins, ce n'est pas le drame que la 
préface de Cromwell promettait à notre siècle. 
Il fut cependant accueilli par de bruyantes accla- 
mations d'enthousiasme de la part des roman- 
tiques, et triompha de l'opposition désespérée des 
classiques. Les deux partis s'étaient donné 
rendez- vous à la première représentation , le 
26 février 1830, comme sur un champ de ba- 
taille. Les romantiques l'emportèrent; et l'on ra- 
conte plaisamment qu'ils dansèrent une ronde 
dans le foyer du Théâtre-Français, en criant : « En- 
foncé Racine ! » Notre-Dame de Paris et les 
Feuilles d'Automne, quoique publiées après 
la révolution de 1830, appartiennent à la période 
précédente , et marquent le point culminant du 
talent fie M. Hugo, pour la pensée, sinon pour 
la forme. La prose de Notre-Dame n'est pas plu3 
riche et plus vigoureuse que celle de la préface 
de Cromwell et du Dernier Jour d'un Con- 
damné , mais l'auteur a fait preuve dans ce ro- 
man d'un talent créateur qu'on ne lui suppo- 
sait pas. Si l'élément lyrique domine toujours» 
si l'action est encore fondée sur l'antithèse vio- 
lente de la laideur et de la beauté, du senti- 
ment élevé et de la forme abjecte , du grotesque 
le plus trivial et du grandiose le plus sinistre, 
ce lyrisme n'est pas déplacé dans la description 
du vieux Paris : ces contrastes excessifs nous 
représentent à merveille le moyen âge finissant, 
avec ses mœurs, ses superstitions, sa vie étroite, 
sombre et poétique. Si Quasimodoest un monstre 
chimérique, Claude Frollo un personnage de 
mélodrame, Pierre Gringoire est une excellente 
et piquante physionomie , Esmeralda une ra- 
vissante figure ; enfin il y a dans toute cette œuvre 
une ampleur, un mouvement, une puissance 
descriptive dignes de l'épopée. Les Feuilles 
d'Automne, dans un genre tout opposé, ne mé- 
ritent pas moins l'admiration. Sans renoncer 
aux riches peintures du monde extérieur, le 
poète a fait une plus large place aux pensées 
dont s'alimente la poésie lyrique la plus haute. 
Pour chanter la grandeur de Dieu, la fragilité de 
l'homme, la fuite rapide de la vie humaine, l'im- 
mortel rajeunissement de la nature, pour s'api- 
toyer sur les misères sociales , pour inviter le 
siècle à la charité» il a trouvé des accents neufs, 

14 



419 



HUGO 



420 



pénétrants , élevés. A côté de ces beautés de 
premier ordre il est impossible de ne pas noter 
deux graves défauts : la confusion dans les idées, 
la diffusion dans le style, qui se montrent déjà 
dans Les Feuillet d'Automne et qui se marque- 
ront plus fortement dans les recueils lyriques 
suivants : Le* Chants du Crépuscule, Us Vois 
intérieures, Les Rayons et les Ombres. Le ta- 
lent, sans avoir faibli, ne s'est pas renouvelé \ te 
poète, forcé de se répéter, redit moins bien ce qu'il 
avait déjà dit plusieurs fois. Un autre défaut, plus 
grave parce qu'A n'est pas simplement littéraire, 
c'est le développement de l'orgueilleuse personne 
lité du poëte. Ou sentiment hautain de sa propre 
grandeur a inspiré à M. Hugo des tirades d'une 
superbe fierté; mais, ramené à tous propos, il fiv 
tigue le lecteur. Les images les plus éclatante? 
ne peuvent compenser une telle absence de tact 

Les œuvres dramatiques postérieures à ffer* 
nani donnent lieu à des remarques encore plus 
sévères. Le Roi s'amuse , dont le succès rat 
douteux à la première représentation et que 
le pouvoir interdît a la seconde, offre de gran- 
des beautés lyriques, mais Lucrèce Borgia, 
Marie Tudor, Angelo sont des mélodrames. 
Ruy-Blas et surtout Les Burgraves sont fort 
au-dessus de ces compositions vulgairement em* 
phatfques. Cependant Ruy Bios fut extrême* 
ment maltraité par la critique, et le même public 
qui avait applaudi Angelo siffla Les Burgraves. 
M. Hugo , découragé ou indigné , renonça au théâ- 
tre. Il aurait do pour sa gloire y renoncer après 
Hernani. 

M: Hugo n'a pas ajouté de nouveaux romans 
à Notre-Dame. Il a publié une Étude sur Mi* 
rabeau, où les côtés supérieurs du grand orateur 
sontlaissé8 dans l'ombre, tandis que la partie ex- 
térieure de «a vie et de son éloquence est ex* 
primée avec un extrême relief. Élu en 1841 
membre de l'Académie Française , en remplace- 
ment de Népomucène Lemercier, il prononça un 
discours qui étonna la nombreuse affluence ac- 
courue pour l'entendre. On espérait qull traiterait 
devant l'Académie la question des innovations lit- 
téraires ; il ne parla guère que de politique, révélant 
le désir, commun à tant d'antres littérateurs, de 
prendre part aux affaires de son pays. Le Rhin, 
lettres à un ami, trahissaient la même prétention, 
et la justifiaient assez mal. Les Lettres consa- 
crées à la description et aux légendes du Rhin 
manquent de goût et d'esprit, et sont médiocres 
an point- de vue du pittoresque. L'auteuY sem- 
ble avoir réservé toute son imagination pour le 
traité politique qui termine l'ouvrage, et dans 
lequel il remanie la carte de l'Europe avec une 
confiance imperturbable. Le roi Louis-Philippe, 
qui aimait peu l'imagination en politique et même 
en littérature , ne céda , dit-on , qu'eux vives 
instances de la duchesse d'Orléans, quand fl 
appela le poète à la chambre des pairs, par 
ordonnance royale du 16 avril 1845. Avant 
de suivre M. Victor Hugo dans sa nouveHe I 



carrière, il faut revenir sur les changements 
survenus dans ses opinions depuis le roya- 
lisme de sa jeunesse. Il suivit le courant qui 
entraînait presque toutes les intelligences vers 
les opinions libérales. Napoléon devint soi 
idole , l'objet de ses chants les plus enthou- 
< siaefte», « le soleil dont il était le Memnon». 
Ses rapports avec lut écrivains du Globe, l'ia* 
ter4iction que le gouvernement de Charles X 
mit sur Marion Delorme, l'éloignèrent de plus 
en plus de la Restauration, et les événements de 
WQ achevèrent de In détacher du royalisme, h 1 
chanta la victoire du peuple tout en pleurant 

. » . . tw aotte noe marte, 
Que rapport* l'exil et que l'exil remporte § 

et il rot l'écho des idées démocratiques, comme 
dix ans plus tôt il avait exprimé les sentiment* 
royalistes. Dans las deux cas, il obéissait mois* 
à une conviction raisonnée qu'à son instinct de 
poète. Lui-même nous a livré plus d'une fois le 
secret de ses inspirations; il dit on tête des 
Feuilles d'Automne t 

Si ma téta , fournaise où mon «prit s'allume, 
Jette le ver» d'airain qui J>QnUU>nnt et qu\ feroe 
Dans le rhytninc profond, saoule mystérieux 
D'où sort la strophe ouvrant ses ailes dans les deux , 
Cest que l'amour, la tombe, et la gtetre «t la rie, 
L'onde qui fait, par l'onde Incessamment suivie, 
Tout souffle, tout rayon, ou propice on fatal , 
Fait reluire et vibrer mon âme de cristal , 
Mon âme aui mltte vota, que le lilen que j'adore 
Mit au centre de tout comme un écho sonore ! 
D'ailleurs, J'ai purement passé les jours manvair, 
Et je sais d'où je viens si j'Ignore où te vais. 
L'orage des parti», avee son vent de flamme, 
Sans en altérer ronde, a routé mon âme. 

Cet orage des partis, qui remua l'âme du poète 
dans les six ou sept premières années qui sui- 
virent la révolution de lidO, finit par s'apaiser. 
La société revint an calme, et la poésie de 
M. Hugo se ressentit naturellement de cet état 
de choses. Les Râpons et les Ombres, comparés 
aux Chants du Crépuscule, attestent un progrès 
vers les idées conservatrices. Le poëte maltraite 
fort « un homme populaire » , et invite son ami 
David d'Angers à ne pas laisser entrer dans son 
cœur 

Les fareon des tribuns et leur songe abhorré, 
de ne pa& se mêler un seul moment 

Aux mêmes visions, au même aveuglement, 
▲nx mêmes vœux haineos, iaeonaés on féroces, 

Kntrépeu après i l'Académie, il fit, en plusieurs 
circonstances , acte d'adhésion et de dévouement 
à la monarchie de Louts-Phnlppe. Dans la cham- 
bre des pairs il se montra conservateur avec 
indépendance. M ne s'asservit pas a la politique 
du ministère, et, tout en rendant plaine justice 
« uu plus éminent des vois de l'Europe » , « ta 
sage couronné qui laissait tomber du haut de 
son trône les paroles de la paix universelle » , 
il eut de nobles flatteries pour une femille alors 
bannie de France. Dans un beau discours, pro- 
noncé le 14 juin «647, au sujet d'une pétition par 
laquelle le prince Jérôme demandait à rentrer 
«n France, il se déclara « du parti des exilés et 



421 



HUGO 



422 



des proscrite ». Dan» le même discours il aver- 
tissait le pouvoir de s'occuper plus activement 
a des masses , de ces olasses nombreuses et la- 
borieuses où il y a tant de eourage , tant dln- 
telligence, tant de patriotisme, où il 7 a tant de 
germes utiles et en même temps , tant de fer- 
ments redoutables ». Là, selon lui, était ledanger 3 
là pouvait « s'ouvrir brusquement un abîme ». 
Sa prévision se réalisa quelque» mois phis tard, 
et une révolution politique, qui prétendait être* 
une révolution sociale, emporta- la dynastie de 
Juillet. M. Hugo donna asses v4te son assenti- 
ment à « cette majestueuse forme sociale , la ré- 
publique, que nos pères ont vue grande et terrthle 
dans le passé, et que nous voulons tous voir 
grande et bienfaisante dans l'avenir». Il eut près 
de soixante mille voix aux premières élections 
pour l'assemblée constituante , et fut élu aux 
élections complémentaires de juin 1848. A peine 
entré dans l'assemblée, il se prononça contre les 
ateliers nationaux. Ce discours, était un. appel à 
ia concorde qui s'adressait surtout « aux philo- 
sophes initiateurs, aux penseurs démocrates, 
aux sociahstea ». — « « Toutes les fois, leur disait» 
il, que vous ne mettes pas en question la feuille 
et la propriété , ces bases saintes sur lesquelles 
repose toute civilisation, noua admettons avec 
vous les instincts nouveaux <fe ttiurosnité; ad* 
mette* avec nous les nécessités momentanées 
des sociétés. » Ce mot de mêimntaméês parut 
étrange dans la bouche d'un conservateur, et fit 
soupçonner aux clairvoyants que les bruyantes 
et populaires théories socialistes entraîneraient 
le poëte orateur. Cependant, sojisrVlmimsJration 
du générai Cavaignae, il sa imûntiot dans la nuança 
modérée et dans l'indépendance des parti». A 
demanda avec la droite l'établissement de deux 
. chambres , avec la gauche la liberté de la presse 
un moment suspendue par fêtât de siège, et l'a- 
bolition de ht peine de mort. Un journal fondé 
sous ses auspices, et rédigé «tans un style em- 
phatique, L'Événement lit une guerre très-vivn 
au général Cavaignae, et If. Hugo témoigna 
d'une constante hostilité à l'égard de ce chef du 
pouvoir exécutif, f I accueillit avec une grande 
faveur Péètction du prince LeukvNanoiéon à la 
présidence, et se prononça très-nettement pour 
ce qu'on appelait le parti réactionnaire. Au mi- 
lieu des murmures de la gauche , il demanda, le 
30 janvier 1849, à la Constituante de se dissoudre 
et de faire place à une assemblée législative. Oe 
fut aussi sous les auspices du parti réactionnaire 
qu'il se présenta aux élections de mai 184Ç. Il 
fut le dixième sur la liste des vingt-huit députés 
de Paris. Peut-être espérait-il une grande posi- 
tion politique qui ne lui Ait pas offerte. En vain 
L'Événement s'efforçait de déraciner dans -les 
esprits « ce préjugé vulgaire et absurde que le 
poète est inhabile et incompétent dans les af- 
faires humaines » ; en vain il étalait cette défini- 
tion étincelante de son poète homme d'État 1 
« Bras et tète, cœur et pensée, glaive et flam- 



beau , doux et fort : doux parce qu'il est fort , et 
fort parce qui! est doux , conquérant et législa- 
teur, roi et prophète, lyre et épée, apôtre et 
messie. » Le pouvoir ne confia pas de porte- 
feuille à M. Hugo, qui dériva très-sensiblement 
ver3 la démocratie avancée. Il se sépara du parti 
réactionnaire au sujet de ia proposition de M. de 
Melnn relative à l'assistance publique; il sou- 
tint la proposition le 10 juillet 1849, mais par 
des motifs qui parurent entachés de socialisme. 
Il semblait croirequll était au pouvoir d'un gou- 
vernement de détruire l'indigence , et il sommait 
l'assemblée de faire des lois contre la misère. Il 
rompit plusouvertement avec la majorité le 20 oc- 
tobre dans la discussion relative aux affaires de 
Rome. Il déclara qu'il « repoussait de tontes les 
forces de son cœur indigné ces sauvages auxi- 
liaires, ces Radetzki, cesRaynau qui prétendent, 
eux aussi , servir cette grande , cette sainte cause, 
et qui font à la civilisation cette abominable in- 
jure de la défendre par les moyens de la bar- 
barie ». Il caractérisa la papauté d'une manière 
qui amena entre lai et M. de Montalembert un 
échange de paroles très-vives. La rupture était 
consommée. Une fois engagé dans le parti dé- 
mocratique, M. Victor Hugo en devint très-vite 
l'organe le plus retentissant. Dans la discussion 
des lois relatives à l'instruction publique, à la 
déportation, à la réforme de la loi électorale , au 
cautionnement des journaux , à la révision dte la 
constitution, sa parole, toujours trop portée à 
i*antith£se et à l'emphase, mais singulièrement 
puissante, excita l'admiration des uns, l'Indi- 
gnation des antres , et n'exerça en somme au- 
cune influence sur la marche des affaires. En 
1851 il prononça h défense de son fils atné, tra- 
duit devant la cour d'assises pour la publication 
d'un article sur la peine de mort. Son plaidoyer, 
digne de l'auteur du Dernier Jour d'un Con- 
damné, ne toucha point le jury. 

On peut juger sévèrement cette partie de la vie 
politique de M. Hugo; mais il est deux choses qu'on 
ne saurait contester : le grand talent oratoire qu'il 
y déploya, et le courage avec lequel il accepta la 
responsabilité de ses opinions lorsqu'elles furent 
proscrites. Banni de Frauee à la suite des évé- 
nements de décembre i85i, R a véeu depuis à 
Jersey et à Guernesey, remplissant se3 loisirs 
d'exilé par des compositions qui n'ont rien ajouté 
à sa gloire. Sans parler de deux ouvrages vio- 
lents , ou la colère étouffe le talent , le recueil 
lyrique des Contemplations a prouvé que les 
défauts de M. Hugo n'avaient fait que grandir 
avec les années , sans que ses qualités suivissent 
la même progression* Jusque dans le chaos de 
pensées et dans l'extrême redondance de style 
qui caractérisent ce recueil , on trouve de bien 
beaux traits, de belles pages, et des élégies pa- 
thétiques sur le plus douloureux événement de 
la vie du poëte, la mort de sa fille, qui périt 
dans un naufrage en 1843. 

Voici les titres des ouvrages de M. Victor 
Î4. 



423 



HUGO - HUGOLINUS 



434 



Hugo; nous citons la première édition de chaque 
ouvrage., et les éditions des œuvres complètes : 
Les Destins de, la Vendée, ode; Paris, 1819, 
in-8°; — Le Génie, ode à M, le vicomte de 
Chateaubriand; Paris, 1820, in-8°; —Ode 
sur la mort de S, A. R. Charles-Ferdinand 
d'Artois, duc de Berri,ftls de France ; Paris, 
1820, in-8° ; — Ode sur la naissance de S. A. /?. 
W le duc de Bordeaux; Paris, 1820, in-8°; 
— Odes; Paris, 1821, in-18; — Odes et Bal- 
lades; Paris, 1826, 3 vol. in-18; — Moïse sur 
le NU , ode couronnée par l'Acad. des Jeux Flo- 
raux; Paris, 1822, in-8°; — Bonaparte, ode; 
Paris, 1822, in- 8° ; — Han d'Islande, roman; 
Paris, 1823, 4 vol. in-12; —Le Sacre de Char- 
les X , ode ; 1825, in-8° ; — Bug-Jargal, roman ; 
Paris, 1826, in-18; — Cromwell, drame en 
cinq actes et en vers; Paris, 1827, in-8°; — les 
Orientales , poésies; Paris, 1829, in-8°; — Le 
dernier Jour d'un Condamné, roman; Paris, 
1829, in-12; — Hernani, ou Vhonneur cas- 
tillan , drame en cinq actes et en vers ; Paris, 

1839, in-8° ; — Notre-Dame de Paris, roman.; 
Paris, 1831, in- 8°; — Marion Delorme, drame 
en cinq actes et en vers; Paris, 1831, in-8°; — 
Les Feuilles d'Automne, poésies ; Paris, 1831, 
in-8° ; — Le Roi s'amuse, drame en cinq actes 
et en vers; Paris, 1832, in-8°; — Lucrèce Bor- 
gia, drame en trois actes et en prose; Paris, 
1838, in-8°; — Marie Tudor, drame en trois 
journées et en prose; Paris, 1833, in-8°; — 
Étude sur Mirabeau; Paris, 1834, in-£°; — 
Littérature et Philosophie mêlées ; Paris, 1834, 
2 vol. in-8°; — Claude Gueux, récit en prose; 
Paris, 1834, in-8°; — Angelo, drame en trois 
journées et en prose; Paris, 1835, in-8°; — Les 
Chants du Crépuscule, poésies; Paris, 1835, 
in-8° ; — La Esmeralda , opéra en quatre actes ; 
Paris, 1836, in-8°; — Les Voix intérieures, 
poésies ; Paris, 1837, in-8° ; — Ruy-Blas, drame 
en cinq actes et en vers; Paris, 1838, in-18; — 
Les Rayons et les Ombres, poésies; Paris, 

1840, in-8°; — Le Retour de V Empereur, 
ode; Paris, 1840, in-8°; — Le Rhin, lettres à 
un ami; Paris, 1842, 2 vol. in-8°; nouvelle édi- 
tion augmentée d'un volume entièrement inédit; 
Paris, 1845, 4 vol. in-8°; — Les Burgraves, 
trilogie en vers; Paris, 1843, in-8°; — Napo- 
léon le Petit, pamphlet ; Bruxelles, 1852, in-18 ; 
— ■ Les Châtiments, poésies; 1853, in-18; — Les 
Contemplations, poésies; Paris, 1856, 2 vol. 
in- 8°; — Œuvres complètes; Paris (Renduel), 
1838, 22 vol. in-8°; nouvelle édition, Paris 
(Fume), 1840 41, 13 vol. in-8°; — nouvelle 
édition; Paris (Charpentier), 1841-1845, 15 vol. 
in-12 ; plusieurs éditions dans divers formats, de 
1852 à 1856, et dont deux sont encore en voie de 
publication , et enfin une nouvelle édition , Paris 
(Hachette), 1858, 23 vol. in-12. 

Divers articles insérés dans Le Conservateur 
littéraire, dans La Revue des Deux Mondes 
et dans d'autres recueils, ont été imprimés sé- 



parément ou insérés dans ses œuvres. Trots dis- 
cours prononcés par M. Victor Hugo a l'Acadé- 
mie française , l'on dans la séance du 3 juin 1841, 
lors de sa réception, en réponse à M. de Sal- 
vandy; le second, dans la séance du 16 janvier 
1845, lors de la réception de M. Sainte-Beuve, 
ont été imprimés à part, chez F. Didot , et insérés 
dans le recueil.de l'Académie. Parmi les discours 
prononcés à la chambre des pairs et aux Assem- 
blées constituante et législative , plusieurs ont 
été imprimés séparément, entre autres le discours 
sur la transportation; 1850, in -8°. L. J. 

Rabbe, JBieçr. univ. et port. des Contemporains, 
«ippl. — Looaéûle, Galerie des Contemporains illustra, 
1. 1. — Cb. Robin, Galerie des Gens de lettres an Dix- 
neuvième siècle. — Sainte-Beuve, Portraits contempo- 
rains, ëdlt. de 18*6, 1. 1. — Gustave Planche, Nouveaux 
Portraits littéraires, édit. de 1854, t. I, et Bévue des 
Deux Mondes, 18 mars 1888, année 1886, 4 roi. — A. Fon- 
taney, dans la Revue des Deux Mondes, 1 er aoàt isss. 
— Cbarleu Magnln, dans la Bévue des Deux Mondes, 
loin 1840 et 18 mars 1848. — Encyclopédie des Gens du 
Monde. — Dictionnaire de la Conversation. — Bour- 
qaelot, Littérature Française contemporaine. — West- 
minster Review, arril 1868. 

; hugo ( Charles ) , littérateur français, fils 
aîné du précédent , né à Paris , le 2 novembre 
1826. Un des fondateurs du journal L'Événement 
en 1848, il fut condamné, au mois de juillet 1851, 
à six mois de prison , par la cour d'assises de la 
Seine, pour avoir attaqué la peine de mort 
à la suite de l'exécution des contrebandiers 
de Montcharmon. 11 fut en cette circonstance dé- 
fendu par son père. M. Charles Hugo ne sortit 
de prison qu'à l'expiration de sa peine, en février 
1852, et alla retrouver son père à Bruxelles, d'où 
il l'a suivi à Jersey et à Guernesey. En 1857 il 
a fait paraître un roman féerique intitulé : Le 
Cochon de saint Antoine. J. Y. 

Renseignements particuliers. 

* huoo ( François-Victor) , littérateur fran- . 
çais, frère du précédent, né à Paris, le 22 oc- 
tobre 1828. Chargé de la partie étrangère dans 
le journal L'Événement m 1848, il fut condamné, 
en septembre 1851 , à neuf mois de prison , 
par la cour d'assises de la Seine, pour avoir 
attaqué le gouvernement d'alors, à l'occasion de 
l'arrestation à Paris d'un certain nombre de ré- 
fugiés allemands. Enfermé dans la même cellule 
que son frère , il fut relâché trois mois avant 
l'expiration de sa peine. Il rejoignit son père à 
Jersey, et le suivit à Guernesey. 11 a publié la 
première traduction française des Sonnets de 
Shakspeare, 1857, in-8°; et la Normandie 
inconnue, ouvrage historique sur les lies de 
la Manche. J. V. 

Docum. particuliers. 

* HUGOL1NUS PBESBYTBR1 , jurisconsulte, 

italien, né dans la seconde moitié du douzième 
siècle, à Bologne, mort un peu après 1233. Après 
avoir étudié la jurisprudence sons la direction 
de Jean Bassianus, il devint professeur de droit 
à l'université de sa ville natale. H y fut aussi 
nommé juge, et envoyé plusieurs fois comme 
ambassadeur par la république. On a de lui : 



495 



HUGOLINUS - HUGOT 



42G 



Summa Digestorum, inséré comme appendice 
dans les éditions de la Summa d'Azon, sauf la 
première; cet ouvrage, important pour l'histoire 
de la jurisprudence, avait été faussement attribué 
à divers autres légistes; Savigny a prouvé qu'il 
est dû à Hugolinus; — Diversitates , seu dis- 
sensiones Dominorum, ouvrage précieux, trai- 
tant des controverses entre les glossateurs, in- 
séré dans le recueil publié par Haenel (voy. ce 
nom), qui concerne cette matière; — Dislinc- 
tiones : des extraits s'en trouvent dans le recueil 
précité ; un manuscrit en existe à la Bibliothèque 
impériale de Paris, n* 4609; — ■ Qusestiones; 
cet ouvrage, dont Haenel a aussi donné plusieurs 
extraits, existe dans le même manuscrit; — 
Gtossx : remarques sur les diverses parties 
du Corpus Juris, dans lesquelles Hugolinus a 
fait preuve d'une sagacité critique rare à son 
époque. Elles se trouvent dans plusieurs manus- 
crits, la plupart à la Bibliothèque impériale de 
Paris. — Hugolinus est encore auteur de quel- 
ques autres ouvrages juridiques, qui ne nous ont 
pas été conservés ; le recueil de lois féodales et 
de constitutions des empereurs d'Allemagne, 
connu sous le nom de Dixième Collation, a été 
rassemblé par lui. £. G. 

DlploccaUrliu, De PrmtanUa Dœtorum, n* 6t. — 
Sartt, De Claris ArcMgymnasH Bononisnsis Professori- 
bus, pars I. — Fantozzl , Scrittori Bolognesi, t. VII. — 
Savigny, Histoire du Droit romain au moyen âge, t. V. 

; hugon .( Gaud-Âmàble, baron ), vice ami- 
ral et sénateur français, né à Granville (Manche), 
le 31 janvier 1783. Il s'engagea à douze ans sur 
un bâtiment de l'État , et y servit en qualité de 
mousse et de novice. Lieutenant de vaisseau le 
23 juin 1810, capitaine de frégate le 1 er sep- 
tembre 1819, Une prit qu'une part secondaire aux 
événements maritimes de la république et de 
l'empire. Sous la seconde restauration , il contri- 
bua à la réorganisation de la marine. Il fut nommé 
capitaine de vaisseau le 23 mai 1825, et appelé 
au commandement de l'Ile de Gorée. L'année sui- 
vante, il se distingua à la bataille de Navarin, 
où, commandant VArmide, il coula à fond la 
frégate torque Lisagnan. Lors de l'expédition 
entreprise contre la régence d'Alger, il eut la 
direction d'environ cinq cents bâtiments chargés 
des transports. Nommé contre-amiral le 1 er mars 
1831, il reçut le commandement de l'escadre de 
Toulon, destinée à former la station du Levant. 
il rendit d'importants services au commerce eu- 
ropéen, en purgeant l'Archipel des pirates qui 
infestaient ces parages. En 1840, il commanda 
l'escadre envoyée dans les eaux de Constan- 
tinople pour contrebalancer l'influence de l'An- 
gleterre et de la Russie, et à la suite de cette expé- 
dition il reçut le brevet de vice-amiral. Employé 
depuis à des travaux d'organisation intérieure, il 
devint successivement membre du conseil d'ami- 
rauté , et vice-président de la commission supé- 
rieure instituée pour examiner les questions 
relatives à la construction, à l'organisation et à 
l'armement des bateaux à vapeur, Grand'croix 



de la Légion d'Honneur (3 mai 1851 ), il fait 
partie du sénat depuis le 26 janvier 1852. 
Sicard. 

Biographie des Membres du Sénat (1852). — Les grands 
Corps politiques de l'État <18S«). — L'Album de la Se- 
maine (1858). - Annuaire de la Marine (1884). 

hugonet ( Philibert ), cardinal français , 
mort à Rome en 1484. Après avoir étudié tour à 
tour à Dijon, à Turin, à Padoue, il devint cha- 
noine de Mâcon, puis doyen de cette église. Ap- 
pelé ensuite dans les conseils de Charles, duc 
de Bourgogne, il fut chargé par lui de diverses 
ambassades auprès des papes Paul H, Sixte IV, 
et de Ferdinand, roi de Naples. Son oncle, 
Etienne Hugonet, qui était évêque de Mâcon, 
mourut en 1473. Philibert fut aussitôt pourvu 
de sa charge, et en la même année, le 7 mai, 
nommé cardinal-prêtre par Sixte IV. Après la 
bataille de Nancy, Guillaume Hugonet, frère de 
Philibert, fut pris par les Gantois et puni de 
mort, comme un des plus zélés fauteurs de la 
tyrannie bourguignonne. A la nouvelle de ce tra- 
gique événement, Philibert se retira en Italie, et 
fut nommé par le pape légat de Viterbe. il mou- 
rut tellement pauvre et endetté, que ses funérail- 
les furent célébrées aux frais de la chambre 
apostolique. B. H. 

Gallia Christ., t IV, col. 1091. 

hugot (il ), surnommé le jeune, mu- 
sicien français, né a Paris, en 1761, mort par 
suicide, le 18 septembre 1803. 11 avait reçu des 
leçons de flûte d'Atys. « Une belle qualité de 
son, dit M. Fétis, une grande justesse d'intona- 
tion et un coup de langue brillant lui procu- 
rèrent de bonne heure une belle réputation. >» 
Quand Yiotti organisa, à la fin de 1789, l'or- 
chestre du théâtre des Bouffes italiens, Hugot 
jeune fut choisi pour première flûte, et son frère 
aîné chargé de la seconde partie. Hugot entra 
aussi dans le corps de musique militaire de la 
garde nationale de Paris ; et après la suppression 
de ce corps, il devint professeur du Conserva- 
toire de Musique, qui venait d'être créé par la 
Convention. L'Opéra-Comique ayant succédé aux 
chanteurs italiens, Hugot jeune resta dans l'or- 
chestre du théâtre Feydeau. Son talent se mon- 
tra avec avantage en 1796 et 1797 dans les con- 
certs donnés à ce théâtre, où il joua des concertos 
de sa composition et des symphonies de De- 
vienne. Chargé par le comité du Conservatoire 
de la rédaction d'une méthode de flûte, il s'oc- 
cupait de ce travail lorsqu'il fut pris d'une fièvre 
nerveuse; dans un accès, il se blessa de plu- 
sieurs coups de- eouteau et se précipita de la 
fenêtre d'un quatrième étage. Il mourut presque 
sur le coup. Wunderlich, aussi professeur de 
flûte au Conservatoire, recueillit les matériaux 
que Hugot avait préparés et publia : Méthode 
de Flûte adoptée pour l'enseignement dans 
le Conservatoire de musique, par A. Hugot, et 
terminée par Wunderlich; Paris, 1804, in-fol. 
Parmi les compositions musicales de Hugot on 



457 



HUGOT 



cite des concertos, des trios, des duos, des so- 
nates et des variations pour flûte* J. Y. 

Fétls, Biogr. mniv. des Musiciens. 
HUGOU. Voy. B\SSKV1LLE. 
HUGTENBURCH. Vop. HuCHTENBUfiCH. 

hugubmn (Sulpiœ), révolutionnaire fran- 
çais, né vers 1750, en Lorraine, mort vers 1803. 
Il avait reçu une bonne éducation, et débuta avec 
succès au barreau de Nancy. En 1778 il obtint 
un prix de l'Académie de Lyon, pour un Mé- 
moire sur tes Étangs (Lyon, 1779, in-«°) ; mais 
de mauvaises relations l'entraînèrent dans le 
débauche, et il se vit contraint de changer de 
carrière. Il s'engagea dans les carabiniers, 
déserta peu après , et entra commis dans l'octroi 
de Paris. Lorsque la révolution éclata, il devint 
l'un des chefs des émeutiers du faubourg Saint- 
Antoine. Il figura dans tous les mouvements 
populaires de la capitale, et se fit remarquer à 
la prise de la Bastille (14 juillet 1789). Le 
20 juin 1792 il guidait les factieux qui, après 
avoir envahi l'Assemblée législative, se ruèrent 
sur les Tuileries. Dans la nuit du 9 au 10 août 
suivant, Huguenin conduisait encore les insurgés 
qui chassèrent la municipalité ; il se fit nommer 
aussitôt président de la commune. Il commit 
alors des dilapidations et des vexations de tous 
genres, et signa le 30 août avec Méhée-Lalouche 
et Tallien des ordres qui remplirent de détenus 
les prisons de Paris. Le 2 septembre il déclara 
la patrie en danger, et donna ainsi le signal du 
massacre des malheureux qu'il venait de Taire 
arrêter. Il fut ensuite envoyé en mission à Lyon, 
à Chambéry, puis à Bruxelles, où il acheva, dit- 
on, de s'enrichir. S'il faut en croire Prudhommc, 
il fit transporter dans sa demeure du faubourg 
Saint-Antoine de Paris douze chariots pleins de 
meubles, tableaux et effets précieux enlevés aux 
châteaux princiers de la Belgique. Le 14 sep- 
tembre 1793, Huguenin fut accusé de concussion 
devant le conseil général delà commune, qui l'o- 
bligea à rendre compte de ses missions. Il invoqua 
ses services révolutionnaires, et réussit à détourner 
la condamnation qui semblait devoir le frapper* 
mais depuis il n'occupa plus aucune fonction pu- 
blique, et mourut dans l'obscurité. H. Lesdeur. 

Le Moniteur universel, an I79î, n«» 286, 246, 291* 
an l« r , n« 629. — biographie moderne (Paris, isoèj. -I 
Arnault, Jay, Jouy et Norvtos, Biographie nouvelle des 
Contemporains ( Paris» 1823 ). 

hucues, nom commun à un grand nombre de 
personnages, dont la plupart appartiennent an 
moyen âge, classés par ordre chronologique. 

I. Hugues, saints ou ecclésiastiques. 

Hugues (Saint), archevêque de Rouen, au 
huitième siècle, mort à Jumiéges, le 8 avril 730. 
Il était fils de Drogon , duc de Bourgogne et 
de Champagne, et de Plectrude, Adaltrude, ou 
Anstrude, qui était elle-même fille de Waraton, 
maire du palais. Drogon avait eu pour père le 
célèbre Pépin d'Héristal. Hugues était donc d'une 
naissance doublement illustre. Il fut d'abord 



— HUGUES 498 

primicier de l'église de Mete* Ensuite il devint 
è la fois archevêque de Rouen, éveque de Paris 
et de Baveux , abbé de Jumiéges et de Saint- 
Wandrille. Cette réunion de plusieurs bénéfice» 
en une seule main était alors un fait ordinaire. 
Souvent même ce ne sont pas des olercs, mais 
bien des laïcs que Ton voit chargés en même 
temps de plusieurs gouvernements ecclésiasti- 
ques. On a publié les actes de saint Hugues. Mais 
les auteurs de l'ancien et du nouveau Qalli* 
Christian* ont rejeté ces actes comme apo- 
cryphes et pleins de fables. a. H. 

GaUi* Chréetiana , i. -VU, col. 26, et t. XI, coL 17. -- 
Bollandus t Acta Sanct., — Aprili inense, 1. 1, p. 841 — 
Bailtet, Vies de* sntnte, 9 avrtl. - Ï1ir*m*i *b»Utr- 
neUêntê , <* AtherU SpfciUgiù t t III, p. me. 

■ugubs, éveque d'Aagouléme> mort en «90 
suivant la Chronique d'Augottiême, et» suivant 
les auteurs de Y Histoire Littéraire, en 993. H 
appartenait par sa naissance aux anciens comtes 
de Jarnac. Sa promotion sur le siège d'Angou» 
lème eut lieu le 21 mars 973* Il s'y comporta 
plutôt en baron qu'en éveque : ayant formé 
le dessein de réunir, en sa main l'administra- 
tion civile du diocèse, il ne s'arrêta pas de- 
vant les protestations du comte Arnauld, et guer- 
roya contre lui pendant plusieurs années. On croit 
que, vers la fin de sa vie, Use retira dans l'abbaye 
dé Saint-Cibard, y prit la robe claustrale, et y 
mourut obscurément, faisant pénitence d'une vie 
trop agitée. Il avait laissé plusieurs ouvrages; 
maison ne tes retrouve pins» B. H. 

Bit*. Utt. es la France, t VIII. 

hitoubs» éveque de Nevers, mort le 8 mai 
1050. On le voit sur te siège de Nevers dès 
l'année 1026. II assistait au concile de Reims en 
1049^ et en 1050 au concile de Rome où fut 
logé Bérenger» C'était un bien médiocre poète, 
comme le prouvent tes vers vraiment barbares 
que lui attribuent les bénédictins» 

fiisu Littër, de te franc* t. vin, p. *?*. 

HUCrUBS Dtt bbbtbcil , éveque de Lan* 
grès, mort lé 16 mars 1051. Il était -fils de Gel- 
duin, comte de Breteuil, et frère de Yateranne, 
abbé de Saint-Vanne. Après avoir étudié la théo- 
logie à l'école de Chartres , sous la discipline de 
Fulbert, Hugues fut appelé par le roi Robert 
sur le siège épiseopal de Langres, dans les pre* 
miers mois de Tannée 1031. C'était un prélat de 
noble origine , et ses mœurs forent plutôt celles 
d'un homme d-épée que d'un éveque. Traduit 
devant le concile dé Reims nomme coupable 
d'une grande série de crimes, parmi lesquels les 
adultères et les homicides n'occupent pas le pre- 
mier rang , il se présenta d'abord devant ses 
juges et parut vouloir se défendre. Mais entre 
la seconde et la troisième session il prit la fuite, 
et fut excommunié. C'est alors que pour ex- 
pier tant de méfaits il se rendit pieds nus a 
Rome, auprès du pape Léon IX, qui, touché par 
les marques d'une si grande pénitence, lui par- 
donna. Il mourut à Biterne, lorsqu'il revenait 
en France. On possède une lettre fort intéres- 



429 



iroauEs 



480 



santé de HugnéS dé Bretenil êur les erreurs de 
Bérenger : elle a été publiée à la Smte des Œu- 
vres de LaHfïunc. B. fl. 

GàlttM •Chfmkénûs U ÎV, - BUti ÏAU. M l* «rame* 
U Vif, p. Mi. 

HUGUES, archevêque de. Besançon, pre- 
mier du nom, mort le %1 juillet ip66.ll était âls 
d'Humbert II, sire de Salins» Sa mère , qui se 
nommait JErmenburge, était fille, dit*on, de Lam- 
bert, comte de Chatons,. V^coeyêgu^ Gaucher 
de Salins mourant en 1031, Hugues, son proche 
parent , fut sans délai appelé sur le même siège. 
Dès les premières années de son épisçûpaL il con- 
gédia les chanoines qui qccupâienl l'erse de 
Saint-Anatole de Salins, et donna cette église 
aux moines de Saint-ÎJénigne de DU«n \ mais il se 
repentit plus tard d'avoir fait os changement) 
et reconstitua en 1046 1» chapitre de Saint-Aftà- 
tole, qui a si longtemps subsisté aven éclat 
L'église cathédrale de fiêaattéon n'était pas 
achevée t Hugues y mit la dêrtrtère main et l'en* 
ricMt de nombreuses donations, Léon IX en 
consacra l'autel* Httgde* rétablit aussi l'église 
abbatiale de Saint^Paul, oO. Il plaça des chanoine* 
séculiers » sous la GOnduite d'un doyen* Cette 
fondation est du U mars 1044. C% sont les actes 
principaux de son Administration métropolitaine; 
mais les historiens en rapportent beaucoup d'an» 
très d'un moindre intérêt, Hugues était un la* 
borieux prélat, toujours occupé de quelque nou* 
velie entreprise. Son crédit auprès des empe- 
reurs, auprès des papes, fut très-grand. Il 
remplit, auprès de l'empereur Henri m, les fonc- 
tions d'archi-chancclier, et assista comme légat 
du saint-siége au couronnement de Philippe I er , 
roi de France. B. H» 

DiiDOd de Chaînage» UisL 4e l'Utilise de Besançon, t. 1, 
p. st. 

HUGUES, archevêque de Lyon, né vraisem- 
blablement à Romans, en t)auphiné, mort le 
7 octobre 1106. Né dans Une des plus nobles 
maisons, celte des ducs de Bourgogne, Hugues 
fut d'abord prieur de Saint-Marcel de Châlons, et 
ensuite évêque de Die. Il occupait lé siège de 
Die, dans la province de Vienne, quand il fut 
nommé légat du saint-siége. En aucun temps, 
peut-être, la mission des légats apostoliques n'a- 
vait été plus laborieuse et plus difficile. Il s'agis- 
sait de réformer toutes les églises , et le saint- 
siége ayant dicté lé programme des réformes , 
le devoir des légats était d'imposer partout, même 
par la contrainte. Une sévère discipline, une ob- 
séquieuse soumission. On contestait ici la né- 
cessité de ces changements; on prétendait ail- 
leurs que la violence du remède devait causer 
dans l'Église un trouble plus grand que le 
mal reconnu t sur tous les points se manifes- 
taient des résistances » que Rome appelait des 
révoltes; dans les assemblées d'évéques oonvo*- 
quées à la fois au nord, au midi de la France * 
éclataient les mêmes tumultes; les légats 
étaient injuriés , les évêques étaient déposés ; 
. les foudres de l'excommunication frappaient tour 



à tour, et les plus hantes et les plus : 
têtes , et de vénérables pasteurs qui avaient dé* 
nonce tes périls de la liberté et des évêques» 
des abbés du plus mauvais renom qni avaient 
invoqué la liberté comme un rempart pour leurs 
désordres ; les fidèles consternés ne savaient plus 
où fuir les ténèbres, Où rechercher la lumière. 
En oette universelle confusion* l'évêqué de Die 
se montra tout a la fois un des plus actifs des- 
légats, et un des plus dévoués à la cause de 
Grégoire VII et dé l'omnipotence romaine. 
Gomme récompense de ses ^datants services, 
il fat nommé archevêque de Lyon , après la mort 
de Gébem. La date de cette mort est incertaine. 
Cependant on croit devoir fa rapporter à Tannée 
1083< Deux ans après, Grégoire VU, sentant les 
atteintes de sa fin prochaine , désigna trois hom- 
mes également dignes, à son avis, de lui suc- 
céder et do continuer son entreprise. Hugues 
fut un de ces trois élus de Grégoire VII * mais 
le conclave loi préféra Didier, abbé du Mont- 
Csssûh On te vit alors se soulever contre le vote 
qui l'avait écarté, s'emporter en injures , en ca- 
lomnies contre te nouveau pape , et demander s» 
déposition même aux représentants dé la puissance 
séculière* Oé qui fat d'abord Un grand scandale, 
et devint presque un schisme. Aussi le concile de 
Bénévefit, en 1087, prononca-t-tt, contre l'arehe? 
vêquo de Lyon et se* fauteurs» une sentence dj'e**< 
communication. Dans Ces temps de trouble » tes 
principaux rotes sont réclamés et comme usurpés 
par les hommes les plus alertes , lès plus auda- 
cieux; mais le mobile de leur audace est aussi : 
souvent, plus -souvent peut-être, l'ambition per- 
sonnelle qne le sèle du bien pubHot Hugues se 
vit très-ooutpromis par sa conduite dans cette af- 
faire. Aussi, après la mort de son rival et Yé~- 
lection d'Urbain II, s'enripressa^t-il de faire pro- 
fession de dévoûment au saint-siége , et de dé- 
savouer tes sentiments sehismatiques qui lui 
avaient été, dit-il, imputés par ses ennemis, 
désignant comme tes plus opiniâtres et tes plus 
véhéments l'abbé et les - moines de Cluny< Ur- 
bain ne refusa pas un pardon qu'on lui deman- 
dait avec les marques d'un tel repentir, et rendit 
à l'archevêque de Lyon sou titre de légat. Dès 
l'année 108&» peu de mois après l'avènement 
d'Urbain » nous le voyons présider, en cette qua- 
lité, le concile où fut absous Thierry, évêque de 
Verdun» qui s'était déclaré pour l'empereur Henri 
dans sa lutte mémorable contre Grégoire VU. 
En 1093 il Ordonna Poppon évêque de Metz» 
qui ne voulait pas être oonsaeré par son propre 
métropolitain» l'archevêque de Trêves, complice 
comme Thierry» mais complice impénitent» des 
résistances impériales* Il est aussi particulier 
à ces époques de grande effervescence qu'on 
n'y conserve pas longtemps le souvenir des er- 
reurs, des trahisons même, et que, dans le 
transport du succès ou l'abattement de la dé- 
faite, on ne juge les hommes qu'au poids de 
leurs services présents. Ainsi, personne n'était 



431 



HUGUES 



432 



plus mal noté que l'archevêque de Lyon au mo- 
ment où le conclave appelait Urbain II sur le 
siège de Saint-Pierre. Quelques années après 
personne n'était plus honoré, plus puissant que 
lui. On rappelait avec emphase primat des 
Gaules, te représentant et l'organe du saint- 
siége dans l'Eglise de France; on le véné- 
rait , on le craignait comme un véritable pape. 
H préside en 1094 le concile d'Autan, qui con- 
firme toutes les sentences déjà publiées contre 
l'empereur, l'anti-pape Guibert et Philippe, roi 
de France. La même année il préside encore 
dans la même ville et à Brives, à Dol, à Sau- 
mur, d'autres assemblées d'évoqués. Il est par- 
tout, et partout il se signale parla même ferveur 
pour les intérêts de l'Église romaine. Pierre le 
Vénérable, qui ne passe pas pour un des hommes 
les plus crédules de son temps , raconte même, 
dans son enthousiasme pour le formidable légat 
que, « lorsqu'il traverse les villes, émues, sa voix 
seule y opère des miracles ». Au concile de Cler- 
mont , en 1095, il fit renouveler par Urbain II 
le décret apostolique qui soumettait toutes les 
métropoles , des Gaules à la primatie de l'Église 
de Lyon. Richer, archevêque de Sens, protesta 
vainement contre les termes de ce décret : ses 
protestations multipliées, ses démarches, ses 
prières, ses ajournements n'eurent d'autre ré- 
sultat que de le faire suspendre. Hugues eut la 
gloire et la joie d'arriver bientôt à ses fins. Ri- 
cher étant mort, Daimbert est éln son succes- 
seur. Hugues interdit de le consacrer avant que 
Daimbert ait solennellement reconnu la supré- 
matie lyonnaise. Tout le clergé de Sens est dans 
la plus vive agitation , et ne permet pas à Daim- 
bert de se soumettre. Celui-ci parlemente, gagne 
du temps, se rend auprès du souverain pontife, 
espérant ramener par de bonnes raisons à recon- 
naître les droits antiques de son siège ; mais 
toutes ses raisons, bonnes ou mauvaises, sont 
inutiles ; il n'est consacré qu'après avoir subi 
la condition imposée. En 1096 Hugues assiste 
au concile de Tours , présidé par Urbain II. 
Quelque temps après il reçoit à Lyon son il- 
lustre ami, Anselme, archevêque de Cantorbéry, 
qu'il avait soutenu dans sa courageuse résistance 
au roi d'Angleterre. Lorsqu'en l'année 1103 An- 
selme se vit condamné à un nouvel exil, c'est à Lyon 
qu'il vint chercher une retraite : il y resta seize 
mois. Si, durant les dernières années de sa vie , 
Hugues s'occupa de moins grandes affaires, il 
ne connut pas davantage le repos. C'est ce que 
nous apprennent, non-seulement les fastes de l'É- 
glise de Lyon, mais encore ceux de toutes les 
églises soumises à cette métropole. Baudri, abbé 
de Bourgueil , puis évêque de Dol, a célébré la 
mémoire de Hugues en quelques vers, paimi les- 
quels nous reproduirons celui-ci : 
Magnas Romans fllius Eccleatae ; 
Hugues fut, en effet, un des plus grands ser- 
viteurs de l'Église romaine, un des lieutenants 
les plus fidèles, et les plus braves de Gré- 



goire VII; mais nous ne pouvons nous dissi- 
muler aujourd'hui qu'il eut un peu trop l'hu- 
meur de son chef. L'un et l'autre accomplirent 
d'importantes réformes, puisque l'unité de l'É- 
glise fut leur ouvrage; mais plus d'une fois l'on 
et l'autre, trop impatients d'atteindre le but, 
trahirent par excès de zèle la personnalité de 
leurs mobiles secrets. Parmi les vertus qui leur 
manquaient il faut nommer d'abord la modestie. 

Les œuvres de Hugues sont ses Lettres, qu'on 
trouve dispersées dans divers recueil». V His- 
toire Littéraire a suffisamment indiqué toutes 
ceHes qui sont parvenues jusqu'à nous. Elles 
contiennent les plus utiles renseignements sur 
l'histoire générale du douzième siècle. B. H. 

Qallia Christ., t. IV, eoL 97. - HisU LUt. de la 
Francs, v IX, p. m. 

HUGUES, abbé de Cluny, né en 1024, à Semar, 
en Briénois, diocèse d'Autun, mort à Cluny, le 
29 avril 1109. Dalmatius, son père, et Arem- 
burge de Vergy, sa mère, appartenaient l'un et 
l'autre à la première noblesse de la Bourgogne. 
A l'âge de quinze ans il fut reçu novice à Cluny, 
et il devint abbé de cette maison à la mort d'O- 
dilon, en 1049. La même année il assistait au 
concile de Reims. Peu de temps après nous le 
trouvons aux conciles de Mayence et de Rome. 
Dans ces diverses assemblées, il se concilia l'es- 
time du pape saint Léon, et celui-ci, ayant ap- 
pris à faire le plus grand état de son jugement 
et de son éloquence, le chargea d'une miswon 
difficile dans les États de Hongrie. H la remplit 
avec succès; et dès lors il fut prié par les papes, 
par les rois, de donner son avis sur toutes les 
grandes questions agitées en France ou à Rome. 
Il exerça même plus d'une fois les fonctions de 
légat apostolique. Son zèle pour les intérêts de 
l'Eglise romaine a été vanté par les papes eux- 
mêmes : telle était cependant la prudence de son 
esprit, telle était l'indépendance de son caractère, 
que, malgré l'autorité de Grégoire VII, il refusa 
de remplir un autre rôle que celui de médiateur 
dans la célèbre querelle de l'empereur et du 
saint- siège. Les historiens de l'abbaye de Cluny 
ont d'ailleurs raconté le détail de son intelligente 
et laborieuse administration; personne n'a plus 
contribué que lui à l'accroissement de ce monas- 
tère : on peut dire qu'il en a été le second fonda- 
teur. La vie de Hugues est bien connue. Plusieurs 
contemporains, et entre autres Hildebert de La- 
vardin, ont prisa tâche denous en transmettre les 
plus importantes circonstances. Mais a-t-il laissé 
d'autres écrits que ses lettres et quelques statuts? 
S'il en existe, l'érudition ne les a pas encore si- 
gnalés. B. H. 

Hist. IAtt. de la France, t. VXIII, p. 166. — Bollandus, 
Acta Sonet., » avril. — Gallia Christ., t. IV. 

HUGUES (Saint), évêque de Grenoble, né à 
Château-Neuf-sur-Lers , près Valence, en 1053, 
mort le 1 er avril 1132. Son père, nommé Odi- 
Ion , était un des seigneurs du pays. Il s'est fait 
connaître lui-même par sa piété : on ne doit donc 
pas trouver extraordinaire qu'il ait engagé son 



433 



HUGUES 



484 



fils à prendre l'habit ecclésiastique. Hugues fut 
d'abord pourra d'un canonicat dans l'église de 
Valence. S'étant ensuite engagé sous la conduite 
du célèbre légat Hugues, évêque de Die, il le 
suivit à Lyon, a Avignon, exécuteur subalterne, 
il est vrai, mais plein de zèle , de toutes les sen- 
tences dictées à Rome par Grégoire VII contre 
les prélats simeniaques et insoumis. Tandis que 
le* légat et son fidèle assesseur étaient dans les 
murs d'Avignon , où se tenait un concile, quel- 
ques chanoines de Grenoble se présentèrent, an* 
nonçant la mort récente de leur évoque et de-* 
mandant au concile de lui donner un successeur. 
On désigna le chanoine de Valence. D accepta. On 
était alors au plus fort de la querelle entre les 
évêque» gallicans, qui s'efforçaient de justifier le 
désordre de leur conduite en alléguant l'indé- 
pendance de leurs sièges , et le pontife romain, 
qui travaillait à confisquer les restes de cette in- 
dépendance en accusant les mœurs et toutes les 
condamnables pratiques des évoques gallicans. 
Le nouvel évêque de Grenoble , ardent serviteur 
de la cause ultramontaine, ne voulut pas être 
consacré par son métropolitain Guermond , ar- 
chevêque de Vienne, déjà dénoncé comme si- 
moniaque. Aussitôt après son élection il se 
rendit à Rome, où il reçut la consécration des 
mains de Grégoire VII, en 1080. Après deux ans 
d'épiscopat, il prit en dégoût les affaires du 
siècle, et, se retirant au monastère de la Chaise- 
Dieu , il y revêtit l'habit claustral. Mais le pape 
ne lui permit pas de demeurer longtemps dans 
cette solitnde. Rappelé par ses ordres à Grenoble, 
Hugues gouvernait cette église en 1084, quand y 
arma saint Bruno, cherchant un lieu désert pour 
y fonder sa Théhaïde. Hugues le conduisit lui- 
même dans les après montagnes où s'éleva plus 
tard l'édifice de la grande Chartreuse. On le voit 
en 1112 au concile de Vienne, et plus tard au 
concile du Puy en Vélay. Il fut un des amis de 
saint Bernard, auquel il alla rendre visite à Clair- 
Taux. Innocent II canonisa Hugues peu de temps 
après sa mort, le 22 avril 1134. 

Saint Hugues est considéré comme l'auteur du 
célèbre cartulaite de l'église de Grenoble, dont 
Jacques Petit a publié plusieurs extraits à la 
suite du Pénitentiel de saint Théodore de Can- 
torbéry. On en trouve aussi quelques-uns dans 
les Mémoires pour servir à V Histoire du Dau- 
phiné. Dom Mabillon a en outre publié une lettre 
de saint Hugues dans l'appendice du tome V de 
ses Annales Ordinis S. Benedicti. B. H. 

Histoire Littéraire de la France, t. XI,> 149. — Gai- 
lia Christiana {vêtus), t. II. 

hdgubs, abbé de Flavigny, diocèse d'Autun, 
né en 1065, mort après l'année 1115. Il était 
d'une naissance illustré, puisqu'il tenait par sa 
mère à l'empereur Othon III. Cependant, dès sa 
jeunesse il se voua tout entier à l'Église, et fit 
profession d'observer la règle de Saint-Benoit à 
l'abbaye de Saint- Vanne , à Verdun. Thierry, 
évêque 3e Verdun , s'étant alors prononcé pour 



l'empereur contre le pape, les moines de Saint- 
Vanne ne suivirent pas son exemple. Ils avaient 
peut-être comme lui le droit de faire un libre 
choix entre les partis belligérants. Cependant, 
Thierry les ayant chasses de sa ville épiscopale 
comme des révoltés, ils se retirèrent dans l'ab- 
baye de Saint-Bénigne de Dijon. Hugues était au 
nombre de ces exilés. L'abbé de Saint-Bénigne, 
Jarenton, lui fit d'abord le plus aimable accueil , 
et bientôt après il ne voulut plus avoir d'autre 
compagnon que ce noble frère, si recomman- 
dante, d'ailleurs, par les brillantes qualités de son 
esprit. Ils parcoururent ensemble l'Angleterre, la 
Normandie. Hugues passait par la ville de Ma- 
çon, quand il y rencontra une assemblée d'é- 
vêques, parmi lesquels Haganon, évêque d'Au- 
tun, se plaignait vivement du fâcheux état où se 
trouvait l'abbaye de Flavigny, privée depuis sept 
ans de la tutelle d'un abbé. Les plaintes d'Ha- 
ganon furent écoutées , et le gouvernement de 
l'abbaye de Flavigny fut attribué au moine de 
Saint-Bénigne. Il fut consacré le 22 novembre 
1097. Mais deux ans après, Norgand ayant rem- 
placé Haganon sur le siège d'Autun, Hugues et 
le nouvel évêque eurent ensemble des contesta- 
tions qui ^amenèrent presque aussitôt une écla- 
tante rupture. Norgaud, cédant à la colère, sus- 
pendit Hugues de ses fonctions sacerdotales. 
Celui-ci quitta dès lors Flavigny, retournant à 
Saint-Bénigne près de son bon ami Jarenton. Ils 
parurent ensemble en 1100 au concile de Va- 
lence, et obtinrent de ce concile une sentence 
sévère contre Norgaud, qui fut d'abord sus- 
pendu, puis déposé pour crime de simonie. Mais, 
dans ces temps de trouble, les évoques déposés 
se maintenaient sur leur siège tant qu'ils n'en 
étaient pas expulsés par les clercs et le peuple 
insurgés. Norgaud, sachant que les moines de 
Flavigny ne regrettaient pas leur ancien abbé, 
se rendit auprès d'eux , et leur donna pour chef 
spirituel le prieur Girard. Ils avaient sans doute 
le droit de résister à cette violence, et cela leur 
eût été facile ; mais on ne s'inquiétait pas beaucoup 
du droit quand on trouvait son profit à ce qu'il 
fût violé. Girard , préféré par les moines , con- 
serva son titre, et, après avoir fait quelques 
vaines tentatives, Hugues renonça lui-même à 
toute prétention sur l'abbaye de "Flavigny. Nous 
le retrouvons en 1111 à Saint-Vanne, recevant 
d'un évêque rebelle au saint-siége la crosse en- 
levée aux mains de l'abbé Laurent C'est une ac- 
tion que l'on a sévèrement condamnée. Nous 
sommes bien loin de l'événement, et il nous est 
raconté par l'abbé Laurent, témoin qui certes 
peut être récusé; cependant il parait que Jaren- 
ton lui-même, renonçant à défendre un ami si 
coupable, prononça contre lui une sentence d'ex- 
communication. Laurent fut rétabli sur son siège 
en 1114. On ne sait pas où et comment Hugues 
acheva sa vie si pleine d'incidents. 

Ses écrits ne sont pas nombreux. Nous dési- 
gnerons simplement sa chronique, appelée la 



4SS 



HUGUES 



436 



Chrmtfue de Verdun ou de Flav*çf^ i que le 
P. Labbe * publiée pour la première fois dan* sa 
Bibliotheca nova, t. I. C'est un des plus pré* 
deux monuments de l'histoire du moyen âge. 
EHe n'offre pas seulement une série de faits , on 
y trouve encore d'amples et intéressantes nar- 
rations. On attribue au même auteur encore 
d'autres ouvrages; mais ce* attributions ne 
sont fondées «pie sur dés conjectures. B. H. 

CalUd Ckrtit , t iv, foi. m. - Chronlcân Pirdu- 
nense* pantin. - HUt ÎAttêr. de te Ftnnee> t. X**. T». 

HiTCrUBft , évêque âe Porto, mort après l'an* 
née 1125. II avait été d'abord archidiacre de 
Compostelle. Le siège épiscopal de Porto ayant 
été rétabli en 1114, Hugues obtint des lors le 
gouvernement de ce diocèse, «t ce fut à sa prière 
qu'en 1120 Cftllistè It éleva l'église de Compos- 
telle à la dignité d'église métropolitaine. Il as- 
sista plus tard à divers conciles , en U2fe, 1128. 
Il a raconté la translation des reliques de saint 
Fructueux , récit inséré dans la collection des 
BoHandistes au 16 avril. On lui doit encore la 
principale partie d'une Hiêtoire 4e V Église de 
Compostelle, qui a beaucoup servi àRoderigode 
Cuuha. Il faut regretter que les exemplaires de 
cette histoire n'aient pas encore été multipliés par 
la presse. B; H. 

HUt. Lutér. de ta Front e, t XI, p lit* 

HueuBB de BAiirrB-MAiiiB, moine de 
Fleuri , mort vers Tannée 1130. On n'a pas d'au- 
tres renseignements sur sa vie. Mais les écrits 
qu'il a laissés ont rendu son nom célèbre. Le 
plus souvent cité est sa Chronique , Chronicon 
Floriacense, aussi appelée Bistioria Ectlesius- 
tica. Elle a été imprimée à Munster, en 1638. 
On a fait plus de cas de son traité De Potêstote 
regali et de saeerdotuli Dignitate, publié par 
Baiuze, dans le tome IV de ses Miscetlanea, et 
fidèlement analysé dans le tome X de V Histoire 
Littéraire, C'est utte apologie fort vive de la 
puissance royale. Les rois , suivant l'auteur, ont 
été établis par Dieu , et c'est outrager Dieu lui- 
même que d'élever sa voix contre leur toute- 
puissance. S'il est quelquefois permis de leur 
résister, c'est quand ils commandent une chose 
contraire à la foi t pour sa foi le chrétien doit 
mourir. Mais il ne faut pas que le prétexte de la 
foi menacée serve à colorer deB défections , des 
révoltes inspirées par cet esprit d'insubordina- 
tion dont l'histoire offre tant d'exemples. La so- 
ciété chrétienne n'est pas la société païenne t la 
société chrétienne a pour principe et pour fon- 
dement l'obéissance des sujets à leur souverain, 
tandis «nie dans la société païenne, où le gou- 
vernement des États n'était réglé que bar le ha* 
sard î la puissance des rbis, faible par son ori- 
gine , avait une action limitée et une durée qui 
dépendait des circonstances. La dignité sacerdo- 
tale est aussi, selon Hugues de Fleuri , d'institu- 
tion divine. Elle possède des droits très-étendus ; 
mais , d'un autre coté , elle est soumise à l'ob- 
servation de nombreux devoirs. Au nombre de 



ces devoirs il place 10 respect de là puissance 
royale , et il s'élève contre le zélé indiscret des 
évèques , qui , pour accroître leur propre auto- 
rité , prétendent dégager lès peuples des liens 
qui les asservissent a leurs chefs temporels. Au 
douzième siècle, cet écrit du moine de Fleuri était 
un manifeste énergique , ou se trouvaient réso- 
lues d'Une manière plus ou moins conforme A l'in- 
térêt public plusieurs ; questions d'une grande 
importance. Aujourd'hui ce n'est plus qu'nne 
déclamation soi* un lieu commun. Hugues de 
Fleuri a encore composé une fie de Si Sacerdos, 
éteque de Limoges, publiée parle P. Labbe, 
dans sa tiibliôth. Hôvd Mùhttteripi. , t. U, 
p. 661, et par les Bollattdîstes, eu 6 mai. Il faut 
en outre inscrire au catalogue de *e* oeuvres tu 
récit des miracles de saint Benoit, Liber Afifa- 
rtltottifti S. Mnedtetiy dont il n'a encore été 
publié que des extraits. Le Manuscrit nous est 
signalé par Êevret de Fontette et par le* auteurs 
de Vffistoire Littéraire comme existant autre- 
fois à la bibliothèque dé Fleuri. Enfin le P. Le- 
long, dans sa Bibliothèque Sacrée, attribue à 
Hugues de Sainte-Marie nn Commentaire sur 
les Psaumes , conservé parmi les manuscrits de 
là cathédrale de Dtirhatth B. H. 

tiist. Littér. de la France, t. X, p. ft8S. — Fevret de 
Fûtatette, HUt. de Prante. — Lédglét du fresitoy, Mé- 
thode pour étudier VkUtolre, t III, p. as. 

Httfetrfes , religieux de Saint-Victor, né proba- 
blement aux environs d'Ypres, mort dans 1 ab- 
baye de Saint-Victor, le 11 février 1141. On 
lui a quelquefois donné la Saxe pour pays natal ; 
mais il parait mieux prouvé qu'il quitta dans sa 
jeunesse la Flandre, sa véritable patrie, et fit 
alors un séjour plus ou moins prolongé sur la 
terre saxonne, chez les chanoines d'HamersIe- 
bett. Enfin un historien peu sobre d'hypothèses 
a prétendu le faire descendre des comtes de Bla- 
kemberg. Mais cette assertion n'a pas le moindre 
fondement. Dès qu'il eut pris le parti de renoncer 
au monde , il se rendit en France , vers l'année 
1118, et alla d'abord chercher une pieuse re- 
traite à l'abbaye de Saint-Victor de Marseille. 
Plus tard il quitta Saint-Victor de Marseille, et 
vint à Saint- Victor de Paris, on il fut reçu par 
l'abbé Gîlduln. Thomas , qui gouvernait l'école 
de cette abbaye, étant tombé sous le poignard 
de quelques assassins, Hugues hérita de sa 
chaire, et l'occupa d'une manière brillante. 
Il y recueillit de si vife, de si nombreux ap- 
plaudissements , que le nom de cet humble reli- 
gieux, étranger à toutes les affaires de son temps, 
n'est pas resté moins célèbre dans l'histoire 
que ceux de saint Anselme et de saint Bernard. 

Il doit cette gloire à ses écrits. Aucun des 
théologiens, aucun des philosophes du moyen 
âge, pas même saint Bernard , n'ont eu tant de 
copistes de leurs œuvres. Dans les bibliothèques 
de tous les monastères , et nous n'exceptons 
pas de ee nombre les plus humWes et les plus 
pauvres, on possédaitdes exemplftiresde quelque? 



437 



HUGUES 



436 



œuvres du célèbre Victoria. On le considérait 
alors, parmi les nouveaux docteurs» comme le 
guide le plus éclairé, le plus sur, des consciences 
chrétiennes, comme un autre saint Augustin, il 
est vrai que son autorité s'affaiblit subitement 
vers le milieu du treizième siècle > dans tes 
grandes villes , les villes lettrées, comme Paris j 
Cologne, Oxford ; mais elle demeura presque in» 
taqte dans les écoles monastiques , où la théo* 
logie cohtentieuse ne se substitua jamais compté» 
teraent à la théologie mystique. S'exulique-t-en 
cet immense crédit en lisant aujourd'hui les œu- 
vres de Hugues de Saint-Victor ? Oui , sa» doute. 
C'est un écrivain subtil, mais ingénieux» Son 
langage, souvent incorrect, est en outre chargé 
d'ornements qui ne trouveraient pas graoe de* 
vant un goûi sévère; maïs il saisit ttmagination 
par Tétrangeté même, par tabizarrerie des jeux de 
mots, des antithèses. C'est un mystique, maie 
non pas un de ces mystiques exaltés qui » dès 
qu'ils paraissent en chaire» enlèvent un audi- 
toire et le fatiguent bientôt j sa voix est donce » 
et recherche pour les séduire les oreilles déli- 
cates; si sa profonde piété lui permet rarement 
de penser avec le calme de la raison > il la do- 
mine assez toutefois pour exprimer ce qu'il veut 
dire suivant les convenances littéraires; c'est un 
mystique raffiné. Ajoutons que pas une des Heure 
de son éloquence n*est dangereuse. Hugues de 
Saint-Victor a sans doute de grandes prétentions 
à l'esprit ; mais il n-'en a pas à l'originalité dog- 
matique : personne n'est plus que lui fidèle sec- 
tateur des Pères orthodoxes. 

Ses œuvres ont été publiées à Rouen , en 1648, 
en trois volumes in-fol., par quelques-uns de 
ses confrères eh religion. Mais, que l'on en soit 
averti , il ne faut pas ouvrir au hasard cet ample 
recueil, et juger l'auteur sur le premier opuscule 
qu'on y pourra rencontrer. Il a été, en effet, 
reconnu que les éditeurs , gens d'un faible dis- 
cernement , ont entassé pêle-mêle dans ce recueil, 
sous te nom de Hugues de Saint- Victor, les écrits 
authentiques de leur confrère et ceux de Hugues 
de Fouilloi. Les preuves ne manquent pas crail- 
leors pour établir que Hugues de Fouilloi n'est 
pas le seul auteur du douzième et du treizième 
siècle qu'ils aient dépouillé de cette manière au 
profit de Hugues le victorin. D'un autre coté, de 
plus savants critiques ont désigné plusieurs traités 
considérables qui, négligés par les éditeurs de 
1 64$, bien qu'appartenant sans contestation à Hu- 
gues de Saint-Victor, attendent encore le secours 
de la presse polir circuler dans toutes les mains. 
Cependant toutes ces désignations ne sont pas éga- 
lement admissibles. Les auteurs de Y Histoire lit- 
téraire ont, par exemple, mentionné parmi les œu- 
vres inédites de ce docteur un assez grand nombre 
de pièces publiées en 1648 sous d'autres titres, ou 
même sans titres particuliers, dans le fatras des 
Miscellanea. La recherche des œuvres sincères 
<»t des œuvres supposées de Hugues de Saint- 
Victor est une affaire pleine de difficultés. L'au- 



teur de cet article s'est proposé ce problème de 
critique littéraire) et il espère l'avoir bientôt ré- 
solu. B. Hauréau. 

UUt, !Àtt. êê M France, t. XII, p. l. - Oddin, I)e 
SùtlpL Bcclei. — VteQcal 4« teanvftls. Spéculum Hist. 
— Jean Trithelm, De Script. Eccles. ~ Bulletin du 
Comité hùtôr. dès tnonum. écrits de VhUt. de France, 
t. III, * 17t. m- Dicttotm. élst Sciences p\ilo$oph. - Dit- 
Uog» DisserUtié de Jfu§ène a S.-ruton. 

Huovfis, évéque du Mans, né à Saint-Ca- 
îais, dans la secondé moitié du onzième siècle, 
mort au Mans , le & février 1 143. Son nom de 
famille était en latin PuQantis , en français p&yen 
ou Péan» il fut d'abord archidiacre du Mans , puis 
doyen de la cathédrale» On le toit dans les actes 
occupant tes fonctions de doyen depuis l'année 
litl.fin 1112 il fut retetn prisonnier avec Hil- 
debert , son évéque , dans le château de Nogent- 
to'Rotrou. C'était, du reste, UU digne ministre 
d'un tel prélat ^ actif, prudent, courageux comme 
lui. Hildebert ayant été nommé archevêque de 
Tours, Guy, qu'on appelle Guy tVÈtampes, de- 
vint évéque du Mans. Sous cette administration 
nouvelle Hugues continua de présider le chapitre 
de Saint-Julien , et de le réprésenter dans toutes 
les grandes affaires ; mais après la mort de Guy, 
il fut à «on tour appelé sur le siège épiscopal du 
Mans, le 20 septembre 1135. Son avènement 
n'eut pas lieu sous d'heureux auspices : il venait 
de revêtir les Insignes de Tépiscopat, lorsque 
Geoffroy, oomted* Anjou , quHl n'avaitpas voulu re- 
connaître pour son souverain (fcoir Geoffroy IV, 
comte d'Anjou), tint occuper le Mans, en 
chassa l'évêque et pilla ses greniers. Hugues n'eut 
la liberté' de reprendre le gouvernement de son 
troupeau qu'après neuf mois d'exil. On le compte 
au nombre des prélats qui s'employèrent avec le 
plus de zèle à la construction de la nouvelle ca- 
thédrale du Mans. B. H. 

GHltla Ckristiuhâ. t. XtV, col. 58*, *tl. - Le Consi- 
ster, Bondoontl, Êvêetm du Mans, 

mnnuflft d$ Mdcon, évéque d'Auxerre, 
mort le 10 octobre 1151. Il était de la maison 
des eomtes de Maçon , et cousin de saint Ber- 
nard. Celui-ci l'entraîna, par son exemple, dans 
la solitude de Ctteaux. Il en sortit plus tard , par 
les ordres de l'abbé Etienne , pour aller dans le 
diocèse d'Auxerre fonder l'abbaye de Pontigny. 
C'est comme abbé de Pontigny qu'il parut, en 
1128, au concile de Troyes. £n 1135 il fut com- 
mis par Thibault, comte de Champagne , pour 
établir des chanoines réguliers dans l'église de 
Saint-Loup de Troyes, jusque alors desservie par 
des clercs séculiers» Le clergé d'Auxerre le choi- 
sit pour évéque au mois d'août 1136. Au mois 
de janvier de l'année suivante, Geoffroy, évéque 
de Chartres, le consacra dans l'abbaye de Fer- 
rière. On le voit, en 1138, établir les Prémontrés 
à Auxerre , et terminer un grave débat entre 
Manassé, évéque de Meaux, et Risende, abbesse 
de Sainte-Fare. En 1140 il assistait au concile 
de Sens, qui condamna la doctrine d'Abélard ; en 
1 144, au colloque de Montreuil , entre le roi 



4*9 



HUGUES 



440 



Louis VII et Thibauld, comte de Blois ; en 1148, 
au concile de Reims, où il combattit les opinions de 
Gilbert de la Porrée. C'était un homme de grand 
conseil : les évoques, les rois, les papes , le char- 
gèrent de régler un grand nombre d'affaires dif- 
ficiles , et qui réclamaient un examen impartial. 
On lui reproche cependant une action qui est, 
en effet , digne de blâme. Au lieu de transmettre 
ses biens aux pauvres, aux églises d'Auxerre, 
il fit à l'heure de sa mort on testament dans 
lequel il légua presque tout ce qu'il possédait a 
un de ses neveux. Saint Bernard fit casser ce 
testament par le pape Eugène m. Plusieurs écrits 
sont attribués à Hugues de Mâcon. Mais toutes 
ces attributions sont contestées et contestables. 
Il n'y a de certitude que pour ses lettres et tes 
diplômes. B. H. 

HisU Litt. de la France, t XJ1, p. *08. - Galtta Ckrtt* 
tiana, t. XII. 

hugues, cardinal, évêque d'Ostie, né en 
France, et apparemment, comme l'assurent les 
auteurs de Y Histoire Littéraire, dans le diocèse 
de Beauvais , mort en 1 158. Ayant fait profession 
d'observer la règle de Clteaux, il fut d'abord 
abbé de Trois-Fontaines , au diocèse de Châlons. 
Le pape Eugène le fit ensuite cardinal vers l'an- 
née 1151, malgré l'opposition de saint Bernard , 
qui regrettait pour son ordre la perte d'un tel 
homme. On lui attribue des commentaires sur 
l'Ancien et le Nouveau Testament ainsi qu'un 
livre sur les miracles du. pape Eugène. Mais ces 
indications paraissent conjecturales, et l'on a 
même lieu de croire qu'elles sont erronées. On 
possède toutefois une de ses lettres, écrite à l'oc- 
casion de la mort d'Eugène. B. H. 

Hist. IAttér. de la France, t. XII, p. ITÎ. 

hugues surnommé de Poitiers, moine de 
Vézelay, mort après l'année 1161. Sa vie est 
peu connue. Par Tordre de Ponce de Montbois- 
sier, abbé de Vézelay, il écrivit Y Histoire de ce 
monastère. Cette histoire , où il y a des détails 
pleins d'intérêt, a été publiée par dom Luc d'A- 
cheri, dans le t. III de son Spicilegium. On le 
donna aussi pour l'auteur de la Chronique des 
Comtes de Nevers, insérée par le P. Labbe dans 
sa Nouvelle Bibliothèque des Manuscrits; 
mais cette attribution n'est pas justifiée. B. H. 

Hist. litt. de la France, t VII, p. 668. 
hugues d'Amiens , archevêque de Bouen , 
né sur le territoire de Laon ,' vers la fin du 
onzième siècle, mort le 11 novembre 1164. On 
l'appelle Hugues d'Amiens, parce qu'il était de la 
maison de Boves, qui prétendait tenir aux 
comtes d'Amiens par un lien plus ou moins 
étroit. Il eut pour maître le célèbre Anselme de 
Laon. Quand il quitta son école, il prit l'habit 
religieux au monastère de Gluny. En 1125, nous 
le trouvons prieur de Saint-Martial de Limoges, 
et peu après prieur de 'Saint-Pancrace de Leuves, 
diocèse deChichester. Il gouvernait cette maison, 
quand le roi Henri I er , informé de son rare me- 
nte, le fit abbé de Reading, au diocèse de Sa- 



lisbury. Une étroite union existait alors entre les 
clercs normands qui résidaient sur l'une et sur 
l'autre rive de la Manche, et, outre qu'Us se 
rendaient volontiers de fréquentes visites, ils 
étaient souvent appelés par les ordres du roi à se 
contrôler, a se réfonneri^proquement. Hugues 
parcourait la Normandie quand, au mois de no- 
vembre 1128, mourut Geoffroy, archevêque de 
Rouen. Aussitôt tous les suffrages rappelèrent 
sur le siège vacant. Il fut consacré le 14 sep- 
tembre 1130. On le voit, l'année même de sa 
consécration , fonder l'abbaye de Saint-Martin 
d'Aumale. S'étant déclaré pour Innocent H contre 
son rival Anacet, Hugues reçut à Rouen ce 
pontife au mois de mai 1131, et l'accompagna 
quelque temps après au concile de Reims. On a 
lait grand bruit de ses différends avec les abbés 
de Normandie. Ces abbés jouissaient d'une assez 
grande liberté. Un de leurs privilèges, fondé 
plutôt sur la coutume que sur quelque décision 
canonique, était qu'ils ne devaient aucun ser- 
ment au pasteur métropolitain. Hugues prétendit 
introduire dans son diocèse cet usage du ser- 
ment , qui était en vigueur dans la plupart des 
diocèses voisins ; mais les abbés lui résistèrent. 
Le roi d'Angleterre, les prenant sous sa protec- 
tion, plaida devant le pape la cause de leur in- 
dépendance traditionnelle, et le pape écrivit à 
l'archevêque de Rouen d'abandonner ses pré- 
tentions, ce que celui-ci fut alors obligé de 
foire, quoique à regret. Hugues assista en 1133 
an concile de Jouarre, en 1134 au concile de 
Montpellier. Il était, comme on vient de le voir, 
jaloux de son autorité, et toujours prompt 
à en faire valoir tous les droits, au mépris 
même des volontés royales. Il le prouva bien 
dans l'affaire de Richard , évêque de Bayeox. 
Ce Richard, fils naturel du comte de Gloces- 
ter, avait été pourvu de révêché de Bayeux 
par le roi Henri. Mais les canons n'admettaient 
pas un prélat convaincu de bâtardise. Hugues 
refusa donc de le consacrer. Quelle fut à cette 
nouvelle la fureur du roi ! On ne sait trop com- 
ment cette contestation se serait terminée, si le 
pape ne l'avait apaisée en accordant une dis- 
pense à Richard. Cependant le roi Henri ne 
pardonnait aucune offense. Connaissant toute 
l'apreté d'humeur du roi, Hugues pensa qu'après 
l'avoir plusieurs fois irrité, il devait éviter sa 
présence. Il traversa donc les monts en 1135, 
parut au concile de Pise, et même après la clô- 
ture de ce concile il prolongea le plus qu'il put 
son séjour, en Italie. Nouvelles plaintes du roi : 
mais sa mort vint les interrompre. Hugues repa- 
raît dans son diocèse en 1136, et s'attache au 
parti d'Etienne de Blois. Sous le règne de ee 
prince, il fut en grande faveur. Prenant part aux 
affaires civiles comme aux affaires ecclésias- 
tiques, il réconcilie le comte de Glocester et le 
comte de Boulogne;, il termine par un discours 
véhément le débat qui s'était élevé entre le roi 
d'Angleterre et les évoques anglais au sujet de 



441 



HUGUES 



443 



leurs forteresses, et son influence est telle que 
personne n'ose résister à ses avis, encore moins 
à ses ordres. Les abbés normands ne lui refusent 
plus le serment : dès qu'il l'exige de Théobald, 
nouyeilement élu abbé du Bec, celui-ci ne tarde 
pas à se soumettre. Très-occupé, d'ailleurs, de 
son administration métropolitaine, il introduit 
partout des réformes : la plupart des églises et 
des monastères de Normandie ont longtemps con- 
servé dans leurs chartriers des actes de ce prélat. 
L'analyse de tons ces actes nous est offerte par 
la Gallia Christiana. On y trouverait la matière 
d'une longue et intéressante narration, si l'on 
voulait choisir Hugues d'Amiens comme un 
exemple pour montrer quelle était l'impor- 
tance des fonctions épiscopales au douzième 
siècle, et quelle était la vie d'un évoque labo- 
rieux. Nous rappellerons encore qu'il siégeait en 
1 148 dans le concile de Paris, réuni contre Gilbert 
de La Porrée, en 1148 dans le* concile de Reims, 
en 1151 dans le concile de Beaugency, et qu'il 
était présent à Westminster, en 1154, au cou- 
ronnement du roi .Henri IL II nous reste à par- 
ler de ses écrits, qui sont assez nombreux. 

Dialogi de Summo Bono Libri Vil. Ces 
dialogues ont été publiés par D. Martène, dans 
le tome V de ses Anecdota, p. 895 : ils intéressent 
beaucoup plus un théologien qu'un philosophe; 
cependant on rencontre dans les premiers le dé- 
veloppement de quelques opinions qui appar- 
tiennent à la philosophie morale : Hugues les 
traite en disciple fidèle de saint Augustin. L'un 
des pins curieux ouvrages de notre docteur a 
pour titre : De Hxresibvs sui t emporte. Cet 
écrit, dédié au cardinal Albéric, évèque d'Ostie , 
a été publié, comme appendice aux Œuvres de 
Gtiibert de Nogent, par dora Lnc d'Acheri. 11 ne 
faut lui demander aucun détail sur les contro- 
verses fameuses provoquées par Roscetin, 
saint Anselme , Abélard , etc. , etc. 11 ne s'a- 
git ici que des hérésies subalternes , de celles 
qui touchent à l'administration des sacrements 
au sein de l'église. Mais , à l'égard de ces héré- 
sies, Hugues nous fournit des renseignements 
qui importent beaucoup à l'histoire de l'Églisedu- 
rant le douzième siècle. On les chercherait vai- 
nement ailleurs. Nous n'avons qu'à mentionner 
deux opuscules In Laudem Mémorise y et De 
Fide Catholica et Oratione Dominica , insérés 
par dom Martène dans le t. IX de son Amplis- 
sitna Collectif). De son traité De Creatione Re- 
rttm, intitulé aussi Hexameron , il n'a été pu- 
blié qu'un fragment, dans le t Y des Anecdota 
de Martène. Un manuscrit complet de cet ou- 
vrage se trouvait à Clairvaux ; il est maintenant 
dans la bibliothèque de Troyes, sous le numéro 
413, in-fol. Le tome Y des Anecdota nous offre 
encore la Vie de saint Adjuteur, moine de Ti- 
ron, par Hugues d'Amiens. Enfin un assez grand 
nombre de ses Lettres ont été publiées par Du- 
chesne, Martène, Guillaume de Malmeshury, La 
Pomeraie, etc. B. H. 



Gallia Christiana, t. H, col. 4t. - Hist. Uttér. de la 
France, t. XII, p. 64T. — Catalogue des Manuscrits des 
bibliothèques publiques des départements, t. II. — Guil- 
laume de Malmesbiiry, Hist. Eceles., pantin. - Ordérle 
Vital, Hist. Ecclés. % paasim. 

HUGUES de frazan ou de TftâSAN, dixième 
abbé de Cluny, mort après l'année 1166. De 
prieur claustral il devint abbé de Cluny en 1157 
ou en 1158. Quelques années après, ayant pris 
le parti de l'antipape Victor IV, il fut excom- 
munié par Alexandre IH et chassé de son abbaye. 
Il se réfugia près de Frédéric Barbe-Rousse. Di- 
vers ouvrages lui sont attribués, mais à tort, 
suivant les auteurs de Y Histoire Littéraire, si 
ce n'est une lettre à l'empereur Frédéric, publiée 
par d'Achery, Spicilegium, t. H, p. 400. Dans 
la collection de lettres de Pierre de Celles, il y en 
a quatre à l'adresse de Hugues de Frazan. B. H. 

Hist. Uttér. de la France, t. XIII, p. 871. 

HUGUES, moine lorrain, né sur le territoire 
de Toul, mort en 1168. On le voit d'abord 
prieur de Saint- Jean de Laon, puis abbé d'Hum- 
blières jusqu'à Tannée 1150, enfin abbé de Saint- 
Amand depuis l'année 1150 jusqu'à sa mort. H 
était très- puissant auprès du comte de Flandre, 
comme le prouve une lettre que lui écrivit Pierre 
de Celles au sujet de l'exil de Jean de SaKsbury. 
Cependant tout ce qui nous reste de Hugues se 
réduit à une autre lettre publiée (par Martène , 
Anecd., 1. 1, col. 443. B. H. 

Hist. Uttér. de la France, t. XIII, p. 1*9. 

hugues de fouilloi, chanoine de Saint- 
Augustin , né au bourg de Fouilloi, près de Cor-» 
bie, mort à une date incertaine , après l'année 

1173. Le nom de ce chanoine est obscur. Il se- 
rait célèbre si, pour marquer dans l'histoire, il 
suffisait d'avoir lait un assez grand nombre de 
livres médiocres, estimés pendant quelque temps 
bien au-dessus de leur valeur. Mais les écrits de 
notre chanoine ont eu cette étrange fortune d*être 
tous attribués, quand on en faisait trop d'es- 
time, à un écrivain très-fécond, dont ils n'ont 
pas alors même augmenté la renommée , tandis 
qu'ils l'ont ensuite compromise. Hugues de 
Fouilloi fit profession d'observer la règle de 
Saint-Augustin dans le prieuré de Saint- Lau- 
rent de Heilly, qui dépendait de l'abbaye de 
Corbie. En 1 149, les chanoines réguliers de Saint- 
Denis de Reims le choisirent pour abbé; mais 
il refusa cette haute dignité. Cependant, quatre 
années après , Olric, prieur de Saint-Laurent, 
étant mort, Hugues consentit à le remplacer. 
Simon lui succédait ensuite dans cette charge en 

1174. Hugues l'avait-il volontairement abdiquée, 
on sa vie finit-elle à cette date même? C'est 
ce qu'on ignore. Quelques auteurs ont supposé 
que le pape Innocent H, mort en 1143, l'avait 
mis an nombre des cardinaux. C'est une sup- 
position gratuite, et qu'il faut rejeter sans antre 
examen. Le discernement de ses œuvres , disper- 
sées dans une foule de recueils manuscrits 9 
et même imprimées sous d'autres non» que ta 



449 



HUGUES' 



444 



sien , est une affaire plus Intéressante et qui 
réclame une laborieuse enquête. 

De Claustro Anima Litri IV. Cet ouvrage* 
souvent attribué à Hugues de Saint-Victor, a été 
publié dans te deuxième tome de se* causes. 
Dom final le restitue sans aucun embarras 4 
Hugues de Fouillai, s'annuyant sur l'autorité 
de quelque» manuscrits et de quelques ancien* 
bibliographe*. Mais la question est plus obscure, 
qu'elle n'a para l'être a. dom Brial, Vincent de, 
Baauvais, presque cwtsmporajn des deux cha* 
noines , et certainement le plus érudit de toua 
les critiques de son temps» énonqe, les tau** 
du problème et n'ose pas le résoudre, Jj sait qu* 
le De Claustre Animm est diversejnant rang* 
parmi lea œuvres de Hugues ta SajntrVwtar et 
parmi otites de Hugue* de Fowttpi, etçanejh 
dant il ne déclare pas quelle est à son, avis ia 
plus exacte de ces attributions, Un des plus an- 
ciens et des plus respectables annalistes, Jean 
de Saint-Victor, affirme, pour sa part, qqe si di- 
vers manuscrits du Cloître de l'Ame portent te 
nom de Hugues de Fouilloi, cette inscription est 
erronée , et qu'il faut le rendre au chanoine de 
Saint-Victor. Cependant, malgré ce témoignage 
et quelques autres encore, nous nous rangerons 
à l'avis de dom Brial, par ce motif que le De 
Claustro Animae, ouvrage d'un style lourd, dif- 
fus, plein de prétention et dépourvu de tout 
éclat , est véritablement indigne du célèbre vic- 
torin. — De Medicinct Anima. Gomme le 
précédent traité, Lajttédecime deVArm est at- 
tribuée par divers bibliographes tantôt au eba- 
noine de Saint- Victor, tantôt au chanoine du 
Saint-Laurent. Pour oeku^ci se prononcent Al- 
bério de Trois** ontainea, Casimir Qudtn» £ltie* 
Dupin, dom Brial; pour celui-là Jean de Tri" 
tenheim et la plupart des manuscrits. la Mé- 
decine de V Ame noua para», comme à dom 
Brial, un opuscule écrit sur le même ton que 
Le Cloître de l'Ame , et noua ne Mfiumms pas 
dé le restituer an même auteur, -* De Avilws, 
ad Rainerium. C'est te prejurier de toeia traités 
Sur les Ammaux, De Bestiis f inséré* parmi les 
œuvres de Hugues de Saiut«-Vtotojr, Or, on ne 
s'explique pas pourquoi eetta diseeriation spé- 
ciale Sur les Oiseaux à été recueilli* par les édi- 
teurs du victorin, ear elle no parait aeus son 
nom dans aucun manuscrit, tandis que plusieurs 
volumes, notamment lenumémAddu fonds même 
de Saint-Vietor, l'assignent ainsi sans équivoque 
au chanoine de SahnVLaurent ; Jmiyti libellais 
domni Uugems de Folietm De Natur-a Avium % 
ad Ratoertum ommremm. Quant an second 
traité mtitnlé Bestiarntm, il est plus difficile 
d'en «mnnattre Hauteur. Dom ftriai in dispute au 
religieux de Saint-Victor, et le réclame pour 
Alain <to LiMe, auteur d*un Bestiaire désigné par 
Jean de Tritenhehn. Mais cette réclamation n'est 
pas bien, fondée. Noua avons, en effet, réoenv 
tnent découvert Le Bestiaire d'Alain de Lille, et 
noua avons fait part au public du cette décou- 



verte dans un des numéros de VAthepatum 
français, Qr, que Ton compare le texte de l'un 
et de l'autre ouvrage, et l'on verra qu'il n'y a 
pas entre eux la moindre analogie. De son côté, 
Casimir Oudin veut que le Bestiaire publié 
parmi \m Œuvres de, Hugues deSaint» Victor soit, 
comme le Fotaarwu, transporté au catalogue 
du chanoine dt&wri-Idiurent* Cependant, toute 
assertion de. et genru doit être fondée aux quel- 
que chose, et eaUe-oi ne l'est sur rien , ni sur tes 
manuscrits, nj sur te tfonojgnage plus ou moins 
fidèle de quelques anciens bjhUographea. H faut 
donc la rejeter. Pour revente au V^utarmre, ajou- 
tons que le marna ouvrage est encore intitulé 
dans quelque* copies du fcewèm* ot du qua- 
torsiome siècle j Jfe ffqtur<s 4m*i> $e (Sa* 
lumto 0ja*çê*$ata, DuMtov CvÀumtos. Que 
l'on ne commette dune pas à roflcaaiun de ce 
livre une erreur trop fréquente; que l'on ne dis* 
tiague pas quatre traité» Avers la. où il a'aaitd'nm 
seul ouvrage reproduit squô quatre titres diffé- 
rents ; -»- De NupiïïS Xifrri //, Inséré* dans le 
recueil de Hugues de Saint-Victor, ces deux li- 
vres semblent, cojftjac* les précédents, apparte- 
nir à Hugues de FuuHloi C'est l'avis de Ca- 
simfr Oudni, de dosa Brial \ il est eunfirmé par 
le plus grand nombre de» manuscrits, et rien m 
nous invitée le contredira ; — De Arw Ne*m$$- 
tka Des&cipUQ} De Axe* JSm moralti fmter* 
pret&io; fie Vamt&e Hetnm mvndqnawmm- 
Ce sont trois onuatule*., souvent séparés ;<«aaia 
comme fauteur du Jte Y Mitât e jurant se dé- 
ojarav dans eetraitd, l'auteur du De Arw moraU, 
et comme il y a dans )&DeArt<* mystioarw pas- 
sage qui renvoie le tectenr aux chapitras 3 et 4, 
litre I e *, de la Des&iptim matait de l'Arche, 
il eatiœeatestabie que oeatrpia opuscules, d*ail- 
leura eonfomws quant à la méthode, l'esprit, 
le st&fovont été compose* par le même docteur. 
Ou es convient gteératesMot. Mai* Casimir 
Quditt et don Brial ne consentent ne* TOlon- 
tiera à caque ce docteur soit tiuguaa de Saint- 
Victor. A leur «via, c'est peut*étre IJugueu de 
FonjUei. Qf,nwi*nfhé*tow pas à àwe qu'ils se 
sont trompé* •« «§É» V"* <* L'autre. D'abord, 
tona le» manMSignU.et tous le», bJMwgiraphes de 
quelqjue aueienju^té^ViBeent de Reauvais, Jean 
de SainfctVieJtor, ISlooJU* Triveth, Kicbard de 
CiuAYtifeuri d»ûai>d, Jean de TritenJrënx s'ae- 
cordent è Mmsae? Hugues, le wtorâu Sanoite 
celui-iji ae nemian lu^méme, quand, dans on du 
ces trufe traités^ il invite 4 lire nu écrit de sa 
plame iutitujéite tribu* Diebw. Ce De triom 
Di*bw est, aoua aan vrai Utfé» le traité doat lea 
éditeur» de W9 ont feit mal à propee le sep- 
tième livre 4U) I?i4<m*l*w> et c'est ua ou- 
vrugs tré^-authentique de Hugues de SaM-Vks 
tor. Si &&» Brial avait fait cette reuiarqjae, il 
aurait currigé Casimir Oudin, au lieu de l'an* 
puyer; — De B* Mari* VwgMtate jWjWfMO» 
dans le toraeia des Œuvres de Hugues de Saint- 
Victor. Toutes les autorités anciennes attribuent 



445 

cet ouvrage m victorin, etles continuateurs de 
dom Rivet ont été les premiers à supposer que 
le chanoine de Saint-Laurent ayant pu composer 
un traité sous le môme titre, il convenait de lui 
adjuger celui-ci. Ce sont de* conjectures témé- 
raires. On signale , il est vrai, quelque différence 
entre la doctrine de ce traité et celle des Se»* 
tentes; et les Sentences appartiennent ineon* 
testablement à Hugues de Saint-Victor. AuraiMl 
changé d'opinion sur quelque point de sa 
croyance? C'est ce qu'on peut admettre. Ces chen* 
gonents n'étaient pas rares an moyen âge , la foi 
théologique n'ayant pas encore été dégagée de 
tous nuages. On peut, d'ailleurs, apprécier que 
l'opuscule intitulé De B. Jfaria? Vir+iniiaie 
perpétua n'est pas du style propre an chanoine 
de Saint-Laurent; — De Pattoribus et Ovibm, 
ouvrage inédit, qui porte le numéro 2404 parmi 
les manuscrits de l'ancien fonds du Roi, à la 
Bibliothèque impériale. C'est un commentaire 
allégorique et chrétien de quelques vers de la 
neuvième églogoe de Virgue. Personne ne ré- 
clame ces jeux d'esprit pour Hugues de Saint- 
Yictor, et nous les trouvons convenablement at- 
tribnés à Hugues de Fouilloi, tant par les ma- 
nuscrits que par Manillon; — De Rota Prxlar 
tionis et de Rota Simulations. Cet ouvrage, du 
même genre que le précédent, fait partira même 
volume, et l'on ne doute pas qu'il ne sôttdu même 
auteur ; — In Lamentàtiones Hiefémtot. Bans 
les Œuvres de Hugues de SaimWîctor, 1. 1, 
p. 14a, il y a des gloses sur lès Lamentations de 
Jérémie : ne stffttoe pas les mêmes gloses qui ont 
été inscrites par Montfaucon sous le nom de Hu- 
gues de Fouilloi , d'après un manuscrit de saint 
Thierry? On peut le supposer, si Ton lie peut 
plus le vérifier. Enfin 6nllt dans le catalogue dé 
la Bibliothèque de Troyes, numéro 558 : Mag. 
ffngonisde FoHeto Aîphabetum panitentiaie, 
in quinque partes distinction. Aucun autre 
manuscrit de cet Alphabet n'est parvenu jusqu'à 
nous, et nous ne saurions dire si c'est un ou- 
vrage qui mérite un^mMoftsp^^» ou «ce 
n'est pas plutôt , sou* un titre de fantaisie , 
quelque fragment d'un des ouvrages dont noua 
avons précédemment parlé, P'anfres de ces frag- 
ments sont en effet intitulés : Tsuctatys de Con- 
versatione monasUcmPe, dwtfecim Abtisw- 
nibus, Flores , etc., atfcCçsopt des extraits du 
De Claustro Anwi& u . & IUw$au. 

Hist. LUtér. 4e te IMtfi t. XtfMfe. - Ctft, Ondt*. 
De Script. Eccifis. -~ CaU&gm 4*s filon* des bjfil. <fe« 
départ, t. II. — Tr^hclm^ ÛëScrijfi. Eecles. 

buguiw, surnommé de Chahi?fi*b*ï, pré- 
lat français, mort le 4 septembre U7§, dans l'ab- 
bayede Saint-Victor, * Paris. Connue chancelier 
(îeFranceentl51,ïlfiitappelé en U59*l'evfr» 
cité de Soissons, Cependant il conserva ses foncr 
lions près du roi, *k Je pape Alexandre 111 , qui 
était fort jajèux d'entretenir de bons rappar}* 
avec la coyr de France , lui écrivit plus d'une 
fois à ce sujet. Hugutf le servit avec, rtte 4 



HUGUES 44Q 

avec succès, Une parait pas s'être montré moins 
fidèle et moins habile serviteur du roi. Cepen- 
dant, en l'année 1171, malgré la puissance des 
amis qui plaidèrent sa cause auprès du roi, au- 
près du pape, il fut atteint par une disgrâce dont 
la cause n'est pas bien connue. Les œuvres de 
Hugues de Champfleuri sont des Lettres nom- 

I braises et intéressantes, qui ont été publiées 
par les continuateurs de dom Bouquet dans le 

I tome XVI de leur collection. B. H. 

ijist. UUes. 4e la Ftawc*» fi. XIII, p. IM. 
HCWUB8 de morceaux, abbé de Saînt-Ger- 
main-des-Prés, mort le 27 mars 1182 (1). Après 
avoir été moine de Véselay, il parait abbé de 
Saint-Germain dès l'année 1162. Le 21 avril tl63, 
il fit consacrer par le pape Alexandre HI sen 
église abbatiale, et, ayanténergiquement protesté 
contre la hardie prétention de Maurice, évo- 
que de Paris, qui s'était présenté pour assister 
à cette cérémonie, il écrivit une relation sottv 
maire de l'événement. Cette relation a été pu- 
bliée par les auteurs du Gallia Chrisliana* 
t VII, tn^r., col. 71. Du Boulay veut que ce 
sqit une pièce apocryphe* Nous la considérons, 
an contraire, comme un des monuments les plus 
curieux de cette antique indépendance dea 
moines noirs, dont, au temps de Du Boulay, il 
existait encore quelques vestiges. Les moines 
de toutes robes n'ont pas assurément fabriqué 
moins de pièces fausses que le» clercs séculiers 
de tous grades; ma.is la relation de Hugues de 
Monceaux nous parait avoir tous les caractères 
d'un petit procès-verbal authentique. Le 19 mai 
de la même année, Hugues assistait au concile 
de Tours, Il y retrouva l'évèque Maurice encore 
en proie à la plus vive émotion et se plaignant 
dans les termes les plus vifs de l'outrage qu'il 
avait reçu. Comme cela devait arriver, ils se 
querellèrent devant le concile. Cependant le 
concile et le pape donnèrent gain de cause à l'o- 
rateur des moines, Le 22 août 116£ Hugues fut 
un des abbés qui présidèrent à la cérémonie du 
baptême de l'enfant royal qui rat depuis Phi- 
lippe-Auguste. Vers le même temps il fut chargé 
par le roi d'intervenir dans les affaires assez 
troublées de l'abbaye de Sainte-Colombe, au 
diocèse de Sens. En 1179 il assistait au concile 
de Latran, Ce sont les actes principaux de sa 
vie. Les historiens de l'abbaye de Saint-Germain 
et les auteurs du Gallia Christian* nous en 
racontent beaucoup d'autres circonstances, qui, 
pour être peu dignes d'intérêt, attestent toutefois 
qu'it jouissait d'un grand erédft tant à la cour de 
France qu'à la cour de Rome. 

Outre le récit de la consécration de l'abbaye 
de Saint-Germain, Hugues de Monceaux nous a 
laissé deux lettres imprimées dam le tome IV 
du recueil d'André Ducbesne. B. H. 



(i) fet inon pas *181, comme rassure Y Histoire IMii* 
ratre, d'après le ÙaMu Christiana; car te Gallia Chris- 
tfflfM,iM»» fournit préeteèvent la date 4« 1*8*. 



447 



HUGUES 



448 



GaîHa Cnristiana, t VII, col. ut. - Histoire Litté- 
raire de la France, t XIII, p. 618. 

uceuES foucaut, moine et historien 
français, mort le 22 octobre 1 197. Les auteurs de 
Y Histoire Littéraire se sont attachés à montrer 
que l'auteur de la chronique intitulée De Tyran- 
nide Siculorum vint, en quittant la Sicile, ha- 
biter la France, et mourut abbé de Saint-Denis, 
à la date que nous venons de rappeler. L'his- 
toire de son administration abbatiale est dépour- 
vue d'intérêt. Sa Chronique, an contraire, est 
très-importante. Elle a été plusieurs fois publiée. 
II nous suffit de désigner l'édition qui nous est 
offerte par le tome VII des Historiens d'Italie par 
Muratori. B. H. 

Hist. Litt. de la France, t. XV. 

huoubs de noh AHT, évoque de Coventry, 
né, à Nouant en Normandie, mort au mois d'a- 
vril 1198. Il était neveu d'Arnoul de Lisieux. 
Après avoir fait ses études à l'université d'Ox- 
ford, il devint archidiacre de Lisieux vers 1173, 
et plus tard, vers 1185, évéque de Coventry. 
H était légat du saint-siége en Angleterre quand 
le roi Richard, partant pour la Palestine, confia 
l'administration de son royaume aux évéques de 
Durham et d'Ely. Hugues se montra l'opiniâtre 
adversaire de l'évéque d'Ely, et le fit disgracier en 
1191. Ce succès obtenu, il fut un des plus puis- 
sants personnages de toute l'Angleterre. Mais, 
comme il abusa de cette puissance, elle dura peu. 
N'eut-il pas l'étrange audace de se déclarer contre 
les moines, et de les remplacer, partout où il le 
put, par des chanoines réguliers ?En même temps 
que l'évéque d'Ely, les moines se plaignirent au 
pape, au roi, et formèrent contre l'évéque de Co- 
ventry une ligue si redoutable, qu'il fut chassé de 
son siège en 1194. Ily revint l'année suivante, mais 
après avoir versé, comme expiation de ses fautes, 
5,000 marcs d'argent dans le trésor du roi. II 
mourut sur le continent, en Normandie, pendant 
un voyage ou pendant un autre exil. Parmi les 
historiens anglais, les uns ont vanté son courage, 
et même, ce qui est plus surprenant, sa douceur; 
les autres l'ont accablé d'outrages. Telle est la 
diversité des traitements réservés après leur 
mort aux hommes de parti. 

Hugues de Nonant nous a laissé un récit de 
la disgrâce de l'évéque d'Ely, qui a été publié 
par Roger de Hoveden, Script. Rer. Ang,. 
p. 702. C'est un violent pamphlet. B. H. 
. Hist. /.«t. de la France, tXV. 

nr«UES de eibeaiont, théologien français, 
au douzième siècle. On ne connaît pas sa vie. 
De ses œuvres il ne reste qu'une Epistola 
de Natura et Origine Animx, recueillie par 
Martène et publiée dans le tome I de ses Anee- 
dota. Cette lettre est moins d'un logicien que 
d'un théologien, comme le prouve l'analyse qui 
en a été faite par les auteurs de Y Histoire Lit- 
téraire. L'auteur, quine.connaissait par le Traité 
de VAme d'Aristote, a puisé toute sa doctrine 



dans les écrits sincères on supposés de saint 
Augustin. B. H. 

* Hist. Litt. de la France, t. XI, p. m. - Martène, 
Anecd., 1. 1, p. 368. 

hugubs ktbéribn, théologien toscan, du 
douzième siècle, contemporain du pape Alexan- 
dre IU, auquel il dédia le principal de ses ou- 
vrages. Il passa quelque temps à la cour de 
Constantinople, et fut estimé de l'empereur Ma- 
nuel Coronène.'A l'occasion de ses conférences 
avec les théologiens grecs, il composa son traité 
De Hseresibus quas Grœci in Latinos devol- 
vunt, que l'on connaît encore sous cet autre 
titre : De Immortali Deo Libri III. Il est im- 
primé dans la Bibliothèque des Pères, édit. de 
Lyon, t. XXIÏ, col. 1198. On trouve dans la 
même Bibliothèque un opuscule de Hugues 
Éthérien sur l'état de l'âme séparée du corps. 

B. H. 

J. TriUietm, De Script. Ecciet. - Elites Dnpta.,flf- 
bUoth. des Auteurs eccU du douzième siècle. 

hugues (Saint), évéque de Lincoln, né en 1140, 
au château d'Avalon, mort le 16 ou le 17 no- 
vembre 1200. Il fut d'abord chanoine régulier 
en Bourgogne, ensuite moine à la grande 
Chartreuse en Dauphiné, prieur de Witham en 
Angleterre, enfin évéque de Lincoln, en 1184. 
Henri U ayant fait enterrer Rosemonde, sa mal- 
tresse, dans une église de religieuses, Hugues 
eut le courage de protester contre cette infrac- 
tion aux règles canoniques, et de faire exhumer 
le corps de Rosemonde. C'est l'acte le plus im- 
portant de sa vie, qui a été longuement racon- 
tée par un de ses contemporains. Saint Hugues 
a laissé la réputation d'un prélat très-lettré, lit- 
teratissémus : cependant on n'a de lui que des 
Statuts pour les religieuses de Cotun. On 
trouve ces Statuts dans le Monasticon Angli- 
canum, 1. 1, p. 924. Saint Hugues a été cano- 
nisé en 1221. B. H. 

Surins , Acta Sonet., t. Vf. - Aroanld d'indilly, 
Vie des Saints, p. SSt. - Hist. Litt, de la France, 
t. XV, p. 61*. 

hugues be SAINT-CHB* , théologien, né, 
comme on le suppose, dans le bourg de Saint- 
Cher, près de Vienne, en Dauphiné, vers la fin 
, du douzième ou le commencement dii treizième 
siècle, mort à Orvieto le 19 mars 1263. Après 
avoir fait ses études à Paris, il y professa Ton 
et l'autre droit; puis, attiré par la grande re- 
nommée de l'Ordre de Saint-Dominique, il s'y 
fit admettre et jura d'en observer les règles, en 
l'année 1225. En 1227, bien que sa profession 
fût encore récente, il était élu provincial de 
France, par considération pour l'éclat de son mé- 
rite; puis, ayant abdiqué quelque temps cette 
haute fonction, pour devenir prieur de la maison 
de Saint- Jacques, à Pari3, il y fut appelé de 
nouveau en 1236. On 'loue le zèle qu'il y mon- 
tra. Outre qu'il prit'uneparttrès-active et très- 
considérable à toutes les contestations auxquelles 
son ordre fut alors mêlé, il fonda plusieurs mai- 
sons dominicaines à Airxerre, à Toul, à Tours, 



.449 



HUGUES 



450 



.à Bourges, à Amiens, etc. En 1240, nous le 
voyons remplir la charge de vicaire général de 
toute la congrégation. Innocent IV lui conféra 
la pourpre en 1244, en le nommant cardinal- 
prêtre du titre de Sainte-Sabine. Occupé dès lors 
des affaires pontificales, il remplit au nom du 
pape plusieurs missions. En 1250 on le trouve en 
Allemagne, ou il ne se comporte pas de manière à 
mériter l'estime de tous les historiens. L'abbé 
Fleury et M. Daunou censurent sa conduite en 
cette légation, et celle de son collègue, Henri de 
Suze. Frédéric n Tenait de monrir : il s'agissait, 
pour l'Église romaine, de recouvrer en Allema- 
gne cette souveraine autorité à laquelle Frédéric 
avait constamment opposé l'insurmontable ob- 
stacle de son intraitable orgueil. L'entreprise était 
difficile. On dit que les négociateurs pontificaux 
employèrent sans beaucoup de succès la vio- 
lence, et qu'ils finirent par céder eux-mêmes 
à la corruption. Cette dernière accusation pèse 
toutefois moins sur le cardinal de Sainte-Sabine 
que sur son collègue Henri de Suze, archevê- 
que d'Embrun. Sous Alexandre IV, après Tan- 
née 1254, Hugues de Saint-Cher conserva son cré- 
dit, et deux affaires importantes lui furent con- 
fiées; il eut à examiner les livres mystiques de 
Jean de Parme et le célèbre pamphlet de Guil- 
laume de Saint-Amour Sur les Périls des Der- 
niers Temps. Il obtint la condamnation des doc- 
trines diverses proposées par l'un et par l'autre. 
Si haute toutefois qu'ait été dans son ordre, 
dans l^Église, la position de Hugues de Saint- 
Cher, il doit moins sa renommée à l'éclat des di- 
gnités dont il a tour à tour été revêtu, qu'au nombre 
et à 1'imporiance de ses ouvrages. Dans une de 
ses épitaphes recueillies par Du Boulay nous 
lisons ce méchant vers : 

Iste fuit per qnem patuit doctrina sophtae. 
C'est assurément un bien grand éloge; il est 
pourtant moins emphatique qu'il ne parait l'être. 
Hugues de Saint-Cher fut, en effet, parmi ses 
contemporains, l'oracle des interprètes de l'É- 
criture, comme saint Thomas fut celui des théo- 
logiens dogmatiques — Il faut commencer la ca- 
talogue de ses œuvres par une révision complète 
du texte de la Bible, travail inédit dont on dé- 
signe plusieurs exemplaires. Ce n'était pas, qu'on 
se le persuade, une médiocre entreprise, au dé- 
but du quatorzième siècle, que de recueillir, 
ordonner et surtout purifier tous les textes de 
l'Écriture Sainte, tant ils avaient été corrompus 
par des scribes barbares durant les siècles pré- 
cédents! A ce travail de correction littéraire 
Hugues en joignit un autre, qui lui fit encore plus 
d'honneur: il commenta tous les livres de l'An- 
cien et du Nouveau Testament. Il n'y a pas une 
bibliothèque qui ne possède quelque exemplaire 
manuscrit de cette glose, ou du moins de plu- 
sieurs des parties qui la composent. Elle a été, 
d'ailleurs, souvent imprimée, soit intégralement, 
soit partiellement. H nous suffit de désigner les 
éditions intégrales de Bâle , 1498 et 1504; de Pa- 

HOOV. BIOGR. CÉNF.R. — Ti XXV. 



ris, 1538; de Venise, 1600, et de Lyon, 1669. 
Enfin, les divers travaux de Hugues de Saint- 
Cher sur les Liwes Saints eurent pour couron- 
nement ces tables précieuses que l'on appelle 
Concordances , tables dont il conçut le plan, et 
à la rédaction desquelles il employa, dit-on, plus 
de cinq cents religieux de son ordre. M. Daunou a 
scrupuleusement recherché et très-exactement, 
il nous semble , déterminé la part qui revient à 
Hugues de Saint-Cher dans ces Concordances, 
tant de fois revues, corrigées, développées, dont 
l'édition la plus usuelle est celle d'Avignon, 1786, 
en 2 vol. in-4°. Les Sermons de Hugues de 
Saint-Cher ont eu moins de succès que ses glo- 
ses. Panzer en signale une édition publiée à 
Zwoll, en 1479, in-fol.; mais cette édition est fort 
rare. M. Daunou ne désigne qu'un manuscrit 
des mêmes Sermons dans le fonds de la Sorbonne. 
Ce seul fonds nous en offre quatre, sous les nu- 
méros 793, 794, 1406, 1.659. On doit encore au 
même docteur un Commentaire sur les Senten- 
ces de Pierre Lombard. H est inédit, mais des 
copies nombreuses en ont été conservées en 
France, en Italie, en Angleterre. Enfin, sous-les 
titres divers de Spéculum Ecclesiœ, Tractatus 
super Missam, Expositio Missœ % De Ordine 
Mi&sœ, nous avons une dissertation de Hugues 
de Saint-Cher sur les cérémonies de la messe : 
dissertation qui a été autrefois très-estimée et 
souvent reproduite par l'impression. B. H. 
Panzer, Annal. Typogr.-Qnètit etÉchard, Script. Ord. 
Pradic., t. 1. - Fabrtclna, Bibliothtca Media jEtat. - 
Hist. Uttér. de la France, t. XIX, p. 88. 

hugubs aicelin, théologien français, né à 
Billiom, vers l'année 1230, mort en décembre 
1297 ou 1298. C'est par erreur qu'on l'a souvent 
nommé Hugues Seguin, Hugues Sévin. Il em- 
brassa la règle de Saint-Dominique, au couvent de 
Clermont, et vint ensuite achever ses études dans 
la maison delà rue Saint-Jacques, à Paris. Quand 
il en sortit, il recueillit dans plusieurs villes les 
plus vifs applaudissements comme prédicateur 
et comme professeur. En 1285 Hugues se ren- 
dit à Rome, où il fut nommé par Honoré IV 
maître du sacré palais; quelques années après, 
le 15 mai 1288, il reçut de Nicolas IV le cha- 
peau de cardinal. Nous le voyons plus tard 
évoque d'Ostie et de Velletri. Ses ouvrages, s'il 
en a laissé, paraissent aujourd'hui perdus. B. H. 

Histoire littéraire de la France, t. XXI, p. 71. 

BU6VES de castro-n ovo, sans douté de 
nbwcastle, près de Parham, théologien an- 
glais, vivait, suivant Luc Wadding, en 1310. Il 
était de l'ordre des frères Mineurs, et fut en 
philosophie un des défenseurs de Duns Scot. 
Baieras lui attribue un traité ayant pour titre : 
De Victoria Christi contra Antichristum, qui, 
selon Fabricius, a été imprimé en 1471 , sans 
nom de lieu. Un exemplaire manuscrit de cet ou- 
vrage se trouve dans le numéro 1715 de l'ancien 
fonds delà Sorbonne, à la Bibliothèque impériale. 
Pits mentionne parmi les œuvres inédites du 

15 



461 



HUGUES 



4*3 



môme auteur on TrecMus de Finale Jud&o 
et un Commentaire sur le» Sentences de Pierre 
le Lombard. Ce Commentaire aur les Sentence* 
nous est offert par les .numéros 684, odô de la 
Sorbonne. Mais ai PHs ni Bakeus n'ont connu 
l'immense traité du même auteur intitulé s De 
Laudibus B. Maria, dont le fonds de la Sor- 
bonne nous présente trois copies» tons les numé- 
ros 1697, 1698, 1704. Cet ouvrage, qui fournirait 
à l'impression plusieurs volumes, doit être sans 
doute un exposé complet de toute la matière. Il 
se compose de douze livres, et le premier de ces 
douze livres, qui est une simple paraphrase 
de la Salutation évaogélique , ne contient pas 
moins de huit chapitres. Le troisième livre traits 
des prérogatives charnelles de Marie; le qua- 
trième, de ses vertus; le sixième, de tous ses 
noms; le septième et le huitième, des objets 
célestes ou terrestres auxquels elle est ordi- 
nairement comparée, etc. L'imagination des 
franciscains s'est toujours complu dans ces 
étranges fantaisies. Ce sont des mystiques té- 
méraires. B. H. 

Luc Wadding, Annal, Min* t. III. - Fabrlcius, «t- 
bliotheca mediœ et injlmae Latinit, 

bugues, religieux minime, né à Prato, dans 
PÉtat de Florence, mort, dit-on, en Tartane, 
après Tannée 1312. Reçu docteur en théologie, 
il quitta le siècle pour se faire admettre dans la 
congrégation des Minimes'; puis, par humilité, 
H adopta l'habit des frères lais ou convers. 
C'était un homme d'une austérité remarquable, 
et qui s'imposait les plus dures mortifications. 
Ainsi , au témoignage de Luc Wadding, il porta 
pendant quarante ans sur sa peau nue une de 
ces cuirasses de fer on cottes de inaille que les 
Italiens appellent panziera. Aussi l'a- t-on souvent 
nommé Hugues de Panziera ; voilà l'origine de 
ce surnom. Luc Wadding compte parmi ses oeu- 
vres une Lettre aux religieux Minimes de Prato, 
ses anciens confrères, un traité De Vita Cm» 
templativa, et un autre traité De Perfection» 
Statuum. Ces ouvrages sont restés manus- 
crits. B. H. 

L. Wadding, BibHotà. Minor. -Fabriclus. Biblio- 
theca Mediœ vEtat. 

hvgues de maçon , Bugo de Matlscone, 
inscrit par Baie, Pits et Fabriclus au nombre des 
écrivains anglais, n'a pas vécu, comme ils l'ont 
supposé vers l'année 1490 : il était certainement 
mort longtemps auparavant, et il parait fort 
douteux que l'Angleterre ait été aa patrie. On 
a de lui un poème en neuf livscs , intitulé : De 
militum Gestis mirabilibus. Ce poème est 
inédit; ii se trouve, avec un commentaire de 
G. de Grana, dans la bibliothèque de Troyes, 
où il porte le numéro 906. B. H. 

Hist. LUtér. de ta Froment. XII, p. 4ti. - Gâtai, de» 
Man. des Bibiioth, des départ^ t II. 

hitgues ( Guillaume d' ), prélat français, 
né à Pujols, en Languedoc, mort a Embrun, le 
27 octobre 1648. Il fut d'abord religieux corde- 
lier, et se distingua dans son ordre au point 



qu'il en fui. éhi supérieur général, Henri IV , 
ayant eu connaissance dssoa mérite, lui confia 
diverses ambassades an Italie , an Allemagne, en 
Angleterre, et Marie de Médtais, régente pendant 
la minoritédeLoais KIU, te nomma Archevêque 
d'Embrun en ltlt* Elisabeth de France, femme 
de Pfafltppe IV, an rendant an Espagne auprès 
de son mari, Gaulât*» d'Hugues (ht «barge de 
raccompagner dans ne natage. CTetf encore lui 
qui Ait envoyé an Angleterre pour négocier te 
mariage d'HenriettttMarle, «sur d'Étisabdh, 
avec te prince an GaUas. Durant nette ambas- 
sade, il obtint ém ni Jacques la permission de 
conférer palniqnemant te sacrement 4e la cou* 
firmatiott à près de dix mille catholiques, b 
iuïï il reçut à Grenoble te eenmenf dnbj**a- 
tioa de François, dneda Lesdéguières. En 1*58, 
le 22 juin, il sacra, dans la maison des chartreux 
à Paris, Alphonse-Louis do Plesste de Richelieu, 
archevêque d'Atx. La ville d'Embrun lui doit les 
principales décorations de sa cathédrale et de 
son palais archiépiscopal. B. H, 

GeMie Cmrist., t. Ut toi. iOfg. 

II. Hugues princes ou laïcs. 

hugues le Blanc ou la Grande comte de 
Paris et duc de France, fils du roi Robert qui 
disputa la couronne à Charles le Simple (I), né 
vers la fin du neuvième siècle, mort le 16 juin 955. 
Son père fut tué à la bataille de Soissons, livrée 
contre Charles te Simple le 15 juin 923. Hugues, 
accourant avec Héribert de Vermandoœ, renou- 
vela le combat, et força Charles à la fuite. U ne 
chercha pas à prendre pour lui le titre de rot, 
que son père avait porte, et le laissa à son nennv 
frère Raoul, duc de Bourgogne. Il tourna tous 
ses soins vers l'agrandissement de ses domai- 
nes, et ne permit pas que la royauté qu'il avait 
dédaignée devint trop puissante. U entra, en 927, 
dans une ligue formée par Héribert contre Raoul 
et en faveur de Charles le Simple, puis U jugeai 
prudent de s'en détacher, et devint le médiateur 
entre le roi de France et le comte de Verman- 
dois. U ne tarda pas à*e brouiller avec oe dernier, 
et aida Raoul à le dépouiller de ses États* Héni- 
bert s'accommoda avec Raoul eu 93 ï, et le roi de 
France mourut l'année suivante. La couronne 



(I) tans ne célèbre passage de fci ÙMM Comédie 
( Pur§., c xx h Daaft» met ci ecès* Augee* Capet , aum 

le premier roi de la troisième race, nftis se* père , 
Hugues le Blanc, surnommé aussi Capet; H lui fait. dire : 
« Je fus la racine de cette plante coupable qui par son 
ombre funeste tnatt à toute terre chrétienne...... On 

n'appela Hugues Capel... Je lus fils "d'un boucher de 
Paris (flçliuol fui d'un beccato di Parigi}. » Ou a pr*~ 
posé diverses explications âe ces derniers mots, qui pris 
à la lettre «ont une erreur Miarre. Solvant Graogier oa 
aurait'donné répUhète de iàucfier au père de Rognes à 
cause* de sa séYérité envers les criminels. M. Artaud de 
Mentor pense que cette éplthète a pu être donnée a 
Robert, père de Hugues, parée que Citait un riche pos» 
sesseur de bestiaux. On raconte que François !•*, enten- 
dant lire le passage de Dante, s'écria : « -Le Toscan en 
a menti par la gorge.'» i foy. la trad. de Dante par Ar- 
taud de Moctor. ) 



453 



HUGUES 



454 



fut encore nne Ibis vacante. « Hngue* te Blanc, 
dit M. Henri Martin, n'avait qu'à étendre le bras 
pour la saisir; mais il préférait de plus solides 
avantages ; pour la seconde fois, il aima mieux 
faire nn roi qiie de l'être lui-même, et Tendre la 
couronne que de l'acheter. Ce froid et prudent 
calculateur passa sa vie à agrandir, a fortifier, à 
enraciner sa maison dans le sol, et Téserva à ses 
enfants l'occupation définitive de la royauté, 
comme s'il eut été sot qu'elle ne pouvait leur 
échapper. » D'accord avec le duc de Normandie, 
le comte de Vermandois et les principaux pré- 
lats, il rappela d'Angleterre le fils de Charles te 
Simple, Louis, alors âgé de trehus ans, et le con- 
duisit à Laon, où 11 fut sacré par l'archevêque de 
Reims. 11 se fit investir par le Jeune roi du du* 
ché de Bourgogne. Mais Louis d'Outre*mer, 
quoique enfant, n'était pas disposé à se laisser 
conduire. Il refusa de vivre à Paris comme le 
voulait Hugues, et alla s'établir à Laon, qui de- 
vint la capitale des derniers Carlovingfens. Le 
comte de Paris se fortifia par une grande alliance 
contre une ambition qu'il n'avait pas prévue, 
et épousa Hedwige, sœur d'Othon le Grand, roi 
de Germanie. Les hostilités éclatèrent en 936 
entre le roi et ses gtonds vassau*. Hugues et Hé* 
ribert renoncèrent à la suzeraineté de Louis , se 
déclarèrent vassaux d'Othon, et avec les secours 
du roi de Germanie forcèrent Louis à s'enfoir 
an delà de la Loire. Le jeune roi se releva par 
son courage et la sympathie qu'inspiraient sa 
jeunesse et son malheur. Une paix générale con* 
clue en 9*2 lui laissa la ville de Laon et replace 
sous sa suzeraineté les comtes* de. Paris et de 
Vermandois. La mort de Héribert le délivra peu 
après du plus redoutable de ses feudataires; 
il voulut en profiter pour étendre ses domaines 
aux dépens du Vermandois, mais là encore il 
rencontra l'opposition de Hugues. Le comte de 
Paris s'allia au jeune Richard de Normandie, que 
Louis voulait aussi priver de son duché. Le roi 
se hâta d'offrir à Hugues le partage de la Nor- 
mandie. Hugues accepta san6 aucun souci de sa 
récente alliance, et envahit avec le roi le duché 
de Richard. Louis ne se réservait que Rouen, le 
pays deCaux et le Vexin Normand ; tout le reste 
devait appartenir à Hugues. Les deux complices 
ne furent pas longtemps d'accord, et avant la fin 
de 944 Hugues avait déjà pris les armes contre 
le roi. Apprenant que ce prince était tombé entre 
les mains des Normands, Il eut l'air d'intervenir 
en sa*fôveur, se le fit livrer, et le retint prisonnier 
jusqu'à ce que Louis lui eût livré la ville de Laon. 
Le roi n'observa pas une convention aussi oné- 
reuse, appela à son secours .Othon de Germanie et 
Conrad d'Arles, et inonda l'ïle^de-France et la 
Normandie de soldats germains. Enfin la lassi- 
tude décida les deux parties à traiter en 950. 
Hugues se reconnut vassal de Louis, et lui rendit 
la tour de Laon. Le roi mourut quatre ans 
après, laissant deux enfants , dont le plus âgé 
atait treize ans. Pour la troisième fois, Hugues 



pouvait être roi, mais il savait qu'il aurait plus 
de profit à disposer de la couronne qu'à se l'ap- 
proprier. H fit couronner Lothaire, fils de Louis, 
et obtint de lui l'investiture du duché d'Aquitaine. 
Il essaya en 965 de s'emparer de Poitiers, ne 
réussit pas, et aurait sans doute renouvelé ses ten- 
tatives si la mortnel'ent enlevé l'année suivante. 
Les contemporains de Hugues l'appelèrent Grand 
à cause de l'étendue de ses domaines plutôt que 
pour ses actions. Sa vie rot, comme celle des 
autres seigneurs de son temps, une longue suite 
de guerres, d'intrigues et de trahisons. « Le 
dixième siècle, dit M. Henri Martin, peut pas- 
ser pour l'ère de la fraude et du mensonge; ja- 
mais, à aucune autre époque de notre histoire, 
le sens moral n'a paru si complètement effacé de 
l'âme humaine que dans cette première période 
de la féodalité. » Z. 

Adhétnar de Cfaabannals* Chroii. — Prodoaré , Chrdn. 
*» Guillaume de Gensbloui, CAf\ - Ordérte Vital, Hirt. 
-. Henri Martin, HiU. 0* France, 1 11, 1. XVI. 

Hueovfi capet (l) 9 roi de France et chef 
de là dynastie des Capétiens , second fils du 
comte Hugues le Grand et de Hedwige, sœur du 
rei Othon, né vers 946, mort le 24 octobre 996. 
U Avait environ dix ans à la mort de son père» 
le iô juin 956. tl eut pour héritage le duché de 
France et le comté de Paris, tandis que son frère 
Othon avait le duché de Bourgogie, et que son 
troisième frère, Eudes ou Henri, était engagé dans 
la filerfeature. JUm de France Lothaire n'était 
guère plus Agé que le nouveau comte de Paris. 
La jeunes** des deux princes fit cesser un mo- 
ment la lutte qui avait divisé leurs pères. Un 
commencement de querelle qui s'éleva entre eux 
fut apaisé par leur onele maternel Bruno, arcbevé* 
que de Cologne, etliothaire confirma Hugues dans 
l'héritage paternel, y compris de prétendus droit» 
sur l'Aquitaine. Le comte de Paris n'étant pas 
assez puissant pour faire valoir ses prétentions 
y renonça, et épousa* en 970, Adélaïde, soairii» 
Guillaume Fier-à-Bras, duc d'Aquitaine, La mort 
de Bruno en 965» celle d'Othon le Grand en 973 
préparèrent de grands changements dens la si- 
tuation de la France «n privant Lothaire de ses 
meilleurs appuhc Le reidn. France fut conduit, 
peut-être par l'influence de Hugues, à rompre 
avee te roi de Germante Othon H, qui venait de 
placer sur te trône de Lorraine, Chartes, second 
jfils de Louis d Ontre<mer. Othon, qui setnhlsM 

(1) U surnom de Capet, que te chef de la troisième dy- 
nastie légua a toute sa race, vient, suivant bu Cange 
( GlosS., au mot Capetus ), tle ce que Hugues se couvrait 
ordinairement II tête d'«* capuce, on de ce que, étant 
eulaat, il avait «outiiine, « par maniera de Jeu », de ra- 
battre les capuces des gens qu'il rencontrait. « Voilà, dit 
M. Henri Martin, une bien frivole origine pour un nom 
ti fameax. 11 se revêtait d'âne ohape, a-t-on dit encore, 
comme abbé laïque de plusieurs monastères ; et c'est 
pour cela qu'on l'appelait Capet ou Chapet. Tous les 
autres grands laïques avalent aussi des abbayes; ce n'é- 
tait là rien de parttentier. Ce surnom ne se rapportait -H 
pas plutôt an caractère de Uugues et ne désignait-il pas 
son naturel opiniâtre et persévérant? Hugues l entêté, 
de caput, tête. » 



455 



HUGUES 



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regarder Hugues comme son principal adversaire, 
raarclia contre Paris au mois d'octobre 978, et 
campa sor les hauteurs de Montmartre. On 
raconte qu'il s'avança au galop jusqu'aux fossés 
de Paris, darda sa lance contre une porte de la 
viHe, et, content de cette bravade, commanda la 
retraite. Les hostilités poussées avec si peu de 
vigueur aboutirent à un accommodement en 980. 
Au printemps suivant Hugues alla passer les 
fêtes de Pâques à Rome avec l'empereur Othon 
et le roi Conrad d'Arles. Lothaire engagea , 
dit-on , Conrad a faire périr Hugues ; mais ce- 
lui-ci avait su se ménager l'amitié de l'impéra- 
trice Théopbanie, qui le fit avertir, et il s'enfuit 
déguise en palefrenier. Cette histoire est peut- 
être une invention des chroniqueurs pour justi- 
fier l'usurpation de Hugues et pour jeter quel- 
que intérêt sur les années qui précédèrent son 
avènement. Rien, en effet, n'est plus insignifiant 
que sa vie à cette époque, « La seule chose, dit 
Sismondi, qu'on nous ait apprise sur le gouver- 
nement de ce duc de France, alors dans toute la 
force de l'âge, c'est qu'il eut, en 981, une vision 
de saint Valéry et de saint Riquier, qui l'engagè- 
rent à se faire rendre- leurs reliques par Arnol- 
phe, comte de Flandre, et à s'emparer de Mon- 
freuil-sur-Mer. Le reste des Gaules ne présente 
pas* plus de. souvenirs, si l'on en excepte celui 
d'un combat livré la même année à Conqueu- 
reue, entre le comte de Rennes et le comte de 
Nantes. C'était le vrai siècle des rois fainéants; 
tous les seigneurs de France, de Bourgogne et 
d'Aquitaine semblèrent s'abandonner à une même 
mollesse. » Au milieu de ce silence de l'histoire, 
on s'aperçoit à peine de l'affaissement graduel 
de la dynastie carlovingienne. « Lothaire, écri- 
vait Gerbert à des amis de Germanie, est roi 
de nom, Hugues l'est de fait; si vous vous fus- 
siez assurés de son amitié, vous n'eussiez plus, 
depuis longtemps, rien à craindre des rois des 
Français. » Lothaire mourut en 986, laissant le 
trône à son fils Louis. Celui-ci ne survécut que 
d'un an à son père, et expira le 21 mai 987. Un 
choniqueur, découvert récemment, Richer, donne 
des détails fort intéressants sur le grand événe- 
ment qui substitua une nouvelle dynastie à la 
dynastie usée des Carlovingiens. « Au moment où 
mourut le jeune roi, un certain nombre[degrand8 
se trouvaient réunis auprès de lui à Senlis pour 
juger l'archevêque de Reims, Adalbéron, accusé^ 
de trahison. Après avoir enseveli Louis à Com- 
piègne, ils conférèrent ensemble touchant le bien 
du royaume. Personne ne soutenant l'accusa- 
tion contre Adalbéron, Hugues, au nom de tous, 
le déclara justifié, et lui donna la préséance dans 
l'assemblée; Adalbéron parla le premier sur la 
question de chercher nn roi. Tous les grands 
n'étant pas présents, il proposa qu'on ajournât 
la décision, que chacun des assistants prêtât ser- 
ment entre les mains du grand-duc ( Hugues ) de 
ne rien chercher ni machiner en particulier sur 
ce sujet jusqu'à la prochaine assemblée. » Tous 



acquiescèrent et retournèrent chez eux. Dans 
l'intervalle, le duc Charles ( frère de Lothaire et 
duc de Lorraine) vint trouver Adalbéron, et le 
pria de l'aider à faire valoir son droit hérédi- 
taire. Adalbéron lui reprocha de n'être entouré 
que de parjures, de sacrilèges, et le renvoya aux 
grands du royaume, sans l'aveu desquels lui 
ne pouvait rien (aire. Charles repartit pour 
Cambrai , d'où il envoya aux seigneurs fran- 
çais des messages que la plupart accueillirent 
sans doute fort mal ; car ce prétendant n'osa se 
rendre à l'assemblée des grands qui se réunit à 
Senlis.. D'après le témoignage de Richer, cette 
assemblée fut nombreuse et imposante : on y 
vit figurer les Français, les Bretons, les Nor- 
mands, les Aquitains, les Goths (de laSeptima- 
nie), les Espagnols ( de la Marche d'Espagne ), 
les Gascons. Les provinces les plus lointaines du 
royaume furent représentées à Senlis, au moins 
par quelques-tins de leurs barons. Richer ne 
dit pas quels furent les absents ; mais on est as- 
suré que Séguin, archevêque de Sens, ne vint 
pas, ni les comtes Arnoul de Flandre, Albert 
de Vermandois, Héribert de Troyes ; peut-être 
Guillaume, comte de Poitiers et duc d'Aqui- 
taine, et l'autre Guillaume, comte de Toulouse, 
ne parurent-ils pas non plus. Le parti de l'an- 
cienne dynastie protesta, par son absence, contre 
un résultat prévu. L'archevêque de Reims ou- 
vrit le débat par un très-remarquable discours : 
« Charles, dit-il, a ses fauteurs, qui le préten- 
dent digne du royaume par le droit que loi ont 
transmis ses parents ; mais le royaume ne s'ac- 
quiert point par droit héréditaire, et l'on ne 
doit élever à la royauté que celui qu'illustre non- 
seulement la noblesse matérielle, mais la sa- 
gesse de l'esprit, celui que soutiennent la foi et 
la grandeur d'âme; peut-on trouver ces qua- 
lités dans ce Charles, que la foi ne gouverne pas, 
qu'une honteuse torpeur énerve, qui a ravalé 
la dignité de sa personne au point de servir 
sans honte un' roi étranger et d'épouser une fem- 
me inférieure à lui, prise dans le rang des sim- 
ples guerriers? Comment le grand-duc souffri- 
rait-il qu'une femme prise parmi ses chevaliers 
devint reine et dominât sur lui?. Si vous voulez 
le malheur de l'État, choisissez donc Charles ! 
Si vous voulez son bien, couronnez l'excellent duc 
Hugues ! Choisissez le duc, illustre par ses ac- 
tions, par sa puissance, et vous trouverez en lui 
un protecteur non-seulement de la chose publi- 
que, mais delà chose de chacun..» Tous applau- 
dirent, et, du consentement de tous, le duc fut 
élevé à la royauté; puis on se transporta de 
Senlis à Noyon, et là, le métropolitain et les 
autres évêques sanctionnèrent par l'onction du 
sacre le choix de l'assemblée nationale et l'irré- 
vocable déchéance de la race carlovingienne. 
Le 1 er juillet 987 , l'archevêque de Reims posa 
sur le front de Hugues Capet, dans la cafiiédrale 
de Noyon, cette couronne de France que deux 
des devanciers de Hugues avaient déjà, portée 



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HUGUES 



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et que ses descendants devaient se transmettre 
durant tant de siècles. » (1) 

Le titre royal conféré à Hugues-Capet n'ajou- 
tait rien à sa puissance et l'obligeait à défendre 
sa nouvelle couronne contre le duc de Lorraine. 
Les grands vassaux se partagèrent presque éga- 
lement entre les deux prétendants. Le duc de 
Normandie, qui avait épousé une sœur de Hugues, 
le comte de Vexin , l'archevêque de Reims , le 
comte et l'évêque de Soissons', et deux grands 
feudataires du duché de France, les comtes de 
Chartres et d'Anjou, soutinrent Hugues Capet, 
tandis que le comte de Flandre, l'archevêque de 
Sens, les comtes de Vermandois, de Troyes et 
le duc d'Aquitaine se déclarèrent pour Charles. 
Hugues traita avec quelques membres de cette 
redoutable ligue, fit couronner son fils Robert le 
jour de Noël 987, et marcha contre le duc d'A- 
quitaine, qu'il battit II revint ensuite défendre 
le duché de France contre Charles, qui s'était em- 
paré de Laon en mai 988. La guerre, assez lan- 
guissante d'abord, devint plus vive au printemps 
de 989. Le nouveau roi de France vaincu leva 
le siège de Laon. Cet échec eut de graves 
conséquences. « Hugues , dit un chroniqueur, 
vit son autorité méconnue par ceux même qui 
lui étaient soumis auparavant dans toute la 
France; mais, grâce à la vivacité de son corps 
non moins qu'à son habileté, il finit par étouffer 
toutes les révoltes. » Adalbéron, archevêque de 
Reims et l'un des plus zélés soutiens de Hugues, 
était mort en 988. Le roi, dans l'espoir de gagner 
quelques partisans de l'ancienne dynastie, donna 
le premier archevêché des Gaules à Arnolphe, fils 
naturel dé Lothaire. Arnolphe, malgré de grandes 
promesses de fidélité, ne tarda pas à livrer Reims 
à Charles, qui se vit maître des diocèses de 
Laert, de Reims et de Soissons. Ce fut le terme 
de ses succès. Hugues gagna Ascelin ou Adal- 
béron', évêque de Laon. Pendant la nuit du jeudi 
saint (2 avril 991 ), Adalbéron s'introduisit dans 
le logis de Charles, endormi, s'empara de lui, de 
sa femme et de son neveu, et le livra à Hugues. 
Charles, envoyé à Orléans, y mourut peu après, 
et son obscure postérité, qui s'éteignit en Alle- 
magne vers le milieu du treizième siècle, n'essaya 
même pas de troubler les Capétiens dans la pos- 
session de la couronne de France. Cette dynastie 
fut généralement reconnue au nord de la Loire, 
mais les pays situés au sud de ce fleuve conti- 
nuèrent à se maintenir indépendants. Le roi 
Hugues était trop occupé dans le voisinage du 
duché de France pour s'engager dans une lutte 
contre l'Aqpitaine. II fit déposer canoniquement 
Arnolphe, archevêque de Reims, et lui substitua 
tGerbert. Le pape Jean XY déclara illicite la dé- 
position d'Arnolphe, et mit en interdit le diocèse 
de Reims. Cette difficile affaire n'était pas encore 
réglée lorsque Hugues mourut, et les dernières 



41) Henri Martin, d'après la Chronique de nicher, dans 
son Histoire de France. 



paroles qu'il adressa à son fils semblent se res- 
sentir d'une certaine terreur religieuse. « O mon 
cher fils ! dit-il à Robert, je te conjure, au nom 
de la sainte et indivisible Trinité, de ne jamais 
abandonner ton esprit aux conseils des flatteurs 
qui chercheront à te séduire par des présents 
empoisonnés , pour que tu disposes, selon leur 
volonté , de ces abbayes que je laisse après Dieu 
sous ton gouvernement. Qu'aucune légèreté 
d'amené t'engage à piller leurs trésors, à les dis- 
traire ou à les dissiper. Je te recommande en- 
core, et cela par-dessus toute chose, de ne ja- 
mais permettre qu'on t'arrache à la dévotion du 
chef de notre religion, savoir, de notre père 
saint Benoit; c'est lui qui, après la mort de ce 
qui n'est que chair, te procurera, auprès de notre 
commun juge, l'entrée du salut , seul port tran- 
quille et seul asile assuré. » Dans la pénurie de 
documents relatifs à Hugues-Capet, il est diffi- 
cile de décider si le fondateur de la troisième 
dynastie fut un prince éminent ou un homme 
médiocre porté au trône par la force des choses. 
Il ne manqua pas d'habileté, mais, les nécessités 
de sa position l'obligèrent à prodiguer les do- 
maines aux seigneurs et aux évêques. Parmi 
les événements notables de son règne on cite la 
fondation de la ville d'Abbeville et l'emploi de 
la langue vulgaire ou romane dans un concile 
tenu à Maison en 995. Z. 

Guillaume de Jamiéges, Hist., liv. IV. — Frodoard; 
Chron. — Glaber, Chron. — Richer, Chron. ; dans les 
Monumenta Germante Hist. de Perlz.— Gerbert , Epist. 
— Slgebert de Gembloux, Epist. — Helgand, Fita Ro- 
berti régis. — Capefigue, Hugues-Capet et la troisième 
race. — Et. Gallois, La Champagne et Us derniers Car- 
lovinçiens; Paris, 1868, in-8®. —La Ferrlère, Histoire 
du Droit français» t. IV. — Slsraondi, Histoire des 
Français, t, III et IV. — Henri Martin, Histoire de 
France, t. II, 1. XVI ; L III, 1. XVII. 

HUGUES, roi d'Italie, né vers la fin du neu- 
vième siècle, mort le 14 avril 947. Il était fils de 
Thibault, comte d'Arles, et de Bertha, fille, selon 
les uns du roi Lothaire n, selon d'autres de 
Louis, roi d'Italie. Après la mort de Thibault, 
Bertha avait épousé Adelbert de Toscane ; de 
ce mariage était née Hermengarde , qui, devenue 
la femme du marquis d'Ivrée , songea à mettre, 
dans ces temps de bouleversement général , son 
frère utérin Hugues sur le trône d'Italie. Toute- 
puissante par ses charmes sur les grands de ce 
pays , elle les décida à se liguer contre Rodolfe II, 
roi de Bourgogne, qui avait succédé à Bérenger 
en Italie. En 926 Rodolfe fut entièrement battu 
à Novare, et se sauva en Bourgogne* Hugues 
quitta alors la Provence, et se rendît à Pavie, 
où il fut reconnu roi dans une assemblée géné- 
rale de barons. Afin de faire régner un peu de 
tranquillité dans son royaume , il usa d'un mé- 
lange de ruse et de cruauté pour empêcher les 
violences incessantes de ses turbulents feuda- 
taires , et il y réussit pendant quelque temps. Il 
prit aussi à tâche de contracter des alliances avec 
les principaux souverains de l'Europe. En 931 
il épousa la fameuse Maroria, courtisane- éhon- 



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HUGUES 



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tée, qui gouvernail la ville de Rome. Mais peu 
de temps après, Albéric, fila de Maroïia, ayant 
été maltraité paf Hugues , ameuta contre celui-ci 
les Romains , qui enfermèrent Hugues an château 
Saint-Ange, d'où il se sauta la nuit, en descen- 
dant an moyen d'une corde. Hngoes, resté maître 
du nord de FItaHe , soupçonna Lambert , mar- 
quis de Toscane, son frère utérin, de vouloir 
s'emparer de la couronne, et lui fit arracher les 
yeux. Les Italiens, entrés de sa tyrannie crois- 
sante, offrirent la couronne à Rodolfe de Bour- 
gogne ; mais celui-ci n'accepta pas , Hugues lni 
ayant abandonné la Bourgogne Cis-Jurane. En 
934 Arnolt, duo de Bavière, tint en Italie pour 
soutenir les ennemis de Hugues; mais il tut battu, 
et dut bientôt se retirer. Hugues, ayant deux 
ans auparavant associé au gouvernement son 
fils Lothaire , rassembla alors une année consi- 
dérable et marcha snr Rome pour en chasser 
Albéric, qui y régnait en despote. Ne pouvant 
s'emparer de la ville, il traita avec Albéric, et lni 
donna sa fille en mariage. Mais bientôt ils se 
brouillèrent de nouveau , et les hostilités recom- 
mencèrent entre eux. Hugues se mita distribuer 
les dignités ecclésiastiques et les grands nefs à 
ses parents; plusieurs de ceux-ci, non encore 
satisfaits, et bien loin de lui garder quelque recon- 
naissance, complotèrent contre lni. Pendant 
quelques années il sut déjouer leurs menées; 
l'un d'eux, Bérenger, marquis d'Ivrée, allait être 
lait prisonnier, pour être ensuite aveuglé , lors- 
que Lothaire, fils de Hugues, lui fit savoir ce 
qui se tramait contre lui. Bérenger se sauva au- 
près du duc de Souabe. Un an après, en 041 , 
Hugues donna 1 Eudoxie, une de se* filles natu- 
relles « en mariage au nevea de Romanus, empe- 
reur de Constantmople; ce dernier envoya Tan- 
née suivante une flotte pour soutenir l'entreprise 
( que Hugues méditait contre les Sarrasins, qui 
' s'étaient établis dans les Alpes Contiennes. Les 
Sarrasins furent entièrement battus; Hugues 
aurait pu les anéantir, mais il préféra traiter avec 
eux , en leur imposant pour condition qu'ils em- 
pêcheraient Bérenger de passer les Alpes. Les 
Hongrois ayant fait invasion en Italie, il tes dé- 
cida à se retirer après lenr avoir fait remettre 
une somme considérable. Bérenger, qui n'avait 
pas pu obtenir de secours de l'empereur Othoo, 
gagné par les présents de Hugues, envoya en 
944 Amédée, un de ses fidèles, en Italie, pour 
y étudier les dispositions des habitants à l'égard 
de Hugues. Amédée , se cachant sous les dégui- 
sements les plus divers, noua des relations 
avec beaucoup d'Italiens , lassés de voir tons 
les emplois publics et toutes les dignités ecclé- 
siastiques distribués aux Provençaux et aux in- 
nombrables enfants naturels de leur roi. En 045 
Bérenger parvint à entrer en Italie avec quelques 
compagnons , et il fnt reçu à bras ouverts par 
Manassès, évêque de Vérone, neveu de Hugues, 
que ce dernier avait comblé de bienfaits. Hugues, 
bientôt abandonné de presque tous «es anciens 



partisans, envoya son Éta Lothaire 'à Pavie, 
pour qu'il y fût reconnu roi à sa place. Quant à 
lui, il se proposait de se rendre en Provence 
avec tous ses trésors. Bérenger n'abusa pas de 
sa victoire, et laissa la couronne à Bogues et 
à Lothaire, se réservant Itaenice réel de l'au- 
torité. Hugues ne supporta pas longtemps cette 
humiliation. En 947 il quitta l'Italie, et arriva 
dans ses États héréditaires, où il mourut bientôt 
après. 

Hugues, courageux et actif,, aimait à protéger 
l'Église et les faibles contre les déprédations des 
barons ; il voulait soumettre ses sujets à no gou- 
vernement stable } mate 9 fut souvent peu scru- 
puleux dans le choix de ses moyens, sans pour 
cela mériter la quanficaubn de Ttftèr* eu petit 
pied que lui donne M uratorl. E, GiutaeiaB. 

Luitprand, Historia, Hb. IV, cap. 8 et 4; lib. v, cap. - 
l-§, et il l»; Hb. VI, eap. l. — Wollhart et Boe%*e, 
Hugo, «orné» JrelmtmOit Lt*itet M**. ~ «ras* et Gri- 
ser, Encwlojmdi*. 

Hueras le Grand, comte de Vermandois, 
troisième fils de Henri I 9 *, roi de France, nées 
1057, mort le 18 octobre 1102. Il épousa Alix, 
héritière des comtés de Vermandois et de Va- 
lois, et reçut le surnom de Grand, « surnom fré- 
quent dans la maison des Oapets* dit Stemondi, qui 
indiquait seulement la dignité du chef de leur fa- 
tnlHe , et qui faisait presque toujours un contraste 
étrange avec la nullité de celui qui le portait >. 
Hugues, un des premiers, prit hveraix à rassest- 
Mée de Clermont eh 1095. il se joignit à te se- 
conde armée des croisée, partie à là fin de sep- 
tembre 1090 de l'Ile-de-France et de la Nor- 
* niandie, et dont le principal chef était Robert 
Courte-Heuse. Cette armée traversa l'Italie dans 
toute sa longueur, et hiverna dans les possesloDs 
normandes de* la Pouille; mais Hugues de Ver- 
mandois ne voulut pas s'arrêter, passa la mer 
avec quelques chevaliers, et débarqua à Du- 
razzo, où un officier de l'empereur Alexis 06m- 
nène l'arrêta. H fat retenu prisonnier à Philippopo- 
lis jusque l'arrivée de Godofroy de Bouillon, qui le 
délivra. Pendant sa captivité il avait prêté ser- 
ment de fidélité à l'empereur Alexis, acte de 
faiblesse qui lui fat vivement reproché. 11 sui- 
vit en Asie la grande armée des croisés, et se 
distingua à la bataille de Dorylée, aux sièges de 
Nicée et d'Antioche. Député avec Etienne, comte 
de Chartres, auprès de l'empereur Alexis, il aban- 
donna ses compagnons d'armes et revint en 
France comme un fugitif, en 1099. De tontes 
parts on l'accusa de lâcheté, et, pour se dérober 
à l'animadversion publique, il dut retourner en 
Terre Sainte l'année suivante, avec de nouvelles 
bandes de croisés qui, encore, plus indisciplinées 
que les premières , furent successivement dé- 
truites par les Turcs dans l'Asie Mineure. Blessé 
dans une rencontre près de Nieée, il alla mourir 
à Tarse en Cilicie. Il laissa trois fils et trois lilles 
de son mariage avec Alix, et fut la tige de la se- 
conde maison de Vermandois. Z. 



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HUGUES 



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Ordérle Vital, Ckrtm~, U IX, X. - Guillaume de Tyr, 
Hist, 1. II, VI, X. — Mlctaaoé, Histoire des Croisades, 
1. 1. — SUraondl, Histoire de* français, U IV, p. «88. — 

Sainte-Marthe. Histoire généalogique de la Maison de 
France, t. II, y. 66'. 

HUGUES I er , duc de Bourgogne, né vers 
1040, mort en 1093. Son père Hugues ayant été 
tué en 1057, Robert I er , duc de Bourgogne, père 
de celui-ci , fit reconnaître comme ses héritiers 
présomptifs ses deux autres fils, an préjudice 
du jeune Hugues. Mais en 1075, lors de la mort 
de Robert, Hugues, aidé par son beau-père Guil- 
laume, comte de Nevers, s'empara en un mois de 
toutes les places fortes de la Bourgogne, et força 
ses deux oncles à quitter le pays. 11 gouverna 
avec sagesse et protégea avec efficacité les églises 
et les faibles contre tonte déprédation. Ayant 
perdu en 1078 sa femme Sibylle, dont il n'avait 
pas eu d'enfants, il se retira à Cluny , où il em- 
brassa la vie monastique , malgré les représen- 
tations du pape Grégoire VTL , qui voyait à re- 
gret un prince aussi télé pour la justice quitter 
le théâtre du monde. E. G. 

Ordérle VK»I, Historia BceksiasMca. - Andr. Du- 
thème, HUtoére é$s Bois, duos et comte» do Bourgogne. 
— M. de torante» Hi$L 4u Orne* do Bourgogne 

hugu&s u, duc de Bourgogne» surnommé 
Borel et le Pacifique, né daos la seconde moitié 
du onzième siècle, mort ea 1 142. Son père Eudes 
étant parti en 1097 pour la croisade , Hugues fat 
chargé de l'administration du duché de Bour- 
gogne, dont il prit possession définitive en M 03, 
Tannée do la mort d'Eudes. Trois ans après, les 
églises de la Bourgogne vinrent se plaindre au 
pape Pascal H, qui se trouvait alors à Dijon, 
des exactions commises sur elles par Hugues; 
celui-ci déclara alors qu'il s'en tiendrait doréna- 
vant aux coutumes établies sous Hugues I er , son 
oncle. En 1 109 Hugues accompagna le roi Louis 
le Gros dans l'expédition contre les Normands; 
en 1124 il vint au secours de ce même roi pour 
repousser les Allemands, qui avaient pénétré en 
Champagne. Après avoir fait en 1140 un pèle- 
rinage à Saint-Jean de Compostelle, il mourut 
deux ans après , ayant su garantir pendant qua- 
rante ans son pays des malheurs de la guerre, 
ce qui lut fit donner le surnom de Pacifique, 

E. G. 

Andr. Doefcesne, Histoire dos Rots, Ducs et Comtes de 
Bourgogne. — Art de vérifier tes dates. 

hugoks m, duc de Bourgogne, né vert 
1150, mort au commencement de 1193. En 1102 
il succéda a Eudes II, mu père, tous la tutelle de 
sa mère Marie, nue de Thibaut le Grand, comte 
de Champagne. Quatre ans après il prit part à 
la guerre entreprise par le roi Louis le Jeune 
contre le comte de Chatons. S'étant rendu en 
1171 en Palestine» il rot surpris par une tempête, 
et fit alors le vomi de bâtir une église à l'honneur 
de la Vierge s'il échappait au danger. De retour 
en 1172, il construisit, pour remplir son vœu, la 
SainterChapelle de Dijon. U eut des démêlés avec 
plusieurs de ses vassaux, tels que le comte de Ne- 
vers et le sire de Vergy. Ce dernier, assiégé dans 



son château, en 1185 parles armées du duc, 
implora le secours de Philippe-Auguste, qui 
força d'abord Hugues à lever le siège, et revint 
l'année suivante, sur tes plaintes portées par 
les ecclésiastiques contre les exactions du 
duc, porter le ravage dans la Bourgogne. En 
1187 Hugues accorda aux habitants de Dijon 
le droit de commune. Deux ans après il con- 
tribua avec le comte de Flandre et l'archevêque 
de Reims à amener un accord entre les rois de 
France et d'Angleterre. En i 190 il partit pour la 
croisade avec Philippe- Auguste, et se trouva 
l'année suivante à la prise d'Acre. Le roi étant 
alors retourné en France, remit à Hugues le 
commandement de l'armée française. A la ba- 
taille d'Ascalon le duc dirigea les opérations de 
l'aile gauche de l'armée chrétienne. Lorsque 
Richard Cœur de Lion voulut marcher sur Jé- 
rusalem , Hugues, jaloux des succès du roi , re- 
fusa de l'accompagner, et se rendit a Tyr, où il 
mourut peu de temps après. « Hugues fut moult 
bon chevalier de sa main et ehevaleureux , mais 
il ne rut oneques tenu à satge, ne à Dieu, ne au 
monde » , dit le sire de Joinville. E. G. 

Doehetoe, Histoire des Rois, Buts et Comtes de Bour- 
gogne. ~ M. 4e Bwnlft #t»f< des Ducs de Bourgogne* 

HUGUES iv, duc de Bourgogne , né le 9 mars 
1312 , mort vers, la fin de 1272, Ayant succédé 
eu 1218 à Eudes III, son père, il gouverna d'a- 
bord soos la tutelle d'Alix de Vergy, sa mère. En 
1237 il acquit, par échange de la seigneurie de 
Salins, les comtés de Chalong et d'Auxonne, Dix 
ans après il s'associa avec plusieurs grands feu- 
dataires pour s'opposer à l'extension des juri- 
dictions ecclésiastiques. En 1248 U se rendit 
avec saint Louis en Palestine , fut pris à la ba- 
taille de Maasoure , et se racheta en même temps 
que le roi; Après être retourné en France en 
1254, il y obtint en 1265 de Baudoin, empereur 
de Constantinople , alors à Paris, le royaume de 
Thessalonique. S'étant rendu en 1272 à Saint- 
Jacques de Compostelle , il mourut pendant le 
retour à Vilaines en Duesmois. U eut de ses 
deux femmes, Yolande de Dreux et Béatrice de 
Champagne, quatre fils et six filles, dont l'une, 
Elisabeth , épousa l'empereur Rodolfe I er . E. G. 

Duchesbe, Histoire des Rois* Ducs et Comtes de Bour- 
gogne. — M. de tarante, HisL des Ducs de Bourgogne. 
HUGUES v, duc de Bourgogne, né vers la 
fin du treizième siècle , mort en 1315. Tl succéda 
à Robert VI, son père, en 1305. On ne sait pres- 
que rien sur sa vie. Il fut créé chevalier en 1313, 
à Paris, par Philippe le Bel. E. G. 

Docbesne, Histoire des Rois % Ducs et Comtes do Bour- 
gogne. — Art de vérifier les dates, 

* bugues i* r , comte de Champagne , vivait 
au commencement du douzième siècle. Il accom- 
pagna, en 1102, l'empereur Henri IV dans son 
expédition en Flandre, et y rat grièvement blessé. 
Trois fois il fit le voyage de la Terre Sainte, en 
1113, 1121 et 1125. Là il se fit recevoir chevalier 
du Temple, et fut félicité par saint Bernard en ces 
termes : Foetus es ex comité mites, ex tUvite 



463 



HUGUES 



464 



pauper. Hugues avait acquis d'autres titres à l'es- 
time du saint par plusieurs pieuses fondations, 
entre autres les abbayes de Trois-Fontaines, de 
Sermaise et deCheminon , et surtout par la conces- 
sion du territoiredeClaûraux. Marié en premières 
noces à Constance, fille de Philippe I ,r , roi de 
France , dont il fut séparé en 11 04, pour cause de 
parenté, il épousa Elisabeth de Bourgogne, dont 
il eut un fils, nommé Eudes, qu'il ne voulut pas 
reconnaître. Il mourut en Palestine, après avoir 
institué son neveu Thibault héritier de ses com- 
tés. Suivant P. Pithou, il les lui aurait vendus 
vers Tan 1125. Etienne Gallois. 

E. Gallois, SUt. des Comtes de Champagne. 

hugues dbs payens (De Paganis) ou 
de Pains, chevalier français de la maison des 
comtes de Champagne, ainsi nommé de la terre 
de Pains, en Champagne, entre Méry sur-Seine 
et Troyes, né vers 1070, mort en 1136. « Se trou- 
vant en Palestine, il forma, dit Le Bas, avec huit 
antres gentilshommes, du nombre de ceux qui 
avaient suivi Godefroy de Bouillon, le dessein 
d'établir un nouvel ordre religieux et militaire, 
consacré àjla défense de la Terre Sainte. Aux 
trois vœux ordinaires de chasteté, d'obéissance 
et de pauvreté qu'ils prononcèrent, en présence 
de Gormond, patriarche de Jérusalem, ses com- 
pagnons et lui joignirent le vœu de porter les 
armes contre les infidèles, et spécialement celui 
de pourvoir à la sûreté des chemins et de mettre 
les pèlerins à l'abri des insultes des brigands. 
Comme ils n'avaient point d'habitation certaine, 
Baudouin H, roi de Jérusalem, intéressé à favo- 
riser leur association naissante, leur accorda 
pour un temps le quartier méridional de son 
palais, bâti dans le voisinage des ruines de l'an- 
cien temple de Salomon, d'où ils fuVent appelés 
Frères de la milice du Temple, chevaliers 
du Temple, Templiers. En 1127, Hugues passa 
en Occident pour obtenir du saint-siége la con- 
firmation de son institut, et fut renvoyé au con- 
cile de Troyes, qui s'ouvrit le 13 janvier de 
Tannée suivante. 11 se présenta à l'assemblée 
avec cinq de ses chevaliers et exposa ses vues. 
Le concile les approuva, ordonna que les mem- 
bres du nouvel ordre porteraient l'habit blanc 
avec la croix rouge, et chargea un nommé Jean 
de Saint-Michel, au refus de saint Bernard, de 
leur rédiger une règle par écrit. Hugues parcou- 
rut ensuite une partie de la France, et de là passa 
en Angleterre, en Espagne et en Italie. Outre les 
aumônes abondantes qu'il- y recueillit pour les 
besoins de la Terre Sainte, il y fit un grand 
nombre de prosélytes , qu'il emmena avec lui 
pour les enrôler dans sa nouvelle milice. » 

Hugues , de retour dans la Terre Sainte, orga- 
nisa son ordre. H le vit se répandre rapidement 
bien au delà de la Palestine. En 1129, le Temple 
avait déjà des établissements dans les Pays-Bas. 
En 1131, Alphonse, roi d'Aragon et de Navarre, 
l'institua, par un testament authentique, héritier 
de ses États. Le testament ne fut pas exécuté, 



mais il prouve quelle importance l'ordre du 
* Temple avait déjà acquise plusieurs années avant 
la mort de son fondateur et premier grand- 
mattre. N. 

Guillaume de Tyr, Histor. — Saint Bernard, Gpvs- 
cula, édit. de Mabttlon. — Le Bas, Diction. Encyclop. 
de la France, art. Templiers. — Fleury , Histoire ec- 
clêsiastique, 1. LXVII. 

hugues (Victor), administrateur français, 
né à Marseille, mort dans le département de la 
Gironde, en novembre 1826. Il appartenait à une 
famille de commerçants. La turbulence de sa 
jeunesse le fit envoyer de bonne heure à Saint- 
Domingue , près d'un oncle et d'un frère qui y 
étaient établis. Lorsque la révolution éclata dans 
cette lie, il se trouvait propriétaire de la bou- 
langerie qui fournissait le pain aux troupes. 
Forcé de revenir en France en 1793, après avoir 
vu périr son frère et son oncle, il eut occasion 
de manifester les opinions les plus démocratiques, 
et fut nommé accusateur public près les tribu- 
naux révolutionnaires de Rochefort et de Brest. 
Il exerçait ces fonctions lorsqu'au commence- 
ment de 1794 il fut nommé avec Le Bas com- 
missaire de la Convention aux lies du Vent. Peu 
de temps après leur départ de Rochefort avec 
huit cents hommes seulement, on apprit à Paris 
que les planteurs de La Martinique, de La Gua- 
deloupe et de Sainte-Lucie s'étaient livrés aux 
Anglais. Les commissaires ne connurent cette 
trahison qu'en arrivant à La Guadeloupe. Us ré- 
solurent aussitôt de combattre lea Anglais , et 
tirèrent au sort celui des deux qui débarquerait 
à la tête des troupes pendant que l'autre reste- 
rait à bord en cas d'événements. Victor Hugues 
fut désigné. H repoussa d'abord les Anglais, qui 
avaient tenté de s'opposer à la descente, et, pro- 
fitant de ce premier avantage, il prit d'assaut le 
fort de Fleur-d'Épée, qui domine la rade de La 
Basse-Terre. Après plusieurs affaires très- vives, 
il parvint à s'emparer de La Pointe-à-Pitre et à 
ehasser les Anglais et les planteurs qui combat- 
taient avec eux. Us tentèrent encore de résister, 
et réunirent de nouvelles forces ; mais, cernés 
enfin de toutes parts, ils furent obligés de capi- 
tuler ; le général Graham ainsi que son armée 
mirent bas les armes et furent faits prisonniers. 
Vietor Hugues, sans perdre de temps, attaqua 
le fort de La Basse-Terre, et força enfin, après un 
siège long et meurtrier, le général Prescott et les 
Anglais à l'évacuer. Le gouvernement français, 
informé de la reprise de La Guadeloupe, envoya 
une nouvelle escadre sous les ordres de Gogrand, 
qui fut adjoint à Victor Hugues. La conquête 
de La Désirade, des Saintes et de Marie-Galante 
suivit eeHe de La Guadeloupe. Sainte-Lucie re- 
tomba au pouvoir des Français, et les Anglais 
furent encore chassés de Saint-Martin et de 
Saint-Eustache; mais ils restèrent les maîtres 
de La Dominique et de La Martinique. En 1798, 
le général Pelardy, renvoyé de La Guadeloupe 
par les commissaires du Directoire pour cause 
d'insubordination et comme ayant cherché à y 



465 . HUGUES — HUGUETAN 

troubler la tranquillité, accusa Victor Hugues 
de vouloir se perpétuer dans son emploi , en 
cherchant à mettre les cultivateurs dans ses in- 
térêts et à jeter de la défaveur sur le général 
Desfourneaux et sur son expédition. En même 
temps Pelardy faisait un tableau déplorable de 
la situation de la colonie. Les ennemis de Victor 
Hugues blâmaient aussi un de ses arrêtés, du 
3 février 1797, qui autorisait les vaisseaux de 
la république et les corsaires français à s'em- 
parer de tout bâtiment neutre destiné aux îles 
du Vent ou sous le Vent livrées aux Anglais et 
occupées par les émigrés. On convenait que ces 
mesures, exécutées de bonne foi, auraient pu 
être avantageuses à la république, mais on sou- 
tenait que Victor Hugues, pouvant seul armer 
ces corsaires de matelots et de volontaires pris 
parmi les troupes, les avait fait servir à com- 
mettre des déprédations envers des tiers, et en 
avait profité pour grossir sa fortune personnelle. 
Victor Hugues nia avoir eu des corsaires à 
lui; il déclara s'être borné à user de l'ascen- 
dant que lui donnait sa place pour déterminer 
les commerçants des Antilles françaises à faire 
des armements en course dont ils ont retiré de 
grands avantages. Ces accusations firent peu 
d'impression sur le Directoire. Victor Hugues fut 
maintenu dans son emploi, ctjLeBas ayant renoncé 
à ses fonctions pour cause de santé, il fut déclaré 
que tous deux avaient bien mérité de la patrie. 
Victor Hugues revint bientôt après en France, 
sur un congé de faveur qui lui rat accordé. Le 
Directoire le nomma alors gouverneur de la 
Guyane. H n'était pas parti lors des événements 
du 18 brumaire, et Une se rendità sa destination 
qu'après avoir été confirmé dans ses fonctions 
par le gouvernement consulaire. Il les remplis- 
sait encore en 1808, lorsque les Anglais et les 
Portugais vinrent attaquer Cayenne. Il capitula 
et revint en France. On l'accusa de n'avoir rien 
préparé pour résistemux ennemis, de ne s'être 
pas défendu avec assez de fermeté , d'avoir livré 
la colonie sans avoir convoqué de conseil de 
guerre ni consulté les autorités civiles et mili- 
taires, enfin d'avoir sacrifié le pays qu'il était 
chargé de gouverner au désir de sauver ses ri- 
chesses personnelles. Traduit devant le conseil 
de guerre de la première division miUtaire en 
1809, il rat acquitté à l'unanimité, et ce juge- 
ment, dont le commissaire impérial avait appelé, 
fut confirmé par le conseil de révision. Quelque 
temps après Victor Hugues retourna à Cayenne 
pour réclamer la levée du séquestre que les 
Portugais avaient mis sur son habitation. Il l'ob- 
tint, et continua de vivre comme simple planteur 
dans cette colonie ; frappé d'une cécité complète 
en 1822, Victor Hugues revint dans sa patrie et 
s'établit dans une grande propriété du départe- 
ment de la Gironde, où il mourut. J. V. 

Brian Edwards, Hist. de* Colonie* angL dan* te* Indes 
occid. — Arnault, Jay, Jooy et Nonrlns, Biogr. nouv. 
des Contemporain*. - Rabbe, VieUh de Boisjolin et 
Salnte-Preote , Biogr. vnlv. et portât, de* Contemp. - 



461 • 

Moniteur, an n, b* Wt ; an in, *» 1 », «M, W ; au w. 
n« 810; an v, n° MO; an vu, n» 188; an vin, p. «78, 
an ne, p. m, 117»; an x, p. a», 88*. 

HUGUES DE TOUCY. Voy. TOOCY. 

HUGUES DBFORSIT. Voy. FORSIT. 

HUGUES MBTEL. Voy. METEL. 

HUGUES D'ESTE. Voy. ESTE. 

HUGUES DE BEftSIL OU BÊEZE. Voy. 

Berze. 

huguet. Voy. Armand. 

hugubt (Marc- Antoine), évêque consti- 
tutionnel français, né à Moissac, en 1757, fusillé 
le 15 vendémiaire an v ( 6 octobre 1796 )* Entré 
dans les ordres sacrés dès sa jeunesse, il devint 
curé d'un petit village de l'Auvergne, et fut élu 
évêque constitutionnel du département de la 
Creuse en 1791, sous la constitution civile du 
clergé. Nommé député à l'Assemblée législative et 
à la Convention nationale par le même départe- 
ment t il se fit remarquer par l'exagération de ses 
opinions. Il n'obtint cependant aucun crédit, 
même dans le parti de la Montagne, où il siégea 
constamment. Il dénonça successivement tons 
les ministres dans les séances du 24 juillet et 
du 5 août 1792, et mit si peu de mesure dans 
les discours qu'il prononça à cette occasion 
que des cris : A V Abbaye! retentirent dans la 
salle. Huguet vota la mort du roi sans appel et 
sans sursis. Mêlé depuis à toutes les émeutes 
populaires, complice de toutes les conspirations 
contre le gouvernement établi, il fut arrêté 
dans la soirée du 12 germinal an m (1 er avril 

1795) avec Dubem, Fous6edoire et Amar, comme 
ayant pris part à la révolte qui venait d'éclater. 
Emprisonné au château de Hara, il dut sa liberté 
à l'amnistie accordée le 4 brumaire an rv (26 oc- 
tobre 1795 ). Il en profita pour tramer, l'année 
suivante, unenouvelleconspiration. Quelques cen- 
tainesde factieux envahirent le camp de Grenelle 
dans la nuit du 24 fructidor an iv ( 10 septembre 

1796) et essayèrent d'entraîner les soldats à entrer 
dans Paris pour renverser le Directoire et sedéfaire 
des membres les plus marquants des deux con- 
seils. Ce projet échoua complètement. Huguet, 
ainsi que la plupart de ses complices, fut arrêté 
au milieu du camp, livré à une commission 
militaire , condamné à mort et fusillé. J. V. 

Moniteur, an ni, n« 19», 19» ; an xv, n« *», >60 ; an v, 
n* to. - Arnaolt, Jay, Jouy et Nonrln», Biogr. nouv. 
desContemp. 

* huguet an (Jean- Antoine), libraire fran- 
çais, né en 1647, mort vers 1750. Il était fils de 
Jean Huguetan, docteur en droit et conseiller 
du roi Gustave-Adolphe. Établi libraire à Lyon , 
il quitta la France après la révocation de l'édit 
de Nantes, et fonda une librairie importante en 
Hollande. Il avait des comptoirs dans tous les 
pays de l'Europe et jusque dans la Turquie d'A- 
sie. Il s'occupa en outre d'opérations de banque, 
et acquit une fortune colossale. Quelques histo- 
riens disent qu'il promit à Louis XIV un prêt 
considérable si. on lui restituait ce qu'on lui 
devait, et que lorsqu'il eut obtenu cette restitu- 



467 



tion H refusa de tenir sa promesse, d'autres ac- 
cusent Louis XIV d'avoir voulu le dépouiller, 
du moins eu partie, du fruit de ses heureuses 
spéculations. Ce qui est certain, c'est qu'on l'at- 
tira en France en lui promettant la restitution de 
ses biens , et aussitôt après son arrivée , Pont- 
chartraio lui fit souscrire des lettres de change 
pour plusieurs millions. Huguetan parvint à ré- 
voquer par le même courrier les ordre* donnés 
à ses correspondants, et se hâta de fuir en Hol- 
lande; mais le gouvernement français le fit en- 
lever, et il ne recouvra sa liberté qu'à la fron- 
tière hollandaise, où un heureux hasard le fit 
reconnaître. Huguetan épousa, dit-on, une fille 
naturelle du prince d'Orange, et obtint le gou- 
vernement de Vianan ; mais peut-être le con- 
fond-on avec quelqu'un de ses fils. Quoi qu'il en 
soit, Huguetan se retira plus tard en Danemark, 
où il se mit à la tête d'une compagnie pour le 
commerce maritime, et où il fonda des manu- 
factures de laine et de soie, une maison de 
banque, etc. Frédéric IV érigea la terre de Gul- 
densteen en comté en sa faveur. On dit qu'il 
mourut plus que centenaire, du chagrin de n'avoir 
pu obtenir l'ordre de l'Éléphant. La Baumelle, 
qui le vit à Copenhague, raconte qu'il vivait de 
la manière la plus magnifique, et suivant M. Weiss 
il soutint de sea dons la colonie de Fredericia. 
— Huguetan avait un frère nommé Jean , qui 
exerçait la profession d'avocat et s'est fait con- 
naître par un Voyage d'Italie curieux et nou* 
veau; Lyon, 1681, in-12. J, V. 

Webs, Hitt. dm Protestant* réfugiés. — Eug\ et En. 
Baagï La France Protestante. — Cbvudoa eft Debidioe. 
Die t. mitu. Hiit., ÇriU et Bibliogr. 

;hugi?ie* ( Pierre-Charles ), chirurgien 
français, né à Séianne, en 1804. Interne des hôpi- 
taux de Paris en 1828, il remporta plusieurs prix 
de médecine et de chirurgie, devint prosecteur, 
reçut le doctorat en 1834 , fut l'année suivante 
professeur agrégé; il est aujourd'hui chirurgien 
à l'hôpital Beaujon, et membre de l'Académie de 
Médecine et de la Légion d'Honneur. On a de lui î 
Diagnostic différentiel des Maladies du 
Coude; 1842, in-4°; — Mémoire sur VBsthio- 
mène ou dartre rongeante vulvo- anale, 
inséré dans les Mém, de VAcad. de Médecine, 
t'XTV ; — . Mémoire sur la Maladie syphilitique 
des Femmes enceintes et des Enfants nouveau- 
nés; (1840); — Mémoire sur les maladies de 
la Glande vulvo-vaginale et les divers Ap- 
pareils sécréteurs de la vulve; 1846 ; — Mé- 
moire sur les Signes communs différentiels 
des Organes contenus dans la Poitrine; dans 
les Archives gén. de Médecine; — Rapport et 
Considérations sur la Désarticulation ou Fa- 
blation complète du Maxillaire inférieur ; 
1857 , in-8°; et dans le t. XXII des Mém. de 
VAead. de Médecine; — notes et additions au 
Traité oVAnatomie descriptive de Bichat, qui 
fait partie de Y Encyclopédie des Sciences médi- 
c <* l * s ' H. H. et G. de F. 



HUGUETAN — HUISSEÀU 



468 



Stchaille, Ut Xédeehu de PmrU ~ tocuments parti- 
culiers. 

I HUIILARD - BRKHOLLE8 ( /,„£, Al~ 

fonse), archéologue français, né à Paru, le 
8 février 1817. Professeur d'histoire an collège 
Charlemagne et membre du comité des mono* 
ments écrits près le mtoatère de l'insiniction 
publique, il a publié : Histoire résumée dût 
Temps Anciens, comprenant V histoire ée la 
Qrèce, de Gilltes, abrégée et modifiée (avec 
M. E. Ruelle); Paria, 1840, 2 toi: in-8°; me 
2 e édit., en 1845; ~- Grande Chronique de 
Matthieu Péris, traduite en français, avec des 
■êtes et précédée d'une introduction de M. le 
due de Luynes; Paris, 1640-1841, 9 vol. 
in-ff>; — Histoire générale du Moyen Age, 
rédigée d*apres le programme universitaire 
(avôo M. B. Ruelle}* Paris, 1842-1843, 2 vol. 
i*8*; 2« édit, 1849, 2 vol. gr. in- 18. Le* m. 
teors se sent posé les Mottes qu'exigeaient le 
caractère et les nécessités de l'enseigneoMat 
universitaire, auquel ils destinaient leur ou- 
vrage; ils ont à la fois évité les développements 
excessifs, sans tomber dans l'aridité des laits 
présentés sans explications et sans détails; — 
Recherches sur les Monuments et V Histoire 
des Normands et de Us Maison de Souabe 
dans V Italie méridionale; Paris, 1*44, *t. 
in-fol. Cet ouvrage, publié aux (rate de M. le 
duc de Luynes, est enrichi de 30 planches, gra- 
vées d'après les dessins de M. Victor fiaitard; 
— Historia diplomatica ftederiei Second*] 
site constitutiones, privilégia, mandata, in- 
strumenta quae supersunt isttus imperotoris 
etjtHorum ejus. Accedunt epistoUs papdnm 
et documenta varia : eollegit, ad fèdem char- 
tarum et codicum recensait, etc.; Paris, 
1. 1 et IV, 1852 à 1854; l'ouvrage doit avoir six 
volumes. g. dis F. 

Documents particuliers. - Journal de la Librairie. 
* HITisseau (Jacques n'), hagiographe fran- 
çais, né en Touraine, mort à Marmoutiers, le 
24 septembre 1626. Il entra jeune encore à l'ab- 
baye de Marmoutiers. Reçu docteur en droit 
canon, il remplissait la fonction de garde des 
chartes de son monastère, lorsqu'il fat choisi, 
aveclsaïe Jaunay, quart-prieur de Marmoutiers, 
pour accompagner Matthieu. Giron , le sacristain 
chargé de transporter à Chartres la sainte am- 
poule qui devait servir au sacre d'Henri IV. La 
même année (1594), il fut nommé grand-prieur, et 
résista aux tentatives exaltées, mais non intem- 
pestives, des réformateurs de son ordre. Ayant re- 
fusé en mai 1604 l'entrée du monastère à Matthieu 
Renusson, visiteur de l'ordre de Saint-Benoit pour 
la province de Tours, il fut frappé, ainsi que ses 
partisans, d'une sentence d'excommunication, 
déposé de sa charge et dépouillé de tout pouvoir. 
Il interjeta appel comme d'abus , et malgré le 
crédit des réformateurs, il n'en garda pas moins, 
jusqu'à la fin de sa vie, le titre et l'autorité, de 
grand-prieur de Marmoutiers, non sans luttes, 



469 



HU1SSEÀU — HULDBICH 



comme on pense, ni sans procédures. A sa mort 
il était provincial de la congrégation bénédictine 
des Exempt» en France. 

lyitaiaseaii a publié à Tours, en 1607» un re- 
cueil de prieras sona le titre de Snehiridion Pre- 
tum, à l'usage de ion abbaye? quelque temps 
aprèt, le Supplément à èo Vhrxmique des 
Abbé* de Mmrmamtiers, et Ters ttt&une Chro- 
nAq*ê éèt Prient* dn même monastère, re* 
«amen écrits d'un style simple, et d'après les 
chattes authentique* consultées par lui sans 
doute a f époque où il avait charge de les con- 
serrer. Cette dernière chronique, rédigée d'a- 
bord en français , fut traduite par l'auteur lui- 
même en latin. Le mamiaerit original signé par 
d'Havane**! cariai* à la Bibliothèque impériale, 
t. XV de la ceilettion Hooaseau, fui* 3*9. 
Géleatin Poav. 

B i iê nrt 49 M* rm * #*-9, n* Pau» llartf nue, Mutw 
crits à la Bibliothèque fcnpérfefe, — Stlmon, Chroni- 
que» de Touraine, p. cxxxvi. 

hctitzilihuilt, second roi des Mexicains, 
né vers 1384, mort en 1409. Il succéda en 1989, 
à son père Acamapitzin, fondateur de la mo- 
narchie mexicaine. Après un interrègne de quatre 
mois , H fut reconnu par une assemblée des no- 
bles de la nation. Il avait prouvé sa valeur en 
maintes occasions; à cette époque tes Mexicains 
proprement dits ou Aztèques, fraction des Chl- 
mimèqoes et arrivant du nord de la Californie, 
. étaient tributaires des Tépanèques, peuple au- 
tochthone de l'Anabuac. tes Aztèques habitaient 
de misérables cabanes de joncs dispersées çà et 
là sur les tles basses de l'immense lac de Tex- 
cuco; ce fut de la réunion de ces Ilots par d'in- 
génieuses mais grossières digues que sortit Mexico. 
Au temps d'Huitzilihuilt la capitale des Aztè- 
ques était Tenochtitlan , la plus grande des tles 
du Texcuco, Le nouveau prince crut devoir con- 
sacrer la souveraine puissance par la religion. 
H se fit oindre ou plutôt teindre par le grand- 
prêtre , qui lui plaça une espèce de mitre sur la 
tête (1). Ses conseillers , pour cimenter son pou- 
voir, le pressèrent de solliciter la fille de son su- 
zerain Tezozomoc , roi des Tépanèques. La de- 
mande fut faite à genoux t dans les termes les 
plus humble* ; elle fut accueillie, et Huitzilihuilt 
épousa la princesse Ayanchcihualt; ce qui ne 
l'empêcha pas de se marier peu après avec Mia- 
huaxochilt, princesse de Quauhnahuac ; mais la 
polygamie était en usage parmi les anciens peuples 
de l'Amérique centrale. En contractant ces gran- 
des alliances» le but du jeune monarque était de 
faire sortir sa nation de l'obscurité et de l'indi- 
gence : il y réussit. Tzompan, prince de Xoltocan, 
ayant attaqué Techotlala , roi des Acolhuacans, 
celui-ci fit alliance avec les Aztèques, et grâce à 
leur aide il battit complètement ses ennemis. Ce 
service fut récompensé par quelques conces- 
sions en terre ferme et par d'avantageuses 

(i) I! est ainsi représenté suf les peintures btérogtypht- 
qncs mexicaines. 



470 

conditions commerciales. Huitzilihuilt se mon- 
tra aussi brave et aussi habile en soutenant 
son beau-père dans plusieurs guerres contre <U\s 
tribus voisines : il y gagna en puissance et en 
considération. En même temps , il ne négligea 
.rien pour ranimer dans ses États l'industrie et le 
commerce; il appela des orfèvres, des sculp- 
teurs, lit bâtir des édifices en pierre, encoura- 
gea la culture et la mise en oeuvre du coton , 
creusa de nouveaux canaux, éleva de nouvelles 
dignes. Il fht détourné de son gouvernement pa- 
cifique par la haine de son beau-frère Maxtlaton, 
( prinee de Coyaean, qui, sous le prétexte que su 
propre soeur (1) Ayanchcihualt, avait été sa 
.fiancée avant d'être l'épouse de Huitzilihuilt, fit 
Assassiner lejeune Acolnahuacalt, fils de ce prince. 
Ce crime ne resta pas impuni : la guerre ayant 
éclaté entre Ixthlxochilt , roi de Texcuco et les 
Tépanèques f \ e roi des Aztèques se joignit au 
premier et Maxtlaton trouva la mort dans la 
lutte. Cependant Clavigero conteste ce fait ( voy. 
Maxtuwn ). 

Huitzilihuilt mourut après un règne de vingt 
ans. Outre le prince Acolnahuacalt, assassiné à 
l'âge de dix ans, il laissa de sa seconde femme 
Miahuaxocbilt un fils, le célèbre Mantezuma 
Ilhuicamina, qui réunit sous sa domination tout 
l'Anahuac. Cependant, ce fut le frère de Huitzili- 
huilt, Chinwlpopoca, qui lui succéda immédia- 
tement, par le vœu des nobles, Alfred de Lacaze. 

Gomara, Hùtoria del Mexico ; Anvers, 1554, in-JJ. — 
Torquemada, Monarquia Indiana; Scvtllc, 1614, 3 vol. 
to-fôl. —Clavigero , Storia antica del Me$$ico, Mb. IV, 
acet. îx. — De La ReaaoaMère, Pérou, dans V Univers 
pittoresque^ p. 14.' 

■uuiRiGH ( Jean - Jacques ) , théologien 
suisse, née Zurich, en 1683, mort le 25 mai 
1731. Il était d'une famille patricienne, dont 
plusieurs membres s'étaient déjà fait remarquer 
comme théologiens et comme philologues (2). Il 
se rendit à Brème, où il étudia l'hébreu sous la 
direction de Corn. Hase. Il partit ensuite pour 
la Hollande, et alla continuer ses études des 
langues orientales à Franeker et à Leyde. De 
retour dans sa ville natale, en 170fi, il y fut 
nommé pasteur de la Maison des Orphelins. En 
1710 il fut appelé à occuper la chaire de morale 
au gymnase de Zurich; peu de temps après il 
fut chargé aussi de celle du droit naturel , qui 
venait d'y être créée. Les académies de Heidel- 
berg et deGroningue cherchèrent en vain à l'at- 
tirer dans leur sein. On a de lui : Hxstoria 
Jeschua Nazareni, a Judasis blasphème cor- 
rupta, ex manuseriplo hactenus inedilo, he- 
braice et latine, cum notis ; Leyde, 1705, in-8° ; 
— Gentilis Obtrectator, sive^de calumniis 
gentilium in Judasos commentarius ; Zurich, 
1744, in-4°. — HuldYich a aussi fait paraître une 

(l) Dans PAnahoac les frères épousaient leurs usant. 

(%)*Fop. Zaéler, Unvcrtai-Uxikon , au met fJvl- 
derich, Jean-Jacques Huldxlch, né à Zurich en 1569, 
rooFl en 1638, dans eette ville, professeur de théologie, 
est antenr dune qatniaine de traités et d'opuscules 
Important* pour rttfetotrc de ta Confession helvétique. 



4*1 



HULDRICH — HUUN 



472 



dizaine de recueils de sermons prêches par loi 
en allemand ; c'est à lui qu'on doit encore la 
publication des Miscellanea Tigurina; Zurich, 
1722, 3 vol. in-8°; collection de divers opus- 
cules écrits par des savants de Zurich. Hul- 
drich a enfin laissé en manuscrit un Commen- 
taire sur l'ouvrage de Puffendorf : De Officio 
Hominis et Civis. E. G. 

Zimraermann, Fita Htdderici; en tête du dernier 
sermon prononcé par Haldrteh, publié à Zarich, 17», 
tB-V,soo*4e titre de :*A<xuaxùxveiov* — Miscellanea 
Duisburgensia, t. I. — Bioltotbeca Bremensis. — Zed- 
ler, Untocrtal-L&ikon. 

hulin ou HULLnr ( Pierre - Augustin, 
comte), général français, né à Paris, le 6 sep- 
tembre 1758, mort dans la même ville, le 9 jan? 
vier 1841. Son père était marchand fripier sous 
les piliers des halles. Engagé en 1771 dans le 
régiment de Champagne, 'Hulin passa bientôt 
dans les gardes françaises, où il fut nommé ser- 
gent en 1780. Au 14 juillet 1789, il se distingua 
à la tête du peuple qui faisait le siège de la Bas- 
tille. Entré un des premiers dans la forteresse, 
il s'empara du gouverneur Delaunay, que les 
insurgés voulaient massacrer. Aidé d'un nommé 
Ame, il essaya de le conduire à l'hôtel de ville; 
en route il Voulut le couvrir de son chapeau ; 
mais Delaunay ne souffrit pas qu'il s'exposât pour 
lui. Lorsqu'ils arrivèrent sur la place de Grève, 
le peuple se rua sur eux , enleva Delaunay des 
mains de ses protecteurs, et le massacra sous 
leurs yeux, malgré leurs efforts. Hulin et 
plusieurs individus qui se signalèrent comme lui 
dans la Journée du 14 juillet reçurent de la mu- 
nicipalité de Paris, avec le titre de vainqueurs de 
la Bastille, une petite médaille qui rappelait cet 
événement. Le 8 octobre il fut promu au grade 
de capitaine commandant de la 8 e compagnie de 
chasseurs soldés. Il prit part aux grandes jour- 
nées de la révolution. Cependant son zèle se 
calma après la chute de la monarchie, et, devenu 
suspect par sa modération , Hulin fut enfermé 
sous la terreur : le 9 thermidor le rendit à la li- 
berté. Il prit alors du service dans l'armée 
d'Italie, et commanda à Nice ; en l'an in, à Klagen- 
furth ; en l'an rv, à Milan; en l'an v, à Ferraré, 
Il se trouvait à Paris à l'époque du 18 brumaire 
(novembre 1799), avec le grade d'adjudant 
général qu'il avait reçu depuis quelques années 
du général Bonaparte , et eut une large part au 
succès de cette journée. Revenu en Italie, il 
contribua efficacement à la défense de Gênes 
en l'an vin (1802). Envoyé auprès des con- 
suls, il suivit Bonaparte à l'armée de réserve. 
Après la bataille de Marengo, il commanda de 
nouveau la place de Milan. Chef d'état-major de 
la division Richepanse en Fan vin, officier 
supérieur du palais en l'an rx, et chef de l'état- 
major de la division Rivaud en Espagne en 
l'an x, Hulin reçut du- premier consul, le 27 
messidor de cette année (16 juillet 1802), l'ordre 
de se rendre à Alger avec une mission secrète 
auprès du dey. Sa mission réussit complètement. 



En Tan xii (1804), il fut promu an grade de 
général de brigade, et reçut le commandement 
des grenadiers à pied delà garde consulaire. Le 
29 ventôse de la même année ( 20 mars ), il hit 
désigné par Murât, gouverneur de' Paris, pour 
présider la commission militaire à laquelle un dé- 
cret du premier consul ordonnait de juger le duc 
d'Enghien ( voy. ce nom). De la brochure publiée 
•plus tard par le général Hulin il résulte que les 
membres de la commission allèrent à Vincennes 
sans savoir de quoi il s'agissait; qu'ils condam- 
nèrent le prince à mort parce que celui-ci avoua 
qu'il avait porté les armes contre la France , et 
déclara que sa naissance et ses opinions le ren- 
daient l'ennemi du gouvernement établi, tout 
en se défendant d'avoir trempé directement ou 
indirectement dans aucun complot contre la vie 
du premier consul, avec qui il désirait avoir une 
entrevue. La commission rendit un jugement in- 
forme, ordonnant l'exécution immédiate, juge- 
ment qu'elle rectifia dans une seconde rédaction, 
laquelle portait seulement quele jugement serait lu 
de suite au condamné et expédié à diverses auto- 
rités ; et pourtant les juges, retenus dans le château 
fort, n'en sortirent qu'après avoir entendu une 
détonation qui leur annonçait que leur sentence 
était exécutée et rendaitainsiinutileles démarches 
que Hulin comptait faire en faveur du condamné. 
Il avait aussi voulu écrire au premier consul 
pour lui exprimer le vœu du prince et du conseil; 
mais le duc de Rovigo ( voy. ce nom ) lui avait 
arraché la plume des mains en lui disant : 
« Votre affaire # est finie; maintenant cela me 
regarde. » 

Promu la même année au grade de comman- 
dant de la Légion d'Honneur, Hulin fut envoyé en 
1805 à la grande armée et chargé du commande- 
ment de Tienne après la prise de cette ville. 
L'année suivante il fit la campagne de Prusse, et 
à la fin de la guerre il reçut le commandement 
de Berlin. A son retour à Paris il fut nommé 
général de division le 9 août 1807, avec le com- 
mandement de la l re division militaire. Créé 
comte de l'empire en 1808, il fût pourvu en 1809 
d'une dotation de 25,000 fr. sur le domaine de 
Hayen en Hanovre. Pendant la guerre de Russie, 
le général Hulin se trouvait le chef de la force 
armée à Paris lorsque le général Malet («09. ce 
nom) conçut l'audacieuse entreprise de ren- 
verser le gouvernement impérial (24 octobre 
1812). II avait déjà fait arrêter plusieurs per- 
sonnages importants lorsqu'il s'adressa au gé- 
néral Hulin. Celui-ci, moins crédule, l'ayant in- 
vité aie suivre dans son cabinet, Malet lui tin 
à bout portant un coup de pistolet qui lui fr&* 
eassa la mâchoire inférieure, puis il se sauva à 
l'état-major, où il fut arrêté. Cette affaire valut 
à Hulîn le surnom populaire de Bouffe la Balte. 
Il conserva le commandement de Paris, fut créé 
grand 'eroix de l'ordre de la Réunion le 3 avril 1 813, 
et, an mois de mars 1814, il conduisit à Blois 
l'impératrice régente Marie-Louise , lorsque les 



473 



HULIN — HULL 



474 



alliés approchaient de la capitale. Le 8 avril suivant 
après l'abdication de Napoléon, il adressa au 
prince deTalieyrand son adhésion au changement 
de régime dans les termes suivants :.« Dégagé 
maintenant du serment de fidélité que nous avons 
prêté à l'empereur, mon état-major et moi nous 
nous empressons d'adhérer aux mesures prises 
par le gouvernement. Mes principes sont inva- 
riables; je me dois à la patrie avant tout. Per- 
suadé que le nouvel ordre de choses ne s'éta- 
blit que pour son bonheur, je prie Y. A. S. de 
vouloir bien être l'organe de mes sentiments pour 
la chose publique et de mon dévouement pour 
notre nouveau souverain. » Hulin n'en perdit pas 
moins le commandement de Paris et toutes ses 
fonctions; mais le retour de Napoléon, Tannée 
suivante, le remit à la tête de la force publique 
de Paris, jusqu'à la seconde restauration. Banni 
par l'ordonnance du 24 juillet 1815, il fut arrêté 
au mois d'octobre dans le département de l'Ain, 
amené à Paris, conduit à Cosne, et enfin l'ordon- 
nance du 17 janvier 1816 le força à quitter la 
France. Il se retira en Belgique et de là en Hol- 
lande. Il paraissait fixé dans ce pays, lorsque l'or- 
donnance du 1 er décembre 1819 lui rouvrit les 
portes de la France. Rentré dans sa patrie, il resta 
quelques années dans une propriété située dan3 
le Nivernais, puis dans une terre située à La 
Queue-en-Brie ( Seine-et-Oise), où ri vécut dans 
la retraite. 11 perdit bientôt la vue, et revint à 
Paris finir son existence, laissant ses titres et sa 
fortune à son neveu et fils adoptif, M. Henri Hulin, 
officier de l'armée d'Afrique. Le duc de Rovigo 
ayant publié en 1823 un extrait de ses Mémoires 
dans lequel, voulant se justifier d'avoir sciem- 
ment et directement concouru à l'enlèvement et 
à la mortdu ducd'Enghien, il établissait que tout 
avait été calculé et mis à exécution par ïalleyrand, 
alors ministre des affaires extérieures , le général 
Hulin fit de son côté paraître : Explications 
offertes aux hommes impartiaux au sujet de 
la commission militaire instituée en Van xii 
pour juger le duc d'Enghien; Paris, 1823, 
in-8°. J. V. 

» Arnault, Jay, Jooy et Norvins, Bioçr. nouv. des Con- 
temp. — Rabbe. "Vieilh de Boisjolla et Sainte-Preuve, 
Bioçr. univ. et portât des Contemp. — C. Maillé, 
Bioçr. des Célébrités militaires des armées de terre et 
de mer de 1789 à 1850. — Diet. de la Couvert. — Chateau- 
briand, Mémoires d'outre-tombe, 4* volume. 

* hpll ou hulls ( Jonathan ) , mécani- 
cien anglais du dix-huitième siècle, sur la vie du- 
quel nous ne savons rien et que nous ne trou- 
vons dans aucune biographie anglaise , mais à 
qui Ton a attribué la première idée de la sub- 
stitution des roues à aubes mues par la vapeur 
aux rames mues à bras d'hommes pour faire 
marcher les bateaux, et la transformation du 
mouvement de va-et-vient en mouvement cir- 
culaire à l'aide d'une manivelle. Jonathan Hull 
a consigné ses. découvertes dans un livre dont 
voici la traduction du titre : Description et 
figure d'une Machine nouvellement inventée 



pour amener les navires el'les vaisseaux dans 
les rades , les ports et , les rivières > ou pour 
les en faire sortir contre le vent et la marée, 
ou par un temps calme; à V occasion de la- 
quelle S. M. Georges II a accordé des lettres 
patentes mu profit de l 'auteur, qui en jouira 
l'espace de quatorze ans; Londres, 1737. 
« Quoique M. Jonathan Hull n'ait rien fait de 
nouveau dans la construction de la machine 
atmosphérique elle-même, dit M. R. Stuart, nous 
ne devons pas moins mentionner son nom avec 
tous les éloges qui lui sont dus pour avoir le pre- 
mier proposé l'application des roues à aubes qui, 
mues par la vapeur, servent à faire marcher les 
vaisseaux , en remplacement des voiles poussées 
par le vent. Il fallait, pour arriver à ce résultat, 
convertir le mouvement rectiligne de va-et-vient 
de la tige du piston en un mouvement de rota- 
tion continue. Or c'était, disait-il très-ingénieu- 
sement, ce qu'il était facile d'effectuer au moyen 
d'une manivelle. 11 n'y a en effet que cette inven- 
tion qui ait rendu la machine à vapeur appli- 
cable, comme force motrice, à toute espèce de 
machine. Hull ne put réussir à faire goûter son 
projet du public, et son application de la mani- 
velle tomba tellement dans l'oubli que, quarante 
ans après, lorsqu'il en fut de nouveau question, 
un brevet d'invention fut accordé à celui qui fit 
revivre ce projet, et l'honneur de la découverte 
réclamé par* le célèbre Watt, qui sans doute 
ignorait qu'elle appartint à Hull. » Brewster 
réduit à peu de chose le mérite de Hull : « Nous 
ne regardons point, dit-il, comme une inven- 
tion la substitution de la force des chevaux , 
de la vapeur ou de l'air échauffé à celle des 
bras , car il nous faudrait alors admettre les pré- 
tentions d'une foule de gens qui réclameraient 
à l'envi l'honneur d'avoir employé la machine à 
vapeur à battre le blé. Or, quand, en 1736, M. Jo- 
nathan Hull proposa de faire l'application de 
cette dernière force au vaisseau remorqueur, il 
n'eut point d'autre mérite que de la substituer 
à celle des bras; sa proposition ne portait nul- 
lement le cachet du génie inventif, et le méca- 
nisme qui convertissait le mouvement alterna- 
tif du piston en mouvement de rotation des roues 
à aubes est aussi grossier qu'imparfait. » Hull 
avait prévu cette objection , car il disait dans son 
livre : « Que si l'on me refuse le mérite d'une 
nouvelle invention, parce que je n'aurais fait 
qu'appliquer à ma machine la même force que 
d'autres ont vu employer à d'autres usages , je 
dirai que l'application de cette puissance n'est 
autreque celle d'un instrument ordinaire ou connu 
pour arriver mécaniquement à un résultat, qu'il 
n'a pas jusque-là servi à obtenir. » Arago a re- 
vendiqué pour Papin l'application de la vapeur 
à la navigation. L'ouvrage de Jonathan Hull « ren- 
ferme, dit-il, 1° la figure et la description de 
deux roues à palettes placées sur l'arrière du 
bâtiment : l'auteur voulait substituer ces roues 
aux rames ordinaires; 2° la proposition de faire 



475 



HULL — HULLMÀNN 



476 



tourner les axes des roues à l'aide de la machine 
de Newcomen, alors bien connue , mais employée 
seulement, d'après les propres expressions de 
Hull peur élever de l'eau à l'aide du feu ». Le 
savant secrétaire perpétuel de l'Académie des 
Sciences rappelle que Papin (voy. ce nom) a 
proposé dam son recueil de 1696 de faire mar- 
cher les bateaux à t'aide de roues drculaires au 
moyen des pistons à vapeur qu'il avait imaginés, 
comme il avait vu un appareil de cette espèce, 
mu par des chevaux, faire marcher une barque 
du prince Robert. * Papm a donc proposé, dans 
un ouvrage imprimé, dit Arago, de faire marcher 
les navires à l'aide de la machine à vapeur, qu*- 
rant*deux ans avant Jonathan Huil. » Papm 
s'était en outre occupé de la transformation du 
mouvement reetiligne en un mouvement de ro- 
tation continu, et pour cela il employait des 
espèces de crémaillères formant l'extrémité des 
pistons et qui s'engrenant à des petites roues 
dentées, affermies sur les essieux des roues a 
aubes, les faisaient tourner. « Le procédé que 
Papût indique , dit encore Arago, pour trans- 
former le mouvement reetiligne du piston en un 
mouvement de rotation continu , n'est pas infé- 
rieur, Je crois, à celui du mécanicien anglais; 
car dans ce dernier les roues attachées à l'axe 
principal et les roues à palettes ne communiquent 
entre elles que par des cordes. » — * Si l'on s'en 
rapporte aux dessins qui nous restent, dit M. Fi- 
guier, le bateau de Jonathan Hull était de la dis- 
position la plus grossière; il ne portait qu'une 
seule roue qui, fixée à l'arrière, était mise en 
mouvement par une machine de Newcomen à 
l'aide de cordes et de poulies; il ne présentait ni 
mâts ni voiles, et l'on ne voyait sur le pont que 
le long tuyau de tôle servant de cheminée à sa 
chaudière. Ce n'était donc qu'un simple remor- 
queur dans lequel ta machine à vapeur rempla- 
çait le cabestan ou le câble. Mais la machine de 
Newcomen ne pouvant produire commodément 
un mouvement de rotation, et l'irrégularité de son 
action mécanique autant que la quantité consi- 
dérable de charbon qu'il aurait fallu prendre à 
bord du remorqueur pour alimenter la chau- 
dière, rendait impraticable le projet de Jonathan 
Hull, qui ne tarda pas à tomber dans l'oobH. » 

L. LotJVET. 
. Brcwster, Mécan. de PérÇuXbk, toi. ïf, p. m. -. 
R. Stuart, ffist. de te Macktim à Fl^mr. - Arago, No- 
tice sur la Machine à Vapeur jtom V Annuaire du Bur. 
des Ijmg. pour 1837, p. Î84. — Quaierly Review, 1818, 
tome XIV, p. 85* et 385. - Figuier, Espos. et Hist. des 
princip. Découvertes scienHfiqms, tome i, p. «♦. 

hull (***), général américain, né vers 1770, 
mort en 1825. Les premières années de sa vie 
sont peu connues ; on sait seulement qu'il se mit 
dès 1788 dans les rangs des yankees et monta 
rapidement au grade de général. En Ifllî, à la 
tête d'un corps de 2,500 hommes, composé de 
quatre régiments des milices de t'Onio et do 
Michigan, il entra dans le haut Canada avec 
l'intention de taire soulever cette contrée contre 



la domination britannique. Il s'empara de San- 
disiek, et parvint jusqu'à Moraviutown ; mais ces 
rapides sucoèe furent bientôt suivis de revers. 
Dans ses proclamation» il déclara' que nul ne 
pouvait rester indifférent dans une lutte qui 
avait pour but la liberté et l'indépendance s « Je 
viens* disait-il^ vous délivrer de l'oppression des 
Anglais i ee sont nos ennemis et les vôtres; au- 
cun de ceux qui se trouveront à coté d'un Anglais 
ou d'un Indien ne sera mit prisonnier s la mort 
sera sur le champ son partage. » Un langage 
aussi violent lit tourner contre lui tous les gens 
modérés , et après quelques engagements , il fut 
rejeté sur la rivière du Canard. Il se retrancha 
dans le fottdu détroit, où legénéral anglais Brock 
vint l'assiéger le 15 août 1812. Trois jours 
après , Hull se rendit à discrétion, et Hvra son 
artillerie (trente-trois pièces). Traduit en 1814 
devant une eour martiale, su conduite fut sévè- 
rement appréciée et depuis lors il n'a rempli 
aucune fonction militaire. A. de L. 

BU#r«*hie mmêlle de* Contemporains (MB). 

hull( Thomas ), pogte anglais, né à Londres 
en 1728, mort en 1808. Après avoir joué pen- 
dant quelque temps sur des théâtres de pro- 
vince, il fnt engagé à Govent-Garden. Sans être 
un acteur remarquable, il entendait bien la théorie 
de son art Comme poète il ne s'éleva pus au- 
dessus du médiocre, et sa prose, quoique on peu 
meilleure que ses vers, n'obtint jamais qu'un 
succès de circonstance, il composa ou arrangea 
dix-neuf pièces. Parmi fies autres ouvrages on 
remarque Richard Plahtagenet, légende; 1774, 
in«4° ; — Moral Taies in «erse ; 1797, 2 vol., 
in-8*. .Z. 

BioçrapMu Dramatieat, 

■ULLIN DE BOISCflWVALLIBR (LoutS-Jo- 

seph), historien français, né le 18 janvier 1742, 
mort à Paris, le 24 mars 1823. Employé dans 
diverses administrations financières, il devint 
conseiller référendaire de première classe à la 
cour des comptes à sa formation, eul 807.. Après 
quelques années d'exercice, il fut admis à la 
retraite avec le titre de conseiller référendaire 
honoraire. On a de lui : Répertoire ou alma- 
nach historique de la Révolution française, 
depuis l'ouverture de la première assemblée 
des notables, le 22 février 1787, jusqu'au 
1 er vendémiaire an K(22 septembre 1796); 
Paris, 1797-1803, 5 parties io- 12 ; — Répertoire 
historique de V Empire français , depuis le 'ré- 
tablissement du culte et la paix d'Amiens 
jusqu'au traité de TUsitt , faisant suite au 
Répertoire ou almanach historique de la 
Révolution française, 6 e partie; Paris, 1807, 
in- 12. Chaque volume est terminé par une table 
alphabétique des personnes et des matières. 
Hullin a laissé quelques autres ouvrages manus- 
crits. J.-V. 

Rabbe, Vieilli de-Boisjolin et Sainte -Preave, Biogr. 
univ. et portât, des Contemp. 

HULLIN. foy. HULIN. 

hullmann (Charles- IHetrich) , histo- 



477 



HULLMANN ~ HULOT 



47» 



rien allemand, né ca 1765, à Erdeborn, mort 
à Bonn, le 12 inaro i«é6. Il fut professeur à 
Bonn, et publia entre antres: Deutsche Fïnanir 
gesehichte des Mittelalters (Histoire des Fins* 
ces allemandes au moyen Age); Berlin, 1805; 
— Gesehiehte des Ursprungt der Régalien in 
Deutschland (Histoire de l'Origine des Droits 
de Régale en .Allemagne); Francfort, 1806; -~ 
Geschichte des Ursprungs der Staende in 
Deutschland (Histoire de l'Origine des États en 
Allemagne); Francfort, 1606*1*08,3 vol.; 
2 e édit. augmentée; Berlin, 1880 ; — GeschicMê 
des byzantinischen Handels (Histoire du Com- 
merce byzantin ) ; Francfort , 1808 ; Cologne , 
1818; — Staaisrecht des Alterthums (Droit 
public de l'antiquité); Cologne, 1820 ; — Staed- 
tewesen des Hittelalters (La Municipalité au 
moyen âge); Bonn, 1825-1829, 4 vol. ; — Urs- 
prànge der Kirchenverfassung des Mittelal- 
ters ( Origines de la Constitution ecclésiastique 
du moyen Age) ; Bonn, 1831 ; — Staatsverfas- 
sung der Jsraeliten ( La Constitution de l'état 
des Israélites); Leipzig, 1834; — Urspruenge 
der roemischen Verfassungen (Origines des 
différentes Constitutions de l'Empire Romain); 
Bonn, 1835; — Jus pontificum der Roemer; 
Bonn, 1837 ; — Handelsgeschichte, der Grie- 
chen ( Histoire du Commerce des Grecs) : ou- 
vrage estimé; Bonn, 1639» R. L. 

Conv.-Lex. 

hcllock (Sir John), Jurisconsulte anglais, 
né à Barnard-Castle ( comté de Durham ), en 
1764, mort le 31 juillet 1829. Avocat distin- 
gué, et connu par de savants ouvrages de juris- 
prudence , il fut nommé avocat de la couronner 
(sergeunt at law) en 1816, et baron de la cour 
de l'échiquier en 1823. Il mourut du choléra 
pendant une tournée judiciaire. On a de lui ; 
The Law ofcosls; 1792, in-8°; — The Law o/ 
cosls in civil actions and criminal procee* 
dings; 1797, in-8°; 1810, 2 vol., in-8°. Z. 
Rose, New général Bi$g. Diction. 

iiJM>T ( Henri), jurisconsulte français, né 
en 1732, à Paris, y est mort en 1775. Il fut reçu 
avocat au barreau de Paris en 1753 ; mais, sans for- 
tune et peu connu, il fut obligé de chercher des 
ressources en donnant des leçons à des étudiants 
en droit. Le conseil de Tordre des avocats 
trouva ce genre d'occupation peu compatible 
avec la dignité de l'avocat. Vainement Hulot se 
défendit dans un mémoire qu'il publia, il fut 
rayé du tableau. Il imagina alors d'entreprendre 
une traduction des Pandectes de Justinien, dont 
il n'existait encore que des traductions partielles. 
Plusieurs légistes distingués de l'époque, entre 
antres Potbier, approuvèrent ce projet; mais, 
en 1764, au moment de faire imprimer son ou- 
vrage, fruit de vingt années de travail , pour le- 
quel il avait 1,500 souscripteurs, et quoiqu'il eût 
obtenu le privilège des censeurs, il rencontra 
des entraves et des obstacles qu'il n'avait pas 
prévus. C'était le temps d'un attachement servile 



aux préjugés aveugles et des erreurs de tra- 
dition : la faculté de Droit de Paris, dont Hulot 
cependant était membre, voulait faire de la 
science des lois romaines un mystère, une sorte 
de propriété à laquelle seule elle pouvait tou- 
cher* elle craignait que cette traduction ne 
nuisit à ses intérêts , à ses prérogatives) «I elle 
parvint à faire révoquer le privilège. Hntot, qui 
avait mis tout mm espoir dans l'ouvre a laquelle 
il avait donné ses soins, rot découragé ; consu- 
mé par le chagrin et le travail, il moorot à peine 
âgé de quarante-trois ans. En 1782, son (H!* 
essaya défaire paraître la traduction du Digeste, 
et en obtint un nouveau privilège ; mais la Faculté 
de Droit intervint de nouveau et eut encore* 
le pouvoir d'empêcher l'impression. Enfin , en 
1803, les libraires Behmer et Lamort, de Meta, 
ne trouvant plus de difficultés pour publier cette 
traduction, la firent paraître sons ce titre ? Cin- 
quante Livres dn Digeste on des Pandectes 
de Vempereur Justinien; Meta, 1803 à 1805,- 
7 vol. in-4* en 35 vol. in-12. Les quarante- 
quatre premiers livres sont traduits par Hotot, 
les six antres par Berthelot. L'ouvrage a eu plu- 
sieurs éditions. Guyot ne Feue. 

Discours préliminaire, en tête de la traduction des 
CtaqumnU Uvres Ou DtgesU. 

*mlot (iV ), mécanicien français, né 

vers 1715, mort è Paris en 1781. Il fut un des 
plus nanties artistes en son genre. Ce n'était pas 
un simple ouvrier, comprenant l'importance de 
sa profession, il apprit les mathématiques, la 
statistique, et une foule de procédés de «feinte 
pratique pour former des alliages, teindre le»' 
bois , tes os , l'ivoire , tremper l'acier, composer 
des mastics. Hulot, d'une adresse supérieure/ 
porta l'art du tour à son pins haut degré de per-» 
fectien, comme on en peut juger par les nom- 
breuses machines qu'il exécuta , telles que tours 
à guillocher, à portrait, etc. Il fournissait aux 
horlogers des plate-formes pour fendre leurs 
roues d'engrenage, et pour donner à ees machi- 
nes tonte la précision possible, il avait «onstrnft 
en bronze un diviseur original de deux mètres 
de diamètre. Il rédigea VArt dm Tùurnenr mé- 
canicien, l re part., Paris, 1775, in-fol., avec 44 
planches, pour la Description des arts et» mé- 
tiers faite ou approuvée par messieurs de l'A- 
cadémieroyale des Sciences; la 2 e partie n'a pas 
paru. Cet ouvrage, dédié au comte d'Artois, est 
précédé d'une introduction dans laquelle l'auteur 
prouve que presque toutes les professions indus- 
trielles ont plus ou moins besoin de recourir à 
l'art du tourneur pour donner la grâce , le fiai , 
la précision à certaines parties de leurs travaux. 
Vient ensuite un abrégé de géométrie pratique 
et de statique. Le chapitre II contient une no- 
tice sur les bois, l'écaillé, l'ivoire, les os, et 
autres matières que les tourneurs recherchent 
de préférence; car il n'y a pas de matière à l'état 
solide qui ne puisse être façonnée au moyen du 

tOUr. TEYSSiftKE 



479 



HULOT — HULSZE 



480 



» DcmmctU, Us Siècles littéraires de to Frime*. ~ 
Qoérard, La fronce Littéraire. 

hulot (Henri- Louis), théologien français, 
né le 1 er mare 1757, à Avenay (Champagne), 
mort le 1 er septembre 1829. Il fat professeur de 
théologie au séminaire et à l'université de Rouen. 
Il occupa cette dernière chaire avec distinc- 
tion jusqu'en 1791, époque où il fut obligé de 
s'exiler pour fuir les persécutions. Réfugié à 
Gand, il y remplissait les fonctions de grand- 
vicaire, lorsque l'entrée des Français dans les 
Pays-Bas, en 1794, le força de s'éloigner. Il alla 
habiter successivement Munster, Erfurt, Dresde, 
Augsbourg. Lorsqu'il put rentrer en France, il 
rat nommé curé de la paroisse d'Avançon, près 
Chàteau-Porcien; puis d'Attigny (Ardennes). 
Après vingt ans de travaux assidus dans cette 
paroisse, il devint chanoine, enfin grand-vicaire 
et officiai à Reims. On a de lui les écrits sui- 
vants : Lettre aux Catholiques de Reims (en 
latin et en français); Gand, 1793, in-8°; — 
Lettre des Prêtres français à VÉvéque de 
Gand (rédigée par Hulot et signée par 188 ec- 
clésiastiques qui exprimaient à ce prélat leur 
reconnaissance); — Collection des Brefs du 
pape Pie VI; Augsbourg, 1796; — Lettres à 
M. Schrofenberg, évéque de Freysingue et de 
Ratisbonne, en faveur des prêtres français; 
1796, in-8°; — Récit de la Mort de M. Mu- 
sart, curé de Somonevesle (en latin, français 
et allemand), 1797; — État des Catholiques 
anglais; 1798, in-8°; — Salisburgensis cu- 
jusdem religiosi (l'augustin Jan Rider) dé- 
lecta Castigatio 9 seu vindicte cleri gallicani 
exulis; 1800, Uv8°; cet ouvrage valut à l'au- 
teur un bref très-flatteur du pape Pie VII; — 
Lettre à un professeur d'Allemagne (Brigald, 
professeur à Wurtzbourg ) ; 1801 , in-8° ; — Gai- 
licanorum Episcoporum Dissensus innocuus ; 
1801, in-8°; — Sur les Antiquités d'Attigny, 
extrait d'un grand travail; — Sedis apostolicœ 
Triumphus, seu Sedes apostolufa, protectore 
Deo, semper invicta; Laon, 1836, in-8°. Il a 
laissé manuscrits quelques ouvrages dé contro- 
verse et des sermons. G. de F. 

VAmi de la Reliçion, année 18». — Feller, Dict. Hist. 

* hulphbhs (Abraham- Abrahamson), voya- 
geur et archéologue suédois , né à Westeras, le 
27 novembre 1734, mort en 1797 dans la même 
ville, où H était commerçant. Il voyagea en Da- 
nemark et en Russie et fit plusieurs excursions 
scientifiques dans sa patrie. On a de lui : Besa 
igenom stora Kopparbergs hœfdingdœme och 
Dalame (Journal d'un Voyage dans la province 
de Stora Kopparberg et la Dalécarlie); Weste- 
ras, 1762 ; — Historick afhandling om Musik 
og Instrumenter (Traité historique sur la Mu- 
sique et les Instruments musicaux , avec une 
notice des orgues de la Suède) ; ibid., 1773 ; — 
Samlingar till en beskrifning cefver Norr- 
land ( Collections pour une Description du Norr- 
land); ibid., 1771-1789, 5 part. in-8°; —Sam» 



Ungar'till m beskrifning œfver Gefieborgs 
lân (Collections pour une Description de la pro- 
vince de Gefleborg ou Gestrikland ) ; ibid ., 1793 ; ' 
ouvrages exacts, précis et détaillés; — Sam- 
ling till korta beskrifning œfver svenska 
stmder (Collections pour une Description abrégée 
des villes suédoises), 1. 1, Westmanland,\\sA., 
1778; t. D, Sœdermanland, ib., 1783; t. III. 
Westerbotten, ib., 1*797 ; — des poésies de peu 
de valeur. E. B. 

W esteras Stiftstidning, 1798. — AUmxnna Tidnin- 
gar, 17W, a» 18. - Biooraphiskt Lexicon, VI, M7. 

hulst (Pieter\kn der), surnommé Sol- 
siffe (tournesol ), peintre hollandais, né à Dort, 
le 18 février 1652, mort en 1708. Après avoir 
étudié sous divers maîtres, il se rendit à Rome, 
et, charmé du talent de Mario di Fiori, se con- 
sacra à la peinture des fleurs, des plantes, des 
fruits. La bande académique le surnomma Sol- 
siffe (tournesol) parce qu'il est rare que cette 
fleur ne se retrouve pas dans chacune de ses 
compositions. H y introduisait souvent aussi des 
reptiles. Ses ouvrages sont d'une bonne couleur, 
d'une touche large et facile; ils sont moins 
finis que ceux de Mignon et de Van Heem , mais 
il y règne plus d'originalité et un mouvement 
assez rare chez les peintres hollandais. Van 
Hulst a peint aussi quelques portraits, mais ils 
sont sans couleur et sans harmonie. A. de L. 

Jakob-Campo Weyerman et Houbraken, De Sehilder 
honst der Ntderlanders, t. III, p. 168-168. — Descamps, 
La Fie des Peintres hollandais, t. II, p. 868. - Pllktag- 
ton, Dietionarp of Pointer». 

î hulst ( Félix-Alexandre van ), écrivain 
belge et avoeat à la cour supérieure de justice 
de Liège, né à Fleurus (Hainant), le 19 février 
1799. Ses principaux ouvrages sont : Vie de 
quelques Belges : Philippe de Comines, Car- 
lier, Fassin, Ramone t, Lambrechts, Jeordon, 
Plasschœrt ; Liège, 1841, in-8 ;— Mélanges: 
littérature, économie politique, instruction 
publique, archéologie, etc.; Liège, 1843, 
grand in-8°. Hubert Goltzius, C. Plantin, 
Ab. Ortélius ; Liège, 1 84 6 , in-8°, avec portraits ; 
— Charles de Langhe et ses amis. P.*. 

MM. Aimé Leroy et Arthur Dlnaax, archives hist. et 
littéraires du nord de la France et du midi de la Bel- 
gique; Valenclennes, 18**, ln-8° ; nouvelle série, totn. V, 
p. 488 et 88*. 

£ hulsze {Jules - Ambroise) > mathémati- 
cien allemand, né à Leipzig, le 2 mai 1812. Il 
est depuis 1850 chargé de la direction de l'École 
Polytechnique de Dresde, et a publié, entre 
autres : Allgemeine Maschinenencyklopàdie 
( Encyclopédie générale des maehines ) ; Leipzig, 
1839-1844, 2 vol.; — Die Polytechnische 
Schule zu Dresden wâlvrend der ersten 
f&nf und zwanzig Jahre ihres Wirkens 
( L'École Polytechnique de Dresde pendant les 
premiers vingt-cinq ans de son existence 1; 
Dresde, 1853; etc. Depuis l835M.Hulsze est 
un des principaux collaborateurs i du journal 



481 HULS2E — HUMANN 

scientifique intitulé : Polytechnisches Central- 
blatt. R. l. 

Conv.-Lex. 



482 



hulthem ( Charles - Joseph - Emmanuel 
vak), hibliophile belge, né à Gand, le 4 avril 
1764, mort dans la môme ville, le 16 décembre 
1832. H fit ses études classiques au collège des 
Augustins de sa ville natale, étudia le droit à 
Louvain, et fut nommé, en 1789, membre de la 
Collace (1) de Gand. En l'an v (1797) il fut 
envoyé par le département de l'Escaut au Con- 
seil des Cinq Cents, et, de 1802 à 1807, il fit 
partie du Tribunat. Bien qu'il eût voté à Gand 
contre le projet de conférer au général Bonaparte 
la dignité impériale, van Hulthem était au mo- 
ment de la chute de l'empire français recteur de 
l'académie de Bruxelles. Après la création du 
royaume des Pays-Bas , il devint greffier de la 
seconde chambre des états généraux, secrétaire 
perpétuel de l'Académie royale de Bruxelles, et 
successivement curateur de l'université de Lou- 
vain et de celle de Gand. Il se démit en 1817 
de la première de ces fonctions, et en 1821 de 
celle de secrétaire perpétuel de l'Académie. 

Possesseur d'une assez grande fortune, van 
Hulthem avait formé une nombreuse collection 
de livres et de manuscrits relatifs surtout à 
l'histoire et à la littérature de son pays, et dont 
le catalogue méthodique, rédigé par A. Voisin, 
bibliothécaire de la ville de Gand, a été publié 
sous le titre de Biblxotheca Hulthemiana; 
Gand, 1836, 6 vol. iu-8°. Acquise par le gou- 
vernement belge au prix de 279,400 francs, elle 
forme aujourd'hui l'un des fonds de la Biblio- 
thèque royale de Bruxelles (.2). 

Van Hulthem,. qui était fort érudit, et dont la 
mémoire était remplie de faits ignorés, n'a livré 
à l'impression que des articles insérés dans les 
journaux de Bruxelles et de Gand et des dis- 
'cours prononcés dans des cérémonies publiques, 
notamment un Discours sur VÉtat ancien et 
moderne de V Agriculture et de la Botanique 
dans les Pays-Bas; Gand, 1817, in-8°. Colla- 
borateur de l'édition des Annales d'Oudegherst, 
publiées par J.-B. Lesbroussart, il lui a fourni 
des lois, des chartes et des traités de paix tirés 
de sa bibliothèque. Il a laissé sur les feuilles de 
garde de ses livres environ dix-huit cents notes 
précieuses sur l'histoire, la bibliographie et la 
littérature des Pays-Bas. Enfin, il a fait des addi- 
tions nombreuses à la Bibliographie historique 
des Pays-Bas commencée par Ermens, en 
8 vol. in-fol., manuscrits; à la Biblxotheca Bel- 
gica de Çoppens; aux Mémoires de Paquot; à 
YOnomasticon de Sax ; et à d'autres ouvrages, 
imprimés ou manuscrits, relatifs à la Belgique. 
E. Regnard. 



(1) Conseil de la ville. 

(») Le Catalogue des Tableaux, dessin», gravure*, etc., 
de van Hulthem, Gand, 18tt. in-8°, comprend 5,336 ar- 
ticles, souvent composés de plusieurs pièces. 

NOCV. BIOCK. CÉNÉR. — T. XXV. 



annuaire de VAcad. roy. des Sciences et Belles-Lettres 
de Bruxelles, année 1835, p. loi. — De Retffenberg, No- 
tice sur M. van Hulthem ; dans le Bulletin du Biblio- 
phile, «• série, 1856-1887, p. 386. — A. Voisin, Notice sur 
Ch. van Hulthem; en tête du 1 er vol. de la Bibliotheca 
Hulthemiana. — Camus, roy âge dans les Départements 
nouvellement réunis, t. H, p. iî5. — Prospectus et Dé- 
dicace aux États de Flandre de l'édition des Annales 
d'Oudegberst donnée par J.-B. Lesbroussart. 

humann (Jean-Georges), financier français, 
né à Strasbourg, le 16 août 1780, mort à Paris, le 
25 avril 1842. Après avoir acquis promptement 
une grande fortune dans les opérations commer- 
ciales et, dit-on, par la contrebande, il s'adonna 
tout jeune encore aux affaires publiques. Élu suc- 
cessivement au tribunal de commerce et à la 
chambre de commerce de Strasbourg, puis au 
conseil général et enfin à la chambre des députés 
en 1820, il se rangea dans l'opposition libérale. Il 
fut l'un des 221 signataires de l'adresse qui amena 
la dissolution de la chambre en 1830. Distingué 
par ses travaux et ses nombreux discours dans 
les discussions sur le budget, au choix du nou- 
veau gouvernement, il remplaça, en 1832, le 
baron Louis au ministère des finances , et dirigea 
cette administration jusqu'au 11 janvier 1836. 
Nommé pair de France l'année suivante, il rentra 
aux affaires avec le cabinet du 29 octobre 1840. 
Comme administrateur, Humann a suivi sans 
y rien changer le plan adopté depuis 1816. Il 
ne croyait au développement de l'industrie fran- 
çaise que sous la protection des tarifs. Il pen- 
sait aussi que le pouvoir doit tendre à abaisser 
les charges publiques, non par la réduction des 
impôts, mais en amenant, par de grandes en- 
treprises d'utilité générale, l'accroissement suc- 
cessif des revenus individuels. Lorsqu'il prit 
pour la seconde fois la direction des finances, 
la situation venait de se trouver sérieusement 
compromise en quelques mois par des inquié- 
tudes, des embarras politiques et des travaux 
extraordinaires. Le déficit avait été inopinément 
élevé de plusieurs centaines de millions. On dut 
contracter un emprunt, et le ministre, en vue 
d'accroître les revenus, ordonna un recense- 
ment général de la propriété immobilière. Cette 
opération, devenue célèbre par la rumeur qu'elle 
excita dans le parti de l'opposition et par les 
troubles qui en furent les conséquences en pro- 
vince, révéla pourtant l'existence de cinq cent 
quarante mille propriétés qui ne payaient pas 
l'impôt. Mais on reprocha au ministre la forme 
blessante du recensement; on cita de lui un mot 
qui devint une arme dans les mains des adver- 
saires du pouvoir : « Il faut faire rendre à l'im- 
pôt tout ce qu'il peut rendre! » énonciation 
trop rigide et trop absolue, en matière d'impôt, 
d'un principe de bonne administration. Du reste, 
M. Humann partageait avec celte fraction d'hom- 
mes politiques dont il faisait partie et qu'on ap- 
pelait les doctrinaires cette inflexibilité d'idées , 
ce dédain de l'opinion qui devaient avoir une si 
funeste influence sur le gouvernement de Louis- 
Philippe. Esprit tenace, travailleur opiniâtre, il 

16 



483 



HT3MANN — HUMBERT 



484 



apportait à la tribune une élocutfon plus solide 
que brillante et dans la direction de ses bureaux 
un rigorisme excessif. M. Humann mourut dans 
son cabinet de travail par la rupture d'un ané- 
vrisme et fut remplacé au ministère par M- La- 
cave-Laplagne. A. Vicque. 

Bajot, Chronologie Ministérielle; Paris, 1836, *• édi- 
tion, in-8°. — Marquis d'Audlffret, Du Système finan- 
cier de la France ,• Paris, 186», 5 voL ln-8». 

humbert, cardinal français, né en Bourgo- 
gne, mort vers 1063. 11 entra dans l'ordre de Saint- 
Benoit , à Moyeo-le-Moutier, diocèse de Toul. Le 
pape Léon IX, qui avait été évêqne de Toul, l'ap- 
pela près de lui à Rome en 1049, et le cria arche- 
vêque de Sicile, puis cardinal-évêque de Blanche- 
Selve. Aucun Français, que l'on sache, n'avait 
encore été honoré de la pourpre. Intimement lié 
avec le pape et admis à tous ses conseils , le 
cardinal Humbert fut envoyé en 1053 à Cons- 
tantinople, en qualité de légat, pour négocier la 
réunion de l'Église grecque, et de l'Église latine, 
Victor II, successeur de Léon IX, lui témoigna 
la même confiance. Il le nomma bibliothécaire 
et chancelier, fonctions qu'il conserva sous 
Etienne III et sous Nicolas U. A la mort de Vic- 
tor II, il fut un moment question de l'élever au 
suprême pontificat. On a de lui plusieurs ou-, 
vrages , entre autres un traité contre les simo- 
niaques, publié par dom Martène dans ses Aneç- 
dota, et la relation de son voyage à Constanti- 
nople. Ce dernier ouvrage, ainsi que deux écrits 
polémiques dirigés contre l'Église grecque, ont 
été imprimés plusieurs fois, notamment dans les 
Annales Ecclesiastici de Baronius. A. L. 

Histoire Littéraire de la France, — Auberi, Histoire 
des Cardinaux français. 

humbert, général de l'ordre de Saint-Domi- 
nique , né à Romans, en Dauphiné, vers Tannée 
1200, mort à Valence, dans la même province, 
le 14 juillet 1277. Sa famille, qui jouissait de 
quelque aisance, l'avait envoyé jeune encore 
étudier à Paris les belles-lettres et le droit canon ; 
il profita de son séjour dans cette ville pour 
y suivre un cours de théologie, et pour assis- 
ter assidûment aux prédications du célèbre do- 
minicain frère Jourdan.On ajoute que le curé de 
Saint- Pierre-aux-Bœufs se joignit au théologien 
et au prédicateur pour détourner le jeune Hum- 
bert de la voie que lui avait tracée l'affection 
paternelle, et le décider à revêtir l'habit de 
Saint-Dominique. C'est en 1224 , âgé d'environ 
vingt ans, qu'Humbert quitta le siècle et se fit re- 
ligieux. Ses études achevées , il fut envoyé par 
ses supérieurs dans la ville de Lyon, où if expli- 
qua l'Ecriture Sainte avec le plus grand succès. 
Rn 1242 il fut élu provincial de Toscane; en 
1244, provincial de France; en 1254, général de 
l'ordre. Mais en 1263 il abdiqua cette haute 
fonction , pour redevenir simple religieux dans 
les maisons dominicaines de Lyon et de Valence. 
On lui offrit en 1264 le patriarchat de Jérusa- 
em ; mais il le refusa. 
Ses œuvres répondent à sa vie. On n'y re- 



marque pas, au point de we littérale* uiimirite 

supérieur ; mais la plupart se recommandent par 

leur utilité, et dans tontes se montre un esprit 

simple et droit, ennemi de l'excès. Ce sont les 

écrits d'un homme qui a conduit les affaires 

d'nne grande corporation, plutôt que ceux d'un 

régent ; ou d'un moine. Ils ont moins pour objet 

d'orner ou même d'éclairer l'intelligence du 

lecteur, que de régler la conduite de sa vie. N'y 

cherchez pas de théorie : la pratique y est tout 

On désigne d'abord : Officium Ecclesiasticum 

universum tant noeturnum quarn dntrnum , 

I ad usum orâinîs Prxdicatorum. Ce titre n'in- 

1 dique pas un traité, mais un recueil de pres- 

| criptions liturgiques. Humbert n'en est pas à 

1 proprement parler Fauteur, mais le compilateur. 

! 11 est inédH. Nous mentionnerons ensuite : 

1 Bocpositio super Èegulam Sancti Augustini. 

1 Cette glose est fort longue. M. Daunou fa jugée 

, fastidieuse, dépourvue de tout éclat, de toute 

| originalité. C'est un jugement bien sévère. Nos 

: anciens avaient, au contraire, une grande estime 

1 pour cet ouvrage : non-seulement ils en ont 

; multiplié les éditions séparées, mais ils lui ont 

1 encore donné place dans le tome XXV de la 

| Bibliothèque des Pères. A notre^avis c'est un 

1 livre sagement composé et "un dés meilleurs 

! manuels de morale ascétique. îl n'est pas même 

sans quelque agrément, puisqu'on y lit des 

; anecdotes racontées avec esprit et d'assez vives 

j critiques des mœurs contemporaines. Ce qui 

! manque surtout à maître Humbert , c'est Péru- 

1 dition classique. licite quelquefois, il est vrai, 

| Sénèque et d'autres latins ; niais il les cite les 

j connaissant à peine, et sur là recommandation 

i accidentelle -de quelque Pérè. Combien de fois 

! son ignorance dé l'antiquité se trahit-elle par 

d'étranges naïvetés! Voici rétymologïe qu'il pro- 

I pose du mot templum : t Tèmpïom diciWr a 

I Theos, quod est Deus , et platea , quasi Dei 

! platea. » Cet exemple suffit; -— Expoiïtio 

super Constitutiones'ordinis JfratmrA Prx- 

; dicatorum. Cette exposition , qu'Hurnbèrt n'a 

i* pas terminée, est inédite. Écbartf en désigne 

i plusieurs manuscrits; — Liber de Fnstructwne 

j Officialium ordinis Fratrum Prxdicatorvm, 

, opuscule imprimé plusieurs fois, notamment à 

i Lyon, en 1515; — ï>e Erudithhé Pracdicalo- 

! rum. Cet ouvrage, quelquefois intitulé De Arte 

; prœdicandî, a été inséré.dans la Bibliothèque 

; des Pères, t. XXV. Le n° 1922 dés manuscrits dp 

1 la bibliothèque deTrOyes l'attribuant à Humbert, 

| abbé de ï*rulli, l'auteur du catalogue dé cette M- 

blîothèque Te signale comme inédit, et s'étonne 

! de ne pas le voir mentionné dans PÉrticle de 

I V Histoire Littéraire qui concerne l'abbé Hum- 

' bert. Que cette omission soit donc justifiée , et 

| l'erreur du catalogue de Troyes corrigée ! ( Catal. 

! des Mss. des départ., t. H, p. 793 ). — Liber de 

Praedicatione Crucis. C'est un appel aux chré- 

; tiens contre les infidèles. Humbert s'efforce de 

i prouver l'urgente nécessité d'une croisade. Nous 



485 



HUMBERT 



486 



ne parions, toutefois, de ce traité que sur le 
rapport d'Echard , car il est inédit et les exem- 
plaires manuscrite en sont rares j — Liber de 
his quai tractante, videbantur in concilia 
generali Lugduni celebrando. Il s'agit du con- 
cile conToqué dans la ville de Lyon par Gré- 
goire X, en 1274. Hartène a publié quelques 
extraits de cet ouvrage, dans son Thésaurus 
Anecdot., t. VII, et c'est tout ce que nous en con- 
naissons. Cela est certainement regrettable. Un 
gros tivre composé sur un sujet aussi spécial 
doit certainement, comme le présume M. Daunou, 
contenir des renseignements utiles pour l'his- 
toire; — VUaB. Dowinici. Cette vie de saint 
Dominique n'a pas non plus été publiée; — 
Epistolx. La plupart de ces lettres d'Humhert 
ont été insérées dans V Année Dominicaine de 
Souèges; — Epistola de Tribus Vûtis substan- 
tialibus reltgiosorum ; dans la Bibliothèque 
des Pères, t. JULV. C'est le même ouvrage 
qui est intitulé : Epistola ad omues Religiom 
de BssentiaUbus Religionis , dans le volume 
165 <«*> du Sappi. latin de la Bibliothèque im- 
périale. Tel est le catalogue des ouvrages au- 
thentiques d'Humbert de Romans. On lui en 
attribue quelques autres encore, mais qui doivent 
être restitués , suivant les derniers critiques , 
a Gérard Frachet, à Guillaume Perrault, ou res- 
ter, comme les manuscrits nous les offrent , ano- 
nymes, jusqu'à ce que de plus certains témoi- 
gnages en aient fait connaître les véritables au- 
teurs. B. H. 

Hist. Littéraire de la France. — Échard , ScHptores 
Ordinis Pradicatorum. — Richard et Giraud, Biblio- 
thèque Sacrée. 

HUMBERT, abbé de PrulK, né à Gendrex, près 
de Besançon, mort à Paris, le 14 mars 1298. Son 
élection comme abbé de Prulli au diocèse de Sens 
est du mots de juillet 1296 : il ne gouverna donc 
Qas longtemps ce monastère. Nous n'apprenons 
rien de plus sur sa vie. Ses ouvrages, tous iné- 
dits , offrent quelque intérêt. Il faut désigner d'a- 
bord ta commentaire sur la Métaphysique 
d'Aristote, Sententiee super libros Metaphy- 
sicx Aristotelis, dont on connaît trois manus- 
crits, dans la bibliothèque de l'École de Médecine 
à Montpellier, dans celle de Laon, et dans 
celle de l'Arsenal, à Paris. Hnmbert a aussi com- 
menté les Sentences de Pierre Lombard : Con- 
clusiones super IV libros Sentêntiarum, parmi 
les manuscrits des bibliothèques publiques de 
Bruges, de Cambrai, de Charieville, etc., etc. 
U avait aussi, suivant Charles de Viscb, com- 
menté le Traité de l'Ame d'Aristote; mais ce 
travail parait perdu. B. H. 

Hist. LUtér. de ta France, t. XXI, p. 86. 

BCMBEifT I er , dauphin de Viennois , mort 
vers le 12 avril 1307, appartenait à l'ancienne 
maison de La Tour-du-Pin. Ayant épousé Anne, 
fille de Guigues VII, il hérita des États de ce 
prince en 1281, après la mort de Jean I er (voy. 
ce nom ), et fut la tige de la troisième race des 
dauphins. Ce fut sous pumbert I er que les rois 



de France commencèrent à s'immiscer dans les 
affaires du Dauphiné. Au mois de décembre 
1294, lors d'un voyage qu'il était allé faire à 
Paris, Philippe le Bel le fit consentir à se re- 
connaître vassal de la couronne moyennant 
une rente annuelle de 500 livres. Pans le traité 
signé à ce sujet , les deux princes se traitèrent 
sur k pied de la plus complète égalité : le roi 
s'engageait à secourir le dauphin, contre le 
comte de Savoie, à le protéger même contre son 
suzerain, l'empereur d'Allemagne, enfin à lui 
fournir, au besoin, l'argent nécessaire pour mettre, 
ses placer fortes en, état 4e défense; Humberf, 
de son côté, promettait à Philippe le Bel de 
lui amener des troupes poutre le foi d'Angleterre. 
Ce traité, tout $ l'avantage d'Humbert, dont il 
devait flatter la vanité , et sans intérêt réel et 
actuel pour le roi de France, était un premier 
pas dans cette voie d'intrigues et de manœuvres 
qui devaient plus tord porter leqr fruit en amenant 
la cession du Dauphiné en 1349. Humbert I er 
eut pour successeur Jean II {voy, oe nom). 

Valbqnnays, Histoire du Dauphiné et des princes qui 
ont porté le nom de daupblnrf. — Claude de Rubys, 
Histoire des Dauphin* et des ricomtes de Viennois. 
— Trtcaut, Histoire des. Dauphins français. - André 
Duchesne , Histoire généalogique des Dauphins. — Le- 
quien de La Neuville, Histoire des Dauphins de Vien- 
nois, d'Auvergne et de France. - Gava , Histoire généa- 
logique des Dauphins. — Chronologie des Dauphins , 
dans X Art de vérifier les dates. — HUtoria' Delphino- 
rum [ manuscrit de la Bibliothèque ' de Lyon ). — Mer- 
cure d'avril 1711.- Histoire du Dauphiné par" Fontanteu 
(manuscrit de la Bib.unp.). On trouve en tète dut* vol. 
de cet ouvrage une savante disse nation sur l'origine et 
les ancêtres de Guigues le Pieux. — A. Lanceidl, Re- 
cherches sur Guy, dauphin; dans In Mémoires de VA- 
caaémie des Inscriptions es Belles-Lettres, t. VI H. 

RtTMBBsvr ii, né en 1313, mort à Clerraont 
(Auvergne), le 22 mai 1355, succéda en 1333 
a Guigues VIII, .son frère. Ce prince, à. qui on 
doit la réunion du Dauphiné à la France, a été 
fort diversement apprécié par les historiens. Quel- 
ques-uns en ont fait presque un grand homme, 
et pour expliquer la cession de sesfeajs se sont 
lancés dans de longues considérations politiques 
et religieuses. Nous croyons; nous, qu'il ne faut 
pas aller chercher si haut les motifs de cet acte, 
et que, ramenée a ses vraies proportions, la ques- 
tion se réduit à de mis&a>lea affaires d'argent. 
Humbert était un prince yain et léger, dévot jus- 
qu'à la sottise, généreux jusqu'à la prodigalité, 
ami du faste, du luxe, des titres et des beaux 
habits. Les moines et les grands seigneurs de 
sa eour abusèrent sans scrupule de sa faiblesse, 
les uns pour se faire grassement doter, les autres 
polir lui soutirer de bonnes terres, des équipages 
ou de l'argent. Les revenus ordinaires du Dau- 
phiné ne pouvant suffire à ses largesses , à ses 
dépenses folles et inconsidérées , il eut recours 
à mille expédients pour remplir ses coffres : il 
pressura ses sujets, pilla les juifs, altéra les 
monnaies, aliéna pièce à pièce la plus grande 
partie de son domaih* privé, puis, se trouvant 
un jour accablé de dettes, harcelé par ses créan- 
ciers, circonvenu par d'habiles conseillers, qui 

16. 



487 



HUMBERT 



48S 



n'avaient plus rien à attendre de lui, il 6e vit con- 
traint de vendre ses États et de se faire moine. 
Les folies de sa vie privée, dans laquelle nous 
allons pénétrer, ne permettent pas d'apprécier 
autrement son caractère et l'acte important qui 
a donné à la France une de ses plus belles pro- 
vinces. 

Humbert II était à Naples lorsque la mort 
de Guigues VHI vint l'appeler au gouvernement 
du Dauphiné. Les finances de cet État se trou- 
vaient alors tellement délabrées que le nouveau 
souverain ne put, faute d'argent , venir immédia- 
tement en prendre possession : il fallut que la 
régente, Béatrix, frappât les juifs d'un emprunt 
forcé pour payer ses frais de voyage. Il arriva 
en Dauphiné (décembre 1333) plein d'idées de 
grandeur qu'il avait prises à la cour de Naples. 
Il commença par se parer d'une foule de titres 
pompeux inconnus à ses prédécesseurs , tels que 
ceux de prince du Briançonnais , de duc de 
Champsaur, de marquis de Césane, de comte 
de Vienne et d'Alton , de baron palatin de La 
Tour, enfin de capitaine général des armées 
du saint-siége. 11 ne lui manquait que le titre 
de roi : il l'obtint au moyen de lettres patentes 
de Louis de Bavière qui érigeaient ses États en 
royaume, sous le nom de royaume de Vienne; 
mais, de peur de se brouiller avec le pape, il 
n'osa pas se décorer de ce titre. 

Humbert s'occupa en même temps à mettre sa 
maison sur un pied digne de lui : il fit deux rè- 
glements, l'un pour les gages de ses officiers, 
l'autre pour sa garde-robe et Je menu de ses repas 
(1336). Son attention se porta sur les plus minu- 
tieux détails : il y détermina le nombre de plats 
et les qualités de mets à servir chaque jour sur 
ses tables, et le rang que devaient garder entre 
eux ceux qui avaient droit d'y manger; il fixa le 
prix des étoffes et des fourrures de ses habits, 
de ceux de la dauphiné et de tous ses officiers, 
selon la qualité des personnes et les saisons (1). 
Cette organisation princièreet les dépenses con- 
sidérables qu'elle nécessitait ayant bientôt épuisé 
ses finances, il lui fallut recourir aux expé- 
dients. Il eut d'abord la singulière idée de mettre 
ses États en ferme (1337) ; mais des difficultés 
d'exécution firent échouer ce projet. H en conçut 
alors un autre qui lui fut suggéré par le cha- 
grin d'avoir perdu, deux ans auparavant (1335), 
André', son fils unique : c'était de faire une ces- 
sion du Dauphiné au roi de Sieile, moyennant 
des avances considérables. Ce nouveau projet 
échoua encore , et laissa le pauvre prince au mi- 
lieu d'embarras inextricables, dont il ne put sortir 
qu'au moyen de taxes arbitraires mises sur 
les juifs et en cédant au plus récalcitrant de 

(1) Ces règlements, extrêmement prédeux, par la mul- 
titude des renseignements qu'ils donnent sur le prix des 
denrées, des étoffes, etc., au quatorzième siècle, sont 
Insérés inexftmtf» dans le t. II de VHist. du Dauphiné 
de Valbonnais, p. 308-317. Ils ont été fort utiles à Ou 
Cnnge pour l'explication d'un grand nombre d'expres- 
sions de basse latinité. 



ses créanciers, un marchand d'étoffes de Lyon, 
les revenus des terres qu'il possédait en Nor- 
mandie et en Auvergne, et la rente héréditaire 
constituée en 1294 par Philippe le Bel à Hum- 
bert I er , son aïeul (voy. ce nom). . i 

Au mois d'août de 1338, il lui prit fantaisie 
de faire la guerre et de s'emparer de Vienne. A 
cet effet , profitant de la discorde qui régnait 
entre le chapitre et l'archevêque, il y lit en- 
trer des troupes , et obtint d'en être reconnu su- 
zerain par les habitante; mais cette expédition 
lui coûta cher. Le prélat dépossédé courut à 
Avignon porter ses plaintes au pape : un procès 
s'ensuivit à la chambre apostolique, et Humbert 
fut condamné à payer à son adversaire des 
dommages considérables. Pour se libérer, il 
dut vendre ses terres de Normandie (1339). 
L'année suivante, il se livra à une tentative du 
même genre sur la ville de Romans, et il ne 
réussit pas mieux. L'archevêque de Vienne, 
suzerain de cette ville, l'excommunia, et le 
pape le condamna en outre à une forte amende 
pour avoir osé toucher aux biens des gens d'é- 
glise. Ces deux affaires l'avaient rendu débiteur 
envers la chambre apostolique d'une somme 
de 16,000 florins , dont Benoit XII ne tarda pas 
à demander avec instance le payement. Humbert 
avait ses coffres vides et se trouvait fort em- 
barrassé ; il exposa inutilement sa détresse et 
offrit des terres en payement, notamment celle 
d'Avisau; le saint-père ne voulut rien entendre, 
et, pour donner plus de poids à ses réclama- 
tions il l'excommunia. C'était la mesure la plus 
propre à alarmer la conscience timorée de son 
débiteur. Le malheureux dut se mettre en mesure 
de chercher des fonds, et, en ayant enfin trou- 
vé, il chargea son proto-notaire, Amblard de 
Beaumont, de les porter à la chambre aposto- 
lique. On vit alors jusqu'à quel point on se mo- 
quait de lui : le pape ne voulut pas donner 
l'acquit des 16,000 florins à moins que la terre 
d'Avisau, dont la cession en payement l«i avait 
d'abord été proposée, n'y fût jointe. Les deux ex- 
communications dont Humbert avait été frappé 
furent ensuite levées à condition qu'il expierait 
ses fautes par ses œuvres pies, et c'est pour ac- 
complir cette pénitence qu'il fonda près de Gre- 
noble le monastère de Montfleury, auquel la ga- 
lante M me de Tencin devait plus tard donner une 
sorte de célébrité. Ces malheureuses affaires n'é- 
taient certes pas dénature à mettre de Tordre dans 
les finances d'Humbert ; aussi, songea-t-i) à faire 
une cession de ses États. Cette fois, d'après les 
conseils de quelques seigneurs de sa cour, il jeta 
ses vues sur le roi de France. Il eut en consé- 
quence une entrevue à Avignon avec le duc de 
Normandie, fils aîné de Philippe de Valois : des 
conférences s'ouvrirent, et on arrêta les ar- 
ticles d'un traité (23 avril 1343) dont il convient 
de rappeler les principales bases : 

1° Le dauphin, dans le cas où il viendrait 
à mourir sans enfants, transmettrait ses États 



489 



HUMBERT 



490 



à Philippe, duc d'Orléans, deuxième fils du roi, 
ou, à son défaut, à l'un des fils du doc de Nor- 
mandie. 

2° Dans aucun cas , le Dauphiné ne pourrait 
être incorporé an royaume, à moins que l'Em- 
pire et la France ne se trouvassent par la suite 
réunis sons un même chef. 

3° Le nouveau dauphin et ses successeurs 
devraient conserver à perpétuité les libertés, pri- 
vilèges et coutumes dn pays, et porter le titre de 
dauphin de Viennois (1). 

4° Le roi acquitterait tontes les dettes d'Hum- 
bert, passées et futures : celles-ci , cependant , li- 
mitées à la somme de 25,000 florins d'or; il lui 
assignerait 10,000 livres de rente en fonds de 
terre en Languedoc, et lui payerait une somme 
de 120,000 florins dans l'espace de trois ans; 
enfin, il lui laisserait en toute propriété diffé- 
rentes terres situées en Dauphiné, de la valeur 
de 10,000 livres de rente. 

5° La naissance d'un fils à Humbert anéanti- 
rait le traité. Dans ce cas, il ne serait tenu qu'au 
remboursement des 120,000 florins, et après sa 
mort seulement. Les pensions et les sommes 
payées pour l'acquit de ses dettes seraient per- 
dues pour le roi; 

• 6° Dans tous les cas , Humbert conserverait 
jusqu'à sa mort la jouissance de ses États. 

Ce traité ne le rendit pas plus riche : il avait 
reçu 40,000 florins à compte sur les 120,000, et 
deux mois après ils étaient entièrement épais- 
ses : il fallut de nouveau recourir aux expé- 
dients. Il fit proposer au roi de Sicile de lui céder 
les terres qu'il s'était réservées en Dauphiné 
moyennant un prêt de 30,000 florins. Cette né- 
gociation échoua ; mais la cour de France , qui en 
avait été instruite, s'en alarma, et pour lui ôter 
le prétexte de former à l'avenir d'autres pro- 
jets du même genre et, en même temps, le lier 
davantage, elle vint à son secours. Elle avança 
les termes désignés dans le traité , et affecta au 
payement des 80,000 florins qui restaient dus 
les revenus de plusieurs terres et les droits 
levés par le roi en certaines provinces (1344). 
Mais ces sources ne tardèrent pas à être épuisées : 
on lui avait donné des terres pour lui tenir 
lieu de la rente héréditaire qu'il possédait sur le 
trésor royal ; il ne les eut pas plus têt en son 
pouvoir, qu'il s'empressa de les vendre pour do- 
ter des prieurés (1345). 

A la même époque , malgré l'état précaire de 
ses finances, Humbert conçut le projet le plus 
insensé et le plus propre à consommer sa 

' (l) La plupart des historiens ont dit par erreur qu'une 
des conditions des traités d'Hombert avec la France 
était que le titre de dauphin serait porté par les fils 
aînée de ses rota. Le traité définitif, celui de 1349, 
prouve le contraire, puisqu'il fut fait en faveur d'un 
petit- fil* de Philippe de Valois. — 11 paratt qoe rien de 
posttir ne fut arrêté à cet égard , qu'on s en remit à la 
volonté des rois, et qu'ils restèrent maîtres du choix. 
Mais , comme lis en disposèrent toujours en faveur de 
leurs fil» aînés, cet usage finit par s'établir d'une manière 
Invariable dans l'ancienne monarchie française, 



ruine. Clément VI venait de publier une croisade 
contre les infidèles : Humbert se mit en tête de 
vouloir la commander. Il brigua cet honneur 
avec tant d'empressement, fit tant de soumis- 
sions au saint-père et de si magnifiques pro- 
messes de dépenses, qu'il obtint le ruineux hon- 
neur d'être le chef de l'armée chrétienne (1). Ce 
titre brillant acheva de lui faire perdre toute 
raison : il vendit sa vaisselle et ses joyaux 
pour en faire faire des croix, des panonceaux 
et autres bimbelots du même genre, destinés À 
orner son casque et la proue de la galère qui allait 
le transporter en Orient; il engagea à grands 
frais, pour lui servir d'escorte, trois cents che- 
valiers, à la tête desquels il se mit à parader 
dans les rues d'Avignon, précédé de l'étendard 
des croisés ; enfin , il assembla sérieusement son 
conseil pour lui annoncer qu'allant au secours 
des Grecs d'Orient, il avait résolu de gréciser 
son nom et de se nommer à l'avenir Ym- 
bert (2). Mais il restait un point important: 
celui de l'argent. Pour s'en procurer, il mit en 
œuvre tous les moyens que la nécessité lui sug- 
géra : il aliéna les terres qu'il avait encore en 
Languedoc; il fit publier dans toutes les pa- 
roisses de ses États qu'il vendrait à des prix 
modérés des franchises et des libertés ; il dé- 
pouilla de nouveau les juifs; mit une imposition 
générale sur ses sujets, etc., etc. Les fonds 
nécessaires étant enfin trouvés , il donna le gou- 
vernement du Dauphiné à Henry de Yillars, ar- 
chevêque de Lyon, et, nouveau Godefroy de 
Bouillon, il s'embarqua avec fracas à Mar- 
seille le 2 septembre 1345. Les historiens nous 
fournissent peu de renseignements sur cette 
croisade : Humbert remporta quelques avan- 
tages sur les Turcs; puis, cédant bientôt à 
sa légèreté naturelle , il désira revenir en Eu- 
rope. Le pape, qui avait été l'instigateur de la 
guerre, se refroidit, lui aussi : il levait difficile- 
ment les dîmes imposées à cette occasion sur 
le clergé , et les rois de la chrétienté ne lui ve- 
naient pas en aide. Craignant dès lors, avec 
raison , d'avoir à supporter seul les frais de la 
guerre, il entra facilement dans les vuesd'Hum- 
bert. En conséquence, ce prince conclut un 
traité de paix, licencia ses troupes, et revint dans 
ses États vers le commencement de septembre 
1347, après deux ans d'absence. 

Par suite de cette malheureuse expédition, ses 
finances étaient dans un état déplorable ; pour 
les rétablir il imposa une taille générale de 6 gros 
par feu, et se livra à de nouvelles et inutiles 
dépenses. Il dotait des prieurés; il achetait à 

(1) On lit dans un discours prononcé à ectte occasion 
par Clément VI: « Et quia tnter caeteros principes reperl 
iiutantem taepitu, svpplicantem hnmilius , optantem 
ardentitu, offerentem liberalius, dilectum. flllum 
Tmbertum deiphlnum Viennensem , idclrco.. . ducem 
et capltaneum contra Turcos exercitns dnximus ordl- 
nandum ( Balifte, Vite Paparum Aveniensivm). 

(S) \oy. Memorabilia H. PUati, dans le 1 11 de VBist. 
du Daupti, de Valbonnays, p. €23. 



491 



HUMBERT 



493 



crédit chez des marchands , qui le trompaient, 
des bijoux, des ornements de chapelles. Plein 
des idées de grandeur que lui avait données lé 
commandement de la croisade, Humbert voulut 
avoir un plus grand nombre d'officiers dans sa 
maison, et créa une compagnie de gardes pour 
veiller jour et nuit sùrfea personne ( f 347). Ses con- 
seillers les plus dévoués lui adressaient en vain 
de sages représentations ; nn mauvais génie sem- 
blait l'entraîner à sa perte. Deux partis S'étaient 
formés à sa cour : l'Un, vendu à Philippe de Va- 
lois, dont Amblard de Beaumont était le chef (1), 
l'encourageait très-probablement dans ces folles 
prodigalités et dans cette mauvaise administration 
qui, eh épuisant toutes les ressources du pauvre 
prince, devait l'amener forcément à abdiquer. 
L'autre, eu contraire, plus national, ayant à sa tête 
le chancelier Jacqoes Brunier, s'efforçait de le 
soustraire à ces fâcheuses influences, afin de con- 
server la nationalité dauphinoise. Ce dernier parti 
lui conseilla de se remarier (2), et proposa d'abord 
Blanche, sœur du comte de Savoie, puis Jeanne, 
Aile du duc de Bourbon. Cette dernière propo- 
sition ayant été agréée, On dressa les articles du 
contrat (1348) ; mais là cour de France se mit 
aussitôt en mesure d'en entraver la conclusion. 
Sous divers prétextes on suscita des lenteurs 
et des ajournements , et on s'y prit de façon , 
que Humbert, voyant à la fin qu'on se moquait 
de lui, déclara ne plus vouloir de ce mariage. 
Sur ces entrefaites (octobre 1348), Jacques 
Brunier était mort, et la perte de ce fidèle con- 
seiller le laissait entièrement sous l'influence du 
parti dévoué à la France. Dès lors, harcelé par 
ses" créanciers, à bout de ressources , peut-être 
aussi dégoûté des hommes , dlont sa faiblesse te 
rendait le jouet, il résolut d'abdiquer le pouvoir 
et de se faire moine. Le roi n'eut pas plus tôt 
appris cette résolution, qu'il envoya en toute 
hâte des députés pour l'y affermir. Des confé- 
rences s'ouvrirent à Tournon et à Romans (févr. 
et mars 1349), et enfin il intervint un dernier 
traité définitif par lequel le dauphin se dépouil- 
lait actuellement et irrévocablement en faveur 
de Charles, fils du duc de Normandie, moyen- 
nant le payement de ses dettes et la remise de 
certaines sommes. Lé 16 juillet suivant, les deux 
princes se réunirent # Lyon dans une assemblée 
solennelle. Humbert y parut pour la dernière fois 
entouré de toute sa noblesse ; it mit le duc Charles 
en possession de ses États, par la tradition du 
sceptre, de l'anneau, de la bannière et de l'épée 
du Dauphiné. Puis , les barons et les seigneurs 



(1) Ed 1840, lors d'un voyage d'Humbert a Pari» , Phi- 
Lippe de Valois s'était fait des créatures auprès de ce 
prince en s'at ta chant par des libéralités plusieurs gen- 
tilshommes du Dauphiné. Le proto-notaire Amblard de 
Beaumont, l'un des plus intimes conseillers d'Humbert, 
avait reçu une pension de 200 liv. de rente sur le tré- 
sor royal. (Voy. Hist. généal. de la Maison de Beaumont, 
t. II, p. 487 et suiv.) 

(2) Sa femme Marie des Baux, qui l'avait suivi dans la 
croisade, était morte à Rhodes-, en mars ou avril 1847. 



qui étaient présents prêtèrent hommage au nou- 
veau dauphin et lui firent serment de fidélité. 
Ce jour-là l'union du Dauphiné à la France fut 
consommée (1). 

Le lendemain (17 juillet 1349) Humbert prit 
l'habit de Saint-Dominique à Lyon, dans le cou- 
vent de cet ordre, et se retira ensuite au château 
de Beauvoir, dont la propriété loi avait été ré- 
servée. Il quitta le Dauphiné pour la dernière 
fois Sur la fin de 1350, et se rendit à Avignon, 
où le pape le promut aux ordres sacrés, le jour 
de Noël, dans l'intervalle des trois messes qui se 
disent en cette Solennité. Il prit le sous-diaconat 
à celle de minuit, le diaconat et la prêtrise pen- 
dant les deux autres et la célébra lui-même immé- 
diatement après. Le pape le sacra ensuite patriar- 
che d'Alexandrie, et lut donna l'administration 
perpétuelle de l'archevêché de Reims. Mais ces 
dignités ne pouvaient convenir longtemps an 
caractère inconstant d'Humbert : il se fatigua 
bien vite de son nouvel état, et voulut eu changer. 
Le roi, qui n'avait rien à lui refuser, le nomma 
à l'archevêché de Paris le 25 janvier 1364. 
Comme il n'y manquait pins que l'agrément du 
pape, Humbert se mit en route pour aller le sol- 
liciter lui-même, et ce fut pendant ce voyage que 
la mort tint l'atteindre, à Clermont en Auvergne, 
à l'âge de quarante-deux ans. Dans son testa- 
ment, il fit plusieurs legs à des églises et à des 
maisons religieuses; il eut surtout grand soin de 
donner dés ordres précis pour le payement de ses 
dettes. Son corps., transportée Paris, fut inhumé 
dans l'église des Dominicains,- à côté de Béatrrx 
de Hongrie, sa mère. 

Au milieu de ses prodigalités et de ses folies, 
Humbert laissa au Dauphiné quelques bonnes 
Institutions : c'est ainsi qu'il donna à la justice 
un cours régulier en créant, sous te nom de con' 
seil delphinal, un conseil chargé dé juger les 
affaires particulières, conseil qui plus tard fut érigé 
en parlement par Louis XI (1453): Enfin ii réor- 
ganisa, par un édit du 25 juillet 1339, l'ancienne 
université de Grenoble, et accorda divers privi- 
lèges aux étudiants pour les attirer en plus 
grand nombre. Ad. Rochas (de Die). 

Guy Ailard, Histoire de Humbert //, dauphin de Vien- 
nois ; Grenoble ( s. d. ), In-lx. — Valbonnays, Hist. du 
Dauphiné, t. II. p. 3B9-379. — Lettre du même à- f abbé 
de Vertoty insérée dans la Continuation des Mém. de 
Litt. du P. Oesmolets, t. VI. — Berriat-Saiut Prix, Recher- 
ches sur la Législation criminelle en Dauphiné., suivies 
d'une description de» repae d'Humbert II ,• Paris, 1836, 
In -8«>. — Le même . Histoire de /' ancienne Université de 
Grenoble; Valence et Paris, 1889, in-8«; — Guy Ailard, 
Les Présidents uniques et premiers Présidents du Conseil 
Delphinal ; Grenoble, 1698, ln-lî. — Le P. Texte, Disser- 



(1) Quelques mois avant son abdication (18 mars) 
Humbert renouvela plusieurs ordonnances faites autre- 
fois par ses prédécesseurs, et publia un règlement qui a 
été regardé depuis comme la loi municipale du Dauphiné. 
C'est ce qu'on appelle le Statut delphinal. Il ne se con- 
tenta pas de confirmer les privilèges et les usages du 
pays, 11 affranchit ses su)ets de diverses servitudes et 
révoqua plusieurs droits extraordinaires introduits par le 
despotisme féodal. 



493 



HUMBERT 



494 



tation sur Aunibert //, dans le Journal de Verdun t 
oct. 1743, p- toi. — Touron, Hist. de Humbert II; dans 
Hitt. de» hommes illustres de tordre de Saint- Domi- 
nique, t. II. — A.. Rochas, Biographie du Daupfyiné. - 
Humbert U à été lé sujet des deol pièces suivantes : 
Humbert il, où lu réunion du Dauphin* à la France, 
tragédie en cinq actes, en ver», lT7B,iA-8° C anonyme), — 
Baçglnet, Humbert //, ou les dauphins français, 
poëme eii un chant; Grenoble, 1Ô17, lti-8°. 

* HUMBERT (Antoine), dit de Queyras , 
probablement à cause du lieu de sa naissance, 
bel esprit du dix-septième siècie^ Il quitta le 
Dauphiné pour venir se fixer à Paris, où il a 
publié quelques romans, fîous connaissons les 
suivants : Alexandre et Isabelle, histoire 
tragi-comique; Paris, 1626,in-8°; — • Cléodonte 
et Hermelinde, ou V histoire d'è la cour; 
Paris, 1629, in-8°. L'auteur y raconte sous des 
noms supposes quelques événements du règne de 
Louis XIII. Ce roman parut la même année avec 
le titre ainsi modifié : Histoire de, la Cour, sous 
les noms de Cléomédonte et d? Hermelinde ; 
— Les Triomphes de la Guerre et de V Amour, 
histoire admirable des sièges de Cazalie et 
de VImphirée, où s'est signalée la prodigieuse 
valeur de Thorasmont , et les chastes amours 
de. ce prinee eî de Vincqmparable Martésië; 
Paris, 1Ô3Î. ih-8°. A. Rochas (de Die). 

\.eaglet-l\nïïesi\oy r £ibliot?iè(iuede$ Romans,, t. 11. — 
Catalogue de la Bibliothèque de là comtesse die Verrue 
(1737, in -8°). - Biographie du Dauphiné. 

ÉUMftÈftT (Abraham ce), mathématicien 
allemand , né à Berlin, eh avril 1689, mort dans 
cette même ville, lé 12 janvier 1761. D'une Fa- 
mille française qui avait émigré en Prusse lors 
de la révocation de l'édit dé Nantes , il entra en 
J708 dans l'armée hollandaise , en 1711 dans 
l'armée saxonne, et en 17 i9 dans le corps de génie 
de la Prusse. Il dirigea les travaux de fortification 
delà ville de Stettinet fixa sur lui l'attention parti- 
culière du roi Frédéric-Guillaume I er , qui l'appela, 
en 1 740, à Berlin , pour lui confier en partie l'éduca- 
tion des princes de Prusse: L'Académie des Scien- 
ces de Berlin l'admit en 1743 parmi ses mem- 
bres. Humbert, quoique vivant en Allemagne , 
n'a guère écrit qu'en français. Seâ principaux 
ouvrages sont : Lettres oVun Officier ingénieur 
sur quelques sujets de Fortification et de géo- 
métrie pratique ; Berlin, 1734, in-4° ; — Lettres 
Politiques, Historiques et Galantes ; Amster- 
dam, 1741-1743, 2 vol. in-12; — Traité des 
Sièges , pour servir de supplément à V Attaque 
et la Défense des places de M. de Vauban ; 
Berlin, 1747, texte allemand ; Potsdam, 1747; 

— Ouvrages divers sur les Bettes* Lettres, V Ar- 
chitecture civile, militaire, les Mécaniques 
et la Géométrie; Berlin, 1747; — Nouveau 
Traité dit Nivellement; ibid., 1750; — L'art 
du Génie pour instruction des gens de guerre , 
ibid., 1755; texte allemand, Bernbourg, 1756; 

— une série d'articles dans les Mémoires de 
VA cadémle de lier lin, dans la Bibliothèque Ger- 
manique et dans le Journal de Berlin ; enfin 
une traduction allemande de Y Attaque et Dé- 



fense desplaees de Vauban (Der Angri/fund 
die Vertheïdigung der Festungen ), avec com- 
mentaires ; Berlin, 1744-1745, 2 vol. R. L. 

Rathlef, Geschichte jetttlebender Gelehrten, vol. V, 
p. 53. — Strôdtmann, Gelehrtes Europa t vol. V, p. iW. - 
Rirsching, Handbuch. — Meusel, Lexicon der von 17W- 
iSOû verstorbenen deutschen Schriftsteller. — Éloge de 
Humbert, par J.-H.-S. Forraey. 

humbert (Jean- Joseph- Amable) , général 
français, né à Rouvray (Lorraine), le 25 no- 
vembre 1755, mort à La Nouvelle-Orléans, en fé- 
vrier 1823. Il était, dit-on, marchand de peaux 
de lapin à l'époque de la révolution. Intelligent 
et courageux, doué d'une, belle taille, il se jeta 
dans la carrière militaire, et parvint jusqu'au grade 
de général de brigade , auquel il fut promu le 
9 avril 1794. Employé à l'armée de l'Ouest, il 
en parcourut divers cantonnements , et se rendit 
seul à une entrevue demandée par un chef' de 
chouans. Après s'être plaint plusieurs fois de 
diverses infractions faites à l'armistice par Cor- 
matin-Desoteux. il opéra l'arrestation de ce chef, 
dont les jours furent épargnés. Aux approches 
de la révolution du 18 fructidor, le général Hum- 
bert se déclara en faveur du Directoire. Il fut 
sou veut maltraité dans les journaux du parti 
Clichyen, qui, le raillant sur son premier état, lui 
lancèrent force épigrammes. L'année précédente 
le général Hoche,. qui avait apprécié ses capa- 
cités à l'armée de l'ouest , l'avait demandé pour 
commander, sou» lui , les troupes de débarque- 
ment de l'expédition d'Irlande, entreprise en 
1796, et qui, par une circonstance fatale, n'avait 
pas réussi. Pendant une brume épaisse, qui 
dura plusieurs jours, l'escadre française avait 
été dispersée , et la frégate qui portait le général 
en chef ayant fait fausse route, avait été obligée 
de rentrer dans un port français. En 1798 fut 
préparée nne seconde expédition composée de 
deux escadres. La première, portant Humbert 
avec environ 1 100 hommes , prit terre , le 4 août, 
àKillala, sur la cote occidentale d'Irlande, où un 
certain nombre d'habitants du pays vint se 
joindre à lui. La seconde escadre n'arriva que 
quelques jours après , fut battue par des forces 
supérieures, et ne put opérer le débarque- 
ment. Humbert remporta d'abord quelques avan- 
tages ; mais bientôt sa petite troupe , réduite 
à 844 hommes, fut enveloppée à Conangen 
(8 septembre,) par l'armée de lord Cornwallis, 
forte de f5,000 hommes, et obligée de mettre bas 
les armes. Les instructions dont Humbert était 
porteur tombèrent entre les mains du gou- 
vernement anglais, qui les fit imprimer. Pri- 
sonnier sur parole, Humbert obtint par ses 
bonnes manières des succès que sa valeur avait 
déjà préparés; il fut échangé, et vint aussitôt 
reprendre du service à l'armée du Danube , où il 
fut blessé à la fin de 1799. Il fit ensuite partie 
dé l'expédition de Saint-Domingue (1802) , et, 
sous les ordres du général Leclerc, il chassa les 
noirs du Port-au-Prince. Après la mort de Le- 
clerc, il repassa en France (1803), accompagnant 



495 



HUMBERT — 



la veuve de son général, Pauline Bonaparte. 
« Républicain très-décidé, dit Le Bas, Humbert 
fnt mal accueilli de Napoléon , tandis qu'on fai- 
sait circuler le bruit qu'il était fort bien avec sa 
soeur : ce double motif le fit exiler en Bretagne. » 
Se voyant à la veille d'être arrêté , il passa fur- 
tivement aux États-Unis d'Amérique, où, quel- 
ques années après l'insurrection des colonies espa- 
gnoles, il vint tenter une entreprise aventureuse. 
Il rassembla à La Nouvelle-Orléans un millier 
d'hommes de diverses nations, et, avec l'aide du 
chef mexicain Toledos, atteignit Kl-Puente-del- 
Rey, entre Xalapa et Vera-Cruz, afin de se 
joindre au généralissime des Indépendants , don 
Jose-MariaMorelos, qui avait succédé à Hi- 
dalgo del Costillo (voy, ce nom ). Cette jonction 
ne put s'opérer : Morelos, battu à Atacama et pris 
à Tepecuacuilco (5 novembre 1815), laissa 
Humbert abandonné à ses seules forces. Celui-ci 
lutta quelque temps, souvent avec avantage, 
contre le vice-roi Calleja. Malgré des renforts 
reçus par le RiodelNorte et du Nueva-Santander, 
il dut se réfugier dans les États-Unis, ef y mou- 
rut. H. Lesveur. 

Le Moniteur général, an vr, n« 85»; an vn, n»« 15, 
18, ît, *i, î07, 86*. — Thiers, Histoire de la Révolution 
française. — Resumen historico de la Insurreeion de 
Nueva-Espana, desde su origen hasta el desembareo 
del senor E.X. de Mina; Mexico, 1881. — Mahul, An- 
nuaire Nécrologique, année 1888. — Le Bas, Dict. ency- 
clopédique de la fronce. 

humbert (Sébastien), homme politique 
français, né dans le Barrois, en 1749, mort à 
Bar-le-Duc, en 1838. n était employé dans la régie 
lorsque éclata la révolution. Partisan des idées 
nonvelles et possédant quelque éloquence natu- 
relle, il fut élu à plusieurs charges municipales. 
En septembre 1792, les électeurs de la Meuse 
l'envoyèrent à la Convention. Lors du jugement 
de Louis XVI, il s'exprima ainsi : « J'ai déclaré 
Louis coupable de haute trahison; j'ai voté 
Tappel au peuple : je dois respecter le vœu de 
la majorité. Je propose la réclusion pendant la 
guerre et le bannissement à la paix. » Humbert 
fut réélu par son département pour siéger au 
Conseil des Cinq Cents; il sortit de cette assem- 
blée en mai 1798, et devint commissaire du gou- 
vernement près de la trésorerie nationale. Il 
occupa cette place plusieurs années , donna sa 
démission avant la chute de l'empire, et finit ses 
jours tranquillement , dans son pays natal. 

H. L. 

Moniteur universel dn tOjaOYler 1798; an vi, n M 239, 
s», tu. — Biographie Moderne ( 1806). — Arnanlt , Jay, 
Jouy et Norvtm, Biographie des Contemporains ( 188 S). 

humbert (Jean), orientaliste suisse, né à 
Genève, le 30 mars 1792, mort le 19 septembre 
1851. Après avoir étudié les langues orientales 
à Paris, il fut nommé, en 1823, professeur d'a- 
rabe à l'Académie de Genève. Il était cor- 
respondant de l'Institut de France ( Académie 
des Inscriptions). On a de lui : Anthologie 
arabe, ou choix de poésies arabes inédites, 
traduites en français, avec le texte en 



HUMBOLDT m 

regard et accompagnées d'une version latine. 
littérale; Paris, 1819, in-S°; elle contient 65 
pièces ; — Coup d'ceil sur les Poètes élégia. 
que* français; ib., 1819; — Discours sur l'U- 
tilité de la Langue Arabe ; Genève, 1823, in-8° ; 

— Commentaire historique et critique sur 
la tragédie de Mahomet; ib., 1825, in-8°; 

— Choix de Poésies orientales en vers et en 
prose, faisant partie de la Bibliothèque Choisie 
de Méquignon-Havard ; Paris, 1830, in -8°; — 
Arabica Chrestomathiafacilior;GeDère, 1834. 
Ce recueil bien fait a été réimprimé au Caire , 
en 1837, à l'usage des Arabes; — Arabica Ana- 
lecta inedita; ib., 1838, h>8°; — Guide de 
la Conversation Arabe; 1838; — Nouveau 
Glossaire genevois; — des articles dans le 
Journal de Genève, dont il fut l'un des fonda- 
teurs. E. B. 

Qnérard , La France Littéraire. — Louandre et Bour- 
quelot. Lu Littérature française contemporaine. 

* humbert (François), orthopédiste fran- 
çais, né à Châlon8-sur-Marae , le 22 octobre 
1776, mort à Morley, le 4 juin 1850. Il servit 
depuis 1795 jusqu'en 1800 comme chirurgien 
dans les armées, et inventa un appareil à injec- 
tions pour les vaisseaux lymphatiques. Fixé à 
Morley (Haute-Marne), il s'occupa de la gué- 
rison des déviations de la taille et du rachitisme, 
et fonda dans cette ville, vers 1820, uu des pre- 
miers établissements orthopédiques. Sa méthode 
pour le traitement de la luxation du fémur, dé- 
crite dansle livre intitulé : Essai et Observations 
sur la manière de réduire les Luxations spon- 
tanées de V articulation ilio-fémorale , mé- 
thode applicable aux luxations congénitales 
et aux luxations anciennes par cause externe 
(avec Jacquier), 1835, lui valut de la part de 
l'Académie de Médecine le prix Montyon. On 
a aussi de lui : De V Emploi des moyens 
mécaniques et gymnastiques dans le Traite- 
ment des Difformités du système osseux; 
1335, 4 vol. in-8°, et 3 vol. de planches 
in-4°; — De l'Invention et de l'emploi de 
l'Hybomètre, instrument destiné à faire con- 
naître les divers changements que le corps 
éprouve par suite d'une incurvation du ra- 
Chis; 1834. J. V. 

Documents particuliers. 

HUMBERT AUX BLANCHES MAINS. Voy. 

Satoje. 

humboldt (Charles -Guillaume, baron de), 
poète, critique, philologue, homme d'État, l'un 
des plus grands esprits de l'Allemagne, naquit à 
Potsdam, le 22 juin 1767. Il appartenait à une 
famille noble de Poméranie. Son père, Alexandre- 
Georges de Humboldt, major dans l'armée pi us- 
sienne et chambellan du roi , avait épousé une 
veuve, M me la baronne de Holwede , qui, ayant 
déjà un fils de son premier mariage, avait confié 
son éducation à l'écrivain Joachim Campe. Campe, 
si connu au dix-huitième siècle par ses écrits 
pédagogiques, était donc précepteur dans la mai- 



497 



HUMBOLDT 



498 



son Je Hamboldt , lorsque deux enfants y na- 
quirent, Guillaume en 1767, Alexandre en 1769; 
et c'est ainsi que le célèbre philanthrope fat le 
premier maître de ces denx intelligences qui de- 
vaient embrasser plus tard tous les domaines de 
la science et des lettres. Quelques années après, 
Campe fut remplacé auprès de ses élèves par un 
grave et 3avant jeune homme nommé Kunth, qui 
joua par la suite .un rôle important dans l'admi- 
nistration prussienne et devint l'ami du baron 
de Stein. Il n'y eut, dès le premier âge, que 
d'austères influences autour des deux jeunes 
frères. Guillaume de Humboldt avait douze ans 
quand son père mourut; sa mère, bien qu'at- 
teinte d'une maladie grave , redoubla de zèle pour 
l'éducation de ses fils, et trouva des auxiliaires 
dévoués chez plusieurs maîtres éminents. Le phi- 
losophe Engel, qui était alors un des chefs de la 
littérature sérieuse dans le nord de l'Allemagne et 
qui fut plus tard employé à l'instruction du roi 
Frédéric-Guillaume ni, exerça une action parti- 
culière sur Guillaume de Humboldt. Le premier 
écrit du jeune Guillaume est comme un résumé 
des leçons de cet excellent maître; c'est une 
étude , composée par lui à dix-neuf ans , sur 
Dieu , la Providence et l'immortalité de l'âme 
d'après Socrate et Platon. Enfin, en 1788, après 
avoir étudié quelques mois à l'université de 
Francfort-sur-1'Oder, Guillaume de Humbçldt ar- 
rivait à Goettingue et s'initiait aux mystères de la 
philologie, sous la direction de l'illustre Heyne. 

La jeunesse de Guillaume de Humboldt fut à la 
fois enthousiaste et sévère. H aimait, il recher- 
chait avec passion les hommes célèbres de son 
temps , mais déjà il savait les juger. Le généreux 
publiciste Georges Forster, gendre du grand phi- 
lologue Gottfried Heyne, exerça une singulière 
attraction sur son esprit ; Forster fut l'ami de 
sa jeunesse , comme Schiller celui de son âge 
mûr. Grâce aux recommandations de Forster, 
Humboldt put connaître intimement quelques- 
uns des chefs de la littérature allemande, entre 
autres Jaeobi et Jean de Muller. « C'était ma 
passion, écrivait-il quarante ans plus tard, de 
voir de près les hommes célèbres , de les étu- 
dier avec soin, de me représenter exactement 
leur manière de vivre et de penser; je les rat- 
tachais à des idées générales; je classais les 
hommes, les esprits ; j'en faisais, pour ainsi 
dire , une science particulière. » 

Guillaume de Humboldt avait vingt-deux ans 
quand la révolution française éclata. Nourri, 
comme il l'était, des principes du dix-huitième 
siècle , élevé par des disciples de Rousseau , il 
salua d'un cri d'enthousiasme la transformation 
de la France. Dès le mois de juillet 1789, il partit 
pour Paris avec son ancien maître, l'honnête 
et naïf Campe. Campe était enivré de joie; il ap- 
préciait tout avec les illusions d'un enfant : ces 
événements qui allaient renouveler le monde au 
milieu de si terribles orages lui apparaissaient 
comme une idylle; et il nous a laissé, dans le 



! récit de son voyage, l'expression de sa confiance. 
Humboldt voyait les choses d'un regard plus 
sûr. A la fois plein de sympathie et d'inquié- 
tude, il continuait sur les hommes réunis et sou- 
levés ces études de philosophie morale qu'il 
avait commencées sur les individus célèbres de 
son époque. L'homme d'État se manifestait déjà 
à travers les* émotions d'une âme juvénile. Quand 
il revint en Allemagne, au mois de septembre, il 
n'avait rien perdu de ses généreuses croyances ; 
mais cette leçon de politique en action avait pré- 
paré son intelligence à des méditations plus 
hautes. Deux ans après il publiait son premier 
ouvrage ; c'étaient quelques pages rapides, sen- 
sées, un programme de philosophie politique, 
provoqué par les événements de la France. Ce 
mémoire, publié en 1792 dans le Berliner Mo- 
natschrift, portait ce titre : Idées sur l'organisa- 
tion de V État 9 à propos de la nouvelle consti- 
tution/rançaise (Ideen ûber Staatsverfassung 
durch die neue franzôsische Constitution 
veranlasst. Voy. Œuvres complètes de G. de 
Humboldt, 1. 1, p. 301 ). L'auteur y condamne 
avec force l'erreur dès théoriciens qui prétendent 
fonder une constitution sur des idées abstraites. 
La même année, Guillaume de Humboldt ré- 
digeait un ouvrage plus étendu auquel il voulait 
donner ce titre : Idées sur un essai de déter- 
miner les limites de Faction que doit exercer 
VÉtaU Son travail terminé, il avait renoncé à 
le mettre au jour, jugeant le moment peu oppor- 
tun pour des discussions de ce genre; le ma- 
nuscrit, égaré puis retrouvé enSilésie, fut publié 
à Breslau quelques années après la mort de l'au- 
teur, et M. Alexandre de Humboldt l'a inséré 
dans le 7* volume des Œuvres complètes de son 
frère. L'âme de ce livre, si je puis ainsi parler, 
c'est un sentiment très- vif de la liberté indivi- 
duelle. Le type de la société par excellence , 
aux yeux de Féminent publiciste, ce serait un 
ordre de choses où il y aurait aussi peu d'en- 
traves que possible au développement légitime 
de l'homme. Dans un temps où les législateurs 
révolutionnaires faisaient prédominer l'idée de 
l'État, on aime à voir les droits de la personne 
humaine revendiqués avec tant de précision et 
de noblesse. Le chapitre sur la religion n'est pas 
moins intéressant. Plein de respect pour tout ce 
qui élève l'âme , G. de Humboldt comprend la 
grandeur du sentiment religieux, mais il place 
à la même hauteur la loi morale qui guide 
l'homme à la vertu. La philosophie de G. de 
Humboldt, est une sorte de stoïcisme, non pas 
sévère et attristé, comme celui de Marc Aurèle 
et d'Épictète, mais un stoïcisme rassurant 
et enthousiaste. Disciple de Kant,il voit dans la 
moralité le plus haut degré de la vie religieuse; 
et ce mot représente pour lui l'épanouissement 
harmonieux et splendide de toutes les facultés 
de notre nature. De là une idée très-hardie de 
la dignité humaine, un sentiment très-élevé et 
très-pratique à la fois du rôle qui appartient à 



499 



HUMBOLDT 



500 



l'homme et des devoirs que ses droit» lui impo- 
sent. Telle est sa confiance dans la nature hu- 
maine que la morale, dégagée môme de la reli- 
gion, lui parait suffire à l'accomplissement de 
nos destinées, ou plutôt la loi morale prend tous 
les caractères sublimes de la loi religieuse dans 
cette àme supérieure. A une certaine hauteur, 
on l'a dit, toutes les. aspirations de l'esprit hu- 
main se réunissent, tous les rayons de la vérité 
se confondent. L'idéal de Guillaume de Humboldt, 
c'est Tidéal de. la noblesse de l'homme. Ainsi, 
une virile intelligence des devoirs de l'homme 
et des droits qui en résultent, à une époque ou 
l'État semble vouloir étouffer l'individu; une 
impartialité philosophique et religieuse dans un 
temps où le sentiment exalté des droits du genre 
humain semblait exclure le respect des religions 
positives, voilà les traits qui caractérisent dès le 
premier jour la philosophie de Guillaume de Hum- 
boldt. C'est parla que , supérieur au dix-hui- 
tième siècle, il prépare de> l'âge qui va suivre. 

Dans sa recherche enthousiaste de l'idéal de 
l'homme* Guillaume de. Humboldt se prit de 
passion pour l'antiquité hellénique. Le pays qui 
a créé l'art, la poésie, la philosophie, et donné 
au monde les premières constitutions libres, la 
patrie de Sophocle et de Platon , de Phidias et 
dePérielès* offrait au jeune penseur un éclatant 
sujet de méditations. C'était le moment où de 
grands philologues , Gottfried Heyne et Frédé- 
ric-Auguste Wolf, renouvelaient f étude de 
l'antiquité. Cette philologie, qui agrandissait 
chaque jour son domaine, accueillit avec empres- 
sement les indications de Guillaume de Humboldt. 
Wolf professait depuis neuf ans a l'université 
de Halle quand Guillaume de Humboldt, en 1 792, 
se présenta ehez lui comme un disciple avide de 
savoir, et lui demanda la solution de plusieurs 
problèmes; il comprit dès le premier mot qu'un 
tel disciple était déjà un maître. L'étude de 
l'antiquité, pour Guillaume de Humboldt, ce de- 
vait être une étude vivante. Interroger Phidias 
et Sophocle * c'était contempler le genre humain 
dans son héroïque adolescence , et il fallait que 
ce travail fût accompli en vue de l'humanité 
nouvelle; sans cela, l'érudition n'est qu'une pré- 
tention pédantesque ou une curiosité frivole. Un 
écrit de Humboldt sur ce sujet , une sorte de 
programmé intitulé Essai sur les Grecs 1 fit 
grand bruit en 1792 parmi les savants de Halle 
et d'Iéna. Wolf, Dalberg, Schiller, le lurent 
avec enthousiasme; Wolf surtout s'en inspira, 
et quatorze ans pins tard , en publiant son Ex- 
position de la Science de V Antiquité ( Dars- 
telluftg der Alterthums-Wissenschaft, dans 
le Muséum der Allerthums-Wissenchaft, 
vol. I e1 , 1806) , il proclamait, dans la langue 
même de Platon , tout ce qu'il devait à son excel- 
lent compagnon d'études philologiques, <ru(iç(^ 
XoXoTfowvtéç xiv6ç 7to8' V)u.ïv xoXoû x'aYarôov. 

Guillaume de Humboldt avait épousé, au mois 
de juillet 1791, M Ue Caroline Dacheroden, esprit 



facile et brillant , qui s'associait sans pédantisme 
à ses belles études sur la Grèce. Pendant un 
séjour qu'il fit il la campagne (c'était dans on 
domaine de sa femme appelé Auleben, non loin 
de Nordhausen ), il employa les loisirs de sa soli- 
tude à lui enseigner la langue d'Homère. Il lisait 
F Odyssée avec elle, et quand il entendait sur les 
lèvres de cette compagne aimée les paroles que 
le poète fait prononcer à. Pénélope et à Naosi- 
caa, il lui semblait qu'ii comprenait mieux la 
grâce et la simplicité de l'art antique. Wolf les 
visitait souvent danâ cette retraite. Aux fêtes 
de Noël, aux congés de Pâques , quand les tra- 
vaux de l'université le laissaient libre, il allait 
trouver Guillaume de Èhimboldt, et c'est 
peut-être là, entre Humboldt et sa compagne, 
que le grand philologue écrivit maintes pages 
de ces Prolégomènes sur ti'omere ? qui allaient, 
deux ans plus tard, foire une révolution dans la 
critique. 

Un an après avoir lié cette intimité sî féconde 
avec l'auteur des Prolégomènes, Guillaume de 
Humboldt allait conquérir une antre amitié qui 
devait tenir aussi une place immense dans sa 
vie. Au mois d'avril 1793 11 alla visiter Schiller 
à léna; il l'avait déjà rencontré plusieurs fois, 
soit à Weimar, soit à ïéna , en 1789 et 1790 ; 
mais, dans ces rencontres rapides, Guillaume de 
Humboldt n'avait pas su se faire apprécier do 
poëte, et Schiller avait même des préventions 
contre lui. Ces préventions disparurent bien 
vite après quelques heures d'entretien. Schiller 
s'occupait alors de philosophie ; il avait annoncé 
à l'université d'Iéna un cours sué Pesiliétique; 
Guillaume dé Humboldt rendit à Schiller les 
mêmes services qu'il venait dé rendre à Wolf. 
il fut pour lui , je n'ose dire un maître , mais 
un de ces compagnons d'études qui excellent à 
soutenir le courage , à ranimer l'inspiration , à 
éveiller maintes Idées fécondes. On sait quelle 
était l'amitié de Schiller pour Kœrner, ce con- 
fident de toutes ses pensées , ce critique franc 
et loyal qui était pour ainsi dire sa conscience 
littéraire ; Guillaume dé Humboldt occupa bientôt 
dans le. cœur du poëte un rang à peu près égal 
à celui de l'excellent Kœrner. ta correspondance 
de Schiller avec Kœrner est un document indis- 
pensable à qui veut étudier le développement 
poétique de Fauteur de Guillaume Tell; sa cor- 
respondance avec Guillaume de Humboldt con- 
tient aussi des indications du plus grand prix. 
Schiller exerça une influence salutaire sur Guil- 
laume de Humboldt; il éveilla chez lui le goût de 
l'action , le désir de produire , et l'arracha aux 
jouissances exquises, mais dangereuses, de la 
contemplation solitaire. Guillaume de Humboldt , 
à son tour, lui rendait le courage et l'espoir, 
quand le poète , tout occupé de ses travaux de 
philosophie et de la préparation de son ensei- 
gnement , se croyait mort pour toujours à la 
poésie. Il connaissait Schiller, a-t-on dit , mieux 
que Schiller ne se connaissait lui-même. II 



501 



fiUMËOLDT 



502 



devint aussi l'ami et le conseiller littéraire 
de Goethe. Dès les premiers temps de cette fra- 
ternelle alliance qui unit l'auteur de Faust et 
l'auteur de Don Carlos, Guillaume de Humboldt 
fut associé aux confidences des deux amis. 
Qcethe travaillait alors à son poème à'Bermann 
et Dorothée; il en adressait souvent des frag- 
ments à Schiller, qai habitait encore Iéna, et en 
même temps qu'il tut demandait son avis , il le 
firiait aussi de soumettre son œuvre à la cri- 
iqae de Guillaume de Humboldt. Gœthe lui- 
Même vint passer quelques mois à Iéna pour 
achever son œuvre sous les yeux de ses amis. 
Iéna présentait alors le brillant spectacle que 
Weimar devait offrir un peu plus tard; cette 
petite ville, si calmé, si paisible , était un foyer 
ardent de travail et de poésie. Tandis que 
Fiente commençait à étonner les esprits et à 
ravir les âmes par l'exposition de son audacieux 
système, Gœthe mettait la dernière main à sa 
familière épopée, Schiller achevait son esthé- 
tique , Guillaume Schlegel traduisait Shakspeare, 
et Guillaume de Humboldt s'essayait à reproduire 
en vers VÂgamemnon d'Eschyle. Un autre vi- 
siteur augmentait l'éclat de cette réunion; 
M. Alexandre de Humboldt, célèbre déjà par 
ses travaux scientifiques, était venu trouver 
son frèreà Iéna, « et il répandait les dons de son 
savoir, écrit Gœthe à Knebei , comme une véri- 
table corne d'abondance ». C'est au milieu de ces 
jouissances de l'esprit , au milieu des travaux 
de Fichte ; des entretiens de Schiller, et de ses 
propres tentatives poétiques, que Guillaume de 
Humboldt avait vu grandir le gracieux chef- 
d'œuvre de Gœthe. 

Le nom de Guillaume de Humboldt est associé 
pour toujours au nom d'ffermann et Doro- 
thée. Est-ce seulement parce que le critique a 
aidé le poète de ses conseils, parce que maintes 
questions de forme et de prosodie ont été réso- 
lues par lui sur la demande de Gœthe , parce 
que dans un voyage à Berlin il a surveillé lui- 
même l'impression de l'ouvrage et qu'il s'est ap- 
pliqué jusqu'au dernier jour à en assurer la per- 
fection suprême? C'est surtout parce que Guil- 
laume de Humboldt a écrit un commentaire 
d'Bermann et Dorothée , et que ce commen- 
taire est un des chefs-d'œuvre de la critique al- 
lemande. Il y avait déjà près d'un an que 
Guillaume de Humboldt avait quitté ses amis 
d'Iéna; il était retourné à Berlin, et de là il 
était parti pour un long voyage dans le midi de 
l'Europe. Un jour, en 1799, Schiller reçoit de* 
Paris un manuscrit portant ce titre : Essais et' 
thétiques sur J'Hermann et Dorothée de Ôte- 
the. C'était le commentaire de Guillaume de 
Humboldt. Pendant sou séjour à Paris, et avant 
de se diriger vers l'Espagne, il avait résumé 
dans ee livre le résultat de ses méditations sur 
l'art , de ses entretiens avec Schiller et Kœrner, 
de ses études d'après Kant et Fiente, de toutes 
les inspirations poétiques que le génie créateur 



de Gœthe avait éveillées au fond de son âme. 
J'ai dit que Guillaume de Humboldt était part! 
pour l'Espagne. Il avait depuis longtemps le 
de*ir de visiter l'Italie et les autres contrées de 
l'Europe méridionale. Les craintes que lui ins- 
pirait sa inëre, atteinte d'une maladie incurable, 
l'avaient empêché de réaliser son projet. Quand 
il eut le malheur de là perdre , au mois de no- 
vembre 179o, l'idée de ce voyage, devenu pour 
lui une distraction nécessaire, se présenta plus 
vivement fi son esprit. D'ardentes ambitions 
littéraires se mêlaient chez loi à cette pensée. 
On voit par ses lettres à ses amis qu'il s'accu- 
sait amèrement dé ne pas avoir encore trouvé 
sa voie. « Plus je m'interroge moi-même, écri- 
vait-il , plus je demeure persuadé que ma vo- 
eatidrt est d'embrasser la tyhthèsê du monde 
moral, de comprendre et d'unir des choses qui 
semblent inconciliables , d'apprécier l'humanité 
sous les formes si diverses qu'elle revêt , de 
tracer une sorte d'anthropologie comparée. » Ces 
voyages devaient donc être une série de prépa- 
rations au* grand travail de sa vie, à ce travail 
qu'il se reprochait d'avoir négligé jusque-là. Il 
voulut commencer par l'Italie. Son intention 
était dé l'étudier à fond, de la posséder dans ses 
moindres détails Les hommes et les choses, 
lès classes instruites et lés classes ouvrières, le 
Clergé , l'aristocratie , les artistes , le peuple, il 
roulait tout connaître. Gœthe et Wolf lui don- 
naient déjà des notes, des programmes d'étude, 
des indications de toutes espèces. II se mît en 
route avec sa femme et ses enfants au prin- 
temps de 1797 ; son frère Alexandre s'était joint 
à lui. Ils S'arrêtèrent quelque temps à Dresde 
auprès de la famille Kœrner, puis ils se rendi- 
rent à Vienne ; de Tienne ils devaient aller en 
Italie , et de là en Espagne et en France. Les 
hostilités venaient de cesser, et la signature de 
l'armistice dé Léoben faisait espérer une paix 
prochaine. Mais bientôt cet espoir s'affaiblit; la 
guerre semble prête à renaître. Il ne retrouvera 
plus dans l'Italie cette contrée propice aux mé- 
ditations de l'étude, à l'enthousiasme de la na- 
ture et de l'art , comme à l'époque où Gœthe y 
renouvelait son génie. Est-ce le moment d'aller 
visiter Rome et Florence? Il change d'itinéraire, 
et se dirige vers la France. Il arrive à Paris au 
mois de novembre 1797 ; il visite les bibliothè- 
ques , les académies , les musées , les théâtres. 
Son esprit, si sympathique et si ouvert, em- 
brasse les choses les plus différentes, et trouve 
partout matière à de fécondes études. En même 
temps qu'il s'entretient d'Homère et de Wolf 
avec les hellénistes de l'Institut, il assiste aux 
représentations des théâtres et fait maintes com- 
paraisons curieuses entre la scène allemande et 
la scène française. Ses lettres à Gœthe , à Schil- 
ler, à Kœrner, contiennent sur ce point les plus 
intéressants détails. Enfin, après un séjour d'un 
an et demi à Paris , il se met en route pour 
l'Espagne. Ge voyage dura six mois. Ce qu'il y 



503 



HDMBOLDT 



504 



recueillit d'inspirations nouvelles, on le sait par 
sa correspondance et par de beaux fragments 
adressés à Schiller et à Goethe. Le récit de son 
excursion au couvent de Montserrat est un des 
meilleurs ouvrages qu'il ait écrits ; la peinture des 
lieux, l'observation des hommes, tout est digne 
d'éloges dans ces pages excellentes où brille avec 
une poésie élevée une philosophie profondément 
humaine. Schiller et Goethe en furent ravis. 

Mais le vrai trésor qu'il rapporta de son 
voyage en Espagne ce furent ses études sur la 
langue basque. 11 était préoccupé, nous l'avons 
dit, de son projet d'anthropologie comparée , et 
il appelait de ce nom une histoire philosophique 
de la culture humaine, un tableau comparé des 
littératures et des civilisations qu'elles expri- 
ment. A force de méditer son dessein, il arriva, 
de déduction en déduction , à ce qui est la base 
et le commencement de toute culture, la forma' 
tion des langues. Ses premiers travaux sur ce 
point furent consacrés aux anciens idiomes de 
l'Espagne et particulièrement à la langue bas- 
que. Ces études, qui ne virent le jour que plus 
tard , prolongèrent son séjour à Paris. Pendant 
que ses amis attendaient impatiemment son re- 
tour, il ne se lassait pas d'interroger les manus- 
crits et d'amasser des notes. Un jour même , 
voulant compléter les renseignements qu'il avait 
recueillis dans son voyage, il laissa sa femme 
et ses enfants à Paris , et repartit pour les pro- 
vinces basques. Enfin, son enquête terminée, ses 
matériaux recueillis et classés avec soin, il put 
revenir à Paris et reprendre le chemin de l'Alle- 
magne. Il y arriva vers la fin de l'été de 1801, et 
un an après il était chargé de représenter le gou- 
vernement prussien auprès du saint-siégc. La di- 
plomatie ne l'enleva pas aux lettres : il menait 
de front tous les travaux de l'esprit. Aussi bien, 
dans un pays comme l'Italie, l'amour des arts 
ne fait-il pas partie des devoirs d'un diplomate ? 
M. de Humboldt comprit ainsi sa tâche, et 
bientôt, tout luthérien qu'il était, il conquit 
auprès du souverain pontife une influence con- 
sidérable. Pie VII et ses cardinaux, alarmés de 
la politique du premier consul, étaient heureux 
de trouver chez le représentant d'un État luthé- 
rien, non-seulement des dispositions amicales 
qui pouvaient être utilisées plus tard, mais une 
déférence si empressée , de si vives sympathies 
pour l'Italie et le génie italien. C'est ainsi que le 
diplomate profitait des généreux systèmes du 
philosophe. Son hôtel était le rendez-vous des 
intelligences d'élite. Les membres les plus émi- 
nents de la société romaine recherchaient ces 
brillants salons dont Mad. de Humboldt faisait 
les honneurs avec toutes les séductions de 
l'esprit et de la grâce. Auprès des princes et des 
prélats on y voyait les savants et les artistes. 
Les plus nobles hôtes de la ville éternelle de- 
venaient les hôtes de Guillaume de Humboldt. 
Un -jour, c'était Mad. de Staël et Guillaume 
Schlegel , le lendemain Tieck, Welcker, Paul- 



Louis Courier, une autre fois Thorwaldsen et 
Christian Rauch. Ses lettres à Goethe et à 
Schiller, ses traductions de Pindare et d'Es- 
chyle , de belles poésies philosophiques, surtout 
le poème intitulé Rome, nous montrent quelles 
inspirations soutenaient son active pensée an 
milieu de la pratique des affaires. Citons aussi 
l'éloquente élégie qui porte ce titre : A Alexan- 
dre de Humbolt. L'illustre voyageur, revenu 
d'Amérique, avait dédié À son frère Guillaume 
ses Tableaux de la Nature ; Guillaume, poureé- 
lébrer son retour, lui renvoyait un sublime reflet 
des scènes qu'il avait décrites. Cette élégie est 
tout un poème sur l'Amérique, et l'on y voit 
grandir ce sentiment de l'humanité qui est l'ins- 
piration constante de son âme. 

Ces pures jouissances furent Interrompoes 
maintes fois par de cruelles épreuves; en 1805, 
il apprit la mort de Schiller; en 1806, une nou- 
velle plus sinistre encore vint le frapper de stu- 
peur : la Prusse avait été abattue à Iéna, et il 
ne tenait qu'au vainqueur de la rayer de la 
carte. Les devoirs de Humboldt le retenaient à 
Rome; pendant toute cette année 1807, où la 
Prusse essayait detoe relever de ses runes,il dot 
rester éloigné du mouvement qui commençait 
dans l'ombre; mais en 1808, appelé en Alle- 
magne par des intérêts de famille , il parut en 
tout hâte, impatient de revoir sa patrie et peut- 
être de la servir plus efficacement qu'à Rome. 
Cette espérance ne fut pas trompée. A peine 
était-il revenu en Prusse que le ministère Al- 
tenstein-Dohna lui confia la direction de l'ins- 
truction publique et des cultes. 

Voici une des plus belles périodes de cette vie 
généreuse. La situation était pleine de périls. 
C'est dans les premiers jours du mois de janvier 
1809 que Guillaume de Humboldt fut appelé à 
réorganiser l'instruction publique; or, le 24 no- 
vembre 1808, un homme dont il vénérait le pa- 
triotisme, le baron de Stein, venait d'être exclu 
du ministère prussien , sur un ordre impérieux 
de Napoléon ; le 16 décembre, le même baron 
de Stein avait été déclaré ennemi de l'empire 
par un décret signé du camp de Madrid,, qui 
contenait ces paroles : « Les biens que ledit Stein 
posséderait soit en France, soit dans les pays de 
la Confédération du Rhin, seront séquestrés. 
Ledit Stein sera saisi de. sa personne partout où 
il pourra être atteint par nos troupes ou celles 
des alliés. » Et de quel crime M. de Stein était- 
il coupable? Il avait voulu réveiller le patriotisme 
tle l'Allemagne. Certes, Guillaume de HumboMt 
n'était pas un homme d'action comme le baron de 
Stein ; il n'était pas disposé comme lui à déchaî- 
ner les passions populaires; mais ce patriotisme 
irrité dont on punissait le grand ministre, il en 
ressentait aussi les sublimes aiguillons. S'il ac- 
cepte la direction de l'instruction publique et des 
cultes, c'est pour travailler à la restauration de 
toutes les forces morales de la Prusse. Il accom- 
plit cette tâche avec un courage, une perse- 



506 



HUMBOLDT 



506 



rance et une élévation de vues qui seront pour 
lui un titre éternel de gloire. On a souvent ad- 
miré l'héroïque confiance de cette Prusse qui , 
courbée encore sons la main du vainqueur, au 
lieu d'invoquer seulement le droit du sabre, fait 
appel aux ressources de l'esprit. La fondation 
de l'université de Berlin en 1810, au milieu des 
inquiétudes et des afflictions de la défaite, est 
certainement un des actes qui honorent le plus 
le pays de Frédéric le Grand ; ce fut l'œuvre de 
Guillaume de Humboldt. 

Mais cette œuvre, que d'obstacles il eut à 
vaincre pour la mener à bien ! Les ministres qui 
avaient remplacé M. de Stein semblaient avoir 
été terrifiés par le décret de Napoléon. A l'im- 
pulsion énergique de l'homme d'État réforma- 
teur avaient succédé rtrrésolution et la crainte. 
On se contentait de vivre au jour le jour. Au- 
cun plan de conduite, aucune pensée générale. 
Guillaume de Humboldt était le seul qui obéît à 
une politique résolue, et cette politique rappe- 
lait trop souvent les hardiesses de M. de Stein 
pour que les autres membres du ministère n'en 
fussent pas alarmés. On lui suscita mille diffi- 
cultés ; il resta ferme à son poste tant que sa 
présence fut nécessaire à l'accomplissement de 
ses projets. Une fois sa réforme de l'instruction 
publique opérée par une législation nouvelle, une 
fois Puniversité de Berlin établie sur des bases 
solides , il se sépara d'une administration dont il 
ne voulait pas partager la responsabilité devant 
l'avenir. Il demanda au roi la permission de re- 
prendre son service dans la diplomatie , et par 
un décret du 14 juin 1810 il fut nommé ministre 
extraordinaire et plénipotentiaire auprès de la 
cour de Vienne. 

Guillaume de Humboldt avait raison : les grands 
serviteurs de la Prusse , en ce moment , n'étaient 
pas dans les conseils de Frédéric-Guillaume III. 
En se rendant à Vienne, il vit à Prague M. le 
baron de Stein , qni fuyait la colère de l'empe- 
reur des Français et répondait à ses menaces 
en préparant le soulèvement de l'Allemagne. 
M. de Stein avait applaudi aux réformes opérées 
dans l'instruction publique par Guillaume deHum- 
boldt; celui-ci fut heureux de visiter le grand 
proscrit, et l'on peut dire qu'avant de partir pour 
Vienne il prit ses instructions , comme si le baron 
de Stein était encore le premier ministre de la 
Prusse. Que devait faire Guillaume de Humboldt 
auprès du cabinet autrichien ? Travailler à la ré- 
conciliation de la Prusse et de l'Autriche, ras- 
sembler les forces de l'Allemagne, et se préparer 
ainsi aux luttes suprêmes qu'on entrevoyait dans 
l'avenir. Tel était le programme du baron de 
Stein; ce fut aussi celui de Guillaume de Hum- 
boldt. La tache n'était pas facile. Lorsque l'Au- 
triche en 1805 s'était levée contre Napoléon, la 
Prusse, trop faible encore, n'avait pu répondre 
à son appel. Maintenant l'Autriche, atterrée à 
son tour par cette foudroyante campagne de 1 809, 
ne songeait plus qu'à restaurer ses finances et à 



prolonger la paix. Le mariage de Marie-Louise 
avec le vainqueur de Wagram ( avril 1810 ) éta- 
blissait d'ailleurs entre l'Autriche et la France 
des relations qui ajournaient les espérances de 
Stein et de Humboldt. Il fallait attendre. Pen- 
dant plus de deux ans, Humboldt demeura à 
Vienne sans y remplir de rôle actif. Ses travaux 
littéraires lui furent un précieux secours pendant 
ces heures trop lentes; qui sait s'ils ne furent 
pas aussi un excellent procédé diplomatique? 
Surveillé, comme il devait l'être, par les repré- 
sentants de la France , il dissimulait sans affec- 
tation ses pensées et ses vœux. Un homme si 
profondément occupé de recherches philologi- 
ques n'était pas bien redoutable pour l'influence 
française. Enfin l'heure de l'action sonne. La 
Prusse, entraînée par la Russie, se soulève en 
1813 contre le dominateur de l'Europe : quel 
parti prendra l'Autriche? Pendant que le nord 
de l'Allemagne est en feu ; pendant que la Prusse 
entière est debout, la monarchie des Habsbourg 
hésite encore. C'est alors que Guillaume de Hum- 
boldt est à l'œuvre. Un congrès se réunit à 
Prague ; la France y est représentée par le duc 
de Vicence, la Russie par M. Anstett, l'Autriche 
par M. de Metternich, la Prusse par M. de Hum- 
boldt. Au milieu de ces terribles péripéties, dans 
l'intervalle de ces batailles qui tenaient le monde 
en suspens, les négociations étaient singulière- 
ment compliquées. Chaque jour pouvait détruire 
le travail de la veille. L'habileté, la présence 
d'esprit, la persévérance, la raison supérieure 
de M. de Humboldt finirent par triompher des 
irrésolutions de M. de Metternich. Pour un Al- 
lemand il n'y avait qu'une politique possible à ce 
moment-là : unir l'Allemagne contre la France. 
Humboldt réussit à la faire prévaloir, mais au 
milieu de quelles difficultés sans cesse renais- 
santes ! La veille du jour où le traité d'alliance 
fut signé entre la Prusse et l'Autriche, il igno- 
rait encore quelle serait l'issue des conférences. 
Enfin, le 10 août 1813, l'Autriche signa le traité 
qui l'engageait décidément dans la coalition de 
l'Europe contre Napoléon. Le baron de Stein en 
poussa un cri de joie, et dans une lettre au comte 
de Munster, il fait honneur de cette résolution de 
l'Autriche à l'influence de Guillaume de Humboldt. 
Dans toutes les conférences diplomatiques de 
1813 et de 1814, à Francfort, à Châtillon, à 
Paris, au congrès de Vienne enfin, Guillaume de 
Humboldt représenta la Prusse avec la même 
supériorité d'esprit. Une perspicacité singulière, 
une admirable netteté de principes , voilà ce qui 
caractérisait chez lui le négociateur politique. Il 
excellait à deviner les secrètes pensées de ses 
adversaires, à découvrir les parties vulnérables 
de leur argumentation, à les amener peu à peu 
vers des principes qu'ils ne pouvaient rejeter sans 
compromettre leur propre cause. A cette clarté 
impitoyable de l'esprit il joignait souvent une 
ironie fine, polie, tranchante, l'ironie d'un phi- 
losophe grand seigneur. Le Mercure du Rhin, 



507 

rédigé par te fougueux. Joseph Genres , disait de 
lui : « i est clair et froid comme un soleil de dé- 
cembre. » M. de Talleyrand, habitué a se jouer en 
maître de toutes. les difficultés de la diplomatie, 
fut plus d'une fois déconcerté au congrès de 
Vienne par l'argumentation du ministre prus- 
sien. Ce n'était plus cette temporisation ingé- 
nieuse, ces spirituelles ambages de M. de Met- 
ternich, dont il connaissait si bien tous les se- 
crets; Guillaume de Humboldt excellait dans la 
discussion , et il obligeait ses adversaires à dis- 
cuter avec lui. « L'Europe, dit un jour M. de 
Talleyrand , n'a pas trois hommes d'État de cette 
force. » 

Le congrès de Vienne n'eut pas seulement à 
régler les grandes questions internationales de 
l'Europe; il s'occupa aussi de la réorganisation 
intérieure de l'Allemagne. L'Allemagne devart- 
elle profiter de ce remaniement universel pour 
se constituée enfin comme une puissance uni- 
taire? D'ardents esprits, et M. de Stein à leur 
tète, étaient prêts aux plus grands sacrifices 
dans l'intérêt de cette unité chimérique,. « L'Au- 
triche, disait le baron de Stein , s'éloigne de plus 
en plus de l'Allemagne; ses intérêts la poussent 
de plus en plus vers l'Italie et l'Orient; c'est 
un mal, un grand mal, que cet éloignement de 
l'Autriche, et le seul moyen d'y porter remède, 
c'est de rattacher forcément la monarchie des 
Habsbourg à la patrie allemande en lui rendant 
cet empire d'Allemagne détruit par les événe- 
ments de 1806. » Étrange système chez un es- 
prit aussi résolument prussien que Tétait le baron 
de Stein t Guillaume de Humboldt combattit ce 
projet dans un mémoire qui est un chef-d'œuvre 
de raison. Un projet analogue de Capo-d^Ja- 
trias fut réfuté par lui avec la même vigueur. 
Ce qu'il y avait de triste ctans cette discussion, 
c'est que tous ces mémoires , ceux de. M. Capo- 
d'Istrias et du baron de Stein, coroine celui de 
Guillaume de Humboldt, étaient adressés* l'em- 
pereur Alexandre. C'était la Russie , au congrès 
de Vienne, qui décidait des destinées de l'Al- 
lemagne. Humboldt fut du moing un «tes, pre- 
miers à comprendre tout ce qu'une telle situa- 
tion avait d'humiliant pour son pays. Tandis, que 
le bacon de Stein invoquait jg protectorat de 
la Russie avec un patrfotfcœe, aveugle, tandis que 
M. de Metternich s'en ^éfiajt au point de vue 
spécial des intérêts autrôhjgns, Humboldt ne 
commettait ni l'une ni l'autre de ces fautes^ Aussi 
Allemand que M. de Stein, aussi opposé que 
M. de Metternich au protectorat çje la Russie, 
s'il voulait que l'Allemagne fû| forte, il voulait 
aussi qu'elle ne dût sa force qu'à elle-même. 
L'empereur de Russie savait bien que Guillaume 
de Humboldt était peu ravorahje à sa politique; 
lorsqu'il conclut avec l'empereur d'Autriche, et 
le roi de Prusse cette singulière association qui! 
appela lui-même la sainte alliance, il exigea de 
Frédéric-Guillaume fil. que Humboldt n'en sût 
, rien avant que tout fût terminé. 



HU!yïÇO^)T §08 

Guillaume de Humboldt, en J815, était au pre- 
mier rang parmi les adversaires déclarés de la 
France; s'il ne partageait pas les fougueuses 
passions des Stein et des Blûcher, il voulait ce- 
pendant nous imposer des pertes de territoire 
plus graves encore que celles que nous avons 
subies, et il a combattu sur ce point les inten- 
tions plus conciliantes de l'empereur de Russie; 
le mal qu'il a pu nous faire ne nous empêchera 
pas de proclamer la gloire qu'il s'est acquise dans 
ces délibérations du congrès de Vienne. L'histoire 
impartiale doit reconnaître qu'il y a déployé 
toutes les qualités d'un esprit supérieur et qu'il 
a étonné la vieille diplomatie européenne par la 
fermeté de ses principes, et la loyauté de sa dis- 
cussion. 

De 1815 à 1820, Guillaume de Humboldt oc- 
cupa encore des postes considérables dans le 
gouvernement de son pars, ambassadeur à 
Londres, représentant de la Prusse à la diète de 
Francfort, membre du ministère à Berlin, il con- 
tinua de servir sa patrie avec le même dévoue- 
ment Mais la politique <Je la Prusse avait bien 
changé; une, réaction odieuse avait succédé à 
1'entbousiasme dé la lutte, et Guillaume de Hum- 
boldt n'était pas un, de ces diplomates qui chan- 
gent de principes selon les circonstances. 11 s'a- 
perçut bientôt qu'il était suspect au gouverne- 
ment dont il faisait P ar % Quand les cabinets 
allemands, en 1819, soui prétexte de poursuivre 
la démagogie, mirent la main sur toutes, les li- 
bertés nationales, qiuantt les héros de 1813 fu- 
rent partout disgraciés, quanti c|es hommes tels 
que le général Gneisenau turent obligés de se 
retirer du service, Guillaume de Humboldt entra 
en lutte avec ses collègues. Il aurait pu quitter le 
ministère.; i| aima mieux l re&^r pour combattre 
dans le conseil même cette, politique insensée. H 
savait bien d'avance qu'il serait vajncu • par un dé- 
cret du 31 décembre 1819, il fût exclu du minis- 
tère et destitua de ses fonctions au conseil d'État. 
Cette <hsgrâce éclatante, un <& se& plus beaux 
titres, lui ropvTfc jja carrière de, l'étude. Le 
29 juin, 1^20, \\ lui ^ l'Académie d^ Sciences de 
Berlin, dont il eMt membre fam* 1910, w» 
mémoire sur la pJtmV>logie, compactée; c'était le 
programme de# twaux qui advient remplir la 
An de sa. vie ei immortaliser sou nom.. A partir 
de cette date, il pe se passe. n&s une an#$e oà 
quelque mémojjpfcne. soit çoœjujuniqqé par lui 4 
l'Académie., e£ chacun <fà ces. mémoires esj 
comme, le. bulletin d'un conquérait qui s'a- 
vance, ^ travers de^ régions inconnues. Quillaume 
de ItumboHt est le yérifcafcte créateur de la phi- 
lologie, comparée. Avant lui , de grands esprits, 
flaroana, Herder., FhabUè grammairien Adetoog, 
fe brillant et profond Frédéric Schl^egel, avaient 
préparé h route et fourni quelquefois des m- 
djpations de g&u> ; Humboldt est le premier qui 
ait constitué la science, Il en embrasse à la fois 
les plus hautes questions et les détails les plus 
techniques. Sa philosophie des langues, ses vues 



Ô09 HUMBOLDT 

sur l'origine dn langage, sur cettç merveilleuse 
création de l'hprame, création non pas réfléchie, 
volontaire et successive, comme le voulait la 
superficielle philosophie du dix-huitième siècle, 
mais création spontanée , instinctive, et, en un 
certain sens , toute divine , ses vues , disais-je, 
sur ces redoutables problèmes révèlent un pen- 
seur du premier ordre.. Qn n'a rien écrit de plus 
profond depuis qqe ces questions occupent d'é- 
minents esprits, et plus d'un philologue ^ont on, 
admire l'originalité ne fait que. développer les 
principes de Guillaume de Hnmboldt. Quant aux 
connaissances spéciales de, linguistique sur les- 
quelles repose sa philosophie 0u langage , elles 
sont de nature à effrayer jes plus latorieux es- 
prits. Langues de l'Asie, de (' Amérique, de la 
Polynésie, sans parler des idiomes de notre Eu- 
rope, voilà quels sont pour Guillaume de Hum- 
boldtles matériaux delà philologie comparée. Il 
étudie avec la même, précision les rapports de 
la langue basque avec le$ anciennes populations 
de l'Espagne, et lés rapports du sanskrit avec 
l'idiome parlé dans }Tle de Java. Sans désigner 
ici tant de dissertations du plus grand prix sur 
tous les points delà philologie, il suffira de citer 
son principal ouvrage : Ça Langue kawi dans 
Vile de Java, 3 volumes in-4°. Ce livre est la 
première pierre de l'immense monument qu'A 
voulait élever. Il avait l'ambition de suivre toute 
la série des langues qui se parlent dansTOcéanie 
et dan,s les lies de la ççier du Sud, persuadé qû^l 
retrouverait ainsi les anneaux de la chaîne qui 
lie l'Amérique à l'Inde. If commença par l'île de 
Java. l'A langue IVàwi , née dans cette île , ne 
présente que des rapports fortuits avec le sans- 
krit. Cen y estpas une langue inculte et populaire 
comme les autres idiomes polynésiens, c'est une 
langue poétique et savante, il suffit d'énoncer ce 
programme pour faire comprendre quelle était 
déjà, entre les mains d'un tel maître, la gran- 
deur de la philologie comparée (1). 

Les dernières années de Guillaume de Humboldt 
furent remplies par les recherches de là science , 
les joies de la famille, et les méditations philoso- 
phiques et religieuses, te stoïcisme de sa jeunesse 
avait fini par s'adqucir ; il espérai^ dans une vie à 
venir, bien qu'il n/et^ pas besoin, disanVil, de cet 
espoir, pour aimer la vejftu et remercier la Pro- 
vidence. Selon |ui, \e$ aroes qiu\ par le mérite de 
leur vie , s'étaient créé, une personnalité , étaient 
seules assurées de survivre aw eprps. Ç'étaitia pen- 
sée d'Aristote, et puisqu'il n'avaitpu s'élever à la 
croyance chrétienne, ou lui sait gré 4u moins d'a- 
voir adopté ce principe; il a dû y trouver des con- 
solations, car s'U était vrai que l'âme fût le propre 
artisan de son immortalité , Guillaume de Hum- 
boldt pouvait attendre avec confiance la dernière 
heure de son existence terrestre. Retiré au château 
de Tegel, sur les bords du lac de Spandau, il donna 

(1) Les manuscrits de G. de H. sur les langues améri- 
caines on tonraniennts vont être publiés par les soins 
d** M. fliisch'nmi!». 



510 
jusqu'à sa mort l'exemple du travail, de la 
loyauté et de la vertu. Sa femme, qui avait été 
pour lui une compagne si digne, si dévouée, était 
morte au mois de mars 1829, et cette séparation 
l'avait frappé au cœur. Trois ans après, il vit 
mourir l'auteur de Faust Gœthe, Schiller, Caro- 
line de Humboldt, tous les amis de sa jeunesse 
avaient quitté ce monde ; de cette grande géné- 
ration, son frère seul restait encore. Épuisé par 
ses longs travaux, presque aveugle, Guillaume de 
IJumboldt sentit bientôt ses forces s'affaiblir; son 
esprit, du moins, ne se voila pas; il mourut le 
8 avril 1835, à soixante-huit ans, dans toute la vi- 
gueur de sonintelligence, dans toute la sérénité de 
son âme, et au moment où ce pur esprit s'envola 
de sa prison, sa bouche récitait encore, comme 
une prière, les vers des poètes qu'il avait aimés. 
Saint-René Taillandier. 



Les Œuvres complètes de Guillaume de Humboldt ont 
été publiées par Charles Brahdes, avec une préface 
d'Alexandre de Humboldt; Berlin, 7 volumes, I8*t- 
i&jf*. - V. sur Gutlteome de Humboldt sa Çtoçra^Me 
par M. Gustave Schlesler;- l'ouvrage du même auteur 
Intitulé : Erirtiœrungen an Wilhetm von Humboldt, 
s voL; Stuttgart, 184S-18M ; et le savant livre de M. Ro- 
bert Hayra, tTilAelm von. tfrwboMt Letwisbild und 
Charakteristik; Berlin, 18(6. 

J humboldt (Frédéric-Henri- Alexandre, 
baron de ) , le plus grand savant de notre épo- 
que, frère du précédent, naquit à Berlin, le 
14 septembre 1769. Il était fort jeune lorsqu'il 
perdit son père, qui s'était distingué dans la 
guerre de Sept Ans comme adjudant du duc Fer- 
dinand de Brunswick. De 1787 à 1789, il étudia 
aux universités de Trancfort-sûr-rOder et pte 
Gœttingue, où il eut, entre autres, pour maîtres 
Gottlob Heyne et Blumenbach. Dans l'intervalle 
des vacances, il fit des excursions géologiques au 
Ôarz et aux bords du fthin, et en publia les ré- 
sultats sous le titre de tlber die Çasalte ani 
Rhein, nebst Ùntersuchungen ùber §yenùund 
Basanit der Alten ( Sur les Basaltes du Rhin , 
ainsi que recherches sur le syénite et le hasa- 
nïte, etc. ) ; ce fut là le début de ses nombreux 
et importants travaux. Le goût pour les voyages 
se développa en lui dé bonne heure, et il ra- 
conte lui-même comment : « Élevé, dit-il , dans 
un pays qui n'entretient aucune communication 
directe avec les colonies des deux Indes , habitant 
des montagnes , éloigné des côtes , je sentis pro • 
gressivement se développer en moi une vraie 
passion pour la mer et pour de longues naviga- 
tions. Le goût des herborisations, Fétude de la 
géologie, une course rapide faite en Hollande 
(au printemps, 1790), en Angleterre et en 
France, avec un homme célèbre, M. Georges 
Forster, qui avait eu le bonheur d'accompagner 
le capitaine Cook dans sa seconde navigation 
autour du gjobç, contribuèrent à donner une 
direction déterminée aux plans de voyage que 
j'avais formés à l'âge de dix -huit ans. Ce n'était 
plus te désir de ^agitation et de la vie errante ; 
c'était celui de voir dé près une nature sauvage, 
majestueuse et variée dans ses productions ; c'é- 



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HUMBOLÙT 



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tait l'espoir de rechercher quelques faits utiles 
aux sciences, qui appelaient sans cesse mes vœux 
vers ces belles régions situées sous la zone tor- 
ride. Ma position personnelle ne me permettant 
pas d'exécuter alors des projets qui occupaient 
si vivement mon esprit, j'eus le loisir de me 
préparer pendant six ans aux observations que 
je devais faire dans Je nouveau continent (!).•» 

Après le retour de son excursion avecForster, 
M. de Humboldt, destiné d'abord aux finances, 
passa quelques mois à l'école de Busch et Ebe- 
ling à Hambourg; mais, dès juin 1791, il suivit les 
cours de Werner à la célèbre école des mines de 
Freiberg, où il se lia d'amitié avec Léopold de 
Buch et André del Rio. 11 profita de son séjour 
à Freiberg pour étudier surtout la flore souter- 
raine, sujet alors peu exploré, et il résuma ses 
observations dans un ouvrage fort intéressant 
( Spécimen Florx subterranem Fribergensis 
et aphorismi ex physiologia chemica planta- 
rum; Berlin, 1793, in-4°), qu'il dédia à son maî- 
tre, le célèbre botaniste WÛldenow (2). Nommé 
assesseur au conseil des mines , il remplit , de 
1792 à 1797 , les fonctions de directeur général 
des mines d'Anspach et Bayreuth. Ces fonc- 
tions administratives ne l'empêchaient pas de 
se livrer à des recherches multipliées sur les 
mofettes, sur une lampe propre à servir dans 
les galeries souterraines, sur un appareil de 
respiration d'après les principes de Beddoes; 
en même temps il recueillit, dès Tannée 1792, 
lorsqu'il apprit les expériences de Galvani, 
les matériaux nécessaires à la publication d'un 
ouvrage important, encore aujourd'hui souvent 
cité, sur l'irritabilité des fibres musculaires et 
nerveuses ( Uber die gereitzte Muskel und 
Nerfenvaser, nebst Vermuthungen ûber den 
Chemischen Procès» des Lebens in der Thier 
und Pfianzenwelt) ; Berlin, 1797-99, 2 vol. 
in-8°) ; enfin il fut le collaborateur de Schiller 
pour le journal que le grand poète faisait paraître 
sous le titre de Die Horen ( Les Heures ). 

C'est ici que se présente, dans le développement 
de la vie scientifique de M. de Humboldt, une 
phase qu'il importe de signaler. L'illustre savant 
croyait alors à l'existence de la force vitale , 
qu'il avait définie « une cause inconnue , empê- 
chant les éléments d'obéir à leurs affinités pri- 
mitives (3). » Cette théorie, mise dans la bouche 
du philosophe Épicharme, fut développée , sous 



(l) Voyage aux régions équinoxiales du Nouveau Con- 
tinent. 

(t) Cet opuscule fut, l'année suivante , traduit en alle- 
mand par O. Fischer, accompagné de notes par Hedwig, 
et d'une prérace par F. Ludwig ( Leipzig, 1704, in-8°). 

(3) Voici ce qu'il dit, entre autres, dans les JphorUmes 
qui accompagnent sa Flora Fribergensis subterranea : 
« Rerum naturam si totam considères, magnum atque du- 
rabile, quod Inter elementa intercedtt, diserimen perspi- 
ctes, quorum altéra affinitatnm legibus obtempéra utla, 
altéra, vinclis solutls, varie juncta apparent... Vimin- 
, ternam, quae chymtca? affinitatis vincula solvft, atque 
obstat quonilnus elementa corporum libère conjungantur, 
vitalem vocamus, etc. » 



forme allégorique, dans le Génie rhodkn , notice 
gracieuse, qui plut singulièrement à Schiller 
( Horen, 1795), et que M. de Humboldt repro- 
duisit, à la prière de son frère Guillaume, dans 
les Tableaux de la Nature, Mais, dès 1797, 
depuis ses expériences sur l'irritabilité des fibres 
musculaires et nerveuses , l'existence des forées 
vitales ne lui paraissait nullement démontrée, et 
il le déclara lui-même. « Depuis lors, dit-il, je 
n'appelle plus force ce qui n'est peut-être que 
l'effet de l'action simultanée des substances par- 
ticulières et des forces physiques... Je nomme 
vivante toute substance dont les parties arbitrai- 
rement séparées changent, après leur séparation, 
d'état moléculaire sous l'influence des conditions 
extérieures permanentes. La rapidité avec la- 
quelle les parties organiques, détachées d'un or- 
gane vivant , changent d'état moléculaire, varie 
beaucoup : le sang des animaux se transforme plus 
vite que le suc des végétaux , les champignons 
se décomposent plus vite que les feuilles d'ar- 
bre , etc. En général , plus la vitalité ou l'irrita- 
bilité est grande , plus la matière animée change 
rapidement d'état moléculaire , après sa sépara- 
tion (1). v La mort de sa mère, en 1796, excita 
encore davantage le désir de voyager : il rési- 
gna ses fonctions administratives, et s'initia, soas 
le baron de Zach , à l'astronomie pratique. Après 
quelques mois de séjour à Iéna et à Vienne, il 
partit avec son ami L. de Buch pour l'Italie, 
dans le but d'y étudier les volcans. Mais lesguerres 
dont le pays était devenu le théâtre les firent re- 
noncer à leur entreprise, et ils passèrent l'hiver 
de 1797-98 à Salzboiirg et à Berchtesgaden, s'oc- 
cupant de météorologie. Là M. de Humboldt fat 
invité par lord Bristol à se joindre à une expé- 
dition qui devait se faire dans la haute Egypte. 
H accepta avec joie, et se rendit à Paris 
pour acheter les instruments nécessaires à 
cette expédition;, mais presque au même mo- 
ment il apprit le départ de Bonaparte pour l'E- 
gypte (en mai 1798), et l'arrestation de lord 
Bristol à Milan. 11 reçut le meilleur accueil à 
Paris de la part des savants , tels que Laplace 
et Berthollet ; il y fitconnaissance avec son futur 
compagnon de voyage , Aimé Bonpland , et le 
Directoire lui permit de se joindre, avec tous ses 
instruments , à l'expédition de Baudin ( voy. ce 
nom). Celle-ci ayant été ajournée, il résolut de 
prendre part à l'expédition française d'Egypte, par 
suite de l'offre d'un bâtiment que lui avait faite le 
consul suédois Skiôldebrand. Mais la frégate 
suédoise qui devait le transporter à Tunis tar- 
dant à venir, il partit avec M. Bonpland pour 
l'Espagne, où il passa l'hiver de 1798-99. L'em- 
pressement que mit le ministre espagnol , Luis 
de Urquijo, a lui faciliter les moyens de. visiter 
les possessions des Indes, le fit changer de 
plan, et le 5 juin 1799 il s'embarqua avec 

(l) Tableaux de la Nature, édlt. de 1849. t. II, p. *7i- 
V7S, de notre traduction (Paris, 18M, in-8*»). Compares 
aussi le Cosmos , 1. 1, p. 73 (de la traduction de M. Fayc) 



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son ami à La Corogne , sur la frégate le Pizzaro. 

Le navire échappa heureusement aux croisières 
anglaises, et mouilla le 19juin dans te port de Santa- 
Cruz. Les deux amis firent l'ascension du pic de 
Ténériffe et explorèrent l'île en naturalistes. Enfin 
le 16 juillet ils touchèrent, au port de Cumana, 
pour la première fois le sol d'Amérique. Ils em- 
ployèrent dix-huit mois à explorer les provinces 
4)e l'État de Venezuela, arrivèrent en février i 800 
à Caracas, quittèrent le littoral à Puerto-Caballo, 
pour gagner l'Apure et de là le Cassiquiar, qui 
réunit l'Orénoque avec l'Amazone. Le souvenir 
de ce voyage a fourni à M. de Humboldt quel- 
ques-unes des plus belles pages de ses Tableaux 
de la Nature. 

« Lorsqu'on a dépassé les vallons de Caraeas et le 
lac de Tacarigua, où se mirent les bananiers j lors- 
qu'on a quitté les champs parés de la verdure tendre 
et transparente de la canne à sucre de TaTti ou le 
sombre feuillage des cacaoyers, la vue se repose, au 
sud , sur les steppes qui bordent l'horizon dans un 
insaisissable lointain. De ce paysage , animé par une 
luxuriante végétation, le voyageur étonné arrive à la 
lisière aride d'un désert dénué d'arbres et couvert 
de rares herbes. Pas une colline , pas un rocher ne 
surgit comme un Ilot dans cet espace incommensu- 
rable. Seulement quelques fragments de couches sé- 
dimenteuses gisent épars sur une surface de deux 
cents lieues carrées, et paraissent plus élevés que 
le terrain environnant. Les indigènes leur donnent 
le nom de bancs , comme si par une sorte d'intuition 
ils avaient deviné cet état primitif où ces élévations 
étaient des bas-fonds, et les steppes mêmes le lit 
d'une vaste mer méditerranéenne. Au milieu de cette 
nature grande et sauvage vivent des peuplades di- 
verses, séparées par une singulière dissemblance de 
langages : les uns , comme les Otomaques et les Ta- 
roures, sont nomades, mangent des fourmis , de la 
gomme et de la terre ; d'autres , comme les Ifariqui- 
tains et les Macos , ont des demeures fixes , se nour- 
rissent de fruits cultivés, sont intelligents et de 
mœurs douces. De vastes espaces entre le Cassiquiare 
et l'Atabapo sont habités non par des hommes, mais 
par des tapirs et des singes réunis en société. Des 
figures gravées sur des rocs montrent que cette so- . 
litude même était jadis le siège d'un certain degré 
de civilisation... Dans l'intérieur de la steppe, c'est 
le tigre et le crocodile qui font la guerre au cheval 
et au taureau ; sur ses bords boisés, c'est l'homme 
qui s'arme perpétuellement contre l'homme. Là, 
quelques peuplades dénaturées boivent le sang de 
leurs ennemis ; d'autres, en apparence sans armes, 
mais préparées au meurtre, donnent la mort avec 
l'ongle empoisonné de leur pouce ; les tribus plus 
faibles, en foulant la rive sablonneuse, effacent 
soigneusement avec leurs mains la trace de leurs 
pas timides. Ainsi, dans la barbarie la plus abjecte , 
comme dans l'éclat trompeur d'une civilisation 
raffinée , l'homme se crée toujours une vie de mi- 
sère. Le voyageur qui parcourt l'espace, comme 
l'historien qui interroge les siècles, a devant lui le 
tableau attristant, uniforme de la discorde hu- 
maine (I). » 

Le bassin de l'Orénoque était encore peu connu 
avant le voyage de MM. de Humbold t et Bonpland* 

(I) Tableaux de la Nature (ehap. Sur les steppes et 
U* déserts), t. I,p. 13 H, et p. 40-41 (de notre trad.). 

MODV. B10GR. eÉNÉR. — T. XXY. 



Le premier trouva à ce fleuve, par le delta que 
forment ses bras , par la régularité, par la quan- 
tité, et par la grosseur de ses crues, une grande 
analogie avec le Nil. Ces deux fleuves se res- 
semblent encore en ce que, d'abord torrents 
impétueux» ils se frayent un passage entre des 
montagnes de granit et de syénite, et coulent en- 
suite lentement, bordés de rivages sans arbres 
et sur une surface presque horizontale. Leurs 
sources n'ont été encore visitées par aucun Eu- 
ropéen. L'Orénoque est du nombre de ces fleuves 
singuliers qui, après avoir serpenté à l'ouest et 
au nord, finit par s'infléchir tellement à l'est, 
que son embouchure se trouve presque au même 
méridien que ses sources. Du Chiguire et Ge- 
hatté jusqu'au Guaviare, il- court à l'ouest 
comme s'il allait porter ses eaux à l'océan Pa- 
cifique. Dans ce trajet, il envoie au sud un bras 
remarquable, le Cassiquiare, qui se réunit au 
rio Negro, exemple unique d'une bifurcation de 
deux grands bassins tout à fait dans l'intérieur 
d'un continent. La nature du sol et la jonction 
du Guaviare et de l'Atabapo avec l'Orénoque 
font dévier ce dernier brusquement au nord. 
C'est par une erreur géographique qu'on avait 
longtemps pris le Guaviare, affluent de l'ouest, 
pour la véritable origine de l'Orénoque. Les 
doutes que le géographe Buache éleva, en 1797, 
contre la possibilité d'une jonction de rorénoque 
avec le fleuve des Amazones furent complètement 
dissipés par l'expédition de M. de Humboldt, 
qu'une navigation non interrompue de deux cent 
trente milles géographiques , à travers un bizarre 
réseau de rivières, conduisit du Rio Negro 
par le Cassiquiare dans FOrénoque , c'est-à-dire 
depuis les frontières du Brésil , par l'intérieur 
du continent, jusqu'au littoral de Caracas. Le 
périlleux passage des cataractes d'Aturès et May- 
pnrès forme un des épisodes les plus intéres- 
sants de cette première expédition , déjà si riche 
en résultats. A son retour au littoral, M. de Hum- 
boldt vint à La Havane pour se rendre par le 
Mexique aux lies Philippines. Il abandonna 
ce plan à la nouvelle que les deux corvettes le 
Géographe et Le Naturaliste doubleraient le 
cap Hora et viendraient aborder à Callao de 
Lima. Pour joindre le capitaine Baudin , M. de 
Humboldt loua aussitôt un bâtiment qui le trans- 
porta de l'Ue de Cuba à Carthagène ( en mars 
1801). Mais l'expédition de Baudin prit une 
route toute différente de celle qui avait été an- 
noncée : au lieu de doubler le cap Horn, elle 
doubla le cap de Bonne-Espérance. Ce contre- 
temps lui fit manquer l'un des buts de son voyage 
au Pérou et du dernier passage de la chaîne des 
Andes. En novembre il fut favorisé par un beau 
temps, bien rare pendant la mauvaise saison dans 
la contrée brumeuse du bas Pérou , ce qui lui 
permit d'observer à Callao le passage de Mercure 
sur le disque du Soleil , observation importante 
pour la détermination exacte de la longitude de 
Lima et de toute la partie sud-ouest du Nouveau 

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Monde. Cette reprise de son voyage le conduisit i 
de Carthagène an platée» de Bogota, après deux . 
mois de navigation sur le fleuve la Magdeletae. , 
H visita, en traversant la cordillère de Qoindiu, la 
volcan de Popay an, le Paramo d'Almaguer, le haut | 
plateau de Los Pastes, et atteignit Qaito le a jan- j 
vier 1809. Cinq mois lurent consacrés à l'expie- j 
ration de la hante vallée de Quito et de la chaîne ( 
des volcans à cimes neigeuses , qui l'enseignent. 
Dans son ascension du Ohhnborsjw , qui passa 
longtemps pour la plus haute montagne du 
globe (1), il s'éleva à 18,096 pieds, hauteur à 
laquelle aucun homme n'était encore parvenu ; fl 
ne lut restait plus que 200 pieds à monter pour en 
atteindre le pic, lorsqu'il fut arrêté par une pro- 
fonde crevasse qui s'ouvrait comme un goufre 
devant les pieds du hardi voyageur. Franchis- 
sant le Paramo de Assuay, défilé des Andes, il 
descendit par Cuenca et les forêts de quinquina 
de Loxa dans la vallée de l'Amazone supérieure 
près de Jaen de Braeamoros; puis, traversant 
le plateau de Caxamarca, fl atteignit Micoi- 
pampa et le penchant occidental des cordillères 
du Pérou. Ce fut de l'Alto de Guangamarca, 
d'une hauteur de 9,000 pieds, qu'A jouit pour 
la première fois de la vue de l'océan Pacifique, 
magnifique spectacle, ranimé pour ainsi dire par 
un souvenir d'enfance, par la lecture de l'expé- 
dition de Yasco Nufiez de Balboa, le hardi com- 
pagnon deFr. Pizarre. Voici comment l'illustre sa- 
vant rend lui-même admirablement ce spectacle : 

• Après avoir franchi bien des ondulations du sol, 
nous atteignîmes enfin le point le plus élevé de 
Y Alto de Guangamarca. La voûte céleste, long- 
temps voilée, s'éclaircit soudain à une forte brise sud- 
ouest, dissipa le brouillard. L'aior foncé de l'air at- 
ténué des montagnes perçait entra les flocons serrés 
des plus hauts nuages. Toute la pente occidentale 
des cordillères , près de Chorifloset de Cascas, cou- 
verte d'énormes blocs de quartz, les plaines de Chala 
et de Molinos jusqu'au rivage près de Truxillo , gi- 
saient là comme sous nos yeux. Nous aperçûmes 
alors distinctement l'océan Pacifique, reflétant près 
du littoral beaucoup de lumière, et reculant les 
bornes de l'horizon dans un vague lointain. La joie 
vive que je partageai avec mes compagnons de 
voyage, Bonpland et Carlos sfontuf ar ( qui était venu 
se joindre à nous à Quito ) nous fit oublier d'ouvrir 
le baromètre sur l'Alto de Guangamarca... L'aspect 
de l'océan Pacifique, eut quelque chose de solennel 
pour celui qui devait une partie de son éducation 
et ses désirs naissants à l'un des compagnons du 
capitaine Gook fll). » 

« Après avoir erré dix-huit mois dans l'intérieur 
des montagnes, nous sûmes le désir bien naturel 
de jouir de l'aspect libre de la mer; ce désir avait 
été encore alimenté par les illusions auxquelles nous 
étions souvent entraînés. De la cime du volcan 
Pichincha, d'où la vue s'étend par-dessus les forêts 
de la province de las Xsmeraldas, on ne distingue 

(l) On sait aujourd'hui que c'est l'Ancien Monde qui 
possède la plot haut* nontafiM du glofce : l'Bverest, 
pie de l'Uimalaya, vient de détrôner le Kuntchindjlnga, 

le Djawalhlr et le Uhawalagbiri de la même chaîne. 
(S) Tableaux de la Nature, t. Il, p. Sis etsulv. 



plus nettement rhorlfon de la mer » le regard 
plonge du point on l'on est placé oomase du haut 
d'un ballon aérostatique % on croit entrevoir, mais 
on n'aperçoit plus rien, Quand nous eûmes atteint , 
entre Loxa et Guanea-Baroba, le Paramo de Gua- 
raani, où gisent épars les débris de beaucoup d'é- 
difices dlncas, nos muletiers nous assuraient que 
nous apercevrions la mer, au delà de la plaine , su 
delà dfos dépressions de Piura et de Lomhajèque. 
Mais un brouillard épais voilait la plaine et le fit- 
votai lointain ( nous visses sesussnent des usasses de 
rochers de formes bizarres surgir et disparaître tour 
l tour, comme des Iles au-dessus d'une mer de 
brume ondoyante , spectacle pareil à celui dont 
nous avions joui sur le pic de Ténériffe.... Le désir 
que l'on a de von* certains objets ne dépend pas 
seulement, il s'en faut, de leur grandeur, de leur 
beauté eu de leur importance i il s'y mêle, dans 
chaque nomme , accMentettsment à beaucoup d'im- 
pressions de la jeunesse une vieille prédilection pear 
certains travaus . le penchant pour k» choses loin- 
taine* et pour un vie agitée. Des difficultés en ap- 
parence insurmontables leur prêtent un channe 
nouveau. Le voyageur jouit d'avance du mosneut où 
il verra la crois du Sud* tes nues de MianMtn , oui 
tournent autour du pôle austral, ta neige du Omsq- 
boraao, la colonne de fumée des volcan* 4a Quito, 
un bois de fougères en arbres, le ealsna de l'Océan 
Les jours de ces impressions ineffaçables, si vive- 
ment désirées» font époque dans la vie d'un bsenass. • 

M. de Humholdt et ses compagnons arrivèrent 
le M mars 1908 à Aeapuleo, après avoir tombé à 
Callaoet Guayaquit. De Hk, fts allèrent visiter la 
capitale du Mexique, où ils séjournèrent plusieurs 
mois, la province Mechoacan et le volcan Joruelo. 
De retour à Mexico, M. de HumboJdt mit en ordre 
ses riches collections, puis il fit rasceanjon du 
volcan de Toiuca (auquel il trouva 14,932 pieds de 
haut), et dn Oofre de Perote ( de fl,S*8 pieds), et 
se rendit à travers des forêts de chênes de Xafopa 
à Tera-Craz , où régnait alors la fièvre janne, à 
laquelle il échappa heureusement. Le 7 mars 
1 804 il quitta le rivage du Mexique, et fit voile pour 
La Havane, où il passa encore dix mois. La il 
s'embarqua , avec M. Bonpland et Montufer, pour 
Philadelphie, et reçut à Washington l'aecueil le 
pins amical de Jeflerson ; enfin, quittant le juin 
le Nouveau Monde , il arriva le 3 août 1804 à 
Bordeaux, après cinq ans d'absence de l'Europe, 
pendant lesquels il s'était passé bien des événe- 
ments. 

Les résultats de ce voyage d'exploration, si 
important pour la géographie, l'ethtMgrapMe, 
la géologie et l'histoire naturelle de f Amérique, 
ont été consignés dans une œuvre monumentale, 
divisée en sept parties, dont chacune forme un ou- 
vrage à part. La l re partie a pour titre : Voyages 
aux régions équinoxiales du Nouveau Con- 
tinent; Paris, 1809-26, 3 voL uv8% édit» al- 
lemande; Stuttgard, 1825-32, in-8°; otast is 
relation historique proprement dite, avec an 
atlas géographique , géologique et physique; — 
2 e partie : Vue des ^Cordillères et Monuments 
des Peuples indigènes de V Amérique; % Paris, 
1810, gr. in-fol. , avec 69 phmehes; 1810, 2 voL 



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HUMBOLDT 



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in-»°, avec 19 planches; on y trouve figurés et 
décrits les principaux monuments de la civili- 
sation primitive du Nouveau Monde, particuliè- 
rement du Mexique et du Pérou ; — 3* partie : 
Recueil tf Observations de Zoologie et d'Ana- 
tomiè comparée; Paris, 1805-32, 2 vol.; — 
4 e partie : Bssai politique sur le Royaume de 
la Nouvelle-Espagne; ibid., 1811, 2 vol. in-4% 
avec atlas; le texte seul, 1811, 5 vol. in-*° : 
c'est, sous un titre modeste , un ouvrage qui 
contient des vues d'économie politique très-éle- 
vées; il embrasse à la fois les richesses miné- 
rales, l'agriculture, l'industrie, le commerce, 
les finances et la défense militaire de ces régions, 
aujourd'hui si divisées; — 6 e partie ; Recueil 
d l Observations astronomiques, d'Opérations 
trigonométriques et de Mesures barométriques 
(revues et calculées par J. Oltmanns); ibid., 
1808-10, 2 vol. in-4* ; il comprend toutes les ob- 
servations faites par l'auteur depuis le 12° de lat. 
australe jusqu'au 41° de lat. boréale, plus un 
tableau de plus de 700 positions géographiques, 
dont 235 ont été pour la première fois retrou- 
vées par lui; — 6* partie ; Physique générale 
et Géologie; Paris, 1807 ; — 7 e partie : Essai 
sur la Géographie des Plantes; ibid., 1806, 
en aUem.; Tubingue, 1807 : dans cet ouvrage, 
plus développé dans De Distributione geogra- 
phiea Plantarum secundum cœli temperiem 
et altitudinem montium, Paris, 1817, in-4°, 
M. de Humboldt s'est montré l'un des créateurs 
de la géographie botanique. A cette partie se 
rattache un herbier de plus de 5,000 espèces 
phanérogames , dont la moitié jusqu'alors in- 
connue des botanistes , et qui fut d'abord donné 
sous le titre de Plantes équinoxiales recueil' 
lies au Mexique, dans Vile de Cuba, etc., 
Paris, 1809, 2 vol. gr. in-fol., avec 144 planches, 
et dans Monographie des Mélastomes et au- 
tres genres du même ordre, ibid., 1809-23, 
2 vol. gr. in-fol., avec 120 planches color. Ces 
matériaux furent enfin mieux classés et décrits 
par S. Kunth, dans le grand ouvrage intitulé : 
Nova Gênera et Species Plantarum quas in 
peregrinatione ad plagam xquinoctialem Or- 
bis Novi collegerunt, descripserunt et adum- 
braverunt A. Bonpland et Alex, de Hum- 
boldt; Paris, 1815-25; Paris, 7 vol. in-fol., avec 
700 planches; puis, dans Mimoses et autres 
Plantes légumineuses du Nouveau Conti- 
nent , rédigé par C. S. Kunth, ibid., 2 vol. gr. 
in-foL, 1819-24, avec planches coloriées ; dans 
Synopsis Plantarum quas in itinere ad pla- 
gam xquin. Orbis Novi collegerunt fj. et B., 
Slrasb. et Paris, 1822-26, 4 vol. in-fol. ; et dans 
Révision des Graminées, etc., précédée d'un 
travail sur cette famille par S. Kunth, Paris, 
1829-34, 2 vol. gr. in-fol., avec 220 planches co- 
loriées. A cette collection de magnifiques tra- 
vaux se rattache enfin l'Essai politique de Vile 
de Cuba; Paris, 1826. 
M. de Humboldt fit paraître tous ces ouvrages 



pendant son séjour à Paris (de 1805 à 1827). 
Dans cet intervalle, il trouva encore le loisir de 
s'occuper de chimie, d'analyser avec Gay-Lussac 
l'air atmosphérique, de collaborer avec Berthollet 
aux Mémoires de la Société d'Arcueil (l)et aux 
Annales de Physique et de Chimie, et de faire 
(1805) avec Gay-Lussac et Léop. de Buch ( voy. 
ces noms) un voyage en Italie, pour faire des 
observations hypsométriques sur le Vésuve, Ces 
observations, il les renouvela avec plus de soin 
et dans des circonstances plus favorables, dix- 
sept ans plus tard, lorsqu'à l'époque du congrès 
de Vérone (1822), il accompagna feu le roi de 
Prusse à Naples. Déjà antérieurement , il avait 
(1807 à 1808) rempli une mission politique pen- 
dant le séjour du prince Guillaume de Prusse à 
Paris, puis il avait accompagné son frère , Guil- 
laumede Humboldt,dans son ambassade à Londres 
( 1814 ), et fait plusieurs excursions en Angleterre 
et en Allemagne (en 1818 lors du congrès d'Aix- 
la-Chapelle), avec son illustre ami Arago et avec 
M. Valenciennes. 

Ce n'est qu'à partir de 1827 que M. de Hum- 
boldt se fixa définitivement à Berlin, où, avec 
le titre de conseiller intime, il n'a pas cessé 
de jouir de la faveur méritée du feu roi de 
Prusse Frédéric-Guillaume III et de son suc- 
cesseur Frédéric-Guillaume IV. Ami de presque 
tous leurs ministres , il a pu souvent leur don- 
ner d'utiles conseils ; et s'il n'a pas été lui-même 
secrétaire d'État, c'est qu'il a toujours mieux 
aimé la science que l'administration des af- 
faires. Ce qui prouve d'une manière incontes- 
table cet amour extrême et vraiment désinté- 
ressé de la science, c'est qu'à un âge où il 
aurait pu , à l'exemple de tant d'autres , se re- 
poser des labeurs d'une vie si bien remplie , à 
soixante ans, M. de Humboldt ne craignit pas 
d'entreprendre un des voyages les plus périlleux. 
Comme il avait passé sa jeunesse à l'exploration du 
Nouveau Continent, il voulut consacrer encore 
ses vieux jours à la connaissance de la partie la 
moins accessible et la plus mystérieuse de l'an- 
cien monde. En 1829, il parcourut, en compa- 
gnie de deux amis, Ehrenberg et Gustave Rose, 
l'Asie centrale. Cette expédition, entreprise sous 
les auspices de l'empereur Nicolas , se dirigea 
à l'est par Moscou, Kasan, Catherinebourg, les 
monts Ourals, Nishné-Tagilsk , Bogoslowsk, 
Tobolsk et Altaï ; de là elle rayonna jusqu'aux 
postes militaires de la Chine, près du lac Dsaï- 
sang, dans la Dzongarie. De l'Altaï, les intrépides 
voyageurs, retournant à l'ouest, passèrent par 
les steppes dlschim, Omsk, Miask, le lac Umen, 
Orenbonrg, Astrakan, la mer Caspienne, Sara- 
tow, Sarepta, Woronesch, Tula, et revinrent à 
Moscou, après avoir fait plus de 2,300 milles 
géographiques dans un espace de neuf moi». 
M. de Humboldt a communiqué les principaux 
résultats de cette expédition, si importante pour 

(t) C'est dans ce célèbre recueil qoe partit, en t«l", 
son Mémoire sur Us Lignes isothermes. 

17. 



519 



HUMBOLDT 



520 



la minéralogie, l'orographie et la climatologie, 
dans son Asie centrale , recherches sur les 
chaînes de montagnes et la climatologie com- 
parée, Paris, 1843,3 Toi. in-8°;édit. allemande, 
par Mahlmann, Berlin, 1843-1844, 2 vol. (1). 
Le voyage de l'Asie centrale enrichit les Ansich- 
ten der Natur ( Tableaux de la Nature), dont 
la 1" édition avait paru en 1808, de nombreuses 
additions qui en firent un livre presque nouveau, 
publié à Berlin, 2 vol. in-12, 1849 (3 e édit.) (2). 
Ces additions portent particulièrement sur les 
steppes et Déserts et les éclaircissements 
qui accompagnent cet admirable tableau. Les 
rapprochements que l'auteur fait entre les déserts 
de l'Afrique et les pampas de l'Amérique et les 
steppes de l'Asie sont d'une saisissante vérité. 
C'est dans ce nouveau voyage que l'illustre 
voyageur a particulièrement battu en brèche 
l'existence de ce prétendu plateau central de 
l'Asie admis depuis Marco-Polo par presque 
tous les géographes. En se trouvant dans la 
Dzougarie chinoise, entre les frontières de la 
Sibérie et le lac Saysan (Dsaîsang), à une 
distance égale de la mer Glaciale et de l'em- 
bouchure du Gange, il avait bien lieu de se 
croire dans l'Asie centrale; cependant, le ba- 
romètre lui apprit bientôt que le bassin de 
l'Irtisch supérieur, entre l'Ustkamenogorsk et le 
poste dzungaro-chinois de Chonimaïlachou, est 
situé à peine à onze cents pieds au-dessus du 
niveau de la mer. Le lac Baïkal lui-même n'est 
qu'à 1332 pieds au-dessus du même niveau. Un 
plateau élevé, mais d'une hauteur très-inégale, 
se dirige, à part quelques faibles interruptions, 
du sud-sud-ouest au nord-nord-est, depuis le 
Thibet oriental jusque vers le noyau des mon- 
tagnes de Kenteï, au sud du lac Baïkal ; il porte 
les noms de Gobi, de Schamo , de Schaho et de 
Hanhaï. Ce renflement du sol est situé entre le 
79° et le 116° de longitude orientale de Paris. 
Le bassin de Caschmir avait également donné , 
lieu à des exagérations hypsométriques , et le 
plateau du Thibet, entre le 71° et 83° longitude 
orientale, n'atteint pas tout à fait une hauteur 
moyenne de dix- huit cents toises, ce qui est à 
oeine la hauteur de la plaine fertile de Caxamarca 
lans ïe Pérou ; mais il est inférieur de 2 1 1 toises à 
la hauteur du plateau de Titicaca, et de 337 toises 
au-dessous du niveau des rues de la ville supé- 
rieure de Potosi. Il n'appartenait qu'à M. de Hura- 
boldt de faire de ces rapprochements orographi- 
ques qui, d'une manière si grandiose, mettent l'An- 
cien Monde en contact avec le Nouveau. Sa Carte 
des Chaînes de Montagnes et des Volcans de 
VAsie centrale, tracée en 1839, et publiée 
seulement en 1843, rectifie bien des erreurs 

(1) La relation historique a été donnée par M. G. Rose, 
dans Mtouraloçisck-geoçnoiUsche Reisc nach dem 
Vrai, Altax «t dem Catpischen Me*re ; Berlin, 1887-18*2, 
«vol., ln-8». 

(l) Il en existe denx traductions françaises, publiées 
presque simultanément, l'une de M. Galusky (Gide), et 
l'autre du signataire de ce» arUele ( Elrmin Oidot ). 



longtemps accréditées, et diffère ainsi radicale- 
ment de toutes les cartes du même genre qui ont 
paru jusqu'à ce jour. Indiquant à grands traits la 
direction moyenne et la hauteur des chaines de 
montagnes, elle représente l'intérieur du con- 
tinent asiatique depuis 30° jusqu'à 60° de la- 
titude, entre les méridiens de Péking et de 
Cherson. — Ce fut à la suite de cette expédi- 
tion que l'Académie de Saint-Pétersbourg établit, 
sur la proposition de M. de Humboldt, des 
stations magnétiques et météorologiques qui 
s'étendent de Saint-Pétersbourg à Peking. Cet 
exemple fut imité par le gouvernement anglais 
pour l'hémisphère austral. 

Après la révolution de 1830, M. de Humboldt 
fut chargé par Frédéric-Guillaume m de recon- 
naître , de la part de la Prusse , l'avènement du 
roi Louis-Philippe. Depuis lors il renouvela, 
presque chaque année , ses voyages à Paris, à la 
grande satisfaction des nombreux amis et admi- 
rateurs qu'il y compte depuis si longtemps. Vers 
cette même époque il élabora et fit impri- 
mer son Examen critique de la Géographie 
du Nouveau Continent; Paris, 1835-38; 
5 vol. in-8 4 ( édit. allemande par Ideler, Berlin, 
1836 , 3 vol. ) , ouvrage plein de recherches 
d'érudition. Son dernier séjour à Paris , qu'il a 
toujours tant aimé, est de 1847 à 1848 ( d'octobre 
à janvier). Nous ne mentionnerons qu'en pas- 
sant deux petits voyages qu'il fit, l'un en 1841, 
à Londres, en accompagnant le roi Frédéric- 
Guillaume IV, qui tint sur les fonts de baptême 
le prince de GaUes , l'autre en 1845 , à Copen- 
hague. — Bien que l'illustre voyageur n'ait jamais 
revu l'Amérique , où son nom est devenu si po- 
pulaire, il s'est toujours vivement intéressé aux 
progrès de la civilisation dans ce jeune et grand 
continent. C'est sur les instances de M. de Hum- 
boldt qne le général Bolivar fit, en 1828 et 1829, 
exécuter par Loyd et Falmore un nivellement 
exact de l'isthme de Panama entre Panama et 
l'embouchure de la rivière de Chagres (l). D'an- 
tres travaux, tels que tracés de canaux, de che- 
mins de fer, d'écluses, de tunnels , ont été faits 
depuis par d'habiles ingénieurs français. Mais 
dans ces travaux, exécutés dans la direction mé- 
ridienne, entre Porto-Bello et Panama, ou à 
l'ouest, vers Chagres et Cruces , les points les 
plus importants, signalés par M. de Humboldt, 
points dirigés de l'est et du sud-est de l'isthme, 
sont des deux côtés du littoral restés inaper- 
çus. « Tant que cette partie, ajoute l'illustre sa- 
vant, n'aura pas été représentée géographique- 
ment par des déterminations exactes de latitude 
et de longitude, faciles à exécuter, et hypomé- 
triquement, en mesurant avec le baromètre les 
reliefs du sol, je regarde le jugement, aujour- 
d'hui encore (en 1849) si diversement répété, 
savoir que l'isthme de Panama est impropre à 
l'établissement d'un canal océanique (canal qui 

(l) Philosoph, Transaet , 1890, p. 19. 



5*1 HUMBOLDT 

aurait moins d'écluses que le canal calédonien), 
et, indépendamment des saisons, au libre pas- 
sage des vaisseaux venant du Chili et de la Ca- 
lifornie, ou de New-York et de Liverpool, 
comme non fondé et tout à fait téméraire. » (1) 
Le même qui, il y a plus d'un demi-siècle, 
explora le Nouveau Monde, et qui à rage de 
soixante ans visita l'Asie centrale, le même 
homme entreprit, octogénaire, de passer en 
revue, dans une oeuvre monumentale, l'en- 
semble des connaissances humaines sur le ciel 
et la terre. Le premier volume du Cosmos (édit. 
allemande) parut en avril 1845, et le quatrième, 
que nous avons sous les yeux, au commence- 
ment de 1858. C'est dans cet ouvrage qu'il faut 
chercher les vues générales de M. de Humboldt 
sur le domicile planétaire départi au genre 
humain , en même temps que là part de gloire 
qui lui revient dans les progrès des sciences. 
Le Cosmos est la synthèse du monde physique ; 
c'est sur une grande échelle le développement 
des Tablejiux de la Nature : dans l'un comme 
dans l'autrelivre l'auteur a voulu montrer que la 
forme sévère de la science, ou ladescription rigou- 
reuse des phénomènes du globe , peut très-bien 
s'allier avec une peinture animée des scènes de la 
nature. H aurait complètement réussi dans cette 
tâche ardue, si une certaine coquetterie de sa- 
vant, qui perce surtout dans les notes, n'avait 
pas rendu la lecture du Cosmos un peu fati- 
gante pour les gens du monde, eux qui ne se fâ- 
chent jamais quand , pour être, plus clair, on les 
suppose plus ignorants qu'ils ne sont. D'un autre 
côté, les savants et les érudits, qui goûteront fort 
ces notes hérissées défaite etde citations ,ne trou- 
veront pas au texte cette gravité didactique qui 
repousse le profanum vulgus , et qui est pour 
les initiés un des ornements nécessaires de la 
science. 11 faut être bien habile dans le grand art 
d'instruire et de plaire pour ne pas échouer contre 
l'un de ces deux redoutables écueils. Mais lais- 
sons là notre critique, et bornons-nous à dire 
très-sommairement ce que le Cosmos renferme. 
L'ouvrage débute (2) par des considérations 
sur les sensations ou jouissances variées que pro- 
cure l'aspect et l'étude de la nature. En première 
ligne se place cette sensation générale de bien- 
être qui résulte du simple contact de l'homme 
avec la nature : cette mise en présenee du grand 
Tout « adoucit la douleur et apaise les passions 
quand l'âme est péniblement agitée » ; c'est le 
pouvoir calmant qu'exerce sur nous le pressen- 
timent d'une harmonie à jamais troublée. Puis 
vient la sensation que produit en nous l'aspect 
d'un paysage, la configuration de la surface du 
globe dans des limites définies : la lutte des élé- 
ments déchaînés , la nudité des steppes et des 
déserts , la vue de champs fertiles , etc., excitent 



522 

des émotions de ce genre. L'auteur évoque ici, 
avec bonheur, le souvenir d'une de ces nuits tro- 
picales où les étoiles « versent une douce lumière 
sur la surface mollement agitée de l'Océan » ; puis 
il rappelle « ces vallées profondes des Cordillères, 
dans lesquelles les stipes élancés des palmiers, 
agitant leurs panaches, percent les voûtes végé- 
tales, et forment, en longues colonnades, une 
forêt sur la forêt». L'uniformité des variations 
atmosphériques (1) et les contrastes de climats 
et de végétation suivant la différence des hau- 
teurs semblent, dans la zone torride , refléter 
l'invariabilité des lois qui gouvernent les mouve- 
ments célestes. Les détails que l'auteur fournit 
à l'appui de ces peintures sont aussi beaux 
qu'abondants. Malheureusement, cette abondance 
même des détails à côté des pensées générali- 
satrices, cette richesse de souvenirs et d'incidents 
font souvent perdre au lecteur le fil conducteur. 
Une troisième jouissance, plus raffinée , naît de 
la connaissance des lois de la nature : l'homme 
se plaît à trouver, comme disait Schiller, « le 
pôle immuable dans l'éternelle fluctuation des 
choses créées ». Mais l'auteur ne veut point, et en 
cela il a bien raison, des rêveries de la philosophie 
de la nature. Après ce préambule il trace à 
grands traits et d'une main sûre le tableau de 
l'univers depuis les nébuleuses et les étoiles jus- 
qu'à l'écorce terrestre et la distribution des vé- 
gétaux et des animaux sur le globe. Les roches 
qui composent notre planète, et dont nous ne con- 
naissons guère que la surface, M. de Humboldt 
les divise en quatre classes : 1° roches d'éruption, 
sorties de l'intérieur du globe, ou volcaniquement 
(à l'état de fusion ), ou plutoniquement (à l'état 
de ramollissement ) ; 2° roches de sédiment, pré- 
cipitées ou condensées dans un milieu liquide, où 
elles étaient primitivement dissoutes ou en suspen- 
sion; 3° roches métaphoriques, dont la texture 
et le mode de stratification ont été altérés, soit 
par le contact ou la proximité d'une roche d'é- 
ruption volcanique ou plutonique, soit par l'ac- 
tion des vapeurs et des sublimations qui accom- 
pagnent le soulèvement de certaines masses à 
l'état de fluides ignés; 4° conglomérats, formés 
des débris des trois roches précédentes divisées 
mécaniquement. — Dès 1817, M. de Humboldt 
eut l'heureuse idée de rendre la distribution de 
la chaleur sur le globe par une représentation 
graphique analogue à celle que Halley avait ima- 
ginée pour le magnétisme terrestre. Les lignes 
isothermes, isothères et isochimènes , repré- 
sentant les températures moyennes annuelles es- 
tivales et hivernales, a fourni depuis une base 
certaine à la climatologie. Pour s'en faire une 
idée bien nette, il faut partir de l'hypothèse qui 
suppose la terre formée de couches homogènes, 
ayant partout la même faculté d'absorber les 



(1) Tableaux de la Nature ; dernière édit., t. II, p. 337 
et sofv. ( de la trad. de M. Hœfçr ). 

t«) Le 1» volume du Cosmos a été traduit en français 
par M. H. Faye; Parts, 1846, tn-8». 



(1) M. de Humboldt a l'un des premiers signalé la ré- 
gularité des fnaxima et minima du baromètre dans 1rs 
régions équinoxiales, ce qui permet d'y employer cet 
instrument pour ainsi dire en guise d'horloge. 



533 



HUMBOLDT 



524 



rayons solaires et Je même pouvoir de rayonner la 
chaleur vers les espaces célestes. Dans cette hy- 
pothèse, les lignes isothermes, isothères et iso- 
chimènes seraient tontes parallèles à l'équateur 
et les mêmes à la surface du globe , à parité de 
latitude. Or, tout ce qui fait varier (et c'est là ee 
qui a toujours lien en réalité ) les pouvoirs ab- 
sorbants et émissifs, dérange le parallélisme de ces 
lignes. Ces inflexions, les angles sous lesquels 
les lignes isothermes , isothères et isochimènes 
coupent les cercles de latitude, la position dn 
sommet de leur convexité on de leur concavité 
par rapport an pôle de l'hémisphère correspon- 
dant, sont des effets de causes qui modiôent plus 
ou moins profondément la température sons les 
diverses latitudes. C'est par là que M. de Hum- 
boldt est arrivé à fonder la géographie des plantes 
et des animaux sur des bases scientifiques. — Le 
deuxième volume contient le tableau de l'histoire 
des sciences; « le reflet du monde extérieur dans 
l'imagination de l'homme » en forme la première 
partie, et l'essai historique sur le développement 
progressif de « l'idée de l'univers » la seconde. 
C'est snrtout dans ce volume que l'auteur révèle 
sa triple qualité de savant, de peintre et de pen- 
seur (1). Après y avoir poursuivi le développe- 
ment de Tidée de l'univers dans le temps, il re- 
vient à V espace occupé par les corps célestes. 
C'est là le sujet du troisième volume, exclusive- 
ment consacré à l'astronomie (2). La zone des 
astéroïdes, dont le nombre augmente tons les ans, 
porta M. de Humbotdt à diviser les planètes en 
trois groupes : 1° les planètes intérieures (Mer- 
cure, Vénus, Terre, Mars), situées plus près du 
Soleil, et en deçà des astéroïdes : elles sont 
toutes de grandeur moyenne, un peu plus 
petites que la Terre, relativement très-denses , 
peu aplaties, douées d'un mouvement de rotation 
à peu près uniforme , de vingt-quatre heures au 
moins, et dépourvues de satellites, à l'exception 
de la Terre; 2° la zone intermédiaire des asté- 
roïdes, qui se font remarquer par leur petitesse 
ainsi que par l'excentricité et l'inclinaison de 
leurs orbites; 3° les planètes extérieures (Jupi- 
ter, Saturne, Uranus, Neptune), situées entre là 
zone des astéroïdes et les extrémités encore in- 
connues du système solaire , sont beaucoup plus 
grandes, cinq fois moins denses, d'un mouve- 
ment de rotation plus rapide, d'un aplatissement 
plus sensible, et toutes pourvues de satellites. 
Les observations de M. de Humboldt sur la lu- 
mière zodiacale, probablement un effet du rayon- 
nement de l'atmosphère solaire, méritent d'être 
prises en considération par les astronomes. « C'est 
surtout des régions tropicales, où les phénomènes 
météorologiques montrent dans leurs variations le 
plus d'uniformité et de régularité, qu'il est permis 



(1) La traduction française de ce volume est de M. Ga- 
losky ; Paris, 1848. / 

(t) La première partie de ee volume (comprenant l'as- 
tronomie stellalre) a été traduite par M. Paye; Paris, 
1881 ; et la deuxième partie par M. Ualusky, ibid., 1888. 



d'attendre des éclaircissements Sur la nature de la 
lumière zodiacale. » Dans le quatrième volume, 
paru en 1858 (1), entièrement consacré à la 
physique du globe, l'auteur développe avec l'au- 
torité du martre plusieurs points qu'il n'avait fait 
qu'ébaucher dans le premier volume; tels sont, 
entre autres, le magnétisme terrestre (lignes iso- 
gones, isoclines et isodynames), les tremblements 
de terre et la lone des volcans. Fidèle à sa méthode, 
l'auteur traite ces intéressants sujets sous le double 
rapport dé l'histoire et de la science du Cosmos f 
eu entendant par ce mot l'enchaînement des phé- 
nomènes terrestres et des phénomènes célestes. 
« Rien de ce qui se passe sur notre planète ne sau- 
rait, dit-il, être conçu sans une connexité cosmi- 
que. Déjà le nom de planète ind ique sa dépendance 
d'un corps central, des rapports avec un groupe 
de corps célestes de grandeur différente, mais 
probablement d'une même origine. On soup- 
çonna de bonne heure l'influence du Soleil sur 
le magnétisme terrestre, et Kepler avait même 
supposé que tous les axes des planètes étaient 
dirigés magnétiquement vers le même point du 
«tel; et, suivant ce grand astronome, le Soleil 
était lui-même un corps magnétique , doué de 
la force qui fait mouvoir les planètes. «—Attentif 
à tous les travaux de ses contemporains, M. de 
Humboldt a toujours sain de conduire la science 
jusqu'au moment même ou il écrit. Ainsi, en 
analysant les découvertes relatives à l'intensité 
du magnétisme terrestre , auxquelles il eut lui- 
même une grande part, il arrive jusqu'aux va- 
riations séculaires qui ne reposent encore que su- 
un très-petit nombre d'observations , et il cite à 
ce sujet celles qui ont été faites à Toronto, an 
Canada, de 1845 à 1849, et qui paraissent montrer 
une diminution magnétique. La périodicité des incli- 
naisons, dont il parle ensuite , n'est connue d'une 
manière certaine que depuis le fonctionnement 
des stations magnétiques établies par le gouver- 
nement britannique dans les deux hémisphères. H 
en résulté, ce qu'avait déjà reconnu Arago, à sa- 
voir que l'inclinaison magnétique est plus grande 
à neuf heures du matin qu'à six heures du soir, 
pendant que l'intensité de la force magnétique 
(mesurée par le nombre des oscillations de l'ai- 
guille horizontale) a son minimum dans la pre- 
mière et son maximum dans la seconde pé- 
riode. Quant aux variations de déclinaison, 
M. Lambnt, cité par M. de Humboldt, y reconnut 
une période de dix ans et huit mois. Dans l'in- 
tervalle de 1841 à 1850, les moyennes des décli- 
naisons mensuelles avaient leur mimnttwenl843 
et leur maximum en 1848. Cette période décen- 
nale coïncide, chose remarquable, avec la fré- 
quence décennale des taches du Soleil. 

Mais arrêtons-nous dans cette incomplète ana- 
lyse du Cosmos. A part quelques défauts, qui ne 
tiennent qu'à la forme ou à l'enchevêtrement des 
détails, c'est un ouvrage qui restera : monumen- 

(i) La traduction française n'en a pas encore paru. 



525 



HUMBOLDT — HUME 



62(5 



twm serepertnnius. Bien que produitànn âge que 
peu d'hommes atteignent, il rappelle, par la vi- 
gueur du style et la fraîcheur de l'imagination, 
les oeuvres de la jeunesse de l'auteur. 

Tandis que, par une lof fatale, tous les hommes, 
à partir de quatre-vingts ans et souvent plus tôt, 
voient leurs fatuités décliner et s'éteindre, 
M. de Humboîdt, Menttt nonagénaire, semble, 
par one faveur spéciale du elel, Nre exception 
à cette loi de la nature t c'est que la eonscisnoa 
d'avoir bien accompli sa mission terrestre est 
seule capable d'entretenir et de ranimer ainsi, 
jusqu'au moment suprême, l'étincelle de la vie 
et du génie. Celai qui, par la multiplicité de ses 
travaux et par les progrès qu'il a (ait ftdreà toutes 
les sciences qo'H a cultivées, mérite le surnom 
<YAristotemodern€> a en même temps noblement 
consacré sa haute position à servir ses sembla* 
blés : bien des savants doivent leurs places, leurs 
honneurs et même leur renommée aux conseils 
et à l'influence légitime do doyen des associés 
de l'Institut de France et du conseiller favori du 
roi de Prusse. — La Prusse a produit, dans deux 
genres bien différents, deux hommes dont elle 
s'enorgueillit a Juste titre : Frédéric H et Alexan- 
dre de Humbolt. F. H. 

Lftweoberg , A. V. ttumboldt, IlêUêfi In Jmertka and 
Atien ; Berftn, iim. - PaMtttt tsatr, Lmt oftk* *r». 
iàiri ummbûUt t uMn tan. ~ kims** Ji* r. n*m~ 
boldt, êiu Hograyh. DnUtmai ; Uipm, 1WI , t* édit. - 
Convertations-Leïilum. - Gaisriedet Contemporains. 

HtJMB (David), philosophe et historien an- 
glais, né à Edimbourg, le 3 avril 1711, mort 
dans la même ville, le 25 août 1776. H apparte- 
nait à une branche peu fortunée de la famille 
des comtes de Home ou Hume ; et comme il 
était le frère cadet, il n'eut qu'un petit patri- 
moine. Encore en bas âge, il perdit son père, et 
sa mère le destina à la jurisprudence, mais ses 
inclinations l'entraînèrent vers une autre carrière. 
* Je suivis avec succès, dit-il dans son autobio- 
graphie, le cours ordinaire de l'éducation, et je 
fus saisi de bonne heure d'un goût pour la littéra- 
ture, qui a été la passion dominante de ma vie 
et la grande source de mes jouissances. Mes dis- 
positions studieuses et mon intelligence firent 
croire à ma famille que j'étais propre à la juris- 
prudence; mais j'éprouvais une insupportable 
aversion pour tout ce qui n'était pas recherches 
philosophiques et savoir en général; et tandis 
qu'on me croyait occupé sur Vînnius et Voet, je dé- 
vorais secrètement Cicéron et Virgile. » — « Notre 
éducation de collège en Ecosse, ajoute- t-il, déten- 
dant peu au delà des langues, finit ordinairement 
quand les écoliers ont quatorze ou quinze ans. 
A cet âge je fus abandonné à mon choix pour 
mes lectures , et je me sentis une inclination 
presque égale pour les livres de raisonnement 
et de philosophie , pour la poésie et les belles- 
lettres. Quiconque est familier avec les philoso- 
phes et les critiques sait qu'il n'y a rien d'établi 
dans aucune de ces deux sciences, et qu'elles ne 
contiennent guère que des disputes sans fin , 



même sur les articles fondamentaux. A leur 
examen je sentis croître en moi une certaine au- 
dace d'esprit qui, loin d'être inclinée à se soumettre 
à aucune autorité sur ces matières, me condui- 
sait à chercher une nouvelle méthode qui pût 
établir la vérité. » Le voeu le plus ardent du jeune 
homme était de se consacrer aux lettres, mais 
la médiocrité de sa fortune ne lui permettait pas 
de réaliser oe plan de vie, et sur les instances 
lie sa famille il fit une faible tentative pour entrer 
dans une carrière lucrative» U se rendit à Bristol 
en 1734, et devint commis ches un riche mar- 
chand. Quelques mois de cette profession le dé- 
goûtèrent complètement du commer*ce. Il passa 
en France, où la vie était moins chère, et avec 
l'intention d'y poursuivre ses études dans une 
ville de province. U s'établit d'abord à Reims, où 
il séjourna peu, puis à La Flèche, où il passa près 
de trois ans, uniquement occupé de méditations 
philosophiques et de ses rêves de réputation. Le 
séjour de La Flèche en lui rappelant la gloire de 
Descartes l'encourageait à tenter la même entre- 
prise ; mais il n'eut pas, comme le philosophe 
français, la patience de mûrir lentement ses 
Idées, et II les livra au public avec l'ardeur im- 
prévoyante de la jeunesse. Rentré en Angleterre 
à la fin de 1787,11 publia, au moisde février 1739 
son Traité sur la Nature humaine. U avait 
fondé d'immenses espérances sur cet ouvrage, qui 
devait selon lui changer complètement la philo- 
sophie (produce a total altération in philo- 
sopha). Un peu déconcerté de voir que le monde 
marchait comme avant, et que la philosophie 
n'était pas renversée, il alla cacher son désap- 
pointement dans la résidence maternelle, à Ni- 
newells. Cet échec hâta chez lui l'expérience. 
Laissant de côté l'ambitieux projet d'embrasser 
la nature humaine dans une grande théorie, il 
traça de courtes esquisses, qu'il publia en 1741, 
sous le titre d'Essais de Morale et de Poli- 
tique. Ce petit recueil, qui à force de révisions et 
d'additions devint plus tard un chef-d'œuvre, eut 
un modeste succès, dont l'auteur, moins exigeant 
que la première fois, sut se contenter. En 1745 
il fut attaché au marquis d'Annandale, qui à 
cause de son triste état mental avait besoin 
d'un compagnon. Cette position de secrétaire d'un 
maniaque avait, malgré d'assez grands avantages 
pécuniaires, quelque chose d'humiliant que Hume 
ressentit avec amertume et dont il garda long- 
temps le souvenir. En quittant le marquis d'An- 
nandale il trouva une situation plus convenable 
auprès du généra) Saint-Clair, qui l'emmena 
avec lui en 1746 comme secrétaire d'ambassade 
à Vienne et à Turin. « Ces deux années , dit 
Hume, sont presque la seule interruption qui ait 
été apportée à mes études dans le cours de ma 
vie; je les passai agréablement et en bonne 
compagnie; et mes appointements, avec mon 
économie, me permirent d'acquérir une fortune 
que j'appelais indépendante , quoique beaucoup 
de mes amis fussent disposés à sourire quand 



527 



HUME 



528 



je pariai* ainsi; bref, j'étais maintenant maître 
de près de mille livres. » De retour dans sa 
retraite de Ninewels, il composa ses Discours 
Politiques, qui formèrent la seconde partie de 
ses Essais, et ses Recherches sur les Principes 
de la Morale, où il reprit les doctrines du Traité 
sur la Nature humaine. Ces deux ouvrages 
parurent en 175), l'un à Edimbourg, l'antre à 
Londres ; et, tandis que le premier obtenait un 
grand succès , le second passa inaperçu. Vers la 
même époque, Hume, qui avait perdu sa mère, 
quitta Ninew ells et Tint s'établir à Edimbourg. 
11 y était depuis quelques mois lorsque la faculté 
des avocats le choisit pour son bibliothécaire. Ses 
appointements furent une utile addition à son 
petit revenu ; mais, bientôt choqué des observa- 
tions des curateurs de la faculté, il renonça à 
son traitement en faveur de Blacklock, le poète 
aveugle. Il se contenta de l'avantage d'avoir à sa 
disposition trente mille volumes. Trouvant dans 
ce riche dépôt d'amples matériaux pour une 
histoire de la maison des Stuarts, il se mit aus- 
sitôt à l'œuvre. Le premier volume de cet ou- 
vrage parut en 1754. 

Hume avait de grandes prétentions à llmpar- 
tialité, et il fat surpris d'être accusé de tontes 
parts de ne voir les choses que d'un côté. « Je 
lus assailli, dit-il, par un cri universel de re- 
proche, de désapprobation et même d'exécration. 
Anglais, Écossais et Irlandais, whig et tory, 
homme d'église et sectaire, libre penseur et dé- 
vot, patriote et courtisan, unirent leur rage 
contre l'homme qui avait osé verser une larme 
sur le sort de Charles F r et du comte de Straf- 
ford ; quand les premières ébullitions de leur furie 
furent apaisées, le livre, ce qui était encore plus 
mortifiant, sembla tomber dans l'oubli. M. Millar 
(le libraire) me dit que dans douze mois il n'en 
avait vendu que quarante-cinq exemplaires..... 
J'étais, je l'avoue, découragé; et si la guerre 
n'eût pas en ce moment éclaté entre la France et 
l'Angleterre, je me serais certainement retiré 
dans quelque ville de province du premier de ces 
royaumes ; j'aurais changé mon nom, et je ne se- 
rais jamais plus retourné dans mon pays natal. 
Mais comme ce projet n'était plus praticable et 
que mon prochain volume était considérablement 
avancé, je résolus de prendre courage et de per- 
sévérer. » Entre le premier et le second volume, 
il publia son Histoire naturelle de la Religion, 
qui fut violemment attaquée par le docteur Hurd. 
Le second YolumeàeY Histoire d? Angleterre, qui 
embrasse la période depuis la mort de Charles I er 
jusqu'à la révolution de 1688, parut en 1756. 
« Ce volume, dit-il, eut le bonheur de donner 
moins de déplaisir aux whigs, et fut mieux reçu ; 
non-seulement il se soutint par lui-même , mais 
il aida à relever son malheureux frère. » L'His- 
toire de la Maison de Tudor fut publiée en 1759, 
et deux volumes contenant Y Histoire de V An- 
gleterre aumogen dge complétèrent l'onvrageen 
1761. Arrivé à ce moment de sa vie, Hume, dans 



Bon autobiographie, se félicite un peu naïvement 
du succès de son œuvre. « Malgré la variété des 
vents et des saisons auxquels mes écrits avaient 
été exposés, dit-il , ils avaient assez réussi pour 
que les droits d'auteur que me payait le libraire 
surpassassent tout ce qu'on avait vu jusque-là en 
Angleterre. Je n'étais pas seulement indépendant, 
mais opulent. Je me retirai dans ma contrée na- 
tale (il avait fait récemment un séjour à Londres), 
bien décidé à ne remettre jamais les pieds 
dehors, et avec la satisfaction de n'avoir jamais 
présenté de requête à aucun homme en place, de 
n'avoir même jamais cherché l'amitié d'aucun. » 
Cette fière détermination ne fut pas de longue 
durée. Le comte d'Hertford lui proposa, en 1763, 
de raccompagner à Paria en qualité de •secrétaire 
d'ambassade. Hume se fit un peu prier; mais 
enfin le désir de revoir la France l'emporta sur 
l'amour de la retraite. Sa réputation l'avait de- 
vancé à Paris, et il y fut reçu avec une faveur 
qui tenait de l'engouement A sa première visite 
à Fontainebleau, les témoignages d'admiration 
dont il fut accablé, même de la part des membres 
de la famille royale, l'embarrassèrent un peu, 
mais il s'y habitua vite. A Versailles le dauphin 
voulut le présenter à ses trois fils. Ces enfants, 
qui devaient être rois tous trois, et dont la vie 
devait être si tragiquement agitée, débitèrent an 
philosophe de petits compliments qu'on leur avait 
fait apprendre. Le plus jeune (depuis Charles X), 
alors âgé de six ans, avait oublié sa leçon et ne 
put prononcer quequelques paroles inintelligibles. 
« Toute cette nation, écrivait Hume à Ferguson, 
depuis la famille royale jusqu'au dernier éche- 
lon, semble avoir pris à cœur de me persuader, 
par toutes espèces de marques d'estime, qu'elle me 
considère comme un des plus grands génies du 
monde. Je ne crois pas que Louis XTV lui-même 
ait jamais eu à endurer pendant trois semaines 
autant de flatteries. » — « Vous me demandez, 
écrivait-il encore à Robertson, quel est mon genre 
de vie : je ne mange que de l'ambroisie, je ne 
bois que du nectar, je ne respire que de l'encens, 
je ne foule que les fleurs. Tous les hommes, et 
plus encore toutes les femmes que je rencontre, 
croiraient manquer au devoir le plus indispen- 
sable en ne m'adressant pas une longue et com- 
pendieuse harangue à ma louange. » — «M. Hume 
doit aimer la France , dit Grimm ; il y a reçu 
l'accueil le plus distingué et le plus flatteur. Paris 
et la cour se sont disputé l'honneur de se sur- 
passer. Cependant M. Hume est bien aussi hardi 
dans ses écrits philosophiques qu'aucun philo- 
sophe de France : ce qu'il y a de plus plaisant, 
c'est que toutes les jolies femmes (1) se le sont 



(1) Une des pins spirituelles des dames à la mode, la 
comtesse de Boufflers, lut écrivait : « Mais quelles expres- 
sions employeral-Je pour vous faire connaître l'effet que 
produit sur mol votre divine Impartialité? J'aurais besoin 
en cette occasion de votre propre éloquence, pour bien 
rendre ma pensée. En vérité , Je crois avoir devant Ira 
yeux l'ouvrage de quelque substance céleste, dégng-c des 



529 



HUME 



580 



arraché et que le gros philosophe écossais se platt 
dans leur société. C'est un excellent homme que 
David Hume ; il est naturellement serein. Il en- 
tend finement, il dit quelquefois avec sel, quoi- 
qu'il parle peu ; mais il est lourd et n'a ni cha- 
leur, ni grâce, ni agrément dans l'esprit, ni rien 
qni soit propre à s'allier au ramage de ces char* 
manies petites machines qu'on appelle jolies 
femmes. » A côté de cette esquisse de Grimm , 
il faut placer une petite anecdote racontée par 
M™* d*Èpinay. H était alors de mode de jouer des 
proverbes dans les salons. Sur sa réputation 
d'homme de génie, on crut Hume très-propre à 
ce genre d'exercice. « H fit son début chez M. de 
T..., dit M œe d'Épinay. On lui avait destiné le 
rôle d'un sultan entre deux esclaves, employant 
toute son éloquence pour s'en faire aimer; les 
trouvant inexorables, il devait chercher le sujet 
de leurs peines et de leur résistance. On le place 
sur un sofa entre les deux plus jolies femmes de 
Paris : il les regarde attentivement, il se frappe 
sur le ventre et les genoux à plusieurs reprises, 
et ne trouve jamais autre chose à dire que : « Eh 
bien, mesdemoiselles... eh bien, vous voilà 
donc... eh bien, vous voilà... vous voilà... » Cette 
phrase dura un quart d'heure sans qu'il pût en 
sortir. »' Cette mésaventure ne nuisit pas à Hume, 
et les jolies femmes continuèrent à se l'arracher; 
« Il est de tous les soupers fins, ajoute M me d'É- 
pinay, et il n'y a point de bonnes fêtes sans lui. » 
Lorsque lord Hertford fut, en 1765, nommé lord 
lieutenant d'Irlande, Hume resta à Paris comme 
chargé d'affaires jusqu'à l'arrivée du duc de Rich- 
mond. Il retourna en Angleterre en 1766, et em- 
mena avec lui J.-J. Rousseau. Cette liaison, si 
vite suivie d'une brouille éclatante, fut pour Hume 
une cause de nombreuses contrariétés. Sa popu- 
larité parisienne en souffrit même un peu, quoique 
les torts ne fussent pas de son côté. Depuis la 
publication de sa correspondance on peut suivre 
dans ses lettres à Blair les progrès et le déclin 
rapide decette amitié. Sous des apparences lourdes 
et froides, Hume, qui cachait delà vivacité et une 
certaine tendance à l'enthousiasme, s'était pris 
de goût et d'admiration pour l'insociable philo- 
sophe de Genève. Il souriait à l'idée de lui mé- 
nager une agréable retraite en Angleterre. En 
vain s'entendait-il dire qu'il ne serait pas arrivé 
à Calais sans s'être brouillé avec lui , il persista 
dans son projet. Un ou deux mois suffirent pour 
lui en montrer l'imprudence. Il avait eu d'abord 
l'intention d'établir son hôte chez un jardinier 
français de Fulham. Un riche propriétaire, M. Da- 
venport, offrit à Rousseau un asile dans sa mai- 
son de campagne du comté de Derby. Rousseau 
accepta, malgré Hume, qui, commençant à le con- 
naître, redoutait pour lui les suites de ce confi- 
nement. « Il sera absolument sans occupation, 
écrit-il à Blair, sans compagnie et presque sans 



passions/qui pour l'utilité a daigné écrire les événements 
ie ces derniers temps. » 



amusement d'aucun genre. Il a très-peu lu du- 
rant le cours de sa vie, et il a maintenant tout 
à fait renoncé à la lecture. Il a vu très-peu , et 
n'a aucune espèce de curiosité de voir ou d'ob- 
server. Il a, à proprement parler, réfléchi et étudié 
fort peu, et n'a pas en vérité beaucoup de savoir. 
Il a seulement senti durant tout le cours de sa 
vie; et, à cet égard, sa sensibilité s'élève à un 
degré qui dépasse tout ce que j'ai vu jusqu'ici; 
mais elle lui donne en outre un sentiment plus 
aigu de la peine que du plaisir. Il est comme un 
homme qui serait dépouillé non-seulement de 
ses vêlements , mais encore de sa peau, et qui 
dans cet état aurait à lutter avec les éléments 
tumultueux qui troublent perpétuellement ce bas 
monde. » Dans cette disposition d'esprit, Rous- 
seau, livré à lui-même, au fond d'une solitude, 
se créa les plus sombres chimères. Il en vint à 
croire que Hume s'était entendu contre lui avec 
les philosophes de Paris, et lavait attiré en An- 
gleterre pour le faire oublier. Plein de cette idée, 
il écrivit à Hume une lettre insensée où il expri- 
mait les soupçons les plus injurieux, et donnait 
à quelques faits vrais une odieuse et extravagante 
interprétation. Le philosophe écossais,* qui aurait 
dû avoir pitié d'une monomanie dont il avait si 
finement décrit la cause , ne sut pas résister à 
un premier mouvement d'indignation. H s'écria 
que Rousseau était sans comparaison le plus noir 
et le plus atroce coquin qui existât au monde, 
et il publia leur correspondance. Tous les torts 
étaient évidemment du côté de' Rousseau ; mais 
le procédé final de Hume manquait de délicatesse. 
H devait compatir aux manies d'un génie malheu- 
reux, et ne pas les révéler avec une cruelle in- 
discrétion. Après avoir clos par une publication 
au moins inutile ce singulier épisode de sa vie, 
Hume, qui semblait tenir un peu moins à l'in- 
dépendance depuis qu'il possédait la fortune, 
devint sous-secrétaire d'Etat en 1767. Il quitta les 
affaires avec le général Conway en 1768, et re- 
tourna à Edimbourg, «fort riche, dit-il (il possédait 
un revenu de mille livres (26,000 f. par an), bien 
portant, et avec perspective de jouir longtemps 
de son aisance, et de voir les progrès de sa ré- 
putation. » Son espoir ne se réalisa qu'incomplè- 
tement, et il n'atteignit pas un âge avancé. Une 
dyssenterie chronique dont il fut atteint depuis 
1774 fit des progrès alarmants dans les premiers 
jours de 1776. Le malade vit sans anxiété et sans 
regret sa fin approcher graduellement, et il s'é- 
teignit presque sans douleur. Hume a laissé de 
lui-même un portrait un peu trop flatteur sans 
doute, mais suffisamment exact pour que nous 
le citions ici : « J'étais, dit-il, d'un tempéra- 
ment doux, qui se possédait facilement, ou- 
vert, sociable, gai, capable d'attachement, peu 
susceptible de haine , et né avec beaucoup de 
modération dans toutes mes passions, te désir 
de me distinguer dans la carrière des lettres, qui 
fut toujours ma passion dominante, ne m'a ja- 
mais aigri le caractère, quoique j'aie vu tant de 



531 



HUME 



&81 



fois mes espérances renversées. Ma société n'était 
désagréable ni à la jeunesse frivole, ni aux. per- 
sonnes studieuses et instruites. Et comme je trou- 
vais un plaisir singulier à fréquenter les femmes 
modestes et vertueuses, j'eus toujours à me louer 
de leurs procédés envers moi. Plusieurs hommes 
éminents par leur sagesse ont eu , je le sais, de 
justes raisons dé se plaindre de la calomnie; 
mais je ne fus pas même atteint par sa dent en* 
venimée; et quoique je me sois imprudemment 
exposé àla haine des factions civiles et religieuses, 
elles semblaient avoir perdu toute leur fureur à 
mon égard : mes amis n'eurent jamais besoin dt 
justifier un seul trait de mon caractère ni une 
seule circonstance de ma conduite. » 

Comme métaphysicien David Hume fut émt- 
nent, quoique ses idées soient loin d'avoir la ri- 
gueur scientifique qu'on leur a attribuée. Il était 
sceptique, mais d'un scepticisme plus étendu que 
profond et qu'il n'éleva Jamais à la hauteur d'un 
système philosophique ; 11 s'en servit comme d'un 
instrument contre ce qui lui paraissait des pré* 
jugés en morale et en religion ; et 11 prétendit que 
cette guerre était un jeu. ïl attaqua tes principes 
de la religion naturelle en affectant pour eux un 
respect qu'il ne ressentait pas (1). Il conseillait 
la même réserve, la même dissimulation à ré* 
gard du christianisme. Au colonel Edmonstone, 
qui le consultait au sujet d'un jeune homme qui 
éprouvait des scrupules au moment d'entrer dans 
les ordres , il répondait t « C'est trop respecter 
le vulgaire et ses superstitions que de se piquer 
de sincérité à leur égard. S'est-on jamais fait un 
point d'honneur de dire la vérité aux enfant* et 
aux fous f Si la chose méritait d'être traitée sé- 
rieusement, je lui dirais que l'oracle pythien, 
avec l'approbation de Xénophon, avertit chacun 
d'adorer les dieux établis par les lois de la ville. 
Je voudrais qu'il fût encore en mon pouvoir 
d'être hypocrite sur ce point. Les communs de- 
voirs de la société l'exigent habituellement, et la 
profession ecclésiastique ajoute bien peu à cette 
innocente dissimulation ou plutôt simulation 
sans laquelle il est impossible de vivre dans le 
monde. » Ce curieux passage contient toute la 
pensée de Hume. On volt que certaines réserves 
de ses écrits sont de simples précautions dont 
il ne faut pas tenir compte. Son scepticisme est 
illimité. Admettant que toutes nos idées nous 
viennent des sens, il prétend que, comme les 
sens ne peuvent nous fournir que des notions in- 
certaines et Illusoires, nous ne savons rien avec 
certitude. Selon lui , nous ne connaissons à vrai 
dire que nos idées, et il nous est impossible de 
savoir si ces idées correspondent à des objets 
réels. « L'esprit, dit-il, est une espèce de théâtre 



(l) Par prudence il n'avait pas publié une de ses pre- 
mières œuvres , les Dialogues sur la Philosophé» natu- 
relle, dont le scepticisme agressif aurait eteite la colère 
du elergé; mais il laissa daas son testament les indica- 
tions les plus précises , les plus péremptoires pour la 
publication aussi prompte que possible de cet ouvrage. 



où chaque perception fait son apparition, passe 
et repasse dans un continuel changement... Que 
cette métaphore de théâtre ne nous abuse pas; 
c'est la succession de nos perceptions qui cons- 
titue notre esprit , et nous n'avons aucune idée, 
même éloignée et confuse, du théâtre où oes 
scènes sont représentées. Pour se reconnaître 
dans cette multitude de phénomènes, les savants 
les ont groupés en catégories, auxquelles ils ont 
donné arbitrairement les noms de cause, de temps, 
d'espace, de substance, d'âme, de Dieu. » Tout 
ce raisonnement repose sur le fameux axiome ; 
« Niml est in intettectu nisi quod prius fuerit in set- 
su » $ que l'on y ajoute seulement, avec Leibnifa, 
• nisi intelleotus ipse », et le scepticisme de Home 
n'a plus de hase. Sa doctrine, excellente pour 
détruire des erreurs accréditées, a peu de valeur 
et d'originalité comme système philosophique. 11 
ne fat qu'un critique hardi et pénétrant, et laissa 
à Kent l'honneur d'être le grand métaphysicien 
du scepticisme critique. 

Les Essais de Humew la Littérature sont 
bien au-dessous deses Dissertations Philosophi- 
ques ; iln'en est pas de même de ses Essais Politi* 
que* , qui comptent parmi ses meilleures pro- 
ductions, et qui eurent le mérite de devancer les 
écrits de ee genre publiés en France et en An- 
gleterre. Quelques-uns des principes essentiels 
de la science y sont exposés avec autant de fi- 
nesse que de clarté. Hume est surtout estimé 
comme historien. Toutes les parties du grand 
ouvrage où il raconte les annales de la Grande- 
Bretagne ne sont pas également remarquables. 
Les deux, volumes consacrés au moyen âge ne 
sont qu'une compilation intelligente et bien écrite; 
YÙistotr* du Tudors laisse aussi beaucoup à dé- 
•slrer pour l'étendue et la profondeur des recher- 
ches. VBistoire dés Stuarts, sans être toujours 
fondée sur des documents originaux, est un ou- 
vrage supérieur, malheureusement un peu gâté 
par les préjugés de l'auteur qui, cependant, se van- 
tait de n'en pas avoir. Hume était Écossais et ai- 
mait dans les Stuarts une dynastie nationale. Dé- 
testant l'Angleterre et aimant la France, il ne pou- 
vait en vouloir aux Stuarts d'avoir subordonné 
leur politique à celle de Louis XIV. Le parti de la 
liberté avait été longtemps en Angleterre celui 
du protestantisme intolérant, et Hume les con- 
fond volontiers. 11 ne voit dans les grandes luttes 
soutenues pour les droits constitutionnels que 
des agitations coupables ou stériles; ces droits 
même ne sont à ses yeux que des illusions, et 
leurschampionsdes fanatiques et des imposteurs. 
Cette manière de voir, sceptique et fausse, est 
insinuée avec infiniment d'adresse et finit par 
gagner le lecteur. L'histoire de Hume, quoique 
médiocrement érudite etécrite à un point de vue 
faux, a exercé une grande et durable influence. 

Les ouvrages de Hume sont ; Treatise upon 
human Nature; Londres, 1730, réimprimé en 
1748, sous le titre de Enquiry concerning hu- 
man Understanding ; — Essays Moral, Poli- 



633 



HUME 



534 



tical and Literary; Edimbourg, 1742, 2 vol. 
in- 8°. Ces Essais forent si favorablement accueil- 
lis que l'auteur en donna Tannée suivante un se- 
cond volume, et une seconde édition du premier; 
une troisième édition du tout parut en 1748 : 
ha Political Discourses , formant la seconde 
partie des Essais, parurent en 1752 : la collec- 
tion complète fut publiée sous oe titre : Essais 
and treatises on several eubjects; 1760, 4 vol. 
in- 12 j 1787, 2 vol. in- 8°; elle a été traduite par 
Mérian, Amsterdam, 1759*64, 5 vol. in-12; Paris 
(sous la rubrique de Londres), 1788, 7 vol. 
in-12. Il a été donné séparément, et sous dif- 
férents titres, trois traductions de la deuxième 
partit des Eseags. La première est de M Ue de 
La Chaux; Amsterdam, 1752, 1763, in-12; 
Paris et Lyon, in-12 (Essais sur le Commerce, 
le buaêi l'Argent ) : elle ne contient que sept des 
seise discours de Hume ; quelques-uns de ces 
discours sont suivis de réflexions du traducteur. 
La seconde traduction est de l'abbé Leblanc ; 
Amsterdam, 1754,2 vol. in-12; Dresde, 1755, 
2 vol. in-8\ La troisième traduction est de 
Mauvillon; Amsterdam, 1754, in-8*. Les Essais 
Économiques de Hume, traduits par M 116 de La 
Chaux, ont été insérés dans le t. XV de la Col- 
lection des principaux Économistes > t. XV ; 
— Enquirg concerning the Principlcs of Mo- 
rale; Londres, 1752; traduit en français par 
Robinet, Amsterdam, 1760, in-12; — History 
of England under the house of Stuart; 
Londres, 1764, 1 er vol., in-4»; 2 e vol., 1756; — 
History oj the House of Tudor; 1759, 2 vol. 
ml-4 ;— HisUof Eng.fromtàeearliestperiod; 
2 vol. in-4°. V Histoire d'Angleterre, dont l'o- 
riginal a eu un grand nombre d'éditions dans 
tous les formats, fut traduite par M»' Belot, et 
publiée, par parties, comme l'original, de 1760 
à 1765* à Londres (Paris) et à Amsterdam (Paris). 
Les trois parties réunies lurent ensuite réim- 
primées à Amsterdam (Paris), sous Je titre 
à' Histoire d'Angleterre; 1769, 18 vol. in-12. 
Jl en parut en 1819, à Paris, sous la direction 
de M. Campenon, une nouvelle édition (la meil- 
leure de toutes ), revue et corrigée , formant 
16 vol. i&-8 , avec la continuation jusqu'en 1760, 
par SmoUet. D'antres publications supplémen- 
taires (Adeiphus, Aikin), également traduites 
en français, ont continué les événements jus- 
qu'en 1820 ; mais tout ce qui est postérieur à 
l'année 1686 n'a plus de rapport direct avec 
Home; — Natural History of the Religion, 
Londres, 1755 ; traduit en français par Mérian, 
Amsterdam, 1759, in-8°; — Life written by 
himself uHtha Letter front Dr Adam Smith to 
M. Sirachan t containing an accountof his last 
days and of his death, Londres, 1777 ; traduit 
par Suard, Paris, 1777, in-12;— Dialogues on 
natural Religion, ouvrage posthume traduit en 
français, sous la fausse indication d'Edimbourg ; 
1779 , in -8°. La meilleure édition des ouvrages 
philosophiques de Hume a paru à Edimbourg, 



1826, 4 vol. in-8°. -*Z« Vie et la Correspon- 
dance de David Hume, d'après les papiers légués 
par son neveu à la Société royale d'Edimbourg, 
et d'autres sources originales ont été publiées 
par John H. Burton; Edimbourg, 1846, 2 vol. 
in-8°. L. J. 

We of D' Hume, bg htmself. — Brenner, Dos Génie des 
Hume oder Sammlung Aer vorxûglichsten Grundsâtze 
dièses Philosophe*; Leipzig, 177*, in-S». - Pratt, Apo- 
logv for the Life and fPriUings of Dav. Hume ; Londres, 
1777, In-iî — Curions, particulars and genuine Anec- 
dotes retpecting the late lord Chetterfield and Dav. 
Hume; Londres, 1788, in-ll. — Rlteble, Account ofthe 
Lifts and fWritings of Dav. Hume ,• Londres, 1807, ta-«e.~ 
Zschievche, Comment atio de D. Humio $ceptico; Balle, 
1888, in-8». — Burton, Life and Correspondance of D r 
Hume. - Êdinburgh Review, Janvier 18*7. - tVesmins- 
ter Beview, octobre lft+e. ~ Revues des Deux Mondes. 
l*r novembre 1886. — Lord Brougham, Men of Letter t of 
the times of George M. 

hitmb (David), jurisconsulte écossais, ne- 
veu du précédent, né en 1756, mort à Edimbourg 
le 30 août 1838. Il fut sher\ff<\e& comtés de Ber- 
vrick et de West-Lothian, professeur de droit à 
l'université d'Edimbourg, et enfin baron de la 
cour de l'échiquier. On a de lui un ouvrage estimé 
intitulé : Commentaries on the Law of Scot- 
land y respecting the description and punish- 
ment of crimes ; 1797, 2 vol. in-4». Z. 

Rose, îfew gênerai Biographical Dlctionary. 

HUME (Patrick), critique écossais, vivait 
dans la seconde moitié du dix-septième siècle. 
Il était maître d'école à Londres. Il publia sous 
le titre de Annotations on Milton's Paradise 
lost, 1695, in-fol., un commentaire dont l'évéque 
Nevtton a fait l'éloge, et qui contient , au milieu 
d'une foule de lieux communs, beaucoup de re- 
marques j udicieuses. Z. 

Le D r Hewton, préface de ion édition det Poettoat 
Works de MUUra. ~ Rose, New Getu Dict. 

HUMB (Sir Abraham), ingénieur anglais, 
né vers 1748, mort en 1838. Il servit d'a- 
bord sur V Or son, dans l'armement envoyé 
contre la Hollande en 1787, et tint presque con- 
tinuellement la mer pendant les longues guerres 
de l'Angleterre contre la France (1793-1815). 
En 1819 il obtint un emploi à Plymouth, où il 
mourut à l'âge ce quatre-vingt-dix ans. On a de 
Hume un court traité sur le perfectionnement 
de l'architecture navale. Cet ouvrage, qui con- 
tient des vues neuves et hardies, fut bien reçu, 
et valut à l'auteur le titre de membre de la So- 
ciété royale. Z. 

Rote, General Biographical Dictionary. 
hcmb (James Deacon), économiste anglais, 
né le 28 avril 1774, à Newington, dans le comté 
de Surrey, mort le 12 janvier 1842. Il ht ses 
études à l'école de Westminster, et devint en 
1790 clerc dans l'administration des douanes. 
Son activité et son intelligence lui valurent mal- 
gré sa jeunesse une place importante. En 1798, 
il se maria, et, fixant sa résidence à Pinner, près 
d'Harrow, il exploita une grande ferme, et se 
livra à des expériences sur l'agriculture sans 
négliger ses devoirs officiels. En 1822, il aban- 
donna l'industrie rurale, et revint s'établir à Lon- 



535 



HUME 



536 



dres. Le gouvernement loi confia le soin de ré- 
duire en un simple code les statuts, au nombre 
de quinze cents, souvent contradictoires et même 
inintelligibles, qui formaient alors l'inextricable 
labyrinthe de la législation douanière anglaise. 
Pour apprécier le service que James Hume ren- 
dit à l'administration et au pouvoir, il faudrait se 
faire une idée du désordre qui existait dans cette 
branche considérable des affaires. Onze actes du 
parlement préparés par Hume y portèrent la lu- 
mière et l'harmonie. Ce grand travail exigea du 
savant économiste des efforts qui ruinèrent sa 
santé, et fut rémunéré par une indemnité de 
cinq mille livres st. Sa compétence pour toutes 
les questions d'affaires le fit appeler comme aide- 
secrétaire (joint-astis tant -s ecretary ) au bu- 
reau du commerce. Au commencement de 1840, 
après quarante-neuf ans de service, il prit sa 
retraite, mais il n'en jouit pas longtemps, et mourut 
deux ans plus tard. Bien que Hume ait beaucoup 
écrit , il a très-peu publié, et ses travaux se bor- 
nèrent en général à préparer des papiers officiels ; 
il fournit cependant mBritishand Foreign Re- 
vient quelques articles d'économie politique, en- 
tre autres un Essai sur le Commerce du Bois 
de Construction; et il donna au Morning Chro- 
nicle, sous la signature de H. B. T., une série d'ar- 
ticles qui furent recueillis sous ce titre: Letters 
on the Corn Laws and on the Right ofthe wor- 
king classes; Londres, 1834, in-8°. Z. 
Ençlish Cyclopœdia {Biography). 

hume (Joseph), homme politique anglais, né 
à Montrose, en 1777, mort le 20 février 1855. 
II étudia la médecine, et passa cinq ans chez un 
praticien; puis, après avoir suivi quelque temps 
les cours de l'université d'Edimbourg, il fut, à 
l'âge de vingt ans, nommé chirurgien pour le 
service des Indes Orientales et attaché, en 1800, 
comme aide-chirurgien, à l'armée qui faisait la 
guerre aux Mahrattes. II se livra, dans ses loi- 
sirs, à l'étude des langues orientales avec assez 
de succès pour remplacer, pendant une maladie 
grave, l'officier attaché en qualité d'interprète, 
à l'expédition. Hume remplit aussi les fonctions 
de payeur, et acquit dans ces emplois lucratifs 
une fortune considérable qu'un riche mariage 
vint encore accroître plus tard. De retour en An- 
gleterre, il habita quelque temps Bath et Chel- 
tenham; puis, après une excursion en Por- 
tugal et en Grèce, il fat élu, en 1812, membre, 
de la chambre des communes pour; le bourg 
de Weymouth ; mais il n'y siégea que quelques 
mois et ne put se faire réélire dans l'automne de 
1812. Il ne rentra au parlement qu'en 1818,. 
comme représentant de son bourg natal de Mont- 
rose. Dans l'intervalle il se lia avec Place, Miil, 
et d'autres disciples de Jérémie Bentham, et* 
porta leurs idées dans la chambre des commu- 
nes. De 1818 a 1830 il représenta le bourg de 
Montrose; il fut ensuite élu par le Middlesex. 
Défait aux élections de 1837, il dut à l'influencer 
d'O 'Connell d'être élu pourKilkenny. En 1841 il ' 



échoua devant les électeurs de Leeds ; mais l'an- 
née suivante il reçut de sa ville natale nn man- 
dat qui lui fut conservé jusqu'à sa mort. « Home, 
dit M. Bathery, est un exemple de ce que peu- 
vent en politique l'esprit pratique et la persis- 
tance dans une opinion donnée. Sans autre gé- 
nie que celui des affaires, sans autre éloquence 
que celle des chiffres, il sut conquérir le rang et 
l'influence d'un chef de parti. Son opposition trèf- 
avancée , presque toujours systématique , fat 
néanmoins toute légale et parlementaire. Chef 
du parti radical dans la chambre des communes, 
il n'eut de ce parti ni la déclamation ni les pré- 
tentions philosophiques. La tribune, les comités, 
le contrôle minutieux des actes ministériels, les 
calculs surtout, tels forent ses moyens et ses 
armes. Pendanttootes les sessions on le vit consa- 
crer quinze heures par jour à l'examen des affai- 
res publiques, et il lui arriva de prendre la parole 
jusqu'à quarante fois dans une seule séance. Ce 
fut surtout dans les questions de finances qu'il 
se fit une spécialité redoutable aux ministres. An 
début de sa carrière parlementaire, les mesures 
financières de M. Vansittart étaient à l'ordre du 
jour : il déclara à ce ministre une guerre à mort, 
critiqua tous ses plans, discuta tous ses calculs, 
et montra dès lors ce fanatisme d'économie, 
cette tendance à réduire toutes les questions aux 
règles de l'arithmétique, qui caractérisa depuis 
son talent et toute sa carrière politique. » Pen- 
dant de nombreuses années Hume fut à la cham- 
bre presque le seul avocat de la réforme finan- 
cière, dans toutes les branches du budget, armée, 
marine, administration, Église. H demanda l'a- 
bolition de la peine du fouet dans l'armée, de la 
presse navale, de l'emprisonnement pour dettes. 
Avec un appui peu actif de la part de ses collègues, 
il obtint le rappel des lois sur les coalitions, des 
lois qui interdisaient l'exportation des machines et 
de l'acte qui défendait aux mécaniciens d'aller à 
l'étranger. 11 attaqua incessamment les abus dans 
l'administration coloniale et municipale, les dé- 
penses électorales, le système des licences, les 
droits sur le papier, sur l'imprimerie, sur les 
objets de consommation domestique. Il prit une 
part active à l'émancipation des catholiques ro- 
mains, au rappel des actes de test et de corpo- 
ration, et à la réforme électorale de 1832. En 
1835 il dénonça l'existence d'un complot oran- 
giste qui avait commencé avant l'avènement de 
Guillaume IV, et fit voter une adresse an roi, la- 
quelle amena la suppression des loges orangistes. 
La santé de Hume déclina rapidement après la 
session de 1854, et il mourut au mois de février 
suivant, à sa résidence de Burnley-Hall, dans le 
comté de Norfolk. Malgré la vivacité de ses opi- 
nions radicales , des orateurs de tous les parus 
saisirent cette occasion de payer un tribut d'é- 
loges à son caractère. Z. 

Ençlish Cyclopœdia {Biography). — Rathery , dut 
VBncyel. du Gens du Monde. — MU». Harriet Mtrttnciu, 
fjistory ofthlrty years' Peace. 



537 



HUME — HUMIÈRES 



J bumeou home (D.Dunglas), évocateqr, 
né en 1835 dans les lies d'Orcades, descend 
d'une ancienne famille d'Ecosse dont le cri de 
guerre était home! home! A l'âge de quatre ans 
il fut emmené en Amérique, où s'écoulèrent son 
enfance et sa première jeunesse. Sa faculté de 
seconde vue se révéla vers 1860. Il en est fait 
mention dans un livre Dublié à Boston en 1853 
par E. C. Rogers, Philosophy of mystericus 
Agents. En 1855 M. Hume vint en Europe, et y 
renouvela les prétendus miracles qui avaient 
étonné le Nouveau Monde; ainsi, à Florence, les 
meubles s'animèrent, dit-on, d'une vie surna- 
turelle en sa présence, et les instruments de 
musique résonnèrent harmonieusement sous des 
doigts invisibles; on conte même qu'il s'enleva 
plusieurs fois dans les airs devant une nom- 
breuse assistance. M. Hume fit eu 1856 un 
voyage à Rome, où il fut présenté au saint-père: 
touché de la grâce, il se convertit; mais l'esprit 
de sa mère lui prédit qu'il perdrait sa puissance 
jusqu'au 10 février 1857. 11 revint à Paris où il 
avait déjà séjourné, manifesta le désir d'ap- 
prendre la médecine, et commença ses études ; 
mais , à la date du 10 février, il faillit succomber 
à une attaque de catalepsie suivie d'une crise 
très-violente. C'est dans le cours de cette ma- 
- Jadie qu'il vit le P. Ravignan, dont l'imagina- 
tion fut , dit-on , vivement frappée par les phé- 
nomènes qui eurent heu autour de lui. Depuis 
cette époque M. Hume continue de se prétendre 
l'intermédiaire entre la terre et les puissances 
invisibles : il a donné des séances devant la plus 
haute société de Paris, et plusieurs souverains 
ont voulu être témoins des effets de sa mysté- 
rieuse puissance. £. C. 

H. Deiaage, U Monde illustre, 1887. « Le Courrier de 
Paris, 1857. 

■umiere (M me d\) Voy. Gaco«. 

* humières, famille française qui tirait son 
nom de la terre d'Humières en Artois, mais dont 
la terre de Monchy-Humières en Beauvaisis de- 
vint par la suite le siège principal. Sa généa- 
logie remonte sans interruption jusqu'à Jean , 
seigneur d'Humières, châtelain de Saint-Omer, 
qui assista à la bataille de Poitiers en 1356. 
Parmi ses descendants on distingue : Philippe, 
son petit-fils, qui combattit à Azincourt, où il 
fut fait prisonnier, et qui s'attacha ensuite au duc 
de Bourgogne; — Matthieu, fils du précédent, 
qui marcha avec ce prince contre les Brugeois en 
1437, et mourut à l'attaque du château de Milly 
en 1442 ; — Adrien, fils du précédent, seigneur 
d'Humières, Bacquincourt , Bouzaincourt, etc., 
chevalier de la Toison d'Or; — Jean III, petit- 
fils d'Adrien, seigneur d'Humières, Monchy, etc., 
gouverneur de Péronne, Montdidier et Roye, 
lieutenant général pour le roi en Dauphiné, Sa- 
voie et Piémont, nommé en 1535 gouverneur du 
jeune dauphin, fils de François I er ; — Jacques, 
fils du précédent , seigneur d'Humières , Mon- 
chy, etc., gouverneur de Péronne, Montdidier, 



638 

et Roye , lieutenant général en Picardie ; — 
Charles, fils de Jacques, seigneur d'Humières, 
marquis d'Ancre, tué à Ham, en 1595, ne laissa 
point de postérité. L'héritage delà maison d'Hu- 
mières passa alors à Jacqueline, sœur de Char- 
les, mariée à Louis de Grevant, vicomte de 
Brigueil, d'une maison originaire de Touraine, 
dont les descendants joignirent à leur nom ce- 
lui d'Humières. Cette dame fut maltresse de 
Henri IV, qui la négligea bientôt pour Gabrielle 
d'Estrées. Les terres de Monchy, Condun, etc., 
furent érigées, en 1690, en duché sous le nom 

Humière8 en faveur de Louis de Crevant Hu- 
mières, maréchal de France, arrière-petit-fils 
de Jacqueline d'Humières et de Louis de Cre- 
vant. A la mort du dnc d'Humières, en 1694, 
le nom et le duché passèrent , à défaut d'hé- 
ritier mâle , comme l'avaient prescrit les lettres 
d'érection, à Louis d'Aumont, époux de Julie 
de Crevant, troisième fille du maréchal et à leurs 
descendants. J. V. 

Anselme, Histoire générale de la Maison du Roi et 
des Grands-Officiers de la Couronne. - Moréri, Grand 
Dictionnaire Historique. - Le Bas, DM. encyclop. de la 
France. > 

*humièees (Jean d'), général français, 
mort au mois de juillet 1550, fut successivement 
chevalier de l'Ordre du Roi, puis chambellan 
en 1517. En 1519 il reçut le gouvernement 
de Péronne, Montdidier et Roye, et fut en- 
voyé en 1527 comme ambassadeur en Angle- 
terre. Fait capitaine de cinquante lances en 
1530, et l'un des gouverneurs du dauphin en 
1535, il devint en 1537 lieutenant général aux 
pays d'Italie, duché de Savoie et principauté de 
Piémont. Il entra en effet dans le Piémont avec 
un corps de lansquenets; mais cette troupe in- 
docile lui fit manquer la prise d'Ast, dont il se 
dédommagea en s'emparant d'Albe. Il eut en 
1538 une compagnie de cent hommes d'armes des 
ordonnances du roi et servit au siège de Perpi- 
gnan en 1542. Quatre ans après il fut nommé 
chambellan du dauphin , du prince Henri U, et 
gouverneur des enfants de ce prince. J. V. 

Ch onologie Militaire, t. I, p. 187. - P. Anselme , 
Histoire des Grands-Officiers de la Couronne. — Hé- 
rault, Abr. chronol. de l'Histoire de France. — P. Da- 
niel, Histoire de France. — Sismondt, Histoire des 
Français, t. XVI, p. m à SU. 

hcmières (Charles), marquis d'Ancre, gé- 
néral français, mort en 1595, d'un coup de mous- 
quet qu'il reçnt à la prise de Ham. Gouverneur 
de Compiègne pendant la ligue, puis lieutenant 
général en Picardie, il fut un des premiers sei- 
gneurs qui, aussitôt après la mort de Henri IH, 
reconnurent Henri IV. Le 10 décembre 1590 
il s'empara de Corbie, et fit passer la garnison 
au fil de l'épée, sans en excepter le gouverneur. 
Cinq ans après il périt au siège de Ham. En ap- 
prenant sa mort Henri IV dit : « Je donnerais 
Ham et bien d'autres places pour un homme de 
ce mérite. » J. V. 

.DeThou, Hlst. sui temp., ch. exil. — Davlla , Hist. 
délie Guerre civili de Francia, Ut. XV. — Bentlvogllo, 



fctt 

Guerra di flsmdrt, Ut. II. — V.-P. Cayet, CArofttytf* 
Novenaire, tome UX, Itr. VII. — SUmondl, Histoire des 
Français, t, XXI, p. t*t. 

■UMifcuts (Louis m Cebvant, marquis 
puis duc d'), maréchal français, mort à Ver- 
sailles, le 30 août 1694. Ami de Louvois, le mar- 
quis d'Homières fit une fortune rapide. Turenne 
«vait aussi de rattachement pour lui et surtout 
pour sa femme , Louise de La Châtre. Louis XIV 
lui accorda également de nombreuses faveurs. 
Nommé gouverneur de Compiègne, sur la dé- 
mission de son père, le il juin 1646, il fut créé 
maréchal de camp le 4 septembre 1660, il leva 
on régiment de cavalerie en 1651, et s'en démit 
en 1653, servit aux sièges et à la prise de Mou- 
zon et de Sainte-Menehould, à l'attaque des lignes 
d'Arras et à la prise du Quesooy en 1654, ainsi 
qu'à celles de Landrecies, de Condé, de Saint- 
Guillain et de la Capelle en 1 655. Promu au grade 
de lieutenant général des armées du roi, le 18 oc- 
tobre 1656, il assista au siège de Saint-Venant et 
à la prise de cette ville, et à celle de Mardick en 
1657. A la bataille des Dunes, le 14 juin 166*, 
il commanda les escadrons de l'aile droite. Il 
rendit des services signalés à la prise de Don- 
kerque, et concourut à la conquête de Bergues, 
de Fumes et de Dixmude. H aida encore à en- 
lever Oudenarde et Ypres, dont il fut nommé 
gouverneur. Après la paix de 1659, il obtint en 
1660 le gouvernement général du Bourbonnais, 
avec le titre de sénéchal. En 1664, d'Humières 
représenta Ariodant aux fêtes de Versailles, où le 
roi jouait le personnage de Roger dans Le Palais 
. ffAlcine. 11 servit comme lieutenant général à 
l'armée du roi, sous le vicomte de Turenne, en 
1 667, et se trouva à la prise de Tourna?, à celle de 
Douai et enfin à celle de Lille. H fut employé à 
l'armée de Flandre, sous le frère du roi, en 1668. 
La paix d'Aix-la-Chapelle termina la guerre le 
2 mai. Nommé gouverneur général de Flandre, 
d'Humières tint à Lille une sorte deconr. Le roi 
le créa maréchal de France en 1668, en même 
temps que le marquis de Créqui et le marquis de 
Bellefonds. On raconte que Louis XIV ayant de- 
mandé au comte de Gramont s'il savait quels 
étaient les maréchaux de la nouvelle promotion : 
« Ont, sire, répondit celui-ci , c'est M. de Cré- 
qui, M. de Bellefonds et madame d'Humières. » 
En 1672 , d'Humières , comme ses deux collè- 
gues, refusa de prendre l'ordre de Turenne, que 
Louis XIV avait fait maréchal général en 1660. 
Pour les punir le roi les exila. Bellefonds fut 
envoyé à Tours, d'Humières alla à sa campagne 
planter des choux, selon l'expression de M"* de 
Sévigné, ainsi que le maréchal de Créqui, et vint 
ensuite à Angers. Tous trois ne rentrèrent au ser- 
vice à la fin de la campagne qu'après avoir fait 
acte d'obéissance. Adjoint au maréchal de Luxem- 
bourg, d'Humières fit peser d'énormes contribu- 
tions sur la Hollande. En 1676, il avait investi la 
ville de Condé avec le maréchal de Créqui quand 
Louis XIV arriva à l'armée, le 21 avril. Cinq 



HUM1ÈRES 540 

jours après , cette petite place se rendit. A la fin 
de Tannée, après le départ du roi, d'Humières 
assiégea Aire , qui ne résista pas longtemps. 
L'année suivante les maréchaux de Luxembourg 
et d'Humières commencèrent l'investissement 
de Valenciennes , le 28 février; le 4 mars 
Louis XIV vint les rejoindre, et la place Ait em- 
portée d'assaut le 17. Le 11 avril, il se trouva 
à la bataille de Cassel, gagnée sur le prince d'O- 
range par le duc d'Orléans : d'Humières com- 
mandait l'aile droite. Au mois de décembre il 
prit Saint-Guillaîn en quelques jours. L'année 
suivante il se rendit maître de Gand. En 1683 fl 
s'empara de Courtrai et de Dixmude. Au mois de 
mars 1684, il s'approcha d'Oudenarde et bom- 
barda pendant trois jours et trois nuits cette ville, 
qu'il détruisit et où il n'essaya pas même d'en- 
trer. La même année il perdit son fils unique, tué 
dans la tranchée devant Luxembourg, le 13 mai. 
L'année suivante Louis XIV chargea d'Humières 
d'aller complimenter Jacques H, qui venait de 
monter sur le trône d'Angleterre. A son retour, 
d'Humières fut nommé grand-maître de l'artil- 
lerie. En 1689 il commanda une armée nom- 
breuse en Flandre. Le 27 août il échoua de- 
vant Walconrt sur la Sombre , dont il avait 
voulu enlever le château, et se laissa battre par 
le prince de Waldeck. Cet échec força Louvois 
à le rappeler , et le maréchal de Luxembourg le 
remplaça. D'Humières n'en conserva pas moins 
les bonnes grâces de son souverain, qui érigea en 
duché-pairie sa terre de Monchy en Picardie. 
Louis XIV alla même plusieurs fois l'y visiter, 
et l'aida à embellir cette propriété. Nommé 
commandant général dans toute la Flandre hors 
les pays sujets à contribution, il fit tête à l'armée 
espagnole augmentée des troupes de Hanovre, 
tandis que le duc de Luxembourg agissait contre 
celle de Hollande. En 1691 il fut reçu chevalier 
des Ordres du Roi. Pendant le siège de Mons, il 
campa à Saint-Guillain, puis il commanda l'armée 
sur la Lys, et ensuite sous le dauphin. En 1692 il 
était encore au siège de Namur, mats il ne servit 
point en 1693. 

Le maréchal d'Humières mourut assez promp- 
tement, en manifestant le regret d'avoir négligé 
trois choses dans sa vie : ses affaires, sa santé et 
son salut. Il finit cependant d'une manière chré- 
tienne , assisté par Bossuet, Fénelon et le père 
Caflaro,tbéatin, son eonfesseur, à qui on attribue 
un livre destiné à prouver que la comédie était 
permise par la religion. D'Humières avait pour 
devise diverses couronnes avec ces mots : A'o 
quiero menos. « C'était, dit Saint-Simon, un 
homme qui avait tous les talents de la cour et 
du grand monde , et toutes les manières d'un 
fort grand seigneur : avec cela homme d'hon- 
neur, quoique fort liant avec les ministres et 
très-bon courtisan. Il était brave, et se montra 
meilleur en second qu'en premier... Il recevait 
avec un air de liberté, de politesse , de discerne- 
ment qui lui était naturel, et qui séparait toute 



541 



HT7MIÉRES~ HUMM£L 



541 



et la 



idée <forgneB cTavee It 
homme qui se veut si 
traindre les antres. H avait lat plat 
colères da monde, serteut ea jetant, et avec 
cela leineflleaTlionnwditetBrmatajnnnla» 
ment aimé. » B recevait aa etfct lont ce qu'a y 
avait de plus âevéàmcsnret à m vOe,eta* 
princes do sang rai faisaient da ftéinnatm vW 
sites. Benscrade le célébra aa vers. « H M la 
premier, dit Voltaire, «ni, aa anje d'Arras, aa 
1 658, se fit serrir ea thhbéi d'argent à la traa» 
ebée, et qui fit man g er à ses convives das m- 

n'avait en longtemps que des asatonai de fer. » j 

L. 

Ckromotoçée MUUmÊn. tomt H, p. « 
£f irfofe-» Jfiflfirr. - Le Nte #A«rigey, ÊÊématrm. - 
Grtffet, Jomrmmà %iitui\mi dm ùm a X/#\ - Satat-Sfc- 
moo, Méwotrms. — M-* 4e Sériel lettre*. — Grt- 
uoard, Jfcmetres mOitmàrt* 4é Lomàs Xir. — Staaage. 
JnnaUâ des P r v vimuê -UtÊim. — La Beat. Jfaf*4rc * 
Hmto XI r. — I il pu. m ttwtn ém Êéçm es Unàs Xir. 
- %atu»v, iMek m» Umu HV. - SumomA, Butoir* 
des FnmçaU, UT, «H, Mi, «a. SSt, SIS, US. Ht. Ut, 
u>; XXVI, », iss. - De CemeUe», MA hUtor.ém 



TOmamt, ( Jean-Népemutène ), rcmhre pie- 
niste et composHeor sllrmand, aé à Piosboaig, 
le 14 novembre 1778, et mort w 17 octobre 1837, 
à Wehnar. Son père, Joseph Hammel, nui naît 
tnaro^feniaslq^àréeefeiiûna^ 
M enseigna les premiers éléments de soi art, at 
à six ans le jeune Hammel était déjà partant 
sur le piano à on degré d'habileté luanvausate 
chez an enflant de cet âge. Ea 178a, son père 
étant resté sans emploi par sotte de la sé p aras 
skm de l'école de Wartberg, qaUta P t es n oar g 
pour se rendre à Vienne, oeil flot nommé chef 
d'orchestre da théâtre de Schilumder. Moaart 
entendit Tenant, dont le talent précoce excita 
tellement son intérêt qn'U w prit chai an et se 
chargea de son édocatûa musicale. Ses progrès 
tinrent dn prodige, et à rage de nanf ans il 
faisait l'admiration des connaisseurs dans les 
concerts où son illustre maître sa plaisait à le faire 
entendre. Hammel entreprit alors avec son père 
des tournées artistiques ea Alemagne, en Dane- 
mark et en Ecosse; ce rat à Edimbourg qu'A 
publia son premier ouvrage, qui oonantait en an 
Air varié pour le pian*, qn'U dédia è la reine 
d'Angleterre. Il se rendit ensuite à Londres, pais 
visita la Hollande, et ea 17ts, après art années 
d'absence, il était de retour à Vienne. Quoique 
* peine âgé de seize ans, Is jeune virtuose s'était 
déjà placé an premier rang des pianistes de 
l'école allemande ; il ne se laissa pas cep enda n t 
éblouir par ses succès, et, redoublant d'ardeur 
pour le travail, il s'efforçait de perfectionner son 
jeu eny appliquant les principes d'un rnécamanie 
régulier qu'il avait posés dans les consens de 
Clementi pendant son séjour en Angleterre. Jus- 
que-là Hummel ne possédait encore qaa de 
bibles notions en composition ; il s'adressa à 
Albrechtsberger, et ft sons la direction de eesa- 



at 
; il recul ensuite de Saluai, avec 
j sens mtimesnant, da précieux* 
maats sur la style drnnitianf Sa i 
uaaantradscaapelle du prince Esterons*, ea 
1809, an fournit l'onoasioa de 
de 



k si èemoi qui est 
«genre;!! écrivit 
et dus ballets qui furent re- 
présentés à Vienne, et bientôt il acquit une juste 
célébrité, qu'il oevait particehèrouitatà es* corn 
etèsoa talent d'exén»- 
resta aa service du prince Ester* 
hosy jusqu'en 1811, époque à laquelle a rnaonaa 
à estai poaitne et vint à Vienne, où il se eaa> 
sacra cxcHMâveioent à renseignement do piano -, 
anàsen 1818 la place de maître de chapeee du 
■ai de Wurtemberg an avant été offerte, il se 
rendit à Stutlaard, pais alla quatre ans après 
remplir las antoes fonctions auprès da grand* 
duc da Saxe- Weimar. A partir de ce moment, il 
aanxa iVaaitin mant à Weimar, profitant toute- 
qui lui étaient accordés pour 
la Russie, la Hollande, la 
nelgin^etUFrance^eim-w^llant partout d'e- 
mnanrt appiandr^rmmtii Au mois de mars 
18X7, à son retour d'un de ces voyages, le bruit 
de la in prochaine de Beethoven étant parvenu 
à Weimar, Hummel partit aussitôt peur venir 
è Yuans se réconcilier avec l'illustre musicien 
qui, quelques années auparavant, s'était brouillé 
avec fan, par suite d'une rivalité d'artistes. En 
t dans m chambre du malade, Hummel 
k contenir son émotion, d'abondantes 
coulèrent de ses yeux. Beethoven lui ten- 
dit la nana ; m s'embrassèrent avec effusion, at 
tant rat ©abbé entre les deux amis, qui n'avaient 
d'ailleurs jamais cessé de s'estimer. En 1819 
Hummel revit U France peur la seconde lois; 
il retourna aussi s Londres, et fit plus tard un 
voyage en Pologne; mais, sentant le besoin de 
repos, il revint à Weimar reprendre le cours de 
ses paisible* occupations, et mourut peu de temps 
après, è Tage de cinquante-neuf ans. 

De même que chez Beethoven, le talent de 
l'artiste s'est révélé chez Hammel sous trois 
aspects différents ; l'exécution, l'improvisation 
et la composition Gomme exécutant, Hummel a 
continué l'école de Moiart en U perfectiomia^ 
par la régularité du méaaesine ; on a pu aller 
plus loin que lui dans la difficulté vaincue, dont 
on a même souvent abusé, mais aucun pianiste 
n'a en on je* ptaspuT et plus correct et nasu 
rendre use peasé* mus*a\e avec autant d€ £**, 
de sentiment et de profonde», avec plus dedeh- 
catesse et a'éléWà^slesdétaik.I^^; 
pmviantiaaa. *^^"^<^*"££ 



S4S 



HUMMEL — HUMPHREYS 



544 



par la grâce et la noblesse de ses idées, comme 
par la science dont il a fait preuve, s'est élevé 
à la hauteur des premiers compositeurs de son 
temps; mais il ne pouvait lutter contre le génie 
fougueux de Beethoven, et nul doote qu'il n'eût en 
encore une plus grande réputation si Beethoven 
fat venu vingt ans plus tard. Hummel s'est 
également distingué dans la musique religieuse, 
mais il n'a réussi que médiocrement au théâtre ; 
son opéra deMathilde de Guise n'eut point de 
succès. 

L'œuvre de cet artiste se compose des ou- 
vrages suivants :— Musique dramatique : Le Vin- 
eende ffiAmore, opéra bouffe, deux actes ; — Ma- 
thilde de Guise , opéra en trois actes ; — Der 
Bans ist zu verkaufen (Maison à vendre), 
opéra en un acte ; — Die Ruckfahrt der Kaisers 
(Le Retour de l'Empereur), opéra en un acte; 

— Hélène et Paris, ballet; — Sapho de 
Mytilène, ballet; — Le Tableau parlant, 
ballet;— -V Anneau magique, pantomime mêlée 
de chants ; — Le Combat magique, id. — Hum- 
mel a écrit aussi deux cantates : V Éloge de VA' 
mitié, avec chœurs , et Diane ed Endimione, 
avec orchestre. — Musique d'Église : Trois 
messes à quatre voix, avec orchestre et orgue, 
la première en si bémol, la seconde en mi 
bémol, et la troisième en ré; — un Offertoire 
(Aima Virgo) pour soprano solo, chœur, or- 
chestre et orgue ; — Graduel (Quodquodin orbe) 
à quatre voix, orchestre et orgue. — Musique ins- 
teumehtale : Une Ouvertureh grand orchestre; 
trois quatuors pour deux violons, viole et vio- 
loncelle; deux grandes Sérénades pour piano, 
violon, guitare, clarinette et basson ; — un grand 
Septuor en ré mineur, pour piano, flûte, haut- 
hois, cor, alto, violoncelle et contrebasse ; — un 
antre grand Septuor militaire, en ut, pour piano, 
flûte, violon, clarinette, trompette et contrebasse ; 
—un grand Quintetti, en mi bémol mineur, pour 
piano, violon, alto, violoncelle et contrebasse; 

— une Symphonie concertante pour piano et vio- 
lon ; — six Concertos de piano ; —des Rondeaux 
et des Airs variés pour le même instrument, avec 
accompagnement d'orchestre; — Le Cor en- 
chanté tfObéron, grande fantaisie pour piano et 
orchestre ; —des Trios pour piano, violon et vio- 
loncelle; —des Sonates pour piano seul ; — et 
un grand nombre d'autres pièces détachées com- 
prenant des Fugues, des Rondeaux, des Va- 
riations, etc. — Hummel a publié, à Vienne, 
une Méthode complète, théorique et pratique 
pour le piano, dans laquelle il a exposé les prin- 
cipes qu'il s'était faits et les résultats de son 
expérience. Diendonné Denne-Baron. 

Fétis, Biographie universelle de* Musiciens. — Revue 
Musicale. — Documents inédits. 

■umphebt ( Laurent ) , controversiste et 
philologue anglais, né à Newport-Pagnell ( comté 
de Buckingham), vers 1527, mort le 1 er février 
1589 (vieux style). Il fit ses études à Cam> 
bridge, et s'appliqua particulièrement au latin et 



au grec. Élu plus tard membre du collège de La 
Madeleine, à Oxford, il fat nommé professeur 
de langue grecque,. et entra dans les ordres. 
En 1555 il quitta l'Angleterre, comme beau- 
coup de protestants zélés, et alla chercher à Zu- 
rich un asile contre la persécution. Après la 
mort de Marie, il revint en Angleterre, et reprit 
sa place au collège de La Madeleine. Il devint 
successivement professeur de théologie au col- 
lège de la Reine en 1560, doyen de Glocester 
en 1570, et de Winchester en 1580. Ses opinions 
religieuses, éloignées du cérémonial de l'Église 
d'Angleterre, l'empêchèrent d'arriver à l'épisco- 
pat. Humphrey était un bon linguiste et un ha- 
bile théologien. On le regarde comme un des 
principaux docteurs des non-conformistes an- 
glicans. On a de lui : Bpistola de grxds LUe- 
ris et Homeri lectione et imitatione , en tète 
du Cornucopix de Junius ; Baie, 1558, in-fol. ; 

— De religionis Conservations et Reforma- 
tione, deque Primatu Regum; Bâle, 1559, 
in-8* ; — De Ratione interpretandi auctores; 
Baie, 1559, in- 8°; — Obadias Propheta, he- 
braice et latine, et Philo « De Judice », gr&ce 
et latine, à la suite du traité précédent; — Op- 
timales, sive de nobilitate ejusque antiqua 
origine, natura, officiis, disciplina; Baie, 
1561, in-8°, avec une traduction latine du traité 
de Philon De Nobilitate; — Joannis JueUi, 
episcopi Salisburiensis, Vita et Hors; Lon- 
dres , 1573, in-4°; — Jesuitismi Pars prima, 
sive praxis roman» curim contrarespublicas 
et principes; Londres, 1582, in-8*; — Jesui- 
tismi Pars secunda :puritano-papismi seu doc- 
trine jesuiticx aliquot rationibus ab Edm. 
Campiano comprehensx et a Johanne Du- 
rœo defensœ Confutatio; Londres, 1584, in-8°; 

— deux Discours adressés à la reine Elisabeth 
et quelques sermons. Z. 

Wood. Athenm Oxoniênsés, vol. I. — Chaînera. Ge- 
neral Bioçraphical DictUmary. — Chaaffepié, Diction- 
naire Historique. 

* humphreys ( David ), poète américain, 
né en 1753 dans le Connecticut, et mort le 
21 février 1818, à Newhaven. Élevé au collège 
dTale, il s'engagea sous les drapeaux de Parmée 
indépendante, et entra, en 1780, avec le rang de 
colonel, dans l'état-major t de Washington. Par 
la protection de ce dernier, qui l'honorait d'une 
sincère amitié, il fut envoyé, en 1780, en qualité 
de secrétaire de légation à Liverpool, revint en 
1786 siéger à la législature du Connecticut, et 
fut le premier ambassadeur de son pays accré- 
dité en Portugal, où il résida six ans ( 1792-1797 ); 
à cette dernière date, il alla remplir le même 
poste à la cour d'Espagne, et, depuis son retour 
(1802), s'occupa de l'importation des laines de 
mérinos. En 1*8 12 il commanda pour la dernière 
fois la milice du Connecticut On a de loi de 
nombreuses pièces de vers, qui forment un vo- 
lume publié en 1804, et où l'on remarque : Ode 
à Mont Vernon; Adress to the armies ofthe 



545 



HUMPHREYS — HUNALO 



546 



United-States (1782); Onthe Happiness oj 
America (1785); Death of gênerai Washington 
(1800), et une version poétique de La Veuve du 
Malabar de Lemierre. P. L— y. 

Everest, Poets of Conructfcut. —The Cyclopedia of 
american Literature, t. L 

hunald ou bunold, duc d'Aquitaine, né 
vers 705, mort en 774. Son père Eudes avait ré- 
clamé les secours de Charles Martel contre les 
Sarrasins. Le prince franc fit payer par une sorte 
de dépendance la protection qu'il accorda à l'A- 
quitaine. Ëodes supporta assez patiemment la 
suzeraineté de Chartes; mais Hunald se révolta 
à l'idée de reconnaître une suprématie quelcon- 
que. S'étantmis, à la mort de son père (735), 
en possession de l'Aquitaine, il ajouta bientôt 
après à ses États une grande partie de la Vas- 
conie échue à Atton, son frère, et conçut le hardi 
projet de briser par une résistance ouverte le 
traité humiliant qui asservissait ses États au roi 
de France, à ce prince dont les chefs aquitains 
nièrent la souveraineté jusque sous la troisième 
race, apposant au bas de leurs chartes la for- 
mule bien connue : Rege terreno déficiente, 
Christo régnante. Au printemps de 736, Char- 
les Martel, dont une première sommation adres- 
sée à Hunald était restée sans réponse, passa la 
Loire, entra en Aquitaine et s'avança jusqu'aux 
bords dé la Garonne. Y eut-il un avantage dé- 
cisif dans la lutte entre les deux chefs, et qui 
l'obtint ? C'est ce que les chroniques ne nous ap- 
prennent pas; on voit seulement que Charles 
trouva Hunald beaucoup plus aguerri et beau- 
coup plus habile qu'il ne le pensait, et que la 
confirmation définitive de l'hommage établi par 
le père ne fut, de la part de ce prince, qu'une 
feinte pour gagner du temps. C'est ce que parait 
dire une chronique citée par M. Fauriel : « Eu- 
don étant mort, Charles prit les armes contre 
ses fils et leur fit beaucoup de mal ; mais la lutte 
ayant ses vicissitudes et beaucoup d'hommes 
ayant été tués de part et d'autre, les deux partis 
conclurent une alliance qui ne devait pas durer 
longtemps. » Quoi qu'il en soit, Hunald demeura 
paisible possesseur de ses États , sous la condi- 
tion de reconnaître la suzeraineté de Charles 
Martel et de ses deux fils , Carloman et Pépin. 
11 est probable qu'Atton, qui cherchait dans 
Charles Martel un appui contre son frère, se ren- 
dit, lors des négociations, coupable de quelque 
trahison; car on le voit quelque temps après mis en 
prison par ordre d'Hunald , et il faut remarquer 
ce fait, parce qu'il présage et explique la lutte 
qui s'éleva entre les deux frères en 745. Atton 
ne subit qu'une courte captivité , et reprit bien- 
tôt une certaine part au gouvernement de l'A- 
quitaine. A la mort de Charles Martel , arrivée 
en 742, Hunald envoya des députés à Odilon, 
duc de Bavière, et ces deux princes, refusant 
obéissance à Pépin et Carloman, conclurent une 
alliance offensive et défensive, et convinrent 
qu'aussitôt que l'un d'eux serait attaqué par les 

NOIV. BIOGK. CÉNÉR. — T. XXV. 



fils de Charles Martel, l'autre se mettrait im- 
médiatement en marche pour le défendre ou 
faire une diversion vigoureuse en sa faveur. Les 
deux frères réunirent en effet leurs armes, pas- 
sèrent la Loire à Orléans, entrèrent sur le ter- 
ritoire des Aquitains, et se dirigèrent sur Bour- 
ges; mais ils se contentèrent d'en, brûler les 
faubourgs, la ville étant trop forte pour eux; et, 
marchant droit à l'ouest , ils poussèrent jusqu'à 
Lukes, aujourd'hui Loches-sur-Indre. Un chro- 
niqueur franc s'extasie, en racontant le siège de 
cette ville, sur la bénignité des vainqueurs qui 
épargnèrent miséricordieusement, dit-il, tous les 
habitants, se contentant de raser la ville, d'y 
faire butin de tout, et de réduire en servitude la 
garnison et la population tout entière. Pendant 
que Pépin et Carloman se livraient ainsi à ladé- 
vastion du pays de leur ennemi, une révolte écla- 
tait contre eux au delà du Rhin. Les Alemanes 
ou Souabes avaient pris les armes à l'instiga- 
tion d'Odilon, et revendiquaient leur indépen- 
dance. Les princes francs, quittant en toute hâte 
l'Aquitaine, gagnèrent à grandes journées les 
bords du Danube. Ils eurent bientôt réduit les 
révoltés à l'obéissance. I/année suivante, ce fut 
Odilon lui-même qui prit les armes, tandis que 
Hunald, sûr de l'impunité, tombait comme la 
foudre sur Orléans et sur Chartres. Il pilla et 
incendia cette dernière ville, sans laisser debout 
ni maison, ni couvent, ni église, pas même la 
cathédrale placée sous l'invocation de la Vierge, 
et reprit ensuite le chemin de son pays sans le 
moindre obstacle. Mais les Bavarois et les 
Saxons furent défaits, et les princes francs repa- 
rurent en 745 à la tète d'une nouvelle armée sur 
les bords de la Loire. Rien ne pouvait sauver 
l'Aquitaine, et Hunald lui-même se voyait sur le 
point de tomber entre les mains des vainqueurs, 
lorsqu'à imagina un expédient qui le tira d'af- 
faire sans compromettre sa dignité et sans 
porter atteinte aux ressources guerrières dont 
ses États 'pouvaient avoir besoin plus tard. Il 
imagina de se retirer dans un cloître et de cé- 
der son pouvoir à son fils Waifre, que les prin- 
ces francs crurent dominer facilement,, tandis 
qu'Hunald, de son côté, fondait sur lui les plus 
grandes espérances. Il ne lui suffisait pas d'ab- 
diquer pour assurer le trône au jeune prince ; 
Atton avait une certaine part dans le gouver- 
nement de l'Aquitaine, et il était à craindre qu'il 
ne lui disputât l'autorité. Hunald l'attira à Bor- 
deaux, et dès qu'il l'eut en son pouvoir, il lui fit 
crever les yeux et l'enferma dans une prison 
d'où il ne devait plus sortir. 

Le chef aquitain ayant ainsi aplani de son mieux 
la carrière de son fils, lui fit ses adieux, prit congé 
de sa femme, et alla revêtir l'habit de moine dans 
le monastère de l'Ile de Ré, où son père avait son 
tombeau. Près de vingt-cinq ans , il sommeilla 
dans le cloître; et Pépin put, après avoir assas- 
siné Waifre, mourir tranquille (768), en pensant 
que son successeur n'aurait rien à redouter d'un 

18 



547 



vieux moine. Il se trompait ; Hunald jeta le froc, 
déserta sou monastère, reprit le titre de duc, et 
s'élança à l'aventure dans l'Aquitaine pour en 
ci tasser les garnisons et les officiers de Pépin 
(769). II rassembla autour de lui tous les mécon- 
tents, profita habilement des troubles qui avaient 
suivi la mort du chef de la dynastie carlovin- 
glenne, s'ouvrit des intelligences jusque dans la 
Vasconie, et fut au moment de parler en maître 
à Charlemagne. Mais celui-ci parvint, par une 
manœuvre habile, à l'envelopper entre la Dor- 
dogne et la Garonne. Hunald gagna alors la Vas- 
conie, puis, abandonné de son armée, il fut forcé 
de se réfugier chez Loup, duc de Gascogne, qui, 
n'osant résister aux ordres de Charlemagne, lui 
livra le fugitif. 

Hunald, conduit en Austrasle, s'échappa deux 
ans après, et gagna la frontière des Alpes et de 
là Rome. Certains auteurs prétendent que Char- 
lemagne lui permit de se rendre en Italie pour 
y rester sous la surveillance du pape Etienne II. 
Arrivé à Rome, Hunald se présenta au souve- 
rain pontife, et fit entre ses mains le serment 
ou le vœu formel de ne jamais s'éloigner du 
tombeau des deux apôtres. Il en devait être de 
ce vœu comme de tous les traités qui lui avaient 
été imposés jusque-là : Didier, roi des Lombards, 
l'appela auprès de lui, pensant qu'il pourrait tirer 
bon parti de son expérience et de sa renommée 
dans sa lutte contre Charlemagne. Hunald s'en- 
fuit aussitôt de Rome, et soutint avec son nou- 
vel ami. le siège que le roi Franc vint mettre 
devant Pavie en 774. Il y mourut la même an- 
née, écrasé sous des pierres. Une tour, en s'é- 
croùlant, l'ensevelit-elie sous ses ruines, ou 
bien fut-il lapidé par les habitants qu'il exhor- 
tait à ne pas capituler? L'expression du chro- 
niqueur ( sicut meruit, lapidibus dignam 
morte vitam finivit ) est obscure et ne noua 
permet pas de décider cette question. 

Le Bas, Dict. encyc. de la France. — Chronicon jtfow- 
siacensis Camobii. — Frétfégaire, Continuât.. — Adon, 
Chron. - Adrien de Valois, Hes Frwietem* I. XXV; — 
Histoire générale du Langmdiùe, 1. VU. — Éfffe- 
hard . Vîtes Caroli Magni Annotes. — FaurtcJ, His- 
toire de la Gaule méridionale, 

hïtnattld (Pierre), médecin français, était 
d'Angers, où il exerça et enseigna Ta médecine à 
la fin du dix-septième siècle et au commence- 
ment du dix-huitième. On a de lui ; Discowfi 
physiaiie sur les Propriétés de la Sauge et 
sur le reste des plantes aromatiques, dans 
lequel par occasion on traite de \a dissolu- 
tion des corps et de la digestion des aliments 
dans l'estomac ; Paris, 1698, in- 12; — Disser- 
tation sur les fièvres malignes qui régnent 
dans les saisons de Vêlé et de l'automne, et 
en particulier sur celles de Vannée 1710; 
Angers, 1710, in-12;— Entretiens sur la Rage 
et ses remèdes, oit, par occasion, on propose 
un nouveau système de la sanguification et 
de quelques autres matières importantes à 
Vart de guérir; Chàteau-Gontier, 1714, 1719, 



HUNALD — HUNAULD 548 

in-12; — Projet d'un nouveau Couru de Hé- 



decine; Ohâteau«Genaer, 1718, in-12. 

Un autre Pierre Hujuuu», aussi médecin à 
Angers, a publié : Dissertation sur les Vapeurs 
et les Pertes de Sang; Angers, 1756, in-12. 

3. V. 

Bioçr. MééUplô, — Qntrartf, to Frunc* Littéraire. 

■un acm» {François- Joseph), anetomisfte 

français, né à Châteauhrtant (Bretagne ), le 24 fé- 
vrier 1701, mort à Paria, le 16 décembre 1743. 
Fils de René Hunauld, médecin de Saint-Maki, 
il appartenait à une famille dont tau* les membres 
s'étaient consacrés à l'art de guérir. Il efiafertaaa 
la même carrière, eommenen ses études à An- 
gers, et se fit recevoir maître es arts* A dix- 
huit ans il vint à Paris, et trois ans aprè* il prit 
le grade de docteur à Reims* De retour à Paris , 
il se livra au* travaux anatotnêigues, et s'attacha 
particulièrement a Winalovf et a Dnverney, ami 
la firent entrer fe l'Académie de* Sciences en 
1724, d'abord en qualité de chimiste adjeiat, seule 
place alors vacante, puis cetnme.aaatoausteen 
*728. A la mort a#Duveïn«y, «0.1730, Hunauld 
le remplaça dan» la ehaijre d'anstofuie sa Jardin 
du Roi. Il s'appliqua dès lors a l'exercice de sa 
profession. Devenu médecin dn due depuis 
maréchal de Rienetien, il raccompagna dans 
son ambassade * V*enan$i7a&-t72in), voyagea 
ensuite, en Angleterre, on H fut nommé membre 
4e la Société Royale et en Hollande*, on il se fia 
avec Boërhaave. .«. Quoiqu'il éprouvât dans se jeu- 
nesse une grande répugnance pour les dissec- 
tion*, dit la Biographie Médiate, il. parvint à 
la surmonter et a se faire parmi tes anafomistes 
une réputation que le temps at pas tout à (ait 
détruite, en la restreignant néanmoins beau- 
coup, L'ostéoiogie .Sut la» partie à Jaquette il s'ap- 
pliqua de préférence, et malgré les ptegrès qu'a 
fcit* la céphalogénie entre les mains des n*> 
4erne&, on citera toujours avec éloge ses re- 
cherchas sur les os du crâne de rbeoime. On kn 
doit aussi la description de quelques cas inté- 
ressants, de monstruosité» entre autres celui 
d'un hydrocéphale dont la surface da cerveau 
ne présentait aucune trace de circonvolutions, » 
De puis on cite de lui : Discours sur les Fièvres 
qui ont régné les année* dernières; Paris, 
1606, in-12; — Xe Chirurgien Médtcin, on 
lettres contre les chirurgiens qui exercent 
la médecine j Paris, 172G, JflHtt; — Disserta- 
tion en forme de lettre*, 00, si&etdos ouvrages 
de Vaytew du tiare sur 4<? maladies des es; 
Paris» 1726, hvta ; c'est une taochw* anonyme 
contre J,-L. Petit» qui y est accusé de plagiat; — 
Nouveau Traité dePhysitm* sm toute sa na* 
ture; Paris, 1742, % vol. in-12v HunaaM a donné 
dans les Mémoires de V Académie des Sciences 
les articles suivants : Recherches anatvmÀques 
sur les Os du Crâne deVMommt I73w; — 
Examen de quelques parties d'¥* singe; 173&; 
— Mémoire dans lequel on examine si i'kuite 
d'olive est un spécifique contre la morsure 



549 



HUWAULD — HUNDT 



550 



des vipères (avec Geoffroy); 1737; — Re- 
cherches sur les Causée de la structure sin- 
gulière qu'on rencontre quelque/ois dans dif- 
férentes parties du corps humain; 1740. Les 
Philasophtcal Transactions contiennent de loi 
des Réflexions sur VOpérattom d*une Fistule 
lacrymale. J. V. 

Biographie MééHéah.^ Qrtrirf, IM France UOétatte. 

Bruno (Wiguiée), généalogiste allemand, né 
en 1514, mort le 18 lévrier 158*, Il était de la fa-» 
mille des comtes Huad de Lautevbacb. En 1530 
il se rendit à faniv efsité d'ingolstadi , où il sui- 
vit divers coni* sons la conduite de J. Agricola. 
Cinq ans après il partit pour Bologne. En 1537 il 
devint professeur de droit à lngolstadt,et en 1540 
conseiller aùiiqoe à Munich. Après avoir occupé 
plusieurs emplois dans la judicatore, il fut enfin 
nommé président du conseil intime de Bavière. 
On a de liri : Êayertsches Stanmbuch (Livre 
des Généalogie* bavaroises); Ingolstadt, 1581, 
1 598, 2 vol. m-toi; te premier volante fut réim- 
primé à Mottich en 1599; il contient des notices 
sur les familles bavaroises éteintes à Fépoqne de 
sa publication; 1er second renferme la généalogie 
de celles qui existaient encore alors. Un troisième 
volume est resté en manuscrit; il se trouve à la 
Bibliothèque royale de Monfeh; on y trouve nue 
autobiographie de Ehffld ; — Mefropélis Satie- 
burgensis continens prtmordia christumœ te- 
ligionis per Êojariam et loca fuxdam tn- 
dna; Ingofstadf , 1582, ia-fol.; Munich, 1620, 
3 vol. râ-foL, avec des adjonctions de Gevrold; 
Ratisbonne, 1719, 3 vol. m-fok; cette dernière 
édition est incorrecte; — MrstUch-pfaltiseke 
und bairische Généalogie nebst andern sur 
pfalzbairiscKcn Geschiehte gch&rigen Sachen 
(Généalogie des Princes palatins et bavarois ainsi 
que d'autres choses concernant l'histoire dn 
Palatinat ef de ta Bavière); Aûgsboorg, 1632, 
in-fol. — H und a encore laissé eh manuscrit : 
Généalogie der Bertoge in Baiern (Généalogie 
des Ducs de Bavière), et Qcographisch-politis- 
che Beschreibung von Baiern (Description his- 
torique et politique de la Bavière). E. G. 

KoboW, Baier-Getéhrten-Lexiton. — ». Tob. KAbler, 
Uben taté&hrifte* JT. Hundt ; GwtUngue, f 750, ln-*°. 
- OEtter, Histor. Bibliothek, t. M. — Erach et Gruber, 
Encyklopxdie. 

HCifDBiKBR (Jean-Pierre) , pédagogue al- 
lemand, né au village de GranôVLaffert, dans 1» 
principauté de Hildesheim, le 29 novembre 1751, 
mort le ? février 1836. Destiné an commerce par 
son père, qui était mercier, il slnstraisft néan- 
moins der son mieux. II fat amst condvtt à re- 
chercher les meilleures méthodes d'édneatkm, et 
i! imagina lui-même des moyens rapides d'ensei- 
gner aux enfants la lecture et récriture, a la 
mort de son père, en 1775, ft organisa, font en 
faisant son commerce dans te village natal, une 
école de connaissances utiles pour tes adultes, et 
il dirigea d'après ses propres méthodes celle qui 
existait déjà pour les enfants. Eh 1798, H se ren- 
dit en Hollande dans l'intérêt de son commerce. 



Ses affaires ayant cessé de prospérer, il reprit 
des élèves. 11 lui en vint de plusieurs endroits , 
de Hildesheim et de Brunswick, et le souverain 
de ce pays l'encouragea dans ses efforts. Aide 
par ce > prince, Hundeiker put établir une insti- 
tution dans le château de Vechelde. Il en fut ex- 
pulsé, après la campagne de 1813, par le prince 
Guttlauroe-Frédéric, revenu dans ses États. Après 
d'inutiles réclamations, Hundeiker alla se retirer 
auprès d'un de sea beaux-fils dans les environs 
de Dresde, où il mourut* Entre autres ouvrages. 
On a de lui ; Chants pour V Enfance; - Abé- 
cédaire. V. R. 

Henke, BvséM*. «-Krach et Grqber, Mrwklop&die 
hujijmuumçbn {Jean-Chrétien), natura- 
liste allemand, né à Hanau, le 10 août 1783,m#rt 
à Gfcsaen, le 10 février 1834. Professeur d'éco- 
nomie forestière à Tubingue en 1821, il devint 
en 1824 directeur de l'école forestière de Gies- 
sen. Oa a de lui : Méthodologie und Grundriss 
der Forstwissenschaft (Méthodologie et élé- 
ments de la Science Forestière) \ Tubingue, 1819 j 

— Encyklopœdie der Forstwissenschaften 
(Encyclopédie des Sciences Forestières); Tu- 
bingue, 1821, 2 vol. ; 3 e édition en 3 vol. 1835- 
1840; vol. t et 2; 4 e édit, 1842-1843; — Lehr- 
buch der Forst und landmrthschaftUchen 
Naturkunde (Traité scientifique de l'Économie 
forestièreetitirate);Tobingue, 1827-1840,4 vol.; 

— DU Anatotnie t de Chemismus und die 
Physiologie der Pflanzen (Anatomie, chimie 
et physiologie des Plantes); Tubingue, 1829; 

— Die ForstschsBtmng auf neuen wissens- 
chaftlichen Grundlagen (La Taxation des Fo- 
rêtsd'aprèa de nouveaux principes scientifiques ) ; 
Tubmgoe, 1826, 2 vol.; — - Beitraege vur ge- 
sammten Forstunssenschaft (Documents pour 
servir à l'étude de la Science Forestière) ; Tu- 
bingue, 1824-1829, 2 vol., ouvrage continué par 
Klanprecht, 

Son ni» Charles Bernard, né le 30 janvier 
1810, à Friedewald, près Hersfeld , professeur 
de théologie à Heidelberg depuis 1847, a pu- 
blié entre autres : Der deutsche Protes- 
tamUsmus, seine Vergangenheit und seine 
heutigen Lebensjragen (Le Protestantisme al- 
lemand, son passé et son présent); Francfort, 
1816 ; 3* édition, 1849 ; -r Veber die ftatur und 
die geschichtliche Entwiekelung der Bu- 
mêmitâttsidee (Dn far Nature et du développement 
historique de ridée de VHuntauité ) ; Heidelberg, 
1852. R. L. 

Cmv.-LesJ. 

*»tJi»tKHM» (André) , professeur allemand, 
né à Breslao, vivait vers la fin du quinzième 
siècle; il enseigna à Erfnrt les belles-lettres, et fit 
imprimer en cette ville en 1494 un Nova A rs 
epistolandi, m-4°. G. B. 

Haln, Repertorittm Biblioçrapkicnm, t. H, P. I, p. 113. 

■un*? (Magnus), naturaliste et philosophe 
allemand, né à Magdebourg, en 1449, mort à 
Meissen, en 1519. Il enseigna la physique à l'u- 

18. 



551 



HUNDT — HUNIADE 



552 



niversité de Leipzig, et devînt recteur de cette 
école. Il est l'auteur d'un grand nombre d'ou- 
vrages, parmi lesquels nous ne citerons qu'un 
seul , curieux au point de Tue de l'histoire de la 
médecine, parce qu'il est un des premiers dans 
lesquels se trouvent des dessins anatomiques : 
Anthropologium de hominis dignitate, na- 
turel et proprietatibus , de elementis, parti- 
bus et membris humant corporis, de jura- 
mentis, nocumentis f accidentibus , vitiis, 
remediis et physionomia ipsorum, de excre- 
mentis et exeuntibus, de spiritu humano 
ejusque natura, partibus et operibus, de 
anima humana et ipsius appendiciis ; Leip- 
zig, 1501, in-4°. Platner, dans son opuscule De 
Maïjno Hundt , tabularum anatomicarum, ut 
videtur, auctore, Leipzig* 1734, in-4°, appelle 
Hundt « l'inventeur des dessins anatomiques », 
car les ouvrages de Ketham (Fasciculus Medi- 
cinœ; Venise, 1495, in-folio) et de Peiligk 
( Compendium Philosophie naturalis ; Leip- 
zig, 1499), qui en contenaient déjà, avaient 
passé presque inaperçus. D r L. 

_ Ersch et Gruber, AUgem. Bncyklopsedie. 

hume (André-Christophe- Albert), punii- 
ciste allemand , né à Gœttingue, le 4 mai 1777, 
mort le 31 décembre 1835. Après avoir suivi les 
cours de l'université de sa ville natale et rempli 
les fonctions de précepteur particulier, il étudia 
la théologie, puis revint à l'enseignement privé. 
De 1804 à 1814 il fut gouverneur des fils de De- 
rental, premier maréchal de la cour. Nommé 
capitaine de la landsturm lors de la guerre de 
1812, il rendit beaucoup de services dans cette 
position. En 1814 il fut pendant un an gouver- 
neur d'un des princes de la famille royale. Puis 
il devint secrétaire du général bavarois La- 
motte. A son retour dans sa ville natale, il se 
livra uniquement à l'étude des sciences et des 
lettres. En même temps il écrivit dans les jour- 
naux et recueils périodiques de l'Allemagne. En 
dernier lieu il avait été nommé conservateur de la 
Bibliothèque royale de Hanovre. Outre ses nom- 
breux articles publiés dans les journaux, on a 
de lui : Petite Histoire du Hanovre; — Es- 
quisse historique et philosophique du Com- 
merce des Esclaves nègres, etc., depuis son 
origine jusqu'en 1820, 1. 1. V. R. 

Conversât. -Lex. der Cegenwart. 
hunéric (*Ov(âptxoç), second roi des Van- 
dales en Afrique, fils et successeur de Genséric, 
régna de 477 à 484. Il était encore enfant lorsque 
son père le donna en otage à l'empereur Valen- 
tinien, en 435 ; mais celui-ci renvoya bientôt le 
jeune prince. Il épousa Eudocie, fille de Valen- 
tinieo, alors prisonnière en Afrique. H succéda à 
son père dans un âge avancé, et n'hérita d'au- 
cune de ses grandes qualités. Avide, cruel et 
lâche , il ne fut redoutable que pour sa famille 
et ses sujets. Comme, d'après une loi de Genséric, 
la couronne devait passer au prince le plus âgé 
de la famille royale, Hunéric, désirant laisser le 



trône à ses enfants, fit tuer son frère Théodoric. 
11 cessa d'entretenir les flottes qui, sous Genséric, 
portaient la terreur sur les rivages de l'empire 
romain, et laissa les Maures s'établir sur le ter- 
ritoire des Vandales. Il persécuta les catholiques. 
Ce fut en vain que son allié, l'empereur Zenon , 
à la prière du pape Félix, lui envoya un ambas- 
sadeur pour demander quelque adoucissement 
à la persécution. Hunéric, loin de rien accorder, 
fit border d'échafaud.*, de chevalets et de bour- 
reaux les rues par où devait passer Vranius, le 
député romain. 11 mourut peu après de la même 
maladie qu'un autre célèbre persécuteur, Gâte- 
rais. Y. 

Procope, BeU. Vand., I, s, 8. — Victor Vttenais, dans 
Ruinait, Historia Pertecutionis Fandalicse. — Gibbon, 
History of Décline and Fait of Roman Empire. 

- HUNIADE OU HUNYADB ( Jean - CORVIN ) , 

voïvode de Transylvanie, né vers 1400, mort le 
10 septembre 1456. La première partie de sa vie 
fut obscure, et a donné lieu à des légendes. On s'ac- 
corde généralement à le faire naître en Valachie. 
Son père était, dit-on , un boïard nommé Butho 
ou Bushi, et sa mère, Elisabeth Morsinay» appar- 
tenait à la famille impériale des Paléologues. Une 
tradition encore plus incertaine, et fondée sur ia 
ressemblance des noms, fait remonter la race 
dHuniade Corvin aux Corvinus romains. D'a- 
près une troisième version, Sigismond, roi de 
Hongrie et ensuite empereur d'Allemagne, dans 
une campagne qu'il fit contre les Turcs sur les 
frontières de la Valachie en 1392 , connut Eli- 
sabeth Morsinay. L'ayant rendue mère, il lui 
laissa un anneau d'or et un écrit qui devaient 
servir de signes de reconnaissance à l'enfant au- 
près de son père. Elisabeth épousa le boïard 
valaque Bushi, qui la laissa bientôt veuve. Un 
jour que l'enfant jouait avec son anneau sur les 
genoux de sa mère, un corbeau (corvus) le lui 
enleva. L'oiseau fut abattu par un beau-frère 
d'Elisabeth , et le jeune Jean reçut le nom de 
Corvin (Corvinus). Quelques années après Jean 
Corvin alla présenter à Sigismond l'anneau et 
l'écrit laissés à sa mère , et fut comblé par ce 
prince d'honneurs et de richesses. Il reçut le 
château d'Huniadi avec soixante villages, et 
ajouta à son nom celui de son nouveau domaine. 
Ce récit, qui a tous les caractères d'une légende, 
est dénué de preuves historiques ; il paraît avoir 
été inventé pour expliquer les deux noms du 
voïvode transylvain. Les Huniades avaient dans 
leurs armes un corbeau tenant à son bec un an- 
neau d'or, et de là sans doute leur vint le sur- 
nom de Corvinus. Une grave difficulté chrono- 
logique s'oppose à ce que Huniade soit le fils de 
Sigismond. L'époque de la liaison supposée de 
ce prince avec Elisabeth précéda de sept ou huit 
ans la naissance d 'Huniade, et si pour éluder 
la difficulté on rapporte cette liaison à Tannée 
1399, on se trouve dans un nouvel embarras. 
Sigismond était alors prisonnier au château de 
Ziklos , et on ne peut pas lui supposer une in- 



553 



HUNIADE — HUNNIUS 



554 



trigue amoureuse en Valachie. Chalcondyle et 
Dupas nous fournissent sur Jean Huniade des 
récits aussi peu authentiques, et qui ne servent 
pas à dissiper l'obscurité qui couvre sa naissance 
et la plus grande partie de sa vie. Son histoire 
ne commence qu'à la mortde l'empereur Albert II, 
au mois d'octobre 1439. Albert laissait sa femme 
Elisabeth enceinte , et le royaume de Hongrie se 
trouvait sans souverain. Quoique la reine eût 
accouché d'un enfant qu'on appela Ladislas, 
beaucoup de Hongrois, redoutant les dangers 
d'une longue minorité, appelèrent an trône Vla- 
dislasIU, roi de Pologne. Huniade, qui s'était ac- 
quis une grande réputation militaire au service de 
Sigismond et d'Albert, se déclara pour ce parti, 
et le fit triompher. Il fut le plus vaillant lieute- 
n%nt de Yladislas. fin 1440 il harcela l'armée 
d'Amurat, qui assiégeait Belgrade et la força à la 
retraite. Il alla ensuite au secours (FHermann- 
stadt pressée par Mezid-Bei, général d'Amurat, 
battit complètement les Turcs et les rejeta au 
delà du Danube. Yladislas le récompensa de cette 
victoire par la dignité de voïvode de Transyl- 
vanie. Irrité des succès du héros qne les Turcs 
appelaient Yanho, Amurat envoya contre lui, 
en 1442, une armée de 80,000 hommes. Huniade 
marcha à leur rencontre avec 15,000 hommes, 
et les mit en déroute à Yasag. L'année suivante 
fut l'époque la pluf brillante de la vie <f Huniade. 
Dans une campagne qui dura cinq mois, et qne 
les Hongrois appellent longue à cause de ses 
exploits, il remporta cinq victoires et prit cinq 
villes. La principale de ces rencontres eut lieu 
à Nissa. Les Hongrois franchirent» an cœur de 
l'hiver, les défilés des Balkans et menacèrent An- 
drinople. Amurat 'envoya une ambassade à Hu- 
niade, et une trêve de dix ans lut conclue à Sze- 
gedin, le 12 juillet 1444. La trêve, solennellement 
jurée, fut violée moins d'un mois après par Yla- 
dislas, malgré les représentations de Huniade. 
Une éclatante défaite suivit ce parjure. L'armée 
chrétienne fut accablée dans la plaine de Varna, 
le 10 novembre 1444. Yladislas y périt et Hu- 
niade s'enfuit. Les Hongrois le choisirent pour 
gouverneur général pendant la minorité de La- 
dislas le Posthume. Il exerça le pouvoir su- 
prême jusqu'en 1453, et en fit un vigoureux 
usage. Si dans sa terrible lutte contre les Turcs 
il essuya des revers aussi éclatants que ses vic- 
toires, il ne se découragea jamais, revint obsti- 
nément à la charge, et partagea avec Scander- 
berg la gloire d'avoir contenu l'invasion musul- 
mane dans la péninsule hellénique. Profitant 
d'un moment où les exploits du héros albanais 
retenaient Amurat loin du Danube, il traversa ce 
fleuve avec 24,000 hommes, et envahit la Servie. 
Amurat lui proposa une trêve qu'il refusa , et 
le 17 octobre 1448 commença la bataille de 
Kossova. Elle dura trois jours, et se termina 
par la destruction presque complète des Hongrois 
qui furent accablés par la supériorité du nom- 
bre. Huniade parvint à regagner la Hongrie à 



travers les forêts de la Servie et de la Tran- 
sylvanie. Une diversion de Scanderberg sauva 
la Hongrie des suites de la défaite de Kossova; 
mais ce pays se trouva hors d'état de rien entre- 
prendre de plusieurs années. La majorité de La- 
dislas et l'ascendant que prit sur ce prince le 
comte Unie de Cilly, ennemi personnel de Hu- 
niade, forcèrent le voïvode de Transylvanie à 
l'inaction. Pendant ce temps les Turcs s'empa- 
rèrent de Constantinople, et détruisirent les der- 
niers restes de la puissance grecque. Le sultan 
Mahomet H vint ensuite avec 150,000 hommes 
et 300 pièces de canon mettre le siège devant 
Belgrade, que défendait Michel Szilagyi, beau- 
frère d'Huniade. Le voïvode, rassemblant à la 
hâte une armée composée d'hommes de tous 
états, bourgeois, paysans, étudiants, moines 
mendiants, armés de pieux, de frondes, de 
faux, accourut au secours de Belgrade. Il était 
accompagné du légat pontifical Capistrano et de 
plusieurs franciscains dont les discours électri- 
saient ces bandes indisciplinées, mal armées , 
mais pleines d'une ardeur religieuse* Le 14 juillet 
1456 Huniade dispersa la flottille turque du Da- 
nube, et le 21 les Hongrois, ayant en tête Capis- 
trano, repoussèrent les Turcs et pénétrèrent 
dans leur camp. Mahomet leva précipitamment 
le siège et abandonna toute son artillerie. Hu- 
niade ne survécut que peu de jours à son triom- 
phe, et mourut des suites des blessures reçues à 
ce siège. Jean Huniade fut un des plus grands 
capitaines de son temps. Vivant à une époque et 
dans un pays peu civilisés, il eut toutes les qua- 
lités des anciens chefs barbares, la ruse, la pa- 
tience, l'audace , mais il en eut aussi les défauts, 
et l'on signale dans sa vie plusieurs traits de 
cruauté. Il laissa deux fils : Ladislas, qui eut la 
tête tranchée pour avoir tué le comte de Cilly, et 
Matthias, qui fut élu roi de Hongrie après la 
mort de Ladislas le Posthume. Z. 

Chalcondyle, 1. V-VII. — Difcas, 1. XXX-XLIV. — Bon- 
flnliu, Dec. III, 4-18. — CalUroachns, De Clade Famensi. 

— G.-B. Barberto, Fita Capistriani. — Bayer, Ditser- 
tatiodeJoannis Huniadis Ortu et Nativitatf. — Chauffe- 
pi*, Nouveau Diction. Historique.- Schwantner, Scrip- 
torei Rerum Hungaricanm veteres ac çenuini. — Pray, 
Annales Regum Hungariœ, ab ann. c. 997 ad ann. 1M4. 

- Eogel, Histoire du Royaume de Hongrie , 1. III. — 
Mallatb, Histoire des Magyares.— Ctaassln, La Hongrie, 
son génie et sa mission. 

HCJraïus (Gille), théologien protestant al- 
lemand , né à Winnenden, dans le Wurtemberg, 
le 21 décembre 1550, mort le 4 avril 1603. Ses 
parents, qui étaient sans fortune, firent de grands 
sacrifices pour qu'il pût faire ses études de col- 
lège. En 1565 il se rendit à l'université de Tu- 
bingue, où il se fit deux ans après recevoir 
maître en philosophie. Il s'appliqua ensuite pen- 
dant huit ans avec une grande ardeur à l'étude de 
la théologie. En 1574 il fut nommé diacre à Tu- 
bîngue. Deux ans après il fut appelé à occuper 
une chaire de théologie à l'université de Mar- 
bourg. Eu 1592 il devint professeur de théologie 
fe \yittemberg en même temps que prévôt à 



655 HUffMUS 

1 'église du château de cette viite. L'année suivante 
ii fut envoyé en Silésie peur y hâter le* progrès 
de la réforme, Après être devenu m 1696 sur- 
intendant général, il assista eu 1601 au colloque 
deBatisboiMie,0Ù il ajfguiaaatA contre Gratter 
et Tanner. Hunnius soutint pendant toute sa 
rie des polémiques ardente* contre les catholi- 
ques , les calviniste* #t «notre tous <*ux qui s'é- 
cartaient d'une ligne de Ja confession d'Augs- 
bourg. £nun, il ffl wnjtewnont tes ptns grands 
efforts pour faire persécuter par son gouverne- 
ment ceux qu'il ne reconoaissaj* pas comme liions 
luthériens, 

Hunnius laissa pfesienraffl*. L'un» Cille, se fit 
remarquer par plusieurs ouvrages de théologie. 
Vautre, Helckerich-Ulrieh , %t d'abord pro- 
fesseur de droit à Gtessen^t ensuite à Marbourg. 
Plus tard il se fit catholique, ef entra au service 
de plusieurs prinoesectteêia&Jâques, Il «st auteur 
de plus de cinquante ouvrage et dissertations 
juridiques (voy. Jpgter, Beytrim wrmMt- 
chen Biographie, t (V ) > 

Les ouvrages <te Huwws a'unt pu» guère 
d'intérêt aujourd'hui ; les principaux «ont : £W- 
vinus tudaiwnt; WWmbw&, i$9g # nM°; 
écrit d'une violence extrême oonfe* te peraonne 
et la doctrine de Calvin ; Pareqs ( wy r m nom ) 
ayant répondu par non Calvin** orthodoxm, 
Hunnius fit paraître , en 150&, aen 4nXMto- 
rseus; — Anti-Qretserm ; WHtemherg, 1*02 
{voy. Baillet, Jugements défi Sawnts, t VI); 
— Anti-Tamenu (wy. Baillet, Jugements 
des Savante, t. VI); — Josephus, deux co- 
médies publiées à Marbourg, en 1634 et 1566. 
Les œuvres latines de Hunnius ont été re- 
cueillies en cinq votantes in-folio j Wittemberg, 
1607 -1600. Le tome premier renferme tes 
traités dogmatiques* le second les écrits polé- 
miques , ie troisième et le quatrième fes ou- 
vrages d'exégèse, le «inqmeme les thèses et ha- 
rangues. Hunnius a encore publié de nombreux 
sermons, des ouvrages de piété ainsi que divers 
traités de controverse. E. G. 

Adami, Vitse Theotojorum. cr Frtbei, Tteatrum. - 
«ayle , Dictionnaire. — Eriétto, Uemer, Theolçqomm 
tnttemh., t. J, p. MB. — Programma in JSg. Hunntutn; 
Wittemberg, l«û8, 4a-* ë - 4J«aner, UieJtenpreOm au/ 
Hwnnms. — Butter, 7Arc»rtû0la 4* f«te Huunii. - 
Ncumann, Programma de Fita Humdi ; WiUeuberg, 
#704, i»-4°. - Er<*œann, ftiogr. sâmmtlicher Prô/este 
in mttenberg. — Strieder, Hestitcke Gelehrtenget- 
chiehte, t. VI, p. »o, et i. il, p. 8M. ^- JOcfcer, ,*tfp. 

iHJOT ( Thomas ) , hébraïsanf anglais , né en 
1696, et «toit à O*focd , le 31 oejobre 1774. 11 
fit ses études à l'*niversiAé d'Oxford àHart-Halie, 
•où il fut reou maître es arts en 1721. 11 était un 
des quatre plus anciens agrégés de cette société, 
quand elle. reçut une organisation régulière et prit 
le nom de Collège de Hertford. Hunt consacra 
ses connaissances jprnloJogiques à des travaux 
sur l'Ancien Testament. Il fut surtout d'un grand 
secours à Wallon , pour la publication de Ja po- 
lyglotte de Londres. En 1738 il fut appelé à la 



~ HUNT 556 

chaine d'arabe fondée par le docteur Land , et 
eu 1747 il fat nommé professeur royal d'hébreu 
à Oxford, fi prit te grade de bachelier en théo- 
logie en 1748, et l'année suivante celui de doc- 
teur. Il était membre de ta Société des Antiquai- 
res et de la Société Royale de Londres , dans la- 
quelle ë Ait reçu en 1740. Hunt était un homme 
timide, d'une modestie poussée à l'exeès, livré 
tout entier à l'étude, et craignant beaucoup de 
se produire an dehors. On a de lui : De Bene- 
dietione patriarche Jacobi; Oxford., 1728 
»-4% tiré seulement à cent exemplaires; — d« 
Antiqvitate, Bleyantoa et UtiUtate Lingux 
Arabie*! Oxford., 1739, in-4°. (Test le dis- 
cowa qu'il prononça en prenant possession de 
sa chaire d'arabe; — De Vsu Dialectorum 
Orientaliutn, acprxcipue Arabise in hebrctico 
codice interprmtando, Oratio; Oxford., t74« 
in*4* : discours d'ouverture de ses leçons d'hé- 
breu ; — Observations m eeveral Passages in 
theboohofProverbe, with twoSennons; Oxford, 
in-4% publiées l'année qui suivit sa mort paries 
nome de Kennikot; — une Notice sur la rela- 
tion de l'Egypte d'Abd - Attatif, qu'il avait tra- 
duite, et dont il proposait la publication par sous- 
cription : ce projet ne reçut pas d'exécution ; — 
an fragment de saint Hippolyte, d'après deux 
manuscrits de la Smliothèque Bodleyenne, dans 
1a BUëtothecm BibUea de «arker, 1728, in-4° 
En 4757 «uptdonna une édition des Œuvres 
complètes de Hooptr, évéque de Batfe , et en 
mo, avec eostar, une noureile édition annotée 
de la Ht&mn Uel&onis Veterum fiersarum 
de Thons. Hydn. M. N. 

»Me, mm MognwMagf DfctfoMry. 
wcvw (Henry), homme potttfque anglais, 
né à Wittmgton, dans le Wiltshire, ie «novembre 
1773, mort le 15 février 1*35. Son père était 
m riche fermier, tet son édmation fot toute pra- 
tiqua, tout agricole. L'amour de ^indépendance 
M des plaisirs l'entramndans quelques écarts de 
jeunesse que In vieux fermier réprima sévère- 
ment. On assure qu'après une scène violente 
Henry flunt s'engagea à bord d'un négrier de 
Bristol. Cet engagement n'eut pas de suite; mais 
quelque temps après , son mariage avec la fille 
d'un aubergiste lui attira de nouveau la colère 
paternelle. A la mort de son père, en 1797, Hunt 
se trouva l'un des plus riches fermiers de TAn- 
gieterne , et se donna tout entier, aux soins qu'exi- 
geaient ses vastes exploitations. Sa ferme était 
citée comme la mieux tenue -dn comté, et lors- 
qu'on 1801 , sur la crainte qu'on eut d'une in- 
vasion française , tous les propriétaires durent 
fournir au lord-lieutenant un état de leur mobi- 
lier, celui de Henry Hunt portait 1,600 sacs de 
froment , 30 chevaux de trait, 30 bœufs et va- 
ches, 4,200 moutons , etc. Le tout, estimé plus 
de 20,000 liv. st., fut mis par lui à la disposi- 
tion du gouvernement en cas d'invasion; il s'en- 
gagea de plus à s'équiper avec trois de ses gens 
pour le service de la cavalerie. Cette offre pa- 



557 

triotique lui fit beaucoup d'honneur, et fl fut 
nommé à l'un des principaux grades de la yeo- 
manty ou milice provinciale. Mais, toujours 
emporté par sa mauvaise tête , il eut avec lord 
Bruce, commandant de ce corps, une querelle à 
raison de laquelle iï lut condamné à 100 liv. st. 
d'amende et à six semaines d'emprisonnement. 
Il connut, en prison , Waddington , Clifford et 
autres radicaux , qui n'eurent pas de peine à en- 
traîner dans lébr parti cet esprit fougueux, aux 
sympathies populaires , à l'humeur ennemie de 
tout frein. Hunt n'était, en y entrant, qu'un mé- 
content, un meneur de localité : il en sortit l'un 
des apôtres les plus fougueux de la réforme uni- 
verselle. On le vit parcourir les villes, et les 
comtés dans un équipage à la fois somptueux et 
bizarre, réunissant lé peuplé sur son passage, 
le haranguant , et faisant de la propagande poli- 
tique avec le stvlé et les allures d'un charlatan. 
Parmi les assemblée* de ce genre qu'il provoqua 
de 1816 à 1810, Ott cite celles de Westminster, 
de Spafields et de Manchester. A la suite dé 
cette dernière , * qui fut dissipée par la force et 
où périrent un assez grand nombre de personnes, 
Hunt fut arrêté et condamné, le 15 mai 1820, 
après de longs débats et une défense remarquable 
présentée par lui-même, à deux ans et demi de 
prison, à 1,000 liv. st. d'amende, et à donner 
caution pour sa bbnne conduite pendant cinq ans, 
& dater du jour de sa mise en liberté. Malgré la 
popularité dont il jouissait auprès des classes 
ouvrières , Hunt n'avait pu réussir à se faire 
nommer au parlement; ses candidatures réité- 
rées et orageuses, en 1818 à Preston, où il exer- 
çait alors l'état de brasseur, à Westminster en 
18f9, en 1826 * Ilchester, avaient constamment 
échoué. Il fut plus heureux en 1830, «dans la 
première de ces localités, et sa victoire, aussi 
bruyante que l'avaient été ses défaites , fut re- 
gardée comme un des symptômes les plus remar- 
quables du mouvement imprimé en Angleterre à 
l'opinion publique par la révolution française de 
juillet 1830. L'année précédente, aux élections 
de Westminster, il n'avait eu que 81 voix sur 
15,000. H fut encore nommé en 1831 ; mais le 
terme de cette session Ait aussi celui de sa car- 
rière parlementaire. Après un essai infructeux 
pour se faire réélire l'année suivante, il reprit 
le cours de ses prédications démagogiques , qu'il 
mêla d'une manière assez bizarre à l'exploitation 
de diverses industries. Il vendit d'abord , sons 
le nom de Café radical, des grains torréfiés, 
dans le but, disait-il , d'affranchir les contribua- 
bles des droits considérables imposés sur le café 
des Antilles et de l'Inde. On le vit ensuite, monté 
dans une calèche traînée par des chevaux blancs 
et couvert d'un chapeau de même couleur, qui 
lui avait fait donner le sobriquet de White Hat, 
débiter lui-même dans les rues de Londres un 
nouveau cirage dont il se disait l'inventeur, et 
dont l'annonce se lisait de près d'un quart de 
Hue, écrite en lettres gigantesques sur les murs 



HUNT 6S8 

de Black-Heatïî, Pendant une de ses tournées 
dans l'ouest de l'Angleterre, il fut pris d'un accès 
de paralysie pendant qu'il descendait de son 
phaëton, et mourut peu de temps après à Abers- 
fort. [ M. Rathery, à<u#VEncficL «tes G. du M.] 

Rose, New General Biographie^ mctionarn, — 
Conv.-Lex. 

J HlWT (Leigh), poète et littérateur anglais, 
né à Southgate (Middlesex ), le 19 octobre 1784 . 
Son père était un créole des Antilles, et sa mère 
une Américaine de Philadelphie. La révolution 
d'Amérique changea sa destinée. Son père, qui 
était avocat et ardent tory, défendit avec, une 
telle hardiesse les droits de la métropole, qu'il 
fut forcé de s'enfuir en Angleterre, n se fit mi- 
nistre, et pendant quelque temps fut gouverneur 
d'un neveu du duc de Chandos, nommé Leigh. 
Le jeune Hunt, après d'excellentes études à 
Cambridge, travailla d'abord dans le cabinet 
d'un avocat, occupa ensuite une place de com- 
mis au ministère de la guerre, et la quitta 
pour devenir, en 1808, fondateur et co-proprié- 
taire du journal hebdomadaire Examiner, 
qui encore aujourd'hui jouit en Angleterre d'une 
vogue méritée. Ses articles le rendirent très-po- 
pulaire. Malheureusement son éducation n'avait 
pas développé chez lui l'esprit pratique des af- 
faires, et de plus, à cette époque, le parti tory 
était tout-puissant. L'opinion indépendante et 
très-libérale du journal blessait vivement l'ad- 
ministration. Hunt était considéré comme un 
factieux , et Pattorney général avait constam- 
ment les yeux sur lui pour le prendre légale- 
ment en défaut. Un passage d'un article politique 
sur la régence proposée en 1810 en fournit 
l'occasion. Ce passage paraîtrait aujourd'hui 
très-doux et très-innocent. M. Hunt fut pour- 
suivi, ainsi que le Morning Chronicle, qui avait 
reproduit l'article incriminé. Le directeur du 
Chronicle, jugé le premier, se défendit avec 
vigueur et esprit, et fut acquitté. La poursuite 
contre Y Examiner tomba naturellement à terre. 
Une autre occasion fut bientôt saisie. Quelques 
réflexions, sans caractère personnel, contre l'u- 
sage du fouet dans l'armée fournirent la seconde 
poursuite. Lord Brbugham, alors simple avocat, 
fut chargé de la défense. Après avoir cité les 
opinions de généraux distingués qui réprouvaient 
l'Usage du fouet comme dégradant et cruel , il 
soutint que la vraie* question à décider pour le 
jury était si un Anglais avait le droit d'exprimer 
sa conviction et ses jugements sur des sujets 
d'intérêt public. Le jury prononça un acquitte- 
ment. Mais M. Hunt ne fut pas aussi heureux à 
la troisième poursuite. Il avait eu l'imprudence 
de blesser un amour-propre de prince. Un jour- 
nal fashionable ayant, en forme d'éloge, appelé 
le prince régent (depuis Georges IV jun Adonis, 
Hunt, dans un accès d'indignation contre la dé- 
fection du prince à l'égard des whigs, ajouta 
« de cinquante ans ». La phrase parut grosse 
de sédition. L'accusation en fit ressortir l'extrême 



559 



HUNT 



560 



danger, et le jury déclara Leigh Hunt et son 
frère John coupables. Chacun d'eux fut con- 
damné à une amende de 500 liv. ( 12,500 fr. ) 
et à un emprisonnement de deux ans. Des in- 
sinuations d'indulgence, et pour l'amende et 
pour la prison, furent faites aux deux frères, à 
condition que des attaques de ce genre ne se re- 
nouvelleraient plus, mais elles furent repoussées 
constamment. Sortis de prison, les MM. Hunt 
continuèrent à écrire comme auparavant et main- 
tinrent la supériorité de leur journal dans la 
presse. Mais son éclat pâlit bientôt par suite de 
l'ascendant des tories. Sur l'invitation de ses amis 
Shelley et lord Byron, M. Hunt commença un 
nouveau journal, le Libéral, qui n'eutqu'une très* 
courteexistence. La révolution de Juillet vint ra- 
nimer sa force et son influence. « Les trois jour- 
nées de Paris, dit un Anglais , n'ont pas été une 
date seulement pour là France, elles ont commencé 
chez nous la chute de la puissance absolue du 
torysme. » Le séjour prolongé ou les fréquents 
voyages de Hunt en Italie lui fournirent l'occa- 
sion d'en approfondir la langue, les mœurs et le 
génie particulier. Ces études se réfléchissent dans 
le choix des sujets qu'il traita plus tard en prose 
et en vers. L'Italie colore son imagination an- 
glaise. Son principal poème, V Histoire de RÛ 
mini, est un des plus beaux récits poétiques 
qui aient paru en anglais depuis l'époque de 
Dryden. Parmi les plus importantes de ses 
œuvres poétiques , nous citerons : son Capi- 
taine Epée et Capitaine Plume; — le Pal- 
jrey; — les récits poétiques intitulés Histoires 
en vers, —et sa Légende de Florence, drame 
en cinq actes, qui a eu beaucoup de succès sur 
le théâtre de Covent-Garden, et qui est une des 
pièces favorites de la reine Victoria. 

Parmi ses ouvrages en prose, nous devons 
mentionner avec éloges Sir Ralph Esher, 
roman, ou plutôt l'autobiographie supposée d'un 
gentilhomme de la cour de Charles H; — 
Histoires des Poètes italiens, avec leurs vies 
critiques ; — Les Hommes, les Femmes et les 
Livres, où il a réuni plusieurs articles insérés 
dans la Revue d'Edimbourg et autres feuilles 
périodiques ; — V Indicateur; — Causeries de 
table; — Imagination et Fantaisie;— Esprit 
et Enjouement y qui sont des essais critiques et 
choisis; — Autobiographie, en 3 volumes, qui 
' renferme en outre le récit corrigé de ses rela- 
tions avec lord Byron; — La Religion du Cœur, 
manuel de foi et de devoir, où l'auteur expose 
ses vues particulières sur ces sujets. 

Leigh Hunt n'a point de rival comme traduc- 
teur de la poésie italienne. Dans la longue liste 
de ses traductions, nous pouvons citer YAminta 
du Tasse, et Baechus en Toscane de JRedi. 
Comme la plupart des écrivains, il a été exposé 
à beaucoup d'attaques, de faux jugements et de 
calomnies. Ses opinions politiques et religieuses 
en avaient fourni le prétexte ou la cause. 11 parle 
de lui-même avec une noble franchise dans son 



autobiographie ; on voit que les traits saillants 
de sa nature sont la droiture, la sensibilité, la 
reconnaissance et un vif intérêt pour le bien-être 
de ses semblables. Malgré l'étendue de ses tra- 
vaux , il n'était pas arrivé à l'aisance pour ses 
vieux jours. En 1847, la reine, sur la proposition 
de lord John Russell , lui a accordé une pension 
viagère de 200 liv. ( 5,000 fr.)* J. Chahut. 

Mm of the Time. 

I bunt ( William Holman ) , peintre anglais, 
né à Londres en 1827. C'est un des chefs émi- 
nents de cette école nouvelle qui s'est elle-même 
appelée pré-raphaélite, et dont le mérite a été 
longuement discuté. En 1846, M. Hunt exposa 
son premier tableau à l'Académie, et quatre ans 
après il était l'objet de l'attention générale. Ses 
premiers sujets, tirés de nouvelles et de poèmes, 
furent : Le docteur Rochecliffe célébrant le 
service divin dans la maison de campagne de' 
Jocelin Jolif/e, à Woodstooch (1847) ; — La 
Fuite de Madeleine et Porphyre, d'après la 
Sainte Agnes de Keats (1848); — Rienzi ju- 
rant d'obtenir justice pour la mort de son 
jeune frère, d'après Bulwer (1849). En 1860, 
M. Hunt, changeant de style, fit choix de sujets 
religieux et mystiques, qui commencèrent surtout 
sa réputation : c'était d'abord Une Famille bre- 
tonne convertie cachant un apôtre chrétien 
contre la persécution des druides, tableau qui 
fut suivi du symbolique Pasteur mercenaire en 
1852. En 1851, il peignit dans un autre sentiment 
Valentin enlevant Sylvie à Protée; en 1853, 
Claudio et Isabella, et Nos Plages anglai- 
ses, belle étude des plaines d'Hastings. Trois de 
ces peintures furent vendues au prix de 50 et 
60 livres à Liverpool et Birmingham. Le sens 
caché de sa Lumière du Monde et de son Ré- 
veil de la Conscience en 1854 fut expliqué 
dans deux lettres adressées au Times par 
M. Ruskin. En 1855, M. Hunt exposa à Paris 
La Lumière du Monde; Moutons égarés; 
Claudio et Isabella. Dans le premier de ces 
trois tableaux, M. Hunt montre le Christ une 
lanterne à la main , cherchant une âme éveillée 
dans l'univers qui dort. La tête du Christ , ornée 
d'une couronne d'or entremêlée d'épines , res- 
pire une mélancolie onctueuse, une tristesse 
pleine de pitié. Les détails sont d'un fini inimagi- 
nable, commedans tous les tableaux de M. Hunt: 
on distingue jusqu'aux gouttes de rosée aux 
pointes des herbes qu'éclairent le reflet de la lan- 
terne. A côté des minuties de détail, on trouve 
dans toutes les œuvres de M. Hunt une extrême 
variété demouvement, une grande puissance d'ex- 
pression. D'autre part, la couleur est négligée et 
la composition manque de charme; mais le faire 
est plus vigoureux que dans les toiles de l'é- 
cole anglaise précédente. L. Locvet. 

Men of the Time. — English Cyclopsedia (Biographe ). ' 
— Th. Gautier, Les Beaux-Arts en Europe. — Delécluie, 
Exposition universelle des Beaux-Arts, dans le Journal 
des Débats des 6 et 30 août 1855. — Mérimée, Exposition 
de Manchester; dans le Moniteur do 9 Juillet 1857. 



561 



HUNT - HUNTER 



562 



; hunt ( William), peintre anglais, naquit 
à No, en 1790. Il s'est distingué comme aquarel- 
liste. Ses tableaux sont nombreux et recherchés. 

Men ofthe Time. 

I bcnt ( Robert), physicien anglais, né le 
6 septembre 1807, à Devonport (comté de De- 
von). Après avoir été, pendant cinq ans, secré> 
taire de la Société Polytechnique de Cornouailles, 
il devint, sur la recommandation de sir H. de La 
Bêche , conservateur du Musée de Géologie de 
Londres, où il a fait dans ces derniers temps 
un cours de mécanique. On a de lui des ou- 
vrages estimés sur diverses branches de la phy- 
sique : Researches on Light; Londres, 1844 : ta- 
bleau des phénomènes de la lumière, ou l'auteur 
étudie plus spécialement l'action chimique 
exercée par les rayons solaires ; — Poetry of 
Science; Londres, 1848; — Panthea, or tke 
spirit of nature; 1849 ; — Elementary Phy- 
sics ; 1850 ; — Manual of Pfrotography ; 1854. 
M. Hunt a fait sur les sciences de nombreuses 
lectures publiques et inséré plusieurs mémoires 
dans le recueil de UBritish Association. 

P. L— Y. 
E Mm of the Time. - Cyclopxdià of Biography. 

hvhtbr ( Robert), écrivain anglais, mort le 
31 mars 1734. Nommé, en 1708, lieutenant gou- 
verneur de la Virginie, il fut pris par les Fran- 
çais dans la traversée et retenu prisonnier à 
Paris jusqu'à la fin de 1709. En 1710, il alla 
prendre le gouvernementde New-York, et y con- 
duisit deux mille colons du Palatinat. En 1728 
il devint gouverneur de la Jamaïque, où il mou- 
rut. On a de lui une Lettre sur V Enthousiasme , 
qui a été attribuée à Swift et plus généralement 
au comte de Shaftesbury. On lui attribue une 
farce dramatique , intitulée Androboros. Z. 
• Baker, Biaçraphia Dramatica. — Cbalmers, General 
Biog. Diction. 

huhtbr ( William ), médecin anglais , né 
le 2 mai 1718, à Kilbridge, dans le comté de 
Lanerk, en Ecosse, mort à Londres, le 20 mars 
1783. Son père, qui le destinait au ministère ec- 
clésiastique, l'envoya à l'âge de quatorze ans 
étudier à l'université de Glascow. Hunter y passa 
cinq ans; puis, se sentant peu de goût pour la 
carrière sacrée, il accepta la proposition de Cul- 
len, alla s'établir dans sa maison à Hamilton, et 
reçut de lui pendant trois ans des leçons de mé- 
decine. En 1741, il suivit à Edimbourg le cours 
de Monro. L'année d'après il se rendit à, Londres, 
où le célèbre accoucheur Douglas le logea dans 
sa maison, le prit pour aide dans. ses travaux 
anatomiques , lui confia l'éducation de ses en- 
fants, et le fît nommer aide-chirurgien de l'hô- 
pital de Saint-Georges. Douglas mourut en 1742* 
Hunter, devenu indépendant, communiqua à la 
Société Royale de Londres un mémoire Sur la 
Structure et les Maladies des eartilages des 
Articulations (imprimé dans les Philosophical 
Transactions, vol. LXII). Vers la même époque 
une société de chirurgiens de marine demanda à 



Samuel Sharp de leur faire des leçons. Au refus 
de Sharp, Hunter accepta la proposition, et s'ac- 
quitta dé cet office avec un tel succès qu'on le pria 
d'ajouter à ses leçons un cours d'anatomie. 11 le 
commença en 1746. L'année suivante il fut reçu 
membre de la corporation des chirurgiens, et 
peu de temps après il visita la France et la Hol- 
lande avec le fils de son ancien maître. Au re- 
tour de ce voyage, qui fut de courte durée, il re- 
prit ses leçons. Il ne tarda pas à abandonner 
la chirurgie, et partagea tout son temps entre 
renseignement de l'anatomie et la pratique de 
l'accouchement. Il fut successivement nommé 
accoucheur de l'hôpital du Middlesex de la Ma- 
ternité de Londres, et médecin extraordinaire de 
la reine en 1764. En 1750, il avait obtenu le 
titre de docteur à Glascow, et avait commencé 
à exercer la médecine. Sa clientèle devint bientôt 
si nombreuse qu'il fut obligé de se donner Hew- 
son pour suppléant dans son cours et pour col- 
laborateur. Cette association ne dura que jus- 
qu'en 1770, époque où Hewson céda à un autre 
habile anatomiste, Cruickshank, la place de coad- 
juteur de Hunter. Celui-ci fut élu en 1767 
membre de la Société Royale. L'année suivante il 
communiqua à ce corps savant un curieux mé- 
moire sur des os trouvés près de l'Ohio en Amé- 
rique; il y démontrait principalement, d'après la 
structure des dents, que ces os appartenaient à 
quelque grand quadrupède, distinct de l'éléphant, 
auquel on les avait généralement attribués. Outre 
ce mémoire, publié dans le L VIII e vol. des Phi- 
losopha Transactions, il inséra dans les LX e et 
LXl e vol. de la même collection des remarques 
sur les os fossiles trouvés à Gibraltar, et une 
description du nylghau, espèce d'antilope des 
Indes. La Société des Antiquaires l'admit dans 
son sein, et à la fondation de l'Académie royale 
des Arts, il reçut dans cet établissement la chaire 
de professeur d'anatomie. L'Académie de Méde- 
cine et l'Académie des Sciences de Paris l'é- 
lurent pour associé étranger. Il acheva et publia 
à Londres, 1775, in-fol., une œuvre à laquelle il 
travaillait depuis près de trente ans, son Ana- 
tomy ofthe human gravid Utérus, en latin et 
en français, ouvrage illustré de 34 planches, 
représentant les objets de grandeur naturelle, 
avec beaucoup de vérité et de précision. Il avait 
commencé une description de ces figures anato- 
miques ; il n'eut pas le temps de l'achever, et 
laissa ce soin à son neveu le docteur Matthew 
Baillie, qui le publia sous ce titre : Anatomical 
Description ofthe gravid Utérus and its con- 
tents; Londres, 1783, in-8°. En 1781, il succéda 
au docteur J. Fothergill comme président du 
Collège des Médecins. Sa pratique étendue et son 
économie lui avaient permis d'amasser une for- 
tune considérable. Il résolut d'en consacrer une 
partie à l'établissement d'une école d'anatomie. 
L'achat du terrain, la construction de l'amphi- 
théâtre d'anatomie et du Muséum se firent à ses 
frais. Il acquit une riche collection de prépara- 



563 



HUNTER 



564 



(ions anatomiques , des fossiles et d'autres ob- 
jets d'histoire naturelle, des livres grecs et la- 
tins, un cabinet d'anciennes médailles, pour le- 
quel il ne dépensa pas moins de 20,000 1. s. 
Il eut la satisfaction de voir ses trésors numis- 
matiques révélés au public par son ami le doc- 
teur Combe, dans unjivre intitulé : Nummorum 
veterum Populorum et Urbium qui in Museo 
Gultelmi Hunier asservantur Descriptio figu- 
ris illustrata; 1783, in-4°. Tourmenté depuis 
longtemps de la goutte, Hunter continua jusqu'à 
la fin les travaux de sa profession. On rapporte 
qu'il mourut avec la plus grande tranquillité. « Si 
j'avais assez de force pour tenir une plume, di- 
sait-il f j'écrirais combien il est aisé et doux de 
mourir. » Hunter dnt son succès au moins au- 
tant à ses excellentes manières qu'à son talent. 
Il possédait un savoir étendu, mais il n'avait ni 
le génie original, ni la puissance, d'investigation 
de. son frère. Cependant on trouve dans ses écrits 
quelques observations neuves. Il avait pensé que 
les vaisseaux lymphatiques absorbent à toutes 
les surfaces, et sont essentiellement les organes 
de l'absorption; que les veines, par conséquent, 
sont étrangères à cette fonction. Il dut donc 
chercher à prouver qu'il existe des vaisseaux 
lymphatiques dans toutes les parties du corps 
où une absorption peut se faire. Ce fait n'était 
pas encore bien connu ; Hunier l'établit au moyen 
d'expériences, qu'il exécuta lui-même, ou qu'il 
fit exécuter sous ses yeux par son frère John 
Hunter, par Hewscin et par Cruikshank. Outre 
les ouvrages de William Hunter cités plus haut, 
on a de lui ; Médical Cômmentaries ; Londres, 
1762, in-8*; — Two introductory Lectures to 
his anatomical Coursé ; Londres, 178&, in-8°. 
Les mémoires que Hunter a insérés dans les 
Transactions Philosophiques et dans les Aetes 
de la Société de Médecine de Londres ont été 
traduits en allemand par Ç.-G. Kuehn; Leipzig, 
1884-1785, 2 vol. in-8°. Z. 

Slmroens, Account of tfte Life ànd fFritingt of WiU. 
Hunter f Londres, 1718, tn-6°. — Vlcq d'Àzyr, Eloge, de 
Hwkterç dans, le» Mémoires de VAcaA. de Médecine.-* 
CbaU»er», General Biographical Victionary. 

BUflTEiÇ(/oàw), célébré chirurgien et anato- 
miste anglais, frère du précédent, né en Ecosse, 
à Kilbridge, dans le comté de Lanark, près de 
Glascow, le 12 février 1728, mort à Londres , le 
8 octobre 1794, était le dixième enfant d'un fer- 
mier peu fortuné. Il reçut une éducation fort né- 
gligée, et pendant tout le cours de sa carrière 
il éprouva les inconvénients qui résultent de 
l'absence presque complète d'instruction élé- 
mentaire. À dix-sept ans , il alla travailler chez 
un de ses beaux-frères qui exerçait à Glascow 
la profession de tourneur. A vingt ans, fatigué 
d'un travail mécanique et excité par les suc- 
cès de son frère William , il alla le retrouver 
a Londres, et étudia l'anatomie sous sa direc- 
tion. Un an après ses débuts , il secondait son 
frère dans l'instruction de ses élèves. Enfin il 
commença l'étude de la chirurgie d'abord à 



l'hôpital de Ghelsea, sous le célèbre Chcseîden, 
puis aux hôpitaux de Saint-Barthélémy et de 
Saint-Paul. W. Hunter servit d'abord comme 
chirurgien d'armée. Ce fut en cette qualité qu'il 
accompagna en 1761 l'armée anglaise qui, sons 
les ordres du général Hodgson, s'empara de Belle- 
Isle, et que l'année suivante il fit partie d'un corps 
d'armée qui opéra en Espagne. 0e retour en 
Angleterre en 1763, il quitta le service, et se 
livra à la pratique civile, tandis qu'il donnait 
des leçons particulières d'anatomie et de méde- 
I cine opératoire. Un des élèves qu'il eut ainsi pen- 
| dant plusieurs années auprès de lui fut Jenner, le 
célèbre inventeur de la vaccine. En 1768, il devint 
chirurgien de l'hôpital Saint-Paul, et peu après 
membre de la corporation des chirurgiens. En 
1776, il fut nommé chirurgien extraordinaire du 
roi. Mais, tout en s'occupant de pratique chirur- 
gicale, Hunter consacrait les moments dont 
il pouvait disposer à des études d'anatomie et 
de physiologie, qui le conduisirent, en 1767, à 
faire partie de la Société Royale de* Londres. 

Les travaux de Hunter sur les diverses par- 
ties de la science des êtres vivants lui assurent 
un des premiers rangs parmi les hommes qui ont 
dévoué leurs efforts aux progrès de la biolo- 
gie : Us méritent d'autant plus d'être exposés 
avec détail que jusqu'à ces derniers temps ils 
sont loin d'avoir été toujours appréciés à leur 
Juste valeur. Hunter. fut l'un des premiers à 
comprendre que l'anatomie et la physiologie ne 
donnent que des résultats incomplets et par con- 
séquent, du moirt s partiellement, faux lorsqu'elles 
se bornent à l'étude d'une espèce. Aussi em- 
brassa-t-il dans toute leur généralité les études 
qui se rattachent à la matière vivante, en se 
livrant avec ardeur à l'étude des phénomènes 
physiologiques sur tous les animaux qu'il pouvait 
se procurer vivants , ainsi qu'à leur dissection 
après leur mort. Il se faisait donner tous les 
animaux qui mouraient à la Tour de Londres , 
et il achetait tous ceux qui mouraient dans les 
ménageries particulières. Il acheta une maison 
de campagne à Brompton, près de Londres, pour 
pouvoir y élever les animaux qu'il voulait sou- 
mettre à ses expériences , et il manqua à plu- 
sieurs reprises d'être fort maltraité par les hôtes 
dangereux qu'il y entretenait. Les dépenses que 
ces études lui occasionnaient étaient très-consi- 
dérables, et lui devinrent souvent très-onéreu- 
ses. Quand il s'agissait d'une pièce anatomique 
précieuse pour enrichir sa collection ou d'un 
, animal rare à disséquer, aucune considération 
d'économie ne pouvait l'arrêter. On raconte à 
ce sujet des anecdotes singulières ; nous n'en 
citerons qu'une , qui peint bien la manie du 
collecteur, empressé de recueillir un objet 
rare. En 1783 il y avait à Londres un Irlan- 
dais, de taille gigantesque, nommé Patrick 
O'Bryan, dans un état de santé qui ne laissait 
aucun espoir. Hunter, qui voulait atout prix s'en 
procurer la squelette, chargea un domestique 



566 



HUTrTEl 



566 



du soin de sorveftter le géant, afin de l'avertir 
du moment où il rendrait le dernier soupir. 
OBryan, averti des projets de Hunter et vive- 
ment eflrayé de l'idée d'être disséqué après sa 
mort, chercha avec un grand soin à prendre les 
pins minutieuses précautions pour éviter un pa- 
reil sort. Il ordonna qu'après sa mort on sur- 
veillât auét 4t jour son cadavre, puis qu'on ie sub- 
mergeât, après l'avoir enfermé dans un cercueil 
de plomb. Lorsqu'il mourut, l'entreprise des 
pompe* funèbres engagea dans Londres phi* 
sieurs hommes pour surveiller ie corps, en exé+ 
cution des volontés du défunt. Hunter, in* 
formé par son domestique que ces hommes se 
rendaient dans une taverne lorsqu'ils n'étaient 
point de garde , y alla ftuMnêrne , nu conversa* 
tion avec l'un d'eux, et finit par lui offrir une 
somme 4e 50 livres sterling si on le laissait en- 
lever le corps. L'homme accepta, mais à la non* 
dition qu'il s'entendrait avec ses confrères, et il 
demanda 100 livres. L'empressement de Hunier 
à accepter cette offre engagea les gardiens du 
corpu è hausser leurs prétentions , et ils arri- 
vèrent à demander une somme de ôOft livres 
qu'Hunier consentit à payer. Ce fut è ce prix 
(12,500 fr.) que Hunter obtint d'emporter de 
nuit Je corps do géant dans une voiture de 
louage; puis dans sa propre voiture jusque dans 
sa maison de Brompton. Craignant d'être dé* 
couvert, il prépara lui-même le squelette, en 
coupant le corps en morceaux qu'il fit bouUHr. 
Ce squelette, qui fut acheté ai cher, est eujour* 
d'oui l'un des plus curieux ornements du musée 
du Collège des Chirurgiens. A une autre époque, 
faisant des études sur l'organisation des céta- 
cés , il envoyait à ses frais un chirurgien sur 
un navire baleinier, pour y faire des prépara* 
tions anatomiques. Ces faits expliquent suffi'* 
samment comment, malgré l'accroissement de sa 
clientèle et malgré les sommes élevées que lai 
donnaient ses élèves particuliers, il fut presque 
constamment dans un état de gène, résultant 
de ses dépenses continuelles pour ses études 
ainsi que de l'achat d'un terrain et de la cons- 
truction de bâtiments pour conserver ses col* 
lectkms. D'après les biographes de Hunter, son 
musée lui aurait conté plus de 70,000 1. st. 
(1, 760,000 fr.). Il est pénibled'avoiràajouterqu'a* 
près la mort de Hunter, qui n'avait laissé à sa 
femme et à ses enfants, en dehors de son musée, 
que des dettes pour tout héritage , cette collée* 
non anatoniique, aujourd'hui encore la plus 
précieuse peut-être de toutes celles qui existent 
dans le monde , ne fut achetée par l'État que 
15,000 livres (375,000 fr.). Encore fallut-il plu- 
sieurs années de longues négociations. « Ce 
n'est pas le moment d'acheter des pièces anato- 
miques, disait à cette occasion Pitt, quand j'ai 
besoin d'argent pour acheter de la poudre. » 

Encore si Hunter avait pu recueillir, après sa 
mort, toute la gloire que ces immenses travaux, 
auxquels il avait usé sa vie, auraient dû lui mé- 



riter. Malheureusement il n'en u*t pas ainsi» H 
n'en avait publié qu'une partie de son vivant. 
La part la plus grande et la plus importante 
peut-être était restée manuscrite. Il laissait à sa 
mort dix volumes invmlio de notes manuscrites 
sur les préparations anatomiques qui composaient 
son musée; et il avait fait faire par un artiste 
nommé Bell, qu'il eut chez lui pendant plusieurs 
années, un nombre considérable de dessins. Une 
grande partie de ces richesses scientifiques fut dé- 
truite, après sa mort , par son beau-frère Eve- 
iardHfMne,aui prétendit avoir agi par ordre. On 
soupçonna quecette action n'avait point eu d'autre 
but que de faire disparaître la trace, de nom- 
breux plagiats. Quoi qu'il 1 en soit* on ne peut 
douter que eette manière d'agir n'ait considé* 
reniement nui à la célébrité, de Hunter. Les 
travaux remarquables du célèbre M, Owen sur 
la collection de Hunter, dont il a dressé le cata- 
logue , en s'asdant de ee qui avait été sauvé des 
manuicrrU, démontrent de la manière la plus 
évidente que Hunter a été un très-grand zoo- 
tomiste, surtout lorsqu'on se rappelle l'époque 
où il vivait, et qu'il avait constaté, dans ses 
dissections, un prodigieux nombre de faits dont 
la découverte, restée inconnue, a été faite de 
nouveau par d'autres «natomistes. Cela ne veut 
pas dire toutefois que nous cherchions à atté- 
nuer le mérite de ceux qui sont venus après lui. 
Mais tout en reconnaissant que les catalogues 
publiés par M. Owen ne sont point de nature à 
devoir changer l'histoire de la science* nous ue 
pouvons nous empêcher. d'admirer, tel qu'il ré- 
sulte pour nous de l'ensemble de ses travaux 
publiés ou inédits» ce ferme génie qui embrassa 
d'un seul coup d'o?ii toutes les branches îles 
sciences biologiques, et de regretter vivement 
que l'anéantissement de la plus grande partie de 
ses travaux les ait empêchés d'exercer sur la 
science des contemporains l'influence qui leur 
devait être nécessairement acquise. D'ailleurs, 
il faut bien ajouter que Hunter, privé de cette 
instruction première dont l'absence se fait tou- 
jours sentir, même chez les esprits les plus éle- 
vés , et dédaignant de chercher le succès dans 
les artifices de l'art oratoire , ne Art pas un pro- 
fesseur brillant et suivi ; il ne rassembla jamais 
plus de trente auditeurs autour de sa chaire» 
même lorsqu'il eut atteint le premier rang comme 
chirurgien et comme savant. Son enseignement, 
tout rempli de faits nouveaux, d'idées nouvelles, 
mais exposés sans aucun art et comme elles 
se présentaient à l'esprit de l'auteur, n'était pas 
de nature à attirer la foule des intelligences vul- 
gaires , et ne pouvait plaire qu'à la très-petite 
élite d'esprits élevés qui voient dans l'étude de 
1a médecine autre chose que la préparation à 
une carrière lucrative. Aussi l'enseignement de 
Hunter, s'il a contribué à former un certain 
nombre de chirurgiens d'un très-grand mérite , 
n'a pas contribué à vulgariser son nom et ses 
idées , et n'est pas devenu pour lui , comme 



,667 



HUNTER 



568 



pour tant de savants d'un mérite bien inférieur, 
le point de départ d'une prompte et brillante re- 
nommée. Tout cela explique comment [Hanter 
n'a pas reçu de ses contemporains et commence 
à, peine à recevoir de la postérité la part de gloire 
qui lui est si légitimement due. 

Hunter, l'un des premiers peut-être, arriva à 
considérer toutes les questions relatives aux 
êtres vivants, soit dans l'état de santé, soit dans 
l'état de maladie , comme ne formant pas autant 
de sciences distinctes , mais comme étant les as- 
pects différents d'une seule et même science, la 
science de la vie , science dont toutes les parties 
doivent s'éclairer les unes les autres et se prêter 
un mutuel appui. C'est cet esprit élevé et généra- 
lisâtes qui donne à tous ses ouvrages, quelle que 
soit l'imperfection de la forme et souvent même 
aussi l'inexactitude du fond , un si grand intérêt 
et même un si grand charme ; car on y recon- 
naît partout une supériorité incontestable sur les 
notions scientifiques du temps , et comme le pré- 
lude des travaux de la science moderne. 

Hunter lisait peu. Patient observateur, puis 
penseur indépendant, il partageait cette erreur 
encore si commune, même chez de bons es- 
prits , sur l'inutilité de l'érudition en matière de 
sciences ; erreur qui fait que l'on croitdécouvrir, à 
chaque siècle, des vérités d'observation qui sou- 
vent existent déjà dans Âristote. Mais ce défaut 
s'excuse plus facilement chez un homme comme 
Hunter, qui , dans son amour sévère pour la vé- 
rité , n'attachait d'importance à ses opinions et à 
ses théories qu'autant qu'il les croyait vraies, et 
se hâtait de les rejeter lorsqu'il arrivait à les ré- 
voquer en doute. « Ne me demandez pas, di- 
sait-il à ses élèves, ce que je pensais l'année der- 
nière sur telle ou telle question : demandez-moi 
ce que je pense aujourd'hui. » Du reste, bien qu'il 
cite peu , on ne peut s'empêcher de reconnaître 
qu'il y a entre ses idées et celles de Harvey une 
ressemblance assez grande pour que Ton ne puisse 
méconnaître la filiation qui unit ses travaux à 
ceux de son illustre compatriote. Le grand obser- 
vateur qui découvrit la circulation, après avoir fait 
connaître le mécanisme du merveilleux appareil 
hydraulique qui porte le sang dans toutes les 
parties du corps, ne pouvait pas ne pas être frappé 
du rôle que joue ce liquide dans l'organisme, et 
ne pas considérer comme l'expression d'une vérité 
physique les célèbres paroles de Moïse , que la vie 
et Vâme de toute chair sont dans le sang. Aussi 
s'était-il occupé avec beaucoup de soin de l'étude 
du sang ; il avait reconnu la présence d'une ma- 
tière coagulable dans le sérum qui se sépare du 
caillot, et s'il n'a pas laissé beaucoup d'autres 
découvertes sur ce point de physiologie, c'est 
qu'il travaillait à une époque où l'usage du mi- 
croscope n'était pas encore très-répandu et où les 
connaissances chimiques ne s'étaient pas encore 
entièrement dégagées des spéculations de l'alchi- 
mie. Les idées de Hunter sur la vie du sang ne sont 
au fond que les idées de Harvey, mais revêtues 



d'une forme beaucoup plus nette et plus précise 
par suite du nombre considérable de faits positifs 
dont l'histoire du sang s'était enrichie entre les 
mains de ces deux observateurs. Cette filiation 
se retrouve également, dans un autre onire 
d'idées , dans cette phrase remarquable que 
M. Owen a trouvée dans les manuscrits de 
Hunter, et qui contient en germe, quoique avec 
une expression très-peu nette, les théories ac- 
tuelles sur V arrêt de développement. « Si nous 
pouvions suivre les développements successifs 
des diverses parties de l'économie depuis leur 
première apparition jusqu'à leur (entier achèye- 
ment chez les animaux les plus parfaits, bous 
pourrions probablement les comparer au mode 
d'organisation de quelques-uns des animaux im- 
parfaits, appartenant à chaque ordre de la créa* 
tion; car, à aucune période, ils ne diffèrent de 
certains de ces êtres inférieurs, ou, en d'autres 
mots, si nous prenons une série d'animaux de- 
puis le plus imparfait jusqu'au plus parfait,. nous 
y trouverons probablement un animal imparfait 
correspondant à quelque période de développe- 
ment du plus parfait. » Ces paroles nous don- 
nent la paraphrase de ce passage de Harvey, 
dans son célèbre ouvrage De Motu Cordis* Sic 
natura perfeeta et divina, nil faciens frus- 
tra, nec cuiquam animait cor addidit>ubi 
non erat opus, neque priusquam esset ejus 
ususyfecit, sed Hsdem gradibus in/orma- 
tione cujuscumque anknalis, transiens per 
omnium animalium constitutions -(ut ita 
dteam, ovum, vermem, fœtum) perfec- 
tionem in singulis acquirit. » C'est égale- 
ment dans l'ouvrage de Harvey sur la géné- 
ration et dans ses expériences sur le dévelop- 
pement de l'œuf que Hunter a pris le germe 
de ses idées sur la vie, considérée comme 
une force qui maintient les substances du corps 
vivant dans un certain état de composition chi- 
mique, tandis qu'elle les abandonne à la putré- 
faction lorsqu'elle cesse d'exister. 

Rien ne serait à coup sûr plus intéressant que 
de suivre pas à pas la série d'idées qui conduisit 
Hunter dans tous ses travanx sur l'économie 
animale : la vraie biographie de l'homme de 
génie est dans l'histoire même de la succession 
de ses pensées. Mais les causes qui ont empê- 
ché Hunter d'exercer une grande influence sur 
ses contemporains ne permettent point un pa- 
reil travail, et d'ailleurs il faut bien reconnaître 
que cet enchaînement d'idées n'est point tou- 
jours le fait d'un anatomiste, obligé, de travailler au 
jour le jour, quand le hasard lui permet de dissé- 
quer un animal rare ou un homme mort d'une ma- 
ladie curieuse. Nous ne pouvons donc qu'indi- 
quer ici successivement les travaux les plus 
importants de Hunter dans les principales bran- 
ches de la biologie, et dans ce but nous suivrons 
l'ordre chronologique, car le lien qui devait réu- 
nir tous ces faits épars nous échappe complè- 
tement. 



5G9 



HUNTER 



570 



Onthe Descent pf the Testis; 1762. Explica- 
tion du mécanisme de la descente des testicules 
dans le scrotum pendant la vie intra-utérine. Ce 
travail eut poar point de départ une observa- 
tion d'un chirurgien nommé Sharp, qui, dans 
on cas de hernie inguinale, avait observé que le 
sac herniaire se confondait avec la tunique va- 
ginale. C'est ce qu'on appelle actuellement une 
hernie congénitale. Vf. Hunter , partant de la 
découverte faite par Haller de l'existence des 
testicules dans la cavité abdominale aux pre- 
miers temps de la grossesse, pensa que l'observa- 
tion de Sharp pourrait bien être en rapport avec 
les faits annoncés par Haller, et il engagea 
John Hunter à faire quelques recherches dans 
ce but. Le travail de John expliqua d'une ma- 
nière très-nette toutes les conditions anatomi- 
ques et physiologiques de la descente des 
testicules dans le scrotum. Ce travail eut un 
très-grand retentissement ; — On Absorption by 
Veins. Dans ce travail, John Hunter mentionne 
on très-grand nombre de faits nouveaux concer- 
nant l'histoire des vaisseaux lymphatiques, prin- 
cipalement chez les animaux à sang froid, faits 
observés par lui et par Hewson. Il admet que l'ab- 
sorption se fait uniquement par le» lymphatiques, 
et que les veines n'y contribuent point : on sait 
que cette dernière conclusion est fausse, comme 
Magendie l'a démontréde notre temps; — An Ac- 
count of an Amphibious Bipes by Ellis. Ce 
travail fait par Ellis , mais dont tontes les ob- 
servations anatomiques sont dues à John Hunter, 
est d'un très-grand intérêt pour l'histoire de la 
science; car il contient la première description 
qui ait été faite d'un animal énigmatiqne qu'un 
médecin nommé Garden avait découvert près 
de Charlestown, dans les marais de la Caroline. 
Cet animal était la Sirène lacertine, dont la 
place dans les cadres zoologiques n'a été bien ap- 
préciée que plus tard, par Georges Cuvier, en 1 807; 
—Essay on the naturalHistory of the human 
Teeth; 1771 . Ce travail, qui fait encore autoritéau- 
jourd'hui, contient de très-nombreuses observa- 
tions sur la structure des dents, déjà étudiée, il est 
vrai, par Leeuwenhoek, et sur leur accroissement. 
On doit à Hunter ce fait intéressant que si l'on 
nourrit un animal avec de la garance, les cou- 
ches d'ivoire anciennement formées ne se colo- 
rent point, tandis que celles qui se forment de- 
puis l'emploi de ce régime se colorent en rougé; 
— On the Digestion of the Stomach a/ter 
death ; 1 772. Dans ce mémoire Hunter a démontré 
le premier ce fait, important pour l'anatomie pa- 
thologique, que l'on trouve quelquefois un ra- 
mollissement très-marqué et même des perfora- 
tions dans l'estomac d'hommes ou d'animaux 
morts ou tués en pleine santé, perforations con- 
sécutives à la mort et que l'on ne peut attribuer 
qu'aune véritable digestion opérée par le suc gas- 
trique sur les parois mêmes de l'estomac; — 
Anatomical Observations on the Torpédo; 
1773. Ce travail eut un grand retentissement Les 



commotions produites par la torpille étaient 
connues dé toute antiquité; maison en ignorait 
la nature et l'on ne connaissait point leur point de 
départ. Ce ne Ait que dans le courant du dix- 
septième siècle (1661) que le célèbre Redi fit 
connaître les organes qui produisent ces commo- 
tions. Ces organes furent ensuite étudiés par 
Stenon (vers 1673), Lorenzini (1678), Caldesi 
(1487) et Réaumur (1714). Hunter en donna 
une description très-complète, et il prouva qu'il 
existe des organes analogues dans les gymnotes 
ou anguilles de Surinam , dont les propriétés at- 
tiraient vivement son attention. Mais jusqu'alors 
on ne s'était point rendu compte de la nature de 
l'agent qui produit ces remarquables phénomè- 
nes. Tout récemment un médecin anglais nommé 
Bancroft , qui avait longtemps voyagé en Amé- 
rique et fait un très-grand nombre d'observa- 
tions d'histoire naturelle, ami de Franklin et de 
Priestley, avait soupçonné que les commotions 
produites par la torpille pourraient être de 
nature électrique. Le travail de Hunter eut 
pour effet de décider Walsh, l'année suivante, 
1772, à constater par des expériences si les 
commotions de la torpille sont de nature élec- 
trique. Cette découverte, si importante fut faite à 
La Rochelle. Deux ans après, Hunter fit connaî- 
tre en détail les organes électriques du gymnote 
1774 ; — On Account of certain réceptacles 
for air in birds which communicates with the 
lungs and Eustdchian tubes, and are lod- 
ged amông the fUshy parts and the hollow 
bones of thèse animais. Dans ce mémoire, très- 
important, Hunter rendit compte d'un grand 
nombre de farfs concernant la respiration des 
oiseaux, faits qui avaient été jusque-là si mal in- 
terprétés. On savait depuis longtemps qu'il 
n'existe point de moelle dans les os des oiseaux , 
et cette observation se trouve déjà dans l'ou- 
vrage de l'empereur Frédéric II sur la faucon- 
nerie. D'autre part Coiter, dans un ouvrage publié 
en 1573, avait montré que les poumons des oi- 
seaux présentent à leur surface de grandes 
perforations, et le célèbre Harvey avait démon- 
tré en 165t que ces perforations sont les orifices 
de grandes cellules à parois membraneuses, 
cellules logées dans l'abdomen et qui servent de 
réservoirs à air. Hunter signala la liaison qui 
existe entre ces deux ordres de faits ; c'est que 
'l'air, après avoir traversé les poumons, se ré- 
pand non-seulement dans les cellules aériennes, 
mais encore jusque dans l'intérieur des os ; il 
reconnut qu'en insufflant de l'air dans les cavités 
dont les os sont creusés, on gonfle les poumons, 
et qu'en poussant de l'air dans la trachée, on 
peut faire sortir ce fluide par un trou pratiqué 
dans une partie éloignée du squelette. Le célè- 
bre Camper revendiqua l'honneur de cette dé- 
couverte, tl est certain que les deux anatomistes 
étudièrent cette question, et qu'ils publièrent les 
résultats qu'ils obtinrent à peu près à la même épo- 
que. Rien ne nous autorise d'ailleurs à penser que 



571 



HUNTER 



572 



l'an des deux aurait été le plagiaire de l'autre ; 
— Expérimente on Animais or Vegetables 
with respect ofthe power of produdng beat ; 
1775; — On the Méat ofthe Animais; 1777. 
Les expériences de Duhamel et Tillet en France 
(1764), celles de Fordyce et Biagden en Angle* 
terre (1774) avaient démontré ce fait, si re- 
marquable , que la température dea animaux a 
sang chaud ne s'élève point quand il» sont pta- 
gés dans un milieu pmn chaud que kur corps , et 
que ces êtres possèdent en quelque sorte la 
propriété de résistera W chaleur, comme celle 
de résister au froid. Ces «bservations conduisis 
rent Hunter a rechercher si dan» les animaux à 
sang froid il ne se passerait rien d'analogue. 
Il fut l'un des premiers a constate*,, bien 
qu'avec dea instruments tito-imparfaits, que 
les animaux dits a sang froid ont une tempe» 
rature propre qui est généralement supé- 
rieure de quelques degrés è celle du milieu am- 
biant, et qu'ils possèdent dans cette température 
propre une force remarquable 4e résistance a» 
froid. Il a constaté également que les œufs de 
poule possèdent à un haut degré cette propriété, 
et que tant qu'ils ment ils résistent à la: congé- 
lation pendant un temps beaucoup» plu» long que 
lorsque leur vie est détruite. Dans ces expérien- 
ce* Hunter se montra le véritable émule de 
Spallanzant ; — An Aecountof thefree Martin ; 

1779. Les Anglais donnent le nom defree Mar- 
tin aux ruminants hermaphrodites, et partie»* 
lièrement à ceux du genre bœuf. Hunter montrai 
que lorsqu'une vache met bas deux-veaux à In 
fois, l'un mâle l'autre paraissant femelle, celui- 
ci n'est ordinanemeat ep'v&free Martin, un her- 
maphrodite impuissant à remplir l'une ou l'autre 
fonction sexuelle ; — Account of a woman who 
had the small pont éurtng Aer preonancg f and 
who. seemed ta hameommunieated the sonte 
disease ta the fmtw; 1780. Ce fut l'un des pre- 
miers exemples connus de fecoinmunicatjisu d'une 
maladie contagieuse de ta mère an fœtus; — 
On aecount of an extraordinary Pheasant; 

1780. Dans ce mémoire, Hunter décrit le pre- 
mier un fait très-curieux de physiologie et 
d'histoire naturelle : c'est que les vieilles poules 
faisanes, lorsqu'elles deviennent, stériles par les 
progrès de l'âge, revêtent peu à peu le plumage 
des mâles , fait qur es0 devenu le point de dé- 
part d'iintrav«Utrè**nrçminnn^ Geoffroy 
SaimVHHairç ; — Accamné •/ tke aryeme of Hea- 
ting in Fishes ; tfifc : desfeipfenaiiaiefnique 
île l'organe de l'ouïe eues tes poissons. Les or- 
ganes de rcweefcea&9»noisse«s«vaient déjà été in- 
diquéaparStenooenlftftH Hunter fuaavee Geof- 
froy le père et Camper ft* des ttatemtstesqui 
donnèrent IsfcptuegraedsdétaHS. sur leu* struc- 
ture ; — Observation' on the inflammation af 
the internai Coatoftheveim; 1784.' Cet écrit, 
dans lequel Hunter décrit pour la preniière fois 
la terrible maladie connue sou» le nom de phlé- 
bite, a une importance immense dans l'histoire I 



de la médecine; car il explique des faits dont on 
se rendait compte d'une manière très-inexact* f 
et il montre l'impuissance des théories solidiste* 
à tout expliquer en pathologie. Cette descrip- 
tion est devenue le point de départ des travaux 
d'Ahernethy sur le même sujet et plus tard de 
ceux d'un grand nombre d* médecins et de cto- 
rmgienafraneuie; — Treatiêe on the venereal 
Mseaset 1786. Cet ouvrage et cerai de Sv*e- 
dietar, que parut h peu] près à la même époque, 
sont sans contredit les deux meilleurs ouvrages 
que Von ait publié» jusqu'à notre siècle sur les 
incendies ayphwtiquB»;, et comme ife reposée! 
sur dea observations bien faites- recueillies par 
dea espsits très-judicieux, ilo eut encore aujour- 
d'hui une très-grande valeur. — Same O&ser» 
vaiiom tendina ta show thaï tte walf, joei* 
and doge, are ail the sama sparte* ; 17*7 > 
expérience» d'accouplement entre des animaux 
d'espèces différentes, analogues, à ceUes que 
Bnfifon indiquait danaaes sunuléments j — Obser- 
vations on. structure and œeonomf ej Whaks i 
1787. Ce laenaoire est l'un des premier* eè 
l'on trowve des imunamnas un peu précises 
sur les diverses espèce» de cétacés et sur leur 
organisation ; — An Meoumt of M. Stmter 's 
methoé of the opération fer the étire of po* 
piiied anemriêrn by Siaerard Même from ma* 
teriaiâfurmshed bp M. Bunter* Ce travail a, 
au point de vue chkurnknt , une grande impor- 
tance, car tons ko cmntrgfeB» savent que les 
Anghna revendiquent, en> faveur de H a nte r , 
tfmvention tfun&aattbedepoftr m cure des ané- 
yiitmen,, que te» churorgiene français eroieat 
devoir attribuer à* Ane* ci à Desauft» Comne il 
y là a» point inspectant dans l'histoire de la 
chisnrniev il est né ce s s aire m l'enaaMner avec 
soin. Dons un ovvrags réeemsuesi publié sar les 
anévoriuiia», M. Beecat a train* cette que&tiea 
historique de* 1* manière la pta& complète* Il 
a uavmitement établi' <*ie la méthode de trai- 
tement des anwwmea par l'apptication d'ane 
ligature aordestw> du sa» appartient ineontesta- 
Mereent ai* «hwwgiea. français Dominique Anel, 
quiprattqma ceA* opération le 30 janvier 1710 à 
Borne, pour guérir un anévrisraede tfartère ra- 
diale. Le texte même d'Anet ne permet «as de mé- 
connaître, qu'il Vagissait pour lui d'une méthode 
nouvelle». « An lieu que Von a accoutumé à faire 
la ligature en haut et en ha» de Y aneurisia», 
je ne la lia que- du côté d'en haut; d'ailleurs, ou 
ouvre le saeanqunamat, et je ne l'ai point teacbé 
du tout y ne doutant pas que le sang ne se dis- 
sipât*: aient la liberté de se porter du coté de 
l'extrémité, et que ce sae une fois vuide ae se 
remphst de nouveau, que les tuniques des 
membranes qu» le formoient ne manquerofeat 
pas de s'affaisser, et qu'ainsi le, tumeur devoit 
disparaître , ce qui n'a pas manqpé d'arriver de 
même que je l'avois pensé. » Des témoignages 
positifs apprennent que plusieurs chirurgiees ei 
Italie , en Allemagne et en Hollande, mirent ea 



573 



HUNTER 



574 



pratique cette méthode, que l'on appelait la mé- 
thode d'Anel -, mais jusqu'à la fin du dix-huitième 
siècle elle ne fut appliquée qu'aux anévrismes 
d'artères peu volumineuses, parce que ronorair, 
guait que la gangrène ne fût la conséquence, 
nécessaire de l'opération. Gène fut que le 22 juin 
17»5 que Desault, guidé par l'observation d «un 
fait où il avait ru l'anévrisme poplité guéri spon-, 
tanérnent par la formation d'une concrétion san- 
guine , appliqua la métnode d'Anel au traitement 
de l'anévrisme poplité, dans l'intention bien ar-, 
rêtée de déterminer la coagulation du sauge l'aide 
de la ligature. 11 est démontré qu'à la date d> 
24 septembre de la même aimée, J„ Hunier igno- 
rait encore la possibilité du fait, du moins pour, 
les artères volumineuses , et il ne serait pas un-, 
possible que lorsqu'il conçut le projet d'appli-. 
quer la ligature au-dessus o*e la tumeur, sans, 
pratiquer l'ouverture du sac, il ait eu connais-, 
sauce de l'opération de Desault; car un chirur- 
gien italien nommé Asaalini, qui avait assisté à 
cette opération, à l'hôtel-Dieu, futa^ss\ le. té- 
moin de la première opération de ce genre,, 
faite par Hanter, le 12 décembre 1785, à Saint- 
George» Hospital. Quoi qu'il en soit, la compa- 
raison des dates ne peut laisser aucune incerti- 
tude sur l'antériorité de l'observation de De- 
sault. Il est juste toutefois d'ajouter que Hunter, 
en transportant la ligature à quelque distance 
au-dessus du sac, avait accompli un progrès. 
véritable, car il avait rendu l'opération plus fa-' t 
ciie , et même aussi plus sûre dans ses résul- 
tats ; qu'il a également constaté que le mode d'ac- 
tion de la ligature consistait à déterminer la coa- 
gulation du sang; et enfin, qu'il a le mérite 
d'avoir vulgarisé une méthode avant lui peu 
connue. Mais ee mérite ne peut en aucune façon 
rabaisser ceux d'Anel et de Desault-, — Tra- 
vels in JSew South Wales by White. Cet ou- 
vrage contient la description faite par Hunter de 
plusieurs mammifères qui venaient d'être décou- 
verts dans la Nouvelle-Hollande, et qui appar-> 
tiennent à la curieuse Camille des Marsupiaux, 
parmi lesquelles on distingue le kanguroo ou 
potoroo, et le grand phalanger volant ; — Obser- 
vations on Betê; 1792. Dans ce travail, où 
Hunter rend compte d'observations laites sur 
l'organisation et les mcears des abeilles pendant; 
plusieurs années , il est question de la découverte 
faite par lui des organes qui sécrètent de là cire 
chez ces animaux; — On/ossil Bones; 1794. 
Dans ce travail J. Hunter fait connaître la na- 
ture chimique de certains os fossiles provenant 
des cavernes de Gaylnreulh, et donne une des-. 
cription très-exacte de crânes d'ours qu'il a re- 
connus parmi ces fossiles ; — Treatise on JBloo4 t 
Inflammation and gun sJwt Wounds. Cet 
ouvrage, dans lequel Hunter résume en quelque 
sorte ses doctrines sur la vie , peut être eoosi-; 
déré, bien, qu'il renferme lia certain, nombve de 
théories qui ne sont plus admises , comme l'un 
des ouvrages qui ont créé la physiologie patho-; ■ 



logique. Partant de cette idée déjà admise par 
Harvey que le sang est un liquide vivant, et voyant ' 
dans le phénomène de la coagulation une des 
conséquences les plus remarquables de la vie du 
sang , JJunter étudie ce fait avec soin, et y cher- 
che le point de départ d'un grand nombre 
de phénomènes physiologiques et pathologiques. 
Le fait t de sa coagulation devient pour lui 
le type de tous les phénomènes d'organisation 
qui se manifestent chez les êtres vivants , dans' 
l'état de santé comme dans l'état de maladie. Il 
décrit mieux qu'on ne l'avait fait avant lui les 
diverses espèces d'inflammations , inflammation 
adbésive, suppurative et ulcérative, et cherche 
à expliquer la formation des cicatrices par le 
phénomène de la coagulation du sang. Ces idées, ' 
qu'il avait conçues principalement d'après 1 l'é- 
tude des plaies d'armes à feu , observées par lui 
pendant le siège de Belle-Isle , ont été en partie 
abandonnées. On a reconnu que le phénomène ' 
de la coagulation du sang n'a qu'une 'ressetn-' 
blance apparente avec les phénomènes (Vo'rga-'' 
irisation, et qu'ji résulte en réalité de la mort 
du sang plutôt que de son état de vie. Mais_ 
quoi qu'il en soit de cette partie de la/ doctrine , ' 
tous les physiologistes reconnaissent aujourd'hui 
avec Hunter que le sang est un liquide vivant, 
et que la vie du sang est un élément important' 
de tous les grands phénomènes physiologiques. 
Hunter faisait d'ailleurs l'application "de sa doc-' 
trine à divers points de chirurgie , et particu- 
lièrement au traitement des plaies d'armes à 
feu. Jl fut l'un des premiers à s'élever contre la 
pratique douloureuse du débridement, pratique 
qui est aujourd'hui généralement abandonnée 
parles chirurgiens d'armée. r 

Hunter, dont l'éducation avait été frès«né- 
gligée t était affectueux et désintéressé; mais iT 
était sujet à dés accès de colère contre lesquels 
il ne savait point se mettre en garde, et qui exer- 
cèrent .une influence nuisible sur sa santé. Ce 
fut à lasuîted'un semblable accident qu'il mourut 
subitement le 18 octobre 1794, au Collège des Chi- 
rurgiens, à la suite d'une vive discussion avec plu- 
sieurs de ses collègues. Il vécut loin du monde, 
n'ayant guère de relations qu'avec ses confrères 
ou ses élèves. « Il était si loin , dit un de ses bio- 
graphes,, de reposer son esprit dans les sociétés, 
qu'il ressentait une fatigue réelle au milieu d'une 
réunion dont la conversation n'avait pas de suite. 
Aussi interposa- t-il quelquefois son intervention 
maritale pour, empêcher les qisifs du monde de 
se réunir chez lui. » Hunier avait épousé en 1771 
miss 4pna ffome^ fille d'un* chirurgien militaire 
sans fortune comme lui - 9 et il avait été oblige' 
d'attendre, pendant plusieurs années, que l'ac- 
croissement de sa position lui permît de se ma : 
rier. . C. Dareste. ; 

Cbalmer*.* r M4« Vnnter,- en têt* de la traduction com- 
plète de ses œuvre* publiée par MM. Cnaasaîgnac et Kt- 
chclot. — dvfeti, Catalogues ofthè Htintêrian Atmantm. 

. h,iînter ( Henri ), prédicateur et traducteur 



675 



HUNTER — HUflTINGTON 



57G 



écossais , né à Culross, dans le Pertshire , en 
1741, mort à Bristol, le 27 octobre 1802. Élevé à 
Edimbourg, il entra dans les ordres, et fut suc- 
cessivement ministre à Dumfermline, à South 
Leith et à Londres. H eut dans la secte presby- 
térienne une grande réputation de savoir, de 
piété et d'éloquence. On a de lui : Sacred Bio- 
graphy, or the characters ofScripture; 1783- 
1792, 6 vol. in-8°; — Miscellaneous Ser- 
mons; 2 vol. in-8°. H traduisit en anglais La 
Physiognomie de Lavater, les Études de la 
Nature de Bernardin de Saint-Pierre, les Let- 
tres d'Euler à une princesse d'Allemagne , 
les 6 vol. des Sermons de Saurin, elles Voyages 
de'Sonini. Z. 

Gentleman's Magazine, yoI. LXXII. — Cbalmcrs, Ge- 
neral Bioçraphical Dictionary. 

HdfTER (Alexandre ), médecin et agronome 
écossais, né à Edimbourg, en 1733, mort à York, 
le 17 mai 1809. Il pratiqua successivement son 
art à Gainsboroug, à Beverley, à York, fut 
membre des Sociétés Royales de Londres et d'E- 
dimbourg, et l'un de3 fondateurs de l'hôpital 
des fous de York et d'une Société d'Agriculture, 
dont il publia les mémoires sous le titre de Geor* 
gical Essays ; 1803-1808, 6 vol. in-8°. On a de 
lui : Observations on the nature and method 
of Cure of the Phthisis Pulmonalis.... with 
the origin, progress and design of the York 
Lunatie Asylum; Londres, 1792, in-8°; — 

— A new Method of raising wheat for a sé- 
ries ofyears on the same land; Londres, 1796, 
in-4°; —An Illustration of the Analogy bet- 
ween vegetable and animal Parturition ; Lon- 
dres, 1797, in-8° \— General Wiew of a plan 
of universal and equal taxation; Londres, 
1797, in-8°. Z. 

Rose, New gênerai Bioçraphical Dictionary. — Bio- 
graphie Médicale. 

hunter ( William ), médecin et orientaliste 
écossais, né à Montrose, vers 1760, mort en 181 5. 
Il fit ses études au collège Marishal à Aberdeen, 
où il prit le grade de docteur en 1777. Il entra 
au service de la Compagnie des Indes, et fut at- 
taché en 1781 à l'établissement médical du Ben- 
gale. H fut chirurgien de marine de 1794 à 1806, 
et pendant quelques années inspecteur générai 
des hôpitaux dans l'Ile de Java. Chirurgien du 
major Palmer, ambassadeur à la cour de Dov? lat 
Ray Scindia, professeur et examinateur du col- 
lège de Calcutta (1784-1794) , secrétaire de la 
société asiatique (1794-1808), Hunter se trouva 
dans une position favorable pour étudier les 
langues et la littérature de l'Inde. On a' de lui : 
A concise Accbunt of the Kingdom of Pegù, 
with a description of the caves of Eléphant a f 
Amboola and Canara; Calcutta, 1784, in-8°; 
trad. en français par Langlès, Paris, 1793, in-8 ; 

— An Essay on the diseases incident to In- 
dian seomen , or Lascars, on long voyages; 
Calcutta, 1804, in-fol.; — Mujmua-i- shuvnsi, 
or a concise vievj of the Copernican system of 



astronomy by Manlawi Abul Khuer, muter 
the superintendence ofW. Hunter; Calcutta, 
1807, in-8*; divers mémoires sur la médecine, 
l'histoire naturelle, etc., dans les Asiatie Re- 
searches et antres recueils périodiques. Z. 

Rote, New gênerai Bioçraphical Dictionarg. 

■UlITKftirS OQ HOKTHBft (Jacques ) , écri- 
vain suédois, né dans l'Upptand, vivait au 
dix-septième siècle: Bans sa jeunesse, il quitta 
sa patrie, embrassa le cafaolieisme en Angle- 
terre, et fut plus tard nommé secrétaire impé- 
rial à la diète de Ratisbonne. Biais lors de l'in- 
vasion des Suédois en Allemagne (1630) , il fut 
privéde cette chargc.Ses lettres à plusieursperson- 
nages célèbres, tels que Baner, Horn, Gyilens- 
tjerna, Salvios, etc., ont été imprimées, sons le 
titre de : Epislolx miscellanex , ornata ien- 
tentiarum concinnitatevestiUe , etc. ; Vienne, 
1631. K. B. 

Sv. Mercurius, 1757 et 1758. — SJernman , Biè4. 3*io- 
Gothica, t. n, p. 7». - Biographie Les., VI, «78. 

HUNTUfCtàON ( Guillaume ) , prédicateur 
méthodiste anglais, né en 1774, mort à Ton- 
bridge- Wells, en 1813. Fils d'un laboureur du 
comté de Kent, il fut tour à tour domestique à 
la ville et à la campagne, et vécut dans la mi- 
sère et la dissipation. Il finit par se convertir, 
et se mit à prêcher avec un grand et souvent 
scandaleux succès. Ses sectateurs élevèrent pour 
lui à Londres nne chapelle dans Tichfieid , puis 
une plus grande dans GroyW-Inn-Read. Après 
la mort de sa première femme, qui était de basse 
condition, Huntingdon épousa la riche veuve de 
l'alderman sir James Saunderson. Parmi ses nom- 
breuses et bizarres compositions religieuses, non* 
n'en citerons que deux : The Arminian Skele- 
ton, or the arminians dissected and anatomi- 
zed; — The Bank and Faith. 2. 

Soutbey, Letters of don Manuel Bspriclla. —4Sortoa, 
Général Bioçraphical Dictionary. 

HUNTiifGDON(i7(?»ry.DE). Voy. Hrheydb 
Huntingdon. 

huhïingfokd (Georges-Isaac), théologien 
et philologue anglais, né à Winchester, en 1748, 
mort en 1832. Elevé à Oxford , il succéda à son 
frère Thomas dans la direction de l'école de 
Westminster, et devint en 1789 maître do col- 
lège de Winchester. Addington, qui avait été son 
élève, le nomma en 1801 évéque de Gloucester. 
Il fut promu en 1815 au siège de Hereford. On 
a de lui : Mctrica Monostrophica ( Odes Mo- 
nostrophiques en grec) ; 1781 ; — Introduction 
to' the Writing of Greek, en deux parties, 1782 ; 
— A Call for Union with the established 
Church, addressed to english protestants; 
1800 : adressé à Addington et réimprimé en 1808; 
—A protestant Letter addressed to the rt. Bon. 
Lord Somers ; 1 8 1 3, in-8° , et divers traités théo- 
logiqoes. Z. 

Rose, New gênerai Bioçraphical Dictionarg. 

huntin&ton ( Robert), théologien et orien- 
taliste anglais, né en février 1636 à Deorhyst 



577 



HUNTINGTON — HUOT 



578 



dans le comté de Gloucester, mort à Dublin, le 
1 er septembre 1701. Après avoir reçu les élé- 
ments d'une éducation classique à l'école libre 
de Bristol, il fut admis en 1652 au collège Mer- 
ton à Oxford, et en devint membre en 1658. Il 
prit le grade de maître es arts en 1663, et, s'é- 
tant appliqué avec succès à l'étude des langues 
orientales, il obtint en 16^0 la place de chape- 
lain de la factorerie anglaise d'Alep. Il occupa ce 
poste pendant onze ans, et en profita pour vi- 
siter Jérusalem, la Galilée, Samarie, Cypre en 
1677, l'Egypte en 1781 et 1782. En 1678 il tenta 
inutilement de parvenir jusqu'à Palmyre. En 
1682 il revint en Angleterre, en traversant l'Italie 
et la France, rentra dans l'enseignement, et rat 
nommé maître du collège de La Trinité à Dublin. 
11 accepta cet emploi à regret , cessa de le rem- 
plir lors de l'invasion de Jacques II, et le résigna 
en 1691. Nommé en 1692 recteur de Hallingbury, 
dans le comté d'Essex, il se trouva fort mal 
dans ce canton rustique, où il se représente comme 
privé de livres et d'amis, comme exclu de la 
société des vivants et des morts. Malgré son 
aversion pour l'Irlande, il accepta l'évêché de 
Raphoe, et mourut douze jours après sa consé- 
cration. On n'a de lui qu'un court mémoire publié 
dans les Pkilosophical Transactions (n° 161), 
sous ce titre : A Letterfrom Dublin concerning 
tàe porphyry Pillars in Egypt; il a été réim- 
primé dans la Collection oj Curions Travels 
and Voyages de Ray, t. II, p. 149-155. A la suite 
du mémoire de Huntington , dans la même col- 
lection , on trouve un extrait du Journal des 
Savants, n° 25,1692, annonçant que des Anglais 
de la factorerie d'Alep, ayant visité Palmyre, 
y avaient remarqué quatre cents colonnes d'une 
sorte de porphyre , et quelques temples entiers 
avec des tombes, des monuments, des inscrip- 
tions grecques et latines. Cette note apprenait au 
public anglais que le voyage tenté inutilement 
par Huntington venait de s'accomplir pour la 
première fois. Les Philosophical Transactions 
pour 1695 en contiennent un récit détaillé. Hun- 
tington doit surtout sa réputation aux nombreux 
manuscrits qu'il rapporta d'Orient. Outre ceux 
qu'il acheta pour l'archevêque Marsh etl'évéque 
Fell , il s'en procura pour son propre compte 
de six à sept cents, dont il donna trente-cinq à 
la Bibliothèque Bodleyenne, et dont il vendit le 
reste à la même bibliothèque pour la faible 
somme de 700 livres st. Huntington tenait avant 
tout à se procurer la traduction syriaque des Épl- 
tres de saint Ignace , et l'on voit par ses lettres 
à -l'archevêque du mont Sinaï et au patriarche 
d'Antioche avec quelle ardeur il poursuivit cet 
objet de ses recherches, qui lui échappa. Par 
une circonstance assez curieuse les Epitres de 
saint Ignace ont été trouvées par M. Tattam 
dans un de ces monastères mêmes de Nitra que 
Huntington avait visités. Trente-neuf lettres 
ont été insérées dans la Vie de Huntington par 
Thomas Smith. Z. 

HOUV. BIOGR. GÉftÉR» — T. XXV. 



Srollh, Disser. de nta, Stud. Peregrinàtionibus et 
Obitu Bob. Huntingtoni; Londres, 1704, !n-S°. - Mo- 
graphia Britannica. — English Cyclopœdia ( Bio- 
grapfiy ). 

; huntington ( Daniel )/ peintre améri- 
cain, né en 1816, à New-York. En sortant du 
collège Hamilton, il embrassa la carrière des 
beaux-arts, qu'il étudia sous la direction du pro- 
fesseur Morse, et compléta son éducation par un 
long voyage à travers l'Angleterre , la France 
et l'Italie. Il habite aujourd'hui sa ville natale. 
Ses principales productions, consacrées au genre 
historique, sont : Henry VIII et Catherine 
Parr; — Lady Jane Grey prisonnière à' la 
Tour; — Les Saintes Femmes au Sépulcre; 

— La Foi et V Espérance; — V Arrêt de mort 
de Jane Grey. P. L— y. 

North American Review. — Pierer, Universal-Lexi- 
kon, Supplément, 1857. 

huntadb (Jean ). Voy. Hcniade. 

* bun yg, roi mexicain de.Tecpan-Atitlan, mort 
en 1519. C'est pour ainsi dise le dernier souve- 
rain de cette région mystérieuse unie jadis à 
l'empire Quiche, où se trouvent de si imposants 
vestiges d'architecture : les princes de Cakchi- 
quel, voisins du Quiche, formèrent un royaume 
à part, et Hunyg, descendant de ces souverains, 
mourut de la peste , cinq ans avant l'arrivée des 
Espagnols. Son petit-fils Francisco-Ernandez 
Arana Xahila écrivit l'histoire de ce souverain. 
Cette chronique, continuée jusqu'en 1597, est 
l'un des livres précieux dont l'étude répandra 
quelque lumière sur des annales qui assignent 
à la civilisation du Nouveau Monde la plus an- 
tique origine. F. D. 

L'abbé Brasseur de Bourbourg, Histoire des Nations 
civilisées du Mexique et de V Amérique centrale, 1. 1, 
p. LXXXUI. 

huot ( Jean- Jacques- Nicolas ) , naturaliste 
français, né à Paris, en 1790, mort à Versailles, 
le 19 mai 1845. Membre de plusieurs sociétés 
savantes, il était à la fin de sa vie conservateur 
de la Bibliothèque de la ville de Versailles. Il a 
laissé différents travaux d'histoire naturelle, de 
géologie, de statistique et de géographie, parmi 
lesquels nous citerons : Annuaire administra- 
tif, judiciaire , ecclésiastique, industriel ., 
agricole et commercial du Département de 
Seine-et-Oise; 18 e année, 1829, in-18; — Fos- 
siles animaux et végétaux : l re partie , Osse-* 
ments ; Paris, 1 836, in-18 ( avecC. P. Deshayes) ; 

— Nouveau Cours élémentaire de Géologie; 
Paris, 1837-1838, 2 vol. in-8°, avec atlas ; dans 
les Suites à huffon éditées par Boret. Pour 
préparer les matériaux de cet ouvrage, Huot 
entreprit de lointaines excursions ; il visita entre 
autres deux fois la Crimée et le Kouban; — 
Nouveau Manuel complet de Géologie; dans 
la collection Roret; Paris, 1839, in-18; —Nou- 
veau Manuel complet de Minéralogie, ou 
tableau de toutes les substances minérales; 
collection Roret; Paris, 1841, 2 vol. in-18. 

— Huot a revu, corrigé, augmenté, mis dans 
un nouvel ordre et enrichi des plus récentes 

19 



679 



HUOT — 



découverte* te Précis de la Géographie uni- 
verselle de fSaRc-Bren, 12 vol. in-8*. B a 
terminé avec Larenaudière et Balbi le Traité 
élémentaire de Géographie de Malte-Brun; 
1830-1331, 2 vol. in-8°. — H a donné dans la 
collection Éisard la traduction du De $ilu Orbis 
de Pomponius Mêla. — JJ a travaillé au Voyage 
dans la Russie méridionale et la Crimée, par 
la Hongrie, la Valackie, la Moldavie, exécuté 
en 1837 sous la direction de M. À. Peroidoff. fluot 
accompagnait l'expédition en qualité de géologue .^ 

— On a en outre de lui dans les Annales des 
Sciences naturelles : Observations sur le banc 
de Grignon, sur le Calcaire renfermant des 
restes de végétaux et sur les Couches supé- 
rieures de cette localité; — Notice Géologique 
sur le prétendu Fossile humain trouvé près 
de Moret, au lieu dit Le Rocher, département 
de Seine-et-Marne (tome III), Imprimé à part; 
Paris, 1824, in-8°$ — Notice jsur la Vie et les 
Travaux de J.-V.-F* Lamouroux ( tome V) ; 

— Quelques Considérations géologiques sur 
la Présence des débris d'Animaux vertébrés 
dans les différentes couches de notre globe 
( tome X ) ; — dans les Mémoires de la So- 
ciété Linnéenne de Normandie.: Notice géolo- 
gique sur un, Terrain occupant 9 sur la rive 
droite de la Seine, la plaine située entre la 
montagne de Triel et la rivière, et, sur la 
rive opposée, l'espace compris depuis Meulan 
jusqu'à RolUboise; — - dans la Galerie Fran- 
çaise ( tome III ), une Notice sur la Vie et les 
ouvrages de Lavoisier. — Huot est le principal 
auteur de la continuation de la Géographie Phy- 
sique, de Y Encyclopédie Méthodique; il fut un 
des collaborateurs de V Encyclopédie moderne 
et de Y Encyclopédie des Gens du Monde. Enfin 
il a collaboré au Bulletin universel des Sciences, 
à la Revue Encyclopédique, à la Revue Dépar- 
tementale, au journal saint-simonien Le Pro- 
ducteur, journal de la morale chrétienne. 

l.L— T. 
Paul Huot flls, La Vie et les Ouvrages deJ.-J.-N. Huot; 
18M, ta-8». - Hardouin Michelin, NoUce lue à la Société 
Géologique de France à f occasion du décès de M. Huot ; 
Paris, 18*8, in-8». — Daniel, Biogr. des Hommes remarq. 
du dép. de Seine*et-Oise. — Pascallet, Le Biographe et le 
Nécroiooe, e* tirrafeo». — «Q»érant, La France LUMmfire. 
~ Bourqueiot* La Littér. franc, contemp, 

j hupfeu> (Hermann)y orientaliste alle- 
mand,, né en 1796, à Marbour,g, occupe depuis 
1843 une chaire à f université de Halle. Ses prin- 
cipaux ouvrages sont : Exercitaiiones Jiïhio- 
picx; Leipzig, 1825; — De Rei Grammaticae 
apfudJudxos Initiisantiquissimisgue Scripto- 
ribus; Halle, 1846;— De antiquioribus apud 
Judaeos occentuum Scriptoribus ; Halle, 1846- 
1847, 2 vol.; — De ver a Festorum apud ffe- 
braeos Ratione; Halle, 1851-1852, 2 vol.; — Die 
Psalmen (Les Psaumes); Gotha, 1855, t* r vol.; 

— Die Quellender Genesis (Les Sources de la 
Genèse ); Berlin, 1853. . R. L. 

Conv.-Lex-. dcr Gegemcart. 

h€ppazoi,i {François), centenaire piémon- 



HUQUIER 580 

tais, né à Casai, le 15 mars 1587, mort le 27 jan- 
vier 1702. Ses parents, qui avaient de l'aisance, 
renvoyèrent k Rome lorsqu'il eut acucyl ses 
études, et le forcèrent à prendre l'babi^ ecclé- 
siastique ; mais il ne s'engagea pas par des vœji* 
perpétuels. Passionné pour les voyages , jl ri- 
,stta la Grèce et les Échelles du Levant, se raarô 
h Scio en lj&2&, et s'occupa d'dffaires oonuner- 
ciales qui lui procurèrent une petite fortune, A 
quatre-vingt-deux ans il fut pourvu du coasiijat 
de Venise à Smyroe. La guerre lui enleva ces 
fouettons; mais en 1699 jl reprit sa charge. 
Sa vie était très régulière; il suivait un ré$w 
sévère, ne buvait aucune liqueur fernxentee, 
rangeait h peine et seulement du gibier rôti ou 
des fruits, se levait de grand matin et se cou- 
chait à la nuit. Exact à remplir ses devoirs re- 
ligieux, jl faisait chaque jour une promenade de 
plusieurs feeures, après avoir entendu la messe, 
se renfermait ensuite pour écrire sa correspon- 
dance, et donnait le reste de son temps à la so- 
ciété. Malade pour la première fois en 1701, il eut 
uncfièvne qui dura quinzejours.il guérit, mais 
il resta sourd pendant trois mois. Quelques mois 
auparavant, il avait perdu ses dents , et il ne vi- 
vait plus que de txmiule ; mats ses gencives se 
durcirent et il put se nourrir de poulet. Attaqué 
de la gravelle, à la fin de l'apnée, îl mourut (f un 
rhume. Il eut jusqu'à la fin l'usage de ses fa- 
cultés. On dit qu'à cent ans ses die veux, qui 
étaient blancs, étaient redevenus noirs, ainsi que 
sa barbe et ses sourcils, et qu'à cent douze ans il 
lui perça deux grosses dents, fl était d'un caractère 
doux, faisait beaucoup de bien, et il n'eut jamais 
d'autre passion que celle desfemmes, passion qu'il 
poussait à l'excès. îl avait été marié cinq fois : A 
épousa sa dernière femme à qw*re-vingt-dix-4iuit 
ans et en eut encore quatre enfants. Ses quatre 
premières femmes lui avaient dorme vingt enfants; 
il en avait en outre vingt-cinq ittégiriœes. 11 
laissa en manuscrit le Journal des Événements 
les plus importants de son temps, en 92 vol. 
in-fol. J. V. 

Mercure de France, août Tf«. 

HtfQViBE ( Jacques-Gabriet ), f$ravearfran- 
çaSs, né à Orléans, en 1695, mort en Àn^eterre, 
en 1772. Il vint tort jeune s'établir à Pans 
comme marchand d'estampes, et réunit «ne fort 
belle collection de dessins <et de .gravures, qu'il 
laissait visiter à certains Jours de la semaine par 
les artistes et les amateurs. Il dessina d'abord 
des ornements dans le goût chinois , puis des 
gravures à l'ean-ferte d'après Bouclier, Wat- 
teau , Oiltot et autres maître*. On lui attribua 
«ne estampe satirique •contre les Jésuites. Ces 
Pères, a1orstout-putssants, i intéressère!it*ajo3tice 
dans cette affaire. Une descente fut faite chez 
Hugnier, «t quoiqtfette demeurât sans résultat, 
H n'en fut pas moins Obligé de s'enftrir en An- 
gleterre, on îl termina ses jours. 'Ses gravures 
sont signées G. H. F. 

Son êls, Gabriel Hcguiea, gravait aussi avec 



S8i HUQUIfcR 

talent : il suivit son pire «a Angleterre, et y 
mourut. A. de L. 

F. Basaii, Didimmbre du Graveurs. - Ch. Bratone, 
dans léfffomfnes illustres de l'Orléanais. 

* jMJft>A# , chef mariannais, mort en 1680. 
Les missions organisées par le P. piego Luiz 
de Sanvitores comroencajent à changer l'as- 
pect d* l'archipel des lies Mariannes lorsque 
Hurao, de la caste des Chamorris ou nobles, ré- 
solut de chasser les Espagnols. 11 se retira dans 
les montagnes, assembla les Chamorris, leur fît 
un discours plein de véhémence dans lequel il 
les excita à l'union, pour expulser de l'archipel 
ces étrangers qui, sous le commandement de 
Legazpi, s'en étaient emparés sans coup férir en 
1565. Hurao connaissait parfaitement les forces 
des chrétiens, et malgré l'infériorité de ses 
armes , qui consistaient en massues et en ja- 
velines durcies au feu, ou armées d'os hu- 
mains , il osa résister. Sa petite armée s'éleva 
un moment à 2,000 hommes. L'invention de 
vastes boucliers, derrière lesquels les Mariannais 
pouvaient affronter lafusillade des Espagnols, put 
faire craindre un moment que l'insurrection 
n'eût des conséquences fâcheuses pour les con- 
quistadores. On parlementa, la paix se rétablit, 
et Hurao conserva son indépendance. Ce chef 
excitait probablement les craintes du gouverne- 
ment espagnol , lorsque, dans une rixe insigni- 
fiante , un soldat européen tua d'un coup de 
baïonnette le seul Chamorris qui eût su dé- 
fendre son pays contre les envahissements de 
l'étranger. Ferdinand Denis. 

Le P. Charles de GoMen, Histoire des Iles Mariannes 
uouveltoBumt converties- -iFreycinet, V oyage autour 
du Monde, t. II. — Dupoont d'Urviile, Poyage autour du 
Monde. 

nvKkVvr (Philippe), comte de Cœverbw 
(chancelier de Chiverny), ministre et ma- 
gistrat français, septième fils de Raoul Hu- 
rault , né au château de Chiverny, le 25 mars 
1528, mort au même lieu, le 30 juillet 1599. Il 
acheta la charge de Michel de Lho&pHal, con- 
seiller au parlement de Paris, et la remplit pen- 
dant neuf ans. Maître des requêtes ordinaire de 
l'Hôtel du Roi, fl s'attacha à Catherine de Médicis. 
Chancelier du duc d'Anjou, il aHa au-devant de 
ce prince à Turin lors de son retour de Po- 
logne , et lui remit les fonds nécessaires pour 
soutenir le luxe et la magnificence que le nouveau 
roi déployait sur sa route. Carde des sceaux en 
1578, chancelier après la mort du cardinal de 
Birague en 1581, son crédit auprès de «Henri III 
commença à décliner. Ce prince, à 6on voyage à 
Chartres aprèsles barricades, lui ôta le gouverne- 
ment d'Orléans pour le donner à d'Entragues. A 
la fin d'août 1588, lors de son départ de Chartres, 
il lui permit, avec les autres ministres, d'aller 
passer quelques jours dans ses terres en lui don- 
nant rendez-vous aux états généraux qu'il devait 
tenir à Blois le 1 er septembre suivant. Arrivé 
dans cette ville , le roi envoya Charles Bcnoist, - 
son secrétaire, à Chiverny, château de Sologne à 



— RURD 582 

deux lieues de Blois, déclarer au chancelier qu'il 
était très-content de ses services, mais lui ordon- 
nait de ne plus se présenter à la cour. Ce ministre 
était en chemin pour se rendre à Blois ; après avoir 
eu un entretien avec Cliarles Benoist, il résolut 
nje poursuivre sa route dans le dessein de parler 
au roi. Malgré l'interven^on de la reine en sa fa- 
veur, il ne put obtenir une audience. Après être 
retourné à Chiverny, il.se retira dans son châ- 
teau d'EoUmont, près Auneau, pour êjtre plus 
éloigné de la cour. Là il reçut la visite de l'histo- 
rien de Thou son beau-frère, qui se rendait aux 
états généraux de Blojs, etflui pendant toute leur 
durée le tint au courant de tout ce qui s'y pas- 
sait. Dans cette retraite , loin des affaires, il 
entrevoyait en quelque sorte l'avenir : il prévit 
le sort que la dissimulation de Henri 1ÏI préparait 
à la témérité et a l'insolence du duc de Guise. 
Le chancelier de Chiverny vivait paisiblement 
au château d'Ecumont quand , eu 1590, fleuri 1Y, 
qui voulait rétablir l'ordre dans les finances et 
dans les autres parties de l'administration de 
l'État, lui envoya l'historien de Thou pour le 
ramener à ia cour. Ce ministre, qui sous Henri m 
avait manqué d'initiative, exécuta les ordres du 
nouveau souverain avec beaucoup de zèle et de 
fidélité. Pour le récompenser de ses services, 
Henri IV le nomma gouverneur de Chartres et 
lieutenant général de la province. Malgré son 
dévouement, ne put échapper aux tirait? de J en- 
vie : les notables assemblés a Rouçn deman- 
dèrent qu'on lui enlevât ies sceaux , et l'accu- 
sèrent de vendre des lettres d'abolition aux 
traitants poursuivis pour leurs exactions, ij s'at- 
tacha alors la marquise de Sourdis, jtante deGa- 
brielle d'Estrées. Henri IV, qui lui cqnserya sa 
faveur, servit de parrain a l'enfanj qui <jut ,1e 
jour à cette liaison ; Gabrielle d'Estrées M Ja 
marraine. Plus tard Hurault de Chiverny se re- 
pentit de cette liaison ; tf moiuuit peu ^e 4£M>P S 
après la marquise de Sourdis. Il é^t seigneur 
de Gourville et de Giraudet. Qn a de Jui des 
Mémoires qui s'arrêtent en juiUet J599, <tf que 
l'abbé de Pont-lc-Voy, son fils, a continués jus- 
qu'en 1601 ; Paris, 1636, in-4° : édition pleine de 
fautes, reproduite en 1641, La Haye, 2 vol, 
in-12;id., 2 vol. in»16, 1791, texte rectifié; — 
Instruction à ses enfants. A. Roullier. 

Note sur Hurautt de Chiverny, en léte de ses Mé- 
moires dans la Collection de MM. Michaud et Poujoulat, 
X. XX. p.4*i. 

nrjRD (Richard), théologien et philologue 
anglais, né en 1720, mort en 1808. Fils d'un 
fermier du comté de Stafford, il eut le bonheur 
de rencontrer dans une ville de campagne, à Bre- 
wood, un excellent maître d'école. Il acheva ses 
études à Cambridge , devint agrégé du collège 
•Emmanuel en 1742, et fut ordonné prêtre en 
1744. 11 publia son premier ouvrage en 1740, et 
fit paraître en 1749 un commentaire sur VArt 
poétique d'Horace. A l'occasion de ce travail, îl 
se lia intimement avec Warburton, dont il fut le 

I9.j 



683 



IHURD — HURTAUT 



584 



discple le plus dévoué et qui lui facilita l'accès 
des dignités ecclésiastiques. Il devint reotenr 
de Thurcaston en 1757, prédicateur de Lincoln'* 
Innen 1765, archidiacre de Gloucester en 1767, 
évêque de Lichfieid et Coventry en 1775, pré- 
cepteur du prince de Galles et du duc d'York 
en 1776, évéque de Worcester en 1781. Il re- 
fusa, en 1783, l'archevêché de Gantorbéry. 
Hurd, quoique écrivain distingué {lui-même, 
est surtout connu par sa liaison 'avec War- 
bnrton. Il accepta les opinions de ce célèbre 
controversiste et érudit, mais il n'en eut ni 
l'arrogance ni la rudesse. Les principaux ouvra- 
ges de Hurd sont : Remarks on Hume' s Essay 
on the natural History of Religion ; 1757 ; on 
croit que Warburton eut beaucoup de part à 
cette réfutation de Hume ; — Dialogues on 
sincerity, retirement , the golden âge of Eli- 
sabeth , and the constitution of the en g lis h 
government; 1759, in-8°; — Dialogues Moral 
andPolitical; 1765. —Hurd donna en 1788 une 
édition des Œuvres de Warburton en 17 vol. 
in-4°, et publia en 1795 une Vie de ce prélat; il 
avait préparé une édition des Œuvres d'Addis- 
son, qui parut après sa mort, en 1810, 6 vol. in-8°. 
La même année on publia une édition des Œu- 
vres complètes de Hurd, 8 vol. in-8*. Z. 

Sa Fie en tète de ses ouvrages. — Nlchols , Llterary 
Anecdote» of the Bighteenth Century. — Chaimers, Cen. 
Bioçraphical Diction. 

hurdis (James ), poète anglais, né à Bishop- 
stone (comté de Sussex), en 1763, mort en 1801. 
Il termina ses études à Oxford, fut agrégé au col- 
lège de La Madeleine, et entra dans les ordres. En 
1788 il publia son The Village Curate. Cet ou- 
vrage fut suivi d'une tragédie intitulée Sir Tho- 
mas More; -— d'autres œuvres poétiques; — 
d'observations théologiques sur la Genèse ; -*■ et 
des Remarks on the Arrangements of the Plays 
of Shakspeare. Il fut élu en 1793 professeur de 
poésie. Hurdis est surtout connu par saliaisonavec 
Cowper, qui lui adressa plusieurs lettres. On es- 
time ses travaux sur Shakspeare. Z. 

Htyley, Ufe of Cowper. — Chaimers , General Bio- 
çraphical Dictionary. 

huré (Charles), littérateur français, né à 
Champigny-8ur-Yoniie, le 7 novembre 1 639, mort 
à Paris le 12 novembre 17Ï7. Il fut principal du 
collège de Boncourt, et publia entre autres une 
édition du Nouveau Testament, avec des notes ; 
Rouen, 1692, 2 vol., in-12; — Novum Testa- 
mentum regulis illustratum; Paris, 1693, 
in-12 ; — Dictionnaire universel de V Ecriture 
Sainte; Reims, 1715, 2 vol. in-folio. G. de F. 
Qnérard, La France Littéraire. 

huret (Grégoire), graveur français, né à 
Lyon, en 1610, mort à Paris, en 1670. B a gravé 
des portraits et des sujets d'après Champaigne, 
Vouet, Bourdon et divers autres maîtres français, 
et des sujets d'après ses dessins, entre autres une 
Histoire de la Passion, en 30 estampes. Ses 
effets sont larges, ses têtes expressives, ses 
draperies bien jetées, et si son burin n'étonne 



point par une manœuvre savante, il est du 
moins conduit avec goût. Il s'occupa aussi d'ar- 
chiteoture, et publia un ouvrage ayant pour titre : 
Règle précise pour décrire le profil élevé du 
fust des colonnes; Paris, 1665. Par suite de 
quelques critiques sur cet ouvrage, il fil paraître 
ensuite une Réponse de Grégoire Huret aux 
quatre articles du Journal dit des Savans, 
Paris, 1665, et Cinq Avis donnés aux auteurs 
du Journal des Savans en considération de 
ce qu'ils sont demeurés sans réplique; 1665. 

G. de F. 

Sncyclop. Méthod. : beaux-arts. — Peller, Dictionn. 
IlUtor. 

*hcrgue8 (Philippe de), d'Arras, échevin 
de Tournai, chroniqueur français, vivait à Douai 
au commencement du dix-septième siècle. On 
a de lui : Mémoires d'eschevin de Tournay, 
contenants les Actes plus signalez. des Con- 
saulx, les Sentences et Jugements plus no- 
tables de VEschevinage de la dite ville, re- 
marquez et escrits par P. de Hurgues. Le 
manuscrit de la bibliothèque de Tournai , petit 
in-4° de 393 pages, a été édité en 1855, dans les 
Mémoires de la Société Historique et litté- 
rairede Tournai, par M. Fréd. Hennebert. J. P. 

Le Courrier du Pat-de-Calaia, 31 ocU, 1855. — Ren- 
seignements inédits. 

HURTADO DB MBNZOZÂ. Voy. MeBTOOZI. 

hurtact (Pierre-Thomas-Nicolas) , litté- 
rateur français, ancien professeur à l'École mi- 
litaire et pensionnaire du roi, né à Paris, le 17 
(et non le 15) avril 1719, mort dans la même 
ville, le 5 mai 1791. Il fut d'abord destiné eu 
commerce de son père, qui était marchand de 
chevaux; mais un penchant très-prononcé pour 
la littérature modifia les projets paternels, et 
le jeune Hurtaut fut mis au collège, où il se dis- 
tingua bientôt par son aptitude et ses progrès, 
et se voua à l'enseignement. On a de Hurtaut : 
VArt de péter, essai théorique, physique et 
méthodique, etc., en Westphalie, chez Florent 
Q. au Soufflet; (Paris), 1751, in-12. Une seconde 
édition, augmentée de V Histoire de Pet-en-VAir 
et de la Reine des Amazones, etc., parut sous 
la même rubrique en 1775; puis une antre, 
en 1776,- augmentée de la Société des Francs- 
Péteurs (par Le Corvaisier) ; in-8° ; — Coup- 
d'œil anglais sur les Cérémonies du Mariage, 
avec des notes, etc., ouvrage (supposé) traduit 
sur la 2 e édition de Londres, par M. M*** ; Ge- 
nève (Paris), 1750, in-12 ; — Dictionnaire des 
Mots homonymes de la Langue française, etc.; 
Paris, 1775, in-12 ; — Dictionnaire historique 
de la Ville de Paris et de ses Environs; Pa- 
ris, 1779, 4 vol. in-8° (avec Magny) ; — Essais 
de Médecine, ou théorie du flux menstruel 
et traité, des maladies de tête, traduit du la- 
tin de Emott., 1739; — Iconologie histo- 
rique et généalogique des Souverains de V Eu- 
rope, t. 1 er et unique; Paris, 1787, in-8°. (avec 
d'Hermilly ). — Manuale Rhetorices, ad usum 
arlisdicendi candidatorum /Paris, 1757. Une 



585 



HURTÀUT — HUS 



586 



3 e édition parut en 1782, in-12 ; — Dissertation 
historique sur V Invention des Lettres ou 
Caractères d'Écriture; — Études convena- 
bles aux Demoiselles ; deux publications dont 

nous n'avons pu découvrir la date Hurtault 

a coopéré à la Bibliographie Parisienne 
(avec d'Hermilly ) pour les années 1769 et 1770. 
Dans les dernières années de sa vie il prenait 
le litre de doyen des maîtres de pension de 
Vuniversité. Ed. de Manne. 

Quérard, France Littéraire. 
hurtault (Maximilien- Joseph), archi- 
tecte français, né à Huningue (Haut-Rhin), [en 
1765, mort à Paris, en 1824. Élève de Mique, il 
resta longtemps obscur et employé en sous-ordre 
au château de Trianon. Après la révolution, il 
devint architecte inspecteur des salles du Con- 
seil des Anciens et de celui des Cinq Cents. Sur 
les dessins de MM. Percier et Fontaine, il dirigea 
la restauration et la décoration de la chapelle» 
du théâtre et des appartements des Tuileries. 
En 1797, il concourut à P Académie, et remporta 
le second grand prix. Il partit pour l'Italie, où 
il réunit un grand nombre de matériaux qu'il 
sut habilement mettre à profit à son retour. Il 
construisit à Paris un grand nombre d'habitations 
particulières; puis, devenu architecte du château 
de Fontainebleau, il y restaura la galerie de 
Diane , éleva la fontaine de Diane qui lui fait 
face , ainsi que le pavillon de l'étang ; enfin il 
traça le jardin qui entoure cette pièce d'eau et 
rétablit les cascades du Tibre. En 1819, il exposa 
au salon le projet d'une fontaine monumentale 
à ériger sur le boulevard Bonne-Nouvelle, et fut 
nommé membre de l'Institut. Il était déjà pro- 
fesseur à l'Académie des Beaux-Arts et inspec- 
teur général du conseil des bâtiments civils. Son 
dernier ouvrage fut le plan d'un joli jardin ré- 
servé au duc de Bordeaux dans le parc de Saint 
Cloud. E. B— n. 

Gabct, Dictionnaire des Jrtistes du dix-neuvième 
siècle. 

I H (JUTER ( Frédéric-Emmanuel ), historien 
suisse, né à Schaffhouse, le 15 mars 1787. Il 
étudia la théologie à Gœttingue, devint en 1824 
pasteur à Schaffhouse, puis abjura le protestan- 
tisme à Rome en 1844. En 1845 il alla se fixer 
à Vienne, où il venait d'être nommé historiographe 
de l'empire d'Autriche. On a de lui : Geschichte 
des ostgothischen Kônigs Theodorich und 
seiner Begierung (Histoire de Théodoric, roi 
des Ostrogoths, et de son règne); Schaffhouse, 
1807 ; — Geschichte Pabst Innocenz III und 
seiner Zeitgenossen (Histoire du pape In- 
nocent III et de ses Contemporains) ; Hambourg 
et Gotha, 1834-1842, 4 vol. in-8« -.ouvrage 
des plus remarquables, traduit en français; 
— Denkwurdigkeiten aus dem letzten De- 
cennium des achtzehnten Jahrhunderts 
( Choses mémorables qui se sont passées dans 
les dix dernières années du dix-huitième siècle ) ; 
Schaffouse, 1840;— Die aargauischen Kloster 



und ihre Ânkldger (Les Couvents d'Argovie 
et leurs Accusateurs); Schaffhouse, 1841 ; — 
Die Befeindung der hatholischen Kirche in 
der Schweitz seitdem Jahre 1834 (Les Atta- 
ques qui ont eu lieu contre l'Église catholique 
en Suisse depuis 1834 ) ; Schaffhouse, 1842-1843, 
4 parties; — Geburt und Wiedergeburt : 
' Erinnerunqen aus meinem Leben und Blicke 
au/ die Kirehe (Naissance et Renaissance : Sou- 
venirs de ma vie et Aperçus sur l'Église ) ; Schaff- 
house, 1845, 3 vol., in-8°; ibid., 1850, 2 vol., 
in-8°; — Geschichte Kaiser Ferdinand II 
und seiner Eltern (Histoire de l'empereur 
Ferdinand II et de ses Parents) ; Schaffhouse, 
1850-1857, 9 vol. in-8° : ouvrage inachevé, 
fait sur des documents originaux; l'histoire de 
Ferdinand H ne commence qu'avec le neu- 
vième volume; — Philipp Long , Kammer* 
diener Kaisers Rudolph II ; eine Kriminal- 
geschichte aus dem An/ange des siebzehnten 
Jahrhundert ( Philipp Lang, valet de chambre 
de l'empereur Rodolphe II ; cause célèbre du 
commencement du dix-septième siècle ) ; Schaff- 
house, 1851. E. G. 

Hurter, Geburt und frieder geburt (autobiographie). 
— Brnnner, Hurter vor dem Tribunal der WahrheiU- 
freunde; Paderborn, 1880. — Briibl, Geschichte der ka 
tholischen Literatur. 

HURTREL d'à RBOVAiu(Louis -Henri- Joseph) y 
vétérinaire français , né à Montreuil-sur-Mer, le 
7 juillet 1 777, y mourut, le 20 juillet 1 839 . Il étudia 
à l'école d'Alfort,et après quelques années d'étu- 
des, il revint à Montreuil exercer la profession de 
vétérinaire. Le camp de Boulogne fut pour lui une 
occasion d'études et d'observations sur les mala- 
dies des chevaux, surtout sur la morve et le 
farcin, dont il constata la nature contagieuse. Il 
fut nommé en 1814 commissaire du gouverne- 
ment pour combattre Tépizootie de typhus qui ré- 
gnait dans le département du Pas-de-Calais. Ses 
principaux ouvrages sont : Notice sur les Ma- 
ladies qui peuvent se développer parmi les bes- 
tiaux soit durant les chaleurs et la sécheresse 
des étés, soit dans le cours des automnes plu- 
vieux et froids; 1819, in-8s 4 e édition, augmen- 
tée; — Instruction sommaire sur VÉpizootie 
contagieuse qui vient de se déclarer dans le 
département du Pas-de-Calais ; 1827, in-8% 
2 e édition, revue, corrigée et augmentée; — Dic- 
tionnaire de Médecine et de Chirurgie vétéri- 
naires ; Paris, 1826 et années suivantes, 4 vol. 
in-4°, avec un atlas par Leblanc et Trousseau; 
1826, grand, in-folio de 30 pi. ; — Traité de la 
Clavelée, de la Vaccination et Clavélisation 
dans les Bêtes à laine; Paris, 1823,in-8°. Il a 
inséré des articles dans teDictionn. abrégé des 
Sciences Médicales et dans quelques publications 
spéciales. G. de F. 

Documents particuliers. 

HUS et non Huss ( ou Jean de Hussinetz) , 
célèbre précurseur de Luther, ainsi appelé du 
nom de la ville où il naquit , en Bohème, le 
6 juillet 1373, mourut brûlé comme hérétique à 



587 



HUS 



588 



Constance, en 1415, lé jour même de l'anniver- 
saire de sa naissance. Issu d'tme famine obs- 
cure, il commença sèé études dans sa ville 
natale, les continua à Praschatitz, Bourg au voi- 
sinage ,• et alla prendre ses grades à i'univef sfté 
«te Prague, alors» très-florissante. Bachelier en 
théologie à Vingt ans, maître es arts trots ans 
après, il était en 1400 prêtre, et desservait la 
petite ehapeHe dé Bethléem. L'éclat dé sa répu- 
tation avait, dès cette époque, attifé flftf hri l'at- 
tention de Wencéslas, foi de Bohême et de sa se- 
conde femme Solfié de Bavière, qui le choisit 
pour son confesseur, et lui donna toute sa con- 
fiante. Les écrits de tyteliffe s'étaient depuis 
pen répandus en Allemagne, et particulièrement 
en Bohême. Hus les vit; fttut4! dire o>e sa foi 
en 4 ftit contfistée, et qtfiï montra tout d'abord 
pour les audacieuses nouveautés qu'il y trouva 
une pieuse aversion ? teê mieux informés parmi 
les écrivains catholiques l'affirment (1). Sans 
doute vers 1402 il ne songeait guère à rompre 
avec l'Église et la papatrfé, et à se fâire le pro- 
pagateur de la doctrine dû fougoéfti héréslrff- 
que d'Oxford. La témérité même et la hardiesse 
des négations de 'VVycliffe étaient bien propres à 
effrayer une âme naturellement douce, que l'ar- 
deur de la lutte n'avait pas encore enflammée, 
et qui, plus tard, au fort de la polémique et au 
milieu du soulèvement général, ne se départit 
point dune certaine modération à l'endroit des 
dogmes fondamentaux de l'Église catholique. 

Si Jean Hus fut en effet scandalisé à la lectarè 
des livres de t¥ycliffe, à conp sûr il ne le fut 
pas longtemps , car dès 1405 nous l'entendons, 
à Prague , fulminer contre le clergé dans deux 
germon* où il attaque la tyrannie, l'orgueil, 
l'impureté, l'hypocrisie, l'avidité des prêtres dé 
tout ordre, et invite l'archevêque à réprimer leurs 
désordres et à purifier ces vases d'iniquité, flous 
l'entendons accuser de front les prélats, qui dé- 
pouillent le peuple au lieu de le défendre; le* or- 
dres mendiants, qui vident la bourse des pauvres; 
tes moines et les curés, dont les mœurs sont un 
scandale pour tes laïques , qui captent les héri- 
tages, extorquent les suce^ssion^,. font commercé 
dés prières et de* sacrements, et le clergé tout 
eritler, où la simonie se pratique à tous les de- 
grés de l'échelle, on l'on voit vendre et acheter 
les charges ecclésiastiques et trafiquer honteuse- 
ment du Saint-Esprit (2). C'est probablement à 
la même époque (jué Jean Hus composa son 
traité De Sanguine Christi, dans lequel il s'élève 
vivement contre le» faux miracles attribués au 
prétendu sang de Jésus-Christ. Ce ne sont là, 
selon lui, que mensonges et sacrilèges mômeries 
de prêtres imposteurs, dont quelques-uns ont 
été convaincus et punis dans plusieurs pays. 
« Le sang de Jésus-Christ a été glorifié avec son 

(1) Balblnus, r.pit. Rer. Bohém., p. 408. — Theobtldus, 
Hist. Hussit., Chap. %. 

(2) Hist. et Mon, J. Hus, tome II, fol. 26-31. ( édit. de 
Nuremberg de 1M58). 



. corps dans la résurrection. C'est leur propre 
sang que des prêtres avares mettent diabolique- 
ment dans l'hostie pour faire accroire aux sots 
que c'est le sang du Christ. » Ce traité reçut 
l'approbation de l'université et de l'archevêque 
de Prague Sbynko. 

La lutte commençait. Aimé du peuple, couvert 
de la protection de la reine , estimé de tous à 
cause de l'austérité de ses mœurs, Hus voyait 
les haines s'accumuler sourdement autour de 
lui. Mais la prudence n'était ni une vertu de cette 
époque ni une qualité de cette âme enthousiaste. 
Il eut crtr, en gardant le silence, manquer à sa 
fnisstotf. « Moi aussi, «'écrle^t-H, Dieu m'a suscité 
jtour percer la muraille afin qu'on découvrit la 
multitude des abominations du heu saint. Il 
a Jrtu att Seigneur de me faire sortir de l'endroit 
où j'étais, comme un tison arraché du feu. Es- 
clave malheureux de mes passions, 8 a fallu 
que, comme Lot, Dieu m'ait tiré de l'embrase- 
ment de Sodome, et j'ai obéi à la voix qui me 
disait; Percez la muraille (1). » En 1407, prê- 
chant devant l'archevêque; il opposait dans une 
*ive antithèse le vrai chrétien au faux chrétien. 
H dépeignait le dérèglement des prêtres et la 
connivence des prélats; il osait faire remon- 
ter jusqu'aux princes la responsabilité des fau- 
tes que commettent leurs sujets ; il reprochait 
au clergé ses vaines disputes qui engendrent 
le schisme; il s'élevait fortement contre la 
vente des indulgences, des reliques, des images 
coloriées , et contre la vaine et mondaine ma- 
gnificence des églises. « Les murs, disait-il, 
sont couverts d'or et de tableaux, les pauvres 
sont nus. » Il attaquait la simonie, la pluralité 
des bénéfices, s'appuyant fréquemment de l'au- 
torité de saint Bernard ou du témoignage de 
saint Bonaventure. Dans un autre sermon du 
même temps il répétait et renouvelait ses atta- 
ques, rappelait le clergé à la simplicité et à l'hu- 
milité été temps apostoliques, l'engageait à 
revêtir le Christ , c'est-à-dire à imiter sa vie, et 
associait les princes qui permettent les désor- 
dres , en ne les réprimant pas , à la damnation 
qui attend les pécheurs endurcis (2). 

Fort de sa conscience et de la faveur de la 
cour, Hus poursuivait sa route sans se soucier 
des mécontentements qu'il semait autour de lui. 
En mai 1408 il avait fait rendre à ses compatrio- 
tes certains privilèges que la nation allemande 
avait usurpés , et avait fait remettre en vigueur 
l'ordonnance de Charles IY (fondateur de l'univer- 
sité de Prague, en 1347 ) qui accordait trois voix 
à la Bohême dans les délibérations et une seule- 
ment aux étrangers. Ceux- ci, irrités de leur 
échec, désertèrent la ville par milliers. C'était 
une perte considérable pour les bourgeois de 
Prague. On en voulut beaucoup à Hus, qui vit 
cependant s'accroître par là son influence sur 

(i) tes Réformateurs avant Ut Méform». par Éro. <;>* 
Bonnechose, t.I, p. 114, édlt. in-lï. 
(*) Hist. et. Mon. J. Hus, t. II, fol. 8». 



589 



HUS 



«90 



la jeunesse. Il en usa, à la fin de cette année, pour 
entraîner l'université dans le parti des cardi- 
naux qui avaient abandonné Grégoire XII à fa- 
sollicitation des amis de la paix ecclésiastique. 
L'archevêque de Prague, Sby&ko, qui jusqu'a- 
lors avait ménagé Jean Hus, éclata à cette oc- 
casion» Fidèle à Grégoire, auquel il devait tout, 
il fit afficher aux portes des églises un mande- 
ment par lequel il interdisait les fonctions sa- 
cerdotales à Hus et aux partisans des cardinaux. 
L'événement fléchit bientôt la colère de l'arche- 
vêque, qui se soumit à la décision du concile de 
Pise et reconnut Alexandre V. 

Jean tins* alors rectaur de l'université (1409), 
ne garda plus de mesure. Il avait pria une con- 
naissance plus exacte des écrit» de Wyclîfîe. Dix 
ans auparavant, il conaeiUait, dit- a», de les 
brûler ou de tea jeter dans la Moldau : aujour- 
d'hui, il ne craignait pa» de le» prôner publi- 
quement. Lorsque Savuko, effrayé du progrès 
des opinions nouvelle*, avait, l'année précédente, 
ordonné qu'on déposai à l'archevêché tes livres 
de Wycliffe, Hua avait été des premiers à en 
appeler à Grégoire XiL La retraite des cardi- 
naux à Uvouroe* la tenue du concile de Pise, la 
déposition de Grégaire et l'élection d'Alexan- 
dre ajournèrent la décision de cette affaire, 
sans interrompre les prédications de Hus. Un 
des premiers soins du nouveau pape fut de s'oc- 
cuper de cette question. En décembre, 1409 il 
publia une bulle contre les promoteurs des doc- 
trines de Wycliffe, manda à Sbynko de les ex- 
tirper par tous les moyens possibles, et jeta l'in- 
terdit sur les chapelles particulières du royaume 
de Bohème. L'archevêque de Prague fit brûler 
sans forme de procès les livre* de Wycliffe qu'il 
avait pu saisir i plusde deux cents volumes, dit-on. 
Grande tempête dans l'université, qui accuse 
l'archevêque d'avoir violé ses privilèges ; Hus se 
porta pour les défendre- La question d'appel 
était encore pendante a Rome, quand Alexan- 
dre V mourut ( mai 1410 ), et Jean XXIli avait 
à peine pris possession du siège pontifical que 
Jean Hus lui adressait an nouvel appel (juin 1410), 
dont nous avens la teneur ; « Contra combus- 
tionem librorum Jounnis Vuiglef et montra 
alia». Hus y accuse ouvertement Sbynko, en soit 
nom et au nom de l'université de Prague, d'à- 
▼oif arraché stibrepticernent Une bulle de con- 
damnation à Alexandre V ; d'avoir fait suivre 
dette balle de procédures iniques contre les dé- 
tenteurs des ouvrages de Wycliffe; d'avoir in- 
sinué faussement que l'hérésie se propageait en 
Bohème* lorsque lui-même Sbynko, dans un 
synode solennel tenu deux ans auparavant 
( juillet 1408 ), avait déclaré, après une longue 
et minutieuse information, qu'iL n'avait trouvé 
ni pu trouver dans le diocèse de Prague tin seul 
hérétique. Hus soutient qu'il est injuste et con- 
traire aux notions vulgaires du droit que, dans 
cette affaire, Sbynko soit à la fois juge et par- 
lie ; il ajoute qu'il y a plusieurs livres qui sont 



laissés aux mains des fidèles et ne sont pas ré- 
putes, dangereux, bien qu'ils contiennent plu- 
sieurs choses contre la foi, tels que les livres 
d'Aristote, d'Averroès, etc. ; que Funiversité de 
Prague, s'est opposée formellement à ce que les 
livres de Wycliffe fussent brûlés ; que de plus 
cette exécution a etf lien sans examen, sans 
enquête préalable. Il réclame en outre contre 
la sentence de l'archevêque qui défend de prê- 
cher dans les chapelles, et enlève au peuple s» 
nourriture spirituelle. Cette sentence, dit il, est 
contraire à PÉvangtye et aux décrets des saints 
Pères* La parole jïe Dieu ne doit pas être en- 
chaînée. Il termine en disant que c'est parce 
qu'il vaut mieux obéir à Dieu qu'aux hommes 
qu'il a fait cette protestation et en a référé à la 
juridiction du siège apostolique (1). Quatre car- 
dinaux, commis par Jean XXIII pour juger ce 
procès, après avoir prie l'avis de* docteurs en 
théologie de t université de Bologne, décidèrent 
que l'archevêque de Prague, en faisant brûler les 
ttvm de Wy enfle, *▼** outrepassé ses droits* 
Hus avait gain de cause', mais ses ennemis se re- 
muèrent et obtinrent qu'il fût cité à comparaître 
êft personne devant fo pape pour répondre aux 
accusations qui circulaient contrer lui et rendre 
témoignage de sa foi. 

Cette citation troubla fort les partisans de 
Hus. Le roi, la reine, les seigneurs, FuniversHé 
intervinrent auprès du cardinal Othon de Co- 
lonne qui ratait décidée. On envoya une ambas: 
sade au pape pour le prier de dispenser Hus 
de comparaître en personne- On déclarait unani- 
mement qu'il était injustement accusé, et qu'il 
n'y avait pas sûreté pour lui à faire le voyage 
d'Italie. On suppliait en même temps Sa Sain- 
teté de ne pas laisser peser sur la Bohème le 
soupçon d'hérésie et de rouvrir les chapelles 
aux prédicateurs; on lui proposait d'envoyer 
aux frais de la couronne des légats pour s'as- 
surer de la pureté et de l'intégrité de la foi en 
Bohème ; on promettait de leur donner aide et 
secours et de punir ceux qui seraient convain- 
cus d'hérésie. L'archevêque lui-même , à l'ins- 
tigation de la cour, écrivit au pape en faveur de 
l'inculpé. H affirmait qu'après avoir réuni les 
professeurs de théologie et les docteurs en droit 
canon pour s'enquérir de l'hérésie prétendue au 
sujet du sacrement de l'Eucharistie, il n'avait 
trouvé la foi de personne en défaut; que grâce 
a la médiation du roi et de la reine, son dissen- 
timent avec Hus était terminé; que ce dernier 
avait rendu témoignage de sa foi en présence 
de l'inquisiteur du siège apostolique & il suppliait 
enfin le pape de lever la citation (2). De son côté 
Hus écrivit au collège des cardinaux : « Je suis 
innocent, disait-il , de tout ce dont mes adver- 
saires m'accusent ; j'en prends à témoin Notre* 
Seigneur Jésus-Christ. Je suis prêt à paraître en 



(1) Hisè. et Mon. J. au», tom. 1 fol. 89-91. 

(2) Ibid., tom. I, fol. 87 (verso), 88. 



591 



HUS 



592 



présence de l'université de Prague, de tous les 
prélats , de tout le peuple qui est venu m'écou- 
ter, et à rendre devant eux, de vive voix et par 
écrit, raison pleine et entière de la foi que Je 
garde en mon cœur et à la confesser même an 
péril du feu (1). » En même temps 11 envoya 
des mandataires pour répondre en son nom 
à tout ce qui lui serait reproché. Toutes ces dé- 
marches furent vaines. Le pape fit pousser la 
procédure. On refusa de recevoir et d'entendre 
les procureurs de Hus : ils protestèrent au nom 
de la justice ; on étouffa leur voix en les jetant 
en prison. Hus, déclaré contumace, hérésiarque, 
fut excommunié, et l'interdit lancé sur Prague 
tant, qu'il y séjournerait. Condamné sans avoir 
été jugé, Hus en appela à Dieu et au prochain 
concile (2). Les lettres qu'il écrivit à cette époque 



(1) Hist. et Mon. J. ira», ton». I, fol. M ( recto ). 

(l) Voici la teneur de cet appel, dont on fit on crime à 
Hns : a Le Dieu tout-puissant , unique essence em trots 
personnes, est le premier et le dernier reloge de ceux 
qui sont opprimés : c'eit le Seigneur qui garde la vérité 
dans tons les siècles, faisant Justice à ceux à qui l'on fait 
tort, se tenant près de ceux qui l'invoquent en vérité, 
en condamnant à la perdition tous les pécheurs Incor- 
rigibles. Notre-Selgneur Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai 
homme , environné des pontifes, des scribes , des phari- 
siens et des sacrificateurs, ses Juges et ses parties, et vou- 
lant racheter de la damnation éternelle ses enfants élus 
avant la fondation du monde, par nue mort sanglante et 
Ignominieuse, a donné ce bel exemple à ses disciples de 
commettre leur cause au Jugement de Dieu, qui peut tout, 
qui sait tout, et qui fait tout ce qu'il veut. En suivant ce 
saint et ce grand exemple, J'en appelle à Dieu, me voyant 
opprimé comme Je suis par la sentence inique et par la 
prétendue excommunication des pontifes, des scribes, 
des pharisiens et des Juges assis sur la chaise de Moïse. 
J'Imite encore dans cet appel saint Chrysostome , qui 
appela de deux conciles ; le bienheureux évéque André de 
Prague et Robert de Lincoln, qui appelèrent humblement 
et salutalrement au souverain et très-Juste Juge, qui ne 
peut être Intimidé par aucune frayeur ni corrompu par 
des/présents, non plus que séduit par de faux témoins. Je 
souhaite quêtons les fidèles chrétiens, principalement les 
princes, barons, gentilshommes, vassaux et tons les habi- 
tants de notre royaume de Bohême soient Informés et 
émus de compassion de la prétendue excommunication 
lancée contre moi par Pierre, cardinal diacre de Saint- 
André, commis à cela par le pape Jean XXIII, à l'instiga- 
tion de mon adversaire Michel de Causis et du consente- 
ment des chanolnes.de Prague. Ce cardinal, pendant près 
de deux ans, a refusé toute audience a mes avocats et 
procureurs, quoiqu'on ne la doive.pas refuser à un Juif ; à 
un païen et à un hérétique. Le même prélat n'a point 
voulu acquiescer aux excuses raisonnables que J'ai allé- 
guées pour être dispensé de comparaître , ni faire aucun 
cas des témoignages authentiques de l'université de Pra- 
gue. D'où 11 est clair que Je n'ai point encouru la note de 
contumace:, puisque ce n'est point par mépris, mais par 
des raisons valables , que Je n'ai pas comparu à Rome, 
lorsque j'y ai été cité, 1° parce qu'on me dressait des 
embûches en chemin ;*• parce que les périls des autres 
m'ont servi d'exemple ; 3 e parce que mes procureurs se 
sont engagés a subir l'épreuve du feu contre qui que ce 
soit à la cour de Rome; *° parce qu'on a mis en prison 
à cette cour mon procureur, sans qu'il refit mérité, au 
moins qne Je sache. Ainsi, comme il est établi par tous 
les anciens droits, tant par les livres divins de l'Ancien 
et du Nouveau Testament que par les canons , que les 
Juges visitent les lieux où le crime a été- commis, et que 
là ils prennent information des faits dont on est accusé 
de gens qui connaissent bien la personne en cause, qui 
ne soient point malintentionnés , ni de ses ennemis, qui 
n'agissent point par haine, mais par zèle pour la loi de 
Diei»; et enfin, cpmmc il est ordonné par les mêmes 



témoignent du trouble profond qu'il éprouva 
avant d'entrer en guerre ouverte avec le saint- 
siège. Après avoir longtemps hésité il quitta 
Prague, obéissant, comme il dit, à cette parole 
du Christ : Lorsqu'ils vous persécuteront dans 
une ville, fuyez dans une autre (1). « Sachez, 
mes bien-aimés, que c'est par l'exemple et l'aver- 
tissement du Christ qne je me sais éloigné de 
tous, de peur d'être aux méchants une occasion 
de condamnation éternelle , et aux bons un su- 
jet de tristesse et de deuil » ; il ajoute aussitôt 
après : « J'ai fui pour prêcher plus librement 
la parole de Dieu (2). » Pouvait-il, en effet, 
rester en repos ? « Malheur à moi si je ne prêche, 
écrit-il encore en parlant des désordres du clergé 
et de l'indignité du pape; malheur a moi si je 
ne pleure, si je n'écris (3) » ; et encore : « La vo- 
lonté de Dieu et l'Écriture nous enseignent que 
l'obéissance aux supérieurs n'est obligatoire que 
dans les choses licites. Bf attachant à cette vé- 
rité , j'ai mieux aimé obéir à Dieu en prêchant 
qu'au pape et à l'archevêque et à tous ceux ( est- 
taris satrapis) qui s'insurgent contre cette parole 
du Christ : « Allez par toute la terre, etc. (4). » 
Encouragé dans sa révolte par ses amis de Bo- 
hême et d'Angleterre (5), Jean Hns entrait de 
plus en pins dans la voie de la résistance, oppo- 
sant la parole de Dieu à celle des hommes, les 
commandements de l'Évangile à ceux de l'É- 
glise, les préceptes des Apôtres et des premiers 
Pères aux bulles et aux décrets du saint-siège 
et des prélats. C'est ce qui paraît assez nette- 
ment dans deux manifestes composés peu de 
mois après sa retraite de Prague (1410). L'un est 
un traité de controverse : De Libris Heeretico- 
rum legendis; les premières lignes en sont 
caractéristiques : Il faut lire et non brûler les li- 
vres des hérétiques, Libri hsereticorum sunt le- 
gendi non comburendi, dum in ipsis veritas 
continetur. Probatur auctoritatibus sancto- 
rum Augustini, ffieronymi, Ambrosii, Bedx t 
Theodori, Liber ati y Cyrilli, Gelasii papx, 
canonibus et rations. Le second est une sorte 
de sermon qui a pour titre : Actus pro de/en- 
sione libri Joannis Wklef De Trinitate 
Sancta... La question de la Trinité n'est qu'on 
prétexte; Hus y traite le même sujet que dans 



droits, que celui qui est cité ou accusé comparaisse 
dans un lieu sûr et libre pour pouvoir se défendre, et que 
le Juge ne soit pas de ses ennemis, aussi bien que' les 
témoins, 11 est manifeste que toutes ces conditions m'ayant 
manqué, Je suis absous devant Dieu du crime de contu- 
mace et déchargé d'une excommunication prétendue et 
frivole. Moi, Jean Hus, Je présente cet appel à Jésus- 
Christ, mon maître et mon Juste Juge, qui connaît, pro- 
tège et Juge la Juste cause de qui ce soit. (/. HUt et 
Hierony. Prag. Mon., t. I, in-fol., 87 recto, ibld., fol. iT 
verso, traduit par Jacq. Lenfant, Hist. du Concile de 
Constance, tome I, p. SS, 34. ) 

(1) Hist. et Mon. J. Hvs, epist. XI, tom. I, fol. 91 
(verso). 

(î) Ibid., epist. XI. 

(3) Ibid., epist. IV. 1. 1, fol. 94 (verso ). 

(k) Ibid., epist. V, 1. 1, fol. 95 ( verso). 

(6) Ibid., epist XV, t. I, fol. 101. 



593 



HUS 



594 



te précédent, et proteste, an nom de l'Evangile 
et de la raison, contre les violences des pouvoirs 
ecclésiastiques pour étouffer la vérité. Toutefois, 
Uns déclare qu'il ne prétend pas innover et 
qu'il n'entend , ni dans cet acte ni dans au- 
cun autre qui pourra à l'avenir sortir de sa 
bouche, rien affirmer qui soit contraire à la 
Sainte Ecriture , ou erroné de quelque manière 
que ce soit. « Que si quelque chose de sem- 
blable m'est échappé, par ignorance ou par sur- 
prise, je suis prêt, dit-il, à le rétracter humble- 
ment. Et si quelque personne de l'Église veut 
m 'éclairer, soit par l'Ecriture, soit par la raison 
( Scriptura Sacra vel ratvone valida ), je suis 
prêt à me soumettre. Dès le commencement de 
mes études, j'ai pris pour règle que toutes les 
fois que dans un sujet quelconque je trouverais 
une pensée meilleure, d'abandonner volontiers et 
humblement la moins bonne (1). » Il attend 
qu'on lui prouve que les livres de Wyctiffe sur la 
Trinité contiennent quelque hérésie» Que s'il se 
rencontre quelque maxime répréhensible dans 
quelque autre de ses ouvrages, pourquoi avoir 
confondu et brûlé ensemble le bon grain avec 
le mauvais? Les Pères ne font-ils pas profession 
de croire qu'on peut tirer quelque utilité de la 
lecture et de la méditation des écrits des héré- 
tiques? Il ne veut pas, quant à lui, adhérer à 
cette sentence ni déserter la cause de la vérité. 
On ne trahit pas seulement la vérité en la dé- 
guisant, mais en la cachant, en ne la déclarant 
pas ouvertement, en ne la défendant pas libre- 
ment. Pour lui', il la proclamera, il la défendra 
jusqu'au bout, dût son courage lui coûter la vie. 
Il semble queHus apercevait le bûcher à l'extré- 
mité de la route où il s'était engagé. « Si la crainte 
de la mort vient m'assaillir, j'espère en mon Dieu 
et dans le secours du Saint-Esprit : Dieumeraffer- 
mira. Et si j'ai trouvé grâce devant ses yeux, il 
me donnera la couronne du martyre. Quelle 
plus belle victoire! Le Sauveur, encourageant 
ses fidèles à la mériter, ne dit-il pas : Ne craignez 
pas ceux qui tuent le corps ; et saint Chrysos- 
torae : Que la crainte de la mort ne vous em- 
pêche pas de dire librement ce que vous avez 
entendu et de prêcher avec assurance ce qui 
vous a été confié à l'oreille (2). » L'Écriture , 
les Pères, la raison, voilà ce que Jean Hus in- 
voque sans cesse. Dans un écrit de 1411, où il 
défend Wycliffe contre Stokes, licencié de l'u- 
niversité de Cambridge, Hus établit en principe 
qu'il n'y a que trois sources de vérité pour un 
chrétien : l'Écriture, les sens et la raison (veritas 
in Scriptura implicita, veritas a sensu co- 
gnita , veritas élaborât a ab infallibili ra- 
tione (3) . « Je ne crois ni ne concède, dit-il, 
que Jean Wycliffe soit hérétique ; je ne le nie 
pas non plus, mais j'espère qu'il ne l'est pas; 



(1) HisU et Mon. J. Hus, tom. I, fol. 105. 
(3) Jbid. y tom. I, fol. 106. 

(8) lbUL, tom. I , fol. 108. Ailleurs il ajoute la révé- 
lation. 



car dans le doute j'aime mieux pencher pour le 
meilleur parti... Rien ne serait plus absurde que 
de dire : Dans les royaumes d'Angleterre , de 
France, de Bohème, une multitude de prélats et 
de clercs regardent Jean Wycliffe comme hé- 
rétique, donc Wycliffe est hérétique. . C'est 
comme si l'on disait : Chez les Turcs, les Sar- 
rasins et les Tartares on ne regarde pas Jé- 
sus-Christ comme Dieu, donc il n'est pas 
Dieu (1). » Qu'on l'ait condamné comme héré- 
tique, qu'on ait brûlé ses livres comme enta- 
chés d'hérésie, cela ne prouve rien non plus 
contre lui. Pour avoir le droit d'affirmer que 
Wycliffe est hérétique, il faut montrer dans ses 
ouvrages un dogme faux, contraire à l'Écriture et 
qu'il a soutenu obstinément. Et encore Dieu 
seul connaît le fond des cœurs, et il a dit : Ne 
jugez pas de peur d'être jugé ; ne condamnez 
pas, et vous ne serez pas condamné. 
' Hus en quittant Prague y avait laissé de nom- 
breux amis, tant à la cour que parmi le peuple. 
Des scènes de violence eurent lieu ; le sang coula : 
Sbynko, chef du parti resté fidèle au saint-siége, 
fut contraint de s'enfuir, et Hus revint prendre 
possession de la chapelle de Bethléem. Il conti- 
nua de plus belle ses attaques contre le clergé ; 
condamnant les pratiques observées dans les en- 
terrements, niant l'efficacité des prières pour 
les morts , sans craindre de compromettre la 
foi au purgatoire. « Il serait bon, s'écriait-il, 
d'enseigner au peuple à bien vivre et non pas 
de lui faire accroire qu'après une vie honteuse 
et coupable la messe d'un prêtre indigne suffira 
à lui procurer la béatitude et à le tirer du 
purgatoire (2). » Dans un des premiers ser- 
mons qu'il prononça , il loue Wenceslas d'a- 
voir forcé les prêtres à prêcher et à officier 
sous peine de suspension de leur temporel. 11 
y professe, après Wycliffe , que les princes ont 
reçu de Dieu le glaive pour protéger les bons et 
réprimer les méchants , qu'ils soient séculiers 
ou prêtres (sive sint seculares f sive spiri- 
tuales); que les princes doivent mettre leur 
puissance au service de la vérité évangélique. 
Cette doctrine trouva des contradicteurs, et Hus 
prit aussitôt la plume pour s'expliquer ( 141 1 ). 
Son traité a pour, titre : Contra occultum Ad- 
versarium. Il y soutient que les princes sont les 
vicaires de Jésus-Christ; qu'ils doivent veiller à 
la défense de la loi de Dieu ; que défendre cette 
loi c'est maintenir dans leur royaume la paix et 
le bon ordre; que rien ne trouble davantage 
la loi de Dieu et par suite la paix et le bon 
ordre du royaume que les injures faites à Dieu, 
la malice du clergé et la simonie; que, par con- 
séquent , c'est le devoir des rois de réprimer 
coercitivement ces vices du clergé. Il s'appuie 
de l'autorité des Apôtres , de saint Augustin et 
de saint Grégoire, et d'exemples empruntés à 

(1) Joannis Hus Hist. et Monum., tom. I, foK 119 
(recto). 
(» /6W., tom. ir, fol. 51 (verso). 



595 

l'histoire, « Voilà qu'un foi étranger, dit-il, 
sévit pour que le Dieu d'Israël ne soit pas blas- 
phémé. Comment donc les rois Chrétiens ne 
doivent-ils pas s'irriter et sévir saintement 
(sancte irasci et sxviréb quand le Christ est 
déshonoré par des prêtres injustes (1). •» 

L'Italie présentait alors le spectacle delà pttts 
triste division : les maux de la guerre citile s'a- 
joutaient à ceux du schisme que le concile de 
Pise n'avait pas éteint. Ladislas, soutenu par 
Grégoire XII, disputait à Louis II d'Anjou la 
couronne de Naples. Jean XXIII, qui tenait pour 
ce dernier, lança successivement contre Ladislas 
deux bulles d'excommunication d'une extrême 
violence (sept, et décemb. 1411 ). 11 y prêchait 
expressément la croisade contre cet ennemi du 
saint-siége, le désignait à la haine et à Fexter- 
minàtion, et accordait des indulgences à tous 
ceux qui s'armeraient contre lui, donneraient de 
l'argent pour cette cause, etc. Ces bofles eurent 
en Bohême un grand retentissement. Le roi Wen- 
ceslas les embrassa, et, à sa suite, la conr, les 
chefs de l'université, les magistrats et le clergé. 
Hûs, délaissé de ses puissants protecteurs, ne 
faiblit pas. Interpellé devant l'archevêque de 
Prague par les légats du pape, s'il voulait 
obéir aux commandements apostoliques : « Je 
veux remplir de grand coeur les commandements 
apostoliques, dit-il. » EtcéUx-ci le croyant sou- 
mis et attestant l'archevêque : « Vous entendez, 
Monseigneur, il veut bien obéir aux ordres de 
notre seigneur le pape. — Comprenez - moi 
bien, reprit-il : j'ai dit que je veux de grand cœur 
remplir les commandements apostoliques et 
leur obéir pleinement, mais j'appelle ainsi la 
doctrine des apôtres du Christ. Je ne consens à 
obéir aux ordres du pape qu'autant qu'ils sont 
conformes à cette doctrine; ma» si f y rencontre 
rien de contraire, je n'y obéirai point, quand 
même je verrais la flamme du bûcher prête 
à dévorer mon corps (2). «C'était une déclara- 
tion de guerre ; l'effet suivit bientôt , et peu de 
jours après Hus publiait une dissertation sur 
cette question : Est-il permis , selon la loi de 



(1) 7. Hus, Hist. et Mon., loin. I, fol. 184 et suIt. 
Voici uo des textes où eette doctrine est nettement 
formulée : « Cum igittfr reges eteaeculares Domini, JuxU 
Apostolfrm, ubisopra, ministfl Del suitt, in bocipsum 
sert lentes, et ad hoc gladium portant et tributa acci- 
piunt, ut vindictam faciant In eis qui malum agunt, et ad 
hoc misai sont, at vlndicent, teste Petro Apostolo !, 
Pétri s. Et sacertfotea debént snbjeett esse omni homanaa 
creator* propter Denra , aive regl tanquam praecellenti, 
sive duclbus, tanquam ab eo missis, quia sic est voluntas 
ireï , ut dieft Ibidem Immédiates ChristiTicarius Petrus 
apostolas; sequttur qaod lpsl reges, principes, et Do- 
mini temporales debent sic lacère , ne sint ex consénsu 
criminis participes. El sacerdotes debent in boc subjectl 
esse regibus, ne slnt ex InobedienUa magis damnabiies, 
qoara lpsi principes et Domini ex coosenso. » (Hus 
Hist. et Mon., t. 1, foi. 186 recto.) 

(a ) Responsio ad scriptum octo Doctorum. Hist. et 
Mon. /. Hus, tom. I, foi. 303 (verso) -. « Sed si quid ad-' 
versl ( régula? régis Christl ) concepero , non obediam, 
etiam si ignem pro combnstione met corporis mets ocu- 
lis praspouatls. » 



flUS 596 

Jésus-Christ, et convient-if, pour l'honneur de 
Dieu, le salut do peuple et l'intérêt du royaume, 
d'approuver les balles du pape qui ordonnent 
la croisade contre Ladislas, roi de Naples et ses 
partisans? 

Ce n'est pas dans un esprit de révolte qu'il 
efigdge cette controverse ; mais il n'est pas de 
cent qui acceptent avec indifférence les buttes 
du pape, sans s'inquiéter de savoir si elles sont 
bonnes* ou mauvaises; il n'est pas de ceux qui 
les blâment dans le secret de leur conscience 
et les louent en public, de peur de compromettre 
leurs dignités, leurs richesses, leur repos et leur 
vie. Il proteste toutefois qu'il est prêt à se rendre, 
s! on lui montre que ces bulles sont conformes 
à la loi du Christ, et à les approuver de tout son 
coeur; qu'il ne songe nullement a prendre parti 
pour Ladislas et Grégoire Xlf, mais plutôt contre 
etfx ; qu'il ne veut pas s'opposer à là puissance 
que le pontife romain a reçue de Dieu, mais 
att renversement de eette puissance. Éclairé 
par la lumière de sa conscience, appuyé sur 
l'autorité de la parole de Dieu et du témoi- 
gnage des apôtres et des Pères , Hus établit que 
les prêtres du Christ et lé pape lui-même n'ont 
pas le pouvoir de donner ta pleine rémission 
des péchés ; que ce pouvoir n'appartient qu'à Dieu 
seul; que c'est utf blasphème qu'on homme, 
quel qu'il soit, dise à un antre : je te remets tes 
péchés; que promettre des indulgences pour 
de l'argent, c'est se rendre coupable de simo- 
nie. — Quant à la guerre , il n'est permis toi à on 
prêtre , ni à un évêque, ni an pontife romain de 
la faire ou de la provoquer dans sa propre cause. 
Les armes des évêques sont les larmes; leur 
glaive c'est la parole de Dieu*. Si le pape vent 
vaincre ses ennemis, qu'il suive te Christ, dont il 
se dit le vicaire ; qu'il prie pour ses ennemis et 
pour l'Église ; qu'il dise : * mon royaume n'est 
pas de ce monde » ; qu'il fasse du bien à ceux 
qui lui veulent du mal ; qu'il bénisse ceux qui 
l'outragent Les bulles condamnent Ladislas jus- 
qu'à la troisième et la quatrième génération; 
Dieu n'a-t-il pas dit : Le fils ne portera pas les 
iniquités du père. Les bulles déclarent Ladis- 
las et ses partisans blasphémateurs, relaps, hé- 
rétiques ; mais ni lui ni ses partisans n'ont été 
convaincus d'hérésie. Les bulles désignent Ladis- 
las et ses partisans à l'eltertnination ; mais j'in- 
terroge la conscience des vrais chrétiens, doux, 
pieux et humbles de cœor : en est-il un qoi 
consentirait à exterminer cruellement Ladislas 
et 3es partisans, supposé qu'il le puisse? S*il ré- 
pond non , il rejette les bulles et refuse d'ache- 
ter d'un tel prix la rémission de ses péchés ; sll 
répond oui, et ne sait pas par une révélation spé- 
ciale que telle est la volonté de Dieu , il viole 
manifestement la volonté de Dieu. Dira-t-on 
qu'on ne peut en aucune chose résister à un 
ordre du pape? Mais où prend-on que toute 
sentence du pape doit être obéie? Une sentence 
de qui que ce soit, et de quelque autorité qu'elle 



597 



HUS! 



*v$ 



soit revêtue, ne doit pas être obéle si elle contient 
née fausseté ou use erreur manifeste (si cvnti- 
neat manifestamfalsUatemsivê errorem). Les 
canons disent fréquemmimt qu'il faut tenir pour 
hérétique | et non pour catholique* tout ce qui 
aura été défini de contraire a la loi de Bien, 
par qui que ee soit : prétendre qu'un pape ne 
peut se tromperie' est plus qu'une erreur, c'est 
un blasphème (l)< 

Cette réponse de Jean Hus aux bulles du pape 
enflamma tous k» esprits à Prague. La faction 
hussite comprenait une partie de la noblesse et 
le peuple presque tout entier. Les troubles qui 
s'étaient produits lors de rexcomuwmeation 
de Jean Hus se renouvelèrent» et avec plus de 
violenee, La populace ééehatné* insulta les 
prédicateurs de la croisade et les partisans des 
bulles do pape y et fit entendre contre eux des 
menaces de mort. La ville était en feu : Hus, 
à la prière des chefs de l'université* contint 
quelque temps les furieux) mais bientôt, entraîné 
dans un raoovemeat qu'il ne pouvait phis diri- 
ger, il s'emporta en fougueuses Invectives contre 
le pape, ses adhérents et le clergé tout entier. 

Aux apologies mal dissimulées des écrits" dt 
Wycliffe (2), la faculté de théologie de Prague 
avait répondu en condamnant dans unsgjtode 
quarante-cinq articles tirés de ses ouvrages; Hus 
s'émut* comme s'il était personnellement frappé * 9 
opposa aux huit docteurs l'université, qui refusa 
de souscrire à cette condamnation* et prit 
la plume pour défendre celui qu'on regar- 
dait comme son maître (3). Ses traités sut le 
Retranchement du Temporel du Clergé et Sur 
les Dîmes firent grand scandale. Il y posait en 
principe que les rois et princes temporels 1 ont 
juridiction sur l'Église , et droit de punir les 
prêtres prévaricateurs en leur enlevant leurs 
biens; que le clergé n'est pus propriétaire, mais 
seulement usufruitier, dépositaire et dispensa- 
teur pour les pauvres, des biens qui sont entre 
ses mains; il déclarait qu'en supposant que les 
richesses fussent un obstacle à la piété» à l'hu- 
milité chrétienne et au service de Dieu , ce 
serait rendre un grand service au clergé que de 
les kn enlever (4). Weneeslas et les seigneurs 



(i) Cette analyse de te réponse de Jean Has aux bulles 
(ta pape Jean XX.UI n'est qu'une sotte de eltations ex- 
traites et traduites presque littéralement du texte même. 
( Voir Uirt. et Mon* J. Hus, du fol. 171 au fol. 18k) 

(S> De tibriê hœretieorum kgendisg — Contra angli- 
eum J- Stokes Wîeletfi calumniatorem ; — Actuspro 
de/ensioM Ubrt /. WieUffi de Trinitate smuta\ déjà 
cité*;. 

(3 ) Le premier de ces traités a pour titre : Defensto 
qtuyrumdam articutomm J. WieUfi. Hus prend la dé- 
fense de ces deux articles condamnés. 1° Ceux qui né- 
gligent de prêcher ou d'entendre la parole de Dieu à 
cause d'nne.exeoamunication humaine sont excommu- 
nies et au Jour du jugement seront réputés traîtres an 
Christ.** Il est permis à tout diacre du prêtre de prêcher 
la parole de Dieu sans la permission du siège apostolique 
ou de l'évéque catholique. {Bise, et Mon. J. Hus, tom> 1, 
fol. 111.) 

(4) Hus proteste que son Intention n'est pas d'exciter 



delà Bohème, qui voyaient le clergé accroître et 
étendre ehaque jour ses domaines, jusqu'à pos- 
séder le tiers- on Je quart du royaume, enten- 
daient sans eotere énoncer ces doctrines» qui, ra- 
menant FÈgfise» son humilité et à sa pauvreté 
primkiveB, tendaient à les enrichir de ses dé- 
pouille*; ou tout au moins établissaient leur 
droit à user des biens du clergé comme des tours 
propres. C'était la contre-partie de la doctrine 
de Grégoire VII ; mais si Hus attribuait à la 
puissance temporelle une surveillance sur l'É- 
glise et ee droit exorbitant de coercition en cas 
de simonie* de prévarication et de violation quel- 
conque de la loi du Christ * il ne fout pas croire 
qu'il pensai à accorder la liberté de conscience 
an*. î-eprésentattte de la puissance temporelle. La 
liberté de conscience* et ce qjne nous entendons 
par ee mot au dra^rteuvième siècle est quelque 
chose de fort étranger à cette époque de foi pas- 
sionnée et d'ardentes controverses (I ). Les rois et 
les princes, selon JtéA Hus, sont les premiers 
serviteurs de In loi de Dieu* les premiers tenus 
d'y obéir. A la fin de son JraUé sur Us Dîmes, 
Hus va jusqu'à poser Cette proposition : Tout 

tes princes I dépouille* le clergé : * Proteste* qaod non 
est InteuUonls me» necuniversttatl sifaderéquod princi- 
pes vel sae cula res Domlnl auferant bona a clero quando 
Yolunt et qualiter valant. » Hist. et M. J. Bus, tom. I, fol. 
Ht ( recto;. Néanmoins, dans plosfeurà passages de ses 
ouvrages, Hus semble appeler de ses veto* U séparation 
complète du temporel et du spirituel. Les biens tempo- 
rel* que pffsièdêht te pape, les cardinaux et tes évéques, 
•011* selon lui fa source des vices du clergé. Qu'ils re- 
tiennent à la pauvreté des apôtres. LA désordre et le 
trouble de 'fcgllse cesseront : « Oa quod Romands pon- 
tîfe* flihll possldeât remporaltum, ut Chrlstas et Petrus 
s&tioUrrUef, sed sit pauoer, mltt* et hnmllis, sœetilarem 
domina Uonem et pempam ibjlcleas, et eessabH qeassa* 
tio. (Rép. aux huit docteurs, tom. I, fol. 321, recto. } 
fat ailleurs : « Jamais depuis le commencement du monde 
fine fut phis nécessaire qu'aujourd'hui due les prêtres 
fidèles, renonçant aux biens temporels, exhortassent les 
èhrétiens, par leur propre exemple, à ne pas encourir la 
perte du sahit éternel par art trop grand attachement 
a*x biètt temporels. Tous 1 aujourd'hui, du plus grand au 
plus petit , sont dominé* par l'avarice. » ( Hist. et Mon. 
J. Hus, tom. Il, fol. 81.) 

(l) 11 n'est pas besoin de lire de bien près les outra- 
ges dé J. Hus pour se convaincre qu'il n'admet pas fa li- 
berté de conscience telle que noua l'entendons aujour- 
d'hui. Il cite à plusieurs reprises le compelle intrare ; et 
bien qui I avoue que personne né peut croire qne volon- 
tairement. 11 approuve l'emploi de la contrainte à l'é- 
gard des hérétiques manifestes ; 11 penche cependant peur 
te parti de l'humanité, car il dit : Altué est compellere, 
aUud exterminare vel oecidêre. Au sujet des bulles du 
pape Jean XXIII contre Ladislas et ses adhérents, il 
s'exprime ainsi : AHud infidèles sic torquere, altud 
christianos.... iterum aU* est eausu Awn Mantfesti 
hseretici leçon Dei impufnant, aliud dum propter 
duos vel très discordantes et de papatu eontendenies 
sibimutuo distentiunt. {Hist. et Mon. Hus, tom. 1. fol. 
81$.) Transformer J. Hus en apôtre de la tolérance, 
c'est, nous le répétons, commettre un étrange ana- 
chronisme, et s'abuser à la fois sur l'époque et sur 
l'homme , quoiqu'il sort vrai de dire que Jean Hus repu* 
gne à l'emploi de l'extrême violence contre ceux qui ne 
croient pas, et professe pour la vie humaine un respect 
fort étranger, à ses contemporains. On lui fit en effet un 
crime d'avoir dit , tom. I, fol. ftft ( verso ). qu'il ne faut 
point punir de mort les hérétiques. C'est le sujet de 
l'article XVI lie parmi les XXXIX qu'on lui reprocha 
le 8 juin à Constance. 



599 EUS 

seigneur temporel, tout prélat, tout évoque, en 
état dépêché mortel, n'est ni seigneur temporel, 
ni prélat, ni évoque, proposition fort étrange as- 
surément, et qui ne semble plus être qu'une tau- 
tologie quand on a pris la peine de lire les ex- 
plications dont Hu8 raccompagne. S'il faut y voir 
en effet autre chose que cette affirmation fort 
innocente : tout seigneur temporel , tout prélat, 
tout évéque en état de péché mortel n'est ni sei- 
gneur temporel, ni prélat, ni évoque selon te 
vérité, selon Injustice, selon V esprit de Dieu; 
si le péché mortel est une cause de déchéance 
positive des fonctions civiles ou religieuses, cela 
va loin , et nulle société n'est plus possible. 

La Bohême était en proie à un véritable 
schisme. En face du clergé catholique s'élevait un 
clergé révolutionnaire qui prenait le nom de clergé 
évangélique : à côté des chaires catholiques se 
dressaient les chaires et les tribunes des fauteurs 
de Hus. Les deux partis se renvoyaient les épithè- 
tes de blasphémateurs et d'hérétiques. Les popula- 
tions engagées dans cette querelle y portaient 
leurs instincts habituels de violence. Hus ne son* 
geait plus à apaiser les troubles et à calmer ses 
partisans. «La vérité, s'écriait-il, est venue met- 
tre dans le monde le glaive et non la paix. » Cha- 
que jour il s'éloignait davantage des traditions 
de l'Église catholique : niait la nécessité de la 
confession auriculaire (1), l'efficacité de la béné- 
diction des* sépultures; attaquait comme une 
idolâtrie le culte des images, la croyance en la 
sainte Vierge, aux saints, à l'Église, et au 
pape (2) ; affirmait que nous ne pouvons dire 
d'aucun pécheur qu'il est frappé de la damna- 
tion éternelle (3) ; accusait les prêtres de se don- 
ner pour les créateurs de leur Dieu dans le sacre- 
ment de l'eucharistie (4) ; soutenait les défail- 
lances des siens, réglait leur foi, éclairait leurs 
doutes, et rappelait à tous, amis ou ennemis, 
les devoirs sacrés du sacerdoce chrétien (5). 

Cependant Stanislas et Pierre de Znoyma, 
Etienne Paletz, autrefois amis de Hus et confi- 
dents de ses pensées, s'étaient séparés de lui, et, 
unis aux docteurs de la faculté de théologie et à 
Conrad, archevêque de Prague, lui faisaient une 
wve opposition. Jean XXHI avait une seconde 

(1) De tribus Dubiis, Hist. et Mon.J. Hus, tom. I, fol. 16S 
(verso) et 169. « Sine conffesslooe ©ri* et solutlone pccna 
exterlorts delenturpeccaU per cootrttlonem et humllita- 
tcm cordis. » 

(l) De tribus Dubiis, Jbid., fol. les (recto). - Qusestio 
de Credere, tom. I, fol. 170 ( recto ). 

(S) « Denollo nos homines mortales sine revelatione et 
sine Scrlptura Sacra de bemus asserere qnod aeteraallter 
ait damoatus. » (De tribus Dubiis, fol. 169, recto. ) 
• (») Contra prstdicatoretn Plzneusem, tom. 1, fol. 14S- 
1*6. Ce n'est pas que Jean Bas nie la transsabstaottatlon ; 
Il soutient qu'elle n'est pas un effet des paroles du prê- 
tre, qui dans ce cas serait le créateur de son Dieu ; mais 
que c'est Dieu même qui fait ce miracle à l'occasion des 
paroles sacramentelles que prononce celui qui officie. 

(DDequinqueO/ficiisSacerdotis, tom. I, fol. 15* (recto). 
Ces cinq devoirs sont : Prêcher la parole de Dieu, prier 
Incessamment pour le peuple, conférer gratis les sacre- 
ments, étudier les Saintes Écritures, donner un bon 
exemple aux autres. 



eoo 



f ois cité Hus à Rome; il n'en tint nul compte : 
les armes spirituelles semblaient usées contre un 
pareil adversaire. Le pape invoqua l'appui de 
Wenceslas, du roi de France et des universités. 
Gerson écrivit à ce sujet à l'archevêque de 
Prague pour stimuler son zèle ( voir l'art. Ger- 
son ). « n ne reste plus, lui disait-il, en termi- 
nant, qu'à mettre la cognée du bras séculier à 
la racine de cet arbre infructueux et maudit. 
C'est à vous à implorer ce bras par toutes sortes 
de voies, et vous y êtes obligé pour le salut 
des Ames confiées à vos soins (1). » Conrad ne 
fut pas sourd à cet appel. Il employa d'abord les 
exhortations, puis les menaces ; enfin il jeta l'in- 
terdit sur la ville de Prague et sur tous tes 
faux où J. Hus séjournerait. Celui-ci se retira à 
Hussinetz, emportant dans sa fuite cette impa- 
tiencede propagande inséparable de sa foi, et cette 
insouciance du péril qui est le caractère des fortes 
convictions. Sa plume n'était pas brisée. A dé- 
faut de sa parole, ses écrits arrivaient à Prague. 
Sur la porte de sa chapelle de Bethléem, qu'a 
ne remplissait plus de sa voix, on lisait les té- 
moignages de sa présence au milieu des ses dis- 
ciples. Un jour c'était un opuscule sur les six 
erreurs , où était résumée presque toute sa po- 
lémique contre le clergé catholique (2) ; un au- 
tre jour, un traité Sur Y Excommunication (3). 
Dans le même temps (1413), il écrivait et faisait 
lire publiquement 3on traité De l'Église , le 
plus long et le plus célèbre de ses écrits dogma- 
tiques. On y trouve cette définition de l'Église : 
« L'Église catholique, c'est-à-dire universelle, est 
l'assemblée de tous les prédestinés présents, pas- 
sés et futurs. » Hus soutient qu'il n'est pas vrai 
de dire que le pape soit la tête et les cardinaux 
le corps de l'Église : qu'elle a été, qu'elle peut 
être gouvernée sans le pape et son collège de 
cardinaux ; que c'est le Christ qui est le fonde- 
ment et la vraie tête de l'Église ; que c'est la 
loi de Dieu, et non la volonté arbitraire de la 
cour de Rome, qui doit être la règle de tous les 
jugements ecclésiastiques. « Quiconque, dit 
Hus, connaît avec certitude que les commande- 
ments du pape sont contraires à ce qu'ordonne 
Jésus-Christ ou tendent à la ruine de l'Église, 
doit y résister hardiment, de crainte de par- 
Ci) Gerson . ap. Cotnlee, Jlist. Hus, p. ». 
(s) Opusculum de Sex Erroribus, tom. I, foLlM (venoj. 
Voici quelles so-nt ces six erreurs : 1° Terreur des prêtres, 
qui se vantaient de faire le corps de Jésos-Christ, dass la 
messe ; 9° Terreur qui consiste & dire : Je crois au pape 
Je crois aux saints, je crois en la vierge; s» l'erreur qal 
consiste dans la prétention des prêtres de pouvoir remet- 
tre la peine et la coulpè du péché a qui 11 leur plaît; 
4 e Terreur qui consiste à croire qu'il faut obéir i ses 
supérieurs quelque chose qu'ils commandent; 1° Terreur 
qui consiste à s'Imaginer qu'une excommunication engage 
et excommunie actuellement celui contre qui eUe est 
lancée, que ce soit Justement, ou non ; S» la simonie, que 
Jean Hus appelle une hérésie , et dont 11 accuse la plus 
grande partie du clergé. 

(») Ce traité De Excommunicatione ne se troove pas 
dans les ouvrages de Jean Hus ; 11 est plusieurs fois cité 
dans la Réponse de Hus aux huit docteurs. Voir Hist. H 
Mon. J. Hus, fol. 30» (verso ), SU ( verso ). 



G01 



HtJS 



602 



liciperau crime par son consentement (1). » Ces 
divers traités de Hus , et surtout le dernier, 
scandalisèrent la faculté de théologie de Prague, 
qui s'empressa de répondre par la plume d'É- 
tienne Paletz et de Stanislas de Znoyma. Nous 
avons trois longs écrits de Hus relatifs à cette 
controverse (2). On rappelle guidamiste , on 
l'accuse de se séparer delà chrétienté. «J'atteste 
Dieu, dit-il, que je suis pleinement chrétien, et 
que je préférerais souffrir le supplice d'une mort 
cruelle plutôt que de rien affirmer de contraire 
à la foi ou de transgresser les commandements 
rie Jésus-Christ. J'ai la même assurance touchant 
ceux qui marchent avec moi, bien que j'aie la dou- 
leur de voir que tous ne sont pas irréprochables 
dans leurs mœurs. » Etencore : « Nous paraîtrons 
tous deux devant le tribunal du Christ, avant 
que mon adversaire m'ait surpris niant un iota 
de la loi du Seigneur. Est-ce donc se séparer de 
la chrétienté que de reprendre la simonie, l'a- 
vidité et tous les vices de la cour de Rome (3) ? » 
On dit qu'il faut une autorité pour interpréter 
l'Écriture ; qu'elle est muette et inanimée ; non, 
l'Écriture est vivante et parle par elle-même. 
C'est le juge qu'il faut interroger et non le pape 
et ses cardinaux , qui souvent jugent mal par 
ignorance ou par avarice. On veut le flétrir lui 
et ses partisans en les nommant wycliffites. Ce 
n'est pas Wycliffe qu'ils suivent, c'est V Écri- 
ture et la raison (4). Les docteurs de Prague 
voyaient bien quel danger il y avait pour l'ordre 
reli^eux et pour l'ordre civil à laisser nier tonte 
autorité indiscutable, et s'introduire ainsi l'es- 
prit de contrôle et d'examen. L'objection qu'ils 
adressent à Hus à ce sujet aussi bien que sa ré- 
ponse, sont •remarquables. « Par son fait ( sa 
réponse aux bulles du pape contre Ladislas ), il 
insinue cette grave erreur que les sujets ne doi- 
vent pas croire et se soumettre aux lettres pa- 
tentes des papes, des empereurs, des rois, des 
princes et des seigneurs, qu'autant que des rai- 

(1) De Ecclesia, chap. xcc, xx, xxi, du fol. 288 an 
fol. 247. 

(s) M. Emile de Bonnechose, dans ton Histoire des Ré- 
formateurs avant la Réforme, parle do débat de Hus avec 
les docteur» de la faculté de théologie de Prague, comme 
s'il avait précédé l'apparition du De Ecclesia ; et a la 
fin de sa publication des lettres de J. Hus , traduites en 
français, le même auteur, donnant un catalogue par or- 
dre de dates, des ouvrages du célèbre hérésiarque, place le 
Traité de relise avant les Réponses de Hus à Etienne 
Paletz, à Stanislas et aux Huit Docteurs. C'est une er- 
reur manifeste. Le De Ecclesia est cité preaqu'à cha- 
que page de ces trois écrits. Hus y renvoie sans cesse 
ses adversaires. De plus , quand on soit de près le détail 
de cette discussion, on voit qu'elle s'engagea à la sntte 
du Traité de l'Église, et que la publication de ce traité 
fut ce qui la suscita . 

(Sj » Spcro quod prias ambo ad tribunal Christ! stabl- 
aiusanteqoam nnum iota legis Domlnl invenertt me ne- 
gare. » (Hist. et Mon. i. Hus, t. I, fol. 260.) 

(*) « Ego entra fateor quod sententias veras qaas 
M. Joanoes Vuigief sacra? théologie professer posuit, 
teneo non quia ipse dlcit, sed qnla dlcens : Scriptnra Tel 
infallibills ratio dlcit. SI autem allquem errorem po- 
suerit, nec Ipsum, nec queracumque alium intendo In er- 
rore qaantumlibet modice seqot » {Hist. et Mon, Hus, 
tom. 1, fol. 284* recto,) 



sons efficaces et très-évidentes lenr auront mon- 
tré manifestement que ce que contiennent ces 
lettres est vrai et raisonnable. Qui pourrait dire 
quel trouble une pareille erreur mettrait dans le 
monde (1)? » « On veut m'effrayer, répond Hus, 
en soulevant contre moi les puissances séculières ; 
mais qu'on sache qn'on ne me fera pas abandonner 
la cause de la vérité. Sans crainte des vaines me- 
naces, les fils de Dieu, vraiment pénétrés de son 
esprit, ne doivent obéir aux lettres patentes des 
papes, des empereurs, des rois, des princes et 
des seigneurs, qu'autant que ce qu'elles contien- 
nent sera conforme à la volonté du souverain 
pontife et tout-puissant roi , le Seigneur Jésus- 
Christ. Que si on leur ordonne quelque chose 
de contraire, ils doivent résister jusqu'à la mort. 
11 allègue l'exemple des Machabées, et répond : 
« Eh quoi î si le pape ou le roi donnait l'ordre de 
massacrer tous les juifs qui sont dans Prague, et 
fournissaient des soldats pour une pareille be- 
sogne, nos docteurs obéiraient sans discussion, 
sans examen, sans objection ! Et si le pape leur 
ordonnait de nous tuer, ils nous tueraient, sans 
doute ; mais moi j'estime qu'il faut discuter de 
pareils ordres, et s'enquérir s'ils sont justes et 
raisonnables (2)... Non, ce ne serait pas une er- 
reur monstrueuse, et le monde ne serait pas 
bouleversé, mais la vérité et la justice pousse- 
raient partout de vives racines ; la paix et la con- 
corde seraient florissantes si les sujets regardaient 
la légitimité des ordres qu'ils reçoivent, cher- 
chaient leur raison selon la loi de Dieu, et s'as- 
suraient ainsi de ce qu'il faut faire rationnelle- 
ment (3). » Chacun peut et doit juger ses su- 
périeurs, fant séculiers que spirituels, examiner 
leurs œuvres, contrôler leurs commandements. 
C'est au for de la conscience de connaître des 
décisions des puissants de l'Église ou du siècle. 
Leur résister dans certains cas, c'est obéir à 
Dieu, c'est même vraiment leur obéir à eux- 
mêmes, car ils ne doivent prescrire que ce qui est 
bien et juste (4). 



(1) « Vutt per suum factum inducere hune gravent 
errorem quod Htteris patentions paparum, imperatorum, 
regum, prlnclpum et domlnoruni a subditls non creda- 
tur et stetur, nlsi veritas et rationabilitas talinm littora- 
rura effleacibus et evtdenUsslmts rationibns et argumen- 
tis fucrit ipsis subditls ostensa manifeste. Et quis posset 
astimare quantus esset hic error et quanta perturba-, 
tio in toto mundo? » (Hist. et Mon. J. Hus, 1. 1, fol. 294 
recto. ) 

(s) Ces éloquentes paroles n'ont pas besoin de commen- 
taire. II est difficile de revendiquer d'un ton plus haut 
les droits de rhumanlté et les droits de la raison. Ce 
qui est remarquable, c'est de rencontrer en 1418 une 
sorte de prédlcUon et une condamnation anticipée de la 
Saint -Barthélémy et des tueries de Philippe II. ( Hist. et 
Mon, Hus, tom. I, fol. 295 recto. ) 

(8) « Patet quod non error insestlmabllls, nec pertu- 
batlo iu toto mundo, sed veritas et justitia pullulè- 
rent, pax et concordia crescerent, si sobditl, solura ad 
veritatem lltterarum (patenttum) aspteerent, et ratlona- 
Mlitatem juxta legem Domlnl ipsarum expeterent, et sic 
cognoscerentqutd foret ratlonabitlterfaciendum. »(Hist. 
et Mon, 1. 1, fol. 296 recto. ) 

(V) Ces quelques lignes sont extraites presque littéra- 
lement de la Réponse aux Huit Docteurs, fol. Ml ( verso ), 



603 



BUS 



604 



Les ouvrages que Jeta Ha» composa ensuite 
jusqu'à son départ pour Constance sont moins 
le fruit d'un esprit calme et logique que le triste 
témoignage des colères que les contradictions et 
les obstacles peuvent allumer dans les âmes les 
plus maîtresses d'elles-mêmes. C'est VAnalomiQ 
Membrorum Antiehristi, le De Begno, Populo, 
Vita et Moribus Antiehristi, double invective 
contre le pape et la cour de Rome ; fe De Sacer- 
dotum et Monachorum carnolium Abominç- 
tione, dont le titre indique assez le caractère. 
C'est une suite de sermons ou plutôt d'explica- 
tions intitulées Sermones de Antichrislo. On 
trouve dans tous ces écrits la wu|H^ impétueuse, 
l'emportement et la chaleur unt peu wiihonde 
de Luther. 

L'empereur Sigismond , qui voulait attacher aa 
gloire à guérir les maux dont sou#rajt )'ÉgÙ&ç, 
avait obtenu du pape Jean XXIU fccouvoiatjou 
du concile de Constance. Jean fins y ftd cité, *t 
Sigismond écrivit à Wenceslas ù> l'y envoyer. 
Au reste, malgré de tristes pi^sssentwuents et tes 
conseils de ses amis, Hus n'hésita pas. Àraot 4e 
quitter Prague, il annonça son départ par des 
lettres affichées aux portes des Églises £t du 
palais du roi. 11 y disait que si sa doctrine éjtajt 
suspecte à qui que ce fût, on le dénonçai à Con- 
rad, archevêque de Prague, ou mieux au con- 
cile général ; qu'il ajjait y rendre témoignagne 4e 
sa doctrine et de sa loi. Ses ensemis si tureut, 
et Nicolas, évoque 4e Nazareth, grand-inquisiteur 
.du diocèse de Prague, attesta par ^écrÂt que per- 
sonne ne s'était présenté pour l'accuser, et quant 
à lui, qu'il n'avait rien trouvé dans ses ac^es qui 
ne fut d'un bon catholique, et dan* ses parafes 
rien qui sentit l'erreur ou l'hérésie (qi+o4 IjWê- 
sim saper et vel errprew ). Conrad attesta ausfi 
son innocence, touf en l'invitant à se purger 4e 
l'excommunication qui pesait sur Juù; jtfpendaat 
il refusa de l'admettre à une assemblée du clergé, 
et Hus lit dresser procès-verbal de ee relus 
d'audience (1). Vers le milieu du mois d'octobre 
(1414), il partit avec un sauf-conduit du roi 
Wenceslas, et reçut en chemin celui de Sigis- 
mond (daté de Spire, 18 octobre), dont la teneur 
nous a été conservée <2). Hus allait à cheval, 

et do Traité de l'Église, <*b. «{, paxUcuUèreoaeD* «a 
fol. S59 ( verso ). 

(t) Uist.et Mon. J. /lut. tojte»*, toi. s { jreno ). 

(1) Voici le texte de ce sanf-condult : Slgtsmondus, Del 
gratta , Itomanorum rex et Hiwgjuste etjuiklverai* et sln- 
Kulis prlociplbus eccle«ia*Mcta et aaequjarlbua dpeibus et 
ad quos prœsente» lllers pervenerUU gratiam regtam et 
onne boaam. Venerafrilea , litres , pabile* et adejea 
dilecti. houorabilem magiatcuoi i. Ho», «acre Théologie 
baecalaureuna et actlara wagfetrum, pcteseoUvai aetea- 
sorem , de Regno Boheralse ad eonoUf am générale Ao ci- 
vitale CoosUnUeuai Qe4e6raadam , ,io pcoAtno transeun- 
lem. quem etiam In noatram et Saorlteperii protecUunem 
reeeptaoua et tntelam , vobto •nnubw M «eatrooi cvittbet 
pleno xecoaMneMamoa affecta : deaJderaDtcs qnateoms 
Ipsum , com ad vos pervenaEkt, «rate ju&cipere , iavora- 
biltter traetare , atoue io fcfe *aae ad ceterttatem et ae- 
curltatera itineris lpslus pertinent, taon per terrain .quant 
per aquam, promouvant albi velilia, et debealts ostendere 
vttuttatem, nec non ipanm cnm fanant, eqoia étalas 



voyageant £ petites journées, accompagné de 
quelques seigneurs, Henri de Latzemboch, Sta- 
nislas Duba, et son ami fidèle Jean de Ghlura. 
les populations accouraient sur son passage, 
pour le voir et l'entendre. Les curés e£ les ma- 
gistrats des villes qu'il traversait venaient fin- 
terroger, lui soumettre leurs (Joutes ou leurs ob- 
jections. Les plus défiants étaient désarmés après 
s'être entretenus avec Jui. « Je n'ai point en- 
core rencontré d'ennemi, eçrivait-il 4e Nurem- 
berg; je sois bien accueilli parfont (1). » 

#us entrai Constance le 3 novembre, au 
milieu 4'ua£ grande multitude avide de |e con- 
naître, 4 Ât aussitôt nojifrer son arrivée au 
pape, ,<pu £t le plus /ayorable accueil à ses en- 
voyés. « Quaud même Jean JIus aurait tué mon 
propre frère, Jjwir dit-il, j'empêcherais de tout 
mon pouyoir qu'on lui 6* U moindre iojnstice 
pendant le temps de sou séjour ici (2). » S'il faut 
même ajouter foi ? uue lettre qui se trouve parmi 
.celles de /. Hm, \e pape, après s'être entendu 
avec les cardinaux, jurait suspendu son inter- 
diction et la sâpten^e ^ui l'excommuniait (3). 
kyqrU d'éviter toujte «au*e 4e scandale et d'é- 
motiou iiapulaice, U\» e'abstiut de prononcer 
deux sermons qu'il ayaat composés. L'un est 
une ^f lication du symJ^le des apôtres , rautre 
a pour Wj«t l'union 4 la pajx de l'JÉghae. Le 
$ noveinùre, Âe comeife s'uuy^; le 1$ «loi lien 
la première session. n'y fut pas question de 
#us. fl vivait et pariait liment , offiqteni cjia- 
Wt jour dians sa cl>aml)r«, m u»Seu de ajes |«r- 
Aisans. jÉtieau* PaÂetz «t M^îel de £au*is, ses 
fflnernjs, savaient de^à commencé tes hostilités. 
Aes p^rds affichés dans l'ég^se et sjgpaés dn 
uom ,de ce dattier, dé^wc^e^t « 1'opixiAtn 
J. Hus wcoêimwtf et &mw4 4'bérésU ». 
f ( Que PW*'J£? ^ v ^ 4^ je pape , /ce sont vos 
.cAmpa|rjo^sx]ui agissant contre vuus. > 1^ 2S, 
Pus îut arrêté, ent>rmé chez le A^anfcre fc h 
mbéAjrtify puis transféré au couvent des 4mw~ 
cains. Jean de Chlura réclama d'abord auprès dn 
pape, qui esquiva 4oute responsatÂHté dans cet 
acte; puis # s'Adressa ^ l'empereur, jjui n'était 
pas encore aimé à Gouatance. &i^Lsmoud, ia- 
digné, écrivit à ses ambassadeurs de faire ouvrir 
les portés de la prison, ef, au besoin de les briser. 
On passa autre : Jean de fihaum jarotesla pu- 
bliouement dans un écrit qu'il fit afficher aux 
portes de toutes tes églises de Constance, swjft 

xebus miia alognUs per ow>saHmme *>as»ua , portua, paa- 
teia, tersaa . doinbUa, JutU41c*Mpftea et aloe xiua aoUttiaae 
icibutt , AelcMaH ant *1io ej^ovU solutiooia cuaece , oaaaieae 
4»rorsoj taprattmnHo jyaaoto, U^paite , ajtate . «orarl et 
redire libère permlttatis, sibique et aois, evaa oppa iacrtt, 
ée aeeoro A *«Uo veati.H et debeaiia puniâert caoâuctu 
aé honortm et wwûMQtlaw ^oatrat HaJ. Jùaê^m Spkat , 
anno Dom. 1M4, die oûtçiwU tt. (Mis*. H Mo*- Bm, 
top. 1, 4oi. A.) 

(1) iJÈire écrite 4tMu tm *ÊÊn§ aux ^déU$é»Pmm^ 
UiU. et Mon. J. Hm, tom. 1, fol. S7 (weo ) et M (recto). 

(2) Stompb, p. 18, cité par tentant, Hiat. 4m iUmcUe 
deCanst., tome I, p.pt. 

;8) Lettre de /oap, curé de Unowitz, mmx fidèles de 
Prague. Hist. et Mon, J. Mus, tom. J, fol. M (recto;. 



605 



HUS 



«40 



la violai*» «te swf-coiHiint et le mépris des or- 
dres /formels de l'empereur (1). Qu'allai! (aire 
Sigisjaotyd? La Pohéme s'agitait à la nouvelle de 
l'emprisonnement 4e Hus ; à peine entré à Cons- 
tance ( 25 décembre ), 1'eiaapereuF avait reçu une 
lettre des barons de Bohème qui le suppliaient de 
rendre Hus à la liberté. « Tout notre espoir, di- 
sajeBi<-ils,esi, après Dieu , dans Votre Majesté. » 
Ils lui écrivirent une seconde fois, invoquant 
av«c force le droit des gens et rinriolafeiliiéde 
la parole impériale (2). 

Cette seconde lettre arrivait trop tard ; quel- 
ques jours auparavant l'empereur s'était laissé 
persuader de lever l'obstacle que le sauf-conduit 
semblait devoir apporter à la liberté d'action 4n 
concile. On lui avait démontré par de longs dis- 
cours qu'il était dispensé de garder sa foi à un 
homme accusé d'hérésie, et, bien plus, qp'jji 
n'était pas en droit de couvrir de sa protection 
un pareil homme. Toutefois, Sjgismond ne céda 
pas sans résistance. Une lettre qu'il écrivait aux 
Bohémiens en 1417 témoigne des efforts qu'il 
fit : « Si Hua, dit-il, ne ftt entré qu'avec moi, a 
Constance, peut-éfa* que ses affaires auraient 
pris un antre Jour. Dieu sait , et je ne puis l'ex- 
primer, combien j'ai été affligé de son malheur, 
et tous ceux de Bohème qui .étaient alors auprès 
de moi ont bien vu quels mouvements je jne 
suis donnés pour cette affaire, et que plusieurs 
fois je suis sorti du concile en furenr. J'avais 
même quitté Constance lorsque les pères du con- 
cile me tirent due que si je ne voulais pas per- 
mettre que le concile exerçât la justice, Us n'a- 
vaient que faire à Constance ; .de sorte que je $ris 
la résolution de ne plus me mêler de cette af- 
faire , parce que si j'eusse voulu m'intéresser 
davantage pour Jean Sus le concile eût été en- 
tièrement dissous (3). » Ce n'est pas le lieu de 
disputer ici sur la valeur de cette espèce déraison 
d'État que Sigismond semble alléguer pour pal- 
lier une atteinte manifeste à la justice. Le pas- 
sage que nous ^citons prouve simplement que 
près de deux ans apsfe» h mor£ de fius la cons- 
cience de l'empereur n'était pasin repos an sujet 
4e la violation du .sa,u/-con4uiJ, (4). 



(i) Hist. et JHm. I. fiut, Hem. Mqi. » ( wrao ). 

C*) Voici un passage de cette lettre : « Cum Joannes 
H us eonfisus Regiœ (use Majestatis litteris ad Constan- 
tiem profectos esse*, queroadHKriom ex constant! faroa 
acceptas, capftus ml Mm *i* JlteflM public* Adei, 
neque hoc tantôt *ed in carperera conjeçtus, neque au- 
ditus, neque convtetus contra leges et tuœ Regiœ Ma- 
jestatis iitteras. Qood factum «t apnd «os et alibi eo 
modo innotuH ut et principe» et barones , paupere* et 
divltes mirai! siat sanctissimum illum Patrera ( le pape 
Jean XX III) tam turplter contra legara auctoritatem , 
constitatlonem , vcritatem, et contra Iitteras Regiœ tuœ 
Majestatis peecare potuisse , «mesertlm com homincni 
Justum et InoQcentem sine causa conjecit in carcerem. » 
Hist et Mon. J. Hus, tora. I, fol. 76. Par quatre fols le 
droit des gens et le sauf-conduit impérial sont invoqués 
dans ces quelques lignes. 

(S) Hist. de la Guerre des H m sites, Jean Cochlée, liv. LV, 
cité par Lenfant, Hist. du Concil. de Const, tora. I, p% 88. 

(4) La question de savoir si le sauf-conduit donpé par 
Sigismond à Jean Uns, et qu'il reçut quelques jqurs après 



i Les ennemis de Hus ne s'étaienj pas Jbornés 
j à de vagues imputations. Quelques jours après 
| son emprisonnement, Michel de Causis avait 
dressé un acte d'accusation en huit articles, 
qu'il avait présenté au pape, et qu'il faisait suivre 
de récriminations envenimées contre la conduite 
que Hus avait tenue en Bohème. Jean XXIII 
nomma trois commissaires pour faire une en- 
quête , rechercher et entendre des témoins,' et 
interroger le prévenu. Hus était malade dans sa 
i prison : il demanda un avocat pour détendre sa 
cause ; on le lui refusa , sous prétexte que le droit 
canon ne permettait a personne de prendre le 
parti d'un hérétique. Une commission, composée 



son départ de ¥rag<ie, fat violé, a été bien souvent con- 
troversée, et décidée diversement par les éciiradns pro- 
testants et catholiques. Jean Hus, se rendant ù J<* citation 
du concile, acceptait sans doute et reconnaissait sa, ju- 
ridiction ; mais 41 y BHait librement, il devait être «- 
bremeot entendu. CLeqiaqquoAs me le sauf aoiulfttt «Le 
l'empereur était sans condition. Or ce sauf-conduit était 
nn mensonge s'il ne devait pas garantir Hus de toute 
contrainte , de toute violence , de toute atteinte à sa li- 
berté, pon-seniement aar la route de Prague & Constance, 
canine ou l'accorde , mats pendant son séjour daps cette 
ville. Cependant qu'arrive-t-ll? Le lendemain do son ar- 
rivée k Constance, Hus fait prévenir le pape, qui pro- 
teste ne lot vouloir aucun nal«t r*lnvtte seulement A ne 
pas prêcher : U obéit et demeure enfermé pendant trois 
semaines dans sa chambre. Le 88 novembre il comparait 
devant les cardinaux réunis en conciliabule : Il est inter- 
rogé , et satisfait a leurs questions , et le jour jnême les 
manœuvres de ses ennemis le font arrêter. JI est Jeté 
en prison dans on lieu infect, séparé de ses amis, privé 
de tout moyen de défense. N'est-ce pas la «ne violation 
manifeste du saof-conduit de Sigismond , et n'a-t-m 
pas le droit de dire qu'en fait les .cardinaux ne JLinrent 
nul compte de l'invitation expresse que l'empereur 
adressait aux princes ecclésiastiques et séculiers et dé- 
chirèrent l'acte protecteur sons la foi duquel Jean ttus 
avait quitté Prague? - Maintenant le concile pouvait-41 
annuler les effets du sauf-conduit Impérial comme at- 
tentatoire à la dignité et au salut de l'Église? C'est une 
question .de métaphysique canonique. Heus n'ayons pft-s 
à la traiter Ici. Antre chose peut-être est le droit na- 
turel, autre chose le droit canon. Observons seule- 
ment que le concile lui-même n'était pas très-assuré de 
son droit, poisque après coup, et comme pour combier 
une lacune de la jurisprudence ecclésiastique, JI dé- 
créta à la fin de septembre 1415, c'est-à-dire plus 
de deux mois après la mort de Hus, « que nul sauf- 
condnit ne pouvait prévaloir contre 4a fol catholique » , 
et, revenant snr l'affaire de Jean {lus, et afin de ré- 
pondre aux accusations de perfidie et de mauvaise foi 
lancées contre l'empereur, qui avait , disait-on , sacrifié 
Hus, an mépris de sa parole, ce qu'un pareil ennemi de 
l'Église était indigne de recevoir un sauf-conduit quel- 
conque, et que, selon le droit naturel, divin et humain, on 
Ae devait Iqi tenir aucune parole au préjudice de la fol 
catholique». Doctrine <qui rendait tout .sauf-conduit ajb- 
solnmeni illusoire. En fait, le ?8 novembre, flus n'était .ni 
jugé ni condamné : pour que Ifqmpqisonnement lût |è- 
£Ul»e, pépie selon la doctrine du concile, ±1 eût fallu 
qu'il suivit et non qu'il précédât l'instruction. Déclaré 
hérétique, après un examen régulier et un' débat con- 
•feçadictpire , j* usage «tait qu'il fût livré au bras séculier. 
A -plusieurs reprises, Hus avait déclaré qu'il acceptai* Je 
jugement du concile, quitte à en .appeler a>u juge su- 
prême et infaillible. 11 Jouait donc sa tête •• M la perdit à 
ce Jeu terrible. Sigismond laissa faire, moins par perfidie 
que par scrupule religieux. En quittant Prague Hus nes- 
jûéralt guère y revenir. S'il eût été livré au clergé catho- 
lique de la Bohême , comme lui-même l'eût trouvé juste 
( lettre 84 ), il n'eût pas été mieux traité , à moins que le 
roi et ses disciples ne l'eussent arraché des mains de ses 
ennemis les plus acharnés. 



607 

de cardinaux et de docteurs, dot examiner 8a doc- 
trine. Etienne Paletz en faisait partie. On ne se 
fit aucun scrupule de saisir les lettres qu'il écri- 
vait à ses amis. Hus avait fort à faire à répondre 
à toutes les allégations qu'on élevait contre lui. 
Cependant il trouvait le temps d'écrire plusieurs 
traités, qu'il adressait à ses gardiens, dont il avait 
su capter la bienveillance, et qu'il faisait passer 
en Bohême par leur entremise (1). Il comptait 
sur l'empereur, et ne cessait de réclamer une 
audience publique. « Voyez Sa Majesté, écrit-il 
à Jean de Chlum, suppliez-la qu'elle me délivre 
de mes fers , afin que je puisse disposer de moi- 
même et venir à l'audience publique (2). » Et 
dans une autre lettre au même : « Je m'étonne 
que l'empereur m'ait oublié et ne me fasse rien 
dire. Peut-être serai-je condamné avant de lui 
avoir dit aucune parole ; c'est à lui de voir s'il 
est de son honneur d'agir ainsi.... Que ne puis- 
je lui parler une fois avant d'être condamné, car 
je suis venu ici d'après son désir et avec la pro- 
messe qu'il me serait permis de retourner sain 
et sauf en Bohême (3). » 11 semblait que le procès 
de Hus dût se terminer à huis clos (4). Sigis- 
mond n'osait intervenir avec énergie, et la sup- 
plique que Hus avait fait remettre au concile 
pour être admis à répondre publiquement à ses 
accusateurs restait sans réponse. Les interro- 
gatoires se succédaient. Les docteurs de l'uni- 
versité de 1 Paris, et Gerson à leur tête, arrivés 
à Constance en février 1415, s'étaient ouverte- 
mentdéclarés contre lui. L'évasion de Jean XXIII 
( 20 mars) fit resserrer la captivité de Hus. Il 
fut remis aux mains de l'évêque de Constance et 
transféré par ses ordres dans la forteresse de 
Gotleben sur le Rhin, où il demeura enchaîné 
nuit et jour. Est-ii vrai que Jean Hus ait essayé 
de prendre la fuite , et faut-il attribuer à cette 
tentative l'excès de rigueur du concile (5) ? On ne 
le saurait affirmer avec vraisemblance, surtout 
en présence du silence des actes ; car on n'au- 
rait pas manqué de tirer parti d'un semblable 
événement. Il est probable que Reichental, qui 
raconte cette histoire, a confondu Hus et son dis- 
ciple Jérôme de Prague. 

La fuite du pape , les embarras et les affaires 
qu'elle suscita ajournèrent quelque temps le» 

(i) De Matrimonio; — De Mandatis Domini et De 
Oratione Dominica; - De Peccato mortali; — De Co- 
ynitUme et Pilectione Dei; — De Tribu* Hottibus Ae- 
minis et Septem PeccaUs mortalibus ; — De Pœnitentia ; 
— De Coma Domini , etc. 

(1) Hist. et Mon. /. Hus, epist. LUI, tom. I, fol. 7*(verso). 

(8) Ibid epist. L1V, tom. I, fol. 7* ( rerso ). 

(4) Volet à ce propos comment Bus s'exprime dans une 
lettre à son ami Jean de Chlum : « Plutôt que (Titre ainsi 
méchamment étouffé par tux. Je préfère que mon corps 
soit consumé par le feu » ; et encore quelques lignes plus 
bas : « Obi que nesuts-Je conduit au bûober plutôt que 
d'être ainsi perfidement étouffé ; * Epist. xXXV, fol. 69. 

(5) Lire sur ce point la discussion de J. Lenfant, His- 
toire du Concile de Constance , tom. I, p. 88 et sulv. — 
Le silence de plusieurs auteurs contemporains, CEneas 
Sylvlus, Ni cm, Vrie, Léonard Arétin, Jacques Plcolo- 
mint, est bien fort contre Tunique l<*inoign:ige de Het- 
Cbental. 



DUS 603 

procès de Hus. Le 4 mai, dans sa huitième ses- 
sion, le concile condamna solennellement la doc- 
trine de Wycliffe, ramenée à quarante-cinq 
chefs d'accusation, et résumée d'autre part 
en deux cent soixante articles. L'homme était 
mort depuis plus de trente ans ; on se contenta 
de maudire sa mémoire et d'ordonner que ses 
os fussent déterrés et jetés à la voirie. C'était 
un prélude naturel à la condamnation de Hus, 
qui avait soutenu par la plume et la parole quel- 
ques-uns des articles déclarés scandaleux et hé- 
rétiques. 

Les lettres que Hus faisait passer en Bohême 
tenaient éveillées les sympathies qu'on avait déjà 
manifestées pour lui. Jérôme de Prague, son 
disciple, malgré ses avertissements, s'était mis 
en route pour aller défendre son maître ; mais 
n'obtenant pas de sauf-conduit de l'empereur, 
et se défiant de celui que le concile lui avait 
proposé, et qui n'était autre chose qu'une citation, 
il était reparti pour la Bohême, avait été arrêté 
en chemin (25 avril ), ramené à Constance chargé 
de chaînes et mis en prison. Vers le milieu do mots 
de mai, les seigneurs de Bohême présentèrent 
successivement deux mémoires au concile. Ils 
protestaient de l'orthodoxie de Jean Hus, se plai- 
gnaient des calomnies que ses ennemis employaient 
pour le perdre, et offraient telle caution qu'on 
voudrait pour son élargissement On leur ré- 
pondit qu'il serait entendit le 5 juin, et que 
l'examen auquel on le soumettrait ferait foi de 
son orthodoxie prétendue et éclaircirait la na- 
ture des accusations portées contre lui. U était 
difficile d'enlever à Hus la satisfaction qu'il de- 
mandait depuis si longtemps d'être entendu pu- 
bliquement. Ses ennemis semblaient redouter le 
grand jour de la discussion : « Qu'une audience 
me soit accordée , avait-il écrit, afin que je ré- 
ponde aux arguments par lesquels ils attaquent 
les articles de mes traités : beaucoup de ceux 
qui crient se tairaient. Mais que la volonté du 
ciel soit faite (1) ». Aux nombreux articles que 
les commissaires lui présentaient dans sa prison, 
il avait constamment répondu « qu'il se soumet- 
trait à la volonté du concile ». Il n'entendait 
pas se soumettre aveuglément; mais , comme il 
s'en expliquait à ses amis, il était prêt à se ré- 
tracter quand on lui aurait montré qu'il avait 
écrit, enseigné ou répandu quelque chose de con- 
traire à la vérité (2). Michel de Causis et Paletx 
essayèrent encore le 5 juin d'empêcher l'audience 
publique ; mais l'empereur l'exigea, et Hus, trans- 
féré le jour même de sa prison de Gotleben au 
couvent des Franciscains, fat introduit. On roi 
présenta ses ouvrages; il les reconnut On com- 
mença la lecture des articles incriminés. Le pre- 
mier article lu, avec les témoignages qui rac- 
compagnaient, Hus se préparait à répondre, 
lorsque des cris partis de tous cotés étouffèrent 
sa voix. « Ils vociféraient tous, écrit-il, comme 

(t) Hist. et Mon. J. Hus, epist. XXXVI, ton. I; fol. ». 
(s) lbid., epist. XV, tom. I, fol. 61 (recto). 



G09 



HUS 



610 



les Juifs contre Jésus-Christ (1). » Toutes les 
fois qu'un insUntdesilencelui permettait d'ouvrir 
la bouche, il invoquait les Écritures et les témoi- 
gnages des saints Pères ; et les membres du concile 
se récriaient, disant : « Cela ne fait rien à la ques- 
tion ». Et puis les uns lui lançaient des injures, 
d'autres des sarcasmes* Vaincu par ces clameurs , 
il se tut, et ses ennemis, croyant avoir triomphé, 
disaient : « Il se tait, il se tait : c'est un signe qu'il 
se reconnaît coupable ». Enfin le tumulte et la 
confusion furent tels que les plus modérés dé- 
cidèrent de remettre l'audience au surlendemain. 
Ce jour là ( 7 juin ) l'empereur était présent à 
la séance. On accusa Hus dé soutenir qu'après 
la consécration le pain matériel demeurait dans 
le sacrement de l'Eucharistie. Il le nia formelle- 
ment. D'Ailly, cardinal de Cambrai, mit la discus- 
sion sur le sujet des universaux et essaya vai- 
nement de l'embarrasser par un dilemme. Un 
docteur anglais déclara que la question des uni- 
versaux était étrangère au débat , et que l'opinion 
de Hus sur la transsubstantiation était ortho- 
doxe. On l'accusa d'avoir traité saint Grégoire 
de bouffon : il le nia avec énergie. Le cardinal 
de Florence lui opposa le grand nombre des té- 
moins qui avaient déposé contre lui. « Quand ils 
seraient beaucoup plus nombreux encore, dit 
Hus, j'estime à un plus haut prix le témoignage 
de ma conscience et de mon Dieu que les juge- 
ments de mes adversaires. » — On l'accusa d'a- 
voir défendu et enseigné en Bohème les articles 
condamnés de Wyclifle ; il répondit qu'il n'avait 
enseigné les erreurs de Wyclifle ni d'aucun autre ; 
que, quand ces ouvrages avaient été condamnés 
par Sbynko, il s'était fait un cas de conscience 
d'adhérer à une condamnation aussi générale, 
et à laquelle refusait de souscrire l'université de 
Prague presque tout entière. Onl'accusa d'en avoir 
appelé du pape à Jésus-Christ; il répondit qu'il 
n'y avait pas d'appel plus efficace et plus légi- 
time, le Christ étant le juge suprême et infail- 
lible. On l'accusa d'avoir prêché la violence et 
mis le fer à la main des populations pour la dé- 
fense de sa doctrine ; il répondit qu'on avait faussé 
sa pensée, qu'il n'avait parlé que du glaive spi- 
rituel, qui est la parole de Dieu. On l'accusa 
d'avoir divisé le clergé, brouillé l'université, et 
obligé les Allemands à quitter Prague. Il se jus- 
tifia. II quittait la salle; le cardinal de Cambrai 
le retint , l'accusant d'avoir dit que s'il n'avait 
pas voulu lui-même venir à Constance, ni le roi 
de Bohême ni l'empereur n'auraient pu l'y 
forcer : il l'avoua, attestant la puissante protec- 
tion des seigneurs de la Bohême. Allors d'Ailly, 
changeant de visage : « Voyez, dit-il , l'impu- 
dence de cet homme. » Un murmure s'éleva. 
Jean de Chlum, qui était présent, affirma que 
Hus avait dit vrai. « Moi seul, si chétif en 
comparaison des autres, dit-il, je pourrais le 
défendre une année entière contre toutes les 

(i) BUt. et Mon. J. iftu,epiat. XXXVI, 1. 1, fol. 6» (recto). 
HOUV. BIOGR. GÉXÉR. — T. XXV. 



forces de ces deux rois. » C'en est assez, dit 
d'Ailly; et il engagea Hus à se soumettre à la 
décision du concile, comme il l'avait promis 
dans sa prison. Sigismond ajouta quelques pa- 
roles dans le même sens, promettant à Hus ses 
bons offices s'il se soumettait, et le menaçant, 
s'il s'y refusait , de l'abandonner à la justice du 
concile. « Jamais , dit-il, je ne soutiendrai tes 
erreurs et ton obstination : bien plus, j'allume- 
rais le feu de mes propres mains plutôt que de to- 
lérer plus longtemps le coupable entêtement que 
ta as montré jusqu'ici. » Ensuite Hus fut em- 
mené hors de la salle. 

Le lendemain il comparut de nouveau. On lui 
lut trente-neuf articles qu'on disait tirés de ses 
écrits et qu'on lui avait pour la plupart déjà pré- 
sentés dans sa prison. Il répondit, comme il avait 
déjà fait, reconnut les uns, expliqua les autres, en 
désavoua plusieurs comme lui étant faussement 
imputés. De ces trente-neuf articles, vingt-six 
étaient extraits plus ou moins fidèlement de son 
traité De l'Église, sept de sa réponse à Etienne 
Paletz et six de sa réponse à Stanislas de Znoyma. 
Ils portaient sur la définition qu'il avait donnée 
de l'Église, sur la prédestination, l'institution 
et l'autorité des papes, l'obéissance ecclésias- 
tique, l'excommunication, l'interdit, les censures 
de l'Église, l'indignité des prélats de tout ordre 
en état de péché mortel (1). Après la lecture de 
ces articles et la discussion qui s'engagea sur 
chacun d'eux , le cardinal de Cambrai invita Hus 
à se soumettre, lui promettant qu'en considé- 
ration de Fempereur et du roi de Bohême , le 
concile le traiterait avec douceur. Il devait en pre- 
mier lieu confesser qu'il avait erré en soutenant les 
articles qui avaient été allégués, et en demander 
pardon; deuxièmement promettre avec serment 
de ne les plus enseigner et de ne les plus tenir; 
troisièmement, les rétracter tous en public. Hus 
répondit qu'il ne pouvait abjurer les erreurs 
qu'on lui attribuait faussement ; que pour les ar- 
ticles qu'il avouait, il attendait pour les rétracter 
qu'on lui montrât qu'il s'était trompé, et qu'on 
lui enseignât quelque chose de meilleur. Sigis- 
mond joignit ses sollicitations à celles de d'Ailly 
et de plusieurs cardinaux ; mais ni ses instances 
ni ses menaces ne purent ébranler la résolution 
de Hus. Il recommanda sa cause à Dieu, et fut 
reconduit en prison , exténué de corps et d'es- 
prit. « S'il ne se rétracte, dit l'empereur quand 
il fut sorti/mon sentiment est qu'il soit puni 
du supplice du feu ( nisi igitur recantet Ma 
omnia, ego censeo ut ignis supplicio affi- 
ciatur ) ». Le 9 juin, on présenta à Hus un for- 
ci) HUt. et Mon. J. Bu$ , tome I, fol. 18 et soir. Il y a 
douze articles qui portent sur ce point. Plusieurs des ou- 
▼rages de Hus avaient échappé aux investigations des 
commissaires do concile. Hus semblait redouter qu'Us ne 
tombassent entre leurs malnst et recommandait A ses 
amis de les tenir cachés. « Je suis charmé, écrit-il 
( epist. XXVII >, qui mon traité Contré un Adversaire 
inconnu n'ait point été découvert non plus que quelques 
autres. » 

20 



611 



HUS 



612 



mulairede rétractation; ilne voulut pas l'accepter. 
Vainement on vint dans sa prison pour l'engager 
à plier devant Farret du concile. Il fol inftexinis. 
« Ma dernière et ferme volonté , écrit-il le 21 jnm 
à ses «mis, est que je refused'avouerpour erronés 
les articles qui ont été véritablement extraite de 
mes oeuvres, et que je refuse d'abjurer ceux qui 
m'ont été attribués par de faux témoins (t) ». 
Tentes les lettres qu'il écrivit dans ce» jours 
suprêmes témoignent do calme iflSTéokfe de cette 
âme, qui dans ses dernières épreuves avait dé- 
pouillé tout ressentiment. Elfes sont enmralnftfs 
d'une douceur et d'une onction vraiment évan- 
gétiques (2). Le 24 jaln le concile condamna ses 
livres au feu. Cette sentence, qui frappan Bradais 
sa foi, tendant à effacer dé monde sa doctrine et 
à mettre à néant ce qu'il croyait avoir laissé d'im- 
périssable, réveilla un instant cette âme attière, 
que la lutte , la prison et la maladie n'avaient pu 
épuiser, et lui arracha nn dernier cri plein d'a- 
mertume. « Mes chers amis, écrivit-il, à cette 
occasion, à ses idéfe»* ne vous laissez pas 
ébranler par l'arrêt de ceux qm ont condamné 
mes livres au feu : souvenez-vous que les 
Israélites ont brûlé les écrits dn prophète Jéré- 
mie, sans cependant éviter le sort qui! leur avait 
prédit.... J'ai cette confiance en Dieu que cette 
école de l'Antéchrist vous redoutera un jour et 
vous laissera en repos. Le concile de Constance 
n'ira point en Bohême , et beaucoup de ceux qui 
en font partie mourront avant d'avoir pu vous 
arracher mes livres d'entre les mains. Et quand, 
au sortir du concile, ils seront dispersés dans 
le monde comme des cigogne» , ils connaîtront 
à l'approche de l'hiver ce qu'ils auront fait en 
été. Considérez qu'ils ont jugé digne de mort le 
pape, leur chef, pour plusieurs crimes horribles. 
Eh bien, répondez à cela, vous antres prédica- 
teurs qui prêchez que le pape est Dieu sur la 
terre; qu'il peut vénère à tort et à travers les 
choses sacrées , eommef le disent les canonistes 
(jurisperiti ) ; qu'il est la tête de toute la sainte 
Église, qu'il l'administre saintement; qnil est le 
cœur de l'Église et qu'il la vivtàe spirituellement; 
qu'il est la source d'où émanent tente vertu et 
toute bonté ;qtfil est le soleil delà sainte Église; 
qu'il est le refuge le plus assuré où tout chré- 
tien doit trouver un asile. VoHà cette tête tran- c 
chée par le glaive, ce dieu terrestre enchaîné, ses 
péchés mis au grand jour; voilà que cette source 
est desséchée, ce soleil obscurci, ce cœur arra- 
ché et jeté par terre... fte concile a ««damné 
son ehef pour avoir vendu des indulgences, des 
évêchés et d'antres chose» de lu même espèce. 
Mais parmi ceux même dont la sentence l'a 
condamné il en était plosieuts. qui les avalent 

CD ma. et Mon. S. AW, epiat. XX, ton*. I, fol. Si 
(recto). 

<» Voir en parttctMef le* lettre» Xvrffc XXI, XXII et 
XXX. Le calme d'une Une maîtresse d'elle-même, rési- 
gnée, et crai porte sans aigreur et pretflue sans impatience 
Tinjustke q«i l'aeoable, respire dansies dernières pages 
sorties de la plume de flus. 



achetées de loi, et en avaient bit à leur tour 
trafic et marchandise:... Vendeurs, acheteurs 
et entremetteurs de pareils contrats, soyez eon- 
damnés, comme saint Pierre a condamné SisaM, 
qui voulait acheter de lui la verts du Saint- 
£eerit!... Ils est dît aeathème an vendeur, ik 
Font condamné; eux \m acheteurs, eus. les 
entremetteurs, us demeurent împunisU. Ah ! 
si Dieu leur avaft dit daiis ce contrites 
da voua qui est sans péché prononce la sentence 
contre le pape Jean , sans doute as seraient sortis 
Funaprès Fautre. Pourquoi donc, avant sa choie, 
MfftÉsstBemfciisie» genoux devant kriPPourquoi 
baawient-ite ses pieds? Pourquoi le nommaient- 
ils tressant ktrsqiriU le savaient être on hé- 
rétique, un homicide, an pécheur endurci? car 
c'est ainsi qu'ils pariaient déjà de lui en pu- 
blic. Pourquoi tes cardinaux l'ont-ils fait pape, 
lorsqu'ils savaient qu'il avait fait périr le trèa^amt 
père (Alexandre Y); et depuis qu'il est pape, 
pourquoi ont-ils souffert qu'il trafiquât des 
choses saintes? He forment-ils pas son conseil 
pour l'avertir de ce qui est juste, et ne sont4ts 
pas aussi coupables que lui de ces crimes? Pour- 
quoi personne n'a-t-il osé lai résister avant sa 
fuite de Constance ? Ils le craignaient tous alors 
comme leur père très-saint. Mais lorsque avec 
la permission de Dieu le pouvoir séculier s'est 
emparé de lui, alors ils ont conspiré, il* ont 
tramé sa mort.... Oh ! combien je voudrais noav 
voir dévoiler tontes les iniquités que je cannais, 
afin que les fidèles serviteurs de Dieu se tmnaont 
en garde contre elles. Mais j'espère que Dieu 
enverra après moi des champions plus ▼igon- 



« J'écris cette lettre le jour de Samft-Jean-» 
Baptiste en prison et dans les chaînes, et je 
songe que saint Jean fut décapité dans sa prison 
pour la parole de Dieu (1). » 

Le ton de cette lettre et les récriminations 
dont elle est pleine disaient assez que Hua ne 
pensait pas à se rétracter. 

En effet ce fut en vain que des députations dn 
concile et de l'empereur essayèrent de l'amener 
à une rétractation. « Je donnerais par là, di- 
sahVit, un grand scandale au peuple de Dieu qui 
a écouté mes prédications, et il vaudrait mieux 
qu'une meule de moaKn fat attachée à mon cou, 
et que je fusse jeté an fond de ta mer. » 

Le a juillet Hus fut amené an concile ( t &' ses- 
sion) pour la dernière fiais. Jamais r maoma h i a t 
n'avait été pins nombreuse. L'évêqne de Leiî 
fit un sermon sur ces paroles de saint Paul: 
afin que U corps eu péché toti détruit. On 
donna lecture de trente nouveaux articles, Mas 
ne pot obtenir de répondre sur chacun d'onx ni 
particulier : on lut ensuite deux sentences, l'une 
qui condamnait ses livres au feu, l'autre qui le 
déclarait hérétique opiniâtre et mconiejble» * •* 
condamnait a la dégradation ecclésiastique. Mas 



61S 



HUS 



614 



à geaaum m& (nasaié de protester et d'en appeler 
à Die», qu'il priât en même temps de pardonner 
à te» aocusateursat à aea juges. On procéda alors 
à la dégradation : il fort revêtu de ton» les orne- 
mente sacerdotaux, puis successivement dépooillé 
de chacun d'eux avec de» paroleade malédiction^ 
Si loi, répandait à cesnuuédiotiuns en rappelant 
les outrage* que le Cariât avait endurés dans sa 
p jM É on . Le rasoir effaça sdr sa tête le» marque» 
de la tonsure. On 1* coiffa ensuite d'une mitre 
de papier sur laquelle étaient pemtes des figure» 
de diable, et écrit ea grosses lettres, le mot héré- 
siarque. Bai cet état, les prélats dévouèrent son 
âme aux démon» de l'enfer, la déclarèrent laïqae 
et le Kt iei ea * an bras séculier. Il marcha au 
suppliée environné de soldats et d'une nmltitado 
de peuple qui courait à son bûcher comme à un 
spectacle. Il sourit en voyant brûler ses livre* an 
pataia éfmcofaL Un poteau avait été dretsé dans 
une prairie attenant au» faubourgs de la ville, 
Hns y fut attaché, et te bote rot accumulé autour 
de lui. L'électeur peJatia l'invite encore nue fois à 
abjurer. Hua répan dit « qu'il signait avee joie de 
sou sang- tact ce qu'Haïrait écrit et enseigné, ne 
l'ayant fait que pour arracher les âmes d'entre 
les mains de» démena et lea délivrer de la tyran- 
nie àù péché ». On mit alers le feu au bûcher, 
et oui put entendre du milieu des flammes la 
voix de Hua, end disait s « Jeans Christ, fil» du 
Dieu vivant, aie pitié de moi ». 11 fat bientôt 
étouffé par nnummeet la fumée. Les bourreaux 
déchirèrent lea parties de son corps que le feu 
avait épargnées et les brûlèrent de nouveau , 
puis recueillirent les cendres de l'hérétique et les 
jetèrent dans le Rhin. 

Telle lut la fin de. celui en qui les protestants 
saluent un confesseur et un martyr de la vérité, 
les philosophes on défenseur des droits de la 
raison, de la conscience et du libre examen, 
les amis de l'humanité une victime des pas- 
sions religieuse» d'une époque de fan ati s me. 

Quand on lit les ouvrages de Ras on ne peut 
s'empêcher de trouver que Luther, m siècle 
plus tard, a moins innové qu'or* ne croit, et que 
le protestantisme 1 est re tout entier dans son 
principe et dan» ses doctrines fondamentale?. 
A défaut des ceuvres de Uns , le» préfaces de 
Luther (édrt. oV Nuremberg, 1666, en tète du 
tome I 6 ') valent sur ce point toute» le» démons- 
trations. L'enthousiasme q«/H y montre peur le 
prédicateur de la Bohème, fthdigaatiov# qu'il 
laisse éclater contre se» ennemi» disent assez 
que H us fut avec WyeMfe le précurseur de m 
réforme. 

Ouvrage* de Bus. Les ottfvre» de Bas cem* 
prennent des trahies dogmatiques* fie» ouvrages 
de controverse, été polémique,, d'exégèse, (les 
sermons et des lettres. 

Ses Lettres forment deo* séries; il y en al 
quatorze écrites é> tkt 1 a W% et efequante-sfe 
éerrtes depuis son départ de Prague pour Cons- 
tance jusqu'à sa mort. 



Ses Sebmon» comprennent d'une part huit 
sermons prêches à Prague : Conciones synodic&; 
vingt-huit autres sons le titre De Antichristo 
( Us n'ont pas dû êtye prêches sous cette forme ), 
et deux autres que Ha» composa à Constance, 
mais qu'il s'abstint de prononcer, Tau De Elu- 
cidatione fiâei suée, l'autre De Pacé.' 

Ses ouvrages d'exégèse sont : Historia Ges- 
torum Christi ex quatuor Evangelistis in 
unum collecta et secundum très annos prx- 
dieationis ejus distincta; — Historia Pas- 
stonis Christi, ea quatuor Evangelistis col- 
lecta et schoiiis illustrata; — Essplicatio in 
sept cm priera capita prunss Epis t. S. Pauli 
ad Corinth.;~ Commentarii in Epis t. Apos- 
toiorum canvnicas sept cm; — Enarratio 
Psalm. 109-118. 

Ses OUVRAGES DOGMATIQUES ET POLÉMIQUES 

sont : De Ecclesia; — De Sanguine Christi 
sub specU vini a laids sumendo (Jean Hus 
adopta mais n'introduisît pas la communion sou* 
l'espèce du vin; les Pères de Constance igno- 
raient son opinion sur ce point; de là le silence 
de» actes ) j— De Libris h&reticorum legendis ; 

— De AbiationeBonùrum temporalium a cle- 
ricis; — De Decimis; — De arguendo Clero 
pro conctone? — De quinque O/ficiis Sacerdo- 
lis; — Determinoti* quxstionis de omni 
sanguine Christi glorijicato; — De Corpore 
Christ*;— De Tribus Dubiisj ~ De Sex Er- 
rerions ; ~ Quxstio de Credere; — Liber de 
AnUchriêto et membrorum ejus Anatomia ; 

— Liber de Megno, Populo, Vita, et Moribus 
Antichristi ; — De Monaokorum et Sacerdo- 
tumearnatsum Abvminaésone ; — De Corpore 
Christi in saeramento altaris quod non créa- 
tur neque incipiat esse; — De Adoratione 
et contra imaginum adorationem; — Actus 
pro Defensione libri Joannis Wycleff De Tri- 
nitate; — Replica contra Anglicum J. Stokes; 

— Defensio quorumdam articulorumJ. Wui- 
clef; — Replicd contra occuttum Âdvcrsa- 
rium; — Replica contra prxdicatorem 
Plznensem; —Quœstio de Indulgentiis sive 
de eruciatu papx Joannis XXIII; — Contra 
Buliam pop» Joannis XXIII; — Responsio 
ad ScriptaM. Stephani Paletz; — Responsio 
ad Scripta M. Stanislai de Znoyma; — Re- 
futatio Scripti Octo Doctorum. Outre ces ou- 
vrages, l'édition de Nuremberg contient des frag- 
menta divers,, tom. I, fol. 472-500. 

11 y a deux éditions des œuvres complètes de 
Hus. L'une est de Strasbourg eu 1525, donnée par 
Q« Brunleby in-4°, avee fig. en bois ( très-rare); 
l'autre est de Nuremberg 1558, et comprend 
deux vol. hrfoliosou» ea titre : /. Mus et Hie~ 
remgmi Pragenm Historia et Monumenta. 
Lea lettre» de J. Hns ont été traduites en fran- 
co» par M. Emile de Beuaeebose avec la pré- 
face de Luther y Pari», t846y i vol. in- 12. 
B. Albé. 

20. 



HUS — HUSCHKE 



615 

rember*. J vol. lu-fol., 1BSS. - Fteory, Hist. de l'Église. 

- labbe, Collection des ConciUs. - Jacques l'Enfant, 
Concile de Constance, l vol. to-*°. - Us Histoires de 
la Bohème, par Dubravlus , par OBneas Sjlvius , Plccolo- 
mini et le Jctuite Balblnna. - Histoire de la Guerre 
des Hussites par Jean Gocblee et par Theobaldus ( Thi- 
bault, écrivain protesUnt ). -CoUectton du docteur Von 
der Hardt, et tous les auteurs de VHistoire de VRglUe. 

— M. Emile de Bonnecbose, Us Réformateurs avant 
la Réformes Parti, 1 vol. In- il, MM. 

bus (Adélaïde-Louise- Pauline), actrice 
française, née à Rennes, le 30 mars 1734, morte 
à Paris, le 18 octobre 1805. Elle débuta à la 
Comédie-Française le 26 juillet 1751, par le rôle 
de Zaïre. Elle fut toujours considérée comme 
médiocre. Voltaire, parlant d'elle dans une lettre 
à M. d'Argental, s'écrie : «Pauvres Parisiens, 
vous n'avez que des Bus ! » Sa charmante figure 
lui tenait lieu de talent, et pendant les vingt-sept 
années qu'elle passa au théâtre elle lui dut d'y 
être vue sans déplaisir. Rochon de Chabannes 
Tut un des rares auteurs qui recoururent à ses 
services ; il lui confia le rôle de M"* de Lisban, 
dans Heureusement, et elle s'y distingua, moins 
par son jeu que par l'esprit d'à-propos. Après 
avoir longtemps ébloui et scandalisé tout Paris 
de son faste et de ses prodigalités, cette actrice 
entreprit de réformer sa conduite, et, abjurant 
ses erreurs, elle épousa, le 8 octobre 1774, un 
sieur Lelièvre, qui la rendit fort malheureuse. 
Aussi, en septembre 1793, se hâta-t-elle d'in- 
voquer le divorce. Elle s'était retirée du théâtre 
en 1780, avec une pension de 1500 livres, et se 
consacra tout entière à des actes de bienfaisance, 
poussant môme si loin l'exercice de cette vertu, 
qu'elle mourut dans un état voisin de la misère. 

La mère de M Uc Hus, comédienne de cam- 
pagne, est auteur d'une comédie intitulée : Plu- 
tus rival de V Amour, jouée avec succès à la 
Comédie-Italienne, le 2 septembre i758. 

Ed. de Manne. 

Correspondance de Grimm. - Id. de Foliaire. ~ De 
Bachaumont, Mémoires, t. I«\ — De Mouhy, Annales 
du Théâtre- Français. — Lemazurier, Galerie historique 
du Théâtre-Français. 

hus-desforges ( Pierre-Louis ), musicien 
français, né à Toulon, en 1778, mort à Pont-le- 
Voy^ le 20 janvier 1838. Élevé à La Rochelle par 
Crouzet, maître de chapelle de la cathédrale, il 
apprit de ce maître à jouer du violoncelle. A la 
révolution, les écoles religieuses de chant furent 
dispersées, et le jeune Hus-Desforges prit du 
service dans la cavalerie. Il fit les campagnes de 
Vendée sous Hoche et Westermann, passa à 
l'armée d'Italie, et se distingua à Marengo, où 
il reçut une blessure qui lui valut sa retraite et 
une pension. Cette blessure retint longtemps le 
jeune virtuose à l'hôpital, et c'est de là que 
datent ses premières compositions. Lorsqu'il fut 
guéri, il vint à Paris, où son talent fat apprécié. 
En 1805, il fut appelé en Russie pour diriger 
la musique du Théâtre-Impérial de Saint-Péters- 
bourg. H publia successivement des œuvres im- 
portantes pour son instrument, qui furent bien 
accueillies, même à Paris. En 1812» la guerre dé- 



610 

clarée à la Russie par la France força Hus-Dea- 
forges à quitter Saint-Pétersbourg. U emporta 
son violoncelle, et rejoignit Tannée française; 
mais en route il eut les pieds gelés. De retour 
en France, il fut nommé dicectear du grand 
théâtre de Bordeaux ; il y resta sept ans, compo- 
sant de la musique dans ses loisirs. Revenu à 
Paris, il devint chef d'orchestre du Vaudeville, 
et plus tord, en 1828, du Gymnase, alors théâtre 
de Madame. « Il donna quelques concerts, dit 
la Biographie des Hommes du Jour, où son 
talent de violoncelliste fat toujours applaudi. On 
aimait le naturel et la vérité de son jeu, la grâce 
et la variété de ses mélodies, et on le comparait 
à Duport; si sa blessure à la main droite pa- 
raissait nuire à l'énergie de l'archet, la qualité 
des sons gardait sa pureté. Hus-Desforges a été 
de ceux qui ont le plus contribué à populariser 
ce riche instrument. » Hus-Desforges rendit un 
autre service aux violoncellistes en publiant sa 
Méthode pour le violoncelle, en 1828. Ensuite 
il compléta cette méthode par des Exercices 
pour le violoncelle y qui furent adoptés par le 
Conservatoire. Forcé de donner sa démission de 
sa place au Gymnase, il tomba dans une situa- 
tion précaire, et accepta enfin la place de direc- 
teur de l'enseignement musical à Poat-le-Voy, 
où il termina sa carrière. Parmi ses productions 
musicales, on remarquedes symphonies, desquin- 
tettes, des concertos, des duos, des sonates, etc., 
pour le violoncelle et d'autres instruments. On 
cite aussi des œuvres de chant, entre autres un 
Regina cœli et une messe à grand orchestre 
qui ont souvent été exécutés à réalisé Saint- 
Roch. J- v - 

Sarrut et Salnt-Edme, Biogr. des Hommes du Jour, 
tome III, « e partie, p. i*s. - Fétte, Biogr. uni», des Mu- 
siciens. — Nécrologie, dam le Moniteur, 1838, p. l». 

husghke ( Emmanuel-Gottlieb), philo- 
logue allemand , né à Greussen ( principauté de 
Schwartebourg-Sondershausen), le8 janvier 1761, 
mort le 18 février 1828. Après avoir étudié la 
philologie à léna, il devint professeur de langues 
anciennes à l'université de Leyde. En 1798, u 
se rendit à Gœttingue, où il donna des leçons 
particulières. En 1806, il fat nommé professeur 
de langue et de littérature grecques et quatreans 
après d'éloquence et de belles-lettres à l'unîver- 
sité de Rostock, dont la bibliothèque fut aussi 
plus tard confiée à ses soins. On a de lui : />«• 
sertatio in qua Tibulli et Propertii qwedm 
loca e grxcis/onlibus derivantur; léna, 1783, 
in-4°; — Epistola ctitica in Propertiuma* 
L. van Sauten; Amsterdam, 1792, in-4'; - 
Analecta critiea in Philosophiam grxcm; 
léna et Leipzig, 1800; — De Fabulis Arch^ 
chi; Altenbourg, 1803; - De Progrem^ 
manitatis Studiorumin Germania; Rowj 
1810, in-8°; — De Inscriptione vascufi & 
cris in Italia rtperti; Rostock, 1813, m-H.; 
— Tibulli Elegi*, eum mimadverstomw* 
Leipiig, 1319, 2 vol., in-*°; avant de doonei 



617 



HUSCHKE - HUSKISSON. 



61* 



cette excellente édition, Uuschke avait publié 
dans divers programmes des remarques sur 
plusieurs élégies de Tibulle; — De Cannio 
Cimbro, LysidiciJilio;Roatock, 1824, in-4°; 
— AnalectaLUteraria ; Leipzig, 1826, gr. in-*» ; 
recueil contenant : Catulli Carmina sexpriora, 
cum commentûriis Brunckhusu, Verburgii 
et éditons; — M. T. Ciceronis Orationes pro 
H. Tullio, cum commentants et excursioni- 
bus;— Comment atio de TibulloetPropertio; 
— Epistolx Virorum doctorum inédite. — 
Hurschke avait travaillé pendant de longues 
années à une édition de Properce, qu'il ne put 
faire paraître avant sa mort. £. G. 

Heue, Ferzeichnist gelcàrter Schwartiburger. — 
Mlgemeine Schulzeitung (année 1828, n° 187). - Neuer 
Necrolog der Teutschen (sixième année, 1. 1). — Ersch 
et Gruber, Encyclopédie. 

I hcschkb ( Georges-Philippe -Edouard), 
jurisconsulte, historien et théologien allemand, 
né à Hunden, le 26 juin 1801. H est professeur 
de droit à Breslau. « M. Huschke, dit avec raison 
M. Laboulaye, est un des érudits les plus ingé- 
nieux de notre temps et un des hommes qui con- 
naissent le mieux l'antiquité et la jurisprudence 
romaine. » Il a publié, entre autres : De Pignore 
nominis, ejus natura et effectu; Gœttingue, 

1821, in-4°; — De Privilegiis Fecennix His- 
palse senatusconsulto eoncessis; .Gœttingue, 

1822, in-8°; — Studien des rômischen Rechts 
(Études sur le Droit romain); Breslau, 1830, 
in-8°; — Die Verfassung des Kônigs Servius 
Tullius (La Constitution du roi Servius Tullius) ; 
Heidelberg, 1838, in-8°: cet ouvrage, de la plus 
haute importance pour l'histoire des institutions 
romaines, rectifie sur beaucoup de points les opi- 
nions deNiebuhr ; — Ad legem XII tabularum 
de signo juncto Commentatio ; Breslau, 1839, 
m-4° ; — Ueber den zur Zeit der Geburt Jesu 
Christi gehaltenen Census (Sur le Recense- 
ment fait lors de la naissance de Jésus-Christ ) ; 
Breslau, 1840, in-8°; — Ueber dos Recht des 
Nexum und dos dite rômische Schuldrecht 
<Sur le Droit du nexum et sur l'ancien Droit 
romain concernant les dettes); Leipzig, 1846, 
m-8°; — Uber den Census und die Steuer- 
verfassung derfruheren rômischen Kaiser 
zeit (Sur le Census et l'état des impôts dans 
les premiers temps de l'empire romain); Ber- 
lin, 1847, in-8°; — Beitrœge zur Kritih des 
Gains (Documents pour servir à la critique de 
Gaius) ; Leipzig, 1855, in-8°. —-Huschke a aussi 
publié avec des notes le document jusqu'alors 
inédit : Flavii Syntrophi Instrumentum do* 
nationis; Breslau, 1838, in-4°. £. G. 

» Conversation*- Lewikon. 

' huskisson (William) y célèbre économiste 
et homme d'État anglais, né à Birch-Moreton 
( comté de Worcester), lé 11 mars 1770, tué par 
accident sur le chemin de fer de Liverpool , le 
1 5 septembre i 830. Placé de très-bonne heure dans 
une école publique, il n'avait encore que douze à 
treize ans lorsqu'il fut confié aux soins d'un oncle 



maternel, le docteur Gem (médecin de l'ambas- 
sade anglaise à Paris), qui l'amena, ainsi que son 
frère cadet, en France, où il résidait depuis 1763. 
Le jeune William avait dix-neuf ans quand la 
révolution éclata. L'ardeur de la jeunesse et l'en- 
traînement d'un si grand spectacle le portèrent 
à y prendre une certaine part. Lorsque, plus tard, 
malgré la prudente hardiesse des réformes qu'il 
introduisit dans le régime économique de son 
pays, Huskisson eut soulevé contre lui des ini- 
mitiés violentes, on lui reprocha beaucoup en 
Angleterre d'avoir donné, en France, dans les 
passions et les folies du jacobinisme. C'était à 
tort ; jamais il ne fut affilié qu'au Club des Pa- 
triotes de 89, réunion d'hommes généralement 
éclairés et modérés. Ce fut là qu'il prononça, le 
29 août 1790, on discours contre la création 
d'assignats proposée par Mirabeau. Il produisit 
une vive sensation : on s'étonna de voir sortir 
de la bouche d'un si jeune homme des réflexions 
pleines de prévoyance sur les dangers du, pa- 
pier-monnaie. Quelques mots acerbes contre les 
ennemis de la révolution terminaient cette ha- 
rangue du futur ministre anglais. Mais si les 
premiers triomphes de la liberté française 
avaient excité son enthousiasme , les premiers 
crimes excitèrent son indignation; les radicaux 
comme les ultra-tories en ont eu la preuve 
écrite, ce qui ne les a pas empêchés d'accuser 
de palinodie un homme qui , dans Page mûr, 
s'est montré, dans son pays, libéral sans exa- 
gération et conservateur sans préjugés. Huskis- 
son fut indiqué à.lord Gower, depuis marquis de 
Stafford et alors ambassadeur en France, comme 
un jeune homme plein de mérite, qui , possé- 
dant le français comme sa langue maternelle 
et suivant de près le mouvement des partis, 
pouvait lui être utile : il devint son secrétaire 
particulier, et retourna dans son pays avec l'am- 
bassade , lorsque la guerre éclata en 1792. Re- 
commandé par lord Gower, qui resta son ami 
pour la vie, à M. Dundas, qui cherchait un chef 
capable pour diriger le bureau des émigrés, il 
fut choisi, et résolut dès lors de se consacrer ■ 
entièrement à la vie publique. Son père avait 
aliéné, pour pourvoir à l'établissement des huit 
enfants qu'il avait eus de ses deux mariages, 
toute la partie non substituée du domaine d'Ox- 
ley, William Huskisson fit dégager ce qui res- 
tait des biens de la substitution, et le vendit pour 
se procurer à Londres une existence en rapport 
avec ses vues pour l'avenir. 

Huskisson fut bientôt apprécié. Sa naissance 
et sa fortune n'avaient rien d'éclatant. Cependant 
il obtint cet avancement rapide que , malgré ou 
plutôt à cause de sa constitution aristocratique, 
l'Angleterre n'a jamais fait attendre, dans une cer- 
taine limite, aux hommes décidément supérieurs. 
Lié en quelque sorte à la fortune politique de 
Pitt, il en suivit à peu près les phases. Passé de 
Yalien-office au poste de sous-secrétaire d'État 
de la guerre en 1795, il le garda jusqu'en 1801, 



«f* 



HUSKISSON 



62# 



époque de la retraite de Pitt. Ainsi que Cajuûng, 
autre protégé de ce ministre, il voulut sortir avec 
lui du gouvernement. Lors du second ministère 
de Pitt, Huskisson devint l'un des deux secré- 
taires de la trésorerie. Après sa mort, eu jan- 
vier 1806, A sortit de nouveau de l'administra- 
lion, pour y rentrer avec te due de Portlaad , 
en avril 1*07. En 1609, Canning «'étant retiré 
par suite d'une mésinteiligenee avec lord Castle- 
reagh < voy. Lomdow>bbrt), Huskisson crut de- 
voir le suivre. En 1814, Canning ayant accepté 
l'ambassade de Lisbonne, Huskisson revint aux 
affaires , comme administrateur en chef des Fo- 
rets , et membre du conseil privé. En 1822, s'é- 
tant trouvé lui-même en opposition avec lord 
Londenderry, H avait offert sa démission de 
commissaire des Forêts, qui n'avait point été ac- 
ceptée. Enfin, en janvier 18*3, après la mort de 
tord Londonderry et son remplacement par Can- 
ning, Huskisson parvint au poste de président 
du bureau de commerce et 4e trésorier de la 
«narine ; mais oe ne fut qu'au commencement de 
l'automne de cette année qu'il eut entrée au ea- 
irinet. 

Depuis longtemps il siégeait au parlement', et 
sa réputation de financier et d'administrateur y 
était faite* Dès 1796, le bourg de Morpeth, sous 
le patronage de lord Carliste, lui en avait ouvert 
les portes. Depuis, il avait échoué à Douvres; 
jnait, élu plus tard A Lisiceard, ensuite à Har- 
*rfch, il représentait depuis 1812 les électeurs 
indépendants de Chiehester, dont le suffrage ne 
l'abandonna jamais, jusqu'au moment où Can- 
ning le força d'accepter à sa place le glorieux 
fardeau de la représentation de Liverpooi , qu'il 
portait encore lors de l'événement fatal qui mit 
.fin à sa vie. Ses débuts parlementaires avaient 
été sans solennité et sans éclat. Harareflement 
modeste, exempt de passions politiques, un peu 
sceptique peut-être quant au* objets de l'ardente 
polémique des partis (comme il arrive aux gens 
calmes et qui ont beaucoup réfléchi), Huskisson 
n'était point homme à parier pour le plaisir de 
parler. L'hésitation , dont sa conduite publique 
était plus d'une fois empreinte, et qu'on re- 
trouvait dans ses habitudes physiques, où elle 
lut la cause de sa fin déplorable, annonçait trop 
de défiance de loi- même pour qu'on dût s'attendre 
à lui voir aborder la carrière politique par un 
de ces discours à fleurs de rhétorique, comme 
ces jeunes gens qui espèrent continuer au parle* 
ment leurs succès d'université. I| fallait qu'il se 
sentit soutenu par l'éloquence des faits pour 
demander la parole. Lié avec Canning dès l'ori- 
gine de leur vie publique, on a supposé que, 
laissant de dessein prémédité à cet esprit brillant, 
hardi et redoutable, le domaine des passions, 
qu'il savait si bien exciter et braver tour à tour, 
Huskisson s'était voué aux études les plus pé- 
nibles, aux questions les plus ardues, pour ar- 
river à une supériorité incontestée par une route 
où personne n'aurait le courage de le suivre. 



Mail il parait clair, au contraire, qu'il obéissait 
à une vocation invincible en se livrant avec ar- 
deur à l'étude des détails de l'organisation finan- 
cière, industrielle et commerciale de son pays. 

L'un des premiers discours où les qualités de 
son esprit se manifestèrent d'une manière frap- 
pante fut celui par lequel il anéantit, en 1809, 
une motion d'un certain colonel Wardle, qui, 
dans une réunion populaire, avait avancé qu'il 
était très-laeilede réaliser sur les dépenses pu- 
bliques une économie de plus de 11 millions 
sterling, et qu'il se faisait fort de le prouver. 
Mis en demeure de s'expliquer à cet égard dans 
le parlement, dont il était membre, Wardle re- 
tarda tant qu'il put sa motion; mais enfin, 
poussé à bout, il la développa, La réponse 
d'Huskisson fut sévère et péremptoire. L'homme 
positif soumit au plus cruel examen les asser- 
tions hasardées du dédamateur populaire, et lui 
fit sentir, en défendant les idées d'ordre et de 
pouvoir, le poids de cette logique des faits qu'il 
eut occasion d'employer plus tard au profit d'in- 
novations libérales. 

Quelque temps après, en 1410, Huskisson, 
alors retiré de l'administration, publia une bro- 
chure sur la question de la circulation monétaire 
en Angleterre, qui obtint sept éditions coup sur 
coup, et qui fut réimprimée plus tard toutes 
les fois que la reprise des payements en espèces 
par la Banque d'Angleterre fut remise en discus- 
sion. Il y prouvait que le billet de banque n'é- 
tait point une denrée susceptible, comme les 
métaux précieux, de servir de mesure commune 
et permanente à tontes les autres denrées ; que 
ce billet n'était qu'une promesse de payer, sur 
sa présentation, une quantité déterminée d'or an 
titre légal ; que la reprise des payements en nu- 
méraire était nécessaire, urgente , possible , et 
•qu'il fanait sortir dans un «bref délai d'un état 
de choses qui pouvait devenir très-dangereux. 
Comme tout se tient dans ceê matières, le com- 
merce des lingots, l'état du change entre l'An- 
gleterre et les pays étrangers , et, par suite la 
question de la balance du commerce , se trou- 
vaient abordés dans cet écrit. Les solutions n'é- 
taient pas nouvelles : c'étaient les principes d'A- 
dam Smith, mais développés d'une manière nette 
et bien appliquée aux circonstances ; c'était enfin 
une intelligence parfaite de tous les détails d'un 
sujet aussi important qu'épineux, et une pré- 
voyance, que l'événement a justifié, des résul- 
tats futurs de l'état où se trouvait en 1810 la 
circulation en Angleterre, tant en métaux qu'en 
papier. Cependant , malgré l'autorité de cet écrit 
et les travaux d'Huskisson dans le comité des 
lingots (bullion comitUe) de la chambre des 
communes, la reprise des payements en espèces 
fut encore ajournée, et le rat même successive- 
ment jusqu'en 1818. La question s'étant repré- 
sentée pendant cette période dans des moments 
où Huskisson faisait partie de l'administration, 
il n'abjura pas ses anciennes opinions; mais il 



€31- 



HUSKISSON 



622 



paraissait, il faut l'avouer, beaucoup plu» préoc- 
cupé qu'il ne l'avait été jusque-là des difficulté* 
de la transition. 

Les rapports de la trésorerie avec la banque, 
les dépenses de l'armée, la législation des grains, 
occupèrent successivement Huskisson, tant aux 
époques où il était en place qu'à celles on il 
siégeait sur les bancs de l'opposition. Du reste, 
sauf la nuance, toujours facile à reconnaître, 
entre la parole de l'homme qui gouverne et celle 
de l'homme qui critique ou au moins qui con- 
trôle, ses opinions ne varièrent pas sensiblement 
sur les questions de politique générale, et moins 
encore sur les questions financières et commer- 
ciales. Au pouvoir, il paraissait plus préoccupé 
des besoins du service public; hors du pouvoir, 
de l'urgence des économies; mais sans aucune 
différence choquante de principes et de langage. 
Favorable d'une manière constante à l'émanci- 
pation catholique , à l'abolition de la traite des 
noirs; partageant, en un mot, avec son ami 
Ganning les opinions libérales de ce groupe 
d'hommes publies qui, en dehors des whigs, fit 
beaucoup pour l'avancement des principes dont 
ceux-ci se portaient les champions exclusifs, il 
parut peut-être moins décidé sur la question 
des grains que sur les autres questions écono- 
miques. Cependant, voulant à la fois faire de 
son pays l'entrepôt du commerce du monde et 
le foyer d'une production manufacturière de 
plus en plus parfaite, les intérêts de l'ouvrier 
devaient le préoccuper pins encore que ceux de 
la propriété foncière. Cette dernière ne s'y mé- 
prit pas et lui voua une défiance toujours crois- 
sante. 

Rendre aussi stable et aussi modéré que pos- 
sible le prix d'une denrée d'une nécessité ab- 
solue et dont les circonstances atmosphériques 
doivent, dit-on , faire varier la valeur locale de 
cent pour cent dans chaque période de cinq ans, 
ce n'est pas un problème d'une solution facile» 
De 168* à 1763, l'Angleterre avait vécu sous le 
régime de la prohibition absolue des grains 
étrangers ( sauf le cas d'extrême cherté ) et de 
primes à l'exportation des blés indigènes. Son 
agriculture était devenue, sous ce .régime, la 
plus florissante de l'Europe; mais une popula- 
tion plus dense, des manufactures plus nom- 
brenses vinrent modifier l'état des choses. Les 
exportations diminuèrent, les importations arri- 
vèrent même à les surpasser, grâce à'des me- 
sures momentanées. On en vint à introduire les 
grains étrangers sans droit d'entrée, lorsque las 
blés du pays s'élevaient à 48 shellings le quar- 
ter, et à suspendre l'exportation lorsqu'il* en 
valaient 44. Enfin, en 1823, le bill proposé par 
Canning, d'après les études de Hnskisson, établit 
le régime des droits gradués à l'importation, 
d'après une échelle ascendante et descendante 
en raison inverse du prix des c#éales indigènes. 

Mais il existait d'autres questions sur les- 
quelles Huskisson était destiné à exercer une 



influence plus décisive et plus heureuse. Depuis 
longtemps il avait reconnu que les relations 
commerciales de peuple à peuple avaient changé 
en Europe et tendaient à changer davantage en- 
core ; que les colonies n'étaient pins à l'égard des 
métropoles dans les mêmes conditions qu'autre- 
fois, et que telle loi qui avait fondé , il y a un 
siècle et demi, la prépondérance maritime et la 
richesse industrielle de l'Angleterre, ne servait 
désormais qu'à faire descendre œ pays de la 
position élevée qu'elle l'avait aidé à atteindre. 
Il y avait longtemps qu'il avait recommandé, à 
sa patrie, dans ses discours parlementaires , de 
ne pas exagérer le système prohibitif, de n'y pas 
persister aveuglément , de ne pas donner aux 
étrangers cet exemple qui deviendrait fatal à 
l'Angleterre. Une fois ministre , il s'occupa sans 
relâche de faire prévaloir dans la législation ces 
nouveaux et importants principes, dent voki une 
succincte analyse. 

L'ancien système colonial n'admettait de re- 
lations de commerce qu'entre la colonie et sa mé- 
tropole : c'était une règle absolue. L'émancipa- 
tion de l'Amérique anglaise et espagnole, la 
séparation du Brésil de la couronne de Portugal 
vinrent changer cet état de choses. Des ports, 
jusque-là fermés, s'ouvrirent à tons les peuples , 
et le pavillon anglais fut des premiers à s'y mon- 
trer. Huskisson voulut que les possessions qui 
restaient à l'Angleterre pussent commercer di- 
rectement avec les ports désormais ouverts des 
anciennes colonies anglaises, espagnoles ou por- 
tugaises. Elles devaient, disait-il, y gagner, et 
la mère patrie ne devait pas y perdre. Il fallait 
d'ailleurs rendre à la fois la production moins 
chère dans les colonies anglaises des Indes oc- 
cidentales et y améliorer le sort des noirs. La 
production annuelle du sucre y était alors de 
300,000 barriques. Les quatre cinquièmes seu- 
lement de cette récolte se consommaient dans 
la métropole. Comment placer sur les marchés 
d'Europe les 60,000 barriques d'excédant, si les 
colons anglais ne pouvaient lutter à armes égales 
avec le Brésil et Cuba? Or, les lies à sucre, arec 
leur système de culture , ne peuvent se passer 
pour leur alimentation des produits des tégions 
tempérées. Mais c'était à grands frais seulement 
que l'Angleterre pouvait approvisionner ses ports 
coloniaux de ces denrées de première aécessité. 
Force était donc de les ouvrir à des fournisseurs 
moins éloignés. Aussi, à plus d'une reprise, on 
avait permis momentanément l'importation , des 
États-Unis aux Antilles anglaisés, de ienrées 
alimentaires indispensables. En 1822, le com- 
merce direct entre ces deux régions par navires 
américains avait été autorisé d'une manière 
permanente. On avait étendu aux états d'Eu- 
rope cette faculté de trafiquer directement avec 
les colonies anglaises, mais par navires anglais 
seulement. Cependant, peu reconnaissants des 
avantages qu'on leur taisait et forts de leur heu- 
reuse position, les États-Unis exigeaient que leurs 



623 



HUSKISSON 



624 



navires fassent reçus dans les colonies anglaises 
sur le même pied qne ceux de la mère patrie, 
et , sur le refus de l'Angleterre , ils avaient frappé 
de droits excessifs les cargaisons apportées des 
colonies britanniques chez eux par navires an- 
glais. Huskisson était trop clairvoyant pour ne 
pas reconnaître que la prépondérance des États* 
Unis dans l'Amérique tropicale était une de ces 
nécessités que le temps amène et contre les- 
quelles le bon sens défend de se roidir; mais 
l'Angleterre ne croyait pouvoir, sans abdiquer sa 
dignité, acquiescer de prime abord à leurs pré- 
tentions altières. Elle leur interdit rentrée de 
ses Antilles, et en attendant que le différend rat 
aplani , Huskisson la fit ouvrir aux navires de 
toutes les nations; et, non content d'appeler les 
pavillons étrangers au secours des colonies, il 
accorda à ces dernières le droit de recevoir en 
entrepôt toutes les denrées d'Europe destinées 
soit à leur consommation, soit à être expédiées 
plus tard dans les ports du continent des deux 
Amériques. U assujettit seulement à un droit de 
15 à 20 pour 100 les marchandises importées 
dans les colonies pour y être consommées , afin 
de leur créer un revenu qui devait être affecté 
à des améliorations locales. L'ensemble de ces 
mesures devait balancer, au profit des colonies 
comme à celui de la métropole, l'influence exclu- 
sive que les États-Unis menaçaient de prendre 
dans tout le Nouveau Monde. Ces modifications 
au régime colonial en entraînaient de corres- 
pondantes dans le système de navigation de l'An- 
gleterre : Huskisson les accomplit. On sait que 
ce système avait pris naissance sous le protec? 
torat de Cromwell ; l'acte de la douzième année 
de Charles II l'avait porté à sa perfection. Hus- 
kisson reconnaissait, avec tous les hommes d'État 
de l'Angleterre que son pays lui avait dû en 
grande partie le prodigieux accroissement de sa 
puissance; mais, avant tous ceux de son épo- 
que, il sut comprendre qu'à cet égard, comme 
à tant d'autres , les temps étaient changés. Quand 
ce régime fut établi, l'Angleterre n'avait pour 
ainsi dire point d'industrie; elle exportait ses 
grains , ses laines > et en général toutes ses ma- 
tières premières. Elle n'avait que peu de navires, 
et cependant une marine formidable était la pre- 
mière condition du maintien de son indépen- 
dance; celle de la Hollande menaçait à la fois 
ses intérêts et sa sécurité. L'Europe continen- 
tale, bien en arrière de ces deux pays quant à 
la navigation , ne songeait pas à lutter contre 
eux« Encourager aux dépens des autres nations 
l'élan du peuple anglais vers les entreprises 
maritimes, c'était une politique nationale, sage, 
et profonde, dès que la chose était possible : le 
régime ultra-protecteur et même exclusif en fa- 
veur de la navigation anglaise avait donc été 
consacré à juste titre au dix-septième siècle ; il 
n'avait point éprouvé d'altération jusqu'à la paix 
de 1783. La pêche, le cabotage, le commerce 
avec l'Europe , celui des colonies , enfin le com- 



merce extra-européen, voilà les~cmq chefs sous 
lesquels on peut ranger la navigation d'un pays 
de notre partie du monde. Les lois anglaises 
avaient attribué aux bâtiments nationaux ex- 
clusivement les deux premiers et les deux der- 
niers. Quant au commerce avec l'Europe, la 
règle générale était que l'importation en Angle- 
terre pouvait avoir lieu de tous les ports euro- 
péens par tous les navires appartenant à des na- 
tions amies ; mais un droit différentiel atteignant 
les bâtiments étrangers protégeait contre leur 
concurrence ceux de l'Angleterre. De plus, la 
règle avait deux exceptions, l'une dirigée contre 
la Hollande, alors à bon droit redoutée des An- 
glais , et qui ne pouvait apporter chez eux dans 
ses navires que les produits de son propre terri- 
toire, l'autre ayant pour but de réserver aux bâ- 
timents anglais et à ceux du pays de production 
l'importation de diverses espèces de marchan- 
dises encombrantes (telles que les bois de cons- 
truction ) , qui, au nombre de vingt-huit , étaient 
connues dans le commerce sous le nom d'arti- 
cles énumérés* Encore ici on retrouvait le droit 
différentiel au profit des navires anglais. Ainsi 
protégée, la navigation britannique était devenue 
la plus florissante du globe; mais la rigueur du 
système exclusif finit par exaspérer les colonies 
de la Nouvelle-Angleterre, et contribua, autant 
que les taxes arbitraires, à leur faire secouer le 
joug. En effet, les ports anglais chicanaient ceux 
de l'Amérique du Nord à l'égard de leurs moin- 
dres expéditions; quant à l'Irlande, sa position 
était telle que, si un navire anglais venant des 
colonies échouait sur ses cotes, la cargaison, 
qui s'y serait bien vendue, ne pouvait y être 
introduite. Il fallait qu'un autre navire anglais 
fut expédié d'Angleterre pour emmener cette car- 
gaison , l'Irlande n'ayant pas le droit de commu- 
niquer directement avec les colonies, et ne 
pouvant recevoir leurs produits que par l'inter- 
médiaire des caboteurs anglais. 

Ces abus monstrueux avaient cessé déjà avant 
le ministère d'Huskisson , qui en effaça les der- 
nières traces. Mais ce n'était pas la seule at- 
teinte que les lois de navigation eussent reçue 
avant lui. Après la paix de 1783, il avait fallu 
compter avec l'Amérique indépendante. En ad- 
mettant ses navires dans les ports anglais , quoi- 
que avec des droits inégaux , on avait violé la 
règle relative au commerce extra-européen. Mais 
dès 1787, s'inspirant du système anglais et l'ap- 
pliquant à son profit , le congrès des États-Unis 
avait frappé de droits différentiels les navires 
étrangers admis dans leurs ports , ainsi que les 
cargaisons. Le coup avait été rude pour l'Angle- 
terre. Après avoir hésité entre un système de 
primes et un système de représailles , elle s'était 
résignée, en 1815, au régime de la réciprocité 
d'admission avec droits égaux : nouvelle brèche 
aux vieilles maUimes. Le Brésil , Saint-Domin- 
gue, etc., avaient obtenu ensuite un pareil trai- 
tement; mais la chose n'avait plus la même tm- 



625 



HUSKISSON 



626 



portance , ces pays étant sans marine. On en était 
là lorsque Huskisson devînt président du bureau 
du commerce. Des réformes avaient été prépa- 
rées par M. Wallace, son prédécesseur; mais ii 
lui était réservé de les effectuer, de les étendre, 
de les faire prévaloir dans les esprits aussi bien 
que dans les faits, par la manière dont il sut les 
exposer et les défendre. 

De 1822 à 1825, il fit voter parle parlement 
des mesures dont le résultat fut : 1° d'admettre , 
soit en entrepôt pour la réexportation, soil im- 
médiatement pour la consommation, dans tous 
les ports de la Grande-Bretagne , les provenances 
des États d'Europe comme des États extra-euro- 
péens, par tous navires des nations amies aussi 
bien que par navires anglais; 2° d'abolir tous 
droits différentiels de douane sur ces provenances, 
qu'elles fussent importées par navires anglais ou 
par navires étrangers; 3° de traiter pour les 
droits de navigation sur le pied d'une réciprocité 
parfaite avec tontes les nations; 4° de laisser 
amener en Angleterre la plupart des articles 
énumérés par tous navires des pays où ils avaient 
été , soit produits, soit introduits. La pèche, le 
cabotage, le commerce direct entre la métropole 
et les colonies et de colonie à colonie demeu- 
raient, comme par le passé, exclusivement ré- 
servés aux bâtiments anglais. Ces changements 
n'excitèrent pas d'abord de grandes plaintes. La 
fièvre de spéculation qui, en 1825, s'était emparée 
de l'Angleterre y avait tellement exagéré le mou- 
vement commercial et maritime que les proprié- 
taires de navires ne pouvaient suffire aux de* 
mandes : aussi , malgré l'emploi d'un grand nom- 
bre de bâtiments étrangers, le fret était hors de 
prix. L'année 1826 vint liquider les folles opé- 
rations de sa devancière : aux espérances gigan- 
tesques succédèrent les amers désappointements. 
Atteints, quoique faiblement, par les résultats 
funestes de la crise, les propriétaires de navires 
jetèrent alors les hauts cris. Ce fut pour se dé- 
fendre de leurs attaques passionnées que Hus- 
kisson prononça, sur le sujet en question, ses 
deux discours du 12 mai 1826 et du 6 mai 
1827. Il demeura victorieux dans cette lutte, et 
jamais triomphe ne fut mieux mérité. Le bon 
sens , la logique, la connaissance la plus exacte 
des faits , les sentiments élevés et généreux, cette 
prévoyance de l'avenir qui caractérise un véri- 
table homme d'État, tout se trouve dans ces dis- 
cours, excepté les vains ornements qu'à coup 
sot personne n'y regrette. 

Huskisson reconnaissait hautement que le pre- 
mier intérêt de sa patrie était celui de sa navi- 
gation ; le commerce et l'industrie n'étaient que 
le second, car les moyens de force et de conser- 
vation doivent passer avant les moyens de ri- 
chesse. Mais la navigation de la Grande-Bre- 
tagne était-elle en décadence? Non; car, au lieu , 
de 16,000 matelots (pied de paix de sa marine 
militaire en 1792), l'Angleterre en avait 30,000 
pour 1826, sans compter la réserve à demi-solde; 



sa marine marchande , à la même époque , occu- 
pait encore (pour le commerce extérieur seule- 
ment ) 1,800,000 tonneaux et 100,000 marins, 
bien que le rétablissement de la paix en 1815, 
l'abolition de la traite des noirs, la cessation de 
la piraterie des barbaresques par suite du bom- 
bardement d'Alger, la diminution des transports 
militaires de l'Angleterre, fussent autant de 
causes d'amoindrissement de la navigation an- 
glaise ou d'accroissement de celle des nations 
continentales. Le pavillon de l'Espagne, autre- 
fois si puissante, avait disparu de l'Océan; la 
France n'avait pas, en 1825, la moitié de son 
tonnage de 1792 ; celui de la Hollande était aussi 
fort diminué; l'Angleterre seule , en Europe, avait 
grandi sous ce rapport dans l'énorme proportion 
de 75 pour 100. Il est vrai qu'une puissance 
nouvelle (les États-Unis) avait surgi dans l'in- 
tervalle; mais c'était précisément cette rivalité 
récente qui devait engager l'Angleterre à sortir 
de ses anciens errements. Qu'avait voulu l'acte 
de Charles II? Deux choses : d'abord conserver 
au pays la plus grande part dans ses transports 
maritimes , et ensuite diviser le reste entre les 
autres nations , de telle sorte qu'aucune d'elles ne 
devfnt prépondérante. Le premier objet était at- 
teint sans doute; mais pour maintenir l'activité 
de la navigation anglaise, les lois protectrices et 
prohibitives ne suffisaient plus. Il fallait étendre 
l'emploi de cette navigation en favorisant le com- 
merce , accablé sous le monopole des possesseurs 
de navires. Attirer, par la concurrence et l'abais- 
sement du fret , dans les entrepôts de la Grande- 
Bretagne une grande partie des denrées destinées 
à la consommation du monde entier, c'était 
servir ces deux intérêts à la fois. Concéder au 
Danemark, à la Suède , à la Norvège, aux villes 
anséatiques, le traitement de réciprocité pour 
leurs navires , c'était donner à ces marines se- 
condaires ce qu'on avait été forcé depuis long- 
temps d'accorder à celle des États-Unis; c'était 
faire librement pour le faible ce qu'on avait été 
contraint de faire pour le fort. A défaut de l'hon- 
neur et de la justice, la politique seule.l'eût com- 
mandé ; car c'était l'unique moyen d'atténuer la 
prépondérance américaine et de poursuivre ainsi 
le second objet des anciennes lois de navigation. 
D'ailleurs l'abandon des droits différentiels était 
forcé , puisque l'Europe, jusque alors indifférente 
à ses intérêts sous ce rapport, entrait à son 
tour dans ce système. La Prusse avait donné 
l'exemple. Si l'on persistait dans une lutte de 
tarifs, qui y perdrait le plus en définitive? Évi- 
demment le peuple le plus navigateur et par 
cela même le plus vulnérable , puisque les droits 
différentiels n'étaient autre chose qu'un impôt 
levé sur son commerce et sa navigation par les 
gouvernements étrangers. Si, pour protéger sa 
propre navigation , à chaque puissance avait re- 
cours aux droits différentiels , on en viendrait à 
ce point que toute contrée exporterait ses pro- 
duits par ses navires et recevrait les produits 



627 



HUSKISSON 



628 



de l'étranger par les bâtiments de l'étranger. 
Tout le désavantage , sous le rapport de la navi- 
gation , ne serait-il pas pour l'Angleterre, qui 
n'exportait que des produits manufacturés et qui 
recevait une énorme quantité de matières pre- 
mières? Une pareille lutte ne tendait à rien 
moins qu'à doubler, au détriment des consom- 
mateurs de l'Europe entière , le prix du transport 
par mer des denrées , en anéantissant les retours. 

A ces raisonnements décisifs Huskisson joi- 
gnait des preuves numériques accablantes pour 
ses adversaires. Aux pétitionnaires des ports , 
qui affirmaient qu'en 1826 la navigation anglaise 
périssait étouffée par la funeste extension de la 
navigation étrangère, il démontrait que c'était 
cette dernière qui perdait du terrain, puisqu'en 
cette année désastreuse le tonnage britannique 
n'avait diminué que de 1 1 pour 100 relativement 
à 1825, année d'activité exagérée, tandis que le 
tonnage étranger avait baissé de 29 pour 1 00. A 
des plaintes sans fondement et sans mesure il 
opposait ainsi des résultats palpables, qui accu- 
saient ou l'ignorance ou la mauvaise foi de ses an- 
tagonistes. Mais ce n'était pas tout que d'obtenir de 
la navigation anglaise , si forte et si vivace, quel- 
ques concessions en faveur des fabriques et du 
commerce du pays, il fallait encore porter la main 
sur les tarifs de douanes et les abaisser dans le 
double intérêt du consommateur indigène et 
de la production destinée pour le dehors , sans 
dépasser la limite qu'imposaient d'une part le 
soin du revenu public , de l'autre la protection 
modérée à laquelle avait droit l'industrie natio- 
nale. 

Des diverses branches de cette industrie, les 
unes produisaient trop chèrement à raison des 
droits qui frappaient les matières premières à 
leur entrée , les autres ne donnaient que des pro- 
duits imparfaits, parce qu'elles n'avaient point à 
redouter la concurrence étrangère. Une contre- 
bande active , résultat obligé de ce régime , ti- 
rait de la poche des consommateurs anglais une 
prime qui, avec un système de droits modérés, 
eut été perçue par le trésor. Les fluctuations 
de ce commerce irrégulier faisaient varier à 
chaque instant le, prix des marchandises an- 
glaises de même nature, au grand dommage du 
commerce lieite. Huskisson fit disparaître les 
droits quasi-prohibitifs, qu'il regardait comme 
un brevet de médiocrité pour les manufactures 
de son pays ; 30 pour 100 de la valeur fut la li- 
mite la plus élevée de ceux qu'il établit à l'im- 
portation des objets fabriqués à l'étranger II 
fixa de 10 à 20 pour 100 les droits d'entrée sur 
les matières premières. Base nécessaire du prix 
de revient des produits manufacturés dans le 
pays, le taux d'achat de ces matières ne pouvait 
être trop diminué si l'on voulait soutenir sur les 
marchés du monde la concurrence de jour en jour 
plus redoutable des autres contrées de l'Europe 
et des États-Unis eux-mêmes, devenus manufac- 
turiers. Ici l'intérêt fiscal devait être mis de 



côté. L'agriculture et les mines delà Grande-Bre- 
tagne avaient seules le droit d'être protégées, lors- 
qu'il s'agissait de poser une limite à l'abaisse- 
ment des droits dîmportation. Huskisson leur 
fit des concessions suffisantes, trop grandes 
peut-être à certains égards, mais qui ne di- 
minuèrent pas leur irritation contre lui. Ce- 
pendant, les maîtres de forge se montrèrent 
conciliants : le droit qui frappait les fers de 
Suède fut abaissé de leur aveu. Quant au cuivre, 
le droit d'entrée ne put être réduit qu'à 27 
pour 100, ce qui maintenait encore la denrée fa- 
briquée à un prix trop haut pour lindustrie an- 
glaise. Malgré leur supériorité Incontestée, les 
étoffes de laine et de coton étaient protégées par 
des droits dont quelques-uns s'élevaient jusqu'à 
60 et 75 pour 100. Pour l'honneur de lindustrie 
nationale , Huskisson les effaça du tarif anglais , 
et les remplaça par d'autres, qui variaient de 10 
à 15. Les porcelaines de luxe, les gants français 
donnaient lieu à une contrebande incessante : la 
prohibition de ces articles fut levée; des droits 
de 15 à 30 pour 100 la remplacèrent , avec profit 
pour tout le monde , excepté pour les fraudeurs. 
Ce régime fut généralisé, avec les modifications 
nécessaires suivant les matières auxquelles on 
l'appliquait; mais à l'égard des laines brutes et 
des soieries , il donna lieu à l'opposition la plus 
véhémente. La fabrication des étoffes de soie, 
importée de France en Angleterre tors de la ré- 
vocation de l'édit de Nantes , avait pour sièges 
principaux Spitalfields , quartier de Londres ha- 
bité par les descendants des réfugiés français, 
Coventry, Maceiesfieidet Tttmton. Ses produits 
étaient solides, mais chers, en étoffes unies; 
leur infériorité à l'égard de ceux de Lyon était 
extrême en tissus de goût et de luxe , dits 
façonnés : aussi la contrebande se chargeaitelle 
d'en approvisionner l'Angleterre. La prohibition 
des soieries du continent n'avait pas garanti la 
fabrique anglaise des épreuves les plus cruelles; 
car en 1816 sa détresse était si grande que la 
peste seule, dit-on , aurait pu donner l'idée de h 
désolation et du silence qui régnait alors à Spi- 
talfields. Après avoir échoué, en 1833, dans la 
chambre des lords, un bill voté, an mois de 
mars 1824, sur la motion d'Huskisson donna 
entrée, à partir de juillet 1826, aux soieries 
étrangères, avec le droit maximum de 30 
p. 100. Au lieu d'employer ce délai à s'aguerrir 
contre une concurrence légitime et nécessaire, 
les fabricants el leurs représentants an parlement 
s'épuisèrent en réclamations violentes, en pro- 
phéties terribles, en intrigues de tous genres 
pour faire rapporter la mesure. M. Baring, dé 
puté de Taunton, qui avait prononcé d'éloquente 
discours en faveur de la liberté du commerce, 
abandonna Huskisson et se joignit aux alarmistes. 
Mais le ministre tint bon, et le bill fat maintenu. 
Les circonstances étaient des plus défavorables : 
la crise commerciale était dans toute son inten- 
sité; comme industrie de luxe, la fabrique des 



629 



HUSKISSON 



630 



soieries en souffrait beaucoup , et l'on attribuait 
. aux eflets anticipés de la mesure ministérielle 
une stagnation qui, du reste, était loin d'at- 
teindre celle de i 816, Cependant tes droits sur les 
soies grèges et organsinées furent abaissés ; les 
soieries du continent furent admises en entrepôt 
pour l'exportation, avec draw-beck payé à la 
sortie, et après plusieurs assauts successive- 
ment livrés à ces utiles réformas dans la chambre 
des communes , Hostisson put prouver, en re- 
poussant les derniers dans son discours du 14 fé- 
vrier 1 £26 et dans ceux de U session de 1890, que 
les fabriques de soieries 8'étaient relevées; que 
la demande d'ouvriers était croissante ; que l'im- 
portation des matières premières avait doublé; 
que Bristol avait pour la première fois exporté 
des soieries en Amérique; que Coventry appli- 
quait la vapeur à ses métiers à rubans; que les 
foulards de l'Inde , dont, avant les changements, 
Hambourg inondait frauduleusement l'Angle- 
terre, et qu'on avait déclares de tout temps ini- 
mitables par l'industrie anglaise, étaient repro- 
duits avec tant de succès qu'on en expédiait 
jusque dans l'Inde; que Lyon et Zurich même, 
si favorisée par le bas prix de ta main-d'œuvre, 
s'inquiétaient de ces progrès; qu'il en était ainsi 
dans d'antres branches d'industrie, dans la 
ganterie» par exemple, oà, l'importation des 
peaux augmentant rapidement, celle des gants 
du continent avait diminué de 61,000 douzaines 
à 36,000, du premier an second semestre de 
1828. Enfin le revenu public s'améliorait et la 
douane grossissait ses recettes des pertes qu'é- 
prouvait la contrebande. 

Tels furent les principaux changements que 
Huekiseon flt adopter. Il en méditait d'autres sur 
les laines, par exemple, que les vicissitudes po- 
étiques l'empêchèrent de mener à fin. Accusé 
d'abord, dans sa patrie, d'aller trop loin et trop 
vite; traité de théoricien inflexible, sourd aux 
cris de détresse que ses cruelles expériences arra- 
chaient à des populations aux abois, il y a trouvé, 
après le succes,idans les pnrs théoriciens , dans 
les économistes radicaux, des appréciateurs non 
moins passionnés , non moins injustes , qui l'ont 
représenté comme un déserteur des principes , 
toujours prêt, soit par corruption, soit par igno- 
rance, a pactiser avec le privilège et le mono- 
pole. L'avenir, plus équitable, reconnaîtra en 
lui un partisan éclairé de la liberté du commerce, 
en tant qu'elle est compatible , pour chaque na- 
tion, avec le soin de son indépendance, de sa 
propre conservation. Huskisson subordonna tou- 
jours à la raison d'État l'intérêt purement maté- 
riel ; mais il ne voulut point immoler cet intérêt, 
dans sa généralité, anx habitudes ou aux conve- 
nances de certaines classes de producteurs. 
Voyant l'Europe tendre à l'isolement commer- 
cial et chaque puissance se barricader dans ses 
lignes de douanes , avec la prétention déraison- 
nable de vendre aux autres sans jamais rien leur 
acheter, il pensa qu'il appartenait à l'Angleterre, 



dont la culture et l'industrie étaient sans rivales, 
d'entrer la première dans une voie plus large 
et plus conciliante. Il ne tendit, quoi qu'on en 
ait pu dire, aucun piège aux étrangers. Son sys- ( 
terne t qui n'eût point trouvé de contradicteurs 
sérieux dans son pays si le continent avait ré- 
pondu à ses avances , était encore le meilleur, le 
continent persistant dans ses vues exclusives. 

Toutes les mesures accessoires qui pouvaient 
favoriser le commerce attirèrent l'attention de 
Huskisson. Quinze cents lois de douanes, dont 
quelques-unes remontaient jusqu'à Edouard I er , 
formaient un code inintelligible et barbare, qui , 
sous son ministère, fut corrigé et résumé en 
onze lois. 11 prévit les catastrophes que prépa- 
raient les spéculations désordonnées de 1825, et 
engageait inutilement les banques de province à 
ne pas seconder cette tendance fatale par des 
avances imprudentes. Tant de travaux altérèrent 
encore une 3anté déjà frêle; le repos lui devint 
nécessaire. En 1825, il revit Paris , et descendit 
chez son ami lord Granville (voy. ce nom), à 
l'ambassasade d'Angleterre, dans ce même 
hôtel où, trente-trois ans auparavant, il avait eu, 
dit-on, le bonheur de sauver la vie au marquis de 
Champcenetz, gouverneur des Tuileries, dans 
la soirée du 10 août 1792. En 1827, toujours 
souffrant, il visita de nouveau le continent. Il 
avait laissé Ganning malade : un courrier, qui le 
joignit dans le Tyrol, lui apporta la nouvelle de 
sa mort. Aussitôt il regagna Paris , et ce fut là 
qu'il consentit à entrer dans le ministère de lord 
Goderich ( voy. Ripon ), comme chargé du dépar- 
tement des colonies. Cette faible administration 
s'étant dissoute à la fin de décembre 1827, le 
duc de Wellington, sir R. Peel et leurs amis 
formèrent un cabinet de coalition avec lord Pal- 
merston, M. Grant et Huskisson, qu'on regar- 
dait comme indispensable. Ce ministère n'avait 
rien d'absolument incompatible avec les opinions 
professées par Huskisson. Cependant telle est en 
Angleterre la fidélité aux amitiés politiques, et 
telles sont aussi, là comme ailleurs, les ran- 
cunes profondes des partis , que Huskisson fut 
amèrement blâmé de s'être joint à quelques 
hommes que la famille de son ami Canning 
regardait comme responsables de sa fin préma 
turée, à eause de la violence de l'opposition 
qu'ils lui avaient faite. A l'ouverture de la session, 
Huskisson se justifia ; cette apologie fut accueil 
lie très-froidement. La meilleure explication 
de sa conduite était précisément celle qu'il ne 
pouvait pas donner, c'est-à-dire le besoin que 
des hommes engagés dans de grandes réformes 
administratives et peu ardents sur les questions 
de parti éprouvent de conserver le pouvoir tant 
qu'ils le peuvent, afin de poursuivre le but au- 
quel leur existence est vouée. Le triomphe des 
catholiques , auquel Huskisson avait contribué, 
vint donner de l'éclat au ministère. Mais bientôt 
des divisions intérieures surgirent sur la législa- 
tion des grains , sur l'abolition des bourgs pourris. 



631 



HUSKISSON — HUSSEIN 



Huskisson n'avait jamais voulu de la réforme 
parlementaire : il y voyait le prélude d'une 
révolution. Mais le seul moyen d'éviter cette 
grande et hasardeuse mesure, c'était de faire 
disparaître les abus les plus criants. Il ne suf- 
fisait pas, selon lui, d'ôter le droit d'élire à 
quelques douzaines d'individus qui trafiquaient 
notoirement de leurs votes : il fallait transporter 
ce droit à de grandes villes que l'industrie mo- 
derne avait élevées et qui n'avaient point de re- 
présentants. Déjà, pendant la session de 1828, il 
avait voté , dans la question du bourg d'East- 
Retfort, contre la majorité du ministère; dans 
celle de 1829, la question s'étant représentée j le 
même vote se reproduisit. Rentré chez lui à 
l'issue de la séance où des paroles piquantes 
avaient été échangées avec quelques-uns de ses 
collègues, Huskisson écrivit au duc de Wel- 
lington un billet d'où celui-ci put inférer qu'il 
donnait sa démission. Dans la journée, le duc 
porta au roi ce billet et la nouvelle de la retraite 
de Huskisson. « S'il s'en va, dit Georges IV, il 
n'y a plus de ministère; et, en effet, l'adminis- 
tration fut dissoute par la sortie de la portion 
libérale du cabinet. Une longue correspondance 
s'établit alors entre le duc et Huskisson, qui pré- 
tendait avoir posé une question et non pas no- 
tice un parti pris. Ces commentaires contradic- 
toires de sa démarche se reproduisirent dans les 
chambres, sans rien éclaircir. L'administration 
se recompléta dans le sens tory, et Huskisson 
sortit du pouvoir pour n'y plus rentrer. 

La session de 1830 fut la dernière où sa voix 
dut s'élever dans les conseils de son pays. Af- 
fecté profondément des attaques furibondes dont 
il avait été l'objet, ses derniers discours sem- 
blèrent empreints d'une mélancolie prophétique. 
Une excursion en Italie n'avait pas rétabli sa 
santé délabrée; mais on avait remarqué que le 
pape avait insisté pour voir et remercier en lui 
un défenseur constant des catholiques irlandais. 
Au commencement de septembre 1830, Huskis- 
son, triste et languissant, se trouvait dans son 
petit domaine d'Ëartham. Les whigs avaient 
agité la question de savoir s'ils devaient faire 
une démarche collective près de lui pour l'enga- 
ger à se mettre à la tête de l'opposition qu'ils 
préparaient pour l'hiver suivant contre le minis- 
tère Wellington ; ils avaient ajourné la décision.. 
Ce fut alors qu'une députation de Liverpool , où 
il avait été réélu sans que sa santé lui eût per- 
mis d'y paraître , vint l'engager à assister à l'i- 
nauguration du chemin de fer de cette ville à 
Manchester. Il s'y rendit, accompagné de sa 
femme , et fut reçu avec le plus vif empresse- 
ment dans cette grande cité, qui ne vivait que 
par la navigation, et qui justifiait par son ac- 
cueil les mesures que l'ex-ministre avait fait 
adopter, depuis sept ans , à l'égard de cette base 
première delà puissance britannique. Le 15 sep- 
tembre , il monta dans les wagons du premier 
convoi qui devait parcourir le chemin de fer. Un 



632 

grand nombre de personnages distingués faisaient 
le voyage, entre autres le duc de Wellington, 
toujours premier ministre, et qui était Tenu re- 
cevoir à Liverpool le droit de cité, honneur que 
cette ville lui avait décerné. A moitié chemin, 
le convoi fit halte : on descendit pour quelques 
minutes. Huskisson cherchait à joindre le doc 
pour lui tendre la main et lui prouver ainsi que 
leur divorce politique l'avait laissé sans rancune 
à son égard. Tout à coup on signale l'approche 
d'une locomotive : chacun regagne précipitam- 
ment sa place; Huskisson reste le dernier, hésite 
une seconde, saisit la portière du wagon, qui 
lui échappe, tombe à la renverse sur les rails, 
et la locomotive lui passe sur le corps , en hn 
brisant les os des cuisses. Un cri de douleur 
retentit. Transporté au presbytère d'Ecoles, 
Huskisson y rendit le dernier soupir le soir 
même, après neuf heures des plus atroces 
souffrances, supportées avec une résignation 
admirable. Il réclama les secours religîeax de 
son hôte, ajouta de sa main quelques mois à 
son testament, et déclara qu'il avait vécu et 
mourait exempt de haine pour qui que ee rot 
La présence d'une épouse dévouée témoin d'un 
aussi cruel spectacle, de quelques excellents 
amis, tels que lord Granville, dut adoucir pour 
lui ces moments terribles. La consternation de 
ceux qui l'entouraient était sans bornes. Une 
véritable stupeur régna dans Liverpool et Mans- 
chester quand la nouvelle de ce fatal événement 
s'y fut répandue. 

Liverpool insista pour conserver les restes de 
son illustre représentant, et, neuf jours pins tard, 
ces débris mutilés furent inhumés dans le cime- 
tière neuf de la ville. Huskisson était d'une taille 
moyenne; il n'avait aucune des qualités phy- 
siques qui attirent l'attention sur on orateur. 
Ses manières étaient simples , son humeur était 
égale. Sa vie privée fut irréprochable; marié, 
en 1799, avec miss Milbanks, fille d'un amiral 
de ce nom , cette union demeura stérile. Grâce 
aux soins de sa veuve, les principaux discours 
de Huskisson et son pamphlet sur la circulation 
ont été recueillis et publiés sous ce titre : 
Speaches oftheright hon. W. Huskisson f 
with a Biographical Memoir; Londres, 1831, 

3VOl. ïn-8°. [0. LAREVELUBRE-LBPEÀUXydanS 

V Encyclopédie des Gens du Monde. ] 

Biographical Memoir, dans les Speaches aftkmnaM 
hon. W. Huskisson. — English Cyclopsedia {Biogra- 
. phy)- — BlanquI aîné, Notice sur la vie et les travaux 
de M. Huskisson, la h la séance annuelle des cinq Aca- 
démies, le s mai 1840. — Joa. Garnier, dans le Dict. d'Eco- 
nomie politique. 

Hussein, schah de Perse de la dynastie des 
Sons ou Sefewis, né vers 1186 de l'hégire (167 s 
deJ.-C), régna de 1106 à 1135 (1694-1 722 ) t 
et fut tué en 1 142 ( 1729). Il n'était que le second 
fils du schah Soliman; mais les eunuques, à 
qui son père avait laissé le choix de l'héritier 
du trône, préférèrent l'indolent Hussein,, à son 
frère Abbas-Mirza, qui paraissait en état de gou- 



verner par lui-même. Le nouveau monarque 
avait des vertus que sa faiblesse et son incapacité 
rendirent inutiles. H abolit la peine de mort, qu'il 
remplaça perdes peines pécuniaires. Pieux jusqu'à 
la bigoterie, il confia les principales charges aux 
mollahs, et fit de chaque établissement religieux 
on asile inviolable, même pour les meurtriers. 
Dès le lendemain de son avènement, il interdit l'u- 
sage du vin , et fit répandre toutes les liqueurs 
enivrantes et les essences qu'il trouva dans le 
palais. Mais il ne tarda pas à violer lui-même 
son décret, et s'adonna au vin avec tant d'excès 
qu'il tomba dans l'abrutissement. Il abandonna 
l'exercice de l'autorité à des eunuques, qui, 
parleurs exactions, mécontentèrent la plupart 
des gouverneurs de provinces. L'un d'eux, 
Georges XII, roîde Géorgie, qui s'était révolté, 
fat fait prisonnier et conduit à ïspahan, où il 
obtint son pardon par l'entremise de sa sœur, 
qui était femme du schah. Ayant embrassé 
l'islamisme sous le nom de Gourghin-Khan, 
il fut nommé gouverneur du Candahar. Les 
Afghans Khildjis, qui occupaient cette province, 
se montraient disposés à secouer le joug. Il les 
traita avec la plus grande rigueur, et fit saisir 
le calender ( magistrat ) de Candahar, Mir- 
Weis, qu'il envoya à ïspahan (1707). Cet 
homme habile profita de son séjour à la cour 
pour gagner la faveur du schah , corrompre les 
ministres et préparer la délivrance de sa tribu* 



HUSSEIN 631 

le gouverneur do Séistan se révolta, et l'imam de 
Mascate occupa les lies du golfe Persique. Hus- 
sein s'allia contre ce dernier, avec les Portu- 
gais de Goa, dont la flotte fut défaite par les 
Arabes. Il entretint des relations amicales 
avec le sultan, dont l'ambassadeur, Dourri- 
Efendi, se rendit à ïspahan en 1720 , et avec le 
roi de France, qnî lui envoya Fabre (1706), 
puis Michel, et qui accrédita deux consuls en 
Perse, Gardanne, à ïspahan ( 1717) et Padery, 
à Schiraz (1720). Un envoyé persan, Mehemet- 
Mirza-Beg, conclut à Paris (1715) un traité 
onéreux pour sa nation. Les armes d'Hussein 
n'avaient pas pins de succès à l'intérieur que 
sa politique à l'extérieur. Un corps de 30,000 
hommes, qu'il opposa à Asad- Allah, chef des 
Afdhalis, fut mis en.déroute , en 1132(1729). 
D'un autre côté, Mir-Mahmoud conquit le Ker- 
man, et marcha sur ïspahan. Son armée, grossie 
d'une troupe de Guèbres, opprimés par les Per- 
sans, s'élevait à 20,000 hommes lorsqu'elle 
arriva à Goulnabad, à neuf lieues d'Ispahan. 
Elle y vainquit un corps de 50,000 Persans. 
Malgré cette victoire, le chef afghan hésitait à 
pousser plus loin. Mais, apprenant que la capitale 
était dans la consternation, il alla assiéger 
Djoulfa. Ce faubourg d'Ispahan était occupé par 
une florissante colonie d'Arméniens. Ses habi- 
tants, ne recevant aucun secours des musulmans, 
dorent capituler après s'être bravement dé- 



Enll20(1708),8*étantrendnàLaMecquecomme j fendus. Au lieu de prendre des mesures éner- 

nAIfflrin il /tlttinf cM>i<Àtamonf Aaa. rirwifonrs <mn_ mm-mo Ilnce<(in «a nnnfnnto /i'avm-ilaov» Iaq rvi»rvo. 



pèlerin, il obtint secrètement des docteurs sun- 
nites des décisions judiciaires qui l'autorisaient 
à faire la guerre aux schiites, c'est-à-dire 
aox Persans. U exploita habilement l'arrivée 
d'un ambassadeur russe pour se faire rendre 
la liberté. Comme cet envoyé se disait issu des 
anciens rois d'Arménie, et se faisait suivre d'un 
grand nombre d'Arméniens, Mir-Weis le repré- 
senta comme un émissaire chargé de faire sou- 
lever les chrétiens et de comploter avec Georges 
pour rendre l'indépendance à l'Arménie et à la 
Géorgie. Renvoyé en Candahar, afin de con- 
trebalancer la puissance du redoutable gouver- 
neur de ce pays, il le fit assassiner dans un fes- 
tin, 1121 (1709), anéantit la garnison persane 
de Candahar, et vainquit successivement le gou- 
verneur du Khorassan , le nouveau wali de 
Géorgie, Khosrou-Khan , 1125 (1713), enfin 
Roostem-Khan, autre général géorgien. Il mou- 
rut en 1127 (1715). Son frère et successeur Mir- 
Abdallah offrit de reconnaître la suzeraineté du 
schah, à condition de ne point payer tribut 
Ce projet le rendit odieux aux Afghans; il rut 
poignardé en 1130 ( 1717) par son neveu Mir- 
Mahmoud, qui rompit les négociations avec le 
schah. L'exemple des Afghans fut imité de plu- 
sieurs autres nations voisines ou tributaires. 
Les Courdes firentdes incursions jusqu'aux envi- 
rons d'Ispahan ;les Afghans Afdhalis se rendirent 
maîtres de Hérat et les Ousbeks, du Khorassan ; 
tes Lesghis ravagèrent le Schirwanetla Géorgie ; 



giques, Hussein se contenta d'expulser les pros- 
tituées de sa capitale, de faire des processions 
et d'implorer le secours du ciel. Ayant fait 
des propositions de paix, qui furent repous- 
sées , il chargea son fils Tahmasp , successeur 
désigné, d'aller chercher des renforts dans les 
provinces. Cependant Mahmoud ravagea les en- 
virons d'Ispahan et cerna cette ville afin de la 
prendre par la famine. Réduits à la plus grande 
détresse, ses habitants demandèrent en vain à 
être conduits contre l'ennemi ; ils périssaient 
chaque jour par milliers. Enfin, au bout de 
deux mois , le 22 octobre 1722, Hussein capitula 
et obtint la vie sauve en cédant son trône au 
vainqueur* Il fut relégué dans un petit palais , 
où il fut tué sept ans plus tard, lorsque les vic- 
toires de Tahmasp et Thahmasp Cooli-Khan mi- 
rent en péril le trône d'Aschraf , successeur de 
Mahmoud. £. Beadvois. 

Krastnskt , Mém.; Lemberg, 178». in-»». — Domtj, Hé- 
lat., dans Maças. Encyclopéd.,*n. im, t. V.-Mobammed 
AU-Hazin, Ltfe t trad. par Belfour ; Londres» 1880, in-8°. — 
Corn. Le Bruyn, Voy. — Hanway, Hist. de Perse. — 
La Mamye-Clairac, Hist. des Révol. de Perse depuis 
te commencer*, de ce siècle; Paris. 1750, L 1, II. 

HUSSÉih*-pacha , surnommé Koutchouk 
( le petit), amiral turc, né en Géorgie, vers 1750, 
mort à Constantinople, le 7 décembre 1803. 
Vendu comme esclave dans son enfance, il fut 
donné, comme page, au prince Sélim ( III 1 ), qui 
était alors enfermé dans le sérail. A l'ayénement 
de ce prince, dont il avait gagné la confiance, et 



6S* 

qui lai fit épouser use de ses cousine» , il fut 
nommé eapitan-pacha ( grand-amiral ) v en 
1789, et compléta les réformes commencées par 
son prédécesseur Ghazi Hassan-Pacha. Des in- 
génieurs français et suédois furent mis à la tête 
de l'École de Marine fondée par le baron de 
Xott, et chargés de la direction des arsenaux et 
des chantiers. La Turquie eut bientôt une flotte 
de vingt vaisseaux de ligne, Hussein fit exploiter 
les mines et les foret» de l'Asie Mineure ; il en- 
courage* le commerce des Grecs, et réprima les 
excès des levantes ou marins ottomans. Cinq 
cents artilleurs turcs, disciplinés par ses ordres, 
se signalèrent au siège de Saint-Jean-d'Acre, 11 
fut moins heureux comme général que comme 
administrateur - Chargé de comprimer la rébel- 
lion de Paswan-Oghlou, il ne put s'emparer de 
Viddin (1798). Il prit, en 1800,1e commande- 
ment de la flotte qui croisa sur les côtes d'E- 
gypte, et signa, en 1801, le traité relatif à l'éva- 
cuation de l'Egypte par les troupes françaises. 
Comme il aimait la France, il disposa Selim III 
à renouer des relations amicales avec cette puis- 
sance. Apre» sa mort, ses projets de réforme furent 
abandonnés. Hussein était passionné pour les 
arts, éclairé^iuroain, généreux, et il affranchit un 
grand nombre de ses esclaves. Son intégrité et 
sa sévérité à l'égard des concussionnaires l'a- 
vaient rendu cher au peuple. Beauvois. 



Castettm, Lettres sur t* Gré». — Jachère» dé 
Denis, Hist. de l'Empire Ottoman, t. 1,397; H, tôt. — 
Moniteur universel* an xit, p. 501. 

Husséin-PACHA, dernier dey [ou plutôt 
. Doï, oui signifie missionnaire] d'Alger, né 
à Srayrae vers 1773, mort à Alexandrie en 
1838. Quoique issu de parents obscurs, il reçut 
une assez bonne éducation, apprit à écrire le 
turc et l'arabe, et fut plos tard considéré comme 
l'un des hommes les ptas instruits de ses États* 
Après avoir exercé le commerce, il entra dans 
la milice algérienne, et devint ministre de 
l'intérieur sous Ali-Pacha. Le 1 er mais 1818, 
l'armée l'état pour succéder à ee dey, qui, selon 
les uns, était mort de la peste , ou ojni , selon 
d'autres, avait été assassiné pat Hussein. Le 
nouveau dey établit sa résidence dan» la fer* 
teresse appelée Casbah, oè il resta continuel- 
lement enfermé et enHvré de ses troupes. Il 
gouverna avec justice, se montra tolérant en 
matière de religion et adoucit l'esclavage des 
chrétiens. Il n'entreprit jamais d'expédition pour 
piller ses sujets ou les tribu» de l'Algérie, et ne 
donna que peu d'encouragements aux corsaires. 
Aussi les différend» qu'il eut avec l'Espagne, la 
Hollande et la France, eurent peur sujet, non 
des acte» de piraterie, mais des affûta» nétu- 
niaires. Dès les premières années de son règne, 
il porta de 17,009 à 200,000 francs la somme 
annuelle que kt France devait lui paye* pour les 
Concession» d'Afrique (établissements su* M 
côte de Barbarie) et peur la pèche du cesaR 
dans te» eaux de m Régence* II réclama en 



HUSSEIN 636 

outre, à la même nation, quatorze millions, 
comme créancier de deux Juifs algériens, Bacri 
et Busnach, qui, sous la république, avaient 
fourni des grains aux armées françaises d'E- 
gypte et d'Italie. Par une transaction, du 28 oc- 
tobre 1819 , cette somme fut réduite de moitié, 
et il reçut en 1820 quatre millions et demi. Mais 
le rente fut déposé à. la caisse des dépôts et con- 
signations, à la requête de quelques Français, 
créanciers des deux Israélites. Impatienté de la 
lenteur des procédures , le dey fit éprouver di- 
verses avanies aux commerçants français, et 
écrivit à Charles X pour réclamer de lui le reste 
des sept roiiUona. Après avoir vainement at- 
tendu une r épo ns e , il demanda des explications 
au consul De val, qui, dit-on, répliqua : « Mon 
mettre ne> répond pas à un chien comme toi. » Ces 
•Broies outrageantes rai firent oublier la qualité 
de son interlocuteur ; il le frappa au visage d'an 
coup de ehasee-mouche, s'adressant, comme il 
rassura plus tard, non au fonctionnaire publie, 
mais à l'homme priv^. Le gouvernement fran- 
çais embrassa la cause de son agent, et fit blo- 
quer les ports de la régence (1827 )- La flottille 
employée à cet effet ne suffit pas pour anéantir le 
commerce algérien ni à réduire le dey A lake des 
excuses. Le blocus durait depuisdéux ans et avait 
déjà coûté vingt millions , lorsque Charles X 
chargea le comte de La Bretonnière d'entrer en 
négociations avec Hussein (juillet 1829). Les 
propositions de son eavoyé ayant été repoussées, 
il résolut de tenter un grand coup, dans l'espoir 
nue le succès de ses armes à l'extérieur ratier- 
insrait son trône menacé à l'intérieur. Le vice- 
amiral Duperré lut mis A la tète d'une flotte 
de onze vaisseaux de ligne, vingt frégates et 
soixante-dix autres embarcations, qui por- 
taient 27,000 marins, et 41,000 soldats, com- 
mandés par fe comte de Bourraont, ministre de 
la guerre. Ces forces arrivèrent devant Alger le 
13 juni 1830, et effectuèrent leur descente, dès le 
lendemain, sur la prescpi'îlade Sidi-Ferrucb, à 
cino; lieues à l'auutt d'Alger. Pendant que la 
flotte canonnait la ville , l'armée de terra rem- 
portait divers avantages sur les Arabes, fort su- 
périeurs eu membre, et allait assiéger le Fort 
P Empereur ( Sultanieh Calassi), qui protégeait 
hr Casbah. Les Français étaient sur le point de 
donner l'assaut, lorsque les assiégés firent 
sauter le fort (4 juillet 1830). Le dey fit alors 
des ouvertures aux commandants français, et, 
te 5 juHlet, H livrai* capital stipulai pour kn 
la faculté de quitter U régence avec sa famille, 
et , pour se» troupes et ses sujets, la liberté de 
culte et le respect des propriétés. On lui laissa 
dix mittionade son trésor particulier. Aprèsavoir 
visité Nantes, Lrvouvne, Paris, Fex-dey alla s'e- 
tabtir a Smyvne, puteà Alexandrie, ou il passa 
lé teste de sa ri#* E. B. 



Moniteur universel, \tiÛ'-î8S6. - R«Mta?, i 
dès- Contemporain», Snp^ém. — A. de Vartatette, Hiek 
*•£»•» Jteifcmrrt, S* Mit., t. vjj» cb. vu - De la» 



HUSSEIN — HUTCHESON 

Bitt. de la C«Hr 



637 

tailler, OM*.*? Alger. - A, 
quête d'Alger; Pari», i857Jn-8°. 

«Hcssoar (Eugène- Alexandre), général et 
sénateur français, né à Reims (Marne), le 
19 mars 1786. II entra en 1803 à l'École Mili- 
taire de Fontainebleau , et fc en sortit Tannée sui- 
vante avec le brevet de sous-lieutenant dans le 
25 e léger, quî faisait alors partie du camp de 
Montrerai. Il fit les campagnes de 1805 à 1808 
en Autriche , en Prusse , en Pologne et en Es- 
pagne, et se signala à la prise de Michael-Berg, 
devant tflm ; il était déjà adjudant-major lors- 
qu'il fut fait prisonnier à la bataille de Baylen, le 

19 juillet 1808. Transporté d'abord dans l'tle de 
Cabrera, il fut ensuite jeté sur les pontons cTAn- 
gleterre, où il subit une rude captivité de six ans. 
Rentré en France après les événements de 1814, 
il entra comme capitaine adjudant-major dans 
le 1 er régiment d'infanterie légère, fit la cam- 
pagne de 1815, et se signala au combat des 
Quatre-Bras, où il fut blessé. La seconde res- 
tauration le conserva dans les rangs de Tannée : 
il fut nommé chef de bataillon le 19 mai 1819, et 
fut désigné pour faire partie de la légion du 
Loiret, fi quitta le service en 1822, et se distin- 
gua dans les rangs du peuple durant les journées 
de juillet 1830. Il rentra avec son grade dans le 
57 e de ligne, devint successivement lieutenant- 
colonel du 33 e de ligne le 25 avril 1832, colonel du 
42 e le 1 er janvier 1838 et maréchal de camp le 

20 avril 1845; il commanda le département de 
l'Aube, jusqu'en 1848, époque à laquelle le gou- 
vernement provisoire le mit à la retraite. Il fat 
élu à l'Assemblée législative et élevé le 26 janvier 
1 852 àtadignité de sénateur. M. Husson est grand- 
officier de la Légion d'Honneur depuis 1854. Il a 
publié : plusieurs petits Manuels à l'usage des 
Sous-Officiers et Soldats (1819-1822); — Les 
Maximes de guerre de Napoléon l* annotées 
( 185Ô*), ouvrage traduit dans plusieurs langues; 

— Pensées et Maximes de tempereur Napo- 
léon (1852). SlCàBD, 

Biographie des Menâtes Au Sénat ( f*»}. - L'Album 
de la Semaine (Util). 

;njussan (Jean-Boneré^Aarietide), sculp- 
tear français, né à Patte le % juillet 1683. Élève 
de David (d'Angara), il remporte en 1*27 le se- 
cond grand nm, et ci 1830 te prenier prix; 
le sujet da concours était Thésée vainqueur du 
Affréteur*. A reupofitieB d* i*37 il reçut te 
grande alésante d*r non» ua gratifie de Marbre 
aussi remaiifejbto par Vei^ttett que par te 
pensée : VAnge earééen offrant à Dieu un 
pécheur repentant; ev bes* groupe est placé 
au musse du Lmemtewrg. Pawâlesouvrages de 
cet habile arttat** nées sigaatemi» î engrenée 
iVAdam et Eve, lttt, a» «aisée 4* Saint-Omar ; , 

— Dante tt VirçiU, bas*reftef, au Musée de 
Boulogne-ser-Mer ; — «ne Tête de Moine, 1836; 

— tes statues de BaiUp et de Voltaire pour te 
faeadederadtei deviHe de Paris; •— L'Été et 
L'Automne, figures colossales pour Tune des fon- 
taine» de te place de te Goac*urdt, lââft* — te 



688 



buste en marbre du roi Louis-Philippe pour 
l'Académie de France à Rome , 1840; — te sta- 
tue de Saint Bernard pour l'église de te Made- 
leine, 1844 ; — tes bustes de Gouvum Saint-Cfr, 
de Boissg d'Anglas et du Chancelier Dambrau 
pour te chambre des pairs; — Saint Louis r 
Marguerite de Provence t Philippe le Mardi 
et te Maréchal Suehet peur te Musée de Ver- 
gailtet; ~* Marguerite de Provence et Bus- 
tache Lesueur, statues eu Marbre pour te jardin 
du Luxembourg ; — te statue de Dugueselim , 
et oae Victoire poar tes funérailles de Napo- 
léon 1 er , tftto, saisi que les Quatre Cariatides 
do bateau catafalque et les quatre Trophées du 
catafalque des Invalides ; — Deux Anges en 
adoration poar Saint-Viucent-de-Paal, figures 
en bois, 1844; ~~ B aidée, délicieuse statue de 
marbre, 1650, placée au Musée de Grenoble ; — 
CknHs pour Sainte-Ctotikte, 1851$ — pour te 
Louvre trois statues en pierre . Eustaehe Le- 
sueur , Jacques Sarraein et te Général Desaix. 
H exécute en ce moment, 1856, un marbre co- 
lossal du- célèbre physicien Coulomb pour te 
Conservatoire des Arts et Métiers de Paris. 

Doom, inédits. 

■gtchksoh (Francis), célèbre philosophe 
écossais, né dans te nord de l'Irlande, le 8 août 
1694, mort en Ecosse, à Gtescow, en 1747. lient 
poar père John Hutchesoa, ministre d'une con- 
grégation dissidente (dissenters) ; et lui-même, 
après des études commencées en Irlande, mais 
achevées à l'université de Gtescow , allait être 
installé en qualité de pasteur de cette congréga- 
tion, lorsque, cédant à de pressantes sollicita- 
tions, H se détermina à aller ouvrir une école à 
Dublin. En 1729, c'est-à-dire à l'âge de trente- 
âmq ans, il fut appelé à Glascow, pour y oc- 
cuper te chaire de ptriteeophie morale, devenue 
vacante par te mort de Gerscom Carmichael, le 
savant éditeur de Puffendorf. Il y-rempfit pen- 
dant dis-huit an» tes fonctions de professeur, 
qui, après sa mort, arrivée en 1747, furent con- 
fiées h f bossas. Craigie. il compta parmi ses 
aaate Tateheveqoe Kiag , Vévêqae Synge,, le pri- 
mat Bootter, et terd Metesworth. Il laissa un fils, 
nommé Francis r ami publia celles des enivre* 
de son aère ont étaient restées manuscrite*. On a 
de HntcaesMi : Inquir* into the Original of 
our ideasofBeauto mnd Yiriue; Uwires, 1725, 
in*?, dedtt à lord Carteret, tord-lieutenant d'Ir- 
lande, traÀ en français sur la 4 e édit. anglaise 
par EHoas; Amsterdam, 174*, 2 vol. in-12; — 
Bssag on the Nature and Conduct of the Pas- 
siens and Affections, with ilèusùratkms on 
the moral sensé; Lond., 1726, in-8°; - Phi- 
leeophUt .meralis InstituHo eempendiaria; 
Gtescow, 1742, in-12; — Metaphgsiex Synop- 
sis ; Glaetour, 4742 f te-a° 5 — A Short Intro- 
duction to moral Philosophy 9 in threebooks; 
containing the éléments of ethics and the 
law of nature, with the principes efeco- 



639 



HUTCHESON 



640 



nomics and politics; translatée from tke 
original latin; Glascow, 1747, in-12 ; et 1764, 
2 vol. in-8° ; — Réfections upon Laughter, and 
remarks on thé fable of the bées; Glascow, 
1750, in-12 ; — A System of moral Philosophy 
in three books, towhich is prefixedan account 
of the life, wtïiings* and charaeter of the au- 
thor, bff W. Leechnusn, principal of the col- 
lège of Glascow; Glascow, 1755, 2 Toi., in-4°. 
Cet ouvrage fut publié par le fils de l'auteur, 
d'après les manuscrits laissés par son père. Le 
1 er livre traite de la constitution de la nature hu- 
maine , le second de la félicité humaine, le troi- 
sième de la société civile. Cet ouvrage est pré- 
cédé d'une courte dédicace au révérend lord 
évéque d'Elphin; trad. en français par Eidous, 
1770 ; — Letters concerning the true Founda- 
tion of Yirtue, or moral goodness; Glascow, 
1772, in-8° : recueillies et publiées vingt-cinq 
ans après la mort de l'auteur. 1 

Dans ces différents écrits, nous rencontrons 
une psychologie, une morale, une théodicée. La 
psychologie de Hutcheson est éparse dans les di- 
vers ouvrages qu'il a composés. Quelle solution 
y apporte-t-il aux deux questions capitales de 
cette science, celle des facultés de l'âme, et 
celle de l'origine des idées? La même que Locke, 
à chacune de ces deux questions. À l'exemple du 
philosophe anglais, Hutcheson (1) admet deux 
facultés générales, l'entendement et la volonté. 
Il reconnaît comme fonctions de l'entendement 
la perception extérieure ou sensation , la cons- 
cience, le jugement, le raisonnement ; et, comme 
fonctions de la volonté, le désir, l'aversion, le 
plaisir, la peine. Toutefois, cette liste des fa- 
cultés de l'âme n'est pas arrêtée chez Hutcheson 
d'une manière tellement absolue, qu'il ne puisse 
s'y trouver place encore pour quelques autres 
fonctions. De ce genre sont le sens interne et le 
sens moral , dont il n'a point parlé dans sa théo- 
rie officielle des facultés , mais qu'il mentionne 
pourtant dans ses Recherches sur V Origine 
de nos Idées du Beau et du Bien , comme des 
pouvoirs réels de l'âme. « Je désigne, dit-il (2) , 
par le nom de sens interne la faculté que nous 
avons d'apercevoir la beauté qui résulte de la 
régularité, de l'ordre, de l'harmonie , et par le 
nom de sens moral cette détermination à ap- 
prouver les affections, les actions ou les carac- 
tères des êtres raisonnables qu'on nomme ver- 
tueux. » On a beaucoup reproché à Hutcheson 
ces dénominations de sens interne et de sens 
moral. Assurément, plusieurs passages de ses 
écrits où ces termes sont employés pourraient 
avoir plus de clarté et de précision ; mais quand 
on envisage l'ensemble, il devient évident 
qu'Hutcheson ne les confond pas avec les sens 
proprement dits, et qu'il les regarde comme de 
véritables fonctions de l'entendement, au même 

(i) Système de Philosophie morale. 1. I er , cb. !**• I 

•cet. v. \ 

(l) Recherthes, etc., prêt, de la 4« édition. 1 



sens que, chez les Latins;, les expressions de 
sensus pulchri, sensus recti f sensus ho- 
nesti. Disciple de Locke dans la question des fa- 
cultés de l'âme, Hutcheson suit également les 
traces du philosophe anglais dans la question de 
l'origine des idées. Au début de son grand ou- 
vrage, intitulé Système de Philosophie morale, 
il distingue les idées en deux classes , lès unes 
venant de la sensation et les autres de la cons- 
cience. Sa doctrine est', en ce point , tout aussi 
affirmative que celle de Locke. « Ces deux pou- 
voirs, dit-il (1), la sensation et la conscience, 
introduisent dans l'esprit tous les matériaux de 
connaissances. Toutes nos idées ou notions pre- 
mières dérivent de l'une ou l'autre de ces deox 
sources. » 

La . morale de Hutcheson est fondée tout en- 
tière sur le principe de la bienveillance, qu'il parait 
avoir emprunté a Richard Cumberland (voy. ce 
nom). Toute action, que nous concevons comme 
moralement bonne ou mauvaise, lui parait tou- 
jours produite par quelque affection envers les 
êtres doués de sensibilité. La tempérance ne lui 
parait être un bien moral que parce qu'elle nous 
rend plus propres au service du genre humain; 
le courage proprement dit serait, à ses yeux., une 
vertu d'insensé, s'il ne servait pas à défendre 
l'innocent ; enfin la prudence ne lui paraîtrait pas 
mériter le nom de vertu, si elle ne favorisait 
que notre intérêt; et, quant à la justice, si elle 
ne tendait au bonheur de l'homme, elle se- 
rait une qualité beaucoup plus convenable à 
la balance, son attribut ordinaire, qu'à on être 
raisonnable. La morale individuelle et la morale 
religieuse n'occupent l'une et l'autre qu'assez 
peu de place dans la philosophie de Hutcheson. 
Mais il n'en est pas de même de la morale so- 
ciale. Nous la trouvons surtout traitée avec beau- 
coup de développement au livre II et au livre m 
de son Système de Philosophie morale. On 
y rencontre une série de chapitres sur les no- 
tions générales qui concernent les droits et les 
lois, sur la nécessité de la vie sociale, sur les 
contrats qui lient entre eux les membres de la 
société civile, sur les motifs qui président à l'é- 
tablissement des gouvernements. Ici, le traité 
de Hutcheson prend un caractère plus politique 
encore que social, et nous voyons ce philosophe 
aborder la question des droits des gouvernants, 
celle des différentes formes de gouvernement, 
celle des avantages et des inconvénients attachés 
à ces différentes formes. Après avoir partagé les 
différents modes de gouvernement en deox ca- 
tégories, d'une part les modes mixtes, qui peu- 
vent être assez variés, et d'autre part les modes 
simples, qui sont la monarchie, l'aristocratie, la 
démocratie, Hutcheson estime qu'une forme 
mixte, qui résulterait de la combinaison de ces 
trois modes simples, neutraliserait les inconvé- 
nients de chacun d'eux et maintiendrait leurs 

fi) SfStèmê 4e Philosophie morale, h \ } e.i, teet 4. 



641 



HUTCHESON — HUTCHINSON 



642 



avantages. On reconnaît dans cette conclusion 
l'optimisme habituel du citoyen anglais, invinci- 
blement convaincu de l'excellence de la consti- 
tution de son pays. 

La théodicée de Hutcheson se rencontre plus 
particulièrement dans son Système de Philo- 
sophie morale. Le chapitre rx du livre I er de 
cet ouvrage traite, avec de grands détails, des 
justes notions que nous devons nous faire de la 
nature de Dieu. Les preuves que le philosophe 
écossais apporte de l'existence de Dieu sont ti- 
rées : l°du plan général. de Trouvera; 2° de la 
structure du corps des animaux; 3° de la pro- 
pagation des animaux ; 4° des rapports du Soleil 
et de l'atmosphère avec la Terre que nous ha- 
bitons et avec le corps des animaux. Ces preu- 
ves appartiennent exclusivement à l'ordre phy- 
sique. Il est regrettable que sur ce point, comme 
sur plusieurs autres déjà signalés, notre philo- 
sophe se soit montré le trop fidèle imitateur de 
Locke, et qu'il ait écarté les arguments méta- 
physiques, ou, comme les appelle Fénelon, les 
preuves tirées des idées intellectuelles. La ques- 
tion de l'existence de Dieu est, dans Hutcheson, 
suivie de celle de ses attributs. Celui sur lequel 
il insiste plus spécialement est la bonté , qu'il 
prouve par l'excellence du plan de l'univers. 
Rencontrant sur sa route l'objection tirée de 
l'existence du mal, il y répond, comme l'ont fait 
saint Thomas et Leibnitz, par cette simple et 
si judicieuse réflexion, que l'être tout-puissant 
a permis l'existence de quelque mal pour faciliter 
l'existence d'un plus grand bien. Cette question 
de l'existence du mal, en tant que liée à ceHe 
de la véritable fin de l'homme, sert de transition 
an philosophe écossais pour aborder le problème 
de l'immortalité de l'âme et de la vie future. Il 
s'attache à démontrer : 1° que l'attente d'une 
vie à venir est universelle ; 2° que la preuve du 
contraire est impossible; 3* que l'âme se dis- 
tingue du corps; 4° que la nécessité d'un état 
futur se déduit directement de l'harmonie con- 
çue par la raison entre la vertu et le bonheur et 
de l'insuffisance de cet accord ici-bas. 

Les qualités de Hutcheson comme écrivain 
sont la clarté, l'élégance, l'abondance. La psy- 
chologie , la morale, mais surtout la morale so- 
ciale et politique tiennent la place la plus con- 
sidérable dans ses écrits. A ce titre, Reid, Fer- 
guson et Beattie sont ceux des philosophes, ses 
compatriotes et ses successeurs, avec lesquels il 
offre le plus d'analogie. Les traits qui caracté- 
risent spécialement ces philosophes se trouvent, 
par une heureuse alliance, réunis en Hutcheson, 
et l'on ne saurait méconnaître en lui non-seule- 
ment le fondateur, mais encore le représentant 
le plus complet de l'école écossaise. C. Mallet. 

Notice sur la Fie, les Écrits et le Caractère de V Auteur 
(Hutcheson), annexée, en forme d'introduction, au Sys- 
tème de Philosophie morale, par le révérend William 
Lechman, professeur de théologie en l'université de 
Gtascow (Glascow et Londres, 1755). — Notices bibliogra- 
phiques sur l'École écossaise depuis Hutcheson jusqu'à 

NOUV. BIOGB. GENSR. — T. XXV. 



nos jours, par Joaffroy, daas sa traducUon des Œuvres 
complètes de Reid, t. 1« p. CCXXV de rédlUon de 1835. 
— Cours de F Histoire de la Philosophie morale au dix- 
huitième siècle, par V. Cousin, école écossaise, publiés 
par MM. Danton et Vacherot, leçons II et III; Paris, Il W. - 
DicL des Sciences philosophiques, art. Hutcheson, 

hutchins (John, archéologue anglais, né 
en 1698, à Bradfort-Peverell ( comté de Dorset), 
mort à Wareham en 1773. Il fut élevé au col- 
lège Baliol à Oxford, entra dans les ordres, oc- 
cupa successivement différentes fonctions ecclé- 
siastiques, et finit par obtenir le rectorat de l'é- 
glise de la Sainte-Trinité à Wareham, où il mou- 
rut. 11 commença en 1737 à rassembler des maté- 
riaux pour une histoire de son comté natal. Elle 
parut après sa mort sous ce titre : The History 
and Antiquities of the County of Dorset; 
Londres , 1774,3 vol. in-fol.; et Londres, 1796- 
1803, 4 vol., avec des planches et des articles 
d'histoire naturelle fournis par le docteur Pul- 
teney et d'autres savants. Z. 

Chalmers, General Bioçraphical Dictionary. 

hutchins (Thomas) , géographe des États- 
Unis d'Amérique, né dans le comté de Monmouth 
(New- Jersey), vers 1730, mort en 1789. H entra 
dans l'armée anglaise, et se distingua contre les 
Indiens dans la Floride occidentale. Il obtint un 
régiment, mais il y renonça par attachement 
aux intérêts de son pays. Se trouvant à Lon- 
dres en 1779, et soupçonné d'entretenir une 
correspondance avec Franklin, alors représentant 
des États-Unis en France , il fut arrêté. Remis 
en liberté peu après, il alla rejoindre l'armée {du 
général Greene à Charlestown, et fut nommé 
géographe général des États-Unis. On a de lui : 
An historical Sketch of the Expédition of 
Bouquet, against the Indians ofOhio in 1764» 
publié en 1765 ; — A topographical Descrip- 
tion of Virginia , Pensylvania, Maryland 
andCarolina, withmaps; Londres, 1778; — 
An historical Account and^topographical 
Description of J/misiana, West-Florida and 
Philadelphia ; 1 784. Z. 

Rose;, New Gen. Biogr. Diction. — Cbaudon et De- 
landine, Nouveau Diction. Hist., Soppl. (18U). 

HUTCHI3SON (John), hébraïsant et natura- 
liste anglais, auteur d'une interprétation mystique 
et cabalistique de la Bible, né en 1674, à Spenni- 
thorne (comté de York), mort le 28 août 1737. 
Après avoir reçu à la maison paternelle une 
excellente éducation, il devint à l'âge de dix- 
neuf ans intendant de M. Batburst. Il passa en- 
suite au service du duc de Somerset, qui lui donna 
de nombreuses marques de confiance. Devenu 
grand-écuyer de Georges 1, le duc de Somerset 
le nomma son riding purveyor (intendant des 
éeuries). Cette sinécure, qui rapportait deux 
cents livres sterl. par an, permit àHutchinson de 
cultiver ses deux sciences favorites, la minéra- 
logie et l'histoire naturelle. Il rassembla une ri- 
che collection de fossiles, et il la remit avec ses 
propres observations auD r Woodwarth pour que 
celui-ci. les arrangeât et les publiât. Woodwarth 
ne s'acquitta pas de cette mission et la transmit 

ai 



643 



HUTCHINSON 



644 



à l'université de Cambridge, à laquelle il légua la 
collection. En 1754, Hutchinson publia la pre- 
mière partie d'un curieux ouvrage intitulé Jfo- 
seis Principia, dans lequel il tourna en ridicule 
Y Histoire naturelle de la IferredeWoodwarth, 
et tenta de réfuter la doctrine de la gravitation 
établie dans les Principta de Newton. Dans k 
geconde partie de cet ouvrage, publiée en 1727, 
il continua ses attaques contre la philosophie 
newtontehne, et soutint que l'existence du plein 
était fondée sur l'autorité de l'Écriture. Depttis 
cette époque jusqu'à sa mort, il fit paraître par 
an un ou deux volumes écrits d'an style décousu 
et incorrect, mais attestant, malgré beaucoup 
d'erreurs, une connaissance profonde et étendue 
des livres hébreux. 

Suivant Hutchinson, 1* Ancien testament con- 
tient un système complet d'histoire naturelle, de 
théodicée et de religion. L'hébreu, ayant été le 
moyen de communication entre Dieu et l'homme, 
est une langue parfaite; comme langue parfaite, 
elle s'étend à tous les objets de connaissance, et 
ses termes signifient véritablement les objets 
oiilis désignent, en expriment la réalité, et n'en 
sont pas des signes représentatifs arbitraires. 
Hutchinson, partant de ce principe, attacha une 
extrême importance attxétymologieshébrafejues, 
et soutint que l'Écriture ne devait pas être com- 
prise et interprétée selon le sens littéral et ap- 
parent, mais selon le sens plus profond que ré- 
vélait la valeur des radicaux de la langue. H est 
clair qu'avec un pareil système on peut trouver 
dans la Bible tout ce que Ton veut, de là physi- 
que, de la métaphysique aussi bien que de l'his- 
toire et de la théologie. Voici, d*après les éditeurs 
des œuvres de Hutchinson, un abrégé de la phi- 
losophie qu'il crut y découvrir ? « Les Écritures 
n'attribuent nulle part le mouvement au Soleil, 
ni la stabilité à la Terre ; elles représentent le 
système créé comme un plein (plénum) sans au- 
cun vide (vacuum); elles rejettent l'assistance 
de la gravitation, de l'attraction et de toute autre 
qualité occulte pour accomplir les opérations de 
la nature, qui sont exécutées par le mécanisme 
des cieux dans leur triple état de feu, lumière et 
esprit ou air, agents matériels mis en œuvre dès 
le commencement des choses. Les cieux, ainsi 
formés par la sagesse toute-puissante, sont l'em- 
blème, le substitut visible de Jehovah Aleim, l'É- 
ternel-Trois, la co-égale et co-adorable Trinité 
dans l'Unité. L'unité de substance des cieux ex- 
prime l'unité d'essence de la Divinité, et la dis- 
tinction de leurs trois états, sa triple personnalité, 
sans confondre les personnes ou diviser la sub- 
stance. C'est parée qu'ils sont des emblèmes que 
les cieux sont appelés en hébreu shemin, noms, 
représentâtes, substituts, exprimant par leurs 
noms qu'ils sont des emblèmes, et par leurs états 
et offices de quelles choses ils sont les emblèmes. » 
Voici un exemple de ce genre d'interprétation éty- 
mologique : le mot berith, que les traducteurs 
rendent par centrai, signifie suivant Hutchinson 



celui ou ce qui purifie, le purificateur ou k 
purification. De ces étymologies il tire la con- 
clusion que tous les rites et cérémonies des Juifs 
étaient des figures de Jésus-Chist, de ce qu'il de- 
vait être, faire et souffrir, que les premiers Juifs 
savaient que ces rites étaient en effet les figures 
de ses actions et de ses souffrances , et qu'en les 
accomplissant ainsi, ils étaient chrétiens par la foi 
et la pratique. Une complète édition des œuvres 
de Hutchinson parut sous ce titre ; Thephiloso- 
phicaland theological Works ofthe latetruly 
leqrned John Hutchinson ; 1748, 12 vol. in-8°. 
Les vues philologiques et exégétiques de Hut- 
chinson trouvèrent de nombreux partisans qui, 
sans constituer un corps de doctrines, prirent le 
nom de hutchinsoniens. Les plus éminents 
sont l'évêque Horner et son biographe William 
Jones, Romaine, Julius Bâtes, le lexicographe 
Parkhurst, le D r Hodges,le D r Wetherell, maître 
du collège de l'université à Oxford, Holioway, au- 
teur de Letter and Spirit, et Lee, auteur de 
Sophron, or nature'* characteristks oj truth. 
Il existe encore un petit nombre de sectateurs 
de la doctrine Hutchinsonienne, Z. 

Ffoy, Btbliotheea Moçriphic*. vol- III. - Chaîner*, 
General Biographioal Dtctiontfy. — Ençlùh Cycb- 
psedia ( Biography ). 

hutchinson ( Thomas ) , homme d'État 
anglo-américain, né à Boston, en 1711 , mort le 
3 juin 1780, Il fut élevé au collège de Harvard, 
et y prit ses grades en 1727. Il suivit d'abord la 
'carrière commerciale, ne réussit pas, et se tourna 
du coté de la jurisprudence. La ville de Boston 
l'envoya comme son agent à Londres en 1738, 
et Hutchinson s'acquitta de cette mission avec 
un succès qui le fit appeler à des places plus im- 
portantes* Membre pendant dix ans de la chambre 
coloniale du Massachusetts > il en fut le prési- 
dent pendant trois ans» Il fit partie du conseil de 
la colonie de 1749 a 1766, et fut lieutenant-gou- 
verneur de 1758 a 1771. Dans l'intervalle il fut 
nommé grand-juge (càief-justice), en 1.760. Hut- 
chinson remplit ces fonctions politiques et ju- 
diciaires à une époque difficile où le méconten- 
tement toujours croissant de la colonie contre b 
métropole menaçait d'aboutir à une rupture. 
Soupçonné d'être favorable aux prétentions de 
l'Angleterre et particulièrement au fameux acte 
du timbre, il vit une populace furieuse assaillir 
deux fois sa demeure. La seconde fois, le 26 août 
1765, les portes de sa maison furent*forcées, son 
argenterie et sa garde-robe pillées, ses meubles 
brisés. Son impopularité le servit auprès du 
ministère anglais, qui le nomma en 1770 gouver- 
neur de Massachusetts. U n'hésita pas à con- 
seiller à la métropole des mesures de violence. 
Les lettres confidentielles où il exprimait cet avis 
tombèrent entie les mains de Franklin, alors 
agent de la colonie à Londres ; celui-ci les trans- 
mit à ses compatriotes, qui demandèrent au roi 
d'Angleterre la destitution do gouverneur. La 
conduite de Hutchinson Tut approuvée par les 



645 



HUTCHINSON — HUTH 



646 



ministres, 'et H resta en place jusqu'à l'arrivée 
du général Gage, le 13 mai 1774. U partit quel- 
ques jours après pour l'Angleterre, ne reçut 
qu'une modique pension, et alla mourir à Bromp- 
ton, oublié du gouvernement, auquel il avait sa- 
crifié les intérêts de sa patrie. On a de Hutchtn- 
son : History of the Colony of Massachusetts 
£ay,fromitsfirst seulement in 1628 to the 
year 1750; 1760-1767, 2 vol. in-8°; — A Col- 
lection of original Papers relative to the His* 
tory of the Colony of Massachusets ; 1769» 
in-8°. Z. 

Cyclopadia of American Literature, t. I, p. 190. — 
S parka. American Biography, t. H (Life of James Otis). 
— Rose, New General Bioçraphical Diction. 

hutchinson ( John-Hely ), jurisconsulte 
anglais , né en Irlande, en 1715, mort en 1794. 
11 s'éleva jusqu'au poste de secrétaire d'État, et 
cumula beaucoup de sinécures lucratives. Son 
avidité fit dire un jour au premier ministre, lord 
North : « Si vous donniez à Hutchinson l'An- 
gleterre et l'Irlande, il vous demanderait encore 
l'île de Man pour en faire un jardin. » Z. 

Rom, New General Biograpkical Dictionarp. 

hutchinson {Richard- Hely), comte de 
Donocgbmore, homme d'État anglais, fils aîné 
du précédent, né à Dublin, le 29 janvier 1756, 
mort à Londres , le 25 août 1825. 11 étudia le 
droit à Oxford , et prit le grade de docteur 
au collège de La Trinité, à Dublin, dont son père 
était prévôt. Élu en 1779 représentant de la ville 
de Cork, il défendit, mais avec réserve, les ca- 
tholiques', et fut nommé en 178 i directeur des 
douanes royales. En 1794 il leva un régiment, le 
94 e , que commanda son frère John Hutchinson. 
Lui-même eut, comme lieutenant-colonel du 1 1 2*, 
à réprimer l'insurrection do comté de Cork, et 
fl s'acquitta de cette tâche avec beaucoup de mo- 
dération. Nommé en 1 800 comte deDonoughmore 
et appelé à siéger dans le parlement anglais 
comme un des trente pairs qui représentaient 
l'Irlande, il continua d'être l'avocat des catho- 
liques, et fit de l'opposition aux différents mi- 
nistères qui se succédèrent de 1807 à 1820. A 
cette dernière époque il se rapprocha du gouver- 
nement à l'occasion du procès de la reine Caro- 
line et fut créé pair du royaume uni en 1821. 
Quoique devenu ministériel, il ne cessa pas d'être 
partisan de l'émancipation des catholiques irlan- 
dais, mais il mourut avant d'avoir vu le triomphe 
de cette cause. Z. 

EnglUh Peerage. - AHnualObUuaty.- CtmverêaHam 
IjtaHkon. 

hutchinson (John-Bely) t comte de Do- 
moughmorb, général anglais, frère du précédent 1 , 
né le 15 mai 1757, mort en 1832. Après avoir 
tait ses études au collège d'Eton, il entra au ser- 
vice en 1774 eomme cornette , devint capitaine 
en 1776, et fut élu, l'année suivante, membre du 
parlement pour Cork. Il alla ensuite perfectionner 
son éducation militaire sur le continent, et il > 
se trouvait en France lors de l'invasion des Prus- 
siens en 1792. De retour en Irlande, il s'unit à 



son frère pour lever un régiment, et en fat nommé 
colonel en 1794. Il fit la campagne de Flandre 
contre les Français comme aide de camp de 
sir Ralph Abercrombie, fut ensuite employé en 
Irlande contre les insurgés , et commandait en 
second à la bataille de Castlebar. En 1796 il ob- 
tint le grade de major général, et en 1799 il se 
distingua dans l'expédition du Helder. Général en 
second dans la campagne d'Egypte, puis général 
en chef après la mort de sir Ralph Abercrombie, 
il força les Français à s'enfermer dans Alexandrie, 
puis à capituler au mois de juillet 1801. Ce succès 
lui valut une pairie avec le titre de baron Hut- 
chinson d? Alexandrie et de Knocklofty. Moins 
heureux ou moins habile comme diplomate, U 
ne remplit pas au gré des ministres la mission 
qui lui fut confiée en 1806 auprès du roi de 
Prusse et de l'empereur de Russie. La demi-dis- 
grâce qui suivit son ambassade le jeta dans 
l'opposition. Ses attaques contre le ministère ne 
l'empêchèrent pas d'être élevé au grade de gé- 
néral en 1813. En 1620, envoyé à la reine Ca- 
roline pour lui proposer un arrangement, il eut 
une entrevue avec elle à Saint-Omer, et ne put 
la décider à renoncer à ses droits. Devenu en 
1825 comte de Donoughmore, il laissa en mou*, 
rant son titre à son neveu Jotm-Hély Hutchin- 
son, connu pour avoir pris part à l'évasion de 
Lavalette. Z. 

Rose, New Gênerai Bioçraphical Dictionarf. -Rabbe, 
Biographie universelle des Contemporains. — Dupln, 
Procès des trois Anglais Rob.-Thom, fTUson, John-Efy 
Hutchinson et Mich. Bruce; Paris, 1816, l»-8*. 

huth (Georges-Léonard), naturaliste et 
médecin allemand, né à. Nuremberg, le 29 mars 
1 705, mort en cette même ville, le 24 février 1 76 1 . 
Il étudia à Leyde sous le célèbre Boerhaavc, et 
collabora, depuis 1733, au Commercium littera- 
rium ad rei medicx et scientiœ naturalls in- 
crementum institutum. Il fut membre de l'Aca- 
démie des Curieux de la Nature, sous le nom 
A r ffygienus lî> et exerça la médecine à Nurera- 
berg. On a de lui : Angenehmer und nuetzli- 
cher Zertverlreibmît Betrachtung curieuser 
Vorstellungen aller hand kriechender, flie- 
gender und schwimmender Thiere, nach der 
Natur gezeichnet gemalet und inKupferges- 
tochen ( Passe-temps agréable et utile , accom- 
pagné d'observations sur diverses espèces d'ani- 
maux aquatiques,de reptiles et d'oiseaux, dessinés 
et gravés d'après nature)'; ibid., 1748-1752,2 vol. 
in-folio ; — Sammlung verschiedener auslaen- 
discher und seltener Voegel, mit illuminirten 
Abbildungen von Seligmann (Collection de diffé- 
rents oiseaux exotiques et rares, avec des plan- 
ches enluminées de Seligmann); Nuremberg, 1749, 
in-folio; — ffortus nitidissimus omnem per 
annum superbiens floribus , s. amœnissimo- 
rum florum imagines quas magnis sumptibus 
collegit Chr. -Jacob. Trew, ipso vero annuente 
in eas incisas vivisque cotoribus pictas; Nu- 
remberg, 1750. Les descriptions latines et al- 
lemandes jusqu'à la lettre E appartiennent h 

21. 



647 



HUTH — HUTTEN 



€48 



Huth; celles qui suivent et toute la seconde 
partie ont été écrites par C.-J. Murr ;*— Pis- 
cium, serpentum, insectorum, aliorumque 
nonnullorum animalium, necnon plantarum 
quarundam Imagines quas Mare. Catesby 
descripsit ; additis vero imaginibus piscium 
tam nostratium quant aliarum reçionum 
auxerunt vivisque coloribus pictas ediderunt 
Eisenberger et Lichtensteger ; Nuremberg, 
1750, in-folio.; — un grand nombre de traduc- 
tions de l'anglais et du français. R. L. 

Binching, Handbuch. — Will, Nuremberg. Gelehrt. 
Lex. — Ersch et Grnber, EncyMlopsedie. 

* hutin (Charles) y peintre français, né à Paris, 
le 4 juillet 1715, et mort à Dresde, le 29 juillet 
1776. Élève de François Lemoine, il remporta 
en 1736 le grand prix de peinture, et, pendant 
son séjour à Rome, se livra à la sculpture, sous 
la direction de Slodtz. Dix ans plus tard, il se 
rendit à Dresde, où il s'établit définitivement , et 
fut admis à l'Académie des Beaux- Arts ( 1747) ; 
son morceau de réception fut un Coron en 
marbre blanc. En 1768, il devint directeur de 
cette compagnie. La plupart de ses oeuvres 
sont disséminées à l'étranger; il cultivait le genre 
et gravait aussi à ieau-forte. Nous citerons 
parmi ses meilleurs tableaux : Jeune Fille te- 
nant une lettre, au musée de Dresde; — Un 
Homme conduisant du vin sur une charrette 
et Une Femme allumant le feu , tous deux au 
musée de Madrid ; — le tableau d'autel et le pla- 
fond de la nouvelle église catholique de Dresde. 

Le frère de cet artiste, Pierre Hotin, gra- 
veur et sculpteur, élève de G. Goustou, a résidé 
avec lui à Dresde, et y a laissé quelques-unes de 
ses œuvres. P. L— -t. 

Siret, Les Peintres de toutes les Écoles. — Dussteox, 
Les Artistes français à l'étranger. 

hutteau {François), jurisconsulte français, 
né à Malesherbes (Beauce), en 1729, mort à 
Paria le 27 juin 1807. Reçu avocat en 1757, il 
s'abstint de paraître au barreau lors de l'exil 
du parlement en 1771, et ne reprit l'exercice 
de sa profession que lorsque Louis XVI eut 
rétabli l'ancienne magistrature. En 1786, il fut 
nommé membre de l'assemblée provinciale de la 
généralité d'Orléans. En 1787, il présenta au roi 
les doléances des six corps de Paris dont il était 
l'avocat. Député de Paris aux états généraux, il 
fut le seul de sa députation qui signa les pro- 
testations de la minorité contre les décrets qui 
anéantissaient le pouvoir monarchique. Il quitta 
Paris la veille des massacres de septembre, et se 
retira à Malesherbes. Santerre vint pour l'arrêter 
en 1793; mais l'assemblée populaire déclara que 
Hutteau était le père des malheureux, et on le 
laissa libre. Cet avocat se faisait souvent remar- 
quer au barreau par sa présence d'esprit et par 
sa gaieté. Un jour il plaidait une question assez 
aride, et les juges s'assoupissaient. Hutteau, qui 
s'en aperçoit, frappe sur le- barreau en s'écriant : 
« Oui, messieurs, prœscriptio eurrit inter dor- 
mientes» ; et les magistrats, réveillés en sursaut, 



prêtèrent en riant une oreille attentive à la plai- 
doierie. Louis XVIII, voulant récompenser dans 
les enfants de Hutteau le dévouement de leur 
père, leur accorda des lettres de noblesse. La col- 
lection de ses mémoires judiciaires forme 26 vo- 
lumes in-4°. Guyot DE FÈRE. 
Feller, Dictionn. Histor. 

hutten ( Ulric de), célèbre promoteur du 
protestantisme, naquit à Steckelberg, le'22 avril 
i486, et mourut le 29 août 1523. Son père, appelé 
également Ulric, était un digne gentilhomme qui 
fit la guerre sous l'empereur Maximilien, notam- 
ment contre les Turcs, et sa mère Ottilia ap- 
partenait aune ancienne et noble famille, les 
Eberstein. On a peu de détails sur son enfance; 
seulement, il raconte lui-même qu'à l'âge de 
onze ans ses parents le conduisirent au monas- 
tère de Fulda dans l'intention de l'y faire élever 
pour l'état ecclésiastique , et même dans l'espoir 
de le voir revêtu un jour de la dignité d'abbé de 
cet illustre établissement Jean II, qui occupait 
alors cette position, étant lié d'amitié avec le 
père d'Ulric de Hutten, qui dès lors annon- 
çait des 'dispositions peu ordinaires, encoura- 
geait cette ambition paternelle. U se présenta 
un autre protecteur du jeune Ulric : c'était le 
chevalier Eithelwolf de Stein. Grand amateur 
des chefs-d'œuvre classiques, Eithelwolf encou- 
rageait tous ceux chez qui il rencontrait le goût 
des sérieuses études. Cependant à l'égard d'Ul- 
ric , il ne pensait ni connue le père ni comme 
l'abbé, et chercha à détourner le premier de 
l'idée de vouer son fils à la carrière monas- 
tique, et il reprocha à l'autre, en ces ternies que 
l'histoire a recueillis, de vouloir égarer son élève 
dans une vocation pour laquelle il n'était pas 
fait : « Tu ne hoc ingenium, perderes », écri- 
vait-il à l'abbé. 

Eithelwolf de Stein avait deviné Hutten; cinq 
ans plus tard, après avoir continué avec ardeur 
ses études, ce dernier, trouvant trop étroit l'hori- 
zon d'un monastère, quittait secrètement l'ab- 
baye de Fulde, au grand regret de ses supérieurs 
et de son père. Il se rendit à Erfurt, dont l'uni- 
versité était alors très -florissante. Il s'y lia 
avec la jeunesse ardente et avide de savoir qui s'y 
trouvait : c'était Crotus Rubianus, l'homme qui 
poursuivaitde sa mordante ironie les moines et les 
savants; c'était Eoban Hesse, si renommé ensuite 
comme poète latin; enfin Pierre Eberbach et 
quelques autres devenus également célèbres. Hut- 
ten poursuivit avec plus d'ardeur que jamais ses 
études de la littérature antique, tandis que des 
amis, des parents , entre autres le même Eithel- 
wolf de Stein, son cousin Frobin et Louis de 
Hutten pourvoyaient à ses besoins. Une maladie 
pestilentielle, jusqu'alors inconnue dans l'Ancien 
Monde, ayant éclaté à Erfurt, il quitta cette ville 
en 1505 pour se rendre avec son ami Crotus à 
Cologne, où les scolastiques tenaient encore le 
seeptre universitaire. Les coryphées de cette 
I secte étaient Ortuinus Gratius , Jacques Hog- 



649 



HUTTEN 



650 



straten, Arnold Tungern, tons ceux enfin que l'on 
surnommait les obscurantistes (Dunkelmœn- 
ner). Hutten s'escrima quelque temps sur le syl- 
logisme ; mais il se dégoûta bientôt de ce labeur 
stérile, et revint à l'étude des chefs-d'œuvre de 
l'antiquité. Il devint le disciple de Jean Rhagius 
qui, sous les auspices du comte Nuenaar, s'effor- 
çait d'introduire à Cologne le goût des lettres an- 
tiques et de la poésie. Il n'en fallut pas davan- 
tage pour que ce maître fût accusé par les obs- 
curantistes de pervertir la jeunesse. Comme il 
arrive presque toujours, le parti de la routine et 
des ténèbres l'emporta d'abord, et Rhagius dut 
quitter Cologne. Il se rendit avec Hutten à l'uni- 
versité, nouvellement créée, de Francfort-sur-l'O» 
der. L'inauguration de cette grande institution, 
qui eut lieu en 1506, inspira à Hutten son premier 
essai poétique imprimé. Il sut répandre , à cette 
occasion, sur un sujet assez prosaïque, l'éloge 
de la Marche de Brandenbourg (Carmen in 
laudem Marchiœ), un reflet de poésie. Hutten 
fut nommé maître es arts à la nouvelle uni- 
versité de Francfort, où il resta jusqu'en 1508. 
A cette époque la contagion qui lui avait fait 
fuir Erfurt l'atteignit encore; et les atteintes 
de ce mal, dont il éprouva toujours les symp- 
tômes toute sa vie, furent une des causes qui le 
firent mourir prématurément. Ses souffrances 
physiques ne ralentirent point son activité in- 
tellectuelle, ni ne calmèrent sa soif d'appren- 
dre. H se rendit dans l'Allemagne du nord, fit 
naufrage sur la Baltique, et, dépouillé de tout, 
arriva à Greifswald, où on l'inscrivit parmi les 
étudiants, qui le connaissaient déjà comme poète. 
D'abord accueilli dans la famille du bourgmestre 
Loetz, il en rat ensuite, on ne sait pas précisé- 
ment pour quel motif, indignement persécuté, à 
tel point que les domestiques de la maison, s'é- 
tant mis à sa poursuite, lui ravirent tout, papiers 
et vêtements. Malade, réduit au dénûment, il 
gagna cependant Rostock, où il rencontra des 
amis et des protecteurs, entre autres le profes- 
seur de philosophie Egbert Harlem. H s'occupa 
alors d'enseignement, et expliqua à de jeunes 
élèves les meilleurs auteurs latins. 

Bientôt Hutten publia un ouvrage intitulé Rio- 
gen gegen Loetz (1510, 2 vol. ), dans lequel il stig- 
matisait l'indigne procédé de cette famille à son 
égard. Ses amis, inquiets de son sort, apprirent 
ainsi ce qu'il était devenu. Un de ceux qui lui mon- 
trèrent le plus d'attachement, Crotus Rubianus, 
alors professeur de langue latine à Fulda, lui fit 
connaître les dispositions de son père à son 
égard. « Ton père, écrivait-il à Hutten, a toute 
la rase d'un Ulysse. Tout en ayant l'air de faire 
peu de cas detpn instruction, il n'est pas fâché 
d'entendre dire du bien de toi. Parfois il lui ar- 
rive de reconnaître que. tu aurais fait un assez 
mauvais moine, et alors il donne à entendre qu'il 
voudrait te voir suivre en Italie les cours de droit 
et de jurisprudence. » Hutten ne put pas d'abord 
£# résoudre à renoncer fr {& vie Indépendante 



qu'il menait. H alla à Wittemberg, et y publia en 
1511 son Ars Versiftcatoria, puis il parcourut, 
dans le plus pauvre équipage, sans sou ni maille, 
vivant presque d'aumônes, la Bohême et la Mo- 
ravie. Il rencontra cependant de nouveaux pro- 
tecteurs, parmi lesquels on doit citer à Olmiitz 
l'évêque Stanislas de Turzo, qui l'hébergea et lui 
fit même présent d'un cheval et de l'argent né- 
cessaire pour continuer sa route. A Vienne, où il 
arriva en 1 5 1 1 , il rencontra un appréciateur éclairé 
dans la personne de Vadian, qui admira telle- 
ment un petit poème de Hutten, à l'adresse de 
l'empereur Maximilien, que, secondé par des 
amis, il le publia à l'insu du poète. Ce petit 
poème est intitulé : Ad Maximilianum, Roma- 
norum imperatorem, ut bellum in Venetos 
cceptum prosequatur, Exhofiatorium. Enfin, 
venuàPavie au mois d'avril 1512, Hutten résolut 
de se conformer au vœu paternel, en se livrante 
l'étude du droit. Mais les circonstances ne lui per- 
mirent point d'accomplir ce projet. La ville ayant 
été, trois mois plus tard, assiégée par les Suisses 
au service du pape, Hutten eut maille à partir avec 
les Français qui la défendaient à l'intérieur : ils 
allèrent jusqu'à l'assiéger chez lui et à le menacer 
de mort. C'est alors que, croyant son trépas pro- 
chain, il composa sa propre épitaphe, qui ne 
manque ni de sel ni d'élégance (1). 

La prise de Pavie par les Suisses lui rendit la 
liberté. Encore fut-il assez malmené par les vain- 
queurs, qui, le croyant d'accord avec l'ennemi , 
lui ravirent tout ce qu'il possédait. C'est en cet 
état qu'il put se rendre à Bologne pour y pour- 
suivre ses études. Il eut dans cette ville à souf- 
frir de la misère et de la maladie dont il avait 
déjà ressenti deux fois les atteintes. Repoussé 
de tous côtés, en particulier par le cardidinal 
Gurk, auquel il s'était adressé, il fut réduit à 
s'enrôler comme simple soldat dans l'armée 
de Maximilien, et c'est ainsi qu'il assista au siège 
dePadoue en 1513. L'année suivante il retourna 
en Allemagne, et se rendit aux eaux d'Ems pour 
y rétablir sa santé. 

Un incident dramatique qui eut un long retentis- 
sement en Allemagne, le meurtre de Jean de Hut- 
ten par le duc Ulric de Wurtemberg, fit éclater 
pour la première fois la verve agressive d'Ulric de 
Hutten et montra son talent d'écrivain sous une face 
toute nouvelle. On le proclama le Cicéronet leDé- 
mosthène de l'Allemagne. Sa plume mordante ne 
laissa nul repos au meurtrier. D'autres écrits sati- 
riques, dirigés contre le duc, suivirent le premier. 
Parmi ces écrits on remarque surtout le Phalaris- 
mus, avec cette devise : Jacta est aléa, que Hut« 

(1) Cette pièce est ainsi conçue : 

Qui misère natos, misera bile transttt sérum, 
Saepe malom terra, sepeque passus aqaa. 
Hic jacet Hutte nos: Galil, ntl taie merenti, 
lasootem gladlis eripoere aolmam. 
Si fuit ex fato , ut tôt maie vlveret anoos, 
Optatura est quod tam corruit il le ctto. 
Ipse suas cotait mille ptr pericola musas. 
Et quanti potuit carmlnls auctor erat. 



651 



HTJTTEN 



652 



ten garda toujours depuis. De ce jour sa renommée 
était établie et populaire en Allemagne; en même 
temps il se reconcilia avec sa famille. Hutten con- 
tinua déprendre part aux controverses de toutes 
natures, si vives alors, et il faut dire qu'il prit tou- 
jours parti pour la tolérance. Cest ainsi qu'il sou- 
tint Reuchlin, vivement attaqué par les ennemis de 
toutes lumières dans la polémique soulevée à l'oc- 
casion de Tordre subrepticement arraché à l'em- 
pereur Maximilien, et aux termes duquel tous les 
écrits des juifs devaient être livrés à la destruc- 
tion. Reuchlin, nommé l'un des commissaires 
chargés d'examiner le mérite des réclamations 
des juifs contre cette barbare décision, déclara 
qu'à son sens il ne convenait d'appliquer la me- 
sure qu'aux ouvrages dans lesquels les juifs s'at- 
taqueraient au christianisme. Les provocateurs 
de l'édit, parmi lesquels un Israélite converti, du 
nom de Jacques Peflerkorn, se révoltèrent contre 
cette interprétation. Les amis de la raison et «les 
lumières se mirent naturellement du côté de 
Reuchlin. Ulric de Hutten écrivit en 1515 sou 
Triumphus Capnionu (1). L'impression de l'ou- 
vrage éprouva d'abord quelques difficultés ; le pru- 
dent Érasme se montra opposé à cette publication, 
qu'il chercha à reculer en disant qu'il était incon- 
séquent de triompher avant la victoire. Toutefois 
le poème parut en 1518. On a élevé quelques dou- 
tes sur la question de savoir si l'œuvre devait 
être véritablement attribuée à Hutten; mais ces 
doutes disparaissent devant une lecture attentive. 
Un ouvrage qui a plus d'importance, ce sont ses fa- 
meuses lettres : Epistolx obscurorum virorum, 
adressées à Ortuinus Gratius de Deventer et pu- 
bliées à la fin de Tannée 1515 ou au commence- 
ment de 1516. C'est une satire vigoureuse de 
l'esprit pédantesque et stérile des hommes qu'il 
attaquait. Hutten ne prit guère part qu'à la ré- 
daction de la deuxième partie de cette œuvre, dont 
Rubianus Crotus avait écrit la première. 

Au mois d'octobre 1515, Hutten fit de nouveauté 
voyage d'Italie dans le dessein d'y reprendre ses 
études de droit et pour remplir ainsi les vues de 
sa famille : il se rendit d'abord à Rome, qu'il dut 
quitter bientôt après par suite d'une rixe entre lui 
et cinq jeunes Français, à l'un desquels il donna la 
mort. Il vint alors à Bologne, qu'il dut bientôt quit- 
ter par un motif semblable, une de ces querelles 
si fréquentes entre étudiants de différents pays, 
cette fois entre les Italiens et les Allemands. Hutten 
avait trop chaudement embrassé le parti de ses 
compatriotes. Il visita Ferrareet Venise, et revint 
ensuite en Allemagne. Arrivé à Augsbourg, il y 
fut présenté par Conrad Peùtinger à l'empereur 
Maximilien, qui l'arma chevalier et lui décerna de 
sa main la couronne de laurier tressée par la 
jeune Constance Pentinger. Retiré quelque temps 
à Steckelberg, il poursuivit la lutte commencée 



(1) Capnion, de xomvo; (fumée), par allusion an nom 
de Reuchlin, qui vient du mot allemand Rauch ayant la 
même signification. 



contre Rome, et qui fit de lui comme le précur- 
seur de la réformation. Après avoir préludé à ce 
rôle par de mordantes épigrammes adressées an 
pape Jules H, il se fit l'éditeur de l'ouvrage de 
Laurent Valla, intitulé : De falso crédita et 
ementita Donatione Constantini Afàgni; 
y joignit une préface, dédiée à Léon X , où il 
adjure ce pontife de pacifier PÉglise, d'honorer, 
de récompenser Laurent Valla, l'ennemi des 
tyrans, de ne point régner en empereur, mais 
de soigner son troupeau en berger fidèle. Ce 
pamphlet, publié dans Tannée même où Luther 
parut sur la scène ( 1517), eut un immense reten- 
tissement. Luther lui-même en fut ému, comme 
en témoigne un passage d'une de ses lettres datée 
de 1520 : « Habeo in manibus, écrit le célèbre 
réformateur, Donationem Constantini a Lauren- 
tio Valleno confutatam, per Huttenum éditant. 
Deus bone, quantœ seu ténèbre, seu nequitix 
Romanorum; et quod in judicio Dei mireris, per 
tôt secula non modo durasse, sed etiam praeva- 
luisse ac inter décrétâtes relata esse tam impura, 
tam crassa, tam impudentia mendacia, inque 
fidei articulorum... vicem suscepisse...». 

En 1518, un an après son édition du livre de 
Valla, et nonobstant cette publication, Hutten 
trouva un protecteur, aussi puissant qu'éclairé, 
dans la personne d'Albert, margrave de Bran- 
debourg et archevêque de Mayence. Invité de- 
puis à venir demeurer avec le prince de l'Église, 
Tardent et généreux promoteur des idées nou- 
velles accepta. Il crut servir les intérêts de son 
pays en se plaçant sous cet éminent patronage. 
Dans un chaleureux panégyrique, il invite son 
protecteur à se mettre à la tête de l'Allemagne, 
dont il pouvait seul réaliser la plus chère espé» 
rance : la fusion de toutes ses parties en un 
corps de nation. C'était, comme on voit, une 
grande idée éclose au quinzième siècle , dans les 
plus puissants esprits de cette époque, et qui, au- 
jourd'hui encore, n'est pas arrivée à sa réalisa- 
tion. A la diète d' Augsbourg, où il suivit Albert, 
et dans laquelle ce moine, jusqu'alors* inconnu, 
Luther, devait rendre compte de sa conduite, 
Hutten chercha à lui rendre favorables quel* 
ques-uns des puissants personnages qui de- 
vaient figurer dans cette assemblée fameuse. 
Hutten essaya aussi de décider les princes al- 
lemands à faire la guerre aux Turcs. L'écrit 
dans lequel il prêéhe cette croisade, publié à 
Steckelberg en 1519, et intitulé : Ad principes 
Germante, ut bellum Tureis invehani Bxh&r- 
tatoria, a tous les caractères du plus vigoureux 
pamphlet : il gourmande la cour de Rome, à la- 
quelle il reproche de n'avoir jamais songé à 
guerroyer contre les Turcs que pour avoir une 
occasion de piller l'Allemagne; et quant aux 
princes de ce pays, il les tance vertement, leur 
dit qu'il est temps de mettre une trêve à leurs 
festins, leurs tournois, leurs parties de chasse, 
et à leurs guerres intestines, qui ne sont que 
des brigandages, pour s'occuper enfin des intérêt» 



653 



HUTTEN 



664 



de l'Empire et s'unir avec son chef contre l'en- 
nemi commun. 

En même temps que ce pamphlet, Hutten 
écrivit un Dialogue sur la vie des courtisans, où 
ii donnait suite à ces attaques contre les habi- 
tudes et les moeurs corrompues de la noblesse, 
attaques violentes qui devaient lui susciter des 
ennemis puissants. Bans une lettre en date du 
6 novembre 151», adressée à Wllllbald Pir- 
kheimer (i), il rend compte des motifs qui le 
guident dans cette polémique : « Je fais peu de 
cas, dit-il, de cette noblesse qui n'a sa raison 
d'être que dans le hasard de la naissance; Je 
veux une noblesse qui «oit mienne et pouvoir 
enfin transmettre à mes descendants une illus- 
tration qui ne me vienne pas uniquement de 
mon père. » Puis répondant a l'invitation faite 
par son ami de se consacrer au culte des Muses, 
au lieu de se jeter dans les querelles du siècle, 
il lui trace un tableau animé de l'état des choses 
en Allemagne, alors le théâtre des exactions de 
la noblesse, des violences même des paysans 
vis-à-vis les uns des autres. « Et vous voudriez, 
ajoute-t-.il, me condamner à demeurer spectateur 
impassible et inactif d'une telle scène ! Enfin il 
s'exalte à la vue du travail, du besoin de réno- 
vation qui agite son époque. * O siècle , 6 scien- 
ces! s'éerte-t4l,onse sent renaître et vivre , bien 
que l'on ne puisse prendre aucun repos. Enfin! 
renaissent, chez Willibald, les talents, les 
sciences. Arrière antique barbarie 1 prends ton 
bâton de voyage et cherche ailleurs quelque re- 
fuge. » 

Gomme Pirkheimer, Érasme prêchait à Hut- 
ten le 'calme. Mais ce dernier ne suivit point 
d'abord ce conseil de ses amis les plus éclairés. 
En 1519, il quitta le margrave Albert pour en- 
trer avec François de Siekingen dans la ligue 
de Souabe dirigée contre Ulric de Wurtemberg, 
son ennemi personnel. Cependant il fit bientôt 
diversion à ses préoccupation» guerrières en 
écrivant sur des matières qui n'avaient rien de 
belliqueux. Conseillé par ses amis, et dans l'es- 
poir de se débarrasser enfin d'une maladie d&- 
venue chronique , il but des décoctions de bois de 
gaïac, et, joignant à la pratique la théorie, il écrivit 
son traité : De Guajaci Medicina et Môrbo 
gallico. Cet ouvrage eut les honneurs de la tra- 
duction en allemand par Thomas Marner, moine 
déchaux et bien connu par ses écrits satiriques, 
et en anglais par Thomas Pagnet, chanoine de 
Marten*Abbey. 

C'est encore vers cette époque, après la diète 
d'Augsbourg, qu'il faut placer l'écrit satirique 
de Hutten ayant ce singulier titreOTTIS (Nemo). 
Seulement il fut composé au château de l'arche- 
vêque de Mayence, duquel Hutten songea enfin 
à se séparer définitivement. Leurs idées ne pou- 



0) EUe est intitulée : Ad Bilibaldum Pirkheimer, pa- 
triciutn Norimbergensêm, Epi$tol<h vitx suse rationem 
erponens,- Augstxrarg, 1516. 



valent plus se concilier ; celles de Hutten étaient 
trop avancées pour le prélat. 

Retiré, après la guerre de Souabe, qui suivit 
cette séparation , au château paternel, Hutten 
reprit sa polémique contre Rome, qui la lui rendit 
en violentes représailles. Léon X demanda son* 
extradition; poursuivi par des assassins, Hutten 
èhercha un refuge dans le château de son ami 
Sicklngen (1590). S» cet asile il lança en Alle- 
magne de nombreux et vite pamphlets. De cette 
époque datent ses Dialogue» et ses Exhorta* 
Mon*, dont le style et la verve rappellent Lucien, 
tl y fait appel aux hommes de toutes professions, 
voire même aux lansquenets, parce que, selon lui, 
le glaive seul peut trancher les grandes difficultés. 
A cette époque aussi commence la liaison de 
Hutten avec Luther. « Vive la liberté, écrit-il au 
chef de la réforme (juin 1520). Si là bas où 
vous êtes vous rencontrer strr votre vole, dans 
l'œuvre que vous entreprenez, tant d'obstacles, 
je m'en afflige assurément. Quant à moi, Je fais 
ce que Je puis. Puisse le Christ être avec fions, 
puisque nous tendons, vous avec une si grande 
vigueur, moi dans la mesure de mes forces, à 
rendre à la lumière sa doctrine obscurcie par 
la papauté! » 

Pour contribuer plus efficacement à cette 
«uvre commune et pour vulgariser sa parole, 
Hutten commença dès lors à écrire dans l'idiome 
de son pays. Précédemment il avait fait paraître 
en latin Téorit intitulé : Ai Carolum impera- 
torem , advenus sibi intmtatam a Romanis 
vint et injuriam Conguestio. Mais il traduisit 
en allemand ( afin, comme fl le disait lui-même, 
que chacun sentit que c'était la cause de tous 
qu'il plaidait) la plainte adressée, dans la per- 
sonne de l'électeur Frédéric de Saxe, à tous les 
États de la nation allemande : Klagsohrtft an 
aile Stœnde teutscher Nation. Au pamphlet 
intitulé Bulles, qui vint ensuite, succéda le 
poème allemand ayant pour titre : Plainte et 
Avertissement contre lé pouvoir exorbitant et 
antiehrétien du pape de Home, etc., toujours 
Avec cette devise : Jacta est aléa. En même 
temps il continuait sa vigoureuse et expressive 
correspondance avec les coryphées de l'époque, 
tels qu'Érasme et surtout Luther, correspondance 
toute empreinte des controverses sur les sujets si 
brûlants que l'on agitait alors. En 1521, Hutten 
se décida, sur la demande de Charles-Quint, à ser- 
vir l'Empire. Un traitement de 200 florins d'or lui 
fut accordé à cet effet. Évidemment c'était son 
silence que IV» voulait acheter, et Hutten ne de- 
vait pas accepter longtemps un tel rôle : il fit, 
avec les troupes de l'Empire, la triste campagne 
de Lorraine, puis il revint retrouver son ami 
ftickingen, après avoir abandonné à ses frères 
son patrimoine, pour ne pas les envelopper 
dans les embarras oh ses luttes incessantes pou- 
vaient l'fifitralner. Mais l'asile que lui offrait si 
généreusement Bickingen lut bientôt perdu pour 
lui par suite de l'issue malheureuse des hostilités 



655 



HUTTEN — HUTTON 



656 



dirigées par ce protecteur contre Richard, arche- 
vêque de Trêves. Hùtten se mit alors en route pour 
la Suisse, où il comptait trouver un appui dans 
Érasme. Malheureusement le caractère de ce philo- 
sophe n'était pas de tons points à la hauteur de son 
esprit : timide,flottantet d'une excessive prudence, 
ainsi que le fait remarquer quelque part Luther, il 
accueillit avec froideur le polémiste ardent. Il eut 
même le tort de prévenir contre lui le conseil de 
Zurich, ainsi qu'en témoigne une lettre en date du 

10 août 1523. Hutten aborda enfin dans l'île 
dUfenau, située dans le lac de Zurich. Épuisé 
par tant de luttes et de longues souffrances, il 
termina bientôt dans cette retraite, en face des 
Alpes, sa carrière, si courte, si agitée et si rem- 
plie par de généreuses aspirations. On peut consi- 
dérer Hutten comme Pun des promoteurs les plus 
désintéressés, les plus sincères dé la révolution 
religieuse qui signala le seizième siècle. Il fit de 
la poésie une arme de guerre, et ses satires sont 
un modèle du genre. 11 se montra le défenseur 
du juste et du bien, et ne poursuivit de sa verve 
vraiment patriotique et ardente que la violence 
et l'hypocrisie. 

L'édition des œuvres ( Opéra omnia) dIJlric 
de Hutten publiée à Berlin, 1821-1825, par Mu- 
nich, 5 vol. in-8°, présente des inexactitudes 
nombreuses» On a donné aussi un choix de ses 
Œuvres, 1622-1824, 3 vol. Rosenwald. 

Lutheri Epiit ; Iéna, 1556. - Gervlnos, Geseh, der 
Deuts. nat. IÂU.\ 1885-1838. - Bayle, Dict. HUt. - Scbu- 
bart, Leben und Character Ulric von Hutten; Leipzig, 
1791 et 1816. — Wesltnger, Hutten** delarvatus. — 
Borckbard . Commentarius de Fatis et Meritis Ulrici 
HuUeni. — Mohnlcke, Ulric von Hutten" iJugendleben. 

— Nicéron, Mérn,, t XV et XX — Mlchelet, La Reforme. 

— Strauss, Ulric von Hutten, 1858. — Bev. Germanique, 
mars 1858. 

huttbe (Leonhard), théologien protestant, né 
en 1563 àTJlm, où son père était ministre, et mort 
à Wittemberg, le 23 octobre 1616. En 1596, on le 
nomma professeur de théologie à Wittemberg ; 
il remplit ces fonctions jusqu'à la fin de ses jours. 

11 est connu surtout par le zèle qu'il déploya 
pour l'orthodoxie luthérienne, zèle qu'il poussa 
jusqu'à l'intolérance pour toutes les autres com- 
munions chrétiennes. C'était un homme entier 
dans ses opinions, incapable de supporter la con- 
tradiction, d'un esprit tranchant et d'une exces- 
sive roideur de caractère. De ses nombreux ou- 
vrages, dont la plupart sont dirigés contre les ca- 
tholiques ou contre les réformés, nous citerons les 
suivants, qui sont les plus importants : De Volun- 
tate Dei circa xternum prmdestinationis sal- 
vandorumDecretum; Wittemberg, 1605, in-4°; 
—Explicatio libri christianœ concordantte ; 
Wittemberg , 1608 , in-8° ; deux autres édît. ; — 
Compendiumlocorum theologicorum ex Sacra 
Seriptura et libro Concordiez Collectum ; Wit- 
temberg,.1610 , in-8°; souvent réédité. Cet ou- 
vrage, fait sur l'invitation de l'électeur de Saxe, 
était destiné à l'instruction religieuse de la jeunesse 
des écoles; — Loei communes theologici, ex 
Sactis Litteris diligenter eruti, veterumque 



Patrum testimoniis passim roborati et confir- 
mait, ad methodum Locorum Melanchthonis ; 
Wittemberg, 1619, in-fol.; Francfort, 1661, in- 
fol.; — Concordia Concors, sive de origine et 
progressus formulée Concordix ecclesiarum 
Augustanx Confessionis ; Wittemberg, 1614, 
in-fol. Deux autres éditions, dont la dernière, 
Francfort, 1690, in-4° , etc., a une préface de Val. 
Alberti. Htitter composa cet ouvrage par ordre 
de l'électeur de Saxe, pour réfuter le Concordia 
Discors et YHistoria Sacmmentalis d'Uospi- 
nius; — Calvinista Aulico-politicus ; Wit- 
temberg, 1614, îh-8° : contre l'édit de tolérance 
de Jean-Sigismond, électeur de Brandebourg; — 
Irenicum vere christianum, sive tractatus 
de synodo et unione evangelicorum non fu- 
cata concilianda; Rostock, 1616, in-4°; autre 
édit. de 1619, in-fol., contre le projet de réunion 
des luthériens et des réformés , mis en avant 
par Pareus, et surtout contre V Irenicum de ce 
théologien. M. N. 

J.-C. Erdmann, Lebensbeschreib. und Uterariteàe 
Nachricht. von den Wittemb. Theologen seit 150t. bie 
1801; Wittemberg, 1804. - Bayle, Diction, Histor.- 
J.-G. Walch, Biblioth. Théologie* Selecta. 

huttich (Jean), antiquaire et numismate 
allemand, né à Mayence vers 1480, mort le 
4 mars 1544. Après s'être fait recevoir maître en 
philosophie dans sa ville natale , il se rendit à 
Strasbourg, ou il fut naturalisé en 1525. Deux 
ans après il devint chanoine à l'église de Saint- 
Thomas, et en 1530 à la cathédrale. Il laissa 
un legs considérable pour doter les filles pau- 
vres qui n'épouseraient pas des soldats. On a 
de lui : Collectanea Antiquitatum in urbe 
atque agre Mpguntino repertarum ; Mayence, 
chez Schœffer, 1 520, in-fol . , rare ; se trouve dans 
le tome IH des Scriptores Historiœ Moguntinx 
de Johannes; — Vitx Imperatorum, cum 
iconibus et numismatibus ad vivum exprès- 
sis; Strasbourg, 1525, 1534; Lyon, 1550 et 
1554, iri-8 '; traduit en allemand, Strasbourg, 
1526, n>8°; —. Collectio diversarum na- 
vigationum etitinerum; Baie, 1536, in-fol. ; — 
Elenchus consulum Romanorum , inséré dans 
les Opéra de J. Sambucus. £. G. 

Johannes, Scriptores Historiœ Moguntinas, t. III, 
p. 8S1. — Hancklos, De RomanarumRerum Scriptoribus, 
t. II. — Bandufl, Bibl. Numaria. — Brach et Gruber, 
Mlgem. Encyclopédie. 

hutton (James), célèbre géologue anglais, 
né le 3 juin 1726 , à Edimbourg, mort dans la 
même ville, le 26 mars 1797. Fils d'un marchand 
d'Edimbourg, il acheva ses études à l'université 
de cette ville. Eu 1743 il entra dans l'étude d'un 
clerc au sceau du roi; mais comme, au lieu de 
s'occuper delà transcription des actes, il amusait 
ses camarades par des expériences de chimie, il 
fut congédié. Il choisit alors la carrière médicale, 
et, après avoir étudié la médecine à Edimbourg 
pendant trois années, il vint à Paris, où il resta 
deux ans; il partit ensuite pour les Pays-Bas, 
et se fit recevoir docteur à Leyde au mois de sep- 
tembre 1749. Arrivé à Londres à la fin de la 



657 



HUTTON 



658 



même aimée, Hutton résolut de s'y fixer, puis il 
abandonna ce projet pour établir une fabrique de 
sel ammoniac, qui réussit complètement. Il re- 
tourna à Edimbourg en 1750. La connaissance 
qu'il fit de l'agronome sir John Hall de Douglas 
le poussa à s'occuper d'économie rurale. Il partit 
donc pour le Norfolk, et s'installa chez un fer- 
mier qui fut à la fois son hôte et son professeur. 
Pendant son séjour dans ce pays , il se mit à 
l'étude de la minéralogie, dans le but de se dis- 
traire en route pendant les fréquentes excursions 
qu'il faisait dans les différentes parties de l'An- 
gleterre. De retour en) Ecosse, il hésita quelque 
temps .dans le choix du lieu où il s'établirait 
pour mettre en pratique ses connaissances agri- 
coles. II finit par se décider pour sa propre ferme, 
située dans le Berwickshire, et cette belle con- 
trée lui doit aujourd'hui l'état florissant de sa 
culture. Cependant la géologie , dont il avait 
continué de s'occuper, lui offrait de plus en 
plus d'attraits; il entreprit en 1764 un voyage 
dans le nord de l'Ecosse, dans l'intérêt de cette 
science, qui en 1768 devint sa passion dominante. 
Il quitta donc sa ferme pour aller s'établir à 
Edimbourg, où il se livra à des essais chimi- 
ques, et découvrit l'alcali minéral contenu dans 
le zéolithe. En 1777, il entreprit de prouver que 
le coal d'Ecosse n'est pas de même espèce que 
la culm d'Angleterre, et ne devait pas par con- 
séquent être assujetti aux droits de transport, ce 
qui finit par être accepté par le conseil privé, et 
termina de vives discussions entre les proprié- 
taires de mines et les officiers du fisc, qui voulaient 
imposer cette matière comme la houille. Hutton 
poursuivit pendant trente ans le cours de ses 
études géologiques avant de se déterminer à pu- 
blier sa théorie delà Terre, qui le plaça au rang des 
premiers géologues. Les encouragements de la So» 
ciétété Royale d'Edimbourg l'y décidèrent enfin. 
Il fit paraître aussi dans le premier volume des 
Transactions de cette société une théorie de la 
pluie (TheoryqfRain), qui mérite d'être placée 
parmi les bons ouvrages sur la météorologie. 
La mort l'empêcha de publier ses Éléments 
d'Agriculture, fruit de nombreux travaux et 
d'une longue expérience. 

Hutton s'est surtout rendu célèbre par sa 
théorie de la Terre. « U attribue au feu , dit un 
de ses biographes , la plupart des phénomènes 
que Werner et d'autres géologues ont cherché 
à expliquer par la solution aqueuse. Le docteur 
Hutton combat également le système de De Luc, 
et pense que les causes qui ont produit les 
substances minérales et présidé à leur arrange- 
ment et distribution sont les mêmes qui sont au- 
jourd'hui en opération dans l'intérieur de la Terre 
et au-dessous des mers. Il croit que les mon- 
tagnes se forment lentement au fond de la mer, 
que les révolutions du globe ne sont jamais gé- 
nérales, et que le ealorique et les gaz comprimés 
sont les agents les plus puissants des catas- 
trophes partielles et plus ou moins soudaines-. 



Depuis la publication du système du docteur 
Hutton, de nouvelles expériences ont démontré 
la possibilité de produire, au moyen d'une haute 
température aidés d'une forte compression, une 
foule de phénomènes minéralogiques qu'on suppo- 
sait ne pouvoir s'expliquer que dans l'hypothèse 
de la solution aqueuse de leurs éléments. Le 
docteur Hutton, tout en admettant le calorique 
comme l'agent principal des grandes opérations 
de la nature, était loin d'adopter le système de la 
fluidité primitive et ignée de notre globe, qu'il 
croyait avoir toujours eu la même structure 
qu'il a aujourd'hui, n'ayant éprouvé que des 
changements partiels , successifs , et pour ainsi 
dire périodiques. » On a de Hutton : Considéra- 
tions on the nature, quality and distinctions 
of Coal and Culm; 1777; — Theory of the 
Earth; Edimbourg, 1795, 1796, 2 vol.; — Dis- 
sertations on différent subjects in natural 
Philosophy; 1792; — An Investigation of 
the prindples of Knowledge, and of the pro- 
gress of reason from sensé to science and phi- 
losophy; 1794,3vol. in-4° ; — Dissertation 
upon the Philosophy ofLight, Beat, and Fire; 
1794,in-8°. L.L— t. 

Playfalr, TheHuttonian Geology* daoslea Philosophical 
Transactions of Eéinburgh, vol. V. — Chaînera, The 
Gênerai Bioçraphicai Dictionary. — 4UM*e, 'VieUh de 
Bolsjolin et Sainte-Preuve , Btogr. univ. et portât, des 
Contemp. 

HUTTOiff ( Guillaume ), archéologue anglais, 
né à Derby, le 30 septembre 1723, mort le 
20 septembre 1815. Fils d'un pauvre journalier, 
il ne reçut aucune éducation , et dès l'âge de sept 
ans il travailla dans un moulin à soie. A qua- 
torze ans il entra en apprentissage chez son 
oncle, fabricant de bas. Il apprit le métier de 
relieur dans ses moments de loisir, et, en 1750, 
il ouvrit une petite librairie et un cabinet de lec- 
ture à Birmingham. U y joignit un commerce 
de papier, et arriva à l'opulence. Devenu riche, 
il cultiva les lettres. En 1791, dans les émeutes 
de Birmingham, sa maison fut pillée, et il perdit 
une partie de sa fortune. Laissant son com- 
merce à son fils, il se retira à Bennet's-Hill près 
de Birmingham. Hutton a été quelquefois ap- 
pelé le Franklin de F Angleterre. On a de lui : 
History of Birmingham, 1781, in-8°; — Jour- 
ney to Tandon; 1784 , in-12 ; — The Court of 
Requests ;|1784, in-8° ; — The Hundred Court ; 
1788,in-8°; — History of Blachpool; 1788, 
in- 8°; — Battle of Bosworth field; 1789, 
in-8°; — History of Derby ; 1790, in-8°; — 
The Barbers, a poem; 1793, in-8°; — Edgar 
and JSlfrida, a poem; 1793, in-8°;— The 
roman Wall; 1801 , in-8° — - Remarks upon 
North Wales; 1801 , in-8°; — Tour to Scar- 
borough; 1803 , in-8° ; — Poems, chiefly Ta- 
ies ; 1804, in-8°; — Trip to Coatham ; 1808, 
in-8°. Tous ces ouvrages sont oubliés, mais on 
lit encore son autobiographie, publiée après sa 
mort par sa fille Catherine Hutton, sous ce titre : 
The Life cf William Hutton, stationer of 



659 



HUTTON 



Birmingham, and the History of his fa- 
mily, written by himself; Londres, 1816, 
in-8°; réimprimée en 1841, dans English Mis- 
cellanies de Knight. Catherine Hutton publia elle- 
même on roman intitulé ; The Miser married; 
1813, 3 vol. in» J 3. Z. 

IA/e of fTilMam uutton. - SngUsk CyofefMNMa 
(JWotfrapÀf). 

hutton ( Charles ) , mathématicien anglais, 
né à Newcastte-sur-Tyne , le 14 août 1737, mort 
à Londres, le 37 janvier 1823. Il appartenait à 
une famille de Westmoreland qui avait été alliée 
à celle de Newton. Fils d'un inspecteur des 
mines, il reçut une éducation fort incomplète, et 
ne dut qu'à lui-même les connaissances multiples 
qu'il acquit plus tard. Il manifesta de bonne 
heure une grande prédilection pour les mathé- 
matiques. A la mort de son père il avait à peine 
dix-huit ans, et entra comme instituteur dans 
l'école da village de Jesroond; quelques an* 
nées après , son maître, qui était ecclésiastique , 
ayant été appelé à une cure, résigna son école 
en faveur de Hotton. £n 1760, Hutton se maria 
et vint s'établir à Newcastle. En 1771 , le pont 
de Newcastle ayant été emporté par un déborde- 
ment du fleuve, Hutton s'occupa des moyens de le 
rétablir avec sécurité, et publia sur la construction 
des ponts un petit ouvrage qui le fit aussitôt 
connaître. £n 1773 il rat nommé professeur de 
mathématiques à l'Académie royale de Wôol- 
wich, à la suite d'un concours. Le 16 novem- 
bre 1774 Hutton fut élu fellowde la Société ttoyale 
de Londres, et après la nomination de John 
Pringle* à la présidence, Hutton devint secré- 
taire de la Société , chargé de la correspondance 
étrangère, office qu'il remplit jusqu'en 1778, 
époque à laquelle on exigea la résidence conti- 
nuelle du secrétaire. En 1775, la Société Royale 
fit faire, sous la direction du docteur Maskelyne, 
une série d'expériences sur la montagne Schi- 
ballien, dans le Perthshire, dans le but de déter- 
miner la densité moyenne de la Terre; Hutton fut 
chargé des calculs qu'entraînait cette opération. 
En 1779 le titre de docteur en droit lui fut con- 
féré par l'université d'Edimbourg. Attaqué d'une 
maladie de poitrine en 1806, il quitta l'Aca- 
démie militaire l'année suivante, et reçut en 
récompense de ses services une pension de 
500 livres steiling. Charles Hutton a pris part 
à presque tous les perfectionnements introduits 
de son tempe par les Anglais dans l'artillerie 
et le génie. Ses principaux ouvrages sont : A 
practical Treatise on Arithmetic and Book- 
keepiny; 1764, plusieurs lois réimprimé; — 
A Treatise on Mensuration, both in theory 
and praetice; Londres, 1771, in-4 ; 1788, 
in-8°; — Principles of Bridges, containing 
the mathematical démonstration of the 
properties of the arches, etc.; Newcastle, 
1772, in-8°; Londres, 1801; — The diarian 
Miscellany, containing ail the useful and 
entertaining parts, both on mathematical 



and practical subjects , extracted frotn the 
Lady's diary , from the beginning of that 
work in 1704 to 1773; with many additionnai 
solutions and improvements ; Londres, 1776, 
6 vol. in-12 ; — Tables of the Product and 
powers of Numbers, with an introduction; 
Londres, 1781, in-8°; — Mathematical Tables, 
containing the common , hyper bolic and lo- 
gUtic logarithms t also sinus, tangents, sécants 
and versed sinus, both natural and logarith- 
mic, etc., to which is prefixed a large and 
original history of the disçoveries and wri- 
tings relating to thèse subjects; Londres, 
1785, nouv. édit,, 1811 ; — Tables of Interest 
fromone pound to 500. millions for one day; 
1786; — Compendious Measurer; being a 
brief yet comprehensive treatise on mensu- 
ration and practical geometry ; with an in- 
troduction to décimal and duodécimal arith- 
metic; Londres, 1786, in-12; — Tracts on 
Mathematical and Philosophical Oubjects; 
Londres, 1786, in-4°; 1812, 3 vol. în-8*; — 
Eléments ofConic Sections; 1787, in-8* : c'est 
son œuvre capitale; — A Mathematical and 
Philosophical Dictionary , containing an ex- 
planation ofthe terms and on account of the 
several subjects comprised under theheads: 
mathematics astronomy and philosopha, 
both natural and expérimental; with an 
historical account of the rise, progress and 
présent state of thèse sciences ; also memoirs 
of the lives and writings of the most emi- 
nent authors, both ancient and modem, who 
by their disçoveries or improvements hâve 
contributed to the advancement of them; 
Londres, 1795-1796* 2 vol, in-4°, avec pi.; nou- 
velle édit, 1815 ; — A Course of Mathematics, 
çomposed and more especially designed for 
the use of the gentlemen cadets in the royal 
military academy ofWoolwich; Londres, 1 798- 
1801, 3 vol. ; — Select Amusements of Mathe- 
matics and Phylosophy , traduit du français 
de Dispian ; 1801, in-12;— Récréations in Ma- 
thematics and natural Philosophy,first çom- 
posed by M. Ozanam, lately recomposed and 
greatly enlarged by M, Montucla, and now 
translatée into english and improved with 
many additions and observations ; Londres, 
1803, 4 vol. ; — The Philosophical Transac- 
tions of the Royal Society of T/mdon, abrid- 
ged by Ch. Hutton, G, Shaw, et R. Pearson; 
Londres, 1804-1809, 18 vol. in-4°; — Tracts 
on many interesting parts of Mathematical 
and Philosophical Sciences; Londres, 1812, 
3 vol. Ch. Hutton a en outre donné une 
nouvelle édition des Principles of Gunnery 
de Bobina, corrigée et augmentée; 1805. II a 
fourni aux Philosophical Transactions des 
articles : sur un moyen prompt de rendre con- 
vergentes les suites pour la rectification des 
courbes; sur la poudre à canon ; sur la «densité 
moyenne de la Terre, d'après les mesures du 



661 



HUTTON — HTJVIER 



662 



Schihallien ; sur le point de plus forte attrac- 
tion à la surface d'une montagne ; et sur le projet 
d'une nouvelle division des cadrans. On trouve 
en outre de Hutton, dans les Transactions de 
la Société Royale d'Edimbourg, un travail inti- 
tulé : Âbstract of Experiments made to dé- 
termine the true résistance of the air te the 
surfaces ofbodies of varions figures and mo- 
ved through in uiïth différent degrees of ve- 
locity. Hutton a aussi contribué au Lady's 
Diary, recueil périodique dont il fut même l'é- 
diteur pendant quelques années. L. Loovet. 

Watt, Bxblioth. BrtU, tome I. — Revus encyclopédi- 
que, tome XVII, p. 688. — Bnglish Cyclopaedia (Biogra- 
pày). ~ Erscti et Grabcis AUg. Encyklopmdie. 

* huusman {Jean~Bmri) t voyageur danois, 
né à Copenhague, en 1704, mort en 1774, a Hes- 
trup, où il était pasteur. Nommé aumônier d'un 
vaisseau de la Compagnie Asiatique de Dane- 
mark , qui fut envoyé en Chine, il publia Bes* 
krivelsë aver Skibet Kronprints Christian* 
Rejse til ochfra China (Description du voyage 
en Chine, exécuté par le navire Le Prince royal 
Christian) \ Copenhague, 1733; traduction aile* 
mande , Copenhague et Leipzig, 1 750. E. B. 

JVyerup et Kraft, Litter.-Uv , 

piuvé (Jean- Jacques), architecte français, 
né à BoinvilHers, près Mantes, en juin 1742, 
mort à Versailles le 24 mai 1808. Fiis d'un 
notaire , il fut envoyé à Paris pour y terminer 
ses études. Ses liaisons avee de jeunes architec- 
tes éveillèrent en loi le goût de» arts du dessin. 
Il reçut des leçons du professeur Blondel. À l'âge 
de vingt-deux ans il fut attaché comme inspec- 
teur aux bâtiments de la Monnaie, et , en 1770, 
remporta le grand prix de l'Académie royale. 
Il visita ensuite l'Italie , la Calabre , la Sicile, la 
Grèce, et rapporta en France une riche collec- 
tion de dessins. U avait laissé sur l'Etna des 
tracée de son passage, en construisant, pour le 
prince Biscari , un pont remarquable par sa har- 
diesse et sa solidité. Il revint à Paris en 1776, et 
fut nommé , l'année suivante , un des inspecteurs 
du château de Versailles. Il fut maire de cette ville 
dans les premières années de la révolution. 

G. oe F. 
Daniel, Biofr. de* Hommes remarquables du dépar* 
tentent de Seine et-Oise. 

hutb (Jean- Jacques- Marie), architecte 
français, fils du précédent, né à Versailles le 
28 avril 1783, mort subitement à Paris, le 23 no- 
vembre 1852. Entré au mois de messidor an iv 
(1 796) à l'École centrale de Versailles, il y fit des 
progrès rapides, et à l'âge de quatorze ans il don- 
nait déjà des leçons particulières de mathéma- 
tiques. Son père commença à l'initier aux élé- 
ments de son art, puis il le plaça chez Percier. 
Le jeune Huvé passa trois années auprès de ee 
maître distingué , obtint cinq médailles à l'É- 
cole des Beaux-Arts et fut admis deux fois à 
concourir pour le grand prix de Rome. Lors- 
qu'en 1808 l'empereur résolut de consacrer à la 
gloire des armées le monument commencé sous 



Louis XV, et qui fut depuis l'église de La Made*' 
lelne, Vignon, qui en était devenu l'architecte, fit 
nommer Huvé conducteur des travaux. Son zèle 
et sa capacité lui valurent bientôt le titre de sous- 
inspecteur. En 1814 il marcha avec la garde na- 
tionale à la défense de la capitale contre l'étran- 
ger ; mais l'année suivante il refusa de prêter 
serment à l'acte additionnel, quoique ce refus 
pût entraîner sa destitution , et que sa place fût 
alors son unique moyen d'existence. En 1817 
il était inspecteur en chef des travaux de La 
Madeleine. Il succéda à Viel, architecte des 
hôpitaux et hospices. En 1819, Huvé fut 
chargé de l'achèvement du château de Saint- 
Ouen. Louis XVIII le nomma ensuite archi- 
tecte du château de Compiègne. En 1827 il 
devint architecte de l'administration des postes. 
Quelque temps après, la démolition de la salle 
Feydeau ayant été résolue , un concours fut ou- 
vert pour élever à la place Ventadour une nou- 
velle salle de spectacle destinée à la remplacer 
pour l'opéra-comique. Le projet de Huvé l'em- 
porta sur ceux de ses concurrents. Vignon étant 
mort, Hnvé le remplaça comme architecte de 
La Madeleine, qu'il termina. En 1837 il fut 
nommé membre honoraire du conseil des bâ- 
timents civils, et quelques années après adjoint 
au jury d'examen pour les concours d'architec- 
ture à l'École des Beaux-Arts. A la mort de Per- 
cier, son maître, en 1838, Huvé fut appelé à le 
remplacer à l'institut, dans la section d'architec- 
ture de l'Académie des Beaux-Arts. Depuis il de- 
vint président de la Société libre des Beaux-Arts 
et de la Société centrale des Architectes. Il a formé 
dans son atelier un grand nombre d'élèves dis- 
tingués , et il venait en aide à une mule de mal- 
heureux. Un matin on le trouva mort dans son Ut ; 
une bougie était allumée près de lui et un livre 
placé à côté. « Artiste savant et consciencieux, 
homme d'une probité exemplaire, et doué d'ail- 
leurs d'un esprit fin et du caractère le pins bien- 
veillant, il y avait, dit un de ses panégyristes, 
double raison pour que l'on aimât avoir affairée 
lui Aussi y a-t-il peu d'architectes de notre épo- 
que qui aient eu une aussi belle clientèle pour les 
travaux privés et qui en outre aient été chargés 
de la construction de trois édifices capitaux : un 
château , une salte de spectacle , et enfin une 
grande église. Si, comme on le dit souvent, mais 
ce qui n'arrive pas toujours , la simphci^ et la 
modestie sont l'apanage et parfois une preuve 
du vrai mérite, personne n'a mieux justifié ce 
douteux adage que M. Huvé , et ses rares et 
belles qualités ont certainement beaucoup con- 
tribué à rehausser son talent et à en faire re- 
chercher l'emploi. » L. Louvet. 

Raoul Rochette, Disconrg lu par H. Carittle sur la 
tombe de M. Huvé, au nom de l'Institut. — Delecluze, 
Journal des Débats du S9 novembre 1883. — Charles Ro- 
magny, Nécrologie, J.-J.-M.ffuvé, dans la Bévue Muni- 
cipale, isst, p. ion. 

* huvibh dbs FONTEWELtBs ( Pierre - 
Marie-François ), littérateur français, né à 



663 



HUVIER — HUYDEGOPER 



664 



Coulommiero, en Brie, dans l'année 1757, mort le 
21 octobre 1823. En sortant du collège de Juilly, 
il entra dans la congrégation de l'Oratoire, qu'il 
quitta en 1780. Destiné à succéder à son père, 
bailli de Coulommiers, il le seconda quelqne 
temps dans l'exercice de ses fonctions; mais à 
l'époque de la révolution il renonça entièrement 
aux affaires, et vécut dans la retraite, unique- 
ment occupé de la culture des lettres. On a de 
Huvier : Les Soirées amusantes, ou entretiens 
sur les jeux à gages et autres; Paris, 1788; 
nouvelle édit., 1796, in-12 ; inséré aussi dans la 
66 e livraison de YEncyclopédie méthodique, qui 
contient les jeux mathématiques et les jeux fa- 
miliers; — La Targétude, tragédie un peu 
bourgeoise, parodie de fAthalie de Racine; 
Paris, 1791, in-8° : dirigée contre Target, rap- 
porteur du comité de .révision de la constitu- 
tion en 1791; — Les Remontrances du Par- 
terre, etc., par Bellemure, ei-devant com- 
missaire de police, réfutées par M. B. D., 
otage de Louis XVI; Paris, 1814, in-8°. 
G. de F. 
Fdler, Dicttonn. Bittor, - Quérard, La France Litté- 

TOirtf. 

HCXELLES. Voy. UXELLES. 

* huxham ( Jean ), célèbre médecin anglais, 
né à Halberton, dans le Devonshire, vers la fin 
du dix-septième siècle, mort le 10 août 1768. Il 
étudia sous Boerhaave à l'université de Leyde, 
où il prit le degré de docteur en médecine. Re- 
tourné en Angleterre, il s'établit à Plymouth, où 
il exerça la médecine pendant une trentaine 
d'années. « C'était un excellent observateur, dit 
la Biographie Médicale. On lui doit la descrip- 
tion d'une maladie assez peu connue, à laquelle 
on donne encore le nom de fièvre lente ner- 
veuse d'Huxham. H est du petit nombre de 
ceux qui n'ont pas méconnu la nature inflamma- 
toire des fièvres dans la plupart des cas, et c'est 
en cela surtout que ses écrits ont beaucoup 
moins vieilli que ceux d'un grand nombre d'au- 
teurs aussi célèbres. » Le quinquina et le vin 
étaient ses remèdes favoris, et comme sa répu- 
tation était considérable de son vivant, il y a lieu 
de croire que sa pratique était heureuse. Une 
infusion del'écorceduPérou (Peruvian barh) 
et d'autres aromates dans l'alcool, qu'il prescri- 
vait souvent, a gardé jusqu'à présent le nom po- 
pulaire de teinture de quinquina d'Huxham. 
Ses principaux ouvrages sont : Observationes 
de Aère et Morbis epidemicis ab anno 1728- 
1752; Londres, 1744-1752, 2 vol., in-8° : son 
fils a donné la suite; ibid., 1760, in-8°; — An 
Essay on Fevers and Diseases; Londres, 1750, 
in-8°; traduit en français, in-12; — Médical 
and Chymical Observations upon Antimony ; 
Londres, 1755, in-8° ; — Dissertation of the 
malignant Vlcerous forethroat; Londres, 
r767, in-8°. Reichel a réuni divers ouvrages 
d'Huxham sous ce titre : Opéra Physico-Me- 
dica ; Leipzig , 1 764, 3 vol. in-8°. J. V. 



Polwhele, Hittory of Devonshiré , vo\. I, p. 826. — 
fiées, Cyclopmdia. — Lysons, Mag. Brttan. — Chalmers, 
General Bioçraphical Dictionary. — Jobo Gortoo, A 
General Biograp. Dict. — Biographie Médicale. 

hcydecopeb ( Balthasar), poète et philo- 
logue hollandais, né en 1695, à Amsterdam, mort 
le 24 septembre 1778. Il fut nommé écbevin de 
sa ville natale et plus tard bailli du Texel. Ses 
productions poétiques, excepté sa tragédie d'Ar- 
sace, ont peu de valeur; mais il s'est fait re- 
marquer comme un des plus habiles connais- 
seurs de la langue hollandaise. On a de lui : 
De triompheerende Standvastigheid of very- 
dette Wraahzucht, Treurspel (La Constance 
triomphante , ou la vengeance déçue ) ; Amster- 
dam, 1717, in-8° ; — Edipus, Treurspel , uit- 
het Pranschvan Corneille (Œdipe, tragédie 
traduite du français de Corneille); Amster- 
dam, 1720, in-8° ; — Arsases oft edelmoe- 
dig Verraad (Arsace, on la trahison géné- 
reuse); Amsterdam, 1722, in-8° ; — Békeldu 
chten en Brieven van Boratius (Satires 
et Épttres d'Horace ) ; Amsterdam , 1626, in-4* ; 
ibid., 1737, in-4°, avec la traduction de Y Art 
poétique; — Achilles, Treurspel (Achille, 
tragédie); Amsterdam, 1728, in-8*; — Proeve 
van Taal~en-Dichtkunde in vrymotdige Aan- 
merhingen op Vondels vertaalde Herschep- 
pingen van Ovidius (Essais philologiques et 
poétiques, ou observations libres sur la traduc- 
tion des Métamorphoses d'Ovide faite parVon- 
del); Amsterdam, 1730, in-4°; Leyde, 1782- 
1784, 2 vol., in-8°, avec des additions, parles 
soins de Lelijveld ; ouvrage précieux qui contient, 
outre d'excellentes remarques sur les littérateurs 
hollandais, un trésor d'observations sur le génie 
et l'histoire de l'idiome hollandais ; — PrivUc- 
gien en Handvesten van Texel ( Privilèges et 
Franchises du Texel ) ; Amsterdam, 1745, in-4°; 
— Gemengen gedichten ( Poésies mêlées); 
Amsterdam , 1788, in-4°. Huydecoper a aussi 
édité : Reimchronijh van Melis Stoke, met 
Bistorie-Oudheid en Taalhundige Aanmer- 
hingen ( Chronique rimée de Melis Stoke, avec 
des remarques historiques et philologiques)-, 
Leyde, 1772, 3 vol. in-4° , excellent ouvrage à 
consulter surtout pour l'histoire de la langue 
hollandaise; — Brieven van Hooft (Lettres de 
Hooft); Amsterdam, 1738, in-fol. — Enfin, Hoy- 
decoper a inséré un Mémoire sur Vablatij ab- 
solu dans le tome I er des Mémoires de la 
Société de Philologie hollandaise de Leyde, 
ainsi que De Pythagoras Kuâpcp, dans le tome VI 
(partie II, p. 417) des Miscellaneae Observa- 
tiones (voy, d'Oryille, Animadversiones ad 
Charitonem, p. 609); dans cette dernière dis- 
sertation il a voulu établir que le Ktioqux; dont 
Pythagore ordonnait à ses disciples de s'abstenir, 
n'était pas \&Jève, mais Vœuf. — Dans les De- 
licix Poeticx de van Santen se trouvent dix 
pièces de poésie latine de Huydecoper. £. 6. . 

Su, OnmasUeon, uyi, p. ««. - Bracb et Grafccf , 



665 



HUYDECOPER — HUYGENS 



66e 



Allgetn. Encgklopsedie. — Van Effen dans le Holltm- 
dsche Spectator ( t IV, p. set ). 



HUY6BNS ( Constantin) 9 seigneur de. Zuyli- 
chem, homme d'État et littérateur hollandais, né 
le 4 septembre 1596, à La Haye, mort le 28 mars 
1687. Son grand-père Corneille Huygens, gentil- 
homme de Brabant, était venu se fixer à An- 
vers, où il épousa Suzanne Hafvaegele, d'une des 
premières familles de cette ville. Christian Huy- 
gens, fils de Corneille et père de Constantin, de- 
vint d'abord secrétaire des commandements de 
Guillaume le Taciturne et plus tard secrétaire 
du conseil d'État de la république des Provinces- 
Unies. Constantin Huygens fut nommé secrétaire 
intime de Frédéric, prince d'Orange. Mais il rési- 
gna bientôt son emploi , qu'il abandonna à son fils 
aîné. Quelque temps après il se rendit, au nom du 
stathouder, auprès de Louis XIV pour obtenir la 
restitution de la ville d'Orange, laquelle lui fut ac- 
cordée en 1665 après quatre ans de négociations. 
Huygens était en relation suivie avec tous les 
hommes distingués de son pays, tels que Hooft , 
les deux Heinsius, Vossius et antres, ainsi 
qu'avec Descartes, Balzac et Corneille. Ses poé- 
sies latines, trop vantées par ses contemporains, 
ne méritent cependant pas d'être dépréciées, 
comme elles l'ont été par Ménage et Chapelain. 
Quant aux compositions poétiques qu'il a écrites 
en hollandais, elles renferment de grandes beau- 
tés; les nombreuses descriptions de la nature 
de son pays qui s'y trouvent sont généralement 
d'une perfection achevée. On y rencontre aussi 
des observations fines et enjouées sur les mœurs 
hollandaises de son époque. On a de Huygens : 
Gebruyh en Ougebruyk van V Or gel (Usage et 
Abus de l'Orgue), ouvrage qui a contribué a faire 
admettre cet instrument dans le culte réformé 
de la Hollande; — Monumenta desultoria; 
Leyde, 1644, in-g»; La Haye , 1655, in-12: re- 
cueil de poésies latines, contenant douze livres 
d'épigrammes, un autre livre intitulé- Farrago, 
composé de pièces diverses, et un dernier désigné 
sous le nom à'OtiorumjuveniliumResegmina; 
— De Ledige Vuren ( Heures de loisir ) ; Amster- 
dam , 1644, in-8°; une seconde partie parut à 
Schiedam, 1647, in-8°; — Korenblœmen 
(Bluets); La Haye, 1653, in-4"; Amsterdam, 
1672, 2 vol. in-4°; Leyde, 1824, 6 vol. in-8°, 
avec des éclaircissements de Bilderdyk ; c'est le 
recueil complet des poésies hollandaises de Huy- 
gens; il contient entre autres sou Hoofwijh, 
description de sa maison de campagne, ses Ze~ 
denprinten (Tableaux de mœurs), Batava 
Tempe, et Vorhout van's Gravenhaye, satire 
sur les mœurs dé la société de La Haye; ces 
deux derniers ouvrages furent réimprimés en- 
semble; Leuward, 1824, in-4°; un poème iné- 
dit de Huygens a été publié à La Haye, 1842, 
in-8°» par Jouckbloet. — Dans les Posthuma 
de Franchis se trouvent quatre lettres de Huy- 
gens, auquel sont adressées cinquante-deux 



lettres de Hooft, publiées dans la correspondance 
de ce dernier. E. 6. • 

Bayle, Dictionnaire (an mot Zuylichem). — Bailler, 
Jugements des Savants, t. IV. — Huygens, De fita pro- 
pria Sennones (autobiographie traduite en hollandais 
par Loosjes; Amsterdam, 1821, in-8°). — Bigdraçen tôt 
de Kenniss van net karakter van C. Huygens ; La 
Haye, 18MUn-8°. - Vries , Histoire de la Poésie hol- 
landaise, t. 1, p. 177. 

huygens, en latin Hugenius, van Zuylichem 
( Christian ) (1) , célèbre physicien, géomètre 
et astronome, frère de Constantin , naquit à la 
Haye le 14 avril 1629, et mourut le 8 juillet 
1C95. Il reçut sa première instruction de son 
père, versé à la fois dans les lettres anciennes et 
dans les mathématiques. A quinze ans il eut 
pour maître un mathématicien d'Amsterdam, 
nommé Stampiœn , dont Descartes ne nous a pas 
laissé un témoignage très-favorable. A seize ans 
il étudia le droit à l'université de Leyde, sous 
le célèbre jurisconsulte Vinnius, qui lui dédia plus 
tard son commentaire sur les Institutes. L'étude 
du droit ne lui fit pas négliger celle des mathé- 
matiques, qu'il continua sérieusement, de 1646 à 
1648, à l'université de Breda , nouvellement 
établie. Sous la direction habile de Fr. van Schoo- 
ten, de J. Pell> le jeune Huygens fit de rapides pro- 
grès, et ses premiers travaux de mathématiques 
attirèrent sur lui l'attention de Descartes, dont 
il n'eut point l'occasion, à son grand regret, de 
faire la connaissance personnelle. Huygens dé- 
buta dans la carrère scientifique par ses Théo- 
remata de quadratura hyperboles, ellipsis et 
circuli, exdato portionum gravitatis centro, 
quibus subjùncta est êÇÉTaatç cyclometrix 
Gregorii a S.- Vîncentio editœ, anno 1647, 
Leyde, où il relève les erreurs du géomètre 
Grégoire de Saint-Vincent, que les jésuites vou- 
laient mettre au même rang que Descartes ; 
cet ouvrage fut bientôt suivi de : De Circuli Ma- 
gnitudine Inventanova;Md. t 1654. « Ce sont là, 
dit Montucla, des essais de la jeunesse d'Huy- 
gens : ils ne peuvent entrer-en comparaison 
avec les inventions dont il enrichit depuis la géo- 
métrie et l'analyse (2). » C'est à la même épo- 
que qu'il faut faire remonter la composition de 
plusieurs mémoires sur la dioptrique, (publiés 
dans le recueil de ses œuvres posthumes. En 
1655 Huygens vint pour, la première fois en 
France, et fut reçu docteur en droit à la faculté 
protestante d'Angers. A son retour en Hollande, 
il se livra, assisté de son frère, à la fabrication 
des lentilles de lunettes, une de ses occupations 
favorites, etparvint à faire un instrument de dix 
pieds (hollandais ) de distance focale, avec le- 
quel il découvrit le premier satellite de Saturne (3). 

(1) Plusieurs lettre» adressées par Hujgens a des «avants 
français portent la signature Huygens; dans ses^ciits 
latins, il s'appelle lui-même Hugenius. Dans les Philo- 
sophical Transactions et dans d'autres ouvrages, ; son 
nom s'écrit indifféremment Huyyhen», Hughaens ou H li- 
chens. 

(3 Montucla, Hist. des Mat h., nouvelle édit., t. II, p. 417. 

(3) Voy. plus loin le récit détaillé de cette découverte, 
qu'il communiqua d'abord aux astronomes soas forme 



667 



HUYGENS 



66$ 



De 1681 à 1687, il fit un grand nombre de 
'verres ayant plus de 100 pieds de distance fo- 
cale ; il y en avait môme un de 170 et un autre de 
210 pieds de foyer. De là des tuyaux qui devaient 
ployer sous le poids de leur énorme longueur. 

En 1656, Huygens publia sur le calcul des pro- 
babilités, dont Pascal et Fermât avaient indiqué les 
premiers traits, un mémoire, originairement écrit 
en hollandais, et que Schooten traduisit en latin 
( De Ratiociniis in ludo aleae), en le réimpri- 
mant dans ses Exercitationes Mathematicx. 
C'est à la même année que remonte l'invention 
qui a le plus popularisé le nom de Huygens celle 
des horloges à pendules. En voici l'origine. Un 
instrument pour bien mesurer le temps est ab- 
solument indispensable en astronomie. Les clep- 
sydres et les sabliers étaient impropres à donner 
des résultats exacts. Depuis que Galilée avait re- 
connu Tisochronisme des oscillations du pendule, 
les astronomes essayaient de s'en servir : un aide 
comptait les oscillations fournies par une chat- 
nette qu'il faisait mouvoir et à l'extrémité de la 
quelle était suspendue un poids. C'était là un 
moyen aussi pénible qu'ennuyeux. Pour y re- 
médier, Huygens supprima d'abord l'aide-comp- 
teur, et donna au rouage des horloges un mou- 
vement régulier, uniforme, par le mécanisme 
suivant : une tige de fer, au bas de laquelle est 
suspendu un poids, et qui représente le pen- 
dule, communique en haut un mouvement alter- 
natif à un essieu garni de deux petites palettes 
( le régulateur ) disposées de manière qu'à cha- 
que oscillation elles ne laissent passer qu'une dent 
de la roue avec laquelle elles s'engrènent. De là, 
pour les roues de l'engrenage, Un mouvement 
aussi uniforme que celui du pendule même. 
Bien plus : la pression exercée par les dents de 
la première roue contre les palettes du régulateur 
communique au pendule à peu près la même quan- 
tité de mouvement qu'il en perd à chaque os- 
cillation par le frottement et la résistance 
de l'air; l'horloge ne peut donc s'arrêter que 
lorsque le poids ou le ressort a cessé d'agir (1). Tel 
est le principe des horloges généralement connues 
sous le nom de pendules. Huygens en présenta 
la première aux états généraux de Hollande, le 
1-6 juin 1657 , et leur demanda un brevet pour 
son invention, qu'il a décrite dans son Horolo- 



d'une énigme qoe voici : Admoxere ocuiis distantia si- 
déra nostrls WVVVVVCCCMtHMBQXj c'était une 
sorte d*anegramme qu*M avait même gravée, dit-on, «or 
l'objectif de sa lunette. E» transposant les lettres, Il 
l'expliqua lui-même ainsi s Saturno Luna suacircun- 
ducitur dieàus sexdecim horis quatuor. Il corrigea pins 
tard cette observation, os substituant à 16 Jours t heures 
15 jours SS heures, durée de larévolution du satellite au- 
tour de Saturne. 

(1) Tav Toung Incline à penser que lbn. Ionnls avait 
déjà, au dixième siècle, appliqué, cbea les Arabes, le pen- 
dule à la détermination du temps. Mais c'est Sanctorius 
qui, en lait, parait avoir le premier employé le pendule 
comme modérateur du rouage d'une horloge. Voy. Tu. 
Toung; Lectures on naturel PAUosophp, 1 1, p. 181. Sé- 
dUlot, Mem. sur Us Instruments astronomiques çMet les 
Ara**.- Humboldt, Cosmos, L il. 



gium, petit traité de 10 pages, placé en tête du 
1 er vol. de ses Opéra varia; Leyde, 1724 (van der 
Aa).Huygen8 songea bientôt à perfectionner sou 
invention. Il avait remarqué qu'il n'y a pas, con- 
trairement aux assertions de Galilée, disochro- 
nisme parfait entre les oscillations d'étendue iné- 
gale. Craignant que les petites différencesaccumu- 
lées ne fissent à lalongue une somme sensible, il 
se proposa de rendre ces oscillations géométrique- 
ment égales, quelle que fût leur amplitude. Ce 
problème le porta à déterminer la courbe le long 
de laquelle un corps doit rouler afin que, de 
quelque point que sa chute commence, il mette 
toujours le même temps pour arriver au plus 
bas. Il trouva que cette courbe est celle que 
tracerait en l'air le point d'une roue se mouvant 
sur nn plan uni ; en un mot, c'était la cycloïde 
qui jouissait de la propriété requise (1). Il lui 
fallut donc inventer le moyen pour faire décrire 
au poids du pendule une cycloïde. C'est là ce qui 
le conduisit à la célèbre Théorie des Dévelop- 
pées : il trouva que toute courbe pouvait être 
décrite par le développement d'une autre, et 
pour que, dans le cas particulier dont il s'agissait, 
je centre du pendule décrivit une cycloïde, il fal- 
lait déterminer cette autre coui be ( la développée ) 
et faire en sorte que le fil du pendule s'appliquât 
sur elle dans ses mouvements. Or, cette courbe 
était encore une cycloïde égale, mais posée 
en sens contraire. En conséquence, il imagina un 
mécanisme particulier pour faire exécuter les 
oscillations du pendufe entre deux arcs de cy- 
cloïde. Cependant, quelque ingénieux que soit ce 
mécanisme, on s'aperçut bientôt qu'il était inutile 
dans la pratique et qu'en faisant décrire au pen- 
dule de très-petits arcs, on . obtenait une régu- 
larité suffisante même pour les horloges les plus 
sensibles. Huygens donna la description de l'hor- 
loge à pendule cycloïdal dans VBorologium os- 
cillatorium; Paris (Maguet ), 1673, in-foL; re- 
produit, avec des additions , dans le 1. 1 de ses 
Opéra varia, p. 29-2 48. C'est la troisième partie 
de ce traité qui contient l'exposition de la Théo 
rie des Développées, dont Huygens est l'auteur. 
En voici l'idée t Que. l'on s'imagine une courbe 
entourée d'un fil très-flexible et délié mais non 
extensible; ce fil, en se déployant roide à l'une des 
deux extrémités, tracera une courbe, pendant qu'à 
l'autre extrémité il décrira une autre courbe. La 
première s'appelle la développée, et la seconde la 
courbedécrite par évolution ou développement Ces 
courbes ont des propriétés particulières , appréciées 
par les géomètres. Dans le cercle, la développée 
est un point, car tous les rayons concourent au 
centre. Dans l'ellipse, Iadéveloppée est une courbe 
à quatre pointes, et qui , malgré la complication 

(1) Ce genre de courbe a reçu depuis le nom de fonte- 
chrone. La eyclolde est la courbe tautœhron» éaas le 
vide et de» l'hypothèse de l'accélération uniforme des 
graves et des directions parallèles. SI ces directions sont 
convergentes vers un point, et que la pesanteur varie 
comme la distance an centre, la tautochrone sera, 
comme l'a ht premier observé Newton, VépUxcloUU. 



669 



HUYGENS 



670 



de son équation, est parfaitement ratifiante : elle 
est égale à quatre fois le demi-paramètre du 
petit axe. En poursuivant cette théorie, Huygens 
découvrit que la développée de la cycloïde est elle- 
même, pour le répéter, une cycloïde égale à la 
première, mais posée en sens contraire; et en 
appliquant le calcul* à la développée de la para- 
bole ordinaire, il trouva que cette développée 
était une des paraboles cubiques, savoir celle dont 
l'équation est a 2 a?=^ 3 , x étant l'ordonnée, et y 
l'abscisse. Enfin, il montra qu'il y a une infinité 
de courbes absolument rectifiantes. Descartes, 
dont Huygens avait l'un des premiers adopté les 
principes géométriques , avait douté de la possi- 
bilité d'en trouver une seule (1). 

La quatrième partie de VHorologium oscilla- 
torium traite du centre d'oscillation des pendu- 
les. L'auteur y résolut tous les problèmes proposés 
par le P. Mersenne, et qui avaient pendant trente 
aos exercé l'esprit ded plus habiles géomètres; 
il y démontre aussi plusieurs proposition* nou- 
velles, et donne une Oèéthode certaine pour trouver 
le centre d'oecillatiaji dans les lignes, dans les 
surfaces et dans les corps solides. Huygens eut le 
premier l'idée d'une mesure invariable et univer- 
selle. A cet effet il propose d'employer un pen- 
dule dont cbaqueosciUatioa soit exactement d'urne 
seconde de temps selon le ■fceuvement moyen du 
Soleil. Ainsi» peur faire savoir aux siècles à venir 
quelle était le longueur do pied de roi dont on 
se servait à Paris, on n'aura qu'à établir la pro- 
portion suivante : la troisième partie de ce peu* 
dule à secondes, que l'auteur appelle pied 
Aoroérs, est au pied de Paris, comme 864 à 
881. « Faute de cette mesure universelle, en a 
perdu» ajoute-toi, ta connaissance de la véritable 
grandeur des mesures dont se sont servis les 
Hébreux, tes Grecs et les Romains (2). » Un 
autre avantage, plus réel , qu'il retira de l'em- 
ploi du pendule, ce fat la détermination plue 
exacte de l'espace que parcourent les corps, en 
TOtn de la pesantenr, dans un temps donné , 
comme celui d'une seconde, Il y avait été con- 
tait pet «« célèbre théorème, d'après lequel 
" le temps d'une neeWation ennère d'un poids 
décrivant une cycloïde, est au temps qu'il em- 
ploierait à tomber de te hauteur de l'axe de cette 
cycloïde , tomme la «freonféreiiee est au dia» 
mètre ». Or, d'après la théorie des développées, 
l'axe de la eytietdè est la moitié de la tan- 
neur du pendule; et comme cette longueur est 
eomiuepour urie làtHmte donnée, on aura, par te 
rapport du diamètre à teefoeonféreace, le tempe 
(fuemettra en corps à tomber de la moitié de la Ion* 
gueur indiquée. Bans cette même partiede Vfforo- 
logiurn oscUlatorinm, Huygens résout lenremier 
le problème des centres d'oscillation proposé 
pu le P. Mersenne. Le P. Mersenne avait demandé 
aux mathématiciens, vers 1646, de déterminer la 

M roi. Moutucla, Hist. des Math,, t. tt, p. ISS et 

sonr. 

(*) Journal des Savants, année 1674, p. Me. 



duréedes oscillations de plusieurs figures suspen- 
dues de différentes manières et mues , soit en 
plan, soit de côté; Descartes et Roberval furent 
particulièrement invités à cette recherche. Le prin- 
cipe fondamental de la théorie d'Huygens sur les 
centres d'oscillation est celui-ci : « Si un pen- 
dule, chargé de plusieurs poids, fait une partie 
de vibration, et qu'alors ces poids , dégagés de 
la verge qui les astreint à se mouvoir ensemble, 
soient réfléchis perpendiculairement en haut 
avec leurs vitesses acquises, leur centre de gra- 
vité remontera précisément à la même hauteur 
que celle d'où il est tombé. » A l'aide de ce prin- 
cipe il détermina le centre d'oscillation d'un pen- 
dule composé. Pour cela il suppose la longueur 
du pendule simple et isochrone indéterminé, 
et d'après cette supposition et les principes 
connus de la mécanique , il calcule la hauteur 
d'où tombe le centre de gravité durant une 
demi- vibration-, et celle à laquelle ce centre 
s'élèverait en supposant les poids libres et re- 
montant avec leurs vitesses acquises. Cette 
seconde hauteur, égalée à la première, lui donne 
une équation qui détermine la longueur isochrone. 
Il trouve, par ce procédé, que cette longueur 
est celle qu'on aurait en faisant la somme des 
produits de chaque poids par le carré de la 
distance de l'axe de suspension, et divisant cette 
somme par celui de tous ces poids multipliés par 
la distance de leur centre de gravité à ce même 
axe(l). — Ace travail se rattache son mémoire 
De Motu Corporum expercussioneycomniuniqué 
en 1669 a la Société Royale de Londres, et re- 
produit dans ses Opuscula posthuma ( Amster- 
dam, 172*, in-4 B ), t. II, p. 75-104. L'auteur 
débute par quelques propositions générales, 
( entre autres celle-ci : Corpus quodlibet semel 
motum, si nihil obstat t pergere moveri eadem 
perpétua celeritate et secundum lineam 
rectam), pour arriver à la démonstration de ce 
qu'il avance. Descartes avait pensé qu'il y avait 
toujours la même quantité de mouvement avant 
et après le choc. C'était là une erreur ; Huy- 
gens montra, par une série d'expériences, « que 
le centre de gravité commun ou est immobile 
eu se meut avant et après le choc avec une 
vitesse uniforme; que ce n'est donc point, 
comme le prétendait Descartes, la quantité 
absolue de mouvement qui reste invariable, 
mais seulement la quantité de mouvement vers 
un même côté (2) ». L'auteur ne se borne pas 
même au cas de deux corps qui se choquent entre 
eux , il fait voir que la même loi se vérifie 
quelle que soit la manière dont les corps se 
choquent et quel que soit leur nombre. Ces 
expériences sur le choc des corps (3) lui firent 
découvrir la loi de la conservation des forces 



<i) roy. Montucla, Hitt. des ATA*»., t II , tk 417. 

(i) ibtd., t. îr, p. sis. 

(8) Ellea «talent faites avec des bâties en Ivoire en 
en marbre (pour les corps élastiques) et en balles d'ar- 
gile fraîche (pour les eorps mous >. 



en 



HUYGENS 



672 



vives (i) appelée aussi loi des forces ascen- 
sionnelles (2) , d'après laquelle la somme des 
produits de chaque masse par le carré de la 
vitesse est la même avant et après le choc. 

Huygens termine son travail par cette remarque 
curieuse que voici : « Lorsqu'un corps en choque 
un autre en repos, par l'entremise d'un tiers d'une 
grandeur moyenne (3), il lui communique tou- 
jours plus de mouvement que s'il frappait immé- 
diatement, et ce mouvement est le plus grand 
qu'il puisse être lorsque le corps intermédiaire est 
moyen géométrique entre l'un et l'autre. Il y a 
plus : ce mouvement sera encore plus grand si 
le corps en question est choqué par l'en- 
tremise de deux autres qui avec les deux ex- 
trêmes fassent une proportion géométrique con- 
tinue. Enfin, plus il y aura de moyens propor- 
tionnels entre l'un et l'autre, plus grande sera 
la vitesse du dernier comparée avec celle du 
premier. Si l'on supposait, par exemple, 100 corps 
en proportion double, le plus grand choquerait le 
moindre par l'entremise de 98 autres, et lui impri- 
merait une vitesse 2,338,492,188,000 fois plus 
grande que la sienne; au lieu que s'il l'eût choqué 
immédiatement , il ne lui aurait donné qu'une 
vitesse un peu moindre que double. 

Enfin, dans la cinquième et dernière partie , 
l'auteur propose l'application du ressort spécial 
à régler le mouvement du balancier des montres. 
Il fut, à cette occasion , vivement attaqué par 
l'abbé d'Hautefeuille,qui réclamait injustement 
la priorité de cette invention. (Voy. Haute- 
feuille ). 

De 1655 à 1663, Huygens fit plusieurs voyages 
en France et en Angleterre, où il communiquait 
à plusieurs personnes ses procédés à travailler le 
verre pour la construction de ses lunettes. Ap- 
pelé par Colbert, il vint en 1666 à Paris faire 
partie de l'Académie des Sciences, nouvellement 
fondée. Il était au nombre des savants les plus 
célèbres pensionnés par Louis XIV, et avait 
reçu un logement à la Bibliothèque du Roi. 
Son séjour à Paris fut de quinze années à peu 
près sans interruption. Dans cet intervalle il 
communiqua à l'Académie des Sciences un grand 
nombre de mémoires, dont quelques-uns , ense- 
velis dans les archives de l'Institut, sont en- 
core inédits; les autres, refondus par l'au- 
teur (4), parurent à Leyde, en français, sous 
le titre de Traité de la Lumière, où sont 
expliquées les causes de ce gui lui arrive 
dans la réflexion et dans la réfraction, et 



(l) L'eipression de force vire est due à Leibnitc, 
appelant force morte celle de la simple pression, qui 
n'est que comme le produit de la masse par la rttesse 
qu'elle aurait si le mouvement s'effectuait. 

(t) On l'appelle ainsi parce que de cette égalité de 
sommesventre les produits des masses par les carrés des 
vitesses avant et après le choc , il suit que le centre 
de gravité d'un système de corps a la puissance de re- 
monter à la- même hauteur que celle d'où il est descendu. 

(8) Vou. Montucla, Mis t. des Mathémat., t. Il, p. 413. 

(4) Entre autres un mémoire Sur l'Aimant. 



particulièrement dans Vêtrange réfraction 
du cristal d'Islande, avec un Discours de la 
Cause de la Pesanteur; 1690, in-4° (1). Cest 
dans cet ouvrage que Huygens développe sa théo- 
rie de l'ondulation, qui depuis a été universelle- 
ment adoptée : « Comme on tient pour certain que 
la sensation de la vue, dit-il, est excitée par l'im- 
pression de quelque mouvement de la matière 
qui agit sur les nerfs au fond de nos yeux , 
c'est encore une raison de croire que la lumière 
consiste dans un mouvement de la matière qui 
se trouve entre nous et le corps lumineux. De 
plus, quand on considère l'extrême vitesse dent 
la lumière s'étend de toutes parts , et que quand 
il en vient de différents endroits, mesme de tout 
opposés les rayons se traversent l'un l'autre sans 
s'empescher, on comprend bien que quand nous 
voyons un objet lumineux ce ne saurait être par le 
transport d'une matière ^ qui depuis cet objet 
s'en vient jusqu'à nous, ainsi qu'une balle ou 
-une flèche traverse Pair ; car assurément cela 
répugne trop à ces deux qualités de la lumière 
et surtout à la dernière. C'est donc d'une autre 
manière qu'elle s'étend, et ce qui nous peut con- 
duire à la comprendre , c'est la connaissance que 
nous avons del'extensiondu son dans l'air (2). » 
j'après des expériences alors toutes nouvelles , 
Huygens estima la vitesse de la lumière 600,000 
fois plus grande que celle du son. Quanta la cause 
de la pesanteur, il la trouve dans le mouvement 
« Car si parmi la matière fluide qui tourne dans 
l'espace, il se rencontre des parties beaucoup 
plus grosses que celles qui la composent, ou des 
corps faits d'un amas de petites parties accro- 
chées ensemble, et que ces corps ne suivent pas 
le mouvement rapide de ladite matière, ils se- 
ront nécessairement poussés vers le centre du 
mouvement et y formeront le globe terrestre, 
s'il y en a assez pour cela et supposé que U 
Terre ne fût pas encore (3). ».— Les expériences 
sur la différencede longueur du pendule à secondes 
sous différentes latitudes, Huygens les expliquait 
par l'action de la force centripète et de la force 
centrifuge. Comme la Terre est un sphéroïde (4) 
de révolution, ii faut raccourcir notre pendule 
à secondes sous l'équateur et l'allonger sous 
les pôles. Dans une Addition au Discours de 
la Cause de la Pesanteur, il critique quelques 
points du célèbre ouvrage de Newton ( Philoso- 
phie naturalis Principia ) qui venait de paraî- 
tre; il bat en brèche les tourbillons de Descartes, et 
donne quelques applications de la courbe qu'-fl 
appelle la logarithmique ou la logistique 
(courbe infinie, qui a une droite pour asymptote). 
Ce fut pendant son séjour à Paris, de 1666 à 
1681, que Huygens voyait la célèbre Ninon et lui 



(i) Ce traité a été ensuite traduit «n latin et reproduit 
dans m» Opéra varia. 

(S) Traité de la Lumière, p. 8. 

(S) Discours de la Cause de la Pesanteur, à 1a fio du 
Traité de la Lumière, p. 187. 

(4) IMd., p. 1*8. 



C73 



HUYGENS 



674 



adressa même, dit-on, des vers. Gomme il était 
protestant, il quitta la France lors de la révoca- 
tion de Tédit de Nantes. On essaya en vain de le 
retenir; et il cessa même toute correspondance 
avec l'Académie des Sciences, tandis qu'il conti- 
nuait d'envoyer des mémoires à la Société Royale 
de Londres, dont il était aussi membre dès la créa- 
tion de cet institut, rival de celui de France. Pen- 
dant son séjour à Paris, il avait connu Leibnitz, 
dont il ne voulut pas d'abord adopter le nouveau 
calcul (calcul différentiel et intégral). lise ser- 
vit de la méthode des anciens pour résoudre 
les problèmes célèbres de la courbe aux appro- 
ches égales , et de la chaînette : ces problèmes 
renfermaient la double. difficulté de les mettre 
en équation et de résoudre ensuite cette équa- 
tion , qui ne pouvait se présenter d'abord sous 
une forme finie, « La méthode de Descartes, 
ajoute Gondorcet , était cependant devenue, entre 
les mains de Wallis, un instrument plus simple 
que celle des anciens; mais, quoique Huygens 
la connût à fond, et que même il l'eût perfec- 
tionnée, il a préféré la méthode des lignes, dont 
une force de tête peu commune ne lui permettait 
guère de sentir les inconvénients, et à laquelle 
il tenait , soit par préjugé , soit parce que cette 
méthode, agissant toujours sur les choses 
mêmes, et. non sur des signes qui les représen- 
tent, ait réellement l'avantage de satisfaire plus 
pleinement l'esprit ( 1 ) » . 

Mous venons de montrer sommairement tout 
ce que Huygens avait fait pour la physique et la 
géométrie; il nous reste à dire ce que lui doit 
l'astronomie. 

Les travaux astronomiques d'Huygens se 
trouvent consignés dans les écrits intitulés : 
Saturni Luna , observatio nova (daté de La 
Haye, le 5 mars 1656; reproduit dans le t. m 
de ses Opéra varia (Leyde, 1724), p. 523-526; 
Systema Saturninunv, sive de causis mi- 
randorum Saturni phxnomenon et comité 
ejtis planeta novo; ibid., p. 529-595, avec des 
planches;— Brevis Assertio Systematis Sa- 
turnii sui, adressé au prince Léopold de Tos- 
cane; ihjd.jp. 621-640 ; c'est une réponse à l'écrit 
d'un savant italien (Eustachi de Diviniis Septem- 
pedani ), intitulé : Brevis Annotatio in Systema 
Saturninum Christ Hugenii; ibid., p. 599- 
618;— Ko<*\uiïétùQoz, sive de Terris cœlestibus, 
earumque ornatu, conjecture ad Constante 
num Hugenium fratrem, Guilielmo III, 
Magnx Britannix régis a secretis ; ibid. , p. 643- 
722 (2). Parfaitement initié aux travaux de Co- 
pernic, de Kepler et d'Hevelius, Huygens enri- 
chit l'astronomie de plusieurs découvertes impor- 
tantes, que nous lui laisserons, pour ajouter à 
leur intérêt historique, raconter lui-même. « L'an 

(1) Condoreet, Éloge d'Huygens. 

(l) Le Oosmotfieorot^ c'est-à-dire Contemplation du 
monde, a été. traduit en français par M. D. ( Dufoor), 
aous le tttre emprunté à l'ouvrage, de Fontenelle : La 
Pluralité des M ondes f Parla, 1701, io-lf. 

NOCV. BIOCR. CÉNÉR. — T. XXV. 



1655, le 25 marj , en regardant Saturne avec 
un tube dioptrique (lunette de 12 pieds), j'a- 
perçus , en dehors des anses ou bras (prseter 
ansas sive brachia) de la planète, à l'occident 
et à une distance d'environ trois scrupules (mi- 
nutes ) une petite étoile ( stellulam), située à peu 
près dans le plan des anses (anneau de Saturne). 
Me doutant que ce pourrait bien être là un corps 
dans le genre des quatre lunes de Jupiter, je 
marquai la position respective de Saturne et de 
cette petite étoile. Je ne m'étais pas trompé : le 
lendemain, elle avait bougé, et je pus ainsi me- 
surer les jours suivants son déplacement dans un 
temps donné (1). » Ce satellite de Saturne, le pre- 
mier dans l'ordre delà découverte, est le sixième 
dans l'ordre de la distance à la planète; il a reçu 
depuis le nom de Titan. Plus tard, Cassini décou- 
vrit (dans l'intervalle de 1672 à 1684) quatre autres 
satellites de Saturne (Japhet, le plus extérieur 
de tous ; Rhéa, le cinquième dans l'ordre des dis- 
tances ; Dioné, le quatrième ; Téthys, le troisième). 
Plus de cent ans après Cassini, W. Herschel dé- 
couvrit, en 1789, deux nouveaux satellites, Mimas 
et Encelade, les plus voisins de la planète ; enfin, 
de nos jours, en septembre 1848, Bond, à Cam- 
bridge, et Lassel, aux États-Unis , découvrirent 
presque simultanément un dernier satellite, Hy- 
périon, le septième dans l'ordre des distances, en 
sorte que le total des satellites de Saturne s'é- 
lève aujourd'hui à huit. Condorcet et, d'après 
lui, Arago ont pour ainsi dire reproché à 
Huygens de n'avoir pas poussé plus loin ses 
recherches sur les satellites de Saturne par respect 
pour une vaine théorie. « Le même instrument 
( avec lequel Huygens avait découvert le premier 
satellite) aurait, dit Arago, pu servir à en aper- 
cevoir d'autres. Mais Huygens ne les chercha 
point : après son observation, le nombre des sa- 
tellites se trouvait égal à celui des planètes de 
notre système. Or, selon d'anciennes opinions, 
à la domination desquelles le grand géomètre 
n'avait pas su se soustraire, il n'était pas pos- 
sible que le nombre des planètes principales fût 
inférieur au nombre total des planètes secon- 
daires. Des idées théoriques ont très-souvent 
conduit à de brillantes découvertes : ici l'effet 
fut diamétralement opposé (2) ». Cette assertion 
manque de justesse. Si Huygens a fait, dans son 
Systema Saturninum, un certain rapproche- 
ment entre le nombre des six lunes (le satellite 
de la Terre, celui de Saturne, et les quatre sa- 
tellites de Jupiter) et le nombre de six planètes 
alors connues (Vénus, Mercure, la Terre, Mars, 
Jupiter, Saturne ), il n'y attachait aucune vue théo- 
rique. Cela est si vrai, que revenant sur sa décou- 
verte dans son Cosmotheoros, l'auteur s'ex- 
prime ainsi : « M. Cassini nous a fait voiries troi- 
sième et cinquième satellites (de Saturne) en 1672, 



(1) De Saturni luna, t: III. Op. var. t p. BIS. 
(*) Aragon Astronomie populaire, t. IV, p. 461; et Con- 
dorcet, Éloge d'Huygens. 



675 



HtJYGEttB 



676 



et plusieurs fois depuis. H nous écrivit en 1684 
qu'il Tenait de trouver le premier et le second 
( dans Tordre des distances alors admises ) ; mais 
on les aperçoit très-difficilement, et je n'oserais 
assurer que je les aie vus jnsqu'à présent, non pas 
qoe je fasse de la difficulté d'ajouter foi à cet 
homme si célèbre et de les mettre au nombre 
des compagnes de Saturne : on peut, an con- 
traire, conjecturer avec raison qu'un ou plusieurs 
de ces satellites sont encore cachés à nos yen* 
( vêl unam vel plures latere suspicari licet 
Hët deest ratio) ; car, comme il y a entre les 
deux derniers un plus grand espace que n'exige 
tattfoujrtiondes distances des autres, il se pour- 
rait bien qu'un sixième satellite occupât cet es- 
pace vide, ou même qu'an delà dn cinquième il 
y en eût d'autres qui circuleraient autour de la 
planète et qu'on n'a pn voir encore à causé 'de 
leur peu d'éclat, puisqu'on n'aperçoit pas ce cin- 
quième satellite et qu'il ne se fait jamais voir en 
plein (1) ». 

N'était-ce pas là laisser une belle marge aux 
observateurs à venir? Évidemment si Hnygens 
n'a découvert qu'un seul satellite de Saturne, c'est 
qu'à l'aide de ses instruments il mi était impos- 
sible d'en apercevoir d'autres. Et il faut, en effet, 
de puissantes lunettes et des conditions très-fa- 
vorables pouf voir les trois satellites découverts 
plus récemment. — Huygens eut aussi le mé- 
rite d'avoir le premier montré que cette espèce 
d*armille mince et plate (anneau) qui entoure SMs 
tutne n'est point, comme on le croyait depuis 
Galilée, adhérente à la planète, qu'il y a au con- 
traire entre celle-ci et l'anneau un intervalle 
an moins égal à la largeur de cet anneau, et enfin 
que cet anneau est incliné sur l'ëcliptique. Par une 
habitude alors très-commune chez les savants, M 
annonça cette découverte dans une espèce d'ana- 
gramme ainsi disposée : aaaaaaa eècce d eeeee 
g h iiiiUi llll thm nnnnnnnnH oooo pp q 
rr s ttttt uuuu y ce qui, en mettant chaque 
lettre à sa place, signfie : Annulo ângttur, te- 
nui, piano f nusquam cçhaerente, ad eclip- 
ttcam inclinato. Il proposa cette énigme en 
1656, et comme personne n'avait pu la deviner, 
il l'expliqua lui-même trois ans après, dans té 
Systema Saturninum (2). — C'est Huygèns qm 
vit aussi le premier la grande nébuleuse (encore 
non résolue )d'Orion( autour de l'étoile marquée 
8, près de la garde de Tépée). « Voici, dit-il; an 
phénomène digne d'être rapporté, et qui n'a pas éfé 
encore, que je sache, remarqué par personne (3). 
Les astronomes comptent dans l'épée d'Orion 
trois étoiles très-voisines l'unede l'autre. Lorsque 
j'observais par hasard, à l'aide de mon tube dîop- 
trique, celle du milieu , j'en vis douze, au lien 
d'une (il en donne ici la figure). De ces étoiles, 



(l) Cosmotheoros, llb. II, p. 697 (t. III, des Op. var. ) 
(8) p. 566. La dédicace, adressée au prince Léopold de 
Toscane, porte la date dus Juillet 1889 (La Haye). 

(3) Simon Marins avait déjà découvert en îet» ta nébu- 
leuse d'Andromède. 



il y en avait trois presque cotttiguës , et quatre 
autres brillaient comme i travers un petit nuage 
(veiut trans nebulam tilcebant), de telle 
manière que l'espace qui les environnait parut 
beaucoup plut lumineni que tout le reste dn 
ciel {tnulto illustrWê épparefet relique muni 
ûcelô ); et Comme celui-ci était parfaitement se- 
rein et (Tira noir foncé, on attrait dit qu'on avait, 
comme à travers une brèche du §ftnamedt, la per- 
spective d'iine région pku lamineuèe {mlut hiatu 
quûdam interruptutn videbatur, per que* 
in plagafn magis tueidatn met prospectus); 
et ce- phénomène prodigieux occupe apparem- 
ment toujours la même placé (i). » On a lien 
de s'étonne? que l'auteur ne soit pas, dans ses 
autres écrits , revenu sur la question des nébu- 
leuses. 

C'est surtout dans le Cosmotheords que l'auteur 
a donné libre carrière à la hardiesse de son génie. 
Cet olivrage est particulièrement destiné à prou- 
ver que toutes les planètes etmémetes étoiles sort 
habitées 4 . Lès raisons qu'il en donne ont été son- 
vent reproduites depuis : elles reposent presque 
tontes sar l'analogie. Comme s'il avait préfnquVtt 
pourrait manifester quelque surprise à le voir 
s'occuper de pareilles choses, il répond d'avance : 
« Si quelqu'un objecte que nous prenons one 
peine inutile et que notre travail né sert de rien, 
je dirai qu'on devrait par la même raison rejeter 
toute l'étude de la physique, en ce <jn'eHe con- 
siste à découvrir les causes de ce qui se passe 
dans la nature, science oh c'est déjà se foire 
beaucoup estimer que d'avoir découvert des 
choses vraisemblables. Mais, pour disposer ses 
conjectures avec art, il ne faut pas oublier qu'il 
y a plusieurs degrés de vraisemblance et de pro- 
babilité : c'est à en faire un juste discernerait 
que consiste l'usage de la raison.... Cent ^re- 
viennent de voyages lointains jugent d'ordinaire 
pttts sainement de leur pays natal que ceux qoi 
n'ont jamais quitté leurs foyers. De même aossi 
celui qui réfléchit en lui-même à la pluralité des 
Terrés semblables à la nôtre, ne regardera pas 
comme de grandes merveilles ce qui se passe ici 
dans l'esprit et le commerce dés hommes.-. . . . Noos 
croirons donc qu'il y a dans les planètes des 
corps qui se meuvent, qui se transportent d'an 
lieu dans on autre, $ui ne sent en rien inférieurs 
à ceux qni sont sur la Terré j éô ttn toot, qifil 
y a des animaux et des plantée <fuî servent à h 
hourrituTe de ceux qni les habitent. » Puis il 
ajoute : « Ce qui m'oblige de croire qu'il y a dans 
les planètes on animai raisonnable, c'est que 
sans cela notre Terre aurait de trop grands «t** 
tages (et cependant C'est une dés planètes tes ph« 
petites), et serait trop élevée étf dignité (elfe 
qni n'est ni la plus proche fti W ptos eïofgnée <to 
Soleil) par-dessus les autres planètes si elle avait 
un animal si fort étové. au-dessus de tons les 
animaux.... Enfin, est-il bien fûmtuMe de peu- 

(i) Systema Saê*rn. f ft. Ufc 



C77 



HUYGENS 



678 



ser que des corps célestes , parmi lesquels notre 
Terre occupe un rang si infime, n'aient été créés 
qu'afin que nous autres petits hommes puissions 
jouir de leur lumière et contempler leur situa- 
tion et iear mouvement. * — L'auteur ne se fait 
pas d'ailleurs illusion sur la difficulté de ces pro- 
blèmes» et il reconnaît que la différence phy- 
sique qui existe entre la Terre et la Lune, l'une et 
l'autre les plus accessibles à nos moyens d'inves- 
tigation, loin de diminuer cette difficulté, l'aug- 
mentent etioore. La description qu'il fait delà Lune 
est d'une grande exactitude: « On voit, dit-il, dans 
notre Lune, même en la regardant avec des lunet- 
tes de trois eu quatre pieds seulement, plusieurs 
chaînes de montagneset des dépressions indiquant 
des plaines très-larges. Sa surface est donc rabo- 
teuse : on voit les ombres des montagnes dn côté 
opposé an soleil , puis des vallées plus ou moins 
petites, renfermées dans les sommets presque cif * 
culaires de ces montagnes* Au milieu de ces val- 
lées s'élèvent encore des monticules. J)e la forme 
arrondie de ees vallées , Kepler tirait Un argu- 
ment pour admettre que c'était là d'immenses ter- 
rassements exécutés par les habitants de la Lune. 
Mais cela est absolument impossible , et à cause 
de la grandeur de ces vallées , et parce que des 
causes naturelles peuvent très-bien produire des 
cavités drbiculaires du même genre. Je n'y trouve 
rien non plus qui ressemble à des mers, con- 
trairement à l'opinion de Kepler et de la plupart 
des astronomes* Mais il y a d'immenses plaines ou 
plateaux , beaucoup plus obscurs que lés mon- 
tagnes; ce sont ces plateaux que l'on prend 
communément pour des mers et que l'en décore 
du nom d'océans. En me servant de lunettes pins 
longues, j'y ai vu de petites cavités rondes, obs- 
curcies par des ombres qui tombent au dedans, 
ce qui ne convient point à la surface de la mer. 
D'ailleurs ces mêmes plaines, si étendues, ne 
présentent point une surface parfaitement unie 
quand on les regarde attentivement C'est pour- 
quoi ce ne sont point des mers Il est mani- 
feste que la Lune n'est pas environnée d'une at- 
mosphère semblable à celle qui entoure notre 
Terre, parte que, s'il y en avait, on ne pourrait 
pas apercevoir les bords de la Lune auçsi nette- 
ment limités qu'on les voit dans les occultations 
d'étoiles. S'il y avait Une atmosphère, la Lune à 
sa circonférence serait plus faiblement éclairée 
(evanidaquadamltice), et serait terminée comme 
par un duvet (veîut lanugine finir et ur) (1). » 
L'opinion de Huygens sur la non-existence de 
mers et d'une atmosphère a été depuis généra- 
lement adoptée. Cependant la question d'une at- 
mosphère lunaire ne nous parait pas encore en- 
tièrement tranchée (2). 

(1) Cosmotheoros, 11b. U, p. 708-706. 

(*) Cette q*stton , à notre avis , a toujours été jaque 
ici mal posée. 

En effet, si l'on considère d'une part, l'élévation dis- 
proportionnée des montagnes lunaires ( puisqu'il y en 
a qui dépassent les plus hautes montagnes de la Terré, 
bien que celle-ci soit plus grande que la Lune), et de 



Le second livre du Cosmotheoros, où l'auteur 
fait assister le lecteur au spectacle du ciel, en le 
transportant successivement au milieu des habi- 
tants de toutes les planètes et de leurs satellites, 
est du plus haut intérêt et éminemment propre 
à faciliter l'étude de l'astronomie. Ainsi, les ha- 
bitants de Mercure voient le Soleil trois fois plus 
grand que nous ne le voyons, parce qu'ils en sont 
trois fois plus près. Quant à la chaleur et à la lu- 
mière, elies doivent être neuf fois plus intenses 1 
une pareille chaleur nous serait insupportable, 
et brûlerait les plantes de la nature de celles qui 
croissent chez nous. Aux habitants de Vénus 
le diamètre du Soleil paraîtra une lois et demi 
aussi grand et sa surface plus de deux fois ; c'est 
pourquoi cet astre leur fournira deux (ois plus de 
chaleur et de lumière qu'à nous. Vénus est la pla- 
nète qui approche le plus de la température de 
la Terre. Notre planète doit paraître aux habitants 
de Mars à peu près comme à nous Vénus, avec 
des phases semblables à celles de la Lune, et elle 
ne doit pas, pour eux, s'éloigner du Soleil de plus 
de 48 degrés. Les lunes qui circulent autour de 
Jupiter et de Saturne doivent procurer aux ha- 
bitants de ces planètes des spectacles aussi beaux 
que variés ; les Saturniens ont, en outre, la jouis- 
sance de la vue de leur anneau. Mais ce sont 
surtout les habitants de la Lune (s'il y en a)» 
c'est-à-dire ceux de l'hémisphère perpétuellement 
tourné vers nous, qui doivent jouir du spec- 
tacle le plus étrange. D'abord la Terre se montre 
à eux suspendue dans l'espace beaucoup plus 
grande que ne nous parait la Lune; « ils la voient 
jour et nuit, comme si elle était immobile , s'ar< 
réter au même endroit du ciel. Les uns l'aper- 
çoivent sur leur tété, et elle leur sert de zénith , 
pour les autres elle est à une certaine hauteur de 
l'horizon, pour d'autres enfin, elle est placée dans 
le plan même de l'horizon; ils la voient tournant 
toujours autour de son axe et montrant, dans Tes* 
pace de vingt-quatreheures, toutes les régions ter* 
restres les unes après les autres, sans même excep- 
ter les pôles, que nous-mêmes ne connaissons pas 
encore bien. Ils la voient successivement croître, 
pleine , diminuer et disparaître dans l'espace d'un 
mois, exactement comme nous voyons la Lun<\ 
avec la différence qu'ils f eçoîvent de la Terre Hno 
lumière quinze fois plus grande qtfê Cette <|un 
nous envoie la Lune, si bien que dans l'hémis- 
phère qui est tourné vers nous ils ont des ffttiH 
fort claires... Le Soleil ne se lèvechéz eux qu'une 
fois tous les mois 4 à les compter comme le* 
nôtres, et lie s'y couche de même qu'une fate : 
lis ont ainsi leurs jours et leurs nuits quinze fois 
plus longs que nous, et toujours égaux par un 
éqninoxe perpétuel (f). » S'H y a des astronomes 

l'autre l'extrême raréfaction de notre atmosphère nu 
sommet des pics neigeux, et qui probablement ne dépasse 
pas dix fois la hauteur du ifoont-Blanc, on sera conduit 
à admettre l'existence d'un atmosphère lunaire : seu- 
lement, ce sera comme un océan qui ne baigne que lus 
vallées ( P. B. ) 
(*) Cotmotheorà*, Ud. II, p. 708. 

M. 



679 



HUYGENS 



G80 



dans la Lune , il leur faudra tout le génie de Co- 
pernic, de Galilée, de Kepler, d'Huygens et de 
Newton réunis, pour parvenir, an milieu de ces 
apparences si extraordinaires à démêler la réalité 
du mouvement des corps célestes. Hésiode, pour 
déterminer la hauteur dn ciel et la profondeur 
des Enfers, avait dit qu'une grosse enclume 
mettrait neuf nyctémères (nnit et jour) à tom- 
ber du ciel sur La terre, et le même espace de 
temps à tomber de la terre dans les enfers. 
Huygens, après avoir cité ce passage du poète 
grec, ajoute : « Un boulet de canon , qui fait en* 
viron 100 toises par seconde (d'après les expé- 
riences du P. Mersenne), et qui conserverait tou- 
jours la même vitesse, emploierait près de 25 
ans pour aller de la Terre au Soleil. De sorte qu'il 
lui faudrait 125 ans pour aller de Jupiter au So- 
leil, et 250 de Saturne au Soleil. Oe calcul dépend 
de la mesure du diamètre de la Terre , lequel , 
suivant les observations les pins exactes des 
Français, est de 6,538,594 toises de Paris, en 
comptant 57,060 toises pour un degré du cercle 
le plus grand. Tout cela montre l'énorme gran- 
deur de tous ces globes en comparaison de notre 
petite Terre, sur laquelle nous entreprenons tant 
de choses , tant de navigations , tant de guerres. 
Plût à Dieu que nos monarques pussent y ré- 
fléchir : ils apprendraient qu'ils se donnent 
bien du mal à eux et à tant d'autres quand ils 
emploient toutes leurs forces à occuper quelque 
petit coin de la Terre (1). » 

Pour terminer cet exposé succinct des travaux 
et découvertes d'Huygens, nous ajouterons qu'il 
inventa le micromètre (2) pour mesurer le diamè- 
tre apparent des planètes , qu'il perfectionna la 
machine pneumatique et le baromètre, qu'il 
proposa le premier de mesurer les, hauteurs à 
l'aide du baromètre, qu'il donna la vraie théorie 
des lunettes (3), enfin qu'il construisit un Plané- 
taire qui lui fit découvrir une propriété des 
fractions continues, que Lagrange, dans ses ad- 
ditions à l'Algèbre d'Euler, appelle « une des 
principales découvertes de ce grand géomètre ». 



(l) « Quod utinam discunt cogltentque reges et monar* 
chae nostrt : ut sciant quantllla In re laborent cura de 
angulo aliquo Terre occupa ndo totis virions, magno mul- 
torummalo, contendunt. • ( Cosmotheoros, lib. Il, p. 711.) 

(t) Ce micromètre, décrit dans le Systema Satuminnm, 
consistait « à placer, au foyer commun de l'objectif et de 
l'oculaire d'une lunette, une lame de cuivre triangulaire, 
mobile eotre deux coulisses établies aux côtés opposés 
du tube. En faisant glisser la lame, on cherchait dans 
quelle partie elle couvrait exactement le diamètre de la 
planète observée ; la largeur de la lame en ce point, com- 
parée au diamètre de la pièce circulaire qui terminait le 
champ, et dont la valeur en minutes et secondes était 
déduite du temps du passage d'une étoile équatortale , 
faisait connaître le diamètre cherché. » ( Arago, Jstron.> 
t. II, p. 48.) 

(3) il établit, entre autres, que la grandeur de l'image 
focale est proportionnelle à la longueur de la distance 
focale de la lentille objective, et fit voir ainsi tous les 
avantages attachés à la grande ouverture des lunettes et 
A leur longueur; enfin il donna une règle très-simple, a 
l'aide de laquelle le grossissement peut se déduire de la 
valeur des distances focales de l'objectif et de l'oculaire, 
auxquels il assigna leur précieux et véritable rôle. 



En 1689 Huygens fit nn nouveau voyage en 
Angleterre , principalement dans le but d'y faire 
la connaissance personnelle de Newton. La fin 
de sa vie fut troublée par des ennuis suscités 
par des parents. « Peut-être sa famille, dit Con- 
dorcet, eut-elle de la peine à lui pardonner d'avoir 
renoncé à tous les avantages qui auraient- re- 
jailli sur elle et fie n'avoir été, qu'un grand 
homme. » Au commencement de l'année 1695, 
Huygens perdit complètement ses facultés : il 
avait déjà éprouvé un accident pareil pendant 
son séjour à Paris; alors un voyage dans son 
pays natal l'avait rétabli. Mais, après cette der- 
nière redhute, il ne conserva que quelques ins- 
tants lucides : il en profita pour transcrire ses 
dernières volontés ; il légua à ses neveux (fils de 
son troisième frère ) sa fortune, qui était consi- 
dérable, et chargea les professeurs Buréherde 
Volder à Leyde et Bernard Fullenà Franeker de la 
publication de ses manuscrits. Peu de jours 
après il mourut, à l'âge de soixante-six. ans et 
trois mois. A l'exemple de ses illustres contem- 
porains, Descartes, Leibnitz et Newton, Huygens 
ne s'était point marié : il pouvait compter sur 
ses œuvres peur perpétuer son nom. Appelé par 
sa naissance et la fortune à vivre dans le grand 
monde, il préféra la retraite, et passa la plus 
grande partie de sa vie à la campagne, todt en- 
tier au culte des sciences aux progrès desquelles 
il a tant contribué. 

S' Gravesande a réuni les écrits imprimés dn 
vivantd'Huygens (1), et les a publiés sous le titre de 
Ckristiani Hugenii Zulechemii, dura viveret 
Zeleni toparchx, Opéra varia, 2 vol. en 4 
tomes in-4° (la pagination se suit dans les tomes 
réunis) ; Leyde (van der Aa), 1^24. Cette édition 
est accompagnée d'une sorte de supplément : 
Chris tiani Hugenii, etc., Opéra reliquat vol. 
in-4° ; Amsterdam, 1728. — Les manuscrits lé- 
gués par Huygens à deux de ses amis ( voy. plus 
haut) avaient paru sous le titre d'Opéra pos- 
thuma; 1700, in-4°; on y trouve Dioptrica, 
où l'auteur donne la théorie complète du télescope 
et du microscope ; — Commentatio deforrnandis 
Vitris (originairement écrit en hollandais, et 
trad. eu latin par Boerhaave) ; — - De Coronis et 
Parhelis; — De Motu Corporum ex Pérou- 
sione; —DeVi Centrifuga; — Automatipla- 
netarii Description Enfin J. Uylembrock a 
publié, d'après desmanuscrits de Leyde, Christ. 
Hugenii aliorumque sxculi XVH viror. 
celèbr. Exerdtationes Mathematicœ ; Leyde, 
1833, in-4°. F. H. 

Vita Hugenii, en tète du 1. 1 de ses Opéra varia. — 
Journal des Savants, 1674. — Montucla . ffist. des Ma- 
thématiques, t. II. — belambre, ffist. de C Astronomie 
moderne, 1. 11. — Condorcet , Éloge d'Huygens* — Ersdt 
et Gfuber, Allgent. Encyclop. 

HTJYttHHS {Martin), latiniste étionandais , 

(l) * l'exception de treize mémoires publiés dans les'PM- 
lotoph. Transactions de la Société Royale de Londres. 
qui conserve, dit -on, encore plusieurs mémoires i 
d'Huygens. 



681 



HUYGENS — HUYOT 



• 682 



mort en 1778. II était régent à l'école latine de 
Dordrecht. On a de lui : P. Terentii Cartha- 
giniensis Âfr. Comedix sex. Accédant Index 
vocabulorum et phrasium absolutissimus et 
Terentii lmitatio Plautina nunc primum 
édita; Amsterdam, 1710, in-1 2. L— z— e. 
i Paqoot , Mémoires, t. IV, p. 48. 

huyot (Jean-Nicolas), architecte français, 
né à Paris le 25 décembre 1780, mort à Paris 
le 2 août 1840. Son père, qui était aussi archi- 
tecte, dirigea de bonne heure ses études vers 
sa profession. Il se préparait aux examens de 
l'École Polytechnique lorsque les circonstances 
le firent entrer dans l'atelier du peintre David. 
Quelques années après il étudia l'architecture, sous 
la direction de Peyre. En 1 807 il remporta le grand 
prix d'architecture à l'École des Beaux-Arts et 
partit pour Rome. 11 s'y occupa d'une restauration 
du vaste temple de La Fortune à Préneste. Après 
un séjour de six années en Italie, Huyot revint en 
France en 1813. Bruyère, alors directeur des tra- 
vaux publics, lui donna une place de sous-inspec- 
teur dès travaux du gouvernement. Lorsque le 
comte de Forbin ( voy. ce nom ) fit son voyage 
dans le Levant, il emmena Huyot avec lui. Us 
s'embarquèrent à Toulon en 1817 ; mais à peine 
avaient-ils relâché à Milo, que Huyot, en visitant 
les ruines de la ville antique, se cassa une jambe. 
Il fut transporté à Smyrne, où stationnait la flotte, 
et logé dans le couvent des capucins français. 
Pendant une assez longue convalescence il s'oc- 
cupa à tracer sur les cartes un projet de voyage 
dans l'Asie Mineure , et fit les plans de divers 
monuments pour la ville de Smyrne. Il visita en 
outre les ruines de Tantal , où se trouvaient une 
grande quantité de murs pélasgiques. Après avoir 
exploré les constructions qui se trouvent sur 
le mont Sipyle, Huyot dessina le plan de la ville 
de Smyrne, bâtie par Alexandre sur la montagne 
où est maintenant le château , et près de là le 
fameux temple d'Esculape. Il reconnut les ruines 
du monument élevé en l'honneur d'Homère, à 
la source du Mélès. Il fit ensuite une première 
excursion à Éphèse pour en étudier les rui- 
nes, puis il se dirigea vers Constantinople. En 
route il dessina les ruines d'Assos. A Constanti- 
nople Huyot fit des projets pour l'achèvement 
du palais de France et les plans d'un hôpital , 
dont la construction était très-avancée à son dé- 
part pour l'Egypte, où il se rendit sur un bâti- 
ment français. D'après les instructions de Dro- 
vetti , il partit du Caire pour la haute Egypte, 
se fixa à Thèbes , et dessina la plus grande 
partie des monuments de cette cité antique. Il 
remonta ensuite le Nil jusqu'à la seconde ca- 
taracte, et esquissa tous les monuments de la 
Nubie qui jusqu'alors étaient peu ou mal con- 
nus. Il fit une étude particulière des car- 
touches qui se trouvaient sur les édifices , les 
copia, et parvint à classer chronologiquement 
tous les monuments qu'il avait pu voir. De 
retour au Caire, Huyot fut invité par le pacha 



à donner son avis sur les travaux du canal 
que ce prince faisait creuser du Nil à Alexan- 
drie. Huyot parcourut toute la ligne du canal, 
en vérifia le nivellement, et observa les di- 
vers terrains qu'il traversait. Entre les lacs de 
Mareotis et d' Aboutir, le travail était rendu dif- 
ficile par une va3e mouvante qu'entretenait la 
filtration des eaux des lacs : Huyot surmonta 
cette difficulté en faisant établir sur les deux 
rives du canal des ouvrages en If is et en maçon- 
nerie qui par leur combinaison retinrent les 
terres mouvantes et empêchèrent les eaux des 
lacs de se répandre dans le canal. Il partit en- 
suite d'Alexandrie pour Smyrne et entreprit un 
voyage dans l'Asie Mineure en se dirigeant d'a- 
bord vers Éphèse. Campé pendant plusieurs se- 
maines au milieu des ruines de cette ville, il en 
releva exactement le plan ainsi que les dessins 
de ses nombreux monuments. Il explora ensuite 
les villes de Prienne, de Gnide, d'Halicarnasse , 
de Milasso , de Stratonice , de Pergame , de Trai- 
tes, etc., et enrichit ses portefeuilles des plans 
de ces cités, de leurs édifices, et des détails de 
leur construction. Après ce voyage pénible, Huyot 
revint à Smyrne, d'où il s'embarqua pour i'At- 
tique. Il passa une année à Athènes, levant le 
plan de la ville, ainsi que de ses longues mu- 
railles, de ses trois ports et des monuments de 
la cité et de l'acropole. On lui dut quelques nou- 
velles recherches sur le Parthénon,les Propylées 
et le temple de Thésée. U entreprit sur les lieux 
mêmes de faire la restauration de ces monuments 
antiques. Il parcourut ensuite la Béotie et l'At- 
tique, et se disposa à faire un voyage dans le 
Péloponnèse. La révolution de Grèce vint à écla- 
ter : Huyot s'embarqua sur un bâtiment italien. 
En arrivant à Patras, il trouva la ville en feu; 
tout ce qu'il y avait déposé de précieux fut dé- 
truit. Il se réfugia alors à Larta, auprès du consul, 
ne sauvant que se3 esquisses. Forcé de renoncer à 
son voyage dans le Péloponnèse, il s'embarqua 
pour Ancêne , où il mit ses dessins en ordre. 
En sortant du lazaret, il prit la route de Rome, 
où il resta un an, relevant aussi le plan général 
de cette ville et de ses monuments. 

De retour à Paris, Huyot fut chargé du cours 
de l'histoire de l'architecture à l'École des 
Beaux-Arts , chaire qui était devenue vacante 
par la mort de Dufourny. Les dessins qu'il rap- 
portait, les recherches qu'il avait faites, et l'é- 
tude des monuments anciens qu'il avait poursui- 
vie sur les lieux avec une grande persévérance, 
lui permirent de faire un cours aussi instructif 
qu'intéressant. En 1823, l'Académie des Beaux- 
Arts l'appela dans son sein à la place de Heurtier, 
dans la section d'architecture. Vers cette époque, 
une ordonnance royale ayant prescrit la conti- 
nuation des travaux de l'arc de triomphe de la 
barrière de l'Étoile, que Louis XVIII voulait con- 
sacrer à la mémoire des succès de l'armée d'Es- 
pagne, le ministre de l'intérieur chargea Huyot 
de lui présenter divers projets pour achever ce 



6*8 



HUYOT - 



monument d'une maniève appropriée aux cir- 
constances et en conservant toutefois les masses 
existantes. Un des projets présentés fut adopté 
par le conseil des bâtiments civils : il consistait 
à ajouter quatre colonnes engagées surmontées 
d'un attique aveo une inscription sur chaque 
face. Le ministre Corbière préféra s'en tenir 
aux plans de Chalgrin ; mais comme ces plans, 
trop développés, en rendaient l'exéeutien presque 
impossible, le ministre chargea une commission 
de la surveillance des travaux. Le monument 
était élevé jusqu'au grand are lorsque Martignao 
en rendit la direction à Huyot en 1 829. Les travaux 
étaient trop avancés pour revenir à son projet, 
n continua donc celui de ses prédécesseurs, en 
ajoutant toutefois de nombreuses modifications 
aux parties qui restaient encore à exécuter, 
comme les caissons de la grande voote, l'enta- 
blement, l'attiqne et les parties supérieures du 
monument. Après la révolution de juillet 1830, 
d'Argout destitua Huyot, qui sous la restauration 
avait encore établi le fameux Calvaire du mont 
Vatérien. En outre il avait fait les projets d'une 
église Saint-Charles à élever sur les terrains de 
Belle-Chasse, à la place de laquelle on voit 
aujourd'hui Samte-Clotilde, exécutée dans un 
autre style et par d'autres architectes. Enfin 
Huyot mt chargé en 1836 de dresser les plans 
d'agrandissement du Palais de Justice. Ses plans, 
maladroitement limités à l'origine, ont été adop- 
tés plus tard et ont été continués depuis sa mort 
avec quelques accroissements. L. L— t. 

Sarrut et Saint-Edme, Biagr. des Hommes du Jour, 
t. IV, a« partie, p. 809. — Rabbe , Vieilli de BoUJolln et 
Sainte- Pieuve, Biogr. univ. et portât, des Contemp. — 
E, J. Qél*Gli)»e 4 Jourmtl de* p#afc, 16 mars 1SM 

huysman de Malin es, peintre belge , né à 
Anvers , en 1648 , mort a Matines, le 1 er juin 
1727. Il était fils d'un habile architecte, qui lui 
donna les premières notions du dessin. Devenu 
orphelin fort jeune, il'suivit successivement les 
leçons de Gaspard de Wit et de Jacques van 
Artois, et devint bon paysagiste. Van der Meulen, 
le célèbre peintre des guerres de Louis XIV , 
fit les plus grands efforts pour l'attirer à Paris, 
mais Huysman préféra se fixer à Matines, où il 
mourut presque octogénaire. 

« Huysman, dit Descamps, avait un grand 
talent pour rendre les montagnes ; on croit y voir 
■ la moqsse et les cailloux s'y détacher. Il a une 
façon de mire toute particulière et ses premiers 
plans ne peuvent se comparer, pour le coloris, 
qu'à ceux de Rembrandt. » Ses principaux ouvra- 
ges sont à Matines, où on remarque surtout dans 
l'église collégiale de Notre-Dame : Les Disciples 
d'Emaûs; on voit aussi des paysages de Huys- 
man à Anvers, à Gand , à Bruxelles, à La Haye, 
à Dresde et dans les grandes galeries de l'Europe. 
A Paris, on possède de lui entre autres morceaux 
une fort belle Vue du Mont* Roussel, près de 
Louvain. Huysman a retouché plusieurs tableaux 
de Minderhout, d'Acht. Schelling et de van Ar- 



HUZARD 684 

tels, auxquels il a tellement imprimé sa ma- 
nière qu'ils ne peuvent se distinguer de se* créa- 
tions; A« de L. 

De*e*m\*,LmWéées Peintres heAla*de*$, l. n, p au, 
M*. - Jacob Campo Weyerroao et Hpubrafett*. &e 

SchUderfionst der Nederlanders, t. III, p. l?S, 

huysum (Jean vam), peintre Mlandais, fils 
du précédent, né à Amsterdam, en 1682, mort 
dans la même ville, en, 1749, Élève de s<m père, 
il s'adonna d'abord au paysage avec beaucoup de 
succès ; mais plus tard il se consacra è la reproduc- 
tion des fleurs et des fruits, et dans ce genre on 
peut dire qu'il arriva à la perfection,, par le goût 
le plus délicat , le pinceau le plus moelleux , un 
fini précieux et une imitation parfaite. Il peignait 
avec une égale vérité le velouté des fruits , l'éclat 
des fleurs, le transparent de la rosée, le mou- 
vement même des insectes, £e grand talent 
d'Huysum contribua peut-être à gâter l'humeur 
de l'artiste. 11 était orgueilleux , jaloux et d'une 
humeur difficile, Sur la fin 4e ses jours des cha- 
grins domestiques égarèrent son esprit : il s'a- 
bandonna à la boisson, et tomba dans une- décré- 
pitude anticipée. Cependant, quelques mois avant 
sa mort, i] recouvra l'usage complet de ses facul- 
tés^t s'en servit pour mettre ordre à ses affaires 
et terminer plusieurs de ses œuvres, Ses dessins 
sont fort recherchés ; pour ses tableaux, ils ne 
se rencontrent que dans les principales galeries 



Jean Van Huysum eut deux frères, qui se dis- 
tinguèrent aussi dans la peinture : 

Juste, mort à vingt-deux ans, tit qui peignait 
avec succès les batailles. 

Jacques , mort à Londres : il copiait avec un 
talent supérieur les toiles de son frère Juste et 
celles des grands maîtres hollandais. 

PtUUngtoo, Dictionaryqf Pointer 9, 

buzabd ( Jean- Baptiste ), célèbre agro- 
nome français, né à Paris, le 3 novembre 1755, 
d'une famille qui y exerçait la marécbalerie de- 
puis plus d'un siècle, mort le 1 er décembre 
1838. Il fit la plus grande partie de ses études 
ehez les augustins réformés, appelés Petits- 
Pères. Ce fut même d'après leurs conseils qu'en 
1769, à l'âge de treize ans, il entra, au moment 
de sa création , à l'École vétérinaire d'Alfert, où 
il étudia sous les auspices de Bourgelat, et où, 
bien jeune encore, en 1773, il fut lui-même 
nommé professeur. Mais dès 1775 son père l'o 
bligea de quitter l'enseignement vétérinaire et de 
se consacrer exclusivement à la pratique qui de- 
vait lui assurer une existence plus large. Malgré 
cela, il concourut en 1779 pour le prix de pratique 
fondée à Alfort par ordonnance royale , et il 
remporta, le premier, la médaille d'or qui de» 
rait être et qui fut une décoration permanente 
pour le lauréat, plus précieuse à ses yeux que les 
insignes qui lui furent conférés plus tard. Vers 
cette époque, il travailla , en collaboration avec 
Vicq-d'Azyr, à des rapports sur divers sujets 
d'économie rurale et de médeeine vétérinaire, 



685 



HUZARD 



adressés h la Société royale de Médecine dont il 
était devenu membre, et gn lui confia le mn de 
rédiger tous les articles de médecine vétérinaire 
de l'Encyclopédie méthodique* En 1785, W fut 
chargé par le tribunal des Juges et Marchands, 
et ensuite par les divers tribunaux de Paris, 4e? 
expertises relatives aux vices rédhibitoires. Il 
exerça cette fonction jusqu'en 1824, et dans 
cet intervalle de quarante années il réunit 
douze volumes in-fol. de rapports et 4e procès-! 
verbaux qui contiennent d'utiles matériaux sur 
la jurisprudence vétérinaire, dont il a ainsi jeté 
ses fondements. En 1792 il devint membre 
du conseil vétérinaire et des remontes de l'ad- 
ministration de la guerre, et deux ans après, 
lorsque le gouvernement fut organisé en douze 
commissions executives ou département» minis- 
tériels, il entra à la commission d'agriculture et 
des arts , qui forma ensuite le ministère de l'in- 
térieur, sous les titres successifs d'agent, de 
commissaire du gouvernement et enfin d'inspec- 
teur générai des écoles vétérinaires, fonctions 
qu'il exerçait encore dans sa quatre-vingt-unième 
année, avec tonte la plénitude de ses facultés. Il 
eut avec Tessier, Gilbert et surtout Danbenton, 
beaucoup de part à l'introduction en France de 
la précieuse race des mérinos d'Espagne, en fai- 
sant insérer dans le traité de l'an m, conclu avec 
cette puissance, l'article secret par lequel le gou- 
vernement espagnol permettait l'exportation de 
plus de cinq mille mérinos. 

Vers la fin de l'empire, Eurard avait été 
chargé de créer deux nouvelles écoles vétéri- 
naires , l'une à Aix-la-Chapelle , l'autre à Zut- 
phen. La marche des événements ne lui permit 
pas de remplir toute sa mission ; mais le roi des 
Pays-Bas utilisa les plans d'organisation pour 
Zutphen,et cet établissement existe encore. Plus 
heureux en 1829, Huzard mena à fin le travail de 
création de l'école de Toulouse, qu'il a officielle- 
ment ouverte à une nouvelle branche de l'ensei- 
gnement, celle qui est toute spéciale à la connais- 
sauce des maladies du grog bétail.. Membre du co- 
mité de la vaccine, il contribua beaucoup à la pro- 
pagation de cette importante découverte. 

Huzard a appartenu à un grand nombre de 
sociétés savantes, au développement ou à l'illus- 
tration desquelles il a concouru par des travaux 
qui portaient un cachet fout particulier; il a été 
l'un des fondateurs de la Société d'Encouragement 
pour l'Industrie nationale, et il était entré à l'A- 
cadémie des Sciepces lors de la formation de 
l'Institut, en 1795. Il était parvenu à créer une 
bibliothèque spéciale de plus de quarante mille 
volumes, dont il annota les plus rares. Il publia, 
en outre, les ouvrages suivants : Almanach 
vétérinaire , avec Chabert et Flandrin ; 1782 , 
in-12; — Essai sur les maux aux jambes des 
chevaux; 1784,in-8°; — Instruction sur les 
moyens de s'assurer de V existence de la morve 
et d'en prévenir les effets; 1785, in-8°. Cet écrit 
eut quatre éditions ; la dernière parut en 1 797 ; — 



Instruction sur les soins à donner aux che- 
vaux pour les conserver en santé sur les routes, 
et dans les camps, imprimé par ordre du co- 
mité de salut public, an n (1794), in-8°; nou- 
velle édition, 1817 ; ce petit ouvrage, qui eut 
un grand nombre d'éditions, fut tiré à plus de 
60,000 exemplaires; —r Essai sur les Mala- 
des qui affectent les Vaches laitières des 
faubourgs et environs de Paris; 1794, iu-8*j 
— Instruction sur l'MpMemw des Vaches , etc.; 
J786, nv$°; -*- Instruction et nouveau Rap- 
port imprimé* m France et en Allemagne et 
relatifs à la Maladie des Bêtes à cornes <fui a 
régné dans le département des Fortts; 1797, 
in-8°j — Instruction sur les Maladies in- 
flammatoires et épi&ootiques, et principale- 
ment sur celle qui affecte les bêtes à cornes 
des départements de Vest , d'une partie de 
V Allemagne et des parcs d'approvisionne- 
ment des armées de Sambre et Meuse et de 
Rhin et Moselle, publiée par le conseil d'agri- 
culture; 1797, in-8°; — • Mémoire sur la Péri- 
pneumonie chronique, ou^phthisiepulmonaire 
qui affecte les Vaches laitières de Paris et 
des environs, avec les Moyens curatifs et 
préservatifs de cette maladie, et des Obser- 
vations sur Vusaqe du lait et de la viande 
des vaches malades, an vm (1860), in-8 # ; — 
Comptes-rendus à la Classe des Sciences ma- 
thématiques et physiques de VJnstitut na- 
tional de la vente des laines du troupeau de 
Rambouillet pendant les années IX-XI 
(1801-1803) (avec Tessier), in-4°; — Instruc- 
tion sur t Amélioration des Chevaux en 
France, destinée principalement aux culti- 
vateurs; an x (1802), in-8°; — Compte-rendu^ 
à l'Institut national des améliorations qui 
se font dans l'établissement rural de Ram- , 
bouillet, et principalement de celle des bêtes 
à laine, et de la vente qui a eu lieu le 15prai- 
rial an XI (1803) ; in-4°; — Notice biogra- 
phique des différentes éditions du Théâtre 
d'Agriculture d'Olivier de Serres , lue à la 
Classe d'Histoire et de Littérature ancienne de 
l'Institut de France, le 23 mai 1806 ; in-4°; — 
Instructions et Observations sur les Mala- 
dies des Animaux domestiques, avec les 
moyens de les guérir, de les conserver en santé, 
de les multiplier, de les élever avec avan- 
tage, etc., publiées avec Chabert et Flandrin , 
1812 , 6 vol. in-8° ; les IV e , V e et VI e volumes 
ont eu une 3 e édit. de 1812 à 1824; — Instruction 
sommaire sur la Maladie des Bêtes à Laine, 
appelée Pourriture ; avec Tessier, 1822, in-8°; 
— Conjectures sur l'origine ou l'étymologie 
du nom de la Maladie connue dans les che- 
vaux sous le nom de Fourbure, auxquelles on 
a ajoute des notes bibliographique» sur quel- 
ques anciens ouvrages de vétérinaire; 1827, 
in-8°; — Notes bibliographiques sur l'ou- 
vrage aTffortensio Lando , intitulé : Sermoni 
funebri de' vari autori nella morte di di- 



687 



HUZARD — HYBRÉAS 



688 



▼erai animali; 1835, in-8°; — Notes biblio- 
graphiques concernant les ouvrages du duc 
de JSardo (Bélisaire Aquaviva) sur la Vénerie 
et la Fauconnerie; 1835, in 8°. Indépendam- 
ment des ouvrages et opuscules mentionné» plus 
haut, Huzard est auteur d'un grand nombre de 
mémoires publiés dans divers recueils scientifi- 
ques, tels que La Feuille du Cultivateur, ceux 
de la Société centrale et royale d'Agriculture, 
les Annales de V Agriculture française, etc., 
ainsi que de nombreux articles d'économie do- 
mestiqueetruraleetd'art vétérinaire, insérés dans 
le Dictionnaire d'Agriculture de la Section d'É- 
conomie rurale de l'Académie des Sciences, qui a 
eu deux éditions ; dans le nouveau Dictionnaire 
d'Histoire naturelle, édité par DeterviUe. On 
connaît encore de lui un Mémoire sur les causes 
qui s'opposent à la guérison des fractures dans 
les grands animaux , et sur quelques moyens 
simples propres à contribuer à cette guérison , 
inséré dans les Mémoires de la Société Agraire 
de Turin. Enfin, Huzard a été l'éditeur du Traité 
des Haras et des Mulets, de Hartmann, 1788, 
in-8°, et de plusieurs ouvrages de Bourgelat, 
qu'il a enrichis de notes importantes. 

E. Gayot. 

Éloges de Huzard , par Bonafous , Pariset et Ralnard. 
— Notices biographiques sur Huzard, par le baron Syl- 
vestre, Mérat et Renault. 

hvitfeld de Oddersberg (Arrild), homme 
d'État et historien danois, naquit en 1549, à Ber- 
gen (Norvège), où son père était commandant, et 
mourut le 13 décembre 1 ($09. Après avoir voyagé, 
il entra dans l'administration, fut nommé séna- 
teur en 1586, et chancelier du royaume en 
1595. Il se démit de ces fonctions quelque temps 
avant sa mort. Il avait rempli diverses missions 
diplomatiques en Angleterre (1597), en Hollande 
et à Brème ( 1602 ). On a de lui : Danmarks Ri- 
ges Krcenike, tilligemed Dispekrœnike (jGhro- 
nique du royaume de Danemark, avec la chro- 
nique épiscopale ) ; Copenhague , 1 596- 1 604 , 
10 vol. in-4°. L'édition de 1652, 2 vol. in-fol., est 
moins correcteque la première, mais elle contient 
en outre : Erkebiskops Jens Grands Historié 
( Histoire de l'archevêque Jens Grand), qui a été 
aussi publiée à part par Nœrmissom en 1636 et 
en 1650, in-8°. La chronique de Hvitfeld s'arrête 
en 1559. Le style en est assez pur, et les faits 
y sont exposés avec clarté et simplicité. L'au- 
teur, flatte la noblesse et le clergé. Il a commis 
un assez grand nombre d'erreurs, quoique sa 
haute position le mit à même de recourir aux 
documents originaux et qu'il en ait inséré plu- 
sieurs dans son ouvrage. Il travailla à la Chro- 
nique de Frédéric 11 par Rcsen, et il édita : 
Andrex Sunonis Versio legum provincialium 
Scaniœ latina; Copenhague, 1590, in-4°; — 
Den Pforske Hirdskraa (Le Droit aulique nor- 
végien), traduit de l'aneien norvégien en da- 
nois; Copenhague, 1594,.in-4°; —Jens Mor- 
tensens norske Krœnike (Chronique norvé- 



gienne de Jens Morten&en); ibid. ; — JElno- 
thus, De Vita et passionibus sancti Canuti; 
ibid., 1602, in-8°. 

Un autre Hvitfeld ( Claus ) mit au pillage les 
biens ecclésiastiques de la Norvège, lors de l'in- 
troduction de la réforme dans ce pays en 1536. 
E. Beauvois. 

T. de Hofman, Portr. histor, des Hommes Illustres du 
Danemark , part. I , p. 14-19. — P. T. Waodal , De 
paa Jssgerspriis ved Mindestem hœdrede fortjente 
Mstnds Levnetsbeskrivelser. — Wolf, Histor. Ordbog., 
VII, ftt-81. — Nyerup, Dansk-norsk. Litter.-Lex. et 
Litterat. i Middelalderen, p. 155-195. — Baden, Dan- 
marks Riges Hist. — Beramte Nordmœnd, publié par 
Cb. Tœnsbtrg, 11V. VI ; CbrUtianla, 1854, in -fol. 

■wiid (André-Christian), orientaliste da- 
nois, né le 20 octobre 1749, à Copenhague, ou 
son père était pasteur, mort le 3 mai 1788. Il 
voyagea aux frais de l'Etat, de 1777 à 1780, étu- 
dia à Gœttingue sous Michaelis et Heyne, et se 
rendit ensuite en Italie , où il fut protégé par 
plusieurs cardinaux, quoique luthérien. A son 
retour, il fut nommé aumônier, et professeur au 
collège de la Régence. On a de lui : Spécimen 
inédit» Versionis Arabico-Samaritanx Pen- 
tateuchi ; Rome, 1780, in-4°. H wiid ignorait que 
ce fragment eût déjà été publié et traduit par 
Durell, à Oxford, en 1763 ; — LibeUus criticus 
deindole codicis mss. N. T. bibliotkecx Cx- 
sareo-Vindobonensis ; Copenhague, 1785; — 
Udtog af en Dagbog holden i Aarene 1777- 
1780 (Extrait d'un Journal de Voyage en Alle- 
magne, en Italie, en France et en Hollande, tenu 
de 1777 à 1780 ); Copenhague, 1787, avec un 
appendice, 1788, in-8*; — des lettres dans 
Briejwechsel de Schlœzer, livr. 39 ; — des noti- 
ces dans OrientalischeBibliothek de Michaelis, 
t. X, XVH, XXÏ, et dans Minerva, 1786-1788. 
• E. B. 

Minerva, 1788, t. H, p. *61 ; t. IV, p. 7, 288, - I.alide, 
Mindesmserker paa Assistentskirkegaarden ved Eja- 
benhatm, llvr. Il, avec port. — Nyerop et Kraft, Dansk- 
norsk Litteraturlex, 

htbbéas ( T6ptaç ), de Mylasa, en • Carie , 
orateur grec, vivait dans le premier siècle avant 
J.-C. Son père lui laissa pour tout héritage une 
mule et un chariot. Il gagna quelque temps sa 
vie à voiturer du bois. Il alla ensuite suivre les 
leçons du rhéteur Diotréphès à Antioche, et fut 
nommé à son retour inspecteur des marchés 
( àyop*v6[ioç ) de sa ville natale. En remplissant 
ces fonctions, il acquit quelque fortune , s'ap- 
pliqua aux affaires publiques, et devint le per- 
sonnage le plus influent de Mylasa. Il était, sui- 
vant Strabon , le plus grand orateur de son 
temps. On cite de lui un mot àEuthydème, autre 
orateur, qui avait eu aussi une très-grande in- 
fluence sur la ville de Mylasa, et qui en avait 
fait un usage tyrannique. . « Euthydème, dit-il, 
tu es un mal nécessaire dans l'État, car nous ne 
pouvons ni vivre avec toi, ni sans toi. » Lorsque 
Antoine pillait l'Asie en 41, après la Bataille de 
Philippes,Hybréas obtint que Mylasa ne payerait 
pas une double contribution comme l'exigeait le 



689 



HYBRUÀS r- HYDE 



triumvir : « Si tu veux, lui dit-il, que nous 
payions deux tributs dans un an, donne-nous 
deux étés et deux automnes dans la même' an- 
née. » L'invasion de l'Asie Mineure par les Par- 
thés, sous les ordres de Labienus et de Pacorus, 
ne rencontra de résistance sérieuse qu'à Lao- 
dicée et à Mylasa. Hybréas, qui dirigea la dé- 
fense de cette dernière ville, se réfugia à Rhodes 
pour se soustraire à la colère de Labienus. Sa 
maison et ses biens furent mis au pillage. Il 
rentra à Mylasa après l'expulsion des Parthes. 
Tous ses ouvrages sont perdus, et on ne con- 
naît de lui ique deux ou trois passages cités par 

Sénèque. Y. 

Plutarque.Vnton., 24. — Strabon, XIII, p. 680; IX1V, 
p, 659, 660. — Westermann, Gesch.d. GrUck. BerêdUam- 
keit, 86, n° 80. 

hybrias (T6ptac), de Crète, poëte lyrique 
grec, d'une époque incertaine, mais probablement 
antérieure de plusieurs siècles à l'ère chrétienne. 
On a de lui une chanson on scolie militaire qui 
nous a été conservée par Athénée (XV, p. 695-6)", 
par Eustathe (ad Odyss., p. 276, .47) et dans 
Y Anthologie Grecque (Brunck, Analec., vol. I, 
p. 159); en voici la traduction : « J'ai pour ri- 
chesse une grande, lance, et une épée, et un bon 
bouclier de peau, défense du corps. Avec cela je 
laboure, je moissonne, je presse le doux vin de 
la vigne, je me fais appeler maître. Et ceux qui 
n'osent pas porter lance et bon bouclier de peau, 
tous ceux-là tombent à genoux devant moi, 
m'adorent comme leur seigneur et me traitent 
de grand roi. » Y. 

Jacobs, Anthol. Gretca., t. I, p. 91; t. VI, p. SOT..- II- 
gen, Scholia seu Carmina Conviv. grseca, p. 10». 

hyde ( Anne ) , première femme • du duc 
d'York, frère de Charles II, roi d'Angleterre, 
dont il fut le successeur sous le nom de Jac- 
ques II. Elle naquit en 1637, et mourut en 1671. 
Anne était fille d'Edouard Hyde, comte de Cla- 
rendon, chancelier de l'échiquier sous Charles I er , 
grand-chancelier sous Charles II, et de Françoise 
Ailesbury. Lord Hyde avait suivi Charles II sur 
le continent et partagé sa mauvaise fortune pen- 
dant le protectorat. En 1659, tandis que le par- 
lement anglais agitait la question du rétablis- 
sement de la monarchie, la famille royale se 
trouvait à La Haye. Anne Hyde était alors fille 
d'honneur de la princesse d'Orange , sœur de 
Charles et de Jacques. Anne n'était pas jolie ; 
dans plusieurs mémoires de son temps elle est 
même dépeintecomme fort laide; mais sa grande 
courtoisie faisait oublier qu'elle avait la bouche 
extraordinairement fendue, et les yeux fort 
êraillés. D'ailleurs elle avait une assez belle 
taille, beaucoup d'esprit et un grand air. Ces 
agréments-là séduisirent le prince Jacques. Anne 
eut l'habileté d'obtenir de lui une promesse de 
mariage qui tranquillisa sa conscience sur leur 
liaison secrète, dont les suites devinrent bientôt 
si apparentes que le jeune prince se détermina 
à épouser clandestinement sa maltresse. Ce nou- 
vel en gagera emeat eut [lieu en Angleterre peu 



après la restauration des Stuarts sur le trône , 
en 1660. Mais la grande difficulté était de faire 
accepter l'union légitime des deux amants par la 
famille royale. Néanmoins, Charles H, bien qu'il 
apprit cette mésalliance avec beaucoup de dé- 
plaisir, ne résista pas longtemps aux instances 
de son frère pour lui faire reconnaître la validité 
de son mariage. Les princesses ne devaient passe 
montrer aussi accommodantes. Prévoyant sans 
doute leur opposition , le père de l'épouse du duc 
d'York, feignant d'être indigné de la conduite de 
sa fille, conseille au roi de la faire enfermer à la 
Tour, et n'ayant pas réussi à attirer sur la tête 
d'Anne la colère d'un prince naturellement dé- 
bonnaire, il séquestra la jeune femme dans son 
appartement, où, en apparence à son insu, Jac- 
ques trouva moyen d'avoir accès. Pour récom- 
penser Hyde de cette petite comédie dont pro- 
bablement il ne fut pas dupe, mais qui témoignait, 
à la vue du public, de son respect pour ses maî- 
tres, Charles éleva ce courtisan bien appris aux 
honneurs de la pairie, et lui fit un présent de 
20,000 livres sterling. Anne, cependant, avait en- 
core bien des obstacles à vaincre pour parvenir 
à se faire accorder le rang et le titre de duchesse 
d'York. La princesse d'Orange, qui se trouvait 
alors à Londres , déclara qu'elle ne souffrirait 
jamais qu'une femme qui s'était tenue debout 
derrière son fauteuil, comme une domestique, 
eût sur elle le droit de préséance dont devait 
jouir à la cour l'épouse du frère du roi. La reine 
mère, Henriette de France, vint à son tour si- 
gnifier son opposition à une alliance qu'elle re- 
gardait comme un déshonneur pour les deux 
maisons de Stuart et de Bourbon. Les ennemis 
politiques de Hyde agirent ensuite avec une au- 
dacieuse malice, qui faillit effectuer la rupture 
des engagements contractés par le duc d'York 
avec Anne. Sous leur pression, plusieurs sei- 
gneurs de la cour attestèrent son inconduite 
antérieurement à son mariage. Un d'entre eux, 
Charles Berkeley, affirma avec serment qu'elle 
avait été autrefois sa maltresse, et il y eut des 
théologiens et des légistes qui soutinrent, en pré- 
sence du duc, que le mariage d'un prince du 
sang n'était pas valide s'il n'avait pas préala- 
blement reçu la sanction dif souverain. Ces 
résistances et ces machinations finirent par 
ébranler la confiance qu'avait Jacques en son 
épouse. H cessa d'aller la voir, et assura la fa- 
mille royale qu'il ne considérait plus Anne comme 
sa femme légitime. Mais, peu de temps après, 
Anne ayant donné le jour à un fils, la tendresse 
du duc pour elle se réveilla; les protestations 
d'innocence de cette jeune mère, corroborées par 
la rétractation de ses accusateurs, chassèrent de 
l'esprit de Jacques les doutes qu'on y avait fait 
naître. La reine douairière consentit à appeler 
Anne sa fille; la princesse d'Orange, qu'on eût 
moins aisément décidée à la traiter de sœur, 
mourut ; et la duchesse d'York, heureuse (foccu- 
per enfin à la cour d'Angleterre et dans la famille 



mi 



loyale le haut rang qu'elle s'était tu si àpre- 
ment disputer, eut la générosité de pardonner à 
ses calomniateurs. Depuis lors jusqu'à sa mort 
Anne jouit d'un très-grand ascendant sur son 
mari ; elle jui fit partager sa prédilection pour 
la religion catholique romaine , dans le giron de 
laquelle elle entra environ un an ayant sa mort. 
Son père, le comte de Clarendon, qui depuis 
trois ans vivait dans Fexil , s'était vainement ef- 
forcé, dans ses lettres, de la rattacher au culte 
anglican. La duchesse fut administrée, à son lit 
de mort, par un franciscain. L'évoque d'Oxford, 
son confesseur protestant, fut aussi admis en 
sa présence & ses derniers moments; mais le 
duc l'ayant informé du changement de religion 
de son épouse , jl se borna à lui adresser quel- 
ques paroles de consolation. Les convictions re- 
ligieuses d'Anne étaient sincères : elle eut raison 
de suivre l'impulsion qu'elle en recevait en ce 
qui la concernait personnellement; mais son 
zèle pieux ne s'arrêta pas là, et le prosélytisme 
qu'elle exerça avec succès sur l'esprit de son 
mari doit être regardé comme la cause première 
d(H* dissensions qui troublèrent l'Angleterre sous 
le règne de Jacques 1J, et qui finirent par dépos- 
séder ce prince du trône dont il avait hérité de 
son frère. Anne avait eu huit enfants, dont deux 
seulement lui survécurent. Ce furent Marie, 
princesse d'Orange, et Anne, princesse de Da- 
nemark f qui succédèrent, l'une après l'autre , à 
leur père détrôné. Camille Lebrun. 

Kennet, Megister. *- Graramopt, Mémoires. — Claren- 
don, Papert. — Moncones, Journal, — Lingard, History 
of England. — Home, History of England. 

htde ( Thomas ), célèbre orientaliste anglais, 
né à Billingsley ( comté d'York ), |e 16 mai 1636, 
et mort à Oxford, le 18 février 1703. Après avoir 
reçu de son père, ministre à Billingsley, les pre- 
miers principes des langues orientales , il fut 
admis au collège du roi à Cambridge, en 1652. 
Wheelock, qui y enseignait l'arabe, lui inspira 
un goût particulier pour le persan, qu'il étudia 
avec autant d'ardeur que de succès. La connais* 
sance qu'il acquit de cette langue le fit juger 
propre, malgré sa jeunesse, à prendre part à la 
publication de la Bible polyglotte de Londres. 
En 1653 il se rendit à Londres dans ce but. I| 
transcrivit en caractères persans la traduction en 
cette langue du Pentateugue t faite par Jacob hen 
Joseph de Tus (Corazan) et imprimée en 1546, 
à Constantinople, en caractères hébreux ; il en fit 
4a traduction latine qui accompagne le texte 
persan q>ns cette polyglotte, et il fut chargé en 
même temps du soin de surveiller l'impression 
des textes arabe, syriaque et persan. En 1653 
il entra, comme agrégé, au collège de la reine 
à Oxford , et bientôt après il fut nommé pro- 
fesseur d'hébreu. Il succéda en 1691- à Pococke 
dans la chaire d'arabe. Nommé vers 1659 conser- 
vateur adjoint de la Bibliothèque Bodleyenne, 
en remplacement de Stubbé , il en devint plus 
tard conservateur en chef. Sous les règnes de 



HTDE 



69* 
Charles II, de Jacques II et de Guillaume 1)1, il 
remplit les fonctions de secrétaire interprète, tt 
eut À traduire une foule de pièces envoyées au 
gouvernement anglais par )es divers États mu- 
sulmans de l'Afrique et de l'Asie. Ses travaux 
furent récompensés, en 1660, par un caaonicat de 
l'église de Salisbury, et en 167$ par l'arçhidia- 
conat de Gloceater. 

On a déjà, vu qu'à la culture des langues sémi- 
tiques Hyde joignit celle du persan, encore peu 
étudié. 11 profita de la présence en Angleterre 
d'un jeune Chinois amené en Europe par les jé- 
suites, pour apprendre la langue chinoise. Les 
langues classiques lui étaient familières, Enfin, il 
possédait une érudition étendue et solide. Une 
aussi rare réunion de connaissances le mit en 
état d'étendre le cercle, jusqu'alors assez restreint, 
des travaux des orientalistes. Tandis qu'avant 
lui ils avaient concentré presque exclusivement 
leurs recherches sur les langues , les littératures 
et l'histoire des peuples sémitiques, Hyde leur 
ouvrit un champ plus vaste, celui de la religion 
et de l'histoire des grands empires qui avaient 
autrefois occupé le centre de l'Asie. Que l'essai 
qu'il fit lui-même sur ces matières n'ait pas été 
heureux, c'est ce qui ne doit pas étonner, puisque 
le premier il s'aventurait sur un terrain nouveau ; 
mais il eut du moins le mérite d'appeler l'atten- 
tion et les investigations des savants sur àes 
sujets qui peut-être sans lui seraient restes long- 
temps négligés, et dont la connaissance est ce- 
pendant d'une si grande nécessité pour l'histoire 
de l'antiquité. 

On a cje flyde : fabulx longitudinumet Latu 
tudinum Stellarum fixarum ex observatione 
prindpis TJlugh-Beiglii; occesserunt Moham- 
med Tmni Tabulm Declinationum et recta- 
rum Ascensionum, arab. et lat, y cum commen- 
tants; Oxford, 1665, in-4°. Le, catalogue des 
étoiles fixes, dressé par Ouloug-Bey, petit-fils de 
Tamerlan, avait' déjà été publié; mais les notes 
de Hyde, surtout celles dans lesquelles il com- 
pare les divers noms des étoiles chez les Grecs, 
donnent un nouveau prix à l'ouvrage original; — 
Catalogua impressorum Librorum Biblio- 
thecse Bodleyanae; Oxford, 1674, in-fol. Il ré- 
digea le catalogue pendant qu'il était conserva- 
teur de eette célèbre bibliothèque ; — Quatuor 
Evangelia et Acta Apostolorwn lingua m- 
laica caracteribus europœis; Oxford, 1677, 
in-4°f — Epistola de Mfnsuris et Ppnderibus 
Sérum sive Sinensium, À la suite du traité de 
Hyde Bernard : De Mensufis et Ponderibus 
antiquis; Oxford, 1688, îiH*f — Abraham 
Peritsol flinera Mundï, id est cosmographia t 
hxbr. et lat. t cum commentants ; occesserunt 
annotadones in traetatum Alb. Pobovti De 
Turcarum Uturgia, pcregrinatione necessa- 
ria, circumcisione, etc., necnon castigatio in 
Angelum a S.-Josepha ; Oxford, 1691, in-4°. Les 
notes du traducteur font le principal mérite de ce 
livre. La réponse au P. Ange de Saint-Joseph, 



693 



HVPE 



694 



qui est à la fin de ce volume, est une refotatioo 
de la critique que ce Père avait faite, dans la 
préface de sa Pharmaeapœa Persica ( Paris; 
16gt, in»**), de la version persane des Évangiles 
dans la Polyglotte de Londres que Hyde avait re- 
vue et qu'il avait traduite en latin ; —De Jeudis 
orientalibus Libri II, quorum prior historiam 
Schahiludii continué, cum pralegomenis / al- 
ler historiam cseterorum Orientis ludorum 
exhibet ; Otford, ifiUé, 31 vol. »-*•, fig.; %' édij;., 
1702, iui8 . Dans le premier livre, consacré au 
j eu des échecs, il recherche l'origine et je$ diverses 
modifications qu'il a subies en Orient et en Eu» 
rope. A la suite de ces recherches , qu trpuve le 
texte hébreu et une traduction latine de deu* 
petits poèmes sur $e jeu , l'on d'Abraham ippr, 
Essa et l'autre de Bousemiorrilw-Zacbjia, *aj)bin 
né dans le midi de la France, Le deuxième livre 
traite des autres jeu* usités dans l'Ûrjent. ïlyde les 
compare avec des jeux analogues en usage parmi 
les Grecs, les Latins et même daes l'Europe mo- 
derne. Lacroze reproche £ l'auteur de cet ou- 
vrage d'avoir fait de trop nombreux emprunts 
à Saumaise, sans même le nommer; «- Jfisr 
toria Religionis veterum Persarum, neenon 
eorum Magorum liber Sad-der, Çoroastris 
prmeepla, seu religionis canones continent, 
persieo latine versus , cum appendice j Oxford, 
1700,û>4 o , fig.; 9 e édit. revue et augm,, due 4 
Hunt età Costar, sous ce nouveau titre : Veterum; 
Persarum, Parthorum et Medorum Relfc 
gionis Bistoria; Londres, 1700, in»4°, planches. 
C'est l'ouvrage capital de Jlydç, On ne neuf 
nier qu'il n'ait su tirer parti de ce qu'on trouve 
sur la religion des Perses dans les anciens écri- 
vains grecs et dans quelques auteurs persans 
postérieurs à l'hégire. Mais, privé des documents 
les plus essentiels, entre autres des livres sacrés 
des anciens Perses, que l'Europe ne possédait 
pas encore, il dut nécessairement se faire de 
cette religion des idées fort erronées. C'est ajn&i 
qu'il assure que le monothéisme régna d'abord 
parmi les Perses; qu'il s'altéra plus tard en se 
mêlant au sahéisme; qu'Abraham I0 ramena à 
sa pureté primitive, et qu'il s'altéra de nouveau 
par un second mélange avec le culte des astres* 
Au commencement du dix-huitième siècle on n'é- 
tait pas encore en mesure de relever ces singut- 
lières erreurs. L'érudition de l'auteur fit illusion, 
et, plein de confiance en un savant qui, an jugement 
même de Herder ( 1 ), s'était pénétré profondément 
de l'esprit de l'Orient, on reçut son ouvrage avec 
faveur, et on crut qu'il présentait un tableau fidèle 
de l'ancienne religion des Perses, Cette opinion 
tomba plus tard, d'abord devant les critiques de 
l'abbé Foucher, qui en 1759 commença de publier, 
dans les Mémoires de V Académie des Inscrip- 
tions et Belles» Lettres, une série d'articles sur 
cette religion, et ensuite devant celles d'Anqnetil 



(1) Herder, Adrastea, ton». VI, pag. 6* de t'édtt. de 
Leipzig, ISS». 



Duperroq, qui avait apporté en France les livres 
sacrés des Perses, et qui avait sur ce sujet des 
notions beaucoup plus près de la vérité que 
celles de Hyde H de l'abbé Foucher, — Les di- 
vers ouvrages de Hyde, sauf sou Histoire de la 
religion des Perses, ont été réunis et publiés avec 
quelques opuscules inédits qu'il avait laissés, 
sous ce Utre : $yntagtnq pisser tationum guqs 
olim Th. flyde separatim edidWf Oxoniae, 
1767, 2 vo). jn-4°. Cette publication est due à 
Gr, Sharp. Las opuscules inédits qu'elle contient 
son! ; tipeçimen Maimonûlis more nevochin 
Hnguq çttanutterib. arabfàs cum interpré- 
tation* Mina et nofis; — Spécimen Historiée 
Timuri f arabiçe, persice et latine: — Spé- 
cimen çantmprimi dmnippetœ hafiz; — 

Qratiod* {Àngmç Àrqbicp fflfiyuUale, Prx- 
sfanttyet ttilitate^im^r» prononcé par Hyde 
je J8 mai J093 en «umpiençant ses leçons d'a- 
rabe ; — ÇommerçiHm Epittolicum, recueil 
de trente lettres frites et reçues par Hyde; — 
enpu un essai de Gr, Sbarp sous ce titre : Ap- 
pen&x de UnqW Sinensi aliisjue Hnguis 
orientalibus. Michel Nicolas. 

Qioçraph. Jnfl. f tom. }?. — Préface de Waiton h ta 
Bible polyglotte de Lendra. — Diseouneur lestwtncip. 
édition* du Bibies P9t*jalf>ttêts ftrb, \m . M»" 1 *- ~ 
Wpyer, Gescti. der #Ar$/frr#<W% 

flYDK de kepyille [Jean- Guillaume , 
baron), homme politique français, né. à La Cha- 
rité-surr J^oire, te 24 janvier t77ô, mort à Paris, 
le 28 maj 18^7, Son père, Anglais d'origine, pro- 
priétaire de Ja terre de Neuville, acheta en 1788 
une belle manufacture ; la révolution le ruina. Le 
jeune Hyde de Neuville, él£ve du collège du car- 
dinal bempine ; ne voulut pas y rester lorsque son 
professeur, qui avait refusé le serment à la cons- 
titution, fut remplacé par un prêtre assermenté. 
Jl acheva ses études par les soins particuliers 
du professeur démissionnaire. A peine âgé de 
sei?e ans, il se. mêla à la politique, et, lors du 
procès de Louis XVI, il servit d'escorte à Mates- 
herbes, et c'est en s'appuyant sur son bras que le 
défenseur du monarque déebu quitta pour la der- 
nière fois la barre de la Convention. Op dit même 
qu'il avait écrit à un membre de la Convention 
pour s'offrir £ défendre le roi ; mais il n'avait 
pas dû tarder h comprendre que s'il pouvait 
y avoir quelque courage dans cette démarche , 
elle ne manquait pas non plus de présomption. 
Revenu auprès de sa mère, il se concilia l'estime 
des gens de bien dans la Nièvre, en plaidant pour 
UU père de famille accusé d'avoir mal parlé de 
}a république, et qu'il réussit à tirer de danger, 
feu de temps après, il enleva de vive force quel- 
ques prisonniers qu'il sauva. Les princes pros- 
crits entrèrent alors eu relation avec ce jeune 
partisan de leur cause ; ruais Hyde fut enfin ar- 
rêté a Cogne, Mis eu liberté provisoire, il vint à 
Paris, d'où, sous le faux nom de Paul Berry, il 
entretint une correspondance suivie avec le 
comte d'Artois. Il devint un des principaux agents 
de ce prince, fit plusieurs voyages en Angleterre, et 



695 



HYDE 



696 



servit souvent d'intermédiaire entre la famille 
royale et le ministre Pitt. Il se mit en rapport 
avec les députés royalistes du club de Clichy, 
auquel appartenait son beau-frère Delarue; mais 
il fut assez habile pour ne pas être compris dans 
la liste des proscrits du 18 fructidor. Rentré 
dans fa Nièvre après cette journée, et investi du 
titre de commissaire du roi, il ne tarda pas à 
être poursuivi pour avoir frappé un agent du 
gouvernement. Il se réfugia de nouveau à Paris, 
et échappa aux poursuites dirigées contre lui, 
grâce à la protection du ministre Lambrechts. 
Les menées royalistes continuaient dans l'ouest 
et à Paris avec vigueur. Le 18 brumaire vint 
les interrompre. Hyde de Neuville et le cheva- 
lier deCoigny, commissaire secret de Louis XVIII, 
gagnèrent à leur cause plusieurs écrivains de ta- 
lent, et répandirent avec profusion des brochures 
dans lesquelles étaient expliqués les principes 
de la légitimité. Hyde de Neuville ne s'arrêta 
' pas là. Il eut, sous le nom 4e Xavier, avec le 
général Bonaparte, une entrevue au palais du 
Luxembourg, dans laquelle il lui proposa de ré- 
tablir la maison de Bourbon sur le trône. Le 
premier consul refusa. Dès lors Hyde de Neu- 
ville dut être considéré comme un ennemi dan- 
gereux du nouvel ordre de choses. La police de 
Fouché signala le royaliste de la Nièvre dans 
tous ses rapports sur les complots contre le 
gouvernement, et notamment dans celui qu'il fit à 
l'occasion de l'explosion de la machine infernale, 
le 3 nivôse an rv. Un rapport de Fouché l'ayant 
désigné comme un des principaux auteurs de 
cette entreprise, Hyde de Neuville imprima un 
mémoire pour se disculper, et, tout en repous- 
sant cette accusation, il ne craignit pas de faire 
profession publique de dévouement à la cause 
du roi. « Comme royaliste, disait-il dans cet 
écrit,- je réclame le bénéfice de la 'dernière 
pacification des royalistes négociée par moi; 
comme accusé d'avoir pris part à l'attentat du 
3 nivôse, je réclame des juges. » Le premier 
consul, à qui le général; Duroc remit le mémoire 
de Efyde de Neuville , demanda au ministre de 
la police un second rapport, à la suite duquel 
son nom fut rayé de la liste des conjurés et de 
la procédure. Fouché a souvent déclaré depuis 
qu'une erreur de signalement lui avait fait porter 
le nom de Hyde de Neuville dans son premier 
rapport sur l'affaire du 3 nivôse. Après ces évé- 
nements, Hyde de Neuville se retira à Lyon, et 
vécut quelques années caché dans une maison 
sur les bords de la Saône, où, sous le nom de 
docteur Rolland, il obtint une médaille pour la 
propagation de la vaccine. M me Hyde de Neu- 
ville, à force de démarehes, avait obtenu de Fou- 
ché la promesse que si son mari faisait acte de 
soumission au gouvernement impérial, il obtien- 
drait sa tranquillité et la levée du séquestre qui 
avait été mis sur ses biens; Napoléon se montra 
plus exigeant, et parla d'un acte de fidélité : Hyde 
de Neuville se refusa à signer cet acte, et pour se 



soustraire à toute poursuite, il se réfugia en 
Suisse. Napoléon promit enfin la levée du sé- 
questre si le proscrit consentait à se rendre en 
Allemagne ou en Italie, afin de s'embarquer pour 
l'Amérique. Des passeports lui furent offerts en 
conséquence. Hyde de Neuville accepta; mais il 
tint à reparaître publiquement et à traverser os- 
tensiblement la France, afin qu'il fût constaté 
que si le royaliste était exilé, le prétendu com- 
plice du 3 nivôse était justifié. En accordant 
cette permission, Napoléon répondit : « C'est 
bien; cela est loyal, c'est français! » Hyde de 
Neuville traversa donc la France, séjourna quel- 
ques jours à Lyon, rejoignit en Espagne un bâ- 
timent qui le transporta en Amérique, où il 
acheta une habitation près de New- York, près 
de celle où résidait le général Moréas, qui la 
quitta comme on sait pour venir mourir en Eu- 
rope. En apprenant cette.fin malheureuse, Hyde 
de Neuville fit paraître un éloge du héros de 
Hohenlinden. Quelque temps après, il sut que 
le duc d'Angoulême s'était réuni à l'armée an- 
glaise en Espagne; il fit aussitôt ses préparatifs 
pour venir se mettre à la disposition des Bour- 
bons. 

1 La restauration avait eu lieu lorsque Hyde de 
Neuville débarqua en France , où il fut parfaite- 
ment reçu à la cour. On lui confia diverses mis- 
sions diplomatiques, et il fut envoyé en Angle- 
terre chargé d'une intervention amicale pour 
amener la paix entre cette puissance et les États- 
Unis. Il réussit complètement. A son retour de 
Londres, il partit pour l'Italie, ayant mission sé- 
crète d'y préparer les moyens de transport de 
Napoléon pour les États-Unis et de faire agréer 
au souverain de l'Ile d'Elbe ce nouveau change- 
ment de fortune. Hyde de Neuville eut de fré- 
quentes entrevues avec un des membres dé la 
famille impériale, et il espérait réussir lorsqu'il 
crut prudent de ne pas aller plus loin sans être 
muni de lettres patentes garantissant le résultat 
des négociations. Il vint donc à Paris demander 
au roi des pleins pouvoirs ; mais le gouvernement 
laissa* traîner les choses en longueur, et 'l'em- 
pereur, averti, débarqua tout à coup en France, 
et arriva aux Tuileries. Hyde de Neuville accom- 
pagna d'abord la famille royale à Gand, puis il 
revint à Paris porteur de lettres patentes -de 
Louis XVÏII pour la nomination d'un gouverne- 
ment provisoire. Ces brevets étaient, dit-on, en 
blanc. Hyde de Neuville se mit en rapport avec 
le maréchal Macdonald , chez lequel se réunis- 
saient les sommités royalistes de l'armée, et, 
après la bataille de Waterloo, il n'eut pas de 
peine À en rallier plusieurs au roi. A sa rentrée, 
Louis XVIII nomma Hyde de Neuville officier 
de la Légion d'Honneur. D'un autre coté, lès 
électeurs de la Nièvre le choisirent pour député 
à la ehambre introuvable. Il y prit place «au 
côté droit, et sanctionna de sa parole et de son 
vote toutes les mesures réactionnaires. La ma- 
jorité lui avait témoigné sa confianse en le nom- 



69.7 



HYDE 



698 



niant secrétaire de la chambre. Il était plus mo- 
déré pourtant dans ses actions, et on prétend 
qu'il empêcha l'exil du maréchal Massena, en de- 
mandant le renvoi an ministre de la guerre de 
la proposition que plusieurs députés avaient 
faite pour l'exclure de la loi d'amnistie. En 1816 
Hyde de Neuville fut nommé ambassadeur aux' 
États-Unis, où il négocia un traité de- commerce 
entre ce pays et la France. Les officiers que la loi 
avait proscrits n'eurent qu'à se lQuer de ses pro- 
cédés. En arrivant aux États-Unis il avait trouvé 
à l'ambassade un magnifique portrait de Napo- 
léon peint par Gérard ; il prit sur lui de l'envoyer 
à Joseph Bonaparte. On voulut incriminer cette 
conduite auprès du roi : « Cela est bien! dit 
Louis XVIII en retournant le mot de Napoléon, 
cela est chevalier, cela est français ! » Pendant que 
Hyde de Neuville était aux États-Unis, le roi le 
créa baron. Rappelé en 1821, et réélu dans la 
Nièvre, il refusa l'ambassade de Gonstantinople, 
pour remplir son mandat à la chambre, où il se fit 
remarquer par son zèle monarchique, notamment 
en demandant avec insistance l'expulsion de 
son collègue Manuel. Appelé à l'ambassade de 
Portugal , il se trouvait à Lisbonne lors de la 
révolte de palais qui faillit enlever la couronne 
an roi Jean VI au profit de la reine sa femme ou 
de dom Miguel. Hyde de Neuville vint courageu- 
sement à la tête du corps diplomatique apporter 
son secours au feible et malheureux monarque, 
qui le nomma comte de Bemposta. Élu de nou- 
veau dans la Nièvre (1824), il sollicita et obtint 
un congé, qui lui permit de siéger à la chambre, 
où il- blâma des actes relatifs à la guerre d'Es- 
pagne , défendit la Grèce et l'Irlande , et attaqua 
l'agiotage de la bourse et du syndicat. Dans la 
discussion relative à l'indemnité des émigrés, il 
demanda que les rentiers de l'État ruinés par la 
révolution fussent admis à l'indemnité. Son am- 
bassadefut supprimée, et il se trouva mis en dispo- 
nibilité. Il déplut encore au ministère par ses révé- 
lations sur les marchés Ouvrard et sur les énor- 
mes dépenses de l'expédition d'Espagne. On lui en- 
leva son traitement. Il fut réélu en 1827 à là 
chambre , après avoir ainsi résumé son opinion : 
« Nous désirons que la France évite tous les excès , 
qu'elle ne soit ni révolutionnaire ni mystique, mais 
religieuse, mais monarchique , mais amie sincère 
de toutes les libertés. » A la ehute du ministère 
Villèle, il reçut le portefeuille de ta marine dans 
le ministère Martignac ( mars 1828). Cependant , 
comme le dit Chateaubriand , ses opinions libérales 
étaient antipathiques à Charles X. Hyde de Neu- 
ville signala son administration de la marine par 
d'utiles améliorations dans le système colonial 
de la France ; il s'éleva avec force contre ce qu'il 
appelait l'infâme trafic de la chair humaine, et 
poursuivit avec vigueur l'accomplissement des 
mesures prises contre les négriers; il prit aussi 
une part active à l'émancipation de la Grèce. 
Après l'avènement du ministère Polignac, il re- 
prit à la ehambre son rôle de défenseur de la 



charte, et soutint dans une brochure les droits de 
la reine dona Maria au trône de Portugal en at- 
taquant la protection accordée à dom Miguel. 

En 1830 Hyde de Neuville ne faillit point à la 
cause royale, et seul, entre tous les députés de 
la droite, il osa se rendre le vendredi 30 juillet à la 
chambre des. députés pour y plaider la cause du 
duc de Bordeaux. Il n'y trouva pas d'écho, quoi- 
que plus d'un député de la gauche sympathisât 
secrètement avec lui. Jusqu'au 9 août, Hyde de 
Neuville crut devoir remplir son mandat et venir 
à toutes les séances protester à peu près tout seul 
contre le vide des bancs de l'extrême droite et 
prendre la parole dans les vérifications des pou- 
voirs en faveur des députés légitimistes dont 
l'élection était contestée. Pensant que ses pou- 
voirs étaient expirés le jour où un nouveau roi 
fut proclamé, il ne parut pas à la séance royale ; 
le 11 août il envoya sa démission et rentra dans 
la vie privée. En 1832 Hyde de Neuville fut 
compris dans les poursuites intentées par M. Per- 
sil contre Chateaubriand. . En 1833 il adressa 
aux chambres une pétition pour demander l'a- 
bolition de la loi qui prescrivait le serment 
politique aux députés, rappelant qu'en 181 fi il 
avait proclamé cette doctrine « qu'aucun pou- 
voir dans l'État n'avait le droit d'imposer un 
serment politique, et qu'un député pouvait se 
refuser à prêter un pareil serment sans rien 
perdre de son caractère. « Un serment politique , 
ajoutait-il, ne mène à rien qu'à blesser la morale, 
qu'à gêner les consciences, et qu'à faire tôt ou 
tard rougir plus d'un homme de bien. Quarante 
années d'expérience attestent assez cette affli- 
geante vérité. » Cette pétition fut vivement re- 
poussée. La discussion du traité avec l'Amé- 
rique lui fit encore prendre la plume, et il fit 
paraître un mémoire sur cette question. Retiré 
dans sa terre de L'Étang, près de Sancerre, où il 
se livrait tout entier à des travaux agricoles, il 
vit tomber, en février 1848-, le, gouvernement de 
Juillet. 11 ne rentra pas dans l'arène politique; 
cependant en 1849 il fut porté comme can- 
didat aux élections générales pour l'assem- 
blée législative par le. comité royaliste de la rue 
Duphot, mais il n'obtint qu'un nombre de voix 
insuffisant. Au mois d'octobre 1851, on le re- 
trouva encore dans les rangs des défenseurs de 
l'ordre à Sancerre. On a de lui : Réponse de 
J. -Guillaume Hyde de Neuville, habitant de 
Paris, à toutes les calomnies dirigées contre 
lui, à Vatroce et absurde accusation d'avoir 
pris part à V attentat du 3 nivôse, avec 
V exposé de sa conduite politique; Paris, 1801 > 
in-8° ; — Éloge historique du général Moreau; 
New- York, 1814, in-8°; — Les Amis de la Li- 
berté de la Presse : Des Inconséquences Mi- 
nistérielles; Paris, 1827, in-8° ; — De la Ques- 
tion Portugaise; Paris, 1830, in-8°; —Lettre 
au Journal des Débats, en réponse à deux ar- 
ticles intitulés : Le Pour et le Contre, ou la ré- 
volution et la contre-révolution ; dans Le Mont- 



699 



HYDE — HYDER 



700 



teur, 1830, p. 735; — Pétition aux Chambres 
pour demander P abolition du ferment poli- 
tique; Paris, 1833, ia-8°; — Observation» à 
joindre au Précisée M. Hératd tontre M. le 
minitire des finances ; 1887, ta-4°j — Nouvel 
Exposé à joindre au Précis pour M. Hératd 
contre M. le mihittré déë finances et ausc 
Observations de M. le baron Hydé de Neu- 
ville, ancien ministre de tu marine ; 1*87, 
m-4°; — Pétition au* àhambreê en faveur 
des indigent» de la classe Agricole ; 1*46, 
in-8°* L» L— tt 

Sarrdt etSalnt-Bdme, Biàçf. éêè Hôtothei dit, Jëér, 
tome 11, i r ° parti* , p. es. — H. de vatlme«fili< ftfde de 
Neuville, notice extrait© 4a CorreipomUtnt, 1857, tn-8°. 
— Rabbe , Vleilh de Bolsjoltn et Sainte-Preuve, Biogr. 
univ. et portât, des Contetnp. -" tlf. Kisatd, dans le 
Dict. dé la Conversation. - Qéèfatd, Là Fronce iMtè- 
roire. — Bourquetot,, Aa LUtér. franc, centemp, 

hyde. Voy. Clarkudon, 

HYDBft-NAlK 00 HTfJBR'ALMlllAN-tfâHA- 

uoub, daïva (logent) do Mysore, soubuh 
(vice-roi) de Sirra, nabab de Blngalore; Bel- 
tapoor et Bassapatnam^ radjah (roi) des Ca- 
nari ns et des Corgaes , suzerain de la} oôfë de 
Malabar et des lies Maldives* né en 1 139 «te l'hé- 
gire (1717 de J.-Ch.), à Dinaveill (Bangalore), 
mort à Tchitor, le 3 éefer 1190 (7 décembre 
1 782 ). Il se prétendait issu de la tribu de Qoréfeeh, 
à laquelle appartenait Mahoinêt. Ters 1076 
(1665), un de ses ancêtres quitta Baghdad pour 
aller s'établir dans te Pendjab. Son père, Feth- 
Mohaxnmed~Nedlm-Sa1>1b; fut lieutenant gétiéral 
dans Famée du sonbâh de betkan ^ Nifaafn«>al- 
Moulk, après la ffloft duquel il devint premier 
général du radjah de Mysore* et obtint le fief de 
Bangalore. Hyder vécut jusqu'à l'âge dé trente- 
trois ans dans tes domaines de sa famille* sans 
rien faire d'important/ fin 1750, chargé de con- 
duire contre leà Mahrattes » (|ui avaient envahi 
la eôte de Corotnaftdel,- un ewps de «50 hommes, 
il combattit de concert aveu tes Français , et visita 
Pondichéry, où il admira les produits.de .l'indus- 
trie européenne. De retour dans le Bangalore , il 
conseilla S son frère , Ismaïl Sahib , qui avait suc- 
cédé à leur père , de discipliner ses troupes et lie 
faire Venir de Bombay des canonsjdes mousquets 
et des baïonnettes. Ett il 52* ayant reçn ordre de 
mener 1,600 cavaliet§ aK secours de Tchanda- 
Sahib, à qui Mobàhiméd^Atl*Khan, fils de l'u- 
surpateur Anwer ed-t>tof KlWrt, disputait le titre 
de nabab d'Arcot, 11 agit dé concert avec Du- 
pleix, gouverneur" de Potidiehéry, et se distingua 
à la bataille de Tritchinofrtffl ( 17 août 1754). 
En 1756 Hyder hérite des charges et des fiefs 
de son frère , qui était Mort sans laisser d'en- 
fants maies. Quotcfu'il n'eût que 15,000 librairies 
de troupes, la popularité dont il jouissait porta 
ombrage au bfahnUne fcandth-Rao * qui atait 
usurpé sur Nadd-Badjàtf, frère du roi, la 
dignité de daïva de Mfsoré. Aitaqtlé par les 
Mahrattes , que son ëfiftèmi avait appelés, il ne 
put leur résister, et se replia sur Seringapatam, 



capitale 'du royaume. Au lieu de lui ouvrir la 
porte de la ville, le daïva fit tirer sur lui, et or- 

'. donna à l'armée de le mettre dans les fers. 
Hyder s'échappa à la faveur des ténèbres, et alla 
s'enfermet daris la forteresse de Bangalore , ou 
il fat rejoint par ose partie de ses troupes. Il fit 
avec snecee la guerre aux Mahrattes, et pot même 
envayeruncorpft auxiliaire de 7,000 hommes à de 
Lallyj qui était assiégé dans Pondichéry par les 
Anglais. Lors 4* la prise de cette ville (1761), 300 
cavaliers français et d'habile» armuriers passèrent 
m Service de Hyder, Ge renfort le mit en état 
de punir lé dalva* Ayant fait une trêve avec les 
Mahrattes, il invita tous les chefs du Mysore à se 

i joindre à lui pour déposer Kandih-Rao et res- 
taurer Nand -Radjah. La plupart se rendirent à cet 
appel* et rarrhéemèmei qnilui était opposée vint 
se ranger sotfé ses étendards* Lee habitants de la 
capitale forcèrent le radjah à destituer Kandih-Rao 
et à Mi donner Hydér pour successeur (1762). Le 
daïva fat mis en jugement et condamné à mort 
par des juges dé sa religion. Cette peine ayant 
été commuée en celle de la détention, le cou- 
pable fut enfermé dans uns eage de fer» au mi- 
Ked de la plate de Bangalore , où il mourut, 
deux ans pins tard. Hyder accepta le titre que 
lai avait décerné le peuple de Seringapatam, 
et il indemnisa Nand'Aadjah en lui donnant en 
fief la forteresse de Mysore. Nouveau maire, do 
pelais sous des rois fainéants , il mit Tordre 
dans les finances^ réduisit plusieurs petits chefs 
ont décapaient diverses places du Mysore, 
cl reprit au roi de Ganaraet aux Mahrattes les 
provinces qu'ils avaient usurpées* Ces derniers 
l'ayant attaqué aVëe une grande armée, il fail- 
lit être tué dans une bataille où* la victoire 
resta indécise (1763), Il conclut avec eux une 
trêve de trois ans et conéêrva Mark sirra , Mag- 
ghefH, Baéeapatnam et le royaume deBisnager, 
moyennant une indemnité pécuniaire qu'il paya 
«0* Mahrattes» Les nababs afghans de Canour, 
de Garpa et dé Senotir avaient refusé de resti- 
tuer tes villes qni'fl avait réclamées d'eux : il leur 
déclara" la gtfetfgf et les vainquit tons à la fois 
prés de Sanonr; Ayant aidé Bazalet-Djeng, 
frère dtf senbah de Dektaa* à se rendre indé- 
pendant* il reçut dé lui lé viUe de Sirra et son ter- 
ritoire j et fut institué seubah de ce pays par 
lé grand -mogol de Dehli, à qui il avait envoyé 
de riches présents (1763)* Vers la même époque, 
Il prit sués sa protection le jeune radjah de Ca- 
nara, qui j arrivé à & majorité * revendiquait le 
trône paternel. La mère de ce prince ayant re- 
fuséde se dessaisir' de là régence, Hyder envahit 
le Canara à la tête de «0,000 hommes. Le jeune 
radjah | rétabli dansées droits, reconnut son 
protecteur pour suzerain , et lui céda le port de 
Mangalore et les pays qui séparaient cette place 
iln Mtsor* (1763). Bientôt,* poussé par sa mère, 
il forma le projet d'assassiner Hyder. La décou- 
verte de ce complot coûta la vie à la reine et la 
liberté an radjah, qui fut détenu à Maggneni 



701 



HYDER 



701 



Hyder réunit à ses possessions le royaume de 
Canara, qui renferme non-seulement des mines 
d'or, de diamants et de pierres précieuses, mais 
qui est en outre le grenier de l'Inde. Il changea 
le nom de Bidnor en celai de Hyder-Nagor, et 
en fit la capitale de tous ses États. 11 attaqua les 
Portugais de Goa, pour leur reprendre cer- 
taines places qui avaient fait partie du Canara. 
Le pays de Carvar et la forteresse d'Opir étant 
tombés entre ses mains, il n'était plu3 séparé 
de Goa qne par la forteresse de Rama. Comme 
les artilleurs francais-refusaient de faire le siège 
de cette place /il couda! la paix avec les Portu- 
gais et conserva ses conquêtes. Là côte de Ma- 
labar, oii il se trouvait alors, renferme on assez 
grand nombre de musulmans originaire^ dd sud 
de F Arabie, et connus sous le nom de mapelets. 
Cette 1 population, active et intelligente, s'était en- 
richie par îe commette, et avait prêté des 
sommes considérables aux naïres ou princes in- 
digènes, qui sont brahmafristes. Ne pouvant se 
faire rembourser, ils réclamèrent l'appui du 
prince qui avait, le premier, fondé une dy- 
nastie musulmane dans le sud de l'Inde. Hyder 
s'empressa de répondre à leur appel , et choisit 
pour amiral le mapelet Ali, qui était devenu, par 
mariage, radjah de Caaanore. Il acheta ou 
fit construire des vaisseaux, et au commence- 
ment de la bette saison sa flotte fit la conquête 
des lies Maldives (1764). Ali fut destitué pour 
avoir /ait crever les yeux au roi des Maldives, 
et fut remplacé par l'Anglais Stanet. Les naïres, 
importunés des- demandes de leurs creanciers,ten- 
tèrent de les exterminer en masse, et réussirent 
à en faire massacrer 12,000. Ce crime ne resta 
point impuni. Hyder envahit la côte de Malabar 
à la tête de 34,000 hommes. Quoique l'armée 
ennemie fût cinq fois plus nombreuse, il la mit 
en déroute, et s'empara de Calicut, dont le roi 
on zamorin se brola dans son propre palais. Il 
réunit cet État aux siens , et réduisit les autres 
naïres à la condition de princes tributaires (1765). 
Dès que le retour des pluies annuelles l'eut forcé 
d'évacuer le pays , les vaincus se soulevèrent 
partout, et pressèrent vigoureusement les gar- 
nisons étrangères. Hyder se remit aussitôt en 
campagne avec 13,000 hommes, qu'iLfit dépouil- 
ler de tout vêtement ; 300 Européens , qui refu- 
saient de se soumettre à cette prescription et 
qui étaient pourvus de parapluies, souffrirent 
beaucoup de la dyssenterie. Ils combattirent 
néanmoins avec tant de furie qne l'armée en- 
nemie dut abandonner son retranchement de 
Pondiaghari. Les naïres restèrent alors à la 
merci du vainqueur : ils furent dépouillés de tous 
leurs privilèges et privés du droit de porter les 
amies. Leur caste , qui était la seconde, fut pla- 
cée après celle des brahmesj il n'y eut d'excep- 
tion que pour ceux d'entre eux qui embrassèrent 
l'islamisme. Hyder se préparait à poursuivre , 
dans le royaume de Travaneore, les débris de 
l'armée vaincue, lorsqu'il apprit que les Anglais 



formaient une coalition contre lui. Il se hâta de 
retournera Seringa patam, où il entra en triompha- 
teur, et découvrit bientôt que le nombre de ses 
ennemis était plus grand qu'il ne l'avait cm. 
Son propre cousin , Mirza-Ali-Khan, gouverneur 
de Sirra, craignant d'avoir à rendre compte des 
sommes qu'il avait follement dissipées, s'était 
jeté dans les bras des Mahrattes. A l'expiration de 
la trêve triennale de 1763, kpeuchwah ( chef de 
la confédération mahratte), Madhou-Kao, envahit 
le Mysore pour lever le .tribut que ses prédé- 
cesseurs s'étaient fait concéder par le grand- 
mogol Aurengzeb , et qui équivalait au septième 
des revenus de l'Inde méridionale. Il fut rejoint 
à Cenapatam par l'armée de Nitzam-Ali , seubah 
duDekkan. Hyder, incapable de résister en pleine 
campagne à cette armée de 250,000 hommes, 
s'enferma dans Seringapatam, et fit ravager .tout 
le pays à 120 kilomètres à la ronde. Les habitante 
de cette contrée se réfugièrent dans la capitale 
du Mysore, après avoir brûlé tout ce qu'ils ne 
pouvaient emporter. Grâce à ces mesures , les 
assiégés vécurent dans l'abondance, tandis que 
les assiégeants étaient en proie à la famine. Les 
Mahrattes furent obligés de conclure une nou- 
velle trêve de trois ans ; ils restituèrent la for- 
teresse de Sirra, et gardèrent le pays qui en dé- 
pendait (1767). Nitzan>Ali, réduit à l'impuis- 
sance par la retraite de ses alliés, conclut égale- 
ment un traité, dont un tiers fit tous les frais. Il 
fut convenu que Moliammed-Ali-Khan, reconnu 
nabab d'Arcot par les Anglais j serait dépouillé 
de cette principauté, et que le prince légitime, 
Mahfouz-Khan , frère aîné de Mohammed , ma- 
rierait sa fille an fils de Hyder, Tippo-Sahib, à 
qui il céderait tous ses droits. Nitzam-Ali s'enga- 
gea à fournir 50,000 hommes pour exécuter cette 
entreprise. Quoique l'armée de Hyder ne comprit 
pas moins de 200,000 hommes, il n'en put porter 
que le quart sur le théâtre de la guerre. Son 
adversaire avait pourallié les Anglais de Madras, 
qui pouvaient mettre en campagne 5,000 Euro- 
péens et 25,000 indigènes. Le général anglais 
Smith qui avait le commandement de ces troupes, 
était plus habile tacticien que Hyder; mais il 
manquait de cavalerie, et se voyait sans cesse 
dérangé dans ses plans par le conseil de Madras. 
Hyder conduisit cette guerre avec beaucoup 
d'habileté» il était toujours exactement informé 
des mouvements de l'ennemi, à qui il savait 
dérober la connaissance des stens. Il s'empara 
de Caveripatam, remporta une victoire à Sin- 
gueman, et mit son fils Tippo^Samb à la tele 
d'un corps de cavalerie qni se présenta aux 
portes de Madras et ftimt prendre le gouverneur 
de cette ville. Les Anglais ayant remporté en 
petit avantagé à Trinconwrfëy (Tirmale) en 
1767, Mteam-Ali, qni avait le plus sontïett dans 
et combat* retourna dans ses États, et signa avec 
te» Anglais vit traité par lequel il leur cédait 
une partie de son territoire et reconnaissait Mo- 
hammed-Ali pour nëbab d'Arcot. Hyder É'eacon- 



TOS 



HYDEft 



704 



tinua pas moins la guerre. Ayant appris que des 
troupes anglaises de Bombay s'étaient emparées 
de Mangalore , sur la côte de Malabar, il marcha 
sur cette Tille , d'où son fils chassa les agres- 
seurs. Il se hâta de retourner sur la côte de Go- 
romande! , pour secourir la ville de Bangalore , 
que les généraux anglais! avaient investie 
(1768). Les ayant repoussés jusqu'à Madras, H 
signa la paix aux portes de cette ville, le 
15 avril 1769. Les parties contractantes échangè- 
rent leurs prisonniers, et promirent de s'assister 
réciproquement contre leurs ennemis. Ce fut 
Mohammed-Ali-Khan qui paya les frais de la 
guerre. Par un traité signé le même jour, il céda 
à Hyder ta ville d'Oscote , avec l'artillerie et les 
munitions qui s'y trouvaient; s'il conserva le 
reste de la principauté d'Arcot, il dut s'engager 
à payer un tribut annuel de six lacs de roupies. 
A peine la trêve de 1767 était-elle expirée , que 
les Mahrattes vinrent de nouveau réclamer le tri- 
but. Ne pouvant faire le siège de Seringapatam, 
où Hyder s'était enfermé , ils se dirigèrent sur 
Bangalore. L'armée du Mysore fut enveloppée 
et mise en déroute. Hyder n'obtint la paix 
qu'en faisant de grands sacrifices pécuniaires 
(juillet 1770). L'année suivante, à l'occasion 
des nouvelles incursions des Mahrattes, la 
compagnie des Indes fut mise en demeure de 
fournir les secours qu'elle avait promis par le 
traité de 1769. Mais elle se borna à offrir sa mé- 
diation. Hyder dut payer une grosse somme 

I our les contributions de guerre, et céda une 
partie de son territoire. Les dissensions des 
Mahrattes lui permirent bientôt de recouvrer 
ce qu'il avait perdu. Il reprit Sirra et battit, le 
5 janvier 1778, un corps de 50,000 Mahrattes , 
qui avaient envabi Carnatic-Belaghat. La guerre 
recommença en cette année entre la France et 
l'Angleterre. Lorque les Anglais se disposèrent 
à assiéger Mahé, la dernière ville qui restât 
aux Français dans l'Inde , il leur fit des re- 
montrances, et menaça d'envahir le Carnatic. 

II ne put secourir Mahé, parce qu'il était en- 
gagé dans une guerre contre les radjahs de Gouti, 
de Carnaul et de Condapah. Mais sitôt qu'il 
eut fait les préparatifs nécessaires , il descendit 
sur la côte de Coromandel et marcha sur Ma- 
dras (1780). Après avoir tout saccagé sur son 
passage, il s'empara deTchitor, et alla assiéger 
Arcot, dont il s'empara au tout de six semaines. 
La victoire qu'il remporta à Condjeveram, le 
10 septembre 1780, fut signalée par les cruautés 
des soldats indigènes, à qui les officiers français 
arrachèrent un assez grand nombre de victimes. 
Le 1 er juin 1781, il fut battu à Cuddalore, par 
te général Eyre Coote. La guerre se prolongea, 
avec des succès divers , jusqu'à la fin de son rè- 
gne, et occupa même les deux premières années 
du règne de son successeur, Tippo-Sahib. Hyder 
était de taille élevée; il avait les traits prononcés 
et le teint, foncé. Quoiqu'il ne sut ni lire ni 
écrire, il était fort éclairé. Tous les Français qui 



se rendaient dans ses Etats étaient sûrs d'y 
trouver un bon accueil. Vers la fin de sa vie, il 
avait 20,000hommes disciplinés à la prussienne, 
et commandés par des officiers européens , qui 
donnaient leurs ordres en français. Il était juste, 
affable, et ménageait la vie de ses sujets et de 
ses soldats. E. Beau vois. 

Mlr-FIimeln- Ali-Khan -Klrmani,' The Hist. of Hydur 
Naik, trad. par le col. W. Mlles ; Londres, 1848, io-8°. - 
M. M. D. L. T. I Maître De U Tour] général de 10,000 h. 
de l'empire mogol, Hist. d'Hayder- Ali Khan; Paris, 1783, 
« vol. tn-lî.— Fr. Robson, The Life of Hyder -/il y-khan, 
Londres, 178«, ln-8», trad. en français ; Paris, 1787, in-is. 
— Gb. Stewart, Not. sur Hyder- Ali; dans A descriptive 
Catalogue of the oriental Library of sultan Tipeo.; 
Cambridge, 1809, ln-4°. — Memoirs of the late Wer tn 
Mia,from 1780 ton»*, publié par Murray; Londres, ïim, 
ln-8*. -Wilks, Historical Sketcltts of the South oflndia; 
Londres 1817, 8 vol. in-*». - Le P. Melcb. Carpaoi, Me- 
morte sopra la Fita d* Hyder- Ali-Khan ; Bassano, 1734, 
in-8«. - J. MM, Hlst. of BritiihIndia,A*ém^w 
Wilson; Londres, 1840, L III, IV. — Thorntoo, Hist. of 
British India; 1841-1848, t. I, II. — GrantDufl, HisUof 
the Mahrattas, t. II. 

hyi>eii-mirza-doghlat, prince mongol de 
la race de Gengis-Khan, et historien persan, né 
dans le Khorassan, vers 906 de l'hégire (1500 
de J.-C), assassiné dans le Kaschmir, en 958 
(1551). Fils de Mohammed-Hosséin-Mira-Do- • 
vghlat, (jui, après une vie agitée, fut tué en 914 
I i(l 508), par ordre deSchéibani, khan des Oazbeks, 
il fut conduit dans le Caboul , à la cour de son 
cousin Baber, qui le traita comme un fils. En 918 
( 1 5 1 2), il s'attacha Saïd-Khan, sultande Kaschgar, 
prit part à la guerre contre les Oazbeks, et fit, 
en 935 (15331), une expédition dans le Kaschmir, 
pour protéger l'une des factions qui s'y dispu- 
taient le pouvoir. Il conquit ce pays, mais ne pat 
s'y maintenir. Pltfs tard, Hyder entra au service 
de Kamram , fils de Baber, et souverain de Ca- 
boul et du Pendjab , qui lui confia le gouverne- 
ment de Lahore, durant son expédition de Can- 
dahar. Voyant que la conduite i m politique de ce 
prince mettait en danger les possessions mon- 
goles de l'Inde, il l'abandonna pour se joindre à 
Houmayoun, qu'il accompagna dans sa faite, 
en 947 (15*40). Il conseilla à l'empereur fugitif 
de s'emparer du Kaschmir, afin d'en faire la 
base de ses futures opérations contre les Af- 
ghans. Appelé par une partie des Kaschmiriens, 
il réunit un corps de 4,000 hommes*; il franchit 
des montagnes réputées inaccessibles, et se ren- 
dit maître de Srinager et de toute la vallée de 
Kaschmir. Ce fut vainement que la faction ri- 
vale essaya de l'expulser ; il se maintint dix ans, 
et gouverna d'abord au nom de Nazouk-Schah, 
radjah indigène, ensuite comme lieutenant de 
Houmayoun. Il conquit Radjouri , Pakheli, le 
grand et' le petit Thibet. Tous ces États prospé- 
rèrent sous son administration : il encourageait le 
commerce, l'agriculture, l'industrie, et appela 
des ouvriers étrangers, qui élevèrent un- grand 
nombre cTédifices. Il protégeait et cultivait les 
lettres. On a de lui : Tarihh i ffaïderi ou 
Taiïkh i Raschidi , excellente histoire, divisée 
en quatre livres, dont les deux premiers traitent 



705 



HYDER — HYGINUS 



706 



avec détails des fchans du Moghulistan et des 
émirs de Kaschgar, à partir de 764 (1353). Les 
deux derniers renferment on récit pittoresque et 
animé des événements dont l'auteur fat témoin 
dans Flndoustan ou en Kaschmir. 

£• Bëauvois. 
W. Erakine, A Hist. af India under Baber and «u- 
mayun, t. I, il. — Quatremère, dans Not. et extr. de* 
Mss., t. XIV, p. 486, 488, 489, 818. - Elliot, Bibliogra- 
phical index tho the Historians ofmuhammedan India, 
1. 1, 7, 106, 117. 

htgin (Saint), pape, mort le 8 janvier 142. 
11 succéda à saint Télesphore, le 6 janvier 138. On 
croit qu'il était Grec de nation, etl'on rapporte qu'il 
chercha à maintenir le bon ordre et qu'il établit 
la distinction des rangs dans le clergé de Rome. 
On cite son zèle et sa vigilance contre les hérésies 
de son temps ; et cependant il usa d'indulgence 
envers Cerdon et Valentin. Il mourut après quatre 
ans et trois jours de pontificat. Saint Pie lui 
succéda. Les modernes lui donnent la qualité de 
martyr, quoique les anciens ne disent pas qu'il 
ait souffert pour la foi. Les deux épttres décré- 
tâtes qu'on attribue à saint Hygin sont suppo- 
sées. J. V. 
Eusèbe, CAron. — Père Papebroch, Acta Sanctorum. 

— Père Pagi , Crit.'histor. chron. in Ann. Ecoles. — Til- 
lemont ,'Mém. pour servir à VHist. ecclés. des six pre- 
miers siècles. — Baillet, ries des Saints. — Dupto, Bi- 
blioth. des Auteurs ecclésiastiques des trois premiers 
Mècles. — Richard et Giraud, Biblioth. Sacrée. 

HYGINUS OU HIGUIUS ( CaiUS - JullUS ) , 

grammairien latin, vivait dans le premier siècle 
avant l'ère chrétienne. Il ne nous est connu que 
par une courte notice de Suétone. « C.-J. Hygi- 
nus , affranchi d'Auguste , était Espagnol , dit ce 
biographe , quoique certains auteurs le fassent 
naître à Alexandrie, d'où César l'avait, disent-ils, 
amené à Rome dans son enfance. Il suivit avec 
ardeur et imita Cornélius Alexandre, grammai- 
rien grec , que , pour sa profonde science de 
l'antiquité, beaucoup d'auteurs ont surnommé 
Polyhistor. Il administra la Bibliothèque du Pa- 
lais, ce qui ne l'empêcha pas de donner des le- 
çons à beaucoup d'élèves. 11 fut intimement lié 
avec le poète Ovide et l'historien Caias Licinius, 
personnage consulaire. Il raconte que Hyginus 
mourut pauvre et n'avait vécu que de ses libéra- 
lités. » Pline, Aulu-Gelle, Servais » Macrobe et 
d'autres auteurs anciens citent sous le nom d'Hy- 
ginus et de Caius-Julius Higinus plusieurs ou- 
vrages aujourd'hui perdus et dont voici les titres : 
Zte Urbibus Italicis ou De Situ Urbium Itali- 
carum, en deux livres au moins ; — De Proprié- 
té* tibus Deorum ; — De Dits Penatibus ; — De 
Virgilio ou Commentaria in Virgilium, en cinq 
Jivres au moins ; — De Familiis Trojanis ; — De 
Agricultura, en deux livres au moins ; — Cinnx 
J>ropempticon;—De VitaRebusquelllustrvum 
Virorum, en six livres au moins ; — Exempta ; 

— DeArte Militari. Il ne reste de ces divers écrits 
que des fragments insignifiants ; mais on a sous 
le nom d'Hygînus deux ouvrages à peu près en- 
tiers, savoir : Fabularum liber : c'est une suite 

BOUT. B10GR. GÉNÉR. — T. XXV. 



de deux cent soixante-dix-sept légendes mytholo- 
giques, avec une généalogie des dieux comme in- 
troduction. Bien que la plupart de ces histoires 
fabuleuses soient empruntées à des sources con- 
nues, l'auteur les présente quelquefois avec des 
circonstances nouvelles qui leur donnent un cer- 
tain prix pour les mytbographes; — Poetictm 
Astronomicon Libri IV, adressés à' un certain 
M. Fabius. Le premier livre, intitulé De Mundi 
ac Sphxree ac utriusque partium Déclara- 
tione, commence par une esquisse générale du 
plan de l'auteur et par une définition des tennes| 
techniques Mundus, Sphaera, Centrum, Axis, 
Polus, etc.; le second livre, De SignorumCce- 
lestium Historiis, comprend une exposition des 
légendes relatives à quarante et une des princi- 
pales constellations , avec une notice des cinq 
planètes et de la voie lactée ; le troisième livre, De 
Descriptionibus Formarum Cœlestium , con- 
tient le compte détaillé du nombre et des arran- 
gements des étoiles dans les constellations ; le 
quatrième livre, De quinque Circulorum inter 
corpora cœlestia Notatione et Planetis, traite 
des cercles de la sphère céleste , des cours du 
Soleil et de la Lune , et du mouvement des pla- 
nètes. Ces deux ouvrages témoignent d'une telle 
ignorance et sont écrits* d'un style si négligé et si 
barbare qu'on ne peut les regarder, dans leur 
forme actuelle, comme l'œuvre de l'époque la 
plus florissante de la littérature romaine. On a 
tour à tour placé l'auteur sous Domitien, sous 
les Antonins, dans les derniers jours de l'empire. 
D'après la conjecture la plus vraisemblable, ces 
deux productions sont des extraits de deux ou- 
vrages plus anciens aujourd'hui perdus. Ces deux 
extraits sont du- quatrième ou du cinquième 
siècle. Les Astronomica parurent d'abord à Ve- 
nise, 1475, itt-4-°, et furent réimprimées quatre 
fois à Venise avant la fin du quinzième siècle. 
L'édition princeps des Fabulx est de Bâle, 
1535, in-fol., dans un volume qui contenait aussi 
les Astronomica, Palaephatus Phornutus, Ful- 
gentius , etc. Les deux ouvrages ont été réim- 
primés dans les Mythographi latini de Munc- 
ker, Amsterdam, 1681, in-8°, et dans les My- 
thographi latini de van Staveren ; Leyde et ' 
Amsterdam, 1742, in-4°. La meilleure édition sé- 
parée des Fabulx est celle de Schefer, Ham- 
bourg, 1674, in-8°. 

11 existe sous le nom d'Hyginus ou Uygenus 
divers fragments relatifs à la Qromatique, ou 
arpentage, dans les recueils des Agrimensores de 
Turnèbe, de Rigault, de Goesius,et dans les 
Gromatici veteres de F. Blume (voy. pour plus, 
de détails sur les Agrimensores l'article Fron- 
tin ). On a encore d'Hyginus un traité De Cas- 
trametatione, publié avec d'autres ouvrages sur 
l'art militaire par Scriverius ; Anvers, 1607, 162 1, 
in-4°. R. H. Scheel en donna une seconde édition 
sous ce titre : Hygini Gromatici et Polybii 
Megalopolitani de Cas tris romanis qux ex- 
stant, cum notis et animadversionibus , qui* 

23 



707 



HYGINUS — HYLARET 



708 



bus accedunt dissertationes aliquot de re «a?" 
dem mUUari; Amsterdam, 1660, in-4°. On 
trouve œ traité dans le Thésaurus Ant. Rom, 
de GflBrios, vol. X, p. 599. Il n'est pas probable 
que l'auteur des traités gromatiques et de la Cas- 
tramétation soit le même que le mytbograpbe, et 
on ne saurait les identifier ni Ton ni l'autre avec 
l'affranchi d'Auguste. Y. 

Suétone, De Rltut. Gramm* m. — Honoré d'Anton, 
De PhiL Mundi. - Raphaël de Volterra, Comment., XVI. 

- Scallger, Ad Manil., I, p. 8* ; ad Euseb. Chron., 10. — 
Sauroalse, fie Annie climac., p. B94. — Blâme , dans le 
Rheinischés Muséum fur Jurisprudeni , vol. VU, p. 117. 

— Zeiss, dans le Zeitschrift fur Alterthumswissens- 
chaft, pour 1M0. — Smith, Dictionary cf Greek and 
Homo* Btoçraphy. — Bonté. DUsert. de Cum. /. Hygini, 
Augutti liberti,rua et ScriptU; Narboorg, 1SM, In-*». 

hylander (André) $ orientaliste suédois, 
né le 23 février 1750, à Tunhem (diocèse de 
Skara), où son père était pasteur, mort le 
1 er juillet 1830. H fut nommé en 1776 docens 
de langues orientales et de grec, et, en 1798, pro- 
fesseur de théologie à l'université de Lund. Parmi 
ses ouvrages il suffit de citer ; Spécimen operis 
cosmographici Jbn el Vardi ; Lund, 1 784- 18 1 2 ; 
32 parties in-4° , réunies par le fils de l'auteur, 
ibtd., 1823, contenant le texte arabe et une tra- 
duction latine de l'introduction et des cinq pre- 
miers chapitres du Kharidet-al-Adjaïb; — 
Samling af Tal och Predikningar hallne vid 
oliha tillfœllen (Recueils de Discours et de Ser- 
mons prononcés en diverses occasions) ; ibid., 
1791-1804, 3 part. 

Son fils unique, Sven Hylander, né le 5 dé- 
cembre 1797, mort le 19 avril 1825, devint en 
1818 docens d'histoire littéraire à l'université 
de Lund, et fit plusieurs excursions scientifiques 
en Suède, en Danemark, en Normandie. On a 
de lui : De literarum in Suecia Studiis sx- 
culo V, part. I; Lund, 1818; — Catalogus re- 
liquiarum sanctorum in ecclesia Lundensi; 
ib., 1820; —Acta, Literx et ObservtUiones ad 
Historiam Scandinavicam medii xvi et recen- 
Horis œvi;ib., 1821. Beauvois. 

W. Faxe, Tal vid A. HyUmdert jordfœitning, avec 
une not. Mograph. par H. Reuterdahl.; Lund, 1831. — 
A Lfdbek et H. Reuterdahl. Minne af Sv. Hylander; 
Luid, 18*0. 

hylabbt (Maurice ), théologien et prédica- 
teur français , né à Angouléme le 5 septembre 
1539, mort à Orléans à la fin de décembre 1591. 
Fils d'un marchand de sa ville natale , il entra 
en 1551 dans l'ordre des Cordelière, et fit profes- 
sion Tannée suivante. Peu après il vint à Paris, 
où il acheva ses études. En 1557 il retourna à 
Angouléme, où il fut ordonné prêtre. De retour à 
Paris , il suivit un cours de théologie ; en 1562 il 
professa la philosophie et ensuite la théologie, 
qu'il enseigna jusqu'en 1571. En 1566, se trou- 
vant au chapitre provincial de son ordre qui se 
tenait àCbâteaudun, il disputa publiquement avec 
le ministre calviniste Godet. En 1568» il vint 
s'asseoir sur les bancs de la Sorbonne, et fut reçu 
docteur deux ans après. Il s'appliqua dès lors 
plus spécialement à la prédication, La réputation 



qui! acquit dans ce ministère le fit appeler en 
1572 à Orléans, où il se fixa. Lui-même nous ap- 
prend qu'il prêcha dans cette ville onze carêmes, 
ce qui nerempêcha pas de prêcher dans plusieurs 
autres cathédrales du royaume. « Pendant les 
troubles qui agitèrent le royaume de son temps, 
il se laissa entraîner, dit Nteéron, à l'esprit de 
faction qui animait alors la plupart des moines et 
des prédicateurs. Il fut même un des pins ardents 
promoteurs de la Ligue par ses sermons séditieux 
et par les confréries du Nom de Jésus et do 
Cordon de saint François, instituées pour atta- 
cher davantage le peuple à ses intérêts, dans les- 
quels il fit entrer tes personnes les plus considé- 
rables de la ville d'Orléans. » L'Étoile, en annon- 
çant la mortd'Hylaret, dit : « En ce temps mourut 
Hylaret , eordelier à Orléans , lequel séduisait le 
peuple par ses séditieuses prédications contre 
le roi , à cause de quoi les Ligueurs et principa- 
i lement ceux du petit Cordon en faisoient un 
1 saint et compagnon de saint Paul en paradis , et 
vinrent à (telle impudence que de dire que ce 
beau Père faisoit dans le ciel la Trinité seconde 
avec les Guises. » Ses ouvrages sont : Sacra? 
Décades quinque partit**, conçûmes quadra- 
gesimales atque Paschalcs, numéro quinqua- 
ginta, varia et rara rerum ac verborum 
suppellectile apparatas instructasque corn- 
plectentes ; Lyon, 1591, 2 vol. fn-8*. « Ces ser- 
mons, dit Moréri, sont un précis de ceux qu'Hy- 
laret avoit prêches pendant vingt-cinq ans. Os 
sont en forme d'homélies , et donnent une fort 
mauvaise idée du goût, du jugement et des lu- 
mières de l'auteur. On y trouve beaucoup d'his- 
toires apocryphes et ridicules et des traits dln- 
décence. On en a une traduction sous ce titre : 
Sermons catholiques pour tous les Jours du 
Carême et fêtes de Pâques, composés en latin 
par frère Maurice Hylaret ; nouvellement 
mis en français par Jean Moynet, avocat au 
siège présidial d'Orléans; Paris, 1589, a vol. 
in-8° ; — Concionum per adventum Snneades 
sacres quatuor, homilias triginta sex corn- 
plectentes, e quibus viginti septem priores 
Joelem prophetam explicant, novem vero 
posteriores Evangelia adventus et festorum 
per id tempus occurentium expUcant; Paris, 
1591, in-8°; — Homili* in Evangelia do- 
minicalia per totum anmrni; Paris, 1604, 
2 vol. in-8*. Du Pin donne à Hylaret les deux 
traités suivants : De non conveniendo cum 
hmreticis et De non in eundo cum hœrettc* 
a virç catholico conjugio; Orléans, 1587. 
« Nous ignorons si ces deux traités ont été com- 
posés en latin, dit Moréri ; ils ne sont cités qu'en 
françois dans le catalogue de la bibliothèque 
de Couet , chanoine de l'église de Paris , sous ce 
titre : Opuscules où il est montré que la fré- 
quentation avec les hérétiques et le mariage 
avec une huguenote est interdit aux catho- 
liques; par frère M, Hylaret; Orléans, 1587, 
in-8°. J. V. 



709 



HYLARET — fiYPATIE 



710 



Jean dû Bdoet, Fie de Hylaret, en tête des Sacras Dé- 
cades. — Nlcéron, Mém, pour servir à l'hist. des Hommes 
lit. dans la républ des lettres, tome XVlll, p. î68. - 
Du Pin, Table des Auteurs ecclésiastiques. — Moréri, 
Grand Met. Histor. — CI». Saune?, Annales Seclesiee 
siureUauensis. - H. Willot, Attenm SodaUUi Francis- 
canié — Lac Wadding, Scriptores Ordinis S. Francisa, 
— 1,. Bail, Sapiéntia forts prœdicans. 

hypatie (ritat(a), célèbre femme philo* 
sopbe, née à Alexandrie, 8oas le règne de Va* 
lens, entre les années 370 et 3*0 de l'ère chré- 
tienne, et morte au moi* de mars 415. Fille de 
Théon, mathématicien distingué, commenta* 
teur d'Eudide et de Ptolémée, Hypatie reçut 
ses premières leçons de son père, qui cul- 
tiva de bonne heure ses heureuses dispositions 
et lui apprit les mathématiques et l'astronomie. 
Elle s'appliqua surtout à la géométrie. Damas* 
cius se sert pour la caractériser du terme y**>- 
(Aexptxif]. On sait te mot de Platon sur son école : 
« Nul n'entre ici qui n'est géomètre. » Ce mot resta 
vrai pour ses successeurs immédiats , et aussi 
pour les néoplatoniciens. La géométrie fut pour 
Hypatie l'initiation naturelle à la philosophie. 

Depuis la mort de Julien ( en 363) et la réaction 
contre l'entreprise de l'empereur philosophe, Té» 
cole d'Alexandrie,- qui s'était compromise en as- 
sociant sa destinée à celle du polythéisme, était, 
de la part d'une population naturellement sédi- 
tieuse et fanatique, l'objet de défiances et de 
haines qu'on de prenait plus la peine de dissimu- 
ler. Entraînée par la force des choses, plus encore 
peut-être que par la politique, hors de son sanc- 
tuaire, et mise au service d'une cause perdue d'a- 
vance, cette école semblait avoir épuisé dans 
cette courte lutte toute sa vitalité; quand elle 
voulut rentrer sur le terrain de la spéculation 
pure, et continuer les traditions pacifiques de ses 
premiers fondateurs, elle avait perdu sa foi en 
elle-même et son inspiration. Le mouvement phi* 
losophiqne commençait dès lors à se déplacer. 
C'est à Athènes, à la fin du quatrième siècle, que 
le néoplatonisme va chercher un asile suprême 
et essayer de se retremper aux sources antiques* 

Hypatie entendit peut-être le sophiste Probe- 
résius à Alexandrie; puis elle se rendit à Athènes 
et y séjourna quelque temps. Plutarque le jeune 
y enseignait alors, commentant pour la foule 
Aristote et Platon, et expliquant à un petit 
cercle de disciples choisis les Oracles chaldéens 
et les secrets de la théurgie. Hypatie partagea- 
t-elle avec Syrianus le privilège de cet enseigne- 
ment ésotérique? Plutarque la reçut-il dans 
cetle société d'initiés où régnait sa fille Asclépii 
génie ? On ne saurait le dire avec certitude ; mais 
peut-être est-il permis de le conjecturer d'un 
passage d'une lettre de Synésius, où, parlant 
d' Hypatie , il se loue d'avoir été, avec son ami 
Herculéius, spectateur et auditeur de la véritable 
initiatrice des mystères de la philosophie (1). 



(1) Aurômai y<*0 ™ * al a.ùvi\toot Yeyovapiêv 
rf;; YV7i?îaç xaOyjyejxovo; twv çiXocoçia; opy^v. 
( Synesius, éd. Pétau, ijetVre 1S6, p, 17t. ) 



Quoi qu'il en soit, Hypatie acquit à Athènes une 
certaine célébrité. De retour à Alexandrie , elle 
ne tarda pas à s'y faire connaître. Son éloquence, 
la pénétration de son esprit, ses mâles talents, 
joints aux grâces et aux vertus de son sexe, atti- 
rèrent datoutes parts les yeux sur elle. On nous la 
représente allant couverte du manteau de philo- 
sophe, insouciante de sa beauté, se mêlant fa- 
milièrement aux hommes les plus distingués , et 
s'entretenant avec eux , sans que le moindre 
soupçon l'effleurât, tant elle portait de dignité 
dans sa conduite et de gravité dans ses discours ! 
Une phrase mal entendue de Damascius a fait 
croire à quelques critiques qu'elle avait épousé 
le philosophe Isidore. Damascius ne dit rien de 
semblable ; bien plus * il cite une certaine Domna 
comme la femme d'Isidore. Synésius, qui lui écrit 
familièrement et la prie de saluer leurs amis 
communs, ne fait nulle mention de son mari. Il est 
donc permis de croire qu'Hypatie se souvint que 
les Muses étaient vierges. Sa naissance et les tra- 
ditions de ses maîtres l'attachaient au paganisme : 
elle y demeura fidèle, moins peut-être par con- 
viction que parce qu'elle pensait avec Thémistius 
et les païens éclairés de cette époque « que les 
cultes, n'étant que des formes extérieures et des 
expressions particulières du sentiment de la di- 
vinité, sont indifférents par eux-mêmes; qu'il y a 
plusieurs voies qui mènent l'âme à Dieu , et que 
chacun est libre de choisir celle qui lui plaît (1) ». 
De plus, au moment où l'empereur Arcadius re« 
nouvelait les sévères ordonnances de son père 
contre Jes adorateurs de Jupiter et de Sérapis , 
au moment où ces derniers étaient pourchassés 
jusqu'au fond des campagnes , il n'était pas pru- 
dent d'élever autel contre autel. Au reste, le seul 
fait de lui avoir attribué la pensée de se faire 
chrétienne prouve qu'elle appartenait à ce paga- 
nisme épuré où la religion nouvelle avait recruté 
plus d'un de ses docteurs , et qui pouvait asse2 
aisément s'accommoder avec les croyances chré- 
tiennes (2). 

L'enseignement philosophique languissait à 
Alexandrie : la chaîne sacrée des maîtres sem- 
blait rompue ; Hypatie la renoua, et, soit par la 
curiosité, soit par l'éclat de sa parole, ramena 
autour d'elle les auditeurs dispersés. Il n'est resté 
aucune trace dans les auteurs anciens de sa mé- 
thode ni de sa doctrine. Nous savons seulement 
qu'elle était écoutée avec une vive admiration. 
Suidas raconte qu'un de ses auditeurs s'éprit 
pour elle d'une violente passion. Le moyen un 
peu brutal dont elle se servit pour la guérir, s'il 

(t) Themtotius, Orat. consul, ad Jovian, Orat. ad Va- 
lentem. 

(t) C'est sur une prétendue lettre d'Hypatle t saint 
Cyrille qu'on s'est appuyé pour prêter à Hypatie ildée 
d'embrasser le christianisme. Cette lettre , qu'on Ht sous 
son nom, dans la Nouvelle Collection des Conciles d'É~ 
tienne de Baluie, tom. I, p. ttfl, et où perce effectivement 
un esprit de bienveillance à rendrait de la religion chré- 
tienne, est évidemment apocryphe. Il y est question de la 
condamnation de Nestorlus qui eut lieu selie ans après 
la mort d'Hypatle. 

23. 



711 



HYPATIÊ 



712 



faut en croire l'anecdote» témoigne qu'elle faisait 
assez bon marché des délicatesses de la pu- 
deur (1). 

Synésius de Cyrène fut élève d'Hypatie, et 
garda toute sa vie pour elle les sentiments d'une 
tendre reconnaissance. L'évéquede Ptolémaisse 
consolait des malheurs de sa patrie en corres- 
pondant arec elle , et en épanchant dans son 
sein ses tristesses iutimes. « Si je recevais de tes 
nouvelles , lui écrit-il , si j'apprenais que tu es, 
comme je l'espère, plus heureuse que moi, je ne 
serais malheureux qu'à demi (2) »... « Mes en- 
fants , mes amismanquent à mon cœur, et sur- 
tout ton âme divine, qui pourrait mieux que 
tout le reste adoucir pour moi les rigueurs de la 
fortune (3). » — « O ma mère, ma sœur, ma 
maîtresse, ma bienfaitrice, mon âme est ac- 
cablée d'affliction : le souvenir de mes enfants , 
que j'ai perdus, me tue (4). » Et ailleurs : «■ A 
toi seule, lui dit-il, je sacrifierais ma patrie; pour 
toi je quitterais ces lieux, si j'en avais le loisir (5). » 
Dans une autre lettre , il lui parle des critiques 
dont il est l'objet de la part de ceux qui l'accu- 
sent d'aimer et de rechercher à l'excès les grâces 
du langage : il lui envoie avec son Dion, et son 
livre sur Y Astrolabe, un Traité des Songes 
qu'il a composé en une nuit , et en appelle à son 
goût. « Si tu penses qu'il mérite de voir le jour, 
je le proposerai en même temps aux orateurs et 
aux philosophes; s'il te parait indigne des oreil- 
les grecques, et qu'avec Aristote tu places la 
vérité au-dessus de l'amitié , il restera enseveli 
dans l'obscurité. Tu me liras la première, car 
ces pages n'ont pas encore .vu le jour (6). » 
De la correspondance d'Hypatie et de Synésius 
il ne nous reste que sept lettres de ce dernier, et 
qui malheureusement n'ontpasgrand intérêt (7). 
Les réponses d'Hypatie ne sont pas venues jus- 
qu'à nous. Ces sept lettres attestent le respect, 
la haute estime que l'évêque de Ptolémaïs pro- 
fessait pour la philosophe , comme il l'appelle, 
et peuvent nous donner une idée de la considéra- 
tion dont elle jouissait parmi les païens. On pour- 
rait s'étonner de ne pas rencontrer,! dans ces 
lettres de Synésius à Hypatie, un seul mot tou- 
chant le christianisme, si Ton ignorait que 



(l) « Cum de auditoribus quidam eam deperlret, pannos 
mensibus fœdatos llli ostendisse dicitar, et dlxlsse ; « Hoc 
qaldem adatnas, o adolescens»; et sic aniroum ejus sa- 
nasse, » Soldas, Lexic. 

(t) Synésius, Lettre 10, p. 170. 

(Si Ibld. 

(*) Synés., Lettre 16 , p. 173. 

(5) ld M Lettre m, p. mo. , 

(6) Id., hettre 155, p. 190. 

(7) Dans one de ces lettres, Synésius demande à 
Hypatie un Instrument dont 11 lui décrit avec exactitnde 
la forme et l'usage. Cet Instrument n'est autre chose, à 
ce qu'il semble, que notre aéromètre ou bydroscope. Il 
est probable qu'il y avait peu de temps qu'on l'avait 
Inventé, car il n'en est fait mention nulle part avant 
cette époque. Mais il semble difficile d'en attribuer l'in- 
vention à Hypatie. Synésius eu effet en parle comme d'un 
objet nouveau et peu connu de celle à laquelle 11 s'a- 
dresse. Ce point curieux d'histoire scientifique avait 
déjà ûxé l'attention de Fermât. ( Voir l'art. Fermât. ) 



sius est encore plus philosophé peut-être que 
chrétien, et que Plotin n'eût pas désavoué la 
théologie qui remplit ses hymnes. 

Hypatie eut le sort commun des grandes in- 
telligences ; elle excita l'envie. Saint Cyrille, ar- 
chevêque d'Alexandrie, ne put, dit-on, se dé- 
fendre d'un mouvement de jalousie, en passant 
un jour devant sa maison , et en voyant la foule 
empressée qui assiégeait sa porte (1). On la 
savait en commerce intime avec les personnages 
les plus considérables de la ville , consultée des 
magistrats, liée d'amitié avec le préfet d'Alexan- 
drie Oreste. Ce dernier s'entendait mal avec 
l'archevêque: tous deux s'accusaient à l'envi 
d'empiéter sur leur juridiction. La ville était di- 
visée et en proie à la violence des partis. En 
414 les juifs, vexés par les Chrétiens, exercèrent 
contre eux de sanglantes représailles : saint 
Cyrille les châtia en les chassant d'Alexandrie, 
après avoir pris de vive force et pillé leurs syna- 
gogues. Oreste écrivit à l'empereur pour se 
plaindre de cet abus d'autorité, et saint Cyrille 
écrivit de son côté pour se justifier. Dans une 
autre circonstance, Oreste avait fait arrêter au 
théâtre un certain maître d'école du nom d'Hié- 
rax, fougueux partisan de l'archevêque, qu'on 
accusait de semer des haines et de pousser 
aux dernières violences ,' et l'avait fait battre de 
verges, au mépris des protestations de l'ar- 
chevêque. Les esprits étaient montés au plus 
haut point. Des moines fanatiques, descendus 
des montagnes voisines et accourus en armes à 
la défense du chef de l'Église d'Alexandrie, in- 
sultent le préfet, lui lancent des pierres et le 
blessent. Un conflit a lieu : force reste à la loi; 
un moine est saisi et appliqué à la torture. Saint 
Cyrille ne craint pas d'en faire l'apologie dans 
un discours public. De nouvelles lettres vont 
porter à l'empereur les griefs du préfet et de 
l'archevêque et dénoncer les empiétements et les 
outrages dont ils s'accusent l'un l'autre. Les em- 
barras d'une minorité empêchant l'autorité 
centrale d'intervenir, saint Cyrille essaye de se 
rapprocher d'Oreste , et vient même un jour 
avec les saints Évangiles pour jurer la réconcilia- 
tion. Cette tentative d'accommodement échoue. 
Hypatie, l'amie et la conseillère d'Oreste, était, 
disait- on , le seul obstacle à la paix entre les 
deux adversaires. L'exaspération contre le parti 
païen se réveilla à cette occasion. Les plus fu- 
rieux d'entre les chrétiens, conduits par un lec- 
teur nommé Pierre, se mirent en embuscade, ar- 
rachèrent Hypatie de sa voiture au moment où elle 
sortait de chez elle, la traînèrent à l'église Césa- 
rienne, la dépouillèrent de ses vêtements et la 
lapidèrent. Son corps fut mis en pièces et ses 
membres palpitants indignement traînés par les 
rues de la ville, puis ramassés et brûlés en un 
lieu appelé Cinaron. Il est difficile de croire que 
saint Cyrille ne trempa pas les mains dans cette 

(S) Damasclos, cité par Suidas, Uxic. 



713 



HYPATIE — HYPERECHIUS 



714 



sanglante tragédie. L'historien Socrate, qui nous 
en raconte les détails, ajoute « que cette action 
couvrit d'infamie non- seulement Cyrille, mais 
toute l'Église d'Alexandrie ». La dissertation de 
l'abbé Goujet, qui a essayé de le disculper (dans 
la Continuation des Mémoires dé Littérature 
et d'Histoire du P. Desmolets, tom. V, pre- 
mière partie) ne nous parait pas très-concluante. 
D'autre part, c'est raisonner d'une étrange 
manière que de prétendre avec Cave ( Hist, 
Littér., p. 251) que Damattcius, qui le pre- 
mier a chargé saint Cyrille de cette accusation» ne 
mérite point d'être cru, étant un ennemi de la 
religion chrétienne , et que le caractère bien 
connu de saint Cyrille suffit à le laver d'une 
pareille tache. 

Hypatie est sans contredit la plus illustre de 
cette pléiade de femmes qui, comme Asclépigé- 
nie , Edésie , Sosipatra, honorèrent la philoso- 
phie grecque au cinquième siècle, par leurs ta- 
lents et leur vertu. Paul Florus, surnommé le 
Silentiaire, a composé en l'honneur d'Hypathie 
une épigramme qu'on trouve dans V Anthologie, 
Grotius Ta traduite en latin. 

Il ne nous reste aucun ouvrage d'Hypatie , si 
ce n'est peut-être un Canon ou Table astrono- 
mique, insérée dans les Tables manuelles at- 
tribuées à Théon. Suidas cite d'elle deux autres 
traités de mathématiques qui sont- perdus: un 
Commentaire sur Diophante et un Commen- 
taire sur les Coniques d'Apollonius de Perga. 

' Synésios, édit. de Petau ; Paris, 16X8, Lettres à Hypatie, 
pages 170, 17* 178, 178, iî8,t60, 190. — Socrate, Hist. 
Ecries., VII, cb. 14, 15. — PhoUus, fragna. — Damasclus, 
Suidas, Hésychius, art. Hypatie. — Niceph., Ecclet. 
Hist., XIV, 16. — Etienne de Baluze, Nova Collect. Con- 
cil.,, tom. I. p. 9*6. — Ménage , Hist. Mut. philos., p. si 
et suiv. — Tillemont, Mém.pour servir à l'Hitt. Eccl, 
tom. XII, p. 501-51»; tom. XIV, p. rtk. - Continuât, des 
Mém. de TAU. et d'Hist. du P. Desmolets, tom. V 
et VI.— Woll, Math. Grœc. Fragmenta,— Schmled, Dia- 
tria, de Hipp. Theon atqm Hypatia. - Tolaod, n° 8 
de son Tetradymus, — Wernadorf, Quatre Dissert, sur 
Hypatie. 

* hypatodoRE frrcaToôtopoç), statuaire thé- 
bain, vivait dans la 102 e olympiade, 372 ans avant 
J.-C. Il était contemporain du premier Polyclès, 
du premier Géphisodote et de Léocharès. Il fit 
avec Aristogiton les statues des chefs argiens 
qui combattirent avec Polynice contre Thèbes. 
Il fit aussi une statue d'Athénée, pour Aliphera 
en Arcadie. Polybe, qui looe magnifiquement 
cette statue, dit qu'elle était l'œuvre de Héca- 
todore et de H. Sostrate. Comme on ne con- 
naît pas d'ailleurs cet Hécatodore, on suppose 
que c'est le même que Hypatodore. Y. 

Pline, Hist. Nat., XXXI V, 8. - Pausanlas , VIII , 86. 
— Polybe, IV, 78. — Boekh, Corp. lnscrfpt., n» 25. — 
O. Millier, Archœol. d. Kunst., 870j n° ». 

* H ypatus , médecin grec dont le véritable 
nom était Georges Sanginatic , vivait dans le 
quinzième siècle. 11 fut médecin du pape Nicolas V, 
qui le créa comte de Latran et consul. 11 prit 
de cette vaine dignité le nom grec û'Hypatus, 



qui signifie consul. On a de lui un petit traité en 
vers politiques intitulé : 'Ëppuiveta r.tçù tc5v toù 
aâpotToç {juEpâv, publié pour la première fois 
par Etienne Le Moyne dans ses Varia sacra, I, 
513, réédité par Jean-Ét. Bernard; Leyde, 1744, 
in-8% avec un traité d'anatomie d'un anonyme 
grec. Y. 

Fabrlcun, BibUotheea Grrnea, vol. XII. — Bernard» 
préface de son édit. — Sax, Onomasticon, t. II, p. 439. 

HYPERBOLUS ( e r7tep6oXoç), démagogue athé- 
nien , né vers 450 avant J.-C, mort vers 410. 
Aucun homme d'État grec, si l'on en excepte 
Cléon, ne fut l'objet d'autant de sarcasmes et 
peut-être de calomnies. On lui contesta sa na- 
tionalité ; on prétendit qu'il était Lydien, Phrygien, 
Syrien, que son père était un esclave public 
qui travaillait dans les mines. On ne peut rien 
tirer de certain de ces assertions contradictoires 
sur la naissance d'Hyperbolus , et pour sa vie 
on est réduit à de rares indications, dispersées 
dans les scoliastes d'Aristophane. Ce poète, qui 
réservait toutes ses forces contre Cléon , n'at- 
taqua Hyperbolus qu'en passant, et l'abandonna 
à ses confrères. Eupolis, dans son Maricas et 
dans ses Villes, Hermippus dans ses Vendeuses 
de pain , Platon le comique dans son Hyper- 
bolus , Polyzelus et Gratinus dans plusieurs de 
leurs pièces , accablèrent le démagogue de rail- 
leries et d'invectives. Mais ces attaques exces- 
sives que tolérait la liberté athénienne étaient 
devenues trop habituelles pour avoir beaucoup 
d'influence sur le sort d'un homme d'État. Si 
Hyperbolus succomba plus tard , ce ne fut pas 
sous les coups des poètes comiques ; il fut victime 
d'une sorte de réaction qui suivit la mort de 
Cléon. Il essaya de le remplacer à la tête du 
parti démocratique, lutta quelque temps contre 
Nicias et Alcibiade, et, pour se débarrasser de 
ces deux rivaux, proposa l'ostracisme. Mais les 
deux hommes d'État menacés se coalisèrent, et 
firent appliquer la mesure à Hyperbolus, qui fut 
banni vers 415 et se retira à Samos. Il y fut 
mis à mort quelques années après par le parti 
oligarchique, sans forme de jugement Cette fin 
tragique parait avoir été aussi imméritée qu'il- 
légale; les poètes et les historiens qui disent le 
plus de mal d'Hyperbolus ne citent aucun fait 
positif à sa charge. Y. 

Thucydide, VIII, 7*. — Plutarqae, Arist. % 7; Aie., 
13; Nie., 11. — Aristophane, Poe., 681; Equités, 1801, 
1360; Fespse, 5*9-660, 1007; Nubes, 87*. 1065; Thesmoph., 
847; Ran., 577; Plut., 1087, avec les «colles. — Lucien, 
Tim. 80, avec les scolles. — Meineke , Qusest. scen., II , 
p. *6. — Grote, History ofancient Greece, t. VII et VIII. 

4 hypereghivs ( TircpéxioO t grammairien 
grec, vivait à Alexandrie sous le règne de l'em- 
pereur Marcien (450-457 après J.-C). Il fut 
banni par l'empereur Léon I er , successeur de Mar- 
cien. Il composa plusieurs ouvrages de gram- 
maire dont on n'a que les titres, savoir : Téxvrj 
YpanjjiaTixYi ; — Ilepi ôvopàxtov ; — nepi p%axo; 
xal ôpÔoYpaçia;. Y. 

Suidas, aux mots Alwv ôMaxéMï);; Tnepéxio;. -* 
Fabrlclus, Bibliot, Grspca, vol. VI^ p. 370. 



715 



HYPÉRIDE 



716 



htpébide ('riupeifivK <m Ticip^c) , célèbre 
orateur athénien, fils de Glaucippus, né dans le 
dèroe deCollytus, vers 395 avant J.-C,misà mort 
en 322. Après avoir roçudlaocratedes laçons d'é- 
loquence, il se dévoua au parti démocratique et le 
servit courageusement à travers tous las dangers, 
et malgré les catastrophes qui abaissèrent suc- 
cessivement Athènes sons Philippe, Alexandre 
et Antipater. Cet inaltérable attachement à une 
grande cause provenait peut-être plus de la liaison 
d'Hypéride avec les chefs du parti patriotique, 
Lycurgue et Démosthène, que de son propre ca- 
ractère, qui semble avoir été assez léger. Ses 
mœurs n'étaient pas irréprochables, bien qu'il eût 
étudié la philosophie à l'école de Platon. Il dé- 
buta dans la carrière oratoire eh soutenant les 
poursuites intentées par d'autres. On a peu de 
détails sur sa vie privée. On raconte qu'amant 
de Phryné, il lui sauva la jie lorsque, accusée 
d'impiété, elle comparut devant le tribunal des 
héliastes. Voyant que ses paroles faisaient peu 
d'impression sur les juges, il découvrit le sein de sa 
cliente et leur demanda s'ils oseraient condamner 
la prétresse favorite de Vénus. Sa vie publique 
est un peu mieux connue. Toutes les actions que 
l'on rapporte de lui sont des traits de dévoue- 
ment patriotique. En 358, dans l'expédition contre 
l'Ile d'Eubée, il équipa deux trirèmes à ses dé- 
pens; en 346 il s'associa à Démosthène pour at- 
taquer le traître Philocrate. Après la bataille de 
Chéronée, en 338, dans un but de résistance déses- 
pérée, il proposa de faire sortir d'Athènes les 
femmes, les enfants, et de les mettre à l'abri dans 
le Pirée, d'affranchir les esclaves, de donner les 
droits politiques aux étrangers domiciliés, etdeles 
rendre aux citoyens qui en avaient été privés. Les 
événements empêchèrent les Athéniens d'exé- 
cuter ce plan vigoureux. La mort de Philippe ra- 
nima l'espoir du parti patriotique, et Hypéride 
fut, quoique l'histoire n'en dise rien, un des plus 
ardents à pousser les Grec3 à la guerre contre la 
Macédoine, puisqu'il se trouva au nombre des 
orateurs qu'Alexandre voulut se faire livrer par 
les Athéniens (voy. Dehade et Démosthène). Ce 
danger qu'il évita ne le rendit pas plus prudent. 
Presque aussitôt après il demanda que les Athé- 
niens n'envoyassent pas de vaisseaux auxiliaires 
aux Macédoniens contre la Perse. La nullité po- 
litique où Athènes tomba pendant le règne d'A- 
lexandre ne laissa plus de place à l'éloquence 
de la tribune, et dans cette période Hypé- 
rideVeut qu'une occasion de se signaler ; ce 
fut contre son ancien ami Démosthène. Il sou- 
tint l'accusation intentée au grand orateur au 
sujet des trésors d'Harpalus. On ignore quelles 
causes amenèrent une [rupture entre deux ora- 
teurs si longtemps unis, et que des espérances 
communes, un même malheur allaient bientôt 
rapprocher de nouveau. A la mort d'Alexandre, 
Hypéride, que l'exil de Démosthène laissait à la 
tête du parti démocratique, prit l'initiative d'un 
soulèvement contre la Macédoine. Il proposa, 



dit-on, mais le fait est très-douteux, de décerner 
une couronne d'or à lolas, empoisonneur sup- 
posé d'Alexandre. 11 eut une part décisive aux 
actes qui amenèrent la guerre lamiaque, et après 
la mort de Leosthène,il prononça l'oraison fu- 
nèbre de ce général. Les premiers succès des 
Athéniens ne se soutinrent pas, et la défaite de 
Cranon, en 322, força les chefs do parti démo- 
cratique a quitter Athènes. Hypéride se retira à 
Égine. Il y rencontra Démosthène et s'excusa 
auprès de lui de sa conduite dans l'affaire d'Har- 
palus. Son dessein était d'aller chercher un an- 
tre lieu de sûreté, lorsqu'il fut arrêté par Archias, 
émissaire d' Antipater, dans le temple de Nep- 
tune, dont il embrassait la statue. On le conduisit 
à Corinthe, où se trouvait Antipater, qui lui fit 
donner la question pour l'obliger à révéler des 
secrets d'État Hypéride supporta héroïquement 
la torture, et se coupa, dit-on, la langue pour se 
forcer au silence. Il mourut dans les tourments. 
Son fils, nommé Glaucippus, fut aussi orateur. 
« J'ai lu, dit Photius, tous tes discoursd'Hypéride. 
Il y en a cinquante-deux que l'on croit être vé- 
ritablement de lui, et vingt-cinq dont on doute; 
ce qui fait en tout soixante-dix-sept. La compo- 
sition de cet orateur est. si excellente, que quel- 
ques-uns n'oseraient décider si Démosthène est 
au-dessus d'Hypéride ou Hypéride au-dessus de 
Démosthène. » Cet éloge est à la fois vague et 
exagéré. Quintilien a dit avec plus de précision 
et d'exactitude : « Le caractère d'Hypéride est 
la douceur mêlée de finesse; mais son style est 
plus approprié aux petites causes. » Quelque fût 
le mérite de cet orateur, il avait été jusqu'ici dif- 
ficile d'en juger par les fragmente, en général fort 
courts, qui nous restaient de lui. Plus d'une fois 
on avait, il est vrai, entretenu l'espoir de recou- 
vrer quelques-uns ou même la totalité de ses 
discours. J. A. Brassicanus (Prxf. ad Salvia- 
num) prétendit au commencement du dix-sep- 
tième siècle en avoir vu un manuscrit complet 
avec de nombreuses scolies dans la bibliothèque 
de Mathias Corvin à Ofen, Taylor (Prxf. ad De- 
mos th., vol. m) déclara aussi avoir vu un ma- 
nuscrit qui contenait plusieurs discours d'Hypé- 
ride. Ces deux assertions n'étaient probablement 
fondées que sur des méprises, et il a été impos- 
sible de les vérifier. Mais une découverte plus 
réelle nous a rendu récemment une faible parue 
des œuvres de l'orateur attique : on trouva dans 
un papyrus rapporté d'Egypte des fragments du 
discours contre Démosthène, et on les publia en 
1848. Par un hasard singulier, un voyageur an- 
glais acheta en 1848 aussi à des Arabes deQooro 
(près des ruines de Thèbes, en Egypte, des feuil- 
lets qui appartenaient au même papyrus et con- 
tenaient deux discours du même orateur, l'on 
complet, l'autre avec des lacunes. Ces deux 
discours, qui se rapportent à des causes privées, 
à de petites causes, n'ont pas un grand intérêt 
historique ; mais ils contiennent des détails dont 
l'érudition peut tirer parti, et Us confirment le 



717 

jugement de Quintilien sur Hypéride. Ces deux 
discours Pour Euasenippe contre Polyeucte; 
( Tnèp EôÇevfanou slaaYYtMaç àmokoyla itpôç Uo- 
àueuxtov); Pour Lycophron ('Ticsp Avxàppovoç), 
publiés d'abord par Churchill Babington, Cam- 
bridge, 1852, in-fol., ont été réédités avec des 
corrections et des notes par Schneidewin ; Gœt- 
tingue, 1853, in-8°. M. Babington a donné , d'a- 
près le même papyrus, l'oraison funèbre presque 
entière d'Hypéride sur Léosmène et ses compa- 
gnons d'armes tués dans la guerre lamiaque ; 
Londres, 1858, in-fol. On connaissait déjà par 
Stobée {Floril.t CXXIV, 36) un important pas- 
sage de ce discours, la péroraison, qu'a traduite 
M. Yillemain, dans son Essai sur V Oraison fu- 
nèbre. M. Dehèque a publié le discours sur Léos- 
thène, avec une traduction française; Paris, 
1868. Tous les discours et fragments d'Hypé- 
ride font partie des Oratores Aitici publiés par 
C. Mùller dans la Bibl. grecq. de A.-F. Didot; 
Paris, 1848-1*58, 2 vol. gr. in-8°. Quelques criti- 
ques attribuent à Hypéride, d'après l'autorité de 
Libanius, un discours Sur les Traités avec 
Alexandre (Htpi rôv irpàç 'AXé&xvSpov auvfoixûv) 
qui est inséré dans les œuvres de Démosthène ; 
cette supposition n'est appuyée par aucun des 
fragments découverts jusqu'à présent. 

L. Joubert. 

Plotarque, Fitse dteem Orat. ; Alexan., 77 ; Phocion, 
13, *9; Demos., J8. — Démosthène, De Corona,; in Mi- 
diatn; De falsa Légat, fcant. Aristoçr., II. — Lycurgue, 
Contra Leocratem. — Diogèoe Laerce, III, 46.— Athénée, 
VIII, p. 84S; XIII, p. 590. - Photius, Bibl., cod, S60- 
«65. — Arrien, Anab., I. 1© ; VII, «7. — Lucien, Encom. 
Demost. - Justin, XIII, 5.— DIodore de Sicile, XVIII, a. 
— Denys d'Hallcarnasae, Dinar., 17.- Longtn, De Su- 
blim., XXXIV. i. — Cicéron, Brut., 81, 8* ; Orat., Si ; De 
Orot. t 'JUI.~- Qaintlllen, XII, 10. — Hermogène, De Form. 
Orat., II, il. - Alcipbron, Eplst., 81-81. — Westennann, 
Gesch. d. Grieeh Btredtsamt, p. 807. — Mém. de VAcad. 
des Inscript, et Belles- Lettres^. VIII, p. 188. - Kiess- 
Hng, De Hypéride orat. attico comment., II; Hiidbarg- 
bamcn ; 1787, ln-4», — Droysen, Gesch. des Hellenism., 
toI. I. — Grote, Hittory ofancient Greece, t. XI et XII. 

htpebius (André Gerhard), un des plus 
remarquables théologiens protestants du sei- 
zième siècle, né le 16 mai 1511, à Ypres, et mort 
à Marbourg, le 1 er février 1564. Son nom est pro- 
prement Gerhard; mais il est généralement 
connu sous celui d'Hyperius, qui indique le lieu 
de sa naissance. Son père, homme instruit et 
avocat distingué, lui fit donner une éducation 
soignée : Hyperius étudia ensuite de 1528 à 1535, 
à l'université de Paria, et, pendant cet espace de 
temps, il employa les vacances à visiter le midi de 
la France et la Lomhardie. Après un court séjour 
à Louvain, il parcourut les Pays-Bas et plus tard 
l'Allemagne. Ce dernier voyage le fit suspecter 
d'hérésie et le priva de la collection d'un bénéfice 
qu'on avait obtenu pour lui. U avait en effet em- 
brassé la cause de la réformation. Il passa alors 
en Angleterre, où il vécut pendant quatre ans au- 
près du fils de Guillaume Mountjoy, qui avait été 
un des amis d'Érasme. La persécution qui s'ap- 
pesantit en 1540 sur les protestants, en Angle- 
terre, le força de quitter ce pays. Il avait formé 



HYPÉRIDE — HYPERIUS 



718 



le dessein de se rendre à Strasbourg, attiré 
par la réputation deBucer, quand, en passant i\ 
Marbourg , il fut retenu par Geldenhauer, pro- 
fesseur en théologie, qui était un de ses amis et 
auquel il succéda en 1542. 

Hyperius joignait à une érudition solide et 
étendue une rare intelligence, et un caractère 
plein de droiture et de douceur. Supérieur à son 
temps , il eut sur la méthode à suivre dans les 
études et les travaux théologiques et principale- 
ment sur les principes qui doivent diriger l'in- 
terprète des livres saints, des vues dont la jus- 
tesse et la profondeur forment le plus grand 
contraste avec les procédés arbitraires des exé- 
gètes du seizième siècle et avec les conceptions 
scolastiques des théologiens de cette époque, et 
qui sont devenues la base des sciences théolo- 
giques modernes. Il sç fit aussi de la prédication 
une idée beaucoup plus saine que les prédica- 
teurs do son temps qui, au lieu d'exposer à leurs 
auditeurs la religion chrétienne au point de vue 
de l'édification, n'apportaient en chaire que des 
discussions abstraites ou des controverses irri- 
tantes. 

On a d'Hyperius : Deformandis Concionibus 
sacris y seu de interpretatione Scripturarum 
populari Libri II ;Dortmund, 1555, in-8° : plu- 
sieurs éditions, dont ladernière avec des additions 
et une vie de l'auteur, est de Halle, 1781, in-8°. 
C'est le premier ouvrage complet et en même 
temps un des meilleurs sur l'art de la chaire ; — 
De Theologo, seu de ratione studii theologici, 
LibrilV; Bâle,1556, in-8*; plus.édit. : excellent 
traité qui aurait pu produire les plus heureux ef- 
fets dans les études théologiques, si la largeur 
des vues et les opinions zwingliennes d'Hyperius 
sur la sainte Cène ne l'avaient pas mis en sus- 
picion auprès des luthériens orthodoxes. Laur. 
Yillavincentius, docteur de Louvain, mit à con- 
tribution cet ouvrage ainsi que le précédent, ou, 
pour mieux dire, il les fit réimprimer sous son 
nom, presque mot à mot, en en retranchant 
seulement ce qui sentait trop le protestantisme, 
dans un écrit qu'il publia à Anvers en 1565 ; — 
Elément a christianœ Religionis; Baie, 1563, 
in-8°; — Topica theologica; Wittemberg, 

1565, in-8°; et Bâle, 1573, in-8°; — Methodi 
Theologte, sive prœcipuorum christianœ re- 
ligionis ïocorumcommunium, Libri III; Bâle, 

1566, et 1568 in-8°. Cet ouvrage devait avoir trois 
autres livres qu'Hyperius ne jugea pas conve- 
nable de composer ; — Opuscula Theologica 
varia; Bâle, 1570, 2 vol. in-8° : c'est la col- 
lection de divers petits écrits qu'il avait pu- 
bliés séparément; — De Saerœ Scripturœ 
Lectione et Meditalione; Bâle, 1581 , in-8° ; — 
Comment, in Epistolas ad Timoth., Titum et 
Pkilem.; Zurich, 1582, in-fol.; — Comment, in 
Pauli Epistolas ; Zurich, 1 583, in-fol.; — Corn - 
ment, in Epistol. ad Hebrœos; Zurich, 1585, 
in-fol. Ces trois derniers écrits furent publiés, 
après sa mort , par les soins de son fils, Lau- 



719 



HYPERIUS — HYRCAH 



72ft 



rent Hyperius; — De Catechesi, réimprimé 
par les soins de J. And. Schmidt à Helmstœdt, 
1704, in-8°. Micb ,1 Nicolas. 

Wlg/ Orthti Oratto funebris de vita et ebitu A, Hy- 
perii; dans l'édlt. de Halle, 1781, du Deformandi» Concio- 
nibus sacris. — Boinard, Icônes Firorum IUtutrium, 
pan III. — Melch. Adam, Fitse Germanorwn Theolo- 
gorum. — Bayle. Dict. Hist. — J. M. Schrœci, Leben- 
sbeschreib. berûhmter Getehrten, 1. 1, et Kirchengesch. 
seU der Reformât., L Y. 

hypsiclès ("TdftxXjfc ), mathématicien grec, 
d'une époque incertaine. Il était d'Alexandrie, ou, 
selon quelques écrivains arabes, d'Ascalon : deux 
assertions qu'il est facile de concilier en suppo- 
sant que Hypsiclès, natif d'Ascalon, étudia et pro- 
fessa à Alexandrie. Suidas prétend qu'Isidore, 
maître d'Hypsiclès, « philosophait sous les frè- 
res ». Sur cette autorité on place généralement 
la vie d'Hypsiclès sous les frères impériaux 
(divis fratribus) MarcAurèleetVerus,yers 165 
après J.-C. Mais comme Isidore est inconnu , et 
que l'expression « sous les frères » est extrê- 
mement Tague, le champ est ouvert aux hypo- 
thèses, et M. de Morgan donne de bonnes raisons 
pour fixer la date d'Hypsiclès vers le milieu du 
sixième siècle après J.-C. Quant à l'opinion qui 
faisait vivre ce mathématicien avant l'ère chré- 
tienne,sous Ptolémée Physcon, elle est générale- 
ment abandonnée. Achille TdUuscited'Hypsiclès 
un traité sur le mouvement harmonieux des 
planètes ( Hepl tyjç èvap^ovCou xiv^rewç ), et Ca- 
siri mentionne de lui, d'après les écrivains ara- 
bes, un ouvrage sur les grandeurs et les distances 
des corps célestes. Il ne nous reste d'Hypsiclès 
qu'un traité astronomique sur l'ascension droite 
des constellations zodiacales (Hept -oj; tûv 
ÇcoÔtav àvatpopaç), publié en grec et en latin par 
Jac. Mentel ; Paris, 1657, in-4°, et avec les Op- 
tiques d'Héliodore, par Erasme Bartholîn , Paris, 
1680, in-4°. Cet ouvrage, qui a été édité en arabe 
par Costha ben Luca , servait chez les Grecs 
aussi bien que chez les Arabes d'étude prépara- 
toire à la Syn taxis de Ptolémée. «Ce livre, dît 
Delambre, ne renferme que six propositions, et 
même les trois premières ne sont que.des lemmes 
qui démontrent trois propriétés des progressions 
arithmétiques ; ainsi l'ouvrage ne consiste véri- 
tablement qu'en trois propositions, dans lesquelles 
Hypsiclès donne une méthode pour calculer en 
combien de temps se lève chaque degré de l'é- 
cliptique ; cette méthode n'est qu'approximative ; 
elle aurait pu avoir quelque mérite avant la dé- 
couverte de la trigonométrie. » On s'étonne que 
Hypsiclès vivant, selon toute probabilité, plu- 
sieurs siècles après Hipparque, ait ignoré ou dé- 
daigné la méthode créée par ce grand géomètre, 
et on s'étonne encore plus qu'un livre sans va- 
leur scientifique aitjservi d'introduction à l'étude 
de Ptolémée. 

Le quatorzième et le quinzième livre des Élé- 
ments d'Euclide, qui ont pour objet le dodécaè- 
dre et Vicosaèdre, passent pour être d'Hypsiclès, 
bien que Casiri prétende, d'après les écrivains 



arabes, qu'il n'avait fait que les corriger, et que 
les anciennes traductions arabes ne mentionnent 
pas son nom ; mais Hypsiclès a pour lui l'auto- 
rité des manuscrits d'Euclide. Y. 

Suidas, Lez. — Fabrlctas, Bibliotheca Grseea. iv. m. 

— Montocla, Histoire des Mathématiques, 1. 1, p. sis. - 
Delambre, Histoire de t Astronomie ancienne, L I, p. 1*6. 

— Gartz, De fttierpret. Euclidis Avoine. — A. de Mor- 
gan, article Hypsiclès dans le Diction, of Greek and Ro- 
man Biography de Smith. 

htpsicrate (*r^txpdtTY|; ), historien grec, 
d'une époque incertaine. II écrivit en phénicien 
une histoire de la Phénicie, qui fut traduite en 
grec par un certain Asitus ( *A<titoç ) ou Laetus 
( ÀaïToç) (Tatien, Orat. ad Gent., 58*, Eusèbe 
Prœp. Evang., X,p. 289). 

Lucien parle d'un autre historien Htpsicrate, 
natif d'Amèse, et qui vécut jusqu'à quatre-vingt* 
douze ans et se distingua par son savoir (Lucien, 
Macrob. , 22 ; Strabon, vn, p. 479 ; XI, p. 769). 

On cite encore deux écrivains de ce nom, 
l'un mentionné par Diogène Laerce comme ac- 
teur d'un traité Hept tcivoxcov ( Diog. Laer., 
VU, 188) ; l'autre grammairien latin, contem- 
porain de Marcus Terentius Varron et cité 
par ce dernier ( De Ling, Lat. 9 V, 88 ); par 
Etienne de Byzance ( au mot Al8£o<{/); et par 
Aulu-Gelle ( XVI, 12 ) qui lui attribue « libres 
sane nobiles super his quae a Graecis accepta 
sunt ». Y. 

C. Huiler, Fragmenta Histor. Grœcorum, t. III, p. ils. 

HYPS1LANTIS. Voy. YPSILANTI. 

ht ne an ( Tpxavo;, Jean ), prince et grand- 
prêtre des Juifs, troisième fils de* Simon Ma- 
chabée, régna depuis 135 avant J.-C. jusqu'en 
106. En 137 Antiochus VII, rétabli sur le trône 
de Syrie après la défaite et la mort de Tryphon, 
voulut réduire la Judée à son ancienne condi- 
tion de puissance tributaire, et confia cette mis- 
sion à Gendebeus, un de ses généraux. Simon 
Machabée opposa aux envahisseurs ses deux 
fils Judas et Jean Hyrcan, qui défirent Cende- 
beus et le chassèrent de la Judée. Simon ne 
jouit pas longtemps de sa victoire; il fut traîtreu- 
sement saisi et égorgé par son gendre Ptolémée, 
gouverneur de Jéricho, en 135. Deux de ses fils 
périrent avec lui; mais Hyrcan, échappant au fer 
des assassins, courut à Jérusalem, s'y fit pro- 
clamer grand-prètre, et marcha avec une armé* 
contre Ptolémée, qui s'enferma dans la forteresse 
de Dagon. Le meurtre de Simon avait été pro- 
bablement concerté avec Antiochus Sidétès, roi 
de Syrie ; ce prince en profita du moins pour 
envahir la Judée. Hyrcan, trop faible pour tenir 
campagne, s'enferma dans Jérusalem, et fut forcé, 
après un long siège, de subir des conditions qui 
replacèrent de nouveau la Judée sous la dépen- 
dance de la Syrie, en 133. Quatre ans après, 
Hyrcan accompagna Antiochus dans l'expédi- 
tion contre les Parthes, prit part aux premiers 
suceès des Syriens, et par un prompt retour à 
Jérusalem, dès l'entrée de l'hiver, il échappa aa 
désastre qui enveloppa le roi de Syrie et son 



721 



HYRCAN 



722 



armée. II saisit l'occasion de s'émanciper de la 
suzeraineté syrienne, conquit plusieurs villes 
sur les confins de la Judée , entre autres Si- 
chem dans la Samarie, et détruisit le temple du 
mont Gerizim. Il subjugua ensuite les Iduméens 
et les força d'adopter les lois et. les coutumes 
des Juifs. Pour se mettre à l'abri du côté de la 
Syrie, il envoya une ambassade à Rome, et ob- 
tint la confirmation du traité conclu par son 
père avec le sénat. Les troubles de la Syrie ne 
le servirent pas moins que la protection romaine. 
Démétrius II, à peine remonté sur le trône des 
Séleucides, en fut précipité par une mort violente, 
en 1 25. Hyrcan s'allia avec un des prétendante 
au trône, Alexandre Zebina; mais il ne parait pas 
lui avoir prêté un appui efficace , car il avait in- 
térêt à prolonger la guerre civile en Syrie. En 
110 il profita de la faiblesse toujours croissante 
de l'empire des Séleucides pour assiéger Samarie, 
qui était depuis des siècles la rivale et l'ennemie 
de Jérusalem. Les Samaritains appelèrent en 
vain à leur secours Antiochus de Cyzique. Ce 
prince fut vaincu par les deux fils d'Hyrcan , 
Antigone et Aristobule ; ses généraux Épicrate 
et Callimander furent également malheureux, et 
Samarie finit par succomber. Hyrcan fit raser 
jusqu'aux fondements cette ville détestée. Les 
disputes des deux puissantes sectes, les Phari- 
siens et les Sadducéens, que Hyrcan favorisa 
Tune après l'autre , semblent avoir troublé la 
tranquillité de ses dernières années , sans pro- 
duire cependant aucune révolte. Hyrcan finit en 
paix, son glorieux règne. Sa mémoire resta chère 
aux Juifs. On disait dans le peuple qu'il avait 
des révélations divines et prédisait l'avenir. Il 
laissa cinq fils : Aristobule, Antigone, Alexandre 
J année, un quatrième dont le nom est inconnu, 
et Absalon. D'après son testament, sa femme 
devait gouverner à sa place; mais Aristobule 
s'empara du pouvoir, et prit le titre de roi au 
lieu de celui de prince ( nasi ), dont Hyrcan s'é- 
tait contenté. Y. 

Bible, Mac., XV, XVI. - Joaèpbe, Antiq., Xlll, 7, 8, 9, 
10; Bel. Jud., l, s. — Dlodore de Sicile, Excerpt., 
XXXIV, 1. - Justin, XXXVI, 1. 

hyrcan il, grand-prêtre et roi des Juifs, fils 
d'Alexandre Jannée et petit-fils du précédent, 
né vers HO avant J.-C, mort en 30 avant J.-C. 
A la mort d'Alexandre, en 78, l'autorité royale 
passa à sa femme, la reine Alexandra , qui nomma 
aussitôt Hyrcan grand-prêtre, et donna le com- 
mandement des troupes à son second fils Aris- 
tobule. Pendant les neuf ans du règne de sa 
mère, Hyrcan se montra fils soumis, et se dé- 
voua au parti des pharisiens, qu'elle favorisait. 
Il lui succéda en 69; mais, aussitôt après, il fut 
attaqué par Aristobule, qui le vainquit à Jéricho, 
l'assiégea dans Jérusalem et le força d'abdiquer. 
Hyrcan, modeste et sans ambition, se serait con- 
tenté d'une position privée si les intrigues de 
l'tduméen Antipas ou Antipater ne l'avaient 
inquiété pour sa sûreté. Il s'enfuit de Jérusalem, 



et se réfugia à la cour d'Arétas, roi de l'Arabie 
Pétrée, en 65. Arétas envahit la Judée, défit 
Aristobule, et le força de s'enfermer dans le 
temple, tandis que Hyrcan était maître du reste 
de la ville. L'intervention de M. iEmilius Scaurus, 
lieutenant de Pompée, obligea le roi d'Arabie et 
son protégé à évacuer la Judée. L'année sui- 
vante Pompée vint lui-même régler les affaires 
des deux princes juifs. Aristobule en rejeta l'ar- 
bitrage, et le général romain n'occupa Jérusalem 
qu'après un long siège, en 63. Il rendit à Hyr- 
can la grande-prêtrise et sinon l'autorité, du 
moins le titre de roi. La protection des Romains 
etl'habUetéd'Antipaterne purent assureràHyrcan 
un règnetranquille. Alexandre, fils d'Aristobule, 
et Aristobule lui-même, s'échappant de Rome, 
excitèrent dans la Judée des insurrections que ré- 
prima le proconsul Gabinius. Fatigué de soutenir 
un prince qui ne savait pas se défendre, le gou- 
verneur romain lui retira l'autorité suprême, et le 
confia à cinq conseils provinciaux ou sanhédrins. 
Le grand-prêtre, privé du pouvoir, royal, eut le 
chagrin de voir Grassus, successeur de Gabinius, 
enlever les richesses du temple. Pendant la 
guerre civile, César encouragea Aristobule à 
faire valoir ses droits au trône; mais ce danger, 
qui menaçait les faibles restes du pouvoir d'Hyr- 
can , fut conjuré par les partisans de Pompée , 
qui empoisonnèrent Aristobule, et par Scipion, 
qui fit tuer Alexandre à Antioche. Après la ba- 
taille de Pharsale, Hyrcan, ou plutôt Antipater, 
rendit des services si importants à César pen- 
dant la guerre alexandrine, que le dictateur, à 
son retour d'Egypte, le rétablitdans l'autorité su- 
prême ; mais Hyrcan n'eut encore que l'appa- 
rence du pouvoir, qui appartenait en réalité à 
Antipater et à ses deux fils, Phasael et Hérode. 
Celui-ci fut traduit devant le grand sanhédrin, 
pour des actes arbitraires commis dans son gou- 
vernement de Galilée, et il allait être condamné 
lorsque Hyrcan le fit prévenir de s'enfuir : il 
obéit, et bientôt, grâce à la protection des Ro- 
mains , il se trouva plus puissant que jamais. 
Hyrcan ne fut plus que le jouet des deux partis 
qui se disputaient le pouvoir. 11 permit à Malien 
d'empoisonner Antipater, et laissa Hérode tirer 
de ce crime une terrible vengeance. Il n'eut dè3 
lors rien à refuser au jeune prince, et lui donna 
en mariage sa petite-fille, la belle Mariamne. 
Après la bataille de Philippes, en 42, Hyrcan et 
Hérode obtinrent la confirmation de leur pou- 
voir; mais ils furent bientôt forcés de fuir devant 
l'invasion des Parthes, qui ramenaient avec eux 
Antigone, fils d'Aristobule. Phasael et Hyrcan, 
ayant eu l'imprudence de se laisser attirer dans 
une entrevue, tombèrent entre les mains des Par- 
thes. Antigone fit couper les oreilles à son oncle 
Hyrcan, afin de l'exclure à. jamais du pontificat, 
car aucun prêtre ayant un défaut corporel ne pou- 
vait approcher de l'autel. Le malheureux prince 
rut emmené par les Parthes, qui le laissèrent vi- 
vre librement à Babylone. Voyant Hérode ré- 



723 



HYRCAJS — HYSTASPE 



724 



tabli sur le trône, il ne pot résister an désir de 
revenir en Judée, en 38. Il y reçut d'abord on ex* 
cellent accueil de la pari de son gendre; mais, 
devenu encore plus faible avec l'âge, il se laissa 
entraîner pas sa fiHe Àlexandra dans des intri- 
gues contre Hérode, qui le lit mettre à mort. 
Avec Hyrean finit la race des Macbabéca. .Y. 

Joaèphe, Antiq. Jud. t Xll\, 16; XIV. 1-4, It, 18; XV, i, 
6; Bel. Jud . 1, 5-S, 11, 11, 18, M.- Dloo Cattitif, XXXVII, 
il, 16 1 XXXVUI.M. - Dtodor* <U «telle, Emcvrft* 
/'ot, XL. ~ Orose, M, «. 

HTBMENTRUDB. Voy. EftlUNTftUDE. 

■vaiTACÈNH. Voy. Théodore. 
HTSTA8PB (TotéçinK en grec, Gaktasp, 
Gustasp, Histasp on Wiitasp en persan), fils 



d'Arsaine et père de Darius I' r , chef de la fa- 
mole royale des Achéménides, vivait dans le 
sixième siècle avant J.-C. Satrape de Perse sous 
Cambyse et probablement aussi sous Cyrus, il 
accompagna ce prince dans son expédition contre 
les Massagètes. Mais il reçut Tordre de revenir 
surveiller son fila aîné Darius, que Cyrus soup- 
çonnait de trahison* Il avait deux autres fils, Ar- 
taban et Artane. Ammien Marcellin fait de lui ua 
chef des mages, et prétend qu'il avait étudié dans 
l'Inde sous les brahmes. On a lu son nom sur les 
inscriptions de Peraépous. Y. 

Hérodote, I, *», Î10; III, 70; IV, 83; VII, «S* - A»- 
mlea MarcelMn, XXIII, 6. - Grotefend, Mêtrwge mt Bm- 



M, ministre de l'empereur Chun, vivait an 
vingt -troisième siècle avant notre ère. Une 
grande famine s'étant déclarée à la suite de l'é- 
coulement des eaux diluviennes, et les grains 
Tenant à manquer dans toutes les campagnes, 
Yu le Grand ( voy. ce nom ) chargea le ministre I 
de pourvoir aux moyens d'assurer la subsistance 
du peuple. Le ministre s'acquitta habilement de 
cette mission, et enseigna l'art de lâchasse aux 
populations de l'empire. H inventa aussi les filets 
et d'autres instruments destinés à la pèche et à 
l'agriculture. P. B. 

Chou-Kino, Ifrre canonique 4m Annales. — Ttmne- 
kien-Jumg+um ( Miroir général 4e l'Histoire de la China ). 
- Histoire générale de la Chine, trad. par MoyrUc de 
Mailla, tora. 1««\ 

* i-pori, chef japonais du paysde Yamato, vi- 
vait au milieu du septième siècle avant notre ère. 
I-Fori fut un des chefs qui s'opposèrent le plus 
rigoureusement à rétablissement de Sin-mou 
(voy. ce nom), le premier empereur et souve- 
rain spirituel du Japon. Il s'était établi sur le 
cap Nagaye-no-oka-saki. On le désignait sous le 
nom de Tsoutsi-goumo , c'est-à-dire araignée 
de terre, parce qu'il n'avait point de demeure 
fixe et qu'il vivait dans des antres et dans des 
souterrains. Il finit par être vaincu par tes troupes 
de Sin-mou. P. B. 

Klaprotb, dans les Annales des Empereurs 4m Japon 
deTiUiag, In-**. 

UBLorsKi. Voy. Jàblotokt. 
iacaïa. VoyesYscAlA. 
iacoub. Voyez Yakovb. 

IAGOU9CHIICSKI. Voy. JkGOUttMKY\(P<lUl). 

ianaki, volvode de Moldavie, tué à la fin de 
l'année 1730. Une insurrection des janissaires 
força le sultan Ahmed d'abdiquer en faveur de 
son neveu Mahmoud au mois d'octobre 1730. 
Par suite de cet événement, des mutations eurent 
lieu dans tous les grands emplois. Grégoire Ghica, 
qui venait d'être nommé voivode de Molda- 
vie, fut révoqué et remplacé par un boucher 
grec nommé Ianaki , lequel acheta cette place 
moyennant cinq cents bourses à Chalil-Patrona, 
simple janissaire dont l'insurrection avait fait un 
des personnages les plus importants de l'empire. 
En vain le grand- vizir représentait que le prince 
Ghica venait d'être confirmé dans sa dignité 
par le nouveau sultan : « Allez trouver le sultan, 
répondit le janissaire, et songes avant tout à faire 
la volonté de Patrona. » Le boucher grec fut donc 
installé sur le trône à la grande indignation des 
Moldaves. Un mois et demi plus tard Chalil-Pa- 

725 



troua succomba à Constantinople, et Ianaki fut 
aussitôt destitué et décapité. Z. 

Bngel, Histoire dé la Valachit % t. 1t. - De Hammer, 
Histoire êê r Empiré Ottoman, 1 . LXV1. 

iajtowski. Voy. Ybhisb. 

* iasos, sculpteur athénien* H prit part à 
l'exécution d'nn dea plus beaux monuments d* 
l'architecture grecque, en travaillant aux bas- 
reliefs du temple de Minerve Polyade. Une ins- 
cription attique en a conservé le nom. G. B. 

Baonl-Rocbette, Lettre é M. Schom, supplément an 
Catalogue dot Artiste» de F Antiquité, p. $86. 

iatbako, l'un des chefs de l'insurrection 
grecque, né en Morée, vers 1770. Il montra dès 
son enfance un goût particulier pour la méde- 
cine. Sans avoir étudié dans aucune faculté, une 
longue pratique lui avait acquis une grande expé- 
rience et une certaine science : de là son surnom 
de latpoxo (le Médecin), que lui donnèrent ses 
compatriotes. Les Turcs eux-mêmes, prenant 
en considération son savoir, lui avaient accor- 
dé de grands privilèges, l'avaient exempté d'im- 
pôts, et lui permettaient de porter des armes alors 
qu'aucun autre rajah n'en devait avoir en sa 
possession. Néanmoins, Tatrako fut l'un des 
premiers à appeler ses compatriotes à l'indépen- 
dance, et, semblable à quelques-uns des héros 
de V Iliade, après avoir vigoureusement combattu, 
il pansait lui-même ses soldats blessés. Il fut, 
après Kolokotroni, celui qui amena le plus de Pâli- 
tares devant Tripolitxa, et prit une part importante 
à la prise de cette ville ( 1621 ). On a mis cepen- 
dant en doute sa valeur et ses talents militaires. 
Il disparut de la scène active peu après 1828. 
Peut-être fut-il tué dans un des combats quoti- 
diens que les Hellènes livraient alors aux Os- 
manli». A. de L. 

Itibbe et VielUi de Bolsjolla, Biographie portative du 
Contemporains» 

ibakra (Joaquin), imprimeur espagnol, 
né à Saragosse en 1725, mort à Madrid le 
23 novembre 1785. Il monta àMadrid une impri- 
merie dont les productions sont encore recher- 
chées des bibliophiles, et porta la perfection de son 
art à un point inconnu jusqu'alors dans la pénin- 
sule hispanique. Il inventa une encre d'une ex- 
cellente qualité, et le premier il fit connaître à 
sçs compatriotes le moyen de lisser le papier im- 
primé pour en faire disparaître les plis et le fou- 
lage occasionné par la pression sur les caractères, 
et lui donner une égalité , un luisant agréable à 
l'œil, lbarra ne dut ses inventions qu'à lui-même, 
car jamais il ne sortit de son pays. Parmi les ou- 
726 



727 



IBARRA — IBN-AL-ABBAR 



728 



▼rages sortis de ses presses, on cite surtout de 
belles éditions de la Bible, du Missel mozarabe, 
de la Historia de Hispana de Mariana , de Don 
Quùrcfe, Madrid, 1780,4to1. in-4°, et 1782,4 vol. 
in-8°, et surtout sa superbe édition du Salluste 
espagnol, traduit par l'infant don Gabriele, Ma- 
drid, 1772, in-fol. : les exemplaires de ce dernier 
ouvrage sont presque introuvables ailleurs que 
dans les bibliothèques princières. L— z— e. 

ChaodoD et Delandtne, Dictionnaire universel ( édit 
de 1810). 

ibas, évêque d'Édesse en Syrie, mort vers 
457. Il était évêque depuis plusieurs années, 
lorsque quatre prêtres de son diocèse l'accu- 
sèrent de l'hérésie nestorienne auprès des ar- 
chevêques d'Antioche et de Constantinople. 
L'empereur le renvoya devant une commission 
composée des évêques Uranius d'ffîmère, Pho- 
tius de Tyr, Eustathe de*Béryte, et du préfet 
Damasce. Cette commission tint deux synodes, 
en 448, l'un à Tyr, l'autre à Béryte, et prononça 
l'absolution d'ibas, qui n'en fut pas moins déposé 
l'année suivante par le fameux concile d'Éphèse et 
expulsé de son diocèse. 11 appela de cette déci- 
sion au concile de Chalcédoine, qui le rétablit 
sur son siège en 451. Longtemps après sa mort, 
en 553, le cinquième concile général de Constan- 
tinople le condamna comme nestorien, malgré 
l'opposition du pape Vigile. Le principal argu- 
ment contre Ibas était une lettre à un Persan 
nommé Maris, dans laquelle il blâmait Rabulas, 
son prédécesseur, d'avoir condamné Théodore 
de Mopsueste. La plus grande partie de cette 
lettre a été insérée dans le Recueil des Conciles, 
t. IV, p. 661. Y, 

Baronius, Annales, an. U8, U», 4SI, 855.- Daptn, Bi- 
bliothèque ecclés. du cinquième siècle. - Cave, Hist. Ut. 

* ibbetson ( Agnès Thompson, mistress), 
femme savante anglaise, née en 1 7 57, à Londres , 
morte en 1823, à Exmouth. Mariée à un avocat 
qui la laissa veuve, elle porta de bonne heure 
son activité sur l'étude de l'astronomie, de la 
géologie et de la botanique, et acquit, dans cette 
dernière science, une connaissance approfondie 
4e la physiologie des plantes. Dooée d'un esprit 
ingénieux et observateur, elle fit, à l'aide du mi- 
croscope, une série de recherches sur la structure 
des végétaux, qui ont été insérées dans lesiin- 
nales of^Philosophy et autres recueils scienti- 
fiques. P. L— Y. 

Boue, New gênerai Bioçraphieal Dictionary , t. VIII. 
— filauQder, Bioçraphieal Treasury, 1847. 

ibbot (Benjamin), théologien anglais, né 
en 1680, à Beachamwell (comté de Norfolk), 
mort en 1725, Après avoir fait ses études à 
Cambridge , il devint le bibliothécaire de l'ar- 
chevêque Tenison , qui le nomma peu après son 
chapelain et lui donna en 1708 la place de tré- 
sorier de la cathédrale de Wells, et ensuite 
celle de recteur des paroisses unies de Saint- Ve- 
dast, Foster-Lane et Saint-Michael-le-Querne à 
Londres. En 1713 et 1714, il fit le cours religieux 
fondé par Boyle, fut nommé chapelain de 



Georges I er en 1716, et prétendais de Westmins- 
ter en 1724. Les Boyle 1 s Lectures furent pu- 
bliées en 1727, in-8°. Le docteur Clarke, son 
ami, fit un choix parmi ses sermons manuscrits, 
et le publia au profit de sa veuve, sous ce titre : 
Thirty Discourses on practical subjects ; 1726, 
2 vol. in-8°. Ibbot publia aussi une traduction 
du traité de Puffendorf De Habitu Religionis 
christianx ad Vitam civilem, 1719, et on a 
quelques vers de lui dans la collection deDods- 
ley. Z. 

» Cbalmers, General Bioçraphieal Dictionary. 
ibbk (Melik Moezz ed-Din). Voyez AÏbek. 

1BERV1LLE. Voyez LEHOINE d'iBERVILLE. 

* ibi (Sinibaldo), peintre de l'école romaine, 
plus connu sous le nom de Sinibaldo de Pérouse, 
né dans cette ville, vivait de 1505 à 1528. 
Assez bon élève du Pérugin , il travailla surtout 
à Gubbio où dans la cathédrale, à la chapelle, 
Bentivoglio, on admire son meilleur ouvrage, une 
Madone assise sur un trône , portant cette inscrip- 
tion, qui malheureusement ne nous apprend pas 
l'année de l'exécution du tableau, que la plupart 
des auteurs fixent à 1505 : Hyeronimus Benti- 
volius P. Pauli et Magdalenœ sorori suœ Si- 
nibaldus Perusinus pinxit hoc opus sexto ka- 
lendàs octobris. 

Sinibaldo eut pour élève Benedetto Nucci, avec 
lequel il peignit pour la confrérie de Santa Maria 
de' laici de Gubbio une belle bannière, qui y existe 
encore dans la riche galerie du comte Ranghias&i 
Brancaleoni. £. B— n. 

LanzL, Storia delta Pittura. — Tkcozsi, IMsionario. 
— Guaiandi, Memorte originali di Belle Art*. 

ibn.al-abbar (Le hafitz Abou-Jibdallak 
Mohammed ben- Ahmed), biographe et poète 
arabe, né à Valence (^spagne), brûlé à Tunis, 
en moharrem 658 de l'hég. (janvier 1260 de J.-C.). 
Il fut secrétaire du prince almohade de Valence 
Abou-Abdallah et de son fils Abou-ZéM , qu'il 
accompagna chez les chrétiens. Lorsque ce der- 
nier embrassa le christianisme , il le quitta, et 
passa au service de Zian Ibn-Merdenisch, usur- 
pateur du trône de Valence. Chargé d'aller im- 
plorer le secours d'Abou-Zakariah, émir bafside 
de Tunis en 235 (1638), il exposa en vers le 
sujet de son ambassade, et obtint une flotte, qui 
tenta en vain de pénétrer dans le port de Va- 
lence. Après la prise de cette ville par don 
Jayme, roi d'Aragon en 636 ( 1238), il retourna 
à Tunis, et fut nommé garde du paraphe du sul- 
tan. Son caractère irascible et son esprit satirique 
le rendirent odieux aux courtisans, qui le firent 
exiler à Bougie. Ayant obtenu sa grâce, il eut 
l'imprudence de faire des vers contre lémir 
Mostanser, successeur d'Abou-Zakariah, et fut 
brûlé avec sa bibliothèque , ses œuvres et ses 
poésies. On a de lui : Tehmilet-li kitab as- 
silet ( complément du livre de Ibn Baschkoual, 
intitulé Don ),. qui a été édité dans la livr. IV 
des Ouvrages arabes publiés par Dozy, et dont 
Casrri a traduit des extraits dans le t. II, p. l?i, 



730 



IBN-ÀL-ÀBBÀR — IBN-ÀL-ATSIR 



730 



de Bibtiotheca Arabico-ffispana; — AUhollet 
as-siyara (Manteau de soie), contenant la vie 
éludes extraits des œuvres des princes et des no* 
blés musulmans d'Afrique et d'Espagne qui se 
sont occupés de poésie. Cette anthologie, com- 
posée avec critique, jette beaucoup de jour sur 
l'histoire littéraire des Arabes occidentaux. Dozy, 
qui se propose de la publier intégralement, en 
a donné un long extrait dans Scriptorum Ara- 
bum Loci de Abbadidis; Leyde, t. II, 1852, 
in-4°, p. 47-123. Casiri en a traduit des passages 
(t. n, p. 30); — Moadjem (Dictionnaire des 
Auteurs arabes d'Espagne) ; — Tohfet al-Cadim 
(Don à rorrivant), anthologie et notice des poètes 
arabes, dent Casiri a extrait la liste de 102 poètes 
(t. H, p. 94). E. B. 

lbn-Khaldoan,l Hitt. des Berbères, trad. par Mac- 
Cucklo de Slane, t. il, p. 307-812, 847-850. — P. de Gayan- 
Ros, Append. à Makkari, t. I, VIS; t. II, p. 828. — 
Hadjl-Khalfah, Lex. bibliogr., t. II, n« 2168, 2642. — Ca- 
siri, Bibl., t. I, p. 94; t. H„p. 16,180, 121, 129, 168, 198. — 
Dozy, De Abbadidis, t. II, p. 46, et Recherches sur l'His- 
toire politique et littéraire de l'Espagne, t. I, p. 868- 
181. — De Ha ramer, Literaturgeschichte der Araber, 
t. VII, p. 725. 

ibn-abi-osaïbiah ( Le schéikh Mowaffik 
edDin Abou'l-Abbas Ahmed ben-Abïl-Kasim 
al-Khazradji), médecin arabe, né à Damas, 
vers 600 de l'hégire ( 1203 de J.-C. ) , mort en 
Djouraada premier 668 (janvier 1270). Après 
âfoir étudié la médecine sous son père et un de 
ses oncles, il se rendit au Caire, où il fut attaché 
à un hôpital, en 634 ( 1234), et passa ensuite en 
Syrie, auprès de lzz ed-Din Eidemir, comman- 
dant de Sarkhad, dont il devint premier méde- 
cin. Il était lié avec Ibn-Beithar et Abdallathif. 
On a de lui : Oyoun al-anba fi thabacat al- 
athibba (Source de Renseignements sur les 
classes des Médecins), en dix-sept chapitres. Il y 
traite d'abord de l'origine de la médecine , et 
donne ensuite des détails biographiques et bi- 
bliographiques sur les anciens médecins grecs, 
les médecins chrétiens d'Alexandrie, les médecins 
syno-nestoriens des Abbassides, les premiers mé- 
decins arabes , les médecins postérieurs classés 
par contrées, enfin les médecins persans et hin- 
dous. On en trouve des fragments édités ou tra- 
duits dans Analecta Medica de Dietz, Leipzig, 
1833, îq-8°; dans Scriptorum Arabum de 
Rébus Indicis Loci et Opuscula inedita par 
Gildemeister, Bonn, 1838, in-8°; The Jour- 
nal of the R. Asiatic Society of Great-Bri- 
tain and Ireland, t. VI, 1841 ; — dans Les 
Classes des Médecins, publié par Sprenger; — 
enfin M. Sanguinetti a traduit les passages rela- 
tifs à l'origine de la médecine, à Esculape, aux 
premiers médecins arabes, aux médecins syriens 
dans Journal Asiatique de Paris, 1834, 1855, 
1856, t. II. Ibn-Ali-Osaïbiah écrivit aussi un 
traité de médecine pratique , une histoire des 
philosophes et des mathématiciens, et des pièces 
de poésie. E. B. 

Ibn-Abl-OsaTblah, Oyoun-alAnba. — Hadji-Khalfah, 
1er. Bibliogr.,, t. IV, 7883, 8640. — Relske, Opuscula 
inedita ex monumeniis Arabum et Ebrxorum, édité 



par Grunér, p. 85. — Sacy, Relat. de VÊgyptêpar Ab- 
dallatif, p. 495, 549. - Wustenfeld, Gesbh. der arabi- 
schen sErzte und Naturforscher ; Gœttingue, 1880, in-8°. 
— Sanguinetti, dans Journ. Asiat., 1854, 1, p. 1M. 

IBN-ABI-ZERA-AL-FASI ( AbouH - Hassan 

Ali ben- Abdallah ), historien arabe, vivait à Fez 
(Maroc) au huitième siècle dé l'hégire ( quator- 
zième de J.-C. ). Tout ce que Ton sait de lui, 
c'est qu'il est auteur de : Al-Anis Al-Mothrib 
bi raudh Al-Carthas fi tarikh medinet 
Fas t histoire de Fez et de cinq dynasties mu- 
sulmanes qui ont possédé cette ville, savoir 
les Édrissides , les Zénètes ou Zéirides , les Mo- 
rabites (Almoravides) ou Lemtounes , les Mo- 
wahhids (Almohades),' enfin les Merinides. 
Cette chronique, qui commence en 145 (762 ), 
est exacte et très-estimée en Maroc. On en a 
deux rédactions, l'une appelée Carthas Saghir 
(Le petit Carthas, ou petit papier), a été traduite 
ou plutôt analysée en allemand par Fr. de Dom- 
bay : Geschichte der mauritanischen Kœnige, 
avec des notes ; Agram , 1794-1797, 2 vol. in-8°; 
traduite assez fidèlement en portugais , sous le 
titre de Historia dos Soberanos mohametanos 
dos primeiras quatro dynastias, e da parte 
da quint a y que reinardo na Mauritania , Lis- 
bonne, 1828, in-4°, par le Fr. Jozè de Santo- 
Antonio-Moura, qui omit les citations de vers, et 
attribua cet ouvrage à Abu-Mohammed Assa- 
leh ben-abd-el-Halim. Cli. J. Tornberg a donné 
le texte arabe et une traduction latine accompa- 
gnée de variantes et de notes sous le titre de : 
Annales Regum Mauritanie , ab Abul-Hasan- 
Ali-ben-Abd- Allah Ibn-abi-Zer' Fesano, vel, 
utalii malunt, Âbu-Muhammed-Salih Ion 
Abd-el-Halim Grenatensi. Fr. Pétisde la Croix 
en avait fait une traduction française, qui est 
restée manuscrite , et qui se trouve à la Biblio- 
thèque impériale de Paris et àUpsal. Le Carthas 
Kebir (Grand Carthas ) n'est point connu en Eu- 
rope, à moins que ce ne soit l'ouvrage traduit 
par Moura, Tornberg et Pétis, lequel est en effet 
plus détaillé que celui de Dombay. Ë. B. 

Hadjl Khalfefa, Lex. Bibliog., n<> i458.-Slivestrè de Sacy, 
Notices dans Magasin Encyclopédique, «• année, t. Il, 
p. 49, 174, 880, 514 ; t. V, p. 58, et dans Journal des Sav., 
1883, p. 658-660. — Tornberg , dans Nova acta regise so- 
cietatis scientiarum Ûpsaliensis, t. XI, 1889, ln-<°. - 
E. Quatremère, Not. dans Journ. des Sav., 1847, p. 474-485. 

ibn-al-atsir (Le schéikh Izz ed-Din 
Abou'l-Hassan Ali-bm-Mohammed-al-Djeze- 
ri),|le meilleur des historiens arabes, né à Djezi- 
reh-beni-Omar, le 4 djoumada premier, 555de l'h. 
(mai 1160 de J.-C.),mortàMossoul en 630(1233). 
Après avoir fait ses études à Mossoul, à Jérusalem 
et à Damas, il combattit contre les chrétiens dans 
l'armée de Saladin, et fut chargé, par les princes 
de Mossoul, de diverses missions diplomatiques, 
spécialement auprès des khalifes de Baghdad. Sa 
maison était le lieu de réunion des hommes les plus 
distingués qui habitaient ou visitaient Mossoul. 
Il comptait Ibn : Kballikan au nombre de ses amis. 
Il était non moins versé dans l'histoire religieuse 
que dans l'histoire profane. On a de lui : KamU» 



781 



IBN-AL-ATSIR — IBN-ALATYR 



735 



at-tewarikh (Chronique complète), en 12 vol., 
dont les deux derniers ont été édités sons le 
titre de Ibn-étrAthéri Chronicon, t XI (an- 
nées 527-683); TJpsal, 18&l,in-8°; t XII (584- 
628), ib., 1853, in-s°, par Tornberg, qui a éga- 
lement traduit en suédois le t. Xi : Ibn */• 
Athir>& Chrœnika; Lund, 1*51-1858, 2* partie, 
in-8°. On trouve aussi des extraits de cet ou* 
vrage traduits dans Bibliographie des Croi- 
sades de Michaud, t. II, p. 390-547; dans Re- 
cueil des Historiens des Croisades f publié par 
l'Académie des Inscriptions, 1 1, qui est sou» 
presse ; enfin à la suite de Histoire de V Afrique 
sous la dynastie alghlabide par Ibn Khal- 
doun 9 traduite par M. Noël Desvergers; Paris, 
1841, in-8°.L'auteur commence par un discours 
sur la dignité de l'histoire, et, après avoir ex* 
posé les ères des divers peuples, il rapporte en 
abrégé l'histoire des Juifs, des Perses, des an- 
ciens Arabes, des Romains et du christianisme 
primitif. A partir de Mahomet, il donne, année 
par année, un récit détaillé de tout ce qui s'est 
passé de remarquable dans le monde musulman 
et de courtes notices des principaux personnages 
qui y sont morts jusqu'en 628 ( 1230), n'inter- 
rompant l'ordre chronologique que pour indiquer 
les causes et les conséquences des grands événe- 
ments. Quoiqu'il manque souvent de critique et 
se contente parfois de copier servilement ses 
prédécesseurs, et particulièrement Thabari, on 
peut le considérer comme le pins excellent des 
chroniqueurs musulmans on chrétiens du moyen 
âge; — Histoire des Atabeks de Syrie, publiée 
sous le titre de AbulhasanAli-Aaeddin, Ges- 
chichte der Atabekiden in Syrien , Hildburg- 
hausen, 1793, in-4°, et analysée par de Gui- 
gnes , dans le U I" des Notices et Extraits des 
Manuscrits de la Bibliothèque du Roi. Cette 
histoire est moins détaillée que la partie corres- 
pondante du Kamil-at-Tewarikh;-- Kitab-al* 
Lobab (Livre de ce qu'il y a de plus pur, rela- 
tif à la vérification des origines ), abrégé en 
3 vol. des Généalogies de Seroani, qui en conte- 
naient tl. Wûstenfeld en a édité une partie: 
Spécimen el-Lobabi 9 sive Genealogiarum, quas 
conscriptas ab Abu Sad Samanense, abbre* 
viavit et emendavit Ibn el-Athir ; Goettingue, 
1835, in -4°. Soyouthi fit un abrégé du Lobab, 
qui a été édité par P. J» Vtth; — Asad al-Gha- 
bet, notices de 7,500 compagnons de Mahomet, 
dont Ibn-Hadjr a tait une nouvelle édition qui a 
été publiée; - Kitab al-Djihad (Livre delà 
Guerre sainte) , où il exhorte les musulmans à 
faire la guerre anx ehrétiens. B. Beauvois. 

Itm-KhallikaB, Biograph. DlctUm., t II, p. «S. - 
Hadtt-Kbatrih, Le*. BiMogr., t I, n« «*7, totti, «Ba- 
il, «SI, t»". 3919; IV, 8071; V, 97U, IQOtft. - Kœbicr, 
Repertortom fur MbliscHe Hier., t. II, p. 8t, - Amarl, 
Storia 4ei <Mvtulmoni ai Sicilla, t. I, Florence, 1M*, 
in-ft», pr«f., p. m. - De Hsmaer, Uteraturçmk MU ê 
der Jraber, t. VIT, p. 710. 

ffBN-ALATTR ( Bit ed-Din-AH ) , écrivain 
arabe fort distingué, de la fin du douzième siècle 



et du commencement du treizième de notre ère. 
Ibn-Alatyr naquit dans la ville de'Djéziré, sur 
les bords du Tigre, l'an 1160 de J.-C.; il était 
fils d'un émir attaché successivement an ser- 
vice de Zenghi, prince de Moussoul et'd'Alep, 
et de celui des fils de Zenghi qui hérita de b 
principauté de Moussoul. Jeune encore, il alla se 
fixer dans cette dernière cité. On était alors an 
plus fort des guerres des croisades , au moment 
delà lutte engagée entre le grand Saladin et les 
colonies chrétiennes de Syrie. Saladin eut l'art 
de faire de sa cause particulière l'affaire de la 
religion musulmane; et bientôt cette guerre reli- 
gieuse entraîna dans sa querelle tops les princes 
mahométans de Syrie et de Mésopotamie. Ihn- 
Alatyr prit, avec les troupes de Monssonl, une 
part active à cette guerre , et partagea les périls 
et les succès de l'islamisme. Il nous apprend 
lui-même qu'il fut témoin des victoires de Sala- 
din et des événements qui, à partir de Tannée 
1182, remirent la plus grande partie des colo- 
nies chrétiennes sous les lois de l'Akoran. Un de 
ses frères servit la même cause avec zèle, et, 
plus tard , rat chargé de gouverner la principauté 
de Damas sous le fils aîné de Saladin. Ibn-Alatyr 
s'était toujours montré avide d'apprendre. Dans 
ses voyages précédents et dans les diverses 
fonctions qu'il eut à remplir, il n'avait négHgé 
aucune occasion d'accroître la masse de ses con- 
naissances; à son retour à Moussoul, il s'entoura 
de livres , et fit de sa maison le rendez-vous des 
curieux de la ville et des étrangers qui aimaient 
à s'instruire. Il mourut en 1233, peu de temps 
après la croisade de l'empereur Frédéric II. 

Il existe deux ouvrages historiques dTJn-Alatyr 
à la Bibliothèque impériale de Paris. Le premier 
est une Histoire des Atabeks , maison des princes 
qui, s'élevant vers les commencements des croi- 
sades, s'emparèrent successivement de Moussoul, 
d'Alep, de Damas, et qui, partagés m plu- 
sieurs branches, se maintinrent avec pinson 
moins d'éclat Jusqu'au treizième siècle; le se- 
cond ouvrage est une histoire universelle, de- 
puis la création do monde jusqu'à l'année 1231. 

V Histoire des Atabeks renferme des détails 
précieux sur l'origine et le développement de la 
puissance de ces princes. On trouve une notice 
de cet ouvrage, par de Guignes, dans le recueil 
des Notices et Extraits des Manuscrits de 
la Bibliothèque du Roi (t. I, p. 542-578); mais 
cette notice n'est pas toujours exacte. Les Ata- 
beks sont ainsi appelés de deux mots turcs qiri 
signifient père, seigneur. Ils jouissaient de toute 
la plénitude de l'autorité souveraine, et pourtant 
fis se disaient les vassaux et les ministres' d'an 
fantôme de prince de la maison des sultans 
seldjouddes de Perse. Comme le père dlbn- 
Alatyr occupait un emploi auprès de l'un des 
Atabeks, le fils s'est étendu avec complaisance 
sur tout ce qui pouvait augmenter la gloire de 
cette maison; mais, arrivé à Tan 1173, lorsque 
Saladin, qui avait , lui et sa famille , les plus 



733 



IBN-ALATYR — IBN-ALDJAUZ1 



7Ô4 



grandes obligations à la même maison, s'empara 
sur elle de Damas et de toute la Syrie, il ne 
peut contenir son indignation, et il déclare qu'il 
n'aura pas la force de retracer des événements 
aussi déplorables. Dès ce moment, l'ouvrage 
n'est presque plus qu'une table chronologique, et 
cesse d'offrir de l'intérêt Du reste , Y Histoire 
des Atabeks parait avoir été le début de l'auteur. 
Les laits ne sont pas toujours bien classés. Des 
lacunes considérables interrompent la liaison 
des événements. Quelquefois le récit se borne à 
des phrases emphatiques et a de grands mots 
vides de sans. 

A l'égard de l'Histoire générale, c'est le récit, 
année par année et sous forme de chronique, de 
tout ce que la muse de l'histoire avait conservé 
de notable chez les musulmans; c'est peut-être 
en son genre l'ouvrage le plus remarquable 
qu'ait produit la littérature arabe. L'auteur a 
intitulé son livre Chronique complète ( Kamel- 
altévaryhh). On y trouve non-seulement les 
événements de quelque importance, mais les 
détails qui servent à les mettre sous un plus 
grand jour; on voit, en le lisant, que l'auteur a 
recueilli les notions historiques éparses dans 
une foule de chroniques, qu'il a lu les mémoires 
particuliers, et qu'il a eu communication des 
correspondances politiques de Saladin et des 
autres souverains de la même époque. If aile 
part peut-être on ne trouverait un tableau plus 
exact et plus complet des événements qui signa- 
lèrent l'élévation de la dynastie des sulthans 
Seldjoucides de Perse, et qui en amenèrent plus 
tard la ruine. Cet esprit de recherches, cet 
amour de la vérité, ont acquis à Ibn-Alatyr la 
plus grande réputation en Orient. Les écrivains 
arabes sont unanimes dans l'éloge qu'ils font de 
son érudition; et Aboul-Féda (voy. ce nom) 
n'a pas craint d'avouer qu'il lui avait emprunté 
la meilleure partie de son récit. 

Jusqu'à ces dernières années, la France ne 
possédait que quelques volumes dépareillés de 
cette Histoire générale; maintenant l'on en 
trouve un exemplaire complet à la Biblio- 
thèque impériale. L'auteur de cet article , qui , 
en 1829, avait publié en français de nombreux 
fragments des deux ouvrages historiques dlbn- 
Alatyr, à la suite de Y Histoire des Croisades 
de Michaud , fait imprimer en ce moment des 
fragments beaucoup plus étendus en arabe, en 
français et avec notes , dans le Recueil des His- 
toriens des Croisades que publie l'Académie des 
Inscription* et Belles-Lettres. D'un autre côté, 
M. le docteur Tornberg, professeur de langues 
orientales à l'université de Lund, en Suède, a 
commencé l'impression de la partie de l'ouvrage 
qui se trouve à la bibliothèque d'Upsal. Il a 
paru deux volumes du texte renfermant la der- 
nière partie de l'ouvrage, c'est-à-dire Fes- 
paee compris entre les années 527 et «28 de 
l'hégire; Upsal, 1851 et 1853,in-8°. L'éditeur 
s'est servi, pour plusieurs passages, des ma- 



nuscrits de la Bibliothèque impériale de Paris. 

Ibn«Alatyr est encore auteur de plusieurs ou 
vrages (inédits) sur les généalogies des familles 
arabes , les compagnons de Mahomet, etc. 
Reinaud. 

Dictionnaire Biographique d'Ibn-KbalikaD ( la Bio- 
graphie particulière d' Ibn-Alatyr ). — Extrait» des his- 
toriens arabes des guerres des croisades , par l'auteur 
de «et article. 

IRN-AL-DJAUZI ( Le schéikh Abou'l-Faradj 
Abdarrahman-ben-Ali al-Koréischi at-Taïmi 
aUBekri), jurisconsulte hanbalite et historien 
arabe , né à Baghdad, en 608 de l'hégire ( 1 1 14 de 
J.-C.) ou 510(1116), mort dans la même ville, le 
12 ramadhan597 (1201). n faisait remonter son 
origine au khalife Abou-Bekr, Il passait pour le 
meilleur traditionniste et prédicateur de son siècle, 
et était versé en théologie, en jurisprudence, en 
histoire, en médecine, en hippiatrique. Parmi 
ses ouvrages, qui sont au nombre de plus de 
quatre-vingts, il suffit de citer : Akbar al-Bcr- 
amïket (Histoire des Barmécides); — Àm- 
mar al-Ayan (Vie des Personnages illustres qui 
ont vécu plus de dix ans et moins de mille); — 
Al-Dzeheb al-Mesbouh (Or liquéfié), biographie 
des rois ; — Sehodzour-al-Ocoud fi tarikh al- 
Okoud (Parcelles des Colliers, ou histoire des 
siècles);— Al-we/aft fadhaïl al-Monthefa, 
traitant de Mahomet et des autres prophètes; 
— Al'Monletzem ft tarik al-Omam (Livre 
bien disposé , relatif à l'histoire des peuples ) ; 
chronique commençant à la création et se ter- 
minant au règne du khalife Mostadhf ; — Zad 
al-masirfi ilm al-tafsir (Provisions de Voyage, 
sur la science de l'interprétation du Corao) en 
4 vol.; — Telkihfohoum ahl al-atsret (Fruc- 
tification de l'intelligence des Amateurs d'his- 
toire), ouvrage sur le plan du Kitab al-Maarif 
de Ibn-Côtéibah, contenant l'histoire de Ma- 
homet, de ses compagnons et de leurs disciples. 
Mohi ed-Din, fils d'Ibnal-Djauzi, s'éleva par son 
éloquence au poste de grand-chambellan du 
khalife, et fut tué, lors de la prise de Baghdad, 
par Houlagou, en 658 (1260). £. B. 

Ibn-KhalUkan, Biogr. Diction., X. II, p. 98. - Hadji- 
Khalfah, Lexic. bibliogr., environ 100 art. - Zettschrift 
derdeutsehen moiyehUend. Geêêlhchaft, t. VII, p. 67«- 
Wi ; VI 11, 6BM56. — De Hammer, Ut.-Getch. ter Ara- 
ber, t.VII,p.si9, 703. 

ibn-al-djauzi - ( Schems ed-Vin AbouH 
Motzaffer Yousouf ben-Couzoghli ou Kizo- 
ghli, plus connu sous le nom de Sibth lbn-aî- 
Djauzi [ petit-fils de Ibn-al-Djauzi J ou simple- 
ment de ) , jurisconsulte hanefite et historien 
arabe, né à Baghdad, en 582 de l'hégire M 186 de 
J.-C), mort en dzou'l-hiddjeh 654 (janvier 
1257). Sa mère était fille du précédent et son 
père était mamlouk (esclave ) du vizir Aun ed- 
Din Yahyaben-Hobéïrah, qui le fit instruire et 
lui donna la liberté. Après avoir voyagé eu di- 
verses contrées pour recueillir des traditions, il 
enseigna et prêcha à Baghdad, puisa Damas. Sa 
science et son éloquence lui méritèrent la faveur 
des princes, et surtout de Melik Moatzem Isa. 



735 



IBN-ÀL-DJÀUZI — IBN-FÀREDH 



736 



Ses principaux ouvrages sont : Commentaire du 
Coran, en 30 vol.; — Tedzkiret aUKhawassi, 
histoire d'Ali et des onze autres imams , qui se 
trouve à Leyde; — Meadin al-Ibriz ( Mines 
d'Or de la tradition ) ; en 10 vol.; — Menakib 
abi-Hanifah (Éloge d'abou-Hanifah); — Mirai 
az-zeman fi tarikh al-ayan (Miroir du Temps, 
ou histoire des hommes illustres); en 40 vol. 
Dzehebi dit que Fauteur n'est pas toujours exact, 
et qu'il favorise les Rafedhites (hérétiques), ce 
qui ne l'a pas empêché de copier le Mirât az- 
zeman. Cet ouvrage a été continué^ par Kothb 
ed-Din Mousa ben-Mohammedal-Balbelrî, qui 
mourut en 726 (1325). E. B. 

Ibn-Khallikao, Biogr. Diction., 1 1, p. 499. — Abou'l- 
• Jiahasen, dans Hist. des MamUmks dtÊgvpte, trad. par 
Quatremère, 1. 1, p. 64. — Abon'1-Péda, Ann.\Mu4lemici„ 
t. IV, p. 666. - Ibn-Habib, dans Orientalia, t. Il, p. 171, 
175,840. — HadJI-Khalfata, Lez. Biblioçr., 1. 1, n" 1896, 
1816; II, 8168, 8t8S, 890». 8986 ; V, 10988, 11117, 11401, 11796, 
19888, 11198; V, 18118, 14089. - De Hammer. Ltteratur- 
geschichie der Araber, t. VII, p. 717. 

ibn-bessam ( A bou'l- Hassan Alias-Schan- 
tarini) , historien arabe, né à Santarem (Es* 
pagne ), mort en 442 de l'hégire (1147 de J.-C). 
Il était médecin, et fréquenta la cour de diffé- 
rents princes. On a de Jui : Dzekhiret fi ma- 
hassin Ahl-al-Djeziret (Trésor ou qualités des 
habitants de la péninsule ), contenant des notices 
des écrivains arabes d'Espagne et des extraits 
de leurs œuvres. .C'est le plus ancien ouvrage 
où il soit parlé du Cid. Le passage relajtif à ce 
personnage célèbre a été édité et traduit dans 
Recherche* sur V Histoire politique et litté- 
raire de V Espagne pendant le moyen dge; 
Leyde, 1849, in-8°, 1. 1, p. 330-362, par R. P. A. 
Dozy, qui a aussi édité un long fragment du 
Dzekhéret dans Scriptorum Arabum Loci de 
Abbadidis; Leyde, 1846, in -4°, 1. 1, p. 220-381. 
Ibn-Bessam écrivit sept autres ouvrages. Hadji- 
Khalfah l'a confondu avec Bessami ou Ibn-Bes- 
sam ( AbouH - Hassan -ait - ben - Mohammed ), 
mort en 303 (914), poète satirique qui n'épar- 
gnait ni les princes , ni les grands, ni même ses 
proches. Le khalife Motadid essaya de se le rendre 
favorable en le nommant directeur de la poste 
aux chevaux et receveur général des douanes 
dans les Awassim ( frontière de l'Asie Mineure ). 
Bessami écrivit Ahhbar Omar -ben- Rebia (His- 
toire de Omar-ben-Rebia) ; — Histoire de Dja- 
far-at-Ahwas, ancien chef arabe ; — Monaki- 
dat as-Schoarà (Contradictions des poètes); 

— Des lettres ; — Makamat ( Séances ) au 
nombre de trente. E. B. 

Ibn.KhalIlkan, Bioçr. Diction., t. H. - Hadjl-Khalfàh, 
Lex. Bibliogr., 1. 1, n°* 180, 109 ; III, 8764, 6799; V, 11704. 

— Aboo'l-Féda, Ann, Musl, t. II, p. 817. - Dozy, De 
Abbadidis, 1. 1, p. 198-119. - Makkari, The Hist. of the 
Moh. Dynast. in Spain, 1. 1, p. 193, 370, 471 ; t. II, p. 164- 
818. — De Hammer, JAteratnrgescMehte der Araber, 
t. VII. 

ibn-cotuibih (Abou-Mohammed Abdal- 
lah-ben-Moslim-ad- Dineweri-al-Merwezi ), 
historien et philologue arabe, né à Merw ou à 
Baghdad, en 213 de l'hégire (829 de J.-C. ), mort 



dans cette dernière ville en 270 (883) ou 296 
( 905). Après avoir étudié sons les plus célèbres 
maîtres, il enseigna les traditions à Baghdad et 
se distingua par l'exactitude de ses renseigne- 
ments. Il fut quelque temps cadhi à Dinawer, 
et il écrivit sur la jurisprudence, la grammaire, 
la mécanique, l'histoire naturelle, la météoro- 
logie. Parmi les quarante ouvrages dont il 
est auteur, il suffit de citer : Kitab al-Maarif 
fi Tarikh ( Livre de Notices sur l'Histoire), con- 
tenant l'histoire et les généalogies des Arabes, 
jusqu'en 256 ( 870 ). Ce n'est qu'une sèche éna- 
mération de dates et de faits pouf les vingt- 
six dernières années. Cet ouvrage a été édité par 
Sprenger, dans Bibliotheca Indica, Calcutta, 
t. XI, et à la même époque par Wustenfeld, sous 
le titre de Ibn-Coteibah's Handbuch der Gts- 
chichte ; Gœttingue, 1850, in-4° ; — Oyoun al- 
Akhbar (Sources de Renseignements ), divisées 
dix chapitres et traitant de politique, de morale, 
de science; — Thabacat as-Schoara (Classes 
des Poètes ), dont J. de Hammer s'est servi pour 
son Histoire de la Li ttérature Arabe ; — Edtb- 
al-Katib (Instruction de l'Écrivain), traité d'or- 
thographe, de synonymie, de grammaire, dont 
Sprenger a traduit un fragment dans The Journal 
ofthe Asiatic Society of Bengal f 1848, t XVII, 
part. II, p. 659-681 ; — Ahadïts al-Itnamat 
(Traditions sur le Principat j, dont Amari a édité 
deux fragments dans Bibliotheca Arabo-Sicula; 
Leipzig, 1855-56, p. 163, et dont P. de Gayangos 
a traduit plusieurs extraits dans The Historg 
ofthe Mohammedan Dynasties in Spain, de 
Makkari, 1840, t. I, append., p. 50. 

Ë. Beauvob. 

Ibn-Khallikan, Bioçr aph. Diction., t. II. p. M. - 
Abou'l-Mataasen. Menhel as-Safi. - Hadjl-Khalbh, La. 
Biblioçr., t I, n" 854, 814. 888, 815 ; II, SSS8. 3447, MM, 
4886; III, 47M, 61*9; IV, 7901, 8458} V, 9846, 9911, 10*71, 
10834,10560,12096,11199.— Eicchorn , fiionumenta H m- 
torix Arabum ; Gotha, 1775, ln-8° ; et Mines de rOrient, 
t. Il, p. 889-874; III, p. 11-40; VI, 2*1-139. — Kœhkr, 
Bepertoriumfûr biblische und morgenUend. Literatv, 
t. I,p. 65-69. — Abou'I-Féda, Ann. Muslem^ édlt. Reiskf, 
t. H, p, 883, 865, 88t. — Hamaker, Spécimen, p. 6. -De 
Hammer, LtteraturgescMchte der Araber, t. IV, p. 4», 
454. 

IBN-FAREDH OU 1BIÏ-AL-FÀRIDH (Schcrtf 

ed-Din Abou-Hafs Omar ben- Ali) , célèbre 
poëte mystique arabe , né au Caire, en 577 de 
l'hégire (1181 de J.-C.), mort en 632 (1234). 
Après avoir étudié sous Beha ed-Din Iba-Asakir, 
il se consacra à la vie dévote, et se retira dans 
la mosquée Al-Azhar, quoiqu'il eût pu brilla 
dans le monde par ses talents et par les grâces 
de sa personne. Le sultan d'Egypte al-Méfit 
al-Kamil tenta de l'attirer à sa cour; il lui en- 
voya mille pièces d'or et lui offrit la place de 
cadhi al-codhat (-juge suprême) d'Egypte. 
lbn-Faredh ne voulut rien accepter. Il était su>t 
aux extases, et restait souvent plusieurs jour 
sans prendre d'aliments et sans voir ni entendre 
ce qui se passait autour de lui. C'est dans cet 
état d'exaltation qu'il composa la plupart de ses 
poésies. Ses disciples n'ont point manqué Je 



737 IBN-FAREDH 

lui attribuer le don des miracles. Quelques pieux 
musulmans, scandalisée de la nudité des tableaux 
qu'il offre aux yeux des lecteurs, ou choqués de 
la crudité des expressions arec lesquelles il dé- 
peint l'amour divin , le considèrent comme un 
infidèle ou un hérétique. Ibn-Faredh n'en est pas 
moins le plus grand poète arabe de la secte des 
sofis. On peut le mettre au même rang que Férid 
ed-Din Atthar, Djelal ed-Din Rouroi, Hafitz, 
Djami. Ses principaux poèmes sont : Khamriyet 
(Sur leVin ), trad. par de Hammer, dans le Mer- 
cure de Wieland, et par Grangeret deLagrange, 
dans Anthologie Grammaticale ; Paris , 1878, 
in-8° (avec texte) ; — Le grand Taiyet (poème ri- 
mant en T), en 760 distiq., édité avec luxe et trad. 
par de Hammer, sous le titre de Bas arabische 
Hohe Lied der Liebe, die Ibnol-Faridh's TaU 
jet; Vienne, 1854, pet. in-4° ; — Le petit Taiyet ; 
— le poème rimant en H, édité parG.-A. Wallin : 
Carmen elegiacum Ibnu-l-Faridhi, cum corn- 
mentario Abdu-l-Ghanii ; Helsingfors, 1850, 
in-8°. Toutes ces pièces et d'autres moins con- 
nues furent réunies en diwan (recueil) par les 
soins d'Ali, petit-fils du poète, en 885 (1480). 
Ce diwan contient 1,7.00 distiques. Il a été litho- 
graphie à Damas en 1841, et imprimé sous le 
titre de Diwan du Cheikh Orner Ibn el Fa- 
ridh, accompagné du commentaire du cheikh 
Hassan el-Bouriny, pour le sens littéral, et 
de celui du cheikh Abd el-Ghany en Na- 
blousy pour le sens mystique, édité par le 
cheikh Rochaid ed-Dedah; Paris, 1855, gr. 
in-8°. £. Beauvois. 

AU, v-ie de son aTeu!, en tête du Diwan. — Abd al- 
ghani Nabloust , Relut, de Foy.\ dans Sitzungsberichte 
de l'Académie de Vienne, t. V, p. 817. - Hadji-Klialfah , 
Lex. Bibliogr., L II, n" 1784, «03*, 1033; IV, 9513; VI, 
14448. — SUvestre de Sacy, Chrestomathie Arabe. — 
Rousseau, Parnasse Oriental. — De Hammer, LUeratur- 
geschichte der Araber, t. VII, p. 405-410, 916-918. 

IBN-FERAT OU 1BN-AL- FORAT (Le SChéikh 

Nasir ed-Din Mohammed ben-Abdarrahim- 
Misri) historien arabe, né en Egypte, en 733 de 
l'hégire ( 1333 de J.-C. ), mort en 807 ( 1404). Il 
était jurisconsulte du rite de Abou-Hanifah. Il 
écrivit une chronique (Tarikh) en 25 vol., ren- 
fermant l'histoire des nations musulmanes du- 
rant les huit premiers siècles de rhégire. La 
Bibliothèque impériale de Vienne en possède 
9 vol. (années 501 à 799= 1108 à 1397), qui 
offrent de nombreuses lacunes. Cet ouvrage ayant 
été apporté à Paris, à la suite de la conquête de 
Vienne par Napoléon, Jourdain en traduisit tout 
ce| qui a rapport aux Croisades. Des fragments 
de ce* travail ont été insérés dans la Biblio- 
graphie des Croisades de Michaud, t. II, p. 765- 
8 1 . On en trouve aussi oes extraits dans lés Mé- 
moires sur l'Egypte par Quatremère. Ibn-al- 
Forat se contente souvent de transcrire tous les 
écrivains qui ont parlé d'un même fait, sans 
s'inquiéter de concilier leurs contradictions on 
de les critiquer les uns par les autres. — Son fils 
Izz ed-Din Abdarrahim ben-Mohammed Ibn al- 

NOUV. BIOGR. GÉRER . — T. XXV. 



IBN-HABIB 



738 



Forât Cahiri, né en 759 de l'hégire ( 1358 de 
J.-C. ), mort en 861 (1447 ), était juge ; il écrivit 
sur le droit hanéfite. £. B. 

Abou'IMabasen, Manhel as sq/l.- Hadji-Khalfab, Lex. 
Bibliogr., t. Il, 1104. — Jourdain, Lettre sur la Chron, 
d'/bn-al-Forat ; dans Mines de f Orient, 1814, t. IV, 
p. 808. 

IBN-HABIB (AboU'Djafar Mohammed ben- 
Djoléib al-Haschimi), généalogiste et philo- 
logue arabe de Baghdad, mort à Samara, en 245 
de l'hégire (859 de J.-C. ), ou, selon Ibn-abi-Ya- 
coub al-Werrak, en 213 (828). Il eut pour maître 
Ihnal-Asabi et Abou-Obéidah. Il est auteur de : 
Ansab as-schoara (Généalogie des Poètes ) , le 
premier ouvrage de ce genre qui ait été écrit en 
arabe,; — Al-mokhtelif we al-motelif fi asma 
al-cabaïl (Ressemblances et Dissemblances dans 
les Noms des Tribus) contenant 600 généalogies. 
Cet ouvrage a été revu par Makrizi et édité par 
Ferd. Wùstenfeld, sous le titre de Muhammed 
ben- Habib ûber die Oleichheit und Vers- 
chiedenheit der arabischen Stœmmenamen ; 
Gœttingue, 1850, gr. in«8°; — Histoire des 
khalifes. Il fut l'un des premiers qui donnèrent 
des histoires critiques. £. B. 

Ibn-Kballikan, W e/ayat al- Ayan, édlt. Wùstenfeld, 
n° 868. — HadJI-Khalfah , Lex. JiibUogr., t. I, n<" 1155, 
1349; V, 11685.— Not. en tête de Ouvrages arabes, publiés 
par R.-P.-A. Dozy. — De Hammer, LiteraturgeschiclUe 
der Araber, t. III, p. 195; IV, p. 98, 447, 4SI. 

ibii-habib ( Bedr ed-Din Hassan ben- 
Omar) f historien arabe, né à Alep, en 709 de 
Thégire (1309 de J.-C. ), mort dans la même 
ville, le 21 rebi second 779 ( 15 juillet 1377 ). Il 
voyagea en Syrie, en Egypte et en Arabie. Il fit des 
vers sur la fameuse peste noire. On a de lui : 
Maaniahlal-beyan min wefayàt al-ayan (Sens 
des Hommes éloquents, tiré des vies des hommes 
illustres ), notices de 237 littérateurs, avec des 
spécimens de leurs œuvres poétiques et histo- 
riques; — Histoire de la Révolte de VÉmir 
Béibagharous ; — Biographie du Cadhi al- 
Codhat Sobki (Taki ed-Din Abou'1-Hassan-Ali ) ; 
— Akhbar ad-Dowel (Histoire des Dynasties), 
abrégé en vers; — Dorret al-aslakfi dewlet 
al-Atrak ( Perle des Colliers , concernant la dy- 
nastie des Turcs), annales d'Egypte et de Syrie 
et des pays voisins de l'empire mamelouk. Cette 
chronique embrasse les années 648-776 (1250- 
1375); elle a été continuée jusqu'en 802 (1399) 
par le fils de l'auteur, Izz ed-Din Tzahir, qui 
mourut en 808 (1405). S'étant astreints mal à 
propos à écrire en prose cadencée et rimée , ces 
deux historiens ont plus d'une fois sacrifié la 
vérité aux exigences de la rime. Leurs phrases 
boursouflées renferment beaucoup de mots, mais 
peu de faits. Ils donnent de courtes notices des 
principaux personnages qui sont décédés dans 
le courant de chaque année. Meursinge et Wei- 
jers ont publié dans Orientalia (Amsterdam, 
t. II, 1846, p. 222-489) un extrait des principaux 
feits politiques et des treize cent vingt et une 
biographies contenues dans le Dorret. 

E. Beauvois. 

24 



789 



IBtf-HABIB — IBN-KHALDOUN 



740 



Abou'l-Malusio, Manjul as-Safi. — Ahmed Askalani, 
Chron. - Hadjl-Kbalfah, Lex. Biblioçr., t. 1, n« 198 ; ni. 
*»15; IV, 767», 8041, 8088; V, 1078*. 10888, 11718, 117*»; 
VI, 10810, 1MII. — BifeoaeQutremére. Appeod. de 
PHist. des Mamelouks par MakrtU, 1. 1, part. Il, p. 10*- 
109. - OrieniaUa, recueil édité par Juynboll, T. Roorda, 
Weljers, t. 11. 

ibh-ha ucal ( Abou'l-Kassm Mohammed ), 
voyageur arabe, écrivait vers 866 de l'hégire 
( 076 de J.-C. ). Il quitta Baghdad pour faire le 
commerce , en 331 (942), et parcourut dorant 
vingt-huit ans la plupart deg contrées soumises 
a l'islamisme, depuis l'océan Atlantique jusqu'à 
1 Indus. Il rencontra Istakhri sur le bord de ce 
fleuve. Les deux voyageurs se communiqué* 
rent leurs notes et les corrigèrent réciproquement. 
lbn-Haucal portait toujours avec lui les ouvrages 
de Ibn-Khordadbeh, de Kodamet et de Moham- 
med at-Djéïhani. C'était un bon observateur; 
ayant recueilli de nombreuses données sor la 
géographie physique et politique, l'histoire, le 
commerce , les produits , les impôts, les distances 
itinéraires, les mœurs des habitants des pays 
musulmans, il composa Al-Mesalik we al-Me- 
malik ( Les Routes et les Royaumes ). Il y ajouta 
des cartes ; mais il négligea de mentionner la posi- 
tion des lieux et de fixer l'orthographe des noms 
propres. Diverses parties de cet ouvrage ont été 
éditées ou traduites par Uylenbrock : Disser- 
tatio de Ibn ffaucalo geographo , née non 
Iracse Persicx descriptio; Leyde, 1822, in-4° ; 
— par Fraehn dans De Cha&aris; Saint- Péters- 
hourg, 1822, in-4°; — par Gildemeister, dans 
Scriptorum Arabum de Rébus Indicis Loci et 
Opuscula; Bonn, 1838, in-8°; — par Mac- 
Guckin de Slane : Afrique, dans Journal Asia- 
tique; 1842, 1. 1; — par Amari, dans Journal 
Asiatique, 1845, 1. 1, et dans BibUotheca arabo- 
Sicula; — par Sprenger, Sind, Sedjestan, Kho- 
rassan , dans Journal de la Société Asiatique 
de Bengale, 1852, 1853 (texte, traduction et 
carte ). Ouseley publia, sous ' le titre de The 
Oriental Geography of Ibn-Haucal, Londres, 
1800, in-4°, une version anglaise pen exacte de 
la traduction persane abrégée du âfesalik. 
E. Beautois. 

Ujlenbrok, De ItmmHaukalo. — Sacy, trot, dam Ma- 
gasin encyclopédique, année 7, t. VI, et dans Journal 
dot Savants, 1813. — Relnaud , Mém. fiist. et géograph. 
sur rinde, 1849, in-*", et Introduct. à la Géographie 
d'jébau'l-Féda, p. 81-87, M8. 

lBN-HATAJf (L'imam Abau-Merwan Hauan 
ben-Khalef), historien arabe, né à Cordoue, en 
377 de l'hégire ( 987 de J.-C. ), mort le 27 rebi 
premier 469 (octobre 1076). Il savait les langues • 
torque et abyssinienne , et il écrivit plus de cin- 
quante traités et commentaires philologiques 014 
théologiques, et trois ouvrages historiques, sa- 
voir : Kitab al-Moktebis fi tarikh al-Anda- 
lous ( Livre de celui qui désire des Renseigne- 
ments sur l'Histoire d'Espagne), traitant des 
temps anciens , en dix volumes, dont il ne reste 
plus que le troisième, qui se trouve à Oxford ; — 
Kitab al-Mobin (Livre qui rend évident), en 
60 vol., ren/ermant le récit des événements con- 



| temporains. Jl.-P.-A. Poiy, qui appelle cet ou- 
vrage Kitab (il-tfatin, en a édité et traduit des 
fragments qui nous ont été conservés par Ibn-Bes- 
ssm, dans Scriptorum Arabum Loci de Abba- 
4idis, t. I; ~ Tarikh Foçaha Corthobah 
( Histoire des Jurisconsultes. (Je Cordoue ). L'au- 
teur se, distingua non moins par sa critique et 
son exactitude que par ses talents littéraires. 

E. B. 

Ibp-KhaUlkan, mogr. JH<*.« % h p. H. — Maktari, The 
Uist. qf the Ma+ammedan Dynasties in Spaim, L 1. 
p. 183, 187, 810, 46*, 764. - Uadjf-Kbalfab, Lex. Bibiiogr^ 
t V, n* HUI; VI, 11780. - Dozy, De AbbadMUs, t. I, 
p. 117418. - De BM»«M», Wer.Ctseh. der Araber, 
L VI, p. 578. 

IBV-fcBALBOUlC (Valy-$d-Din Abcu-Zéyd 
Abd-Alratma* ), écrivain arabe de la fin do 
quatorzième siècle de notre ère, et dont le non 
a acquis depuis quelques années une grande cé- 
lébrité en Europe. Ibn-Khaldoun était issu d'une 
des nombreuses familles arabes qui, peu d'an- 
nées après la mort de Mahomet, quittèrent leur 
patrie pour se répandre en Afrique et en Es- 
pagne. On lui donne les surnoms de tfatf Arany, 
c'est-à-dire originaire de la province d'Arabie 
appelée Hadramaouth , et de Ascbhyly, ou origi- 
naire de géville. Il naquit à Tunis, l'an 1332 de 
J.-C, et étudia dflns sa patrie, auprès de son 
père et des hommes les plus habiles 4e la con- 
trée, l'Alcpran, les traditions du prophète, la 
grammaire, la poésie et la jurisprudence, il fit 
ensuite un voyage en Espagne , et séjourna pen- 
dant quelques années à Grenade , ville qni jetait 
alors le plus grand éclat. Il composa pour le roi 
de Grenade, Abpul-hedjaoj-Joussoqf, un traité 
de logique. H rédigea également un traité de re- 
ligion musulmane , dont la copie autographe se 
trouve aujourd'hui à la bibliothèque de l'Escu- 
rial. De plus , il donna cours à son goût pour la j 
poésie, et composa un grand nombre devers. 
De retour dans sa patrie, jl s'attacha au service 
de son souverain,. L'emploi d'Itui-Kbaldoun cou- 
sistait à écrire en gros caractères , sur les actes ' 
du gouvernement, la devise du prince, qui se I 
composait de ces mots : Lowwg* à Dieu , et \ 
actions, de grâces à Dieu. i 

Au milieu des troubles qui désolaient l'Afrique, 
IbnrKhaldoun passa au service du souverain de 
Fea. Enfin» l'an 1382, il quitta pour toujours 
les région* occidentales, et, après avoir fait le 
pèlerinage de La Mecque, il établit sa résidence 
au Caire, ou il se livra à l'enseignement dans 
divers collèges. Au bout de deux ans, on k 
nomma cfref de* cadis d'Egypte pour les mu- 
sulmans de la secte de Malefe. Son intégrité dans 
l'exercice de ses fonctions Un flt des ennemis 
auprès des hommes puissants j d'un autre côte, 
son mérite incontestable forçait de recourir à lui* 
Il fut plusieurs fois déposé, et toujours réintègre 
dans ses fonctions. 

Cependant le fameux Timour avait fini «le 
subjuguer les contrées situées aux environs de 
l'Oxus, ainsi que la Perse et la Mésopotamie, il 



741 



IBN-KHALDOUN 



742 



&e disposait a envahir la Syrie, l'Asie Mineure et 
l'Egypte même. Le sultan d'Egypte et de Syrie 
s'étaot rend a dans cette dernière contrée pour 
repousser les efforts du conquérant tatare, ïbn- 
Khaldoqn accompagna son souverain. Quand 
Tiroour se fut rendu maître de Damas, Ibn-Khal- 
doun se fit présenter à lui, et lui plut beau- 
coup par l'agrément de sa conversation. Après 
le départ de Timour, il retourna lui-même au 
Caire (1400). Si on en croit l'historien arabe 
Ibn-Arab-Chah, Ibn-Khaldoun, qui avait fait as* 
ses bassement sa cour au conquérant et n'avait 
rien négligé pour se le rendre favorable, avait 
obtenu de lui la permission d'aller chercher sa 
famille et ses livres an Caire, et de venir le re- 
trouver. Quoi qu'il en soit, à son retour an Caire, 
il rat de-nouveau investi des fonctions de grand- 
cadi des Malékites, et mourut en 1406, âgé 
d'environ soixantcquatorze ans. 

Le principal ouvrage d Ibn-Khaldoun, et celui 
qui parait destiné à lui assurer une réputation 
durable, porte le titre de Kitab alibar oua 
divan almobtada oua alkhabar, etc., c'est 
à-dire Livre des Exemples instructifs et Re- 
cueil du Sujet et de T Attribut, concernant 
V Histoire de» Arabes , des Persans, des Ber- 
bers et des Nations qui ent habité avec eux 
sur la terre. Dans ce titre, les mots Recueil du 
Sujet et de l'Attribut renferment un de ces 
jeux de meta qui sent si familiers aux Orien- 
taux. On peut y voir une allusion grammaticale ; 
et e'est comme si l'auteur avait dit que son 
ouvrage est complet, et quûj de même qu'une 
proposition grammaticale est parfaite quand 
elle réunit un inchoatif ou sujet à un énonciatif 
ou attribut, de même cet ouvrage dispense de 
recourir à tout autre. Il est encore possible que 
l'auteur ait voulu dire que l'ouvrage contenait 
l'histoire des origines des nations et celle des 
événements qui en ont signalé l'existence dans la 
suite des siècles. 

L'ouvrage d'fbn-Khaldoun se compose de 
trois ou plutôt de quatre parties bien distinctes. 
La première, qui souvent est considérée comme 
un traité à part et que l'on rencontre plus faci- 
lement, porte communément le titre de Mocad- 
dama, c'est-à-dire Prolégomènes. La seconde 
est un tableau du monde ancien, particulière- 
ment des Arabes , depuis la création du monde 
jusqu'à l'apparition de Mahomet. La troisième 
est une histoire de rétablissement des Arabes 
en Afrique et en Espagne, et un tableau des 
tribus berbères depuis les plus anciens temps 
jusqu'au quatorzième siècle. Enfin, la quatrième 
partie est le tableau des nombreuses dynasties 
musulmanes répandues dans les diverses par- 
ties du monde, notamment dans l'Egypte et 
l'Asie. 

L.a première partie, c'est-à-dire les Prolégo- 
mènes, ne se trouve dans les bibliothèques 
chrétiennes d'Europe que depuis le commence- 
ment de ce siècle ; les autres parties ne nous 



sont connues que depuis ces dernières années. 
L'attention se portant de toutes parts sur cette 
riche mine de renseignements, nous croyons 
devoir fttir* connaître l'ouvrage avec quelques 
détails. ' 

Le Motadd&ma est précédé d'une espèce 
de préface, consistant dans quelques considéra- 
tions générales sur l'utilité de l'histoire et sur 
la manière de l'écrite. L'auteur indique les di- 
verses sources des erreurs dans lesquelles tom- 
bent ceux qui se vouent à ce genre de travail. 
Le traité eommenoe ensuite par des observa- 
tions générales sur le genre de société qui est 
naturel à l'homme. A ces observations succè- 
dent une description sueelncte dn globe et des 
réflexions sur l'influence physique et morale du 
climat et de la diète sur l'espèce humaine. 
Cette première section se termine par un long 
chapitre sur les diverses manières de connaître 
les choses secrètes on futures, sur les révéla- 
tions, les visions, les songes, les sorts, etc. 
Dans la deuxième et la troisième section, l'auteur 
examine la vie nomade, particulièrement chez les 
Arabes bédouins, dans ses rapports avec la civi- 
lisation de la société en général ; 11 y est parlé du 
passage de la société de la famille à la formation 
des tribus et à l'établissement d'un gouverne- 
ment fédératif. On y voit aussi que l'esprit de 
conquête est inhérent à cette situation poli- 
tique. L'auteur parcourt ensuite les différentes 
parties de l'administration , la cour, la justice , 
la religion, les finances, la guerre, le com- 
merce, etc. Puis il traite des vices qui s'intro- 
duisent à la longue dans cette forme de gouver- 
nement, des remèdes qu'on y peut apporter et 
de la ruine qui est la fin de toutes choses. La 
quatrième section est consacrée à l'état de la ci- 
vilisation et de la société en général chez les 
hommes réunis dans les villes. Là prospèrent le 
luxe et les arts ; là de grandes richesses se ras- 
semblent. Cet état est le dernier degré dans 
l'ordre de la civilisation \ il est suivi de la déca- 
dence et de la ruina des empires. Dans la cin- 
quième section, l'auteur s'occupe du travail con- 
sidéré comme moyen pour l'homme de pourvoira 
sa subsistance, des diverses professions libérales 
ou mécaniques, telles que la culture des sciences, 
les fonctions de la religion, de la magistrature, 
de l'administration, le commerce, l 'architecture, 
le métier de copiste, la médecine, la musique, etc. 
Enfin , dans la sixième section , qui forme plus 
du tiers du traité, Ibn-Khaldoun parcourt le do- 
maine de la science et ses division» ; il en présente 
lt système et b distribution. 

Tel est l'ensemble des prolégomènes d 'Ibn- 
Khaldoun. L'auteur n a pas toujours su s'affran- 
chir des préjugés de son siècle et de sa nation. 
La manière dont il parle de l'astrologie et des 
divers genres de divination prouve qu'il n'était 
pas éloigné de croire à la réalité de ces chi- 
mères. Les chapitres dont l'ouvrage se compose 
sont entremêlés d'une multitude de faits curieux 

24. 



743 



IBN-KHÀLDOUN 



744 



et d'exemples pris chez les Arabes, les Persans, 
les Berbers, et chez les autres nations an- 
ciennes et modernes. Mais on voit que l'auteur 
n'avait pas assez mûri son travail ; en quelques 
endroits il attribue à une époque ou à un pays 
ce qui appartient à un autre pays ou à une autre 
époque. D'autres fois, il se laisse entraîner par 
une idée exclusive; et il met sur le compte 
d'une seule cause ce qui a été le résultat du 
concours de plusieurs causes différentes. Une 
autre circonstance qui, même en Orient, a 
beaucoup nui au succès de l'ouvrage, c'est le 
style dans lequel il est écrit : ce style, comme 
celui de tous les écrits dlbn-Khaldoun que 
nous connaissons, est à la fois concis et diffus. 
L'auteur reproduit quelquefois la même idée 
sous plusieurs formes différentes; en même 
temps , il oublie les* liaisons les plus indispen- 
sables. Il affecte les mots nouveaux ou des 
mots détournés de leur signification ordinaire. 
Enfin, certaines considérations manquent des 
développements convenables. Néanmoins, ce 
traité, quand il parut pour la première fois, pro- 
duisit la plus grande sensation. Voici le jugement 
qu'en porte le célèbre Makrizi, qui avait été l'é- 
lève d'Ibn-Khaldoun : « Jamais ouvrage pareil 
ne fut fait, et jamais Ton n'en fera de semblable. 
C'est la crème du savoir, le fruit d'un sain ju- 
gement, le produit d'une intelligence qui a pé- 
nétré dans l'essence des choses et qui a saisi le 
véritable caractère des événements. » Il existe 
une traduction de l'ouvrage en turc. L'auteur 
de cette traduction est Mohammed Pirizadé, 
qui vivait à Constantinople il y a un peu plus 
d'un siècle, sous le règne du sultan Ahmed III., 
Voulant faire disparaître, autant. qu'il était en 
lui, les difficultés qui l'arrêtaient dans la lecture 
de l'ouvrage, il s'attacha à employer un style 
naturel et facile ; il rétablit les liaisons qui man- 
quaient dans l'original; il suppléa même aux 
développements dont certaines considérations 
avaient besoin. Le livre , dans l'état où l'a mis 
le traducteur, est regardé par les Turcs comme 
le manuel le plus propre à former des hommes 
d'État. D'un autre côté, c'est à la version origi- 
nale que Hadji-Khalfah a emprunté les tableaux 
qui, dans son Dictionnaire Bibliographique 
arabe, persan et turc, précèdent chaque science. 
La sensation que ce traité a faite à son ap- 
parition dans l'Europe chrétienne a été presque 
générale. On était habitué à voir dans les 
récits des Orientaux des faits dépouillés des 
circonstances qui les avaient amena ou qui les 
avaient suivis ; ou bien c'était souvent une suite 
de phrases dépourvues de sens. On rencontrait 
enfin un esprit qui avait médité sur la nature 
des choses, et qui, sans 'résoudre toutes les 
questions de la manière la plus convenable, avait 
le mérite de les soulever. Jusqu'à présent, 
les Prologomènes d'Ibn-Khaldoun nous étaient 
surtout connus par les fragments que l'illustre 
Silvestre de Sacy avait insérés dans sa Chresto- 



mathie Arabe et dans les notes qui accompa- 
gnent sa traduction d'Abd-AUatif. Le texte entier 
vient de paraître, par les soins de M. £. Qua- 
tremère, dans les tomes XVI e , XVIT et 
XVIII e du recueil des Notices et Extraits des 
Manuscrits de la Bibliothèque impériale; 
d'un autre côté, M. de Slane est chargé par l'Aca- 
démie des Inscriptions d'en préparer une tra- 
duction française. 

Nous avons dit que la deuxième partie do 
grand ouvrage d'tbbn-Khaldoun était une es- 
pèce d'histoire universelle depuis la création do 
monde jusqu'à l'apparition de Mahomet. L'au- 
teur ne s'est pas borné, comme la plupart des 
écrivains de sa nation, à recueillir les traditions 
qui avaient cours de son temps : il a soumis 
ces traditions à une critique sévère, et il a sou- 
vent mis en lumière des résultats aussi cer- 
tains qu'intéressants. Cette partie est surtout 
utile pour l'histoire des anciens Arabes, histoire 
si importante et connue jusqu'ici d'une manière 
si imparfaite. 

Feu M. l'abbé Arri , membre de l'Académie de 
Turin , avait commencé , sous les auspices do 
roi de Sardaigne, l'impression du texte de cette 
deuxième partie, accompagnée d'une version 
italienne et de notes. Il serait à désirer que ce 
travail fût repris par un homme suffisamment 
préparé. 

La troisième partie, consacrée aux tribus in- 
digènes de l'Afrique et aux Arabes établis en 
Afrique et en Espagne , est à elle seule aussi 
considérable que les deux premières : elle forme 
deux gros volumes in-4°. Les Arabes, lorsqu'ils 
envahirent l'Afrique, dans la dernière moitié du 
septième siècle de notre ère, soumirent, après 
quelque résistance, les tribus berbères, la plu- 
part nomades 1 , qui occupaient la chaîne de l'A- 
tlas depuis l'océan Atlantique jusqu'aux fron- 
tières de l'Egypte. Ces tribus, quoique parlant 
en général un langage particulier, et bien qu'ayant 
conservé pendant plusieurs siècles leurs croyan- 
ces et leurs pratiques religieuses , s* enrôlèrent 
de bonne heure dans les armées musulmanes, 
et contribuèrent puissamment à la conquête de 
de l'Espagne, du midi de la France et de l'I- 
talie. Plus tard, il se forma des dynasties ber- 
bères en Afrique et en Espagne. Il était donc 
du plus haut intérêt pour nous de connaître l'o- 
rigine de ces tribus, leurs rapports entre elles, 
les guerres qu'elles soutinrent sur leur propre 
territoire et sur le territoire étranger. Ces détails 
étaient même indispensables pour connaître 
l'histoire des peuplades arabes avec lesquelles 
les Berbères se trouvaient souvent mêlés. Mal* 
heureusement, lorsque Ibn-Khaldoun vint au 
monde, les traditions étaient en partie effacées, 
et il n'était plus au pouvoir de personne de re- 
nouer de tous points la chaîne des temps. Les 
écrivains grecs et romains n'ont jamais eo 
qu'une idée vague de l'origine respective des po- 
pulations indigènes de l'Afrique. Ils rappor- 



745 



IBN-KHÀLDOUN 



746 



lent les noms d'un certain nombre de tribus ; 
mais ces noms sont souvent altérés, et, comme 
la plupart des noms véritables oot changé dans 
l'intervalle, il était devenu bien difficile d'établir 
une concordance. De leur côté , les indigènes 
n'ont pas eu d'historien, et ils sont hors d'état 
de suppléer à ce qui nous manque. Les Arabes 
seuls auraient pu nous fixer à cet égard ; mais 
pendant longtemps les Arabes songèrent plutôt 
à bien faire qu'à bien dire; et, pour cette époque 
d'enthousiasme et de gloire, les annales arabes 
elles-mêmes sont très-incomplètes. Les Berbères 
commencèrent à recueillir des documents sur 
leur origine, à partir du dixième siècle de 
notre ère, précisément à l'instant où les Arabes 
songèrent à arracher à l'oubli leurs propres 
exploits; mais, dès cette époque, les souvenirs 
étaient très-affaiblis ; et différentes eau ses agirent 
fatalement sur la direction à donner aux re- 
cherches. Déjà, au dixième siècle, si certaines 
tribus avaient grandi en puissance et en gloire, 
il y en avait qui étaient déchues; pour celles- 
ci, la situation était d'autant plus pénible, que, 
d'une part, elles étaient traitées sans ménage* 
ment par le gouvernement, et que, de l'autre, 
chose qui leur était peut-être encore plus sen- 
sible , elles avaient à subir les sarcasmes des 
tribus voisines. Il arriva de là ce qui arrive tou- 
jours quand une autorité supérieure n'est pas là 
pour maintenir le bon ordre : c'est que les tri- 
bus cherchèrent à se relever au détriment les 
unes des autres. On vit alors apparaître les pré- 
tentions les plus étranges. Il eut été naturel que 
les populations qui avaient résisté avec le plus 
de succès aux armes des Carthaginois et des 
Romains fissent valoir leurs anciens exploits ; 
mais le souvenir de ces exploits était perdu. 
On se tourna donc du côté des Arabes, qui 
étaient devenus les maîtres du pays et qui 
lui avaient imposé leur religion et une partie 
de leurs idées. Certains généalogistes, qui vou- 
laient rendre hommage à la nouvelle religion, 
imaginèrent de rattacher leur tribu aux propres 
ancêtres du prophète des Arabes. Abjurant les 
idées bibliques qui de bonne heure avaient pé- 
nétré parmi les indigènes et qui faisaient re- 
monter la nation berbère à Cham, fils de Noé, 
et afin de s'affranchir de tout lien avec un mal- 
heureux qui avait encouru (a malédiction de son 
père, ils adoptèrent pour origine, Sera, fils aîné 
de Noé ; ils rangèrent au nombre de leurs aïeux 
Abraham et son fils Ismael, et se présentèrent 
hardiment comme les cousins du plus illustre 
des rejetons d'Ismael, Mahomet. D'autres gé- 
néalogistes, qui visaient surtout à la gloire pro- 
fane, cherchèrent des ancêtres parmi certains 
rois fabuleux de l'Arabie Heureuse. H faut sa- 
voir que les Arabes, qui pendant longtemps 
eurent peu de souci des héros qui, dans les pre- 
miers siècles de l'islamisme, avaient porté si haut 
le nom de leur race, se sont montrés fiers des 
prétendus exploits des rois du Yémen, qui, plu- 



sieurs siècles avant l'hégire, auraient soumis 
tout l'ancien monde à leurs lois, sans excepter 
l'intérieur de l'Afrique. D'après de nombreux 
auteurs, ce fut un de ces rois, nommé Ifricus 
ou plutôt Africu8 , lequel , d'après leur propre 
récit, aurait vécu quelques années seulement 
avant l'ère chrétienne, qui, après avoir subju- 
gué l'Afrique, y laissa des colonies consi- 
dérables et lui imposa son nom. A toutes les 
causes d'embarras, il faut ajouter ce mélange 
d'émigrés venus de tous les points de l'horizon, 
les Phéniciens, les Égyptiens, les Grecs, les Ro- 
mains, les Vandales, ainsi que les Nègres qui, de 
tous temps, ont afflué de l'intérieur sur les côtes. 
Ces divers points de vue sont discutés dans un 
mémoire auquel travaille Fauteur de cet article, 
et qui est intitulé : Mémoire sur les Populations 
de V Afrique septentrionale, leur Langage, 
leurs Croyances, et leur État Social aux dif- 
férentes époques de Vhistoire. 

La partie de l'ouvrage dlbn-Khaldoun qui 
est consacrée spécialement à la nation berbère 
renferme le résumé des opinions qui ont été 
émises à cet égard, et supplée pour nous aux 
traités originaux qui ne sont point parvenus en 
Europe. L'auteur a écrit un peu vite et quelque- 
fois de mémoire ; ses aperçus manquent, dans 
certains endroits , de netteté , et les noms pro- 
pres ne sont pas toujours marqués exactement ; 
mais, en rapprochant les différents passages qui 
se rapportent aux mêmes matières, et en recou- 
rant discrètement à une source où Ibn-Khal- 
doun n'était pas en état de puiser, les écrits des 
Grecs et des Romains, on arrivera probablement 
à rétablir la vérité. 

Quoi qu'il en soit, V Histoire des Berbères d'Ibn- 
Khaldoun ne pouvait manquer d'attirer l'atten- 
tion du gouvernement français. Avec l'établisse- 
ment des Français en Algérie sont survenues des 
relations de chaque jour, des rapports d'amitié 
et de guerre entre eux. et les tribus qui occu- 
pent l'intérieur des terres. M. de Slane a publié 
en 1847 et 1851, sous les auspices du ministère 
de la guerre, le texte arabe de cette histoire; 
Alger, deux volumes in-4°. Quelques années 
après, il a paru une traduction française du texte, 
par le même savant, 1852-1856, quatre volumes 
in-8°. La quatrième et dernière partie traite des 
dynasties musulmanes de l'Egypte et de l'Asie. 
Cette portion forme aussi 'deux vol. in-4°. Pour 
cette section, à en juger par les chapitres que 
nous avons lus, l'auteur donne un extrait des 
meilleures chroniques qui existaient de son 
temps, notamment de celle d'Ibn-Alatyr ( voy. 
ce nom. On peut juger de cette partie par les 
deux chapitres que M. Noël des Vergers en a 
publiés, sous le titre de : Histoire de l'Afri- 
que sous la dynastie des Aghlabites , et de la 
Sicile sous la domination musulmane; texte 
arabe, accompagné d'une traduction française et 
dénotes; Paris, 1841, m-8°. Voyez aussi les 
passages relatifs aux guerres des croisades, que 



747 



IBN-KHALDOUN - IBN-KHALLIKAN 



748 



M* Toraberg a publiés dans le tome Xll des 
Mémoires de V Académie d'Upsai, texte arabe, 
traduction latine et notes* 

flous avons dit que le grand ouvrage d'Ibn- 
Khaldonn n'est connu de l'Europe savante que 
depuis quelques années. Il s'en trouve des 
exemplaires à Paris, à Leyde, en Angleterre, 
ainsi qu'à Constantinople) mais ce sont de sim- 
ples volumes dépareillés; aucune bibliothèque 
accessible pour nous ne renferme d'exemplaire 
écrit de la même main et dont tons les volumes 
se suivent. Ainsi, il n'est pas sûr que nous pos- 
sédions l'ouvrage tout entier. Un pareil recueil 
devrait se trouver en Afrique» patrie de l'au- 
teur ; et jusqu'à présent on n'y a rencontré que 
des fragments. Il y a dans ee fait de la faute de 
l'auteur : que n'employait-îl un style qui lui per- 
mit d'être In par toute personne Instruite ? Il y a 
aussi de la faute du pays et de l'état de déca- 
dence où les habitants se trouvent. Un ouvrage 
de cette étendue exige beaucoup de temps pour 
être copié j par conséquent» un exemplaire, même 
d'une exécution médiocre, coûterait un prix 
élevé ; d'ailleurs, par les matières dont il traite, 
il exige un lecteur exercé et instruit, et les es- 
prits de cette trempe sont maintenant rares chex 
les musulmans. On trouve chez eux des théolo- 
giens et des juristes! parce que la jurisprudence 
et la théologie donnent un rang dans le monde : 
la pure littérature ne menant ordinairement à 
rien, il n'existe plus ni élèves ni maîtres. Cette 
situation déplorable rend pins sensibles les res- 
sources dont l'Europe savante dispose en ce mo- 
ment. Le temps n'est pas loin où l'on pourra 
étudier à ses véritables sources l'histoire des 
nations musulmanes, de ces nations que l'on 
ne connaissait guère que par des chroniques 
maigres et décharnées, et qui cependant ont 
longtemps occupé avec gloire les plus belles con- 
trées de la terre. Reihauo. 

Autobiographie flbn-Khaldoun, traduite de l'arabe 
en français, par M. de Slane, et publiée dans le Journal 
Asiatique de tannée 16U. — Extrait du mémoire de 
M. Reloaud cite dans l'article ( extrait qui a .été inséré 
dans les Nouvelles Annales des Voyages du mois de 
février 1M8). 

IBN-EHALLUUN (Chems-ed-Din- Aboul- 

Abbas-Ahmed) , écrivain arabe de la dernière 
moitié du treizième siècle de notre ère , était issu 
de l'illustre famille des Barmeky (Barmécides), 
qui joua un si grand rôle sous les premiers kha- 
lifes de Bagdad. Il reçut le surnom d'Ibn-Kha*- 
likan à cause de son bisaïeul , qui était ainsi ap- 
pelé. Il naquit à Arbèles, à l'orient du Tigre, 
l'an 1211 de J.-C. La langue arabe, la littéra- 
ture, l'histoire et la jurisprudence lui devinrent 
de bonne heure familières ; il connaissait parfai- 
tement l'histoire musulmane , réussissait très- 
bien à faire des vers, et savait par coeur les 
morceaux de poésie qui avaient le plus de cours 
de son temps. Les hommes les plus habiles de 
la Mésopotamie et de la Syrie , particulièrement 



Boha-ed-Din, historien du grand Saladin, et Ihn 
Alatyr (voy. ces noms) , qui avaient été lès amis 
de son père, concoururent à son instruction. 
Ibn-Khalllkan séjourna pendant quelque temps 
en Syrie; puis il passa en Egypte, où il fut re- 
vêtu des fonctions de substitut du grancf-cadi du 
Caire. En 1261 , le sultan Bibars le nomma 
grand-cadl de Damas. Ibn-Khallikan s'acquitta 
de ses fonctions avec autant d'intégrité que de 
talent. Destitué en 1270, il retourna en Egypte, 
où il se chargea de professer dans un des collè- 
ges du Caire. En 1277, le sultan lui confia de 
nouveau le rôle de grartd-cadi de Damas. A son 
approche , une partie des habitants s'avança à sa 
rencontre, et tan grand nombre de poètes loi 
adressèrent des vers de fêticitation. Il perdit de 
nouveau cette charge en 1281 , et mourut 
l'année suivante , dans on état peu éloigné de la 
misère. 

Ibn-Khallikan est l'auteur d'un assez grand 
nombre d'ouvrages, sans compter une Histoire 
générale, dont il n'eut pas le temps d'achever la 
rédaction. Le principal des ouvrages dont on lui 
est redevable est un Dictionnaire biographique 
des Hommes Illustres de V Islamisme. Dans l'o- 
rigine , ce dictionnaire devait traiter spécialement 
de l'époque précise oh chacun de ces personnages 
était mort : il devait servir de table alphabétique 
à une foule de recueils arabes où Ton a enre- 
gistré, année par année, le décès des princes, 
des généraux , des magistrats , des docteurs 3 des 
poètes, etc., accompagnée d'une notice! plus on 
moins étendue. L'auteur avait naturellement com- 
pris dans son plan les personnages dont la mort 
était récente et qui s'étaient distingués d'une 
manière quelconque. Il se contenta d'exclure les 
compagnons de Mahomet et les khalifes , dont 
l'instoire était suffisamment connue. De plus , la 
nature de son plan lui interdit les hommes célè- 
bres dont on ignorait l'année de la mort. L'ou- 
vrage est intitulé : Vefayat alayan otta anba 
abna al&eman , c'est-à-dire Les Décès des Per- 
sonnages Éminents et les Histoires des Hom- 
mes de ce Siècle. Ce rat en 1256 que Ibn-Kha! 
likan, alors au Caire, commença à mettre en 
ordre les matériaux qu'il avait rassemblés. I! 
ne cessa pas de corriger et d'étendre l'ouvrage 
dans le cours de ses voyages ; au moment de sa 
mort, il renfermait environ 865 articles. 

Ges articles, comme ceux de toutes espèces de 
dictionnaires , ne sont pas également importants ; 
tous ne sont pas rédigés avec le même soin. 
Quelquefois l'article consiste en partie en discus- 
sions sur le mois et le quantième du mois où un 
événement s'est passé. La généalogie des per- 
sonnages , sujet qui intéresse au plus haut point 
les Arabes , n'a pas le même intérêt pour des 
Européens. Les morceaux de vers qui accom- 
pagnent la plupart des notices, et qui y jettent 
une grande variété , sont souvent privés d'éclair- 
cissements indispensables pour nous. D'ailleurs, 
l'auteur partageait le mauvais goût qui a presque 



749 IBN-KHALL1KAJS 

toujours dominé en Orient; et quelquefois il cite 
comme des pièces admirables des morceaux qui 
n'ont d'autre mérite que leur singularité. 
Ajoutez à cela que le récit se ressent plus d'une 
Ibis du désordre occasionné pat des additions 
faites après coup et à de longs intervalles les unes 
des autres. Néanmoins, le DiotiohUaire d'Ibn- 
Khallikah a toujours été considéré comme étant 
d'une importance capitale. D'ailleurs, une partie 
des défauts que rioUS reprochons à Ibn-Khallikan 
n'en sont pas pour sa nation. Dans tous les Cas, 
ou ne petit pas lui contester son immense érudi- 
tion historique, bibliographique et littéraire, 
son esprit de critique, son talent merveilleux 
pour fixer l'époque des événements. Le célèbre 
William Jones a comparé les notices d'Ibn-Khal- 
likan aux vies de PlutàrVJue. Ce rapprochement 
pris dans son ensemble, est loin d'être exact; 
mais si , parmi les huit ceiit soixante-cinq per- 
sonnages dont fiarle Ibn-Khallikan , on choisit 
ceux Qu'il avait cdtiiiUs persotiitellfement ou ceux 
sur le compte desquels il avait obtenu des rën- 
seigrtements particuliers; le fuirâllèle n'a rien 
d'étrange. Qu'ôh lise lea articles Djafor et 
fridl, dé la famille de* Barmécides, l'article de 
Koukbôilrtj , prince d'Arbèles , et l'on sera aussi 
surpris que charmé dti tact avec lequel Îbn-Khal- 
likan, au moyeu d'anecdote* bien choisies, a 
fait ressortir le caractère et la situation particu- 
lière de ces personnages. 

La variété des matières traitées dans le Dic- 
tionnaire d'Ibn-KhallikaU, les fragments de poésie 
isoîé3 de ce ijUi devait en faciliter l'intelligence, 
enfin, la raretéet même la grande divergence des 
manuscrits, qui , indépendamment des additions 
de l'auteur, ont subi quelquefois des interpola- 
tions considérables, avaient empêché jusqu'ici 
d'en donner une édition. Ces obstacles sont tom- 
bés devant les progrès qu'a faits la littérature 
arabe dans ces dernières années ; et il en a été 
entrepris deux éditions à la fois. L'une est auto- 
graphiée, et a paru à Ctaettingue par les soins de 
M. Wiîstenfeld. L'antre, qui était dirigée par 
M. dé Slane, et qui s'imprimait à Paris, devait 
former deux volumes in-4°. Le premier volume, 
renfermant un pett plus de la moitié de l'ouvrage, 
parut en 1841 M. de Slane profita de son accès 
auprès de l'immense dépôt de la Bibliothèque 
royale pour puiser en grande partie aux sources 
mêmes où avait puisé Ibn-Khallikan ; il rétablit 
certaiUs passages qui avaient été défigurés par 
les copistes. De plus , M. de Slane commença 
à Paris une version anglaise aux frais du comité 
oriental de Londres. Cette traduction était ac- 
compagnée des nombreux éclaircissements qu'exi- 
geait un texte si difficile, et devait former 4 vol. 
ih-4°. Lefïremier volume parut en 1842, et le 
deuxième en 1843. Il n'a plus été imprimé que 
la première moitié du troisième volume. Il est 
à désirer que M. de Slane puisse achever sa 
double publication. REiiutro. 

En attendant la notice âéUUlée qfte M. de Slane à an- 



— IBN-MOCLAH 



7S0 



noncée , voyez l'Introduction que ce savant a plaeéfe en 
tête du premier volume de sa version anglaise. 

ibn-khordadbeh ( Abou't-Kasxm Obéid- 
Allah ben- Ahmed), géographe arabe, morten 300 
de l'hégire (912 de i.-C. ). Petit-fils d'un Guèbre, 
qui avait embrassé l'islamisme, il fut directeur 
de la poste et de la police dans ïepjebal (Médie), 
et vécut ensuite à la cour du khalife Motémid. 
Il écrivit huit ouvrages , et notamment le Kitab 
al-Mesalik we al-Memalik ( Livres des Routes 
et des Royaumes ), qui se trouve à Oxford. C'est 
un recueil d'itinéraires , qui, malgré sa séche- 
resse, renferme de précieux renseignements sur 
le commerce Mes différentes contrées musul- 
manes , et sur les impôts dans les vallées du 
Tigre et de l'Euphrate. v E. B. 

Ibn-abt-Yacoub Al-Werrak, Fihrist, t. 1, fol. 800. — 
itadjl-Khalfâh , Lex. Bibliogr., t. Il, n° Î088; V, U878. - 
Reinaud, Introd. à la Céogr. d'Abou'l-F4da, p. 87-89. — 
De Hamroer, Lit. -Ge se h. der Araber> t. IV, p. 828. 

ibn-moclah (Abou-Ali Mohammed ben- 
AU), homme d'État et calligraphe arabe, né à 
Baghdad,en272 de l'hégire (885 deJ.-C.),mortle 
1 1 sehawal 328 ( 20 juillet 940 ) ou en 330 (941). 
Il était collecteur d'impôts dans le Fars, lorsque 
le khalife Moctadir le nomma grand-vizir, en 
316 (929). Il ne conserva que deux ans la direc- 
tion des affaires. Ayant été réintégré dans ces 
fonctions, mais destitué peu de temps après par 
le khalife Gahir-Billah , en 321 (933), il contribua 
par ses menées à accélérer la chute de ce prince. 
A l'avènement de Radhi-Billah, il acheta 500,000 
dinars le titre de grand-vizir. Il fit mettre à 
mort le sectaire Schalmagani, et expulsa de Mos- 
soul, en 323(935), Nassir ed-Daulab, fondateur 
de la dynastie des Hamdanides. Son adminis- 
tration fut de peu de durée. Cédant aux instiga- 
tions de Ibn-Yacout , le khalife le priva de sa 
charge , le fit mettre à la torture, et lui extorqua 
un million de dinars. Ces disgrâces ne calmè- 
rent point l'humeur ambitieuse de Ibn-Mo- 
clah. Dans l'espoir de se rendre nécessaire, il 
engagea le khalife à se débarrasser de lbn-Raïk, 
qui, sous le nom d'émir al-omera (prince des 
princes ) , s'était arrogé une autorité presque ab- 
solue. Il fut replacé à la tête des affaires en 32f 
(938). Mais le faible Radhi-Billah ne tarda guère 
a dévoiler à lbn-Raïk le projet de son ministre. 
Ibn-Moclah fut emprisonné et condamné à avoir 
la main droite coupée. 11 n'en continua pas moins 
à écrire avec le moignon du bras pour montrer 
qu'il était encore capable de remplir les fonctions 
de secrétaire du khalife. Son ennemi lui fit alors 
couper la langue, et le laissa mourir de faim et 
de misère. Ibn-Moclah ne manquait point de ta- 
lents poétiques, et il se fit une grande réputation 
comme calligraphe. Il perfectionna le caractère 
neskhi; mais c'est à tort qu'on a prétendu qu'il 
l'eût inventé. On a retrouvé des pièces écrites 
avec ce caractère en 133 (750 de J.-C. ), c'est-à- 
dire plus d'un siècle avant la naissance d 'Ibn- 
Moclah. E. B. 

Ibn-Khallikan , TTefayat al-ayan, édlt. Wiistenfeld. 
n°7i8. - G. Weil, Giseh. der Chalif*h t »• M. ~ De- 



751 

frémery, Ment, sur les Émirs Al-Omera; dans Metn. 
prétentés par divers savants à fAcad. des Inscript., 
1881, série I» t II. — De Hammer, LUeraturgeschichte 
deriAraber, t. IV, p. 78, 441. — SUveslre de Sacy, Journal 
des Sav., août I8ts. 

ibn-al-mokaffa ( Abou- Mohammed Ab- 
dallah), écrivain arabe, né à Hour, dans le Fars, 
assassiné en 142 de l'hégire ( 759 de J.-C. ) 
ou en 137 (754) ou en 145 (762), à l'âge de trente- 
six ans. Fils d'un Guèbre , qui était collecteur 
d'impôts, il embrassa l'islamisme, et changea 
son nom persan de Ronzbeh en celui d'Abou- 
Mohammed Abdallah. Mais comme il conti- 
nuait à s'occuper de l'histoire de ses ancê- 
tres , et qu'il tentait d'imiter, dans ses écrits, 
le style du Coran , on douta de la sincérité de 
sa conversion. Il était secrétaire du prince Isa ben- 
Ali, oncle du khalife abbasside Al-Mansour. 
Ayant été chargé de rédiger un acte d'amnistie 
en faveur du prince Abdallah, qui s'était révolté, 
il mit tant de zèle à sauvegarder les intérêts de 
ce dernier, qu'il s'attira la haine du khalife. 
Soffian , gouverneur de Bassora, reçut ordre de 
punir Ibn-al-Mokaffa. Irrité depuis longtemps 
contre cet écrivain, qui l'avait outragé dans ses 
vers, il l'attira secrètement dans sa mai- 
son, et le fit jeter dans un four ardent, après 
lui avoir fait couper les membres. lbn-al-Mo- 
kaffa est auteur de Dorret Yetimet ( Perle pré- 
cieuse ) , traité de la vie spirituelle et notice des 
saints. Il fit un abrégé des catégories d'Aristote, 
et traduisit du pehlwi en arabe le Khodaï- 
Nameji (Livre des Rois ) de Danischwer. Sa tra- 
duction, intitulée Sier al-Molouh, fut l'une des 
sources où puisa Firdousi ; — La Vie de Khos- 
rou Nouschirwan ; — Calilah et Dimnah, ou 
les Fables de Bidpaï; sa traduction a été éditée 
en partie par Schultens, Leyde, 1786, et intégra- 
lement par Silv. de Sacy, Paris, 1816, in-4°. 
Elle fut mise en vers arabes et traduite en persan 
par Hos&éin-Waïtz en syriaque, en turc par 
Wasi Ali-Tchelebi, en grec, en latin, en espa- 
gnol , en italien , en vieux français , en allemand» 

E. B. 

Ibn-Abl-Yakoub al-Werrak, Fihrist al-Oloum. — Ibn- 
KhalUkan, Biogr. Dict., t.l, p. 431. - Hadjt-Khalfab, 
Lex. Bibliogr., t. III, n° 4980; IV, 7410; VI, «819. - Sil- 
vectre de Sacy, Estai sur l'origine indienne de Cailla 
et Ûimna, en tête de son cdlt. de cet ouvrage, et dans 
JYot. et Extr. des Manuscrits de la Bibl. du Roi, t. X, 
p. 184, 166. — De Hammer, LUeraturgeschichte der 
Araber, t. III. 

1RN AS-SCHINEH OU IBN-SCHOHNAH 

( Zéin ed-din Abou'l-Welid Mohammed ben- 
Mohammed Halebi ), historien arabe et juris- 
consulte hanéfite, né à Alep, mort en 815 de 
l'hégire (1412 de Jésus-Christ). Il fut cadhi 
al-codhat (juge suprême) à Alep et au Caire. 
Après la bataille d'Âlep et la prise de cette ville 
par Tamerian, en 802 (1400), il fut conduit devant 
le conquérant, etrépondit avec habileté à plusieurs 
questions délicates qui lui furent adressées. II 
écrivit plusieurs ouvrages de droit, et les his- 
toires suivantes : Raudh ahMonatzir fi ilm 
al-awaïl we al-awakhir ( Jardin des Aspects, 



IBN-MOCLAH — IBN-THOFÉIL 



752 

ou la 'Science des principes et des fins) , en trois 
parties, dont la première contient l'Histoire des 
Perses, des Pharaons , des anciens Arabe*», des 
Juifs; la deuxième l'Histoire des Musulmans jus- 
qu'en 806 (1403) ; la troisième traite de la Fin du 
Monde d'après les traditions prophétiques. Erd- 
mann en a publié un fragment pour compléter la Vk 
de Tamerian par Ahmed Ibn-Arabschah, sous 
le titre de Arabsiaden ex manuscripto ignoto 
Ibn-Schohnah supplevit et emendavit; Casas, 
1823, in-8°; — Al~Mobtegha 9 abrégé de l'ou- 
vrage précédent; — continuât, du Mohhtasarfi 
Akhbar al-baschar (Abrégé de l'Histoire du 
Genre humain, ou annales d'Abou'1-Féda ) ; — 
Dort al-Montekheb fi tarihh Haleb ( Perles 
choisies, ou histoire d'Alep ), que Hadji-Khalfah 
attribue à Ibn-al-Khathib an-Nasiriyet ( Abou'l- 
Hassan Ali ben-Mohammed Djibrini ), mort en 
843 (1439). C'est une continuation du Boghtet 
at-ThaUb de Kemaled-Din Halebi. A. Kremer en 
a traduit des documents sur la géographie de la 
Syrie septentrionale, dans Denhsckriften ( Mé- 
moires ) de l'Académie des Sciences de Vienne , 
1852, t. III, et la description des édifices d'Alep, 
dans Sitzungsberichte ( Comptes-rendus des 
séances de la même académie ) , 1850, t. IV: 

Son fils Ibn-às-Schibnbh (Mohibb ed-Din 
Abou'l-Fadhl Mohammed ben-Abïl-Wélid), 
mort en 890 (1485), était aussi cadhi al-codhat 
Il écrivit en vers des ouvrages de jurisprudence, 
et amplifia le Raudh al-Monatzir. Cette nou- 
velle édition est intitulée Nozhet an-Newatzir 
(Délices du Spectateur): Il y ajouta un appendice 
pour le neuvième siècle de l'hégire. — Son fils, le 
cadhi al-codhat Ibn-as-Schihneh ( Abd-al-Berr 
ben-Mohammed), mort en 921 (1515) écrivit 
sur le droit. £. Beauvois. 

Ahmed Ibn-Arabschah, Fie de Tamerian. — De Ham- 
mer, tiist. de VEmp. Ottoman, I- VII. — Hadji-Khalfah, 
Lex. Biblioçr., t. III, n° 6601; V, 11093, 11616; VI, »190, 
13195, 1SS03, 13785. — Krafft, Catai. des Manuscrits 
orientaux de l'Acad. orient, de Vienne. 

IBN-THOFÉIL (Abou-Bekr ou Abou-Djafar 
Mohammed ben-Abdalmélik al-Kaïsï al- 
Berschani ), philosophe arabe, né à Berschan 
( Purchena), dans les environs d'A(meria( Es- 
pagne), mort à Maroc, en 581 de l'hégire (1 188 de 
J.-C. ). Il fut médecin et secrétaire du gouver- 
neur de Grenade, puis du sultan almohade 
Abd-al-Moumin. U était versé en physique , en 
astronomie , en mathématiques, en philosophie, 
et composa une cassidet ( élégie ) sur la prise 
de la ville de Kafsa, événement qui arriva en 
556 (1161). On a de lui : Bai Ibn-Yokdhan, 
roman philosophique, dont le héros, abandonné 
à sa naissance dans une île déserte, et nourri 
par une chèvre , s'élève successivement à la con- 
naissance des plus hautes vérités , par la seule 
réflexion, et par la contemplation de soi-même 
et de la nature. C'est leRobinson des Orientaux. 
Ibn-Thoféil prouve l'existence de Dieu par di- 
vers arguments qui ne seraient point désavoués 
des philosophes de nos jours. Son ouvrage a été 



IBN-THOFÉIL — IBN-ZÉIDOUN 



traduit en persan, en hébreu, en latin, par 
Ed. Pococke, sous le titre de Philosophus au- 
todidactes, sive epistola Abi Jaafar Ebn 
Tophàil de Haï Ebn Yokdhan ( avec le texte ) ; 
Oxford, 1671 et 1700, m-4°; en anglais par 
S. Ockley; Londres, 1708 et 1731,in-8°; en 
allemand, par J.-G. P. (Prilius); Francfort, 
1726, in-8°, et par J.-G. Eichhorn; Berlin, 
1782, in-8°. K. Beacvois. 

Abd-al-Wahld Marekoschi, Hist. des Almohaves, édll. 
par Dozy,jp. 178-175.'.- MaHcarl, Hist. ofthe Moham. Dy- 
nasties in Spain, trad. par de Goyangos,t. 1, Î35, 885,864. 

— Léon l'Africain, dans Biblioth. Grseca de Fabricius, 
t. XIII. - Badjl-Khalfah, Lex. BMiogr., 1. 1, n« 645; III, 
eus. — Not. sur Haï Kbn-Yokbdhan, dans Magasin En- 
cyclopéd., 1806, t. II, p. 818-847. - Doiy, Scriptorum 
Arabum Loei de AbbadidU, t. Il, p. 171. - De Hammer, 
LiteraturgeschieMe der Araber, U VII, p. 44î, 771; 854. 

- Zenker, Bibl. Orient., n°» 1814-1818. 
ibn-al-wardi ( L'imam Zéin ed-Dln 

Abou-Hass Omar ben-Motzaffer al-Marri al- 
Halebi), jurisconsulte schaféite, historien et géo- 
graphe arabe, mort à Alep, en 749 ou 750 de l'hé- 
gire ( 1348 ou 1349 de J.-C. ), à l'âge d'environ 
soixante ans. H fut naïb du cadhi ( substitut 
du juge) de plusieurs villes, et notamment 
d'Alep , où il enseigna aussi le droit. Il fit des 
vers sur la fameuse peste noire , dont il fut l'une 
des victimes^ et écrivit en vers des traités juris- 
prudence et de grammaire. Ses ouvrages les plus 
connus sont : Al-Mokhtasar fi ahhbar al-bas~ 
char ( Abrégé de l'Histoire du Genre humain ),. 
extrait de la chronique d'Abou'1-Féda, qu'il 
continua jusqu'à l'année de sa mort ; — Khe- 
ridet al-Adjaïb we feridet al-Gharaïb 
( Pierre précieuse des Merveilles et Perle des 
Choses mémorables), traité abrégé de géographie 
physique et d'histoire naturelle , qu'il composa 
pour servir d'explication à un planisphère cons- 
truit par lui. Hadji-Khalfah estimait peu cet ou- 
vrage, qui, disait-il, est rempli d'erreurs, et 
dont les cartes sont inexactes. Il avoue néan- 
moins que peu de livres étaient plus populaires 
et plus répandus. Le Kkeridet al-Adjaïb est 
l'un des ouvrages dont les orientalistes se sont 
le plus occupés. De Guignes en a donné une 
analyse détaillée dans le t. II des Notices 
et Extraits des Manuscrits, de la Biblio- 
thèque du Roi. Les fragments suivants ont 
été édités ou traduits en latin par Aurivilius : 
De Pa/ma;Upsal, 1745; --par Eœhler : Syrie, 
à la fin de Prodidagmata ad Hagji Chaltfx 
librum; Leipzig, 1766, in-4 e ; — par A. Hy- 
lander : Spécimen Operis cosmographici Ibn 
el-Vardi (texte et trad. de la préf. et des 
chap. 1-5 ) ; Lund, 1784-1812 , réuni par Sv. Hy- 
Iander,ibid., 1823; — par Fraehn : JBgyptus, 
auctore lbn al-Vardi (text. et trad.); Hall, 
1804, in-8°; — par C. J. Tornberg , Fragmen- 
tumlibriMargarita mirabilium ;Upsal, 1835- 
1839, 2 part. in-8°, avec la carte générale; — 
par S* Freund : De Rébus die resurrectionis 
eventuris ; Breslau, 1853, in-8°. E. B. 

Aboo'I-Mahasen, Manhal as-Safl, t. IV. - lbn-Hablb, 
dans OrientaUa II, 890. - Hadjl-Khalfah, Lex., t. I, 



754 

n«« 1148, 1146, 1152; H, Î689, 8886; III, 4379,' 4688, 64*6 ; 
V, 14058, 11170, 14616, 11917 ; VI, 1Î873, 13188, 18987. - Dozy, 
Cat. des Manuscrits orientaux de Leyde, t. H, p. 78. - 
Relnaud, Introd. à la Géog. d'Atwu'l-Féda, p. 154. 

* ibn-ykmin fbryoumendi ( L'émir Mah- 
moud ), poète persan, né à Féryomnend, mort 
en 745 de l'hégire (1344 de J.-C.). H était fils 
de Ibn-Yemin Ala-ed-Din Thoghraï, grand-vizir 
del'Ilkhan Khodabendeh (Oldjaïtou). Au lieu 
d'imiter son frère, qui tenta de se rendre indé- 
pendant dans une province, et qui périt sans 
réussir, il se retira dans ses domaines, pour y 
mener- une vie privée, et se livra tout entier à 
la culture des lettres. U consigna ses réflexions 
philosophiques sur les vicissitudes des choses 
humaines , dans une Lettre poétique à son père, 
dont le baron Ott* de Schlechta-Wssehrd a 
traduit à peu près la moitié sous le titre de Ibn- 
Yemin's Bruchstucke (Fragments); Vienne, 
1852,in-8«. E. B. 

Louthf All-Beg, Atesch kedah. - De Hammer. Gesch. 
derschônen RedekHnste Persiens, p.M4. - Schlechta- 
Wssehrd , Préf. de sa trad. 

ibn-zéidoun ( Abou'l-ivélid Ahmed ben- 
Abdallah al-Màkhzoumi al-Andalousi al- 
Corthobi ) , poëte arabe , né à Cordoue, en 397 
de l'hégire( 1007 de J.-C), mort à Séville, en 463 
(1071). Fils de l'un des premiers jurisconsultes 
de sa ville natale, il se distingua de bonne heure 
par ses talents poétiques, et brilla à la cour du 
khalife ommiade de Cordoue Mohammed III 
Mostakfi. La fille de ce t prince, la belle Wel- 
ladet, commença dès lors à le remarquer, et 
lorsque, après la mort de son père, elle se fut 
soustraite à la réclusion du harem pour aller 
vivre au milieu des poètes et des beaux-esprits, 
elle préféra Ibn-Zéidoun à tous les grands per- 
sonnages qui se; disputaient ses bonnes grâces. 
L'un de ces derniers, le vizir Ibn-Abdous, ca- 
lomnia son heureux rival auprès d'Ibn-Djehwer, 
président du sénat après la chute des Ommiades. 
Jeté en prison, Ibn-Zéidoun s'échappa au bout 
de quelque temps, et se réfugia à Valence , puis 
à Séville, où il devint vizir du. prince abba- 
dide Motadhid-Billah, en 441 (1049), puis de son 
fils Motemid. Dans son exil, il entretint une 
correspondance avec Welladet, et écrivit au 
nom de cette princesse la célèbre lettre contre 
Ibn-Abdous, qui a été publiée en arabe et en latin 
parReiske: Abil WalidilbnZeiduniRisalet, 
seu epistolium; Leipzig, 1755, in-4°. Cepoëme 
est très-difficHe à entendre à cause de la bour- 
souflure du style et des allusions historiques dont 
il est rempli* Parmi les nombreux commentaires 
dont il a été l'objet, le plus connu est celui de 
Ibn-Nobatah (mort en 768-1366), dont une tra- 
duction turque a été éditée sous le titre de Terd- 
joumet scherh\ al-Oyoun; Constantinople, 
1257 (1841), gr. in-8°. On en trouve des frag- 
ments en arabe et en latin dans Additamenta 
ad Historiam Arabum ante Jslamismum par 
J.-L. Rasmussen ; Copenhague , 1821 , in-4°. Ibn- 
Zéidoun écrivit une autre lettre à Ibn-Djewher, 



755 



IBN-ZEIDOUN — IBRAHIM 



756 



tandis qu'il était eu prison. Son fils Abou-Bekr 
fut vizir de Motimid Ibn-Abbad, et périt lors 
delà prise de Sentie par les Aimoravides, en 484 
(1091). £. B. 

lbn-Betttm, DtakMHt - Iin-Basehkoa*l, SUet. - 
Ibo-Khalukao, Bioeruph. Mct. t t. 1, p. ut. - Spécimen 
critieum exibeni locos Ibn-khoconis de lbn-Zeiduno , 
«dit. par ft.-B. vVelJersj Lefde, 1131, fa •**. — Proleço- 
tHena ad MttioftMH dkbrum Itm-Zeiduni Bpistotarum 
et commentariorxm. luibus ub IbnUobata et Sçtfadio 
sinçula illustratà sunt, edit. par H. S. WeQers; Leyde, 
1834, in 8°. — Ibn fcobàU et Satadi , passages «or Ibn- 
Eéldoirà, dan* Catâl: Codé. OilenUUium bibl. AcademUe 
Lu^duno-Batwm de Doiy, t.l, p. ttl-itt. - Hadjl-tvhal- 
tab, Lex. Biblioçr., t. Il, n° t098 ; III, 5981. - Hlrt, fragm. 
dans Chrestomathie Arabe; léna, irro. — De Sacy, 
Poème d'Ibn-Zeidoun, eitr. des CoUiert d'Or de Ibn- 
Kbacao, et trad. dan» /ourn. Atiat^ 181», II, p. M0-S18. 

ibh-abd-ar-rbbbibi ( Abov-Omar Ahmed 
ben- Mohammed). Voy. Abmbb Ibn-Abdab- 
Rebbihi. 

IBff.ARABSCHAM. V09. AHMBD IbH-AbAB- 
SCHAH. 

IBN-BADJEH. Voy. ABBMPACB. 
lBK-BATBOtTTAB. Voy. MoÉAatMBD. 
IBN-BATRIK. Voy. ËOTTCHIUS. 
IBM-BBITHAB. Voy. ÀBEN-BétTHÀft. 

ibn-dOreid ( Abou-Bekr Mohammed ). 
Voy. Doréid. 

IBN-RBACAN. Voy. Al-FATH IbR-KHAGAN. 
1BH-ROSCBD. Voy. AVERBHOÈS. 

iBN-SAlo (Nour ed-DinAbou'l). Voy. Au 
Ibn-Saïb. 

1BA-SIHA. Voy. AVlCENIfE. 

IBN-TAGRi BB*Dl. Voy. ABOU'L-MAfiAS8BN. 

iBN-tocMs ou iBA-TOVNdfl (Aboiïl- Has- 
san Ali ). Voy. Au Ibn-Yocms. 

ibn-zarcaL (Ibrahim Ibn-Abd ar-Rah* 
man ). Voy. Arzacbel. 

ibn-zohb. Voy. AberZoab. 

Ibrahim (Abou-ishah) , khalife abbasside, 
né le 1 er dzou'l-cadeh 162 de l'hégire (juillet 779 
de J.-C. ), mort à Samarra (Irak), le 7 rama- 
idhan 224 (juillet 839). Il était frère de Haroon 
ar-Raschid et fils du khalife Mahdi et d'une né- 
gresse. Son neveu Matnoun, désirant mettre fin 
'aux guerres civiles qui désolaient l'empire de- 
puis l'avènement d'Ali , résolut de rendre le trône 
à la famille. de ce dernier, et désigna pour son 
successeur l'imam Ali ar-Ridha , fils de Mousa. 
Ces dispositions mécontentèrent la plupart des 
partisans de la dynastie régnante, et les habitants 
de Baghdad déclarèrent le khalife déchu. Ibrahim 
fut proclamé à sa place, sous le nom de Moba- 
reh ( béni ) , le 5 rdoharrem 202 ( 24 juillet 817). 
Ne pouvant satisfaire aux exigences de ses trou- 
pes, il leur permit de piller quelques villages. 
Cet acte impolitique lui fit perdre sa popularité. 
\ Comme il ignorait entièrement l'art de la guerre, 
il laissa le commandement de l'armée à Isa beti- 
: Mohammed , qui fut vaincu à Wasit par Hassan 
ben-Sehl , et trahit les intérêts de son parti. Ce- 
• pendant Mamoun , voyant l'impossibilité de faire 
triompher son projet , l'avait abandonné , et avait, 
dit-on , fait empoisonner l'imam ar-Ridha. Lors- 



qu'il quitta le Khorassan pour rentrer à Baghdad, 
Ibrahim abdiqua en dzou'l-hiddjeb 203 (juin 
819); il se déguisa en femme, et réussit à se 
soustraire pendant longtemps à toutes les recher- 
ches des émissaires de son neveu. Ayant été dé- 
couvert en 210, il fut conduit en présence de 
Mamoun , qui lui pardonna, et se contenta de le 
faire surveiller par deux soldats. Ses talents de 
société lui concilièrent bientôt l'affection de ce 
prince , qui en fit le compagnon ordinaire de ses 
plaisirs. Ibrahim passait pour le meilleur musi- 
cien et chanteur de son temps. Comme poète, 
il n'eut point d'égal parmi les princes de sa 
famille. Ê. B. 

Tbabarl, Ann. - Ibn«dl-AtMr, KmmU ae-Yevmkk.- 
Ibn-ghalllian, Btoçr. Dictio*.; t. I, p. 19. - Le faox 
Fakhr-ed-Dln , dëns le Journal AHat., îftw, I, »9, Ut 
SU. — Aventures tf'Ibrablfcr, dans les AneUemta Araiica 
ië Humbert - About-Féda, Ann. Muilem., C II. - Wett, 
GetcKderChalifen, X. II, p. ti\ Ht, 17t. - De Hammer, 
Ltteratnrgeichichtè ûér Araber, t. lit, p. Si. 

Ibrahim , sultan ottoman , né le 12 schawal 
1024 de l'an 46 (4 novembre iôl5 de J.-C), 
étranglé le 28 redjeb 1058 (18 août 1648). De tous 
les princes de la famille impériale, il fut le seul 
qu'épargna la cruauté de son frère Mourad IV. A la 
mort de ce dernier, qui ne laissa point de posté- 
rité, il fut placé sur le trône en 1049 0640). Pour 
prévenir l'extinction de la dynastie ottomane, la 
mère et les vizirs du nouveau sultan se firent 
un devoir défavoriser ses penchants voluptueux. 
Chaque semaine, on lui offrait une nouvelle con- 
cubine. Ibrahim se livra à la luxure avec tant 
d'excès qu'il tomba au plus bas degré de l'abru- 
tissement. Incapable de s'occuper des soins du 
gouvernement, il laissa l'exercice du pouvoir, 
d'abord au grand -vizir Cara-Mustafa, ensuite 
à sa mère Kœsera, à son favori Sultanzadeh- 
Moharamed , à son écuyer Yousouf et à son pré- 
cepteur Djindji. En 1641 la paix fut conclue avec 
l'Autriche, et une armée turque alla assiéger la 
ville d'Azof, dont les Cosaques s'étaient emparés 
cinq ans auparavant. Cette expédition échoua; 
mais l'année suivante les Cosaques évacuèrent 
la viHe après l'avoir réduite en cendres. En 1642, 
Hosséin Nassouhzadeh se révolta à Àlep et mar- 
cha sur Constantinople. Arrivé à Scutari, il hési- 
tait à attaquer la capitale; en présence de cette 
hésitation, ses officiers l'abandonnèrent; H fat 
pris et mis à mort au milieu des tortures. £0 
1055 (1645), les Vénitiens de Crète ayant fourni 
des provisions à des corsaires maltais qui ve- 
naient de capturer quelques navires du grand- 
seigneur, une armée turque , portée par quatre- 
vingts galères, alla mettre le siège devant LaCa- 
née, dont les habitants capitulèrent et obtinrent 
la faculté de se retirer. Ibrahim , mécontent de 
ce que l'on eût épargné des infidèles , fit mettre 
à mort le oapitan- pacha Yousouf, dont les pré- 
tendus trésors excitèrent sa convoitise. Appre- 
nant que les Vénitiens avaient fait une descente 
en Morée, il ordonna un massacre général des 
chrétiens dans tout l'empire. On eut beaucoup 



757 



IBRAHIM 



758 



de peine à lui faire rétracter cet ordre, qui con- 
cernait pJol de la moitié de ses sujets. Ibrahim 
ne ménageait pas davantage la vie , l'honneur et 
la fortune des musulmans. Il dilapidait les fi- 
nances et assignait à chacun* de ses favorites lés 
retenus d'une ou de plusieurs provinces. Sa ty- 
rannie occasionna plusieurs révoltes, et notam- 
ment celle de Wartlar-Ali* gouverneur de fciWas, 
à qui le sultan voulut faire enlever la fiancée 
d'Jpsir-Paeha. Wàrdar* Ali périt dans cette entre- 
prise ; mais les janissaires vengèrent sa mort et 
celle de tant d'autres Vleimés. Le sultan fût dé- 
posé le 1 8 redjeb lOôS ( S août 1648 ) , et étranglé 
dix jours après. Il etrt pour successeur son fils 
Mohammed IYi E. B. 

De A*mi*et f HMi *e t'BmiHrê Ottoman, brtd. Hdtert, 
t. IX, p. 3S«j*,*M*ti 

ibba Viftl-ftat , chef des mamelouks , né ëff 
Circassie* vers 1781» mort en 1817, à Dongolah 
en Nubie. Amené dans sori enfance comme esclave 
en Egypte, il fut enrôlé dans les mamelouks de 
Mohammed Abou+Dahab * qui plus tard l'affran- 
chit , lui donna le titre de bey» et le chargea de 
l'administration du Caire, en partant pour soti 
expédition de Syrie en 1776; A la mort de Mo- 
hammed , Ibrahim voulut s'emparer dn pouvoir 
wpréme ; Mourad- Bey {voy. ce nom ) y préten- 
tait aussi : ils partagèrent ensemble l'autorité, 
et Ibrahim, qui était le plus âgé , obtint le titre 
le cheyk-él-Ulad (chef du pays), ce qui lui 
permettait de résider ordinairement au Caire. 
\es deux beys eurent de fréquentes querelles; 
nais l'intérêt les rapprochait souvent; ils se 
léfendirent ensemble contre les beys Ismael et 
ïaçan, commirent de nombreuses exactions, 
ie révoltèrent contre la Porte, et résistèrent à 
'expédition entreprise contre eux par le oapitan- 
tacha Gasi-Haçari, en 1786 et 1787 : ils ne crai- 
firent pas de Vexer les négociants français éta* 
►lis en Egypte. « Au premier bruit de l'appdri* 
ion de l'armée française enÉgftrté, en 1798, dit 
Ludiflret, Ibrahim reprocha à Mourad d'avoir 
ro roqué cette guerre par. ses indignes procédés, 
t il le laissa s'occuper sënl des moyens de dé- 
aïs*. Préférant les voies pacifiques, il seconda 
•é. femme, qui, respectée au Caire pour ses terttië, 
t parée qu'elle était issue du législateur dés mo- 
ulmans , usait de son crédit pour sauver de la 
ireur populaire le* négociante français, dont elle 
'établit gardienne dans un palais ou elle les 
rait fait renfermer avec leurs épouses. Ibrahim, 
e concert avec le pacha titulaire d'Egypte, se 
isposait à envoyer un de ces négociants pour 
arleroenter aveo Bonaparte \ mais il le retint en 
^prenant l'issue de la bataille des Pyramides. 
andis que Mourad et Mohammed-Elfl-Bey, soti 
vori , qu'il avait rappelé dé la province du 
harkieh, Où il faisait la guerre aux Arabes , 
>utenaient avec un rare courage une lutte iné- 
tie et malheureuse contre les Français, Ibrahim, 
tmpé sur la rive gauche du Nil, incendiait la 
?i£îlJe des mamelouks, pour qu'elle ne tombât 



paâ>au pouvoir des vainqueurs, et se retira en- 
suite en Syrie avec ses troupes et ses effets les 
plus précieux , se bornant à soutenir des com- 
bats partiels et à fomenter l'insurrection.... Après 
la rupture du traité d'ÊI-Arisch pour l'évacua- 
tion de l'Egypte eh janvier 1800, Ibrahim, ren- 
forcé par un grand nombre de mamelouks qui 
avaient abandonné Mourad , se joignit à l'armée 
du grand-visir JOùssouf. Pendant la bataille 
d'fléliopotis, dont il n'attendit j)as l'issue, il alla 
surprendre Le Caire, qu'il fit insurger contre les 
Français ; Mais les cruautés exercées sur eux et 
sur leurs partisans furent l'ouvrage du féroce Nas- 
souf-Pacha. La résistance du château donna le 
temps à fcleber et â son armée victorieuse de 
rentrer au Caire... Ibrahim, reconduit avec ses 
troupes Jusqu'aux frontières cte Syrie , ne rentra 
étî Egypte qu'après l'assassinat de Kleber et le 
débarquement de la flotte anglo-tUrqùe. Les pro- 
positions pacifiques qu'il transmit de la part du 
grand- visir à Mourad, et que celui-ci lit présenter 
par Osman-Bey Bardissi â Menou, successeur 
de Kleber, ayant été rejetées par cet imprudent 
général, la bataillé d'Alexandrie décida du sort 
de l'Egypte. Ibrahim n'y assista pas; mais il se- 
conda par ses hostilités les opérations du grand- 
visir, du Capitan-pacha et des Anglais , et con- 
tribua aux succès qui amenèrent les capitulations 
dés divers corps de l'armée française. » Après 
l 'évacuation de rËgy pie par les troupes françaises, 
la Porte voulut disperser les mamelouks. Ibrahim 
fut arrêté au Caire avec quelques autres chefs, mais 
lé général anglais Èaird les fit relâcher. Ibrahim 
se retira â Djizeh, où campaient les mamelouks. 
Muharrimed-Khosrou-Pacha, à peine installé dans 
lé gouvernement de l'Egypte (lévrier 1802 ) , en- 
voya des forces contre les mamelouks réfugiés 
dans le Sàïd. * Attaqués par les Turcs et se • 
fiant péti âlrt Anglais , Ibrahim et Osman-Bey 
Bardissi, successeur de Mourad, malgré les 
avantagea qu'ils avaient obtenus, tournèrent 
leurs regards vers la Frarice, et envoyèrent à 
Livourné un agent avec une lettre pour Bona- 
parte, dont ils réclamaient le secours en échange 
de letir soumission, aux conditions qu'il lui plai- 
rait d'Imposer. L'arrivée à Paris d'un ambassa- 
deur ottoman rendit cette démarche inutile ; on 
craignit de mettre obstacle à la paix qui allait 
se conclure aVec la forte. » Après le départ de 
l'escadre anglaise venue de l'Inde, le pacha en- 
leva en personne tijizeh aux mamelouks. Ibrahim 
se retira dans le désert. Une révolution ramena 
les mamelouks dans la basse Egypte. Taher- 
Pacha, qui les avait combattus à la tète des Al- 
banais ou ArnaUtes,et qui commandait en second 
sotis Khosrou, se révolta contre ce pacha, le 
força de se retirer à Damiette, et s'empara du 
Caire. Ses extorsions et seseruautés l'ayant rendu 
odieux , il fut assassiné par les Osmanlis. Son 
neveu Méhémet-Ali (voy. ce nom) continua sa 
politique et resta (fabord uni aux mamelouks. 
Ibrahim reprit la police et Fadministratiott du 



759 



IBRAHIM 



760 



Caire. La désunion s'étant mise parmi les chefs < 
mamelouks, Méhémet-Ali fit attaquer Osman 
Bardissi et Ibrahim dans la ville du Caire , où ils 
s'étaient fait détester par leurs exactions. Ils 
curent beaucoup de peine à sortir de la ville , 
perdirent plusieurs de leurs hommes, et leurs 
maisons furent pillées. Méhémet-Ali se fit pro- 
clamer pacha. En 1805, il feignit de se rappro- 
cher des mamelouks, et en massacra un certain 
nombre qui s'étaient laissé attirer dans la ville, 
pendant qu'Ibrahim et son fils Marzouk-Bey 
taillaient en pièces 1,500 hommes que Méhémet- 
Ali avait envoyés contre eux. Retirés dans la 
haute Egypte, les beys s'emparèrent de Syout , 
entrèrent dans leFayoum et poussèrent en 1806 
leurs incursions jusqu'aux environs du Caire. 
Méhémet-Ali chercha à les gagner en leur offrant 
des apanages; mais ils (ne purent s'entendre. 
Leur armée se renforçait par la désertion d'une 
partie des troupes du vice-roi. Cependant les 
Anglais avaient obtenu du divan de Constanti- 
nople le rétablissement de l'autorité des beys ; le 
capitan-pacha arriva à Alexandrie le 1 er juillet 
1806; mais la jalousie des différents chefs em- 
pêcha l'élévation d'Elfi , que les Anglais proté- 
geaient particulièrement. L'envoyé de la Porte 
se décida à laisser le pouvoir à Méhémet-Ali. 
Chahin, successeur d'Osman-Bardissi et de Mo- 
hammed-Elfi, le lui disputa, mais Ibrahim se retira 
bientôt dans le Fayoum. Le vice-roi lui renvoya 
sa femme , un de ses fils et son petit-fils. Mar- 
zouk-,Bey, fils d'Ibrahim, se soumit en 1808 au 
pacha, qui avait cédé le Fayoum à Chahin. D'au- 
tres beys se rapprochèrent encore du pacha, qui 
leur imposait le séjour du Caire. Ibrahim refusa 
de faire sa paix. Méhémet-Ali voulut le contraindre, 
et envoya contre lui une flottille et une armée, 
qui furent battues dans la nuit du 13 au 14 juillet 
1810 par les mamelouks. Enfin, le 1 er mars 1811, 
Méhémet-Ali mit à exécution le projet qu'il mé- 
ditait depuis longtemps : il fit massacrer un 
millier de mamelouks avec plusieurs beys , tant 
au Caire que dans les provinces. Ibrahim, Osman 
Haçan et les autres beys qui échappèrent à cette 
boucherie abandonnèrent Djizeh et se retirèrent 
avec leurs troupes dans le Saïd. Ils y furent at- 
taqués en 1812 par les troupes du vice-roi ; plu- 
sieurs d'entre eux furent pris et décapités, et 
les autres se réfugièrent en Nubie , jusqu'à Don- 
golah dont ils soumirent les souverains. C'est 
là que moururent les deux chefs. Quatre ans 
après, une expédition, conduite en Nubie par Is- 
raaïl-Pacha, fils de Méhémet-Ali, acheva de dis- 
perser les mamelouks. Brave, religieux, juste et 
pacifique, sobre et prudent, Ibrahim était malheu- 
reusement timide dans le conseil, et ne sut ni ral- 
lier ni maintenir les autres ehefs, qui n'avaient ni 
sa droiture ni son expérience. Ses contemporains 
l'avaient surnommé El Kébir (le Grand). 

L. L— t. 

Audlffret, dans VBncyclop. des Gens du Monde, article 
Màmxxauks. 



Ibrahim-pacha, prince égyptien, né en 

1789 à Cavalla, petite ville de la Roumélie, 
mort au Caire le 9 novembre 1848. H passait 
généralement pour être le fils de Méhémet-Ali, et 
suivant M. Clot-Bey il était en effet le fils aîné 
du vice-roi d'Egypte; mais d'autres prétendent 
qu'il n'était que son fils adoptif : ceux-ci ne s'ac- 
cordent pas même sur l'époque de cette adop- 
tion ; les uns disent qu'elle eut lieu lorsque Ibra- 
him n'avait que trois ans ; selon les autres, Mé- 
hémet-Ali ne l'aurait aftpté qu'après la mort de 
Toussoun, son fils chéri, qui mourut en 1818. 
Ce qu'il y a de certain, c'est que Méhémet-Ali a 
toujours traité Ibrahim comme un fils. L'Arabie 
fut le théâtre des premiers exploits militaires 
d Ibrahim. Les Wahabites occupaient une grande 
partie de cette contrée et étaient maîtres des 
villes saintes. Après l'avènement de leur chef, 
Abd-Allah ben-Souhoud en 1814, la Porte or- 
donna au vice-roi d'Egypte de détruire ces héré- 
tiques. Méhémet-Ali s'empressa d'expédier une 
aimée dont il donna le commandement à son 
fils Toussoun. La campagne fut mal conduite. 
Méhémet alla lui-même se mettre à la tète de 
ses troupes et obtint quelques succès ; mais il 
fut contraint de revenir au Caire, et en son ab- 
sence Toussoun conclut la paix avec les Waha- 
bites. Méhémet refusa de ratifier ce traité , et 
donna la conduite de l'armée à Ibrahim-Pacha 
(1816). Celui-ci se rendit d'abord à Médine, où 
il fit avec éclat ses dévotions au tombeau du 
Prophète, y laissa de riches présents et répandit 
d'abondantes aumônes. Il commença ensuite les 
opérations militaires, et s'avança rapidement vers 
le Nedjed , province de l'Arabie centrale, où les 
Wahabites avaient été refoulés par Toussoun 
et Méhémet. A l'origine , Ibrahim essuya quel- 
ques revers ; il ne put s'emparer d'El-Bass, pre- 
mière place des Wahabites qu'il rencontra sur 
son passage. Après un siège inutile de quatre 
mois , il prit le parti de laisser cette ville derrière' 
lui et de pénétrer rapidement au cœur du pa\s. 
Cette manœuvre hardie fut couronnée de succès. 
Ibrahim enleva successivement plusieurs villes 
fortes aux rebelles et parvint jusque sous le> 
murs de Derrayeh, leur capitale. Le siège de 
cette ville, défendue par Abd-Allah, fut long et 
meurtrier. Un incendie qui éclata dans le camp 
égyptien mit Ibrahim dans la position la plu* 
critique en consumant ses provisions ; mais, sans 
attendre les renforts que lui envoyait Méhémet- 
Ali, il tenta un effort désespéré et se rendit maître 
de la place. Abd-Allah , fait prisonnier, fut envoyé 
au Caire et de là à Constantinople, où il eut la 
tête tranchée en décembre 1818. La prise de 
Derrayeh amena la soumission de tout le pa}>, 
qui fut saccagé et dévasté. Ibrahim, décoré par 
la Porte du titre de pacha des villes saintes, ra- 
mena son armée en Egypte, et fit une entrée 
triomphale au Caire le 11 décembre 1819. 

Après le retour d'Ibrahim, Méhémet-Ali vou- 
lut créer une armée régulière exercée à 1 V - 



761 



IBRAHIM 



762 



ne. Ibrahim seconda avec ardeur ce 
projet. Quelques officiers français, parmi les- 
quels se distinguait le colonel Sèves, depuis 
connu sous le nom de Soliman-Pacha, lui ensei- 
gnèrent la tactique européenne et le maniement 
d'armes. Ibrahim fit l'exercice comme un simple 
soldat, placé même d'après sa taille à la queue 
in peloton. Son exemple et ses efforts contri- 
buèrent puissamment à faire adopter aux Orien- 
taux une innovation si contraire à leurs idées 
et à leurs habitudes. Sur ces entrefaites, l'insur- 
rection des Grecs prit un caractère si alarmant 
que le sultan appela à son aide le pacha d'Egypte. 
Vléhémet-Ali envoya Ibrahim en Grèce, en 1824, 
ï la tète de forces imposantes. Ibrahim s'empara 
3'abord de l'île de Candie , et livra sur mer plu- 
sieurs combats à l'amiral grec Miaulis. En fé- 
vrier 1825, il débarqua à Modon à la tête de 
10,000 hommes. Il s'empara d'abord de Navarin, 
qu'il attaqua à la fois par terre et par mer, prit en- 
suite Maniati, Arcadia, Calamata, Cytries, Tripo- 
litza, et s'avança jusqu'aux portes de Nauplie, alors 
capitale de la Grèce. Repoussé par D. Ypsijanti, 
Ibrahim dut se replier surTripolitza. Enfin au mois 
de décembre , cédant aux instantes prières du sé- 
raskierReschid-Pacha, qui désespérait de s'em- 
parer seul de Missolonghi, il vint mettre le siège 
deyant cette ville. La chute héroïque de cette place 
fut plutôt une défaite qu'une victoire pour les as- 
siégeants. Cependant Ibrahim continua à tenir la 
campagne pendant les années 1826 et 1827 sans 
remporter des avantages bien marqués, mais 
aussi sans perdre de terrain. La bataille de Na- 
varin et l'expédition française en Grèce le for- 
cèrent à quitter la Morée. Ibrahim n'était pas du 
reste à Navarin lorsque les alliés détruisirent sa 
flotte : il y arriva quatre jours après. Bloqué dans 
le Péloponnèse, il dut se procurer des vivres de 
gré ou de force dans l'intérieur des terres, et à 
toute demande d'évacuation que lui faisaient les 
commissaires des puissance alliées, il répondait 
qu'il ne céderait qu'aux ordres de la Porte ou 
du vice^roi, son père. Il se trouvait encore à la 
Jête de 20,000 hommes et pouvait prolonger la 
lotte lorsqu'il reçut de Méhémet-Ali l'autorisation 
de traiter pour l'évacuation de la Morée. Il con- 
clut alors avec les amiraux de Rigny et Hey- 
«en, le commodore anglais Campbell et le ma- 
réchal Maison, une capitulation honorable, en 
vertu de laquelle il se mit à évacuer la Grèce le 
16 septembre 1828. Il partit avec le dernier con- 
voi » et arriva devant le Caire le 10 octobre. Sa 
campagne de Morée lui valut de la part de l'Eu- 
*>pe philhellène la qualification de tigre altéré 
«e sang. Plus tard , par une réaction dont l'his- 
toire contemporaine offre plus d'un exemple, 
quelques écrivains, justement épris d'ailleurs des 
grandes qualités d'Ibrahim, ont cherché à réha- 
to'rter sa conduite en Grèce et à le représenter 
^ûme un vainqueur clément et généreux. Le 
fait est qu'il fit la guerre contre tea giaourô en 
^i musulman, sans ménager le faible, sans 



épargner le vaincu; car à cette époque, ses pré- 
jugés contre les chrétiens étaient encore dans 
toute leur force. 

Ce qu'Ibrahim avait vu des troupes françaises 
en Morée avait augmenté son admiration pour 
la tactique européenne. Frappé surtout de -la 
supériorité de la cavalerie régulière, il s'occupa, 
aussitôt après son retour en Egypte d'organiser 
des régiments de cavalerie des différentes armes 
usitées en Europe. Bientôt Méhémet-Ali posséda 
une armée disciplinée, pendant que les désastres 
de la flotte égyptienne à Navarin étaient réparés 
par les soins d'un ingénieur français, M. de Cé- 
risy. A la même époque une tentative d'insurrec- 
tion eut lieu en Arabie ; Ahmed-Pacha, un des 
généraux du vice-roi, la réprima vivement. Quoi- 
que Ibrahim n'eût pris aucune part à cette 
guerre , ce fut à cette occasion que le sultan 
Mahmoud lui décerna le titre d'émir de La Mec- 
que, peut-être dans l'espérance de jeter la dé- 
sunion entre lui et Méhémet ; mais Ibrahim, quoi- 
que élevé ainsi à une dignité presque égale à 
celle de son père, n'en resta pas moins on fils 
soumis et respectueux. Depuis longtemps Mé- 
hémet-Ali convoitait la Syrie. Un différend qu'il 
eut avec Abdallah, pacha de Saint-Jean-d'Acre, à 
l'occasion de 6,000 fellahs qui avaient quitté l'E- 
gypte et qu'Abdallah refusait de rendre, fut pour 
le vice-roi un prétexte d'envahir ce pachalik. 
Ibrahim reçut la mission de s'emparer de 
Saint-Jean-d'Acre. Au moment où il allait se 
mettre, en mouvement, le choléra éclata en 
Egypte et fit d'horribles ravages dans son ar- 
mée ; cinq mille de ses soldats périrent du fléau. 
Les préparatifs de l'expédition furent suspendus, 
et l'armée ne put partir que le 2 novembre 1831 ; 
elle s'empara aisément des villes de Gaza, Jaffa 
et Kaïffa. Ibrahim se rendit en Syrie par mer et 
vint prendre, à Kaïffa , le commandement des 
troupes. Le 26 novembre, il était en vue d'Acre, 
où Abdallah avait concentré toutes ses forces. 
Attaqués par terre et par mer avec la plus 
grande vigueur, les 3,000 défenseurs de cette 
ville résistèrent avec un courage héroïque aux 
efforts de l'armée égyptienne. La longueur du 
siège et les rigueurs de l'hiver jetèrent le dé- 
couragement dans l'année d'Ibrahim, qui fit 
lui-même des prodiges de valeur personnelle 
pour ranimer l'ardeur de ses troupes. Au mo- 
ment de tenter un assaut décisif, il apprend que 
les pachas d'Alep, de Kaïssarieh et de Maaden 
marchent au secours d'Abdallah. Il change à 
l'instant le siège en blocus, et part avec ses meil- 
leures troupes à la rencontre de ces nouveaux 
ennemis, qu'il défait complètement non loin de 
Tripoli. Cette victoire retrempe le courage des 
Égyptiens ; Ibrahim les ramène sous les murs 
d'Acre, et reprend avec une nouvelle ardeur les 
opérations du siège, habilement régularisées par 
un officier du génie, M. Rozet. Le 27 mai 1832, 
le signal de l'attaque est enfin donné : les Égyp- 
tiens montent à l'assaut au son de bruyantes 



763 



IBRAHIM 



764 



fanfare*. La brèche est attaquée et défendue 
avec un égal acharnement ; Ibrahim voit la vic- 
toire indécise, et, payant de aa personne, s'é- 
lance lui-même a la téta de aet soldats, qui, 
électrisés par se* exemple, aqrmontent tous les 
obstacles et emportent le* derniers retranche* 
ments. Le siège avait duré m mais. Abdallah» 
fait prisonnier, fut envoyé en ftgypte, où Blé* 
hémet-Ali lui fit bon accueil et le complimenta 
même, dit-on, sur sa belle défense. Le suent* 
d'Ibrahim donna la plue haute idée de les Ut 
lents militaires, et amena la soumission de Da, 
mas, la tille la plus importent* de l'intérieur des 
terres. 

Cependant la Porto, voyait dans l'oceupetien 
de la Syrie un acte flagrant de rébellion de le 
part du vice-roi, avait prononcé, le 23 avril, se 
déchéance et celle de' son fils* Une armée nom» 
hreuse et disciplinée aussi a l'européenne fut 
envoyée à la rencontre d'Jprahimi Husséin-Pa? 
(ha, ancien aga des janissaires, la commandait. 
Mais les intrigues du vieux séreskier Khosron , 
qui voyait d'un œil d'envie la faveur que le sul- 
tan accordait à Hussein , ne réussirent que trop 
bien à contrarier tous les plana de ce général et 
à lui faire perdre la confiance des soldats. Met 
hémet-Pacha, qui commandait sous lui les trou- 
pes régulières , se crut ainsi en droit de déso- 
béir à son chef, et, contre les ordres positifs de 
Hussein , marcha sur Homs à la rencontre d'I- 
brahim. C'était la première fois que deux ar* 
mées orientales organisées l'une et l'autre I 
l'européenne se trouvaient en présence ** la vie? 
toire fut longuement et bravement disputée j 
une charge à la baïonnette, exécutée avec impér 
tuosité par l'infanterie égyptienne, décida du 
sort de le bataille. Lee Turcs laissèrent sur le 
terrain 2,000 morts, 3,000 prisonniers, leurs 
tentes et tout leur bagage. La soumission d'A- 
lep et celle de presque toute la Êyne furent les 
fruits du combat de Homs ( Emesa ), qui eut 
lieu le 19 juillet 1832, Après avoir laissé garni- 
son à Alep, le généralissime égyptien refoula les 
Turcs jusqu'aux monts Taurus. Husséin-Pacha, 
à qui la défaite de Homs avait enlevé la meil* 
leure partie de ses troupes, essaya en vain d'ar- 
rêter les Égyptiens aux défilée de Beyian-Bo- 
ghasi (Portes Syriennes), les retranchements 
furent encore enlevés à la baïonnette par l'infan- 
terie égyptienne, habilement secondée par l'ar- 
tillerie et la cavalerie, qui poursuivit les fuyards, 
et fit 2,000 priaapniers. Maître des défilés du 
Taurus, Ibrahim s'avauea rapidement dans l'A* 
aie Mineure. Un autre général turc, le grand? 
visir ftesehid~Paoha, reçut le mission d'arrêter 
ta marche du conquérant victorieux, qui seul* 
blait déjà menacer ConstanthMpie. Quoiqu'une 
armée formidable , bien fournie de vivres et de 
munitions, et un grand matériel d'artillerie 
fussent mis à la disposition de Resehid, le vieux 
Khosrou , jaloux de voir encore le sultan confier 
à un autre que lui le commandement des ar- 



mées, sut de nouveau! par de sourdes menées 
paralyser les efforts du grand-viair. Forcé d'o 
béir à Tordre formel qu'il reçut du divan, et 
quoique convaincu lui-même du désavantage de 
sa position, Reechidjivra bataille aux Égyptiens 
à Konieh, le «0 décembre 1832, et, dans cette 
journée, Ibrahim défit si complètement l'armée 
turque qu'il mit en cause l'existence même 
de l'Empire Ottoman, Il eût été facile alors 
au fila de Méharnet-Ali de marefoer sur la capi- 
tale de l'empire i mais, soumis aux volontés 
de son père, il a'errftta. Lee puissances de 
l'Europe intervinrent i «t le traité de Kutahieh, 
conclu le 14 mal 1833, sauva l'empire Ottoman 
de sa ruine, qui semblait imminente. 

Par ee traité la Forte consentait a aban- 
donner an vice-roi d'Egypte la Syrie, et cédait 
fr titre de fief le cercle d'Adana à Ibrahim per- 
sonnellement, Gouverneur de la. Syrie en nom 
de son père, il organise ce pays avec habileté, 
tout en lui faisant sentir le poids, d'une autorité 
ferme jusqu'à l'oppression. De fréquentes ré- 
voltes éclatèrent dans les. montagnes du Liban 
et envahirent parfois même le littoral. Ibrahim, 
puissamment aidé par le vieux émir Béchir, 
prince des Druses, parvint fe soumettre les re- 
belles et à les contraindre de payer les contri- 
butions et de fournir leur contingent d'hommes 
au* armées du vice-roi. L'msurrecfonde 1*3*, 
plus formidable que les, précédentes, faillit déjà 
soustraire laSyriefr la. dorowMiop égyptienne. Les 
Druses et les Naplousains, excités à> révolte par 
la Porte, se soulevèrent en ruasse et bravèrent 
longtemps le* armes d'Ibrahim. « fl tut obligé 
cette fois, dit M, UW* de recourir à une ex- 
trême rigueur. Up grand nombre de rebelles 
furent mis à mort» plusieurs villages furent in- 
cendiés, et la population entière soumise à un 
énorme irapo* de guerre. » fce sultan essayas* 
eore une fois en 1839 de ramener à. l'obéissance 
le redoutable Méhémet-Ali. Pans ce but le divan 
ordonna au aéfgsJiier HafU-Pacfoa de franchir 
l'Euphrate, et Mébémet vjt dans cette marche 
une infraction au traité de Kutabieh. En consé- 
quence, Ibrahim reçut l'ordre de iuarcheroantre 
les Turcs* Les deu* armées en vinrent au 
mains à Néiib, le 24 juin 1*39. Grâce aux ha- 
biles manœuvres d'Ibrahim et de poiranan (Sel- 
ves), l'armée turque , malgré sa défense opi- 
niâtre, fut complètement mise en déroute. Va 
immense butin resta eu pouvoir du vajuquesr. 
Cependant I|irahim.< obéissant aveuglément, 
selon sa coutume, au* ordres de sop père qui 
lui forent apportés « quelques jours après la 
bataille, par le capitaine Caillé, aide de canna 4a 
maréchal 0uult (alors président dp conseil des 
ministres) envoyé en ÉfifPte ave© une nussioa 
partieol^re, s'arrêta, enmme à, Konieh, an stia 
de la victoire. 

Les grandes puissances de l'Europe se mê- 
lèrent aussitôt du différend. Toutes manife* 
tèrent le désir de maintenir l'intégrité de l'Em* 



76* IBRAHIM 

pire Ottoman. Mais on était loin de s'entendre 
sur les moyens, pendant qu'on discutait en Eu- 
rope, une insurrection éclata dans le Liban. Enfin 
le 16 juillet 1840, contre l'avis et sans la parti- 
cipation de la France, un traité fut conclu à Lo&* 
dres entre l'Angleterre, l'Autriche, la Prusse et 
ja Russie, pour foncer Méhémet-Ali à accepter 
les conditions que lui faisait la Porte de l'hé- 
rédité de l'Egypte, avec le commandement de la 
forteresse de Saint- Jean d'Acre sa vie durant, 
sous le titre de pacha d'Acre, et l'administration 
de la partie méridionale de la Syrie, à la condi- 
tion d'accepter ces offres dans les dix jours de 
la notification et de quitter aussitôt l'Arabie, les 
villes saintes, 111e de Candie, le district d'A* 
dana et toutes les parties de l'empire non corn* 
prises dans le pachalik d'Aere. En cas de refus, 
les flottes anglaise et autrichienne devaient d'à* 
bord aider les populations qui désiraient rem 
trer sous la puissance du sultan. Les Anglais 
livrèrent des armes aux insurgés. Lelt sep- 
tembre, après neuf jours de bombardement, 
Beyrouth fut évacué par les Égyptiens. L'in* 
surrection s'était étendue. Bidon ne résista pas, 
et Saint-Jean-d'Acre ne put tenir plus de trois 
heures contre le feu de l'escadre de siège. Bien- 
tôt les Égyptiens furent chassés des positions 
qu'ils occupaient sur la cote. L'émir Béchir avait 
abandonné la cause du vice-roi et s'était rendu 
aux alliés. Ibrahim s'était retiré avec son armée 
sur Damas , ou il ne pouvait guère tenir. Le Com- 
modore Napter s'apprêtait à commencer le siège 
d'Alexandrie quand le vice-roi Be décida à ac- 
cepter, le 27 novembre, l'ultimatum qu'on lui 
présentait et à signer une convention provisoire 
par laquelle il s'engageait à évacuer la Syrie et 
à restituer la flotte ottomane que lui avait livrée 
le capitan-paeha au commencement des hosti- 
lités , dès que la résolution de la Porte de le main- 
tenir dans le gouvernement de l'Egypte lui serait 
notifiée sous la garantie des grandes puissances* 
Tout cela ayant été accordé, Ibrahim-PacHa ac« 
complit sa retraite vers l'Egypte. H opéra ce mou- 
vement avec des difficultés et des pertes incalcu- 
lables, et en marchant sur trois colonnes à travers 
le désert. Depuis cette époque, Ibrahim, qui par 
suite des conventions faites entre son père et la 
Porte était désigné pour son successeur, sem- 
bla se retirer des affaires publiques et s'occupa 
surtout d'encourager l'agriculture dans ses do- 
maines. H possédait dans la plaine d'Héliopolis de 
grandes propriétés, oh l'on vit les plus belles plan- 
tations de l'Egypte. Il les fit couvrir de cotons 
niers et d'oliviers. La culture de ces derniers 
avait été abandonnée dans ce pays. Ibrahim en 
fit planter à lui seul plus de 80,000, rangés symé- 
triquement; dans les intervalles, il fit semer de 
l'orge, des fèves et du blé. Ce ne fut qu'en 1844, 
à l'occasion de la résolution aussitôt abandonnée 
que prise par Méhémet-Ali de quitter le pouvoir 
et daller vivre à La Mecque, qcton vit Ibrahim 
reparaître sur la scène potilique. Mais déjà ilres- 



— IBYCUS 766 

sentait les premières atteintes du mal auquel j| 
devait succomber. Les médecins lui conseillèrent 
un voyage dans le midi de l'Europe. En 1845 
Ibrahim arriva en Toscane, od il prit les bains 
de San Giuliano, et parut à Florence, accompagné 
du docteur Lallemand , qui lui témoignait une 
grande affection et lui conseilla les eaux du Vernet 
dans les Pyrénées. Ibrahim se rendit d'abord 
Gènes, puis à Toulon , au Vernet, à Toulouse , ^ 
Bordeaux, et enfin à Paris. Partout il fut accueilli 
aveoraveur. Logea l'Elysée Bourfrm» il passa un 
mois en fêtes, bals, festins et revues. H visifa 
ensuite l'Angleterre , et revint à Alexandrie au 
mois d'août 1846, après avoir relâché ? Cadix, 
Lisbonne, Gibraltar et Malte. Son séjour en, 
Europe et la vue de la civilisation occidentale 
avaient encore agrandi ses idées politiques, ainsi 
qu'il le prouva à son retour par de certaines me? 
sures de tolérance. Méhémet-Ali, accablé de vieil- 
lesse, dut lui laisser prendre plus de pouvoir; 
mais son mal s'aggravait. Atteint d'qpe dyssen- 
terie violente, il quitta Le Caire en 1847, pour re- 
venir à Alexandrie, où il sentit du mieux. On 
lui conseilla encore de changer de climat. Il 
parut à Malte, passa l'hiver en Italie et retourna 
en Egypte. Les facultés de Méhéinet-Ali bais? 
saient sensiblement. Au mois de juillet 1848, 
Ibrahim alla à. Gonatantinople, pu il futcpnprmé 
dans la dignité de vice-roi d'Egypte ; mais il mou- 
rut peu de temps après son, retour et quelques 
mois avant Méhémet-Ali- 

M. Clot-Bey a fait d'Ibrahim le portrait sui- 
vant i « Il est d'une taille peu élevée (environ cinq 
pieds deux pouces) ; il est fbjrtementconstitué ; les 
fatigues de la guerre ont finit blanchir de bonne 
heure ses cheveux et sa barbe, qui étaient aupa- 
ravant d'un blond ardent. Sa figure est allopgée, 
son nei long et effilé ; il a les yeux gris et le visage 
gravé de la petite vérole. Son tempérament est 
sanguin-bilieux \ il est naturellement sérieux, 
quoiqu'il se livre parfois fr l'hilarité. Sa voix 
est forte. 11 n'a pas l'amabilité de manières qui 
distingue son père ; son abord , sans être dur 
ni désagréable, intimide, v Un peu gros de corps, 
sa physionomie était noble et imposante, spu œil 
était vif et pénétrant ; son regard fixe, hardi et 
digne. Il s'hahillait simplement et portait ordi- 
nairement le fès, une veste égyptienne brune, et 
s'entourait le corps d'un cachemire. Son courage 
était à toute épreuve, et M. Label le comparait 
à un sabre vivant. 

S— F— OetL. *>rrT. 

Clot-Bey, aperçu généra s*r l' Egypte. — l^bat, UÉ- 
%Wte ancienne fit moderne. — Cadalvène et E. Barrault, 
Histoire de la Guerre de Jffehémeô-Jti contre ta 
Porte Ottomane en Syrie et en Asie Mineure ( latt- 
is**), et Doux Années de V Histoire d'Orient < im-nw^ 
— SchCBRefeldt dans \'Encyc\. des Qens du monde. — 
Dictionnaire de la Conversation. — Rabbe, V»eHh 
de Bolsjolln et Sainte-Preuve, fHogr. tente, et portât. 



ibycus ('16fao< ), poète lyrique grec, le cin- 
quième sur lajiste ou canon des Alexandrins, n^ 
à Rhegium, à l'extrémité méridionale de l'Italie, 



767 



IBYCUS - ICARD 



76S 



vivait vers le milieu du sixième siècle avant 
J.-C. La population de Rhegium était un mélange 
d'Ioniens de Chalcis et deDoriens du Péloponnèse 
ou Messéniens, qui avaient quitté leur patrie à la 
suite delà seconde guerre de Messénie. Ibycus, 
qui appartenait sans doute à la race dorienne, a 
été appelé quelquefois Messénien. On croit que son 
père se nommait Phytius, bien que certains auteurs 
l'appellent Polyzelus, Cerdas, Eclidas. Comme 
plusieurs autres poète» lyriques, Ibycus eut 
une vie errante. Il en passa une partie à la cour 
de Polycrate, tyran de Samos, vers la soixantième 
olympiade, 540 avant J.-C. Suidas le place par 
erreur vingt ans plus tôt, du temps de Crésus et 
sons le père du tyran. On n'a pas d'autres détails 
de sa vie , excepté la tragique aventure qui la 
termina. Un jour qu'il traversait un endroit dé- 
sert près de Corinthe, il fut assailli par des vo- 
leurs qui le blessèrent mortellement. Avant 
d'expirer, il prit à témoin du meurtre une troupe 
de grues qui vinrent à passer au-dessus de sa 
tête, et les adjura de venger sa mort. Peu de temps 
après, comme le peuple de Corinthe était as- 
semblé au théâtre, des grues planèrent sur les 
spectateurs, et un des assassins, qui se trouvait 
présent, s'écria : « Voilà les vengeurs d'Ibycus. » 
Cette parole amena la découverte des meur- 
triers, qui furent punis de mort : de là le pro- 
verbe grec « les grues d'Ibycus. » ( al *Iêuxou 
■yépavoi). Schneidewin a contesté la réalité de 
ce fait, où l'on peut sans doute ne voir qu'une 
belle légende ; mais son objection, fondée sur 
l'existence du tombeau du poète à Rhegium, ne 
prouve rien, car on sait que les Grecs élevaient 
des tombeaux ou cénotaphes à ceux de leurs il- 
lustres concitoyens dont ils ne possédaient pas 
la dépouille mortelle. 

Il ne reste d'Ibycus qu'un très-petit nombre 
de fragments. Eu les combinant avec les divers 
passages des anciens où il est question de lui, 
on peut à peine se faire une idée de son génie et 
de sa manière. Son langage était l'ionien épique, 
avec des locutions particulières au dialecte de 
Rhegium. Les critiques anciens le rapprochent 
de Stésichore. Comme ce poète, il transporta 
dans l'ode les sujets de l'épopée, et chanta la 
guerre de Troie, l'expédition des Argonautes. Il 
dut surtout sa célébrité à des compositions eroti- 
ques aussi remarquables par l'impureté que par le 
talent de Fauteur. Cicéron a dit de lui: « Maxime 
veroomnium flagrasse amore puerorum Rheginum 
Ibycum apparet ex scriptis ». Cette accusation 
ne paraît pas invraisemblable lorsqu'on songe aux 
mœurs voluptueuses de la cour de Polycrate où 
Ibycus avait longtemps vécu. Cependant comme 
les témoignages contre lui viennent d'écrivains 
qui vivaient plusieurs sièclesaprès sa mort, on peut 
supposer que ces écrivains ont mal interprété ses 
poésies et oublié dans quelles circonstances elles 
avaient été composées. Ses odes ne ressemblent 
pointa des poésies intimes ; la longueur des stro- 
phes, la structure artificielle des vers prouvent 



qu'elles étaient chantées par des chœurs , dans cer- 
taines solennités. Un anniversaire de naissance, 
ou toute autre fête de famille, une victoire au 
gymnase étaient des occasions pour le poëte'de 
venir avec un chœur dans la cour de la maison du 
jeune homme objet de ses chants, et de le célé- 
brer avec toute la pompe lyrique. Sur beaucoup 
de vases peints, trouvés dans la grande Grèce, 
patrie d'Ibycus, on voit représentées des scènes 
de gymnase avec cette inscription : « Il est beau 
l'enfant » ( KaXo; à naïç ). Nous croyons avec 
Ot. Muller que les odes erotiques d'Ibycus cé- 
lébraient les faits représentés sur les vases 
peints. Il est vrai qu'à travers l'appareil lyrique, 
les sentiments intimes du poète pouvaient se 
faire jour par la bouche du chœur. Les plus beaux 
vers qui nous restent de lui appartiennent évi- 
demment à l'inspiration personnelle. On en ju- 
gera par les deux fragments suivants : « Au 
printemps les cognassiers fleurissent arrosés par 
les sources courantes dans le jardin intact des 
vierges ; les grappes croissent sous le verdoyant 
ombrage des tendrons de la vigne; mais pour 
moi l'amour ne s'apaise en aucune saison : 
comme le vent de Thrace brûlant sous les éclairs, 
l'amour s'élançant de Cypris avec ses ardeurs 
insensées, sombre, indomptable, possède vio- 
lemment mon âme dès l'enfance. » — « De nouveau 
l'amour, sous ses noirs sourcils, me regardant de 
ses yeux qui fendent l'âme, m'attire par toutes 
sortes de doux appels, dans les filets sans fin 
de Cypris. Je tremble à son approche, comme 
le cheval qui a remporté le prix dans les cour- 
ses, tremble lorsque près de la vieillesse il loi 
faut reprendre le harnais et entrer en lice avec 
les rapides attelages. » — Dans ses odes erotiques 
Ibycus introduisit les légendes qui se rappor- 
taient à ce genre d'inspiration; ainsi, dans une 
ode à Gorgias, il raconta l'enlèvement de Gany- 
mède et de Tithon. Les Fragments d'Ibycus 
ont été recueillis par Schneidewin : Ibyci Car- 
minum Reliquise, avec une préface de Ot Mill- 
ier; Gœttingue, 1833, in-8°. On les trouve aussi 
dans le Delectus Poes. Eleg. de Schneidewin, 
et dans les Fragm. Poet. lyr. Grsec. de Bergk. 

L. J. 

Soldas, Lex. — Anttpater de Sldon, Epigr. 73, dans 
les Anal, de Brunck, vol. II, p. Vt. — Plutarque, de Car- 
ral. t p, 610.— Cicéron, Tu seul, VI, 83. — Dranck.'^na/., 
vol. III, p. 16S. — BOttiger, Amatthea, I, p. ». — Her- 
mann, dans les Jnn. de Jabn, IX, 871. — Welcler, Bkein. 
Mus., 1882, vol. III, p. 401 ; Kleine Schri/ten, vol. I, 
p. 100. - Ot. MttlIeT-, Dorier, vol. II, p. 850. — Hist. of 
Lit. of ancient Greeee, ch. XIV, 

icard (Charles), ministre protestant français, 
né à Saint-Hippolyte (Languedoc) en février 1636, 
et mort à Brème, le 9 juin 17 1 5, des suites de l'opé- 
ration de la taille. Après avoir fait ses études clas- 
siques à Anduze, Orange et Nîmes, où il suivit 
quelques cours de théologie, il alla a Genève en 
1655, et à la fin de ses études théologiques, il 
se rendit à Pari3 (1659). Admis au ministère 
évangélique par le synode provincial d'Ay, il 
(ht nommé pasteur à LaNorville. En Î66S, dans 



76fr 



ICABD — ICELUS 



770 



un voyage qu'il fit pour visiter sa famille, il prê- 
cha à Nîmes avec succès. On lai offrit une place 
de pasteur dans cette ville ; il l'accepta. Cepen- 
dant les vexations de tous genres dont les pro- 
testants étaient les victimes redoublaient à me- 
sure que Ton approchait de l'époque qui devait 
être témoin de la révocation de l'édit de Nantes. 
Le besoin d'une commune défense fit créer, 
sur la proposition de Claude Brousson, un co- 
mité directeur des affaires protestantes. Icard, 
qui s'était fait connaître par sa fermeté, en fut 
nommé membre pour le synode du bas Langue- 
doc, réuni àUzès en 1682. Sur ces entrefaites, 
quelques populations du Vivarais et du bas Lan- 
guedoc, exaspérées par la persécution', pri- 
rent les armes ; l'insurrection fut étouffée dans 
le sang, et les ministres qui faisaient: partie du 
comité directeur furent regardés comme les 
auteurs du soulèvement et poursuivis avec la der- 
nière rigueur. Icard réussit à se sauver à Ge- 
nève. Ne s'y croyant pas en sûreté, il se retira à 
Neufchâtel. En se rendant dans cette ville, il 
apprit, à Yverdun, qu'il avait été jugé par 
contumace et condamné, le 26 juin 1682, à périr 
sur la roue. Nommé pasteur à Neufchâtel, il y 
resta jusqu'en 1688. Il fut alors appelé à Brème, 
où il desservit l'église française jusqu'à la fin de 
ses jours. On a de lui deux Sermons, dont un lui 
attira un procès devant la chambre de l'édrf de 
Castres ; — un Avis salutaire aux Églises ré- 
formées de France; Amsterd., 1685, in- 12, pour 
exhorter ses coreligionnaires à ne pas céder à la 
persécution ; — une édition des Institutions de 
Calvin, dont il rajeunit le style ( les deux pre- 
miers livres, Brème, 1696-97, in-4°, et le tout, 
Brème, 17 13, in-fol. ) ;— une édition des Entre- 
tiens d'un Père et de son Fils sur le Change- 
ment de Religion, parJosué de La Place, dont 
il eut le tort de retoucher le style, qui n'avait rien 
de suranné. Michel Nicolas. 

Détail abrégé delà Fie de Ch. Icard, par Hotsal (son 
gendre ); dam l'Histoire critiqué de la République des 
Lettres} 1717, tom. XIV, p. 183-301. - MM. Haag. La France 
protest, 

* icaeius, poète et administrateur romain, 
vivait vers la fin du quatrième siècle de l'ère 
chrétienne. Il était fils du notaire Théodore, qui 
fut mis à mort avee plusieurs autres personnes 
à Antioche, en 371, sous le règne de Valens, pour 
avoir cherché à découvrir par des arts magiques 
quel devait être le successeur de l'empereur. H 
se distingua par ses talents littéraires. Tillemont 
voudrait l'identifier avec un rhéteur du même 
nom mentionné dans les Confessions de saint 
Augustin; mais cette conjecture ne parait pas 
fondée. 11 écrivit un poème en l'honneur de 
Théodose. Cette composition, dont il ne reste 
rien, lui valut la dignité de comte d'Orient. H 
entra en charge en 384. Antioehe souffrait alors 
de la famine ; Icarius crut remédier au mal en 
taxant le prix du pain. Cette mesure, qui obligea 
les boulangers à s'enfuir, ne fit qu'aggraver le 
fléau. Elle fut rapportée, sur les instances de 

WODV. BIOGR. Gémfe. — T. 1XV. 



Libanius , que le comte traitait avec un respect 
filial ; mais Icarius revint bientôt à ses procédés 
arbitraires, et donna carrière à son caractère 
soupçonneux. On croit qu'il était païen. Libanius 
lui adressa trois harangues , dont deux invec- 
tives. La seconde invective, omise dans l'édition 
des ouvrages de Libanius par Morel , a été insé- 
rée dans l'édition de Reiske. Ces trois harangues 
et un discours de Libanius Sur sa vie ( Ilepl Tïfc 
loturoû ttixTK )• Y. 

Tillemont, Histoire des Empereurs, vol. V, p. 1108, *17. 

* iccius, philosophe romain, amidUorace (1), 
vivait vers 30 avant J.-C. Horace lui adressa 
une ode et une épttre. L'ode fut écrite en 25 
avant J.-C., lorsque lcoius se préparait à accom- 
pagner JEWxa Gallus dans l'expédition d'Arabie. 
Le poète dissuade son ami de quitter, pour des 
profits douteux et des périls certains, le repos 
et l'étude de la philosophie. On ne sait si cette 
ode produisit de l'effet sur Iccius, mais dix ans 
plus tard on le retrouve trésorier de Vipsanius 
Agrippa en Sicile , toujours étudiant la philoso- 
phie, et n'ayant pas encore appris la modération, 
puisque son ami Horace est forcé de lui rappeler 
que le bonheur n'est pas dans les richesses, et 
de lui dire, avec un bon sens un peu prosaïque : 

SI rentri bene, si lateri est pedlbusque tais, nll 
Dlvltiae poterant regales addere majos. 

Jaoobs a défendu Iccius contre l'imputation d'a- 
varice. Y. 

Horace, Carm. $ I, *>; Epit. y I, lt. — Jacobs, dans le 
Rhein, Mus., II, 1; Ferm. Schr. t V, p. 1-30. 

* iccus ("Ixxoç), athlète et professeur de gym- 
nastique de Tarente, vivait vers la 77 e olymp., 
470 avant J.-C. Pausanias te regarde comme le 
meilleur gymnaste de son temps, et Platon le 
mentionne aussi avec grand éloge. Il regardait la 
tempérance comme le fruit des exercices gym- 
nastiques. Jamblique l'appelle un philosophe py- 
thagoricien, et, suivant Themistius, Platon le 
comptait au nombre des sophistes. Y. 

Pausanias, VI, 10. — Platon, De Letfb., VIII, p. 840; 
Protag., p. 316. — Laden , Quomodo hist. sit conscrit?., 
31. - Élleo, Far. Hi$t. y XI, 3. - Jamblique, Vita 
Pythag., 3fi. - Themistius, Oral, XXIIÏ, p. 360. édtt. 
Dlndorf. 

* icelus maecianus, affranchi de Galba, 
mis à mort en 68 après J.-C. Arrêté par l'ordre 
de Néron, à la première nouvelle de la défection 
de Galba, il fut relâché lorsque la révolte eut ga- 
gné Rome. Il rendit le corps de Néron à ses af- 
franchis, et se hâta d'aller annoncer à Galba, alors 
à Clunia dans l'Espagne Tarragonaise, que l'ar- 
mée et le sénat venaient de lui décerner l'em- 
pire. Le nouvel empereur le récompensa de son 
zèle en lui donnant le titre de chevalier et le nom 
de Marcianvs. Icelus fut un des plus puissants et 

(i> On connaît encore deux reclus. — ledus, noble de 
Reims dans la Gaule Belgique. Il fut mis à la tête d'une 
députatlon de ses concitoyens qui, en 89, allèrent placer 
leur État sous la protection de César et lui demandèrent 
son assistance contre les autres tribus belglqnes. ( cé- 
sar. Bel. Gai., II, S, 6 ). — Iccius nommé préteur de Si- 
cile par Mare-Antoine, en novembre 44. 



771 



1CELUS — ICILIUS 



m 



des plus rapaces parmi les affranchis et les fa- 
voris de Galba. Dans le dissentiment qui parta- 
geait les conseillers de l'empereur, il se rangea 
du coté du préfet du prétoire, Cornélius Laco, 
et s'opposa à l'élection d'Otbon. Après la mort 
de Galba, tcelus fut exécuté comme un affranchi, 
et sans aucun égard pour sa nouvelle dignité 

Y. 



Tacite, HUt., 1, 1», 88, 87, 48 ; II, 9*. - Suétone, Néron, 
49 ; Galba, 14,lt. — Plutarque, Galb., 7. — tHon Coté**, 
LX1V, I. 

icBfift ( Pierre) , médecin et helléniste fran- 
çais , né à Montpellier, le il janvier l«5«, mort 
dans la même ville, le 22 mai 1713. San pè» 
était procureur de la tfeamtoe des compte*. 
Icher fit ses études dans sa ville natale; et comme 
sa famille était protestante , il ftrt envoyé an* 
prendre les sciences physiques à Genève, n se 
décida à suivre là carrière de ta médecine, et se 
fit recevoir docteur en 1680. Il Tevint dans toa 
patrie, embrassa le cathoUcfsme, et avait déjà 
une belle clientèle lorsqu'une affection ue tv tw» 
le força de renoncer à la pratique. K là formatiez 
de la Société royale des Sciences de Montpcftie* v 
Icher fut appelé à en faire partie comme physi- 
cien, et fit de nombreux Rapports à cette société 
savante, n a laissé d'Importantes Remarques sur 
Aristophane et sur le dialecte attiqoe. L— z— e. 

Ganteras, Éloge de P. Ictusr* daûs les Élopes dm dca- 
démiciens de Montpellier, p. S. — R, Desgenettes, dans 
- la Biographie médicale. 

ichon {Pierre-Jjouis), nomme politique 
français, né fin Gascogne, vers 1756, mort à 
Thouars, le 5 janvier 1839. D entra fort jeune dans 
les ordres, et devint supérieur de la maison de 
l'Oratoire à Condom. Il accepta les idées libérales, 
et fut nommé, en 1791, membre 4e l'Assemblée 
législative par les électeurs d« Gers. 14 se plaça 
dans les rangs de l'opposition (côté gauche), et 
s'éleva constamment contre les prêtres qui re- 
fusaient le serment oonrôtotionael ( prêtres ré- 
fractaires). Le 22 mai 1792 il prononça contre 
eux un discours des plus énergiques, demandant 
que « puisqu'ils ne voulaient point reconnaître 
les lois acceptées par leur pays, le pays ne fut 
pas obligé de payer leurs émoluments ». par un 
amendement assez singulier, il proposa ensuite 
de leur continuer leur traitement intégral , mais 
à la condition qu'ils sortiraient aussitôt de France : 
« C'était, disait-il , se débarrasser encore 4 -bon 
marché de ferments de discorde. » Comme ec- 
clésiastique, il se prétendait compétent dans la 
cause; néanmoins, soniimendement n'ayant pas 
été adopté, 11 vota pour la déportation pure et 
simple des récalcitrants. Réém à la Convention , 
il siégea au sommet de >la Montagne, et fut un de 
ceux qui à la Société des Jacobins, dont il était 
membre influent, 'provoquèrent la mise en ac- 
cusation de Louis XVI. Il vota sans appel ni sursis 
la mort de ce monarque. Envoyé, quelque temps 
après , avec Dartygoyte en mission dans la Gi- 
ronde , il se montra surtout le persécuteur des 
prêtres non- assermentés, n fut arrêté a Bor- 



deaux à la nouvelle des évâteMettfe <to si mai; 
mais les autorités le firent mettre et liberté, et 
il revint à Paris. Ses eottègues IWroyèreotdâas 
le Loiret pour y organiser des remontes de ca- 
valerie. Pour un et-abbé, la mission peut sembler 
étrange. Barrère attaqua tes opérations d'fcfanà 
l'occasion de la conduite d'un 4e ses délégués, 
nommé Foorniet ; celte fcottosatien n'est pas de 
sufte. Sous Napoléon, fchon devint inspecteur* 
| la loterie à Sentis , mais 11 fut 4estftié es ISIS, 
: et expulsé de France comme régicide. II te revit 
sa patrie qu'après ta tévotoflen de «30, et ne* 
! rut dans la retraite. H. Leboedr. 

j Le MvniUtor gentr*, kb a, «• vto, m, ne; ni n 
; n* *7S. - Armlt, Jay, J<*j et Jtorrtu» BioçrtpHe 
; nouvelle des Contemporain». 
i iciar ( Juan dc ), grammairien et calligraphe 
j espagnol , né à Durango, en 1550. 11 était profes- 
; seur de langues et dessinait fort bien. On a de 
j lui : Ortoçrafia practica, ou or te deescribir; 
| Saragosse, i575. Cet ouvrage, très-rare et très- 
estiraé, contient une série d'ornements do goût le 
4>lus pur, et tous dessinés par l'auteur. 11 a été 
j .gravé sur bois par Juan Vingles. L— z-e. 
QtiUlet, Dictionnaire des Peintres espagnol*. 
iciLiirs (Spurius), membre de la maison 
plébéienne des Icilius (Tcitia gens) , distinguée 
dès les premiers temps de la république par son 
opposition aux patriciens , vivaft an commeux- 
ment du cinquième siècle avant 5.-C. II fat m 
des trois envoyés que les plébéiens, après leur 
sécession sur le mont Sacré, chargèrent de traiter 
avec le sénat, en 494. Il ne parait pas avoir été 
élu aux premières élections trîbùnitiennes en 493, 
mais seulement à celles de l'année suivante. Pen- 
dant sa magistrature il attaqua violemment le 
sénat à cause de la cherté des subsistances, et il 
proposa que les tribuns fussent autorisés à cotto- 
quer des assemblées. Cette loi portait : « Dans te 
assemblées du peuple tenues par les tribuns, que 
personne ne les contredise ni ne les hfterrompe. 
Si quelqu'un enfreint cette loi, il donnera caution 
atrx tribuns de se présenter quand il sera cité, et 
de payer l'amende à laquelle il* sera condamné. 
Que celui qui refusera de le faire soit mis à mort, 
et que ses biens soient consacrés aux dieux. SU 
arrive des contestations au sujet de l'amende, que 
le peuple soit juge du différend. «Niebubrremarqoe 
que cette loi n'a pas pu passer avant la loi Pu- 
blilia, en 471, qui transféra Télection des tribuns 
des comices par centuries (c&mitiacimtvriats), 
aux comices par tribus (camftia tr&>&a),&P 
donna à ces magistrats le droit de proposera 
mesures dans les comices par tribus, droit <p% 
ne possédaient pas dans les comices par conv- 
ries. Il suppose donc que la loi Icilrâ passa a 
471, sous le tribunat d'un autre ïcinus. Il est pro- 
bable en effet que la loi ne fut votée qu'eu 471, 
mais rien ne s'oppose à ce que Sp. ïrilios, tribun 
en 471, fat le même flue l'IciKus tribun en 493. 
Pendant son premier tribunat, Sp. Icilius fotéta 
édile, et prit une part active aox pouTstrite? di- 
rigées contre Coriolan. Y- 



773 



1CIUU5 — IDA 



774 



Tlte LlFfi, II, «, M. — Denjji d'HaUcarn*s«e, VI, 88; 
VU, u, 17, î6, 55; IX, l. - Cicéron, Pro Settlo, 87. - 
Ktebuhr, Histoire Romaine, trad. de Golbéry. 

icilius (Lucius), fils de C. Icilius Ruga, 
mentionné par Denys d'Halicarnasse comme un 
des cinq premiers tribuns du peuple élus après 
l'étabtissement de cette magistrature en 493, 
vivait dans le cinquième siècle avant J.-C. Pen- 
dant «on premier tribunat, es 466, il réclama 
pour les tribuns le droit de convoquer Je sénat 
Il fit passer aussi , malgré l'opposition furieuse 
du sénat et des patriciens, une loi relative au 
mont Aventio, Cette colline faisait partie du do- 
maine public.; mais les patriciens y avaient cons- 
truit des maisons, et exigeaient des plébéiens 
des droits de location. La loi Jutia indemnisa les 
patriciens pour leurs bâtiments , et attribua 4e 
mont Aventin aux plébéiens. Cette mesure, qui 
«enlevait le quartier populaire à l'influence des 
patriciens, avait une grande importance politique. 
L'année suivante, Icilius et ses collègues, réélus 
tribuns, proposèrent une loi agraire dont les pa- 
triciens n'empêchèrent le vote que par la force 
ouverte. Six ans plus tard, en 449, Icilius fut un 
des chefs de l'insurrection contre les décemvirs. 
Virginie, fille de L. Virginius, lui avait été pro- 
mise en mariage. Le décemvir Appius Claudius , 
qui avait conçu une vive passion pour cette jeune 
fille , essaya de l'enlever, en la livrant, par un 
abus de son pouvoir judiciaire, à C. Claudius, un 
de ses clients. En l'absence de Virginius, retenu 
à l'armée, Icilius défendit courageusement sa 
fiancée, obtint que la sentence serait remise au 
lendemain , et donna à Virgfnius le temps d'ac- 
courir. Le récit des événements qui suivirent 
jusqu'à la mort de Virginie n'appartient pas à cet 
article. Aussitôt après la cataatnaphe, tandis que 
Virginius soulevait l'armée domaine du mont 
Algide et l'entraînait sur l'Aventùi , John** se 
rendit auprès des troupes campées dans la Sa- 
bine, et les décida à se tourner contre les décem- 
virs. Les deux années insurgeai s'établirent sur 
le mont Sacré, forcèrent les décemirirs à résigner 
leur pouvoir et obtinrent le rétablissement du 
tribunat. Élevé pour la troisième lois à cette ma- 
gistrature, Icinus fit passer un plébiscite oui 
assurait l'impunité aux insurgés, et poursuivit 
M. Claudius, le client du décemvir. Il obtint aussi 
du peuple, et malgré le sénat, les honneurs du 
triomphe pour les consuls L. Vaterius et M. Ho- 
ratius. Y. 

Tlte Lire, III, si, U-54, 68. - Denys dTTalIcarnassc , 
X, si-M; XI, 18, »6. - Nlebuhr, Hiit. Romaine, trad. de 
Golbéry. 

Icomcs. Voy. Goetz. 

* ictinus ( 'Ixtîvo; ), le plus célèbre architecte 
du siècle de Périclès (cinquièmeavant J.-C. ). Par 
«ne rare fortune , sur trois des monuments qu'il 
construisit, deux sont encore debout et permet- 
tent à la postérité d'admirer le génie dictions. 
En 444, il commence le Parthénon , aidé par l'ar- 
chitecte Callicrate et sous la direction de Phidias, 



qui présidait à toutes les entreprises de Périclès. 
Le temple fut achevé en cinq ans, et la rapidité ne 
nuisit en rien à son inimitable perfection. Ictinus 
appliqua à sa construction la science la pins raf- 
finée des proportions. Les modernes yjennent seu- 
lement de s'apercevoir, il y a quelques années, que 
les lignes courbes avaient été partout substituées 
aux lignes droites, a6n.de donner à l'architecture 
un caractère pins doux, puis harmonieux. Proba- 
blement Ictinus avait consigné tous les éléments 
de ces curieux problèmes dans un traité sur le 
Parthénon, qu'il éemjt de concert avec un cer- 
tain Garpion. Yitruve a «onnu ce précieux ou- 
vrage, qui est nwftanreusement perdu pour la 
postérité. 

letinus fut changé encore par Périclès de nous- 
truire la <raste enceinte destinée aux initiés d'E- 
leusis <p.u<mx0c oipoc). Cet édifiée, dont on 
retrouvera probablement le *4an en déblayant 
Éieasis, était immense et pouvait nantenk autant 
de personnes qu'un théâtre. 

L'amitié qui liait Ictinus a Phidias lui fit sans 
doute prendre Athènes en dégoét quand le grand 
sculpteur dut s'expatrier pour échapper aux per- 
sécutions de ses concitoyens. Pendant que Phi- 
dias ornait le temple d'Olympie, Ictinus, non 
loin de là, sur les sommets des montagnes d'Ar- 
cadie, construisait son temple d'Apollon Epi- 
courios. La situation admirable du monument 
ajoute encore à la beauté des ruines. Il est d'ordre 
dorique , comme le Parthénon; mais l'ordre inté- 
rieur est ionique et les colonnes sont engagées 
dans des saillies du mur. Un architecte français, 
M. Lebouteux, a mesuré et dessiné le temple 
de Phigalie avec plus de soin et d'exactitude 
que n'avait pu le faire Blouet pendant l'expédi- 
tion de Morée. De même les travaux de M. Pac- 
card sur le Parthénon sont justement renommés. 

Le temple de Phigalie dut être construit avant 
la guerre du Péloponnèse, quelques années après 
l'achèvement du Parlhénon. Pendant l'absence 
d'Ictinus, les Propylées furent bâtis : c'est pour 
cette raison, sans doute, que Périclès, n'ayant 
plus Ictinus sous la main, chargea Mnésiclès 
d'exécuter ce nouveau .chef-d'œuvre. JSeulé. 

Pawanin, vtH, 41. - Strpbon, IX, p. m, 896. - 
Nutarque, Périclès, U- *- Vlt/av/c, vu, Proœm. - <B£tfJé, 
Acropole d'Athènes. - Expédition dé Morée. 

ida, première ahbesse du couvent d'Argon - 
soles, morte en 1226. Lorsque la comtesse de 
Champagne, Blanche, fonda ce monastère, ette 
appela pour la gouverner cette religieuse, qui 
avait acquis en Hollande une grande réputation 
de vertu et de savoir. Un moine de l'ordre de 
Ctteaux, Philippe, écrivit sa vie, qui est restée 
inédite. Thomas de Cantimpré raconte, dans 
son Livre des Abeilles ,' qu'Ida discutait avec 
«ne rare inteHigenoe les questions les plus ar- 
dues de la théologie ; il ajoute, circonstance con- 
testable sans doute, qu'elle demanda et obtint 
la grâce de mourir en remplacement de la 
comtesse Blanche. Un pareil vœu n'avait guère 

25. 



775 



IDA — IDÀNTHYRSE 



776 



d'exemple et n'a pas trouvé beaucoup d'imita- 
teurs. G. B. 

Histoire Littéraire de la France, t. XVIII, p. 5*1. 

idace, surnommé Clar us on V Illustre, prélat 
espagnol, né dans la première moitié du qua- 
trième siècle, mort vers Tan 392. Devenu 
évéque de Merida, il se signala par l'ardeur 
avec laquelle il poursuivit, en commun avec 
Ithace, évoque d'Ossobona, l'hérésiarque Priscil- 
lien (voy. ce nom) et les adhérents de ce der- 
nier, contre les doctrines duquel il écrivit, sous 
le titre d'Apologeticus, un ouvrage aujourd'hui 
perdu. En 388, après la mort de l'empereur 
Maxime, qui avait encouragé les persécutions di- 
rigées contre les priscillianistes, Idace se démit 
d'abord spontanément de sonévêché; mais, ayant 
bientôt après cherché a s'y faire rétablir, il fut 
envoyé en exil, où il mourut. Au dire de Sulpice 
Sévère, la conduite dldace fut jugée par ses 
contemporains comme bien moins coupable que 
celle d' Ithace (voy. ce nom). £. 6. 

<Sulpltias ScTcros, Historia Sacra. — I§More de Sé- 
Yllle, De Scrtptoribus Bcelesiasticis. — Antonio, Biblio- 
theca Hispana vêtue, 1. 1, p. 17t. 

idace, chroniqueur espagnol, né vers la fin 
du quatrième siècle, à Lamego, en Galice, mort 
après 468. Après avoir visité. l'Orient, où il 
entra en relations avec saint Jérôme, Jean de 
Jérusalem et autres pieux solitaires, il fut 
promu, vers 427, à l'évêché de Chiaves, petite 
ville du Portugal (d'autres disent à celui de La- 
mego). Il rat envoyé en 431 auprès du général 
Aétius , pour réclamer des secours contre les 
Suèves. Plus tard il fut chargé par le pape saint 
Léon de prendre des mesures pour s'opposer à 
la propagation de l'hérésie priscillianiste. £n 
461 les Suèves le déposèrent de son évèché, et 
le tinrent prisonnier pendant trois mois. A 
partir de ce moment on n'a plus de renseigne- 
ments sur lui. Idace est auteur d'un Chronicon, 
qui commence à l'an 379 et finit à l'an 468. A 
partir de 427 cette chronique, écrite dans un 
style barbare, devient une source importante 
pour l'histoire des invasions des Goths et des 
Suèves; elle a été continuée jusqu'en l'an 1100 
par quatre auteurs différents. Imprimée pour 
la première fois, d'après un manuscrit fautif et 
incomplet, par Canisius, dans le tome II de ses 
Antiqux Lectiones, et reproduite sans correc- 
tions par Scaliger dans la première édition de son 
Thésaurus Temporum, ainsi que par Linden- 
brog et Sandoval , elle fut enfin publiée avec exac- 
titude et dans son intégrité par Sirmond, Paris, 
1619, in-8°; le texte donné par Sirmond parât 
ensuite dans le tome II des Opéra de cet éru- 
dit; dans la seconde édition du Thésaurus 
de Scaliger; dans la Bibliotheca maxima Pa- 
trum, t. VII; dans le t. X de la Bibliotheca 
Patrum de Galland ; la meilleure édition fut 
donnée par Roncalli dans le Vetustiora latino- 
rum Scriptorum Chronica, Padoue, 1787, et 
ensuite par Rœsler dans les Chronica Medii jEvi , 
Tubingue, 1798. Sirmond trouva dans un ma- 



nuscrit, à la suite du Chronicon dldace, des 
Fasti consulares, commençant à Tan 245 de 
Rome, et s'arrêtant à l'an 468 de notre ère; on 
y rencontre des faits historiques concernant les 
quatrième et cinquième siècles, rapportés dans 
un style qui ressemble à celui du Chronicon. 
Cette ressemblance a porté Sirmond et plusieurs 
autres savants à attribuer ces Fasti à Idace, 
opinion qui n'a pas été admise généralement. Quoi 
qu'il en soit, ces Fasti se trouvent ajoutés aux 
éditions du Chronicon postérieures à celle de 
Sirmond, ainsi que dans la Nova Bibliotheca 
Manuscriptorutn de Labbe , et dans le tome XI 
du Thésaurus Antiquitatum Bomanarum de 
Grœvius. E. G. 

Roncalli , Dissertatio de Idatio ( en tête de «on édition 
da Chronicon). - Rosier, Dissertatio de Idatio (en tète 
de son édition da Chronicon ). — Bsehr, Geschichte der 
rômischen Literatur (supplément, § 45). — Smttb, Diction- 
nary of Greek and Roman Btographf. — Le Nain 4e 
TUIemont, Histoire des Empereurs, t. VI. — Antonio, 
Bibliotheca Hispana vêtus, 1. 1. 

idace, théologien, vivait à Naples au milieu 
du cinquième siècle. On n'a aucun détail sur sa 
vie. U a écrit : Libri adversus Varimadum 
diaconum arianum : cet ouvrage» qui se trouve 
dans le Antidoton adversus Bxreses de Sichard , 
dans la ffaeresiologia de J. Herold , dans le 
tome IV de la Bibliotheca Patrum , ainsi que 
dans les Opéra de Vigile, évéque de Tapsus, 
publiés par Chifflet, est attribué faussement par 
ce dernier à Vigile; — Libri VIII de Sancta 
Trinitate , ouvrage qui a été recueilli dans les 
éditions des œuvres de saint Athanase, qui eo 
a souvent été considéré comme l'auteur. E. G. 

J. Anthelmlus, Ditqùisitio de Symbolo Jthantuiano. 
— Montfaucon , Athanasii Opéra, t. III, p. 605. - Fa- 
bricius, Bibliotheca latina Media et Infimx jEtatis. * 

idace, évéque d'Ossobona. Voy. Ithace. 

* IDANTHYRJE (ItevOupaoç), roi des Scythes, 
vivait probablement dans le septième siècle 
avant J.-C. Suivant Strabon, il commandait la 
horde scythique qui envahit l'Asie et s'avança 
jusqu'en Egypte. La date et les événements de 
cette invasion ne sont pas connus, à moins qu'on 
ne l'identifie avec l'incursion mentionnée par Hé- 
rodote, laquelle établit pendant vingt-huit ans h 
puissance des Scythes en Asie et se termina par 
leur expulsion, sous Cyaxare, en 607. Hérodote 
donne au roi qui commandait cette expédition 
le nom de Madyas. D'après Strabon, Madyas 
était un roi des Cimmériens. Justin parle d'une 
invasion des Scythes jusque sur les frontières 
de l'Egypte, mais il le fait en termes obscurs 
et qui ne peuvent éclaircir le passage de Stra- 
bon. Y. 

Strabon, XV, p. «87. - Hérodote, I, 11,103, lot; IV, 
il, lt, «7; V|l, M. - Justln^l, 3. -Clinton, Fast. HeU. % 
vol. l. 

*idakthyR8E, roi des Scythes, vivait dans 
le sixième siècle avant J.-C. Il était fils de San- 
lius, frère et meurtrier d'Anacharais. Quand Da- 
rius, fils d'Hystaspe, envahit la Scythie, vers 508, 
les Scythes se retirèrent devant lui. II envoya 
alors un message à Idantliyrse pour le t 



777 



IDANTHYRSE — IDELER 



778 



de combattre ou de se soumettre. Le roi des 
Scythes répondit que s'il fuyait devant les Perses, 
ce n'était pas par crainte, et que cette vie er- 
rante était dans ses habitudes. S'il ne combattait 
pas, c'est qu'il n'avait ni villes ni champs cul- 
tivés à défendre contre les envahisseurs. Que 
les Perses s'avançassent jusqu'aux sépultures 
des Scythes, et ils verraient si ceux-ci auraient 
le courage de combattre pour les tombeaux de 
leurs pères. Quant à se soumettre, les Scythes 
ne reconnaissaient d'autres maîtres que leurs 
dieux; au lieu du don de la terre et de l'eau que 
réclamait Darius, il lui envoyait des dons plus 
convenables. Ces présents, qui consistaient en un 
oiseau, un rat, une grenouille et cinq flèches , 
exercèrent la sagacité des Perses. Darius y vit 
un symbole de soumission ; Gobryas les inter- 
préta tout différemment-, et l'événement prouva 
qu'il avait raison. Selon lui, les présents dl- 
danthyrse signifiaient qne si les Perses ne s'en- 
volaient pas dans l'air comme des oiseaux , s'ils 
ne se cachaient sous terre comme des rats, ou 
dans l'eau comme des grenouilles , ils n'échap- 
peraient pas aux flèches des Scythes. Y. 

Hérodote, IV, 76, «0, 117, 131, in. — Plutarque, Beg. 
et lmp. Apophth. — Justin, 11,8,5; VII, s.— Paul 
Or ose, II; S. 

idb ( La bienheureuse ), comtesse de Boulogne, 
née vers l'an 1040, morte le 13 avril 1113. Elle 
était fillede Godefroi IV dit le Grand, le Hardiei 
le Barbu, duc de Lothier (basse Lorraine), et de 
Gode, Dode ou Ode, l'un et l'autre appartenant 
à la branche carlovingienne allemande. A l'âge 
de dix-sept ans, Ide épousa Eustache II, comte 
de Boulogne, dont elle eut le célèbre Godefroy 
de Bouillon (1), créé marquis <? Anvers (par 
l'empereur Henri IV, en 1076) , puis duc de 
Lothier et de Brabant , ensuite chef des croisés 
(1096), et élu roi de Jérusalem (23 juillet 1099) ; 
Eustache 111, qui succéda à son père vers 1093 , 
et Beaudoin, comte d'Édesse, et ensuite roi de 
Jérusalem après son frère Godefroy (1100) (2). 
Ide se fit toujours remarquer par une extrême 
piété et une grande sagesse. Devenue veuve en 
1070, elle vendit une partie de son domaine par- 



ti) Selon les auteurs de VArt de vérifier les dates , U 
était fils aine, d 'Eustache II, et non puîné comme le pré- 
tendent les Bollandistes. La plupart des chroniqueurs se 
taisent à cet égard ou ne se prononcent pas d'une ma- 
nière formelle. Le Tasse, dans a* Jérusalem délivrée, 
fait de Godefroy l'afné de sa famille. 

(S) 1 de ne nom me que ces trots enfants dans une charte de 
Tan 1096 : on ne sait pourquoi Guillaume de Tyr, suivi 
en cela par l'auteur de la Chronique de Saint- Médard 
et par Guillaume de Nangis, mit parmi les chefs de la 
première croisade (Ltb., IX, cap. xxn) un Guillaume 
qu'il dit expressément frère de Godefroi de Bouillon et 
par conséquent fils d'Eustache II. fioémond 1**, prince 
d'Antiocbe, dans une lettre à Roger, son frère, rapportée 
par Baronlus ( ad an. 10M, n° 14 ), donne également à Go- 
defroy de Bouillon un autre frère nommé Hugues : Godo- 
fridui et Hugo Bollionii Fratres, dit-il. SI ces deux en* 
fants d'Eustache II sont réels, leur naissance ne paraît 
pas légitime. Ordéric Vital donne en outre'à Eustache II 
deux filles : Adélaïde on Agnes, femme de l'empereur 
Henri IV, et Ide, mariée à un comte allemand nommé 
Conon. 



ticulierpour fonaer des églises et des monastères. 
Les principales de ces fondations furent Saint- 
Wulmer à Boulogne, Sainl-Wast (depuis Vascon- 
villiers), Saint- Wulmer-aux-Bois (aujourd'hui 
Saumer ou Samer) et Notre-Dame-de-la-Cha 
pelle. Ide mourut plus que septuagénaire, et futen- 
terréedans l'abbaye de Saint- Wast. « Cependant, 
disent les auteurs de la Bibliothèque sacrée, 
Ton prétendait avoir son corps dans l'église des 
Filles du Saint-Sacrement de la rue Cassette, à 
Paris, où Ton célébrait tous les ans sa fête, le 
13 avril, comme d'une sainte canonisée, quoi- 
qu'elle ne le soit pas. » A. L. 

Henschenius, Fit» Sanctorwn, 15 avril. — Baillet , le 
iLéme Jour, dans les Fies des Saints. — Richard et Gl- 
raud, Bibliothèque Sacrée. — Le Mire, Opp. Diplom., 
t. I, p. 76. — Dom Bouquet, t. XII, p. 88*. 

* ideler (Chrétien- Louis), chronologiste al- 
lemand^ le 21 septembre 1766, mort le 10 août 
1846. Après avoir été employé par le gouverne- 
ment prussien pour le calcul des annuaires astro- 
nomiques, il devint en 1816 précepteur de deux 
princes de la famille royale, et en 1821 professeur 
a l'université de Berlin. Il fit partie de l'Académie 
de cette ville, et fut nommé en 1839 membre ho- 
noraire de l'Institut de France. On a de lui : 
Historische Untersuchungen uber die astro- 
nomischen Beobachtungen der Alten (Études 
historiques sur les Observations astronomiques 
desanciens); Leipzig, 1806;— Untersuchung 
ûber den Ursprung und die Bedeutung der 
Sternnamen (Examen de l'Origine et de la Si- 
gnification des Noms des Étoiles) ; Berlin, 1809 ; 
— Handbuch der mathematischen und tech- 
nischen Chronologie (.Manuel de Chronologie 
mathématique et technique) ; Berlin, 1825-1826, 
2 vol., in-8°; une seconde édition, refondue, pa- 
rut sous le titre de Lehrbuch der Chronologie 
(Manuel de Chronologie) ; Berlin, 1831 : c'est un 
ouvrage excellent; — Die Zeitrechnung der 
Chines en (La Chronologie des Chinois); Berlin, 
1839. — Ideler a publié en commun avec Nolte : 
Handbuch der franzosischen Sprache und 
Uteratur (Manuel de la Langue et de la Litté- 
rature françaises); Berlin, en 3 vol., qui ont 
eu de nombreuses éditions; — Handbuch der 
englischen Sprache und Literatvr (Manuel de 
la Langue et de la Littérature anglaise.) ; 2 vol. : 
plusieurs fois réimprimés. — Ideler a fait 
aussi paraître plusieurs dissertations remarqua- 
bles , parmi lesquelles nous citerons : Ueber 
den Kalender des Ptolemaus (Sur le Calen- 
drier de Ptoîémée); — Uber die.Wegmaase 
der Alten (Sur les Mesures de Routes des an- 
ciens ) ; — Uber dos Alter der Runenialen 
der (Sur l'Age des Calendriers runiques). E. G. 
CotwersationS'LexOon. 

ideler (Jules-Louis), érudit allemand, fils 
du précédent, né à Berlin, le 3 septembre 1809, 
mort le 17 juillet 1842. Après avoir étudié la 
médecine, il enseigna cette science à l'univer- 
sité de Berlin, en qualité de privat-dooent. On. 
a de lui : Meteorologia veterum Greecorum 



770 



IDELER — 



et Romanorum; BerKn, 1832; — Die Sage 
von dem Schuss des Tell ( La Légende de Tell ) ; 
Berlin, 1736; — Bermapion, rive rudimenta 
hieroglyphicx veterum Mgyptivrum Utero- 
turœ; Leipzig, 1841, ï vol., in- 8° , — Geschichtc 
der altfranzôsischen National- Literatur bis 
au/ Franz I ( Histoire de l'ancienne Littérature 
française jusqu'aux temps de François I e ' ) ; Ber- 
lin, 1 842, in-8°. — Ideler s'est aussi fait remarquer 
comme éditeur; en cette qualité, il a publié : 
Aristotelis Meteorologia ; Leipzig , 1824-1836, 
2 vol. ; Psalterium Copticumt Berlin! 1837; 
— Physici et Medici Grœci minores; Berlin, 
184M842, 2 roi* E, G, 

CoMféTMItions- LêtiMôn. 

' IbKLFCmso ott 8Arf-cAftLO ( P. ), érudit 
espagnol , né an 1709» mort à Rome, le 30 no- 
vembre 1790. 11 appartenait à Tordre des Pia- 
ristes, et passa la plus grande partie de sa vie 
à Rome, où il devint précepteur de Charles- 
Edouard , prince de Galles , surnommé le Pré- 
tendant , et de son frère le cardinal Smart* duc 
d'York, tous deux fila de Jacques III, prétendu 
roi d'Angleterre» Idelfonso de San-Çarlo possé- 
dait une très-vaste érudition, et occupa les prin- 
cipaux emplois de son ordre. Il traduisit en latin, 
par ordre de Benoît XIV, lea Édits, Notifica- 
tions et Lettres pastorales A* ce pape» pour l'e* 
dition complète de set oeuvres ; Rome en 1748. 

A.L. 
Chaud** et Deiandtne, Dictionnaire Historique* 
ides ( Bverard-Isbrants) t voyageur alle- 
mand, néà Glukstadt ( Holstein)* vers 1660, mort 
vers 1700. Il était d'origine hollandaise; il se 
rendit en Russie, et y monta une maison de 
commerce* qui devint bientôt florissante. Le taar 
Pierre I er remarqua l'intelligence de Ides, et en fit 
un de ses conseillers. En 1692, il te chargea 
d'aller à Péking conclure un traité de commerce 
avec l'empereur Khang~hi , et de faire détermi- 
ner les limites des deux empires, oontigus depuis 
1651. Ides partit de Moscou le 14 mars, traversa 
la Tartane, franchit la fameuse muraille chinoise 
le 27 octobre, et le 3 novembre entra dans la 
capitale du Céleste E^npfre. Il fut fort bien ac- 
cueilli par Khang-hi, et, malgré l'opposition de 
plusieurs mandarins importants, réussit complè- 
tement dans son ambassade. 11 fut, au surplus, très- 
bien secondé par les missionnaires jésuites, en- 
tre autres par le P. Gerbillon ( voy. ce nom ), qui 
lui servit d'interprète, et l'initia aux mystères et 
aux cérémonies de la cour chinoise. Il y eut des 
conférencôôd'asseï longue durée et dans lesquelles 
le ministre russe déploya un luxe inouï de ri- 
chesses. Enfin, ou convint de prendre pour fron- 
tière commune la rivière de Gorbitsa. Ides quitta 
Péking le 19 février 1693, et ne rentra à Moscou 
que le 19 janvier 1694, après avoir couru de 
grands dangers en Tartane et en Sibérie. Le tzar 
le nomma conseiller impérial du commerce, et 
l'envoya explorer Àrkangeiet la Russie Blanche, 
ides mourut peu après son retour. Ses fatigues 



IDOMÉNÉE 780 

passées et la rigueur du climat avancèrent ses 
jours. Il avait publié une relation de sa aatsskm 
en hollandais, et sous ce titre ; Voyage de l'am- 
bassadeur moscovite E.-l. Ides, de Moscou 
à la Chine, fait par terre par la grande 
Oustiga, la Striante, la Permie, lu Sibérie, la 
Daourie et la grande Tartarie, et gui a duré 
trois an s y contenant la description des mœurs 
des peuples , etc. ; et enrichi d'une carte et de 
beaucoup de figures dessinées par l'ambaaaadeur, 
en outre d'une Description de la Chine i écrite 
par un Chinois dans sa langue, et traduite pour 
la première fois en hollandais avec des Remar- 
ques; publié par les soins de Nicolas Witsen, 
bourgmestre et géographe d'Amsterdam ; Ams- 
terdam , 1704, in-4*. Quelques bibliographes font 
mention d'une première édition qui aurait paru 
dès 1696. Le Voyage de Ides a été traduit en an- 
glais, Londres, 1706, in-4°; en allemand, Franc- 
fort, 1707, in-4° ; en français, dans le t. Vlil du 
Recueil des Voyages au Nord* Avant te publi- 
cation de cet ouvrage, Ad. Brand, natif de Lu- 
beck, et qui avait accompagné Ides dans son am- 
bassade, en fit imprimer une relation en allemand, 
Hambourg, 1698, in- 12 ; trad. en français, sous Iô 
titre de : Relation du Voyage de M. Everard 
Ysbrantz, ambassadeur de S. M. Tzarienne 
à la Chine en 1692, 1693, 1694; Amsterdam, 
1699, in- 12 ; et traduit en latin par LeHmitz dans 
ses Novissima Sinica; 1697, m-12. Cet ouvrage, 
au point de vue géographique, est encore plus 
incomplet que eelui d'Ides ; cependant on trouve 
dans l'un et dans l'autre des renseignements cu- 
rieux sur les mœurs des Tartares, des Sibériens, 
et des Chinois. A. de Lacaze. 

Gazette littéraire de Leipzig, anD. ntt. - Voltaire, 
Histoire de Pierre le Grand. - De Mailla, Histoire çé- 
« nérate de la Chine, t. XI et X. — fesbeau et Cheaecbot, 
Histoire 4» Russie, L IV, p. M-M. 

IDIOT OU LB SAVAftT IDIOT. VOy> JORBAH 

(Raymond). 

iDMâif (Nicolas), philologue suédois du 
dix -huitième siècle. Il n'est connu que par un 
ouvrage très-curieux publié d'abord en suédois, 
mais traduit en français par Edmond-C. Genest, 
sous le titre de : Recherches sur le Peuple Fi- 
nois 9 d'après les rapports de la langue finoise 
avecla langue grecque ; Strasbourg, 1 776, în-8° ; 
c'est par erreur que les auteurs de la Êiographie 
Moderne ont attribué cette traduction à Edme- 
Jacques Genest. L— *— e. 

GezentU, Biosraf. Lextc. - QoérArd, La France lit- 
téraire. 

MdOMAnéB (l&oufveuc), historien grec, né 
à Lampsaque, vivait vers 300 avant J.-C. Ami 
et disciple dUlpicure, il se maria avec Bâtis, 
sœur de Métrodore de Lampsaque, qui tut aussi 
l'élève de ce philosophe. H occupa une haute di- 
gnité dans sa patrie, peut-être la tyrannie, et 
montra le désir. d'une vaine gloire, le faste, le 
luxe et d'autres passions qui accompagnent sou- 
vent le pouvoir suprême. Épicure fot obligé de 
rappeler son disciple à de meilleurs sentiments. 



781 



IDOMÉNÉE 



Ses ouvrages, que Ton ne connaît plus que par 
de vagues mentions, semblent avoir eu pour 
objet la vie privée des hommes illustres de la 
Grèce, plutarque, qui les cite, ne leur accorde 
pas une grande valeur historique. Voici les ti- 
tres connus des ouvrages dldoménée : Histoire 
de Samothrace flçTopta tc5v xaxà Eoc{i.o6pàx7îv), 
et Sur les Socratiques (lïepi tôv StoxpatixâSv ). 
Divers passages relatifs à Pisistrate, à Thémîs- 
tocle , h Aristide , à Périclès , à Démosthène, à 
Eschine, à Hypéride, à Phocion, ne peuvent 
appartenir à aucun de ces deux ouvrages, bien 
que Sintenis les revendique pour les Socrati- 
ques. L'œuvre dont Ils faisaient partie s'intitulait, 
suivant Jonsius ; Sur les Hommes illustres (lïepi 
év&ôfr>v àvSpôv), et selon Luaac, Sur le Luxe des 
Hommes illustres (Iîspl tf]ç tôv êv86|u>v xpu- 
çyfc); mais M. Sauppe paraît en avoir découvert 
le véritable titre dans un passage corrompu des 
Anecdota de Bekker (p. 249). D'après la cor- 
rection qu'il propose, le titre de l'ouvrage d'Ido- 
ménée était : lïepi fiyniaywYûv (Sur les Démago- 
gues ou plutôt Sur les Hommes politiques). Les 
fragments trop peu nombreux d'idoménée ont été 
recueillis par M. Millier, dans ses Fragmenta 
Historicorum Grxcorum, t. II, p. 489. Y. 

Diogéne Laerce, X, 88, ». — Strabon , XIII, p. 589. — 
Athénée, VII, p. f79. — Suidas, au mot ÎBoftevetiç. — 
Voisins, De Hist. Grstcis, p. tos, édlt. Westermann. - 
Stntenis, cinquième Rxcwrsus sur le Périclès de Piutar*- 
i;ue. — Jonsius, Hist. Script. Philos., II. — Heerep, p« 
Font. Fit. Plut., p. 98. — Luzac, Leet. M tic, p. lis. - 
Sauppe , Rheinisches Muséum , année 18*3 , p. MO. 

IDRIB0S OQ BIDEIECS fMpieOç OU c Iôp.), roi 

ou dynaste de Carie , mort en 344 avant J.-C. 
Second fils d'Hécatomnus, il monta sur le trône 
à la mort d'Artémise, veuve dé son frère Mau- 
sole, en 351. Peu après son avènement il reçut 
du roi des Perses Àrtaxerxès Ochus la demande 
d'un corps auxiliaire contre l'Ile de Cypre. 
Idrfens fournit une flotte de quarante trirèmes et 
une année de 8,000 mercenaires, qu'il plaça sous 
le commandement d'Évagoras et du général 
athénien Phocion. Il ne resta pas longtemps 
l'allié des Perses ; mais sa rupture avec eux ne 
nuisît en rien à la prospérité de son rtyawne. 
Isocrate parle de lut comme d'un des plus ri- 
ches et des plus puissants princes de l'Asie, et 
Démosthène dit qu'il ajouta à ses domaines 
héréditaires, Chios, Cos et Rhodes. Il mourut 
après un règne de sept ans, laissant le trône à sa 
sœur Ada, qu'il avait épousée suivant la coutume 
orientale. Y. 

iefrbmopf, voyageur russe, né vers 1744, 
mort à Saint-Pétersbourg, après 1809. Il entra 
fort jeune dans la carrière militaire, et était sous- 
officier lorsqu'en 1774 il fut fait prisonnier par 
les Kaisacks ou Krrghiz de la grande horde , aux 
environs d'Orenbourg, sur ta droite de l'Oural. 
Il devint l'esclave d'un chef boukhare, qui l'af- 
franchit, et lui confia un commandement. Iefre- 
moff se trouva ainsi en relations avec lesTadjiks, 
les Usbeks, les Turcomans et autres peuples avoi- 



— IENICHEN 782 

sinant la mer Caspienne. De son temps le kha- 
nat de Boukbarie (ancienne Sogdiane) contenait 
environ 2,500,000 habit., qui pouvaient mettre 
sous les armes 300,000 cavaliers. Les principales 
villes étaient Boukhara, Karakoul, Kermina, Min- 
ka], Samarcand, Juzzek, Karchi, Labiak et Balk. 
Tefremoff prit part à plusieurs expéditions contre 
les Khiviens, les Merviens et quelques autres 
populations tartares. Il profita de la liberté dont 
il jouissait pour chercher à revoir sa patrie. Il 
atteignit d'abord Khokhand(t); puis, traversant 
leTurkestan chinois, il s'arrêta successivement à 
Marghylan(où il vit un drapeau rouge qui avait ap- 
partenu, disait-on, à l'armée d'Alexandre le Grand) 
à Kachgar, à Hiarkand. 11 pénétra ensuite dans 
leThibet, séjourna près d'un moisà Tohangamrinf, 
franchit, malgré de nombreux dangers, l'Himalaya, 
descenditdansrindoustan, visita Delhi,et, gagnant 
la côte occidentale de la presqu'île gangénique, il 
prit passage sur un navire anglais. Ce ne fut 
qu'en 1782, après huit années d'absence, qu'il 
débarqua, à Saint-Pétersbourg. Les documents 
nouveaux et précieux qu'il rapporta sur les cen- 
trées qu'A avait visitées le firent bien accueillir du 
gouvernement russe, qui lui accorda même la 
noblesse et le titre de conseiller aulique. Iefre- 
moff a publié ses 'aventures sous le titre de : 
Voyages en Boukharie, à Khiva, en Perse et 
dans Vlnde; Saint-Pétersbourg, 1786. A. de L. 

piodore , XVI, «, 48, 69. - Strabon, XIV, p. 686. — 
An-ten, Anab., I, 33. — Isocrate, Philipp., p. lOî. — Dé- 
moftfrène, J># face. 

iftiflcuBH (Gottlob-frédéric), philologue et 
philosophe allemand, né le 36 mars 1680, à Eu- 
teritsch, près de Leipzig, mort le 17 septembre 
1 735. Son père, Georges Ienichen, auteur de quel- 
ques opusoulea, était ministre protestant. Après 
s'être fait recevoir, en 1699, maître en philosophie 
à Leipzig, Ienichen fit un voyage en Allemagne, 
en Hollande et en Angleterre. De retour à Leipzig 
en 1706, il devint assesseur de la faculté de philo- 
sophie, et six ans après professeur de morale et de 
politique. On a de lui : De Genesimantia ; Leipzig, 
1699, in-4 Q ; - De Cultu Heroinarum sagp 
vel toga illustrium; 1700, in-4°; — Historia 
Spinosïsmi Leenhosiani ; 1707, in-4°; — De 
Democrito Philosopha; Leipzig, 1720, in-4°; 
— In Funere J.-B. Menkenii; Leipzig, 1732, 
in-fol. ; — In Funere L. Chr. Crellii ; Leip- 
zig, 1733, in-fol,; — In Funere Griebneri; 
Leipzig, 1734, in-fol. Ienichen a encore publié 
plusieurs autres opuscules, parmi lesquels nous 
citerons : Deeo quod JustuwekJ)eeorum est 
circa jocos etfacetias. Il a aussi donné une édi- 
tion des Opéra Philosophica et de VArs Critica 
deLeclerc. £. Gv 

Kappe , Programma in funere Jenicheni ; Leipxte, 
1735, in-fol. — Acta Eruélitorum IApsiensia, année 1736X 
p. 91. — Jdcher. Allg. Gel. Lex. 

(1) Ville de la Ta r tarte indépendante, située par *0« «' 
long, est, et 64 e 14' de lat. nord. Elle a été la principale 
résidence de Gengte-Khan et de Tamerlan. lefremoff y 
compta plus de 400 mosquées. 



7S3 



1EN1CHEN - IERMAN 



784 



IBNICHBM {Gottlob- Auguste), jurisconsulte, 
bibliographe, historien et biographe allemand, 
neveu du précédent , né à Leipzig, le 9 juillet 
1709, mort le 1 er avril 1759. Après s'être fait 
recevoir en 1730 docteur en droit à l'université 
de Leipzig, il entra an barreau. En 1747 il de- 
vint professeur de droit à Giessen. On a de lui : 
Epistola singularia de viris doctis conti- 
nent; Leipzig, 1729, in-4°; — Commentarius 
de Doctis qui extra patriam patriom in- 
venere /Leipzig , 1729 , in-4°; — Spécimen Bi- 
bliothecx Eruditorum longœvorum; Leipzig, 
1730, in-4* ; — De spuriis advocatorum Privi- 
légia; Leipzig, 1733, in-4°; — De Prisco 
Javoleno jurisconsulte ; Leipzig, 1734, in-4°; 
— De C. Afrania; Leipzig, 1734, in-4°; — 
Conjecturas de Testamenti ad pias causai 
Origine; Leipzig, 1734, in-4°; — Juristischer 
Buehersaal oder grùndliche Nachricht von 
den besten juristischen Bûchern (Bibliothèque 
Juridique, ou compte-rendu étendu des meilleurs 
ouvrages de jurisprudence) ; Leipzig, 1737-1739, 
2 vol. in-8°, sans nom d'auteur; — Continua- 
tio Notitte Auctorum Juridicorum Beyeri; 
Leipzig, 1738, in-8° ; — Allerneueste Nachri- 
ehten von juristischen Bûchern (Compte- 
rendu des Ouvrages Juridiques les plus ré- 
cents); Francfort et Leipzig, 1739-1747, rà-8°, 
sans nom d'auteur ; — Vnpartheische Nachri- 
chten von dem Leben und Schriften der 
jetztlebenden Rechtsgelehrten in Deutschland 
( Notices impartiales sur les Jurisconsultes vi- 
vants de l'Allemagne) ; Leipzig, 1739, in- 8° ; — 
Singularia de Callistrato jurisconsulte ; 
Leipzig, 1742, in-4°; — Besondere Anmer- 
kungen von den durch die deutschen Ge- 
setze eingeschrœnhten Verlôbniss-und Hoch- 
zeitmahlen (Remarques particulières sur les 
Repas de Noces et de Fiançailles restreints par 
les lois allemandes ); Iéna, 1746, in-4° ; — Éls- 
torische und rechtiiche Abhandlung von Be- 
gràbniss-Hahlzeiten (Dissertation historique 
et juridique sur les Repas de Funérailles); Leip- 
zig, 1747, in-4° ; — Thésaurus Furis Feudalis ; 
Francfort, 1750-1755, 3 vol. in-4° ; recueil de 
cent -soixante-dix opuscules et dissertations 
écrites par divers auteurs sur des matières féo- 
dales; — De Secta Compendiariorum et Per- 
fectionistarum ; Giessen, 1852, in-4°; — Elo- 
giumJo.-R. Engau; Giessen, 1756, in-4°; — 
Observationes criminelles de Tabaco; Giessen, 

1756, in-4 # ; — Observationes de S. Paner a- 
tio; Giessen, 1757 -, in-4°; — Vom dem 
Rechte der ersten Bitte einer romischen Kai- 
serinn (Sur le Droit de première Demande ap- 
partenant à l'impératrice romaine); Giessen, 

1757, in-4°. On doit aussi à Ienichen les édi- 
tions des ouvrages suivants : Majansii Epis- 
tolarum IÀbri IV; Leipzig, 1734, in-4 e ; il s'y 
trouve huit lettres de Ienichen; — Lipenii Bi- 
bliotheca realis juridica, post F, Struvii 
curas jrecensuit opus, innumeros errores sus* , 



tulit t ultra dimidiam partem auxit Je»t- 
chen; Leipzig, 1738-1743, 4 vol. in-fol.; — 
Mylii Opusoula academica.; Leyde, 1738, 
in-8° ; — BrunquelU De Retractionibus Ju- 
risconsultorum ; Leyde, 1738, in-4»; — Lu- 
nigs BibliothecaDeduclionum; Leipzig, 1745, 
2 vol. in-8° ; — Leyseri Meditationes ad Pan- 
dectas, vol. XI et ultimum edidU t et opus- 
cula nonnulla sua adjecit Ienichen ; Viol- 
fenbuttel, 1748, in-4°; — et plusieurs disserta- 
tions sur des matières juridiques. 

£. G. 

WeldDch, Naehriehten von jetztlebenden Rechtsoe- 
lehrten, partie II, p. 806. - Strieder, Hestische Celehr- 
ten-Gétchichte.t. Vf. — Àdelung , Supplément à Jô- 
cher. — Hirschlng, Histor. titter. Handbuch. — Ench et 
Gruber, Mlgem, Encyklopxdie. 

* ieblbf {Alexis- Ivanovitch) y écrivait russe, 
vivait au milieu du dix-septième siècle. 11 était 
secrétaire du tzar Alexis Mikhaïlovitsch, et 
fut adjoint, en 1650, au boyard Xolstchaninof 
pour aller en ambassade chez le tzar d'Iméritie 
Alexandre; il rédigea le Journal de cette am- 
bassade, qui se conserve à la Bibliothèque syno- 
dale de Moscou. F* A. G — h. 

Documents inédits. 

iermak (lïmoféef), ataman kosaque, au- 
quel la Russie est redevable de la possession de 
la Sibérie, mourut le 6 août 1584. Effrayé par la 
conquête de Kasan (1552), le khan de Sibérie 
Iédiguer s'était reconnu tributaire divan IV (1); 
mais ce khan nogaïs ayant été chassé par Kout- 
choum , d'origine kirguize , moins pacifique qu'Ié- 
diguer, le tzar, occupé ailleurs, fut obligé de 
renoncer à étendre sa puissance, et confia aux 
marchands Strogonof le soin de garder ses fron- 
tières asiatiques. Ces Médicis du Nord appelèrent 
à leur aide leurs voisins les Kosaques du Don, 
dont la licence n'était pas sans danger pour 
eux, et formèrent avec leur chef Iermak, sans 
l'agrément d'Ivan, le projet non-seulement de 
repousser les Tatars , mais encore de les sub- 
juguer. Iermak avait 540 hommes, les Strogonof 
en avaient 300 : c'est avec cette faible troupe 
d'une moralité plus que suspecte qu'lermak se 
lança, à travers d'incalculables périls , à la con- 
quête de ces immenses et glaciales provinces, 
dont la Russie tire son principal bien-être. Après 
avoir défait à plusieurs reprises des hordes in- 
nombrables, il livra une bataille sanglante à 
Koutchoum, près de l'Irtich, fit prisonnier son 
fils Mametkoul et entra triomphant en 1581 , à 
la tête d'une bande réduite à 400 individus , dans 
Isker ou Sibir, situé à seize verstes de la capi- 
tale actuelle de la Sibérie. A peine vainqueur, à 
force de ruse et de vaillance , il dépêcha son lieu- 
tenant Ivan Koltzo auprès du tzar pour lui de- 
mander grâce et lui offrir tout le profit de sa vic- 
toire. Koltzo ) condamné peu auparavant à être 
écartelé, fut accueilli au Kremlin comme Pen- 

(l) Ce qui Indique que cette partie du inonde était bien 
découverte avant 1563, quoi qu'en dise Voltaire, Histoire 
de f Empire de Russie sous Pierre le Grand. 



785 



IERMAK — IFFLAND 



786 



voyé d'ail souverain, et retourna près de son an- 
cien compagnon de désordre, comblé de récom- 
penses et de présents. Cependant l'étoile d'Iermak 
devait bientôt pâlir. Assiégé par Karatcha, 
mouzza de Koutchoum, il parvint à lui échap- 
per et à détruire des miniers de Tatars et d'Os- 
tiaks ; mais, surpris une nuit par Koutchoum 
lui-même sur les bords resserrés du Vagaï, où 
il l'avait perfidement attiré , Iermak finit par plier 
sons le nombre de ses agresseurs, et le pied lui 
ayant manqué en sautant sur une nacelle peu éloi- 
gnée du rivage, gêné parle poids d'une splendide 
armure qu'il portait par respect pour le tzar qui 
la lui avait envoyée , il périt dans les flots dn 
Vagaï. Lévesque rapporte, dans son Histoire de 
Russie (Paris, 1782, 5 vol. in-12), qu'Iermak avait 
dans son armée un moine fugitif et trois popes 
qui célébraient régulièrement le service divin, 
auquel il faisait assister ses Kosaques. Ce chef 
de brigands, qui se faisait un jeu du meurtre 
et du pillage, craignant que les péchés contre la 
pureté n'attirassent sur lui la colère divine, fai- 
sait plonger dans l'eau ceux de sa troupe qui 
s'en rendaient coupables, et ensuite il les faisait 
mettre dans les fers pour trois jours. Avant de 
s'emparer de Sibir, il prescrivit un jeûne de qua- 
rante jours pour appeler la bénédiction du ciel sur 
son entreprise. Ces détails peignent les mœurs de 
la race hère et étrange que le courage dlermak 
a illustrée. Un grand nombre de légendes ont 
conservé parmi le peuple russe le souvenir des 
exploits de cet étonnant aventurier, auquel l'i- 
magination prête une taille gigantesque. Un des 
meilleurs poètes actuels de Moscou, Khomiakof, 
en a fait le héros d'une tragédie nationale et es- 
timée. P* e A. Galitzin. 

Miller, Opisanie sibirskaço tzarstra; Saint-Pétersb., 
1750. — JmerUie lioudi Strogonovi; Saint-Pétersb., 1841. 
— Bousskaia litoria oustrialova. 

■ iezdedjeed i er , ii , ni , rois de Perse. Voy. 
Yezdedjerd. 
iézid. Voy. Yézid. 

IÉZ1ERSKI. Voy. JÉZIERSKI. 

ierzmanowski (François). Voy. Jerz- 

MANOWSKI. 

iffland (Auguste-Guillaume), acteur et 
poète dramatique allemand, né le 19 avril 1759, 
à Hanovre, mort à Berlin, le 22 septembre 1814. 
A l'âge de six ans, il assistait un jour à une repré- 
sentation théâtrale : l'impression qu'il éprouva fut 
si vive que la carrière qu'il a suivie se rattache 
certainement à cette soirée. De retour chez lui, 
cet enfant, rempli d'imagination , essaya de re- 
produire avec un zèle naïf ce qu'il avait vu et 
entendu. Son père, pour étouffer dans son germe 
cette passion naissante, n'épargna ni les repro- 
ches ni les punitions; il conduisit son fils plus 
fréquemment au service divin, et Iffland raconte 
dans ses Mémoires (1) qu'il essaya en vain de 



Ci) Meine theàtralische Laufbahn ( Ma Carrière dra- 
matique ) , t. l* r de ses Œuvres complètes. 



retrouver en (ace de la chaire les brûlantes émo- 
tions du théâtre. « L'orateur ne parlait pas comme 
tout le monde ; il psalmodiait sur un ton lugubre 
et larmoyant. Personne n'entamait une conver- 
sation aveclui; plus d'un auditeur s'était endormi. 
Ah I quand je songeais à ces belles figures , inon- 
dées de lumière, qui parlaient, qui agissaient 
comme nous, que mon imagination était alors 
éveillée , électrisée ! » Cet aven caractérise bien 
l'acteur futur. Quelques années plus tard, Iffland 
assiste à la représentation de Sara Sampson , 
de Leasing. « Jusqu'ici (c'est encore lui qui parle) 
je ne connaissais les souffrances des hommes que 
par les histoires bibliques de Hubner, ou par les 
pauvres qui demandent l'aumône dans la rue; 
je n'avais aucune idée d'une pareille langue, 
d'une histoire aussi douloureuse... A partir de 
ce moment, le théâtre devint pour moi une 
école de sagesse et de nobles sentiments. » Mais 
son père le contrariait de plus en plus dans son 
goût théâtral. Le 21 février 1777, le jeune Iffland 
assistait à la représentation d'une comédie de 
Gotter, probablement à l'insu de ses parents ; 
tout à coup arrive au parterre une missive qui 
lui ordonne de rentrer au logis. Irrité par les 
reproches, sans doute fort sensés, qu'on lui 
adressait, humilié, blessé au vif, il oublie tout, 
son devoir filial , le bonheur de la maison pater- 
nelle, la fortune qui l'attendait; il ne voit plus 
que l'art, sa religion à lui; il n'entend que la 
voix de cette irrésistible passion du théâtre qui 
l'avait saisi au sortir du berceau , pour ne l'a- 
bandonner que la veille de sa mort; il part, il 
s'enfuit, et se fait acteur. Le 15 mars 1777, il 
monte pour la première fois sur les planches, à 
Gotha, dans une comédie d'Engel, où il rem- 
plit le rôle d'un vieux juif. Le public , devinant 
en lui le grand comédien , l'accueillit avec faveur* 
Après la mort du directeur Eckhoff, Iffland se 
rendit de Gotha à Manheim, où son remarquable 
talent se développa avec rapidité, et où il com- 
mença à écrire lui-même des pièces pour le 
théâtre. L'Allemagne n'oubliera jamais que c'est 
à Iffland qu'elle doit Schiller. Sur la fin de 1781, 
un jeune homme inconnu vint présenter à Iffland 
le manuscrit d'une tragédie intitulée : Les' Bri- 
gands , et, le 13 janvier 1782, Iffland créa le 
rôle de Franz Moor. De 1784 à 1785, il composa 
Le Crime par ambition, La Pupille, Les Chas- 
seurs , et obtint par ces drames un grand succès 
comme auteur dramatique , après avoir échoué 
dans quelques essais antérieurs (Albert de 
Thurneisen, en 1781 ). Attaché à la cour élec- 
torale, qui le traitait avec distinction, Iffland 
refusa les offres qui lui arrivaient de Vienne , de 
Berlin, et , au plus fort de la tourmente révolu- 
tionnaire , pendant les sièges que Manheim eut 
à soutenir, il ne désespéra jamais de sa position 
comme directeur: il tint bon jusqu'en 1796, où 
des querelles désagréables avec le baron de Dal- 
berg lui firent désirer un changement de position. 
Appelé à la direction du théâtre national de Ber- 



787 



IFFLAND — IGELSTROM 



788 



lia, il quitta Manheim, le cœur brisé. Des succès 
éclatants l'attendaient dans la capitale de la Prusse, 
dont il releva le théâtre. En 1800, il fut saisi 
d'une douleur patriotique à la tue des loges 
remplies de Français qui ne pouvaient compren- 
dre que son jeu muet ; aux ordres qu'on lui in- 
tima de faire représenter sur le théâtre berlinois 
des pièces blessantes pour l'honneur national de 
la Prusse , il opposa une noble résistance , et 
plus d'une fois il fut sur le point d'être arrêté 
et déporté en France. En 1807, à la rentrée du 
roi Frédéric-Guillaume m , il fut décoré de l'Ai- 
gle Rouge. En 1811, sa santé, épuisée par les 
fatigues de la composition et du théâtre, com- 
mença à donner des inquiétudes à ses amis'; 
Iffland fit un voyage dans les villes qui avaient 
été témoins de ses premiers succès : il revit 
Manheim , et ce fut pour la dernière fois. Ne 
consentant jamais à se soumettre aux avis des 
médecins , qui lui ordonnaient de renoncer à la 
scène, il hâta le terme de sa carrière. 

Les contemporains dlffland parlent tous de 
. son talent d'acteur avec admiration et enthou- 
siasme. Il saisissait merveilleusement l'ensemble 
d'un rôle, le dominait, et savait éviter toute 
routine théâtrale. Par des études constantes sur 
l'art qu'il exerçait et par une sagacité instinc- 
tive , Iffland avait atteint la perfection. Rien n'é- 
galait le naturel avec lequel il jouait les pères 
nobles; il excellait dans le haut comique; mais, 
dans la dernière partie de sa vie , son embon- 
point ne lui permettait plus de jouer la tragédie. 
Il était d'une taille assez petite, et ressemblait un 
peu à Garrick ; son œil était noir et brillant, et son 
jeu très-souvent se concentrait dans son regard. 
Comme tous les grands artistes , il produisait les 
plus grands effets par les moyens les plus sim- 
ples; jamais le jeu de sa physionomie n'allait 
jusqu'à la charge. Quelquefois il improvisait avec 
une heureuse assurance , et suppléait avec une 
grande présence d'esprit à une disposition scé- 
nique défectueuse et au manque de mémoire de 
ses camarades. 

Comme auteur dramatique , Iffland n'a pas eu 
moins de vogue. Ses drames offrent de bons ta- 
bleaux d'intérieur et des caractères vrais, em- 
pruntés à la vie bourgeoise. Une sentimentalité 
un peu monotone fait le fond de toutes ses pièces, 
qui manquent d'ailleurs de cette force comique , 
de cette ironie mordante et misanthrope qui cons- 
titue la véritable comédie. Iffland n'avait point , 
dans son imagination, l'élan créateur qui fait le 
grand poète. Il a introduit sur la scène allemande 
le genre larmoyant que Kotzebuë et ses imita- 
teurs ont singulièrement outré. Aussi Schiller, 
dans une de ses épigrammes intitulée VOmbre 
de Shakspeare , se moque-t-il un peu de cette 
piteuse cohue de colonels de hussards , de con- 
seillers de justice et d'épiciers, qui sont venus 
chasser les dieux et les héros, et de cette justice 
distributive qui , pour ménager la sensibilité des 
femmes, punit uniformément le vice et convie, à 



la fin du cinquième acte , la vertu à un festin 
splendide. Les personnages d'Ifflarjd moralisent 
toujours, et malheureusement ils expriment 
leurs sentiments dans une prose traînante et 
raboteuse. 

Ce jugement, un peu sévère, n'est applicable 
d'ailleurs qu'à la généralité des drames et des co- 
médies dlffland. Dans le nombre , il y a des 
pièces vraiment distinguées : nous ne citerons 
que Les Chasseurs, les Soldats, Les Céliba- 
taires, La Journée d* Automne, La Dot, Le 
Joueur, Le Magnétisme, Les Avocats, etc. 
Le mérite des pièces d'MDand est dans le con- 
traste entre les mœurs des villes et celles de la 
campagne, dans la peinture fidèle de H classe 
moyenne à la fin du dix-huitième siècle. Iffland 
peint à merveille le bonheur domestique, la na- 
ture morale de l'homme , et fait vibrer des cordes 
dans tous les cœurs "bien nés. Sa vie privée était 
exemplaire; marié depuis 1796, 11 ne souffrit 
jamais que sa femme s'engageât au théâtre. On 
a faussement accusé Iffland d'an orgueil excessif: 
il était réservé , mais il n'avait pas même la va- 
nité permise à un artiste. II aimait l'art d'une 
façon vraiment désintéressée. 

Iffland a écrit des traités remarquables sar 
l'art théâtral, qu'il a consignés dans VAlmanach 
dramatique de Berlin (1807-1809) (1). Ha lui- 
même publié ses Œuvres dramatiques àLeipzi», 
en dix-hnit vol., 1798-1809. Un choix de ses ou- 
vrages dramatiques a paru à Leipzig, en onze vol. 
in* 18, 1827-1828. Il existe aussi quatre volumes de 
traductions et de piècesarrangées ( Berlin, 1808- 
1812). [L. Spach, dans YEncyc. des G. du M.] 

Iffland, autobiographie; dans le premier vol. de ses Œu- 
vres dramatiques. — L. Funck, Brinntrunçen ans éem 
Leben zweier Schauspieler ; Leipzig, 1858, — Mémoires 
d' Iffland avec une notice sur ses ouvrages ( Paris, 18*3), 
trad. par Picard. 

* igelstrom ( Le comte Joseph ), général 
livonien, mort en 1817, joua un rôle important 
en Pologne en 1764, sous les ordres du fameux 
prince Repnin. C'est lui qui mit la main sur 
Gaétan Soltyk , évêque de Cracovie, et le fit pri- 
sonnier avec les principaux seigneurs qui s'op- 
posaient aux vues de l'impératrice Catherine. 
Lié avec la maltresse du faible Poniatowski, il 
savait par celle-ci les secrets d'État et les com- 
muniquait à son chef. Igelstrom se conduisit 
mieux en Turquie dans l'armée do prince Gali- 
tzin (1769) : il assiégea et prit Akerman; dis- 
tingué par le prince Potemkin , à la suite de ce 
fait d'armes, il devint successivement général 
gouverneur de Simbirsk (1784), de Pskof (1792), 
et de Kief (1793). Les devoirs, de cette charge 
le ramenèrent en Pologne au moment où ce pays 
se soulevait contre ses puissants voisins (17&): 
ce fut à grand'peine qu'il parvint à se faire jour 
avec 300 hommes à travers les rues ensanglan- 
tées de Varsovie. Il perdit alors la faveur de 

(i) Cet ouvrage a été traduit en français ( Berlin, MM» 
in-16). 



789 



1GELSTR0M — IGNACE 



790 



l'impératrice. L'empereur Paul, à son avène- 
ment au trône (1796), lui confia le gouvernement 
d'Orembourg, mais l'en priva deux ans après. Par 
suite de cette seconde disgrâce, lgelstrom se 
retira en Livonie aveè beaucoup de décorations 
sur sa poitrine et quelques remords peut-être 
sous ces hochets. P ce A. G. 

Banticb-Kamenskl , Slovar doshpamiainikh lioitdêi 
nmsêhoi zetnli. — Àuhlière , Anarchie éé la Pologne* 
- Kértllo , Histoire de la Owerrt entre lé Rmtêie et ta 
Turquie; Saint-Pétcrsbourgj 1778. 

IGNACE ( Saint) OU 1GNATIUS ( *Iyvdtio; ), 

d'Antioche, un des pères apostoliques, appelé 
aussi Theophorus ou Deifér ( 6 6eo?opo< ), 
vivait dans le premier siècle dé l'ère chré- 
tienne (1). On ignore le lieu de sa naissance (2)* 
Suivant saint Chrysostome, il conversa avec les 
apôtres et fut nommé par eux évéque d'Antioche* 
Théodoret ajoute que l'apotre Pierre lui imposa 
les mains ; mais cette assertion ne s'accorde pas 
avec le récit d'Eusèbe, qui place l'ordination d'I- 
gnace en 69 après J.-C., c'est-à-dire après la 
mort de saint Pierre et de plusieurs des apô- 
tres. On sait peu de chose sur l'épiscopat de 
saint Ignace. Les Actes de son martyre ( Mar- 
tyrium Ignatii ) le montrent plein de zèle et 
de fermeté pour son troupeau pendant la per- 
sécution de Domitien, laquelle passa sans faire 
beaucoup de mal à l'église d'Antioche. Une 
épreuve plus difficile était réservée à cette Église, 
fcn 107 Trajan visita Antioche, et commença 
immédiatement une violente persécution contre 
les chrétiens. Ignace s'offrit au martyre pour 
sauver son troupeau, et se présenta devant l'em- 
pereur. Après un court entretien rapporté dans 
e Martyrium , Trajan ordonna que saint Ignace 
ut conduit à Rome et jeté aux bêtes féroces 
ta eirque pour le plaisir du peuple (ut sitpastus 
f erarum 9 ad dêlectationem populi ). Pendant 
ette longue route » saint Ignace eut la permission 
le communiquer avec les chrétiens des villes qu'il 
raversait. Il fut exposé dans l'amphithéâtre ro- 
nain à la fête du treizième ( Vj Tpiaxai&exary) ) , 
'est-à-dire le treizième avant les calendes de 
mvier ou le 20 décembre : c'était une des sa- 
urnales. Les amis du martyr, recueillant ce qui 
estait de son corps, rapportèrent ces débris à 
ntioche, et les ensevelirent hors de la ville. 

fi) Saint Ignace, datit sa conversation avec Trajan, ««» 
ique cette épUhètc flâna le aen» de « celui qnt a le CM* 
in» «on cœur ». De» autours grecs, lai donnant un moi 
nsH , la rendent par « celai qui est porté par Dieu », 
pposant que Ignace était -le petit enfant que le Set* 
iear prit dans ses bras ( saint Hlarc, IX, se ). Cette m- 
rprétatlon, loin d'être appuyée sur aucun témoignage, 
t contredite pat saint Chrysostome, qui affirme en passant 
le satnt Ignace ne vit Jamais Jésua-Chriat ( In S.fynaL 
•mil. ). Si saint Jérôme prétend le contraire ( De rt* 
tut., o. t6), c'est d'après un passage mal compris d'Eu- 
be. 

t) On avait cru trouver dans Abulfarage ( fHst. Dy* 
$t.. VII, p. il, édit. Poeock; Oxford, îees ) que saint 
aace était né à Nura , et on supposait que cette ville 
ut Nura en Sardaigne ou Nora en Cappadoce. Mais 
dernières recherches de M. Cureton montrent que 
mou d'Abulfarage ne se rapportent pas au Ueu natal 
saint Ignace, 



Plus tard l'empereur Théodose il les fit trans- 
porter dans la ville même et placer dans une 
église qui avait été le temple de la Fortune. L'É- 
glise romaine célèbre le martyre de saint Ignace le 
1 er février, et l'Église grecque plus exactement 
le 20 décembre. On a beaucoup disputé sur la 
date de la mort de saint Ignace. Les meilleures ' 
autorités la placent en 107, tandis que quelques 
critiques la reportent jusqu'à l'année 116. 

Le fait que saint Ignace, évéque d'Antioche, 
écrivit des épltres à différentes communautés 
chrétiennes peu de temps avant son martyre 
est suffisamment attesté. Elles sont mentionnées 
par des auteurs respectables du second et du 
troisième siècle, saint Poly carpe, saint Irénée, 
Théophile d'Antioche et Origène, qui citent trois 
épltres, sans indiquer qu'il en existait d'autres» 
t)ans le quatrième siècle, cependant, Eusèbe 
mentionne sept épltres qui de son temps cou- 
raient sous le nom de saint Ignace.; mais il en 
parie avec une réserve qui prouve qu'il n'était 
pas parfaitement sûr de leur authenticité. Il re- 
marque que les Épttres aux Romains et à Po- 
lycarpe avaient été mentionnées par d'anciens 
écrivains ecclésiastiques; il aurait pu y ajouter 
le témoignage d'Origène en ce qui concerne VÉ- 
pitre aux Êphésiens. Mais ni lui ni aucun 
autre ne citent de témoignage en faveur des 
Épttres aux Magnésiens , aux Tralliens, aux 
Philadelphiens , aux Smyr nient. Nous igno- 
rons si Èusèbe, outre les sept épltres qu'il cite, en 
connaissait d'autres ; mais aujourd'hui nous pos- 
sédons sous le nom de saint Ignace quinze Épt- 
tres , dont douze en grec et trois en latin. Sui- 
tes douze en grec, sept passent pour authenti- 
ques, savoir : Aux Êphésiens ( llpo; 'Eçg'aiovç ) ; 
— Aux Magnésiens ( Ma-rvYidieudiv ) ; — Aux 
Tralliens ( TpaXXtavoî; ) • — Aux ' Romains 
( îlpnç 'Pw|AaCouç); — Aux Philadelphiens 
( fciXac^pewiv ) ; — Aux Smyrniens (I|ivp- 
vatoiç); — A Poly carpe (IIpô; IIoXuxapTtov ); 
On a deux recensions du texte grec de ces Épl- 
tres, Tune plus courte et qui passe pour à peu 
près authentique, l'autre plus longue et qui a 
dû être très-interpolée. Il existe deux anciennes 
traductions latines qui correspondent assez exac- 
tement aux deux recensions, et dont la plus 
étendue est la traduction vulgate; l'autre ver- 
sion fut découverte et publiée par l'archevêque 
Usher. Les cinq autres épttres grecques pas- 
sent pour apocryphes; en voici les titres : A 
Marie, à Nèapolis, près du Zarbus ( npôç Ma- 
piav et; NeontoXiv rjv irpoc xG> Zapé$) OU à 
Marie Cassobolite (IIpoc Mapiav Kaaaoêo- 
Xittjv ) ; — Aux habitants de Tarse ( IIpo; toù« 
èv Tap<Tq>); -^ Aux habitants # Antioche 
(Iïpoc Avrioxeîç); — ■ A Héron, diacre d'An- 
tioche ( Ilpèç "Hpcova, Siàxovov AvrioxeCaç ); — 
Aux habitants de Philippe ( np6ç q>iXitctoi- 
atouç). Il existe deux traductions latines de 
quatre de ces épltres , la version commune ou 
vulgate et la nouvelle version publiée par Usher. 



791 



IGNACE 



792 



Pour YÉpttre aux habitants de Philippes f 
on n'a que la traduction vulgate. Outre les douze 
épltres grecques, on en possède trois autres, 
fort courtes et en latin seulement : Sancti Joannx 
JBvangelistx ; — Ad Eundem; — Beatee Vir- 
gini ; la Lettre à la Vierge est suivie d'une 
' réponse deceHe-ci (Beat a Virgo Ignatio).T)e 
la collection épistolaire de saint Ignace , les trois 
lettres latines avec la réponse de la Vierge paru- 
rent les premières à Paris, 1495, in-4*. Le Ferre 
d'Étaples publia la traduction latine des onze 
lettres grecques (celle de Marie Cassobolite était 
omise ) à la suite des œuvres de Denys i'Àréo- 
pagite; Paris, 1498, in-fol. Ces onze épltres fo- 
rent réimprimées à Venise en 1502, à Paris en 
1515, à Baie en 1520, à Strasbourg en 1527; 
Symp. Cbamperius les réunit aux trois lettres 
latines, y ajouta YÉpttre à Marie, et donna an 
public la collection complète, sous forme latine, 
des épltres de saint Ignace; Paris, 1516, in-4*; 
souvent réimprimée dans le cours du seizième 
siècle. Le texte des douze épltres grecques parut 
par les soins de Yalentin Paceus , Dillingen, 1 557, 
m-8° ; réimprimé à Paris, 1558, in-8° ; publié 
de nouveau, par André Gesner, avec une traduc- 
tion latine de Jean Brunner, Zurich, 1559, in- 8°. 
Quoique les éditions de Dillingen et de Zurich 
aient été faites sur des manuscrits différents, 
elles donnent l'une et l'autre le texte des sept 
premières épltres dans la forme la plus étendue. 
La récension la plus courte n'avait pas encore 
été découverte. On commençait déjà à discuter 
l'authenticité des épltres. Les auteurs des Cen- 
turies de Magdebourg exprimèrent les premiers 
des doutes; Calvin déclara toute fa collection 
apocryphe. Ce fut pour les catholiques un motif 
d'en maintenir l'authenticité. Yedel, professeur 
à Genève, n'admit comme véritables que les 
sept premières épltres, et, dans celles-ci, il es- 
saya de faire la part des interpolations ( Sancti 
tgnatii qux exstant omnia; Genèye, 1623, 
in-4°). La controverse en était là^lorsque l'ar- 
chevêque Usher lui fournit une base plus solide 
par son édition intitulée : Polycarpi et lgnatii 
Epistolœ, una cum vetere vulgata interpréta- 
tione latina 9 ex trium manuscriptorum codd. 
collatione, integritati suée restitutae. Accessit 
et 1 Ignatiarum Bpistolarum versio antiqua 
alia, ex duobus manuscriptis in Anglia re- 
pertis, nunc primum in lucem édita. Quibus 
prxfixa est non de lgnatii solum et Polycarpi 
script is f sed etiam de apostolicis constitution 
nibuset canonibus démenti Romano tributis 
Jacobi UsseriDissertatio; Oxford, 1644, in-4°. 
Vossius donna presque aussitôt la plus courte 
récension de six épltres d'après un manuscrit de 
la bibliothèque Médicis à Florence; Amsterdam , 
1646, in-4 . La plus courte récension de YÉpître 
aux Romains manquait dans le manuscrit de 
Florence, et fut publiée plus tard par Leclerc, 
sur un manuscrit de la bibliothèque de Colbert. 
Usher profita de l'édition de Vossius pour ajouter 



un appendice à la sienne : Appendix Igna- 
tiana, in qua continentur sancti Tgnatii épis- 
tolx géminée, a posterioris interpclatoris 
assumentis liber» , ex grseco Medicxo exem- 
, plari expresses et nova versione latma expli- 
catx; lgnatii Martyrium; a Philone, Âga- 
thopode et aliis, qui passioni Ulius inter- 
fueranty descriptum ex duobus antiquisla- 
Unis ejusdem versionibus, nunc primtm in 

lucem editum In lgnatii..» acta,at- 

que in Epistolas, etiam Ignatio perperam 
adscripta, annotationes ; Londres, 1647, in-4 9 . 
Lorsque les travaux de Usher et de Vossius 
eurent fixé le texte des épltres, le protestant 
français Daillé dirigea contre leur authenticité 
l'attaque la plus redoutable, en 1666. Pearson 
lui répondit, en 1672, dans ses Vindicte Igna- 
tianss, qui épuisèrent la question ; et cette longue 
controverse aboutit à reconnaître l'authenticité 
des sept épltres dans leur forme la plus courte, 
et sauf quelques interpolations. Les épttres de 
saint Ignace se distinguent par la simplicité des 
pensées et la ferveur des sentiments religieux. 
On y remarque surtout l'ardeur avec laquelle 
le saint se précipite vers la mort, et réclame 
la couronne du martyre. Des citations peuvent 
seules donner une idée de ce prodigieux amour 
de la mort. Voici des passages de YEpttre aui 
Romains : « Je vous écris vivant et désirant 
passionnément mourir ( êpûv wv àitoOaveTv ). 
Mon amour ( des choses mondaines ) est cru- 
cifié , et il n'y a pas en moi de feu ami de b 
matière ; mais l'eau vivant et parlant en moi 
( TEsprit-Saint ) me dit intérieurement :*« Tiens 
au Père. » Je n'ai plus goût à la nourriture cor- 
ruptible et aux plaisirs de cette vie. Je veux le 
pain de Dieu, le pain céleste, le pain de vie 
qui est la chair de Jésus-Christ ; je veux la boisson 
de Dieu, son sang, qui est l'agape incorrup- 
tible, et la vie éternelle. » — « J'écris aux églises 
et je tous mande à tous que volontiers je meurs 
pour Dieu, si vous ne m'en empêchez pas. Jp 
tous adjure de ne pas montrer pour moi une 
bienveillance ; intempestive. Laissez-moi être la 
nourriture des bêtes féroces par lesquelles il 
est donné d'arriver à Dieu. Je suis le froment de 
Dieu, et les dents des bêtes me moudront afia 
que je sois trouvé le pain pur du Christ Ca- 
ressez plutôt les bêtes, afin qu'elles me soient in 
tombeau, et que rien ne reste de mon corpi 
Alors je serai vraiment disciple du Christ, lorsque 
le monde ne verra plus moncorps. » — « Laisses 
moi jouir des bêtes féroces ( 'OvaC^v tôW (bjpt»») 
qui me sont préparées ; je voudrais les rencontrer 
bientôt. Je les caresserai pour qu'elles me man- 
gent promptement, et ne reculent pas enrayées 
sans me toucher; si elles ne veulent pas medt- 
vorer, je les y forcerai. Laissez-moi faire, je 
sais ce qui m'est profitable. Que rien dans les 
choses visibles et invisibles ne m'empêche de 
posséder Jésus-Christ. Feu et croix, troupeau* 
de bêtes féroces, instruments qui tranchent 



793 



IGNACE 



794 



et déchirent, fractures des os, amputation des 
membres, broiement de tout le corps, atroces 
tortures du diable; que tout vienne fondre sur 
moi, pourvu que j'obtienne Jésus-Christ. » On 
a blâmé quelquefois ce désir insatiable du mar- 
tyre ; il faut blâmer surtout les magistrats ro- 
mains qui n'en comprenaient pas la grandeur 
morale, et qui, avant de le satisfaire par des 
supplices, l'avaient fait naître par leur intolé- 
rance. 

Les épîtres de saint Ignace et les actes de 
son martyre ( Martyrium Ignatii ) ont été re- 
cueillis dans les diverses collections des Pères 
apostoliques , parmi lesquelles nous citerons les 
Patres Apostolici de Cotelier, seconde édition, 
par Leclerc , Amsterdam , 1724, 2 vol. in-fol., 
et les Patrum Apostolicorum Opéra deC.-J. He- 
fele ( quatrième édition ) ; Tubingue , 1855, in -8°. 
M. Jacobson en a donné une bonne édition , Ox- 
ford, 1838, 2 vol. in-8°, et M. Petermannen a 
publié une récension nouvelle avec des notes; 
Leipzig, 1849, in-8°. Le Martyrium Ignatii, 
donné d'abord en latin par Usher, fut publié pour 
la première fois en grec par Ruinart dans ses 
Acta Martyrum sincera; Paris, 1689, in-4°. 
L'authenticité de ce précieux document est gé- 
néralement reconnue , mais on suppose qu'il a 
subi des interpolations. Un fragment considé- 
rable d'une ancienne traduction syriaque du 
martyre de saint Ignace a été publié par M. Cu- 
reton. 

Une découverte récente a ranimé la contro- 
verse sur les épîtres de saint Ignace en lui 
fournissant de nouveaux éléments. Beaucoup de 
critiques pensaient que même les lettres authen- 
tiques étaient interpolées. La découverte d'une 
ancienne traduction syriaque des Epttres à Po- 
ly carpe, aux Éphésiens, aux Romains, leur 
a donné raison. Cette traduction, trouvée dans 
des manuscrits syriaques rapportés d'un couvent 
du désert de Nitrie en Egypte et déposés aux 
British Muséum de Londres , a été publiée par 
le R. W. Cureton , sous ce titre : The ancient 
syrtac version ofthe Epistles of saint Jgna* 
tius; Londres, 1845, in-8». La traduction sy- 
riaque, qui remonte lu sixième siècle pour VE~ 
pitre à Polycarpe , au septième ou au huitième 
siècle pour les Epttres aux Romains et aux 
Éphésiens, est plus courte que la plus courte 
récension grecque et représente plus fidèlement, 
suivant M. Cureton, les lettres primitives de 
saint Ignace. Le savant éditeur, remarquant que 
les passages omis sont destinés à renforcer l'au- 
torité cléricale et épiscopale, ou à défendre la 
divinité de Jésus-Christ, pense que ce sont des 
interpolations faites au quatrième siècle. L'im- 
portance de cette question a décidé M. Cureton 
a reprendre son premier travail dans une pu- 
blication plus étendue qui a pour titre : Corpus 
Ignatianum : a complète collection of the 
l'jnatian Epistles, genuine, interpolated, 
andspurious together, with numerous ex- 



tracts from them , as quoted by ecclesiasticql 
writers down to the tenth century ; in sy- 
riac, greék, and latin; anenglish transla- 
tion of the syriac text , copions notes, and 
introduction; Londres, 1849, in-8°. L. J. 

Cave, Hist. Hteraria. — Oudin , De Script. Ecries. — 
DalUé, De Scriptit quœ sub DionysU Areopagitse et 
Ignatii Antiocheni rumine circnmf. IAbri duo; Genève, 
1666, in-4». — Pearson, Vindicte Ignatiante ; Cambridge, 
167*, ln-4<>. — Leclerc, Dissertàtiode IgnaUanis Epistolis, 
dans son édition des Epttres. — Lardner, Credibility; — 
Galland, Bibliotheca Patrum; vol. I , Proleg., c. 7, 8. — 
Beyer, Dissertationet II de IgnaUo, veritatit conf essore 
et martyre; Leipzig, 17H, ln-4°.— Dom Cet Hier, Histoire 
des Auteurs sacrés, vol. I, p. 610. — W. Cureton, Vin- 
dicte Ignatianae, or the genuine writings of saint lgna- 
tias as exhibiied in the ancient syriac version vindicated 
from the charge of heresy; Londres, 18 W,' in- 8°. — 
Smith, Diction, of Greék and Roman Biography. — 
Edinburgh Review, Juillet 1949. 

Ignace de Constantinople , le Diacre ou 
Magister, prélat et hagiographe grec, vivait au 
commencement du neuvième siècle. Il fut diacre 
et scevophylax, ou gardien des vases sacrés 
dans la grande église de Constantinople, sous 
les patriarcats de Tarasius (784-806) et de Ni- 
céphore (806-815),*etil semble avoir été lié avec 
ces deux prélats comme disciple et comme ami. 
H apprit de Tarasius la composition poétique. 
On ne sait plus rien de sa vie, sinon qu'il devint 
archevêque de Nicée. On a de lui : Bto; TapaaCou 
tov 7caTptdpxov> KwvffravTivowréXew; (Vie de Ta- 
rasius, patriarche de Constantinople); le texte 
grec est resté inédit ; il en a été publié une tra- 
duction latine dans le De probatis Sanctorum 
Vitis de Surius et dans les Acta Sanctorum des 
Bollandistes, 25 février, vol. Ut, p. 576; — Bto; 
•cou &yio\) Ntxiflpopou, «aTp;dpxou Kwvor. (Vie de 
saint Nicéphore, patriarche de Constantinople); 
le texte grec est donné dans les Acta Sancto- 
rum, 13 mars, vol. Il; Appendix, p. 704; et 
une traduction latine a été insérée dans le même 
volume , p. 294. Ignace composa encore d'autres 
ouvrages, entre autres un abrégé de cinquante- 
trois fablesde Babrius en vers ïambiques. Chaque 
fable n'a que quatre vers. Ces quatrains furent 
d'abord publiés sous le nom de Gabrias , Gabrius 
ou Babrius, dans V Ésope de Aide, Venise, 1505 ; 
ils parurent sous le nom de leur véritable auteur 
(Ignatius Magister) dans le Phèdre de Ritterhu- 
sius; dans la Mythologia Msopïca de Neve- 
let (1). Y. 

(i)On connatt plusieurs antres Ignace byzantins, parmi 
lesquels on remarque t 

ignacb (Iconomaque), contemporain de Théodore 
Studlta ( commencement du neuvième siècle) et auteur 
de quelques vers acrostiches contre le culte des Images, 
publies, avec la réfutation de Théodore Studlta, dans les 
Opéra varia de Slrmond, vol. V, p. 169 ( voy. Fabrlcius, 
B. G., vol. VII, p. 48; Smith, Dict. of G. and R. Biog.). 

*givace de Sélybrle, d'une époque Incertaine, auteur 
d'un Commmtarius in ArtstoteUs scripta togica, en 
manuscrit dans la bibliothèque Saint-Mare à Venise, et 
d'un B(oc xal icoXiteCa t6>v AyCojv OeoaréîiTwv pe- 
Y&ttv {tanXéwv xat t<jairo<rr6Xcov Ktovaravrivov 
xal 'EXévrK (Vie et conversation des très-nsaints et 
«grands souverains apostoliques Constantin et Hélène )• 
Voy. Fabrlcius, B. G., vol. III. p. «10 j vol. VII, p. 44. 



T35 



IGNACE 



796 



r Soldas, M mot Ivvâttoc. - Patate*», BiblMut* 
(*mco, toL I, p.**; VI, p. S7S; VII.p. MjX, p.efT,*». 

i«magb (Saint), patriarche de Constant*» 
nonle, né en 7*t, mortes 23 octobre 876, était 
le pins jeune 6k de Michel Rangabéet daPreeo* 
]>ia, fille de l'empereur Nice>ner#. Il te nom- 
mait Nicétas ayant d'être moine. Inhumefaeasent 
mutilé par Léon V Arménien, pour lui 6ter tonte 
chance au trdae, que oe l n i ei avait usurpé* tan 
j>ère, il se consacra à Dieu dès Page de qua- 
torze ans, dans le monastère de Satyre, dont 
ne tarda pas à être éra afaaé. Appelé au «ftéeede 
Coostantinople par les vœux unanimes du dergé 
et du peuple, il en prit possession le 4 JDUJtf 
846. Vénéré même par ias hétérodoxe* , car ses 
moindres actions, selon Texpressiond'iin feiste- 
rien russe (1), n'étaient inspirées que par la' 
charité, il employa paisiblement les premières 
années 4e son patriarcat à de grandes œuvres; 
mais, ayant refusé la communion à Bardas, 
parce qu'il vivait publiquement avec sa belle- 
fiUe, et son ministère à l'empereur Michel, qui 
avait violenté sa mère Tbéodora, 3 fut arraché 
de son siège en 857, relégué dans 111e de Téré- 
biathe, et les évèques grecs, joués par Bardas, 
mirent a sa place le premier écuyer de l'empe- 
reur, Photos, qui en six jours passa par tous 
les degrés de l'échelle hiérarchique. Pour con- 
solider une élévation aussi rapide, dont les 
annales ecclésiastiques n'offrent pas un second 
exemple, Photius sentait qu'elle devait être 
régularisée par la démission d'Ignace et la con- 
firmation <du pontife suprême. 11 commença par 
user de ruse àl'egard d'Ignace; mais bientôt, après 
l'avoir enfermé sans aliments et vêtements dans 
une étable à chèvres et l'avoir transporté de là 
dans une prison obscure ou des soldats se re- 
layaient pour le inaftraHer, il poussa la cruauté 
jusqu'à le suspendre en l'air, le brûler avec 
des fers chauds et des lames ardentes , le faire 
monter, de grosses pierres aux pieds , sur Je 
tombeau de Constantin Copronyme, formé en 
voûte et de marbre taillé en pointe , et de 
le précipiter du haul de ce monument. Toutes 
ces oruautés ne purent ébranler Ignace. Alors 
Photius recourut à Rome, et adressa la plus 
humble Mies requêtes à Nicolas I er (1% S'A ne 
réussit pas à surprendre sa bonne foi; du moins 
il parvint à corrompre ses légats à Constan- 
tinople; *nais , dès que le ,pape eut connais- 
sance de la* vérité, il déclara «p'Jgnaee alanait 
jamais -été déposé, ne l'ayant été que "par ceux 
qui n'avaient aucun fouvoir, et îl condamna 
son bourreau ooBMiie un intrus. Toutefois, -ne ne 



<i) Natch«l*0léTzei*ovji<»l, Istortt Jfnoh&tto. 

(S) M. A. MouravieUav<uacé(J>r^tfax54ten4ltf jtor- 
kvi; S.-Rg'i **"» p. «jsj^ue ie* Reroalua avouent la 
Dûn-£Xistence de cette lettre de Pbotius. Mais id son 
érudition lui fait déraift .- citée par Wp9los«nriiii- ma- 
nuscrit du Vatican, cette lettre « trouve tant «caHare 
dans un ouvrage imprimé en 1708 en Valaoble, fntitnié : 
T6{ioç Xaçâç, qu'on peut eonnutter à la 
impériale de Paria. 



fut qu'après la fi» tragique de Bardas (29 avril 
666), et celle de Michel (24 sept £67) , et après 
un martyre de neuf ans qu'il fat donné au digne 
successeur de saint Cbrysostome d'être réin- 
tégré dans ses droits et d'en jouir encore onze 
ans. Le premier usage que saint Ignace fit de sa 
liberté fut de prier Adrien a de convoquer un 
cou cite pour remédier aux maux dont l'Église avait 
été affligée. Ce concile, qui est te quatrième 
de Constantinople et le huitième œcuménique, 
entièrement composé d'evéques orientaux, à 
l'exception des représentants de ta papauté, 
«ans rien changer anx dogmes , ne les discuta 
même sas, pur la saison qu'il ne s'agissait pas 
de doctrine à cette époque, mais simplement 
de crime* ecclésiastique» et civil». C'est I*É- 
tjisn gpoaqne à eue tonte seule qui forma ce 
concile, et c'est aujourd'hui 4te toute seule qui 
ranatnrtanatiae, jaaoiane, par une louante incon- 
séquence, etteeofc d'accord avec l'Église univer- 
selle pour célébrer, le 22 octobre, la mémoire de 
son héros. Bratant de zèle pour la foi, saint 
Ignace aurera des docteur» évangétiques jusqu'à 
Kiefi «e sait est «connu par Karamzin (1), et 
preuve «ne fois de pins que c'est a la source la 
plus pure que les Busses doivent les premières 
lueurs de leur foi. Ignace, dit un docte et cous 
«Sencieux historiographe de ne* jour» (2) # est un 
des fAus noble* caractères «toi aient para sur le 
siège de Censtanënople. Il a fourni l'exemple 
des plus grandes vertus comme des plus grands 
malheurs , si toutefois on doit appeler malheurs 
des persécutions essuyées avec la constance la 
plus feéroïque, pour une cause si légitime. On 
avait vu toriller en lui «ne piété «iacère, une 
chasteté angékque , unegnande fermeté de ca- 
ractère, me mstruotion solide et mm attachement 
faviolaMe anx devoirs de «a lignite. Une seule 
faute peut lui être reprochée, c'«at non obstina- 
tion 4 exercer «a iaridintio* *ur la Bulgarie, 
malgrétedéfease des panes, en^uoi il a fait voir 
«•nribienéj étaitdu^le j^ patrie*^ à* Coas- 
tantmople, dansai nosiaien élevée on ils se trou- 
vaient, de se rsnfmner dans le cercle de leurs 
droits et defeure devoirs. Mais Ignace n'a point 
été fertile an aaiutrsiégé, il en reconnaissait la 
primauté? il mettait de la lenteur à en «xécoler 
les ordres, punie qu$ croyait défendre les droits 
de son Église, et il est à pnésnmer qu'il aurait 
eédé à 4a dernière inevitio*, sitodnortne l'avait 
point eawpfis avant de l'avoir reçue. Ce qui est 
«eifen, c'est *quM «et mont dans la commanioii 
de rÉntise; 1e ckè et ia terre se sont déclares es 
sa faveur : le «iei par les nombreux roirades 
opérés à son toauèaau;4a tan» par le culte re- 
tigieuxque lnieat décerné l'une et l'autre ÉgU*e. * 



,(t) Jl, c IV. r<*. aussi .- VU. Basil. Maced., nom. XC, VI, 
p. m, inter. BUt. Byzant. script, post Theopmn.; Pari 
«lis, 1SSS. 
(i) M. l'*à*J*sv,tiiM*ir<$4e.Pk(*Àm. U vu. 



797 



IGNACE 



798 



D*Ttd tTOsétrt, T\è de saint Ignace; ti>gt>ïrt*dt , MO*, 
In-**. — BttMiiiit, simules. — Batliet et G©4escard, 
fées des Sainte. — Miéalatzçptof, PravoslaynobafoUt' 
càeskoi vostotchnoi Tzerkvi. 

* image, voyagsur et moine rusae, natil de 
Smofenak, vivait àkk^ qftatorrième siècle. 
Il a accompagn* «a 1389 ée métropolite Pimeri 
à Oonstaitfeopte, et a lait une relation très-dé* 
taitiée 4e ce voyage, da couronnement de l'em- 
pereur Manuel, auquel â a assisté, et des saint» 
lieux, qu'il a visités : Taticttobef en faisait grand 
cas* et l'a insérée dans le 4 e tome de son His- 
toire de Rmsie. P°« A, G— m. 

Slovar, PUateUnkh ëouTAmmapo TvMm *r.-rw». 
Tzerkvi. 

i6fi Ace me uoveiA ( Saint), célèbre «m- 
dateur de la Compagnie de Jésus, né en 1491 
au château de Loyola (Guipuscoa), mort à Rome 
le 31 juillet 1556. Il était le onzième enfant de 
Bertran Jagnez et de Marina Saez y Balde, fun 
et l'autre de noblesse biscaïenne. A peine âgé 
de quatorze ans, Ignace fut envoyé à la cour du 
roi de CastHle, Ferdinand V, qui rattacha à sa 
personne en qualité de page. Il suivit son souve- 
rain dans «es guerres coatredes Portugais, con- 
tre les Navarrais, contre 'tes Français et surtout 
contre les Sarrasins. Partout il se distingua par 
use valeur «bevalereftaue. S'<il faut en croire ses 
biographes, -ses «xptofts «en amour 'égalèrent «eeux 
des champs de bataille. En 1521 , en défendant 
Pampelune , <u* «édat 4e tanharde le blessa si 
grièvement à la jambe d*e*te , <qaSl «en resta 
boiteux. Cette difformité arrêtait forcément sa 
carrière militaire et galante ; il touxna alors ses 
pensées vers la rengion;et,4uTant «a longue 
convalescence, ïa lecture de quelques hvres de 
piété enflammn son iœa£Hia&ifiv il y puisa une 
dévotion particulière «pour 4a mère de 4'Homwe- 
Bieu. îl se.déciara chevalier de ïa Vierge, et vou- 
lut se battre avec un Maure qui avait contesté 
la virgiarté de Manie O 1 }* £«* usions, «aosées 
sans doute par la fièvre, WS montrèrent fésoset 
Satan se disputant .le monde ; enrôlant les âmes 
et les divisant ten deux o bm ooc jeMeunesyenive 
lesquelles se déciderait., •pour Fétcrnitë, la grande 
lutte de la Aumièce^coutca les ténèbres. Ignace se 
rangea sous é'étendaud 4e 4a Cvoûc : il se «rat 
appelée due mission jproVWeifften> dontle snecès 
assurerait <à jaaoais Ja .gloire'ae Dieu et le bon- 
heur des créature*, *e* îles. «vissant «toutes «par 
'un lien sacré : celui du •euthetirtsme. 41 entra 
dans cette voie par un pèlerinage a Notre-Dame 
,deMoot^errat,en<Cfttakîgnô.,La maladie vint 4e 
•saisir de nouveau : « ^ personne *dev*nt si ridl- 
rcule et si affreuse, que, dès qu'il paraissait dans 
•une ville, les enfants ieduontraieùt auiloigt, lui 
'jetaient des pierres et le suivaient avec de 
, grandes huées (2). » 71 se réfugia dans l'hôpital 
I de Manresa, puis dans une-caverne «hors la *iUe. 



(l) Le P. Booboors, Vie Os saint Ignace. 
(s) Fleuri, Hittotrt Ecclésiastique, «ont. 



Ce lut dans cette caverne qull arrêta le plan de 
de son livre des Exercices spirituels. A peu 
près guéri , il se dirigea sut Barcelone, où il 
s'embarqua pour la Terre Suinte» B arriva à Jé- 
rusalem le 4 septembre 1523. Le contraste de 
son ignorance avec la grandeur de ses vues le fit 
mal accueftHr par les franciscains , auxquels îl 
s'adressa ; mais cet échec fat pour lui une leçon 
utile. Il vit que motus exercices extérieurs et 
plus d'études le conduiraient mieux a son but : 
ri échangea donc son costume de pèlerin contre 
un ptns convenable, et revint à Barcelone, ou il 
n'hésita pas, quoiqu'il eut trente-deux ans, à se 
mettre sur les bancs desécohers. ItaHa ensuite étu- 
dier la philosophie à Alcala et à Seiatnanque. Il 
commença dès lors à catéchiser. V Imitation de 
Jésus-Christ était surtout le texte qu'il dévelop* 
paitde préférence; mais ce thème -s! simple était 
peu goûté des professeurs espagnols ; et les ora- 
teurs ecclésiastiques eux-mêmes en trouvaient 
l'application prématurée. Fatigué des contra- 
riétés qu'il éprouvait dans «a patrie, Ignace 
vint à Paris a» commencement de lévrier *526. 
fl recommença ses humanités au collège Mon- 
taigu , fît de nouveau sa philosophie à celui de 
Sahrte-Bafbe , et enfin sa théologie chez les ja- 
cobins. H fut reçu -maître es arts en 1534. 
Dans ce moment IHsIamismefavait vers l'Afrique 
et l'Orient devant Pépée des Espagnols, des Po- 
lonais, des Hongrois, tandis que le judaïsme 
disparaissait dans les prisons ou sur les bûchers 
delInquisHion ; mais la réforme triomphante ve- 
nait do Nord attaquer le cathoKcisme. De toutes 
parts en Allemagne, en Hollande, en Angleterre, 
en France, tm proclamait la doctrine du libre exa- 
men ; on agitait les questions fondamentales de 
la religion, et chacun était ébranlé dans sa foi. 
Ignace comprit qu'il fallait, sans perdre de temps, 
opposer une forte digue au torrent qui menaçait 
de faire disparaître à jamais les croyances ultra- 
montraines. C'était chose difficile; car l'es- 
prit du siècle se prêtait peu aux associations 
religieuses. Toutefois, après une longue résistance, 
PierreLeFèvre, pauvre prêtre savoyard, se laissa 
gagner; François-Xavier, gentilhomme navar- 
rais, qui professait la rjhilosophie au collège de 
Beauvais, esprit léger et ami des plaisirs, se ren- 
dit à ses instances ; les Espagnols Jahnelainez, 
Alfonse Salmeron, Nicolas BobadHIa, et le Por- 
tugais ftodriguez d'Azevedo, tous étudiants dis- 
tingués , écoutèrent également ses propositions. 
Le 15 août 1534, jour de l'Assomption, Ignace et 
ses amis se rendirent au couvent des religieuses 
de Montmartre. Le Fèvre leur dit la messe dans 
une chapelle souterraine ; puis ils s'engagèrent, 
par un serment solennel, à consacrer leur exis- 
tence au service de la religion, à se contenter 
pour eux-mêmes du strict nécessaire et à faite 
ensemble le pèlerinage de Jérusalem pour y tra- 
vailler à la conversion des infidèles. Le but véri- 
table de l'association n'était pas encore avoué ; 
mais ses membres devaient se réunir tous les 



799 



IGNACE 



800 



ans au même jour. Ignace leur donna rendez-vous 
à Venise pour 1536. Tous furent exacts, et leur 
nombre s'y accrut de trois nouveaux adeptes, 
dont deux Français. La guerre avec les Turcs fer- 
mant aux pèlerins missionnaires les routes de la 
Terre Sainte, Ignace les décida, pour accomplir 
leur vœu, à se mettre à la discrétion du pape, afin 
que le saint-père disposât de leur personne pour 
la défense de la foi catholique. Comme ils quit- 
taient Sienne pour se rendre à leur nouvelle des- 
tination, Ignace eut une vision dans laquelle 
Jésus le fortifiait dans sa résolution par ces mots : 
« Je vous serai propice à Rome (1). » 

Cependant, avant de se présenter devant le 
souverain pontife, Ignace prit le soin d'envoyer 
Le Fèvre et François-Xavier à Rome pour se 
faire des partisans à la cour papale. Il dispersa 
ses autres compagnons, dans le même but, à 
Bologne, à Ferrare, à Padoue, à Sienne, dans 
les grands centres universitaires. * Ils prê- 
chaient sur la place publique, rapporte le 
P. Fabre ; et, comme ils avaient la mine étrangère 
et qu'ils pariaient mal italien, le peuple; qui les 
prenait pour des tabarins et des saltimbanques, 
s'assemblait en foule autour d'eux. » Ils furent 
souvent accusés d'erreur ; et les augustins, entre 
autres, attaquèrent vivement leur enseignement. 
Néanmoins, Ignace se rendit à Rome, et le 15 avril 
1538 il soumit les bases de sa Société à l'ap- 
probation de Paul III. Mais, sur l'opposition du 
cardinal Guidiccioni, il fut décidé qu'il n'y avait 
aucune urgence de créer un ordre nouveau. Ce 
refus ne découragea pas Loyola; il fit présenter 
au pape , par le cardinal Contarini, un projet de 
statuts qui expliquait plus complètement le but 
de l'association qu'il voulait fonder. Outre les 
vœux ordinaires de pauvreté, de chasteté , les 
membres de la nouvelle congrégation promet- 
taient « de servir Dieu et son vicaire sous la 
bannière de la Croix; de travailler au perfection- 
nement des âmes par la prédication et la confes- 
sion ; d'instruire la jeunesse et de propager la 
foi ». Mais ce qui les distinguait des autres 
ordres religieux était «qu'au chef du nouvel or- 
dre appartenait seul le droit d'employer comme 
il l'entendrait tous les membres de la Société, de 
faire, d'après les conseils de ses compagnons, qui 
n'ôteraientrien à son pouvoir absolu, tels règle- 
ments qu'il jugerait convenables; enfin d'accepter, 
malgré le vœu de pauvreté strictement obliga- 
toire pour les membres de l'ordre, toutes les do- 
nations en rentes ou biens-fonds destinés à l'ex- 
tension de la Compagnie et à la prospérité de ses 
établissements ». L'homologation de ce projet 
rencontra une vive opposition dans le collège des 
cardinaux; mais Paul m, en face des dangers que 
^ courait le trône de saint Pierre , ne crut pas de- 
voir refuser les secours que lui apportaient ces 



(l) Cotte vision aurait en Heu a la Storta, village assez 
voisin de Rome et où on l'a représentée dans une église 
bâtie en souvenir. 



dévoués auxiliaires. 11 leur accorda d'abord une 
église consacrée sous le vocable de Giesu (Jésus ), 
d'où la Compagnie prit, en 1539, le nom de Jé- 
suites, puis leur confia des missions dans di- 
verses villes d'Italie. Enfin, le roi de Portugal, 
Jo&o ni, ayant demandé six de ces nouveaux 
apôtres, parmi lesquels François-Xavier, pour 
prêcher la foi dans les Indes, Paul M ne résista 
plus, et, le 27 septembre 1540, par sa bulle Se- 
gimirU militantis Ecclesix, il approuva le nou- 
vel institut, sous la dénomination de Société de 
Jésus. Ignace fut proclamé général de l'ordre 
pour trois ans, le 22 avril 1541, et en rédigea 
immédiatement les constitutions avec le grave 
Jacques Lainez, qui fut avec Loyala le génie 
organisateur de la grande Compagnie des Jé- 
suites (1), 



(l) Solvant Horeri, le P. Cajetan aurait prouvé, dans soa 
F index Benedictormn,qae saint Ignace avait pris sa. rè- 
gle sur celle de Saint-Benoit D'après ce code, que le 
cardinal de Richelieu considérait comme on chef-d'œuvre 
à la fols politique et religieux , le général exerce «ne ao- 
'torité à peu près absolue sur tous les membres de la So- 
ciété. II reçoit et exclut qui 11 veut, nomme à tous les 
emplois, à l'exception de deux , convoque et préside ks 
congrégations ou assemblées générales. Dans le cas oa 
l'âge ou les Infirmités le rendraient incapable de remplir 
les devoirs de sa charge, l'ordre, avec la sanction da 
pape , lui nomme un vicaire général, lequel doit lui «ac- 
céder. Cinq assistants composent le conseU secret du gé- 
néral, . et dirigent, sous ses ordres, les affaires de la société 
dans les cinq principales nations théâtre de ses travaux: 
l'Italie, l'Allemagne ,1a France , l'Espagne et le Portugal. 
Ils pourraient convoquer une assemblée générale pour 
déposer le chef lui-même , s'il menait une vie scandaleuse 
ou dissipait les revenus de l'ordre. Ils sont nommes par 
la congrégation assemblée , comme l'est aussi Fadraoni- 
teur, conseiller intime chargé d'avertir en secret le gé- 
néral de ce qu'il 'pourrait remarquer dlirégutter dans 
sa conduite. L'ordre est divisé en provinces, dont ks 
chefs, dits provinciaux, choisissent; moyennant la sanc- 
tion du général, les supérieurs des malsons professes et 
des noviciats, les recteurs des collèges, et une foule 
d'officiers Inférieurs qui se partagent les différentes 
branches du service. La question da la fortune de l'ordre 
est confiée, à Borne, à un procureur général, et dam 
chaque province,* un procureur particulier. Les maisons 
de prof es ne peuvent posséder d'immeubles : les collèges 
ont ce droit, et ils viennent en aide aux premières. 
Les Jésuites sont partagés en cinq classes. Les ecclé- 
siastiques qui veulent faire partie de l'ordre doivent d'a- 
bord passer deux ans dans celle des novices. Ce temps 
d'épreuve est consacré à les former à l'obéissance et à 
l'abnégation la plus absolue. De cette classe'. Us passes* 
d'abord dans celle des écoliers approuvés , où Ha se lient 
par des vœux secrets, puis dans celle des coadjoteun 
spirituels, où ils font des vœux publics , qnt sont reçus 
par le supérieur an nom da général. Ces deux classes 
sont plus particulièrement chargées de l'instruction ds 
de la Jeunesse, de la prédication, de la direction' da 
consciences. Pour entrer dans celle des profès , 11 fint 
avoir atteint l'âge de trente-trois ans et ajouter aax 
trois vœux ordinaires de pauvreté, de chasteté et d> 
bélssance celui d'un entier dévouement aux ordres da 
paps en tout ce qui concerne les missions. Les profs* 
peuvent être regardés comme les patriciens de l'ordre. 
C'est à eux que sont dévolues les fonctions dunettes de 
supérieurs des missions, de directeurs spirituels da 
princes. Seuls Ils ont voix dans l'élection da général, et 
peuvent remplir ks hautes charges de l'ordre. La cin- 
quième classe, tout à fait en dehors de la hiérarchie 
dont nous venons de présenter le tableau , est ceUe des 
coadjnteurs temporels. Ce sont des laïques qui ne pren- 
nent d'autre engagement que celui de servir l'ordre. 



801 



IGNACE 



802 



Quoique la bulle papale limitât le nombre des 
jésuites à soixante proies, Tordre se* développa 
avec une merveilleuse rapidité. « Il n'eut, comme 
l'a dit. le cardinal de Bausset, ni enfance ni vieil- 
lesse. » Ses membres, au lieu de cacher au fond 
des cloîtres d'inutiles austérités, se jetèrent au mi* 
heu du monde pour mieux le gouverner. Polis et 
savants, habiles d'ailleurs à se plier aux cir- 
constances, ils ne tardèrent pas à prendre dans 
la confiance des fidèles la place qu'avaient occu- 
pée* avant eux les franciscains et les sombres 
donûnieains. lisse donnèrent aussitôt pour tache 
l'instruction des enfants, la récolte des aumônes, 
la conversion des et celle des courtisanes. 
Bientôt ils abandonnèrent les juifs, qui offraient 
peu de chances de succès et de recette ; ils aban- 
donnèrent également les courtisanes, dont la con- 
version donnait lieu à de nombreuses tentations 
et à des accusations continuelles. Les efforts que 
les bons Pères faisaient pour empêcher les jeunes 
filles de se perdre donnant prise à des calom- 
nies, Ignace s'en tint ai sa première mission, celle 
de convertir les infidèles. Déjà'Rodriguez avait 
été associé par Jofto III à la direction morale du 
royaume de Portugal, et, malgré l'opposition du 
peuple et de la noblesse, il augmentait chaque 
jour l'influence de sa Compagnie, à laquelle il fai- 
sait bâtir un superbe collège à Coïmbre. Ignace 
envoya Brouet et Salmeron en Irlande pour dé- 
fendre cette Ile contre les prétentions théologiques 
de Henri VIII; mais le zèle excessif de ces mis- 
sionnaires les fit expulser. Le Fèvre, Le Jay et 
Alonzo Bobadilla furent plus prudents et plus 
heureux en Allemagne. Le premier arrêta la ré- 
forme à Cologne ; le second obtint une chaire à 
Ingolstadt, et Bobadilla devint le conseiller par- 
ticulier de l'empereur. En 1540, seize compagnons 
d'Ignace s'étaient rendus à Paris pour y suivre 
des .cours. Guillaume Duprat, évêque de Cler- 
mont, se déclara leur protecteur ; et l'ordre en- 
tier, le 14 mars 1543, obtint une étendue illi- 
mitée et le pouvoir de changer ou compléter ses 



En dekors de l'ordre proprement dit il existe on assez 
grand nombre de personnes que l'on regarde comme ses 
affiliés et auxquelles on a donné le nom te jésuites dérobe 
courte. Une correspondance régulière et directe avec 
le général concourt A donner de l'unité; à ce corps im- 
mense. 

Les Jésuites n'ont point, à proprement parler, de cos- 
tume dlsttnctif. lia prennent de préférence celui que 
portaient les prêtres à l'époque de la fonda lion de 
l'ordre; mais 11 leor est loisible de le modifier selon les 
pays et les temps. Afin que rien ne détournât ses dis- 
ciples de leur mission spéciale, Loyola voulut qu'ils re- 
nonçassent aux dignités de l'Eglise ; et en effet Sun Jé- 
suite ne peut accepter l'éptecopat; mais, en fermant ainsi 
à l'ambition de ses disciples une carrière légitime , le 
fondateur ouvrit la voie à ses empiétements dans toutes 
les antres carrières, qol ont créé contre eux tant de Ja- 
lousie et de naine, nous ajouterons que la règle de saint 
Ignace Introduisit dans l'Église catholique une forme 
entièrement nouvelle d'association monastique ; elle af- 
franchit tout membre de l'ordre de l'obligation de réciter 
l'office liturgique en commun , chose Inouïe Jusqu'alors. 
De plus, elle substitua {'action à la grâce comme but 
principal. 

HOCV. B10GR* GÉWÉR. — 1. XXV. ' 



statuts sans avoir besoin de l'approbation du che* 
de l'Église. 

Cette concession obtenue , les jésuites déployè- 
rent une nouvelle activité, Xavier avait fondé à 
Goa sa principale station pour la propagation du 
christianisme. Il songeait à convertir les peuples 
de Çochin, de Ceylan, de Malacca : on lui envoya 
des compagnons ; et bientôt l'Europe retentit des 
succès qu'obtenaient les missionnaires jésuites 
aux Indes orientales, au Japon, en Chine, en 
Abyssinie, au Brésil, et au Paraguay. Mais ce 
qui importait davantage à la Compagnie, c'était 
de s'assurer un rôle important en Europe. Il lui 
/allait pour cela l'influence que donne le sacer- 
doce. Ignace, A 1545, obtint la faculté pour les 
membres de la Société « d'exercer les fonctions 
du ministère sacré en tous lieux et dans toutes 
les églises ». Ce privilège a été depuis accordé à 
toutes les corporations appelées au droit cano- 
nique de nullius, c'est-à-dire relevant direc- 
tement du saint-siége. 

Le concile de Trente allait s'ouvrir ;~et "il ne 
s'agissait pas seulement de repousser le protes- 
tantisme, mais de combattre cette tendance, alors 
si répandue,' de réformer l'Église dans son chef 
et dans ses membres. — Soutenir l'ancien édifice 
contre les plaintes des princes les plus puissants 
et contre un certain nombre de prélats savants 
et vertueux, c'était une tache difficile, Lainez, 
Salmeron et Le Jay en furent chargés. lisse pré- 
sentèrent comme avocats de la papauté au con- 
cile de Trente, et se montrèrent constamment à 
la hauteur de leur mission pendant cette longue 
et solennelle révision des doctrines et des insti- 
tutions de l'Église catholique (1545-1562). Ils 
gagnèrent la cause papale; et, il faut le remar- 
quer, depuis lors le protestantisme fit peu de pro- 
grès. Toutefois, le catholicisme, de son côté, ne 
gagna guère de prosélytes sous la bannière mi- 
litante des jésuites; mais ils arrêtèrent, ils re- 
foulèrent même sur quelques points d'Allemagne, 
de Suisse et de France l'élément réformateur. 
Quant aux services que les compagnons d'Ignace, 
que les jésuites rendirent à la civilisation, à 
l'humanité en Asie, en Afrique, en Amérique, ils 
sont incontestables : ces services continuent en- 
core ; et chaque nouvelle étape de leurs mission- 
naires est sanctifiée par le martyre. 

D'immenses progrès dans l'esprit général fu- 
rent les résultats de leurs travaux, accomplis 
partout avec un égal dévouement, une égale ha- 
bileté. En 1550, Henri II, sur la recommandation 
du pape et par l'entremise des Guise, les auto- 
risa à s'établir à Paris et à y professer ; mais le 
parlement refusa d'enregistrer les lettres royales. 
Persévérant dans leur volonté , les jésuites ob- 
tinrent de nouvelles lettres. Guillaume Duprat 
était mort, leur laissant des collèges à Billom, 
et à Mauriac; un hôtel, rue Saint-Jacques ( c'est 
aujourd'hui le collège Louis-le-Grand), à Paris, 
et 36,000 écus de rente. Le parlement renvoya, 
le 3 août 1554, la question d'enseignement de- 

26 



803 



IGNACE 



m 



vaut l'évéque de Paris, Eustaché du Bellay, et 
devant le doyen de la faculté de théologie. Totis 
deux se prononcèrent contre les Jésuites; le 
prélat parisien , statuant même sur la baie pa- 
pale , déclara « qu'elle contenait des cette» en 
opposition arec la raison et qui ne détalent être 
tolérées ni reçues en ta religion chrétienne»». La 
Sorbonne déclara qoe la Société paraJieait « dan- 
gereuse pour la foi , perturbatrice de la pain dé 
PÉglise et plus propre à détruire qu'à édifier »« 
On leur accorda cependant le professorat à 011- 
lom. 

Ignace, auquel le P. Brouet, supérieur des je* 
suites de Paris, rendit comptede l'affaire, l'exhorta 
à se soumettre et à attendre. « Dans certaines 
causes, lui écrivit-il , il vaut mieux se taire que 
de parler; et l'on n'a pas besoin de se venger «h 
de se défendre par la plume quand la vérité se 
venge et se défend elle-même. Quelque grande 
que soit l'autorité des théologiens qui nous eon* 
damnent, elle ne doit point nous faire peur r Dieu 
est notre défense. Mettons notre cause entre 
ses mains et nous triompherons de la calomnie. * 
Ignace fut prophète; car, avant sa mort, le par- 
lement consentit à l'établissement des Jésuites en 
France, parce que cette Société lui parut la plus 
propre à combattre les protestants. 

Cependant, Eustache dn Bellay ayant interdit 
aux jésuites toute fonction ecclésiastique dans 
son diocèse, ils prirent le parti de se soustraire 
à son autorité en allant s'établir dans le quartier 
qui était sous la juridiction de l'abbé de Saint- 
Germain-des-Prés : c'était rester dans Paris, mats 
sans blesser les droits de l'évéque. An surplus , 
les faveurs de la cour romaine dédommageaient 
amplement Loyola de l'opposition que lui mani- 
festait une grande partie du clergé gallican. Non- 
seulement les pontifes Paul III et Jules III avaient 
accordé à leur pieuse milice tous les privilèges 
des autres ordres, mais ils en avaient créé d'ex- 
ceptionnels. C'est ainsi qu'ils avalent reconnu 
au nouvel institut le pouvoir de conférer tons 
les degrés académiques ; et ces degrés devaient 
taire jouir ceux qui les avaient obtenus de 
droits égaux à ceux des gradués des aniversi~ 
tés. En 1545, Jules TU accorda au* jésuites la 
faculté d'exercer le ministère sacré dans tontes 
les églises de la chrétienté, inémé pendant un 
interdit, et de donner l'absolution pour les cas, 
même réservés au saini+siégef ils étaient 
d'ailleurs affranchis de tonte juridiction locale. 

Certes, Ignace de Loyola , qui avait obtenu 
tant de concessions des papes , qui avait triom- 
phé si hautement de la répulsion des monarques 
et des peuples, n'était pas un homme ordinaire, 
en dépit de quelques écrivains, qui n'ont voulu 
voir en lui qu'un instrument. Ignace de Loyola 
était une des individualités les plus caractérisées 
de son époque. Nous pouvons croire, sans trop 
de présomption /qu'il entrevoyait à sa mort ftm- 
men.se succès de son œuvre, congrégation moitié 
ecclésiastique moitié laïque, toujours «Mitante, . 



toujours conquérante; car dé}»* m 1*56, Tordre, 
quoique repoussé en France, comptait don» 
province* an Europe, trois en Amérique , une en 
Afrique , et une an Asie. Déjà dan» plus de ceo| 
eettége» niile urigréganjatea ptupageaisat bai» 
tentant «es principe» dana Je monde entier- 

11 ne conviant pas è notre cadre de fiujm dam 
se* dév elonpnmwta la Société fondé* par Ignwe 
de Loyola, JDane la netitiqn* elle fut «s qu'elle 
devait être selon le formule 0é«< ut wn*, aui 
mou $int > adoptée pa# km premiers fondateurs: 
le trkihieiiedeUGorapee^ 
eenl but oeebadnn.de sesroeœbres ; mais il foui 
reconnaître que les jésuites ont rendu de grandi 
services à J^ufeanité dan» H wtr action, dans il 
linguistique, dan» le» science* et surtout dan» 
le» nusaiens* qui leur ont fourni l'occasion de 
répandre la lumière dans de nombreuses cen- 
trée» et de servir, an qn*lqnesart»,4» trait d'u- 
nion entra la ejvilisatian et l'état sauvage, 

Penl V béatifia igneee de Loyoie, en 1607, et 
Grégoire XV letononja», en m%\ Urbain VIII 
intreduistt son nom dan» le martyrologe romain. 
êoneorps avait été inhumé dans l'église de Jésus 
de Rome. Sa fête est célébrée H) 31 juillet. On 
connaît d'Ignace de Loyola le» ouvrages suivants : 
IÂbro de In» Ctmstitueioms de l& Compania 
de IBS., trad. en latin par le P, Juan Polaneo, 
Rome 1558 et 1569, in* 9 j Prague» 1567, in-foL; 

— Formula /fiatifeft/ octobre U*ûi —, Carte, 
de la religUua Obediencia, adreaaée fc ses as- 
sociés de Portugal ; avril 1653 ; — Caria de la 
Perfeccte* retigitsa, au% mio* espagnols; 
9 mars 1547 j — Eçeroicioê fiipirituales , trad. 
en latin par André Frueius ; souvent retpriprimés; 
trad. en franoai» par Dronet de Maupertqo» i c'est 
an recueil de méditations qui renferme une ins- 
truction particulière pour la réformation des 
mestirs ; on en a souvent discuté le» principes. 

A. la. 

P. Alegambe, Èibliatheca SockéatU Jësn. — ftiba* 
nelra, PUa de 3. Mgnmeéo, Madrid \W, ta-S°, - Gtor. 
Pietro Mafféi, De Vita et Moribus S. Ignatii Lopolx, 
Rome, In-*». — Stetn, rita Ignatii Loyolee ; 159*. 
In-f9l. - Gretaer, Apologies pro Flta S. Ignatii,- in«o. 
tfadt, ISW-IW*. lfl-8». — te F* lotriiMirt, Vite 49 *** 
Ignace, fondateur delà Compagnie 4e Jésus, w gartiwl. 
tjist. de la Soc. de Jésus. — Ptetro-Patito lombiD», rm 
S. Ignatii; Naples, Mil, in-*». - Mtehté W*lpole, IMe 
of S. IgnatiuS. -± NUsolto AtttonU), MMtotSW» Hu 
pana nova, t. III, p. 6H. - Le Cardinal de Bau&srî. 
Histoire Se Fënehn, t. I. p. !•>«. - b. 4e Guawan. 
Historié dé fis* JHistionest Mute* i*u,l vot> te -Col. - 
Baillet, ries des Saints, Si Juillet. ~ Q«*e)lt . Ute 
des Tieiligen IgHattus von Loyola ; laspraak, ssta, lu r. 

- Crétineau-Jolv, Histoire de» JéMHtss.~ LeCtuvr, Ut* 
du Collège RoUtn. 

*IGNACB, deuxième patriarche russe tfo 
commencement du dts-septième siècle, partis* 
du faux Dmitri, jeté dan» un couvent par Basft 
Chouiski; les historiens eentemporainn s' Accor- 
dent à dire qu'il était catholique. P" A. G—» 

Document relatif m Pmtriareot m*s*qv#*i Par* 
Techener, 1SW. 

* ignagb ( torlévitch), abbé russe du A\\ 



805 IGNACE — 

septième siècle, protesta centre la «entente du 
clergé de Moscou, réuni en lftftft, au concile 
qui condamna le célèbre patriarche Nikon (voy. ce 
nom) à être dégradé et emprisonné pour Je reste 
de ses jours. Il émit «a faveur de ce patriarche 
calomnié on vota toegnerneiat motivé (Qolos), 
qui a été conservé. On a aussi de mi des Ha- 
rangues qu'a a adressés» eu tsar Alexis et à 
divers grands seigneurs. P ce A. G — n. 

Drernaja, RouitJutia BWioteca* V 111. 

iqnacb ra si»m , missionnaire italien du 
dix*septième siècle. H appartenait à Tordre des 
Carmes déchaussés, et alla prêcher l'Évangile en 
Turquie, dans l'Asie Mineure, en Arménie et 
jusqu'en Perse, où !1 séjourna longtemps. Il s'ef- 
força surtout de ramener à la mi catholique les 
sectaires dits de saint Jean ( en oriental Men- 
éaï). Il revint à Rome vers 165o. Ses princi- 
paux ouvrages sont : Narrntief Origiitis È\- 
tttwn et Errorum CkrisHanotum sancti Joan- 
nis, Rome, 1*52, in-a»; réimprimé dans fè 
Recueil des Voyages de Thévenoi On apprend 
dans cette relation de nombreux détails sur l'o- 
rigine et les coutumes des sehismatiques de Syrie ; 
— Qrammatic* Lingues Persicx ; Rome, i 66 i , 
in-4°. A. L. 

teurnml dis SavëttU, ana. 16M. — «tefcard et Glraurf, 
BibUothé^tê seteréé. 

* icn acm (Âir*sM'KorsaMof), métropolite 
deTobolsk, mort à Moscou, le 13 mal 1701. Il 
était stolnik ( offtrier de table ) <m ttar Alex* 
avant d'embrasser la vie eéaobrtique, en 1677, M 
SoloTetzk. fl est oeqHtt par son lèle à étouffe* 
les nombreuses sectes qui minent depuis long- 
temps l'Église russe, et par les oèmges suivants 
que ee sèle lui a inspirés $ un, Rapport sur 
les sectaires de Kostrom&j -* un Sommaire 
de V Histoire de Russie / ces deux travaux sont 
conservés en manuscrit à la bibliothèque de 
l'Académie des Sciences taSafet-Petêrshourg ; — 
des Éfitres fort curieuses ( Bible patriarcale de 
Moscou ) et un Hècit de la Vie et des Prodiges 
du Bh. Siméon , qui doit être enfoui m me* 
nastère de Verkhotoursk. P e4> A. O^-a. 

Slovar , PUateltakh Awkhovnago TôMfia grekotoijUs- 
koi Pzerkvi. - Drevn, ttots. MitHot., t t XIV et XVI. 

IGNACE D* JB8US-JIAHU. Vo$. 8\HBOÎt 

(Jacques), 

IGSACB DK 8AINT-AHTOWB. Vûf. ïtMJOH» 
( Antoine). 

ICLNACH D« RHEINPBL9. Vty. E©€». 

lesiARBA (Nicolas), antiquaire italien, né 
à Pietra-Bianca, le 21 septembre 1728, mort à 
Naples, le 6 août 1808. Après avoir étudié les 
langues et les littératures anciennes an collège 
fondé à Naples par le cardinal Spinelli , il fut 
chargé, a l'âge de vingt ans, d'enseigner le grée a 
ce môme collège, Son ardeur pour l'étude le fit 
remarquer par le célèbre Maztfochi , avec lequel 
il se lia intimement et qu'il fut appelé en 1763 
à remplacer comme professeur de l'interpréta- 
tion de l'Écriture Sainte» emploi dont il Ait 



IGOLINO &06 

chargé définit** ement e» 1771, après la mort de 
Maazochi. Nommé en 1755 membre de l'Aca- 
démie Hereulanèse, il devint en 1782 directeur 
de rimprimerlé royale, et deux ans après pré- 
cepteur du prince héréditaire. Ayant refusé d'ac- 
cepter Vévècbé deReg^e, il fut promu en 1794 
à un canonicat de la cathédrale de Naples. Quatre 
ans après- tt perdit entièrement la mémoire. On 
a de lui i VeHstèton gpitframma in tnarmore 
repertum; Naples, 1759, ta-4° r transcription 
en distiques latins d'une inscription grecque 
trouvée près de TésjTrse des frères de la Mission, 
et explication savante du bas- refief auquel se 
trouvait jointe éette inscription ; — Jbe Pales- 
tre neapotitema; aâeertitur de Buthysix 
agone puleùlano; Naples, 1770, te-4°; dans 
cet «mage, plein d'érudition, Ignarra établit 
qu'une inscription grecque, découverte près de 
la Porta Noiana, s'était trouvée primitivement 
dans le gymnase de Naples; — Doctissimi 
Mazzecki Vita; Naples, t77t, in-8*j — Ùe 
Pkratrils neapolitanis ; Naples, 1797, in-4«; 
l'anteu> y démontre , eontre FopiHion générale 
des antie^naires d'alors, que les associations, 
connues sous 14 nom de Pkratrix, tt étalent pas 
à Naples des confréries religieuses, mais de* so- 
ciétés pofftiqUès | à la fin de l'ouvrage se trouve 
tme dissertation sur le mot Pausilyppe; — 
Opustoli; Naples, f807, in-4 : ce recueil, pu- 
blié par lés soins de Vin. Orsmo, contient des 
dtesertatfor/a sur l'antiquité sacrée et profane, 
des poésies 1 latines, des lettres, etc. E G. 

Oasfatdl; îgnarrse Vita; en tête des Opuscot) d'Ignarra, 
— Biographia degli U-ornini illustri del Reqno\di Napoli, 
t. I. ~ TipaMo, Biogr<tfa(toiK haiwnt W**m, ». IV. 

* WNATnur ( A ndré), voyageur rues*, aumfc- 
nier du comte Toiatoï , ambassadeur dé Pierre I e * 
à Cotstantinople en 1209, est auteur crn» 
Voyage* Jérusalem, dont la famille des comtes* 
Tofctoï possède le manuscrit. P°* A. G—*. 

Boe. partie. 

me»É,iNO de Montecatini, médecin îtalîen, 
né v«^ 1348, à Montecatini, dans la vallée de 
Ntevole en Toscane, mort vers 1425. Hproftssa 
^«ridant vlngt-cii«| ans la médecine à l'université 
de Pise. Lorsque cette ville passa sous la do- 
mination de Jean Gâteaztto, duc de Milan , ît se 
démit de sa place, et se rendit à Jacques, où if 
ftit accueilli par Paul Guinigi. il entra ensuite au 
service de Malatesta, seigneur de Pesaro, avec 
une pension' de cinq cents florins d'or. D'après 
une inscriptiod sépulcrale qui se Hsait dans 
l'église de Santa-Maria-Novella, à Florence, on 
pense qo'JgoHno mourut dans cette ville en 
142S. Il écrivit le premier sur les bams de Pîse. 
Son traité, èomposé vers 1410, est resté manus- 
crit; mais Bondhii en a donné une notice en 
1789. On a encore d'fgolino : De Balneornm 
Halte Preprietatious ac Virêutibus , dans la 
collection De Balneis, publiée par les Giontis, 
à Venise, 1553. Z. 

BttMiiil, Aottoe sur IgeUno. 

26. 



«07 



IGOLMO — 1BRE 



808 



IGOR I", grand-duo de Moeoovte, né Yen 
875, mort en 945, était l'unique fils de Rurik, 
fondateur de la monarchie russe. Enfant à la 
mort de son père ( 879 ), il necommença à régner 
qu'après celle, de .son tuteur, Oleg (912). Il 
réussit à soumettre lesDrevliens et les Ougtitohs, 
et à surprendre, en 941, Byzance sans défense ; 
mais, après avoir ravagé ses environs durant 
trois mois, surpris à son tour par une armée 
que le patrice Bardas s'était hâté de rallier, 
poursuivi en mer par Théophane, qui détruisit 
presque toutes ses barques par un feu qui avait 
des ailes , dirent les Russes à leur retour, 
Igor paya cher cette folle entreprise, sans 
toutefois se laisser abattre. En 944 il ras- 
sembla une nouvelle armée, prit à sa solde les 
farouches Petchénègues, et marcha de nouveau 
sur la Grèce par terre et par eau; mais l'usur- 
pateur qui occupait alors le trône de Constantin 
lui ayant* offert de lui donner le même tribut 
qu'Oleg avait imposé à ses prédécesseurs , Igor 
consentit à rebrousser chemin et à renouveler le 
traité que son sage tuteur avait avantageuse- 
ment conclu trente-cinq ans auparavant Pour se 
dédommager du riche butin qui leur échap- 
pait, les lieutenants et les soldats d'Igor l'obli- 
gèrent à aller lever de nouveaux impôts chez les 
Drevliens. Cette injuste expédition lui coûta la 
vie. Tombé dans une embuscade, Igor rat at- 
taché à deux arbres et mis en pièces par ces 
tributaires exaspérés. Igor avait pour épouse 
sainte Olga. P ce Augustin Gautzdt. 

Chronique de Nestor. - Histoire de Russie de SotoTief 
et d'Oastrialof. 

iooe il, Olegowitch, grand-prince de Russie, 
massacré en 1147. Il succéda en 1147 à son frère 
Vsérolof n, au détriment des enfants de ce der- 
nier, et par les intrigues de la puissante famille 
des Monomaques. En reconnaissant Igor II, le 
peuple de Kief lui fit jurer sur la croix de sup- 
primer une partie des impôts vexatoires que son 
prédécesseur avait établis et d'exiger à l'avenir 
« que les juges se contentassent de l'impôt légal, 
au lieu de surcharger les accusés de contributions 
arbitraires ». Pour tenir cette promesse, il fallait 
qu'Igor mécontentât les boyards, qui faisaient de 
la justice une véritable spéculation. Le choix 
était difficile pour un prince plus amoureux dn 
pouvoir que de l'équité. Il se décida pour la 
continuation des abus, et bientôt le peuple, poussé 
à bout, ne voulut plus d'un parjure pour sou- 
verain. Ysiaslaf(n) Mstislavitch, prince de Péréas- 
lavle, profita de ces dispositions à la révolte : il 
réunit une armée formidable sur le Dnieper, et 
s'avança vers Kief. Igor marcha à sa rencontre; 
mais une partie de ses troupes l'abandonna , et 
le reste rat massacré; lui-même tomba dans 
un marais, d'où il ne fut lire que pour être con- 
duit, chargé de chaînes, au couvent de Saint- Jean 
à Péréaslavle, où il ne tarda pas à entrer dans les 
ordres; il obtint à cette condition d'être transféré 
au couvent de Saint-Théodore à Kief. Son frère 



dévoué, Sviatoslaf, se retira àNovgorod-Séversky, 
d'où il continua une rude guerre contre Ysiaslaf 
et les Kiéviens. Ceux-ci, regardant Ivor comme la 
cause de leurs malheurs, l'arrachèrent du pied 
des autels/et malgré l'opposition feinte ou réelle 
de Vladimir, frère de Ysiaslaf II, le massacrèrent 
et firent mille outrages à son cadavre. Le règne 
d'Igor avait duré environ six semaines.) 

A. d'E— p— c. 

Le?e«que, Histoire de Russie; t. I. — Kanmsln, 
Histoire de Russie, tnd. pur P. de Dfwofr, U if, *. us- 
868. — j. Esneaui, Histoire politique et philosophique de 
Russie, t. II, p. 1 à 79. 

ihrb (Jean), savant suédois, né à Lund, le 
3 mars 1707, mort le 1 er décembre 1780. Dès 
l'Âge de douze ans il savait le grec. Après avoir 
étudié dans sa patrie et voyagé en Danemark, en 
Allemagne, en Angleterre (1730-1733), il fut 
nommé en 1737 professeur de belles-lettres à 
l'université d'Upsal. Les théologiens lui •suscitè- 
rent de grands embarras à l'occasion d'une disser- 
tation latine où il démontrait l'alliance de la foi 
et de la raison. L'autorité refusa de sévir contre 
le professeur inculpé , et invita les deux parties 
à exposer leurs arguments réciproques dans un 
colloque public qui eut lieu le 13 octobre 1743. 
Ihre se fit une grande réputation par sa défense. 
On a de lui : Uthast till annuerkningar œf- 
ver svenslsa sprdket (Essai et Remarques sur h 
Langue Suédoise); Upsal, 1745, Stockholm, 1751 : 
ouvrage rempli d'observations judicieuses sur 
l'orthographe, les flexions, l'étymologie de la 
langue suédoise, alors très-pauvre et presque in- 
culte ; — Vetustus Catalogus Regum Suiogo- 
thorum; Upsal, 1752-1755, 5 part; — Brtf 
om Wetenskapens TUlstând i Sverge under 
hedend&ms och pàfvedoms tiden (Lettre sur 
l'état des Sciences en» Suède, sous le paganisme 
et le catholicisme); ib., 1759; — Svenskt dia- 
lect-Lexicon (Dictionnaire des dialectes de la 
Suède); ib., 1766, ouvrage utile, mais incomplet, 
et composé, sans grande critique, d'après des 
vocabulaires recueillis par des étudiants de 
chaque province ; — Vlphilas illustrâtes ; ib., 
1752-1755,^6 part.; — Fragmenta versionis 
Ulphilanœ ; ib. , 1763, 2 part. ; réimprimés en 
1773„par Buschmg, sous le titre de Scriptarer- 
sionem UlphUanam et linguam nueso-gothi- 
eam illustrantia, avec des changements et 
additions par l'auteur; — Annuerhningar rx- 
rande Codex Argenteus (Remarques sur le 
Codex'Argenteus d'Upsal) ; Stockholm, 1767, et 
dans le t. II de K. Bibliothekets Mningàt 
Gjœrwel : tous ces travaux sur Ulphâas sont 
encore estimés ; — Glossariutn Suio-Crothicum ; 
Upsal, 1769, 2 vol. in-8° : ouvrage capital, pour 
Fimpression duquel l'auteur reçut des étals une 
subvention de 10,000 darter-silbermynt; on y trouve 
l'explication et l'étymologie de tons les mots 
suédois; — Bref till Lagerbring rœrande 
then islœndska Jfftfrfa (Lettre sur l'Edda ), 1772, 
enfermant des aperçus nouveaux ; — Upsalia 



809 



IHRE — ILBERNAZ 



810 



itlustrata; ih., 1762-1772,8 part.; — livH 
Bistoriarum libri CXI Fragtnentum , cum 
notis criticis ; ib., nouvelle édition améliorée 
des fragments découverts et publiés à Rome 
par Bran; — des discours, des éloges funè- 
bres , de 453 dissertations académiques et des 
Mémoires dans Vetenskaps akademiens ffand- 
lingar et Nova acta R. Societatis Upsa- 
liensis, dont Dire était membre et secrétaire. 
Son père, Thomas Ihrb, né à Wisby, dans 
rtlede Gottland, le 3 septembre 1659, mort 
le i 1 mars 1720, à Linkœping, où il était pasteur, 
enseigna la théologie à Upsal (1692) et à Lund 
(1693-1717). Il publia neuf dissertations et une 
grammaire latine intitulée Roma in nuce; Ros- 
tock, 1680; Lund, 1706; Upsal, 1759 et 1780. 

£. B. 

Sur le père : J.-L. Torner, Post fanera virtus et fama 
tnanet Th. Ihre ; Linkœping, tfto. — T. Radeen, Ltkpre- 
dika; lbid. — Sur le fils : V loâervs, Parent *Uo ; Upsal., 
1781.— Sotberg, Éloge, dans VUterhets Akademiens hand- 
Unçar, t, IV. — Nordin, Éloge, dans Svenska Ahademiens 
Jiandltoaar, U VI. — Svenskt Panthéon, lWr. 16. - 
Gezelins; Lex. - BiographUkt Lex., i. VI, p. S51-M1. 

ikek (Conrad), hébraîsant et théologien al- 
lemand, né à Brème, le 2 5 'décembre 1689, et 
mort dans la même ville, le 30 juin 1753. H rat 
professeur de théologie au gymnase réformé et 
premier prédicateur de Saint-Étienne à Brème. 
On a de lui : AntiquUates Hebraicx secundum 
triplicem Judeorum statum, ecclesiasticum , 
politicum, et œconomicwn; Brème, 1730, in-4°. 
Quatre antres édit., dont la dernière, Utrecht, 
1810, in*8°, est annotée par J.-H. Schacht; — 
Thésaurus novus theolog.-philolog. Disserta- 
ttonumexegeticarum ex Musxo Th. Hasxiet 
Conr.Ikenii; Leyde, 1732, 2 vol. in-foL; — De 
tempore célébrât* ultinus Camx paschalis 
Christ i ; Brème, 1735 et 1739, in-8% contre G. F. 
Gudius, ainsi que le suivant; — Dissertatio 
qux contra Gudium demonstratur Cœnam 
Christi <*ravp6><Tt|Aov vere paschalem fuisse; 
Brème, 1742, in-8° ;— Tractatus Talmudicus 
de*Cultu quotidiano Templi, quem versione 
latina donatum et notis illustratum erudi- 
torum examinisubjicit Conr. Ikenius; Brème, 
1736, û>4 ; — Symbolx litterarix ad incre- 
mentum scientiarum omnis generis , a variis 
amicis collaU; Brème, 1744-1749, 3 vol. in-8° ; 
— Harmonia historié perpessionumJ. Christi; 
Brème, 1743, in-4°; 2 e édit., Utrecht, 1758, in-4° ; 
— Dissertations philoL-theolog. in diversa 
sacra codicis utriusque instrumentalia loca ; 
Leyde, 1749, in-4°; 2 e édit. augmentée d'une se- 
conde partie, et due à J. H. Schacht , Utrecht, 
1770, 2 part, in-4»; — De Institutis et Cserimo- 
niisLegis Mosaicx ante Mosen; Brème, 1752, 
2 part in-4°. 

* iken, (Henri-Frédéric), parent du précé- 
dent, né àNeuenkirchen,le 11 février 1791, et 
pasteur à Grœpelingen, près de Brème, depuis 
1820, s'est fait connaître par la réfutation d'un 



ouvrage que J.-And. Brennecke publia en 1819, 
pour prouver que Jésus-Christ, après sa résur- 
rection, avait passé vingt-sept ans sur la terre, 
et par quelques livres d'édification, parmi les- 
quels on remarque particulièrement ; Trostbi- 
bel fur kranke und Leidende (Bible de Conso- 
lation pour les malades et les affligés, extraite des 
psaumes, et accompagnée d'explications) ; Ham- 
bourg, 1827, in-8° ; 2 e édit., Brème, 1835, in-8°. 

M. N. 

J.G. Walchi, BWioth. Tfuotooiea teiceta. - Wtrna, 
Handbuch der theolog. Literatur. 

*i-mang, célèbre princesse chinoise, mourut 
en l'an 701 avant l'ère chrétienne. Elle avait 
épousé Siouen-Koung, prince de Wei, et lui avait 
donné un fils nommé Et, lequel, en qualité d'en- 
fant d'épouse légitime, devait succéder à son 
père. Mais Siouen-Koung étant devenu amou- 
reux de la fille du prince de Tsi, donna à cette 
princesse le premier rang qui appartenait de droit 
à I -Kiang. De cette façon Ki cessa d'être prince 
héréditaire, et Chéou, fils de la princesse de Tsi, 
fut proclamé à sa place. — I-Kiang se plaignit 
amèrement de l'injustice dont elle et son fils 
étaient l'objet de la part du prince de Wei, son 
époux; et comme celui-ci ne fit point attention 
à ses plaintes, elle se pendit de désespoir, la 
dix-neuvième année du règne de Houan-Wang 
(701 avant notre ère); Cet événement rat le début 
d'un sanglant drame, dont on trouvera le récit 
au nom du prince Ki ( voy. ce nom). R. F. 

Tottûg-Klen-Kang-Mou, Hist. de la Chine. —Mailla, 
Histoire générale de la Chine, vol. II. 

* ikmalios, artiste grec de l'âge homérique; 
il est cité dans Y Odyssée (XIX, 56) comme ayant 
fabriqué le siège orné d'ivoire et d'argent qui 
servait à Pénélope. G. B. 

Raoul-Rochette, Lettre à M. Sehorn, Supplément au 
Catalogue des Artistes de f Antiquité, p. 336. 

* ilbernaz (Francisco de Faria), explo- 
rateur brésilien, né à Saint-Paul, vivait dans la 
première moitié du dix-huitième siècle. Il dé- 
couvrit les riches lavages d'or situés au pied 
du pic escarpé iïltabira, dont le nom signifie la 
pierre qui brille. Il résidait, vers l'année 1720, 
dans les mines d'Itambé, lorsqu'il se décida, ac- 
compagné de ses frères, à entreprendre de nou- 
velles explorations, qui devaient le conduire vers 
une montagne pyramidale, que l'on avait remar- 
quée à dix lieues au nord de sa résidence. Il ar- 
riva au bord d'une fontaine qui roulait dans 
ses eaux des pépites de couleur argentine (fonte 
da plata). C'était de l'or et non de l'argent 
qullbernaz venait de trouver en si grande 
abondance, et bientôt une exploitation régulière 
démontra quelle était l'importance de ce gi- 
sement. Des maisons s'établirent sur les bords 
de ce ruisseau, une chapelle s'y éleva, et ainsi 
fut fondée Tune des bourgades les plus riches 
du pays de Minas. Quant à Ilbernaz et à ses 
compagnons, après avoir exploité les portions 
aurifères les plus opulentes de leur nouvelle dé* 



811 1LPEENAZ — 

couverte, ils vendirent aux nouveau -venus 
« les vastes possessions qu'ils avaieat acquises 
par le droit du premier occupant, et ils se reti- 
rèrent dans la province de Goya* et à Saint- 
Paul, leur patrie ». On ne connaît guère la 
biographie de ces hommes intrépides que par ta 
date, bien récente encore, ae leurs décou- 
vertes. Ce qui peut donner une idée de la richesse 
prodigieuse dd territoire d'Itabina lors de l'ou- 
verture de l'exploitation , c'est qu'on y trouva, 
sous là direction d'Ubernaz lui-même, un fil 
d'or d'une detnf'totse de longueur et qui adhé- 
rait, dit un savant naturaliste, au minerai de 
fer pierreux dont se compose la roche. Une 
seule bateà (c'est le nom qu'on donne aux 
grandes sébiles propres à exécuter le lavage) 
t fourni plus récemment vingt-Huit marcs d'or. 

F.D. 

Documents particuliers.- Aug. Saint-tillalre, Voyage 
ûmtu les ptevintoi de MëAe Jtoieirc et ae Mhas 
Cernes» t. 1, p. fit. 

lliPHFOftSB (Saint)) archevêque espagnol, né 
à Tolède, en 607, mort le 23 février 660. U ap^ 
partenait à une des plus illustres tonifies de la 
CastOle (1), et eut pour précepteur saint IsU 
dore, evêque de fié ville. A la mort de ee prélat, 
Ildefonse revint à Tolède, et entra dans le odtt* 
yen! des Saint- Côtoie* et -Daffiien, ou Hellade, 
évéque de Tolède, lui conféra les ordres sacrés. 
p passa ensuite au monastère d'Agali> dont il 
devint abbé après Adéodati U assista au neu- 
vième concile tenu à Tolède en décembre 653, 
où le roi Récesuiuthe fit sa profession, et où il fût 
décidé, par cinquante-deux évêquei présents, que 
désormais l'élection des rois d'Espagne se ferait 
dans l'endroit où le prédécesseur serait mort, et 
que cette élection serait faite par les évéques qui 
s'y trouveraient présents et par les grands-offr 
ciers du royaume* Les douze canons adoptés 
dans ce concile ne furent guère observés; leur 
rédaction est d'un style si diffus et si figuré qu'on 
doit croire quTldefonse, alors abbé seulement, et 
dont les écrits concis et sentencieux témoignent 
d'un certain mérite, n'y prit aucune part. Saint 
Eugène III» oncle maternel d'Ildefonse, gouver- 
nait à cette époque l'église de Tolède ; ce prélat 
étant mort à la fin de 657 Ou en janvier 658, son 
neveu fut élu pour lui succéder, et vécut encore 
neuf ans* U fut enterré dans l'église de Sainte-, 
Léocadie de Tolède* On ne sait s'il fut canonisé 
d'une manière régulière) toutefois l'Espagne 
l'honore comme un de ses patrons, Je 23 jan- 
vier. La vie de saint Ildefonse a été écrite par 
Cixila et par Julien, qui furent Vue et l'autre ses 
successeurs et lui attribuent plusieurs miracles, 
entre autres d'avoir retrouvé le lieu ou gisait le 
corps de sainte Léocadie et d'avoir reçu une cha- 
suble des mains de U Vierge (2). 

(1) Nicolas Antonio en donne la généalogie dans sa 
BWiotheca ( vêtus ) Hispana, t. 1, lib. V, cap. vu, p. 897. 

(2) Dieu, rapporte CUila, sensible ans prières d'Ildefonse, 
permit qu'à la vue de tous les assistants la tombe du se- 



ILDEFONSE 



8(2 



Les écrits de saint Ildefonse sont, nombreux, 
mais plusieurs lui sont contestés. Voici les 
noms, de ceux que les bagiograpbes lui accordent 
généralement : De Viris illustrions Scriptorï- 
ous eccle&asticis, pour servir de continuation à 
l'ouvrage de saint Isidore. Les notices de saint 
Ildefonse sont au nombre de quatorze. On les 
trouve ordinairement à la suite des catalogues de 
saint Jérôme et de Gennade; — Librum Pro- 
sopopxix , imbecillitatis proprie , aujourd'hui 
perdu \ — De Viryinitate S. Marue § contra très 
infidèles , édité d'après Mich. Alph. Carrants; 
Valence, i55ô,in-8 d ; Bàle, 1657, in- 8° $ Loufaio, 
1569, in-8°: d'après Jérôme Welaeous; Paris, 
1 576, in-8°; Douai, 1625, in-4°; et dans tes diver- 
ses Bibliothèques des Pères. Les trois infidèles 
sont Jovinien, Helvidius, et le Juif, perfide et incré- 
dule. L'auteur établit contre Jovinien « que Marie 
a conservé sa virginité dans son enfantement » ; 
contre Helvidius, « qu'elle est demeurée vierge 
après avoir mis Jésus-Christ au monde » ; et con- 
tre lee Juifs , « qu'elle a conçu sans perdre sa vir- 
ginité » ; — De Proprietate personarum Patris 
et PîliietSpiritusSancti; — Libriduo adno- 
tationum de Çognitione baptismi, et de iti- 
nere deserti quo pergitur post baptismum; 
(lads les Miscellan, de Baluie, t. IV, p. 5 et 
104 ; — (Spistolx du* ad Quiricïum (ou Cy- 
ricium) t episcop. Barcilonensem, dans lëSpi- 
çilége de dom d'Aeuerr, t. II j ces lettres ont en- 
core pour objet la virginité perpétuelle de Marie. 
Les ouvrage* attribués à saint Ildefonse sont 



pillera Ht la sainte* que Iritate hommes n'auraient pas pu 
soulever, s'élevât d'elle-même et que la glorieuse Léecadie 
se montrât aux yeux de tous. Saint Ildefonse , pénétré 
d'une faveur si signalée, embrassa la sainte avec respect et 
humilité, et le roi flécesulathe, qui était présent, tffa sa da- 
gue et coupa an morceau du voile de la bienheureuse. » 
Ce fut la seule relique que l'on, put avoir de aainle Leo- 
oddie; et depuis ion on expose à là vénération des fidèles 
le morceau de voile et la digue dans la métropole de 
Tolède. » 

Ci* lia s'exprime ainsi t « Le 18 de décembre, fête de 
l'Ahfldnclatlon, salrit Ildefonse se leva de grand matin 
pour aller prier à J'égHse , et se fit accompagner de quel- 
ques ecclésiastiques avec des flambeaux, parce qu'il ne 
faisait pas clair. Arrivé à l'église, les portes s'ouvrirent 
d'elles-mêmes, et l'intérieur en parut éclairé d'une cé- 
leste lumière. Ildefonse, enhardi par cette confiance que 
donne la pureté de çenscleneè, entra dans l'église, mais 
ceux qui le suivaient n'osèrent l'y suivre. Le saint évé- 
que aperçut sur la chaire d'où U avait coutume de 
donner sa bénédletlon la relue des anges, assise et en- 
vironnée du chœur des vierges qui chantaient dea motets. 
La sainte mère de Jésus-Christ le fit approcher, et lui 
présenta un Vêtement sacré, lui disant qu'elle Iè Ini ap- 
portait des trésors de son Sis, en récompense des ou- 
vrages qu'il avait faits enaon honneur» afin que dès cette 
vie il fût revêtu des habits de la gloire. » Après qu'elle 
eut achevé ces mots, elle disparut avec tout son auguste 
collège. Ferreras* qui rapporte lé version de Cixila, 
ajoute : a L'habillement que la sainte Vierge donna A 
saint Ildefonse fut une chasuble, que l'on garde encore 
dans l'église d'Oviedo, â ce que l'on prétend, quoique je 
doute fort que personne l'ait vue. A l'égard dé la pierre 
où la sainte Vierge a posé les pieds, on la conserva dans 
la métropole de Tolède, où Je l'ai vénérée pluateunjeis. 
Aucun archevêque n'a osé depuis s'asseoir sur la chaire 
qui a servi de siège â Notre-Dame, excepté le malheu- 
reux Sisbert. » 



813 ILDEFONSE 

principalement i un Mer MpbMwm, qui est 
évidemment l'eauvr* de plusieurs personnes de- 
meurées inconnues; ■— » de» Miâito de* Hymni 
en l'honneur de le bienheureuse Vierge Marie; 
— dee Epiiephia et des £j»fr<)m*Httaj - 
des QfMOf Annun$iatton*$, et».; — enfin 
neuf flerfttertti ou homéHtej «avoir t ait sa» 
l'Assomption* deux sur le Nativité» on sur la 
Purification, que Manillon, d'Acherit Pozzft et 
CeiUier attribuent au bénédictin Paatihase Ratbert 
ou à un auteur plus récent. Cette opinion a ce* 
pendant été combattue par le eomte Andreeazi de 
Saint- André, dans un ouvrage intitulé : Vindicte 
Sermonis MHcH \Mtftmsi, archiepispopi To* 
letanii de perpétua vifginiêaêë m partuH- 
tione Deigëhitrict* Mar iœ. f etc. ; Kome, 174», 
in- 8°. Los oeuvres complètes de saint tldefonse, 
aTec celles qui lui ont été attribuées, recueiliiee 
par du F. Feuddent de l'Ordre des Frères Mineurs, 
ont paru à Paria, en 1676, et depuis dans les Bi- 
bliothèques des Père». ; A* L. 

Julien Pomerie, FUa llde/omi; daneSurius, FitœSarui- 
torum, au 17 jauvlér, p. W7. -»■ CM fa, Pita Ildefonsi; 
et la méttte &ftf italien, laris lèa Atta Sanètorum (Anvers), 
t. II, p. tas et M4' *- fireÉoflo Miyina, *W<i de S. Il- 
de/omo. orzobupQ de lu saxtia içlesiade Toledo ; Va- 
lence, I7*r, ln-li.' -~ tfhrithème et Bellarmln, ÛeSctip- 
tcribut tètètéHëétici*. «-Le Mire, ÉiètMkeca Ëcclei. - 
rwwtin, Aptmahu wMr.-> BèttQt»**4tffiri«J«f, owt 
667, n°« •<«. — Wqwl De Hi$t. Latin.*- Mariana, Hispa- 
nia ïllustrata, t. IX. - Fabrictus, Sibtiothecâ îâtina 
Médite et tnfttMe ÂttUto, toi. Illj p. W8-770. - »u 
Pin, Bibl. BtxUtiaitèQëëiteptMme slêofc. **» Baillet* P*es 
des Saints, M janvier. — Morérl, Le Grand Dictionnaire 
Historique. — Jtian de Ferreras, trad. de d'HérollIy, His- 
toire générale d'Êspaofic, i: il, p. S«Mtt.- «* tablas An- 
tonio, BWietheeu («rtna* Httpanà), t t* p. SM-Wt. - 
Dom CeiUier» Histoire des Auteurs Sacrés et Ecriés,, 
t. XVII, p. 7Uetsoiv.- Richard et Giraud, Bibliothèque 
Sacrée. - Histoire impaire détèFranèè, t. M, p. wo 
états. 

^îutratracuff» poète ruai* «ontemnorain. 
Il tient une boutique d'épicerie» dattsun village 
des enriwmade Saint-Pétersbourg, et a oomposé 
dea poésies pastorales qui ont été couronnées 
par l'Académie impériale de naint-Pétérsbourg. 
P ce A. G— n. 

Notice sur ta* plus remareuaelee PoHe* de Im ttussie, 
par le prince Eitm Metchertkl. 

imcino* poète italien. Voy. Glicino. 

*ilin (Nicolas- Jvanovitch), auteur drama- 
tique russe contemporain. On lui doit plusieurs 
traductions de comédies françaises en russe, et la 
fondation de VAmi des Enfants, journal qui pa- 
rait à Moscou depuis 1809, et qui lui a valu 
le titre de Berquin russe. P ce A. G— n. 

Doc. partie. 

*imeiski (/van), philologue russe, morte 
Saint-Pétersbourg en 1735, a enseigné la littéra- 
ture russe att prince AntioChus Kahtémir, connu 
par ses satires, et a traduit du latin l'ouvrage de 
ce dernier sur la religion mahométane. 

P* A. G-w. 

Doc. partie. 

* ixrrcimrçki , poète rusée, mort en 1837. 
Ami de Poucbkin, il a composé des épigramrnes 
pie : nés de verve- 



— 1LLIERS 



0U 



EUm Melcher&\,Nottoswr les pitutvmariiuables Poètes 
de la Russie. 

t lit fi (Jacob), controversiste anglais, né 
vers 1710, mort en 1763. Il tenait à la fois une 
fonderie de caractères et une imprimerie. Il pu- 
blia en 1733 tin discoure destiné à prouver la plu- 
ralité des mondes. ïl y prétendait que la Terre est 
utt enfer , et que lés âfnes des Hommes sont des 
anges tombéi Avaiit d'ifflprlmef son ouvrage, il 
efl avait lait de* lectures publiques, et après sa 
publication, il Continua, stir* des 1 sujets analogue*, 
des prédications fort peu orthodoxe*. Dans la 
même année dé 1733 parut tin second volume, 
Intitulé : A Dialogue ùëtween dûùtor ofthe 
Churèh of Ênpland aMd Mi Jacob tlive upon 
the sûbjecl of thë àrdtiàtt. En 1751 U| publia 
Une prétendue traduction du Livre de Jasher 
{The bbvk of Jasher) , ouvrage qu'il attribuait 
à un certain Alcuin de Bretagne, et dont il était 
l'auteur. Un nouveau pamphlet, intitulé Modest 
Êemafhs on bishàp SherlMk's Sêhhon*,ïm 
valut détix ans de prison. Il profita de son séjour 
forcé à Cièrkenwell Bridewell, potir publier : 
Reasons 6/fêred fur the reformation of thé 
tiouse of correction in Cièrkenwell. Au milieu 
de toutes ces production* bizarre* et hétérodoxes, 
ÎHve fendit Un véritable service aux études bl- 
bliqtiès eri irripriifialitla seconde édition des Con- 
cûfdaiitiS Hacrvrûm BibliorWm de Calasto; 
tondra, 1W,Ï Vol. hvfol. Z. 

&émgtt, BnUsh fopographf, *- WUsoft , met. ofdis- 
smttng Churokés. - ChaUnefâ, <Sen. Biog. DicHonary. 

*IM*GE1¥ (Christian-Frédéric) , théologien 
protestant allemand, né à Cbemnitz» le 16 septem- 
bre (786, et mort à Leipzig, en décembre 1844* Il 
fut d'abord professeur de philosophie à l'université 
de Leipzig depuis 1818. En 1823 il fut nommé 
^rofeseeur de théologie. Il est surtout connu 
par l'excellent' journal qu'il publia à Leipzig 
depuis 1832 jusqu'à sa mort, avec le concours 
de plusieurs théologiens érudits, et qui parait 
encore, sous la direction de M. Ch. W. Niedner. 
OU a d'IUgen : Ueber den Werth der christli- 
chen Dogmengeschichle (De la Valeur de l'His- 
toire des Dogmes chrétiens )v Leipzig, 1817, 
in-8°; — Histor. theol. Abhandlungen (Mé- 
moires historice-théologiqttes); Leipzig, 1818- 
1824, 3 vol. in-8°, publiés par la société formée 
à Leipzig pour l'étude de la théologie historique ; 
-s- Die Verklxrung des irdischen Lebens durch 
dos Evangetium (La Transfiguration de la vie 
terrestre par l'Évangile) j Leipzig, 1823, in-8°; 
— Vïta Lœlii Sodini; Leipzig, 1814, in-8°; — 
Symholae ad Vitam et Doctrinam tœlii Socini 
Mustrandum; Leipzig, 1826, 2 part in-4°; — 
Memoria utriitsque cdlechismi Lutheri ; Leip* 
zig, 1829-1830, 4 part. in-4°; — Historia Col- 
legii PhiloMblici; Leipzig, 1836-1837, 2 part 
in-4°. M. N- 

Conv.-Lex. 

*illiêrs (t) (Florent b'), capitaine fran- 

11) IlKers» chef-lieu de canton, arrondissement de Char- 
tres , est une vieille petite ville, située sur les confins du 



S1& 



ILLIERS - ILLUS 



816 



çais, né vers 1400, mort le|10 aont 1475. 11 était 
capitaine de Châteaudun, lorsqu'en 1428 et 1429 
les Anglais vinrent attaquer, an cœur de ses do- 
maines , le duc d'Orléans, seigneur du comté 
de Chartres, qui comprenait le Dunois, dont 
Châteaudun était la capitale. Le 28 avril 1429, 
F. dllliers arma dans Orléans à la tète de quatre 
cents chevaliers, servis chacun par plusieurs 
écuyers ou auxiliaires. prit une part considé- 
rable à toutes les opérations du siège qui fut 
soutenu par cette ville, et qui se termina, comme 
on sait, par la déroute des Anglais. Florent y 
combattit parmi les plus braves, à coté de la 
Pucelle, en compagnie du bâtard d'Orléans , de 
Lattre, etc. Aussitôt que le saint de la ville fut 
assuré, le 7 mai 1429, il prit congé de ses com- 
pagnons d'armes et retourna en toute hâte à son 
poste de Châteaudun. 

Florent d'IUiers ne tarda pas toutefois à re- 
paraître dans Orléans, et sortit de nouveau, le 
11 juin 1429, de cette ville, pour accompagner 
la Pucelle an siège de Gergeau. £^1432, vers le 
mois d'avril, il pénétra, par un coup de main 
hardi, dans la vule de Chartres', où il rétablit 
l'autorité de Charles VII (1). La même année, 
avec La Hire, il défendit Louviers contre les 
Anglais. En- 1435 il se signala par la prise de 
Meulan. En 1449 s'ouvrit la campagne de Nor- 
mandie, à laquelle Florent d'IUiers participa 
d'une manière importante. Le 20 juillet de cette 
année il rat ehargé d'assiéger la tour de Ver- 
neuil (2). H contribua spécialement à expulser 
les Anglais des comtés de Chartres, de Dunois, 
du Vendômois, ainsi que du Perche, et prit sur 
eux Neubonrg , Beaumesnil et Verneuil. 

Florent d'IUiers s'était trouvé, dès sa jeunesse, 
en contact et en rapport de fonctions avec le cé- 
lèbre bâtard d'Orléans , plus connu sous le nom 
de comte de Dunois. Simon de Phares , astrolo- 
gue de Charles VIII, et natif de Châteaudun, 
rapporte dans ses mémoires que cet illustre ca- 
pitaine faisait le plus grand cas de Florent d'il- 
hers,»« par le conseil duquel il se gouvernoit, 
dit-il, en ses hautes entreprises, par espécial es 
conquestes de Normandie et Guyenne (3) ». 
Charles VII, par lettres-patentes du 2 novembre 



pays chartralfl et du Perche. On y voyait encore, au 
temps de Louis XIV, un château très-ancien, mouvant, 
pour la Juridiction féodale, de la grosse tour de Chartres. . 
Les seigneurs d'Illlers-étaient au nombre des plus anciens 
barons de ce comté. On les regardait comme Issus des 
puînés de la maison de Blols. Florent d'IUiers, lus aîné 
de Pierre , appartenait à cette mce. 

\%\ Par lettres données à Selles en Berry, le 10 août 1*81, 
le roi fit présent d'un coursier acheté au prix de cinq 
cents moutons d'or à« son amé et féal chevalier et cham- 
bellan Florent d'IUiers ». (Original, parchemin; ca- 
binet des titres.) 

(s) Le cabinet des titras renferme une quittance origi- 
nale sur parchemin signée Fleurentin d'IUiers en auto- 
graphe. FU d'IUiers, capitaine de Châteaudun, reconnaît 
avoir reçu 10 livres tournois, qu'il a dépensées pour la solde 
de ses francs-archers, à VerneuU. 

(9) Autobiographie de Simon de Phares, Fo*, Histoire 
de V Instruction publique, 1849, tn-4«, page 87». 



1457, le nomma bailli et gouverneur de Chartres. 
Il disparut de la scène après la fin de ce prince, 
mort le 22 juillet 1461 (1). 

Florent d'IUiers avait épousé Jeanne de Contes, 
petite-fille de Jean Le Mercier, grand-maître de 
France, sons le roi Charles VI. 11 en eut sept 
fils. Milon ou Miles d'IUiers (2), frère de Florent, 
par le crédit de ce dernier et à la recommanda- 
tion de Jean, comte de Dunois, rat nommé 
évèque de Chartres le 8 septembre 1459. Ce pré- 
lat mourut en 1492 (3). Il eut pour successeur 
l'un de ses neveux, René d'IUiers, fils de Flo- 
rent, qui occupa le siège de Chartres jusqu'en 
1507 (4). Vàllet de Vrnrviu.K. 

Godefroy, Histoire de Charles Fil » Paria, ltftl, in-folio, 
pages 849 et suivantes. — Chronique de Jean Chartier . édi- 
tion clzévirienne, 18», ln-16, tome I« r , pages ?*. 141, 
168, et II, page 81.- Qutcberat, Procès de la Pucelle, à la 
table : Mien. — Mémoires de Laisné, prieur de Mon- 
donville, ms.de la Bibliot. impériale, vol. I, fol. 3*. — 
De Lépinoy, Histoire de Chartres; 1858, in-8«, tome IL 

* illvs, général byzantin, dont le nom est 
écrit différemment TXX6ç, "RXouc, TXXoc, et*RXoûc 
par les Grecs , tUus, Ellus, et ffyUus par les 
Latins, mis à mort en 488. 11 était Isaurien. On 
ignore la date et le heu de sa naissance. Il rem- 
plit des fonctions élevées sous l'empereur 
Léon I er (457-472 ), et se lia intimement avec 
son compatriote Zénon.*L'avénement de Zenon 
au trône impérial mit fin à leur amitié, nius, in- 
digné des vices et de l'incapacité du nouvel em- 
pereur, se joignit à l'impératrice douairière Ye> 
rina et à BasUicus, frère de celle-ci, pour le chasser 
de Constantinople en 475. U fut chargé avec son 
frère Trocondus de le poursuivre en Isanrie où 
il s'était réfugié. Les deux frères défirent l'em- 
pereur fugitif en. juillet 476, et l'assiégèrent sur 
une colline appelée Constantinople. Pendant le 
blocus, Illus et Trocondus, à l'instigation du sénat 
qui détestait Basilicns , mécontents eux-mêmes 
de l'usurpateur et séduits par les promesses de 
Zenon, se déclarèrent brusquement pour ce der- 
nier, unirent leurs forces aux siennes^et mar- 
chèrent sur Constantinople. ANicée, en Bithynie, 
ils rencontrèrent les troupes de Basilicns, com- 
mandées par son neveu Harmatus. Ce général ne 
fut pas plus fidèle que les autres, et une nouvelle 
trahison précipita Basilicus du trône en 477. 
Illus fut seul consul en 478 et 479. U réprima b 
révolte de Marcien, et usa de son influence en 
faveur des sciences et des lettres. Parmi ses 
protégés se trouvait un Pamprépius, natif d'É- 

(1) Flenrentln d'IUiers, seigneur de Maisoncetles prés 
Le Maos, reçut, en 1481, 1488, 1466 et 1467, divers hommage* 
(cabinet des titres). U paraîtrait pas que ce seigneur de 
Maisoncetles est le même que le personnage objet de 
cet article» 

(l) En 1488 et 1484, Mlles d'IUiers, doyen de l'égHse de 
Chartres et conseiller du roi, fat chargé par ce prisée 
(Charles VII) de tenir an nom dn souverain les assises 
ou échiquier de Rouen, au terme de Pâques ( Cabinet des 
titres). 

(S) Voyez Documents relatifs à la biographie de Jcen 
comte de Dunois dans le Cabinet historique, revue men- 
suelle, 1857, in-8% page 116, note 9. 

(4) Les armcsd'Illiers sont d'or, à six anneaux de gueules. 



817 



ILLUS - IMAD ED-DIN 



618 



gypte, poète et grammairien distingué, mais 
païen déclaré et connu surtout par l'art de pré- 
dire l'avenir. Pamprépius prit une grande in- 
fluence sur Bios, qui, élevé à la dignité de patrice 
et de maître des offices , se voyait exposé à la 
jalousie de l'empereur et avait eu même à re- 
pousser plusieurs tentatives d'assassinat nius, 
irrité de voir ses services si mal récompensés, 
quitta la cour avec son ami Pamprépius, se saisit 
du commandement en chef des troupes d'Asie, 
et proclama empereur le patrice Léonce en 484. 
Zenon opposa aux rebelles une armée composée 
de Macédoniens* et de Scythes (Huns et Ostro- 
goths), sous les ordres de Jean le Scythe et de 
Théodoric. Léonce, Illus et son frère Trocondus 
furent complètement défaits près de Séleucie en 
Isaurie, en 485, et forcés de s'enfermer dans le 
château fort de Papyrius. Dans les premiers 
temps du siège, Trocondus essaya de percer la 
ligne de blocus et de«tenterune diversion, mais 
il tomba entre les mains des ennemis, nui lui 
tranchèrent la tète. Gomme les assiégés igno- 
raient cet événement, Pamprépius les amusait 
par. ses prédictions, leur promettant chaque jour 
que Trocondus allait arriver avec du secours. 
Enfin, après trois ans de siège, Léonce et Illus, 
à bout de vivres, comprirent que leur prophète 
était un imposteur, et lui firent couper la tète. 
Quelques jours après, la trahison d'un beau-frère 
de Trocondus livra le fort aux assiégeants. Illus 
et Léonce eurent la tète tranchée (488). Tillemont 
et Le Beau regardent la révolte dUlus comme 
une tentative pour rétablir le paganisme; mais 
rien ne prouve que le général isaurien poursuivit 
un but aussi important et aussi lointain : il pa- 
raît n'avoir eu d'autres mobiles que son ambi- 
tion et le soin de sa sûreté. Y. 

Suidas, aux mots Ztqvo>v, IIau.ftpfaiOç. — Zooaras, 
XIV. 1. — Théophane, Chronog., p. 108, édlt. du Loutre. 
- BvagThis, Hist. eeeles., M, 8, 16, It, 86, 17. - Candi- 
dldus, dans la Bibl. de Photlos, cod. 79. — Malchus, dans * 
la Bibt. de Photlos, 78. - Damascias, dans la Bibl. de 
Pbotius, cod. lia. - Proeope, Bel. Vand., 1, 7. — Mar- 
celttnns, Chronicon. — Victor de Tunes, Chronicon. — 
Théodoret, HisL Ecries., I, 87; II, 8, *. — Jornandes, 
De Heg. sueeess., c. 47. — Cedrenos , Compendium. — U> 
beratns Dtaconns, Breviarixtm Causses Nestorianorum 
et Eutychianorum, c. 16, 17, dans la Bibl. Petrum de 
GaUand, vol. X. — TillemoQt, Histoire des Empereurs, 
▼ol. VI. - Le Beau, Hist. du Bas-Empire, 1. XXXV, 
XXXVI. 

illyrictjs (Flaccus). Voy. Francowitz. 

* ilmoki (Immanuel), médecin finlandais, 
né à Nummis, le 29 mars 1797, mort à Helsing- 
fors, le 14 avril 1856. Après avoir étudié à Abo 
et à Stockholm, et voyagé de 1828 à 1832, il 
fut nommé professeur de médecine à l'univer- 
sité d'Helsingfors (1834). On a de lui : Physio- 
logia Systematis Ossium; 1825-1826, 2 part.; 
— Bidrag till Nordens sjukdoms his toria (Do- 
cuments pour l'Histoire Nosologique du Nord ); 
Helsingfors, 1846-1833, 3 vol. in-8°; le 4 e est 
resté inachevé, etc. £. B. 

Vnsere ZeiU 1887, p. 410. — L. B. Tœrnoth, Notice dans 
Finska vetenshaps soeietetent Handlingar, t. V, 1888. 



imad eo-datjlah( Abou'l-Bassan Ali-ben- 
Bouyah ou Boweih), fondateur delà dynastie 
des Bouides, né dans leDaïlem, vers 281 de 
l'hégire (994 de J.-G. ), mort le 16 djoumada pre- 
mier 338 (novembre 949). Il faisait remonter 
son origine aux rois sassanides de Perse. Son 
père, Aboo-Schodja-Booyah, était, selon les uns, 
un pitavre pécheur, selon les autres, un puissant 
général au service des Sassanides. Quoi qu'il en 
soit, les trois fils d'Abou-Schodja se mirent à la 
solde de Merdawidj, prince de Ghilan et de Tha- 
baristan. L'ainé Abou'1-Hassan-Ali rat nommé 
gouverneur de Karadj, et se rendit maître d'Ispa- 
han, où Motzaffer-Ibn-Yacouth commandait au 
nom du khaKfe de Bagdad, Quoiqu'il n'eût alors 
aous ses ordres qu'environ 1,000 hommes, ses 
succès portèrent ombrage à Merdawidj, qui le 
dépouilla de sa nouvelle conquête. Forcé de cher- 
cher fortune ailleurs , il se jeta sur Arrendjan, 
d'où il chassa Motzaffer, en 320 (932) , puis sur 
la province de Fars, dont le chef-lieu, Schiraz, 
tomba en son pouvoir, en 322 (934). Il sauva 
cette ville du pillage, afin d'en faire la capitale de 
ses États, et prit le nom de Imad ed-Daulah 
(Soutie* de l'Etat). Après la mort de Merdawidj, " 
il reconquit Ispahan, et chargea ses frères Abou- 
Ali-Hassan (plus tard Rokn ed-Daulah) et Abou'l- 
Hassan- Ahmed ( plus tard Moïzz ed-Daulah ) de 
réduire l'Irak et le Kerman. Avant fait occuper 
Bagdad, il s'arrogea, sinon la dignité, du moins 
Fautorité khahïale. Imad ed-Daulah était un 
prince juste, humain et fort aimé de ses sujets. 
Comme il mourut sans laisser d'entants, il eut 
pour successeur son frère Rokn ed-Daulah, gou- 
verneur de Bagdad. £. Bbàuvois. 

Ibn-KBanikao, BioçrapMcal DicUonarf, trad. par Mao 
Onekln de SUne.t. II,p..si*. - Harodallah-Mostaafl , 
Tarifai Guaideh. - Mirkkood, Gesehichte der Sultane 
aus dem GescMechte Buj«h, texte et trad; par Vr. Wil- 
keo; Berlin, 1888, in-4», p. 60-68. —G. Well, GeschicMe 
des Ch&lifen, t. II, 111. - Price, Chronological Rétro- 
speetj or memoirs o/the principal events ofmohamme- 
dan history, t. II, p. 888 et sut?. 

imad ed-din (Mohammed), secrétaire par- 
ticulier du grand Saladin , et désigné souvent par 
le titre de aUKdteb, ou le secrétaire ; naquit à Is- 
pahan, dans la Perse, Tan 1 1 25 de l'ère chrétienne 
(518 de l'hégire), et mourut en 1201 (597del'h.), 
à Damas. Son vrai nom est Mohammed : Imad 
ed-Din n'est qu'un titre, qui signifie en arabe 
colonne de la religion , et qui, à l'exemple des 
autres titres que prenaient alors les hommes 
de plume et d'épée, témoignait, dans un temps 
où les religions chrétienne et musulmane étaient 
en présence, d'un zèle ardent pour l'islamisme. 
On était alors au plus fort de l'excitation des 
guerres des croisades, et ces guerres avaient à 
la fois pour théâtre l'Asie Mineure, la Syrie, la 
Mésopotamie, l'Egypte, ainsi que l'Afrique et 
l'Espagne. t 

imad ed-Din étudia successivement dans le lieu 
de sa naissance et à Bagdad. Son goût pour la 
littérature se montra debonneheure, et ne le quitta 
pas jusqu'à sa mort; en même temps il cherchait 



819 



IMAD ED-DIN 



830 



à donner à set eotuiatssaaees littéraire» une ap- 
plication pratique, Apre» evoir parcouru la Mé» 
sopotamie et l'ajiotenne Gbaldée, mitant Isa 
gens de lettres et tânbant de se tendre compta 
des intérêts poétique* des prisées qui dorais 
Baient surce» contrées* il passa en ^yrie, et devint 
le secrétaire dç Jiour ed-Din, «tors maître de De* 
mas et d'Àlep* * la mort de Nour ed-Din» les 
troubles qui agitèrent le pays le privèrent de 
son emploi ; mais ao bout de quelque temps mv» 
ladln, qni régnait sur l'Egypte, soumit toute la 
ftyrie et mémo une partie de la Mésopotamie a 
ses loti. Imad uâ«Bfat se rendit auprès de lui et 
servit de secrétaire an sultan jusqu'à sa mortj 
Oe fut lui 4ui rédigea ea grande partie la eor~ 
respondanoe do Baladin trèfle khalife de Baodad 
et les autre* souverains de son temps» SeMin 
étadt hiort* il renpnoa k la politique j et ne, 
s'ooenpa plus que de la composition dpscs ou*» 
▼rages* 

Imad ed*Din paraît avoir en un caractère 
noble et généreux. Dans une des expéditions de 
Soladin «outre faft ohrétiens, Je suit** af ant fait 
plusieurs prisonnteray endonna de lenr couper la 
tète) il voulut même que les nommes pieu* et 
dévots de son armée se chargeassent de eettfl 
eléeutioni. Pour imad ed-ONn* ainsi qu'il bous ftp* 
prend luMBéme* il Refusa de souiller ainsi ses 
maint) il se contenta de demander in plus jeune 
des prisonniers, qu'il éleva auprès de lui* 
. Oïl est redevable à Imad ed-£Ufi de quatre ou-» 
vrages. Les deiin premiers sont rdatift an» ait* 
ploits de Saladin centre les chrétiens. I/un est 
intitulé AUBate al*»thmny (éclair de fiyrie), 
et a pour sujet les conquêtes, du salades dans la 
Syrie, la Palestine et la Phéniete$ H n'est point 
parvenu en Europe , et nous ne le connaissons 
que par les extraits qui en ont été laits par les 
écrivains postérieurs. L'autre , dont l'objet est 
analogue, porte le titre de KitQb àl-fath al- 
Kossy fylfath al-Kêdêy, ou livre de l'éloquence; 
deKoss relativement à la conquête de- Jérusalem 
(sur les croisés)» £**« est le nom d'un évêque 
arabe qui vivait au temps de Mahomet» et qui. 
passait pour l'homme le plus éloquent de l'é- 
poque; c'est comme si l'auteur eut dît : « Ou- 
vrage qui, par son élégance» rappelle la gloire 
des anciens temps. » En effet Imad ed-Dio n'a 
lien négligé pour mériter sous oe rapport le suf- 
frage de ses contemporains. L'ouvrage, par son 
objet, était digne de la plus grande attention. 
Il commence aux préparatifs de Saladin contre 
la ville sainte , et se termine à. la mort du sultan 
et au partage de ses États entre ses enfants) 
malheureusement le goût n'a presque jamais été 
bien pur en Orient* «t H ne l'était guère à une 
époque d'ailleurs remarquable par les souve* 
nirs qu'elle a laissés. L'auteur s'occupe plus des 
mots que des choses, plus de la forme que du 
fond-, naturellement le récit est en prose, mais 
cette prose est découpée en membres qui se ter- 
minent par les mêmes lettres et ce style factice 



a nécessité l'emploi de termes d'un usage rare 
et de tournures extraordinaires. C'est la manière 
de Hariri* dans le récit des aventures romanes- 
ques d'Abou-Zéid * maja ici » bien qu'il s'agisse 
de faits réels « l'exagération dépasse toutes les 
bornes. La grandeur des événement* n'a pas suffi 
pour maintenir te narrateur dans des limites 
quelconques t tout occupé de la forme, il ne 
prend pas les faite au sérieux, de manière 
qu'un livre quj, par l'importance, du sujet et la 
position de f écrivain « était susceptible du plus 
haut intérêt, tombe sans cesse des mains, et ne 
laisse que le pagret de tant de sojas inutiles. Oa 
peut juger de* bizarreries du style du livre par 
l'extrait qu'Albert gohultens en a publié à la suit* 
de la vie de Saladin par Bob* ed-Din , avec texte 
arabe et traduction latine. 

Letroisiéme ouvrage d'Imad ed-Din, qui en lui- 
même était susceptible de la même importance, 
et qui .est dépare par les mêmes défauts , est une 
histoire de lé dynastie des Sel6*joukides, depuis la 
première arrivée de oes princes en perse jusqu'au 
temps de l'auteur* Le titre du livre est flîos rti 
*&tré ont* etffref fU'Athré ( Secours contre 
la langueur» et refuge pour l'activité d'esprit). 
La Bibliothèque Impériale possède $ la fois l'ou- 
vrage et un îlbrené de l'ouvrage qui fut lait peu 
de temps après Ta mort de l'auteur par un de 
ses compatriotes appelé Fath-sl-Boadary . Le but 
de Bondery * été de dégager les faits des images 
outrées sous lesquelles ils étaient comme étouffe. 
Bondary avait entrepris le même travail pour IX 
clair de Syrie s malheureusement cet abrégé ne 
nous est point parvenu* 

La quatrième ouvrage dlmad ed-Din me parait 
être le plus intéressent de tous. C'est une suite 
de notices'de poètes , ©lasses par pays 4 avec des 
échantillons de leurs poésies. Le titre est Khe- 
ridet cd^ctur oua djeridet al-atr ( La Perle 
du Palais et la Palhle do Temps ), Plusieurs re- 
cueils analogues avalent précédé celui-ci , notam- 
ment le. Yetimet-al-Dahr de tsalebi; aussi 
Imad ed-Din n'a commencé que là où ses devan- 
ciers finissent , c'est-à-dire aux premières années 
du sixième siècle de l'hégire , douzième siècle 
de l'ère chrétienne. Ici Imad ed-Din, qui tonte 
sa Vie s'était Occupé de littérature, et qui dans 
ses écrits avait toujours visé au style relevé, 
se trouvait dans son élément* Personne d'ail- 
leurs n'était mieux placé que lui pour donner 
à un recueil de ce genre le développement dont 
il était susceptible, il avait dès son jeune Age 
beaucoup voyagé , et, dans ses voyages, il ne 
manquait pas de visiter les gens de lettres, qni 
tous alors n'auraient pas cru mériter ce nom 
s'ils ne s'étaient pas exercés plus ou moins dans 
la. poésie. De plus, sa position élevée l'avait mis 
en rapport avec les plus grandes notabilités de 
ce temps. On pourra juger du parti qu'il est pos- 
sible de tirer de ce recueil pour l'histoire litté- 
raire de l'époque à laquelle il est consacré , par 
la notice de Hariri, qui est placée en tête du 



821 



IMAD ED-DIN — IMBERT 



»22 



deuxième volume de l'édition des Séances de 
Hariri par MM. Reinattd et Derenbourg. 

La Bibliothèque impériale |>ossède plusieurs 
volumes àtx Khêridé, botatnrttettt Ceux qui trai- 
tent des poètes de la Mésopotamie, clé l'Ëspagttë 
et de ia Sicile. D'autres portions existent dans 
d'autres bibliothèques. On trouvera la série 
complète des notices dont se Compose Ce recueil 
dans le deuxième volume du catalogue des ma- 
nuscrits orientaux je la bibliothèque de Leyde, 
par M. fceinhafl-ftoty, pag. 208 et suiv. 

tniàd ed-Din latèsa aussi un recueil de lettres 
et un recueil de poésies. Ni l'un ni l'autre né 
nous sont parvenus. Les lettres» sont probable- 
ment celles qu'il a*ttft successivement rédigées 
par ordre de tfoùr ed-Din et de Saladln. Plu- 
sieurs dé ces lettrés ont été fapbortées dans led 
traités historiques Consacrés a la partie corres- 
pondante des annales musulmanes. Comme toutes 
celles qui sortent des chancelier les arabes, per- 
sanes ex turques, elles sont écrites dans un style 
boursouflé et emphatique, au milieu duquel il est 
très-difficile de démêler les faits qui y ont donné 
lieu. ftfei&Àtjn. 

bictionnàifè èibgfaphiquè fllbri-RhalUkàh, tradlictidfl 
anglaiatf 46 M. «é Aiaiit, W*. Ht, Pag. Ml et Mit, ** 
EstruiU *$ HHtyctoM #r»«f tf« GwrVH *** Oral* 
$ades, par M. fieiaaud; Paris» 18*8, 

; ijmbe&dis (André), historien et magistrat 
français, né vers 1810, à Ambert (Puy-de-Dôme). 
Reçu avocat après là révolution de Juillet» il 
porta la parole dans plusieurs procès politiques 
dirigés contrôle parti républicain, notamment 
dans celui des accusés d'avril. 1835. et fat pen- 
dant longtemps attaché au barreau ae Clermont- 
Ferrand. Depuis 184g f il occupe un siège de 
conseiller à la cour impériale d'Alger , et c'est en 
qualité de président des assises d'Oran qu'au 
mois de novembre 1857 il a dirigé, avec beau- 
coup de fermeté, les longs et pénibles débats re- 
latifs à l'assassinat d'un chef arabe, et (Jui eut pour 
résultat la condamnation à mort du principal 
accusé, le capitaine français Doineau» 1|. Imberdis 
a d'abord écrit un recueil de poésies et quelques 
romans i mais nous citerons de préférence ses 
travaux historiques, entra autres < Histoire des 
Guerres religieuses en Auvergne pendant tes 
seizième et dix-septième siècles; 1840-1841 , 
2 vol. in-8° : couronnée en 1839 par l'Académie 
des Belles-Lettres de Clermont-Ferrand, et réim- 
primée en 184e, avec beaucoup d'additions; — 
Z,' Auvergne historique depuis tes Gaulois jus- 
qu'au dix-huitième siècle: 1851, in-8 è ; — et 
une curieuse étude de psycnologie morale inti- 
tulée : Les Nuits d'un Criminel; 1844, 2 vol. 
ïn-8°» P. L— y. 

littérature français* contemporains. — V Auvergne 
-pittoresque. — Journal de la Librairie. 

imbert ( Pierre), troubadour du treizième 
siècle. On sait peu sur son compte. Il est resté 
de lai une chanson où il invoque l'amour. G. B. 

Bajnouard, Choix de Poésies des Troubadours, t. V, 
p; 817. 



imbert, fou de Henri IV, connu aussi sous 
le nom tfÂngoulevent ou d'Engoulevent. Voy. 
JouBERf (Ificolas). 

imbert (Jean), jurisconsulte français, né à La; 
rtochelle, vers 1 522, mort à Fontenà'y-le-Cohite, k 
la fin du seizième siècle. Après avoir étudié le droit 
à Poitiers, Il s'établît à Fontenay-ie-Comte, où if 
èXerçâ pendant trente ans, et avec une grande 
distinction, là profession d'avocat. Il était par- 
venu à Uti âge avancé lorsqu'il devint lieutenant 
criminel an siège royal de la môme ville , fonc- 
tions qu'il remplissait encore au moment de sa 
mort. Ofl a de lui : ÎHStitutiônum Porensium 
èttllias, pêne totius quœ moribus regltitr, 
cbfhmunium tibri quatuor, etc.; Lyon, 1542, 
ih-8*. L'auteur en publia une traduction inti- 
tulée: tnstituttones Porëfises, oti Practiqueju- 
ÂMairè, translatée de latin en françois; Paris, 
1548, 1534, 1560, ln-8*; Poitiers, 1563, ln-4 tt ; 
Parts, im, 1604, léife-, itel et 1727, in-4% avec 
les commentaires de P. GUenoisetdeB. Automne. 
Solvdrtt preux du Radier, Une seconde traduction 
est due & Guillaume. Lymandas. Fontanon en a 
donné une 1 accompagnée de notes; Paris, 1577 
et 1 3&1 , in-4 b . Cet ouvrage, tort estimé, renferme, 
dans la partie relative au droit criminel, le pre- 
mier commentaire dès. ordonnances de 1536 et 
de 1539. On doit encore à Imbert un livre inti- 
tulé : Ënthitidton Juris Scripti, Gallise mo- 
ribui et tonsuèttidlne ftequentiore usitati, 
itêthque âbrôgàtl, Lyon, 1^58, ln-8*; traduit 
eH français et augmenté par Tnévenau, Poi- 
tiers, 1559, ln-4 6 . Guebois eh a donné une nou- 
velle édition* Paris, 1603, ln-4 tt . Imbert était un 
savant jurisconsulte dont Cujas a dit : QUo ad 
triturant fbtMsm nutlus melior. È. Rëgnard. 

F Dreux dd Ràdlef, ÊibllotkèqUe historique et critique 
dé Poitou. » tittpltti Lettres sis* tm profession tTdtio- 
c*t, par. Camus* #• édlu, tem. II, p. lit, - Ch. Menar- 
dière, Essai sur les Jurisconsultes poitevins antérieurs 
aH Cvéè Civil; Poitiers, is*é, ln-8». - Catalogue de la 
BtiMotHiQUèTli m Cour dé C*sihtiBn. 

IMBRRT ( Éenêtt ), poète latin moderne, né 
en Auvergne, en mars 1630, mort au PUy, le 
16 décembre 1696. Il entra datte la Société des 
Jésuites le lo septembre 1645, et après avoir 
enseigné plusieurs années la rhétorique et ia 
philosophie , il se consacra & là prédication. On 
a de lui : L'arme* keroicutn Armando de Be- 
lAitftft, tpîmpo Anieiensis Le Puy* 1668, 
h*4»j ~* V&Më* adventorium et Ode pane- 
gyticà fff/wHMh» de serroni, urchiepiscopo 
Atbienêi; Toulouse, 1678, tn-4 d ;^ Secix Ced- 
vinian* in Qallia Jam tota mtholica Tu- 
mulm; Valence, 1686, in-4°} — Car bien sœ- 
culare meharvsticum éontullbus urHs Ane- 
ciensiS) etc.* Le Puy, 1669, in-4°j/- Pttro, 
cardinab Bonzi f «iïàMepimpo Narbmnensl, 
Carmen , in->4°. A» or L, 

Le P. Oadtn, daas U grand tHetionsuate universel àe 
Morért. — Augustin et Afols de Baeker, Biàliothéque 
des Écrivain* de la Compagnie de Jésus. 

imbert (Le F. Joseph-Gabriel), peintre 
français, né à Marseille, en 1654,' mort à Ville- 



833 



IMBERT 



824 



neuve-lès-Avignon, en 1740. Il eut pour maître, 
dans sa patrie, un artiste habile, mais peu 
connu , Serre; il vint ensuite à Paris, et se per- 
fectionna sous les inspirations de Charles 
Le Bran et de van der Meulen. H prit chez le 
maître français de la correction dans le dessin 
et de la vigueur dans l'exécution, et chez le 
maître flamand une beHe couleur et l'art de 
la perspective. Sa réputation était établie lors- 
que, dans un voyage qu'il fit en 1688 dans sa 
Tille natale , il entra tout à coup dans Tordre 
de Saint-Bruno. Un amour malheureux et la 
trahison d'un ami le décidèrent, dit-on. L'art 
le consola et lui aida à supporter la vie mo- 
notone du chartreux. Ses supérieurs, gens 
éclairés, lui facilitèrent, d'ailleurs, les moyens 
d'exercer ses talents, mais il ne travailla plus 
que pour les maisons de son ordre. Imbert dé- 
cora ainsi plusieurs chartreuses , surtout celles 
de Villeneuve-lès-Avignon et de Marseille : 
c'est dans cette dernière que se trouvait son chef- 
d'œuvre : Le Calvaire y qu'on admirait au mattre- 
autel. Ses Pèlerine tfEmaûs, qu'a acheva quand 
il était déjà plus qu'octogénaire, mirent le sceau 
à sa réputation. A. de L. 

ChaodoD et Delandlne, IWct. JHist. — Le Bas, ZHct. en- 
cycl. de la France. 

imbbbt ( Barthélemi ), poète français, né à 
Nîmes, en 1747, mort à Paris, le 23 août 1790. 
Il fit ses études dans sa ville natale, puis, à.l'age 
de vingt ans, il vint à Paris, et y prit rang 
parmi les jeunes poètes qui, enviant les succès 
de Dorât, cherchaient à imiter sa manière. Im- 
bert y réussit mieux qu'un autre, et par son Ju- 
gement de Péris il se plaça d'un seul coup à côté 
du maître , si même il ne le dépassa pas. « Ce 
poème, écrit Desessarts, fut une espèce de phé- 
nomène. Ce trait de la fable, si rebattu dans la 
poésie ancienne, si souvent et si faiblement 
traité dans la poésie moderne, parut rajeuni sous 
la plume dlmbert, et enrichi d'une invention 
plus piquante, et d'un nouveau ressort qui pro- 
duit le plus grand effet. Sans s'assujettir aux tra- 
ditions de la mythologie, le génie dlmbert créa 
son héros, et le caractère qu'il lui donna est des 
mieux imaginés et des mieux soutenus. Rien de 
plus ingénieux et de plus simple que le plan de 
ce poème. Les trois déesses y sont représentées 
sous des couleurs riantes ettrès-distinctes, selon 
les attributs que la fable leur a départis. L'élé- 
gance, le naturel, l'aménité répandent sur les 
détails un air de vie qui égayé l'imagination, la 
fixe sur tous les objets et les lui rend sensi- 
bles. » Après cet éloge, on peu trop bienveil- 
lant, Desessarts est forcé de convenir que l'œu- 
vre d'Imbert contient beaucoup de longueurs, 
des discours interminables et des incorrections 
fâcheuses. Imbert avait une prodigieuse facilité, 
qui l'égara souvent; les succès faciles, les petits 
triomphes de société le flattèrent et l'empê- 
chèrent' d'en chercher de plus durables. 11 es- 
saya tous les genres. Très-médiocre dans le tra- 



gique , il réussit mieux dans le comique et dans 
la poésie légère ; mais, malgré sa fécondité et sa 
facilité, il n'a rien fait qui soit supérieur à son pre- 
mier ouvrage. Imbert avait un caractère aimable, 
généreux jusqu'à l'excès; il avait peu d'aptitude 
pour les affaires, ce qui nuisit à ses intérêts. De 
la littérature, recherché et bien accueilli dans le 
monde, il mena une existence brillante; la dou- 
ceur et la bonté de son caractère lui avaient attiré 
beaucoup d'amis auxquels il était très-attaché. 
On a de lui : Pdnsinet et Molière, dialogue; 

1770, in-8°; — Thérèse d'Anet à Euphémie; 

1771, in-8°; — Le Jugement de Paris, poème 
en quatre chants; Amsterdam, Paris, 1772, 1774, 
1777, l'édition de 1772 est la plus recherchée. Cet 
ouvrage a été réimprimé dans des recueils; — 
Œuvres diverses ; 1772, in-8°; — Élégie sur la 
mort de Piron; 1773, in-8°; — Fables nou- 
velles ; Amsterdam, 1773,in-8° ; — Historiettes 
ou Nouvelles en vers; Londres, 1774 ; Amster- 
dam, Paris, 1774, in-8 # ; — Lettre d'une Reli- 
gieuse à la Reine; 1774, in-8°; — Le Gâteau 
des Rois, comédie en vers avec prologue ; 1775, 
ûv8*; — Les Bienfaits du Sommeil, ou les 
quatre rêves accomplis; 1776, in-8° avecfig.; 

— Les Égarements de l'amour, ou lettres de 
Fannyet de Mïlfort; Paris, 1776, 2 vol. in-8°; 
1793, 3 vol. in-12. Ce roman est plein d'intérêt 
et écrit avec pureté; — Rêveries philosophi- 
ques ; La Haye, 17T7, in-8° ; — Œuvres poé- 
tiques ; La Haye , 1777 , 2 vol. in-12 ; — Ga- 
brielle de Passy , parodie de Gabrielle de 
Vergy (avec Dussieux); 1777, in-8°; — Les 
Deux Frères , ou la famille comme il y en 
a tant ; Amsterdam, 1779, in-8°; — Le Lord 
et le Chevalier français, comédie en vers 
libres; Paris, 1780, in-8*; — Les Deux Syl- 
phes, comédie en vers libres, mêlée d'arriettes; 
Paris, 1781, in-8° ; — Le Jaloux sans amour, 
comédie en cinq actes et en vers libres ; Paris, 
1781, 1785, in-8°;nouv. édit., Paris, 1819, 
in-8° ; — V Inauguration du Théâtre-Fran- 
çais, drame en vers libres ; Paris, 1782, in-S* ; 

— Lectures du matin, ou nouvelles histori- 
ques; Paris, 1782, in-8°; — Lectures du soir, 
ou nouvelles historiques; Paris, 1783, in-8*; 

— Lectures variées, ou bigarrures littéraires; 
Paris, 1783, in-8°; — Choix c? anciens fa- 
bliaux, mis en vers; Paris, 1788, 2 vol. in-12; 

— La Fausse Apparence, ou le jaloux malgré 
lui, comédie entrais actes et en vers ; 1789, in-8°; 

— Marie de Brabant, reine de France, tra- 
gédie en cinq actes; Paris, 1790,.in-8°. — On a 
publié ses Œuvres poétiques; La Haye, 1777, 
2 vol. in-12; — ses Œuvres diverses; 1782, 
in-8° ; — ses Œuvres choisies en vers ; Paris, 
an V (1797), ^4 vol. in-8°. Imbert a rédigé 
pendant quelques années l'article Spectacle àws, 
le Mercure, et fournissait dans le même temps 
des pièces a d'autres recueils et journaux, tels 
que VAlmanach des Muses, la Bibliothèque 
universelle des Romans, etc.; enfin il fut co- 



825 



HUBERT 



éditeur des Annales Poétiques, recueil intéres- 
sant. À. Jadm. 

Desseanrts, Les Siècles littéraires de la France, — 
Qoérard, La France Littéraire. 

imbbrt de boudraux (Guillaume), 
littérateur français, né à Limoges, en 1744, mort 
à Paris , le 19 mai 1803. Sa famille le força à 
entrer dans Tordre des Bénédictins : aussi ne 
cessa-t-il de protester contre cette violence et 
quitta-t-il le couvent; aussitôt qu'il le put. Il se 
livra alors à ses goûts pour la critique politique 
et littéraire, et fit paraître des recueils périodi- 
ques qui le firent mettre trois fois à la Bastille. 
Redoutant de nouveaux emprisonnements, il 
alla habiter Neuwied ( Prusse rhénane ). Il re- 
vint pourtant dans sa patrie vers 1790 et y ter- 
mina ses jours. On a de lui : État présent de 
V Espagne et de la Nation espagnole, trad. de 
l'anglais, de Clarke; 1770, 2 vol. in- 12. Ce li- 
vre fut défendu en France et en Espagne dès son 
apparition; — - Dissertation sur l'Origine de 
F Imprimerie en Angleterre, trad. de l'anglais 
de Gonyers Middleton; Londres et Paris, 1775, 
tn-8°. L'auteur y établit que Caxton apporta le 
premier à Westminster les procédés de cet art, 
et repousse l'opinion qui place le berceau de 
l'imprimerie anglaise à Oxford, où elle aurait été 
introduite par un étranger; — Correspondance 
littéraire secrète , publiée chaque semaine, du 
4 juin 1 774 à octobre 1785. Une grande partie de 
ces feuilles hebdomadaires ont été réimprimées 
sous la rubrique de Londres, de 1787 à 1790, 
en 18 vol. in-12 et continuées à Neuwied jus- 
qu'aux 7 mars 1793 par Beaunoir ; — La Philo- 
sophie de la Guerre, extrait des Mémoires du 
général Henri Lloyd, trad. par un officier 
français (Romance, marquis de Mesmon); 
1790, in-12; — Anecdotes du dix-huitième 
Siècle; Londres, 1783-1785, 2 vol. in-8° : Im- 
bert eut plusieurs collaborateurs pour cet ou- 
vrage;— La Chronique scandaleuse, ou mé- 
moires pour servir à V histoire des mœurs de 
la génération présente; Paris, 1783, in-12 ; 
1785, 2 vol. in-12; 1785 et 1791, 5 vol. in-12 ; — 
Mémoire politique et militaire sur la Défense 
et V Invasion de la Grande-Bretagne, trad. 
de l'anglais du général H. Lloyd; Limoges et 
Paris, an ix ( 1801), in-8°, avec carte et plan. 
Cet ouvrage fut réfuté par le général Jacques- 
François-Louis Grobert, dans ses* Observations 
sur le Mémoire du général Lloyd concernant 
r Invasion et la Défense de la Grande-Bre- 
tagne; Paris, 1803, in-8°. Une réplique dlmbert 
fut défendue par le gouvernement. H. Lesceur. 

Barbier, Examen critique des Dictionnaires. — 
Quérard, La France Littéraire. — Desesaarts, Les Siè- 
cles Littéraires de la Frottes. — Boucher de La Richar- 
derie, Bibliothèque des rouages, III, p.f891. 

imbbrt-golombs (Jacques ), homme po- 
litique français, né à Lyon, en 1 725, mort à Bath, 
en 1809. Issu d'une riche famille de commer- 
çants, il se faisait remarquer par son goût pour 
les sciences et surtout pour la chimie, lorsque 



ses concitoyens le choisirent pour leur premier 
échevin. Imbert-Colomès occupait cette magis- 
trature au moment de la disette et du froid ri- 
goureux qui affligèrent la France en 1788. U 
rendit alors de grands services à ses administrés, 
en faisant arriver de toutes parts des vivres et 
des combustibles et en dirigeant la distribution 
de ces secours d'une manière équitable et intelli- 
gente. Eu février 1790, il se trouvait encore à la 
tète de la municipalité lyonnaise lorsque le peuple 
se révolta au nom de la liberté. Imbert-Colo- 
mès essaya d'avèter le mouvement et se déclara 
hautement partisan du régime monarchique; il 
perdit aussitôt sa popularité, vit sa maison as- 
saillie et fut obligé de s'enfuir à Bourg. U passa 
de là en Suisse, puis en Piémont, en Allemagne, 
en Russie, et devint l'un des agents les plus ac- 
tifs de la branche aînée des Bourbons. Il ne 
craignit pas de rentrer à Lyon en 1797, et sut 
se faire nommer, en avril 1797, député du 
Rhône au Conseil des Cinq Cents. Il se fit rayer 
de la liste des émigrés , mais se Ka avec les Cli- 
chyens, et ne cessa de seconder les projets du 
parti royaliste en attaquant sans cesse le Direc- 
toire. Compris dans la liste de déportation du 
19 fructidor an V (5 septembre 1797), il fut 
réintégré sur la liste des émigrés^ et put gagner 
l'Allemagne , mais ne fut pas amnistié par le 
gouvernement consulaire; au contraire, en 
juillet 1801, sur la réquisition de Bonaparte, il 
fut arrêté à Bayreuth par les autorités prus- 
siennes. Rendu à la liberté en 1809, il alla re- 
joindre Louis XVm, et mourut quelques mois 
après. Le gouvernement français fit imprimer 
les papiers saisis chez Imbert-Colomès sous le 
titre de Papiers saisis à Bayreuth et à Mende. 
H. Lesueca. 
Moniteur universel, an 1789, n« 102; an 1790, n» 48; 

an V. 169, 176, «80, 80*, M J, 3*9, 850, 881, 886. - 

Galerie historique des Contemporains ,• BraxeUca , 1819. 

— Arnaalt, Jay, Jouy et Ronrlna, Biogr. nouv. des 
Contemp,; 1818. 

imbbrt-dblokkàs, médecin français, né 
à Yaqueiras (comtat d'Avignon), vers 1745, 
mort à Paris, en 1820. Reçu docteur à la faculté 
de médecine de Caen, il fut chirurgien particu- 
lier du duc d'Orléans. Pendant les troubles de 
la révolution, il vécut dans la retraite à Mont- 
geron , près de Paris, et ne fut appelé qu'après 
le 9 thermidor an n au service supérieur des 
armées, où il remplit les fonctions de chirurgien 
en chef de divers corps. On a de lui : Traité 
de VUydrocéU et de plusieurs Maladies des 
Parties de la Génération de V homme; Paris, 
1785, in-4° ; 2 e édit, 1791 , in-8° : il place le 
siège de l'hydrocèle non dans la tunique vagi- 
nale, mais dans la tunique albuginée; — Pro- 
grès de la Chirurgie en France guéris par 
les opérations modernes sur la fin du 
dix-huitième siècle : publié par ordre et aux 
frais du gouvernement; Paris, an viii, in-8°; 

— Opération courte, facile et sans danger 
pour guérir entièrement VHydrecele; corn» 



817 

paraison de cette découverte avee le traite- 
ment çle cette maladie par les injections; 
Avignon, an xi, in-8°; cet opuscule fait suite an 
Hvre précédent; — jfouvellês Considérations 
sur le Cautère actuel; apologie de ee puis- 
sant remède comparé aveu les causti- 
ques, etc. ; Paris, i«tî, in-8* aw flg;. 0. ne F. 

narjavel, Dictionnaire hlstor. du Dép. de FcHutMH. - 
biographie Mti4iê*tèé 

ihuohati (Le P. don» C*rto*QtUieppé), 
biographe italien , né à Milan, mort à Rome 
«près 1606. Il appartenait à la jBngFégation rt 
formée de 8aintBer«jml*de4a*ra»iteiMe 9 at M 
l'élève tt le compagne» d'études du P. GM» 
Bartolocd de Celleno. Imbonati aida beaatfOBp 
Bartotoeoî dans aa Bibliatheem matna BodlM* 
frica,dont il acheva même smI le quatrième 
volume. On lai doit en outre t BibliothoUa 16- 
tina-Hebraiom; Rome, 108A, 3 vol. kHfll. Cto 
«rand ouvrage contient lea notice» des auteurs 
qui ont parlé des Hébreux tt de ee qui se rap- 
porte à leur histoire j — Ohrmk** tntéiiUi*, 
sîve de êventibUê tragtiis prinoipum; Rome, 
l696,in~4f li+-*-*a. 

Journal dw Snvonts, année i«t, a. «Vf o\ «il. - ai* 
chard et Giraud, Bibliothèque Sacrée, - fifetfofluair* 
Historique (m%;. 

* imbrei (Catus-Licinius) , ancien poète 
comique latin, vivait vers 200 avant J. C. Aulu- 
Gelle et Festus le citent; Vulcatius Sedlgitus loi 
assignait fa quatrième place sur la liste des poètes 
comiques latins. II ne reste rien de ses pièces, 
dont Tune était intitulée JSeœra. Vosslus sup- 
pose que Licinius Imbrex est le même que le 
Licinius Tégula mentionné par Tite Live , puis- 
que imbrex (tuile) est une espèce de tegula; 
mais Festus donne au premier le prénom de 
Caius , tandis que Tite Live appelle le second 
Publius L. T. Y. 

Festin, aux mots imbremet Ob$titvm y ^ 4ult»-Çelle, 
XIII, si; XV, t*. - Voattnf , Qt hmtis lmtinto t p. s. 

imhof (Jacques-Guillaume dé), généalo- 
giste allemand, tié à Nuremberg, le 8 mars *951, 
mort le 20 décembre 1728. Après avoir étndié 
à ^université d'Altorf, il parconnit l'AH*- 
magne, visita tes Pays-Bas, la France et l'I- 
talie. De retour dans sa ville natale en 1673, A 
y occupa plusieurs platie» dans l'administration 
publique; mais.il ne voulût jamais, comme en 
l'en sollicitait, entrer au conseil supérieur, aftn 
de pouvoir se vouer librement anx recherches 
généalogiques, pouf lesquelles Boeder et Spener, 
dont il avait fait la connaissance pendant ses 
voyages, lui avaient inspiré un goèt fnarqué. 
Ses travaux sur ces matière* attestent one rare 
érudition, et on les consulte encore aujourd'hui 
pour ce qui s'y trouve rapporté stor la noblesse 
de l'Allemagne; quant aux ouvrages d'Imhof 
concernant les familles des autres pays, lia n'ont 
pas la rriérùfc autorité. On à de lui : Bpicilegium 
Rilterhusianum ; Tubiogue, 1683-1685, 6 vol., 
in -fol.; cet ouvrage contient soixante-dix tables 
généalogiques nouvelles , qui forment on sop- 



IMBERT — fMHOFF 



828 



plément au livre de fcitteriit«; — WotUia 
S. R. G. Imperii procerum, tam ecclesiasti- 
corum quam secularium hlstorico-héraldico- 
genealooica: Tulfague, 1684, 2 val,, in-8 # ; 
ibid., tô^.uH*; ib>d„ 1693 et 1699, lu-fol.; 
une cinquième édition, augmentée, fut donnée 
par gçeler , TuWR2««, 1732-1734, 2 yo|. in-fol., 
avec là planches d'armoiries, j c'est l'ouvrage le 
plus important d'jmhof ; ,- ÊaxeUentium in 
Ga\lia Famitiaritm Gèntaloqix\ Nuremberg, 

1687, in-fol. j îj s'y trouve. 157 tables généalo- 
giques de» maisons nphïea de Frappe : — Gène- 
Jogix familiariipi ttellomaneriœ t çlaromon- 
lanx, de Gallerande et Memmi$; Nuremberg, 

1688, in-fpl.; — Regum Parrumaue Magmc 
$r\tanntx fiisioriç, aenealogica ; ftureraberg, 
169Q-1691, 2 vol. in-fol.; — Genealogicx Ris- 
forUe epsarearurh, reglarum etfrincipaiium 
famidarum j qu% in terris Europxis post 
romanx extifictiohem monarchies hucusaue 
imperqrunt; Francfort et Leipzig, 1701, in-fol. : 
c'est une édition frès-ajigmentée et corrigée îles 
Tables Généalogiques <îe Lohmeier, à la pre- 
mière édition desquelles Imhof avait déjà col- 
laboré; — Historia italix et Hispanùe qe- 
r\ealogica x exhibent iifatat prodromi stem ma 
jpesiderianum ; Nuremberg, 1701, in-fol.; -~ 
Corpus Bistofix gènealogicœ Italix et Mis- 

fanix; Nuremberg, 1702, hi-fol.j — Rechercha 
istorigues et généalogiques des Grands 
d'Espagne; Amsterdam, 1707, in-12; - 
Sfemma Hegiym lusitanicuïn;; Amsterdam, 
170$, in-fol.; ^- Qenealogix XX illustrhm 
in Ùalia familiarum; Amsterdam, 1718, 
in-fol.; — éenealogiœ XX Hlustriùm in His- 
pantq famitiavum; Leîpzjg # 171?, in-fol.; — 
Genealogia Ruthenory.m Çomitùm\ de Domi- 
nqrum in Plauen ; jSuremherg , 1715, in-fol. ; 
— Àlbanefisis Famjllœ Ârbor genealagica t il- 
tustrata hiMoriçarcMione; Nuremberg, 1725, 
ip-fol. E 5 G. 

K celer, Lebentge$ch\çhte ImHùf's ((fans le tome 11 âH 
mitértuÀe Mimèëehuii9**9** 4e Kttter). — WîO, 

Encpclop<ï<ty. — tUrgchtqg ^Uistor. littér. ffandbuck. 
IMHOFF ( CfUstave-Guillaumej baron »*}, 
gouverneur général des Indes hollandaise*, né 
en 17Q5, à Lier (Ôst-Frise), <f'une famille <tia- 
tlnguéed'Amsterdajrt^ort àBatavia, le 1 er no- 
vembre 17âl. Son grand-père avait été Fun des 
directeurs de la Compagnie hollandaise des 
Indes orientâtes; il s'engagea au service de la 
même Compagnie, et arrivai Batavia ei» 1725, ea 
qualité de sons-CoTnmis. L'année suivante , fi 
rot tait commfs , §t successivement secrétaire 
4» ift r^Aoe «t ûs«4 de» eaux (1730) , co&- 
seiitoi axtiacifdnire dt»Ind«B (1799), et gou- 
verneur de Oeyfcm (1736) en remplacement <fe 
Doemtmtg. Entre autres bons effets de son ad- 
mimstratiori dans cette Ha, on fit sortir de lin- 
pfimerfe qu'il y avait établie plusieurs livres de 
piété , ta Bible et les quatre évangétistes ne 
caractères cbingnlais, potrrFnistruction des to 



899 



iMHOf* — IMÔIiA 



suIaireS: ï! fit urt nouveau traité tivtfe FOmpereur 
de Càndy, et partit pour la Hollande, où il fut 
élevé à la dignité dé conseiller ordinaire. Dès 
1740 il était de retour à Batavia. Il frrit une part 
active dans l'affreux massacra des Chinois a 
Batavia, (9 octobre 1740) où dix mille de ces 
malheureux perdirent la vie. « On enfonça leurs 
portes, dit Du Bois, on les arracha de leurs 
maisons ; et le carnage «a fut &i grand, que le 
sang, répandu dans tes rues à l* hauteur de la 
cheville du pied, ruiaaeioit dans. lia canaux, et 
dans la rivière. Ce qu'il y eut de remarquable, 
c'est que ces gens , malgré leur nombre et la 
quantité de leurs armes , se ; paissaient tuer et 
poignarder sans résistance comme des moutons 
à la boucherie. » Après vue pareille Saint*B*r- 
thélemy, les Hollandais n'ont plus rien a repro- 
cher aux massacreurs, de la Ligue» Ce drame 
sanglant est complété par ces lignes de l'histo- 
rien hollandais ; « Il n'échappa en ce jour à la 
fureur commune que ceux qui se sauvèrent 
sur les toits de leurs maisons , pour éviter la 
présence d'une foule d'Européens, la plupart 
matelots, moins acharnés au massacre qu'au 
pillage. >» Le tort des Chinois était à nette époque 
d'être trop actifs, trop riches, et Irop nom- 
breux; ils menaçaient les Hollandais da les 
exproprier de leur colonie i ceux-ci jugèrent 
convenable da les prévenir. Imhoff fomenta e&- 
suitg une opposition contré Je gévvemur gé- 
néral , Adrien Walkmaer, qui le. fit arrêter 
et te déporta en Hollande} là Imhoff, arrivant 
comme prisonmerv reçut à son débarquement 
la nouvelle de sa promotion au gouvernement 
générât des Indes , décidée dès le -2 décembre 
1740. Les directeurs de la Compagnie front 
mémo construire un navire nouveau, Her- 
steller ( le Restaurateur ) pouf le reconduire 
à Batavia. H y eontihua nne gnerre d'exter- 
mination contre les Chinois ; et , s'il parvint 
ainsi à préserver la suprématie hollandaise, du 
moins priva-t-il là colonie de son élément le 
plus fécond; En février 1745, ïmhofT soumit le 
prince de Màdura, révolté par les exigences de 
fa Compagnie ; iteut, lès années suivantes, à sou- 
tenir de grands démêlés contre les Français, les 
Espagnols et les Anglais r 11 sût les terminer ou 
du moins en atténueï l'effet Sous son adminis- 
tration , la colonie arriva à : oti degré de prospé- 
rité qu'elfe n'avait jamais atteint. II mourut 
comme on meurt à Batavia, encore jeune d'années, 
mais considéré par* ses compatriotes comme tfn 
de leurs grands hommes. 

Alfred de Lacjjzb. 

Do Bols, Pies des Gouverneurs kôilànéaU, p. Mtots. 

1MILCON. Voy. HlMILCON. 

iMMEHMAifN (Charles), poète* allemand, 
né à Magdebourg, le 24 avril 1796, mort à Dus- 
seldorf ,' le 25 aoot 1840. 11 fit Ses études au 
collège de sa ville natale et à l'université de 
Halle, et assista à la campagne de 1815. 00 re- 
tour à Halle , il s'opposa à l'esprit d'indépen- 



dance qui s* manifestait à eétte «>>qé# dans la 
jeunesse allemande, et écrivit à ee sujet Une 
brochure : Vêbet die StMtigheitêH dèr Mu- 
direnden zu Halle (Dos Querelles parmi les 
Étudiants de Halle) ) Leipcig, 4817, qui fut so- 
lennellement brûlée par les étudiants assemblé; 
en 1817 sur la Wartbourg. Bientôt après Immev- 
mann obtint une plaé* de référendaire au tri- 
bunal de Magdebourg. H passa de là à Munster, 
et de cette dernière ville, en 1827, à Dusse]- 
dorf, ou it eterça pendant plusieurs années Mb 
fonctions de conseiller du tribunal. Dans l'in- 
tention de former une troupfc docteurs modèles, 
il se chargea de la direction dn théâtre de ÎJtis- 
seldorf. Ses efforts échouèrent contre l'Indiffé- 
rence du public. 

M. Juliau Scbmidt , dans son ouvrage sur (a 
littérature du dix-neuvième siècle, dit d'Immet- 
mann : « C'est un artiste trës-raisônnable, qui ré- 
fléchit mûrement sur ce qui peut causer la pltié\ 
la peur, la frayeur ; mais la naïveté lui manqué ; 
il n'a pas la puissance dé créer lé tragique, et il 
ne sait peindre que ce qui inspire là terreur et 
même le dégoût. *<&e*' principaux ouvrages 
sont ; Die Printen von Syrakw ( Les Princes 
de Syracuse), comédie) 1881 y -~ Da* TfuUwn 
Roneeval (La Vaftée ie Roaeevaui), tragédie; 
1822; — R&nig Pwiander (Roi Periander), 
tragédie^ 1823; -~ Da* Ange der Liebe (L'Œil 
de l'Amour), spirituelle eomédie; 1024; *~ Gê- 
dtehté (Poésies) j Hamm, 1826; ~- Cardenio 
und Oelindê (1828)^ tragédie; ~* Dom Tramr- 
wpiel in Tirôl (La Tragédie dans h» \Tyrol), 
célèbre poème dramatique) 4828.) **• Frie- 
drich II, tragédie; 1828;— DU Verkltèdun- 
gm (Les Déguisements), comédie; 1828;** Die 
Sefiute der Frommen ( L'Éooledes Dévots ), co- 
médie ; 1829 ; <*- Der ton IrrçùrUn der Metrik 
vmhertaumelnde Cattotter (Le Cavalier chan- 
celant dans le labyrinthe de la Métrique ), comé- 
die aristophanique , dam isqaeite immermatn 
se moque des prétentions du poète Platée (voir 
ce nom); Hambourg, 1829) -r- Nëue Gtdichte 
(Nouvelles Poésies); Stattgard, mO;^Ttill- 
fantchen , conte drolatique ; Munster, 1830 ; — 
Alexis, grand poème dramatique; l$32j — 
Merlin, poëme mythique; 1832;— Reise jour- 
nal (Journal d'un Voyageur)) Dussotdorf, 
1833-183»; ^ EpigônènttowBn; DusseMorf, 
1836, 9 vol.) •— MûWS hhuusen , roman <n- 
tniquo; DusseldOrf, 1838*143(1, 4 vol.) 2 e éJu- 
! tien, 1841 ; — GhUmmdd oéer di# Opfrr des 
Schwelgens (Ghtsmoftda, ou les Victimes du 
silence), tragédie; f 88*. Us* Œubres etw»- 
plèteê d'Immefraann cet été réunies tdans une 
édition qui a paru è Dusseldorf ; 1884*1846, 
14 vol. Ri ■LiimÀtrv 

Conversations - Lexttâ'n dèr àeaèmvaft. — Jui. 
Bcfemldt , Genthièkte der déutioken lÂUtVtur im le teii 
Jahrh., r édit.; Leipzig, 1395, vol. Il, p. *3S-9t6. 

1MOLA ( Domenico da ). Voy. Ferhettï ( Giù- 
vmn*Domenico). 



831 



IMOLA — IMPERIAL! 



m 



moi* (Innoemaio »a). Voy. Fbamcucci 

(Innocensio). v. 

îMwimATO (Francesco), peintre italien , né 
à tfaptes, vers 1530, vivait en 1565. Après 
avoir étudié les principes de son art sous Gian- 
filippo Criscnolo , il passa à Venise dans l'école 
du Titien, dont il parvint à imiter le style avec 
assez de bonheur. De retour dans sa patrie, il 
peignit divers tableaux, parmi lesquels un Saint 
Pierre martyr, pour l'église consacrée à ce saint, 
tableau justement vanté par Carracciolo et Do- 
minid. E. B— h. 

DoiDlalcl, VUe eW Ptttori Napotetani. - UnsJ, Sto- 
ria délia Pittura. — Tlooul, Dizionario» 

impaeato ( Girolamo\ peintre, fils du pré- 
cédent, mort vers 1620. Elève de son père, il 
parcourut comme lui l'Italie , pour se perfec- 
tionner par l'étude des maîtres modénais, lom- 
bards et vénitiens. H peignit pour les églises de 
Naples un assez grand nombre de tableaux qui 
lui -valurent une certaine renommée, inférieure 
toutefois à* celle de son père. £. B— n. 

DomiDici, VUe de' PUtori Napoletani. - Camporl, 
Gli'ArUsU negli Stati BsteneL - Lancl, Storim delta 
Pittura. — Tkcozst, JHUonario, 

îatPBftATO ( Ferrante), naturaliste italien, 
vivait dans le seizième siècle. Pharmacien à 
Naples, il fonda un jardin botanique, et rassem- 
bla une collection de minéraux. Il était en cor- 
respondance avec les plus célèbres naturalistes 
de son temps , tels que Guilandini, Meranta, qui 
lui dédia son Traité de la Thériaque, et Aldro- 
vande, qui le cite dans ses ouvrages. On a de lui : 
DelV Istoria naturale Libri XXVIII; Naples, 
1599, in-fol. : c'est moins une histoire naturelle, 
qu'on catalogue raisonné et descriptif de 
plantes, de minéraux et de pierres précieuses. 
Cet ouvrage n'a pas une grande valeur ; on pré- 
tendit cependant qu'Imperato l'avait acheté,pour 
cent ducats à Nicolas Stelliola. Toppi et Nico- 
demo ont rejeté cette accusation, qui , suivant 
Tiraboschi, ne manque pas de vraisemblance. 
U Istoria naturale dlmperato fut réimprimée 
à Venise; 1672, in-fol. ; elle a été traduite en 
latin et publiée à Cologne; 1695,in-4°. Z. 

Placctus, Theatrum Anonrnmorum, sis. — Toppi, Bi- 
bliotheca Napoletana , avec les additions de Nlcodcmo. 
- Tiraboschi, Storia delta Utterat. ItaL, t VII, p. Il, 
p. 17. 

mro&i alk ( Françoù), poète espagnol, d'o- 
rigine italienne, vivait au commencement du 
quinzième siècle. Il était né à Gènes ; mais, con- 
duit' jeune en Espagne et vivant à Se ville, il 
devint tout à fait Espagnol par le langage, et 
figura avec honneur dans la brillante et artifi- 
cielle école poétique dont les noms les plus con- 
nus sont, après Impériale, Villasandino, Diego de 
Valencia, Baéna, Fernan Perez de Guzman et 
Ferrant-Manuel de Lando. Le principal de ses 
poèmes célèbre la naissance du roi Jean en 1405. 
Parmi ses autres compositions poétiques, presque 
toutes consacrées à des circonstances sans inté- 
rêt, il en est une fort curieuse. Tamerlan avait 
envoyé du fond de l'Orient une (3e ses captives 



au roi Henri Ifl de CaetiUe. La singulière des- 
tinée de cette femme inspira à François Impé- 
riale des vers touchants et gracieux. Plusieurs 
poésies d'Impériale ont été insérées dans la JK- j 
bliottca Bspanola de Castro, 1. 1, siglo XI 

Z. 
Saocbex; Poeskn CasUUanas, t I, p. IX, va, etc. - 
Argote de Molina , Nobleia del AndaluiÀa, et dans la 
préfsce de sa PJda del Gran Tomorlan. -Tlcàuor, 
Mistorw of Spanish lÂUrature, 1. 1, p. Si». 
iMPEftiàUC. Voy. Lecaai. j 

iM*niAiA (Jean-Vincent), poète italien, né ! 
à Gènes vers 1570, mort dans la même Tille 
vers 1645. Fils de Jean Imperiali, nommé dop 
en 1617, il fut envoyé en ambassade auprès do 
roi d'Espagne Philippe IV, qui l'accaeillit avec 
faveur et le chargea d'une mission pour le duc 
de Mantoue et la cour de Rome. H ent à soc 
retour un commandement naval, et l'exerça arec 
fermeté dans plusieurs occasions, particulière- 
ment dans le port de Messine, où il défendit le 
pavillon génois contre les prétentions de l'ordre i 
de Malte. U débarrassa le littoral génois des pi- | 
rates qui l'infestaient, et contribua beweoup ; 
aux embellissements de la ville. Malgré ses ser- 
vices, il fut banni à un âge déjà avancé. Hmon- 
rut peu après son rappel. On a de lui : U Staio 
RutticOy poème en vers scialti&ur l'agriculture; 
Gènes, 161 1 ; Venise, 1613, in-12 : « Ce poème, 
- dit Tiraboschi, fut reçu avec beaucoup d'applau- 
dissements, bien qu'il ne poisse soutenir la com- 
paraison avec la Coltivazione d'Alamanni >; 
et plusieurs autres ouvrages peu importants. Il 
écrivit des Arguments pour la Gerusalemnt 
conquistata du Tasse; Gènes, 1604, in-12, et 
publia les Opère Spirituali du chanoine Bap- 
tiste Vemacia, de Gènes. Z. 

Soprani , ScrUtori JÀguri. - TItiJmwcM, Storie étOt 
UUerat. Itattana,t. VIII, p. ST9. 

impbaiali (Jean-Baptiste), médecin ita- 
lien, de la noble famille génoise des Imperiali, 
né à Vicence, en 1568, mort dans la même ville, 
le 26 mai 1623. Il étudia la médecine à Bologne 
et à Padoue. De retour dans sa patrie, il pnbhi 
son premier ouvrage, pour défendre Alexandre- 
Masaria, son compatriote et l'un de ses maîtres, 
contre les critiques d'Horace Augène, médecin 
alors célèbre. Lui-même se fit un nom par sa 
pratique médicale, et surtout par des poésies la- 
tines où Ton trouva qu'il imitait fort heureuse- 
ment Catulle. Venise, Messine et Padoue es- 
sayèrent vainement de l'attirer; il resta fidèle à 
aa ville natale. Son principal ouvrage est intitulé : 
Exotericarum Lectionum Libri duo; Venise, 
1603, in-4°. Z. 

Moréri , Grand Diction. Historique. - Éloy, Du***- 
historique de la Médecine. 

ihpk&iali (Jean) y médecin italien, fils do 
précédent, né à Vicence, en 1602, mort dans b 
même ville vers 1664. H étudia la médecine à 
Padoue, et la pratiqua avec succès dans sa pa- 
trie. On a de lui : Pestis anni 1630 Descript* 
JêistoriCQ-medica; Vicence, 1631, ta-4°; - 



833 



IMPEMAL1 — INA 



834 



Muséum historicum et physicum. In primo 
illustrium litteris virorum imagines ad vi- 
vum expressx continentur, additis elogiis 
eorum vitas ac mores notantibus. In secundo 
animorum imagines, sive ingeniorum naturx 
perpenduntur ; Venise, 1640, in-4°. La première 
partie de cet ouvrage a été réimprimée à la suite 
desApes urdona? d'ADatius, Hambourg, 1711, 
in«4°; elle renferme cinquante-quatre éloges. 
« La seconde parjtie est extrêmement remar- 
quable, dit la Biographie Médicale, et mérite 
d'être signalée aujourd'hui qu'on examine la 
biologie sons un point de vue plus philosophique. 
L'auteur, à la suite d'observations sur le caractère 
des hommes célèbres dont il a donné les éloges 
dans la première partie, se livre à des réflexions 
curieuses sur l'influence que les circonstances 
physiques au milieu desquelles ils vivaient ont 
pu exercer à l'égard du développement de leurs 
dispositions naturelles. » ; — Le Notte Bar- 
berine 9 ovvero discorsi fisici, medici, etc* ; Ve- 
nise, 1663, in-4°. Z. 

Kceniff, Bibliotheca vêtus et nova. — Papadopoli, His- 
toria Gymnasii Patavini, t. Il, 1. s, p. 808. 

imperiali (Joseph-René), prélat italien, de 
la famille génoise de ce nom, né à Oria, dans la 
terre d'Otrante, le 26 avril 1651, mort à Rome, 
le 15 janvier 1737. Fils de Michel de Francavilla, 
marquis d'Oria et de Brigitte Grimaldi de Mo- 
naco, neveu du cardinal Laurent Imperiali, il 
entra dans les ordres et parvint rapidement aux 
dignités ecclésiastiques. Clerc de la chambre 
apostolique sous Clément X, trésorier général 
de la même chambre sous Innocent XI, il fut 
nommé cardinal le 13 février 1690, et chargé la 
même année de la légation de Ferrare, où il se 
montra administrateur éclairé et bienveillant. 
En 1711 il alla à Milan en qualité de légat a 
latere reconnaître Charles VI comme empereur 
et eomme roi d'Espagne. Bans le conclave de 
1730, il ne lui manqua, le 21 mars, qu'une voix 
pour être élu pape,'; et comme son parti augmen- 
tait chaque jour, il aurait été élu si le cardinal 
Bentivoglio ne lui eût appliqué l'exclusion au nom 
de la cour d'Espagne. Imperiali était fort géné- 
reux : il protégeait les gens de lettres, et leur ou- 
vrait son palais, où il avait rassemblé une ma- 
gnifique bibliothèque, dont Montfaucon a fait 
l'éloge dans son Diarium Italicum % et dont Fon- 
tanini publia le catalogue, Rome, 1711, in-fol. 
JJ chargea par son testament son neveu et léga- 
taire le prince de Francavilla de faire disposer 
sa bibliothèque dans un local ouvert au public, 
et légua une somme pour l'entretien et l'accrois- 
sement de cette collection. Un second catalogue 
de la bibliothèque d'Imperiali fut publié à Rome, 
1793, 2 vol. in-8«. Z. 

G. Chlapponi, Legazionedel tard. Gius.-Ren. Impe- 
riali a Carlo M, rè délie Spagne, Vanno 1711 ; Rome, 
nu, in-V». — Mercure de France» mars 1787. — Morérl, 
Grand Diction. Historique. — Tlpaldo, Biografia degli 
Ualiani iUtutri, t. VIII. 

imperiali (L'). Voy. Fernandi (Francesco). 

MOUT. BIOCR. GÉRER. — T. XXV. 



impiccati (Andréa decu). Hoy. Castagno 
(Andréa dei). 

*in-kyô ten-wô, vingtième mikado ou em- 
pereur japonais, né en 375 de notre ère, mort en 
453. Il fut le successeur du mikado Fan-Syô Ten- 
wô; mais ce ne fut que plus d'un an après la 
mort de ce prince qu'il consentit à prendre les 
rênes du gouvernement. C'est à ce souverain que 
l'on doit l'introduction des noms de famille et 
des surnoms chez les Japonais et la révision des 
titres de famille des sujets de son empire. In-Tok 
Ten-wô eut pour maltresse une sœur de sa femme, 
appelée So-Towori Fimé (voy. ce nom) : les 
poésies que cette princesse composa pour son 
amant ont été conservées; plusieurs d'entre elles 
passent pour être très-remarquables. In-Tok 
Ten-wô mourut à l'âge de soixante-dix-huit 
ans , laissant le trône à son fils An~K6 Ten- 
wô: L. Léon de Rosny. ! 

Nippon-tcô dai~itti-ran (Coup d'oeil sur les Dynastie! 
des Empereurs Japonais, 11 v. in-4°.- Wa-nen-Kei, édtt. 
de Ko-Tctalng-Tchang, avec trad. de J. Hoffmann. — 
TitsiDgh et Klaprotb, Annale* des Empereurs du Japon. 

in-to-tse , nom chinois du père Prosper 
Intoratta, missionnaire sicilien en Chine. Voy. In- 

TORATTA. 

* in-youen, appelé au Japon In-Gen Zen-Si, 
célèbre bonze chinois, né à Foû-Thsing (dé- 
partement de Foû-Tcheou-Fou ), dans le Foù-Kien, 
en 1592, mort en 1673. Le 6 du septième mois 
de Tannée 1654, il arriva de Chine à Nagasaki 
pour réformer la religion bouddhique et réunir 
les nombreuses dissidences qui s'étaient formées 
parmi les sectateurs du culte de Çakya-Mouni. 
L'empereur Go-Kwô Myô-In , qui régnait alors 
au Japon, le reçut avec les plus grands égards et 
lui donna pour demeure un temple situé sur la 
montagne Wô-Bak, près de Myako. In-Youen a 
joué un rôle très-important dans les annales re- 
ligieuses du Japon. L. de R. 

Klaprotb, Suppl. aux Annales des'Dalri de Tettlngh., 
in-4». 

ina, roi du royaume anglo-saxon de Wessex 
de 689 à 729. H succéda à Ceadwalla, et surpassa 
tous ses prédécesseurs par sa sagesse et son 
habileté. Dans la cinquième année de son règne, 
il réunit un witenagemot, et de l'avis de cette 
assemblée il publia un code en soixante-dix- 
neuf lois , qui réglait l'administration de la jus- 
tice, fixait le taux de la compensation pour 
les crimes, limitait les haines héréditaires , et 
punissait les fraudes dans les transactions com- 
merciales et les mutations de propriété. Ina pour- 
suivit, comme ses aïeux, le projet de soumettre 
tous les Bretons à la domination saxonne. 11 
ajouta successivement plusieurs districts aux pro- 
vinces occidentales de son royaume , et , après de 
longues guerres, il parvint à conquérir la Cor- 
nouailles sur le prince gallois Gerwent. Moins 
heureux contre Ceolred,roi de Mercie, au- 
quel il livra la bataille indécise de Wodnesbury 
en 715, il renonça à ses plans d'agrandissement, 
et s'efforça de rétablie la paix dans ses États 

27 



8S5 



INÀ — INCHBALD 



836 



troublés par les prétentions de ses feudataires. 
Deux noues saxons, CeHulf, et Eadbyrht, essayè- 
rent de s'emparer du trône, ina les vainquit; 
mais, langue de ces troubles continuels, il abdi- 
qua. Quelque temps après, il partit pour Rome 
avec sa femme Ethelburge, et alla prier sur les 
tombeaux des apôtres Pierre et Paul. Dans sa 
pieuse ardeur, il voulut vivre confondu avec les 
pauvres. 11 refusa de se faire raser la tète ou de 
prendre l'habit monastique, s'entretint du travail 
de ses mains, et accomplit ses dévotions sous le 
costume d'un pauvre pèlerin inconnu à tous. Il 
mourut avant la fin de Tannée. Z. 

Chronicon Saxonicum. — Guillaume de Maimestary, 
Gesta Begum Anetontw\ % eêkL 4e Londres, 1840. — Lin- 
gard, Histoire drjmkterre (trad. far ftoqjoo*),t I, 
c. III. 

*iMAftU8 (Ivopwç), prince égyptien, vivait 
dans le cinquième siècle avant J.-C. Chef de 
quelques tribus libyques situées à l'ouest de 
l'Egypte , il se révolta en 461 contre les Perses 
qui étaient alors maîtres de ce pays. L'insurrec- 
tion, partie de l'extrémité occidentale du Delta, 
s'étendit bientôt sur toute l'Egypte, (narus ap- 
pela à son secoure les Athéniens, qui avaient alors 
près de nie de Cypre une flotte de deux cents 
galères. La flotte athénienne remonta le Mil, et 
mit le siège devant Memphis. Inarus avec ses 
alliés remporta sur les Perses une grande vic- 
toire, dans laquelle Achéménès, frère du roi Ar- 
taxerxès, périt par la main même du chef des 
révoltés. Mais celui-ci fut moins heureux contre 
le nouveau général perse Mégabyse. Après une 
défaite complète, il tomba, suivant Thucydide, au 
pouvoir des vainqueurs qui le firent mettre en 
croix. Ctésias donne plus de détails sur cet évé- 
nement. D'après lui, Inarus, voyant l'Egypte re- 
conquise, se retira dans la ville de Byblos , où il 
capitula à condition qu'il aurait la vie sauve. ! 
Mégabyse le conduisit à la cour d'Artaxerxès, ! 
qui, pendant cinq ans, respecta la convention de j 
Byblos, mais qui enfin, cédant aux instances \ 
d'Amytis, sa mère et la mère d'Achémènes, fit ! 
mourir Inarus sur la croix. Mégabyse, indigné, se ! 
révolta. Au rapport d'Hérodote, quoique Inarus 
eût fait plus de mal aux Perses qu'aucun homme 
avant lui, son fils conserva le gouvernement des 
tribus libyques. Y. 

Hérodote, III, iS, li ; VU, 7. - MoAore, XJ, ft. - 
Thucydide, I, 104, 110. — Ctésias, Frag^ Si. 

IMGA MKNDRZ T SOTOMATOB (Don Ber- 

nardo ), calligraphe espagnol , vivait à Cordoue 
en 1709. Il était allié aux plus anciennes familles 
d'Espagne et comptait parmi ses ancêtres un des 
derniers membres de la famille royale péru- 
vienne ; fl excellait dans le dessin à la plume. On 
cite surtout de lui les portraits de Samuel Scott 
et de Paul Romain, qui sont des modèles de 
ressemblance et de correction. A. de L. 

QuUltet, DictUmmakre des Peintres espagnols. 

inchbald (Elisabeth Simpson, mistress), 
actrice et femme de lettres anglaise, née à Stan- 
ningfield, près de Bury Saint-£dmunds, dans le 



comté de Snffolk, le 15 octobre 1753, morte le 
1" août 1821. Elle était fille d'un fermier nommé 
Simpson. Son père, fermier aisé, mourut quand 
elle avait à peine dix-huit ans , laissant une fa- 
mille nombreuse ; la jeune Elisabeth, affligée d'un 
défaut de prononciation dont elle ne se corrigea 
que difficilement par la suite, fuyait le monde et 
les plaisirs de son âge pour dévorer des romans 
et des pièces de théâtre. Elle copiait désistes, tes 
apprenait par cœur, et s'exerçait à les déclamer. 
L'exemple d'on frère qui se fit acteur acheva de 
lui tourner la tète. D'humeur indépendante, vive, 
un pen coquette, mais résolue et maltresse 
d'elle-même, la voilà courant de Stanningfietd à 
Londres , et adressant à tous les directeurs des 
sollicitations que ses dix-huit ans et sa joue 
figure rendaient fort dangereuses ; mais partout 
elle rencontrait plus d'hommages que d'encou- 
ragements, et, pour sortir de cette position équi- 
voque, elle s'estima heureuse d'accorder sa main 
à l'acteur Inchbald, l'un des plus murs et des 
plus honnêtes de ses soupirants. Cet événement 
eut lieu à Londres en 1772. Peu de temps après, 
les deux époux partirent pour Bristol, où mis- 
tress Inchbald débuta dans le rôle de Cornelia 
du Roi Lear. Elle n'obtint pas, à cette première 
épreuve, tout le succès qui fut depuis la récom- 
pense de ses efforts. Sa beauté, son Intelligence 
prévenaient le public en sa faveur; mais la len- 
teur qu'elle était obligée de mettre dans son dé- 
bit pour articuler distinctement nuisait à l'effet 
dramatique. Nous ne la suivrons pas à Edim- 
bourg, à Glasgow, à Ljverpool, etc., Tilles où efle 
s'exerça dans la tragédie, dans la comédie, quel- 
quefois même dans la pantomime. Après une 
comte excursion en France, elle revint à Londres 
en 1777. La perte de son mari, qui suivit de 
près , lui fit plus que jamais une nécessité de 
tirer parti de ses talents. Elle contracta un en- 
gagement de plusieurs années à Covent-Garden. 
En même temps , elle se mit à arranger pour le 
théâtre des farces et des comédies tirées le plus 
souvent de l'allemand et du français. Plusieurs 
de ces pièces, te Conte mogol, Je vous le di- 
rai, V Heure de Minuit, Chacun a ses Défauts, 
eurent du succès, et lui attirèrent des offres 
avantageuses de la part des libraires. Elle atta- 
cha son nom à plusieurs collections de pièces de 
théâtre qu'elle enrichit de préfaces et de notes. 
Mais son roman, Simple ffistoire, traduit à 
son apparition dans toutes les langues de l'Eu- 
rope, et vingt fols réimprimé depuis , restera 
comme une de ces créations qui se confondes* 
dans nos souvenirs avec les impressions de h 
vie réelle. Miss Mflner, Sandford, lord Ebiswood 
sont des types familiers à toutes les mémoires. 
Cest un phénomène littéraire assez curfeux'qi* 
cette œuvre si pure et si naïve, écrite au fond 
des coulisses , par une femme de théâtre sans 
éducation, mais qui avait beaucoup vécu* par 
l'imagination et par le cœur. Ses autres remaas : 
Lady Mathilde, suite de Simple Histoire,* 



837 



INCHBALD — 1NCH0FER 



888 



Lm Nature et F Art, sans avoir la fraîcheur 
d'une première inspiration ni l'éclat d'un premier 
succès , vinrent ajouter de nouveaux titres à la 
réputation littéraire de l'auteur. Mistress Inch- 
b'ald, retirée du théâtre depuis 1789, portait dans 
la société le charme qui s'attachait à la plupart 
de ses écrits. Mais dans les dernières années de 
sa vie, sans rien perdre de la vivacité de son 
esprit, elle était revenue à des penchants de 
solitude, de frugalité et même de dévotion (elle 
était catholique) qui ne l'avaient jamais aban- 
donnée à travers les vicissitudes de sa vie aven- 
tureuse. La presque totalité de ses revenus était 
affectée an soulagement de sa famille et à des 
actes de charité. Voici les titres des ouvrages 
dramatiques de mistress Inchbald :A mogu l Taie, 
drame; 1784, non imprimé; '— Appearence is 
against them, farce; 1785, in-8°; — VU tell 
you what, comédie; 1786, in-8 6 ; — Widow's 
Vow , farce; 1786, in-8 B ; — AU on a summer's 
Day, comédie; 1787, non imprimée ; — Animal 
Magnelism, farce; 1788, non imprimée; — The 
Child oj Nature, drame; 1788, in-8 ;— Mid- 
night Hour, comédie; 1788, in-8° ; — Such 
thinga are, pièce; 1788, in-8; — Married 
Man, comédie; 1789, in-8°; — The Bue and 
JEry ,fw»} 1791, non imp.;— Neat Door 
Neighhmrs, coméd.; 1791, in-8° ; — Young 
Men and old Women, farce; 1792, nonimp.; 

— Mvery one has his fault, comédie; 1793, 
iorê° ; ~ The Wedding Day, corn.; 1794,in-8°; 

— Wmes a$ they urne, and Maid$ as they 
are, eon.; 1797, ia*8«; -—Loves'r Vows, pièce; 

1798, in-»°; — Wise Han ofthe East, pièce; 

1799, in-fl°; *~ To Marryor not to M arr y, co- 
médie; i80é, ûv§°. On a de plus de mistress In- 
chbald j A Simple Stofy, roman} 1791, 4 vol. 
in- 12 ; traduit en français par Deschamps, Paris, 
1791, 4 voi. in- 18 et in-8°; — Nature and 
Art, roman, 1796, 2 vol. in- 12 ; tari, en fran- 
çais par Desehamps, Paris, 1796, 2 vol. in- 18 
et 1 vol. in-8 9 '; et par Paquis , Paris , 1830, 
2 vol., in-12, Mistrees* Inchbald a publié aussi, 
avec de» remarques critiques et biographiques : 
The Britiêh Théâtre, collection de pièces; 
1806-1809, 2$ vol ; — The Modem Théâtre; 
1809, 10 vol» ; et une collection de Farces , en 
7 vol. Elle avait écrit un récit de sa vie; elle le 
refusa à un éditeur qui lui en offrait 1,000 1. st., 
et par son testament elle ordonna qu'il fût dé- 
truit Mais on a conservé son journal, et d'après 
ce document et sa correspondance M* Boaden 
rédigea les Mémoires de Mistress Inchbald. 
[M, Ràthbby, dans Vtincyc. des G> du M., avec 
«ddjt* parZ.} 

Botta), Mémo/Un af Mittnm IneMalé; 173». ~ Bio- 
grapbia Dramatise. 

l*GMOV*m(Mêkhior), savant jésuite alle- 
mand, né à Vienne, en i 584, mort le 28 septembre 
1648. Après avoir étudié h Home la jurispru- 
dence , il entra à l'âge de vingt-trois ans dans 
Tordre des Jésuites, et fut envoyé par ses supé- 



rieurs quelques années après à Messine, pour y 
professer la théologie et les mathématiques. Cité 
en 1630 devant ta congrégation de Y Index, pour 
avoir publié un commentaire sur nne lettre apo- 
cryphe de la Vierge aux Messinois, il se rendit à 
Rome, où il se concilia l'indulgence de ses juges, 
n'ayant péché que par une trop grande crédulité. 
Après être retourné en Sicile en 1634, il revint 
à Rome, deux ans après, pour y travailler à un 
grand ouvrage sur le Martyrologe Romain, dont 
plusieurs manuscrits, conserves à l'abbaye de 
Saint-Sauveur de Messine, lui avaient donné 
l'idée. Mais ayant improuvé par écrit le genre 
de mutilation auquel on soumettait alors des en- 
fants pour leur faire obtenir une voix agréable, 
il s'attira le ressentiment de ceux qui défendaient 
cette coutume; cela, joint à diverses tracasseries 
auxquelles il fut en butte, lui fit quitter Rome en 
1647. Il partit pour Macerata, où il eut à diriger 
le collège que son ordre avait dans cette ville. 
Quelque temps après il se rendit à Milan pour 
y consulter un manuscrit contenant plusieurs 
vies des saints ; mais à peine arrivé, il y mourut 
épuisé par le travail et les veilles. Inchofer avait 
beaucoup d'érudition; mais il manquait de cri- 
tique. On a de lui : Epistolm B. Marias ad Mes- 
sanenses Veritas vindicata; Messine, 1629, 
in -fol., très-rare; d'après nne décision de la 
congrégation de V Index, cet ouvrage fut mo- 
difié par Inchofer, et parut alors sous le nou- 
veau titre de : De Epistola B. Virginis ad 
Messanenses Conjectatio; Vlterbe, 1632, in-fol.; 
le vrai lieu d'impression était Rome ; •— Trac- 
tatus syUepticus, in quo quid de Terras So- 
lisque motu vel statione secundum Sacram 
Scripturam sentiendum ostenditur; Rome, 
1633, in-4° : ouvrage écrit pour combattre le sys- 
tème de Kopernic; — ffistoria sacrœ Latinita- 
tis, hoc est de variis linguas laiinœ mysteriis; 
Messine, 1635, in-4° ; Munich , 1638, in- 8° ; — 
Grammaticus Pœdicus , sive pueriîis.; 1638, 
in- 12 : écrit dirigé contre Scioppius et publié sous 
le pseudonyme d'Eugène Lavanda, ainsi que le 
suivant : Grammaticus Palœphatius , sive 
nugivendus, hoc est 4 in très consultationes 
Scioppii De Rattene Studiorum notationes; 
1639, in-12; — Annales ecclesiastici regni 
Hungariae, tomus I; Rome , 1644, in-fol. ; cet 
ouvrage, qui est resté inachevé, s'étend jusqu'à 
l'an 1059; — De Eunuchismo, inséré dans les 
Symmista d'AUatius. — Inchofer .a encore pu- 
blié divers opuscules sur des matières de théo- 
logie et d'astronomie ; enfin il a laissé en manuscrit 
plusieurs ouvrages , entre autres le Martyro- 
logium Romanum, auquel il travailla pendant 
une grande partie de sa vie. On a faussement 
attribué à Inchofer une satire violente contre 
les jésuites, publiée sous le titre de ; Lucii Cor- 
nelii Europxi Monarehia SoUpsorum; Venise, 
1645, in-12; cet écrit est d'un autre jésuite, 
nommé Jules Scotti(t>oy. ce nom). E. G. 
AkgjuBlM, Bibltothee* icript. Soc. Jesu. - u AUatkw , 



839 IIVCHOFER — rNDTBILIS 

Ape$ urbana. — Bayle, Dictionnaire. — Nicéron, Mé- 
moires, t. XXXV. -Cfaanffepté, IfoweaulDietion, HUU 

ingledon (Benjamin-Charles), chanteur 
anglais, né vers 1764, àSaint-Keveran(comtéde 
Cornouailles,raort à Worcester, en 1826. A l'âge 
de hait ans, il fut confié an compositeur Jackson 
d'Oxford, et passa sept ans sons sa direction, 
comme choriste de la cathédrale ô"Exeter. 11 
quitta son maître en 1779, et s'embarqua comme 
matelotà bord du Formidable. Il y resta cinq ans, 
et fit le voyage des Indes, occidentales. À son re- 
tour, il s'essaya sur les théâtres de Southampton 
et de Bath, et fut engagé au mois d'octobre 1790 
à Covent-Garden. H devint bientôt et resta jusqu'à 
sa mort un des chanteurs les plus populaires de 
l'Angleterre. Z. 

Rose, New gênerai Bioçraphical Dictionary. 

* ISDA.CO (Jacopo de Florence, dit L' ), peintre 
de l'école florentine, vivait en 1534, et mou- 
rut à Rome, à l'âge de'soixante-huit ans. Élève de 
Domenico Ghirlandajo, il travailla à Rome avec 
Pinturicchio, et fut lié d'amitié avec Michel- Ange, 
qui venait chercher dans sa conversation un re- 
pos à ses fatigues du corps et de l'esprit. L'Iu- 
daco était appelé à tenir un rang distingué dans 
son école; mais, malheureusement, il détestait 
le travail autant qu'il aimait le plaisir, et ses ou- 
vrages s'en ressentirent. On y trouve cependant 
une vérité qui fait regretter d'autant plus l'ab- 
sence des autres qualités qu'il eût pu acquérir 
par un peu d'étude. E. B— n. 

Vasari, Vite. — Bottari, Nette aile ViU tel Vatari, — 
Lanzl, Storia délia Pittûra. — Ticozzi, Dizionario. - 
Guida dl relterra. 

HP *iWDàco (Francesco, dit V), peintre de l'école 
florentine, frère du précédent, vivait en 1536. H 
fut, comme son frère, élève de Domenico Ghirlan- 
dajo. Il était bon dessinateur, et modelait en stuc 
et en terre avec habileté. Vasari le qualifie de pein- 
tre éminent, tout en lui reprochant, comme à Ja- 
copo , une paresse qui nuisit à ses progrès. Mal- 
heureusement les fresques qu'il avait peintes à 
Monte-Pulciano, à Arezzo et à Florence ont toutes 
disparu. E. B— n. 

Vasari, Vite. — Orlandl, Abbecedario. — Lanii, Storia 
délia Pittura. — Ticozzi, Dizionario. 

*india (Tullio), dit V ancien y peintre de 
l'école vénitienne, né à Vérone, florissaiten 1545. 
Il fut habile peintre à fresque , excellent copiste, 
et ne réussit pas moins dans l'art du portrait. Il 
jouit de son vivant d'une grande réputation, et 
l'on peut voir, par une curieuse lettre de cet ar- 
tiste , publiée par Gualandi , que les plus grands 
, seigneurs cherchaient à l'attacher à leur service, 
mais qu'il préféra toujours son indépendance, 
quelque dorées que fussent les chaînes qui lui 
étaient offertes. Peu de ses nombreuses fresques 
sont parvenues jusqu'à nous; on voit cependant 
encore avec plaisir de jolis enfants dans des rin- 
ceaux formant la frise du palais Miniscalchi de 
Vérone. E. B— n. 

Pozzo, Vite dé* Pittori.Scultorie ArchitetU Feronesi. 
— Vasari, rite* - Lanxi, storia delta Pittura. — 6e- 



840 

nantit!, Guida di Ferma. -Gualandi, Simone orty- 
nali di Belle-Arti. 

MroiA ( Bernardino ) , peintre de l'école vé- 
nitienne, fils du précédent, né à Vérone, virait 
de 1572 à 1584. Après avoir reçu de son père 
les premiers principes de son art, il entra à l'é- 
cole que Jules Romain avait ouverte à Man- 
toue; on trouve dans ses ouvrages une vi- 
sible imitation de la force de l'illustre élève de 
Raphaël, qualité qui n'exclut pas le charme et la 
grâce. Les peintures delndiasont nombreuses à 
Vérone; parmi les fresques, les principales sont 
les plafonds des palais Giuliari et Canossa et la 
façade du palais Murari ; parmi les tableaux, Its 
plus importants sont à S.-Bernardino, la Nati- 
vité de Nôtre-Seigneur, portant la date de 1572, 
et La Vierge entre saint Roch et saint Sébut- 
tien ; à S.-Zeno-Maggiore, La Vierge etpliakm 
saints ; à Samt-Nazaire-et-Saint-Celse, la Conver- 
sion de saint Paul, peinte en 1584. E. B-ir. 

vasari, rite. — Orettl, Memorie. — Unzi, Storia Mê 
Pittura. — Ticozzi, Dizionario. — Benassott, Guidé H 
Verona. 

indibilis ('Av8o6<SXvk dans Polybe, 'Hi- 
êiXtç dans Appien), prince espagnol, tué en 205 
avant J.-C. Il était roi ou chef de la tribu des 
Ilergètes, qui prit une grande part à la lutte des 
Carthaginois contre les Romains dans la seconde 
gnerre punique. Il est mentionné pour la pre- 
mière fois en 218. Commandant les auxiliaires 
espagnols au service de Hannon, gouverneur des 
provinces situées au bord de l'Erré, il fut vainco 
avec ce général par Cneius Scipion, et fait prison- 
nier. On ignore par quels moyens il recouvra sa 
liberté ; mais Tannée suivante on le retrouve avec 
son frère dévastant le territoire des tribus soo- 
mises aux Romains. 11 fut repoussé, et les soc 
ces des deux Scipions le forcèrent au repos. Ea 
212 il conduisit 7,500 hommes au secours du 
général carthaginois Asdrubal, et ce fat en vou- 
lant intercepter ce corps d'armée que P. Scipion 
périt. La victoire des Carthaginois amena le ré- 
tablissement d'Indibilis et de Mandonius dans 
leurs Etats, d'où les Romains les avaient chassés; 
mais le hautain et violent Adsdrubal s'aliéna 
bientôt les deux chefs espagnols en leur impo- 
sant une contribution de guerre et en exigeant 
comme otages la femme de Mandonius et les filles 
dlndibilis. Publius Scipion le jeune s'empara A* 
ces otages à la prise de Carthagène, et les traita 
avec une distinction qui gagna le cœur des dew 
frères. Indibilis et Mandonius vinrent avec toute 
leurs forces se joindre à Scipion au printemps 
de 209, et firent sous ses ordres la campagaequi 
se termina par la victoire de Bœcula. Us Matè- 
rent fidèles à l'alliance romaine tant que Scipion 
fut prêt d'eux ; mais sur le faux bruit de sa morf, 
en 206, ils se soulevèrent et firent révolter te 
tribus celtibériennes voisines. Scipion accourant 
les rejeta dans leurs États, les y poursuivit et te 
força d'implorer un pardon qu'il leur accorda ao 
prix d'une contribution de guerre. Sa M* *** 
fut mal reconnue par les deux frères, qui aussi»» 



841 



IND1BILIS — INEZ 



842: 



après son départ, en 205, recommencèrent la 
guerre avec 30,000 fantassins et 4,000 cavaliers. 
Les .lieutenants de Scipion L. Lentulus etL. Man- 
lius Acidinos marchèrent contre les insurgés et 
les vainquirent après une lutte acharnée. Indi- 
bilis périt sur le champ de bataille. Mandonins 
s'échappa avec les restes de son armée ; mais ses 
compagnons d'armes le livrèrent aux généraux 
romains, qui le firent tuer immédiatement. Y. 

Potjbe, III, 7« ; IX, 11 ; X, 18, Si, 18, 40 ; XI, tt, î», S1-3S. 
— Tite-Ltve, XXII, Il $ XXV, S* j XXVI, 49; XXVII, 17, 
19; XXVIII, 14, 18, 31-84; XXIX, 1-1. - Dlodore de Si- 
cile, XXVI, Excerp. Fat. — Applen, HUpan,, 37, 58. — 
Zonaras, rx, 10. 

ihdobtàs, prince espagnol, tué en 232 avant 
J.-C. H était chef d'une des tribus celtibériennes 
situées dans le voisinage de rÈbre. Après la dé- 
faîte d'Istolatius par le général carthaginois Amil- 
car Barca, Indortès, qui le remplaça dans le 
commandement des Celtibériens, n'osa pas, mal- 
gré le nombre de ses soldats ( 50,000, au rapport 
deDiodore), engager une bataille contre les- Car- 
thaginois, et se retira sur une hauteur où Amil- 
car l'assiégea. Il tenta alors de s'échapper pen- 
dant la nuit ; mais il tomba au pouvoir du général 
carthaginois, qui le fit mettre «n croix après lui 
avoir infligé diverses tortures. Y. 

Dlodore de Sicile, XXV, 10. 

indulf, roi d'Ecosse, régna de 959 à 969. 11 
succéda à Malcolm. Les premières années de son 
règne furent paisibles ; mais vers 967 les Danois, 
irrités de son alliance avec les Anglais, firent des 
incursions dans ses États. Une bande de ces pi- 
rates ayant débarqué au nord de l'Ecosse, Indulf 
marcha contre eux, et les força de regagner leurs 
vaisseaux. Comme il les poursuivait avec trop 
d'ardeur, il fut tné d'un coup de flèche. Y. 

Bucbanan, Hlstoria Scotlca, 

£ikduko (Dominique), peintre italien, né 
à Milan en 1815. Il fréquenta les cours de l'A- 
cadémie royale de cette ville ainsi que l'atelier 
de M. Hayez, et remporta en 1837 un grand prix 
de peinture, distinction qui lui permit d'aller 
passer plusieurs années à Rome aux frais du gou- 
vernement autrichien. Cet artiste, qui réside à 
Milan, se distingue par de sérieuses qualités de 
composition, et a obtenu une médaille d'honneur 
à l'exposition de Gènes ( 1852) et une mention 
honorable à celle de Paris ( 1855 ). On cite parmi 
ses toiles d'histoire et de genre : Samuel et Da- 
vid, qui se trouve au musée de Vienne; — 
Les Contrebandiers ; — Pain et Larmes ; — La 
Douleur du Soldat;— Le Village incendié; — 
La Quête, etc. P. L— y. 

Siret, Livrets des Salons. 

indutumare (Indutiomarus ou Indu- 
ciomarus ), un des chefs des Trévires ( habitants 
de Trêves ) , mort en 54 avant J.-C. Quand Cé- 
sar pénétra sur le territoire des Trévires, Indu- 
tiomare, qui était à la tète du parti opposé aux 
Romains , leva des troupes et se prépara vigou- 
reusement à la guerre. Mais lorsqu'il vit les 
principaux de l'État, entraînés par Cingétorix, chef 



du parti romain, se rendre auprès de César, il lui 
envoya aussi des députés. César accepta ses 
excuses et exigea de lui deux cents otages; en 
même temps il engagea fortement les chefs tré- 
vires à se rallier autour de Cingétorix. Exaspéré 
de l'atteinte portée à son influence, Indutiomare 
attendit avec impatience l'occasion de se venger 
des Romains. Elle se présenta plus tôt qu'il ne l'es- 
pérait César fut obligé, par la rareté des vivres, 
de mettre ses troupes dans des quartiers d'hiver 
éloignés les uns des autres. Indutiomare décida 
Ambiorix et Cativolcus, chefs des Éburons, à 
attaquer les légions romaines stationnées dans 
leur pays, et marcha contre Labienus, qui cam- 
pait chez les Rèmes sur la frontière des Trévires. 
La nouvelle de la victoire de César sur les Ner- 
viens l'obligea momentanément à la retraite. U 
renforça son armée, et marcha une seconde fois 
contre Labienus, dont il entoura le camp. Une 
soudaine sortie des Romains mit ses troupes en 
fuite, et lui-même fut tué dans la déroute en pas- 
sant une rivière (peut-être la Meuse). Y. 

César, Bel. Gai., V, », 16,53, 55, 58. - Bion Casstns, XL, 
II, 81. 

USEZ de Castro (Dona ) , reine célèbre du 
Portugal, née dans la Galice espagnole, vers les 
premières années du quatorzième siècle, morte 
assassinée, le 7 janvier 1355. Il y a dans la vie de 
cette princesse deux parties bien distinctes, la lé- 
gende, qui a transmis son nom parmi tous les 
peuples, et qui la fait revivre après cinq cents 
ans; l'histoire réelle, que toutes les investiga- 
tions de l'école moderne n'ont pu encore élucider 
complètement : ce sera la réalité des faits que 
nous tenterons de découvrir. — On ignore com- 
plètement l'époque précise de la naissance dînez, 
et l'on ne sait pas d'une manière plus certaine 
en quel lieu elle vint au monde. Son père ap- 
partenait à l'une des plus anciennes familles de 
la Galice (1), et se nommait don Pedro Fernandéz 
de Castro; il était seigneur deSarria e Lemos et 
grand-majordome du roi de Castille Alphonse XI; 
sa mère s'appelait dona Aldonça Soares de Val- 
ladares, et elle était fille de Lourenço Soares de 
Valladares, garde des frontières (fronteiré 
mor) de la province de Entre- Douro-e-Minho. 
L'union de cette grande dame avec le père. d'Inez 
n'avait pas été ratifiée par un mariage valable, et 
ses enfants passaient pour bâtards (2) ; peut-être 
le grand seigneur galicien, qui comptait des rois 
parmi ses aïeux, aspirait-il à une alliance royale , 
et ne voulut-il pas compromettre sa situation en 
épousantdona Aldonça (3). Parmi les grands noms 



(1) A en Juger par ses armes, la famille des Castro re- 
montait aux époques antiques, où les peuples gaels se 
confondaient avec les Ibères; les castros.ne sont antre 
chose qoe des enceintes circulaire» de pierre, servant an 
culte druidique. Voy. O panorama Jornal literarlo, 
t VJI, p. M9. Os eastros em trot os montes. 

(î) Le JVobilario du comte de Barcellos renferme ce- 
pendant les détails les plus précis sur le mariage dont 
sortirent Inez et ses frères. 

(8) Voy. Inventaire général du royaume d'Espagne, 
manuscrit de la Blbl, imp. de Paris. 1 



848 



INEZ 



844 



historiques qui avaient illustré leur maison, les 
Castro nommaient avec orgueil Laïn Calvo : ils 
Taisaient remonter leur généalogie Jusqu'à Gras- 
tinius , ce Romain valeureux qui, à la bataille de 
Pharsale, alla le premier attaquer Pompée. 

Les poètes de la péninsule ont épuisé toutes 
les formes d'une admiration hyperbolique pour 
nous donner une idée de la beauté d'Inez, et 
leurs portraits sont si variés, qu'il est difficile 
d'y voir un écho de la tradition. Le surnom que 
lui donne l'histoire sert à faire comprendre la 
grâce indicible qui charma ses contemporains et 
lui donna une réputation populaire de beauté qui 
retentit encore dans le Romancero. La belle Edith 
s'appelait Swanêë Haie» (coude cygne) ; on avait 
surnommé Inès Collo de 4tors4( soude héron). 
Les femmes de sa race avaient une grande réputa- 
tion de beauté, de discrétion et de oourage. Le 
poète admiré d'Érasme, Gll-Vicente ( 1), a dit ; 

Ai mulheret de Cratto tao de pôuca/alla. 

Formatât e firmes como Saberêti 

et, se trouvant à Coïmbre, dans le lieu même où 
périt la victime d'Alfonse, il ajoute, comme un 
hommage à la beauté célèbre qu'il veut désigner : 

Pola triste morte de Dona Inès, 

A quai de Gouttante morreo n'esta Sala. 

Nous ne savons absolument rien sur les pre- 
mières années de la fille de don Fernandezde Cas- 
tro ; mais nous pouvons supposer qu'à la petite cour 
chrétienne où elle vivait, pale reflet des fastueuses 
cours arabes, cette jeune fille relevait sa beauté 
naturelle de toutes les recherches du luxe oriental, 
qu'on ignorait alors dans les cours du Nord. Des 
miniatures (2) du treizième siècle, peintes pour or- 
ner les poésies d'Alfonse X, sont aujourd'hui des 
témoins irrécusables de la grâce vraiment ori- 
ginale, du mélange de splendeur orientale et d'é- 
légance qui du harem des Musulmans avaient 
passé dans les châteaux des grands feudataires 
de la Castille et de l' Aragon. Un petit-fils de 
saint Ferdinand, Don Juan Manuel, dnc de Pe- 
nafiel et marquis de Villena, l'un des hommes 
les plus spirituels et (es plus instruits de son 
siècle, tenait alors une de ces cours semi-chré- 
tiennes semi-orientales dans la capitale de la Ga- 
lice. Ce fut dans le palais de ce prince qu'Inez 
dut être élevée ; eHe parait avoir vécu dès l'ori- 
gine avec Dona Constança Manuel, fille du duc, 
dont elle était la cousine (3), et qui, ayant refusé 



(1) Obrat de GU-Vicente, eomedia tebre m divisa da 
ctdade de Coimora, V II, p. 1M. 

(t) Et surtout ie Livre des ÊchecsJ&n reproduisant comme 
il le fait en ce moment ces précieuses miniatures dans 
son Iconographie etpognole, M. Vatentin Cardercra Jette 
on Jour inattendu sur l'histoire des morars chrétiennes 
daos la péninsule. Ces odaliaquea revêtues de vêtements 
diaphanes, qui environnent le fils d'un roi canonisé par 
l'Église en lui offrant des parfums, nous disent aises ce 
que devaient être ces cours voluptueuses, trop voisines de 
celles de Gordene et de Grenade pour n'en point refléter 
les usages. 

(3) D. Juan Manuel l'avait eue de son premier ma- 
riage avec Dona Constanea , aile de Jayme, roi d'A- 
ragon. 



plusieurs fois des têtes couronnées, s'était dé- 
cidés à épouser D. Pedro, infant de Poilu- 
gai (1). Les deux jeunes filles quittèrent ensemble 
la petite cour de Penafiel en 134Q, et Inez de 
Castro vint demeurer à Lisbonne on à Coïmbre, 
en qualité de dame parente. Ses frères l'avaient 
probablement accompagnée, et la tradition ajoute 
que tout aussitôt son arrivée à la cour d'Al- 
, fonse IV, elle excita une vive passion dans le 
coeur de D. Pedro. 

Les moeurs des musulmans, il faut bien le dire, 
s'étaient' introduites peu à peu dans les cours 
des princes chrétiens; rien n'était si commun 
alors et rien n'était si toléré que la coutume 
d'honorer, comme une seconde épouse, ce que 
les Espagnols appelaient la barragana et les 
Portugais la barragdo (2). Inez de Castro, 
aimée passionnément par. l'héritier du trône du 
vivant de l'épouse légitime, était d'un trop noble 
lignage pour prendre ostensiblement un titre 
pareil; mais on comprend que la cour d'Al- 
fonse TV ait vu sans étonnement une union que 
légitimaient, pour ainsi dire , les habitudes du 
quatorzième siècle, Il est bien, certain, néan- 
moins, que les amours d'Inez et de don Pedro ex- 
citèrent au plus haut degré la jalousie de la fille 
du duc de Penafiel. S'il en eût été autrement, 
une légende, qui s'est conservée jusqu'à nos jours, 
à Coïmbre, et que Faria y Souza nous a trans- 
mise, n'aurait pas été adoptée comme elle le fut 
par le peuple durant le dix-septième siècle. Lors- 
qu'on visite à Coïmbre le jardin délicieux connu 
sous le nom de Quinta dos Laç rimas, on vous 
montre La Fontaine des Amours; si l'on en 
croit M. Kinsey, ce parc aurait appartenu aux 
ancêtres d'Inez. Nous ignorons sur quelles au- 
torités ce voyageur anglais se fonde; mais on 
prétend que lorsque les deux amants voulaient 
correspondre , un message écrit par don i :dro 
était confié an ruisseau qui s'échappait de la 
fontaine, et était transmis par ces eaux limpides 
à celle qui le devait recevoir (3). S'il en était 
ainsi, Inez ne demeurait pas sous le môme toit 
que dona Constança. Nous savons que don 
Pedro ne résidait pas toujours à Coïmbre dans 
le commencement de son mariage; car le pre- 
mier enfant qu'il eut de son épouse légitime na- 
quit à Evora, le 6 avril 1342. Trois ans plus 
tard, la malheureuse dona Constança mourut des 
suites de ses couches ( le 13 novembre 1345). 



{1) M. de Pdlbusqde a donné sur cette petite cour tent 
les renseignement* désirables dans son eiceUeate intro- 
duction au Comte Lucanor, livre très-curieux, dent le 
duo Juan Manuel est l'auteur. 

(l) Ou Barregaa. foy.lt signification réelle de ce mot 
dans ï'Etucidario depàlawat antigut de Santa-Rosa de 
Vlterbo. Les entants qui procédaient de ces unions to- 
lérées par la société, mais non admises par l'église, pre- 
naient la dénomination de gvança, ganta on ganhadia. 

(B) foy. sur cette légende peu connue les notes de Fa- 
rta y Souza, dans les Rimas de Camoens,* partie^bhfoL, 
page 87. F~oy. aussi les Mémoires de M— la duchesse 
d'Àbrantès, souvenirs d'une ambassade, t. II, p. »♦ 
et 109. 



845 



IREZ 



816 



A partir de cette époque, les liens qui s'étaient 
formés entre Inez et l'infant dorent prendre un 
caractère fort différent de ce qu'ils étaient do- 
rant la vie de l'épouse légitime. Don Pedro eut 
plusieurs enfants dînez ; mais on ignore la date 
de lenr naissance , et il est bien certain que les 
premiers de ces enfants naquirent ayant qu'une 
union longtemps projetée se réalisât, si jamais 
elle eut lieu. Vers 1354, neuf ans après la mort 
de dona Constança, don Pedro épousa à Bra~ 
ganee, en présence de révoque de Guarda et de 
quelques serviteurs, celle qui avait été durant si 
longtemps sa maîtresse; mais une circonstance 
fort singulière marque ce changement subit 
dans la position de la malheureuse Inez : le ma- 
riage fut béni, et nul acte valable ne le rappela; 
rien ne spécifia les droits qui étaient dévolus à la 
nouvelle épouse et à ses enfants ; aucun des té- 
moins du mariage et le prince lui-même quand 
il tut devenu roi ne purent assigner une date pré- 
cise à ee mariage clandestin, qui, par la suite, 
devait donner une reine au Portugal. Quand on a 
sous les yeux les documents historiques de l'é- 
poque, on comprend parfaitement comment l'ha- 
bile jurisconsulte Jean de Regras put contester, 
en 1385, avec tant de succès, la validité d'une 
union d'où devaient résulter tant de changements 
politiques (1). 

En 1345, Tinfantdon Pedro n'avait que vingt- 
cinq ans, et le roi lui proposa plusieurs alliances ; 
elles furent toutes refusées. Don Pedro, quit- 
tant. la cour, se retira dès lors à Santa-CIara de 
Coïmbre , dans un palais fondé par sainte Eli- 
sabeth, la femme du roi Diniz. Là il reçut divers 
messages du roi tendant tous à obtenir de lui 
une décision définitive. Âlfonse IV affirma qu'à 
plusieurs reprises il avait prié l'infant ou de con- 
tracter une union avec une princesse royale, on 
de faire d'Inez sa femme légitime. Les indécisions 
de cette àme énergique et violente devaient 
amener les plus funestes résultats. 

Rien dans les chroniques contemporaines ne 
prouve qu'une femme jeune, belle, dont toutes 
les actions dénotent une véritable élévation 
d'âme et une grande tendresse pour ses enfants, 
ait jamais provoqué la haine du peuple; elle* ap- 
paraît, au contraire, dans les vieilles ronfances, 
revêtue du plus touchant caractère ; sa mort fut 
le résultat d'une lutte orageuse qui s'éleva entre 
quelques rades chevaliers. 

En 1355, Alfonse IV avait transporté sa cour 
à Monte-mor-o-Velho, lorsque plusieurs per- 
sonnages influents, ennemis de la famille que re- 
présentait alors avec éclat Pedro Fernandez de 
Castro, persuadèrent au monarque qu'il fallait 
diminuer les prétentions de cette maison puis- 



t (i) Voyez à ce sujet : Catatogo das Rainhas de Por- 
tugal por p. Jazè Barbota; Liab., 1777. On y présente 
dans son étendue l'argumentation hostile de J. das Re- 
gras. D. Pedro avait cependant joré solennellement à 
Castanbede , en 1861, qu'il était uni légitimement â 
Inez. 



santé, qui se faisait presque autant redouter en 
Espagne qu'en Portugal, et que le plus sur 
moyen de rabaisser était d'ôter la vie à une 
jeune femme prête à monter sur le trône ; les 
principaux instigateurs de cet attentat furent 
trois seigneurs ennemis de Pedro Fernandez : 
AlvaroTSonçalves (meirînho mor du royaume ), 
Pedro Coelho, et Diogo Lopes Pacheco, seigneur 
de Ferreira. Selon Femand Lopez, le grand his- 
torien auquel on a imposé le surnom de Froig- 
sart portugais, et qui avait eu, dans sa jeunesse , 
des rapports avec quelques-uns des hommes qui 
jouèrent un rôle dans ce drame, ce ne fut 
pas sans bien des combats intérieurs que le roi 
se décida à accomplir cette action détestable. 
« D'une part, il voyait le péril de son petit-fils, 
premier né, et la destruction du royaume; de 
l'autre, il considérait combien ce serait une ac- 
tion cruelle de faire mourir une femme, et une 
femme innocente, pour une faute qui lui était 
étrangère, et cela au moment où il était au som- 
met de la vie , alors qu'il devait se rendre Dieu 
propice et ne pas tacher ses mains par le sang 
d'un meurtre que beaucoup regarderaient comme 
un parricide. » 

Quoi qu'il en soit, le vieux roi profita d'un mo- 
ment où D. Pedro avait organisé une de ces 
grandes chasses où les princes du moyen âge 
retrouvaient une image de la guerre, et il.se ren- 
dit secrètement au palais que l'infant occupait à 
Coïmbre. Nous aHons laisser parler encore le 
vieil historien. « Quand dona Inez sut la venue 
du roi et les intentions qu'il avait contre elle, 
transportée de la douleur où elle était de ne 
pouvoir se sauver par aucun moyen, elle vint le 
recevoir à la porte avec un visage de femme 
qui voyait la mort présente; et pour s'assurer 
si elle trouverait dans le roi quelque pitié, elle 
amenait avec elle les trois innocents princes ses 
fils, enfants de peu d'âge et très-beaux. Avec eux 
donc, et employant beaucoup de larmes et de pa- 
roles touchantes, elle demanda pardon et misé- 
ricorde. Quoique dur de son naturel et rendu 
plus rigoureux encore par la persuasion des 
siens, le roi, voyant le spectable déplorable d'une 
femme si belle et si innocente qu'embrassaient 
de si beaux enfants, qu'elle prenait pour bouclier 
et pour défense, le roi, dis-je, s'en allait déjà 
et lui laissait la vie ; mais quelques chevaliers, 
qui venaient avec lui pour être présents à la 
mort, principalement Alvaro Gonçalvez, huis- 
sier major, Pero Coelho et Diogo Lopez Pa- 
checo, seigneur de Ferreira, ne pensèrent pas 
ainsi. Quand ils virent le roi sortir comme, 
ayant révoqué la sentence, ils le supplièrent de 
les envoyer tuer Inez ; car, disaient-ils, ils se 
trouvaient compromis, en raison de la détermi- 
nation publique à la suite de laquelle il les avait 
amenés, et se voyaient en butte dorénavant au 
péril que leur faisait courir la forte hafne de 
l'infant D. Pedro. Quelques-uns d'entre eux donc, 
entrant où elle était, la tuèrent cFueilement 



847 



INEZ 



comme des bouchers (1). Cette action fut re- 
prochée au roi, comme une grande cruauté, par 
les gens en qui il y avait quelque humanité et 
quelque bon sens ; car ils disaient qu'on aurait 
dû attendre les événements qui étaient à venir et 
encore incertains, au lieu de se jeter dans le péché. 
Us ajoutaient qu'on avait évité un inconvénient 
pour tomber dans un plus grand encore, celui 
de tuer une innocente, à laquelle il ne manquait, 
de Tavis de tous, pour mériter d'être reine, que 
le mariage de son père avec sa mère ; car par le 
lignage, par les qualités qui étaient en elle, elle 
le devait être certainement. » 

Le corps d'Inez fut inhumé immédiatement à 
Santa-Clara. Mais le vieux chroniqueur, si bien 
au fait des moindres circonstances de ce drame 
sanglant, et qui nous racontera avec tant 
de pompe les funérailles de celle qui ne fut 
reine qu'après sa mort, comme disent les anciens 
dramatiques espagnols, Fernand Lopez, se tait 
complètement sur l'exhumation d'Inez et sur la 
cérémonie fantastique admise par la tradition* 
Sur ce fait important, il laisse le champ ouvert 
aux conjectures, et nous avouerons que si on 
ne peut complètement l'admettre, un antique 
usage, renouvelé de nos jours, et qui exi- 
geait en Portugal qu'on vint baiser la main du 
souverain glacée par la mort, tendrait à y faire 
croire ; dans ce cas, cette cérémonie aurait été pas- 
sée sous silence par le vieil historien uniquement 
parce qu'il avait été naturel qu'elle s'accomplit, 
comme étant trop conforme à la coutume éta- 
blie pour qu'on dût s'en préoccuper. Une au- 
tre circonstance, d'ailleurs, a bien pu donner 
naissance à la légende si dramatique adoptée 
par quelques historiens, et qui a fourni le sujet 
d'un si beau tableau à M. Saint-Evre. Au qua- 
torzième, au quinzième et au seizième siècle, 
les effigies des princes, moulées en cire et co- 
loriées avec habileté , étaient toujours portées 
au-dessus du cercueil du grand personnage dont 
on célébrait les funérailles. Il est possible que 
bien des années après la mort d'Inez , et lors- 
qu'on lui fît des obsèques qui effacèrent tout 
ce que l'on avait vu en ce genre dans la Pénin- 
sule, le roi ait exigé qu'on rendit à l'effigie de 
celle qu'il honorait comme une épouse légitime 
l'hommage qu'on lui eût rendu à elle-même le 
lendemain de sa mort* 

Ce que Fernand Lopez raconte longuement, ce 
sont les excès de la vengeance, les fureurs de l'in- 
fant, commedit un autre vieil historien. Ce prince, 
que son siècle a surnommé le Cruel et le Justicier, 
et que le peuple a caractérisé en disant « qu'un 
tel souverain n'eût dû jamais naître ou n'eût dû 
jamais mourir », ce prince,disons*nous, commença 



(1) A. coups de poignard, selon divers historiens. Le livre 
de la nonne de Santa-Crnz (o livra da noa de Sanla- 
Crnz), qui remonte à cette période historique, dit, en fixant 
la date de cet assassinat : Era MCCCXCIU diejanuarii 
décolleta fuit donna Brmes per mandatum régis Alfon- 
sii IF. U s'agit Ici de l'ère espagnole. 



848 



son règne fécond et terrible à dater de la mort 
d'Inez;; il se révolta ouvertement contre l'auto- 
rité de son père, et il ne fallut rien moins que les 
supplications d'une mère et l'intervention d'un 
saint prélat pour l'apaiser après des mois de 
lutte. En consentant à la paix, il garda du vi- 
vant d'Alfonse IV une partie de l'autorité royale. 
Le vieux roi comprit si bien que des idées de 
vengeance inassouvie obsédaient cette âme de 
feu, qu!il fat le premier à faire sortir du royaume 
les complices de la mort d'Inez, qull allait bien- 
tôt ne plus pouvoir protéger. Ceux-ci se réfu- 
gièrent en Castille, et ils y étaient à la fin de mai 
1357, au moment où D. Pedro se voyait par la 
mort d'Alfonse investi de l'autorité entière. L'asile 
était mal choisi, car c'était Pierre le Cruel, 
propre neveu de Pierre le Justicier, qui régnait 
dans cette partie de la péninsule. L'accord fat 
promptement résolu ; les deux monarques avaient 
à se venger tous les deux : les réfugiés furent li- 
vrés. Un seul des trois coupables échappa; c'é- 
tait Diogo Lopez, qu'un mendiant, reconnaissant 
d'anciens bienfaits, sut faire évader, et qui par- 
vint à gagner la France (1) ; quanta Pedro Coelho 
et à Facheco , ils furent immédiatement conduits 
à Santarem, où les attendait une mort épouvan- 
table. Conduits à l'échafaud, qu'on avait dressé 
devant la salle où dînait le roi, celui-ci les fit 
mettre à la géhenne en sa présence, voulant 
avoir la satisfaction de leur faire avouer leur 
forfait. Comme ils niaient leur culpabilité, D. Pe- 
dro s'emporta jusqu'au point de frapper avec 
son fouet Coelho au visage ; et celui-ci ayant 
répondu ,par des injures à cette violence , le roi 
ajouta aux coups d'horribles railleries qui allaient 
devenir le signal du supplice. « Apportez-moi du 
sel, des oignons et du vinaigre, dit-il : il nous 
faut assaisonner ce lapin » ; affreux jeu de mots 
qui roulait, .comme on le voit, sur le nom de 
la victime, puisque Coelho signifie lapin en por- 
tugais. Le supplice et les paroles qui l'avaient 
accompagné excitèrent, à ce qu'il parait,- dans le 
public une certaine horreur; carie vieil historien 
avoue qu'il cache encore bien des détails' qu'on 
doit celer pour l'honneur du monarque; ce 
qu'il raconte longuement, en revanche, ce sont 
les honneurs rendus à la mémoire d'Inez. Pour 
en donner une idée en peu de mots, nous dirons 
que de Coïmbre au couvent d'Alcobaca on ne 
compte pas moins de dix-sept lieues, et que ce- 
pendant des hommes armés de torches se 
voyaient échelonnés le long de la route pour 
éclairer le cortège. Plusieurs milliers d'indivi- 
dus avaient été requis, nous dit Pedro de Mariz, 
pour former cette haie funèbre. 

Inez de Castro fut déposée à Alcobaça, sous 
la nef, du coté de l'épttre, dans une tombe de 
marbre blanc, portant une effigie couronnée, 

(1) il est fort curieux de voir par la suite ce person- 
nage reparaître sur la scène politique , et quoique extrê- 
mement vieux s'attacher au parti d'un fils d'Inez, l'in- 
fant D. Dinlz. 



849 



INEZ 



850 



que D. Pedro avait fait préparer à l'avance, et 
près de laquelle il avait fait dresser sa propre 
sépulture. Ce beau monument de la statuaire du 
quatorzième siècle ne nous est malheureusement 
pas parvenu intact. Une curiosité presque sacri- 
lège, une violence brutale, plus coupable encore, 
l'ont tour à tour endommagé (1). 

La postérité d'Inez ne monta pas directement 
sur le trône, mais elle s'allia à toutes les têtes 
couronnées de l'Europe; il semble néanmoins 
qu'une cruelle fatalité ait pesé sur toute cette 
famille. L'aîné, D. Alfonse, mourut en bas âge; 
D. Jofio, qni eût pu prétendre à la couronne, se 
souilla d'an crime abominable pour l'obtenir (2), 
et excitant plus tard les craintes de l'Espagne, 
qui l'avait d'abord accueilli, il succomba en capti- 



(i) Ce tombeau a été figuré pour la première fols dans 
le voyage pittoresque en Espagne publié par M. le baron 
Taylor ; c*est de ce livre que le Maçask* pittoresque et 
l'Univers ont tiré leurs gravures. L'Infortuné priuoe 
LichnovjBk.1 en a donné une description très-complète. 
Las premières traces de dommages faits au monument 
remontent au seizième siècle, lorsque D. Sébastien fit 
ouvrir la plupart des tombes d'Alcobaça (voy. dans 
cette. Biographie au mot Fallâ). Il parait que les ouvriers 
rencontrèrent alors une telle .résistance, qu'on ne put 
satisfaire la curiosité du Jeune roi; les choses se passé- 
rent'à peu près de même en 1704, lorsque l'empereur 
Charles VI, venu en Portugal sous lé nom de Carlos III, 
roi d'Espagne, eut la même fantaisie. Durant l'invasion 
française, en 1810, ie bruit se répandit malheureusement 
lue de grands trésors étaient renfermés dans cette tombe. 
Cette fois la sépulture fut ouverte et la statue mutilée ; 
a soldatesque lui brisa le nez. On dépouilla le cadavre 
le sa belle chevelure blonde ; mais tout ne fut pas 4é- 
-obé par les Français. Nous avons entre les mains 
ine lettre du marquis de Rezende qui raconte comment 
a plus grande partie de ces cheveux ayant été apportés 
i Rio-de-Janeiro, un coup de vent violent les enleva au 
nomen{ où Us étaient offerts à Jean VI par le comte de 
JobareS, sans qu'on pût les retrouver: Une petite mèche 
•rorenant de la même chevelure, que nous avions vue 
adis dans le cabinet de Denon, est conservée aujour- 
llraLdans un reliquaire de la collection du comte Pour- 
aJés. Si l'on s'en rapporte à une autre lettre écrite 
'Alcobaça, le 8o avril 1811, par J. Teixelra Duarte, qui 
ssista pour ainsi dire aux dévastations odieuses corn- 
lises dans le couvent, ces cheveux étaient à peu près 
>ut ce qu'il restait d'une beauté dont le souvenir est 
ocore vivant dans la mémoire du peuple. Le squelette 
lait complètement brisé (o corpo estava todo despeda- 
ido).Ce futie 16 septembre, avant l'affaire de But- 
ico, qu'eut lieu.cette profanation. 11 est inutile de dire 
ne le portrait conservé au dix-huitième siècle par le 
rate de Bedondo, et qui a été successivement repren- 
ait dans les Metratos et dans Kinsey, n'offre » aucune 
ira d lie de ressemblance : sa date, ne remonte pas au 
ela du dix-septième siècle. 

(•S) Dans l'espérance d'épouser la fiUe de D. Fernando, 
rot refînant, 11 poignarda sa femme légitime, la belle 
aria Telles de Menezès. 11 en avait eu un fils que l'on 
>pela D. Fernando de Eça ( D. Fernand du Cercueil), 
il fixa sa résidence en Galice : ce personnage pourrait 
en être , soit dit en passant , le type du D. Juan espa- 
ioI. Bne vieille chronique s'ezprlree en ces termes à 
n sujet. « 11 eut une ample génération, car il avait une 
nsetence si large qu'il se mariait a toutes les femmes 
t vivant les unes des autres.» Fernando de Eça, le petlt- 
i d'Inez, n'eut pas moins de quarante-deux enfants, 
ot fils que filles, tant légitimes que bâtards. C'était de 
JoAo que descendait ce fameux marquis de Gascaès 
mt il est question dans les historiettes de Tallemant des 
aux, et qui, nommé ambassadeur auprès de Louis XIV, 
fiant, étonna la cour de France par son faste. Voy. la 
lie édition ln-8° donnée par M. Paulin Paris. 



vite. Enfin D. Diniz, errant sans cesse d'Angleterre 
en Flandre, et prenant vainement le titre de roi, 
passa par les plus funestes aventures avant 
d'épouser dona Joanna, fille naturelle du roi de 
Castille. Enfin un neveu de cette femme mal- 
heureuse, pour expier tant de maux, se voua 
à la plus rude pénitence durant quarante-quatre 
ans dans les montagnes d'Arrabida, après avoir 
été un chevalier sans reproche. La fille seule 
d'Inez fit une exception heureuse à cette série 
de mésaventures bien ignorées aujourd'hui; elle 
s'appelait dona Britez, et, après avoir épousé 
D. Sancho, comte d'Albuquerque, fils illégitime 
d'Alfonse XI, elle eut de lui une nombreuse des- 
cendance, et mena, disent les chroniques contem- 
poraines, la vie la plus sainte* 

C'est d'Alvaro Pires de Castro , comte d'Ar- 
rayolos , grand-alcaide de Lisbonne et premier 
connétable du royaume, que descend, en ligne 
directe, la maison régnante actuelle de Portugal : 
D. Alvaro était le propre frère d'Inez. 

Il est très-vrai, et nous nous sommes assuré 
de ce fait purement bibliographique, qu'en ras- 
semblant tous les ouvrages qui ont été écrits 
sur Inez, et en en donnant une analyse succincte, 
on ferait un volume. A l'exception cependant 
du récit énergique et parfois grandiose de Fer- 
nand Lopez, del'admirable épisode de Camoens, 
d'un sonnet de Boccage, et de la noble tragédie 
d'Antonio Ferreira, il reste de tous ces livres 
peu de chose à conserver. Nous aimons à rap- 
peler ici que la première pièce régulière donnée 
en Europe après la SophonUbe a étéJT/nez de 
Castro que nous venons de signaler ; ce fut bien 
plutôt une étude heureuse du théâtre antique 
qu'une pièce originale. M. Patin l'a signalée 
comme une véritable émanation du théâtre grec, 
et en a restitué l'honneur aux Portugais. M. Mar- 
tinez de la Rosa a prouvé qu'un faux patriotisme 
ne devait plus égarer la critique. 

En France , c'est aussi un drame qui a po- 
pularisé le nom d'Inez ; la pièce de Lamotte fut 
représentée le 6 avril 1723. Voltaire a dit, à pro- 
pos de cette tragédie, un mot qui rappelle assez 
bien l'effet qu'elle produisit alors : « J'allai hier 
à Inez : la pièce me fit rire, mais le cinquième 
acte me fit pleurer. Je crois qu'elle sera tou- 
jours au nombre de ces pièces médiocres et mal 
écrites qui subsistent par l'intérêt. » 

Ferdinand Denis. 
NobiUario do eonde de Barcellos, éditions de Farla 
y Souza et de Lavanha ; voy. aussi le ms. de la Bib. iœp. 
Fernand Lopes, voy. le t. IV de ta Collecçdo de livros 
inédites da historia Portugueza , Chroniea de4 iïey 
D. Pedro, pub. par Pereira Bayam, en 1788. — Pedro 
de Marti, Dialogos de varia historia. — D. Luiz de Sa- 
laz y Castro, HisU Genealoçiea de la cran Casa de Cas- 
tro} Mad:, 1685, Ûg.—Lusiadas de Luis de Camoes. prin- 
cipe de los poetas de.Bspaha t eommentadas por Manuel 
de Fartai Souza; 1689, 8 vol. ln-fol. — Docteur AnL Fer- 
reira, Poemas Ituttanos; Lisbonne, 177 i, s voL, ln-ao. C'est 
dans cette deuxième édition que se trouve contenue la Cas- 
tro; elle avait paru d'abord dans le vol. intitulé Comedku 
famosas dos Doctores de S* de Mirandc Ant. Ferreira ; 
1618, tn-4*. — Théâtre européen, Inez de Castro* tragédie 
en cinq actes, par Ant Ferreira, trad. par Ferdinand Denis. 



851 



INEZ — INFANTADO 



855 



Voy. dana la mène volume Notice sur Inex de Castro, 
iuivie d'un extrait de» chronique» portugaise» tur 
D. Pedro. — Primeras tragedias espanolas, nise lau- 
reada,nise lastimosa, que bajo el nombre de Antonio de 
Sylra publlco Oeronine Barmudei} ma. ~ Lope de Vega, 
Dona Inez dé Cmstro. ~ MeiU de Lacards, Z*ma Inez 
de Castro,- — Vêlez, Reynar despues de tnorir. — M a (os, 
fer y créer, segundaparte de Reynar, Despues demorir. 

— Dona /pus d> OaMro de Hieotae Lab. — Dona Igné* 
de Castro, a tragedy, from the pertugueae of Nicolas 
Luiz, by John Adamson . New-CasUe, 1M8. — Manoel de 
Aievedo, Saudades de Dona Igné* de Castro; CaTmbre, 
17M, in-st. - Domingo dot Rate Qulta, Castro. — tgnez 
de Castro, a tragedy in three aets, wrltten by 0. Quita, 
translated by BcqJ. Thompson ; 1800. — régnés de Cas- 
tro, a tragedy, wiltten by a rounglodr (M", Cath., 
afterward M" Coekborna ); Londreaj tête. - M». ftebn, 
The History of Agnes de Castro. — filvtra, • tragedy, 
wrltten by Mallet, 1778. — Saudades dos serenissimos 
rets de Portugal D, Pedro i* e D. Aléa de Castro, Méri- 
tas por D. Maria de Lara e Menezèa. » M u « 9. B. de 
Briilac, Agnès de Castro, nouvelle portugaise; îess, et 
Amsterdam, 1710, ln-li. — Juan Soarez de Alarcon, La 
Infante coronada, per el Rey D. Pedro; Lisbonne. 1006 
( poème). - Histoire sYInez; dans Jcs Amusements his- 
torique* s 17W, — D. Jozé Barbota , Catalogo dos Rain- 
has de Portugal; 1717. — Histoire d'Agnes de Castro, 
trad. de l'anglais (de M"« Behn); Amsterdam, 1701 
fait partie d'nn volune inutulé Romans traduits de Van- 
glais ). - L'abbé Guyot Deafontainea , Inez de Castro, 
ou histoire de Pierre de Portugal, On a du même : 
Histoire de D. Juan de Portugal, /Us de D. Pedro et 
dflnoz de Castro ; Paria, 171* ( tn-ii. » Berthe de Boor- 
ntslen, D. Pedro é Jnez de Castro, heroide ; 1788, tn-ia. 

— D. Francisco Manoel de Mello, Collecfào de Sonetos a 
morte de D. Inez de Castro ; Lyon, 1M5. — leronymo 
Petaoto do Sylva, rida de D. Inez de Castro» — Ré- 
ponse aux paradoxe» de Taebé Desfontaines contre 
Inez de Castro, par M. de Boone?al, 17 la, in-8». — Voy. 
afla même époque, dans le Mercure du mois d'octobre 
1718, une Infinité d'écrits et de parodies, entre autres 
Agnes de ChaUlot, imprtm. A Ja suite de la représentation 
de la tragédie de Lamothc. - Retratos e Elogios dos Va- 
roens illustres ;1817. — M. Louis Dubois, Recherches 
historiques sur Ine% de Castre et sur D. Pedro. — Inex. 
de Castro, tragédie de Ferrelra , trad. en ang. par Mus- 
grave ; 1815. — J. Baptlsta Gomez Junior, Nova Castro ; 
llsb., 1817 ; S« édlt, 1880. - Manuel de Flguelredo, Inez 
de Castro, tragedia. — Joaejulm José Sabine, Nova Cas- 
tro. - Davlde Bertoletti, Inez de Castro, tragedia ,• Mt- 
lano, 18M. — M M de Genlls, Les Tableaux de M. de 
Forbin ; in-8*.— Inez de Castro, noveta sacada de la his- 
toria de Portugal per madama dé Genli» ( par Moura ) ; 
Paris, 1818, 1 vol. in-18. - Jgiologio Lusitàno , t. I, 
p. 167. -Alexis Collotde JsvlUlet, Horœ subscecivse ; Lis- 
bonne, 1679, ln-ll. - J. X. de Matos, Rimas ; Lisb., 1800, 
8 vol. in-8°. — Retratos et biographias de personnagen» 
illustres de Portugal; lisb., 18+b, lo-fol. -Kinsey, Por- 
tugal illustrated, p. 401. — Adolphe de Pulbusque, Le 
comte de Lueanor ; 1884.— Ferdinand Denis, Chronique» 
chevaleresques de VEspagne et du Portugal, L I". 

infant ADO ( iV.... due be ), homme d'État 
espagnol , né en 1773, mort à Madrid le 28 no- 
vembre 1841. H appartenait à l'illustre famille 
de Silva, en faveur de laquelle un duché fut érigé 
en 1475, et affectéà une seigneurie de la Castille, 
qui prit le nom d'Infantado parce qu'elle avait 
-été auparavant un apanage des infants d'Espagne. 
H fut élevé en France sous les yeux de sa mère, 
qui était une princesse de Salm-Salm. Dans la 
guerre de 1793, il leva an régiment à ses frais, 
et fit la campagne de Catalogne. Après la con- 
clusion de la paix de Bâle avec la république 
française , le jeune duc se livra avec ardeur à des 
entreprises utiles. Il établit en Catalogne des fila- 
tures de coton, qui prospérèrent sous la direction 
de chefs habiles appelés d'Angleterre. Il fit la 



campagne de 1800 contre le Portugal, tous les 
ordres de Godci, et visita Lisbonne apife la paix. 
« Plus instruit que la plupart des seigneurs es- 
pagnols, dit la Biographie Rabbe, et d'nn ca- 
ractère doux et albble, il devint très-popnlaire. 
Sa hante naissance, des revenus très-considéra- 
bles, et surtout le bon usage qu'il faisait de a 
fortune firent pendant quelques aimé» croire 
qu'il deviendrait le régénérateur de son pays, 
et le public vit de bon œil l'intimité qui s'établit 
bientôt entre le prince des Astories, depià Fer- 
dinand VII, et le duc de Infantado. » Cependant 
cette liaison ayant donné de l'ombrage an prince 
de la Paix et à la renie, le duc reçut Mit de 
quitter Madrid en 1905. Malgré stm exil, il con- 
tinua d'entretenir des relations avec l'héritier h 
trône; et lorsque celui-ci fut arrêté, en 1807, on 
trouva' dans ses papiers la nomination du duc 
de Infantado à la place de généralissime des ar- 
mées espagnoles. Impliqué dans le précis 4e 
l'Escortai , le duc de Infantado allait en même 
temps qu'Escoaquiz être condamné à mort, lors- 
que les sentiments connus du peuple et l'inter- 
vention de l'ambassadeur de Franeeempêchèrat 
que cette sentence ne fltt en effet prononcée. En 
1808, le duc de Infantado accompagna Ferdi- 
nand VII à Bayonne; il signa, le 7 juillet IMS, 
la constitution que Napoléon avait préparée pour 
l'Espagne , et la proclamation des notables espa- 
gnols réunis à Bayonne, engageant lenn compa- 
triotes à reconnaître Joseph Bonaparte pour sou- 
verain. De plus il entra comme colonel dans la 
garde du nouveau roi. Mais il se démit de ses 
places après la capitulation de Baylen, et appela 
la nation aux armes contre la Frasée. Napoléon 
le proscrivit comme traître', dans on décret do 
12 novembre. Placé en 1809 à la tête ta corps 
d'armée espagnol, le due d'Infantado fut battu 
deux fois sous les murs de Saint-Sébastieo, et 
malgré sa bravoure, il perdit son commandement 
avec la confiance de la junte supérieure. Il se retira 
alors à Séville. En 1811 les cortès le nommè- 
rent président du conseil d'Espagne et des Indes, 
et le ebargèrent d'une mission extraordinaire 
auprès du prince régent d'Angleterre. En juin 
1812 il revint à Cadix, et en 1813, après Né- 
part des Français, il se rendit à Madrid; mai* 
la junte lui intima Tordre de quitter la capitale 
comme un des cbefs du parti des serviles. Fff 
dinand VII l'appela alors auprès de lui, le nomo» 
président du conseil de Castille et le traita aw 
une faveur toute particulière. Après le rétaWis- 
sement de la constitution en 1820, le duc de In 
rantado résigna ses fonctions et se retira dam» 
terre, près de Madrid, d'où il fut exilé à Ma- 
jorque. En 1823, il fut appelé à la présidence^ 
la régence instituée à Madrid par les Fracas 
pendant la guerre ; et au mots d'août , eonj^ 
ment avec son collègue le prélat Victor SaeM 
remit, à Puerto Santa«Maria,le gouveniema* a 
roi, qui le nomma membre de son wn8e "7v 
duc conçut alors le plan d'organisation des rq?' 



853 



INFÀNTÀDO — INGE 



854 



ments des gardes, et il employa son crédit à 
trouver la somme dont Ferdinand VII avait be- 
soin pour faire en 1824 le voyage d'Aranjuez. 
L'année suivante* il remplaça Zea Berraudez 
comme chef do ministère. Il transforma la junte 
délibérative de son prédécesseur en un conseil 
l'État; mais ayant à lutter contre les intrigues 
incessantes du parti apostolique , il ne put réa- 
liser ses projets de réforme, et se vit obligé, en 
1826, de rentrer dans la vie privée. Il vécut de- 
puis à Madrid en simple particulier, mais tou- 
ours sévèrement surveillé; on ne lui permit 
néme pas en 1830 de partir pour l'Italie. Ce- 
rclant, après la mort de Ferdinand VII» il quitta 
'Espagne et se rendit en France. Il rentra en- 
mite en Espagne, et y vécut dans la retraite jus- 
|o'à sa mort, J. V. 

ftabbe, ViaUb do BoUJoUo «t Sainte Prouve, ffojr. 
miv. et portât, des Contemp. — Encyclopédie des Gens 
lu Monde. — DU*, de ta Conversation. — Conversa- 
tons-Lexiton. 

* infante (Jodo), navigateur portugais, 
rivait au quinzième siècle. Il commandait le se- 
tond navire faisant partie de la célèbre expédition 
onfiée, en 1496, à Barthélémy Dias ; 11 avait pour 
illotes Àlvaro Martins et. maître Jean le Grec, 
t s'était acquis de la réputation comme marin, 
le même que ses deux compagnons. Le navire 
ions ses ordres s'appelait le Saint-Pantalécn ; 
'équipage devait en être à peu près aussi const 
lérable que celui de Dias, et il est à présumer 
tue Joâo Infante eut à résister, comme ce hardi 
lavigateur, aux injonctions de son équipage, qui 
emsait d'avancer plus loin. Arrivé par les 
12° 80' à vingt-cinq lieues de l'îlot da Cruz, In- 
ante fut le premier qui débarqua sur la côte ; de 
à vient qu'on donna son nom au fleuve qui se jette 
i la mer en cet endroit. V infant héritier de 
a couronne, comme en le peut voir, n'est pour 
ien dans cette dénomination. On a cependant 
tien à tort affirmé le contraire. Après une na- 
igation de seize mois et dix-sept jours, Infante 
evint avec Dias en 1487 ; il avait pris part à une 
xploration de trois cent cinquante lieues. F. D. 
Gomez Eannez de Azurara , Conquistade Guiné 

* infessura ( Stephano), historien italien, 
ivait à la fin du quinzième siècle. D'abord juge 

Orta, ensuite chancelier du pape, il parait 
voir été un personnage de quelque importance; 
i imita l'exemple de Burchardt ( voy. ce nom ), 
n consignant sur le papier les faits dont il était 
émoin, et il a laissé un Diarium urbis Romx, 
crit partie en latin, partie en italien, et allant 
e Tan 1371 à l'an 1494; ce journal a été im- 
rimé dans le Corpus Scriptorum Medii JSvi 
'Eccard, t. II, p. 1863, et dans Muratori, Re- 
um Italicarum Scriptores, t. IÏI, p. 1109; 
lais il faut observer que, dans ce dernier recueil, 
» passages où l'historien .retrace les scandales 
onnés par Alexandre VI sont retranchés , cir- 
onstance qui a été relevée avec raison, en Aile- 
nagne, par Schelhorn, dans les Âcta lenensia, 



t. IV, et par Saxe , Quxstiones Littéraux et 
Eistoricx. G. B. 

Schelhorn, Jeta lenensia, t. IV. 

*ixeA*NATi (Pietro Degl'), peintre de 
l'école vénitienne, vivait dans la première moitié 
du seizième siècle. On ne possède aucun rensei- 
gnement sur cet artiste , dont on ne connaît 
qu'un «Mil tableau, une Madone et plusieurs 
saints, an musée de Berlin. Dans ce tableau , 
signé Pêtrusde Ingannatis, on reconnaît un 
élève ou au moins un imitateur de Jean Bel- 
liai. E. B— n. 

Sïret, DioHonntHre historique De* Peintres. 
INGE ou 1NGOH, roi de Suède, fils de Stenkil, 
vivait au commencement du douzième siècle. 
Son long règne n'est guère connu que par le 
Supplément du Bervara. Voici un résumé de 
cette saga : Inge était bon chrétien ; il abolit les 
sacrifices offerts aux dieux dans le Suithiod et 
ordonna à tout le peuple de se faire baptiser. 
Mais les Suédois tenaient à leurs idoles. Dans 
un thing ( assemblée ), ils proposèrent à lnge de 
maintenir l'ancien culte ou d'abandonner le pou- 
voir. Ingerenisa de quitter sa croyance; alors 
les Suédois lui lancèrent des pierres et le chas- 
sèrent du thing. Il se réfugia en Vestrogothie , 
pendant que Sven, son beau-frère, régnait à sa 
place. Au bout de trois hivers, il revint avec une 
armée et attaqua à l'improviste Sven, qui fut 
vaincu et tué. Il reprit le pouvoir, rétablit le 
christianisme et gouverna tranquillement jusqu'à 
sa mort. Inge eut deux filles, Marguerite,. sur- 
nommée FHdkulla ( Vierge de la paix ), qui 
épousa Magnus Barfbt, roi de Norvège, et Chris- 
tin a y qui fut fiancée au grand-duc de Russie. 
Gomme il ne laissa pas d'enfant mâle, la couronne 
passa à son frère Halstan. Celui-ci eut pour 
successeur ses deux fils , Philippe et Inge. Le 
premier mourut en -1118. La date de la mort 
du second est incertaine, mais il ne vivait plus 
en 1129. 11 fut empoisonné. Avec lui finit la 
maison de Stenkil. Z. 

Snorro Sturleson, Konûnga* SÔgur. — Geyer, Histoire 
de Suéde { traduite par LundbJad ), c. III. 

inge ou ingon I er , roi de Norvège, fils de 
Harald Gillichrist , régna de 1135 à 1161. A la 
mort d'Harald, en 1135, ses trois fils Sigurd 
Bronch, Egstein et Ingon se partagèrent ses États. 
Tandis que Sigurd prenait, en qualité d'aîné, le 
titre de roi, Inge eut pour fief la Norvège mé- 
ridionale. La mort de Sigurd, en 1155 amena 
entre Ingon, son frère Egstein et son neveu 
Haquin Berdebred, qui se disputaient le pouvoir 
suprême, de longues querelles, terminées à la 
bataille d'Opsols (3 février 1161) par la défaite 
et la mort delngen. Sous le règne de ce prince, le 
cardinal Nicolas Brekespeare ( depuis Adrien IV) 
fut envoyé en mission en Norvège par le pape 
Eugène III, et fonda l'évôché de Drontheim. 

On voit encore figurer dans la série des rois de 
Norvège un Inge ou Ingon II, dont le règne 



855 



INGE — IN GELBURGE 



856 



obscur, de 1207 à 1217, mérite à peine une men- 
tion ( voy. Haquin V et VI ). Z. 

Tortetu, Hittoria Rer. Norvinç,, i. III. — Snorro 
SlnrtaoB, Nareçt KonUnga Sôçur. — G. Scnœaniiig, 
fforges Rigtt Historié. i 

iiffiBLBUAGE, reine de France, née en Da- 
nemark, en 1176, morte à Corbeil , le 20 juillet 
1236. Elle était fille de Waldemar le Grand, roi 
de Danemark, et sœur de Canut VI, qui régnait 
en oe pays, lorsque, en 1193, Philippe-Auguste, 
veuf depuis trois ans, fit demander la main de 
•cette princesse. Aucun motif politique n'avait in- 
fluencé le jeune monarque français dans le choix 
de sa seconde épouse. La réputation de beauté 
d'Ingelburge avait apparemment enflammé l'ima- 
gination de ce prince, dont les passions étaient ar- 
dentes. Sa proposition d'alliance fut acceptée par 
le roi de Danemark, et Ingelburge ayant été con- 
duite à Amiens, ou* Philippe était allé l'attendre , 
la double cérémonie du mariage et du couron- 
nement de la princesse danoise eut aussitôt lieu 
en cette ville. Mais le lendemain matin, au grand 
étonnement et au grand scandale des seigneurs 
français, non moins que des personnes de la 
suite de la nouvelle reine, Philippe déclara sa 
résolution de la répudier et de la renvoyer en 
Danemark. La plupart des historiens, ne sachant 
à quoi attribuer ce caprice du roi de France, ont 
présumé qu'îngelburge avait quelque défaut phy- 
sique ou quelque infirmité qui inspirait du dé- 
goût pour elle à Philippe; d'autres, imbus des 
superstitions de l'époque à laquelle ils écrivaient, 
supposent que l'aversion instantanée du roi pour 
une jeune femme dont la grâce naïve donnait à 
sa beauté un charme de plus, fut l'effet d'un 
maléfice. La France tout entière ressentit les 
funestes conséquences de la conduite de son 
souverain en cette occasion. Philippe, fondant 
sa demande de divorce sur une prétendue pa- 
renté entre Ingelburge et Isabelle de Hainaut, 
sa première (épouse, convoqua à Compiègne une 
assemblée d 'évoques, présidée par l'archevêque 
de Reims. Ingelburge assista à cette procédure 
dont elle connaissait le but, mais dont elle ne 
comprit pas un mot , car elle ne savait pas le 
français. Son mariage avec le roi fut déclaré 
nul; lorsqu'on signifia cette sentence à la prin- 
cesse , elle ne put que s'écrier en entrecoupant 
ses paroles de sanglots et de larmes : Maie 
France! Maie France!.... Rome! Rome! » — 
C'était du pouvoir pontifical qu'elle attendait la 
réparation de l'affront qu'on lui faisait. Néan- 
moins , on l'engagea à retourner en Danemark ; 
elle y consentit d'abord , puis, appréhendant que 
sa soumission ne fat considérée comme une adhé- 
sion au jugement prononcé par les évéques, elle 
demeura en France. Le roi Canut porta plainte 
pour sa sœur au pape Célestin III ; ses récla- 
mations furent à peine écoutées. Comme l'affaire 
restait ainsi en suspens à Rome, Philippe, se 
croyant suffisamment autorisé par la décision 
des prélats de son royaume à contracter de nou- 



veaux liens, épousa, en 1196, Agnès de Me- 
ranie. Cependant les instances de- Canot, sou- 
tenues par la réfutation que, d'après ses ordres, 
son ministre avait dressée de la généalogie qui 
établissait un degré prohibé d'affinité entre les 
deux époux , déterminèrent Célestin à envoyer à 
Paris des légats .chargés d'examiner de nouveau 
cette affaire; ceux-ci la trouvèrent si épineuse 
qu'ils n'osèrent pas se prononcer positivement 
contre le roi de France. Biais Innocent III ayant 
succédé à Célestin, la procédure fut encore re- 
prise par un concile que ce pape réunit à Lyon, 
cité alors libre, et gouvernée par ses archefè- 
ques : la volonté du monarque français ne pou- 
vait pas y exercer autant d'influence que dans 
les autres villes du royaume. Cette fois , Ingel- 
burge gagna sa cause; Philippe fut condamné 
à quitter Agnès, et à reconnaître la princesse 
danoise pour son épouse légitime, sous peine 
d'excommunication et d'interdit. Philippe n'arait 
pas moins d'amour pour Agnès que d'aversion 
pour Ingelburge; il s'efforça de résister à la 
puissance papale; mais Innocent m, homme 
sévère, impérieux, et qui ( remarque un his- 
torien) traitait les princes couronnés comme 
les souverains traitent leurs vassaux , lança 
les foudres de l'Église sur le roi et sur ses su- 
jets. Les annalistes des siècles où le saint-siégp 
sévissait sur des millions d'innocents pour châ- 
tier un prince coupable ou réputé tel, ont tracé 
à diverses époques le lugubre tableau de la 
désolation qu'un interdit pontifical répandait 
sur tout un royaume. Philippe, exaspéré, mais 
non vaincu, fit arracher Ingelburge du couvent 
dans 'lequel elle s'était retirée à Soissons, et la 
princesse fut enfermée dans le château d'ttam- 
pes, où on la traita très-rigoureusement Enfin, 
le roi, cédant aux clameurs de ses sujets et aux 
conseils de deux autres légats qui arrivèrent en 
France, se décida à se séparer d'Agnès et à tirer 
Ingelburge de sa prison royale ; toutefois, au bout 
de cinq semaines la princesse danoise se vit 
obligée de retourner dans un couvent à Soissons. 
Philippe parut ensuite devant le concile assemblé 
en cette ville, à sa demande, au mois de mars 
1201. Il s'y présenta accompagné de canonistts. 
Le roi de Danemark, de son côté , y avait en- 
voyé des jurisconsultes. Tout à coup , le roi, 
vraisemblablement las d'une si pénible lutte arec 
Rome , résolut d'en brusquer le dénoûmenL fl 
quitte l'assemblée au moment où la discussion 
est le pins animée; il va trouver Ingelburge, iti 
dit qu'il reconnaît la validité de leur mariage, 
l'emmène hors du couvent , la fait asseoir en 
croupe sur son propre cheval , ordonne qn'oo 
aille avertir les évéques de cette issue inopinée, 
et part avec la' princesse pour Paris. Ainsi se 
terminèrent les nombreuses péripéties de l'exis- 
tence dlngelburge. Néanmoins , malgré sa posi- 
tion dès lors reconnue de reine de France , eue 
vécut longtemps encore délaissée par son mari; 
ils ne furent véritablement réconciliés que quel- 



857 



INGELBTÎRGE — INGELGER 



858 



ques années après leur réunion. Camille Lebrun. 

Mgori , Histoire de Philippe- Auguste. — De Thou, 
Histoire universelle, — Daniel, Histoire de France, — 
Roger Hoveden , Chronique. — Mézeral, Histoire. 

irgegn ERI (Angiolo), littérateur italien, 
né à Venise en 1550, mort vers 1613. On ne sait 
rien des premières années de sa vie. En 1572 il 
traduisit en vers italiens le Remedium amoris 
d'Ovide , et dédia au [comte de Villachiara cet 
ouvrage qui parut à Avignon quatre ans plus 
tard. Se tronvant à Turin en 1578, il recueillit le 
Tasse fugitif, qu'il avait beaucoup connu à Venise, 
et le conduisit au palais du marquis Philippe 
d'Esté. II alla ensuite à Parme, et pendant que 
le Tasse était détenu dans un hôpital de fous , il 
publia sa Jérusalem délivrée , d'après une copie 
authentique faite sur un manuscrit corrigé de 
la main du poète. Il en donna deux éditions 
dans la même année (1581), Tune à Parme, 
l'autre à Casalmaggiore. Il séjourna encore plu- 
sieurs années à la cour de Parme, et y composa 
en 1583 une pastorale intitulée la Danza Ui Vé- 
nère. Cette pièce, commencée à la demande de 
l'Académie Olympique de Vicence dont il était 
membre, fut achevée sur les encouragements de 
la marquise de Soragna, et la fille de la mar- 
quise, Camilla Lupi , jeune personne d'une grande 
beauté, y joua le principal rôle. La Danza di 
Venere parut à Vicence en 1584, in-8°, avec une 
dédicace à la jeune Camilla qui avait joué le rôle 
d'Àmarilli. Le poète, dans son épttre dédicatoire, 
se plaint du mauvais état de ses affaires et im- 
plore le patronage de la marquise et de sa fille. 
On ne sait si Ingegneri dut à la protection des 
belles dames de la cour d'être appelé à Guas- 
tatla en 1585 par le duc Ferrante II de Gonzague, 
non pour composer des pastorales, mais pour 
fabriquer du savon. Le fait est assez bizarre 
pour que Tiraboschi, en le publiant lepremier, 
ait cru devoir citer comme preuves des lettres 
du duc et d'Ingegneri tirées des archives de Guas- 
talla. Le duc, dans une lettre adressée à son se- 
crétaire Marliani, recommande d'achever la cons- 
truction d'une maison pour y loger Ingegneri avec 
les instruments du métier, entre autres deux 
chaudières fabriquées à Mantoue , d'acheter pour 
lui à Venise du savon pour quatre cents écus; 
enfin, de lui faire compter cent écus pour son 
voyage et celui de sa famille. Malgré les bons 
offices du duc Ferrante, Ingegneri ne s'enrichit 
pas ; il fit même des dettes , fut obligé de se cons- 
tituer prisonnier en 1587, et ne dut la conser- 
vation de son mobilier qu'à l'intervention du 
duc. Dégoûté de l'industrie, il revint aux lettres, 
et alla chercher fortune à Rome. Il entra au ser- 
vice du cardinal Cinthio Aldobrandini , généreux 
protecteur du Tasse, et renoua son ancienne 
liaison avec ce poète. Il devinU'éditeur de la Je- 
rusalem Conquise comme il l'avait été delà Jé- 
rusalem Délivrée, et conserva le poème des 
Sept Journées. « Il était en ce moment plus 
assidu que jamais auprès du Tasse, dit Ginguené, 



et recueillait avec autant de prestesse que d'exac- 
titude tous les vers que le poète allait sans cesse, 
ou récitant de vive voix , ou écrivant en abrégé 
sur de petits papiers, précaution heureuse, et 
sans laquelle une grande partie de ce poème, 
imparfait encore, mais, tel qu'il est, l'un des 
fruits les plus précieux des derniers temps de 
l'auteur, aurait infailliblement péri. » Du service 
du cardinal Aldobrandini, Ingegneri passa en 
1598 à celui du duc dTJrbin. Celui-ci l'envoya, 
en 1599, tenir en son nom un enfant du duc de 
Modène , marque de faveur dont Ingegneri ne tira 
point parti pour sa fortune. On le retrouve en 
1608 à la cour de Turin, toujours pauvre, et 
forcé de recourir à la générosité du duc de Guas- 
talla. On l'entrevoit une dernière fois en 1613 à 
Venise, où il fit imprimer des poèmes en idiome 
vénitien, et on ignore le lieu et la date de sa 
mort. Un malheur si constant, sans cause connue, 
et malgré le bon vouloir de plusieurs protecteurs, 
a fait penser à Ginguené que Ingegneri avait en 
lui-même la cause de son infortune, qu'il était 
ou dissipateur incorrigible, ou de cette insou- 
ciance qui nuit quelquefois autant que la prodi- 
galité. On a de lui : Ovidio, de 1 Remedj contra 
Vamore, fatto volgare e ridetto in ottava 
rima; Avignon, 1576, in-4°; Gènes, 1583, in-16; 
Bergame , 1604, in-4° ; — La Danza di Venere; 
Vicence, 1585, in-8° : la scène de cette pastorale 
est en Sicile, dans une vallée près du mont Erga ; 
l'intrigue, plus compliquée que celle de YAminta, 
en est une imitation ; le style, assez peu poétique, a 
le mérite d'une certaine simplicité, et la pièce 
en somme ne manque pas d'intérêt; elle est plus 
décente et moins maniérée que les autres pas- 
torales de cette époque; — Del Buon Segre- . 
tario Libri tre; Rome, 1594, in-4°; Venfee, 
1595, in-8° : ouvrage d'une morale assez com- 
mune, mais d'un bon style; — Discorso délia 
Poesia rappresentativa ; Ferrare, 1595, in-8° : 
dans ce petit traité il est surtout question des 
pièces pastorales, et l'auteur se montre fort dur 
à l'égard du Pastor fido; — Tomiri, tragédie; 
Naples, 1602 , 1607, in-4°; — Ver si alla vene* 
ziana, zoè canzone, satire, lettere amorose, 
mâtine, canzonette in ajerè moderne, cône 
altrecose belle, opéra del signor Anzolo In- 
zegner ed altri bellissimi spiriti; Venise, 
1613, in-12. Quadrio cite encore de Ingegneri 
un traité en vers contre l'alchimie, intitulé : Pa- 
linodia délV Argonautica; enfin ce poète a 
donné une édition des Rime de Curzio de Gon- 
zage; Vicence, 1585. Z. 

Quadrio , Storia e Ragione d'ogni Poesia, t. Vf, p. 7S. 
— Apostolo Zeno, Note al Fontanini, 1. 1, p. 157. — 
Tiraboschi, Storia délia Letteratura Italiana, t. VU, 
par. 8, p. 810. - Ginguené, Histoire Littéraire d'Italie, 
t VI, p. 871. 

iNGEGffo (L'). Voy, Am&i (Andréa*'). 

* ingelgbr, premier comte héréditaire 
d'Anjou, mort en 888. Il était fils de Tertulle, 
sénéchal de Gâtinais, et petit-fils de Torquat, 
un des forestiers d'Anjou, descendant de ces 



859 [INGELGER - 

Bretons chasse» d'Armorique par la conquête 
romaine. Un gracieuse légende raconte qu'Adèle, 
dame de Château- Landon, allait périr condamnée 
pour crime d'adultère, quand Ingelger, qui était 
son filleul, s'offrit pour champion de la dame et 
tua en champ clos l'accusateur, convaincu d'im- 
posture. Ce fut le commencement de sa fortune. 
Adèle, en demandant an roi, juge du combat, 
l'autorisation de se retirer dans un monastère, 
le pria de permettre qu'une partie de ses biens 
passât à son défenseur, au détriment de parents 
qui n'avaient pas daigné la protéger, Ingelger, à 
peine âgé de seize ans , se trouva ainsi héritier 
tout au moins d'une partis du Gâtinais , où sa 
famille possédait déjà des bénéfices importants. 
Sa parenté avec Hugues l'Abbé, doc de Bour- 
gogne , le désignait d'ailleurs d'assez près à la 
faveur royale. Charles le Chauve lui confia 
bientôt la vicomte d'Orléans et la sénéehaoaée 
de Tours, où il épousa Aélinde, d'une des plus 
puissantes familles du pays. Ce mariage lui ap- 
porta en patrimoine Buzancais, ChàtUlon, Am- 
boise, dont le roi se chargea de faire relever les 
ruines , et bientôt, grâce à l'influence de sa nou- 
velle famille, il obtint celui des deux comtés d'An- 
jou, qui avait pour principale ville Angers, ^alors 
partie intégrante du duché de France. Il tenait 
ainsi .comme le remarque* plus tard Foulques 
Réchin, « tout son fief directement du roi, non 
pas.d'un roi de la descendance d'un usurpateur, 
mais bien de la race de Charles le Chauve, qui 
fut fils de Louis, fils de Charles le Grand, » et se 
trouvait placé à l'extrême frontière, en face des 
Normands et des Bretons, que les barons ses 
voisins, las de guerres, lui laissèrent volon- 
tiers prendre seul à partie. Mais le fait saillant 
de la vie d'Ingelger, celui qui le signala à l'ad- 
miration des chroniqueurs ecclésiastiques, c'est 
là campagne qu'il entreprit pour faire restituer 
à l'église de Tours le corps de saint Martin, 
mis en dépôt pendant les guerres normandes 
à Auxerre, et injustement détenu par l'évoque. 
Le roi refusant d'intervenir, Ingelger, sollicité 
par l'archevêque de Tours, par les évèques 
d'Orléans et d'Angers et par la voix des peuples, 
rassembla plusieurs milliers d'hommes , et, ac- 
compagné d'un nombreux cortège de clercs et de 
clianaines, s'en alla quérir le précieux dépôt, 
qui fut rapporté en triomphe , aux chants des 
hymnes et des psaumes» h travers les popula- 
tions accourues de toutes parts pour se proster- 
ner sur le passage du grand saint. Les chanoines 
de Tours, pour récompenser le zèle d'Ingelger, 
lui donnèrent un fragment des reliques , et en 
outre, à perpétuité, une prébende dans leur église 
dont ses successeurs s'honorèrent toujours de 
porter le titre, avec le droit d'arborer, en toutes 
leurs guerres, l'étendard ou chappe de saint Mar- 
tin contre tous leurs ennemis, le roi* de France 
excepté. Ingelger était beau de visage, généreux 
de cœur, affable , éloquent. Foulques Réchin dé- 
clare ignorer même le lieu de sa sépulture. Au 



INGELRAMNE 860 

rapport du moine Jean, postérieur pourtant en- 
core d'un siècle, mais plus à portée des sources 
historiques, il fut inhumé à Saint-Martin de 
Châteauneuf près Tours. — Le fils. d'Ingelger 
lui succéda ; c'est Foulques le Roux. 

Célestin Port. 

Chroniques 4* Anjou, publiée» p»r U) Société de l'His- 
toire de France. - Chroniques de Touraine, publiées 
par Salmon, p. 101-108. 

INfiKLMAH (C.-G,), poôte suédois, né en 
1788, mort en 1S45, Il était attaché à un minis- 
tère. On a de lui < Skaldefwsœk ( Essais poé- 
tiques); Stockholm, mê et suiv,; et Valia 
Skalde/œrsœk (Essais poétiques choisis)-, in., 
1843 * ouvrages bien écrits et remplis de jolies 
description» | — Helgê de Œhlenschl&çer, 
traduit an suédois; ib.> 1830, in-8\ E, 6. 

Leiutrœm, Svens** Poutaw historié p. 704. 

* UfGELBAMïf E , évêque de Metz, mort en 
791. Élève des écoles monastiques de Gorze et 
de Saint- Avold, Ingelramne était à la fois re- 
commandé par sa naissance et par son mérite, 
quand, en l'année 768 r Charlemagne lui conféra 
le double titre d'évêque de Metz et d'archi-cha- 
pelain du palais. Nous le voyons vers le même 
temps abbé de Senones-en- Vosges. Cette accumu- 
lation de charges et de revenus sur une seule 
tète était un fait ordinaire au huitième siècle. Il 
parait toutefois que les moines de Senones se 
révoltèrent contre cette coutume, qu'ils osèrent 
considérer comme un abus. Pour les apaiser, 
Ingelramne leur envoya le corps de saint Siméoa, 
évèque de Metz. La possession d'une sainte re- 
lique procurant dès lors de grands profits, la 
générosité du prélat devait, pensait-il, faire 
oublier l'irrégularité de l'abbé. Mais il se trom- 
pait. Pour témoigner qu'ils étaient avant tout 
jaloux de leur indépendance, les religieux de 
Senones allèrent même jusqu'à fermer les portes 
de leur église aux restes vénérables de l'évoque 
Siméon. N'espérant plus alors vaincre leur ré- 
sistance, Ingelramne abdiqua le gouvernement 
de l'abbaye rebelle, et l'attribua, par voie de 
transmission, suivant un usage déjà consacré, à 
son ancien maître, Nargaud, moine de Gorze. 
L'épiscopat d'Ingelramne n'a pas laissé de traces 
nombreuses dans les fastes de l'église de Metz. 
Ses fonctions auliques ne lui permirent pas sans 
doute de consacrer beaucoup de temps aux af- 
faires de son évêché. L'archi-chapelain de Char- 
lemagne l'accompagnait , en effet» dans tous les 
lieux où l'appelaient les nécessités de l'Empire oo 
les fantaisies de son caractère, vif, inquiet, impa- 
tient de tout repos. Ainsi la mort vint sur- 
prendre Ingelramne dans la ville de Chunisberg, 
ou de Commeberg, lorsqu'il se rendait à U 
suite de Charlemagne dans les lointaines re 
traites de Huns» C'est à sa prière que Paul 
Warnefried composa V Histoire des É vécues de 
Meti. On doit, en outre, à Ingelrarome un*' 
collection de canons, qu'il envoya au pape 



SOI 



INGELRAMNE — INGEMANN 



Adrien pour justifier quelque actes de m» admi- 
nistration. B. HauiuUv. 

Gatti* CàrUt., t XII, ool. TO. 

* inableamiib, surnommé te Sage, abbé 
de Saint-Riquier, né dans le bourg même de 
Saint-Riquier, mort le 9 décembre 1045. Il Ait 
admis dès son enfance parmi les religieux de 
l'abbaye, et distingué de bonne heure par son 
mérite. Aussi toutes las voix rappelèrent-elles à 
la première dignité de cette illustre maison, lors- 
qu'il s'agit de donner un euccesseur à Ingelard. 
Ingelramne refusa d'abord le titre que lui décer- 
naient ses confrères, et courut se cacher dans 
une forêt voisine. Mais le roi Robert, qui le con- 
naissait et l'aimait, le fit arracher à cette retraite. 
On raconte que vers la fin de sa vie il retint la 
crosse en ses mains défaillantes avec autant d'ar- 
deur qull avait mis autrefois d'obstination à la 
repousser. Comme il était atteint de paralysie et 
ne pouvait plus convenablement remplir tous les 
devoirs de sa charge, le roi Henri lui avait donné 
pour successeur un moine nommé Foulques. 
Celui-ci venant prendre possession , Ingelramne 
ne consentit pas à céder la place; bien plus : 
se faisant transporter auprès du roi , il lui re- 
procha vivement sa conduite, et obtint l'éloi- 
gnement de l'abbé désigné. Sous le gouverne- 
ment <nngelramne, Vécole de Saint-Riquier fut 
très-florissante : on en vît alors sortir Guy, qui 
devint évèque d'Amiens , et Drogon futur pas- 
teur de r église de Térouane. Il avait un goût 
très-vif pour les lettres, et donnait tous ses 
soins à l'instruction de ses moines ; mais s'il a 
lui-même beaucoup écrit, il n'a jamais été qu'un 
poète médiocre. On a cependant conservé une 
partie de ses œuvres. Le plus considérable des 
différents poèmes qui lui sont attribués est une 
Vie de saint Riquier dont Mabillon a publié seu- 
lement le premier et le dernier livre, Act'a 
SS. Ord. S. Ben., t. H, p. 201. B. H. 

CenttU. Chronicon, dans le tome IV du Spicileffium de 
d'Achery. — Hist. Littér. de la France, t. VII, p. «81,- 
Gallia Christiana, t X. ocL 194t. 

J ingemaîiîi (Bernhard-Severin), poète et 
romancier danois , né le 28 mai 1789, à Torkilds- 
trup (Ile de Falster), où son père était pasteur. 
En 1818 et 1819, il voyagea, aux frais de PÉtat, 
en Allemagne, en France, en Suisse, en Italie, 
et se lia intimement avec le poète Tieck. 
Nommé, en 1822, lecteur de langue et de litté- 
rature danoises à l'Académie de Sorcae, il devint, 
en 1842, directeur de cet établissement. C'est 
l'un des écrivains danois les plus féconds. Il di- 
vise lui-même sa vie littéraire en trois périodes , 
dont la première (1611-1814) est caractérisée 
par un excès de romantisme et de sentimen- 
talité, et la seconde par des tendances presque 
exclusivement dramatiques. Dans la troisième 
{à partir de 1821) ses meilleures productions 
sont des poèmes et des romans historiques, 
à l'imitation de Walter Scott, et des nouvelles 
dans le «eût germanique. Ses romans, qui font 



assez bien connaître les mœurs de* Danois du 
moyen âge, sont beaucoup lus du peuple. Voici 
le titre de ses principales œuvres ; Dicte ( Poé- 
sies); Copenhague, 1811-1812; 2 e édit, 1817, 
in- 12; — Procne, recueil de poésies, 1813; — 
Ungdomsdigte ( Poésies de jeunesse, 1813-1818), 
3 vol. in-8°; 3 e édit., 1845 ; — De Sorte Riddere 
(Les Chevaliers Noirs), épopée romantique en 
neuf chants, 1814; 2 e édit,, 1845;— Masaniello, 
tragédie; 1815; —Blanca, tragédie, 1515; trad. 
en vers allemands par D. W. Lewetzow , Co- 
penhague, 1815; ~ Rcesten i Œrkenen (La 
Voix dans le désert) , drame biblique; 1815 ; — 
Hyrden af Tolosa ( Le Pasteur de Tolosa ) , 
tragédie, 1816; trad. en allemand par Hell,dans 
Bûhne ans Aus.lssnder, Dresde, 1819, et par 
L. H. Scholtz, Schleswig, 1820; — lœverid- 
deren (Le Chevalier du Lion), ibid., 1816 ; trad. 
envers aUem. par Fr. M. Lange, Attona, 1825 ; 
— Tassas Sefrielse ( La Délivrance du Tasse ) , 
poème dramatique , 1819; traduit trois fofo en 
altan., et notamment par Oarfhausen , Leipzig, 
1820; — Kampenfor Valhal ( Bataille pour la 
possession du Valhal), tragédie, 1621; —Ma- 
gnetismen i Barbterstuen ( Le Magnétisme dans 
la boutkfuedu barbier ), comédie en cinq actes ; 
1821 ; — De Underjordiske ( Les Êtres souter- 
rains), tradition de l'Ile de Bornholm; 1817 ; — 
JSventyr og Fortxllinger (Contes et Récits), 
i 821 ; — Reiselyren ( Lyre de Voyage ) ; 1820, 
deux part.; 2 e édit, 1845;— Psalmer (Psaumes), 
1825; 3 e édit., 1845; — Waldemar den store 
og hans Mxnd (Waldemar le Grand et ses 
compagnons ), 1824; 3 e édit., 1847 : poème his- 
torique en dix chants, qui est le chef-d'œuvre de 
l'auteur; — Waldemar Seier ( Waldemar vain- 
queur), roman en quatre part., 1826; 6 e édit., 1855; 
trad. en allemand et en anglais; ~ fioveller; 
1827; — Erik Menveds Barndom (Jeunesse de 
Erik Menved ), roman eu trois part., 1828; 5 e édit., 
1857; trad. en allemand, en anglais et en fran- 
çais par M. Duckett, Paris, 1843, 2 vol. in-8°; 
autre édit., 1845; — Stnaadigte og Reisemin- 
der ( Poésies détachées et Souvenirs de voyages); 
1832 ; — Kong Erik og de Fredlœse ( Le Roi 
Brik og de Fredlœse ( Le Roi Erik et les Pros- 
crits), roman, deux part., 1833; 4 e édit, 1851; — 
Prinds Otto af Danmark og hans Samtid 
( Le Prince Otton de Danemark et son siècle), 
roman, 1835; 4 e édit, 1851 ; — Dronning Mar- 
gareta (La Reine Marguerite), poème en dix 
chants; 1836; 4 e édit, 1866;— Holger Danske 
(Ogier le Danois), 1837 ; 3* édit, 1847 : poème 
national, dont lé héros, suivant les traditions 
populaires, apparaît dans toutes les circons- 
tances difficiles pour sauver le Danemark ; — 
Renegaten (Le Renégat), poème dramatique; 
1838 ; — Salomons'Ring (L'Anneau de Salo- 
mon), poème dramat; 1839; — Kunnukog 
Naja, ou las Groenlandais, nouvelle, 1842; — 
Blandede Digte (Poésies diverses), 1842; 
4 e édit, 1846; — A/msverus et poésies déta- 



86* 



INGEMANN — 1NGHIRAMI 



864 



tachées; 1846;— De Flre Rubiner (Les Quatre 
Rubis) , conte ; 1849 ; — Den stumme Frœken 
(La Demoiselle muette), nouvelle; 1850; — 
Lansbybarnene ( Les Enfants de Village) , ro- 
man, en quatre part. ; 1 852; — Tanhebrevefra en 
Àfdœd ( Lettres d'un décédé ), poème; 1855 ;— 
Guldxblet ( La Pomme d'Or) , conte en vers, en 
douze cliants ; 1856. Tous ces ouvrages ont été 
réunis sous le titre de Samlede Skrifter, -en 
quatre séries :l.Œuvres dramatiques, 1853,6 vol.; 
IIJ Poèmes et Romans historiques, 1847-1855, 
12 vol.; IU, Contes et Nouvelles, 1847-1853, 
12|voi.; IV, Romances, Poésies, Contes en vers, 
1845-1856, 9 vol. £. B. 

Holbach , Dansk-poetisk anthologie . t. IV, p. m-lflQ. 
-.P.-L. Mœller, DanskPantheon m -~x.MaraAa % LUterat. 
«candi». — Vf. et H. Howltt, The Littérature and Ro~ 
nuance of northem Europe,' Londres , îsif, t. II, p. 186- 
106. — Brtlew, Forfatter-Lex. 

* ingen (Willem van), peintre hollandais, 
né en 1651 ou 1657, mort à Amsterdam. Il fut 
d'abord élève d'Antoine Grebber, et se rendit 
ensuite en Italie (.1670), où il se perfectionna 
sous les leçons du célèbre Carlo Maratti, qui lui 
procura de grands ouvrages dans plusieurs 
églises de Rome. Il résida quelque temps à Ve- 
nise, puis à Naples, où il fut très-occupé. De re- 
tour dans sa patrie, il se fixa à Amsterdam. Ses 
tableaux, devenus rares, renferment de très- 
belles parties, mais le dessin y laisse beaucoup à 
désirer. Le meilleur élève dlngen fut Albert 
Spiers. A. de L. 

Descamps, La VU des Peintres hollandais , -t. II» 
p. SII-SI3. — PUklngton, Dictionary of Pointers. — 
Jakob Campo Weyerman , De Schilderkonst der Neder- 
landers, t. III, p. i»-im. 

ingenhocsz (Jean), naturaliste et chimiste 
hollandais, né à Bréda, en 1730, mort à Bowood 
(Angleterre), le 7 septembre 1799. Reçu docteur, 
il exerça pendant quelque temps la médecine 
dans sa ville natale. Venu ensuite en Angleterre, il 
s'y fit remarquer par son talent médical. Il fut 
surtout apprécié par Pringle, président delà So- 
ciété royale de Londres, qui le désigna à Marie- 
Thérèse, lorsque cette princesse, désespérée d'a- 
voir perdu deux de ses enfants, victimes de la 
petite vérole, demandait un médecin habile 
pour opérer l'inoculation de la famille impériale. 
Ingenhousz partit aussitôt pour Vienne, où il 
vaccina plusieurs princes et princesses. En ré- 
compense de ses services en cette occasion , il 
devint conseiller aulique et médecin de la fa- 
mille impériale. Il fut estimé de Joseph II, qui 
aimait à le visiter dans son cabinet, et se plai- 
sait à faire avec lui des expériences de physique. 
Quelques années plus tard, Ingenhousz retourna 
eu Hollande; puis il visita la France et l'Alle- 
magne. Il mourut dans une maison de campagne 
appartenant au marquis de Lansdown, chez 
lequel il était venu s'établir en dernier lieu. 
On doit à Ingenhousz l'emploi des plateaux de 
verre dans la construction des machines élec- 
triques dont Ramsden s'était attribué l'invention. 
H a fait aussi d'importantes recherches sur la 



différence de vitesse avec laquelle la chaleur se 
propage dans des métaux différents, et confirma 
les expériences de Thomas Percivaltsur la nutri- 
tion dés plantes ; enfin il a démontré que les végé- 
taux «vivants exposés à la lumière émettent de 
l'oxygène, tandis qu'a l'ombre ils exhalent de 
l'acide carbonique. C'est Ingenhousz qui , le 
premier, introduisit dans la médecine l'usage du 
dernier gai. On a de lui : Expérimente on ve- 
getables discovering their .gréai power of 
pufifying the common air in suns-hine , but 
injuring it in the shadeornight, 1779 ; tra- 
duit de l'anglais en allemand; Vienne, 1786; — 
Nouvelles Expériences et observations sur 
divers objets de physique; ouvrage écrit pri- 
mitivement en anglais; — une traduction latine 
du Traité du Calcul, du Scorbut et de la Goutte j 
par Hukne ; Leyde, 1778, in-8° ; — de nombreux 
Mémoires, insérés dans les Transactions Phi- i 
losophiques f et dans les Actes de l'Académie ■ 
des Sciences de Rotterdam. V. R. 

Biographie Médicale. - Rose , NewlBioçr. Diet. \ 

ingenuus, un des usurpateurs énumérés par 
Trebellius Pollion, sous le titre des trente tyrans, 
tué vers 260 après J.-C. Il était gouverneur de i 
la Pannonie, lorsque l'empereur Valérien partit 
pour son expédition de Perse, laissant le gou- , 
vernement à son fils Gallien. Plein de mépris 
pour ce prince dissolu, et redoutant peut-être sa 
cruauté, Ingenuus prit la pourpre impériale. Mais | 
Gallien, qui en cette circonstance montra beau- 
coup d'activité et de résolution, traversa rapide- 
ment llllyrie, et rencontra l'usurpateur à Mursia. 
Les rebelles furent complètement défaits, et 
Ingenuus périt dans l'action ou, selon d'autres 
récits , se tua pour éviter de tomber vivant an 
pouvoir du vainqueur. Suivant Pollion, l'insur- 
rection dlngenuus éclata sous le consulat de 
Fuscus (ou plutôt Tuscus) et de Bassas, c'est- 
à-dire en 258 , l'année même du départ de Valé- 
rien pour la Perse. Aurelius Victor, au contraire, 
place cet événement deux ou trois ans plus tard, 
après la défaite de Vajentinien. Y. 

TrebeUtus Pollion , Triginta Tyranni.— àorelias Vic- 
tor, De Cms., XXXIII. - Zonaras, XII, fit. 

ingenuus , sculpteur romain, auquel on at- 
tribue une statue 4e Mercure conservée au mu- 
sée du Vatican, et dont la plinthe porte en gros 
caractères le mot : INGENVI. G. B. 

Raool-Rochette, Lettre à M. Schorn, p. St*. - VJs- 
coati, MuseoPio-Oementino, t. III, p. «5. 

inghieami ( Tommaso, surnommé Fedra), 
humaniste italien, né à Volterraen 1470, mort le 
6 septembre 1516. Après avoir été conduit à Flo- 
rence dès l'âge de deux ans, il se rendit en 1483 à 
Rome, où il se livra avec ardeur à l'étude des au- 
teurs de l'antiquité. Ayant joué avec le plus grand 
succès le rôle de Phèdre.dans la tragédie de Sé- 
nèque, que le cardinal Rafaël de San-Giorgio fit 
représenter dans son palais, il en reçut le sur- 
nom de Fedra, qui a été considéré par plusieurs 
de ses biographes, tels que Vossius et Bayle, 
comme son nom de famille. Ses discours loi 



865 



mGHIRAMI 



866 



firent, to rapport d'Erasme, donner le surnom de 
Cicéron de son époque. En 1493, accompagnant 
le cardinal Carvajal, nonce du pape auprès de 
l'empereur Maximilien, Inghirami prononça de- 
vant ce dernier un discours d'apparat, dontje style 
élégant lui fit obtenir la couronne poétique et le 
titre de comte palatin. De retour à Rome, il devint 
chanoine du Latran; vers la fin du quinzième 
siècle, il fut nommé professeur d'éloquence. Sous 
Jules II il fut appelé aux fonctions de clerc de 
la chapelle papale, de conservateur de la biblio- 
thèque du Vatican et de garde des archives sé- 
crètes du château Saint-Ange. Sa réputation, 
attestée par les éloges que lui donnent les litté- 
rateurs les plus célèbres de son temps, tels que 
Bembo et Sadolet, allait toujours en croissant, 
lorsqu'il mourut par suite d'une chute. Voici le 
jugement que porte sur lui Érasme : Ibidem 
( Borna) cognovi et amavi Th. Phxdrum, lin- 
gua vertus quam calamo célébrera; mira erat 
in dicendo tam copia quam autoritas. On a 
de lui ; Oratio in Funere cardinalis Lud. de 
Podocataro ;— Oratio in Laudem Ferdinandi, 
Hispanix régis ; — Oratio in Laudem Pétri di 
Vicezia, episcopi Cesenatensis ; ces trois dis- 
cours ont été publiés par Galetti dans les Aned- 
doti letterarji di Roma d'Amaduzzi; — Ora- 
tiones dux in Funere Galeotti Franciotti, 
cardinalis vice-cancellarii; altéra item fu- 
nebris pro Julio II; Rome, 1777, in-8° : ces 
discours furent découverts par Galetti dan3 la 
bibliothèque de Guarnacci, dans laquelle il 
s'en trouvait beaucoup d'autres, ainsi que des 
lettres et des poèmes d'Inghirami. Celui-ci a 
laissé en manuscrit : Apologia Ciceronis in ob- 
trectatores; — Annalium Breviarium; — Ad 
Plautum Quxstiones ; — In Horatii Poe ticam 
Comment aria; — In Bhetoricam Introductio, 
c'est à tort que Vossitfs et d'autres ont attri- 
bué à Inghirami la Chronique étrusque apo- 
cryphe publiée par Curzio Inghirami. £. G. 

Bayle, Diction, (an mot Phèdre). - Eloçj d'niustri 
Toscani. t II, p. M7. — Galetti, Eloçio d'Inghirami 
(dam le tome III des jdneddoti d'Amaduzzi). — Tiraboa- 
ehl. Storia délia Letteratura Italiana, t. VII, parte III. 
— Brseh et Ornber, Encyklùpxdie. 

inghirami (Curzio), érudit italien de la 
même Camille que le précédent, né le 29 dé- 
cembre 1614, à Volterra, mort le 23 décembre 
1655. Pendant toute sa vie, il s'occupa de l'étude 
de l'antiquité, et s'acquit un certain renom parmi 
les archéologues de son pays ; mais il eut le 
malheur de croire à l'authenticité d'une Chro- 
nique étrusque apocryphe, écrite soit-disant en 
l'an 700 de Rome par un certain Prosper Fesu- 
lanus, mais fabriquée évidemment par quelque 
faussaire peu de temps avant qu'elle ne vint dans 
les mains d'Inghirami, qui s'empressa de la pu- 
blier sous le titre de : Ethruscarum Antiqui- 
tatum Fragmenta, quitus urbis Borna alia- 
rumque gentium primordial mores et res 
gestx indicantur; Florence, 1636; Francfort, 
1637, in-fol. Henri Ernst attaqua le premier, 

NOUV. BIOGft. CÉNÉR. — T. XXV. 



dans ses Varia Observationes adAntiquitates 
Ethruscas, l'authenticité de ces fragments d'his- 
toire ; mais ce fut surtout Léon Allatius qui prouva 
dans ses In Antiquttatum Etruscarum Frag- 
menta Animadverstones , Paris, 1640, in-4°, 
qu'Inghirami avait été la dupe d'une supposition 
aussi audacieuse que mal déguisée. Le malheu- 
reux éditeur fit paraître pour sa défense un Dis- 
corso sopra Vopposizioni fatte al antichità 
Toscane y Florence, 1645, in-4° ; mais il avoua 
bientôt lui-même qu'il s'en était laissé imposer. 
Quant à sa bonne foi, il y a des raisons suffisantes 
pour ne pas en douter. L'auteur de cette super- 
cherie n'a jamais pu être découvert; c'est à tort 
qu'on en a accusé Th. Fedra Inghirami. E. G. 
Eloçj deçli Toscani Illustré, t. III. — Ttraboschl. .Mo- 
rte (faite Letter. Italiana, t VIII. - Placcius, Theatrum 
Jnonymorum» — Cltusical Journal (&nnéc 1817). — Ersch 
et Gruber, Encyldopsedie. 

* inghirami (François), célèbre archéo- 
logue italien, descendant du précédent, né en 
1772, à Volterra, mort à Florence, le 17 mai 1846. 
Destiné à la marine par son père, il se rendit en 
1785 à Naples, où il entra à l'École militaire. Il 
y fréquenta beaucoup la maison de son oncle 
Domenico Venuti , directeur de la fabrique de 
porcelaine et du Museo Borbonico, ce qui lui 
donna l'occasion de se familiariser avec les chefs- 
d'œuvre de l'art antique et à entrer en relation 
avec des artistes et des antiquaires. Après quel- 
que résistance, son père l'autorisa à quitter la 
carrière militaire et à se livrer entièrement à son 
goût pour les arts. Inghirami se rendit à Florence, 
où il apprit à fond le dessin, et où il étudia l'ar- 
chéologie sous la direction du célèbre Lanzi. 
En 1799, il alla rejoindre à Pise son ami Phil. 
Hackert (voy. ce nom), et s'exerça auprès de 
lui dans la peinture du paysage et dans l'art de 
graver. De retour à Volterra, où il avait pré- 
cédemment donné une impulsion nouvelle à 
l'exploitation de l'albâtre, il y fut nommé con- 
servateur de la bibliothèque publique, dans la- 
quelle se trouvait placée une collection consi- 
dérable d'antiquités étrusques. La faire connaître 
au monde savant, tel fut dès lors son but cons- 
tant. Par un procédé optique particulier, il des- 
sina avec une exactitude complète le» objets de 
cette collection, qu'il suivit en 1811 à Florence, 
lorsqu'elle y fut transportée. Après avoir rempli 
pendant quelque temps les fonctions de biblio- 
thécaire à la bibliothèque Marcelliane, il alla en- 
suite établir avec plusieurs élèves qu'il avait 
formés, une imprimerie et un atelier de gravure 
dans l'ancienne abbaye de Fiesole, établissement 
auquel il donna le nom de Poligrafia Fiesolana. 
C'est là qu'il publia son grand ouvrage sur les 
Monumenti Btruschi, par lequel il réhabilita le 
nom d'Inghirami, que la mésaventure de son 
aïeul avait décrédité. Le reste de sa vie fut con- 
sacré à des travaux d'archéologie et d'histoire, 
dont plusieurs ont une grande importance. On 
a d'Inghirami : Dichiarazione délie Pitture 
di un servito di tavola; Naples, 1790; — 

28 



867 



INGHIRAMI — INGLES 



868 



Relazione affriole délie lmprese faite dalV 
armi Volierrane nel Moral* toscane; U- 
vourne, 1799; —OsservatUmi topra i Manu* 
menti antichi, insérées en appendice a l'édi- 
tion donnée par Inghirami de YJtalia avanti 
il dominio dei Romani deMicatt; Florence) 
1811; — Estratto del libro intitoiato ; De 
Pateris antiquorum , ce* aggiunto di oseer* 
vazioni e note; Gènes, 1829; — DescrUtione 
del Palazzo dei Pitti; Florence, 1«19; — 
Hagionamento sopra una Patêra Mtrusca; j 
Gènes, 1819; — Monument* Btrusehi o 4i 
etruscho nome; Poligrafia Fiesolana, 1 820-1 W* 
10 vol., in 4°, en soixante*srx hvraisons, dont 
chacune contient don» planches; — Ragionm* 
mento suit' Influente Lunari; ibidem, 1830; 

— Viaggioalla Valtombrosa ; Florence, 1823; 

— Osservazioni suit Antichitàdi Selinunte; 
Florence, r825; — Qalleria Omeriaa, o rac~ 
colta di monumenti antichi esibita per ser* 
vire allô studio delF Iliade e deH 1 Odissea; 
Florence, 1827-1838, 3 vol., in-g% ouvrage 
de luxe, qui contient près de quatre cents 
planches; — Lettere di B trusta BrmdùOone; 
Florence, 1828 et 1839; — Pittute dei Vati 
fittili per servire di studio alla mltologia 
ed alla storia degli antichi popoli; Flo- 
rence, 1831-1837, 4 vol., in-4°, avec quatre 
cents planches; — Memorie storiche per ser- 
vire di guida ail' osservatore in Fiesole; 
Poligrafia Fiesolana, 1839; — Storia délia 
Toscana, compilata ed in sette epoche distrP- 
butta; Florence, 1841-1845, 16 vol. : ouvrage 
inachevé. — Inghirami a aussi édité tes Notitkc 
délia Scutturadegli Antichi, ouvrage de Lanal, 
en tète duquel il a publié une biographie de Fan» 
teur; — Nuova Colleitone di OpuscoUe m* 
tiiie di scienze, lettere ed or lit Poligrana 
Fiesolana, 1820-1823, 4 vol., 1*4°. Enfin il a 
pris une part active à la publication du Musée 
etruscho- cÀituino; Florence , 1833, 4 toi., 
avec deux cent seise planches» E. Ô. 

Brandes, Litteraritche ÊtHtUnff (Berlin, année 18*6, 
n» 80). - Gewdorf, Leipsiçer RepertoHum , aott** îst*. 

— Brtcb et Grnber, £ncyJUofMNlfc. 

UHHALD ILLBADA, roi du SultMode OU 

d'Upsala (Suède), fils d'Anund et dernier prince 
de la famille dlfnglinga, vivait dans Je septième 
siècle après J.-C. Il appartient à la période lé* 
gendaire de la Suède, et ne nous est connu que par 
la Saga d'Ynglinga. Nous résumerons oe récit 
poétique qui doit être fondé sur des faits réels, 
mais qui contient sans doute aussi une large 
part de fiction. Le royaome de Suithiode s'était 
subdivisé entre plusieurs branches de la famille 
royale, et IngiaM n'hérita que d'une principauté 
très-bornée. Pour célébrer son avènement, il fit 
construire une grande salle qu'il appela la salie 
des Sep t Rois, et invita à un banquet les rois du 
Suithiode, et les jatte. Six rois se rendirent à 
son invitation. Pendant le repas, il juta de re- 
culer au loin les bornes de l'héritage paternel, 



et, le soir même, il fit périr tes lin rois an milieu 
des flammes. Après cet événement* resté célèbre 
sous le nom d'incendie d'Upsala, Ingiaid demi 
sit par trahison doute rois , et mérita le surnom 
à'illrada (féroce )» On raconte que dam mm en- 
fance il avait mangé le cour d'un loup, oeqoU'i» 
vaitrendocratl. Asa, sa fille, paitageasmerasatei 
et son surnom. Mariée à Gudrod, roi de lente, 
eue tua: son époux, et revint auprès de son stot. 
Indigné de tant de crimes, un neveu de Godmd, 
Ivaf Widfamne, rassembla Une armée, et mardi 
contre Ingiald. A son approche, le roi d'Upsala 
et ai Alto ne se sentant pas aasef torts pourra 
sister, donnèrent un banquet a lents fidèles, 
s'enivrèrent avee eu*, et, incendiant le stfc 
royale, périrent consumés aven tons tours en- 
vivea. La mort dlngiak) rat le signal dW ré- 
volte générale contre ta famille d*Yngftiigft, qn' 
fat partout dépouillée du potrvotr, La pnolérké 
dlngiald se réfugia dans m Norvège, qu*nfi è> 
ses descendants, Harald tiarfagir, érty» phts 
tard en royaume. z. 

s*em #rMM*a j du» te Km tm tt f sm* de wtm 

Starlcsmi. — Gcjwit WHMf * Suéde { (rat per Uat 

blad ),cL 

* UKH.Bg (Le maître Sorpé), peintre e»p- 
gnol, vivait dans le quinzième siècle. Il se dis- 
tingua dans l'histoire et le portrait II teste 
assez de belles fresques de cet artiste pour qu'on 
puisse expliquer le surnom de maitre que ses 
contemporains lui avaient donné, il décors à Gre- 
nade, en 1454, le grand autel et les parties laté- 
rales de l'église de Buitrago. Il y peiajût plusieurs 
des membres de la famille de* Santiilane, fonda- 
teur* de cet établissement, un Saint Georsu, 
un Saint Jacques^ et un Saint Sébastien, Ls 
couleur et le dessin en sont irréprochabKS, 
mais la composition laisse à désirer : eUe est 
lourde ; l'air et la lumière circulent mal dans 
des espaces trop remplis. C'est d'ailleurs le dé- 
faut de l'école et de l'époque de ce peintre, hm- 
coup d'établissements religieux on de charité «le 
P Aragon possèdent des œuvres du maître .fonte 
Ihgtes. Quelques-uns dé ses portraits ont ete 
gravés habilement par dom Peraaod Salma* 

A. M L. 
ftaefam, Los ComêtUërU* M Im Pin****. •» QattA 
Dictionnaire des Peintres espagnols. 

* ingles (Don José), peintre espagnol, né à 
Valence, en 1718, mort dans la même ville, es 
1780. Il était élève de don Antonio fticharte, fi 
en fit un excellent coloriste. Il peignait très-ton 
le portrait et montrait une rare habileté daosU 
peinture à fresque. Quoiqu'il ait exécuté île 
nombreux morceaux» ses sujets sont toujour» 
variés et d'une composition nouvelle. Il fut 
sous-directeur de l'Académie de Valence. Ses 
principales productions se remarquent dans si 
ville natale (qu'il quitta peu ), au couvent de ls 
Merced, dans l'église de Saint-Augustin et dsoi 
la paroisse du Campanar. A. de L. 

Philippe de Gaevarra, Ijss Cmuntarios de laPiwtor*. 
publiés par Antonio Pons; Madrid, 1788. - Lu Cm- 



860 

tttvclones 9 Jetas del Aeademia de Valence. — Qutl- 
llet, Dictionnaire des Peintres espagnols. 

inglis (Esther). Voy. English. 
ixglis (Henri-David) , littérateur anglais, 
né en 1795, en Ecosse, raort en 1835. Passionné 
pour les voyages, il profita du rétablissement de 
la paix pour visiter la plupart des contrées de 
l'Europe; sa vie se passa presque tout entière 
sur les grands chemins. Au milieu de ces fatigues 
continuelles, il fut atteint d'une affection de poi- 
trine qui le mit rapidement au tombeau. Ses 
principales relations de voyages, écrites avec une 
agréable facilité, sont : The Taies qf Ardennes, 
solitary walhs through many lands; — Tra- 
tels in Aorway and Sweden ; Spain in 1830; 
— the iVeto Gil Blas; — Ireland in 1834, sa 
dernière production. Cet auteur a signé ses pre- 
miers ouvrages du pseudonyme de Dérivent 
Conway. P. L— t. 

Rose, Biographlcal Dictionary. — Gentleman Maga- 
%lne, 1836. 

* inglis (Sir Robert-Harry), homme poli- 
tique anglais, né en 1786, mort le 8 mai 1855. 
Avocat , membre du conseil du collège royal , 
directeur d'une société d'assurances sur la vie 
et membre du parlement, y siégea parmi les 
conservateurs, et vota pour la protection de l'a- 
griculture en 1846. Il siégea à la chambre des 
communes pour«Dundalk de 1824 à 1826, et 
pour Ripon de 1826 à 1828. Depuis cette époque 
il représenta l'université d'Oxford , qui l'élut à 
la place de sir Robert Peel lorsque celui-ci crut 
devoir donner sa démission pour mettre ses 
commettants en état de se prononcer sur son 
changement de conduite relativement à l'éman- 
cipation des catholiques. J. V. 
Parliamentary Compunion. 
*ixgoli (Matteo) , architecte et peintre de 
l'école vénitienne , né à Ravenne, en 1587, mort 
de la peste, en 1631. II fut élève à Venise de 
L. Benfatti dal Friso ; mais il s'appliqua surtout 
à imiter les ouvrages de Paul Véronèse et du 
Palma, se formant un style plus solide qu'a- 
gréable. Ses principaux tableaux sont, à Venise, 
une Cène, dans l'église des Saints- Apôtres, et six 
sujets de la vie de la Vierge, dans celle de Saint- 
Sebastien . Ingoli s'occupa aussi d'architecture; 
mais sa mort prématurée ne lui permit de lais- 
ser aucun monument de quelque importance. 

Ê. B-n. 
Boschini, Car ta del Navegar pittoresco. — Orlandf , 
Abbecedario. — EUdolQ, Vite deçli lllustri PUtori e 
dello stato. — Lanzl, Storia délia Pittnra. — Ticozzi, 
Dizionario. — Quadri, Otto Giorni in Fenetia. 

* IXGOM4R, hagiographe et historien breton, 
vivait dans le onzième siècle , sous Geoffroi I er 
et Alain III. Il avait composé divers ouvrages 
dont on ne possède aujourd'hui que des frag- 
ments, savoir : une Généalogie des Princes de 
la Domnonée, fondue dans la Chronique de 
Saint- Brieuc (D. Morice, Pr., 1. 1, col. 7-102), 
dans l'Histoire de L. Raud et dans la Vie des 
Saints de D. Lobineau ; — une Vie de saint Jud- 
wal, citée par D. Lobineau; — une Vie de 



1NGLES — INGOUF 870 

saint Judikhael; et une Vie de saint Win- 
noch (De Morice, Pr., t. I,col. 204-206 et 211- 
215). La légende de saint Winnoch , écrite dans 
le huitième siècle par un auteur anonyme , re- 
touchée et augmentée par Ingomar, a été aussi 
publiée par Surius, au 6 novembre; par Mabil- 
lon, dans Âcta ord. s. Benedict. et surtout par 
Ghisquière, bollandiste, avec des notes, dans les 
Acta Sanctorum Belgii, t. VI, imprimés à l'ab- 
baye de Tongerloo, en 1794. Ingomar, dont Su- 
rius relève le mérite, écrivait avec plus de goût 
et de discernement que les autres légendaires ses 
contemporains. P. Levot. 

D. morice, Histoire de Bretagne. — D. Lobineau, Vie 
des Saints, etc. — Surtu», rit* Sanctorum, etc. 

1NGON. Voy. IlfOB. 

MrteoNi (Donino), sculpteur modénais, 
mort en 1604. Il travailla beaucoup pour le roi 
de France et le vice-roi de Naples , et revint finir 
ses jours dans sa patrie combié d'honneurs et de 
présents. E. B— ». 

Vidrlanl, rite de? PUtori, Scuttori ed Architetti Mode- 
nesi. — OrlandI, Abbecedario. 

*ingoni ou JUGQNi ( Giovanni- Battis ta ) , 
peintre de l'école de Modène, né dans cette ville, 
vers 1528, mort en 1608.11 fut, selon Vasari, l'é- 
mule de Niccold dell' Abbate, et travailla heau- 
coup à Rome , à Pérou se et à Modène. Cependant 
on connaît peu de tableaux de ce maître ; mais 
dans le petit nombre de ceux que l'on possède , 
on trouve un coloris agréable, dea poses de bon 
goût et des figures pleines d'expressions 

E; B-N. 
Vidrlanl, rite de PUtori, Scuttori eê Architetti Mo- 
denesi. — Vasari, F ite. — Tlraboscht, Notizie degli Ar- 
tefci Modenesi. — Lanzl, Storia délia Pittura. 

ingoiîf (Pierre- Char les) , graveur français, 
né à Paris, en 1746, mort vers 1800. Il apprit la 
gravure sous J.-J. Flipart. Il a gravé avec goût 
différents morceaux d'après divers maîtres. On 
remarque entre autres : Quatre têtes, pleines 
d'expression, d'après Greuze; — La Paix dit 
ménage , d'après le même; — La bonne Édu- 
cation, d'après le même; — Jeune Fille sé- 
duite qui caresse un chien ou VInnocence 
trompée consoléeparV Amitié, d'après le môme ; 

— Portrait de Jean-Georges Wille; — une 
Scène de Tome Jones (acte I, scène III ), d'après 
P.-A. Wille; — La Mère contente, d'après le 
même; — La Mère en courroux, d'après le 
même , etc. A. de L. 

Notizie d*Qli Intaaliatori, par G. Gori Gandellinl, con- 
tinuation de l'abbé Lulgl de' Angelis, t. II, p. 197 198. 

ingouf ( François- Robert) , graveur fran- 
çais, frère du précédent, né à Paris, en, 1747, 
mort le 18 juin 1812.11 fut aussi élève de J.-J. Fli- 
part. On a de lui un grand nombre d'estampes, 
parmi lesquelles on distingue : Les Canadiens 
pleurant surlatombe de leur enfant, d'après 
Lebarbier; — La Nativité, d'après Raphaël ; —la 
même, d'après Ribera; ces deux gravures se 
trouvent dans le Recueil du Muséum de Laurent; 

— un Buste de Jean- Jacques-Rousseau ; — • 

28.* 



871 INGOUF — 

Gérard Dow jouant du violon ; — le Portrait 
d'Armand- Jérôme Blgnon , maître des cérémo- 
nies, d'après Drouais ; — Le Soldat en semestre, 
d'après Freudenberg; — Le Négociant ambu- 
lant, d'après le môme; — Le Retour du La- 
boureur, d'après Benezech ; —plusieurs planches 
du Voyage de Cassas et du grand ouvrage 
de la commission d'Egypte. 

L'abbé Lulgi d'Ange», Notizie degli Intaçliatori (con- 
tinuation de G. Corl GandineM), t. II, p. 196-197. 

ingaam ( Robert), théologien anglais, né en 
1727, à Beverley ( Yorkshire) , et mort en 1804. 
Il étudia à l'université de Cambridge, y fut chargé 
de L'enseignement théologique, et administra suc- 
cessivement plusieurs paroisses des comtés de 
Kent, de Nottingham et d'Essex. Il a laissé beau- 
coup de commentaires sur le texte des Écritures 
Saintes , dont il tirait parfois les interprétations 
les plus étranges ; nous rappellerons entre autres : 
A View of the great events of the seventh 
plague; — Account of the ten Tribes of Is> 
rael being in America , publié dans l'origine 
par Manassé ben Israël ; — Explanation of the 
Prophecy of the seven vials oftorath, etc. 

P. L— Y. 

Rose, Biographieal Dictionary. ; 

ixgrand ( François- Pierre), homme poli- 
tique français, né à Usseault (Poitou), le 9 no- 
vembre 1756, mort à Paris, le 21 juillet 1831. II 
était d'une famille protestante ruinée lors de la 
révocation de l'édit de Nantes.. Il exerçait la pro- 
fession d'avocat au commencement de la révolu- 
tion, et en accepta les principes avec une grande 
ardeur. En 1790, il fut nommé l'un des adminis- 
trateurs de son département, qui le députa à l'As- 
semblée législative, puis à la Convention natio- 
nale. Le 17 décembre 1792, il fit décréter l'an- 
nihilation des procédures relatives aux troubles 
de Copet et de Saint-Étienne. En janvier 179.1, 
Ingrand était membre du comité de sûreté géné- 
rale. Il vota la mort de Louis XVI sans appel ni 
sursis. Il fut ensuite chargé de missions dans la 
Vienne et la Vendée, et déploya dans ces dépar- 
tements une grande sévérité; aussi, après le 9 ther- 
v midor, fut-il accusé d'avoir exercé des rigueurs 
inutiles et excessives. Thrbaudeau l'accusa môme 
d'avoir fait arrêter arbitrairement son père. In- 
grand prouva qu'il n'avait fait qu'exécuter les 
ordres des comités. 11 prit plusieurs autres fois 
Fa parole sur la nécessité de rendre aux patriotes 
'eur énergie et d'imposer silence aux aristocrates, 
ît dénonça les progrès que faisaient les contre- 
révolutionnaires dans les départements de l'ouest. 
Après la session conventionnelle, il devint 
membre du Conseil des Cinq Cents, d'où il sortit 
en 1797. Nommé inspecteur forestier à Beauvais, 
puis à Château-Thierry, il se fit remarquer par 
son intégrité. Frappé en février 1815 par la loi 
contre les régicides, il dut se retirer à Bruxelles, 
où il vécut fort malheureux. La révolution de 
juillet 1830 lui permit de venir mourir dans sa 
patrie. H. Lesduhi. 



ItfGRASSU 



872 



Le Moniteur général, an 17M, n° S54; an I e », n*» 3, 
15, 138; an H, n«« m, 357 ; an ni, n» 6. — Biographie 
Moderne (1W6 ). — Arnault. Jay, Jouy et Norvius, Biogra- 
phie nouvelle des Contemporains (1823J. 

ingrand de SAïNT-M kVK, chef de chouans, 
né vers 1775. Il ne figura dans la guerre civile 
qu'en 1799, et se mit à la tête des bandes qui, 
sous le prétexte de royalisme, désolèrent le dé- 
partement de l'Eure. Il s'acquit une certaine ré- 
putation de bravoure par plusieurs combats sou- 
tenus contre les troupes. Il fut l'un des derniers 
à accepter l'amnistie accordée par le gouverne- 
ment, et ne déposa les armes que lorsqu'il se 
vit traqué de toutes parts. Il se trouvait à Paris 
lors de l'explosion de la machine infernale ( 3 ni- 
vôse an rx = 24 décembre 1801), et fut in- 
carcéré au Temple. Sa participation active ne put 
être prouvée; néanmoins il fut transféré à la 
citadelle de Besançon, d'où il ne sortit qu'en 1805 
pour être mis en surveillance dans le départe- 
ment des Côtes-du-Nord. Il ne reparut plus sur la 
scène politique. H. L. 

Biographie Moderne (180S). — Arnault, Jay, Jouy et 
Horvlni, Biographie des Contemporains ( 1823). 

ingrassia ou ingrassias (Giovanni-Fe- 
lippe), médecin sicilien, né à Palerme,en 1510, 
mort dans la même ville, le 6 novembre 1580 (I). 
Il fit ses études à Padoue, où il fut reçu docteur en 
médecine en 1537. Il enseigna avec un grand 
succès à Naples. Ses critiques anatomîques sur 
Galien sont remarquables par la justesse de ses 
observations sur les os. Ha donné une description 
exacte du sphénoïde et de l'ethmoïde; il con- 
naissait les sinus sphénoïdaux , et les irons 
arbitraires antérieur et postérieur. Il paraît 
être le premier qui ait parlé de Vétrier (2). Co- 
lombo, il est vrai, s'en est arrogé la découverte; 
mais Ingrassia l'a constamment traité de pla- 
giaire. Fallope, moins avide de gloire que jaloux de 
la vérité, renonça au mérite de cette découverte 
qu'il croyait, lui-même, avoir faite, pour l'attri- 
buer à Ingrassia. Coiter, qui vivait en même 
temps, et qui était disciple de Fallope, l'attribue 
aussi à Ingrassia. A son tour Eustachi dé- 
crivit Vétrier, et soutiut que le premier il l'a- 
vait reconnu. Éloy ne doute pas que la décou- 
verte n'appartienne à Ingrassia , et Portai ajoute 
« qu'fngrassias parle aussi fort au long de la ca- 
vité du tympan ; qu'il a connu les fenêtres rondt 
et ovale , le cordon du tambour, qui traverse 
cette cavité, la plupart des éminences qui s'y trou- 
vent, le limaçon et les canaux demi-circulai- 
res, les cellules mastoïdiennes ; et, si l'onenjuge 
par une des planches de son ouvrage , il a coiun 
aussi le muscle du marteau, dont on acconk 
généralement ladécouvertc à Eustachi. «En 1563, 
Philippe II, roi d'Espagne, nomma Ingrassia proto- 
médecin de la Sicile. L'ardeur avec laquelle il sou- 
tint l'honneur de sa profession le fit passer pour 
un homme dur et sévère ; mais il ramena vers 

(1) Selon d'autres biographe», 11 «eralt né aux rmlrcm 
d« Païenne, ou môme à U»rkersbiiur|? ( basse stjrir). 
(i; Petit oê de 1 Intérieur (Je l oreille Interne. 



873 



INGRASSIA — INGRES 



874 



lui l'affection générale pendant la peste qui déso- 
lait Païenne en 1575. Malgré son âge avancé, on 
le vit se multiplier, braver la fatigue et l'épidémie, 
secourir les malades, rassurer les valides et 
donner des ordres si sages que le fléau s'arrêta 
bientôt. Toute la ville lui décerna le titre d'iftp- 
pocrate sicilien, et lui vota une pension an- 
nuelle de 3,000 écus d'or. Il consacra cette somme 
à l'ornement et à l'entretien d'une chapelle sous 
le vocable de Sainte-Barbe dans le cloître des 
Dominicains de Païenne, où il y rat enterré. On 
a de lui : Iatropologia. Liber quo multa ad- 
venus barbaros tnedicos disputantur; Ve- 
nise, 1544, 1558, in-8°; — Scholia in latro- 
pologiam; Naples, 1549, in-8°; — De Tumo- 
ribus praeter naturam; Naples, 1553, in-fol.; 
— RaggionamenU) fatto sopra Vinfermita 
epidemica delV anno 1558, suivi d'un Trat- 
tato di due Mostri nati in Palermo in diversi 
tempi ; Païenne, 1560, in-4° ; — Consiitutiones 
et Capitula, neenon juridictiones regii Proto- 
Medicatus o/ficii, cum Pandectis ejusdem re- 
formaiis ; Païenne, 1564, 1575, in-4°; — De 
Purgatione per medicamentum, atqueobiter 
etiam de sanguinis missione, etc.; Venise, 
1568, in-4°; — Galeni Ars medica; Venise, 
1573, in-fol. Le traducteur y a joint beaucoup' de 
commentaires , — De frigido Potu post me- 
dicamentum purgans ; Venise, 1575, in-4°; 
Milan, J586, in-4°; — Informatione del Pes- 
ti/ero e contaggioso Morbo il quale afflige 
e hâve affLito la città di Palermo e moite 
altre città e terre del regno di Sicilia nelV 
anno 1575 e 1576; Païenne, 1576, in-4°;trad. 
en latin par Joachim Camerarius, sous le titre 
de : Methodus curandi pest\ferum conta* 
gium; Nuremberg, 1583, in-8°; — Methodus 
dandi relationes pro mutilatis torquendis, 
ante a tortura excusandis, pro déformions 
venenatisque judicandis; pro elephantiacis 
extra urbem propulsandis , sive intus urbem 
sequestrandis , vel fortassis publiée conser- 
vât* dimit tendis ; Venise, 1578-1637, in-fol.; — 
In Galeni librum de ossibus doctissima et 
expertissima Comment aria; Messine, 1603, 
in-fol.; Venise, 1604, in-fol. Cet ouvrage, plein 
d'érudition, est divisé en vingt-quatre livres : les 
figures sont gravées d'après les dessins de Vé- 
sale. L— Z— e. 

Éloy, Dictionnaire historique de la Médecine. — Bio- 
graphie Médicale. 

J ingres (Jean- Auguste-Dominique), cé- 
lèbre peintre français , est né à Montauban en 
1780. Son père, peintre et musicien distingué, 
professait le dessin dans cette ville. M. Ingres 
eut à choisir entre les deux arts; d'abord il les 
cultiva tous deux avec une égale ardeur; mais 
la peinture prit le dessus. Cet enfant, qui préfé- 
rait un crayon à tous les jouets de son âge, montra 
bientôt les plus heureuses dispositions , copiant 
les gravures du temps, copiant la nature, et, 
ce qui fait l'éloge de son instinct d'artiste , com- 



mençant dès lors à démêler le bon dn mauvais, 
et préférant Raphaël et Nicolas Poussin aux pein- 
tres à la mode , Boucher, Fragonard et Vanloo. 

Les premières années de M. Ingres furent stu- 
dieuses, mais sans contrainte et sans ennui. Le 
père de M. Ingres , voulant mettre à profit la 
brillante organisation de son fils, le conduisit, 
encore enfant, à Toulouse, et le confia aux soins 
d'un de ses collègues de l'Académie de Peinture, 
M. Roques. Ce professeur habile avait séjourné 
en Italie, et dans un temps où l'on ne jurait, en 
province surtout où le retour de David vers 
l'antique était encore ignoré, que par Vanloo et 
Fragonard, il étudiait Raphaël avec goût et in- 
telligence. Une belle copie de la Madone alla 
seggiola, que M. Roques avait rapportée de 
Florence, révéla d'un seul coup à M. Ingres ces 
grandes vérités de l'art qu'il n'avait fait qu'entre- 
voir. Raphaël devint son modèle de prédilection 
et presque son idéal. Sous la direction de M. Ro- 
ques , les progrès du jeune artiste furent rapides, 
et dès lors il n'hésita plus sur sa vocation. A 
onze ans il obtint à l'Académie de Toulouse le 
grand prix de dessin et les honneurs de l'ova- 
tion du Capitole. A seize ans, M. Ingres était 
maître de son crayon, et dessinait avec une vé- 
rité et une précision peu communes. C'est alors 
qu'il vint à Paris, et, comme le patronage aca- 
démique de l'école était indispensable pour ob- 
tenir les prix qui conduisent à Rome , il entra à 
l'atelier de David, malgré de secrètes répugnances ; 
c'était, je crois, en 1796. Le peintre de Socrate, 
des Boraces et de Bé lis aire, revenu du déplo- 
rable enivrement de la terreur, reprenait ses 
pinceaux. Derrière les préceptes rigoureux et 
conventionnels du maître, derrière cette étude 
abstraite du dessin anatomique , astreint à cer- 
taines règles mathématiques , M. Ingres entre- 
voyait toujours Raphaël et sa ligne si vraie , si 
souple, si correcte dans sa grandeur. Raphaël 
pour le jeune artiste, soumis momentanément à 
la discipline de l'école régnante, c'était la na- 
ture dans toute sa grâce et sa perfection ; c'était 
presque la liberté. 

Cependant, M. Ingres, élève de David, débuta 
comme tons les artistes du temps par la repro- 
duction conventionnelle du bas-relief et de la 
statue. Achille recevant dans sa tente les dé- 
putés d'Agamemnon , et Antiochus renvoyant 
à Scipion V Africain son fils fait prisonnier 
sur mer , sont ses deux premiers tableaux. VAn- 
tiochus obtint le second prix de peinture en 
1799, et Y Achille le grand prix en 1802. On as- 
sure que Flaxman répétait que le tableau de ce dé- 
butant était ce qu'il avait vu de mieux en France. 
Quoiqu'il eût obtenu le grand prix dès 1802, 
M. Ingres ne se rendit cependant en Italie que 
vers 1804. L'Académie avait été supprimée de- 
puis 1793; et le voyage à Rome était remplacé 
par une pension de mille francs. A l'Académie de 
Rome , M. Ingres rencontra Guérin, Granger et 
Menjaud, pensionnaires comme lui, mais dont il 



875 



INGRES 



876 



se distingua aussitôt par sa manière originale. 
Ces premières velléités d'indépendance et ce re- 
tour vers la réalité se manifestent surtout dans le 
tableau d* Œdipe expliquant Fénigme, que 
M. Ingres exposa en 1808, au sortir de l'École 
de Rome. La tète de l'Œdipe se distingue essen- 
tiellement de ces types de beauté conventionnelle 
que reproduisaient tous les artistes du temps; 
aussi l'accusa-t-on de laideur et de vulgarité. 
Les nouvelles tendances de l'artiste apparaissent 
également dans le naturel parfait de la pose, dans 
la netteté du contour que l'on qualifia de séche- 
resse; elles se montrent encore dans la fermeté 
du dessin musculaire et dans cette extrême sim- , 
plieité d'exécution qui s'écartait singulièrement 
du genre gréco-fleuri de l'époque. A Rome M. In- 
gres exécuta, dans les salles du palais de Monte- 
Cavallo, des fresques dont l'histoire romaine et 
les poèmes d'Ossian avaient fourni le sujet : Le 
Triomphe de Romulus, vainqueur d*Acron , 
roi des Cédniens, vaste peinture qui a été 
exécutée en détrempe ; Le Sommeil d'Ossian ,' 
plafond peint à l'huile. Pendant son séjour en' 
Italie, outre ses peintures du palais de Monte» 
Cavallo, M. Ingres composa un certain nombre 
de tableaux , dont quelques-uns seulement nous 
sont connus. C'est de cette époque que datent La 
Chapelle Sixtine t Raphaël et la Fornarina^ 
Francesca da Rvmini, Le cardinal Bibiena 
fiançant sa nièce à Raphaël , Virgile lisant ton 
poème devant Auguste, etc. M. Ingres, à cette 
époque de sa vie , eut à soutenir une lutte pénible' 
avec le besoin , et dut faire un grand effort de vo- 
lonté pour ne pas s'écarter de cette ligne rigou- 
reuse qui ne pouvait le conduire que bien len- 
tement à la fortune et à ce qu'il ambitionnait phi» 
encore, à la gloire. M. Ingres persista; se refu- 
sant à toute concession au goût du moment , il 
entreprit de régenter ses critiques : joignant les 
œuvres à la prédication, il voulut leur montrer 
comment l'étude de la nature et l'étude de l'an- 
tique pouvaient se combiner : il composa La 
grande Odalisque. A son apparition au salon 
de 1819, ce tableau causa dans l'école alors en 
vogue une sorte de soulèvement. On cria au 
mauvais goût, à la barbarie. Landon, dans son 
Salon de Peinture de 1 819, et M. deKératry dans 
son Annuaire du même salon le condamnèrent 
sans rémission. Cependant, le coloris de L'Otfa- 
lisque doit à l'empâtement des ombres une soli- 
dité qu'on rencontre rarement dans les peintures 
de la même époque (1819), dont les ombres, 
indiquées par quelques glacis de bitume, man- 
quent de fermeté , et dont les clairs même sont 
à peine empâtés. Aussi , après moins de trente 
années, la plupart de ces tableaux se sont-Us 
désaccordés, tandis qu'au contraire le coloris de 
VOdalisque a gagné et gagnera encore, le temps 
ne pouvant qu'harmoniser des tableaux dont 
toutes les parties sont exécutées avec le même 
soin consciencieux , la même horreur de l'à-peu- 
près. 



Cette période de lutte, qui comprend près de 
quinte années, de 18tû à 1825, fut favorable au 
talent de M. Ingres; la critique a pu lui arra- 
cher des cris de douleur ou éé colère, elle ne l'a 
jamais accablé. Cette loi , qui veut que la résis- 
tance seule amène le complet déploiement des 
forces, est surtout applicable aux beaux-arts. 
Pendant la seconde partie de son séjour en Italie, 
M. Ingres, mis au ban de l'École, et que les 
commandes importantes n'allaient pas chercher, 
ne produisit guère, outre des portraits, que des 
compositions de petite dimension. La Chapelle 
Sixtine, Raphaël et la Fomarina, Francesca 
da RtoniniJLe maréchal de Berwtck, L'Arétin, 
Les deux tableaux de Henri IV, la Mort de 
Léonard de Vinci, Roger et Angélique, et 
V Entré» de Charles V â Paris, furent exécutés 
durant la période dont noue parlons. 

Vers 1824, M. Ingres, décidé à revenir en 
France voulut préparer son retour par un coup 
d'éclat. Il exposa au salon de cette année trois 
tableaux et plusieurs portraits ; l'un de ces ta- 
bleaux, Le Vœu de Louis XIII, était le plus 
important que M. Ingres eût encore composé; 
et c'est un de ses meilleurs ouvrages. L'effet fut 
grand et répondit à l'attente de l'artiste. La cri- 
tique ne désarma pas; elle accusa le peintre de 
réminiscence; c'était couvrir sa retraite : cinq ans 
plus tôt on eût crié au plagiat. La Madone de 
Saint-Sixte de Raphaël avait, disait-on, fourni 
à l'artiste le motif de sa composition. L'obser- 
vation était fondée ; mais les reproches auxquels 
elle servait de prétexte n'étaient pas mérités. 
Se pénétrer du grand sentiment do Raphaël, 
rappeler un de ses chefs-d'œuvre en restant ori- 
ginal, n'est pas un mérite si commun. Imiter 
ainsi, c'est créer. On loua généralement l'ordon- 
nance à la fois simple et majestueuse de la com- 
position, et l'on accorda même au peintre une 
qualité que jusqu'alors on lui avait refusée, le 
mérite de l'exécution. Cette composition ouvrit 
à M. Ingres les portes de l'Institut. De retour 
en France, M* Ingres, dont la foi avait grandi 
dans son exil volontaire, fut aussitôt entouré d'a- 
deptes fervents. L'époque de l'enseignement, 
nous dirions presque de l'apostolat, commençait. 
Raphaël était le dieu que révélait le disciple fidèle. 
Une gravure de la Madone de Saint-Sixte ou 
de la Tranfiguralion servait de texte à sa pré- 
dication. H fallait entendre avec quelle verve ar- 
dente et convaincue l'apôtre exaltait son dieu, et 
lançait l'anathéme contre ceux qui l'avaient ou 
méconnu ou renié. C'est vers ce temps -que 
M. Ingres peignit son Apothéose d'Homère. 
Cette composition, la plus vaste que M. Ingres 
ait produite, et ceUe que ses admirateurs procla- 
ment son chef-d'œuvre par excellence, le montre 
sous une face imprévue. La figure d'Homère, 
malgré son extrême décrépitude et son attitude 
contrainte, et, en quelque sorte , égyptienne, an- 
nonce admirablement cette forte et féconde vieil- 
lesse, commencement de l'immortalité. Les deux 



877 



INGRES 



878 



figures allégorique* de l'Iliade et de l'Odyssée, 
assises sur les degrés du sanctuaire, rappellent 
les plus heureuses inspirations de l'art grec con- 
tinué par le génie italien ; mais le coloris de leurs 
ajustements n'est-il pas d'une Vivacité par trop 
primitive? 

Vers le même temps, M. Ingres, fatigué de 
s'entendre reprocher l'imitation exclusive des 
qualités secondaires de Raphaël, conçut le «ta* 
bleau de Sain* Symphorien. Cette composition, 
où domine le style florentin dans toute sa vigou- 
reuse êpreté, rappelle, dans quelques* unes de 
ses parties , et principalement dans l'étude si ac- 
centuée des membres nus des personnages de la 
droite et dans le geste énergique de la mère du 
saint, la manière grandiose et violente de Michel- 
Ange. La saillie des muscles des bourreaux est 
extraordinaire : leur relief, poussé jusqu'à la 
dureté, et la singularité des attitudes, accusent 
un souvenir distinct de la manière du peintre 
de la chapelle Siitine. La figure du saint et par- 
ticulièrement l'expression si sublime du regard 
appartiennent entièrement à M. Ingres, et suffi- 
raient pour constituer l'originalité de l'œuvre. Il 
n'y a là ni imitation de Raphaël ni réminiscence 
de Michel-Ange. Ce regard exprime une série de 
pensées particulières de notre époque, qui, 
croyante à sa manière, a remplacé les cruelles 
superstitions du quatorzième siècle par une reli- 
gion plus consolante et plus sublime. Le tableau 
du Martyre de saint Symphorien fut exposé au 
salon de 1834. G'est le dernier ouvrage de M. In- 
gres qui ait figuré dans nos expositions annuelles. 

D'inconvenantes manifestations de la part de» 
quelques enfants perdus des écoles dissidentes, 
et, il fout le dire , la froideur et la surprise avec 
lesquelles la majeure partie du public avait ac- 
cueilli son oeuvre de prédilection , déterminèrent 
l'artiste à prendre une de ces résolutions ex- 
trêmes que dicte l'amour-propre. Grâce au ciel, 
M. Ingres ne brisa pas 6es pinceaux ; mais s'il 
continua à produire, il se refusa à cette publi- 
cité sans réserve des expositions du Louvre. En 
1835 M. Ingres se rendit à Rome comme direc- 
teur de l'Académie de France, Sa direction fut 
su itou t signalée par l'ardeur qu'il mit à rallier 
les fidèles et à les discipliner. Cette préoeen- 
l>ation un peu exclusive porta même ombrage à 
l'Institut, qui crut de son devoir de protester. 
M. Ingres laissa dire, endoctrina, catéchisa, et, 
chose singulière , ces cinq années de retraite 
et d'éloignement , de 1835 à 1840, furent aussi 
favorables aux progrès de son école que les dix 
années qu'il avait passées autrefois à Rome et à 
Florence avaient été profitables à sa renommée. 

Il nous reste maintenant à parler de M, Ingres 
comme peintre de portraits. C'est moins sa vo- 
cation que la nécessité qui l'engagea à cultiver 
cette branche si importante de l'art. A l'étran- 
ger, les grandes commandes n'arrivaient pas , 
et les petits tableaux se plaçaient difficilement. 
Faites des portraits, disaitron à l'artiste dans le 



besoin. « Mais cela est bien difficile », répondait* 
il , comme ce peintre du dernier siècle dont nous 
parle Diderot. Néanmoins , comme il fallait vi- 
vre, il luttait contre la difficulté et faisait des 
portraits. Ceux qu'il a composés dans sa pre- 
mière manière trahissent de singulières velléités 
archaïques et manquent parfois de modelé. Ceux 
qu'il a produits dans ses dernières années, et, 
dans le nombre, les portraits de M. Mole, de 
M. Berlin, de Cherubini^ en dernier lieu le por- 
trait de M** d'ffauisonvitle, sont exécutes dans 
un tout autre système et dénotent une imitation 
plus rigoureuse de la nature. 

Ici se présente cette importante question ; 
« quelle a été l'action de M. Ingres sur l'école 
française. Son influence sera-t-elle stérile ou 
féconde? » A peine revenu en France, après un 
long séjour en Italie, M. Ingres vit de nom- 
breux élèves se presser dans son atelier. La 
nouveauté de sa manière comparativement à ce 
qui se faisait alors, ses prédilections si tranchées, 
l'éloquence avec laquelle il exposait ses principes 
et combattait ses adversaires, quelque chose d'ab- 
solu et de paternel à la fois dans la façon dont 
il imposait ses croyances, et par-dessus tout cette 
foi exclusive de chef d'école, lui acquirent aussi- 
tôt une influence sans bornes sur l'esprit de la 
plupart de ses élèves. Son autorité fut d'autant 
plus grande, qu'il l'exerçait sympathiquement et 
cherchait moins à dominer qu'à convaincre. Nul 
homme, en effet, n'est plus exempt que M. Ingres 
de cette vulgaire ambition qui fait aimer la domi- 
nation pour elle-même. Le pouvoir pour lui 
n'est qu'un moyen de répandre ses doctrines. 
M. Ingres ne dit pas ; Obéissez-moi; mais : 
Croyex-moi. Et on croit en lui, et on lui obrit. 
M. Ingres n'a pas seulement des disciples, il a 
des fanatiques qui ont poussé jusqu'à leurs con- 
séquences les plus extrêmes les doctrines qu'il 
professe, et qui ont exagéré sa manière jusqu'à 
la rendre méconnaissable. Les uns ont renversé 
l'autel du divin Raphaël sous les yeux de son 
apêtre; remontant aux premières époques de 
l'art, ils ont copié Cimabué et Giotto, et se sont 
livrés à toutes sortes de folies archaïques dont 
M. Ingres lui-même doit être le premier à sou- 
rire. Les autres, péchant par excès de fidélité, 
s'en sont tenus à une imitation littérale de la 
manière du peintre d'Homère, et ont fait abné- 
gation de toute personnalité. Les plus sages , et 
dans le nombre MM. Mettez, Lehmann et 
Flandrin, ont su, en n'abdiquant pas complète- 
ment leur indépendance, dégager des leçons du 
maître des conséquences pras fécondes. 

L'influence de M. Ingres ne s'est pas seulement 
exercée dans l'atelier, et au moyen du professo- 
rat ; elle s'est rapidement étendue de proche en 
proche, et s'est surtout manifestée par les mo 
difications que la plupart des artistes ont appor- 
tées à leurs manières. Des élèves de Gros et do 
Gérard sont devenus dessinateurs , ont cherche 
la ligne précise» le modèle sculptural, et mettant 



879 



INGRES — ING-TSOUNG 



du blanc dans leurs ombres et du gris dans leurs 
lumières, ont amorti ce que leur coloris avait de 
trop diaphane on de trop ardent. Les maîtres eux- 
mêmes, tels que MM. Paul Deiaroche et Schef- 
fer, n'ont pas échappé à cette influence; fatale 
peut-être à ce dernier, elle a, sans nul doute, 
été profitable au peintre de Henri M, à' Eli- 
sabeth et de Richelieu, dont elle a évidemment 
agrandi la manière. Cette transformation est 
surtout sensible dans la vaste composition qui 
décore l'hémicycle du palais des Beaux-Arts. 
Entre le plafond d'Homère et cette peinture, qui 
en est en quelque sorte la magnifique paraphrase, 
l'analogie est frappante. L'influence de M. In- 
gres s'est également étendue sur les écoles 
étrangères. Les Allemands l'ont acceptée avec 
cette docilité bienveillante qu'ils montrent à l'é- 
gard de toute autorité légitime et non contestée; 
les Italiens, avec la passion qu'ils apportent dans 
toute chose. La jeune école italienne jure au- 
jourd'hui par M. Ingres, comme Bossi, Camuc- 
cini et Benvenuti juraient naguère par David. 

En dehors des écoles, il existe certain nombre 
d'esprits indépendants et aventureux qui tien- 
nent avant tout à leur individualité : chacun de 
ces esprits cherche à s'ouvrir une route qui lui 
soit propre. L'influence de l'illustre chef d'école 
sur ces artistes indépendants n'aura pas été si 
stérile qu'on se platt à le répéter et qu'eux-mê- 
mes le pensent; elle s'exercera négativement, 
c'est-à-dire, que, si elle ne multiplie pas les chefs- 
d'œuvre, elle empêchera beaucoup de mal. A 
la suite de tant de révolutions successives, 
quand le trouble était dans les esprits et qu'à 
la faveur de la confusion les barbares s'effor- 
çaient de pénétrer dans le sanctuaire, il est heu- 
reux qu'un homme d'un goût sûr et d'une volonté 
énergique se soit résolument décidé à leur tenir 
tête. Par les barbares , nous n'entendons pas 
désigner ces esprits vigoureux et naturels qui 
ont tenté pour le coloris une révolution analogue 
à celle que M. Ingres a opérée pour la forme. 
MM. Eugène Delacroix et Decamps, par exem- 
ple, nous paraissent, chacun dans son genre, des 
peintres d'un ordre fort relevé. La barbarie, 
pour nons , c'est la banalité facile et féconde , 
l'à-peu-près qui se satisfait à si peu de frais, la 
naïveté prétentieuse, le mauvais goût grossier, 
l'imitation aveugle etservile, en un mot la mé- 
diocrité sous toutes ses formes. Les barbares, 
comme on voit, sont bien nombreux , et M. In- 
gres aura grandement à faire pour les mettre à la 
raison. Nous sommes certain du moins que la 
volonté et le courage ne lui feront pas défaut. 

Parvenu à l'âge où tant d'autres se retirent 
de la lice par prudence ou par épuisement, 
M. Ingres a, en effet, conservé toute la verdeur 
de la jeunesse , toute l'énergie de sa volonté , 
toute la puissance de son talent , et ce même 
amour de l'art qui , dès sa première enfance , a 
été le mobile de toutes ses actions. 11 semble 
même qu'à l'exemple de certaines natures cal- 



mes et fortes, il ait réservé sa fécondité pour 
Farrière-saison. M. Ingres , en effet , dans ces 
dernières années s'est plu à multiplier ses œu- 
vres en imprimant à chacune d'elles un cachet 
de grâce, de force et de variété, toujours frappant 
et toujours nouveau. 

Nous ne pouvons même.énumérer ici tous ces 
ouvrages; nous nous contenterons de citer les 
plus éminents, tels que ['Apothéose de Napo- 
léon, pour l'hôtel de ville, cette vaste et abs- 
traite composition qui relève de l'art antique le 
plus élevé; la Jeanne d'Arc; La Vierge à 
V Hostie; la Vénus Anadyomène et La Source, 
les deux plus charmants ouvrages du maître et 
dont le dernier semble un Chant de Moschus ou 
de Théocrite; et tout récemment Molière et 
Louis XIV, et Jésus au milieu des docteurs, 
composition distinguée à laquelle l'artiste n'a 
pas mis encore la dernière main. A cette liste 
nous pourrions ajouter de nombreux portraits, 
parmi lesquels nous distinguerons ceux de 
jfme la duchesse de Broglie et de M. Ingres 
lui-même. On voit que si la nature favorise 
M. Ingres en lui ménageant une de ces vastes et 
vigoureuses vieillesses qu'elle accorda autrefois 
aux Michel-Ange, aux Titien, l'illustre artiste a 
su tirer de cette faveur un glorieux parti pour 
garder la place que depuis plus d'un tiers de 
siècle il occupe à la tête de l'école française. 
de Mercey. 

Livrets des Salons. — Documents particuliers. 

1N6-TSOCWG, empereur de la Chine, de la 
dynastie des Ming , né en 1427, mort en 1465. Il 
était fils atné de l'empereur Siouen-tsoung, au- 
quel il succéda le premier mois de l'année 1436. 
Comme il n'avait que huit ans à la mort de 
son père, l'impératrice Tchang-chi, sa grand'- 
mère, se fit déclarer régente. Toutefois, l'autorité 
passa bientôt entre les mains de l'eunuque Wang- 
tching, favori astucieux du jeune empereur, qui, 
après avoir encouru la haine de la régente, sut 
captiver l'esprit de cette princesse , et devenir 
le maître réel , sinon le chef nominal de l'em- 
pire. A la mort de l'impératrice ( 1443 ) , le jeune 
empereur se mit à la tête du gouvernement. Quant 
à l'eunuque Wang-tching, il ne perdit rien à ce 
changement; sa puissance, de nouveau reconnue, 
se maintint en dépit des murmures des grands 
et du peuple. Peu d'années après, ce même 
eunuque attira de grands malheurs à l'empereur 
Ing-tsoung et à ses sujets. Yésien (voy. ce nom), 
chef des Tartares , à la tête de troupes for- 
midables, parcourait alors les frontières de la 
Chine qu'il menaçaitde franchir. L'empereur en fut 
informé ; mais l'eunuque Wang-tching n'ayant 
point jugé convenable de tenir compte de ces 
avis, Yésien put continuer tranquillement ses 
préparatifs menaçants contre la Chine. A l'exemple 
de son père, Yésien avait envoyé (1450) de- 
mander en mariage une des filles de l'empereur; 
Wang-tching fit entendre que cette demande 
était accordée. En conséquence, le chef des Tar- 



881 



ING-TSOUNG — INGULF 



882 



ta res dépêcha une nombreuse ambassade pour of- 
frir à la cour ses présents de noces et demander 
la fille de l'empereur. Wang-tching reçut les pré- 
sents comme un tribut; et, comme l'empereur 
ignorait la promesse qu'il avait faite en son nom, 
il ne craignit point de renier sa parole et de ren- 
voyer dédaigneusement les Tartares sans leur re- 
mettre la princesse. Yésien, irrité à cette nouvelle, 
jura d'en tirer vengeance, et, dès la septième 
lune de la même année ( 1450 ), il fit invasion 
sur le territoire chinois, et parut se diriger sur 
Péking. Wang-tching engagea l'empereur Ing- 
tsoung à se mettre à la tête de l'armée destinée 
à arrêter la marche envahissante des Tartares. 
Cette armée, composée d'environ cinq cent mille 
hommes, fut bientôt décimée par la faim et les 
maladies, contre lesquelles cet eunuque ignorant 
n'avait su prendre aucune précaution. Ce misé- 
rable favori, jaloux de diriger par lui-même cette 
difficile expédition, et sourd aux représentations 
des généraux chinois les plus expérimentés , fit 
camper les troupes impérialesdans une si fâcheuse 
position, qu'elles furent investies par les Tartares, 
et perdirent tout espoir de se défendre. Attaqués 
brusquement par les forces de Yésien , les Chi- 
nois perdirent cent mille hommes , deux géné- 
raux , trois ministres et une foule d'autres man- 
darins de tous les grades. Ing-tsoung lui-même 
fut fait prisonnier et conduit dans l'intérieur de 
la Tartarie. L'impératrice mère et l'impératrice 
régnante envoyèrent tous leurs bijoux pour payer 
sa rançon : ces présents furent acceptés ; mais 
le chef des Tartares, les jugeant d'une valeur 
insuffisante pour la rançon d'un aussi illustre 
prisonnier, déclara qu'il ne serait point rendu 
à ce prix. Tchu-kien-tchin, fils de l'empereur 
captif, fut déclaré prince héréditaire; mais, 
comme il n'avait alors que deux ans, Tching- 
wang , frère puîné de Ing-tsoung fut chargé de 
gouverner par intérim. Le neuvième mois de l'an- 
née 1450, il fut proclamé empereur, sous le nom 
de King-ti, bien qu'alors Yésien offrit de rendre 
son prisonnier moyennant une nouvelle rançon. 
King-ti conserva le trône jusqu'en 1457, époque 
à laquelle il fut frappé d'une maladie mortelle 
qui devait l'emporter deux ans plus tard ( 1459). 
Ing-tsoung reprit les rênes du gouverne- 
ment ( 1458), et donna aux années de son règne 
l'épi thète de tïen-chun. Il récompensa tout d'a- 
bord ceux qui avaient travaillé à son rétablisse- 
ment, et fit charger de chaînes et emprisonner 
ceux qui lui avaient été hostiles. Plusieurs d'entre 
ces derniers perdirent la vie. Ing-tsoung mourut 
à l'âge de trente-huit ans et trois mois , laissant 
le trône à son fils Tchu-kien-chin, qui régna sous 
le nom de Hien-tsoung (1). L. Léon de Rosny. 

Sources originales : Ming-sse : Annales des Historiens 
de la Dynastie des Ming ( dans la grande Collection 
des Historiens de la Chine). — Histoire du premier 

(l) Ce prince avait déjà pris en main les affaires , à 
caunedela maladie dcson père. Cf. Ming-sse ( Collect. des 
Hist. de ta Chine), Kiouen XIf î 9 7, v°. 



Règne de Ing-tsoung (Tsien-kl), llvr. X. — Histoire de 
la Restauration de Ing-tsoung ( Heou-ki), lirr. XII. ( \x 
livre XI e renferme l'Histoire de la Chine durant la 
captivité de Ing-tsoung, sous le gouvernement de 
King-ti }. — Li-tal ti-wang nien-piao, ( Chronolo- 
gie des Empereurs de la Chine ), dynast. des Ming, 
fol. 8, v* et sq. — Toung - kien - kang-mou (Miroir 
de l'Histoire de la Chine ). — Cf. Mailla, Hist. genér. de 
la Chine, vol. X). 

*WGmOMER (Inguiomerus), prince ger- 
main , frère de Sigiraer et oncle d'Arminius, vi- 
vait au commencement de l'ère chrétienne. Il 
avait été longtemps attaché aux Romains; mais, 
après la révolte victorieuse de son neveu , il prit 
parti contre eux, et fut un des principaux chefs 
des Chérusques révoltés. Lorsque Germanicus, 
en l'an 16 après J.-C, pénétra jusque dans la 
plaine d'Idastavisus, entre le Weser ( Visurgis ) 
et les montagnes voisines , Àrminius voulait at- 
tendre la sortie des Romains hors de leur camp 
et les attaquer dans leur marche au milieu des 
marais et des bois ; Inguiomer, au contraire, fut 
d'avis d'assaillir les Romains dans leur camp. Ce 
conseil téméraire coûta cher aux Chérusques, qui 
furent complètement défaits. Inguiomer échappa 
avec peine au carnage. L'année suivante, jaloux 
de la puissance d'Arminius , il abandonna la con- 
fédération chérusque, et passa avec tous ses clients 
du côté de Marobodus , roi des Suèves. M arobo- 
dus et son nouvel allié furent vaincus par Ar- 
minius. Y. 

Tacite, Annales, I, 60; H, 17, 21, *S, 46. 

ingulf ou ingclphus, chroniqueur an- 
glais , né vers 1030, mort en 1109. Il obtint la 
faveur de Guillaume le Conquérant, qui le choisit 
pour scribe ou secrétaire. Il visita ensuite Jéru- 
salem, devint moine, puis prieur de Fontenelle, 
sous l'abbé Gerbert, et fut rappelé dans son pays 
natal par le roi Guillaume, qui le nomma abbé 
de Croyland ou Crowland, dans le comté de Lin- 
coln, à la place d'Ulfketel, privé de sa dignité par 
les Normands en 1075. Ingulf mourut après avoir 
gouverné cet ancien et célèbre monastère pendant 
près de trente-cinq ans, à une époquede troubles. 
Ces faits sont empruntés à Orderic Vital , qui 
connaissait bien l'histoire de l'abbaye de Croy- 
land, et qui parait y avoir résidé trois ans après 
la mort d' Ingulf. On peut donc les regarder 
comme certains ; mais il n'en est pas de même 
d'un récit bien plus détaillé , qui se trouve dans 
Y-Histoire du Monastère de Croyland, publiée 
sous le nom d'Ingulf. L'auteur raconte que ses 
parents étaient des bourgeois de Londres, qui 
l'envoyèrent à l'école de Westminster et de là à 
l'université d'Oxford. « Quand j'eus, dit- il, plus 
profité dans Aristote que beaucoup d'enfants de 
mon âge, j'étudiai aussi profondément le premier 
et le second livre de la Rhétorique de Tuilius. » 
A mesure qu'il grandit , Ingulf devint honteux 
de l'humble condition de ses parents, et les aban- 
donna pour fréquenter la cour, où son goût du 
luxe et de la pompe s'accrut chaque jour. Il se 
trouvait à la cour lorsque le duc Guillaume de 
Normandie vint visiter le roi d'Angleterre, eii 1051. 



8ftS 



INGULF — INGUIMBERT 



884 



Le duc emmena Ingulf en qualité de scribe , et 
lai accorda bientôt une confiance qui excita la 
jalousie des autres courtisans. En 1034, Ingulf se 
joignit à une troupe de sept mille pèlerins qui se 
rendaient en Terre Sainte. En passant à Cofts- 
tantinople il salua V empereur Alexis (Alexis ne 
monta sur le trône qu'en 1081 ) ; et, après avoir 
été attaqué et pillé en Lycie, il arriva à Jérusalem, 
où il fut recueilli par le patriarche Sophronius. 
De retour en Normandie, il devint moine de Fon- 
tanelle. Ce récit fait partie, comme nous l'avons 
dit, d'une Histoire du Monastère de Croyland. 
Henry Wharton, Hicks et d'autres critiques 
avaient déjà émis des doutes sur l'authenticité 
de oc document, lorsque sir Francis Palgrave dé- 
montra que la prétendue Histoire de Croyland 
était une aorte de fiction historique, an histo- 
rical novéty composée par quelque moine au 
troisième ou au quatorzième siècle. On y trouve 
beaucoup de faits intéressants et probablement 
vrais , mais elle contient aussi un grand nombre 
de chartes évidemment fabriquées , d'erreurs et 
d'anachronisme*. La vie dlngulf est une amplifi- 
cation malheureuse du récit d'Orderic Vital , et 
les détails de son éducation se rapportent au trei- 
zième et au quatorzième siècle beaucoup plus 
qu'au onzième. Nous avons déjà signalé l'ana- 
chronjame relatif à l'empereur Alexis : Ingulf ne 
l'eût point commis; mais un compilateur, voyant 
les noms de l'empereur Alexis dans tous les ré- 
cits de la première croisade, a imaginé de faire 
intervenir ce prince dans le pèlerinage dlngulf. 
Enfin ni Orderic Vital, qui avait visité Croyland, 
et qui recherchait avec soin les documents his- 
toriques, ni Guillaume de Croyland, qui, dans sa 
Vie du comte Waltheof, mentionne plusieurs 
fois Ingulf, ne parlent de cette histoire de Croy- 
land. il parait donc prouvé qu'elle fut rédigée 
longtemps après le onzième siècle ( au treizième ou 
au quatorzième), bien qu'elle contienne peut-être 
des passages écrits par Ingulf .lui-môme. Il y est 
question d'une Vie de saint Guthlac par Ingulf, 
laquelle n'est mentionnée nulle part ailleurs, et 
dont on ne connaît aucun manuscrit. VHistoria 
Monasterii Croylandensis fut publiée pour la 
première fois, mais incomplètement, dans les Re~ 
rum Anglioarum Scriptorespost Bedam pra* 
cipui désir Henri Savile, Londres, 1596, in-fol., 
Francfort, 1601, in-fol., p. 850-916; elle fut pu- 
bliée entièrement et avec la continuation de Pierre 
de Bkris dans le Rerum Anglicarum Scripto- 
rum veterum Tomus prknus, de Gale , Oxford, 
1384, in-fol., p. 1-107. Une traduction anglaise 
de V Histoire attribuée à Ingulf et de la conti- 
nuation de Pierre de Blois par T.-H. Riley forme 
un volume de VAntiquarian IÀbrary de Bonn. 

Z. 

Orderic Vtttl , BOtoria Itettt., i. IV, p. 187-s»», de 
i'édlt. Le Prévost - Guillaume de Croyland, Fit a et 
Passio tPaldêvi comtois ; dans les Chroniques Jnglo- 
Normandes, vol. ri, p. 101, 118, 4M. — H. Wbatton, 
Origines Sritannicœ. - Francis Palgrave, dans le Quar- 
Lerly Jievicw, juin 1826, n° 67, u° stf. — Lappenberg, 



Gesehickts von EnjUrnd, t r», p. Ltttl, LT1V. - Bn~ 
QUskCyelojméUUBiôçraphth 

îNGUlMBERt (Le P. Joseph d' ), connu aussi 
sous le nom de doin MalacMe, prélat français, 
né à Carpentras, le 2e août 1683, mort dans 
cette ville, le 6 septembre 175?» Âpres avoir ter- 
miné ses humanités au collège des jésuites de 
Carpentras, il prit en 1698 l'habit de dominicain, 
passa à Rome» et devint professeur de théologie 
à Pise. Son noviciat terminé, il fut envoyé par 
ses supérieurs à Aix en Provence. Bientôt , en- 
traîné par son goût vers la vie solitaire, il em- 
brassa la réforme de ta Trappe, introduite dans 
l'abbaye de Notre-Dame di buon Sollazzo, située 
à quelques lieues de Florence. Il prit en entrant 
dans cette maison le nom de dom Matachie, qu'A 
a continué à porter depuis. Malgré la règle, il 
fut autorisé à s'occuper de travaux de cabinet , 
et il v composa quelques ouvrages ascétiques qui 
l'obligèrent d'aller quelquefois à Florence, sur- 
tout pour y consulter les dépôts littéraires et 
les savants. L'évéque de Pistoie l'établit pendant 
quelque temps supérieur de son séminaire. Plus 
tord , le cardinal-camerlingue Annibal Albani , 
neveu de Clément XI, ayant demandé au grand- 
duc des religieux de 1 abbaye di buon Sollazzo, 
pour introduire la réforme dans celte de Caza- 
mari , Inguimbert fut choisi pour être le chef 
de cette pieuse colonie. Le pape t'appela deux 
fois auprès de sa personne pour prendre des con- 
seils sur les affaires qui agitaient alors l'Église 
de France. Après la mort de Clément XI (1721), 
il fut chargé par Albani d'écrire la vie de ce 
pontife, et, pour cet objet, reçut la permission 
de se fixer à Rome , en Conservant le titre et 
la pension de théologien que lui faisait le grand- 
duc. Mais, au bout de six ans, la mésintelligence 
qui se mit entre le cardinal et lui l'empêcha de 
terminer la tâche qu'il avait entreprise. Albani 
t'accusait d'avoir communiqué à la cour de 
France et au P. Quesnel des pièces relatives à 
la bulle Vnigenitus ; il lui fit donner l'ordre de 
retourner sur-le-champ à son monastère. Toute- 
fois, Inguimbert trouva de puissants protecteurs 
auprès de Benoit XQl ; la princesse de Piombino 
le fit placer chez le cardinal Corsini, qui l'admit 
dans son palais et le nomma son bibliothécaire 
(1727). Il dressa le catalogue de sa riche col- 
lection de livres, qu'il contribua à rendre pu- 
blique à Rome. Ce prélat, élevé à la papauté en 
1730, sous le nom de Clément XII, lui accorda 
les plus amples privilèges ; il le fit consulteur 
du saint-office et prélat domestique, lui donna 
plusieurs bénéfices et l'archevêché titulaire de 
Théodosie. Enfin, dom Malachie devint, vers 
la fin de ses jours , évêque de Carpentras, sa 
ville natale. C'est lut qui fit construire l'hôpital 
de Carpentras. Ayant acheté, au prix de 40,000 
livres, la précieuse bibliothèque du président-de 
Mazaugues, il en dota sa ville natale, en l'aug- 
mentant de 4,000 volumes qu'il avait rapportés 
de Rome, et il consacra les revenus d'un capi- 



885 INGUIMBERT 

tal de 60 t ooo fr. à l'entretien de cette biblio- 
thèque(t). Ses principaux ouvrages sont : mcolai 
Baccettii, Florentini,ex ordine Cisterciensi, 
abbatis SepUmianx Historié libri VIU, avec 
préface, note* et observations j Rome, 1724, 
in-8* i ~ Vita d% D. Armando-Giovanni le 
Bouthilier di Rance , abbate regolare e rç~ 
formatore del monastero délia Trappa 9 etc. ; 
Rome, 17*6, 2 vol. in-4» : la bibliothèque de 
Garpentras possède un manuscrit non autographe 
de cet ouvrage; — la Teologia del Chiostro, 
overo la santUà e la obligations délia vita 
monastiWt etc.; Rome, 1731, 3 vol, in-folio ; — 
Trattato teologico delV Autorita ed Jn/ailli- 
bila del Papi, etc.; Rome, 1731» in-fol., avec 
le portrait du pape Clément XJi, La bibliothèque 
Corsini , à Rome , possède plusieurs manuscrits 
d'inguimbert, entre autres la Vie de Clément XI 
Gitïot de Fèrb. 

Olivier vlUlto, Xotice Histor. sur la Fie de MalacMe 
d'inguimbert; Carpentras, 181», in-V», avec le portrait 
de ce prélat. — Annuaire de Faucluse, ISS*. — Mil- 
lin, Voyage dans te Midi de la France, — BarJaTol, 
Dictionnaire Mstor- de Faueluse, 

imGO(Jean Collet, plus connu sous le nom 
d'), graveur anglais, d'origine espagnole, né 
vers 1720, mort à Londres en 1780. On n'a pas 
de détails sur sa vie, mais on connaît de lui deux 
gravures très*remarquables dans le genre d'Ho- 
garth et de Cailot, savoir : Antiquarian Smsl- 
ling to the chamberpot of gueen Boadicea ; 
— A Monkey pointing to a very dark Gicture 
of Moses stricking the rock. On s'étonne qu'un 
artiste capable de deux ouvrages aussi distin- 
gués n'en ait pas fait un plus grand nombre. 

z. 

Strutt, Biographical Dictionary of Ençraven, 

INNB8 ou innés (Louis), historien écossais, 
vivait dans le dix-septième siècle. Issu d'une 
noble famille d'Ecosse, il fut élevé en France, 
entra dans les ordres, et devint principal du 
collège des Écossais. Jacques II, roi d'Angleterre, 
se réfugia en France après la révolution de 1688 ; 
il choisit Innés pour secrétaire, et le nomma 
aumônier de sa femme , la reine Marie.. Barbier 
attribue à Innés les Mémoires de Jacques II 
qui furent publiés par le docteur Clarke, Lon- 
dres, 1816,2 vol. in-4° ; il donna sur ce curieux ou- 
vrage les renseignements suivants ; « Le cheva- 
lier de Saint-Georges, fils de Jacques II, l'a revu 
et corrigé. Toutes les phrases que Ton y trouve 
en lettres italiques sont de son écriture. Cet 
ouvrage, formant quatre volumes, a été soigeuse- 
ment conservé par tous les princes de la famille 
des Stuarts, jusqu'à ce que la mort du dernier 
d'entre eux le fit tomber dans les mains de sa 
femme, la comtesse d'Albany. Celle-ci en mou- 
rant le légua à l'abbé Waters, procureur général 



(1) Une délibération du eonseil municipal, en 1833, a 
donné le non d'inguimbert a une nouvelle place de la 
ville. Son portrait est placé dans une des salles de l'hô- 
pital qu'il a fondé, et une copie orne la salle du con- 
seil de l'hôtel de ville. 



— INNOCENT 



886 



des bénédictins anglais à Rome , lequel le céda 
au prince régent d'Angleterre (depuis Georges IV), 
pour une pension. Le manuscrit fut remis au 
docteur Clarke, qui le fit imprimer après un tra- 
vail de plusieurs années. » — Ces Mémoires sont 
précieux parce qu'ils sont extraits des papiers 
de Jacques II , collection fort intéressante que 
oe prince avait déposée au collège des Écossais, 
et qui fut détruite pendant la révolution française ; 
ils ont été traduits en français par Cohen; Paris, 
4 vol, in-$°. Z, 

Barbier, Examen critique des Dictionnaires histori- 
ques. 

1NNBS ou innés (Thomas), historien écos- 
sais, frère du précédent, né en 1662, mort le 
9 février 1744. Il fil: ses études au collège 
de Navarre, embrassa l'état ecclésiastique, et 
remplaça son frère dans les fonctions de prin- 
cipal du collège des Écossais. Malgré quelques 
persécutions que lui attirèrent ses opinions jan- 
sénistes , il resta jusqu'à sa mort à la tète de 
cet établissement. On a de lui ! A oritical Essay 
on the andent Inhabitant» of the northern 
parts of Britain; Londres, 1729 , 2 vol.in-8° , 
ouvrage dans lequel il réfute les assertions de 
la Chronique de Fordun relatives à l'histoire 
ancienne de l'Ecosse. Z. 

Barbier, Examen critique des Dictionnaires historié 
ques. ~ Journal des Savants, année m*, ~ Rose, Gen 
Biographical Dictionary. 

innocent 1 er (Saint), quarante-deuxième 
pape, successeur d'Anastase I* r , né à Albano, près 
de Rome, élu le 27 avril 402, mort le 12 mars 
417 (le 28 juillet, suivant Baronius ). Saint Jean- 
Chrysostoroe venait d'être chassé de Constan- 
tinople ; son zèle contre l'arianisme , ses atta- 
ques contre l'impératrice Eudoxie l'avaient fait 
exiler en Bifhynie, Innocent I er prit hautement 
sa défense; il voulut d'ahord renvoyer l'examen 
de cette affaire à un concile où seraient réunis les 
évéques d'Orient et d'Occident ; il chercha ensuite 
à négocier avec l'empereur, mais ses députés 
furent maltraités et durent regagner l'Italie sans 
avoir rien obtenu. Saint Jean - Chrysostome 
mourut sur ces entrefaites ; sa mort ne termina 
pas cette lutte entre les églises d'Orient et (^Oc- 
cident ; Innocent résolut de n'avoir avec Cons- 
tantinople aucun rapport tant que la mémoire 
du saint n'aurait pas été réhabilitée. Mais l'Oc- 
cident lui-même était loin d'être tranquille : en 
Afrique l'Église était divisée par la secte des 
donatistes : le concile de Carthage ( 23 août 405) 
les condamne; à Rome le savant Vigilance se 
déclare énergiqUement contre les abus introduits 
dans la religion ; il blâme le célibat ecclésiastique, 
le culte des reliques et la vie monastique. 
Mais une terrible nouvelle vient étouffer cette 
voix : Alaric, à la tête des Goths, s'avançait sur 
Rome. Les chrétiens effrayés courent dans les 
temples implorer la protection du ciel, et In- 
nocent accorde aux païens l'autorisation d'offrir 
des sacrifices à leurs dieux. Prières et sacrifices 
furent inutiles; il fallut négocier avec Alaric, et 



887 



INNOCENT 



le pape, pour payer la rançon de Rome, ordonna 
de dépouiller les temples de ees idoles qui s'é- 
taient montrées sourdes anx prières, et de fondre 
toutes les statues d'or et d'argent. Le roi des 
Goths consent donc à lever le siège; il gagne 
Rimini pour être plus à même de régler avec 
l'empereur les conditions de la paix ; mais ils ne 
parviennent point à s'entendre. Innocent se rend 
lui-même à Ravenne, auprès d'Honorius. Alaric 
revient sur Rome, s'en empare ( 24 août 410), 
et la livre au pillage; l'année suivante cette ville 
est pillée une seconde fois par Astolffe, beau-frère 
d'Alaric. Quand l'ennemi a disparu, Innocent 
revient; il trouve les chrétiens désolés et réduits 
à la plus affreuse misère ; il s'efforce de calmer 
leurs maux. Son zèle le fit chérir des Romains, 
et rapprocha du christianisme beaucoup d'ido- 
lâtres. Les dernières années de son pontificat s'é- 
coulèrent sans trouble, et ne furent marquées que 
par la condamnation du pélagianisme, qui niait 
la doctrine du péché originel, la corruption de 
la nature humaine et la nécessité de la grâce. 
Condamné à Rome par Innocent, Pelage passe 
en Palestine, où il justifie sa doctrine devant le 
concile de Diospolis (415 ), qui l'absout.; il est 
de nouveau anathématisé par le concile de 
Carthage ( 416) et par celui de Milène ( 417 ) au- 
quel Innocent, consulté par saint Augustin, en- 
voie trois lettres dirigées contre le pélagianisme. 
Innocent se montra toujours fort jaloux de la 
grandeur de l'Église et fort attaché à ses droits; 
il écrivait facilement, mais son style est loin 
d'être un modèle d'élégance. Les Conciles de 
Labbe, t. II, p. 1245 à 1308, contiennent trente 
lettres de ce pape. Gennadio , De Scriptoribus 
Ecclesiasticis, chap. III, lui attribue : Decretum 
occidentalium et orient aliumeccles us adver- 
sus pelagianos datum, qui fut publié par 
Zosime I er , successeur d'Innocent. 

Alfred Franklin. 
Zosime, Histoire Romaine, livre V, trad. da président 
Cousin, In-*», p. 918. - Brays , Histoire des Papes, 1735, 
6 v. in-4» ; t. I e ', p. 160. — Labbe et Cossart, Sacrosancta 
Concilia, 1671» 15 v. in -fol ; t. II, p. 12*1 à 1588. — Ba- 
ronius, Annales Ecclesiasticœ , 17S«, 9 v. in-fol.; t. VI, 
p. 401 à 681: VII, l à 95. - Fleury, Histoire Ecclésiastique, 
1787, 87 v. in-*°; llv. V, en. u. — Voulus , Histor. Pe- 
lag., passlm. — Sozomene, Histoire Ecclésiast., trad. 
Cousin, I. vin, en. 36. — H. de Norls ( Norlslus ), Histoire 
du Pélagianisme. - Alletz, Hist. des Papes , 1778, s t. 
in-is ; t. I er , p. 96. - Anastase le Bibliothécaire, Vite 
Roman. Pontificunij Rome, 1718, k y. in-fol.; t. I« r , p. î78. 
- Ciaconlus, F.itœ et ResgestssPonti/tcum Romanorum, 
Rome, 1718, k v. In-fol. ; t: I er , p. 68. 

innocent il (Grégoire), cent soixante- 
dixième pape , successeur d'Honorius H, né à 
Rome, élu le 14 février 1130, mort le 13 
septembre 1143. Pour prévenir les désordres 
qui accompagnaient les élections , tous les car- 
dinaux s'étaient engagés à s'assembler dans 
l'église Saint -Marc , pour nommer un nouveau 
pape, dès que la mort d'Honorius serait connue. 
Honorius meurt ; les cardinaux qui l'approchaient 
de plus près cachent cette nouvelle, se réunis- 
sent à Saint-Jean-de-Latran, et élisent Grégoire 



qui prend le nom d'Innocent II. Le soir même, 
les autres oardinaux se rendent, suivant leur 
convention, à Saint-Marc, et nomment Pierre de 
Léon, qui Ait appelé Anaclet. Grégoire avait été 
moine à Saint-Jean-de-Latran, puis abbé du 
monastère de Saint- Nicolas ; Urbain II l'avait fait 
cardinal et Calixte II l'avait envoyé comme 
légat en France (1124) avec Pierre de Léon. 
Celui-ci était le petit -fils d'un juif converti 
par Léon IX, qui lui avait donné son nom; il 
avait étudié à Paris ; Pascal II l'avait rappelé à 
Rome et nommé cardinal. Grégoire jouissait de 
l'estime générale ; il était affable, doux, éloquent, 
et dix-sept cardinaux avaient concouru à son 
élection. Pierre avait , au contraire , mené, pen- 
dant son séjour en France, une vie scandaleuse; 
suivant Arnoul de Lisieux (t. II, p. 336), il eut 
des enfants de sa propre soeur. Mais il possédait 
d'immenses richesses, et gagna le peuple romain 
par ses libéralités. Innocent et les cardinaux de 
son parti durent se réfugier dans les maisons 
fortifiées des Frangipani,et bientôt après quitter 
Rome. Les négociations commencèrent et n'a- 
boutirent à rien. Anaclet écrit de tous côtés 
pour soutenir ses droits ; sa lettre à Lothaire, 
roi des Romains, est contresignée par vingt-sept 
cardinaux ; celle qu'il adresse au roi de France 
( Louis VI ) est portée par le légat Otton , qui 
a ordre de respecter tous les principes de l'Église 
gallicane. L'Orient reste indécis entre les deux 
papes; mais l'Italie entière reconnaît Anaclet. 
Innocent, de son côté, avait traversé Pise et la 
Toscane, la Provence et l'Auvergne , et s'était 
réfugié chez les moines de Cluny. Pendant ce 
voyage, Louis le Gros avait réuni un concile à 
Étampes, et saint Bernard, choisi comme 
arbitre, s'était déclaré en faveur d'Innocent. Le 
roi vint donc jusqu'à Saint-Benoît-sur-Loire au- 
devant du pape, se prosterna à ses pieds, et lui 
offrit ses services pour lui et pour l'Église. Pen- 
dant que saint Bernard en Angleterre et Gauthier 
de Ravenne en Allemagne font reconnaître In- 
nocent , celui-ci parcourt la France, visitant les 
monastères. Le 19 avril 1131, il était à Saint- 
Denis, où il célébra la fête de Pâques avec la 
plus grande magnificence. L'abbé Suger vint au- 
devant de lui; le pape, monté sur un cheval 
blanc richement caparaçonné, était coiffé d'une 
tiare brodée et ornée d'un cercle d'or ; les barons 
et les vassaux de l'abbaye marchaient autour 
du pontife ; les nobles précédaient le cortège, 
et écartaient le peuple en lui jetant de l'argent 
Innocent passa en France toute l'année 1 131 ; 
les monastères qu'il visitait subvenaient à ses 
besoins , de gré ou de force d'ailleurs. Brors 
(t. II, p. 636) l'accuse d'avoir ravagé les plus 
riches églises de France ; car le pape ne pouvait 
rien tirer alors des revenus du saint-siége. Le 
18 octobre, il convoque à Reims un concile, où il 
fait approuver son élection, et excommunie 
Anaclet ; il célèbre à Cluny la fête de la Purifi- 
cation, et y reçoit les lettres d'obédience de 



889 



INNOCENT 



890 



Guillaume, patriarche de Jérusalem. Il reprend 
enfin, accompagné de saint Bernard, la route 
d'Italie, traverse la Lombardie, tient un concile 
à Plaisance , et réconcilie les Pisans et les Génois 
(bulle du 19 mars 1133, dans Ughelli , t. IV, 
p. 1 187 ). Le roi Lothaire vient le rejoindre à la 
iôte d'une armée; ils marchent sur Rome et y 
entrent le 1 er mai 1133. Lothaire reçoit des mains 
d'Innocent la couronne impériale à Saint- Jean- 
de-Latran ( 4 juin 1133 ). Anaclet était maître 
de l'église Saint-Pierre, du château Saint- Ange 
et de quelques forteresses d'où il maltraitait la 
petite armée de son rival. Lothaire dut retourner 
en Allemagne. Innocent, ne se croyant plus en 
sûreté dans Rome, se retira à pise ; là il as- 
sembla un concile, où Pierre de Léon fut encore 
excommunié. Lothaire repassa les Alpes avec 
une nombreuse armée , et saint Bernard entre- 
prit un nouveau voyage en Italie. Lothaire prit 
plusieurs villes sur Roger, protecteur de l'anti- 
pape , pendant que saint Bernard cherchait à ga- 
gner des défenseurs à la cause d'Innocent. Ana- 
clet meurt sur ces entrefaites (7 janvier 1138); 
les cardinaux de son parti élisent , au mois de 
mars suivant, Grégoire, prêtre-cardinal, qu'ils 
nomment Victor; leur intention était d'ailleurs 
moins de perpétuer le schisme que de gagner 
du temps pour se réconcilier plus avantageuse- 
ment avec Innocent. Aussi, deux mois après 
son élection, Victor alta se jeter aux pieds du pape, 
et le schisme fut terminé le 29 mai 1138. In- 
nocent reprit toute l'autorité dans Rome; il 
rétablit le culte , fit faire des processions solen- 
nelles, repeupla les colonies désertes et rappela 
les exilés. Enfin le 8 avril 1 139 s'ouvrit le concile 
général de Latran (deuxième deLatran, dixième 
oecuménique) ; plus de mille évéques s'y trou-* 
Taient. Les ordinations faites par Pierre de Léon et 
les autres schismatiques furent déclarées nulles ; 
puislnnocent appela chacun des évêques ordonnés 
pendant le schisme, et, après leur avoir reproché 
leur conduite avec indignation, il leur arracha 
la crosse, l'anneau et le paJlium. Saint Bernard 
blâma cet excès de rigueur, surtout envers 
Pierre de Pise, à qui le pape avait déjà pardonné. 
Roger, roi de Sicile, apprend que le concile Ta 
excommunié ; il arrive à Saleme le 7 mai, et 
soumet toute la Pouille. Innocent veut résister : 
il est fait prisonnier, et doit, en échange de la 
liberté, accorder la Sicile à Roger, confirmant 
ainsi le titre donné par Anaclet. Saint Bernard 
avait regagné la France; jaloux des succès d'A- 
beilard , il saisit avec empressement l'occasion 
qui se présenta de l'accuser d'hérésie. Au con- 
cile de Sens (2 juin 1140), en présence du roi de 
France et d'un grand nombre de prélats , il dé- 
nonce comme hérétiques treize propositions 
extraites des ouvrages d'Abeilard. Celui-ci en 
appelle au saint-siége, qui, circonvenu par saint 
Bernard, condamne l'accusé sans l'entendre. 
L'année suivante ( 1 141 ), Albéric, archevêque de 
Bourges, meurt ; Innocent le remplace par Pierre 



de La Châtre. Louis Je Jeune, irrité de cette no- 
mination, jure que, lui vivant, Pierre ne sera ja- 
mais archevêque de Bourges. Pierre va à Rome et 
se fait sacrer par le pape, qui met toute la Fiance 
en interdit. Thibaud , comte de Champagne , 
prend parti pour le nouvel évêque; le roi porte la 
guerre en Champagne et brûle Vitry-le-Français. 
Saint Bernard se chargea de négocier la récon- 
ciliation entre le roi et le pape ; le saint avait 
perdu déjà beaucoup de son influence au- 
près d'Innocent, qui ne pouvait lui pardonner 
de se mêler à toutes les affaires de l'Église et 
de parler trop souvent en maître. L'Italie n'était 
pas tranquille : Innocent avait depuis longtemps 
excommunié les Tiburtinset tenait leur ville as- 
siégée ; il les contraignit enfin ( 1 143 ) à se rendre, 
et leur pardonna. (Mais les Romains, souvent 
battus par eux, exigèrent que le pape fit abattre 
leurs muraiHes. innocent refuse ; les Romains 
s'assemblent au Capitole, rétablissent le sénat 
et commencent la guerre. Le pape ne put sup- 
porter cette dernière épreuve, il tomba malade 
et mourut après un pontificat de treize ans et 
sept mois. On trouve quarante-trois lettres d'In- 
nocent dans les Conciles de Labbe, t. X, p. 946 
à 971 ; Ughelli en a reproduit une, dans son Ita- 
lia Sacra, t. IV, p. 456. Innocent II eut Céles- 
tin II pour successeur. Alfred Franklin. 

Labbe, t. X, p. 944 à 1084. — Bruys, t. il, p. 627. - 
Baronius.t. XVIII, p. 417 à 614. - Fleury, liv. XIV, 
ch. 68. — AUetz, t. !•', p. 48S. — Ughelli, Italia Sacra; 
Venise, 17n-M,10v. in-fol.; t. IV, p. 4M- Velly, Villaret 
et Garnier, Histoire de France, 1770 , 15 v. in -4» ; t. II , 
p. 18. — PlaUna, lstoria délie Vite de i S uni mi Ponteflci , 
Venise, 1613, in-4», p. 146. — De Potier, Esprit de 
V Eglise; Paris, 1811. 8 v. in-8»; t. VI, p. 114. — Ar- 
taud de Montor, Histoire des Souv. Pontifes romains; 
1847-49, 8 y. to-8° ; t. II, p. 164. — A. du Chesne, Hist. 
des Papes , 1683 , l v. in-fol. ; t II, p. 94. — D. Dclannes. 
Hist. du Pontificat d'Innocent II ; 1781, in-li. — Suger, 
V ie de Louis le Gros, — De ViUefore, Vie de saint Ber- 
nard. — Ciaconius, t. 1 er , p. 971. — Arnulphus Lexiovlen- 
sis ( Arnoul de Lisieux ), Tractatus de Schismate orto 
pott Honorii il papa decessum ; dans le Spicilëge 
d'Acbéry, 1687, io-4»; t. H, p. 336. — Vita Innocenta 
papa il ex ms Bern. Guidonis ; Vita ejusdem ex car- 
dinall Aragonio , dans Muratorl, Rerum ltalicarum 
Scriptores , Milan, 1738, 17 v. in-fol. ; t. 111 , p. 433 et a. 
— J. Hartmann, Vita Innocenta II, pont\ficis romani ; 
1744, in- 4°. 

innocent m, cent soixante-onzième pape, 
né à Rome, vers Fan 1160, mort à Pérouse, le 
16 juillet 1216. Son père, qui se nommait le comte 
Trasmondo, appartenait à l'illustre maison des 
Conti ; Claricia, sa mère, était de celle des Scotti. 
Il reçut en naissant, sur les fonts baptismaux, le 
nom de Lothaire. Dès sa jeunesse, Lothaire fut 
voué à l'église. Trois de ses proches parents 
étaient cardinaux, et quoique l'Église romaine ait 
toujours condamné le népotisme, il n'a jamais été 
tout à fait indifférent, dans l'Église romaine, d'être 
ou de n'être pas bien parenté : les principes ont 
leurs droits , mais la faiblesse humaine a les siens. 
Il n'y avait pas, vers la fin du douzième siècle, 
une autre école de théologie que celle de Paris. En- 
voyé dans cette ville, Lothaire y eut pour maître 
Pierre de Corbeil, pour condisciple Robert de 



801 



INNOCENT 



892 



Courçon. On le vit ensuite étudier le droit ca- 
nonique à l'école de Bologne. Ses études ache- 
vées, ii revint à Rome. C'est alors que son onde 
maternel, Paulin Scolaro, fut élevé sur le trône 
pontifical, sons le nom de Clément ni, le 20 dé* 
cembre 1187. Quelques années après, en 1190, 
Clément nomma Lothaire cardinal ^diacre, an 
titre de Saint-Serge et de Saint-Baccb. Ce fut, 
pendant longtemps, le pins jeune des cardinaux. 
Si Clément l'avait appelé trop tôt à une aussi 
haute dignité , et avait confié de trop graves af- 
faires à son active inexpérience, Célestin III, 
succédant à Clément m, l'éloigna trop da ses 
conseils : Lothaire se sentit offensé par cette 
marque de défiance, quitta Rome, se retira dans 
une terre de sa famille , à Anagni, et composa 
dans cette retraite un traité : De Contemplu 
Mundi, sive de miseriis humanx condilionis. 
Célestin m mourut le 8 janvier 1198. Le jour 
même de sa mort, les cardinaux réunis lui don- 
nèrent Lothaire pour successeur. 11 prit alors le 
nom d'Innocent III. 

Le pontificat d'Innocent III a été la matière 
de déclamations contradictoires. Tous les histo- 
riens se sont accordés à louer les qualités de 
l'homme, l'austérité de ses mœurs , sa vigilance 
assidue , sa constante sérénité , la rare fermeté 
de son caractère, et son goût passionné pour 
la grandeur. Mais on a diversement apprécié 
l'usage qu'il a fait de ces brillantes qualités. Il a 
été pour les uns l'héroïque vengeur de tous les 
droits méconnus; pour les autres, un ambitieux 
sans frein, un effronté violateur de tous les 
pactes. En d'autres termes, les jugements que 
les historiens ont portés sur Innocent III ont 
varié selon leurs sentiments favorables ou con- 
traires à la papauté. Le temps n'est-il donc pas 
enfin venu de juger avec un parfait désintéres- 
sement le rôle joué par la papauté durant le 
moyen âge ? Nous n'éprouvons, ponr notre part, 
aucun embarras à concilier ces deux opinions : 
Tune, que les peuples ne doivent aujourd'hui 
tolérer en aucune manière l'intervention du pape 
dans le règlement de leurs affaires civiles; 
l'autre, que les papes furent vraiment au moyen 
âge, en présence de tant d'empereurs, de rois, 
d'exarques, de princes, de seigneurs, d'usur- 
pateurs ou de tyrans barbares, les organes tem- 
poraires de l'éternelle justice. Qu'on se soulève 
contre des prétentions posthumes, soit! Mais, 
d'autre part, qu'on accorde le témoignage d'une 
équitable reconnaissance aux. grands papes qui 
ont été pour les peuples opprimés de si se- 
courantes patrons. Les plus grands ne se sont 
pas toujours , il est vrai , montrés assez mo- 
destes. L'orgueil est le vice commun des hom- 
mes. Mats encore ont-ils eu moins d'orgueil que 
d'ambition, et l'ambition est un sentiment qui 
n'est jamais sans noblesse. Il y a d'ailleurs beau- 
coup à dire pour excuser l'ambition des papes. 
Us n'auraient pu sans doute exercer efficacement 
leur bienfaisant patronage, si la papauté, telle- 



ment faible à son origine, alors pourvue par des 
décrets équivoques d'une autorité tellement pré- 
caire, n'avait pas avec le temps acquis assez de 
force pour faire valoir sa juridiction, et créer au 
moins des difficultés à ceux qui prétendaient s'y 
soustraire. Condamnons donc librement, même 
au moyen âge, les mauvais papes, ceux qui 
n'ont été que des turbulents et ont invoqué de 
grands principes pour servir de médiocres inté- 
rêts; mais ayons de l'indulgence même pour les 
faiblesses des ambitieux qui , avec plus d'intelli- 
gence et de droiture, ont travaillé de si grand 
cœur à l'accroissement de l'autorité qu'ils ont 
ensuite vaillamment exercée. Innocent III fut 
un de ceux-ci. Qu'il ait eu de l'ambition, cela 
n'est pat contestable : n'est-il permis qu'aux 
fils des rois d'aspirer a l'éclat d'une grande re- 
nommée ? 11 se trompa quelquefois, et ne servit 
pas toujours la meilleure cause. Ce sont de re- 
grettables erreurs; mais que l'on trouve dans 
son temps un prince animé d'intentions plus 
loyales que les siennes, plus habile à discerner 
le bien du mai et moins souvent abusé par son 
intérêt personnel. Il ne reconnut pas de bornes 
à l'exercice de son influence, et prétendit donner 
son avis sur tontes les affaires agitées dans le 
monde chrétien; mais nous sommes à la fin du 
douzième siècle : tous les rois chrétiens sont 
des rois absolus; on ne peut leur parler de jus- 
tice sans invoquer les prescriptions de la justice 
divine ; et qni a ee droit, si ce n'est le pape ? Re- 
marquons, d'ailleurs, qu'en montant sur le trône 
pontifical, il voit, partout où se promènent ses 
regards, l'anarchie, la guerre, tous les princes, 
tous les peuples armés , les plaines , les villes 
dévastées par mille incendies, et qu'il ne va 
prétendre à cette universelle influence qu'au 
preât dea nations impitoyablement traitées par 
leurs maîtres, au profit de la paix. 

Il y avait de grands désordres dans l'adminis- 
tration temporelle de la ville de Rome et de grands 
abus dans la comptabilité fiscale de la cour romaine. 
C'est par là que le nouveau pape commence ses 
réformes. Avant d'entreprendre la correction des 
autres, il faut se corriger soi-même. Cette mé- 
thode est à tous les points de vue la meilleure. 
Qui s'est montré d'abord sévère pour ses propres 
vices, sera mieux écouté faisant ensuite des re- 
montrances à son prochain. De Rome la sollici- 
tude d'Innocent II î se porte bientôt sur la pro- 
vince romaine , de la province romaine sur les 
villes italiennes, arrachées en divers temps an 
domaine de saint Pierre, et possédées sans titre 
par des vassaux de l'Empire , la plupart alle- 
mands. Innocent commande à ces étrangers de 
quitter le territoire latin , écrase ceux qui refu- 
sent, déjoue les ruses de ceux qui diffèrent d'o- 
béir, et repousse même hautement les obsé- 
quieuses soumissions de ceux qui offrent de l'or, 
demandant qu'on veuille bien à ce prix agréer 
leurs hommages. La première année de son pon- 
tificat n'était pas achevée, qu'Innocent III avait 



S93 



INNOCENT 



mi 



recoovré dans les marches Ancône , Fermo, Fano, 
Osimo, Sinigaglia, Jesi , Cesena ; dans le duché 
de Spolette, Assise, Spolette, Rieti, Foligno, 
RucerajTodi; et, en outre, Sabine, Pérouse, 
tout ie comté de Bénévent* Enfin, mettant a pro- 
fit les embarras où se trouvait Constance, reine 
de Sicile, non-seulement il exige d'elle la recon- 
naissance de la suzeraineté romaine, mais il ne 
lui renouvelle l'investiture qu'après l'avoir con- 
trainte à condamner publiquement les usurpa- 
tions qu'elle avait faites sur les droits de l'É- 
glise. Ainsi fut assurée pour quelque temps la 
paix de l'Italie. An centre, au nord, au midi» il 
n'y eut plus qu'Ain souverain, représenté par des 
préfets plus ou moins télés ou des vassaux plus 
ou moins dociles* 

La nomenclature des actes d'Innocent lit, la 
simple mention des lettres, des diplômes qui 
portent son nom occuperait un fort volume. 
Pas une question n'a de son temps profondé- 
ment agité les esprits qui ne lui ait été sou- 
mise, ou qu'il n'ait évoquée. Nous ne pouvons 
donc relater ici que les principaux événements 
d'une vie si occupée. Quels sont donc ceux qui 
nous intéressent davantage ? Ceux-là même que 
l'on a le plus souvent discutés , et que Ton dis- 
cutera le plus souvent encore. 

Voici l'Empire d'Allemagne que se disputent 
deux compétiteurs , Othon, comte de Poitou, et 
Philippe , duc de Souabe. Si tous les électeurs 
avaient fait le même choix, l'Allemagne serait 
en paix; mais les suffrages s'étant partagés, 
on se prépare à la guerre. Le pape n'a pas été 
consulté sur cette question» et il n'a pas mani- 
festé de préférence : il importe de le remarquer. 
A l'origine de ce grave débat, la personne du 
pape est absente ; on ne peut donc l'accuser de 
l'avoir provoqué. Mais dès que les adhérents de 
l'un et de l'autre candidat se séparent courrou- 
cés, s'adressant de mutuelles menaces, dès que 
l'on court aux armes, qu'on lève des troupes, et 
que le clairon des batailles fait retentir en tous 
lieux, ses provocations homicides , Innocent n'a- 
t-il pas le droit de se jeter entre les deux partis, 
et de proposer une solution pacifique au diffé- 
rend qui va tout à l'heure ensanglanter l'Europe 
entière? Séparons-nous du temps présent pour 
juger sainement le temps passé. Aujourd'hui les 
grandes affaires internationales sont portées de- 
vant des congrès, qui les décident d'une manière 
souveraine. Mais la pratique de ces congrès est 
toute récente. Au moyen âge, à défaut de con- 
grès, U n'y avait que le glaive ou le pape pour 
terminer une controverse entre deux princes 
souverains > entre deux rois» Si donc Innocent 
intervient entre Othon et Philippe, et, pour épar- 
gner à l'Europe les malheurs qu'on redoute, as- 
signe tes deux parties devant son tribunal , il 
n'exercera qu'un droit reconnu. Mais il n'a pas 
besoin d'envoyer cette assignation; il n'a pas 
besoin de courir au-devant des armées, et de 
prononcer aux oreâles des prétendants la me- 



nace des vengeances divines. Othon envoie le 
premier des ambassadeurs au pontife romain, 
et, pour obtenir une décision qui le favorise, il 
prodigue les promesses. Philippe, dit-il, est un 
impie ; sa conduite passée témoigne trop qu'il 
n'entend respecter aucune des franchises ecclé- 
siastiques. Othon proclamé, sacré par le pape, 
Rome aura sur le trône impérial le plus fidèle , 
le plus soumis des clients. Quelle est, pendant 
ce temps, la conduite de Philippe? Comme s'il 
ne reconnaissait pas même à ï'évèque de Home 
le droit de consacrer l'empereur des Romains, il 
ne lui fait pas savoir que des suffrages plus on 
moins nombreux ont décerné la couronne impé- 
riale à l'héritier des ducs de Souabe. En ce mo- 
ment il n'y a donc pour innocent qu'un élu : 
c'est le Comte de Poitou. Cependant, sa prudence 
lui conseille d'ajourner un choix qu'il n'est pas 
encore obligé de faire. L'Allemagne est évidem- 
ment partagée. Se prononcer aussitôt pour tel ou 
tel prétendant, c'est peut-être s'attacher au parti 
qui, les glaives tirés, se trouvera le moins valide, 
et succombera. Mieux vaut attendre, et disposer 
encore les esprits à la conciliation. Enfin le duc 
Philippe, sentant qu'il ne peut rien sans l'appui 
du pape , le sollicite. Ainsi la force des choses 
établit Innocent arbitre de l'élection. Dès que 
cet arbitrage lui est enfin proposé par les deux 
parties, innocent ne l'accepte pas seulement, U est 
vrai , comme un devoir ; il va l'exercer encore 
comme un des privilèges de la tiare papale. C'est 
ce qu'il déclare dans les termes les moins ambi- 
gus aux envoyés mêmes de Philippe. Cependant, 
cette déclaration faite, il suspend encore l'arrêt 
qu'on; lui demande. Les armées s'ébranlent, le 
fer et la flamme commencent leurs ravages. In- 
nocent négocie toujours un accommodement. 
N'est-ce pas déjà trop temporiser? Ce n'est pas, 
du moins , usurper avec un impétueuse violence 
une autorité contestable et contestée. Innocent 
ne se prononça pour Othon qu'en l'année 1201, 
toutes les tentatives de conciliation ayant échoué. 
Si la division continua, si l'Allemagne fut, après 
la déclaration du pape, de plus en plus troublée, 
qu'on ne rejette donc pas sur lui la responsabilité 
de ces déchirements. Que l'on accuse de tant de 
malheurs celui des deux compétiteurs qui osa 
s'inscrire contre l'arrêt de l'arbitre et maintenir 
des prétentions condamnées; que Ton accuse 
surtout les prélats, les abbés allemands, les 
archevêques de Magdebourg, de Brème, de Salz- 
bourg, et tant d'autres, qui, désertant la cause 
de l'Église pour servir leurs proprés Intérêts, 
restèrent aux côtés du duc de Souabe, et conti- 
nuèrent à fomenter la discorde. Cela dura sept 
années. Après sept années de luttes presque 
sans trêve, le parti d'Othon se trouva le plus af- 
faibli ; on put même croire que sa cause était 
désespérée. Que fit alors Innocent lit ? Qu'on le 
remarque bien, caf c'est un des actes de Son 
pontificat qui l'honorent le plus. Pendant sept 
années, il a, disons-nous, servi les intérêts d'O- 



895 



INNOCENT 



89S 



thon. Enfin celui-ci se trouve réduit à de telles 
extrémités que le patronage d'Innocent est dé- 
sormais tout ce qui lai reste. Innocent craint 
alors d'être considéré comme un obstacle à la 
paix. Wavaît-il pas contre Philippe des griefs 
considérables ? Oui sans doute ; mais il les ou- 
blie. Philippe à ces griefs anciens avait, pendant 
sept années , joint une foule d'outrages contre le 
pape, contre la papauté. Innocent fera taire ses 
rancunes. Pour donner le repos à l'Allemagne, 
à la chrétienté , il se tourne vers Philippe , lui 
envoie des ambassadeurs, et traite avec lui. Les 
clauses de ce traité allaient être rendues publi- 
ques, quand un de ces vigoureux bandits que 
Philippe avait pour commensaux , Othon, duc 
de Bourgogne, le frappe d'un coup d'épée pour 
venger une injure privée, et termine d'une autre 
manière la querelle de l'Empire. Le comte de 
Poitou fut alors proclamé par toutes les voix. 
Même en de telles circonstances, cet heureux 
résultat n'était guère prévu, tant les esprits 
étaient divisés par la contrariété des intérêts; 
mais les actives démarches d'Innocent, sa facilité 
naturelle à pardonner toutes les injures, l'auto- 
rité de ses promesses, la certitude où chacun 
était qu'elles seraient sanctionnées par toutes les 
parties, préparèrent, achevèrent enfin la récon- 
ciliation générale, qui rat signée, le 11 novembre 
1208, dans la ville de Francfort. Othon rat en- 
suite couronné roi des Romains dans la basilique 
de Saint-Pierre, le 4 octobre 1209. 

Mais Othon, revêtu des insignes impériaux, ne 
se montra pas moins zélé pour les prétentions 
de l'Empire que Philippe de Souabe aurait pu 
l'être. Or c'était le sentiment de tous les princes 
enrôlés sous ses drapeaux, que l'empereur, héri- 
tier des césars, devait toujours aspirer à recons- 
tituer leur ancien domaine, qu'au pape, chef spi- 
rituel de l'Église, n'appartenait aucune juridic- 
tion temporelle, et que les Latins, comme les 
Siciliens et les Lombards, étalent les sujets ré- 
voltés des Germains. Ces Germains assistaient 
en grand nombre à la cérémonie du couronne- 
ment : telle fut alors leur conduite dans la cam- 
pagne, dans la ville même de Rome , que le 
peuple prit les armes pour leur donner une le- 
çon de modestie et de politesse. Elle fut san- 
glante. Othon, forcé de quitter Rome avec les 
débris de son armée, se promit une vengeance. 
S'emparant donc de toutes les villes qu'il traversa 
dans sa retraite , il répondit du* admonitions 
du pape qu'il reprenait un bien usurpé. Il fit en- 
suite, poursuivant les conséquences du même 
principe, une expédition dans le royaume de Si- 
cile, et accueillit avec d'autres sarcasmes les 
nouvelles remontrances d'Innocent. Mous enten- 
dons des historiens modernes qui applaudissent 
à ces sarcasmes. Eh bien, ils se trompent, s'ils 
pensent qu'on n'est plus philosophe dès qu'on 
refuse d'y applaudir avec eux. Dans les jugements 
qu'elle porte sur les faits historiques, la sage phi- 
losophie tient compte des temps ainsi que des 



lieux. Oui, sans doute, l'étrange doctrine de l'em- 
pereur Othon offre l'apparence d'un syllogisme 
régulier : qui doit, en effet, être le maître de 
Rome, si ce n'est le roi des Romains? Mais la 
philosophie ne consacre pas légèrement un syl- 
logisme qni porte dans ses flancs d'aussi formi- 
dables tempêtes. Encore une fois nous sommes 
à la fin du douzième siècle , et quand alors In- 
nocent eût laissé déposséder la papauté de toute 
souveraineté temporelle, assurément ni la Franc*, 
ni l'Angleterre , ni l'Espagne n'eussent ratifié 
cette abdication. C'était donc une guerre engagée 
entre tontes les autres puissances chrétiennes 
et l'Allemagne. Innocent ne manqua pas de pa- 
tience. Mais quand il dut être persuadé qu'O- 
thon avait fermement résolu de ne pas recaler, 
il l'excommunia , réclama la protection de la 
France, et invita les électeurs de l'Empire à faire 
choix d'un autre empereur. ; 

Ce qui est bien remarquable en cette affaire, 
ce qui prouve, de la manière la plus convaincante, 
quel était alors l'ascendant de la papauté, et 
quelle était la fragilité des pouvoirs civils, c'est 
qu'on vit, à la simple requête d'Innocent m, 
les électeurs se réunir, déposer Othon, et loi 
donner Frédéric pour successeur. Mais accose- 
t-on Innocent d'avoir abusé de cet ascendant? 
Dépossédé de toutes ses villes, tout à l'heure 
assiégé dans Rome même, il prit enfin le parti • 
de se défendre. Où est l'abus? Il se défendit en 
usant du glaive pontifical , l'excommunication. 
Serait-il immédiatement excusé s'il avait d'abord 
invoqué l'autre glaive ? Corrigeons-nous donc de 
cette faiblesse pour le meurtre et les meurtriers. 
Ce qui est regrettable, ce n'est pas qu'Otboo 
excommunié ait été si vite destitué de son titre 
par les électeurs de l'Empire; c'est bien plutôt 
qu'il ait encore , après l'élection de Frédéric, con- 
servé trop d'amis. Il ne désespéra pas , en effet, 
de rétablir ses affaires , resta sous les armes, et 
bientôt engagea le combat. Le dernier coup lui 
fut porté par Philippe-Auguste dans les champs 
de Bouvines. 

Les affaires d'Allemagne furent assurément 
celles qui inquiétèrent le plus Innocent III. Ses 
démêlés avec le roi de France occupent ensuite 
la place la plus importante dans l'histoire de son 
pontificat. Nous venons de nommer ce roi de 
France , Philippe-Auguste , tour à tour allié do 
pape contre Jean d'Angleterre et contre l'empe- 
reur Othon. Ce n'était pas sans doute un allié 
désintéressé; mais les intérêts de Philippe et cem 
d'Innocent se trouvaient le plus souvent d'ac- 
cord. Innocent n'avait d'ailleurs à redouter de 
Philippe aucune fourberie. La loyauté était me 
de ses rares vertus. Puisque le souverain pon- 
tife , destitué de toute force militaire, devait être 
l'ami d'un roi qui fat toujours en mesure de lai 
prêter main forte , Innocent devait pratiquer cette 
alliance avec Philippe : il n'aurait pas trouvé 
mieux. Cependant jamais Innocent ne s'inclina 
devant cette nécessité, au point de tout per- 



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INNOCENT 



898 



mettre à son allié , afin de conserver son appui. 
Il lui donna même plus d'une leçon. Nous rap- 
pellerons simplement l'affaire du divorce. 

Le divorce de Philippe avec Ingelburge était 
une des questions les plus difficiles que Cèles- 
tin III eût transmises à son successeur. Nous ne 
voulons pas dire que le droit de chacun fût dans 
cette question , incertain, équivoque. Le roi Phi- 
lippe avait juré, comme le plus humble de ses 
sujets, d'observer ponctuellement les lois de l'É- 
glise en ce qui regarde le sacrement du mariage 
et les autres sacrements : or, en chassant du lit 
nuptial sa femme légitime, Ingelburge, en n'al- 
léguant pour justifier cette brutalité que les plus 
indécents et les plus ridicules prétextes , il avait 
manifestement provoqué, mérité la sentence déjà 
rendue contre lui par Célestm m. Le mariage 
n'était-il pas alors un contrat religieux, fait devant 
Dieu représenté par ses ministres? Qui donc 
pouvait le rompre sans leur assentiment? Et 
cet assentiment solennellement refusé, n'était-ce 
pas sortir soi-même de l'Église, s'exiler volon- 
tairement de la société chrétienne , que de main- 
tenir en fait ce qui n'existait pas en droit? Rien 
de plus clair assurément; Mais une brouille avec 
la France pouvait être bien funeste à la papauté , 
déjà Menacée du côté dé l'Allemagne. L'intérêt 
bien entendu conseillait à Innocent d'abandonner 
à son triste veuvage cette femme venue des rives 
glacées de la Baltique, dont l'injure ne touchait 
qu'un prince impuissant. Cependant , le devoir 
lui conseillait une autre conduite. Innocent n'hé- 
sita pas à suivre l'inspiration du devoir. Dès son 
installation sur le siège de saint Pierre, il écrit à 
Philippe, que, « protecteur des faibles, des femmes 
opprimées , il ne peut voir avec indifférence le 
coupable abandon dlngelbufge; que préposé par 
Dieu même à la police de la société chrétienne , 
il ne peut admettre qu'un prince donne l'exemple 
d'un si grand scandale , et , sous les yeux de ses 
peuples , place une concubine dans le lit de l'é- 
pouse légitime ». Philippe n'entend pas encore ce 
langage. C'est un homme plus prompt à com- 
mander qu'à obéir. Innocent renouvelle ses 
plaintes , et y ajoute des menaces. Les menaces 
sont aussi vaines que les prières. Un concile 
est convoqué pour le 6 décembre 1199, et Phi- 
lippe est sommé d'y comparaître. Il fait jeter 
hors de son palais les deux abbés qui viennent 
loi porter cet ordre. Cependant le concile s'as- 
semble , et , après sept jours employés à déli- 
bérer sur cette si grave et si triste affaire , le con- 
cile, où siégeaient la plupart des évêques fran- 
çais , met l'interdit sur le royaume de France. 
Telle est la loi religieuse. La loi civile réserve 
à la bigamie d'autres châtiments. L'Église se con- 
tente de proclamer qu'on roi bigame n'est plus 
un roi chrétien. On dit que Philippe, ayant 
vainement essayé de fléchir le pape , s'écria dans 
son impatience : « Je veux me faire infidèle. 
Heureux Saladin ! il n'avait point de pape t » 
Ce jeu d'esprit n'est pas heureux : la religion de 

KOOV. BIOGR. CÉWÉR. — T. XXV. 



Saladin , en lui permettant la polygamie, l'assu- 
jettissait à d'autres règles. « Heureux Philippe 1 
aurait pu dire Saladin : il n'a pas de muphti 
pour lui interdire la douce ivresse qu'on trouve, 
au fond d'une coupe de Syracuse 1 » La so- 
ciété, la religion se protègent elles-mêmes par 
des lois que nul ne peut enfreindre sans encourir 
la peine qu'elles prononcent. Philippe finit par 
le comprendre, et son arrogance est ébranlée. 
Les évêques du royaume se sont déclarés contre 
lui; il convoque les barons. Les barons font la 
même réponse que les évêques. Les parents de 
Philippe s'éloignent eux-mêmes à son approche. 
La nation entière contemple avec un morne ef- 
froi le ciel voilé de lugubres ténèbres. Philippe 
ne rit plus alors des menaces du pape; il le sup- 
plie d'apprécier sans colère d'humbles objections, 
de croire d'abord à sa parfaite bonne foi dans 
toute cette affaire, et de considérer ensuite que 
la rupture du second mariage aura de plus graves 
conséquences quecelle du premier. La belle Agnès 
de Méranie, l'imprudente complice du royal 
adultère, joint ses larmes aux prières de Phi- 
lippe, et parle pour elle-même, pour ses jeunes 
enfants , en des termes qui nous émeuvent en- 
core aujourd'hui, tant il y a d'éloquence dans 
leur sincérité! Innocent ni est .inexorable, 
comme la loi. Philippe doit céder : il cède enfin. 
Agnès, écartée , meurt peu de temps après. Phi- 
lippe prie du moins le pape de légitimer ses en- 
fants. Pourquoi l'Église n'eût-elle pas souscrit à 
ce vœu? Innocenttaccorda ce qui lui était de- * 
mandé. Quelques seigneurs français, suivant Ri- 
gord, murmurèrent contre cette faiblesse. Elle 
les surprit chez un tel pape : c'est qu'ils ne l'a- 
vaienUipas compris usant de sa force. Innocent 
a châtié l'époux coupable; mais il lui convient 
de se montrer ensuite plein de commisération 
pour le père malheureux. 

Est-ce l'Angleterre qui proteste contre les nom- 
breux diplômes d'Innocent HI qui concernent 
son église et ses rois ? 

Innocent est prié, dès la première année de 
son pontificat, de tourner ses regards vers l'An- 
gleterre. C'est le roi Richard qui fait un appel à 
la justice du pape. Les ducs de Souabe et d'Au- 
triche ont pris Richard dans une embûche , l'ont 
jeté captif dans une prison , et ne l'ont ensuite af- 
franchi de cette dure captivité qu'après avoir reçu 
le prix de sa rançon. C'est ainsi que des princes 
chrétiens ont traité le chef d'une armée chrétienne, 
au retour d'une expédition malheureuse contre les 
infidèles» Richard réclame, du moins, la resti- 
tution des sommes que ces traîtres lui ont ex- 
torquées. Aussitôt Innocent se charge de sa cause, 
la plaide aveciénergie, et déclare au duc d'Au- 
triche aussi bien qu'au duc de Souabe , récent 
empereur d'Allemagne, que s'ils n'offrent pas à 
RicharcTnine ^prompte satisfaction, ils seront, 
comme l'équité l'ordonne , excommuniés. 

Ce Richard est d'ailleurs pour le roi de France 
un voisin incommode. Des griefs réciproques 

29 



899 



INNOCENT 



000 



les animent Ton contre l'autre, et ils sont cons- 
tamment aux prises. Ce ne sont que combats , 
incendies et pillages. La rivalité des deux rois 
cause aux deux peuples des maux infinis. Inno- 
cent, ami de Richard, brouillé avec Philippe, 
ne va-t-ît pas s'interposer entre les combattants, 
adopter, appuyer les griefs de l'Angleterre, et 
commander à la France de céder? Cette conduite 
eût été celle d'un pape moins sage. Innocent ne 
veut pas aigrir le débat en s'y mêlant. Mais 
parmi les intérêts engagés dans cette question , 
quel est le plus sérieux ? Celui des peuples que 
ruine la guerre. Le cardinal Pierre de Capoue , 
envoyé par Innocent , va négocier la paix, et, 
comme résultat des plus laborieux efforts, il ob- 
tient du moins une trêve de cinq ans. 

Après la mort de Richard , Jean occdpe sa 
place. Les mœurs de Jean sont celles de son 
frère. Rien ne doit résister à l'emportement de 
ses brutales passions, et il n'a pas, comme Ri- 
chard , le goût des nobles aventures. Par l'assas- 
sinat d'Arthur, son neveu, il met le comble à ses 
crimes. On accuse Innocent d'avoir voulu les 
ignorer. C'est une accusation contre laquelle il 
est, en effet, assez difficile de le défendre. Ce- 
pendant s'il abandonnait Jean , il fortifiait son 
rival , le roi de France , et tout accroissement de 
territoire, de puissance pour celui-ci , tournait 
contre le parti qu'Innocent favorisait alors en 
Allemagne. Ainsi tous ses efforts étaient décon* 
certes. On doit croire qu'Innocent entendit plus 
d'une fois sa conscience protester contre les 
bienveillantes missives qu'il adressait au meur- 
trier d'Arthur. Mais il ne pouvait créer les chefs 
des nations , il ne lui était pas permis de refuser 
ceux que la loi du sang lui présentait. Et de 
quel prince eût-il accepté le concours , s'il n'a- 
vait voulu serrer d'autres mains que des mains 
pures? Les nécessités de la politique imposèrent 
donc à Innocent de fâcheuses indulgences. 
Remarquons toutefois qu'après avoir trop long- 
temps ménagé l'indigne successeur de l'intré- 
pide Richard , il se montra d'autant plus sévère 
à son égard quand les plaintes de l'Église oppri- 
mée éveillèrent enfin sa justice. La défense de 
l'Église était un devoir avec lequel il ne pouvait 
transiger. 

On le vit bien dans l'affaire de l'archevêché de 
Cantorbéry. Après deux ans de troubles, une 
élection, longtemps contrariée par des rivalités 
ecclésiastiques et plus encore par les intrigues et 
les violences du roi , avait enfin appelé sur te 
siège de Cantorbéry un des plus érudits des clercs 
anglais , Etienne Langthon. Jean ne voulut pas 
accepter le résultat du scrutin, et ses persécu- 
tions allèrent chercher à la fois l'élu , les élec- 
teurs, séculiers et réguliers. Les évêques de 
Londres, d'Ély , de Winchester se rendirent au- 
près de Jean , lui parlèrent des libertés ecclésias- 
tiques , et lui firent entrevoir quels dommages 
pouvait lui causer le ressentiment du pape. Jean 
répondit à leurs supplications par les plus véhé- 



mentes menaces. Que le pape ose interdire son 
royaume, il fera saisir archevêques, évêques, 
clercs et moines, et les transportera tous sur le 
continent les yeux crevés , le nez coupé , les 
chargeant d'aller apprendre au pape quel cas un 
roi d'Angleterre fait de son autorité. L'interdit 
prononcé, Jean frémit de colère, exile les évê- 
ques, les religieux, saisit leurs biens, met les 
scellés sur leurs granges, et fait vendre leow 
meubles à l'encan. La lutte qu'Innocent avait 
voulu prévenir est donc engagée. Se demande- 
t-on où est la justice ? Si, comme trop d'historiens 
l'ont prétendu , tout ce qui s'accorde le mieux 
avec l'intérêt des rois est légitime , les torts peu- 
vent être imputés à Innocent III; mais si, sous 
l'empire des gouvernements les plus despotiques, 
il reste quelques droits aux sujets, assurément 
les clercs de Cantorbéry pouvaient , d'accord avec 
le pape, leur chef spirituel, préférer pour ar- 
chevêque un cardinal anglais , homme de grande 
maison et de grand savoir, an candidat que le 
roi Jean avait choisi parmi ses familiers ; et, leur 
élection faite , ils pouvaient encore la maintenir. 
C'est là du reste ce que Jean lui-même ne tarda 
pas trop à reconnaître : après avoir commis de 
grandes violences, il fit, du moins, paraître un 
grand repentir, et offrit lui-même au pape une 
réparation qui fut d'abord jugée suffisante. Mais 
il ne voulait en réalité qu'apaiser le pape irrité. 
Aussitôt qu'il crut avoir atteint ce résultat, il 
s'abandonna à de nouveaux excès. La persécu- 
tion recommença contre les ecclésiastiques, contre 
les étudiants, traînés devant les juges laïcs. Un 
grand nombre d'évéques ne purent se soustraire 
à la fureur du roi que par l'exil. Alors Innocent 
fit succéder à l'interdit l'excommunication per. 
sonnette. Mais personne n'osa publier cette nou- 
velle sentence, et Jean, continuant ses prouesses, 
accumula crimes sur crimes, jusqu'au jour où 
les barons anglais» se conjurant enfin contre 
cette peste publique r offrirent eux-mêmes la cou- 
ronne d'Angleterre au roi de France, le suppliant 
au plus tôt de mettre fin à un règne exécré. Innocent 
ratifia cette offre , et une croisade fut proclamée. 
Il connaissait Jean plus brutal qqe brave , et es- 
pérait le faire changer de conduite par une me- 
nace énergique. En effet, à la nouvelle des ar- 
mements préparés contre lui» Jean manifeste un 
profond désespoir, et demande au pape à quel 
prix lui seront pardonnes les méfaits dont il 
reconnaît que sa conscience est chargée. Une 
négociation est commencée, mais elle est bientôt 
interrompue* Il est nn principe que Jean ne veut 
pas accepter ; c'est l'indépendance de l'Église. 
Les menaces d'Innocent deviennent alors ploi 
vives, et le châtiment parait plus proche. Jean 
s'incline enfin , et plus bas même qu'il ne lai 
était commandé de le faire. Il dépose sa cou- 
ronne entre les mains des messagers aposto- 
liques, déclare qu'il ne sera plus roi que par la 
grâce du pape , et , cette grâce lui étant accordée, 
il rend au pape l'hommage prosterné d'un vassal 



901 



INNOCENT 



902 



pénitent. Il y a peu d'exemples d'an abaisse- 
ment pareil. Est-il donc fait pour nous inspirer 
du moins quelque pitié? Les barons d'Angleterre, 
d'abord soulevés contre les iniquités du roi, 
s'indignèrent ensuite de sa lâcheté. Cette indigna- 
tion est encore le sentiment que l'on éprouve 
en racontant l'histoire d'une si honteuse dé- 
chéance. 

En Sicile, Constance étant morte, le Germain 
Markwald» déjà chassé des Marches par Inno- 
cent, arrive à la tète de quelques partisans, et ré- 
clame, au nom de l'empereur, la tutelle du jeune 
roi. Celui-ci répond que le pape lui a été donné 
pour tuteur par sa mère, qu'il n'en veut pas ac- 
cepter un autre, et somme Markwald de s'é- 
loigner » Mais, en donnant cet ordre , le fils de 
Constance suit les conseils du parti national , des 
seigneurs italiens. Or le royaume de Sicile est 
plein d'Allemands dont l'entreprise de Markwald 
flatte les cupides espérance» : il s'agit pour ces 
étrangers de dominer en Sicile et d'en usurper les 
plus beaux domaines. Se ralliant donc autour de 
Markwald, ils l'encouragent .à tout oser; et voici 
qu'une armée de Normands» de Germains, d'a- 
venturiers envahit* pille les champs voisins du 
mont Cassin,. occupe la ville de San-Germano, 
enveloppe l'antique monastère, et en fait le siège. 
Que dirait-on d'un tuteur qui, dans ces extré- 
mités, eût abandonné Son pupille? Innocent fait 
pénétrer quelques troupes dand l'État de Sicile, 
et appelle aux armes les comtes, les barons, tes 
bourgeois, tout le peuplé de Capoue, de l'Apn- 
lie, de la Calabre ; une croisade est préchée contre 
l'étranger, le sacrilège dévastateur des domaines 
ecclésiastiques, le fléau de la noblesse Sicilienne, 
le farouche bourreau des clercs et des moines. 
Celui-ci promet au pape, s'il Vent simplement 
détourner ses regards de la Sicile^ l'hommage fu- 
tur d'une loyale soumission, et par avance offre 
20,000 onces d'or au trésor pontifical, jurant 
d'envoyer bientôt une plus forte somme. Quelle 
opinion aurait-on d'Innocent acceptant cet or, et 
pactisant avec L'usurpation germaine? Il repousse 
les présents, déjoue les perfidies de Markwald, 
le force à quitter le continent et le poursuit en* 
core dans l'île de Sicile. Une sorte de paix est 
ensuite conclue. Mais les partisans de Markwald 
n'y trouvent pas leur compte. La guerre leur of- 
fre, en effet, les profits quotidiens du pillage. 
La paix est donc rompue, une armée de Sarra* 
sins vient se ranger sous les enseignes de Mark- 
wald, et des bandes allemandes, sarrasines par- 
courent dans tods les sens l'Ile de Sicile, dévas* 
tant les bourgs et les ville», n'épargnant pas pin* 
les lieux saints que les profanes. Innocent est 
de nouveau contraint de porter secours à son 
pupille. L'armée royale et l'armée rebelle se 
rencontrent sous les murs de Palerme, et Mark- 
wald est vaincu. Markwald mort, l'état des af- 
faires n'est pas meilleur dans le royaume de Si- 
cile. D'autres factions se forment, prennent des 
gages, aspirent et travaillent à dominer. Le jeune 



roi, entouré d'ambitieux et de traîtres, ne com- 
mande plus à personne; les fermiers de ses 
.douanes versent en des mains ennemies le pro- 
duit des impôts; on vend même ses domaines, 
et on les vend en son nom, sans lui en donner 
le prix. Seul Innocent le protège encore, et lui 
envoie des conseils, des soldats, des écus. Enfin, 
en 1208, après dix années d*efrorts, Innocent 
parvient à rétablir le bon ordre dans ce pays, 
si longtemps affligé, et» le parcourant en tuteur 
fidèle, envigUant pontife, il y recueille les hom- 
mages dus à sa persévérante loyauté» 

Nous voyons dans le même temps les mes- 
sagers pacifiques d'Innocent parcourir l'Espagne, 
le Portugal, la . Pologne, le Danemark, la Hon- 
grie, Constantinople, te Bulgarie ; sur toute 
contrée de l'Europe, durant dix-huit années, 
s'étendit la main puissante de ce grand pape. 
On peut même remarquer qu'aux froides limites 
du monde chrétien, en Norvège , son interven- 
tion ne fut pas moins active, moins efficace que 
dans les pays dont les frontières étaient celles 
du domaine pontifical. La Norvège se trouvait 
depuis longtemps en proie à de sanglantes dis- 
cordes. Swerrer le Grand, arrogant parvenu, 
dont l'ambition égalait le courage, opprimait et 
l'État et l'Église, n'admettant personne au par- 
tage du pouvoir qu'il avait conquis;par ses heu- 
reux efforts. Cependant il y avait chez cet homme 
entreprenant, inflexible, qui faisait tout céder à 
son caprice, quelques traits de ressemblance 
avec les grands réformateurs : s'il avait peu 
d'égards pour les anciens privilèges de la no- 
blesse et pour les droits assez mal définis de 
l'Église norvégienne, il savait du moins écouter» 
entendre te voix du peuple, et le peuple ratifiait 
volontiers les décrets de sa pleine ptûssanee. 
L'Église et la noblesse adressèrent leurs plaintes 
au pape. Célestin occupait encore le siège pon- 
tifical. Il voulut, avant de se prononcer, mieux 
connaître l'état des choses, et par ses ordres un 
cardinal se rendit en Norvège* Mais il était im- 
possible de composer avec Swerrer. Le cardinal, 
d'abord enclin à le favoriser, se vit bientôt forcé 
de l'abandonner* Alors les violences et les frau- 
des de Swerrer n+ respectèrent plus rien : pour 
comprimer toutes tes plaintes, il ne se contenta 
pas démultiplier les confiscations, les supplices; 
Û alla jusqu'à fabriquer des lettres papales, or- 
nées d'un sceau frauduleux, à'ia faveur des- 
quelles il promulgua lui-même l'approbation de 
ses crimes, Tout cela devait-il être supporté? 
En alléguant te principe moderne de l'autone» 
mie nationale, de l'indépendance individuelle 
des nations, cm pourra sans doute soutenir qu'il* 
nocent n'avait point affaire de savoir comment 
Swerrer |le Grand se comportait en Norvège, 
Mais c'est lui-même qui par ses ambassadeurs in- 
terrogea le saint-père sur sa conduite, réclamant 
son intervention contre des évêques, contre des 
vassaux révoltés; et le saint-père interrogé le 
condamna, déclara son usurpation criminelle, 

29. 



908 



INNOCENT 



904 



exhorta te peuple norvégien à secouer le joug 
de ce faussaire, de ce tyran. 

L'ambition d'Innocent III fut donc d'établir 
en tous lieux la liberté de l'Église à l'égard des 
rois, et la paix entre les peuples. C'est le dou- 
ble but qu'il poursuivit avec la plus constante 
énergie. Tous les moyens lui semblèrent-ils bons 
pour l'atteindre I C'est une question qui doit être 
posée. 

Jus et fas raoltos feetant; Ptolemee, noeentet... 
La grande politique recherche l'utile et méprise 
le juste. C'est la maxime de Photin et de plu- 
sieurs autres conseillers de semblables tyrans. 
Elle est exécrable, et nous n'hésitons pas à croire 
qu'Innocent l'eût condamnée. Cependant il fant 
reconnaître qu'il n'eut pas toujours, dans la 
pratique des affaires, cette horreur de l'intrigue, 
des moyens détournés, des suggestions ingé- 
nieusement perfides, qui est à bon droit consi- 
dérée comme la marque des grands cœurs et des 
grands esprits. Mais il faut encore ici tenir 
compte des temps, n est, en effet, certain que la 
conscience humaine s'est beaucoup anoblie de- 
puis le douzième siècle. Chez aucun des con- 
temporains d'Innocent m vous ne trouverez 
l'idée du juste et de l'honnête, telle que notre 
intelligence la conçoit et la définit. Si donc aujour- 
d'hui nous ne pouvons approuver tous les moyens 
employés par Innocent pour atteindre les résultats 
que nous estimons louables, nous ne lui reproche- 
rons pas toutefois avec une excessive sévérité 
de n'avoir pas scrupuleusement observé la règle 
qu'il connaissait mal. 

Une autre remarque à faire sur la série des 
lettres'et diplômes d'Innocent m, c'est que son 
intervention dans les affaires des Églises s'é- 
tend bien plus loin que son intervention dans 
les affaires des États. En ce qui regarde les Églises 
même les plus lointaines, il n'y a pas de si mi- 
sérable débat dont Une s'occupe, quand il en est 
prié : comme pasteur de tous les fidèles, comme 
administrateur suprême de la grande famille 
ecclésiastique, il se doit à tous et à chacun, il est 
le serviteur de quiconque lui demande un ser- 
vice. Mais il ne touche ordinairement qu'aux 
plus hautes questions de l'ordre civil, à celles 
qui préoccupent à la fois l'Église et l'État, ou 
bien encore à celles où se trouvent engagés les 
premiers intérêts des nations; alors même, en 
effet, qu'elles sont purement civiles, ces ques- 
tions peuvent encore* être appelées sociales, et 
elles doivent être résolues suivant les principes 
de la justice par un arbitre désintéressé. In- 
nocent parait avoir entendu que le gouverne- 
ment intérieur des États appartenait aux rois et 
ne devait leur être disputé qu'en de rares occa- 
sions. Ajoutons même que lorsqu'il a cru devoir, 
soit au nom d'un droit équivoque, soit à la re- 
quête des parties, déclarer son propre senti- 
ment sur les contestations agitées entre les rois 
et leurs peuples, il ne l'a pas toujours fait avec 
bonheur. Il s'est, par exemple, gravement trompé 



dans l'affaire de la grande charte d'Angleterre, 
lorsqu'il s'est prononcé contre les justes récla- 
mations des barons. En ces circonstances, il su- 
bordonnait volontiers le droit des peuples, dont 
il se souciait peu, aux intérêts présents de la pa- 
pauté, dont alors il se souciait trop. 

Ceci nous conduit à dire que l'histoire, lors- 
qu'elle considère la papauté comme ayant, du- 
rant le moyen fige, servi la cause des peuples 
en donnant des leçons aux rois, ne doit pas ce- 
pendant attribuer aux papes des intentions qu'ils 
n'ont point eues. Us ont heureusement contenu 
le despotisme farouche des hommes d'épée ; ils 
ont fait prévaloir l'autorité de rintelligence sur 
la force matérielle, et ils ont ainsi facilité cette 
émancipation graduelle des âmes qui a en pour 
conséquence ultérieure l'essor des peuples vers 
la liberté. Mais jamais ils tfont poursuivi, ja- 
mais ils n'ont entrevu ce résultat. Le but qu'ils 
ont recherché, bien différent de celui vers le- 
quel ont ensuite tendu les vœux des nations, a 
été la liberté de l'Église à l'égard des rois, de 
l'Église servilement docile à l'autorité des papes. 
Chaque siècle doit sa part d'efforts à une œu- 
vre dont Dieu seul connaît la fin. Ne soyons pas 
trop exigeants à l'égard du passé, puisque notre 
présent aura l'avenir pour juge. Voilà ce qu'il 
suffit de comprendre, pour apprécier à leur vraie 
mesure les services rendus à la société moderne 
par Grégoire VII, par Innocent III, par les papes 
animés du même esprit. Us n'ont pas tout fait, 
ils ne pouvaient tout faire. Us ont été les ouvriers 
de leur heure; d'autres devaient venir et sont 
venus après eux. 

Considérons maintenant sous une antre face 
le pontificat d'Innocent III. Tous les gouverne- 
ments ont à lutter contre deux partis t celui qui 
veut les rappeler en arrière, et celui qui prétend 
les pousser trop vite en avant. L'histoire est 
toujours dure pour le premier de ces partis; 
elle applaudit même sans aucune pitié à tous 
ses désastres. Pour le second, au contraire, elle 
professe de publiques sympathies, et, forcée d'en- 
registrer ses échecs, ne pouvant même se défen- 
dre de les regarder comme inévitables, elle les 
déplore néanmoins. S'il est, en effet, téméraire 
de réclamer plus qu'il ne peut être accordé, cette 
témérité prend son origine dans un élan géné- 
reux. Qu'il nous soit donc permis de manifester 
un vif intérêt pour ces novateurs inconsidérés 
qu'Innocent III sacrifia sans aucun scrupule au 
seul intérêt qu'il comprit et put comprendre, 
l'unité de l'Église, et dont plus tard, à cette autre 
heure qu'on ne sait pas assez attendre , les om- 
bres vengeresses sont venues assiéger le chevet 
de Léon X. 

Innocent n'avait pas de haine contre les infi- 
dèles. Une mit autant d'ardeur à précipiter l'Eu- 
rope sur l'Asie que pour affranchir le tombeau 
du Christ. Bien des prélats, bien des seigneurs 
chrétiens se sont croisés pour exterminer des 
musulmans, pour mettre à sac des cités k mu- 



9ÔS 



INNOCENT 



906 



sulmanes : ce sont de tout autres sentiments 
que respirent les lettres d'Innocent m prêchant 
la croisade contre les conquérants de la Pales- 
tine. A l'entendre , c'est une question d'honneur 
pour tous les chrétiens que de posséder les lieux 
où est né , où a souffert, où est mort le divin 
auteur de leur religion; mais il ne conseille pas 
l'extermination ou le pillage des infidèles. En- 
tendons-le maintenant parler des juifs. On est 
généralement persuadé que, durant le moyen 
âge, la cour de Rome inspira toutes les violences 
qui furent commises contre les enfants d'Israël. 
Partout les rois les persécutent, les seigneurs 
les rançonnent,' les peuples les lapident. Mais 
écoutez Innocent : c'est d'une voix attendrie 
qu'il entreprend leur défense, et les arguments 
qu'il invoque en faveur de ces 'infortunés sont 
presque ceux de nos derniers philosophes : « Si les 
juifs ont fermé leur cœur à la grâce ; du moins 
ils pratiquent la loi* A ce titre, ils ont déjà droit 
à la considération des chrétiens. » Mais un prin- 
cipe supérieur les protège encore. Ce principe, 
Innocent in ose en être l'éloquent interprète, 
c'est le respect des consciences. Si les juifs s'obs- 
tinent à refuser le baptême, c'est leur affaire, 
non celle des chrétiens, « il n'est permis, écrit- 
il , à aucun chrétien de forcer un juif à rece- 
voir le baptême. » Et aussitôt il suspend la 
menace de l'excommunication sur la tête des 
gens qui prétendraient exercer sur eux cette bar- 
bare contrainte. Mais voici le secret de cette 
charité pour les juifs. N'appartenant pas à la 
famille chrétienne, ils étaient pour Innocent des 
étrangers, des étrangers dont la faiblesse ne 
pouvait lui inspirer aucune crainte. Mais com- 
bien son langage et sa conduite diffèrent lors- 
qu'il s'agit des albigeois ! 

Les albigeois ou patarins , répandus dans le 
midi de la France, depuis Béziers jusqu'à Bor- 
deaux, professaient une doctrine religieuse qui, 
sur beaucoup de points, était peu conforme à la 
doctrine romaine. Aussi avaient-ils en horreur 
le nom de Rome. De plus , il s'était produit 
parmi eux beaucoup de beaux esprits, gais trou- 
badours, logiciens érudits, théologiens auda- 
cieux, qui, élevant leur séparation de l'Église 
romaine à la hauteur d'un système, prétendaient 
que la liberté des consciences est un droit supé- 
rieur à tous les décrets des conciles et des papes. 
Non-seulement Innocent leur envoya des mis- 
sionnaires apostoliques chargés de réfuter leurs 
erreurs; mais ces missionnaires faisant peu de 
prosélytes', Innocent fit un appel au bras sécu- 
lier. On connaît la suite. Les albigeois, poursuivis 
de ville en ville, de retraite en retraite, furent 
tous massacrés. Le souvenir de ce drame sanglant 
consterne la pensée. Vers la fin de la guerre, In- 
nocent protesta contre la rapacité des meurtriers , 
cela est vrai ; mais auparavant il avait prêché 
le meurtre. Il lavait, hélas ! prêché sans aucune 
hésitation , sans aucun trouble. L'unité de l'É- 
glise était menacée; donc il fallait la défendre. 



Que Bourges, Bordeaux, Poitiers se déclarent 
aujourd'hui séparées de la nation française, 
qu'elles se donnent un gouvernement, un code-à 
part, qu'elles refusent à Tannée française leurs 
soldats, au trésor national leurs écus : ces villes 
seront considérées comme rebelles, et il semblera 
légitime de les réduire par la force. Voflà ce 
qu'un jour peut-être on appellera le préjugé de 
notre temps. Eh bien 1 le préjugé du moyen âge 
était Vunité de V Église. Terminant l'éloge de 
Philippe-Auguste, Condillac s'exprime en ces 
termes : « Je ne lui reproche pas la guerre qu'il 
fit aux albigeois ; ce reproche tomberait plus 
sur son siècle que sur lui. » Que cette excuse 
ne soit pas moins valable pour Innocent m que 
pour Philippe-Auguste! L'un et l'autre ont eu les 
idées, les passions de leur siècle, et ils n'ont 
pu soupçonner les scrupules du^nôtre. 

H nous reste à mentionner les ouvrages d'In- 
nocent III. Un très - grand nombre de ses 
Lettres avaient été puhliées par Baluze, en 16*2, 
en 2 vol. in-fol., sous le titre de : Epistolarum 
Innocenta 111, romani pontifias, Libri XL 
Mais cette collection considérable était encore 
bien incomplète. MM. de Bréquigny et La Porte 
du Theil ayant fait copier à Rome, par les ordres 
du gouvernement français, une longue suite 
d'autres lettrés pontificales, ajoutèrent, en 1791, 
à la collection de Baluze, deux volumes in-fol. 
Quant à ses traités théologiques, on en connaît 
plusieurs éditions : de Cologne, 1552, 1575 ; de 
Venise, 1578. B. Hauréau. 

Frédéric Hurter, Hist du Pape Innocent III. — 
M. Léop. Dellsle, Itinéraire d'Innocent III. - Artaud 
de Montor, Hist. de» Souverains Pontifes romains, t IL 
— Fleury, Hist. Ecclésiast. — La Porte du TheU, Notices 
et Extraits des Manuscrits. — Baronlus, Annales, pas- 
sim. ~ Pagi, BreviartumHistorico^hroMtogico-criti- 
cum. 

innocent it ( Sinibalde de Fiesqce), cent- 
quatre-vingt-sixième pape, successeur de Cèles- 
tin IV, né à Gênes, élu à Anagni, le 24 juin 
1243, mort à Naples le 10 décembre 1254. Cé- 
lestin IV mourut dix-huit jours après son exal- 
tation; c'est donc au pontificat de Grégoire IX 
que se relient les événements qui amenèrent 
Innocent IV sur le trône pontifical. Frédéric n 
retenait encore prisonniers les deux cardinaux 
qu'il avait pris sur mer ; les autres ne pouvaient 
s'entendre : chacun voulait la tiare pour soi; ils 
se dispersèrent donc en différentes villes, espé- 
rant qu'en retardant l'élection, la mort éclairci- 
rait les rangs des prétendants. L'empereur et le 
roi de France les prient en vain de faire cesser 
une vacance qui durait depuis dix-huit mois. 
Pour ôter tout nouveau prétexte de retard, Fré- 
déric met en liberté les deux cardinaux qu'il 
retenait; puis, voyant l'inutilité de cette mesure, 
il- marche sur Rome (avril 1243), met les car- 
dinaux au ban de l'Empire, et permet à ses troupes 
de ravager leurs terres et celles de l'Église; les 
gibelins profitent de cette autorisation pour pil- 
ler et détruire, Les cardinaux se rendent enfin 



et élisent Sinibaldfi de Fieague, qui prend (e nom 
4'lawMWVt IV. On Pavait cboiii à. causa d* IV 
initié que lui portait Frédéric ; mai* celui-ci, plus 
pénétrant que ses flatteurs, leur répandit d'un 
air affligé que cette élection « lui ferait perdra l'a- 
mitié d'un cardinal et lui attirerait la bain* d'un 
papa ». Il était temps de conclure la paix avec la 
aaintaiéga; l'empereur s'engagea a Tendre toutes 
ta* terras qui avaient appartenu aux papes avant 
la guerre, 4e réparer ton* les torts fa»> aux 
prélata qui avaient 4tt prisonniers, et d'obéir en 
tout au papa, lans préjudice, du l'Empire, Ces 
articles furent jurée soiennellenient à Borne, 
Mai* Frédéric aa repentit bientôt de ses conces- 
sions, et fit savoir a. Innocent qu'il n'exécuterait 
la traité qu'après avoir reçu dès lettrée d'absu* 
luttai, le pape tredoute une nouvelle guerre et 
s'enfuit à Qeaaa; de fo il écrit aux rois de 
Brencft, d'Aragon et d'Angleterre pour leur de- 
mander un aaile. Us refusèrent tous les trois, 
et innocent dut se réfugier i Lion (W), ville 
neutre qui appartenait à. son archevêque, Fré- 
déric est alors excommunié pour la cinquième 
fais* mais cela ne tuffit P°iut au pape. Suivant 
las traees de Gre^oir* IX, tt ^semble un concile 
général (premier de I^yon. troisième œcumé- 
nique), y accusa l'empereur de parjure, de sa* 
çrilége. et d'nérésie, («es. ambassadeurs de Fré- 
déric, la juêti&eqt avec énergie, et reprochent 
au pape se* usures, ses taxes sur le clergé et 
d'autre* abua, Mais l'empereur était condamné 
d'avance t aa déposition fut solennellement pro- 
noncée. Frédéric était à Turin quand il apprit 
cette nouvelle) il envoie aussitôt son tils Conrad 
en Allemagne, et écrit à saint Louis pour se 
plaindre de l'audace du pape, qui, de son côté, 
pressait les princes allemands d'élire un autre 
empereur. Saint Louis était loin d'approuver la 
cnndujta d'innoeant; il eut avec lui quelques 
entrevues à Clunj (U45 et 1246), mais sans 
pouvoir réconcilier les deux ennemis, Pendant 
que las arcbevéquea de Mayence et de Cologne 
élisent roi des Romains Henri, landgrave de Tbu- 
ringa, la pape excommunie Sancbe II, roi de forr 
tugal et Jacques I er , roi d'Aragon. Cedernier avait 
fait couper la langue l l'évèque de Qûrope pour 
le punir d'avoir révélé la confession royale. 
Saint Louis venait de partir pour I*. Terre Sainte ; 
mais la croisade que la pape ptfcbait contre 
Frédério nuisit beaucoup > celle du roi de France ; 
car Innocent accordait pour toutes deux les 
mêmes indulgence*. {^'Allemagne, divisée entre 
|e pape et l'empereur, était en feu* les évêques 
s'excommuniaient réciproquement : Frédéric re- 
prend alors la route d'flaUa. Bans Ja. fouille, un 
médecin, gagné par Innocent, tente del'empoison- 
par (ltttu) ; il offre enfin la paix au pape, et meurt 
la 13 décembre 1250. Aussitôt Innocent écrit en 
Allemagne pour y maintenir la révolte, et en 
Sicile pour tâcher d'usurper les droits de l'em- 
pereur sur cette contrée. Une telle conduite lui 
aliène tous les partis} il en est réduit à offrir le 



INNOCENT 90» 

trône d'Allemagne à, HaquJn, roide Jforvte, qui 
répond publiquement qu'il veut bien combattre 
les ennemis de l'Église, mais non ceux du pape. 
Alors Innocent fulmine une nouvelle excommu- 
nication contre la mémoire de Frédéric et contre 
Conrad, son ûla, publie une croisade contre ce 
dernier, et quitte Lyon le 19 avril 1251, pour 
regagner Htaue. Conrad, débarqué à Pesai», 
allait» aidé des Vénitiens, prendre possession du 
royaume da ftcjle, quand |j meurt (21 mai 1254), 
laissant pour successeur Conradin, on enfant de 
deux ans, dont Mainfrol, fils naturel de Frédéric, 
obtient la tutelle, Mainfroi se soumit d'abord à 
toutes les exigences du pape ; mais Innocent n'a- 
vait pas renoncé à ses prétentions sur la Sicile. 
Mainfroi s'en aperçut à temps; il se jette dans 
tyocéra babitée par des Sarrasins, se met à leur 
tète et bat les troupes pontificales dans plusieurs 
rencontres. Innocent IV mourut sur ces entre- 
faites. Son instruction, ses grandes connaissances 
en droit, ne peuvent faire oublier son avarice 
insatiable, son caractère bautain et inflexible, 
son ambition démesurée, se* entreprises insen- 
sées sur les droits des souverains , et surtout 
les guerres sanglantes qu'il alluma et entretint 
pendant les onge années de soq pontificat. On 
prétend que c'est lui qui le Premier donna le cha- 
peau rouge, aux cardinaux, Il a laissé : Appara- 
tu* super (fccrçfales, in-fol., souvent réim- 
primé* -r- JtePQtettate EccUs,\astieQ et Jurv- 
4icti<we JmpçrHj — Qffkiufli in octavisfesti 
fiativitatii £. tfax%#; ^ Interpretatianes 
in Vetm Tetfamentuw. On trouve dix-neuf 
lettres de ce papa dans les Conciles de Labbe, 
t, XI, p, 59a à, 632; quarante-butt dans Yltqlïa 
Sqçth d'Ugbelli, passim ; cinq dans X^Historix 
de Duchesne, t. V, p. 4t? et 861. — Innocent IV 
gut Alexandre JY pour successeur. 

Alfred Franklin. 

Labbe et Coatirt, Sacrosuncia Concilia, U7i, is toi. 
Vp-fol. ; \. XI, p. «97 à 716. - UghelU, Jfqlia Sacrai 
Venise, 1717, 10 vol. lu-fol. — Duchesne, Historiés Fran- 
corum Scriptores, 1717, 5 vol. In-fol. ; t. V. — Brnys, 
Uist. des Papes, 1789, 8 voL in-**; t. 111, p. ISS. - 
n«;n«l01i ContinMOtion de florflRiw» Lucanes. 174T, 
18 vol. In-fol. ; t. |I, p. «86 à S18. - Àlleti, Hist. des 
Papes, 1776, a voL in-ll ; t. !•», p. 185. — Flenry, ma. 
Ecclésiastique, 1767, 17 vol. in-4«;l. XVII, cb. uxm, 
rr JoiaviMe, Mémoires, cpltect. PetltoÈ, l>« série, t. Il, 
p. 78 à 111. — fit a Innocenta papœ IV, ex ms. Bern. 
Guidonis ; Vitâ ejusdem scripta a /ratre Nicolao de 
Ourpia; dais Muralovi, Berum italicansm Scriptores; 
Milan, 17.S3, «7 vol. tn-fpl. ; t. H|, p. 689 cl M*. - J, Hart- 
paapq, Pisjertatia, de Vita Innocenta ff,- 1788, ln-4». - 
Ph. de Mornay, Hist. de la Papauté. l«lt, in-h, p. S7€ 
à 404.— CUoontiH, fitm et Mes gett» PQ»ttfcum Borna- 
norwnitwa*) i<rn, T val. bi-IoLii,.)^ p. «S. — Paojo 
Panza, r\ta del qrm Pçntefiçe Innocenzio Quarto; 
Naples, 1601, tn-4°. 

iifNOÇEBiTY (f «Tr€ PP CnA»AGNi ou de 
Champ agmuco ) , cent quatre -vingt -onzième 
pape, successeur de Grégoire X, pé à Moustier 
en Savqie, en 1525.., élu le 20 janvier 1270, mprt 
à Rome le 22 juin 1276. Pierre de Champagni 
entra très-jeune dans l'ordre des Frères Prê- 
cheurs, où il acquit bientôt une grande réputa- 



909 



HWOCKNT 



910 



tion sous le nom de Pierre de Tarentaise; il 
succéda à saint Thomas d'Âquin dans l'ensei- 
gnement de la théologie à l'université de Paris, 
passa en 1272 sur le trône archiépiscopal de 
Lyon , puis fut nommé évéque d'Ostie et grand 
pénitencier. Élu pape dix jours après la mort de 
Grégoire X, il se rendit aussitôt a Rome, et fut 
couronné dans l'église Saint-Pierre, le 23 février 
1276. Son premier soin fut de rétablir la paix 
en Italie; il releva les Florentins des censures 
prononcées contre eux par son prédécesseur, et 
envoya en Toscane deux légats qui , unis aux 
ambassadeurs de Charles de Sicile, parvinrent 
à réconcilier les Lucquois et les Pisans. Enfin, 
il était sur le point de décider Michel Paléologue 
à confirmer l'acte de réunion fait au concile de 
Lyon, quand la mort l'emporta après un ponti- 
ficat de cinq mois et deux jours. Innocent V, 
qu'on avait surnommé fantosmimus doctor, 
a laissé des commentaires i Saper IV libros 
Senfentiantm ; Toulouse, 1652, 3 vol., in-fol, ; 
— Super Pentateuchum ; super Lucam; su- 
per Epistolas PûuH* Cologne, 1478; Anvers, 
1617, in-fol. — Divers traités : De Unitate 
Formée ; — De Materia Cœlij — De Mternitdte 
Mundi; — De Intellectu et Volttntate; et 
quelques autres ouvrages manuscrits dont on 
trouve les titres dans Quétif , Scriptores Ordi- 
nis Prœdicatorum ; Paris, 1719, 2 vol., in* 
fol. ; t. I er , p. 350. A. F. 

Labbe, t. XI, p. 1007. - Bruys, t. III, p. tes. - Claco- 
nlus, t. II, p. 203. - Raynaldi, t. III, p. 8OT * *0î. - Al- 
letz, t. il, p, n. — Fleury, Hv. XVllI, cb. lxxxyi. — 
A. du Chesue, Hist. des papes, 1653, 8 vol., In fol. ; t. If, 
p. 808. — J.-B. de Glen, Hist. pontificale, Liège, 1600, 
lu -4° ; p. 789. — Plfittna, Morte delta vite de i pontejùi „• 
Venise , 1618, In-**, p. 174. — F Ha Innocenta pupse V, 
ex ms. Bernardi Guidonis; dans Muratorl, t. III, p. 605. 

ixxocfeHT vi (Etienne Acbér), deux cent- 
troisième pape, successeur de Clément VI, et 
résidant à Avignon, né an village dn Mont, 
près de Pompadour (Limousin), érale 18 dé- 
cembre 1352, mort le 12 septembre 1361 Ao- 
ber avait professé le droit civil à Toulouse; 
appelé successivement à l'évéché de Noyon et 
à celui de Clermont, il fut créé cardinal en 
1342, et devint deux ans après évéque d'Ostie 
et grand -pénitencier. Après là mort de Clé- 
ment TI, les cardinaux, craignant que son suc- 
cesseur ne réprimât les abus ecclésiastiques, 
rédigèrent un règlement qui, à cet égard, Hait 
les mains du futur pape, et que tons jurèrent de 
respecter. Le premier soin d'Innocent, après son 
élection, fut d'annuler cet acte, qui restreignait 
son autorité en la soumettant, sur certains points, 
à la sanction des cardinaux ; puis H opéra trae 
partie des réformes qu'exigeait depuis si long- 
temps l'Église. Il obligea à la résidence les prélats 
et les bénéficiera, révoqua les commandes, sus- 
pendit les réserves qu'avait établies son prédé- 
cesseur, mit nn terme k l'impunité que le meurtre 
trouvait, à prix d'argent, auprès des officiers ec- 
clésiastiques, et assigna des revenus aux audi- 
teurs de la Rote pour laisser sur eux moins de 



prise à la corruption ; enfin, il réduisit le luxe 
de la cour pontificale et le faste des cardinaux* 
L'état de l'Italie ne réclamait pas moins impé* 
rieusement l'attention et l'énergie du pape : des 
tyrans dominaient presque toutes les villes sou- 
mises au saint-siége; Rome était le théâtre des 
plus grands désordres; l'anarchie y régnait. Pour 
ramener le pays à son obéissance, Innocent y 
envoya, en qualité de légat, le cardinal Gilles 
d'Albornos, accompagné de Nicolas Laurent, qui, 
sous le pontificat précédent, avait exercé à Rome 
une dictature éphémère. Le légat chercha d'a- 
bord à réduire Jean de Vico, qui, s'intitulant pré- 
fet de Rome, s'était emparé de quelques villes du 
patrimoine de Saint-Pierre; excommunié par 
Jean XXII et par Clément VI, il méprisait les 
censures ecclésiastiques. Albornos l'excommunia 
de nouveau et lui enleva la ville de Toscanelle. 
Les Romains, à la nouvelle de ce succès, traitèrent 
avec le légat, invoquèrent sa protection, et 
Laurent reprit son ancienne autorité sous ie titre 
de sénateur. Vers cette époque, Charles IV, em- 
pereur d'Allemagne, sacré à Aix-la-Chapelle, 
négocia avec lé pape pour être couronné à Milan 
et à Rome, selon l'usage. Innocent y consentit, 
mais en exigeant de lui la promesse de quitter 
Rome le jour même de ta cérémonie. Charles IV 
se sonmit à cette condition humiliante. Aussitôt 
après son couronnement, il prétexta une partie de 
châsse, et alla coucher à Saint-Laurent hors de» 
murs. Cette condescendance lui fut amèrement 
reprochée par le poète Pétrarque qui, dans une 
lettre très-violente, l'accusa d'avoir abaissé sa 
dignité d'empereur. La même année, Jean Pa- 
léologue offrit au pape de soumettre l'Église 
grecque à l'autorité du saint-siége ; pour prix 
de son concours, il demandait des secours contre 
Mathieu Cantacuzène ; mais cette condition, qu'In- 
nocent ne put remplir, fit échouer la proposition. 
Le saint-siége eut d'ailleurs bientôt besoin de 
concentrer autour d'Avignon tontes ses forces 
disponibles. Après la bataille de Poitiers, une 
partie des troupes françaises se débanda, et, sous 
la conduite d'Arnaud de Cervole, gentilhomme 
du Périgord, se répandit dans la Provence, qu'elle 
saccagea; les licenciements qu'amena la paix 
de Brétlgnv grossirent encore leur troupe, qui 
étendit ses dévastations et pilla la vine de Saint- 
Esprit, située sur le Rhône, à sept lieues d'Avi- 
gnon. Le pape, effrayé, prêche aussitôt une croi- 
sade, mais sans succès; car le mauvais état des 
finances empêchait de soutenir les fidèles autre- 
ment que par des indulgences. Innocent VI mou- 
rut à Avignon après tin pontificat de dix années; 
les historiens louent sa droiture, sa charité et la 
protection qu'il accordait aux gens de lettres. 
Sous son pontificat, les Fratricelles, qui persis- 
taient à attaquer l'autorité du saint-siége, su- 
birent de nouvelles persécutions et deux d'entre 
eux furent brûlés à Montpellier. Un frère mineur, 
nommé Jean de Rochetaillade, eut le même sort 
à Avignon, pour avoir prêché contre ka abus eo 



ait 



INNOCENT 



912 



clésiastiques et les envahissements de la papauté. 
On a une lettre d'Innocent dans les Conciles de 
Labbe, t XI, p. 1930 ; quatre dans YltaliaSacra 
d'Ughelli, et deux cent chiquante dans le Thé- 
saurus de D. Martène, t. II, p. 843 à 1072. — 
Innocent VI eut pour successeur Urbain Y. 

A. F. 
Labbe, t. XI, P. 1MI à IMS. — Broya, t III, p. 464. — 
Allets, t. II, p: »8. - A. du Chesne, t. II, p. Ml. — Rey- 
naldl, t. VI, p. 871 à 688; VII, 1 à 77. — Flenry, lir. XX, 
ch. ucxxxvi. — PiatJna, p. 1M. — De Glen, p. 819. — 
VeUy, VUlaret et Oarnltr, t. IX, p. 49. - Martène, Thé- 
saurus novus Jnecdotorvm; Paris, 1717, s vol. In-foL; 
t H, p. 848. — ststnondl, Uist. des Français» 1844, 81 t. 
in 8°; t. X, p. 897 à 886. 

MHoeBHT ¥ii (Corne Meuorati), deux 
cent dixième pape, successeur de Boniface IX , 
néà Sulmone,dans PAbruzze, en 1336, élu à Rome 
le 17 octobre 1404, mort dans cette ville le 
6 novembre 1406. On était au milieu du grand 
schisme d'Occident; la lutte continuait entre les 
papes.de, Rome et ceux d'Avignon; A la mort de 
Grégoire XI (1378), les Romains, Irrités de voir 
les papes tixrer la ville sainte au désordre et à la 
misère pour aller voluptueusement s'ensevelir 
dans les délices de la cour d'Avignon, avaient 
réclamé avec. menaces un pontife italien; les car- 
dinaux nomment le Napolitain Urbain iVI. Mais 
bientôt, fatigués , eux aussi , du séjour de Rome, 
ils déclarent que cette élection leur a été arrachée 
par la violence; ils somment le nouveau pape 
d'abdiquer, et, sur son refus, ils le remplacent par 
Robert de Genève, qui prend le nom de Clé- 
ment VII. L'Europe se partage entre les rivaux, 
qui s'excommunient réciproquement, et une lutte 
terrible commenee. Urbain meurt. Boniface IX 
prend sa place; Clément VII meurt, Benoit XIII 
lui succède, et la guerre continue. La France 
et l'Angleterre, impatientes de mettre fin au 
schisme, se réunissent, et, au nom de la paix, 
supplient les deux papes d'abdiquer la tiare. 
Ceux-ci se cramponnent au saint-siège; mais un 
violent accès de colère emporte Boniface IX. Les 
cardinaux s'assemblent et jurent sur l'Évan- 
gile que celui d'entre eux qui sera élu emploiera 
aussitôt tous les moyens propres à rendre la 
paix à l'Église, sans excepter même l'abdication. 
Les suffrages se portent sur Cosme Meliorati qui 
prend le nom d'Innocent YII. C'était un bon 
choix. Innocent avait passé par tous les grades 
de l'état ecclésiastique, et avait successivement 
occupé les sièges de Ravenne et de Bologne; 
enfin , ce qui valait mieux dans les circonstances 
où se trouvait l'Église , il était doux, affable, 
rompu aux affaires et d'uneconduiteirréprochable. 
Innocent notifia son élection à tous les princes 
de l'Europe dans des lettres qui respirent le plus 
ardent désir de la paix ; Benoit XIII y répond 
en accusant son concurrent de parjure, et la fac- 
tion, de Benoit excite à Rome des séditions si 
violentes qu'Innocent doit se sauver à Viterbe, 
après. avoir plus d'une fois couru le risque d'être 
massacré. Les deux papes recommencent leurs 
protestations en faveur de la paix, et s'accu- 



sent i^proquement de mettre leur propre in- 
térêt au-dessus des intérêts';de l'Église. Inno- 
cent peut enfin rentrer à Rome devenue plus 
tranquille. Il y mourut, d'apoplexie suivant tes 
uns, par le poison suivant les autres, après m 
pontificat de deux années. Les cardinaux se réu- 
nirent , et chacun s'engagea solennellement, s'A 
était élu, à renoncer à son droit aussitôt qoe 
Benoit XIII renoncerait au sien; le choix se 
porta sur Grégoire XII; on a vu (t XXI, 
page 822 ) de quelle manière il tint son serment 
On trouve une lettre d'Innocent Vil dans Yltaha 
Sacra d'Ughelli, t. I er , p. 1381; on a en encore 
de lui Oratio de Ecclesiastica Unione; — ip- 
probatto régula fratrum et sororum depm- 
tentia ordinis S. Dominici. A. F. 

Labbe, t. XI, p. 9089. — Bruys, t. III, p. 688.— BayuMi, 
L VIII, p. 119 à 166. - Fleury, lir. XX, ch, 99. - a. du 
Cbesne, t. II, p. 998. - J.-B. de Glen , p. 880 — AOetz, 
t II, p. 198. — Platlna, p. 906. — Sismondi , L XU, 
p. Ml. - Santo-Domingo, Esprit des Papes; 1889, tu-*; 
p. 178. - Malmbonrg, Hlst. du grand Schisme d'Oc- 
cident. - Martène, Thésaurus, t. II. — Léoaard 
Aréttn ( Bruni d'Arezzo ), De Rébus ItaUeis et Bpislolx 
famiiiares. — Jnvénat dea Uralns; Bist, de Charles rn. 
— Ciaconins , t. II, p. 71t. - Lenfant, Hist. du Concile 
dePise. 

isnocKsrriu (Jean-Baptiste Cmo) y deux 
cent vingt-deuxième pape, successeur de Sixte IV, 
né à Gênes en 1432 , élu le 24 août 1484 , mort 
le 25 juillet 1492. La famille d'Innocent était 
originaire delà Grèce ; son père s'appelait Aaroo; 
lui-même était resté longtemps au service d'Aï- 
fonse d'Aragon, roi de Naples. Paul II 1m 
donna l'évèché de Savone et Sixte IV celui de 
Melfe , et il fut fait cardinal en 1453. Sa con- 
duite avait été fort déréglée; il avait eu sept 
enfants de différentes femmes; il était d'ailleurs 
marié avant son entrée dans les ordres. Des 
troubles sérieux suivirent la mort de Sixte IV, 
et l'élection du nouveau pape fut loin d'être 
édifiante. A la tête des intrigants qui agitaient 
le conclave était le chancelier Borgia, si hon- 
teusement célèbre depuis sous le nom d'A- 
lexandre VI ; ses brigues en faveur de Cibo réus- 
sirent. Innocent VIII acheta la tiare moyennant 
des bénéfices, des légations, des palais et des 
sommes considérables ; c'est donc par allusion 
plutôt à son .nom qu'à sa conduite» qu'il prit 
pour devise ces paroles du psaume 25 : Ego 
autem in innocentia mea ingressus sum. Son 
premier soin fut de travailler à réconcilier les 
princes italiens et à rapprocher du saint-siége 
ceux que son prédécesseur en avait éloignés. Mais 
Bajazet, à la tête des Turcs, poursuivait ses 
conquêtes, et ses nouveaux préparatifs sem- 
blaient menacer l'Italie. Le pape, alarmé, écrit à 
tous les princes chrétiens, et les invite à terminer 
leurs différends, pour s'opposer à l'ennemi com- 
mun du christianisme , et à envoyer de l'argent 
s'ils ne sont pas en mesure de lever des trou- 
pes. Des sommes immenses furent ainsi recueil- 
lies par le saint-siége, qui n'entreprit rien contre 
les Turcs, sous prétexte que l'on ne pouvait ar- 



013 



INNOCENT 



914 



rôter l'ennemi sans la participation des princes al- 
lemands ; et les guerres qui divisaient Mathias, roi 
de Hongrie, et l'empereur Frédéric, Albert de Bran- 
debourg et Othon de Bavière, ne leur permettaient 
pas de prendre part à la croisade. C'est contre le 
roi de Naples que ces richesses furent employées : 
Ferdinand I er refusait de payer au pape le tribut 
accoutumé de quarante mille écus d'or, soute- 
nant que la reine Jeanne n'avait cédé au saint- 
siège le comtat d'Avignon que pour remplacer 
cette redevance. Ferdinand commence par apaiser 
les seigneurs de son royaume ; il s'efforce en- 
suite d'engager Innocent dans une guerre civile; 
il met tout en œuvre pour soulever le peuple et 
les cardinaux contre le pontife et faire déclarer 
son élection irrégulière. Innocent place son 
armée sous le commandement de San-Severino ; 
mais déjà les environs de Rome ont été saccagés, 
Florence et Milan tiennent pour Ferdinand, 
Venise et Gènes pour le pape ; l'Italie est en feu. 
La paix se conclut enfin, mais le roi de Naples 
refuse d'exécuter les clauses du traité* Innocent 
l'excommunie et le déclare privé de son royaume 
au profit du roi de France (Charles VIII), qui 
prétendait y avoir des droits. Ferdinand se rit 
de cette sentence, arme le roi de Hongrie contre 
le pape, et fait égorger, après un repas, quel- 
ques seigneurs romains. Innocent prononce 
contre lui deux nouvelles sentences d'excom- 
munication ; puis, ne pouvant réussira organiser 
une croisade pour soutenir le saint-siége dans 
cette lutte, il presse Charles VUI de venir prendre 
possession du royaume de Naples, et Ferdinand 
se soumet en apprenant les préparatifs faits dans 
ce but par le roi de France: 

Les Turcs étaient toujours menaçants. Zizim, 
pour fuir la colère de Bajazet, son frère, avait 
dû se réfugier à Rhodes, et le grand maître 
(d'Aubusson) le faisait garder en France. La 
plupart des princes désiraient avoir Zizim en 
leur pouvoir; d'Aubusson le livra au pape, 
contre le chapeau de cardinal. Zizim fut pré- 
senté au pontife dans un consistoire public par 
l'ambassadeur de France, mais on ne put le 
décider à baiser les pieds du pape. Une fois 
maître de Zizim, Innocent déclare qu'il est résolu 
à une guerre acharnée contre les Turcs ; tous 
les princes chrétiens sont prévenus : on convient 
que chacun contribuera à cette sainte croisade 
contre l'infidèle en envoyant des troupes, des 
armes , ou de l'argent, et que le pape pourra 
partout lever les annates et les décimes. Sur 
ces entrefaites, on arrêta à Rome un misérable 
nommé Macrin, qui avoua être envoyé de Constan- 
tinople par Bajazet pour tuer Innocent et Zizim ; 
par ordre du pape , Macrin fut déchiré avec 
des tenailles rougies au feu. Bajazet ne re- 
nonça point à ses projets contre son frère; il 
dépêcha un ambassadeur à Innocent pour lui 
proposer une alliance et lui offrir cent vingt 
mille écus d'or s'il veut retenir Zizim en prison. 
L'ambassadeur turc est reçu à Rome en grande 



pompe ; des officiers du saint-siége vont au-devant 
de lui ; il est admis en audience publique en ' 
présence de tout le sacré collège. Innocent ac- 
cepte l'indigne marché qu'on lui offre, et en 
reçoit le prix , conduite d'autant plus odieuse 
que le Soudan d'Egypte venait de demander 
Zizim pour le mettre à la tête de l'armée qui 
marchait contre Bajazet ; il proposait, en échange, 
de rendre Jérusalem aux chrétiens, et de re- 
mettre au pape toutes les conquêtes que l'on 
ferait sur les Turcs. Bajazet, du reste, se montra 
généreux envers son complice : le 29 mai 1492 
il lui envoya le fer de la lance dont on avait 
percé le flanc de Jésus-Christ sur la croix ; il 
provenait des trésors que Mahomet II avait re- 
cueillis après la prise de Constantinople. Tout 
le clergé alla en grande cérémonie recevoir cette 
relique, qui était en Europe la troisième de son 
espèce ; car l'empereur d'Allemagne croyait l'avoir 
à Nuremberg et le roi de France à la Sainte-Cha- 
pelle. En 1491, Innocent, à la suite d'une attaque 
d'apoplexie, avait perdu beaucoup de sa liberté 
d'esprit; il eut dès lors un pressentiment 
de sa fin prochaine. Il se prépara à la mort 
avec résignation et se reprocha les immenses 
richesses qu'il avait accumulées sur ses enfants 
légitimes et naturels. — Innocent VIII avait con- 
firmé (1485) l'institut des religieuses de la Con- 
ception, que Béatrix de Sylva avait fondé à 
Tolède. Il canonisa (1485) Léopold d'Autriche, ~ 
mort au douzième siècle en odeur de sainteté; 
il condamna les thèses de Jean Pic de La Miran- 
dole (1487) , autorisa la réunion à la couronne 
d'Espagne des trois ordres militaires de Cala- 
trava, de Saint- Jacques, et d'Alcantara( 1488) ; il 
consentit, sur la demanded'Henri VII, à diminuer 
les privilèges du droitd'asile en Angleterre (1488) ; 
il approuva la Confrérie de la Miséricorde, insti- 
tuée à Rome pour assister les criminels con- 
damnés à mort et avoir soin de leur sépulture 
( 1490 ). On a deux lettres de ce pape dans 
Vltalia Sacra d'Ughelli, t. I, p. 710 ; V, 948. 
Innocent VIII eut Alexandre VI pour successeur. 
Alfred Franklin. 

Labbe, t. XIII, p. 1*61. — Braysj t IV, p. t«s. - 
Raynaldlj € XI, p. 98 à 107. - Fleury, liv. XXIII, 
cb. xv. — A. Ducheane , t. II, p. 350. — J.-B. de Glen, 
p. 85S — AUetz, t. 11, p. 186. — Santo- Domingo, p. soo. 

— Sismondl, t. XIV, p. 60»; XV, 8. — Ciaconius, t. lir, 
p. 90. — Ph. de Mornay , p. 609. - F. Serdonatl, Fita 
e Fatti d'innocenzo FUI s Milan, 1819, tn-8°. — Léger, 
Hist. des Églises vaudoUe$> t. H. — De Prades, Abrégé 
de rBist. ecclésiastique, Berne (Berlin ), 1766. t t. in-12; 
t. H, p. 193. — F.-M. Vlalardo, Istoria délie Vite de* Som- 
mi Ponteftcii Innocenzo FUI....,; 1618,ln-fol. - De 
Potter, Esprit de l'Église, îsit, 8 v. ln-8« ; t. iv, p. 183. 

— Macquer et Lacombe, Abrégé de l'Hist. ecclé$. % 1757, 
îv. tn-8°; t. H, p. «98. — Comlnei, H émoiret, llv. vu, 
en. I". 

innocent ix ( Jean- Antoine F kCBnuBm), 
deux cent trente-neuvième pape, successeur de 
Grégoire XIV, né à Bologne en 1519, élu le 
30 octobre 1591 , mort le 30 décembre de la 
même année. Le court pontificat d'Innocent IX 
fut employé tout entier en réformes intérieures ; 



915 



INNOCENT 



916 



le nouveau pape se conduisit avec tant de pru- 
dence qu'il sut contenter en même temps la 
noblesse, le peuple et les ministres étrangers. 
Rempli d'un ardent désir de soulager la misère 
des Romains , il tint après son couronnement un 
consistoire où il exposa les desseins qu'il avait 
conçus dans ce but. Il voulut qu'on établit une 
caisse de secours pour subvenir aux besoins du 
peuple et du saint-siége, qu'on diminuât les im- 
pôts et qu'on prit toutes les mesures néces- 
saires pour faire renaître l'abondance ; il exprima 
l'intention de faire nettoyer le port d'Aucune 
pour faciliter la navigation , et de creuser un 
canal près du château Saint- Ange, afin de mettre 
la ville de Rome à l'abri des fréquentes inonda- 
tions du Tibre. Malheureusement la mort le sur- 
prit avant qu'il eût eu le temps de mettre ces 
projets à exécution. Innocent IX, quoique d'un 
extérieur grave et sévère, était doux et affable ; ses 
mœurs étaient très-pures et sa sobriété extrême. 
Il eut Clément VIII pour successeur. A. F. 

Lskbbe, t. XV, p. UM. ~- Brajs t, V, p. 100. - AUetx, 
t. II. p. 3SS. — Du Chesne» t. II, p. 4M. - De Gieo, p. 888. 

- FÎeury, Hv. XXVI, ch. 179. — Slsmondl, t. XXI, p. 1**. 

— ClacoDius, t. IV, p. S9S. — Ranke, Hlêt. de la Papauté 
pendant le seizième et le dix-septième siècle, traduction 
de J.-B.HaUer, 1838, fi vol. in 8°; t. 111. p. «78. -Palma- 
Cayet, Chronologie Novenaire et Journal de l'Estoile; 
dans la Collection Pet» tôt, t. XL, p. 343; XLVI, «00. - 
B. JusUntani, OraHo habita infunere Innoeentii IX; 
Rome, 1598, Uh4°. 

innocent x ( Jean - Baptiste P/ucnu), 
deux cent quarante-cinquième pape, successeur 
d'Urbain VIII, né à Rome, en 1579, élu le 15 sep- 
tembre 1644, mort le 7 janvier 1655. Le conclave 
qui porta InnoeentX au trône pontifical fut fort 
agité : les Barberini, neveux d'Urbain VIII, pres- 
saient l'élection de Sachetti ; sur l'opposition du 
parti espagnol, ils présentent Ferenzola, car- 
dinal de Saint-Clément ; le parti français le re- 
poussa parce qu'il était connu comme ennemi de 
Maiarin. Grâce à cette double exclusion , Panfili 
put être élu ; il avait été successivement avoeat 
consistorial, auditeur de la Rote , nonce à Naples, 
dataire dans la légation de François Barberini 
en France et en Espagne ; enfin Urbain VIII l'a- 
vait créé cardinal en 1629. Les historiens sont 
loin d'être d'accord sur la personne et le carac- 
tère d'Innocent X ; les ans le représentent comme 
un homme de haute stature, d'un regard impo- 
sant, d'une démarche grave et majestueuse , unis 
à un naturel hardi , à une âme élevée , à une pé- 
nétration merveilleuse; les autres disent qu'il 
était laid , difforme, faux, artificieux , ignorant, 
et qu'il contrefaisait admirablement en public 
Une dévotion qu'il raillait en secret. Quoi qu'il 
en soit, Innocent X , ennemi déclaré du cardinal 
Mazarin , ne tarda pas à rompre la paix que la 
France avait négociée entre le saint-siége et le 
duc de Parme; l'occasion se présenta d'elle- 
même. Innocent X nomme à Vévêché de Castro 
un évêque dont Rainuce II, duc de Parme, avait 
eu à se plaindre ; celui-ci prie le pape de faire un 
autre choix, l'évêque nommé appuie lui-même 



cette demande, Innocent X n'a aucun égard à ces 
représentations ; l'évêque est sacré , et il allait 
prendre possession de son siège quand il meurt 
assassiné» Ce crime avait été commis avec de 
telles précautions que le coupable ne put être 
découvert. Innocent en accuse Rainuce , fait dé- 
molir la ville de Castro et élève sur son empla- 
cement une pyramide portant cette inscription : 
Qui fit Castro; en même temps le duc est dé- 
claré déchu de son trône. Innocent montra la 
même énergie vis-à-vis des Barberini, qui avalent 
appuyé son élection ; irrités de voir le pape dis- 
penser à ses neveux des grâces et des fonctions 
auxquelles ils croyaient que leur dévouement 
leur avait donné droit , ils se plaignirent haute- 
ment ; le pape répondit en les accusant de con- 
cussions et en dirigeant contre eux des pour- 
suites. Le cardinal Antoine Barberini, plus exposé 
que les autres en cette circonstance à cause de 
ses fonctions de camerlingue, implora l'appui 
du cardinal Mazarin, et se réfugia en France, on 
il rat reçu avec distinction ; il gagna même si 
bien la cour qu'il fut pins tard (1653) nommé 
archevêque de Reims. Mais Innocent fit aussitôt 
saisir ses biens , et distribua ses titres et ses 
charges à de nouveaux favoris. François Barbe- 
rini n'avait pas tardé à rejoindre son frère en 
France ; Innocent publia contre eux une bulle 
terrible (21 février 1646): elle déclarait que les 
cardinaux qui s'éloigneraient sans autorisation 
verraient tous leurs biens confisqués ; s'ils n'é- 
taient pas revenus six mois après la publication 
de la bulle, ils seraient dépouillés de leurs bé- 
néfices, de leurs emplois, et l'entrée des églises 
leur serait interdite; enfin, s'ils persistaient dans 
la désobéissance, ils seraient privés du chapeau 
de cardinal , et le sacré-collége lui-même ne pour- 
rait le leur rendre. Tous les cardinaux alors ab- 
sents de l'État ecclésiastique se trouvaient at- 
teints par cette bulle, qui dérogeait à tous les 
canons , à toutes les constitutions apostoliques et 
à toutes les décisions des conciles. Innocent 
avait ainsi trouvé moyen d'attaquer à la fois les 
Barberini et leur protecteur le cardinal Mazarin, 
qui ne se souciait nullement d'aller vivre à Rome 
en simple particulier; il montra d'ailleurs qu'il 
était assez fort pour braver de tels coups. Le par- 
lement de Paris fut saisi de cette bulle par suite d'un 
appel comme d'abus, et M. Talon, avocat général , 
la signala comme nulle et abusive. Aussitôt un 
arrêt du conseil défend d'envoyer désormais de 
l'argent à Rome pour l'expédition des bulles , et 
on menace le pape de lui enlever Avignon. Quel- 
ques préparatifs ont lieu dans ce but ; Innocent 
change alors de ton , cherche à se réconcilier avec 
les Barberini, et notifie bientôt, qu'à la considéra- 
tion du roi très-chrétien qui les avait honorés de 
sa protection , il leur rend leurs biens et leurs 
dignités. 

Le soulèvement de l'Italie méridionale fournit 
à Innocent X une nouvelle occasion de s'incliner 
devant la puissancede Mazarin. L'Espagne, ruinée 



91T 



WN0CKNT 



018 



par la guerre, mit dû Obliger les vice-roi» de 
Naples et de Sicile à surcharger le peuple d'im- 
pôts; une révolte éclate à Naptes et à Palerme ; 
Henri If, duc de Guise, était alors a Rome, où il 
sollicitait la cassation de son mariage avec la 
comtesse de Bossu, afin de pouvoir épouser ma* 
(lemoisalle de Pons. Henri de Guise, descen- 
dant du roi fiené par les femmes, avait des droits 
sur )« royaume de Naples; les Napolitains rap- 
pellent à leur secours et s'offrent h lui, Innocent, 
espérant plaire h 1% France , engage vivement le 
jeune prince à tenter l'expédition ; elle échoue 
par la volonté de Mazarin, qui refuse de la sou- 
tenir, Innocent donne alors le chapeau à pierre 
Mazarin, archevêque d'Aix et (rare du cardinal- 
inini^ti'cçpmptantparsonînflnencefaire restituer 
pjqjntrino au mince fcudovisio, son neveu, Mar 
zarjn se montra fort peu sensible & une faveur 
qu'on lui avait fait trop longtemps attendre; il 
remercia h peine le pape, et ne fit rien en faveur 
de Ludovtsio. Il est temps de parler d'une femme 
qui joua un grand rôle squs le pontificat d'Inno- 
cent X : la liaison de dona Olympia Maldacbjni 
avec le pape, son beau-frère, datait de loin ; cette 
femme avait su prendre sqr lui un ascendant qui 
grandit encore avec le temps. Bruys (t. V, 
p. 202 ) dit qu'elle lui avait appris l'art de tout 
dissimuler, sauf l'amour qu'il avait pour elle. 
Les choses en vinrent au point que dona Olympia 
sembla occuper seule le trône pontifical; elle 
recevait les placées et entendait les plaintes du 
peuple, donnait audience, faisait et abrogeai \ 
des règlements- D'une avarice sordide, elle se 
servait, pour satisfaire cette passion, de l'empire 
qu'elle avait sur l'esprit du pape , et vendait au 
plus offrant les charges civiles et ecclésiastiques. 
Olympia fut bientôt l'objet de la haine publique; 
en 1649, les satires et les pamphlets dirigés contre 
le pape et sa belle-sœur devinrent si nombreux 
et virulents , qu'Innocent dut se résoudre à la 
renvoyer ; mais il la remplaça presque aussitôt 
par la princesse de Rossano, sa nièce, et les sa- 
tires recommencèrent. Cette nouvelle favorite 
activa la pomination au cardinalat du chef de la 
Fronde, Paul de Retz, coadjuteur de Paris (1652). 
Marçarjn, irrité, fait enfermer le nouveau cardinal 
au château de Vincennes; le pape envoie à Paris 
l'arphevêque de Lyon pour exiger que le juge- 
ment du prisonnier soit réservé au saint-siége; 
mais le prélat trouva à Lyon une défense de 
passer outre. L'archevêque de Paris mourut 
sur ces entrefaites, et sa mort fit naître une 
autre contestation : le pape et le cardinal Ma- 
zarin prétendaient tous deux au droit de pour- 
voir au gouvernement du diocèse ; on convint 
que le premier choisirait pour grand vicaire 
un des sujets que proposerait le second. Une 
lutte plus grave se préparait : la fameuse dis- 
pute sur la grâce, entre les jésuites et les jan- 
sénistes, se compliquait chaque jour. Dès 1650, 
Habert, évéque de Vabres, avait dénoncé au 
pape cinq propositions attribuées à Jansenius, 



et qui, l'année précédante, avaient été déférées 
à la faculté de théologie ; Innocent établit pour 
les examiner une congrégation particulière qui 
tint sa première séance le 20 avril 1651 ; de 
Saint-Amour et quelques autres docteurs, que 
les jansénistes avaient envoyés à Rome, furent 
entendus le 19 mai 1653. Mais le P. Annat, jé- 
suite, nous apprend que la décision était déjà prise 
et rédigée, Enfin le 30 mai Innocent donna une 
bulle (Cum occasione) pour la condamnation 
des cinq propositions, qui y sont qualifiées cha- 
cune en particulier et déclarées fausses , héré- 
tiques , scandaleuses , impies , et blasphématoi- 
res. Louis XIV, par lettres patentes du 4 juillet, 
autorisa la réception de cette bulle en France; 
le H les évoques présents à Paris l'acceptèrent 
à l'unanimité, et dressèrent le formulaire d'ac- 
ceptation, qui fut envoyé à tous les prélats du 
royaume. Innocent X ne survécut pas longtemps 
à la conclusion de cette affaire. Accablé de vieil- 
lesse, tourmenté par de violentes attaques de 
goutte, incapable de se tenir debout, il rappela 
auprès de lui dona Olympia, qui eut bientôt re- 
pris sur lui toHt l'empire qu'elle avait eu précé- 
demment; elle sut lui inspirer la crainte que des 
ennemis ne cherchassent à l'empoisonner, et dès 
lors il se confia tout entier à elle. Dona Olympia lui 
donnait à manger, prenait ses repas auprès du lit 
du vieillard, et défendit qu'on l'approchât en son 
absence. A la fin de décembre, les médecins le 
condamnèrent; personne n'osant lui annoncer 
son état, le cardinal Azzolina en chargea un 
théatin, confesseur du pape. Cette nouvelle 
sembla réveiller Innocent de sa torpeur; il donna 
sa bénédiction à ses neveux et nièces, puis aper- 
cevant près de son Ut le cardinal Sforce, 4 il lui 
dit : « Vous voyez où vont aboutir toutes les 
grandeurs pontificales. » Il ordonna ensuite qu'on 
laissât ouvertes pendant trois jours les portes du 
palais, afin que tout le monde pût approcher de 
son corps. 11 mourut dans la nuit du 6 au 7 jan- 
vier, âgé de plus de quatre-vingts ans. U avait fait 
bâtir a Rome deux magnifiques églises, et laissa 
des trésors immenses, qui furent d'un grand se- 
cours à Alexandre VII, son successeur. On a im- 
primé à Paris : Décret du pape Innocent X qui 
condamne, cette proposition : Saint Pierre et 
saint Paul sont deux chefs de V Église qui 
n'en font qu'un ; 1647, in-4°; — Bulle d'In- 
nocent Xoii sont définies et déterminées cinq 
propositions en matière de foi , avec la décla- 
ration de S, M* pour l'exécution de la bulle; 
1653, hH*. Alfred Franklin. 

Bruyfl, t. V, p. «M. — A. Du Cbesne, t. II, p. 83*. — 
Aanke, t. IV, p. fis. - Alletz, t, II. p. 899. — De Prades, 
i. II, p. atû. - De Polter, t. IV, p. Ml. - Ciaconius, 
t. IV, p. 64*. - Slsmondl, t XXIV, p. 78. - Relation des 
Délibérations du clergé de France sur la Constitution 
et sur le Bref de If. S. P. le pape Innocent X ; Paris, îew, 
ia-fol. - De Latane, Défense de les Constitution du pape 
Innocent X et de la Foi de l'Église; 1688, in-4°. - De 
Electione.lnnoeentii X; Helmeataedt, 1651, in-4°. — An- 
érsa TaurelH, De novistima Elections Innocenta X ,- 
Bologne, 1M4, la-fol. — Fie de madame Oiyyipe Mal' 
daçHni, qui a gouverné l'Église pendant le pontilcat 



919 



INNOCENT 



920 



d'Innocent X; AmterJam, Mil, ta-ia, - Mémoires de 
Fontmaw-Mareuil; dut ta Collection Petïtot, i* série, 
L U, p. tlO à SSl. — O. Talon, Mémoires, 17*1, 8 vol. 
in-8° ; t. III, p. «M à M9 ; IV, i à 4t. - Aubéry. Hist. du 
cardinal Mazarln , livre II. — Mémoires du cardinal de 
Bel*, llrre III. - De Harrey, Hist. de Louis XI r. - Mé- 
moires d'Henri de Guise; Paria, 1671, in-ii, livre 1". — 
L. de Saint-Amour, Journal de ce qui s'est fait à Rome 
dans l'affaire des cinq propositions; Paria, 1661, tn-fol. 
- J.-C Botsteaacher, Historia Innocenta X ; 1676, in-*». 

innocent xi ( Benoit Odescàixhi ) , deux 
cent quarante-neuvième pape, successeur de 
Clément X, né à Corne, dans le Milanais, en 161 1 , 
élu le 10 septembre 1676, mort le 21 août 1689. 
Odescalchi avait failli être élu au conclave précé- 
dent ; l'austérité de ses mœurs, sa sévérité avaient 
seules effrayé les cardinaux, qui lui préférèrent 
Clément IX. La famille d'Innocent XI s'était en- 
richie dans le commerce; lui-même, après avoir 
fait ses études chez les jésuites, avait suivi 
quelque temps la carrière des armes ; à la suite 
d'une blessure assez dangereuse, il se fixa à 
Rome, et entra dans les ordres. Urbain Vin le 
fit successivement protonotaire apostolique, pré- 
sident de la chambre, commissaire de la pro- 
vince de la Marche et gouverneur de Macerata, 
Innocent X le créa cardinal en 1647, nomination 
due à l'influence de dona Olympia ( voy. Inno- 
cent X). Pendant les premières années de son pon- 
tificat, Innocent XI s'efforça de rétablir la discipline 
ecclésiastique, de corriger les abus qui s'étaient 
glissés dans l'Église, de faire revivre chez le 
clergé la science et la vertu ; il défendit sévère- 
ment l'us.ure aux juifs ; il renvoya dans leurs 
diocèses tous les évêques qui habitaient Rome; 
il pourvut libéralement aux besoins des pauvres, 
et assijma une pension considérable à la reine 
Christine , qui s'était réfugiée au pied du Va- 
tican; enfin il envoya des nonces en Espagne , en 
Portugal et en France pour engager ces États à 
la paix. A l'égard du dernier, l'exhortation eut 
peu de succès; le pontificat d'Innocent XI fut 
presque exclusivement rempli par des démêlés 
avec la France, et le caractère hautain du pon- 
tife dut plus d'une fois s'humilier devant le fier 
despotisme de Louis XIV. Les querelles com- 
mencèrent à l'occasion des franchises : à Rome 
les palais des ambassadeurs ne jouissaient pas 
seuls de l'inviolabilité; ce droit s'étendait encore 
sur toutes les places et rues qui les entouraient; 
aucun officier de police ne pouvait s'y montrer. 
Plusieurs papes avaient vainement tenté de ré- 
former cet abus; les bulles rendues à cet égard 
par Jules II, Pie IV, Grégoire XIII et Sixte V 
étaient restées sans exécution. Alexandre VII 
ayant laissé violer les franchises, Louis XIV 
saisit Avignon , et força le pape à céder. Inno- 
cent XI, inflexible dans ses volontés , osa rallu- 
mer la querelle : il publia une déclaration qui 
abolissait les franchises et autorisait les gens 
chargés de la police à pénétrer partout pour 
exercer leurs fonctions. Louis XIV déclara qu'il 
ne renoncerait jamais à aucun droit de sa cou- 
ronne; les autres nations promirent de céder dès 



que la France leur en donnerait l'exemple ; la que- 
relle s'assoupit cependant , mais pour se réveiller 
plus vive encore dix ans plus tard. Un nouveau 
démêlé venait de naître. On sait que la régale 
était , entre les mains du roi , le droit de toucher 
les revenus des évêchés du royaume , et de con- 
férer, pendant la vacance des sièges, les bénéfices 
qui n'ont point charge d'âmes. Louis XIV en 1673 
avait rendu un édit pour étendre le droit de ré- 
gale dans les provincesdeLanguedoc, de Guyenne, 
de Provence et de Dauphiné, qui jusque-là en 
avaient été exemptes; cet édit ayant soulevé 
quelque opposition, Louis XIV en donna un se- 
cond en 1675; cette fois les évêques d'Alet (Pa- 
villon) et de Pamiers (Cauiet) protestèrent 
seuls; le roi fit saisir les revenus de leurs évê- 
chés , et nomma", par droit de régale , aux béné- 
fices vacants dans leurs diocèses ; les deux évê- 
ques excommunient les nouveaux benéficiers et 
portent plainte à Innocent XI. Le pape prend 
parti pour les évêques, et envoie au roi un bref 
(27 décembre 1679) dans lequel il Y exhorte à 
rétracter et abolir V ordonnance et tout et 
qui a été fait contre la liberté et les droits 
de V Église; autrement, le pape craint très-fort 
que le roi n'encoure l'indignation céleste. 
Louis XTV n'en tint aucun compte. La mort des 
évêques d'Ales et de Pamiers ne termina pas le 
différend : le chapitre et les grands vicaires ré- 
sistaient toujours; de son coté l'archevêque de 
Toulouse, métropolitain de Pamiers, nomme on 
vicaire général qui défend le droit de régale, et 
le parlement de Toulouse fait le procès au Père 
Cèle, qui se disait grand-vicaire du. diocèse de 
Pamiers ; du fond de sa prison , Cèle casse tontes 
les sentences de l'archevêque , et excommunie le 
grand-vicaire et le promoteur nouvellement nom- 
més. Deux brefs du pape viennent encore sou- 
tenir les anti-royalistes et envenimer la querelle. 
Le clergé de France demandait un concile géné- 
ral pour maintenir les droits de l'Église gallicane 
et de l'État; le roi convoque une assemblée gé- 
nérale. L'assemblée déclara ( 3 février 1682) 
qu'elle approuvait l'extension du droit de régale; 
qu'elle approuvait l'édit du roi. L'assemblée dé- 
cida qu'elle écrirait à Innocent, au nom de tout 
le clergé de France, pour lui faire connaître cette 
décision. En attendant la réponse de Rome, l'as- 
semblée continua ses séances ; résolue à mettre 
un terme aux empiétements du saint-siége et à 
fixer d'une manière solennelle la doctrine de l'É- 
glise gallicane sur la puissance temporelle des 
papes , leur infaillibilité et l'indépendance du roi, 
elle rendit ( 16 mars) la fameuse déclaration de 
1682 , dont l'article 1 er met les conciles généraux 
au-dessDsdUpape; l'article 2 établit que le tem- 
porel des rois ne peut être atteint par les pontifes 
ni les sujets déliés par eux du serment de fidélité ; 
l'article 3 limite la puissance papale par l'autorité 
des canons apostoliques ; l'article 4 nie TiiifaiUi- 
bilité du pape et reconnaît celle des conciles 
œcuméniuues. Louis XIV défend d'enseigner en 



921 



INNOCENT 



922 



Franee toute antre doctrine. A cette nonrelle, In- 
nocent XI tient un consistoire solennel, condamne 
les évêques et fait brûler ignominieusement les 
quatre propositions; puis il adresse à rassem- 
blée ( 1 1 avril 1682.) un bref qui annule toutes les 
décisions qu'elle a prises. En même temps Inno- 
cent refuse d'accorder ces bulles aux ecclésias- 
tiques de second ordre qui avaient assisté à ras- 
semblée et qui venaient d'être nommés évêques. 
Louis XIV, de son côté, fait défendre de se pour- 
voir en cour de Rome pour avoir des bulles, et 
déclare en appeler au prochain concile à l'égard 
de tout ce que le pape pourrait entreprendre 
contre les droits de la couronne de France. Les 
années suivantes furent marquées par la révo- 
cation de l'édit de filantes et les dragonnades 
contre les protestants , par la condamnation pro- 
noncée à Paris contre le dominicain François Ma- 
lagola, qui , dans une thèse , avait affirmé la sou- 
veraineté temporelle et spirituelle du pape , enfin 
par les lois somptuaires d'Innocent, qui, sous 
peine d'excommunication, ordonna aux femmes 
de se couvrir le sein et les épaules jusqu'au cou, 
et les bras jusqu'au poignet. Le 12 mai 1687, 
le pape rallume la querelle des franchises par un 
bref qui les abolit de nouveau et excommunie 
ceux qui prétendaient les conserver. Louis XIV 
ordonne au marquis de Lavardin , son ambassa- 
deur, de ne pas céder, et le marquis fait son 
entrée à Rome ( 16 novembre 1687) en homme 
bien résolu d'exécuter les ordres de son maître; 
il avait un cortège de huit cents personnes armées ; 
les douaniers se présentent pour visiter les ba- 
gages de Son Excellence : on les menace de leur 
couper le nez et les oreilles. Innocent, voyant 
qu'on bravait son autorité jusque dans Rome, pré- 
tendit que, en vertu du bref, Lavardin était notoi- 
rement excommunié et résolut de le traitercomme 
tel. Lavardin demande une audience an pape, 
qui la refuse ; il annonce l'intention d'aller à Saint- 
Jean-de-Latran : le pape donne ordre de cesser 
le service ; l'ambassadeur entre le jour de Noël dans 
l'église Saint-Louis, paroisse des Français : le pape 
interdit l'église et le clergé (26 décembre 1687). 
L'ambassadeur proteste contre cette sentence : 
Louis XIV, irrité, renvoie l'examen de l'affaire au 
parlement, qui reçoit l'avocat général appelant 
comme d'abus contre la bulle du pape , et supplie 
le roi de tenir un concile national , afin d'aviser 
aux moyens de faire cesser les désordres pro- 
duits par la situation de plusieurs évêchés aux 
titulaires desquels le pape refusait des bulles. 
Les archevêques et évêques présents à Paris 
s'assemblèrent et se prononcèrent en faveur de 
l'appel au. prochain concile; le clergé de Paris et 
l'université se joignirent à eux et soutinrent 
énergiquement les intérêts et lesdroitsde l'Église 
gallicane. On s'assura de la personne du nonce, 
et Louis XIV saisit le comtat d'Avignon; Inno- 
cent, toujours inflexible, cherche à mortifier le roi 
en refusant l'archevêché de Cologne au cardinal 
de Furstemberg,qui était soutenu par la France. 



Cette querelle se prolongea pendant tout le reste 
du pontificat d'Innocent XI, et ne se termina 
que sous Innocent XII. L'année précédente, lo 
pape avait condamné le quiétisme dans la per- 
sonne de Michel Molinos, prêtre espagnol du 
diocèse de Saragosse. Molinos comptait à Rome 
un grand nombre de disciples; il avait déve- 
loppé sa doctrine dans La Guide spirituelle , 
ouvrage qui fit longtemps l'admiration des per- 
sonnes les plus pieuses ; des plaintes arrivèrent 
pourtant jusqu'à l'oreille du pontife, qui aban- 
donna Molinos au tribunal du saint-office; son 
procès fut instruit : il se vit condamné à faire 
abjuration publique de ses erreurs. La cérémonie 
eut lieu le 3 septembre 1687, dans l'église de 
Sainte-Marie-de - la- Minerve, en présence des 
cardinaux , des prélats de la cour de Rome et 
du peuple, a qui l'on avait promis des indulgences, 
s'il s'y trouvait; Molinos fut ensuite enfermé 
pour le reste de ses jours dans les cachots de 
l'inquisition. Quant à sa doctrine, le tribunal 
avait condamné soixante-huit propositions de 
Molinos comme hérétiques, scandaleuses, détrui- 
sant la monarchie chrétienne, etc., et le pape 
confirma par une bulle la sentence de l'inquisi- 
tion. Rappelons qu'à la fin de 1676 Innocent 
avait défendu aux jésuites de recevoir des no- 
vices ; ces Pères prétendirent que le pape était 
janséniste et firent faire des prières pour sa con- 
version. Innocent XI était tourmenté depuis 
longtemps par des humeurs catarrheuses; ses 
médecins crurent le soulager en lui faisant des 
incisions aux jambes; mais le pontife, accablé 
d'infirmités et de vieillesse,*ne put supporter ce 
remède; le 8 août 1689, la fièvre devint si vio- 
lente qu'on désespéra de sa vie. Innocent, se 
voyant près de sa fin, fit appeler son neveu Livio 
et lui recommanda de se retirer dans ses terres, 
et de ne pas se mêler aux intrigues qu'il pré- 
voyait devoir éclater dans le prochain conclave ; 
il voulut ensuite que les généraux et deux reli- 
gieux de tous les ordres vinssent lui donner leur 
bénédiction, et fussent présents à sa mort, qui 
arriva le 12 août, à quatre heures du soir. On a 
de ce pape deux lettres dans VItalia Sacra d'U- 
ghelli, t. IV, p. 51 3 ; X, 53. On a publié à Paris : 
Brève ad Frandscum episcopum Apamien- 
sem; in-4°; — Decretumde sacrx commu- 
niants Usu datum; 1679, in-4°; — Différents 
brefs touchant les évêques d'Alet, de Pa- 
miers et autres; in-4°; — Bref pour la con- 
firmation des chapitres généraux de V ordre 
de Citeaux des années- 1672 et 1683; in-4°. 
Innocent XI eut pour successeur Alexandre VIII. 
Alfred Franklin. 

Ughelll, italia Sacra; Venise, 1717-M, 10 ? oh -la-fol. - 
Ranke, t. IV, p. 488. — Macquer et Lacombe, p. 661. — 
Slsmon<H,t. XXV, p. Ml et s. —De Prades, t. II, p. 232. 
— Santo-Domingo, p. 18*. — Brnys, t, V, p. 860. — Alletz, 
t. II, p. 43*. - J.-A. Coita (R. Simon ) , Hist. de l'Origine 
des Revenus ecclésiastiques, Francfort, 1684; In- il, 
p. lie à 177. — De La Fayette, Mémoires de la Cour de 
France pendant les années 1688 et 1689. — M. Mlsson, 
Nouveau foyage d'Italie; 17M, 8 vol. in-li. — De Lar- 



928 



INNOCEHT 



924 



roque, Nmnmu Traité de te Béêmie ; IMS, Ift-ll. - Biyle, 
Nouvelles de la République des Lettres, année 1686. — 
Heidegger, Historia Papatut ; Amsterdam, 1698. in-4«, 
fl« parUe* - Mémoires de M. de M—; dans la Collection 
PstUot, I e série, t. LIX, p. B19. — De U Ltuerne, Sur 
la Déclaration de V assemblé* du clergé de France en 
16»; Paris, istf, io-8». — P. Macedo, PaneçyrUus Inno- 
eentio xi i 1STT, Jn-fol. - P. ftuonimldt, De Ma et Rebui 
gestii Innocenta XI g Rome, irr6,JB-6*. 

INNOGBRT *U( Antoine Pighatblli), deux 
cent cinquante et unième pape , successeur d'A- 
lexandre VIII, né à Naples,le 13 mars 1616, élu 
le la juillet 1091, mort le 7 septembre 1700. Le 
conclave qui suivit la mort d'Alexandre Vin fut 
troublé par des brigues qui le firent durer plus 
de cinq mois; aussi l'élection dePignatelli lut- 
elle accueillie dans Rome avec une grande fa- 
veur. Le nouveau pape avait été élevé dans un 
séminaire ; Urbain VIII l'avait nommé vice-légat 
du duché dTJrbin; Innocent X,<grand-inquisiteur 
de Malte , gouverneur de Viterbe et nonee à 
Florence; Alexandre VII, nonce en Pologne et à 
Vienne; Clément X évéque de Lucques , secré- 
taire de la Congrégation des Évéques et des Ré- 
guliers ; Innocent XI l'avait fait cardinal et nommé 
évéque de Faenza, légat de Bologne, puis ar»> 
chevéqne de Naples. Ce rot par reconnaissance 
pour ce pape qu'il prit le nom d'Innocent XII. 
Aussitôt après son élection, il s'efforça de faire 
cesser les désordres qu'avait causés la longue 
vacance du saint-siége , et ne voulut donner à 
ses parents aucun bénéfice; en revanche, son 
affection pour les pauvres était si grande, qu'il 
les appelait ses neveux , et répandait sur eux 
tous les biens que la plupart de ses prédéces- 
seurs prodiguaient à leurs favoris. Le 23 Juillet, 
dans son premier consistoire, il déclara qu'A 
voulait travailler uniquement à la gloire de Dieu 
et de l'Église , qu'il ne donnerait les emplois 
qu'aux hommes de mérite, sans avoir égard à la 
naissance , à l'amitié ni à là parenté ; il défen- 
dit sévèrement aux officiers de justice d'accepter 
aucun présent. Alexandre VIII avait endetté le 
saint-siège de cinquante millions d'éeus; Inno- 
cent supprima toutes les charges Inutiles, écono- 
misant ainsi quatre-vingt mille écus par an à la 
chambre apostolique. Il apporta la même par- 
cimonie dans l'organisation de son palais , et 
ordonna qu'on ne dépensât, four son dtnet, ja- 
mais plus d'un teston (environ un franc cin- 
quante centimes de France). Un mois après son 
élection , il commença à donner Chaque lundi 
audience publique à tons ceux qui voulaient le 
consulter ; un accident le força A abandonner cette 
sage coutume. Mais il continua à s'occuper ac- 
tivement de Tordre, de la police et de FÉgllse; 
il força les curés de Rome à s'assembler tous 
les mercredis pour discuter des cas de cons- 
cience, leur défendit de porter perruque, et leur 
recommanda d'être modestes et convenables 
dans leurs sermons; il interdit tous les jeux de 
hasard. Par son ordre, un duc qui avait insulté 
un prélat fut enfermé au château Saint-Ange , et 
nn cavalier, pour le même fait, fut banni de la 



ville t il avait pour oncle un cardinal, qui iut* 
céda vainement en sa faveur. Innocent s'efforça 
de réformer la vie licencieuse que menaient les 
moines réguliers. Puis il tourna tes regards vers 
la France, où ses prédécesseurs avaient laissé 
plusieurs querelles à terminer. La question des 
franchises et celle de la régale (twyea luira» 
obNt XI) se présentaient les premières; il y 
avait alors en France plus de trente prélat» 
auxquels le pape avait refusé des nulles. 
Louis XIV avait déjà rendu Avignon; il aban- 
donna le droit de franohise, et Innocent, de son 
coté, accepta tacitement les édita du roi sur la 
régale. U restait à s'entendre sut le* prélats qui 
avaient assisté h l'assemblée de lott et sur tes 
quatre articles de l'Église gallicane. Innocent,! 
l'égard des prélats , exigeait un acte de soumis- 
sion ; ils s'y décidèrent, et écrivirent an pape 
une lettre d'excuse ; ils y déclaraient que leur 
dessein n'avait pas été de supprimer des droits 
àl^serOTname^rtq^flleaartrcleSpouVaiait 
être interprétée comme portant préjudice à ta 
puissance ecclésiastique et à l'autorité des papes, 
il les ingardaient comme non avenus. Cette lettre, 
longuement discutée, et qui subit trois rédac- 
tions consécutives, fut assez sévèrement jugée 
en France : on accusa avec raison les prâats 
d'avoir compromis la dignité et les droits de 
l'Église gallicane ; car les termes dans lesquels 
cette lettreétatt conçue pouvaient la faire re- 
garder comme une révocation de ce qui s'était 
fait dam l'awemttée. Il est pourtant juste de 
reconnaître que les prélats prouver eut bien par 
la suite qu'ils n'avaient jamais «m la pensée de 
rétracter la déclaration de 16*2. Quoi qull ea 
«oit, cette lettre fut reçue a Rome avec la pins 
grande joie; Innocent Xtl pardonna tout et en- 
voya dee*bulle« aux prélats- L'affaire du qvU~ 
tante reparut alors; cette doctrine avait fait de 
grands progrès en Italie, et Bossuet amas* 
Fénelon de l'avoir favorisée dan» ton ouvrage 
intitulé s Explication des Maxime* des Sainti 
sur la vie intérieure, qui avait été publié et 
1697. Bossuet défère le livre à Rome*, Inno- 
cent nomme une congrégation pour l'examiner; 
les deux partit produisirent plusieurs mémoires. 
L'affaire resta longtemps en suspens; le pape 
prononça enfin, par on décret du H mars 17» 
sur le livre en général, et en partfeotter sur 
vingt-trois propositions accusées de tendre I 
établir la réalité d'un état on l'on aime ie*t* 
Dieu seulement pour hû'ftidme, et eYeudm 
ainsi les motift de crainte et d'MfJt^nsKe, le dé- 
sir d«reœmpensé»ét de la béatitude, un blet 
fit connaître ce décret m roi de France. Féne- 
lon publia aussitôt un mandement pu* lequel i 
se soumettait k ht déetston du pontife , et déc*n 
dans un synode , null tint à cette occasion, eue 
le roi serait supplié d'ordonner par lettres pa- 
tentes que les ouvrages faits pour défendre Y Ex- 
plication des Maxime* des Sdiritefaemâ sup- 
primée. Innocent Xfl ne survécut que quelques 



925 



INNOCENT 



926 



mois à la conclusion de ce différend. On a pu- 
blié h Paris ; Bref {.portant suspension de 
tontes indulgences pendant Vannée du jubilé 
1700; 1699, in-4°; — Actes et délibérations 
concernant la Constitution deN.S. P. le pape 
Innocent XI 1 portant la condamnation du 
livre de Fénelon; 1700, in-4°. Innocent XII 
eut Clément XI pour successeur. A. F. 

Bruys, t. V, p. 454. - AUetz, t. II, p. 899. - Ranke, 
t. IV, p. 464. — Slsmondi, t. XXVI, p. 69. - Mâcquer et 
Lacorobe, t. It, p. 871. - De Prade», t. H, p. 888. - 
N. P. Qlannetaslo, Panegyricuê infmn innocenta XII; 
Naple.s, 1700, in-8°. 

innocent xiii ( Michel-Ange Conti ),deux 
cent cinquante-troisième pape, successeur de 
ClémentjXJ, né à Rome, le 16 mai 1655, élu le 
s mai 1721, mort le 7 mars 1724. Cinquante- 
cinq cardinaux composaient le conclave qui sui- 
vit la mort de Clément XI ; une seule voix man- 
qua au nouveau pape : ce fut la sienne, qu'il avait 
donnée au cardinal Tanara, doyen du sacré col- 
lège. La famille des Conti était une des plus 
illustres de Rome; elle avait déjà fourni huit 
papes à la chrétienté. Michel- Ange Conti avait été 
nommé gouverneur de Viterbe en 1693, arche- 
vêque de Tarse en 1695, nonce à Lisbonne en 
1698, cardinal en 1707, légat de Ferrareen 1709, 
évéque de Viterbe en 1712. Les discussions re- 
latives à la constitution Unigenitus étaient loin 
d'être terminées. Le 9 juin 1721 sept évêques de 
France écrivirent à Innocent pour lui représen- 
ter que cette constitution soutenait les mauvais 
principes qui s'étaient introduits pendant le 
siècle précédent, et qu'il était de l'honneur du 
saint-siége de la révoquer. Le cardinal d'Althan, 
au nom de l'empereur d'Allemagne , se plaignit 
également des troubles que la constitution sou- 
levait dans l'Empire. Le pape reçut assez bien 
les observations de l'empereur ; mais, choqué de 
le voir entrer dans cette dispute, il pressa le 
tribunal de l'inquisition, qui publia un décret 
contre la lettre des sept évoques français; eue 
fut déclarée schismatique et contenant des pro- 
positions injurieuses à la mémoire de Clément XI 
et au saint-siége. Des discussions relatives aux 
États de Parme et de Plaisance occupèrent en- 
suite Innocent : l'Espagne, par l'entremise de la 
France, venait de demander à l'empereur l'in- 
vestiture de ces trois États; Innocent soutint 
avec chaleur qu'ils devaient être considérés 
comme fiefs immédiats du saint-siége; ses récla- 
mations restèrent inutiles. En 1723, Innocent 
termina l'affaire du cardinal Alberoni, qui s'était 
retiré à Rome après sa diftgrêce. Dans le consis- 
toire du 20 décembre, il déclara que les crimes 
dont Alberoni avait été accusé n'étant point 
prouvés, il devait continuer à jouir de tous les 
droits attachés à sa dignité de cardinal. Le pon- 
tificat d'Innocent XIII serait presque sans re- 
proche si Ton pouvait passer sous silence la 
promotion de Dubois au cardinalat; les détails 
de ce marché sont trop connus pour que nous 
les rappellions ici; disons cependant que Dubois 



fut {présenté comme candidat au chapeau par 
l'ambassadeur de France, au nom du régent, 
et que les mille fils de l'intrigue nouée à cette 
occasion ont pu tromper le pape. Innocent, qui 
avait renouvelé la défense faite aux jésuites de 
recevoir des novices , allait dissoudre cette com- 
pagnie quand il mourut. 6a mort fit naître d'in- 
jurieux soupçons d'empoisonnement : on ou- 
bliait que le pape , depuis son avènement au 
pontificat, avait toujours été tourmenté par 
plusieurs maladies* Innocent était peu capable, 
mais plein de piété , de désintéressement et d'a- 
mour pour la paix. Son successeur Ait Benoit IX. 
Alfred Franklin, 

Bhiy», t. V, p. 489. - Allsti, t. il, p. 4M. - Slsmondi, 
t. XXVII, p. 442, - Ultnde, f ofCK/c d'un Français en 
Italie pendant les années 1765 et 1766, 1786, 9 vol. ln-12. 
— Mongez, Vie privée au cardinal Dubois; Londres, 
1789, ln-8°. — De PiOftieM, M«motr& Os la Régence au 
d*c d'Orleant / 1741, 8 vol. la-li. - A. Trtetud, Relatim 
de la Mort d'Innocent XIII; Nancy, 17*4, tn-is. 

* innocent , jurisconsulte romain, contem- 
porain de Constantin. Entre autres ouvrages, il 
en avait composé un sur les règles relatives à 
la mesure des terres et sur les contestations 
qui pouvaient s'élever à cet égard; cet écrit 
était divisé en douze livres au moins ; il ne 
s'en est conservé que quelques extraits dans la 
collection des Gromatici ou auteurs qui se 
sont occupés de cette matière .( voir p. 220 de 
l'édition de Goes.) G. B. 

Baehr, Geschichte der ràmttohm Uteratur, S M9. - 
Bacn., Historia Atrisprudentiœ Romanœ, p. 542. 

* innocent ( Gi sci), prélat russe, naquit 
dans la Pologne prussienne, de parents luthé- 
riens, au commencement du dix-septième siècle, 
et mourut à Kief, le 24 février 1684. Il embrassa 
fort jeune la religion grecque, et l'état monas- 
tique , et fut appelé par le métropolite Pierre Mo- 
hila à fonder une chaire d'éloquence latine à Kief. 
Ses talents lui méritèrent, après avoir passé par 
différents grades, d'être placé à la tête de la grande 
Laure de Kief; ses vertus lui valurent une Orai- 
son funèbre d'un de ses disciples que l'Église 
russe a canonisé, Dmitri de Rostof. Il existe trois 
ouvrages d'Innocent Gtzel : — un livre intitulé : 
De la Paix entre Dieu et V homme, Kief, 
1669, qu'un oukace du synode de 1766 a mis à 
l'index ;— un Sommaire ( Synopsis) de l'Histoire 
russe y depuis V origine de la nation slave 
jusqu'au règne de Théodore Alexiévitch 
[1676]; Kief, 1674 : lequel a été douze fois 
réimprimé, parce que c'est le seul livre historique 
qu'eurent les écoles jusqu'à Lomonosof; — 
des Instructions sur le sacrement de la Pé- 
nitence; Kief, 1671. La Bibliothèque synodale 
de Moscou possède, en outre, un manuscrit po- 
lonais intitulé : Prawdziva Weeira (La Foi 
véritable), dans lequel ce moine essaye vai- 
nement de réfuter un livre Sur ta Suprématie 
de saint Pierre et la Procession du Saint- 
Esprit, que le P. Benoit Boym ( voy. ce nom ) 
venait de publier à Vilna en 1663. P cc A. G— n. 



927 



INNOCENT — INTHIEMA 



< Greteh, SlovarpisaUliaXh doukhomagotchtna greto- 
roêjiiêkoi Tzerkvi. 

* innocent, prélat russe, né en 1800, à 
Sievsk , gouvernement d'Orel, mort à Odessa , 
le 6 mai 1857. Un discours qu'il prononça au 
séminaire deKief sur la mort d'un de ses cama- 
rades révéla de bonne heure son talent oratoire. 
Il prit à vingt-quatre ans l'habit de Saint-Basile; 
deux ans après, il; était inspecteur de l'aca- 
démie théologique de Saint-Pétersbourg, et rec- 
teur de celle de Kief en 1830* Sacré évêque en 
1836 , il continua de demeurer quatre ans 
comme vicaire dans cet antique berceau du 
christianisme, passa de là huit mois à Vo- 
logda, sept ans à Kharkof , fut appelé au siège 
de Kherson en 1848, et désigné membre du 
saint Synode en 1856. Ses principaux ouvrages 
sont : Les derniers Jours delà vie terrestre 
de Christ; 1828; — La Vie du saint apôtre 
Paul ; ibid. ;— Discours et Sermons, 3 1., 1 843 : 
M* Stourdza en a traduit une partie ;*- Sermons 
prononcés à Vologda; — La Prière de saint 
Éphrem ; — Du Péché et de ses conséquences; 
1844; —Dieu est avec nous! 1845;— Sermons 
prononcés à Kharkof, 3 1.; 1847 ; — une traduc- 
tion de l'admirable Doctrine chrétienne de 
S. Augustin;— De la Chute d'Adam , etc., etc. 
Plusieurs de ces travaux sont dignes d'être 
connus en Occident, et un lecteur quelque peu 
attentif y découvrirait sans peine qu'il n'y a 
qu'un cheveu, en quelque sorte, qui s'oppose à 
cette réunion des deux Églises qui transformerait 
aussitôt et avantageusement la face du monde. 
P ce Augustin Galitzin. 
RoussJtaia Khrestomatia Galakhova. - Journal 
d'Odessa du 80 mai 1887. 

INTAPHERNB. Voy. DARIUS. 

interiano ( Giorgio), voyageur génois du 
quinzième siècle, a résidé plusieurs années, vers 
1450, en Circassie, et a décrit les mœurs de 
ses habitants. Son récit, intitulé : Delta Vita de 1 
Zychi, altrimente Circxsi; Venezia, apud 
Aldum Manutium; 1502, in-8°, n'a été repro- 
duit que par Ramusio,U, 196. Pce A. G— n. 
Storia delV antica Liguria e di Genova del Mar- 
chese Serra ; Tarin, 1884, IV, m*.. — Adelung, Ûber- 
sicht der Reisendenin Russlatid, bis 1770. 

interiano (Paul), historien et astronome 
italien, né à Gênes, vivait dans le seizième siècle. 
On a de lui : Ristretto délie Istorie Genovesi; 
Gènes, 1506, in-8°; Lucques, 1551, in-4°; — 
Invenzione del Corso délia Longitudine , col 
ristretto délia s/era; Lucques, 1551, in-8°. 
« Dans ce traité, dit Tiraboschi, Interiano s'ef- 
força, mais avee peu de succès , si on le compare 
aux autres astronomes, de fixer les degrés de 
longitude. » z. 

Tlraboscbl, Storia délia Letteratura ltaliana, t. VII, 
part. I, p. 484; II, p. 888. 

t interiano de ATA la (Juan), littérateur 
espagnol , né en 1656, mort à Madrid, le 20 oc- 
tobre 1730. Il faisait partie de l'ordre royal et 
militaire de la Sainte-Vierge de la Rédemption 
des Captifs, autrement dit de la Merci. «Il était, 



928 



rapporte Moréri, poète, historien, critique, 
théologien, traducteur, et n'a cessé d'écrire 
qu'avec la vie. La poésie du P. Interiano est fa- 
cile et naturelle, mais souvent trop prosaïque. 
Il prenait les titres de théologien de son ordre, 
et professeur jubilé de l'université de Sala- 
manque , prédicateur et théologien de Sa Majesté 
le roi d'Espagne, etc. » U était en relation avec 
les savants les plus connus de son temps. Le 
plus grand nombre de ses ouvrages est en langue 
espagnole, et écrit avec pureté et élégance ; on 
connaît entre autres : Relation des Actions pu- 
bliques et des Réjouissances faites par Vuni- 
versité de Salamanque, pour célébrer l'heu- 
reuse naissance du prince Louis , premier de 
ce nom en Espagne; Salamanque, 1707, in-4°; 
— Examen sérieux de la Vérité : Démons- 
tration historique de l'état religieux de saint 
Pierre Pascal de Valence, évêque feJaën, etc., 
en réponse à un écrit de don Juan Ferreras ; 
Madrid, 1721, in-4°. Après avoir lu l'ouvrage 
d'Interiano Ferreras il déclara qu'il s'était 
trompé au sujet de S. P. Pascal; — Sermons 
prêches en différentes occasions; Madrid, 
trois parties, 1720-1722, in-4° ;— Relation 
des Cérémonies observées aux obsèques de 
Louis /",' roi d'Espagne, réitérées pour les 
funérailles de Jean-Emmanuel- Fernandez 
Pacheco, marquis de Vilna, premier insti- 
tuteur et directeur de l'Académie d'Espagne; 
Madrid, 1725; Valence, 2 vol. in-8° ;— Pictor 
christianus eruditus; Madrid, 1730, in-foL 
L'auteur y relève les erreurs dans laquelle 
tombent la plupart des peintres de tableaux de 
piété ; —Humaniores atque amamiores ad Mu- 
sas Excursus, siveopusculapoetica. L— z— e. 
Grégoire de -Mayans, Epistolss ( Valence, 1783, ln-4«), 
p. 108-814.— Moréri, ts grand Dictionnaire Historique. 
* intharatcba, souverain siamois, mort en 
l'an 780 du chunlasakkarat, ou petite ère de 
soixante ans (1418 de J.-C). Bien que ce prince 
appartint à la famille royale de Siam , il ne 
parvint au trône qu'en s'en emparant de vive 
force. Après s'être rendu maître de Youthia, ville 
célèbre qui fut longtemps la plus importante cité 
du royaume de Siam, il y établit sa résidence. 
Il envoya ensuite ses trois fils dans la province 
septentrionale dont il les fit gouverneurs : Chao- 
sam fut roi dans la ville de Thâinat, Ghao-Aï à 
Soup'an, Chao-Yi à P'rèksiratcha. A la mort de 
leur père, ces deux derniers princes se rendirent 
à Youthia, dans le dessein de s'emparer du 
trône. S'étant rencontrés , au milieu d'un pont, 
montés sur des éléphants, ils s'élancèrent Pua 
contre l'autre, et leurs armes après s'être entre- 
choqués leur tranchèrent la tète à tous deux. 
Chao-sam, couronné sous le nom de BàrÔmma- 
ticahathirat , resta ainsi seul et tranquille héri- 
tier du trône dlrôiaratcha. L. Léon de Roskt. 
P*ong-sa va dan ( Annales de Siam ), 8* partie (en da- 
nois ). — Pallegoix, dans sa Gramm. Hngt&at ( Bangkok. 
1850,ln-4«). ^^ 

inthiema ( Feico de ), littérateur hollandais, 



929 



INTHIEMÀ — INTIERI 



930 



né vers 1650, à Coudem (Geesterland), mort 
après 1 605. Ses parents, quoique d'origine noble, 
cultivaient eux-mêmes leurs champs, et Fré- 
déric d'Inthieraa conduisit lui-même la charrue* 
Ce fut contre le gré de sa famille qu'il entra an 
collège et étudia la jurisprudence à Louvain, où 
il prit le grade de licencié en l'un et l'autre 
droit. II exerça ensuite la profession d'avocat à 
Worcum, dont il devint bourgmestre. Plus tard, 
il alla s'établir à Leuwarde, où il épousa Mar- 
guerite de Hesling, dont il-eut six garçons. Les 
guerres qui dévastaient la Frise l'obligèrent de 
fuir en Hollande. Le comte Jean d'Embden l'ac- 
cueillit et le fixa près de lui dans la petite ville 
de Lier. On a d'Inthiema : Querella Batavo- 
rum; — Carmen de Nativitate, Sepultura, 
et Resurrectione Christi; — De Arcis Lyn- 
ganx Deditionis Causa ejusdemque in pas- 
terum evilandx cautela , et de conseqttentia 
probabile, etc.; — De Malorum Regum Gu- 
bernatione libri très ; — Consilia Juris. Pa- 
quot croit que ces deux derniers ouvrages sont 
restés manuscrits. L— z— e. 

Suffred. Pétri, Décade XVI, n. 8, p. 454-M6. — 
VriemoSt, MAén. Fris., p. 888. — Paqnot, Mémoire» pour 
servir à l'Histoire Littéraire des Pays-Bas, t. VI, p. M9- 

831. 

inthiema (ffero de), jurisconsulte et poète 
hollandais, fils du précédent, né dans l'Ost- 
Frise en 1576, mort à Franeker, en novembre 
1623. Il fit ses études à Franeker, où il fut reçu 
docteur, le 28 juillet 1593. Il retourna dans sa 
province, qu'il quitta pour exercer l'emploi de 
censor militaris (grand-prévôt -, juge mili- 
taire) dans les troupes du comte de Nassau, 
gouverneur de Frise. En 1618, il devint biblio- 
thécaire et secrétaire de l'université de Frane- 
ker. 11 exerça ces fonctions jusqu'en 1621. 
Suivant Paquot, c'était un médiocre écrivain. On 
a de lui : Circa gentilitias Jamiliarum Domos, 
earumque appendentes prxrogativas mascu- 
las, et defunctorum supremas super iisdem 
voluntates, malxque fidei possessorum ma- 
chinatUmes, etc.; Leuwarde, 1619, in-4°; — 
JHsceptatio juridica super esse inter comi- 
tem Frisix orientalis Ennonem et Frideri~ 
cum, liberum baronem in Schwartzenborch ; 
Leuwarde, 1619, in-4°; — Censura, Judi- 
ciwn, sive opinio super C*** et contra atro- 
cissimos EvangelH implacabiUs , insatia- 
bles et hostes belligerandi fides, quam Er- 
nestusy princeps et cornes Mansveldix, et 
ChristianusBrunswicensis prsestiterunt, etc.; 
1621, in-4°; — - Elegia 9 in qua ex causis pro- 
babilièus, per inconsideratam Bergopzom& 
factam obsidionem f regni Hispanici pério- 
des prœdicitur ; 1 62 1 , in-4°. L— z— e. 

Valère André, Biblioth. Belgica, p. 388. — Vrtemofit, 
uithen. Fris., p. 888-888. — Paquot. Mém, pour servir 
d VHis. lAtt. des Pays-Bas, t. V, p. 831. 

in-ti , second et dernier empereur de Chine 
de la dynastie des Han postérieurs , élu en 948, 
mort en 950 de notre ère. Il succéda à son père, 

NO0V. BIOCR. GÉNÉR. — T. XXV, 



Kao-tson, fondateur de la seconde dynastie des 
Han. Avant de monter sur le trône, In-ti s'appe- 
lait Lieou-tching-yeou. Sous son règne les eu- 
nuques recouvrèrent toute leur puissance dans 
le palais impérial ; le caractère faible de In-ti le 
fit tomber de faute en faute. Ayant donné ordre 
de mettre à mort Kouo-weï, général qui avait 
contribué à placer son père sur le trône, et qui 
lui avait rendu de signalés services, ce général 
marcha avec ses troupes vers la capitale, et mit 
en fuite l'armée impériale; de sorte que In-ti, 
resté presque seul, dut se sauver dans un vil- 
lage, où il fut tué avant d'avoir été reconnu. 
L'empire passa dès lors entre les mains de Kouo- 
weï, qui fonda, sous le titre de Taï-tsou, la dy- 
nastie des Tcheou postérieurs. R. F< 

Mailla, Histoire générale de la Chine, tome VII. 

intieri (Barthélémy), économiste et mé- 
canicien italien, né à Pistoie , dans la Toscane, 
vers 1676, mort à Naples, le 21 février 1757. Il 
vint très-jeune à Naples y étudia particulière- 
ment la philosophie et les mathématiques , et 
enseigna ensuite ces deux sciences. La famille 
Corsinilui confia la direction de vastes domaines 
dontil doubla rapidement le revenu; le grand-duc 
de Toscane voulut aussi l'avoir pour intendant des 
propriétés qu'il possédait dans le royaume de 
Naples, et la maison Rinuccino de Florence le 
chargea de surveiller ses intérêts dans le même 
pays. Ces occupations multiples familiarisèrent 
Intieri avec les faits qui servent de base à l'éco- 
nomie politique ; en même temps, les profits consi- 
dérables qu'il en retira lui permirent de consacrer 
une partie de sa fortune aux progrès de cette 
science* Il établit à Naples une école de com- 
merce. H introduisit la méthode d'emmaganiser 
les blés dans les silos, et imagina l'étuve à blé, 
machine destinée à préserver les grains en les 
privant par la dessiccation de leur faculté germi- 
native. Il perfectionna le paloreis, ancienne- 
ment employé par les habitants d'Amalfi et de 
Vico pour transporter le bois du sommet des 
montagnes au bord de la mer; il rendit cette 
machine plus commode et plus puissante. H 
trouva une manière d'imprimer les billets de 
loterie qui rendit la contrefaçon impossible et 
produisit, pour le trésor royal, si l'on en croit 6a- 
lanti, une économie de quatre mille ducats par 
an. Enfin il fonda à ses frais, en 1754, dans l'uni- 
versité de Naples, une chaire de. commerce (ou 
d'économie politique ), dont le premier titulaire 
fut son ami le P. Genovesi. On a d'Intieri : Délia 
perfetta Conservazione del Grano;, Naples , 
1754, in-fol. ; on a quelquefois attribué à Galiani 
cet ouvrage dont Intieri aurait fourni l'idée et 
la matière. On a prétendu aussi qu'Intieri et le 
marquis de Rinuccini avaient fourni h GaRani 
les matériaux de son traité Sur la Monnaie. Z. 

Genovesi, Discorso sopra il Fine délie Sciente. — Ga- 
lant!, Elogio storico deiV ab. Genovesi ( troisième édtt.); 
Florence, 1781, p. 161. - ViUarosa. MtraM, p. 168, - 

80 



931 



WTlEftl 

Tlpsléo, ato* 



Bioçra/la u nè— rf te ( tdtt, M Venue ). 
§mfia4U0li JtaUm «***, 1 1, p. 78. 

utroftOKTTA (1) (Le père Prosper), missic** 
naire sicilien en Chine , de la Compagnie de Jésus, 
né à Piazza , en 1626, mort le 3 octobre 1696. 
A l'âge de seize ans, il s'échappa du collège de 
Gitane, et abandonna l'étude du droit pour aller 
auprès des jésuites de Messine leur faire part 
de sa vocation arrêtée pour les missions chré* 
tiennes. Apres avoir acquis des connaissances 
suffisantes en théologie , il partit pour la Chine 
avec seize autres jésuites, (ntorcetta prononça 
*e* vœux à Macao, et pénétra, dans le cou- 
rant de la seizième année du règne de Çbun« 
tcbt (1669), dans la province de Kiang-si, où 
il s'établit 11 y construisit une église , et un 
grand nombre de Chinois furent baptisés par ses 
soins. Dénoncé au vice-roi de la province , il 
eut son> église rasée et dut se cacher pour éviter 
le péril qui le menaçait. En 1664, il fut con- 
damné à la bastonnade et à l'exil ; mais cette per- 
sécution fut réduite à un emprisonnement a 
Macao. Un autre missionnaire s'étant offert h 
sa place, il put se rendre à Rome pour exposer 
au général de son ordre la triste condition des 
chrétiens dans l'empire chinois. De retour en 
Chine, il y retrouva ses compagnons de captivité 
libérés. lU'établit ensuite à Hang-teheou, capitale 
du Tche-kiang. Lors de la persécution de 1690, 
il comparut devant divers tribunaux chinois 
érigés contre les missionnaires chrétiens : il y fit 
preuve d'une grande énergie, qui lut valut l'ad- 
miration même de ses juges. On a du père 
Prosper Intorcetta les ouvrages suivants , pour 
la plupart extrêmement rares en Europe ; Tav- 
hio ( ou La grande Étude de Confuoius et de 
son disciple Tseu-sse ), texte original avec une 
traduction latine par le père Ignace de Costa , 
jésuite portugais, édition xylographique im- 
primée à Kien-tchang-fou ( province du Kiang- 
si) en 1662; — Tchoung-young (ou Tin varia- 
bilité dans le milieu, l'un des quatre Livres de 
Contactas et de son école); édition imprimée, 
partie xylographiquement a Canton, partie ty- 
pographiquement a Goa, en 1669, petit in-fol. 
Cet ouvrage, extrêmement rare, est précédé 
d'un Confucii Vita. La réimpression de oe livre 
à Goa (1611, m-8° ), citée par Pinèlo, est in- 
connue jusqu'à présent des bibliophiles ; — Lun* 
yu( Le Livre des Discussions philosophiques de 
Confucius), sans heu ni date, 1 vol. petit in-fol. 
( rarisime ) ; — Testirnonium de Cultu Sinensi i 
Lyon, 1700, in-8°; — Compendiosa Narra- 
tione dello Stato délia Missione Cinese, co- 
nxtociando dalV anno 1581 sino al 1669, o/~ 
ferta in Borna ait Em. Sign. Card. délia 
sqcr. Congregat. de Propag. Fid. ;Rome, 1671 
on 1672 (?) , in-8°. 11 reste du père Prosper In- 
torcetta une paraphrase complète et inédite des 
livres de Confucius communément désignés sous 

(i) Le nom Intorcetta est écrit en chinois M-to4t# 
( prononciation mandarine ). 



- ION M2 

le nom de Les Çiiatr*£*iw (en chinois : Sse- 
chou). P. F. 

Itêutmma Mékmgm aeiattimê, nw A bel Mnmsat 

(t<upeU);Ui-^~/f<*ofr*0**raJe de Ut Chine, par 
le père Mojriac de Mailla ( tomeX); In-*». - CemelH 
Careri, totn. IV, p. ut. - Ching-tiao-tin ecAin* (Ho- 
ttoe su fts nteaioaaairtft «ft»«tt«n«en CUm ) ; ln-i» , en 



mvRUBs ( Augustin) > historien sicilien, né 
à Sojacoa en 1595, mort à Paiera* au mois d'a- 
vril 1677» 11 embrassa l'état ecclésiastique et 
passa quelque temps dans la société de Jésus, où 
il enseigna la philosophie et la théologie. 11 «n 
sortit pour se consacrer tout entier à l'étude des 
Pères de l'Égjssa et fc des recherches sur l'histoire 
de la Sicile. La riche bibliothèque de Fr. Schia- 
fani, prêtre de Païenne, lui fournit une grande 
quantité de matériaux, dont il tira habilement 
parti. On a de lui : Palermo Antico, parte 
prima degli Annali délia felice città di Pa- 
lermo, prima stdia, eorona del re e capo 
del regnç di SUMia; Pakrma, 1649, in-fol.; 
cet ouvrage» estimé et rare* a été inséré dans le 
Thésaurus Antiquitatum SieUim deBurmann, 
t X; — Palermo S&rot deuxième parti** des 
Annali... di Palermoi Païenne, 1650, ta-fo*. ; 
— Palermo mbile, troisième partie de* An* 
nalii 1651, in-fol. ; — La Carthagine Sici- 
liana, hisloria delta città di Caccamo, di- 
visa in Ubri dui; Palerme, 1651, în-4° : le 
troisième livre parut après la mort de fauteur, 
par les soins d'Aman* ; Païenne, 1708 j Burmann 
a inséré cet ouvrage dans son Thésaurus Anti- 
quitatum Sicilix, t. X; — Historia Sacra 
Paradm terrestris et S. S. Innocentix status; 
Pajerme, 1661, in-4°. Inveges laissa plusieurs 
ouvrages inédits, entre autres des Annales Regni 
Siçilix en 4 vol. in-fol„ dont l'introduction seule 
a été publiée par le P. Michel de Giudice, sous 
ce titre : Ad annales siculos prœliminaris Ap- 
paratus; Païenne, 1709, in-4*. Z. 

Mongltore, Bibliotheca Sicula, t. I, p. 87. - Nlcéron, 
Mémoires pour servir à FBtstoire* det Bommes /Ifto- 
trêt, t. XI. 

*ioh ('Itov), poète et historien grec, né à 
CMos, vers la 74« olympiade (4844*1 avant J.-C.X 
mort vers la 89 e olympiade (421-424 av. J. C. ). 
U était fll* d'Orthomène, Les Athénien* le sur- 
nommèrent fils de Xuthus, par auusion m my- 
thologique Ion (1). Il vint jeune à Athènee* comme 
oftle voit par sa liaison familier* avec d'ffluetrui 
habitant» de cette ville, beaucoup plus âfcés que 
lui. Dans ses Souvenirs , dont H ne ieate *»*** 
heureusement que de rare» fragments, il race** 
tait ses conversations avee Citton, dont il était 
l'admirateur, avec Eschyle, dont il fût l'ami in- 
time et qui lui enseigna l'art dramatique* Il 
connut aussi Périclès, se brouilla avec lui peur 
une rivalité d'amour, et ne lui pardonna jamais. 
Il fit jouer sa première tragédie dans la «2 e orynv 

(1) Ion, le fabuleux ancêtre «les Ioniens, était, solvant les 
mytbographes, fils d»Apollon et de Creuse, fille d'Breen- 
tkée et femme de Xuthus. La légende d'Ion S fourni le 
sujet (fane des plus belles pièces (TBwrtpWo. 



ION - 10PHON 



934 



piade ( 452 avant J.-C. ). Gimon mourut peu 
après, et Periciès devint tout-puissant : ce fût 
pour Ion un double motif de quitter Athènes. II 
retint à Cbios, où en 440 il eut l'occasion de 
dîner avec le poète Sophocle, qui allait prendre 
le commandement de l'expédition de Samoa. 
Le récit de ce banquet avèe tes propos enjoués 
des confire* et lé badmege hardi de Sophocle, 
se lit dans une charmante page des Souvenirs 
conservée par Athénée; On ne sait combien se 
prolongea le séjour d'Ion à Chu»; mais en 489 
il était de retour à Athènes, et faisait jouer une 
tragédie en compétition avec Euripide et lopnon. 
Il mourut avant 421, puisque Aristophane^ dans 
sa comédie de £n Palti, jouée cette année même, 
le place an nombre des nommes devenus astres 
après leur mort 

Ion remporta use fois le prix de la* tragédie, 
et comme il avait gagné en même temps celui 
du dithyrambe * il manifesta sa roconnajesanee 
pour les Athéniens en leur faisant distribuer à 
chacun une croche de vin de Objosj Une pareHle 
munificence prouve qu'Ion était riche. Les cri- 
tiques portent diversement le nombre de ses 
tragédies a donne > à trente et à qua rente, Mous 
avons les titrée et quelques fragments de dix 
tragédies : 'At**^****, 'Atapfrnii 'Action M*r« 
Apdpra, $po\joo< , $*m$ J} Katysâç* $otvi£ m*~ 
Tepo;, Ttùnpoc* EupttiSai* Abépm, et d'un drame 
satirique 'Ojuçatow Longin traite très-sévèrement 
les tragédies d'Ion. Il n'y voit qu'élégance sans 
vigueur, et estime que toutes ensemble elles ne 
valent pas Œdipe de Sophocle. Les contempo- 
rains d'Ion et les critiques d'Alexandrie sem- 
blent en avoir jugé autrement* puisque les uns 
le couronnèrent, et les autres le placèrent sur le 
canon des cinq poètes tragiques athéniens. }J 
eut pour commentateurs Areésilaùs , Batton de 
Sinope, Pidyme, Épigeneet même Aristarque, 

Le scoliaste d'Aristophane dit que, outre ses 
tragédies, Ion composa des poèmes lyriques, 
des comédies * des épigrammes , des peins , des 
hymnes , des scolies et des élégies. Quant aux 
comédies , comme il n'en est pas question ail- 
leurs, le scoliaste peut avoir fait une confusion 
entre comédie et tragédie * bien que son asser- 
tion n'ait rien d'improbable en égard à la fécon- 
dité d'ion. Il reste de ses élégies quelques frag* 
ments recueillis par Brandi ( Analeçta,v*\. l t 
p. 161 ). Le même scoliaste cite d'Jtoa les ou- 
vrages en prose stUvant* » Uterôtumov ; ^ 
KTidiç;— Ko<rpofoYtxéç * — TirdprtiJiMrrf , et 
quelques antres qu'il ne* spécifie pus. On ne sait 
ce que pouvait être le premier de ces ouvrages? 
qui parut supposé même aux anciens ; le titre 
complet du second était Ktidiç Xt«u : histoire de 
Chics écrite dans le dialecte ionien et dans le 
genre, sinon à l'imitation d'Hérodote. &effom.ot 
fccnrtxoq devait être un ouvrage de ptnlosefftie) 
probablement le même que le Iptorruife on 
Tpt«Y(jio{ attribué aussi a Ion t et qai expliquait 
la formation du monde suivant la théorie or* 



phique ou pythagoricienne des triades. Nous 
avons déjà parlé des *Y7to\kvi\\kaxa ( Souvenirs ), 
que certains critiques identifient avec un autre 
de ses ouvrages intitulé : 'EKi$v)|jiai ou *£k&v)(ui- 
tntéç, lequel contenait soit le récit de ses propres 
voyages , soit la relation des visites faites à Ghios 
par d'illustres personnages. On a souvent con- 
fondu Ion de Chios aveo Ion d'Éphèse , rapsode 
.du temps de floeraie* et qui a donné son nom à 
un des dialogues de Platon; Bentley a démontré 
clairement que c'était une erreur* Les fragments 
de Ion ont été recueillis par G, Meberding t Aie 
tonti Ohii Féto, Moribus et 8$udm4oetrin*> 
Leipzig, I0d6? par Kopke : De lente poète Vièk 
et Fraermntis, Berlin t 1836 < et dans le £eiti* 
chrift fur Alterth*mmi$sên**haft t tftM, 
p. 689-605" ;' les restes d* ses tragédie* ont été 
insérés dans les Fragment* Trapicotum Qret- 
cerum de Wagner ( BM. Qt*e* de A. F. Didot), 
et les fragments de aes Ouvragés en prose déris 
le» Fragmenta metorieûrtm Gréearum de 
G. MiiUer* t. II, p. 44 ( même eoUedÎM h Ii» J. 

Strabon , XlV, .p. èii. — éntdàa, feudocie, ttarpocra- 
tlon, âii itiot *l6iv. - PlÙtanjaB, c'fwiOrt, t, 0, 16; t*erl- 
ctes, %, *»j M hitfèd. m ritt., » fc iï. «-. ÀttMbpUdftë, 
î)e root, )M ( ateala note** nolliite. *• âtueflésj 1 4 XI, 
XIII, XIV. - Mogèfie Utrce. IV, 11. - Farcira, MM. 
Grxca, vol. II, p. 807. - Bentley. Epistold àa Joli. Mu- 
Htèm CHïeîtlco JfaHMs MuteW iUBjUnctè, Oifard, 
tm t et dans se» Opmteêtài - Hltirah, *V>fct\ oé Plot. 
Ion. - Welcker, 0fa Grtiph. Iraq., p. M8-9IS. - ftayter, 
tiistoria criticd Trag. Gràc.; GœtUoguç, 18*3, p". ilB 

199. 

* iophox # poète tragique athénien, fils de 
Sophocle et de Nicostrate * vivait vers 490 avant 
J.-G« Il fit jouet des tragédies du vivant de son 
père, et l'on prétend même qu'il lutta contre 
lui. Il eut le second pria e*-499* dan» un con- 
cours où Euripide fut le premier et ion le troi- 
sième. Il remporta, on ignore à quelle époque» 
une brillante victoire ( é*mn<ts lotpnpAi, dit le 
scoliaste). On n'a point d'autres détails sur sa rie» 
mais l'on sait qu'a vivait encore en 401* Pans ses 
Qrenùuilteêi, représentées à cette date y Aristo- 
phane parle de lui comme do seul bon poêle 
tragique qui reste au» Athéniens ; mais il defife 
que, privé de son pèf^iqui venait de mourir h 
il puisse maintenir sa réputation t donnant par 
là h entendre que les tragédies dn fils étaient 
retouchées > peut-être composées par le pèf*« 
lies anciens en connaissaient cinquante; dontlen 
suivantes sent mentionnées pat Suidas i 'Agtfr 
XtéQ, T^efKK^'Atfrawv* 'itfev rfletria, Ae&Efictâfc 
Bâqtat; netfràc i Un deui derniers titres appn#» 
tienneiit évidemment à la même pièce, Pent-étr* 
faut-il ajouter à eettfi lista un drame sétyriqtf* 
intitulé Aàhp&ol , mentionné par Clément d*A* 
lexandrie ( StrematM f I ). Ces pièces, dont il 
né reste presque rienjont moins contribué à faire 
éoiinattre loahtin que le procès qu'il intenta à 
euh père < dey» Seraotius ). ilse réconcilia avec 
lui » et inscrivit sur Sa tombé ttne épitaphe on fl 
était questioti do VŒdipe à Colone, tragédie 

30. 



935 IOPHON — 1PHICRATE 

qui avait en tant d'influence sur la décision des 
jugea. Y. 

Soldas, aux mots loçffiv» EoçoxXîJç» — Aristophane, 
Hanse, 78-18, avee les Scoliet.— Valère Mailme, Vlll,7. 
— Welcker, Die Griech. Trag, t p, t78-«T7. — Kajraer, 
UUt. criL Troc. Grmc. % p. 78-7*. 



936 



iousoup. Voy. Yousour. 

iphicrate ftyxpoforK), général athénien, 
né en 419 avant-J.-C, mort vers 350 avant J;-C. 
Il était fils d'un cordonnier nommé, à ce que Ton 
croit, Timothée. Il se distingua d'abord à une ba- 
taille navale (peut-être celle de Cnide, en 394 ) 
où il s'empara d'un vaisseau ennemi. Cet exploit 
hit valut, malgré sa jeunesse, le commandement 
des troupes envoyé» au secours des Béotiens 
après leur défaite a Coronée. L'année suivante , 
il conduisit un corps de mercenaires à la défense 
de Gorinthe; il ne put pas empêcher le général 
Praxitas de vaincre les forces réunies des Corin- 
thiens, des Argiens, des Béotiens et des Athé- 
niens, mais l'empêcha de profiter de sa victoire. 
Comprenant que dans l'état de lassitude où se 
trouvaient les divers peuples de la Grèce, une 
bataille rangée n'était pas probable, et que les 
parties belligérantes s'en tiendraient à une guerre 
d'escarmouches, d'incursions et de ravages, il 
modifia dans cette prévision l'organisation de 
ses soldats, et leur donna plus de légèreté. An 
lourd bouclier il en substitua un plus petit, 
remplaça la vieille cotte de mailles par une cui- 
rasse en toile, et fit porter à ses soldats une lé- 
gère chaussure, qui fut appelée de son nom iphi- 
cratides ( Itnxpatfôec). H leur donna en même 
temps des épées et des piques plus longues. Avec 
ces troupes, devenues plus mobiles sans avoir 
perdu de leur solidité, il se porta rapidement 
sur le territoire de Pblius , en Arcadie , et obligea 
les Spartiates d'envoyer leurs forces de ce côté. 
Il vint ensuite au printemps de 392 tenir gar- 
nison av«c ses peltastes ( soldats armés du petit 
bouclier ) à Peirasum , sur le territoire de Co- 
rinthe. Cette ville, menacée par Agé&ilas, appela 
à son secours Iphiorate. Le mouvement d'Agé- 
8ilas était une feinte. Il en voulait réellement à 
Peiraeum, et il s'empara de cette forteresse aus- 
sitôt qu'elle eut été abandonnée par le général 
athénien. Celui-ci prit une éclatante revanche en 
détruisant près de Corinthe un détachement 
Spartiate. Il profita de ce succès pour reprendre 
Sidas et Crommyon, qui avaient été conquis par 
Praxitas , et pour enlever à Agésilas la ville 
d'Œnoé. Il aurait probablement forcé le roi Spar- 
tiate, si les Argiens, qui redoutaient son ambi- 
tion, n'avaient obtenu son rappel. Les Athéniens 
l'envoyèrent en 389 dans lUellespont contre Ana- 
nibius, qui fut vaincu et tué. Iphicrate fût en- 
core une fois arrêté au milieu de ses succès par 
la pacification générale connue sous le nom de 
traité dïAntalcidas ( 3»7 ). Au lien de revenir à 
Athènes, il offrit ses services à Senthers, roi des 
Odrysses, et le rétablit sur le trône, puis à Cotys, 
qui lui donna sa fille en mariage et lui fournit les 



moyens de bâtir la ville de Drus. En 377 les Athé- 
niens l'envoyèrent avec vingt mille mercenaires à 
Pharnabaze, qui se préparait à envahir l'Egypte 
insurgée. Les préparatifs de l'expédition durè- 
rent plusieurs années, et, dès les débuts de la 
compagne, il s'éleva un désaccord entre Iphi- 
crate, qui aurait voulu attaquer immédiatement 
Memphis, et le satrape, qui temporisa, laissa 
passer le moment et rat forcé de se retirer de- 
vant l'inondation. Iphicrate, se rappelant com- 
ment les Perses avaient traité Canon, et crai- 
gnant pour sa sûreté personnelle, s'enfuit à 
Athènes en 374. Pharnabaze rejeta sur lui le mau- 
vais succès de l'expédition et demanda qu'il fut 
mis en jugement; les Athéniens le poursuivi- 
rent , mais les circonstances ne leur permettaient 
pas de se priver de ses secours. La guerre s'é- 
tait rallumée entre eux et les Spartiates. Iphi- 
crate, avec une flotte réunie à la hâte en 373, fit 
voile pour Corcyre , battit les renforts que Denys 
de Syracuse envoyait aux Lacédémoniens, et 
poussa les opérations avec une vigueur qui hâta 
la conclusion de la paix, en 371. 

Lors de l'invasion du Péloponnèse par Épami- 
nondas, en 369, Iphicrate commanda les troupes 
envoyées par Athènes au secours de Sparte. Il 
ne put, ou ne voulut rien faire, et laissa les Thé- 
bains opérer tranquillement leur retraite à tra- 
vers l'isthme de Corinthe. H partit ensuite pour 
Amphipolis dont les Athéniens méditaient Je 
siège. Ne pouvant rien entreprendre contre cette 
ville avec le faible corps qui lui était confié, il 
s'occupa des affaires de la Macédoine. Eurydice, 
veuve d'Amyntas H, vint implorer son secours 
contre le prétendant Pausanias. Plaçant ses denx 
fils Perdiccas et Philippe sur les genoux du gé- 
néral athénien, et lui rappelant qu'Amyntns Pa- 
vait autrefois adopté pour fils, elle le conjura 
de défendre deux enfants qui étaient ses frères 
d'adoption. Iphicrate chassa en effet Pausanias, 
et Ptolémée d'Alorus, qui passait pour être l'a- 
mant d'Eurydice, devint régent de Macédoine. 
Le nouveau régent montra peu de reconnaissance 
aux Athéniens , et s'opposa à leurs projets sur 
Amphipolis. Iphicrate n'en parvint pas moins avec 
le secours de l'aventurier Charidème à réduire 
cette ville à l'extrémité, et il allait s'en emparer 
lorsque Timothée le remplaça dans son com- 
mandement. Ses liaisons avec les barbares l'a- 
vaient rendu suspect aux Athéniens, qui ne vou- 
laient pas le laisser à la tête de leurs troupes 
lorsqu'ils étaient en guerre avec son beau-père 
Cotys. Timothée insistait même pour qulphi- 
erate fut privé par un jugement de ses droits de 
citoyen. Iphicrate échappa a cette condamna- 
tion, et se retira d'abord à Antissa , puis dans sa 
ville de Drus. Les Athéniens le rappelèrent après 
la mort de Chabrias, et lui donnèrent un com- 
mandement dans la guerre sociale. U avait pour 
collègues Timothée, Ménesfhée et Charès. Celui- 
ci, voyant ses plans contrariés par les autres gé- 
néraux, les accusa devant le peuple, et obtint leur 



937 



IPHICRATE — IRALA 



938 



mise en jugement. Iphicrate et Ménesthée furent 
* quittés, en 355; Timothée seul fut condamné à 
une forte amende, en 354. On ne connaît rien 
des dernières années d'Iphicrate, mais on sait 
qu'il ne vivait plus à l'époque où Bémosthène 
prononça son discours contre Midias, en 346. 

Iphicrate appartient, comme Chabrias et Cha- 
rès, à cette classe de hardis hommes de guerre qui 
maintinrent au quatrième siècle la puissance d'A- 
thènes , mais qui n'eurent pas les qualités na- 
tionales des Cimon , des Aristide et des Péri- 
clès. Chefs de mercenaires , employés à des ex- 
péditions lointaines , ils ne Tenaient guère à 
Athènes que pour recevoir des récompenses ou 
répondre à des accusations, et prenaient à peine 
part aux affaires publiques. Ils avaient soin de se 
ménager l'appui de quelques orateurs célèbres, et 
Iphicrate fut particulièrement lié avec Lysias. 

— Iphicrate, fils du précédent, fut un des ambas- 
sadeurs envoyés de Grèce à Darius Codoman. 
Ses collègues et lui tombèrent après la bataille 
d'Issus, en 333, entre les mains des Macédoniens. 
Alexandre, qui se rappelait les rapports de la fa- 
mille royale avec Iphicrate le père, traita le fils 
avec beaucoup d'égards. Celui-ci mourut peu 
après , et ses os furent rapportés à ses parents. 

y. 

Cornélius Népos*, IpMcraUs. — Suidas, aux mots Kdt- 
pavoç, Eevtxpv, A pu;, Iqptxp^TVK. — Harpocratioa, 
aux mots Eevtx6v et Apyç. — Plutarque, jépoph.; Pe- 
lot»* «î JtgesU., n ; fite decem orat. Lysias. — Arts- 
tote, Rhet., 1,7, 9; II, 13; III, 10. — Démosthène, Phi- 
lip., I ; cent. Arist., cont. Timot., cont. Mêid. — Sco- 
llaste sur le Piutus d'Aristophane, 17S. — Dtodore de 
Sicile, XIV, 86, 91, M; XV, 99, 41-48, 47 ; XVI, 87. - Po- 
lyen, I. 9; III, 9. - Xéoophon, Hellen., IV, 4, s, 8; VI, 
s. S. — Platon, Menen. — Andoclde, De Pace. — Strabon, 
VTir, p. 889. - Pausanlas, III, 10. — Athénée, IV, p. 181. 

— Isée, De Harred. MenecU — /Eachlne, De falsa Léga- 
tions. — Denys d'Halicarnasse, De Lysia. — Dlnarque, 
Cont. Philocl. - QulDtlllen , V, 10. — Arrlen, Anabasis, 
II, 18. - Qulnte-Curce, III, 10.-- Rendant! , Fitse Iphi- 
cratis, Chabrias, Tlmotkei Athen.; Berlin, 1848, in-*». 

— G.' Grote, Bistory o/AncUmt Creece, t. IX et X. 

irailh (Augustin-Simon), historien et lit- 
térateur français , naquit au Puy-en-Velay, le 
16 juin 1719, et mourut au mois de mars 1794. 
Ayant embrassé l'état ecclésiastique, il devint 
chanoine de l'église collégiale de Monistrol , et 
ensuite prieur-curé de Saint-Vincent dans le dio- 
cèse de Cahors. S'il faut s'en rapporter à une 
indication donnée par l'abbé Sabatier de Castres, 
il Ait chargé de l'éducation d'un des petits neveux 
de Voltaire, ce qui expliquerait, selon ce cri- 
tique, l'espèce de partialité avec laquelle l'abbé 
Irailh a rendu compte des démêlés de l'auteur de 
LaHenriade avec l'abbé Desfontaines, J*-J. Rous- 
seau et Maupertuis, dans son principal ouvrage, 
recherché encore aujourd'hui, et qui a pour 
titie : Querelles littéraires, ou mémoires pour 
servir à V histoire des révolutions de la ré- 
publique des lettres , depuis Homère jusqu'à 
nos jours;. Paris, 1761, 4 vol. in- 12, avec 
cette épigraphe, Tantxne animis cœlêstibus 
ir.de l Ces Mémoires sont divisés en trois par- 



ties distinctes; la première traite des querelles 
d'auteur à auteur; la seconde, des querelles gé- 
nérales, ou sur de grands sujets; la «troisième, 
de querelles des corps contre d'autres corps, ou 
même contre un seul particulier. L'intérêt que 
l'auteur a su répandre sur l'exposé des divers 
incidents de ces tournois littéraires, les anecdotes 
singulières ou piquantes dont il est semé, expli- 
quent suffisamment le succès du livre , qui a de 
plus le mérite d'être si bien écrit qu'il rat d'abord 
attribué à Raynal et ensuite à Voltaire. L'abbé 
Sabatier assure même « qu'on n'y peut mécon- 
« naître en plusieurs endroits la touche et les 
« idées de l'historien du siècle de Louis XIV; 
« c'est sa manière d'écrire, sa tournure d'esprit 
« et sa façon de penser ». On aurait pu sans 
doute grossir le livre d'un plus grand nombre de 
démêlés littéraires, ayant eu plus ou moins de 
retentissement ; mais l'auteur nous semble s'être 
maintenu dans des limites fort sages, en se bor- 
nant au choix qu'il a fait parmi tant de maté- 
riaux que l'esprit d'hostilité scientifique ou U||eV 
raire mettait à sa disposition. On doit i 1'albé 
Irailh un autre ouvrage également intéressant par 
son objet, et qui a mérité la même estime; c'est 
V Histoire de la Réunion de la Bretagne à la 
France, où Von trouve des anecdotes sur la 
princesse Anne, fille de François II, duc de 
Bretagne ; Paris, Durand , 1764, 2 vol. in-12. 
La France littéraire de 1778 mentionne comme 
ayant été composée par lui, mais sans en faire 
connaître la date ni le format, une tragédie en 
cinq actes et en prose, intitulée : Henri le Grand 
et la marquise de Verneuil, ou le triomphe 
de r héroïsme, accompagnée de notes ainsi 
que de plusieurs lettres de Henri IV à la 
marquise. 11 y a lieu de croire que cette espèce 
de drame n'a pas été imprimé ; car on en cherche 
vainement le titre dans plusieurs collections dra- 
matiques , et notamment dans celle de M. de So- 
leinne , la plus complète et la plus étendue de 
celles qui aient été formées. On a aussi attribué 
à l'abbé Irailh Y Histoire de miss Honora, ou 
le vice dupe de lui-même, 1766, 4 parties, 
in-12 ; mais elle est de Lefèvre de Beauvray, qui, 
dans une lettre écrite aux auteurs du Journal 
Encyclopédique, a prétendu avoir dicté ce roman 
« à un galant homme de ses amfs » (l'abbé Iraim), 
qui s'en fit « ensuite l'éditeur et le vendeur ». 
C'est un trait qui aurait pu servir de complément 
à la nomenclature des querelles littéraires. 
J. Lamouredx. 
Quérard, La France Littéraire. — Docum. partie. 
irala tuso (Fra Mathias - Antonio) , 
peintre et graveur espagnol , né à Madrid Je 
25 février 1680, mort dans la même ville le 1 6 dé- 
cembre 1753. Il appartenait à une riche famille du 
Guipuscoa,et montra dès sa jeunesse de grandes 
dispositions pour le dessin et la peinture. Des mo- 
tifs, restés inconnus, le déterminèrent, le 22 mars 
1704, à entrer chez les franciscains de Madrid, et, 
durant quarante-huit années, il professa ou pra- 



990 ÏRALA 

tiqua dans aa cellule l'art qui fit s* réputation. 
Irala ¥oao a formé du bons élève*. Parmi ses 
meilleurs tekseaox on distingue à Madrid, $aint 
François de Paul» distribuant des plante* 
médiatnasn à des malades et plusieurs autres 
taaits de la via <ki même saint; h Alqala de H^ 
nafèi , total Thomas (TAquin. H a beaucoup 
gravé, et les musée» de Madrid et (ta l'Escurial 
possèdent pue grande .quantité de se* esquisses, 
, file, À. a*; L, 



aneratra, Lêê ComenSmtU» de la fHmSv rm. «• Uq» 
— QuUtyetf Q\çt&nxx*ri fat Peintreg espaçnols. 

, IEAI.A. Vou. Ybaju, 

itBLAHD ( Samuel), demain et graveur an- 
glais, aé à Londres, ver» |760, mort en 1800. 
D'abord ouvrier tisserand à Spftalfields, il devint 
marchand de curiosités dan* le Strand. Il sayait 
passablement dessiner et graver. Pour tirer parti 
de oa talent, il écrivit des voyages avec des vues 
gravées principalement à Vaquatinta des en.- 
drutts qu'il avait visités* U débuta par un, Taitr 
thMtgh Bolland, Qrabant, and a part of 
France, mode la the autuwn of 1739, \Uu$- 
tPated wtthprimti; Londres, 1790, 2 vol. in-8°. 
Hasuite parurent s fiioturesque View* on tfo 
rimer Thame*; 1798, 3 ¥Ol. in-8°; — Pictu,-* 
resque Vieux on the river Me4v>ay; 1793, 
in*g«; — Graphie illustrations of Hoçarthi 
17*4^1798, • voL in-8° ; — ficturesque Views 
on the Upper or WaruMtehire Avon; 1795, 
îft-8*. D eut le malheur de devenir le complice 
involontaire d'une fraude littéraire de son fils 
(Dey. Samuel- Wil.-Hen. Irslajd) ; le regret qu'il 
en ressentit hâta, dit-on, sa mort. On a encore 
de lui : Piosuresque Views and an historical 
aeetxunt of the Inns of Court in Lontfon and 
Westminster; 1800, hv8°. Ces ouvrages ont 
peu de valeur; cependant ils sont encore utiles 
à consulter pour l'histoire de certaines localités 
qui ont beaucoup changé depuis le siècle der- 
nier. £. 
, Chaînée*, Gcnmml Bioçraphical Dictiomn. 

lULâHD (Samuel-William-Henry) t litté- 
rateur anglais, fils du précédent, né à Londres, 
dans le Strand, en 1777, mort la 17 avril 1835. Il 
fat élevé dans une école privée en France. En 
1795, il accompagna son père dans un voyage à 
Stratford<8ur-Avon. Voyant que celui-ci, plein 
d'enthousiasme pour âhakspeare, ne désirait rien 
tant que d'en trouver quelque retique, U imagina 
d'en fabriquer une. U lui présenta un autographe 
de Shakspeare, et déclara l'avoir trouvé parmi de 
vieux papiers. Émerveillé d'une si belle décou- 
verte, Ireland encourage* son fils à continuer ses 
recherches. Le jeune faussaire continua en effet, 
et il en résulta une masse de manuscrits qui, étalés 
dans la maison de Samuel Ireland, trompèrent la 
crédulité publique. Entre autres productions se 
trouvait une tragédie de Yortigern, t que Sheridan 
acheta pour le théâtre et fit jouer devant une 
satte comble et très-disposée a applaudir. Mais 



— IRÈNE 940 

toute la bienveillance de l'auditoire ne pot tenir 

contre cette détestable rnpsodie, où Ton cherchait 

en vain quelque trait digne de Shakspeare. Aussi 

quand l'acteur Kérnhle prononça ce vers de son 

rôle; 

Et maintenant c'po f»t tait de cette solennelle moquerie, 

la tempête éclata, et U fallut baisser le rideau. 
Vortigern disparut pour toujours du théâtre. 
En même temps les attaques de Malone et d'an- 
tres critiques éveillèrent les soupçons d'Ireland 
père, qui interrogea son fils, en obtint Vayeu de 
la fraude, et reconnut pubUquexpent son erreur. 
Samuel William Ireland quitta la maison pater- 
nelle, et vécut des nombreux produits de sa 
plume. A la fin de 1796, il publia un opuscule où 
il se reconnaissait fauteur des manuscrits qu'il 
avait produits sous le nom de Shakspeare. ce 
petit ouvrage reparut, fort augmenté, avec le titre 
de Confessions, en 1805. Ireland écrivit aussi des 
romans : The Abbess; 1799, 4 vol.;— Gandez 
the Monh; 1004* 4 vo).; - The Womn of 
feeling» 4 vol.; et un poème : ffeglected Genius; 
1812. Toutes ces productions ne valaient pas 
mieux que les prétendus manuscrits de Shak- 
speare, et attirèrent infiniment moins l'attention. 
Jusqu'à la un de sa vie, il continua d'écrire pour 
les libraires. Parmi ses derniers ouvrages le plus 
important est la partie descriptive d'une His- 
toire illustrée du Comté, de Kent, en 4 vol. Z. 
Gentleman' t Magazine, 1796-7. — Monthlty Review, 
▼oL XII, XX, XXI|, XXVII, XXXV. - Malone, Inquiry. 

— Owlmers. Apology for tfc beUevert. - Brigiùh 6> 
cloptedia ( Bioçraphy ). 

iufiLANu (John), amateur anglais, né vers 
1730, aux environs de Wrem (comté de Salop), 
et mort en 1808. Adopté dans son enfance par 
la veuve de Wycherly, auteur dramatique dis- 
tingué, il manifesta pour les beaux-arts un goût 
très-vif, qui devint la passion dominante de toute 
sa vie. Après avoir fait une excursion malheu- 
reuse dans la carrière commerciale , il s'occupa 
de tableaux, d'estampes et de Kvres, et devint 
en ces matières un des amateur* les plue éclairés 
de son temps. On a de loi deux monographies es- 
timées, l'une sur l'acteur Heuderson : life and 
letters of Benderson; Londres, 1786, 2 vol.; 

— et l'autre sur le pesntie Hegarth ; JU§arth 
ilèustrated; Londres, 179 M m, a ici, grand 
in-18,avec 1*3 planches? réhaprinséo eu 1793 et 
en 1804. P* I*— i. 

Ko«e, New J*>ft#ftf*feeJ Pfoffeftfr y. - «wnel, *«- 
mtel de tAtnaUur de Uvrm, 

IRBNJBCS. Voy. GlESELER. 

iRàtfB (Elf^vq), Impératrice de Oonstanti- 
nople, née à Athènes, vers 752 1 morte dans l'Ile 
de Lesbos, le 15 août 803. On ne sait rien de 
ses premières années. L'éclat de sa beauté et de 
son génie attira Fattentîon de l'empereur Cons- 
tantin Gopronyme, qui la destina à son fils et 
héritier présomptif, Léon. Irène fit son entrée à 
Constantinople le 1 er septembre 769, au milieu 
d'un magnifique cortège. Les fiançailles furent 
célébrées dans la chapelle du palais deux jours 



941 



IRÈNE 



942 



après, et le mariage s'accomplit te 17 décembre. 
La princesse reçut le même jour le titre d'aw- 
gits (a . Léon,avant et après *onevénement,en 775, 
lui témoigna beaucoup de tendresse; mais un 
motif religieux amena nue rupture entre les deux 
époux. Irène* élevée dan» le cuite des images, 
avait dn y renoncer solennellement pour se con- 
former anx opinions de Constantin et de Léon » 
tous deux gelés iconoclastes» Cependant elle avait 
gardé, peut-être par inattention * deux images 
dans sa chambre, L'empereur les découvrit, entra 
dans une violenta colère « et rompit tout com- 
merce arec l'impératrice. Il aurait même pris à 
son égard des résolutions plus rigoureuses , s'il 
n'était mort presque aussitôt après, le 8 septembre 
780, laissant le trône à son fils Constantin VI, 
Porpbyrogéoète» alors à peine âgé de dix ans. 
Irène, régente de l'empire* gouverna avec une vi- 
gueur qui alla jusqu'à la cruauté* Les principaux 
actes de son administration ont été racontés à 
l'article Constantin VI ; nous n'insisterons ici que 
sur les faits qui se rapportent directement à elle- 
même. Elle se.oontenta d'abord de suspendre les 
poursuites contre les orthodoxes (adorateurs des 
images) et de les favoriser secrètement ; mais, 
en 786, elle convoqua un concile a Constantinonle 
pour rétablir le culte des images dans tout l'em- 
pire. Las soldats de la garde « peut-être par 
haine contre l'impératrice et son favori l'eunuque 
Stauratius» étaient très-attachés aux opinions 
iconoclastes; Us se soulevèrent et dispersèrent 
les prélats du concile. Irène dissimula son indi- 
gnation , fit passer les soldats en Asie sous pré- 
texte d'une expédition contre les Sarrasins, les 
licencia , et les remplaça par une antre garde 
composée de Thraces et commandée par Staura- 
tius. L'année suivante * elle rassembla è Nlcée un 
nouveau coneile (le septième général) qui s'ou- 
vrit le 24 septembre et se termina le 2fl octobre, 
Le concile rétablit le culte des images, déclara 
faux et hérétique le conoUe tenu sous Constantin 
Copronyme, frappa d'anathème les prélats ico- 
noclastes , et donna au jeune empereur le titre de 
nouveau Constantin , et à Irène celui de nouvelle 
Hélène* Les décisions du concile excitèrent de 
nombreux mécontentements, que Constantin es- 
saya plus tard d'exploiter pour se dérober à la 
tutelle de sa mère. Ses tentatives, plusieurs fois 
renouvelées, ne réussirent jamais complètement, 
et finirent, par amener sa déposition et sa mort, 
en 797. Irène» qui avait été l'âme du complot et 
qui n'avait pas hésité à faire crever les yeux à 
son fils, resta seule maîtresse de l'empire. Elle 
gouverna avec toute la fermeté dont eue avait 
toujours (ait preuve et en général avec une mo- 
dération que l'on ne pouvait guère attendre d'elle. 
Cependant la raison d'État lui fit commettre des 
actes de cruauté en usage à la cour de Byzanee. 
Les quatre fils de Constantin Copronyme, dont 
l'un, Nicéphore, avait eu les yeux crevés, tandis 
» qu'on avait coupé la langue aux trois autres, vou- 
lurent revendiquer le trône;; mais fis furent fa- 



ottement arrêtés et exilés à Athènes. Une seconde 
tentative ne leur réussit pas mieux. Irène leur fit 
crever les yeux à tous, et les transféra à Panorme, 
dans la Macédoine. Tout pliait sous son ascendant, 
et les échecs de ses armes contre les Sarrasios 
dans l'Asie Mineure ne portèrent pas-atteinte à son 
pouvoir intérieur. Le lundi de Pâques de l'année 
799 elle se rendit à l'église des Saints-Apôtres, 
dans un char enrichi d'or et attelé de quatre che- 
vaux blancs. Quatre patrices des plus éminente 
tenaient les guides. L'impératrice, magnifique- 
ment vêtue, la couronne sur la tête, le sceptre et 
le globe à la main , s'avança au milieu des accla- 
mations populaires. Les intrigues de Stauratius 
et d'un autre favori, nommé Aétius, qui se jalou- 
saient et cherchaient à se renverser, créèrent des 
difficultés à Irène, et auraient peut-être amené la 
guerre civile si Stauratius n'était mort à propos, 
en 800. Vers la même époque, des négociations se 
renouèrent entre la cour de Constantinople et 
celle d'Aix-la-Chapelle. Si l'on en croit les nia* 
toriens grecs, Irène offrit sa main à Charlemagne, 
et ce prince agréa ou même conçut le premier 
le projet d'une union qui aurait reconstitué rem- 
pire romain ; Aétius fit manquer ce plan gran- 
diose. Le silence des Occidentaux et surtout d'É- 
ginhard rend bien douteuse l'assertion des chro- 
niqueurs byzantins* Irène continua de gouverner 
l'empire avec autant d'habileté que d'énergie , 
sans pouvoir faire oublier le crime auquel elle 
devait le trône. Elle prodigua au peuple le trésor 
impérial»; elle fonda <ks hôpitaux pour les vieil' 
lards, pour les étrangers, pour les pauvres; elle 
fit une remise générale des dettes du fisc, et di* 
minua les charges publiques. Ces bienfaits n'a- 
joutèrent rien à la stabilité de son pouvoir. Malgré 
sa prudence, elle se laissa tromper par les pro- 
testations de dévouement du grand-logothète 
(trésorier) Nicéphore, ambitieux qui joignait à 
une avarice sordide l'ingratitude et l'hypocrisie. 
Sept eunuques, commandants de la garde et hauts 
dignitaires du palais, s'associèrent à ses projets. 
Le 31 octobre 802, tandis qu'Irène était retenue 
par une maladie au fond du palais d'Éleuthère, 
les conjurés, usant de leur autorité sur la garde, 
se saisirent de l'impératrice, qu'ils enfermèrent - 
dans le grand palais. Le lendemain Micéphore, 
après s'être fait couronner par le patriarche inti- 
midé, alla rendre visite à Irène, et obtint qu'elle 
lui livrerait ses trésors. II promettait à ce prix 
de la laisser en possession du palais d'Éleuthère ; 
mais il s'inquiéta peu détenir sa parole : il la re- 
légua dans Vile des Princes, où elle avait fondé 
un mouaetàfe. et la fit conduire peu après à Mi- 
tylène,dans Ille de Lesbos. Par haine et par 
avarice, il la laissa manquer même du nécessaire, 
et cette princesse, autrefoiasi magnifique, fut ré- 
duite à filer pour gagner sa vie. Elle survécut 
moins de dix mois à sa chute. EHe était âgée d'en- 
viron cinquante ans, Les Grecs* oubliant son 
crime et ne se rappelant que la protection accor- 
dée au culte d*es images, l'ont placée au* nombre 



94* 



IRÈNE — IRÉNÉE 



944 



des saintes. Ils célèbrent sa fête le 15 août, jour 
supposé de sa mort. L. J. 

Cédrene, Chron., p. Vît, etc., édlt. du Louvre.- — Théo- 
phane, p. S99, etc.. éd. da L.— Zonaras, toI. u, p. i», e tc^ 
éd. du L. — Glycas, p. tSl, éd. do L. — Vincent Mlgnot 
Histoire de V Impératrice Irène; Amsterdam, 1761. — 
Le Beau, Histoire du Bas-Bmpire, 1. LXV et LXVI. — 
Gibbon, Historf of Décline and FaU of Roman Empire, 
U . — Scbiosaer, GescMchte der bilderstUrmenden 
Kaiser des Oit. Romischen Reiches. 

inÈH E; jeune Grecque célèbre par sa beauté. 
Voy. Mahomet IL 

iftÉRÉB (Saint), Etpnvatoç, second évêque de 
Lyon et martyr, naquit dans l'Asie Mineure, à 
Smyrne ou dans les environs, à une époque sur 
laquelle les historiens de l'Église ne sont pas par- 
faitement d'accord (1), mais qu'il semble légitime 
de fixer entre les années 135 et 145 de J.-C, et 
mourut vers 202, pendant la persécution ordonnée 
par Séptime Sévère. Tout ce qui concerne l'ori- 
gine d'Irénée, la condition de ses parents, leur 
religion, les premières années de sa vie estcouvert 
d'une profonde obscurité. Tout au plus peut-on 
dire qu'il était Grec; on sait au moins que c'est 
dans cette langue qu'il a composé ses ouvrages. 
Une lettre qu'il adressait à Florinus, un de ses 
condisciples, et dont Eusèbe nous a conservé un 
fragment, nous apprend qu'il vit et entendit saint 
Polycarpe. H était à peine sorti de l'enfance ( en 
watç ôv), et l'enseignement du saint vieillard fit 
une si profonde impression sur lui qu'arrivé lui* 
mèmeà une vieillesse avancée, il se souvenait non- 
seulement de ses discours, mais se représentait 
fort distinctement le lieu où il réunissait ses dis- 
ciples et les moindres particularités de sa vie et 
de ses habitudes. Indépendamment de saint Po- 
lycarpe, il eut encore pour maître saint Papius, 
évoque d'Hiérapolis. On peut donc dire qu'il puisa 
la foi chrétienne aux sources primitives de la 
pure doctrine apostolique. 

Irénée joignit à la méditation des Saintes Écri- 
tures l'étude approfondie des sciences profanes. 
Son âme était ardente et curieuse de tontes les 
connaissances humaines. Tertultien l'appelle om- 
nium doctrinarvm curiosissimus explorator. 
Dans un temps où le christianisme avait à se dé- 
fendre non-seulement contre les attaques vio- 
lentes de ses ennemis, mais encore contre les 
dangereuses nouveautés de partisans téméraires; 
quand il fallait répondre aux critiques des écri- 
vains païens et en même temps combattre les 

(1) Dora CellUer et Lenaln de Tillemont placent la nais- 
sance d'Irénée vers i*>; Dnpln la recale jusqu'en 140; 
Massaet, dans la vie d'Irénée qui précède l'édition qu'il a 
dônneeide ses œuvres, a adopté cette dernière date, et de 
même -Mœlher, dans sa patrologte. Saint Polycarpe est 
mort entre 164 et 168; Irénée raconte loi-même qu'étant 
encore enfant 11 a entendu le saint martyr, déjà parvenu 
à l'extrême vleUlease (ndvu ynpaXeoç). Si on suppose 
qn'Irénée est né en lto et qu'il a reçu les leçons de Po- 
lycarpe à douze ou quatorze ans, il se sera écoulé trente- 
quatre ou trente-six ans entre cette époque où Polycarpe, 
d'après le témoignage même d'Irénée , était déjà très- 
vieux, et sa mort , ce qui semble très-difflcile à admettre, 
il parait plus légitime de placer la naissance d'Irénée entre 
las années 115 et us. 



entreprises et les tendances dangereuses de cer- 
tains chrétiens, fourvoyés dans le mysticisme 
oriental , il était nécessaire , pour entrer dans l'a- 
rène , d'être armé de toutes pièces , de connaître 
le fort et le faible de chaque doctrine, et par con- 
séquent de les avoir toutes examinées, môme les 
plus superstitieuses et les plus fausses. Le com- 
merce des philosophes et des poètes de la Grèce, 
sans refroidir sa ferveur, communiqua à l'esprit 
d'Irénée une clarté, une élégance, une grâce que 
les premiers apologistes de l'Église ont trop sou- 
vent dédaignées, et à son raisonnement une 
souplesse et une force remarquables. Cest une 
question de savoir combien de temps Irénée de- 
meura en Asie, ce qu'il y fit et s'il y fut revêtu 
des fonctions sacerdotales. Les auteurs anciens 
se taisent sur tous ces points. Grégoire de Tours 
rapporte qu'il fut envoyé dans les Gaules par 
saint Polycarpe (1). Cette mission, dont on ignore 
le motif immédiat, n'est pas douteuse, mais il 
est vraisemblable que, quand H en rat chargé, 
son ancien maître avait cessé d'exister. 

Saint Photin, évéque de Lyon, le reçut et l'at- 
tacha à son église en qualité de prêtre. H ne 
tarda pas à se faire connaître, et fut apparemment 
un des adversaires les plus actifs de la secte de 
Montanus, qui, chassée de Rome, essayait de s'in- 
troduire en Gaule et d'y recruter des partisans. 
Le rôle qu'il joua dans cette occasion le désigna 
sans doute aux martyrs de Lyon, qui, écrivant au 
pape Éleuthère au sujet de l'hérésie montaniste, 
le chargèrent de porter leur lettre à Rome : 
« Nous avons, disaient-ils, prié notre très-cher 
frère et collègue Irénée de te remettre cette lettre ; 
nous te le recommandons, et nous te prions de 
le regarder comme un homme brûlant de zèle 
pour l'Évangile de Jésus-Christ. Si nous pensions 
que son mérite pût être relevé par sa dignité, 
nous te le recommanderions très-particolière- 
ment en qualité de prêtre (2). » 

Pendant le séjour d'Irénée à Rome, le sang 
des chrétiens coulait en Gaule. Photin ayant reçu 
la couronne du martyre, Irénée rat élu à sa place 
évêque de Lyon (178). 

Le fardeau de l'épiscopat était alors lourd à 
porter : aux maux permanents d'une persécu- 
tion que la résignation des martyrs ne pouvait 
lasser s'ajoutaient, au sein même de l'Église, des 
divisions et des dangers domestiques. Le gnos- 
ticisme, avec ses subtilités panthéistiques, son 
piérâme et ses interminables générations d'éons, 
compromettait gravement la profonde simplicité 
de là métaphysique chrétienne; les sectateurs 
de Montanus, avec leurs extases, leur dédain 
excessif de la nature, et leurs aspirations vers 
une perfection outrée qui captivait les âmes con- 
templatives, tendaient à éloigner les faibles, en 
leur proposant un idéal inaccessible, et en rom- 
pant en visière avec les conditions les plus natu- 

(i) Greg. Toron., Hist. Franc*, U «o. 
(J) Eusèbe, Ut. V, en. rv. 



945 



IRÉNÉE 



946 



relies de la vie; d'antre part, l'époque de la 
célébration de la Pâque divisait les évoques d'O- 
rient et d'Occident. La conférence de saint Po- 
1) carpe et du pape Anicet sur ce point avait 
plutôt ajourné que terminé le différend. Outre 
ces difficultés générales, la situation particulière 
du christianisme dans les Gaules exigeait d'Iré- 
née un zèle infatigable; car la religion nouvelle 
n'avait pas encore de fortes racines dans ce 
pays, et, avant de pacifier et d'unir, il fallait ga- 
gner des âmes à la foi. Irénée se donna tout en- 
tier à cette œuvre, et avec un succès auquel 
Grégoire de Tours rend témoignage en disant 
que par sa prédication il parvint, dans un court 
espace de temps, à faire de Lyon une ville chré- 
tienne. En même temps il étendait et propageait 
la foi par des missions apostoliques à Valence et 
à Besançon, et combattait les hérétiques dans 
des livres où il dévoilait et réfutait leurs doc- 
trines. Les trois premiers livres de son traité 
contre les hérésies furent écrits sous le pontificat 
d'Éleuthère. 

Le débat qui divisait les Églises d'Orient et d'Oc- 
cident sur le jour où l'on devait célébrer la Pâque 
menaçait de tourner en schisme. Des deux côtés 
on invoquait la tradition apostolique. Le pape 
Anicet, sur le conseil de Polycarpe, et pour éviter 
tout déchirement, avait laissé les églises suivre 
librement leur usage sur un point où la foi n'é- 
tait pas intéressée. Le pape Victor entreprit de 
rétablir l'unité; mais il rencontra une vive op- 
position de la part des évêques de l'Asie Mineure 
et particulièrement de Polycrate d'Éphèse. La 
résistance l'irrita. Irénée s'entremit, et lui per- 
suada de suivre la politique sage et modérée de 
ses prédécesseurs, en lui représentant avec une 
respectueuse fermeté les embarras dans lesquels 
il engagerait l'Église. Grâce à son intervention , 
la question fut encore réservée. Ce fut seulement 
le concile de Nicée (325) qui fixa le jour de la 
Pâque au dimanche qui suivait la pleine lune la 
plus rapprochée de l'équinoxe du printemps. 
C'est ainsi, dit Eusèbe, qu'lrénée, remplissant 
toute la signification de son nom, se montra vé- 
ritablement amateur de la paix par la douceur 
de ses mœurs, par la modération de sa conduite, 
et par les mouvements qu'il se donna pour la 
procurer à l'Église (i). 

Irénée fut une des nombreuses victimes de la 
persécution de Septime Sévère. Les actes de son 
martyre n'existent plus : du temps de Grégoire 
le Grand, ils étaient déjà introuvables. 

La liste des ouvrages de saint Irénée est 
longue, et prouve mieux que tous les discours 
son zèle et son activité. Par malheur, à l'excep- 
tion de son grand traité Contre les Hérésies et 
de quelques rares fragments conservés par Eu- 
sèbe, nous avons tout perdu. Saint Jérôme cite 
expressément une Épitre au pape Victor sur 
la célébration de la Pdque. Nous possédons 

(1) Eusèbe, 11?. V, ch. xv. 



encore un passage de cette lettre; — une Épitre 
contre Bios tus, itepl <3yi <J V ja * i- G* Blastus pa- 
rait avoir été un chrétien judaïsant. 11 s'agissait 
probablement dans cette lettre du débat au sujet 
de la Pâque; — deux Épttres à Florinus, l'une 
Sur la Monarchie, ou sur cette question Que 
Dieu n'est pas V auteur du mal; l'autre Sur 
VOgdoade, où il combattait l'erreur valentinienne 
sur le nombre de huit ; — une Épitre à son frère 
Martin sur la tradition apostolique (Ifepi tou 
'AnooxoXixoO xyjpvyimctoç ; — un Livre contre 
les Grecs, ou Sur la science (np&ç "EXXnva; 
4j wepi ëici<rnQ|j.vrc; — un Recueil de traités de 
différents genres (BCGXiov ôiaXéÇewv Siapépcov) ; 
— ■ Eusèbe fait entendre clairement qu'lrénée avait 
écrit contre Marcion, et Irénée lui-même, dans 
sa réfutation des hérésies, marque plusieurs fois 
l'intention d'en parler. Saint Maxime cite d'ïré- 
née un traité De Fide, Les fragments en latin 
d'un ouvrage qui porte ce titre, que Feuardent 
a donnés, ne paraissent pas pouvoir lui être lé- 
gitimement attribués; il en faut dire autant 
d'autres fragments découverts dans un manus- 
crit de la bibliothèque de Turin. Le débat qui 
s'est élevé à ce sujet entre le chancelier Pfaff de 
Tubingue et Soipion Maffei n'a rien éclairci (1). 
Le seul ouvrage d'Irénée qui soit venu jusqu'à 
nous est incontestablement le plus considérable 
de tous ceux qu'il a composés. Son titre exact 
est celui-ci : Exposition et réfutation des 
Mensonges de la Gnose ('EXevxoc **î àvaorpoç^ 
Tîjç ^ eu $a)v\>{AOu Yva>aeu>0* O n le désigne plus 
communément sous le titre de Traité contre 
les Hérésies. Ce traité forme un des plus longs 
ouvrages de polémique de l'antiquité chrétienne. 
Il se divise en cinq livres. Le texte grec a péri, 
sauf quelques fragments assez étendus ; mais la 
traduction latine que nous en avons est très-an- 
cienne et peut-être contemporaine d'Irénée. Au 
reste, elle est fort barbare, hérissée d'heHénismes 
et souvent d'une intelligence très-difficile. Les 
objections que Semler a élevées contre l'authen- 
ticité de cet ouvrage sont peu sérieuses et ne 
valent pas la peine qu'on s'y arrête. Le premier 
livre est consacré à mettre dans tout son jour 
tes mystères du gnosticisme valentinien. Irénée 
y expose cette théologie bizarre où la théorie pan- 
théiste des émanations s'allie au dualisme orien- 
tal : il décrit la génération des éons , leur rapport 
avec Dieu et avec le monde, opposant les varia- 
tions et les contradictions de cette doctrine à la 
simplicité de la tradition apostolique , une et 
invariable; puis il rapporte l'origine du gnosti- 
cisme à Simon le Magicien, et le suit dans ses di- 
verses transformations jusqu'à ses derniers par- 
tisans. Le deuxième livre est employé à réfuter la 
doctrine gnostique. L'hypothèse de la formation 
du monde par une volonté et une puissance autres 
que celles de Dieu est inadmissible et contradic- 
toire : Irénée montre le danger des interpréta- 

(1) Mœlher, Patrotogie, tom. I, pag. 387 et suif. 



947 



IHÉNÉE 



948 



tions téméraires des Saintes Écritures, et les con- 
séquences morales de l'anthropologie des gnos- 
tiques. Dans le troisième livre, irénée pose la 
question sur le terrain de l'histoire et de la tradi- 
tion positives. 11 fait Toir que les hérétiques ne 
sauraient se prévaloir de l'autorité de la tradition 
dans l'établissement de leurs dogmes. Pans l'E- 
glise chrétienne, la tradition se perpétue par les 
docteurs et les évêques qui se la transmettent» 
pour ainsi dire, de main en main sans interrup- 
tion. Ensuite il expose cette tradition elle-même 
et ses immuables enseignements sur les rap- 
ports du Père et du Fils, et démontre cette doc- 
trine par l'autorité des quatre Évangiles et les 
décisions des Apôtres. Les raisons que donne 
Irénée pour établir qu'il n'y a que quatre Évan- 
giles, ni plus ni moins, ne paraissent pas très- 
frappantes; il ne semble pas qu'on puisse con- 
clure rien de semblable « de ce qu'il y a quatre 
régions du monde dans lequel nous vivons, et 
quatre points cardinaux ». Dans le quatrième 
livre, Irénée marque le rapport étroit de la 
théologie de l'Ancien Testament avec celle qui 
se trouve dans le Nouveau. La loi nouvelle, bien 
que supérieure à l'ancienne, loin de la contre- 
dire , la complète et l'achève- La Loi mosaïque 
n'avait d'autre but que de dompter l'opiniâ- 
treté du peuple juif, d'en réprimer les passions 
sauvages et de préparer les âmes à l'avènement 
du Christ , au règne de la charité. Aussi la Loi 
nouvelle a-t-elle été donnée, non pas aux seuls 
Juifs, mais à toutes les nations. Ce livre se ter* 
mine par une défense du libre arbitre contre 
les sectes gnostiques et par quelques considé- 
rations qui se rattachent à cette question. Le 
cinquième et dernier livre a pour objet d'ex* 
pliquer les effets de la rédemption, et d'établir 
sur des preuves solides la résurrection des 
corps. Irénée insiste longuement sur ce dernier 
point. La doctrine de la résurrection des corps 
était une de celles qui avaient suscité le plus 
d'objections contre le christianisme, de la part 
des philosophes et de celle des hérétiques. Un 
philosophe chrétien, contemporain d'Irénée, 
Athénagore, venait récemment de composer un 
traité dans lequel il prétendait démontrer la ré- 
surrection des corps par les seules lumières de' 
la raison. Irénée entreprend de prouver que le 
dogme de la résurrection de la chair est intime- 
ment lié au dogme de l'incarnation. Dans la 
dernière partie de ce livre, on trouve l'opinion 
d'Irénée sur le millénaire ou règne de mille ans, 
auquel il croyait comme son maître Papias et 
comme saint Justin, son contemporain. C'est sur 
ce point seulement qulrénée pourrait être taxé 
d'hétérodoxie. Sa doctrine même est assez bi- 
zarre : il prétend que les Ames des justes ne 
parviennent pas immédiatement après leur mort 
à la contemplation de Dieu; mais que, comme 
Jésus-Christ , qui, avant de monter au eiel, a 
passé trois jours aux enfers, elles doivent tra- 
verser différents états intermédiaires. Le premier 



est celui où elles attendent la résurrection de 
leur corps, dans une bienheureuse communica- 
tion avec Jésus~Chriat. Le second celui où, ressus- 
cites, ils doivent régner arec Jésua-Christ aur la 
terre au milieu de toutes les jouissances. Le 
troisième enfin est celui où ils sont admis à la 
contemplation de Dieu. Cette tache, qu'on peut 
justement reprocher à Irénée, disparaît du reste 
dans l'ensemble do son exposition de la doctrine 
chrétienne. 

Nous avons un grand nombre d'éditions des œu- 
vres d'Irénée ; Érasme donna la première, à Baie, 
en 1620, Elle fut réimprimée plusieurs fia» jus- 
qu'en UGQ, tant à Baie qu'à Paris, ia-foL etin-8°, 
en 1563, Les protestants Nicolas GaUaakia et 
Grynœus en donnèrent une nouvelle édition, l'un à 
Genève en 1570, l'autre à Bâte en 1571, ia-fol. 
Feuardent, frère mineur et professeur de V univer- 
sité de Paria* «tanna ta troisième édition * mcn su- 
périeure aux précédente*, à Parie, I6â9et it7*, 
in-fol. Ernest Grau* est l'auteur dé la quatrième 
édition, publiée à Oxford en 1702. Cette éâffion est 
très-reroarquablapour l^Xéwtion typographique. 
Enfin Massuet, bénédictin de Saint-Maur * publia 
en 1700 à Paris, et en 1734 à Vienne, in-fol., 
son excellente édition. Ce travail, dit Mmlher, 
offre le parfait modèle d'une édition critique. 
On y trouve tous les fragmenta d'Irénée, mène 
ceux de Pfaff et la polémique de ce dernier avec 
Scipion Maffei, . B. Aub*. 

Œuvre* d'Irénée, édit» de Haatvet, Parte, itw. - 
Tertullien. - Saint Jérôme, De F iris Ulustribus. -Grc 
gotre de Tours, I, 10. — Eosébe. Misé. JSccl., V, *. - 
nom ftcny Oetllter, hist gênés: été Jut. Satfrés et Ke- 
ciù„ tom. II. - Uaain de Tlltonoo*, HWoir. ttcte-, 
tom. III. - Fleury, Hist. Ecclés., tom.. IV, — Mœther, 
Patrologie, tom. II, et toutes tes histoire* de l'Église. 

irénée (Saint), martyr en toscane, en 275. 
Solvant les hagiographes, il fut arrêté lors de la 
persécution ordonnée contré les chrétiens par 
l'empereur Anrélien. Le préteur de la Toscane, 
Turclus, le fit conduire à Chlusi. « 11 ordonna, 
rapporte Baillet , qu'on l'étendlt Sur le chevalet, 
qu'on lui déchirât les ooles avec des ongles de 
fer, qu'on lui appliquât des torches ardentes sur 
les flancs. » Irénée mourut au milieu de ces 
cruels supplices; 11 avait pour compagne de mar- 
tyre une dame nommée Mostiole, qui succomba 
sous des coups de fouet plombé. Tillemont re- 
connaît que les actes de ces saints « quoique 
graves, ne sont pas originaux » ; cependant, l'É- 
glise les honore le 3 juillet. A. L. 

Tttfetnont, Mémoires Bccl-ëfiasMqms, t. IV. - Batllrt, 
Fies des Saints, t. Il, S )HUet. - Richard et Glraad , Bi 
bliothèqw Sacrée, 

wAnéb ( Saint), martyr, décapité le 25 mars 
ou le 6 avril 304, à Sirmicb, en Pannonie (au- 
jourd'hui la Hongrie). Il était éveque de Sirmicb, 
lorsque Probus, gouverneur de la Pannonie, le 
fit sommer de renoncer à la religion chrétienne. 
Probus agissait en vertu des ordres des empe- 
reurs Dioctétien et Maxknien. Il offrît à Irénée 
divers moyens de transiger avec les lois ro- 
maines; mais le saint prélat ne daigna pas même 



949 



loi répondra Aprë* »^Qir subi diverses tortures, 
Irénée eut la tête coupée. Vhi&toire de 00a mar- 
tyre semble authentique. L'Église l'honore le 
26 mars. A, L. 

poro RulRavt, f'iUp Sanfitarup. *> TUleijiont, Mé- 
moires Ecclésiastiques, t. V. - Bail le t, fies des Saints, 
t. il, SB mars. — Richard et Glraud, -Bibliothèque Sacrée* 

minée, évêque de Tyr, vivait dans la pre- 
mière moitié du cinquième siècle. D'abord comte 
de Pempire, il représenta ^empereur Théodose II 
au concile d'Éphèse en 431, et prît parti pour 
les nestoriens. A la fin du concile il se rendit 
en toute hâte à Coustantineple pour combattre 
dans l'esprit de IViupereur l'influence du parti 
contraire. Il y reuss.it pendant quelque temps; 
mais Théodose, après de longues hésitations , se 
déclara contre le* nestoriens, et bannit Irénée 
de la cour, vers 435. tes évoques orientaux, qui 
partageaient ses opinions religieuses, t'élurent 
évêque de Tyr en 44 4., Un décret impérial or- 
donna de le dépoter de Vépiscopat et de le 
priver du caractère ecclésiastique. La sentence 
fut exécutée en 448. Irénée écrivit dans sa re- 
traite une histoire de la controverse nestorienne, 
sous ce titre ; Tragœdia, seu commentant de 
rébus m$gnQtlaEphe$ix ac in Oriente gestis. 
Le texte grec de cet ouvrage est perdu ; mais il 
reste des fragments étendus d'une vieille traduc- 
tion latine publiée par Christian Lupus sous le 
titre fort inexact de : Variorum Patrum Epis- 
toi ce ad coneUium Bphesium pertinentes; 
Louvain, 1683, Y, 

Manst, Satr. Cancil. «e* Colket., ▼«!. V, p. Ml, 7». 
— TU le mont, Mém. Ecclés., vol. XIV. — Cave, Hist, Lit- 
leraria. 

irénée, grammairien grec, dont les Latins 
raduisirent le nom. en celui de Pacatus. On 
nanque de détails sur sa vie, mai» on sait miU 
rivait sous les Ptolémées et qu'il était établi à 
Alexandrie; il s'occupa surtout de recherche» 
nr le dialecte de l'Attique et sur celui d'Alexan- 
Irie. Suidas mentionne plusieurs ouvrages d'I* 
énée sur différente sujets de grammaire; Us 
ont aujourd'hui perdus. Il avait aussi écrit un 
ommeutaire sur Apollonius, cité à diverses re- 
prises dans les scolies qui nous sont parvenues 
ur ce poëte. G. B. 

Suidas. Lexicon, t, II, p. M, édtt. de Kaater. — Ffcbrl- 
«u, Mibliotheea Qrmca; 1 VI, a>. 17t. 

xbAaéb, surnommé le Référendaire, prêtre 
rec, qui parait avoir été contemporain de Justi- 
ieu ; il reste de lui trois pièces dn genre erotique ; 
lies ont été insérées dans Y Anthologie. G. B. 
^jnthologiu, édtt. de Jaoota, t. III, p. Ml et XIII, sos. 

* ibénék ( Klementievski), théologien russe, 
* en 1 7â3, à Klementief ( gouvernement de Via- 
noir), mort à Saint-Pétersbourg, le 24 avril 1818, 
ait un moine fort érudit, qui fut évêque de 
irar et archevêque de Pskof. Il a écrit des 
»¥Yimentaires sur les douze petits prophètes , 
ti- les Épttres de saint Paul aux Romains et 
l-x Hébreux, et a prononcé des sermons à la 
ur, imorimés à Saint-Pétersbourg en 1794, \\ 



IRÉNÉE — IRETON 050 

a, en outre , traduit en russe, soit du grec, soit 
du latin, plusieurs traités de différents Pères de 
l'Église, ainsi que les commentaires sur les 
psaumes du cardinal Bellarmin; Moscou, 1807, 
2 vol. in-4°» et deux opuscules ascétiques de ce 
célèbre théologien, P" A. G— a. 



Slovor pUatélioW doukhovmço tchina greko-rossiis- 
koi Tzerkvi, 

*i*énAe (faltovski), prélat russe, né le 
28 mal 17 62, mort le 29 avril 1823, était fils 
d'un pauvre curé de campagne. Non content 
de posséder l'hébreu , le latin, le français et l'al- 
lemand, il alla en Hongrie étudier la philosophie, 
l'histoire et les mathématiques. Le mérite seul 
l'éleva à l'épiscopat, dont les prêtres mariés 
sent exclue en Russie. On a de lui : Chro- 
n*lo§iê ecclésiastique) Moscou, lT97;f!— 
Christian* çrthodaMX dagmatm-polemicas 
Thêologi* Oosnpmdivm; Moscou, 1802, t. JI, 
in-s° 5 — cl des commentaires sur les Épttres de 
saint Paul m» Romains et aux Galate*» Kief, 
1800, x t in-8 Q . p çe A, G— m. 

De ft» TlUttortÊ ému VÉQlimrm**» par le p. Qngarin ; 
Paris, iafï, p, <*, 

i*BTO?f (Henïy), homme politique et géné- 
ral anglais, né à Attente*, dans le comté de Not- 
tingham, en lftlû, mort le 15 novembre 1651, 
Il recul son édnestion au collège de lia Trinité h 
Oxford, et il étudiait encore le droit a Middle 
Temple lorsque éclata la guerre civile. U se dé* 
elara avec ardeur peur la cause du parlement, 
et montra des talents nriUtairee. On prétend même 
que Çromwell apprit de kù les premiers élé- 
ments de Part de la guerre. En 1646 Ireton 
épousa Bridget, fille aînée de OromwéU, et reçut 
bientôt après une commission de capitaine, de 
cavalerie, pois de colonel. Il fut peut-être l'auteur 
le pins direct de la mort de Chartes 1 er . Les par- 
lementaires négociaient avec ce prince, et Crom- 
well ne repoussait pas Vidée d'un accommode- 
ment, lorsque Ireton intercepta une lettre du 
roi. Cette missive prouvait que Charles n'était 
pas sincère et qu'au lieu des honneurs au'il 
promettait aux chefs révolutionnaires, il leur 
réservait les plus rigoureux châtiments. Ire- 
ton et CromweM, destinés les premiers à la ven- 
geance royale, ne voulurent plus entendre par- 
ler de conciliation , et poussèrent impitoyable- 
ment an jugement, a la condamnation et au sup- 
plice de Charles I er , Après l'établissement de la 
république, Ireton se rendit en Irlande , comme 
premier lieutenant de Cromwell, et au départ de 
ce général » il le remplaça, dans le gouvernement 
de l'Ile. Sa réputation de vigueur ramena presque 
toute l'Irlande à l'obéissance sans coup férir, li 
était au comble du succès lorsqu'il fut atteint 
devant Umerick d'une maladie contagieuse qui 
l'enleva à. l'âge de quarante et un ans. Ses enne- 
mis le représentent comme cruel dans la guerre, 
dissimulé, traître, hypocrite en politique. Pour 
son parti, au contraire, il fut un grand général , 
un homme d'État et un saint. Ses talents sont in- 



061 



IRETON — IRMINON 



952 



contestables , la sincérité de ses opinions est 
plus douteuse; mais s'il montra une ambition peu 
scrupuleuse sur les moyens, il fit du moins 
preuve de désintéressement : il refusa une rente 
annuelle de 2,000 livres sur les propriétés con- 
fisquées du duc de Buckingham ; le parlement 
la conféra après sa mort à sa veuve et à ses cinq 
enfants (un fils nommé Henri et quatre filles). 
Son corps, enseveli dans la chapelle de Henri VII, 
dans l'abbaye de Westminster, lut exhumé après 
la Restauration, attaché au gibet et brûlé à Ty- 
burn. Z. 

Biographie Britannica. — Graoger, Biographieal 
Historu of England. - Guteot, Histoire de là Révolution 
d'Angleterre. 

ieiaetb (Ignacio) , habile paysagiste espa- 
gnol, né à Aicoitia (Guipuscoa), en 1620, mort 
à Séville après 1669. Il étudia la peinture dans 
l'atelier de Herrera le Vieux ( 1642), et prit le goût 
et la couleur de ce maître; cependant il ne put 
réussir à représenter la figure. Il se consacra donc 
au paysage, et se plaça bientôt au premier rang 
dans ce genre. Murillo , longtemps son ami et 
son admirateur , exécutait les personnages de 
ses compositions : celles-là sont les plus pré- 
denses. La jalousie brouilla ces deux artistes, et 
depuis lors Iriarte n'anima plus ses toiles. 11 fut 
l'un des fondateurs de l'académie de Séville, 
dont il fut le premier secrétaire (4 janvier 1660). 
Les paysages d'Iriarte se font admirer par la lé- 
gèreté du feuillage, le naturel vigoureux des 
arbres,la profondeur de l'horizon, l'heureux choix 
des sites, la transparence des ciels, la l'impidité 
des eaux , l'entente du clair-obscur, enfin par 
une harmonie générale; aussi les tableaux de 
ce maître quoique nombreux ont-ils conservé un 
prix élevé. A: de L. 

Lot Constitutiones y Jetas de la Aeaiewka de Séville. 
— Raphaël Mengs, Las Obras, etc. ; Madrid, 1780. — Gac- 
▼arra, Los. Cotnmentarios de la Pintura. — QalUlet, 
Dictionnaire des Peintres espagnols. 

iriarte. Voy. Yriarte. 

irico (L'abbé Jean-André), érudit italien, 
né à Trino, près de Verceil, le 6 juin 1704, mort 
dans la même ville; le 2 mars 1782. Il fit ses étu- 
des sous la direction de son oncle, chanoine de 
Casai, entra dans les ordres, et fut nommé cha- 
noine à Livorno, dans le comté de Verceil. Ses 
travaux sur les annales de la Lombardie le mi- 
rent en relation avec plusieurs savants de Milan 
qui l'attirèrent dans cette viHe. Il fut nommé en 
1748 un des préfets de la bibliothèque arabro- 
sienne. Il quitta cette position en 1764 pour aller 
occuper dans sa ville natale la dignité de prévôt 
et de curé de l'église paroissiale qu'il conserva 
jusqu'à sa mort. Ses principaux ouvrages sont : 
Rerumpatirx Libri très, ab anno urbis œternx 
154, ad annum Christi 1672, ubi Montfer- 
rati principum , episcoporum , aliorumque 
virorum gesta ex monumentis plurimis nunc 
primum editis fecensentur; accedit disser- 
tatio de sancto Oglerio, Locediensis mo- 
nasteril abbate, cum figuris et indicibus; 



Milan, 1.745, in-fol.; — Codex Bvangeliorum 
sancti Busebii Magni, episcopi et martgrU, 
manu exaratum ex autographo Basilic* 
Vercellensis , ad unguem exhïbitus * nunc 
primum in tucem prédit. ; Milan, 174S, 2 vol. 
in-4°. Irénée fournit beaucoup de matériaux à 
Irico pour sa Bibliotheca Scriptorum Medvo- 
lanensium 9 et laissa un grand nombre de ma- 
nuscrits parmi lesquels on distingue : Le Anii- 
chità ecclesiastiche, in oppositions a quelle 
delV Inglese Bingam. Z. 

De Gregory, Storia délia Letteratura rereelUs*.—TL 
paldo, Biographia degti Jtaliani Ulustri, voL V,p. 109. 

iblahd (Robert) , jurisconsulte écossais, né 
vers 1475, mort le 15 février 1561. D'une des 
plus anciennes familles d'Ecosse, il préféra la 
carrière des lettres à celle des armes; après 
avoir étudié la philosophie dans son pays, il vint 
en France, vers 1496, et se fit recevoir docteur 
en droit à Poitiers , où il obtint une chaire en 
1502. Il eut pour élèves le célèbre Baro , qui lm 
dédia son JSconomia Pandectarum , Roaiden, 
Chiverny, chancelier de France, Achille de jHar- 
lay, Christophe de Thon, Brisson, Pibracet 
autres hommes distingués, qui manifestèrent 
toujours à leur savant maître la plus grande 
considération. * £. G. 

Dreux do Radier, Histoire Littéraire dm Poitou. 
i*UMD(Bonaventure) 9 jurisconsulte fran- 
çais, fils du précédent, né à Poitiers, en 1551, 
mort vers 1612. 11 étudia la philosophie sous la 
direction du célèbre Ramus ; quant à la juris- 
prudence, il eut pour maîtres son père et Du- 
moulin. Ses grandes capacités sont attestées 
par une lettre de Scaliger, dans laquelle le cé- 
lèbre savant, répondant à diverses questions de 
droit et de littérature que lui avait adressées Ir- 
land, alors à peine âgé de vingt ans, fait le plus 
grand éloge de la science précoce de son jeune 
correspondant. Irland, nommé en 1579 professeur 
de droit à Poitiers;, joignit deux ans après à cet 
emploi celui de conseiller au présidial, charge 
qui lui était léguée par le don d'Aubertson onde 
maternel. On a d'Irland : Remontrances au roi 
Henri III, au nom du pays de Poitou; Poi- 
tiers, sans date, in-8°; — De Emphasi et Hy- 
postasi ad recte judicandi rationem Considt- 
ratio; Poitiers, 1599, in-8° : dans cet ouvrage, 
l'auteur se propose d'enseigner les moyens de 
se garantir de l'influenee des préjugés et autres 
erreurs spécieuses, surtout en matière de droit 
et de religion; — Pubticx Laetitia Auncta/ia 
ob natum delphinum; Poitiers, 1605, in- 12. 

E. G. 

Irland, Epittola dedicatoria ad Ph. Muraldum (en 
tête un traité De Emphasi et Hypostasi d'Irland). - 
Dreux du Radier, Hist. IÀttér. du Poitou. 

* lRMiNôN,abbé de Saint-Germain-des-Prés, 
au commencement du neuvième siècle. Sa signa- 
ture se trouve après le testament de Charie- 
magne, et divers actes de son monastère le 
mentionnent en 812 et en 817. On lui doit un re- 
cueil bien précieux : le Polyptyque , ou livre 



953 IRMINOW 

censier de Pabbaye de Saint-Germain au neu- 
vième siècle. M. Benjamin Guérard Fa publié, 
avec des notes et nne préface, qui est elle-même 
un des plus beaux monuments de l'érudition con- 
temporaine. B. H. 

HUt. litt. de la France. 

ibnemus (1), célèbre jurisconsulte ita- 
lien (2), né à Bologne , dans la seconde moitié 
du 'onzième siècle, mort après 1118. Il devint 
d'abord maître es arts , et enseigna pendant 
quelque temps dans sa ville natale le trivium 
et le quadrivium. Consulté un jour par un 
professeur de théologie sur les significations du 
mot as chez les Romains, il fut conduit à faire 
des recherches dans les textes du droit romain, 
qu'il se.mit ensuite à étudier avec ardeur, tout 
seul, sans professeur ni gaide. Ce droit, sur le- 
quel quelque temps auparavant des juristes de 
Ravenne d'abord et ensuite un certain Pepo de 
Bologne avaient essayé de faire des leçons, 
n'était plus alors l'objet d'aucun enseignement. 
Irnerius, étant arrivé peu à peu à s'initier aux 
principes de la législation romaine , se mit, vers 
la fin du onzième siècle, à l'expliquer dans des 
cours publics. Son entreprise fut couronnée de 
succès et les élèves affluèrent autour de sa 
chaire. C'est ainsi qulrnerius devint le rénova- 
teur de l'étude du droit romain en Occident, fait 
qui eut une immense influence sur la marche de 
la civilisation. Il acquit bientôt une grande ré- 
putation, et fut appelé aux fonctions de juge. En 
1118 l'empereur Henri V l'envoya à Rome pour 
y faire hâter l'élection du pape. A partir de cette 
année, on n'a plus de renseignements sur Ime- 
rius; mais un passage du Chronicon Usper- 
gense fait croire qu'il vécut encore quelque temps. 
De l'école de droit fondée par lui sortirent les 
fameux quatre docteurs, qu'on a même déclaré 
plusieurs fois, quoique probablement à tort, être 
ses disciples immédiats; cette école enfin fut le 
fondement de la célèbre université de Bologne. 
Irnerius a écrit : Glossx : remarques sur les di- 
verses parties du droit romain ; elles sont de deux 
sorteâ : interlinéaires et marginales. Les pre- 
mières, intercalées dans le texte, ne sont qu'une 
explication succincte de ce texte, et sont impri- 
mées dans toutes les éditions glosées du Corpus 
Juris (3). Les secondes, qui contiennent une 
interprétation plus approfondie des difficultés du 
texte, à la marge duquel elles se trouvent dans 
les manuscrits , n'ont pas encore été publiées ; 
on en rencontre dans divers manuscrits, dont 
Savigny a donné l'indication dans le t IV de son 

(l) C'est le nom sons lequel II est le pins généralement 
connu ; dans les documents où U figure comme témoin, 
11 est désigné tantôt par Warnerius* tantôt par Gerne- 
rius; mats dé)a au douzième siècle des auteurs rappellent 
Ymerius, eu Irnerius. 

(t) Son nom germanique a faltjdlre à plusieurs de ses 
biographes qu'Irnerlus était d'origine allemande ; cela 
est complètement Inexact. 

(S) On a souTent prétendu, mais à tort, que tonte la 
glose interlinéaire était due à Irnerius; U n'en» a rédigé 
que la plus grando partie. 



— IRSON 



954 



Histoire du Droit Romain au moyen âge, et qui 
se conservent la plupart à ta Bibliothèque impé- 
riale de Paris. Dans les gloses d'Irnerius, qu'on 
distingue de celles des autres commentateurs 
par les sigles G., Y. ou J, qui les accompagnent, 
se remarque une dialectique serrée, résultat des 
premières études philosophiques de l'auteur. Ce- 
lui-ci fait preuve d'unegrandesagacitécritique en 
cherchant à plusieurs reprises à épurer les textes 
qu'il a devant lui. Reconnaissons donc avec Sa- 
vigny tout le mérite d'Irnerius, qui,* par les 
seules ressources de son intelligence, inventa 
pour l'interprétation du droit romain une mé- 
thode entièrement nouvelle et féconde en résul- 
tats. Ses autres ouvrages sont : Authenticx; 
extraits des nouvelles de Justinien, qu'on trouve 
intercalés'dansle texte des Instituteset dans celui 
des neuf premiers livres du Code de Justinien; 
d'après les recherches de Savigny, il est hors de 
doute que c'est à Irnerius qu'est due la majeure 
partie de ces extraits, qui sont imprimés dans 
beaucoup d'éditions du Corpus Juris ( voy. sur 
ce point : Bynkershœk, De Auctore Authenti- 
carum, et Biener, Historia Authenticarum); 
— Formularium Tabellionum, ouvrage perdu 
dès la fin du treizième siècle; — Quxstiones, 
écrit également perdu, de même qu'un traité De 
Actionibus. Notons en dernier lieu que c'est 
Irnerius qui inventa le nom d y Infor tiatum, par 
lequel on désignait au moyen âge la partie des 
Pandectes qui commence au troisième titre du 
livre XX1Y et qui va jusqu'au livre XXXIX. 
irnerius n'eut d'abord à sa disposition que le 
Digestum novum, qui va du premier livre au 
troisième titre du livre XXIV, le Digestum 
vêtus, ou les onze derniers livres des Pandectes, 
les Institutes et les neuf premiers livres du 
Code; les autres parties du Corpus Juris étaient 
restées à Ravenne. Mais quelque temps après on 
transporta de là à Bologne ce qui manquait 
pour compléter les Pandectes, sauf un dernier 
morceau qui, commençant par les mots Très 
partes, par lesquels on les désigne, ne rat dé- 
couvert que plus tard. C'est alors qn'Irnerius 
proposa pour la seconde partie des Pandectes le 
nom* d' In fortiatum t indiquant que cette partie 
venait d'être renforcée ou augmentée. Bientôt 
après enfin on reçut à Bologne les trois derniers 
livres du Code et les Novelles* £. G. 

Trltbemlos, Dé Scriptoritms EcclestasticU. — Dlplo- 
vataccius, De Prxstantia Doctorum. — B. Nihustus, 
Irnerius; Cologne, 1C4S, in-8«. -tSartl, De Claris Archi- 
gymasii Bononiensis Professoribus ; pars I, p. il. ( L'ar- 
ticle qui concerne Irnerius est réimprimé dans : Biga /#- 
bellorum authenUcos lillustrantium de Ztpernik). — 
Fantuzzl, Scrittori Botognesi, t IV. - Savigny Histoire 
du Droit Romain au moyen âge , t. IV. 

irson ( Claude ), grammairien et mathéma- 
ticien français, né en Bourgogne*, au dix-septième 
siècle. « Claude Irson parait, dit Barbier, avoir 
tenu une des petites écoles de Paris pendant une 
grande partie de sa vie. Il aimait cet état, et l'on, 
voit, par ses épi très dédicatoires, qu'il cherchait 



96* 



IRSOJS — 1RVINO 



m 



des protecteur*, pouf n'être point troublé dans 
set fonctions par des envieux. Vers 1678, il dé- 
tint juré teneur de litres de compte, par lettres 
patentes du rot. » On a de loi : Nouvelle Méthode 
pour apprendre facilement let Principes et 
la Pureté de la Langue Française; Paris, 
1656, in-8*; 2 e édit., augmentée, 166* : la pre* 
mière édition est dédiée à Sentent , la seconde à 
Gandin; toutes deux contiennent une liste pré- 
cieuse des auteurs les plus célèbres dé notre 
langue, avec de courts jugements sur leurs ou- 
trages ; — Méthode abrégée et familière pour 
apprendre à lire; Paris, 1667, in-12; — 
Arithmétique universelle} Paris, 1674, in<4+; 
4 e , édition sous ce titre : Arithmétique pratique 
et raisonnée; Paris, 1692, in-4°; il en a parti 
un abrégé en 1695, in-12 ; — Méthode pour bien 
apprendre toutes sortes de Comptes, composée 
par ordre de Colvert; Parla, 1679, in-fol.; — 
Traité des Changes étrangers; Paris, 1686, ; 
in-4° : r auteur a donné un abrégé de ce traité en 
1694, in-12. a L'abbé Papillon a eu tort, dit Bar- 
bier, d'attribuer à un fils de notre grammairien 
V Arithmétique universelle et autres outrages 
de ce genre. Les différents cataloguée Insérés 
par Claude Irson à la suite de plusieurs de ses 
outrages prouvent qu'il a composé ceux qui re- 
gardent la grammaire et ceux, qui concernent les 

J. V. 



Papillon, Biàliothéqu* U ÊoutyOtfté- - Ooujct, Bi- 
kliotk. franc. - BarMftr, Mammem erU. et eompl. en 
Dict.HUtor, 

l lEYine ( Washington), littérateur améri- 
cain, né à New-York, le 3 avril 1763. Le nom de 
M. Irting jouit aux États-Unis d'une brillante 
renommée, et il est presque aussi populaire en 
Angleterre môme. C'est , en effet f un des écri- 
vains les pins gracieux et le» pins ingénieux que 
présente la première moitié du siècle. Il a tou- 
ché à plusieurs genres, les essais de mœufs, 
les voyages et l'histoire, sinon ntèt la même 
supériorité, du moins avec un rare talent de 
penseur et d'artiste. Son père était Écossais d'o- 
rigine et négociant à New- York, Son éducation 
fat principalement dirigée par ses frères aînés, 
qui, tout en s'occupent de commerce, étaient 
remarquables par leur intelligence et leur goét 
pour les lettres. Sa santé étant un peu délicate, 
on loi laissa toute liberté de parcourir les sites 
pittoresques de l'Ile de Manhattan ; et c'est dans' 
ees excursions, où il observait à la fois les pay- 
sages et les mœurs, qu'il recueillît une foule de 
vieilles traditions , de traits singuliers et amu- 
sants qu'il introduisit dans ses ouvrages» U dé- 
buta par des essais sur les théatf es, les mœurs 
de la tille et sujets de ce genre, clans le Mor- 
ning- Chronicle, journal pnblié par un de ses 
frères, essais qu'il sigfla d'un flom emprunté , 
Jonathan Oldstyle. K l'âge de tïflgt ans, quel- 
ques signes de consomption s*étant manifestés, 
H fut entoyé dans le midi de la France, résida 
ensuite à Gènes, visita la Sicile, Naples, Rome, 



et, traversant toute l'Italie et la Suisse, tint 
passer plusieurs mois à Paris. De là, use rendit 
en Angleterre, après avoir visité avec soin ta 
Hollande. U recueillit ainsi une foule de mtes 
et d'observations qui plus tard ont servi de 
base à plusieurs de ses essais les plus ingéniera» 
Sa santé étant tout à fait rétablie, il revint à 
New-York, après une absence d'environ trois ans 
(1806). U reprit l'étude du droit, qu'il ataitinter- 
rdtnpde, se fit recevoir au barreau , mais et 
réalité ne pratiqua jamais comme avocat. Bien- 
tôt 11 commença avec tin de ses amis, M. PauJ- 
ding, une espèce de revue , Salmagundi, pa- 
raissant tous les quinze jours, et retraçant avec 
beaucoup à'humor et de piquant les ridicules, 
les mœurs, les personnages excentriques du 
jour. Ce recueil obtint aussitôt une grande popu- 
larité. Quelques difficultés avec l'éditeur tinrent 
llnterrompfe brusquement après une année de 
succès (1808). En décembre 1809, il publia 
VBistoire de New-York par tHedrich Knic- 
herboher. Cest nne histoire comique , assai- 
sonnée de beaticocty dé saillies, d'exagérations 
bouffonnes, de fictions enjouées , de la colonie 
hollandaise de Nèvt-ttork. les anciennes fa- 
milles qui en descendaient furent d'abord cho- 
quées de voir traiter àtec cette irrévérence tes 
mœurs et les souvenirs de leurs ancêtres; mais 
la majorité des lecteur* y trouva Uni d'esprit 
et d'amusement, que dès" Ce moment M. Irrïng 
devint un des auteurs les" (dus populaires. Le 
nom de Kniekerbockèr se propagea rapide- 
ment ; et on le trouvé aujourd'hui appliqué à mie 
foule d'hôtels, de bateaux à tapeur et d'étabfas- 
ments. En 1810 deux de ses frères qui étaient dans 
les affaires, l'un chef dé là maison" de Aetr-York, 
et l'autre à Liverpool , lui donnèrent un intérêt, 
mais en lui laissant la liberté de ftoursuivre ses 
travaux littéraires. Pendant îà pierre avec l'An- 
gleterre (181M814 ), partageant les èêùtimenis 
patriotiques dé f époque, it publia, dans l'Ana- 
lectiô Magazine, des biographies éloquentes des 
principatfx capitaine*? de marine africains, et 
fut nommé aide fa èamp du général tompkins, 
gouverneur de ftew-York, avec fe titre de co- 
lonel. La paix ne tarda pas à éfre rétablie; et, 
abandonnant son titre et la carrière militaire, 
il fit toile podr fiiterpooî(iSi5). Il parcourut 
tes parties agrestes du* pays de Galles, les ptos 
beaux comtés d'Angleterre, et les highlands, 
l'Ecosse. Son întèntiôfl était de faire on autre 
forage SoY le 4 continent, lorsque des désastres, 
résultat de la britëqde transition de fa guerre i 
la paix, tinrent frapper la maison de commerce 
de see frères et changer sa position et ses pro- 
jets. Il eut recours à sa plume, et comme consola- 
tion et comme ressource. Mettant en œuvre la 
observations qu'il avait faites sur la tie rurale et 
(es mtôurs, fi commença â écrire les essais de 
son célèbre Sketch Book (Litre d'Esquisses), 
et le» enteya à New-York , où ils obtinrent on 
grand succès. Le premier Volume étant parvenu 



957 



IRVïIfO 



964 



en Angleterre, de nombreux extraits en furent 
publiés dans un journal hebdomadaire en re- 
nom, la Uterary Gazette, dirigée par Jerdan, 
et furent extrêmement goûtés (1819). M. Irvtag 
résolut atorç d'en faire une édition anglaise. 
Malgré les démarches amicales de Walter Scott, 
qui peu d'années auparavant ratait tfès-graeieu- 
sement reçu à Abbotsford, fl ne réassit pas à s'en-* 
tendre avec un libraire, et il se hasarda à le pu* 
blier à ses propres frais. C'est ainsi que parut le 
premier volume en Angleterre ( i820), Mais sur- 
vint bientôt un fâcheux incident. Au bout d'un 
mois, l'éditeur auquel il avait été confié fit faillite, 
et la vente fut suspendue. Dans cette perplexité, 
M» Irving s'adressa encore à Walter Scott ; et ce- 
lui-ci» étant venu à Londres, entama des négocia- 
tion? avec le célèbre libraire Murray, qui consentit 
à s'en charger. Dès lors M. Irving eut pour ses 
autres ouvrages un éditeur assuré, et qui dans 
toutes ses relations montra l'esprit le plus li- 
béral. Murray lui accorda 200 livres sterling 
( 5,000 fr. ) pour ses droits d'auteur, et l'ouvrage 
ayant obtenu le plus brillant succès, il lui en- 
voya sans aucune promesse antérieure une autre 
somme de 200 liv. sterling. M. Irving devint 
aussi célébrée» Angleterre qu'il l'était aux États- 
Unis. On admira généralement l'esprit de bon 
aloi* la grâce piquante, la douce sensibilité, et le 
style addiwnien qui distinguent ces charmants 
easais* LMiêtoUrê de Rip Van Winkte eut en par- 
ticulier une immense popularité. 

Après avoir résidé cinq ans en Angleterre, 
M. Irving vint se fixer à Paris (1820), et c'est 
là qu'il fit la connaissance du poète Moore et 
qu'il écrivit Braeebridge Hall, or tke tfumou- 
rists , qui présente une suite d'esquisses de ta 
vie rurale en Angleterre, et qui ajouta encore à 
sa réputation (1822). Il passa l'hiver suivant à 
Dresde, revint à Paris en 1 823, et à la fin de 
1 824 il publia : Taies qfa Traveller (Contes d'un 
Voyageur ), dont il avait glané l'idée première 
dans ses nombreux voyages , et qu'il développa 
avec autant d'esprit que d'imagination. Moore 
nous dit dans son Journal que pour cet ouvrage 
Murray lui donna 1,500 liv. sterl., et qu'il aurait 
pu en avoir 2,000. 11 passa l'hiver de 1825 dans 
le midi de la France , et c'est alors qu'il fut 
invité par Alex. Everett , alors ministre des 
États-Unis en Espagne, à venir à Madrid pour 
examiner des documents nouveaux relatifs 
aux voyages de Colomb, qui avaient été recueil- 
lis par Navarette. Le ministre pensait qu'on 
pouvait en faire une traduction intéressante. 
M. Irving se rendit à Madrid au printemps sui- 
vant, et, après examen , se convainquit qu'au lieu 
de les traduire, il était infiniment préférable de 
s'en servir pour une histoire nouvelle de l'il- 
lustre amiral. Il se mit donc avec ardeur à la 
besogne ; et, comme les archives espagnoles lui 
étaient libéralement ouvertes , il put mettre à 
profit beaucoup de documents aussi nouveaux 
qu'intéressants. De là son ouvrage History of 



the lÀfé and Voyage* of ChrUtophe Colum- 
bus (Histoire de la Vie et des Ouvrages de 
C. Colomb ), qui parut en 1 828 , et fut suivi, en 
1831, par un autre qui en était le complément, 
Voyages and Discoveties of the Companion* 
ofGoliMbus* Sa résidence en Espagne, ses re- 
cherches historiques, le spectacle des débris 
encore magnifiques des monuments arabes lui 
inspirèrent ua très-vif intérêt pour les Maures 
de Grenade, et le résultat de se» travaux fut 
une espèce de roman historique intitulé : a 
OhroMcèë of the Conque* ( of Grenada, by 
Fray Antbnio àgapyia ( 1829). De nouvelles 
études > des exoursions dans les vieilles cités 
d'Espagne et un séjour de quelques mois dans 
l'ancien palais de Grenade lui fournirent une 
série d'esquissée qu'il publia en 1832 sous le 
titre de Aihambra; plus tard, de retour en 
Amérique , il donna ses Legends qf the Con- 
qnest of Spain (1835), qui avec Mahomet 
and his iuceessors ( 1849-1850) complètent la 
série des sujets espagnols et maures, qu'il a 
traités avec l'éclat d'une imagination orientale. 
Dans l'été de 1829* il quitta l'Espagne pour 
l'Angleterre, où il avait été nommé secrétaire 
de la légation américaine, poste qu'il remplit 
deux ans. Il était une des célébrités de l'époque, 
et recherché dans les meilleures sociétés. En 
1830 , il reçut une des deux médailles d'or de la 
Société royale de Littérature, l'autre ayant été 
décernée à l'historien M. fiatlain. Au printemps 
de 1832, il retourna en Amérique, après une 
absence de dix-sept ans, et fut rëçtl h Nety- 
York et ailleurs avec les témoignages lès ptos 
Qatteurs d'estime et d'enthousiasme. Afâig il rie 
resta pas longtemps dans sa Ville natale. Jùs* 
qu'ici il n'avait traité que des sujets européens. 
Il saisit avec empressement l'occasion d'Accom- 
pagner M. Ellsworth, un des commissaires 
pour les affaires indiennes, afin de voir de ses 
yeux le Far West, d'étudier cette nature sauvage 
et les mœurs des tribus. Il en résulta on Volume 
qui fut publié sous le titre de : Tant on the 
Prairies (1835). Cet ouvrage fut suivi pâl- 
ies souvenirs à 1 Abbotsford et de V Abbaye de 
Newstead. L'année suivante, 1838, il donna 
Astoria, qui retrace l'expédition hardie en- 
treprise vingt-cinq ans auparavant pour fran- 
chir les Montagnes Rocheuses et pénétrer dans 
la Colombie (aujourd'hui Orégon); et en 1837, 
Adventures of Captain Bonneville, in the 
Rocky-Mountains and the Far-West, dont 
les manuscrits lui avaient été confiés, mais 
dont il fit un ouvrage original par le talent de 
composition et de style. On peut considérer ces 
travaux comme son tribut de reconnaissance à 
l'Amérique et un moyen de soutenir sa popula- 
rité. Les critiques ne pouvaient plus dire qu'il 
avait négligé entièrement les sujets nationaux. 
En 1842 il fut nommé, sans aucune sollicita- 
tion, ministre des États-Unis en Espagne. Ce 
choix fut très-bien accueilli à Madrid, où sa 



959 



IRVING - IRW1N 



résidence* antérieure et sa Ffe de Colomb loi 
avaient fait de nombreux amis. Il occupa ce 
poste quatre ans, et donna sa démission lorsque 
Je candidat du parti démocratique, James Polk, 
arriva à la présidence (1846). H revint aux 
États-Unis, et s'établit dans une charmante 
maison de campagne, sur les bords de l'Hodson, 
h vingt-cinq milles de New-York, et qu'il avait 
préparée et embellie d'avance comme l'asile de ses 
vieux jours. Il lui a donné le nom poétique de 
Sunnyside, qui est tout à fait justifié par sa belle 
exposition. Malgré l'âge avancé .et le charme 
du repos, après tant de voyages et de travaux 
littéraires, il n'y resta pas inactif. Il commença 
une nouvelle édition de ses œuvres complètes , 
auxquelles il ajouta des préfaces et des améliora- 
tions notables. De 1849 à 1850, il publia, comme 
nous l'avons déjà indiqué , son ouvrage de Ma- 
homet et ses Successeurs , et plus tard, une 
biographie étendue d'Olivier Goldsmith. En 
1855, il donna un volume d'esquisses, dont 
quelques-unes avaient paru dans les Magazines 
de New York, sous le titre de Chronicles of 
Woolferfs Boost and other paper*, qui rap- 
pellent le style élégant et ingénieux, Y humour 
et la force qui avaient donné tant d'éclat an 
Sketch-Book. 

Un dernier ouvrage , du plus vif intérêt pour 
les Américains, est en voie de publication. On 
savait que , même avant son ambassade en Es- 
pagne, M. Irving recueillait les matériaux pour 
une nouvelle biographie de Washington» et que 
c'était le sujet par lequel il voulait clore tous ses 
travaux littéraires. Le premier volume a paru 
en 1855 , deux autres ont suivi et un quatrième 
est annoncé. Le récit en est remarquable par 
l'élégance et l'excellent style ; mais l'auteur 
ne vise ni à la profondeur ni aux vues philoso- 
phiques. H se distingue par beaucoup d'im- 
partialité, tout en rendant pleine justice aux 
qualités morales et aux talents du héros, et en 
exprimant une vive sympathie pour sa noble en- 
treprise, la fondation d'un pays et d'un peuple 
libre. "* 

Nous avons évité de faire avec détails une 
appréciation critique des divers ouvrages de 



M. Irving ; l'espace ne le permettait pas. C'est 
surtout comme essayiste qu'il arrivera à la pos- 
térité; car c'est dans ses divers essais qoe bril- 
lent au plus haut degré les qualités qui le tison - 
guent, la finesse d'observation, la morale saoe , 
la peinture fidèle de mœurs ou de paysages, 
Y humour et l'esprit ingénieux , et surtout la 
forme artistique et l'élégance exquise de style. 
J. Chahut. 

Qfdopsedia of American IÂterature. — Englsk 
Cvclopsedia ( Bioçrapky ). - Men of the Time. - 
Documents particuliers. 

IBWW (Byles ), poète anglais, né à Calcutta, 
en 1748, mort à Clifton, le 14 octobre 1817. Ra- 
mené tout enfant en Angleterre, il fut élevé à 
ChisWick, et revint dans l'Inde en 1767 comme 
employé civil. Il fut suspendu de ses fonctions 
en 1777, à cause de son attachement à lord Pigot, 
et résolut d'aller demander justice à la coût des 
directeurs à Londres. Son voyage, marqué de 
nombreux incidents, ne dura pas moins de onze 
mois. Il obtint facilement sa réintégration , et se 
hâta d'aller reprendre son poste à Madras. Dans 
l'état de crise où se trouvaient les possessions an- 
glaises par suite de la guerre de l'Angleterre avec 
la France, il rendit à la Compagnie des services 
importants, et se plaignit d'être mal récompensé. 
Rappelé en 1785 , il fut rétabli en 1792 dans les 
fonctions[cle surintendant des affaires de la Com- 
pagnie à la Chine. Il revint en Angleterre deux ou 
trois ans après, et, malgré ses démarobes, H n'ob- 
tint plus d'emploi dans la Compagnie. On a de lui : 
Adventures during a voyage up the Red Seo, 
and a journey across the désert; Londres, 
1780, in-8° ; — Inquiry into the feasibiiUy of 
Buonaparte's Expédition to the East; 1798 , 
in-8* ; et beaucoup de petits de poèmes intitulés : 
Thomas** Mount; 1771, in-4°; — Bedekah, 
an indian pastoral; 1776, in -4°; — Eastem 
Bclogues; 1780, in-8°; — Ode on theDeath oj 
Hyder AU; 1784; — Buonaparte in Egypt; 
1798, in-8°; — Nilus , an elegy on the vie- 
tory of admirai Nelson; 1798; — Elegy on 
the Fait 6/Saragossa; 1809 ; — - Napoléon, or 
the vanity of human wishes; 1814, in-4». Z. 

Annual Biography % - Rose, New gênerai Biographe 
cal Dictionary. 



FIN DU VIKGT-CINQCIBME TOLUMK. 



20 



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