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Full text of "Revue critique d'histoire et de littérature"

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REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 


SEIZIÈME  ANNÉE 

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(Nouvelle   Série.   —    Tome   XIV) 


REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

PUBLIÉE    SOUS    LA    DIRECTION    DE 

MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.  PARIS 


Secrétaire  de  la  Rédaction  :  M.  A.  Chuquet 


SEIZIÈME  ANNÉE 


DEUXIEME  SEMESTRE 


Nouvelle   Série.    —  Tome  XIV 


PARIS 
ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

LIBRAIRE    DE   LA   SOCIETE   ASIATIQUE 
DE     L'ÉCOLE     DES     LANGUES     ORIENTALES     VIVANTES,     ETC. 

28,    RUE   BONAPARTE,    28 
1882 


\0O~7 


ANNEE     1882 


TABLE  DU  DEUXIÈME  SEMESTRE 


ARTICLES 


TABLE  ALPHABÉTIQUE 

art.  pages 

Abdallah  'Ibn-ul  Mata^,  par  Loth.  (D.  Gûnzburg.).  ...  187  21 3 
Abel,  La  «  Descriptio  tabulae  mundi  »  de  Jean  de  Gaza. 

(P.  de  Nolhac.) 1 39  33 

Adler  et  Curtius,  Olympie  et  ses  environs.  (J.  Martha.).  .  .  206  271 

Alcmène  (F)  d'Euripide,  par  Engelmann.  (Th.  Reinach.).  .  201  261 
A lexandrine  (la  poésie)  sous  les  trois  premiers  Ptolémées,  par 

Couat.  (A.  Croiset.) 243  441 

Andrieux,  Contes  en  vers,  p.  p.  Ristelhuber 169  1 55 

A raméens  (les  dialectes),  par  Socin.  (R.  Duval.) 1 65  141 

Archives  de  l'Orient  latin,  tome  I.  (A.  Molinier.) 167  148 

Aristophane,  les  Grenouilles,  p.  p.  de  Velsen.  (A.  Martin.).  125  2 

—  Les  Oiseaux,  p.  p.  Blaydes.  (A.  Martin.) 207  279 

—  Plutus,  p.  p.  de  Velsen.  (A.  Martin.) 207  279 

—  son  impiété,  par  Hild.  (A.  Martin.) 1 3  3  22 

Arndt,  Jery  et  Bâtely,  de  Gœthe 1 3o  14 

Arnim  (d'),  Les  prologues  d'Euripide.  (Th.  Reinach.) 192  233 

Asse,  Correspondance  de  Galiani.  (M.  Tourneux.) i63  128 

Banquet  (le)  de  Xénophon,  p.  p.  Rettig.  (H.  Weil.) 159  121 

Bartholomae,  Recherches  aryennes.  (C.  de  Harlez.) 261  5oi 

Bartsch,  Vies  et  œuvres  des  troubadours,  de  Diez.  (P.  M.).  2o3  266 
Baschet,  Les  comédiens  italiens  à  la  cour  de  France  (T. 

de  L.) 233  384 

Bader,  Thémistocle.  (R.  L.) i32  21 

Baunack,  Le  nom  de  Déméter 182  197 

Beauvois,  Claude  Bouton,  seigneur  de  Corberon.  (T.  de  L.).  238  407 
Bengesco,  Bibliographie  des  œuvres  de  Voltaire,  I.  (M.  Tour- 
neux.)   23o  367 


VI  TABLE    DES  MATIERES 

art.  pages 

Bieling,  Le  Reinecké  Fuchs  de  Gœthe.  (A.  C.) 197  243 

Blaydhs,  les  Oiseaux  d'Aristophane.  (A.  Martin.) 207  279 

Bloomfield,  As  final  devant  les  sonores  en  sanscrit.  (L.  Ha- 

.vet.) 149  61 

Bouché-Leclercq,  Histoire  de  la  divination  dans  l'antiquité. 

(P.  Decharme.) 252  481 

Bougerel  (le  P.),  prêtre  de  l'Oratoire 249  467 

Bourbon  (Antoine  de)  et  Jeanne  d'Albret,  par  de  Ruble  (T. 

de  L.). 263  509 

Bouteiller  (de)  et  Hepp,  Correspondance  adressée  au  ma- 
gistrat de  Strasbourg  par  ses  agents  à  Metz,  1394-1683. 

(R-) M5  447 

Bouton,  seigneur  de  Corberon,  par  Beauvois.  (T.  de  L.).  .  2  38  407 

Breucker,  La  cession  de  la  Poméranie  à  la  Suède.  (R.).  .  .  264  5 11 

Buchner,  Ferdinand  Freiligrath.  (A.  Chuquet.) 234  387 

Cafres  (recueil  de  contes),  par  Theal.  (G.  P.) 199  246 

Cagnat,  Les  impôts  indirects  chez  les  Romains.  (E.  Ferni- 

que.) ,.  137  29 

Calderon,  sa  vie  et  ses  œuvres,  par  Moguel.  (A.  Morel-Fa- 

tio.) 1 5 1  67 

Catilina,  p.  p.  Schmalz.  (R.  Lallier.) 142  41 

Champion,  Philosophie  de  l'histoire  de  France. 191  220 

Chantelauze,  Saint  Vincent  de  Paul  et  les  Gondi.  (T.  de  L.).  239  412 

Chastel,  Histoire  du  christianisme,  I  et  II.  (M.  N.) 2i5  3o6 

Châtelain,  Lexique  latin-français.  (L.  Havet.) 253  482 

Chéruel,  Histoire  de  France  sous  le  ministère  de  Mazarin, 

I.  (T.  de  L.) 216  3o9 

Chipiez  et  Perrot,  Histoire  de  l'art  dans  l'antiquité.  (P.  De- 
charme.) 1 56  101 

Christ,  Démosthène,  édition  d'Atticus.  (H.  W.) 242  424 

Combes,  L'entrevue  de  Bayonne 210  288 

Contes  et  chansons  populaires,  collection  Em.  Leroux.  (G. 

P.) 200  25  3 

Costa  (de),  Mémoires  sur  Verazzano.  (E.  Beauvois.) 204  268 

Couat,  La  poésie  alexandrine  sous  les  trois  Ptolémées.  (A. 

Croiset.) 243  441 

Croisades  (Histoire  des),  par  Kugler 145  44 

Curtius  (E*),  Antiquité  et  présent.  (P.  Decharme.) 262  5o5 

CuRTiuset  Adler,  Olympie  et  les  environs.  (J.  Martha.).  .  .  206  277 

Dalton,  Jean  Laski.  (R.) 244  445 

Dalwigk,  Le  théâtre  d'Oldenbourg.  (C.) 164  1 35 

Delà  Borderie,  Œuvres  de  Des  Forges  Maillard.  (T.  de  L.).  212  292 
Delahante,  Une  famille  de  finance  au  xvme  siècle.  (J.  Flam- 

mermont.). '. 179  188 

Déméter  (le  nom  de),  par  Baunack.  ..,.,.,, 182  197 


TABLE    DES    MATIERES  VII 

art.  pages 

Démosthène,  Edition  d'Atticus,  p.  p.  Christ.  (H.  W.).  .  .  242  424 
Des  Forges  Maillard  (œuvres  de),  p.  p.  De  la  Borderie  et 

Kerviler.  (T.  de  L.) 212  292 

Diez,  Vies  et  œuvres  des  troubadours,  p.  p.  Bartsch.  (P.  M.).  2o3  266 

Diodore  (les  sources  de),  par  Evers.  (C.  Jullian.) 236  404 

Douais,  Sources  de  l'histoire  de  l'Inquisition  dans  le  midi 

de  la  France.  (A.  Molinier.) 146  46 

Dozon,  Contes  albanais.  (G.  P.) 200  253 

Duchesne,  Vie  de  Polycarpe.  (Max  Bonnet.) 228  36 1 

Duruy  (A.),  L'instruction  publique  et  la  Révolution.  (A. 

Gazier.) 2  58  486 

Dusevel,  ses  œuvres  inédites  et  sa  correspondance.  (T.  de  L.).  1 52  76 

Ebner  (Marguerite),  par  Strauch 174  172 

Eichert,  Lexique  de  Justin.  (L.  Havet.). 143  43 

Engel,  Le  docteur  Faust.  (C.) 2i3  295 

Engelmann,  l'Alcmène  d'Euripide.  (Th.  Reinach.) 201  261 

Essenisme  (F),  par  Lucius.  (M.  N.) 232  383 

Euripide,  ses  prologues,  par  d'ARNiM.  (Th.  Reinach.) 192  233 

—  Alcmène  (1'),  par  Engelmann  (Th.  Reinach.) 201  261 

Evers,  Les  sources  de  Diodore.  (C.  Jullian.) 236  404 

Eyssenhardt,  Romain  et  roman.  (L.  Havet.) 1 38  3i 

Fabre,  La  jeunesse  de  Fléchier.  (T.  de  L.) 178  i83 

Faust,  de  Gœthe,  p.  p.  Schrôer,  II.  (J.) 181  191 

—  fragment,  p.  p.  Seuffert.  (C.) 186  204 

—  p.  p.  Engel.  (Ç.) 2i3  295 

—  sa  vie,  par  Widmann.  (C.) 127  8 

Fléchier,  sa  jeunesse,  par  Fabre.  (T.  de  L.) 178  i83 

Foerster,  Des  manuscrits  et  de  l'histoire  de  la  philologie.  .  25 1  481 

Freiligrath  (Ferdinand),  par  W.  Buchner 234  387 

Funk,  Opéra  patrum  apostolicorum 218  32i 

—  Vie  de  Polycarpe.  (M.  Bonnet.) 247  463 

Galiani,  Correspondance,  p.  p.  Perey  et  Maugras,  p.  p. 

Asse.  (M.'Tourneux.) i63  128 

Gerson,  son  origine,  son  village  natal  et  sa  famille,  par  Ja- 

DART I75  174 

Gierke,  Les  doctrines  de  Tétat  et  la  corporation 144  43 

Giraudet,  Les  origines  de  l'imprimerie  à  Tours.  (Em.  Picot.).  1 55  88 
Godefroy,  Dictionnaire  de  l'ancienne  langue  française.  (A. 

Thomas.) i58  114 

Gœthe,  Etudes,  par  Schoell.  (C.) 176  175 

—  Faust,  p,  p.  Schrôer,  IL  (J.) 181  191 

—  Faust,  fragment,  p.  p.  Seuffert.  (C.) 186  204 

—  Jery  et  Bâtely,  p.  p.  Arndt.  (C.) 1  i3o  14 

—  Reineke  Fuchs,  par  Bieling.  (C.) 197  243 

Gothein,  Histoire  romaine,  par  Neumann 160  123 


VIII  TABLE    DES    MATIERES 

art.  pages 

Grenouilles  (les)  d'Aristophane,  p.  p.  de  Velsen.  .  '.  .  . '  .  .  .  125  2 
Grimm,    Correspondance  litte'raire,  p.  p.  Tourneux.  (T. 

de  L.) 25o  470 

Guerrier,  Mm0  Guyon,  sa  vie,  sa  doctrine  et  son  influence. 

(T.  de  L.) 223  332 

Guyon  (MmB),  sa  vie,  sa  doctrine  et  son  influence,  par  Guer- 
rier. (T.  de  L.) 223  332 

Haller,  sa  vie  et  ses  œuvres,  par  L.  Hirzel.  (A.  Chuquet.).  227  355 

Haller,  Histoire  de  la  littérature  russe.  (L.  Léger.) 148  55 

Hauler,  Etudes  sur  Térence.  (L.  Havet.) 177  181 

Haussonville  (d'),  Le  salon  de  Mme  Necker.  (M.  Tourneux.)..  226  352 
Heerdegen,  Recherches  relatives  à  la  sémasiologie  latine. 

(O.  R.) i36  27 

Heinse,  sa  vie  et  ses  œuvres,  par  Schober.  (A.  Chuquet.).  .140  34 
Hepp  et  de  Bouteiller,  Correspondance  adressée  au  magis- 
trat de  Strasbourg  par  ses  agents  à  Metz,  1 594-1683.  (R.).  245  447 

Hermann  (1'),  de  Wieland,  p.  p.  Muncker.  (A.  C.) 189  219 

Héron  de  Villefosse  et  Thédenat,  Cachets  d'oculistes  ro- 
mains. (R.  Cagnat) 194  238 

Htld,  L'impiété  d'Aristophane.  (A.  Martin.) 1 33  22 

Hirzel,  Albert  de  Haller.  (A.  Chuquet.) 227  355 

Hitzigrath,  Les  écrits  sur  la  paix  de  Prague  en  1 635 .  (R.).  229  366 
Hoernle,  Grammaire  comparée  des  idiomes  aryens  moder- 
nes de  l'Inde.  (Barth.) i53  81 

Hovelacque,  Les  races  humaines.  (H.  Gaidoz.) 246  461 

Hultsch,  L'Heraion  de  Samos  et  l'Artemision  d'Ephèse.  (J. 

Martha.) 188  217 

Inquisition  (Y)  dans  le  midi  de  la  France,  sources  de  son 

histoire,  par  Douais.  (A.  Molinier.) 146  46 

Isocrate,  Le  manuscrit  Urbinas,  par  A.  Martin.  (A.  Jacob.).  193  236 

Jadart,  Jean  de  Gerson • 175  174 

Jagic,  Textes  de  langue  slavonne.  (L.  Léger.) 126  7 

Janssen,  Frédéric  Stolberg.  (C.) 170  i55 

Jean  de  Ga\a,  sa  «  Descriptio  tabulae  mundi  » 139  33 

Jery  et  Bàtely,  de  Gœthe « i3o  14 

Jonas,  Christian  Gottfried  Koerner.  (A.  Chuquet.) 217  3 12 

Joshué  le  Stylite,  sa  chronique,  p.  p.  Wright.  (R.  Duval.).  235  401 

Jûlg,  Vie  de  Séjan.  (R.  L.) 134  24 

Juste,  L'élection  de  Léopold  1 190  220 

Justin  (lexique  de),  par  Eichert.  (L.  Havet.) 143  43 

Kalb  (Charlotte  de),  ses  lettres  à  Jean  Paul  Richter,  par 

Nerrlich.  (C.) 205  271 

Keller  (Ad.  de),  Vie  de  Faust,  par  Widmann 127  8 

Kerviler,  Œuvres  de  Des  Forges  Maillard.  (T.  de  L.).  ...  212  292 

Klinger,  dans  la  période  d'orage 129  n 


TABLE   DES   MATIERES  IX 

art.  pages 

Kluge,  Dictionnaire  étymologique  de  la  langue  allemande. 

(J.  Kirste.) 161  125 

Koerner  (Christian  Gottfried),  par  Jonas.  (A.  Chuquet.)  ...  217  3 12 

Kugler,  Histoire  des  Croisades 145  44 

La  Bruyère,  notice,  par  Servois.  (T.  de  L.) 211  289 

Lafon  (Mary),  Histoire  littéraire  du  midi  de  la  France.  (P. 

M.) 195  239 

—  Exploit  de  M.  Mary  Lafon 429 

Lair,  La  Vallière  et  la  jeunesse  de  Louis  XIV.  (T.  de  L.).  .  147  5o 

Laski  (Jean),  par  Dalton.  (R.) 244  445 

Léger  (L.),  Contes  populaires  slaves.  (G.  P.) 200  253 

—  Lettre  à  M.  G.  Paris 3/3 

Legrand,  Contes  populaires  grecs.  (G.  P.) 200  253 

Leouzon-le-Duc,  Correspondance  diplomatique  du  baron  de 

Staèl-Holstein.  (A.  S.) i3i  i5 

Lessing,  Emilia  Galotti,  par  Werner.  (C.) 180  191 

Lexique  latin-français,  par  Châtelain.  (L.  Havet.) 253  482 

Lionne  et  la  paix  des  Pyrénées,  par  Valfrey.  (A.  Gazier.).  .  265  5i2 

Lodge,  Histoire  des  colonies  anglaises  d'Amérique.  (Ch.  B.).  198  244 

Loi  indoue  (la),  par  Nelson  et  Mayne.  (Barth.) 172  161 

Lossen,  La  guerre  de  Cologne,  I.  (R.) 237  405 

Loth,  Abdallah  Ibn-ul-Mutazz.  (D.  Gûnzburg.) 187  21 3 

Loth,  Essai  sur  le  verbe  néo-celtique.  (H.  d'Arbois  de  Ju- 

bainville.) 224  341 

Louis  de  Bavière  et  sa  lutte  avec  la  curie  romaine.  (R.).  .  .  243  427 

Lucius,  L'essenisme.  (M.  N.).  . 232  383 

Machiavel  et  son  temps,  par  Villari.  (C.  Paoli.) 225  345 

Madvig,  La  constitution  romaine.  (C.  Jullian.) 157  108 

—  trad.  par  Ch.  Morel.  (C.  Jullian.) 220  322 

—  Lettre  de  M.  Morel 432 

Mangold,  Histoire  et  critique  du  Tartufe.  (C.) 196  241 

Martin  (Alb.),  Le  manuscrit  d'Isocrate  Urbinas.  (A.  Jacob.).  193  236 
Maugras  et  Perey,  Correspondance  de  Galiani.  (M.  Tour- 

neux.) i63  128 

Mayne,  La  loi  Indoue.  (Barth.) 172  161 

Ma^arin,  Histoire  de  France  sous  son  ministère,  I,  par  Ché- 

ruel.  (T.  de  L.) 216  309 

Meyer  (W.),  Le  ludus  de  Antichristo  et  la  poésie  latine 

rythmique.  (G.  P.) 184  200 

Miranda,  Richard  de  Cornouailles  et  Aix-la-Chapelle.  (R.).  254  482 
Mispoulet,  Les  institutions  politiques  des  Romains,  I.  (C. 

Jullian.) 214  3oi 

MoGUEL,La  vie  et  les  œuvres  de  Calderon.  (A.  Morel-Fatio.).  1 5 1  67 
Morel  (Ch.),  trad.  de  «  La  constitution  romaine  »  de  Mad- 
vig. (C.  Jullian.) 220  322 


X  TABLE    DES   MATIERES 

art.  '  pages 

—  Lettre  de  M.  Ch.  Morel 432 

Mùller  (C),  Lutte  de  Louis  de  Bavière  avec  la  curie  ro- 
maine. (R.) 243  427 

Mûller  (Sophus),  L'ornementation  dans  le  Nord.  (E.  Beau- 

vois.) i83  198 

Muncker,  L'Hermann  de  Wieland.  (A.  C.) 189  219 

Necker  (Mme),  son  salon,  par  d'HAUssoNviLLE.  (M.  Tour- 

neux.) 226  352 

Nelson,  La  loi  indoue.  (Barth.) 172  161 

Nerrlich,  Lettres  de  Charlotte  de  Kalb  à  J.  P.  Richter.  (A. 

C.) 2o5  271 

Neumann,  Histoire  romaine  de  Scipion  Emilien  à  Sylla.  (C. 

Jullian) 160  123 

Nonius,  Collation  du  ms.   Harleianus,  p.  p.  Onions.  (L. 

Havet.) 1 35  25 

Oculistes  romains  (cachets  d') 194  238 

Oiseaux  (les)  d'Aristophane,  p.  p.  Blaydes.  (A.  Martin.).  .  207  279 

Oldenbourg,  Le  pays  et  les  gens,  par  Strackerjan.  (C).  .  .  164  1 35 

—  Le  théâtre,  par  Dalwigk.  (C).  .  .  . 164  1 35 

Olympie  et  ses  environs,  par  Curtius  et  Adler.  (J.  Mai tha.).  206  277 
Onions,  Collation  de  l'Harleianus,  ms.  de  Nonius.  (L.  Ha- 
vet.)   :  i35  25 

Overbeck,  De  l'histoire  du  Canon.  (M.  N.) 219  32i 

Pajol,  Les  guerres  sous  Louis  XV.  (A.  C.) 168  /53 

Papauté  (la)  au  moyen-âge,  par  Rocquain.  (P.  Viollet.).  .  .  i5o  64 
Perey  et  Maugras,  Correspondance  de  Galiani.  (M.  Tour- 

neux.) ' . i63  128 

Perrot  et  Chipiez,  Histoire  de  l'art  dans  l'antiquité,  I.  (P. 

Decharme.) 1 56  10 1 

Person  (L.),  Histoire  du  véritable  Saint-Genest  de  Rotrou. 

(A.  Morel- Fatio.) 1 85  201 

—  Notes  critiques  et   bibliographiques  sur  Rotrou.  (Ch. 
Marty-Laveaux.) 128  9 

Pierling,  La  mission  de  Possevino  en  Russie.  (L.  Léger.)   .  2D7  485 

Pirenne,  Sedulius  de  Liège.  (L.  Havet.) 154  86 

Plutus  (le)  d'Aristophane,  p.  p.  de  Velsen.  (A.  Martin.).  .  .  207  279 

Polycarpe  (vie  de),  p.  p.  Duchesne.  (Max  Bonnet.) 228  36i 

—  p.  p.  Funk.  (Max  Bonnet) 247  463 

Possevino  en  Russie,  par  le  P.  Pierling.  (L.  Léger.) 257  485 

Pouy,  Etude  sur  les  œuvres  inédites  et  la  correspondance  de 

Dusevel.  (T.  de  L.) 102  76 

Puymatgre  (de),  Romanceiro,  choix  de  vieux  chants  portu- 
gais. (G.  P.) 200  253 

Reineke  Fuchs  (le),  de  Gœthe,  par  Bieling.  (A.  C.) 197  243 

Rettig,  Le  Banquet  de  Xénophon.  (H.  Weil.) 159  121 


TABLE    DES   MATIERES  XI 

art.  pages 

Révolution  (la)  et  l'instruction  publique 258  486 

Ribbeck,  F.  W.  Ritschl,  II 260  494 

Rieger,  Klinger  dans  la  période  d'orage.  (A.  Chuquet.).  .  .  129  11 
Rieu,  Catalogue  des  manuscrits  persans  du  British  Muséum , 

II.  (E.  Fagnan.) 241  421 

Ring,  Etudes  de  vieux  latin.  (L.  Havet.) 208  282 

Ristelhuber,  Les  contes  en  vers  d'Andrieux.  (W.) 169  i55 

Ritschl,  par  Ribbeck,  II 260  494 

Rivière,  Contes  populaires  de  la  Kabylie.  (G.  P.) 200  253 

Rochas  d'Aiglun  (de),  L'artillerie  chez  les  anciens.  (L.  Ha- 
vet.)   123  1 

Rocquain,  La  papauté  au  moyen  âge.  (P.  Viollet.) i5o  64 

Roget,  Histoire  du  peuple  de  Genève,  VI.  (R.) 255  483 

Ronchaud  (de),  Théâtre  choisi  de  Rotrou.  (A.  C.) 162  126 

Rotrou,  Notes  critiques  et  bibliographiques,  par  L.  Person. 

(Ch.  Marty-Laveaux.) 128  9 

—  Saint-Genest,  par  L.  Person.  (A.  Morel-Fatio.) i85  201 

—  Théâtre  choisi,  par  de  Ronchaud.  (A.  C.) 162  126 

Ruble  (de),  Antoine  de  Bourbon  et  Jeanne  d'Albret.  (T.  de 

L.) 263  509 

Ruelens,  Le  peintre  Adrien  de  Vries.  (T.  de  L.) 248  464 

Saint-Genest  (le)  de  Rotrou,  par  L.  Person.  (A.  Morel- 
Fatio.) i85  201 

Salluste,  Catilina,  p.  p.  Schmalz.  (R.  Lallier.) 142  41 

Sanders,  Dictionnaire  complémentaire  de  la  langue  alle- 
mande. (A.  Bauer.)-  .  •  ' 240  415 

Scaliger,  Lettres  françaises,  p.  p.  Tamizey  de  Larroque 

(P.  de  Nolhac.) 222  328 

Schaefer,  Sources  de  l'histoire  romaine.  (C.  Jullian.) 173  169 

—  Sources  de  l'histoire  grecque.  (A.  Martin.) 202  265 

Scherer  (W.),  Histoire  de  la  littérature  allemande.  (A.  Bos- 

sert.) 259  492 

Schmalz,  Catilina,  de  Salluste.  (R.  Lallier.) 142  41 

Schober,  Heinse,  sa  vie  et  ses  œuvres.  (A.  Chuquet.) 140  34 

Schoell,  Etudes  surGœthe.  (C.) ; 176  175 

Schroer,  Le  Faust  de  Goethe,  II.  (J.) 181  191 

Schulze  (E.),  La  poésie  grecque,  esquisses.  (J.  Nicole.).  ...  124  2 

Sedulius,  de  Liège,  par  Pirenne.  (L.  Havet.) 154  86 

Séjan  (vie  de),  par  Jûlg.  (R.  L.) 134  24 

Servois,  Notice  biographique  sur  La  Bruyère.  (T.  de  L.).  .  211  289 

Simson,  Napoléon  III  et  l'Allemagne 171  1 56 

Socin,  Les  dialectes  araméensd'Ourmiaà  Mossoul.  (R.  Du- 

val.) ï  65  141 

Staël-Holstein  (Correspondance  du  baron  de) i3i  i5 

Sto Iberg  (Frédéric),  par  Janssen.  (C.) 170  1 55 


XII  TABLE    DES   MATIERES 

art.  pages 

Storm,  Philologie  anglaise.  (G.  J.) 209  284 

—  Lettre  de  M.  Storm 449 

Strackerjan,  Le  pays  et  les  gens  d'Oldenbourg.  (C.) 164  1 35 

Strauch,  Marguerite  Ebner  et  Henri  de  Nordlingen 174  172 

Tamizey  de  Larroque,  Lettres  françaises  de  Scaliger.  (P.  de 

Nolhac.) 222  328 

Tartufe,  son  histoire  et  sa  critique,  par  Mangold.  (C).  •  •  •  196  241 

Térence,  Etudes,  par  Hauler.  (L.  Havet.) 177  181 

Theax,  Recueil  de  contes  cafres.  (G.  P.) 199  246 

Thédenat  et  Héron  de  Villefosse,  Cachets  d'oculistes  ro- 
mains. (R.  Cagnat.) 194  238 

Thémistocle,  par  Bauer.  (R.  L.) i32  21 

Tourneux,  Correspondance  littéraire  de  Grimm.  (T.  de  L.).  25o  470 

Tours  (l'imprimerie  à) 1 55  88 

Valfrey,  Lionne  et  la  paix  des  Pyrénées.  (A.  Gazier.).  .  .  .  265  5i2 
Vallière  (la)  et  la  jeunesse  de  Louis  XIV,  par  Lair.  (T.  de 

L.) 147  5o 

Vauchez,  Esquisses  d'histoire  suisse.  (Ed.  Favre.) 256  484 

Velsen  (de),  Les  Grenouilles  d'Aristophane.  (A.  Martin.).  .  .  125  2 

—  Plutus,  d'Aristophane.  (A.  Martin.) 207  279 

Veratfano  (mémoires  sur),  par  de  Costa 204  268 

Villari,  Machiavel  et  son  temps.  (C.  Paoli.) 225  345 

Vincent  de  Paul  et  les  Gondi,  par  Chantelauze.  (T.  de  L.).  239  41 2 

Vivo  (de),  Grammaire  de  la  langue  russe.  (E.  Léger.).  ....  141  36 
Voltaire,  Bibliographie  de  ses  œuvres,  par  Bengesco,  I. 

(M.   Tourneux.) 23o  367 

Vries  (Adrien  de),  par  Rubens.  (T.  de  L.) 248  464 

Warren,  Manuscrits  de  Térence  collationnés  par  Bentley.  .  166  147 

Werner,  l'Emilia  Galotti  de  Lessing.  (C.) 180  191 

Widmann,  Vie  de  Faust 127  8 

Wieland,  Hermann,  p.  p.  Muncker.  (A.  C.) 189  219 

Wille,  Philippe  de  Hesse  et  Ulric  de  Wurtemberg.  (R.).  .  221  326 

Windisch,  L'influence  grecque  sur  le  théâtre  hindou.  (Barth.).  23i  38i 

Wright,  La  Chronique  de  Joshué  le  Stylite.  (R.  Duval.).  .  .  235  401 

Xénophon,  Le  Banquet,  p.  p.  Rettig.  (H.  Weil.) 159  121 


TABLE  PAR  ORDRE  DE  MATIERES 


Langues  et  littératures  orientales. 

Bartholomae,  Recherches  aryennes.  (C.  de  Harlez.) 261     5oi 

Hoernle,  Grammaire  comparée  des  idiomes  aryens  moder- 
nes de  l'Inde.  (Barth.) i53       81 


TABLE   DES   MATIERES  XIII 

art.  pages 

Loth,  Abdallah  Ibn-ul-Mutazz.  (D.  Gûnzburg.) 187  2i3 

Mayne,  La  loi  indoue.  (Barth.) 172  161 

Nelson,  La  loi  indoue.  (Barth.) 172  161 

Rieu,  Catalogue  des  manuscrits  persans  du  British  Muséum, 

II.  (E.  Fagnan.) 241  421 

Socin,  Les  dialectes  araméens  d'Ourmia  à  Mossoul.  (R.  Du- 

val.) i65  141 

Windisch,  L'influence  grecque  sur  le  théâtre  hindou.  (Barth.).  23i  38i 

Wright,  La  Chronique  de  Joshué  le  Stylite.  (R.  Duval.).  .  .  235  401 


Histoire  de  l'Eglise  et  théologie. 

Chastel,  Histoire  du  christianisme,  I  et  II.  (M.  N.) 21 5  3o6 

Duchesne,  Vie  de  Polycarpe.  (Max  Bonnet.) 228  36 1 

Funk,  Opéra  patrum  apostolicorum 218  32 1 

—  Vie  de  Polycarpe.  (Max  Bonnet.) 247  463 

Lucius,  L'Essenisme.  (M.  N.) 232  383 

Overbeck,  De  l'histoire  du  Canon.  (M.  N.) 219  32 1 


Archéologie  et  beaux-arts. 

Curtius  (E.),  Antiquité  et  présent.  (P.  Decharme.) 262     5o5 

Curtius  et  Adler,  Olympieet  ses  environs.  (J.  Martha.).  .  .      206     277 

Héron  de  Villefosse  et  Thédenat,  Cachets  d'oculistes  ro- 
mains. (R.  Cagnat.) 194    238 

Hultsch,  L'Heraion  de  Samos  et  l'Artemision  d'Ephèse.  (J. 
Martha.) 188     217 

Mûller  (Sophus),  L'ornementation  dans  le  Nord.  (E.  Beau- 
vois.) i83     198 

Perrot  et  Chipiez,  Histoire  de  Fart  dans  l'antiquité,  I.  (P. 
Decharme.) 1 56     101 

Ruelens,  Le  peintre  Adrien  de  Vries,  (T.  de  L.) 248    464 


Ethnologie. 
Hovelacque,  Les  races  humaines.  (H.  Gaidoz.) 246    461 

Grammaire  comparée. 

Bloomfield,  As  final  devant  les  sonores  en  sanscrit.  (L.  Ha- 
vet.) 149       61 


XIV  TABLE    DES    MATIERES 

art.      pages 


Littérature  et  philologie  grecques. 

Abel,  La  «  descriptio  tabulae  mundi  »  de  Jean  de  Gaza.  (P. 

de  Nolhac.) r3g  33 

Aristophane,  Grenouilles,  p.  p.  de  Velsen.  (A.  Martin.).  .  .  125  2 

—  Plutus,  p.  p.  de  Velsen.  (A.  Martin.) 207  279 

—  les  Qiseaux,  p.  p.  Blaydes.  (A.  Martin.) 207  279 

Arnim  (d')>  Les  prologues  d'Euripide.  (Th.  Reinach.) 192  233 

Baunack,  Le  nom  de  Déméter 182  197 

Bouché -Leclercq,  Histoire  de  la  divination  dans  l'antiquité. 

(P.  Decharme.) 252  481 

Christ,  Démosthène,  édition  d'Atticus.  (H.  W.) 242  424 

Couat,  La  poésie  alexandrine  sous  les  trois  premiers  Ptolé- 

mées.  (A.  Croiset.) 243  441 

Engelmann,  l'Alcmène  d'Euripide.  (Th.  Reinach.) 201  261 

Hild,  L'impiété  d'Aristophane.  (A.  Martin.) 1 33  22 

Martin  (Alb.),  Le  manuscrit  d'IsocrateUrbinas.  (A.  Jacob.).  193  236 

Schulze  (E.),  La  poésie  grecque,  esquisses.  (J.  Nicole.).  ...  124  2 

Xénophon,  Le  banquet,  p.  p.  Rettig.  (H.  Weil.).  .......  159  121 


Littérature  et  philologie  latines. 

Châtelain,  Lexique  latin-français.  (L.  Havet.) 253  482 

Eichert,  Lexique  de  Justin.  (L.  Havet.) 143  43 

Foerster,  Des  manuscrits  et  de  l'histoire  de  la  philologie. .  .  25 1  481 

Hauler,  Etudes  sur  Térence.  (L.  Havet.) 177  181 

Heerdegen,  Recherches  relatives  à  la  sémasiologie  latine. 

(O.  R.) ■'.  i36  27 

Meyer  (W.),  Le  ludus  de  Antichristo  et  la  poésie  latine 

rythmique.  (G.  P.) 184  200 

Onions,  Collation  de  l'Harleianus,  ms.  de  Nonins.  (L.  Ha- 
vet.).    i35  25 

Pirenne,  Sedulius  de  Liège.  (L.  Havet.) .  154  86 

Ribbeck,  F.  W.  Ritschl,  II 260  494 

Ring,  Etudes  de  vieux  latin.  (L.  Havet.) 208  282 

Salluste,  Catilina,  p.  p.  Schmalz.  (R.  Lallier.) 142  41 

Warren,  Manuscrits  de  Térence  collationnés  par  Bentley.  .  166  147 


Histoire  ancienne  (grecque  et  romaine). 
Bauer,  Thémistocle.  (R.  L.) i32       25 


TABLK   DES    MATIERES  XV 

art.       pages 

Cagnat,  Les  impôts  indirects  chez  les  Romains.  (£.  Ferni- 

que.) 1 37       29 

Evers,  Les  sources  de  Diodore.  (C.  Jullian.) 236    404 

Jûlg,  Vie  de  Séjan.  (R.  L.) 134       24 

Madvig,  La  constitution  romaine.  (C.  Jullian.) 157     108 

—  trad.  par  Ch.  Morel.  (C.  Jullian.) 220     322 

—  Lettre  de  M.  Morel 432 

Mispoulet,  Les  institutions  politiques  des  Romains.  I.  (C. 

Jullian.) 214     3oi 

Neumann,  Histoire  romaine  de  Scipion  Emilien  à  Sylla.  (C. 

Jullian.) 160     123 

Rochas  d'Aiglun  (de),  L'artillerie  chez  les  anciens.  (L.  Ha- 

vet.) 123         i 

Schaefer,  Sources  de  l'histoire  romaine.  (C.  Jullian.) 173     169 

—  Sources  de  l'histoire  grecque.  (A.  Martin.) 202     265 


Histoire  du  moyen  âge. 

Archives  de  l'Orient  latin,  tome  I.  (A.  Molinier.) 167  148 

Douais,  Sources  de  l'histoire  de  l'Inquisition  dans  le  midi  de 

la  France.  (A.  Molinier.) , 146  46 

Gierke,  Les  doctrines  de  l'état  et  la  corporation.  .  , 144  43 

Jadart,  Jean  de  Gerson 175  174 

Kugler,  Histoire  des  Croisades 145  44 

RocQUAiN,  La  papauté  au  moyen  âge.  (P.  Yiollet.) i5o  64 


Histoire  modems. 

Beauvois,  Claude  Bouton, seigneur  de  Corberon.  (T.  de  L.).  238  407 
BouTEiLi.ER  (de)  et  Hepp,  Correspondance  adressée  au  magis- 
trat de  Strasbourg  par  ses  agents  à  Metz,  1 594-1683.  (R.).  245  447 
Breucker,  La  cession  de  la  Poméranie  à  la  Suède.  (R).  .  .  .  264  5i  1 

Champion,  Philosophie  de  l'histoire  de  France 191  220 

Chantelauze,  Vincent  de  Paul  et  les  Gondi.  (T.  de  L.).  .  .  .  239  412 
Chéruel,  Histoire  de  France  sous  le  ministère  de  Mazarin, 

I.  (T.  de  L.) 216  309 

Combes,  L'entrevue  de  Bayonne 210  288 

Cota  (de),  Mémoires  sur  Verazzano.  (E.  Beauvois  ) 204  268 

Dalton,  Jean  Laski.  (R.) 244  445 

Delahante,  Une  famille  de  finance  au  xvnr3  siècle.  (J.  Flam- 

mermont.) 179  188 

Duruy  (A.),  L'instruction  publique  et  la  Révolution.  (A. 

Gazier.) , 258  486 


XVI  TABLE   DES   MATIERES 

art.  pages 

Hitzigrath,  Les  écrits  sur  la  paix  de  Prague  en  i635.  (R.).  229  366 

Juste,  L'élection  de  Léopold  1 190  220 

Lair,  La  Vallière  et  la  jeunesse  de  Louis  XIV.  (T.  de  L.).  .  147  5o 
Léouzon-le-Duc,  Correspondance  diplomatique  du  baron 

de  Staël-Holstein.  (A.  S.) i3i  i5 

Lodge,  Histoire  des  colonies  anglaises  d'Amérique.  (Ch.  B.).  198  244 

Lossen,  La  guerre  de  Cologne,  I.  (R.) 237  405 

Miranda,  Richard  de  Cornouailles  et  Aix-la-Chapelle.  (R.).  .  254  482 
Mûller  (C),  Lutte  de  Louis  de  Bavière  avec  la  curie  ro- 
maine. (R.) 243  427 

Pajol,  Les  guerres  sous  Louis  XV.  (A.  C.) 168  1 53 

Pierling,  La  mission  de  Possevino  en  Russie.  (L.  Léger.).  257  485 

Roget,  Histoire  du  peuple  de  Genève,  VI.  (R.) 255  483 

Simson,  Napoléon  III  et  l'Allemagne , 171  1 56 

Valfrey,  Lionne  et  la  paix  des  Pyrénées.  (A.  Gazier.) 265  5  12 

Vauchez,  Esquisses  d'histoire  suisse.  (Ed.  Favre.) 256  484 

Villari,  Machiavel  et  son  temps.  (C.  Paoli.) 225  345 

Wille,  Philippe  de  Hesse  et  Ulric  de  Wurtemberg. (R.).  .  .  221  326 


Littérature  française  (moyen  âge). 

Diez,  Vies  et  œuvres  des  troubadours,  p.p.  Bartsch.  (P.  M.).  2o3     266 

Eyssenhardt,  Romain  et  roman.  (L.  Havet.) 1 38       3i 

Godefroy,  Dictionnaire  de  l'ancienne  langue  française.  (A. 

Thomas.) 1 58     114 

Lafon  (Mary),  Histoire  littéraire  du  midi  de  la  France.  (P. 

M.) 195     239 

—  Exploit  de  M.  Mary  Lafon 429 


Littérature  française  (temps  modernes). 

Andrieux,  contes  envers,  p.  p.  Ristelhuber.  (W.) 169  1 5  5 

Baschet,  Les  comédiens  italiens  à  la  cour  de  France.  (T.  de 

L.) 233  384 

Bouger el  (le  P.),  prêtre  de  l'Oratoire 249  467 

Des  Forges  Maillard  (œuvres  de),  p.  p.  de  la  Borderie  et 

Kerviler.  (T.  de  L.) 212  292 

Fabre,  La  naissance  de  Fléchier.  (T.  de  L.) 178  i83 

Galiani,  Correspondance,  p.  p.  Perey  et  Maugras,  p.  p. 

Asse.  (M.  Tourneux.) i63  128 

Guerrier,  Mm0  Guyon,  sa  vie,  sa  doctrine  et  son  influence. 

(T.  de  L.) 223  332 

Haussonville  (d'),  Le  salon  de  Mme  Necker.  (M.  Tourneux.).  226  352 


TABLE    DES    MATIKRES  XVII 

art.  pages 

Mangold,  Histoire  et  critique  du  Tartufe.  (C.) 194  241 

Person  (L.),  Notes  critiques  et  biographiques  sur  Rotrou. 

(Ch.  Marty-Laveaux.) 128  9 

—  Le  Saint-Genest  de  Rotrou.  (A.  Morel-Fatio.) i85  201 

Pouy,  Etude  sur  les  œuvres  inédites  et  la  correspondance  de 

Dusevel.  (T.  de  L.). i52  76 

Ronchaud  (de),  Théâtre  choisi  de  Rotrou.  (A.  C.) 162  126 

Ruble  (de),  Antoine  de  Bourbon  et  Jeanne  d'Albret.  (T.  de 

L.) 263  509 

Servois,  Notice  sur  La  Bruyère.  (T.  de  L.) 211  289 

Tamizey  de  Larroque,  Lettres  françaises  de  Scaliger.  (P.  de 

Nolhac.) 222  328 

Tourneux,  Correspondance  littéraire  de  Grimm.  (T.  de  L.).  25o  470 


Langues  et  littératures  germaniques. 

Buchner,  Ferdinand  Freiligrath.  (A.  Chuquet.) 234  387 

Èngel,  Le  docteur  Faust.  (C.) , 2i3  295 

Gœthe,  Jery  et  Bâtely,  p.  p.  Arndt.  (C.) i3o  14 

—  Faust,  p.  p.  Schroer,  II.  (J.) 181  191 

—  Faust,  fragment,  p.  p.  Seuffert.  (C.) 186  204 

—  Reineke  Fuchs,  par  Bieling.  (G.) 197  243 

Hirzel,  Albert  de  Haller.  (A.  Chuquet.) 227  355 

Janssen,  Frédéric  Stolberg.  (C.) 170  1 55 

Jonas,  Christian  Gottfried  Koerner.  (A.  Chuquet.) .  217  3 12 

Kluge,  Dictionnaire  étymologique  de  la  langue  allemande. 

(J.  Kirste.) 161  125 

Nerrlich,  Lettres  de  Charlotte  de  Kalb  à  J.  P.  Ricbter.  (A. 

C.) 2o5  271 

Oldenbourg,  le  pays  et  les  gens,  par  Strackerjan 164  1 35 

—  le  théâtre,  par  Dalwigk 164  1 35 

Rieger,  Klinger  dans  dans  la  période  d'orage.  (A.  Chuquet.).  129  11 
Sanders,  Dictionnaire  complémentaire  de  la  langue  alle- 
mande. (A.  Bauer.) 240  41 5 

Scherer  (W.),  Histoire  de  la  littérature  allemande.  (A.  Bos- 

sert.) , 259  492 

Schober,  Heinse,  sa  vie  et  ses  œuvres.  (A.  Chuquet.).'  ....  140  34 

Schoell,  Etudes  sur  Gœthe.  (C.) 176  175 

Storm,  Philologie  anglaise.  (C.  J.) 209  214 

—  Lettre  de  M.  Storm 449 

Strauch,  Marguerite  Ebner  et  Henri  de  Nordlingen 174  172 

Werner,  l'Emilia  Galotti  de  Lessing.  (C.) 180  191 

Widmann,  Vie  de  Faust,  p.  p.  Ad.  de  Keller.  (A.  C.) 127  8 

Wieland,  Hermann.  p.  p.  Muncker.  (A.  C.) 189  219 


XVIII  TABLE   DES    MATIERES 

art.       pages 


Langues  et  littératures  celtiques. 

Loth,  Essai  sur  le  verbe  néo-celtique.  (H.  d'Arbois  de  Ju- 
bainville.).  .  . 224     341 


Langues  et  littératures  méridionales. 

Moguel,  La  vie  etlesœuvresdeCalderon.(A.  Morel-Fatio.).  1 5 1  67 

Langues  et  littératures  slaves. 

Haller,  Histoire  de  la  littérature  russe.  (L.  Léger.) 148  55 

Jagic,  Textes  de  langue  slavonne.  (L.  Léger.) 126  7 

Vivo  (de),  Grammaire  de  la  langue  russe.  (L.  Léger.).  ...  141  36 

Bibliographie. 

Bengesco,  Bibliographie  des  œuvres  de  Voltaire,  I.  (M.  Tour- 

neux.) 23o  367 

Giraudet,  Les  origines  de  l'imprimerie  à  Tours.  (Em.  Picot.).  1 5  5  88 

Folklore. 

Dozon,  Contes  albanais.  (G.  P.) 200  253 

Léger  (L.),  Contes  populaires  slaves.  (G.  P.) 200  25  3 

Legrand,  Contes  populaires  grecs.  (G.  P.) 200  253 

Puymaigre  (de),  Romanceiro,  choix  de  vieux  chants  portu- 
gais. (G.  P.) 200  253 

Rivière,  Contes  populaires  de  la  Kabylie.  (G.  P.) 200  253 

Theal,  Recueil  de  contes  cafres.  (G.  P.) 199  246 


TABLE    DES   MATIERES  XIX 

pages 


Variétés 

Gaidoz,  Bibliographie  créole,  note  supplémentaire 453 

Gazier,  L'histoire  de  France  du  P.  Loriquet 206 

Gûnzburg,  L'itinéraire  de  Théodosius 221 

Guyard,  Le  mot  assyrien  «  tamkâru  » 56 

Revue  de  l'Extrême-Orient,  I.  (G.) 16 

Tamizey  de  Larroque,  Date  de  la  naissance  de  Fléchier 296 


Correspondances  . 

Exploit  de  M.  Mary  Lafon 449 

Lettre  de  M.  Léger  à  M .  G.  Paris 3y3 

Lettre  de  M.  Ch.  Morel ..**  432 

Lettre  de  M.  Storm 449 


Chronique. 

Annuaire  théologique 196 

Archives  pour  l'étude  des  traditions  populaires,  p.  p.  Pitre 

et  Marino 211 

Archives  pour  l'histoire  littéraire,  III 207 

Bastin,  Morceaux  de  lecture 3 18 

Béer,  Papiers  de  Tegethoff 459 

Behaghel,  Sur  la  jeunesse  des  gymnases 275 

Bello,  le  poète  de  la  Colombie 299 

Bernays,  Le  contingent  de  Francfort  sous  le  premier  empire.  5 1 8 

Bernus,  Notice  bibliographique  sur  Richard  Simon 419 

Bersot,  Un  moraliste,  études  et  pensées 337 

Boucher,  Tableau  de  la  littérature  anglaise. 18 

Bulletin  de  correspondance  africaine 247 

Burnell,  not.  nécrol 397 

Chapelain,  Les  douze  derniers  chants  de  la  Pucelle,  p.  p. 

Herluison 45  5 

Charvériat,  Urbain  VIII  et  la  guerre  de  Trente  Ans 359 

Clermont-Ganneau,  Rapports  sur  une  mission  en  Phénicie 

et  en  Palestine 5 1 5 

Collection  Léopold  Cerf. 17 

Commission  historique,  réunion  du  29  septembre  au  2  oc- 
tobre, à  Munich , . .  378 

Communications  des  archives  de  la  guerre,  d'Autriche 25 1 


XX  TABLE    DES    MATIERES 

pages 

Concord  et  son  école  de  philosophie 211 

Congrès  anthropologique  de  Francfort  sur  le  Main 249 

Congrès  des  Orientalistes,  vol.  de  Mémoires q6 

Congrès  des  philologues  allemands,  à  Carlsruhe 25 1 ,395,458 

Dictionnaire  des  antiquités  grecques  et  romaines,  VIIIe  fas- 
cicule   337 

Ebert  (Egon),  not.  nécrol 5 18 

Ecole  d'Athènes  et  de  Rome,  Rapport  de  M.  Perrot 177 

Ecole  du  Louvre  (V) 495 

Ecole  française  d'Athènes  (!')  et  le  mémoire  de  première 

année 495 

El  Z'  Dam,  Geronimo  le  martyr  du  Fort  des  Vingt-quatre 

heures, ; , . .  228 

Enseignement  [!')  secondaire  des  jeunes  filles,  Revue  men- 
suelle   338 

Etat-major  allemand  (Y)  et  ses  monographies  de  détail  sur 

l'histoire  de  la  guerre 498 

Eugène  (prince)  de  Savoie,  ses  campagnes,  VIIIe  vol 208 

Examens  de  sortie  des  gymnases  prussiens 98 

Gamucci,  Pourquoi  les  Grecs  n'ont  pas  fait  de  progrès  en 

harmonie 229 

Garnier  (F.),  de  Paris  au  Tibet 226 

Gatteyrias,  l'Arménie  et  les  Arméniens 376 

Gemaehling,  Le  combat  du  cap  Ortegal 226 

Grammont  (de),  Relation  des  préparatifs  faits  pour  surpren- 
dre Alger,  par  Conestaggio 497 

Griswold,  Table  des  matières  de  la  «  Deutsche  Rundschau  ».  317 

Hérelle,  Correspondance  de  Dom  Thierry  de  Viaixnes.. . .  194 

Hervé- Bazin,  Mémoires  et  récits  de  François  Bazin 96 

Herzog,  not.  nécrol 395 

Israël,  Recueil  d'écrits  pédagogiques  des  xvie  et  xvir°  siècles.  459 

Jametel,  L'encre  de  Chine 375 

Journal  de  la  province  de  Posen 180 

Juste,  Souvenirs  du  baron  Nothomb , 397 

Keller  (Ad  de),  Le  «  litterarischer  Verein  »  de  Stuttgart. .  118 

Kervyn  de  Lettenhove,  Charles  IX  et  le  Tasse. 298 

Kinkel  (G.) ,  not.  nécrol 5 1 6 

Labbé,  Etudes  de  pédagogie  morale 497 

Lamy,  Hymnes  et  sermons  de  saint  Ephrem 38 

Lanciani,  Fragment  d'une  lettre  sur  les  fouilles  du  Forum. .  519 

Laveleye  (de),  Eléments  d'économie  politique 376 

Loiseleur,  Trois  énigmes  historiques ,...,.  375 

Lund,  Histoire  du  Danemark  et  delà  Norvège,  1559-  1596  .  1 38 
Macaulay,  Essais  d'histoire  et  de  littérature,  trad.  p.   G. 

Guizot 79 


TABLE    DES    MATIERES  XX! 

pages 

Martinov,  Un  manuscrit  slavon  de  la  Bibliothèque  de  Gand.  418 
Mémoires  et  documents,  tome  XXXVI,  de  la  Société  d'his- 
toire de  la  Suisse  romande 419 

Milliet,  Morceaux  choisis  de  Mirabeau 94 

Moreira  da  Sa,  Morceaux  choisis  à  l'usage  des  écoles  du 

Portugal j  9 

Muller  (W.),  Histoire  de  l'Europe  de  1 871  à  188 1 459 

Muntz,  Les  arts  à  la  cour  des  papes,  III 157 

Person  (L.),  Histoire  du  Venceslas  de  Rotrou i5g 

Piot,  Le  testament  d'Egmont 1 3j 

Programme  du  Congrès  de  la  Sorbonne  en  i883 274 

Queux  de  Saint-Hilaire,  Les  fables  d'Esope  trad.  par  Cor- 

rozet 272 

Revue  historique  du  Béarn  et  de  la  Navarre. 5y 

Riemann,  Les  mètres  lyriques  d'Horace 375 

Rooses,  Nouveau  livre  d'esquisses i38 

Rostand  et  Benoist,  Traduction  et  édition  de  Catulle 455 

Scherer  (Edm.),  Etudes  sur  la  littérature  contemporaine,  VI.  37 

Schliemann,  Lettre  sur  ses  fouilles  à  Troie 195 

Schlumberger  (G.),  Ier  vol.  des  Œuvres  d'Adr.  de  Longpé- 

rier 514 

Schmidt  (Ch.),  Histoire  de  l'imprimerie  à  Strasbourg 58 

Société  des  anciens  textes  écossais 5 1 6 

Société  historique,  Cercle  Saint-Simon 78,  457 

Sorel,  Essais  de  critique  et  d'histoire 456 

Tamizey  de  Larroque,  Entrée  de  Charles  IX  à  Bordeaux. . ,  1 59 

—  Lettres  inédites  de  Saumaise 3 1 6 

—  Oraison  funèbre  de  Gassendi,  par  Nie.  Taxil. 359 

Tardif  (Jules),  not.  nécrol , 479 

Vandenpeereboom,  Jansenius 298 

Vapereau,  Supplément  au  Dictionnaire  universel  des  con- 
temporains   497 

Vinson,  Les  Basques  et  le  pays  basque 338 

Viçir  de  Lankuran  (le),  p.  p.  Magard  et  Le  Strange 517 

Wijnne,  Négociation  du  comte  d'Avaux,  L 435 


Comptes-rendus  des  séances  des  sociétés  savantes. 

Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 

Séances  des  23  et  40  juin,  7,  12,  21  et  28  juillet,  4,  n,  18  et  25  août, 

1,  8,  i5,  22  et  29  septembre,  6,  i3,  20  et  27  octobre,  3,  10,  17  et  24 

novembre,  1,  8  et  i5  décembre  1882. 
Comptes-rendus  de  M.  Julien  Havet. 


XXIf  TABLE    DES    MATIERES 

Pages  20,  3g,  bg,  80,  100,  120,  140,  23o,  2.52,  276,  3oo,  319,  33g,  36o, 
378,  399,  419,  435,  460,  480,  519. 

Société  nationale  des  antiquaires  de  France. 

Séances  des  14  et  21  juin,  5,  12  et  19  juillet,  6  septembre,  4  et  18  octo- 
bre, 8,  i5  et  22  novembre,  6  décembre  1882. 
Pages  19,  59,  79,  99,  139,  25i,  339,  420>  5°°>  520. 

Société  asiatique. 

Séances  des  10  novembre  et  10  décembre. 

Pages  440  et  5  00. 


PÉRIODIQUES 


ANALYSES  SUR  LA  COUVERTURE 


Allemands 

Archiv  jiïr  slawische  Philologie,  tome  VI,  n8  et  me  livr. . .   N°*   27,  5o 
Deutsche  Literatur\eitung,  nos  23-48,  10  juin-2  décembre 

1882 28,  29,  3o, 

33,  34,  35,  36,  37,  38,  40,  44,  46,  47,  48,  49,  5o,  5i 

Deutsche  Rundschau,  juillet-novembre  1882 3r,  36,  41, 

42,  5i 
Gottingische  gelehrte  An\eigen,  nos  22-49,  3i  mai-6  dé- 
cembre 1882 27,29,31, 

33,  34,  37,  40,  41»  46,  5r,  52 
Literarisches  Centralblatt,  nos  24-48, 10  juin-25  novembre 

1882. .' 27,  29,  3o, 

3 1,  33,  35,  36,  37,  39,  40,  43,  45,  46,  47,  48,  49,  5o,  5r,  52 
Philologische  Rundschau,  n°s  24-37,  10  juin-9  septembre 

1882 1 27,  28,  3r, 

32,  35,  36,  43,  45,  46,  5o,  5i 
Philologische  Wochenschrift,  n°  20-42,  20  mai-2'1  octobre 

1882 27,  28,  29, 

3o,  3i,  32,  35,  45,  47,  48,  49 
Theologische  Liieratur^eitung,  n03   12-24,  l7  juin-2  dé- 
cembre 1882 28,32,33, 

34,  36,  41,  42,  44,  45,  5o,  5i,  52 
Zeitschriftfilr  deutsches  Alterthum  und  Literatur,  1882, 

I,  II,  Illfasc > 38,  39 


TABLlï    DES    MATIERES  XXIII 


Anglais 

The  Academy,  nos  527-552,  10  juin  2-décembre  1882. ...    27,  29,  32, 

34,  35,  36,  38,  42,  43,  44,  45,  46,  47,  48,  49,  5o,  5i,  52 
The  Athenaeum,  nos  2850-2875,  10  juin-2  décembre  1882.    27,  33,  34, 

35,  36,  38,  39,  41,  42,  43,  44,  46,  47,  48,  49,  5o,  5i,  52 


Belges 

Âthenaeum  belge,  n,s  u-23,  1  juin-i  décembre  1882 28,  32,  36, 

37,  39,  41,  44,46,  47,  5o,  5i 
Revue  de  l'instruction  publique  (supérieure  et  moyenne), 
tome  XXV,  III,  IV,  V .'.     3i,  39,5i 


Danois 
Vor  Ungdom,  ier,  2e,  3e,  4e,  5e  fasc 41 ,  47 

Italiens 

Archivio  per  lo  studio  delli  tradi^ioni  popolari,  vol.  I, 

fasc.  III,  juillet -septembre 41 

Archivio  storico per  Trieste,  ITstria  ed  il  Trentino,  I,  4.  3i 

Roumains 
Columna  lui  Trajan,  n°  4,  avril 3o 


le  puy,  imprimerie  marchessou  fils,  boulevard  saint-laurent,  23. 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

N»  27  -  3  Juillet  —  1882 


Sommaire  s  123.  De  Rochas  d'Aiglun,  L'artillerie  chez  les  anciens.  —  124.  E. 
Sohulze,  La  poésie  grecque,  esquisses.  —  iî5.  Ler  Grenouilles  d'Aristophane,  p. 
p.  de  Velsen.  —  126.  Jagic,  Textes  de  langue  slavonne.  —  127.  La  Vie  de  Faust, 
de  Widmann,  p.  p.  Ad.  de  Keller.  —  128.  L,  Person,  Notes  critiques  et  biblio- 
graphiques sur  Rotrou.  —  129.  Rieger,  Klinger  dans  la  période  d'orage.  —  i3o. 
Jeri  et  Bàtely,  de  Gœthe,  p.  p.  Arndt.  —  i3i.  Correspondance  diplomatique  du 
baron  de  Staël-Holstein,  p.  p.  LécTuzon  le  Duc.  —  Variétés  :  La  Revue  de  l'Ex- 
trême Orient,  dirigée  par  H.  Cordier.  —  Chronique.  —  Société  des  antiquaires 
de  France.  —  Académie  des  Inscriptions. 


123.  —  A.  de  Rochas  d'Aiglun.  L'Artillerie  chez  les  anciens.  Tours,  impri- 
merie Paul  Bousrez.  Extrait  du  Bulletin  monumental,  nos  2  et  3.  1882,  28  pages 
in-8°,  plusieurs  figures. 

Notice  sommaire  par  un  officier  supérieur  du  génie,  dont  l'érudition 
et  la  compétence  sont  bien  connues,  sur  ce  qu'on  sait  des  machines  de 
jet  antiques;  claire  et  intéressante.  —  En  appendice,  Description  de  la 
machine  aérotone,  par  Philon  deByzance;  traduction  inédite  d'A.-J.-H. 
Vincent.  La  machine  aérotone  a  pour  principe  l'élasticité  de  l'air  com- 
primé, par  opposition  aux  machines  qui  ont  pour  principe  l'élasticité 
d'une  corde  ou  d'un  ressort. 

Relevons  les  lignes  relatives  aux  origines  de  l'artillerie.  «  Les  machi- 
nes de  jet  étaient  inconnues  en  Grèce  à  l'époque  de  la  guerre  du  Pélopo- 
nèse,  car  Thucydide,  si  précis  en  toutes  choses,  n'en  parle  pas  ;  elles  s'y 
introduisirent  à  propos  du  concours  ouvert  à  Syracuse  entre  les  ingé- 
nieurs de  tous  les  pays  par  Denys  l'Ancien,  qui  se  préparait  à  attaquer 
Carthage,  vers  l'an  400  avant  Jésus-Christ.  Le  premier  emploi  qu'en 
rapporte  l'histoire  eut  lieu  au  siège  de  Motye  par  le  même  Denys  (Diod., 
xiv,  5i).  » 

Tite  Live  a  beau  parler  (I,  xltii,  3)  de  deux  centuries  de  f abri  qu'au- 
rait organisées  Servius  Tullius,  longtemps  avant  Denys  et  avant  la 
guerre  du  Péloponnèse,  ut  machinas  in  bello  ferrent  '  :  ce  n'est  pas  un 
témoignage  si  vague  et  si  peu  sûr  qui  prévaudra  contre  l'induction  tirée 
du  silence  d'un  Thucydide.  Mais,  en  dehors  des  sujets  de  Servius,  quel- 
que peuple  barbare  a-t-il  eu  une  artillerie  avant  les  Grecs?  «  La  plus  an- 
cienne mention  de  ces  engins  que  l'on  trouve  dans  l'histoire  remonte  en- 
viron à  l'an  800  avant  Jésus-Christ.  Oziasarme  les  remparts  de  Jérusalem 
«  de  machines  construites  par  un  ingénieur  pour  lancer  des  traits  et  de 

1.   Non  pas  précisément  pour  confectionner  des  machines  (de  Rochas,  p.  il). 
Nouvelle  série,  X'V.  i 


2  REVUE    CKITIQUK 

•  «  grosses  pierres.  »  Deux  siècles  plus  tard,  Ezéchiel  menace  la  ville  sainte 
des  balisîes  de  Nabuchodonosor .  »  Il  serait  plus  exact  de  dire  :  L'artil- 
lerie ayant  pris  naissance  vers  400,  l'auteur  des  Paralipomènes  est  très 
postérieur  à  cette  date;  il  attribue  des  machines  à  Ozias  (II,  xxvi,  i5) 
sans  se  méfier  de  l'anachronisme  '.  Il  en  faut  penser  autant  de  l'auteur 
&  Ezéchiel  si,  dans  son  passage  sur  Nabuchodonosor  (xxi,  22),  les  hé- 
braïsants  acceptent  comme  une  traduction  exacte  du  texte  le  (SeXocTâcsiç 
de  la  version  grecque.  « 

Louis  Havet. 

■ 

124.  —  Ole  liellenisclie  Dichtkunst,  Sktzzen  von  E.  Schulze.  Gotha,  F.  A. 
Perthes.  1881,  i3z  pages. 

Cinq  chapitres  absolument  détachés  sur  Homère,  sur  Archiloque,  Al- 
cée  et  Solon,  sur  YAjax  de  Sophocle,  sur  les  Acharniens  et  les  Grenouil- 
les d'Aristophane,  enfin  sur  l'Anthologie  grecque.  C'est  de  l'histoire  et 
de  la  littérature  fragmentaires.  M.  Schulze  ne  nous  dit  pas  pourquoi, 
en  traçant  ses  «  esquisses  »,  il  a  fixé  son  choix  plutôt  sur  tel  poète 
que  sur  tel  autre,  sur  Sophocle  plutôt  que  sur  Eschyle  ou  Euripide; 
pourquoi  il  nous  parle  beaucoup  de  Solon  et  oublie  complètement  Pin- 
dare;  pourquoi,  enfin,  il  passe  tout  d'un  coup  d'Aristophane  à  l'Antho- 
logie sans  nous  laisser  soupçonner  l'existence  de  la  poésie  alexandrine. 
Evidemment  M.  S.  a  voulu  dérober  à  la  discussion  le  plan  de  son  ou- 
vrage, et  nous  n'avons  qu'à  constater  le  fait.  Si  M.  Schulze  ne  se  pique 
pas  d'être  complet,  il  se  flatte  encore  moins  d'être  original.  Il  nous  pré- 
vient dans  sa  préface  qu'il  a  pris  à  O,  Mûller,  à  Fr.  Jacobs,  à  E.  Cur- 
tius,  à  Bernhardy  et  à  d'autres  le  peu  d'histoire  littéraire  qu'on  trouvera 
chez  lui  et  que  les  citations  dont  il  se  propose  d'illustrer  abondamment 
ses  esquisses  sont  tirées  des  meilleures  traductions  allemandes  connues, 
sauf  cependant  pour  quelques  épigrammes  qu'il  a  traduites  à  ses  périls 
et  risques.  «  Le  tout  est  destiné,  dit-il,  à  une  catégorie  d'hommes  culti- 
vés qui  ne  peuvent  puiser  directement  à  la  source.  »  Il  eût  mieux  valu, 
pensons-nous,  leur  indiquer  tout  simplement  un  manuel  de  littérature 
grecque. 

J.  Nicole. 


125.  —  ArJetoplianis  Ranœ.  Recensuit  Adolphus  von  Velsen.  Leipzig,  Teub- 
ner.  1881,  un  vol.  in-8°  de  vi-141  pages. 

Il  y  a  à  peu  près  un  an,  en  rendant  compte,  ici  même  %  de  l'édition 

1.  Dans  les  Rois  (IV,  xiv-xv),  on  ne  trouve  rien  sur  l'organisation  militaire  attri- 
buée par  les  Paralipomènes  à  ce  Servius  Tullius  juif,  Ozias  ou  Azarias. 

2.  Revue  critique  du  21  mars  i88r. 


D  HISTOIRE    ET    DE    LITTERATURE  5 

des  Thesmophoriaçasœ  de  M.  Fr.  H.  M.  Blaydes,  et  en  comparant  cette 
édition  avec  celle  de  M.  A.  von  Velsen,  nous  exprimions  l'espoir  que  ce 
dernier  savant,  détourné  d'Aristophane  par  sa  collaboration  au  Corpus 
Inscriptionum  Atticarum  et  à  la  publication  des  fac-similés  de  manus- 
crits avec  Wattenbach,  revînt  à  des  études  dans  lesquelles  il  avait  rendu 
d'éminents  services.  Nous  ignorions  que  cet  espoir  fût  si  près  d'être  réa- 
lisé; en  effet,  M.  V.  est  revenu  à  Aristophane;  il  a  repris  la  recension,  un 
moment  interrompue,  des  œuvres  du  grand  comique.  La  nouvelle  édi- 
tion des  Grenouilles  fait  suite  à  l'édition  des  Thesmophoria\usœ  '  qui 
est  de  1878,  à  celle  des  Chevaliers  qui  est  de  1868.  Il  y  a  donc  14  ans 
que  cette  publication  est  commencée;  espérons  aujourd'hui  que  M.  V. 
restera  fidèle  à  Aristophane  et  qu'il  nous  donnera  successivement  tou- 
tes les  œuvres  qui  nous  restent  du  poète  \ 

Une  édition  critique  d'Aristophane  était  désirée  depuis  longtemps.  Les 
dernières  collations  qu'on  avait  des  mss.  principaux,  celles  d.e  Bekker  et 
de  Dindorf,  étaient  reconnues  insuffisantes.  Assurément,  depuis,  le  texte 
du  poète  avait  été  amélioré,  ces  progrès  sont  sensibles  dans  les  dernières 
éditions  données  par  Meineke  et  Bergk;  mais  on  manquait  d'une  base 
solide,  la  tradition  du  texte  dans  les  mss.  n'était  pas  connue  d'une  ma- 
nière satisfaisante.  M.  V.  prit  pour  tâche  de  la  faire  connaître  :  quand  il 
vint  en  Italie,  -son  but  était  parfaitement  déterminé  :  il  venait  y  recueillir 
l'apparat  nécessaire  pour  former  une  édition  critique  telle  qu'on  l'exige 
aujourd'hui.  Ajoutons  que  M.  V.  était  prêt  pour  cette  étude  :  depuis 
longtemps  il  s'occupait  d'Aristophane;  dès  1860,  nous  trouvons  une  sé- 
rie de  corrections  au  texte  du  comique  publiées  dans  un  programme  du 
gymnase  de  Saarbruck,  et,  de  i863  à  1866,  le  Philologus  et  le  Rhei- 
nisches  Muséum  contiennent  fréquemment  des  travaux  du  même  genre 
dus  aussi  à  M.  Velsen  3. 

C'est  en  1866  qu'il  obtint  un  congé,  lui  permettant  de  quitter  son 
gymnase  de  Saarbruck  et  de  venir  en  Italie.  La  question,  qu'il  avait  à 
étudier  était  complexe.  Aristophane  ne  nous  est  pas  parvenu  dans  un 
manuscrit  qui  soit  la  source  de  tous  les  autres  ou  dont  la  supériorité  soit 
telle  qu'il  rejette  ses  rivaux  dans  l'ombre  et  rende  leur  secours  inutile, 
comme  c'est  le  cas,  par  exemple,  pour  Isocrate,  Démosthène,  Athénée, 
peut-être  pour  Eschyle  et  Sophocle  4.  Quatre  des  mss.  d'Aristophane,  qui 

1.  Nous  avons  malheureusement  à  déplorer  ici  un  manque  d'unité  dans  la  publi- 
cation :  cette  pièce  a  paru  dans  un  programme  du  gymnase  de  Saarbruck.  in-fo- 
lio, les  autres  pièces  sont  dans  le  format  des  in  -8°  ordinaires  de  la  maison  Teubner. 
Rien  de  plus  désagréable  que  ces  irrégularités  quand  il  s'agit  d'une  même  collection. 

2.  Nous  recevons  le  Plutus,  qui  forme  le  quatrième  volume  de  la  collection;  nous 
en  rendrons  compte  très  prochainement. 

3.  Signalons  aussi  un  article  du  même  genre  dans  les  Symbola  philol.  Bonn,  in 
honorem  Fr.  Ritschelii  collecta,  1864,  fasc.  I.  p.  411  sqq.  Après  son  retour  d'Italie, 
M.  A.  v.  V.  a  donné  de  nouveaux  articles  sur  Aristophane  dans  les  deux  revues  que 
nous  avons  citées. 

4.  In  multis  scriptoribus  Graecis,  nnum  ?>o\\im  tesiemhabemus,  cujus  verbaalii  atque 


4  RICVUK    CU1TIQUE 

sont  en  Italie,  étaient  considérés  comme  importants,  le  Ravennas,  le  Ve- 
netus  et  deux  mss.  de  Florence  T  et  0.  Or.  M  .V.  avait  lui-même  démontré 
[Philologus,  XXIV,  p.  124  sqq.)  qu'il  n'y  avait  aucun  de  ces  manuscrits 
qui  ne  fût  assez  gravement  altéré,  que  tous  reproduisaient  très  imparfai- 
tement la  tradition  commune,  enfin  qu'aucun  d'eux  ne  pouvait  suffire  à 
lui  tout  seul  pour  constituer  le  texte.  Cette  insuffisance  avait  des  degrés 
sans  doute,  mais  elle  était  grande,  même  pour  les  meilleurs  mss.  M.  V. 
avait  donc  d1abord  à  collationner  très  exactement  ces  quatre  manuscrits  ; 
de  plus,  puisque  le  texte  ici  doit  être  constitué  à  l'aide  de  secours  pris  à  des 
sources  différentes,  il  avait  à  faire  dans  les  bibliothèques  italiennes,  une 
enquête  rigoureuse  et  à  voir  si,  parmi  les  manuscrits  jusque  là  négligés,  il 
n'y  en  avait  pas  quelqu'un  qui  pût  être  utile  et  fournir  quelque  secours. 
Signalons  d'abord  deux  résultats  importants,  fruits  de  ces  recherches. 
L'édition  princeps  d'Aristophane,  donnée  par  Aide  Manuce  à  Venise  en 
1498  ,  ne  contient  que  neuf  des  onze  comédies  du  poète;  les  deux 
qui  manquent,  Lysistrata  et  les  Thesmophoriaçusœ,  furent  publiées 
pour  la  première  fois  à  Florence,  en  i5i5,  par  B.  Junti,  d'après  un  ma- 
nuscrit provenant  de  la  bibliothèque  d'Urbin  '.  Depuis  Junti,  ce  manus- 
crit, qui  paraissait  appartenir  à  une  bonne  famille,  avait  disparu  et  la 
Juntine,  qui  le  représentait,  était  considérée  comme  une  des  sources  pour 
la  constitution  du  texte  de  Lysistrata  et  des  Thesmophpr ia\usœ.  On 
n'avait  pas  cependant  renoncé  à  tout  espoir  de  retrouver  l'Urbinas  de 
Junti  et  M.  V.  moins  que  tout  autre  2.  Tout  en  faisant  ses  collations,  il 
fouillait  les  bibliothèques  italiennes,  en  quête  du  manuscrit  perdu.  Il  y 
a,  dans  ce  fait  de  voir  disparaître  en  pleine  culture  littéraire  des  docu- 
ments, échappés  à  des  siècles  de  barbarie  et  d'ignorance,  quelque  chose 
qui  irrite;  on  ne  se  résigne  pas  facilement;  et,  malgré  de  trop  nombreux 
mécomptes,  on  a  toujours  peine  à  croire  que  tout  espoir  est  définitive- 
ment perdu.  Le  résultat  ne  fut  pas  pour  M.  V.  tel  qu'il  l'avait  peut-être 
rêvé  :  s'il  retrouva  l'Urbinas  de  Junti,  il  n'eut  pas  le  bonheur  de  nous 
rendre  un  nouveau  texte  d'Aristophane  3.  Il  se  trouva,  en  effet,  que  le 


alii  sinefructu  etcumnovis  semper  erroribusrepetunt.In  quibusdam  alns  duo  idonei 
testes  supersunt,  quos  qui  audiverit  habet  omnia.  Gobet.  Varice  Leciiones,  préf., 
p.  xxiv.  2e  édit. 

1.  «  Venit,  mi  Francisce,  expectata  dies  illa  in  qua  exurbinate  bibliotheca  antiquis- 
simum  Aristophanis  exemplar  nacti  sumus,  ibique  inter  aliis  AufflffTpdcTTQV  m)  0£- 
ajxocpopiaÇoôcaç...  non  alias  visas  comedias  nacti  sumus  ».  Préface  de  B.  Junti. 

2.  Als  ich  in  den  Jahren  1866  and  67  in  Italien  war,  habe  ich  natûrlich  in  Rom 
nach  jenem  codex  urbinas. ..  eifrig  gesucht,  aber  vergebens.  Ebenso  vergeblich  war 
meine  Mûhe  auf  den  ûbrigen  italienischen  Bibliotlieken.  A.  v.  Velsen,  Ueber  den 
Codex  Urbinas  der  Lysistrata  und  der  Thesmophoria^usen.WaWe,  1871,  p.  3. 

3.  Dièse  Abhandlung  macht  uns  um  eine  Handschrift  sermer,  um  eine  Kenntniss 
reicher,  dit  justement  Wecklein  en  rendant  compte  de  la  brochure  de  M.  Velsen.  (Phi- 
loîogischer  An^eiger,  1877,  p.  227.)  M.  V.  avait  noté,  dans  le  ms.de  Ravenne,  des  chif- 
fres arabes  et  autres  signes  placés  à  côté  du  texte  de  Lysistrata  et  des  Thesmopho- 
riazusas.  C'est  seulement  en  Allemagne,  en  étudiant  ses  collations,  qu'il  s'aperçut  de 


O  HISTOIKR    KT     l>K    I.ITTKK AI  UHK  D 

ms.,  d'après  lequel  avait  été  éditée  la  Juntine,  n'était  autre  que  le  ms. 
de  Ravenne.  La  découverte  n'en  était  pas  moins  intéressante  :  elle  éclai- 
rait Thistoire  d'un  manuscrit  important,  elle  donnait  la  solution  d'un 
problème  relatif  au  texte  du  poète.  De  toute  manière  elle  faisait  honneur 
à  la  sagacité  du  savant. 

Le  second  service  rendu  par  M.  V.,  c'est  d'avoir  signalé  le  premier 
l'importance  de  Y Ambrosianus  M.  «  Is  liber,  diligentissime  pictus, 
gravissimi  in  constituendis  poetae  verdis  est  momenti  :  utpote  qui 
genuinam  Aristophanis  manum  saepe  servaverit  solus  cum  Ravennate, 
interdum  quamvis  raro  solus  '. 

L'édition  des  comédies  d'Aristophane  publiée  par  M.  V.  est  pure- 
ment critique  ;  l'éditeur  ne  s'occupe  que  de  constituer  le  texte  sans 
chercher  à  l'expliquer  ;  les  notes,  qui  se  trouvent  au  bas  des  pages,  sont 
divisées  en  deux  groupes,  le  premier  est  consacré  aux  conjectures  tant 
du  nouvel  éditeur  que  des  savants  qui  l'ont  précédé  %  le  second  forme 
l'apparat  critique.  Cette  dernière  partie  est  de  beaucoup  la  plus  dévelop- 
pée, c'est  elle  qui  forme  la  valeur  essentielle  de  l'ouvrage.  Cette  édition 
marque  un  progrès  décisif  ;  elle  donne  à  la  critique,  pour  l'étude  du 
texte  d'Aristophane,  cette  base  qui  jusqu'ici  lui  faisait  défaut.  Quand 
M.  V.  aura  terminé  son  œuvre,  nous  posséderons  du  poète  comi- 
que une  édition  critique  telle  qu'il  n'y  en  a  de  semblable  que  pour  bien 
peu  d'auteurs. 

Il  suffit  de  jeter  les  yeux  sur  cet  apparat  critique,  pour  voir  avec  quelle 
attention,  avec  quel  scrupule  les  manuscrits  ont  été  examinés  :  les  parti- 
cularités les  plus  insignifiantes  en  apparence  ont  été  relevées  avec  le  soin 
le  plus  minutieux  3,  je  me  bornerai  à  un  seul  ordre  de  faits.  Le  manus- 
crit de  Ravenne  est  du  xi°  siècle,  l'accentuation  y  est  irrégulière,  mise 
généralement,  mais  assez  souvent  omise;  que  M.  V.  relève  avec  soin 
toutes  les  divergences  d'accentuation,  cela  est  nécessaire,  mais  est-il 
bien  utile  d'indiquer  absolument  tous  les  cas  où  le  copiste  a  négligé  ici 
un  esprit,  là  un  accent?  Ainsi  dans  les  Grenouilles  :  5i,  £7107]  s^wf'  et 
lemma  4  scholii  e^uy'  R-  —  69,  xaxo);]  Kaxw  R  xoctw.  U  xàtw  A  y.aTw; 
minio  corr.  ex  xaTor  M.  —  74,  èaxt]  wct  R  hsv,  V.  —  82,  euxoXoç]  eùxoXoç 

la  concordance  que  ces  chiffres  offraient   avec   la  Juntina;  cette    concordance  était 
telle  que  le  doute  n'était  plus  possible  sur  l'emploi  de  ce  ms.  par  Junti. 

1.  Préface  de  l'édition  des  'faxrçç  (p.  vin);  dans  la  préface  des  BaTpa/Gt,  l'auteur 
ajoute  :  Hune  codicem  in  Ranarum  fabula  certe  e  Ravennate  non  transcriptum  esse 
docent  vv.  201,  208,  274,  alii,  p.  vt. 

2.  L'auteur  n'a  donné  naturellement  que  les  conjectures  les  plus  dignes  d'attention. 

3.  L'apparat  critique  des  Grenouilles  nous  semble  même  plus  développé  que 
celui  des  Chevaliers. 

4.  On  voit  par  cette  citation  que  M.  V.  indique,  à  côté  de  la  leçon  qui  est  donnée 
par  le  texte,  la  leçon  qui  se  trouve  souvent  dans  les  lemmes  des  scolies.  C'est  un 
soin  dont  il  faut  lui  savoir  gré;  la  leçon  du  lemme  diffère  souvent  de  celle  du  texte, 
nous  avons  là  deux  témoignages  appartenant  à  la  même  époque,  il  est  utile  de  les 
connaître  tous  deux. 


6  RKVUK    CRITIQUE 

R.  —  m,  ^Xôeç]  f,XO£ç  R.  -—  117,  xpbç]  rcpoç  R.  Jfo'rf.,  àXXà]  àXXa  R. 
N'est-il  pas  permis  de  regarder  un  peu  comme  superflu  le  relevé  si 
rigoureux  de  fautes  qui  ne  sont  d'aucune  importance  pour  la  constitution 
du  texte  et  qui  s'expliquent  toutes  par  une  cause  générale  parfaitement 
connue?  Nous  n'avons  pas  cependant  le  courage  d'en  faire  un  reproche 
à  M.  V.  ;  il  y  a  dans  cette  édition  un  tel  effort,  une  telle  somme  de 
travail  qu'on  ne  voudrait  pas  croire  qu'une  partie  de  cette  peine  a  été  de 
la  peine  perdue.  Il  y  avait,  croyons-nous,  un  moyen  bien  simple  d'éviter 
ces  redites  :  il  suffisait,  à  la  fin  de  la  préface,  d'une  note  de  quelques  lignes, 
faisant  connaître  à  la  fois  les  deux  ou  trois  fautes  les  plus  fréquentes  et 
quelques-unes  des  habitudes  particulières  à  chacun  des  copistes.  M.jV.  au- 
rait gagné  à  cela  d'alléger  son  bagage,  ce  qui  n'est  pas  un  mince  avantage 
pour  un  travail  de  ce  genre';  il  y  aurait  gagné,  ce  qui  est  plus  grave,  d'être 
plus  clair.  Je  prends  un  des  deux  exemples.  Le  ms.  de  Ravenne  présente 
une  particularité  curieuse,  le  mot  oùx  est  presque  toujours  suivi  de  l'apos- 
trophe oùx.'.  Faudra-t-il  relever  perpétuellement  cette  particularité  '?  Et, 
si  on  la  relève,  que  pensera  de  ce  signe  le  lecteur  qui  n'est  pas  prévenu? 
Lenégligera-t-il?  Cherchera-t-il  à  lui  attribuer  une  valeur? —  Le  copiste 
du  Venetus  met  ordinairement  le  double  point  :  pour  indiquer  la  fin 
d'un  discours.  C'est  un  signe  particulier,  qui  a  sa  valeur  propre  et  qui 
n'exclut  pas  une  autre  ponctuation,  ainsi  Grenouilles,  25,  k^ù  :;  Il  y  a 
à  la  fois  un  double  point  pour  indiquer  que  le  personnage  a  fini  de  parler, 
et  un  point  d'interrogation,  la  phrase  étant  interrogative.  Cette  double 
ponctuation  dans  l'édition  de  M.  V.  est  une  énigme  pour  le  lecteur  3. 

Nous  sommes  convaincus  qu'il  est  difficile  dans  une  collation  de 
pousser  l'exactitude  aussi  loin  que  l'a  fait  M.V.  dans  les  siennes;  maison 
sait  combien  les  travaux  de  ce  genre  sont  délicats  ;  si  rigoureuse,  si  exacte 
qu'on  suppose  une  collation,  il  sera  toujours  possible  d'y  trouver  à  repren- 
dre. J'ai  pu  contrôler  l'exactitude  delà  présente  édition  des  Grenouilles 
sur  trois  des  principaux  mss.  d'Aristophane,  le  Ravennas,  le  Venetus 
et  l'Urbinas  3;  voici  les  observations  que  j'ai  à  proposer  :  11.  Syjt'  iks- 
t£Ôg)  et  non  Syjô*  txeTeùo)  R.  —  42,  §Y)[ji,YjTpav  et  non  §Y)fjt,YjTpa  U.  —  76,  V. 
dit  :  «  post  priuso  in  xporepov  erasa  est  una  littera  U.  »  Un  point  seul  a 
été  gratté,  —  85,  tXyj^wv]  tX^wv  U.  —  io3,  après  àpéaxei  V  a  un  point 
d'interrogation  formé  ainsi  :  .,  (Il  y  a  d'assez  nombreux  exemples  de 
cette  ponctuation  dans  le  ms.)  —  33o,  tyjv  devant  daéXacxov  est  aussi  la 
leçon  de  V.  —  359,  toXitoccç]  xoXityjç  V  (par  abréviation  de  rtç  au-dessus 
du  t),  tcoXF  R. 

Ce  qui  fait  la  valeur  de  cette  édition,  avons-nous  dit,  c'est  la  précision 

1.  Cf.  sur  les  divers  emplois  de  l'apostrophe,  Gardthausen,  Griechische  Palœo- 
graphie.  Leipzig,  187g,  p.  272. 

2.  Toutes  ces  particularités  seront  peut-être  signalées  dans  le  travail  que  M.  V.  a 
promis  sur  les  mss.  d'Aristophane  :  disputatione  de  universa  librorum  Aristopha- 
niorum  ratione  in  aliud  tempus  reservata.  Préface  des  Chevaliers,  p.  VI 

3.  Nous  avons  collationné  de  la  pièce  des  Grenouilles  les  vers  1-100  et  324-370. 


d'histoire  kt  dk  uttrratukk  7 

et  la  richesse  de  l'apparat  critique  ;  elle  a  un  autre  mérite,  moins  impor- 
tant sans  doute,  mais  qui  ne  doit  pas  être  passé  sous  silence.  M.  V.  ne 
s'est  pas  contenté  de  nous  faire  connaître  la  leçon  des  manuscrits,  il  a 
aussi  payé  de  sa  personne  et  essayé  d'améliorer  lui-même  le  texte.  Quel- 
ques-unes des  conjectures  qu'il  propose  nous  paraissent  acceptables, 
la  plupart  sont  ingénieuses,  nous  en  citerons  quelques-unes  :  207, 
/,uy.yo6aTpaxwv  au  lieu  de  (Saxpaxtov  /.Okvwv  (Bothe  avait  déjà  proposé 
(3axpaxo>tôxv<i>v,  ce  qui  est  plus  voisin  de  la  leçon  des  mss.).  —  405,  xat  10 
au  lieu  de  xcvîe  tov.  —  718,  toùç  zaXoùç  y.al  xoùç  %ay.oûç  au  lieu  de  toùç 
xaXoûç  ts  y.aYa6où;  (Meineke  avait  proposé  xoùç  xaxcuç  -ce  ttdtyaôoùç).  — 
101 1,  p.oxOy]poùç  ToûaS';  R  et  A  ont  po/ÔYjpcùç,  V.  jjlo^Oyj pcrépcuç  x',  V  et  M 
[j,oxO'/]poTaTCUç,.  —  i3oi,  Tcopvôv  ^sXwv  au  lieu  de  nopviBtwv.  La  conjecture 
du  v.  i5  est  très  ingénieuse  : 

sxsuy]  tîo'x'  et  cpépouatv  èv  xw[i.<i)8ta  ; 
Il  y  a  cependant  un  enchevêtrement  de  deux  propositions  commençant 
toutes  deux  par  et  (etrcep  1 3  et  et  i5)  qui  n'est  pas  d'un  bon  effet.  Ce 
vers  a  été  considéré  comme  interpolé  et  avec  raison,  à  ce  qu'il  semble. 
Souhaitons  en  terminant  que  M.  Velsen  poursuive  l'œuvre  com- 
mencée :  il  rend  un  service  signalé  à  tous  les  amis  d'Aristophane, 
c'est-à-dire  à  tous  ceux  qui  s'occupent  de  l'antiquité  classique.  Espérons 
que  les  retards,  qui  nous  ont  fait  attendre  les  nouveaux  volumes,  ne  se 
reproduiront  pas,  et  que  les  comédies,  qui  nous  manquent  encore, 
viendront  toutes  au  jour  chacune  à  son  temps  et  à  son  heure.  C'est  par 
ce  souhait  que  nous  avons  commencé,  c'est  aussi  par  ce  souhait  que  nous 
voulons  terminer  ce  compte-rendu. 

Albert  Martin. 
.3JDBX3  ie  t92imu< 

126.  —  V.  Jagic.  Speclmiua  lingute  palaeslovenicse.  Un  vol.  in-86  de  147  p. 
Saint-Pétersbourg,  1882.  Imprimerie  de  l'Académie  des  sciences. 

Le  recueil  que  nous  offre  M.  Jagic  est  évidemment  un  manuel  d'en- 
seignement; l'auteur  a  voulu  réunir  dans  une  chrestomathie  portative  et 
peu  coûteuse  les  textes  les  plus  importants  pour  l'étude  de  la  langue 
slavonne  sous  sa  forme  la  plus  ancienne  et  la  plus  pure.  Ce  petit  recueil 
est  plutôt  le  livre  du  maître  que  celui  de  l'élève;  il  ne  donne  aucun  ren- 
seignement chronologique  sur  les  textes  qu'il  renferme,  aucun  commen- 
taire. Il  se  contente  de  signaler  les  variantes.  Une  bonne  partie  des 
morceaux  est  imprimée  en  caractères  glagolitiques;  c'est  là  une  innova- 
tion utile;  car  les  chrestomathies  glagolitiques  sont  rares  et  les  étudiants 
—  je  parle  des  étudiants  russes,  —  n'ont  guère  l'occasion  de  s'exercer  à 
la  lecture  de  cet  alphabet  difficile  '.'Un  index  slavon  gréco-latin  accom- 

1.  M.  Miklosich  n'a  pas  osé  imprimer  en  glagolitique  les  textes  qui  accompagnent 
sa  Formenlehre.  «  Dièse  stûcke,  dit-il,  in  der  urschrift  abdrucken  zu  lassen,  davon 
hielt  mich  die  besorgniss  zuruck,  sie  mœchten  dann  nicht  gelesen  werden.  » 


HKVUK    CRITIQUE 


pagne  ce  recueil;  l'exécution  typographique  en  est  remarquable;  mais  il 
serait  à  désirer  qu'un  nouveau  tirage  fût  fait  sur  un  papier  plus  solide, 
moins  transparent  et  collé  autant  que  possible. 

L.  L. 


127.  —  Fansts  Leben,  von  Georg  Rudolf  Widmann,  herausgegeben  von  Adelbert 
von  Keller  (i46ste  Publication  des  Litterarischen  Vereins  in  Stuttgart  [Tûbin- 
gen]).  Tûbingen.  1880,  in-8°,  737  p.  —  Prix  :  20  mark  l. 

Tous  les  admirateurs  et  amis  de  Goethe  seront  reconnaissants  a 
M.  Adalbert  de  Keller  d'avoir  reproduit  dans  une  des  publications  du 
Litterarischer  Verein  de  Stuttgart-Tubingue  le  remaniement  que 
Nicolas  Pfitzer  fit  paraître  en  1674,  à  Nuremberg,  chez  Endter,  du  Faust 
de  George  Rod.  Widmann  [Das  àrgerliche  Leben  und  schreckliche 
Ende  dess  viel-berùchtigten  Ert\-Schwar\kunstlers  Johannis  Fausti, 
erstlich,  vor  vielen  Jahren,  fleissig  beschrieben,  von  G.  R.  Widmann, 
iet\o,  au/s  neue  ùbersehen,  und  so  wol  mit  neuen  Erinnerungen,  als 
nachdencklichen  Fragen  und  Geschichten,  der  heutigen  bosen  Welt,  \ur 
Warnung,  vermehret,  nebst  vorangefilgtem  Bericht  Conradi  Wolff  : 
Plat^ii,  weiland  der  heiligen  Schrifft  Doctorens ,  von  der  greulichen 
Zauberey-Sùnde  ;  und  einem  Anhange,  von  den Lapponischen  Wahrsa- 
ger-Pauken,  wie  auch  sonst  et  lichen  \aubrischen  Geschichten).  Il  est  cer- 
tain que  Gœthe  et  le  peintre  Mûller  ont  connu  l'œuvre  de  Widmann  et  lui 
ont  emprunté  quelques  traits.  M.  A.  de  Keller  fait,  à  la  fin  du  volume,  de 
très  brefs  rapprochements  entre  le  Faust  de  Widmann  et  celui  de  Gœthe 
(pp.  145,439,606),  mais  sans  les  faire  tous,  parce  qu'il  se  réserve  de  trai- 
ter plus  amplement  le  sujet,  et  de  citer  ailleurs  d'autres  passages  du 
Faust  de  Gœthe  qui  rappellent  le  Faust  de  Widmann  mot  pour  mot 
[welche  wortlich  an  unser  Buch  anklingen,  p.  728).  On  remarquera 
surtout  (p.  439)  le  passage  où  chaque  buveur,  croyant  saisir  le  raisin,  et 
levant  son  couteau,  s'aperçoit  soudain  qu'il  tient  dans  sa  main  le  nez  de 
son  voisin  2.  M.  A.  de  Keller  a  reproduit  le  texte  avec  tout  le  soin  et 
toute  l'exactitude  scrupuleuse  qu'on  lui  connaît;  il  n'a  rien  changé  à  la 
ponctuation  et  à  Torthographe  de  l'édition  de  1674,  sauf  dans  quelques 
cas  où  il  suffisait  de  faire  une  très  légère  modification  pour  rendre  le 
texte  plus  clair.  Le  volume,  comme  toutes  les  publications  du  Littera- 
rischer Verein,  est  beau  et  très  nettement  imprimé. 

A.  C. 

1.  Tout  exemplaire  des  publications  du  Litterarischer  Verein  de  Stuttgart  coûte, 
pris  isolement,  20  mark;  mais,  en  s'abonnant  pour  un  an,  également  à  20  mark,  on 
reçoit  un  exemplaire  de  toutes  les  publications  du  Verein  parues  dans  l'année  de 
l'abonnement.  Rappelons  encore  que  le  siège  de  l'administration  du  Verein  est  à 
Tûbingen,  et  non  à  Stuttgart. 

2.  Voir  la  scène  de  la  cave  d'Auerbach;  cp.  aussi,  p.  140,  le  passage  où  l'esprit  se 
déclare  le  fidèle  serviteur  de  Faust. 


0  HISTOIKK    tir     DE    l.UTÊKATURK  9 

128.  —  IVotes    critiques   et    biographiques    sur  Rotrou,   par    M.   Léonce 
Person.  Paris,  Cerf.  1882,  in-8°. 

• 

Voici  une  intéressante  brochure,  qui,  dans  les  quarante-quatre  pages 
dont  elle  se  compose,  contient  plus  de  faits  curieux  qu'on  n'en  trouve 
quelquefois  dans  de  gros  volumes. 

Fort  économe  de  phrases  inutiles,  l'auteur  de  ce  travail,  au  lieu  de  ré- 
péter pour  la  centième  fois  ce  que  tout  le  monde  sait,  précise  les  points 
incertains  et  réunit  quelques  documents  nouveaux. 

D'ordinaire  on  fixe  la  naissance  de  Rotrou  au  21  août  1609  et  sa 
mort  au  28  juin  i65o.  Ces  dates  ne  sont  point  rigoureusement 
exactes;  ce  sont  celles  du  baptême  du  poète  et  de  son  inhumation. 
Comme  il  mourut  de  la  peste,  son  enterrement  a  dû  suivre  sa  mort  de 
très  près,  mais,  quant  au  baptême,  il  est  bien  probable  qu'il  est  posté- 
rieur de  plusieurs  jours  à  la  naissance. 

M.  Léonce  Person  écarte  avec  une  vigilance  fort  judicieuse  tout  do- 
cument qui  n'est  pas  d'une  authenticité  incontestable.  Il  en  est  du  reste 
plusieurs,  de  fabrication  récente,  dont  la  fausseté  n'était  pas  fort  difficile 
à  établir. 

Tel  est,  entre  autres,  un  prétendu  autographe  adresse,  dit-on,  par  Ro- 
trou à  son  frère,  et  où  se  trouve  ce  beau  passage  si  connu  :  «  Les  clo- 
ches sonnent  pour  la  vingt-deuxième  personne  qui  est  morte  aujour- 
d^ui.  Ce  sera  pour  moi  quand  il  plaira  à  Dieu.  »  Le  faussaire  a 
évidemment  copié  cette  lettre  dans  un  Dictionnaire  historique  publié 
en  1822,  mais  ce  texte  est  lui-même  supposé  à  l'exception  de  ce  que 
nous  venons  d'en  citer.  Ce  court  fragment,  qui  seul  paraît  incontesta- 
blement de  Rotrou,  se  lit,  dès  1728,  dans  une  notice  des  plus  exactes,  in- 
sérée dans  les  Singularités  historiques  de  D.  Liron,  et  rédigée  à  l'aide  de 
renseignements  fournis  par  Pierre  de  Rotrou  de  Saudreville,  frère  du 
poète.  Ce  morceau  y  est  rapporté  comme  extrait  d'une  lettre  de  Rotrou 
adressée  par  lui,  non  à  ce  frère,  comme  on  l'a  prétendu  depuis,  mais  à 
Mmfi  de  Clermont  d'Antraigue,  qui  lui  avait  proposé  de  venir,  pendant 
Tépidémie,  habiter  son  château  situé  à  une  lieue  de  Dreux. 

Du  reste,  les  documents  apocryphes  relatifs  à  Rotrou  que  M.  P.  a 
signalés  ne  sont  pas  les  seuls.  On  a,  par  exemple,  beaucoup  parlé,  il  y  a 
quelques  années,  d'une  fausse  lettre  de  Corneille  à  ce  poète.  L'hospita- 
lité fastueuse  qu'elle  a  reçue  bien  mal  à  propos  dans  les  vitrines  du 
British  Muséum  lui  avait  valu  une  grande  notoriété,  et  même,  auprès 
de  quelques  personnes,  une  autorité  des  moins  justifiées.  Corneille  y 
manifeste  la  crainte  que  l'Académie  «  se  laisse  influencer  »  par  le  cardi- 
nal de  Richelieu.  Ce  néologisme  aurait  dû  suffire  pour  découvrir  la 
fraude,  mais,  comme  elle  n'est  pas  encore  évidente  pour  tous,  M.  P. 
aurait  dû  la  signaler. 

Rotrou  n'est  pas  un  créateur  ;  il  a  surtout  transporté  sur  la  scène 
française  des  pièces  habilement  imitées  des  littératures  anciennes  ou 


10  RKVUK    CRIllQtlh 

étrangères.  On  Pavait  constaté  pour  beaucoup  d'ouvrages;  M.  P.  ajoute 
à  la  liste  des  emprunts  du  poète  :  Les  deux  pucelles,  dont  le  point  de 
départ  est  une  nouvelle  de  Cervantes,  las  dos  Doncellas  et  la  Bague  de 
l'oubli,  tirée  de  la  Sortija  del  olvido  de  Lope  de  Vega  ;  enfin,  ce  qui 
est  plus  important,  il  constate  que  le  Saint -Gewst,  toujours  cité  comme 
l'œuvre  la  plus  originale  et  la  plus  personnelle  de  Rotrou,  est  égale- 
ment imité  de  Lope,  et  que,  beaucoup  plus  anciennement,  cette  légende 
avait  inspiré  à  nos  vieux  auteurs  dramatiques  un  mystère  de  Saint- 
Genis. 

M.  P.  nous  apprend  qu'il  l'a  «  fait  copier  ».  Si  c'est  avec  l'intention 
de  le  publier  quelque  jour,  il  fera  bien  de  revoir  cette  copie  avec  soin, 
car  les  quelques  vers  qu'il  a  cités  sont  remplis  de  fautes  de  toutes  sortes. 
Je  pourrais  le  prouver  par  de  nombreux  exemples,  je  me  contenterai  du 
suivant  :  Genis  voulant  démontrer  la  Trinité  à  l'empereur,  à  l'aide  des 
arguments  habituels  du  moyen  âge,  lui  indique  les  diverses  «  choses  » 
qu'on  peut  remarquer  dans  une  pomme  bien  qu'elle  demeure  une  : 

La  première,  c'est  la  colleur, 

La  seconde,  si  est  loudeur, 

La  tierce,  c'est  la  saveur  bonne, 

La  copie  ne  respectant  ni  le  sens,  ni  même  la  mesure  du  vers,  donne,  au 
lieu  de  loudeur  (l'odeur),  «  la  lourdeur  ». 

M.  P.  n'a  pas  seulement  indiqué  les  sources  des  œuvres  de  Rotrou;  ri 
s'est  aussi  préoccupé  des  imitations  qu'on  en  a  faites.  «  Feu  M.  Edouard 
Fournier,  dit-il,  nous  apprend  que  le  spirituel  Carmouche  a  tiré  de 
Y  Hypocondriaque  de  Rotrou  un  de  ses  proverbes  les  plus  amusants. 
Voilà  encore  une  découverte  à  faire  :  pour  notre  compte,  nous  n'avons 
rien  trouvé  dans  les  œuvres  de  Carmouche  qui  rappelât  de  près  ou  de 
loin  V Hypocondriaque  de  Rotrou,  mais  l'indication  d'Edouard  Four- 
nier mérite  d'attirer  l'attention.  »  Nous  n'avons  pas  poursuivi  cette  re- 
cherche, mais  nous  soumettons  à  l'auteur  une  conjecture,  qui  nous 
semble  vraisemblable  et  qui  expliquerait  son  insuccès.  Jamais  Carmou- 
che, auteur  de  vaudevilles,  n'a  fait  de  proverbes,  il  me  semble  donc  pro- 
bable qu'il  y  a  une  coquille  dans  l'article  cité  de  la  Patrie,  et  qu'au  lieu 
du  nom  de  Carmouche  il  faut  lire  celui  d'un  très  célèbre  et  surtout  très 
fécond  auteur  de  proverbes  :  Carmontelle. 

M.  Léonce  Person  ne  s'est  pas  contenté  de  réunir  des  faits  nouveaux, 
il  a  recueilli  un  sonnet  de  Rotrou,  placé  en  tête  de  la  Coutume  de 
Châteauneuf  de  Du  Lorens  et  qu'aucun  bibliographe  n'avait  encore 
signalé.  C'est  dire  combien  cet  opuscule  sera  important  à  consulter 
pour  tous  ceux  qui,  à  l'avenir,  s'occuperont  de  l'ami  et  du  rival  de  Cor- 
neille. 

Ch.  Mabty-La veaux. 


o'histoirk   kt   DE  LITTÉRATURE  I  1 

J2Q.  Kllnger  lo  der  Slurm-nnd  Drangperlode,  dargestellt  von  M.  Rie- 

ger.  Mit  vielen  Briefen.  Darmstadt,  Arnold  Bergstrsesser.  1880,  in-8°,  xn  et  440  p. 
—  Prix  :  8  m.  60. 

On  attendait  depuis  longtemps  avec  impatience  l'ouvrage  de  M.  Rie- 
ger  sur  Klinger  '.  A  la  nouvelle  que  M.  R.  préparait  une  biographie  de 
l'auteur  des  Jumeaux,  M.  Weinhold,  qui  avait  commencé  le  même  tra- 
vail, l'abandonnait  aussitôt  et  envoyait  à  M.  R.  les  matériaux  qu'il  avait 
rassemblés.  M.  R.  est  le  petit-neveu  de  Klinger  2;  il  a  eu  entre' les  mains 
une  foule  de  documents  relatifs  à  son  grand-oncle;  et,  quoique  sa  mère, 
dont  il  invoque  souvent  le  témoignage,  n'ait  jamais  vu  Klinger,  il  a  pu 
parler  du  poète  d'après  de  précieuses  traditions  de  famille.  L'ouvrage 
aura  deux  volumes;  le  premier,  paru  il  y  a  près  de  deux  ans  3,  est  con- 
sacré à  la  vie  et  aux  œuvres  de  Klinger  durant  la  période  d'orage. 

M.  R.  expose  dans  le  premier  chapitre  de  son  volume  la  jeunesse  et 
l'enfance  de  Klinger  à  Francfort.  Klinger  est  né  le  17  février  1752  dans 
la  même  ville  que  Gœthe;  son  père  était  Konstabler  ou  officier  de  police, 
il  mourut  en  1760;  sa  veuve,  chargée  de  trois  enfants  et  d'une  vieille 
mère,  se  fit  blanchisseuse;  au  temps  de  la  foire,  elle  vendait  des  pierres  à 
feu  et  des  billes.  M.  R.  fait  justice  des  légendes  qu'on  a  racontées  sur  l'en- 
fance de  Klinger;  ce  qui  est  sûr,  c'est  que  le  jeune  Maximilien  eut  des 
protecteurs  qui  le  firent  entrer  au  gymnase  de  Francfort  et  qu'il  trouva 
sur  les  bancs  de  sa  classe  un  écolier  plus  misérable  que  lui-même,  un 
orphelin,  Authâus,  qui  devint  son  ami  et  son  protégé.  Toutefois  la  pau- 
vreté des  Klinger  était  extrême,  et  Maximilien  dut  s'engager  dans  la 
troupe  des  Currendfehuler  qui  chantaient  des  cantiques  aux  enterre- 
ments ;  en  même  temps,  il  remplissait  au  gymnase  TorEce  de  calefactor 
on,  comme  on  dit  dans  nos  lycées,  de  chauffeur,  et  avait,  en  conséquence, 
une  chambrette  dans  l'établissement;  c'est  ainsi  qu'il  n'y  a  pas  long- 
temps encore  le  tapin  de  nos  collèges  était  toujours  un  boursier.  Enfin, 
Klinger  donnait  des  leçons  particulières,  afin  d'amasser  le  petit  pécule 
nécessaire  à  son  entretien  pendant  les  futures  années  d'université.  En 
1772,  il  quitta  le  gymnase,  mais  ce  n'est  que  le  16  avril  1774  qu'il  se  fit 
inscrire  comme  étudiant  à  la  faculté  de  droit  de  Giessen. 

De  1772a  1774,  il  fréquenta  Kayser,  H.  L.Wagner,  Goethe,  etc.; 
toute  cette  jeunesse  était  unie  par  la  commune  admiration  de  Shaks- 
peare,  tous  étaient  shakspearefest ;  c'est,  dit-on,  dans  la  chambre  de 
Klinger  que  fut  écrite  et  récitée  la  «  farce  »  de  Gœthe,  Dieux,  héros  et 
Wieland.  Mais,  selon  M.  R.,  Klinger  avait  déjà  connu  Gœthe  dans  son 
enfance  et  joué  avec  lui  ;  les  vers  connus  an  diesem  Brunnen  hast  auch 
du  gespielt  et  eine  Schwelle  hiess  ins  Leben,  etc.,  lui  paraissent  prou- 

1.  On  sait  que  Klinger  est  un  des  dramaturges  les  plus  violents  de  la  période  d'o- 
rage. C'est  à  lui  que  cette  période  doit  son  nom;  Sturm  und  Dr  an  g  est  le  titre  d'un 
drame  de  Klinger. 

2.  Il  est  le  petit-fils  d'Agnès  Klinger. 

3.  Nous  ne  l'avons  reçu  de  l'éditeur  qu'à  la  fin  de  1881. 


12  REVUE    CR1TIQUK 

ver  que  la  famille  de  Klinger  a  demeuré  quelque  temps  dans  le  voisinage 
de  celle  de  Goethe  (dans  le  bâtiment  que  le  conseiller  Gœthe  fit  abattre 
en  1755);  et  Klinger  ne  dit-il  pas  qu'il  a  passé  bien  des  heures  auprès  de 
Mme  Gœthe  (Frau  Aja)  cloué  sur  une  chaise  et  écoutant  des  contes? 

Le  deuxième  chapitre  du  livre  est  intitulé  Giessen.  M.  R.  y  raconte 
la  vie  solitaire  que  menait  Klinger,  sa  liaison  avec.Hôpfner,  à  qui  Gœ- 
the l'avait  recommandé  et  qui  lui  offrit  une  chambre  dans  sa  maison, 
son  amitié  pour  Schleiermacher,  le  futur  fondateur  du  musée  de  Darm- 
stadt,  la  passion  sentimentale  qu'avait  vouée  Albertine  de  Grûn  au  jeune 
étudiant,  les  visites  que  firent  au  dramaturge  déjà  célèbre  —  au  rival  de 
Lenz  et  de  Gœthe,  —  les  Stolberg,  F.  H.  Jacobi,  Miller,  Boie.  M.  R. 
analyse  longuement,  en  citant  les  jugements  des  critiques  de  l'époque, 
les  drames  que  Klinger  composa  durant  son  séjour  à  Giessen  :  Otto,  das 
leidende  Weib,  Donna  Viola,  Die  Zwillinge  (où  il  aurait  fallu  citer, 
au  moins  en  note,  l'opinion  d'Erich  Schmidt,  adoptée  par  M.  R.  An\ei- 
ger,  1877,  p.  199),  Pyrrhus,  die  neue  Arria,  Simsone  Grisaldo.  Au 
bout  de  deux  ans  ',  Klinger,  brouillé  avec  Hôpfner,  quitta  Giessen  et  se 
rendit  à  Weimar  pour  y  tenter  la  fortune;  l'éclatante  faveur  que  Gœthe 
avait  trouvée  auprès  du  grand-duc  attirait  tous  les  «  génies  »  de  l'épo- 
que. Mais  Klinger  se  rendit  impossible;  il  dut  partir;  M.  R.  raconte 
avec  grand  détail  cette  déconvenue  du  poète,  ses  relations  avec  l1  «  apô- 
tre »  Kaufmann,  l'impression  que  produisirent  sur  la  cour  de  Wei- 
mar et  sur  Gœthe  ses  prétentions  excessives  et  ce  qu'on  appelait  alors  le 
genialisches  Treiben,  etc.  La  vie  de  Klinger,  après  son  départ  de  Wei- 
mar, fut  semée  d'aventures  ;  il  suivit,  en  qualité  de  «  dramaturge  »,  la 
troupe  d'acteurs  de  Seyler  à  Dresde  et  à  Mannheim  ;  puis  il  alla  passer 
quelque  temps  à  Dusseldorf  chez  Jacobi,  revint  à  Francfort,  et  accepta 
l'hospitalité  que  le  beau-frère  de  Gœthe,  G.  Schlosser,  lui  offrait  à  Em- 
mendingen.  A  ce  moment  éclatait  la  guerre  de  la  succession  de  Bavière; 
Klinger  s'engagea  dans  un  corps  de  volontaires  ;  il  fut  fait  lieutenant  ; 
il  rêvait  déjà  un  brillant  avenir  militaire;  mais  la  campagne  fut  courte; 
Klinger  ne  combattit  même  pas  et  fut  congédié.  Enfin,  après  avoir 
mené  une  existence  vagabonde  et  couru  de  mécompte  en  mécompte  et 
de  déception  en  déception,  il  obtint,  par  l'entremise  de  Schlosser  et  à  la 
recommandation  du  duc  Frédéric-Eugène  de  Montbéliard,  un  brevet 
de  lieutenant  dans  l'armée  russe  ;  il  partit  pour  Pétersbourg  en  septem- 
bre 1780.  Son  temps  d'épreuves  était  fini  ;  le  bouillant  dramaturge  fera 
place  au  stoïque  romancier;  le  misanthrope  se  pliera  aux  exigences  du 
monde;  après  bien  des  aigreurs  et  des  souffrances,  l'aventurier  va  de- 
venir général  et  l'un  des  plus  hauts  fonctionnaires  de  la  Russie. 

Chemin  faisant,  M.  R.  apprécie  les  œuvres  de  Klinger  durant  cette 


1.  L'ouvrage  comprend  six  chapitres  :  I.  Kindheit  und  Jugend  in  Frankfurt.  II. 
Giessen.  III.  Weimar.  IV.  Bei  Seyler.  V.  Bei  Schlosser  und  im  Kriege.  VI.  Nach 
dem  Kriege,  Zurich,  Emmendingen  und  Basel. 


0  HISTOIRK    Kl     UK    LITTÉRATURE. 


l3 


partie  de  sa  vie  :  Sturm  und  Drang,  Stilpo,  Orpheus  (où  il  montre  fort 
bien  l'imitation  de  Crebillon  et  de  Wieland),  Plimplamplasko  (où  il  re- 
jette la  collaboration  de  Pfeffel  et  doute  de  celle  de  Lavater),  etc.;  il  fait 
une  étude  approfondie  de  chacune  de  ces  productions,  en  expose  l'ori- 
gine et  le  sujet  ;  quiconque  voudra  connaître  Klinger  et  la  période  à  la- 
quelle il  a  donné  et  le  nom  et  le  mot  d'ordre,  devra  recourir  à  ces  ana- 
lyses si  consciencieuses  et  si  étendues,  'mil. 

Quelques  esprits  difficiles  pourront  reprocher  à  M.  R.  d'être  parfois 
trop  long  ;  on  ne  lui  en  voudrait  pas  d'avoir  glissé  par  instants  sur  cer- 
taines circonstances,  d'avoir  donné  à  plusieurs  épisodes  moins  de  déve- 
loppements, d'avoir  attribué  à  de  menus  détails  moins  d'importance. 
On  lui  aurait  su  gré  d'apprécier  l'Orphée  en  une  seule  fois,  et  non  par- 
tie par  partie,  selon  l'ordre  chronologique.  Et  pourtant,  M.  R.  a  eu 
raison  de  ne  pas  séparer  la  vie  et  les  œuvres  de  Klinger,  d'exposer  les 
circonstances  qui  ont  influé  sur  les  écrits  du  poète,  de  suivre  Klinger 
pas  à  pas  dans  les  diverses  situations  d'esprit  d'où  naissaient  ses  poésies 
et  ses  drames;  presque  tout  ce  que  Klinger  a  composé  a,  comme  dit 
M.  R.  à  propos  de  Simsone  Grisaldo,  une  ce  valeur  subjective  »  (p.  141); 
et  n'est-ce  pas  pour  gagner  le  prix  proposé  par  Schroder  qu'il  a  composé 
les  Jumeaux?  On  pourra  également  chicaner  M.  R.  sur  quelques  juge- 
ments un  peu  exagérés;  M.  R.  n'est  pas  impunément  le  descendant  et 
le  biographe  de  Klinger  ;  il  est,  ce  nous  semble,  quelquefois  trop  indul- 
gent pour  son  grand-oncle,  et  il  donne  par  endroits  au  héros  de  son  li- 
vre une  louange  excessive.  Il  a  tort  de  regarder  l'action  d'Otto  comme 
plus  dramatique  et  plus  tragique  que  celle  de  3ôt%  de  Berlichingen 
(p.  42),  et,  si  dur  que  lui  semble  le  jugement  des  deux  Lessing  sur  la 
Neue  Arria,  il  est  celui  de  tous  les  critiques  (pp.  125-128).  Mais  après 
tout,  c'est  précisément  parce  que  Klinger  était  sympathique  à  M.  R.  que 
nous  possédons  cette  belle  biographie  ;  l'auteur  a  traité  dignement  son 
sujet  parce  qu'il  l'avait  abordé  avec  amour  et  un  respect  presque  filial. 
Dirons-nous  encore  que  dans  un  livre  où  l'auteur  s'écarte  quelquefois 
de  son  sujet  proprement  dit,  où  il  nous  présente  assez  longuement  les 
amis  de  Klinger,  où  il  nous  donne  de  minutieux  détails  sur  la  troupe  de 
Seyler,  on  s'étonne  de  ne  pas  trouver  une  peinture  plus  développée  des 
mœurs  des  étudiants  deGiessen?  Quoique  Klinger  fît  profession  de  «  dé- 
tester la  vie  académique  »,  il  est  certain  que  la  grossièreté  et  la  brutalité 
presque  proverbiales  des  étudiants  de  Giessen  n'ont  pas  dû  res  ter  sans 
influence  sur  son  caractère  déjà  rude  et  fougueux  ;  une  pièce  du  temps 
de  Gottsched  représente  l'étudiant  d'Iéna  sous  le  nom  de  Ungestumm  ; 
l'étudiant  de  Giessen,  et  Klinger  lui-même  à  cette  époque  de  sa  vie, 
méritent  ce  nom-.  Pourrait-on  aussi  faire  observer  à  M.  R.  qu'il  n'a  pas 
marqué  en  traits  assez  précis  et  assez  forts  le  caractère  général  de  la  lit- 
térature du  temps;  qu'il  n'a  pas  mis  suffisamment  en  relief  le  rôle  de 
Klinger  dans  l'ensemble  de  cette  singulière  époque  littéraire;  qu'il  n'in- 
siste pas  sur  la  langue  de  Klinger,  langue  forte  et  drue,  assez  semblable 


14  KKVUK    CRITIQUE 

au  personnage  lui-même,  qui,  porté  aux  extrêmes,  ne  voit  dans  tous 
ceux  qui  l'entourent  qu'un  grand  homme  ou  un  imbécile  (ein  herrli- 
cher  Junge  oder  ein  Scheisskerl),  comme  dit  M.  R.  (p.  168).  Il  est  vrai 
que,  là  encore,  M.  R.  pourrait  objecter  qu'il  n'a  voulu  étudier  spéciale- 
ment que  la  vie  et  les  œuvres  de  Klinger  et  qu'il  a  laissé  aux  histoires 
générales  de  la  littérature  ou  à  MM.  Erich  Schmidt  et  O.  Erdmann  la 
tâche  de  marquer  la  place  de  Klinger  dans  la  période  d'orage. 

Mais  ce  volume,  d'ailleurs  magnifique  d'exécution,  orné  d'un  portrait 
de  Klinger  d'après  un  dessin  au  crayon  de  Gœthe  (janvier  1775),  est  si 
instructif,  il  renferme  tant  d'analyses  pénétrantes  et  complètes  (du  reste 
difficiles  à  faire,  car  il  y  a  des  pièces  de  Klinger  qui  sont  un  véritable 
fouillis),  tant  d'aperçus  nouveaux,  tant  d'informations  inédites  qu'il 
vaut  mieux  exprimer  à  l'auteur  notre  reconnaissance  que  de  nous  attar- 
der à  de  menues  critiques.  On  ne  savait  pas  grand  chose,  dit  M.  R.  dans 
sa  préface,  de  la  vie  de  Klinger,  et  l'on  n'avait  pas  une  connaissance 
profonde  et  suivie  de  ses  œuvres  ;  grâce  aux  recherches  de  M.  R.,  grâce 
aux  résumés  et  aux  citations  qui  remplissent  son  premier  volume,  on 
connaîtra  désormais  la  jeunesse  si  tourmentée  du  poète  et  ses  œuvres  de- 
venues presque  inaccessibles.  Enfin,  l'appendice  du  volume  a  une  grande 
valeur;  mitvielen  Briefen,  dit  le  sous-titre  de  l'ouvrage;  c'est  dans  l'ap- 
pendice qu'on  trouve  ces  «  nombreuses  lettres  »  de  Klinger  ;  il  y  en  a  cin- 
quante-sept, dont  vingt-huit  adressées  à  Schleiermacher,  et  les  autres  à 
la  mère  et  aux  sœurs  de  Klinger,  au  peintre  Mûller,  etc.;  quinze  sont 
datées  de  Weimar.  A  ces  lettres  qui  forment,  selon  l'expression  de 
M.  R.,  tout  un  fond  de  matériaux  biographiques  et  qui  suffisaient  pour 
le  rendre  supérieur  à  quiconque  aurait  traité  le  même  sujet,  sont  jointes 
quatorze  lettres  du  compositeur  Kayser,  adressées  également  à  Schleier- 
macher. Il  ne  nous  reste  qu'à  souhaiter  à  M.  Rieger  le  prompt  et  heu- 
reux achèvement  de  sa  publication;  puissions-nous  avoir  bientôt  le  se- 
cond volume  qui  nous  représentera  Klinger  dans  la  pleine  force  de  son 
talent  et  «  dans  la  maturité  de  la  vie  »  fin  der  Reife  des  Lebens),  et  qui 
sera  plus  important,  plus  attachant  encore  que  son  aîné,  car  il  sera  con- 
sacré aux  meilleures  œuvres  de  Klinger,  à  ses  romans,  où,  selon  les 
mots  de  Gervinus  (IV,  663),  l'éternel  contraste  entre  l'idéal  et  le  monde, 
le  cœur  et  la  raison,  l'enthousiasme  et  le  sang-froid,  la  vertu  et  le  vice, 
le  poète  et  l'homme  du  monde,  l'ange  et  le  diable,  Dieu  et  la  bête,  a  oc- 
cupé le  poète  devenu  un  grave  penseur. 

A.  Chuquet. 

l3o.  —  Jei*I  und  !*:»•  •<•!>,  ein  Singspiel,  von  Gœthe,  in  der  ursprùnglichen 
"Gestalt  zum  ersten  Maie  hrsg.  Leipzig,  Veit.  1881,  in-8°,  xxxn  et  47  p.  —  Prix  : 
2  mark. 

..  ïoni'jî  fia 
M.  Arndt,  l'historien,  s'est  déjà  fait  connaître  comme  un  des  plus  dis- 
tingués des  Gœtheforscher  et  nous  avons  parlé  ici  même  de  la  belle  et 


O'HISTOIKK    KT    DR    LITTÉRATURfc  l5 

excellente  édition  qu'il  a  donnée  des  lettres  de  Gœthe  à  Auguste  de  Stol- 
berg.  x\vant  cette  publication,  il  avait  fait  paraître  la  première  rédaction 
de  l'opérette  Jeri  et  Bàtely  ;  il  a  eu,  cette  fois  encore,  la  modestie  de  ne 
pas  mettre  son  nom  en  tête  de  l'édition  ;  on  ne  le  trouvera  qu'à  la  fin  de 
Tintroduction.  Malgré  cette  discrétion,  M.  A.  n'échappera  pas  à  nos  élo- 
ges. On  lui  saura  le  plus  grand  gré  d'avoir  découvert  et  publié  avec  tant 
de  soin  et  dans  un  petit  volume  de  l'aspect  le  plus  coquet  l'idylle  drama- 
tique de  Gœthe  sous  sa  première  forme  '.  On  ne  connaissait  jusqu'ici 
Jeri  et  Bàtely  que  dans  la  rédaction  définitive  adoptée  par  Gœthe  en 
Italie  et  publiée  dans  l'édition  des  œuvres  complètes  en  huit  volumes 
(chez  Goschen);  la  première,  que  donne  aujourd'hui  M.  A.,  nous  sem- 
ble préférable;  elle  a  plus  de  fraîcheur  et  de  grâce;  on  y  trouve  tout  le 
charme  et  l'élan  d'une  production  de  premier  jet  ;  enfin,  elle  offre  de  gran- 
des différences  avec  la  seconde  ;  (la  jeune  fille  y  demeure,  non  pas  avec  son 
père,  mais  avec  sa  mère  et  beaucoup  d'endroits  que  Gœthe  a  depuis  mis  en 
prose,  sont  en  vers,  parce  qu'ils  étaient  destinés  à  être  chantés,  etc.)  M.  A. 
donne  dans  son  introduction  des  détails  intéressants  sur  la  composition 
de  Jeri  et  Bàtely,  sur  la  représentation  de  l'opérette  à  la  cour  de  Wei- 
mar,  sur  le  ms.  qui  renferme  cette  ire  version,  sur  les  variantes  qu'offre 
le  texte  jusqu'ici  connu  ;  il  s'élève  contre  les  critiques  qui  veulent  voir  à 
tout  prix  dans  Jeri  et  Bàtely  des  allusions  à  la  société  de  Weimar.  Cette 
publication  de  M.  Arndt  aura  été,  pour  parler  comme  l'éditeur,  un  don 
agréable  aux  amis  de  Gœthe  et  à  M.  Zarncke,  à  qui  elle  est  dédiée. 

C. 
iuoq  tttetB2rr)oe  il 

33}flio{  JfîOZ  ,13 

-  c  ' *  î  A*  P   *  - 
1 3 1 ,  —  Correspondance  diplomatique  du  baron  de  Staël-Holstein,  par 

M.  L.  Leouzon  le  Duc.  Hachette,  1881,  in-8°,  416  p. 

-02  'A  îôjnaid 

Ces  extraits  de  la  correspondance  du  baron  de  Staël  sont  fort  intéres- 
sants pour  l'histoire  intérieure  de  la  France  et  pour  l'histoire  des  rela- 
tions entre  la  France  et  la  Suède  de  1786  à  1792.  C'est  la  partie  princi- 
pale du  volume  (1  à  254).  Les  historiens  de  la  Révolution  y  trouveront 
nombre  de  notes  à  relever,  moins  sur  les  événements  mêmes,  qui  sont  en 
grande  partie  élucidés,  que  sur  les  impressions  des  contemporains  —  dont 
on  ne  saurait  jamais  assez  se  pénétrer  et  qu'on  a  trop  rarement  l'occasion 
de  saisir  sur  le  fait.  C'est  le  prix  des  correspondances  diplomatiques 
quand  elles  sont  bien  faites.  Celle  du  baron  de  Staël  est  remarquable.  Il 
était  merveilleusement  placé  pour  observer  et  pour  savoir.  Le  volume 
contient  un  court  résumé  (pp.  255  à  271)  des  deux  missions  de  Staël  à 
Paris  en  1793  et  1795.  Il  est  bien  regrettable  que  l'éditeur  n'ait  pas  pu 
(voir  p.  1 1)  nous  donner  la  correspondance  d'alors,  car  nous  sommes 
particulièrement  pauvres  en  témoignages  contemporains  sur  cette  pé- 

1.  Le  ms.  se  trouve  à  la  bibliothèque  de  Gotha. 


IÔ  KKVUK    CRITIQUE 

riode.  Les  extraits  s'arrêtent  précisément  au  moment  où  l'on  aurait  dé- 
siré les  voir  se  multiplier.  On  le  regrette  d'autant  plus  que  les  rapports 
de  Brinkman,  chargé  d'affaires  de  Suède  à  Paris  en  1799,  sont  remplis 
d'intérêt  :  c'est  la  partie  la  plus  neuve  du  volume,  et  l'on  y  voit,  par 
un  exemple  frappant,  quel  eût  été  le  prix  de  rapports  du  même  genre 
sur  le  Comité  de  salut  public  et  la  Convention. 

A   S 

■:.i  ?.u\n  chnoqàT  JQ£V£2  Sfflàm  à. 

■âis  lia  -  iio  vj32 , s  JxjBbnaj  3s  rçtà'mft 
•pi  sJ  .aiîaM  cl  û  a^Bnmléq  x  .. 
VARIÉTÉS 

■  >  aqfilè  ,c. 

La   «  Revue  de  l'extrême  Orient  »  ». 

rn  anu  «âiqB  bzJnozaB' 

De  toutes  les  études  orientales,  la  moins  répandue,  en  France,  est 
celle  de  l' Extrême-Orient.  Cette  immense  région  est  pourtant  intéres- 
sante à  bien  des  titres,  que  l'on  s'attache  à  son  histoire  intérieure  ou  que, 
pour  l'étudier,  on  se  place  au  point  de  vue  de  ses  relations  avec  le 
monde  indien  et  le  monde  musulman.  Depuis  quelques  années,  pour- 
tant, la  Chine,  le  Japon,  l'Indo-Chine  et  la  Malaisie  ont  été,  chez  nous, 
l'objet  de  publications  importantes  qui  commencent  à  éveiller  la  curio- 
sité de  nos  érudits.  La  création  de  la  Revue  *  que  nous  annonçons  nous 
paraît  répondre  à  un  véritable  besoin  et  le  nom  de  son  fondateur, 
M.  Henri  Cordier,  nous  est  un  sûr  garant  de  l'esprit  qui  animera  ce 
nouveau  recueil,  auquel  nous  souhaitons  longue  vie  et  prospérité. 

La  Revue  admet  dans  son  cadre  des  articles  de  fond,  des  mélanges,  un 
bulletin  bibliographique,  une  chronique,  des  questions  et  réponses  et 
enfin  une  bibliographie.  On  voit  qu'ici  encore  c'est  la  Revue  historique 
qui  a  servi  de  modèle  :  on  n'en  pouvait  choisir  de  meilleur. 

Le  premier  numéro  débute  par  une  statistique  des  sexes,  au  Japon, 
due  à  M.  Léon  Metchnikoff,  après  laquelle  vient  une  biographie  du  cé- 
lèbre sinologue  russe  Palladius.  Sous  le  titre  de  «  Documents  inédits 
pour  servir  à  l'histoire  ecclésiastique  de  l'Extrême-Orient,  »  M.  Cordier 
publie  ensuite  la  correspondance  du  P.  Foucquet  avec  le  cardinal  Gual- 
terio.  L'histoire  des  peuplades  de  la  Chine  orientale,  extraite  de  l'histoire 
de  la  dynastie  des  Han  postérieurs,  et  traduite  en  anglais  par  M.  A.  Wy- 
lie,  forme  une  importante  contribution  au  présent  fascicule.  M.  Moura 
nous  retrace,  après,  son  voyage  de  Phnom-Penh  à  Pursat,  en  compa- 
gnie du  roi  de  Cambodge,  et  décrit  la  pagode  d'Oudoug  ornée  de  pein- 
tures représentant  les  principaux  épisodes  de  la  vie  du  Buddha.  Vient 
enfin  le  commencement  d'une  liste,  dressée  par  M.  Cordier,  des  manus- 
crits relatifs  à  la  Chine  conservés  dans  les  bibliothèques  de  l'Europe. 

1.  Revue  de  l'extrême  Orient  publiée  sous  la  direction  de  M.  Henri  Cordier.  Tome 
premier,  n°  1,  janvier-février-mars.  Paris,  Ernest  Leroux,  1882.  ln-8. 


i)  nisroïKK   kt   ue  LirrKHATUHb  17 

Signalons,  dans  les  Mélanges,  un  article  étendu  de  M.  Gordier  sur  la 
presse  européenne  en  Chine,  et  la  traduction  du  traité  entre  la  Russie  et 
la  Chine,  concernant  le  rétablissement  de  l'autorité  chinoise  dans  le 
pays  d"Ili,  qui  était  occupé  depuis  1871  par  les  armées  russes.  M.  G.  De- 
véria  décrit  ensuite  un  ingénieux  procédé  d'estampage  usité  en  Chine  et 
qui  fournit  d'excellentes  reproductions  des  inscriptions  en  blanc  sur 
fond  noir.  Le  même  savant  répond,  plus  loin,  à  une  question  posée  dans 
la  China  Reviens  et  tendant  à  savoir  s'il  existe  des  Chinois  musulmans 
se  rendant  en  pèlerinage  à  la  Mekke.  La  réponse  est  affirmative,  et 
M.  Devéria  nous  donne,  en  outre,  d'après  une  relation  chinoise,  l'iti- 
néraire d'un  pèlerin  chinois,  étape  par  étape,  jusqu'à  Jérusalem  et  l'E- 
gypte. Nous  ferons  observer,  à  ce  propos,  que  les  noms  géographiques 
auraient  dû  être  transcrits  d'après  une  méthode  uniforme.  Ainsi  nous  ne 
voyons  pas  pourquoi  Y  ou  est  tantôt  orthographié  00,  tantôt  u  ;  pourquoi 
le  dj  est  transcrit  j,  sauf  dans  Chardjuy  (m  Tchârdjoûy),  etc. 

La  bibliographie  qui  termine  ce  premier  fascicule  nous  a  paru  très 
complète. 

G. 


CHRONIQUE 


FRANCE,  —  A  la  liste  des  collaborateurs  aux  Mélanges  d'érudition  classique 
dédiés  à  la  mémoire  de  Graux  (ci-dessus  n°  23,  p.  <±bb)  il  faut  ajouter  le  nom  de 
M.  Théodore  Mommsen,  qui  a  fait  parvenir  au  comité  un  manuscrit  intitulé  :  Officia- 
lium  et  militum  Romanorum  sepulcretum  Carthaginiense. 

—  M.  Jacques  Denis,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de  Caen  a  publié  dans  les 
Mémoires  de  l'Académie  Nationale  des  Sciences,  Arts  et  Belles-Lettres  de  Caen 
deux  études  sur  la  comédie  grecque,  dont  il  nous  adresse  des  tirages  à  part  (Caen , 
imprimerie  de  F.  Le  Blanc-Hardel,  in-8").  La  première  a  pour  titre  Comédie  moyenne 
(1881,  76  pages),  la  seconde  Comédie  nouvelle  (1882,  128  pages). 

—  L'éditeur  Léopold  Cerf  (Paris,  rue  de  Médicis,  i3)  entreprend  la  publication 
d'une  Nouvelle  collection  illustrée  à  un  franc  le  volume.  Trois  ouvrages  apparte- 
nant à  cette  collection  viennent  de  paraître,  ce  sont  :  i"  Le  siège  de  Belfort,  par 
L.  Dussieux,  professeur  honoraire  à  l'école  Saint-Cyr  (in -8°  i3o  p.).  L'auteur  s'est 
proposé  de  raconter  exactement  et  sans  parti-pris,  d'après  les  documents  français  et 
allemands,  l'histoire  de  ce  siège  mémorable;  il  fait  surtout  ressortir  comment  le  tir 
indirect  (dans  lequel  le  but  à  atteindre  échappe  à  la  vue  du  pointeur  qui  règle  son 
tir  sur  des  repères  fixés  avec  précision)  et  la  défense  des  positions  extérieures  con- 
tribuèrent à  prolonger  la  résistance  de  la  place;  il  montre  comment,  grâce  au  colo- 
nel Denfert,  Belfort  resta  à  la  France.  On  remarquera  dans  ce  volume  la  page  (i3) 
consacrée  au  premier  siège  de  Belfort  en  1814;  on  ne  connaît  d'ordinaire  que  le 
deuxième  siège,  de  181 5,  auquel  se  rattache  le  nom  de  Lecourbe.  M.  Dussieux  ra- 
conte le  siège  de  18 14  et  donne  le  résumé  des  états  de  service  du  premier  défenseur 
de  Belfort,  le  chef  de  bataillon  Jean  Legrand.  P.  1 10,  il  faut  lire  Teufelsgrube  et  non 
«  Teufelsgrub  ».  Parmi  les  gravures,  le  plan  de  la  ville  et  des  environs,  ainsi  que  le 


lO  KKVUK     CRIT1QUK" 

plan  de  la  région,  seront  utiles;  l'église,  la  place,  la  vue  prise  des  Barres,  La  Miotte 
sont  exactes;  la  gravure  qui  représente  Belfort  pendant  le  départ  des  Prussiens  est 
assez  grossière;  celle  qui  représente  Belfort  à  la  rentrée  des  Français,  aurait  pu  être 
laissée  de  côté.  Pourquoi,  à  la  dernière  page,  ne  pas  donner  plus  de  détails  sur  Den- 
fert;  pourquoi  ne  pas  nommer  les  départements  qui  l'envoyèrent  à  la  Chambre  et  ne 
pas  citer  exactement  le  jour  de  sa  mort? 

2°  Tableau  de  la  littérature  anglaise,  par  M.  Léon  Boucher,  professeur  à  la  Fa- 
culté des  lettres  de  Besançon.  (In-8°,  i5o.  p.)  Ce  Tableau  comprend  dix  chapitres  :  I. 
Les  origines,  Chaucer;  II.  Le  siècle  d'Elisabeth,  Spenser;  III.  Le  drame  anglais  et 
Shakspere;  I"V.  Le  xvie  siècle  :  Milton;  V.  La  Restauration  :  Dryden  ;  VI.  Le 
xvme  siècle  :  les  écrivains  de  la  reine  Anne  ;  VII.  Le  xvxn"  siècle  :  les  romanciers, 
la  critique,  l'histoire.  VIII.  Le  xviii"  siècle  :  Révolution  poétique,  Cowper  et  Burns  ; 
IV.  Le  xixe  siècle,  la  poésie  romantique;  X.  Le  xix"  siècle,  le  roman,  la  critique, 
l'essai.  Le  volume  se  termine  par  un  appendice  renfermant  des  notices  biblio- 
graphiques; nous  y  reviendrons  probablement;  mais  nous  pouvons  dire,  dès  à  pré- 
sent, que  ce  petit  livre,  sans  grandes  prétentions,  est  écrit  avec  beaucoup  d'agrément 
et  d'élégance,  qu'il  renferme  des  jugements  justes  et  fins  dans  leur  brièveté  et  qu'il 
mente  d  être  recommande  aux  élevés  de  nos  lycées. 

3°  Les  races  humaines,  par  M.  Abel  Hovelacque,  professeur  à  l'Ecole  d'anthropo- 
logie (in-8°,  160  p.).  —  Cette  collection  aura  sans  doute  un  grand  succès;  l'extrême 
modicité  du  prix  et  la  beauté  de  l'exécution  typographique  suffiraient  déjà  à  lui  as- 
surer de  nombreux  acheteurs.  L'éditeur  annonce,  pour  paraître  prochainement,  les 
volumes  suivants  :  L'Espagne  des  Goths  et  des  Arabes,  par  M.  Léon  Geley,  pro- 
fesseur au  lycée  de  Vanves;  Les  Basques  et  le  pays  basque,  par  M.  Julien  Vinson; 
L  Arménie  et  les  Arméniens,  par  M.  J.  A.  Gattevrias  ;  L'armée  romaine,  par  M.  Léon 
Fontaine,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de  Lyon;  La  monnaie,  histoire  de  For, 
de  l'argent  et  du  papier,  par  M.  A.  Dalsème;  Les  grandes  époques  du  commerce  de  la 
France,  par  M.  H.  Pigonneau,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de  Pans. 

ALLEMAGNE.  —  La  première  livraison  du  Dictionnaire  étymologique  de  la  lan- 
gue allemande  (Etymologisches  Wœrterbuch  der  deutschen  Sprache),  de  M.  Friedrich 
Kluge,  privat-docent  à  l'Université  de  Strasbourg,  vient  de  paraître  (Strasbourg, 
chez  Trûbner,  pp.  t-64);  elle  va  jusqu'au  mot  elf  inclusivement.  L'ouvrage  com- 
prendra, en  son  entier,  sept  à  huit  livraisons,  chacune  au  prix  de  1  mark  5o;  il  sera 
terminé  avant  la  fin  de  l'année  1882;  lors  même  qu'il  prendrait  un  plus  grand  dé- 
veloppement que  le  croit  l'éditeur,  le  prix  de  12  mark  (i5  francs)  ne  sera  pas  dé- 
passé. 

—  La  36e  assemblée  des  philologues  et  professeurs  allemands  (Philologen  und 
Schulmœnner)  aura  lieu  cette  année  à  Carlsruhe,  du  27  au  3o  septembre  (présidents 
MM.  Wendt,  de  Carlsruhe  et  Wachsmuth,  de  Heidelberg). 

—  La  collection  des  «  éditions  et  dissertations  sur  le  domaine  de  la  philologie 
romane  »  (Ausgaben  und  Abhandlungen  aus  dem  Gebiete  der  romanischen  Philologie), 
que  dirige  M.  Edm.  Stengel,  renfermera  dans  ses  prochains  fascicules  des  Etudes 
épiques  (L  Die  Chanson  des  Saxons  Johann  Bodels  in  ihrem  Verhœltnisse  \um  Ro- 
landsliede  und  %ur  Karlamagnussaga,  par  H.  Meyer;II.  Die  culturgeschichtlichen 
Momente  des  provençalischen  Romans  Flamenca,  par  F.  W.  Hermanni;  III.  Das 
Handschriftenverhœltniss  der  Chanson  de  Horn,  par  R.  Brede;  IV.  Das  Handschrif- 
tenverhœltniss der  Chanson  von  der  Belagerung  von  Barbastre,  par  A.  Gundlach  ;) 
des  «  Contributions  à  la  connaissance  de  la  poétique  et  de  la  littérature  provença- 
les »  (I.  Peire  Cardenals  Strophenbau  in  seinem  Verhœltniss  %u  dem  anderer  Troba- 
dors,  par  W.  Maus  ;  II.  Des  Manches  von  Montaudon  Dichtungen,  par  O.  Klein, 


D-H  ISTOIKE    KT    DK    LITTKRATUKK  19 

etc.),  et  des  «  Contributions  à  la  grammaire  française  et  provençale  »  (I.  Die  Flexion 
der  Substantiva  im  Rolandsliede,  par  B.  Schneider  ;  II.  Der  Infinitiv.  im  Proven^a- 
lischen  nach  den  Reimen  de?-  Trobadors,  par  A.  Fischer,  etc.) 

BULGARIE.  —  La  société  de  littérature  bulgare  qui  existait  avant  la  guerre  à 
Braïla  (Roumanie)  vient  de  se  reformer  à  Sofia.  Ses  mémoires  —  qui  renferment  des 
travaux  fort  intéressants  —  paraîtront  désormais  six  fois  par  an. 

DANEMARK.  —  M.  Kr.  Nyrop  va  publier  un  petit  livre  sur  l'étymologie  popu- 
laire en  danois.  (Copenhague,  Reitzel.) 

PORTUGAL.  —  Nous  avons  reçu  d'un  fidèle  ami  de  notre  revue,  M.  Bernardo 
Valentim  Moreira  de  Sa,  un  gros  volume,  contenant  des  morceaux  choisis  des  écri- 
vains français  à  l'usage  des  écoles  de  Portugal  [Selecta  france^a  para  uso  dos 
lyceus,  compilada,  annotada  e  com  numerosas  referencias  à  grammatica  francesa 
dos  Snrs.  J.  Eduardvon  Hafe  e  A.  Epiphanio  da  Silvas  Dias.  Porto,  Magalhâes  et 
Moniz.  In-8°,  vin  et  6oS  pp.)  Malgré  l'errata,  il  reste  encore  beaucoup  de  fautes 
d'impression;  il  nous  est  impossible  de  les  énumérer  toutes;  citons  seulement  la 
pièce  de  Theod.  de  Banville,  le  cimetière  (pp.  36o-36i)  où  nous  lisons  perfuiris, 
chouchés  et pervanches.  Signalons  encore  une  petite  erreur;  Duguet  (p.  44)  n'est  pas 
un  «  auteur  contemporain  ».  Mais  le  volume  de  M.  Moreira  de  Sa  est  bien  fait,  et 
nous  pensons  que  ses  nombreux  mérites  le  rendront  en  quelque  sorte  classique 
dans  les  lycées  du  Portugal.  Les  morceaux  sont  habilement  gradués;  l'élève,  en 
avançant  dans  la  lecture  de  l'ouvrage,  ira  insensiblement  du  facile  au  difficile.  Ces 
morceaux  offrent,  en  outre,  une  agréable  variété  ;  l'éditeur  du  recueil  a  su,  avec 
beaucoup  de  goût  et  d'adresse,  entremêler  la  prose  et  la  poésie;  on  passe  d'une  pièce 
de  vers  à  un  récit  historique,  d'une  narration  à  un  morceau  didactique,  etc. 
Ouvrons  le  volume  au  hasard;  pp.  39-43,  nous  trouvons  une  poésie  de  Joachim 
du  Bellay,  Contentement  passe  richesse;  Le  laiton,  de  E.  Dupuis;  Noël,  de  Théo- 
phile Gautier;  L'Histoire,  de  MM.  Dhombres-  et  Gabriel  Monod;  Les  deux 
voyageurs  de  Florian  ;  pp.  488-520,  voici  Le  défilé,  de  Coppée  ;  Un  mariage 
grec,  de  Victor  Langlois  ;  Le  sanglier,  de  Theod.  de  Banville;  Les  construc- 
teurs d'îles,  de  Pouchet  ;  La  fenaison,  d'Autran;  La  musique,  de  Victor  Cou- 
sin; un  petit  fragment  de  YEsther  de  Racine;  Le  foyer  domestique,  de  Jules 
Simon;  La  situation  du  travailleur  avant  la  Révolution  française,  de  Tarnier;  La 
mort  du  loup,  d'Alfred  de  Vigny;  Le  roi  de  Dahomey,  de  M.  de  Cherville;  Shakes- 
peare, de  M.  Paul  Stapfer;  Les  châteaux  en  Espagne,  de  Collin  d'Harleville; 
Les  proverbes,  de  M.  Michel  Bréal.  On  ne  peut  guère  imaginer,  dans  un  recueil  de 
morceaux  choisis,  une  plus  attrayante  diversité;  l'ouvrage  renferme,  au  reste,  3g2  ar- 
ticles. On  aura  remarqué  que  M.  Moreira  de  Sa  fait  une  grande  place  aux  auteurs 
contemporains;  c'est  ainsi  qu'il  cite  encore  (pp.  542-546)  un  morceau  que  nous 
avons  lu  avec  un  vif  intérêt,  Un  combat  de  cavalerie  sous  Met$,  de  M.  Ludovic 
Halévy.  Le  volume  de  l'écrivain  portugais  contient  d'ailleurs  nombre  de  morceaux 
qui  respirent  l'amour  de  la  France;  non-seulement  il  contribuera,  comme  dit 
M.  Moreira  de  Sa,  a  educaçdo  das  faculdades  moraes  e  desenvolvimento  do  bom  gosto 
litterario;  mais  il  fera  aimer,  et  en  Portugal  et  au  Brésil,  notre  langue  et  notre 
pays. 


SOCIÉTÉ  NATIONALE  DES  ANTIQUAIRES  DE  FRANCE 

Séance  du  14  juin  1882. 
M.  de  Barthélémy  lit  une  lettre  de  M.  Jacob  relative  à  un  cippe  gallo-romain  dé- 
couvert à  Bar-Le-ûuc,  et  dont  la  face  principale  porte,  en  haut  relief,  un  enfant  nu 
tenant  un  oiseau. 


20  KKVUK    CRJT1QUK    D  HISTOIRE    KT    DK     LITTERATURE 

M.    Schlumberger  lit  une  notice  sur  la  vie  et  les  travaux  de  M.  de  Longpérier; 
cette  notice,  à  laquelle  est  jointe  une  bibliographie  complète  des  mémoires  et  articles 
si  nombreux  publiés  par  M.  de  Longpérier,  sera  insérée  dans  le  Bulletin  de  la  So- 
ciété. 


ACADEMIE  DES  INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  23  juin  1882. 

M.  de  Laigue,  consul  de  France  à  Malaga,  adresse  à  l'Académie  le  calque  d'un  frag- 
ment d'inscription  arabe,  levé  par  les  soins  du  vice-consul  de  France  à  Almeria.  Cette 
inscription  incomplète  a  été  trouvée  dans  la  sierra  de  Gador,  à  l'ouest  de  la  province 
d'Almeria.  Gador,  qui  n'est  plus  qu'un  bourg  d'environ  2,boo  habitants,  paraît  avoir 
été  autrefois  un  centre  de  population  plus  considérable.  On  y  a  trouvé  des  vestiges 
qui  témoignent  de  l'importance  de  ce  lieu,  tant  avant  la  conquête  romaine  que  sous 
les  Romains  et  plus  tard  sous  les  Arabes. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  M.  le  président  fait  connaître  le  résultat  du 
concours  ouvert  pour  le  prix  ordinaire,  sur  cette  question  :  Etude  sur  les  institutions 
politiques,  administratives  et  judiciaires  du  règne  de  Charles  V.  Le  prix  n'est  pas 
décerné.  La  question  est  retirée  du  concours. 

L'Académie  procède  à  l'élection  d'un  membre  ordinaire,  en  remplacement  de 
M.  Guessard.  M.  Senart  obtient  27  voix,  M.  Revillout  8.  M.  Senart  est  élu;  l'élection 
sera  soumise  à  l'approbation  de  M.  le  Président  de  la  République. 

M.  Siméon  Luce  est  désigné  pour  faire  une  lecture  au  nom  de  l'Académie  à  la  pro- 
chaine séance  trimestrielle  de  1  Institut.  Il  lira  son  mémoire  sur  les  comptes  de  dé- 
penses d'un  prieur  de  Saint-Martin-des-Champs  au  xve  siècle. 

M.  Oppert  continue  sa  communication  sur  les  inscriptions  du  roi  Gudea,  trouvées 
en  Chaldée  par  M.  de  Sarzec.  Il  donne  la  traduction  d'un  nouveau  texte  et  complète 
ou  rectifie  quelques  parties  de  ses  lectures  précédentes.  —  Il  repousse  l'opinion  qui 
a  été  présentée  récemment  à  l'Académie,  suivant  laquelle  le  nom  du  roi,  lu  par 
M.  Oppert  Gudea,  devrait  se  lire  Nabu.  On  a  dit  que  le  signe  de  la  divinité,  qui  pré- 
cède ce  nom,  obligeait  de  choisir  parmi  les  différentes  manières  de  le  lire  celle  qui 
reproduit  le  nom  d'un  dieu.  M.  Oppert  n'entend  pas  ainsi  ce  signe,  il  y  voit  un  mot 
à  part,  qui,  joint  au  nom,  donne  cette  phrase  :  le  dieu  de  Gudea.  D'autres  raisons 
prouvent,  selon  lui,  que  Gudea  est  la  seule  lecture  possible.  —  Dans  une  des  ins- 
criptions déjà  traduites,  M.  Oppert  avait  cru  voir  qu'il  était  question  d'une  offrande 
de  lait,  faite  à  la  divinité.  Un  nouvel  examen  l'amène  à  croire  qu'il  s'agit,  non  de 
lait,  mais  d'une  liqueur  enivrante  appe'ée  sikaru.  —  Dans  l'inscription  qu'il  étudie 
aujourd'hui,  M.  Oppert  signale  des  imprécations  lancées  contre  ceux  qui  gratteraient 
la  pierre  pour  y  effacer  le  nom  du  roi. 

M.  Aube  commence  la  lecture  d'un  mémoire  sur  Polyeucte  et  son  martyre,  d'après 
des  documents  inédits.  Dans  le  premier  paragraphe  de  ce  travail,  l'auteur  examine  la 
question  de  la  réalité  historique  du  personnage  de  Polyeucte.  11  croit  que  Polyeucte  a 
existé  et  subi  le  martyre;  la  tradition  relative  à  ce  saint  remonte  assez  haut  pour 
qu'on  doive  penser  qu'elle  a  un  fondement  vrai.  Ses  Actes  sont  d'une  époque  relati- 
vement basse,  mais  on  peut  croire  que  celui  qui  les  a  écrits  avait  sous  les  yeux  un 
récit  plus  ancien.  Dès  le  ive  siècle,  plusieurs  églises  étaient  placées  sous  l'invocation 
de  saint  Polyeucte.  On  a  aussi  des  lampes  votives  avec  l'inscription  :  TOT  AITOY 
II0AY0KTÔ2  (le  nom  au  nominatif,  au  lieu  du  génitif,  faute  qui  n'est  pas  rare  dans 
les  monuments  de  ce  genre). 

Ouvrages  présentés  :  —  par  M.  Jourdain  :  Huit  (Ch),  Platon  à  l'Académie,  fon- 
dation de  la  première  école  de  philosophie  en  Grèce;  —  par  M.  Heuzey  :  Ecole  fran- 
çaise de  Rome  :  Mélanges  d'archéologie  et  d'histoire;  —  par  M.  Oppert  :  Charencey 
(Hyacinthe  de),  Recherches  sur  les  dialectes  tasmaniens  ;  —  par  M.  Alexandre  Bertrand: 
Kerviler  (René),  Etude  critique  sur  l'ancienne  géographie  armoricaine  ;  —  par 
M.  Delisle  :  Prost  (Auguste),  les  Chroniques  vénitiennes.  , 

Julien  Havet. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 


Le  Puy,  typ.  et  lith.  Marchesseu  fils,  boulevard  Saint-l.aurent,  ai' 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

N°  28  -  10  Juillet  -  1882 

I 
Sommaire  s  i32.  A.  Baueb,  Thémistocle,  études  sur  les  historiens  grecs.  —  1 33. 
Hild,  L'impiété  d'Aristophane.  —  134.  Jûlg,  Vie  de  Séjan.  —  i35.  Onions,  Col- 
lation de  l'Harleiânus,  ms.  de  Nonius.  —  i36.  Heerdegen,  Recherches  relatives  à 
la  sémasiologie  latine.  —  1 37.  Gagnât,  Etude  historique  sur  les  impôts  indirects 
chez  les  Romains  jusqu'aux  invasions  des  barbares.  —  1 38.  Eyssenhardt,  Romain 
et  roman.  —  i3cj.  La  «  descriptio  tabulae  mundi  »  de  Jean  de  Gaza  et  six  poésies 
anacréontiques,  p.  p.  Eug.  Abel.  —  140.  Schober,  Heinse,  sa  vie  et  ses  œuvres. 
—  141.  De  Vivo,  Grammaire  de  la  langue  russe.  —  Chronique.  —  Académie  des 
Inscriptions. 


i32.  —  Themistokles.  Studien  und  Beitraege  zur  griechischen  Historiographie 
und  Quellenkunde  von  A.  Bauer.  Merseburg,  Steffenhagen,  1881.  1  vol.  in-8u, 
i73  p. 

Pour  apprécier  à  sa  juste  valeur  l'ouvrage  de  M.  Bauer,  il  convient 
de  faire  attention  moins  au  titre  qu'au  sous-titre,  qui  explique  mieux  le 
dessein  de  l'auteur.  On  ne  trouvera  pas  ici,  en  effet,  un  portrait  de 
Thémistocle,  un  récit  suivi  des  événements  auxquels  il  a  été  mêlé,  avec 
un  jugement  d'ensemble  sur  sa  vie,  son  caractère  et  le  rôle  qu'il  a  joué 
dans  la  guerre  contre  les  Perses  et  dans  les  affaires  intérieures  d'Athènes. 
C'est  un  tout  autre  sujet  que  s'est  proposé  M.  Bauer.  Il  l'indique  lui- 
même  très  nettement  dans  son  avant-propos  :  le  nom  de  Thémistocle 
n'est  pour  lui  que  l'occasion  ou  le  point  de  départ  d'une  série  de  re- 
cherches instituées  sur  les  différents  historiens  grecs.  Ce  n'est  pas  le 
héros  de  tant  de  récits  qui  attire  l'attention  de  M.  B.,  mais  les  narrateurs 
eux-mêmes.  Il  entreprend  de  distinguer  et  de  définir  les  points  de  vue 
divers  auxquels  ils  se  sont  placés  en  parlant  de  Thémistocle,  persuadé 
que  les  divergences  et  les  contradictions  mêmes  de  leurs  jugements  sont 
singulièrement  instructives  et  permettent  de  connaître  ridée  que  chacun 
d'eux  s'est  faite  sur  les  conditions  d'existence  et  le  rôle  du  peuple  grec. 
Thémistocle  a  fondé  la  puissance  maritime  de  sa  patrie  :  suivant  qu'ils 
lui  sont  favorables  ou  hostiles,  les  historiens  révèlent  les  dispositions  qui 
les  animent  à  l'égard  d'Athènes,  de  son  empire,  de  la  politique  qu'elle  re- 
présente et  de  l'influence  qu'elle  a  exercée  dans  le  monde  hellénique. 
Reconnaître  ces  dispositions,  les  caractériser  et  montrer  ainsi  les  diffé- 
rentes manières  dont  l'histoire  grecque  a  été  envisagée  aux  différentes 
époques  de  l'antiquité,  telle  est  la  tâche  que  M.  B.  s'est  donnée.  De  plus, 
il  a  recherché  quelles  étaient  les  sources  auxquelles  ont  eu  recours  les 
nombreux  historiens  qu'il  passe  en  revue,  depuis  les  contemporains  de 
Thémistocle  jusqu'au  rhéteur  yElius  Aristide. 

Nouvelle  série,  XIV.  2 


22  RKVUH.    CRITIQUE 

L'ouvrage  de  M.  B.  est  d'une  lecture  assez  difficile.  La  marche  de  la 
discussion,  déjà  un  peu  lente  par  elle-même,  est  encore  embarrassée  par 
les  controverses  que  soulève  l'auteur  sur  beaucoup  de  points  de  détail. 
C'est  un  livre  de  polémique  presque  autant  qu'un  livre  d'exposition, 
M.  B.  s'attardant  à  chaque  pas  pour  discuter  les  opinions  de  M.  A. 
Schmidt,  ou  de  M.  Mûller-Strùbing,  ou  de  M.  Holzapfel.  Il  en  résulte 
que  l'attention  du  lecteur  est  forcée  de  se  partager  entre  le  texte,  où 
M.  B.  présente  ses  propres  idées,  et  les  notes,  très  abondantes,  souvent 
très  longues,  où  il  bataille  contre  ses  adversaires.  On  aurait  tort  cepen- 
dant de  se  laisser  rebuter  trop  vite.  A  la  condition  de  s'armer  de  patience, 
on  trouvera  beaucoup  à  apprendre  dans  le  volume  de  M.  Bauer.  La 
question  principale,  —  l'auteur  en  fait  l'aveu,  —  est  quelquefois  perdue 
de  vue,  mais  les  digressions  elles-mêmes  sont  instructives. 

Sans  vouloir  entreprendre  une  analyse  détaillée,  qui  serait  trop  longue 
et  qui  serait  parfois  assez  difficile  à  faire,  je  signalerai  quelques-uns  des 
chapitres,  où  se  montrent  le  mieux  l'érudition  de  M.  Bauer  et  la  péné- 
tration ingénieuse  de  son  esprit  :  Hérodote  (p.  i5)  ;  la  comédie  (p.  60), 
où  l'on  trouve  d'excellentes  remarques  sur  le  cas  qu'il  convient  de  faire 
du  témoignage  d'Aristophane  et  des  autres  comiques  ;  Platon  et  Xéno- 
phon  (p.  69)  -,  Isocrate  et  les  orateurs  (p.  y 6).  On  lira  également  avec 
beaucoup  d'intérêt  le  chapitre  consacré  à  Thucydide  (p.  28),  où  l'auteur 
met  nettement  en  lumière  les  différences  qui  séparent  l'historien  athé- 
nien de  ses  prédécesseurs  et  particulièrement  d'Hérodote. 

R.  L. 


t33.  —  Aristophane»  Impietatls  rens,  thesim  Facultati  Litterarum  Parisiensi 
proponebat  J.-A.  Hild.  Vesontione  1880,  in»8°,  vm-i33  p. 

Cette  étude  est  incomplète  et  un  peu  confuse,  mais  elle  témoigne  d'un 
effort  consciencieux.  L'auteur  a  travaillé  sans  direction,  gregarius  pe- 
riculosum  iter  solus  ingressus;  on  sent,  de  plus,  qu'il  n'a  pas  eu  à  sa 
disposition  toutes  les  ressources  nécessaires.  Quelques-unes  des  im- 
perfections du  travail  de  M.  Hild  trouvent  là  une  explication  et  une  ex- 
cuse. 

M.  H.  a  essayé  de  résoudre  une  question  intéressante.  Quoi  de  plus 
singulier  que  de  voir  Aristophane  reprocher  à  un  Euripide,  à  un  So- 
crate  d'attaquer  les  divinités  nationales  et  être  lui-même  si  irrévéren- 
cieux envers  ces  divinités!  Cet  adversaire  de  l'impiété  était-il  lui-même 
un  impie?  Il  y  a  là  une  de  ces  contradictions  qui  éveillent  notre  at- 
tention et  piquent  notre  curiosité  ;  aussi  le  sujet  a-t-il  été  déjà  traité 
plusieurs  fois,  et  récemment  encore  dans  un  travail  qui  a  été  très  re- 
marqué \.  Qu'Aristophane  se  moque  des  augures  et  des  oracles,  qu'il 

1.  Jules  Girard,  La  religion  dans  Aristophane,  Revue  des  Deux-Mondes  1"  août 
et  i5  novembre  1878. 


d'histoire    KT   DK  LITTÉRATURE  2  3 

bafoue  prêtres  et  devins,  qu'il  fasse  la  guerre  à  toutes  ces  divinités  étran- 
gères, asiatiques  ou  thraces,  depuis  peu  introduites  dans  l'Attique,  il  n'y 
a  là  rien  qui  doive  surprendre.  Ce  qui  est  grave,  c'est  de  le  voir  s'atta- 
quer aux  divinités  nationales. 

M.  H.  distingue  quatre  époques  dans  la  croyance  d'Aristophane.  Dans 
la  première  (Chevaliers,  an  424),  le  poète  est  religieux,  il  parle  avec  le 
plus  profond  respect  des  deux  divinités  protectrices  de  l'Attique,  Poséi- 
don et  Athena  (Parabase  des  Chevaliers);  en  4F 4,  au  contraire,  dix  ans 
après,  nous  trouvons  un  changement  complet;  la  comédie  des  Oiseaux 
est  une  moquerie  sans  fin  des  principaux  dieux  de  l'Olympe  :  c'est  le 
grand  moment  d'Athènes,  dont  les  armées  entourent  Syracuse.  L'issue 
désastreuse  de  l'expédition  de  Sicile  semble  marquer  la  fin  de  la  puis- 
sance athénienne  :  le  poète,  avec  Lysistrata  et  les  Thesmophoria^usœ, 
revient  à  des  sentiments  religieux.  Peu  après,  les  Grenouilles  nous  mon- 
trent une  nouvelle  rechute  dans  l'irréligion,  rechute  qui  semble  irrémé- 
diable avec  le  Plutus.  Cette  division  peut  être  acceptée  dans  l'ensemble, 
sans  être  peut-être  aussi  tranchée  que  le  veut  M.  Hild  h 

La  conclusion  de  M.  H.,  c'est  que  décidément  Aristophane  est  un  im- 
pie, et  qu'il  est  singulier  qu'il  n'ait  pas  été  l'objet  d'une  ^ç>ct.qr\  àasésiaç. 
M.  Girard  n'allait  pas  si  loin;  il  se  contentait  de  dire  qu'il  n'y  avait  chez 
Aristophane  ni  religion  ni  foi  particulièrement  vive.  M.  H.  ne  tient 
certes  pas  assez  compte  des  nécessités  imposées  au  poète.  Dans  la  comé- 
die antique,  tout  doit  être  comique.  S'il  est  un  poète  qu'Aristophane 
aime  et  admire,  c'est  Eschyle;  l'auteur  des  Sept  Chefs  en  est-il  moins  à 
l'abri  des  moqueries  du  comique  dans  les  Grenouilles?  Sans  doute,  c'est 
à  Eschyle  que  la  victoire  finit  par  être  décernée,  mais  en  a-t-il  été,  au 
fond,  moins  maltraité  qu'Euripide? Que  dans  les  attaques  d'Aristophane 
contre  la  religion  il  y  ait  eu  autre  chose  que  des  plaisanteries  de  comé- 
die, on  peut  très  bien  l'accorder,  mais  c'est  aller  trop  loin  que  de  faire 
de  lui  un  apôtre  d'impiété. 

Faut-il  croire  aussi  que  l'auteur  des  Nuées,  l'ennemi  acharné  des  phi- 
losophes, soit  devenu  lui-même  philosophe  vers  la  fin  de  sa  carrière? 
Aristophane  figure  dans  le  Banquet  de  Platon  et  y  joue  un  rôle  très  ho- 
norable; mais  de  ce  qu'on  figure  dans  un  dialogue  de  Platon,  à  côté  de 
Socrate  2,  il  ne  s'ensuit  pas  qu'on  soit  socratique.  Tout  prouve,  au  con- 
traire, que  si  Platon  a  introduit  Aristophane  auprès  de  Socrate,  c'est 
une  pure  malice  de  philosophe.  Aristophane  n'est  là  que  pour  entendre 


1 .  Nous  trouvons  une  division  à  peu  près  analogue  dans  un  travail  en  hongrois 
dont  nous  ne  connaissons  qu'un  court  résumé,  Revue  des  Revues  {Revue  de  philolo- 
gie, nouv.  sér.),  année  1881,  p.  178,  1.  b  sqq. 

2.  «  Impius  igitur  posterorum  judicio  erit  habendus,  et  insignem  illius  setatis  in 
religiosis  ut  in  ceteris  effigiem  expressit  :  ita  tamen  ut  impietas  illa  pro  perspicacia 
et  sapientia  numeretur,  qua  Epicharmi,  Xenophanis,  Socratis  quoque  renovantium 
temporis  sui  studia,  elaboraverit  in  opère,  et  pro  sua  virili  parte,  rationabilem  reli- 
gionem....  constituent.  » 


24  RBVUK    CRITIQUE 

l'éloge  de  l'homme  qu'il  a  si  violemment  attaqué,  et,  ce  qui  est  piquant, 
c'est  lui  qui  fournit  les  frais  de  cet  éloge  ;  c'est  avec  un  des  passages 
les  plus  insultants  des  Nuées  qu'Alcibiade  glorifie  Socrate  sous  les  yeux 
d'Aristophane  '. 

Etait-il  a  ailleurs  bien  nécessaire  d  être  de  1  école  de  bocrate  pour  être 
impie?  Dans  la  pièce  la  plus  irréligieuse  d'Aristophane,  dans  le  Plutus, 
ce  n'est  pas  avec  les  idées  nouvelles  que  le  comique  fait  la  guerre  aux 
dieux;  c'est  la  croyance  d'Hérodote  et  d'Eschyle,  c'est  l'idée  du  çOévoç  ou 
de  la  jalousie  des  dieux  qui  fournit  à  Aristophane  ses  traits  les  plus  vio- 
lents contre  la  religion  de  son  pays.  Il  me  suffira  de  renvoyer  à  la  thèse 
de  M.  Ed.  Tour  nier  sur  la  Némésis  et  la  jalousie  des  dieux  2,  en  regret- 
tant que  M.  H.  n'ait  pas  cru,  pour  sa  thèse  latine,  devoir  se  servir  de 
ce  travail. 

Un  autre  ouvrage  qu'on  est  étonné  de  ne  pas  voir  cité,  c'est  la  thèse 
de  M.  P.  Foucart  sur  les  Associations  religieuses  che^  les  Grecs  3. 
M.  H.  y  aurait  trouvé  des  éclaircissements  sur  la  façon  dont  les  cultes 
étrangers  s'introduisirent  en  Attique  et  sur  l'accueil  que  les  comiques  et, 
en  particulier,  Aristophane  firent  aux  nouveaux  dieux.  Il  y  a  là  (2e  par- 
tie, chap.  ix)  tout  un  chapitre  de  sa  thèse  que  M.  Hild  aurait  trouvé 
déjà  traité. 

Albert  Martin' 

l34.  —  Vita  Ij.  JEll  Sejani  xlbei*îo  imperante  praefectl  prtetorlo.  Ad- 

umbravit  Joannes  Julg.  lnnsbrûck,  Wagner,  1882.  1  vol.  in-8°,  38  p. 

M.  Jûlg  s'est  proposé  une  double  tâche  :  recueillir  et  classer  méthodi- 
quement tous  les  renseignements  qui  nous  sont  parvenus  sur  Séjan, 
puis,  à  l'aide  de  ces  renseignements,  tracer  un  portrait  exact  du  préfet 
de  Tibère.  En  ce  qui  concerne  ce  dernier  point,  je  ne  crois  pas  que 
M.  J.  ait  atteint  le  but  qu'il  s'était  assigné.  Ses  conclusions,  qui  tiennent 
en  deux  pages  (37-38),  ne  nous  apprennent  rien  de  nouveau.  Elles  ne 
nous  laissent  pas  une  impression  qui  soit  bien  nette;  on  y  remarquera 
même  une  assertion  qui  n'est  nullement  justifiée  par  les  textes  que 
l'auteur  a  réunis  et  commentés  dans  la  première  partie  de  son  travail. 
D'après  M.  J.,  Séjan  aurait  échoué,  parce  que,  au  moment  de  s'emparer 
du  souverain  pouvoir,  alors  qu'il  ne  lui  restait  plus  qu'à  se  débarrasser 
de  Tibère,  il  aurait  été  retenu  par  un  sentiment  de  reconnaissance  ou 
d'affection  <.  Il  avait  brisé  sans  scrupule  tous  les  autres  obstacles  qui  se 

1.  Platon,  221 ,  chap.  xxvi  du  Banquet. 

2.  Paris,  i863. 

3.  Paris,  1873.  Ces  deux  ouvrages  doivent  se  trouver  dans  toutes  les  bibliothè- 
ques universitaires.  M.  H.  s'est  servi  de  celui  de  M.  Tournier  pour  sa  thèse  fran- 
çaise. 

4.  «  Fortasse  enim,  etsi  omnem  humanitatem  exuerat,  gratus  quidam  animus  vel 


d'histoire  et  de  littérature  25 

dressaient  devant  lui;  il  avait  fait  périr  Drusus,  il  avait  écarté  de  son 
chemin  Agrippine  et  les  fils  de  Germanicus,  à  l'exception  de  celai  qui 
devait  être  plus  tard  Caligula  ;  mais  il  aurait  hésité  à  frapper  Tibère  et, 
après  avoir  décidé  sa  perte,  aurait  été  tenté  de  l'épargner.  Ces  retards 
dans  l'exécution  auraient  donné  à  l'empereur  le  temps  de  déjouer  le 
complot,  si  bien  que  Séjan  aurait  succombé  victime  de  ses  remords 
tardifs  et  d'un  mouvement  de  générosité,  qu'on  s'explique  mal  chez  un 
homme  tel  que  lui.  Je  ne  discute  pas  ici  la  valeur  de  cette  opinion  ;  il 
me  suffit  de  constater  que  c'est  là  une  supposition  purement  gratuite.  Il 
n'y  a  rien,  pas  une  ligne,  pas  un  mot,  dans  le  récit  des  faits  tel  qu'il  est 
présenté  par  M.  J.,  qui  la  justifie  ou  la  prépare. 

Il  ne  faudrait  pas  cependant,  parce  que  les  conclusions  sont  insuffi- 
santes, juger  avec  trop  de  sévérité  le  travail  de  M.  Jûlg.  S'il  n'a  pas 
réussi  dans  la  seconde  partie  de  sa  tâche,  il  s'est  acquitté  de  la  première 
avec  beaucoup  de  soin  et  avec  une  consciencieuse  exactitude.  Il  a  fait 
une  œuvre  utile  en  recueillant  dans  Tacite,  Suétone,  Dion  Cassius,  etc., 
tous  les  textes  qui  ont  rapport  à  Séjan,  d'autant  plus  qu'il  ne  s'est  pas 
borné  à  composer  un  simple  index.  Chemin  faisant,  il  rapporte  et 
discute  brièvement  les  principales  opinions  qui  ont  été  émises  par  lès 
critiques  modernes  sur  Séjan,  son  caractère,  ses  projets,  ses  relations 
avec  les  différents  membres  de  la  famille  impériale  et  avec  Tibère.  C'est 
toute  une  bibliographie  de  la  question,  et  une  bibliographie  raisonnée, 
que  l'on  trouve  dans  la  dissertation  de  M.  Jiilg.  Il  a  ainsi  le  mérite 
d'avoir  beaucoup  simplifié  et  facilité  la  tâche  de  ceux  qui  voudront, 
après  lui,  reprendre  le  même  sujet. 

R.  L. 

■ 

l35.  —  Monius  Marcellus,  Harleian  Ms.  «ri»  collated  by  J.  H.  Onions, 
M.  A.  Oxford,  at  the  Clarendon  Press.  1882.  (Anecdota  Oxoniensia,  Texts,  Docu- 
ments, and  Extracts,  chiefly  from  Manuscripts  in  the  Bodleian  and  other  Oxford 
Libraries,  Classical  Séries,  Vol.  I,  Part  II,  pages  0,3  à  1 53),  petit  in-40. 

M.  Louis  Quicherat,  dans  son  édition  de  Nonius,  a  le  premier  donné 
du  manuscrit  harléien  une  collation  complète,  fournie  par  M.  Gustave 
Massôn.  Le  vénérable  éditeur  français  la  considère  comme  absolument 
définitive,  presque  équivalente  à  l'original  :  «  excellentissimum  librum 
non  partim  et  obiter  consuluit,  sed  a  capite  ad  calcem  tam  religiosa  se- 
dulitate  examinavit,  ut  codex  ipse  mihi  in  manu  esse  videretur.  » 
M.  Onions  pense  autrement;  selon  lui,  cette  collation  est  quite  untrust- 
worthy.  En  conséquence,  il  a  collationné  à  son  tour  l'Harleianus,  no- 
tant les  leçons  que  M.  Quicherat  ne  mentionne  pas  et  rectifiant  les  indi- 
cations inexactes.  Il  va  de  soi  qu'un  tel  travail  est  très  utile. 

«  quaedam  pietas  erga  illum,  per  quem  omnia  assecutus  erat,  eum  a  vita  principis 
«  retinuerit  »  (p.  38). 


20  REVU1Î   CRITIQUE 

M.  Onions  distingue  dans  l'Harleianus  trois  mains;  les  deux  premiè- 
res se  sont  partagé  les  livres  I-III,  la  troisième  commence  au  livre  IV; 
cette  dernière  a  commis  des  fautes  plus  nombreuses  et  plus  graves.  Voilà 
une  distinction  d'une  grande  importance.  Certains  manuscrits,  comme 
celui  de  Genève,  ne  donnent  que  le  livre  IV.  Dans  le  manuscrit  de  Mont- 
pellier, ce  même  livre  précède  les  livres  I,  II-,  III.  Le  manuscrit  de  Paris 
se  compose  de  deux  parties,  Tune  qui  contient  le  livre  I  et  le  commen- 
cement du  livre  II  ',  l'autre  qui  commence  au  livre  IV;  et. d'après  une 
observation  encore  inédite  de  M.  Meylan,  élève  de  l'Ecole  pratique  des 
hautes  études,  la  seconde  partie  est  d'une  autre  main  que  la  première.  Il 
est  vrai  que  la  première  main  semble  reprendre  plus  loin.  Tous  ces  indi- 
ces amènent  à  conjecturer  que  le  corps  actuel  de  notre  Nonius  a  été 
formé  (aux  temps  carolingiens)  par  la  juxtaposition  d'au  moins  trois 
Nonius  partiels,  l'un  finissant  avec  III,  Fautre  contenant  IV,  le  troi- 
sième commençant  avec  V  ;  que,  par  conséquent,  il  serait  chimérique  de 
vouloir  résumer  dans  une  généalogie  unique  Phistoire  de  la  transmis- 
sion du  texte  a. 

M.  Onions  reconnaît  dans  l'Harleianus,  outre  les  trois  mains  origina- 
les, trois  mains  de  correcteurs  ou  glossateurs.  La  distinction  de  ces  six 
sources  a  son  prix,  et  doit  être  signalée  comme  l'un  des  mérites  de  la  pu- 
blication nouvelle. 

Le  Parisiensis,  selon  une  conjecture  un  peu  légère  de  l'auteur,  sem- 
blerait avoir  été  copié  sur  l'Harleianus  après  le  passage  des  deux  premiers 
correcteurs.  Ce  qui  a  été  dit  tout  à  l'heure  montre  que,  pour  les  manus- 
crits de  Nonius,  il  faut  se  garder  d'aller  si  vite  en  matière  de  généalogie. 
M.  Onions,  d'ailleurs,  se  réfute  lui-même  sans  s'en  apercevoir.  Le  Pari- 
siensis, dit-il,  suit  ordinairement  la  correction;  il  donne  parfois  aussi  la 
leçon  originale,  parfois  une  combinaison  des  deux.  Voilà  un  éclectisme 
qu'on  ne  peut  légitimement  supposer  chez  un  copiste.  Si  le  Parisiensis 
dérivait  réellement  de  l'Harleianus,  on  n'y  trouverait  pas  de  leçons  ori- 
ginales repêchées  sous  les  corrections. 

L'Harleianus  a  fourni  à  M.  Onions  des  leçons  précieuses,  jusqu'ici  in- 
connues. Ainsi  (178,  22),  dans  un  fragment  d'Afranius,  Iam  istam  cal- 
uam  colafis  comminuissem  testatim  tibi,  les  autres  manuscrits  omettent 
calnam,  l'Harleianus  l'a  conservé  3. 

La  nouvelle  collation  est-elle  irréprochable?  Non  sans  doute.  M.  Onions 
n'a  recueilli  qu'un  «  nombre  considérable  »  des  notes  marginales;  il  fal- 


1.  La  fin  du  livre  II  et  le  livre  III  manquent  (la  lacune  du  Parisiensis  finit  avec  la 
partie  de  l'Harleianus  copie'e  par  la  seconde  main,  mais  elle  commence  plus  loin, 
p.  141  ;  la  seconde  main  de  l'Harleianus  commence  p.  117). 

2.  Sur  l'origine  complexe  du  manuscrit  de  Montpellier,  voir  L.  Havet,  De  Satur- 
nio,  p.  335. 

3.  En  le  déplaçant,  comme  l'indique  l'absence  de  coupe  régulière;  il  faut  (ce  que 
M.  Onions  n'a  pas  vu)  mettre  caluam  devant  testatim,  là  même  où  M.  Quicherat  in- 
sérait par  conjecture  testam. 


d'histoire  et  de  littératurk  27 

lait  les  recueillir  toutes  \  La  leçon  caluam,  citée  tout  à  l'heure,  est  seu- 
lement de  la  première  main,  à  en  croire  la  préface,  mais  c'est  ce  que  ne 
dit  point  la  collation  même.  Dans  un  vers  d'Accius  (9,  20),  M.  Quiche- 
rat,  imprimant  [sinjite  me  ad,  oublie  d'avertir  que  les  manuscrits  (y 
compris  le  Parisiensis,  fol.  4  r°  a)  ont  item  ad  :  M.  Onions  se  tait  aussi. 
Il  se  peut  qu'un  examen  du  manuscrit  fasse  apercevoir  d'autres  imper- 
fections. Il  faut  pourtant  remercier  l'auteur  de  sa  peine,  et,  désormais, 
contrôler  par  sa  collation  le  texte  de  Nonius. 

Louis  Havet. 


i36.  —  Ferdinand   Heerdegen,  lJnter«mcl»uiigen    zm*  lateinischen    Sema- 
siologie.  Erlangen,  Deichert.  1881.  III.  Heft.  In-8°,  107  p.  —  Prix  :  2  mark. 

La  «  sémasiologie  »  est  la  science  qui  s'occupe  de  préciser  le  sens  des 
mots  d'une  langue  et  de  rechercher  les  variations  de  signification  par  où 
ils  ont  pu  passer  ;  elle  forme  donc  une  partie  importante  deTétude  scien- 
tifique du  vocabulaire.  Le  livre  de  M.  Heerdegen  est  la  réunion  de  trois 
dissertations,  qui  avaient  d'abord  paru  séparément  :  i°  De  l'étendue  et 
des  divisions  de  la  science  du  langage  en  général  et  de  la  grammaire 
latine  en  ■particulier  (Erlangen,  1875),  48  p.:  —  20  Du  but  et  de  la 
méthode  de  la  sémasiologie  latine  (Erlangen,  1878),  58  p.  ;  —  3°  Du  dé- 
veloppement historique  de  la  signification  des  mots  latins  (Erlangen, 
1881),  107  p. 

I.  —  Le  plus  intéressant  de  ces  trois  articles  est  le  troisième,  qui  con- 
tient une  histoire  du  mot  orare  2,  considéré  successivement,  dans  ses  di- 
vers emplois,  chez  les  différents  auteurs  latins.  On  sait  que  ce  mot,  dé- 
rivé de  os,  oris,  signifia  d'abord  parler,  puis,  par  une  limitation  du 
sens  primitif,  prier,  demander.  C'est  l'histoire  de  ce  changement  de 
sens  que  M.  H.  étudie  dans  le  plus  grand  détail.  Le  sens  primitif  se 
trouve,  par  exemple,  chez  Plaute  dans  des  locutions  telles  que  orare 
(=  agere)  cum  aliquo,  œquom  or  as,  jus  or  as,  jus  bonum oras\  on  en 
rencontre  encore  des  traces  chez  Cicéron  dans  certaines  expressions  con- 
sacrées, inorata  causa,  causam  ou  litem  orare;  on  lit  chez  Tite-Live, 
39,  40,  12  :  «  (M.  Porcius)  qui,  sextum  et  octogesimum  annum  agens, 
causam  dixerit,  ipse  pro  se  oraverit  scripseritque  »,  et,  pour  le  remar- 
quer en  passant,  je  ne  crois  pas  que  M.  H.  réussisse  à  persuader  beau- 
coup de  gens  que,  si  Tite-Live  a  ici  employé  oraverit  dans  ce  sens  un 
peu  vieilli,  c'était  «  évidemment  »  (?)  pour  donner  au  passage  un  carac- 
tère archaïque  qui  fût  en  rapport  avec  la  personne  de  Caton,  dont  il 

1.  M.  Meylan  a  reconnu  récemment,  entre  les  notes  marginales  du  Parisiensis  et 
celles  du  Guelferbytanus,  des  concordances  intéressantes  pour  l'histoire  du  texte. 

2.  M.  Heerdegen  a  aussi  publié  un  travail  sur  le  sens  du  mot  fides  chez  Cicéron 
(De  fi  de  Tulliana.  Erlangen,  1876). 


28  RRVUK    CRITIQUE 

fait  le  portrait  (??).  D'autre  part,  M.  H.  montre  que  Plaute  et  Cicéron 
emploient  bien  orare  dans  le  sens  de  prier,  mais  pas  encore,  à  ce  qu'il 
semble,  dans  le  sens  de  demander,  c'est-à-dire  avec  l'accusatif  d'un  nom 
de  chose  comme  complément  direct  (lorsqu'on  dit  «  hoc  te  oro  »,  cela 
équivaut  logiquement  à  a  hanc  orationem  te  oro  »,  «  je  te  prie  de  cette 
prière  »);  au  contraire,  chez  Térence,  plus  tard  chez  Salluste,  orare  se 
rencontre  dans  le  sens  de  demander  ;  T.-Live  enfin  construit  ce  verbe 
avec  un  double  complément  direct  [auxilia  regem  orabant,  «  ils 
priaient  le  roi  et  ils  demandaient  au  secours)  »,  ce  qui  ne  se  trouve 
pas  en  prose  avant  lui.  Viennent  ensuite  les  deux  premiers  siècles  de 
l'époque  impériale,  où  il  semble  à  M.  H.  que  orare,  dans  le  sens  de 
prier. ■  vieillit  rapidement;  Sénèque  le  rhéteur,  Sénèque  le  philosophe, 
Pétrone,  Quintilien,  Pline  le  jeune  emploient  presque  toujours  rogare 
dans  ce  sens,  rarement  orare;  si  Tacitej  au  contraire,  n'emploie  guère 
que  orare,  c'est  chez  lui,  dit  M.  H.,  un  archaïsme.  Un  autre  fait  très 
remarquable,  c'est  l'usage  extrêmement  fréquent  de  orare  chez  Quinti- 
lien dans  le  sens  technique  de  être  orateur,  plaider,  qui  se  rattache  au 
sens  primitif  du  mot. 

Je  n'indique  ici  que  quelques-uns  des  points  sur  lesquels  porte  l'étude 
de  M.  Heerdegen.  Cette  étude  est  faite  avec  beaucoup  de  soin  et  de  cons- 
cience, trop  de  conscience  peut-être  :  il  y  a  dans  ces  longues  énuméra- 
tions  de  passages  bien  des  détails  dont  j'avoue  ne  pas  voir  l'intérêt.  C'est 
ainsi  que  je  ne  comprends  pas  bien  ce  que  c'est  que  «  l'éthos  »  ou  «  l'em- 
ploi éthique  »  (?)  du  mot  orare.  M.  H.  est  d'ailleurs  trop  affirmatif  :  il 
semble  croire  que  les  résultats  auxquels  son  étude  Ta  conduit  sont  des 
vérités  certaines;  or  il  faut  bien  se  rendre  compte  qu'en  l'absence  de  la 
plus  grande  partie  des  monuments  de  la  langue  latine,  il  nous  est  im- 
possible d'arriver  à  autre  chose  que  des  hypothèses  sur  tout  ce  qui  tou- 
che à  l'histoire  de  cette  langue.  Enfin  il  y  a  certaines  observations  de  dé- 
tail qui  me  paraissent  contestables  :  pourquoi,  par  exemple,  omnibus  ou 
multis  precibus  orare  (p.  3o)  serait-il  une  locution  de  la  langue  vul- 
gaire? Je  ne  vois  absolument  rien  qui  autorise  cette  supposition.  Les 
études  sur  le  latin  vulgaire  sont  à  la  mode  depuis  quelques  années  ;  elles 
ont  mis  en  lumière  des  faits  bien  intéressants;  mais  il  faut  avouer  aussi 
qu'on  abuse  étrangement  aujourd'hui  de  ce  latin  vulgaire,  et  qu'on  veut  en 
voir  partout.  De  même  il  me  paraît  difficile  d'admettre  que  dans  la  for- 
mule quod  ego  te  oro,  etc.  (p.  33,  note),  quod  soit  en  réalité  l'ablatif 
quo  =  quare  :  une  confusion  de  prononciation  n'était  guère  possible 
entre  l'abl.  quo  (d),  où  Yo  était  long  et  le  d  prononcé  faiblement,  puis- 
qu'il finit  par  disparaître,  et  le  neutre  quod,  où  l'o  était  bref  et  le  d  pro- 
noncé d'une  manière  assez  dure,  puisqu'un  peu  plus  tard  quod  et  quot 
se  prirent  l'un  pour  l'autre  dans  l'orthographe  vulgaire. 

Malgré  ces  quelques  réserves  et  d'autres  critiques  de  détail  qu'il  y  aurait 
peut-être  lieu  défaire,  l'étudede  M.  H.  sur  le  verbe  orare  est  intéressante 
et  bien  faite  ;  elle  appartient  d'ailleurs  à  un  ordre  de  recherches  qui  a 


|  liBiîioq  al  ÏM  ' 

Ji'up  33  é >k     ■  rt&no  ôsid  Jnsiolqm»; 

d'histoire  et  de  littérature  29 

été  trop  négligé  jusqu'ici,  et,  à  ce  titre,  elle  mérite  doublement  qu'on  lui 
fasse  bon  accueil. 

II.  —  Les  deux  autres  dissertations  de  M.  H.  ne  contiennent  guère 
que  des  considération  générales.  Je  me  contenterai  de  relever  une  théo- 
rie de  M.  H.  d'après  laquelle  (p.  23  sqq.)  le  développement  de  la  signifi- 
cation des  mots  ne  se  serait  fait  que  de  deux  manières  :  soit  par  limita- 
tion du  sens  primitif  (exemple  :  litterae,  «  quelque  chose  d'écrit  »,  puis, 
dans  un  sens  plus  restreint,  «  une  lettre  »),  soit  par  association  d'idées 
(exemple  :  harena,  «  sable  »,  ou,  par  limitation,  «  arène  »;  c'est  ensuite  par 
association  d'idées  que  Pline  le  jeune,  prenant  le  mot  au  sens  figuré, 
dira,  Lettres,  6,  12  :  «  Vettio  Prisco  quantum  plurimum  potuero  prae- 
stabo,  praesertim  in  harena  mea,  hoc  est,  apud  centumviros  »).  Il  me 
semble  que  cette  division  n'est  pas  complète  :  quelquefois  la  langue,  au 
lieu  d'appliquer  un  mot  de  sens  général  à  un  cas  particulier  et  d'en 
préciser  ou  d'en  limiter  ainsi  la  signification,  efface  au  contraire  la 
nuance  particulière  qu'exprimait  le  mot  et  lui  attribue  ainsi  un  sens 
plus  général,  plus  vague,  plus  indéterminé  :  il  y  aurait  donc,  à  ce  qu'il 
me  semble,  une  3e  catégorie  à  ajouter  aux  deux  catégories  admises  par 
M.  Heerdegen.  Ainsi  le  mot  infans,  qui  a  désigné  d'abord  un  enfant 
qui  ne  parle  pas,  reçut  de  bonne  heure  un  sens  plus  large  :  l'âge  désigné 
par  infantia  '  allait  jusqu'à  sept  ans  à  peu  près  (v.  Ulpien,  Digeste, 
26,  7,  1,  et  cf.  Forcellini,  aux  mots  œtas  et  infantia;v.  aussi  Horace, 
Odes,  3,  4,  20).  Plus  tard,  dans  le  latin  vulgaire,  ce  même  mot  injans 
prit  un  sens  bien  plus  étendu  encore  :  on  peut  voir  dans  Forcellini  (édi- 
tion de  Vit,  au  mot  infans,  §§8- 10)  que,  dans  certains  textes  épigraphi- 
ques  et  certains  passages  de  saint  Jérôme,  infans  correspond  déjà  tout 
à  fait  à  notre  mot  enfant.  Voilà  donc  un  mot  dont  le  sens  a  été  en  se 
généralisant  de  plus  en  plus. 

O.  R. 


137.  —  Etude  historique  sur  les  impôts  indirects  chez  les  Romains 
Jusqu'aux  invasions  des  barbares,  d'après  les  documents  littéraires  et  épi- 
graphiques,  par  M.  R.  Cagnat.  i  vol.  in-8°  de  256  p.  accompagné  de  3  cartes. 
Paris,  Thorin.  1882. 

Nous  avions  annoncé  l'année  dernière,  en  rendant  compte  de  la  thèse 
latine  de  M.  Cagnat,  la  publication  prochaine  de  son  Etude  historique 
sur  les  impôts  indirects  che\  les  Romains,  couronnée  par  l'Académie 

— 

i."Ce  mot  s'applique  alors,  non  plus  à  l'âge  où  l'on  ne  parle  pas  du  tout,  mais  à 
l'âge  où  l'on  ne  parle  pas  encore  bien  (cf.  l'emploi  de  infans  adjectif  pour  désigner 
un  orateur  qui  ne  sait  pas  parler,  c'est-à-dire  qui  parle  mal).  Mais  on  ne  peut  pas 
appeler  cela  une  limitation  du  sens  primitif;  c'en  est,  au  contraire,  une  extension  : 
l'expression  a  cessé  d'être  prise  dans  son  sens  rigoureux;  la  signification  en  a  été 
élargie,  et  non  restreinte. 


30  RttVUK    CR1TIQ0S 

des  Inscriptions  et  Belles-Lettres.  Plusieurs  parties  du  sujet  avaient  déjà 
été  traitées  avant  lui  au  point  de  vue  juridique  et  1  auteur  rend  pleine 
justice  aux  travaux  de  MM.  Naquet,  Humbert ,  etc.  (Bibliographie, 
p.  xiii-xiv)  ;  mais  l'étude  du  riche  apparatus  épigraphique  qui  s'y  rap- 
porte avait  été  quelque  peu  négligée.  C'est  à  cette  source  que  M.  C.  a 
surtout  puisé.  Parmi  les  vectigalia  que,  d'après  la  définition  moderne, 
on  peut  considérer  comme  impôts  indirects,  il  faut  ranger  :  les  portoria 
(douanes  et  péages),  la  vicesima  hereditatium  (impôt  sur  les  successions 
et  les  legs  testamentaires),  \a.vicesima  libertatis  (impôt  sur  les  affranchis- 
sements) et  la  centesima  ou  la  ducentesima  rerum  venalium  »  ;  puis, 
quelques  autres  taxes  moins  importantes  :  l'impôt  sur  la  vente  des  escla- 
ves, certains  octrois,  surtout  celui  de  la  ville  de  Rome,  l'impôt  sur  le  sel 
et  la  quâdragesima  litium. 

La  première  partie  est  la  plus  développée.  Après  avoir  défini  le  sens 
exact  du  mot  portorium  qui  correspond  à  la  fois  aux  douanes,  péages  et 
octrois  des  temps  modernes,  et  montré  que  les  anciens  n'y  voyaient 
qu'une  ressource  fiscale  et  non  une  mesure  économique,  M.  C.  fait  un 
historique  du  portorium.  C'est  seulement  à  partir  de  Néron  qu'on  peut 
d'une  manière  nette,  grâce  aux  inscriptions,  en  déterminer  le  fonction- 
nement. Plus  tard,  avec  les  textes  juridiques  de  la  fin  de  l'empire,  les 
difficultés  d'interprétation  apparaissent  :  qu'est-ce  que  Yoctava?  Etait-ce 
le  taux  du  portorium  depuis  Auguste  ou,  comme  le  pensait  M.  Naudet, 
un  tarif  qui  s'appliquait  seulement  aux  objets  du  luxe?  L'auteur  partage 
l'opinion  de  M.  Marquardt,  et  regarde  Yoctava  comme  le  taux  unique 
du  portorium  à  la  fin  de  l'empire,  tandis  que  jusque-là  il  avait  été,  soit 
du  quarantième,  soit  du  cinquantième,  soit  du  vingtième  suivant  les 
différentes  provinces.  Cette  réforme  est  probablement  postérieure  à  l'épo- 
que de  Théodose. 

La  détermination  des  circonscriptions  douanières  est  une  des  parties  les 
plus  neuves  de  l'ouvrage  ;  l'épigraphie  seule  a  pu  fournir  à  M.  C.  les 
éléments  de  ce  chapitre  et  deux  cartes  très  claires  servent  à  en  rendre  la 
lecture  facile.  —  Remarques  intéressantes  sur  la  ligne  douanière  de  l' II— 
lyricum  (pp.  36-37) :  en  Gaule  et  en  Afrique,  les  légions  étaient  laissées  à 
dessein  en  dehors  de  la  ligne  douanière,  afin  de  permettre  aux  soldats  de 
jouir  de  la  franchise.  Rien  de  pareil  dans  l'Illyricum,  parce  qu'il  y  avait 
sur  les  bords  du  Danube  une  organisation  particulière  destinée  à  préve- 
nir les  incursions  des  barbares  [limes  imperii).  Il  faut  aussi  citer  de  cu- 
rieux détails  sur  la  station  de  Lugdunum,  probablement  centre  adminis- 
tratif de  la  quâdragesima  Galliarum. 

Quant  au  taux  de  l'impôt,  il  variait  suivant  les  provinces  :  on  l'ignore 
pour  l'Illyricum  (p.  46),  pour  l'Afrique  (p.  74),  car  le  tarif  de  Zraïa 
était  spécial  à  cette  localité,  pour  l'Egypte;  il  était  de  2  0/0  en  Espagne, 
de  2  et  demi  0/0  en  Gaule,  en  Asie  et  probablement  aussi  en  Italie  ;  sous 
la  République,  le  taux  du  portorium  en  Sicile  avait  été  de  5  0/0. 

M.  C.  étudie  ensuite  successivement  le  mode  de  perception  de  l'impôt 


d'histoire  et  de  littérature  3i 

de  l'époque  de  la  République  au  Bas-Empire,  il  recherche  quelles  étaient 
les  marchandises  et  les  personnes  soumises  à  l'impôt  du  portorium; 
quelles  étaient  celles  qui  en  étaient  exemptes  ;  quelles  étaient  les  lois  qui 
protégeaient  les  publicains  contre  les  marchands;  quelles  étaient  celles 
qui  protégeaient  les  marchands  contre  les  publicains.  Sous  la  République, 
le  produit  de  la  ferme  du  portorium  était  versé  dans  Y aerarium  Saturni ; 
au  début  de  l'empire,  les  recettes  fournies  par  le  portorium  revenaient 
au  fisc  dans  les  provinces  procuratoriennes  et  sans  doute  dans  les  pro- 
vinces impériales  ;  dans  les  provinces  sénatoriales,  une  partie  du  pro- 
duit de  la  ferme  du  portorium  appartenait  peut-être  aussi  au  fisc,  plus 
tard  les  recettes  furent  partout  versées  dans  le  fisc.  Deux  chapitres  sont 
enfin  consacrés  aux  péages  et  aux  octrois  (octrois  dans  les  provinces  et 
octroi  de  Rome). 

Les  études  sur  la  vicesima  libertatis  et  la  vicesima  hereditatium  sont 
faites  d'après  la  même  méthode;  aucune  inscription  n'est  omise  et  toutes 
celles  qui  touchent  directement  le  sujet  sont  transcrites  en  caractères  épi- 
graphiques.  —  Dans  la  dernière  partie  (Impôts  sur  les  ventes  et  les  pro- 
cès, les  monopoles),  il  faut  citer  surtout  une  discussion  au  sujet  de  l'im- 
pôt sur  le  sel  (pp.  237-243)  ;  d'après  M.  Marquardt,  le  monopole  du  sel 
créé  sous  la  République  subsista  jusqu'à  la  fin  de  l'Empire.  D'après 
M.  Cohn,  ce  monopole  n'aurait  jamais  existé  ;  M.  C.  combat  ce  que  les 
deux  assertions  ont  d'exagéré  et  arrive  à  cette  conclusion  :  «  il  semble 
que  le  monopole  sur  le  sel  que  l'état  s'était  réservé  en  246  ait  amené  en 
25o  la  création  d'un  impôt  indirect.  Mais  on  ne  voit  pas  que  cet  impôt 
ait  persisté  longtemps  puisqu'on  n'en  trouve  ancune  trace  postérieure- 
ment. Il  est  donc  vraisemblable  que,  par  suite  de  la  conquête  de  nouvel- 
les provinces ,  l'application  de  cette  nouvelle  mesure  rencontra  de 
grandes  difficultés,  si  même  elle  fut  jamais  tentée  en  dehors  de  l'Italie 
et  l'on  est  autorisée  penser  que  le  sel  resta  de  bonne  heure  libre  de  toute 
taxe.  » 

Nous  croyons  que  M.  Cagnat  a  traité  le  sujet  d'une  manière  aussi 
complète  que  possible  et  que,  sur  cette  question,  il  faudra  toujours  re- 
courir à  son  ouvrage. 

Emmanuel  Fernique. 


1 38.  —   Rocmisch    nnd   Romanlecli,   ein   Beitrag    zur   Sprachgeschichte  von 
Franz  Eyssenhardt.  Berlin,  Gebrûder  Borntraeger.  1882,  xi-2o5  p.  petit  in-8°. 

L'auteur  était  connu  honorablement  des  érudits  par  des  éditions  d'au- 
teurs latins,  utiles  et  faites  avec  Fleiss.  Il  fait  cette  fois  une  infidélité  à 
la  philologie  pure,  et  il  publie  sur  un  sujet  prodigieusement  difficile, 
qui  eût  fait  reculer  un  linguiste  moins  novice,  un  des  livres  les  plus 
mal  faits  qui  se  puissent  voir. 

Ce  n'est  pas  que  cet  imprimé  de  deux  cents  pages  soit  tout  à  fait 


^Idiàaoqmi  .  >qy\  snnsin 

32  REVUE   CRITIQUE 

vide.  L'auteur  publie  p.  149  un  sonnet  italien  inédit,  et  il  examine  le 
texte  de  quelques  passages  latins  (catalogués  p.  2o5).  Il  reproduit  à  pro- 
pos de  tout  et  de  rien  des  échantillons  de  patois  italiens  et  espagnols, 
qui  pourraient  être  amusants  à  déchiffrer  en  prison  ou  en  diligence, 
mais  qui  ne  font  rien  à  sa  thèse,  si  l'on  peut  dire  qu'il  en  ait  une.  Il 
donne  un  index  alphabétique.  Là  s'arrête  malheureusement  la  part  de 
l'éloge. 

Ce  triste  livre  est  le  désordre  même.  Plaute  est  mis  avant  Livius  An- 
dronicus  ;  l'origine  de  l'italien  sei  et  de  l'espagnol  ères  est  examinée  à 
propos  de  la  chute  de  l\s  finale  en  latin;  l'inscription  des  frères  Minu- 
cius,  qui  délimitèrent  le  territoire  de  Gênes  en  1 17  avant  notre  ère,  sert 
de  transition  entre  la  mauvaise  foi  politique  de  César  et  la  prosodie  de 
Catulle. 

L'idée  directrice,  que  le  lecteur  aurait  peine  à  découvrir  tout  seul, 
est  exposée  par  Fauteur  en  ces  termes  (p.  199)  :  «  La  façon  de  voir  mise 
à  l'épreuve  ici  part  de  ce  point,  que  dans  le  développement  de  la  vie  des 
langues  et  des  peuples  il  n'y  a  point  de  coupures,  mais  cohésion  et  conti- 
nuité. Si  le  tueur  de  taureau  nomme  sa  victime  un  toro  de  poca  ou  de 
mucha  Romana  pour  dire  que  c'est  un  taureau  faible  ou  fort,  cette  ex- 
pression a  sa  racine  dans  le  même  sentiment  qui,  tant  de  siècles  aupa- 
ravant, faisait  déclarer  à  Florus  que  personne  n'est  plus  noble  qu'un 
citoyen  romain;  et  si  aujourd'hui,  à  Rome,  les  mères  disent  à  leurs  en- 
fants : 

o  Ddio  sinnôe!  oh  ppôvea  catûa! 

au  lieu  de  oh  Dio  signore!  0  povera  creatura,  elles  se  trouvent  dans 
la  même  phase  linguistique  qui  a  fait  sortir  du  latin  area  l'italien  aja.  » 
On  ne  pouvait  être  plus  malheureux  dans  le  choix  des  exemples,  car  l'éty- 
mologie  du  terme  d'argot  technique  romana  n'est  point  évidente,  encore 
moins  évidente  son  histoire;  quant  à  la  chute  à'r  entre  voyelles,  en  pa- 
tois romain  contemporain,*  elle  n'a  avec  la  chute  d'r  devant  i  con- 
sonne %  en  italien  non  exclusivement  romain  du  haut  moyen-âge,  ni 
«  cohésion  »  ni  «  continuité  ». 

M.  Eyssenhardt,  en  écrivant  Romain  et  Roman,  avait-il  une  con- 
naissance sérieuse  de  la  linguistique  romane  ?  Il  suffira  de  citer  son  affir- 
mation 2  que  les  langues  romanes  n'ont  pas  même  essayé  [nicht  einmal 
•{u  dem  Versuche  gekommen  sind),  pour  distinguer  les  cas  du  substan- 
tif, de  donner  à  l'article  une  forme  d'accusatif  autre  que  celle  du  nomi- 
natif. 

Les  théories  philologico-linguistiques  sur  le  latin  sont-elles  meilleu- 
res? Non  3.  M.  Eyssenhardt  nous  apprend  que  la  versification  satur- 

i.  Issu  à'e  ou  i  devant  une  voyelle.  ittttv&v»  U 

2.  P.  53.  L'ensemble  du  livre  ne  fait  que  trop  voir  qu'il  n'y  a  point  coquille  ou 
lapsus. 

3.  Ce  qui  surprend  le  plus  quand  on  songe  que  le    livre  est  d'un  philologue,  ce 


d'histoire  et  de  littérature  33 

nienne  repose  sur  l'accent,  et  que  là-dessus  le  doute  est  impossible,  c'est 
le  cas  de  le  dire,  tout  à  fait  impossible,  eigentlich  vôllig  unmoglich  '. 
Or,  en  réalité,  le  vers  saturnien  est  fondé  sur  la  quantité,  et  l'accent  y 
joue  un  rôle  nul.  —  Plaute,  arbitrairement,  supprimait  toutes  les  con- 
sonnes finales  selon  le  besoin  (p.  33  et  passim).  Un  lecteur  confiant  s'i- 
maginerait, et  M.  Eyssenhardt  paraît  persuadé,  que  Plaute  pourrait 
finir  un  sénaire  par  magnum  sit,  illûdfert  ou  mater  te,  comme  il  peut 
effectivement  le  finir  par  occidistis  me.  —  Les  faits  orthographiques 
fournis  par  les  inscriptions  sont  transformés  par  l'auteur,  sans  l'ombre 
de  réflexion  et  de  contrôle,  en  faits  de  prononciation.  —  Sarsine  était  une 
ville  foncièrement  ombrienne,  point  latinisée,  car  c'est  en  ombrien  qu'on 

écrivait à  Iguvium.  Voilà  pourquoi  la  prosodie  du  poète  de  Sarsine 

est  calquée  sur  l'ombrien.  L'auteur  oublie  d'ajouter  qu'elle  ne  diffère 
pas  d'un  iota  de  la  prosodie  latine  antérieure,  celle  du  Tarentin  Andro- 
nicus  et  du  citoyen  romain  Névius.  —  La  prononciation  latine  tendait 
à  supprimer  le  t  final,  car  on  n'écrivait  plus...  le  d  de  l'ablatif.  —  Pour 
se  persuader  que  la  métrique  grecque  n'était  pas  apte  à  régir  le  la- 
tin au  temps  de  Plaute,  il  faut  considérer...  la  versification  italienne 
de  Carducci.  Des  façons  de  raisonner  pareilles  désarment  le  lec- 
teur. Il  ne  se  fâche  plus  quand  il  voit  l'auteur  affirmer  (avec  un  étoh- 
nement  judicieux,  dont  il  est  juste  de  lui  donner  acte)  que  le  latin 
écrit  n'a  jamais  été  parlé,  et  que  le  latin  parlé  n'a  jamais  été  écrit. 

Arrêtons-nous  sur  cette  dernière  proposition.  Elle  eût  pu  suffire  à  la 
rigueur  pour  faire  juger  tout  le  livre. 

Louis  Havet. 


l3g.  —  .loannis  Gazaei  descrlptlo  tabulae  mnndi  et  Anacreontea.  Re- 

censuit  Eugenius  Abel.  Berlin,  Calvary,  1882,  in-8°  de  87   p.  —  Prix  :  2  m.  40. 

Un  helléniste  hongrois,  M.  Eug.  Abel,  semble  s'être  imposé  la  tâche 
parfois  ingrate  de  publier,  avec  un  appareil  critique  complet,  les  textes 
poétiques  de  l'école  de  Nonnus.  Nous  avons  déjà  eu  occasion  d'exami- 
ner sa  méthode  et  de  louer  l'extrême  soin  qu'il  porte  à  ses  travaux  à 
propos  de  son  édition  de  Colluthus  (Rev.  crit.,  xve  année,  n°  29, 
18  juillet  188 1)  ;  depuis  lors  il  a  donné  une  édition  des  Orphei  Lithica 
et  enfin  la  Descriptio  tabulae  mundi  de  Jean  de  Gaza.  A  ce  dernier 
poème,  qui  compte  732  vers,  il  a  joint  six  petites  pièces  lyriques,  pu- 

sont  certaines  imaginations  relatives  à  l'histoire  littéraire.  Varron,  dans  un  écrit  de 
sa  jeunesse,  s'inspire  de  Lucrèce  (p.  48).  Le  silence  de  Cicéron  sur  Catulle  tient  à  sa 
mauvaise  humeur  de  ce  que  Catulle  ne  supprimait  jamais  Vs  finale  dans  ses  vers,  ou 
du  moins  ne  l'a  supprimée  qu'une  fois  (p.  4^). 

1 .  Trop  souvent  les  adverbes  vœllig  et  eigentlich  tiennent  lieu  d'arguments.  Pour 
les  poètes  qui  écrivaient  en  saturniens,  la  prosodie  était  vœllig  unbekannt.  L'ori- 
gine ombrienne  de  Plaute  est  eigentlich  selbstverstcendlich. 


34  REVUE    CRITIQUE 

bliées  déjà  par  Matranga  et  par  Bergk,  sous  le  nom  â'Anacreontea. 
L'exçpactç  est  éditée  pour  la  troisième  fois;  donnée  d'abord  par  Rut- 
gersius  dans  ses  Variae  lectiones  (Leyde,  1618),  elle  l'a  été  depuis  par 
Fred.  Graefe  à  Leipzig,  en  1822,  à  la  suite  de  Paul  le  Silentiaire.  Cette 
édition  fut  faite  sur  la  copie,  collationnée  pour  Graete  par  Fr.  Jacobs,de 
Tunique  manuscrit  qui  nous  ait  conservé  ce  texte,  et  qui  n'est  autre  que 
le  fameux  ms.  parisien  de  l'Anthologie  Palatine  [Suppl.  grec  384, 
S.  629-639).  L'édition  de  Graefe,  très  rare  aujourd'hui,  ne  donne  qu'une 
collation  incomplète  et  ne  fait  pas  entrer  dans  le  texte  toutes  les  bonnes 
leçons  du  ms.  de  Paris.  M.  A.,  en  comblant  ces  deux  lacunes,  donne 
une  édition  qui,  jusqu'à  la  découverte  peu  probable  d'un  second  ms., 
doit  être  regardée  comme  définitive.  Il  a  fait  suivre  le  texte  d'un  index 
verborum  très  complet  et  par  suite  très  utile.  Il  s'est  plu,  en  outre,  à  no- 
ter les  nombreux  passages  que  Jean  de  Gaza  a  imités  de  Nonnus  et  à 
montrer  à  quel  point  l'auteur  de  la  Descriptio  parle  la  langue  de  l'au- 
teur des  Dionysiaques.  On  sait  d'ailleurs  que,  pour  la  métrique  parti- 
culièrement, Nonnus  n'a  pas  eu  d'imitateur  plus  strict  et  d'élève  plus 
docile  que  Jean  de  Gaza,  Je  regrette  que  l'éditeur  n'ait  point  attaché 
d'importance  à  plusieurs  croix  pointées  qui  sont  en  marge  de  la  première 
partie  du  ms,,  et  n'ait  pas  discuté  les  divisions,  que  le  copiste  a  marquées 
en  commençant  certains  vers  en  avant  de  la  marge  ordinaire.  Les  autres 
détails  paléographiques  sont  scrupuleusement  relevés. 

P.  de  Nolhac 


140.  —  «Johsmn  Jakob  VS/illselm  Heinse,  sein  Leben  und  seine  Werke,  ein  Kul- 
tur-und  Literacurbild,  von  Johann  Schober.  Mit  Heinse's  Portrait.  Leipzig,  W. 
Friedrich.  1882,  23 1  p.  —  Prix  :  5  mark. 

Nous  n'avons  pas  besoin  d'apprendre  à  nos  lecteurs  ce  que  fut  Heinse, 
auquel  est  consacré  le  livre  de  M.  Schober  ;  nous  les  renvoyons  à  notre 
article  sur  un  ouvrage  de  M.  Prôhle,  où  il  était  question  de  l'auteur 
à'  Ardinghello  '.M.  Sch.  a  divisé  son  livre  en  dix  chapitres  :  I.  Heinse 
dans  sa  patrie,  ses  écrits  de  jeunesse;  II.  Heinse  à  l'Université,  ses  épi- 
grammes;  III.  Heinse  dans  le  sud  de  l'Allemagne,  sa  traduction  de 
Pétrone  et  les  Cerises  (poésie  imitée  de  Dorât)  ;  IV.  Heinse  chez  Gleim, 
la  «  boîte  »  (où  Gleim  et  ses  amis  mettaient  leurs  vers  dirigés  contre 
les  critiques  de  l'époque)  et  Laidion\  V.  Heinse  chez  Jacobi,  l'Iris  et  les 
lettres  sur  la  galerie  de  Dùsseldorf;  VI.  Heinse  en  Italie;  la  traduction 
du  Tasse  et  d'Arioste  ;  VII.  Heinse  à  Dùsseldorf;  son  Ardinghello; 
VIII.  Heinse  à  Mayence,  son  Hildegarde ;  IX.  Heinse  à  Aschaffen- 
bourg,  son  Anastasie  ;  X.  Heinse,  comme  homme,  artiste,  poète  et  écri- 
vain. 

M.  Sch.  n'apporte  pas  de  nouveaux  documents;  il  a  eu,  il  est  vrai, 

1.  Revue  critique,  1878,  n°  3,  art.  16. 


d'histoire  et  dk  littérature  35 

entre  les  mains  une  grande  partie  de  la  correspondance  de  Heinse,  mais 
toutes  les  lettres  du  sensuel  écrivain  ont  été  publiées  par  Kôrte,  Wa- 
gner, Laube,  Prôhle  et  Hettner,  et  M.  Sch.  n'a  pu  faire  que  quelques 
corrections  de  détail.  Son  livre  est  néanmoins  utile;  il  a  été  composé 
avec  un  grand  soin  et  une  très  louable  exactitude;  il  occupe  une  digne 
place  parmi  tous  les  travaux  qu'a  provoqués  dans  ces  derniers  temps  la 
Sturm-und  Drangperiode ;  comme  le  dit  M.  Sch.,  ce  n'était  pas  un 
mince  labeur  de  réunir  ces  abondants  matériaux  et  de  les  mettre  en 
œuvre;  cette  étude  d'ensemble  mérite  d'être  consultée,  et  le  sera  long- 
temps encore.  La  meilleure  partie  du  livre  est  consacrée  aux  rapports  de 
Wieland  et  de  Heinse;  M.  Sch.  a  très  bien  montré  l'influence  de  Wie- 
land  sur  les  premières  œuvres  du  jeune  étudiant  d'Erfurt;  mais  il  ra- 
conte aussi  d'une  façon  piquante  comment  Wieland  finit  par  trouver 
que  Heinse  l'imitait  trop;  après  avoir  complaisamment  accepté  les  hom- 
mages de  Heinse  qui  vantait  la  grâce  de  son  style  et  le  charme  de  ses 
peintures  licencieuses,  Wieland  traita  son  disciple  de  misérable,  à  qui 
le  priapisme  le  plus  ordurier  servait  d'inspiration.  Nous  reprocherons 
toutefois  à  M.  Sch.  de  Savoir  pas  assez  insisté  sur  la  critique  d'art  chez 
Heinse;  les  quelques  lignes  sur  les  Lettres  de  Dûsseldorf  ne  suffisent  pas, 
et  il  faudra  revenir  aux  pages  brillantes  de  Hettner  sur  le  même  sujet. 
Ardinghello  est  longuement  analysé,  et  impartialement  jugé;  mais  l'ap- 
préciation de  ce  roman  n'est  pas  complète  et  n'épuise  pas  tous  les  points 
de  vue;  M.  Sch.  ne  parle  pas  de  l'amour  du  héros  pour  la  Grèce  mo- 
derne; Heinse  est  un  prédécesseur  de  Byron;  il  a  influé  sur  Hôl- 
derlin  (Hyperion),  et  il  n'aurait  pas  été  inutile  de  rappeler  que 
«  l'Hymne  à  la  déesse  de  l'harmonie  »  a  comme  épigraphe  une  phrase 
&  Ardinghello.  Enfin,  dans  un  livre  sur  l'un  des  écrivains  les  plus  ori- 
ginaux de  la  littérature  allemande,  l'un  de  ceux  qui  ont  le  plus  de 
flamme  et  de  vigueur,  n'eût-il  pas  fallu  mettre  plus  de  couleur  et  de 
relief?  Mais  on  trouvera  dans  l'ouvrage  de  M.  Sch.  tous  les  faits  impor- 
tants de  la  vie  de  Heinse  et  de  solides  jugements  sur  ses  œuvres  ;  les 
dernières  pages  du  volume  sont  peut-être  ce  qu'on  a  écrit  de  plus  pé- 
nétrant et  de  plus  approfondi  sur  cet  étrange  génie,  à  la  fois  poète,  ro- 
mancier et  critique  d'art,  et  qui  fut,  comme  dit  M.  Schober,  le  prédica- 
teur inspiré  de  l'Evangile  de  la  nature  de  Rousseau  en  même  temps  que 
l'élève  le  plus  remarquable  de  Wieland  *. 

A.  Chuquet. 


i  .  L'ouvrage  se  termine  par  une  suite  de  lettres  déjà  reproduites  dans  les  «  lettres 
de  Wieland  à  différents  amis  »,  mais  M.  Schober  a  revu  soigneusement  l'original; 
on  y  trouvera  par  endroits  des  phrases  ou  des  mots  oubliés  dans  les  précédentes 
publications —  p.  72,  ligne  12,  lire  Prometheus ;  p.  82,  note  1,  ligne  3,  lire  Mau- 
villons;  pp.  91,  ligne  8,  et  118,  ligne  i3,  lire  bekleidete  et  non  «  begleitete  »;  — 
p.  123,  est-il  exact  de  dire  que  Forster,  réfugié  à  Paris,  y  «  succomba  sous  la  Ré- 
volution »  {erlag  der  Révolution);  —  pp.    125-127,  M.  Schober  se  prononce   contre 


36  REVUE    CRITIQUE 

141.  —  De  Vivo,  Grammatlca  délia  lingua  russa  con  spéciale  attenzione  al 
movimento  dell'  accento.  1  vol.  in-8°  de  vi,  344  p.  Dorpat,  Schnakenburg.  1882. 

La  grammaire  russe  de  M.  De  Vivo,  lecteur  à  l'université  de  Dorpat, 
est  le  premier  ouvrage  de  ce  genre  en  langue  italienne.  Il  rendra  évi- 
demment service  aux  compatriotes  de  l'auteur.  Il  tient  le  milieu  entre 
les  grammaires  scientifiques  et  les  grammaires  purement  expérimentales. 
M.  De  V.  —  et  nous  l'en  félicitons  —  n'y  a  point  admis  quelques-unes 
des  erreurs  traditionnelles  qui  défigurent  la  plupart  des  ouvrages  analo- 
gues. Dans  certains  cas  donnés,  il  lui  eût  cependant  été  facile  d'être  plus 
scientifique.  En  général,  on  étouffe  l'étranger  qui  veut  apprendre  le  russe 
sous  un  luxe  pernicieux  de  classes,  de  catégories,  de  formes,  etc..  La 
langue  russe  est  bien  assez  riche  par  elle-même  sans  qu'on  lui  prête 
des  richesses  factices.  Ainsi,  pour  le  verbe  (p.  1 56-157),  les  verbes  en 
a-ti,  iati,  ieti  sont  présentés  comme  formant  trois  combinaisons  diffé- 
rentes, alors  qu'ils  n'en  offrent  qu'une  en  réalité.  C'est  à  la  grammaire 
surtout  qu'il  faut  appliquer  le  mot  des  anciens  scolastiques  :  Entia  non 
sunt  multiplicanda  prœter  necessitatem. 

Le  défaut  de  la  plupart  des  grammaires  russes,  c'est  que  leurs  auteurs 
ignorent  le  slavon  qui  seul  peut  leur  donner  la  clef  d'une  foule  de  diffi- 
cultés apparentes.  Si  M.  De  V.  avait  un  peu  étudié  le  Handbuch  der 
Altbulgarischen  Sprache  de  M.  Leskien,  il  aurait  vu  comment  la 
grammaire  d'une  langue  très  riche  en  apparence  peut  se  réduire  à  une 
cinquantaine  de  pages  et  comment  les  classifications  doivent  s'établir 
sur  les  caractères  internes  des  mots  et  non  pas  sur  le  hasard  de  la  rime 
ou  de  l'ordre  alphabétique.  Les  verbes  prétendus  irréguliers  de  la  langue 
russe  gagnent  singulièrement  à  être  groupés  d'après  des  lois  scientifi- 
ques. Dans  le  tableau  des  verbes  irréguliers  (pp.  174-175),  les  verbes  à 
thème  en  a  et  à  thème  nasal  sont  confondus  dans  une  même  catégorie, 
au  grand  détriment  de  la  méthode  et  de  la  clarté.  A.  la  p.  178,  les  verbes 
dont  le  thème  se  termine  en  k  et  ceux  dont  le  thème  se  termine  en  g 
sont  également  confondus.  Evidemment  la  faute  n'en  est  pas  unique- 
ment à  l'auteur  qui  a  mis  à  profit  les  grammaires  antérieures  qu'il  avait 
sous  les  yeux.  Mais  il  est  regrettable  que  les  découvertes  de  la  linguisti- 
que moderne  n'aient  pas  encore  pénétré  dans  la  plupart  des  ouvrages 
élémentaires.  La  grammaire  de  M.  Bouslaiev  aurait  pu  fournir  à 
M.  De  Vivo  de  précieuses  indications.  Ces  réserves  faites,  cet  essai  n'en 
reste  pas  moins  une  œuvre  recommandable  ;  il  faut  louer  le  soin  de  l'au- 
teur à  élucider  les  questions  d'accentuation  et  l'exécution  typographique 
qui  est  très  convenable.  Louis  Léger.    . 

l'attribution  de  la  Fiormona  à  Heinse;  mais  la  question  ne  nous  semble  pas  entiè- 
rement résolue;  il  resterait  à  prouver  que  Meyer  de  Bramstedt,  l'ami  et  le  biogra- 
phe de  Schœder,  est  l'auteur  du  roman;  —  p.  i55,  ligne  12,  lire  Kurfùrstlicher,  et 
non  «  Kurfùrstlichen  ;  »  —  le  nom  de  Heinse  est  écrit  partout  «  Heinse  »,  sauf  sur  le 
dos  du  volume,  où  on  lit  Heinse;  —  enfin,  M.  Schober  eût  pu  tirer  parti  d'une  as- 
sertion de  Voss  (Herbst,  I,  116). 
?*»wfl  D  Vtt&l  «lima  , 


d'histoire  et  de  littérature  37 

CHRONIQUE 

în  ÛliBmraB'i: 

FRANCE.  —  La  publication  du  second  volume  de  Y  Histoire  de  l'art  de  MM.  Per- 
rot  et  Chipiez  a  commencé,  par  livraisons  hebdomadaires.  Ce  second  volume  com- 
prendra la  Chaldée,  l'Assyrie  et  la  Phénicie;  il  contiendra  environ  5oo  gravures 
dans  le  texte  et  i5  planches  hors  texte.  M.  Perrot  compte  y  publier,  d'une  manière 
à  peu  près  complète,  la  série  des  objets  rapportés  de  Chaldée  par  M.  de  Sarzec,  qui 
ont  été  acquis  l'an  dernier,  grâce  au  vote  par  les  Chambres  d'un  crédit  spécial,  et  qui 
ont  tant  ajouté  à  la  valeur  de  notre  collection  orientale;  on  en  aura  ainsi,  pour  la 
première  fois,  des  reproductions  fidèles. 

—  La  librairie  Pion  publie  un  ouvrage  de  M.  le  comte  Bernard  d'HARCOuRT,  inti- 
tulé :  Les  quatre  ministères  de  M.  Drouyn  de  Lhuys  et  un  volume  in-160  elzévi- 
rien,  tiré  à  petit  nombre,  renfermant  les  Sonnets  des  vieux  maistres  françois  (i520- 
1670). 

—  M.  Léonce  Person  va  publier  prochainement,  à  la  librairie  Cerf,  un  nouveau 
travail  sur  une  pièce  de  Rotrou,  le  Venceslas. 

—  Le  XVIe  et  dernier  volume  de  la  Correspondance  littéraire  de  Grimm,  Diderot, 
etc.,  publié  par  M.  Maurice  Tourneux  à  la  librairie  Garnier  vient  de  paraître;  il  ren- 
ferme les  Opuscules  de  Grimm,  de  nombreuses  lettres  inédites,  et,  outre  un  grand 
nombre  de  précieuses  informations,  une  table  analytique  fort  complète;  un  de  nos 
collaborateurs  donnera  prochainement  à  notre  recueil  un  article  d'ensemble  sur  cette 
vaste  publication  qui  renferme  près  de  la  moitié  de  l'histoire  littéraire  du  xvnr  siè- 
cle. 

—  Le  VIIe  volume  des  Etudes  sur  la  littérature  contemporaine,  de  M.  Edmond  Sche- 
rer  (Calmann  Lévy,  in-8e,  38o  p.),  renferme  les  études  et  articles  suivants  :  Words- 
worth  et  la  poésie  moderne  de  l'Angleterre  (pp.  i-5g,  à  propos  de  la  récente  publica- 
tion des  œuvres  choisies  du  poète,  par  M.  Matthew  Arnold)  ;  Thomas  Carlyle 
(pp.  60,  69);  Endymion  (pp.  70-83);  Don  Quichotte  (pp.  84-97,  à  propos  de  la  tra- 
duction de  M.  Lucien  Biart);  Les  deux  masques  (pp.  98-106);  Les  lettres  de Doudan 
/pp.  107-147);  Les  pensées  de  Doudan  (pp.  148-155);  «  Mes  pensées  »  (pp.  156-164); 
Emile  Zola  (pp.  i65-ig6);  Louis  XIV  et  la  république  de  Genève  (pp.  197-208, 
d'après  l'ouvrage  de  M.  Albert  Rilliet  sur  «  le  rétablissement  du  catholicisme  à  Ge- 
nève il  y  a  deux  siècles  »);  Les  origines  de  la  triple  alliance  (pp.  208-229),  d'après  le 
livre  de  M.  Sorel.  «  La  question  d'Orient  au  xvme  siècle  »  ;  la  Revue  critique  n'a  pas 
parlé  de  cet  ouvrage;  disons  donc  que  M.  Scherer  y  admire  «  l'érudition  qui  a  réuni 
tant  de  faits  nouveaux  ou  imparfaitement  connus  jusqu'ici,  la  sagacité  avec  laquelle 
ces  faits  sont  interprétés,  l'agrément  enfin  que  des  vues  ingénieuses  et  de  piquantes 
citations  jettent  dans  une  relation  nécessairement  sévère  ».  Le  seul  défaut  que  la  cri- 
tique reproche  à  l'auteur,  c'est  «  la  complexité  du  récit.  »  M.  Taine  et  la  Révolu- 
tion (pp.  230-247;  art.  qui  conclut  ainsi  :  «La  Révolution  française  a  eu  la  vertu 
de  transformer  le  plus  désintéressé,  en  apparence,  et  le  plus  abstrait  de  nos  penseurs 
en  un  polémiste  échauffé,  en  un  écrivain  de  parti  et  de  parti-pris  »);  Les  Mémoires  de 
Mm«  deRémusat  (pp.  248-265;  ces  souvenirs,  dit  M.  Scherer,  ont  pris  place  parmi  les 
documents  les  plus  précieux  pour  la  connaissance  du  caractère  moral  de  Napoléon)  ; 
Le  christianisme  et  ses  origines,  par  Ernest  Havet  (pp.  266-282);  Le  Port-Royal  de 
Sainte-Beuve  (pp .  282-295);  Ce  que  c'est  qu'un  jésuite  (pp.  296-307)  ;  L'Encyclique 
Aeterni  Palris  (pp.  3o8-3 1 3)  ;  L'Horace  de  M.  le  comte  Siméon  (pp.  314-317). 
M.  de  Sacy  (p.  3 18-334)  ',  Emile  Littré  (pp.   335-346)  ;  Réceptions  de  MM.  Renan, 


38  KKVUK    CK1TIQ1JK 

d' '  Audiffret-Pasquier ,  Du  Camp  à  l'Académie  française  (pp.  347-368);  Les  clichés, 
lettre  au  directeur  du  «  Temps  ».  (pp.  369-378.) 

ALLEMAGNE.  —  Parmi  les  prochaines  publications  de  la  librairie  Teubner,  de 
Leipzig,  nous  signalerons  les  suivantes  :  i°  de  M.  Moritz  Schmidt,  un  travail  inti- 
tulé :  ùber  den  Bau  der  pindarischen  Strophen;  —  20  de  M.  Otto  Ribbeck,  une  étude 
sur  ràXa£(î)V,  dans  l'antiquité  et  la  comédie  gréco-romaine,  avec  une  traduction  du 
«  Miles  gloriosus  »  de  Plaute  (Ala^on,  ein  Beitrag  %ur  antiken  Ethologie  und  ^ur 
Kenntniss  der  griechisch-rœmischen  Komœdie,  nebst  Ueberset^ung  des  Plautinis- 
chen  Miles  Gloriosus  ;  —  3°  la  correspondance  de  Bœckh  et  d'Otfried  Mûller  (Brief- 
wechsel  ^wischen  Aug.  Bœckh  und  Karl  Otfried  Mûller,  ces  lettres  ont  été  écrites  de 
1818  à  i83g  et  dans  l'une  d'elles,  datée  du  22  octobre  i835,  Otfried  Mùller  écrit  à 
Bceckh  qu'en  mettant  en  ordre  cette  correspondance,  il  a  été  véritablement  ému  par 
l'affection  paternelle  que  Bceckh  n'a  cessé  de  lui  témoigner,  par  ces  preuves  d'une 
amitié  qui  ne  s'est  jamais  lassé  de  l'encourager  et  de  lui  montrer  le  droit  chemin); 
—  40  la  première  partie  des  Opéra  rhetorica  de  Cicéron,  éditée  par  M.  W.  Fried- 
rich ;  —  5°  le  premier  volume  d'une  édition  hongroise  de  l'Edda,  comprenant  l'Atla- 
mâl,  par  M.  Lomnitzi  Meltzl  Hugo  {A  régi  Edda  hœsénekei,  I  Kœtet.  A%  Atlamal 
(Atlamal  en  Gronlen^co) . 

—  Le  comité  d'administration  de  la  «  fondation  Wedekind  »  (Wedekindsche 
Preisstiftung  fur  deutsche  Geschichte)  décernera  trois  prix  pour  les  travaux  suivants, 
à  écrire  soit  en  allemand,  soit  en  latin.  Premier  prix  (1,000  thalers)  une  édition  des 
Denkwùrdigketein  ùber  Leben  und  Zeit  Kaiser  Sigismunds  du  Mayençais  Eberhard 
Windeck. — Deuxième-prix  (1,000  thalers)  Geschichte  des  jùngeren  Hauses  der  Wel- 
f en  von  io55-i  2,35  (von  dem  ersten  Auftreten  Welf  IV in  Deutschland  bis  ^ur  Er- 
richtung  des  Her^ogthums  Braunschweig-Lûneburg) .  —  Troisième  prix  :  un  tra- 
vail quelconque  sur.l'histoire  de  l'Allemagne,  mais  ce  doit  être  un  travail  d'ensemble 
relatif  à  un  des  grands  états  de  l'empire  (voir,  pour  plus  de  détails,le  n°  14  des  Nach- 
richtende  la  Société  royale  des  sciences  de  Gœttingue,  pp.  417-424). 

—  On  annonce  la  mort  de  Frédéric-Guillaume-Auguste  Mullach,  professeur  ex- 
traordinaire à  l'Université  de  Berlin,  éditeur  des  Fragmenta  philosophorum  Grae- 
corum  (Didot,  3  volumes),  auteur  d'un  Grundriss  der  griechischen  Vulgœrsprache, 
hé  en  1807;  —  de  M.  Ant.  Phil.  Edzardi,  professeur  extraordinaire  à  l'Université  de 
Leipzig;  —  de  M.  Ad.  Schœll,  bibliothécaire  en  chef  de  la  Bibliothèque  de  Weimar. 

—  L'Université  de  Gœttingue  (province  de  Hanovre)  a  r,o83  étudiants.  286,  dont  221 
sujets  prussiens,  s'occupent  de  philologie  et  d'histoire. 

BELGIQUE.  —  La  classe  des  lettres  de  l'Académie  royale  de  Belgique  a  entendu 
la  lecture  du  rapport  du  jury  chargé  d'examiner  les  ouvrages  présentés  au  concours 
pour  le  prix  Joseph  De  Keyn  (2e  période  :  ouvrages  laïques  d'instruction  et  d'éduca- 
tion moyennes).  Nous  avons  fait  connaître  le  résultat  de  ce  concours.  Outre  les  ou- 
vrages couronnés,  le  jury  a  accordé  une  mention  spéciale  aux  suivants  :  une  édition 
du  discours  pro  Archia,  de  Cicéron,  par  M.  Paul  Thomas;  Marnix,  par  M.  Paul 
Fredericq,  et  une  Etude  sur  l'administration  de  l'ancienne  ville  de  Gand,  par  M.  L. 
de  Rycker  (dans  le  Willems-Fonds) ;  Joseph  II  et  l'ancien  régime,  par  M.  Théodore 
Juste  (Bibliothèque  Gilon),  etc. 

—  Dans  la  séance  dû  b  juin  de  la  classe  des  lettres  de  l'Académie  royale  de  Belgi- 
que, M.  Lamv,  en  faisant  hommage  à  la  classe  du  tome  Ier  des  Hymni  et  sermones 
de  Saint-Ephrem,  édités  par  lui,  a  donné  lecture  de  la  note  suivante  :  «  Ephrem, 
diacre  de  l'église  d'Edesse,  est,  sans  contredit,  le  plus  grand  écrivain  qu'ait  jusqu'ici 
produit  l'Orient  chrétien.  Contemporain  de  S.  Basile  et  de  S.  Athanase,  plus  ancien 
que  S.  Jean  Chrysostome,  que  S.  Jérôme  et  que  S.  Augustin,  il  occupe  dans  l'Eglise 


i>HlSTOU<iï  Kl     DK    L1TTEKATURB  39 

syrienne  le  même  rang  que  ces  grands  docteurs  occupent  dans  l'Eglise  latine  et  dans 
l'Eglise  grecque,  Ses  commentaire»  sur  les  Ecritures  se  distinguent  par  leur  conci- 
sion et  leur  exactitude  à  expliquer  le  sens  littéral  selon  la  méthode  de  l'école  d'An- 
tioche;  ses  discours  sont  aussi  remarquables  parleur  éloquence  entraînante  que  la 
sublimité  de  la  doctrine;  ses  hymnes,  extrêmement  nombreuses,  contiennent  une 
poésie  inimitable,  tantôt  gracieuse,  tantôt  sublime,  tantôt  plaintive,  selon  les  sujets, 
toujours  orientale  et  biblique,  qui  n'a  rien  d'analogue  dans  nos  poésies  occidentales, 
mais  qui  a  servi  de  modèle  aux  Mélodes  byzantins.  Un  Belge,  Gérard  Vossius,  a,  le 
premier,  recueilli  et  publié  à  Rome,  sur  la  fin  du  xvi°  siècle,  en  trois  volumes  in-fo- 
lio, tout  ce  qu'il  a  pu  trouver  des  écriis  de  S.  Ephrem  dans  les  manuscrits  grecs  et 
latins.  Jusqu'alors  les  manuscrits  syriaques  faisaient  défaut  dans  les  bibliothèques 
d'Europe.  Au  commencement  du  siècle  dernier,  les  savants  maronites  de  Rome,  sous 
l'impulsion  de  Clément XI,  se  rendirent  en  Egypte,  visitèrent  le  désert  de  Nitrée  et 
trouvèrent  dans  le  monastère  de  Notre-Dame  des  Syriens  une  riche  bibliothèque. 
Us  obtinrent,  non  sans  peine,  une  cinquantaine  de  manuscrits  syriaques  de  la  plus 
haute  antiquité  qui  sont  maintenant  un  des  plus  beaux  ornements  de  la  Bibliothèque 
vaticane.  Quatre  codices  du  vi*  siècle  contenaient  une  partie  considérable  des  œuvres 
de  S.  Ephrem,  inconnus  jusqu'alors  en  Occident.  Trois  doctes  maronites  furent 
chargés  d«  les  publier.  Leur  travail,  qui  dura  quatorze  ans,  de  1732  à  1746,  ajouta 
aux  écrits  grecs  et  latins  du  diacre  d'Edesse  trois  volumes  d'œuvres  inédites  publiées 
cette  fois  dans  le  texte  original.  Depuis  lors,  les  biliothèques  des  grandes  capita- 
les de  l'Europe  se  sont  enrichies  de  nombreux  manuscrits  syriaques.  Le  British 
Muséum,  entre  autres,  a  acquis  toute  la  bibliothèque  du  couvent  de  Notre-Dame  des 
Syriens.  C'est  de  là,  ainsi  que  des  bibliothèques  de  Paris  et  d'Oxford,  que  j'ai  trans- 
crit les  documents  dont  j'offre  aujourd'hui  le  premier  volume  à  l'Académie.  Le  texte 
syriaque  est  accompagné  d'une  traduction  latine,  de  variantes  et  de  notes  et  précédé 
de  prolégomènes  assez  étendus.  Ce  premier  volume  contient  i5  hymnes  sur  l'Epi- 
phanie, 1 5  hymnes  sur  la  dernière  Cène,  8  hymnes  pour  le  Vendredi-Saint  et  1 1  dis- 
cours sur  la  Passion,  la  Résurrection  et  d'autres  sujets.  » 

DANEMARK.  — Nous  apprenons  la  mort  (11  novembre  1881)  deM.C.  Engelhardtj 
secrétaire  de  la  Société  royale  des  antiquités  du  Nord  ;  son  successeur  est  M.  Sophus 
Mûller,  —  et  (3  juin  1882)  de  M.  Caspar  Peter  Paludan-Muller,  professeur  d'his- 
toire à  l'Université  de  Copenhague,  connu  par  de  nombreux  ouvrages,  la  Législa- 
tion de  Harald Blaatand  (i83z),  Riençi  (i836),  Machiavel  (i83ç)),  Le  Traité  de  Cal- 
mar (1840),  La  mort  de  Charles  XII  (1847),  La  guerre  du  comte  (1802-54),  Les 
premiers  rois  de  la  dynastie  d'Oldenbourg,  etc. 

TURQUIE.  —  Le  gouvernement  ottoman  a  nommé  dernièrement  directeur  des  bi- 
bliothèques de  Constantinople  Schalich-Effendi,  qui  a  commencé  à  faire  dresser 
le  catalogue  général  des  livres  imprimés  et  des  manuscrits  y  existant.  Il  a  déjà  révélé 
l'existence  de  manuscrits  précieux,  entre  autres  la  copie  d'un  anecdoton  géoponique 
dont  le  prototype  a  existé  dans  la  bibliothèque  d'Alexandrie,  détruite  au  vne  siècle. 


ACADEMIE  DES  INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  3 o  juin  1882. 
L'auteur  du  mémoire  unique  déposé  au  concours   pour  le   prix  Bordin,  sur  cette 
question  :  Etudier  les  documents  géographiques  et  les  relations   de  voyage  publiées 


40  REVUE    CRITIQUE    D  HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURB 

par  les  Arabes  du  111e  au  vme  siècle  de  l'hégire,  etc.,  auquel  une  récompense  de 
i,5oo  fr.  a  été  décernée  sur  les  fonds  du  prix,  est  M.  L.  Marcel  Devic,  professeur  à 
la  faculté  des  lettres  de  Montpellier. 

Le  prince  S.  Abamelek-Lazarew  envoie  un  estampage  de  la  grande  inscription 
palmyrénienne  et  grecque,  découverte  par  lui  à  Palmyre,  dont  M.  Waddington  a 
entretenu  dernièrement  l'Académie.  Il  regrette  de  n'avoir  pu  prendre  qu'un  estam- 
page imparfait,  étant  pressé  par  le  temps;  de  plus,  le  paquet  a  été  maltraité  par  la 
douane  à  l'entrée  en  Russie,  au  port  d'Odessa. 

M.  Léon  Renier  lit  un  mémoire  de  M.  E.  Masqueray,  intitulé  :  Étude  des  ruines 
d'El-Meraba  des  Beni-Ouelban.  Ces  ruines,  situées  dans  le  département  de  Cons- 
tantine,  ont  été  déjà  explorées  plusieurs  fois  par  diverses  personnes,  et  on  a  publié 
une  vingtaine  d'inscriptions  latines  qui  y  ont  été  découvertes.  M.  Masqueray  vient 
de  les  visiter  à  son  tour  et,  à  l'aide  des  ressources  qui  ont  été  mises  à  sa  disposition 
par  M.  le  gouverneur  général  de  l'Algérie,  il  a  pu  y  faire  exécuter  des  fouilles,  aux- 
quelles cinquante  ouvriers  indigènes  ont  été  employés  pendant  douze  jours.  Il  a  re- 
connu le  forum  et  la  nécropole  d'une  cité  antique,  et  il  a  découvert  environ  cent 
trente  inscriptions  inédites.  D'après  quelques  unes  de  ces  inscriptions,  la  ville  ro- 
maine qui  occupait  l'emplacement  actuel  d'El-Meraba  était  une  colonie,  appelée  res- 
publica  coloniae  Celtianensium. 

M.  Oppert  lit  un  mémoire  intitulé  :  Un  Poids  médique  au  Louvre.  L'objet  qu'il 
étudie  est,  non  un  poids,  mais  une  anse  de  poids,  récemment  acquise  par  le  musée 
du  Louvre.  On  y  remarque  une  inscription  cunéiforme,  dans  laquelle  M.  Oppert 
reconnaît  un  texte  médique.  Il  propose,  à  titre  de  conjecture  et  sans  en  affirmer 
l'exactitude,  la  traduction  suivante  :  «  Un  sixième.  Maison  royale.  Cent  drachmes.  » 
Il  pense  que  les  expressions  «  un  sixième  »  et  «  cent  drachmes»  sont  synonymes; 
ce  sont  deux  manières  de  désigner  un  même  poids,  d'après  deux  unités  différentes. 
M.  E.  Desjardins  communique  de  la  part  de  M.  Poinssot,  délégué  de  la  Société 
d'archéologie  d'Oran,  l'inscription  suivante,  trouvée  à  Agbal,  près  de  Lamoricière, 
entre  Tlemcen  et  Sidi-bel-Abbès,  par  le  major  Demaeght  : 

AVRELIOANTO 

LSEPTIMISEVERI 

PERTI .  AVGPATRI 

PRO   PRINCIPATV 

STATVAMQVAM 

POLLICTVSEST 

SECVNDVMACTA 

PVBLICA.P.VALE 

RIVS  .  LONGVS 
PRINCEPS 

PVALERILONGI 

PRINCIPIS  .  FIL 
POSVIT 
Aurelio  Antonino,  L.  Septimi  Severi  Pertinacis  patri,  pro  principatu,  statuant  quant 
pollicitus  est  secundum  acta  publica,  P.  Valerius  princeps  P.  Valeri  principis  filius 
posuit.  L'auteur  de  cette  dédicace  avait  promis,  sous  le  règne  de  Marc  Aurèle,  d'éle- 
ver une  statue  à  ce  prince,  s'il  obtenait  les  honneurs  du piincipatus.  La  statue  n'a- 
vait pu  être  achevée  que  beaucoup  plus  tard,  sous  le  règne  de  Septime  Sévère.  Alors 
on  mentionna  dans  l'inscription,  avec  le  nom  de  l'empereur  auquel  la  statue  était 
consacrée,  celui  de  l'empereur  régnant,  et  l'on  indiqua  la  paternité  fictive  et  pos- 
thume que  Septime  Sévère  avait  attribuée  à  Marc  Aurèle,  en  se  déclarant,  par  dé- 
cret, son  fils  adoptif.  La  promesse  de  statue,  faite  par  Publius  Valerius,  avait  été 
inscrite  dans  les  actes  publiés  de  la  cité;  c'est  un  fait  dont  on  ne  connaissait  pas 
encore  d'exemple. 

M.  Aube,  continuant  sa  lecture  sur  Polyeucte,  indique  quels  sont  les  documents 
écrits  qui  nous  renseignent  sur  l'histoire  de  ce  personnage.  Deux  relations  de  son 


pli 

homélie  destinée  à  être  dite  dans  les  églises  d'Orient,  à  l'occasion  de  la' fête  de  saint 
Polyeucte. 

Ouvrages  présentés  :  —  par  M.  Oppert  :  i°  Chossat  (E.  de),  Répertoire  sumérien 
(accadien),  Lyon,  1882;  2°  Haupt  (Paul),  Die  sumerisch-akkadische  Sprache;  —  par 
M.  L.  Delisle  :  i°  Chronique  de  Jean  de  Saint-Paul,  publiée  par  A.  delà  Borderie, 
Nantes,  1881  ;  20  Bengesco  (Georges),  Voltaire,  bibliographie  de  ses  œuvres,  tome  I, 
Paris,  1882  ;  3*  Buzy  (J  .-B.),  Dom  Maugérard  ou  Histoire  d'un  bibliographe  lorrain, 
Châlons,  1882  ;  4°  Collection  de  documents  pour  servir  à  l'histoire  des  hôpitaux  de 
Paris,  tome  I,  délibérations  de  l'ancien  bureau  de  l'Hôtel- Dieu,  publiées  par  A. 
Brièle,  fasc.  2,  années  1674-1767. 

Julien  Havet. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 
Le  Puy,  typ.  et  lith.  Marchessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

N°  29  -   17  Juillet  —  1882 

— — — — — — ■    » ■■!■■       .■■  —  ——■——    I     I  II  .11.1     I.  !■■       «««Illllll       ■!■  ■     ■■IHI1WWI É.    Il— ■■!■■  ■       ■!■!!!■«■ 

Sommaire  :  142.  Le  Catilina  de  Salluste,  p.  p.  Schmalz.  —  143.  Eichert,  Lexi- 
que de  Justin.  —  144.  Gierke,  Les  doctrines  de  l'état  et  de  la  corporation.  — 
145.  Kugler,  Histoire  des  Croisades.  —  146.  Douais,  Les  sources  de  l'histoire  de 
l'Inquisition  dans  le  midi  de  la  France.  —  147.  Lair,  Louise  de  La  Vallière  et  la 
jeunesse  de  Louis  XIV.  —  148.  Haller,  Histoire  de  la  littérature  russe.  —  Va- 
riétés :  Guvard,  Le  mot  assyrien  «  tamkâru  ».  —  Chronique.  —  Société  des  anti- 
quaires de  France.  —  Académie  des  Inscriptions. 


I42.  —  C.  Sallusti  Crispi  de  Catilinae  conjura tione  libei  ,  fur  den  Schul- 
gebrauch  erklaert  von  J.  H.  Schmalz.  Gotha,  Perthes.  1882. 

Cette  nouvelle  édition  du  Catilina  doit  être  suivie,  à  bref  délai,  par 
une  édition  du  Jugurtha,  dans  laquelle  M.  Schmalz  se  réserve  d'indi- 
quer les  différences  qui  existent  entre  le  texte  qu'il  a  adopté  et  celui  de 
Jordan  (2e  édition),  qu'il  a  pris  pour  base  de  son  travail.  Il  convient 
d'attendre  la  publication  de  cet  appendice  critique  que  nous  promet 
M.  S.,  pour  apprécier  la  façon,  dont  il  a  établi  son  texte  *.  Aussi  je  ne 
m'occuperai  ici  que  du  commentaire. 

M.  S.  avait  à  lutter  contre  une  concurrence  redoutable.  Le  commen- 
taire de  R.  Jacobs  et  de  Wirz,  très  répandu  en  Allemagne,  a  une  haute 
valeur.  Je  n'irai  pas  jusqu'à  dire  que  le  travail  du  nouvel  éditeur  est  des- 
tiné à  le  remplacer;  du  moins,  il  peut  tenir  auprès  de  lui  une  place  fort 
honorable  et  rendre  d'utiles  services.  Il  est  conçu,  d'ailleurs,  sur  un  plan 
un  peu  différent.  C'est  ainsi  que  la  partie  historique  est  à  peu  près  complè- 
tement sacrifiée  dans  l'annotation  de  M.  Schmalz.  En  France,  une  pareille 
omission  serait  regrettable;  elle  a  peut-être  moins  d^nconvénients  en 
Allemagne,  où  les  élèves  ont  à  leur  disposition  plus  de  secours  (manuels, 
dictionnaires  d'antiquités,  etc.)  et  sont  mieux  habitués  à  en  faire  usage  2. 


1.  Autant  que  j'en  puis  juger  par  une  première  lecture  un  peu  rapi'de,  le  texte  du 
nouvel  éditeur  ne  s'écarte  de  celui  de  Jordan  que  dans  un  très  petit  nombre  de  pas- 
sages. Parmi  ces  changements,  il  y  en  a  qui  ne  me  paraissent  pas  suffisamment  jus- 
tifiés :  ainsi,  29,  1,  au  lieu  de  «  exagitatam  »,  qui  offre  un  sens  très  satisfaisant, 
M.  S.  reproduit  la  leçon  «  exagitatum  »;  3i,  5,  il  écrit  «  Si  cujus  jurgio  lacessitus 
foret  »  au  lieu  de  :  «  Sicut  jurgio  lacessitus  foret  »;  le  texte  de  Jordan  est  inexpli- 
plicable,  mais  la  conjecture,  d'ailleurs  ingénieuse,  qui  a  été  admise  par  M.  S.,  ne 
vaut  pas,  je  crois,  celle  de  Linker  «  Sicubi  jurgio...  »;  5i,  i5,  «  Severior  »  au  lieu 
de  «  Sœvior  »,  malgré  l'autorité  de  Wirz  et  des  éditeurs  assez  nombreux  qui  ont 
adopté  cette  leçon  il   n'y  a  pas  lieu  de  modifier  le  texte  de  Jordan. 

2.  D'ailleurs,  l'auteur  n'est  pas  toujours  resté  fidèle  à  son  système  et,  quoiqu'il  se 
défende   dans  son   avant-propos   d'avoir  voulu  faire  un   commentaire  historique,  il 

M  II  >   •  l/l  Vv  „  Vl 

Nouvelle  série,  X'V.  S 


42  RliVUK    CR1T1QUK 

M.  S.  a  voulu  faire  un  commentaire  purement  grammatical  et  il  est 
juste  de  reconnaître  qu'il  s'est  acquitté  très  heureusement  de  la  tâche 
qu'il  s'était  proposée.  A  une  connaissance  sérieuse,  approfondie,  de  la 
langue  de  Salluste,  il  joint  une  rare  expérience  de  l'enseignement.  C'est 
même  par  ce  caractère  d'utilité  pratique  que  son  travail  se  recommande 
le  plus.  On  pourrait  reprocher  à  l'annotation  d'être  un  peu  surabon- 
dante, parfois  même  un  peu  prolixe;  mais,  dans  l'ensemble,  elle  est  bien 
appropriée  aux  besoins  de  l'enseignement.  M.  S.  s'est  abstenu  le  plus 
souvent,  et  il  a  eu  raison,  de  faire  des  notes  de  simple  traduction,  mais 
il  a  indiqué  avec  beaucoup  de  soin  les  procédés,  il  serait  plus  juste  de 
dire  les  principes  de  la  méthode  dont  l'élève  devra  se  servir  pour  rendre 
en  allemand  et  d'une  manière  conforme  au  génie  de  la  langue  les  phra- 
ses et  les  expressions  de  Salluste.  Toute  cette  partie  du  commentaire  est 
faite  avec  une  exactitude  minutieuse  et  me  paraît  digne  des  plus  grands 
éloges.  De  même  l'auteur  est  très  attentif  à  définir  les  particularités  de  la 
langue  de  Salluste,  à  exposer  en  quoi  elle  diffère  de  la  langue  classique, 
avertissant  l'élève  que  tel  mot  est  détourné  de  son  acception  ordinaire, 
que  telle  construction  ne  doit  pas  être  imitée.  La  seule  critique  que  j'a- 
dresserai sur  ce  point  à  M.  S.,  c'est  qu'il  a  péché  par  excès  de  conscience 
et  de  scrupule  ;  plusieurs  des  remarques  qu'il  a  pris  la  peine  de  rédiger 
ainsi,  conviendraient  peut-être  mieux  à  un  enseignement  donné  de  vive 
voix. 

En  ce  qui  concerne  l'interprétation,  je  serais  presque  toujours  d'ac- 
cord avec  le  nouvel  éditeur.  Il  y  a  cependant,  plusieurs  passages,  où  je 
ne  puis  me  ranger  à  son  opinion.  Je  citerai,  un  peu  au  hasard,  quelques 
exemples  :  5r,  28.  «  Lacedaemonii  devictis  Atheniensibus  triginta  viros 
imposuere  »;  dans  cette  phrase,  M.  S.  veut  que  devictis  Atheniensibus 
soit  un  ablatif  absolu;  j'y  verrais  plutôt,  avec  Kritz  et  la  plupart  des 
commentateurs,  un  datif,  régi  par  imposuere. 

5 1,  38  :  «  imitari  quam  invidere  bonis  malebant  »,  pour  M.  S.  bonis 
est  un  masculin  ;  bien  que  cette  opinion  ait  été  adoptée  par  un  certain 
nombre  d'éditeurs,  je  reste  convaincu,  avec  Kritz,  que  bonis  est  au 
neutre. 

54,  4  :  «  bellum  novom  »  est  expliqué  à  peu  près  comme  s'il  y  avait 
dans  le  texte  «  bellum  integrum  »  ;  cette  interprétation  est  inadmissible. 

59,  3  :  «  evocatos  »  est  pris  dans  le  sens  de  vétérans;  je  n'ignore  pas 
que  cette  explication  a  pour  eile  de  nombreuses  autorités,  cependant  je 
ne  crois  pas  qu'il  y  ait  lieu  de  conserver  ici  à  evocatus  son  sens  techni- 
que et  je  l'expliquerais,  comme  Gerlach,  «  appelé  hors  des  rangs  ». 

59,  5  :  <i  equo  circumiens  »  est  rapproché  de  l'expression  française 


n'a  pu  se  dispenser  de  donner,  au  moins  de  temps  en  temps,  quelques  explications, 
qui  sont  un  peu  en  dehors  du  cadre'  qu'il  s'était  tracé.  Quoi  qu'il  en  soit,  j'exprime- 
rai le  vœu  que  M.  S.  mette  à  la  fin  de  son  2e  volume  un  dictionnaire  des  noms  pro- 
pres. 


d'histoire  et  de  littérature  43 

«  aller  à  cheval  »  ;  j'avoue  ne  comprendre  ni  l'utilité  ni  la  justesse  de  ce 
rapprochemeut. 

L'introduction  de  M.  Schmalz  expose  sous  une  forme  abrégée,  mais 
d'une  façon  suffisamment  claire  et  précise,  tout  ce  qu'il  est  indispensa- 
ble de  savoir  sur  la  vie  et  les  oeuvres  de  Salluste. 

R.  Lallier. 


143.  —    Vollstsemliges    Wœrterbncli    atur    Pliîliupischen   Gesehlclite 

des  Justlnu».  Von  Dr.  Otto  Eichert.  Hannover,  Hahn.  1882,  111-200  p.  in-8°. 

Le  but  de  ce  lexique  est  de  faciliter  aux  élèves  la  préparation  du  texte 
de  Justin.  Les  signes  de  quantité  dont  l'auteur  charge  les  mots  latins 
seraient  plus  à  leur  place  dans  le  lexique  d'un  poète.  La  traduction  qui 
accompagne  chaque  mot  s'adresse  aux  élèves  allemands;  elle  est,  en  gé- 
néral, sans  intérêt  pour  les  érudits  et  pour  le  public  français. 

Tout  en  destinant  son  travail  aux  élèves,  M.  Eichert  s'est  efforcé  de 
dépouiller  Justin  pour  l'usage  des  grammairiens,  mais  seulement  dans 
la  mesure  où  son  cadre  le  lui  a  permis.  Il  faut  regretter  un  peu  que  ce 
but  secondaire  n'ait  pas  été  le  but  principal.  11  n'eût  pas  été  beaucoup 
plus  difficile  de  dresser  un  index  uerborum  qui  fût  complet  pour  les  noms, 
pour  les  verbes,  pour  les  adverbes  et  pour  toutes  les  particules  qui  ne  sont 
pas  trop  fréquentes.  Le  plus  fâcheux,  c'est  que  le  lexique  s'applique  non 
à  Justin  lui-même,  tel  qu'on  peut  le  reconstituer,  mais  au  Justin  de  cer- 
taines éditions.  L'auteur  suit  Jeep  (réimpression  donnée  en  1876  de 
l'édition  de  1859)  en  se  reportant,  dans  certains  cas  importants,  aux  édi- 
tions antérieures  de  Frotscher  et  Dûbner.  Avec  un  petit  nombre  de  jour- 
nées de  travail  de  plus,  il  eût  pu  tenir  compte  directement  des  sources  et 
mettre  à  profit  les  quelques  travaux  postérieurs  à  l'édition  Jeep.  S'il 
avait  consulté,  par  exemple,  l'article  de  M.  Harant  sur  le  Justin  de  Laon 
(Revue  de  philologie,  1878,  pp.  78  et  suivantes),  il  eût  effacé  un  faux 
exemple  defilia  pour  le  remplacer  par  un  exemple  du  pluriel  7^"  aux 
sens  d'enfants,  mâles  ou  femelles.  Toutefois,  il  faut  reconnaître  que, 
dans  bien  des  circonstances,  un  philologue  tirera  profit  de  la  publication 
de  M.  Eichert  et  lui  saura  gré  de  ses  peines  '. 

La  librairie  Hahn  n'a  pas  fait  coudre  la  brochure,  ce  qui  est  d'une  in- 
commodité insupportable  pour  un  lexique. 

Louis  Havet. 


144.  —  Otto  GlERKE.  Das  tient  relie  Genoeiengclmftsreclit ,  111er  Band;  die 
Staats-und  Corporationslehre  des  Altertums  und  des  Mittelalters  und  ihre  Auf- 
nahme  in  Deutschland.  Berlin,  Weidmann.  1881,  in-8°,  lu  et  826  p.—  Prix  :  12  m. 

M.  O.  Gierke  vient  d'ajouter  un  troisième  volume  au  grand  ouvrage 

1.  Le  livre  n'est  pas  exempt  de  fautes  de  détail.  Voir  Philologische  Wochenschrift, 
1882,  n°  14,  pp.  429-430. 


44  REVUE    CKlIlQUfc. 

intitulé  Das  deutsche  Genossenschaftsrecht  dont  il  a  commencé  la  pu- 
blication en  1868.  L'intérêt  de  cet  ouvrage  est  très  vaste  et  très  général, 
bien  que  le  titre  vise  seulement  l'Allemagne  :  il  s'agit  d'une  étude  très 
compréhensive  sur  toutes  les  notions  et  tous  les  droits  de  collectivité. 
Dans  le  volume  que  nous  avons  sous  les  yeux,  M .  O.  Gierke  étudie  les 
notions  Etat,  Corporation  dans  l'antiquité  et  au  moyen  âge  ;  il  s'oc- 
cupe surtout  de  l'histoire  des  théories,  ce  qui  donne  à  ce  beau  travail 
une  allure  un  peu  froide  peut-être  et  un  peu  scolastique.  Rien  d'aussi 
considérable  n'avait  encore  été  publié  sur  cette  matière  :  ce  livre  s'a- 
dresse aux  philosophes  tout  autant  qu'aux  historiens. 


145.  —  Gescliichte  dei*  Kreuzzûge,  von  Dr.  Bernhard  Kugler,  Professor  an 
der  Universitaet  Tûbingen.  Mit  Illustrationen  und  Karten.  Berlin,  Grote.  1880, 
in-8°,  vin-444  p. 

L'histoire  des  croisades  de  M.  Kugler  fait  partie  de  l'Histoire  uni- 
verselle de  W.  Oncken.  On  ne  pouvait  faire  un  meilleur  choix  pour 
ce  travail  difficile:  M.  K.  est  bien  connu  'de  tous  les  érudits  qui  s'occu- 
pent de  l'histoire  des  croisades  et  de  l'Orient  latin,  et  tous  ont  lu  les 
Studien  \ur  Geschichte  des  \weiten  Krew{\uges,  parus  en  1866.  Pré- 
paré à  sa  tache  par  une  longue  étude  des  sources,  l'auteur  a  pu,  sans 
dépasser  le  cadre  assez  exigu  qui  lui  était  imposé  par  les  proportions  de 
l'œuvre  dont  son  histoire  fait  partie,  donner  un  résumé  nourri  de  faits 
et  d'idées,  composé  soit  d'après  les  documents  originaux  eux-mêmes, 
soit  d'après  les  ouvrages  critiques  les  plus  autorisés.  Dès  les  premières  pa- 
ges dans  lesquelles  l'auteur  résume  l'histoire  de  l'Orient  depuis  la  con- 
quête arabe  du  vne  siècle  jusqu'aux  préliminaires  de  la  première  croi- 
sade, on  sent  qu'on  a  affaire  à  un  érudit  habitué  à  employer,  à  discuter 
les  textes  et  qui,  par  suite,  ne  répète  pas  les  historiettes,  dont  sont 
farcies  la  plupart  des  histoires  générales  des  croisades  écrites  en  fran- 
çais. Il  est  surtout  parfaitement  au  courant  des  travaux  parus  tant  en 
Allemagne  qu'en  France  sur  cette  période  historique,  et  cette  qualité 
est  à  noter.  L'histoire  des  croisades  s'enseigne  aujourd'hui  encore,  en 
France,  d'après  la  mauvaise  compilation  de  Michaud  ;  cette  œuvre  am- 
poulée et  déclamatoire  jouit  encore  d'un  succès  incroyable,  qu'elle  pouvait 
mériter  vers  l'an  de  grâce  1840,  et  c'est  par  elle  que  les  écoliers  studieux 
apprennent  à  connaître  ces  expéditions,  auxquelles  les  Français  prirent 
une  part  si  importante.  Espérons  que  l'exemple  de  M.  K.  tentera 
quelque  érudit  français  ;  écrire  dans  notre  langue  un  bon  résumé  de 
l'histoire  de  l'Orient  latin  serait  œuvre  difficile,  mais  méritoire,  et  qui 
rendrait  de  grands  services  à  l'enseignement. 

Dans  les  dernières  pages  de  son  histoire,  M.  K.,  après  quelques  mots 
sur  la  société  de  l'Orient  latin,  fondée  depuis  quelques  années  à  Paris, 


O  HISTOiKK    fffl     DE    LITTÉRATURK  45 

s'occupe  assez  longuement  de  deux  des  publications  du  secrétaire 'de  cette 
société,  M.  le  comte  Riant;  ces  deux  publications  sont  :  Alexii  I 
Comneiii...  ad  Rebertum  I  Flandriae  comitem  epistola  spuria.  Ge- 
nevae,  1879,  in-8°,et  Inventaire  critique  des  lettres  historiques  des  croi- 
sades, in-8°,  1880  (extrait  des  Archives  de  l'Orient  latin).  Remarquons 
en  passant  que  M.  K.  paraît  n'avoir  pas  connu  le  compte-rendu  du  pre- 
mier de  ces  deux  travaux  par  M.  Gaston  Paris,  compte-rendu  publié 
par  la  Revue  critique  (1879,' VIII,  pp.  379-388).  M.  K.,  comme 
MM.  Riant  et  Paris,  regarde  Ja  lettre  comme  fausse,  mais  tandis  que 
M.  Paris  critique  la  date  assignées  cette  lettre  par  l'éditeur,  il  fait  porter 
sa  critique  sur  un  autre  point;  il  s'attaque  à  une  autre  partie  du  sys- 
tème de  M.  Riant.  Celui-ci  nie  qu'il  faille  mettre  au  nombre  des 
causes  directes  de  la  première  croisade  des  demandes  de  secours  adressées 
par  Alexis  Comnène  à  l'Occident;  suivant  lui,  Alexis  a  bien  eu  avec  Ur- 
bain II  des  relations  diplomatiques  assez  actives,  mais  il  ne  s'agit 
dans  cette  correspondance  que  d'affaires  religieuses  et  l'empire  grec 
était  assez  fort  pour  se  passer  de  l'appui  des  croisés.  La  cause  réelle 
de  la  prédication  de  la  première  croisade  a  été  (toujours  d'après 
M.  Riant)  l'espoir  chez  le  pape  de  secourir  par  une  expédition  en 
Orient  les  chrétiens  d'Espagne,  pressés  à  cette  époque  par  les  Almora- 
vides.  M.  K.  croit  la  thèse  de  M.  Riant  trop  absolue;  suivant  lui,  l'em- 
pire byzantin  se  sentait  assez  menacé  par  les  attaques 'des  Seldjoucides 
d'Asie-Mineure  pour  qu'Alexis  ait  demandé  au  pape,  non  pas  la  pré- 
dication d'une  croisade,  mais  l'envoi  de  secours  militaires.  Ces  deman- 
des de  secours  sont  indiquées  par  plusieurs  historiens  contemporains, 
notamment  par  Bernold  de  S.  Biaise,  et  le  fait  était  assez  connu  à  l'époque 
même  pour  qu'un  rhéteur  inconnu  ait  pu  en  faire  le  sujet  d'une  amplifi- 
cation dans  le  genre  de  celle  dont  nous  parlons.  M.  K.  sait  bien  que  dans 
le  cas  où  cette  hypothèse  serait  fondée,  l'Asie-Mineure  eût  du  être  choisie 
comme  champ  de  bataille,  de  préférence  à  la  Syrie.  Mais,  suivant  lui, 
la  conquête  des  Lieux-Saints,  souillés  par  la  présence  des  infidèles,  était 
un  but  à  proposer  aux  chrétiens  d'Occident.  Urbain  II  pouvait  ainsi 
exciter  leur  enthousiasme;  et,  d'autre  part,  en  favorisant  l'établisse- 
ment des  Latins  en  Palestine,  Alexis  Comnène  créait  à  l'Empire  des 
alliés  d'autant  moins  gênants  qu'ils  seraient  plus  éloignés  de  ses  fron- 
tières. Telle  est  la  thèse  soutenue  par  M.  K.,  thèse  qui,  à  ses  yeux,  ex- 
plique la  politique  d'Alexis  Comnène  et  prouve  que,  tout  en  sollicitant 
des  secours  de  l'Occident,  ce  prince  ne  s'abaissa  pas  aux  humbles  sup- 
plications que  lui  attribue  la  fausse  lettre  à  Robert  de  Flandre  et 
qu'il  agit  toujours  au  mieux  des  intérêts  de  l'Empire.  Pour  juger 
de  la  valeur  de  cette  thèse,  il  faudrait  avoir  sous  les  yeux  les  textes  que 
M.  K.  indique  sans  les  citer;  ce  n'est  qu'alors  qu'on  pourrait  décider 
entre  elle  et  celle  qu'a  soutenue  M.  Riant. 

En  terminant,  disons  un  mot  de  l'exécution  matérielle  du  volume 
de  M.  Kugler;  l'impression  en  est  élégante,  mais  la  plupart  des  gravures 


46  REVUE    CRITIQUE 

sont  bien  défectueuses;  beaucoup  sont  empruntées  à  la  reproduction 
photographique  du  De  passagiis  Terrae  Sanctae ;  elles  n'ont  aucune 
valeur  iconographique  (v.  notamment  p.  96)  et  sont  de  dimensions  trop 
exiguës.  Dans  la  légende  des  gravures  des  pp.  41  et  71,  relevons  une 
faute,  qui  doit  être  une  faute  d'impression,  les  sceaux  reproduits  sont 
du  xne  siècle,  du  milieu  et  de  la  fin  de  ce  siècle  '. 


146.  —  JLes  sources  de  l'iiistoire  de  l'Inquisition  dans  le  midi  de  la 
France,  aux.  XIIIe  et  XIVe  siècles.  Mémoire  suivi  du  texte  authentique  et 
complet  de  la  Chronique  de  Guillem  Pelhisso  et  d'un  fragment  d'un  registre  de 
l'Inquisition  publié  pour  la  première  fois,  par  l'abbé  C.  Douais,  des  Facultés  li- 
bres de  Toulouse,  membre  de  l'Académie  de  religion  catholique  de  Rome.  Paris, 
1881,  in-8°,  i32  p,j.  in-8°. 

L'opuscule  de  M.  l'abbé  Douais  ne  peut  passer  pour  un  travail  ori- 
ginal; l'auteur  s'est  contenté  d'y  mettre  en  œuvre,  en  les  classant  dans 
un  autre  ordre,  les  faits  qu'il  trouvait  tout  réunis  dans  un  livre  publié 
il  y  a  dix-huit  mois  sous  un  titre  presque  identique;  tout  ce  qu'il  donne 
en  plus  est  tiré  de  livres  imprimés.  Rien  de  plus  légitime  que  cette  mé- 
thode; M.  D.  a  sur  l'inquisition  des  idées,  des  opinions  personnelles, 
il  a  le  droit  de  les  exprimer  et  de  tirer  des  faits  cités  par  son  prédéces- 
seur des  conclusions  toutes  différentes.  Seulement  il  eût  été  convenable 
de  rendre  à  chacun  ce  qui  lui  appartient  ;  M.  D.  ne  cite  guère  M.  Char- 
les Molinier  que  pour  combattre  ses  opinions  ;  et  ses  citations  sont 
données  d'une  façon  si  singulière,  qu'on  peut  croire,  —  et  plus  d'un 
s'y  est  trompé,  —  que,  comme  son  prédécesseur,  il  a  dépouillé  tous 
les  manuscrits  inédits  de  Paris  et  de  Toulouse  se  rapportant  à  son  su- 
jet. M.  D.,  pour  être  équitable,  eût  bien  fait  de  dire  à  qui  il  empruntait 
toutes  ses  citations  de  manuscrits  et  beaucoup  de  renvois  à  des  impri- 
més. On  pourrait  répondre  que  quand  deux  auteurs  traitent  le  même 
sujet,  les  mêmes  textes  doivent  être  fréquemment  cités  dans  leurs  notes; 
mais,  dans  le  cas  présent,  l'argument  perd  toute  sa  force.  Les  ren- 
vois à  des  manuscrits  donnés  par  M.  D.,  se  retrouvent  dans  l'ouvrage 
de  M.  Ch.  Molinier,  et  on  peut  affirmer,  ce  que  M.  D.  ne  dit  pas,  qu'il 
n'a  jamais  vu  le  plus  grand  nombre  des  manuscrits  qu'il  cite.  Voici  la 
preuve  de  cette  dernière  assertion.  P.  71  et  suiv.  de  son  opuscule, 
M.  D.  donne  quelques  indications  sur  certains  volumes  de  la  collection 
de  Doat  à  la  Bibliothèque  nationale,  qui  sont  relatifs  à  l'histoire  de 
l'Inquisition;  il  parle  de  ces  volumes  en  homme  qui  les  a  vus;  mal- 
heureusement il  ajoute  que  la  collection  est  conservée  aux  archives  na- 
tionales. On  doit  en  conclure  :  i°  que  tous  les  renvois  à  cette  collec- 


1.  Les  gravures  des  pp.  1 13,  n5,  représentant  un  Templier,  un  moine  du  S.  Sé- 
pulcre, etc.,  ne  sont-elles  pas  tirées  de  Y  Histoire  des  ordres  religieux,  d'Hélyotr 


d'histoire  et  de  littérature  47 

tion  sont  tirés  de  l'ouvrage  de  M.  Molinier;  2°  que  M.  D.  n'a  jamais 
mis  les  pieds  à  la  Bibliothèque  nationale,  où  la  collection  Doat,  placée 
dans  la  salle  même  de  travail  des  manuscrits,  eût  été  forcément  remar- 
quée par  lui.  Voilà  donc  expliqué  cet  accord  singulier  entre  deux  au- 
teurs restés  inconnus  l'un  à  l'autre;  M.  D.  eût  mieux  fait  de  recon- 
naître la  source  de  sa  science  de  fraîche  date  et  de  rendre  justice  à  son 
devancier.  Un  peu  plus  de  franchise  eût  désarmé  la  critique  et  l'eût 
rendue  plus  indulgente  pour  les  idées  singulières  et  les  erreurs,  les 
bévues  qui  foisonnent  dans  ce  court  travail. 

Les  opinions  de  M.  l'abbé  D.  méritent  toujours  l'épithète  qu'on  leur 
appliquait  jadis  ici  même;  ce  sont  des  opinions  professionnelles  '.  Tou- 
tefois, pour  être  juste,  il  faut  reconnaître  que  l'expression  en  est  moins 
violente  qu'autrefois;  dans  ses  précédents  ouvrages,  M.  D.  accablait 
d'injures  les  hérétiques  du  xme  siècle  ;  plus  calme  aujourd'hui,  il  fait 
le  panégyrique  de  leurs  persécuteurs  et  les  vertus  qu'il  découvre  en  eux, 
ce  sont  la  charité  et  la  douceur.  La  découverte  est  inattendue,  mais  elle 
n'étonnera  que  ceux  qui  ne  connaissent  pas  les  mystères  du  raisonne- 
ment théologique;  la  douceur  des  inquisiteurs  n'est-elle  pas  évidente, 
puisqu'ils  se  contentent  d'abandonner  les  coupables  au  bras  séculier? 
Quant  à  leur  charité,  c'est  elle  qui  élève  les  prisons  où  les  coupables 
expient  leurs  erreurs  dans  les  souffrances  et  les  privations,  c'est  elle  qui 
allume  les  bûchers,  dont  les  flammes,  en  dévorant  le  corps,  purifient 
l'âme  coupable.  Mais  il  serait  inutile  de  discuter  ces  opinions  singuliè- 
res; il  faut  être  bien  engagé  dans  les  polémiques  politiques  et  religieuses 
pour  défendre  l'Inquisition  ;  c'est  une  cause  désespérée;  autant  entre- 
prendre la  justification  des  tribunaux  révolutionnaires.  Pour  condam- 
ner l'inquisition,  les  quelques  lignes  de  M.  Fournies  dans  son  livre  sur 
les  officialités  au  moyen  âge,  lignes  que  cite  M.  l'abbé  D.  (pp.  n-12), 
suffisent  amplement,  et  ce  dernier  lui-même  ne  peut  soupçonner  l'au- 
teur de  malveillance.  Quant  à  la  réponse  de  M.  D.  aux  assertions  de 
M.  Fournier,  inutile  d'en  parler;  tout  ce  qu'on  en  pourrait  dire,  c'est 
ce  que  sont  des  mots  et  non  des  faits. 

Les  idées  personnelles  de  l'auteur  sont  bizarres,  mais  a-t-il  du  moins 
trouvé  sur  la  question  quelques  points  de  vue  nouveaux,  quelques 
aperçus  originaux?  Il  n'en  est  rien  malheureusement;  l'auteur  est  bien 
trop  ignorant  de  l'histoire  du  xme  siècle;  citer  toutes  les  grosses  bévues 
qu'il  a  commises  serait  chose  trop  longue,  on  en  trouve  à  chaque  page  ; 
en  voici  pourtant  un  recueil  assez  riche. 

P.  10,  n.  2,  Luc  de  Tuy  devient  évêque  de  Tuy  en  Gallicie  (!)  — 
P.  i3,  n.  5,  Sicard  de  Crémone,  auteur  du  Liber  Mitralie(sic),  devient 
un  glossateur  (?)  ;  le  Rationale  de  G.  Durand  est  traité  de  glose  sur  le 
Digeste,  et  l'auteur  est  qualifié  d'évêque  de  Crémone.  Pour  un  prêtre, 
obligé  de  connaître  la  liturgie,  ces  trois  ou  quatre  erreurs  ne  laissent 

1.  Article  de  M.  P.  Meyer,  Revue  critique ,  26  juillet  187g,  p.  81. 


48  R&VC*    CKIT1QUE 

pas  d'être  piquantes.  —  P.  20,  une  collection  de  noms  méridionaux  ab- 
solument estropiés  (v.  aussi  p.  26).  —  P.  24, .M.  D.  parle  des  biens  des 
faidits  d'une  manière  qui  prouve  qu'il  n'a  pas  lu  le  texte  qu'il  cite,  et 
qu'il  ignore  absolument  les  règles  du  droit  féodal.  —  P.  21  et  passim, 
quand  M.  l'abbé  D.  trouve  l'abréviation  Fr.  devant  un  nom  de  per- 
sonne, il  traduit  François.  —  P.  20,  l'auteur  prouve  qu'il  n'a  connu  le 
travail  de  M.  Delisle  sur  Bernard  Gui  que  par  l'ouvrage  de  M.  Ch.  Mo- 
linier,  qu'il  n'a  pas  compris,  car  il  fait  vivre  B.  Gui  avant  Etienne  de 
Salagnac. —  P.  34-35,  lire  une  explication  tout  à  fait  amusante  du  Débat 
de  Sicardet  d'I^arn  de  Figueiras,  publié  par  M.  Meyer.  —  P.  37,  M.  D. 
confond  les  enquêteurs  de  saint  Louis  et  les  inquisiteurs  (v.  encore  pp.  55 
et  57).  Il  est  à  remarquer,  ce  qui  prouve  la  légèreté  avec  laquelle  il  tra- 
vaille, qu'il  cite  le  travail  publié  il  y  a  deux  ans  sur  l'administration  de 
saint  Louis  par  l'auteur  du  présent  article,  travail  à  la  suite  duquel  ont 
été  imprimées  les  enquêtes  faites  par  ordre  de  ce  prince  dans  le  midi.  Il 
faut  d'ailleurs  ne  rien  savoir  de  la  législation  du  xin°  siècle  pour  attribuer 
aux  inquisiteurs  de  la  foi  les  sentences  administratives  rendues  par  les 
clercs  du  roi.  Le  seul  fait  de  citer  un  laïque  in  forum  vetitum,  eût  en- 
traîné pour  l'auteur  de  la  citation  une  forte  amende.  —  P.  41,  la  Roma- 
nia  des  textes  du  xme  siècle,  c'est-à-dire  l'empire  d'Orient,  devient  la  Rou- 
manie.—  P.  44,  ce  que  1/auteur  dit  des  en-cours  ou  confiscations  pour  fait 
d'hérésie  prouve  qu'il  ne  connaît  pas  un  mot  de  la  question  (v.  encore 
p.  53).  —  P.  59,  l'auteur,  après  avoir  reproché  à  tort  à  M.  Ch.  Moli- 
nier  de  n'avoir  point  connu  les  questions  de  Gui  Foucois,  exagère  l'im- 
portance de  ce  petit  texte  que  l'éditeur,  Caréna,  a  accompagné  de  com- 
mentaires très  copieux  et  aussi  très  diffus.  — P.  60,  l'Antonin  de  Pamiers 
devient  saint  Antoine  de  Pamiers;  du  reste,  l'auteur,  quoique  habitant 
le  midi,  traite  les  noms  de  lieux  et  d'hommes  de  ce  pays  avec  un  sans- 
gêne  étonnant.  —  P.  62,  M.  l'abbé  D.  rattache,  sans  aucune  raison,  les 
Sorts  des  apôtres,  dont  on  s'est  occupé  récemment,  aux  doctrines  albi- 
geoises; pour  faire  ce  rapprochement  qui  lui  a  été  suggéré  par  M.  N.  Pey- 
rat,  il  faut  posséder  la  forte  imagination,  de  ce  dernier  auteur.  — 
P.  67,  le  procès  de  Bernart  Saisset  est  publié  depuis  près  de  200  ans  et 
ne  renferme  rien  qui  ait  rapport  à  l'inquisition.  —  P.  72-74,  longs 
passages  empruntés  textuellement  à  l'ouvrage  de  M.  Delisle  sur  Bernard 
Gui. 

En  résumé,  le  travail  de  M.  D.  ne  renferme  aucun  fait  nouveau; 
tous  ses  renseignements  sont  empruntés  à  des  travaux  antérieurs,  et  son 
article  ne  peut  passer  que  pour  un  compte-rendu,  que  déparent  nombre 
d'erreurs  et  de  bévues  dont  il  est  seul  responsable  et  qui  lui  appar- 
tiennent en  propre.  Il  nous  reste  à  parler  de  la  seconde  partie  du  vo- 
lume, la  seule  qui  soit  à  consulter. 

M.  l'abbé  D.  imprime  dans  cette  seconde  partie  :  i°  la  chronique  de 
Guillem  Pelhisso;  20  de  courts  fragments  d'un  registre  de  l'inquisition 
de  Toulouse,  appartenant  à  un  collectionneur  de  Béziers. 


d'histoire  et  de  littérature  49 

La  chronique  de  Guillem  Pelhisso  avait  été  publiée  en  1880  par 
M.  Ch.  Molinier,  d'après  une  copie  moderne  appartenant  à  la  Bibl.  muni- 
cipale de  Carcassonne.  L'édition  de  M.  D.  est  donnée  d'après  un  ms.  du 
musée  Galvet  à  Avignon,  ms.  qui  remonte  au  commencement  du  xive  siècle 
et  dont  l'existence  avait  été  signalée  par  le  P.  Balme,  dans  un  article  de 
la  Revue  des  questions  historiques  (numéro  d'avril  188 1)  ;  M.  D.  a  oublié 
de  mentionner  cette  dernière  circonstance.  La  copie  d'Avignon  est  beau- 
coup plus  correcte  que  celle  de  Carcassonne,  comble  certaines  lacunes, 
corrige  plusieurs  phrases  corrompues  de  celle-ci.  Toutefois  les  variantes 
utiles  qu'elle  fournit  ne  sont  pas  aussi  nombreuses  que  voudrait  le  faire 
croire  le  nouvel  éditeur,  la  plupart  de  celles  qu'il  note  étant  de  simples  dif- 
férences orthographiques  ;  le  copiste  moderne  a  mis  partout  ae  là  où  le  ms. 
d'Avignon  écrit  e,  et  M.  D.  a  relevé  soigneusement  toutes  ces  différences 
insignifiantes.  En  réalité,  le  nombre  des  corrections  utiles  fournies  parle 
ms.  d'Avignon  est  assez  faible,  et,  dans  quelques  cas,  la  leçon  dums.  de 
Carcassonne  est  préférable;  ainsi,  p.  83,  1.  8,  M.  D.  lit  utiliter;  le  ms. 
d'Avignon  porte  probablement  viriliter  qui  est  la  leçon  bien  meilleure 
de  celui  de  Carcassonne.  En  outre,  le  ms.  d'Avignon  et  celui  de  Carcas- 
sonne, quoique  ce  dernier  soit  bien  inférieur,  représentant  deux  familles 
différentes  ',1e  nouvel  éditeur  eût  pu  améliorer  son  texte  en  combinant 
les  leçons  de  l'un  et  de  l'autre.  Toute  la  partie  utile  des  notes  de  la  nou- 
velle édition  est  empruntée  à  celle  du  prédécesseur  de  M.  D.  et  celui-ci 
aurait  dû  le  reconnaître,  d'autant  plus  que,  dans  les  notes  qui  lui  sont 
personnelles,  on  relève  un  certain  nombre  de  grosses  bévues;  Ainsi,  dans 
un  extrait  de  Bernard  Gui,  donné  par  M.  D.  d'après  un  ms.  de  Tou- 
louse, extrait  qui  a  trois  lignes  (p.  86,  note  4),  nous  relevons  trois  gros 
ses  fautes  :  domina  providentiel  pour  divinaprovidentia  ;  debellctntespouv 
decertantes ;  postea  pour  pro  ea.  Ailleurs,  p.  87,  notes,  1.  1 ,  il  imprime 
sale  condidit,  au  lieu  de  sale  condivit,  que  donnent  le  ms.  de  Toulouse 
et  l'édition  de  M.  Molinier. —  P.  8g,  note  4,  Haec  sunt  in  fossa,  pour 
Hacsunt  in  fossa. —  P.  90,  M.  D.  qui  prétend  avoir  vérifié  sur  le  ms.  de 
Toulouse  un  passage  qu'il  cite  à  la  suite  de  M.  Ch.  Molinier  passe  deux 
mots  que  celui-ci  avait  omis. —  P.  91, 1.  5,  il  imprime .Fr.  Stephanus  de 
Salhnihaco;le  ms.  d'Avignon  doit  porter  Salanhaco ;  c'est  le  célèbre 
auteur  dont  M.  Delisle  a  écrit  la  vie  tout  récemment.  —  P.  94,  1.  i3, 
Deneuse ,  lisez  de  Manso ;  le  personnage  est  connu  d'ailleurs.  — 
P.  102,  1.  ult.,  tibicinari,  pour  tubicinari,  jouer  de  la  flûte  pour  faire 
une  proclamation  ;  la  même  faute  se  retrouve  ailleurs  et  porte  sur  tubi- 
bicinator,  écrit  tibicinator  (p.  110).  —  P.  io5.  fer  ta  IIP  post  festum 
omn.  Sanctorum,  nonis  novembris  ;  M.  D.  traduit  en  note  le  3  novem- 
bre et  en  profite  pour  faire  un  rapprochement  assez  inattendu  avec  un 
fait  d'histoire  contemporaine. 

Le  fragment  de  registre  d'inquisition  qui  termine  le  volume  (pp.   119- 

1.  V.  notamment  pp.  84  et  85. 


5o  RKVOK    CKITKjUE 

i32)  est  intéressant,  mais  l'édition  en  est  déparée  par  nombre  de 
fautes  de  lecture;  p.  120, 1.  1,  maires  hereticas  2  ;  p.  122,  une  note  bi- 
zarre sur  le  sens  du  mot  fogacia,  fouasse  ;  nous  renvoyons  M.  l'abbé  D. 
à  certain  chapitre  de  Rabelais  sur  les  causes  de  la  guerre  entre  Grandgou- 
sier  et  Picrochole;  p.  123  et  passim,  Piccavinus  pour  Pictavinus,  nom 
bien  fréquent  en  Languedoc,  aujourd'hui  Peitavi.  P.  128,  note  3,  le 
texte  qui  est  du  xme  siècle,  cite  la  fête  de  sainte  Catherine  ;  M.  l'abbé 
Douais  traduit  le  3  avril,  jour  de  la  mort  de  la  célèbre  mystique  sainte 
Catherine  de  Sienne  (f  i38o);  la  sainte  Catherine  en  question  est 
sainte  Catherine  d'Alexandrie.  Un  ecclésiastique  n'a  pas  le  droit  de 
commettre  pareille  confusion, 

A.  Molinier. 


147.  Louise  de  La  Vallière  et  la  jeunesse  de  Louis  XIV  d'après  des  do- 
cuments inédits  avec  le  texte  authentique  des  lettres  de  la  duchesse  au  maréchal 
de  Bellefonds  par  J.  Lair,  ancien  élève  de  l'Ecole  des  Chartes,  avec  deux  portraits. 
Paris,  Pion,  1881,  gr.  in-8°  de  vi-437  p. 

On  a  tout  dit  sur  le  livre  de  M.  Lair,  sur  son  «  beau  livre,  »  comme 
j'ai  déjà  eu  l'occasion  de  l'appeler  '.  Pas  .un  seul  des  nombreux  critiques 
qui  ont  rendu  compte  de  Louise  de  La  Vallière  n'a  manqué  de  louer 
autant  l'exactitude  du  biographe  que  le  talent  de  l'écrivain.  Ne  voulant 
répéter  ni  les  éloges  de  mes  devanciers,  ni  leurs  observations,  il  ne  me 
reste  que  bien  peu  de  choses  à  dire  de  l'histoire  à  la  fois  si  charmante  et 
si  touchante  «  de  cette  femme  gracieuse  et  tendre,  dont  le  désintéresse- 
ment et  la  modestie  voilèrent  l'unique  faute,  que  le  monde  pardonnait, 
mais  qu'elle  voulut  cependant  expier  par  une  pénitence  de  plus  de 
quarante  années  2  ».  Nous  aimions  tous  déjà  Mlle  de  La  Vallière  :  le 
livre  de  M.  L.,  en  nous  la  faisant  mieux  connaître,  nous  la  fait  plus  ai- 
mer encore.  Plusieurs  écrivains  avaient  raconté  la  vie  de  Françoise 
Louise  de  La  Baume-Le-Blanc  (l'abbé  Lequeux,  M.  A.  Houssaye, 
M.  Pierre  Clément,  M.  l'abbé  Duclos,  M.  A.  Giraud)  :  tous  leurs  tra- 
vaux sont  tellement  dépassés  par  le  travail  de  M.  L.  qu'ils  disparaissent, 
en  quelque  sorte,  et  ne  méritent  plus  d'être  consultés  3.  L'auteur  nous 
dit  (p.  v)  :  «  Cette  étude  a  pris  les  loisirs  de  six  années.  On  ne  le  croira 
pas  à  le  voir,  et  pourtant  cela  est.  »  Qu'il  s'agisse  de  la  jeune  fille,  de  la 
duchesse  de  La  Vallière  et  enfin  de  la  sœur  Louise  de  la  Miséricorde,  les 
recherches  de  M.  L.  ont  été  si  minutieuses,  si  approfondies,  que,  loin 


1.  N°  du  9  janvier  1882,  p.  34,  note  2. 

2.  Avant-propos,  p.  iv. 

3.  Voir,  sur  les  fautes  d'un  des  meilleurs  devanciers.de  M.  L.,  M.  P.  Clément,  di- 
verses notes  (pp.  i55,  168,  182,  246,  298,  etc).  Encore  M.  L.  fait-il  observer  (p.  402), 
à  propos  d'une  méprise  de  M.  A.  Houssaye,  qu'il  n'aime  pas  à  s'attarder  pour  criti- 
quer les  écrivains  qui  l'ont  précédé. 


l>'HÎSTO(RK     KT    OK    UTYÉKATURK  5l 

de  s'étonner  des  longues  heures  employées  à  ces  recherches,  on  s'étonne- 
rait, au  contraire,  du  peu  de  temps  qu'il  a  fallu  pour  réunir  tant  de  ma- 
tériaux et  pour  en  tirer  un  livre  qui,  comme  la  douce  héroïne  auquel  ce 
livre  est  consacré,  est  presque  sans  défauts.  Ce  qui  augmente  singulière- 
ment le  mérite  de  l'auteur,  c'est  que,  non  content  de  peindre  Louise  de 
La  Vallière  avec  la  plus  scrupuleuse  fidélité,  il  a  peint  avec  la  même  fidé- 
lité tous  les  personnages  mêlés  à  son  histoire,  son  père  (Laurent  de 
la  Baume-Le-Blanc),  sa  mère  (Françoise  Le  Prévost  de  la  Coute- 
laye),  son  frère  (François,  marquis  de  La  Vallière),  Louis  XIV,  Anne 
d'Autriche,  Marie-Thérèse,  le  cardinal  Mazarin  et  ses  nièces,  Mlle  de  la 
Motte-Argencourt,  Mlle  delà  Motte-Houdancourt,  MIle  de  Montpensier, 
Henriette  d'Angleterre,  Mme  de  Choisy,  Mme  de  Montespan,  Mme  de 
Maintenon,  le  maréchal  de  Bellefonds,  M.  et  Mme  de  Montauzier,  la  du- 
chesse de  Loogueville,  Bossuet,  le  comte  de  Guiche,  le  marquis  de  Var- 
des,  Mlle  de  Blois,  le  comte  de  Vermandois,  etc.  En  un  mot,  l'histoire 
de  Louise  de  La  Vallière  est  l'histoire  entière  de  son  temps,  rajeunie  pat- 
une  foule  de  détails  nouveaux  *,  et  dont  il  faudra  tenir  grand  compte, 
toutes  les  fois  que  l'on  voudra  s'occuper  de  la  seconde  moitié  du  xvnc  siè- 
cle 2. 

Une  aussi  remarquable  étude  est  complétée:  i°  par  la  réimpression 
(pp.  352-398)  des  lettres  au  maréchal  de  Bellefonds,  w  connues  seule- 
ment jusqu'à  ce  jour  par  un  arrangement  de  rhétoricien  3  »  ;  2°  par  di- 

1.  M.  L,  a  surtout  tiré  parti  de  la  correspondance  de  l'ambassadeur  vénitien  Sa- 
gredo-. 

2.  M.  L.  a  rectifié  bon  nombre  d'erreurs  des  auteurs  de  mémoires  du  xvir3  siècle, 
sans  parler  des  erreurs  des  éditeurs  de  ces  mêmes  mémoires.  Mentionnons  particu- 
lièrement ce  qui  regarde  les  mémoires  de  M,ne  de  Motteville  (pp.  i5,  16  64),  de 
Mlle  de  Montpensier  (p.  93),  de  Saint-Simon  (pp.  77,  2g6\  Je  tiens  à  citer  une  de 
ces  excellentes  et  piquantes  notes  (p.  16)  :  «  Mme  de  Motteville,  sur  cet  article,  expli- 
que les  choses,  comme  toujours,  mieux  que  personne,  mais  sa  narration  finit  par 
une  faute  chronologique  qui  a  jeté  dans  l'erreur  presque  tous  ceux  qui  l'ont  copiée 
sans  contrôle.  Mlle  de  Montpensier,  qui  écrivait  en  'même  temps  et  même  un  peu 
avant,  montre  Mlle  de  la  Motte-Argencourt  auprès  de  la  Reine-Mère,  en  i658,  en  1660. 
V.  Mémoires,  t.  III,  pp.  275,  288.  Walckenaer  (Mémoires  sur  MD"  de  Sévigné, 
t.  III,  c.  ix)  a  donné  trop  d'importance  à  l'épisode  de  la  Motte-Argencourt,  et  a  com- 
mis l'erreur  de  date  que  nous  signalons  plus  haut.  Amédée  Renée  [Les  Nièces  de 
Mazarin,  p.  24g)  a  confondu  les  époques.  Son  agréable  récit  manque  de  suite  chro- 
nologique, et  ce  défaut  de  précision  prive  cette  histoire  intime  de  sa  plus  grande 
valeur.  Cet  accident  n'a  pas  de  date,  voilà  qui  est  bientôt  dit.  Quant  aux  auteurs 
qui  ont  confondu  La  Motte-Argencourt  et  La  Motte  Houdancourt,  La  Motte-Hou- 
dancourt,  nièce  du  maréchal,  et  La  Motte  Houdancourt,  fille  du  maréchal,  il  faut  re- 
noncer à  les  citer.  »  Cf.  la  note  1,  p.  88  :  «  Il  serait  impossible  de  relever  toutes  les 
confusions  faites  entre  La  Motte-Argencourt  et  La  Motte-Houdancourt.  Nous  n'en 
signalerons  que  deux  qui  pourraient  être  dangereuses,  vu  l'autorité  très  légitime  des 
auteurs  :  M.  Chéruel,  dans  une  note  Dr,  sur  les  Mémoires  de  Saint-Simon,  t.  V, 
p.  467,  édition  i865  ;  M.  de  Monmerqué,  Lettres  de  Sévigné,  édition  Hachette,  1872, 
t.  II,  p.  48.  L'annotateur  aurait  dû  voir  que,  d'après  son  propre  calcul,  sa  demoi- 
selle de  La  Motte-Houdancourt  n'aurait  eu  que  onze  ans  en  1662.  » 

3.  Avant-propos,  p.  iv. 


52  REVUE    CRITIQUE 

verses  «  notes  et  pièces  justificatives  »  (pp.  399-424).  Les  lettres  ont  été 
publiées  d'après  une  excellente  copie  de  la  fin  du  règne  de  Louis  XIV,  con- 
servée au  château  de  Bures  (en  pleine  vallée  de  Chevreuse)  et  commu- 
niquée à  M.  L.  par  Mme  la  comtesse  de  Wavrin,  morte  en  1879,  et  à  la 
mémoire  de  laquelle  il  a  dédié  son  volume  en  termes  très  délicats.  Le 
premier  éditeur  des  lettres  de  la  duchesse  de  La  Vallière  (1767),  l'abbé 
Lequeux,  avait  donné  un  texte  altéré  à  chaque  page  par  des  correc- 
tions '  et  même  par  des  paraphrases.  Remercions  M.  L.  de  nous  avoir 
rendu  les  lettres  au  maréchal  de  Bellefonds  dans  toute  leur  simplicité 
exquise,  dans  toute  leur  naïveté  originale.  —  Les  Notes  et  pièces  justi- 
ficatives se  composent  d'éclaircissements  sur  la  retraite  de  Mne  de  la 
Motte-Argencourt  et  ses  causes,  sur  Gabrielle  Glè,  belle-sœur  de  Louise 
de  La  Vallière,  sur  le  pamphlet  :  Amours  de  Madame  et  du  comte  de 
Guiche,  sur  une  lettre  de  Louise  de  La  Vallière  à  Mmc  de  Montauzier, 
conservée  dans  la  bibliothèque  de  Munich,  sur  la  mort  de  Madame,  sur 
l'acquisition  du  domaine  de  Vaujours  pour  Louise  de  La  Vallière,  sur 
les  diverses  éditions  des  Réflexions  sur  la  miséricorde  de  Dieu  %  sur 
l'iconographie  de  Louise  de  La  Vallière  3,  sur  ses  armes,  inexactement 
reproduites  par  la  plupart  des  auteurs,  et  même  par  le  P.  Anselme4. 
Une  seule  pièce  justificative  figure  parmi  ces  notes  (pp.  405-406)  :  les 
lettres  de  légitimation  du  comte  de  Vermandois  qui  n'avaient  pas  été 
publiées  jusqu'ici  et  qui  sont  datées  du  20  février  1669. 

Les  observations  les  plus  importantes  ayant   été  déjà  présentées   à 


1.  M.  L.  remarque  spirituellement,  à  ce  propos  (p.  2Ô2),  qu'au  xvme  siècle,  un 
éditeur  aurait  cru  manquer  à  ses  devoirs  en  ne  réparant  pas  les  petits  désordres  de  la 
toilette  grammaticale  de  son  auteur. 

2.  M.  L.  n'admet  pas  (p.  414)  que  cet  ouvrage  de  la  duchesse  de  la  Vallière  ait  été 
corrigé  par  Bossuet.  Entre  M.  Romain  Cornut,  qui  a  cru  reconnaître  dans  les  cor- 
rections la  touche  de  l'évêque  de  Meaux,  et  feu  M.  Floquet,  qui  a  déclaré  que 
l'on  ne  pouvait  les  attribuer  à  son  auteur  favori,  il  ne  saurait  hésiter.  Il  a  ajouté  et  il 
prouve  que  «  les  moyens  de  décider  se  trouvent  suffisamment  dans  la  seule  compa- 
raison des  textes  imprimés.  »  11  complète  la  liste  des  éditions  des  Réflexions  données 
par  M.  Clément,  en  mentionnant  une  rarissime  traduction  italienne,  imprimée  à 
Rome  en  1681,  une  contrefaçon  belge  de  l'édition  de  Paris,  1712  (Bruxelles,  Fop- 
pens,  1712),  une  édition  de  Lyon  (Guillaume  Langlois,  1698),  qui  est  extrêmement 
rare.  Indiquons  encore  (pp.  415-416)  une  analyse  de  l'Amante  convertie,  ou  V Illustre 
pénitente,  analyse  à  la  suite  de  laquelle  M.  L.  rétablit  la  vérité  en  ce  qui  regarde  le 
sermon  prononcé  par  M6''  de  Fromentières  pour  la  vêture  de  Louise  de  La  Vallière. 

3.  M.  L.  met  sous  nos  yeux  (pp.  417-422)  une  liste,  sinon  complète,  du  moins  très 
étendue,  des  portraits  peints  et  gravés  de  Louise  de  La  Vallière  :  il  y  rectifie  force 
erreurs  commises,  à  cet  égard,  un  peu  partout,  même  dans  les  catalogues  des  musées 
du  Louvre  et  de  Versailles.  Les  deux  portraits  reproduits  dans  le  volume  sont  le 
portrait  gravé  par  Larmessin,  qui  paraît  être  le  plus  ancien  de  tous  les  portraits 
gravés  de  la  duchesse,  et  le  portrait  en  religieuse,  conservé  à  l'hospice  de  Château- 
La-Vallière. 

4.  Les  véritables  armes  sont  celles-ci  :  écu  coupé  de  gueule  et  d'or  au  lion  léo- 
pardé  d'argent  et  de  sable.  Dans  les  armes  jointes  au  portrait  gravé  par  Edelinck 
Y  a  fur  a  été  introduit  à  tort. 


J   HISÎOIUK     KJ      I)K     I   I  ITIîliAUJKh 


53 


M.  L.  je  suis  obligé  de  me  rabattre  sur  des  observations  secondaires. 
Au  sujet  de  «  l'éducation  très  négligée  »  de  Louis  XIV,  il  ne  cite  (p.  5) 
que  le  témoignage  de  La  Porte.  C'est  bien  peu,  surtout  si  l'on  se  sou- 
vient du  dédain  avec  lequel  M.  Léon  de  Laborde  a  parlé  (Palais  Ma\a- 
rin,  notes)  des  mensongers  mémoires  de  ce  valet  de  chambre.  —  L'His- 
toire du  traité  de  la  paix  conclue  en  Pan  165g  est  attribuée  au  comte 
Galeazzo  Gualdo  Priorato  non-seulement  «  par  un  éditeur  allemand  » 
(p.  17,  note  2),  mais  par  tout  le  monde.  —  Sur  la  conduite  de  Mazarin 
à  l'égard  de  Louis  XIV  voulant  épouser  Marie  Mancini,  M.  L.  dit  plai- 
samment (p.  29,  note  1),  que  «  pour  savoir  la  vérité  vraie,  il  faudra  at- 
tendre le  jugement  derniqr.  »  Ni  M.  Chéruel,  ni  M.  Chantelauze  ne  se 
résigneront  à  accepter  une  aussi  lointaine  échéance.  — Ce  que  M.  L. 
pense  (Ibid.)  des  Mémoires  de  Marie  Mancini  doit  être  rapproché  de  ce 
qu'en  a  pensé  M.  Chantelauze  (Louis  XIV  et  Marie  Mancini,  1880, 
pp.  225-228).  —  M.  L.  donne  deux  M  (p.  88)  au  nom  du  chevalier  de 
Gramont,  comme  ailleurs  au  nom  du  maréchal,  père  du  comte  de  Gui- 
che.  J'ai  vu  trop  de  documents  des  trois  derniers  siècles  signés  Gramont 
pour  ne  pas  réclamer.  Puisque  j'en  suis  aux  minuties,  je  dirai  encore  que 
M.  L.  a  tort  de  refuser  au  nom  du  surintendant  Foucquet  le  c  que  ce  der- 
nier mettait  dans  sa  signature  et  que  M.  Bonnaffé  a  eu  soin  de  lui  laisser 
dans  son  récent  ouvrage  sur  ce  grand  curieux.  —  M.  L..,  citant  (p.  97, 
note  2)  Tédition  de  1707  des  Lettres  de  Guy  Patin,  ajoute  :  «  Je  re- 
grette de  n'avoir  pu  me  procurer  l'excellente  édition  donnée  par  M.  La- 
lanne  ;  elle  ne  se  trouve  plus  dans  le  commerce.  »  Malheureusement 
M.  Lalanne  n'a  jamais  donné  une  édition  des  lettres  de  Guy  Patin. 
M.  L.  aurait-il  confondu,  par  hasard,  cette  introuvable  édition  avec 
celle  du  Dr  Reveillé-Parise  (Paris,  J.  B.  Baillière,  1846,  3  vol.  in-80)? 
S'il  s'agit  de  cette  dernière,  je  dirai  que,  loin  de  mériter  le  titre  d'excel- 
lente, elle  est  des  plus  médiocres,  et  que,  loin  d'être  rare,  elle  est  assez 
commune  pour  que  les  bouquinistes  la  vendent  à  un  prix  très  doux.  — 
M.  L.  nous  montre  (p.  o5)  le  duc  de  Lorraine  logeant  «  dans  une  mé- 
chante cabane  avec  le  jardinier  du  Luxembourg.  »  C'était  assez  de  par- 
ler d'une  maisonnette,  car  la  relation  vénitienne  indique  una  piccola  cas- 
setta,  une  petite  maison,  et  une  cabane,  en  italien,  s'appelle  capanna. 
—  Le  fameux  Lauzun  nous  apparaît  (p.  137)  sous  le  nom  de  Péguilin. 
C'est  là  une  corruption  de  Puyguilhem,  nom  d'une  terre  de  la  maison 
de  Caumont.  M.  L.  aurait  dû  imiter  Louis  XIV,  qui,  dans  une  lettre 
dont  un  passage  est  cité  (p.  147),  donne  au  mari  de  Mademoiselle  son 
vrai  nom  de  Puyguilhem.  —  L'auteur,  à  propos  du  château  de  Cham- 
bord,  dit  (p.  201)  :  «  Sur  la  verrière  d'une  des  fenêtres  de  Chambord,  un 
roi,  critique  peu  autorisé,  avait  écrit  ces  deux  vers  si  connus  : 

Souvent  femme  varie, 
Mal  habil  qui  s'y  fie.  » 

Rien  ne  prouve  que  François  Ier  ait  écrit  ces  deux  vers  sur  une  ver- 
rière. Le  plus  ancien  des  écrivains  qui  puisse  être  cité  sur   ce  point, 


54  RKVUE    CRIT1QUK 

Brantôme,  se  contente  de  raconter  qu'à  Chambord  un  ancien  valet  de 
chambre  de  François  Ier  lui  montra,  comme  étant  de  la  main  de  son 
maître,  «  un  escrit  au  costé  de  la  fenêtre  »  où  «  en  grandes  lettres  il  y 
avoit  ce  mot  :  Toute  femme  varie.  »  On  voit  qu'il  ne  s'agit  là  ni  de  vi- 
tre, ni  de  distique.  Ce  sont  des  auteurs  aussi  peu  sérieux  que  l'auteur 
des  Galanteries  des  Roy  s  de  France  (1690,  in-8°)  qui  ont  transformé  en 
deux  vers  les  trois  mots  lus  par  Brantôme  et  qui  ont  ajouté  les  fabu- 
leuses circonstances  de  la  vitre,  de  la  bague  et  du  diamant  l.  —  M.  L. 
semble  croire  (p.  242  et  surtout  Appendice,  pp.  407-410)  à  l'empoi- 
sonnement de  Madame.  Je  ne  puis  que  le  renvoyer  à  la  nouvelle  édi- 
tion de  Y  Histoire  d' Henriette  d'Angleterre  publiée  par  M.  Anatole 
France  (chez  Charavay)  et  où,  comme  je  l'ai  fait  remarquer  ici ».  tout 
ce  qui  touche  à  cette  question  a  été  si  bien  examiné.  —  M.  L.,  relevant 
(p.  401)  un  anachronisme  dans  les  Mémoires  de  Mme  de  Motteville,  dit 
«  que  cela  fait  craindre  que  ces  Mémoires,  comme  ceux  de  Mlle  de  Mont* 
pensier,  composés  de  fragments  authentiques,  n'aient  été  rajustés  par 
une  main  inexpérimentée.  »  Il  a  raison  de  soupçonner  que  les  Mémoi- 
res de  Mmc  de  Motteville  ont  été  parfois  maladroitement  arrangés,  mais 
il  a  tort  de  les  comparer  en  cela  aux  Mémoires  de  Mlle  de  Montpensier, 
dont  le  manuscrit  entièrement  autographe  est  conservé  à  la  Bibliothèque 
nationale.  —  Nous  lisons  (p.  403),  au  sujet  de  l'affaire  du  libelle  des 
Amours  de  Madame  et  du  comte  de  Guiche,  à  laquelle  fut  mêlé  Char- 
les Patin,  que  le  fils  de  Guy  Patin  a  fut  poursuivi  vers  mars  1666.  » 
Ce  fut  quelques  mois  plus  tard,  comme  nous  l'apprend  un  document 
imprimé  du  recueil  connu  à  la  Bibliothèque  nationale  sous  le  nom  de 
recueil  Thoisy  (t.  VII,  f°  276)  :  Factum  pour  maistre  Charles  Patin, 
docteur  en  médecine  accusé,  contre  ses  accusateurs 3. 

Le  livre  de  M.  L.  est  très  bien  écrit.  C'est  pour  cela  que  je  voudrais 
en  effacer  quelques  taches  que  Ton  ne  remarquerait  pas  dans  un  livre 
dont  le  style  ne  serait  pas  aussi  pur.  A  côté  de  phrases  très  élégantes, 
comme  par  exemple,  certaine  phrase  sur  les  demoiselles  d'honneur  4,  on 

1.  Voir  l'ingénieuse  discussion  de  M.  Edouard  Fournier  (l'Esprit  dans  V His- 
toire, 3me  édition,  1867,  pp.  154-157).  C'est  un  des  meilleurs  chapitres  d'un  recueil 
trop  inégal.  M.  Fournier  n'a  pas  manqué  de  se  moquer  (p.  157)  de  ceux  qui  ont 
donné  à  la  légende  de  la  fameuse  vitre  une  digne  conclusion,  en  prétendant  que 
Louis  XIV  la  sacrifia  à  M™  de  La  Vallière.  M.  L.  a  eu  la  prudence  de  se  servir,  à 
l'occasion  de  ce  dernier  détail,  des  expressions  :  On  a  raconté  qu'un  jour...  si  Von 
admet  la  tradition. 

2.  N°  du  29  mai  1882,  p.  431. 

3.  D'après  le  factum,  Charles  Patin  reçut  le  ballot  de  livres  prohibés  le  10  novem- 
bre, et  «  le  lendemain  onze,  à  huit  heures  du  matin,  il  en  fut  dépouillé  par  la  saisie 
qui  en  fut  faite  sur  la  dénonciation  de  Thiery,  adjoint  du  scindic  des  libraires.  » 
L'auteur  du  factum  affirme  que  ce  fut  en  juin  1666  que  Patin  apprit  que  l'on 
imprimait  en  Flandre  le  livre  de  l'Histoire  galante,  ce  dont  il  fit  donner  avis  à 
«  Leurs  Altesses  Royales,  à  qui  ce  livre  ne  plaisoit  pas.  » 

4.  «  Demoiselle  d'honneur!  Que  d'idées  s'éveillaient  à  ces  mots!  Quel  avenir 
splendide  s'entr'ouvrait  !  Etre  un  des  fleurons  de  cette  couronne  d'innocence  ou  de 


DHISTOIRE    ET    DE    LITTERATURE  55 

trouve  —  ce  qui  est  une  dissonnance  —  des  phrases  un  peu  trop  fami- 
lières '.  Quelques  tournures,  quelques  expressions  ne  sont  pas  assez 
correctes  2.  L'auteur  abuse  peut-être  des  maximes  et  tournerait  presque 
à  l'homme  sentencieux  3.  Son  livre,  qui  a  eu  déjà  deux  éditions  *,  en 
aura  bientôt  une  troisième.  C'est  l'occasion  pour  M.  Lair  de  reviser 
sévèrement  un  travail  qui  laisse  si  peu  à  désirer,  et  de  le  rendre  irré- 
prochable. 

T.  DE  L. 


148.  —  K.  Haller,   Gescliichte  der  russischen  KJteratur.  1  vol.  in-8°  de 
247  p.  Dorpat,  Schnakenburg,  1882. 

L'histoire  de  la  littérature  russe  de  M.  Haller  n'a  pas  la  prétention 
d'être  un  ouvrage  original.  C'est  une  Bearbeitung  du  cours  de  littéra- 
ture de  M.  Petrov  qui  a  été  traduit  en  français  sous  ce  titre  :  Tableaux 
de  la  littérature  russe  depuis  son  origine  jusqu'à  nos  jours,  par 
C.  Petrov,  traduit  du  russe  par  A .  Romuald.  Saint-Pétersbourg,  i8j2. 
M.  Haller  a  complété  le  manuel  de  Petrov  et  l'a  conduit  jusqu'à  nos  jours  ; 
tel  qu'il  est,  ce  résumé  est  surtout  destiné  aux  jeunes  Allemands  des 
provinces  baltiques  qui  doivent,  au  sortir  du  gymnase,  passer  un  exa- 
men de  littérature  russe.  Il  est  nécessairement  un  peu  aride,  mais  il 


vertu  que  l'étiquette  avait  placée  autour  des  reines  et  des  princesses  comme  les  fleurs 
d'une  bordure  autour  de  la  maîtresse  fleur  du  jardin  »  (p.  41).  —  Rapprochons  de 
ces  métaphores  les  métaphores  d'une  page  voisine  (p.  43)  :  «  C'était  bien  la  petite 
fleur,  à  demi  cachée  sous  l'herbe,  que  trahit  son  parfum  et  qui  craint  la  trop  grande 
ardeur  de  l'été,  et  pourtant  cette  humble  violette  allait  être  transplantée  en  pleine 
cour  de  France  et  sous  les  regards  de  ce  prince  qu'on  devait  appeler  bientôt  le  Roi- 
Soleil.  » 

1.  «  On  se  tromperait  si  l'on  mesurait  à  cette  aune  tous  les  personnages  de  ce 
temps  »  (p.  81). —  «  Mme  de  Lafayette  est  encore,  pour  ces  menus  détails  de  la  petite 
histoire,  supérieure  à  tous  les  autres  reporters  de  son  temps  »  (p.  91). —  «  Le  duc 
Charles  était  voué  à  ces  artistes  »  (des  apothicaires  !)  (p.  95). —  «  Que  peut-on  ajouter 
à  cette  juste  et  mélancolique  pensée  ?  Ainsi-soit-il  »  (p.  109).  —  «  Louis  laissa  inter- 
ner V ex-objet  de  son  amour.  » 

2.  «  Ses  détracteurs  la  trouvaient  menue  et  qu'elle  ne  marchait  pas  de  bon  air  » 
(p.  5o).  —  «  C'est  alors  que  le  jeune  monarque  partait  en  forêt,  courant  avec  sa 
maîtresse  »  (p.  64).  —  «  Peu  fortuné,  il  logeait  »  (p.  g5).-—  «A  travers  cette  appro- 
bation générale,  le  roi  devina  une  femme  en  quête  de  faveur,  et  que  le  misanthrope 
Montausier  détournerait  les  yeux  à  propos.  » 

3.  «  L'absence,  qui  tue  l'amour  à  son  déclin,  l'excite  à  sa  naissance  »  (p.  65;.  — 
«  Il  oubliait  que  toujours  n'est  pas  une  devise  d'amour  »  (p.  i36).  —  «  Comme  il 
n'est  pas  d'hiver  où  ne  se  montre  le  sourire  de  quelques  beaux  jours,  l'amour  ne 
s'en  va  pas  sans  quelques  retours  de  passion  »  (p.  i65).  «  Le  malheur,  s'il  disjoint 
les  amitiés  fausses,  cimente  les  véritables  »  (264) . 

4.  La  seconde  édition  a  paru,  au  commencement  de  la  présente  année,  dans  le 
format  in- 18. 


56  KKVUE    CBITIQIIK 

fournit  des  renseignements  utiles,  notamment  sur    la    littérature   du 
xixc  siècle  qui  occupe  les  trois  quarts  du  volume. 

,    Louis  Léger. 


VARIÉTÉS 


I^e  mot  assyrien  «  tamkârii  j» 

Dans  un  article  paru  ici  même  (n°  du  19  janvier  1880),  j'avais  reven- 
diqué pour  la  langue  assyrienne  un  mot  tamkâru  «  cultivateur  »,  que 
les  assyriologues  lisaient  damqani,  et  qu'ils  considéraient  comme  un 
terme  accadien  ou  sumérien  d'origine,  formé  de  dam  «  homme  »  et  de 
qar  «  champ  ».  A  ce  propos,  M.  Lenormant  m'adresse  les  remarques 
suivantes,  en  son  second  volume  des  Origines  de  l'histoire,  p.  243, 
note  2  : 

«  M.  Stan.  Guyard,  qui,  dans  d'autres  cas,  a  été  mieux  inspiré,  s'est 
«  efforcé  vainement  de  montrer  dans  damkaru  un  mot  sémitique,  qu'il 
«  croit  dérivé  de  la  racine  mdkar,  laquelle  existe  en  effet  en  assyrien  et 
«  en  arabe.  Mais  pour  trouver  dans  le  quatrilitère  qui  nous  occupe  un 
«  dérivé,  possible  au  point  de  vue  de  la  philologie  sémitique,  de  cette 
«  racine,  il  faut  de  damkaru  le  changer  arbitrairement  en  tamkaru,  en 
«  inventant  pour  le  signe  initial  de  l'orthographe  de  ce  mot,  le  signe 
«  dam,  une  valeur  tam  qu'il  n'a  nulle  part,  que  rien  ne  justifie  et  n'au- 
«  torise,  que  tout,  au  contraire,  combat  et  dément.  La  lecture  damkaru 
«  est  la  seule  admissible;  et  dès  lors  que  deviennent  le  prétendu  caractère 
«  sémitique  de  ce  mot  et  sa  dérivation  de  la  racine  mdkar?  »,  etc. 

J'accorde  très  volontiers  à  M.  Lenormant  que  si  le  mot  dont  il  s'agit 
était  toujours  écrit  damqaru,  l'analyse  que  j'en  fais  n'aurait  que  la  va- 
leur d'une  hypothèse.  Mais  si  je  montre  que  l'orthographe  damqaru, 
imaginée  simplement  pour  fournir  l'étymologie  factice  d'homme  des 
champs  l,  n'est  pas  invariable  ;  si  je  montre  que  le  terme  en  litige  s'écrit 
parfois  aussi  tamkaru,  comme  il  se  prononce,  que  deviendront,  à  leur 
tour,  le  prétendu  caractère  accado-sumérien  de  ce  mot  et  sa  dérivation 
de  dam  et  de  qar? 

Une  tablette  du  British  Muséum  vient  trancher  la  question.  Elle  est 
reproduite  par  l'un  des  plus  ardents  champions  de  la  théorie  suméro-ac- 
cadienne,  M.  Paul  Haupt,  dans  ses  Akkadische  und  Sumerische  Keil- 
schrifttexte,  p.  69, 1.  8.  Là  nous  voyons  que  le  prétendu  accadien  DAM- 
QAR  se  transcrit  en  assyrien  :  tam-ka-ri  (au  génitif),  dans  l'expression 
kasap  tamkâri  «  argent  (prix?  ou  salaire?)  d'un  cultivateur  ».  Il  résulte 
de  là  que  tamkâru  est  bien  et  dûment  un  dérivé  du  verbe  assyrien  makdru 

1.  Sur  ce  procédé,  voir  Revue  de  l'histoire  des  religions,  t.  V,  n°  2,  p.  268. 


0  '  H  I SÏ  O !  R  h    Kl     1) K    LU  1  BK  A  l  U  H  b  57 

«  cultiver  »,  dont  j'ai  cité  deux  exemples  en  rendant  compte  ici  du  tra- 
vail de  M.  Pognon  sur  l'inscription  de  Bavian,  exemples  auxquels  on 
peut  ajouter  encore  celui  de  l'impératif  saphel,  dans  la  phrase  sumkir 
tamirtus  «  rends  cultivé  (c'est  à-'dire  prospère)  son  domaine  »,  que  nous 
lisons  chez  Oppert,  Expédition  en  Mésopotamie,  t.  II,  p.  339. 

Au  surplus,  si  je  vois  dans  tamkâru  un  dérivé  de  la  racine  makâru, 
j'ai  pour  complices  les  assyriens  eux-mêmes,  car  le  texte  lexicographique 
bien  connu  R.  II,  pi.  7  groupe  dans  le  même  article,  en  face  des  for- 
mes accado-sumériennes,  que  nous  appelons  hiératiques,  notre  mot 
tamkâru  et  un  autre  mot,  makru,  au  féminin  makritu,  qui  paraît,  lui 
aussi,  avoir  le  sens  de  «  cultivateur  »,  et  sur  la  dérivation  duquel  il  ne 
saurait  planer  aucun  doute.  Il  est  évident  que  si  le  rédacteur  de  cet  arti- 
cle lexicographique  avait  considéré  tamkâru  comme  une  altération  de 
l'accado-sumérien  dam-qar,  il  n'aurait  pas  été  le  classer  à  la  suite  de  dé- 
rivés de  la  racine  makâru,  nous  indiquant  ainsi  clairement  que  pour  lui 
le  ta  de  tamkâru  est  une  syllabe  formative  et  non  radicale.  Ainsi  de  deux 
choses  l'une  :  ou  bien  les  auteurs  de  ces  textes  lexicographiques  avaient 
perdu  la  notion  de  raccado-sumérien,  et  dans  cette  conjoncture  com- 
ment se  fait-il  qu'ils  le  traduisent  couramment,  ou  bien  ils  ne  voyaient 
dans  ces  groupes  dits  accado-sumériens  que  ce  que  nous  voulons  y  voir, 
M.  Halévy  et  moi,  des  mots  assyriens  écrits  dans  un  système  particulier, 
et  qu'il  s'agissait  de  rendre  plus  intelligibles  en  les  transcrivant  en  ca- 
ractères phonétiques. 

Stanislas  Guyard. 


CHRONIQUE 


FRANCE.  —  La  librairie  Leroux  publie  les  Mémoires  sur  la  chronologie  et  l'i- 
conographie des  rois parthes  Arsacides,  de  feu  M.  Adrien  de  Longpérier.  L'ouvrage 
est  accompagné  de  18  planches  gravées,  et  porte  la  double  date  i853-i882.  M.  de 
Longpérier  avait,  par  suite  de  diverses  circonstances,  toujours  différé  de  donner  au 
public  cet  ouvrage  imprimé  depuis  i853.  Après  sa  mort,  sa  famille  a  cru  devoir  faire 
paraître  une  œuvre  à  laquelle  il  attachait  une  grande  importance.  —  Prochainement 
paraîtra  à  la  même  librairie  le  Ier  volume  des  Œuvres  de  M.  de  Longpérier  ;  ce  vo- 
lume renfermera  les  Mémoires  d'archéologie  et  de  numismatique  orientales. 

—  Nous  avons  reçu  la  I"  livraison  d'une  nouvelle  revue  d'histoire  provinciale,  la 
Revue  historique  du  Béarn  et  de  la  Navarre  (Bayonne,pays  de  Labour d,  Landes). 
Cette  revue  publiera,  comme  l'indique  l'avis  aux  lecteurs,  des  documents  concernant 
les  Béarnais,  Basques  et  Bayonnais  des  siècles  passés,  documents  tirés  des  fonds 
provinciaux  et  surtout  des  dépôts  de  Paris,  et  qui  seront  toujours  précédés  d'une 
étude  sommaire.  Elle  donnera  des  études  biographiques  ainsi  qu'une  bibliographie. 
Elle  compte  parmi  ses  collaborateurs  MM.  Baschet,  de  Carsalade  du  Pont,  Jung, 
Margry,  Tamizey  de  Larroque,  Vinson,  etc.  La  première  livraison  de  la  Revue  histo- 
rique du  Béarn  et  de  la  Navarre  s'ouvre  par  un  art.  de  M.  Tamizey  de  Larroque- 


58  RKVUE    CRITIQUE' 

intitulé  Documents  inédits  pour  servir  à  l'histoire  de  la  ville  de  Dax  (pp.  5-i8);  le 
premier  de  ces  documents  est  une  notice  sur  Dax,  rédigée  en   i568  par  l'archéologue 
gascon  André  de  la  Serre  ;  les  autres  documents  sont  des  lettres  relatives  à  l'histoire 
de  Dax  et  écrites  de  1740  à  1751  par  divers  personnages;  quelques-uns  qui  ne  méri- 
taient pas  d'être  intégralement  reproduits,  ont  été  analysés  par  l'infatigable  savant.  — 
M.  E.  Ducèré  publie  le  commencement  d'un  travail  sur  V artillerie  et  les  arsenaux 
de  la  ville  de  Bayonne  (pp.  ig-35);  son  art.  forme  le  chapitre  1  de  cette  étude  et  a 
pour  titre  :  les  arsenaux  bayonnais  jusqu'à  la  conquête  de  145 1  (par  Dunois  et  le 
seigneur  d'Albret).  —  M.  A.  Communay,  après  une  rapide  exposition  de  la  situation 
générale  du  royaume  de  Navarre,  communique  un  document  relatif  à  YInvasion  du 
Béarn  par  Mongonmery  (pp.  36-44)  et  au  massacre  de  Navarreinx.  —  Sous  le  titre 
Un  hercule  gascon  (pp.  44-46),  M.  Ch.  Dupré  reproduit,  d'après  le  n°  de  novembre 
17 10  du  Mercure  de  France,  deux  tours  de  force  accomplis  par  le  mousquetaire 
Bassabat.  —  Le  fascicule  se  termine  par  une  question  :  «  A  quelle  époque  Bayonne 
prit  elle  pour  devise  les  mots  nunquam  polluta  et  à  quelle  occasion  ?  »   et  par  les 
Preuves  de  la  noblesse  de  Théophile-François  de  Navailles,  agréé  pour  être  reçu 
page  du  roi  dans  la  grande  écurie  (pp.  49-56).  La  «  Revue  historique  du  Béarn  et  de 
la  Navarre  »,  publiera  ainsi  les  preuves  produites  par  les  vieilles  familles  nobles  de 
ces  deux  provinces  devant  les  généalogistes  d'Hozier  (cabinet  des  titres  de  la  Biblio- 
thèque nationale,  section  des  manuscrits);  cette  publication  ou  ce  nobiliaire  se  subdi- 
visera en  trois  parties  :  I.  Les  pages  de  la  grande  et  de  la  petite  écurie.  II.  Les  de- 
moiselles de  Saint-Cyr.  III.  Les  gentilshommes  admis  aux  écoles  militaires.  —  Ce 
recueil  est  certainement  une  œuvre  sérieuse;  nous  lui  souhaitons  d'être  durable  et 
faisons  des  vœux  pour  son  succès.  Il  paraît  tous  les  mois,  en  une  brochure  de  56  pages 
in-8°,  et  forme,  à  la  fin  de  l'année,  un  volume  de  700  pages  environ  (prix  par  an  : 
18  francs  pour  les  huit  départements  :  Basses- Pyrénées,  Hautes- Pyrénées,  Landes, 
Gironde,  Lot-et-Garonne,  Tarn-et-Garon ne,  Gers  et  Haute-Garonne;  20  francs  pour 
le  reste  de  la  France;  tous  les  abonnements  partent  du  mois  de  juillet;  les  commu- 
nications concernant  la  rédaction  et  l'administration  doivent  être  adressées  au  direc- 
teur de  la  Revue,  M.  A.  Communay,  à  Bayonne,  rue  Bourg-Neuf,  60). 

—  M.  Ch.  Schmidt  vient  de  publier  un  excellent  ouvrage,  rempli  de  faits  intéressants 
et  d'informations  neuves,  sur  les  plus  anciennes  bibliothèques  et  les  premiers  impri- 
meurs de  Strasbourg  (Zur  Geschichte  der  aeltesten  Biblioiheken  und  der  ersten  Buch- 
drucker  %u  Strassburg,  C.  F.  Schmidt  [Fr.  Bull.].  In-8°,  200  p.).  L'ouvrage,  dont 
l'exécution  typographique  mérite  d'ailleurs  les  plus  grands  éloges,  comprend,  comme 
le  titre  l'indique,  deux  parties  :  i°  Les  livres  et  les  bibliothèques  à  Strasbourg  au 
moyen  âge  {Bûcher  und  Bibliotheken  $u  Strassburg  im  Mittelalter,  pp.  1-74);  cette 
première  partie  avait  déjà  paru  en  français  dans  la  Revue  d'Alsace  sous  le  titre  : 
Livres  et  bibliothèques  à  Strasbourg  au  moyen  âge  (1877);  on  a  prié  M.  Schmidt 
de  publier  une  traduction  allemande  de  ce  travail,  et  le  savant  strasbourgeois  a 
préféré  faire  lui-même  cette  traduction  qui  lui  offrait  l'occasion  d'ajouter  quelques 
détails  nouveaux.  20  Les  imprimeurs  de  Strasbourg  avant  i52o  (Die  Strassburger 
Buchdrucker  vor  i520,  pp.  75-162);  cette  partie,  entièrement  biographique,  renferme 
beaucoup  de  renseignements  précieux,  tirés  de  documents  disparus  avec  l'ancienne 
bibliothèque  de  Strasbourg  durant  le  bombardement  de  la  ville.  En  outre,  un  chapitre 
qui  sert  d'appendice  à  ce  beau  volume  est  consacré  à  l'histoire  peu  connue,  empruntée, 
elle  aussi,  à  des  documents  manuscrits,  de  la  fondation  de  la  bibliothèque,  qui  devint 
au  xvu°  siècle  celle  de  l'université  protestante,  et  plus  tard  celle  du  séminaire  pro- 
testant; «  aucun  Strasbourgeois  n'a  oublié  comment  elle  a  péri,  dit  M.  Schmidt,  et 
j'ai  regardé  comme  un  devoir  pieux  de  raconter  son  origine  ».  [Die  ehmalige  Biblio- 


d'histoire  et  de  littérature  59 

ihek  der  Strassburger  hohen  Schuleim  ersten  Jahrhundert  ihres  Bestehens,  pp.  i63- 
298).  L/n  de  nos  collaborateurs  reviendra  plus  amplement  sur  cette  publication. 


SOCIÉTÉ  NATIONALE  DES  ANTIQUAIRES  DE  FRANCE 


Séance  du  21  juin. 

M.  E.  Muntz  lit  une  note  sur  le  tombeau  du  pape  Benoît  XII,  à  Notre-Dame 
d'Avignon.  Ce  tombeau,  dont  il  n'existe  ni  gravure,  ni  photographie,  contient,  sous 
un  dais  surmonté  de  nombreux  clochetons,  la  statue  couchée  du  pape  mort.  Des 
comptes  trouvés  par  M.  Muntz  dans  les  archives  du  Vatican  (années  1342  et  1 343) 
prouvent  qu'il  a  été  fait  par  un  imagier  parisien  jusqu'ici  inconnu,  maître  Jean  La- 
venier.  Tandis  que  les  peintres  employés  par  les  papes  d'Avignon  étaient  presque 
tous  des  Italiens,  les  architectes  et  les  sculpteurs,  dont  ils  se  servaient,  étaient  le 
plus  souvent  des  Français;  il  y  a  là  une  preuve  de  la  supériorité  de  la  France, 
au  xive  siècle,  dans  l'architecture  et  la  sculpture.  t 

M.  d'Arbois  de  Jubainville  présente  quelques  observations  sur  le  mot  celte  (en 
latin  celta,  en  grec  KcXtOç).  Gluck  a  fait  venir  celta  d'une  racine  cel  qui  a  le  sens 
d'élever,  et  qui  se  trouve  en  latin  dans  cel-sus,  ex-cel-lo,  col-lis,  en  grec  dans 
KoX-tovoç,  KoX-Oçwv.  Mais  il  n'a  pu  prouver  l'existence  de  cette  racine  dans  la 
langue  celtique.  Or,  dans  un  éloge  de  saint  Columban  écrit  parun'clerc  irlandais  qui 
est  mort  en  1106,  on  trouve  le  mot  celthe,  avec  le  sens  de  «  faîte  »;  dans  une  vie  de 
sainte  Brigitte  manuscrit  du  xive  siècle,  le  même  mot  désigne  le  comble  d'une 
église;  enfin,  dans  un  glossaire  irlandais  du  xvic  siècle,  il  est  donné  comme  adjectif, 
avec  le  sens  de  haut,  grand,  noble.  Clethe  suppose  une  forme  ancienne  clet-ios,  qui 
ne  diffère  de  celta  ou  kel-tos  que  par  une  méthathèse.  Celte  signifie  donc  bien  haut, 
grand,  noble;  M.  d'Arbois  de  Jubainville  ajoute  que,  dans  le  même  éloge  de  saint  Co- 
lumban, on  trouve  l'adjectif  Nertmar  «  grand  par  la  force  s  c'est  la  forme  irlandaise 
du  nom  propre  gaulois   Nertomarus,  connu  par  plusieurs  inscriptions  latines. 


ACADEMIE  DES  INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  7  juillet  ià'82. 

M.  le  secrétaire  perpétuel  donne  lecture  d'un  décret  du  président  de  la  République, 
en  date  du  3o  juin,  par  lequel  est  approuvée  l'élection  de  M.  Sénart,  en  qualité  de 
membre  ordinaire,  en  remplacement  de  M.  Guessard.  M.  Sénart  est  introduit  et  prend 
place. 

M.  Gaston  Paris  fait  connaître  le  jugement  du  concours  des  antiquités  de  la  France 
pour  188.1.  La  commission  décerne  trois  médailles  de  cinq  cents  francs  et  six  men- 
tions honorables,  ainsi  qu'il  suit  : 

1"  médaille  :  M.  Jules  Guiffrey,  pour  son  livre  sur  la  Tapisserie  en  France; 

2e  médaille  :  MM.  Héron  de  Villefosse  et  Thédenat,  Cachets  d'oculistes  romains,  I; 


2  e 

mention 

:  M 

3<" 

mention 

:  M. 

4e 

mention 

:  M. 

5» 

mention  : 

M. 

6* 

mention  : 

M. 

60  RKVCJE    CRITIQUE    D'HISTOIRE    ET    DE    UTTÉRATURB 

3"  médaille  :  M.  Ch.  Kohler,  Étude  critique  sur  le  texte  de  la  Vie  latine  de  sainte 
Geneviève  de  Paris; 

ire  mention  :  M.  Héron,  Œuvres  de  Henri  d'Andeli; 

.  Charles  Molinier,  Y  Inquisition  dans  le  midi  de  la  France; 
Perroud,  Les  Origines  du  duché  d'Aquitaine  ; 
de  la  Chauvelays,  Les  armées  des  ducs  de  Bourgogne  ; 
de  Fierville,  Documents  sur  Philippe  de  Commynes; 
d'Hermansart,  Les  Corporations  de  Saint-Omer. 
M.  Charles  Nisard  commence  la  lecture  d'un  mémoire  sur  deux  scandaleux  at- 
tentats à  la  propriété  littéraire  au  xv°  siècle. 

M.  Clermont-Ganneau  met  sous  les  yeux  des  membres  de  l'Académie  une  petite 
figurine  d'un  bronze  trouvé  à  Beyrouth.  Cette  statuette,  d'un  travail  qui,  sans  être 
irréprochable,  ne  manque  pas  d'élégance,  représente  une  femme  entièrement  nue, 
coiffée  d'un  diadème  en  forme  de  croissant  renversé,  appuyée  sur  la  jambe  droite, 
la  main  droite  abaissée  comme  pour  toucher  le  pied  gauche.  Le  bras  gauche  est 
étendu  et  la  main  s'appuyait  sur  un  objet  qui  est  aujourd'hui  séparé  de  la  statuette, 
mais  qui  a  été  retrouvé  aussi  et  qui  fait  maintenant  partie  d'une  collection  particu- 
lière, autre  que  celle  à  laquelle  appartient  la  figurine.  M.  Clermont-Ganneau  a  vu  cet 
objet  et  en  présente  la  photographie.  C'est  une  grande  rame  ou  un  gouvernail,  sur 
lequel  on  lit  une  inscription  en  quatre  lettres  phéniciennes,  qui  signifient  :  a  Aux 
Sidoniens  »,  ou  «  Des  Sidoniens  ».  C'est  l'inscription  ordinaire  des  monnaies  de 
Sidon.  On  ne  saurait  hésiter,  dit  M.  Clermont-Ganneau,  à  reconnaître  dans  cet 
ensemble  la  déesse  même  des  Sidoniens,  s'appuyant  sur  l'attribut  qui  caractérise 
cette  divinité  essentiellement  maritime.  Ce  monument  précieux  nous  donne  donc  une 
image  de  l'Astarté  sidonienne,  telle  que  se  la  figuraient  ses  adorateurs  à  l'époque  des 
Séleucides.  La  déesse  est  ici  habillée  ou  plutôt  déshabillée  à  la  grecque.  Plus  ancien- 
nement, elle  se  serait  sans  doute  présentée  à  nous  sous  des  formes  égyptiennes  ou 
assyriennes;  car  les  Phéniciens  n'ont  jamais  eu  d'art  en  propre,  ils  ont  toujours  suivi, 
en  fait  de  plastique,  la  mode  régnante,  et  la  mode  variait  suivant  la  politique  qui  pré- 
valait. 

M.  Aube  termine  la  lecture  de  son  mémoire  sur  Polyeucte.  Il  conclut  qu'il  y  a  lieu 
de  croire  à  la  réalité  des  principaux  traits  de  la  légende  de  Polyeucte,  qu'on  doit  no- 
tamment considérer  comme  historique  :  «  les  noms  des  personnes,  Néarque,  Po- 
lyeucte, Félix  et  Pauline,  que  l'auteur  des  Actes  n'a  pas  inventés,  non  plus  que  leur 
condition  sociale  et  les  liens  d'amitié  ou  de  parenté  qui  les  unissaient;  l'édit  de 
Valérien,  que  nous  connaissons  par  d'autres  témoignages,  l'obéissance  de  la  plupart 
des  chrétiens  devant  ses  menaces  et  au  contraire  l'éclat  de  foi  dans  l'âme  généreuse 
de  Polyeucte...;  le  renversement  des  statues  païennes,  les  efforts  de  Félix  pour  sau- 
ver son  gendre,  et  l'amènera  faire  amende  honorable, l'intervention  vaine  de  Pauline 
et  de  ses  enfants,  la  condamnation  de  Polyeucte  et  son  exécution  par  le  glaive.  » 
Au  total  enfin,  dit  M.  Aube,  la  tragédie  de  Corneille  «  repose  sur  un  fond  parfaite- 
ment historique.  » 

Julien  Havet. 


Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 


Le  Fuy,  ty-p.  et  lith,  Marchessou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  ajf 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

N«  30  -  24  Juillet  —  1882 


Sommaire  t  149.  Bloomfield,  As  final  devant  les  sonores  en  sanscrit.  — 
i5o.  Rocquain,  La  papauté  au  moyen-âge.  —  i5r.  Moguel,  La  vie  et  les  œuvres 
de  Calderon.  —  i52.  Pouy,  Etude  sur  les  œuvres  inédites  et  sur  la  correspondance 
de  Dusevel.  —  Chronique.  —  Société  nationale  des  antiquaires  de  France.—  Aca- 
démie des  Inscriptions. 


149. —  Final  AS  beforc  sortants  îti  Sanskrit,  by  Maurice  Bloomfield.  Johns 
Hopkins  University.  Reprinted  from  the  American  Journal  of  Philology,  vol.  III, 
No  1.  Baltimore,  1882.  21  p.  in-8°. 

Si  courte  que  soit  cette  brochure,  je  crois  devoir  m'étendre  sur  les  cir- 
constances qui  la  rendent  digne  d'attention. 

On  sait  qu'en  sanskrit  Ye  et  Yo  brefs  des  langues  européennes  ont 
pour  équivalent  un  a  (jjivoç  est  en  sanskrit  manas).  Par  suite,  les  sons 
e  bref,  o  bref  manquent  à  l'alphabet;  il  y  a  bien  un  ê  et  un  o,  mais  ils 
servent  à  noter  des  longues  issues  de  la  contraction  de  deux  voyelles  [ai, 
au)  à  une  époque  relativement  récente,  c'est-à-dire  des  sons  non  primi- 
tifs. Cet  état  de  chose  fit  croire  à  Bopp  et,  jusqu'à  ces  dernières  années, 
à  tous  les  linguistes,  que  Yo  et  l'e  n'avaient  point  existé  à  l'époque  de 
l'unité  ario-européenne  ;  que  pivoç  provenait  d'un  manas  ario-européen, 
ne  différant  pas  du  manas  sanskrit.  C'était  le  contrepied  de  la  vérité. 
C'est  [/ivoç  qui  est  le  type  primitif;  le  sanskrit  a  changé  e  et  0  en  a,  le 
grec  n'a  point  eu  à  changer  a  en  e  et  0. 

Ce  retournement  de  la  doctrine  est  aujourd'hui  admis  de  tous,  mais 
tous  ne  l'expriment  pas  avec  netteté.  Par  une  concession  bizarre  à  la  re- 
ligion surannée  du  sanskrit,  ceux  qui  firent  le  plus  pour  démontrer  le  ca- 
ractère récent  de  son  vocalisme  lui  empruntèrent  une  notation  des  voyelles 
primitives.  Au  lieu  d'écrire  la  forme  ario-européenne  :  menos,  ils  l'écri- 
vaient :  ma^na-xS,  sous  prétexte  que  la  première  voyelle  n'avait  peut-être 
pas  exactement  la  même  nuance  de  timbre  que  l'e,  ni  la  seconde  la  même 
que  l'o.  A  quel  grimoire  pourrait  aboutir  une  pseudo-algèbre  de  ce  genre 
si  on  la  généralisait!  Celle-ci,  outre  qu'elle  entretenait  des  idées  vagues, 
contribuait  à  rendre  la  phonétique  historique  moins  abordable  aux 
grammairiens  qui  n'ont  pas  le  temps  d'apprendre  sérieusement  le  sans- 
krit. Elle  était  née  de  plus  d'une  cause  :  faiblesse  à  l'égard  d'une  an- 
cienne routine,  illusion  d'une  précision  mathématique  apparente.  Elle 
venait  surtout  de  ce  que  la  démonstration  de  la  vérité  n'avait  pas  été  com- 
plète. Tandis  que  les  langues  d'Europe  faisaient  voir  sous  un  jour  direct 
le  vocalisme  ario-européen,  le  sanskrit  n'en  avait  gardé  que  des  reflets 
Nouvelle  série,  X'V.  4  . 


02  REVUE   CRITIQUE 

malaisés  à  saisir.  Il  confondait,  dans  le  parfait  dadarca,  les  deux  voyel- 
les que  le  grec  distingue  dans  BéSopy.s.  Dans  le  parfait  cakâra  (il  fit),  il 
distinguait  bien  Ye  du  redoublement  et  l'o  de  la  racine,  mais  d'une  façon 
obscure;  Ye  devenait  a  bref  et  palatalisaitla  consonne  précédente,  Yo  de- 
venait a  et  laissait  la  consonne  intacte  :  combien  les  formations  xixpor.z, 
zéxovôs,  XéXoizs  sont  plus  nettes!  Ainsi  le  sanskrit  portait  des  traces  de 
ses  infidélités  au  vocalisme  originel,  mais  il  les  laissait  à  peine  transpa- 
raître. En  vain  ses  accusateurs  le  convainquaient  par  les  témoignages  des 
autres  idiomes  et  par  ses  propres  incohérences  :  ils  plaidaient  comme  si 
intérieurement  il  leur  restait  un  doute.  Le  sanskrit  n'avait  pas  avoué. 

Il  fallait,  pour  en  finir,  trouver  sur  le  sol  asiatique  quelque  souvenir 
direct  de  Ye  et  de  Yo.  Cela  touchait  d'abord  la  science  pure,  pour  qui 
toute  bribe  de  vérité  est  un  imj^aeîç  àd.  Mais  c'était  un  point  autrement 
grave  pour  la  vulgarisation.  L'e  et  Yo  sont  des  voyelles  importantes. 
Elles  sont  plus  employées  que  les  autres  ;  en  outre,  elles  constituent  les 
pièces  du  plus  curieux  des  mécanismes  ario-européens  :  ce  sont  elles  que 
la  loi  de  Yablaut  fait  alterner  dans  la  flexion  (Tpéxw,  xéTpoxa)  et  dans  la 
dérivation  (Tpéxco,  xpixoç  ;  tego,  toga).  Tant  qu'on  s'est  trompé  sur  leur 
date,  on  était  forcé  de  ne  voir  [vivoçqu'à  travers  le  sanskrit  manas,  oéSopxs 
à  travers  dadarca  :  pour  regarder  le  grec  et  le  latin,  on  mettait  des  lu- 
nettes hindoues.  Cette  nécessité  fermait  la  grammaire  historique  à  une 
partie  du  public.  La  théorie  nouvelle  facilite  merveilleusement  l'ensei- 
gnement de  cette  science.  Elle  invite,  dans  les  cas  les  plus  importants, 
à  mettre  le  grec  au  premier  plan  de  l'exposition  ;  le  sanskrit,  réduit  à 
une  intervention  minima,  ne  rebute  plus  un  étudiant  non  orientaliste. 
Seulement,  si  l'on  ne  veut  pas  perdre  ce  fruit  du  progrès  de  la  science, 
il  faut  parler  chrétien  (j'entends  écrire  menos  et  non  maina2s).  Et  si  en 
parlant  on  veut  se  sentir  à  l'aise,  il  faut  avoir  fait  confirmer  les  témoigna- 
ges des  langues  d'Europe,  en  bonne  et  due  forme  qui  coupe  court  à  toute 
subtilité  et  à  tout  grimoire,  par  des  témoignages  nets  et  clairs  du  sans- 
krit, par  des  exemples  sanskrits  de  Ye  et  de  l'o  primitifs.  C'est  cette  pen- 
sée qui  me  portait  à  écrire,  il  y  a  trois  ans  :  «  Le  sanskrit...  semble  ail- 
leurs avoir  gardé  quelques  vestiges  du  timbre  même  de  Ye  et  de  l'o.  Je 
veux  parler  des  formes  où  un  é  long  ou  un  ô  long  représente  une  an- 
cienne syllabe  as,  c'est-à-dire  tantôt  es  et  tantôt  os.  Le  nominatif  de  la 
seconde  déclinaison  était  en  os  :  grec  îxxoç  (cheval),  latin  equus  et  an- 
ciennement equos.  Or,  le  sanskrit  emploie  devant  certaines  lettres  le  no- 
minatif açvas  (cheval),  mais,  devant  certaines  autres  lettres,  il  dit,  avec 
un  ô,  acvô.  Le  verbe  être  contenait  la  syllabe  es  :  grec  hsxit  latin,  est,  il 
est.  Or,  le  sanskrit  dit  à  l'impératif,  avec  un  e,  êd'hi  (sois)  h  » 

La  brochure  de  M.  Maurice  Bloomfield  est  une  étude  détaillée  des  for- 


i.  Supplément  au  Journal  de  Genève  du  mardi  2 5  février  187g,  verso,  col.  3 
(compte-rendu  du  livre  de  M.  Ferdinand  de  Saussure,  Mémoire  sur  le  système  pri- 
mitif des  voyelles...). 


d'histoire  et  de  littérature  63 

mes  sanskrites  dans  lesquelles  ô  représente  ainsi  une  ancienne  syllabe  os, 
ou  ê  une  syllabe  es.  La  chute  de  ïs  et  l'allongement  compensatif  de  la 
voyelle  (lequel  pare  au  changement  en  a,  qui  eût  atteint  e  ou  o  resté 
bref),  a  lieu  devant  les  sonores,  comme  g,  dh,  m,  les  voyelles.  Le  titre 
ne  promet  qu'un  examen  des  syllabes  finales,  mais  les  syllabes  intérieures 
sont  examinées  aussi  avec  un  soin  très  suffisant.  —  M.  Bloomfield  sem- 
ble avoir  été  guidé  par  des  préoccupations  exclusivement  scientifiques. 
11  écrit  comme  s'il  ne  devait  être  lu  que  par  des  indianistes  '.  Les  consi- 
dérations exposées  tout  à  l'heure  font  voir  que  ses  recherches  touchent 
en  réalité  un  public  beaucoup  moins  restreint.  Elles  ont  un  intérêt  que 
pourraient  n'avoir  pas  au  même  degré  d'autres  études  de  phonétique  in- 
dienne. 

Non-seulement  M.  Bloomfield  a  groupé  tous  les  exemples  d'un  an- 
cien e  ou  o  conservé  en  sanskrit  grâce  à  l'allongement  compensatif,  mais 
il  fait  de  chacun  d'eux  l'objet  d'une  discussion  solide  et  presque  tou- 
jours convaincante,  et  résout  les  difficultés  que  présentent  certaines  for- 
mes. Il  explique  par  l'influence  labialisante  d'un  v  Vô  du  nom  de  nom- 
bre shvdaça  pour  *sveshdaça  (latin  sedecim").  L'infinitif  védique  vudhum 
(latin  uectuni)  suppose  une  labialisation  analogue  (soit  de  ve  en  vô,  soit 
plutôt,  selon  l'auteur,  de  va  en  vu)  ;  quant  à  l'infinitif  sôdhum,  où  il  n'y 
a  pas  de  v  pour  expliquer  la  labiale,  ce  n'est  qu'une  création  analogique, 
plus  récente  que  la  langue  du  Véda.  L'instrumental  plurielen  ôbhis  des 
radicaux  en  es  semble  inconciliable  avec  les  formes  grecques  comme 
opscç-i,  mais  M.  Bloomfield  fait  voir  que  le  sanskrit  a  dévié  ici  du  type 
ario-européen,  et  que  ce  dernier  se  retrouve  intact  dans  les  formes  zen- 
des  en  êbîs.  La  finale  ô,  que  la  phonétique  syntactique  substitue,  de- 
vant certaines  lettres,  à  as  issu  de  es  aussi  bien  qu'à  as  issu  de  os,  s'ex- 
plique dans  le  second  cas  par  voie  phonétique,  dans  le  premier  par  voie 
analogique  (le  Véda  présente  dix-huit  exemples  de  as  =  os  pour  sept  seu- 
lement de  as  —  es). 

Nombre  de  pages  ont  trait  aux  phénomènes  qu'engendre  la  rencontre 
de  cette  finale  ô  ou  d'une  finale  ê  avec  une  voyelle  initiale.  L'auteur, 
reprenant  les  recherches  de  prosodie  védique  d'Adalbert  Kuhn,  arrive  à 
des  résultats  curieux  et  solides.  Je  dois  avouer  que  je  n*ai  pas  réussi  à 
saisir  en  quoi  cette  étude  prouve  l'existence  antéhistorique  d'une  finale 
es.  Quoi  qu'il  en  soit  de  ce  détail,  M.  Bloomfield  a  fait  progresser  la 


i .  C'est  le  seul  reproche  que  je  ferai  à  son  travail.Trop  de  mots  sanskrits  sont  cités 
sans  que  l'auteur  ait  la  précaution  d'y  joindre  soit  un  équivalent  grec  ou  latin,  soit 
une  traduction.  Certains  termes  techniques  des  grammairiens  hindous,  comme  pra- 
grkya,  p.  16,  devraient  être  expliqués  aux  profanes.  La  grammaire  historique  ne 
peut  être  approfondie  sans  une  connaissance  sérieuse  du  sanskrit,  elle  peut  et  doit 
être  rendue  intelligible  à  quiconque  s'occupe  de  grec  ou  de  latin. 

2.  Cf.  Mémoires  de  la  Soc.  de  ling.,  V,  p.  42.  Vd  de  va  (latin  ue)  indique  aussi  un 
changement  de  ve  en  vo.  M.  de  Saussure  me  fait  remarquer  qu'on  peut  ajouter 
vdsas  (vêtement),  met  formé  comme  [J.évcç,  ^évoç,  îé7v0ç,  ilCOÇ,  '^époq, 


64  RliVUK    CR1T1QUK 

grammaire  ario-européenne,  et  cela  sur  un  point  qui  imparte  plus  que 
d'autres  à  la  popularisation  de  la  science. 

Louis  Havet. 


i5o.  —  r.a  Papauté  au  moyen-âge  s  Nicolas  Ier,  Grégoire  VII,  Innocent  III, 
Boniface  VIII,  études  sur  le  pouvoir  pontifical,  par  Félix  Rocquain.  Paris,  Didier, 
in-8°  de  xn-3g3  pp. 

La  notoriété  considérable  conquise  par  M.  Rocquain  qui  s'est 
attaqué,  depuis  plusieurs  années,  avec  un  égal  succès  à  des  sujets  très 
divers  me  faisait  bien  augurer  de  cet  ouvrage  sur  la  papauté  depuis 
longtemps  en  préparation.  Mon  espoir  n'est  pas  déçu  :  cette  étude  est 
celle  qu'on  devait  attendre  de  M.  Rocquain. 

L'auteur  a  voulu,  prenant  pour  types  quatre  grands  pontificats  :  ceux 
de  Nicolas  Ier,  Grégoire  VII,  Innocent  III,  Boniface  VIII,  tracer  un 
tableau  du  mouvement  ascensionnel  de  la  papauté,  mouvement  qui  se 
fait  sentir  au  sein  même  de  l'Eglise  par  une  transformation  de  la  disci- 
pline et  en  dehors  d'elle  par  un  rayonnement  du  pouvoir  spirituel  sur 
le  pouvoir  temporel. 

Le  pontificat  de  Boniface  VIII  marque  tout  à  la  fois  et  l'apogée  de 
cette  puissance  et  sa  décadence  irrémédiable. 

M.  R.  est  un  historien  qui  vise  constamment  à  une  haute  impartia- 
lité, un  lettré  qui  sait  exprimer  toujours  clairement  et  simplement  sa 
pensée.  Le  grand  nombre  d'ouvrages  consultés  pour  cette  étude  n'en- 
combre jamais  l'auteur  qui  poursuit  sa  marche  sans  fatigue  pour  le  lec- 
teur. 

Le  dernier  mot  des  grands  problèmes  historiques  agités  par  l'auteur  nous 
est-il  toujours  donné  dans  ces  291  pages,  in-8  (291  pages,  non  compris 
l'appendice)?  Je  n'oserais  l'affirmer.  A  mon  sens,  M.  R.  ne  fait  pas  une  as- 
sez large  part  au  développement  naturel  de  l'institution  qu'il  étudie  : 
on  en  viendra,  laissant  de  côté  Faction  ou  l'influence  épisodique  de 
quelques  hommes,  à  considérer  surtout  dans  l'histoire  du  pouvoir  pon- 
tifical une  application  de  cette  grande  loi  de  concentration  qui  régit  les 
sociétés  pendant  une  certaine  phase  de  leur  existence.  Cette  concentra- 
tion est-elle,  si  nous  examinons  de  très  près  la  structure  du  pouvoir 
pontifical,  en  contradiction  avec  ses  origines?  Il  ne  me  semble  pas  ■  ;  tel 
passage  incontesté  de  saint  Gyprien  est,  à  ce  sujet,  singulièrement  ins- 
tructif'-. 


1.  II  est  remarquable  que  cette  conception,  qu'on  pourrait  appeler  naturaliste  et 
qui  me  paraît  ressortir  de  l'étude  des  textes,  est  en  harmonie  avec  le  sentiment  ca- 
tholique. 

a.  Cf.  Revue  crit.,  1880,  p.  33  n.  4. 


d'histoire  et  de  littérature  65 

Mais  je  ne  puis  qu'indiquer  ici  ces  vues  :  je  les  signale,  en  passant,  à 
l'esprit  généralisateur  et  philosophique  de  M.  Rocquain. 

L'ouvrage  est  nécessairement  fragmenté,  puisqu'il  ne  présente  pas  une 
suite  historique  continue,  mais  une  étude  sur  quatre  papes  différents. 
Indépendamment  de  cette  critique  générale,  je  dois  ajouter  quelques 
observations  de  détail  : 

i°  Parlant  des  décisions  pontificales  qui  sont  entrées  dans  le  Corpus 
juris  canonici,  M.  R.  laisse  croire  qu'elles  ont  un  caractère  spécial, 
que  le  pape  dut  en  peser  davantage  les  expressions,  s'en  occuper  plus 
particulièrement.  Il  en  eût  été  fort  empêché,  ignorant  parfaitement  le 
sort  réservé  plus  tard  par  les  hasards  des  compilations  à  chacune  de  ses 
décisions.  Une  décrétale  passée  dans  le  Corpus  juris  ne  diffère  originai- 
rement d'une  décrétale  restée  en  dehors  du  Corpus  pas  plus  qu'un  arrêt 
recueilli  dans  le  Sirey  ne  diffère  d'un  arrêt  négligé  par  les  collaborateurs 
de  cette  grande  entreprise  ; 

2°  Une  observation  importante  se  présente  à  propos  de  Boniface  VIII: 
la  plupart  de  nos  écrivains  français  paraissent  ignorer  —  M.  R.  ne  fait 
pas  exception  —  que  les  accusations  si  graves  qui  furent  tout  à  coup  lan- 
cées par  Philippe  le  Bel  contre  Boniface  VIII,  avaient  une  origine  très- 
sérieuse  :  ce  ne  fut  point  un  instrument  de  guerre  subitement  fabriqué, 
ou,  comme  on  l'a  dit,  un  orage  éclatant  dans  un  ciel  serein.  Plusieurs 
membres  influents  du  clergé  devaient  connaître  ces  imputations  qui 
avaient  été  répétées  »  par  les  plus  hauts  personnages  ;  ceci  explique  peut- 
être  en  partie  les  adhésions  nombreuses  du  clergé  que  recueillit  si  facile- 
ment le  roi  de  France  et  justifie,  à  coup  sûr,  cette  assertion  de  Philippe 
le  Bel  traité  un  peu  durement  par  M.  R.,  à  savoir  qu'à  plusieurs  repri- 
ses des  bruits  très  défavorables  à  Boniface  étaient  venus  jusqu'à  lui  ; 

3°  A  propos  d'une  lettre  d'Innocent  III  sur  le  sens  du  mot  novalis  t 
M.  R.  fait  remarquer  que  le  correspondant  du  pape  lui  avait  adressé 
une  consultation  purement  grammaticale  qui  fut  suivie  d'une  réponse 
de  grammairien  ou  de  philologue  (p.  168).  Nullement  :  l'intérêt  que  les 
correspondants  attachent  à  la  question  est  tout  à  fait  pratique  et  cano- 
nique :  si  on  discute  sur  le  sens  du  mot  novalis,  c'est  que  diverses  ques- 
tions relatives  à  la  perception  des  dîmes  se  rattachent  au  sens  de  ce  mot. 
Ainsi  les  couvents  sont  exempts  de  la  dîme  en  ce  qui  concerne  les  nova- 
les  :  il  est  donc  très  important  d'être  fixé  sur  le  sens  du  mot  novalis.  La 
décrétale  d'Innocent  III  est  si  peu  un  exercice  académique  sur  le  sens 
d'un  mot  qu'elle  a  passé  à  bon  droit  dans  le  Corpus  juris  canonici". 

4°  A  la  p.  225,  M.  R.  vise,  d'après  le  livre  de  Janus,  un  écrit  attribué 
à  saint  Bon  aventure  où  il  est  dit  que  la  cour  de  Rome  est  la  prostituée 
empoisonnant  l'Eglise  de  ses  vices.  (Je  reprends  les  expressions  de  Janus 


1.  Je  fais  allusion  à  un  document  publié  par  Hcefler  et  analysé  par  Hefele,  Hist. 
des  conc,  trad.  Delarc,  t.  IX,  p.  256  et  suiv. 

2.  Décret,  de  Grég.  IX,  V,  xl,  21, 


66  rkvuk  eurriQtifc 

un  peu  adoucies  dans  Rocquain).  J'aurais  besoin  ici  d'un  renvoi  immédiat 
aux  œuvres  de  saint  Bonaventure  et  de  renseignements  précis  et  cir- 
constanciés. Tout  en  exprimant  ce  vœu,  je  ne  puis  faire  à  M.  R,  un 
reproche  bien  rigoureux  de  ne  pas  avoir  cité  directement  saint  Bona- 
venture sur  un  point  si  important;  car  le  Supplément  à  ses  œuvres  in- 
voqué ici  par  Janus  est  d'une  infinie  rareté  '  :  la  citation  directe  eût 
nécessité  une  correspondance  avec  l'Italie  et  peut-être  un  excursus  cri- 
tique :  la  question  en  valait  la  peine. 

5°  P.  225,  je  lis  : 

«  En  France  comme  à  Rome,  on  trafiquait  de  la  religion.  Sous  Boni- 
ce  face  VIII,  les  péchés  les  plus  graves  y  étaient  rachetés  à  prix  d'ar- 
«  gent.  » 

L'auteur  fait  allusion  à  un  concile  de  Saumur  qui  interdit  à  divers 
dignitaires  ecclésiastiques  inférieurs  d'accorder  aux  pénitents  ces  ra- 
chats. Je  n'aime  pas  ces  expressions  un  peu  lourdes  en  face  du  texte 
visé  :  «  On  trafiquait  de  la  religion.  »  —  «  Les  péchés  les  plus  graves 
étaient  rachetés  à  prix  d'argent.  »  En  y  regardant  de  près;  on  s'aperçoit 
que  le  relâchement  de  discipline  dont  s'occupe  le  concile  de  Saumur  n'a 
en  soi  rien  de  monstrueux  et  ne  doit  pas  du  tout  soulever  l'indignation 
des  historiens  modernes.  De  quoi  s'agit-il?  De  remplacer  les  pénitences 
canoniques  par  le  paiement  d'une  somme  d'argent.  Ce  système  qui 
remonte  très  haut  a  donné  lieu  à  d'énormes  abus  ;  il  a  pu  conduire  au 
trafic  dont  parle  M.  R.;  mais  il  est  en  soi  très  inoffensif:  faire  péni- 
tence en  se  couvrant  de  cendres,  en  se  privant  d'entrer  dans  l'église, 
en  jeûnant  ou  en  versant  une  somme  d'argent  avec  destination  pieuse, 
ce  sont  des  procédés  comparables.  De  nos  jours,  l'usage  de  la  péni- 
tence en  argent  subsiste  toujours  et  n'excite  pas  l'horreur  des  plus  dé- 
licats. Je  rachète,  par  exemple,  dans  certaines  conditions,  la  pé- 
nitence quadragésimale  par  l'aumône  du  carême  :  ceci  est  dans  la  tradi- 
tion contre  laquelle  se  révoltent  trop  facilement  et,  pour  ainsi  dire,  sans 
viser  juste  2  des  historiens  qui  n'en  comprennent  pas  le  véritable  sens. 

Deux  appendices  intéressants  terminent  l'ouvrage  :  i°  Innocent  III  et 
Otton  de  Brunswick  ;  2°  les  registres  des  papes  et  le  Regesta  Pontijîcum 

i.  Cf.  Bernard,  a  Portu  Romatino,  -Ratio  novae  collect.  operum  omnium  S.  Bo- 
naventurae.  »  Taurini,  1874,  p.  45. 

2.  Je  prends  la  liberté  de  renvoyer  ici  à  quelques  pages  que  j'ai  publiées  sur  cette 
matière  dans  la  Revue  historique  de  iMars-Avril  1880,  p.  442  et  suiv.  ;  et,  puisque 
l'occasion  se  présente,  je  retire  en  même  temps  une  conjecture  erronée  que  j'avais 
proposée  dans  cet  article  :  je  relevais  ce  passage  d'une  taxe  de  la  chancellerie  aposto- 
lique :  «  Nova  diligenter  quod  hujusmodi  gratiae  et  dispensationes  non  conceduntur 
pauperibus,  quia  non  sunt  et  ideo  non  possunt  consolari.  »  Je  corrigeais  sunt  en 
solvunt  :  je  me  trompais.  Ce  passage  est  inspiré  de  saint  Matthieu  :  «  Tune  adim- 
«  pletumest  quod  dictum  est  per  Jeremiam  prophetam  dicentem  :  Vox  in  Rama  au- 
«  dita  est  ploratus  et  ululatus  multus  :  Rachel  plorans  nlios  suos,  et  noluit  conso- 
«  tari,  quia  non  sunt.  »  (Saint  Matth.,  Evang.,  ch.  n,  versets  17,  18.)  Je  dois  ce 
rapprochement  décisif  à  M.  l'abbé  Duchesne. 


d'kISTOIUK    lîl     DR    LlTTBRATUtiE  6j 

de  Jaffé.  Dans  le  corps  de  l'ouvrage,  l'auteur  a  eu  l'occasion  d'étudier  le 
décret  de  Nicolas  II  sur  l'élection  des  papes;  il  repousse  le  texte  de  Pertz 
et  ses  observations  personnelles  le  conduisent  fort  heureusement  aux 
conclusions  qu'a  formulées,  de  son  côté,  M.  Scheffer-Boichorst. 

L'ouvrage,  dans  son  ensemble,  est  une  œuvre  historique  de  bon  aloi. 
M.  Rocquain,  dont  le  grand  public  connaît  et  apprécie  les  travaux,  con- 
tribue efficacement  à  l'éducation,  à  l'instruction  de  ses  lecteurs;  il  les 
initie  autant  que  possible  à  l'étude  des  sources  :  son  livre  réalise  un 
progrès  très  notable  sur  la  plupart  de  ceux  qui  peuvent  lui  être  com- 
parés. 

Paul  Viollet. 


1 5 1 .  —  El  Ateneo  de  Madrid  en   el  Centenario  de  Calderon.  Discrtacio- 

nes,  poesîas  y  discursos  de  los  senores  Sanchez  Moguel,  Revilla,  Ruiz  Aguilera, 
Fernandez  y  Gonzalez,  Palacio,  Campillo,  Moreno  Nieto,  Moret  y  Echegaray.  Ma- 
drid, Gaspar.  1881,  xv  et  2i3  pages  in-8°. 

Encore  un  écho  du  Centenaire,  le  dernier  probablement.  Une  lassi- 
tude de  fâcheuse  augure  se  laisse,  en  effet,  surprendre  dans  ce  volume 
publié  par  Y  Ateneo  de  Madrid  '.  Les  morceaux  qui  le  composent,  une 
histoire  de  la  vie  et  des  œuvres  de  Calderon  par  D.  Antonio  Sanchez 
Moguel,  une  étude  sur  le  théâtre  de  Calderon  par  D.  Manuel  de  la  Re- 
villa, plusieurs  poésies  et  discours,  se  ressentent,  il  est  vrai,  de  l'exal- 
tation de  ces  jours  de  fête;  mais  la  préface,  d'un  lyrisme  beaucoup  plus 
tempéré,  nous  apprend  que  le  projet  de  publication,  adopté  par  V Ate- 
neo dans  les  premiers  mois  de  l'année  dernière,  a  subi  d'importantes 
modifications  :  on  a  dû  renoncer  à  la  partie  artistique,  aux  gravures 
destinées  à  l'ornementation  du  livre,  puis  il  a  fallu  se  passer  aussi  des 
productions  de  plusieurs  écrivains  très  en  renom,  que  l'association 
avait  invités  à  collaborer  à  l'œuvre.  Tel  qu'il  est,  le  livre  de  Y  Ateneo 
ne  répond  pas  à  l'attente  du  public,  fort  alléché  par  l'annonce  de  tant  de 
belles  choses,  dont,  en  fin  de  compte,  il  se  voit  privé.  Mais  il  faut  pren- 
dre ce  qu'on  nous  donne.  Je  n'ai  point  l'intention  d'examiner  tout  le 
contenu  de  ce  volume,  dont  plusieurs  morceaux  ne  sont  pas  du  ressort 
de  la  Revue  ;  je  m'en  tiendrai  au  mémoire  de  M.  Sanchez  Moguel  sur 
la  vie  et  les  œuvres  de  Calderon. 

La  vie  et  les  œuvres  de  Calderon  !  C'est  là  un  sujet  qu'on  ne  peut 
se  promettre  d'épuiser  en  soixante-six  pages.  M.  M.  l'a  bien  senti  et  je 
dois  dire  qu'il  ne  s'est  point  fait  illusion  sur  les  résultats  qu'il  croit 
avoir  obtenus.  «  Il  me  suffira,   dit-il,  d'avoir  rectifié  des   erreurs  et 


1.  Le  volume  porte  la  date  de  1881,  mais  il  n'a  été  publié  ou  mis  en  vente  que 
cette  année-ci;  il  est  annoncé  dans  le  numéro  de  mars  1882  du  Boleiin  de  la  libre- 
ria  de  Murillo. 


68  REVUE    CRITiQUK 

ajouté  quelque  chose  de  nouveau.  »  Le  nouveau  de  cette  étude  se  ré- 
duit à  peu  de  chose,  ou,  pour  mieux  dire,  à  presque  rien,  et  je  ne  sais 
même  pas  si,  en  ce  qui  touche  la  vie  de  Calderon,  M.  M.  a  tiré  parti  de 
tous  les  travaux  parus  à  l'époque  des  fêtes  du  Centenaire  et  dont  quel- 
ques-uns ont  ajouté  des  bribes  de  renseignements  à  ceux  qu'on  avait 
déjà  réunis  sur  les  faits  et  gestes  du  poète.  Ainsi  je  ne  vois  pas  qu'il  ait 
eu  recours  à  la  biographie  de  Calderon  publiée,  en  mai  1881,  par  D. 
Felipe  Picatoste,  qui  semble  avoir  tiré  des  archives  du  comte  del  Asalto 
des  données  nouvelles  sur  certaines  périodes  de  la  vie  du  poète  '.  Il  est 
regrettable  que  M.  M.  ne  se  soit  pas  borné  à  écrire  cette  vie,  d'après 
toutes  les  sources,  dont  il  aurait  préalablement  éprouvé  avec  soin  la 
valeur.  En  voulant  trop  embrasser,  il  a  été  souvent  obligé  de  jurer  in 
verba  magistri  et  d'accepter,  les  yeux  fermés,  bien  des  opinions  contes- 
tables de  ses  devanciers.  La  partie  de  son  étude  qui  traite  des  œuvres  de 
Calderon,  de  la  chronologie  de  ses  drames,  est  faible;  tandis  que  le  ré- 
sumé de  la  vie  du  poète,  malgré  des  inadvertances,  des  lacunes  et  un 
manque  absolu  de  précision  dans  les  renvois  aux  sources,  qui  rend 
très  difficiles  les  vérifications,  peut  être  au  moins  recommandé  à  ceux 
qui,  avant  de  lire  l'œuvre  du  poète,  voudraient  connaître  en  gros  les 
péripéties  de  son  existence  2.  Malheureusement  une  faute  de  critique 


1 .  Cette  biographie  a  paru  dans  un  ouvrage  intitulé  :  Homenaje  a  Calderon.  Mo- 
nografias.  La  vida  es  sueho.  Madrid,  1881,  in-fol.  (Prix  :  5o  fr.)  J'ai  omis  d'en 
parler  dans  ma  Revue  critique  des  publications  du  Centenaire  (Paris,  E.  Demie, 
1881),  car  alors  j'en  ignorais  complètement  l'existence  :  le  titre  du  volume,  il  faut 
le  dire,  ne  laissait  guère  soupçonner  qu'il  pût  s'y  trouver  une  vie  de  Calderon.  En- 
core aujourd'hui  je  ne  connais  de  cette  biographie  que  les  quelques  extraits  qu'en  a 
donnés  M.  J.  Fastenrath,  Calderon  in  Spanien,  Leipzig,  1882,  pp.  179  et  28Ô  à  293. 
—  Je  profite  de  l'occasion  pour  rectifier  sur  deux  points  ma  Revue  :  i°  Le  papel 
de  Calderon  dont  il  est  parlé  à  la  page  9  n'a  pas  été  publié  seulement  par  Hartzen- 
busch,  t.  IV,  p.  676  de  son  édition,  il  a  encore  été  reproduit  (dans  la  même  Biblio- 
teca  Rivadeneyra)  par  Eugenio  de  Ochoa,  Epistolario  espaftol,  t.  II,  p.  140; 
20  D.  Cayetano  Rosell  (Entremeses  de  Quinones  de  Benavente,  Madrid,  1874,  t.  II, 
p.  363)  cite  un  manuscrit  de  l'Académie  de  l'Histoire  qui  contient  des  règlements 
administratifs  pour  les  théâtres  de  Madrid,  des  années  i6o3,  1608,  i6i5  et  1641; 
il  a  même  imprimé  un  règlement  de  1753  qui  reproduit  beaucoup  de  dispositions 
antérieures;  cf.  ma  revue,  p.  45  et  suiv.  ;  3°  Le  dossier  cité  à  la  p.  6,  note  I,  de  la 
Revue  a  été  analysé  par  Hartzenbusch,  Memoria  leida  en  la  Biblioteca  Nacional. 
Madrid,  1870,  p.  6  et  suiv.,  mais  cela  ne  suffit  pas. 

2.  Il  faut  signaler  une  inadvertance.  A  propos  du  nom  de  famille  de  la  mère  ds 
Calderon  Henao,  qui  serait  l'équivalent  de  Hainaut,  M.  M.  dit  que  «  notre  poète 
appartenait  à  la  classe  de  ceux  qui,  de  son  temps,  s'appelaient  Esgui^aros  ou  Esji^a- 
ros,  c'est-à-dire  fils  ou  descendants  de  deux  familles,  l'une  espagnole,  l'autre  étran- 
gère. »  Esguiçaro  n'a,  en  aucun  temps,  servi  à  désigner  une  telle  origine.  Ce  mot, 
qui  vient  de  Schwei^er,  n'a  jamais  eu  d'autre  sens  que  celui  de  «  Suisse  »  ou,  au 
figuré,  de  «  lourdaud,  niais.  »  —  Autre  chose  :  M.  M.  écrit  trop  vite;  il  a  commis 
quelque  part  (p.  64)  un  plugio  (!),  capable  de  faire  trembler  sur  sa  base  l'édifice  de 
la  rue  Valverde.  Est-ce  que  de  tels  américanismes  ont  déjà  reçu  droit  de  cité  à 
VAteneo  ? 


d'histoire  et  de  littératurb  69 

dépare  cette  nouvelle  biographie  et  rend  fort  problématiques  plu- 
sieurs déductions  de  l'auteur.  Voici  de  quoi  il  s'agit. 

A  la  suite  de  Hartzenbusch  et  de  divers  autres  érudits,  M.  M.  a  ad- 
mis sans  hésitation  l'authenticité  d'un  romance,  où,  à  ce  que  l'on  pré- 
tend, Calderon  se  serait  peint  au  naturel  (trop  au  naturel)  à  une  dame 
qui  désirait  l'épouser,  lui  contant  à  ce  propos  les  traits  principaux  de  sa 
vie,  jusqu'à  un  âge  assez  mûr.  Tient-on  ce  morceau  pour  authentique, 
il  faut  alors  montrer  comment  les  faits  qui  y  sont  relatés  se  concilient 
avec  «  l'histoire  vraie  »,  celle  qui  résulte  de  documents  officiels  ou  de 
témoignages  contemporains.  Jusqu'ici  ce  travail  de  critique  n'a  été  fait 
par  personne;  on  a  tant  bien  que  mal  combiné  les  données  du  romance 
avec  ce  qu'on  sait  d'autre  part  de  l'histoire  du  poète,  et  nul  ne  s'est  de- 
mandé si  l'origine  dudit  romance  est  clairement  établie,  s'il  n'existe 
pas  quelque  motif  de  douter  qu'il  puisse  être  un  produit  de  la  plume  de 
Calderon.  Sans  avoir  la  prétention  de  résoudre  définitivement  le  pro- 
blème, je  voudrais  contribuer  à  l'éclaircir  :  il  est  vraiment  grand  temps 
qu'on  soit  fixé  sur  la  valeur  de  cette  pièce.  J'y  suis  d'ailleurs  personnel- 
lement intéressé,  car  il  m'est  arrivé  à  moi  aussi  d'admettre  imprudem- 
ment, sur  la  foi  de  Hartzenbusch,  que  le  romance  est  a  la  seule  auto- 
biographie que  nous  possédions  de  Calderon  '.  »  Depuis  j'ai  changé 
d'avis.  Mais  il  faut  présenter  au  lecteur  les  pièces  du  procès. 

Dans  le  tome  Ier  des  Comedias  de  Lope  de  Vega  2  de  la  Biblioteca 
Rivadeneyra,  Hartzenbusch  inséra,  aux  appendices,  une  pièce  intitulée 
«  Romance  de  Don  Pedro  Calderon  à  une  dame  qui  désirait  connaître 
sa  condition,  sa  personne  et  sa  vie,  »  et  indiqua  en  ces  termes  de  qui  il 
la  tenait  :  «  M.  Jorge  Diez,  très  digne  directeur  du  collège  royal  de  Sé- 
ville  et  aussi  instruit  que  généreux,  m'a  remis  un  cahier  manuscrit,  in- 
titulé Poesias  de  diferentes  autores  ;  à  côté  de  compositions  déjà  con- 
nues, ce  cahier  en  renferme  d'inédites,  dont  la  dernière  est  un  romance 
de  Calderon,  où  il  décrit  minutieusement  sa  personne  et  donne  quelques 
détails  sur  sa  vie.  Par  malheur  le  dernier  feuillet  manque  et  le  romance 
est  incomplet...  L'écriture  du  cahier  est  indubitablement  du  xvue  siè- 
cle 3.  »  Dans  cette  édition  princeps  le  romance  compte  187  vers. — 
Le  très  érudit  D.  Cayetano  La  Barrera  fut  le  premier,  ou  l'un  des 
premiers,  à  accorder  à  ce  texte,  d'après  Hartzenbusch,  la  valeur  d'un 
document  autobiographique  :  son  catalogue  de  l'ancien  théâtre  espa- 
gnol, publié  en  1860,  en  fait  foi  (voir  p.  47).  —  En  1868  parut  le  tome 
premier  du  Teatro  escogido  de  D.  Pedro  Calderon  de  la  Barca, 
imprimé  par  D.  Patricio  de  la  Escosura  sous  les  auspices  de  l'Académie 


1.  Revue  critique  du  2  5  septembre  1875. 

2.  Mon  exemplaire  de  la  seconde  édition  de   ce    volume    est  daté  de  i85g;  je  ne 
sais  pas  au  juste  quand  a  été  publiée  la  première. 

3.  Hartzenbusch  ne  dit  pas  si  le  titre  du  romance  tel  qu'il  le  donne  se  trouve  dans 
le  manuscrit. 


JO  REVUE    CRITIQUB 

Espagnole.  L'éditeur  y  cite  à  deux  reprises  (pp.  x  et  xxxiv),  d'après 
Hatzenbusch,  divers  passages  du  romance  qu'il  n'hésite  pas  à  croire  au- 
thentique. Dès  lors  la  pièce  était  canonisée.  —  En  1874,1e  rédacteur  de 
la  Mentor ia  para  la  Biblioteca  Nacional  en  el  présente  ano  (1874)  ', 
D.  Cayetano  Rosell,  rendant  compte  dans  cet  écrit  de  la  donation  faite 
à  la  Bibliothèque  Nationale  de  Madrid  des  livres  et  manuscrits  de  D. 
Luis  Usoz  y  Rio,  s'exprimait  ainsi  :  «  Dans  un  des  manuscrits  de  cette 
collection  se  trouve  intégralement  reproduit  le  romance  de  Calderon  qui 
a  été  publié,  moins  une  cinquantaine  de  vers,  dans  le  tome  XXIV  de  la 
Biblioteca  de  autores  espanoles  »,  puis  il  attribuait  la  mutilation  du 
manuscrit  de  Diez  au  langage  fort  libre  des  derniers  couplets  tels  qu'on 
les  lit  dans  celui  d'Usoz.  En  cette  même  année  1874,  le  texte  complet  du 
romance  vit  enfin  le  jour  dans  un  charmant  petit  volume,  d'un  format 
microscopique,  imprimé  par  Miguel  Ginesta  2.  D'après  des  renseigne- 
ments que  je  tiens  d'un  amibien  informé,  l'impression  de  ce  recueil  fut 
dirigée  par  Hartzenbusch  et  ce  fut  à  l'aide  du  manuscrit  d'Usoz,  quoi- 
qu'il n'ait  point  jugé  à  propos  de  le  dire,  que  l'éditeur  compléta  le  texte 
du  romance.  Dans  cette  nouvelle  édition  le  romance  compte  deux  cent 
trente-six  vers. 

Ici  se  place  une  découverte  importante.  Pendant  son  séjour  à  Paris, 
dans  le  courant  de  l'année  1877,  mon  savant  ami  D.  Marcelino  Menén- 
dez  Pelayo,  ayant  eu  l'occasion  de  lire  le  numéro  de  la  Revue  critique, 
dont  je  parlais  tout  à  l'heure,  voulut  bien  m'écrire,  à  la  date  du  Ier  juin, 
que  le  romance  attribué  à  Calderon  ne  lui  semblait  pas  authentique,  par 
la  raison  qu'en  parcourant  YEnsayo  de  una  biblioteca  espahola  de  Ga- 
llardo,  il  y  avait  lu  dans  la  description  d'un  manuscrit  du  poète  sévillan 
Cepeday  Guzman,  plusieurs  fragments  d'une  composition  presque  iden- 
tique au  romance,  et  qu'à  son  avis  la  présence  de  ce  morceau  dans  un 
manuscrit,  sinon  autographe,  du  moins  revu  et  annoté  par  l'auteur,  aussi 
bien  que  le  style  de  ces  vers,  beaucoup  plus  conforme  à  la  manière  enjouée 
et  libre  de  Cepeda  qu'au  genre  grave  de  Calderon  devaient  conduire  en 
bonne  critique  à  retirer  à  ce  dernier  la  paternité  du  romance  3.  Si  l'on  se 


1.  Madrid,  Aribau  et  C'",  gr.  in-8°,  1874. 

2.  Poesias  de  Calderon  de  la  Barca.  Madrid,  Miguel  Ginesta,  1874,  in-32.  —  Un 
nouveau  recueil,  publié  l'an  dernier,  Poesias  inéditas  (sic)  de  Calderon  (Biblioteca 
universal)  ne  donne  que  les  184  premiers  vers  du  romance.  «  Suprimimos  los  ulti- 
mos  versos  por  ser  demasiado  libres  »,  dit  l'éditeur,  p.  46. 

3.  Il  me  paraît  utile  de  transcrire  ici  le  passage  de  la  lettre  de  M.  Menendez  dont 
je  viens  de  donner  la  substance  :  «  Leyendo  el  articulo  de  Vd.  acerca  de  la  éd.  de 
El  Magico  hecha  por  Magnabal,  he  visto  que  cita  Vd.  el  fragmento  de  romance  en 
que  Calderon  describe  a  una  dama  sus  cualidades  fisicas  y  morales,  etc.  No  lo  creo 
auténtico.  En  el  20  tomo  del  Ensayo  de  Gallardo  encontrarâ  Vd.  la  descripcion  y  el 
extracto  de  un  codice  de  poesias  de  D.  Carlos  Cepeda  y  Guzman,  y  entre  ellas  trozos 
de  un  romance  que  conviene  con  el  atribuido  â  Calderon.  El  codice  de  Cepeda  me- 
rece  toda  fé,  porque  (si  la  memoria.no  me  engana)  es  autôgrafo  6  â  lo  menos  corre- 
gido  de  propia  mano  por  el  autor.  En  cambio  el  ms.  de  donde  tomô  el  romance 


D  HISTOIRE    ET   DE    LITTERATURE  Jl 

reporte  à  l'ouvrage  cité  par  M.  Menendez,  on  y  trouve  en  effet  (au 
tome  II,  col.  364  et  suiv.)  une  description  très  détaillée  d'un  manuscrit 
de  poésies  de  D.  Carlos  Cepeda  y  Guzman,  baptisé  à  Séville,  le  7  octo- 
bre 1640,  et  mort  on  ne  sait  au  juste  quand,  mais  en  tout  cas  pas  avant 
l'année  1690.  Parmi  les  extraits  de  ce  manuscrit  imprimés  dans  le  livre 
de  Gallardo  se  trouvent  soixante-dix-huit  vers  d'un  romance  qui  corres- 
pondent aux  vers  1  à  8,  17  à  20,  49  à  52,  93  à  104,  117  a  120,  141  à 
i52,  161  à  164,  167  à  184,  189  à  192,  229  à  236  du  romance  attribué 
à  Calderon.  Malgré  des  variantes  qui  seront  examinées  en  détail  plus 
loin,  la  comparaison  de  ces  extraits  avec  la  leçon  des  manuscrits  de  Diez 
et  d'Usoz  montre  clairement  que  nous  avons  là  deux  versions  d'un  seul 
et  même  romance;  il  s'agit  donc  de  décider  duquel  des  deux  poètes, 
Cepeda  ou  Calderon,  il  est  l'œuvre,  et  auquel  des  deux  les  détails  auto- 
biographiques qui  s'y  lisent  conviennent  le  mieux. 

Le  manuscrit  de  Cepeda  étant  au  premier  chef  un  manuscrit  original  ', 
tandis  que  les  autres  ne  sont  que  des  copies  dont  on  ignore  la  date  exacte 
ainsi  que  la  provenance,  c'est  par  la  version  du  premier  manuscrit  qu'il 
faut  commencer.  Je  passe  la  première  partie  du  romance  où  l'auteur  se 
peint  des  pieds  à  la  tête,  parce  que,  ne  connaissant  rien  du  physique  de 
Cepeda,  il  m'est  impossible  d'apprécier  l'exactitude  de  cette  description, 
qui  a  été  d'ailleurs  fort  abrégée  par  Gallardo  (16  vers. dans  ses  extraits 
contre  84  vers  dans  le  texte  de  Hartzenbusch),  et  je  me  borne  à  résumer 
ce  qu'il  raconte  de  sa  naissance,  de  son  éducation  et  de  la'carrière  qu'il 
a  suivie.  Il  est  né  à  Séville.  Destiné  à  l'Eglise  par  son  père,  il  est  ordonné 
par  el  de  Tapia.  Ici  une  note  autographe  :  «  L'illustrissime  D.  Fray 
Pedro  de  Tapia,  archevêque  de  Séville,  m'ordonna  le  10  mai  1 653  »  2. 
Il  va  à  Salamanque,  où  il  gagne  le  grade  de  bachelier  ;  puis  il  prend  goût 
à  la  poésie  et  se  fait  pour  la  première  fois  couronner  dans  un  concours 
littéraire  célébré  à  propos  de  la  canonisation  de  S.  Thomas  de  Villanueva 
(1 658).  Ce  succès  le  détourne  de  continuer  ses  études  de  droit,  qu'il  aban- 
donne pour  se  mêler  aux  gens  de  théâtre;  il  fait  des  copias.  Puis  il  entre 
au  service  de  son  parrain,  le  marquis  de  Villanueva,  dans  la  maison 
duquel  il  remplissait,  au  moment  même  où  il  écrit,  les  fonctions  d'é- 
cuyer  {cab  aller  i\oj.  Je  veux  rester  célibataire,  dit-il,  et  d'ailleurs  aucune 
femme  ne  voudrait  m'épouser,  de  peur  d'être  nommée  écuyère.  Cepeda 
préfère  avoir  à  la  fois  deux  maîtresses  et  il  explique  longuement  pour- 


Diez  debia  ser  uno  de  esos  tomos  de  poesias  varias,  donde  muchas  veces  se  atribuyen 
â  un  autor  composiciones  que  no  le  pertenecen.  Vd.  verâ.  El  estilo  del  romance  y 
lo  que  en  él  se  dice  estan  mas  en  la  cuerda  de  Cepeda,  ingenio  burlon  y  maleante, 
que  en  la  de  Calderon.  » 

1.  Tout  le  manuscrit  n'est  pas  autographe,  Cepeda  n'y  a  transcrit  de  sa  main  propre 
que  certaines  compositions  satiriques  (Ensayo,  II,  col.  Syg,  note),  mais  les  pièces 
copiées  par  un  autre  ont  été  revues  par  lui,  comme  le  prouvent  les  notes  autographes 
qui  les  accompagnent. 

2.  Pedro  de  Tapia  occupa  le  siège  métropolitain  de  Séville  de  i653  à  1657. 


72  REVUE    CRITIQUE 

quoi  ;  il  termine  en  disant  à  la  dame  qui  Pavait  interrogé  sur  sa  vie  : 
«  Je  veux  bien  vous  donner  l'investiture  à  la  première  vacance,  mais  ne 
me  parlez  pas  de  mariage.  »  Cette  dernière  partie  du  romance  est  un 
peu  trop  leste  pour  pouvoir  être  analysée  plus  en  détail. 

Voilà  ce  que  contient  cette  pièce  intitulée  dans  le  manuscrit  :  a  A 
una  dama  que  deseaba  conocer  a  D.  Carlos  y  saber  su  estado  y  vida.  » 
A-t-on  quelque  raison  de  la  croire  apocryphe,  y  trouve-t-on  des  traits 
dont  on  puisse  dire  avec  certitude  qu'ils  n'ont  pas  pu  être  écrits  par 
Cepeda  parlant  de  lui-même?  A  vrai  dire,  les  maigres  renseignements 
sur  la  vie  de  Cepeda  que  fournissent  une  notice  généalogique  imprimée 
par  Gallardo  [Ensayo,  II,  col.  364),  la  dédicace  de  son  recueil  et  quel- 
ques adresses  de  ses  poésies  ne  donnent  pas  le  moyen  d'éprouver 
l'exactitude  de  tous  les  détails  du  romance,  mais,  en  tout  cas,  n'en  dé- 
mentent aucun  ;  et  puisque  l'auteur  affirme  que  c'est  bien  lui  qui  parle, 
qui  se  peint,  et  qu'il  prend  même  le  soin  d'annoter  ses  vers,  on  est  tenu 
de  le  croire.  En  second  lieu^  la  qualité  du  style  qui,  à  elle  seule,  ne 
serait  pas  un  argument  décisif,  est  à  considérer.  11  suffit  de  lire  quel- 
ques-unes des  autres  pièces  de  Cepeda  pour  se  convaincre  que  notre 
romance  ne  détonne  pas  dans  la  collection.  Calderon,  lui,  n'a  pas  dans 
ses  poésies  lyriques  un  seul  morceau  d'une  allure  aussi  familière,  aussi 
libre. 

Voyons  maintenant  la  version  des  manuscrits  de  Diez  et  d'Usoz,  celle 
qu'on  dit  être  de  Calderon.  Les  différences  principales  (les  seules  qui 
vaillent  la  peine  d'être  mentionnées)  que  cette  version  présente  sur  la 
première,  sont  les  suivantes  '  :  v.  g3,  Naci  en  Madrid,  au  lieu  de  Naci 
en  Sevilla  :  la  substitution  était  d'autant  plus  facile  à  faire  que  les  deux 
leçons  comptent  dans  le  vers  pour  le  même  nombre  de  syllabes;  — 
v.  10 1  El  de  Troya  au  lieu  d'El  de  Tapia.  Comment  un  archevêque 
de  Séville  aurait-il  ordonné  Calderon,  qui  passa  toute  son  enfance  ou  sa 
première  jeunesse  à  Madrid  ?  La  leçon  el  de  Troya,  au  contraire,  désigne 
un  personnage  des  mains  duquel  il  ne  serait  point  invraisemblable  que 
Calderon  eût  pu  recevoir  les  premiers  ordres.  L'histoire  ecclésiastique 
d'Espagne  connaît  en  effet  un  évêque  in  partibns  de  Troie,  Melchior  de 
Soria  y  Vera,  suffragant  de  l'archevêque  de  Tolède,  Sandoval  y  Rojas, 
de  1600  à  1618  2.  Madrid  appartenant  au  diocèse  de  Tolède,  il  n'est  pas 
impossible  que  cet  évêque  auxiliaire  y  soit  venu,  pendant  le  temps  qu'a 
duré  sa  charge,  pour  y  procéder  à  des  ordinations;  —  v.  109-112.  Le 
concours  littéraire  de  la  canonisation  de  Thomas  de  Villanueva  (  1 658) 
est  ici  remplacé  par  ceux  de  la  béatification  et  de  la  canonisation  d'Isidore 
de  Madrid  (1620  et  1622),  auxquels  nous  savons  par  d'autres  sources 
• _— _ . * 

i.  Ici  encore  je  passe  la  partie  qui  traite  du  physique,  car  les  mauvaises  repro- 
ductions que  j'ai  sous  les  yeux  d'un  portrait  de  Calderon,  ne  servent  à  rien.  Et 
puis  il  faut  dire  que  la  description  est  dans  un  ton  trop  burlesque  pour  qu'il  y  ait 
lieu  d'y  attacher  grande  importance. 

2.  Espaha  Sagrada,  t,  LI,  p.  3n. 


d'histoire  et  de  littérature  7?» 

que  Calderon  prit  part  ;  —  v.  119.  Le  mot  copias  est  remplacé  par  co- 
medias.  Cepeda  dit  seulement  qu'il  prit  goût  au  théâtre,  ou  plutôt  à  la 
société  des  comédiens,  et  qu'il  fit  des  copias  (La  cômica  inclinacion 
Me  llevô  a  la  farandula  ';  Copias  he/echoj,  et,  en  effet,  il  n'existe  aucun 
ouvrage  dramatique  de  cet  auteur,  tandis  qu'on  était  tenu  de  faire  dire 
à  Calderon  comedias  hice;  —  v.  143.  Por  ramones  de  que  el  Duque 
Mi  senor  tiene  la  culpa.  au  lieu  de  Por  ramones  que  el  Marques  Mi 
sehor,  etc.  Cepeda  eut  pour  principal  protecteur  un  marquis  et  Calderon 
un  duc,  le  duc  d'Albe.  C'est  tout. 

Comme  le  manuscrit  de  Cepeda  est  un  manuscrit  original. et  offre  les 
plus  solides  garanties  d'authenticité,  j'étais  autorisé  à  considérer  les  va- 
riantes de  la  seconde  version  comme  autant  de  substitutions  à  la  leçon 
originale;  mais  admettons  un  instant  que  le  manuscrit  de  Cepeda  n'ait 
pas  le  caractère  qu'il  a,  que  les  deux  versions  nous  aient  été  transmises 
dans  des  copies  quelconques,  que  nous  n'ayons  pour  nous  guider  que 
les  données  historiques  contenues  dans  le  romance  :  laquelle  des  deux 
versions  devrons-nous  tenir  pour  apocryphe?  J'ai  indiqué  tout  à  l'heure 
que  la  première  ne  renferme  rien  qui  contredise  le  peu  qu'on  sait  de  la 
vie  de  Cepeda;  en  dira-t-on  autant  de  la  seconde,  ne  s'y  trouve-t-il 
rien  qui  déconseille  d'y  voir  un  morceau  autobiographique  de  l'auteur 
de  La  vida  es  sueho  ?  A  mon  avis,  il  y  a  plusieurs  objections  à  faire  à 
cette  version  du  romance,  et  je  vais  les  résumer  aussi  succinctement  que 
possible.  Une  remarque  toutefois  avant  de  commencer.  Le  principal 
instrument  de  critique  dont  nous  disposions  en  cette  occurrence  est  la 
biographie  de  Calderon  par  Juan  de  Vera  Tasis.  Or,  sous  prétexte  que 
cet  écrivain  s'est  trompé  sur  la  date  de  la  naissance  du  poète,  divers  éru- 
dits  de  nos  jours  (M.  M.  entre  autres)  traitent  fort  légèrement  cet  écrit 
et  pensent  qu'on  peut  s'abstenir  d'y  ajouter  foi.  Cette  façon  de  procéder 
ne  me  paraît  pas  sérieuse.  De  ce  que  Vera  Tasis  a  commis  une  erreur  de 
date,  il  ne  s'en  suit  point  du  tout  que  son  autorité  soit  pour  le  reste 
amoindrie;  il  est  bon  d'ailleurs  de  savoir  que  plusieurs  faits  avancés 
par  lui  ont  été  dans  la  suite  confirmés  par  des  documents  authentiques  : 
jusqu'à  preuve  bien  établie  du  contraire,  il  n'existe  donc  pas  de  motif 
de  douter  de  l'exactitude  des  autres  et,  en  général,  de  la  véracité  du  bio- 
graphe de  Calderon. 

J'énumère  maintenant  mes  objections  :  i°  le  romance  dit  que  Calde- 
ron a  été  ordonné  dans  sa  première  jeunesse  par  l'évêque  de  Troie.  Vera 
Tasis  ne  mentionne  pas  ce  détail  et  ne  sait  rien  de  l'intention  qu'aurait 
eue  la  mère2  de  Calderon  de  destiner  son  fils  à  la  carrière  ecclésiastique; 
suivant  lui,  c'est  seulement  à  l'âge  de  cinquante  et  un  ans  que  le  poète 

1.  Le  sens  technique  de  farandula  est  donné  par  Agustin  de  Rojas  dans  son  Viage 
entretenido,  éd.  de  1793,  p.  121.  a  Es  vispera  de  compania  »,  c'est-à-dire  «un  peu 
moins  qu'une  véritable  troupe  de  comédiens.  » 

2.  Y  mi  sehoramadre  Religiosamente  astuta.  Dans  le  ms.  de  Cepeda  on  ht  :  Y  mi 
querido  padre  (Con  religion  bien  astuta/. 


74  KKVUK     CKITJQOK 

songea  à  chercher  un  refuge  dans  l'Eglise,  comme  tant  d'autres  hommes 
de  lettres  de  son  temps,  et  qu'il  se  fit  ordonner  prêtre;  2°  d'après  le  ro- 
mance, il  semblerait  que  son  auteur  n'étudia  à  Salamanque  que  le  droit 
et  même  que  le  droit  civil  (v.  1 1 3,  Bartulo  y  Baldo...  v.  121,  Desde 
letrado  à  poeta  Pasé).  Or,  nous  savons  par  Vera  Tasis  que  Calderon 
fit  à  Salamanque  des  études  approfondies  de  philosophie,  d'histoire  sa- 
crée et  profane,  de  droit  civil  et  canonique,  etc.  ;  en  sortant  de  cette  uni- 
versité, il  était  donc  tout  autre  chose  qu'un  letrado  ';  3°  il  est  dit  ensuite 
dans  le  romance  (vv.  122  et  suiv.)  que  le  poète  renonça  à  la  poésie  sur 
les  observations  de  quelques  vieux  grincheux  et  se  fit  escudero.  «  Etu- 
diant, poète,  escudero  j'ai  été  et  serai  »,  tels  sont,  dit-il,  «  les  degrés  de 
ma  fortune  »,  et  il  ajoute  :  «  Jusqu'ici  je  suis  resté  célibataire  par  la  faute 
du  duc  mon  seigneur  :  comme  il  m'a  fait  son  caballeri\o,  toutes  les 
femmes  m'évitent,  de  peur  d'avoir  à  porter  le  titre  de  caballeri^a  ».  Le 
mot  escudero  a  très  clairement  ici  le  sens  de  le  page,  domestique  »  (d'un 
ordre  un  peu  élevé)  et  le  mot  caballeri^o,  écuyer  proprement  dit,  n'est 
là  que  pour  préciser  la  nature  des  fonctions  escuderiles  que  l'ex-poète 
remplissait  chez  son  duc  au  moment  où  il  écrivait  sa  lettre. 
Ainsi  Calderon  aurait  abandonné  la  Muse  pour  entrer  au  service  d'un 
grand  seigneur  qui  lui  aurait  donné  la  charge  d'écuyer.  Pour  le  coup, 
voilà  qui  est  nouveau  et  qui  s'accorde  fort  mal  avec  le  récit  non  dé- 
menti de  Vera  Tasis  :  «  L'an  1619,  Calderon  quitta  Salamanque,  conti- 
nuant à  cultiver  le  précieux  fonds  de  connaissances  qu'il  en  avait  rap- 
porté auprès  (al  lado)  de  plusieurs  grands  seigneurs  de  la  cour.  L'an 
1625,  il  alla  de  son  propre  mouvement  servir  le  roi  dans  l'Etat  de 
Milan  et  en  Flandre...  Il  aurait  obtenu  un  rapide  avancement  dans  cette 
honorable  carrière,  si  le  roi  n'avait  pas  daigné  le  rappeler  pour  faire  con- 
tribuer son  talent  au  succès  des  fêtes  du  Palais  1  ;  en  1 636,  il  reçut  de 
la  faveur  royale  l'habit  de  Saint-Jacques,  qu'il  commença  à  porter  l'an- 
née suivante.  »  Puis  Vera  Tasis  ajoute  qu'en  1640  Calderon  partit  avec 
les  chevaliers  de  son  ordre  pour  combattre  les  Catalans  révoltés,  malgré 
les  instances  que  fit  Philippe  IV  pour  le  retenir  auprès  de  lui.  Tout  cela 
ressemble  peu  au  romance,  qui,  si  on  le  confronte  avec  le  récit  du  bio- 
graphe de  Calderon,  contient  des  choses  invraisemblables  et  inexactes. 
Il  est  inexact  que  Calderon  ait  abandonné  la  poésie  pour"  servir  dans  la 
maison  d'un  grand  seigneur,  et  il  est  invraisemblable  qu'il  ait  jamais 
rempli  auprès  de  n'importe  qui  les  fonctions  de  caballeri\o.  Enfin  il  est 
avéré  que,  peu  d'années  après  son  retour  de  Salamanque,  Calderon  es- 
saya du  métier  militaire  et  prit  part  aux  campagnes  d'Italie  et  de  Flan- 
dre de  la  première  moitié  du  xvn°  siècle  :  le  romance  n'en  dit  mot. 
M.  M.  ne  s'est  point  troublé  de  ces  difficultés;  il  ne  croit  pas,  malgré 


1.  M.  M.  rapporte  très  inexactement  ce  passage.  Vera  Tasis  ne  dit  pas  du  tout  que 
Calderon  soit  resté  dix  ans  au  service  hors  d'Espagne  et  que  le  roi  le  rappela  en 
1635. 


6  HISTOIRE    m     1)K    I.,!T!P.I!,\TURK  J  0 

l'autorité  de  Vera  Tasis,  que  Calderon  ait  servi  à  l'étranger  ;  il  admet 
seulement  qu'il  a  été,  pendant  quelque  temps,  soldat  en  Espagne  et  voit 
dans  Yescudero  du  v.  127  une  allusion  à  la  profession  militaire  du 
poète:  escudero  aurait  ici  le  sens  d'escudero  en  la  milicia!  Pour  ma 
part,  je  ne  saurais  admettre  une  telle  combinaison  de  deux  témoignages 
absolument  discordants. 

L'authenticité  de  la  prétendue  version  calderonienne  n'est  donc  rien 
moins  qu'évidente.  Mais,  dira-t-on,  si  la  version  originale  est  de  Cepeda 
et  concerne  Cepeda,  comment  expliquer  qu'on  ait  voulu  la  faire  passer 
pour  l'œuvre  de  Calderon?  Pourquoi  travestir  ainsi  l'autobiographie  du 
poète  de  Séville,  pourquoi  tromper  le  public  et  tenter  de  lui  faire  pren- 
dre ce  romance  pour  une  confession  du  poète  madrilène?  Je  ne  suis  pas 
en  mesure  d'indiquer  le  motif  de  la  fraude  ni  d'en  nommer  l'auteur  (l'his- 
toire littéraire  de  l'Espagne  est  riche  en  picardias  de  ce  genre)  ;  il  me 
suffit  d'avoir  établi  qu'on  ne  doit  plus  désormais,  en  se  reposant  sur 
Hartzenbusch,  se  servir  du  fameux  romance  pour  compléter  ou  rectifier 
les  sources  de  la  vie  de  Calderon.  Avant  la  découverte  de  cette  pièce  dans 
le  manuscrit  de  Cepeda,  on  a  pu  être  jusqu'à  un  certain  point  excusable 
de  s'en  rapporter  au  dire  de  l'éditeur  de  Calderon  :  on  ne  le  serait  plus 
maintenant,  et  ceci  me  ramène  à  M.  Moguel.  Le  membre  de  VAteneo  a, 
dans  la  première  partie  de  son  mémoire,  utilisé  à  diverses  reprises  le  ro- 
mance, sans  manifester  le  moindre  doute  sur  son  authenticité,  sans  faire 
la  moindre  allusion  au  manuscrit  de  Cepeda;  mais,  arrivé  presque  au 
terme  de  son  travail,  il  laisse  voir  qu'il  a  eu  vent  de  la  trouvaille  de 
M.  Ménendez.  A  la  p.  5j,  après  avoir  cité  un  passage  d'une  pièce  en 
vers  hendécasyllabes  composée  par  Cepeda  à  l'occasion  de  la  mort  de 
Calderon,  il  s'exprime  ainsi  :   «  Admirateur  enthousiaste  de  Calderon, 
Cepeda  l'imita  souvent  (no  pocas  veces),  il  prit  plaisir  même  d'appli- 
quer à  sa  vie  le  romance  que  Calderon  écrivit  à  une  dame  et  dont  nous 
nous  sommes  servi  dans  divers  passages  de  cette  étude».  Il  est  évident  que 
le  imitôlo  no  pocas  veces  n'est  là  que  pour  rendre  vraisemblable  ce  qui 
suit;  en  fait  M.  M.  serait  fort  embarrassé  de  citer  un  seul  exemple  de  ces 
prétendues  imitations.  Inutile  de  montrer  combien  d'objections  soulè- 
verait le  plagiat  que  M.  M.  met  avec  tant  de  désinvolture  sur  le  compte 
du  poète  de  Séville.  Cepeda,  le  recueil  de  ses  poésies  le  prouve  assez, 
n'était  pas  en  peine  de  trouver  des  idées  et  des  rimes;  il  est  absurde  de 
supposer  qu'il  se  soit  plu  à  démarquer  l'œuvre  d'autrui,  surtout  une  œu- 
vre si  personnelle,  si  intime.  Franchement,  M.  Moguel  eût  mieux  fait 
d'avouer  qu'il  s'était  avec  d'autres  engagé  dans  une  fausse  voie  que  de 
proposer  une  si  piètre  explication  du  curieux  problème. 

Pour  tenter  de  le  résoudre  d'une  façon  absolument  satisfaisante,  il 
faudrait  revoir  avec  soin  les  trois  manuscrits  (si  l'on  réussit  à  les  retrou- 
ver tous  trois).  Je  souhaite  que  quelque  érudit  espagnol  se  charge  de 
cette  recherche,  mais  je  pense  bien  que  nul  ne  s'en  souciera. 

Alfred  Morel-Fatio. 


j6  REVUE    CRITIQUE 

l52. —  Étude  sur  les    œuvres  inédites   et  sur,   lu    correspondance    de 

H.  Dusevel,  archéologue  et  historien,  inspecteur  des  monuments  historiques, 
membre  non  résidant  du  comité  des  travaux  historiques,  lauréat  de  l'Institut,  of- 
ficier de  l'Instruction  publique,  etc.,  par  F.  Pouy,  correspondant  du  ministère  de 
l'Instruction  publique.  Amiens,  imprimerie  Delattre-Lenoel,  éditeur,  1882.  In-8° 
de  128  pages.  (Tirage  à  200  exemplaires  :  175  sur  vélin,  25  sur  vergé). 

M.  F.  Pouy  a  publié,  en  1881,  une  excellente  Notice  biographique 
et  bibliographique  sur  H.  Dusevel  (in-8°  de.  32  pages).  Après  avoir  ra- 
conté avec  autant  d'exactitude  que  de  sympathie  l'histoire  de  la  vie  d'his- 
torien et  d'archéologue  de  son  compatriote  et  confrère,  après  avoir 
dressé  la  liste  des  publications  grandes  ou  petites  de  celui  qui  fut  un 
des  plus  féconds  écrivains  de  la  Picardie,  il  a  voulu  —  et  nous  devons 
l'en  louer  —  faire  connaître  l'œuvre  inédite  de  cet  estimable  érudit.  Il  a 
donc  énuméré,  en  les  analysant  soigneusement,  les  manuscrits  laissés 
par  le  grand  travailleur.  Il  a  surtout  donné,  dans  cette  étude  si  com- 
plète, une  large  place  à  la  vaste  correspondance  de  Dusevel,  disant  avec 
raison  (Avertissement,  p.  4),  que  «  cette  correspondance  offre  une  source 
précieuse  de  renseignements  curieux  et  intéressants  et  parfois  de  révéla- 
tions piquantes,  »  et  que  1'  «  on  y  rencontre,  à  chaque  pas,  la  trace  des 
relations  de  l'auteur  avec  un  grand  nombre  de  savants  et  de  lettrés,  dont 
les  noms  connus  auront  pour  le  lecteur  un  attrait  tout  particulier.  » 
Contentons- nous  d'indiquer  rapidement  les  sujets  traités  dans  les  trois 
premiers  chapitres.  (Chapitre  I  :  Débuts,  fonctions  d'avoué,  voyages  et 
études,  organisation  de  correspondance,  renaissance  de  l'histoire  et 
de  V archéologie,  premier  musée  d'Amiens,  premiers  écrits,  collabo- 
ration à  divers  journaux,  etc.  (1 817-1830),  pp.  5- 18.  —  Chapitre  II  : 
Travaux,  publications  diverses,  collaboration  à  divers  grands  ou- 
vrages, journaux,  revues,  documents  fournis  à  l'histoire  du  tiers- 
état,  succès,  emplois,  titres  honorifiques,  relations,  incidents  divers, 
projets  (i83o-i85o),  pp.  ig-36.  —  Chapitre  III  :  Suite  des  travaux, 
nouvelles  recherches,  projets  d'histoire  de  Picardie  et  autres,  résumé 
et  appréciations  sur  la  vie  laborieuse  de  l'auteur  (i85o-i86i),  pp.  3j- 
58)  li  Mais  arrêtons-nous  un  peu  devant  le  chapitre  IV,  entièrement  con- 
sacré à  la  correspondance.  Voici,  par  ordre  alphabétique,  les  noms  des 
personnes  dont  les  lettres  sont  analysées  et  souvent  en  partie  reproduites 
par  M.  P.  :  le  comte  Beugnot,  de  l'Institut  ;  Bottin,  le  célèbre  créateur 
de  l'almanach  qui  porte  ce  nom,  archéologue  qui  fut  un  des  membres  de 
l'Académie  celtique  et  qui  a  publié  des  Mélanges  sur  Samarobriva  et 
sur  divers  monuments  de  la  Picardie;  Boucher  de  Perthes,  l'ardent  pro- 
pagateur de  la  science  préhistorique;  le  P.  Cahier,  réminent  archéolo- 

1.  M.  P.  dit  (p.  54)  :  «  En  considérant  l'immense  travail  accompli  par  H.  Dusevel 
tant  dans  l'exercice  de  ses  nombreuses  fonctions  que  comme  écrivain,  on  se  de- 
mande comment  la  vie  d'un  homme,  si  longue  qu'elle  fût,  a  pu  suffire  à  une  pareille 
tâche,  et  cependant,  on  le  sait,  elle  n'a  pas  abrégé  l'existence  de  cet  intrépide  tra- 
vailleur. Il  y  a  des  grâces  spéciales  aux  hommes  de  sa  génération.  » 


DriîSTOIREET    DE    L1TTEUAXURB  77 

gue  dont  on  déplore  la  perte  encore  récente;  le  comte  de  Calonne,  con- 
servateur du  château  de  Chambord;  Crapelet,  l'habile  imprimeur,  le 
zélé  éditeur  de  vieux  textes;  Emeric  David,  de  l'Institut;  M.  Jules  Des- 
noyers, le  vénérable  secrétaire  de  la  Société  de  l'histoire  de  France;  Di- 
dron  aîné,  le  vaillant  iconographe,  le  directeur  des  Annales  archéologi- 
ques; Dupré  (de  Gorbie),  qui  signe  :  Vainqueur  commandant  de  la 
Bastille  du  14  juillet  178g,  et  qui  se  recommande  à  nous  par  un 
meilleur  titre,  car  il  découvrit  un  très  beau  chapiteau  de  style  roman, 
retraçant  l'histoire  du  premier  homme,  une  des  plus  remarquables  piè- 
ces du  musée  d'Amiens;  de  la  Fons,  baron  de  Mélicocq,  que  les  innom- 
brables extraits  de  documents  dont  il  enrichissait  (d'autres  disent  en- 
combrait) une  foule  de  recueils,  avait  fait  surnommer  le  grand  extrac- 
teur ;  le  marquis  de  Fortia  d'Urban,  de  l'institut  '  ;  Gilbert,  de  la  Société 
des  Antiquaires  de  France  ;  Louis  Graves,  auteur  de  notables  travaux 
sur  le  département  de  l'Oise;  Hyacinthe  Langlois,  un  des  bons  savants 
, de  la  Normandie;  M.  Louandre  père,  le  bibliothécaire  abbevillois;  le 
comte  de  Mailly,  qui  s'intitulait  :  archéologue  amateur  ;  Prosper  Méri- 
mée, qui,  le  12  juillet  1843,  adressait  à  Dusevel  ce  compliment  :  «  Vous 
rendez  la  science  amusante,  sans  qu'elle  cesse  d'être  science  »;  le  comte 
de  Mérode,  beau-père  de  Montalembert  ;  Ms1-  Mioland,  évêque  d'Amiens; 
puis  archevêque  de  Toulouse;  Mollevault ,  de  l'Institut,  qui,  poète 
même  en  prose,  parle  des  mânes  de  son  épouse;  Montalembert,  qui 
écrit  à  l'historien  d'Amiens,  le  29  juin  i838  :  «  Je  félicite  sincèrement 
la  Picardie  de  compter  dans  son  sein  un  explorateur  tel  que  vous  »;  Au- 
guste Moutié,  le  collaborateur  du  duc  de  Luynes;  Paulin  Paris,  dont 
M.  P.  fait  (p.  100)  un  charmant  éloge  auquel  je  lui  suis  reconnaissant 
d'avoir  associé  mon  nom;  Léon  Paulet,  littérateur  et  historien  belge, 
qui  écrivait  à  Dusevel,  mécontent  de  n'être  pas  récompensé,  ce  mot  si 
vrai  et  si  consolant  :  Est-ce  que  les  sciences  ne  nous  paient  pas  elles- 
mêmes  de  nos  peines?  Pongerville,  le  traducteur  ou  plutôt  le  para- 
phraste  de  Lucrèce  ;  de  la  Querière,  auteur  de  la  Description  des  maisons 
les  plus  curieuses  de  la  ville  de  Rouen;  Paul  Roger,  auteur  de  la  Bi- 
bliothèque de  la  Picardie  et  de  l'Artois;  de  La  noblesse  de  France 
aux  croisades,  etc.;  César  Roussel,  l'explorateur  des  souterrains  de 
Saint-Valery-sur-Somme;  Alex,  du  Sommerard,  le  fondateur  du  Musée 
de  Cluny;  le  baron  Taylor,  dont  une  lettre  à  propos  du  Voyage  pitto- 
resque en  Picardie,  auquel  collabora  Dusevel,  est  un  fort  curieux  frag- 
ment autobiographique;  Troche,  le  chercheur  infatigable,  le  collection - 

1.  Cet  académicien  écrivait,  le  8  octobre  1841,  à  Dusevel  :  «  Vous  auriez  pitié  de 
moi,  si  vous  saviez  dans  quels  embarras  m'a  jeté  ce  malheureux  goût  que  j'ai  pour 
les  imprimés.  Mon  livre  des  itinéraires  anciens  me  coûte  plus  de  3o,ooo  francs.  » 
Peu  d'auteurs  ont  été  plus  féconds  que  Fortia  d'Urban.  A  l'effrayante  liste  de  ses 
ouvrages  imprimés,  il  faut  joindre  une  liste  assez  considérable  de  ses  ouvrages  ma- 
nuscrits conservés  aujourd'hui  dans  la  bibliothèque  de  M.  le  marquis  de  Seguins,  à 
Garpentras,  où  j'ai  pu  les  feuilleter  il  y  a  quelques  jours. 


yS  RS.VUE   CRITIQUE 

neur  de  documents  et  d'estampes  sur  Paris  J  ;  le  comte  de  Vaublanc, 
l'ancien  ministre;  A.  Vincent  et  Ludovic  Vitet,  tous  deux  de  l'Institut. 
En  remerciant  M.  P.  de  nous  avoir  donné  dans  son  livre,  et  notam- 
ment dans  la  dernière  partie  de  ce  livre,  tant  de  pages  agréables  et  ins- 
tructives, je  lui  demanderai  de  rendre  un  nouveau  service  à  la  mémoire 
de  Dusevel.  Le  meilleur  de  tous  les  ouvrages  de  cet  érudit  est  devenu 
fort  rare.  Que  M.  Pouy  réimprime  Y  Histoire  d'Amiens  avec  additions  et 
rectifications  2  !  Nul  n'est  plus  capable  que  lui  de  publier  une  parfaite 
édition  de  cette  histoire.  Ce  sera  bien  mériter  à  la  fois  de  l'ami  pour  le- 
quel il  a  déjà  tant  fait  et  de  ces  autres  amis  que  l'on  appelle  lecteurs. 

T.  DE  L. 


CHRONIQUE 


FRANCE.  —  Il  existait  jusqu'ici  à  Paris  de  nombreux  cercles  artistiques,  politiques, 
commerciaux,  agricoles,  etc.,  mais  il  n'existait  aucun  cercle  qui  eût  pour  objet  de 
réunir  les  hommes  d'étude,  les  littérateurs  et  les  savants,  de  former  un  centre  intel- 
lectuel analogue  à  ce  qu'est,  en  Angleterre,  l'Athenaeum  Club.  C'est  pour  combler 
cette  lacune  que  vient  de  se  constituer  la  Société  historique  qui  a  ouvert  le  i8  juil- 
let, un  cercle  au  n°  2  de  la  rue  Saint-Simon,  n°  2i5  du  boulevard  Saint-Germain. 
Le  bureau  de  la  Société  est  composé  de  MM.  Martin  et  Mignet,  présidents  d'hon- 
neur; G.  Monod,  président;  Lavisse  et  Sorel,  vice-présidents;  Hanotaux  et  Puaux, 
secrétaires  ;  Mayrargues  et  Rayet,  trésoriers.  Nous  remarquons  parmi  les  membres, 
pour  ne  citer  que  les  membres  de  l'Institut,  MM.  Boutmy,  Bréal,  Cherbuliez,  Du 
Camp,  A.  Dumont,  V.  Duruy,  Fustel  de  Coulanges,  J.  Girard,  Laboulaye,  Levas- 
seur,  H.  Martin,  A.  Maury,  Mézières,  Mignet,  G.  Paris,  G.  Picot,  Renan,  Rozière, 
L.  Say,  Sully  Prudhomme,  Taine,  J.  Zeller.  La  cotisation  annuelle  n'est,  poul- 
ies 5oo  premiers  membres,  que  de  60  f'r.  par  an;  elle  sera  portée  ensuite  à  100  fr. 
Les  élèves  des  établissements  d'enseignement  supérieur  peuvent  y  être  admis  moyen- 
nant 20  fr.  par  an.  L'art  ierdes  statuts  de  la  Société  en  définit  le  but  en  ces  termes  : 
Art.  1e1'.  Le  but  que  se  propose  la  Société  est  de  faciliter  les  relations  entre  les  hom- 
mes d'étude,  en  dehors  de  tout  esprit  de  parti  ;  de  leur  fournir  les  moyens  d'infor- 
mation scientifique;  d'encourager  les  études  sérieuses;  de  provoquer  la  sympathie  de 
tous  ceux  qui  s'intéressent  au  développement  intellectuel  de  notre  pays;  en  un  mot, 
de  former  une  vaste  association  inspirée  par  l'amour  de  la  science  et  de  la  patrie.  — 
Art.  2.  —  La  Société  crée  à  cet  effet  un  Cercle  qui  servira  de  centre  de  réunion  pour 


1.  Voir  (p.  101)  une  plaisante  anecdote  sur  M™"  Troche,  qui,  infiniment  moins 
amie  des  livres  que  son  mari,  luttait  virilement  contre  l'invasion  dont  sa  maison 
était  sans  cesse  menacée.  Le  correspondant  de  Dusevel  veut  que  l'on  évite  la  douane 
de  M"10  Troche.  En  cette  occasion,  comme  en  bien  d'autres,  M.  P.  a  entouré  ses  ci- 
tations de  remarques  fort  spirituelles. 

2.  M.  P.  reconnaît  (p.  55,  note  1)  que  l'ouvrage  réclame  «  quelques  améliora- 
tions. »  Il  a(oute  :  «  \J  Histoire  d'Amiens  est  tellement  populaire,  qu'elle  est  deman- 
dée presque  chaque  jour,  à  la  bibliothèque  de  cette  ville,  par  des  lecteurs  de  toutes 
les  classes.  » 


O  HISTOIRE    ET    Pli    LITTÉRATURE  79 

tous  ceux  qui  s'occupent  d'études  historiques  ou  qui  s'intéressent  à  ces  mêmes  étu- 
des comprises  dans  le  sens  le  plus  large  :  histoire  proprement  dite,  histoire  litté- 
raire, histoire  du  droit,  de  la  philosophie,  de  l'art,  des  langues,  etc.  —  Art.  3.  Le 
cercle  mettra  à  la  disposition  de  ses  membres  dans  ses  salons  les  journaux  et  revues 
littéraires,  historiques,  scientifiques  de  la  France  et  de  l'étranger.  —  Art.  4.  Le  cer- 
cle facilitera  à  ses  membres  l'acquisition  des  livres  français  et  étrangers  aux  condi- 
tions les  plus  favorables.  —  Nous  souhaitons  rapide  prospérité  et  longue  vie  à  la  So- 
ciété Historique  et  au  Cercle  Saint-Simon. 

—  M.  Guillaume  Guizot  vient  de  publier  à  la  librairie  Calmann-Lévy  la  traduc- 
tion d'un  volume  de  Macaulay,  renfermant  quelques-uns  des  Essais  d'histoire  et  de 
littérature  (in-8,  424  pp.).  Ce  volume  contient  les  essais  suivants  :  Samuel  Johnson 
(pp.  1-55,  paru  en  décembre  i856  dans  1'  «  Encyclopaedia  britannica  »  et  pp.  56-123, 
publié  en  septembre  i83i  dans  la  «  Revue  d'Edimbourg  »);  Addison  (paru  en 
juillet  1843  dans  la  «  Revue  d'Edimbourg  »,  pp.  124-238);  Madame  d'Arblay  (paru 
en  janvier  1843  dans  la  «  Revue  d'Edimbourg  »;  on  sait  que  Mme  d'Arblay  ou 
Françoise  Burney,  mariée  à  un  Français  émigré,  le  général  d'Arblay,  est  l'auteur  de 
trois  romans,  Evelina,  Cecilia  et  Camilla  dont  les  deux  premiers  eurent  en  leur 
temps  un  grand  succès)  ;  De  l'histoire  (pp.  323-38g,  paru  en  mai  1828  dans  la 
«  Revue  d'Edimbourg  »)  ;  M.  Robert  Montgomery  (pp.  390-421).  Nous  lisons  dans 
l'avertissement  que  M.  Guill.  Guizot  a  mis  en  tête  de  sa  traduction  :  «  Ce  sixième 
volume  des  œuvres  de  lord  Macaulay  que  je  m'étais  proposé  de  traduire,  n'est  pas  le 
dernier.  Il  me  reste  encore  à  donner  quelques-uns  de  ses  Essais,  et,  comme  je  crois 
que,  pour  bien  apprécier  Macaulay,  il  faut  avoir  vu  en  lui  l'orateur  et  le  poète,  à 
côté  du  critique,  du  polémiste  et  de  l'historien,  notre  septième  volume  comprendra 
aussi  un  choix  de  ses  poésies  et  de  ses  discours.  » 

ALLEMAGNE.  —  Le  sixième  volume  des  Kleinere  Schriften  de  Jacob  Grimm, 
renfermant  la  troisième  partie  des  comptes-rendus  et  articles  mêlés  [Recensionen  und 
vermischte  Aufsœtçe,  dritter  Theil,  in-8°,  422  pp.  9  mark),  a  paru  à  la  librairie 
Ferd.  Dûmmler  [Harrwitz  et  Gossmannj. 

—  La  librairie  Perthes,  de  Gotha,  a  publié  la  soixante  et  unième  édition  du 
Schulatlas  de  Stieler,  revue  et  complètement  remaniée  par  M.  Herm.  Berghaus. 
In-40,  33  cartes,  4  mark.) 


SOCIÉTÉ  NATIONALE  DES  ANTIQUAIRES  DE  FRANCE 


Séance  du  5  juillet  1882. 

M.  le  vicomte  Jacques  de  Rougé  est  élu  membre  résidant. 

M.  Guillaume  lit  une  note  de  M.  Caffiaux  sur  les  armes  impériales  sculptées  sur  la 
clef  de  voûte  d'une  salle  d'une  ancienne  porte  de  Valenciennes.  Dans  l'armoriai  du 
héraut  de  Gueldre,  qui  est  de  la  première  moitié  du  xive  siècle,  l'aigle  impériale 
éployée  n'a  qu'une  tête.  Ici  elle  en  a  deux,  et  c'est  probablement  là  un  des  premiers 
exemples  de  ce  nouveau  type,  puisque  la  porte  a  été  construite  en  1 358.  Le  zèle  de 
Valenciennes  à  se  tenir  au  courant  des  modifications  de  l'écu  impérial  s'explique 
par  l'opiniâtreté  avec  laquelle  elle  défendait  contre  les  prétentions  des  comtes  de 
Hainaut  son  titre  de  Ville  impériale,  qui  lui  assurait  une  certaine  autonomie.  Elle 
reconnaissait  ces  comtes  comme  mandataires  de  l'empire,  mais  point  comme  ses 
seigneurs,  et  ne  perdait  pas  une  occasion  d'affirmer  sa  situation  privilégiée  vis-à-vis 
d'eux.  C'est  une  querelle  qui  dura  400  ans,  jusqu'à  la  conquête  française,  et  qui  re- 
commença un  moment  en  1793,  lorsque  Valenciennes  eut  succombé' sous  les  efforts 
de  la  coalition. 


REVUE   CRITIQUE    D  HISTOIRE    ET    DE    LITTERATURE 


ACADEMIE  DES  INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  12  juillet  1882. 

M.  Charles  Nisard  continue  la  lecture  de  son  mémoire  intitulé  r  De  V état  incertain 
et  précaire  de  la  propriété  littéraire  vers  le  milieu  du  xvie  siècle.  Dans  la  première 
partie  de  ce  mémoire,  sous  ce  titre  :  Frutérius.  et  Gifanius,  M.  Nisard  entreprend 
de  réhabiliter  la  mémoire  du  philologue  hollandais  Obertus  Gifanius,  à  qui  ses 
contemporains  ont  fait  et  qui  a  conservé  jusqu'à  nos  jours  la  réputation  imméritée 
d'un  voleur  de  livres  et  d'un  plagiaire.  Ce  Gifanius  eut  une  querelle  avec  un  autre 
Hollandais,  Janus  Douza,  au  sujet  de  la  succession  littéraire  d'un  de  leurs  amis 
communs  et  compatriotes,  Lucas  Frutérius,  mort  à  Paris,  en  1 565,  à  l'âge  de  vingt- 
cinq  ans.  Frutérius  laissait  des  écrits  inédits,  tels  qu'une  collection  de  remarques  cri- 
tiques sur  Varron,  Festus,  Plaute,  Catulle.  Tibulle,  Properce  et  Aulu-Gelle,  intitulée 
Verisimilia,  et  un  petit  nombre  de  poésies  latines.  En  mourant,  il  avait  légué  ces 
ouvrages  à  Gifanius  et  l'avait  chargé  de  les  publier  ;  mais  Douza  parvint  à  dérober 
les  manuscrits,  refusa  obstinément  de  les  rendre,  et  Gifanius  eut  en  vain  recours  aux 
tribunaux  pour  l'y  contraindre.  D'un  caractère  faible  et  pusillanime,  il  finit  par 
céder  et  laissa  les  Verisimilia  entre  les  mains  de  Douza,  qui  les  publia,  chez  Plantin, 
à  Anvers,  en  1584.  Le  voleur  triomphant  ne  se  fit  pas  faute  d'insulter  sa  victime  et 
de  l'accabler  de  calomnies.  Bientôt  après,  en  i566,  Gifanius  ayant  publié  une  édition 
de  Lucrèce,  le  dernier  éditeur  de  ce  poète,  Denis  Lambin,  mécontent  de  voir  re- 
poussées quelques  conjectures  qu'il  avait  proposées,  accusa  Gifanius  de  l'avoir  pillé 
et  le  traita  de  plagiaire.  Le  Hollandais,  toujours  faible  et  craintif,  négligea  de  répon- 
dre. La  calomnie  fut  dès  lors  acceptée  universellement  et  s'est  propagée  jusqu'à  nos 
jours.  M.  Nisard  estime  qu'il  était  temps  d'en  faire  enfin  justice. 

M.  Halévy  communique  de  nouvelles  remarques  sur  la  langue  sumérienne  ou 
accadienne,  à  propos  des  inscriptions  chaldéennes  récemment  découvertes  par  M.  de 
Sarzec.  Il  répète  les  arguments  par  lesquels  il  a  déjà  entrepris  d'établir  que  cette 
prétendue  langue  n'en  est  pas  une,  que  les  textes  dits  sumériens  ne  nous  offrent 
que  de  l'assyrien  écrit  à  l'aide  d'un  système  artificiel  hiératique,  une  sorte  de 
chiffre  ou  de  rébus  sacré.  Il  s'attache  particulièrement  à  répondre  à  l'objection  qui  a 
été  tirée  des  différences  dans  l'ordre  des  mots, .en  assyrien  et  en  sumérien.  Il  soutient 
que  ces  différences  sont  très  minimes,  qu'elles  s'expliquent,  dans  les  rares  cas  où 
elles  se  présentent,  par  des  circonstances  particulières,  qu'en  règle  générale  et  à 
prendre  les  choses  d'ensemble,  l'ordre  des  mots  est  le  même  dans  les  textes  assyriens 
et  dans  les  textes  dits  sumériens. 

M.  Ledrain  communique  la  traduction  d'une  brique  inédite  de  la  collection  de 
M.  de  Sarzec.  L'inscription  de  cette  brique  est,  dit— il,  en  langue  sumérienne.  Elle 
fournit,  dans  cette  histoire  jusqu'ici  si  flottante  des  gouverneurs  de  Sirpurla,  un 
point  fixe.  On  y  rencontre  le  nom  de  Lik-Papsoukal,  fils  de  Goudea. 

M.  Ledrain  communique  ensuite  un  sceau  phénicien  inédit,  qui  porte  le  nom  juif 
de  Baalnathan.  Ce  nom,  de  forme  hébraïque,  est,  d'après  M.  Ledrain,  celui  d'un 
juif  du  temps  qui  précède  la  captivité.  Passé  au  culte  de  Baal,  cet  Israélite  aurait 
échangé  son  nom  de  Jonathan,  ce  celui  que  donne  Iahvé  »,  pour  celui  de  Baalna- 
than, «  celui  que  donne  Baal  ». 

M.  Derenbourg  fait  remarquer  qu'on  connaît  déjà  quelques  noms  juifs  dans  la 
composition  desquels  entre  le  nom  de  Baal,  par  exemple  Jeroubaal,  surnom  de 
Gédéon. 

Ouvrages  présentés  :  —  par  M.  Wallon  :  Pimodan  (le  marquis  de),  le  Château 
d'Echenay  ;  —  par  M.  Georges  Perrot  :  Bulletin  de  correspondance  hellénique,  VII 
(juillet  1882)  ;  —  par  M.  Delisle  :  i°  Chronique  de  Jean  le  F'evre,  seigneur  de  Saint- 
Rémy,  publiée  pour  la  Société  de  l'histoire  de  France  par  M.  Morand;  %"  Castan 
(Auguste),  Jules  Quicherat,  notice,  lue  à  la  Société  d'émulation  du  Doubs,  le  i3  mai 
1882;  —  par  M.  Jules  Girard  :  Couat  (Auguste),  la  Poésie  alexandrine  sous  les 
trois  premiers  Ptolémées  (3 24-2 2  2  av.  J.-C). 

Julien  Havët. 


Le  Propriéiaire-Geratit  :  ERNEST  LEROUX. 


Le  Puy,  imprimerie  Marckcssou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  '23. 


REVUE    CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

N°  31  -  31  Juillet  —  1882 


Sommaire:  i53.  Hoernle,  Grammaire  comparative  des  idiomes  aryens  modernes 
de  l'Inde.  —  154.  Pirenne,  Sedulius  de  Liège. —  i55.  Giraudet,»Lcs  origines  de 
l'imprimerie  à  Tours.  —  Chronique.  —  Société  nationale  des  antiquaires  de 
France.  —  Académie  des  Inscriptions. 


i53.  — A. -F.  Rudolf  Hoernle.  A.  comparative  Grammai»  of  the  Gaudian 
Languages  with  spécial  référence  to  lîie  Eastern  ISimii,  Accompanied 
by  a  language-map  and  a  table  of  alphabets.  Londôn,  Trûbner  et  Co,  1880. 
XL-416  pp.  in-8°. 

Voici  un  livre  dont  le  plus  simple  examen  montre  mieux  que 
ne  pourrait  le  faire  n'importe  quelle  dissertation  ex  professo,  à  quel 
degré  de  précision  a  été  porté  l'art  d'analyser  et  de  décrire  un  groupe  de 
langues,  d'en  suivre  ou  d'en  deviner  les  altérations  progressives  et  d'en 
rétablir  la  filiation.  Il  y  a  vingt  ans,  à  supposer  même  que  les  matériaux 
sur  lesquels  il  repose,  eussent  été  accessibles,  la  pensée  de  l'écrire  sur  le 
même  plan  ne  serait  venu  à  personne.  Le  grammairien  consommé  qui 
eût  réussi  à  embrasser  le  sujet  d'une  vue  aussi  nette,  eût  été  obligé,  dans 
l'exposition  et  sous  peine  de  n'être  compris  que  d'un  bien  petit  nombre 
de  lecteurs,  de  s'arrêter  à  chaque  pas  pour  asseoir  ou  déblayer  sa  route, 
d'établir  ou  de  rappeler  des  principes,  d'entrer  dans  des  digressions  et 
d'embarrasser  sa  marche  de  tout  un  appareil  de  généralités  théoriques. 
M.  Hoernle  a  trouvé  le  terrain  mieux  préparé.  Il  a  pu  réduire  ses  impe- 
dimenta au  strict  nécessaire  et  faire  tenir  dans  400  pages  la  grammaire 
historique  et  comparative  de  tous  les  idiomes  aryens  modernes  de  l'Inde  '. 
Son  livre,  qui  embrasse  la  même  aire  géographique  et  linguistique  que 
les  trois  volumes  de  M .  Beames,  est  sous  plusieurs  rapports,  matériellement 
plus  complet,  en  même  temps  que  la  doctrine  y  est  poussée  plus  à  fond. 
C'est  là  un  résultat  qui  fait  infiniment  d'honneur  a  M.  H.,  mais  c'est 
aussi  un  heureux  signe  de  l'état  actuel  des  études  linguistiques,  qu'un 
pareil  résultat  ait  pu  être  poursuivi  sans  trop  présumer  du  public. 

Pour  arriver  à  se  loger  en  si  peu  d'espace,  M.  H.  a  dû  nécessaire- 
ment serrer  les  lignes.  Le  volume  est  fort  court  de  marge  et  les  pages  en 
sont  hérissées  d'initiales  et  d'abréviations  :  termes  grammaticaux,  dé- 
signations de  langues  et  de  dialectes,  noms  d'auteurs,  titres  d'ouvrages 
hindous  et  européens  connus  ou  inconnus,  publiés  ou  manuscrits,  au- 

1.  Des  variétés  un  peu  notables,  il  n'en  manque  qu'une,  le  Kâshmîri,  qui  n'est 
mentionné  qu'occasionellement. 

Nouvelle  série,  XIV.  5 


82  REVUE    CRITIQUE 

tant  de  sigles  dont  l'abondance  serait  fâcheuse  dans  tout  autre  livre 
moins  destiné  à  l'étude  patiente,  minutieuse.  Par  contre  les  économies 
ne  sont  jamais  faites  aux  dépens  des  choses  essentielles  ou  simplement 
importantes.  Les  exemples,  et  ils  sont  innombrables,  depuis  la  simple 
forme  jusqu'à  la  location  développée,  sont  tous  donnés  en  caractères 
devanâgarîs  '  et,  d'un  bout  à  l'autre,  accompagnés  de  la  traductien. 
Bien  que  sobre  engénéral  de  commentaires,  l'auteur  n'hésite  pas  à  s'en- 
gager dans  de'  longues  discussions  sur  des  points  particulièrement  obs- 
curs ou  controversés.  Mais,  ce  qu'il  a  évité  par-dessus  tout,  c'est  d'éco- 
nomiser sur  les  faits.  Sous  ce  rapport,  son  livre  est  d'une  étonnante 
richesse.  Dans  aucun  autre  ouvrage  on  ne  trouvera  pour  toutes  les  pé- 
riodes de  l'histoire  de  ces  langues,  l'inventaire  aussi  complet  de  leur 
mécanisme  grammatical,  depuis  les  moindres  accidents  de  la  phonéti- 
que jusqu'aux  procédés  caractéristiques  de  leur  syntaxe.  Aussi  la  gram- 
maire de  M.  H.  avec  son  caractère  hautement  doctrinal,  est-elle  en 
même  temps  un  livre  d'enseignement  pratique,  autant  que  peut  l'être 
un  ouvrage  essentiellement  comparatif,  et  cela  non  seulement  pour  le 
dialecte  Hindî  qui  sert  de  base  à  l'exposition,  mais  aussi  pour  les  autres 

variétés  dont  il  est  traité  d'une  façon  moins  directe. 

i 

Ce  qui  en  réalité  a  permis  à  M.  H.  d'accomplir  sans  accident  ce  tour 
de  force  de  concision,  c'est  la  disposition  ingénieuse  et  rigoureusement 
1  conséquente  de  son  livre,  où  toutes  choses  viennent  si  bien  à  leur  place  que 
le  commentaire  est  la  plupart  du  temps  contenu  dans  l'énoncé  même.  Sa 
grammaire  n'est  point,  en  effet,  l'essai  d'un  débutant.  Longtemps  avant 
de  l'écrire,  il  en  avait  en  quelque  sorte  tracé  le  plan  dans  des  articles 
fort  remarqués  lors  de  leur  publication  dans  le  journal  asiatique  de 
Bengale  2.  Plus  tard,  il  avait  donné  sa  mesure  dans  une  grammaire  du 
dialecte  Garvari  3  et,  à  différentes  reprises,  il  avait  discuté  les  objections 
soulevées  par  quelques-unes  de  ses  théories4.  Il  ne  fallait  pas  moins  que 
cette  longue  préparation  à  Bénarès  même,  le  centre  et  comme  l'abrégé 
de  l'Inde  entière,  pour  aboutir  à  une  œuvre  aussi  parfaitement  méditée 
que  celle  qui  nous  occupe,  où  jusqu'au  moindre  détail,  tout  est  prévu 
et  mesuré  d'avance  et  qui,  bien  que  sortie  peu  à  peu  d'une  grammaire 
du  Hindî  oriental,  était  certainement  construite  tout  entière  dans  la  pen- 
sée de  Fauteur  avant  que  la  première  ligne  en' fut  rédigée. 
Dans  cinq  sections  subdivisées  en  douze  chapitres,  un  plus  grand  nom- 


i.  Pour  e,  6,  aï,  au,  qui  manquent  en  devanâgarî,  M.  H.  se  sert  des  caractères 
gurmukhis  ou  bengalis;  r  et  rh  cérébrales  sont  empruntés  à  l'alphabet  kaithi;  pour 
la  voyelle  brève  neutre,  qui  n'est  jamais  initiale,  il  emploie  un  point  placé  à  la  droite 
de  la  consonne. 

2.  Années  1872,  1873,  sous  le  titre  de  Essays  in  aid  of  a  comparative  grammar 
of  the  Gaudian  lenguages. 

3.  A  Grammar  of  the  Eastern  Hindi  commonly  called  Ganvari,  London,  1878, 
in-8°. 

4.  Indian  Antiquary  1,  356;  n,  210;  v,  119. 


d'histoire  et  de  littérature  83 

bre  de  sous-chapitres  et  570  paragraphes,  M.  H.  traite  successivement  des 
alphabets  '  et  de  la  phonétique;  des  suffixes  et  des  racines  2;  delallexion 
du  nom,  substantif,  adjectif,  nom  de  nombre  et  pronom  ;  de  la  flexion  du 
verbe  en  toutes  ses  formes  primitives,  dérivées  et  composées  ;  enfin,  des 
indéclinables.  Une  sixième  section  est  consacrée  à  des  spécimens  du 
Hindi  oriental,  tel  qu'il  se  parle  aux  environs  de  Bénarès. 

C'est  de  ce  dialecte,  en  effet,  le  Bhojpuri,  que  M.  H.  traite  en  pre- 
mière ligne.  Il  en  donne  la  grammaire  complète,  parfaitement  suffisante 
pour  l'acquisition  pratique  de  la  langue.  A  la  suite  de  chaque  paragra- 
phe et  sous  la  rubrique  affinities,  il  analyse  ensuite  les  conformités  ou 
les  divergences  que  présentent,  par  rapporta  ce  type,  les  autres  dialec- 
tes d'origine  aryenne  :  à  l'Orient,  les  diverses  formes  du  Bengali  et  l'O- 
riya  ;  au  nord,  les  idiomes  himalayens  du  Garhwal,  de  Kumaon  et  du 
Népal;  à  l'Ouest,  les  diverses  variétés  du  Hindî occidental  et,  plus  loin, 
les  dialectes  parlés  dans  le  Gujarât,  dans  le  Sindh  et  dans  le  Penjâb  ; 
enfin,  au  Sud,  le  Marâ^hi  avec  ses  subdivisions.  C'est  là  la  partie  com- 
parative, méthodiquement  distribuée  dans  toutes  les  parties  du  livre. 
Quant  à  la  partie  historique,  elle  est  distribuée  de  même  à  la  suite  de 
chaque  paragraphe  sous  la  rubrique  Dérivation  and  Origin.  M.  H.  y 
examine  ce  que  les  faits  ainsi  signalés  deviennent  dans  les  formes  archaï- 
ques de  ces  divers  idiomes,  quand  celles-ci  sont  accessibles  dans  des 
œuvres  écrites  ou  traditionnelles  ;  puis,  à  l'aide  des  prâkrits,  du  pâli  et  de 
la  langues  des  plus  anciennes  inscriptions,  il  remonte  pour  chacun 
d'eux,  jusqu'au  sanscrit,  qui,  d'une  façon  générale,  peut  en  être  regardé 
comme  la  source  commune.  Cette  partie  du  livre,  la  plus  intéressante, 
au  point  de  vue  de  la  linguistique  générale,  en  est  une  des  plus  origi- 
nales. C'est  une  de  celles  aussi  qui  soulèveront  peut-être  le  plus  d'ob- 
jections de  détail.  On  ne  reprochera  pas  sans  doute  à  M.  H.  sa  tendance 
à  tout  expliquer  par  le  sanscrit  .  C'est  là  une  direction  qui  était  en 
quelque  sorte  tracée  d'avance,  chaque  pas  en  avant  dans  la  philologie  de 
ces  langues  ayant  constamment  réduit  le  nombre  des  faits  qui  parais- 
saient exiger  une  explication  différente.  Mais  on  ne  peut  se  dissimuler 
que  parmi  les  dérivations  de  M.  H.,  il  y  en  a  quelques-unes  d'héroï- 
ques. Tout  le  monde  ne  sera  pas  disposé,  par  exemple,  à  reconnaître 
dans  l'élément  ka  que  l'analyse  constate  ou  rétablit  dans  tant  de  suf- 
fixes de  dérivation  ou  de  flexion,  le  représentant  du"  sanscrit  kxita. 
Mais  il  convient  d'ajouter  que  M.  H.  a  soin  lui-même,  en  plus  d'un 
endroit,  d'exprimer  des  réserves;  que  ses  partis  pris,  en  apparence  les  plus 
audacieux,  reposent  sur  des  analogies  si  nombreuses,  sur  une  expérience 

1.  M.  H.  eût  rendu  sa  Table  des  alphabets  bien  plus  utile  encore,  s'il  avait  rem- 
placé les  alphabets  anciens  (Maurya,  Gupta,  Valabhi)  un  peu  hors  de  cause  ici,  par 
une  série  plus  complète  des  variétés  modernes  et  des  l'ormes  intermédiaires  du 
moyen  âge. 

2.  Une  liste  alphabétique  des  racines,  d'abord  destinée  à  la  grammaire,  a  été  pu- 
bliée à  part  dans  le  journal  asiatique  de  Bengale,  1880,  p.  33  et  s. 


84  REVUE   CRITIQUE 

si  parfaite  de  toutes  les  particularités  de  ce  domaine  linguistique,  qu'une 
contradiction  dont  il  n'aurait  pas  lui-même  reconnu  et  signalé  la  possi- 
bilité, aurait  rarement  la  chance  d'être  bien  fondée.  Pour  moi  du  moins, 
qui  ai  surtout  à  apprendre  dans  ce  livre,  je  ne  ne  me  permettrai  pas  de 
le  critiquer. 

Une  œuvre  ainsi  disposée,  suppose  une  classification  et  une  généalo- 
gie de  toutes  ces  langues.  C'est,  en  effet,  ce  que  nous  donne  l'introduc- 
tion. M.  H.  divise  ces  idiomes  en  quatre  groupes  principaux.  Groupe 
de  l'Est  :  Hindî  oriental,  Bengali  et  Oriya.  Groupe  de  l'Ouest  :  Hindi 
occidental,  Gujarâtî,  Sindhî  et  Penjâbî.  Groupe  du  Nord  :  les  langues 
aryennes  de  l'Himalaya.  Groupe  du  Sud  ou  Marâfhî.  Le  Hindî  se  par- 
tage ainsi  entre  le  groupe  de  l'Est  et  celui  de  TOuest,  ses  deux  branches 
ayant  plus  d'affinités  avec  le  Bengali  d'un  côté,  le  Gujarâtî  et  le  Penjâbî 
de  l'autre,  qu'elles  n'en  ont  entre  elles.  Les  œuvres  littéraires  qui  nous 
sont  parvenues,  montrent  que  chacun  de  ces  groupes,  maintenant  frac- 
tionnés en  de  nombreux  dialectes,  ne  formait  vers  le  xne  ou  xm°  siècle 
qu'une  seule  langue.  En  examinant  les  caractères  principaux  de  ces  qua- 
tre langues,  on  s'aperçoit  ensuite  que  le  groupe  du  Nord  se  rapproche 
de  celui  de  l'Ouest,  tandis  que  celui  du  Sud  est  en  relation  plus  étroite 
avec  celui  de  l'Est  et  que,  par  conséquent,  à  une  époque  plus  ancienne 
dont  les  inscriptions  d'Açoka  nous  ont  laissé  quelque  souvenir,  les  qua- 
tre groupes  se  réduisaient  à  deux,  qui  correspondent  aux  prâkrits  Çau- 
rasenî  et  Mâgadhî.  Non  pas  aux  variétés  de  ce  nom  qu'enseignent  les 
grammairiens,  celles-ci  sont  des  langues  littéraires  et  plus  ou  moins  ar- 
tificielles, mais  à  leurs  dialectes  vulgaires  ou  Apabhrawças.  Et  ici  en- 
core, il  faut  entendre  non  les  Apabhramças  des  grammairiens,  qui  sont  eux- 
mêmes  plus  ou  moins  artificiels,  mais  les  Apabhramças  vrais,  qui  ont 
péri,  à  moins  que  le  pâli  ne  nous  ait  conservé  Timage  de  l'un  d'eux. 
Quant  au  MâhârâshM,  c'est  une  variété  du  Çaurasenî,  c'est-à-dire  du 
groupe  occidental  ;  il  n'a  rien  de  commun  que  le  nom  '  avec  le  Marâfhî 
actuel  et  passé  dont  on  l'a  souvent  rapproché  et  que  ses  caractères  font 
rentrer  au  contraire  dans  le  groupe  oriental  ou  mâgadhî.  A  côté  de  ces 
langues  aryennes  parlées  par  des  aryens,  se  sont  formés  en  outre,  chez 
les  populations  non  aryennes,  un  certain  nombre  de  patois.  Ce  sont  les 
dialectes  qualifiés  de  Paisâcî,  qui  ont  péri  de  bonne  heure  et  dont  le 
Paisâcî  des  grammairiens  nous  a  seul  conservé  quelques  traits.  Ces 
deux  langues,  Çaurasenî  vulgaire  et  Mâgadhî  vulgaire,  étaient  venues 
toutes  deux  de  l'Ouest,  la  plus  orientale,  le  Mâgadhî,  ayant  précédé 
l'autre,  puisqu'elle  a  laissé  des  traces  tout  le  long  de  la  route,  jusque 
dans  la  vallée  du  Kaboul  et  encore  au  delà.  L'autre,  plus  jeune,  le 
Çaurasenî,  ne  s'est  pas  avancée  plus  loin  vers  l'Est  et  vers  le  Sud  que  la 
limite  actuelle  du  Hindî  oriental  et  du  Marâfhî.  A  leur  tour,  elles  n'é- 


1.  Ce  nom  serait  à  prendre  comme  qualificatif,  «  la  langue  du  grand  royaume  », 
d'après  M.  H.,  du  Doab. 


D  HISTOIRE    ET    DE    LITTERATURE 


85 


taient  que  des  varie'tés  dialectales  d'un  idiome  unique,  qui,  élevé  à  l'état 
de  langue  littéraire,  est  représenté  par  le  sanscrit. 

Telle  est,  en  résumé,  d'après  M.  H.,  l'histoire  des  langues  aryennes 
de  l'Inde  '.  Sur  plusieurs  points,  par  exemple  en  ce  qui  concerne  la  po- 
sition respective  du  MâhârâshZrî  et  du  Marârtiî,  elle  est  entièrement 
neuve.  L'ensemble  en  est  séduisant,  car,  à  première  vue,  elle  paraît  plus 
simple  et  mieux  liée  qu'aucune  autre  qu'on  ait  encore  présentée.  Est- 
elle pourtant  à  l'abri  de  toute  objection  ?  Sans  entrer  dans  un  examen 
qui  m'entraîn<É-ait  trop  loin  et  qui,  pour  être  complet,  devrait  empiéter 
sur  un  terrain  où  je  ne  me  sens  plus  compétent,  je  dois  dire  que  les  con- 
clusions de  M.  H.  me  paraissent  parfois  bien  affirmatives,  eu  égard  à  la 
nature  de  ses  données.  Rien  que  par  le  résumé  qui  précède,  on  a  pu  voir 
combien  de  termes  essentiels  de  la  série  ont  disparu,  au  lieu  et  place  des- 
quels il  n'a  que  des  approximations  suspectes,  dont  lui-même  se  défie  et 
dont  il  se  sert  pourtant  comme  s'il  ne  s'en  défiait  pas.  Au  départ,  en  ef- 
fet, M.  H.  marche  sur  un  terrain  solide  :  il  a  affaire  à  des  langues  ac- 
tuellement parlées.  Mais  dès  qu'il  remonte  dans  le  passé  (et  c'est  là  une 
objection  qui,  pour  le  dire  en  passant,  porte  aussi  parfois  sur  ses  dériva- 
tions), il  ne  dispose  plus  que  de  langues  littéraires  ou,  pis  encore,  de  lan- 
gues qui  ont  servi  de  médium  à  des  mouvements  religieux.  De  ce  que 
les  plus  anciens  Kîrtans  vishnouites  ne  sont  ni  en  Bengali  ni  en  Hindi, 
mais  dans  un  idiome  qui  participe  des  deux  ;  de  ce  que  le  Hindî  occi- 
dental, le  Gujarâti  et  le  Penjâbî  se  confondent  pour  ainsi  -dire  dans  le 
poème  de  Cand,  s'en  suit-il  qu'on  ne  parlait  alors  que  deux  langues  des 
montagnes  de  l'Afghanistan  au  Doab  et  du  Doab  aux  collines  d'Assam  ? 
De  même  les  inscriptions  d'Açoka  autorisent-elles  réellement  la  conclu- 
sion qu'un  seul  idiome  régnait  à  cette  époque  des  sources  de  la  Jumnâ 
aux  bouches  du  Gange?  Répondre  négativement  à  ces  questions  et  à 
d'autres  semblables,  ce  n'est  pas  repousser  sans  doute  la  théorie  histori- 
que de  M.  H.  ;  mais  c'est  lui  enlever  quelque  chose  de  sa  rigueur,  de  sa 
précision  et  de  sa  simplicité.  D'ailleurs,  ne  sait-on  pas  combien  la  clas- 
sification des  dialectes  est  délicate,  même  quand  il  s'agit  de  variétés  ac- 
tuellement existantes?  M.  H.  trouve,  par  exemple,  que  le  MarâJhî 
s'accorde  avec  le  groupe  oriental  sur  quatre  points  et  avec  le  groupe  oc- 
cidental sur  huit  ;  mais  que  la  proposition  est  renversée  si  on  ne  consi- 
dère que  les  traits  vraiment  caractéristiques,  selon  lui,  des  deux  groupes. 
Le  Maràthî  s'accorde  alors  sur  quatre  points  avec  le  groupe  oriental  et, 
avec  le  groupe  occidental,  sur  deux  seulement.  Cela  suffit  pour  le  ranger 

i.  Les  mêmes  vues,  parfois  appuyées  d'arguments  différents,  ont  été  présentées 
par  M.  H.  dans  la  préface  à  sa  belle  édition  de  la  grammaire  de  Chania  :  The 
Prdkr'xta-Lakshanam,  or  Chanda's  Grammar  of  the  Ancient  (Arsha)  Prâkr'it.  Part.  I. 
Text  ivith  a  critical  Introduction  and  Notes.  Calcutta,  1880  (Bibliotheca  Indica). 
D'une  autre  publication  de  M.  H.,  sur  le  même  sujet,  mais  écrite  probablement  en 
vue  d'un  public  moins  spécial,  A  sketch  of  the  History  of  Prakrït  Philology,  Cal- 
cutta Review,  october  1880,  je  ne  connais  que  le  titre. 


86  RKVUK    CftlTIQl.'K 

parmi  les  langues  de  l'Est,  et,  comme  le  MâhârâshJrî  se  'range  parmi 
celles  de  l'Ouest,  on  n'admettra  aucun  rapport  entre  les  deux.  Est-il  be- 
soin d'ajouter  qu'il  y  a  toujours  quelque  chose  d'arbitraire,  et,  par  con- 
séquent, d'aléatoire  dans  cette  sorte  de  calculs?  M.  Garrez,  tout  au  con- 
traire, croit  devoir  admettre  une  relation  particulièrement  étroite  entre 
le  Mâhârâshfrî  et  le  Marâfhî,  et  ses  vues  à  cet  égard,  émises  depuis  des 
années,  ont  été  généralement  approuvées,  à  plusieurs  reprises,  notam- 
ment par  M.  Weber.  Ce  seul  fait  montre  qu'il  y  a  encore  en  tout  ceci 
bien  de  l'incertitude  et  que,  tout  en  rendant  hommage  ttu  vaste  savoir 
et  à  l'habileté  avec  lesquels  M.  H.  a  édifié  cette  histoire  linguistique  de 
l'Inde,  il  convient  de  tempérer  çà  et  là,  par  quelque  doute,  la  rigueur  ap- 
parente de  ses  démonstrations. 

Le  volume  est  terminé  par  un  index  alphabét(que  qui  facilite  les  re- 
cherches. La  correction  typographique  qui  présentait  ici  des  difficultés 
toutes  particulières,  est  irréprochable.  Du  moins  n'ai-je  trouvé  qu'un 
nombre  tout  à  fait  insignifiant  de  fautes  ayant  échappé  à  l'erratum  ;  par 
exemple,  p.  6,  lig.  8,  le  virâma  dans  amvita;  p.  35,  lig.  4,  infra,  dh  au 
lieu  àegh;  à  la  ligne  suivante,  samhah  devrait  être  marqué  d'un  astéri- 
que  ;  p.  126,  lig.  22,  il  faut  lire  indrdm. 

Cet  article  était  à  peu  près  achevé  quand  la  Grammaire  de  M.  Hoernle 
a  été  honorée  du  prix  Volney  par  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles- 
Lettres.  Après  un  pareil  suffrage,  le  mien  n'est  plus  d'aucun  prix.  Je 
n'en  suis  pas  moins  heureux  de  pouvoir  féliciter  de  cette  haute  distinc- 
tion l'auteur  d'un  ouvrage  dont  je  pense  tant  de  bien. 

A.  Barth. 


154.  —  Sédulius  de  Liège»  par  Henri  Pirenne.  Bruxelles,  F.  Hayez,  1882.  72  p. 
in-8°  et  un  fac-similé  de  manuscrit.  Extrait  des  Mémoires  de  l'Académie  royale 
de  Belgique,  collection  in-8°,  tome  XXXI1L  En  appendice  (p.  51-72),  Sedulii  car~ 
mina  inedita. 

Sédulius  de  Liège,  ou  plutôt  Sédulius  l'Irlandais,  Sedulhis  Scottus, 
est  un  poète  du  ixe  siècle,  que  son  nom  a  fait  confondre  parfois  avec 
l'auteur  plus  célèbre  et  beaucoup  plus  ancien  du  Carmen  Paschale. 
Le  manuscrit  unique  de  ses  poèmes  se  trouve  à  Bruxelles  :  il  contient 
près  de  quatre-vingt-dix  pièces.  Seize  de  ces  pièces  ont  été  publiées  par 
M.  Grosse,  quarante-six  par  M.  Ernest  Dûmmler,  non  d'un  seul  coup, 
mais  en  trois  publications.  On  doit  aujourd'hui  à  un  jeune  érudit  belge 
la  connaissance  des  morceaux  qu'avaient  négligés  les  deux  éditeurs  alle- 
mands. En  passant,  je  ne  puis  ne  pas  exprimer  un  regret.  Le  contenu  du 
manuscrit  aurait  pu  tenir  dans  une  plaquette,  le  voilà  éparpillé  dans 
cinq  imprimés  différents.  L'étude  de  la  littérature  carolingienne  était 
pourtant,  par  elle-même,  assez  épineuse  pour  que  les  savants  ne  contri- 
buassent pas  à  la  compliquer.  Cette  critique  n'atteint  pas  M.  Pirenne  : 


0  HISTOIRE    HT    DE    LITTEHATURR  0~ 

ce  n'est  point  sa  faute  s'il  ne  lui  est  resté  à  publier  qu'un  quart  du 
recueil  bruxellois,  et  ce  n'est  point  non  plus  sa  faute  si  ce  résidu  n'en 
était  pas  la  partie  la  plus  intéressante. 

Les  pièces  contenues  dans  le  manuscrit  sont-elles  bien  de  Sédulius? 
Le  manuscrit  le  dit  :  incipiunî  uersus  quos  Sédulius  Scottus  uenerabili 
pontijici  Harîgario  cornposuit  (Dûmmler,  Sed.  Scotti  carmina  XL, 
p.  3).  Le  poète  lui-même  et  l'évêque  de  Liège  Hartgar  sont  nommés 
effectivement  dans  plusieurs  pièces;  d'autres  sont  adressés  à  des  princes 
carolingiens  du  temps.  Mais  la  pièce  XIX  de  M.  Pirenne,  épitaphe  du 
roi  saxon  Caedual,  est  très  antérieure  et  figure  déjà  dans  Bède.  Quel- 
ques-unes sont  fort  impersonnelles,  et  il  serait  impossible  d'en  deviner 
l'auteur  :  ainsi  XX  (subtilités  sur  uerum  et  aequum),  XXII  (vers  sur  une 
croi»),  IV  (indiquant  le  sujet  de  certaines  peintures),  XIII  [uersus  in 
quodam  picto  solario  scriptï).  Cette  dernière  pièce  se  compose  de  vers 
détachés,  dont  chacun  résume  soit  un  des  épisodes  figurés  en  peinture 
(Messiam  natum  pastoribus  angélus  inquit)  soit  un  ensemble  de  deux 
épisodes  (Ecce  magi  stellam  uîsunt  ;  Symeon  quoque  Christum);  leur 
désordre  (que  l'éditeur  aurait  dû  respecter)  fait  voir  qu'ils  ont  été  co- 
piés sur  la  peinture,  non  sur  le  brouillon  du  poète,  que  par  conséquent 
nous  pourrions  avoir  là,  au  lieu  d'une  composition  de  Sédulius,  des  vers 
transcrits  par  lui  ou  par  un  autre  au  cours  d'un  voyage,  comme  l'épitaphe 
de  Caedual.  Voilà  qui  rend  quelque  peu  douteuse  l'origine  de  toutes  les 
pièces  qui  ont  un  caractère  semblable  (ainsi  Dûmmler  XII,  uersus  ad  Er- 
mingardem  imper atricem  conscripti  in  serico pallio  de  uirtutibus  Pétri 
apostoli;  XXI,  de  quodam  altari  ;  Pirenne  IX,  épitaphe  de  l'évêque 
Hildbert).  Il  faut  y  bien  regarder  avant  de  fonder  une  conclusion  sur  le 
témoignage  du  manuscrit.  A  ce  point  de  vue,  la  dissémination  des 
textes  nuit  à  l'étude.  La  pièce  XXIII  de  M.  Pirenne  indique  le  sujet  des 
peintures  exécutées  pour  l'évêque  de  Cologne  Gonthar  ;  il  faut  se  repor- 
ter au  recueil  de  M.  Dûmmler,  pièce  XXX,  pour  voir  que  Sédulius  a 
été  effectivement  en  relation  personnelle  avec  cet  évêque,  et  qu'il  a  pu 
recevoir  de  lui  une  commande  poétique.  —  On  doit  se  méfier  d'autant 
plus  de  la  donnée  fournie  par  le  manuscrit,  qu'il  s'en  faut  de  beaucoup 
que  tous  les  vers  s'adressent  «  uenerabili pontifici  Hartgario  ».  De  plus, 
on  trouve  beaucoup  trop  souvent  réunies  des  pièces  disparates  (ainsi  les 
fragments  incohérents  de  la  pièce  XXV  Pirenne;  les  deux  morceaux 
indépendants  que  l'éditeur  laisse  unis  sous  le  numéro  XXI  ')  ;  il  saute  aux 
yeux  que  le  collecteur  de  ces  morceaux  détachés  n'en  avait  pas  toujours 
une  notion  bien  nette.  Enfin  la  mention  particulière  du  nom  de  Sédu- 
lius dans  quelques  titres  [De  paschali  festiuitate  Sédulius  cornposuit, 
Dûmmler  XXVII),  est  faite  pour  inquiéter  toutes  les  fois  que  ce  nom 
manque.  —  M.  Pirenne  a  malheureusement  négligé  d'indiquer  en  tête 


i.   Aussi   ne  peut-on  dire  avec  une   exactitude  rigoureuse  combien    le    recueil 
bruxellois  contient  de  pièces  distinctes. 


06  REVUE    CRIT1QUK 

de  chaque  pièce  le  numéro  qu'elle  porte  dans  le  sommaire  général  du 
manuscric,  donné  par  M.  Dûmmler  ;  il  faut  un  petit  travail  pour  re- 
trouver quelle  pièce  suit  et  quelle  pièce  précède.  Il  est  trop  enclin  à 
corriger  le  texte  '  :  une  première  édition  doit  être  plus  conservatrice. 

Un  texte  inédit  l'emporte  toujours  en  intérêt  sur  un  travail  moderne  : 
c'est  pourquoi  j'ai  mis  au  premier  plan,  dans  ce  compte-rendu,  la  pu- 
blication qui  pour  M.  Pirenne  ne  forme  qu'un  appendice.  Le  corps 
même  de  son  mémoire  est  une  étude  sur  Sédulius  ;  elle  s'appuie  exclu- 
sivement sur  les  pièces  publiées  par  MM.  Grosse  et  Dûmmler,  lesquels 
avaient  eu  soin  de  choisir  tout  ce  qui  pouvait  éclairer  la  biographie  de 
leur  auteur.  M.  Pirenne  montre  que  les  poésies  de  Sédulius  comblent 
une  lacune  dans  l'histoire  de  ce  qu'il  appelle  «  le  txe  siècle  liégeois  ». 
Son  opuscule,  inspiré  par  des  préoccupations  toutes  locales,  a  été  fait 
pour  être  «  présenté  au  cours  d'histoire  de  M.  le  professeur  Kurth,  à 
l'Université  de  Liège».  On  peut  lui  reprocher,  outre  quelques  gaucheries 
d'expression  2,  le  mélange  du  travail  sur  les  sources  avec  le  travail  de 
seconde  main  3  ;  mais  il  atteste  un  jugement  sain,  des  connaissances  so- 
lides, et  des  recherches  méthodiques  et  consciencieuses. 

Louis  Havet. 


ï  55 . —  Les  Origine»  «le  l'imprimerie  à  Tours  (1 -Ç<*,y-i;ï*>0),  contenant 
la  nomenclature  des  imprimeurs  depuis  la  fin  du  xve  siècle  jusqu'en  i85o  ;  par  le 
docteur  E.  Giraudet.  Tours,  imprimerie  Rouillé-Ladevèze,  1881.  Gr.  in-8°  de 
viij  et  i3o  pp,,  plus  1  f.  de  table  et  1  planche  gravée. 

M.  le  docteur  Giraudet  est  déjà  connu  des  bibliographes  par  une  inté- 
ressante publication  relative  aux  imprimeurs  parisiens  réfugiés  à  Tours 
pendant  les  guerres  de  la  Ligue  4  ;  sa  nouvelle  étude,  qui  nous  révèle 


1.  Ainsi  il  eût  dû  laisser  ceu  III,  19,  laeua  gaudetque  magistri  IV,  11,  enim 
VI,  6,  Agarenos  VII,  56,  Bethlehem  XIII,  inormis  et  inorme,  VII,  33  et  XVII,  34 
(cf.  énorme,  ou  plutôt  sans  doute  inorme,  Biblioth.  de  VEc.  des  chartes,  I,  p.  528). 
III,  11,  il  faut  ponctuer  sine  fine  beata.  IV,  8,  la  correction  Maximiane  pour 
Maxime,  est  arbitraire  ;  la  peinture  devait  présenter  douze  personnages  et  non  onze, 
et  le  vers  faux  donné  par  le  manuscrit  doit  provenir  de  deux  vers  soudés  en  un.  Vil, 
5o,  il  n'est  pas  permis  de  toucher  au  second  hémistiche,  répétition  du  premier 
hémistiche  du  vers  précédent.  IX,  4,  tenes  et  non  tenet.  XV,  5,  il  faut  garder  se 
condere  (ras.  secundere),  sauf  à  corriger  spelaeis  ou  à  supposer  ce  mot  disyllabique. 
XX,  second  titre,  idem;  M.  Dûmmler  dit  item,  qui  est  plus  vraisemblable.  XIII,  3, 
la  correction  proposée  est  inconciliable  avec  1-2.  I,  3,  Luodeuinci  doit  être  lu 
Luodeuuici. 

2.  P.  7  :  «  Malheureusement  Sédulius  n'est  pas  historien,  il  n'est  pas  même 
Liégeois.  » 

3.  On  supprimerait  sans  dommage  ce  qui  est  dit  du  rôle  des  émigrés  irlandais 
dans  l'enseignement  carolingien,  p.  1 1  et  suivantes. 

4.  Une  Association  d'imprimeurs  et  de  libraires  de  Paris  réfugiés  à  Tours  au 
xvi*  siècle;  Tours,  1877,  gr.  in-8". 


D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE  89 

bon  nombre  de. détails  inconnus  sur  les  premiers  typographes  touran- 
geaux, ne  sera  pas  moins  bien  accueillie  des  érudits  et  des  curieux.  Elle 
complète,  en  effet,  et  rectifie  sur  bien  des  points  la  notice  tout  à  fait  in- 
suffisante de  M.  Clément  de  Ris  '. 

Les  recherches  de  M.  G.  présentent,  en  général,  un  grand  intérêt  quand 
elles  s'appuientsur  des  documents  d'archives  ;  elles  sont,  il  est  vrai,  moins 
fécondes  quand  elles  portent  non  plus  sur  des  pièces  inédites,  mais  sur 
les  livres  eux-mêmes.  Au  début  de  son  travail,  M.  G.  reprend  une  discus- 
sion déjà  ancienne  au  sujet  d'un  livre  considéré  par  divers  auteurs  comme 
le  premier  produit'  des  presses  de  Tours.  Il  s'agit  d'un  petit  roman  du 
Florentin  Francesco  Florio  intitulé  :  De  Amore  Camilli  et  Aemiliae 
Aretitîorum.  On  lit  à  la  fin  de  cet  ouvrage  :  Liber  expletus  est  Tu- 
ronis.  Editas  in  domo  Guillermi ,  archiepiscopi  Turonensis ,  anno 
Domini  millesimo  quadringentesimo  sexagesimo  septimo,  pridie  ka- 
lendis  Januarii.  M.  G.  n'hésite  pas  à  voir  dans  cette  souscription 
la  preuve  que  l'imprimerie  existait  à  Tours  à  la  fin  de  l'année  1467; 
elle  ne  prouve  en  réalité  rien  de  semblable.  Le  mot  editus  signifie  sim- 
plement que  l'ouvrage  a  «  vu  le  jour  »,  qu'il  a  été  écrit  ou,  tout  au 
moins,  achevé,  dans  tel  ou  tel  endroit.  Le  sens  ne  paraîtra  pas  douteux 
si  l'on  compare  entre  elles  diverses  souscriptions  analogues.  Les  seuls 
ouvrages  du  mathématicien  Charles  de  Bovelles  nous  en  fournissent 
plusieurs.  Ses  Tractatus  varii,  imprimés  par  Henri  Ier  Estienne,  se 
terminent  ainsi  :  Editum  est  universum  hoc  volumen  Ambianis  in 
aedibus  reverendi  in  Christo  patris  Francisci  de  Hallewin,  ejusdem 
loci  pontificis ,  et  emissum  ex  officina  Henrici  Stephani ,  impensis 
ejusdem  et  Joannis  Parvi,  chalcotypa  arte  sociorum.  Anno  Christi 
Salvatoris  omnium  M.  D.  X.  Primo  Cal.  Februarii.  Parisiis  \ 
Des  formules  presque  semblables  se  trouvent  à  la  fin  de  deux  autres 
ouvrages  du  même  auteur  :  Dominica  Oratio  tertrinis  ecclesiastice 
hiérarchie  ordinibus particulatim  attributa  etfacili  explanata  commen- 
tario  '  et  Theologicarum  conclusionum . . .  Libri  decem  4.  Ces  rappro- 
chements nous  paraissent  suffisamment  concluants  :  le  mot  editus  n'a 
nullement  le  sens  moderne  de  «  édité  ».  On  est  ainsi  conduit  à  se  ranger 


1.  La  Typographie  en  Touraine  (1467-1830),  par  le  comte  L.  Clément  de  Ris; 
Paris,  L.  Techener,  1878,  in-8»  (extr.  du  Bulletin  du  Bibliophile). 

2.  Renouard,  Ann.  des  Estienne,  p.  8.  —  Incunables  de  la  Bibliothèque  de  Tou- 
louse, n°  93. 

3.  Commentarioli  in  Dominicam  Orationem  Finis.  Editi  in  edibus  reverendi  in 
Christo  patris  Francisci  de  Hallevin,  pontificis  Ambianensis,  anno  a  Dominica  incar- 
natione  i5i  1,  septima  die  Julii.  Emissi  ex  officina  Joannis  Parvi,  8.  idus  Octobris 
anni  ejusdem.  In-40. 

4.  Theologicarum  Conclusionum...  Finis.  Aeditae  sunt  in  Carolopontino  vico,  in 
aedibus...  Caroli  de  Geniis,  Noviodunensis  episcopi,  anno  humanae  salutis  M.  D. 
XIII.  octava  et  vigesima  die  septembris...  Impressac  sunt  in  aedibus  Asccnsianis  idi- 
busJunii M.  D.  XV.  In-fol.  —  Panzer,  Ann.,  21,  n°  779. 


gO  REVUE    CRITIQUE 

à  l'opinion  soutenue  par  De  Boze,  il  y  a  un  siècle  1,  à  savoir  que  le  vo- 
lume dont  il  est  question  a  été  imprimé  à  Paris  par  Pierre  De  Keysere  et 
Jehan  Stoll,  ainsi  que  le  prouvent  les  caractères  semblables  à  ceux  que 
ces  deux  associés  ont  employés  dans  des  éditions  qui  portent  leurs  noms. 
Le  fait  que  l'impression  a  été  exécutée  à  Paris  permet  d'expliquer  sans 
peine  que  le  typographe  se  soit  trompé  sur  le  nom  de  l'archevêque  de 
Tours,  qu'il  appelle  Guillermus  au  lieu  de  Girardus  (il  s'agit  de 
Girard  de  Crussol).  Quant  à  la  supposition  de  M.  G.  qu'il  s'agirait  non 
pas  de  ce  prélat,  mais  d'un  maître-maçon  appelé  «  Guillaume  Archeves- 
que  »,  nous  croyons  inutile  de  la  réfuter.  Nous  aurons  plus  loin  à  rele- 
ver une  erreur  plus  étonnante  encore  de  la  part  d'un  imprimeur,  qui 
nous  paraît  avoir  altéré  le  nom  du  libraire  même  pour  qui  il  travaillait. 
M.  G.  cite  incidemment  (p.  i5)  les  noms  de  divers  libraires  de  la  fin 
du  xve  siècle  mentionnés  dans  les  minutes  des  notaires  de  Tours.  Ces 
noms  sont  ceux  de  :  Jehan  du  Liège,  Antoine  Vérard,  Jehan  Richart, 
Chariot  Robert,  Jehan  Le  Fort,  Jehan  Audyau,  Jehan  Fafeu,  Jehan 
Bredin,  Jehan  Margerie  et  Arnoul  Rousset.  M.  G.  ne  donne  malheu- 
sement  pas  d'extraits,  pas  même  les  dates,  des  actes  dans  lesquels  il  a  re- 
levé les  noms  que  nous  venons  de  citer.  Il  remarque  seulement  que  les 
deux  premiers  sont  bien  connus  des  bibliographes.  Jehan  du  Liège 
(c'est-à-dire  de  Liège)  est  connu,  en  effet,  pour  avoir  fait  imprimer  par 
Mathieu  Lateron,  en  1496,  La  Vie  et  les  Miracles  de  monseigneur 
Saint-Martin2',  mais,  quoiqu'en  disent  M.  Clément  de  Ris  3  et  M.  le 
Dr  G.,  il  n'est  nullement  démontré  qu'on  doive  reconnaître  en  lui 
«  le  chef  de  cette  illustre  famille  de  Marnef,  vouée  au  culte  de  l'impri- 
merie pendant  de  longues  années  t.  Dès  leur  début  dans  l'imprimerie  à 
Paris,  les  frères  de  Marnef  exercèrent  sous  leur  nom  :  Geofroi,  de  148 1  à 
i526;  Enguilbert  Ier,  de  1491  à  1 535  K  Nous  ne  voyons  pas  qu'aucun 
lien  ait  existé  entre  eux  et  le  libraire  de  Tours.  Quant  à  Antoine 
Vérard,  ce  n'était  pas  un  «  proche  parent,  sans  doute,  d'un  imprimeur 
de  ce  nom  établi  à  Paris  dans  le  même  temps  »;  c'était  lui-même.  Vé- 
rard, qui  était  à  la  tête  de  la  plus  importante  librairie  de  Paris  à  la  fin 
du  xve  siècle,  entretenait  des  relations  suivies  avec  la  province  et  même 
avec  l'étranger;  rien  d'étonnant  à  ce  que  son  passage  à  Tours  ait  été 
constaté.  M.  G.  eût  pu  facilement  nous  donner  quelques  renseigne- 
ments sur  plusieurs  des  autres  libraires  dont  il  a  retrouvé  les  noms. 
Jehan  Richard ,  dont  Lottin  fait  un  libraire  parisien  et  dont  il  place 
l'exercice  de  1497  a  i5io,  fut,  en  réalité,  libraire  à  Rouen  de  1490  a 
i5 17  5;  il  dut  venir  à  Tours,  comme  il  vint  à  Paris^et  comme  il  alla  pro- 

1.  M.  G.  dit  par  inadvertance  (p.  19)  :  il  y  a  deux  siècles. 

2.  Brunet,  V,  11 94. 

3.  Bull,  du  Bibliophile,  1877,  536. 

4.  Nous  donnons  ces  dates  d'après  Lottin,  sans  avoir  ici  à  les  vérifier. 

5.  Voy.  Frère,  Des  livres  de  liturgie  des  églises  d'Angleterre  imprimés  à  Rouen 
(Rouen,  1867,  in-8°),  23. 


d'histoire  et  de  littératurb  91 

bablement  en  Angleterre,  pour  les  besoins  de  son  commerce.  Il  ne  nous 
paraît  pas  pouvoir  être  confondu  avec  le  Jehan  Richard  qui  exerçait  à 
Tours  en  i533  et  en  i536  \  Jehan  Fafeu  n'était-il  pas  de  la  même  fa- 
mille que  le  Pierre  Faifeu  dont  Charles  de  Bourdigné  a  écrit  la  Légende  ? 
Quant  à  Jehan  Margerie;  on  trouve  son  nom  sur  une  édition  s.  d. 
des  Consuetudines  totius presidatus  seu  Turonensis  bailliviae  2.  M.  G. 
eût  été  mieux  placé  que  personne  pour  compléter  ce  qu'on  sait  jusqu'ici 
de  ces  personnages  et  pour  nous  donner  quelques  renseignements  sur  les 
autres. 

M.  Giraudet,  qui  se  montre  si  affirmatif  dans  son  attribution  du  livre 
de  Florio  à  une  officine  tourangelle,  ne  l'est  pas  moins  quant  à  deux 
autres  volumes  également  douteux;  nous  voulons  parler  de  V Or- 
dre qui  a  esté  gardé  à  Tours  pour  appeller  devant  le  roy...  ceux 
des  trois  Estat^,  1484,  in-4  goth.,  et  du  Missale  Turonense,  1485, 
in-fol.  goth.  Pour  le  premier  de  ces  ouvrages,  il  ne  nous  donne  pas 
même  un  commencement  de  preuve  ;  au  contraire,  il  reconnaît  que  les 
caractères  employés  sont  ceux  de  l'imprimeur  parisien  Jehan  Du  Pré. 
Il  est  dès  lors  tout  naturel  de  penser  que  l'éditeur,  Jehan  de  Rely,  aura 
fait  imprimer  le  livre  à  Paris,  où  il  était  chanoine.  M.  G.  suppose,  il  est 
vrai,  que  Jehan  Du  Pré  avait  établi  une  succursale  à  Tours  ;  il  fonde 
cette  conjecture  sur  ce  que  le  missel,  également  imprimé  avec  les  carac- 
tères de  Du  Pré,  se  termine  par  la  souscription  suivante  :  Impressum 
est  hoc  Missale  Turon  Anno  dni.  M  cccclxxxv  ;  mais,  ici  encore  la 
preuve  n'est  pas  décisive,  ^abréviation  Turon  se  lit  plus  naturellement 
Turonense  qne  Turonis  et,  dans  le  doute,  il  nous  paraît  prudent  de 
nous  en  tenir  à  la  première  interprétation.  Nous  avons  peine  à  croire 
que,  si  Jehan  Du  Pré  avait  établi  une  officine  à  Tours,  M.  G.,  qui  a  dé- 
pouillé si  consciencieusement  les  archives  de  Tours,  ainsi  que  les  re- 
gistres capitulaires  conservés  à  la  Bibliothèque  nationale,  n'y  eût  trouvé 
aucune  mention.  Jehan  Du  Pré,  l'imprimeur  parisien,  qui  devint  plus 
tard  libraire  de  l'Université,  possédait  un  établissement  très  important,  si 
l'on  en  juge  par  le  grand  nombre  d'ouvrages,  surtout  de  Missels,  sortis 
de  son  officine  3;  il  n'était  ni  un  de  ces  typographes  besoigneux,  réduits  à 


1.  Voy.  Cat.  Taschereau,  n°'  189  et  141.  Cf.  Clément  de  Ris,  loc.  cit. 

2.  Brunet,  II,  3g2.  Cf.  Cat.  Potier,  1872,  n°  23 1. 

3.  Notons,  en  passant,  qu'il  y  eut,  à  la  fin  du  xve  siècle,  deux  imprimeurs  diffé- 
rents du  nom  de  Jehan  Du  Pré.  L'un,  que  Lottin  ne  cite  que  sous  la  date  de  i486, 
exerçait  à  Paris  dès  14^1  ;  il  avait  alors  pour  associé  Didier  H uy  m  (Brunet,  III,  1763). 
Sans  énumérer  ici  ses  productions,  nous  dirons  qu'il  imprimait  encore  en  i5oi 
(Brunet,  III,  1197),  mais  qu'il  mourut  peu  de  temps  après.  Nous  connaissons  en 
effet,  des  Horae  béate  Marie  Virginis  achevées  par  sa  veuve,  le  Ier  avril  i5o6,  nou  • 
veau  style.  (Librairie  Ellis  et  White,  à  Londres,  Cat.  n°  47,  art.  337).  Le  second  Je- 
han Du  Pré  exerçait  à  Abbeville  au  commencement  de  l'année  1487  (Brunet,  I,  36o); 
il  passa  ensuite  à  Lyon,  où  on  peut  le  suivre  depuis  la  fin  de  cette  même  année 
(Péricaud,  Bibliogr.  lyonnaise  du  xvc  siècle,  nouv.  éd.,  n°  32)  jusqu'à  la  fin  de 
l'année  1495  (ibid.,  n°  126): 


92  REVUE   CRITIQUE 

transporter  leurs  presses  de  ville  en  ville,  ni  un  de  ces  industriels  disposés 
à  monter  des  ateliers  loin  de  leur  surveillance.  Si  M.  G.  a  raison  de  con- 
sidérer comme  des  impressions  tourangelles  les  deux  volumes  dont  nous 
venons  de  parler,  il  faut  admettre  qu'ils  ont  été  exécutés  par  quelque  im- 
primeur inconnu,  à  qui  Du  Pré  aura  fourni  des  caractères  comme  il  en 
fournit,  par  exemple,  à  Jehan  Le  Bourgeois,  à  Rouen,  en  1488  '. 

Avec  Simon  Porcellet,  qui  imprime,  de  149 1  à  1494,  ^e  Breviarium 
Turonense,  nous  marchons  sur  un  terrain  plus  solide.  Pour  nous, 
comme  pour  M.  Deschamps,  Porcellet  est  encore  le  prototypographe  de 
Tours.  Jehan  de  Rely,  chargé  de  la  publication  du  Bréviaire,  est  devenu 
confesseur  du  roi;  il  est  nommé  doyen  de  Saint-Martin  ;  c'est  désormais 
un  personnage  puissant,  qui  peut  décider  un  imprimeur  à  s'établir  près 
de  lui.  S'il  y  avait  eu  à  Tours  une  officine  en  pleine  activité,  il  eût  été 
inutile  de  recourir  aux  services  du  nouveau  venu,  qui  paraît  avoir  été 
fort  mal  outillé,  si  l'on  en  juge  par  le  temps  qu'il  mit  à  accomplir  la  tâ- 
che qui  lui  était  confiée.  M.  G.  a  eu  l'heureuse  chance  de  découvrir 
dans  les  registres  capitulaires  de  Saint-Martin  des  renseignements  fort 
précieux  sur  cette  publication,  qui  fut  tellement  onéreuse  pour  Porcel- 
let que  les  chanoines  durent  lui  accorder  une  indemnité  supplémen- 
taire. 

M.  G.  fait  suivre  sa  notice  sur  Porcellet,  de  trois  chapitres  consacrés  à 
Mathieu  Latheron,  à  Mathieu  Cherchelé  et  à  Jehan  Rousset.  Ces 
chapitres  sont  pleins  de  documents  inédits  d'une  réelle  importance* 
Nous  n'avons  rien  à  ajouter  aux  détails  qui  nous  sont  donnés  sur  Lathe- 
ron; quant  à  la  bibliographie  de  Cherchelé  et  de  Rousset,  elle  pourrait 
être  plus  complète.  Parmi  les  productions  de  Cherchelé,  M.  G.  omet  le 
Manuel  royal  ou  Opuscules  de  la  doctrine  et  condition  du  prince,  de 
Jehan  Brèche,  achevé  d'imprimer  le  i3  janvier  1541  (1542  n.  s.),  in-4 
goth.  de  58  ff.  non  chiffr.  2;  il  passe  également  sous  silence  la  Déclara- 
ration  des  abu-{  et  tromperies  que  font  les  apoticaires,  par  maistre 
Lisset  Benancio,  1 533,  in-8  3.  En  ce  qui  concerne  Jean  Rousset,  M.  G. 


Ces  deux  imprimeurs  ont  été  souvent  considérés  comme  un  même  personnage;  on 
les  a  souvent  aussi  confondus  avec  Jehan  Des  Pre%,  imprimeur  à  Salins  (1485). 

11  y  eut  à  Paris  au  commencement  du  xvie  siècle  un  autre  Jehan  Du  Pré,  qui 
exerçait  dès  l'année  iboj  (Brunet,  III,  1197^,  possédait  encore  son  officine  en  i52a 
(Brunet,  III,  450),  et  vivait  peut-être  encore  en  1547  (Suppl.au  Man.  du  Libraire, 
II,  44).  Le  nouveau  Jehan  Du  Pré  n'était  sans  doute  pas  le  fils  du  premier;  il  de- 
meurait en  la  rue  des  Porées,  à  l'image  saint  Sébastien,  tandis  que  l'ancien  impri- 
meur du  même  nom  était  établi  rue  Saint-Jacques,  à  l'enseigne  des  deux  Cygnes, 
près  de  Saint-Séverin,  (nous  retrouvons  sa  veuve  à  la  même  adresse).  Il  est  proba- 
ble que  le  célèbre  Galiot  Du  Pré  était  le  fils,  ou  tout  au  moins  le  proche  parent  du 
premier  Jehan  Du  Pré;  en  tout  cas  il  fut,  comme  lui,  libraire  de  l'Université. 

1.  Brunet,  III,  8o5. 

2.  Biblioth.  nat.,  Y  4508.  A. —  M.  Brunet  (I,  12 16)  donne  à  ce  volume  la  date  de 
1544. 

3.  Biblioth.  nat.,  T.  18.  2.  —  Sur  l'auteur,  voy.  Brunet,  I,  768. 


D  HÎSTOlRIi  KT    DIC    LITTiCR  ATURB  g3 

eût  pu  se  référer  à  un  article  que  nous  avons  consacré  aux  Imprimeurs 
vendomois  de  M.  le  marquis  de  Rochambeau  '  ;  il  y  aurait  trouvé  l'in- 
dication de  trois  pièces  qu'il  n'a  pas  citées.  Par  contre,  le  bibliographe 
tourangeau  nous  donne  (p.  87)  un  document  qui  mérite  toute  notre  at- 
tention ;  c'est  un  acte  du  2  juillet  1547,  en  vertu  duquel  Jean  Lambert, 
devient  acquéreur  d'une  partie  du  matériel  de  Rousset.  Nous  pouvons 
juger  par  cet  acte  de  ce  qu'était  alors  une  petite  imprimerie  provinciale; 
nous  y  trouvons  aussi  la  confirmation  d'un  fait  qui  n'était  guère  connu 
jusqu'ici  que  par  une  note  peu  explicite  de  l'imprimeur  parisien  Jehan 
Du  Pré  %  à  savoir  que  les  figures  destinées  à  l'ornement  des  livres 
d'heu/es  étaient  gravées  sur  cuivre  et  non  sur  bois.  Parmi  les  objets  cé- 
dés à  Lambert  figurent  «  cinq  cens  Rudimens,  de  Pelisson  »  ;  il  s'agit 
probablement  de  YEpitome  de  la  grammaire  latine  de  Jean  Despau- 
tére,  que  Du  Verdier  3  attribue  à  Jehan  Pelisson,  de  Coindrrieu,  princi- 
pal du  collège  de  Tournon,  mais  dont  il  n'indique  pas  le  lieu  d'impres- 
sion. 

M.  G.  complète  ses  notes  sur  les  imprimeurs  de  Tours  par  des  noti- 
ces sur  trois  hommes  que  la  Touraine  revendique  comme  ses  enfants  : 
Nicolas  Jenson,  Cristophe  Plantin  et  Guillaume  Roville,  Nous  n'au- 
rions jamais  fini  si  nous  voulions  entrer  dans  l'examen  détaillé  de  ces 
notices.  Remarquons  seulement  que  Jenson  a  été  parfois  revendiqué 
par  les  Danois  4.  Sur  Plantin  on  peut  consulter  avec  fruit  divers  arti- 
cles de  la  Bibliotheca  belgica,  de  M.  F.  vander  Haegheh,  en  attendant 
la  publication  à' Annales  Plantiniennes  plus  complètes  que  celles  de 
MM.  Ruelens  et  De  Backer.  Quant  à  Roville,  qui,  d'après  La  Croix  du 
Maine,  était  Tourangeau,  M.  G.  s'obstine  à  l'appeler  Rouillé.  Il  est  cer- 
tain que  le  titre  et  l'extrait  du  privilège  de  deux  volumes  publiés  en 
i55o,  portent  Rouillé,  (avec  un  accent  aigu  bien  marqué)  5,  mais  ces 
deux  volumes,  que  M.  G.  eût  dû  citer  à  l'appui  de  sa  thèse,  ne  nous  ont 
pas  convaincu. 

Guillaume  était  libraire  et  non  pas  imprimeur,  comme  le  dit  à  tort 
M.  G.  ;  la  forme  Rouillé  pour  Rouille  (c'est-à-dire  Roville)  nous  pa- 
raît due  à  une  erreur  typographique.  Nous  avons  noté  un  très  grand 
nombre  de  volumes  publiés  par  Roville,  et  nous  n'avons  pas  rencontré 
une  seule  fois  après  i55o  la  forme  Rouillé.  Mais  ce  qui,  à  notre  avis, 


1.  Revue  critique,  1881,  I,  365-3Ô7. 

2.  Voy.  Brunet,  V,  1612. 

3.  Edition  Rigoley  de  Juvigny,  II  490. 

4.  Voy.  Camille  Nyrop,  Bidrag  til  den  danske  Boghandels  Historié  (Kœbenhavn, 
1870,  2  vol.  in-8),  I,  3i,  et  les  divers  ouvrages  qui  y  sont  cités. 

5.  Livre  de  V estât  et  mutation  des  temps  [par  Richard  Roussat],  i55o,  in-8.  (Bi- 
Blioth.  de  feu  M.  le  baron  James  de  Rothschild.) 

La  Circée  de  M.  Giovan  Baptista  Gello,  académie  florentin  ;  nouvellement  mis  en 
françoys  pur  le  seigneur  Du  Parc,  Champenois,  i55o,  in-8.  Voy.  La  Croix  Du 
Maine,  I,  346. 


94  REVUK    CRITIQUK 

est  décisif,  c'est  que,  sur  les  titres  latins,  Roville  est  appelé  Rovillius  et, 
sur  les  titres  italiens,  Rovillio,  ou  même  Roviglio  '.  On  aura  beau  faire, 
on  ne  pourra  jamais  rattacher  ces  formes  au  français  Rouillé^  aussi  per- 
sisterons-nous à  dire,  jusqu'à  nouvelles  preuves  contraires,  Roville  ou 
Rouville.  M.  G.  n'est  du  reste  pas  parvenu  à  établir  les  relations  de  pa- 
renté qui  pouvaient  unir  le  libraire  lyonnais  à  aucune  famille  touran- 
gelle. 

Le  volume  que  nous  analysons  se  termine  par  une  Liste  chronologi- 
que des  imprimeurs  établis  à  Tours  depuis  V introduction  de  l'im- 
primerie à  Tours  jusqu'à  l'année  i85o.  M.  G.  a  négligé  les  sim- 
ples libraires,  ce  qui  est,  ce  nous  semble  une  lacune  regrettable  ;  mais 
est-il  bien  sûr,  par  exemple,  que  les  frères  Laurent  et  Michel  Richard 
aient  été  imprimeurs?  Comme  libraires,  ils  avaient  commencé  d'exercer 
dès  les  premiers  jours  de  l'année  1542  2.  La  liste  contient  les  noms  de 
simples  ouvriers  comme  Jehan  Bourreau  et  Jacques  de  La  Rue  ;  pour- 
quoi alors  n'y  trouve-t-on  pas  le  nom  de  Loys  de  Bonart,  imprimeur, 
qui,  d'après  M.  G.  lui-même  3,  figure  comme  témoin  dans  un  acte  de 
1594? 

Nous  nous  arrêterons  ici,  en  félicitant  M.  Giraudet  de  ses  découver- 
tes et  en  l'engageant  à  continuer  ses  recherches  pour  nous  donner  un 
jour  une  grande  bibliographie  tourangelle. 

Emile  Picot. 


CHRONIQUE 


FRANCE.  —  Mme  la  comtesse  Gédéon  de  Clermont-Tonnerre,  née  Vaudreuil, 
a  publié  tout  récemment  à  la  librairie  Didier  la  traduction  du  remarquable  ouvrage 
de  M.  Francis  Parkman,  Les  jésuites  dans  V Amérique  du  Nord  au  xvu°  siècle  (Di- 
dier, in-8°,  378  pp.  3  fr.  5o). 

—  La  «  Bibliothèque  d'éducation  moderne  »  que  publient  les  éditeurs  Charavay, 
s'est  grossie  d'un  volume  nouveau,  les  Morceaux  choisis  de  Mirabeau,  avec  préface, 
notices  et  notes,  par  M.  E.  D.  Milliet.  (In-8°.  208  pp.  1  fr.  5o).  Le  volume  renferme 
quelques  gravures  qui  intéresseront  les  élèves;  il  comprend  deux  parties  :  les 
œuvres  diverses  et  les  discours  politiques;  il  se  termine  par  le  récit  des  derniers 
moments  de  Mirabeau  (Cabanis)  et  par  les  jugements  de  Thiers,  Louis  Blanc,  Miche- 
let,  Lamartine  et  Victor  Hugo  sur  le  grand  orateur.  M.  Milliet  ignore  peut-être  qu'un 
Allemand,  M.  H.  Fritsche,  directeur  du  gymnase  de  Grûnberg,  a  fait  paraître  en 
1878,  dans  la  collection  Weidmann,  un  recueil  à  peu  près  semblable  au  sien  ;  mais 


1.  Voy.  notamment  Cat.  Didot,  1879,  nos  450  et  457. 

2.  C'est  pour  les   frères  Richard  que  Mathieu  Cherchelé  a  imprimé  le  Manuel 
royal  de  Jehan  Brèche,  que  nous  avons  cité  ci-dessus. 

3.  Une  Association  d'imprimeurs  et  de  libraires  parisiens,  p.  42. 


:i  HIKiUIH!'.    Kl     UK    L!t  l  t'.HA  î  UKK  9-1 

ce  recueil  ne  comprend  que  les  discours  de  Mirabeau  {Ausgewxhlte  Reden  Mira- 
beau s,  trois  petits  volumes  in-8°,  chacun  de  i3o  pages). 

—  La  Société  asiatique  a  célébré,  le  3o  juin  dernier,  son  60e  anniversaire.  M.  Er- 
nest Renan,  dans  son  rapport  annuel,  a  énuméré  les  travaux  de  l'année  et  constaté 
les  progrès  accomplis,  en  France,-  par  les  études  orientales.  M.  E.  Senart  a  donné 
ensuite  lecture  d'un  mémoire  sur  les  origines  du  théâtre  indien.  Il  s'est  surtout  at- 
taché à  indiquer  la  place  que  le  drame  occupe  dans  le  mouvement  littéraire  de 
l'Inde,  et,  sans  nier  entièrement  l'influence  grecque,  il  a  revendiqué  pour  le  théâtre 
indien  une  part  d'originalité  plus  grande  que  certains  savants  allemands  ne  pa- 
raissent disposés  à  lui  reconnaître.  —  Le  bureau  de  la  Société  asiatique  est  ainsi 
composé  :  Président  honoraire  :  M.  Barthélémy  Saint-Hilaire.  Président  :  M.  A. 
Régnier.^  Vice-présidents  :  MM.  Defrémery  et  Barbier  de  Meynard.  Secrétaire  : 
M.  Ernest  Renan.  Secrétaire-adjoint  :  M.  Stanislas  Guyard. 

—  M.  J.  B.  Mispoulet,  avocat  à  la  cour  d'appel,  docteur  en  droit,  ancien  élève  de 
l'Ecole  des  Hautes  Etudes,  vient  de  publier  le  premier  volume  d'un  ouvrage  intitulé 
Les  institutions  politiques  des  Romains  ou  exposé  historique  des  règles  de  la  cons- 
titution de  l'administration  romaine  depuis  la  fondation  de  Rome  jusqu'au  règne 
de  Justinien.  Ce  premier  volume  (Paris,  Pedone-Lauriel.  In-8°,  xi  et  3go  p.)  a  pour 
titre  La  constitution  et  renferme  quatorze  chapitres;  [Les  origines]  Institutions  pri- 
mitives ;  —  La  constitution  royale  jusqu'au  règne  de  Servius  Tullius  ;  —  La  cons- 
titution servienne  ;  —  [La  République]  Caractère  du  gouvernement  consulaire.  — 
Des  magistratures  en  général;  —  De  chaque  magistrature  en  particulier;  —  Le 
sénat  ;  —  Les  comices;  —  [Du  règne  d'Auguste  à  celui  de  Dioclétien]  La  constitu- 
tion impériale  ;  —  Les  anciens  pouvoirs  de  la  République,  magistratures,  comices, 
sénat;  —  Attributions  respectives  des  pouvoirs  publics  ;  —  Des  nouvelles  fonctions 
créées  sous  l'empire  ;  —  [Du  règne  de  Dioclétien  à  celui  de  Justinien]  Le  pouvoir 
impérial,  les  fonctionnaires  ;  —  Les  anciens  pouvoirs.  •  Un  de  nos  collaborateurs 
rendra  plus  amplement  compte  de  ce  volume. 

—  Le  tome  premier  du  grand  ouvrage  de  M.  Madvig  sur  l'Etat  romain,  —  ouvrage 
dont  la  Revue  critique  rendra  compte  très  prochainement  —  vient  de  paraître  dans 
une  traduction  française  due  à  M.  Charles  Morel  (L'état  romain,  sa  constitution  et 
son  administration,  par  J.  M.  Madvig,  traduit  par  Ch.  Morel.  Tome  premier.  Pa- 
ris, F.  Vieweg.  In-8°,  ix  et  296  p.)  «  C'est  d'après  le  texte  allemand,  dit  M.  Ch.  Mo- 
rel dans  son  avant-propos,  que  cette  traduction  a  été  faite,  mais  comme  ce  texte  est 
malheureusement  assez  fautif  et  diffus,  j'ai  eu  recours  à  l'édition  danoise,  surtout 
pour  contrôler  les  renvois  et  les  citations...  je  crois  avoir  rempli  scrupuleusement 
ma  tâche  en  m'appliquant  à  rendre  toujours  la  pensée  originale  avec  toute  l'exacti- 
tude que  comporte  la  diversité  des  langues.  Je  me  suis  efforcé  de  couper  les  périodes 
trop  longues,  farcies  de  relatifs  et  de  corrélatifs.  Dans  l'original,  les  renvois,  les  ci- 
tations et  souvent  des  explications  d'une  certaine  étendue  étaient  intercalés  dans  le 
texte  même,  entre  parenthèses,  empêchant  de  suivre  le  texte  général,  tandis  que 
d'autres  remarques  étaient  placées  au  bas  des  pages.  Jamais  le  public  français  n'eût 
admis  une  disposition  pareille  ;  j'ai  donc  dû  rejeter  en  notes  tous  ces  renvois  et  n'ai 
laissé,  dans  le  texte,  entre  parenthèses,  que  les  termes  techniques  latins  et  grecs  et 
certaines  définitions  importantes;  parfois  j'ai  fait  passer  des  notes  dans  le  texte, 
certaines  observations  qui  me  paraissaient  pouvoir  se  fondre  dans  l'exposé  général. 
Je  me  suis  permis  d'ajouter  de  mon  chef,  entre  crochets,  quelques  brèves  annota- 
tions destinées  soit  à  faire  mieux  comprendre  la  pensée  de  l'auteur,  soit  à  relever 
de  légères  erreurs  de  détail  qu'il  me  paraissait  impossible  de  ne  pas  rectifier.  » 

—  M.  Henri  Chevreul  poursuit  la  publication  de  ses  Pièces  sur  la  Ligue  en  Bour- 


g6  RKVUE    C1UTJQUB 

gogne.  Le  nouveau  volume  qu'il  vient  de  publier  (Martin, {petit  in-S°,  xi  et  70  p.) 
renferme  :  i°  Vie  et  faits  héroïques  du  mareschal  d'Aumont,  avec  la  quenouille  des 
dames  d'Autun  (1 591) ;  20  La  prinse  de  la  ville  d'Autun  par  le  mareschal  de  Biron 
^  1 595)  ;  3°  Réduction  de  la  ville  et  du  château  de  Beaune,  le  5  février«(i595)  par  Le- 
maidon;  40  Discours  sur  le  combat  de  Fontaine-Françoise  (i5g5);  5°  Lettre  du  roy 
à  MM.  du  Parlement  et  de  la  Cour  des  comptes  (i5g5). 

—  M.  E.  Ducéré  a  fait  tirer  à  part  (bulletin  de  la  Société  des  sciences,  lettres  et 
arts  de  Pau,  2e  série,  tome  X.  Bayonne,  Hourquet.  In-8°,  169  p.)  une  étude  sur 
Y  armée  des  Pyrénées  occidentales,  éclaircissements  historiques  sur  les  campagnes 
de  I7g3,  1794,  i7g5. 

—  M.  F.  Hervé-Bazin,  professeur  à  l'Université  catholique  d'Angers,  a  publié  les 
Mémoires  et  récits  de  François  Chéron,  son  grand-père  (Tardieu ,  in-120,  vin  et 
280  p.,  3  fr.  5o)  Chéron,  né  en  1764,  et  mort  en  1827,  fut  toute  sa  vie  un  roya- 
liste; membre  du  conseil  secret  de  Louis  XVI  au  10  août,  emprisonné  par  la  Con- 
vention et  sauvé  de  la  mort  par  le  9  thermidor,  combattant  du  i3  vendémiaire,  il 
attaqua  le  Directoire  dans  un  journal,  la  Défense,  qui  fut  supprimé  au  18  fruc- 
tidor. Sous  la  Restauration,  de  1818  à  1825,  Chéron  fut  commissaire  du  roi  près 
le  Théâtre-Français;  aussi  connut-il  les  principaux  écrivains  de  l'époque,  et  l'on 
trouvera  dans  ses  Mémoires  un  certain  nombre  de  lettres  inédites  de  Nodier,  An- 
celot,  Andrieux,  Quatremère de  Quincy,  Parceval-Grandmaison,  Victor  Hugo,  etc. 

—  L'imprimerie  nouvelle  de  Pithiviers  va  réimprimer  à  petit  nombre,  avec  notes 
explicatives  (deux  vol.  in-8%  3o  fr.)  Y  Histoire  générale  des  pays  du  Gastinois,  Se- 
nonois  et  Hurpois,  de  dom  Guillaume  Morin. 

—  Un  Traité  du  blason  en  deux  volumes  in-4",  ornés  de  plus  de  3oo  blasons  co- 
loriés, doit  paraître  prochainement;  l'auteur  est  M.  le  comte  Amédée  de  Foras,  déjà 
connu  par  un  Armoriai  de  la  Savoie. 

—  L'Académie  des  sciences  morales  et  politiques  a,  dans  sa  séance  du  17  juin,  dé- 
cerné le  prix  du  budget  {Histoire  du  pouvoir  royal  et  des  institutions  françaises  sous 
les  premiers  Capétiens  jusqu'à  Philippe-Auguste)  à  M.  Achille  Luchaire,  professeur 
à  la  Faculté  des  lettres  de  Bordeaux.  Ce  prix,  dont  la  valeur  a  été  doublée,  est  de 
3,ooo  fr.  —  L'autre  prix  du  budget  (Les  origines  et  les  caractères  de  la  chevalerie 
et  de  la  littérature  chevaleresqui,  n'a  pas  été  décerné;  le  concours  est  prorogé  pour 
1884.  —  La  question  suivante  :  <c  Examiner  quels  furent  les  caractères  distinctifs  de 
la  politique  de  Charles  V,par  quels  moyens  ce  prince  sut  reconstituer  la  puissance 
royale  et  faire  respecter  son  autorité  sans  recourir  aux  procédés  de  gouverne- 
ment qui  étaient  en  usage  sous  ses  prédécesseurs  et  qui  se  renouvelèrent  après  lui» 
est  mise  au  concours  pour  l'année  i885  (terme  de  rigueur,  3i  décembre  1884). 

—  L'Ecole  libre  des  sciences  politiques  met  tous  les  ans  au  concours  entre  ses 
anciens  élèves  diplômés  une  bourse  de  4,000  fr.  destinée  à  défrayer  un  voyage 
d'études  à  l'étranger.  Le  lauréat  du  dernier  concours,  qui  a  eu  lieu  le  24  juin, 
est  M.  Bedout,  attaché  au  ministère  des  affaires  étrangères;  le  travail  couronné  a 
pour  titre  «  La  jurisprudence  des  cours  d'amirauté  anglaise  pendant  la  révolution  et 
le  premier  empire  ». 

—  La  Revue  nouvelle  d'Alsace-Lorraine  paraîtra  désormais  une  fois  par  mois,  et 
non  plus  deux  fois;  la  livraison  sera  augmentée  d'une  ou  deux  feuilles  ;  le  prix  sera 
abaissé  (12  fr.  5o  au  lieu  de  2b  fr.).  » 

ALLEMAGNE.  —  La  première  moitié  des  mémoires  et  communications  lus  au 
cinquième  congrès  des  Orientalistes  (Berlin,  septembre  1881),  vient  d'être  distri- 
buée. Ce  volume  contient  les  travaux  de  la  section  sémitique  et  de  la  section 
africaine.  Nous  y  remarquons  un  article  de  M.  Dieterici  sur  La  prétendue  théologie 


d'histoire  et  de  littérature  97 

d'Aristote  che%  les  Arabes;  une  notice  de  M.  Golénischeff  sur  le  travail  de 
M.  Stassof  intitulé  :  «  Remarques  sur  les  Rous  d'Ibn  Fadhlân  et  d'autres  auteurs 
arabes  »;  une  étude  de  M.  Spitta  sur  La  géographie  de  Ptolémée  cheç  les  Arabes; 
un  rapport  de*M.  Guillen  Roblçs,  sur  l'Etat  actuel  des  études  arabes  en  Espagne. 
Suivent  plusieurs  travaux  signés  Ethé,  Christ.  Ginsburg,  A.  Merx,  Sp.  Papageor- 
gios  et  Emil  Kautzsch,  et  intitulés  respectivement  :  Les  tensons  persans  ;  Les  Alephs 
marqués  du  daguesch,  dans  le  ms.  de  Karlsruhe  ;  Remarques  sur  la  vocalisation 
des  Targums;  Hymnes  remarquables  en  usage  dans  les  synagogues  de  Corfou; 
Une  inscription  énigmatique  du  Nord  de  l'Afrique.  M.  Oppert  expose  ensuite  les 
résultats  des  fouilles  de  M.  de  Sarzec  en  Chaldée.  M.  Paul  Haupt  publie  une 
esquisse  de  la  langue  suméro-accadienne.  M.  Kessler  cherche  les  origines  du 
gnosticisme  dans  l'antique  religion  babylonienne.  M.  Sayce  annonce  qu'il  prépare 
un  mémoire  étendu  sur  les  inscriptions  en  langue  inconnue  du  lac  de  Van  :  «  De- 
«  puis  plusieurs  années,  dit-il,  j'étudiais  les  inscriptions  cunéiformes  de  Van  dans 
«  l'intention  de  les  déchiffrer  quand  une  brillante  découverte  de  M.  Stanislas 
«  Guyard  vint  répandre  des  flots  de  lumière  sur  une  partie  de  ces  inscriptions  et 
«  m'encouragea  à  continuer  mes  recherches,  qui  ont  eu  pour  résultat,  je  crois,  une 
«  complète  interprétation  de  ces  textes  intéressants.  La  découverte  de  M.  Guyard 
«  consiste  en  ce  qu'il  a  reconnu  qu'une  formule  revenant  fréquemment  avec  plus  ou 
«  moins  de  variantes  à  la  fin  de  ces  inscriptions  est  une  formule  imprécatoire  ana- 
«  logueà  celle  qui  termine  ordinairement  les  documents  assyriens  ».  Après  l'article 
de  M.  Sayce,  le  P.  Strassmaier  publie  une  longue  série  d'anciens  contrats  babylo- 
niens provenant  de  Warka.  La  section  africaine  est  remplie  par  les  travaux  suivants  : 
Naville,  L'édition  thébaine  du  Livre  des  Morts  ;  Maspero,  Sur  la  cachette  décou- 
verte à  Dêr-el-Baharî  en  juillet  1881  ;  Brugsch,  L'ancien  Tableau  des  Peuples  en 
égyptien  ;  Révillout,  Les  monnaies  égyptiennes;  Lieblein,  Sur  des  textes  égyp- 
tiens datés;  Golénischef,  Sur  un  ancien  compte  égyptien  (rappelant  certains  récits 
de  l'Odyssée  et  des  voyages  Je  Sindibâd  le  marin)  ;  Cust,  Etat  de  la  science  sur  les 
langues  de  l'Afrique. 

—  Les  Historische  Studien  publiées  à  la  librairie  Veit  par  les  professeurs  d'his- 
toire de  l'Université  de  Leipzig,  MM.  W.  Arndt,  C.  von  Noorden,  etc.,  et  leurs  élè- 
ves, viennent  de  s'augmenter  de  deux  fascicules  nouveaux;  le  III8,  dû  à  M.  Rich. 
Mùller,  Er^bischof  Aribo  von  Main%  i02i-io3i ,  avec  une  introduction  de  M.  R. 
Paul  (In-8°,  vi  et  62  p.  1  mark  60),  et  le  IVe,  dû  à  M.  Paul  Meyer,  Die  Fortset^er 
Hermann's  von  Reichenau,  ein  Beitrag  \ur  Quellengeschichte  des  XI.  Jahrhun- 
derts,  avec  une  introduction  de  M..C,  von  Noorden  (in-8°,  ni  et  5g  p.  1  mark  60). 

—  «  L'université  allemande  de  Dorpat  à  la  lumière  de  l'histoire  et  du  présent  » 
(Die  deutsche  Universitœt  Dorpat  im  Lichte  der  Gcschichte  und  der  Gegenwart, 
eine  historische  Studie  auf  dem  Gebiete  œstlicher  Culturkœmpfe) ,  tel  est  le  titre 
d'un  ouvrage  dont  la  seconde  édition  vient  de  paraître  à  la  librairie  Brockhaus,  de 
Leipzig;  c'est,  dit  le  prospectus,  une  «  protestation  énergique  contre  les  actes  de 
violence  dont  les  slavophiles  russes  menacent  le  Deutschthum  en  Livonie  et  surtout 
l'Université  de  Dorpat  ». 

—  M.  Karl  Weinhold,  professeur  à  l'Université  de  Breslau,  dirige  une  nouvelle 
collection  d'études  relatives  aux  langues  et  littératures  germaniques;  cette  collection, 
qui  porte  le  titre  de  Germanistische  Abhandlungen,  sera  consacrée  à  des  recherches 
littéraires  et  grammaticales,  à  des  publications  de  textes,  à  des  travaux  sur  l'his- 
toire de  la  vie  de  la  nation  germanique  à  ses  diverses  époques;  les  fascicules  de  la 
collection  paraîtront  à  intervalles  indéterminés,  chez  l'éditeur  W.  Koebner,  de  Bres- 
lau. Les  trois  premiers  fascicules  des  Germanistische  Abhandlungen  sont  sur  le  point 


98  REVUE   CRITIQUE 

d'être  publiés;  en  voici  les  titres  :  I.  Beitrœge  pim  Leben  und  Dichten  Daniel  Cas- 
pers  von  Lohenstein,  par  M.  Conrad  Mûller;  II. Der  Mantel,  Stiick  eines  grœsseren 
Gedichtes  Heinrichs  vom  Tùrlein,  par  M.  Otto  Warnatsch  ;  III.  Untersuchungen  ùber 
die  Worlstellung  im  Allhochdeutschen,  par  M.  Joseph  Starker. 

—  La  «  Société  de  philologie  allemande  »,  de  Berlin,  publie,  tous  les  ans,  depuis 
1879,  à  la  librairie  Calvary,  une  revue  bibliographique  des  ouvrages  relatifs  à  la 
philologie  germanique.  (Jahresbericht  ùber  die  Erscheinungen  auf  dem  Gebiete  der 
germanischen  Philologie) .  Le  troisième  volume,  consacré  à  l'année  1881,  vient  de 
paraître. 

—  Il  vient  de  paraître  à  la  librairie  Grieben  (L.  Fernau)  à  Leipzig,  la  treizième 
édition  du  Dictionnaire  des  synonymes  de  la  langue  allemande  d'Eberhard  (Johann 
August  Ebehard's  synonymisches  Handwœrterbuch  der  deutschen  Spraché).  La 
douzième  édition  avait  paru  par  les  soins  de  Frédéric  Ruckert;  la  treizième  est  pu- 
bliée, avec  de  nombreux  remaniements,  par  MM.  Otto  Lyon  et  F.  Wilbrandt. 

—  La  Société  philosophique  de  Berlin,  fondée  en  1842,  publiait  depuis  l'année 
1875  dans  des  fascicules  paraissant  à  époques  indéterminées,  ses  mémoires  desti- 
nés au  grand  public;  elle  a  publié  ainsi  jusqu'au  commencement  de  cette  année 
vingt-deux  fascicules  ou  Hefte.  Elle  fera  désormais  paraître  ses  travaux  sous  le  titre 
de  Philosophische  Vortrœge  et  s'efforcera  de  leur  donner  une  forme  plus  accessi- 
ble au  public;  d'ailleurs  elle  ne  publiera  dans  cette  nouvelle  série  que  des  études  re- 
latives aux  questions  d'un  intérêt  général.  Il  paraîtra  à  peu  près  six  fascicules  par 
an;  les  deux  premiers  seront,  l'un,  de  M.  Frederichs,  ùber  das  realistische  Princip 
der  Autoritœt  als  der  Grundlage  des  Rechts  und  der  Moral,  et  l'autre  de  M.  Mi- 
chelet,  ùber  die  Philosophie  von  Herbert  Spencer.  Chaque  fascicule  coûtera  1  mark 
20  (à  Halle,  chez  C.  E.  M.  Pfeffer  [R.  Stricker). 

—  La  Faculté  de  théologie  de  l'Université  de  Gcettingue  a  mis  au  concours,  pour 
l'année  i883,  le  sujet  suivant  :  Justus  Gesenius  und  seine  Verdienste  uni  die  hanno- 
versche  Landeskirche ;  les  travaux  doivent  être  remis  avant  le  ier  janvier  de  l'année 
prochaine. 

—  Le  ministère  prussien  de  l'instruction  publique  a  donné,  en  date  du  27  mai 
1882,  un  nouveau  règlement  des  examens  de  sortie  des  gymnases.  Ces  examens 
équivalent  à  un  baccalauréat  double,  à  la  fois  ès-Iettres  et  ès-sciences;  toutefois  on 
n'y  demande  pas  de  chimie.  Matières  de  l'examen  écrit  :  composition  allemande,  b 
heures;  latine,  5  heures;  thème  latin,  2  heures;  version  grecque,  3  heures;  compo- 
sition mathématique,  5  heures;  celle-ci  comprend  quatre  problèmes  (planimétrie, 
stéréométrie,  trigonométrie,  algèbre)  dont  l'un  est  en  même  temps  un  problème  de 
physique;  on  admet  les  dictionnaires  grec,  latin,  et  la  table  de  logarithmes.  Matiè- 
res de  l'examen  oral  :  enseignement  religieux,  grec,  latin,  français,  histoire  et  géo- 
graphie, mathématiques.  Matières  facultatives  :  hébreu  (version  et  interrogation); 
dans  certaines  villes,  polonais  (thème)  *.  —  Droits  :  3o  mark  (fr.  37  5o).  Séries  :  dix 
candidats  au  plus  à  la  fois.  Point  de  dispenses  d'âge;  nul  élève  absolument  ne  peut 
se  présenter  avant  la  classe  Oberprima.  En  cas  d'examen  écrit  excellent,  dispense 
de  l'examen  oral  (seulement  à  l'unanimité  des  voix).  En  cas  de  majorité  de  mauvai- 
ses notes,  on  ne  peut  déconseiller  à  l'élève  l'examen  oral  ;  on  l'en  exclut,  si  déjà 
l'autorité  scolaire  lui  avait  déconseillé  l'examen  écrit.  Un  candidat  refusé  ne  peut  se 
représenter  que  deux  fois.  —  La  commission  d'examen  siège  dans  l'établissement. 
Ses  membres  sont  les  maîtres  de  la  plus  haute  classe  et  le  directeur.  Son  président 

1 .  Les  candidats  qui  ont  reçu  l'instruction  à  domicile  font,  par  surcroît,  un  thème  grec  et  un  thème 
français,  el  sont  interrogés  en  littérature  allemande  et  en  physique. 


D'HISTOIRE    ET    DE    LITTERATURE  99 

est  le  commissaire  du  roi,  c'est-à-dire  en  général  celui  des  membres  du  conseil  sco- 
laire provincial  à  qui  l'établissement  ressortit  en  fait  (en  tout  cas,  il  est  désigné  par 
ce  conseil  provincial).  Le  commissaire  du  roi  est  armé  de  pouvoirs  à  peu  près  dis- 
crétionnaires. —  Le  règlement  s'écarte  des  prescriptions  de  i856  pour  revenir  à  cel- 
les de  1834.  En  matière  religieuse,  il  rétablit  à  côté  du  dogme  l'histoire  ecclésiasti- 
que. En  allemand,  à  côté  de  la  grammaire  il  fait  de  nouveau  mention  expresse  de  la 
littérature.  En  latin,  il  mentionne  de  nouveau  la  métrique;  il  permet  de  nouveau  le 
dictionnaire  latin, -allemand,  tout  en  continuant  d'exclure  l'allemand-latin.  En  grec, 
il  remet  la  version  à  la  place  du  thème  de  règles.  Dans  l'interrogation  d'histoire,  il 
supprime  une  innovation  de  i836,  la  narration  suivie.  —  Le  thème  français,  jus- 
qu'ici exigé,  est  remplacé  par  l'interrogation  orale. 

ANGLETERRE.  —  Les  manuscrits  judéo-persans  récemment  acquis  par  M.  Neu- 
bauer  et  dont  M.  James  Darmesteter  a  parlé  dans  le  n"  23  de  la  Revue  critique,  ont 
été  achetés  par  le  British  Muséum. 

—  Le  prochain  volume  (le  XIVe)  de  YEncyclopaedia  britannica  renfermera,  entre 
autres  articles  importants  :  Keats  et  Landor,  de  M.  Swinburne;  Kurdistan,  de 
sir  H.  C.  Rawlinson  ;  La  Fontaine,  de  M.  George  Saintsbury  ;  Landlord  and  tenant, 
de  M.  E.  Robertson;  Latin  language,  de  M.  Wilkins;  Latium,  de  M.  Bunbury; 
Lebanon,  de  M.  Socin  ;  Leonardo,  de  M.  Sidney  Col  vin;  Leopardi,  de  M.  Garnett; 
Lessing,  de  M.  James  Sime;  Lévites,  de  M.  Robertson  Smith;  Locke,  de  M.  Fraser; 
London,  de  MM.  Henderson  et  Wheatley. 

—  Un  comité  dont  font  partie  l'archevêque  de  Cantorbéry,  l'évêque  de  Durham,  le 
doyen  de  Westminster,  etc.,  s'est  formé  pour  aider  à  l'achèvement  des  fouilles  entre- 
prises à  Ephèse  sur  l'emplacement  du  temple  de  Diane  sous  la  direction  de  M.  J.  T. 
Wood. 

—  Les  deux  prochains  volumes  de  la  collection  des  «  English  men  of  letters  » 
seront  :  Swift,  de.  M.  Leslie  Stephen  et  Sterne,  de  M.  H.  D.  Traill. 

—  M.  Furnivall  termine  pour  la  New  Shakspere  Society  l'édition  de  la  seconde 
partie  de  YAnatomie  of  abuses  de  Phillip  Stubbes. 

—  On  annonce  la  prochaine  publication  du  Journal  que  tint  M.  Nassau  W.  Senior 
durant  son  séjour  en  Egypte  dans  l'hiver  et  au  printemps  de  l'année  i855-i856. 

—  M.  Eirikr  Magnusson,  de  Cambridge,  vient  de  terminer  son  édition  de  la  Saga 
of  Thomas  à  Becket,  qui  sera  publiée  dans  les  «  Rolls  Séries  ». 

—  Le  Rev.  W.  Forbes  Leith,  de  la  Compagnie  de  Jésus,  doit  faire  paraître  dans 
quelque  temps  un  travail  sur  les  Ecossais  au  service  de  France  (The  scots  men-at- 
arms  in  the  service  of  France). 


SOCIETE  NATIONALE  DES  ANTIQUAIRES  DE  FRANCE 


Séance  du  12  juillet.. 

M.  Ulysse  Robert  lit  une  note  sur  une  commande  de  vitraux  pour  l'église  de 
Loheac  en  Bretagne,  faite  en  14Q4  par  Thomas  de  Riou,  argentier  d'Anne  de  Breta- 
gne, à  un  peintre  verrier  de  Paris  nommé  Amé  Pierre.  Ces  vitraux,  au  nombre 
de  r3,  à  deux  meneaux,  devaient  représenter  «  78  histoires  de  la  généalogie  de 
Mwe  Saincte  Anne  »  ;  le  prix  convenu,  pour  l'exéeulion  et  la  pose,  était  de  3oo  li- 
vres tournois. 

M.  Prost  communique  la  découverte,  faite  au  Sablon  près  de  Metz,  d'un  édifice 
romain  octogone  et  de  deux  cippes  dédiés  à  une  déesse  précédemment  inconnue, 
Scovellauna. 


100  REVUE    CRITIQUE    D  HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

M.  Héron  de  Villefosse  signale  la  trouvaille  faite  par  M.  A.  Farges  à  Khenchela 
(province  de  Constantine),  d'un  plomb  portant  la  légende  Genio  Tus-dritanoru(m) 
«  au  génie  des  habitants  de  Thysdrus  »  (Aujourd'hui  El-Djem).  Il  informe  ensuite 
la  Société  que  des  travaux  sont  en  cours  d'exécution  au  Louvre,  sous  la  direction  de 
M.  Edmond  Guillaume  pour  placer  la  Victoire  montée  sur  la  proue  de  galère  qui  lui 
servait  de  base,  en  haut  du  nouvel  escalier  de  M.  Lefuel.  Des  lettres  d'appareil 
ont  été  découvertes  sur  les  blocs  dont  la  base  était  composée. 





ACADEMIE  DES  INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  21  juillet  1882. 

M.  le  secrétaire  perpétuel  donne  lecture  de  son  rapport  trimestriel  sur  les  travaux 
de  l'Académie.  Ce  rapport  sera  imprimé. 

M.  Ch.  Nisard  continue  la  lecture  de  son  mémoire  sur  l'état  incertain  et  précaire 
de  la  propriété  littéraire  vers  le  milieu  du  xve  siècle. 

M.  Le  Blant  lit  un  mémoire  intitulé  :  Les  chrétiens  dans  la  société  païenne  aux 
premiers  âges  de  l'Eglise.  Après  avoir  rappelé  qu'en  théorie  le  christianisme  or- 
donnait à  ses  adeptes  de  s'isoler  de  la  société  païenne,  de  s'abstenir  de  tout  com- 
merce, de  toutes  relations  d'affaires  ou  d'amitié  avec  les  païens,  de  ne  pas  prendre 
part  à  leurs  assemblées  ou  cérémonies,  M.  Le  Blant  s'attache  à  montrer  que  ces 
prescriptions  rigoureuses  n'ont  jamais  été  exécutées  ni  pu  être  exécutées  à  la  lettre, 

3ue  les  chrétiens  qui  vécurent  ainsi  à  part  et  s'abstinrent  de  toutes  relations  inter- 
ites  avec  les  païens  furent  le  petit  nombre,  qu'en  général  les  chrétiens  vécurent 
mêlés  à  la  société  païenne  et  de  la  même  vie  que  les  païens.  Aussi  Tertullien  se 
plaint-il  de  ces  relations,  qui  lui  semblent  un  abandon  de  la  foi.  Il  dénonce,  par 
exemple,  avec  indignation  le  stratagème  de  quelques  chrétiens,  qui,  obligés  pour  pas- 
ser un  contrat  dans  les  formes  de  prêter  un  serment  au  nom  des  dieux,  juraient  par 
écrit,  disant  que  la  loi  chrétienne  n'avait  défendu  que  de  prêter  des  serments,  mais 
non  d'en  écrire.  Le  même  auteur  réprouve  les  chrétiens  qui  acceptaient  des  fonc- 
tions publiques.  Il  dit  qu'il  n'y  verrait  pas  de  mal,  si  l'on  pouvait  exercer  ces  fonc- 
tions sans  offrir  ni  faire  offrir  des  sacrifices,  sans  pourvoir  à  l'entretien  des  temples, 
sans  consacrer  son  argent  ou  l'argent  public  aux  besoins  du  culte  païen  ;  mais  tout 
cela  lui  paraît  impossible.  Or,  il  est  certain  qu'en  fait  les  chrétiens  acceptaient  sou- 
vent des  fonctions  municipales  (que  d'ailleurs  ils  n'étaient  pas  toujours  libres  de  re- 
fuser) ;  on  en  a  de  nombreux  exemples.  On  sait  aussi  qu'il  y  a  eu  dans  les  légions 
nombre  de  soldats  chrétiens;  or,  les  soldats  ne  pouvaient  se  dispenser  de  concourir 
ou  au  moins  d'assister,  dans  bien  des  cas,  aux  cérémonies  du  paganisme.  Il  faut  donc 
croire  que  les  chrétiens  du  premier  âge  ont  admis  bien  des  compromis  de  conscience, 
des  accommodements  avec  la  discipline  rigoureuse  de  l'antique  Eglise,  et  que  celle- 
ci  n'a  jamais  été  obéie  à  la  lettre. 

M.  Halévy  continue  sa  lecture  sur  la  prétendue  langue  sumérienne  ou  accadienne, 


des  exemples  d'écriture  analogue  employés  dans  d'autres  pays.  La  numération  écrite, 

f>ar  exemple,  est  une  écriture  idéographique,  par  laquelle  .on  représente  des  mots  de 
a  langue  parlée  sans  en  figurer  la  prononciation.  La  syntaxe  du  sumérien,  a-t-on 
dit,  est  quelquefois  différente  de  celle  de  l'assyrien;  mais  de  même  la  construction 
des  nombres  écrits  en  chiffres  est  différente  de  celle  des  nombres  parlés,  et  cepen- 
dant les  uns  représentent  les  autres.  Ainsi  nous  écrivons  i3,  c'est-à-dire,  d'après  les 
lois  de  la  numération  écrite,  dix  et  trois,  et  nous  prononçons  treize,  qui,  étymolo- 
giquement,  signifie  irois  et  dix.  Le  Talmud,  d'autre  part,  témoigne  de  l'emploi  d'une 
langue  conventionnelle,  d'une  sorte  d'argot  scolastique,  à  l'usage  des  docteurs  juifs, 

3ui  ressemble  à  l'assyrien  hiératique  des  textes  pseudo-sumériens.  On  trouve  même 
ans  l' Ancien-Testament  des  traces  de  ce  langage  artificiel. 

Julien  Havet. 


Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 


Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  23. 


REVUE    CRITIQUE 

D'HISTOIRE   ET   DE    LITTÉRATURE 

N»  32  —  7  Août  —  1882 


Sommaires  i56.  Perrot  et  Chipiez,  Histoire  de  l'art  dans  l'antiquité. —  157. 
Madvig,  La  constitution  et  l'administration  de  l'empire  romain. —  1 58.  Godefroy. 
Dictionnaire  de  l'ancienne  langue  française.  —  Chronique.  —  Académie  des  Ins- 
criptions. 


l56. —  Histoire  de  l'Art  dans  l'antiquité,  par  MM.  Georges  Perrot  et 
Charles  Chipiez.  Tome  Ier,  1' Egypte.  Grand  in  8°  de  Lxxvi-879  pages;  14  planches 
et  5g  1  figures.  Paris,  Hachette,  1882. 

Le  grand  ouvrage  dont  nous  signalons  aujourd'hui  le  premier  volume 
aura  ce  mérite,  entre  plusieurs  autres,  de  paraître  à  son  heure.  Il  y  a 
vingt  ans  encore,  il  eût  été  trop  tôt  pour  l'entreprendre.  Si  le  Manuel 
d'Otfried  Mûller,  excellent  en  son  temps,  ne  suffit  plus  aujourd'hui,  c'est 
qu'il  a  été  composé  avant  les  découvertes  qui  nous  ont  révélé  l'art  orien- 
tal. Le  sol  de  l'Egypte,  de  l'Assyrie,  de  l'Asie  Antérieure,  de  la  Grèce  elle- 
même,  réserve  sans  doute  aux  futurs  explorateurs  plus  d'une  surprise,  qui 
pourra  modifier  les  idées  et  les  théories  actuellement  en  cours.  Cepen- 
dant, on  connaît  un  assez  grand  nombre  de  monuments  de  provenances 
et  d'époques  diverses,  assez  de  résultats  importants  sont  désormais  ac- 
quis à  la  science,  pour  qu'on  puisse  aujourd'hui,  sans  courir  le  risque 
d'erreurs  capitales,  essayer  de  retracer  l'histoire  générale  de  l'art  dans 
l'antiquité.  Cette  histoire  n'a  encore  été  traitée  par  personne  d'une  fa- 
çon complète.  En  Allemagne,  le  Manuel  de  Kûgler  revu  par  Lubke, 
l'histoire  plus  développée  des  Arts  plastiques  de  Cari  Schnaase,  n'ac- 
cordent pas  à  l'antiquité  la  place  qu'elle  mérite.  Bernhard  Stark,  qui 
avait  entrepris  de  refaire,  sur  un  plan  nouveau,  le  travail  d'Otfried  Mill- 
ier, arrêté  par  la  mort,  ne  nous  a  laissé  qu'une  Introduction  '.  On  peut 
dire  que  l'art  grec  lui-même  a  été  étudié  plutôt  par  parties  que  dans  son 
ensemble.  Nous  possédons  une  bonne  histoire  de  la  sculpture  grecque, 
celle  d'Overbeck;  nous  ne  possédons  pas  d'histoire  complète  de  l'art 
grec  2.  Pour  la  Grèce,  comme  pour  l'antiquité  tout  entière,  l'ouvrage  de 
MM.  Perrot  et  Chipiez  comblera  donc  une  lacune.  Le  cadre  en  est 
nettement  déterminé.   De  ce  cadre  sont  exclus,  pour   de  fort  bonnes 

1.  On  sait  que  cette  introduction  a  été  publiée  sous  le  titre,  de  Systematik  und 
Geschichte  der  Archaeologie  dev  Kunst  (Leipzig,  Engelmann,  1880).  Cf.  Revue  cri- 
tique 1879,  n°  24,  art.  m. 

2.  Nous  n'oublions  pas  l'ouvrage  de  H.  Brunn,  Geschichte  der  griechischen  Kùn- 
stler,  mais  cet  ouvrage,  d'ailleurs  si  important,  est  plutôt,  comme  l'indique  son  ti- 
tre, une  histoire  des  artistes  qu'une  histoire  de  l'art  lui-même. 

Nouvelle  série,  XIV.  6 


102  REVUE   CRITIQUE 

raisons,  l'art  préhistorique  et  celui  de  l'extrême  Orient.  L'antiquité  dont 
il  y  est  question,  c'est,  outre  l'antiquité  classique  proprement  dite,  celle 
qui  a  été  en  rapport  direct  ou  indirect  avec  la  Grèce.  La  Grèce  formera 
donc  «  comme  le  centre  et  le  cœur  »  de  l'ouvrage.  Ce  que  les  auteurs 
se  sont  proposé,  c'est  avant  tout  d'écrire  une  histoire  de  l'art  hellé- 
nique ,  mais  une  histoire  de  l'art  hellénique  qui  a  pour  intro- 
duction nécessaire  l'étude  de  l'art  chez  les  peuples  de  l'Orient,  pour 
épilogue  non  moins  nécessaire,  l'étude  de  l'art  des  peuples  italiotes. 
Tel  est,  dans  sa  simplicité  et  dans  son  unité,  le  plan  général  de  l'œu- 
vre. Pour  l'exécution  de  ce  plan,  M.  P.  a  jugé  bon  de  s'adjoindre  un 
collaborateur.  Si  l'on  songe  que  ce  collaborateur  est  M.  Chipiez1,  on  es- 
timera que  cette  association  ne  peut  avoir  que  d'heureux  résultats.  D'une 
part,  en  effet,  la  division  du  travail  permet  d'espérer  l'achèvement  rela- 
tivement prompt  de  l'ouvrage;  de  l'autre,  on  peut  être  assuré  qu'aucune 
question  technique  n'aura  été  négligée,  que  l'architecture  trop  souvent 
sacrifiée,  et  pour  cause,  par  les  archéologues,  occupera  dans  l'ensembie 
de  cette  histoire  la  place  qui  lui  appartient,  que  tous  les  soins  possibles 
seront  donnés  à  la  reproduction  fidèle  des  monuments  et  à  la  bonne  exé- 
cution des  figures. 

Ce  premier  volume  est  consacré  à  l'histoire  de  l'art  en  Egypte.  Quel- 
ques personnes  eussent  peut-être  souhaité  que  cette  histoire  fût  écrite  par 
un  égyptologue.  Notre  avis  est  qu'il  ne  faut  pas  se  montrer  sur  ce  point 
plus  exigeant  que  les  égyptologues  eux-mêmes  qui  déjà  se  sont  pronon- 
cés. G.  Ebers,  tout  en  formulant  quelques  objections  de  détail,  s'est  plu 
à  reconnaître  hautement  2  l'exactitude  générale  des  informations  recueil- 
lies par  M.  P.,  et  leur  parfait  accord  avec  l'état  actuel  de  la  science.  Il 
y  a,  dans  un  pareil  témoignage,  de  quoi  rassurer  toutes  les  inquiétudes. 
On  s'aperçoit  bien  vite  d'ailleurs  de  la  prudence  qui  a  présidé  à  ces  in- 
formations. Il  est  telles  parties  du  sujet  où  il  eût  été  périlleux  de  viser  à 
l'originalité.  M.  P.  s'est  donc  plusieurs  fois  borné  à  se  faire  le  rappor- 
teur des  travaux  et  des  opinions  des  savants  spéciaux.  L'exposition  des 
idées  des  Egyptiens  sur  l'autre  vie  —  idées  sans  lesquelles  on  ne  peut 
comprendre  l'architecture  funéraire — est  en  partie  empruntée  à  M.  Mas- 
pero  3.  La  description  du  mastaba,  ou  de  la  plus  ancienne  tombe  privée 
de  l'Ancien  Empire,  est  donnée  presque  textuellement  d'après  Manette, 
qui  a  ouvert  le  plus  grand  nombre  de  ces  sépultures.  On  trouve  ainsi, 
méthodiquement  groupés  et  mis  en  œuvre,  les  renseignements  les  plus 
sûrs,  puisés  aux  meilleures  sources. 

i.  M.  C.  est  l'auteur  d'une  Histoire  critique  des  origines  et  de  la  formation  des 
ordres  grecs,  couronnée,  en  1877*  par  l'Académie  des  Inscriptions  (Cf.  Rev.  criti- 
que, 1876,  II,  p.  374).  Aux  Salons  de  1878  et  de  1879,  les  connaisseurs  ont  remar- 
qué ses  Essais  de  restauration  d'un  temple  grec  hypaethre  et  des  tours  à  étages  de 
laChaldée. 

2.  Dans  le  Centralblatt,  n°  du  4  mars  1882. 

3.  M.  P.  nous  avertit  qu'il  a  beaucoup  consulté  et  beaucoup  fait  causer  M.  Mas- 
pero,  avant  son  départ  pour  le  Caire. 


D'HISTOIRE    ET    DE    LtITÉRATURE  103 

Ce  n'est  pas  une  histoire  complète  de  Part  égyptien,  depuis  ses  ori- 
gines jusqu'à  sa  décadence,  que  les  auteurs  ont  prétendu  écrire.  La  série 
des  monuments  qu'ils  ont  Voulu  étudier  s'arrête  à  la  conquête  perse, 
c'est  à  dire  au  moment  où  l'art  égyptien  a  accompli  son  évolution  et 
épuisé  sa  force  créatrice.  A  quoi  bon  parler  longuement  d'un  art  qui  dé- 
sormais se  répète  et  se  copie  lui-même?  S'il  esta  peine  question  des  mo- 
numents de  l'Egypte  ptolémaïque,  en  revanche  une  place  très  large  est 
faite  à  ceux  de  l'Ancien  Empire.  Personne  ne  se  plaindra  de  cette  heu- 
reuse disproportion.  L'art  de  l'Ancien  Empire,  cet  art  antérieur  au  rè» 
gne  des  conventions,  qui  a  créé  les  types  et  façonné  les  moules  dont  se 
serviront  les  âges  suivants,  est  de  tous  à  la  fois  le  plus  intéressant  et  le 
moins  connu.  Les  monuments  qu'on  en  peut  voir  à  Paris  ou  à  Berlin 
sont  fort  peu  nombreux;  c'est  en  Egypte  qu'il  faut  aller  les  étudier. 
Mais  combien  de  personnes  vont  à  Boulaq?  11  faut  donc  remercier 
MM.  P.  et  C.  du  soin  qu'ils  ont  pris  de  décrire,  après  les  avoir  fait  des- 
siner, les  figures  les  plus  remarquables  qui  sont  sorties  de  la  nécropole 
de  Memphis.  La  simple  vue  de  ces  figures  fera  tomber  bien  des  préju- 
gés. Regardez  le  Scribe  accroupi  du  Louvre  (pi.  x)  et  le  ckeikh-el-beled 
(fig.  7)  du  musée  de  Boulaq.  Si  vous. croyiez  encore  à  la  raideur  hiérati- 
que de  l'art  égyptien,  vous  n'y  croirez  plus. 

L'histoire  de  l'architecture  occupe  plus  de  cinq  cents  pages,  ç'est-à-dire 
les  deux  tiers  du  volume.  C'est  que  l'architecture  est  en  Egypte  l'art  par 
excellence,  dont  la  sculpture  et  la  peinture  ne  sont  que  les  humbles  ser- 
vantes. Si  le  sculpteur  travaille,  c'est  pour  l'architecture.  Les  images 
qu'a  créées  son  ciseau  ne  sont  point  faites  pour  le  regard  des  vivants  : 
enfermées  dans  l'épaisseur  du  massif  de  la  tombe,  dans  le  serdab  muré 
pour  l'éternité,  elles  sont  uniquement  destinées  à  remplir  un  office  reli- 
gieux dans  l'ensemble  du  monument  construit  et  ordonné  par  l'archi- 
tecte. De  même  la  peinture,  qui  d'ordinaire  se  borne  à  orner  de  ses  tons 
vifs  les  parois  du  monument  ou  à  compléter  l'effet  du  modelé  dans  les 
statues  et  les  bas-reliefs,  la  peinture  n'est  point,  en  Egypte,  un  art  indé- 
pendant. On  ne  s'étonnera  donc  pas  du  large  développement  que  M.  P., 
grâce  à  la  collaboration,  ici  très  spéciale  et  très  active,  de  M.  C,  a  donné 
à  l'histoire  de  l'architecture.  La  matière,  d'ailleurs,  est  tellement  riche, 
qu'il  était  impossible  de  l'épuiser.  Il  ne  faut  pas  s'attendre  à  trouver 
dans  ce  chapitre  une  description  détaillée  de  tous  les  grands  monuments 
de  l'Egypte.  Les  touristes,  après  l'avoir  lu,  auront  encore  besoin  des 
Guides  d'Isambert  et  de  Baedeker;  les  architectes  qui  désireraient  avoir 
les  cotes  des  pyramides  de  Gizeh,  ne  seront  point  dispensés  de  recourir  à 
Vyse  et  à  Perring;  d'une  façon  générale,  toute  personne  qui  sera  cu- 
rieuse d'étudier  le  détail  de  ces  questions,  devra  consulter  le  grand  ou- 
vrage de  Lepsius  et  celui  de  Prisse  d'Avennes.  Cette  histoire  de  l'archi- 
tecture égyptienne  se  propose  autre  chose  que  d'être  complète  :  elle  vise 
surtout  à  présenter  au  lecteur  des  résultats  généraux  ;  elle  veut  lui  faire 
comprendre,  par  des  exemples  caractéristiques,  ce  qu'ont  été,  aux  dif- 


-aril .  3b2jnsmunomiîbfi£ir 
io4'   noiîomeshfil  éalrtrï     ««von  critjqok 

férentes  époques,  les  deux  monuments  essentiels  de  l'Egypte  :  le  tombeau 
et  le  temple.  \  U  g  ^3£jb  ^noJ}eii 

Le  chapitre  sur  l'architecture  funéraire  sera  lu  par  tout  le  monde  avec 
un  grand  intérêt  :  d'abord,  parce  qu'il  n'exige,  pour  être  compris,  pres- 
que aucune  connaissance  technique  ;  ensuite,  parce  que  la  construction, 
si  originale,  de  la  tombe  égyptienne,  est  éclairée  d'une  vive  lumière  par 
l'exposition  des  idées  particulières  aux  Egyptiens  sur  l'existence  des 
âmes  après  la  mort.  Ici  encore,  plus  d'une  idée  fausse  devra  céder  devant 
la  réalité  des  faits.  S'il  y  a  dans  le  tombeau  égyptien,  sous  le  Moyen 
Empire  comme  sous  l'Ancien  et  le  Nouveau,  des  éléments  toujours 
identiques  (le  puits  et  le  caveau),  rien  de  plus  varié  que  les  dispositions 
prises  par  les  architectes,  suivant  les  temps,  suivant  aussi  la  matière 
qu'ils  emploient  ou  le  roc  qu'ils  attaquent.  Quant  aux  pyramides,  il  n'y 
en  a  pas  deux  qui  se  ressemblent  exactement.  La  pyramide  méridionale 
de  Dachour,  dont  l'inclinaison  change  vers  le  milieu  de  sa  hauteur,  la 
pyramide  à  degrés  de  Sakkarah  démontrent  jusqu'à  l'évidence  que  tous 
ces  monuments  «  ne  sont  pas  des  épreuves  d'un  même  modèle  coulées 
dans  des  moules  de  différentes  grandeurs.  »  Il  faut  donc  se  garder  de 
prononcer  le  mot  d'uniformité  à  propos  de  la  tombe  privée  ou  de  la 
tombe  royale  égyptienne.  Ce  mot  serait  contraire  à  la  vérité  des  choses. — 
Dans  ce  chapitre  si  intéressant,  il  n  est  qu'un  point  où  l'esprit  du  lecteur 
reste  dans  le  doute  :  c'est  au  sujet  de  la  construction  des  pyramides.  Le 
système  qui  considère  toute  pyramide  de  grande  dimension  comme  ayant 
pour  noyau  une  pyramide  plus  petite,  et  comme  formée  par  la  superpo- 
sition de  plusieurs  enveloppes  pyramidales,  système  qui  paraît  être  en 
faveur  en  Allemagne,  est  discuté  ici  et  contesté.  Les  objections  qui  y  sont 
faites  paraissent  très  fortes;  mais  rien  n'y  est  substitué'.  Les  auteurs 
laissent  bien  entendre  que  les  tombes  royales  n'ont  pas  été  toutes  cons- 
truites d'après  un  système  unique,  mais  ils  oublient  de  nous  dire  quels 
étaient  ces  systèmes  différents.  S'il  y  a  là  une  difficulté  qui  ne  soit  pas 
encore  résolue,  peut-être  eût-il  mieux  valu  ne  pas  soulever  la  question 
que  la  laisser  en  suspens. 

Il  était  plus  facile  de  faire  comprendre  la  tombe  que  le  temple,  qui  est 
beaucoup  moins  simple.  'L'ordre  adopté  dans  cette  seconde  étude  est 
l'ordre  même  dans  lequel  les  objets  s'offraient  aux  regards  des  visiteurs. 
On  trouvera  donc  décrits  successivement  les  abords  du  monument  (dro- 
nios,  avenues  de  sphinx,  etc.),  puis  les  pylônes,  puis  le  monument  lui- 
même  dans  son  ordonnance  la  plus  générale.  L'exemple  choisi,  pour 
rendre  sensible  cette  ordonnance,  est  le  temple  de  Khons  à  Karnak,  qui 
a  cet  avantage  d'être  bien  conservé  et  d'offrir  réunis  les  traits  principaux 
qui  caractérisaient  le  temple  égyptien.  Les  auteurs  ne  s'en  tiennent  point 


i.  On  nous  dit  bien  (p.  202)  que  la  pyramide  est  née  du  tertre,  qu'elle  est  le  ter- 
tre bâti.  Mais  on  ne  voit  pas  quels  étaient  les  procédés  employés  pour  cette  bâ- 
tisse. 


d'histoire  kt  jûk  littératurb  io5 

cependant  à  cet  exemple  :  ils  entreprennent  ensuite  de  nous  expliquer, 
dans  leur  diversité  et  leur  complication,  les  grands  monuments  de  Thè- 
bes.  Les  figures  prêtent  ici  le  concours  le  plus  utile  à  la  description.  Nous 
sommes  hors  d'état  d'apprécier  la  valeur  des  vues  perspectives  et  des  res- 
taurations dues  à  M.  G.;  mais  il  nous  sera  permis  de  constater  que,  grâce 
à  ces  figures,  la  disposition  des  temples  de  Karnak,  de  Louqsor,du  Ra- 
messéum,  est  rendue  aussi  claire  que  possible,  et  qu'on  ne  peut  avoir  lu 
attentivement  ce  chapitre,  sans  en  emporter  une  idée  nette  des  caractè- 
res dominants  du  temple  égyptien.  Quelques  pages  seulement  sont  con- 
sacrées à  l'architecture  civile  et  militaire  dont  il  est  resté  peu  de  traces; 
après  quoi,  on  arrive  à  l'étude  de  la  construction,  à  celle  des  ordres  et  à 
l'analyse  des  formes  secondaires.  On  remarquera  surtout  les  développe- 
ments relatifs  à  la  voûte,  au  pilier  et  à  la  colonne.  Les  origines  de  la  co- 
lonne égyptienne  ont  déjà  suscité  plus  d'une  hypothèse.  En  général,  on 
croit  y  reconnaître  une  copie  de  formes  végétales  :  les  colonnes  à  chapi- 
teaux campaniformes  seraient  une  imitation  du  papyrus  et  de  sa  pani- 
cule;  les  colonnes  à  chapiteaux  dit  lotiformes,  une  imitation  du  lotus. 
Une  comparaison  soigneuse  des  soit-disant  modèles  avec  les  prétendues 
copies  montre  qu'il  entre  dans  ces  rapprochements  une  part  de  fantaisie, 
et  nous  ne  sommes  point  surpris  que  MM.  P.  et  C.  écartent  cette  hypo- 
thèse. Us  lui  en  substituent  d'ailleurs  une  autre,  voisine  de  celle-ci,  mais 
plus  modeste,  en  ce  sens  qu'elle  ne  prétend  expliquer  que  le  chapiteau 
tout  seul  et  non  la  colonne,  laquelle  sans  doute  dérive  simplement  du  pi- 
lier quadrangulaire.  «  11  est  possible  que,  les  jours  de  fêtes,  on  ait  entouré 
de  branchages  et  de  fleurs  les  soutiens  de  bois  et  de  pierre  qui  portaient  le 
plafond  des  portiques...  Par  le  bas  et  par  le  haut,  lotus  et  papyrus  ve- 
naient s'attacher  au  pilier  qu'ils  tapissaient.  Les  feuilles  radicales  traî- 
naient à  terre  au  pied  du  fût,  tandis  que  les  feuilles  terminales  et  les 
fleurs  s'étalaient  en  corbeilles  sous  l'architrave; elles  élargissaient  le  cha- 
piteau, quand  il  en  existait  un;  elles  suppléaient  à  son  absence,  lorsqu'il 
faisait  défaut...  Pourquoi  l'architecte,  quand  il  éprouva  le  désir  d'em- 
bellir et  d'orner  sa  colonne  de  pierre,  ne  se  serait-il  pas  inspiré  de  ce  dé- 
cor '  ?  »  La  conjecture  est  assurément  séduisante  et  ne  manque  pas  de 
vraisemblance  ;  mais  n'est-il  pas  encore  plus  sage  de  dire  que  a  dans  les 
lointains  de  ce  passé,  entreprendre  de  suivre  l'obscure  genèse  de  chaque 
forme  d'art,  ce  serait  risquer  de  perdre  bien  du  temps  en  conjectures 
douteuses  ?»—  Ce  vaste  chapitre  de  l'architecture,  si  instructif  et  si  plein, 
ne  nous  paraît  avoir  qu'un  léger  défaut  ;  c'est  qu'il  empiète  parfois  sur 
celui  de  la  sculpture.  Je  sais  bien  que  c'eût  été  donner  une  idée  incom- 
plète de  la  tombe  et  du  temple  que  de  passer  sous  silence  les  statues  et 
les  bas-reliefs  qui  y  étaient  enfermés  ;  mais  ne  pouvait-on  se  borner  à 
les  indiquer  et  en  réserver  pour  plus  tard  la  description?  Il  est  nécessaire, 
en  effet,  d'y  revenir,  de  les  rappeler  au  lecteur  qui  n'en  a  plus  qu'un  sou- 

; -'A^ggJLlU .iiajscijsjiup 

i.  Pag.  584. 

M  ub  sba  Î83  sbiminYq  *l  sup  (sos 
ilqma  abbtemq  aal  mstoè  afai/p  s,  ,iJsM-,ïffc*  377 

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lOÔ  REVUE   CRITIQUB 

venir  éloigné;  ce  qui  entraîne,  au  chapitre  de  la  sculpture,  des  redites 
ou  des  renvois  peu  commodes  '. 

La  part,  même  ainsi  limitée,  faite  à  la  sculpture,  est  encore  assez 
large  pour  en  mettre  en  relief  tous  les  caractères  essentiels.  Quant  à  la 
statuaire,  il  y  avait  à  distinguer  entre  les  statues  privées,  les  effigies  roya- 
les et  les  images  divines.  Les  premières,  sous  l'Ancien  Empire,  sont  de 
véritables  portraits,  saisissants  d'expression  et  de  réalité  :  Râ-Hotep  et 
Nefert  (planche  IX)  sont  des  personnages  vivants.  Dans  cet  art  que  l'on 
a  cru  longtemps  un  art  de  convention,  la  ressemblance  individuelle,  dès 
une  haute  antiquité,  a  été  poursuivie  et  saisie  par  les  artistes.  Gomment 
ne  comprendrait-on  pas  mieux  cette  qualité  de  la  statuaire  de  l'Ancien 
Empire,  quand  elle  nous  est  présentée  comme  une  conséquence  des 
croyances  funèbres  des  Egyptiens?  Il  fallait  au  double,  au  fantôme  qui 
survit  à  la  mort,  un  appui  matériel,  un  corps  de  pierre  qui  remplaçât  le 
corps  de  chair  :  ce  corps  nouveau  devait  reproduire  fidèlement,  minu- 
tieusement, tous  les  traits  de  son  modèle;  autrement,  il  n'eût  pas  rempli 
l'office  qu'on  attendait  de  lui.  C'est  à  cette  croyance  que  nous  devons 
les  chefs-d'œuvre  de  la  sculpture  égyptienne.  Les  effigies  des  rois,  avant 
le  règne  des  conventions,  sont  également  des  portraits.  Les  images  de 
Chéphren  sont  très  différentes  de  celles  de  ses  successeurs,  et  Améno- 
phis  III  ne  ressemble  guère  à  Aménophis  IV.  Il  faut  aller  voir  au  Lou- 
vre ce  triste  personnage  2  pour  comprendre  comment  la  fidélité  de  l'imi- 
tation devait  être  une  loi  qui  s'imposait  aux  artistes.  Mais  cette  fidélité, 
il  n'était  pas  toujours  facile  d'y  atteindre  :  beaucoup  de  ces  statues  roya- 
les devaient,  en  effet,  être  taillées  dans  le  granit,  dans  le  basalte  ou  dans 
la  diorite.  Après  M.  Soldi 3,  MM.  P.  et  G.  ont  montré  comment  l'em- 
ploi des  roches  dures  et  l'imperfection  des  outils  ont  été  pour  la  statuaire 
égyptienne  des  causes  nécessaires  d^nfériorité.  Ils  nous  expliquent  éga- 
lement les  raisons  diverses  qui  ont  fait  que  les  images  divines  ont  moins 
bien  inspiré  les  artistes  égyptiens  que  les  portraits  privés  et  les  effigies 
des  rois.  Une  de  ces  raisons,  c'est  l'usage  adopté  de  mêler,  dans  les  re- 
présentations des  dieux,  les  formes  animales  aux  formes  humaines.  Gé- 
néralement, on  explique  ce  fait  en  disant  que  les  caractères  spécifiques 
de  l'animal  étaient  un  procédé  commode  pour  distinguer  les  uns  des  au- 
tres les  personnages  multiples  du  panthéon  égyptien.  M.  P.  en  cher- 
che, plus  justement,  la  raison  dans  ce  culte  fétichiste  des  animaux  qui  a 
dû  être  la  plus  ancienne  religion  de  l'Egypte  où  il  a  toujours  eu  de  pro- 
fondes racines  dans  les  croyances  populaires. 

i.  Pages  698-699,  on  ne  trouve  pas  moins  de  seize  renvois  à  des  figures  déjà  don- 
nées et  précédemment  décrites.  On  eût  aimé  d'en  avoir  ici  quelques-unes  en  regard 
du  texte. 

2.  Cf.  la  notice  consacrée  par  M.  Maspero  à  la  statuette  d' Aménophis  IV,  dans  la 
3e  livraison  des  Monuments  de  l'art  antique  publiés  sous  la  direction  de  M.  Rayet. 

3.  La  Sculpture  égyptienne  (Paris,  Leroux,  1876).  Cf.  Rev.  critique,  n°  du  4  no- 
vembre 1876. 


>   d'histoire  et  de  littérature  107 

En  Egypte,  le  peintre  n'est  qu'un  artisan  chargé  d'étendre  la  cou- 
leur par  tons  entiers  et  plats,  dans  le  champ  que  lui  a  tracé  le  dessina- 
teur. La  peinture  égyptienne  ne  pouvait  donc  fournir  matière  à  de  longs 
développements.  On  s'étonnera  cependant  de  ne  pas  trouver  ici  un  plus 
grand  nombre  de  planches  en  couleur.  Les  planches  XIII  et  XIV,  où  l'on 
est  revenu  avec  succès  au  procédé  de  Vaqua  tinta,  sont,  il  est  vrai,  deux 
brillants  spécimens  de  l'ornementation  polychrome  de  l'Ancien  Empire. 
Mais,  pour  la  figure,  les  planches  font  défaut.  Cette  lacune  tient  à  un 
scrupule  des  auteurs  qui,  manquant  d'études  faites  pour  eux  sur  les  ori- 
ginaux, n'ont  pas. voulu  emprunter  à  Champollion,  à  Lepsius  ou  à 
Prisse  des  copies  dont  ils  n'auraient  pu  garantir  la  complète  fidélité.  La 
raison  est  excellente,  mais  il  est  permis  de  regretter  que  les  mêmes  ar- 
tistes qui  ont  relevé  sur  place  les  tons  du  tombeau  de  Phtah-Hotep, 
n'aient  pas  fait  cela  pour  d'autres  monuments. 

Cette  observation  nous  amène  à  dire  quelques  mots  des  gravures  qui, 
dans  ce  livre,  sont  autre  chose  encore  et  mieux  qu'un  ornement.  Les 
figures  sont  comme  les  documents  d'une  histoire  de  l'art  :  il  importe 
avant  tout  que  ces  documents  soient  transcrits  exactement.  Les  auteurs 
et  les  éditeurs  n'ont  épargné  aucun  soin  pour  cet  objet.  On  trouvera 
dans  ce  premier  volume  un  grand  nombre  de  monuments  inédits,  qui 
ont  été  dessinés  au  musée  de  Boulaq  par  deux  artistes  envoyés  tout  ex- 
près en  Egypte;  un  autre  artiste  a  été  chargé  de  reproduire  les  monu- 
ments les  plus  importants  du  Louvre.  Bien  qu'il  y  ait  dans  ce  volume 
plusieurs  belles  planches,  il  faut  louer  les  auteurs  d'avoir  préféré  au  luxe 
qui  éblouit  l'exactitude  qui  instruit  ',  à  la  magnificence  la  sincérité,  qui 
est  la  première  qualité  de  toute  reproduction  artistique.  C'est  à  ce  be- 
soin d'exactitude  que  répondent  les  nombreuses  gravures  sur  zinc  et  sur 
bois,  placées  en  regard  du  texte  qu'elles  éclairent  et  qui  en  est,  à  son 
tour,  le  perpétuel  commentaire.  L'ensemble  de  cette  illustration  fait 
grand  honneur  à  la  direction  générale  de  l'œuvre  et  aux- artistes  qui  ont 
prêté  leur  concours  à  M.  Chipiez.  On  s'assurera  facilement  de  leur  mé- 
rite, en  comparant  les  figures  qu'ils  ont  exécutées  à  celles  qui,  dans  le 
bel  ouvrage  d'Ebers,  représentent  les  mêmes  monuments  \ 

Sous  tous  les  rapports,  cette  histoire  de  l'art  égyptien  est  donc  de  na- 
ture à  satisfaire  la  critique.  Seuls,  les  esprits  rigoureux  y  découvriront 
quelques  longueurs  3.  Mais  ce  livre  n'a  pas  été  écrit  uniquement  pour 


1.  Pourquoi  seulement  la  lithochromie  a-t-elle  donné  une  teinte  uniforme  au 
Scribe  accroupi  (pi.  X)  sans  tenir  compte  du  caleçon,  qui  se  détache  en  blanc  sur  le 
brun  roux  du  corps? 

2.  Comparez,  par  exemple,  la  statue  de  Chéphren  (Perrot,  p.  678;  Ebers,  I,  p.  172 
de  la  traduction  française),  le  Scribe  (Perrot,  pi.  X;  Ebers,  I,  p.  i53),  le  cheik-el-be- 
led  (Perrot,  p.  11  ;  Ebers,  II,  p.  5i).  Les  gravures  de  l'ouvrage  d'Ebers,  d'ailleurs  si 
remarquable  au  point  de  vue  pittoresque,  sont  poussées  au  noir  d'une  façon  désa- 
gréable. 

3.  Ces  longueurs,  dont  on  ose  à  peine  faire  une  critique,  puisqu'elles  se  rattachent 


108  REVUE   CRITIQUE 

eux.  La  plupart  des  lecteurs  auxquels  il  s'adresse  ne  se  plaindront  pas, 
au  contraire,  de  ces  larges  développements  qui  ont  l'avantage  de  mettre 
les  idées  dans  tout  leur  jour;  ils  ne  résisteront  pas  à  l'attrait  de  cette  fa- 
cile et  lumineuse  exposition,  qui  sait  être  précise  quand  il  le  faut,  mais 
qui,  le  plus  souvent,  se  déroule  avec  l'ampleur  et  l'abondance  d'un 
fleuve  puissant.  Ce  premier  volume  annonce  et  promet  une  œuvre  ca- 
pitale. Personne  n'a  été  surpris  d'apprendre  qu'il  paraît  à  Leipzig  l  une 
traduction  allemande  de  l'Histoire  de  l'art  dans  V antiquité.  Le  succès 
de  l'ouvrage  est  désormais  assuré  à  l'étranger.  Ce  succès  devra  être  en- 
core plus  grand  chez  nous  où,  mieux  que  partout  ailleurs,  on  apprécie 
les  œuvres  qui,  à  la  solidité  indiscutable  de  la  science,  joignent  des  qua- 
lités maîtresses  d'ordre,  de  méthode  et  de  goût,  et  qui  sont  douées,  en 
outre,  de  ce  charme  souverain  du  style,  qui  semble  n'être  d'ailleurs  que 
la  parure  indispensable  d'une  histoire  de  l'art.  Tout  le  monde  fera  donc 
des  vœux  pour  l'heureux  et  régulier  achèvement  de  cette  grande  entre- 
prise, destinée  à  servir  avec  éclat,  en  tout  pays,  les  intérêts  de  la  science. 

P.  Decharme. 


157.  —  J.-N.  Madvig.   Oie  Verfassang  and  Verwaltung  des  rœmisclien 

stnats  (traduit  du  danois).  Tome  I,  Leipzig,  Teubner.  1881,  in-8°  de  xiv-5o,6  p. 
Prix  :  12  mark. 

On  ne  saurait  parler  du  livre  de  M.  Madvig  qu'avec  un  sentiment  de 
profond  respect.  C'est  presque  l'œuvre  la  plus  considérable  d'un  des 
hommes  de  notre  siècle  qui  ont  le  plus  aimé  et  le  mieux  connu  le 
monde  romain.  A  l'âge  de  vingt  ans,  il  promettait  de  consacrer  à  l'anti- 
quité sa  vie  tout  entière,  et  il  a  tenu  parole  :  ni  les  devoirs  de  l'ensei- 
gnement, ni  de  hautes  fonctions  administratives  ne  l'ont  détourné  un  ins- 
tant de  ses  chères  études.  Malade,  âgé  de  quatre-vingts  ans,  aveugle,  il 
les  continue  avec  la  même  ardeur,  la  même  tranquillité  d'âme,  aidé  par 
ses  enfants,  qui  sont  pour  lui  des  secrétaires  admirables  de  dévouement. 

M.  M.  a  d'abord  été,  il  est  encore  avant  tout  un  philologue.  Ce- 
pendant, l'histoire  des  institutions  romaines  l'a  attiré  de  très  bonne  heure. 
Son  travail  sur  la  condition  des  colonies  2  demeure  le  fondement  de  toute 
étude  sur  les  origines  du  droit  municipal  romain.  On  connaît  ses  aper- 
çus sur  les  constitutions  politiques  de  l'antiquité  3.  Ces  dernières  années, 
il  s'est  occupé  des  institutions  militaires  de  la  république  i.  Enfin  ses 

à  la  manière  propre  de  l'auteur,  sont  surtout  sensibles  dans  les  développements 
relatifs  à  la  tombe  du  Nouvel  Empire. 

1.  A  la  librairie  Brockhaus. 

2.  De  jure  et  conditione  coloniarum  popuîi  romani  (Opuscula  philologica,  I  (1834), 
p.  208). 

3.  Blick  auf  die  Staatsverfassungen  des  Altertums,  1840. 

4.  Die  Befehlshaber  und  das  Avancement  in  dem  rœmischen  Ileere  (Kleine  phil. 
Sclir.,  Leipzig,  1875);  Remarques  sur  quelques  officiers  appelés  praefecti  dans  les  der- 
niers temps  de  la  rép.  rom.  (Revue  de  philologie,  1878). 


I  icq/jlq  bJL  i>, . 
dh.stouœ  kx  de  littérature  ^  109 

Opuscula  philologica  et  ses  Emendationes  Livianae  sont  remplis  d'ob- 
servations sur  des  points  de  détail,  qui  ont  un  prix  infini  pour  la  con- 
naissance de  l'histoire.  En  publiant  un  manuel  des  institutions  romai- 
nes, M.  M.  est  donc  sur  un  domaine  qui  lui  appartient  :  son  livre  est  le 
résumé  de  recherches  et  de  réflexions  continuées  pendant  cinquante  ans 
de  lectures  sans  relâche  et  de  critique  ininterrompue.       (  9§bivjw>*|  sb 

II.  est  visible  toutefois  que  ce  livre  s'adresse  plus  particulièrement  aux 
philologues.  Il  nous  offre  le  tableau  complet  de.l'administration  romaine  : 
mais  ce  tableau  est  avant  tout  destiné  à  faciliter  l'intelligence  des  textes 
classiques,  la  lecture  des  historiens  et  des  écrivains  de  l'antiquité.  Ce  li- 
vre n'est  point  né,  dit  l'auteur  dans  sa  préface  (p.  iv),  du  désir  conçu  un 
beau  jour  d'écrire  un  traité  sur  la  constitution  de  Rome  :  il  a  son  origine 
dans  la  pratique  assidue  des  littératures  anciennes,  dans  le  besoin  de  ré- 
pandre un  peu  de  lumière  sur  le  monde  qu'elles  décrivent.  Aussi,  la  par- 
tie essentielle  de  l'ouvrage  est  l'histoire  politique  de  la  Rome  consulaire. 
M.  M.  ne  traite  la  période  monarchique  que  pendant  le  temps  où  les 
lettres  conservent  les  vieilles  traditions,  où  l'Etat  maintient   les  formes 
républicaines.  Pour  tout  ce  qui  concerne  le  troisième  et  le  quatrième  siè- 
cle, il  ne  nous  donne  qu'un  résumé  des  plus  rapides  :  car  le  monde  anti- 
que, ses  institutions  comme  sa  littérature,  finit  après  les  Antonins  (p^f  28). 
Dès  le   111e  siècle,   nous    sommes  en  présence   de  principes  nouveaux, 
diamétralement  opposés  à  ceux  dont  avait  jusque-là  vécu  le  droit  romain. 
M.  M.  s'est  fidèlement  tenu  en  deçà  des  limites  qu'il  s'était  tracées  et  qui 
convenaient  si  bien  au  but  immédiat  de  son  ouvrage.  Il  est  permis  de  le 
regretter.  Sans  doute  le  monde  où  vécurent  et  écrivirent  Ammien  Mar- 
cellin,  Symmaque,  Oaudien,  s'éloigne  étrangement  de  celui  de  César  et 
de  Tite-Live  :  mais  il  n'en  diffère  pas  plus  que  le  siècle  d'Auguste  ne 
diffère  de  la  période  royale  et  du  temps  des  décemvirs;  c'est  encore   un 
monde  romain,  il  y  a  encore  une  littérature  romaine.  Les  consuls  ne 
ressemblent  guère  à  ceux  de  l'ancienne  Rome,  mais  il  n'y  a  dans  les 
pouvoirs  des  uns  et  des  autres  qu'une  différence  de  degré  et  non  de  na- 
ture :   ils  jouissent  encore   au    iv«  siècle  de  ce  droit   d'affranchir,  de 
cette  juridiction  volontaire,  qui  avait  été  le  privilège  des  magistratures 
suprêmes.  Il  y  a  encore,  au  temps  de  Théodose,  des  préteurs  chargés  à 
Rome  de  la  nomination  des  tuteurs  comme  il  y  en  avait  sous  les  Anto- 
nins. Le  caractère  antique  de  toutes  les  magistratures,  de  tous  les  pou- 
voirs, se  conserva  toujours  avec  cette  merveilleuse  persistance  qui  fait 
que  la  tradition  se  continue  encore  à  la  fin  du  iv°  siècle,  qui  fait  que, 
malgré  tout,  de  Romulus  à  Constantin,  l'histoire  romaine  a  son  unité. 
Si  les  préoccupations  de  M.  M.,  si  ses  habitudes  scientifiques  l'ont 
amené  à  trop  restreindre  le  cadre  de  son  étude,  à  sacrifier  quelques  dé- 
tails d'administration  et  de  droit  public,  il  faut  dire  que  son  livre  leur 
doit  d'être  composé  avec  une  méthode  d'une  irréprochable  perfection. 
Avant  tout,  M.  M.  a  voulu  que  son  ouvrage  fût  le  résumé  de  tout  ce 
que  la  lecture  des  écrivains  anciens  nous  autorise  à  affirmer  sur  la  cons- 


I  10  RKVUK    CUITIQUfe. 

titution  romaine;  11  a  cherché  à  concilier  les  écrivains  qui  se  combat- 
tent, mais  dont  les  témoignages  ne  sont  pas  contradictoires  :  ceux  qu'il 
est  impossible  d'accorder,  il  les  cite  côte  à  côte,  et  refuse  absolument  de 
se  prononcer.  Bien  des  questions,  dans  le  droit  public  romain,  n'offrent 
pas  de  solution  certaine,  et  peut-être  même  sont  à  jamais  insolubles. 
M.  M.  ne  comble  jamais  les  lacunes  à  l'aide  d'hypothèses.  11  se  borne  à 
dire  :  Voilà  ce  que  les  écrivains  naus  apprennent  :  au-delà,  nous  ne  sa- 
vons rien.  Peu  de  livres'ont  un  pareil  caractère  de  modestie  et  de  sincé- 
rité. 

M.  M.,  fait  un  usage  constant  des  inscriptions  :  il  rend  souvent 
hommage  aux  admirables  efforts  et  aux  merveilleux  résultats  de  la 
science  épigraphique  de  notre  siècle.  On  sent  bien  toutefois  que  le  point 
de  départ  de  ses  recherches  pour  toutes  les  questions,  même  pour  l'ad- 
ministration impériale,  est  la  lecture  et  l'explication  des  textes  écrits. 
L'épigraphie  (à  part  les  grandes  inscriptions  juridiques)  nous  fait  con- 
naître surtout  un  mécanisme  administratif.  Mais  il  importe  aussi  de 
savoir  ce  que  les  contemporains  ont  pensé  de  ces  institutions,  l'idée 
qu'ils  se  sont  faite  du  régime  sous  lequel  ils  vivaient  :  ce  que  nous  ne 
trouvons  que  dans  la  littérature.  En  somme,  la  méthode  de  M.  M.  si  on 
la  compare  à  «celle  des  savants  allemands,  est  moins  objective  que 
subjective  ;  elle  se  rapproche  davantage  de  celle  dont  nous  trouvons 
l'emploi  le  plus  complet  et  le  plus  judicieux  dans  les  Institutions  politi- 
ques de  M.  Fustel  de  Coulanges.  Il  en  résulte  que  M.  M.  évite  avec  le 
plus  grand  soin  toute  vue  d'ensemble  sur  l'administration  romaine  qui 
ne  se  trouve  pas  nettement  formulée  dans  les  écrivains  de  l'antiquité. 
Sans  cette  précaution,  on  court  inévitablement  le  risque  d'élever  de 
fantaisistes  constructions,  d'imaginer  des  théories  diamétralement  op- 
posées aux  idées  du  monde  ancien.  Avec  elle  on  renonce  aux  ingénieu- 
ses fictions,  à  ces  hypothèses  hardies  qui,  il  iaut  bien  le  dire,  permettent 
quelquefois  d'atteindre  d'un  seul  coup  la  vérité  tout  entière.  On  ne  trou- 
vera ni  les  unes  ni  les  autres  dans  le  livre  de  M.  M.,  et  il  serait  fâché  lui- 
même  qu'elles  y  fussent;  mais  on  peut  être  assuré  avec  ce  guide  infailli- 
ble, de  ne  s'écarter  jamais  de  la  certitude. 

Ce  que  M.  M.  reproche  surtout  au  Droit  public  de  M.  Mommsen, 
c'est  de  faire  dériver  les  institutions  romaines  de  concepts  a  priori,  de 
principes  bizarres  ■  qu'il  substitue  aux  sentiments,  aux  pensées  des 
Romains  eux-mêmes.  Malgré  cette  accusation  formelle,  il  est  impossible 
de  regarder  l'ouvrage  de  M.  M.  comme  la  réfutation  continuelle  et 
voulue  du  traité  de  M.  Mommsen.  Que  les  deux  livres,  surtout  pour  ce 
qui  concerne  l'empire,  se  combattent,  .non-seulement  dans,  l'idée  géné- 
rale, mais  encore  dans  les  plus  petites  questions  de  détail,  cela  est 
certain.  Mais  c'est  avant  tout  le  résultat  de  points  de  départ  opposés  et 


i.  Collégialité,  Dyarchie.   Voyez  en  particulier    Staatsrecht,    II  (*•   éd.)..    pp.   725 
et  io36. 


DHISIOlHhKI     DK    LUTKRaIUUK  III 

de  méthodes  différentes.  C'est  n'avoir  ni  justice  scientifique,  ni  respect 
moral,  que  de  douter  des  nobles  paroles  par  lesquelles  M.  M.  va  au- 
devant  de  cette  accusation  :  «.Beaucoup  croiront,  dit-il,  que  j'ai  voulu, 
de  parti-pris,  rabaisser  le  mérite  de  la  science  allemande;  ce  n'est 'point 
par  des  mots  que  je  puis  écarter  ce  reproche.  J'ai  toujours  eu  pour  cette 
science  une  admiration  ardente,  quoique  réfléchie  :  j'ai  toujours  été  en 
même  temps  le  zélé  défenseur  du  droit  et  de  l'honneur  de  ma  patrie; 
mais,  dans  les  choses  de  science,  je  ne  pense  pas  à  la  nationalité,  mais  à 
la  vérité.  »  Il  ne  nous  appartient  pas  de  commenter  les  paroles  et  les  sen- 
timents de  M.  Madvig. 

La  méthode  de  M.  M.  se  retrouve  enfin  dans  la  composition  de  son 
livre.  Quand  on  renonce  à  toute  construction  a  priori,  il  n'y  a  qu'un 
seul  ordre  à  suivre  pour  parler  des  institutions  d'un  peuple  :  l'ordre 
dans  lequel  elles  se  sont  produites.  C'est  le  seul,  en  effet,  qui  préserve  de 
l'arbitraire:  c'est,  dans  un  livre  de  caractère  aussi  théorique,  d'apparence 
aussi  abstraite  que  doit  l'être  un  manuel  de  droit  public,  c'est  le  seul 
ordre  qui  permette  d'étudier,  à  côté  de  l'essence  et  du  principe  des 
institutions,  leur  origine  et  leur  développement  véritables,  qui  permette 
surtout  de  rattacher  leur  histoire  à  l'histoire  générale  des  faits  et  de  la 
civilisation.  Commencer  une  étude  sur  la  constitution  romaine  par  des 
recherches  sur  les  magistratures,  sans  parler  du  peuple  et  du  sénat,  c'est 
réserver  pour  la  fin  ce  qui  est  à  la  fois  le  commencement  chronologique 
et  le  fondement  légal  de  cette  constitution.  On  sait  que  le  premier  vo- 
lume des  Antiquités  romaines  de  MM.  Mommsen  et  Marquardt,  contre 
lesquels  M.  M.  dirige  ce  reproche,  traite  de  l'essence  des  magistratures, 
le  second,  des  fonctions  des  différents  magistrats  :  le  troisième  sera 
consacré  au  peuple  et  au  sénat.  Le  livre  de  M.  M.  (et  c'est  ce  qui  lui 
donne  sur  l'ouvrage  allemand,  une  incomparable  supériorité  de  compo- 
sition et  d'intérêt  historique),  commence  '  par  la  définition  du  citoyen 
romain,  par  l'étude  des  droits  et  des  devoirs  qui  s'attachent  à  ce  titre, 
des  conditions  de  ceux  qui  en  sont  privés,  de  la  manière  dont  il  s'obtient 
(ch.  i)  ;  M.  M.  examine  ensuite  les  différentes  classes  entre  lesquelles  se 
divise  le  corps  des  citoyens  romains,  et,  en  particulier,  les  classes  des 
privilégiés,  patriciens,  sénateurs,  nobles,  chevaliers,  tribuni  aerarii 
(ch.  n)  ;  puis  vient  l'étude  de  ce  corps  réuni  en  assemblées  politiques  et 
veillant  aux  destinées  de  la  nation,  du  fonctionnement  de  ces  diverses 
assemblées,  comices  curiates,  centuriates,  comices  par  tribus,  des  dispo- 
sitions enfin  qui  y  étaient  prises  (ch.  m);  M.  M.  passe  ensuite  aux  diffé- 
rents pouvoirs  chargés  du  gouvernement  de  l'Etat,  le  sénat  d'abord 


i.  Le  livre  est  précédé  d'une  courte  introduction  sur  l'histoire  générale  de  Rome, 
sur  la  littérature,  les  mœurs,  la  politique  romaines,  sur  la  topographie  de  la  ville. 
D'ordinaire,  tous  les  chapitres  commencent  par  un  aperçu  des  sources  :  par  exem- 
ple, le  chapitre  sur  les  magistratures,  par  un  examen  des  principaux  traités  que  les 
Romains  ont  écrits  sur  la  question.  On  ne  saurai.!  trop  remercier  M.  M.  de  cette 
innovation. 


I  12  KKVLJK    CRIT1QUK 

(ch.  iv),  puis  la  royauté  et  les  magistratures  (ch.  v),  enfin  l'empire  (ch.  vi). 
Le  premier  volume  se  termine  par  un  tableau  de  l'administration  du 
bas  empire  tel  que  le  présente  la  Notifia  dignitatum. 

Il  est  impossible  d'entrer,  à  propos  de  ce  livre,  dans  une  critique  de 
détail.  Il  y  échappe,  non-seulement  par  sa  nature  de  manuel,  mais  encore 
et  surtout  par  la  méthode  de  l'auteur,  qui,  s'arrétant  là  où  commencent 
l'incertitude  et  l'hypothèse,  ne  s'écarte  jamais  de  la  stricte  vérité.  Il  y  a 
évidemment  un  nombre  considérable  de  questions  qui  ont  prêté  et  qui 
prêteront  encore  à  d'éternelles  discussions,  et  sur  lesquelles  les  adversai- 
res de  M.  M.  ne  céderont  probablement  pas  '.  Il  est  parfaitement  inutile 
de  juger  entre  eux  et  lui,  d'autant  plus  que  M.  M.  se  borne  à  émettre 
son  opinion,  et  se  refuse  absolument  à  discuter,  ce  qui  aurait  en  effet 
dénaturé  le  caractère  de  son  manuel  \  D'autres  questions,  dans  le  livre 
de  M.  M.,  sont  fortement  écourtées  :  mais  il  n'y  a  pas,  à  proprement 
parler,  des  lacunes  3.  Cependant  l'excès  de  la  concision  entraîne  quel- 
quefois l'auteur  à  donner  le  change  sur  sa  véritable  pensée  :  il  dit,  par 
exemple,  que  les  fonctionnaires  étaient  divisés,  dans  le  bas  empire,  en 
cinq  classes,  illustres,  spectabiles,  clarissimi,  perfectissimi,  egregii\ 
L'expression  trahit  évidemment  M.  Madvig.  Le  titre  de  clarissimus  ne 
désigne  pas  une  certaine  classe  de  fonctionnaires  :  il  est  héréditaire 
comme  la  classe  qu'il  caractérise,  noblesse  de  sang  entièrement  différente 
de  la  noblesse,  purement  temporaire  et  hiérarchique,  des  spectabiles  et 
des  illustres. 

Il  est  cependant  une  partie  du  livre  de  M.  M.  sur  laquelle  il  importe 

i.  M.  M.  n'admet  pas  qu'il  y  ait  eu  de  différence  entre  les  droits  des  anciens 
Latins  et  le  jus  Latii  tel  que  le  définissent  Asconius,  Strabon,  Cicéron,  Oppien 
(pp.  64-65);  cf.  au  contraire  Marquardt,  Staatsr.,  I  (188 1),  p.  55.  La  loi  de  Malaca 
est  pour  lui  la  loi  d'une  cité'  romaine,  et  non  latine  (p.  65),  contre  Mommsen, 
[Staatsreclit,  pp.  363  sqq.).  En  revanche,  Novum  Comum  reçut  de  César  une  colonie 
latine  (p.  3o),  cf.  Mommsen,  Corp.  Inscr.  Lat.,  V,  p.  565,  Imperium  n'a  jamais 
désigné  que  l'autorité  supérieure  (p.  345).  cf.  Mommsen,  Staatsreclit,  I  (1876),  p.  24. 

II  n'y  eut  jamais  qu'un  seul  empereur  souverain  [pontife  jusque  vers  le  milieu  du 
m*  siècle,  dit  M.  Mommsen,  Str.,  II  (1877),  p.  io53  :  quand  il  y  avait  deux  empe- 
reurs, il  y  avait  aussi  deux  pontijîces  maximi,  dit  M.  Madvig  (p.  540).  Ces  quelques 
exemples  sont  pris  au  hasard  entre  mille.  Cf.  encore  la  question  des  comices  curia- 
tes,  p.  224,  du  rapport  des  préteurs  avec  les  quaestiones perpetuae,  pp.  388-3go,  etc. 

2.  M.  M.  ne  se  départit  guère  qu'une  fois  de  sa  réserve  :  c'est  au  sujet  de  la 
civitas  sine  suffragio.  La  cité  sans  suffrage  n'est  pas  du  tout  une  récompense,  un 
privilège  donné  aux  villes,  comme  l'a  dit  Aulu-Gelle  (16,  i3)  :  c'est  au  contraire  la 
forme  la  plus  étroite  de  la  soumission.  M.  M.  reprend,  en  la  développant  et  en  lui 
donnant  une  précision  plus  grande,  la  thèse  qu'il  avait  soutenue  dans  ses  Opuscula 
philologica  (I,  p,  3(38).  Il  est  certainement  dans  le  vrai  contre  Zumpt.  De  propaga- 
tione  civitatis  romanae  {Studia  romana,  p.  366). 

3.  En  particulier,  sur  la  juridiction  consulaire,  sous  l'empire,  p.  37g;  sur  celle 
des  préteurs,  p.  592,  des  tribuns,  p.  479,  sur  les  curae  et  les  triumvirs  deducendis 
coloniis,  pp.  5o3-5o6,  sur  les  chevaliers  du  temps  de  l'empire,  pp.  179-180. 

4.  P.  590.  Voyez  les  inscriptions  C.  I.  L.,  V,  1730,  1732,  1188,  1189,  1190; 
Orelli,  11 54;  C.  Théod.,  11,  1,6. 


d'histOirk   ET   DR   LITTERATURB  ii3 

de  s'arrêter  plus  longtemps,  à  cause  de  la  curiosité  extrême  qu'elle  a 
éveillée  et  de  la  polémique  qu'elle  suscitera  :  c1est  celle  où  il  expose  ses 
idées  sur  le  pouvoir  impérial.  Si  Ton  ne  regarde  que  l'expression,  elles 
sont  diamétralement  opposées  à  celles  qui  régnent  aujourd'hui  dans  la 
science  allemande  et  que  M.  Mommsen  exposait  si  nettement,  en  1875, 
dans  les  premières  pages  de  son  volume  sur  le  principat  '.  «  Le  nouveau 
régime,  disait-il,  ne  peut,  dans  le  droit  public,  être  désigné  comme  une 
monarchie,  pas  même  comme  une  monarchie  limitée.  Le  mot  qui 
exprimerait  de  la  façon  la  plus  juste  l'essence  de  cette  merveilleuse  insti- 
tution est  celui  de  dyarchie,  c'est-à-dire  le  partage  de  la  souveraineté, 
fait  une  fois  pour  toutes,  entre  le  sénat  d'une  part,  et  le  prince  de  l'autre, 
ce  dernier  comme  homme  de  confiance  de  l'assemblée...  La  souveraineté 
d'Auguste  ne  s'est  point  présentée  comme  mettant  fin  à  la  constitution 
républicaine,  comme  s'opposant  à  elle,  mais  bien  plutôt  comme  la  réa- 
lisation de  cet  état  de  choses  et  l'opposé  du  gouvernement  exceptionnel 
qui  depuis  vingt-deux  ans  en  suspendait  le  fonctionnement  régulier.  » 
Voici  quelles  sont,  à  peu  près,  les  paroles  de  M.  Madvig  2  :  «  L'empire 
est  sorti  d'un  régime  que  les  faits  seuls  avaient  fondé  :  il  est  né  de  la 
nécessité  d'une  monarchie  absolue,  que  tous  jugeaient  nécessaire  et  que 
l'habitude  avait  fait  approuver  ;  et  cette  monarchie,  pendant  longtemps, 
se  transmit  comme  telle,  étrangère  à  toute  théorie  constitutionnelle... 
L'empereur  est  à  l'origine  le  citoyen  le  plus  considéré  de  l'Etat,  auquel 
le  peuple  et  le  sénat  ont  conféré  des  pouvoirs  extraordinaires,  et,  en 
particulier,  toute  la  puissance  militaire...  Le  sénat,  avec  les  anciennes 
magistratures,  devait  représenter  l'Etat  :  mais  il  manquait  en  réalité  de 
tout  fondement  indépendant  de  force  et  d'autorité.  » 

M.  Mommsen,  préoccupé  avant  tout  de  retrouver  une  théorie  consti- 
tutionnelle, M.  Madvig,  s'inspirant  des  faits  et  de  la  pensée  des  écrivains, 
ont  abouti  à  deux  définitions  de  l'empire,  qui  semblent  opposées, 
dyarchie  et  monarchie.  Toutefois  la  pensée  de  M.  M.  n'est  pas  aussi 
éloignée  de  celle  de  M.  Mommsen  qu'il  paraît  au  premier  abord. 
Sur  la  question  de  savoir  si  l'empire  a  été  absolu,  en  fait,  dès  l'origine, 
il  est  évident  que  M.  Mommsen  n'a  jamais  eu  d'autre  opinion  que  celle 
de  M.  Madvig.  Le  mot  de  dyarchie  ne  porte  que  sur  le  principe  légal  de 
la  constitution  impériale. Or,  il  ne  serait  pas  difficile  de  prouver  que  l'un 
et  l'autre  sont  d'accord  là-dessus  :  l'empereur,  selon  M.  Madvig  tient  ses 
droits  du  sénat,  qui  lui  a  conféré  successivement  tous  les  pouvoirs  dont 
se  compose  sa  souveraineté  (p.  53o)  ;  pendant  le  règne  de  chaque  prince, 
le  sénat  continue  à  représenter  officiellement  l'Etat,  la  république 
(p.  532),  depuis  que  toute  la  puissance  du  peuple  a  passé  entre  ses 
mains;  le  sénat  a  ses  provinces,  son  trésor,  ses  magistrats;  à  côté  du 
gouvernement  du  prince,  il  y  a  un  gouvernement  du  sénat  (p.  5 61).  Or, 

1.  Staatsrecht,  11(1875),  p.  709=  (1877),  p.  72b. 

2.  I,  pp.  53i-532. 


I  14  REVUE    CRITIQUB 

M.  Mommsen  ne  dit  pas  autre  chose,  et  il  a  raison  avec  M.  Madvig. 
Il  est  certain,  toutefois,  que  l'expression  dedyarchie  peut  prêter  à  des 
malentendus.  Le  mot  de  monarchie  a  sur  lui  au  moins  l'avantage  de 
répondre  aux  idées  et  aux  sentiments  des  écrivains  de  l'empire,  même 
des  contemporains  d'Auguste.  Si  l'on  entend,  en  effet,  par  dyarchie  un 
gouvernement  formé  de  deux  pouvoirs  égaux,  d'origine  différente,  ayant 
chacun  sa  sphère  d'action,  et  indépendants  l'un  de  l'autre,  tel  n'était 
certainement  pas  le  régime  impérial.  Le  mot  est  juste  quand  il  y  a  deux 
empereurs  égaux  en  autorité  par  tout  l'empire,  en  s'en  partageant  les 
provinces.  Mais  ici  les  deux  pouvoirs  entrent,  pour  ainsi  dire,  l'un  dans 
l'autre.  C'est  du  sénat  que  l'empereur  reçoit  ses  pouvoirs,  et  l'empereur 
est  le  président  du  sénat,  surveille  le  recrutement  de  l'assemblée  ;  il  est 
le  maître,  quand  il  le  veut,  des  provinces  dites  sénatoriales,  et  quand  le 
sénat  les  gouverne,  c'est  de  l'empereur  qu'il  les  tient.  Il  y  a  deux  pou- 
voirs, sans  doute,  mais,  le  sénat,  pouvoir  souverain,  abdique  sa  sou- 
veraineté entre  les  mains  de  l'empereur.  En  droit,  par  conséquent, 
comme  en  fait,  il  n'y  a  qu'une  monarchie  :  il  n'y  a  pas  plus  de  dyarchie 
qu'il  n'y  en  avait  lorsque,  sous  la  royauté  ou  la  république,  tous  les 
pouvoirs  étaient  délégués  au  roi  ou  aux  consuls  :  «  L'autorité  impériale 
eut,  dit  M.  Fustel  deCoulanges  ',  la  même  source  et  le  même  principe 
que  l'autorité  des  anciens  consuls.  Comme  eux,  les  empereurs  eurent 
dans  les  mains  cette  puissance  absolue  que  l'esprit  romain  avait  toujours 
accordée  à  la  République.  La  seule  différence  fut  qu'au  lieu  d'être 
partagée  entre  plusieurs  magistrats,  cette  puissance  appartint  tout  entière 
à  un  seul  homme.  Un  chef  unique  remplaça  plusieurs  chefs,  un  seul 
maître  plusieurs  maîtres;  à  cela  près  le  Droit  public  resta  le  même  ». 
Dans  cette  théorie,  les  théories  de  M.  Madvig  et  de  M.  Mommsen  se 

confondent  et  s'accordent 2. 

Camille  Jullian. 


1 58.  —  Frédéric  Godefroy.  Dictionnaire  de  l'ancienne  langue  française 
et  de  tons  ses  dialectes  du  IXe  au  XV*  siècle,  composé  d'après  le  dé- 
pouillement de  tous  les  plus  importants  documents...  publié  sous  les  auspices  du 
ministère  de  l'Instruction  publique.  Paris,  Vieweg,  1880,  gr.  in-40;  Tomel  (iv- 
799  p.  ;  A.  Castaigneux)  et  4  fascicules  du  tome  II  parus  (jusqu'au  mot  Cortoisie). 

L'immense  répertoire  dont  M.  Godefroy  poursuit  la  publication  avec 

1.  Institutions  politiques,  2,  1.  M.  Fustel  croit  que  cette  délégation  de  l'autorité  se 
fit,  dès  le  temps  d'Auguste,  par  un  acte  formel,  une  loi  régulière,  ce  que  ne  croient 
ni  M.  Madvig  (pp.  53o-53i),  ni  M.  Mommsen. 

2.  Nons  nous  permettons  de  relever  quelques  fautes  d'impression  :  p.  60,  1.  22  : 
eiver  pour  einer;  p.  102,  1.  4.  :  Gerchlechtsnamen  pour  Geschlechtsnamen  ;  p.  240, 
1.  2  :  eigentliahe  pour  eigentlicher ;  p.  421,  J  11,  1.  1  :  Aedililtœt  pour  Aedilitaet; 
p.  5o3,  1.  18  :  coustituendae  pour  constituendae  ;  p.  584,  1.  27  :  Diomitian  pour 
Diocletian. 


d'histoire  et  de  LITTÉRATURE  I  I  5 

une  louable  activité  doit  avoir  environ  dix  volumes  ;  il  n'est  donc  pas 
trop  tard,  semble-t-il,  pour  en  parler,  puisque  nous  sommes  à  peine  ar- 
rivés au  milieu  du  tome  II.  Toutefois,  une  œuvre  de  ce  genre  peut  se 
juger  dès  les  premiers  fascicules,  et  déjà  des  jugements  aussi  compétents 
que  longuement  motivés  ont  été  portés  par  les  savants  les  plus  autori- 
sés. Je  fais  allusion  notamment  aux  importants  articles  publiés  par 
MM.  Adolf  Tobler  '  et  Arsène  Darmesteter  2.  Après  le  dernier  surtout, 
dont  je  partage  la  plupart  des  idées,  il  reste  bien  peu  de  chose  à  dire.  Je 
n'ai  donc  qu'à  me  confiner  dans  le  rôle  modeste  de  rapporteur  pour  une 
partie  de  ma  tâche. 

Le  plus  grand  reproche  que  l'on  puisse  faire  à  la  publication  de  M.  G., 
c'est  de  ne  pas  répondre  complètement  au  titre  qu'il  lui  a  donné  de  Dic- 
tionnaire de  l'ancienne  langue  française  du  ixe  au  xve  siècle.  L'au- 
teur a  soin  de  nous  en  prévenir  en  ces  termes  :  «  Dans  le  Dictionnaire 
dont  nous  publions  aujourd'hui  le  premier  fascicule,  nous  ne  présentons 
pas  tous  les  mots  français  qui  ont  été  usités  durant  les  siècles  que  nous 
embrassons...  Nous  nous  sommes  résigné  à  commencer  par  un  frag- 
ment... Ce  fragment  contient  les  mots  de  la  langue  du  moyen-âge  que  la 
langue  moderne  n'a  pas  gardés.  Lorsque  nous  enregistrerons  des  mots 
conservés,  ce  ne  sera  que  pour  certaines  significations  disparues.  Il  suit 
de  là  qu'il  ne  faut  pas  toujours  s'attendre  à  trouver  une  classification  sa- 
tisfaisante du  sens  des  mots  que  nous  citons,  puisque  tel  sens  ancien 
peut  dériver  d'une  signification  encore  aujourd'hui  vivante  que  nous 
supprimons  systématiquement.  » 

M.  G.  avait  conçu  d'abord,  et  en  partie  exécuté,  un  dictionnaire  his- 
torique unique  donnant  à  leur  ordre  alphabétique  tous  les  mots  de  la 
langue  française  à  toutes  les  époques,  et  permettant  ainsi  de  suivre  de 
siècle  en  siècle  le  développement  de  chacun  d'entre  eux  et  pour  le  sens  et 
pour  la  forme.  Des  nécessités  matérielles  l'ont  forcé  à  subdiviser  en  trois 
parties  cette  œuvre  immense,  et  à  publier  successivement  trois  diction- 
naires au  lieu  d'un  :  i°  dictionnaire  des  mots  et  des  sens  disparus  (c'est 
celui  qui  s'imprime  actuellement);  2°  dictionnaire  de  la  langue  moderne, 
conçu  au  point  de  vue  historique;  3*  dictionnaire  de  la  langue  savante. 
Malheureusement  ces  trois  dictionnaires  partiels,  en  en  supposant  la  pu- 
blication achevée,  ne  vaudront  jamais  le  dictionnaire  unique  que  l'au- 
teur nous  avait  fait  espérer.  En  se  résignant  (avec  quels  regrets,  on  le 
devine)  à  modifier  sa  conception  primitive,  M.  Godefroy  n'avait  qu'un 
parti  à  prendre,  ainsi  que  M.  Darmesteter  l'a  lumineusement  démontré  : 
donner  dans  un  premier  dictionnaire  tous  les  mots  connus  de  la  langue 
depuis  les  origines  jusqu'à  la  fin  du  xvie  siècle,  dans  l'autre  tous  les  mots 
employés  depuis  cette  époque  jusqu'à  nos  jours.  Quant  à  la  langue  sa- 
vante, aucune  bonne  raison  ne  justifie  pour  elle  la  constitution  d'un  ré- 


i.  Zeitschriftfùr  romanische  Philologie,  V,  pp.  147-159. 
2.  Romania,  X,  pp.  420-439. 


I  l6  REVUE   CRITIQUE 

pertoire  spécial.  La  distinction  entre  les  mots  savants  et  les  mots  popu- 
laires est  très  réelle,  et  l'on  doit  savoir  gré  aux  vulgarisateurs  comme 
M.  Brachet  d'en  avoir  peu  à  peu  répandu  l'idée  dans  le  grand  public; 
mais  que  de  questions  délicates  peuvent  être  soulevées  à  ce  propos,  dont 
peut-être  M.  G.  lui-même  ne  se  doute  pas!  Que  de  nuances,  que  de  cou- 
ches chronologiques  différentes  peuvent  s'observer  dans  ce  qu'on  croit  a 
priori  être  des  mots  populaires  ou  des  mots  savants!  Miracle  paraîtra 
populaire  à  côté  de  tentacule,  parce  que  l'accent  tonique  y  est  fidèle  au 
latin;  mais  la  comparaison  de  formes  comme  gouvernail,  soupirail,  où 
-aculum  =  ail,  nous  montre  dans  miracle  un  mot  savant  introduit  dans 
la  langue  commune  avant  qu'on  eût  encore  perdu  le  sens  de  l'accent  la- 
tin. Humble  ne  sembie-t-il  pas  de  formation  toute  populaire?  Et  pour- 
tant M.  Gaston  Paris  a  fait  voir  tout  récemment  qu'il  n'en  était  pas 
ainsi.  Il  est  donc  bien  imprudent,  dans  ces  conditions,  de  vouloir  consa- 
crer un  lexique  spécial  à  la  langue  savante,  lorsqu'on  peut  légitimement 
s'épargner  une  tâche  aussi  difficile. 

En  excluant  de  son  dictionnaire  actuel  les  mots  et  les  sens  qui  ont 
survécu,  M.  G.  a  voulu  «  courir  au  plus  pressé  et  donner  la  partie  du 
dictionnaire  qui  pouvait  être  la  plus  utile  aux  étudiants  » .  Cette  raison 
toute  pratique  ne  suffirait  peut-être  pas  à  justifier  une  exclusion  regret- 
table pour  qui  considère  les  choses  à  un  point  de  vue  plus  élevé.  Mais 
dans  la  pratique  même,  le  système  adopté  est  très  défectueux.  Supposez 
les  trois  dictionnaires  publiés.  Un  étudiant  encore  inexpérimenté  trouve 
dans  un  texte  le  mot  tenoire  ;  il  y  a  gros  à  parier  qu'il  n'y  reconnaîtra 
pas  une  forme  dialectale  du  mot  actuel  tonnerre.  Il  cherchera  tenoire 
dans  le  premier  dictionnaire,  il  le  cherchera  dans  le  second,  dans  le  troi- 
sième, et  vraisemblablement  il  ne  le  trouvera  nulle  part. 

J'insiste  sur  ce  vice  de  constitution  du  Dictionnaire,  parce  que  c'est, 
à  mon  sens,  le  reproche  le  plus  grave  qu'on  puisse  lui  faire,  parce  que 
c'est  là  la  source  de  la  plupart  des  inconséquences,  des  bizarreries  dont 
M .  Darmesteter  a  cité  de  nombreux  exemples  et  dont  on  pourrait  facile- 
ment augmenter  la  liste.  Un  examen  minutieux  de  chaque  fascicule  ré- 
vélerait, en  outre,  bien  des  imperfections  de  détail.  Voici,  par  exemple, 
quelques  observations  que  me  suggère  le  dernier  fascicule  paru,  après  une 
lecture  attentive  des  45  premières  pages  seulement. 

Conmeslure,  s,  f.  mélange  :  un  ex.  emprunté  aux  poésies  de  Frois- 
sart;  or  cet  exemple  est  déjà  cité  au  fasc.  i3,  sous  la  forme  comelure  et 
avec  le  sens  de  parure  des  cheveux,  ornement  de  tête.  L'article  conmes- 
lure  est  donc  à  supprimer,  car  il  n'y  a  pas  de  doute  qu'il  faille  lire  et  in- 
terpréter comme  l'a  fait  l'auteur  au  mot  comelure. 

Conobrage,  s.  m.  action  de  reconnaître  :  deux  exemples  empruntés  à 
des  chartes  saintongeaises.  Le  mot  est  assez  étrange;  mais,  en  l'admettant 
pour  authentique  il  faut  le  rattacher  pour  le  sens  à  recouvrer  et  non  à 
reconnaître. 

Conthoral,  s.  f.  épouse  :  un  ex.  de  1406.  Mot  savant,  que  M.  G.  ne 

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P  HISTOIRE   ET    DE    LITTERATURE  117 

.  jiinuq  bnfi  f 

peut  admettre  qu'en  renonçant  à  son  glossaire  spécial  de  la  langue  sa- 
vante. uriBun  si  0   M  aiîè •■ 

Contise,  s.  f.,  recette  :  un  seul  ex.  où  le  mot  est  écrit  quentyse.  Il  fal- 
lait le  fondre  dans  l'article  cointise. 

Conton,  s.  m.,  comte  :  un  seul  ex.  où  ce  mot  rime  avec  anchison  ;  il 
faut  lire  contor  et  anchisor.~nmr) 

Contracter  2.  L'exemple  emprunté  aux  Actes  des  Apôtres  n'est  qu'une 
mauvaise  orthographe  de  contraster. 

Contraignance .  Ce  mot,  comme  ses  congénères,  d'après  l'usage  suivi 
en  pareil  cas  par  l'auteur,  devrait  être  écrit,  en  tête  de  l'article,  constrai- 
gnance,  et  placé  dans  l'ordre  alphabétique  réclamé  par  cette  ortho- 
graphe. 

Contrajeter,  v.  a.  et  contrajetir,  v.  n.  Deux  exemples  empruntés  à  un 
texte  lorrain  publié  par  M.  Bonnardot.  Or  ces  deux  mots  n'en  font 
qu'un  :  la  contraction  de  ier  en  ir  dans  les  dialectes  de  Test  est  un  fait 
bien  connu,  et  il  n'y  a  pas  là  une  différence  de  conjugaison.  En  ou- 
tre,le  texte  auquel  les  exemples  sont  empruntés  maintient  l'a  latin  atone 
dans  beaucoup  de  cas  où  le  français  le  change  en  e.  Il  fallait  donc  faire 
un  article  unique  et  lui  donner  pour  tête  la  forme  normale  contrejetier 
dont  contrajeter  et  contrajetir  ne  sont  que  des  variantes  dialectales. 

Contraval.  Forme  dialectale  pour  contreval,  ne  voulait  pas  un  article 
spécial. 

Contrerimoier,  v.  a.  rimer.  Définition  insuffisante. 

Contresierer.  Forme  wallonne  ;  il  fallait  la  ramener  à  la  forme  nor- 
male contreserer. 

Contretrover.  Un  seul  ex.  qui  fait  le  vers  faux;  il  faut  lire  controver. 

Contwnal.  Trois  ex.  où  l'on  lit  contumaus,  ou  contumaux  ;  ce  sont 
des  imitations  directes  du  latin  contumax;  jamais  la  forme  contumal  n'a 
existé. 

Je  pourrais  poursuivre  jusque  la  fin  du  fascicule,  mais  je  préfère  m'ar- 
rêter.  Dans  l'appréciation  d'un  ouvrage,  on  peut  ne  considérer  que  ce  qu'il 
devrait  être  pour  être  parfait,  et  se  montrer  d'autant  plus  sévère  que  l'ou- 
vrage est  plus  éloigné  de  la  perfection  absolue  :  c'est  cette  idée  élevée  du  rôle 
de  la  critique  qui  a  inspiré  les  fondateurs  de  cette  Revue  et  qui  continue 
à  animer  sçs  collaborateurs.  A  ce  point  de  vue,  le  Dictionnaire  de  M.  G. 
pourrait  justifier  un  jugement  assez  sévère.  Mais  c'est  un  peu  le  cas  de 
dire  :  Summum  jus  summa  injuria.  Devant  une  œuvre  aussi  considéra- 
ble, la  critique  deviendrait  souverainement  injuste  si  elle  ne  tenait 
compte  des  difficultés  d'exécution  que  cette  œuvre  présentait,  de  la  puis- 
sance et  de  l'intensité  de  travail  qu'il  a  fallu  pour  la  mener  à  bonne  fin, 
et  des  services  immenses  que  cette  œuvre,  tout  imparfaite  qu'elle  est,  est 
appelée  à  rendre  à  la  science.  Faire  un  bon  dictionnaire  est  un  idéal  bien 
difficile  à  réaliser.  Littré  semble  y  avoir  réussi  pour  la  langue  moderne  : 
son  œuvre  est  tellement  au-dessus  de  ce  que  nous  avions  jusqu'alors,  qu'on 
a  pu  le  croire  arrivé  du  premier  coup  à  la  perfection.  Qu'il  s'en  faut  ce- 


I  l8  REVUE    CRITIQUE 

pendant!  Quand  le  dictionnaire  préparé  et  annoncé  depuis  longtemps  par 
M.  A.  Darmesteter  aura  enfin  paru,  on  pourra  s'en  rendre  compte  par  une 
comparaison  minutieuse  tout  à  l'avantage  de  ce  dernier.  Combien  plus 
malaisé  était  un  dictionnaire  de  l'ancienne  langue  !  M.  G.  y  a  consacré 
plus  de  trente  ans  de  sa  vie.  Quand  il  a  commencé  ses  dépouillements, 
bien  peu  de  textes  étaient  publiés;  il  y  en  a  davantage  aujourd'hui,  mais 
bien  peu  encore  qui  soient  réellement  des  textes  définitifs.  Parmi  les  sa- 
vants français  actuels  qui  se  sont  fait  un  nom  dans  la  philologie  du 
moyen-âge,  plusieurs  assurément  auraient  pu  mieux  faire  que  M.  G.  : 
mais  l'auraient- ils  voulu?  Il  est  permis  d'en  douter.  Tous,  en  tout  cas, 
trouveront  beaucoup  à  prendre  parmi  les  immenses  matériaux  réunis 
dans  ce  Dictionnaire,  et  la  publication  ne  peut  qu'en  être  accueillie  avec 
la  plus  vive  reconnaissance  par  tous  les  amis  de  notre  ancienne  langue. 
C'est  un  merveilleux  instrument  de  travail  qui  se  trouve  mis  dès  aujour- 
d'hui entre  leurs  mains,  et  l'année  1880,  grâce  à  M.  Godefroy,  sera 
comme  le  commencement  d'une  ère  nouvelle  pour  la  philologie  du 
vieux  français.  Il  ne  faudrait  pas  donner  son  dictionnaire  comme  un 
spécimen  de  notre  science,  mais  il  prouve  au  moins  que  le  courage  d'en- 
treprendre de  longs  travaux  et  la  persévérance  à  les  poursuivre  sont  des 
qualités  qui  ne  nous  font  pas  défaut. 

Antoine  Thomas. 


CHRONIQUE 


ALLEMAGNE.  —  Le  sixième  fascicule  de  YHistoire  de  la  littérature  allemande 
de  M.  Wilhelm  Scherer  (Berlin,  Weidmann.  In-8°,  pp.  385-464)  vient  de  paraître; 
il  renferme  la  fin  du  xe  chapitre,  intitulé  «  Les  commencements  de  la  littérature 
moderne  (le  théâtre),  et  la  plus  grande  partie  du  xic  chapitre,  qui  a  pour  titre  a  le 
siècle  de  Frédéric  le  Grand  »  (Das  Zeitalter  Friedrichs  des  Grossen)  et  qui  se  sub- 
divise ainsi  :  Leipzig  (Gottsched,  Gellert,  Rabener,  Elie  Schlegel,  Weisse);  Zurich 
et  Berlin  (Bodmer  et  Breitinger;  Klopstock;  Kleist;  Wieland)  ;  Lessing. 

—  Outre  les  six  fascicules  annoncés  des  Françœsische  Studien  (IIIe  volume),  que 
MM.  Kœrting  et  Koschwitz  publient  à  la  librairie  Henninger,  de  Heilbronn,  pa- 
raîtront encore  deux  fascicules,  l'un,  de  M.  A.  Rœsiger,  Neu-Hengstett-Burset, 
Geschichte  und  Sprache  einerWaldenserkolonie  inWurttemberg,  et  l'autre,  de  M.  J. 
Uthoff,  Nivelle  de  la  Chaussées  Leben  und  Werke. 

—  M.  Adelbert  de  Keller  nous  envoie  le  rapport  qu'il  a  fait  récemment,  en  sa 
qualité  de  président  du  litterarischer  Verein  de  Stuttgart,  sur  la  fondation  et  l'heu- 
reux développement  [de  1'associatiQ.n  (Bericht  ûber  Entstehung  und  Fortgang  des 
litterarischen  Vereins  in  Stuttgart.  Tûbingen.  Fues,  imprimeur,  In-8°,  35  p.). 
Déjà  en  1870  M.  Adelbert  de  K.  avait  joint  au  centième  volume  publié  par  le  littera- 
rischer Verein  un  mémoire  relatif  à  l'activité  scientifique  de  la  société  ;  c'est  ce  mé- 
moire qu'il  fait  paraître  aujourd'hui  eh  deuxième  édition,  mais  en  y  ajoutant  le 
compte-rendu  de  l'œuvre  du  Verein  depuis  1870  jusqu'à  cette  année.  M.  Adelbert 
de  K.  fournit  des  détails  intéressants  sur  la  fondation  et  l'administration  de  l'associa- 


D  HISTOIRE    ET   DE    LITTERATURE  IIO, 

tion  qu'il  préside;  il  donne  la  liste  des  membres  du  Verein  et  les  statuts  qui  le  ré- 
gissent, ainsi  qu'une  table  très  détaillée  (et  par  ordre  de  matières  et  par  ordre 
chronologique)  des  publications  de  la  société.  Le  Verein  est  entré  dans  sa  trente- 
cinquième  année  d'existence  et  a  fait  distribuer  son  ib-jm*  volume.  M.  Adel- 
bert  de  K.  joint  à  toutes  ces  informations  la  liste  de  ceux  qui  ont  publié  des 
textes  anciens  pour  le  Verein  ;  cette  liste  se  compose  de  plus  de  soixante-dix 
noms;  elle  est  suivie  d'une  autre  table  plus  complète  et  plus  minutieuse  que  les  autres 
tables,  et  qui  renferme  les  noms  des  auteurs,  des  éditeurs  et  des  œuvres  de  la  «  Bi- 
bliothèque »  du  litterarischèr  Verein.  —  M.  Adelbert  de  K.  nous  en  voudrait  peut- 
être  si  nous  n'ajoutions  pas  que  nous  avons  trouvé  dans  ce  mémoire  une  petite  feuille, 
pleine  d'esprit  et  d'humour,  qu'il  a  pris  la  peine  de  faire  imprimer  tout  exprès  et 
qu'il  a  intitulée  Mein  Vorname,  «  mon  prénom  ».  Il  paraît  que  beaucoup  de  gens  nom- 
ment M.  de  Keller  a  Adalbert  »  et  non  Adelbert;  nous-mêmes  dans  le  compte-rendu 
de  l'édition  du  Faust  de  Widmann  qu'a  récemment  publiée  l'éminent  érudit,  nous 
avons  laissé  échapper  un  «  Adalbert»  qui  a  déplu  à  M.  de  Keller;  nous  lui  en  ex- 
primons ici  tous  nos  regrets  et  lui  promettons  de  ne  plus  commettre  à  l'avenir  cette 
déplorable  confusion,  et  pour  mieux  nous  graver  dans  l'esprit  la  forme  véritable  de 
ce  prénom  et  l'inculquer  à  nos  collaborateurs  et  lecteurs,  nous  traduisons  l'agréable 
et  piquante  note  de  M.  de  Keller.  Le  président  du  litterarischèr  Verein  de  Stutfgart 
fait  allusion  à  un  passage  de  Goethe  dans  «  Poésie  et  Vérité  »;  le  nom  propre  d'un 
homme,  dit  Gcethe,  n'est  pas  simplement  un  manteau  qui  flotte  autour  de  sa  per- 
sonne et  qu'on  peut,  à  la  rigueur,  secouer  et  tirailler;  c'est  un  habit  parfaitement 
juste,  qui  s'est  développé  sur  l'homme  tout  entier,  comme  la  peau,  et  que  l'on  ne 
peut  ni  érafler  ni  écorcher  sans  le  blesser  lui-même.«  Pourquoi,  poursuit  M.  de  Keller, 
n'aurais-je  pas  le  droit  de  réclamer  contre  l'atteinte  si  souvent  portée  à  mon  pré- 
nom? Mon  père  m'a  baptisé  Adelbert,  et  non  Adalbert.  Enfant  de  l'époque  nouvelle, 
je  porte  un  nom  dont  la  forme  appartient  au  xixme  siècle;  pourquoi  le  traduire  en  un 
nom  du  x«  siècle?  Dit-on  aujourd'hui  adal,  nebal,  sattal,  sessal,wachtal,  etc.,  comme 
il  y  a  mille  ans?  Ou  bien  devons-nous  dire  désormais  Adalheid  et  non  «  Adelheid  » 
Adahulf  et  non  «  Adolf  »,  Hiltimuat  et  non  «  Hellmuth  »,  Hiru%  et  non  «  Hirsch,  » 
Hagihar  et  non  «  Hecker  »,  Chuonrat  et  non  «  Konrat  »,  Berahtold  et  non  «  Ber- 
thold  »,  Willahalm  et  non  a  Wilhelm  »,  etc.? 

BELGIQUE,  —  La  commission  royale  d'histoire  a  fait  distribuer  deux  volumes  in-4»  ; 
i°  Le  tome  Ier  des  Relations  politiques  des  Pays-Bas  et  de  l'Angleterre  sous  le  règne 
de  Philippe  II,  édité  par  M.  Kervyn  he  Lettenhove;  ce  volume  renferme  41 3  lettres, 
écrites  du  27  octobre  i555  au  23  août  i55q,  et  empruntées  au  Record  Office,  aux 
archives  de  Bruxelles,  de  Vienne  et  de  Simancas,  ainsi  qu'une  introduction  de  34  pa- 
ges contenant  un  précis  des  faits  les  plus  remarquables  consignés  dans  ces  lettres; 
20  le  tome  IV  et  dernier  de  la  Collection  des  voyages  des  souverains  des  Pays-Bas, 
édité  par  M.  Charles  Piot.  Ce  tome  comprend  :  I.  Le  Journal  des  voyages  de  Phi- 
lippe II  de  i554  à  i56g,  par  Jean  de  Vandenesse,  suivi  de  3j3  lettres  et  autres  pièces 
(juillet  i553-nn  décembre  ibb^)  relatives  au  mariage  de  Philippe  avec  Marie  Tudor  ; 
II.  le  Voyage  de  Y  archiduc  Albert  en  Espagne  (i5g8),  par  Gilles  du  Faing;  III.  Ulti- 
néraire  d'Antoine,  duc  de  Brabant  (1407-1415)  ;  IV.  L'Itinéraire  de  Jean  IV,  duc  de 
Brabant  (1415-1427);  V.  L'Itinéraire  de  Philippe  de  Saint-Pol,  duc  de  Brabant 
(1427-1430);  en  tête  de  ces  textes  M.  Piot  a  placé  une  introduction  de  quarante  pages 
où  il  insiste  surtout  sur  les  voyages  de  Philippe  II  et  sur  les  négociations  auxquelles 
donna  lieu  le  mariage  de  ce  prince  avec  la  reine  d'Angleterre;  il  a  mis  à  la  fin  du 
volume  une  table  alphabétique  des  noms  de  personnes  et  de  lieux  cités  dans  les  qua- 
tre volumes  de  la  publication,  oitsbfldi  «1 1 


120  REVUE   CRITIQUE    D'HISTOIRE   ET   DE    LITTÉRATURB 

—  M.  Frédéric  Fétis,  conseiller  à  la  cour  d'appel  de  Bruxelles,  a  tout  récemment 
publié  le  Catalogue  des  collections  de  poteries,  faïences  et  porcelaines  (moyen  âge  et 
temps  modernes)  du  Musée  royal  d'antiquités  et  d'armures. 

—  Parmi  les  questions  mises  au  concours  par  la  Société  libre  de  VEmulation  de 
Liège,  nous  remarquons  les  suivantes  :  Etat  des  établissements  d'instruction  publi- 
que à  Liège  depuis  Charlemagne  jusqu'à  nos  jours  (1,000  fr.);  —  Histoire  adminis- 
trative de  la  province  de  Liège  depuis  la  première  invasion  française  (i  ,000  fr.)  — 
Inventaire  raisonné  des  objets  d'art  que  renferment  les  monuments  civils  et  religieux 
de  Liège  (600  fr.)  ;  —  Histoire  de  l'industrie  armurier e  dans  le  pays  de  Liège 
(t,ooo  fr.). 


ACADEMIE  DES  INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  28  juillet  1882. 

L'Académie,  ayant  à  choisir  un  lecteur  pour  la  séance  publique  de  l'Institut,  le 
25  octobre  prochain,  désigne  M.  Le  Blant.  Il  lira  le  mémoire  communiqué  par  lui 
à  la  dernière  séance,  qui  porte  pour  titre  les  Chrétiens  dans  la  société  païenne  aux 
premiers  âges  de  l'Eglise. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  M.  Ch.  Nisard  termine  la  lecture  de  son 
mémoire  intitulé  :  De  Vétat  incertain  et  précaire  de  la  propriété  littéraire  vers  le 
■milieu  du  xvi"  siècle.  Dans  la  seconde  partie  de  ce  mémoire,  M.  Nisard  raconte  la 
spoliation  dont  fut  victime  SufFridus  Petrus,  natif  de  Frise,  professeur  de  droit  à 
Cologne,  mort  en  i5gy.  Il  avait  fait  de  longues  études  sur  les  œuvres  de  Gicéron  et 
avait  réuni  les  éléments  d'un  recueil  de  Castigations  ou  corrections  au  texte  de  cet 
auteur,  d'après  divers  manuscrits.  Il  se  proposait  de  publier  ce  travail  ;  mais,  ne 
trouvant  pas  le  temps  de  mettre  le  manuscrit  au  net  pour  l'impression,  il  le  confia  à 
un  de  ses  élèves,  Janus  Wilhelms,  de  Lûbeck,  qui  avait  entrepris  des  travaux  sur 
le  même  sujet.  Il  fut  convenu  entre  eux  que  Janus  réunirait  ses  propres  corrections 
à  celles  de  son  maître  et  formerait  du  tout  un  seul  ouvrage,  qui  paraîtrait  avec  le 
nom  des  deux  auteurs,  et  que  les  bénéfices,  s'il  y  en  avait  à  recueillir,  seraient  par- 
tagés par  moitié.  Janus  n'eut  pas  le  temps  de  faire  cette  publication  ;  il  mourut  peu 
de  temps  après,  à  Bourges  ;  ses  manuscrits,  enlevés  par  un  Allemand,  nommé 
Kockert,  furent  remis  à  ses  héritiers  à  Lùbeck.  Suffridus  les  réclama  en  vain,  allé- 
guant que  la  majeure  partie  de  ces  manuscrits  représentait  son  travail  et  non  celui 
de  Janus,  que  même  les  parties  écrites  de  la  main  de  Janus  avaient  été  pour  la 
plupart  copiées  par  celui-ci  sur  les  notes  fournies  par  son  maître.  Les  héritiers  re- 
fusèrent de  rien  restituer  et  Suffridus  mourut  sans  avoir  réussi  à  se  faire  rendre 
justice.  Les  Castigations  et  celles  de  Janus  ne  furent  publiées  que  longtemps  après, 
par  Gruter,  en  1618;  mais  cet  éditeur  et  ceux  qui  ont  depuis  consulté  son  livre  ont 
attribué  l'honneur  de  ces  corrections  presque  entièrement  à  Janus;  au  contraire, 
selon  M.  Nisard,  c'est  Suffridus  qui  en  a  été,  sinon  le  seul,  au  moins  le  principal 
auteur. 

M.  Bergaigne  commence  la  lecture  d'un  mémoire  intitulé  :  les  Inscriptions  sanscri- 
tes du  Cambodge  ;  examen  d'un  mémoire  de  M.  Aymonier.  Les  inscriptions  dont  il 
entretient  l'Académie  ont  été  recueillies  par  M.  Aymonier  dans  un  premier  voyage 
au  Cambodge,  avant  la  mission  qui  lui  a  été  confiée  récemment  par  le  gouvernement. 
Les  copies  de  ces  textes  ont  été  envoyées  par  M.  Aymonier  à  la  Société  asiatique  ; 
MM.  Barth,  Sénart  et  Bergaigne  se  sont  partagé  le  soin  dé  les  étudier. 

Ouvrages  présentés  :  —  par  M.  Jourdain  :  Gozzadini,  Maria  Teresa  di  Serego- 
Allighieri  Go^çadini ;  —  par  M.  Egger,  de  la  part  de  M.  Guénin,  sténographe  révi- 
seur du  sénat  :  Anderson  (Th.),  History  of  shorthand  with  a  review  of  its  présent 
condition  and  prospects  in  Europe  and  America;  —  par  M.  Delisle  :  Courajod,  Quel- 
ques sculptures  de  la  collection  du  cardinal  de  Richelieu,  aujourd'hui  au  musée  du 
Louvre;  le  même,  Quelques  sculptures  viceniines,  à  propos  du  bas-relief  donné  au 
musée  du  Louvre  par  M.  Ch.  Timbal. 

Julien  Havet. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 

Le  Puy,  imprimerie  Marckcssou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  23. 


REVUE    CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

N°  33  '     -  14  Août  -  1882 


Sommah-e  s  i5g.  Le  Banquet  de  Xenophon,  p.  p.  Rettig.  —  160.  Neumann,  His- 
toire romaine  de  Scipion  Emilien  à  la  mort  de  Sylla,  p.  p.  Gothein.  —  Kluge, 
Dictionnaire  étymologique  de  la  langue  allemande.  ~-  161.  Théâtre  choisi  de 
Rotrou,  p.  p.  De  Ronchaud.  —  i63.  Lettres  de  l'abbé  Galiani,  p.  p.  Perey  et 
Maugras,  p.  p.  Asse.  —  164.  Strackerjan,  Le  pays  et  les  gens  d'Oldenbourg;  De 
Dalwigk,  Le  théâtre  d'Oldenbourg.  —  Chronique.  —  Société  nationale  des  anti- 
quaires de  France.  —  Académie  des  Inscriptions. 


i5g.  —   Xenophons  Gastmaltl.   Griechisch  und  deutsch    herausgegeben    von 
Ferdinand  Rettig.  Leipzig,  W.  Engelmann.  [881.  iv  et  273  p.  petit  in-8°. 

Le  présent  volume  se  compose  de  93  pages  d'introduction,  de  100  pa- 
ges de  notes  explicatives  ;  le  texte  grec,  la  traduction  allemande  et  les 
notes  critiques  occupent  80  pages.  On  le  voit,  M.  Rettig  a  mis  beau- 
coup du  sien  dans  ce  livre,  il  a  tenu  à  commenter  son  auteur  de  toutes 
les  façons,  en  le  traduisant,  en  exposant  l'ensemble  de  la  composition, 
en  interprétant  les  menus  détails  de  style  et  de  langue. 

M.  R.  est  de  ceux  dont  on  a  dit  qu'ils  ne  se  contentent  pas  d'expli- 
quer leur  auteur,  mais  qu'ils  le  sucent.  Des  différentes  parties  de  son  tra- 
vail, l'Introduction  est,  si  je  ne  m'abuse,  celle  à  laquelle  l'auteur  doit 
tenir  le  plus,  et  que  le  lecteur  jugera  la  plus  originale  et  la  plus  remar- 
quable. M.  R.  y  fait  l'analyse  du  Banquet  de  Xenophon  de  manière  à 
faire  comprendre  l'à-propos  et  la  convenance  de  tous  les  incidents  qui 
s'y  produisent,  de  toutes  les  paroles  qui  y  sont  prononcées  ;  il  s'efforce 
de  marquer  la  place  et  le  rang  que  chaque  détail  occupe  dans  l'ensem- 
ble de  l'ouvrage,  de  deviner  les  intentions  de  l'auteur,  de  subordonner 
tous  les  détails  à  une  idée  maîtresse,  de  montrer  enfin  que  ce  petit  dialo- 
gue est  l'œuvre  d'un  art  consommé,  aussi  attachant  par  la  variété  des 
détails  qu'admirable  par  l'unité  de  conception.  On  peut  trouver  que 
M.  R.  a  parfois  trop  de  sagacité,  trop  de  finesse  et  surtout  qu'il  appuie 
un  peu  plus  qu'il  ne  le  faudrait  :  cette  longue  dissertation  philosophi- 
que et  esthétique  me  gâte  un  peu,  je  l'avoue,  l'impression  que  laisse  l'ou- 
vrage d'un  laisser-aller  si  charmant  :  mais  ceci  est  affaire  de  goût  et 
d'appréciation  personnelle;  je  rends,  d'ailleurs,  pleine  justice  à  la  péné- 
tration de  l'auteur  et  je  crois  que  l'on  peut  adopter  la  plupart  de  ses  ju- 
gements et  de  ses  vues.  Il  y  a  cependant  un  point  sur  lequel  je  me  sépare 
décidément  de  lui. 

On  se  souvient  d'un  incident  qui  tient  une  grande  place  dans  ce  ban- 
quet :  les  convives  conviennent  de  s'amuser  eux-mêmes  par  un  jeu  de 
Nouvelle  série,  XIV.  7 


122  RKVUK    CRITIQUE 

société;  chacun  dira  quel  est  le  bien  qu'il  est  le  plus  fier  de  posséder. 
Cela  se  fait  d'une  manière  piquante,  paradoxale,  moitié  plaisante,  moitié 
sérieuse.  Socrate,  qui  parle  en  dernier  lieu,  se  vante  de  posséder  l'art  de 
l'entremetteur  ([j.acTpoxeta).  Plus  lard  Socrate  fait  l'éloge  d'Eros,  le  dieu 
qui  préside  en  quelque  sorte  à  la  fête  donnée  par  le  riche  Callias  au  bel 
Autolycos.  Mais  Socrate  distingue  deux  Eros,  l'un,  l'amour  sensuel, 
éhonté,  il  le  condamne  et  le  flétrit  ;  il  exalte,  au  contraire,  l'amour  des 
belles  âmes,  qui  rend  meilleur  et  celui  qui  en  est  l'objet  et  celui  qui  le 
ressent.  Ce  discours  de  Socrate  remplit  le  chapitre  vin  ;  il  l'emporte  sur 
tous  les  autres,  non  seulement  par  son  étendue,  mais  aussi  par  le  sérieux 
soutenu  du  ton  (Socrate  s'accuse  et  s'excuse  lui-même  de  ce  sérieux  au 
§  41),  et  par  la  portée  des  idées.  On  y  voit,  en  effet,  cette  épuration  des 
égarements  de  la  Grèce  que  l'on  pourrait  appeler  amour  socratique,  si 
le  grand  philosophe,  qui  en  fit  une  des  pièces  constitutives  de  son  sys- 
tème, n'y  avait  à  jamais  attaché  son  nom.  Tous  les  lecteurs  non  préve- 
nus, si  on  leur  demandait  quel  est  le  morceau  capital  du  Banquet  de 
Xénophon,  désigneraient,  je  crois,  d'un  commun  accord,  ce  grand  dis- 
cours de  Socrate.  M.  R.  regarde  comme  le  morceau  le  plus  important 
de  tout  l'ouvrage  la  fin  du  chapitre  11,  les  lignes  dans  lesquelles  Socrate 
se  vante  d'être  un  excellent  entremetteur.  Ce  n'est  pas  la  première  fois 
que  M.  R.  émet  cette  idée  paradoxale;  on  la  contesta  comme  de  raison, 
mais  il  y  tient  et  il  la  défend  avec  d'autant  plus  d'ardeur,  qu'elle  lui  ap- 
partient incontestablement  en  propre. 

Voici  ses  arguments  :  le  morceau  capital  doit  se  trouver  dans  la  partie 
centrale  de  l'ouvrage;  or,  ce  centre,  c'est  le  jeu  de  société  auquel  concou- 
rent tous  les  convives,  et  le  point  culminant  de  cette  joute,  ce  sont  les 
paroles  prononcées  par  Socrate  à  la  fin  du  quatrième  chapitre.  On  voit 
que  M.  R.  applique  les  principes  de  l'architecture  à  la  structure  d'un 
ouvrage  littéraire. 

Ce  n'est  pas  tout  :  M.  R.  a  étudié  le  Banquet  de  Platon  dont  il  a 
donné  une  édition  avec  le  même  soin  que  celui  de  Xénophon,  et  il  fait 
une  comparaison  approfondie,  détaillée,  peut-être  un  peu  trop  minu- 
tieuse, des  deux  ouvrages.  Or  il  trouve  que  le  chapitre  vin  de  Xénophon, 
le  discours  de  Socrate  sur  l'amour  répondent  à  ce  que  dit  Alcibiade  dans 
la  fin  du  Banquet  de  Platon.  D'un  autre  côté,  les  paroles  placées  dans 
la  bouche  de  Socrate  au  quatrième  chapitre  de  Xénophon,  trouvent  leur 
parallèle  dans  le  grand  discours  de  Socrate  chez  Platon.  Mais  ce  der- 
nier discours  étant  évidemment  le  morceau  capital  du  dialogue  de  Pla- 
ton, il  s'en  suit  qu'il  faut  en  dire  autant  de  la  partie  correspondante  du 
dialogue  de  Xénophon.  Voilà  où  l'amour  des  constructions  peut  con- 
duire un  bon  esprit. 

Pour  la  constitution  du  texte,  M.  R.  s'est  servi,  comme  de  raison, 
de  l'édition  de  K.  Schenkl,  (Berlin  1866)  et  des  Xenophontische  Studien 
du  même  savant  (Vienne,  1876).  Cependant  il  a  de  nouveau  collationné 
lui-même  le  manuscrit  de  notre  Bibliothèque  nationale,  1643,  qu'il  es- 


t>  HISIOIKK    Kl     (>&    LITTËHAfUftK  1  2ï 

s 

time  Je  meilleur  de  tous,  quoi  qu'en  dise  Schenkl.  Quelques  corrections 
évidentes  ont  été  introduites  dans  le  texte,  comme  au  en.  vi,  §  2  : 
'AXÀ'  dtpy.ct  tcOto  (conjecture  de  Cobet),  pour  àXkà  ocy.et  tguto.  Malgré  la 
judicieuse  réserve  que  l'éditeur  s'est  imposée  à  cet  égard,  il  est  un  pas- 
sage dans  lequel  je  suis  tenté  de  défendre  contre  lui  la  leçon  des  manus- 
crits. Au  commencement  du  ch.  vin,  Socrate  exalte  les  qualités  contra- 
dictoires d'Éros,  le  plus  ancien  des  dieux  par  Page  et  le  plus  jeune  par  la 
figure,  v.a\  |#s*féftet  toxvtoc  «téxovcoç,  tyw/Jfi  o'àvGpwrau  îopu(j.ivou.  C'est 
ainsi  que  M.  R.  écrit  avec  Blomfield  pour  t<70u[/.évou,  qu'il  déclare 
inintelligible.  Avais-je  tort  de  comprendre  cette  leçon  ?  11  me  semblait 
qu'Éros  y  était  représenté  comme  un  dieu  qui  sait  proportionner  sa  taille 
à  l'âme  humaine,  se  faire  petit  pour  y  entrer.  Quoiqu'il  en  soit,  lopupivoit 
ne  saurait,  je  crois,  se  construire  avec  un  simple  datif,  sans  la  préposition 
'ev.—  Voici,  au  contraire,  un  passage  que  je  voudrais  corriger.  On  lit  vi, 
9  :  Tôïç  xafft  y.akoXq  /.al  xoXç,  (âsT/uccoiç  saaÇw  owtcv,  et  on  explique  tgiç 
icSat  xaXoïç,  «  à  ceux  qui  sont  beaux  aux  yeux  de  tout  le  monde.  »  J'ai- 
merais mieux  toTç  TrocYxdtXoiç. 

Je  soumets  ces  observations  à  M.  Rettig.  Son  édition  du  Banquet  faite 
avec  un  soin  scrupuleux,  entourée  d'explications  abondantes  et  instruc- 
tives, inspirée  par  une  vive  admiration  de  l'auteur,  se  recommande  à 
tous  les  amis  de  Xénophon. 

Henri  Weil. 


160.  —  «ai»l  Neumann.  Geschichte  Roms  waehrend  des  Verfalles  der  Republik, 
vom  Zeitalter  des  Scipio  Aemilianus  bis  zu  Sulla's  Tode,  aus  seinem  Nachlassc 
herausgegeben  von  Dr  E.  Gotiiein.  Breslau,  Koebner,  1881,8°  de  vi-624  p.  12 
mark. 

Charles  Neumann  '  a  été,  pendant  dix-sept  ans  (novembre  1 863-2  juil- 
let 1880,  date  de  sa  mort),  un  des  savants  les  plus  distingués,  un  des 
professeurs  les  plus  écoutés  de  l'Université  de  Breslau.  Il  a  peu  écrit  : 
des  articles  dans  les  recueils  de  Petermann  (Neumann  était  un  bon  géo- 
graphe), un  travail,  sur  le  pays  des  Scythes  et  ses  rapports  avec  le  monde 
grec,  dont  le  premier  volume  a  paru  en  1 855  et  qui  n'a  pas  été  conti- 
nué 2.  Neumann  se  donnait  tout  entier  à  l'enseignement,  ou  il  excellait; 
il  a  formé  des  élèves,  et  en  particulier  M.  Gothein,  l'éditeur  de  ce  livre 
et  l'auteur  d'études  sur  l'histoire  religieuse  du  xve  siècle;  il  a  exercé  sur 
l'Université  de  Breslau  une  véritable  influence,  dont  les  résultats  se  fe- 
ront longtemps  sentir. 


1 .  Voyez  la  longue  et  intéressante  notice  que  lui  a  consacré  M.  Fartscb,  ZcilscJirifi 
der  Gcsellschafi  fur  Erdkundc,  Berlin,  t.  XVII. 

a.  Die  Hellenen  im  Skythenlande,  Beilrœgc  ^ur  allai  Géographie.  Ethnographie, 
etc.  Vol.  I,  8°,  Berlin,  i853. 


124  REVUE   CRITIQUE 

A  côté  de  ses  travaux  géographiques,  Neumann  faisait  des  cours  sur 
l'histoire  ancienne  et,  en  particulier,  sur  l'histoire  romaine.  Dans  cha- 
que semestre,  il  étudiait  une  période  généralement  très  courte;  par  exem- 
ple, dans  le  semestre  d'hiver  1869-1870,  l'histoire  de  Rome  depuis  les 
Gracques  jusqu'à  Sylla.  C'est  ce  dernier  cours  qui  forme  ce  livre  :  si  l'on 
songe  aux  dimensions  considérables  de  l'ouvrage  et  à  la  correction 
avec  laquelle  il  est  imprimé,  on  reconnaîtra  que  Neumann  fut 
vraiment  aimé  de  ses  élèves,  on  applaudira  au  sentiment  qui  a  inspiré 
M.  G.  et  ses  collègues,  on  rendra  pleine  justice  au  zèle  heureux  qu'ils 
ont  déployé  pour  honorer  la  mémoire  de  leur  maître. 

Que  M.  G.  nous  permette  cependant  de  croire  et  de  dire,  en  toute 
franchise,  que  la  science  gagnera  moins  à  la  publication  de  ce  livre  que 
la  mémoire  de  Neumann.  Certes,  les  mérites  de  Neumann,  comme  his- 
torien, sont  incontestables.  La  langue  qu'il  écrit  est  parfaite  de  netteté; 
les  faits  sont  bien  enchaînés  et  bien  racontés;  nous  avons  un  tableau 
aussi  complet  que  possible  de  l'histoire  romaine  pendant  sa  période  la 
plus  confuse;  les  causes  de  la  chute  de  la  république,  dont  l'étude  forme 
le  premier  chapitre,  sont  exposées  avec  clarté,  méthode  et  jugement.  Je 
ne  craindrais  pas  de  comparer  ce  récit,  pour  sa  richesse  et  son  exactitude, 
à  celui  de  Lenain  de  Tillemont,  et  c'est  le  plus  grand  éloge  qu'on  sau- 
rait faire  à  un  historien.  Eh  bien!  malgré  tout,  il  ne  semble  pas  que  ce 
livre  puisse  être  de  quelque  utilité  vraiment  scientifique,  par  la  seule  rai- 
son que  les  renvois  aux  textes  manquent  partout  à  peu  près  complètement. 
On  ne  saurait,  sans  doute,  en  vouloir  trop  aux  éditeurs  d'avoir  négligé 
de  les  chercher  et  de  les  indiquer  eux-mêmes;  ils  ont  renoncé  à  une  be- 
sogne aussi  fastidieuse  que  longue,  qui  aurait  demandé  des  années  et 
n'aurait  pu  être  faite  que  par  un  homme  profondément  versé  dans  l'his- 
toire romaine.  Cette  besogne  indispensable  n'ayant  pas  été  faite,  nous 
n'avons  qu'un  répertoire  immense,  sans  indication  de  sources;  nous 
sommes  en  présence  d'une  mine  très  précieuse,  privés  des  moyens  de 
l'exploiter. 

Neumann  écrivait  ses  leçons  avec  un  soin  extrême,  en  arrêtait  la  forme 
dans  les  moindres  détails.  On  le  voit  bien  à  la  lecture  de  son  livre;  il  est 
difficile  de  songer  que  ces  pages  n'étaient  point  destinées  à  l'impression. 
Or,  devant  ses  auditeurs,  Neumann  négligeait  complètement  ce  qu'il 
avait  écrit.  Les  cas  étaient  extrêmement  rares,  dit  son  biographe,  où, 
ayant  à  citer  quelques  textes,  il  montait  en  chaire  et  consultait  ses  no- 
tes. Le  plus  souvent,  il  se  promenait  devant  les  bancs  de  ses  élèves,  con- 
versant avec  eux  et  répondant  à  leurs  objections.  Il  en  résulte  que  cet 
intérêt,  cette  vie  que  Neumann  mettait  dans  ses  conférences,  font  pres- 
que toujours  défaut  à  ce  livre.  Le  récit  se  poursuit  d'une  façon  lente  et 
monotone  :  rien  ne  réveille  l'attention,  ne  repose  l'esprit  fatigué.  On 
chercherait  en  vain  quelque  citation  un  peu  étendue,  quelque  chose  qui 
parlerait  un  peu  à  l'imagination.  Les  réflexions  sont  extrêmement  rares, 
et  c'est  encore  ce  qu'il  y  a  de  plus  fâcheux,  car  Neumann  était  un  esprit 


d'hISTOIRIC    ET    DR    UTTBRÀTUttft  125 

très  clair,  très  judicieux.  Ses  considérations  sur  la  portée  de  la  réforme 
de  Sylla,  sur  les  différents  «  facteurs  »  de  la  révolution  le  montrent  suf- 
fisamment et  font  regretter  que  les  idées  générales  tiennent  si  peu  de 
place  dans  son  ouvrage.  Encore  une  fois,  cela  se  comprend,  cela  tient  aux 
vices  de  la  publication  même  :  ce  qui  nous  manque,  c'est  préci- 
sément ce  qu'il  y  avait  de  meilleur  dans  les  leçons  de  Neumann,  ce  qui 
aurait  été  pour  nous  de  la  plus  grande  utilité  et  ce  qu'il  était  impossible 
de  faire  entrer  dans  ce  livre. 

Néanmoins  l'ouvrage  ne  peut  pas  être  complètement  inutile,  surtout 
à  ceux  qui  voudront  approfondir  cette  période  de  l'histoire  romaine.  La 
lecture  en  sera  toujours  une  excellente  préparation,  très  complète  et  très 
solide,  de  toute  étude  sérieuse  et  scientifique,  mais  ce  ne  sera  jamais 
qu'une  préparation.  Malgré  les  imperfections  et  les  lacunes  de  ce  livre,  il 
faut  remercier  M.  Gothein  de  ne  pas  avoir  reculé  devant  la  publica- 
tion. 

Camille  Jullian. 


161. —  F.  Kluge.  Etymologiselies'Wcerterlmcli  tier  cleutsclien  Bpràché. 

Fasc.  I  Strasbourg,  Trûbner,  1882.  64  pages  in~4.e  (sur  deux  colonnes).  De  aal  à 
elf.  Prix  du  fascicule  :  ï  mark  5o. 

M.  F.  Kluge,  déjà  connu  par  quelques  travaux  estimés  sur  l'histoire 
des  langues  germaniques,  s'est  proposé  de  publier  un  «  dictionnaire 
étymologique  de  la  langue  allemande  »  dont  le  premier  fascicule  vient 
de  paraître.  Cette  œuvre  s'adresse  tant  au  public,  qui  n'a  pas  l'occasion 
de  se  mettre  au  courant  des  découvertes  des  savants,  qu'aux  savants  eux- 
mêmes,  et  c'est  pour  cela  que  nous  nous  permettons  tout  d'abord  l'ob- 
servation suivante.  M.  K.  n'est  pas  toujours  conséquent  dans  la  suppo- 
sition des  «  racines  »  ;  ainsi  balance-t-il  pour  braten  (rôtir)  entre  bhrêdh 
et  bhrêt,  pour  bringen  (apporter)  entre  bhrengh  et  bhrenk,  pour  Bïihel 
(colline)  entre  bhug  et  bhuk.  Il  pense  pour  le  mot  Dieb  (voleur)  à  une  ra- 
cine finissant  par  la  ténue,  ce  qui  ne  l'empêche  pas  de  regarder  «  dhubh  » 
comme  forme  primitive  du  gothique  dambs  [sot,  sourd,  muet),  et  il  s'a- 
vise même  de  séparer  Bug  (courbure)  de  biegen  (courber)  en  faisant  de 
l'un  le  représentant  d'un  prototype  «  bhâgh  »,  de  l'autre  d'une  racine 
«  bhuk  ».  Nous  avons  examiné  ailleurs  '  les  hypothèses  relatives  à  la 
forme  des  racines  indo-européennes,  d'où  sont  venues  les  racines  ger- 
maniques commençant  et  finissant  par  une  moyenne,  il  n'y  a  donc  pas 
lieu  ici  d'y  revenir;  nous  nous  contenterons  de  proposer  une  étymologie 
et  une  seule.  Ne  pourrait-on  admettre  une  racine  dhup  (slav.  dûpli , 
creux)  pour  expliquer  la  moyenne  finale  de  dumb-?Cf.  pour  la  relation 
des  acceptions  de  ces  mots  l'allem.  taube  Nuss,  noix  creuse. 


i.D.  Verschhisslauîe  i.  Indogerm. ,  Graz,  1881.) 


126  KKVUk    CKITIQUh 

Nous  espérons  que  l'auteur  saura  éviter  dans  les  fascicules  qui  vont 
suivre  l'inconséquence  signalée,  qui  porte  quelque  préjudice  à  son  tra- 
vail. Mais,  à  en  juger  par  ce  fascicule,  l'ouvrage  de  M.  K.  rendra  de 
très  grands  services,  et  l'on  ne  saurait  trop  le  recommander  à  tous  ceux 
qui  s'intéressent  à  l'histoire  des  mots  ;  chaque  article  est  traité  avec  une 
brièveté,  une  concision  qui  ne  laisse  pas  soupçonner,  au  premier  abord, 
les  longues  et  patientes  recherches  auxquelles  a  dû  se  livrer  M.  Kluge  ; 
mais,  sous  cette  forme  serrée,  nette  et  qui  n'est  jamais  obscure,  chaque 
article  renferme  tout  ce  qu'il  faut  savoir  et  apprendra  beaucoup,  non- 
seulement  aux  «  laïques  »,  mais  aux  chercheurs  mêmes  et  aux  Fachge- 
nossen;  l'auteur  remonte  aussi  loin  qu'on  peut  aller  pour  nous  donner 
la  forme  et  la  signification  du  mot;  il  fait  les  rapprochements  nécessai- 
res avec  les  langues  classiques  et  indique  les  liens  de  parenté  du  terme 
allemand  avec  les  autres  langues  germaniques,  les  langues  romanes,  et, 
le  cas  échéant,  avec  le  sanscrit  et  le  zend,  les  langues  celtiques  ou  sla- 
ves '.  Le  présent  fascicule  s'arrête  au  mot  elf;  sept  ou  huit  autres  fasci- 
cules suffiront  pour  que  l'ouvrage  soit  complet;  en  tout  cas,  la  publica- 
tion en  son  entier  ne  coûtera  que  12  marks  ou  i5  francs;  ce  prix  assez 
modique  contribuera  à  répandre  un  ouvrage  que  recommande  déjà  la 
science  profonde  et  sagace  de  son  auteur.' 

J.  Kirste. 


162. —  Théâtre  choisi  de  .1.  de  Rotrou,  avec  une  étude  par  L.  de  Ronchaud. 
Portrait  gravé  à  l'eau-forte  par  Lalauze.  Paris,  Librairie  des  bibliophiles.  Deux 
volumes  in-8°,  lv  et  248  p.,  260  p.   Prix  des  deux  volumes  :  i5  francs. 

Cette  édition  du  théâtre  choisi  de  Rotrou  sera  favorablement  accueil- 

1.  Une  revue  allemande  a  fort  bien  caractérisé  ce  mérite  de  M.  Kluge  parles  mots 
«  élégante  brièveté  »  (élégante  Kùr^e).  Voici,  au  reste,  deux  articles  de  ce  fascicule  ; 
celui  qui  le  commence  et  celui  qui  le  termine,  l'art,  aal  et  l'art,  elf.  —  Aal,  m.  aus 
gleichbedeut.  mhd.  ahd.  al  m.;  gemeingerm.  Benennung,  got.  *êls  voraussetzend; 
vgl.  anord.  ail,  angls.  œl,  engl.  eel,  ndl.  aal,  asaechs.  *âl.  Urverwandtschaft  mit 
dem  gleichbedeutenden  lat.  anguilla,  wozu  gr.  'é^y.z\uç  gezogen  wird,  ist  unmce- 
glich,  weil  die  Laute  der  german.  Worte  zu  sehr  davon  abweichen;  selbst  aus  *an~ 
gla  —  kcennte  kein  ahd.  al  oder  angls.  œl  hergeleitet  werden.  Auch  giebt  es  keine 
Benennungen  von  Fischarten,  die  das  germ.  mit  dem  gr.  lat.  als  Erbgut  gemein 
hsette,  s.  Fisch.  —  Elf,  Num,  aus  gleichbedeut.  mhd.  eilf,  eilif,  einlif,  ahd.  einlif, 
gemeingerm.  Bezeichnung  fur  «  elf  »,  vgl.  asaechs.  êlleban  (fur  ên-liban),  angls. 
andleofan,  endleofan,  (fur  dnleofan),  engl.  eleven,  anord.  ellifu,  got.  ainlif  :  zusam- 
mcnsetzung  aus  got.  ains,  hd.  ein  und  dem  Elément  —  lif  in  zwœlf,  got.  twalif. 
Von  den  aussergerm.  Sprachen  besitzt  nur  das  Lit.  eine  entsprechende  Bildung,  vgl. 
lit.  vénohka  «  elf  »  twilika  «  zwœlf  »  ;  das/  des  deutschen  Wortes  ist  Verschiebung 
aus  fcwie  in  Wolf  (X6x,oç).  Die  Bedeutung  des  zweiten  Kompositionselementes,  das 
im  Germ.  und  Lit.  nur  in  den  Zahlen  elf  und  pvœlf  begegnet,  ist  unsicher;  man 
deutet  die  dem  Lit.  und  Germ.  zu  Grunde  liegende  Zusammensetzung  aus  der  idg. 
Wz.  lik  «  ûbrig  sein  »  (s.  leihen)  oder  aus  der  idg.  Wz.  lip  (s.  bleiben)  und  fasst 
e//als  a  eins  darûber  ». 


d'histoire  et  de  littérature  127 

lie  du  public  '.  Quoique  l'édition  complète,  donnée  en  cinq  volumes 
par  Viollet  le  Duc  (1820-1822),  ne  soit  pas  devenue  rare  et  se  vende  en- 
core à  un  prix  raisonnable,  les  deux  volumes  que  publie,  avec  son  soin 
ordinaire,  la  Librairie  des  Bibliophiles,  rendront  service  et  à  Rotrou,  qui 
ne  mérite  pas  de  tomber  entièrement  dans  l'oubli,  et  aux  lettrés  qui  ne 
veulent  pas  affronter  la  grande  édition  de  Viollet-le-Duc.  L'étude  de 
M.  de  Ronchaud  est  intéressante  ;  on  y  remarque  surtout  les  compa- 
raisons qu'a  faites  le  préfacier  entre  Rotrou,  Molière  et  Racine.  Mais 
peut  être  M.  de  R.  est-il  trop  sévère  pour  certaines  pièces  de  Rotrou;  si 
«  bizarres  »  et  si  «  compliquées  »  qu'elles  soient,  il  en  est,  même  Diane, 
même  les  Occasions  perdues,  dont  la  lecture  n'est  pas  si  «  ennuyeuse  » 
et  si  «  fade  »  que  le  déclare  le  critique.  Pourquoi  ne  fait-il  que  men- 
tionner dans  une  note  sèche  le  Cosroès  (p.  li)?  M.  de  R.  ne  veut  pas, 
dit-il,  abuser  des  analyses;  ne  se  serait-il  pas  fatigué  à  la  fin  de  son  tra- 
vail, et  Cosroès  ne  méritait- il  pas  autant  de  lignes  que  V Hercule  mou- 
rant? A  quoi  bon  parler,  des  «  fortes  beautés  »  de  cette  pièce  (p.  11) 
pour  la  laisser  ensuite  de  côté?  Enfin,  qui  nous  dit,  comme  l'affirme 
hardiment  M.  de  R.  que  Rotrou,  s'il  eût  vécu  jusqu'à  quatre-vingts  ans 
comme  Corneille,  n'eût  pas  eu  les  «  retours  généreux  »  de  l'auteur  de 
Nicomède  et  de  Sertorius? (p.  m).  Le  génie  du  poète,  écrit  M.  de  R., 
a  été  fécond  de  bonne  heure  et  s'est  un  peu  alangui  par  sa  facilité  même; 
cela  est  bientôt  dit;  mais  Saint-Genest,  Venceslas  et  Cosroès,  les  der- 
nières œuvres  de  Rotrou,  sont  précisément  ses  meilleures  et  prouvent 
que  son  talent  dramatique  croissait  en  vigueur  avec  les  années.  11  est 
regrettable  que  M.  de  R.  n'ait  pas  connu  à  temps  les  études  de  M.  Léonce 
Person  2  ;  il  est  vrai,  on  ne  doit  pas  trop  lui  en  vouloir  d'ignorer  que  le 
Saint-Genest  est  une  imitation  du  Fingido  Verdadero  de  Lope  de 
Vega;  ce  fait  est  également  ignoré  de  Sainte-Beuve,  de  M.  Jarry,  etc. 
Mais  pourquoi  dire  (p.  xxvm)  que  Rotrou  eut  trois  enfants,  un  fils  et 
deux  filles,  lorsque  l'Analyse  des  archives  communales  de  la  ville  de 
Dreux,  publiée  en  1875  par  M.  Lucien  Merlet,  archiviste  du  département 
d'Eure-et-Loir,  atteste  que  le  poète  a  eu,  non  pas  trois,  mais  quatre 
enfants  ?  Que  signifie  la  note  suivante  (p.  xxvn,  à  propos  du  buste  de 
Caffieri)  :  «  11  s'agit  de  peintures  prêtées  par  la  famille  à  l'artiste  sur  la 
demande  des  comédiens  français  et  par  l'intermédiaire  de  M.  Michel  de 
Rotrou,  maire  de  Montreuil  en  1779  »?  M.  R.  a  mal  lu  l'article  du 
Dictionnaire  critique  de  Jal;  M.  Michel  de  Rotrou,  ancien  maire  de 
Montreuilj  chevalier  de  la  Légion  d'honneur,  est  né  en  1797  (de  là  la 
confusion  avec  1779)  ;  il  est  encore  vivant;  il  a  deux  fils,  dont  l'un  a  été 
et  dont  l'autre  est  en  ce  moment  officier  de  marine  ;  il  descend  en  ligne 

1.  Elle  fait  partie  de  la  collection  des  Petits  classiques  qui  comprend  déjà  les  Con- 
tes de  Boufflers,  les  Lettres  de  Voiture  et  les  Œuvres  choisies  de  Saint-Evremond ; 
l'éditeur  annonce,  pour  paraître  bientôt,  les  Œuvres  choisies  de  Fontenelle. 

2.  Notes  critiques  et  biographiques  sur  Rotrou.  Cerf.  Ces  Notes,  qu'on  ne  trou- 
vera pas  dans  le  commerce,  ont  été  reproduites  par  M.  Person  à  la  suite  d'un  livre 
qu'il  vient  de  publier  sur  Venceslas. 


128  RKVUE    CRITIQUE 

directe  de  Pierre  Rotrou  de  Saudreville,  frère  du  poète  ;  il  est  donc  plus 
rapproché  de  l'auteur  du  Venceslas  et  de  Saint-Genest  que  Mllc  Léon- 
tine  Lelièvre- Rotrou,  que  M.  de  R.  cite  dans  une  note  de  la  page  m 
comme  la  seule  personne  qui  représente  aujourd'hui  la  famille  de  Ro- 
trou (voir  Person,  Notes  critiques,  etc).  Une  faute  plus  grave,  c'est  de 
dire  (note,  p.  vi-vi)  que  le  sujet  du  Menteur  est  pris  de  la  Sospechosa 
Verdad  de  Lope  de  Vega  ;  comme  on  peut  s'en  convaincre  en  lisant 
l'Examen  du  Menteur  et  la  notice  de  l'édition  Régnier,  la  pièce  espa- 
gnole mentionnée  par  M.  de  R.  est  de  Ruiz  de  Alarcon  '.  Néanmoins, 
il  y  a  dans, la  notice  de  M.  de  R.  de  bonnes  analyses  accompagnées  de 
citations  heureusement  choisies,  et  des  jugements  qui  témoignent  d'un 
goût  sûr  et  fin.  Quoiqu'il  n'ait  pu  profiter  du  travail  de  M.  Person, 
M.  de  R.  ne  croit  pas  aux  anecdotes  légendaires,  comme  celle  des  fagots 
où  le  poète  jetait  son  argent  et. qui  étaient,  dit-il  spirituellement,  sa  caisse 
d'épargne  ;  il  n'admet  pas  que  Rotrou  fut  sur  le  point  d'être  arrêté  pour 
dettes  au  moment  de  la  représentation  du  Venceslas;  il  doute  que  Ro- 
trou ait  senti  son  génie,  à  l'âge  de  quinze  ans,  en  lisant  Sophocle.  La 
préface  de  M.  de  R.  est  d'ailleurs  écrite  avec  beaucoup  d'agrément  et  de 
verve.  Nous  allions  oublier  de  citer  les  pièces  de  Rotrou  que  M.  de  R. 
admet  dans  son  édition  ;  elles  sont  au  nombre  de  six  ;  dans  le  premier 
volume.  Hercule  mourant,  Antigone,  Le  véritable  Saint-Genest  ; 
dans  le  second,  Dom  Bernard  de  Cabrére,  Venceslas  et  Cosroès.  Six 
pièces,  c'est  peu,  et  l'on  pourrait  chicaner  encore  l'éditeur  sur  le  choix 
qu'il  a  fait;  on  regrettera  au  moins  de  ne  pas  trouver  dans  ce  recueil  si 
élégamment  édité  la  charmante  comédie  de  la  Sœur  et  ces  Sosies  qui  ont 
fourni  à  Molière  tant  de  détails  heureux  et  que  M.  de  Ronchaud  re- 
garde comme  une  «  très  bonne  comédie,  pleine  de  traits  excellents  » 
(p.  xxx  »  2).  A.  C. 


i63.  —  L'abbé  Galiani.  Correspondance  avec  Mme  d'Epinay,  Mme  Necker. 
Mme  Geoffrin,  Diderot,  Grimm,  d'Alembert.  de  Sartine,  d'Holbach,  etc.  Nouvelle 
édition,  ornée  d'un  portrait  de  Galiani,  entièrement  rétablie  d'après  les  textes  ori- 
ginaux, augmentée  de  tous  les  passages  supprimés  et  d'un  grand  nombre  de  lettres 
inédites,  avec  une  étude  sur  la  vie  et  les  œuvres  de  Galiani,  par  Lucien  Perey  et 
Gaston  Maugras.  Paris,  C.  Lévy,  1881,  2  vol.  in-8°  de  lxxiv-543  p.  et  de  681  p. 

Lettres  de  l'abbé  Gallnni  à  Mme  d'Epinay,  Voltaire,  Diderot,  etc.,  etc., 
publiées  d'après  les  éditions  originales,  augmentées  des  variantes,  de  nombreuses 
notes  et  d'un  index,  avec  notice  biographique,  par  Eugène  Asse.  Paris,  Char- 
pentier, 1881,  2  vol.  in-18  de  vi-422  p.  et  Lxx-422  p.  (La  notice,  brochée  en  tête 
du  tome  II,  doit  être  reliée#en  tête  du  tome  Ier). 

La  correspondance  française  de  l'abbé  Galiani  a  eu  deux  fois  en  ce 

1.  P.  li  «  Rotrou  était  à  Paris,  »  dit  M.  de  R.,  lorsque  l'épidémie,  dont  il  devait 
être  victime,  éclata  à  Dreux;  M.  Person  a  prouvé  que  Rotrou  était  à  Dreux,  lors- 
que se  déclara  la  maladie. 

2.  On  nous  dit  que  ces  deux  pièces  se  trouveront  dans  l'édition  que  M.  Félix  Hé- 
mon,  l'auteur  de  Y  Eloge  de  Rotrou  récemment  couronné  par  l'Académie,  doit  bien- 
tôt publier  chez  Laplace  et  Sanchez. 


0  HISTOIRE    Kl     DK    LITTÉRATUKR  I  2Q 

siècle  une  fortune  singulière.  Révélée  au  public  en  1818  par  les  éditions 
simultanées,  et  toutes  deux  fort  médiocres,  de  Barbier  et  de  Serieys,  elle 
a  sollicité,  en  1881,  la  curiosité  d'érudits  qui  ont  travaillé  à  l'insu  les 
uns  des  autres  et  dont  les  publications  n'ont  ni  les  mêmes  qualités,  ni 
les  mêmes  défauts.  N'est-il  pas  curieux  que  Galiani  ait  attendu  plus  de 
soixante  ans  un  honneur  dont  il  était  assurément  plus  digne  que  bien 
d'autres  épistolaires?  Les  imperfections  choquantes  des  textes  de  18 18 
éveillaient,  en  i85o,  la  sagacité  toujours  aiguisée  de  Sainte-Beuve  : 
«  Ces  deux  éditions,  disait-il  ',  sont  également  défectueuses  au  point 
de  compromettre  l'agrément  de  la  lecture.  On  ne  saurait  imaginer  les 
inexactitudes  de  mots,  les  altérations  de  sens,  les  inepties,  pour  tout 
dire,  qui  se  sont  glissées  dans  le  texte  de  l'une  et  de  l'autre  ;  il  serait  dif- 
ficile de  les  distinguera  cet  égard  ».  Vers  le  même  temps,  MM.  E. 
et  J.  de  Goncourt  réclamaient  une  édition  plus  complète  et  ajoutaient 
qu'après  ce  nouveau  travail  il  y  aurait  «  un  remaniement  dans  l'ordre 
des  épistolaires  français  et  peut-être  un  changement  de  rang  dans  les 
premiers  rangs  \  »  Cet  appel  ne  devait  être  entendu  qu'après  un  nouvel 
intervalle  de  trente  ans. 

M.  Perey  et  Maugras  ont  consacré  plusieurs  années  à  copier  et  à 
collationner,soit  les  lettres  de  l'abbé  qu'ils  avaient  achetées  en  suivant 
assidûment  les  ventes,  soit  celles  que  les  amateurs  leur  ont  permis  de 
collationner  sur  les  autographes;  M.  P.  a  obtenu  non  sans  peine,  et  grâce 
au  concours  de  M.  A.  Geffroy,  la  communication  de  la  correspondance 
diplomatique  de  Galiani  avec  son  ministre  Tanucci;  les  publications  ré- 
centes dont  l'abbé  a  été  l'objet  de  la  part  de  ses  compatriotes  ont  été 
mises  à  profit  et  des  documents  inconnus,  tels  que  le  Journal,  encore 
inédit,  d'un  voyage  en  Italie  par  Mme  Necker  de  Saussure,  ont  fourni 
un  contingent  notable  de  faits,  de  traits  et  d'anecdotes.  Le  principal 
résultat  de  ces  efforts  est  la  réunion  de  trente  lettres  inédites  ou  non  re» 
cueillies,  dont  treize  au  numismate  Joseph  Pellerin  (les  originaux  for- 
ment à  la  Bibliothèque  nationale  le  n°  1074  des  nouvelles  acquisitions 
françaises);  quatre  à  d'Alembert,  dont  trois  déjà  publiées  par  Ch.  Pou- 
gens  dans  les  Œuvres  posthumes  de  d'Alembert  (An  VII,  1799,  2  vol. 
in- 18,  tome  I,  pp.  404-414),  et  qui  ne  méritaient  pas,  par  ce  fait,  l'épi- 
thète  d'inédites  3;  les  autres  ont  été  signalées  ou   communiquées  par 

1.  Causeries  du  lundi,  t.  II,  p.  440.  Voir  aussi  une  note  sur  Galiani  à  propos  du 
choix  publié  en  1866  par  M.  Paul  Ristelhuber  (Causeries,  tome  VIII,  p.  545  . 
Sainte-Beuve  rappelle,  à  ce  propos,  que  la  Revue  critique  du  6  octobre  i865  avait 
dit  un  mot  de  ces  Contes,  lettres  et  pensées. 

2.  UEclair,  journal  (1852)  nos  6  et  7. Ces  deux  articles  n'ont  point  été  réimprimés. 

3.  La  lettre  du  25  septembre  1775,  dont  l'original  appartient  actuellement  à 
M.  Minoret,  a  été  publiée  aussi  comme  inédite  dans  l'Amateur  d'autographes  de 
i865,  p.  325,  avec  d'assez  nombreuses  fautes  de  lecture  qui  ont  été  rectifiées  par 
MM.  Perey  et  Maugras.  La  seule  lettre  à  d'Alembert,  qui  fût  véritablement  inédite 
(collection  Dubrunfaut),  se  trouve  reproduite  deux  fois,  p.  xlvii  de  l'introduction  et 
tome  II,  p.  645. 


l3û  RKVCH,    CRITIQUE 

Mmc  la  comtesse  d'Haussonville,  M.  le  marquis  de  Fiers,  M.  Minoret, 
M.  le  comte  A.  de  Gobineau,  M.  Rieu,  duBritish  Muséum,  M.  J.  Grot, 
de  Saint-Pétersbourg,  MM.  Puttick  et  Simpson,  libraires  à  Londres,  et 
M.  Etienne  Charavay.  M.  Dubrunfaut  avait,  en  outre,  permis  à 
MM.  P.  et  M.  de  conférer  sur  les  autographes  toutes  les  lettres  de  l'an- 
née 1771  qu'il  avait  acquises  dans  la  vente  du  2  février  1874.  Enfin  les 
éditeurs  ont  eut  le  bonheur  de  se  procurer  trois  lettres  adressées  à  Ga- 
liani  par  Diderot,  par  Grimm  et  par  la  reine  Caroline  (celle-ci  a  été 
retrouvée  aux  archives  du  Palais-Royal  de  Naples  par  M.  A.  Geffroy); 
ils  ont,  en  outre,  reproduit  douze  lettres  de  Mmc  d'Epinay  à  l'abbé,  in- 
sérées par  MM.  Brunet  et  Parison  à  la  fin  des  Mémoires  mis  au  jour  en 
1 8 1 8  ;  Barbier  n'en  avait  publié  que  quatre  et  Seriey s  aucune. 

M.  Asse  a  procédé  tout  autrement.  Il  ne  semble  pas  s'être  douté  que 
les  originaux  mêmes  de  toute  la  correspondance  de  Galiani  avec  Mme  d'E- 
pinay,  sans  parler  d'un  certain  nombre  d'autres  autographes,  ont  passé 
à  diverses  époques  chez  MM.  Charavay.  Après  avoir  comparé  entre  elles 
les  éditions  Barbier  et  Serieys,  «  nous  arrivâmes,  dit-il  (Avertissement, 
p.  m),  à  la  conviction  que  si  le  véritable  texte  de  Galiani  n'existait  pas 
plus  dans  l'une  que  dans  l'autre  prises  séparément,  il  pouvait  être  établi, 
par  leur  minutieuse  confrontation,  et  que  ce  qui  manquait  dans  l'une 
pouvait  être  retrouvé  dans  l'autre  ».  De  ce  que  Barbier  reproche  à 
Serieys  d'avoir  négligé  parmi  les  suppressions  nécessaires,  «  celles  qui 
étaient  impérieusement  commandées  par  le  bon  goût  et  le  respect  pour 
les  mœurs  »,  M.  A.  conclut  que  le  texte  de  Serieys  est  préférable, 
puisque  les  scrupules  de  son  concurrent  sont  inconciliables  «  avec  la 
fidélité  rigoureuse  qui  est  le  premier  devoir  —  c'est  du  moins  ainsi  qu'on 
le  comprend  aujourd'hui  —  d'un  éditeur  ».  M.  A.  va  plus  loin,  il 
accepte  pour  valable  la  défense  de  Serieys  qui,  soucieux  de  justifier  l'au- 
thenticité des  copies  dont  il  s'était  servi,  prétendait  les  tenir  de  Mme  R..., 
fille  de  Lecourt  de  Villière,  secrétaire  de  Grimm  ;  celui-ci  les  lui  aurait 
confiées  en  quittant  la  France.  J'ignore  si  cette  explication  parut  suffi- 
sante aux  lecteurs  de  18 18,  mais  puisque  M.  A.  fait  à  la  nouvelle  édition 
de  la  Correspondance  littét  aire  l'honneur  de  la  citer  presque  à  chaque 
page,  il  a  certainement  jeté  les  yeux  sur  le  Mémoire  où  Grimm  célèbre 
les  bienfaits  de  Catherine  et  il  y  aura  vu  que,  menacé  dans  sa  liberté  et 
peut-être  dans  sa  vie,  par  les  dénonciations  de  la  section  du  Mont-Blanc, 
il  quitta  brusquement  Paris  en  février  1793,  n'emportant  que  les  lettres  de 
l'impératrice  *.  Bientôt  après  sa  maison  fut  mise  au  pillage  et  sa  biblio- 
thèque transportée  au  dépôt  littéraire  de  la  rue  Saint-Marc.  Les  a  pape- 
rasses »,  selon  l'expression  de  D.  Poirier,  y  formaient  à  elles  seules 
trente-quatre  paquets  et  les  lettres  de  Galiani  y  devaient  tenir  leur  place, 
ainsi  que  les  manuscrits  et  les  papiers  personnels  de  Mme  d'Epinay.  Or, 
Serieys  était,  à  cette  époque,  conservateur  du  dépôt  littéraire  delà  rue  de 

j.  Cf.  Corr.  litt.,  tome  1,  pp.  41-46,  et  tome  XVI,  p.  552. 


D  HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE  I  3  I 

Lille  et  il  lui  fut  sans  doute  aisé  de  se  procurer  la  copie  de  cette  corres- 
pondance, comme  il  se  procura  celle  des  lettres  du  P.  Pacciaudi  à  Caylus 
et  du  président  de  Brosses  qu'il  édita  en  1799  et  en  1802.  Dans  sa  Lettre 
de  V éditeur  de  la  correspondance  complète  de  l'abbé  Galixni  à  l'éditeur 
de  cette  correspondance  incomplète  ',  il  accuse  Barbier  d'avoir  sup- 
primé vingt-neuf  lettres  ;  le  terme  n'est  pas  tout  à  fait  exact  et  pour 
cause  :  s'il  avait  pu,  en  effet,  retrouver  seize  lettres  à  Mme  de  Belzunce, 
fille  de  Mme  d'Epinay  (Barbier  n'en  a  donné  que  deux),  dont  l'authenti- 
cité paraît  incontestable,  il  y  avait  ajouté  une  lettre  à  Caraccioli  qui 
nous  inspire  quelques  doutes  par  la  complaisance  avec  laquelle  Galiani 
reproduit  les  éloges  que  Voltaire  avait  donnés  aux  Dialogues  sur  les  blés 
(MM.  P.  et  M.  l'ont  reproduite  en  y  joignant  un  fragment  de  Caraccioli 
lui-même  dont  ils  ne  font  pas  connaître  la  provenance)  ;  une  lettre  à 
Msr  Sanseverino,  archevêque  de  Païenne,  dont  MM.  P.  et  M.  n'ont  pas 
tenu  plus  de  compte  que  d'une  lettre  à  l'abbé  Le  Batteux,  toute  relative 
à  Horace,  mais  où  Galiani  attaque  sans  motif  les  ennemis  de  Voltaire 
et  l'orthographe  de  celui-ci  -,  une  à  Mme  d'Epinay  (14  novembre  1772), 
connue  sous  le  nom  de  lettre  aux  p...  (mutilée  par  MM.  P.  et  M.)  ;  deux 
à  Mme  Du  Boccage  que  Serieys  dit  tenir  de  Mme  de  Beauharnais,  mais 
qu'il  a  dû  complétera  sa  manière  (ainsi  que  le  remarquent  MM.  P.  et  M.)  ; 
une  à  d'Alembert  (28  novembre  1777),  Q111  provoque  de  leur  part  la 
même  observation  ;  enfin  quatre  lettres  à  Voltaire,  à  Marmontel,  à 
Raynal  et  à  Thomas,  rejetées  avec  raison  par  ces  mêmes  éditeurs  : 
«  La  moindre  connaissance  du  style  de  Galiani,  disent-ils,  prouve  que 
ce  sont  là  d'audacieux  pastiches.  D'abord  les  sujets  de  ces  lettres  sont 
tous  empruntés  à  un  fait  ou  à  une  anecdote  tirés  de  la  biographie  de 
Diodati  ou  des  mémoires  du  temps...  Ensuite,  aux  lettres  authentiques 
de  Galiani  l'éditeur  ne  met  pas  une  seule  note  explicative  ;  au  contraire, 
il  les  prodigue  à  chaque  page  lorsque  la  lettre  est  de  sa  composition  et, 
pour  donner  encore  plus  de  vraisemblance  à  sa  supercherie,  il  feint  soit 
une  erreur  de  date,  soit  une  erreur  de  fait  et  il  s'empresse  de  mettre  une 
note  pour  expliquer  que  l'abbé  s'est  trompé.  Enfin,  le  ton  qui  règne  dans 
ces  lettres  ne  peut  laisser  le  moindre  doute  sur  leur  auteur.  Autant 
Galiani  est  aimable  et  poli,  autant  Serieys  se  montre  grossier  et  trivial; 
en  particulier  la  lettre  à  Raynâl  n'est  qu'un  tissu  d'injures.  » 

M.  A.  s'est  montré  moins  difficile;  il  accueille  toutes  ces  pages  sup- 
posées ou  adultérées,  sans  émettre  la  moindre  réserve  ;  il  intervertit  les 
rôles  lorsqu'il  reproche  à  l'édition  Barbier  «  des  fautes  évidentes  de  lec- 
ture qui  ne  sont  pas  dans  l'édition  Serieys  »;  il  se  plaît  même  à  repro- 

i.  Par  M.  C.  de  S4  M...  (pseudonyme  adopté  par  Serieys  à  cette  occasion),  Paris, 
J.-G.  Dentu,  imp.  libr.  1818,  in-8,  16  pp.  Ce  pamphlet,  dont  ne  parlent  point  les 
nouveaux  éditeurs,  était  distribué  aux  acheteurs  de  l'édition  Dentu  ;  on  le  trouve 
souvent  dans  les  ex.  anciennement  reliés.  P.  i3,  Serieys  y  annonce  la  prochaine 
publication  de  la  correspondance  de  l'abbé  Conti  «  avec  une  dame  aussi  célèbre  que 
Mme  d'Epinay,  »  Ce  projet  n'a  pas  eu  de  suite. 


l32  RKVUIC    CKITIQUh 

duire  comme  des  variantes  des  bévues  que  signalait  en  1819  une  note 
anonyme  du  Journal  des  savants,  communiquée  sans  doute  doute  par 
Barbier  à  Daunou  ï  :  d'Albant  pour  d'Albaret,  Père  pour  Pe\ay, 
Sgnarra  pour  Ignarra,  et  celle-ci,  plus  surprenante  que  les  autres  : 
«  Si  je  voulais  me  venger,  écrit  Galiani  dans  sa  première  lettre  connue 
à  Mme  d'Epinay  (Paris,  2  février  1765),  je  vous  retrancherais  les  dations 
des  oranges  de  Malte  »;  MM.  P.  et  M.  ont  lu  et  bien  lu  rations,  mais 
M.  A.,  par  respect  pour  le  texte  de  Serieys,  n'a  pas  osé  faire  une  correc- 
tion aussi  élémentaire! 

Bien  que  déshonorée  par  de  telles  inadvertances  et  d'aussi  méprisables 
subterfuges,  l'édition  Serieys  avait  sur  celle  de  Barbier  l'avantage  d'of- 
frir un  texte  plus  exact  en  ce  qui  touche  non  seulement  les  italianismes, 
mais  encore  les  passages  libres  ou  irrévérencieux.  Il  est  fâcheux  que 
MM.  P.  et  M.  aient  obéi  à  des  scrupules  très  discutables  en  pareil  cas; 
lorsqu'ils  se  flattent  d'avoir  rétabli  «  les  passages  supprimés  »,  on  pour- 
rait leur  répondre  :  «  Beaucoup,  soit,  mais  pas  tous  ».  Il  est  assez  scabreux, 
je  le  sais  bien,  de  réclamer  la  restitution  des  polissonneries  qui  choquent 
à  juste  titre,  mais  sur  cette  question  d'intégrité,  il  ne  me  semble  pas  qu'il 
puisse  y  avoir  ici  divergence  d'opinions;  l'éditeur  ne  doit  jamais  oublier 
qu'il  est  avant  tout  le  très  humble  serviteur  de  l'auteur  qu'il  réimprime 
et  il  est  tenu  de  ne  point  biffer  ce  qu'il  n'oserait  écrire  lui-même. 

Toute  cette  question  fort  complexe  de  l'établissement  du  texte  de  Ga- 
liani méritait  d'être  étudiée,  et  les  lecteurs  de  la  Revue  critique  me  par- 
donneront sans  doute  de  m'y  être  arrêté  un  peu  longuement.  Il  fallait 
bien  suppléer  à  la  brièveté  ou  même  à  l'absence  d'indications  qu'on  était 
en  droit  d'exiger  des  nouveaux  éditeurs.  Il  me  reste  à  présenter  quelques 
observations  sur  leurs  commentaires  :  celui  de  MM.  P.  et  M.  a  surtout 
été  écrit  en  vue  des  gens  du  monde  à  qui  l'on  veut  épargner  la  moindre 
recherche;  celui  de  M.  A.  décèle  sa  parfaite  connaissance  des  hommes 
et  des  choses  du  xvin0  siècle,  et  il  y  a  fort  à  apprendre  dans  ses  excel- 
lentes notules  généalogiques,  biographiques  et  bibliographiques. 

17  juillet  1769  (édition  A,  t.  I,  p.  3).  Cette  lettre  a  été  insérée  dans  la 
Correspondance  littéraire  (janvier  1 77 1  )  par  Grimm,  qui  promettait 
de  la  faire  suivre  d'autres  pour  remplacer  celles  de  Voltaire  à  Damila- 
ville  (mort  en  1768  et  non  en  1778,  comme  un  lapsus  typographique  le 
fait  dire  a  M.  Asse).  «  Il  résulte  delà,  ajoute-t-il,  que  l'on  pourrait  espé- 
rer trouver  dans  les  archives  de  Gotha  et  ailleurs  des  copies  des  lettres 
de  Galiani  adressées  par  Grimm  à  la  suite  des  siennes  ».  Je  suis  en  me- 
sure d'affirmer  à  M.  A.  que  ces  lettres  n'existent  point,  du  moins  à 
Gotha,  non  plus  que  celle  dont  Galiani  paraît  si  fier  :  «  Le  duc  de  Saxe 

1.  Le  Journal  des  savants  a  successivement  annoncé  l'édition  Barbier  (juin  1818, 
p.  377),  signalé  les  balourdises  de  la  publication  concurrente  (septembre  »8i8,  p.  56g) 
et  donné  un  article  de  Daunou,  fort  sévère  dans  ses  conclusions  sur  le  caractère  de 
Galiani  lianvier  1819,  p.  16.;  les  nouveaux  éditeurs  ont  passé  sous  silence  ces  trois 
articles,  dignes  cependant  d'attirer  leur  attention. 


d'histoire    kt    OK    LITTÉRATURE  1^3 

Gotha,  écrit-il  le  2  3  avril  1774,  a  reçu  de  moi  une  réponse  fort  drôle  :  si 
j'avais  un  copiste  français,  je  vous  enverrais  l'une  et  l'autre.  »  M.  le  Dr 
Pertsch  a  bien  voulu  faire  à  cet  égard  des  recherches  restées  absolument 
infructueuses. 

4  août  1770  (éd.  A,  p.  117,  note  1).  Gabriel-François  Coyer  était  abbé 
et  non  religieux  ;  il  n'a  donc  pas  droit  au  qualificatif  de  Père. 

i3  décembre  1770  (éd.  A.,  p.  179).  M.  A.  a  corrigé  dans  l'Appendice 
de  son  second  volume  une  note  inexacte  sur  les  Annonces,  Affiches  et 
avis  divers,  connus  sous  le  nom  de  Journal  des  provinces,  mais  il  ne 
dit  pas  que  l'«  extrait  »,  attribué  par  Galiani  à  d'Alembert,  a  paru  dans  le 
n°  46  (14  novembre  1 770)  ;  le  2  r  août  1 77 1 ,  il  est  également  fait  allusion 
aux  Dialogues  sur  les  blés  et  à  leur  auteur,  à  propos  de  la  Méthode  pour 
recueillir  les  grains  de  Ducarne  de  Blangy. 

9  mars  1771  (éd.  A.,  p.  216).  M.  A.  suppose  à  tort  que  le  Sermon 
prononcé  par  Grimm  dans  la  «  synagogue»  d'Holbach  a  été  mal  classé 
par  les  éditeurs  de  la  Correspondance  littéraire.  Ce  sermon  figure  bien 
à  la  date  de  janvier  1770  dans  le  manuscrit  et  il  n'a  pu,  en  effet,  être 
composé  qu'à  la  fin  de  1769,  au  retour  du  voyage  de  cinq  mois  que 
Grimm  fit  en  Allemagne.  Mme  d'Epinay  n'en  avait  envoyé  copie  à  Ga- 
liani que  beaucoup  plus  tard,  et  cela  n'a  rien  de  surprenant,  quand  on 
songe  à  la  lenteur  des  communications  à  cette  époque. 

19  octobre  1771.  Mme  d'Epinay  à  Galiani  (éd.  P.  et  M.,  t.  I,  p.  457; 
éd.  A.,  t.  I,  p.  283).  Dans  l'édition  P.  et  M.,  il  faut  lire  Gilabeldé  et 
non  Gisabeldi.  Tout  le  passage  commençant  par  :  «  Feu  M.  l'abbé  de 
Bragelongne,  »  jusqu'à  :  «  Il  est  impossible  qu'un  rêve  philosophique  et 
métaphysique  ne  le  soit  pas  [obscur]  »  se  retrouve,  sauf  deux  ou  trois 
variantes,  dans  les  Œuvres  complètes  de  Diderot,  t.  IX,  p.  464.  Mme  dE- 
pinay,  qui  a  soin  de  dire  :  «  Je  tiens  ce  conte  de  Diderot,  »  recopiait 
sans  doute  le  manuscrit  qu'elle  avait  sous  les  yeux  et  qui  était  destiné  à 
la  Correspondance  littéraire  rédigée  par  elle  et  par  le  philosophe  pen- 
dant le  voyage  de  Grimm  en  Angleterre  l.  M.  A.  dit  avoir  cherché  inu- 
tilement les  Eléments  du  système  général  du  monde  par  M.  de  Laz- 
niez  (Diderot  l'appelle  Lasnière).  Je  confesse  qu'après  de  nombreuses 
investigations  je  n'ai  pas  été  plus  heureux,  mais  je  serais  tenté  de  croire 
que  Diderot,  assez  coutumier  du  fait,  a  estropié  le  nom  de  l'auteur  ou 
le  titre  du  livre  et  peut-être  tous  les  deux. 

i3  juin  1772  (éd.  A.,  p.  35o).  La  note  citée  par  M.  A.  n'est  point 
de  l'auteur  de  cet  article,  mais  de  M.  Taschereau.  Je  n'ai  pas  eu  l'hon- 
neur de  connaître  M.  Hippolyte  de  La  Porte,  mort  le  29  février  i852. 


1.  On  peut  faire  la  même  observation  au  sujet  de  la  Lettre  de  M.  Raphaël  le 
jeune  dont  parle  Mm<»  d'Epinay  dans  sa  lettre  du  b  octobre  1771;  l'extrait  qu'elle 
en  donne  figure  à  peu  près  textuellement  dans  les  Œuvres  complètes  de  Diderot, 
t.  XVII,  p.  5oo,  et  dans  la  Correspondance  littéraire,  t.  IX,  p.  376;  mais  il  est  im- 
possible de  déterminer  qui  des  deux  auteurs  a  fourni  le  canevas. 


.- 


1  34  REVUE    CRITIQUE 

22  novembre  1772  (éd.  P.  et  M.,  t.  II,  p.  1 39).  La  note  sur  le  dessi 
nateur  Huber.  est  insuffisante.  Grimm  a  maintes  fois  parlé  de  lui  en  ter- 
mes qui  font  vivement  regretter  la  dispersion  de  ces  fameuses  découpu- 
res. Quant  aux  tableaux  «  assez  mauvais  »  dont  parle  la  baronne 
d'Oberkirch  dans  ses  Mémoires,  ceux  qui  ont  vu  en  1878  le  petit  por- 
trait à  l'huile  de  Voltaire  (appartenant  à  M.  d'Haussonville)  ne  seront 
pas  tentés  de  ratifier  ce  jugement  :  c'est  une  peinture  délicate,  sobre  et 
ferme  qui  rappelle  presque  l'école  de  Clouet.  M.  Desnoiresterres  a  pu- 
blié en  fac  similé  dans  V Iconographie  voltairienne  un  dessin  très  large 
et  très  vigoureux  d*un  autre  portrait,  dessin  faisant  partie  de  la  collec- 
tion de  M.  le  comte  Berolingein,  à  Spire. 

12  décembre  1772  (éd.  P.  et  M.,  t.  II,  p.  i5o;  éd.  A.,  t.  I,  p.  3o,8). 
A  propos  d'une  des  épitaphes  de  Piron,  dont  Galiani  remercie  Mme  d'E- 
pinay,  MM .  P.  et  M.  citent  celle  qui  commence  par  : 

J'achève  ici -bas  ma  route; 
C'est  un  vrai  casse-cou,  etc. 

M.  A.  paraît  avoir  mieux  choisi  en  indiquant  celle-ci  qui  est  beaucoup 
plus  célèbre  : 

Ci-gît...  Qui?  Quoi?  "Ma  foi,  personne,  rien; 
Un  qui,  vivant,  ne  fut  ni  valet  ni  maître,  etc. 

23  janvier  1773  (éd.  P.  et  M.,  t.  II,  p.  161  ;  éd.  A.,  t.  II,  p.  11, 
note  2).  Aufresne  n'est  pas  mort  vers  1806,  mais  le  4  juillet  1804,  à 
Saint-Pétersbourg  (Cf.  A.  de  Montet,  Dictionnaire  biographique  des 
Genevois  et  des-  Vaudois.  Lausanne,  G.  Bridel,  1877,  2  vol.  in-8). 
Même  lettre.  L'Honnête  criminel  de  Fenouillot  de  Falbaire  ne  fut  pas 
seulement  joué  en  province,  il  fut  représenté  en  1778  sur  le  théâtre  de 
Versailles,  par  ordre  de  la  reine,  alors  qu'il  était  officiellement  interdit  à 
la  Comédie-Française  :  singulière  contradiction,  dont  la  Partie  de 
chasse  de  Henri  IV  de  Collé  offre  un  autre  exemple. 

19  juin  1773  (éd.  P.  et  M.,  t.  II,  p.  216;  éd.  A.,  t.  II,  p.  63).  MM.  P. 
et  M.  ne  donnent  aucun  renseignement  sur  le  portrait  du  marquis  de 
Croismare  reçu  par  Galiani  ;  M.  A.  suppose  qu'il  n'existe  pas  à  la  Bi- 
bliothèque nationale.  Il  figure,  au  cabinet  des  Estampes,  dans  l'œuvre 
de  Cochin.  C'est  un  médaillon  de  profil  à  gauche,  gravé  par  Halm,  avec 
cette  inscription  :  M.  A.  N.  de  Croismare,  marquis  de  Lasson,  et  cette 
devise  :  Nil  dixit,  nil  egit  ut  alter,  tamen  omnia  recte,  devise  que 
l'on  peut,  sans  trop  de  présomption,  attribuer  à  Grimm,  puisqu'il  ter- 
mine ainsi  le  portrait  du  marquis  publié  pour  la  première  fois  dans  la 
nouvelle  édition  :  «  On  peut  écrire  sur  sa  tombe  qu'il  n'a  jamais  rien 
fait  ni  rien  dit  comme  un  autre  et  qu'il  a  cependant  toujours  fait  et  dit 
au  mieux.  »  (Cf.  tome  X,  p.  5o.) 

9  juin  178  1  (éd.  P.  et  M.,  t.  II,  p.  619).  MM.  P.  et  M.  ont  fait  deux 
personnages  de  Daudet  de  Jossan,  l'auteur,  selon  Meister,  ou  le  réviseur, 
selon  Barbier,  de  la  Lettre  de  M.  le  marquis  de  Caraccioli  à  M.  d'A- 
lembert  (contre  Necker).  La  note  de  M.  A.  est  plus  exacte  (t.  II,  p.  369) 


d'histoire  kt   de  littérature  I 3 5 

sans  être  complète  :  cette  lettre,  attribuée  à  Beaumarchais  par  Métra  et 
Bachaumont,  a  été  réimprimée  en  1828  par  M.  de  Ghâteaugiron  dans 
les  Mélanges  de  la  Société  des  bibliophiles  français  et  tirée  à  part. 

M.  A.  a  terminé  son  trayail  par  un  très  bon  index  alphabétique  ; 
MM.  P.  et  M.  ont  cru  remplacer  cet  indispensable  complément  par  des 
sommaires  qui  sont  loin  de  rendre  le  même  service.  M.  Asse  a  fait  figu- 
rer en  appendice  les  deux  Mémoires  à  Sartine  sur  les  monts  de  piété  ou 
lombards,  et  sur  les  entrepôts  de  blé  de  Sicile,  le  Dialogue  sur  les 
femmes  et  la  Dissertation  sur  le  chœur  et  la  musique  des  anciens. 
MM.  Perey  et  Maugras  n'ont  reproduit  que  la  première  et  la  troisième 
de  ces  quatre  pièces,  mais  ils  promettent  de  publier  les  deux  autres  avec 
la  Correspondance  diplomatique  inédite  et  les  Commentaires  sur  Ho- 
race, dont  ils  possèdent  le  texte  complet.  Souhaitons  qu'ils  parviennent 
à  recouvrer  toutes  les  lettres  adressées  à  Galiani  par  ses  amis  de  France  : 
ce  jour-là  seulement  ils  pourront  considérer  leur  tâche  comme  accom- 
plie. 

Maurice  Tourneux. 


164.  —  Von    Land    nnd   Leuten,   Bllder    und    Geschichten    aus    dem 

Herzogtum  Oldenbnrg,  von  Ludwig  Strackerjan.  Oldenburg,  Schulze.  in-8°, 
xvhi  et  169  p. 
Cbronlk      des     alten     Theaters      in     Oldenburg     (1S33     bis     1881), 

Festschrift   zu  der  Erœffnung  des  neuerbauten  Theaters  am  8  October  1881  von 
Freiherr  R.  von  Dalwigk.  Oldenburg,  Schulze.  in-8°,  iv  et  23o  p. 

Le  premier  de  ces  deux  ouvrages,  dont  le  titre  peut  être  traduit  ainsi 
«  Le  pays  et  les  gens  d'Oldenbourg  »,  renferme  d'agréables  récits  con- 
tés avec  humour  par  feu  Louis  Strackerjan  et  relatifs  aux  mœurs  du 
pays  d'Oldenbourg;  on" y  trouvera  de  curieux  détails  sur  la  superstition 
des  paysans,  sur  les  légendes  oldenbourgeoises,  sur  les  devises  et  senten- 
ces gravées  sur  les  maisons,  et  sur  ce  qu'en  Allemagne  on  nomme  la 
Culturgeschichte  ;  un  des  articles  les  plus  attachants  du  recueil  est 
consacré  aux  présages  et  aux  pressentiments  (Vorspuk);  nous  donnons 
en  note  les  titres  des  morceaux  qui  composent  le  volume  '. 

Le  théâtre  d'Oldenbourg  est  un  des  théâtres  de  VA  llemagne  qui  mé- 
ritent une  étude  spéciale  ;  dans  ces  cinquante  dernières  années  et  surtout 


1.  Erinnerung  aus  der  Marsch.  —  Hûnensteine  im  Oldenburgischen.  —  Die 
Kirchhofslinde  fit  Oldenburg.  —  Eine  Pastorei  im  Jahre  ijoo.  —  Das  Regenhleid, 
eine  Geschichte  aus  dem  Jahre  1708.  —  Die  Lehre  vom  Essen  im  plattdeutschen 
Sprichwort.  —  Haussprùche  im  Oldenburgischen.  —  Strafrecht  vor  %wei  hundert 
Jahren.  —  Edo  Wimeken  der  aeltere,  ein  Geschichtsbild  aus  den  friesischen 
Marschen.  —  Wie  ist  der  Vorspuk  %u  erklœren?  —  Die  Ochoter  Lùnse.  —  Eine 
Herbstdeichschau.  —  Wetterstimmungen.  —  Die  rœumliche  'Entwickelung  der  Siadt 
Oldenburg  vor  und  nach  dem  Freibriefe  von  i345.  —  Wie' s  der  dite  Lùning 
gemacht  hat.  —  Die  Zeitung  an  der  Drehorgel.  —  Die  Thorsperre  in  Oldenburg. 


f  36  KKVUK    CK1T1QUK 

dans  la  période  de  i83o  a  i85o,  il  s'est  acquis  des  titres  à  l'eslime  des 
lettrés  ;  il  a  eu  le  souci  du  grand  art,  il  n'a  représenté  relativement  que 
très  peu  de  pièces  vulgaires  et  banales,  il  a  joué  pour  la  première  fois 
YUriel  Acosta  de  Gutzkovv,  etc.  M.  de  Dalwigk  raconte  l'histoire  du 
théâtre  d'Oldenbourg  avec  beaucoup  de  détail  ;  il  suit  l'ordre  chronolo- 
gique; aussi,  son  récit  a  l'allure  et  la  monotonie  d'une  chronique  locale. 
Mais  on  sent  qu'il  est  homme  de  goût  et  qu'il  connaît  bien  les  choses 
du  théâtre;  ses  observations  sur  l'influence  des  grands  mouvements 
littéraires,  sur  le  rôle  des  personnages  remarquables  qui  furent  attachés 
au  théâtre  d'Oldenbourg,  comme  Adolphe  Stahr,  Julius  Mosen  (nommé 
«  dramaturge  »  en  1844),  Palleske,  sont  intéressantes  '. 

C. 


CHRONIQUE 


ALLEMAGNE.  —  La  collection  des  Deutsche  Litteraturdènkmale  ou  écrits  alle- 
mands du  xvnie  siècle,  que  publient  les  frères  Henninger,  de  Heilbronn,  et  que  dirige 
M.  Seuffert,  de  Wûrzbourg,  vient  de  s'augmenter  d'un  volume  nouveau,  YHermann, 
de  vVieland.  Sous  presse  sont  les  Frankfurter  gelehrte  An^eigen,  de  l'année  1772, 
plus  tard  paraîtront  :  de  Bodmer,  Charakter  der  deutschen  Geschichte  ;  de  Brentano, 
Gustav  Wasa;  de  Frédéric  II,  De  la  littérature  allemande  ;  de  Hagedorn,  Versuch 
einiger  Gedichte ;  de  Klinger  et  Sarasin,  Plimplamplasko  ;  de  Klopstock,  le  Mcssias 
de  1748  et  le  recueil  de  1771,  Oden  und  Elegien;  de  Moritz,  Anton  Reiser;  de  Schil- 
ler, les  Rœuber  de  1781  et  le  Musenalmanach ;  de  A.  W.  Schlegel,  Ueber  Littera- 
tur,KunstundGeist  des  Zeitaliers  ;de  J.  Elie  Schlegel,  Dramaturgische  Schriften; 
de  Thûmmel,  Wilhelmine;  de  Wagner,  die  Kindermœrderinn  ;  de  Wieland,  Er- 
^œhlungen,  Musarion,  Oberon  ;  de  Winckelmann,  Gedanken  ûber  die  Nachahmung 
der  griechischen  Werke,  Sendschreiben  ùber  die  Gedanken,  Erlœuterung  der  Gedan- 
ken ;  ajoutons-y  le  recueil  de  Herder,  von  deutscher  Art  und  Kunst. 

ANGLETERRE.—  Quoique  Thackeray  ait  désiré  qu'on  ne  fît  jamais  sa  biogra- 
phie, M.  R.-H.  Shepherd  prépare,  en  deux  volumes,  un  ouvrage  sur  l'auteur  de 
«  Pendennis  »  et  de  «  Vanity  Fair,  »  sous  le  titre  The  life,  letters  and  uncollected 
writings  in  prose  and  verse  of  W.  Makepeace  Trackeray.  On  voit,  par  le  titre  du 
livre,  que  la  publication  de  M.  Shepherd  renfermera,  outre  la  vie  du  célèbre  roman- 
cier, ses  lettres  et  ses  écrits  inédits. 

—  La  collection  des  Oriental  séries  de  Trûbner  s'accroîtra  bientôt  d'un  volume 
nouveau,  la  Metrical  Translation  of  Manu,  de  M.  Burnell,  qui  devait  paraître  d'a- 
bord dans  la  collection  des  «  sacred  books  of  the  East.  » 

—  M.  Alois  Brandl  prépare  un  livre  sur  Coleridge. 

BELGIQUE. —  Dans  une  séance  de  la  Société  d'entomologie  (ier  juillet), un  des  mem- 

1.  On  remarquera,  p.  9,  le  prologue  qui  fut  dit  le  i5  août  18 12  en  l'honnenr  de 
Napoléon  Ier  au  théâtre  d'Oldenbourg  :  «  laissez-le,  ô  dieux,  affermir  et  achever  notre 
bonheur...  vois,  son  peuple  fidèle  loue  en  lui  le  sage,  le  héros  et  le  père,  et  son 
trône  repose  sur  des  pieds  de  diamant.  »  —  P.  5o,  lire  Lausanne  et  non  «  Lauranne  ». 
—  Le  nom  du  célèbre  dramaturge  et  romancier  est  Freytag  et  non  Freitag. 


D'HISTOIRE  ET    DE    LITTERATURE  I  37 

bres,  M.  Van  Segvelt,  a  parlé  de  la  récente  publication  de  M.  Maspero,  La  trouvaille 
de  Deir-el-Bahari,  où  il  avait  trouvé  un  fait  intéressant  la  science  entomologique.Un 
cercueil  renfermait  la  momie  d'Amenhotep  I,  enveloppée,  selon  l'usage  de  l'époque 
thébaine,  des  pieds  à  la  tête,  de  guirlandes  de  fleurs  rouges,  jaunes  et  bleues;  au 
moment  de  l'enterrement,  une  guêpe,  attirée  par  les  fleurs,  entra  dans  le  cercueil; 
elle  s'y  est  conservée  intacte  et  nous  fournit  l'exemple,  probablement  unique,  d'une 
momie  de  guêpe;  sa  mort  remonte  à  3,55o  ans,  et  c'est  le  seul  insecte  d'une  si  haute 
antiquité  ayant  date  certaine. 

—  Le  Portugal,  notes  d'art  et  d'archéologie,  tel  est  le  titre  d'un  opuscule  intéres- 
sant de  M.  Adolf  de  Ceuleneer  (extr.  du  «  Bulletin  de  l'académie  d'archéologie  de 
Belgique  ».  Anvers,  90  p.).  Cet  opuscule  comprend  trois  parties  :  dans  la  première, 
M.  de  G.  retrace  les  questions  agitées  au  congrès  international  d'anthropologie  et 
d'archéologie  préhistoriques,  de  Lisbonne  (1880);  dans  la  deuxième,  il  étudie  les 
a^ulejos  ou  carreaux  émaillés;  dans  la  troisième,  il  nous  renseigne  sur  l'ancienne 
école  de  peinture  en  Portugal. 

—  Le  prix  annuel  de  25, 000  francs,  institué  par  le  Roi,  sera  décerné  :  en  1886,  à 
l'ouvrage  le  mieux  conçu  pour  développer  chez  la  jeunesse  belge,  l'intelligence  et  le 
goût  des  littératures  anciennes  et  modernes;  —  en  1887,  à  l'ouvrage  qui  démontrera 
le  mieux  de  quelle  manière  la  Belgique  doit  comprendre  son  rôle  dans  la  grande  fa- 
mille européenne;  —  en  1888,  au  meilleur  livre  sur  l'enseignement  des  arts  plasti- 
ques en  Belgique  et  sur  le  moyen  d'y  développer  l'art  et  de  le  porter  à  un  niveau 
plus  élevé.  Ces  concours  sont  exclusivement  belges. 

—  Dans  la  séance  du  3  juillet  de  la  commission  royale  d'histoire,  M.  Charles  Piot. 
a  lu  deux  notes  importantes,  la  première  sur  la  vaisselle  et  les  bijoux  de  Philippe  de 
Beau,_  et  la  seconde,  sur  le  testament  du  comte  Lamoral  d'Egmont ;  ce  testament, 
jusqu'ici  inconnu  et  dont  M.  Piot  donne  le  texte  complet,  fut  fait  par  Egmont,  le 
21  juin  i558,  au  moment  où  il  se  préparait  à  quitter  Bruxelles  pour  se  mettre  à  la 
tête  de  l'armée  «  du  roy  d'Espaigne  et  d'Engleterre,  en  ceste  guerre  d'entre  luy  et  le 
roy  de  France  ».  L'acte  contient  nombre  de  détails  intéressants  sur  les  nombreux 
enfants  du  comte,  sur  ses  biens  et  leur  partage;  on  y  voit  l'affection  tendre  et  pro- 
fonde qu'Egmont  portait  à  sa  femme  Sophie  de  Bavière,  alors  enceinte,  et  que  con- 
firme la  lettre  qu'il  lui  écrivit  quelques  heures  avant  de  monter  sur  l'échafaud. 

—  Les  séances  du  3o  mai  et  du  26  juin  de  la  Société  d'Anthropologie  ont  été 
marquées  par  de  curieuses  communications  et  discussions.  M.  Houzé  a  lu  une  no- 
tice sur  l'indice  céphalique  des  Flamands  et  des  Wallons,  et  M.  Vanderkindere, 
un  mémoire  sur  la  question  celtique;  nous  n'insistons  pas,  et  renvoyons  nos  lec- 
teurs au  numéro  14  (i5  juillet)  de  YAthenaeum  belge,  où  ils  trouveront  le  compte- 
rendu  détaillé  de  ces  deux  séances. 

—  La  classe  des  lettres  de  l'Académie  royale  met  au  concours  les  questions  sui- 
vantes :  Concours  annuel  pour  1884.  I.  Règles  de  la  poétique  et  de  la  versification 
suivies  par  les  Rederykers  au  xve  et  au  xvr3  siècle;  II.  Histoire  du  cartésianisme  en 
Belgique;  III,  Caractères  et  tendances  du  roman  historique  depuis  Walter  Scott  ; 
IV.  Histoire  des  origines,  des  développements  et  du  rôle  des  officiers  fiscaux  près 
les  Conseils  de  justice,  dans  les  anciens  Pays-Bas,  depuis  le  xve  siècle  jusqu'à  la 
fin  du  xvme;  V.  Etude  historique,  d'après  les  auteurs  et  les  inscriptions,  sur  l'or- 
ganisation, les  droits,  les  devoirs  et  l'influence  des  corporations  d'ouvriers  et  d'ar- 
tistes, che\  les  Grecs  et  les  Romains,  en  comprenant  dans  cette  étude  les  Grecs  de 
l'Asie-Mineure,  des  Iles  et  de  la  Grande  Grèce;  VI.  Histoire  de  la  dette  publique 
belge  ;  VII.  Exposé  comparatif,  au  point  de  vue  économique,  du  système  des  an- 
ciens corps  de  métiers  et  des  systèmes  d'associations  coopératives  de  production 


I  38  «KVUK    CKllIQUh 

formulées  dans  les  temps  modernes.  (Pour  chacune  de  ces  sepl  questions,  médaille 
d'or  de  «Soo  francs}.  —  Prix  Stassart  :  I.  Apprécier  l'influence  exercée  au  xvte  siècle 
par  les  géographes  belges,  notamment  par  Mercator  et  Ortelius  ;  donner  un  exposé 
des  travaux  relatif  s  à  la  science  géographique,  qui  ont  été  publiés  aux  Pays-Bas, et 
de  ceux  dont  ces  pays  ont  été  l'objet,  depuis  V invention  de  V imprimerie  et  la  décou- 
verte de  V Amérique  jusqu'à  l'avènement  des  archiducs  Albert  et  Isabelle.  (Prix  de 
3,ooo  francs);  II.  Notice  sur  Simon  Stévin  (prix  de  600  francs).  —  Prix  de  Saint- 
Génois  :  I.  Quelle  influence  ont  eue  sur  la  littérature  néerlandaise  les  réfugiés  fran- 
çais qui  se  sont  établis  aux  Pays-Bas  après  la  révocation  de  l'édit  de  Nantes  (Mé- 
moires à  rédiger  en  flamand;  prix  de  450  fr.)  —  Prix  Teirlinck  :  Histoire  de  la 
prose  néerlandaise  avant  Marnix  de  Sainte- Aldegonde  (1,000  fr.) 

—  On  trouvera  dans  la  2e  livraison  du  Bulletin  Rubens  des  rapports  adressés  par 
M.  Ruelens  et  datés  de  Carpentras,  où  cet  érudit  a  dépouillé  la  collection  Peiresc; 
on  sait  que  M.  Ruelens  a  été  chargé  de  rechercher  et  de  recueillir  dans  les  biblio- 
thèques et  dépôts  d'archives  de  France  les  documents  relatifs  à  Rubens. 

—  Le  conservateur  du  Musée  Plantin,  à  Anvers,  M.  Max  Rooses,  vient  de  faire 
paraître  (Gand,  Hoste),  un  a  nouveau  livre  d'esquisses  »  en  langue  flamande;  on 
trouvera  dans  ce  Nieuxv  Schetsenboek  une  étude  sur  les  Nibelungen  comparés  aux 
chants  de  YEdda;  une  histoire  de  la  chanson  politique  et  religieuse  dans  les  Pays- 
Bas  au  xvie  siècle;  deux  monographies,  l'une  sur  le  poète  dramatique  Willem  Ogier, 
et  l'autre  sur  le  jésuite  Poiriers  (les  seuls  écrivains  remarquables  en  langue  flamande 
au  xvne  siècle);  un  essai  sur  la  poésie  flamande  de  i83o  à  1880;  un  morceau  très 
intéressant  sur  Henri  Conscience,  sa  vie  et  ses  œuvres.  —  Il  y  a  quelque  temps, 
M.  Rooses  avait  publié  un  petit  mémoire  fort  curieux  sur  Plantin  et  l'imprimerie 
plantinienne  {Plantijn  en  de  Plantijnsche  drukkerij);  M.  Rooses  a  repris  ce  travail 
et  lui  a  donné  de  plus  grands  développements,  grâce  aux  documents  sans  nombre 
qu'il  a  trouvés  dans  le  Musée  Plantin;  nous  pouvons  annoncer  que  son  étude,  re- 
maniée et  considérablement  augmentée,  paraîtra  assez  prochainement,  en  langue  fran- 
çaise, et  sous  le  titre  :  Christophe  Plantin,  imprimeur  anversois.  Cette  grande  publi- 
cation sera  ornée  de  cent  planches  phototypiques  hors  texte  et  de  plusieurs  centaines 
de  planches  dans  le  texte. 

DANEMARK.  —  M.  Troels  Lund  travaille  à  une  Histoire  du  Danemark  et  de  la 
Norvège  dans  la  seconde  moitié  duxvi*  siècle,  de  i55o  à  i5q6;  dans  cette  publica- 
tion (en  langue  danoise)  il  retrace  d'abord  la  situation  générale  de  la  nation,  puis 
l'histoire  politique  de  la  monarchie.  Il  a  composé  jusqu'à  présent  les  quatre  pre- 
miers livres  de  la  première  partie  de  cet  ouvrage;  chaque  livre  forme  un  volume; 
dans  le  premier  volume,  il  décrit  en  traits  généraux  le  pays  et  le  peuple  d'alors  et 
montre  en  quoi  ils  différaient  du  peuple  et  du  pays  d'aujourd'hui;  dans  le  deuxième 
et  le  troisième  livre  il  expose  la  vie  de  chaque  jour,  le  dehors  et  l'intérieur  des  mai- 
sons à  la  campagne  et  à.  la  ville,  l'existence  des  seigneurs  dans  leurs  châteaux, 
etc.  ;  dans  le  quatrième  livre  il  traite  des  costumes  de  l'époque.  Le  deuxième  et  le 
troisième  livre  forment  un  ouvrage  spécial  qui  vient  d'être  traduit  en  allemand  sous 
la  direction  de  l'auteur  lui-même,  et  qui  a  pour  titre  :  Das  tœgliche  Leben  in  Skan- 
dinavien  wœhrcnd  des-  XVI.  Jahrhunderts,  eine  cullurhistorische  Siudic  ùber  die 
Entwickelung  und  Einrichtung  der  Wohnungen  (Copenhague,  Hœst  et  fils.  In-8°, 
vi  et  485  p.  9  mark.) 

ESPAGNE.  —  Une  publication  considérable,  consacrée  aux  chants  populaires  de 
l'Espagne,  paraîtra  prochainement,  à  la  librairie  Francisco  Alvarez,  de  Séville,  sous 
le  titre  :  Cantos  popularcs  espaholes,  recogidos,  ordenaJos  i  ilustrados  por  Fran- 


D  HISTOIRE    ET    DE    LlllKHAlUilh  1^9 

cisco  Rodrigue^  Marin.   L'ouvrage  comprendra  quatre  volumes  et  renfermera  près 
de  10,000  chants  populaires. 

GRÈCE.  —  Un  de  nos  correspondants  nous  écrit  d'Athènes  :  deux  importantes 
études  archéologiques  viennent  de  paraître  :  toute  deux  se  rapportent  à  la  topogra- 
phie du  Pirée.  L'une  (qui  a  d'abord  été  publiée  dans  le  Parnassos)  est  l'œuvre  du 
professeur  J.  Gh.  Dragatsis,  et  a  pour  litre  :  Ta  Oéaxpa  xou  Iletpatûç  -/.a!  6  y.o)çbç 
A'.ij/rjv.  Grâce  à  cette  monographie,  la  place  des  deux  théâtres  du  Pirée  est  à  jamais 
fixée,  ainsi  que  celle  du  port  appelé  le  xtoçoç  Xtjrrçv  ;  le  passage  de  Xénophon,  Hellen., 
II,  4,  32,  trouve  une  explication  claire  et  satisfaisante.  L'autre,  de  M.  A.  Mélétopoulos, 
Hîp!  vqç,  <7X,suo6y)X,y;<;  tou  <P£Xg)VOÇ,  fixe  l'emplacement  du  célèbre  arsenal  de  Philon 
d'Eleusis. 

—  Une  Société  historique  et  ethnologique  de  la  Grèce  s'est  fondée  récemment.  Elle 
se  propose  de  créer  un  musée  renfermant  toute  sorte  d'objets  relatifs  à  l'histoire  de 
la  Grèce  au  moyen  âge  et  dans  les  temps  modernes.  Les  manuscrits  et  documents 
écrits  formeront  une  dépendance  à  part  du  Musée  sous  le  nom  d'Archivé  historique. 
C'est  le  même  but  que  la  Société  Archéologique  d'Athènes  poursuit  pour  la  Grèce 
classique. 

—  L'ÎVOrjvaiov  a  cessé  de  paraître. 

RUSSIE.—  Une  nouvelle  édition  des  Œuvres  de  Pouschkine  doit  paraître  à  Mos- 
cou, par  les  soins  de  M.  Efremof  ;  elle  comprendra  sept  volumes,  dont  l'un  renfer- 
mera les  lettres  intimes  du  poète;  on  y  trouvera  deux  portraits  de  Pouschkine,  dont 
l'un,  jusqu'ici  inconnu  et  conservé  maintenant  au  Musée  de  Moscou,  est  dû  à  Pousch- 
kine lui-même. 

SUISSE.  —  M.  G.  Meyer  de  Knonau  vient  de  rééditer  une  des  meilleures  œuvres 
d'histoire  du  moyen  âge,  les  Nihve  casus  monasterii  Sancti  Galli  (Saint-Gall,  Iluber. 
In-8°,  lxii  et  3gi  p.).  La  Société  historique  de  Saint-Gall  avait  déjà  fait  paraître  en 
1862  une  édition  de  cet  ouvrage;  mais  cette  édition  n'avait  ni  commentaire  ni  index 
et  le  texte  n'avait  pas  été  établi  avec  toute  la  rigueur  désirable.  M.  Meyer  de  Knonau 
a  publié  à  nouveau  ce  texte  avec  la  plus  grande  correction,  en  y  ajoutant  des  notes 
nombreuses  et  une  table  des  noms  de  lieux  et  de  personnes;  en  appendice,  on  trouve 
un  assez  long  exposé  des  rapports  de  l'évêque  Eberhard  II  de  Constance  et  de  l'abbé 
Berthold  de  Saint-Gall  de  i52i  à  ibiq  et  une  réimpression  du  Planctus  beati  Galli 
de  1252. 


SOCIÉTÉ  NATIONALE  DES  ANTIQUAIRES  DE  FRANCE 


Séance  du  1  g  juillet  1882. 

M.  d'Arbois  de  Jubainville  signale  l'existence,  dans  le  nord  de  l'Irlande,  de  forts 
vitrifiés,  semblables  à  ceux  de  France  ou  d'Ecosse.  La  construction  doit  vraisembla- 
ment  en  être  attribuée  aux  Pietés,  habitants  primitifs  de  l'Ecosse,  qui  ont  aussi  oc- 
cupé la  partie  de  l'Irlande  où  ces  forts  se  trouvent. 

M.  Schlumberger  communique  plusieurs  sceaux  inédits  de  fonctionnaires  byzan- 
tins {stratèges  ou  gouverneurs,  commerciaires  ou  directeurs  des  douanes)  du  thème 
de  Khersois.  Il  montre  également  à  la  société  plusieurs  sceaux  de  fonctionnaires  de 
la  Bulgarie.  Ce  dernier  pays,  reconquis  par  l'empereur  Basile,  ne  fut  pas  constitué 
en  thème,  et  resta  une  sorte  de  province  militaire,  administrée  par  des  ducs,  des  pré- 
teurs, et  surtout  des  provéditeurs  (iupovoY)Taï  TiaGYjç  BcuX^aptaç)  sorte  de  commissai- 
res extraordinaires. 

M.  Courajod  lit,  au  nom  de  M.  Mûntz,  une  note  sur  le  premier  architecte  du 
palais  pontifical  d'Avignon.  Il  s'appelait  Pierre  Poisson  ou  Peysson  (Magister  Petrus 
Piscis  ou  Peysonnis)  et  était  de  Mirepoix.  Dans  les  comptes  conservés  aux  archi- 


I4O  REVUE    CRITIQUE    D  HlSTOiKE    ET    DE    LITTÉRATURE 

ves  secrètes  du  Vatican,  on  trouve  plusieurs  fois  son  nom  depuis  1 335.  L'année  qui 
suivit  l'avènement  du  fondateur  de  l'édifice,  Benoit  Xll,  jusqu'en  1337,  il  dirigea  no- 
tamment la  construction  de  la  chapelle  et  de  la  tour  du  palais,  d'un  cabinet  de  tra- 
vail pour  le  pape  et  d'une  salle  d'audience. 

M.  Héron  de  Villefosse   lit,   au  nom   de  M.    Maxe-Verly,  une   note  sur  deux  ins- 
criptions fausses  attribuées  à  Nasium  (Naix-en-Barrois). 


ACADEMIE  DES  INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  4  août  1882. 

Le  prince  S.  Abamelek-Lazarew  envoie  des  photographies  et  une  copie  des  parties 
grecques  de  l'inscription  bilingue  découverte  par  lui  à  Palmyre,  dont  il  a  déjà  fait 
parvenir  à  l'Académie  un  estampage  malheureusement  fort  endommagé. 

M.  Heuzey  annonce  par  lettre  des  observations  nouvelles  qu'il  vient  de  faire  sur 
les  monuments  chaldéens  trouvés  par  M.  de  Sarzec,  dans  les  ruines  de  Tello,  l'antique 
Sirtella.  En  enlevant  l'efflorescence  calcaire  qui  recouvrait  un  fragment  de  style  très 
ancien,  on  y  a  reconnu  la  présence  d'une  inscription  cunéiforme  en  caractères  ar- 
chaïques; M.  Heuzey  y  a  lu  le  nom  d'un  souverain,  qualifié,  non  comme  dans  les 
inscriptions  déjà  publiées,  de  gouverneur  (patesi),  mais  de  roi  de  Sirtella.  Cette 
constatation  l'a  amené  à  étudier  d'autres  monuments  analogues,  et  il  y  a  rencontré  des 
mentions  semblables.  Il  a  relevé,  en  tout,  jusqu'ici  les  noms  de  quatre  rois  de  Sir- 
tella, dont  deux  accompagnés  d'indications  généalogiques.  Il  faut  donc  admettre  qu'à 
une  époque  très  ancienne,  antérieure  à  celle  des  textes  précédemment  étudiés,  la  ville 
de  Sirtella  formait  un  royaume  indépendant,  gouverné  par  ses  propres  souverains  et 
non  par  des  gouverneurs  envoyés  d  ailleurs.  M.  Heuzey  a  trouvé  aussi  quatre  ins- 
criptions qui  mentionnent  des  gouverneurs  ou, patesi,  et  donnent  leurs  noms  et  leur 
filiation.  Celles-ci  sont  postérieures  à  celles  des  rois,  mais  antérieures  à  celles  du 
patesi  dont  le  nom  a  été  lu  Goudea,  et  sur  lequel  s'est  portée  principalement  jusqu'ici 
l'attention  des  savants. 

Le  prix  Duchalais  est  décerné  à  M.  Stanley  Lane  Poole,  pour  son  volume  intitulé  : 
the  Coins  of the  Moors  of  Africa  and  Spain,  qui  forme  la  5e  partie  du  Catalogue  of 
oriental  coins  in  the  British  Muséum. 

M.  Egger  communique  quelques  observations  sur  une  inscription  funéraire  d'A- 
thènes, qui  vient  d'être  publiée  par  M.  Koumanoudis,  dans  le  dernier  fascicule  de 
1'  'AÔYjVaiOV.  Cette  inscription  se  compose  d'une  liste  de  soldats  athéniens  tués  dans 
diverses  guerres,  pendant  les  trente  ou  quarante  années  qui  précédèrent  la  guerre  du 
Péloponèse;  cette  liste  est  suivie  de  deux  distiques  en  l'honneur  des  morts.  C'est  un 
monument  intéressant  à  beaucoup  d'égards,  et  d'abord  par  sa  date  relativement  an- 
cienne; la  langue  y  présente  des  caractères  d'archaïsme  dignes  d'attention,  notamment 
dans  les  deux  distiques.  Il  faut  remarquer,  en  outre,  parmi  les  noms  propres,  quel- 
ques composés  formés  pour  rappeler  le  souvenir  d'un  succès  militaire  des  Athéniens 
et  tirés  du  nom  d'une  ville  prise  ou  d'un  pays  conquis,  comme  chez  les  Romains  les 
surnoms  d'Africanus,  Asiaticus,  etc.  Enfin,  ce  texte  offre  un  nouveau  témoignage  de 
l'attention  patriotique  des  Athéniens  à  perpétuer  sur  le  marbre  des  tombeaux  le  nom 
des  guerriers  morts  pour  la  patrie,  tandis  que  dans  les  oraisons  funèbres,  au  con- 
traire, l'usage  voulait  qu'on  ne  nommât  pas  les  morts  et  qu'on  honorât  leur  dévoû- 
ment  par  des  éloges  d  un  caractère  tout  à  fait  général. 

M.  Weil  donne  une  seconde  lecture  de  son  mémoire  sur  un  papyrus  grec  qui  con- 
tient des  fragments  des  Oiseaux  d'Aristophane. 

Ouvrages  présentés  :  —  par  M.  Alexandre  Bertrand  :  Evans  (John),  les  Ages  de  la 
pierre;  le  même,  l'Age  de  bronze;  —  par  M.  Desjardins  :  Bulletin  trimestriel  des 
antiquités  africaines  recueillies  par  les  soins  de  la  Société  de  géographie  et  d'archéo- 
logie de  la  province  d'Or  an,  et  publiées  sous  la  direction  de  MM.  J.  Poinssot  etL.  De- 
maeght,  sous  le  patronage  et  avec  la  collaboration  de  MM.  L.  Renier,  E.  Renan, 
E.  Desjardins,  Ch.  Tissot  (de  V Institut),  Héron  de  Villefosse,  Poulie,  Cherbonneau, 
et  de  divers  savants  français  et  étrangers,  Ier  fascicule,  juillet  18H2;  —  par  M.  Geffroy: 
Ecole  française  de  Rome,  Mélanges  d'archéologie  et  d'histoire,  1*  année,  fascicules  3 
et  4;  —  par  M,  Gaston  Paris  :  Bladé  (J.-F.),  Poésies  populaires  de  la  Gascogne, 
t.  III  et  IV; —  par  M.  Delisle  :  Tamizey  de  Larroque,  Entrée  du  roy  Charles  IX 
à  Bordeaux;  la  Borderie  (A.  de),  Diablintes,  Curiosolites  et  Corisopites;  Marre 
(Aristide),  Problèmes  numériques  de  Nicolas  Chuquet. 

Julien  Havet. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 
Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  23. 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

N°  34  -  21  Août  -  1882 


Sommaire  s  i65.  Socin,  Les  dialectes  araraéens  d'Ourmia  à  Mossoul.  —  166. 
Warren,  Manuscrits  de  Térence  collationnés  par  Bentley.  —  167.  Archives  de 
l'Orient  latin,  tome  I.—  168.  Pajol,  Les  guerres  sous  Louis  XV,  vol.  I.  —  16g. 
Les  contes  en  vers  d'Andrieux,  p.  p.  Ristelhuber.  —  170.  Janssen,  Frédéric 
Stolberg.  —  171.  Simson,  Rapports  de  Napoléon  III  avec  la  France  et  l'Allemagne. 
—  Chronique. 


l65.  —  Die  neu-aramaeieclien  Dialekte  von  Ui*miu  bis  Mosul,  Texte 
und  Uebersetzung  herausgegeben  von  Dr  Albert  Socin,  Professor  an  der  Universi- 
taet  Tubingen.  Laupp,  Tubingen,  1882,  xi  et  224  p.  in-40. 

M.  Socin  poursuit  sans  relâche  ses  travaux  sur  les  dialectes  des  pays 
environnant  Mossoul.  L'année  dernière,  il  éditait,  en  collaboration  avec 
M.  Prym,  un  volume  qui  nous  révélait  le  dialecte  araméen  du  Tour 
'Abdin  •.  Cette  année  s'annonce  encore  plus  fructueuse;  outre  ce  livre-ci 
consacré  à  divers  dialectes  araméens,  il  a  publié,  dans  le  premier  cahier 
de  cette  année  du  Journal  oriental  allemand,  une  première  série  de  textes 
du  dialecte  arabe  de  Mossoul  et  de  Mardin,  lesquels,  avec  les  Proverbes 
arabes  2,  doivent  servir  de  matériaux  pour  des  travaux  ultérieurs  de 
grammaire  et  de  lexicographie.  Il  paraîtra  aussi  prochainement  une  im- 
portante collection  de  chants  kurdes  et  des  textes  dans  le  dialecte  turc  du 
Kurdistan. 

Malgré  la  généralité  de  son  titre,  le  présent  livre  n'a  pas  la  prétention 
d'être  complet  ;  cependant  il  forme,  dans  son  ensemble,  un  recueil  de  pre- 
mière valeur  pour  l'étude  des  dialectes  néo-syriaques.  Le  soin  que  M.  S. 
a  mis  à  rendre  exactement  la  prononciation  de  ces  dialectes,  lui  assure 
la  reconnaissance  des  philologues.  Il  suit  le  système  de  transcription 
adopté  précédemment  pour  le  dialecte  du  Tour  'Abdin  ;  les  diverses  arti- 
culations et  les  nuances  des  voyelles  y  sont  minutieusement  notées  au 
moyen  de  caractères  latins  munis  de  points  et  d'appendices  diacritiques. 
Il  est  a  désirer  que  cette  excellente  méthode  serve  de  modèle  pour  les 
travaux  de  ce  genre. 

Six  dialectes  sont  représentés  par  des  textes  classés  sous  vingt-sept 
numéros  :  le  dialecte  d'Ourmia,  nos  I-XXII  :  le  dialecte  deSupurghan  et 
le  dialecte  de  Chosrowa,  n°  XXIII,   1  et  2;  le  dialecte   de  Dschelu, 


1.  V.  Revue  critique,  nL'  du  i5  août  1881. 

2.  Arabische  Sprichwoerter  und  Redensarten.  Tubingen,  1878. 

Nouvelle  série,  XIV. 


I42  REVUE    CRITIQUB 

n°  XXIV  a  b  c;  le  dialecte  FelliAi,  n™  XXV  et  XXVI  ;  et  le  dialecte  des 
Juifs  de  Zacho,  n°  XXVII  a  et  b. 

£omme  on  le  voit  par  cette  classification,  le  dialecte  d'Ourmia  est  de 
beaucoup  le  mieux  partagé,  sous  le  rapport  du  nombre  des  textes.  Ceux-ci 
sont  dus  à  la  composition  d'un  certain  Joseph  Audischu  ',  natif  de  Mat- 
maryam,  faubourg  d'Ourmia.  MM.  Hoffmann  et  Socin,  alors  à  Berlin, 
profitèrent  de  la  présence  d' Audischu  dans  cette  ville  pour  les  lui  faire 
écrire  et  lire!  C'est  pendant  la  lecture  qu'ils  en  fixèrent  la  transcription 
exacte  au  moyen  de  caractères  latins  et  de  signes  spéciaux. 

Le  style  d' Audischu  nous  était  déjà  connu  par  plusieurs  morceaux 
publiés  en  1873  par  M.  Merx  dans  sa  chrestomathie  néo-syriaque  [Neu- 
sjyrisches  Lesebuch,  pp.  1-28).  Mais  cette  publication  s'en  tenait  à  l'ortho- 
graphe d' Audischu  qui,  se  servant  de  caractères  syriaques,  tantôt  recher- 
chait l'étymologie,  tantôt  imitait  la  prononciation,  à  moins  qu'il  ne  se 
laissât  aller  à  sa  fantaisie.  Son  esprit  peu  cultivé  ne  lui  permettait  pas  de 
suivre  une  orthographe  régulière,  comme  celle  que  durent  adopter  les 
missionnaires  protestants,  qui, avaient  d'autres  soucis  que  de  faire  de  la 
philologie.  Il  est  singulier  qu'ils  marquent  d'un  point  inférieur  le  waw 
du  suffixe  de  la  3e  personne  fém.  sing.  Audischu  suit  cette  ponctuation 
vicieuse;  heureusement,  la  prononciation  figurée  nous  apprend  que  ce 
suffixe  est  0  et  se  distingue  du  masculin  ou. 

Le  principal  intérêt  de  la  nouvelle  publication  de  M.  S.  ré- 
side donc  dans  sa  méthode  de  transcription.  Il  aurait  pu  avantageusement 
laisser  de  côté  la  rédaction  syriaque  d' Audischu,  qui  accompagne  le  texte 
des  treize  premiers  numéros  ;  en  la  conservant,  il  devait,  il  nous  semble, 
la  corriger  et  la  ramener  à  la  stricte  étymologie.  La  prononciation  étant 
assurée  par  la  transcription  en  caractères  latins,  la  rédaction  syriaque  ne 
devait  plus  servir  que  de  commentaire  facilitant  l'intelligence  des 
textes;  telle  est,  par  exemple,  l'excellente  rédaction  arabe  que  M.  S. 
a  jointe  à  son  édition  des  dialectes  arabes  de  Mossoul  et  de  Mardin, 
mentionnés  plus  haut.  Le  respect  scrupuleux  de  l'éditeur  pour  son  ma- 
nuscrit est  très  louable  en  ce  qui  concerne  la  transcription  phonétique; 
c'est  à  la  critique  à  rechercher  si  les  inconséquences  inhérentes  à  cette 
méthode  sont  dues  à  la  mobilité  du  parler  vulgaire  ou  à  des  lapsus  très 
excusables  de  la  part  d'une  oreille  européenne,  ou  bien  si  elles  trouvent 
leur  justification  dans  des  raisons  grammaticales.  Mais  nous  n'avions 
aucun  intérêt  à  connaître  l'orthographe  d'Audischu  et  à  savoir  quelle 
valeur  il  donnait  à  telle  ou  telle  consonne  syriaque;  citons,  par  exemple, 
tèt  au  lieu  de  taw  dans  sita  «  mesure  »  54,  11;  sâde  au  lieu  de  semkat 
dans  sau  et  sawo  «  vieillard  »,  46,  5  et  12,  comp.  46,  14;  'aïn  explétif 
dans  bd^û^e  «  spoliateurs  »,  48,  17,  dans  khlimi  «  gros  »  5o,  7,  et 
khulmânuitu  «grosseur  »,  54,  12,  comp.  neu-syr.  gr.  p.  237,  not.  1; 
en  tête  de  ara  «  terre  »,  1 ,  3;  54,  21,  etc;  sans  compter  les  mots  où  il  est 

1.   Prononciation  moderne  du  nom  nestorien  'Abdischo,  autrement  dit  'Ebed-Iesu. 


d'histoire  kt  dk  littérature  143 

transposé,  comme  marre,  12,  18,  bibâya,  26,  16,  marya,  40,  6,  ma\\eta, 
49,  1 3,  ma\diyanta,  5o,  2,  ma\dihy  5o,  1 5 ,  et  ceux  où  il  fait  défaut,  comme 
towilun,  38,  i3.  La  transcription  phonétique  enseigne  suffisamment 
que  ces  emphatiques  ont  perdu  de  leur  valeur  et  permutent  souvent 
avec  les  consonnes  simples  correspondantes;  l'orthographe  d'Audischu  ne 
nous  apprend  rien  de  plus,  mais  elle  peut  induire  en  erreur.  Elle  est,  du 
reste,  aussi  négligée  que  son  style  :  boud  qouirawâti  «  tombeaux  », 
p.  44,  21,  mais  plus  exactement  beit  qoubrawâti,  46,  i3;  bat r  dimmu, 
94,  21,  pour  bar  dimmu;  le  lamed  suivi  du  pronom  suffixe  de  la 
3e  pers.  sing.  est  écrit  tantôt  suivant  l'orthographe  du  syriaque  litté- 
raire leh  masc,  lah  fém.,  tantôt  comme  le  verbe  substantif  ilé,  ilâ;  dans 
ce  dernier  cas,  l'écriture  syriaque  n'est  pas  toujours  conforme  à  la  pro- 
nonciation ;  ainsi,  p.  36,  3»  on  lit  bayyêli  au  lieu  de  bayyâli;  p.  40,  5, 
kha\yawêli2,\x  lieu  de  khaiyawâli ; youme  au  lieu  de youmdne,  46,  21. 
Ces  observations,  qu'il  serait  aisé  de  multiplier,  montrent  toute  l'impor- 
tance qu'on  doit  attacher  à  la  transcription  phonétique  de  M.  Socin. 

Le  crochet  doit  être  sous  le  h  dans  thilale,  35,  2,  et  briha,  107,  i5  ; 
le  second  g  de  ligdâga  102,  -6  est  pour  r. 

Supurghan  et  Chosrowa,  au  dialecte  desquels  est  consacré  le  n°XXIII, 
sont  situés  :  le  premier,  au  nord-est  d'Ourmia;  le  deuxième,  au  nord  de 
la  même  ville,  dans  le  district  de  Salamâs. Ce  numéro  est  reproduit  en  deux 
leçons,  l'une  pour  Supurghan,  l'autre  pour  Chosrowa;  il  provient  de  la 
même  source  que  les  précédents.  Il  est  malheureusement  trop  court  pour 
donner  une  connaissance  suffisante  des  particularités  dialectales  qui  distin- 
guent ces  idiomes.  Au  reste,  Audischu  paraît  s'être  complètement  mépris 
en  ce  qui  concerne  le  dialecte  de  Chosrowa  qu'il  assimile  à  tort  à  celui 
de  Gawar.  Les  scrupules  de  M.  S.  étaient  bien  fondés,  quand  il  disait 
dans  sa  préface,  p.  vin,  que  les  données  d'Audischu  sur  les  dialectes  de 
la  Plaine  et  de  la  Montagne  ne  devaient  pas  être  accueillies  sans  réserve. 
Un  vénérable  prêtre  de  la  Mission  de  Paris,  M.  le  P.  Bedjan,  dont  la 
présence  à  Paris  nous  avait  été  signalée  par  M.  S.,  a  bien  voulu  nous 
donner  quelques  renseignements  sur  le  dialecte  de  Chosrowa,  son  pays 
natal;  nous  les  consignerons  ici,  à  titre  de  contrôle  :  comme  à  Ourmia, 
les  noms  de  nombre  n'ont  qu'une  seule  forme  pour  le  masculin  et  le 
féminin;  l'article  indéfini  «  un  »,  «  une  y>  est  khâ;  les  formes  khê  et 
kdhd  d'Audischu  sont  d'autant  plus  erronées  qu'il  prend  khê  pour  le 
féminin  et  kdhd  pour  le  masculin,  excepté  dans  khdâ  schinna,  121,  17, 
où  il  est  féminin.  Khammisch  «  cinq  »,  ischit  «  six  »,  1 2 1 ,  1 5  et  16,  sont 
également  inusités;  on  dit,  en  tout  cas,  khammischta  et  ischta.  Les  dési- 
nences âya  s'abrègent  en  â,  comme  rewâ  «  ivrogne  »  au  lieu  de  rewâya, 
121,  9;  bidd  au  lieu  de  bidâya  «  savoir  »,  122,  2.  Le  suffixe  du  pronom 
de  la  3e  pers.  mas.  sing.  est  ou  pour  les  substantifs  et  la  plupart  des  pré- 
positions, on  dit  :  idou  «  sa  main  »  et  non  idi,  121,  14;  qd'ou  «  à  lui  » 
et  non  qâti,.  121,  21.  Le  mot  kya,  121,  21,  est  une  interjection  qui 
peut  s'adressera  une  femme,  mais  non  à  un  homme;  cim  «  très  »,  a\i\ïh 


144  REVUE    CRITIQUK 

«  mon  ami  »,  soyougli  «  mon  cher  »,  se  disent  à  Ourmia,  mais  non  à 
Chosrowa.  Audischu  connaissait  le  dialecte  de  Gawar,  car  sa  famille 
était  originaire  de  cet  endroit  ;  ce  morceau  aurait  peut-être  été  mieux 
intitulé  :  «  Dialecte  de  Gawar  ». 

Le  n°  XXIV,  relatif  au  dialecte  de  Dschelu  dans  la  Montagne,  se  com- 
pose de  trois  morceaux  fournis  par  un  habjtant  peu  lettré  de  ce  pays  à 
M.  S.,  qui  en  fit  la  rencontre  à  Damas.  Dans  les  dialogues,  la  troisième 
personne  est  employée  pour  la  seconde;  cet  usage  était  digne  d'être  re- 
marqué; on  le  retrouve  également  dans  d'autres  passages,  voy.  note  18  ; 
si  on  n'y  prenait  garde,  on  pourrait  être  tenté  de  prendre  le  suffixe  ou 
de  la  3e  pers.  pour  celui  de  la  seconde,  oukh,  en  supposant  la  chute  de 
la  gutturale,  chute  qui  existe  effectivement  dans  da  «  une  »,  122,  18; 
123,  2,  pour  khda.  Cette  manière  de  parler,  constatée  chez  des  gens 
grossiers,  est  instructive  au  point  de  vue  du  développement  du  langage. 
On  devrait  peut-être  lire  :  en  la  «  sinon  »  au  lieu  de  la,  122,  22, 
comp.  123,  12.  Le  suffixe  du  pronom  de  la  3e  pers.  masc.  sing. 
est  prononcé  tantôt  ou,  tantôt  i  :  Ibïyù,  123,  1,  ou  Ibiyi,  123, 
14  «  à  sa  maison  ».  Comme  dans  le  dialecte  arabe  de  Mossoul ', 
on   trouve   une   forme  étendue  du  pronom    isolé,   hinnêle  «  il  est  », 

123,  20,  de  hinnu?  et  ilê,  ainsi  que  des  suffixes  :  biyenih  «  en  moi», 

124,  19;  kislenih  «  chez  moi  »,  124,  20,  comp.  binemude  «  avec  quoi  », 
124,  22,  et  Arab.  Sprichwœrter,  p.  tx.  Comme  dans  ce  dialecte  égale- 
ment, le  conjonctif  «  que  »  est  exprimé  par  le  persan  ta  au  lieu  de  Para- 
méen  di  ou  qad  :  ta\ikh  «  que  nous  allions  »,  124,  3;  tasqakh  «  que 
nous  montions  »,  125,  i5. 

Le  n°  XXV  est  un  recueil  important  de  chants  en  Fellihi.  On  appelle 
ainsi  à  Mossoul  l'araméen  parlé  par  les  chrétiens  de  cette  contrée.  Ce 
terme  est  un  peu  vague,  car,  dans  un  sens  plus  général,  il  désigne  les 
chrétiens  aussi  bien  du  Kurdistan  que  de  TAzerbeighan.  Ces  Fellihis 
tiennent-ils  leur  nom  des  anciens  Nabatéens,  des  Fellahs  du  Bet-Arbayé 
et  de  l'Adiabène?  La  solution  de  cette  question,  dans  un  sens  affirmatif, 
jetterait  un  jour  nouveau  sur  l'origine  des  dialectes  araméens  qui  ont 
subsisté  jusqu'à  ce  jour. 

Ce  morceau  et  le  suivant  sont  accompagnés  de  gloses  arabes  dans  le 
dialecte  de  Mossoul,  qui  traduisent  les  passages  les  plus  difficiles. 

Comme  dans  la  Tour  'Abdin,  a  long  oscille  entre  a  et  0,  et  est  pro- 
noncé quelquefois  aie  :  vôlâ  ou  vâld  «  elle  était  »,  bôtre  ou  bâtre  «  après 
lui  »,  mruloh  «  dites  lui  (à  elle)  »,  reschau  «  sa  tête  (à  elle)  »,  minnau 
«  d'elle  ».  Le  mot  kimma  ou  kumma  «  bouche  »,  comparé  avec  l'arabe 
tumma  des  gloses,  pp.  1 38,  3  et  i58,  17,  offre  un  exemple  de  permuta- 
tion de  t  et  Ar;la  forme  araméenne poumma est  aussi  usitée,  140,  21.  On 
remarquera  la  double  prononciation  de  la  préposition  ta  «  pour  »,  sans 
■  1    ■  .  .   ■ — ■ — » 

i.  V.  Zeitsch.  der  DMG,  1882,  p.  1 1, 1.  8  et  11  et  passim  :  hinu  «  lui  »,  linu  «  à 
lui  »,  etc. 


d'histoire  et  de  littérature  145 

emphase,  142,  17;  21,  22;  143,  2,  avec  emphase  i3o,  6;  1 35,  2  et  i3, 
140,  5  et  6;  de  même  à  Zacho,  p.  160,  3  et  7.  La  conjonction  lad  a  pour 
que  »  ne  présente  qu'une  forme,  i32,  10;  1 35,  3,  4,  14,  etc. 

Les  noms  de  nombre  «  un  »  et  «  deux  »  ont  un  masculin  et  un  fémi- 
nin; le  féminin  de  deux  titti  ou  titte,  1 38,  4;  142,  i5;  143,  4,  est  plus 
près  de  l'arabe  tintên  des  gloses,  1 38,  4,  que  du  néo-syriaque  de  la 
Montagne  tirte,  r  tombant  moins  facilement  que  w. 

P.  134,  2,  lire  menalmesa  dans  la  glose  arabe. 

Le  n°  XXVI,  qui  appartient  au  même  dialecte,  est  une  poésie  religieuse 
d'un  nommé  Toma-es-Sindschari,  d'un  bourg  aux  environs  de  Dehok, 
au  nord  de  Mossoul.  La  versification  diffère  de  celle  des  chants  du  nu- 
méro précédent  :  ceux-ci  se  composent  de  quatre  vers  heptasyllabiques 
rimes;  celle-là  est  divisée  en  strophes  de  trois  vers  rimes,  coupés  par  une 
césure.  Les  vers  sont  formés  de  quatre  pieds  dissyllabiques  ou  trissylla- 
biques  distingués  par  l'accent  tonique;  la  césure  est  après  le  second  pied. 
En  outre,  sans  doute  par  analogie  des  chants  kurdes,  le  premier  vers  de 
chaque  strophe  reprend,  en  partie,  le  dernier  vers  de  la  strophe  précé- 
dente, dont  il  forme  le  refrain,  mais  de  manière  que  la  rime  change. 
Comme  le  remarque  M.  S.,  cette  poésie  n'est  pas  exempte  de  l'influence 
du  syriaque  littéraire;  l'auteur  y  fait  usage  d'une  voyelle  adjuvante  dans 
mauvidyâne  «  confesseurs  »,  147,  21,  comp.  maudiyânouta  «  confes- 
sion »,  147,  7. 

La  permutation  de  n  en  /  est  remarquable  dans  takhmalta  «  pensée  », 
takhmuîê.a  penser  »,  takhmali «  ils  pensent  »,  i52,  i5;  1 53,  19;  i55,  7; 
1 56,  1;  dans  les  autres  dialectes,  le  radical  takhmen,  d'origine  arabe, 
demeure  intact. 

La  particule  de  comparaison  «  comme  »  présente  des  formes  variées  : 
le  simple  kh,  abrégé  de  akh,  est  le  plus  usuel,  khvadja'e  «  comme  sa 
douleur  »,t5o,  7  ;  khburqa  «  comme  un  éclair  »,  1 56,  7;  une  deuxième 
forme  est  khedegit  ou  khedegid,  144,  21  ;  1 55,  8  et  9,  dans  laquelle  kh 
est  composé  avec  le  dconjonctif  st  eigit  ou  eigid  «  quand  »  «  lorsque  », 
154,  16;  celui-ci  est  lui-même  formé  de  eiga  «  alors  »,  et  d  «  que  ».  Ce 
composé  autoriserait  à  chercher  dans  le  syriaque  littéraire  kêmat  un 
composé  de  k  -\-  êmatÇx).  De  même  qu'à  Ourmia  on  dit  akh  et  makh,  en 
préposant  à  ce  dernier  le  mim  de  la  préposition  men,  on  prononce  aussi 
dans  ce  dialecte-ci  mukhedegid,  145,  20;  1 53,  1  et  2.  A  Zacho,  on  se 
sert,  dans  le  même  sens,  de  mukhwasid,  167,  6  et  21,  lequel,  abstraction 
faite  du  mim  initial  et  du  dâlat  final,  est  l'ancien  syriaque  akhwât,  le 
taw  aspiré  se  prononçant  s  dans  ce  pays-là. 

Une  autre  particule  intéressante  est  schud  qui  indique  le  volontatit  : 
schud  emha\li  «  qu'il  se  moque  »,  1 5 3,  4.  M.  le  P.  Bedjan  a  bien  voulu 
nous  donner,  à  ce  sujet,  les  renseignements  suivants  :  à  Ourmia,  on  em- 
ploie dans  ce  sens  l'impératif  khousch  suivi  du  d  conjonctif  :  khousch 
dâ\el  «  qu'il  aille  »,  khousch  dmâkhe  «  qu'il  frappe  »  ;  dans  la  Montagne, 
on   se  sert  de  schoud  :  schoud  âçel    «  qu'il   aille  »,    schoud  mâkhe 


I46  REVUE    CRITIQUE 

«  qu'il  frappe  »  ;  à  Chosrowa,  on  abrège  et  on  prononce  scht  ou  sch  : 
schtâ^el  «  qu'il  aille  »,  schmâkhe  «  qu'il  frappe  ». 

La  coupe  beid-isri,  i52,  1  1  et  12,  est  meilleure  que  bei-disri,  1 58,  14. 

Les  gloses  arabes  forment  une  utile  contribution  à  la  lexicographie 
du  dialecte  de  Mossoul.  On  y  trouve  la  forme,  propre  à  ce  dialecte,  ako 
ou  akosch  '•«  il  y  a  »,  makosch  «  il  n'y  a  pas  »,  i5o,  7;  i52,  12  et  1 58, 
x5  ;  nous  voyons  dans  cette  location  le  néo-syriaque  akhâ  -f-  (h)ou  «  ici 
est  »  ;  le  schin  ajouté  est  fréquent  en  arabe  vulgaire,  surtout  après  une 
négation.  Akosch  traduit  l'araméen  it,  au  pluriel  itin,  qui  se  trouve  aussi 
p.  5i,  10;  itin  répond  au  syriaque  littéraire  itaihoun. 

Le  dernier  numéro,  XXVII  a  et  b,  représente  le  dialecte  des  Juifs  de 
Zacho  sur  le  Chabor  oriental,  un  affluent  du  haut  Tigre.  Il  ne  faudrait 
pas  y  chercher  un  judéo-araméen  analogue  au  fragment  de  targoum  des 
Juifs  de  Salamas  publié  par  M.  le  Rév.  Albert  Lœwy  dans  les  Transac- 
tions of  the society  ofbiblical  archœology,  1875,  p.  98  et  suiv.  Ce  dia- 
lecte ne  diffère  pas,  au  fond,  de  ceux  dont  il  a  été  question  plus  haut  et  ne 
se  sent  nullement  de  l'influence  judaïque;  il  se  rapproche  beaucoup  de 
l'araméen  du  Tour  'Abdin.  Il  présente  cependant  plusieurs  particula- 
rités :  il  prononce  s  le  taw  aspiré  et  \  le  dalat  aspiré,  ex.  :  âse 
«  qu'il  vienne  »,  kasvenno  «  j'écrirai  »,  psikhle  «  il  ouvrit  »,  basre 
«  après  lui  *,pâsu  «  sa  figure  »,  khdsi  «  ma  sœur  »,  susawdsa  «  che- 
vaux »;  o\  «  fais  *-,  u\le  «  il  fit  »,  kh\âra  «  aller  çà  et  là  »;  mais  bêtha 
«  maison  »,  160,  20,  quoique  bêsa  soit  plus  fréquent;  didukh  «  de  toi  », 
dide  «  de  lui  »  did  ou  dit  «  afin  que  »,  167,  4  et  9,  bid  a  dans  »,  bidi\u 
«  dans  leurs  mains  »,  164,  8.  Il  tient  donc  le  milieu  entre  les  dialectes 
qui  maintiennent  ces  consonnes  aspirées  et  ceux  qui  les  laissent  tomber  ; 
à  Chosrowa,  en  effet,  on  dit  :  biya  2  «  maison  »,  pâha  «  figure  »,  slouwa 
«  prière  »,  ddya  «  mère  »,  pour  bêtha,  pâtha,  sloutha,  dâdha. 

L'*aïn  est  prononcé  encore  dans  un  certain  nombre  de  mots  :  'oriqlu 
«  ils  s'enfuirent  »,  le'al  «  par  dessus  »  ;  il  est  pour  hamza  dans  d'irru 
(ou  durru,  i63,  18)  «  ils  tournèrent  »,  comme  dans  le  dialecte  du  Tour 
'Abdin.  Comme  dans  ce  dialecte  également  le  démonstratif  o  maso,  ei 
fém.,  an  plur.  com.,  est  usité  pour  Particle  déterminatif;  le  pronom  est 
renforcé  de  la  particule  hâ  :  ôha  «  celui-ci  »,  164,  22;  êha  «  celle-ci  », 
i65,  3;  âwa  «  celui-là  »,  162,  6,  i3,  \7\aya  «  celle-là  »,  164,  12.  La 
même  particule  apparaît  en  tête  de  ahit,  ahid  ou  ahèd  «  toi  ». 

On  devrait  lire  wo-khina  au  lieu  de  wo-kheta,  162,  6;  \evirrut  i65, 
7,  est  à  séparer  en  deux  mots  :  \e  «  aussi  »  et  virru  «  ils  passèrent  ». 

Une  traduction  aussi  littérale  que  le  comporte  ce  genre  de  littérature 
facilite  l'étude  des  textes.  De  nombreuses  difficultés  ont  été  surmontées 
avec  une  sûreté  de  jugement  qui  appelle  la  confiance  du  lecteur.  Il  reste 


1.  Comp.  Socin,  Sprichwoerter ,  nos  82  et  484,  et  ZDMG,  1882,  p.  8.  2  et  p.  18,  16. 

2.  Cette  prononciation  explique  l'ancienne  forme  bê  de  bêth  «  maison  »,  ainsi  que 
l'arabe  bî'a  «  synagogue  »,  «  église  ». 


D'HISTOIRK    ET    DR    LITTRRATURB  I47 

bien  quelques  passages  douteux,  notamment  dans  les  chants  fellihi, 
comme  le  remarque  M.  Socin.  Nous  avons  noté  la  phrase  suivante  qui 
traduit  Ja  ligne  6  de  la  page  47  :  «  Da  dies  in  spaeter  Stunde  geschieht, 
schrumpft  jener  vor  Furcht  zusammen  »,  nous  croyons  qu'il  serait  plus 
exact  de  dire  :  «  Dans  cette  heure  d'angoisse,  celui-ci  devient  plus  sec 
qu'un  vieillard  sous  l'empire  de  la  crainte  qui  l'oppresse.  »  Rank,  dans 
cet  endroit,  ne  peut  être  que  le  persan  randj  «  douleur  ».  Page  22  3,  1.  2, 

au  lieu  de  :  «  So  kehrten  sie zurûck  »,  il  est  plus  conforme  au  texte 

de  traduire  :  «  Nous  sommes  revenus.  »  La  forme  schâté  que  M.  S.  ne 
s'explique  pas,  note  179,  ne  peut  être  que  le  participe  dans  le  sens  d'un 
volontatif  :  «  Bois-la  (la  coupe).  —  Qu'il  la  boive  et  que  bien  lui  fasse! 
dit-on  d'elle  (en  montrant  la  coupe)  ».  Note  2i5,  le  mot  hhudjâta  est 
sans  doute  l'arabe  hhidja  «  fourberie  ». 

Les  savantes  et  nombreuses  notes  que  M.  S.  a  jointes  à  la  traduction 
n'ont  généralement  pas  trait  à  la  langue  elle-même  ;  la  publication  de 
ces  textes  fait  donc  sentir  encore  plus  vivement  le  manque  d'un  lexique 
néo-syriaque.  Si  M.  S.  accomplit  le  projet  qu'il  a  conçu  de  combler  cette 
lacune,  il  rendra  à  la  science  un  service  signalé. 

Au  point  de  vue  littéraire,  ces  divers  morceaux  n'offrent  pas  le  même 
intérêt  que  les  contes  recueillis  par  MM.  Prym  et  Socin  dans  le  dialecte 
du  Tour  cAbdin.  Il  faut  excepter  cependant  le  n°  XXVII  a,  où  se  trou- 
vent fondues  ensemble  deux  légendes  anciennes  :  la  légende  du  diable 
qui,  sous  la  forme  d'une  gazelle,  entraîne  à  sa  poursuite  les  chasseurs  et 
les  égare  dans  les  forêts,  et  la  légende  de  la  fontaine  enchantée  qui  mé- 
tamorphose les  jeunes  gens  en  femmes.  La  première  est  conservée  par  le 
Râmayana  et  le  Talmud  de  Babylone  dans  deux  passages  judicieusement 
rapprochés  par  M.  James  Darmesteter  dans  la  Revue  des  Etudes  juives, 
188 1,  t.  I,  pp.  3oo-3o2.  La  deuxième,  qui  nous  est  connue  par  le  roman 
de  Sindban  ou  les  sept  Sages,  doit  avoir  avec  la  précédente  une  origine 
commune.  L'enseignement  des  missionnaires  n'est  pas  à  méconnaître 
dans  certains  récits.  Notre  réputation  de  mangeurs  de  grenouilles,  n°  xix 
a,  est  d'importation  anglaise  ;  sahs  doute  aussi  la  fable  du  berger  men- 
teur, n°  xvm  d,  et  le  dicton  populaire  :  Quand  il  pleut  par  le  soleil,  le 
diable  marie  sa  fille,  mais,  au  lieu  de  noces  de  diables,  ce  sont  des  noces 
de  loups,  n°  xvm  a,  le  mot  déva  prêtant  en  néo-syriaque  à  ce  double 
sens. 

Rubens  Duval. 


166.-  On  Bentley's  English  Mas.  of  Terence.  [Reprinted  from   The  Ame- 
rican Journal  Philology,  Vol.  III,  No.  9]  ;  signé  :  Minton  Warren.  i3  p.  in-8°. 

Indication  de  quelques  inexactitudes  dans  la  collection  du  Parisinus 
fournie  par  Auguste  Fritsch  à  l'édition  Umpfenbach.  Identification  des 
Regii  de  Bentley,  collationnés  par  M.  Warren  au  British  Muséum. 


I48  REVUE   CRITÏQUB 

Liste  des  manuscrits  collationnés  par  Bentley,  écrite  deux  fois  de  sa 
main  (sous  deux  formes  différentes)  sur  un  Térence  de  1686  conservé  à 
Cambridge. 


167.  —  Archives  de  l'Orient  latin,  publiées  sous  les  auspices  de  la  Société 
de  l'Orient  latin.  Tome  I.  Paris,  Leroux  188 1,  gr.  in-8°,  xvi-767-75  p.  Prix  : 
2  5  francs. 

La  Société  de  l'Orient  latin  a  pour  objet  la  publication  des  nombreux 
documents  historiques  et  géographiques,  relatifs  aux  croisades,  que 
l'Académie  des  Inscriptions  n'a  pas  admis  à  figurer  dans  sa  collection 
des  Historiens  des  croisades.  Ces  textes  sont  innombrables  et  se  trou- 
vent un  peu  partout;  non-seulement  les  manuscrits  qui  les  renferment 
ont  subi  les  mêmes  vicissitudes  que  tous  ceux  du  moyen  âge,  transpor- 
tés du  nord  au  sud  de  l'Europe  suivant  les  hasards  des  enchères, 
mais  encore  les  chrétiens  du  moyen  âge  ayant  toujours  regardé 
la  Terre-Sainte  comme  leur  patrimoine  commun,  les  ouvrages  relatifs 
aux  Lieux  saints  ont  été  extrêmement  répandus  et  en  faveur  chez  tous 
les  peuples  de  l'Europe.  De  là  des  difficultés  extrêmes  quand  on  veut 
retrouver  les  exemplaires  manuscrits  de  ces  documents,  généralement 
peu  étendus  et  qui  ont  d'autant  plus  facilement  échappé  à  l'attention 
des  bibliographes.  Toutes  les  publications  des  textes  du  moyen  âge  ont 
eu  à  lutter  contre  les  mêmes  difficultés;  pour  les  vaincre,  on  a  généra- 
lement eu  recours  au  même  système  :  à  côté  de  la  série  principale,  on  a 
créé  un  recueil  annexe,  publiant  des  articles  de  bibliographie  des 
textes  moins  étendus,  donnant  le  résultat  des  premières  recherches.  Tel 
a  été  le  rôle  de  VArchiv,  créé  par  G.  Pertz  et  dont  la  publication  est 
continuée  par  les  directeurs  actuels  des  Monumenta  Germaniae  ;  tous 
ceux  qui  s'occupent  de  l'histoire  du  moyen  âge  savent  ce  que  renferme 
ce  recueil  unique  au  monde.  Les  Archives  de  l'Orient  latin  sont  conçues 
sur  le  même  plan  que  VArchiv  ;  mais  elles  ne  paraîtront  pas  à  époques 
fixes  comme  le  Neues  Archiv;  chaque  volume  formera  un  tout,  dans 
lequel  les  matières  seront  classées  méthodiquement  et  réparties  en  quatre 
grandes  classes  :  A.  Critique  des  sources;  B.  Inventaires  et  descriptions 
de  manuscrits,  bibliographie  ;  C.  Documents  (lettres,  chartes,  poèmes  et 
documents  divers)  ;  D.  Mélanges  historiques  et  archéologiques.  Cette 
division  méthodique  a  certains  avantages  ;  elle  donne  au  volume 
meilleure  apparence;  mais  elle  offre  un  inconvénient  qui  serait  très 
grave  dans  un  recueil  périodique,  qui  l'est  moins  dans  une  publication 
comme  celle  qui  nous  occupe  ;  la  préparation  et  la  publication  de 
chaque  volume  sera  toujours  très  longue,  car,  avant  d'imprimer  une  seule 
page,  il  faudra  avoir  le  volume  entier  en  manuscrit.  A  vrai  dire,  c'est  la 
seule  critique  qu'on  puisse  faire  à  ce  recueil  ',  qui  présente  en  général  le 

1.  Sauf  une  autre  toute  matérielle;   l'impression  du  volume   est   bien   fine,  et  la 


D  HISTOIRE    ET    DE    LITTERATURE  I49 

plus  grand  intérêt  et  auquel  tous  les  savants  de  l'Europe  qui  s'occupent 
de  l'histoire  de  l'Orient  latin  ont  tenu  à  honneur  de  collaborer,  si  bien 
que,  tout  comme  les  croisades,  les  nouvelles  Archives  ont  un  vé- 
ritable caractère  cosmopolite.  Le  meilleur  moyen  de  donner  au 
lecteur  une  idée  exacte  de  l'intérêt  que  présente  ce  recueil  est  d'en  re- 
produire la  table,  c'est  ce  que  nous  faisons  plus  bas;  mais,  parmi  les 
articles  et  les  textes  qui  y  figurent,  il  faut  mentionner  avant  tout 
l'Inventaire  critique  des  lettres  historiques  des  croisades  de  M.  le 
comte  Riant,  l'un  des  meilleurs  travaux  de  critique,  dont  les  sources  de 
l'histoire  de  l'Orient  latin  aient  jamais  été  l'objet;  les  actes  passés  en 
Arménie  par  des  Génois,  publiés  par  M.  le  chevalier  Desimoni;  le 
procès- verbal  du  martyre  de  quatre  frères  mineurs  en  1 391 ,  publié  par 
M. 'Durrieu  ;  les  fragments  du  Solymarius,  de  Gùnther  de  Pairis,  re- 
trouvés à  Cologne  par  M.  Wattenbach  ;  l'article  de  M.  Rôhricht  sur  la 
croisade  du  prince  Edouard  d'Angleterre,  enfin  les  textes  découverts  par 
M.  de  Mas- Latrie  aux  archives  de  Venise.  Mais  cette  énumération  laisse 
de  côté  plus  d'un  article  intéressant,  plus  d'un  texte  précieux  ;  la  lecture 
de  la  table  va  en  convaincre  les  lecteurs. 

A.  Critique  des  sources. 

I.  Inventaire  critique  des  lettres  historiques  des  croisades,  par  M.  le 
comte  Riant  (pp.  1-224).  Première  partie  jusqu'à  l'an  1100.  Sur  ce  très 
important  travail,  voir  la.  Revue  critique,  X,  302-307  (18  octobre  1880) 

II.  La  Descriptio  Terrae  Sanctae  de  Belardo  d'Ascoli  (1 1 12-1 120), 
par  le  Dr  Neumann  (pp.  225-229).  Curieuse  analyse  d'un  opuscule 
conservé  dans  un  ms.  du  Vatican  (n.  11 10). 

III.  Al-Harizi  et  ses  pérégrinations  en  Terre-Sainte  (vers  1217),  par 
M.  Moïse  Schwab  (pp.  231-244).  Analyse  des  passages  où  ce  poète  parle 
de  la  Terre-Sainte. 

B.  Inventaires  et  descriptions  de  manuscrits.  Bibliographie. 

I.  Inventaire  sommaire  des  manuscrits  de  l'Eracles,  par  M.  le  comte 
Riant  (pp.  247-2  56).  Plus  complet  que  toutes  les  bibliographies  publiées 
jusqu'à  ce  jour.  Voir  aussi  aux  additions,  pp.  716-718. 

IL  Dépouillement  des  tomes  XXII -XXI II  de  YOrbis  Christianus  de 
Henri  de  Suarez  (Paris,  B.  N.,  mss.  lat.  8983-8984.  —  Patriarcats  de 
Constantinople  et  de  Jérusalem,  par  M.  le  comte  Riant  (pp.  257-287). 
L'auteur  a  relevé  dans  cette  compilation  assez  confuse  la  cote  et  la 
copie  de  i65  bulles  des  années  1 3 1 7-1 3y5;  cinq  qui  paraissent  inédites, 
ont  été  publiées  en  entier. 

III.  Description  du  Liber  Bellorum  Domini  (Rome,  Vatican,  Reg. 
Christ.,  547),  par  MM.  le  comte  Riant  et  Giorgi  (pp.  289-322).  Com- 
pilation indigeste,  mais  utile  à  consulter,  de  la  fin  du  xivc  siècle. 


lecture  en  est,  par  suite,  assez  fatigante;  sans  compter  que  la  correction  des  épreuves 
a  du  être  par  conséquent  des  plus  laborieuses.  Voir  notamment  le  caractère  le  plus 
fin  des  pages  267  et  suiv. 


I  50  REVUK    CRITIQUE  • 

IV.  Description  du  manuscrit  20  H.  39  de  la  bibliothèque  du  prince 
de  Metternich  à  Koenigswart  (variantes  d'Arculf),  par  le  docteur  Neu- 
mann  (pp.  323-333).  Ms.  du  xne  siècle,  très  important  ;  sera  à  employer 
pour  une  nouvelle  édition  d'Arculf. 

V.  Description  de  deux  manuscrits  contenant  la  règle  de  la  Militia 
passionis  Jesu  Christi  de  Philippe  de  Mézières,  par  M.  A.  Molinier 
(pp.  335-364  et  p.  719).  Analyse  et  extraits  de  deux  mss.  des  biblio- 
thèques de  l'Arsenal  et  de  la  Mazarine  ;  ce  dernier  avait  déjà  été  signalé 
par  l'abbé  Lebeuf. 

VI.  Inventaire  d'une  collection  de  photographies  exécutées  dans  le 
cours  d'un  voyage  en  Orient  (1 859-1 860),  par  M.  Louis  de  Clercq 
(pp.  365-37i).  Monuments  et  paysages,  collection  très-rare. 

C.  Documents. 

1.  Lettres.  —  1.  Lettre  du  clerc  Nicétas  à  Constantin  VII  Porphyrogé- 
nètesur  le  feu  sacré  (comte  Riant),  pp.  375-382.  —  Lettre  fausse  publiée 
en  1787  par  un  certain  Chrysanthe,  kamarasi  du  S.  Sépulcre. 

2.  Six  lettres  relatives  aux  croisades  (comte  Riant),  pp.  383-392, 
xne,  xme  et  xvc  siècles.  Cinq  étaient  inédites;  une  seule  avait  été  impri- 
mée en  1859,  en  Italie,  dans  un  opuscule  de  la  plus  grande  rareté. 

II.  Chartes.  —  1.  Charte  relative  à  Pierre  l'Hermite  (Léon  Vieillard), 
pp.  393-4.  Année  1 100.  * 

2.  Actes  constatant  la  participation  des  Plaisançais  à  la  première 
croisade  (D.  G.  Tononi),  pp.  395-401.  Interrogatoires  de  1 173  et  1174. 

3.  Acte  de  soumission  des  barons  du  royaume  de  Jérusalem  à  Frédé- 
ric II  (R.  Rôhricht),  pp.  402-403.  D'après  l'original,  aujourd'hui  au 
Musée  britannique.  Année  1241. 

4.  Indulgences  octroyées  par  Galerand,  évêque  de  Beryte,  ambassa- 
deur de  Terre-Sainte  en  Angleterre  (comte  Riant),  pp.  404-405.  Charte 
du  5  novembre  1244  pour  l'abbaye  d'Oseney. 

5.  Traité  des  Vénitiens  avec  l'émir  d'Acre  en  1304  (M.  de  Mas-La- 
trie), pp.  406-408. 

6.  Trois  chartes  du  xne  siècle,  concernant  l'ordre  de  Saint-Jean-de- 
Jérusalem  (Delaville  le  Roulx),  pp.  409-415.  Deux  de  ces  pièces  sont 
tirées  des  archives  de  la  Haute-Garonne;  la  troisième,  des  archives  de 
Malte;  cette  dernière,  dont  un  fac-similé  accompagne  le  volume,  pré- 
sente cette  particularité  de  porter  des  souscriptions  en  grec  et  en 
latin. 

7.  Privilèges  octroyés  à  l'Ordre  Teutonique  (comte  Riant),  pp.  416- 
422.  Six  pièces,  dont  cinq  se  rapportent  aux  biens  possédés  en  An- 
gleterre par  l'Ordre  Teutonique  (1 235-1401). 

8.  Titres  de  l'hôpital  des  Bretons  d'Acre  (Delaville  le  Roulx),  pp.  423- 
433.  Années  1 255-126 1  ;  8  actes  dont  7  bulles  des  papes  Alexandre  IV 
et  Urbain  IV,  et  1  de  Gilles,  archevêque  de  Tyr.  En  tête,  une  note  très 
intéressante  sur  cet  hôpital. 

9.  Actes  passés  en  1271,  1274  et  1279  à  L'Aïas  (Petite- Arménie)  et  à 


u'HISTOrRK    ET    DR    LITTÉRATURK  I  5  I 

Beyrouth  par  devant  des  notaires  génois  (Cher.  Desimoni).  pp.  434-534. 
En  tête,  préface  très  curieuse  de  l'éditeur  sur  les  relations  des  Génois 
avec  l'Arménie,  l'intérêt  que  peuvent  présenter  les  actes  publiés  et  la 
valeur  des  monnaies  citées  dans  ces  documents.  Ces  dernières  notes  sont 
d'autant  plus  précieuses  qu'on  connaît  la  compétence  de  M.  le  chevalier 
Desimoni  pour  tout  ce  qui  touche  l'histoire  monétaire  des  pays  mé- 
diterranéens. Les  actes  sont  au  nombre  de  79  et  tirés  tous  des  archives 
notariales  de  Gênes. 

10.  Libre  exercice  du  commerce  octroyé  à  un  pèlerin  champenois 
(1 153).  (A.  de  Barthélémy),  pp.  535-536.  Charte  des  archives  de  l'hôpi- 
tal de  Châlons-sur-Marne. 

11.  Charte  de  départ  du  dauphin  Humbert  II  (J.  Roman),  pp.  537- 
538.  Acte  du  2  septembre  1 345,  daté  de  la  galée,  qui  transporta  le  dau- 
phin en  Orient. 

12.  Procès-verbal  du  martyre  de  quatre  frères  mineurs  (1 391). 
(P.  Durrieu),  pp.  539-546.  Tiré  des  archives  du  Vatican;  très  cu- 
rieux. 

III.  Poèmes.  —  En  tête,  note  de  M.  le  comte  Riant  sur  les  poèmes 
existants,  relatifs  à  l'histoire  de  l'Orient  latin  (pp.  547-55o  et  p.  720), 
et  sur  ceux  qui,  signalés  par  d'anciens  auteurs,  ont  disparu  depuis. 

1.  Le  Solymarius  de  Gunther  de  Pairis  (W.  Wattenbach),  pp.  55 1- 
56i.  M.  Wattenbach  a  retrouvé  à  Cologne,  à  la  Bibliothèque  du  gym- 
nase, dans  des  fragments  de  manuscrits,  environ  240  vers  du  fameux 
Solymarius.  L'éditeur  a  soumis  ces  fragments  à  M.  Pannenborg,  qui  y 
a  reconnu  les  expressions  et  tournures  favorites  de  l'auteur  du  Ligu- 
rinus,  expressions  et  tournures  qu'il  était  seul  à  employer  à  son  époque. 
Au  point  de  vue  littéraire,  la  découverte  de  M.  Wattenbach  est  tout  à 
fait  importante;  au  point  de  vue  historique,  elle  l'est  moins,  Gunther 
s'étant  contenté  de  mettre  en  vers  l'ouvrage  de  Robert  le  Moine. 

2.  Achard  d'Arrouaise,  Poème  sur  le  Templum  Domini  (marquis  de 
Vogué),  pp.  562-579.  Poème  latin,  où  l'on  trouve  quelques  détails  cu- 
rieux sur  les  querelles  des  Latins  pendant  leur  domination  à  Jérusalem 
et  sur  le  Templum  Domini. 

3.  Deux  poésies  latines  relatives  à  la  IIIe  croisade  (H.  Hagenmeyer), 
pp.  58o-585.  L'une,  écrite  vers  1187,  est  publiée  d'après  un  ms.de 
la  bibliothèque  de  Laon  ;  l'autre  est  donnée  d'après  un  ms.  de  Saint- 
Gall. 

IV.  Documents  divers . —  1.  Aboul  Hassan  Aly  el  Herewy.  Indica- 
tions sur  les  lieux  de  pèlerinage  (Charles  Schefer),  pp.  587-609.  Voya- 
geur arabe  du  xnK  siècle,  mort  en  1215  ;  M.  Schefer  donne,  d'après  un 
manuscrit  du  xiue  siècle,  la  traduction  des  passages  de  son  voyage  rela- 
tifs à  la  Galilée,  à  la  Palestine  et  aux  côtes  de  Syrie.  On  y  trouve  beau- 
coup de  renseignements  qui  concordent  avec  ceux  que  fournissent  les 
relations  des  pèlerins  chrétiens. 

2.  Les  Remembrances  de  la  haute  cour  de  Nicosie.  Les  Usages  de 


l52  REVUE    CRITIQUE 

Naxos  (P.  Viollet),  pp.  610-614.  D'après  le  ms.  5684  de  la  bibliothèque 
de  sir  Thomas  Phillips,  traduction  italienne  d'une  partie  des  Remem- 
brances;  et  d'après  le  ms.  85 12  du  British  Muséum,  traduction  dans  la 
même  langue  d'une  partie  des  Usages. 

D.  Mélanges  historiques  et  archéologiques. 

I.  Etudes  sur  les  derniers  temps  du  royaume  de  Jérusalem  (Rôhricht), 
pp.  617-652. —  A.  La  croisade  du  prince  Edouard  d'Angleterre  (1270- 
1274)  ;  très  intéressant;  article  fait  en  partie  d'après  des  sources  inédites. 
—  B.  Les  batailles  de  Hims  (1287  et  1299).  Défaits  la  première  fois,  les 
Mongols  y  dispersèrent,  en  1299,  les  troupes  égyptiennes. 

II.  Projets  d'empoisonnement  de  Mahomet  II  et  du  pacha  de  Bosnie, 
accueillis  par  la  république  de  Venise  (De  Mas-Latrie),  pp.  65  3-66o. 
Textes  authentiques  tirés  des  archives  de  Venise,  qui  prouvent  que  le 
gouvernement  de  Venise  employait  sans  le  moindre  scrupule  les  moyens 
les  plus  expéditifs  de  se  débarrasser  de  ses  ennemis.  Ces  textes  et  d'autres 
semblables  semblent  avoir  été  la  source  du  faussaire,  auteur  des  cé- 
lèbres statuts  du  conseil  des  Dix  publiés  par  Daru,  statuts  dont  l'au- 
thenticité est  d'ailleurs  inadmissible. 

III.  Trois  sceaux  et  deux  monnaies  de  l'époque  des  croisades  (G. 
Schlumberger),  pp.  663-678.  Sceau  de  plomb  de  Renaud  de  Châtillon, 
seigneur  de  Karak  et  Montréal;  matrice  de  sceau  de  Gautier  de  Châtil- 
lon ;  matrice  de  sceau  d'un  catholicos  d'Arménie  du  xme  siècle  ;  monnaie 
de  bronze  de  Girard ,  comte  de  Sagète  ou  Sidon  ;  monnaie  d'or  de 
Léon  II,  roi  d'Arménie.  Figures.  —  Article  très  intéressant,  toutefois 
nous  croyons  que  M.  Schlumberger  a  tort  d'admettre  que  les  gra- 
veurs des  sceaux  représentant  des  monuments,  châteaux  ou  églises  ont 
toujours  essayé  de  reproduire  exactement  le  château  ou  l'église  qu'ils 
avaient  sous  les  yeux;  l'étude  attentive  des  sceaux  du  midi  de  la  France 
dont  il  parle,  l'amènerait,  sans  aucun  doute,  à  des  conclusions  un  peu 
différentes  de  celles  qu'il  exprime  (pp.  667-8). 

IV.  Bulles  de  hauts  fonctionnaires  byzantins  d'ordre  militaire,  prin- 
cipalement de  chefs  des  corps  étrangers  ou  indigènes  de  la  garde  et  de 
généralissimes  des  forces  d'Occident  en  Orient  (G.  Schlumberger), 
pp.  679-696.  Intéressant;  quelques-unes  de  ces  bulles,  dont  M.  S.  pu- 
blie le  dessin,  ont  une  certaine  valeur  artistique. 

V.  Bulles  byzantines  relatives  aux  Varègues  (Dr  A.  Mordtmann), 
pp.  697-703.  Description  de  8  bulles,  les  seules  qui  soient  actuellement 
connues. 

VI.  Les  Archives  des  établissements  latins  d'Orient,  à  propos  d'une 
publication  récente  de  l'Ecole  française  de  Rome  (comte  Riant),  pp.  705- 
710.  Article  déjà  publié  dans  la  Bibliothèque  de  V école  des  Chartes, 
et  dans  lequel  M.  Riant  indique  les  lacunes  à  combler  dans  la  série  de 
ces  archives,  les  pays  où  devront  chercher  les  savants  pour  retrouver 
trace  des  collections  perdues.  M.  Riant  dit,  en  passant,  quelques  mots  de 
la  publication  de  M.  F.  Delaborde,  les  Chartes  de  Josaphat. 


d'histoire  et  dk   LITTÉRATURE  I  5  3 

Le  volume  renferme  ensuite  dix  pages  d'additions  et  de  corrections  et 
se  termine  par  un  index  très  copieux  (pp.  723-767).  Suit  enfin,  avec 
une  pagination  particulière,  une  copieuse  bibliographie  de  l'Orient  latin 
pour  les  années  1878,  1879  et  1880  [j5  pages  à  2  colonnes).  Elle  se 
divise  en  trois  parties  :  A.  Livres  et  articles  divers.  B.  Articles  publiés 
dans  les  périodiques  spéciaux.  C.  Cartes.  La  première  partie  est  classée 
par  ordre  alphabétique  ;  à  chaque  ouvrage  ou  article  sont  indiqués  les 
comptes-rendus  qui  en  ont  paru;  le  nombre  des  articles  est  de  71 1 ,  dans 
toutes  les  langues  de  l'Europe,  mais  principalement  en  allemand,  an- 
glais et  français.  —  Le  dépouillement  des  périodiques  spéciaux  est  moins 
intéressant;  la  plupart  des  articles  qu'ils  renferment  ont  peu  de  valeur 
et  sont  écrits  dans  un  but  d'édification  et  de  propagande.  Ainsi  les 
ncs  928  à  1066,  tirés  de  la  Terre  sainte,  journal  des  lieux  saints,  n'ont 
à  peu  près  aucun  intérêt  et  la  plupart  sont  des  articles  de  polémique. 
Toutefois,  sous  peine  d'être  incomplets,  les  rédacteurs  de  cette  biblio- 
graphie devaient  dépouiller  ces  revues  spéciales  ;  elles  sont  au  nombre 
de  8,  dont  3  en  français,  4  en  allemand  et  1  en  anglais;  cette  dernière 
est  le  Statements,  la  plus  importante  de  toutes.  Les  cartes  n'occupent 
que  24  numéros;  la  plupart  viennent  d'Allemagne.  Cette  bibliographie 
se  termine  par  une  table  analytique,  dans  laquelle  les  ouvrages  sont  ran- 
gés sous  un  certain  nombre  de  rubriques  générales. 

A.  Molinier. 

168.  —  L,e»  guerres  sous  Louis  X.V,  par  le  comte  Pajol,  général  de  division. 
Tome  I.  1715-1739.  Paris.  Firmin-Didot.  In-8°  vu  et  652  p. 

Le  général  comte  Pajol  se  propose  de  retracer  le  plus  complètement 
possible,  en  sept  volumes,  l'histoire  des  guerres  du  règne  de  Louis  XV. 
Le  présent  volume  est  consacré  à  la  guerre  d'Espagne  et  à  celle  de  la 
guerre  de  la  succession  de  Pologne  ;  les  deux  volumes  suivants  con- 
tiendront l'histoire  de  la  guerre  de  la  succession  d'Autriche;  le  IVe  et  le 
Ve,  celle  de  la  guerre  de  Sept  Ans  ;  le  VIe,  celle  de  diverses  expéditions 
(Minorque,  Corse,  Canada,  Indes,  débarquement  du  prétendant  en 
Ecosse);  le  VIIe,  enfin,  renfermera  l'historique  abrégé  des  corps  de  l'in- 
fanterie et  de  la  cavalerie. 

L'expédition  d'Espagne  (17 18-1720),  dirigée  par  le  maréchal  de 
Berwick,  n'était  connue  jusqu'ici  que  dans  ses  grandes  lignes;  M.  P. 
en  fait  une  histoire  minutieuse,  il  expose  l'état  de  l'armée  française  au 
commencement  de  la  campagne,  en  s'aidant  surtout  de  la  correspon- 
dance de  Berwick  au  régent  ;  il  raconte  très  amplement  les  opérations 
militaires  en  Espagne  (prise  de  Fontarabie,  de  Saint-Sébastien  et 
d'Urgel). 

Dans  la  période  qui  s'étend  de  la  guerre  d'Espagne  à  celle  de  la  guerre 
de  la  succession  de  Pologne,  ont  lieu  de  nombreuses  réformes  (réorgani- 
sation de  la  maréchaussée  et  de  l'artillerie,  ordonnance  du  27  février 


1  54  REVUE    CRIMQDR 

1726  sur  les  milices,  création  de  six  compagnies  de  cadets,  camps  d'ins- 
tructions, rétablissement  du  service  des  étapes,  etc.). 

La  guerre  de  la  succession  de  Pologne  forme  la  plus  grande  partie  du 
livre  de  M.  Pajol.  On  regrettera  qu'il  n'ait  pas  cité,  au  moins  au  bas  de 
la  page,  l'ouvrage  de  M.  Rathery  sur  le  comte  de  Plélo.  Mais  les  campa- 
gnes d'Allemagne,  sous  Berwick,  Asfeld  et  Coigny,  celles  d'Italie,  sous 
Villars,  Coigny,  Broglie,  Noailles,  sont  racontées  avec  une  telle  abon- 
dance de  renseignements  et  un  tel  luxe  de  détails  qu'il  sera  désormais  im- 
possible à  tout  historien  de  cette  guerre  d'être  plus  complet  que  M.  Pa- 
jol'.Grâce  au  grand  nombre  de  documents  qu'il  a  consultés,  surtout  aux 
archives  du  dépôt  de  la  guerre,  pièces  officielles,  dépêches  confidentiel- 
les, avis  secrets,  ordres,  notes  d'avant-poste,  M.  P.  a  fait  comme  le  jour- 
nal de  la  guerre  de  la  succession  ae  Pologne  ;  il  a  tout  recueilli,  tout 
classé,  mentionné  les  moindres  faits  de  cette  longue  lutte,  en  les  ap- 
puyant de  citations  copieuses  et  étendues;  c'est  une  histoire  toute  mili- 
taire qu'il  a  voulu  composer  ;  aussi  ne  tient-il  aucun  compte  des  anec- 
dotes de  cour,  des  influences  de  salon  ou  de  boudoir,  des  discussions 
philosophiques  et  religieuses  de  l'époque  ;  M.  P.  pense  surtout,  dit-il,  à 
servir  les  intérêts  de  l'armée. 

Par  là,  son  récit  est  fort  monotone;  ce  n'est  souvent  qu'une  liste  des 
régiments  qui  prirent  part  aux  opérations,  une  longue  nomenclature 
des  villes  et  des  villages  marqués  par  les  mouvements  de  nos  troupes  ;  et 
d'ailleurs,  une  guerre  où  il  y  eut  tant  de  marches  et  de  contre-marches, 
tant  de  petites  surprises,  tant  de  minces  affaires  d'avant-poste,  n'offre 
pas  au  lecteur  un  bien  vif  intérêt.  En  Allemagne,  l'armée  française  ne 
livra  pas  une  seule  grande  bataille  ;  le  seul  fait  éclatant  est  la  prise  de 
Philippsbourg.  En  Italie,  il  y  eut  deux  batailles,  mais  aussi  stériles  que 
meurtrières  :  celles  de  Parme  et  de  Guastalla.  Toutefois2,  on  devra  sa- 
voir le  plus  grand  gré  à  M.  le  comte  Pajol  de  ce  travail  si  conscien- 
cieux ;  on  ne  peut  que  le  recommander  chaudement  à  tous  ceux  qui 
étudient  l'histoire  de  la  guerre,  et  l'ouvrage,  lorsqu'il  sera  terminé,  ne 
devra  manquer  dans  aucune  de  nos  bibliothèques  de  régiment.     A.  C. 

1.  Il  faut  cependant  attendre  le  volume  ou  plutôt  les  volumes  qui  paraîtront  dans 
la  seconde  série  de  la  grande  publication  de  la  section  historique  des  Archives  de  la 
guerre,  d'Autriche  (Feld^ùge  des  Prin^en  Eugen  von  Savoyen). 

2.  P.  141,  le  roi  Frédéric-Guillaume,  père  de  Frédéric  II,  ne  fut  jamais  «  l'arbitre 
de  l'Europe  ».  —  P.  162,  la  Saxe  galante  n'est  pas  un  «  livre  assez  rare  »j  toute  la 
note  consacrée  à  cet  ouvrage  est  inutile  et  par  trop  naïve;  M.  P.  avoue,  qu'en  le  li- 
sant, il  était  bien  loin  de  soupçonner  que  les  vieux  palais  de  Dresde  et  ses  châteaux 
eussent  abrité  jadis  tant  de  splendeurs  et  de  galanteries.  —  P.  ij5,  qu'est-ce  que  le 
Knipaof,  àDanzig?  —  P.  026,  lire  Kopfstùck  (pièce  de  monnaie)  et  non  «  Kop- 
stuck  ».  —  Pourquoi  dire  «  Weissenburg  »  et  non  Wissembourg,  «  Lauterburg  »  et 
non  Lauterbourg,  «  Freyburg  »  et  non  Fribourg,  «  Bitsch  »  et  non  Bitche  ;  dans 
ce  cas,  il  faut  écrire  «  Strassburg  »  et  non  Strasbourg.  —  P.  207,  note,  une  mention 
comme  celle-ci  «  Seckendorf's  Lebensbeschreibung  »  est  trop  vague.  —  Le  style  est 
parfois  négligé;  «  les  princes...  suivaient  cette  campagne  comme  instruction  mili- 
taire »  (p.  242). 


OHISTOIRE    ET    DE    LITTERATURK  I  5  5 

169.  —  Lei  conte»  en  ver*  d'Andrieux,  suivis  de  lettres  inédites,  avec  notice 
et  notes,  par  P.  Ristelhuber.  Paris,  Charavay.  1882,  in-12,  xxxv-227  p. 

Tout  le  monde  connaît  le  Meunier  sans  souci  ;  les  autres  con- 
tes d'Andrieux  sont  fort  oubliés  aujourd'hui.. Ils  ne  valent  pas  celui-là, 
mais  ils  se  font  presque  tous  lire  avec  agrément.  Le  Procès  du  sénat  de 
Capoue  contient  des  traits  excellents  ;  les  vers  du  Doyen  de  Badajo^ 
ne  valent  pas  mieux  que  la  prose  de  Blanchard,  mais  conservent  le  sel 
de  ce  joli  apologue;  V Alchimiste  et  ses  enfants,  Une  promenade  de 
Fénelon,  Cécile  et  Térence  montrent  le  bon  naturel  du  poète;  la  Bulle 
d'Alexandre  VI \  médiocre  imitation  d'une  plate  nouvelle  de  Casti,  ne 
rachète  pas  la  crudité  du  fond  par  une  suffisante  légèreté  de  forme.  Tel 
qu'il  est,  avec  deux  ou  trois  fleurs  encore  brillantes,  quelques  autres  fa- 
nées et  une  poignée  de  brins  d'herbe,  le  bouquet  que  nous  offre  M.  Ris- 
telhuber conserve  pour  nous  un  peu  de  son  parfum, qui  n'a  jamais  été  très 
pénétrant.  Andrieux  a  lui-même,  sous  le  voile  de  l'anonyme,  jugé  ses 
contes  avec  une  parfaite  justesse  :  «  Ces  pièces,  dit-il,  ont  du  naturel  et 
de  la  gaieté,  mais  elles  manquent  de  poésie...  Il  est  bon  d'être  facile, 
mais  il  ne  faut  pas  que  cela  aille  jusqu'à  la  faiblesse  ou  à  la  négligence.» — 
La  notice  de  l'éditeur  est  suffisante  ;  ses  notes  sont  très  sobres.  Il  a  donné 
ailleurs,  dans  une  intéressante  brochure,  l'étude  des  sources  et  de  la  part 
de  vérité  du  Meunier  sans  souci  [Une  fable  de  Florian,  étude  de  litté- 
rature comparée.  Paris,  Baur,  1881).  —  Les  lettres  publiées  à  la  fin  du 
volume,  relatives  aux  efforts  d'Andrieux,  dans  sa  vieillesse,  pour  faire 
reprendre  ses  pièces  de  théâtre,  n'ont  aucun  intérêt. 

W. 


170.  — Friedrich  L.eopold  Graf  zu  Stolberg,  sein  Entwicklungggang 
nnd  sein  Wirken  im  Celste  der  Kirche,  von  Johannes  Janssen.  Ineinem 
Bande,  zweite  Auflage.  Mit  Stolberg's  Bildniss.  Freiburg  im  Breisgau,  Herder. 
1882.  In-8°,  vi  et  496  p.  5  mark. 

Comme  l'indique  le  titre  et  comme  le  répète  M.  Janssen  dans  sa  pré- 
face, cet  ouvrage  est  la  seconde  édition,  un  peu  abrégée,  des  deux  volu- 
mes parus  en  1877.  Aussi  conseillerons-nous  à  quiconque  voudra  con- 
naître Frédéric  Stolberg  et  l'étudier  à  fond,  de  lire  les  deux  volumes  de 
1877  plutôt  que  le  volume  de  1882.  M.  J.  a  voulu  faire  un  ouvrage  dont 
le  prix  fût  plus  abordable;  il  a  voulu  surtout  mettre  dans  un  jour  plus 
vif  le  «  développement  et  l'activité  de  Stolberg  sur  le  domaine  religieux  ». 
Toutefois,  le  nouveau  livre  de  M.  J .  renferme  quelques  lettres  inédites  et 
des  extraits  de  lettres  qu'on  ne  trouve  pas  dans  l'édition  de  1877  ;  le  récit, 
en  outre,  est  mieux  ordonné  ;  il  suit  moins  strictement  l'ordre  chronolo- 
gique; c'est  ainsi  que  M.  J.  traite  en  une  seule  fois,  et  non  à  diverses  re- 
prises, des  relations  amicales  et  quasi  paternelles  de  Stolberg  avec  Werner 
de  Haxthausen.  Comme  dans  la  première  édition,  M.  J.  laisse  le  plus  sou- 


I  56  REVUE    CRITIQUE 

vent  la  parole  à  Frédéric  Stolberg;  il  reproduit  les  lettres  du  pieux  écrivain, 
soit  par  extraits,  soit  en  entier,  en  se  contentant  de  faire  en  peu  de  mots 
les  liaisons  indispensables  à  l'intelligence  du  récit.  Cette  nouvelle  édition 
aura  certainement  un  grand  succès  dans  le  monde  des  lecteurs  catholiques 
d'Allemagne;  elle  représente  dans  Frédéric  Stolberg  moins  le  poète  et  le 
traducteur  que  le  protestant  converti,  le  catholique  fervent,  l'ami  delà 
princesse  Galitzin;  elle  ne  fait  que  citer  en  passant  les  titres  littéraires 
de  Stolberg  et  s'attache  surtout,  selon  l'expression  même  de  M.  Janssen 
en  tête  de  son  volume,  aux  agissements  du  comte  Frédéric  a  dans  l'es- 
prit de  l'église  ».  Une  partie  importante  du  livre  et  que  nous  recomman- 
dons particulièrement  aux  lecteurs  français,  est  celle  qui  renferme  les 
jugements  de  Stolberg  sur  la  Révolution  française,  sur  Bonaparte,  sur 
les  événements  du  premier  Empire,  enfin  sur  le  mouvement  national  de 
1 8 1 3  et  la  guerre  de  1 8  r 5.  C. 


171.    —    Uebei*     die    Bezlehungen    Kapoleons    III    z»    Preussen     und 

neutschlanri,  oîn  Vortrag,  von  Bernhard  Simson,  Professor  in  Freiburg  im 
Breisgau.  Freiburg  i.  B.  u.  Tûbingen,  J.  C.B.  Mohr  [Paul  Siebeck].  1882.  In-8° 
62  p.  1  mark  20. 

On  lira  cet  opuscule  avec  intérêt  ;  ce  n'est,  comme  l'auteur  nous  l'ap- 
prend, qu'une  conférence  (faite  sans  doute  devant  le  public  de  Fribourg 
en  Brisgau),  et  M.  Simson  n'apporte  aucun  document  inédit;  il  recon- 
naît lui-même  qu'il  court  le  danger  de  répéter  bien  des  choses  qui  sont 
encore  dans  toutes  les  mémoires.  Mais  cette  «  esquisse  »,  où  M.  S.  a 
«  mis  en  relief  ce  qui  lui  a  paru  le  plus  important  et  le  plus  frappant  » 
est  composée  avec  talent.  M.  S.  nous  expose  d'abord  les  sympathies  que 
Napoléon  III  avait  pour  l'Allemagne  et  la  Prusse,  depuis  son  séjour 
sur  le  lac  de  Constance  et  à  Wurzbourg;  puis,  en  tirant  parti  des  ou- 
vrages de  Martin  (Vie  du  prince  Albert),  Geffcken  (Histoire  de  la  guerre 
d'Orient),  Delord,  etc.,  des  études  de  MM.  Rothan  et  de  Sybel  ',  des 
écrits  et  dépêches  de  l'époque,  il  retrace  les  rapports  de  l'empereur  avec 
le  roi  Guillaume  et  M.  de  Bismarck;  tout  cela  est  résumé  avec  clarté,  et 
non  sans  élégance;  c'est  un  abrégé  de  l'histoire  diplomatique  de  la 
France  et  de  l'Allemagne  sous  le  second  empire.  M.  Simson  montre  sur- 
tout que  la  cause  principale  de  toutes  les  erreurs  de  la  politique  fran- 
çaise a  été  ce  qu'il  appelle  die  Unterschàtçung  der  Kraft  Preussens, 
le  trop  peu  de  cas  qu'on  faisait  en  France  des  forces  de  la  Prusse  2. 

1 .  Nous  voulons  parler  de  la  belle  étude  de  M.  de  Sybel  sur  Napoléon  III  dans  le 
troisième  volume  de  ses  Kleine  historische  Schriften  (Stuttgart,  Cotta,  1880). 

2.  Le  prince  Albert  rapporte  que  Napoléon  III  lui  récita  «  une  poésie  de  Schiller 
sur  les  avantages  de  la  guerre  et  de  la  paix  pour  l'humanité  »  ;  M.  Simson  pense  à 
un  passage  de  la  Fiancée  de  Messine;  on  peut  citer  aussi  un  passage  des  Piccolomini 
(I,  IV). 


d'histoire  et  de  littérature  ID7 

CHRONIQUE 

FRANCE.  —  Aux  deux  premières  parties  de  sa  publication,  Les  arts  à  la  cour  des 
papes  pendant  le  xve  et  le  xvi*  siècle,  documents  inédits  tirés  des  archives  et  des  bi- 
bliothèques romaines,  M.  Eugène  Mùntz  vient  d'ajouter  une  troisième  partie.  La  pre- 
mière partie  de  ce  considérable  ouvrage  était  consacrée  à  Martin  V  et  à  Pie  II  (1417- 
1464Ï,  et  la  deuxième  à  Paul  II  (1464-147 1);  la  troisième  traite  de  Sixte  IV  et  de 
Léon  X  (1471-15-.il)  et  se  divise  en  deux  sections,  dont  la  première,  relative  au  pon- 
tificat de  Sixte  IV  (in-8%  3oo  p.  avec  2  gravures;  XXVIIIe  fasc.  de  la  «  Bibliothèque 
des  écoles  françaises  d'Athènes  et  de  Rome  »),  fait  l'objet  de  la  présente  note.  Le 
volume  s'ouvre  par  une  Notice  préliminaire  sur  Sixte  IV  (g  août  1 471-18  août  1484); 
dans  cette  très  intéressante  notice,  M.  Muntz,  après  avoir  finement  marqué  le  carac- 
tère de  François  délia  Rovere,  expose  les  ressources  matérielles  dont  le  nouveau 
pontife  disposait  et  comment  il  joua  son  rôle  de  Mécène.  «  Ce  sera  l'honneur  des 
Médicis,  dit  l'auteur,  d'avoir  compris  que  le  musée  doit  être  le  complément  de  la 
bibliothèque,  et  d'avoir  assigné  une  place  aux  marbres  à  côté  des  manuscrits...  Ils 
ont  formé  une  collection  d'antiques  qui  ne  tarda  pas  à  devenir  la  première  de  l'Ita- 
lie, et  qui  jeta  un  éclat  incomparable  sur  leur  palais  de  la  Via  Larga,  véritable  école 
de  la  Renaissance  florentine.  A  Rome,  pendant  tout  le  xve  siècle,  ces  deux  tendances 
paraissent  inconciliables.  Un  pape  se  distingue-t-il  par  son  amour  pour  la  littérature 
antique,  on  peut  affirmer  d'avance  qu'il  négligera  les  monuments.  S'attache-t-il,  au 
contraire,  aux  monuments,  c'est  que  la  littérature  n'a  pas  d'attraits  pour  lui.  » 
M.  M.  montre  que  Sixte  a  ouvert  le  musée  du  Capitole  au  public,  achevé  la  res- 
tauration de  la  statue  de  Marc-Aurèle,  défendu  l'exportation  des  marbres  antiques, 
mais  —  c'est  le  revers  de  la  médaille  —  qu'il  a  dispersé  le  musée  du  palais  Saint- 
Marc,  démoli  une  demi-douzaine  de  temples  ou  d'arcs  de  triomphe,  autorisé  ses  ar- 
chitectes à  prendre  partout  les  matériaux  nécessaires  aux  constructions  nouvelles  ; 
«  comment  justifier  la  conduite  de  Sixte  vis-à-vis  des  ruines  vénérables  qui  couvraient 
sa  capitale  !  Ses  victimes  sont  innombrables,  et  le  long  martyrologe  de  Rome  anti- 
que enregistre  son  règne  comme  un  des  plus  néfastes  »  (p.  i5).  Il  est  vrai,  ces  «  cri- 
mes »  commis  par  Sixte-  contre  la  Rome  antique  se  rachètent  par  les  services  ren- 
dus à  la  Rome  moderne;  Sixte  élève  la  Chapelle-Sixtine,  Sainte-Marie-du  Peuple, 
Sainte-Marie-de-la-Paix,  l'hospice  du  Saint-Esprit;  il  restaure  et  embellit  vingt  ba- 
siliques; il  reconstruit  le  pont  du  Janicule,  rétablit  les  aqueducs  de  la  fontaine  Trevi, 
pave  les  rues  boueuses,  ouvre  de  nouvelles  avenues,  remplace  les  dédales  de  ruelles 
par  de  grandes  artères  régulières  (le  Corso,  la  Via  Giulia,  Ripetta,  la  Lungara),  etc. 
M.  M.  admire  cette  œuvre  en  son  ensemble,  mais  il  fait  des  réserves  sur  les  détails  ; 
.les  architectes  de  Sixte  ne  furent  que  des  artistes  laborieux  sans  originalité  ni  puis- 
sance créatrice.  Il  choisit  mieux  ses  sculpteurs  et  ses  peintres;  ce  furent  les  premiers 
de  l'Italie;  mais  ils  durent  ne  consacrer  leur  ciseau  ou  leur  pinceau  qu'à  la  glorifi- 
cation de  la  religion.  Dans  cet  exposé  sommaire,  M.  M.  ne  retrace  pas  seulement 
l'œuvre  de  Sixte;  il  étudie  les  auxiliaires  du  pontife,  les  Riario,  les  Basso,  les  délia 
Rovere,  dont  les  fondations  ont  parfois  rivalisé  avec  celles  du  pape,  et  surtout  Guil- 
laume d'Estouteville,  archevêque  de  Rouen,  camerlingue  de  l'Eglise  romaine,  sur- 
intendant de  l'édilité,  que  Fulvio  nomme  nummosissimus  héros.  Cette  introduction 
de  M.  M.  est  suivie  du  chapitre  premier,  qui  renferme  des  Notices  sur  les  princi- 
paux artistes  du  règne  de  Sixte  I V  (pp.  66-1 11);  les  documents  découverts  par  M.  M. 
dans  les  archives  du  Vatican  et  du  Campo  Mario,  ainsi  que  ceux  que  M.  Milanesi  a 
trouvés  dans  les  archives  de  la  Toscane,  permettent  de  modifier  sensiblement  l'his- 


I  58  RSVUK    CRITIQUE 

toire  de  l'architecture  romaine;  M.  M.  restreint  le  rôle  de  Baccio   Pontelli;  il  juge 
problématique  la  participation  de  Giuliano  da  Majano  aux  travaux  entrepris  à  Rome; 
il  restitue  à  Giuliano  da  San  Gallo  l'influence  qu'il  a  exercée  sur  le  développement 
de  l'architecture;  il  rend  à  Meo  del  Caprino  et  Giacomo  da  Pietrasanta  les  œuvres 
qu'on  attribuait  à  d'autres,  il  appelle  l'attention  sur  un  artiste  jusqu'ici  entièiement 
inconnu,  Giovannino  de'  Dolci,  humble  charpentier,  élevé  à  la  dignité  de  commis- 
saire des  constructions  pontificales,  et  qui  fut  l'architecte  de  la  chapelle  Sixtine;  il 
donne  la  liste  des  sculpteurs  et  des  peintres  employés  par  Sixte;  il  publie  le  texte 
inédit  des  Statuts  de  la  corporation  des  peintres  de  Rome  inexactement  traduits  en 
italien  par  Missirini.  Le  n*,  le  m%  le  IVe  et  le  ve  chapitre  traitent  plus  spécialement 
et  avec  le  plus  grand  détail  des  travaux  exécutés  à  Rome  :  if.  Le  palais  et  la  basilique 
du  Vatican  (pp.  iii-i5i);  nr.  Les  églises  (pp.  i52-i68);  iv.  Les  monuments  antiques 
(pp.  168-178);  v.  Edifices  civils  divers,  places  et  rues,  ponts,  portes  et  murs  (pp.  178- 
207).  On  remarquera,   dans  le  n'  chapitre,  les  documents  relatifs  à  la  bibliothèque 
du  Vatican  et  tirés  des  registres  de  Platina  *;  les  pages  sur  la  chapelle  Sixtine,  dont 
les  travaux,  d'après  des  passages  de  la  chronique  de  Jacques  de  Volterra  relevés  pour 
la  première  fois  par  M.  M.,  n'étaient  pas  encore  assez  avancés  en  1481  pour  qu'on 
pût  y  officierT  etc.  Le  111e  chapitre  démontre,  entre  autres  points  nouveaux,  que,  con- 
tre l'opinion  de  Vasari,  Giovannino  de'  Dolci  a  restauré  la  basilique  des  Saints-Apô- 
tres. Le  chapitre  iv  reproduit  des  documents  qui  définissent  l'attitude  de  Sixte  IV 
vis-à-vis  de  l'art  antique;  l'un  d'eux  établit  que,  longtemps  avant  Alexandre  VI,  le 
Vatican  communiquait  avec  le  château  Saint-Ange  par  un  chemin  couvert,  qui  per- 
mettait de  se  rendre  de  l'un  à  l'autre  édifice  sans  être  vu  du  dehors;  on  ne  lit  pas 
sans  intérêt  la  liste  des  antiques  que  comprenait,  à  cette  époque,  le  musée  du  Capi- 
tule. Dans  le  chapitre  V,  M.  M.  publie  les  documents  concernant   les  grands  travaux 
de  voirie  entrepris  par  Sixte  V;  ce  pape  réorganisa  l'office  des  «  magistri  viarum  ■ 
sous  la  présidence  du  cardinal  d'Estouteville;  dans  la  bulle  de    1480,  il  posa  avec 
une  netteté  incomparable  les  règles  de  l'expropriation  pour  cause  d'utilité  publique; 
il  fit  reconstruire  le  «  Pons  Quinti  »  qu'on  appela  depuis  le  Ponte  Sisto,  non  point 
par  Ponteili,  comme  le  dit  Vasari  —  que  M.  M.  surprend  si  souvent  en  flagrant  dé- 
lit d'erreur,  —  mais   surtout  par  Niccolo  de  Narni.  Le  vi'  chapitre  de  l'ouvrage 
(pp.  207-238)  a  pour  titre  :  Travaux  exécutés  en  dehors  de  Rome  (Ancône,  Assise,  Cé- 
sène,  Civita-Vecchia,  Foligno,   Forli,  Ostie,  Savone,  ville  natale  de  Sixte  IV,  etc.). 
Le  vu'  et  dernier  chapitre-(pp.  239-284)  traite  de  l'orfèvrerie,  de  la  tapisserie,  de  la 
broderie,  des  fêtes;  il   montre  que  Sixte,  qui  fit  un  instant  mine  d'austérité,  «  ne 
tarda  pas  à  céder  au  courant  et  à  rechercher  cette  magnificence  qui  paraissait  insé- 
parable du  pouvoir  pontifical  »  ;  il  se  termine  par  la  reproduction  de  YEdit  somp- 
tuaire  de  1473  (pp.  280-284)  où  Sixte  recommandait  à  ses  sujets  d'observer  les  rè- 
gles que  lui-même  ne  pratiquait  pas.  Un  appendice  renferme  des  documents  inédits 
sur  les  travaux  et  commandes  du  cardinal  d'Estouteville  (pp.  285-297)  et  le  Testa- 
ment du  cardinal  François  de  Gonzague;  un  autre  appendice,  à  la  suite  de  la  «  No- 
tice préliminaire  »,  contient  quelques  poésies  d'Aurelio  Brandolini  de  laudibus  Sixti 
quarti  et  des  documents  sur  les  finances  de  Sixte  IV  (pp.  56-6i>).  Ce  nouvel  ouvrage 
du  bibliothécaire  de  notre  Ecole  des  beaux-arts  se  recommande  par  les  qualités  dont 
témoignent  déjà  ses  travaux  précédents;  les  recherches  de   M.  Mûntz  sont  menées 
non-seulement  avec  sagacité,  mais  avec  un  soin  scrupuleux,  une  ardeur  qui  ne  né- 

1.  Dans  l'inscription  métrique  de  Platina  sur  la  Bibliothèque  (vers  4),  M.  M.  met  un  point  d'in- 
terrogation après  moconide;  ne  peut-on  lire  Moeonide  et  traduire  ainsi  :  Pisistrate  (Cecropius 
lyrannus)  ne  peut  se  glorifier  que  d'avoir  réuni  les  fragments  dispersés  d'Homère  ? 


0  HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE  I  5o. 

glige  aucun  document,  aucun  détail  ;  elles  aboutissent  à  des  résultats  nouveaux  pour 
l'histoire  de  l'art  ;  elles  sont  résumées  dans  un  récit  clair  et  net,  où  l'on  trouve  sou- 
vent de  précieuses  observations  sur  l'esprit  de  la  fin  du  xvc  siècle  et  de  la  Renaissance. 

—  Deux  nouvelles  plaquettes  de  M.  Albert  Babeau  sont  consacrées,  l'une  à  l'entrée 
de  Henri  IV  à  Troyes  (Encore  quelques  mots  sur  Henri  IV  à  Troyes,  Troyes,  Du- 
four-Bourquet.  In-8°,  8  p.,  avec  une  planche  lithographiée)  ;  elle  donne  la  descrip- 
tion du  vitrail  de  Linard  Gontier  représentant  l'entrée  du  roi  dans  la  cathédrale  de 
Saint- Pierre  ;  l'autre,  à  Grosley  magistrat  (Ibid.  In-8",  i5  p.);  M.  Babeau  nous 
montre  Grosley,  grand-maire  de  l'abbaye  de  Saint-Loup  et  bailli  de  la  baronnie  de 
Chappés  et  de  Vauchassis. 

—  M.  Ph.  Tamzey  de  LARROQUEa  trouvé  à  la  bibliothèque  de  Carpentras  (recueil 
335  m)  une  plaquette  extrêmement  rare  qui  n'est  pas  mentionnée  par  les  plus  exacts 
bibliographes;  c'est  la  relation  de  Y  Entrée  de  Charles  IX  à  Bordeaux,  publiée  a 
Paris  en  i565,  M.  T.  de  L.  a  jugé  utile  de  réimprimer  cet  opuscule  qui  comblera 
les  lacunes  de  Y  Histoire  de  la  ville  de  Bordeaux,  de  Dom  Devienne.  11  a  gardé  la 
longue  pièce  de  vers  latins,  intitulée  Aquitania,  qui  suit  cette  relation,  parce  que 
«  cette  pièce,  dédiée  au  chancelier  de  France,  Michel  de  Lhospital,  est  charmante, 
et  a  pour  auteur  Stephanus  Crusellus  que  rien  n'empêche  d'identifier  avec  Etienne 
de  Ouseau  le  chroniqueur  ».  La  réimpression  faite  par  M.  T.  de  L.  et  augmentée 
par  lui  d'un  avertissement  et  d'un  commentaire,  est  extraite  de  la  Revue  des  biblio- 
philes (tirage  à  j5  exemplaires)  et  se  vend  à  Bordeaux,  chez  P.  Chollet.  Nous  y  re- 
lèverons une  note  curieuse  ;  il  est  dit  dans  la  relation  que  la  livrée  du  roi  était 
«  blanc,  pcrs  et  rouge  ».  «  Pets,  dit  M.  T.  de  L.,  signifie  une  sorte  de  couleur  bleue. 
Voir  le  dictionnaire  de  Littré  qui  cite  un  passage  d'un  poète  du  xvie  siècle,  Ma- 
chaut,  où  pers  est  synonyme  d'azur.  D'après  le  Dictionnaire  de  V Académie,  pers  dé- 
signerait une  nuance  entre  le  vert  et  le  bleu.  Le  Dictionnaire  de  Richelet  dans  la 
définition  du  mot  pers,  écarte  le  vert  et  ne  garde  que  le  bleu.  Le  Dictionnaire  de 
Trévoux  explique  le  mot  :  «  qui  est  de  couleur  bleue,  ou  tirant  sur  le  bleu,  cœru- 
leus  ;  Homère  appelle  souvent  Minerve  aux  yeux  pers,  Minerva  glaucopis.  »  On  voit 
qu'en  tout  cela  c'est  le  bleu  qui  domine.  On  est  donc  autorisé  à  dire  que  la  livrée 
blanc,  pers  et  rouge  de  Charles  IX  avait  devancé  notre  drapeau  tricolore  »  (p.  7). 
—  M.  T.  de  L.  a  trouvé  encore  à  la  bibliothèque  de  Carpentras  quelques  autres  pla- 
quettes d'une  insigne  rareté,  et  il  compte  les  publier  successivement,  pour  la  plus 
grande  joie  des  curieux  en  général,  et  des  curieux  de  h  son  cher  Sud-Ouest,  en  par- 
ticulier ».  Il  en  réunira  quatre,  nous  dit-il,  sous  le  titre  de  :  Le  duc  de  Rohan  en 
Gascogne,  et  quatre  autres  sous  le  titre  de  :  Le  vice-amiral  Barrault  et  les  pirates 
de  la  Gironde. 

—  Après  l'histoire  du  Véritable  Saint-Genest  de  Rotrou,  M.  Léonce  Person  nous 
donne  une  Histoire  de  Vences las  (Cerf,  in-8°,  vin  et  99  p.).  Dans  le  premier  cha- 
pitre de  son  ouvrage  (pp.. 22-28)  l'auteur  montre  ingénieusement  comment  le  sujet 
de  Venceslas  s'accordait  merveilleusement  avec  le  génie  de  Rotrou  et  le  tour  parti- 
culier de  ses  idées  ;  Rotrou  a  aimé  par-dessus  tout  les  «  intrigues,  amenées  par  un 
déguisement  des  personnages,  qui  produit  une  erreur  sur  la  personne  ».  Le  chapi- 
tre 11  (pp.  29-48)  étudie  la  pièce  de  Francisco  de  Rojas,  No  ay  serpadre  siendorey 
(«On  ne  peut  être  père  et  roi  en  même  temps  »  ou,  comme  traduit  Alph.  Royer,  «  il 
n'y  a  pas  à  être  père  quand  on  est  roi  »);  M.  Person  analyse  très  minutieusement 
la  première  et  la  deuxième  journée  de  cette  pièce  espagnole  qui  inspira  la  tragédie 
de  Rotrou  ;  il  montre  que  le  poète  français  s'est  gardé  des  gongorismes  de  Rojas, 
mais  il  regrette  qu'il  n'ait  pas  profité  des  incidents  et  des  péripéties  que  renferme 
la  deuxième  journée  et  qu'ilait  refroidi  sa  pièce  par  l'inutile  complication  des  amours 


IÔO  REVUE    CRITIQUE    D'HISTOIRE    ET    DE    U1TERATURB 

de  Théodore  et  du  duc.  Le  me  chapitre  (pp.  49-65)  compare  la  troisième  journée 
de  la  comédie  espagnole  et  le  ive  et  leve  acte  de  Venceslas;  le  coup  de  théâtre  est  plus 
saisissant  dans  Rotrou  que  dans  Rojas,  grâce  à  l'incertitude  qui  règne,  au  moment  du 
mariage  et  du  meurtre,  sur  l'identité  de  la  victime,  et  le  caractère  de  Ladislas  est  tout- 
à-faitune  création  du  poète  français;  «  farouche  et  indompté,  violent,  hautain,  contra- 
dicteur desautres  et  de  soi-même,  terrible  en  ses  colères  comme  un  comte  de  Gharolais, 
ou  comme  un  duc  de  Bourgogne  qui  n'aurait  pas  eu  son  Beauvillier  ou  son  Fénelon; 
donnant  la  mort  lâchement  et  s'apprêtant  à  la  recevoir  bravement  ;  effrayant  et  me- 
naçant dans  la  mort  même;  dominé  enfin  par  une  de  ces  violentes  passions  qui  peu- 
vent faire  d'un  homme  un  héros,  quand  elles  n'en  font  point  un  criminel  »,  tel  est 
Ladislas  (pp.  64-60).  Le  chapitre  iv  est  consacré  à  Venceslas  au  xvue  et  au  xvine  siè- 
cle (pp.  66-78)  ;  M.  Person  donne  les  dates  indiquées  par  les  registres  de  La  Grange; 
il  rappelle  la  mort  de  Baron  qui  joua  le  rôle  de  Venceslas  à  l'âge  de  76  ans,  se 
trouva  mal  et  «  tomba  au  champ  d'honneur  comme  Mondory,  Montfleury  et  Molière  »  ; 
il  raconte  la  querelle  de  l'Année  littéraire  et  du  Mercure  de  France,  de  Fréron  et  de 
Marmontel  qui  avait  fort  témérairement  corrigé  le  texte  primitif  de   Venceslas.  Le 
chapitre  v,  Venceslas  au  Théâtre-Français  sous  le  premier  Empire  (pp.  80-89)  ex~ 
pose  les  griefs  du  critique  du  Journal  des  Débats.  Geoffroy,  contre  la  pièce  de  Ro- 
trou; Geoffroy  louait  1'  «  impétuosité  sauvage  »  de  Talma  dans  le  rôle  de  Ladislas, 
mais  il  regrettait  l'impunité  et  le  couronnement  du  meurtrier  et  trouvait  qu'il  y  a  là 
une  grande  immoralité;  M.  Person  justifie  Rotrou;  il  fait  sur  le  caractère  de  Ladis- 
las et  le  dénouement  de  la  pièce  des  observations  à  la  fois  spirituelles  et  vraies.  Le 
chapitre  vi  fpp.  90-95)  a  pour  titre  :   Venceslas  de  no9»jours  (représentation  de  1842, 
inauguration  de  la  statue  de  Rotrou  à  Dreux  le  3o  juin  1867,  matinées  littéraires  de 
Ballande,  1873  et  1875).  Le  chapitre  vu  (pp.  96-99)  traite  des  idées  politiques  dans 
Venceslas  et  dans  les  œuvres  de  Rotrou.  —  On  trouvera  à  la  fin  du  volume  la  repro- 
duction des  Notes  critiques  et  biographiques  sur  Rotrou  (pp.  103-148)  que  M.  Per- 
son avait  récemment  publiées,  mais  sans  les  mettre  dans  le  commerce;  l'auteur  a 
profité  des  observations  et  rectifications  que  lui  avaient  adressées  quelques  critiques, 
entre  autres  M.  Marty-Laveaux,  dans  notre  recueil  (3  juillet  1882);  on  sera  heureux 
de  relire  dans  cet  appendice  les  faits  rigoureusement  exacts  que  M.  Person  est  par- 
venu à  établir;  mais  le  modeste  et  consciencieux  écrivain,  un  de  ceux  qui  font  le 
plus  d'honneur  à  notre  enseignement  secondaire  par  leur  studieuse  ardeur  et  leur  sa- 
voir, ne  nous  dit   pas  dans   son  Avant-propos  qu'il  a  ajouté  quelques  points  nou- 
veaux, comme  l'étude  sur  le  Manuscrit  de  Laurent  Mahelot,   machiniste  et  décora- 
teur du  temps  (pp.  120-124),  comme  les  pages  sur  le  nombre  des  pièces  de  Rotrou 
(pp.  124-133)  et  sur  Rotrou  d'après  les  lettres  de  Chapelain  (pp.  i33-i35),  comme 
les  réflexions  sur  les  beaux  vers  de  Rotrou  et  sur  ce  que  M.  Person  appelle,  selon  le 
mot  qu'un  biographe  applique  à  l'éloquence  de  Mazarin,  la  indoratura   del  suo  bel 
dire  (pp.  138-146)  *. 

1 .  Nous  aurions  aimé  que  M .  Person  citât  ces  mots  de  Voltaire  :  «  La  première  scène  et  une  par- 
tie du  quatrième  acte  de  Venceslas  sont  des  chefs-d'œuvre  »  ^Ecrivains  du  siècle  de  Louis  XIVJ. 


Erratum.  —  N°  32,  art.  de  M.  Jullian  sur  le  livre  de  M.  Madvig  ;  p.  1 12,  note  4,  lire  C.  I.  L. 
VI,  et  non  V.  —  p.  114,  ligne  9,  ou  s'en  partageant  et  non  «  en  s'en  partageant  ». 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 


Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  23. 


REVUE    CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

N°  35  -  28  Août  -  1882 


Sommaire  x  172.  Nelson  et  Maynë,  La  loi  indoue.—  173.  Arn.  Schaefer,  Sources 
de  l'histoire  romaine.  —  174,  Strauch,  Marguerite  Ebner  et  Henri  de  Nordlingen. 
—  175.  Jadart,  Jean  de  Gerson,  son  origine,  son  village  natal  et  sa  famille.  — 
176,  Schoell,  Etudes  sur  Goethe.  —  Chronique. 


172.  —  J.-H.  Nelson.  A  Prospectus  of'tlie  sclentiflc  study  ofthe  Hindu 

Luw.  London,  Kegan  Paul  et  Co,  1881.  xiv-208  p.  in-8°. 
John  D.  Mayne.  —  A.    Treatise    of    Hindu   Law    and  Usage.  Madras,  Hig- 

ginbotham  et  Co.  London,  Stevens  and  Haynes.  1878.  xxxix-607  p.  in-8°. 

Les  deux  ouvrages  dont  les  titres  précèdent,  l'un  tout  récent,  l'autre 
dont  j'aurais  dû  rendre  compte  depuis  longtemps  déjà,  sont  d'un  heu- 
reux augure  pour  l'avenir  des  études  juridiques  dans  Flnde.  Ils  nous 
montrent,  chacun  à  sa  façon,  ces  études  résolument  engagées  dans  des 
voies  nouvelles,  et  ils  témoignent  de  l'intérêt  croissant  qu'elles  rencon- 
trent dans  les  rangs  de  la  magistrature  anglo-indienne.  M.  Nelson  est 
actuellement  juge  dans  la  présidence  de  Madras,  et  son  livre,  écrit  au 
milieu  du  conflit  des  idées  et  sous  l'impression  des  difficultés  journaliè- 
res de  la  pratique,  a  quelque  chose  des  allures  d'un  pamphlet.  M.  Mayne, 
qui  a  longtemps  siégé  à  la  haute  cour  de  Madras,  a  réuni  dans  l'Inde  les 
matériaux  du  sien,  fruit  d'une  expérience  plus  mûre  et  d'une  ardeur  qui 
a  eu  le  temps  de  se  calmer.  Mais,  l'un  et  l'autre,  ils  conçoivent  le  droit 
de  la  même  façon,  ni  comme  une  science  abstraite  et  de  pure  spécula- 
tion, ni  comme  l'interprétation  strictement  professionnelle  de  prescrip- 
tions admises  toutes  faites,  mais  comme  une  branche  de  la  critique  his- 
torique. C'est  à  ce  point  de  vue,  le  seul  où  je  puisse  me  croire  quelque 
compétence,  que  je  vais  essayer  d'apprécier  leurs  ouvrages. 

Bien  qu'il  soit  le  plus  récent,  je  commencerai  par  celui  de  M.  N., 
parce  qu'il  se  rattache  par  le  lien  le  plus  étroit  à  une  précédente  publi- 
cation du  même  auteur,  dont  j'ai  rendu  compte,  il  y  a  de  cela  quatre 
ans,  dans  la  Revue  K  Dans  ce  premier  écrit,  M.  N.  établissait  :  que  le 
terme  de  «  Loi  hindoue  »  n'est  pas  aussi  facile  à  définir  qu'on  se  Tima- 
gine  d'ordinaire,  et  que  c'est  se  méprendre  sur  la  nature  des  livres  juri- 
diques de  l'Inde  que  de  les  assimiler  à  nos  codes;  que  l'autorité  an- 
glaise étend  outre  mesure  l'empire  de  cette  législation  en  l'appliquant 
indistinctement  à  des  populations  pour  lesquelles  elle  n'est  pas  faite  et 

1.  A  View  ofthe  Hindû  Law  as  administered  by  the  High  Court  of  Judicature  at 
Madras.  Madras,  1877.  Cf.  Revue  critique  du  29  juin  1878. 

Nouvelle  série,  XIV.  9 


IÔ2  RKVUE   CRITIQUE 

qu'elle-même  n'a  jamais  prétendu  soumettre  à  ses  prescriptions  ;  que  lui 
sacrifier  notamment,  dans  la  mesure  qu'on  le  fait,  la  coutume  non- 
écrite,  c'est  violer  un  de  ses  principes  les  plus  évidents;  qu'enfin,  sur  un 
certain  nombre  de  points  spécifiés,  la  jurisprudence  des  tribunaux  an- 
glais, en  particulier  de  ceux  qui  relèvent  de  Madras,  est  en  contradiction 
directe  avec  l'esprit  et  avec  la  lettre  de  cette  loi  qu'elle  prétend  appli- 
quer. Dans  mon  compte-rendu,  tout  en  me  déclarant  d'accord  pour  le 
fond  avec  M.  N.,  tout  en  rendant  hommage  à  la  conviction  résolue  avec 
laquelle,  à  des  erreurs  autorisées  de  haut,  il  opposait  des  idées  qui,  pour 
n'être  pas  absolument  neuves  parmi  les  indianistes,  l'étaient  beaucoup 
au  contraire  venant  d'un  jurisconsulte,  je  dus  exprimer  maintes  réser- 
ves sur  des  points  où  l'auteur  me  paraissait  dépasser  le  but.  J'essayai  de 
faire  voir  qu'après  tout,  il  restait  bien  quelque  chose  de  ce  hindu  law 
dont  M.  N.  faisait  à  peu  près  table  rase,  et  qu'il  y  avait  beaucoup  à  re- 
dire à  sa  façon  de  faire  intervenir  l'ethnographie  dans  la  question.  1}  y  a 
♦certainement  dans  l'Inde  des  populations  entières,  se  chiffrant  par  mil- 
lions, qui  n'ont  pas  une  goutte  de  sang  aryen  dans  les  veines,  et  qui  n'en 
prétendent  pas  moins  vivre  conformément  au  dharma  proclamé  par  les 
anciens  sages;  et,  réciproquement,  parmi  les  tribus  brahmaniques  les 
plus  pures,  il  n'y  en  a  peut-être  pas  une  seule  qui  se  conforme  rigoureu- 
sement à  la  loi  écrite.  Comme  le  nouvel  ouvrage  de  M.  N.  n'est  que  le 
développement  de  la  même  thèse,  je  ne  rentrerai  pas  dans  le  débat.  Je 
m'en  tiendrai  à  ce  qui  est  la  partie  neuve  du  livre,  et,  puisqu'il  a  bien 
voulu  faire  à  mon  article  l'honneur  de  lui  emprunter  l'épigraphe  du 
nouveau  volume,  je  dirai,  d'une  façon  générale,  mais  aussi  nettement 
que  je  pourrai,  en  quoi  nous  sommes  d'accord  et  en  quoi  nous  diffé- 
rons. 

Les  développements  nouveaux  peuvent  se  ranger  sous  deux  rubri- 
ques :  des  aperçus  historiques  sur  l'origine,  sur  la  tradition  et  l'interpré- 
tation de  la  smvîti,  et  les  vues  personnelles  de  M.  N.  sur  les  mesures  à 
prendre  pour  remédier  à  la  façon  fâcheuse  dont  la  justice  est  adminis- 
trée à  beaucoup  d'Hindous. 

Il  y  a  quantité  d'observations  justes  et  vraies  dans  la  partie  historique 
de  ce  travail.  L'auteur  montre  fort  bien  tout  ce  qu'il  y  a  d'incertain 
dans  l'origine  de  ces  livres,  d'obscur  dans  leur  transmission,  de  suspect 
dans  beaucoup  de  leurs  prétentions  et  de  contradictoire  dans  certaines  de 
leurs  doctrines.  Mais  ici,  comme  dans  le  précédent  volume,  il  lui  arrive 
rarement  de  toucher  le  but  sans  aussitôt  le  dépasser.  La  moitié  peut-être 
de  toute  son  argumentation  tend  à  prouver  qu'il  n'y  a  pas,  qu'il  n'y  a 
jamais  eu  de  loi  hindoue,  de  sorte  que  le  lecteur  doit  se  demander  par- 
fois à  quoi  peut  servir  l'étude  scientifique  de  quelque  chose  qui  n'existe 
pas.  Heureusement  M.  N.  ne  s'est  pas  adressé  la  question  a  lui-même, 
sans  quoi  nous  courions  risque  de  n'avoir  jamais  son  livre,  et  c'eût  été 
dommage.  Evidemment,  il  y  a  dans  toute  cette  appréciation  plus  que  de 
l'exagération.  Si  c'est  se  tromper  que  de  mettre  les  castras  sur  la  même 


d'histoire  et  de  LITTÉRATURE  1 63 

1  igné  que  la  loi  des  Douze  Tables  ou  que  le  Code  civil,  c'est  non  moins 
se  tromper  que  de  vouloir  les  juger  d'après  la  même  mesure.  Il  faut  les 
prendre  pour  ce  qu'ils  sont,  une  tradition  écrite  et  cela  à  des  époques  et 
sous  des  influences  bien  diverses,  non  par  des  législateurs,  mais  par  des 
lettrés  sans  relation,  la  plupart,  avec  l'autorité  publique,  mais  qui,  à 
part  certaines  doctrines  touchant  plutôt  à  des  prétentions  sociales  qu'au 
droit  civil  proprement  dit  et  où  cette  tradition  est  en  dehors  de  la  réa- 
lité, n'en  travaillaient  pas  moins  de  bonne  foi  et  ne  s'inspiraient  pas  uni- 
quement de  leur  fantaisie. 

M.  N.  attache,  et  avec  raison,  une  grande  importance  au  fait  attesté 
par  des  observateurs  judicieux  et  bien  informés  qu'encore  à  une  époque 
récente,  aussi  bien  qu'au  temps  de  Mégasthène,  les  habitants  de  diverses 
contrées  de  l'Inde  n'avaient  recours  à  aucune  loi  écrite  pour  régler  leurs 
différends.  Mais,  quand  il  conclut  de  là  qu'avant  la  publication  de  Wil- 
liam Jones  on  eût  fort  étonné  un  pandit  de  Madras  en  lui  citant  le  code 
de  Manu  comme  un  livre  faisant  autorité  en  matière  de  droit,  sa  conclu- 
sion est  sûrement  erronée.  Le  pandit  n'eût  pas  parlé  sans  doute  du  code 
comme  le  ferait  un  Anglais  d'une  loi  votée  par  le  Parlement,  mais  il  y 
eût  certainement  reconnu  une  des  nombreuses  expressions  du  dharma 
éternel.  11  y  a  ainsi  trop  souvent  chez  M.  N.  des  conséquences  fausses 
déduites  d'observations  vraies.  En  général,  c'est  par  le  détail  que  pèche 
cette  partie  du  livre.  L'auteur  a  beaucoup  lu  ',  il  a  réuni  une  infinité  de 
faits  et  de  témoignages,  mais  il  les  compte  plutôt  qu'il  ne  les  pèse,  et  il 
lui  arrive  de  s'en  servir  parfois  sans  les  avoir  bien  compris.  C'est  ainsi 
qu'ayant  vu  chez  M.  Max  Mûller  que  le  code  de  Manu  était  basé  sur  un 
sûtra  de  Mânavas,  ce  qui,  du  reste,  n'est  pas  le  cas,  il  conteste  la  grande 
réputation  du  livre  par  la  raison  que  cette  école  ne  paraît  pas  avoir  été 
bien  répandue.  Sûrement  M.  Max  Mûller  n'a  pas  prétendu  dire  que  1 
code  actuel  fût  encore  un  livre  propre  aux  Mânavas,  ni  que  les  Hindous, 
depuis  des  siècles,  l'eussent  considéré  comme  tel.  Ailleurs  c'est  Yâjna- 
valkya dont  le  code  ne  saurait  avoir  été  reçu  comme  loi  dans  le  Sud, 
parce  que  Yâjnavalkya  appartient  au  Yajus  blanc,  tandis  que  la  presque 
totalité  des  brahmanes  de  ce  pays  suivent  le  Yajus  noir.  Entre  le  code  et 
le  Yajus  blanc  il  n'y  a  pourtant  pas  d'autre  rapport  qu'un  nom,  le  nom 
respecté  d'un  prophète  du  Veda,  que  l'auteur  du  castra  a  trouvé  com- 
mode de  mettre  en  tête  de  son  livre  apocryphe.  Il  y  a  plus  :  M.  Weber 
ayant  fait  la  remarque  que  le  même  Yâjnavalkya  apparaissait  dans  certai- 
nes parties  du  Yajus  blanc  et  surtout  dans  le  Mahâbhârata  avec  les  allures 
d'un  docteur  bouddhiste,  cela  suffit  pour  que  le  Yajus  blanc  soit  véhé- 
mentement suspect  d'être  un  Veda  boudhique  et  que  le  code  et,  à  la  suite 
du  code,  la  Mitdxard,  qui  en  est  une  sorte  de  commentaire  et  de  plus  la 

i.  On  ne  saurait  trop  reconnaître  le  zèle  que  M.  N.  a  mis  à  ne  négliger  aucune 
source  d'information.  Il  a  été  jusqu'à  s'enquérir  de  ce  que  pensait  sur  ces  matières 
notre  propre  magistrature  coloniale.  Comme  on  devait  s'y  attendre,  il  n'a  rien 
trouvé. 


164  REVUE   CRITIQUE 

bête  noire  de  M.  N.,  soient  écartés  comme  livres  sectaires  et  hérétiques. 
L'auteur  en  arrive  ainsi  à  émettre  de  véritables  énormités,  à  exclure, 
par  exemple,  du  nombre  des  Hindous  à  la  fois  les  Civaïtes  et  les  Vish- 
nouites. 

Faut-il  s'étonner  qu'avec  cette  humeur-là  M.  N.  soit  sévère  pour  la 
plupart  de  ses  devanciers?  A  l'entendre,  tout  ce  qui  a  été  fait  depuis 
cent  ans  sur  le  droit  hindou  l'aurait  été  à  rebours,  et  toute  la  littérature 
juridique  anglo-indienne,  à  l'exception  de  quelques  travaux  des  derniè- 
res années,  ne  serait  autre  chose  qu'un  malentendu.  Je  ne  connais  que 
très  imparfaitement  cette  littérature  en  majeure  partie  spéciale  et  toute 
pratique.  Mais  je  puis  dire  en  toute  assurance  à  M.  N.  qu'ici  encore  il  ne 
lui  suffit  pas  d'avoir  raison  :  il  faut,  de  plus,  qu'il  se  mette  dans  son  tort. 
Il  y  a  là  des  travaux  estimables,  qu'on  souffre  de  lui  voir  traiter  avec  au- 
tant de  dédain.  Ces  travaux  sont  imparfaits  et,  dans  l'état  actuel  des  con- 
naissances, insuffisants.  Mais  quelle  est  donc  la  branche  du  savoir  qui 
ait  débuté  par  la  critique?  Docet  diem  dies  est  une  vieille  vérité  faite 
pour  donner  une  équitable  confiance.  Or  M.  N.,  non-seulement  n'est  pas 
toujours  équitable,  mais  il  lui  arrive  d'être  souverainement  injuste.  Où 
a-t-il  vu  que  William  Jones  et  Golebrooke  croyaient  tout  ce  que  leur  di- 
saient leurs  pandits?  Colebrooke  surtout,  la  prudence  en  personne,  que 
la  critique,  depuis  plus  d'un  demi-siècle,  a  peut-être  pris  en  défaut  sur 
cinq  ou  six  points  de  détail,  tandis  qu'elle  n'est  pas  encore  parvenue  à  ré- 
soudre la  moitié  de  ses  doutes,  et  dont  toutes  les  publications  réunies  ne 
contiennent  pas  autant  d'erreurs  matérielles  que  M.  N.  en  a  parfois  mis 
dans  une  douzaine  de  pages.  Je  ne  puis  vraiment  pardonner  à  l'auteur  la 
légèreté  avec  laquelle  il  s'est  attaqué  à  cette  grande  mémoire.  Il  lui  re- 
proche d'avoir  le  premier  parlé  de  différentes  écoles  du  droit  hindou. 
Mais  est-ce  la  faute  de  Colebrooke,  si,  après  lui,  on  a  fait  mauvais  usage 
de  son  assertion  ?  et  quel  autre  mot  aurait-il  bien  pu  employer  pour  dési- 
gner un  fait  vrai,  à  savoir  que  le  dharma  qui,  pour  les  brahmanes,  n'est 
pas  seulement  une  pratique,  mais  qui  est  aussi  un  de  leurs  castras,  de 
leurs  disciplines,  ne  s'enseignait  pas  tout-à-fait  de  même  dans  les  diverses 
régions  de  l'Inde?  Il  lui  reproche  jusqu'à  sa  défiance  à  l'égard  de  la  mé- 
thode mîmâmsâ  appliquée  à  la  solution  des  questions  de  droit,  et  il  ne 
se  dit  pas  que  Colebrooke  ne  faisait  ainsi  que  professer  par  avance  un 
de  ses  propres  principes  à  lui,  M.  N.,  de  ne  pas  essayer  de  réconcilier  des 
textes  contraires  au  nom  d'un  hindu  law  idéal,  qui  n'a  probablement  ja- 
mais existé.  Mais  il  y  a  plus  fort  que  cela.  Colebrooke  s'est  exprimé  avec 
son  exactitude  et  sa  circonspection  habituelles  sur  l'auteur  et  sur  l'âge 
probable  de  la  Mitaxârâ.  Il  la  place  quelque  temps  après  Dhâreçvara,  qui 
est  cité  dans  l'ouvrage,  et,  ce  Dhâreçvara,  il  l'identifie,  avec  hésitation 
toutefois  (aujourd'hui  on  n'hésite  plus;  c'est  à  peu  près  tout  ce  que 
nous  avons  gagné  depuis),  avec  Bhoja,  roi  de  Dhârâ  au  xie  siècle,  prince 
nullement  mythique,  dont  on  a  des  œuvres  authentiques  et  des  ins- 
criptions. M.  N.  renverse  tout  cela  et  le  remplace  par  la  supposition 


d'histoire  et  de  littérature  i65 

original  indeed  et  de  plus  trois  ou  quatre  fois  impossible,  que  ce  Dhâ- 
reçvara  pourrait  bien  être  Dâra  Shakoh,  le  frère  d'Aurangzeb,  et  que 
la  Mitâxarâ  serait  ainsi  du  xvir3  ou  du  xvme  siècle  '.  Il  pense  montrer 
par  là  «  how,  if  an  attempt  is  to  be  made  hereafter  to  study  Hindû  law 
methodically  and  scientifically,  the  unauthorized  and  scientifically  va- 
lueless  dicta  of  great  men  should  be  ruthlessly  set  aside  and  rendered 
harmless  ».  Tout  indianiste  q*ui  a  lu  Colebrooke,  lui  répondra  que  si 
cet  admirable  chercheur  n'avait  rien  trouvé  de  mieux  à  dire  sur  la  Mi- 
tâxarâ, il  n'eût  pas  écrit  une  ligne  sur  ce  sujet. 

L'histoire  de  la  littérature  juridique  de  l'Inde  tant  indigène  qu'euro- 
péenne, tout  imparfaite,  incertaine,  pleine  de  lacunes  qu'elle  est,  comme 
tout  ce  qui  concerne  le  passé  de  ce  singulier  pays,  n'est  donc  pas  le  chaos 
informe  ni  le  tissu  de  contre-sens  qu'elle  paraît  à  l'imagination  un  peu 
échauffée  de  M.  Nelson.  Ce  qui  est  vrai,  c'est  que  l'Angleterre  en  s'enga- 
geant  à  respecter,  dans  la  mesure  du  possible,  cette  tradition  multiple  et, 
en  même  temps,  à  l'appliquer  à  l'aide  destitutions  et  de  méthodes  sans 
lesquelles  la  justice  ne  se  conçoit  pas  dans  notre  Occident,  a  assumé  une 
tâche  difficile  dès  le  début,  et  dont  les  complications  sont  devenues  d'au- 
tant plus  sensibles,  qu'on  a  mieux  appris  à  connaître  les  conditions  pré- 
sentes et  passées  du  pays.  Ceci  m'amène  à  considérer  l'autre  partie  neuve 
du  travail  de  M.  N.,  les  moyens  qu'il  propose  pour  sortir  d'embarras. 

Ce  n'est  qu'en  hésitant,  toutefois,  que  je  le  suis  sur  ce  terrain,  car  je 
ne  me  permets  certainement  pas  d'avoir  des  idées  arrêtées  sur  l'adminis- 
tration de  la  justice  à  Madras.  Je  ne  puis  m'empêcher  pourtant  de  crain- 
dre qu'il  ne  se  mêle  quelque  illusion  à  ces  projets  de  réforme.  M.  N. 
n'est  pas  d'avis  de  remplacer  la  loi  du  pays  par  une  législation  nouvelle, 
faite  de  toute  pièce  par  l'autorité  britannique,  et  il  raille  avec  beaucoup 
d'esprit  ceux  qui  n'estiment  rien  de  plus  facile  que  de  confectionner  «  un 
bon  petit  code  »  qui  contenterait  tout  le  monde.  Le  remède,  pour  lui,  est 
dans  l'étude  méthodique,  scientifique  du  droit  écrit  d'un  côté,  du  droit 
coutumier  de  l'autre,  dans  la  délimitation  précise  de  leur  autorité  respec- 
tive, et  dans  la  pleine  reconnaissance  de  cette  autorité  non -seulement  en 
principe,  mais  aussi  dans  la  pratique.  Ce  sont  là  des  conseils  qui  se  recom- 
mandent eux-mêmes.  Il  est  certain  qu'en  étudiant  mieux,  on  saura  davan- 
tage :  il  est  non  moins  certain  qu'en  vertu  de  ses  propres  maximes  et  du 
consentement  explicite  du  droit  écrit,  l'autorité  anglaise  est  tenue  de  res- 
pecter ia  coutume,  et  c'est  un  des  grands  mérites  de  M.  N,  de  s'être  fait  le 
défenseur  infatigable  de  cette  dernière.  Seulement,  la  question  est  de  sa- 
voir ce  qui  peut  résulter  de  là  dans  la  pratique.  Voici  cent  ans  bientôt 
qu'on  étudie  le  droit  écrit  et,  d'après  M.  N .  lui-même,  on  n'y  a  rien  fait  qui 


i.  M.  N.  ne  paraît  pas  être  philologue.  Cela  semble  ressortir  du  moins  de  ses 
transcriptions  de  Cera  et  Cola  p.  6,  gr'ihya  20  et  60,  vinaçana  3i,  çramana  34,  çîlâ- 
ditya  35,  et  de  ses  étymologies  :  çûdra  dérivé  de  svid,  suer,  4;  Maurya—  Tartare 
de  Merv,  32  et  91. 


floiîiaoqquiî  bI   inq  soçiqmi 


l66  RiTVUE   CRITIQUE 

vaille.  Pense-t-il  qu'on  viendra  plus  vite  et  plus  facilement  à  bout  de  la 
coutume  ?  Parmi  les  questions  mêmes  que  M .  N .  demande  à  voir  résolues 
au  préalable  et  à  bref  délai,  il  y  en  a  plusieurs  qui  sont  actuellement  in- 
solubles et  qui  le  resteront  peut-être  longtemps  encore.  Que  fera  la  jus- 
tice en  attendant?  et  ses  décisions  ne  seront-elles  pas  caduques  d'avance, 
une  fois  qu'il  sera  bien  établi  quelles  ne  sont  que  des  pis-aller  provisoi- 
res ?  Sur  beaucoup  de  points,  les  autorités  écrites  sont  vagues  et  obscures  : 
elles  font  une  large  place  au  jugement  selon  l'équité,  c'est-à-dire  à  l'arbi- 
traire :  elles  se  contredisent  elles-mêmes  et  entre  elles,  et  c'est  une  grosse 
question  que  de  savoir  laquelle  appliquer.  Les  mêmes  difficultés  ne  se 
présenteront-elles  pas  et  plus  fortes  encore,  pour  la  coutume?  On  a  fa- 
briqué des  textes  :  on  essaiera  de  fabriquer  des  coutumes,  il  n'en  faut 
point  douter.  Il  y  a  plus  :  la  loi  écrite  prise  en  général  et  la  coutume 
existent  presque  partout  l'une  à  côté  de  l'autre,  également  respectées 
bien  que  très  différentes,  les  indigènes  ayant  une  façon  d'arranger  ces 
contradictions,  dont  un  tribunal  européen  ne  s'accommodera  jamais.  A 
la  question  quelle  est  votre  loi,  quelle  est  votre  coutume?  il  y  aura  donc 
plus  d'une  réponse.  D'une  façon  générale,  on  se  réclamera  à  la  fois,  et  de 
la  loi  des  saints  n'shis  que  savent  les  pandits  et  de  la  pratique  des  ancê- 
tres :  dans  les  cas  particuliers  et,  de  ceux-ci,  le  forum  officiel  ne  connaît 
que  les  plus  gros,  les  plus  embrouillés,  les  autres  se  décidant  en  dehors 
de  lui,  on  se  réclamera  de  l'une  ou  de  l'autre  selon  l'intérêt  du  moment. 
Je  vois  bien  que  M.  N.  a  prévu  ces  difficultés  et  pris  des  précautions  en 
conséquence.  Seulement,  je  me  demande  si  elles  seront  efficaces.  En  tout 
cas,  il  y  a  là  matière  à  des  doutes  assez  graves,  pour  qu'on  se  souvienne 
de  la  maxime  audiatur  et  pars  altéra.  Dans  ses  projets  de  réforme, 
M.  N.  fait  la  part  assez  large  à  l'action  législative  du  gouvernement.  Se- 
rait-ce un  pressentiment  que  sa  dernière  ressource  pour  sortir  d'embar- 
ras pourrait  bien  être  de  revenir  à  la  confection  de  ce  «  petit  code  »  dont 
il  s'est  moqué  avec  tant  d'esprit? 

J'ai  commencé  ce  compte-rendu  avec  l'intention  de  dire  beaucoup  de 
bien  de  ce  livre  et  je  m'aperçois,  en  finissant,  que  je  n'ai  guère  fait  que 
le  critiquer.  Mon  opinion  sur  l'ouvrage  n'a  pourtant  pas  changé  en  che- 
min. Je  le  crois  toujours  encore  juste  et  vrai  dans  le  fond,  en  progrès 
quant  à  la  Taçon  d'envisager  ces  études,  plein  d'idées  et  surtout  d'in- 
tentions excellentes,  éminemment  utile  et  malheureusement  justifié  en 
beaucoup  de  ses  attaques.  Si,  malgré  cela,  mon  temps  s'est  passé  aie 
contredire,  la  faute  en  est  à  l'auteur  d'aberd,  qui  a  gâté  ses  meilleures 
raisons  par  sa  verve  intempérante  et  qui  s'est  aventuré  sur  le  terrain  de 
l'histoire  générale  et  de  l'histoire  littéraire  plus  qu'il  n'aurait  dû.  Elle  est 
à  moi  ensuite  et  à  ma  compétence  limitée.  Malgré  ses  digressions  en 
tous  sens,  le  livre  de  M.  N.  n'en  est  pas  moins  un  livre  de  droit,  de  droit 
pratique,  et,  de  ce  chef,  le  jugement  de  l'indianiste  réduit  à  se  pronon- 
cer sur  des  généralités  dont  il  ne  saurait  toujours  mesurer  les  redouta- 
bles conséquences,  ne  peut  être  que  d'un  faible  poids.  C'est  aux  hommes 


/ 

d'histoire  et  de  Littérature  167 

de  la  partie,  aux  collègues  de  l'auteur  qui,  comme  lui,  sont  aux  prises 
chaque  jour  avec  ces  questions  si  complexes,  de  se  prononcer  sur  cette 
partie  du  livre.  Il  est  probable  que,  de  ce  côté,  l'auteur  a  dû  soulever  plus 
d'une  violente  opposition.  Il  s'attaque  à  trop  de  choses  pour  ne  pas  ren- 
contrer beaucoup  d'adversaires.  Mais  il  est  à  espérer  aussi  qu'il  y  trou- 
vera des  défenseurs.  Même  pour  le  profane,  il  est  visible  que  sur  bien 
des  points  il  y  a  abus,  que  la  loi  qu'on  applique  n'est  pas  toujours  celle 
à  laquelle  les  parties  auraient  droit  et  que,  dans  cette  application,  la  ju- 
risprudence n'est  parfois  conséquente,  ni  avec  la  loi,  ni  avec  elle-même. 
Il  est  impossible  de  ne  pas  condamner  avec  l'auteur  les  envahissements 
progressifs  de  cejudge-made  law,  dont  certaines  exigences  en  matière  de 
transmission  des  biens  et  de  statut  personnel  sont  vraiment  iniques  et  de 
nature  à  porter  de  graves  atteintes  à  la  prospérité  du  pays.  On  lui  par- 
donne alors  ses  vivacités,  ses  exagérations  et  sa  trop  grande  facilité  à 
faire,  comme  on  dit,  flèche  de  tout  bois.  Car  ce  livre  écrit  avec  une  opi- 
niâtre conviction  ',  est  avant  tout  une  œuvre  de  combat  et  c'est  comme 
tel  qu'il  faut  le  juger,  si  on  veut  être  équitable  envers  lui. 

Tout  autre  d'allure  est  l'ouvrage  de  M.  Mayne.  C'est  aussi  un  livre 
de  controverse  et,  comme  M.  N.,  Fauteur  est  convaincu  de  la  nécessité 
d'importantes  réformes.  Mais  la  discussion  chez  lui  est  mesurée  et  sé- 
vère :  il  expose,  il  ne  lutte  pas.  «  Je  me  suis  efforcé,  dit-il  dans  sa  Pré- 
face, de  montrer  non  seulement  ce  que  la  loi  hindoue  est,  mais  com- 
ment.il  s'est  fait  qu'elle  soit  devenue  ce  qu'elle  est.  »  Et  cette  tâche  si 
vaste,  il  l'a  remplie  en  toute  conscience.  Il  y  a  déployé  un  remarquable 
savoir,  l'expérience  d'une  longue  pratique,  un  jugement  aussi  bien  en 
garde  contre  les  nouveautés  impatientes  que  contre  les  préjugés,  une 
critique  fine,  vigilante  et  circonspecte.  Peut-être  lui  arrive- t-il  parfois  de 
rester  en  deçà  où  M.  N.  se  laisse  emporter  au  delà.  Peut-être  aussi  les 
parties  du  livre  qui  traitent  du  passé  font-elles  regretter  cette  précision, 
cette  sûreté  de  main  que  la  possession  de  la  langue,  et,  par  elle,  la  con- 
naissance de  toutes  les  manifestations  de  l'esprit  d'un  peuple,  peuvent 
seules  donner  à  l'historien.  Mais,  tel  qu'il  est,  son  ouvrage  constitue 
l'exposition  la  plus  complète  et  la  plus  sûre  que  nous  ayons  de  l'ensem- 
ble du  droit  écrit  des  Hindous. 

M.  M.  ramène  les  différentes  appréciations  dont  ce  droit  a  été  ré- 
cemment l'objet,  à  trois  variétés  principales  :  l'opinion  des  archéologues 
à  outrance,  qui  ne  reconnaissent  d'autorité  qu'aux  plus  anciens  textes  ; 
l'école  critique  qui,  dans  ses  conclusions  extrêmes  représentées  par 
M.  N.  2,  estime,  en  somme,  que  ce  droit  n'est  valable  que  pour  les  seuls 
brahmanes;  enfin  l'opinion  des  partisans  d'une  réforme  radicale  qui 
veulent  une  législation  nouvelle.  Il  s'écarte  plus  ou  moins  des  uns  et  des 

1.  M.  N.  a  exposé  les  mêmes  idées  dans  un  article  du  journal  de  la  Société  asia- 
tique de  Londres,  XIII,  p.  208  (1881). 

2.  Il  s'agit  du  premier  ouvrage  de  M.  Nelson. 


l68  REVUE  CRITIQUE 

autres,  des  premiers,  parce  qu'ils  ne  tiennent  aucun  compte  des  change- 
ments que  vingt  siècles  ont  dû  amener  même  en  Orient;  des  derniers, 
parce  qu'ils  supposent  les  plus  violents  possibles  et  ne  se  doutent  pas  de 
la  force  des  liens  qui  attachent  un  peuple  à  son  passé.  Peut-être  M.  M. 
n'a-t-il  pas  fait  observer  assez  que  la  loi  hindoue  elle-même  est  beau- 
coup trop  du  parti  des  premiers,  qu'elle  est  restée  en  somme  la  même 
pendant  que  tout  changeait  autour  d'elle,  et  que  les  tribunaux  britanni- 
ques, en  l'appliquant  comme  elle  ne  l'avait  jamais  été,  font  en  réalité  de 
l'archéologie  juridique  sur  une  grande  échelle.  C'est  un  des  points  où, 
à  notre  avis,  M.  M.  est  resté  en  deçà.  Enfin,  il  s'écarte  des  conclusions 
de  M.  N.  en  ce  qu'elles  lui  paraissent  avoir  d'extrême.  Sans  méconnaître 
les  caractères  tout  spéciaux  du  hindu  law,  qui  en  font  quelque  chose  de 
bien  différent  de  ce  que  nous  appelons  une  législation,  il  part  du  fait 
que  cette  loi  est  acceptée  en  somme  par  la  grande  majorité  de  ces  innom- 
brables populations  ;  que  de  l'Himalaya  au  cap  Comorin  elle  a  profondé- 
ment pénétré  les  mœurs  et  les  usages,  que  beaucoup  la  pratiquent  sans 
la  reconnaître  expressément,  comme  certaines  classes  de  musulmans  et 
de  chrétiens  indigènes,  et  qu'un  nombre  infiniment  plus  grand  qui  ne 
la  pratique  pas,  ou  presque  pas,  n'en  croit  pas  moins  vivre  en  confor- 
mité avec  elle.  Il  estime  d'ailleurs  que  l'action  des  brahmanes  sur  cette 
loi,  du  moins  en  ce  qui  concerne  le  droit  écrit,  n'a  pas  été  aussi  consi- 
dérable qu'on  l'a  parfois  prétendu  ;  qu'elle  est  l'expression  de  coutumes 
et  d'un  état  social  qui  a  dû  être  sensiblement  le  même  chez  les  diverses 
races  et  dans  les  différentes  classes  delà  population.  Ici  encore  il  y  a 
chez  M.  M.  un  peu  d'optimisme.  Il  est  certain  que  dans  leurs  sûtras, 
auxquels  la  littérature  postérieure  n'a  rien  ajouté  d'essentiel,  les  brah- 
manes ne  se  sont  guère  occupés  que  d'eux-mêmes  et  que  le  peu  qu'ils 
disent  des  autres  classes  n'est  là  que  pour  mémoire  et  doit  être  tenu  pour 
suspect  au  premier  chef.  Il  est  non  moins  certain  que  le  dharma  reli- 
gieux des  brahmanes  a  profondement  influé  sur  la  constitution  de  la 
famille,  sur  le  mariage,  sur  la  transmission  des  héritages,  et  qu'en  ces 
matières,  les  tribunaux  appliquent  à  certaines  classes  des  prescriptions 
qui,  à  l'origine,  n'étaient  point  faites  pour  elles  et  qui,  maintenant  en- 
core, ne  leur  conviennent  qu'imparfaitement.  Il  s'est  fait  là,  entre  la  loi 
écrite  et  l'usage,  des  compromis  aussi  nombreux  que  variables  depuis 
la  complète  assimilation  jusqu'à  la  complète  indépendance,  qui  embar- 
rasseront longtemps  encore  la  justice  britannique.  Rarement  la  loi  des 
castras  est  parvenu  à  effacer  complètement  la  coutume  ;  sur  plusieurs 
points  même  elle  l'a  simplement  et  directement  adoptée.  Le  régime  delà 
famille  à  l'état  d'union,  par  exemple,  n'est  probablement  pas,  ainsi  que 
le  fait  observer  M.  M.,  d'origine  brahmanique,  car  ce  régime  est  con- 
traire aux  principes  du  dharma,  qui  tend  à  multiplier  les  foyers  indé- 
pendants, pour  multiplier  par  là  les  devoirs  du  culte.  Dans  les  cas,  d'ail- 
leurs, où  cette  législation  blesse  absolument  le  sentiment  de  justice,  il 
reste  toujours  à  l'autorité  publique  la  ressource  d'intervenir,  comme  elle 


d'histoire  et  de  littérature  169 

vient  encore  de  le  faire  re'cemment  en  reconnaissant  comme  valable  le 
mariage  des  veuves. 

M.  M.  expose  l'ensemble  de  cette  législation  tant  écrite  que  contu- 
mière  (cette  dernière  partie  est  naturellement  bien  moins  complète  que 
la  première)  en  5  sections  comprenant  21  chapitres.  Dans  la  ic  section, 
il  traite  des  sources  de  la  loi  hindoue  ;  dans  la  2e,  de  la  constitution  de  la 
famille  ;  dans  la  3e,  de  la  propriété  de  la  famille;  dans  la  4%  du  régime 
des  successions;  dans  la  5e  et  dernière,  de  la  position  légale  de  la 
femme. 

Dans  le  cours  de  ce  long  examen,  M.  M.  a  été  amené  plus  d'une  fois 
à  toucher  à  des  faits  et  à  des  théories  fort  en  faveur,  la  polyandrie,  la 
communauté  des  femmes,  la  gynécocratie,  la  propriété  en  commun  du 
sol.  Il  l'a  fait  avec  une  prudence  et  une  réserve  qui  nous  paraissent  ab- 
solument louables.  Ces  faits  se  rencontrent  dans  l'Inde  aussi  bien  qu'ail- 
leurs, et  distribués  d'une  façon  qui  ne  correspond  qu'imparfaitement 
aux  divisions  ethnographiques.  M.  M.  n'a  point  voulu  en  tirer  de  con- 
clusions quant  à  l'état  primitif  des  tribus  aryennes.  Depuis  que  ces  peu- 
ples parlent  leurs  langues,  le  chef  de  famille,  chez  eux,  est  l'époux  de  sa 
femme  et  le  maître  de  son  enclos,  et  le  fait  de  l'exploitation  en  commun 
des  pâturages  ou  des  terres  inondables  où  se  cultive  le  riz,  n'est  pas  plus 
une  preuve  de  l'existence  chez  eux  d'un  communisme  primitif,  que  ne 
le  sont  chez  nous  nos  sociétés  par  actions  et  nos  compagnies  de  chemins 
de  fer.. 

D'un  bout  à  l'autre,  l'exécution  du  livre  est  soignée  jusque  dans  les 
moindres  détails.  Les  fautes  matérielles  et  les  erreurs  de  rédaction  y 
sont  très  rares.  En  un  seul  endroit,  la  vigilance  de  M.  Mayne  paraît  s'ê- 
tre assoupie,  p.  72,  où  il  écrit  :  «  Two  persons  are  sapindas  to  each 
other,  if  their  common  ancestor,  being  a  maie,  is  not  farther  removed 
from  either  of  them  than  six  degrees,  or  four  degrees  where  the  com- 
mon ancestor  is  a  female.  »  La  définition  est  fausse  d'abord  ;  il  s'agit  du 
6e  ancêtre  dans  la  ligne  paternelle  et  du  4e  ancêtre  dans  la  ligne  mater- 
nelle. Elle  est  de  plus  impossible  ;  on  ne  peut  descendre  d'une  femme 
sans  descendre  aussi  d'un  homme,  dans  l'Inde  aussi  bien  qu'ailleurs,  et, 
comme  dans  l'Inde  la  femme  ne  se  remarie  pas,  les  descendants  de  la 
même  femme  sont  aussi  les  descendants  du  même  homme. 

L'usage  du  livre  est  facilité  par  plusieurs  index  :  une  table  des  matiè- 
res, une  liste  alphabétique  des  cas  décidés  en  justice  et  cités  dans  l'ou- 
vrage, enfin  un  index  alphabétique  très  détaillé  de  tout  le  contenu. 

A.  Barth. 


»y3.    —    Arnold   Sch.eker.    Ahi'is«    «1er    Quellcnkunde    der    grîecljfsclsen 

mitî  rœiiiîsclien  «G.oscîiïehSe  ;  2e  Abth,  :  Die  Période  des  rœmischen  Reichs, 
Leipzig,.  Teubner,  1881,  in-8°  de  200  p. 

Le  livre  de  M,  Arnold  Schœier  contient  :  i°  la  liste  des  écrivains  la- 


I7O  REVUE    CRITIQUE 

tins  ou  grecs  dont  les  ouvrages,  conservés  ou  perdus,  peuvent  ou  au- 
raient pu  servir  à  la  connaissance  de  l'histoire  romaine;  20  la  transcrip- 
tion ou  le  résumé  des  témoignages  de  l'antiquité  sur  ces  écrivains;  3°  la 
mention  des  principaux  travaux  modernes  auxquels  ils  ont  donné  lieu 
et  des  meilleuies  éditions  de  leurs  ouvrages.  C'est,  comme  l'indique  le 
titre,  le  résumé  de  tout  ce  que  nous  savons  sur  les  sources  de  l'histoire 
romaine. 

Le  livre  commence  aux  origines,  il  ne  s'arrête  qu'à  la  mort  de  Justi- 
nien.  Son  cadre  embrasse  donc  la  période  du  bas  empire,  qui  s'étend 
depuis  Constantin  jusqu'à  la  dynastie  thrace  ;  il  sort,  et  de  beaucoup,  des 
limites  que  l'on  assigne  d'ordinaire  aux  travaux  sur  l'histoire  romaine. 
M.  S.  a  cru  que  le  règne  de  Justinien  appartenait  à  cette  histoire,  au 
même  titre  que  celui  d'Auguste.  Il  est  assez  difficile  de  penser  autrement 
que  lui. 

M.  S.  divise  les  quatorze  siècles  de  l'histoire  romaine  en  six  périodes  : 
la  seconde  guerre  punique,  le  tribunat  de  Tibérius  Gracchus,  les  règnes 
d'Auguste,  d'Hadrien,  de  Théodose,  la  mort  de  Justinien  sont  les  épo- 
ques qui  en  marquent  la  fin.  Quoique  les  divisions  en  périodes  soient 
en  histoire  une  chose  souvent  arbitraire,  plus  souvent  encore  inutile,  il 
faut  reconnaître  que  celles  que  donne  M.  S.  échappent  à  l'un  et  l'autre 
défaut.  On  pourrait  le  critiquer  cependant  d'avoir  fait  commencer  à 
Théodose  la  dernière  période  de  l'empire  romain.  En  quoi  cet  empereur 
qui,  malgré  les  surnoms  dont  on  l'a  gratifié,  ne  fut  ni  grand  ni  glo- 
rieux, et  dont  les  qualités  administratives  sont  au  moins  discutables, 
a-t-il  transformé  le  gouvernement  de  l'état  romain  ?  Le  véritable  organi- 
sateur au  ive  siècle,  celui  qui  donna  à  l'empire  la  forme  qu'il  devait  con- 
server jusqu'à  Héraclius  et  qui  modifia  le  premier,  d'une  façon  sérieuse, 
le  régime  fondé  par  Hadrien,  fut  Constantin.  Les  contemporains  ne  s'y 
sont  point  mépris  :  il  faut  s'en  tenir  à  leur  opinion  ;  dans  des  choses  qui, 
comme  celle-là,  sont  de  pure  appréciation,  elle  a  plus  de  chances  d'être 
la  vraie. 

Les  auteurs,  grecs  ou  romains,  sont  énumérés  suivant  l'époque  où  ils 
ont  écrit,  et  non  pas  suivant  le  temps  dont  ils  ont  raconté  l'histoire  ;  à 
côté  d'eux  sont  mentionnés  les  écrivains  contemporains,  biographes, 
orateurs  ou  poètes  dont  les  ouvrages  sont  une  source  aussi  abondante 
que  les  histoires  proprement  dites.  Cet  ordre  a  un  très  grand  avantage:  il 
nous  offre  un  tableau  complet  de  la  littérature  historique,  et  même  delà 
littérature  tout  entière  de  chaque  période.  Mais  est-ce  bien  pourtant  l'u- 
tilité que  devait  avoir  ce  livre?  Pour  ce  qui  concerne  l'historiographie 
romaine,  nous  avons,  dans  la  Littérature  de  Teuffel,  un  tableau  aussi 
complet;  il  est  vrai  que  le  livre  de  M.  S.  a  le  mérite  de  le  présenter,  en 
le  résumant,  d'une  façon  infiniment  plus  commode.  Il  ne  fait  souvent, 
malgré  tout,  que  le  répéter.  Peut-être  aurait-on  pu  comprendre  autre- 
ment la  disposition  de  ce  livre;  on  aurait  placé  au  début  les  ouvrages 
sur  l'histoire  romaine  en  général,  écrits  par  l'antiquité,  en  commençant 


D'HISTOIRE    ET    DE    LITTERATURE  I7I 

par  ceux  dont  les  fragments  embrassent  la  période  de  temps  la  plus 
vaste,  par  exemple  par  celui  de  Dion  Cassais;  puis,  dans  chaque  pé- 
riode, on  aurait  énuméré  les  auteurs  qui  n'ont  écrit  que  sur  cette  pé- 
riode, et,  en  même  temps,  les  ouvrages  contemporains  qui,  comme  les 
lettres  de  Cicéron  ou  le  panégyrique  de  Trajan,  ont  une  importance 
historique  considérable,  sans  être  des  livres  d'histoire.  Rien  n'empêche- 
rait, à  l'aide  de  renvois,  de  revenir  sur  les  auteurs  d1histoires  générales 
qui  ont  insisté  sur  les  événements  de  leur  temps,  comme  Dion  Cassius 
sur  les  règnes  d'Héliogabale  et  de  Caracalla.  On  peut  regretter  que 
M.  S.  ne  nous  ait  point  donné  ce  livre  et  qu'il  se  soit  plutôt  occupé  des 
écrivains,  en  tant  que  sources  de  l'histoire  romaine,  que  des  sources  mê- 
mes de  cette  histoire  1. 

Ces  réserves  faites  sur  le  plan  de  l'ouvrage,  on  rendra  justice  au  soin 
avec  lequel  il  a  été  composé,  au  nombre  des  matériaux  qui  s'y  trouvent 
réunis,  au  discernement  qui  a  présidé  à  leur  choix.  Il  faut,  en  particu- 
lier, savoir  un  gré  infini  à  M.  S.  d'avoir  extrait  la  substance  des  innom- 
brables dissertations  parues  sur  les  autorités  de  Tite-Live  et  les  premiers 
annalistes  romains.  M.  S.  a  pris  très  rarement  parti  entre  les  opinions 
contraires  qui  se  sont  produites.  Par  exemple,  Tite-Live  a-t  il  consulté 
Polybe  pour  le- récit  des  campagnes  d'Hannibal  en  Italie?  Niebuhr, 
Nitzsch,  M.  Nissen,  bien  d'autres  encore,  ont  affirmé  que  non.  Lach- 
mann  a  prétendu  le  contraire;  MM.  Cari  Peter  et  Wœlffiin  ont  vivement 
soutenu  son  opinion.  Le  débat  court  le  risque  de  durer  longtemps  en- 
core, d'autant  plus  que  M.  O.  Hirschfeld  vient  de  lancer  une  troisième 
hypothèse,  que  Tite-Live  aurait  consulté  simplement  un  abrégé  de  Po- 
lybe. Il  est  fort  à  craindre  que  nous  ignorions  toujours  la  vérité  : 
M.  S.  nous  indique  au  moins  où  d'autrts  ont  pensé  qu'elle  se  rencon- 
trait. 

Il  y  a,  dans  le  livre  de  M.  S.,  un  certain  nombre  d'omissions.  Elles 
sont  de  deux  sortes.  Les  unes  concernent  des  auteurs  ou  des  ouvrages 
de  l'antiquité.  Par  exemple,  il  n'est  point  fait  mention  de  l'écrit  que 
Tibérius  Gracchus  composa  et  qui  fut  peut-être,  sous  forme  de  lettre, 
la  justification  de  sa  conduite  politique.  Ces  lacunes,  très  rares  pour  la 
période  républicaine,. sont  assez  fréquentes  pour  les  siècles  de  l'empire. 
En  particulier,  M.  S.  n'a  point  tiré  profit  des  autorités  de  toute  sorte 
consultés  par  les  écrivains  de  l'histoire  auguste,  et  dont  ils  énumèrent 
toujours  la  liste  avec  une  grande  complaisance.  Tantôt  ce  sont  des  his- 
toriens célèbres  en  leur  temps  et  dont  ils  nous  ont  conservé  le  nom,  le 

1.  Une  conséquence  de  l'ordre  suivi  par  M.  S.  est  que  les  subdivisions  sont  sou- 
vent assez  factices.  L'Histoire  d'Alexandre,  de  Quinte-Curce,  se  trouve  mentionnée 
avec  la  géographie  de  Strabon,  le  traité  des  aqueducs  de  Frontin,  les  Memorabilia 
de  Valère  Maxime  sous  le  titre  commun  d'  «  Histoire  générale  et  géographie.  » 
Dans  la  période  d'Hadrien  à  Théodose,  la  troisième  subdivision  est  intitulée  «  Ecri- 
vains chrétiens  et  leurs  adversaires  »  et  renferme,  à  la  suite  d'Eusèbe  et  de  Por- 
phyre, Iïs  juristes  romains,  Gaius,  Ulpien  et  les  autres. 


172  REVUK    CRITIQUE 

Grec  Callicratès  de  Tyr,  Graecorum  longe  doctissimus  scriptor,  dit 
Vopiscus,  Théoclius,  Fabius  Céryllianus,  Onésimus,  Turdulus  Gallica- 
nus,  d'autres  encore;  leur  nombre,  qui  est  fort  grand,  révèle  l'existence, 
au  111e  siècle,  d'une  littérature  historique  des  plus  riches,  que  les  empe- 
reurs encourageaient  en  en  réunissant  soigneusement  les  publications 
dans  les  bibliothèques  publiques,  et  dont  nous  ne  possédons,  dans  l'his- 
toire auguste,  qu'un  informe  résumé.  Tantôt  ce  sont  des  pièces  officiel- 
les, les  éphémérides  des  empereurs,  les  actes  du  sénat  et  du  peuple,  les 
regesta  des  scribes,  d'où  Vopiscus  et  les  autres  prétendent  avoir  extrait 
les  documents  qu'ils  insèrent  dans  leurs  biographies.  L'omission  de  l'his- 
toire en  vers  que  Callistus  consacra  à  Julien,  dont  il  avait  été  l'ami  et  le 
protector,  celle  de  la  chronologie  du  moine  Annien,  contemporain  des 
fils  de  Théodose,  de  l'Histoire  chrétienne  de  l'ami  de  saint  Jean  Chry- 
sostome,  Philippe  de  Sidè,  l'absence  d'une  nomenclature  complète  des 
listes  de  province,  sont  des  lacunes  beaucoup  moins  regrettables. 

La  seconde  espèce  d'omissions  est  relative  aux  travaux  modernes.  Le 
dépouillement  fait  par  M.  S.  est  certainement  très  riche.  Pourquoi 
faut- il  que  nous  ayons  à  lui  reprocher  de  n'indiquer  presque  jamais  les 
ouvrages  de  l'érudition  française?  Pourquoi  le  recueil  des  thèses  n'a-t-il 
pas  été  consulté?  Pourquoi  nos  bonnes  éditions  classiques  ne  sont-elles 
pas  mentionnées?  Des  travaux  comme  ceux  de  M.  Waddington  sur 
iElius  Aristide,  de  M.  Fustel  de  Coulanges  sur  Polybe,  de  M.  Vidal  de 
la  Blache  sur  Hérode  Atticus  ont  une  valeur  historique  au  premier 
chef.  Il  n'est  rien  dit  enfin  des  études  sur  les  écrivains  et  les  historiens 
de  l'empire,  que  Lenain  de  Tillemont  a  placées  à  la  fin  de  chaque  «  ar- 
ticle »,  dans  son  Histoire  des  empereurs.  Personne  ne  contestera  que, 
pour  le  nombre  des  textes  comme  pour  la  sûreté  de  la  critique,  ces 
études  demeurent  encore  la  base  de  tout  travail  sur  les  sources  de  l'his- 
toire de  l'empire.  M.  S.  ne  pense-t-il  pas.,  comme  nous,  qu'oublier  Le- 
nain de  Tillemont,  c'est  presque  de  l'ingratitude  ? 

Nous  n'oublierons  pas  le  livre  de  M.  Schaefer.  Nous  nous  en  servirons 
beaucoup  et  souvent.  C'est  un  répertoire  qui  sera  pour  tout  le  monde 
d'une  utilité  considérable.  II  est  fait  avec  cette  conscience,  et,  disons  le 
mot,  ce  désintéressement  que  laisse  deviner  le  nom  de  M.  Arnold  Schae- 
fer. Nous  accueillons  la  première  édition  de  cet  ouvrage  avec  une  véri- 
table reconnaissance  '. 

Camille  Jullian. 


174.  —  RIargai*etim  Ebnci-  und  Ileîm-lcli  von  IVœi*cIlingci>,  ein  Beitrag 
zur  Geschichte  der  deutschen  Mystik,  von  Philipp  Strauch.  Freiburg  u.  Tûbingen. 
Mohr.  ln-8°,  cvi  et  414  p,  1 2  mark. 

iiip 

Ce  volume,  —  dont  l'élégante  impression  fait  grand  honneur  à  la  li- 


1.  Nous   publierons  prochainement  un  autre  article,  de  M.  Albert  Martin,   sur  la 
partie  de  l'ouvrage  de  M.  Arnold  Schaefer,  consacre'e  à  l'histoire  grecque.  (Réd.). 


d'histoire  et  de  littérature  173 

brairie  Mohr,  —  renferme  le  texte,  publié  pour  la  première  fois  dans 
son  intégrité,  des  Révélations  de  la  célèbre  mystique  Marguerite  Ebner, 
et  des  Lettres  de  Henri  de  Nôrdlingen.  M.  Strauch,  l'éditeur,  publie  : 
i°  les  Révélations  d'après  deux  manuscrits,  celui  de  Medingen,  à  la  fois 
le  meilleur  et  le  plus  ancien  ( f  353),  et  celui  de  Mayhingen  (1735},  qui 
tous  deux  ont  la  même  Vorlage  et  reproduisent  l'original  rédigé  par 
Henri  de  Nôrdlingen  (p.  xxvm);  20  les  Lettres  de  Henri  de  Nôrdlingen, 
d'après  le  manuscrit  du  British  Muséum  déjà  consulté  par  Heumann 
(p.  xvii).  M.  S.  donne  d'ailleurs,  dans  son  introduction,  les  renseigne- 
ments les  plus  minutieux  et  les  plus  complets  sur  les  divers  manuscrits 
dont  il  s'est  servi  :  il  ne  se  borne  pas  à  l'exposé  de  Y  Handschriften- 
verhiiltniss  ;  il  étudie  les  rapports  si  intéressants  de  Marguerite  Ebner 
et  de  Henri  ;  il  décrit  la  vie,  pleine  d'extases  et  de  visions,  de  Margue- 
rite; il  raconte  longuement  l'existence  de  Henri,  d'après  sa  correspon- 
dance, son  séjour  à  Baie,  ses  courses  vagabondes,  la  visite  qu'il  fit  en 
1 35 1  à  Christine  Ebner  et  après  laquelle  on  ne  trouve  plus  trace  de  lui. 
On  remarquera  dans  la  savante  introduction  de  M.  S.  les  pages  con- 
sacrées à  cette  correspondance  de  Henri  de  Nôrdlingen,  qui  est,  à  vrai 
dire,  le  premier  recueil  épistolaire,  dans  l'ordre  des  temps,  de  la  littéra- 
ture allemande,  et  qui  fournit  d'abondantes  et  précieuses  informations  à 
l'historien  du  moyen  âge  (pp.  lxii-lxviii,  Culturgeschichtliches  aus  den 
Briefen).  M.  S.  analyse,  en  outre,  le  style  de  Henri;  les  locutions 
qu'emploie  volontiers  ce  tendre  mystique,  les  diminutifs  auxquels  il  re- 
court, les  comparaisons  dont  il  abonde,  tout  cela  est  indiqué  avec  finesse 
par  le  jeune  professeur  de  Tiibingue  ;  enfin,  un  long  chapitre,  intitulé  «  De 
la  langue  »  et  qui  témoigne  d'un  patient  labeur,  donne  la  liste  des  par- 
ticularités de  langage,  qui,  dans  les  deux  manuscrits  de  Medingen  et  de 
Mayhingen,  s'écartent  de  l'usage  du  moyen-haut-allemand.  Vient  en- 
suite le  texte  des  Révélations  (pp.  1-161),  et  des  Lettres  (pp.  169-284), 
suivi  de  remarques  (pp.  287-405)  qui  dénotent  une  profonde  connais- 
sance de  la  littérature  et  de  l'histoire  de  cette  époque,  et  où  l'éditeur  a 
tantôt  fixé  avec  précision  la  date  des  lettres,  tantôt  éclairé  le  texte  par 
d'autres  témoignages  contemporains,  par  des  explications  des  notes  dif- 
ficiles et  des  phrases  obscures,  par  une  foule  de  notes  instructives  et  de 
renseignements  tirés  d'écrits  peu  connus  et  peu  accessibles.  Aussi  peut- 
on  dire  que  M.  Strauch,  en  publiant  pour  la  première  fois  le  texte  cpm- 
plet  des  Révélations  de  Marguerite  Ebner  et  des  Lettres  de  Henri  de 
Nôrdlingen  avec  autant  de  soin  et  d'exactitude,  en  donnant  sur  la  vie 
et  les  œuvres  de  ces  deux  personnages  tous  les  détails  qu'il  était  possible 
de  donner,  en  commentant  leurs  écrits  avec  une  telle  abondance  et  un 
tel  luxe  de  notes  et  de  remarques,  a  fait  un  travail  fort  remarquable  et 
qui  sera  d'un  grand  profit  et  pour  les  théologiens  et  pour  les  philolo- 
gues et  pour  les  historiens  de  la  littérature  médiévale. 


174  REVUE   CRITIQUE 

175.  —  JTean  de  Gerson  (1303-14L9O),  recherches  sur  son  origine,  son  vil- 
lage natal  et  sa  famille,  par  Henri  Jadart,  juge  suppléant  au  tribunal  civil.  Reims. 
Deligne  et  Renart.  1881.  In-8°,  vin  et  280  pp.  avec  12  planches  hors  texte  et  ins- 
criptions. (Extrait  du  tome  LXVIII  des  Travaux  de  l'Académie  de  Reims,  tiré  à 
3oo  exemplaires.) 

Ce  livre  d'un  de  nos  plus  consciencieux  et  infatigables  travailleurs  de 
la  province  s'ouvre  par  un  chapitre  renfermant  un  «  aperçu  de  la  vie  et 
des  œuvres  de  Gerson  »  (pp.  9-48).  Ce  chapitre  ne  contient  rien  de  nou- 
veau; l'auteUr,  selon  sa  propre  expression,  y  fait  œuvre  de  vulgarisation 
plutôt  que  d'érudition;  il  retrace  brièvement  le  rôle  littéraire,  politique 
et  religieux  de  Gerson,  en  prenant  aux  meilleurs  biographes  du  chance- 
lier et  à  ses  œuvres  leurs  traits  les  plus  expressifs.  Les  trois  chapitres  qui 
suivent  (11,  ni,  îv)  sont  plus  importants;  dans  le  n°  chapitre,  M.  Jadart 
fait  l'histoire  du  village  de  Gerson  du  ixe  au  xvne  siècle  »  (pp.  49-107)  ; 
ce  village,  situé  sur  une  colline  à  3  kilom.  O.  de  Réthel  (et  non  à  7  kil. 
comme  l'indique  la  Nouvelle  géographie  universelle  de  M.  Elisée  Re- 
clus) n'existe  plus  ;  mais  on  sait  qu'il  fut  «  contigu  et  en  quelque  sorte 
juxtaposé  à  celui  de  Barby,  le  chef-lieu  de  la  paroisse,  avec  lequel  il  se 
confondit  dans  la  seconde  moitié  du  xvne  siècle  ».  M.  J.  remarque  néan- 
moins que  le  terroir  survécut  aux  habitants  et  ne  fut  divisé  qu'en  1791  ; 
les  habitants  furent  même  officiellement  convoqués  au  tiers-état  du  bail- 
liage de  Reims  en  1 789  et  défaut  fut  donné  contre  eux  ;  «  chose  singulière, 
Barby  et  Gerson,  si  rapprochés  l'un  de  l'autre  qu'ils  se  confondirent,  dé- 
pendaient de  deux  ressorts  différents,  Barby  de  Vitry  ou  du  Rethélois, 
et  Gerson  du  Vermandois  ou  du  Rémois  »  (p.  52).  M.  J.  reproduit,  d'a- 
près le  Polyptyque  de  Saint-Remy  publié  par  M.  Guérard  en  i853,  le 
dénombrement  des  manses  et  des  familles  de  Gerson  vers  845  ;  il  montre 
que  Gerson  figure  dans  la  plupart  des  diplômes  et  bulles  de  la  grande 
abbaye  de  Saint-Remy;  il  fait  le  tableau  des  misères  qui  accablèrent  au 
xvc  siècle  les  habitants  du  village  et  leur  valurent  un  adoucissement  de 
leurs  redevances,  etc.  En  1 541,  la  population  de  Gerson  ne  comptait 
que  trente-six  feux,  c'est-à-dire  environ  1 5o  habitants  ;  ce  fut  dans  les 
guerres  de  la  Fronde  que  le  village  disparut  (sièges  de  Réthel,  i652  et 
i653).  —  Le  chapitre  111  est  consacré  à  la  famille  de  Gerson  (pp.  109- 
170).  On  sait  que  Gerson  nous  a  laissé  sur  ses  parents  quelques  indica- 
tions, entre  autres  dans  une  épitre  en  vers  (Arnulpho  Charlier  cui  nup- 
sit  Elisabeth  olitn)  et  dans  ses  lettres  à  ses  sœurs,  et  on  lit  encore  sur  la 
muraille  de  l'église  de  Barby  l'épitaphe  de  sa  mère  Elisabeth  la  Charde- 
nière  *i  M.  J.  est  même  porté  à  attribuer  au  chancelier  cette  épitaphe 
conçue  en  vers  rimes;  il  croit,  au  reste,  qu'Elisabeth  était  «  supérieure  à 
sa  condition  par  la  noblesse  et  l'élévation  de  ses  sentiments  »  (p.  11 6)  et 
il  reproduit  (pp.  119-121)  une  lettre  que  cette  excellente  femme  écrivit 
vers  1396  à  ses  enfants  et  que  Paulin  Paris  regardait  comme  un  «  chef* 
,  -— _ 

1.  Epitaphe  reproduite  dans  le  livre  de  M.  Jadart,  p.  ioq. 


D'HISTOIRE    KT  DK    LITTÉRATURE  I  7 1 

d'œuvre  d'onction,  de  pureté,  de  bonté  »  '.  Il  nous  apprend  que  le  nom 
de  Jean,  que  le  fils  aîné  d'Arnaut  le  Charlier  reçut  au  baptême,  le  plaçait 
sous  le  patronage  des  deux  saints  saint  Jean-Baptiste  et  saint  Jean  l'E- 
vangéliste  qui  éiaient  à  l'église  de  Barby  L'objet  d'un  culte  spécial.  Il  nous 
donne  nombre  de  renseignements  sur  les  onze  frères  et  sœurs  de  Gerson. 
—  Le  chapitre  iv  intitulé  :  Jean  de  Gerson  et  son  pays  natal  (pp.  171- 
229),  traite  des  épitaphes  de  Gerson  et  des  pièces  à  sa  mémoire  2;  des 
relations  de  Gerson  avec  Reims  et  les  Rémois  ;  de  son  éloge  dans  les 
historiens  du  pays;  des  monuments  consacrés  à  son  souvenir  à  Paris,  à 
Lyon  et  à  Barby.  Le  volume  de  M.  J.  se  termine  par  des  documents  et 
pièces  justificatives  (pp.  209-272)  :  l'église  de  Barby  et  le  monument  de 
Gerson  ;  documents  servant  de  pièces  justificatives  à  l'histoire  du  village 
de  Gerson;  une  œuvre  française  de  Gerson,  L'Abc  des  simples  gens, 
suivi  d'extraits  de  traités  populaires  du  chancelier  qui  se  trouvent  à  la 
Bibliothèque  de  Charleville;  un  éloge  de  Gerson  dans  un  recueil  manus- 
crit du  xviic  siècle  intitulé  :  De  l'antiquité  de  la  ville  de  Rethel  ;  une 
bibliographie  gersonienne,  imprimés,  manuscrits,  gravures  et  portraits. 
Nous  en  avons  assez  dit  pour  montrer  que  l'ouvrage  de  M.  Jadart  a  été 
fait  avec  le  plus  grand  soin  et  qu'il  a  coûté  à  son  auteur  beaucoup  de 
temps  et  de  patientes  recherches;  son  livre  est  conçu  sur  le  même  plan 
que  celui  qu'il  publiait  naguère  sur  Mabillon,  et  il  mérite  les  même  élo- 
ges ;  il  tiendra  un  rang  distingué  .parmi  les  nombreux  travaux  qui  ont 
déjà  paru  sur  Gerson  (le  Répertoire  des  sources  historiques  du  moyen 
âge  en  comptait  soixante-neuf  en  1878)  et  il  fait  honneur  à  l'Académie 
de  Reims,  qui  a  publié  dans  ses  Mémoires  le  travail  de  M.  Jadart,  son 
secrétaire-archiviste. 


176.  —  Gœtlie  in  Hauptzûgen  seines  Leltens  une!  Wlrkeus,  gesam- 
melte  Abhandlungen  von  Adolf  Scholl.  Berlin,  Wilhelm  Hertz.  1882.  In-8°, 
572  p.  (avec  un  index). 

L'auteur  de  cet  ouvrage,  l'aimable  et  savant  bibliothécaire  de  Wei- 
mar,  Adolphe  Scholl,  ne  lira  pas  les  comptes-rendus  du  livre  où  il  avait 
réuni  ses  études  sur  Gœthe;  il  est  mort  le  26  mai  de  cette  année.  Mais, 
pendant  longtemps  encore,  son  nom  et  ses  travaux  seront  rappelés  avec 
honneur  par  tous  les  amis  de  la  littérature  allemande  et  spécialement 
par  les  amis  et  admirateurs  de  Gœthe.  Le  volume  que  nous  annonçons 

1.  Les  Manuscrits  fr.  de  la  Bibl.  du  Roi,  t.  VII,  p.  410. 

2.  Il  faut  dire  que  Wimpheling  «  relata  »  et  non  «  composa  »  l'épitaphe  en  lan- 
gue vulgaire  que  M.  Jadart  reproduit  p.  172.  Le  petit  volume,  dans  lequel  se  trouve 
cette  épitaphe.  a  paru  certainement  en  i5o6,  cp.  Gh.  Schmidt,  Histoire  littéraire  de 
V Alsace  à  la  fin  du  xve  et  au  commencement  du  xvi'  siècle,  index  bibliographique, 
p.  325,  n°  27. 


I76  REVUE   CRITIQUE 

témoigne  des  studieuses  recherches  que  Schôll  avait  consacrées,  pendant 
une  grande  partie  de  sa  vie,  au  plus  illustre  écrivain  de  l'Allemagne;  il 
était  passionné  pour  la  gloire  de  Gœthe  ;  il  trouvait  que  le  public  de  son 
pays  ne  connaissait  pas  encore  assez  «  et  le  poète  et  l'importance  que 
son  génie  a  et  peut  avoir  en  tout  temps  sur  la  culture  et  le  perfectionne- 
ment de  la  nation  allemande  »  (p.  2).  Aussi  ce  volume  s'ouvre  par  une 
critique,  très  juste  à  beaucoup  d'égards,  de  l'ouvrage  de  Lewes  ;  Schôll 
est  «  offensé  des  jugements  grossiers  et  vulgaires  que  cet  Anglais  porte 
sur  les  plus  profondes  poésies  de  Gœthe,  avec  l'air  résolu  d'un  connais- 
seur »  (p.  3)  ;  il  reconnaît  que  Lewes  a  su  ramasser  çà  et  là  des  anecdotes, 
mais  il  lui  semble  que  ce  biographe  tant  admiré  n'a  pas  dominé  son  su- 
jet et  qu'il  a  commis  vraiment  trop  de  légèretés  et  d'erreurs.  A  la  suite 
de  cet  article  viennent  d'autres  études,  dont  voici  les  titres  :  Der  junge 
Gœthe  (ij4q-ijj8)  ;  — ■  Ueber  Gœthe' s  Geschwister;  —  Gœthe  als 
Staats-itnd  Geschaftsmann  ;  —  Gœthes  Verhiiltniss  \um  Theater;  — 
Gœthes  Tasso  und  Schillers  Don  Carlos;  —  Gœthe  und  die  Wendung 
der  modernen  Kultur  ;  —  Gœthe  in  seinen  Zeiten  ;  —  Ueber  Gœthes 
Pandora,  ihre  Entstehung  und  Bedeuiung  ;  —  Gœthe  und  die  fran^ôs- 
ische  Révolution  ;  —  Dichter  und  Eroberer  ;  —  Zu  Gœthes  Stella  ;  — 
Ein  verlorenes  Schauspiel  von  Gœthe  ;  —  Ueber  Gœthes  :  das  Neueste 
von  Plundersweilern  ;  —  Sendbrief  an  Doktor  Hir\el  in  Leipzig  ;  — 
Ueber  Gœthe- Auto graphen.  Huit  de  ces  études  n'avaient  pas  encore 
paru  ;  ce  sont  :  «  Le  jeune  Goethe  »;  «.  Le  Tasse  de  Gœthe  et  le  don  Car- 
los de  Schiller  »  ;  «  Gœthe  et  la  culture  moderne  »  ;  «  Gœthe  et  son 
temps  »  ;  «  Gœthe  et  la  Révolution  française  »  ;  «  Stella  »  ;  «  Lettre  à 
M.  Hirzel  »,  et  «  Les  autographes  de  Gœthe  ».  Plus  d'un  passage  dans 
ces  différentes  études  appellerait  la  critique;  c'est  ainsi  (pp.  5io-5n) 
qu'à  propos  du  singulier  factum  de  Frédéric  II  contre  la  littérature  alle- 
mande de  son  époque,  Schôll,  citant  les  noms  de  ceux  qui  défendirent 
contre  le  roi  gallophile  la  poésie  et  la  langue  de  l'Allemagne,  oublie  de 
mentionner  la  réplique  de  Mme  de  Gràvemeyer  au  ministre  Hertzberg, 
et  dans  l'article  intitulé  «  poète  et  conquérant  »,  Schôll  s'est  trop  com- 
plu à  opposer  Gœthe  et  Napoléon  Ier;  il  n'avait  pas  besoin  de  nous  rap- 
peler les  débuts  de  Bonaparte  ;  s'il  n'était  pas  remonté  si  haut,  il  n'au- 
rait pas  dit  que  le  jeune  officier  gagna  le  prix  proposé  par  l'Académie  de 
Lyon,  alors  que  tout  le  monde  sait  que  Bonaparte  n'eut  pas  même  l'ac- 
cessit. Mais  ce  volume  de  Schôll  renferme  tant  de  justes  et  ingénieux 
aperçus,  tant  de  faits  intéressants  et  puisés  aux  sources,  que  nous  ne 
voulons  pas  insister  davantage  sur  quelques  fautes  que  l'auteur,  du  reste, 
ne  pourra  plus  corriger,  et,  en  regrettant  la  mort  prématurée  du  con- 
sciencieux biographe  de  Gœthe,  nous  recommandons  sincèrement  à  tous 

l'ouvrage  où  il  a  mis  tant  de  science  et  de  travail. 

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0'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURF.  177 

CHRONIQUE 



FRANCE.—  Comme  on  le  verra'  sur  la  couverture  de  notre  recueil,  l'éditeur  Ernest 
Leroux,  après  avoir  terminé  la  publication  de  Y  Histoire  grecque  de  M.  Ernest  Curtius 
entreprend  la  publication  d'une  autre  grande  œuvre  historique,  qui  forme  la  suite  et 
le  complément  de  l'ouvrage  de  M.  Curtius  :  VHistoire  de  V Hellénisme,  par  M.  J.-G. 
Droysen.  Cette  «  Histoire  de  l'Hellénisme  »  est  traduite  sous  la  direction  de  M.  A. 
Bouché-Leclercq.  ;  elle  comprendra  trois  volumes;  le  premier,  consacré  à  VHistoire 
<F Alexandre  le  Grand;  le  deuxième  et  le  troisième  volume,  aux  successeurs  d'Alexan- 
dre. L'ouvrage  paraît  en  2  5  fascicules  à  i  fr.  25. 

—  M.  le  vicomte  Ferdinand  des  Roberts,  de  l'Académie  de  Metz,  vient  de  publier 
une  notice  sur  un  Vocabulaire  messin  du  xvie  siècle,  latin-français  allemand  qui  fut 
imprimé  en  i5i5  à  Metz  par  Gaspard  Hochffeder  et  qui  se  trouve  à  la  Bibliothèque 
municipale  de  Nancy;  il  décrit  avec  détail  ce  Vocabulaire,  l'analyse  et  en  donne  de- 
curieux  extraits.  M.  F.  des  Roberts  prépare  un  ouvrage  sur  les  Campagnes  de  Char- 
les IV,  duc  de  Lorraine  et  de  Bar,  i634-i638,  qui  sera  mis  en  vente  chez  Cham- 
pion. 

—  L'Histoire  des  Etats  généraux  et  des  libertés  publiques  en  Franche-Comté,  par 
M.  Ed.  Clerc,  qui  avait  paru  de  1874  à  1878  dans  les  Mémoires  de  la  Société  d'é- 
mulation du  Jura,  vient  d'être  publiée  en  deux  volumes  (Besançon,  Marion). 

L'année  dernière  s'est  fondée  une  Société  d'études  des  Hautes- Alpes,  qui   a 

pour  but  de  «  vulgariser  tout  ce  que  l'on  sait  sur  les  Hautes-Alpes,  au  point  de  vue 
historique,  scientifique,  artistique  et  littéraire.  »  Cette  Société  publie  un  Bulletin 
périodique  dont  les  deux  premiers  fascicules  (janvier  à  juin)  renferment,  entre  au- 
tres articles,  des  études  historiques  de  M.  l'abbé  P.  Guillaume  et  de  M.  A.  de  Rochas, 
et  une  étude  épigraphique  de  M.  Florian  Vallentin. 

—  M.  Henri  Beaune,  professeur  à  la  Faculté  libre  de  droit  de  Lyon,  avait  publié 
l'an  dernier  une  Introduction  à  l'étude  historique  du  droit  coutumier  français  jusqu'à 
la  rédaction  officielle  des  coutumes.  11  va  faire  paraître  un  autre  Volume  sur  l'Etat 
des  personnes  en  France  d'après  les  ordonnances  et  les  coutumes  jusqu'en  178g; 
deux  autres  volumes  suivront,  et  seront  consacrés  à  l'Etat  des  biens. 

—  Un  nouveau  travail  sur  l'instruction  primaire  pendant  la  Révolution  vient  de 
paraître  à  Auxerre;  il  est  dû  à  M.  l'abbé  Ricordeau,  et  a  pour  titre  Histoire  de 
l'instruction  primaire  en  France  et  particulièrement  dans  le  département  de  V  Yonne 
de  17 go  à  l'an  VIII  (in-8°,  35  p.).  Les  éléments  de  ce  travail  ont  été  puisés,  dit 
l'auteur,  dans  la  série  l  des  Archives  départementales  de  l'Yonne.  M.  Ricordeau  a 
retrouvé  les  rapports  administratifs  de  l'an  vi  sur  la  situation  scolaire  de  20  cantons 
(le  département  se  composant  de  69  cantons);  dans  ces  25  cantons,  35  écoles  publi- 
ques étaient  en  exercice. 

—  Voici  le  résumé  du  rapport  fait  récemment  par  M.  G.  Perrot,  au  nom  de  la 
Commission  des  écoles  d'Athènes  et  de  Rome,  sur  les  travaux  de  ces  deux  écoles 
pendant  l'année  1881.  École  d'Athènes  :  M.  Hauvette-Besnault a  remis  un  mémoire 
sur  les  Archontes  athéniens,  dans  lequel  il  étudie  et  critique  le  rôle  et  la  compétence 
de  cette  magistrature  au  milieu  du  ve  siècle.  —  M.  Salomon  Reinagh  a  continué  les 
fouilles  entreprises  par  l'Ecole  en  Asie-Mineure,  dans  la  nécropole  de  Myrina,  en 
Eolide,  et  les  a  étendues  au  cimetière  de  l'antique  Cymé.  Assisté  de  M.  Pottier, 
M.  Reinach  ne  s'est  pas  contenté  de  rapprocher  les  fragments  des  tombes  et  de  re- 
composer des  figures  souvent  brisées  en  plusieurs  morceaux  ;  il  a  constaté  comment 
ces  charmantes  figurines  étaient  disposées  dans  les  sépultures  et  soumis  les  tombeaux 


1J&  REVUE   CRITIQUE 

grecs  au  système  d'investigation  régulière  qu'on  emploie  pour  les  plus  grossiers  de 
nos  tumuli.  La  manière  des  figurines  découvertes  par  M.  Reinach,  dans  la  nécropole 
de  Myrina,  Jui  paraît  se  rattacher  de  loin  au  style  de  Lysippe  et  particulièrement  à 
l'école  des  sculpteurs  de  Pergame.  L'atelier  de  Myrina,  moins  ancien  que  celui  de 
Tanagra,  toucherait  donc  à  la  décadence  et  aux  premiers  siècles  de  la  conquête  ro- 
maine. C'est  au  cycle  de  Bacchus,  à  celui  d'Aphrodite  et  au  mythe  d'Hercule  qu'ap- 
partiennent les  petites  images  de  Myrina,  dont  il  a  été  possible  de  déterminer  le  sujet. 
—  M.  Clerc,  auteur  d'un  travail  intitulé  :  Mémoire  sur  les  Ambassades  «he^  les 
Grecs,  a  développé  une  partie  du  mémoire  de  M.  E.  Egger  sur  les  «  traités  publics 
chez  les  Grecs  et  les  Romains  »,  en  utilisant  les  textes  épigraphiques  que  M.  Egger 
ne  pouvait  avoir  à  sa  disposition  en  1866.  —  M.  Bilco,  dans  un  Mémoire  .sur  les 
jeux  publics  en  Grèce,  a  heureusement  complété  une  portion  du  consciencieux  tra- 
vail de  Meursius  sur  les  fêtes  et  les  jeux  de  la  Grèce,  travail  devenu  très  incomplet 
par  suite  des  découvertes  ultérieures  en  épigraphie  et  en  numismatique.  —  M.  Ba- 
rilleau,  agrégé  des  facultés  de  droit,  a  remis  deux  mémoires;  l'un  :  Des  sources 
de  l'ancien  droit  grec  (où  l'on  peut  regretter  l'omission  des  sources  latines,  et,  en  ce 
qui  concerne  les  sources  grecques,  l'oubli  des  papyrus  gréco-égyptiens,  et  du  Lexi- 
con  rhetoricum  cantabrigiense,  rédigé  par  Houtsma  à  Leyde  en  1870);  l'autre  :  Des 
constitutions  de  dot  dans  l'ancienne  Grèce,  qui  est  la  première  étude  faite  sur  la  ma- 
tière avec  le  secours  des  inscriptions.  —  A  l'Ecole  française  de  Rome,  l'activité  n'a 
pas  été  moindre,  et  les  travaux  ont  offert  plus  de  variété,  comme  il  fallait  s'y  atten- 
dre, l'Ecole  de  Rome  se  recrutant  à  la  fois  parmi  les  élèves  de  l'Ecole  normale,  ceux 
de  l'école  des  Hautes-Etudes  et  ceux  de  l'école  des  Chartes.  M.  Perrot  remarque  que, 
si  les  travaux  sont  variés,  l'unité  se  retrouve  dans  la  direction  vraiment  scientifique 
imprimée  à  l'école  par  son  fondateur  M.  Albert  Dumont,  et  continuée  par  M.  Geffroy 
(Cp.  Revue  critique,  n°  2 5,  p.  455,  la  reproduction  d'un  art.  de  M.  Perrot  sur  les 
Mélanges  d'archéologie  et  d'histoire  de  l'Ecole  de  Rome).  M.  René  de  la  Blanchère 
a  poursuivi  ses  recherches  sur  les  Terres  pontines  ;  dès  à  présent,  une  conclusion  se 
dégage  de  ces  études,  c'est  que  la  conquête  romaine,  qui  provoquait  dans  les  pro- 
vinces éloignées  de  Rome,  comme  la  Gaule  transalpine,  un  merveilleux  essor  de  po- 
pulation et  de  richesse,  dépeuplait  et  appauvrissait  les  territoires  plus  rapprochés  de 
la  capitale.  —  M.  Lacour-Gayet  a  dressé  le  tableau  aussi  complet  que  possible  des 
membres  de  la  famille  des  Antonins;  il  a  étudié  leurs  noms  et  leurs  titres,  et,  à 
propos  du  Temple  d'Antonin  et  de  Faustine  au  Forum,  apprécié  l'art  romain  à  cette 
époque.  —  M.  Albert  Martin  a  entrepris  une  étude  des  Scoliastes  d'Aristophane, 
dont  il  a  rédigé  deux  chapitres  :  l.  De  la  critique  d'Aristophane  avant  Aristarque; 
II.  Aristarque  et  sa  critique  d'Aristophane  comparée  à  sa  critique  des  poèmes  homé- 
riques. —  M.  Ant.  Thomas  a  envoyé  deux  mémoires  :  l'un  est  intitulé  Francesco  da 
Barberino,  étude  sur  une  source  nouvelle  de  la  littérature  provençale,  où  M.  Thomas 
fournit  de  curieux  renseignements  sur  Raimond  d'Anjou,  Hugolin  de  Forcalquier  et 
sa  femme  Blanchemain,  trois  poètes  dont  nous  ne  connaîtrions  ni  le  nom  ni  les  œu- 
vres sans  Francesco  da  Barberino;  l'autre  a  pour  titre  -.Nouvelles  recherches  sur 
l'Entrée  en  Espagne,  chanson  de  geste  f ranco-italienne ;  M.  Thomas  y  démontre  que 
le  poème  appelé  l'Ent-ée  en  Espagne  ou  la  Prise  de  Pampelune,  et  dont  le  héros  est 
Charlemagne,  eut  deux  auteurs,  l'un  Padouan  et  l'autre  Véronais,  qui  portaient  tous 
deux  le  nom  de  Nicolas.  —  M.  Camille  Jullian  a  remis  un  mémoire  sur  les  Domestici 
et  les  Protectores,  troupes  de  garde  des  empereurs  du  111e  au  vnc  siècle  et  envoyé  une 
collation  de  plusieurs  manuscrits  de  la  Notitia  Dignitatum.  —  M.  Maurice  Faucon  a 
consacré  son  année  au  travail  d'analyse  et  de  copies  partielles  des  Registres  de  Bo- 
niface  VIII,  conservés  à  l'Archive  vaticane.  —  M.  Vigneaux  a  envoyé  une  Etude 


d'histoire  et  de  littérature  179 

historique  et  juridique  sur  le  praefectus  urbi,  qui  fut,  avec  le  Préfet  du  prétoire,  le 
principal  agent  d'Auguste  et  de  ses  successeurs,  et  une  Notice  sur  trois  manuscrits 
inédits  delà  Vaticane  (recueils  de  consultations  des  jurisconsultes  italiens  du  xivc  et 
du  xvc  siècle).  —  En  terminant  son  rapport,  M.  Perrot  regrette  que  l'étroit  budget  de 
l'école  d'Athènes  ne  lui  permette  pas  des  découvertes  comparables  à  celles  des  savants 
allemands  qui  ont  rendu  au  jour  les  marbres  d'Olympie  et  de  Pergame.  Les  fouilles 
de  Delphes  pourraient  donner  d'importants  résultats;  un  traité  préparé  par  le  direc- 
teur de  l'école  d'Athènes  et  par  le  ministre  de  France  donnera  bientôt  à  l'école  la 
possession  du  village  de  Kastri  qui  recouvre  les  restes  du  temple  d'Apollon  et  de 
ses  dépendances. 

—  Nous  avons  récemment  annoncé  que  M.  J.  Schlumbbrger  avait  publié  un  Eloge 
de  M.  de  Saulcy  (Genève,  Fick.  In-8°,  56  p.).  On  y  remarquera  la  bibliographie 
complète  des  ceuvresdu  savant  archéologue;  cette  bibliographie,  classée  par  ordre  de 
matières,  comprend  i63  art.  de  numismatique,  33  d'histoire  et  de  voyages,  67  d'ar- 
chéologie, 56  de  philologie  et  3g  de  mélanges. 

—  M.  François  Joseph  Chabas,  né  le  2  janvier  1817  a  Briançon,  est  mort  à  Ver- 
sailles le  (j  mai  ;  «  il  n'est  pas  un  seul  égyptologue  a  dit  M.  Révillout,  qui  n'ait 
fait  ses  premiers  pas  à  l'aide  des  travaux  de  M.  Chabas,  et  les  plus  illustres  le  recon- 
naissent ouvertement  pour  maître;  il  a,  le  premier,  fixé  d'une  façon  certaine  les  ba- 
ses scientifiques  de  la  métrologie  égyptienne  ;  indiqué,  de  main  de  maître,  les 
grands  jalons  de  l'histoire  et  de  la  chronologie;  donné  les  premiers  et  jusqu'ici 
uniques  matériaux  concernant  le  droit  criminel  de  l'époque  pharaonique.  »  Il  est 
impossible  d'énumérer  ici  tous"  les  mémoires  de  M.  Chabas;  on  en  trouvera  la  liste 
dans  le  Polybiblion  de  juillet  (pp.  70-73). 

—  Nous  avons  encore  à  annoncer  la  mort  de  M.  Olivier-Alexandre  Barbier 
(20  juin  i8o6-5  février  i883),  conservateur  honoraire  de  la  Bibliothèque  nationale, 
collaborateur  à  la  dernière  édition  du  Manuel  du  libraire  de  Brunet;—  de  M.  Charles- 
Alfred  Bertauld  (9  juin  1812-9  avril  1882),  sénateur  inamovible  et  procureur-géné- 
ral à  la  Cour  de  cassation,  auteur  d'une  Philosophie  politique  de  V histoire  de  France 
(1861)  et  de  nombreux  travaux  juridiques;  —  de  M.  Norbert  Bonafous  (1809-jan- 
vier  1882),  auteur  d'une  Etude  sur  l'Astrée  et  sur  Honoré  d'Urfé  (1847);  —  de 
M.  H.  F.  J.  Cocherts  (icr  décembre  1829-avril  1882),  auteur  de  Notices  et  extraits  des 
documents  manuscrits  conservés  dans  les  dépôts  publics  de  Prris  et  relatifs  à  l'his- 
toire de  la  Picardie  (1804,  et  suiv.),  d'une  Table  des  art.  du  Journal  des  Savants, 
de  1816  à  i858  (1860),  d'un  Dictionnaire  des  anciens  noms  des  communes  du  dé- 
partement  de  Seine-et-Oise  (1874),  etc.  etc.;  —de  M.  l'abbé  .Coffinet  (27  mars 
1810-19  mars  1882),  auteur  de  plusieurs  travaux  et  mémoires  archéologiques  sur  la 
ville  de  Troyes;  —  de  deux  libraires  bien  connus  de  tous  les  bibliophiles,  MM.  Fa- 
toux  (3i  octobre  i83g-i6  juin  1882),  l'associé  de  M.  Morgand,  et  Adolphe  Labitte; 
—  de  M.  l'abbé  Jacques  Laffetay  (i8io-i3  février  1882),  auteur  d'une  Histoire  du 
diocèse  de  Bayeux  (i855);  —  de  M.  de  Lamberterye  (27  déc.  1800-1  nov.  1881), 
auteur  d'Etudes  sur  le  département  du  Lot  (i856),  remaniés  dans  une  nouvelle  édition 
en  deux  parties  (1874-1880)  ;  —  de  M.  Le  Boucq  de  Ternas  (1829-29  mai  1882), 
connu  par  ses  études  archéologiques  et  généalogiques  sur  la  Flandre  Wallonne. 

ALLEMAGNE.  —  La  deuxième  livraison  du  Dictionnaire  étymologique  de  la 
langue  allemande,  de  M.  Fr.  Kluge  a  paru  (Strasbourg,  Trûbner,  pp.  65-128); 
elle  va  du  mot  elfenbein  au  mot  hehlen  et  comprend,  par  conséquent,  la  fin  de  la  lettre 
e,  les  lettres  f  et  g,  et  le  commencement  de  la  lettre  h. 

—  Parmi  les  prochaines  publications  de  la  librairie  Teubner,  de  Leipzig,  nous 
signalerons  les  suivantes  :   Homeri  Iliadis  carmina,  dejuncta,  discreta,  emendata, 


l80  REVUE    CRITIQUE   D'HISTOIRE    ET    DE    LITrÉRATURE 

prolegomenis  et  apparatu  critico  instructa,  éd.  W.  Christ  ;  Kunst  und  Gewerbe  im 
homerischen  Zeitalter,  de  M.  Wolfgang  Helbig  ;  la  troisième  édition  de  la  Républi- 
que de  Platon,  de  Stallbaum  revue  par  M.  Herm.  Heller;  la  septième  édition  du 
Griechisch-deutsches  Schulwœrterbuch  de  Benseler,  revue  et  remaniée  par  M.  Au- 
tenrieth  ;  le  Ier  fascicule  du  IIe  vol.  des  Commentaires  de  Servius,  par  M.  G.  Thilo  ; 
une  édition  des  Aratea  d'Avienus  par  M.  A.  Breysig,  etc.  Citons  encore  de  M.  Va- 
lentin  Rose  :  Sorani  Gynaeciorum  vêtus  translatio  latina  nunc  primum  édita  cum 
additis  graeci  textus  reliquiis  a  Diet^io  repertis  atque  ad  ipsum  codicem  Pari- 
siensem  nunc  recognitis. 

—  M.  E.  Brentano,  qui  avait  déjà  publié  deux  ouvrages  relatifs  à  l'emplacement  de 
Troie  et  aux  fouilles  de  M.  Schliemann,  Alt-llion  im  Dumbrekthal  et  Zur  Lœsung 
der  trojanischen  Frage,  vient  de  faire  paraître  à  la  librairie  Henninger,  de  Heilbronn, 
un  troisième  ouvrage  sur  la  «  question  troyenne  »  :  Troia  und  Neu-Ilion  (x  et 
74  p.  2  mark).  Nous  comptons  en  parler  plus  amplement. 

—  Le  premier  fascicule  d'une  revue  consacrée  à  l'histoire  de  la  province  de  Posen 
et  intitulée  Zeitschrifi  fur  Geschichte  und  Landeskunde  der  Provins  Posen  a  paru 
chez  l'éditeur  bien  connu  de  Breslau,  W.  Koebner.  Cette  revue  est  dirigée  par 
M.  Christ.  Meyer,  archiviste  de  la  province,  sous  les  auspices  du  ministère  de 
l'instruction  publique  -,  elle  traitera  de  l'histoire  «  intérieure  »  de  la  Posnanie,  des 
arts  et  des  sciences,  de  la  langue  et  des  mœurs,  du  commerce  et  de  l'industrie  de  la 
province.  Voici  le  sommaire  du  premier  fascicule  :  Zachert,  Nachricht  von  der 
Stadt  Meseritç  I  ;  M.  Bjer,  Geschichte  der  lutherischen  Gemeinde  der  Stadt  Posen, 
et  Johannes  a  Lasco  ;  Christ.  Meyer,  Die  deutsche  Bevœlkerung  der  Provins  Po- 
sen gegenùber  dem  polnischen  Auf stand  im  Jahre  1848  et  Friedrich  der  Grosse 
und  der  Netçedistrict,  I;  viennent  ensuite  des  «  communications  littéraires  ».  La 
revue  paraît  trois  fois  par  an  (abonnement  annuel,  10  mark). 

—  La  collection  des  «  classiques  militaires  d'Allemagne  et  de  l'étranger  »  que 
publie  M.  G.  de  Marée  (à  Berlin,  chez  l'éditeur  Wilhelmi)  s'est  augmentée  de  deux 
nouveaux  fascicules,  le  XIVe  et  le  XVe  renfermant  les  Ecrits  militaires  {Militxrische 
Schriften)  de  l'archiduc  Charles.  Le  baron  de  Waldst^etten  a  mis  en  tête  de  cette 
publication  une  notice  sur  la  vie  du  célèbre  général  autrichien.  On  sait  que  l'archi- 
duc fut  tenu  à  l'écart,  à  partir  de  1809,  et  qu'il  resta  inactif  durant  trente-huit  ans; 
il  a,  paraît-il,  profité  de  ces  loisirs,  que  lui  faisait  Metternich,  pour  composer  des 
Mémoires  ;  ne  serait-il  pas  temps  de  les  publier? 

—  L'ouvrage  de  M.  Aug.  Lehmann  sur  les  fautes  de  langage  que  commettent  ses 
compatriotes  (Sprachliche  Sùnden  der  Gegenwart.  Brunswick,  Wreden),  vient  d'a- 
voir une  troisième  édition. 

—  Le  Catalogue  de  la  bibliothèque  du  Reichstag  a  paru,  par  les  soins  du  biblio- 
thécaire, M.  A.  Potthast.  (2  mark,  à  Berlin,  chez  Puttkammer  et  Mûhlbrecht.) 

ANGLETERRE.  —  M.  Whitley  Stokes  prépare  une  édition  du  Psalter  na  Raan 
pour  les  «  Anecdota  Oxoniensia  ». 

—  La  partie  de  la  Picturesque  Palestine  relative  à  l'Egypte,  a  été  confiée  par  les 
éditeurs  Virtue,  de  Londres,  à  M.  St.  Lane-Poole;  la  «  Picturesque  Palestine  »  pa- 
raît avec  la  collaboration  de  MM.  le  colonel  Wilson,  le  lieutenant  Conder,  le  Prof. 
Palmer,  Miss  Rogers,  etc. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 
Le  Puy,  imprimerie  de  Marchessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23. 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

M»  36  —4  Septembre  —  1882 


Sommaire  :  177.  Hauleu,  Etudes  sur  Térence.  —  178.  Fabre,  La  jeunesse  de 
Fléchier.  —  179.  Delahante,  Une  famille  de  finance  au  xvnr3  siècle.  —  180. 
Werner,  L'Emilia  Galotti  de  Lessing.  —  181.  Le  Faust  de  Goethe,  II,  p.  p. 
Schroer.  —  Chronique. 


177.  —  Terentinna.  Quaestiones   cum  specimine  lexici.   Scripsit  Dp  Edmundus 
Hauler.  Vindobonae,  apud  Alfr.  Hoelderum.  1882,  47  p.  gr.  in-8°. 

L'auteur  examine  le  texte  de  quatre  passages  de  Térence  '.  Ensuite  il 
traite  du  vocatif  des  noms  comme  Chrêmes,  et  classe  les  mots  employés 
par  Térence  qu'il  suppose  empruntés  au  grec.  En  troisième  lieu,  il 
étudie,  dans  Térence  et  d'autres  auteurs,  la  figure  qu'on  pourrait  appeler 
la  rime  étymologique,  reppulit  propulit,  salipotenti  multipotenti.  Par- 
tout il  montre  une  grande  connaissance  du  sujet,  et  le  lecteur  trouvera 
son  profit  dans  ces  observations  diverses.  Mais  ce  qu'il  y  a  de  plus  inté- 
ressant dans  cette  brochure,  ce  sont  les  Prolegomena  ad  lexicon  Te- 
rentianum  et  les  dix-huit  colonnes  (de  a  à  acuo)  du  Spécimen  lexici 
Terentiani.  Il  s'agit  d'un  index  complet  et  raisonné  de  tous  les  mots 
contenus  dcns  Térence.  Avant  de  le  faire  imprimer,  l'auteur  veut  s'as- 
surer que  son  plan  a  l'approbation  des  érudits. 

L'index  complet  a  déjà  été  fait,  ce  que  M.  Hauler  paraît  ne  pas  soup- 
çonner (il  dit  des  index  de  Térence  à  lui  connus  :  nonnullis  enim  locis  me- 
morabilibus  continentur).  Cet  index,  depuis  plus  d'un  demi-siècle, 
permet  aux  philologues  de  retrouver  instantanément  un  passage  quel- 
conque du  poète;  il  se  trouve  dans  le  troisième  volume  du  Térence  de 
Lemaire  (Paris,  1828).  L'index  viennois  sera  incontestablement  très  su- 
périeur, mais,  en  attendant,  celui  de  Lemaire  rend  bien  des  services. 
M.  Hauler,  qui  a  déployé  dans  son  travail  un  zèle  et  une  patience  dignes 
de  tout  éloge,  ne  reculera  sans  doute  pas  devant  l'ennui  d'un  pointage 
comparatif  qui  le  rassurera  sur  le  danger  d'avoir  laissé  échapper  quelque 
erreur  ou  quelque  omission. 

Gela  dit,  je  n'ai  qu'à  louer  sans  réserves  le  soin  et  la  précision  de 
M.  Hauler.  Il  indique  scrupuleusement  les  leçons  des  manuscrits  et  les 
conjectures  des  philologues  ;  il  marque  d'un  chiffre  '  les  mots  qu'on  ne 

I.  Dans  le  premier  (£««.,  267)  il  propose  de  remplacer  par  huius  ou  eius  stare  le 
mot  Thaidis,  glose  du  pronom.  L'essentiel  de  cette  correction  paraît  bon;  seulement 
l'ordre  stare  eius  donne  une  coupe  meilleure  et  explique  mieux  l'erreur  du  copiste, 
qui  a  pris  ThAidl S  de  l'interligne  pour  une  correction  de  sTAreeluS  du  texte. 

Nouvelle  série,  XIV.  10 


I  8  2  .  RKVUK    CHiriQUh 

rencontre  pas  avant  Térence;  un  point  d'interrogation  signale  les  formes 
douteuses,  et  une  étoile  les  formes  supposées  apocryphes  •  ;  un  trait  ver- 
tical marque  les  fins  de  vers  ;  des  points  remplacent  les  mots  dont  l'au- 
teur a  allégé  ses  citations2.  Les  exemples  sont  classés  d'après  le  sens  et  la 
construction.  A  cet  égard,  l'index  Hauler  sera  extrêmement  précieux 
pour  les  recherches  de  syntaxe. 

L'index  Lemaire  restera  plus  commode  pour  les  recherches  de  forme 
et  de  prosodie,  parce  que  la  classification  y  est  morphologique,  accipio 
d'abord,  puis  accipis,  puis  accipit,  etc.  M.  Hauler  a  senti  le  besoin  de 
donner  quelque  satisfaction  au  lecteur  en  ce  qui  touche  les  formes.  En 
tête  des  principaux  articles  il  cite  et  classe  des  particularités  choisies 
d'orthographe  ou  de  prononciation.  Mais  c'est  là  un  maigre  secours.  Dans 
cette  partie  de  son  ouvrage,  par  lui  considérée  comme  secondaire,  il  dé- 
signe les  passages  par  de  simples  chiffres,  sans  en  reproduire  le  texte. 
En  outre,  il  n'a  pas  eu  le  moins  du  monde  la  prétention  d'épuiser  cet 
ordre  de  questions,  de  sorte  qu'on  est  exposé  à  le  trouver  muet  justement 
sur  le  point  qu'on  voudrait  éclaircir.  Puisque  l'auteur  demande  avis  à 
ses  lecteurs,  je  n'hésite  pas  à  dire  qu'il  devrait  supprimer  cette  partie.  11 
y  aura  quelque  jour  un  index  morphologique  et  prosodique  de  Térence; 
il  ne  sera  bon  que  si  l'on  n'y  mêle  pas  la  syntaxe. 

M.  Hauler,  au  mot  accido,  indique,  avec  un  signe  de  doute,  que 
peut-être  la  syllabe  det  est  longue  dans  le  groupe  de  mots  accidet  animo. 
N'est-il  pas  clair  que  ceci  concerne  l'histoire  de  la  conjugaison  en  géné- 
ral, non  point  le  verbe  accido  en  particulier,  et  que  si  accidet  est  long 
il  en  sera  de  même  de  incidet,  afferet,  perleget  ? 

Quant  aux  particularités  qui  atteindraient  le  radical,  comme  l'abrège- 
ment de  la  seconde  syllabe  dans  magistratus,  fenestra,  iuuentutem,  je 
comprends  qu'on  en  dresse  un  catalogue  alphabétique  :  mais  à  quoi  bon 
en  noyer  les  articles  dans  un  catalogue  des  significations  et  des  régimes3? 

Supposons  donc  l'index  allégé  de  la  partie  morphologique,  nous  ne 
pourrons  reprocher  à  l'auteur  qu'un  excès  de  conscience.  Dans  un  vers 
de  XHecyra  tout  le  monde  admet  que  le  pluriel  neutre  acerba,  en  accord 
avec  plura,  et  pris  substantivement,  est  le  sujet  dresse.  A  quoi  bon  in- 
diquer sous  acerbits,  par  quatorze  sigles,  quels  manuscrits  portent  et 
quels  éditeurs  admettent  acerba  plura,  on  plura  acerba,  on  plura  ego 
acerba,  ou  ego  plura  esse  acerba?  Il  suffisait  de  faire  savoir,  par  un  si- 
gne conventionnel  quelconque,  qu'ici  le  texte  varie,  sans  toutefois  que 
cette  variation  affecte  le  sens  ou  la  construction  du  mot  qui  est  le  sujet 


i.  Le  même  signe  est  apposé  aux  formes  tirées  des  didascalies  et  des  arguments, 
que  l'auteur  a  dépouillés  avec  le  même  soin  que  le  texte  lui-même. 

2.  La  valeur  conventionnelle  attribuée  au  point  en  haut  n'est  pas  expliquée  à  côté 
de  celle  des  autres  signes. 

3.  Un  détail  superflu,  à  supprimer,  est  le  signe  de  longue  sur  Ve  d'accresco,  et 
Yad'actus.  La  quantité  de  ces  voyelles  intéresse  forthoépie  latine  en  général;  elle  ne 
fait  rien  a  Térence  en  particulier. 


JHISIOIKK    Kl     DK    LITTÈUATURR 


i83 


de  l'article.  Que  de  peine  économisée  pour  l'auteur!  —  et  j'ajoute,  pour 
le  lecteur,  qui  ne  se  débrouille  pas  sans  un  effort  cérébral  dans  cette  al- 
gèbre inutile. 

La  disposition  typographique  a  quelque  importance  dans  un  index 
surchargé  de  signes  et  d'abréviations.  Celle  du  spécimen  ne  permet  pas 
une  lecture  assez  rapide.  Je  soumets  à  M.  Hauler  l'idée  des  deux  modi- 
fications suivantes  :  i°  dans  chaque  citation  de  Térence,  mettre  en  carac- 
tères gras  le  mot  qui  est  le  sujet  de  l'article  (ce  qui  permet  au  lecteur 
de  se  faire  lui-même,  sans  perte  de  temps,  un  classement  morphologique)  ; 
2°  dans  tout  ce  qui  n'est  pas  de  Térence,  sans  exception  aucune, 
remplacer  les  lettres  romaines  par  des  lettres  italiques  ". 

Il  ne  me  reste  plus  qu'à  souhaiter  à  M.  Hauler,  et  plus  encore  au  pu- 
blic érudit,  la  prompte  publication  d"u  nouvel  index. 

Louis  Havet. 


178.  —  l..n  jeunesse  de  l^lécïiiei',  par  l'abbé  A.  Fabue,  docteur  ès-lettres , 
membre  correspondant  de  l'Académie  du  Gard.  Paris,  Didier,  1882.  2  vol.  in-8° 
de  1 11-396  et  412  p.  —  Prix  :   12  francs. 

M.  l'abbé  Fabrc  a  publié,  il  y  a  dix  ans,  un  volume  consacré  aux  re- 
lations épistolaires  de  Fléchier  avec  les  dames  Des  Houlières  \  Les  lec- 
teurs de  ce  charmant  recueil  exprimèrent  le  vœu  que  M.  l'abbé  F.  n'en 
restât  pas  là.  Je  fus  un  de  ceux  qui  insistèrent  le  plus  vivement  pour  que 
l'habile  éditeur  continuât  d'aussi  attachantes  études.  Voici  comment  il 
nous  présente  (Avant-propos,  p.  1)  l'ouvrage  qu'il  nous  devait  :  g  Nous 
voudrions  compléter  ce  que  nous  avons  commencé  autrefois;  faire  con- 
naître les  travaux  de  Fléchier  dans  sa  jeunesse,  les  amis  qu'il  a  recher- 
chés, les  réunions  qu'il  préféra,  et  au  milieu  desquelles,  en  quelque 
sorte,  son  talent  se  forma  et  prit  peu  à  peu  ces  plis  divers  que  l'élégant 
prélat  garda  jusqu'à  la  fin  de  sa  noble  carrière.  11  y  a  là  des  détails  bien 
curieux,  ignorés  pour  la  plupart,  à  l'aide  desquels  on  peut  dessiner  net- 
tement les  traits  de  cette  physionomie  littéraire,  l'une  des  plus  fines,  des 
plus  déliées,  des  plus  spirituelles  de  ce  xvne  siècle,  si  fécond  pourtant  en 
excellents  écrivains  et  en  esprits  originaux.  » 

Comme  biographie  de  Fléchier,  le  livre  de  M.  l'abbé  F.  est  plus  exact, 


1.  Pour  l'art  de  se  servir  des  ressources  typographiques,  il  y  a  beaucoup  à  appren- 
dre de  la  Grammaire  latine  de  MM.  Guardia  et  Wierzeyski.  On  voit  là  comment  de 
bons  types  de  caractères  gras  permettent  à,e.  mettre  autant  de  mots  qu'on  veut  en 
relief  sans  salir  l'aspect  de  la  page.—  Ceux  que  M.  Hauler  emploie  pour  la  désignation 
des  manuscrits  attirent  l'œil  sur  ce  qu'il  y  a  de  moins  imporlant.  Ils  conviendraient 
fort  bien  à  l'apparatus  d'une  édition,  ils  conviennent  mal  à  un  index  où  des  italiques 
ordinaires  les  remplaceraient  avantageusement. 

2.  De  la  correspondance  de  Fléchier  avec  Mmc  Des  Houlières  et  sa  fille.  Didier, 
1872,   1  vol.  in-8°. 


l8|  RKVUE    CftlTIQOR 

plus  complet  que  tous  les  travaux  antérieurs  ',  mais  c'est  surtout  comme 
tableau  du  monde  littéraire  où  vécut  le  futur  évêque  de  Nîmes,  que  ce 
livre  est  particulièrement  digne  d'attention.  On  y  trouve  les  renseigne- 
ments les  plus  intéressants  sur  tout  l'entourage  de  Fléchier,  notamment 
sur  son  oncle  maternel  Hercule  Audiffret,  supérieur-général  de  la  Con- 
grégation de  la  doctrine  chrétienne,  prédicateur  de  quelque  célébrité,  sur 
son  singulier  professeur  d'éloquence,  Jean  de  Soudier  de  Richesource, 
celui  que  l'abbé  d'Artigny  appela  si  plaisamment  un  distillateur  de 
galimatias  ;  sur  le  P.  Senault,  supérieur  général  de  l'Oratoire,  qui  eut 
le  futur  évêque  de  Nîmes  pour  disciple  avec  Fromentières,  le  futur  évê- 
que d'Aix,  et  Mascaron,  le  futur  évêque  d'Agen  ;  sur  Conrart,  un  de  ses 
meilleurs  protecteurs;  sur  Chapelain,  à  qui  Conrart  Pavait  recommandé, 
et  dont  il  loua  fort  ingénieusement  la  Pucelle  dans  ses  Mémoires  sur 
les  grands  jours  d'Auvergne  ;  sur  Daniel  Huet  et  sur  le  duc  de  Mon- 
tauzier,  ses  deux  plus  intimes  amis;  sur  M.  de  Caumartin  et  sur  la  se- 
conde femme  de  ce  magistrat  (Catherine-Magdelaine  de  Verthamon, 
sœur  de  Mme  de  Guitaut);  sur  Louis-Urbain  de  Caumartin,  leur  fils  et 
son  élève;  sur  ses  amies  qui,  sans  compter  Mme  et  Mlle  Deshoulières,  sur 
lesquelles  il  était  inutile  de  revenir,  furent  Mlle  de  Scudéry,  Mlle  Marie 
Dupré,  appelée  par  Huet  Virgo  erudita,  surnommée  par  tout  le  monde 
la  Cartésienne,  celle  qui  figure  sous  le  nom  de  Diophanise  dans  le 
Grand  Dictionnaire  des  Précieuses  2,  et  M1!e  de  La  Vigne,  «  l'une  des 
plus  belles,  des  plus  savantes  et  des  plus  spirituelles  filles  de  l'Europe,  » 
comme  s'exprime  Le  Fort  de  la  Morinière  [Bibliothèque  poétique,  t.  II, 
p.  414),  la  Nouvelle  Melpomène,  comme  la  surnommèrent  ses  contem- 
porains 3.  Ces  deux  dernières  notices,  qui  remplissent,  l'une  les  chapi- 

1.  Ces  travaux  sont  :  la  Notice  de  Ménard,  au  commencement  du  seul  volume 
des  Œuvres  de  Fléchier  que  le  savant  historien  de  Nîmes  ait  publié  (Paris,  1743, 
in-40)  ;  le  Discours  sur  la  personne  et  les  écrits  de  Fléchier,  par  Ducreux,  en  tête  des 
Œuvres  complètes  (Nîmes,  1782,  10  vol.  in-8°)  ;  YHistoire  de  Fléchier,  évêque  de 
Nîmes,  d'après  des  documents  originaux,  par  M.  l'abbé  A.  Delacroix  (Paris,  i865, 
in-8°),  Voir,  sur  ce  dernier  ouvrage,  la  Revue  critique  du  28  juillet  1866,  pp.  57- 
61.  Aux  observations  adressées  là  au  biographe  de  Fléchier,  il  faut  joindre  les  ob- 
servations que  lui  adresse  M.  l'abbé  F.  (t.  I,  pp.  1,  24,  43,  47,  57,  84,  146,  i63  ; 
t.  II,  pp.  27,  117,  118,  277,  2q3).  Constatons,  pour  ne  prendre  qu'un  exemple,  que 
tous  les  devanciers  de  M.  l'abbé  F.  lui  ont  laissé  le  plaisir  de  découvrir,  dans  VHis- 
toire  de  la  ville  de  Pentes  par  J.-J.  Giberti,  dont  le  manuscrit  original  est  conservé  à 
la  Bibliothèque  de  Carpentras,  l'indication  précise  du  jour  où  Fléchier  fut  fait  prêtre 
(26  mai  1657). 

2.  Le  dernier  éditeur  du  recueil  de  Somaize,  M.  Ch.  Livet,  n'a  pas  reconnu  l'amie 
de  Fléchier,  la  correspondante  de  Bussy-Rabutin  {Clef  historique  et  anecdotique,  t.  II, 
p.  223).  M.  l'abbé  F.  n'a  pu  retrouver  la  date  de  la  naissance  et  de  la  mort  de  cette 
nièce  de  Desmarest  de  Saint-Sorlin,  mais  aux  biographes  qui  ont  avancé  qu'elle 
mourut  «  dans  la  dernière  moitié  du  xvne  siècle,  »  il  apprend  que  Fléchier  lui  écri- 
vait encore  le  10  janvier  1707. 

3.  M.  l'abbé  F.  rectifie  (t.  II,  p.  26)  l'erreur  commise  par  Vigneul-Marville,  par 
Ch.  Labitte,  par  la  Nouvelle  Biographie  générale,  etc.,  au  sujet  du  berceau  de  Mlle  de 
la  Vigne  :  elle  naquit,  en  1634,  à  Paris,  et  non  à  Vernon,  en  Normandie.  Il  rectifie 


OHlSTOIftS    ET    DK    LITTBKATUftfc  I  85 

très  vin  et  ix,  l'autre  les  chapitres  x,  xi  et  xn,  sont  les  plus  curieuses  de 
tout  l'ouvrage. 

Pour  montrer  combien  la  critique  de  M.  l'abbé  F.  est  à  la  fois  sûre 
et  fine,  je  reproduirai  un  passage  où  il  s'élève  (t.  II,  p.  117)  contre  une 
assertion  que  l'on  retrouve  partout  :  «  On  a  dit  que  Fléchier  avait  été 
admis  à  l'hôtel  de  Rambouillet,  et  qu'il  y  reçut  une  empreinte  que  son 
talent  conserva  toujours.  Sorti  de  l'hôtel  de  Rambouillet,  écrit  M.  Ch. 
Labitte,  il  en  a  gardé  les  délicatesses  en  les  épurant.  Et,  si  nous  en 
croyons  le  même  critique,  il  paraîtrait  que  Conrart,  son  protecteur  et 
son  ami,  le  présenta  à  l'illustre  marquise,  et  à  celle  qui  devait  être  plus 
tard  la  duchesse  de  Montauzier.  Depuis,  on  ne  cesse  de  répéter  toujours 
la  même  chose.  Peu  à  peu  cette  opinion  a  prévalu,  et  on  a  fini  par  croire 
que  Fléchier  avait  été  parmi  les  habitués  dessalons  de  la  rue  Saint-Tho- 
mas du  Louvre  '.  Malgré  toutes  ces  autorités,  nous  ne  pouvons  admet- 
tre que  Fléchier  ait  assisté  aux  réunions  de  l'hôtel  de  Rambouillet.  S'il 
y  vint  jamais,  ce  ne  fut  que  fort  tard,  vers  les  dernières  années  de  la 
vie  de  la  marquise,  à  l'époque  où,  accablée  par  la  vieillesse  et  les  infir- 
mités, elle  ne  recevait  plus  chez  elle  que  de  rares  visiteurs.  Or,  au  mo- 
ment où  les  brillantes  assemblées  d'autrefois  avaient  cessé,  alors  que 
l'éloignement  ou  la  mort  avaient  dispersé  les  amis  les  plus  fidèles  de  la 
belle  Arthénice,  nous  ne  voyons  pas  quelle  influence  sérieuse  le  célèbre 
hôtel  aurait  pu  exercer  encore  sur  le  talent  de  l'ancien  doctrinaire  \  » 

M.  l'abbé  F.  ne  discute  ni  moins  finement,  ni  moins  agréablement 
(t.  Il,  pp.  126- 127), -ce  que  l'on  a  raconté  des  visites  de  son  héros  à 
Mme  de  Sévignéj  «  Sur  la  foi  de  Ménard,  M.  Delacroix,  dans  son  esti- 
mable histoire  de  Fléchier,  affirme  que  Mme  de  Sévigné  reçut  chez  elle 
l'auteur  des  Mémoires  sur  les  grands  jours.  Mme  de  Sévigné  lui  ouvrit 
aussi  ses  salons,  nous  dit-il.  Il  allait  souvent  la  voir  à  Livry,  où  s'assem- 
blaient les  beaux  esprits  du  temps.  Voilà  un  fait  que  nous  voudrions 
bien  admettre;  mais  est-il  certain?  Rien  de  plus  charmant,  sans  doute, 
que  de  se  représenter  Fléchier  et  Mme  de  Sévigné,  deux  personnes  d'un 
esprit  si  distingué,  si  piquant  et  si  fin,  causant  ensemble  sous  les  om- 
brages de  l'abbaye  de  Livry,  à  travers  les  allées  de  ce  parc  magnifique 
encore  aujourd'hui,  au  milieu  de  quelques  amis  éclairés,  venus  de  Pa- 
ris pour  rendre  visite  à  l'abbé  de  Coulanges  et  à  son  adorable  nièce. 

plus  loin  (p.  101)  une  erreur  des  éditeurs  des  Lettres  de  Mma  de  Sévigné  (collection 
des  Grands  écrivains  de  la  France),  qui  ont  attribué  (t.  III,  p.  22  1)  à  Mlle  Dupré  une 
épitre  adressée,  en  1673,  à  MUe  de  la  Vigne,  par  MUe  Descartes,  la  nièce  du  grand 
philosophe.  M.  l'abbé  F.  ne  veut  pas  que  l'on  écrive  Lavigne,  mais  bien  La  Vigne. 

i.  Ch.  Labitte,  Revue  des  Deux-Mondes,  5  mars  1845;  —  Ménard,  p.  12;  — 
Ducreux,  Œuvres  complètes  de  Fléchier,  vol.  IV,  p.  xxx;  —  Biographie  Didol,  arti- 
cle :  Fléchier  ;  —  M.  Ch.  Livet,  Dictionnaire  des  Précieuses,  par  Somaize,  préface, 
p.  x;  —  M.  A.  Delacroix,  Histoire  de  Fléchier,  pp.  3o  et  suiv. 

2.  Rappelons  que  l'on  a  aussi  redit  souvent  que  Balzac  fréquenta  l'hôtel  de  Ram- 
bouillet, où  pourtant  il  ne  mit  jamais  les  pieds,  comme  le  prouve  sa  correspon- 
dance. 


I  86  KKVOK    CRITIQCH 

Oui,  notre  imagination  s'arrête  volontiers  devant  un  tableau  bien  fait 
pour  la  séduire,  et  il  nous  en  coûte  de  rejeter  une  si  délicieuse  illusion. 
En  effet,  nous  ne  croyons  pas  que  Fléchier  ait  eu  des  relations  suivies 
avec  Mme  de  Sévigné,  car  nous  n'avons  trouvé  aucun  témoignage  sé- 
rieux à  ce  sujet.  Ce  qui  confirme  encore  nos  doutes,  c'est  que,  parmi  les 
lettres  de  Fléchier,  il  n'y  en  a  pas  une  seule  adressée  à  Mllie  de  Sévigné. 
D'autre  part,  si  Fléchier  a  été  admis,  à  Paris,  chez  Mme  de  Sévigné,  s'il 
est  allé  souvent  la  voir  à  Livry,  est-il  naturel  que  Mme  de  Sévigné  ne 
fasse  jamais  mention  de  ces  visites  à  sa  fille,  à  Bussy-Rabutin,  ou  à  tout 
autre  de  ses  correspondants  ?. . .  » 

Les  Grands  jours  d'Auvergne  ont  fourni  à  M.  l'abbé  F.  le  sujet  de 
trois  chapitres  qu'on  lit  avec  grand  plaisir,  même  après  avoir  lu  Y  Intro- 
duction de  Sainte-Beuve  aux  Mémoires  de  Fléchier,  introduction  qui 
est  un  des  plus  savoureux  de  tous  les  morceaux  que  l'on  doit  à  l'admi- 
rable critique  '.  Dans  les  deux  derniers  chapitres  de  l'ouvrage,  le  nou- 
veau biographe  a  jugé  en  Fléchier  le  poète  français  avec  autant  de  sens 
et  de  goût  qu'il  avait  précédemment  jugé  en  lui  le  poète  latin  2. 

La  Jeunesse  de  Fléchier  est  accompagnée  d'un  grand  nombre  de 
Pièces  justificatives  et  de  documents  inédits  3 '.  En  voici  l'énuméra- 
tion  :  Fléchier  et  sa  famille;  Deux  lettres  de  l'homme  d'affaires  de 
la  famille  de  Fléchier-,  Extraits  d'un  passage  des  discours  académi- 
ques et  oratoires  de  Richesource  ;  Lettres  inédites  de  Fléchier  ;  Let- 
tre de  Chapelain  à  Fléchier  ;  Lettre  du  P.  de  la  Rue  à  Huet  ;  Let- 
tre de  Conrart  au  même  ;  Lettre  de  Mme  Dacier  au  même  ;  Lettres 
de  Ménage  au  même  ;  Lettres  de  Montau\ier  au  mên^e  ;  Remarques 
sur  le  Térence,  l'Horace  et  le  Virgile  de  la  collection  ad  usum 
Delphini  ;  Note  sur  M.  de  Brieux  ;  fragment  de  Y  Auberge  ou  les  bri- 
gands sans  le  savoir,  comédie-vaudeville,  par  MM.  Scribe  et  Delestre- 
Poirson  4  ;  Note   sur  M^  Dupré ;  Lettres  de   Mme  de   la  Fayette  à 

i.  M.  l'abbé  F.  rend  ainsi  hommage  (t.  I,  p.  io5)  à  l'éclatant  mérite  de  l'étude 
de  Sainte-Beuve  sur  Fléchier  avant  l'épiscopat  :  «  11  était  difficile  de  parler  de  l'évê- 
que  de  Nîmes  avec  plus  de  tact,  de  finesse  et  de  mesure,  que  ne  l'a  fait  le  remarqua- 
ble auteur  des  Causeries  du  Lundi.  » 

2.  L'auteur  avait  spécialement  traité  ce  dernier  sujet  dans  sa  thèse  pour  le  docto- 
rat ès-lettres  :  Delatinis  Flecherii  carminibus  (Paris,  Didier,  1872). 

3.  Il  y  a  quelques  autres  documents  dans  le  corps  même  de  l'ouvrage,  notamment 
des  lettres  d'Audiffret  et  de  Godcau,  tirées  des  papiers  de  Conrart  (t.  I,  pp.  78-83;,  des 
lettres  de  Montauzier,  tirées  des  papiers  de  Huet  (t.  I,  pp.  179-184).  M.  l'abbé  F.  a  eu 
soin  de  déclarer  qu'il  n'entend  pas  garantir  la  virginité  de  toutes  les  pièces  qu'il 
reproduit.  Rien  n'est  plus  sage  qu'une  telle  précaution,  car  c'est  surtout  en  fait  de 
documents  du  xvir3  siècle  que  l'on  peut  répéter  le  mot  de  La  Bruyère,  si  modeste- 
ment cité  par  l'auteur  (t.  I,  p.  1 10)  :  «  Le  plus  beau  et  le  meilleur  est  enlevé.  »  Les 
plus  expérimentés  s'y  trompent  et  M.  l'abbé  F.  a,  par  exemple,  pu  constater  (t.  I, 
p.  242)  qu'une  lettre  de  Fléchier  à  Mlle  de  Scudéry,  du  26  décembre  1 685  ou  16S6. 
a  été  citée  à  tort  par  feu  Rathery  comme  inédite  :  elle  avait  été  déjà  publiée  par  Du- 
creux  (t.  X,  p.  358). 

4.  Il  n'était  peut-être  pas  indispensable  de  consacrer  0  pages  à  cette  citation.  On 
trouverait  encore  quelques  hors-d'œuvre  dans  le  livre,   comme  là   où  l'auteur  (t.  I, 


O  H.fSTOlKK    ICI     UK    UTTKRATURK  1  87 

Huet  ;  Vers  inédits  de  Fléchier  ;  Note  sur  la  maison  de  Fléchier  à 
Pernes  ;  Notes  sur  la  famille  de  Caumartin  ;  Le  Conseil  d'Etat  dans 
l'ancienne  monarchie  ;  Notes  sur  deux  vers  de  Boileau  ;  Note  sur  le 
Parlement  de  Paris;  Notes  sur  MM.  des  Grands  Jours  ;  Lettre  de 
Fléchier  à  M.  de  B avilie. 

Soit  par  l'intérêt  du  récit,  soit  par  la  richesse  des  documents,  les  deux 
volumes  de  M.  l'abbé  Fabre  méritent  l'honneur  d'être  rapprochés  des 
deux  volumes  de  Victor  Cousin  sur  la  société  française  au  xvne  siècle  *-. 
Espérons  que  l'excellent  critique  nous  donnera  prochainement  ce  tra- 
vail sur  Fléchier  orateur  qu'il  nous  promet  dans  son  Avant-Propos  et 
qui  achèvera  de  nous  faire  connaître  l'homme  dont  le  talent  fut  assez 
grand  pour  que  Fénelon,  en  apprenant  sa  mort,  pût  s'écrier  :  «  Nous 
avons  perdu  notre  maître! 2  » 

T.  de  L. 


p.  139)  s'étend,  à  propos  de  la  liaison  du  doux  Fléchier  avec  Huet,  le  roi  des  opiniâ- 
tres, sur  l'amitié  de  Brutus  et  de  Cicéron. 

1.  Le  brillant  écrivain  n'aurait  pas  désavoué  certaines  pages  de  la  Jeunesse  de  Flé- 
chier, surtout  les  pages  vraiment  éloquentes  où  M.  l'abbé  F.  repousse  les  attaques 
dirigées  contre  le  siècle  de  Louis  XIV  (pp.  332-335). 

2.  Les  taches  sont  rares  dans  le  livre  de  M.  l'abbé  Fabre.  Je  voudrais  effacer  l'il- 
logique expression  dans  un  but  qui  reparaît  souvent  et  qui  brille  pour  la  première 
fois  au  bas  de  la  page  12  (note  2)  :  «  Dans  un  voyage  que  nous  avons  fait  dans  ce 
but  à  Narbonne...  »  Parmi  les  autres  petites  négligences,  citons  une  malencontreuse 
répétition  (p.  134)  :  «  Nous  croyons  volontiers  qu'avec  le  temps  il  s'établit,  entre  l'aca- 
démicien vieillissant  [Chapelain]  et  l'auteur  des  Grands  jours,  une  intimité  véritable, 
qui  paraît,  d'ailleurs,  assez  bien  établie.  »  Il  y  aurait  une  faute  plus  grave  à  relever 
(t.  II,  p.  356,  note  2),  si  le  :  nous  nous  en  rappelons  bien,  n'était  pas  une  évidente 
faute  d'impression.  —  Quand  M.  l'abbé  F.  dit  (t.  I,  p.  2  3)  que  le  véritable  nom  de 
Richesource  était  «  J.  Soudier  Escuyer  »,  il  a  l'air  de  croire  que  le  mot  Escuyer  fai- 
sait partie  du  nom  de  l'homme  au  galimatias.  Escuyer  est  le  titre  que  prenait  le 
marchand  de  leçons  d'éloquence  sur  lequel  je  citerai  une  récente  publication  de 
M.  Revillout,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de  Montpellier,  Un  maître  de  con- 
férences au  milieu  du  xvne  siècle.  Jean  de  Soudier  de  Richesource  (Montpellier,  1881, 
in-40  de  100  pages,  publication  à  laquelle  notre  savant  collaborateur  M.  Defrémery, 
en  la  présentant  à  l'Académie  des  Inscriptions  (séance  du  16  décembre  1881),  a  donné 
cet  éloge:  «  Une  des  monographies  les  plus  complètes,  les  plus  piquantes  et  les  plus 
exactes  publiées  depuis  longtemps  sur  l'histoire  littéraire  du  xvue  siècle.  »  —  Il  est 
incontestable  queConrart  ne  savait  ni  le  latin  ni  le  grec.  Ce  n'est  donc  pas  l'occa- 
sion de  dire,  comme  le  fait  M.  l'abbé  F.  (p.  m)  :  «  Nous  voilà  dans  une  grande  per- 
plexité. »  Aux  preuves  déjà  données  ici  (Compte-rendu  de  l'ouvrage  de  MM.  Ed.  de 
Barthélémy  et  R.  Kerviler,  n°  du  4  avril  188 1,  p.  269),  j'ajouterai  cette  cita- 
tion tirée  par  M.  l'abbé  F.  des  Mémoires  de  Huet:  «  Je  fis  en  outre  la  connaissance 
de  Valentin  Conrart,  «  rare  et  singulier  exemple  d'une  réputation  littéraire  acquise 
sans  la  moindre  teinture  de  l'antiquité.  » — Je  crois  pouvoir  répondre  à  une  question 
de  M.  l'abbé  F.  (p.  i36)  :  oui,  le  manuscrit  des  douze  derniers  chants  de  la  Pucelle 
conservé  à  la  Bibliothèque  nationale  (F.  F.  n°  i5oo2)  est  bien  l'exemplaire  qui,  des 
mains  de  Fléchier,  passa  dans  celles  de  Huet.  —  Je  crois  pouvoir  aussi  répondre  à 
une  autre  question  qu'il  pose  au  sujet  de  M.  Graindorge,  nommé  dans  une  lettre  de 
Fléchier  (p.  144)  :  Ce  personnage  est  sans  aucun  doute  André  Graindorge,  docteur 
en  médecine,  mort  le  i3  janvier  1676,  l'auteur  du  Traité  de  l'origine  des  macreuses 


I  88  RRVtrtt    CRITIQUE 

i^q. —  Une  famille  de  finance  au  X.V5II'  siècle.  Mémoires,  correspondance 
et  papiers  de  famille,  réunis  et  mis  en  ordre  par  M.  A.  Delahante.  Deuxième 
édition.  Paris,  Hetzel,  1881.  2  vol.  in-8°. 

M.  Delahante,  en  écrivant  ce  livre,  travaillait  seulement  pour  quel- 
ques parents  et  amis;  plus  tard  il  s'est  décidé  à  publier  à  grand  nombre 
l'ouvrage  d'abord  imprimé  à  peu  d'exemplaires  et  on  doit  le  féliciter 
sincèrement  de  cette  résolution.  Ce  n'est  pas  que  son  œuvre  soit  irré- 
prochable ;  loin  de  là.  On  y  trouve  beaucoup  de  longueurs  et  on  y  re- 
grette de  nombreuses  et  importantes  lacunes.  M.  D.,  en  rééditant  son 
premier  travail,  aurait  pu  supprimer  avec  avantage  de  longs  passages, 
qui  n'ont  aucun  intérêt  pour  les  personnes  étrangères  à  sa  famille  et  au- 
rait facilement  réduit  en  un  seul  ces  deux  gros  volumes;  son  livre  y 
aurait  beaucoup  gagné.  En  outre,  M.  D.,  comme  la  plupart  des  gens 
du  monde,  qui  sur  le  tard  se  font  historiens,  n'est  pas  au  courant  de  la 
science;  il  découvre  longuement  des  choses  connues  depuis  longtemps 
et  il  passe  rapidement  sur  des  faits  qu'on  serait  curieux  de  connaître; 
en  revanche,  il  n'omet  rien  de  ce  qu'il  peut  trouver  sur  ses  ancêtres, 
quand  bien  même  cela  ne  serait  pas  intéressant.  Mais  le  sentiment,  qui 
a  mis  la  plume  à  la  main  de  M.  D.,  est  trop  respectable  pour  que  nous 
insistions  plus  qu'il  ne  convient  sur  ses  défauts  de  méthode,  et  que 
nous  lui  reprochions  plus  longtemps  de  s'être  un  peu  trop  attardé  en 
chemin.  D'ailleurs  il  est  toujours  important  pour  les  historiens  et  pour 
les  économistes  de  pouvoir  suivre  les  progrès  d'une  famille  considéra- 

et  de  divers  autres  ouvrages  mentionnés  dans  les  Mémoires  de  Huet  et  dans  les  Let- 
tres de  Chapelain.  —  Une  note  bien  sèche  sur  les  frères  de  Boileau  (pp.  187-188) 
aurait  pu,  du  moins,  renvoyer  le  lecteur  à  une  étude  très  substantielle  et  très  spiri- 
tuelle de  M.  Gaston  Bizos,  professeur  de  littérature  française  à  la  Faculté  d'Aix  :  Les 
frères  de  Boileau-Despréaux  (Aix,  1880,  grand  in-8°  de  123  pages).  —  M.  l'abbé  F. 
se  trompe  en  annonçant  que  le  second  volume  des  Lettres  de  Chapelain  nous  don- 
nera les  lettres  écrites  de  1640  à  1674,  époque  de  la  mort  de  l'auteur.  Il  oublie  que 
le  recueil  manuscrit  légué  par  Sainte-Beuve  à  la  Bibliothèque  nationale  est  incomplet 
et  que  nous  n'avons  pas  les  lettres  comprises  entre  1640  et  i65g.  —  Parlant  des  Let- 
tres de  Montauzier  à  Huet,  il  en  loue  le  ton  poli,  spirituel  et  enjoué,  ajoutant  :  «  le 
Misanthrope  avait  parfois  de  très  agréables  sourires.»  Je  ne  pense  pas  que  l'on  puisse 
identifier  Montauzier  avec  l'austère  héros  de  Molière. —  Enfin  (p.  207),  M.  l'abbé  F. 
nous  montre  Montauzier  épousant  Julie-Lucine  d'Angennes  le  16  juillet  164b.  J'en 
appelle  sur  ce  point  de  M.  l'abbé  F.  à  M.  l'abbé  F.  lui-même  qui,  quelques  pages 
avant,  avait  ainsi  donné  la  véritable  date  (p.  191)  :  «  On  sait  avec  quelle  constance 
Montausier  aima  Mlle  de  Rambouillet.  Venu  à  l'hôtel  de  Rambouillet  vers  i63i,  il 
aima  dès  cette  époque  la  fille  de  la  célèbre  marquise,  et,  toutefois,  le  mariage  n'eut 
lieu  que  quatorze  ans  après,  le  i3  juillet  1645.  Cette  date  est  indiquée  par  M.  Cousin 
(la  Société  française,  vol.  II,  p.  4b;  par  M.  Amédée  Roux,  p.  61).  Ducreux,  dans  sa 
notice  sur  Mme  de  Montausier  et  dans  celle  de  M.  de  Montausier,  fixe  à  tort  le  16  juil- 
let {Œuvres  complètes  de  Fléchier,  vol.  IV).  Née  en  1607,  MUo  de  Rambouillet  avait 
38  ans,  quand  elle  se  maria;  de  son  côté,  Montausier  en  avait  35  :  il  était  né  en 
1610.  Tallemant  a  donc  raison  de  le  dire  :  C'a  été  un  mourant  d'une  constance  qui 
a  duré  plus  de  i3  ans.  Ce  fut  là  une  longue  et  rare  fidélité,  qui  méritait  bien  d'ê- 
tre récompensée.  »  Cette  dernière  réflexion  n'est-elle  pas  digne  de  l'abbé  Fléchier  ' 


D'HISTOIRE    KT    DR    LITTERATURE  1 89 

ble  à  travers  plusieurs  générations,  et  les  travaux  de  ce  genre  sont  en- 
core trop  rares  pour  que  la  critique  ne  tienne  pas  le  plus  grand  compte 
de  leurs  efforts  aux  hommes  qui  s'imposent  la  besogne  souvent  aride 
de  mettre  en  œuvre  à  l'usage  du  public  leurs  papiers  de  famille. 

Le  véritable  fondateur  de  la  famille  Delahante  fut  un  modeste  pra- 
ticien, qui  vint  fixer  sa  résidence  à  Crespy-en-Valois  au  commencement 
du  xvme  siècle.  Fils  d'un  pauvre  chirurgien  de  campagne,  chargé  de 
famille,  il  n'avait  aucune  fortune  pour  l'aider  à  ses  débuts  dans  la  vie, 
mais  à  force  d'énergie  et  de  travail,  il  parvint  à  se  faire  une  bonne  posi- 
tion. Notaire  à  Crespy  en  1700,  ensuite  procureur  au  présidial,  il  était 
chargé  de  rendre  la  justice  dans  plusieurs  seigneuries  établies  près  de  cette 
ville,  et  il  fut  en  outre,  pendant  de  longues  années,  directeur  des  fermes 
de  l'apanage  du  duc  d'Orléans  pour  le  département  du  Valois. 

Ce  cumul,  dont  M.  D.  s'étonne  fort,  n'était  pas  extraordinaire;  tout 
au  contraire,  c'était  la  règle.  Les  gens  de  loi  étaient  fort  nombreux  dans 
les  petites  villes;  mais  les  charges  de  judicature  étaient  encore  beaucoup 
plus  nombreuses.  Par  contre,  elles  ne  rapportaient  à  leurs  détenteurs  que 
de  maigres  profits,  du  moins  légalement,  et  pour  vivre  les  malheureux 
praticiens  se  disputaient  les  procès  et  les  justices;  procureurs  ou  avocats 
à  la  ville,  ils  étaient  juges  dans  un  village  et  greffiers  dans  l'autre  et 
malgré  tout  ils  étaient,  en  général,  fort  besoigneux.  On  connaît  les  plain- 
tes qu'excitaient  de  tous  côtés  les  juges  de  village  et  l'usage  que  la  co- 
médie a  fait  de  ce  type;  il  faut  convenir  que  la  réputation  détestable  de 
ces  officiers  était  souvent  plus  que  justifiée.  Tel  n'était  pas  le  cas  du 
juge  Delahante  ;  il  était  regardé  par  tout  le  monde  comme  un  homme  un 
peu  rude  et  dur,  mais  fort  honnête  et,  en  mourant,  il  laissa  à  chacun  de 
ses  entants  une  modeste  aisance.  Un  de  ses  fils  entra  dans  les  bureaux 
des  Fermes-Générales  ;  l'aîné  suivit  la  carrière  paternelle  ;  gruyer  et  en- 
suite maître  des  eaux  et  forêts  de  Valois,  il  mourut  très  jeune,  laissant 
un  fils,  qui  fut  adopté  par  son  oncle  paternel  et  devint  son  adjoint  à  la 
Ferme-Générale. 

La  vie  du  fermier  général  Jacques  Delahante  et  celle  de  son  adjoint  et 
neveu  Etienne-Marie,  tous  deux  parvenus  à  cette  haute  fonction  après 
avoir  été  petits  employés  et  après  avoir  franchi  tous  les  degrés  de  l'échelle 
administrative  tient  la  plus  grande  place  dans  l'histoire  de  leur  famille 
et  est  de  beaucoup  la  partie  la  plus  curieuse  de  cet  intéressant  ouvrage. 
Cependant  il  ne  faudrait  pas  y  chercher  une  étude  complète  et  exacte 
sur  les  Fermes-Générales  au  xvme  siècle:  ainsi  on  n'y  trouve  rien  sur 
les  aides  et  sur  le  domaine;  les  renseignements  sur  le  mécanisme  de  la 
perception  des  autres  impôts  indirects  sont  rares  et  tout  à  fait  insuffi- 
sants et  le  tableau  de  l'administration  des  Fermes,  tel  que  le  trace  M.  D., 
est  peu  exact  et  très  incomplet.  Cependant  le  livre  de  M.  D.  est,  par  cer- 
tains côtés,  supérieur  au  travail  de  Pierre  Clément  sur  les  derniers  fer- 
miers générauxet  est  le  meilleur  ouvrage  que  nous  ayons  surcetteinstitu- 
tion.  Mais  le  défaut  le  plus  grave  qu'on  puisse  lui  reprocher,  c'est  d'avoir 


190  RKVUE    CRITIQUE 

tenté  une  réhabilitation  des  fermiers  généraux  et  de  leur  administration 
sans  l'avoir  appuyée  sur  des  arguments  sérieux  et  sur  des  faits  nom- 
breux et  précis.  Parce  que  les  fermiers  généraux  Jacques  et  Etienne  De- 
lahante  étaient  des  hommes  fort  compétents,  arrivés  à  cette  haute  situa- 
tion par  leur  mérite  et  par  leur  travail,  cela  ne  prouve  nullement  que  la 
plupart  de  leurs  collègues  fussent  dans  le  même  cas.  Encore  aujourd'hui 
les  grandes  compagnies  financières,  que  M.  D.  se  plaît  à  comparer  aux 
Fermes-Générales,  choisissent  parfois  pour  administrateurs  des  hommes 
peu  riches,  mais  rompus  aux  affaires  çt  capables  de  faire  aller  la  ma- 
chine, qui  sans  eux  craquerait  de  tous  côtés.  Pour  justifier  son  opinion, 
M.  D.  aurait  dû  nous  montrer  que  la  plupart  des  fermiers  généraux 
étaient  des  hommes  instruits  de  leurs  métier  et  soucieux  de  leurs  de- 
voirs. Afin  de  détruire  la  détestable  réputation,  qu'ils  ont  justement 
laissée,  il  aurait  dû  réfuter  la  mauvaise  opinion  que  Turgot  manifeste 
sur  ces  financiers  dans  sa  lettre  au  roi  à  propos  du  bail  de  Laurent  Da- 
vid. M.  D.  ne  démontre  pas  plus  clairement  que  la  Ferme  ne  commet- 
tait pas,  dans  sa  perception  de  l'impôt,  les  abus  aussi  nombreux  que 
scandaleux,  que  les  publicistes  du  siècle  dernier  et  surtout  les  cours  des 
aides,  bien  placées  pour  en  juger,  lui  reprochaient  si  vivement;  tout  le 
monde  connaît  les  célèbres  remontrances  rédigées  par  Malesherbes  sur 
ce  sujet  de  1756  a  1770  et  publiées  en  un  volume  in-4  en  1779.  Parce 
que  M .  Delahante  neveu  réussit  à  augmenter  le  produit  de  la  gabelle  dans 
certaines  provinces,  par  une  meilleure  organisation  du  service  chargé 
de  réprimer  la  fraude,  cela  n'est  pas,  comme  le  croit  M.  D.  (II, 
pp.  99-102),  une  preuve  péremptoire  de  l'indulgente  administration  des 
Fermes  et  cela  ne  suffit  pas  pour  établir  que  les  impôts  indirects  étaient 
perçus  conformément  aux  lois  et  aux  règlements  sur  la  matière  et  sur- 
tout suivant  les  règles  de  l'équité  et  de  la  justice. 

Quoiqu'il  en  soit,  le  livre  de  M.  D.  rendra  de  grands  services  à  tous 
ceux  qui  s'occupent  de  l'histoire  de  nos  institutions  financières;  ils  y 
trouveront  des  renseignements  curieux  sur  l'impôt  du  tabac  et,  en  parti- 
culier, sur  la  célèbre  question  du  tabac  râpé,  dont  M.  Delahante  aîné  s'oc- 
cupa avec  tant  d'ardeur  et  de  persévérance  pendant  tout  le  temps  qu'il 
passa  dans  les  conseils  des  Fermes-Générales.  Enfin,  malgré  ses  lacunes 
et  ses  longueurs,  le  livre  est  intéressant  et  se  lit  toujours  avec  plaisir. 
C'est  plus  qu'il  n'en  faut,  et  il  serait  fort  à  désirer  que  tous  ceux  qui 
ont  entre  les  mains  de  curieux  papiers  de  famille  suivissent  l'exemple 
d'intelligente  piété  filiale,  donné  par  M.  A.  Delahante,  et  fissent  profiter 
de  leurs  documents  le  public  et  les  historiens. 

Jules  Flammermont. 


d'histoire  et  de  littérature  191 

180.  —  Leasings  EmUIn   Galotti,  nebst  einem  Anhange  :  die  dreiactige  Bear- 
beitung,  von  Richard  Maria  Werner.  Berlin,  Hertz,  in-8°,  yb  p. 

On  ne  pourra  désormais  parler  de  l'Emilie  Galotti  de  Lessing,  sans 
avoir  lu  l'opuscule  de  M.  R.  M.  Werner.  L'auteur  analyse  successive- 
ment avec  une  très  grande  finesse,  parfois  un  peu  subtilement,  les  per- 
sonnages d'Odoardo,  d'Emilie,  du  prince,  de  Marinelli,  etc.  ;  un  chapitre 
spécial,  intitulé  Virginie,  étudie  minutieusement  la  grande  scène  en- 
tre le  père  et  la  fille.  M.  W.  conclut  qu'Emilie  Galotti  est  presque 
sans  défaut;  il  y  a  toutefois  un  défaut  qu'il  ne  reconnaît  pas  assez  et 
qu'un  juge  excellent,  M.  Bossert,  a  déjà  remarqué;  c'est  la  trop  grande 
rapidité  de  l'action  ;  «  elle  est  si  rapide  qu'elle  laisse  à  peine  au  dialogue 
l'espace  nécessaire  pour  se  développer.  Des  scènes  entières  sont  réduites 
à  quelques  lignes;  et,  si  la  pièce  a  un  défaut  qui  lui  nuise  réellement, 
c'est  son  extrême  concision  ■  ».  A  cette  suite  d'analyses  et  d'ingénieuses 
considérations,  M.  W.  ajoute,  en  appendice,  un  essai  de  «  reconstruc- 
tion »  de  la  première  version  ^Emilie  Galotti;  la  pièce  était  originai- 
rement en  trois  actes;  M.  W.  s'efforce  de  la  rétablir  et  de  la  reconsti- 
tuer dans  sa  forme  primitive;  il  a  déployé  dans  cette  tâche  délicate 
beaucoup  de  sagacité;  on  remarquera  surtout  avec  quelle  habileté  il  a 
su  retrouver  la  méthode  même  de  Lessing,  en  s'aidant  de  la  première 
esquisse  de  Nathan  le  Sage.  Ce  petit  livre  soulèvera  certainement  en 
Allemagne,  parmi  les  acteurs  et  amateurs  de  théâtre,  de  vives  discus- 
sions; tout  le  monde  n'acceptera  pas  l'opinion  de  M.  Werner  sur  le 
caractère  de  Hector  de  Gonzague,  sur  sa  «  démoniaque  amabilité  »,  sur 
sa  «  virilité  imposante  »,  etc.;  mais,  par  cela  même  que  l'opuscule  est 
anregend  et  fait  naître  une  controverse  utile,  il  se  recommande  déjà  à 
notre  attention.  •  C. 


i8i,  —  Faust  von  Gœtlie.  Mit  Einleitung  und  fortlaufen  der  Erklaerung  hrgg. 
von  K.  J.  Schroer.  Zweiter  Theil.  Heilbronn,  Vcrlag  von  Gebr.  Henninger.  1S81, 
in-12,  ci,  441  pp. 

Dans  sa  préface  M.  K.  J.  Schroer  parle  des  éloges  que  l'édition  du 
«  premier  Faust  »  lui  a  valus,  de  la  part  des  juges  les  plus  compétents, 
comme  Loeper,  Bartsch,  Fr.  Th.  Vischer.  La  publication  de  la  seconde 
partie  du  chef-d'œuvre  de  Gœthe  ne  lui  en  méritera  pas  de  moindres;  il 
était  difficile,  en  effet,  d'aborder  cette  entreprise  ardue  après  une  prépara- 
tion plus  complète  ou  avec  une  connaissance  plus  approfondie  du  sujet  : 
intelligence  et  critique  du  texte,  recherche  minutieuse  de  la  formation 
lente  et  tardive  de  cette  œuvre  si  merveilleusement  étrange,  tout  se  réu- 
nit pour  faire  de  l'édition  du  «  second  Faust  »  un  modèle  de  ce  que 
doit  être  la  publication  d'un  texte  moderne. 

1.  Bossert.  Gœthe,  ses  précurseurs  et  ses  contemporains,  p.  79  ;  2e  édition,  Hachette. 


1U2  KKVCJE   CRITIQUE 

Après  un  avant-propos  où  il  relève  un  grand  nombre  de  formes  vi- 
cieuses, qui  se  sont  glissées  dans  le  texte  de  la  seconde  partie  du  Faust, 
M.  K.  J;  S,  retrace  la  genèse  de  cette  dernière  production  de  Gœthe  et  en 
suit  avec  un  soin  scrupuleux  les  phases  diverses;  puis,  commentant  scène 
par  scène  les  cinq  actes  du  drame,  il  nous  montre  à  quelle  occasion  ou 
dans  quelle  circonstance  chacune  d'elles  a  été  composée;  je  ne  connais 
rien  de  plus  instructif,  de  plus  propre  à  donner  une  intelligence  vérita- 
ble de  l'œuvre  du  grand  poète  que  cette  étude  simple  et  lumineuse; 
M.  K.  J.  S.  a  rompu  avec  cette  exégèse  fantaisiste,  qui,  faisant  violence 
au  texte,  voulait  trouver  dans  le  Faust  un  système  philosophique  tout 
fait;  pour  lui  sans  doute  le  héros  de  Gœthe  est  bien  le  représentant  de 
l'homme  moderne  dans  ses  aspirations  incessantes  vers  l'idéal,  mais 
c'est  aussi  avant  tout  un  fils  de  la  nature,  et  si  le  symbole  se  mêle  à  son 
histoire,  M.  K.  J.  S.  n'oublie  pas  que  cette  histoire,  dans  ses  traits  es- 
sentiels, a  été  d'abord  fournie  au  poète  par  la  légende  du  xvic  siècle; 
Gœthe  l'a  transformée,  il  est  vrai,  mais  le  plus  souvent,  M.  K.  J.  S.  le 
rappelle  fort  à  propos,  en  y  mêlant  des  épisodes  empruntés  à  des  poètes 
modernes,  en  particulier  à  Hans  Sachs.  C'est  le  mérite  du  savant 
éditeur  d'avoir  mis  en  évidence,  mieux  qu'on  ne  l'avait  encore  fait, 
tout  ce  que  Gœthe  doit  à  ce  dernier;  ainsi  la  scène  de  Méphistophélès  à 
la  cour  de  l'empereur,  l'évocation  d'Hélène,  inconnue  à  l'ancienne  lé- 
gende de  Faust,  sont  tirées  du  poète  nurembergeois.  On  voit  par  là 
combien  les  conceptions,  les  plus  singulières  en  apparence,  du  drame  de 
Gœthe  s'expliquent  sans  peine,  grâce  au  commentaire  historique  de 
M.  K.  J.  Schrôer.  Je  me  bornerai  à  en  donaer  encore  un  exemple.  On  sait 
combien  est  peu  satisfaisant  ce  qu'on  a  dit  de  la  nature  des  Mères  que 
Faust  va  consulter  au  premier  acte;  pour  M.  K.  J.S.,.ce  nom  mysté- 
rieux n'est  autre  que  celui  des  déesses  honorées  à  Engyion,  au  rap- 
port de  Plutarque,  nom  dont  Gœthe  s'est  emparé  pour  en  faire  celui  des 
divinités  qui  révèlent  à  son  héros  le  moyen  d'évoquer  de  l'autre  monde 
Paris  et  Hélène. 

C'est  seulement  après  ce  commentaire  général  de  plus  de  cent  pages 
que  M.  K.  J.  S.  donne  le  texte  du  Faust;  établi  avec  la  critique  la  plus 
sévère,  il  est  accompagné  de  notes  substantielles  qui  éclaircissent  chaque 
difficulté,  chaque  allusion  obscure;  — et  l'on  sait  si  l'œuvre  de  Gœthe  en 
renferme, —  chaque  forme  incertaine;  M.  K.  J.  S.  y  a  fait  preuve  d'une 
érudition  aussi  étendue  que  sûre,  en  même  temps  qu'il  y  a  mis  toute  sa 
connaissance  intime  de  son  poète  favori;  je  doute  aussi  qu'on  puisse 
ajouter  beaucoup  après  lui  à  l'intelligence  du  second  Faust.  Une  table 
alphabétique  très  complète  permet  de  se  reporter  sans  peine  aux  divers 
passages  commentés  ou  étudiés  de  l'œuvre  de  Gœthe.  Enfin,  M.  K.  J. 
Schrôer  a  donné  en  appendice,  ce  qui  n'est  pas  une  des  parties  les  moins 
précieuses  ou  utiles  de  son  livre,  une  longue  liste  de  lectures  erronées, 
de  fautes  d'impression  ou  de  leçons  nouvelles  du  premier  Faust;  il  ne 
pouvait  plus  dignement  compléter  son  œuvre,  et  c'est  là  un  nouveau 


d'histoire  et  de  littérature  193 

titre  de  recommandation  pour  son  édition  du  drame  de  Gœthe,  auquel 
son  nom  restera  désormais  attaché,  comme  celui  de  tout  éditeur  con- 
sciencieux à  l'ouvrage  qu'il  publie. 

J. 


CHRONIQUE 


FRANCE.  —  Le  IIe  volume  de  l'Empire  des  tsars  et  des  Russes,  de  M.  Anatole 
Leroy-Beaulieu,  doit  prochainement  paraître  à  la  librairie  Hachette. 

—  La  Nouvelle  Revue  a  publié,  dans  sa  livraison  du  ior  août,  quelques  chapitres 
des  Mémoires  du  baron  de  Vitrolles  qui  paraîtront  bientôt  chez  Charpentier,  —  s'ils 
ne  paraissent  au  moment  où  nous  publions  ces  lignes.  Ces  mémoires  seront  utiles  à 
l'historien  de  la  Restauration,  et  l'on  trouve  dans  les  pages  que  donne  la  Nouvelle 
Revue  d'intéressantes  observations  et  de  curieux  détails  sur  Stadion,  Metternich,  etc. 

—  Nous  avons  annoncé  un  volume  de  la  Petite  Bibliothèque  messine,  publié  par 
M.  E.  de  Bouteiller  et  intitulé  Eloge  de  Met%,  par  Sigebert  de  Gembloux,  poème 
latin  traduit  et  annoté,  suivi  de  quelques  autres  pièces  sur  le  même  sujet  (Dumoulin. 
In-12%  148  pp.  5  fr.  Tiré  à  245  exempl.)  Ce  charmant  volume,  précédé  d'une  in- 
troduction et  accompagné  de  notes  instructives,  renferme,  outre  l'Eloge  de  Metz 
(placé  comme  annexe  à  la  suite  de  la  Vie  en  vers  de  Thierry  I,  quoiqu'il  ne  semble 
pas  en  avoir  fait  primitivement  partie),  l'épitre  à  Villicus  où  Fortunat  a  chanté  l'an- 
tique Divodurum  et  ses  beaux  environs,  le  poème  latin  du  bénédictin  don  Bermudez 
Pierron,  Templum  Metensibus  sacrum,  et  des  vers  français  de  Paul  Ferry  à  1'  «  illus- 
tre cité,  sa  douce  patrie  ». 

—  Le  tome  VII  de  la  Bibliothèque  oratorienne  publiée  par  le  P.  Ingold  renferme 
un  ouvrage  inédit  du  P.  Ch.  de  Condren,  les  Considérations  sur  les  mystères  de 
Jésus-Christ,  selon  que  V Eglise  les  propose  pendant  le  cours  de  Vannée.  (Poussiel- 
gue.  In-î8°,  xxv-225  pp.),  d'après  un  manuscrit  de  la  bibliothèque  Mazarine;  on  y 
trouve,  dit  l'introduction,  cette  profonde  et  sublime  spiritualité  qui  a  fait  du  P.  de 
Condren  l'une  des  plus  grandes  lumières  de  France,  lumière  à  ce  point  éblouissante 
que  sainte  Chantai  disait  qu'il  lui  semblait  que  Dieu  l'avait  rendu  capable  d'instruire 
les  anges.  Le  volume  renferme,  en  outre,  quelques  fragments  de  l'Oraison  funèbre 
du  P.  de  Condren,  prononcée  par  l'évêque  de  Saint-Brieuc,  Etienne  de  Virazel,  et 
quelques  lettres  inédites  de  ce  second  général  de  l'Oratoire. 

—  M.  le  chanoine  Callen,  professeur  à  la  Faculté  de  théologie  de  Bordeaux,  en- 
treprend de  donner,  en  deux  volumes  (Bordeaux,  Feret)  une  nouvelle  édition  de 
l'ouvrage  publié  en  1668  par  Lopès,  chanoine  et  théologal  de  Saint-André,  et  inti- 
tulé L  Eglise  métropolitaine  et primatiale  de  S,  André  de  Bordeaux  où  il  est  traité 
de  la  noblesse,  droits,  honneurs  et  prééminences  de  cette  Eglise,  avec  V histoire  de  ses 
archevêques  et  le  pouillé  des  bénéfices  du  diocèse.  Cet  ouvrage,  le  plus  important 
qui  ait  paru  sur  l'histoire  ecclésiastique  de  Bordeaux,  est  divisé  en  trois  parties, 
l'Eglise,  les  Archevêques,  le  Chapitre;  il  décrit  la  cathédrale,  ses  reliques,les 
œuvres  d'art  qu'elle  contenait  au  temps  de  Lopès  ;  il  renferme  de  courtes  notices  sur 
les  archevêques  jusqu'à  Henri  de  Béthune,  et  les  plus  complètes  informations  sur  la 
vie  et  les  usages  du  chapitre;  enfin,  il  donne  une  foule  de  pièces  justificatives,  bul- 
les, lettres  patentes,  arrêts  du  parlement,  etc.  La  nouvelle  édition  de  l'ouvrage  de 
Lopès  comprendra,  outre   des   gravures,  des  fac-similés  et  une  carte  de  l'ancien 


IQ4  KKVCE    CRITIQUA 

diocèse  de  Bordeaux,  une  introduction  sur  la  vie  et  l'œuvre  du  savant  chanoine,  des 
notes  en  grand  nombre,  et  un  supplément  ou  plutôt  une  continuation  du  livre  à 
laquelle  collaboreront  plusieurs  érudits,  grands  connaisseurs  des  archives  de  Bor- 
deaux et  de  la  Gironde. 

—  M.  G.  Hérelle  a  publié,  il  y  a  quelque  temps,  la  Correspondance  inédite 
(in-8°,  52  p.),  d'un  des  plus  ardents  jansénistes,  Dom  Thierry  de  Viaixnes;  agent  dé- 
voué de  son  parti,  dit  M.  H.,  fort  bien  renseigné  sur  les  faits  et  gestes  du  clergé 
contemporain,  en  relations  suivies  et  journalières  avec  plusieurs  évêques,  ami  intime 
du  célèbre  auteur  des  Réflexions  morales,  homme  de  science  et  d'action  tout  à  la 
fois,  dom  Thierry  de  Viaixnes  parut  à  ses  adversaires  assez  redoutable  pour  mériter 
leurs  persécutions,  fut  emprisonné  plusieurs  fois  et  mourut  en  exil.  La  correspon- 
dance publiée  par  M.  Hérelle  comprend  seize  lettres  adressées  à  l'abbé  Longer  de 
Saint  Jean  (1717-1721)  et  précédées  d'un  mémoire  de  dom  Thierry  au  lieutenant  du 
Roy  de  Vincennes.  Il  est  surtout  question  dans  ces  lettres  du  P.  Quesnel;  Dom 
Thierry  attaque  les  jésuites  avec  violence;  «  il  faut,  dit-il,  accuser  Molina,  Suarez 
et  leurs  disciples  de  pélagianisme,  et  même  de  pire  que  pélagianisme  pour  les  prin- 
cipes de  morale;  il  faut  convaincre  les  jésuites  dans  cette  dénonciation,  de  corrompre 
toute  la  morale  de  l'Evangile,  et  de  renverser  les  parties  les  plus  essentielles  de  la 
discipline  ». 

—  Philomneste  Junior,  le  fécond  bibliographe,  a  publié  récemment  la  Bibliomanie 
en  1881,  bibliographie  rétrospective  des  adjudications  les  plus  remarquables  faites 
cette  année,  et  de  la  valeur  primitive  de  ces  ouvrages  (Bruxelles,  Gay  et  Douce.  In-120, 
6g  p  ,  5  fr.).  L'auteur  s'occupe  des  ventes  du  marquis  de  Ganay,  de  M.  Ambroise 
Firmin-Didot,  de  M.  Collin,  de  M.  Renard,  du  duc  de  Sunderland.  11  remarque  que 
les  livres  qui  ont  atteint,  dans  ces  ventes,  les  prix  les  plus  élevés,  sont  les  éditions 
originales  de  nos  classiques,  surtout  de  Corneille  et  de  Molière,  les  livres  illustrés  par 
les  artistes  du  siècle  dernier,  Eisen,  Marillier,  Moreau,  etc.,  les  reliures  exécutées  au 
xvine  siècle  par  Boyet,  Padeloup  et  Derome,  les  volumes  portant  les  insignes  de 
quelques  bibliophiles  éminents,  comme  Longepierre  et  le  comte  d'Hoym.  Il  cite, 
parmi  les  volumes  vendus  à  très  haut  prix,  une  Bible  reliée  par  Le  Gascon,  un  opus- 
cule de  Dorât,  les  Rimes  de  Pernette  du  Guillet  qui  ont  dépassé  5,ooo  francs,  le 
Dialogue  des  créatures  de  Colard  Mansion,  qui  monta  à  i2,5oo  francs,  le  Chevalier 
délibéré  d'Olivier  de  la  Marche  (16,000  fr.),  les  Grandes  chroniques  des  gestes  des 
ducs  et  princes  de  Savoye,  de  Symphorien  Champier  (24,000  fr.).  Il  serait  injuste 
d'oublier  les  notes,  pleines  d'intérêt  et  de  savoir,  du  'bibliographe;  il  nous  promet, 
pour  l'année  prochaine,  un  volume  du  même  genre  :  La  BibUomanie  en  1882. 

—  L'éditeur  Maurice  Tardieu  prépare  la  publication  d'un  Dictionnaire  des  ouvrages 
anonymes  et  pseudonymes  publiés  par  des  religieux  de  la  Compagnie  de  Jésus,  par 
le  P.  Carlos  Sommervogel,  Strasbourgeois;  ce  «  Dictionnaire  »  sera  un  supplément 
de  la  Bibliothèque  des  écrivains  de  la  Compagnie  de  Jésus.  (Deux  vol.  in-8°  :  3o  fr.) 

—  Le  14  juillet  dernier  a  eu  lieu  à  Chambéry  l'inauguration  du  buste  de  Pierre 
Lanfrey;  il  est  aussi  question  de  donner  à  une  des  places  de  la  ville  le  nom  de 
Lanfrey. 

—  M.  Victor  Smith,  juge  honoraire  au  Tribunal  civil  de  Saint-Etienne,  honora- 
blement connu  par  d'excellents  travaux,  presque  tous  publiés  dans  la  Romania,  sur 
la  poésie  populaire,  est  décédé  le  3o  juillet  dernier.  • 

ALLEMAGNE.  —  L'état  de  santé  de  M.  Schliemann  l'a  forcé  à  quitter  la  Troade 
pour  se  rendre  à  Carlsbad;  il  assistera  peut-être  au  prochain  congrès  anthropologique 
de  Francfort-sur-le-Main  et  y  fera  d'importantes  communications  sur  ses  découvertes 
les  plus  récentes.  On  sait  qu'il  avait  recommencé  ses  fouilles  à  Troie,  le  1"  mars  de 


D'HISTOIRIi    ET    DE    LITTÉRATUKR  195 

cette  année,  avec  la  collaboration  de  deux  architectes  allemands  et  i5o  ouvriers.  La 
couche  énorme  de  décombres  qu'il  avait  regardée,  avec  Burnouf  et  Virchow,  comme 
appartenante  une  seule  ville,  contient,  selon  lui,  les  strata  de  deux  villes  différentes 
qui  ont  toutes  deux  été  détruites  par  une  catastrophe;  les  «  squelettes  »  des  maisons 
de  la  ville  supérieure  sont  «  lilliputiens  »  en  comparaison  de  ceux  de  la  ville  infé- 
rieure; la  ville  supérieure  ne  s'étendait  pas  en  dehors  de  la  colline  d'Hissarlik  et  ne 
l'occupait  pas  même  entièrement,  la  ville  inférieure  n'avait  sur  la  colline  d'Hissarlik 
que  son  Acropole,  et  s'étendait  sur  le  haut  plateau  au  sud  et  à  l'est.  Les  trois  mon- 
ticules de  briques,  dans  lesquels  Burnouf  croit  reconnaître  les  restes  du  mur  d'en- 
ceinte de  la  troisième  ville,  sont,  d'après  M.  Schliemann,  les  ruines  de  deux  bâtiments 
parallèles  l'un  à  l'autre,  et  qui  étaient  probablement  des  temples,  mais  appartenant 
à  deux  époques  différentes.  M.  Schliemann  a  trouvé  dans  ces  bâtiments  des  clous  de 
bronze,  des  fusaioles  ornementées  qu'il  regarde  comme  des  offrandes  à  Pallas  Athéné, 
des  idoles  en  marbre  où  l'on  voit  une  tête  de  chouette  gravée  ou  faiblement  indiquée 
en  noir,  des  frondes  en  hématite,  des  broches  de  bronze.  M.  Schliemann  a  découvert 
une  grande  partie  de  l'Acropole;  tout  lui  prouve  l'existence  de  la  seconde  ville  basse 
(la  première  ville  brûlée)  à  laquelle  Hissarlik  ne  servait  que  de  T£u,svoç  *,  toutefois, 
il  n'a  pas  réussi  à  trouver  des  ruines  de  cette  ville  basse,  et  il  est  porté  à  croire 
qu'elles  ont  disparu.  Il  a  fouillé  le  théâtre  ide  l'époque  romaine)  assez  vaste  pour 
contenir  vingt  mille  spectateurs  ;  il  y  a  trouvé  les  bâtisses  de  la  scène,  un  grand  four 
à  chaux  et  des  fragments  de  statues  en  très  grand  nombre.  Tout  le  reste  de  l'Acro- 
pole est  couvert  de  fondations  d'édifices  helléniques  ou  romains;  mais  M.  Schlie- 
mann fait  disparaître  une  grande  partie  de  ces  fondations  en  mettant  à  jour  la  Per- 
game  de  la  seconde  ville  (la  première  ville  brûlée)  dans  toute  son  étendue,  avec  son 
mur  d'enceinte  entier.  «  En  voyant  ce  mur,  écrit  M.  Schliemann,  mur  colossal  dont 
les  substructions  n'ont  pas  moins  de  8  mètres  de  haut,  vous  croirez  facilement  qu'il 
a  été  considéré  à  l'époque  troyenne  comme  une  grande  merveille,  telle  qu'on  a  pu 
attribuer  sa  construction  à  Poséidon  et  à  Apollon.  »  M.  Schliemann-  a  exploré  les 
tombeaux  héroïques  que  la  tradition  regarde  comme  les  tombeaux  d'Achille  et  de 
Patrocle;  il  a  trouvé  des  poteries  archaïques  helléniques  remontant  au-delà  du 
ix8  siècle  avant  J.-C.  Il  y  a  de  même  exploré,  mais  seulement  à  moitié,  le  vaste  tu- 
mulus  attribué  à  Protesilas  (i25  m.  de  diamètre)  et  y  a  trouvé  des  tessons  de  poterie 
préhistorique,  la  plus  ancienne  qu'il  ait  jamais  trouvée  à  Hissarlik,  ainsi  que  des 
armes  et  des  ustensiles  en  pierre;  ces  fouilles  ont  été  malheureusement  interrompues 
''par  ordre  du  ministère  de  lajguerre  de  Turquie. «  Le  peu  d'or  découvert  jusqu'à  pré- 
sent, dit  encore  M.  Schliemann,  a  été  trouvé  dans  le  plus  grand  temple  de  la  deuxième 
ville,  qui  semble  être,  à  tous  égards,  identique  à  la  description  qu'Homère  nous  fait 
de  la  Troie  de  Priam  avec  sa  ville  basse  et  sa  Pergame  ■  ». 

—  M.  Wendelin  Fœrster  vient  de  publier,  à  la  librairie  Henninger,  de  Heilbronn, 
le  premier  volume  des  Tragédies  de  Robert  Garnier.  (In-8°,  xvm  et  21 3  p.  3  mark 
60).  Ce  volume  comprend  les  tragédies  suivantes:  Porcie  (pp.  13-78);  Cornêlie 
(pp.  79-146);  Marc-Antoine  (pp.  147-213)  ;  le  texte  de  Garnier  est  reproduit  d'après 
la  première  édition  des  œuvres  complètes  (Paris,  1 585))  ;  mais  l'éditeur  a  soin  de 
donner  les  variantes  de  toutes  les  éditions  précédentes.  Le  premier  volume,  que  nous 
annonçons,  renferme,  outre  les  trois  tragédies,  une  «  introduction  générale  »,  une 
notice  bibliographique,  et  la  dédicace,  en  vers  et  en  prose,  au  roi  de  France  et  de 
Pologne.  Le  deuxième  volume  renfermera  Hippolyte  et  La  Troade  ;  le  troisième, 

1.  Nous  tirons  ces  renseignements  d'une  lettre  de  M.  Schliemann  au  Secrétaire  perpétuel  de  l'Aca- 
démie royale  de  Belgique;  cette  lettre  est  datée  de  Troie,  23  mai. 


I96  RKVUE    CRITIQUE   D'HISTOIRE    ET   DE   LITTÉRATURE 

Antigone  et  Les  Juives  ;  le  quatrième,  Bradamante,  avec  une  courte  notice  littéraire, 
historique  et  biographique,  et  un  glossaire  des  mots  qui  manquent  dans  le  dic- 
tionnaire de  Sachs. 

—  Le  même  érudit  publie  en  même  temps  le  Ve  volume  de  sa  «  Altfranzœsische 
Bibliothek»  (Lyoner  Y^opet,  altfranzœsische  Ueberset^ung  des  XIII.  Jahrhunderts 
in  der  Mundart  der  Franche-Comté,  mit  dem  kritischen  Text  des  lateinischen  Ori- 
ginals,  sog.  Anonymus  Neveleti  :  Heilbronn,  Henninger.  In-8°,  xuv  et  166  p.)  Il 
doit  publier  aussi  la  Chanson  de  Roland  d'après  les  mss.  de  Châteauroux  et  de  Ve- 
nise VII  (VU"16  vol.)  et  d'après  les  mss.  de  Paris,  Lyon  et  Cambridge  (VIlie  vol.).  Le 
VIe  volume  de  la  collection  sera  formé  par  le  roman  en  ancien  français  Octavian,  que 
publiera  pour  la  première  fois,  d'après  le  ras.  d'Oxford  (Bodl.  Hatton,  100)  M.  K. 
Vollmœller.  Les  autres  volumes  en  préparation  sont  :  Thomas  Becket,  de  Garnier 
de  Pont  Sainte-Maxence;  Jehan  de  Lanson;  Jaufré;  une  Vie  poitevine  de  Sainte - 
Catherine  (Tours);  le  Planctus  Maviae  provençal  (Bartsch,  Grundriss,  20,  1 1,  d'après 
les  quatre  mss.  connus);  Mystère  d'Adam  (Tours);  Roman  de  Cristal;  Nat  de 
Mons  ;  Roman  de  Hom;  Orthographia  gallica;  Roman  du  Castelain  de  Couci. 

■■—  Parmi  les  prochaines  publications  de  la  librairie  Deichert,  d'Erlangen,  on  nous 
signale  les  suivantes  :  de  M.  W.  G.  Wilhelm  Geiger,  Ostiranische  Cultur  im  Alter- 
{hum; —  de  M.  Gust.  Landgraf,  Cicerd's  Rede  fur  Sext.  Roscius  aus  Ameria,  mit 
den  Testimonia  veterum  und  dem  Scholiasta  Gronovianus.  Ve  partie;  —  de  M.  K. 
Sittl,  Die  localen  V erschiedenheiten  der  lateinischen  Sprache  mit  besonderer  Be- 
rùcksichtigung  des  afrikanischen  Lateins  ;  — de  M.  Ad.  Westermaver,  Der  Prota- 
goras  des  Plato  |«r  Einfùhrung  in  das  Verstœndniss  der  platonischen  Dialoge, 
erklœrt. 

—  Il  a  paru  un  Annuaire  théologique,  Theologischer  Jahresbericht,  dirigé  par 
M.  B.  Pûnjer,  avec  la  collaboration  de  MM.  Bassermann,  Benrath,  Bœhringer,  etc.; 
il  est  consacré  aux  publications  théologiques  de  l'année  1881.  (Theologischer  Jahres- 
bericht, enthaltend  die  Literatur  des  Jahres  1881.  Leipzig,  Barth.  ln-8°,  v  et  38g  p. 
8  mark.)  Les  auteurs  du  volume  se  sont  efforcés  d'être  le  plus  courts  possible;  ils 
rendent  compte  dans  ce  volume,  qui  ne  renferme  pas  400  pages,  de  près  de  mille 
volumes  ou  dissertations.  M.  Ludemann  traite  des  ouvrages  qui  ont  pour  sujet  l'his- 
toire de  l'Eglise  jusqu'au  concile  de  Nicée;  M.  Bcchringer  passe  en  revue  les  publi- 
cations qui  ont  trait  à  l'histoire  de  l'Eglise  depuis  le  concile  de  Nicée  jusqu'à  la  Ré- 
forme; M.  Benrath  analyse  et  critique  les  œuvres  qui  traitent  de  la  période  de  l'his- 
toire religieuse  comprise  entre  les  années  i5i7et  1700,  etc.  Nous  souhaitons  bon 
succès  à  cette  entreprise,  et  de  longues  années  au  theologischer  Jahresbericht. 

SUISSE.  —  Les  éditeurs  Orell  et  Fûssli,  de  Zurich,  font  paraître,  par  fascicules, 
un  recueil  de  poésies  dans  le  dialecte  suisse  sous  le  titre  Schwi^erdùtsch  ;  le  pre- 
mier fascicule  est  consacré  au  canton  de  Zurich  (aus  dem  Kanton  Zurich). 

—  La  librairie  Huber,  de  Frauenfeld,  publiera  prochainement  le  IV*  volume  de  la 
Bibliothek  œlterer  Schriftwerke  der  deutschen  Schwei^.  Ce  volume  est  un  recueil 
de  chants  populaires  suisses  (Schwei^erische  Volkslieder);  l'éditeur  est  M.  L.  To- 
bler.  Cette  publication,  qui  renfermera  un  certain  nombre  de  chants  inédits,  con- 
tiendra, en  outre,  une  introduction  où  M.  L.  Toblef  traitera  de  l'histoire  des  poésies 
populaires  en  Suisse,  de  ses  sources,  des  recueils  précédents  de  Volkslieder  ;  il  don- 
nera une  liste  chronologique  complète  des  chants  populaires  historiques,  etc.  — 
M.  Bartsch  doit  publier  dans  cette  collection  une  édition  des  Minnesinger  suisses. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 

Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  a  3. 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

N°  37  -  11  Septembre  —  1882 


Sommaire  s  182.  Baunack,  Le  nom  de  Déméter.  —  i83.  Sophus  Mûller, 
L'ornementation  dans  le  Nord.  —  184.  W.  Meyer,  Le  ludus  de  Antichristo  et  la 
poésie  latine  rythmique.  —  i85.  Person,  Histoire  du  véritable  Saint- Genest  de 
Rotrou.  —  186.  Faust,  fragment,  de  Gœthe,  p.  p.  Seuffert.  --  Variétés  :  Gazier, 
L'histoire  de  France  du  P.  Loriquet.  —  Chronique. 


182.  —  Grammatieches.  I.  Einige  sprachgeschichtliche  wichtige  Glossen  des 
Hesychius.  IL  Ueber  den  Namen  Aï)U,Y)TY]p  und  zur  Bildung  der  griechischen  Ei- 
gennamen  ûberhaupt.  8  p.  in-8°.  Signé  :  J.  Baunack.  Extrait  du  Rheinisches  Mu- 
séum, 1882. 

Ce  petit  article,  à  côté  de  détails  qui  s'adressent  aux  seuls  linguistes, 
en  contient  un  d'un  intérêt  plus  général,  l'étymologie  de  A^^xvjp.  Ce 
mot  ne  vient  pas  de  yv)  ;  c'est  une  syncope  de  StjjAOpnfjr^p,  la  mère  du 
%rt\».oq  (c'est-à-dire,  au  sens  originel,  la  mère  de  la  terre,  du  pays). 


l83.  —  Dyreornamentiken  I  Norden,  dens  Oprindelse,  Udvlkling  og 
Forhold  til  samtidige  Htilar<er.  En  archaeologisk  Undersœgelse  af  Sophus 
Mûller,  dans  Aarbœger  for  nordisk  Oldk^ndiglied  og  Historié,  udgiv ne 
af  det  K.  nordiske  Oldskrift-Selskab.  1880.  p.  i85-4.o5,  avec  2  pi.  et  81  fig.  dans 
le  texte.  Kjœbenhavn,  Gyldendaske  Boghandel.  In-8°,  aussi  à  part. 
Die  Tbler-Oi'iiamentik  im  Norden,  Ursprung,  £ni\vicklnng  und 
Verha?-Itniss  derselben  zn  gleichxeitlgen  Stilarten.  Archaeologische 
Umersuchung  von  Dr  Sophus  Mûller,  aus  dem  dœnischen  ùbersetzt  von 
J.  Mestorf.  Hamburg.  Otto  Meissner.  1881,  vm-191  p.  in-S°  avec  2  pi.  et  81  fig. 
dans  le  texte. 

Nous  ignorons  si  les  Scandinaves  des  temps  païens  ont  jamais  cultivé 
l'art  pour  lui-même,  mais  nous  savons  par  de  nombreuses  trouvailles  et 
par  des  descriptions  et  des  allusions  contenues  dans  les  sagas  et  les  poè- 
mes des  skalds  que,  outre  leurs  riches  et  jolies  parures,  ils  avaient  de 
beaux  édifices,  ce  qui  implique  la  connaissance  de  l'architecture,  et 
qu'ils  pratiquaient  la  peinture  et  la  sculpture.  S'ils  n'ont  pas  eu  d'artistes 
proprement  dits,  ils  avaient  certainement  d'habiles  ouvriers  qui  appli- 
quaient l'art  à  l'industrie,  et  dont  les  travaux  décoratifs  sont  pour  nous 
les  seuls  spécimens  de  l'art  Scandinave  des  temps  préhistoriques.  L'étude 
de  l'ornementation  chez  les  peuples  du  Nord  a  donc  un  intérêt  spécial, 
qui  justifie  l'étendue  du  mémoire  que  lui  a  consacré  M.  S.  Mûller, 
le  nouveau  secrétaire  de  la  Société  royale  des  antiquaires  du  Nord.  Le 
Nouvelle  série,  XIV.  11 


I98  REVUE    CRITIQUE 

savant  archéologue  a  passé  trois  ans  à  en  réunir  les  matériaux,  qu'il  a 
trouvés  non-seulement  dans  le  célèbre  musée  des  antiquités  septen- 
trionales de  Copenhague,  mais  encore  dans  la  plupart  des  grandes 
collections  archéologiques  et  bibliographiques  de  l'Europe.  L'examen 
critique  qu'il  fait  des  travaux  de  ses  prédécesseurs,  montre  qu'il  ne  con- 
naît pas  uniquement  les  objets  et  leurs  décors,  mais  aussi  les  livres  et 
mémoires  Scandinaves,  allemands,  français,  italiens,  anglais,  qui  les 
concernent.  Du  point  de  vue  où  il  s'est  placé,  il  avait  à  saisir  d'un  même 
coup  d'œil  un  vaste  ensemble  de  faits  disparates  et  incohérents;  à  voir 
le  lien  qui  les  unit  ;  à  caractériser  le  style  décoratif  des  diverses  périodes 
préhistoriques,  chez  les  Scandinaves  et  leurs  voisins;  à  découvrir  son 
origine;  à  montrer  comment  il  s'est  développé,  soit  en  vertu  de  ses  pro- 
pres forces,  soit  sous  l'influence  des  civilisations  étrangères.  Voici  la 
marche  qu'a  suivie  l'auteur  :  après  le  compte-rendu  sommaire  des  tra- 
vaux relatifs  au  sujet,  il  étudie  l'ornementation  chez  les  peuples  germa- 
niques soumis  à  l'influence  romaine,  puis  celle  de  la  période  des  migra- 
tions, pour  arriver  à  l'ornementation  hiberno-scandinave  qui  l'arrête 
longtemps;  il  passe  plus  rapidement  en  revue  celles  de  la  période  carlo- 
vingienne,  des  Byzantins,  des  Sassanides,  des  Arabes,  des  Finnois  et 
des  Slaves;  enfin  il  donne  ses  conclusions  dont  voici  le  résumé  : 

L'ornementation  est  le  début  de  l'art;  très  simple  dans  l'âge  de  pierre, 
elle  consiste  en  points  et  en  lignes  droites,  ajoutons  aussi  en  lignes  bri- 
sées. A  ces  éléments  les  plus  primitifs  se  joignent  dans  l'âge  de  bronze 
les  lignes  courbes,  les  cercles,  les  spirales,  les  bandelettes  dont  les  extré- 
mités affectent  volontiers  la  forme  de  têtes  d'animaux.  Le  style  décoratif 
ne  reçut  pas  grand  développement  dans  la  première  période  européenne 
de  Tàge  de  fer,  représentée  par  les  trouvailles  de  Hallstatt  en  Autriche 
et  de  la  Têne  en  Suisse;  bientôt  il  fut  modifié  par  l'art  classique  qui 
empruntait  ses  motifs  d'ornementation  tout  à  la  fois  à  la  botanique  et  à 
la  zoologie,  et  qui,  à  la  faveur  de  la  prépondérance  romaine,  les  répan- 
dit dans  toute  l'Europe  centrale  et  les  propagea  même  jusqu'en  Scandi- 
navie. Pourtant  les  peuples  barbares  ne  purent  s'assimiler  tous  les  élé- 
ments décoratifs  en  usage  chez  les  Grecs  et  les  Romains;  s'ils  imitèrent 
grossièrement  les  figures  d'animaux,  ils  laissèrent  de  côté  la  flore  orne- 
mentale. Au  temps  des  grandes  migrations,  les  Germains  avaient  un  art 
décoratif  commun,  qu'ils  portèrent  dans  les  différentes  parties  de  l'em- 
pire romain  où  ils  s'établirent,  mais  ils  ne  tardèrent  pas  à  le  modifier  de 
nouveau  sous  l'influence  tout  à  la  fois  de  l'ancienne  civilisation  et  de  la 
nouvelle  qui  était  animée  de  l'esprit  chrétien.  Les  Scandinaves,  au  con- 
traire, qui  n'avaient  pas  quitté  leur  patrie,  conservèrent  assez  purement 
et  développèrent  le  style  pendant  toute  la  longue  période  qui  s'étend  des 
grandes  migrations  terrestres  des  ve  et  vic  siècles  jusqu'aux  migrations 
maritimes  des  ixe  et  x°  siècles.  Etant  alors  entrés  en  relations  suivies  avec 
les  Irlandais,  ils  adoptèrent  les  motifs  d'ornementation  que  ce  peuple 
avait  portés  à  un  haut  degré  de  finesse  et  d'élégance,  et  les  .gardèrent 


d'histoire  et  de  littérature  199 

jusqu'à  ce  que  l'art  roman  se  fût  imposé  à  toute  l'Europe  catholique. 

Il  y  a  là  une  foule  de  questions  fort  délicates  sur  lesquelles  M.  S.  M .  est 
loin  d'être  d'accord  avec  ceux  qui  les  avaient  déjà  traitées  dans  diverses 
contrées;  nous  ne  répondons  pas  qu'à  l'avenir  ses  émules  les  résoudront 
de  la  même  façon  que  lui;  car.  malgré  sa  perspicacité,  il  n'a  pas  assez 
tenu  compte  de  la  disparité  des  matériaux  qu'il  compare.  Il  prétend,  par 
exemple,  que  les  fleurons  et  les  autres  motifs  d'ornementation  botani- 
que, à  l'exception  d'une  espèce  de  feuilles  à  côtes,  manquent  totalement 
dans  l'antiquité  septentrionale,  jusqu'aux  derniers  temps  du  paganisme. 
Cette  assertion  est  beaucoup  trop  absolue,  comme  on  peut  s'en  convain- 
cre en  examinant  les  pendeloques  barbares  de  la  trouvaille  de  Brang- 
strup,  taillées  en  forme  de  feuilles,  pointues,  arrondies,  échancrées  ou  or- 
nées d'autres  feuilles.  Rappelons  aussi  trois  garnitures  en  fer  et  trois 
bouterolles  de  fourreaux  d'épées  portant  des  fleurons  et  même  des  guir- 
landes de  feuillage.  Il  est  vrai  que,  dans  l'état  actuel  de  nos  connaissan- 
ces, il  n'y  a  pas  beaucoup  d'exemples  de  ce  genre;  mais  il  faut  considé- 
rer que,  parmi  les  antiquités  préhistoriques  qui  nous  sont  parvenues,  il 
en  est  très  peu  qui  fussent  propres  à  la  décoration  végétale,  celle-ci  de- 
mandant surtout  des  surfaces  planes  et  un  champ  d'une  certaine  lar- 
geur; les  poignées  d'armes  et  d'outils,  les  parures,  avec  leurs  surfaces 
bossuées  et  leurs  extrémités  aiguës,  se  prêtaient  mieux  à  la  décoration 
zoologique  ;  elles  diffèrent  d'ailleurs  trop  des  feuilles  d'un  manuscrit 
pour  qu'il  soit  permis  de  les  comparer.  C'est  ce  que  M.  S.  M.  a  trop  ou- 
blié. Si  les  Scandinaves  des  temps  païens  avaient  été  calligraphes  comme 
les  Gaëls  chrétiens,  ils  nous  auraient  sans  doute  aussi  laissé  des  manus- 
crits ornés  de  fleurons.  De  même,  si  nous  avions  les  grandes  tapisseries 
que  brodaient  les  dames  du  Nord,  il  est  probable  que  nous  y  trouverions 
des  fleurons  et  des  guirlandes,  comme  on  en  voit,  en  effet,  sur  le  man- 
teau de  Mammen  en  Jutland. 

D'autre  part,  M.  S.  M.  prétend  que  les  figures  d'animaux  dont  sont 
ornés  les  bijoux,  les  bractéates,  etc.,  n'ont  rien  de  symbolique.  Nous 
l'admettons  volontiers;  mais  il  nous  semble  aller  trop  loin,  en  affirmant 
qu'ils  n'ont  aucune  signification.  S'il  en  est  ainsi  pour  la  plupart  des 
figures  isolées,  il  doit  en  être  autrement  des  scènes  représentant  tout  à  la 
fois  des  hommes,  des  quadrupèdes,  des  volatiles,  des  reptiles,  et  souvent 
accompagnées  de  légendes  en  runes  anciennes.  Sans  doute  il  est  aussi 
difficile  d'interpréter  celles-ci  que  d'expliquer  celles-là;  ce  n'est  pourtant 
pas  impossible,  comme  M.  Worsaae  l'a  prouvé  par  son  mémoire  sur  les 
Empreintes  des  bractéates  en  or.  Aux  exemples  apportés  par  l'illustre 
archéologue,  nous  en  pourrions  ajouter  un  autre  :  une  médaille  d'or, 
trouvée  à  Harlingen  et  conservée  au  musée  de  Leeuwarden  en  Frisa, 
porte  d'un  côté  l'imitation  barbare  d'une  monnaie  de  l'empereur  Théo- 
dose, de  l'autre  une  harpe  avec  deux  personnages,  dont  le  plus  grand  a 
les  pieds  dans  la  boîte  de  cet  instrument  et  tend  la  main  à  une  petite  fille 
qui  approche.  On  devine  de  suite  qu'il  s'agit  là  de  Heimi  qui  va  cacher 


200  REVUE    CRITIQUK 

dans  la  boite  de  la  harpe  la  petite  Aslange,  orpheline  et  fugitive.  Cette 
conjecture  est  confirmée  par  l'inscription  en  runes  anciennes,  que 
MM.  G.  Stephens  et  Dietrich  lisent  Hama,  forme  anglo-saxonne  du 
nom  de  Heimi.  —  Nous  chicanerons  encore  notre  auteur  sur  sa  ten- 
dance à  voir  des  bandelettes  (ou  des  lanières  de  parchemin,  auxquelles 
on  aurait  ajouté  tête,  queue,  pieds)  dans  les  serpents  et  les  lézards  enrou- 
lés et  entrelacés  qui  portent  des  inscriptions  runiques.  Ce  sont  tout  sim- 
plement des  animaux  fantastiques,  comme  les  orfèvres  et  les  sculpteurs 
aimaient  à  en  représenter  partout  pendant  l'âge  de  fer. 

Malgré  les  réserves  que  nous  venons  de  faire,  le  mémoire  de  M.  S.  Mill- 
ier embrasse  tant  de  faits,  touche  à  tant  de  questions  discutées,  les  traite 
d'une  manière  si  indépendante  et  en  donne  quelques  solutions  si  neuves, 
qu'il  s'impose  à  l'attention  de  quiconque  s'intéresse  à  l'archéologie  et  à 
l'histoire  des  arts  décoratifs  ;  et,  grâce  à  la  traduction  allemande  de 
M1Ie  Mestorf,  il  est  maintenant  accessible  à  un  plus  grand  nombre  de 
lecteurs.  La  traductrice,  qui  a  déjà  mis  à  la  portée  de  ses  compatriotes 
tant  de  mémoires  danois  et  suédois,  ne  sait  pas  seulement  les  langues 
Scandinaves;  elle  a  aussi,  comme  conservateur  de  la  collection  d'anti- 
quités de  Kiel,  une  grande  expérience  archéologique  qui,  à  défaut  d'au- 
tres titres  suffirait  à  recommander  sa  traduction,  intégrale  et  très  fidèle. 
Seulement  il  est  regrettable  que  l'orthographe  des  noms  étrangers  et  des 
titres  d'ouvrages  ne  soit  pas  toujours  correcte,  et  surtout  que  les  chif- 
fres des  pages  citées  soient  si  souvent  inexacts  (Cfr.,  par  exemple,  pp.  25, 
•34,  42,  44). 

E.  Beau  vois. 


184.  —  Ludus   de  Anticliristo  und    ûber    die  lateinteelicn    Rjthmen, 

von  Dr  Wilhelm  Meyer  aus  Steyer.  Munich,  Straub,  1882,  in-8°,  192. p.  (Extrait 
du  premier  cahier  des  Comptes-rendus  des  séances  de  la  classe  philosophico-phi- 
lologique  de  l'Académie  royale  des  sciences  de  Bavière  pour  1882). 

Le  Ludus  de  Antichristo,  drame  en  vers  latins  rythmiques  composé  en 
Allemagne  un  peu  après  le  milieu  du  xn°  siècle,  a  été  publié  déjà  deux 
fois.  Il  a  beaucoup  attiré,  dans  ces  dernières  années,  l'attention  des  cri- 
tiques, qui  lui  ont  attribué  une  valeur  supérieure  à  celle  qu'il  nous  pa- 
raît posséder  \  M.  Meyer  de  Spire  vient  d'en  donner  une  édition  bien 
meilleure  que  celles  de  Pez  et  de  Zeschwitz,  et  il  y  a  joint  une  fort  bonne 
introduction,  où  il  montre  dans  quel  rapport  étroit  est  le  drame  avec  le 
célèbre  ouvrage  d'Adson  sur  l'Antéchrist,  lequel  à  son  tour  repose  sur 

l'écrit  attribué  à  Méthodius. 

j 

1.  Le  patriotisme  allemand  et  la  haine  des  Français  qui  animent  la  pièce  sont  as- 
surément dignes  de  remarque  et  lui  donnent  un  intérêt  qu'on  rencontre  rarement 
dans  les  ouvrages  de  ce  genre;  mais  la  construction  du  drame  est  purement  mécani- 
que et  le  ssyle  laisse  à  désirer  comme  élégance  et  clarté. 


d'histoire  et  DE. LITTERATURE  201 

La  seconde  partie  du  livre  de  M.  M.,  la  plus  importante  de  beaucoup, 
n'a  qu'un  lien  très  faible  avec  la  première.  C'est  un  traité  complet  de  la 
poésie  latine  rythmique,  que  nous  n'avons  pas  le  loisir  d'étudier  ici  en 
détail,  mais  que  nous  signalons  à  nos  lecteurs  comme  devant  être  doré- 
navant la  base  de  toutes  les  études  sur  cet  intéressant  sujet.  Après  quel- 
ques mots,  peut-être  un  peu  rapides,  sur  les  origines  de  cette  poésie, 
M.  M.  traite  d'abord  des  «  Rythmes  du  vie  au  xne  siècle  »  ;  il  trace  les 
lois  difficiles  et  jusqu'à  lui  à  peine  soupçonnées  de  la  versification  mal 
fixée  de  cette  longue  période,  et  donne  ensuite,  d'après  toutes  les  sources 
connues,  l'inventaire  des  pièces  où  chaque  forme  est  employée.  La  se- 
conde période,  xiie-xme  siècle,  qu'on  peut  appeler  période  classique  de 
la  versification  rythmique,  est  également  étudiée  avec  un  grand  soin; 
l'auteur  perfectionne  et  rectifie  les  règles  qui  avaient  été  données  avant 
lui,  et  appuie  ses  théories  par  un  grand  nombre  d'exemples.  La  tâche 
qu'il  a  entreprise  ne  pouvait  être  menée  à  bonne  fin  que  par  des  lectures 
considérables  jointes  à  une  méthode  rigoureuse  et  à  une  observation 
toujours  en  éveil;  M.  Meyer  a  réuni  toutes  ces  conditions.  Grâce  à  lui, 
des  résultats  définitifs  sont  acquis  à  la  science.  On  pourra  les  présenter 
sous  une  forme  plus  facile,  et  peut-être  parfois  plus  claire  ;  mais  il  est  à 
croire  qu'on  ne  trouvera  pas  beaucoup  à  y  ajouter  ou  à  y  reprendre. 
Nous  n'oserions  pas  en  dire  autant,  dès  aujourd'hui,  de  certaines  vues 
générales  de  l'auteur,  concernant  les  origines  et  le  développement  de  la 
poésie  latine  rythmique;  mais  ceux  mêmes  qui  n'interprètent  pas  tou- 
jours comme  lui  les  faits  qu'il  a  exposés,  lui  en  devront  le  plus  souvent 
la  connaissance  exacte  et  la  véritable  intelligence. 

G.  P. 


■ 

1 85.  —  Histoire  du  véritable  Saint-Genest  de  Rotrou ,  par  Léonce 
Person,  professeur  au  lycée  Saint- Louis.  Paris,  Léopold  Cerf,  1882,  in-8% 
io3  pages. 

Il  a  été  rendu  compte  ici  tout  dernièrement  •  d'un  intéressant  travail 
de  M.  L.  Person  sur  Rotrou,  dans  lequel  n'était  qu'annoncée  l'impor- 
tante découverte  de  l'original  espagnol  du  Saint-Genest.  Aujourd'hui 
M.  Person  nous  offre  une  histoire  complète  de  la  célèbre  tragédie  de 
Rotrou;  la  partie  la  plus  neuve  et  la  plus  curieuse  de  cette  étude  est 
l'analyse  de  la  pièce  de  Lope  de  Vega  qui  a  servi  de  modèle  au  poète 
français  :  après  l'avoir  lue,  il  n'est  pas  possible  de  mettre  en  doute  la 
thèse  soutenue  par  le  professeur  du  lycée  Saint- Louis,  la  démonstration 
est  concluante  et  ne  laisse  rien  à  désirer. 

La  comedia  de  Lope  intitulée  Lo  fingido  verdadero  ou  La  vida 
y  martirio  de  San  Gines  représentante,  bien  qu'elle  ait  été  imprimée 

— 

1.  Voir  la  Revue  critique  du  3  juillet. 


202  REVUE   CRITIQUE 

du  vivant  de  l'auteur  dans  un  des  volumes  (Parte  XVI)  de  la  collection 
spéciale  de  ses  oeuvres  dramatiques,  est  une  des  plus  oubliées,  des  plus 
ignorées  du  grand  poète.  Aucun  des  érudits  qui,  en  Espagne,  en  France 
et  en  Allemagne,  se  sont  occupés  du  théâtre  de  Lope  ne  semble  l'avoir 
lue;  aussi  ne  doit-on  pas  s'étonner  que  nul  n'ait  eu  vent,  jusqu'à 
M.  P.,  des  nombreux  emprunts  que  lui  a  faits  Rotrou  :  M.  de  Schack 
lui-même,  qui  eût  été  si  heureux  d'ajouter  \t*Saint-Genest  à  sa  liste  de 
pièces  prises  aux  Espagnols  et  gâtées  par  les  Français,  n'en  dit  mot. 
Comme  le  Fingido  verdadero  a  été  dédié  par  Lope  à  Tirso  de  Molina, 
le  dernier  éditeur  '  d'un  choix  de  comedias  de  ce  poète  a  cité  en  passant 
le  drame  de  Lope  et  reproduit  quelques  lignes  de  la  dédicace;  c'est  de 
ce  passage  de  l'éditeur  espagnol  que  dérive  directement  une  note  de 
M.  Alphonse  Royer  qui,  au  premier  abord,  semble  avoir  intrigué 
M.  P.  ;  il  peut  être  tranquille  maintenant  :  Royer  ne  savait  rien  de  plus 
que  Hartzenbusch,  qui  lui-même  ne  savait  rien.  La  pièce  de  Lope  pour- 
tant n'est  point  de  celles  qui  méritaient  le  plus  de  tomber  dans  l'oubli  ; 
au  point  de  vue  exclusivement  espagnol  même,  elle  ne  manque  pas  d'in- 
térêt. Ainsi  il  s'y  trouve,  au  deuxième  acte,  un  passage  curieux  pour 
l'histoire  du  théâtre  espagnol  au  xvne  siècle  :  Dioclétien  demande  qu'on 
lui  donne  <s  une  pièce  nouvelle  qui  ait  de  l'invention,  quand  bien  même 
elle  ne  serait  point  assujettie  aux  règles,  car  en  cela,  dit-il,  j'ai  le  goû 
espagnol  »,  et  Lope  part  de  là  pour  faire  quelques  allusions  (très  voilées 
d'ailleurs) à  des  drames  de  l'époque.  A  la  fin  du  troisième  acte  aussi,  on 
ne  lirait  pas  sans  profit  une  scène  où  sont  énumérés  les  principaux  rôles 
de  convention  du  théâtre  espagnol. 

Pour  donner  du  drame  de  Lope,  mal  écrit  et  plus  mal  imprimé,  une 
version  française  parfaitement  correcte  et  fidèle,  une  longue  et  solide 
préparation  serait  nécessaire.  M.  P.,  dont  l'intention  n'était  que  de 
traduire  quelques  passages  pour  fournir  au  lecteur  le  moyen  de  contrô- 
ler ce  qu'il  dit  des  rapports  de  la  comedia  espagnole  avec  le  drame  fran- 
çais, a  pu,  sans  cette  préparation  spéciale,  se  tirer  heureusement  des 
principales  difficultés.  Je  ne  crois  pas  utile  de  repasser  minutieusement  sa 
traduction  pour  y  noter  çà  et  là  quelques  défauts  ;  je  n'insisterai  que 
sur  deux  ou  trois  passages.  Auparavant  je  dois  faire  observer  à  l'auteur 
qu'il  n'est  pas  suffisant  de  dire  que  Lo  fingido  verdadero  «  date  pour 
le  moins  de  l'année  1622  ».  Non  seulement  la  Parte  XVI  où  a  été  in- 
séré ce  drame,  contient  des  pièces  préliminaires  datées  de  1620,  notam- 
ment l'approbation  de  Vicente  Espinel,  ce  qui  déjà  prouve  qu'il  était 
terminé  en  cette  année-là,  mais  le  drame  figure  dans  un  supplément  à 
la  liste  des  comedias  de  Lope  imprimé  pour  la  première  fois  dans  l'édi- 
tion de  16 18  du  roman  El  peregrino  en  su  patria;  il  en  résulte  donc 
incontestablement  que  notre  pièce  date,  pour  le  moins,  de  l'année  16 18. 

1.  D.  Juan  Eugenio  Hartzenbusch,  Comedias  escogidas  de  Tirso  de  Afolina  (Bibl. 
Rivadeneyra),  p.  xvn,  note. 


d'histoire  kt  de  LITTÉRATURE  203 

Au  début  du  premier  acte  du  Fingido  verdadero  se  lisent  ces  vers  : 
Ha^emos  prueva  Deste  Frances  emperador  Romano.  M.  P.  pense 
que  le  mot  frances,  appliqué  ici  à  l'empereur  Aurélien,  est  un  terme  de 
mépris,  une  injure.  Cela  n'est  guère  vraisemblable.  Il  faudrait  supposer 
pour  cela,  au  temps  où  Lope  écrivait  ^a  pièce,  une  grande  animosité  des 
Espagnols  contre  leurs  voisins  ou  de  bien  mauvaises  relations  entre  les 
couronnes  de  France  et  d'Espagne.  Or  il  se  trouve  que  le  commence- 
ment du  xvne  siècle  est  précisément  une  époque  de  bons  rapports  entre 
les  deux  pays;  les  mariages  espagnols  venaient  de  resserrer  les  liens  des 
deux  familles  régnantes,  et,  à  supposer  même  que  Lope  eût  eu  le  tempé- 
rament très  anti-français  (ce  dont  on  ne  sait  rien),  il  n'aurait  pas,  si  peu 
de  temps  après  le  mariage  de  l'héritier  de  Philippe  III  avec  Elisabeth, 
fille  de  Henri  IV,  lancé  sur  la  scène  un  outrage  à  la  nation  voisine. 
L'emploi  de  Frances  s'explique,  je  crois,  autrement.  Aurélien  appa- 
raît pour  la  première  fois  dans  l'histoire  comme  tribun  de  la  sixième  lé- 
gion gallicane  ;  il  fut  décoré  par  Valérien  du  titre  de  restaurateur  des 
Gaules;  après  avoir  été  élevé  à  l'empire,  il  reconquit  la  Gaule  sur  Té- 
tricus  :  en  résumé,  il  eut,  dans  le  cours  de  sa  vie,  beaucoup  de  points  de 
contact  avec  le  pays  qui  devint  la  France.  Il  se  peut  que,  par  suite  d'une 
confusion,  Aurélien  ait  été  désigné  dans  quelque  compilation  de  vies 
d'hommes  illustres  comme  gaulois,  et  le  poète  espagnol,  qui  n'y  regar- 
dait pas  de  fort  près,  en  aura  fait  un  Frances.  En  tout  cas,  cet  adjectif, 
tel  qu'il  est  employé  dans  le  passage  en  question,  ne  saurait  être  pris  en 
mauvaise  part. 

La  traduction  du  monologue  de  Gines  (p.  40)  laisse  un  peu  à  désirer. 
Je  ne  m'explique  pas  d'abord  pourquoi  M.  P.  l'a  abrégé  en  omettant  de 
traduire  au  début  quelques  vers  dont  le  sens  pourtant  n'offre  pas  de  dif- 
ficulté ;  puis  le  passage  qui  commence  dans  le  texte  (p.  70)  par  Mas  de- 
vome  de  enganar  n'a  pas  été  bien  rendu  :  il  est  vrai  de  dire  que  la 
ponctuation  de  l'original  est  mauvaise.  Voici,  je  crois,  comment  il  con- 
viendrait de  traduire  littéralement  :  «  Mais  je  dois  me  tromper,  et  pour 
ce  qui  est  de  demander  le  baptême,  quand  je  serais  le  chrétien  lui-même 
qui  tente  de  se  sauver,  comment  pourrais-je  mieux  entrer  dans  le  rôle? 
Allons,  je  recommence  :  «  Saints,  demandez  à  Dieu,  puisque  je  me  dé- 
cide à  l'être  (saint)  ',  que  je  gagne  le  ciel,  par  votre  intercession.  »  Mais 
que  de  chimères  je  me  forge,  poussé  par  le  désir  de  réussir  à  jouer  ce 
rôle  de  chrétien,  comme  me  l'ordonne  l'empereur  »  ! 

Lorsque  Dioclétien  commence  à  témoigner  son  mécontentement  du 
désordre  qui  se  produit  sur  la  scène  à  la  suite  de  l'improvisation  de  Gi- 
nes, il  ne  s'écrie  point  :  «  Avez-vous  fait  remarquer  aux  comédiens  que 
je  suis  ici?  »  mais  bien  :  «  Avez-vous  fait  attention,  comédiens,  que 
c'est  moi  qui  vous  écoute  ?»  Et  le  même  Dioclétien,  en  condamnant  à 

1.  Régulièrement  lo  dans  serlo  se  rapporte  à  santo  contenu  dans  santos;  à  la  ri- 
gueur, on  pourrait,  comme  l'a  fait  M.  P.,  rapporter  lo  à  cristiano. 


204  REVUE   CRITIQUE 

mort  Gines,  ne  lui  dit  point  :  «  Je  terminerai  mon  rôle,  quand  Lentulus 
et  Sulpice  auront  arrêté  et  questionné  tous  ceux  qui  sont  avec  toi  », 
mais  :  «  Je  terminerai  mon  rôle  en  faisant  aussi  prendre  et  interroger  tes 
compagnons  par  Lentulus  et  Sulpice.  » 

Tout  cela  n'a  pas  grande  importance  et  n'empêche  pas  M.  Person 
d'avoir  parfaitement  atteint  son  but.  qui  était  surtout  de  commenter  sa 
fort  jolie  trouvaille  et  de  bien  établir  que  le  Saint-Genest  ne  doit  plus 
désormais  être  tenu  pour  l'œuvre  la  plus  originale  de  Rotrou,  mais  que 
cette  tragédie  procède,  comme  plusieurs  autres  pièces  du  rival  de  Cor- 
neille, de  l'inépuisable  répertoire  de  la  comedia  espagnole. 

Alfred  Morel-Fatio. 


186.  —  Faust,  ein  Fragment,  von  Gœthe  (Deutsche  Litteraturdenkmale  des  XVIII. 
Jahrhunderts  in  Neudrucken  herausgegeben  von  Bernhard  Seuffert,  v).  Heil- 
bronn,  Henninger.  In-8°,  xv  et  89  p. 

Ce  cinquième  volume  de  la  collection  des  Monuments  de  la  littéra- 
ture allemande  du  xvme  siècle  renferme  le  Faust  de  Gœthe,  sous  la 
première  forme  que  connut  le  public,  sous  la  forme  du  Fragment  paru 
en  1790.  M.  Seuffert,  le  directeur  de  la  collection,  a  publié  ce  Frag- 
ment avec  le  soin  et  l'exactitude  qu'on  lui  connaît  et  en  notant  à  la 
marge  le  chiffre  des  vers  correspondants  des  éditions  de  Loeper  et  de 
Schrôer.  Dans  l'introduction,  il  donne  l'indication  très  détaillée  des 
diverses  éditions  du  Fragment  qui  parurent  presque  en  même  temps, 
et  insiste  spécialement  sur  un  point  qu'il  est,  croyons-nous,  le  premier 
à  découvrir.  C'est  la  comparaison  entre  le  Faust  de  Gœthe  et  le  drame 
lyrique  de  Wieland,  Die  Wahl  des  Herkules ;  l'Hercule  de  Wieland 
est  une  sorte  de  Faust,  que  tourmente,  non  pas  la  soif  de  la  vérité, 
mais  l'amour  de  la  vertu;  il  brise  les  chaînes  de  l'amour;  il  s'efforce  de 
ressembler  aux  dieux,  etc.  M.  S.  fait  encore  d'autres  rapprochements 
entre  le  Faust  et  Musarion  et  montre  qu'on  peut  tirer  de  la  poésie  de 
Wieland  an  Psyché  d'utiles  renseignements  sur  les  parties  du  poème 
de  Gœthe  qui  étaient  terminées  à  la  fin  de  l'année  1775.  On  sait  que 
M.  Seuffert  prépare  une  Biographie  de  Wieland. 

C. 


VARIÉTÉS 



■  /Histoire  de  France  du  I»ère  Loriquet. 

On  s'occupe  beaucoup,  depuis  quelque  temps,  du  jésuite  Loriquet,  et 
la  fameuse  phrase  qu'on  lui  attribue  relativement  au  marquis  de  Bona- 
parte, généralissime  des  armées  du  roi  Louis  XVII I,  donne  encore  lieu 


d'histoire   et    DE    LITTÉRATURE  205 

à  de  nombreuses  discussions.  On  trouve  même  des  personnes  qui  croient 
se  souvenir  d'avoir  lu,  il  y  a  5o  ou  60  ans,  une  histoire  de  France  com- 
posée par  l'abbé  Loriquet,  dans  laquelle  était  la  phrase  en  question  ; 
mais  on  peut  affirmer  que  la  mémoire  de  ces  personnes  est  infidèle.  Les 
ouvrages  A  M  D  G.  sont  anonymes-,  et  un  jésuite  aussi  arrogant  que  le 
P.  Loriquet  n'aurait  jamais  consenti,  vers  1828  surtout,  à  se  laisser  ap- 
peler abbé.  D'ailleurs  Y  Histoire  de  France  de  Loriquet  existe;  c'est  un 
ouvrage  en  2  vol.  in- 12  de  400  et  378  pages  publié  à  Lyon  chez  Ru- 
sand,  et  l'histoire  de  Napoléon  s'y  trouve  racontée  au  chapitre  Empire, 
de  la  page  3o8  à  la  page  378  du  tome  II l.  Il  est  vrai  que  l'on  n'en  mon- 
tre pas  la  première  édition,  et  ceux  qui  croient  à  l'existence  de  la  phrase 
célèbre  disent  qu'elle  se  trouvait  dans  la  première  édition  de  l'histoire 
du  P.  Loriquet.  Je  crois  pouvoir  répondre  en  deux  mots  à  Cette  objec- 
tion, et  clore  le  débat  d'une  manière  définitive. 

L'Histoire  de  France  A  M  D  G.  fait  partie  d'un  Cours  d'histoire 
en  7  volumes  dont  voici  les  titres  :  I.  Tableau  chronologique,  1  vol. — 
IL  Histoire  sainte,  1  vol.  —  III.  Histoire  ecclésiastique,  1  vol.  — 
IV.  Histoire  ancienne,  1  vol.  —  V.  Histoire  romaine,  1  vol.  —  VI. 
Histoire  de  France,  2  vol.  V Histoire  ecclésiastique,  dont  j'ai  sous 
les  yeux  la  5e  édition,  n'a  pas  été,  comme  Y  Histoire  de  France,  «  re- 
vue, corrigée  et  augmentée  par  l'auteur  »  ;  elle  est  restée  ce  qu'elle  était 
au  début,  en  18 16.  Or,  il  est  question  dans  cette  Histoire  ecclésiasti- 
que, pp.  108  et  suivantes,  du  premier  consul  et  de  l'empereur  Napoléon, 
qui  se  proposait,  dit  Loriquet,  non  pas  a  d'égorger,  »  mais  «  d'étouffer  » 
le  christianisme  (p.  1 14).  Voici  même  en  quels  termes  Loriquet  raconte 
les  dernières  années  de  l'empire  : 

«  D.  Comment  se  termina  cette  longue  oppression? 

«  R.  Elle  se  termina  par  une  suite  d'événements  dans  lesquels  il  n'est 
«  pas  possible  de  méconnaître  la  main  de  Dieu. 

«  L'ambition  aveugla  Napoléon,  et  le  conduisit  jusqu'au  fond  de  la 
«  Russie,  où  sa  réputation  et  sa  puissance  restèrent  ensevelies  avec  plus 
«  de  400,000  Français  (18 12).  De  retour  en  France,  il  va  trouver  le 
d  pape  à  Fontainebleau;  car,  depuis  4  mois,  il  y  avait  fait  transférer  cet 
«  auguste  captif.  Ramené,  ce  semble,  à  la  modération  par  ses  revers,  il 
«  lui  proposa  un  accommodement.  Le  pape  déclare  ne  vouloir  traiter 
«  qu'à  Rome,  et  entouré  du  sacré  collège.  Cette  résolution  l'étonné  ; 
«  mais  bientôt  la  surprise  fait  place  à  la  colère,  puis  à  la  fureur  ;  il  éclate 
«  en  menaces,  il  outrage  le  pontife;  il  s'oublie  jusqu'à  lever  la  main  sur 
«  sa  personne  sacrée,  jusqu'à  le  saisir  par  les  cheveux.  Peu  après,  il  a 
«  honte  de  son  emportement,  il  revient  à  des  procédés  plus  doux;  il 
«  flatte,  il  caresse,  il  promet;  enfin,  moitié  ruse,  moitié  violence,  il 
«  amène  son  captif  à  signer  un  projet  qui  devait,  moyennant  certaines 

1.  J'en  ai  sous  les  yeux  deux  exemplaires,  l'un  de  1824,  l'autre  de  1828;  la  pagi- 
nation est  absolument  la  même,  et  tous  deux  portent  le  titre  de  5e  édition. 


206  REVUE    CRITIQUE 

«  conditions,  servir  de  base  à  un  nouveau  concordat.  Dès  que  l'impos- 
er teur  a  cette  pièce  entre  les  mains,  il  la  tronque,  il  la  publie,  contre  la 
«  foi  donnée,  il  la  présente  à  la  France  comme  un  concordat  absolu,  il 
«  l'érigé  en  loi  de  l'état.  Le  pape  se  hâta  de  protester  contre  la  perfidie  ; 
«  Napoléon  en  avait  assez  obtenu  pour  tromper  ceux  qui  voulaient  être 
«  trompés  (181 3). 

«  Il  s'applaudissait  de  son  triomphe,  et  il  était  sur  le  bord  de  l'abîme. 
«  L'Europe  entière  se  ligue  contre  lui;  tous  ses  alliés  l'abandonnent  à  la 
«  fois;  il  est  chassé  de  l'Allemagne,  de  l'Espagne,  de  la  Suisse  ;  ses  en- 
«  nemis  le  suivent,  et  sur  ses  pas  pénètrent  dans  l'intérieur  de  la  France. 
«  Il  pourrait  encore  les  désarmer;  on  lui  offre  la  paix,  il  la  refuse  :  livré 
«  à  un  esprit  d'erreur  et  de  vertige,  il  a  tout  perdu,  jusqu'à  ses  talents 
«  militaires.  Semblable  à  une  bête  féroce  entourée  de  chasseurs,  il  se  dé- 
«  bat  quelque  temps  avec  plus  de  fureur  que  d'intelligence.  Enfin  la 
«  main  de  Dieu  l'a  frappé,  il  succombe  :  il  se  voit  captif  dans  Fontaine- 
«  bleau,  dans  ce  même  palais  où  il  a  enchaîné  son  bienfaiteur  et  son 
«  père;  il  arrose  des  pleurs  du  désespoir  ces  mêmes  lieux  où  il  a  fait  coû- 
te 1er  celles  [sic)  du  vicaire  de  J.-C.  Relégué  dans  une  île  écartée,  il  survit 
«  à  sa  puissance,  pour  voir  l'univers  s'applaudir  de  sa  chute,  et  se  félici- 
«  ter  d'avoir  enfin  échappé  à  l'ennemi  de  Dieu  et  des  hommes  »  (1814), 
etc. 

Il  est  évident  que  les  deux  ouvrages,  l*  Histoire  ecclésiastique  et 
l'Histoire  de  France,  composés  sur  le  même  plan,  faisant  partie  de  la 
même  collection  et  publiés  à  la  même  époque,  racontent  les  événements 
d'une  manière  uniforme,  et  par  suite  que  la  première  édition  de  l'His- 
toire de  France  parlait  de  Napoléon  comme  empereur  des  Français. 
La  question  est  donc  Jugée  ;  mais  il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  le  P.  Lo- 
riquet  a  mérité  le  ridicule  dont  il  est  couvert  par  le  cynisme  avec  lequel 
il  a  travesti  l'histoire  '. 

A.  Gazier. 


CHRONIQUE 


ALLEMAGNE.—  L'auteur  du  dictionnaire  moyen-bas-allemand,  M.  A.  Lûbben,  a 
fait  paraître  une  grammaire  du  moyen-bas-allemand  (Mittelniederdeutsche  Gram- 
matik.  Leipzig,  Weigel.  In-8°,  vm  et  221  p.  b'  mark);  cette  grammaire  est  accom- 
pagnée d'une  chrestomathie  (pp.  1 35-200)  soigneusement  faite  et  dont  plusieurs 
morceaux  sont  tirés  des  manuscrits,  ainsi  que  d'un  petit  glossaire  (pp.  2o3-22i). 

-■i  La  librairie  Kûhl,  de  Berlin,  publie  une  réimpression,  soignée  par  M.  Max  von 
Waldberg,  du  roman  de  Lenz,  der  Waldbruder. 


1,  On  peut  voir  des  extraits  fidèles  de  V Histoire  de  France  du  P.  Loriquet  dans 
le  Dictionnaire  universel  du  xix*  siècle  de  Pierre  Larousse,  tome  VIII,  p.  744. 


d'histoire  et  de  littérature  207 

—  Le  IIIe  fascicule  du  recueil  trimestriel,  YArchiv  fur  Litteraturgeschichte,  qui 
paraît  à  la  librairie  Teubner,  de  Leipzig,  sous  la  direction  du  bibliothécaire  de 
Dresde,  M.  Fr.  Schnorr  von  Carolsfeld,  renferme  quelques  articles  intéressants  et 
curieux.  M.  Erich  Schmidt  contribue  à  ce  fascicule  par  quelques  glanures  (Lese- 
frùchte)  où  l'on  remarquera  les  notes  sur  «les  paysages  alpestres  dans  la  littérature  al- 
lemande »;  il  cite,  parmi  les  poètes  latins  du  xvie  siècle  qui  ont  parlé  des  Alpes,  non 
sans  un  certain  sentiment  de  la  nature,  G.  Sabinus,  le  gendre  de  Mélanchton  (IIe  li- 
vre des  Elégies,  Poemata.  Leipzig,  i58i,  p.  57),  P.  Lotichius  qui  célèbre,  avant  Hal- 
ler,  la  simplicité  des  mœurs  suisses,  Hans  Sachs,  Rompler  de  Lcewenhalt,  Jacob 
Balde.  —  M.  Wilhelm  Schulze  analyse  une  comédie  scolaire,  en  latin,  de  l'année 
1485;  elle  a  pour  auteur  un  nommé  Jean  Kerckmeister  et  pour  titre  Codrus ;  le  hé- 
ros de  la  pièce,  Codrus,  est  un  partisan  de  la  routine  et  de  la  vieille  grammaire 
«  mécanique  »;  quitté  par  ses  élèves,  qui  adoptent  avec  enthousiasme  les  nouvelles 
doctrines  de  l'humanisme,  Codrus  se  rend  à  Cologne  pour  y  conquérir  un  grade  aca- 
démique; il  tombe  entre  les  mains  des  étudiants  qui  le  bernent,  et  lui  décernent  un 
grade  illusoire.  —  M.  Goedeke  consacre  trois  pages  au  Trattfat^brief  de  Fischart. 
—  M.  Benno  Meklenburg  donne  des  renseignements  détaillés  sur  une  édition  de 
1657,  du  Fveundin  der  Noth,  de  Balthazar  Schupp,  que  M.  W.  Braune  n'a  pas  con- 
nue.—  M.  Theod.  Distel  communique  une  lettre  inédite  de  Leibnitz,  écrite  de  Leip- 
zig le  26  mars  1666  au  recteur  de  Zwickau,  Daum  (en  latfn).  —  L'art,  suivant,  de 
M.  Philippe  Kohlmann,  est  peut-être  le  plus  important  du  fascicule.  Parmi  les  ju- 
gements fort  singuliers  que  Frédéric  II  a  portés  dans  son  célèbre  factum  De  la  litté- 
ture  allemande,  se  trouve  l'éloge  suivant  d'un  poète  que  le  roi  ne  nomme  pas  :  «  J'a- 
jouteFai  à  ces  messieurs,  que  je  viens  de  nommer,  un  anonyme,  dont  j'ai  vu  les  vers 
non  rimes;  leur  cadence  et  leur  harmonie  résultait  d'un  mélange  de  dactyles  et  de 
spondées;  ils  étaient  remplis  de  sens,  et  mon  oreille  a  été  flattée  agréablement  par 
des  sons  sonores,  dont  je  n'aurais  pas  cru  notre  langue  susceptible.  J'ose  présumer 
que  ce  genre  de  versification  est  peut-être  celui  qui  est  le  plus  convenable  à  notre 
idiome,  et  qu'il  est  de  plus  préférable  à  la  rime;  il  est  vraisemblable  qu'on  ferait  des 
progrès,  si  on  se  donnait  la  peine  de  le  perfectionner  ».  On  a  toujours  cru  jusqu'ici, 
sur  la  foi  de  Knebel,  que  cet  anonyme  était  J.  Nie.  Gcetz  (1721-1781),  l'ami  d'Uz  et 
de  Gleim  et  que  le  poème  auquel  Frédéric  II  faisait  allusion  est  l'élégie  de  Gœtz  in- 
titulée Die  Mœdcheninsel.  M.  Kohlmann  émet  une  autre  hypothèse  qui  nous  semble 
plus  probante;  la  pièce  de  vers  louée  par  le  roi  de  Prusse  serait  un  poème  composé 
en  1751  par  Christophe  Frédéric  de  Derschau,  président  du  gouvernement  de  la 
Frise  orientale,  en  l'honneur  de  la  Compagnie  des  Indes  nouvellement  érigée  à  Em- 
den  (Aufdie  \u  Emden  in  Jahre  ij5i  errichtete  Ostindische  Handlungs-Compagnie). 
M.  Kohlmann  publie  intégralement  le  texte  de  ce  poème,  qu'on  trouve  dans  le  re- 
cueil des  poésies  de  Derschau,  paru,  sans  nom  d'auteur,  à  Aurich  en  1772  sous  le  ti- 
tre «  Andenken  fur  meine  Freunde  ».  Le  poème  comprend  3i  strophes,  chaque  stro- 
phe étant  formée  de  trois  hexamètres  (avec  la  «  Vorschlagssylbe  »  introduite  par 
Kleist)  et  d'un  dimètre  catalectique;  le  vers,  malgré  quelque  raideur,  ne  manque  pas 
de  souplesse  et  d'harmonie;  le  sujet  et  la  façon  dont  il  est  traité,  durent  faire  sur  le 
roi  une  certaine  impression.  Frédéric  H  s'intéressait  vivement  à  sa  province 
de  Frise  acquise  en  1744;  il  y  vint  deux  fois,  en  1761  et  en  1755,  et  ce  fut  en 
1752,  lorsque  le  premier  navire  de  la  Compagnie,  le  Kœnig  von  Preussen,  partit 
d'Emden  pour  la  Chine,  que  Derschau  composa  son  poème.  M.  Kohlmann  fait  re- 
marquer que  dans  un  journal  de  la  Frise,  les  Mannigfaltigkeiten  (n°  49,  p.  391), 
Coner,  d' Aurich,  inséra  en  1785  une  note  où  il  disait  que  les  mots  de  Frédéric  s'ap- 
pliquaient à  un  poème  de  1731  en  l'honneur  de  la  Compagnie  commerciale  d'Em- 


208  RKVUK     CRtTIQUK 

den.  —  Viennent  ensuite  des  art.  de  M.  Em.  Grosse  sur  la  critique  du  texte  d'Emi- 
lia  Galotti,  de  M.  L.  Hirzel  sur  un  écrit  oublié  de  Wieland  (Plan  einer  Privatschule), 
de  M.  R.  Kcehler  sur  une  lettre  inédite  de  Gœthe  au  poète  italien  Poerio  et  sur  les 
notes  de  Poerio  relatives  à  ses  relations  personnelles  avec  Goethe;  de  M.  P.  Hohl- 
feld  sur  les  Mères  dans  la  seconde  partie  de  Faust  (Goethe  aurait  suivi  sur  ce  point 
l'auteur  d'une  «  mathematische  Philosophie  »  parue  en  1811,  J.  J.  Wagner);  de 
M.  Bernh.  Seuffert  sur  Y Historischer  Kalender  de  Gœschen. 

—  Le  huitième  volume  des  «  Campagnes  du  prince  Eugène  »  {Feld^ûge  des  Prin- 
%en  Eugen  von  Savoy  en)  vient  de  paraître.  On  sait  qu'en  1871  le  ministère  de  la 
guerre,  en  Autriche,  résolut  d'entreprendre  une  grande  publication  qui  serait  con- 
sacrée aux  guerres  de  l'Autriche;  le  récit  devait  avoir  pour  base  les  documents  des 
archives,  et  commencer  à  l'époque  où  le  prince  Eugène  commandait  en  chef  l'armée 
autrichienne.  On  divisa  les  campagnes  dirigées  par  Eugène  en  deux  séries;  la  pre- 
mière série  comprenait  les  années  1697  et  1698  de  la  guerre  contre  les  Turcs  ainsi 
que  les  années  1 701-1707  de  la  guerre  de  la  succession  d'Espagne;  la  seconde  série 
embrassait  les  années  subséquentes  de  la  guerre  de  la  succession  d'Espagne,  la 
guerre  contre  les  Turcs  de  171 6  à  1718  et  la  guerre  de  la  succession  de  Pologne 
(1 734-1 735).  La  section  de  l'histoire  militaire  (Abteilung  fur  Kriegsgeschichte) 
des  archives  de  la  guerre  se  mit  à  l'œuvre  et  publia  successivement  huit  volumes. 
Le  premier,  paru  en  1876  (Vienne,  librairie  de  l'état-major  ou  Gerold  ;  in-8°,  xvi  et 
744  p.  3o  mark)  sert  d'introduction  aux  volumes  suivants;  il  décrit  la  situation  gé- 
nérale de  l'Europe  dans  la  seconde  moitié  du  xvn°  siècle,  expose  les  ressources  de 
l'empereur,  marque  le  caractère  de  Léopold  Ier  et  du  prince  Eugène  ;  on  y  trouve 
aussi  un  tableau  géographique  et  statistique  des  états  de  l'Europe,  une  description 
détaillée  des  différents  théâtres  de  la  guerre,  un  aperçu  général  des  forces  et  des 
moyens  d'action  de  chacune  des  puissances  qui  prirent  part  à  la  lutte;  on  y  voit 
quels  étaient  les  principes  de  la  tactique  en  usage,  le  système  des  fortifications,  les 
monnaies,  le  prix  de  tous  les  objets  servant  à  la  guerre.  Les  divers  chapitres  de  ce 
premier  volume  ont  évidemment  plusieurs  auteurs,  qui  ne  se  nomment  pas  ;  les 
volumes  suivants  ont  chacun  leur  propre  auteur.  —  Le  deuxième  volume,  paru  en 
1876  comme  le  premier  (ix,  5i5  et  io5  pp.  7  cartes  et  planches,  20  mark)  est  dû 
à  M.  le  major  von  Angeli,  et  renferme  les  campagnes  contre  les  Turcs  en  1697  et 
en  1698  ainsi  que  la  paix  de  Carlowitz  (1699).  —  Le  troisième  volume,  paru,  comme 
le  premier  et  le  second,  en  1876  (vu,  53 1  et  108  p.,  6  cartes  et  planches,  20  mark), 
ainsi  que  le  quatrième,  paru  en  1877  (x,  740  et  3o2  p.,  10  cartes  et  planches, 
3o  mark)  ont  pour  auteur -le  capitaine  Wetzer  et  racontent,  le  troisième  volume, 
l'année  1701  de  la  guerre  de  la  succession  d'Espagne,  le  quatrième,  l'année  1702.  — 
Le  cinquième  volume  (1878,  xxvn,  727  et  172  p.,  6  cartes  et  planches,  3o  mark)  a 
été  composé  par  M.  le  lieutenant  en  premier  Danzer  et  concerne  l'année  1703  de  la 
même  guerre;  —  l'année  1704  est  traitée  dans  le  sixième  volume  (1879,  xxiir,  908 
et  3oo  p.,  8  cartes  et  planches,  3o  mark)  par  M.  le  capitaine  Ratzenhofer;  —  et 
l'année  1705,  dans  le  septième  volume  (1881,  xxx,  555  et  542  p.  6  cartes  et  plan- 
ches, 3o  mark),  par  M.  le  lieutenant-colonel  de  Rechkron  ;  —  enfin,  le  huitième  vo- 
lume qui  vient  d'être  publié,  raconte  les  événements  militaires  de  l'année  1706 
(xiv,  526  et  342  p.,  7  cartes  et  planches,  3o  mark)  ;  il  a  été  commencé  par  le  lieute- 
nant-colonel Mayerhofer  von  Grûnbuhl  et,  après  la  mort  de  ce  dernier,  continué 
et  terminé  par  Je  lieutenant-colonel  Komers  von  Lindenbach.  Il  ne  reste  plus  qu'à 
faire  l'histoire  de  l'année  1707,  pour  achever  la  première  série  de  la  publication. 
Chaque  volume  forme  un  tout,  et  a  été  conçu  à  peu  près  sur  le  même  plan;  chacun 
commence  par  un  exposé  de  la  situation  politique  et  militaire  et  des  armements  des 


D'HISTOIRK  Kl     DE    UTTÉKATURK  209 

deux  partis  ;  chacun  raconte  la  guerre,  non  par  ordre  chronologique,  mais  selon  les 
divers  théâtres  de  la  lutte;  au  bas  des  pages  se  trouvent  de  courtes  notices  sur  les 
personnages  les  plus  remarquables  qui  figurent  dans  le  récit;  à  la  fin  du  volume 
sont  relégués  les  documents.  Le  critique  de  la  Deutsche  Litteratur^eitung  qui  doit 
être  un  homme  du  métier  et  qui,  sous  la  signature  l.  f.,  fournit  à  la  rubrique 
«  Kriegswissenschaft  »  de  la  revue  berlinoise  d'excellents  articles,  fait  un  très  grand 
éloge  des  volumes  parus  jusqu'ici  des  Campagnes  du  prince  Eugène.  Il  signale  tou- 
tefois quelques  défauts;  le  point  de  vue  autrichien  domine  trop  dans  la  publication; 
il  semblerait  que  l'intérêt  personnel  de  la  maison  de  Habsbourg  n'ait  jamais  été  un  des 
mobiles  de  la  politique  autrichienne  ;  la  caractéristique  de  Léopold  Ier  aura  surpris 
bien  des  Autrichiens  ;  la  bataille  de  Luzzara  est  tout  bonnement  une  «  défaite  »  des 
Français,  etc.  En  outre,  la  publication  a  trop  la  forme  d'un  monument  élevé  en 
l'honneur  du  prince  Eugène;  le  style  est  trop  souvent  celui  d'un  panégyrique,  et 
non  d'une  œuvre  d'histoire;  il  n'eût  pas  fallu  se  laisser  dominer  à  ce  point  par  1'  a  é- 
minente  personnalité  d'Eugène  ».  Mais  le  critique  reconnaît  que  la  publication  con- 
sidérable, entreprise  par  le  ministère  de  la  guerre  d'Autriche,  a  une  grande  valeur  ; 
l'honneur  de  l'avoir  conçue  et  lancée  revient  surtout  à  l'ancien  ministre  M.  de 
Kuhn,  et  les  officiers  qui  ont  collaboré  à  ce  grand  ouvrage,  méritent  la  reconnais- 
sance, non  seulement  des  «  cercles  militaires  »,  mais  aussi  des  amis  de  l'histoire. 

—  L'Université  de  Gœttingue  a  mis  au  concours  pour  l'année  i883  les  questions 
suivantes  :  i°  Faculté  de  théologie  :  Exponatur  celeberrima  Luther i  sententia,  «  ubi 
remissio  peccatorum  est,  ibiest  vita  et  salus  »,  ita  ut,  quce  ad  illam  illustrandam 
libri  symbolici  conferunt,  comparentur ;  20  faculté  de  droit  :  Sinn  und  Umfang  der 
Gleichstellung  von  lata  culpa  und  dolus  ïm  rœmischen.Recht ;  3°  faculté  de  philo- 
phie  :  Es  soll  durch  eine  sorgfœlhge  Vergleichung  der-Sprache  des  Mdlavikdgni- 
mitra  und  der  ùbrigen  dem  Kdlidâsd  ^ugeschriebenen  Werke  ge^eigt  werden,  ob 
oder  in  wie  weit  Zweifel  an  der  Autorschaft  des  erstgenannten  Werkes  begrûndet 
sind.  Les  mémoires  doivent  être  écrits  dans  la  même  langue  que  le  texte  du  sujet 
proposé. 

ANGLETERRE.  —  Un  nouvel  ouvrage  de  M.  Monier  Williams  paraîtra  pro- 
chainement sous  le  titre  :  Religious  thoughts  in  India.  Cet  ouvrage  sera  publié 
par  l'éditeur  Murray,  en  même  temps  qu'un  volume  de  sir  C.  Alfred  Lyall,  intitulé 
Asiatic  Studies,  religious  and  social. 

—  On  annonce  la  prochaine  publication  d'une  troisième  édition  de  l'Introduction 
to  the  New  Testament,  de  M.  Scrivener. 

—  M.  Furnivall  a  mis  sous  presse,  pour  1'  «  Early  English  Text  Society  »,  la  pre- 
mière partie  des  Earliest  english  wills  in  the  royal  court  of  probaie,  de  1387. 

—  La  première  partie  d'une  histoire  du  Norfolk  (Hisiory  of  Norfolk)  par  M.  R.-H. 
Mason  doit  être  bientôt  publiée;  elle  renferme  l'histoire  du  comté  jusqu'à  la  fin  du 
xvie  siècle. 

—  Parmi  d'autres  ouvrages  nouveaux  qui  paraîtront  prochainement,  nous  pouvons 
citer  encore  la  Short  histOry  of  french  literature  de  M.  Saintsbury  ;  la  Vie  de  lord 
Lawrence,  de  M.  Bosworth  Smith  ;  Sir  William  Hamilton  (série  des  «  philosophes 
classiques  »)  par  M.  J.  Weitch;  l'édition  des  œuvres  de  Lindesay  commencée  par 
M.  Herrtage  et  qui  sera  achevée  parle  bibliothécaire  de  l'Université  d'Edimbourg, 
M.  J.  Small  ;  la  traduction  des  Lois  de  Manou,  par  M.  George  Bûhler  (pour  la 
collection  des  a  Sacred  books  of  the  east  »);  une  Grammaire  anglaise,  de 
M.  Wrightson,  de  Cambridge. 

—  D'intéressantes  communications  seront  faites  dans  le  mois  de  décembre  à  la 
Société  philologique  de  Londres.   Le  prince  Louis-Lucien  Bonaparte  lira  deux  mé- 


210  RKVUK    CKlTlQUk 

moires  :  On  initial  mutations  in  the  celtic,  basque,  sardinian  and  italian  dialects  et 
on  the  successors  of  the  latin  J  ;  M.  Henry  Sweet  lira  également  deux  mémoires  • 
On  the  history  of  english  sounds  et  on  intonation  in  spoken  english;  M.  Thomas 
Powell  examinera  les  étymologies  celtiques  données  par  M.  Skeat  dans  son  Dic- 
tionnaire. On  cite  encore  d'autres  mémoires  :  de  M.  A.  J.  Ellis,  The  Dialects  of  the 
north  of  England  and  the  Lowlands  of  Scotland ;  de  M.  William  Jones,  On  en- 
glish words  in  the  Anglesea  Dialect ;  de  M.  Lach  Szyrma,  On  the  laws  affecting 
the  decay  ani  death  of  languages,  as  illustrated  by  the  old  cornish;  de  M.  Post- 
gate,  quelques  étymologies  grecques  et  latines,  etc. 

—  Nous  avons  annoncé  la  souscription  publique  en  faveur  des  fouilles  d'Ephèse. 
Le  meeting  qui  a  provoqué  cette  souscription  a  été  tenu  à  Londres,  le  24  juillet,  sous 
la  présidence  du  lord-maire  ;  M.  Wood  qui  a  dirigé  les  fouilles  d'Ephèse  pendant 
longtemps,  pour  le  compte  du  gouvernement  anglais,  assistait  à  la  réunion,  et  a  pro- 
noncé un  discours.  Il  a  raconté  les  recherches  auxquelles  il  s'était  livré  à  Ephèse  et 
qui  avaient  abouti,  après  six  ans  d'efforts,  à  la  découverte  de  l'emplacement  du  temple 
de  Diane.  M.  Wood  croit  qu'il  est  possible  de  retrouver  d'autres  restes  de  la  frise 
sculptée  et  des  colonnes  dont  on  voit  au  British-Museum  de  si  magnifiques  spéci- 
mens. Il  a  terminé  son  discours  en  se  mettant  entièrement  à  la  disposition  du  co- 
mité pour  la  continuation  des  travaux.  M.  Newton,  un  des  conservateurs  du  British- 
Museum,  a  pris  la  parole  après  M.  Wood  pour  appuyer  le  projet  de  souscription;  il 
a  rappelé  les  dépenses  faites  par  l'Allemagne  pour  les  fouilles  d'Olympie;  sur  sa 
motion,  l'assemblée  a  déclaré  la  souscription  ouverte  .--M.  Wood  ne  demande,  pour 
terminer  les  travaux  et  assurer  à  l'Angleterre  la  possession  des  trésors  enfouis  à 
Ephèse,  que  1 25, 000  francs.- 

BELGIQUE.  —  M.  Thonissen,  professeur  à  l'Université  de  Louvain  et  membre  de 
la  chambre  des  représentants,  a  mis  sous  presse  une  édition  revue  et  augmentée  de 
son  travail  sur  le  droit  pénal  de  la  loi  salique.  Nous  avons  déjà  reçu  un  exemplaire 
de  la  première  édition;  nous  attendrons  la  publication  de  la  deuxième  édition,  dont 
un  exemplaire  doit  nous  être  adressé,  pour  rendre  compte  de  ce  livre  important. 

—  Parmi  les  plus  récentes  publications  belges,  nous  signalerons  l'étude  de  M.  Eug. 
Hubert  sur  la  condition  des  protestants  en  Belgique  depuis  Charles-Quint  jusqu'à 
Joseph  II  et  l'édit  de  tolérance  de  1781,  et  deux  travaux  extraits  des  mémoires  et 
des  bulletins  de  l'Académie  royale  de  Belgique,  l'un,  de  M.  Paul  Henrard,  Jules-Cé- 
sar et  les  Eburons;  l'autre,  de  M.  Alphonse  Wauters,  le  premier  fascicule  des  Re- 
cherches sur  l'histoire  de  l'Ecole  flamande  de  peinture  dans  la  seconde  moitié  du 
xve  siècle. 

ESPAGNE.  —  On  annonce  de  Compostelle  à  YAcademy  que  Don  José  Flores  La- 
guna  est  parvenu  à  déchiffrer  et  à  arranger  la  musique  de  l'Hymne  des  pèlerins  fla- 
mands à  Santiago,  datant  du  xn°  siècle;  cette  hymne  sera  chantée  pour  la  première 
fois  après  plusieurs  siècles,  à  la  prochaine  visite  des  pèlerins  français. 

ETATS-UNIS.  —  Les  éditeurs  de  Boston,  Honghton,  Mifflin  et  Co.,  publieront  en 
automne  un  certain  nombre  d'ouvrages  intéressants,  parmi  lesquels  nous  relevons  : 
une  nouvelle  édition  des  œuvres  de  M.  Oliver  Wendell  Holmes  (en  six  ou  huit  volu- 
mes), revue  par  l'auteur;  une  nouvelle  édition  des  Œuvres  d'Hawthorne,  en  douze 
volumes,  avec  des  introductions  bibliographiques  de  M.  Lathrop  ;  un  recueil  de 
M.  Henry  Watterston,  intitulé  Wit  and  humour  of  the  South,  from  the  various 
humourists  of  the  last  half  century  ;  une  Vie  de  Fenimore  Cooper,  par  M.  Louns- 
bury  (fait  partie  de  la  collection  des  «  American  men  of  letters  »;  des  vies  de  André 
Jackson,  par  M.  G.  Sunmer,  de  Randolph  de  Roanoke,  par  M.  Henry  Adams,  de 
Thomas  Jefferson,  par  M.  Norse  (font  partie  de  la  collection   des  «  American  sta- 


O  HISTOIRK    ET    DE    LITTÉRATURK  2  11 

tesmen  »)  ;  une  édition  variorum  des  English  and  scotch  ballads,  en  huit  parties, 
par  M.  Child,  d'Harvard  Collège,  etc. 

—  Un  ouvrage,  en  deux  volumes,  de  M.  W.  R.  Plum.  sur  La  télégraphie  militaire 
pendant  la  guerre  civile  des  Etats-  Unis  doit  paraître  à  Chicago,  chez  MM.  Jansen, 
Macclurg  et  Co. 

—  Les  éditeurs  Harpers,  de  New- York,  ont  publié  un  volume  renfermant  sur  un 
côté  de  la  page  le  texte  anglais  adopté  par  les  réviseurs  du  Nouveau-Testament  et 
sur  l'autre  côté,  le  texte  grec  établi  par  MM.  Westcott  et  Hort  ;  M.  Ph.  Schaff  a  mis 
une  introduction  en  tête  du  volume. 

se  Dans  la  Princeton  Reviexv  recueil  américain  dont  nous  avons  donné  autrefois 
le  sommaire,  M.  Mac  Cosh  parle  de  VEcole  de  philosophie  de  Concord,  qui  semble 
destinée  à  exercer  une  grande  influence  philosophique  aux  Etats-Unis.  Concord  est, 
comme  on  sait,  un  village  de  trois  mille  habitants,  et  une  annexe  de  la  «  moderne 
Athènes  »,  Boston.  Le  nom  de  ce  village  est  associé  à  de  grands  noms,  à  ceux  de 
Hawthorne,  Margaret  Fuller,  Ripley,  Alcott,  Emerson.  Le  directeur  de  la  revue, 
The  journal  of  spéculative  philosophy,  M.  W.  T.  Harris,  a  récemment  quitté  Saint- 
Louis  pour  Concord  et  deviendra,  à  ce  que  croit  M.  Mac  Cosh,  le  leader  de  la  nou- 
velle école.  Cette  école  est  platonicienne  ;  parmi  ses  membres,  les  uns  adoptent  le 
christianisme,  comme  l'ont  fait  au  11e  siècle  quelques  platoniciens,  par  tendance 
philosophique;  les  autres,  au  contraire,  le  combattent,  comme  faisaient  les  néo- 
platoniciens d'Alexandrie  ;  d'autres  l'accommodent  à  leurs  goûts  et  en  font  une  religion 
universelle  qui  peut  contenir  toutes  les  autres  par  une  interprétation  suffisante; 
d'autres,  comme  les  néo-platoniciens,  croient  aux  influences  surnaturelles  et  au  spi- 
ritisme. —  Nous  avons  autrefois  annoncé  le  premier  numéro  d'une  revue,  The 
Platonist,  qui  paraissait  à  Saint- Louis;  dans  l'article  de  la  «  Princeton  Review  », 
M.  Mac  Cosh  observe  que  le  Platonist  penche  bien  plus  vers  le  néo-platonisme  que 
vers  la  doctrine  de  Platon  ;  les  plus  récents  numéros  renfermaient  des  traductions  de 
Proclus,  de  Jamblique  et  de  Porphyre.  —  La  Revue  philosophique  de  M.  Ribot  doit, 
au  reste,  publier  dans  un  de  ses  prochains  numéros  un  art.  d'un  de  ses  collaborateurs 
qui  a  visité  l'Ecole  de  Concord. 

ITALIE.  —  Le  folk-lore  est  plus  que  jamais  en  honneur,  en  Italie;  après  les  ou- 
vrages que  nous  ont  déjà  donnés  MM.  Comparetti  et  Pitre,  ainsi  que  M.  Gennaro 
Finamore  qui  a  publié  récemment  le  premier  volume  d'une  collection  de  traditions 
populaires  abruzzes,  voici  qu'on  lui  consacre  une  revue  spéciale.  Cette  revue  est 
YArchivio  per  lo  studio  délie  tradi^ioni  popolari,  dirigée  par  MM.  G.  Pitre  et  Sa- 
lomone  Marino;  elle  paraît  tous  les  trimestres  à  Palerme  chez  l'éditeur  L.  Pedone- 
Lauriel  (14  fr.  par  an  pour  tous  les  pays  de  l'Union  postale).  »  Les  récents  progrès 
de  la  mythologie  comparée  —  lisons-nous  dans  l'avis  aux  lecteurs  du  premier  fas- 
cicule —  et  de  la  démo-psychologie  (Demo-psicologia) ,  et  l'intérêt  croissant  pour  les 
traditions  populaires  font  désormais  sentir  le  besoin  d'une  re'/ue  dans  laquelle  les 
érudits  des  diverses  nations  trouvent  un  moyen  de  communiquer  ensemble  et  de 
faire  connaître  leurs  études  et  leurs  recherches.  h'Archivio  se  propose  de  mettre  en 
évidence  les  formes  différentes  de  la  littérature  orale  et  les  multiples  manifestations 
de  la  vie  physique  et  morale  des  peuples  en  général  et  du  peuple  italien  en  par- 
ticulier ;  outre  les  articles  originaux  sur  un  sujet  quelconque  de  la  science  que  les 
Anglais  nomment  folk-lore,  YArchivio  accueillera  des  nouvelles,  des  légendes,  des 
chants,  des  devinettes,  des  proverbes,  etc.  «  Le  premier  fascicule  s'ouvre  par  une 
lettre  de  M.  Max  Mûller  à  M.  Pitre  où  le  savant  orientaliste  et  mythologue  expose 
les  difficultés  de  l'entreprise  tentée  par  les  deux  directeurs  ;  viennent  ensuite  des 
art.  de  M.  Salom.  Marino,  Coutumes  des  paysans  siciliens;  de  M.  Pitre,  Nouvelles 


212  REVUE    CRITIQUE    D  HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

populaires  toscanes   et  les  Ciarauli,  croyances  populaires  siciliennes;  de  M.  Rein- 
hold  Koehler,  Pourquoi  les  hommes  ne  savent   plus  quand  ils  doivent  mourir;  de 
M.  Z.  Consiglieri  Pedroso,  Un  conte  populaire  de  l'Inde  portugaise;  de  M.  Fina- 
more,  Histoires  populaires  abru^es  en  vers;  de  M.  Th.  de  Puymaigre,  (en  français), 
Veillées  de  villages,  les  Dayemans  (c'étaient,  dans  l'ancien  département  de  la  Mo- 
selle,  des  espèces  de  colloques,   plus  ou  moins  rimes  ou  assonances,  qui   se  pro- 
duisaient au   retour  des  couairails  ou  veillées  d'hiver  ;  on  dayait  surtout  dans  la 
soirée  du  samedi)  ;  de  M.  Ant.  Gianandrea,  Proverbes  des  Marches  ;  deMme  Carolina 
Coronedi-Berti,  Proverbes  bolonais,  relatifs  à  l'agriculture  et   à  la    météorologie; 
de  M.  Joachin  Costa,  un  art.  en  espagnol,  intitulé  »  Influencia  del  arbolado  en  la  sa- 
biduria  popular  »;  de  M.  Gius.  Ferraro,  la  première  partie  d'un  art.  qui  a  pour  titre 
«  cinquanta  giuochi  fanciuileschi  monferrini  »  ;  —  le  second  fascicule  de  1'  «  Archi- 
vio  »  contient  des  articles  tout  aussi  intéressants  :  de  M.  Salom.  Marino,   la  suite  de 
ses  esquisses  sur  la  vie  privée  des  «  contadini  »  siciliens;    de  M.  Pitre,  la  suite  de 
ses  contes  ou  nouvelles  populaires  de  Toscane,   et  un  art.   curieux  sur   les  cris  des 
marchands  ambulants  [le  voci  dei  venditori  ambulanti);  de  M.  Finamore,  la  continua- 
tion de  ses  petits  poèmes  populaires  des  Abruzzes;  de  MM.  P.  Giorgi  et  Salom.  Ma- 
rino, des  chants  enfantins  et  noëls  de  la  Sicile  (antica  ninna-nanna  siciliana   del 
Santo.  Natale)  ;  de  M.  Mango,  des   «  poésies  populaires  enfantines  de  la  Calabre  »  ; 
de  M.  G.  Ferraro,  la  suite  de  ses  «  Cinquante  jeux  enfantins  du  Montferrat  »;  de 
M.   R.  Castelli,   Un  mythe  moderne  (légende  du  bandit  Catinella  de  Mazzara,  sur- 
nommé Salta-le-viti)  ;  de  M.  H.  Ch.  Coote,  l'origine  de  Cendrillon  (Cenerentola)  ;  de 
M.  F.  Liebrecht,  Le  conte  de  Satni-Khdmoïs ;  de  M.  J.  Leite  de  Vasconcellos,  Cou- 
tumes et  croyances  du  Portugal;  de  M.  Rodriguez  Marin,  un  jeu  enfantin,  nommé 
juego  de  las  chinas.  — Chacun  de  ces  deux  fascicules,  —  et  il  en   sera  ainsi  des  sui- 
vants —  renferme  des  Miscellanées  où  les  folkloristes  trouveront  plus  d'un  détail  in- 
téressant :  dans  le  Ier  fasc.  «  Remèdes  et  formules  contre  la  jettatura  (Sal.  Marino); 
«  Hérode  et  Hérodiade  dans  la  tradition  populaire   catalane  »  (Pelay  Briz),  et  dans  le 
1P  fasc.  «  Les  Zingari  en  Sicile  »  (Sal.  Marino),  «  Flamencos  e  Gachos  »  (Merucci), 
la  légende  de  Caïn  en  Sicile  »  (Guastalla),  etc.  etc.   Une  revue  bibliographique,  très 
étendue,  examine  les   plus  récents   ouvrages  relatifs  aux  choses  de  «  démopsycholo- 
gie »  ou  —  s'il  était  possible  de  neutraliser  ce  mot  —  de  démologie  ;  on  y  trouvera, 
pour  ne  parler  que  des  ouvrages  français,   le  compte-rendu  des  livres  suivants  :  Sé- 
billot,  La  littérature  orale  de  la  Haute-Bretagne;   Rolland,  La  faune  populaire 
de  la  France;  Th.  de  Puymaigre,   Romanceiro,  choix  de  vieux  chants  portugais 
et  chants  populaires  recueillis  dans  le  pays  messin;  Luzel,  Légendes  chrétiennes 
delà  Basse-Bretagne  ;  Maspero,  Les  contes  populaires  de  V  Egypte  ancienne.  Cha- 
que fascicule   de  1'  «  Archivio  »  se  termine  par  un  bulletin  bibliographique,  par  la 
nomenclature  des  publications  récentes  et  le  sommaire  des  articles  de  revues  relatifs 
au  folk-lore,  par  une  chronique  ou  suite  de  petites  nouvelles  (notifie  varie).  —  On 
juge,  par  le  résumé  que  nous  venons  de  faire,  de  l'intérêt  et  de  l'abondance  des  ren- 
seignements que  renferme  Y  Archivio  per  lo  studio  délie  tradi^ioni  popolari;  c'est 
une  des  revues  spéciales  les  mieux  composées  et  les  mieux  meublées  d'articles,  que 
nous  connaissions;  nous  lui  souhaitons  grand  succès  et  longue  vie,  et  n'hésitons 
pas  à  croire  qu'elle  trouvera  la  «  lieta  et  onesta  accoglienza  »  la  «  buona  riuscita  »  que 
lui  mérite  le  zèle  ardent  et  désintéressé   de  ses  directeurs  et  de  ses  rédacteurs,  qui 
comptent,  comme  dit  M.  Max  Mùller,  parmi  «  i  migliori  cultori  del  folk-lore  » 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 

Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23. 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

No  38  —  18  Septembre  —  1882 


eommnire  s  187.  O.  Loth,  Sur  la  vie  et  les  œuvres  d'Abdallah  Ibn-ul-Mutazz.  — 
188.  Hultsch,  L'Heraion  de  Samos  et  l'Artémision  d'Ephèse.  —  189.  Wieland, 
Hermann,  p.  p.  Muncker.  —  190.  Juste,  L'élection  de  Léopold  Ier,  d'après  des 
documents  inédits.  —  191.  Champion,  Philosophie  de  l'histoire  de  France. —  Va- 
riétés :  L'Itinéraire  de  Theodosius.  —  Chronique.  —  Académie  des  Inscriptions. 


187.  —  Ueber  Leben  und  Werkc  de»  «Abdallah  Ibn  ul  Illu'tazz  von  Otto 
Loth.  Stud.  Lingg.  Orientt.  Leipzig,  1882.  Hinrichs'sche  Bucchandlung,  pp.  vi,  75. 

Il  y  a  un  an  que  M.  Loth  est  mort  dans  toute  la  vigueur  de  sa  matu- 
rité, en  laissant  quantité  de  notes  et  de  matériaux  qui,  produits  au  jour, 
auraient  fait  honneur  à  leur  auteur  et  rendu  de  grands  services  à  la 
science.  Il  est  pénible  de  songer  à  la  masse  de  labeur  humain,  qui  se 
perd  ainsi  pour  la  société,  lorsqu'un  travailleur  intelligent  descend  subi- 
tement au  tombeau  sans  avoir  eu  le  temps  de  partager  avec  le  public  le 
fruit  de  ses  études.  En  vain  l'on  cherche,  au  moyen  des  feuilles  éparses, 
tracées  par  sa  main,  de  renouer  le  fil  de  ses  idées,  de  suivre  le  dédale  de 
ses  pensées  :  la  mort  a  brisé  le  lien  qui  les  rattachait  ensemble.  Cela  est 
d'autant  plus  regrettable,  que  chaque  savant  travaille  à  sa  manière  et 
apprend  à  sa  façon  ;  le  cachet  qu'il  imprime  à  ses  études  est  un  chiffre 
dont  lui  seul  a  le  secret.  Et  si  l'on  se  prend  à  réfléchir  au  nombre  de 
ceux  qui  ont  amassé  des  trésors  de  science  et  ne  laisseront  à  la  postérité 
que  quelques  bribes  de  leur  solide  savoir,  on  ne  peut  se  défendre  d'un 
sentiment  de  profonde  tristesse.  Nous  en  avons  un  exemple  sous  les  yeux  : 
c'est  Loth.  Nous  en  connaissons  d'autres  qui  se  sont  illustrés  par  plu- 
sieurs travaux,  mais  dont  les  cartons  —  et  plus  encore  la  mémoire  — 
sont  pleins  de  renseignements  aussi  exacts  qu'utiles,  de  recherches  pa- 
tientes et  laborieuses,  de  rapprochements  lumineux,  d'investigations 
fécondes.  Quand  leur  heure  sera  venue,  la  poésie  orientale  aura  à  dé- 
plorer la  perte  irréparable  de  ses  meilleurs  interprètes  :  j1ai  nommé  le 
Dr  Ahlwardt,  professeur  à  Greifswald,  et  M.  Sanior  Sachs.  Et  personne  ne 
saura  recueillir  leur  héritage,  personne  ne  sera  à  même  de  coordonner 
les  résultats  acquis  au  cours  d'une  longue  vie  bien  employée A  me- 
sure qu'on  avance  dans  le  chemin  de  la  science,  on  découvre  des  hori- 
zons nouveaux,  on  se  laisse  entraîner  par  le  charme  de  trouvailles  inat- 
tendues et  l'on  arrive  au  bout  de  la  carrière,  riche  d'expérience,  content 
de  la  route  parcourue,  plein  d'espoir  dans  l'avenir,  puis  vient  un  jour  où 
le  sang  se  glace  dans  les  veines,  et  tout  est  perdu  sans  retour.  Il  en  est 

Nouvelle  série,  XlV.  la 


214  REVUE    CRITIQUE 

de  même  de  M.  O.  L.,  dont  la  Société  orientale  d'Allemagne  entreprend 
à  présent  de  rédiger  les  œuvres  (avant-propos). 

.  Elle  a  commencé  par  éditer  sa  première  thèse,  qu'il  composa  sous  les 
yeux  du  professeur  Fleischer  à  l'âge  de  vingt-deux  ans,  et  à  laquelle  il 
mit  sans  cesse  la  main  jusqu'à  ce  que  la  mort  vînt  le  surprendre  au  mi- 
lieu de  ses  travaux.  Les  lecteurs  de  la  Revue  critique  (n°  du  7  juil.  82) 
savent  déjà  que  le  vénérable  M.  Fleischer  a  donné  sa  haute  approbation 
à  l'étude  sur  'Abdallah  Ibn  ul-Mu'tazz.  En  effet,  la  vie  de  ce  prince 
élégant  ne  laisse  pas  d'être  un  sujet  intéressant  pour  un  tableau  de  genre; 
et  L.  dépeint  avec  assez  de  verve  la  cour  des  Abbâsides,  où  la  barbarie 
de  l'Asie  Centrale  étendait  ses  ravages  comme  une  lèpre  hideuse  sur  la 
civilisation  brillante  des  Arabes;  où,  d'une  part,  le  despotisme  des  na- 
tions caduques  avait  subjugué  les  fils  libres  du  désert;  où,  de  l'autre,  la 
mollesse  d'une  vie  facile  s'alliait  à  la  rude  violence  des  hommes  élevés 
dans  les  camps;  où  l'élévation  de  l'esprit  marchait  de  pair  avec  la  bassesse 
du  caractère.  Au  milieu  des  crimes  et  des  débauches,  du  cliquetis  des 
armes  et  du  bruit  des  orgies,  nous  voyons  se  dresser  la  figure  pure  et 
délicate  d,(Abdallah  lbn  ul-Mu'tazz,  qui  paya  de  sa  vie  le  privilège  de  la 
clémence.  De  la  société  galante,  dans  laquelle  il  passa  ses  meilleurs  jours, 
nous  passons  dans  son  intimité,  et  nous  voyons  le  fils  des  Khalifes  polir 
des  vers  gracieux,  conter  fleurettes  et  anecdotes,  enseigner  l'art  de  bien 
parler  aux  gens  de  bon  goût.  Il  se  dégage  de  l'esquisse  de  L,  un  parfum  de 
poésie  et  de  sereine  philosophie  qui  enivre  le  lecteur,  et,  lorsqu'il  arrive 
au  bout  de  l'opuscule,  il  est  tenté  de  dire  :  «  Déjà  fini?  »  Toutefois,  on 
nous  permettra  de  regretter  de  ne  pas  trouver  dans  la  thèse  juvénile  de 
L.  l'exactitude  magistrale,  l'érudition  merveilleuse  qui  frappent  dans  les 
ouvrages  de  M.  Ahlwardt.  Loin  de  nous  l'idée  de  nous  attaquer  à  un 
mort  ;  nous  croyons  pourtant  qu'il  serait  bon  de  relever  quelques  points 
de  détail,  laissés  dans  l'ombre  par  Fauteur;  si  nous  nous  égarons  dans 
cette  voie,  nous  serons  reconnaissant  à  celui  qui  voudra  bien  redresser 
nos  erreurs. 

L.  n'a  pas  profité  des  renseignements  fournis  par  Maçoudi  sur  'Abdal- 
lah Ibn  ul-Mu'tazz;  il  y  aurait  rencontré  des  choses  intéressantes.  Ainsi, 
Maçoudi  raconte  au  t.  VIII  de  ses  Prairies  d'or,  p.  41,  qu'Ibn  ul- 
Mu'tazz,  exilé  à  la  Mecque  par  le  khalife  Mouhtadi,  ne  rentra  à  Samarra 
qu'en  256,  après  l'avènement  de  Moutamid.  Ceci  eût  renforcé  les  som- 
bres couleurs  du  tableau,  tracé  par  L.  à  la  p.  4  de  son  étude. 

Les  éditeurs  auraient  pu  supprimer  ses  conjectures  touchant  le  Kitab 
uz-Zahrah  (p.  41).  En  effet,  il  suffit  d'ouvrir  le  t.  VIII  des  Prairies 
d'or,  à  la  p.  25o  et  à  la  p.  254,  pour  se  convaincre  que  ce  livre  n'a  pas 
été  composé  par  Ibn  ul-Mu'tazz,  mais  qu'il  appartient  en  réalité  au  ju- 
risconsulte Abu  Bekr  Mohammed  el-Isbahani.  Hammer  n'a  pas  remarqué 
que  Maçoudi  avait  déjà  terminé  sa  notice  sur  Ibn  ul-Mu'tazz  et  passé  à 
l'examen  des  vers  d'un  autre  poète. 

Je  ne  sais  ce  qui  offusque  L.  dans  la  date  de  l'assassinat  du  vizir  el- 


d'histoire   et   de   LITTÉRATURE  2  I  5 

'  Abbas,  telle  qu'elle  est  donnée  par  Tabari  (v.  p.  29).  Maçoudi  (Pr.  d'or, 
t.  VIII,  p.  249)  n'en  connaît  pas  d'autre,  et  cependant  il  s'est  donné 
beaucoup  de  peine  pour  établir  une  chronologie  exacte  [ib.}  t.  IV,  p.  io5  ; 
t.  IX,  pp.  39  et  49)  ;  il  n'est  pas  probable  qu'il  se  soit  trompé  sur  la  date 
d'un  événement  qui  s'est  passé  de  son  temps.  D'ailleurs,  je  ne  vois  pas 
de  contradiction  entre  les  données  de  Tabari  et  de  Maçoudi  d'un  côté,  et 
celles  d'Ibn  ul-Athir  de  l'autre.  Ibn  ul-Athir  place  le  meurtre  le  20  rebi  I, 
qui,  en  l'an  de  l'hégire  296,  tomba  un  samedi.  Tabari  et  Maçoudi  disent 
qu'el-'Abbas  fut  tué  le  samedi,  alors  qu'il  restait  onze  nuits  du  mois  de 
rebi  I.  En  ne  perdant  pas  de  vue  que  la  nuit  précède  le  jour,  et  en  nous 
remettant  en  mémoire  que  le  mois  de  rebi  I  est  plein,  nous  défalquerons 
onze  jours  et  nous  trouverons  qu'au  vendredi  soir,  à  l'entrée  du  samedi 
20,  il  restait  onze  nuits  jusqu'à  la  fin  du  mois;  c'est  ainsi  qu'il  faut  sup- 
puter ces  nombres,  comme  il  est  facile  de  s'en  convaincre  d'après  les 
dates  données  par  Ibn  Djaubaïr  et  par  Maçoudi. 

Je  note,  en  passant,  que  Maçoudi  ne  place  pas  l'usurpation  d'Ibn  ul- 
Mu'tazz  immédiatement  après  l'assassinat  d'el-' Abbas  '  ;  il  la  recule  même 
de  vingt  années  entières,  comme  on  peut  le  voir  au  t.  IX  de  ses  Pr.  d'or, 
p.  47.  De  ce  dernier  passage  il  est  loisible  d'inférer  que  les  doutes  sou- 
levés par  L.  au  sujet  de  la  durée  du  khalifat  éphémère  de  notre  poète, 
ne  reposent  sur  aucun  fondement,  car  Maçoudi  lui  assigne  deux  jours  de 
règne  jusqu'à  sa  déchéance  ;  or,  le  jour  où  a  été  promulguée  sa  déchéance 
ne  saurait  entrer  en  ligne  de  compte,  à  moins  de  supputer  les  heures  de 
son  règne.  Mais  je  ne  me  charge  pas  d'accorder  Ibn  ul-Athir  avec  Tabari. 

J'ai  vu  plusieurs  fois  au  Caucase  des  hommes  danser  le  dastabend 
('Abd.  Ibn  ul-Mu'tazz,  p.  70)  sur  les  terrasses  des  maisons.  On  se  prend 
par  la  main,  on  fait  un  cercle,  un  des  danseurs  entonne  une  chanson 
turque  ou  persane,  qu'on  répète  en  chœur  en  se  balançant  du  haut  du 
corps  et  en  frappant  la  terre  en  cadence;  la  mesure  comporte  trois  temps, 
comme  notre  polka;  les  danseurs  font  deux  pas  en  avant,  puis  un  en  ar- 
rière, et  tournent  de  cette  façon,  accélérant  leur  marche  et  précipitant 
leur  chant,  jusqu'à  ce  qu'ils  arrivent  à  une  espèce  d'extase;  leur  visage 
grave  s'épanouit,  leurs  yeux  brillent,  leurs  jambes  vacillent,  leur  voix 
s'éraille,  et,  exténués,  à  bout  d'haleine,  ils  rompent  à  regret  le  cercle  qui 
les  retient  dans  son  sein  comme  s'il  avait  été  tracé  par  un  magicien. 

Il  me  semble  inutile  de  corriger  (p.  10)  awwalu-n-nâsi  en  awwalu 
insânin,  quand  nous  voyons  Moténabbi  se  permettre  une  licence  dans 
le  genre  de  kad%a-n-nâ$i  et  Abou'lala  ne  pas  craindre  de  dire  had\a-l- 
wara  (Chresth.  ar.  de  Sacy,  t.  III,  pp.  44  et  91).  De  même,  il  n'est  pas 

1 .  M.  B.  de  Meynard  a  eu  tort  de  faire  peser  l'assassinat  du  vizir  sur  la  conscience  de 
Muktadir  (Pr.  d'or,  t.  VIII,  p,  272);  il  faut  lire  Qutila  au  passif,  ce  que  j'infère  des 
paroles  de  Maçoudi  plus  haut  (pp.  248-249),  des  versions  citées  par  Loth  dans  sa 
brochure  (p.  29)  et  du  récit  d'Ibn  Etthiqthaqa  (v.  El-Fachri,  éd.  Ahlwardt,  p.  3 11), 
qui  emploie  exactement  la  même  tournure  sans  toutefois  se  ranger  à  l'opinion  de 
Maçoudi  concernant  l'avènement  au  trône  d'Ibn  ul-Mu'tazz. 


2l6  RKVUK    CRITIQUE 

avéré  qu'il  faille  (p.  18)  écrire  ala  tara  par  élif,  lam,  élif  en  substituant 
cet  élif  final  au  ya  du  ms.  ;  la  correction  pédante  des  grammairiens 
l'exige,  mais  les  anciens  mss.  hébraeo-arabes  les  plus  corrects  ont  sou- 
vent leya  au  lieu  de  l'élif,  ce  qui  montre  que,  dès  avant  le  xnie  siècle,  la 
prononciation  permettait  une  transmutation  pareille.  A  mon  sens,  il 
est  fort  intéressant  de  relever  ces  inexactitudes  orthographiques,  qui 
peuvent  jeter  une  grande  lumière  sur  l'histoire  des  transformations  suc- 
cessives, par  lesquelles  a  passé  la  langue  arabe. 

Une  inadvertance  du  correcteur  a  laissé,  à  la  p.  58,  tomber  le  teshdid 
du  mot  ^àdd,  mordre  (1.  7).  Plus  haut  (5e  1.)  le  mot  tashawwafat  n'a  pas 
le  sens  que  lui  prête  Loth  :  ce  àngstlich  emporschaute  »;  la  liqueur  géné- 
reuse monte  dans  le  bocal  et  paraît  aux  yeux  des  convives,  comme  une 
femme,  qui  se  montre  dans  ses  plus  beaux  atours.  L'expression  (6e  1.) 
watadayyaqat  katadayyuqi-l-1, adorai  n'a  pas  non  plus,  je  crois,  été 
rendue  avec  une  exactitude  satisfaisante  par  l'expression  «  und  Herzbe- 
klemmung  empfand  wie  die  Braut  »:  si  je  ne  me  trompe,  le  poète  a  voulu 
dire  que  le  vin,  versé  par  l'échanson,  frappe  les  parois  du  verre  et  sem- 
ble y  chercher  un  refuge,  comme  une  chaste  jeune  fille  se  soustrait  aux 
embrassements  et  se  serre  contre  le  mur  dans  sa  timidité  virginale.  Loth 
aurait  aussi  mieux  fait  de  ne  pas  rendre  lnluin  raxbin  (p.  56)  par  «  von 
frischen  Perlen  »  ;  ce  n'est  pas  de  la  fraîcheur  des  perles  qu'il  s'agit,  c'est 
de  leur  éclat  ;  ne  disons-nous  pas  une  pierre  de  la  plus  belle  eau  ?  Ibn 
ul-Mu'tazz  a  en  vue  des  perles  de  choix. 

11  ne  nous  reste  qu'à  faire  remarquer  que  la  note  (p.  55)  sur  dabbaqa 
(dont  le  sens  a  été  depuis  recueilli  par  Lane  dans  son  Dictionnaire)  té- 
moigne une  fois  de  plus  de  l'injuste  oubli,  auquel  le  dictionnaire  de 
Biberstein-Kazimirski  est  condamné  par  les  savants  étrangers  à  la 
France  :  dépouillé  de  tout  appareil  scientifique  et  privé,  par  là,  d'un  ca- 
ractère de  certitude  absolue,  il  n'en  est  pas  moins  précieux  à  cause  de  sa 
plénitude  relative  et  de  son  format  commode  pour  les  recherches  ;  on 
feint  nonobstant  d'en  ignorer  l'existence  ;  il  faut  espérer  qu'on  reconnaî- 
tra un  jour  les  services  rendus  par  cet  ouvrage,  à  la  fois  modeste  et 
utile. 

En  finissant,  nous  croyons  de  notre  devoir  de  signaler  les  passages 
des  Prairies  d'Or,  où  Maçoudi  fait  mention  d"  Abdallah  Ibn  ul-Mu'tazz  : 

II,  p.  147,  où  nous  assistons  à  une  polémique  entre  lui  et  un  poète 
persan,  au  sujet  de  la  préséance  d'Isaac  entre  les  enfants  d'Abraham;  il 
semble  ressortir  du  texte  :  «  il  composa  cette  qasidah  du  vivant  de  son 
adversaire,  or,  celui-ci  prolongea  ses  jours  au-delà  de  l'an  3oo  »  —  que 
Maçoudi  tient  à  faire  mourir  Ibn  ul-Mu'tazz  au  commencement  du 
ivc  siècle;  autrement  il  aurait  pu  se  contenter  de  la  date  du  poème  de 
son  antagoniste  (290  de  l'hégire).  La  traduction  des  3  vers  laisse,  je 
crois,  quelque  chose  à  désirer  ;  ne  vaudrait-il  pas  mieux  traduire  ainsi 
le  2ehémist.  du  1"  vers  :  «  Quel  est  donc  ce  malheureux,  dont  on  pou- 
vait verseï  le  sang  impunément?  »  la  fin  du  2e  vers  gagnerait  en  énergie, 


V>HIJ»IX)lKh     Kl     DK     LIlTKRAlUKfe.  217 

si  on  le  rendait  de  cette  façon  :  a  Et  si  vous  êtes  ses  fils,  eh  bien  ! 
quoi  }  ?  » 

VI,  i33.  'Abd.  Ibn  al-Mu't.  y  est  cité  comme  arbitre  des  convenan- 
ces, et  Maçoudi  s'appuie  sur  deux  de  ses  vers  pour  montrer  comment 
on  doit  se  tenir  en  bonne  compagnie. 

VIII,  41.  L'exil  à  la  Mecque. 

249-254.  Renvoi  à  l'Histoire  moyenne  pour  les  faits  relatifs  à  notre 
poète.  Puis  vient  une  appréciation  de  son  talent,  qu'Ibn  Khallikân  n'a 
fait  que  copier  mot  pour  mot  (v.  Loth,p.  5i).  Nous  lisons  ensuite 
3o  vers  de  la  facture  d'Ibn  ul-Mu't.  fort  bien  tournés  et  choisis  dans  des 
poésies  de  genres  divers,  entre  autres  deux  pièces  de  circonstance  en 
l'honneur  du  khalife  Moutaded,  qui  peuvent  servir  d'illustration  au 
récit  de  Loth  (p.  7  de  son  opuscule);  un  distique  à  l'adresse  de  la  fa- 
mille de  Suleiman,  qui  fournit  des  variantes  au  texte  adopté  par  Ibn 
Etthiqthaqa  dans  son  El  Fachri  (éd.  Ahlw.  p.  3o3,  Loth  Abd.  J.  ul- 
M'ut.,  p.  6)  :  au  lieu  de  «  ils  ont  rabattu  l'insolence  delà  fortune  à  mon 
égard  »,  Maçoudi  lit  «  ils  ont  enseigné  à  la  fortune  à  se  bien  comporter 
envers  moi  »  *;  un  extrait  de  l'ode  à  Ibn  el  Forât,  à  laquelle  Loth  fait 
allusion  dans  la  note  74,  p.  26,  et  de  laquelle  on  serait  en  droit  de  con- 
clure qu'Ibn  ul-Mu'tazz  lui  devait  une  certaine  dose  de  reconnaissance. 

VIII,  3io.  Maçoudi,  pour  donner  la  mesure  du  talent  d'un  poète 
qu'il  estime,  affirme  qu'il  n'est  pas  inférieur  à  Ibn  ul-Mu'tazz. 

392-394.  Poème  culinaire  d'Ibn  ul-Mu'tazz  en  i5  vers,  qui  servit  de 
menu  au  khalife  Mostakrl. 

IX,  47.  Maçoudi  donne  à  Mouktadir  21  ans  de  règne  sans  trouble  et 
fixe  l'usurpation  d'Ibn  ul-Mu'tazz  à  l'an  3 16,  après  quoi  il  fait  régner 
Mouktadir  jusqu'en  319  ;on  peut,  à  la  rigueur,  faire  concorder  ces  don- 
nées avec  la  biographie  d'Ibn  el  Forât,  telle  qu'elle  est  donnée  par  les 
Prairies  d'Or,  t.  VIII,  p.  272,  mais  elles  sont  en  contradiction  flagrante 
avec  les  autres  sources;  cf.  Loth,  pp.  29-37,  et  El-Fachri,  pp.  3i2-3i3, 
d'après  lequel  Ibn-el-Forat  serait  mort  déjà  en  3 12  3.  Wallah  'a'iam. 

David  Gûnzburg. 


188.  Ilernlon    und  Artemblon,  zwel    Tempelbauten    Ioniens  ein   Vor- 
trag  von  Friedrich  Hultsch.  Berlin,  Weidmann,  1881.  8°,  52  p.  1  mark  5o. 

L'auteur  de  cette  brochure  en  définit  nettement  le  caractère  :  c'est  une 
simple  exposition,  une  conférence  écrite  pour  une  solennité  scolaire  et 

1.  Il  faut  en  dire  autant  du  6e  vers  du  poète  persan,  p.  147,  1.  3. 

2.  Lisez  humu  sans  waw  (p.  252);  p.  253,  3"  v.,  corrigez  :  qad  t^anndka  'id\a 
djarëita,  etc.  ;  7e  v.  :  muhakkamun. 

3.  L'alphabet  latin  étant  fort  mal  adapté  à  la  prononciation  orientale,  nous 
avons  préféré  nous  en  tenir,  quant  à  la  transcription  des  noms  propres,  à  l'ortho- 
graphe des  éditeurs  de  chaque  ouvrage. 


2l8  RKVUE   CRITIQUH 

pour  un  public,  familiarisé  sans  doute  avec  l'antiquité,  mais  non  savant. 
Il  s'agit  seulement  de  faire  connaître  deux  sanctuaires  célèbres,  celui  de 
Héra  à  Samos  et  celui  d'Artémis  à  Ephèse  et  de  montrer  par  quelle  mé- 
thode la  science  arrive  à  en  restaurer  le  plan  et  l'aspect  général. 

M.  H.  commence  par  dire  quelques  mots  de  l'état  actuel  des  ruines. 
Celles  de  l'Héraion  sont  dans  un  état  lamentable  :  une  seule  colonne 
restée  debout  en  signale  l'emplacement.  M.  Hultsch  rend  justice  aux 
efforts  de  M.  Paul  Girard,  qui  en  187g,  étant  membre  de  l'école  d'Athè- 
nes, entreprit  des  fouilles  au  pied  de  cette  colonne,  mais  dut  malheureu- 
sement s'arrêter,  après  quelques  sondages,  devant  les  revendications 
exorbitantes  et  obstinées  des  propriétaires  du  terrain,  dont  les  fonds  mis 
à  sa  disposition  ne  lui  permettaient  pas  d'avoir  raison.  Il  put  cependant 
reconnaître  certains  détails  des  fondations,  marquer  la  place  de  quelques 
colonnes  et  prendre  plusieurs  dimensions  :  si  incomplètes  que  fussent 
encore  ces  données,  M.  H.  a  pu  en  tirer  parti. 

L'Artemision  d'Ephèseest  mieux  connu  grâce  aux  descriptions  plus  ou 
moins  précises  d'Hérodote,  de  Philon,  de  Pline,  grâce  aux  fouilles  pa- 
tientes poursuivies  par  M.  Wood  de  i863  à  1869,  grâce  enfin  aux 
relevés  faits  en  1871  par  MM.  Curtius  et  Adler. 

Pour  reconstituer  dans  leur  ensemble  l'Héraion  et  l'Artemision,  il  ne 
suffit  pas  de  coordonner  ces  divers  renseignements.  Le  plan  des  temples 
antiques  était  si  savamment  conçu,  les  rapports  des  différentes  parties 
avec  le  tout  étaient  si  réguliers  que,  pour  comprendre  toute  l'harmonie 
de  cette  architecture,  il  est  nécessaire  de  se  faire  une  idée  du  système  de 
mesures  employé  par  les  Grecs.  M.  H.  résume  à  ce  propos  les  études 
persévérantes  par  lesquelles  il  a  réussi  à  retrouver  les  principes  des 
mesures  antiques  et  en  particulier  des  mesures  grecques.  On  connaît  la 
compétence  de  l'auteur  de  la  Métrologie  grecque  et  latine.  Appliquant 
ces  principes  aux  sanctuaires  de  Samos  et  d'Ephèse,  il  en  explique  le 
plan,  l'ordonnance  générale,  les  proportions  et  termine  par  quelques 
mots  sur  la  décoration  des  temples  grecs  où  la  sculpture  et  la  peinture 
s'unissent  à  l'architecture  pour  en  rehausser  l'effet. 

Il  est  toujours  intéressant  de  voir  ainsi  un  homme  de  science  essayer 
de  faire  connaître  lui-même  au  public  les  résultats  de  ses  recherches  et 
ne  pas  laisser  ce  soin  à  des  vulgarisateurs  souvent  maladroits.  A  ce  point 
de  vue,  la  brochure  de  M.  H.  mérite  quelque  attention.  Elle  est  rapide- 
ment écrite  et  d'une  lecture  facile.  J'ajoute  qu'elle  est  pour  tout  le 
monde  utile  à  consulter,  grâce  à  la  peine  qu'a  prise  M.  Hultsch  d'y 
joindre  un  excellent  appendice,  riche  de  faits,  d'observations  et  de  notes 
bibliographiques.  \ 

Jules  Martha. 


D  HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE  21 9 

189.  —  Hermann,  von  C.  M.  Wieland.  (Deutsche  Litteraturdcnkmalc  des 
XVIII.  Jahrhunderts,  in  Neudrucken  hrsg.  v.  Bernhard  Seuffert).  Heilbronn, 
Henninger.  In-8°,  xxx  et  116  p.  1  mark  3o. 

Lorsqu'il  étudiait  à  l'Université  de  Tubingue,  Wieland  avait  envoyé  à 
Bodmer  un  poème  épique  dont  il  était  l'auteur  et  Arminius,  le  héros; 
Bodmer  le  félicita,  mais  Wieland  savait  bien  que  son  œuvre  avait  des 
défauts  ;  il  l'avait  composée  très  vite;  une  foule  de  vers  étaient  négligés, 
et  même  faux  ;  il  y  avait  dans  le  poème  un  nombre  incroyable  de  lon- 
gueurs et  de  redites  ;  il  eut  le  bon  sens  de  mettre  cet  Hermann  de  côté 
et  n'y  pensa  plus  (  i  j5 1  ).  Près  de  quatre  ans  après,  il  y  revint  pourtant  ; 
il  se  demandait  comment  un  poète  épique  devait  traiter  le  sujet  d'Armi- 
nius  ;  il  reprit  tout  un  passage  de  sa  première  élucubration  et  le  remania 
complètement.  La  même  année  (175 5)  parut  son  «  Ankundigung  einer 
Dunciade  fur  die  Deutschen  »  où  il  se  moquait  de  Gottsched  et  du 
disciple  chéri  de  Gottsched,  Schônaich,  l'auteur  d'une  épopée  intitulée 
«  Hermann  oder  das  befreite  Deutschland  »,  parue  en  iy5i  quelques 
mois  après  que  Wieland  avait  envoyé  son  essai  à  Bodmer.  A  la  suite  de 
cette  Ankundigung,  Wieland  publiait  une  dissertation,  sous  forme  de 
conversation  entre  plusieurs  amis,  sur  le  plan  d'une  future  épopée  qui 
célébrait,  comme  le  poème  de  Schônaich,  la  victoire  d'Armin  sur  les 
Romains  (de  là  le  titre  de  cet  appendice  :  Der  verbesserte  Hermann)  ; 
le  plan  exposé  par  Wieland  diffère  totalement  du  plan  adopté  par  lui 
dans  le  poème  communiqué  à  Bodmer.  On  pouvait  donc  croire  que 
Wieland  n'abandonnerait  pas  ce  sujet  qui  lui  tenait  à  cœur,  qu'il  allait 
retoucher  et  refondre  entièrement  son  premier  travail,  et  que  l'Allema- 
gne  posséderait  enfin  une  épopée  nationale,  bien  supérieure  à  celle  de 
Schônaich  ;  mais  Wieland  fut  détourné  par  d'autres  travaux,  il  laissa 
son  manuscrit  dans  les  mains  de  Bodmer  et  ne  le  revit  plus.  Toutefois, 
en  175 1  (i5  décembre),  Bodmer  avait  déjà  publié  dans  les  Freimùtigen 
Nachrichten  de  Zurich,  avec  force  louanges,  le  début  du  poème  et  un  pas- 
sage sur  l'amour  d'Hermann  pour  Thusnelda.  Mais  l'épopée  même  de 
Wieland  n'a  jamais  paru,  et  l'on  croyait  même  que  l'auteur  l'avait  dé- 
truite. Cependant  le  manuscrit  existait  encore  ;  Bodmer  l'avait  conservé 
dans  ses  papiers  qui  sont  aujourd'hui  à  la  Bibliothèque  de  la  ville,  à  Zurich. 
M.  Fr.  Muncker,  de  Munich,  reproduit  ce  manuscrit  dans  le  volume 
dont  nous  rendons  compte  et  qui  est  le  sixième  de  la  collection  des  mo- 
numents de  la  littérature  allemande  publiée  par  M.  Seuffert;  il  donne 
dans  le  texte  la  forme  définitive  que  le  jeune  poète  avait  adoptée,  et  au 
bas  des  pages  les  variantes,  les  termes  et  expressions  corrigés  par  Wie- 
land et  qu'on  peut  encore  lire  sur  le  manuscrit;  il  conserve  l'orthogra- 
phe de  l'auteur,  quoique  très  indécise  surtout  dans  les  noms  propres,  et 
la  ponctuation  quoique  souvent  superflue;  enfin,  il  a  fait  précéder  le 
texte  du  poème  des  fragments  déjà  imprimés,  soit  par  Bodmer,  soit  par 
Wieland  dans  le  verbesserte  Hermann.  L'introduction  est  digne  de 
grands  éloges  :  elle  renferme  non-seulement  l'histoire  de  cette  épopée 


220  REVUK   CRITlQUfc 

inédite  de  Wieland,  dont  les  plus  érudits  connaissaient  à  peine  le  titre, 
mais  une  fort  bonne  appréciation  de  l'œuvre,  de  ses  défauts,  de  son 
style,  etc.  ;  M.  Muncker  montre  que  l'influence  de  Klopstock  se  fait 
sentir  en  de  nombreux  passages,  dans  le  vers  comme  dans  les  expres- 
sions ;  il  indique  les  sources  que  Wieland  a  consultées  et  ses  erreurs 
historiques  et  géographiques  ;  il  insiste  sur  les  ressemblances  avec 
Lohenstein  et  prouve  que  Wieland  a  suivi  de  très  près  le  romancier  si- 
lésien  (Ier  et  IVe  livre  du  Grossmutiger  Feldherr  Arminius)  ;  il  marque 
au  passage  les  imitations  de  Virgile.  —  Le  prochain  volume,  ou  plutôt 
les  deux  prochains  volumes  de  la  collection,  renfermeront  les  «  Annon- 
ces savantes  de  Francfort  »,  de  l'année  1772. 

A.  G. 


igo.  —    L'élection    de    Léopold    Ier,  d'après  des  documents  inédits,  par  Th. 
Juste.  Bruxelles,  Muquardt.  1882.  In-8°. 

Le  nouveau  livre  de  M.  Juste  est  relatif  aux  négociations  qui  .eurent 
lieu  en  avril  et  en  mai  i83i,  entre  Londres  et  Bruxelles,  au  sujet  de  la 
candidature  du  prince  Léopold  de  Saxe-Cobourg  à  la  couronne  de  Bel- 
gique. Quatre  membres  du  congrès,  H.  de  Brouckere,  H.  Vilain  XIII, 
F.  de  Mérode  et  l'abbé  Defoere,  auxquels  se  joignirent  Jules  Van  Praet 
et  Devaux,  ce  dernier,  comme  membre  du  conseil  des  ministres,  allèrent 
s'aboucher  avec  le  prince  Leopold  et  plaider  en  même  temps  la  cause  de 
la  Belgique  auprès  des  représentants  de  la  France  et  de  l'Angleterre  à  la 
conférence.  M.  J.  publie  les  rapports  très  étendus  des  commissaires  bel- 
ges, en  y  ajoutant  quelques  lettres  particulières,  diverses  lettres  de  Jules 
Van  Praet  et  deux  dépêches  de  Devaux.  On  saura  gré  à  M.  J.  d'avoir 
recueilli  et  mis  à  la  portée  de  tous  ces  documents  inédits  qui  sont  de 
grand  intérêt;  on  lui  reprochera,  par  contre,  de  ne  pas  indiquer  l'origine 
de  ces  documents,  l'endroit  où  l'on  peut  les  retrouver.  En  lisant 
ces  dépèches  et  lettres  que  publie  M.  Juste,  on  est  frappé  du  ton 
plein  de  dignité  ferme  et  d'élévation  que  les  représentants  de  la  Belgique 
prenaient  dans  la  conférence  ;  ces  commissaires,  sans  expérience  politi- 
que, parlant  au  nom  d'un  état  à  peine  formé  et  que  menaçaient  les  en- 
nemis de  l'intérieur  et  de  l'extérieur,  avaient  foi  dans  la  justice  de  leur 
cause  et  dans  l'énergie  du  sentiment  national. 


191.  —  Edme  Champion.  Philosophie  de  l'histoire  de  France.  Paris,   Char- 
pentier. In-8°,  3o5  p.  3  fr.  5o. 

M.  Champion  s'est  proposé,  dans  cet  ouvrage,  de  dire  «  quelles  ré- 
flexions Jui  suggèrent  les  annales  de  son  pays  relues  à  la  lueur  d'un  jour 
nouveau  »  ;  il  tâche  de  «  dégager  de  la  masse  confuse  des  faits  les  points 


J  HISTOIKK    KT     L»K    LITTÉKATURR  221 

saillants,  les  traits  qui  lui  paraissent  essentiels  et  caractéristiques  »  (p.  2). 
Ce  n'est  donc  pas  un  livre  d'e'rudition  que  nous  avons  là;  l'ouvrage  de 
M.  C.  est  une  suite  de  considérations  et  de  raisonnements.  L'auteur  est 
républicain  ;  il  a,  dit-il,  dans  la  mesure  de  ses  forces,  lutté  dans  l'ombre 
pour  préparer  l'avènement  du  régime  actuel  et  il  écrit  maintenant  au 
milieu  des  dangers  de  la  victoire  (p.  3).  Il  aurait  voulu  que  la  royauté 
fût  abolie  par  la  Constituante  ;  ce  qui  aurait  évité  le  massacre  du  Champ- 
dé-Mars  et  les  journées  du  20  juin  et  du  10  août  ;  il  n'excuse  pas  cette 
assemblée  de  n'avoir  pas  déposé  Louis  XVI  à  la  fin  de  juin  179 1  (p.  3oo). 
Il  est  entièrement  hostile  à  l'Eglise;  il  pense  qu'il  faut  revenir  aujour- 
d'hui «  au  jugement  de  Voltaire  et  des  contemporains  mieux  informés 
et  plus  judicieux  qu'on  ne  croit  »  (p.  1 53)  ;  dans  un  chapitre  sur  les  hé- 
résies et  les  persécutions  au  moyen  âge,  il  s'élève  contre  «  le  despotisme 
pieux  »  plus  féroce  et  plus  énervant  que  le  despotisme  odieux  des  Cé- 
sars, qui,  «  au  nom  de  la  divinité,  s'en  allait  fouiller  dans  les  conscien- 
ces et  poursuivait  à  tout  prix  le  triomphe  d'un  dogme  incompréhensi- 
ble »  (p.  139).  Toutefois,  il  est  tolérant;  il  pense  avec  Voltaire  qu'il 
doit  être  permis  de  prier  Dieu  à  sa  mode  comme  de  manger  selon  son 
goût,  et  que  la  conscience,  comme  l'estomac,  doit  avoir  une  liberté  en- 
tière; «  observez  ce  précepte  en  89  ,  plus  de  constitution  civile  du  clergé, 
pas  de  prêtres  assermentés,  pas  de  consciences  froissées  ;  la  résistance 
change  aussitôt  de  caractère  ;  la  guerre  de  Vendée,  en  admettant  qu'il  y 
aurait  eu  une  Vendée,  n'était  plus  la  guerre  religieuse  que  nous  connais- 
sons »  (p.  290).  Les  meilleurs  chapitres  de  l'ouvrage  sont  consacrés  à  la 
Réforme,  à  l'établissement  du  pouvoir  absolu,  à  Louis  XIV,  à  la  prépa- 
ration du  xviue  siècle. On  aura  peine  à  croire  que  Louis  XIV  était,  comme 
ledit  M.  C,  dégagé  des  passions  religieuses;  en  tout  cas,  on  ne  peut 
tirer  cette  conclusion  des  «  excellentes  relations  »  de  ce  prince  avec  Ge- 
nève, et  «  qui  font  penser  à  celles  de  François  Ier  avec  les  protestants 
d'Allemagne  »  (p.  267).  En  résumé,  le  volume  de  M.  Champion  ren- 
ferme des  vues  intéressantes;  c'est  l'œuvre  d'un  homme  à  l'esprit  vif  et 
pénétrant,  qui  a  beaucoup  lu,  beaucoup  retenu  et  qui  sait  tirer  des  faits 
les  idées  qu'ils  renferment  ;  le  style  est  presque  toujours  sain,  agréable 
et  rapide. 


VARIÉTÉS 


B.'li  inêi'ati-e  de  Théodoslns. 

Dans  un  des  derniers  numéros  de  la  Revue  critique  (24  avril  1882), 
M.  Molinier  a  parlé  de  l'édition  du  De  situ  Terrae  Sanctae,  qu'a  donnée 
récemment  M,  le  Dr  Gildemeister.  Sans  entrer  dans  la  discussion  qui  s'est 
élevée  entre  ces  deux  savants  au  sujet  de  cet  opuscule,  je  voudrais  sou- 


2  22  hkvuk    CRITIQlih 

mettre  au  jugement  des  hommes  compétents  quelques  observations  qui 
m'ont  été  suggérées  par  la  lecture  de  l'itinéraire  de  Théodose. 

Je  ne  vois  pas  pourquoi  le  savant  professeur  de  Bonn  veut  reconnaître 
sous  le  nom  de  Ramusa  (p.  3o)  la  ville  de  Dagusa,  Dacusa  ou  Dascusa 
(v.  p.  29)  ;  bien  loin  d'être  inconnue,  la  ville  de  Ramusa  se  trouvait  dans 
le  district  d'Alep,  à  peu  de  distance  de  Kinesryn,  suivant  le  témoignage 
du  géographe  arabe  Yakut,  et  l'on  peut  trouver  quelques  renseignements 
à  ce  sujet  dans  la  Chr.  ar.  de  Sacy  III,  p.  1 1,  56,  5j, 

M.  Molinier  a  déjà  émis  son  opinion  sur  le  peu  de  valeur  que  présente 
l'hypothèse  de  M.  G. ,  touchant  la  patrie  de  notre  Théodose :1a  désignation 
de  l'arianisme  par  «  religio  Wandalorum  »  lui  semble,  à  bon  droit,  une 
raison  peu  concluante  pour  faire  de  Théodose  un  Africain  (cf.  De  situ, 
p.  23).  S'il  m'était  permis  de  hasarder  une  conjecture,  je  serais  plutôt  in- 
cliné à  attribuer  à  notre  auteur  une  origine  arménienne.  En  effet,  il  est 
assez  curieux  que,  dans  les  quelques  pages  de  son  petit  traité,  il  ait  trouvé 
moyen  de  citer  par  trois  fois  l'Arménie  :  p.  22,  «  inde  jam  est  Arme- 
nia  »  ;  p.  23,  «  de  monte  Armeniae  exeunt  flumina  duo  »;  p.  27,  «  in 
sinistra  Armenia  prima  et  secunda  Armenia  et  Persarmenia,  quae  Ar- 
meniae sub  imperatore  sunt  ».  On  voit  qu'il  s'en  occupe  spécialement. 
De  plus,  à  la  p.  3o,  nous  rencontrons  encore  l'Arménien  Abgar,  dont 
l'histoire  a  été  conservée  par  Eusèbe  et  amplifiée  d'après  les  sources  ar- 
méniennes par  Moïse  de  Khorène. 

A  la  p.,  22,  M.  G.  suppose  que  Théodose  a  mis  Cherson  en  Asie-Mi- 
neure. Est-ce  parce  qu'il  parle  tout  de  suite  après  de  Sinope  (de  Chersona 
usque  in  Sinope)  ?  Mais  le  patriarche  des  chroniqueurs  russes  qui,  lui, 
connaissait  bien  la  position  de  Korsun  (transcription  russe  du  nom  de 
Cherson),  n'en  agit  pas  autrement  :  «  André,  qui  enseignait  à -Sinope, 
étant  arrivé  à  Korsun,  apprit  que  l'embouchure  du  Dniepr  n'en  était  pas 
éloignée,  etc.  »  (Lietopis'  po  Lawrentiewskiemu  spisku,  Saint-Péters- 
bourg, 1872,  p.  7). 

M.  G.  renvoie,  à  ce  propos,  le  lecteur  aux  Actes  apocryphes  des  Apô- 
tres, édités  par  Tischendorff  (Leipzig,  i85 j).  Mais  dans  les  Actes  des 
saints  André  et  Mathieu  il  n'est  question  que  d'anthropophages  sans 
indication  de  lieu;  plus  loin,  dans  les  Actes  de  Mathieu,  la  ville  des 
anthropophages  où  ce  dernier  reçut  le  martyr  s'appelle  Myrne  [Acta  ap. 
Ap.,  pp.  173  et  189).  En  comparant  ce  qui  est  dit  à  la  p.  1 5  r  avec  le 
récit  de  la  p.  166,  on  est  amené  à  croire  que  l'auteur  ou  le  rédacteur  de 
ces  Actes  apocryphes  identifiait  dans  sa  pensée  l'endroit  où  Mathieu  avait 
été  délivré  par  André  et  l'endroit  où  il  confessa  plus  tard  la  foi.  Quant  à 
Théodose,  il  ne  songe  pas  à  Myrne  :  «  De  Chersona  usque  in  Sinope,  ubi 
dominus  Andréas  liberavit  dominum  Matthaeum  evangelistam  de  car- 
cere.  »  Usait  seulement  que  les  habitants  de  cette  Sinope  étaient  jadis 
anthropophages  et  avaient  dans  la  suite  changé  de  mœurs,  si  bien  que 
«  ut  ad  stratas  sedeant  peregrinis  suscipiendis  ». 

Or,  Strabon  savait  par  ouï-dire  que  les  Scythes  se  nourrissaient  de 


d'histoire   et   DE  LITTÉRATURE  223 

chair  humaine  [Géogr.,  i.  IV,  ch.  vi,  éd.  Didot,  p.  167:  1.  VII,  ch.  in, 
p.  248),  du  moins,  ceux  qui  habitaient  le  littoral  du  Pont-Euxin  (cf. 
la  légende  d'Iphigénie).  Quoiqu'il  en  soit,  Théodose  avait  en  vue  une 
ville  de  la  Crimée  ou  du  Caucase  occidental,  où  l'existence  de  l'anthro- 
pophagie est  attestée  par  le  témoignage  des  annales  géorgiennes,  des 
chroniques  arméniennes,  et  des  auteurs  qui  ont  fourni  à  Wakhoucht 
les  matériaux  de  son  travail  '.  Saint  André  a  visité  le  Caucase,  à  en  croire 
les  traditions  indigènes,  qui  le  font  voyager  à  Atsqour  et  Pitzounda  2. 

En  outre,  Théodose  prétend  que  Sinope  se  nommait  autrefois  Myrmi- 
ciona,  qu'il  est  difficile  de  ne  pas  rapprocher  de  Myrmikion  (prononcia- 
tion byzantine),  de  Strabon  et  des  autres  géographes  grecs,  qui  s'avançait 
sur  le  Bosphore  Cimmérien,  et  dont  les  ruines  ont  été  reconnues  par 
Dubois  de  Montpéreux,  lors  de  son  voyage  autour  du  Caucase  (t.  V, 
pp.  36,  io5,  137,  145,  23i;  t.  VI,  p.  166).  Du  reste,  Théodose  n'a  pas 
l'air  de  faire  erreur  et  semble  plutôt  indiquer  une  autre  Sinope  que  la 
colonie  de  Milet  :  «  Quae  Sinope  illo  tempore  Myrmiciona  dicebatur  »  ; 
par  conséquent,  c'est  une  ville  qui  peut  tout  au  plus  être  cherchée  en 
Crimée,  près  de  Kercz,  ou  sur  le  littoral  opposé. 

Il  n'y  a  rien  qui  doive  nous  effaroucher  dans  les  mots  :  «  inde  jam  est 
Armenia  »,  ou,  selon  une  autre  leçon  :  «  via  decurrit  in  Armeniam.  » 
Strabon  mettait  en  Arménie  les  sources  du  Kour  et  les  défilés  de  l'Aragwa 
(1.  XI,  ch.  m,  p.  429).  Dimichqi  place  même  Tiflis  dans  la  deuxième 
Arménie  {Cosmographie,  éd.  Mehren,  Saint-Pétersbourg,  p.  189). 
D'ailleurs  les  nations  caucasiennes  reconnaissent  entre  elles  une  certaine 
communauté  d'origine  et  se  prétendent  issues  des  frères  cadets  de  Haïe, 
père  des  Arméniens  ;  les  nations  kartweliennes  n'hésitent  pas  à  affirmer 
que  leur  langue  maternelle  a  été  l'arménien  jusqu'au  temps  où  la  fusion 
d'idiomes  divers  produisit  la  langue  géorgienne  {Hist.  de  la  Géorgie, 
par  Brosset).  Il  n'y  a  donc  pas  lieu  de  s'étonner  si  Théodose  recule  aussi 
loin  les  frontières  de  l'Arménie,  surtout  si,  comme  je  le  crois,  il  était  de 
ce  pays  dont  les  natifs  se  distinguent  par  un  patriotisme  excessif.  Dans 
ce  cas,  la  réputation  d'hospitalité  qu'il  fait  aux  arrière-neveux  des  an- 
thropophages n'est  pas  déplacée,  car  il  n'y  a  certes  pas  de  peuple  qui 
puisse  se  vanter  d'être  plus  hospitalier  que  les  habitants  du  Caucase. 

David  Gûnzburg. 


t.  Voy.  Histoire  de  la  Géorgie,  par  Brosset,  t.  I  de  la  ire  partie,  et  la  chron.  armén. 
place'e  en  tête  des  Addit.  et  Eclaire.  Voy.  encore  Géogr.  de  la  Géorgie,  par  le  Tsa- 
révitch Wakhoucht,  éd.  par  Brosset,  p.  9. 

2.  Hist.  de  la  Géogr.,  ire  partie,  t.  1,  pp.  57  et  60  ;  Dubois  de  Montpéreux,  Voy.  au- 
tour du  Caucase,  t.  II,  p.  335. 


224  RKVUB    CRITIQUE 

CHRONIQUE 


FRANCE.  —  M.  le  comte  de  Charencey  va  publier  à  la  librairie  Ern.  Leroux  des 
Mélanges  de  philologie  et  de  paléographie  américaines  ;  ce  volume  se  compose  de 
mémoires  détachés  et  ayant  paru  à  des  époques  diverses,  mais  se  rapportant  tous  à 
un  seul  et  même  sujet,  la  linguistique  américaine  et  spécialement  celle  de  la  Nouvelle 
Espagne.  Plusieurs  des  ouvrages  consultés  par  M.  de  Charencey  sont  restés  manus- 
crits et  lui  ont  été  communiqués  par  l'abbé  Brasseur,  de  Bourbourg.  Le  livre  se  ter- 
minera par  un  exposé  des  recherches  de  l'auteur  sur  le  déchiffrement  des  écritures 
dites  calculiformes  et  propres  au  Yucatan  et  aux  contrées  avoisinantes. 

—  L'auteur  de  la  Ville  et  du  Village  sous  l'ancien  régime,  M.  Albert  Babeau,  pu- 
bliera, avant  la  fin  de  l'année,  un  ouvrage  sur  la  Vie  rurale  dans  V ancienne  France, 

—  Dans  une  brochure  de  5o  pages  (Lons-le-Saulnier,  Declume.  In-8°),  notre  colla- 
borateur M.  Ulysse  Robert  publie  VEtat  des  monastères  franc-comtois  de  l'ordre  de 
Cluny  aux  xinc-xve  siècles  ;  les  textes  latins  qu'il  nous  donne  sont  des  procès-ver- 
baux de  visites,  tirés  d'un  volume  de  la  Bibliothèque  nationale  (coll.  de  Bourgogne, 
tome  LXXXII)  ;  ils  ne  témoignent  guère  en  faveur  des  mœurs  des  clunistes  dans  les 
monastères  de  la  Franche-Comté.  M.  U.  Robert  souhaite  de  voir  prochainement 
réunir  et  publier  tous  les  procès-verbaux  de  même  sorte  qui  sont  relatifs  aux  prieu- 
rés français  de  l'ordre  de  Cluny.  Nous  nous  associons  à  ce  souhait. 

—  Les  éditeurs  Féchoz  et  Letouzey,  de  Paris  (5,  rue  des  Saints-Pères)  préparent 
pour  le  «  Dictionnaire  des  anonymes,  »  de  Barbier  et  les  «  Supercheries  littéraires 
dévoilées  »  de  Quérard  :  I.  Des  additions  et  corrections  qu'on  pourra  ajouter  à  la  fin 
de  chaque  tome;  IL  Un  Supplément  en  deux  volumes;  III.  une  Table  générale.  Ils 
font  appel  au  concours  de  tous  les  bibliophiles  et  les  prient  de  les  aider  par  leurs  in- 
formations dans  la  tâche  qu'ils  ont  entreprise  et  que  nous  leur  souhaitons  de  mener 
à  bonne  fin. 

—  Une  nouvelle  édition  du  Glossarium  de  Du  Cange,  reproduisant  la  dernière 
édition  donnée  par  la  maison  Didot  avec  les  notes  de  Henschel,  paraîtra  chez  l'édi- 
teur de  Niort,  L.  Favre;  elle  comprendra  dix  volumes  qui  seront  publiés  en  cent 
fascicules. 

—  La  i"  livraison  du  tome  premier  de  Y  Histoire  générale  de  la  province  de  Quercy 
de  G.  Lacoste,  publiée  par  les  soins  de  MM.  L.  Combarieu  et  F.  Cangardel,  archiviste 
bibliothécaire,  a  paru  à  Cahors,  chez  Girma  (In-8°,  p.  i  à  40.)  L'ouvrage  formera 
huit  volumes  de  5oo  pages  chacun,  paraissant  en  livraisons  mensuelles  pendant  les 
années  1882,  t883,  1884.  Son  prix  sera  de  18  francs,  payables  :  6  fr.  par  an.  Les 
exemplaires  de  souscription  sont  tirés  sur  papier  vergé  teinté. 

—  Deux  volumes  nouveaux  des  Mémoires-journaux  de  Pierre  de  l'Estoile,  le  vo- 
lume IX  et  le  volume  X,  ont  paru  récemment  à  la  Librairie  des  bibliophiles  (In-8% 
438  et  427  pp.);  ils  comprennent  la  fin  du  Journal  de  Henri  IV,  de  1607  a  1610  ; 
le  tome  X  est  consacré  presque  entièrement  à  l'assassinat  du  Béarnais. 

—  Dans  la  notice  intitulée  Quelques  sculptures  de  la  collection  du  cardinal  de  Ri- 
chelieu, aujourd'hui  au  musée  du  Louvre  (Champion,  in-8,  16  p.),  et  qui  a  été  pré- 
sentée à  l'Académie  des  Inscriptions  par  M.  L.  Delisle  (séance  du  28  juillet),  M.  L. 
Courajod  détermine  l'origine  et  examine  la  valeur  critique  de  quatre  des  bustes  les 
plus  importants  de  nos  collections  :  Jean  de  Bologne,  Henri  II,  Charles  IX  et  Henri  III, 
qui  ont  fait  partie  de  la  galerie  du  cardinal.  M.  Courajod  considère  comme  moderne 
la  tête  de  Charles  IX,  qui  a  néanmoins  depuis  longtemps  les  préférences  du  public. 


0HIS1O1RKKÏ     DK    UTTKKATUKh  225 

—  Le  3e  fascicule  de  la  Revue  d'histoire  nobiliaire  et  d'archéologie  héraldique  ren- 
ferme des  lettres  inédites  de  Henri  IV  à  son  gentilhomme  ordinaire  Julien  de  Beau- 
repaire,  sieur  de  Pierrefitte  et  gouverneur  de  Saint-Maixent;  ces  lettres,  qui  vont  de 
i588  à  i5go,  sont  publiées  par  le  directeur  du  recueil,  M.  L.  Sandret. 

—  Le  second  volume  des  Mémoires  sur  la  vie  publique  et  privée  de  Claude  Pellot, 
conseiller  maître  des  requêtes,  intendant  et  premier  président  du  Parlement  de  Nor- 
mandie (16 ig-i683),  publiés  par  M..  E.  O'Reilly,  conseiller  à  la  cour  d'appel  de 
Rouen  (Rouen,  Cagniard;  Paris,  Champion.  In-8°,  753  pp.)  a  paru;  comme  nous 
l'avions  constaté,  en  parlant  ici  même  du  premier  volume,  ce  livre  donne  de  très 
instructifs  renseignements  sur  l'administration  et  la  justice  en  France  au  xvn"  siècle  ; 
Claude  Pellot  fut  l'ami  et  le  confident  de  Colbert,  son  parent  par  alliance,  et  c'est  des 
lettres  inédites  de  Pellot  au  grand  ministre  et  au  chancelier  Séguier  que  M.  0*Reilly 
a  tiré  les  matériaux  de  sa  publication. 

—  Dans  le  cahier  de  juin  du  Journal  des  savants  (pp.  363-37o),  M.  Gaston  Bois- 
sier  parle  du  volume  récemment  publié  par  M.  Aug.  Louis  Ménard,  sous  le  titre 
d' Œuvres  inédites  de  Bossuet.  Le  cours  royal  complet  sur  Juvenal.  M.  Boissier  pense 
qu'  «  il  suffit  de  parcourir  le  manuscrit  de  M.  Ménard  à  certains  endroits,  pour  qu'il 
soit  impossible  de  croire  qu'il  puisse  être  la  reproduction  exacte  des  paroles  de  Bos- 
suet à  son  élève.  Ce  n'est  pas  ainsi  que  Bossuet  formait  le  cœur  et  l'esprit  du  Dau- 
phin ».  Il  y  a  d'ailleurs  dans  le  manuscrit  des  contre-sens  «  qu'il  est  bien  difficile 
et  très  peu  respectueux  d'attribuer  à  Bossuet  »,  et  quant  aux  vers  de  la  dixième  sa- 
tire sur  Annibal,  dont  la  traduction  paraît  à  M.  Ménard  le  morceau  le  plus  parfait  de 
la  langue  française,  «  est-il  possible  d'attribuer  à  Bossuet  de  pareilles  platitudes?  » 
(Cp.  Revue  critique,  n°  7,  art.  43). 

—  Le  premier  volume  d'une  Bibliographie  des  œuvres  de  Voltaire  vient  d'être 
publié  par  M.  Georges  Bengesco. 

—  M.  Léon  Séché  prépare  un  ouvrage  où  il  se  propose  de  raconterai' Histoire  du 
jansénisme  depuis  la  Révolution  jusqu'à  nos  jours.  L'introduction  de  cet  ouvrage  a 
paru  dans  la  Paix  (n°*  des  18  et  19  août)  sous  le  titre  «  Les  derniers  jansénistes  »; 
cette  étude  montre,  dit  l'auteur,  par  des  exemples  tirés  de  nos  jours,  combien  les 
grandes  idées  sont  lentes  à  mourir  une  fois  qu'elles  sont  entrées  dans  le  cœur  des 
femmes. 

—  Parmi  les  nouvelles  éditions  de  classiques  français  qu'ont  fait  éclore  les  nou- 
veaux programmes,  nous  signalons  volontiers  la  bonne  édition  du  Cinna  de  Cor- 
neille, récemment  publiée  chez  Delagrave  par  M.  Félix  Hémon,  professeur  au  lycée 
de  Brest,  lauréat  de  l'Académie  française.  Le  texte  est  éclairé  par  d'utiles  et  solides 
réflexions  soit  littéraires,  soit  grammaticales;  M.  Hémon  a  «  puisé  à  pleines 
mains  »  dans  le  Lexique  de  M.  Marty-Laveaux  et  surtout  dans  le  dictionnaire  de 
Littré;  l'introduction,  d'un  style  élégant  et  aisé,  renferme  une  histoire  de  la  pièce, 
une  étude  des  caractères,  quelques  pages  fort  intéressantes  sur  la  façon  dont  Cor- 
neille a  modifié  les  données  de  l'histoire,  une  notice  sur  la  trop  fameuse  épître  à 
Montoron.  On  ne  peut  que  souhaiter  de  voir  se  multiplier  des  éditions  de  ce  genre, 
qui,  sans  tomber  dans  le  détail  superflu,  sont  destinées  par  de  savantes  et  ingé- 
nieuses notices,  par  un  commentaire  explicatif  nourri,  à  donner  à  la  jeunesse  de 
nos  écoles  la  véritable  intelligence  de  nos  grands  écrivains. 

—  M.  le  comte  Th.  de  Puymaigre  a  commencé  dans  le  Contemporain  la  publica- 
tion des  Souvenirs  de  son  père,  le  comte  Alexandre  de  Puymaigre  (1 789-1833); 
nous  comptons  que  ces  souvenirs  paraîtront  réunis  en  un  volume. 

—  L'ouvrage,  couronné  par  la  Société  archéologique  de  l'Orléanais,  de  Mlle  A.  de 
Foulques  de   Villaret,  sur  Y  Instruction  primaire  avant    178  g  à  Orléans  et  dans 


22Ô  RBVOh    CRITIQOK 

les  communes  de  V arrondissement ,  d'après  des  documents  inédits,  comprend  deux 
parties  :  I.  l'étude  des  établissements  d'instruction  qui  existaient  dans  les  vingt  pa- 
roisses de  la  ville  d'Orléans  et  les  cinq  paroisses  de  sa  banlieue  (avec  une  repro- 
duction d'un  plan  de  la  cité,  datant  de  1704).  II.  l'étude  des  écoles  rurales  (avec 
une  carte  scolaire  de  l'arrondissement  d'Orléans).  Le  travail  de  Mu*  de  Villaret 
est  accompagné  de  vingt  pièces  justificatives. 

—  Le  combat  du  cap  Ortegal,  livré  un  mois  après  la  bataille  de  Trafalgar  (4  no- 
vembre i8o5)  par  la  flotte  hispano-française  à  la  flotte  anglaise,  fut  à  la  fois  fu- 
neste et  glorieux  pour  nos  armes;  le  commodore  sir  John  Stracham  écrivait  aux 
lords  de  l'Amirauté  que  les  Français  avaient  combattu  d'une  manière  admirable  et 
ne  s'étaient  rendus  que  lorsqu'il  était  absolument  impossible  de  manœuvrer  leurs 
vaisseaux.  M.  GemjEhling  a  trouvé  dans  ses  papiers  de  famille  le  récit  détaillé  de  ce 
combat  naval;  c'est  une  lettre  écrite  par  son  père  le  Ier  décembre,  de  la  cale  d'un 
ponton  anglais,  à  Plymouth;  le  père  de  M.  Gemsehling,  embarqué  sur  le  Duguay- 
Trouin  et  qui  avait  déjà  pris  part  à  la  bataille  de  Trafalgar,  fut  un  des  héros  de  la 
malheureuse  quoique  honorable  affaire  du  cap  Ortegal.  M.  Gemaehling  fils  a  repro- 
duit le  récit  de  son  père,  après  en  avoir  contrôlé  l'exactitude  par  une  comparaison 
avec  les  rapports  officiels  déposés  aux  Archives  du  ministère  de  la  marine  {Combat 
du  cap  Ortegal,  \3  brumaire  an  xiv  [4  novembre  i8o5],  épilogue  de  la  bataille 
de  Trafalgar.  Chaix.  In-8°,  25  p.  et  10  planches). 

—  La  librairie  Hachette  vient  de  publier  sous  le  titre  De  Paris  au  Tibet  les  notes 
de  voyage  de  Francis  Garnier,  le  jeune  explorateur  et  conquérant  qui  prit  Hanoï  et 
s'empara,  dans  une  expédition  presque  fabuleuse,  de  tout  le  bas  Tonkin  en  moins 
d'un  mois.  Ces  notes  avaient  paru,  sous  le  même  titre,  dans  le  journal  le  Temps, 
du  3o  juillet  1873  au  i3  mars  1874;  elles  comprennent  quatre  parties  :  De  Paris  à 
Shang-Haï  (pp.  1-57);  De  Shang-Haï  à  Hankéou  (pp.  bg-83);  De  Shang-Hai  à 
Pékin  (pp.  85-155);  Une  excursion  de  trois  mois  au  centre,  de  la  Chine  (pp.  157-286). 
On  a  joint  à  ces  notes  un  mémoire  adressé  par  Francis  Garnier  à  la  société  de  géo- 
graphie de  Paris  sur  un  Voyage  dans  la  Chine  centrale  (vallée  du  Yang-T^u), 
pp.  289-361,  et  une  étude,  publiée  pour  la  première  fois  dans  le  n°  du  g  octobre 
1875  de  la  «  Revue  scientifique  »  sur  Le  rôle  de  la  France  dans  V extrême  Orient 
en  Chine  et  en  Indo-Chine  (pp.  365~4i6).  Le  volume  est  précédé  d'une  notice  sur 
Francis  Garnier  (pp.  i-xxxv)  ;  cette  notice  est  due  à  M.  Léon  Garnier  qui  annonce 
l'intention  de  faire  paraître  prochainement  une  étude  complète  et  très  développée 
sur  la  vie  et  les  travaux  du  regretté  lieutenant  de  vaisseau  ;  telle  qu'elle  est,  on  la  lira 
avec  intérêt,  aussi  bien  que  les  impressions  de  voyage  de  Garnier  dans  ce  monde 
oriental,  dont  —  disait-il  dans  une  lettre  à  M.  Hébrard,  —  nous  avons  tenu  jadis  les 
destinées  entre  nos  mains  et  où  il  dépend  de  nous  de  reprendre,  Dieu  aidant,  une 
situation  digne  de  la  France.  Garnier  voudrait  remplacer,  s'il  était  possible,  l'écriture 
hiéroglyphique  des  Chinois  par  les  caractères  latins;  le  temps  que  les  Célestes  em- 
ploient à  n'apprendre  qu'à  lire  imparfaitement  serait  gagné  pour  une  foule  de  no- 
tions qui  leur  feraient  voir  le  monde  sous  un  jour  tout  nouveau  et  leur  montreraient 
l'importance  des  relations  avec  les  autres  peuples;  aucune  révolution,  sauf  celle  que 
l'imprimerie  a  opérée  au  xvie  siècle,  ne  serait  comparable  à  celle-là.  Garnier  reconnaît 
le  bien  considérable  que  font  les  missions  catholiques;  mais  il  ne  croit  pas  à  la 
conversion  des  Chinois,  parce  que  le  Chinois  n'a  pas  le  sentiment  religieux  et  n'est 
accessible  qu'aux  considérations  d'intérêt  matériel;  il  pense  que  les  missionnaires 
ne  domineront  les  populations  chinoises  que  par  leur  supériorité  scientifique.  Les 
missionnaires,  dit-il  (p.  397),  arrivent,  armés  d'un  grand  savoir  théologique,  mais 
ignorant  l'histoire  et  les  moeurs  des  peuples  qu'ils  vont  évangéliser;  ils  sont  à  peine 


d'histoire  et  de  littérature  227 

plus  avancés  en  physique,  en  chimie,  en  cosmographie,  en  hygiène  que  les  Chinois 
eux-mêmes  ;  absolument  isolés,  manquant  de  livres,  ne  recevant  que  les  «  Annales 
de  la  propagation  de  la  foi  »  qui  racontent  leurs  travaux,  ils  se  chinoisent  au  bout 
de  quinze  ou  vingt  ans.  Garnier  propose  de  créer  à  Pékin  et  à  Shang-Haï  deux 
collèges  où  les  jeunes  missionnaires  trouveraient  tous  les  moyens  d'étude  aujourd'hui 
connus.  Mais  il  exige  des  missions  le  respect  absolu  des  lois  et  coutumes  chinoises; 
la  meilleure  politique  de  la  France  à  l'égard  de  la  Chine,  c'est  de  maintenir  et  d'a- 
méliorer les  traités  existants.  On  remarquera  encore  ce  que  dit  Garnier  de  la  création 
d'un  corps  de  traducteurs  interprètes,  et  de  l'admission  si  désirable  d'un  grand 
nombre  de  Français  dans  les  administrations  générales  de  la  Chine.  En  attendant, 
il  faut  mettre  en  relation  directe  la  Cochinchine  et  le  Céleste  Empire  par  le  grand 
fleuve  du  Tonkin,  le  Song-Coï  qui  descend  de  la  province  la  plus  méridionale  de  la 
Chine,  le  Yun-nan. 

—  M.  Dareste  de  la  Chavanne  (Antoine-Elisabeth-Cléophas),  né  à  Paris  le  25  oc- 
tobre 1820,  est  mort  à  Lucenay-les-Aix,  dans  la  Nièvre,  le  6  août.  Professeur  d'his- 
toire aux  lycées  de  Versailles  et  de  Rennes,  puis  au  collège  Stanislas,  puis  aux 
facultés  de  Grenoble  et  de  Lyon,  recteur  de  l'Académie  de  Nancy  (1872),  puis  de 
celle  de  Lyon  (1878),  mis  en  disponibilité  par  décret  du  8  décembre  1878,  M.  Da- 
reste de  la  Chavanne  était  l'auteur  des  ouvrages  suivants  :  Eloge  de  Turgot  (1846  ; 
Histoire  de  l'administration  en  F-ance  depuis  Philippe-Auguste  (1848);  Histoire 
des  classes  agricoles  depuis  saint  Louis  jusqu'à  Louis  XVI  (i853);  Histoire  de 
France  depuis  ses  origines  jusqu'à  nos  jours  (1865-1873,  t.  I-VIII)  qui  valut  à  son 
auteur  le  grand  prix  Gobert  en  1868.  Il  était,  depuis  187g,  correspondant  de  l'Aca- 
démie des  sciences  morales  et  politiques. 

—  Le  général  Ducrot,  qui  vient  de  mourir,  avait  publié  La  journée  de  Sedan  (1871); 
De  l'état-major  et  des  différentes  armes  (même  année);  La  vérité  sur  l'Algérie 
(même  année)  ;  Quelques  observations  sur  le  système  de  défense  de  la  France  (même 
année);  Guerre  des  frontières,  Wissembourg ,  réponse  à  l'état-major  allemand 
(1873);  La  défense  de  Paris  (1875-78,  en  quatre  vols.). 

—  On  trouvera  dans  le  Polybiblion  d'août  (pp.  166-168)  la  liste  complète  des  pu- 
blications du  P.  Jean-Xavier  Gagarin,  né  à  Moscou  le  Ier  août  18 14  et  mort  à  Paris 
le  19  juillet  de  cette  année.  Secrétaire  d'ambassade  à  Munich  et  à  Paris  —  il  connut 
dans  cette  dernière  ville  U.™  Swetchine  et  le  P.  de  Ravignan  —  il  entra  en  1841 
dans  la  Compagnie  de  Jésus,  fit  son  noviciat  à  Saint-Acheul,  professa  à  Brugelette, 
à  Vaugirard,  etc.  Nous  relevons  parmi  ses  ouvrages  les  suivants  :  Les  jésuites  de 
Russie,  1772-1785,  et  Religion  et  moeurs  des  Russes,  anecdotes  recueillies  par  le 
comte  Joseph  de  Maistre  et  le  P.  Grivel  (Ier  vol.  de  la  Bibliothèque  slave  elzévi- 
rienne  éditée  par  Ern.  Leroux). 

—  Notre  collaborateur  M.  Charles  Joret,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  d'Aix, 
a  été  chargé  d'une  mission  ethnographique  en  Danemark  et  en  Norwège. 

—  Une  thèse  française  récemment  soutenue  devant  la  Faculté  des  lettres  de  Ren- 
nes par  M.  l'abbé  Poulain  a  pour  titre  :  Duguay-  Trouin  et  Saint-Malo,  la  cité 
corsaire. 

—  Les  travaux  de  sculpture  nécessaires  pour  la  restauration  de  la  salle  du  Jeu  de 
paume  à  Versailles  sont  en  bonne  voie;  M.  L.  Olivier  Merson  a  été  chargé  de  faire 
le  tableau  représentant,  d'après  David ,  la  scène  fameuse  du  Serment;  la  salle  restaurée 
pourra  être  inaugurée  le  20  juin  1 883. 

—  L'agrandissement  de  la  bibliothèque  Carnavalet,  projeté  depuis  longtemps,  en- 
trera bientôt  en  voie  d'exécution  ;  il  consistera  en  un  corps  de  bâtiment  allant  dç 


228  RKVUK   f.U  ITtQtftk  » 

l'aile  où  est  située  la  salle  de  lecture  publique  à  la  partie  de  l'édifice  connue  sous  le 
nom  de  l'hôtel  des  Drapiers.  Cette  annexe  comprendra,  au  rez-de-chaussée,  une  con- 
tinuation des  pierres  tombales,  inscriptions  ou  autres  se  rattachant  à  l'histoire  de 
Paris;  au  premier  étage,  une  galerie  de  tableaux  et  de  gravures  du  vieux  Paris,  qui 
encombrent  en  ce  moment  les  salles  de  numismatique.  Ces  dernières  salles  seront 
mises  en  communication  avec  les  autres  parties  du  musée  et  ne  seront  ouvertes  au 
public  que  le  dimanche.  Le  musée  Carnavalet  s'enrichit,  d'ailleurs,  de  nouveaux  do- 
cuments. On  a  placé  dans  l'escalier  qui  conduit  à  la  bibliothèque  un  immense  plan 
de  Paris,  commencé  en  1704  et  achevé  en  1749  (levé  et  dessiné  par  Louis  Bretez, 
gravé  par  Claude  Lucas  et  écrit  par  Aubin).  La  galerie  consacrée  à  l'époque  révolu- 
tionnaire renferme  deux  statuettes  d'un  artiste  contemporain  de  cette  période  -.  Apol- 
lon républicain,  écrasant  le  fanatisme  et  l'ignorance;  Jupiter  républicain  foudroyant 
la  tyrannie.  Signalons  encore  douze  vues  du  cours  de  la  Seine,  signées  du  peintre 
Raguenet,  et  une  esquisse  peinte  représentant  l'apothéose  de  Marat  et  qui  est  attribuée 
au  peintre  David. 

ALLEMAGNE.—  M.  J.  Dielitz  publie  à  la  librairie  Starke,  de  Gœrlitz,  le  premier 
fascicule  d'un  Dictionnaire  alphabétique  des  devises,  cris  de  guerre,  etc.,  du  moyen 
âge  et  des  temps  modernes  (Die  Wahl-und  Denkspriiche,  Feldgeschreie,  Losungen, 
Schlacht-und  Volksrufe  besonders  des  Mittelalters  und  der  Neuçeit,  gesammelt, 
alphabetisch  geordnet  und  erlœutert.  In-40,  48  p.,  2  mark  40).  L'ouvrage  compren- 
dra dix  livraisons,  480  pages  en  tout. 

—  Nous  traduisons,  à  titre  de  curiosité,  le  compte-rendu  du  Deutsches  Litteratur- 
blatt  (n°  21,  19  août  1882)  sur  un  opuscule  de  M.  van  Santen  consacré  à  Wolfram 
d'Eschenbach;  l'auteur  de  l'article,  M.  Henri  Keck,  directeur  du  Litteraturblatt,  s'ex- 
prime ainsi  :  «  Depuis  les  jours  des  romantiques  les  histoires  de  la  littérature  répè- 
tent toujours  l'excessive  louange  de  Wolfram  et  surtout  de  son  P arrivai.  L'auteur  de 
ce  livre,  M.  Van  Santen,  prétend,  à  notre  avis,  avec  la  plus  entière  raison,  que 
Wolfram  a  été  plutôt  un  traducteur  qu'un  poète  original,  et  que  dans  ses  vues  mo- 
rales il  ne  s'élève  nullement  au-dessus  de  la  frivolité  welche  de  son  époque.  Nous 
saluons  cet  écrit  avec  joie,  parce  qu'il  contribuera  à  décider  la  question,  si  la  jeunesse 
de  nos  établissements  d'instruction  doit  être  introduite  dans  cette  littérature  du 
moyen  âge  qui,  même  en  ses  plus  brillantes  créations,  respire,  non  l'esprit  allemand, 
mais  l'esprit  welche,  et  par  là  cause  un  grand  dommage  au  point  de  vue  non  seule- 
ment esthétique  mais  moral.  » 

—  La  Gegenwart  a  publié  (numéros  3o  et  32)  des  extraits  de  lettres  inédites  d'A- 
lexandre de  Humboldt  à  son  ami  W.  G.  Wegener;  ces  lettres  sont  datées  de  Berlin 
et  deGœttingue  où  Alex,  de  Humboldt  suivit  les  cours  de  l'Université  (1788-1790); 
on  y  remarque  déjà  le  savoir  étendu  et  presque  universel  de  Humboldt,  des  obser- 
vations profondes  sur  la  botanique,  une  foule  de  détails  sur  la  philologie  ancienne, 
des  portraits  du  monde  universitaire  de  Francfort  sur  l'Oder  et  de  Gœttingue,  des  es- 
quisses intéressantes  de  la  société  de  Berlin. 

—  La  librairie  Langenscheidt  de  Berlin  a  publié  une  treizième  édition  de  l'excel- 
lent Dictionnaire  des  principales  difficultés  de  la  langue  allemande  de  M.  Daniel  San- 
ders  dont  la  Revue  êritique  a  rendu  compte  en  son  temps.  Cette  nouvelle  édition 
diffère  surtout  de  la  précédente  par  l'addition  d'un  Index  complémentaire  très  dé- 
taillé et  qui  rendra  les  recherches  plus  faciles. 

—  M.  R.  M.  Werner  doit  publier  prochainement  la  Correspondance  de  Nicolai  et 
de  Hamann. 

—  Au  i«r  octobre  YAllgemeine  Zeitung  aura  quitté  Augsbourg  et  se  publiera  désor- 
mais à  Munich. 


D'HiSTOIKK    Kl     DK    LITTÉRATURE  229 

ANGLETERRE.  —  M.  Max  Mûller  doit  publier,  en  un  volume,  les  conférences 
qu'il  a  faites  récemment  à  Cambridge,  ainsi  qu'une  nouvelle  édition  de  ses  Hibbert 
Lectures  et  de  son  Introduction  lo  the  science  of  religion. 

—  Trois  volumes  nouveaux  de  la  collection  des  «  Sacred  books  of  the  east  »,  diri- 
gée par  M.  Max  Mûller,  sont  annoncés  pour  paraître  prochainement  :  I.  La  seconde 
partie  des  «  Sacred  laws  of  Aryans  »,  renfermant  le  Vasishtha  et  le  Baudhâyana, 
p.  p.  G.  Bûhler;  II.  La  seconde  partie  des  «  Pahlavi  Texts  »,  renfermant  le  Dâ- 
ôistdni  Dînîk  et  les  «  Epistles  of  Mànûskihar,  p.  p.  E.  W.  West  ;  III.  La  seconde  partie 
des  «  Pâli  Texts  »,  conclusion  du  Mahdvagga  et  partie  du  Kullavaga,  p.  p.  Rhys 
Davids  et  Oldenberg. 

—  La  «  Clarendon  Press  «  doit  publier  bientôt  un  ouvrage  de  M.  Monro,  Gram- 
mar  ofthe  homeric  dialect. 

—  Sous  le  titre  de  Spinoza  Essays  paraîtra  à  la  librairie  Williams  et  Norgate,  un 
volume  renfermant  des  études  de  MM.  Land,  Van  Vloten  et  Kuno  Fischer,  traduites, 
sous  la  direction  de  M.  Knight,  par  M.  Menzies,  du  hollandais,  et  par  Miss  F. 
Schmidt,  de  l'allemand. 

—  M.  Mac  Crindle  publie  d'abord  dans  YIndian  Antiquary,  puis  à  part,  une  série 
de  petits  volumes  sur  l'Inde  ancienne  ;  c'est  ainsi  qu'il  a  fait  paraître  en  1877, 
YAnciènt  India  as  described  by  Megasthenes  and  Arrian,  et  en  1879  c  The  commerce 
and  navigation  of  the  Erythraean  Sea  »,  avec  un  appendice  a  Arrian' s  account  of 
the  voyage  of  Nearkhos  ».  Un  troisième  volume  a  paru  sous  le  titre  «  Ancient  India 
as  described  by  Ktesias  the  Knidian  ». 

ITALIE.  —  M.  C.  Paoli  nous  envoie  un  article,  tiré  à  part  de  1'  «  Archivio  storico 
italiano  »  et  consacré  à  la  mémoire  de  M.  Ch.  Fréd.  Stumpf-Brentano  et  de  notre  re- 
gretté Charles  Graux  ;  m  una  giovine  e  rigogliosa  vita  s'  e  spenta  in  Carlo  Graux.  La 
morte  l'a  a  colto  non  ancora  trentenne,  nell'  età  ch'  è  più  lieta  di  speranza  e  di  la- 
voro,  e  ch'  egli  aveva  già  cosi  bene  impiegata,  da  lasciare  dopo  di  se,  nella  scuola  e 
nella  scienza,  frutti  non  dimenticabili  d'operosità  di  dottrina  e  d'  ingegno  grandis- 
sime. Io  conobbi  il  Graux  fugacemente  in  Firenze,  e  ho  ancora  viva  nella  memoria 
quella  sua  fisonomia  intelligente  ed  aperta  e  la  squisitezza  dei  suoi  modi...  Di  lui 
sertsse  la  Revue  critique  le  seguenti  nobili  e  degne  parole,  colle  quali  mi  par  bene 
di  chiudere  questo  brève  ricordo  :La  Francia  in  Carlo  Graux  ha  perduto  non  sola- 
mente  un  sommo  scienziato,  ma  un  riformatore  e  ordinatore  efficace  délia  sua  cul- 
tura  superiore;  morendo  a  ventinove  anni,  egli  ha  lasciato  un  vuoto  che  non  sarà 
facilmente  riempito  ». 

—  Dans  un  mémoire  extrait  du  journal  musical  Boccherini  et  intitulé  «  Pourquoj 
les  Grecs  anciens  n'ont-ils  pas  fait  de  progrès  en  harmonie  »  {Perche  i  Greci  anti- 
chi  non  progredirono  nell'  armonia.  Florence,  Guidi.  In-8°,  71  p.),  M.  Baldassare 
Gamucgi  a  fait  sur  cette  difficile  question  d'utiles  et  ingénieuses  remarques;  il  in- 
siste particulièrement  sur  les  rapports  intimes  de  la  musique  grecque  avec  la  danse, 
et  la  définit  comme  imitative  et  analytique,  par  opposition  à  la  musique  moderne 
qui  serait  expressive  et  synthétique;  la  conclusion  du  mémoire  de  M.  B.  Gamucci, 
c'est  que  «  la  musique  des  Grecs  était  en  substance  l'imitation  artistique  des  inflexions 
de  la  voix  et  des  mouvements  rythmiques  exprimant  matériellement  les  diverses 
émotions  de  l'âme.  » 

—  La  correspondance  de  Gino-Capponi  doit  prochainement  paraître  à  Florence, 
chez  Le  Monnier,  par  les  soins  de  MM.  Carraresi  et  Guasti. 

—  D'après  certains  journaux,  la  municipalité  de  Rome  a  décidé  de  rappeler  par 
une  plaque  commémorative  en  marbre  que  Michel  Montaigne  a  habité  l'auberge 
delV  Orso;    une  inscription    sera  gravée. sur  cette  plaque;  en  voici  la  traduction  : 


2  3o 


RKVUE    CKITIQUE 


«  s.  p.  q.  r.  Dans  cette  ancienne  auberge  dell'Orso  demeurait  en  l'an  i58i  le  mora- 
liste français  Michel  Montaigne,  auteur  du  livre  des  sages,  qui  a  beaucoup  contribué 
au  progrès  de  la  philosophie.  Le  Sénat  de  Rome  lui  avait  conféré  le  droit  de  citoyen 
romain.  » 


ACADÉMIE  DES  INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  1 1  août  1882. 

M.  Hussenet,  médecin  aide-major,  écrit  de  l'île  de  Djerba  :  «  Les  fouilles  exécutées 
par  un  détachement  du  78e  de  ligne,  sous  la  direction  de  M.  le  lieutenant  Le  Hello, 
dans  les  ruines  de  l'ancienne  Menina,  ont  fait  découvrir  une  inscription  funéraire 
chrétienne,  provenant  d'une  basilique.  »  M.  Hussenet  adresse  à  l'Académie  une  co- 
pie et  une  description  de  ce  monument.  Le  tombeau  auquel  appartient  l'inscription 
est  formé  de  belles  dalles,  dont  une,  de  forme  pyramidale  tronquée,  porte  une  croix 
latine  et  aux  quatre  angles  un  chrisme  entre  l'A  et  l'Q.  L'inscription  est  en  partie 
effacée.  La  défunte  était  une  jeune  fille, puella,  nommée  Egnatia.  On  distingue  aussi  les 
formules  in  pace  et  in  mundo,  celle-ci  précède  l'indication  de  la  durée  de  la  vie  de  la 
jeune  fille,  avec  la  date  de  la  mort  et  celle  de  la  sépulture.  Les  noms  d'Egnatius  et  Egna- 
tia paraissent  avoir  été  répandus  dans  cette  contrée.  Celui  d'Egnatia  se  rencontre  dans 
une  autre  inscription  trouvée  à  Menina,  par  M.  Pellissier,  sur  un  piédestal  de  caryatide, 
celui  d'Egnatius  dans  une  inscription  païenne  de  la  vallée  de  la  Medjerdah,  décou- 
verte par  M.  Victor  Guérin,  etc. 

M.  Bergaigne  achève  la  lecture  de  son  mémoire  intitulé  :  les  Inscriptions  sanscrites 
du  Cambodge,  examen  sommaire  d un  envoi  de  M.  Aymonier,  par  MM .  Barth,  Ber- 
gaigne et  Senart  {rapport  à  M.  le  président  de  la  Société  asiatique).  L'envoi  de  M.  le 
capitaine  Aymonier  se  compose  des  calques  d'inscriptions  qu'il  avait  recueillis  pen- 
dant ses  premiers  voyages  au  Cambodge,  avant  la  mission  officielle  dont  il  est  ac- 
tuellement chargé.  Cet  envoi  comprend  cinquante-quatre  numéros,  formant  ensem- 
ble une  vingtaine  d'inscriptions.  Tous  ces  textes  sont  en  vers  sanscrits,  parfois  mêlés 
de  quelques  lignes  de  prose  cambodgienne;  la  plupart  sont  très  étendus;  l'ensemble 
équivaut  à  un  total  de  plus  de  quinze  cents  hexamètres.  Tous  sont  inédits,  sauf  un 
seul  fragment,  qui  était  déjà  connu,  mais  qui  est  aujourd'hui  complété  par  la  décou- 
verte des  autres  parties  de  l'inscription  à  laquelle  il  appartient.  Les  données  de  tout 
genre  que  renferment  ces  documents  dépassent  en  importance  celles  de  tous  les  tex- 
tes épigraphiques  de  Cambodge  publiés  jusqu'à  ce  jour. 

La  plus  ancienne  inscription  datée  qui  se  trouve  comprise  dans  l'envoi  de  M.  Ay- 
monier est  de  l'an  589  de  l'ère  çaka  ou  667  de  notre  ère.  Elle  fait  connaître  les  noms 
et  l'ordre  de  succession  de  cinq  rois,  Rudravarman,  Bhavavarman,  Mahendravarman, 
Içânavarman,  et  Iayavarman.  Une  autre  inscription  qui  ne  porte  pas  de  date,  est 
certainement  plus  ancienne  encore;  le  roi  sous  lequel  elle  a  été  gravée  était  un  fils 
du  second  des  princes  portés  sur  cette  liste,  Bhavavarman.  Ces  deux  textes,  intéres- 
sants par  leur  haute  ancienneté,  et  dont  l'écriture  présente  une  grande  ressemblance 
avec  celle  des  plus  anciennes  pierres  gravées  du  Dekkan,  seront  publiées  par  M.  Barth 
dans  le  Journal  asiatique. 

Les  inscriptions  qui  viennent  ensuite  sont  postérieures  a  celles-ci  de  plus  de  deux 
siècles.  Elles  font  connaître  les  dates  de  l'avènement  de  deux  rois,  Indravarman,  en 
797  çaka,  ou  875  de  notre  ère,  et  Yaçovarman,  son  fils,  en  81 1  çaka,  889  de  notre 
ère.  Ce  dernier  était  déjà  connu  par  une  inscription  de  l'an  8i5çaka,  découverte 
par  le  commandant  Doudart  de  Lagrée  et  publiée  par  le  lieutenant  Garnier  dans 
son  Voyage  d"1  exploration  en  Indo-Chine.  Les  inscriptions  d'Yaçovarman  envoyées 
par  M.  Aymonier  et  trouvées  par  lui  près  d'Angkor  présentent  un  double  intérêt, 
paléographique  et  historique.  On  y  rencontre  à  la  fois  deux  genres  d'écriture  diffé- 
rents, l'écriture  cambodgienne  ordinaire,  originaire  de  l'Inde  méridionale,  et  un  al- 
phabet hiératique  qui  paraît  provenir  de  l'Inde  du  nord.  Chaque  texte  est  écrit 
deux  fois,  en  caractères  du  Nord  et  en  caractères  du  Sud,  sur  les  deux  faces  de  la 
même  stèle.  Ces  textes  doubles,  dont  l'un  va  être  publié  prochainement  par  M.  Ber- 
gaigne, renferment  des  indications  généalogiques  qui  permettent  d'établir  la  succes- 
sion des  prédécesseurs  d'Indravarman.  Le  plus  remarquable  de  ces  princes  est  un 
Iayavarman,  qu'on  peut  appeler,  provisoirement,  Iayavarman  II,  et  qui  fut  le  chef 
d'une  branche  nouvelle.  Il  descendait  d'une  famille  de  rois  vassaux  et  changea  son 
premier  nom  de  Mahîpativarman  en  celui  de  Iayavarman  quand  il  devint  roi  su- 
zerain. Son  avènement  paraît  coïncider  avec  un  changement  de  capitale.  Iayavar- 
man II  fixa  sa  résidence  sur  le  mont  Mahendra,  près  d'Angkor  ou  à  Angkor  même, 
et  c'est  probablement  à  lui  qu'il  faut  attribuer  le  commencement  des  constructions 


d'histoire  et  DE  LITTÉRATURE  23 I 

dont  les  ruines  forment  ce  qu'on  appelle  aujourd'hui  «  le  groupe  d'Angkor  ».  Il  dut 
régner  vers  le  milieu  du  ixe  siècle  ;  en  effet,  il  eut  pour  gendre  Indravarman  dont 
le  règne  est  compris  entre  les  années  875  et  889  de  notre  ère.  Indravarman  ne  suc- 
céda pas,  du  reste,  immédiatement  à  son  beau-pere;  entre  eux  se  placent  trois  rois, 
Iayavarman  III,   Rudravarman  II  et  Prithivîndravarman. 

D'autres  inscriptions,  de  date  postérieure,  permettent  de  dresser  également  la  liste 
des  successeurs  des  rois  Indravarman  et  Yaçovarman,  jusqu'à  Harshavarman  III,  qui 
paraît  avoir  vécu  au  xue  siècle  de  notre  ère.  Des  inscriptions  des  années  973  et  988 
de  l'ère  çaka  (io5i  et  1066)  contiennent  des  récits  en  style  épique,  relatifs  à  des 
combats' livrés  à  un  ennemi  puissant,  peut-être  à  un  rebelle.  C'est  à  peu  près  le  seul 
renseignement  que  ces  textes  fournissent  pour  l'histoire  politique,  en  dehors  de  la 
généalogie  des  rois  et  de  la  chronologie  de  leurs  règnes.  On  y  trouve  plus  de  don- 
nées pour  l'histoire  religieuse.  Autant  qu'on  peut  en  juger  par  les  textes  étudiés 
jusqu'ici,  les  premiers  cultes  transportés  de  l'Inde  au  Cambodge  ont  été  celui  de 
Çiva  et  des  autres  divinités  brahmaniques.  Le  bouddhisme  ne  serait  venu  qu'après. 
Jusqu'à  présent,  le  premier  roi  dont  on  ait  des  inscriptions  bouddhiques  est  Ràjen- 
dravarman,  qui  commença  de  régner  en  866  çaka  (944  de  notre  ère). 


d'( 

santés  est  l'épitaphe  d'un  decurio  praeposit 

M.  Clermont-Ganneau  communique  quelques  détails  nouveaux  sur  les  résultats 
de  sa  mission  archéologique  en  Syrie  et  en  Palestine.  Aux  environs  de  la  ville  de 
Gezer,  il  a  trouvé,  à  plusieurs  endroits,  des  pierres  sur  lesquelles  était  gravé,  en  hé- 
breu, le  mot  limite.  Ces  pierres  servaient  à  indiquer  le  terme  du  chemin  qu'il  était 
permis  de  faire  le  jour  du  sabbat.  Au  mont  Carmel,  M.  Clermont-Ganneau  a  relevé 
un  fragment  d'inscription  votive,  qui  semble  provenir  d'un  temple. 

M.  Dieulafoy,  ingénieur  des  ponts  et  chaussées,  rend  compte  de  quelques-uns  des 
résultats  d'une  mission  archéologique  en  Perse,  qui  lui  avait  été  confiée  par  le  gou- 
vernement, et  dont  l'objet  était  l'étude  des  monuments  des  dynasties  achéménide  et 
sassanide.  Il  s'occupe  principalement  de  deux  monuments  situés  dans  la  plaine  du 
Polvar-Roud,  au  nord  de  Persépolis,  auprès  des  villages  actuels  de  Meched-Mouzzab 
et  de  Maderè-Soleïman.  On  a  voulu  voir  dans  ce  lieu  le  site  de  l'antique  Pasargade, 
où,  selon  la  tradition,  fut  enseveli  Cyrus.  M.  Dieulafoy  combat  cettte  opinion  et 
reconnaît  dans  la  plaine  du  Polvar-Roud  le  lieu  où  Cyrus  vainquit  les  troupes  d'As- 
tyage  son  grand-pere,  et  où  Cambyse,  son  père,  fut  tué  et  enseveli.  Cyrus  avait  com- 
mencé en  ce  lieu  la  construction  d'une  ville  dont  il  voulait  faire  sa  capitale.  M.  Dieu- 
lafoy lui  attribue  l'un  des  deux  édifices  dont  il  entretient  l'Académie,  celui  qui  porte 
le  nom  de  takht  Maderè-Soleïman  (trône  de  la  mère  de  Soleïman).  C'est  un  immense 
soubassement  de  pierres  colossales,  inachevé,  qui  rappelle  les  monuments  grecs  les 
plus  anciens,  tels  que  ceux  de  Ségeste  ou  de  Sélinonte,  et  qui  paraît  avoir  servi  de 
modèle  à  la  grande  terrasse  du  palais  de  Persépolis.  Quant  à  l'édifice  de  Meched- 
Mouzzab,  tour  carrée,  toute  semblable  aux  tombeaux  lyciens,  M.  Dieulafoy  pense 
que  c'est  la  sculpture  même  de  Cambyse.  La  capitale  que  Cyrus  voulait  fonder 
avait  dû  recevoir  le  nom  de  Parçakarta  (ville  des  Perses),  en  grec  Persépolis,  titre  ho- 
norifique qui  appartenait  à  toutes  les  capitales  et  qui  fut  transporté  plus  tard  à  la 
ville  fondée  par  Darius  à  trente  kilomètres  au  sud  de  celle  de  son  père.  C'est  ce  nom 
de  Parçakarta  qui  aura  été  confondu  par  les  Grecs  avec  celui  de  Pasargade,  et  cette 
confusion  a  donné  lieu  à  l'erreur  signalée  plus  haut. 

Ouvrages  présentés  :  —  par  M.  P.-Ch.  Robert  :  Aurès,  étude  sur  le  système  mé- 
trique assyrien;  —  par  M.  Pavet  de  Courteille  :  Colonna-Ceccaldi  (Georges),  Monu- 
ments antiques  de  Chypre,  de  Syrie  et  d'Egypte;  —  par  l'auteur  :  Desnoyers,  Rap- 
port sur  les  travaux  de  la  Société  de  l'histoire  de  France. 

Séance  du  18  août  1882. 

M.  de  la  Blanchère,  professeur  à  l'école  supérieure  des  lettres  d'Alger,  lit  un  mé- 
moire sur  les  Djedar,  monuments  qui  se  rencontrent,  au  nombre  de  dix,  divisés  en 
deux  groupes,  à  la  limite  des  hauts  plateaux  et  du  Tell,  sur  le  Djebel  Ladjdar  et 
aux  environs.  Ce  sont  des  pyramides  quadrangulaires,  reposant  chacune  sur  un 
soubassement  carré  de  pierre  de  taille.  On  y  pénètre  par  une  porte  pratiquée  dans 
la  façade  de  chaque  djeâar;  on  accédait  à  la  porte  par  une  avancée  de  laquelle  on 
jetait  un  pont  volant.  A  l'intérieur  est  un  système  assez  compliqué  de  galeries  et  de 
chambres,  celles-ci  fermées  par  des  pierres  que  l'on  fait  glisser  ou  rouler  dans  des 
rainures.  Les  dimensions  sont  variables;  les  pyramides  les  plus  grandes  sont  hautes 
de  34  mètres  et  larges  de  45.  Les  procédés  de  construction  sont  grossiers  et  révè- 
lent une  époque  de  décadence.  Dans  quelques  djedar,  on  a  trouvé  des  débris  enlevés 
à  des  monuments  antiques,  notamment  un  fragment  d'une  inscription  où  devait 
figurer  le  nom  de  Caracalla  :  ADIABENICVS-PARTHICVS-M.  L'ornementation 
intérieure  comprend  des  sculptures  et  des  restes  de  peintures,  d'une  exécution  très 
imparfaite;  on  y  voit  surtout  des  emblèmes  chrétiens,  analogues  à  ceux  qu'on  trouve 
dans  les  catacombes  les  plus  récentes  et  sur  les  monuments  des  Ostrogoths  et  des 
Lombards  en  Italie.  Le  tout  donne  lieu  de  penser  que  les  djedar  ont  dû  être  cons- 


232  REVUE    CRITIQUE    D'HISTOIRE    ET    DE  J-IJTÉR^IURK 

truits  du  ve  au  vn& siècle  de  notre  ère.  M.  de  la  Blanchère,  en  s'aidant  de  quelques 
données  fournies  par  les  historiens,  y  voit  les  tombeaux  des  princes  d'une  dynastie 
chrétienne  indigène,  qui  se  serait  établie  et  aurait  régni  en  Mauritanie,. à^la  faveur 
du  désordre  général,  pendant  tout  ou  partie  de  l'intervalle  compris  entre  la  chute  <Je 
la  domination  romaine  et  la  conquête  musulmane. 

M.  " 
et 

M.  de'Sarzec.  Développant  les  points  qu'il  avait  indiqi 
note  envoyée  précédemment  à  l'Académie,  M.  Heuzey  s'attache  à  établir  qu'avant 
l'époque  du  prince  dont  le  nom  a  été  lu  Goudea,  et  qui  gouvernait  la  ville  de  Sir- 
tella  (Tello)  en  qualité  de  gouverneur,  sans  doute  sous  l'autorité  et  au  nom  d'un  roi 
étranger  et  suzerain,  il  y  a  eu  une  dynastie  autonome,  dont  les  membres  ont  possédé 
cette  ville  en  pleine  souveraineté  et  ont  pris  le  titre  de  roi  et  non  celui  de  gouver- 
neur. Plusieurs  inscriptions  donnent  les  noms  et  les  titres  de  ces  rois  et  permettent 
de  dresser  (sauf  l'incertitude  qui  règne  toujours  sur  la  véritable  prononciation  des 
noms  écrits  en  caractères  cunéiformes)  une  première  liste  généalogique  de  trois 
noms  :  i°  Hal-Dou,  père  de  roi,  sinon  roi  lui-même;  2°  Our-Nina,  roi  de  Sirtella, 
fils  de  Hal-Dou;  3°  Kour-Gal,  roi  de  Sirtella,  fils  d'Our-Nina.  Au  temps  du  règne 
de  celte  antique  dynastie  correspond  une  période  archaïque  de  l'art  chaldeen. 
M.  Heuzey  met  sous  les  yeux  des  membres  de  l'Académie  divers  monuments,  sur 
lesquels  on  observe  les  caractères  qui  distinguent  cet  art  primitif  de  celui  des  épo- 
ques postérieures. 

Séance  du  25  août  1882. 

M.  Pascal  Duprat.  au  nom  du  comité  de  souscription  formé  pour  l'érection  d'une 
statue  à  Lakanal,  informe  par  lettre  l'Académie  que  la  statue  sera  inaugurée  à  Foix 
(Ariège)  le  7  septembre,  et  invite  la  compagnie  à  se  faire  représenter  à  cette  solen- 
nité. 

M.  Ferdinand  Delaunay  lit  un  mémoire  de  M.  Romanet  du  Caillaud,  avocat  à  la 
cour  d'appel  de  Limoges,  sur  l'origine  et  la  date  de  la  loi  romaine  connue  sous  le 
nom  de  lex  Julia  Norbana.  L'objet  de  cette  loi  était  de  rendre  valables  des  affran- 
chissements irréguliers  en  la  forme  et  qui  étaient  jusque-là  dépourvus  de  toute  va- 
leur légale;  mais,  en  accordant  la  liberté  aux  esclaves  affranchis  d'une  façon  irrégu- 
lière, la  nouvelle  loi  leur  refusait  la  qualité  de  citoyen  romain  et  créait  pour  eux  une 
condition  intermédiaire,  analogue  à  celle  des  Latins  des  colonies,  ce  qui  fit  qu'on 
donna  aux  esclaves  affranchis  en  vertu  de  cette  loi  le  nom  de  latins  juniens.  Les 
auteurs  qui  nous  font  connaître  l'objet  et  les  prescriptions  de  la  loi  Junia  Norbana 
n'en  indiquent  pas  la  date.  Comme  il  était  d'usage  de  donner  aux  lois  le  nom  des 
magistrats  qui  les  avaient  proposées  et  que  les  lois  étaient  le  plus  souvent  présentées 
par.  les  consuls,  on  a  toujours  pensé  que,  pour  trouver  la  date  de  la  loi,  il  fallait 
chercher  une  année  où  se  rencontrassent,  dans  les  fastes  consulaires,  les  noms  de 
Junius  et  de  Norbanus.  Jusqu'ici  on  hésitait  entre  deux  dates,  l'an  670  de  Rome 
(82  avant  notre  ère),  où  l'on  trouvait  un  consul  G.  Junius  Norbanus,  et  l'an  771  de 
Rome  (îq  de  notre  ère),  où  l'un  des  deux  consuls  s'appelait  M.  Junius  Silanus  et 
l'autre  L.  Norbanus  Flaccus.  M.  Romanet  du  Caillaud  présente  diverses  objections 
contre  ces  deux  solutions.  La  première,  supposerait  la  loi  antérieure  à  l'époque  où 
Cicéron  écrivit  ses  Topiques  ;  or,  dans  cet  ouvrage,  Cicéron  énumère  les  formes  par 
lesquelles  on  peut  affranchir  un  esclave  et  n'indique  que  celles  qui  étaient  en  usage 
avant  la  loi  Junia  Norbana.  L'autre  hypothèse  reculerait  la  réforme  à  une  date  bien 
tardive.  M.  Romanet  du  Caillaud  émet  une  hypothèse  nouvelle,  qui  consiste  à  ad- 
mettre que  la  loi  a  été  faite  en  deux  fois,  qu'elle  avait  été  votée  d  abord  sur  la  pro- 
position d'un  consul  Junius  et  qu'elle  fut  revisée  ou  amendée  plus  tard  sur  la  pro- 
fiosition  d'un  consul  Norbanus.  En  l'an  728  de  Rome  (24  avant  notre  ère),  les  consuls 
urent  l'empereur  Auguste  et  M.  Junius  Silanus;  l'année  suivante  (729-23)  Auguste 
fut  encore  consul  et  eut  pour  collègue  C.  Norbanus  Flaccus.  M.  Romanet  du  Cail- 
laud pense  qu'Auguste  fut  le  véritable  auteur  de  la  loi  en  question.  En  728,  il  la  fit 
présenter  par  son  collègue  le  consul  Junius;  en  729,  ayant  reconnu  la  nécessité  d'y 
faire  quelques  changements,  il  chargea  son  nouveau  collègue,  Norbanus,  de  les  pro- 
poser. La  loi,  amendée,  prit  à  la  fois  les  noms  du  magistrat  qui  l'avait  introduite  le 
premier  et  de  celui  qui  en  avait  présenté  la  rédaction  définitive. 

M.  Deloche  donne  une  seconde  lecture  de  son  Mémoire  sur  les  monnaies  frappées 
en  Gaule  au  nom  de  l'empereur  Maurice  Tibère. 

Ouvrages  présentés  ;  —  par  l'auteur  :  Hauréau,  les  Mélanges  poétiques  d'Hilde- 
bert  de  Lavardin; —  par  M.  Egger  :  Mélitopoulo,  Etude  sur  une  inscription  décou- 
verte au  Pirée;  —  par  M.  Delisle  :  Mûntz  (Eug.)  et  Faucon  (Maurice),  Inventaire  des 
objets  précieux  vendus  à  Avignon  en  i358  par  le  pape  Innocent  VI. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 

Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint -Laurent,  23 

■ 


REVUE    CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

N»  39  -  25  Septembre  —  1882 


Sommaire  s  192.  D'Arnim,  Les  prologues  d'Euripide.  —  193.  Alb.  Martin,  Le 
manuscrit  d'Isocrate  Urbinas  cxi  de  la  Vaticane.  —  194.  Héron  de  Villefosse  et 
Thédenat,  Cachets  d'oculistes  romains.  —  195.  Mary-Lafon,  Histoire  littéraire 
du  midi  de  la  France.  —  196.  Mangold,  Histoire  et  critique  du  Tartufe.  —  197. 
Le  Reineke  Fuchs  de  Gœthe,  p.  p.  Bieling.  —  198.  Lodge,  Histoire  des  colonies 
anglaises  d'Amérique.  —  199.  Theal.  Recueil  de  contes  cafres.  —  Chronique.  — 
Société  des  antiquaires  de  France.  —  Académie  des  Inscriptions. 


192.  —  J.  d'Arnim.  De  prologorum  Euripideorum  nrte  et  interpolatione. 

Dissertatio  inauguralis  philologica.  Greifswald,  1882.  In-8°,  108  p. 

M .  Jean  d'Arnim  a  consacré  sa  thèse  de  doctorat  à  l'étude  des  prolo- 
gues d'Euripide,  mais  il  n'a  pas  traité  sous  toutes  ses  faces  ce  sujet  at- 
trayant. 

A  la  fin  de  sa  dissertation,  dans  une  vingtaine  de  pages  d'un  latin  cor- 
rect, quoique  un  peu  lourd,  il  esquisse,  plutôt  qu'il  ne  développe,  les 
règles  auxquelles  Euripide  s'est  conformé  dans  les  prologues.  Ce  résumé 
est  généralement  exact,  et  M.  d'A.  a  bien  vu  que  toutes  ces  règles  se  ra- 
mènent, en  définitive,  à  une  seule,  celle-là  même  que  le  poète,  dans  les 
Grenouilles  d'Aristophane,  se  vante  d'avoir  scrupuleusement  suivie  »  : 

ETt'  OÙ*  £>vY)pOUV  OTl  TU/OIJ/.',  OuS'  £[J(.X£<jà)V  £ÇUpOV, 

'aXV  ou£i<*>v  xpumcxa  [ûv  \i.oi  to  févoç  six'  av  e56ùç 

tou  o"pà[jiaT0ç.... 

Exs'.t'  àxb  twv  TCpu)TO)v  èxwv  oùBsv  xap^x.'  av  àp^ov 
aXk'  ëXefsv  Y)  ^uvy)  té  jjloi  yù  SouXoç  oùBèv  ^ttov, 

X«  o"£cx6ty)ç  yjq  xap6évoç  y$  ^pauç  av.... 
En  d'autres  termes,  le  prologue  comprend  deux  parties  :  un  long  mo- 
nologue (icpooC|xiov)  destiné  à  instruire  le  public  des  faits  qui  se  sont  pas- 
sés avant  Faction  et  des  circonstances  dans  lesquelles  elle  s'engage,  et  un 
dialogue  qui  nous  montre  sous  leur  vrai  jour  les  sentiments  dont  sont 
animés  les  principaux  acteurs,  et  met  pour  ainsi  dire  en  présence  les 
deux  camps  dont  le  conflit  constitue  l'intérêt  dramatique  de  la  pièce. 
Quant  à  la  persona  xpoXofiÇouGa,  elle  est  toujours  choisie  dans  le  parti 
avec  lequel  le  poète  veut  nous  faire  sympathiser;  mais  comme  son  ex- 
posé doit  être  impartial,  ce  n'est  généralement  pas  le  héros  lui-même, 
surtout  s'il  est  dominé  par  des  passions  vives.  Quand  la  marche  de  l'in- 
trigue exige  que  les  personnages  soient  dans  l'ignorance  de  certains  faits, 


1.  Grenouilles,  vv.  945-950. 

Nouvelle  série,  XIV.  .      i3 


234  RKVUK    CRITIQUE 

Euripide,  qui  ne  veut  pas  que  le  spectateur  partage  leur  ignorance, 
charge  du  prologue  un  dieu  dont  le  choix  n'est  jamais  arbitraire. 

Cette  analyse  est  judicieuse;  mais  M.  d'A.  aurait  dû  la  pousser  plus 
loin,  et  se  demander  pourquoi  Euripide  a  jugé  nécessaire  de  donner  à 
ses  expositions  une  précision  presque  fastidieuse  qu'on  ne  trouve 
pas  chez  ses  devanciers.  Il  ne  suffit  pas,  pour  rendre  compte  de  cette  dif- 
férence, d'opposer  d'une  façon  générale  l'art  «  réfléchi  »  d'Euripide,  son 
inquiète  soumission  à  des  formules  étroites,  à  l'art  plus  libre  d'Eschyle 
et  de  Sophocle  «  ubi  veluti  flores  in  prato  nascuntur.  »  En  réalité, 
dans  bon  nombre  de  tragédies,  le  soin  méticuleux  d'Euripide  s'explique 
par  la  nouveauté  de  l'intrigue  ou  par  les  modifications  essentielles  que, 
dans  sa  préoccupation  de  rajeunir  des  sujets  rabattus,  le  poète  a  fait  su- 
bir aux  destinées  et  aux  caractères  consacrés  des  personnages.  Il  est  évi- 
dent que,  pour  faire  accepter  au  public  des  situations  aussi  bizarres  que 
celles  d'Electre  ou  d'Hélène  dans  les  tragédies  qui  portent  leur  nom,  des 
explications  préliminaires  assez  détaillées  étaient  indispensables.  Eschyle 
et  Sophocle,  qui  ne  s'éloignaient  guère  dans  la  donnée  générale  de  leurs 
drames  des  récits  des  poètes  épiques,  familiers  à  leur  auditoire,  pouvaient 
entrer  in  médias  res  sans  tant  de  précautions  l.  —  Dans  d'autres  prolo- 
gues, on  peut  croire  qu'Euripide  a  saisi  une  occasion  commode  de  rap- 
peler des  légendes  qu'il  savait  devoir  plaire  aux  Athéniens  (Ion,  Hippo- 
lyte,  les  Héraclides)  ou  encore  d'exposer  sur  les  exploits  attribués  aux 
héros  et  aux  dieux  des  réflexions  philosophiques .  Aucune  partie  du  drame 
n'offre,  en  effet,  au  poète  l'occasion  de  s'expliquer  aussi  librement  :  le 
prologue  lui  tient  lieu  de  parabase. 

Il  n'aurait  pas  été  hors  de  propos  d'étudier,  au  point  de  vue  du  style 
et  de  la  tournure  de  phrase,  les  prologues,  et  surtout  la  tirade  initiale  si 
caractéristique.  La  monotonie  de  ces  débuts  a  excité  la  verve  railleuse 
d'Aristophane  2.  M.  d'A.  s'est  interdit  cette  étude  intéressante,  de  même 
que  toute  appréciation  littéraire  «  cum  hœc  et  difficilior  causa  sit 
quant  ut  ab  adolescente  apte  suscipiatur,  et  ut-pote  magnam  partent 
in  proprio  uniuscujusque  sensu  posita,  philologici  muneris  fines  trans- 
grediatur.  »  C'est  pousser  un  peu  loin  la  modestie,  tant  pour  soi  que 
pour  la  philologie. 

i.  A  cet  égard,  Euripide  se  trouvait  un  peu  dans  les  conditions  des  poètes  comi- 
ques. Voyez  le  joli  morceau  où  Antiphane  se  plaint  de  l'avantage  qu'ont  sur  ses 
pareils  les  poètes  tragiques  «  qui. ne  présentent  jamais  au  public  que  des  personna- 
ges dont  il  connaît  l'histoire  de  longue  date.  »  (Antiph.,  in  com.  Ilonjctç,  éd.  Didot, 
p.  392.) 

2.  Disons,  en  passant,  que  M.  d'A.  pose  en  règle  que,  dans  les  pièces  antérieures 
à  l'expédition  de  Sicile,  Euripide  s'est  astreint  à  désigner  nommément  la  persona 
ftpoXof  t'Çouaa  dès  les  trois  ou  quatre  premiers  vers  ;  il  se  serait  ensuite  relâché 
de  cette  règle  rigoureuse,  et  M.  d'A.  en  conclut  que  le  Phrixus  appartient  à  la  der- 
nière époque  du  poète.  La  chronologie  des  pièces  d'Euripide  ne  me  paraît  pas  assez 
certaine  pour  autoriser  ces  déductions;  d'ailleurs,  M.  d'A.  constate  lui-même  plusieurs 
dérogations  à  sa  règle  (Médée,  les  Héraclides). 


d'histoire   et   DE   LITTÉRATURE  2  35 

La  majeure  partie  de  la  dissertation,  celle  où  l'auteur  étudie  indivi- 
duellement les  divers  prologues  d'Euripide,  est  moins  une  œuvre  origi- 
nale qu'un  commentaire  critique  du  récent  ouvrage  de  M.  Klinkenberg 
sur  le  même  sujet  l.  M.  d'A.  suit  pas  à  pas,  en  le  rectifiant,  le  travail  de 
son  devancier  dont  il  admire  vivement- non  seulement  la  conscience,  mais 
encore  le  sens  critique,  acre  judicium  et  magna  diligentia.  Je  ne  connais 
pas  le  livre  de  M.  Klinkenberg;  à  en  juger  par  les  nombreuses  citations 
de  M.  d'A.,  je  ne  puis  m'associer  à  une  appréciation  aussi  flatteuse.  Si 
M.  Klinkenberg  témoigne  parfois  de  savoir  et  de  sagacité,  bien  plus  sou- 
vent il  cède  à  la  manie  d'effacer  ce  qu'il  ne  comprend  pas  à  première 
vue  ou  qui  ne  cadre  pas  exactement  avec  les  règles  scolastiques  et  arbi- 
traires où  il  prétend  enfermer  son  auteur.  Il  arrive  ainsi  à  supprimer 
près  de  la  moitié  des  vers  des  prologues  qui  nous  sont  restés  2. 

Je  me  hâte  de  dire  que  M.  d'A.  ne  cède  pas,  en  général,  au  fnror  hy- 
percriticus  de  son  devancier.  Il  préfère  la  médecine  à  la  chirurgie;  et, 
là  où  il  est  arrêté,  il  aime  mieux  avouer  son  ignorance  ou  corriger  le 
texte  que  raturer.  D'ordinaire,  ses  conjectures  se  distinguent  plutôt  par 
le  bon  sens  et  une  saine  érudition  que  par  un  sentiment  bien  vif  de  la 
poésie  euripidéenne,  disons  mieux,  de  la  poésie  tout  court.  Il  en  est  peu 
qui  emportent  la  conviction.  Comme  telle  je  citerai  volontiers  la  leçon 
ècr^aXouaa  au  vers  35  d' Andromaque,>  au  lieu  d'èy.jâaÀouca  qui  donnait  un 
sens  peu  intelligible.  La  confusion  des  groupes  EK  et  EIC  n'a  pas  be- 
soin d'être  justifiée.  Au  vers  18  d'Ion,  la  leçon  Saxpuouca  pour  Kpéouca  me 
sourirait  fort,  s'il  ne  fallait  pas  user  avec  beaucoup  de  ménagement  de 
l'anapeste  initial  dans  le  trimètre,  en  dehors  des  noms  propres.  Citons 
encore  cette  variante  des  vers  29-31  d' Hippolyte,  qui  ont  tant  tourmenté 
les  éditeurs  : 

Kai  rcptv  [J.£V  èXôsïv  ty;os,  *pjç  TpoiÇyjviaç 
(TceTpav  xap'  aùxïjv  IlaXXâSoç)  xaTGtjnov 
6eaç  rrçcSs  vabv  KuTiptBoç  è^y-aôicaTO. 
La  vulgate  a  irjvBs  pp  TpoiÇvjvtiJcv  et  au  v.  3i  rfqç  frjaBe  vabv.  Les  correc- 
tions de  M.  d'A.  écartent  ces  répétitions  insupportables,  mais  laissent 
subsister  quelque,  embarras  dans  la  phrase  3. 

Dans  plus  d'un  passage,  M.  d'A.  s'est  laissé  encore  entraîner  à  des  athé- 

1.  De  Euripideorum  prol'ogorum  arte  et  interpolatione.  Bonn,  1881. 

2.  Si  encore  M.  Klinkenberg  s'était  bien  pénétré  du  génie  d'Euripide  avant  de 
fulminer  ses  doctes  athétèses  !  Dans  le  prologue  d'Hippolyte,  il  retranche  les  vers 
7-8  où  se  trouve  cette  remarque  si  finement  ironique  dans  la  bouche  du  poète  libre- 
penseur  : 

"Evs<ru  *j"àp  By)  /.àv  Gewv  Y^vet  xéâs, 

ti|Mj)[j.£voi  xatpouaiv  àvôp&irwv  5«o. 
N'est-ce  pas  le  cas  de  dire  :  ipsum  Euripidem  ex  Euripide  exsulare  jubet?  (comparez 
avec  M.  Weil,  Bacch.,  v.  3-ii). 

3.  La  quantité  un  peu  insolite  de  Qeaç  est  autorisée  notamment  par  Androm.,  v.  20 
(vers  retranché  à  tort  par  Arnim  et  Klinkenberg). 


\^£  «iJUlAHHII!.!    30     ÏA  M>lioï2IH'û 

236  REVUK    CRITIQUE 

teses  peu  nécessaires  ou  a  des  corrections  qui  empirent  Je  texte.  Ainsi,  au 
vers  27  à'Oreste,  il  lit  : 

'317  duci  £w  tout  0  caseç  ev  xotvw  cnwjceiv 

i-       j     1      5      A/r  •    1         1     !      »    '  r         .  «    u-  -objnBrtoq 

au  heu  de  ccaaçeç.  Mais  la  vulgate  s  explique  très  bien,  non  pas  par  : 

«  Se  in  publico  causant  necis  Agamemnonis  non  pronuntiaturam  », 

comme  le  veut  M.  KUnkenberg,  mais  par  :  «  Linquo  rem  dubiam  corn- 

muni  judicio  dijudicandam  ».  — Au  vers  17  à'Iphigénie  en  Tauride  : 

w  tyjgB'  àvactjcov  'EXXââoç  aipct.ir^ioi.ç 
M.  d'A.  n'a  pas  vu  que  àviaceiv  aTpaTYJYtaç  est  une  locution  poétique  qui 
s'explique  comme  «  dormez  votre  sommeil  »  '.  Il  a  écrit  : 

t  '  ;'fl73î 

w  "frçç  àviaawv   EX^âBoç  ffTpaiYJYia 
ce  qui  frise  la  platitude.  —  Dans  la  même  tragédie,  aux  vers  35  suiv., 
j  ai  peine  a  croire  qu'il  aurait  propose  la  faible  conjecture  : 

fchistv  VOU.OKJI  toi  ai  v  aosxai  Osa 

s'il  avait  connu  la  belle  et  certaine  2  correction  de  M.  Weil  : 

oOev  vouotsi,  toigiv  -nosTa'.  osa, 

Xpw[j.saO  eoprTjç. 
Disons,  en  terminant,  que  M.  d\Arnim  mérite  rarement  des  critiques 
de  ce  dernier  genre.  Ordinairement,  il  est  bien  au  courant  de  la  «  litté- 
rature »  de  son  sujet,  et  c'est  pourquoi,  alors  même  qu'on  n'acceptera 
pas  ses  conjectures,  on  ne  lira  jamais  sans  profit  les  observations  que  lui 
suggèrent  les  difficultés  nombreuses  du  texte  3. 
-U03  233  Théodore  Reinach. 

■■Jè  B3b  fi 

-GD3l.9upfr^  jnmeM  .M  a  .atusl 

-33  ;DldB20a  ,9b ;  9b   ivi38  jg3«g  9]8j 

38r'"  d  183  li  inBbnsq 

ig3.  —  I-e  manuscrit  disocrate  Urbinas  CXI  de  la  Vaticanc.  Descrip- 
tion et  histoire.  Recension  du  Panégyrique,  par  Albert  Martin,  membre  de  l'école 
française  de  Rome.  Paris,  Thorin,  «881.  Une  brochure  de  33  pp. 

I  3b   U3ll 

Les  collations  bien  faites  sont  rares;  un  grand  nombre  de  celles  qu'on 
trouve  dans  les  éditions  critiques  un  peu  anciennes  sont  ou  incomplètes 
ou  remplies  d'inexactitudes.  Nous  ne  demandons  pas  que  l'on  présente 
toutes  les  variantes,  sans  exception,  mais  il  serait  à  souhaiter  que  les 
leçons  reproduites  fussent  toujours  sûres  pour  pouvoir  établir  la  filiation 
des  variantes,  et  faire  le  classement  des  manuscrits.  Ces  deux  bases  de  la 
critique  verbale  manqueront  toujours  de  solidité  tant  que  la  plupart  des 
collations  qui  existent  n'auront  pas  étérevisées  avec  soin. 

_____ j    2311  pbjjp 

1.  Comparez  Odyssée  Q,  3o  wç  oçsXsç  ti-a^ç  dbroVY)[Ji.svoç,  ÎJOTSp  otoaroireç: 

2.  Je  n'entends  pas  affirmer  que  le  mot  ^pâ)[j.su6a  soit  au-dessus  de  toute  contes- 
tation, mais  bien  qu'"ApTS[J.lç  est  une  glose  qui  a  pris  la  place  d'un  verbe. 

3.  Signalons,  comme  particulièrement  intéressante,  l'étude  des  passages  suivants  : 
Ion,  v.  20-27  (plusieurs  conjectures  peu  admissibles);  Hélène,  v.  33-43;  Bacch., 
v.  55  suiv.;  Héracl.,  v.  3i-37  ;  Hèc,  v.  28  suiv. 


d'histujkk  et  db  mttrkaturk  237 

„  •,....  , ..  .         dUs 

Certainement  on  ne  reproduira  jamais  dans  une  édition  cri- 
tique tous  les  détails  que  doit  noter  un  collationneur  ;  il  n'ôrt^ëêt  ^*àâ 
moins  nécessaire,  chaque  fois  qu'on  est  en  présence  d'un  manuscrit  im- 
portant, d'en  prendre  une  collation  minutieuse.  C'est  ce  que  vient  de 
faire  M.  Albert  Martin  pour  le  Panégyrique  d'Isocrate,  qui  se  trouve 
dans  YUrbinas  CXI;  «  en  négligeant  seulement  quelques  détails  secon- 
daires de  l'accentuation,  delà  ponctuation,  etc.  »,  et  en  insistant  surtout 
sur  la  distinction  des  diverses  mains  qui,  pour  un  certain  nombre  de 
leçons,  n'avait  jamais  été  faite. 

M.  M.,  après  une  brève  description  qui  porte  sur  le  nombre  des  qua- 
ternions  et  des  feuillets,  donne  du  manuscrit  une  histoire  succincte, 
à  la  fois  très  claire  et  très  probante;  puis  il  aborde  la  description  pa- 
léographique qu'il  fait  bien  complète,  d'après  la  méthode  inaugurée  par 
Ch.  Graux  à  l'école  des  Hautes-Etudes  en  1877  '.  A  ce  sujet,  nous 
adresserons  quelques  critiques  au  travail,  d'ailleurs  très  consciencieux, 
de  M.  Martin.  P.  9  :  il  dit  que  dans  les  notes  marginales,  dont  l'écriture 
est  l'onciale,  on  rencontre  deux  fois  l'abréviation  de  yjç;  mais  il  n'en  in- 
dique pas  la  forme  qui,  pourtant,  aurait  pu  servir  de  preuve  à  son  asser- 
tion, que  ces  notes  sont  dues  à  une  main  très  ancienne.  —  Même  page  : 
«  Les  mots  sont  coupés  selon  la  paléographie;  ainsi  l'a,  l's,  le  a,  le  x,  etc., 
sont  presque  toujours  rattachés  à  la  lettre  suivante;  l't,  l'o,  le  p,  l'u  nele 
sont  jamais.  »  Je  serais  bien  étonné  que  ceci  fût  vrai  pour  l'u,  et  que 
cette  lettre  ne  fût  pas  rattachée  à  la  suivante  dans  aùxéç,  U7:6,  to6ç,  etc.  — 
P.  10:  «  L'encre  est  rousse  ou  noire;  la  distinction  est  très  marquée;  il  y 
a  des  séries  de  feuillets  tantôt  avec  l'une,  tantôt  avec  l'autre  de  ces  cou- 
leurs. »  M.  Martin  paraît  croire,  si  nous  le  comprenons  bien,  que  le  co- 
piste s'est  servi  de  deux  encres  différentes.  Ce  n'est  pas  impossible;  ce- 
pendant il  est  bon  de  se  rappeler  que  la  décoloration  des  encres  à  base 
de  fer  n'a  pas  lieu  d'une  manière  uniforme  dans  les  manuscrits.  On  voit 
quelquefois  sur  la  même  page  des  teintes  bien  tranchées  sans  qu'il  y  ait 
lieu  de  croire  à  l'emploi  de  deux  encres.  A  certains  feuillets  l'encre  est 
décolorée,  à  d'autres  elle  est  bien  conservée;  quelquefois  elle  est  devenue 
rousse  au  recto,  tandis  qu'au  verso  elle  est  restée  presque  noire,  ou  réci- 
proquement. —  Un  peu  plus  loin,  page  28,  en  note,  M.  M.  prévient 
qu'il  compte  comme  une  seule  lettre  la  ligature  et  ;  il  a  raison,  car  et 
n'occupe  certainement  que  la  place  d'une  lettre;  seulement  ei  n'est  pas 
une  ligature,  mais  un  sigle.  Nous  signalerons  encore  trois  fautes  d'im- 
pression :  p.  32,  irfa-pwcaGcttfcsv,  (3ooXY)ôeT[;.£v ;  p.  33,  cpXeîaaioç. 

Dans  la  seconde  partie  de  son  travail,  M.  Martin,  après  avoir  signalé 
quelques  particularités  paléographiques  de  YUrbinas,  discute  certains 

Trmrrr-r— ; 

-833nop  atuo)  -j! 

1.  Cf.  Rapport  sur  la  section  des  sciences  historiques  et  philologiques,  1877-78, 

pp.  6-7.  —  Quand  M.  Martin  a  fait  imprimer  son  ouvrage,  Gh.  Graux  vivait  encore; 

aujourd'hui  qu'il  n'est  plus,  M.  M.  ne  nous  saura  pas  mauvais  gré  de  rappeler  ce 

que  son  travail  doit  à  celui  qui  fut  notre  maître  à  tous  deux. 


238  REVUE    CRITIQUE 

passages  du  Panégyrique  en  comparant  les  leçons  nouvelles  fournies 
par  sa  collation  avec  les  leçons  vulgaires.  Ces  discussions  sont  conduites 
avec  beaucoup  de  rigueur  et  de  méthode. 

Alfred  Jacob. 


194.  —  Cachets    d'oculistes    romains,  par  A.   Héron   de    Villefosse    et  H. 
Thédenat.  Tome  I.  Paris,  1882.  ln-8°. 

MM.  Héron  de  Villefosse  et  Thédenat  qui,  depuis  quelques  années, 
avaient  publié,  chacun  de  leur  côté,  des  cachets  inédits  d'oculistes  ro- 
mains, et  qui  possédaient  les  empreintes  de  plusieurs  autres,  ont  pensé 
qu'il  serait  utile  de  se  réunir  afin  de  les  faire  connaître,  ainsi  que  les 
textes  et  les  observations  qu'ils  avaient  recueillis  en  travaillant  isolément. 
Ils  nous  en  avertissent  dans  un  court  avant-propos  et  ajoutent  qu'ils  ne 
considèrent  le  travail  qu'ils  viennent  de  faire  paraître  que  comme  des 
notes.  Ils  auraient  dû  ajouter  qu'elles  ne  sont  pas  moins  étendues  que 
variées,  et  que,  pour  être  aussi  nourries  que  les  notes  les  plus  savantes, 
elles  n'en  ont  pas  la  sécheresse.  Telle  a  été  certainement  la  pensée  de 
l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres  quand  elle  a  récompensé 
ce  travail,  tout  récemment. 

Le  tome  premier,  le  seul  qui  ait  encore  paru,  contient  18  cachets  d'o- 
culistes, tous  trouvés  en  France,  à  l'exception  d'un  seul  dont  la  prove- 
nance est  ignorée;  ces  cachets  nous  révèlent  17  noms  d'oculistes,  pour 
la  plupart  inconnus,  ainsi  qu'un  certain  nombre  de  maladies  et  de  re- 
mèdes nouveaux  dont,  soit  dit  en  passant,  il  est  regrettable  de  ne  pas 
trouver  une  liste  dans  les  tables.  C'est,  sans  doute,  une  omission  volon- 
taire qui  sera  réparée  dans  le  deuxième  volume. 

Le  grand  mérite  de  ce  livre  consiste  dans  les  mille  détails  qu'il  ren- 
ferme; il  nous  est  donc  impossible  ici  de  suivre  les  auteurs  pas  à  pas  : 
ce  serait  d'ailleurs  plutôt  l'affaire  d'un  médecin  que  d'un  archéologue; 
nous  nous  contenterons  de  leur  présenter  trois  observations  : 

i°  Afin,  sans  doute,  d'éviter  l'aridité,  les  auteurs  ont  cru  devoir  ajou- 
ter parfois  de  nouvelles  observations  lorsqu'ils  rencontraient  le  nom 
d'une  maladie  ou  d'un  remède  dont  ils  avaient  déjà  parlé  :  nous  n'en  ci- 
terons qu'un  exemple,  mais  nous  pourrions  en  signaler  d'autres.  On  lit, 
page  91  :  «  Diasmyrnes.  Grotefend  a  indiqué  les  principaux  textes  des 
médecins  anciens,  concernant  le  collyre  diasmyrnes,  nous  n'avons  pas 
à  y  revenir  »;  et  page  i65  :  «Diasmyrnes.  Nous  avons  déjà  rencontré  ce 
collyre  sur  le  cachet  de  Poitiers  :  nous  allons  compléter  ici  les  quelques 
lignes  que  nous  lui  avons  consacrées  à  cette  occasion.  »  Suivent  six  pa- 
ges de  développements  qui,  nous  semble-t*il,  auraient  été  plus  à  leur 
place  à  la  page  91 .  Cette  méthode  n'est  pas  sans  créer  quelque  embar- 
ras à  celui  qui  voudra  se  servir,  pour  des  recherches,  de  ce  livre  si 
utile. 


D  HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE  2^9 

2°  Pp.  98  et  suiv.  Des  trois  hypothèses  que  proposent  les  auteurs  pour 
expliquer  le  mot  haipaston  (collyre  harpaston),  il  nous  semble  que  la 
première  seule  est  admissible,  grammaticalement. 

On  ne  saurait,  en  effet,  faire  du  mot  àp7caax6v  «  un  adjectif  dérivé  de 
harpax  comme  harmation  de  harma  ».  'Apzcn.ci6q  n'est  pas  un  adjectif, 
mais  le  verbal  en  toç  du  verbe  àpitâÇw.  "ApicaÇ,  au  contraire,  est  un  ad- 
jectif formé  de  la  racine  àpTcay,  et  qui  signifie  celui  qui  prend.  Comment 
donc,  avec  un  corps  qui  signifie  preneur,  l'am,bre  ou  tout  autre,  forme- 
rait un  collyre  qui  signifierait  pris?  On  comprend  aussi  très  bien  qu'on 
nomme  harpax  un  emplâtre  qui  prend  rapidement;  on  ne  voit  pas  com- 
ment on  pourrait  appeler  un  collyre  harpastos,  parce  qu'il  aurait  la 
propriété  d'être  mordant.  Nous  ferons,  du  reste,  observer  que  àpjjuxTiov 
ne  nous  semble  pas  être  ici  un  adjectif  formé  de  ap^a,  mais  le  diminutif 
de  ce  mot.  C'est  ainsi,  d'ailleurs,  qu'Aetius  Ta  compris  puisqu'il  dit  : 
«  àpixâiiov,  id est  currus»,  comme  le  constatent  les  auteurs  eux-mêmes. 

3°  P.  102.  Que  le  collyre  Foos  soit  le  même  que  le  collyre  Fos,  c'est, 
je  crois,  ce  qui  ne  peut  faire  de  doute  pour  personne.  Mais  les  formes 
poétiques  ou  plutôt  dialectales  çawç  et  tpétoç  n'ont  peut-être  pas  besoin 
d'être  invoquées  à  l'appui  de  ce  fait.  Foos  ne  serait-il  pas  la  transcription 
pure  et  simple  du  grec  çwç  par  un  graveur  qui  aura  voulu  rendre  sen- 
sible la  longue  «  w  «  en  répétant  deux  fois  la  brève  «  oo  »? 

R.  Cagnat. 


195.  —  Histoire  littéraire  du  midi  de  I»  France,  par  Mary  Lafom.   Paris, 
Reinwald,  1882,  8°,  xiu-421  pages,  Prix  :  7  tr.  5o. 

On  a  dit  souvent  qu'il  n'y  avait  si  mauvais  livre  dont  on  ne  pût  tirer 
quelque  profit.  Nous  croyons  toutefois  que  le  livre  de  M.  Mary-Lafon 
devra  être  considéré  comme  l'une  de  ces  exceptions  dont  on  dit  qu'elles 
confirment  la  règle,  car  nous  ne  voyons  pas  ce  qu'on  pourrait  tirer  d'un 
ouvrage  où  il  n'y  a  pas  un  fait  nouveau,  pas  une  recherche  originale,  et 
dont  on  ne  pourrait  citer  une  page  qui  ne  contînt  quelque  grosse  bévue. 
Aussi  voulons-nous  simplement,  en  l'annonçant  ici,  mettre  en  garde  les 
lecteurs  qu'un  titre  prétentieux  pourrait  attirer.  Dans  cette  prétendue 
Histoire  littéraire  du  Midi  de  la  France,  70  pages  sont  consacrées  à  la 
littérature  latine  jusqu'au  xe  siècle  environ.  Le  lecteur  se  rendra  suffi- 
samment compte  de  la  portée  et  du  style  de  ce  chapitre,  en  jetant  les 
yeux  sur  les  premières  lignes  delà  table  analytique  des  matières  :  «  Gaule 
«  et  Rome,  p.  1.  —  Les  Flatteurs  du  chef,  p.  2.  —  Poésies  gauloises,  p.  3. 
«  —  Chants  ibériens,  p.  4  l.  —  L'oiseau  joli  chanteur,  p.  5.  —  Le  tour 

1.  On  voit  que  M.  Mary-Lafon  n'est  guère  au  courant  des  travaux  qui  ont  démon- 
tré le  peu  d'ancienneté  des  chants  «  ibériens  »  (cf.  Revue  critique,  1866,  art.  199 
le  compte-rendu  de  la  dissertation  de  M.  Bladé  sur  les  chants  héroïques  des  Bas- 
ques). Mais  dé  quoi  est-il  au  courant  ? 


24O  REVUE   CRITIQUE 

«  delà  terre,  p.  8.  —  Rhéteurs  massaliens,p.  g.  —  La  main  impie,  p.  12. 

«  —  Les  champs  bien  aimés,  p.  i3.  —  Le  Fils  de  l'Aude,  p.  14  ' » 

Le  reste  du  volume  traite  de  la  littérature  (en  fait,  de  la  poésie  seulement) 
en  langue  vulgaire,  depuis  les  troubadours  jusqu'aux  felibres,  qui  sont 
assez  maltraités.  Mireio  elle-même,  la  gracieuse  et  idéale  création  de 
Mistral,  ne  trouve  pas  grâce  devant  l1  «  historien  »  de  notre  littérature 
méridionale  :  «  Quel  intérêt  —  je  vous  le  demande  —  peuvent  inspirer 
«  ce  vannier  pieds  nus  (le  Vincent  de  Mireille),  grossier  comme  ses  cor- 
«  beilles,  et  cette  paysanne  rougeaude,  brûlés  tous  deux  par  le  soleil,  et 
«  sentant  l'ail  et  l'huile  rance?  »  (p.  372).  J'avoue  que  je  ne  m'étais  ja- 
mais représenté  Mireille  rougeaude  ni  brûlée  par  le  soleil,  et  j'aime 
mieux  Vincent  pieds  nus  qu'en  bottines  vernies,  mais  poursuivons.  Les 
35o  pages  ou  environ  que  l'auteur  a  consacrées  à  la  poésie  du  midi,  ne 
sont  guère  qu'une  suite  de  citations  médiocrement  choisies,  traduites  le 
plus  souvent  en  vers  (et  quels  vers!)  et  accompagnées  d'observations  dont 
le  lecteur  peut  déjà  soupçonner  la  portée.  Il  n'y  a  dans  tout  cela  aucun 
ordre  quelconque.  Du  reste,  tout  classement,  soit  par  matières,  soit  par 
ordre  chronologique,  était  interdit  à  un  homme  qui  ne  sait  de  la  littéra- 
ture provençale  que  le  peu  qu'on  en  savait  il  y  a  cinquante  ans.  Ainsi, 
M.  M.-L.  ne  soupçonne  même  pas  l'existence  des  poèmes  de  la  Guerre 
de  Navarre,  de  Guillaume  de  la  Barre,  de  Daurel  et  Béton.  Il  ne  connaît, 
pour  Girart  de  Roussillon,  que  le  ms.  incomplet  de  la  Bibliothèque  na- 
tionale, et  ignore,  par  conséquent,  que  le  début  de  ce  poème  est  publié  et 
même  traduit  [Revue  de  Gascogne,  1869)  depuis  longtemps,  d'après  le 
ms.  d'Oxford.  Il  en  est  encore  à  croire  que  Ferabras  appartient  en  pro- 
pre à  la  littérature  provençale.  Aucun  des  nombreux  travaux  qui  ont, 
par  des  voies  diverses,  mis  hors  de  doute  la  date  relativement  récente 
des  poèmes  vaudois,  n'est  parvenu  jusqu'à  lui,  et  à  ses  yeux,  comme 
pour  Raynouard,  la  Nobla  Leyc^on  est  un  poème  du  xie siècle.  Il  ignore 
ou  feint  d'ignorer  l'existence  de  la  nouvelle  édition  de  la  chanson  de  la 
Croisade  albigeoise,  qui  a  modifié  considérablement  les  idées  courantes 
sur  ce  poème  historique,  dont  il  ne  dit  rien  de  ce  qu'il  y  avait  à  dire.  Il  ne 
sait  rien  de  l'ancien  théâtre  religieux  du  Midi,  rien  des  découvertes  récen- 
tes (voy.  Romania,  VIII,  481-508)  qui  ont  été  faites  sur  la  source  de  la 
vie  de  saint  Honorât.  Il  cite  (p.  235  et  suiv.)  comme  étant  du  xve  siècle, 
des  poésies. qui  sont  tirées  des  Leys  d'amors,  et  par  conséquent  ne  peu- 
vent être  postérieures  à  la  première  moitié  du  xive  siècle.  Il  parle  du 
Breviari  d'amor  pour  dire  que  Dante  y  a  puisé  l'idée  de  la  Divine  Co- 
médie. Quant  aux  fautes  innombrables  dont  textes  et  traductions  sont 
parsemés,  je  n'en  dirai  rien,  ayant  eu  l'occasion,  il  y  a  une  quinzaine 
d'années,  de  montrer  ici-même  2  de  quels  contre-sens  M.  M.-L.  est  capa- 
ble quand  il  se  mêle  de  traduire  du  provençal.  En  somme,  il  n'y  a  dans 


1.  C'est  P.  T.  Varro. 

2.  Revue  critique,  1868,  II,  pp.  ï 36  et  3 19. 


d'histoire  et  de  littérature  241 

cette  mauvaise  compilation  pas  un  fait  qui  soit  exact,  pas  une  idée  qui 
soit  juste.  Le  pis  est  que  l'auteur  prétend  donner  comme  une  œuvre  ori- 
ginale ce  qui  n'est  en  réalité,  comme  je  viens  de  le  dire,  qu'une  mauvaise 
compilation.  Il  affecte  de  citer  (souvent  peu  exactement)  les  manuscrits, 
mais  on  ne  voit  pas  qu'il  en  ait  rien  tiré  qui  ne  se  trouve  dans  les  édi- 
rt?pnsJ .principalement  dans  Raynouard  et  Rochegude,  qu'il  se  garde  bien- 
u/èi??ifteF.lîÊQin:s"'Raynouard,  M.  M.-L.  ne  parle  que  pour  écrire  cette 
"^fira^qu'f  mérite  une  mention  :  «  S'il  eût  possédé  les  moyens  d'instruc- 
«  lion  indispensables  pour  expliquer  la  formation  de  la  langue  des  trou- 
3  '  <f  badours,  je  veux  dire  le  grec,  les  idiomes   germaniques  et  l'arabe, 
«  M.  Raynouard  n'eût  jamais  connu  de  rival  dans  ce  genre.  »  Si,  pour 
être  sans  rival  «  dans  ce  genre  »,  il  faut  savoir  le  grec,  je  crains  bien  que 
M.  M.-L.  reste  notablement  au  dessous  de  Raynouard,  qui  du  moins 
n'eût  jamais  tracé  l'extravagant  assemblage  de  lettres  grecques  qu'on 
peut  voir  au  bas  de  la  p.  2  de T  «  Histoire  littéraire  »  de  M.  Mary- 
Lafon. 

«  Le  livre  aujourd'hui  publié  date  de  longtemps,  »  nous  dit  l'auteur 
au  début  de  la  préface.  «  J'avais  dix  ans  lorsque  l'idée  m'en  vint.  »  Il  y 
est  resté  beaucoup  de  la  conception  première. 

P.  M. 

23b  :on.        

IBVfîK  ob 
>>    IJJOQ 

196.  —   Mollèi-es  Tartuffe,  Geschlchte  und  Krltlk,  von  Wilhelm  Mangold, 
Oppeln,  Maske.  1881.  In-8°,  vi  et  23ç  p. 

Le  travail  de  M.  Mangold  sur  le  Tartuffe  est  un  des  meilleurs  tra- 
vaux qu'on  ait  publiés  en  Allemagne  sur  notre  grand  comique.  M.  M. 
a  consulté  toutes  les  études  antérieures  qui  ont  trait  à  son  sujet,  et  nous 
ne  croyons  pas  qu'il  en  ait  négligé  une  seule,  depuis  la  Critique  du 
Tartuffe  jusqu'au  travail  du  Russe  Wesselovsky,  jusqu'à  l'étude  de 
M.  Legouvé  sur  Scribe.  M.  M.  connaîrbien  la  littérature  du  xvir3  siè- 
cle, et  il  cite  avec  à-propos  des  passages  tirés  des  auteurs  de  l'époque  et 
qui  éclairent  d'une  vive  lumière  certains  de  ses  jugements.  Dans  un  pre- 
mier chapitre,  il  expose  très  brièvement  la  vie  de  Molière,  l'influence 
qu'a  exercée  Gassendi  sur  le  grand  comique  (mais  qui,  à  notre  avis,  ne 
ne  s'est  pas  manifestée  dans  le  Tartuffe),  les  vues  de  Molière  sur  la 
religion  et  la  morale;  il  consacre  quelques  pages  sur  le  clergé  de  l'épo- 
que, aux  jésuites,  aux  jansénistes,  etc.  Dans  le  deuxième  chapitre,  M.  M. 
expose  le  sujet  du  Tartuffe  ;  il  rappelle  les  œuvres  où  l'hypocrite  joue 
un  rôle,  celles  auxquelles  Molière  a  sans  doute  pris  quelques  traits,  etc.; 
il  insiste  principalement  sur  le  Montufar  de  Scarron,  il  énumère  les  di- 
verses allusions  que  Molière  aurait  faites  à  certains  personnages  de  l'é- 
poque. Le  111e  chapitre,  où  M.  M.  s'est,  avec  raison,  inspiré  surtout  de 
l'excellente  notice  de  Despois-Mesnard,  est  consacré  à  l'histoire  du  Tar- 
tuffe (ire  représentation  des  trois  premiers  actes,  opinions  pour  et  contre. 


242  REVUE   CRITIQUE 

la  pièce,  première  défense  de  la  jouer,  premier  placet  de  Molière,  lectu- 
res du  Tartuffe  dans  des  sociétés  particulières;  2e  représentation  chez 
Madame,  3°  représentation  au  Raincy,  Don  Juan,  4e  représentation  du 
Tartuffe  et  deuxième  défense  de  le  jouer,  second  placet  de  Molière, 
condamnation  du  Tartuffe  par  l'archevêque  de  Paris,  Lettre  sur  l'Im- 
posteur, l'Amphitryon,  etc.)  ;  toute  cette  histoire  du  Tartuffe  est  racon- 
tée par  M.  M.  avec  précision  et  clarté.  Mais  M.  M.  ne  s'arrête  pas  au 
temps  de  Molière  ;  il  pousse  plus  loin  son  enquête  et  fait  l'histoire  du 
Tartuffe  jusqu'à  nos  jours;  il  traite  d'abord  de  la  polémique  contre  le 
Tartuffe  et  le  théâtre  en  général  (du  P.  Caffaro  et  de  Bossuet  jusqu'à 
MM.  L.  Veuillot  et  de  La  Pommeraye),  puis  des  pièces  inspirées  par 
Tartuffe,  de  ses  imitations,  de  ses  traductions;  les  nombreuses  informa- 
tions qu'il  a  recueillies  témoignent  d'une  lecture  étendue  et  de  patientes 
recherches;  aucun  de  nos  moliéristes  français,  par  exemple,  n'a  connu 
la  pièce  de  Mme  Gottsched,  Die  Pietisterey  im  Fischbeinrocke  oder 
die  doctormàssige Frau  (p.  1  52).  Mais  M.  M.  a-t-il  connu  ce  que  dit  de 
cette  pièce  M.  W.  Greizenach  dans  son  excellente  brochure  Zur  Ent- 
stehungsgeschichte  des  modernen deutschen Lustspiels? (pp.  3o-32).  Le 
ive  chapitre,  qui  est,  avec  le  précédent,  le  plus  remarquable  de  l'ouvrage, 
est  intitulé  Tartuffe  au  point  de  vue  dramatique  ;  M.  M.  y  examine 
successivement  les  caractères  et  l'action  du  Tartuffe  ;  on  trouvera  là  de 
fines  analyses  et  de  pénétrantes  observations.  L'ouvrage  se  termine  par  un 
5e  et  dernier  chapitre  qui  a  pour  titre  :  «  Critique  éthique  et  esthétique  ». 
On  ne  pourrait  faire  à  M.  M.  que  de  légères  chicanes.  Par  exemple, 
parmi  les  étymologies  du  nom  de  Tartuffe,  il  aurait  pu  citer,  ne 
serait-ce  que  pour  mémoire,  l'étymologie  proposée  par  Génin  qui 
dérive  tartuffe  du  mot  tartufo  «  petit  homme  d'humeur  fort  mé- 
chante »  (dans  le  Malmantile  de  Lippi).  —  Pp.  35-36.  Il  nous  semble 
que  les  traits  de  ITpocrito  de  l'Aretin  peuvent  convenir  au  Tar- 
tuffe et  que  l'Ipocrito  ressemble  tout  à  fait  à  l'hypocrite  de  Molière  (il  est 
introduit  dans  une  famille,  séduit  le  chef  de  la  maison,  fait  toutes  les  si- 
magrées de  la  dévotion,  marche  les  yeux  baissés  et  le  paroissien  sous  le 
bras,  déplore  humblement  ses  péchés,  loue  les  hypocrites,  aime  les  bons 
repas,  convoite  la  femme  de  son  hôte,  etc.).  —  P.  59.  On  trouvera  assez 
étrange  l'expression  «  un  certain  Gourville  »,  ein  gewisser  Gourville, 
et  nous  ne  croyons  pas  que  le  discours  de  Don  Luis  à  Don  Juan  ren- 
ferme les  allusions  à  la  conduite  privée  de  Louis  XIV  (p.  98),  ni  qu'il  y 
ait  là,  ainsi  que  dit  M.  M.,  beaucoup  de  démocratie  et  comme  la  prépa- 
ration de  la  grande  Révolution.  C'est  aller  bien  loin  que  de  faire  de  Mo- 
lière le  précurseur  et  le  prophète  de  1789. —  P.  1 38,  M.  M.  dit  qu'il  se- 
rait fatigant  (  ermûdend)  de  suivre  les  pensées  de  Bossuet  dans  ses 
Maximes  et  réflexions  sur  la  comédie;  M.  M.  a  certainement  raison 
de  désapprouver  le  zèle  fougueux  de  Bossuet  et  la  véritable  furie  de  son 
attaque  contre  Molière;  mais  l'évêque  a  mis  au  service  d'une  mauvaise 
cause  une  vigoureuse  éloquence.  — P.  140.  Quelques  lignes  plus  loin, 


d'hISTOIKK    K'I     DK    LlTTICKATURt  243 

M.  M.  déclare  que  la  lettre  de  Rousseau  à  d'Alembert  est  «  trop  en- 
nuyeuse et  trop  sotte  »  (\u  langweilig  und  \u  albern)  pour  mériter  une 
longue  analyse;  c'est  méconnaître  ce  que  la  Lettre  sur  les  spectacles 
renferme  d'original  ;  il  y  a,  dans  cette  protestation  contre  le  théâtre,  des 
traits  éloquents,  et  quelques  vérités  exprimées  avec  l'éclat  et  l'énergie 
qui  distinguent  le  style  de  Rousseau.  —  P.  146.  Sur  l'Onuphre  de  La 
Bruyère,  il  est  permis  de  rappeler  que  wSainte-Beuve  dit  (P.  L.  II,  407) 
qu'Onuphre  est  une  critique  pointilleuse  et  un  contre-pied  du  Tartuffe; 
Sainte-Beuve  ajoute  :  «  La  Motte  avait  vu  de  même  dans  le  portrait 
d'Onuphre  un  tableau  de  Y  Hypocrite  où  La  Bruyère  commence  par  ef- 
facer un  trait  du  Tartuffe,  et  ensuite  en  recouche  un  tout  contraire  ». — 
Le  travail  de  M.  M.  est  complet,  exact,  rempli  de  justes  appréciations, 
de  rapprochements  intéressants  et  d'instructifs  commentaires.  L'auteur 
aurait  pu  être  plus  concis  en  certains  endroits,  par  exemple  dans  le 
11e  chapitre  et  dans  le  dernier  qui  tourne  trop  à  la  dissertation  ;  quelques 
lecteurs  difficiles  trouveront  même  que  M.  Mangold  abuse  des  citations; 
mais,  par  son  ouvrage,  il  s'est  placé  au  premier  rang  des  moliéristes 
d'Allemagne,  et  cette  étude  sur  le  Tartuffe,  solide,  consciencieuse,  écrite 
d'ailleurs  avec  agrément ,  mérite  de  ne  point  passer  inaperçue  en 
France. 

C. 


197.  —  Cœtlie's  Reineke  Fucbs  nach  dem  ersten  Druck  von  Jahre  1794  mit 
Proben  der  aelteren  Thierepen  hrsg.  u.  erlacntert  von  Alex.  Bieling.  Berlin, 
Wiedmann.  1882.  In-8°,  226  p.  4  mark. 

M.  Bieling  a  reproduit  dans  ce  volume,  avec  la  plus  grande  fidélité,  la 
première  édition  du  Reineke  Fuchs  de  Goethe  (pp.  29-156);  il  en  a  con- 
servé scrupuleusement  l'orthographe  et,  autant  que  possible,  la  ponc- 
tuation ;  naturellement,  il  a  corrigé  les  fautes  évidentes  d'impression.  Il 
a  joint  au  texte  une  liste  de  ces  fautes  d'impression  et  des  variantes  de  la 
dernière  édition  donnée  par  Gœthe  en  i83o  [abweichende  Lesarten, 
pp.  1 57-1 58),  ainsi  que  des  remarques  {Erlàuterungen,  pp.  159-206). 
Ces  remarques,  fort  instructives,  et  renfermant  soit  des  éclaircissements 
tirés  de  l'histoire  du  droit  du  moyen  âge,  soit  des  citations  du  Ro- 
man de  Renart,  de  Reinaert,  du  Reinke  Vos,  etc.,  soit  des  expli- 
cations grammaticales  et  philologiques,  auraient  mieux  été  à  leur  place 
au  bas  des  pages.  Le  volume  —  dont  il  sied  de  louer,  en  passant,  l'a- 
gréable impression  —  se  termine  par  des  Proben  aus  denalteren  Tier- 
epen  (pp.  206-226)  ;  pour  mieux  montrer  par  un  exemple  l'affinité  des 
plus  importantes  épopées  animales,  M.  B.  a  cité  le  même  passage 
(chez  Gœthe,  le  commencement  du  IVe  chant)  traité  dans  le  Reinhart 
moyen-haut  allemand  de  Henri  le  glichesare  (ancien  texte  et  version 
postérieure),  dans  le  Roman  de  Renart  (extraits  de  Martin),  dans  le 


244  KKVUK    CRIIIQUh 

r 

Reinaert,  dans  la  traduction  en  distiques  latins  de  Baudoin  (hic  vulpes 
HfiftiftjtÇPW71,  leone  et  persuadet  pulcre),  dans  la  Reinaerts  historié, 
dans  Hendrik  van  Alkmaar,  dans  1q- Reinke  bas-allemand,  dans  la  tra- 
duction allemande  de  i65o,  dans  la  traduction  en  prose  de  Gottsched. 
Il  ne  nous  reste  plus  à  parler  que  de  l'introduction,  mise  en  tête  du 
volume  par  M.  B.  (pp.  1-26);  on  ne  la  lira  pas  sans  intérêt;  on  y 
remarquera  surtout  la  liste  des  noms  des  animaux  qui  se  trouvent  dans 
le  Reineke  Fuchs,  et  leur  signification  étymologique  (pp.  22-26)  ;  mais 
Eitelbauch  ou  Idelbach  (dans  Gottsched,  Ydelbach)  signifie-t-il  «  nichts 
als  Bal  g  »  et  ne  faut-il  pas  entendre  «  qui  a  toujours  le  ventre  vide  »  ? 
(p.  24).  L'introduction  est  d'ailleurs  claire  et  précise;  M.  B.  con- 
naît les  travaux  récents,  surtout  ceux  de  M.  Voigt,  sur  la  légende  ani- 
male ;  il  examine  et  apprécie  successivement  YEcbasis  captivi,  Vlsen- 
grimus,  le  Reinardus  vulpes,  etc.  ;  il  raconte  l'histoire  de  la  traduction 
de  Gœthe  qu'il  nomme  avec  raison  la  plus  «  réussie  »  de  toutes  les  tra- 
ductions et  qui,  malgré  quelques  erreurs  communes  à  Gottsched  et  à 
Gœthe,  a,  grâce  au  vers  hexamètre,  rendu  «  chère  au  peuple  allemand 
cette  perle  de  la  poésie  populaire  »  (p.  21).  On  aurait  voulu  que  cette 
introduction  fût  plus  complète  encore;  M.  Bieling  ne  fait  guère  que 
mentionner,  sans  plus  de  détails,  la  traduction  de  Gottsched  et  les  gra- 
vures «  spirituelles  »  d'Everdingen  (p.  16)  ;  il  nomme  en  passant  Hack- 
mann,  le  professeur  de  Helmstaedt  et  l'éditeur  de  171 1  (Wolfenbuttel), 
mais  il  oublie  Heinecke  ou  Heineccius,  l'auteur  de  YAntiquitatum.ro- 
manarum  jurisprudentiam  il lustrant ium  syntagma,  à  qui  Gœthe  dé- 
cerne, en  même  temps  qu'à  Eberhard  Otto,  1  épithète  d'éle'gant  (D.  u. 
W.  VI,  p.  3 1 ,  Loeper)  et  qui  fut,  au  xvme  siècle,  un  des  jurisconsultes 
qui  appelèrent  l'attention  sur  le  Reineke  ;  il  aurait  pu  encore  citer,  au 
xvie  siècle,  Moscherosch(cp.  Koberstein,  II,  p.  287,  note  17).  En  somme, 
édition  recommandable  et  utile,  qui  fera  certainement  son  chemin  dans 

les  gymnases  allemands. 

Mimn  ao1qîuI  26iqB 

j3io:>n3  jîb!  xuaim 

iulq  ùup  oibno  Joaavfjl 

JEdma'i  éuiÊb  _  <l 

198.  —  A  Short  lii-ioi  y  of  the  english  colonies  in  America,  by  Henry 
Cabot  Lodge.  New  York,  Harper  and  brothers.  1881.  vi-56o  p.  in-8°. 

«  L'histoire  des  treize  colonies  américaines  est,  avant  tout,  une  his- 
toire fragmentaire  et  provinciale;  elle  n'acquiert  pas  l'importance  ni  la 
valeur  d'une  histoire  nationale  avant  la  réunion  du  Congrès  qui  eut  lieu 
à  New-York  en  1765,  au  sujet  de  la  loi  sur  le  timbre.  Quels  étaient  ces 
gens  qui  firent  la  guerre  de  l'Indépendance  et  fondèrent  les  Etats-Unis; 
quel  était  leur  genre  de  vie,  quels  étaient  leurs  usages,  leurs  idées,  leurs 
mœurs,  toutes  ces  questions,  lorsque  je  commençai  l'étude  de  l'histoire 
d'Amérique,  m'ont  semblé  présenter  le  plus  profond  intérêt;  elles  n'a- 
vaient pas  encore  été  traitées  d'une  façon  complète  et  résumée  à  la  fois; 

isup  aab  anoiiuimni  Ja  aiusorn 


d'histoire  et  de  littérature  245 

le  présent  volume  est  un  essai  tenté  pour  combler  cette  lacune.  » 
Par  ces  lignes,  qui  sont  les  premières  de  la  préface,  M.  Lodge  indique 
fort  bien  le  but  qu'il  s'est  proposé,  et,  disons-le  dès  maintenant,  qu'il 
a  su  atteindre.  Le  sujet  n'était  pas  des  plus  aisés.  Les  documents  sont 
beaucoup  moins  abondants  qu'on  ne  pourrait  croire.  Ces  colonies  ont 
eu  pour  la  plupart  de  fort  médiocres  débuts;  on  y  gagnait  sa  vie  comme 
on  pouvait,  et  l'on  n'y  écrivait  guère.  En  outre,  chacune  d'elles  formait 
un  état  à  part,  avait  son  existence  individuelle,  et,  pour  décrire  les  diffé- 
rentes colonies  en  1765,  on  ne  pouvait  échapper  à  la  nécessité  de  faire 
leur  histoire  l'une  après  l'autre.  C'est  ce  qu'a  fait  M.  Lodge.  Son  livre 
se  divise  ainsi  en  deux  parties,  fort  inégales  d'ailleurs  en  étendue  : 
i°  L'histoire  des  treize  colonies  (p.  1  à  476)  ;  20  La  Révolution  et  la  guerre 
de  l'Indépendance  (p.  476  à  52 1). 

Quant  à  l'histoire  particulière  de  ces  colonies,  on  eût  désiré  que  l'au- 
teur indiquât  l'ordre  qu'il  entendait  suivre.  Cependant  il  est  assez  facile 
de  le  deviner.  M.  L.  répartit  les  treize  colonies  en  trois  groupes  :  i°  cinq 
au  sud  :  Virginie  (depuis  1606),  Maryland  (i632),  les  deux  Carolines 
(166 3)  et  la  Géorgie  (1732)  ;  20  quatre  au  centre  :  Delaware  et  Pensyl- 
vanie  ;  New-Jersey  et  New- York;  3°  la  Nouvelle-Angleterre,  qui  a  formé 
Massachusetts,  Connecticut,  Rhode  Island  et  New-Hampshire.  Pour 
chacune  de  ces  colonies,  l'auteur  en  trace  l'histoire  dans  un  pre- 
mier chapitre,  puis,  dans  un  second,  il  en  décrit  l'état  social,  intellectuel, 
moral,  industriel  et  politique  *.  C'est  cette  seconde  partie  qu'il  a  traitée 
avec  le  plus  de  soin,  et,  quand  même  il  n'en  aurait  pas  prévenu  le  lecteur 
dans  sa  préface,  on  s'en  apercevrait  tout  de  suite  en  ouvrant  le  volume  : 
tandis  que  pour  l'histoire  il  ne  donne  aucune  référence,  pour  les  institu- 
tions, au  contraire,  il  renvoie  à  de  nombreux  auteurs.  Il  avertit  d'ailleurs 
qu'il  s'en  faut  de  beaucoup  qu'il  ait  indiqué  toutes  ses  sources;  mais  il 
a  voulu  multiplier  ces  indications  pour  être  utile  à  ceux  qui  étudieraient 
après  lui  le  même  sujet.  L'intention  est  excellente;  l'auteur  eût 
mieux  fait  encore,  s'il  avait  donné  avec  plus  de  précision  les  titres  des 
livres  ou  des  documents  auxquels  il  se  réfère.  Il  est  à  craindre  que  plus 
d'un  lecteur  sur  le  vieux  continent  ne  soit  souvent  dans  l'embarras  en 
présence  de  ces  renvois  trop  laconiques. 

Le  présent  ouvrage  abonde  en  faits  intéressants,  présentés  avec  exacti- 
tude et  méthode;  les  idées  générales  y  font  un  peu  défaut,  et  l'on  ne  lit 
pas  sans  fatigue  certains  chapitres,  surtout  les  chapitres  proprement 
historiques,  du  livre;  on  se  demande  si  M.  L.  n'aurait  pas  pu  grouper 
avec  plus  d'art  les  diverses  monographies  qui  le  composent,  pour  faire 
mieux  comprendre  les  grandes  lois  qui  ont  présidé  au  développement  des 
colonies.  Ce  qui  surtout  ne  ressort  pas  assez  nettement,  c'est  la  situation 
de  ces  colonies  à  l'égard  de  la  métropole.  Sans  doute  M.  L.  montre  bien 

1.  Il  a  eu  l'heureuse  idée  de  réunir  en  un  seul  chapitre  tout  ce  qu'il  avait  à  dire  des 
mœurs  et  institutions  des  quatre  colonies  qui  composent  la  «  Nouvelle  Angleterre  ». 


246  REVUli    CKITIQUh 

qu'elles  furent  lentes  à  se  séparer  de  la  mère  patrie,  et  que  le  ministère 
anglais  est  responsable,  par  les  lourdes  fautes  qu'il  a  commises,  de  la 
guerre  de  l'Indépendance  (cf.  p.  474);  mais  les  erreurs  du  système  co- 
lonial ont  été  une  cause  plus  profonde  encore  de  cette  guerre.  Il  serait 
bon  de  relire  après  M.  L.,  par  exemple,  la  partie  correspondante  de  la 
History  ofthe  english people  de  M.  Green  (t.  IV,  p.  241  et  suiv.). 

Malgré  ces  desiderata,  il  y  a  beaucoup  à  prendre  et  à  apprendre  dans 
l'ouvrage  de  M.  Lodge.Nousn'avonscertainement  en  France  aucun  livre 
qui  nous  renseigne  aussi  bien  sur  l'histoire  de  ces  colonies,  si  humbles 
pendant  un  siècle  et  demi,  si  péniblement  arrivées  à  l'indépendance, 
mais  qui  sont  le' fondement,  inébranlable  à  ce  qu'il  semble,  de  cet  extra- 
ordinaire empire  des  Etats-Unis  d'Amérique.  Ajoutons  qu'un  copieux 
répertoire  chronologique  et  un  index  très  détaillé  facilitent  les  recherches. 
C'est  donc  un  réel  service  que  le  livre  de  M.  Lodge  est  appelé  à  rendre 
aux  historiens  et  aux  politiques. 

Ch.  B. 


199.—  KafQp  Folk-Lorc;  or,  a  sélection  from  the  traditional  taies  current  among 
the  people  living  on  the  eastern  border  of  the  Cape  Colony,  with  copious  explana- 
tory  notes,  by  Geo.  M8  Call  Theal.  London,  Swan  Sonnenschein,  i882,in-8°, 
xn-212  p. 

Les  contes  africains  qu'on  a  recueillis  jusqu'à  présent  sont  intéressants 
à  plusieurs  points  de  vue.  Le  fond,  à  travers  des  altérations  souvent  ex- 
trêmes, se  laisse  plus  d'une  fois  rapprocher  de  celui  des  contes  indiens, 
et  montre  ainsi  que  les  récits  répandus  chez  les  divers  peuples  du  grand 
continent  équatorial  leur  ont  été  apportés,  au  moins  en  partie,  par  les 
musulmans  (en  certains  cas  même  par  les  Européens).  Quelques  traits, 
au  contraire,  sont  absolument  spéciaux  et  indiquent  chez  les  populations 
africaines,  avec  une  grande  pauvreté  d'imagination  et  une  impuissance 
plastique  à  peu  près  complète,  un  curieux  ensemble  de  croyances  et  une 
façon  particulière  de  se  représenter  les  rapports  de  l'homme  avec  la  na- 
ture. Enfin  la  forme  que  revêtent  les  récits  abonde  en  renseignements 
précieux  sur  les  mœurs,  les  usages,  les  idées  et  les  sentiments  des  tribus 
chez  lesquelles  on  les  recueille.  Toutes  les  collections  de  ce  genre,  quand 
elles  offrent,  comme  celle  de  M.  Theal,  des  contes  recueillis  avec  fidélité 
et  très  bien  commentés,  sont  donc  fort  précieuses.  M.  Th.  a  rassemblé  ses 
contes  dans  la  tribu  des  Xosa  ou  Amaxosas,  les  plus  méridionaux  des  Ca- 
fres  établis  entre  la  colonie  du  Cap  et  celle  de  Natal  ;  l'auteur,  qui  a  vécu 
vingt  ans  en  relations  constantes  avec  eux,  donne  de  leur  manière  de  vi- 
vre un  tableau  concis,' mais  suffisant  à  nous  la  faire  comprendre.  Il  a 
entendu  les  contes  qu'il  publie  de  la  bouche  de  plusieurs  narrateurs, 
sans  grandes  variantes,  ce  qui  prouve  que  l'incohérence,  l'absence  de 
motifs  et  de  but,  le  défaut  presque  complet  d'intérêt,  au  moins  dans 


0' HISTOIRE    KT    DK    LlTTRKAlUftfc  247 

l'ensemble,  qui  s'y  font  remarquer,  ne  sont  pas  accidentels  ;  on  re- 
trouve, en  effet,  ces  caractères  dans  d'autres  contes  africains.  Le  folk- 
lore proprement  dit  est  joint  aux  contes  sous  forme  de  commentaire. 
Dans  les  contes  le  mythographe  relève  à  chaque  instant  des  traits  qui  lui 
sont  connus  d'ailleurs,  mais  il  est  rare  qu'un  récit  tout  entier  soit  assez 
homogène  pour  se  comparer  aux  récits  d'un  autre  peuple.  L'histoire  de 
Hlakanyana,  «  ce  rusé  petit  gaillard  »,  est  une  suite  d'épisodes  rappelant 
les  aventures  de  Dâumling  ou  d'Hermès  enfant.  L'un  de  ces  épisodes  est 
une  forme  reconnaissable,  quoique  défigurée,  d'un  conte  très  répandu, 
le  LXIIe  des  Contes  lorrains  si  savamment  annotés  par  M.  Cosquin, 
L'Homme  au  pois  (voy.  Romania,  t.  X,  p.  578).  Le  dernier  conte,  le 
Lion  et  le  Chacal,  est  supposé  par  M.  T.  être  d'origine  hottentotte  :  il 
a  sans  doute  raison,  car  on  en  trouve  des  épisodes  à  peu  près  identiques 
dans  les  recueils  hottentots  de  Krônlein  et  de  Sanderson  (voy.  Bleek, 
Reineke  Fuchs  inAfrika,  pp.  1  ss.);  il  est  bon  de  noter  qu'un  trait  de  ce 
conte  (que  M.  T.  a  cru  malheureusement  devoir  abréger), —  la  sottise  du 
lion  qui,  ayant  saisi  la  queue  du  chacal,  se  laisse  persuader  que  c'est  une 
racine  et  la  lâche,  —  se  retrouve  dans  un  conte  recueilli  oralement  dans 
l'Inde  (M.  Frère,  Old  Deccan  Days,  p.  3io).  On  pourrait  faire  bien 
des  rapprochements  analogues;  mais  je  signale  particulièrement  ce  conte 
du  Lion  et  du  Chacal,  parce  que,  à  mon  avis,  dans  sa  forme  indienne 
primitive,  il  est  la  source  de  toute  la  partie  du  cycle  de  Renart  qui  n'a 
pas  son  origine  dans  les  fables  ésopiques  gréco-romaines.  Une  petite  col- 
lection de  proverbes  et  locutions  figurées  termine  le  volume  de  M.  Theal, 
que  nous  recommandons  à  tous  ceux  qui  s'occupent  àtfolk-lore. 

G.  P. 


CHRONIQUE 


FRANCE.  —  Nous  avons  reçu  les  deux  premiers  fascicules  (janvier  et  février, 
mars  et  avril)  du  Bulletin  de  correspondance  africaine,  publié  par  l'Ecole  supérieure 
des  lettres  d'Alger,  avec  ce  sous-titre  :  Antiquités  libyques,  puniques,  grecques  et  ro- 
maines. L'avant-propos,  signé  de  M.  Emile  Masqueray,  directeur  de  l'Ecole,  est  ainsi 
conçu  :  «  Ce  bulletin  doit  de  paraître  à  la  libéralité  de  M.  Paul  Bert,  ministre  de 
l'instruction  publique,  ardent  ami  de  l'Algérie,  et  à  l'initiative  de  M.  Albert  Dumont, 
directeur  de  l'enseignement  supérieur,  qui  continue  dans  l'Ecole  d'Alger  son  œuvre 
de  Rome  et  d'Athènes.  L'occupation  de  la  Tunisie  et  la  création  rapide  de  tant  de 
villages  sur  notre  territoire  civil  ouvrent  aux  découvertes  archéologiques  une  ère 
nouvelle,  et  ce  n'est  pas  trop,  pour  en  transmettre  une  part  au  monde  savant,  qu'une 
publication  bi-mensuelle  de  deux  feuilles  environ,  sœur  de  la  Revue  africaine,  du 
Recueil  de  la  Société  archéologique  de  Constantine,  ç,t  du  Bulletin  de  l'académie 
d'Hippone.  La  science  et  le  dévouement  de  MM.  Renier,  Judas,  Halévy,  Faidherbe, 
Tissot,  Poulie,  Berbrugger,  Delamare,  Mac-Carthy,  Reboud,   Cahen,  Cherbonneau, 


248  *RKVUIi    CRITIQUE 

Letourneux,  Féraud,  nous  ont  frayé  la  voie  :  nous  puiserons  nos  forces  dans  une  com- 
munion constante  d'idées  et  de  sentiments  avec  les  personnes  qui  nous  favorisent  de 
leur  correspondance.  D'ailleurs,  l'indignation  seule  nous  aurait  poussés  à  recueillir, 
nous  aussi,  les  épaves  d'un  naufrage  dans  lequel  des  villes  entières  disparaissent. On 
a  fait  de  la  chaux  avec  des  statues  de  Caesarea;  Naraggara,  Thagora,  Auzia,  sont  en- 
glouties dans  des  casernes;  j'ai  vu  scier  des  marbres  du  temple  d'Esculape  à  Lam- 
bèse;  les  collections  locales  sont  au  pillage;  mais  ce  n'est  pas  le  lieu  de  se  répandre 
en  plaintes  stériles,  et  Tite  Live  nous  avertit  de  faire  taire  nos  regrets  au  moment 
où  nous  déployons  notre  voile  avec  l'aide  des  Dieux  ».  —  Le  premier  fascicule  du 
Bulletin  de  correspondance  africaine  renferme  un  article  où  M.  Masqueray  repro- 
duit quatre  inscriptions  inédites  d'Auzia,  détruites  aujourd'hui,  mais  copiées  à  temps 
par  M.  Grenade  Delaporte;  la  première  est  datée  de  l'an  2i3  de  notre  ère,  la  seconde 
de  l'an  222,  la  troisième  de  l'an  241  ;  dans  le  même  art.  M.  Masqueray  détermine, 
d'après  une  borne  milliaire,  le  municipe  de  Rapidi  et  Labdia  (pp.  7-22).  M.  R.  de 
La  Blanchère  étudie,  dans  l'article  suivant,  divers  antiques  que  renferme  la  cour  du 
palais  archiépiscopal  d'Alger,  et  qui  proviennent  pour  la  plupart  de  St.  Cyprien  des 
Attaf,  entre  Duperré  et  Orléansville,  c'est-à-dire  du  lieu  où  l'on  suppose  qu'était 
autrefois  Tigava  (pp.  23-27).  M.  Edouard  Gat  donne  des  inscriptions  inédites  ré- 
cemment trouvées  dans  les  environs  de  Cherchell  (pp.  28-07).  M.  Masqueray  examine 
la  stèle  lybique  de  Souama,  qu'il  juge  presque  identique  à  la  stèle  d'Abizar  déposée 
au  musée  d'Alger  (pp.  38-41).  —  Le  deuxième  fascicule  du  Bulletin  est  rempli  tout 
entier  par  un  article  de  M.  Masqueray  sur  les  ruines  d'El  Meraba,  dans  le  pays  des 
Béni  Ouelban;  M.  M.  fait  connaître  le  nom  de  la  ville  romaine  dont  il  ne  reste  que 
la  ruine  d'El  Meraba;  ce  serait  Celtiane;  il  retrace  quelques  traits  de  l'histoire  de 
cette  cité  d'après  les  inscriptions  qu'il  a  découvertes  ou  relues;  il  pense  que  ce  sont 
des  Lollii  qui  ont,  sinon  fondé  au  moins  considérablement  accru  cette  ville  de  Cel- 
tiane, etc.  —  Chaque  fascicule  se  termine  par  une  Bibliographie;  dans  le  premier, 
M.  Masqueray  consacre  quelques  lignes  aux  «  Tables  générales  des  vingt  premiers 
volumes  de  la  Société  archéologique  du  département  de  Constantine  »,  que  vient  de 
publier  M.  Poulie  ;  dans  le  second,  il  souhaite  la  bienvenue  au  «  Bulletin  trimes- 
triel des  antiquités  africaines  »  qui  paraît  par  les  soins  de  la  Société  de  géographie  et 
d'archéologie  de  la  province  d'Oran,  sous  la  direction  de  MM.  Poinssot  et  Demaeght. 
—  Le  prix  de  l'abonnement  d'un  an  au  Bulletin  de  correspondance  africaine  est,  pour 
la  France  et  l'Algérie,  20  francs;  pour  l'étranger,  2  5  francs;  le  prix  de  chaque  fas- 
cicule, 4  ou  5  fr.  (S'adresser  à  Paris,  chez  Baer  ou  Challamel,  à  Alger,  chez  Jourdan). 
—  Un  érudit  qui  connaît  à  fond  les  choses  d'Algérie  et  qui  signe  El  Z'  Dam  nous 
envoie  une  «  étude  critique  »  intitulée  Geronimo  surnommé  le  martyr  du  Fort  des 
Vingt-Quatre  Heures,  a-t-il  existé,  ses  restes  ont-ils  été  découverts  ?  (Alger,  Docks 
de  l'imprimerie  [Petit  Colon].  1882.  ln-120,  3cj  p.  tiré  à  cent  exemplaires) ;  nousen 
résumons  les  traits  essentiels.  En  i853,  lors  de  la  démolition  du  Fort  des  Vingt- 
Quatre  Heures,  on  trouva  dans  l'excavation  d'un  bloc  des  remparts  un  squelette  hu- 
main; cette  excavation  n'était  autre  que  le  moule  du  corps  même  de  la  victime;  un 
sculpteur  en  obtint  facilement  le  relief,  et  le  plâtre  peut  se  voir  aujourd'hui  à  la  Bi- 
bliothèque-Musée d'Alger,  sous  l'inscription  :  Geronimo,  plâtre  original  obtenu 
au  moyen  de  l'empreinte  laissée  par  son  propre  corps  dans  le  bloc  de  pisé  où  il  fut 
jeté  vif  par  les  Turcs  d'Alger  le  18  septembre  i56q  et  retrouvé  le  2  7  décembre 
18 53;  quant  au  bloc  et  aux  ossements,  ils  furent  transportés  dans  la  cathédrale 
d'Alger.  Haëdo  raconte,  en  effet,  qu'un  jeune  Arabe,  pris  dans  une  razzia  par  les  Es- 
pagnols d'Oran  en  1548,  devenu  esclave,  et  baptisé  sous  le  nom  de  Geronimo,  puis 
évadé  trois  années  après,  et,  à  l'âge  de  25  ans,  revenu  chez  les  Espagnols,  qui  lui  firent 

I        Ate'j  û  Jnarnatstiiqc!  la  sm 


Huprn  i 

0  HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE  i.uiru/'l  ,XlJ..rn  ,  249 

bon  accueil  et  le  réconcilièrent  avec  l'Eglise,  fut  en  i56g  repris  par  ses  anciens  coreli- 
gionnaires, mené  à  Alger,  sommé  d'abjurer,  et,  sur  son  refus,  empisé  par  ordre  du 
pacha  El  Euldj-Ali,  dans  un  des  blocs  du  Fort  des  Vingt-Quatre  Heures  alors  en 
construction.  L'auteur  de  notre  brochure,  El  Z'  Dam,  n'accorde  pas  confiance  au  ré- 
cit d'Haëdo  ;  car  Haëdo  a  été  plusieurs  fois  induit  en  erreur;  il  est  improbable  qu'un 
enfant,  fait  chrétien  de  force,  ait  reçu  des  impressions  assez  durables  pour  trahir  les 
siens  à  l'âge  de  25  ans  et  qu'Euldj-Ali,  dont  le  caractère  bienveillant  est  historique- 
ment connu,  ait  commis  l'acte  de  cruauté  qui  lui  est  imputé;  enfin,  il  est  impossible 
qu'Euldj  Ali  ait  fait  emprisonner  un  captif  dans  les  assises  d'un  fort  déjà  construit 
avant  son  arrivée  à  Alger.  Si  ce  drame  s'est  passé,  il  faut  en  changer  la  date,  la  re- 
porter à  l'année  de  l'hégire  gjb,  et  substituera  Euldj-Ali  le  féroce  Mohammed  ben 
Sala  Reïs.  Mais  le  squelette  découvert  le  27  décembre  i853  et  transporté  à  la  cathé- 
drale d'Alger  est-il  celui  de  Geronimo?  Non,  car  le  corps  a  été  retrouvé,  non  pas 
dans  la  face  Nord  du  fort,  comme  le  dit  Haëdo,  mais  dans  la  face  Ouest;  le  bloc, 
qui,  selon  Haëdo,  se  distingue  entre  les  autres  parce  qu'il  est  tout  en  ruines,  était  en 
i853  encore  assez  solide  pour  qu'il  fût  nécessaire  de  le  briser  par  la  mine;  enfin,  le 
moulage  de  la  Bibliothèque-Musée  d'Alger  ne  donne  pas  les  caractères  physiques 
attribués  par  Haëdo  au  malheureux  Geronimo.  Il  était  impossible,  ajoute  El  Z'  Dam 
dans  sa  démonstration,  de  trouver  les  restes  de  Geronimo,  car  ils  n'ont  jamais  été 
placés  dans  le  Fort  des  Vingt-Quatre  Heures;  ce  fort  n'est  plus  le  même  que  celui 
dont  parle  Haëdo  ;  il  a  été  totalement  reconstruit  et  il  ne  subsiste  rien  de  l'ouvrage 
primitif  (qu'on  songe  seulement  aux  six  bombardements,  1682,  i683,  1688,  1783, 
1784,  1816,  que  le  fort  eut  à  supporter,  aux  deux  tremblements  de  terre  de  17*6  et 
de  1755  et  aux  explosions  de  poudrières).  M.  Berbrugger,  qui  «  ne  savait  pas  se  ré- 
signer à  avoir  tort  »,  est  responsable  de  l'erreur  démontrée  par  El  Z'  Dam  ;  il  avait 
publié  en  1847  une  étude  sur  Geronimo  où  il  déclarait,  malgré  l'absence  de  tout  in- 
dice, que  les  ossements  du  martyr  se  trouvaient  dans  la  paroi  nord  du  fort  ;  il  savait 
pourtant  que  l'édifice  était  tout  récent,  que  le  supplice  de  l'emmurement  était  fré- 
quemment infligé  et  que  la  découverte  de  i853  ne  prouvait  rien  en  faveur  de  l'iden- 
tité de  la  victime;  mais  il  ne  voulait  jamais  retirer  les  conclusions  prématurées,  que 
sa  vive  imagination  l'avait  induit  à  présenter.  «  Ce  petit  travail,  dit  El  Z'  Dam  en 
terminant,  ne  plaira  pas  à  tout  le  monde,  mais  il  y  a  longtemps  que  j'ai  adopté 
comme  règle  de  conduite  la  maxime  d'El-Djilani  :  si  tu  crains  les  aboiements  des 
chiens,  ne  te  mets  pas  en  route.  » 

—  Notre  collaborateur  M.  Emile  Châtelain  a  été  chargé  d'une  mission  en  Italie  à 
l'effet  d'étudier  dans  les  bibliothèques  publiques  les  principaux  manuscrits  des  au- 
teurs classiques  latins  et  d'en  faire  exécuter  des  fac-similés  photographiques,  ainsi 
que  de  terminer  la  collation  des  manuscrits  de  Sidoine  Apollinaire. 

ALLEMAGNE.  —  M.  Schliemann  a  assisté  au  congrès  anthropologique  de  Franc- 
fort sur  le  Main  (lundi  14  août)  et  y  a  fait  des  communications  intéressantes  sur 
les  feuilles  qu'il  a  récemment  entreprises  en  Troade  ;  nous  renvoyons  nos  lecteurs 
aux  pages  194-195  (n°  36)  de  notre  recueil  :  ce  que  M.  Schliemann  a  exposé  au 
congrès  de  Francfort  était  déjà  relaté  dans  sa  lettre  à  l'Académie  de  Belgique  que 
nous  avons  résumée.  Dans  ce  même  congrès,  M.  Virchow  a  entretenu  le  public  de 
Darwin  et  de  ses  travaux  sur  l'anthropologie;  —  Mlle  Thorma,  de  Broos  (Transylva- 
nie), a  présenté  à  l'assemblée  une  collection  d'objets  de  l'époque  néolithique  trouvés 
dans  les  environs  de  Broos  ;  certains  objets  sont  ornés  de  signes  qui  se  rencontrent 
également  sur' des  vases  trouvés  en  Troade  et  à  Chypre;  —  M.  Gross  a  fait  un  rap- 
port sur  les  fouilles  exécutées  récemment  dans  les  stations  lacustres  du  lac  de 
Bienne  et  spécialement  à  celle  de  Fénil;  —  M.  Rau  a  lu  un  travail  sur  la  charrue  et 


25 O  RKVUK    CR1TIQUK 

son  emploi  dans  les  temps  les  plus  reculés;  —  M.  Neuburger  a  démontré  les  rela- 
tions qui  existent  entre  l'étude  des  langues  et  l'anthropologie;  —  M.  Mehlis  a  parlé 
des  restes  de  constructions  romaines  trouvés  sur  l'Eisenberg,  et  M.  Naue,  d'un  tu- 
mulus  de  l'âge  de  fer  découvert  près  de  Pullach;  —  M.  Wilsen  a  lu  une  disserta- 
tion sur  les  Celtes  et  les  Germains;  —  M.  Sepp  a  cherché  à  prouver,  en  s'appuyant 
sur  les  mythes  et  les  traditions,  que  la  fondation  de  Francfort  remonte  bien  avant 
l'époque  carolingienne  et  que  Francfort  serait  peut-être  même  la  ville  appelée  Askis 
par  Ptolémée;  —  M.  Kollmann  a  traité  des  relations  qui  existent  entre  la  race  et  la 
nation;  —  enfin,  M.  Virchow  a  parlé  de  l'anthropologie  du  Caucase.  —  Les  mem- 
bres du  congrès  ont  fait  plusieurs  excursions,  à  Bodenheim,  près  de  Mayence,  où 
ils  ont  vu  des  tombes  franques  qui  remonteraient  au  vie  et  au  vnc  siècle  de  notre 
ère,  à  Hombourg  et  au  castel  de  Sarbourg,  le  Pompéi  allemand;  ils  ont  également 
visité  le  musée  gallo-romain,  installé  au  château  de  Mayence,  par  le  professeur  Lin- 
denschmit.  La  ville  de  Trêves  a  été  désignée  comme  siège  du  congrès  qui  doit  avoir 
lieu  au  mois  d'août  de  l'année  prochaine;  M.  Virchow  a  été  nommé  président,  et 
MM.  Lucae  et  Schaffhausen,  vice-présidents  du  bureau  pour  l'année  1882-1883. 

—  Parmi  les  ouvrages  qui  doivent  prochainement  paraître,  nous  citerons  :  de 
M.  Brandl,  un  travail  sur  Coleridge,  où  sera  surtout  appréciée  l'influence  de  Her- 
der  et  des  Allemands  sur  l'écrivain  anglais;  de  M.  Oscar  Brenner,  Altnordische 
Grammaiik,  Chrestomathie  und  Glossar  (Leipzig,  Weigel)  ;  de  M.  Breymann,  une  édi- 
tion critique  du  Faust  et  de  V Edouard  II  de  Marlowe  (Munich,  Oldenbourg);  de 
M.  W.  Foerster,  une  édition  de  la  traduction  en  ancien  français  (Franche-Comté) 
de  Végèce  par  Prioraz  de  Besançon  et  une  étude  linguistique  sur  le  même  texte  de 
M.  Fr.  Wendelborn  (pour  la  société  littéraire  de  Stuttgart-Tubingue)  ;  du  P.  Hœtzl, 
une  édition  des  Sermons  latins  de  Berthold  de  Ratisbonne;  de  M.  Humbert,  une 
étude  sur  Molière  en  Allemagne  ;  de  M.  Mahrenholtz,  des  Etudes  sur  Voltaire 
(Voltairestudien) ;  de  M.  Schade,  un  travail  complet  sur  YAblaut  germanique  et  la 
conjugaison;  de  M.  Ad.  Schroeter,  une  étude  sur  les  Nibelungen  dans  la  poésie  al- 
lemande; de  M.  Sittl,  des  recherches  sur  les  différences  locales  du  latin  {Die  loca- 
len  Ver schiedenheiten  der  lateinischen  Sprache)  ;  de  M.  Wœlfflin,  la  reproduction 
d'une  conférence  «  Gemination  in  der  lateinischen  Sprache  »,  etc. 

—  M.  Josef  Haller,  de  Munich,  prépare  un  grand  ouvrage,  en  deux  volumes,  sur 
les  proverbes  espagnols  (Ratisbonne,  Manz). 

—  L'éditeur  M.  W.  Friedrich,  de  Leipzig,  fait  paraître  une  collection  d'Histoires 
des  littératures  étrangères  (Geschichte  der  Weltliieratur  in  Ein^eldarstellungen);  les 
trois  premiers  volumes  de  cette  collection  vont  paraître;  le  ier  est  consacré  à  la  lit- 
térature française  (M.  Ed.  Engel);  le  2e,  à  la  littérature  polonaise  (M.  H.  Nitschmann); 
le  3e,  à  la  littérature  italienne  (M.  C.  M.  Sauer);  d'autres  ouvrages  sur  les  littératu- 
res anglaise,  hongroise  et  espagnole  sont  en  préparation  ;  chaque  volume  coûtera 
7  mark  5o. 

—  Un  troisième  volume  d'Essais  de  M.  Hermann  Grimm  a  paru  chez  Dûmmler,  à 
Berlin. 

—  A  l'occasion  du  centième  anniversaire  de  la  naissance  d'Esaias  Tegnér  (novem- 
bre), l'éditeur  Senf,  de  Leipzig,  fait  paraître  une  monographie  du  grand  poète,  due 
à  M.  Jens  Christensen  et  intitulée  «  Esaias  Tegner,  der  Sœnger  der  Fritjofsage»; 
un  autre  éditeur,  M.  O.  Leiner,  annonce  une  traduction  allemande,  en  sept  volumes, 
d'un  Choix  des  Œuvres  de  Tegner  (I.  La  «  Fritjofsage  »;  IL  poèmes  épiques,  Axel, 
Gerda,  Henri  IV,  etc.;  III  et  IV,  poésies  lyriques;  V-VII,  œuvres  en  prose);  cette 
traduction  est  due  à  M.  Gottfr.  v.  Leinburg. 

--On  nous  dit  que  Ranke  fera  paraître  avant  Noël  la  troisième  partie  de  sa  Weltge 


d'histoire   et   DE  LITTÉRATURE  25  I 

schichte.  Ranke  a  deux  secrétaires,  dont  l'un  l'assiste  le  matin,  et  l'autre  le  soir  et  la 
nuit,  car  l'illustre  historien,  malgré  ses  87  ans,  travaille  de  9  heures  du  matin  à 
i  heure  de  l'après-midi  et  de  8  heures  du  soir  à  1  heure  de  la  nuit.  Pour  se  délasser, 
Ranke  se  promène  l'après-midi,  de  2  à  4  heures;  il  va  ordinairement  seul  au  Thier- 
garten.  Après  sa  promenade,  il  consacre  une  heure  à  la  conversation;  ce  n'est  qu'à 
ce  moment  de  la  journée  qu'il  reçoit  ses  visiteurs;  même  Sybel,  Duncker,  Droysen, 
Mommsen  ne  sont  admis  qu'à  cette  heure-là.  Ranke  habite  le  second  étage  d'une 
maison  de  la  Luisenstrasse  depuis  trente-neuf  ans. 

—  Le  premier  centenaire  de  la  fondation  du  théâtre  de  Francfort  sur  le  Main  a  été 
célébré  par  une  représentation  des  deux  parties  du  Faust  de  Goethe. 

—  La  section  des  langues  germaniques  et  des  langues  romanes  du  Congrès  des 
philologues  qui  aura  lieu  à  Carlsruhe  du  27  au  3o  septembre,  entendra  les  lectures 
suivantes  :  de  M.  Bartsch,  sur  la  fondation  de  séminaires  pour  les  langues  germani- 
que et  les  langues  romanes  et  sur  la  méthode  des  exercices  critiques;  de  M.  Bech- 
stein,  sur  Floia,  le  plus  ancien  poème  macaronique  de  la  littérature  allemande  ;  de 
M.  Kluge,  sur  l'étymologie;  de  M.  Koch,  sur  les  rapports  de  la  littérature  allemande 
et  de  la  littérature  anglaise  au  xvm"  siècle;  de  M.  Rieger,  sur  Max  Klinger  et  son 
goldener  Hahn;  de  M.  Wûlcker,  sur  Luther  et  la  chancellerie  saxonne,  etc. 

—  Les  Mitteilungen  de  Petermann  donnent  les  chiffres  suivants  pour  la  popula- 
tion de  l'Europe  :  Allemagne,  45,234,061  habitants;  Autriche-Hongrie,  37,869,954; 
France  :  37,321,186;  Angleterre:  35,246,562;  Russie:  81,598,569;  Pays-Bas  : 
4,060, 58o;  Suisse:  2,846,102;  Luxembourg:  209,570;  Danemark:  i,g6o,o3g; 
Suède  :  4,565,668;  Norvège  :  i,gi3,5oo;  Espagne  :  16, 333, 293;  Portugal  :  4,160, 3i5; 
Italie  :  28,452,639;  Roumanie  :  5,376,000;  Serbie:  1,700,21 1  ;  Turquie  :  5,3o5,5oo; 
Bulgarie:  1,998,983;  Grèce  :  1,979,423.  La  Chine  a  une  population  de  35o,ooo,ooo 
habitants;  le  Japon,  36,357,212;  l'Inde  anglaise,  248,833,564. 

AUTRICHE.  —  Les  fascicules  I  et  II  des  Mitteilungen  ou  «  Communications  » 
des  archives  de  la  guerre,  d'Autriche  (pp.  1-218.  Vienne,  Waldheim),  renferment 
douze  documents  des  années  i63i-i635  provenant  des  papiers  du  comte  Schlick, 
ennemi  de  Wallenstein  et  président  depuis  i632  du  conseil  de  la  guerre,  et  relatifs 
aux  négociations  du  duc  de  Friedland  avec  la  Saxe  et  le  Brandebourg  et  aux  événe- 
ments du  banquet  de  Pilsen  ;  —  des  notes  sur  les  armements  de  l'Autriche  contre  la 
Turquie  en  i683;  —  une  correspondance  curieuse  de  Frédéric-Guillaume  Ier  avec  le 
commandant  de  Komorn,  chargé  de  lui  procurer  de  beaux  hommes  pour  sa  «  garde 
de  géants  »  ;  le  roi  de  Prusse  promet  au  commandant  un  ordre  très'  rare,  dit-il,  et 
qui  n'est  donné  qu'aux  étrangers  qui  ont  enrôlé  pour  son  compte  des  hommes  de 
haute  taille;  —  les  lettres  de  Frédéric  II  à  Fouqué,  prises  à  Glatz  (fin);  —  des  do- 
cuments sur  les  négociations  du  colonel  prussien  Gcetzen  avec  Bubna  en  1808  et  sur 
les  combats  livrés  dans  le  Tyrol  en  1809;  —  le  mémoire  d'un  diplomate  anonyme 
sur  la  situation  de  l'Autriche  en  1810,  où  l'on  relèvera  ces  mots  significatifs  qui  sont 
devenus  le  programme  du  gouvernement  autrichien  :  «  Verlegung  des  politischen 
Schwerpunktes  der  Monarchie  nach  Osten  ». 


SOCIÉTÉ  NATIONALE  DES  ANTIQUAIRES  DE  FRANCE 


Séance  du  6  septembre. 

M.  le  Ministre  de  la  Guerre,  en  réponse  à  une  lettre  du  président,  informe  la  So- 
ciété que  la  porte  de  Lille  à  Valenciennes  n'est  pas  actuellement  menacée,  mais  que 


252  REVUE    CRITIQUE   D*HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

la  courtine  intérieure  doit   seule  être  démolie,  et  les  fossés  remplis  par  mesure  hy- 
giénique. 

M.  Courajod  remet  sur  le  bureau  un  exemplaire  -du  catalogue  de  la  collection 
Timbal  récemment  acquise  par  le  Musée  du  Louvre,  et  depuis  la  veille,  exposée  dans 
les  galeries.  Il  lit  ensuite  un  travail  sur  les  objets  d'art  recueillis  par  Alexandre  Le- 
noir  et  dispersés  un  peu  partout.  Il  signale  particulièrement  à  l'attention  un  lion  en 
marbre  devant  accompagner  la  statue  de  l'amiral  Chabot,  exposée  depuis  de  lon- 
gues années  dans  une  cour  de  l'école  des  Beaux-Arts,  et  émet  le  vœu  que  cette  figure 
vienne  retrouver  le  monument  qu'elle  accompagnait  primitivement. 


ACADEMIE  DES  INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du   zer  septembre  1882. 

M.  Lenormant  présente  de  la  part  de  M.  Marmier,  capitaine  d'état-major,  des  vues 
photographiques  de  deux  monuments  importants  de  la  Pouille,  qui  n'avaient  encore 
été  ni  reproduits  ni  même  décrits  nulle  part.  Ce  sont  la  cathédrale  de  Siponte  et 
celle  de  Termoli,  Dans  la  cathédrale  de  Siponte,  construite  avant  la  conquête  du  pays 
par  les  Normands,  à  la  fin  du  xe  siècle  Ou  au  commencement  du  xi*  siècle,  l'archi- 
tecture présente  le  plus  curieux  mélange  des  influences  byzantine  et  arabe.  La  ca- 
thédrale de  Termoli,  au  contraire,  bâtie  après  la  conquête,  au  commencement  du 
xne  siècle,  offre  un  magnifique  spécimen  d'une  architecture  inspirée  de  l'art  roman 
français.  Elle  rappelle  surtout  les  édifices  romans  bourguignons  de  la  région  d'Au- 
tun.Ce  qui  donne  encore  à  cette  église  un  intérêt  particulier,  c'est  qu'elle  porte  sur 
la  façade  une  inscription  qui  fait  connaître  le  nom  de  l'architecte,  Johannes  Gri- 
maldi,  et  le  pape  sous  le  pontificat  duquel  l'édifice  fut  élevé,  Pascal  II  (1099-1118). 

M.  P.-Ch.  Robert  donne  une  seconde  lecture  de  son  mémoire  sur  Gondovald  et  le 
monnayage  au  nom  de  l'empereur  Maurice  Tibère  dans  la  Gaule  méridionale. 

M.  Halévy  lit  un  mémoire  intitulé  :  V Immortalité  de  l'dme  chc\  les  Sémites. 
L'objet  de  ce  mémoire  est  d'établir,  contrairement  à  ce  qu'ont  affirmé  plusieurs  sa- 
vants, que  les  divers  peuples  sémitiques  ont  cru  à  une  survivance  de  l'homme  sous 
une  autre  forme  après  la  mort,  à  une  seconde  existence  dans  un  autre  monde.  A 
l'appui  de  son  opinion,  M.  Halévy  invoque  en  premier  lieu  des  textes  assyriens  en 
caractères  cunéiformes,  où  se  trouvent  de  fréquentes  allusions  à  la  seconde  existence 
et  même  des  descriptions  du  pays  des  morts.  On  trouve,  par  exemple,  dans  ces  textes 
un  récit  mythologique  qui  représente  la  déesse  Astarté  descendant  aux  enfers  pour  y 
chercher  son  amant  Toumouz.  Ailleurs  il  est  question  de  la  félicité  dont  jouit,  dans 
l'éternité,  un  guerrier  mort  glorieusement  sur  le  champ  de  bataille.  On  croyait  aussi 
à  une  résurrection;  certains  dieux  ont  pour  surnom  :  «  Celui  »  ou  «  Celle  qui  fait 
revivre  les  morts.  »  Chez  les  Hébreux,  on  ne  trouve  pas  de  textes  aussi  explicites, 
mais  il  ne  faut  pas,  dit  M.  Halévy,  s'en  étonner.  Ce  qui  nous  est  parvenu  de  la  lit- 
térature hébraïque  ne  représente  pas  toute  la  pensée  de  toute  la  nation  [juive,  mais 
seulement  celle  du  parti  monothéiste,  qui  cherchait  à  substituer  aux  cultes  multi- 
ples du  vieil  Israël  le  culte  d'un  dieu  unique.  Les  livres  de  la  Bible  sont  des  écrits 
f>olémiques;  les  croyances  populaires  des  Juifs  ne  sont  pas  celles  que  ces  livres  déve- 
oppent,  ce  sont  celles  qu'ils  combattent.  Les  ombres  des  morts,  dans  l'ancienne  re- 
ligion polythéiste  des  Juifs,  recevaient  un  culte;  c'en  était  assez  pour  que  les  auteurs 
des  livres  saints  considérassent  cette  idée  des  ombres,  et  des  enfers,   comme  une 

f)réoccupation  funeste,  qu'il  fallait  chercher  à  éteindre  et  à  faire  tomber  en  oubli.  De 
à  leur  silence  presque  absolu  sur  cette  croyance.  Ils  n'ont  pu  pourtant  en  effacer 
toutes  les  traces,  et  M.  Halévy  relève  et  cite  divers  passages  de  l'Ancien  Testament, 
qui  mentionnent  expressément,  ordinairement  pour  les  prohiber,  les  offrandes  aux 
morts,  la  nécromancie,  etc.  Le  plus  remarquable  de  ces  passages  est  le  récit  où  l'on 
voit  la  pythonisse  d'Endor  évoquer  l'ombre  de  Samuel.  Les  Hébreux  ont  cru,  comme 
les  Grecs,  que  l'homme  ne  mourait  pas  tout  entier,  qu'il  subsistait  de  lui  une  om- 
bre; comme  les  Grecs  aussi,  ils  ont  assigné  aux  ombres  un  séjour  particulier,  ils  ont 
cru  à  un  monde  ides  enfers.  Chez  les  Grecs,  ce  pays  des  morts  se  nommait  Yhadès; 
en  hébreu,  c'est  le  schéol.  C'est  à  tort  qu'on  a  prétendu  que  le  mot  schéol  signifiait 
simplement  tombeau.  Des  expressions  comme  :  «  Il  fut  réuni  à  son  peuple  »,  qui 
reviennent  souvent  dans  la  Bible  pour  dire  :  «Il  mourut»,  sont  des  allusions  à  ce 
séjour  des  ombres,  où  l'on  croyait  que  le  mourant  allait  rejoindre  les  siens,  morts 
avant  lui. 

Ouvrage  présenté,  de  la  part  de  l'auteur,  par  M.  Alfred  Maury  :  Chèvkemont 
(Alexandre),  les  Mouvements  du  sol  sur  les  côtes  occidentales  de  la  France  et  parti- 
culièrement dans  le  golfe  normanno-breton.  Julien  Havet. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 
Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  23 


ivafl  sis 

REVUE    CRITIQUE  ,*,, _ f, 

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D'HISTOIRE    ET   DE    LITTERATURE 

na  non  nu  n 



N°  40  -  2  Octobre  —  1882 


Souimaii  •  s  2o».  Collection  de  contes  et  de  chansons  populaires  de  la  librairie 
Leroux  :  Legrand,  Contes  populaires  grecs;  De  Puymaigre,  Choix  de  vieux  chants 
portugais;  Dozon,  Contes  albanais;  Rivière,  Contes  populaires  de  la  Kabylie; 
Léger,  Contes  populaires  slaves.  —  201.  Engelmann,  L'Alcmène  d'Euripide,  — 
202.  Arn.  Schaefer,  Sources  de  l'histoire  grecque  jusqu'à  Polybe.  —  2o3.  Diez, 
Vies  et  œuvres  des  troubadours,  2e  édit.  p.  p.  Bartsch.  —  204.  De  Costa,  Mé- 
moires sur  Verraaano.  —  2o5.  Lettres  de  Charlotte  de  Kalb  à  Jean  Paul  Richler, 
p.  p.  Nerrlich.  —  Chronique.  —  Académie  des  Inscriptions. 


200.  —    Collection    de  contes  et   «le  chanson»  populaires.  Paris,  Ernest 
Leroux,  1881-2,  in-18.  Prix  du  volume  :  5  francs. 
I.  Recueil  de  contes  populaires  grecs  traduits  sur  les  textes  originaux  par  Emileiorrr 

Legrand.  xrx-274  p. 
IL  Romanceiro.  Choix  de   vieux  chants  portugais   traduits  et  annotés    par  lbJngV 
comte  de  Puymaigr»,  Lx-280  p.  inno)  aiîuB-snu 

III.  Contes  albanais  recueillis  et  traduits  par  Auguste  Dozon,  xxvn-264  p. 

IV.  Recueil  de  contes  populaires  de  la  Kabylie  du   Djurdjura,  recueillis  et  tra- 
duits par  J.  Rivière,  vi-2  5o  p.  tiaoladlYJn  ihbi  no 

V.  Recueil  de   contes  populaires  slaves,  traduits  sur  les  textes   originaux   par 

Louis  Léger,  xiv-266  p. 

garnis 

Les  études  de  littérature  populaire,  presque  inconnues  en  France,  y 
jouissent  maintenant  d'une  certaine  faveur.  Si  le  recueil  que  leur  avait 
consacré,  sous  le  nom  de  Mélusine,  une  initiative  intelligente,  mais  ap- 
paremment prématurée,  n'a  pu  prolonger  son  existence  au-delà  de  sa 
première  année,  de  nombreux  symptômes  annoncent  en  leur  faveur 
un  éveil  de  l'attention  publique  qui,  il  faut  l'espérer,  sera  définitif.  L'un 
de  ces  symptômes  est  la  création  de  la  collection  que  nous  annonçons, 
qui  a  vu  surgir  à  côté  d'elle  une  rivale,  conçue  d^illeurs  sur  un  plan  un 
peu  différent,  dont  nous  parlerons  prochainement  aux  lecteurs  de  la 
Revue.  Le  recueil  commencé  l'année  dernière  par  M.  Leroux,  et  qui 
compte  déjà  cinq  volumes,  n'embrasse  pas  le  folk-lore  dans  toute  son 
étendue;  il  se  borne  aux  contes  et  aux  chansons  populaires.  Il  n'y  a 
rien  à  objecter  à  cette  restriction  ;  on  eût  même  fort  bien  pu  se 
borner  à  Tune  des  deux  catégories,  ou  ouvrir  pour  chacune  d'elles  une 
collection  séparée.  Les  contes  dominent  d^illeurs  jusqu'à  présent  : 
quatre  des  cinq  volumes  publiés  leur  appartiennent  en  propre,  ainsi  que 
le  sixième  qui  est  annoncé  [Contes  indiens).  C'est  d'eux  que  je  m'occu- 
perai principalement  aussi,  indiquant  seulement  le  recueil  des  romances 
Nouvelle  série,  XIV.  14 


2  54  REVUE   CRITIQUE 

portugaises  '  traduites  et  annotées  par  M.  le  comte  de  Puymaigre  ;  on  y 
retrouve  le  bon  goût  littéraire  et  l'érudition  solide  de  l'auteur  des  ou- 
vrages que  l'on  connaît  sur  la  littérature  espagnole  et  sur  les  chansons 
populaires  :  les  lecteurs  français  qu'attire  une  poésie  d'un  charme  péné- 
trant et  souvent  un  peu  étrange  et  qui  n'ont  pas  à  leur  disposition  les 
différents  romanceiros  portugais  liront  ce  joli  volume  avec  autant  de 
plaisir  que  de  profit. 

Parmi  les  recueils  de  contes,  deux  surtout  ont  une  haute  valeur,  celui 
de  M.  Dozon  et  celui  de  M.  Rivière.  Ils  ont  été  recueillis  de  la  bouche 
des  Albanais  a  et  des  Kabyles  et  sont  présentés  pour  la  première  fois  au 
public  européen  3  ;  ils  enrichissent  précieusement  le  trésor  déjà  si  grand 
des  matériaux  de  la  mythographie  comparée.Ceuxàqui  nous  les  devons 
ont  de  cette  science  une  idée  inégalement  incomplète  ;  M.  Dozon,  grâce 
aux  travaux  de  Hahn,  en  connaît  les  linéaments  généraux,  mais  il  n'en 
possède  pas  avec  précision  la  méthode  rigoureuse  et  les  résultats  désormais 
acquis.  Il  faut  lui  savoir  gré  des  rapprochements  qu'il  donne  avec  les 
contes  grecs  et  albanais  de  Hahn  ;  il  a  emprunté  avec  raison  à  ce  savant 
l'observation  que  les  contes  se  composent  de  traits  qui  se  retrouvent 
isolés  ou  groupés  de  manières  différentes,  et,  en  signalant  ces  traits  dans 
différents  récits  où  ils  sont  épars,  il  facilite  les  recherches.  Les  contes  en 
eux-mêmes  ne  sont  pas  mauvais,  ils  sont  généralefnent  d'une  conserva- 
tion passable,  d'ailleurs  assez  secs  et  sans  grand  charme.  Ils  paraissent 
(je  suis  en  cela  de  l'avis  de  M.  D.)  être  arrivés  aux  Chkipétars  par  l'in- 
termédiaire des  Slaves  et  des  Grecs  :  on  n'^  trouve  de  national  que  le 
nom  de  koutchédra  et  de  loubie  donné  aux  lamies,  qui  tiennent  presque 
toujours  dans  les  contes  la  place  du  drakos  grec  ou  de  notre  ogre.  C'est 
là  un  fait  qui  se  retrouve  chez  tous  les  peuples  :  en  s'appropriant  les 
contes  merveilleux  venus  de  l'Orient,  chaque  peuple  européen  a  substi- 
tué aux  êtres  surnaturels  qui  y  figuraient  ceux  que  lui  fournissait  son 
propre  folk-lore  :  il  ne  faut  rien  conclure  de  ces  noms  pour  To- 
rigine  des  récits  ;  il  y  a;  en  réalité,  très  souvent  désaccord  ou  au 
moins  diversité  de  provenance  et  d'antiquité  entre  ces  noms  et  les 
contes  où  ils  figurent  ;  c'est  une  observation  qu'il  importe  de  faire  et  qui 
suffit  à  dissiper  bien  des  rapprochements  établis,  d'ordinaire  à  tort,  entre 
la  mythologie  et  la  mythographie,  qui  ont  beaucoup  moins  de  points  de 
contact  qu'on  ne  le  croit.  En  général,  les  êtres  qui  figurent  dans  les 


i.  M.  de  P.  ne  veut  pas  faire  romance  du  féminin,  et  il  en  donne  de  bonnes 
raisons;  mais  outre  que  le  mot  romance  au  fém.  est  consacré  (cf.  Romania,  I,  373), 
il  faudrait  pour  traduire  le  roma nce  des  Espagnols  et  des  Portugais  dire  en  français 
un  roman. 

i.  Quelques-uns  de  ceux  de  M.  Dozon  ont  été  empruntés  par  lui  à  l'Abeille 
clikipe,  journal  albanais  publié  à  Alexandrie. 

3.  M.  Dozon  avait  déjà  imprimé  le  texte  albanais  de  ses  contes  dans  son  Manuel 
de  la  langue  chkipe  (Paris,  Leroux,  1878). 


d'histoire  et  de  LITTÉRATURE  255 

contes  ont  peu  d'importance  mythographique;.  ce  sont  les  événements 
qui  en  ont  un  capital,  et  c'est  surtout  sur  eux  qu'il  faut  faire  porter 
l'effort  de  la  critique  et  de  la  comparaison.  —  Il  y  aurait  naturellement 
bien  des  remarques  à  faire  sur  les  contes  albanais  de  M.  Dozon,  mais  il 
serait  difficile  de  trouver  la  mesure,  et  des  remarques  détachées  seraient 
peu  utiles.  Je  noterai  seulement  que  le  n°  XVïII,  appelé  assez  inexac- 
tement le  Pêcheur,  provient  de  la  légende  d'Alexandre  (voy.  Romania, 
XI),  où  un  œil  humain  remplace  la  feuille;  le  Lion  aux  pièces  d'or 
(XVII)  est  une  altération  fort  maladroite  du  conte  d'origine  indienne, 
mais  déjà  connu  de  l'antiquité,  que  Senecé  a  mis  en  vers  sous  le  nom  du 
Serpent  mangeur  de  kaïmak;  enfin  le  n°  XXI  (Tosko  et  Mosko)me 
paraît  particulièrement  intéressant,  parce  qu'il  ressemble,  et  en  certains 
détails  de  fort  près,  au  tableau  français  de  Barat  et  Haimet.  auquel  je 
ne  connais  pas  d'autre  parallèle  '» 

M.  Rivière,  qui  a  recueilli  les  cinquante-deux  contes  kabyles  qui  for- 
ment le  quatrième  volume  de  la  collection,  n'a  pas  des  idées  fort  nettes 
sur  la  science  à  laquelle  il  apporte  une  si  intéressante  contribution.  Il  dit 
bien  qu'il  a  «  pour  objet  de  fournir  une  nouvelle  matière  pour  l'étude 
comparée  des  croyances  et  des  traditions  populaires  »  ;  mais  il  ajoute 
qu'on  lira  «  avec  intérêt  ces  pages  si  originales,  où  un  peuple  illettré 
trace  à  notre  curiosité  le  tableau  vivant  de  ses  qualités  morales  et  sur- 
tout de  ses  vices  ».  D'après  cette  idée,  il  a  groupé  une  grande  partie  des 
contes  qu'il  a  recueillis  sous  différents  chefs  intitulés  :  Le  vol,  La  ven- 
geance et  la  jalousie,  Le  mensonge,  L'hospitalité  et  Vassistance  pu- 
blique, etc.,  entendant  que  ces  contes  nous  représentent  fidèlement  ces 
différents  aspects  de  la  vie  kabyle.  Mais  la  plupart  d'entre  eux,  coïncidant 
parfois,  jusque  dans  les  détails,  avec  les  contes  d'autres  peuples,  ne  sont 
visiblement  pas  nés  chez  les  Kabyles  et  ne  sauraient,  par  conséquent, 
offrir  un  tableau  exact  de  leur  manière  de  vivre.  Par  exemple,  sur  cinq 
contes  consacrés  au  vol,  le  second,  Ali  g  Icher,  est  une  variante  de 
Ddumling,  fort  curieuse  du  reste,  car  elle  nous  offre  l'intermédiaire  en- 
tre la  version  européenne  et  un  conte  recueilli  chez  un  peuple  africain 
du  Sénégal2;  le  3e,  Les  deux  frères,  est  une  variante  de  l'histoire  de 
Rhampsinite  3  ;  le  40,  le  Juif  infidèle,  est  un  récit  indien  qui,  sous  le 
nom  du  Dépositaire  infidèle,  se  retrouve  dans  La  Fontaine;  le  4e,  Ali 
et  ou  Ali,  quoique  plus  original,  n'est  pas  sans  analogie  avec  des  contes 
européens  (cf.  ci-dessus,  texte  et  note);  le  premier  seul,   Thadhellala, 
paraît  sortir  de  l'imagination  kabyle  ;  mais,  sous  la  forme  où  il  a  été  re- 


1.  On  peut  trouver  quelques    ressemblances,  mais  assez  vagues,  entre  ce  récit  et  le 
n*I,4  des  Contes  kabyles  dont  il  est  parlé  ci-après. 

2.  Voy.  le  conte  teumé  que  j'ai  reproduit  dans  Le  petit  Poucet  et  la  grande  Ourse, 
(Paris,  1873),  à  Y  Appendice. 

3.  J'ai  fait,  il  y  a  longtemps,  un  travail  étendu  sur  cette  histoire,  et  j'espère,  après 
l'avoir  remanié,  le  publier  prochainement. 


256  REVUE   CRITIQUE 

cueilli,  il  est  déplorablement  incohérent.  M.  Rivière  va  certainement 
trop  loin  en  disant  que  «  beaucoup  [des  contes  kabyles]  sont  aborigè- 
nes »;  il  ajoute  d'ailleurs  :  «  Une  étude  comparative  nous  permettrait 
de  retrouver  le  fond  d'un  grand  nombre  d'autres  dans  le  recueil  des 
Mille  et  une  nuits  ou  dans  celui  (?)  des  contes  indiens  ».  Quant  à  la 
«  forme  nouvelle  »  qu'auraient  revêtue  ces  contes  empruntés,  il  ne  faut 
pas  non  plus  en  exagérer  l'importance,  ni  surtout  l'originalité.  Les  con- 
tes qui  forment  le  patrimoine  commun  de  tant  de  peuples  se  sont  assu- 
rément modifiés  dans  leurs  pérégrinations,  mais  les  raisons  de  ces-  chan- 
gements doivent  être  cherchées  presque  toujours  dans  leur  propre 
évolution,  si  l'on  peut  ainsi  dire,  et  non  dans  l'influence  des  milieux  où 
ils  ont  pénétré.  Un  conte  à  l'origine  est  un,  logique  et  complet;  en  se 
transmettant  de  bouche  en  bouche,  il  a  perdu  certaines  parties,  altéré 
certains  traits;  souvent  alors  les  conteurs  ont  comblé  les  lacunes,  rétabli 
la  suite  du  récit,  inventé  des  motifs  nouveaux  à  des  épisodes  qui  n'en 
avaient  plus  ;  mais  tout  ce  travail  est  déterminé  par  l'état  dans  lequel  ils 
avaient  reçu  le  conte,  et  rarement  il  a  été  bien  actif  et  bien  personnel. 
Les  différences  de  mœurs  entre  les  peuples  qui  ont  accueilli  successive- 
ment les  contes  ont  agi  surtout  négativement,  c'est-à-dire  qu'on  a  sup- 
primé les  traits  qu'on  ne  comprenait  pas;  rarement  on  les  a  remplacés 
par  des  traits  correspondants  dans  les  mœurs  nationales  ».  Les  contes  des 
Kabyles  confirment  d'ordinaire  ces  observations  générales  :  les  contes  que 
nous  connaissons  d'ailleurs  se  retrouvent  chez  eux  mutilés,  incomplets, 
décousus,  mais  non  transformés  et  réellement  assimilés.  Au  reste,  il  faut 
toujours  considérer  la  forme  des  contes,  dans  les  recueils  du  genre  de  ce- 
lui de  M.  Rivière,  comme  fortuite  et  individuelle  ;  les  mêmes  récits,  si 
un  autre  conteur  les  avait  faits  au  collecteur,  seraient  souvent  meilleurs, 
plus  complets,  plus  suivis  (ou,  au  contraire,  plus  imparfaits).  Ceux-ci  ne 
sont  pas,  en  général,  remarquables  comme  forme,  et  souvent  ils  sont  à  peu 
près  inintelligibles  ;  M.  Rivière,  et  je  l'en  félicite,  n'a  pas  voulu  les  amé- 
liorer ;  il  les  a  traduits  avec  une  fidélité  scrupuleuse  qui  donne  une  va- 
leur tout  à  fait  scientifique  à  son  recueil  ;  ajoutons  qu'il  a  le  mérite  de 
nous  offrir  les  premiers  échantillons  connus  jusqu'ici  de  la  littérature 
populaire  kabyle.  Au  reste,  si  les  contes  qu'il  nous  donne  n'ont  pas  l'in- 
térêt suivi  et  le  charme  de  narration  qu'on  trouve  dans  beaucoup  de 
contes  européens,  ils  sont  cependant  bien  supérieurs  à  la  plupart  des 
contes  recueillis  chez  les  peuples  moins  civilisés  de  l'Afrique  2  et  plu- 
sieurs se  lisent  avec  un  vrai  plaisir  et  offrent  même  des  traits  de  naïveté 

i.  Cela  est  pourtant  arrivé;  il  y  en  a  un  exemple  fort  intéressant  dans  l'histoire 
du  conte  de  Rhampsinite;  mais,  si  je  ne  me  trompe,  on  reconnaît  là  la  main  d'un 
lettré. 

2.  Comme  je  l'ai  déjà  indiqué,  les  contes  kabyles  forment  parfois  la  transition  en- 
tre les  premiers  et  les  seconds;  ils  confirment  l'hypothèse  d'après  laquelle  ces  con- 
tes recueillis  chez  les  peuples  divers  de  l'Afrique  leur  sont  venus  en  bonne  partie, 
sans  doute  assez  récemment,  par  les  musulmans. 


d'histoire  kt  de  littérature  257 

et  de  poésie  charmante.  M.  Rivière  a  joint  à  ses  contes  des  fables  ■  et  des 
énigmes;  ses  remarques  sur  la  vie  kabyle  présentent  de  l'intérêt  :  on  voit 
qu'il  connaît  à  fond  le  peuple  dont  il  parle.  «  Nous  eussions  aimé,  dit 
l'auteur  dans  la  préface,  à  rencontrer  de  ces.  légendes  nationales  où  se 
trouve  défigurée,  mais  reconnaissable  sous  bien  des  traits,  l'histoire  d'un 
peuple...  Nos  recherches  ont  été  sans  résultat...  A  l'égard  des  souvenirs  et 
des  monuments  du  passé  le  Kabyle  est  un  être  indifférent  à  l'excès  ».  M. 
Rivière  aurait  eu  la  même  déception  s'il  avait  fait  la  même  quête  dans 
n'importe  quel  pays.  Je  crois  qu'on  peut  aujourd'hui  le  proclamer  avec 
une  assez  grande  assurance  :  il  n'y  a  pas  de  tradition  historique  orale  ; 
ce  qui  passe  ou  a  passé  pour  tel  est  de  la  pure  fiction.  Il  semble  bien 
étrange,  au  premier  abord,  que  des  contes  comme  celui  du  trésor  de 
Rhampsinite,  par  exemple,  se  racontent  aujourd'hui  encore  avec  une  fi- 
délité admirable  depuis  la  Sibérie  jusqu'au  Djurjura,  depuis  la  Syrie 
jusqu'à  l'Ecosse,  et  que  ces  peuples  qui  conservent  avec  tant  de  ténacité 
le  récit  d'inventions  fictives  oublient  les  événements  historiques  avec  une 
rapidité  telle  qu'en  deux  ou  trois  générations  on  n'en  retrouve  le  plus 
souvent  aucune  trace  2.  Ce  contraste  est,  je  crois,  explicable  et  a  sa  rai- 
son d'être  dans  la  nature  même  de  l'esprit  humain  :  ce  n'est  pas  ici  le 
lieu  de  l'exposer  telle  que  je  crois  l'apercevoir  ;  je  me  borne  à  constater 
le  fait. 

Le  volume  de  M.  E.  Legrand  ne  contient,  sauf  cinq  communiqués  à 
l'auteur  par  un  ami,  et  un  dû  à  M.  Jean  Pio,  que  des  contes  déjà  publiés  ; 
trots  l'ont  été  en  français  même  par  Buchon  ;  cinq  sont  tirés  du  pré- 
cieux recueil  de  M.  Sakellarios,  et  étaient  déjà  connus  par  la  traduction 
allemande  de  M.  Liebrecht  [Jahrb.  fur  rom.  Literatur);  quatre  sont 
des  contes  grecs  de  la  Terre  d'Otrante  recueillis  par  M.  Morosi  ; 
un,  que  M.  L.  regarde  d'ailleurs  comme  apocryphe3,  a  été  publié  par 
un  «  albano-grec  »,  nommé  Molossos;  enfin  le  dernier,  qui  roule  sur 
le  même  sujet  que  la  Manekine  ou  la  Fille  sans  mains,  a  été  emprunté 
au  recueil  de  légendes  pieuses  du  moine  Agapios  (xvne  siècle  4)  ;  les  dix 

1.  A  vrai  dire,  plusieurs  de  ces  fables  n'en  sont  pas  ;  ainsi  le  n°  1,  Le  roi  et  le 
chacal,  n'est  qu'une  ibrme  très  altérée  du  conte  recueilli  plus  haut  sous  le  titre  de 
Le  singe  et  le  pécheur,  et  ces  deux  contes  appartiennent  au  thème  du  Chat  botté.  Le 
n°  2,  Le  petit  enfant,  est  une  variante,  très  peu  particulière,  du  thème  de  la  Chanson 
du  chevreau. 

2.  A  moins  de  circonstances  exceptionnelles,  comme  un  monument;  encore  le 
plus  souvent  lui  attribue-t-on  une  destination  tout  autre  que  la  vraie.  Les  lieux 
prennent  souvent  aussi  des  noms  d'après  les  événements  dont  ils  ont  été  le  théâtre 
et  rappellent  ainsi  ces  événements  à  la  mémoire.  L'épopée  ne  contient  d'élément 
historique  que  quand  elle  a  pour  base  des  chants  composés  au  moment  des  faits. 

3.  Peut-être  M.  L.  va-t-il  trop  loin  dans  sa  méfiance  contre  cette  pièce,  qui  me 
paraît  ne  pas  déceler  la  fabrication  autantqu'il  ledit,  au  moins  pour  le  fond. 

4.  M.  L.  pense  que  le  récit  d' Agapios  provient  de  quelque  imitation  italienne  du 
roman  français  de  la  Manekine;  mais  les  différences  sont  très  grandes,  et  le  récit  a 
existé  dans  d'innombrables  versions. 


258  REVUE   CRITIQUE  , 

autres  sont  traduits  d'après  des  versions  publiées  dans  un  journal  littéraire 
grec.  M.  L.  a  fait  précéder  ces  contes  de  quelques  remarques,  où  il  met 
surtout  en  relief  les  rapports  qu'ils  présentent  avec  divers  récits  de  la  my- 
thologie grecque.  C'est  un-  point  qui,  même  après  les  excellents  travaux 
de  M.  Schmidt,  demanderait  à  être  soumis  à  une  étude  approfondie;  on 
sait  qu'il  faut  se  méfier  de  plus  d'un  des  textes  qu'on  allègue,  et  que  des 
faussaires,  soit  par  patriotisme,  soit  par  dilettantisme,  se  sont  parfois 
amusés  à  rapprocher  des  contes  modernes  de  mythes  anciens.  Les  contes 
grecs  paraissent  en  réalité,  au  moins  en  grande  partie,  avoir  une  pro- 
venance slave;  quelques  souvenirs  de  l'ancienne  religion  hellénique, 
d'ailleurs  assez  défigurés  (comme  Charos,  les  Néraïdes,  etc.),  y  apparais- 
sent accessoirement,  et  il  n'est  pas  impossible  que  telle  ou  telle  des  aven- 
tures des  dieux  antiques,  souvent  si  semblables  à  nos  contes,  ait  vécu 
jusqu'à  nos  jours  dans  le  souvenir  des  habitants  de  l'ancienne  Grèce. 
Toutefois  il  est  bien  difficile,  quand  on  arrive  aux  cas  spéciaux,  de  l'affir- 
mer à  coup  sûr.  Ainsi,  sur  le  premier  des  contes  qu'il  a  traduits,  le  Sei- 
gneur du  monde  souterrain,  M.  L.  remarque  :  «  On  trouve  dans  ce 
récit  certains  traits  qui  rappellent  la  fable  de  l'Amour  et  Psyché,  telle 
que  la  raconte  Apulée,  et  les  tentatives  de  séduction  exercées  par  la  reine 
remettent  en  mémoire  l'histoire  de  Bellérophon  ».  Mais  une  femme  qui 
se  prend  d'un  amour  coupable  pour  son  serviteur,  et,  repoussée,  l'accuse 
auprès  de  son  mari,  c'est  un  lieu  commun  qui  se  retrouve  partout;  et 
quant  à  la  fable  d'Apulée,  il  n'est  même  pas  certain  qu'elle  soit  grecque 
d'origine,  et  on  lui  trouve  des  pendants  chez  tous  les  peuples  du  monde. 
Les  contes  anecdotiques  ont  parfois  la  vie  plus  tenace  que  les  autres  : 
ainsi  l'histoire  de  la  fille  qui  allaite  son  père  prisonnier  se  rencontre 
dans  un  texte  byzantin  comme  rattachée  à  une  énigme,  et  c'est  ainsi 
qu'elle  nous  apparaît  dans  le  septième  conte  de  M.  Legrand.  Les  contes 
grecs  n'offrent  d'ailleurs  pas  de  traits  bien  distinctifs,  sauf,  en  beaucoup 
de  cas,  quand  les  collecteurs  ne  les  ont  pas  arrangés,  une  barbarie  qui 
sans  doute  les  rapproche  souvent  de  la  forme  primitive,  et  notam- 
ment une  férocité  qui  pourrait  bien  parfois  leur  appartenir  en  propre. 
Ainsi  l'avant-dernier  conte,  la  Princesse  et  sa  Nourrice,  fort  curieux 
en  ce  qu'il  a  un  dénouement  à  peu  près  identique  à  un  épisode  de  Tris- 
tan, nous  montre  une  princesse  enfermée  dans  une  tour,  devenant  grosse 
d'un  passant,  et,  pour  faire  disparaître  l'enfant  qu'elle  a  mis  au  monde, 
le  faisant  cuire  et  le  mangeant  avec  sa  nourrice,  qu'elle  essaie  ensuite  de 
tuer  pour  cacher  leur  secret;  le  conteur  ne  semble  d'ailleurs  pas  la  blâ- 
mer et  termine  en  disant  que  la  princesse  et  la  nourrice,  réconciliées,  vé- 
curent heureuses  ensemble.  Dans  le  poème  breton,  l'atrocité  est  beau- 
coup moins  grande,  et  si  Iseut  veut  également  faire  périr  Brangain  pour 
être  sûre  qu'elle  ne  la  trahira  pas,  ce  n'est  pas  un  secret  aussi  horrible 
qu'elle  partage  avec  elle.  Comme  on  trouve  dans  le  conte  grec,  à  côté 
de  ce  festin  révoltant,  la  substitution  d'une  suivante  (différente  de  la 
nourrice)  à  la  reine  dans  le  lit  du  roi  la  première  nuit  de  ses   noces 


d'histoire  et  de  littérature  259 

comme  dans  Tristan),  il  semble  bien  qu'on  ait  ici  deux  histoires  sou- 
dées ensemble  et  originairement  étrangères  l'une  à  l'autre;  le  forgeron 
qui  joue  un  rôle  dans  la  première  partie  doit  aussi  avoir  une  raison 
d'être.  —  Sauf  les  contes  publiés  par  Buchon,  Sakellarios  et  Hahn, 
ceux  qu'a  traduits  M.  L.  étaient  pour  ainsi  dire  inconnus  aux  sa- 
vants occidentaux,  et  on  doit  lui  savoir  beaucoup  de  gré  de  les 
avoir  réunis  ;  mais  combien  plus  précieuse  que  ce  recueil  sera 
la  collection  dont  il  parle  dans  la  préface,  la  collection  formée  par 
lui-même  en  Grèce!  «  Nous  avons  en  portefeuille,  dit-il,  plus  de  trois 
cents  contes  et  légendes,  qui  présentent  tous  un  vif  intérêt  tant  sous 
le  rapport  philologique  et  littéraire  qu'au  point  de  vue  de  l'his- 
toire des  croyances  populaires  ».  Espérons  que  cette  collection,  accompa- 
gnée d'une  traduction,  ne  tardera  pas  à  être  publiée;  l'annonce  qui  en 
est  faite  éveillera  certainement  chez  tous  les  mythographes  le  plus  vif 
désir  de  la  posséder. 

On  peut  considérer  comme  suffisamment  accessibles  aux  travailleurs 
les  recueils  de  contes  écrits  dans  les  langues  romanes  et  germaniques,  et, 
au  moins  au  point  de  vue  scientifique,  il  semble  inutile  de  les  traduire. 
Il  n'en  est  pas  de  même  des  contes  asiatiques,  et,  pour  l'Europe,  des 
contes  écrits  dans  les  langues  celtiques,  basque,  finno-lapones,  magyare, 
turque,  grecque,  albanaise,  lithuanienne  et  même  slaves.  Dans  un  demi- 
siècle,  les  savants  seront  peut-être  obligés  de  savoir  au  moins  le  russe,  ce 
qui  leur  permettra  de  comprendre  les  autres  langues  slaves,  comme  au- 
jourd'hui ils  sont  obligés  de  savoir  l'allemand,  ce  qui  leur  permet  de  lire 
plus  ou  moins  aisément  les  livres  écrits  dans  les  autres  idiomes  germa- 
niques. Ceux  qui  s'occupent  de  littérature  populaire,  notamment,  ne 
pourront  absolument  s'en  passer,  tant  est  riche  et  varié  le  trésor  du  folk- 
lore slave.  Pour  le  moment,  c'est  un  trésor  fermé  au  moins  pour  le  plus 
grand  nombre  d'entre  eux,  et  ils  sont  fort  reconnaissants  à  ceux  qui  en 
extraient  quelque  chose  à  leur  intention.  C'est  ce  qu'a  voulu  faire 
M.  Léger  dans  son  recueil  de  contes  slaves,  et  il  était  plus  capable  que 
personne  de  bien  s'acquitter  de  cette  tâche.  Il  possède,  en  effet,  tous  les 
dialectes  des  diverses  branches  de  la  grande  famille  slave,  et  il  a  pu  nous 
donner  des  contes  traduits  du  serbe,  du  tchèque,  du  russe,  du  dalmate, 
du  slovaque,  du  polonais,  du  bulgare,  du  croate  et  du  petit-russien.  En 
outre,  il  est  au  courant  des  études  de  mythographie  et  en  état,  par  con- 
séquent, d'apprécier  ce  qui  est  intéressant  et  authentique.  J'avoue  que, 
étant  données  ces  conditions  favorables,  j'attendais  de  M.  Léger  plus  et 
mieux  que  n'apporte  le  volume  qu'il  nous  a  donné.  On  y  sent  trop  une 
préoccupation  qui  se  montre  dans  la  plupart  des  travaux  français  consa- 
crés aufolk-lore,  qui  entrave  leur  succès  loin  de  le  favoriser,  qui  a,  par 
exemple,  contribué  à  empêcher  la  Mélnsine  de  prospérer,  et  qui  se  re- 
trouve dans  la  conception  même  de  la  collection  dont  je  rends  compte  : 
je  veux  parler  de  l'idée  de  plaire  au  grand  public  en  même  temps  qu'aux 


20O  REVUE    CRITIQUE 

savants.  Cette  confusion,  qui  produit  presque  toujours  des  œuvres  gau- 
ches et  bâtardes,  n'est  pas  d'ailleurs  propre  à  ce  sujet;  elle  se  retrouve  en 
France  dans  beaucoup  d'autres  domaines,  et  elle  y  a  partout  de- fâchera 
ses  conséquences.  M.  Léger,  à  mon  sens,  au  lieu  de  faire  un  choix,  né- 
cessairement bien  restreint,  dans  les  recueils  de  contes  de  neuf 'peuples 
slaves,  aurait  rendu  un  plus  grand  service  en  traduisant  entièremerft'Çrip 
de  ces  recueils  et  en  y  joignant  des  notes  comparatives  renvoyëfit',"j)êu'£ 
chaque  forme,  aux  contes  parallèles  contenus  dans  d'autres  collections 
slaves.  Au  moins  le  savant  français  ou  allemand  qui  travaillerait  avec 
un  tel  livre  saurait  au  juste  ce  qu'il  a  sous  les  yeux.  En  outre,  les  recueils 
slaves  ont  une  valeur  très  inégale;  les  derniers  recueils  russes,  surtout 
celui  d'Afanasief,  sont  incomparablement  les  plus  précieux  et  méri- 
taient une  préférence  presque  exclusive.  Les  autres  ont  été  formés  à  une 
époque  où  le  point  de  vue  purement  scientifique  n'avait  pas  prévalu,  et 
souvent  sous  l'influence  de  préoccupations  littéraires  ou  patriotiques 
qui  en  rendent  la  forme  suspecte;  quelques-uns  ne  méritent  aucune 
confiance.  M.  Léger  n'a  pas  appliqué  à  ces  contes  une  critique  assez  sé- 
vère. Ainsi  il  nous  apprend  qu'il  a  supprimé  «  certains  détails  fantaisis- 
tes »  ajoutés  par  le  collecteur  au  conte  dalmate  de  la  Fille  du  Doge, 
conte  croate  ;  mais  le  conte  tout  entier,  s'il  a  quelque  chose  de  populaire 
au  fond,  est  tellement  arrangé,  moralisé,  etc.,  qu'il  ne  méritait  pas  d'être 
traduit.  Le  berger  et  le  dragon,  conte  slovaque,  est  aussi  bien  peu  po- 
pulaire, au  moins  dans  beaucoup  de  traits,  et  n'offre  d'ailleurs  guère 
d'intérêt  :  quoi  de  plus  fade  que  de  nous  raconter  une  histoire  fantasti- 
que pour  terminer  en  nous  apprenant  que  c'était  simplement  un  rêve? 
Blanche-Neige,  prétendu  conte  russe,  est  visiblement  une  fiction  de  let- 
tré. Plus  d'un  autre  conte  donnerait  lieu  à  des  observations  analogues. 
A  côté  de  cela,  naturellement,  beaucoup  de  contes  excellents,  empruntés 
surtout  à  Afanasief  et  à  Roudjenko  (petit-russien).  Il  me  semble  cepen- 
dant que  le  choix,  là  encore,  puisqu'on  voulait  choisir,  aurait  pu  être 
fait  autrement.  Il  était  inutile,  par  exemple,  de  resservir  des  contes  tra- 
duits en  anglais  par  M.  Ralston  et  d'après  lui  en  français  par  M.  Brueyretyl 
et  en  éliminant  les  récits  indiqués  ci-dessus,  on  aurait  eu  de  la  place 
pour  d'autres  qui  valent  mieux.  Je  voudrais  que  M.  Léger  nous  fit  pro- 
fiter plus  complètement  de  ses  rares  connaissances,  et  que,  choisissant  tel 
ou  tel  recueil  russe  ou  petit-russien,  il  le  traduisît  soit  en  entier,  soit  au 
moins  en  indiquant  les  contes  qu'il  ne  croirait  pas  devoir  traduire.  Il 
pourrait  ainsi  donner  à  la  collection  Leroux  plus  d'un  volume,  qui, 

I 

5TI525HJ 

i.  N'ayant  pas  les  ouvrages  en  question   sous  la  main,  je  ne  puis  affirmer  qUfcil 
mes  souvenirs  ne  me  trompent  pas.  Je  remarque  aussi  que  j'ai  donne,  dans  Le  petit: 
Poucet  et  la  grande  Ourse,  la  traduction  du  conte  d'Afanasief  sur  ce  sujet;  il  était 
inutile  de  le  retraduire.    Mais  ce  qui  est  plus  grave,   c'est  que  dans  sa  traduction f. 
M.  Léger  a  omis,  sans  en  prévenir,  deux  traits  importants  (le  premier  stfrtdu'r}  :p^raJr  * 
l'étude  mythographique  du  récit;  il  faut  espérer  que  c'est, là  uaifittl\is&W^    tOJjnwn 

tilnsîbi  -t:»bIoW  .  stiùe  aupfeiïj) 


d'histoire  et  de  littérature  261 

moins  agréable  peut-être  que  le  premier  pour  les  gens  du  monde,  serait 
assurément  mieux  accueilli  par  les  mythograpb.es. 

Je  souhaite,  en  terminant,  que  cette  collection,  qui  contient  déjà  des 
choses  si  précieuses,  se  continue  activement.  Le  champ  est  vaste,  pres- 
que illimité.  Les  contes  de  tous  les  pays  peuvent  y  entrer,  et  nos  provin- 
ces en  gardent  encore  assez  d'inédits  pour  tenter  plus  d'un  collecteur. 
Il  faut  aussi  désirer  que  les  volumes  ne  soient  pas  de  simples  recueils  de 
matériaux.  La  France  compte,  dès  aujourd'hui,  des  mythographes  de 
premier  ordre,  comme  M.  Cosquin,  capables  de  commenter  avec  toute 
la  compétence  voulue  les  contes  qu'ils  publient.  Espérons  que  leur 
exemple  sera  suivi,  et  que  ces  études,  trop  abandonnées  aux  dilettantes, 
seront  traitées  de  plus  en  plus  fréquemment  avec  la  méthode  rigoureuse 
et  les  connaissances  étendues  qu'elles  exigent.  C'est  par  là  qu'elles  s'im- 
planteront solidement  chez  nous,  et  que  les  travaux  français  prendront 
un  rang  honorable  à  côté  de  ceux  que  l'on  consacre  à  la  mythographie, 
avec  tant  de  science  et  de  zèle,  en  Allemagne,  en  Russie,  en  Italie  et  en 


Portugal. 


G.  P. 


201.  —  Richard  Engelmann.  Deiti-sege  aeu  Euripide».  I.  Alkmene.  (Supplé- 
ment littéraire  du  programme  du  Friedrichs  Gymnasium).  Berlin,  Weidmann. 
1882.  In-40  20  p. 

Alcmène  est  une  tragédie  d'Euripide  dont  Stobée  et  d'autres  compila- 
teurs nous  ont  conservé  quelques  fragments  assez  insignifiants. 

A  défaut  d'indications  précises,  le  bon  sens  aurait  dû  faire  présume 
qu'Euripide  n'avait  pu  traiter  dans  le  mythe  d'Alcmène  que  le  même 
épisode  qui  a  fourni  la  matière  de  Y  Amphitryon  de  Plaute  et  de  Mo- 
lière. Alcmène,  comme  Léda,  comme  Sémélé,  n'est  célèbre  que  pour 
avoir  plu  un  jour  à  Jupiter,  et  aucun  autre  incident  dans  cette  vie  assez 
obscure  ne  se  prête  aux  exigences  d'une  action  dramatique.  D'ailleurs, 
si,  dans  les  vers  parvenus  jusqu'à  nous,  rien  n'imposait  absolument  une 
conjecture  aussi  naturelle,  rien  non  plus  ne  venait  la  contredire.  Mal- 
heureusement, cette  fois,  comme  dans  d'autres  occasions,  l'explication  du 
bon  sens  était  beaucoup  trop  simple  pour  contenter  les  philologues  : 
aussi  l'ont-ils  rejetée  presque  unanimement  pour  y  substituer  les  hypo- 
thèses les  plus  variées  et  les  plus  arbitraires.  Jugeant  que  les  complica- 
tions qui  résultent  de  la  visite  nocturne  de  Jupiter,  étaient  plutôt  du 
domaine  de  la  comédie  que  de  la  tragédie,  on  s'est  ingénié  à  découvrir 
quelque  autre  événement  où  Alcmène  eût  été  mêlée,  si  peu  que  ce  fût. 
Plusieurs,  sous  prétexte  que  le  titre  de  notre  tragédie  est  omis  sur  le 
marmor  Albanum,  ont  imaginé  qu'il  faisait  double  emploi  avec 
quelque  autre  :  Welcker  identifiait  Alcmène  avec  le  Rhadamanthe,  dont 


C«?  lOTrilHCl 

202  RKVUR   CRITIQtJE 

J'inauthcntiatéest  certaine;  Hartung  avec  le  Licymnios.  Bref,  la  ques- 
tion, embrouillée  comme  à  plaisir,  en  était  venue  à  un  tel  rjbiBV'^o'bV- 
curité  que  Wagner,  dans  son  édition  des  fragments  d'Euripide; 'tôflïS?- 
sait  ingénument  qu'en  l'absence  d'une  solution  vraiment'sJâii$£féa,nitl#/(ïl 
aimait  mieux  s'abstenir  de  toute  explication.  IJ;VJ;  ai^° 

Sur  ces  entrefaites,  en  1837,  Millingen  publia,  dans  les  Nouvelles 
Annales  de  l'Institut  archéologique  de  Rome,  un  vase  d'origine 'hi- 
canienne,  rapporté  d'Italie  par  le  peintre  Tresham,  et  appartenant  ac- 
tuellement à  une  collection  particulière  à  Castle- Howard  en  Angle- 
terre '.  La  face  de  ce  vase  qui  nous  intéresse  représente  une  scène 
mythologique  dont  la  lecture  est  rendue  facile  par  les  inscriptions  pla- 
cées au-dessus  des  figures  principales.  Sur  un  bûcher,  terminé  à  la  par- 
tie supérieure  en  forme  d'entablement  dorique,  est  assise  une  femme  ri- 
chement vêtue,  que  la  légende  appelle  Alcmène.  Un  personnage  barbu, 
Amphitryon,  et  un  jeune  homme  désigné  sous  le  nom  d'Anténor,  sont 
occupés  à  mettre  le  feu  au  bûcher  à  l'aide  de  brandons  allumés.  Mais 
deux  carreaux  de  foudre  viennent  de  tomber  à  leurs  pieds,  et,  pendant 
qu'ils  s'arrêtent  effrayés,  Jupiter  apparaît  dans  les  airs,  le  sceptre  à  la 
main  et  couronné  de  lauriers.  En  l'apercevant,  Alcmène  lève  la  main 
droite  au  ciel,  avec  une  expression  de  stupeur  et  de  joie.  Sur  Tordre  du 
dieu,  deux  jeunes  divinités  (les  Hyades)  versent  sur  le  bûcher  l'eau  conte- 
nue dans  deux  amphores,  tandis  qu'un  arc-en-ciel,  brillant  à  travers  une 
épaisse  tempête,  annonce  le  rétablissement  de  la  paix  sur  terre  et  dans 
l'atmosphère.  Enfin,  dans  l'angle  droit  du  Qso),gysÎov,  la  figure  de  l'Aurore 
(AQE)  fait  pendant  à  celle  de  Jupiter  et  complète  la  composition.  Cette 
peinture,  d'une  exécution  médiocre,  mais  qui  paraît  inspirée  par  un  ori- 
ginal de  valeur,  est  signée  du  nom  d'un  artiste  inconnu,  Python. 

Rien  ne  pouvait  être  plus  clair  que  le  sens  de  la  peinture  publiée  par 
Millingen.  L'attitude  des  principaux  personnages,  celle  d'Alcmène  en 
particulier,  montrait  à  l'évidence  qu'il  s'agissait  d'une  exécution  par  le 
feu,  et  cette  exécution,  bien  qu'aucun  poète  n'en  fît  mention,  s'expli- 
quait à  merveille  :  Amphitryon,  convaincu  de  l'infidélité  de  sa  femme, 
exaspéré  par  ses  dénégations,  l'a  condamnée  au  dernier  supplice,  et  c'est 
au  moment  où,  de  concert  avec  quelque  parent  d'Alcmène,  il  s'apprête 
à  accomplir  la  sentence,  que  Jupiter  survient  pour  lui  donner  la  clé  du 
mystère  et  lui  révéler  l'honneur  auquel  sa  maison  est  appelée. 

Le  croira-t-on  ?  Ici  encore  le  parti  pris  et  des  scrupules  érudits  ont  em- 
pêché les  savants  a'y  voir  clair,  et  leur  ont  fait  substituer  à  une  explica- 
tion qui  crevait,  pour  ainsi  dire,  les  yeux,  l'interprétation  la  plus  alam- 
, ■■■    — — 

1.  Nouvelles  Annales,  tome  I  (i836- 1837),  pp.  487  sq.  I. a  belle  reproduction  en 
couleurs  forme  la  planche  X  des  Monuments  inédits  publiés  à  la  suite  de  ce  recueil. 
Disons  en  passant  que  l'atlas  de  ces  planches  manque  à  la  Bibliothèque  nationale 
et  dans  les  autres  bibliothèques  publiques  de  Paris.  Nous  l'avons  trouvé  à  la  biblio- 
thèque de  l'Institut,  relié  à  la  suite  des  Momnncnii  inediti  des  Annali  delV  InstiLUto 
archeologico.  -(£P>  -H  <is-> 


d'histoire;  et  de  littérature  263 


os 


biquce  qui  fût  possible.  Millingen  s'est  souvenu  que,  d'après  une 
tradition  obscure  rapportée  par  le  mythographe  Antoninus  Liberalis,  le 
corps  d'Alcmène  fut,  après  sa  mort,  enlevé  au  ciel  par  Jupiter,  et  rem- 
placép,.^^  son  cercueil,  par  une  grosse  pierre.  De  là  à  un  enlèvement 
opéré  avant  la  crémation,  il  n'y  avait  qu'un  pas;  Millingen  n'hésite  pas 
^kfrABfhjUj,  çt,  voilà  comment  la  peinture  de  Python  se  trouve  baptisée 
r Apothéose  d'Alcmène.  Millingen  accompagnait  la  description  du  mo- 
nument de  rapprochements  fort  érudits  où  l'archéologie  et  la  mytholo- 
gie avaient  à  glaner  ;  mais  cet  échafaudage  de  suppositions  aurait  dû  s'é- 
crouler devant  deux  faits:  i°  la  posture  d'Alcmène  dans  la  peinture 
n'est  pas  celle  d'une  morte  ;  20  suivant  la  tradition  constante  des  au- 
teurs anciens,  Alcmène  survécut  à  Amphitryon  et  épousa  en  secondes 
noces  Rhadamanthe  '. 

Il  a  fallu  néanmoins  attendre  jusqu'en  1872  pour  que  l'on  reconnût 
la  fausseté  de  l'interprétation  de  Millingen.  A  cette  époque,  M.  Engelmann 
publia  dans  les  Annali  delV  Instituto  une  peinture  assez  rudimentaire, 
mais  visiblement  issue  de  la  même  origine  que  celle  de  Python.  On  y 
voyait  un  jeune  homme  — l'Anténor  du  vase  de  Millingen  —  s'élançant, 
un  brandon  à  la  main,  vers  une  femme  qui  s'est  réfugiée  sur  un  autel  et 
lève  les  bras  au  ciel  dans  une  attitude  de  terreur.  Deux  divinités,  apparais- 
sant dans  un  arc -en-ciel,  versent  des  hydries  pleines  d'eau  sur  la  flamme 
qui  la  menace2.  En  présence  de  ce  monument,  d'une  signification  en- 
core plus  claire  que  le  précédent,  il  n'était  plus  possible  de  soutenir  que 
la  scène  commentée  par  Millingen  se  rattachât  à  une  cérémonie  funé- 
raire. M.  Engelmann  a  eu  le  mérite  de  le  démontrer  le  premier,  mais  il 
ne  s'est  pas  contenté  de  ce  résultat  trop  facile.  Remontant  à  la  source 
même  de  la  légende  figurée  sur  nos  deux  vases,  il  s'est  demandé  s'il  ne 
fallait  pas  reconnaître  dans  cette  variante  du  mythe  d'Alcmène  l'influence 
d'un  poète  tragique.  Ce  point  de  départ  admis  —  et  rien  n'est  moins  té- 
méraire —  il  n'a  pas  eu  de  peine  à  conclure  que  l'auteur  en  question  ne 
pouvait  être  qu'Euripide,  seul  assez  populaire  pour  exercer  une  influence 
appréciable  sur  l'art  du  111e  siècle,  et  que  la  composition  de  Python  pou- 
vait être  regardée  comme  une  illustration  d'Alcmène  3.  Ainsi  disparais- 
saient du  même  coup  la  fantaisie  archéologique  de  Millingen  et  les  fan- 
taisies littéraires  de  Welcker  et  de  Hartung. 

Cette  partie  de  la  thèse  de  M.  E.  ne  va  pas  sans  quelques  difficultés. 
Je  n'attache  qu'une  médiocre  importance  à  celle  qu'on  pourrait  tirer  des 

— ; 

1.  Voyez  notamment  les  Héraclides  d'Euripide.  Si,  dans  l' Hercule  furieux  du 
même  auteur,  Alcmène  ne  figure  pas  auprès  de  son  mari,  il  n'en  résulte  pas  né- 
cessairement qu'elle  soit  morte,  mais  seulement  qu'elle  n'a  pas  suivi  Amphitryon  en 
todLÇEngelmann,  p.  7,  n.  4). 

2.  Annali,  187a,  pp.  5-i8  et  iav.  d'agg.  A.  L'original  est  à  Londres. 
iH&lidlest  juste  d'ajouter  que  Millingen  avait  déjà  émis,  d'une  façon  très  dubitative, 
il  est  vrai,  l'idée  d'une  relation  entre  la  peinture  de  Python  et  notre  tragédie  (loc. 
cit.,  p.  492). 


^^4  SHU1  RKVUE   CRITIQ«¥2lH'a 

j.frqgm^qts  4e, la.  tragédie  :  leur  insignifiancfe^îQommode  de  toutesrles 
jf^pfétations,  et,  en  effet,  M.  E.  éprouve  peu  d'embarras»  ià  teSr.plfer 
au?;  besoins  de  sa  thèse.  Mais  on  peut  s'étonner  qu'Euripide,  si  amateur 
qu'on  le  sache  de  coups  de  théâtre,  de  machinerie  et  de  moyens  violente, 
ait  osé  porter  sur  la  scène  un  spectacle  aussi  atroce  quccelnai^datisBp- 
plice  d'Alcmène,  ajoutons  :  aussi  peu  conforme  à  rindulgence>rre{liâci|ve 
des  mœurs  athéniennes  pour  la  femme  adultère.  On  peut  s'étonnep^ussi 
de  ne  rencontrer  chez  les  auteurs  aucune  allusion,  même  lointaine, là 
cette  nouveauté:  Aristophane  aurait  dû  y  trouver,  ce  semble,  une  ample 
matière  à  satire  '.  i  ;  i j L q  avl  ztnqas  23l 

Ces  objections  sont  sérieuses  et  M.  E.,  qui  s'efforce  de  les  écarter,  n'en 
a  pas  méconnu  la  gravité.  Sans  entrer  dans  le  détail  d'une  discussion  un 
peu  minutieuse, 'je  dirai  que  toutes  les  difficultés,  si  réelles  qu'elles 
soient,  ne  peuvent  contrebalancer,  à  mon  avis,  la  force  de  conviction 
presque  irrésistible  qui  résulte  du  rapprochement  de  la  peinture  de  Py- 
thon avec  un  passage,  jusqu'à  présent  peu  intelligible  du  Rudens  de 
Plaute  : 

Proh  di  immortales  !  tempestatim  quious  modi 
Neptunus  nobis  nocte  hac  misit  proxuma!  „..^t/r 

Detexit  ventus  villam...  Quid  verbis  opust? 
j-aup^Slg  oii(yi>'.Non  ventus  fuit,  verum  Alcumena  Euripidi  %. 
n(}Cette  tempête  épouvantable,  assez  célèbre  pour  fournir  au  comique 
Romain  une  allusion  comprise  de  son  public,  ne  saurait  être,  comme  le 
veut  Welcker,  un  simple  trait  emprunté  à  un  récit  épisodique  de  la 
tflajissance  d'Hercule.  Il  s'agit  évidemment  d'une  tempête  qui  joue  un 
rôle  dans  Faction  de  la  pièce,  et  nous  en  avons  précisément  l'image 
dans  la  foudre,  l'arc-en-ciel,  le  vent  et  la  grêle  (figd'réi^'p^^  ide^gros 
points)  du  vase  de  Millingen. 

Maintenant,  cette  tempête  et  la  scène  même  du  bûcher  Se'  pèftSSfëm- 
elles  réellement  sous  les  yeux  du  spectateur,  ou  se  contentait-ôW'de  faire 
entendre  derrière  le  théâtre  le  mugissement  de  la  foudre  et  du  vent,  et 
un  messager  venait-il  ensuite  raconter  les  détails  de  l'intervention  mira- 
culeuse du  deus  ex  machina?  M.  E.  penche  pour  la  première  hypo- 

: 

i.  Deux  passages  cités  par  M.  E.  (Lysist.,  269;  Thesmoph.,  726)  ne  sont  guère 
concluants.  L'invention  du  bûcher  peut  paraître  moins  choquante  quand  on  la  rap- 
proche de  la  mort  d'Evadné  dans  les  Suppliantes  et  des  vers  bien  connus  de  Y  Her- 
cule furieux  (vv.  240  sq.),  mais  je  me  refuse  à  voir  autre  chose  qu'une  coïncidence 
fortuite  avec  l'histoire  de  Crésus  (Hérodote,  I,  87)  et  l'épisode  du  siège  de  Platées 
(Thuc,  II,  77)  que  rappelle  M.  Engelmann.  De  même,  la  grossesse  apparente  d'Alc- 
mène  dans  la  peinture  de  Python,  la  ressemblance  prétendue  entre  Jupiter  et  Am- 
phitryon (le  dessin  du  profil  dans  la  chromolithographie  est  tout  à  fait  différent),  la 
relation  entre  la  couronne  de  lauriers  du  dieu  et  le  torulus  aureus  qu'il  porte  dans 
la  pièce  de  Plaute  (Amph.,  v.  144),  me  paraissent  autant  de  subtilités.  En  regardant 
trop  longtemps  un  dessin,  on  finit  par  y  découvrir  toute  sorte  de  finesses  qui  n'exis- 
tent que  dans  l'imagination,  comme  ces  archéologues  fatigués  qui,  voyageant  en 
Grèce,  aperçoivent  une  inscription  dans  chaque  fissure  d^ rp,ehfirB j   (  p2  ço  ,yy    ^o\ 

2.  Rudens,  vv.  1-4.  nflBl  Vj  MofofcW  zéiqs  (.vil  'c 


d'histoire  et  DE  LITTÉRATURE  2Ô5 

thèse;  la  seconde  serait  peut-être  plus  conforme  au  caractère  général  du 
théâtre  grec  et  rendrait  suffisamment  compte  du  passage  du  Rudens  ' . 
Maisi ce  n'est  là  qu'un  point  secondaire  :  sur  l'ensemble  de  la  question, 
l'argumentation  de  M.  E.  me  paraît  décisive,  et  son  ingénieuse  trou- 
vaille bstidu.  meilleur  augure  pour  la  suite  des  Etudes  sur  Euripide 

oxqittfiiL'nous  promet. 

i82uDepuis  Bœckh,  il  ne  devrait  plus  être  permis  de  contester  l'utilité  de 
l'alliance  de  la  philologie  et  de  l'archéologie  figurée  ;  il  me  semble  que  des 
travaux  comme  celui  de  M.  Engelmann  sont  de  nature  à  en  convaincre 
les  esprits  les  plus  rebelles  2. 

Théodore  Reinach. 

aiî  floiaarJDaibsnjj'b  lu    ■ 

aalb'up  ealbVi 

noiioivnoa  ab  sd* 

202. —  Abrïsz  «1er  Quellcnknnde  der  Grlr  clilschen  und  Rœmischen 
«icseliielite.  Ersto  Abteilung,  «îrieeliisclie  Gcachldite  his  auf 
R'olyklos,  von  Arnold  Sch^efer.  Troisième  édition,  Leipzig,  Teubner.  1S82. 
1  ri  p.  in-8°. 

Nous  sommes  heureux  d'annoncer  cette  troisième  édition  d'un  travail 
si  utile,  si  commode  pour  tous  ceux  qui  s'occupent  d'histoire  grecque; 
la  première  édition  est  de  mai  1867,  la  deuxième  de  janvier  1873.  On 
voit  que  le  succès  a  été  rapide  pour  ces  simples  «feuilles  »,  destinées 
seulement,  dans  la  pensée  de  M.  Schœfer.Tà  guider  les  étudiants. 

M,  S.  a  classé  les  auteurs  d'après  l'ordre  chronologique,  il  établit 
quatre  périodes  :  i°  depuis  les  temps  les  plus  reculés  jusqu'à  Hérodote; 
20  de  Périclès  à  Philippe  de  Macédoine  ;  3°  l'époque  de  la  puissance 
macédonienne;  40  les  derniers  temps  des  états  grecs,  les  Alexandrins. 
Chacune  de  ces  divisions  comprend  des  subdivisions  dans  lesquelles 
les  auteurs  sont  rangés  cette  fois  d'après  le  genre  de  leurs 
œuvres;  ainsi,  dans  la  troisième  période,  celle  de  la  puissance  macédo- 
nienne, sont  indiqués  par  ordre  :  les  histoires  générales  d'Ephore,  de 
Théopompe,  etc.,  —  les  mémoires  concernant  Alexandre  et  les  Diado- 
ques,  —  les  histoires  qui  forment  la  suite  de  celle  d'Ephore,  —  les 
Atthides,  —  l'histoire  sicilienne  —  enfin  les  œuvres  d'auteurs  qui,  sans 
être  proprement  des  historiens,  n'en  forment  pas  moins  une  des  sources 
importantes  pour  l'histoire,  les  orateurs  et  les  philosophes. 

1.  Nous  aurions  donc  ici  une  scène  entièrement  analogue  à  celle  qui  termine  \'I~ 
phigénie  à  Aulis.  C'est  peut-être  une  preuve  à  ajouter  à  celles  que  Patin  et  M.  Weil 
ont  fait  valoir  en  faveur  de  l'authenticité  tant  discutée  de  ce  dernier  morceau.  Le 
dénouement  d'Alcmènea  pu  inspirer  Python  fou  l'original  imité  par  Python)  comme 
les  vers  1  $49-1 55o  A'Iphigênic  ont  inspiré  Timanthe,  sans  que  cependant  la  scène 
du  sacrifice  se  passât  sur  le  théâtre. 

2.  Voyez  un  récent  exemple  des  étroites  relations  de  la  poésie  et  de  l'art  antique 
au  sujet  du  mythe  d'Erichthonius  {Ann.  dell'  Inst.  18  7 9  tav.  d'agg.  F  comparé  avec 
Ion,  vv.  25  sq.).  La  théorie  de  ces  rapports  a  été  exposée  par  Robert  {Phil.  Unters., 
5e  liv.)  après  Welcker  et  Jahn. 


REVUE    CRrTIQUBOTaiH'a 

La  notice  consacrée  à  chaque  auteur  comprend  d'abord  une  bibliogra- 
phie indiquant  les  travaux  les  plus  importants  des  savants  modernes,  les 
principales,  éditions,  les  travaux  spéciaux  des  anciens  sur  l'auteurjcp 
question.  Après  cette  notice,  M.  S.  donne  des  extraits  empruntés  isoit/à 
l'auteur  lui-même,  soit  aux  autres  écrivains  ;  ces  extraits  constituent  mos 
sources  pour  connaître  la  vie  de  l'auteur,  ses  ouvrages,  sa  manière 
d'écrire  et  de  penser,  la  valeur  qu'on  lui  attribuait,  les  jugements  qu'on 
portait  sur  ses  œuvres,  etc.  lùùvubn  eînarn 

Comme  le  dit  M.  Scheefer,  la  nature  du  travail  interdisait  des  citations  et 
des  indications  trop  nombreuses,  il  fallait  se  borner  à  donner  seulement 
le  plus  important;  nous  croyons  que  M.  S.  l'a  donné.  Nous  nous  per- 
mettrons cependant  d'indiquer  quelques  travaux  qui  auraient  pu  très 
bien  figurer  dans  l'ouvrage  de  M.  Schaefer,  même  tel  qu'il  l'entendait  : 
dans  la  liste  des  recueils  d'inscriptions,  celui  du  British  Muséum  (The 
collection  of  ancient  Greek  inscriptions  inthe  British  Muséum,  pars  I, 
Attica,  Oxford,  1874)  ;  —  article  Xénophon,  O.  Riemann,  Qiia  rei 
criticœ  tract andœ  ratione  Hellenicon  Xenophontis  t ex tus  constituen- 
dus  sit,  Paris,  1879;  —  article  tragédie,  H.  Weil  De  tragœdiarum 
grœcarum  cum  rébus  publicis  conjunctione,  Paris,  1844;  —  article 
DurisdeSamos,  Horstig,  Qiiœstionum  Duridearum  pars  I,Stolp,  1862; 
—  J.  G.  Droysen,  Zu  Duris  und  Hieronymos,  Hermès,  XI,  p.  458, 
H.  Kalleuberg,  Die  Que  II  en  fur  die  Nachrichten  der  alten  Histori- 
ker  uber  die  Diadochenkœmpfe  bis  \um  Tode  des  Eumenes  und  der 
Olympias,  Philologus,  XXXVII,  p.  193;  —  article  Phylarchos,  Paul 
Foucart,  Mémoire  sur  un  décret  inédit  de  la  ligue  Arcadiennc  en 
l'honneur  de  l'Athénien  Phylarchos  dans  les  Mémoires  présentés  par 
divers  savants  à  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres,  pre- 
mière série,  t.  VIII,  1874,  pp.  93-119;  — article  Callimaque,  on  aurait 
pu  mentionner  la  grande  édition  de  O.  Schneider,  2  vol.  Leipzig, 
1870-73,  la  question  des  llhav.eq  est  traitée  t.  II,  p.  297  ;  —  à  l'article 
Polémon,  ajouter  E.  Egger,  Polémon  le  voyageur  archéologue,  dans 
les  Mémoires  d'histoire  ancienne  et  de  philologie,  Paris,  186 3, 
pp.  i5-57;  J:>aul  Foucart,  Renseignements  nouveaux  sur  trois  écrivains 
grecs  du  11e  siècle  avant  notre  ère.  Polémon  le  Périégète,  Hégésianax 
d 'Alexandrie  de  Troade,  Philippos  de  Pergame,  dans  la  Revue  de 
Philologie,  N.  S.,  t.  II,  1878,  p.  214. 

Albert  Martin. 

-no-j  hvj?.  h  .v/auW.  lonrus  fi 

rn/fiTJ  un  10  '  ub 

•  aâii  3b  saiCl 

ao3.  —  Ixbcn  undi  Warke  der  Troubadours;  ein  Beitrag  zur  nœliern 
KenntnissdesMittelallers,  von  Fr.  Diez.  Zweitevermehrtc  Auflagc  von  K.Bartsch. 
Leipzig,  Barth,  1882.  In-8",  xvi-5o6  p.  Prix  :  12  fr.  5o. 

an   xoiCI  z'iualIifi'Q  .akt 

Les  «  Vies  et  œuvres  des  Troubadours  »  sont  l'un  des  premiers  ouvra- 
ges de  Diez.  L'édition  originale,  et  unique  jusqu'à  la  réimpression  que 


n'HISTOHtE    ET    DR    UTTKHATURR 

vient  de  nous  donner  M.  Bartsch,  est  de  1820.  Pourtant,  entre  tous  les 
travaux  consacrés  aux  études  romanes  par  l'illustre  professeur  de  Bonn, 
ipendant  le  cours  d'une  vie  longue  et  laborieuse,  il  n'en  est  aucun  qui  ait 
aussi  peu  vieilli.  Ainsi,  la  Grammaire  des  langues  romanes,  qui  restera 
toujours  l'œuvre  capitale  de  Diez,  exigerait  maintenant  une  refonte  com- 
plète, bien  que  la  dernière  édition  revue  par  l'auteur  date  de  dix  ans  à 
peine.  C'est  qu'en  effet  dans  le  domaine  de  la  linguistique  romane  les  élé- 
ments nouveaux  d'informations  se  sont,  depuis  quelques  années,  accu- 
mulés dans  des  proportions  formidables,  en  même  temps  que  les  méthodes 
d'études  s'amélioraient  de  plus  en  plus.  L'art  de  composer  des  biographies, 
au  contraire,  n'est  pas  susceptible  de  perfectionnements  bien  notables, 
et,  en  ce  qui  concerne  les  Troubadours,  les  sources  dont  on  dispose  au- 
jourd'hui ne  sont  pas  très  sensiblement  plus  nombreuses  qu'en  1829.  Aussi 
pouvais-je  dire,  il  y  a  dix-huit  ans,  en  parlant  de  la  Poésie  des  Trou- 
badours de  Diez  (1826)  et  des  Vies  et  œuvres  des  Troubadours,  du  même: 
«  Ces  deux  ouvrages  sont  le  fondement  des  études  provençales,  car  la 
«  publication  du  cours  de  Fauriel  et  celle  de  plusieurs  volumes  de  ÏHis- 
«  toire  littéraire  ne  leur  ont  point  fait  perdre  de  leur  nouveauté,  et 
«  maintenant  encore  ils  sont,  sur  la  plupart  des  points,  au  courant  de 
«  la  science.  Si  on  voulait  en  donner  une  nouvelle  édition,  il  n'y  aurait 
«  point  à  les  refondre  :  il  suffirait  d'en  compléter  certaines  parties  main- 
«  tenant  mieux  connues,  grâce  à  des  publications  récentes  "...  » 

Je  ne  voudrais  plus  actuellement  mettre  sur  le  même  pied  la  Poésie 
des  Troubadours  et  les  Vies  et  œuvres  des  Troubadours.  Le  premier  de 
ces  deux  ouvrages  comprend  un  très  grand  nombre  de  matières.  Il  ne 
traite  pas  seulement  de  la  poésie  lyrique  —  ce  qui  est  proprement  la 
poésie  des  troubadours  —  il  passe  en  revue  tous  les  genres  de  la  poésie 
provençale,  et  suit  jusque  dans  les  littératures  étrangères  l'influence 
exercée  par  chacun  de  ces  genres.  Or,  dans  certaines  parties  de  ce  vaste 
domaine,  dans  la  poésie  religieuse  notamment  et  dans  la  poésie  narrative, 
pour  ne  citer  que  deux  genres,  il  a  été  fait  bien  des  découvertes  depuis 
1826,  époque  de  la  publication  de  la  Poésie  des  Troubadours.  On  ne 
connaissait,  en  1826,  ni  Flamenca,  ni  Blandin  de  Cornouailles,  ni  Fe- 
rabras,  ni  Daurel  et  Béton,  ni  le  poème  de  la  guerre  de  Navarre,  pour 
ne  citer  que  quelques  titres.  Du  poème  de  la  croisade  albigeoise  et  d'au- 
tres ouvrages  également  importants  on  ne  pouvait  se  former  qu'une  idée 
très  insuffisante.  Je  crois  donc  que  lorsque  M.  Bartsch  rééditera,  comme 
il  annonce  devoir  le  faire  (p.  xv)  la  Poésie  des  Troubadours,  il  sera  con- 
duit, s'il  veut  faire  une  œuvre  réellement  utile,  à  ajouter  au  travail  de 
Diez  de  très  nombreux  compléments.  Au  contraire,  dans  le  domaine 
étroitement  circonscrit  des  «  Vies  et  œuvres  »,  il  ne  s'est  pas  produit, 
depuis  le  temps  de  Raynouard,  de  découvertes  d'une  importance  capi- 
tale. D'ailleurs  Diez  ne  s'en  était  pas  tenu  aux  textes  édités  dans  le 
iju  c  muii ..- .  . , 1 

1 .  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes,  6e  série,  I,  281 .    ' 


2Ô8  REVUE    CRITIQUE 

Choix  des  poésies  originales  des  Troubadours  ou  dans  le  Parnasse 
occitanien  de  Rochegude,  il  avait  copié  à  Paris  beaucoup  de  pièces  iné- 
dites ',  dont  il  a  donné,  en  original  ou  en  traduction  allemande,  un  as- 
sez grand  nombre  d'extraits  dans  son  livre.  En  somme,  il  n'était  pas  be- 
soin de  bien  grands  efforts  pour  remettre  à  peu  près  au  courant  de  la 
science  de  1882  le  livre  publié  par  Diez  en  1829.  M.  Bartsch  paraît 
avoir  été  du  même  avis.  Il  respecte  scrupuleusement  le  texte  original,  ce 
dont  on  ne  peut  que  le  louer;  il  n'en  retranche  rien,  sinon  quelques 
citations  de  textes  qui,  maintenant,  n'ont  plus  d'intérêt;  il  n'y  ajoute 
que  les  notes  les  plus  indispensables,  qu'il  place  entre  crochets.  Ces  no- 
tes rectifient  brièvement  les  erreurs  ou  renvoient  à  des  travaux  dans  les- 
quels telle  ou  telle  partie  du  sujet  se  trouve  avoir  été  traitée  à  nouveau. 
C'est  une  annotation  très  sobre,  un  peu  maigre  parfois.  Elle  se  tient 
trop  dans  la  dépendance  des  travaux  publiés  depuis  Diez,  sans  même  en 
tirer  tout  le  parti  possible.  11  y  a  dans  le  livre  de  Diez,  si  remarquable 
qu'il  soit  pour  le  temps  où  il  a  paru,  un  assez  grand  nombre  de  petites 
erreurs,  surtout  d'erreurs  historiques,  qui  n'ont  jamais  été  relevées,  mais 
qu'il  appartenait  au  nouvel  éditeur  de  corriger.  En  un  mot,  on  souhai- 
terait dans  l'annotation  un  peu  plus  d'originalité.  Malgré  tout,  cette 
nouvelle  édition  sera  la  bien  venue,  et  si  le  commentaire  pèche  par  ex- 
cès de  sobriété,  reconnaissons  que,  somme  toute,  la  sobriété  est  une  qua- 
lité, et  une  qualité  qui  se  fait  rare  dans  les  études  romanes,  où  on  prend 
de  plus  en  plus  l'habitude  de  disserter  à  perte  de  vue  sur  des  riens. 

P.  M. 


204.  —  Verrazano  tlie  Expïorei-»   being    a    V indication  of  bis  Lettei- 

and  Voyage9  with  an  Examination  of  the  Map  of  Hieronimo  da  Verrazano,  and 
a  Dissertation  upon  the  Globe  of  Ulpius,  to  wich  is  prefixed  a  Bibliography  of 
the  subject,  by  B.  F.  De  Costa.  New-York.  A.  S  Barnes  and  C°,  1880,  vi-82  p. 
in-40,  avec  5  cartes  et  2  portraits. 

Les  sous-titres  indiquent  suffisamment  le  contenu  de  cet  ouvrage  où 
l'auteur  de  la  Découverte  de  l'Amérique  avant  Chr.  Colomb  et  des  Scan- 
dinaves dans  VEtat  du  Maine  a  réuni,  après  les  avoir  remaniés,  quatre 
mémoires  déjà  publiés  dans  The  Magasine  of  American  History,  dont 
il  est  devenu  le  directeur.  Il  ne  faut  donc  pas  s'attendre,  d'après  le  titre 
général,  à  trouver  dans  ce  recueil  une  biographie  du  grand  navigateur; 
on  a  si  peu  de  notions  sur  lui  que  le  tout  pourrait  tenir  en  quelques  pa- 
ges; M.  de  Costa  y  ajoute,  dans  sa  préface,  un  document  curieux  qui  a 
été  découvert  aux  archives  de  Rouen  par  M.  Gosselin  et  copié  par  l'ar- 
chiviste M.  de  Beaurepaire  ;  c'est  un  acte  du  29  septembre  1 525,  par 

1.  Diez  avait  fait  relier  ces  copies,  qui  formaient  dans  sa  bibliothèque  un  assez  gros 
volume  in-40. 


D*HrSTOn?E    ET    DE   LITTÉRATURE  2Ô() 

lequel  Zanobus  de  Rousselay,  bourgeois  et  marchand,  demeurant  à 
Rotfffî&  ^ortè'-baùtion^ôVir'messire  Jehan  de  Verrassaiie',i'à/''refïèi0cTér 
permettre  à  ce  dernier  de  défendre  dans  un  procès  à' Im  fa^ëHfë  par0 
Gûilkumé'Eynoult,  dit  Cornette,  de  Dieppe,  pour  le  paiement  de  95iV-J 
vtffcsI.tSéj  renseignement  joint  à  d'autres  contribuera  à  jeter  quelque  jour 
sût 'Jèettë);pbysionomie  encore  si  obscure.  Elle  l'est  à  tel  point  que  des 
savants  profonds,  comme  MM.  Henry  C.  Murphy  et  B.  F.  de  C,  l'en- 
visagent sous  des  aspects  diamétralement  opposés.  Le  premier  prétend  ' 
que  Giovanni  da  Verrazano  n'a  pas  fait  les  découvertes  qu'on  lui  at- 
tribue; le  second  s'efforce  de  prouver,  dans  son  premier  chapitre,  que 
la  lettre  publiée  sous  le  nom  de  ce  navigateur  n'est  pas  une  supercherie; 
les  petites  différences  constatées  entre  le  texte  de  Ramusio  et  celui  de 
Garli  tiennent,  croit-il,  à  ce  que  ni  l'un  ni  l'autre  n'est  l'original,  mais 
que  tous  deux  sont  traduits  du  français,  langue  dans  laquelle  était 
écrite,  selon  l'espagnol  Pinello  (1629),  ^a  relation  traduite  par  Ramu- 
sio ;  et,  pour  corroborer  cette  opinion,  il  soutient  que  Jehan  Allefonsce, 
l'auteur  d'une  cosmographie  inédite,  terminée  en  1 545,  par  Raulin  Seca- 
lart,  a  connu  le  texte  français  de  la  lettre  adressée  de  Dieppe  à  Fran- 
çois Ier,  par  Verrazano,  le  8  juillet  1524,  quelques  jours  après  son 
retour  du  nouveau  monde  ;  le  voyageur  et  le  géographe  emploient  en 
effet  les  mêmes  traits,  et  à  peu  près  dans  le  même  ordre,  pour  la  descrip- 
tion de  l'Amérique  du  Nord,  quoique  les  expressions  soient  passablement 
différentes;  en  conséquence,  on  ne  pourrait  douter  que  celui-ci  n'ait  ern1-1 
prunté  ces  traits  à  celui-là,  s'il  n'avait  lui-même,  en  1542,  visité  la  côte 
septentrionale  des  Etats-Unis,  en  descendant  jusqu'au  420  de  L.  N.  ;  il 
n'avait  donc  qu'à  rapporter  ce  qu'il  avait  observé  lui-même,  sans  se  faire 
plagiaire  de  Verrazano,  comme  l'en  accuse  M.  de  Costa. 

Si  nous  ne  partageons  pas  en  ce  point  l'opinion  du  savant  auteur,  nous 
aimyfrslà>'ft?coln,naîtTfe1cftre',  dans  le  chapitre  suivant,  il  a  trouvé  ou  repro- 
duit d'excellents  arguments  pour  prouver  la  véracité  de  la  lettre  contes- 
tée; il  fait  surtout  valoir  la  conformité  des  descriptions  de  Verrazano 
avec  celles  données  postérieurement  par  d'autres  explorateurs  et  avec  l'é- 
tat réel  des  lieux.  Ici,  la  connaissance  qu'il  a  du  pays  et  son  érudition 
bibliographique  lui  ont  été  d'un  grand  secours  ;  aussi,  dans  la  plupart  des 
cas,  réfute-t-il  solidement  les  objections  de  M.  Murphy.  Une  des  plus 
grandes  difficultés  de  ce  travail  est  l'absence  d'indications  précises  dans 
la  lettre  de  l'explorateur;  il  ne  donne  que  fort  rarement  la  latitude 
entre  le  340  où  il  aborda  dans  la  Caroline  septentrionale  et  le  5o°  où  il 
cessa  de  côtoyer  la  Terre  des  Bretons  pour  regagner  la  France.  Le  li- 
bretto  contenant  le  rapport  scientifique,  qui   était  joint  à  la  lettre  de 

b  iop  xifehua Jn 

-ici  TBq  ôiqc  ~~~     '  r 

•yjgçDaçig  tPyh^-fâWfàffi-Pf  Verrazano  ;  a  Chapter  in  the  Early  History  of  Mari- 
time Discovery  in  America,  New-York,  1875,  in-8°.  Cet  ouvrage  n'est  malheureuse- 
ment pas  dans  le  commerce,  et  c'est  regrettable,  car  la  fausseté  de  la  thèse  qui  y 
est  soutenue  n'empêche  pas  qu'il  ne  contienne  beaucoup  de  bons  renseignements. 


2JQ  REVUK   CRITIQUE 

Verrazano,  a  malheureusement  disparu  sans  laisser  de  trace,  si  ce  n'est 
dans  la  carte  dressée  en  029  par  Hieronimo  da  Verrazano,  le  frère  de 
Giovanni,  d'après  les  données  de  ce  dernier  et  d'après  des  cartes  anté- 
rieures.  Notre    auteur  loue   fort  cette    mappemonde,    si   exacte  pour 
l'époque  qu'il  fallut  un  siècle  pour  y  apporter  de  sérieuses  améliorations 
en  ce  qui  concerne  la  côte  nord-américaine,  et  il  en  conclut  avec  raison 
qu'elle  doit  être  basée  sur  une  réelle  exploration  de  ces  parages.  Il  en 
a  donné  une  réduction  et  il  a  reproduit  à  une  plus  grande  échelle,  avec 
les  noms,  la  côte  nord-américaine.  Ceux-ci  sont  parfois  difficiles  à  lire 
et  à  interpréter  ;  il  serait  donc  injuste  de  critiquer  un  premier  essai 
de  déchiffrement  ;  il  vaut  mieux  que  chacun  apporte  son  contingent 
pour  cette  interprétation;  pour  notre  part,  nous  choisirons,  par  exem- 
ple, entre  les  deux  leçons  données  par  M.  de  C.  pour  une  même  lé- 
gende en  deux  lignes,  celle  qui  est  la  plus  logique  et  nous  lirons  : 
terra  onde  ha  mala  gente  (terre  où  il  y  a  de  mauvaises  gens),  au  lieu  de 
terra  onde  mue  ha  gente,  où  l'espagnol  mucha  se  trouverait  seul  de  cette 
langue  entre  trois  mots  italiens.  La  lettre  de  Giovanni  da  Verrazano  et 
la  cosmographie  de  Jehan  Allefonsce  placent,  en  effet,  un  peuple  barbare 
et  méchant  dans  les  parages  septentrionaux.  Terra  onde  ne  peut  signi- 
fier terre  profonde  (deep  land)  et  n'a  aucun  rapport  avec  Rio  Hondo  ou 
Fondo  (rivière  profonde)  des  cartographes  espagnols,  d'où  viendrait  le 
nom  de  la  baie  Fundy,  selon  une  ingénieuse  conjecture  de  notre  auteur. 
M.  de  C.  a  aussi  été  le  premier  à  faire  remarquer  que  beaucoup  de  noms 
de  la  carte  de  H.  da  Verrazano  sont,  malgré  leur  forme  italienne,  em- 
pruntés à  des  localités  françaises  situées  sur  la  route  de  Dieppe  à  la  Ro- 
chelle, ports  fréquentés  par  les  deux  frères  Verrazano.  11  montre  aussi 
que  l'île  Luisa,  ainsi  appelée  d'après  la  régente,  mère  de  François  Ier, 
est  devenue,  par  suite  d'une  confusion   entre  la  mère  et  la  première 
femme  de  ce    monarque  ou  bien  par  suite  d'une  mauvaise   lecture, 
Claudia  et  même  Brisa  ou  Briso  ;  en  un  mot,  il  a  donné  beaucoup  de 
bonnes  indications  pour  l'intelligence  de  la  mappemonde  en  question. 
Mais  le  principal  objet  de  ce  troisième  mémoire  est  de  montrer  l'in- 
fluence occulte  ou  avouée  des  Verrazani  sur  la  cartographie  du  xvie  siècle 
et,  par  suite,  de  prouver  la  réalité  du  voyage  de  Giovanni  da  Verrazano. 
Le  globe  construit  à  Rome  en  1 542,  par  un  certain  Euphrosynus  Ulpius, 
pour  le  cardinal  Marcellus  Cervinus  de  Spanniochi  (plus  tard  le  pape 
Marcel  II)  est  un  des  monuments  géographiques  où  cette  influence  est 
le  plus  visible.  Découvert  en  1859  chez  un  marchand  d'antiquités  à 
Madrid,  il  n'a  pas  encore  été  totalement  reproduit;  M.  de  Costa  en  a 
publié  l'hémisphère  situé  des  deux  côtés  de  la  fameuse  ligne  de  démarca- 
tion tracée  par  le  pape  Alexandre  VI,  et  il  l'a  décrit  dans  son  quatrième 
et  dernier  mémoire,  où  l'on  trouve,  comme  ailleurs,  des  explications 
pleines  de  sagacité,  avec  des  pages  éloquentes  sur  les  services  rendus  à  la 
géographie  par  les  Italiens  et  des  paroles  sympathiques  pour  l'œuvre 
d'exploration  et  de  colonisation  de  la  France.  Malgré  quelques  incor- 


d'histoire  et  de  littérature  271 

rcctions  et  des  fautes  d'impression, comme  Nicolas  Parrenat,  lord  Gran- 
ville  (Perrenot,  seigneur  de  Granvelle),  l'ensemble  de  ces  études  élucide 
bien  des  questions  relatives  à  la  Verrazane,  comme  les  étrangers  eux- 
mêmes  ont  appelé  la  Nouvelle-France,  et  démontre  que  les  doutes  éle- 
vés dans  ces  dernières  années  sur  l'authenticité  de  la  lettre  de  Giovanni 
da  Verrazano  n'ont  pas  le  moindre  fondement. 

E.  Beauvois. 


205.  —  ISi-iefe  von  Charlotte  von  Kalb  an  Jean  Paul  unil  deasen 
Gattin,  herausgegeben  von  Dr.  Paul  Nerrlich.  Berlin,  Weidmann.  1882.  In-8°, 
x  et  190  p.  4  mark. 

On  trouvera  dans  ce  volume  les  lettres  écrites  par  Charlotte  de  Kalb 
la  «  Titanide  »,  la  Linda  du  Titan,  à  Jean  Paul  Richter  et  à  la  femme 
de  celui-ci.  Charlotte  de  Kalb,  comme  Emilie  de  Berlepsch,  Joséphine 
de  Sydow,  Caroline  de  Feuchtersleben,  la  comtesse  de  Schlabrendorf, 
Caroline  Mayer  et  tant  d'autres  femmes  sentimentales  dont  M.  Paul 
Nerrlich  nous  a  parlé  dans  un  précédent  volume  ',  conçut  pour  Jean- 
Paul  la  plus  vive  passion  ;  un  soir,  après  un  souper  chez  Herder,  elle 
déclara  son  amour  à  l'auteur  d'Hesperus  et  lui  proposa  le  mariage.  Jean- 
Paul  trouvait  que  Mme  de  Kalb  «  avait  deux  grandes  choses:  de  grands 
yeux,  comme  il  n'en  avait  pas  encore  vu,  et  une  grande  âme  »  -,  elle 
parlait,  disait-il,  avec  le  même  accent  que  Herder  dans  ses  Lettres  sur 
l'humanité  ;  il  admirait  son  éloquence  et  la  flamme  intérieure  qui  la 
brûlait;  mais  elle  ne  répondait  pas  à  ses  «  rêves  »  ;  il  soupirait,  écrit-il  à 
son  fidèle.  Otto,  après  le  repos,  après  l'idylle  et  la  vie  calme  de  Joditz;  la 
passion  orageuse  et  géniale  de  Mme  de  Kalb  l'effrayait.  Il  «  dit  non  à 
cette  âme  si  haute  et  si  ardente.  »  Les  lettres  que  publie  M.  N.  et  qui 
sont  «  peut-être  les  plus  importants  témoignages  que  nous  possédons  sur 
Charlotte  »,  nous  montrent  d'abord  le  bonheur  que  Mme  de  Kalb  trou- 
vait dans  son  amour  exalté  pour  cet  être  «  immortel  »  (p.  9);  mais  le 
ton  change,  après  le  refus  de  Jean-Paul  et  son  mariage  avec  Caroline 
Mayer  ;  le  malheur  fond  sur  Mme  de  Kalb  ;  elle  est  ruinée  ;  elle  devient 
presque  aveugle;  il  faut  qu'elle  vive  de  son  travail;  elle  fait  de  la  bro- 
derie et  des  dentelles.  Néanmoins  elle  est  restée  en  correspondance  avec 
Jean-Paul;  le  commerce  de  lettres,  renoué  en  1802  avec  le  célèbre  ro- 
mancier et  sa  femme,  —  ce  livre  intéressant,  dit  Mme  de  Kalb,  dont  elle 
n'a  lu  que  le  titre  (p.  83),  —  dure,  avec  quelques  interruptions,  jusqu'en 
1821.  Mme  de  Kalb  s'intéresse  vivement  aux  œuvres  de  Jean-Paul  ;  elle 
lui  demande  conseil;  elle  lui  confie  ses  plans  d'avenir,  ses  spéculations 
désastreuses,    ses    soucis    toujours   croissants;  elle    lui   parle  de   son 


1.  Jean  Paul  und  seine  Zeitgenossen.   Berlin,  Weidmann,  1876. 


272  REVUE    CRITIQUE 

entourage,  des  écrivains  du  temps,  de  la  société  de  Berlin.  La  lec- 
ture de  ses  lettres  offre  donc  un  vif  intérêt.  Il  est  vrai  que  le  style 
de  Mme  de  Kalb  manque  d'agrément  et  de  grâce  ;  elle  n'écrit  pas  simple- 
ment ;  la  plupart  de  ses  lettres  sont  emphatiques,  lourdes  et  obscures; 
mais,  comme  le  fait  observer  M.  N.,  elles  renferment  des  pensées  ingé- 
nieuses, des  saillies  spirituelles,  des  sentiments  élevés  qui  com- 
pensent, à  là  rigueur,  ces  défauts.  Les  lettres  de  Mffie  de  Kalb  ont  été 
libéralement  communiquées  à  M.  N.  par  M.  Ernest  Fôrster,  de  Mu- 
nich; M.  N.  en  a  fixé  la  chronologie  avec  autant  d'exactitude  qu'il  était 
possible;  il  a  rétabli  l'orthographe  et  la  ponctuation,  toutes  deux  fort 
capricieuses  dans  les  lettres  de  Charlotte  ;  il  a  mis  au  bas  des  pages  des 
notes  concises  qui  nous  renseignent  sur  les  ouvrages  ou  les  passages  de 
Jean-Paul,  sur  les  événements  et  les  publications  dont  il  est  question 
dans  la  correspondance  de  la  célèbre  Titanide  ;  ajoutons  que  l'écriture 
de  Mme  de  Kalb  est  très  difficile  à  lire,  —  indéchiffrable,  disait  Charlotte 
elle-même  —  ;  il  faut  donc  remercier  M.  Nerrlich  d'avoir  mené  à  bonne 
fin  la  publication  de  ce  recueil;  mais  la  tâche,  si  délicate  qu'elle  fût,  ne 
pouvait  qu'être  bien  remplie  par  l'homme  d'Allemagne  qui  connaît  le 
mieux  Jean-Paul. 

A.  C. 


CHRONIQUE 


FRAN.CE.  —  M.  le  marquis  de  Queux  de  Saint-Hilaire  a  publié  dans  la  collection 
du  «  Cabinet  du  bibliophile  »  (Jouaust.  In-8°,  vu  et  277  pp.  12  fr.)  les  Fables  du  très 
ancien  Esope  mises  en  rithmefrançoise  par  Gilles  Corrozet,  d'après  un  exemplaire  de 
la  première  édition  de  1542  (Bibliot.  Nationale,  n°  Y,  6543, réserve).  La  seconde  édi- 
tion date  de  deux  ans  plus  tard  (1544)  et  n'est  pas  la  reproduction  textuelle  de  celle  de 
1542;  Corrozet  y  a  fait  de  nombreuses  corrections,  que  M.  de  Queux  de  Saint-Hi- 
laire a  relevées  et  reproduites  à  la  fin  du  volume  ;  «  ces  corrections  et  ces  variantes, 
qui  changent  souvent  des  vers  entiers,  sont  assez  généralement  heureuses  »  (  Va- 
riantes, pp.  265-271);  une  troisième  édition,  imprimée  à  Lyon  par  Jean  de  Tournes 
en  1 583  —  les  deux  premières  ont  été  imprimées  â  Paris  par  Denis  Janot,  —  contient 
vingt-trois  fables  de  plus  que  les  deux  éditions  précédentes,  et  reproduit,  pour  le 
reste,  le  texte  de  la  première  édition  de  1542  ;  elle  renferme,  en  outre,  une  Vie  d'E- 
sope extraicte  de  Volaterran  et  autres  autheurs  que  l'éditeur  actuel  a  réimprimée  à 
la  fin  de  sa  publication  (pp.  s55-263).  «  L'intérêt  de  ces  fables,  dit  M.  de  Queux  de 
Saint-Hilaire  dans  sa  préface,  réside,  dans  la  grande  variété  des  rythmes  employés 
par  Corrozet  et  dans  sa  naïveté....  Quelquefois  Corrozet  se  met  en  scène;  il  s'inté- 
resse à  ses  personnages  ;  il  relie  parfois  entre  elles  deux  ou  trois  fables  qui  se  sui- 
vent dans  son  recueil,  comme  par  exemple  les  fables  2,  le  loup  et  l'agneau,  et  6, 
le  loup  et  la  grue,  où  c'est  l'os  de  l'agneau  qui  est  resté  dans  la  gorge  du  loup  et  qui 
l'étrangle...  »  —  L'éditeur  espère  que  sa  réimpression  sera  favorablement  accueillie 
des  amateurs;  dans  ce  cas,  elle  «  pourra  servir  de  point  de  départ  à  un  recueil  eu- 


d'histoire  et  de  littérature  273 

rieux  des  différents  fabulistes  qui  ont  été,  au  xvi°  et  au'  xvne  siècle,  les  précurseurs 
et  les  contemporains  de  notre  La  Fontaine  ». 

—  M.  Victor  Jeanvrot,  substitut  du  procureur  général  près  la  cour  d'Angers,  vient 
de  publier  une  réédition  d'un  livre  d'un  des  plus  remarquables  criminalistes  du  xvie  siè- 
cle, Pierre  Ayrault,  Ordre  et  instruction  judiciaire  ;  Ayraultfait  connaître  dans  cet  ou- 
vrage l'organisation  de  la  justice  criminelle  en  France  dans  la  seconde  moitié  du 
xvie  siècle;  M.  Jeanvrot  a  fait  précéder  cette  réédition  d'une  étude  sur  l'histoire  de 
l'ancienne  procédure  criminelle  en  France.  (Paris,  Cotillon.  In-ib",  5  fr.) 

—  L'avocat  au  parlement  de  Bretagne,  Pierre  Belardeau,  sieur  de  la  Grée,  adressa 
à  Henri  IV  un  Bref discours  des  misères  delà  province  de  Bretagne,  de  la  cause  d'icelle 
et  du  remède  que  samajestê  y  a  apporté  par  le  moyen  de  la  paix  (Lyon.  in-8°,  1598). 
La  seconde  édition  de  cet  opuscule  parut  en  1617  à  Paris,  sous  le  titre  de  Polyarchie, 
c'est-à-dire  tableau  de  la  domination  exercée  par  plusieurs.  M.  Olivier  de  Gourcuff 
a  publié  sur  cette  Polyarchie  de  Pierre  Belardeau  une  «  étude  historique  et  litté- 
raire »  (Nantes,  Forest  et  Grimaud.  In-8°,  28  p.),  où  il  analyse  l'œuvre  de  l'avocat 
breton,  —  mais  sans  mentionner  la  première  édition  de  1698. 

—  L'évêque  d'Autun,  Ad.  Perraud,  membre  de  l'Académie  française,  vient  de  pu- 
blier le  discours  qu'il  prononça,  le  il?  décembre  1866,  comme  professeur  en  Sor- 
bonne,  lors  de  la  réintégration  du  chef  du  cardinal  de  Richelieu  (seul  reste  authen- 
tique des  dépouilles  violées  en  1793)  dans  son  tombeau  en  l'église  de  la  Sorbonne. 
Comme  l'indique  le  titre  de  la  brochure  (Gervais.  In-8°,  57  pp.  2  fr.),  le  P.  Adolphe 
Perraud  étudie  surtout  dans  ce  discours  le  cardinal  de  Richelieu  comme  évêque  et 
théologien  et  protecteur  des  lettres. 

—  René  du  Plessis  de  la  Roche-Pichemer,  marquis  de  Jarzé  et  baron  du  Plessis- 
Bourrée  (1613-1672),  l'imprudent  amoureux  d'Anne  d'Autriche  et  le  Fou  des  fous  de 
la  Fronde,  vient  de  trouver  un  biographe  en  M.  E.  Pavie  (notice  gr.  in-8°  de  35  p. 
extraite  delà  Revue  de  l'Anjou).  M.  Pavie  raconte  la  vie  de  Jarzé,  ses  belles  actions 
militaires,  sa  conduite  à  Fribourg,  où  il  combattait  à  côté  de  Condé,  sa  mort  malheu- 
reuse au  siège  de  Duisburg  où  il  fut  tué  par  une  sentinelle  française  qui  n'entendit 
pas  sa  réponse  au  qui-vive.  On  regrettera  qu'il  n'ait  pas  consulté  les  Notes  du  palais 
Ma%arin,de  M.  Léon  de  Laborde  (p.  i56),  où  il  aurait  trouvé  de  curieux  détails  sur 
la  passion  affichée  par  Jarzé  pour  la  reine-mère. 

—  Notre  collaborateur  M.  Ph.  Tamizey  de  Larroque  doit  publier  prochainement 
le  Ve  fascicule  des  Correspondants  de  Peiresc,  renfermant  des  Lettres  inédites  de 
Claude  de  Saumaise;  une  Oraison  funèbre  de  Gassendi;  un  recueil  de  Lettres  iné- 
dites d'Adrien  d'Aspremont,  vicomte  d'Orthe,  gouverneur  de  Bayonne  ;  et  dans  la 
«  collection  des  petits  mémoires  sur  l'histoire  de  France  »  que  fait  paraître  la  librai- 
rie de  la  société  bibliographique,  une  réimpression  des  Mémoires  de  Puységur. 

—  Une  traduction  nouvelle  des  Pensées  sur  l'éducation  de  Locke  a  paru  à  la  librai- 
rie Hachette;  elle  est  due  à  M.  Gabriel  Compayré,  qui  y  a  joint  des  commentaires  et 
une  préface  intéressante  (33  pages);  dans  cette  préface,  M.  Compayré  fait  une  assez 
longue  comparaison  entre  le  traité  de  Locke  et  l'Essai  sur  l'éducation  de  Herbert 
Spencer,  qu'il  regarde  comme  «  une  refonte  au  goût  du  jour  des  idées  de  Locke  ». 

—  M.  Charles  Bémont  a  rédigé  la  Table  générale  des  cinq  premières  années  de  la 
Revue  historique  (1876  a  1880  inclusivement);  cette  Table  générale  se  vend  à  la 
librairie  Germer-Baillière  (une  brochure  grand  in-8°,  3  fr.  ;  pour  les  abonnés  de  la 
Revue  historique,  1  fr.  5o.) 

—  Il  paraît  en  Alsace  une  nouvelle  revue,  la  Revue  catholique  d'Alsace,  dirigée  par 
M.  l'abbé  Delsor  (Rixheim,  Sutter).  Les  deux  premiers  numéros  renferment  les  art. 
suivants  :  de  M.  Cetty,  un  tableau  de  la  Famille  ouvrière  en  Alsace;  de  M.  Mury, 


•274  REVUE    CKITiQUB 

le  Journal  de  ce  qui  s'est  passé  à  l'approche  des  Français  à  Vienne  en  iSo5,  par 
l'abbé  Gérard,  grand-vicaire  de  Strasbourg  (i  748-1 835)  ;  de  M.  Sigrist,  une  Histoire 
de  l'abbaye  de  Marmoutier,  etc. 

—  Le  catalogue  du  musée  de  sculpture  du  Louvre  (bas-reliefs,  cippes,  autels,  va- 
ses, sièges,  etc.,  par  M.  Félix  Ravaisson  ;  statues  et  bustes,  par  M.  Charles  Ravais- 
son)  paraîtra  probablement  à  la  fin  de  cette  année.  Le  catalogue  des  inscriptions  la- 
tines, et  celui  des  antiquités  chrétiennes,  rédigés  tous  deux  par  M.  Ant.  Héron  de 
Villefosse,  paraîtront,  le  premier  en  1884,  le  second  en  i883.  Le  catalogue  des 
terres  cuites  orientales,  par  M.  Heuzey,  doit  également  paraître  sous  peu.  M.  Revil- 
lout  prépare  un  catalogue  des  manuscrits  grecs,  coptes,  démotiques  et  orientaux, 
tracés  sur  papyrus  ou  sur  lerre-cuite,  que  renferme  la  collection  égyptienne* 

—  Voici  le  programme  du  Congrès  de  la  Sorbonne  en  i883,  tel  qu'il  a  été  arrêté  par 
le  Ministre  de  l'Instruction  publique  pour  la  section  d'histoire  et  de  philologie  et  celle 
d'archéologie.  Section  d'histoire  et  de  philologie.  I.  Quelle  méthode  faut-il  suivre  pour 
rechercher  l'origine  des  noms  de  lieu  en  France  ;  valeur  des  résultats  déjà  obtenus  dans 
cette  recherche.  IL  A  quelles  époques,  dans  quelles  provinces  et  sous  quelles  influences 
les  villes  neuves  et  les  bastides  ont-elles  été  fondées;  III.  Histoire  des  milices  communales 
au  moyen  âge.  (Date  de  leur  organisation  et  de  l'introduction  du  tiers-état  dans  les  ar- 
mées royales;  autorité   de9  magistrats  municipaux  sur  ces  milices  et  conditions  de 
leur  recrutement;  mode  de  convocation,  nature  et  durée  du  service  ;  leur  transformation 
au  commencement  du  xiv*  siècle,  levées  en  masse  ou  appel  de  l'arrière-ban,  substitution 
de  l'impôt  à  la  prestation  des  sergents;  origine  et  organisation  des  confréries  d'ar- 
chers et  d'arbalétriers;  institution,  organisation,   recrutement  et  rôle  militaire  des 
francs-archers  de  Charles  VII  à  François  Ier,  1448-1521  ;  conditions  de  la  levée  et  de 
l'organisation  des  milices  provinciales  à  partir  de  1668  et  leur  rôle  dans  les  guerres 
sous  Louis  XIV  et  Louis  XV).  IV.  Pèlerinages  (routes  que  suivaient  ordinairement 
les  pèlerins  français  quTse  rendaient  en  Italie  ou  en  Terre-Sainte).  V.  Signaler  les 
documents  antérieurs  à  la  fin  du  xve  9iècle  qui  peuvent  faire  connaître  l'origine,  le 
caractère,  l'organisation  et  le  but  des  confréries  religieuses  et  des  corporations  indus- 
trielles. VI.  Rédaction  des  coutumes  (documents  sur  les  assemblées  qui  ont  procédé 
à  cette  rédaction  et  sur  les  débats  des  parlements  à  l'occasion  de  l'homologation  des 
coutumes;  rechercher  les  coutumes  locales  qui  sont  restées  inédites).  VIL  Etats  pro- 
vinciaux (documents  inédits  sur  les  élections  des  députés,  l'étendue  des  mandats, 
les  délibérations,  les  pouvoirs  des  députés  et  l'efficacité  de  leur  action).  VIII.  Condi- 
tions de  l'éligibilité  et  de  Télectorat  dans  les  communes,  communautés  et  paroisses, 
soit  à  l'occasion  des  offices  municipaux,  soit  pour  la  nomination  des  délégués  chargés 
des  cahiers  des  doléances).  IX.  Quelles  additions  les  recherches  poursuivies  dans  les 
archives  et  les  bibliothèques  locales  permettent-elles  de  faire  aux  ouvrages  généraux 
sur  les  origines  et  le  développement  de  l'art  dramatique  en  France  jusqu'au  xvie  siè- 
cle inclusivement  i  X.  Signaler  les  documents  importants  pour  l'histoire  que  renfer- 
ment les  anciens  greffes,  les  registres  paroissiaux  et  les  minutes  des  notaires.  XI.  His- 
toire des  petites  écoles  avant  178g  (sources  manuscrites  et  imprimées,  statistique 
aux  différents  siècles;  origine,  développement,  nombre  dans  chaque  diocèse  et  pa- 
roisse; recrutement  et  honoraires  des  maîtres  et  des  maîtres-adjoints;  condition  ma- 
térielle, discipline,  programme  et  fréquentation  ;  gratuité  et  fondations  scolaires  ; 
rapports  entre  la  gratuité  dans  les  petites  écoles  et  la  gratuité  dans  les  universités; 
livres  employés  dans  les  petites  écoles).  XII.  Quelles  villes  de  France  ont  possédé  des 
ateliers  typographiques  avant  le  milieu  du  xvi"  siècle?  Dans  quelles  circonstances  ces 

ateliers  ont-ils  été  établis  et  ont-ils  fonctionné? Section  d'archéologie.  Signaler 

les  documents  épigraphiques  de  l'antiquité  et  du  moyen  âge  en  France  et  en  Algérie, 


d'histoirk  et  dk  LirrÉRATUHK  275 

récemment  découverts,  ou  dont  la  lecture  comporte  des  rectifications;  II.  Quels  sont 
les  monuments  qui,  par  l'authenticité  de  leur  date,  peuvent  être  considérés  comme 
des  types  certains  de  l'architecture  en  France,  avant  le  milieu  du  xu"  siècle?  III.  Etu- 
dier les  caractères  des  diverses  écoles  d'architecture  religieuse  à  l'époque  romane, 
s'attacher  à  mettre  en  relief  les  éléments  constitutifs  des  monuments,  plan,  voûtes,  etc. 
IV.  Quels  sont  les  monuments  dont  la  date,  attestée  par  des  documents  historiques, 
peut  servir  à  déterminer  l'état  précis  de  l'architecture  militaire  en  France  aux  diffé- 
rents siècles  du  moyen  âge?  V.  Signaler  les  œuvres  de  la  sculpture  française  anté- 
rieures au  xvie  siècle,  qui  se  recommandent  soit  par  la  certitude  de  leur  date,  soit  par 
des  signatures  d'artistes.  VI.  Signaler  et  décrire  les  peintures  murales  antérieures  au 
xvie  siècle  existant  encore  dans  les  édifices  de  la  France.  VII.  Etudier  les  produits 
des  principaux  centres  de  fabrication  de  l'orfèvrerie  en  France  pendant  le  moyen  âge 
et  signaler  les  caractères  qui  permettent  de  les  distinguer.  VIII.  Quels  sont  les  mo- 
numents aujourd'hui  connus  de  l'émaillerie  française  antérieurs  au  xviuc  siècle? 

—  Nous  apprenons  avec  un  bien  vif  regret  la  mort  de  M.  Bilco,  ancien  élève  de 
l'Ecole  normale,  agrégé  des  lettres  et  membre  de  l'Ecole  française  d'Athènes.  11  était 
arrivé  à  Lamia  le  7  septembre  pour  y  faire  des  fouilles  lorsqu'un  accès  de  fièvre 
pernicieuse  l'a  soudainement  enlevé  à  ses  amis  et  à  la  science.  M.  Bilco  n'avait  pas 
vingt-quatre  ans. 

ALLEMAGNE.  —  En  Allemagne,  comme  en  France,  on  se  plaint  que  les  élèves 
des  lycées  sont  surchargés,  ûberbiirdet ;  la  question  de  VUberb'ùvdung  est  à  l'or- 
dre du  jour;  elle  a  fait  l'objet  de  vives  discussions  dans  les  réunions  de  professeurs 
et  de  directeurs  des  gymnases;  elle  provoque  de  nombreux  écrits  de  circonstance! 
(voir  celui  que  publiait  naguère  sous  le  titre  der  Sprachunterricht  viuss  amkehren 
un  pédagogue  qui  signe  a  Quousque  tandem  »;  cp.  Revue  critique,  n°  26,  p.  5 18). 
Une  nouvelle  brochure  sur  la  question  vient  de  paraître  sous  le  titre  «  Die  Entlasi- 
ung  der  ùberbiirdeten  Schuljugend  der  Mittelschulen  »  (Heilbronn,  Henninger.  In-8°, 
76  p.  1  mark)  :  elle  a  pour  auteur  M.  Aug.  Behaghel,  professeur  au  «  Realgymna- 
sium  »  de  Mannheim.  L'auteur  imagine  un  dialogue  entre  deux  personnages,  dont 
l'un  est  attaché  à  l'ancienne  méthode,  et  l'autre  —  c'est  M.  Behaghel  lui-même  — 
plaide  la  cause  des  réformes.  En  résumé,  M,  Behaghel  voudrait  diminuer  considéra- 
blement le  nombre  des  devoirs  écrits,  car  «  l'élève  se  voit  forcé  tout  à  fait  inutile- 
ment et  à  même  à  son  grand  dommage,  d'écrire  et  de  transcrire  une  foule  de  cho- 
ses qui  n'ont  pas  la  moindre  -valeur  »  (p.  3o);  il  désire  que  l'enseignement,  quel 
qu'il  soit,  commence  le  plus  lentement  possible,  im  langsamsten  Tempo  (p.  44);  ce 
n'est  que  plus  tard,  dans  la  quatrième  ou  la  cinquième  année,  qu'on  pourra  se  hâ- 
ter et  marcher  plus  vite  (p.  46);  au  lieu  de  traduire  en  une  heure  une  trentaine  de 
phrases,  on  ne  devrait  en  traduire  que  dix  ou  six;  il  faut,  en  un  mot,  ne  donner  à 
l'élève  que  des  connaissances  solides  et  sûres,  et  ne  pas  l'accoutumer  à  n'apprendre 
que  légèrement  et  à  la  surface  (p.  55).  M.  Behaghel  veut  sacrifier  Cornélius  Nepos 
(il  cite  en  passant  le  dur  jugement  de  Teuffel)  et  donner  à  César  une  plus  grande 
importance.  Mais  le  point  essentiel  de  son  opuscule,  et  sur  lequel  il  revient  à  tout 
instant  avec  insistance,  c'est  que,  dan3  les  premières  années,  l'élève  ne  fasse  presque 
pas  de  devoirs  écrits  à  la  maison  (Hausaufgaben);  il  s'élève  avec  force  contre  les 
griffonnages  et  barbouillages  de  papier  (pvecklose  Schreibereien)  (p.  61)  qui  ont  été 
jusqu'à  présent  à  la  mode;  il  demande  que  le  maître  soit  moins  prodigue  de  pen- 
sums et  d'arrêts  ;  l'élève  élevé  d'après  sa  méthode  entre  en  classe,  après  avoir  joué 
la  veille  deux  ou  trois  heures  et  avoir,  en  deux  heures  au  plus,  fait  des  devoirs 
assez  faciles  ;  il  ne  craint  pas  d'être  puni  ;  il  a  l'esprit  rassis  et  clair;  il  est  convaincu 
que  s'il  travaille  consciencieusement  pendant  la  classe,  il  n'aura  pas  besoin  de  grands 


276  RE^UE    CRITIQUE   D'HISTOIRE    ET    DE   LITTÉRATURE 

efforts  pour  contenter  son  maître  et  suivre  le  cours  (pp.  65-66).   La  brochure  de 
M.  Behaghel  renferme  donc  beaucoup  de  vues  utiles  (voir  encore  ce  que  dit  l'auteur 
de  la  gymnastique,    (pp.  Ô7-68),    et  on  lit   avec  intérêt  cet  opuscule  d'ailleurs    écrit 
avec  vivacité,  et  où  se   glisse  parfois   plus    d'un  mot  expressif;  l'auteur,  comme 
dit,   n'hésite  pas  à  employer  un  «  krceftig  Wortlein.  » 


ACADÉMIE   DES   INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  8  septembre  1882. 

M.  Charles  N isard  est  désigné  pour  faire  une  lecture  au  nom  de  l'Académie  des 
inscriptions  et  belles-lettres,  à  la  prochaine  séance  trimestrielle  de  l'Institut,  le  mer- 
credi 4  octobre.  Il  lira  une  partie  de  son  mémoire  sur  l'état  incertain  et  précaire  de 
la  propriété  littéraire  au  xvie  siècle. 

M.  Delaunay  achève  la  seconde  lecture  du  mémoire  de  M.  P.-Ch.  Robert  sur  l'ex- 
pédition de  Gondovald  et  les  monnaies  frappées  au  nom  de  l'empereur  Maurice  Ti- 
bère dans  plusieurs  villes  de  la  Gaule  méridionale. 

M.  Deloche  présente  quelques  observations  en  réponse  au  mémoire  de  M.  P.-Ch. 
Robert.  L'objet  du  débat  entre  les  deux  académiciens  est  double.  Il  y  a  une  ques- 
tion d'histoire  et  une  question  de  numismatique.  Il  s'agit  de  savoir,  d'une  part,  si 
l'expédition  dirigée  contre  la  monarchie  franque,  à  la  fin  du  vie  siècle,  par  l'aventu- 
rier Gondovald,  était  soutenue  par  l'empereur  byzantin  Maurice  Tibère  et  tendait  à 
rétablir  l'autorité  impériale  sur  la  Gaule;  d'autre  part,  si  les  pièces  d'or  qui  nous  sont 
parvenues  en  assez  grand  nombre  et  qui  portent  à  la  fois  le  nom  de  Maurice  Tibère 
et  l'indication  d'un  atelier  monétaire  des  bords  du  Rhône  doivent  être  considérées 
comme  frappées  par  Gondovald,  au  nom  de  l'empereur,  pendant  sa  courte  domina- 
tion sur  la  contrée,  et  s'il  faut  y  voir  un  acte  d'allégeance  à  l'empire  byzantin.  A 
ces  questions  M.  Robert  répond  non,  M.  Deloche  oui.  Contrairement  à  M.  Robert, 
M.  Deloche  s'attache  à  établir  : 

i°  -Que  Gondovald  était  soutenu  par  la  cour  de  Byzance;  on  ne  s'expliquerait  pas 
autrement  l'origine  des  subsides  considérables  qu'il  eut  à  sa  disposition  au  moment 
de  son  entreprise  et  qui  dépassaient  de  beaucoup,  sans  nul  doute,  sa  fortune  per- 
sonnelle; 

2"  Que  Gondovald  prétendait  substituer  son  autorité  à  celle  des  rois  mérovingiens 
et  gouverner  à  leur  place,  qu'il  a  donc  dû  agir  en  maître  dans  les  villes  qu'il  a  occu- 
pées, qu'il  est  donc  tout  naturel  qu'il  y  ait  battu  monnaie;  ses  prétentions  à  exercer 
le  pouvoir  à  la  place  des  rois  sont  nettement  affirmées  par  Grégoire  de  Tours  :  «  ille, 
dit-il,  qui  omnem  principatum  Galliarum  se  testabatur  accipere  »  Hist.  Franc, 
VIII,  2); 

3"  Que  seule  l'occupation  de  la  Provence  par  Gondovald,  agissant  au  nom  et  comme 
lieutenant  de  l'empereur  byzantin,  permet  d'expliquer  qu'un  si  grand  nombre  de 
monnaies  aient  été  frappées  dans  cette  contrée  au  nom  de  Maurice  Tibère.  M.  P.--C. 
Robert  a  allégué  que  souvent  les  rois  mérovingiens  avaient  imité  le  type  des  mon- 
naies impériales,  simplement  parce  que  ce  type  était  accrédité  et  qu'en  l'imitant  ils 
assuraient  à  leurs  monnaies  une  circulation  plus  facile  et  plus  étendue.  Cette  remar- 
que est  juste,  dit  M.  Deloche,  mais  elle  ne  fournit  pas  une  explication  suffisante  en 
ce  qui  concerne  les  monnaies  de  Maurice  Tibère.  Cet  empereur  est  arrivé  au  trône  à 
une  époque  où  la  fabrication  des  monnaies  mérovingiennes  imitées  du  type  impérial 
était  déjà  à  peu  près  tombée  en  désuétude.  On  n'a  qu'un  très  petit  nombre  de  mon- 
naies frappées  en  Gaule  au  nom  de  Justin  II,  on  n'en  a  pas  du  tout  au  nom  de  Tibère 
Constantin  ;  on  en  a  un  très  grand  nombre  au  nom  de  leur  successeur  Maurice. 
Cette  recrudescence  brusque  est  une  anomalie  qui  ne  peut  s'expliquer  que  par  des 
circonstances  exceptionnelles;  et  ces  circonstances  exceptionnelles,  on  les  trouve 
dans  l'histoire  de  Gondovald,  si  on  veut  entendre^  cette  histoire  comme  l'entend 
M.  Deloche  et  comme  l'ont  entendue  la  plupart  des  érudits  avant  lui. 

Ouvrages   présentés  :  —  par  M.  Oppert  :  Hommel  (Frit/),  Sumir  et  Accad,  traduit 
par  Ernest   Babelon ;   —  par  M.    Barbier  de  Meynard   :  Halévy  (J.),  Etude  sur  les 
inscriptions  du  Safa;  — par  M.  Ravaisson  :  Musée  du  Louvre,  catalogue  de  la  col- 
lection Timbal  (rédigé  par  MM.   Tauzia,  Gruyer,  Saglio,  Courajod  et  Emile  Moli-njoq 
nier). 

Julien  Havet. 

— — . —  — —— — - — ■         .    ■  ~~      <iJoii  bI  J3 

Le  Puy,  vnpnmerie  de  Marchessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23. 

. 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

N»  41  —  9  Octobre  —  1882 


Sommaire  s  206.  Curtius  et  Adler,  Olympie  et  les  environs. —  207.  Aristophane, 
Plutus,  p.  p.  de  Velsen;  les  Oiseaux,  p.  p.  Blaydes.  —  208.  Ring,  Etudes  de 
vieux  latin.  —  20g.  Storm,  Philologie  anglaise.  —  210.  Combes,  L'entrevue  de 
Bayonne.  —  211.  Servois,  Notice  biographique  sur  La  Bruyère.  —  212.  Œuvres 
complètes  de  Des  Forges  Maillard,  p.  p.  delà  Borderie  et  R.  Kerviler.  —  2i3. 
Le  docteur  Faust,  p.  p.  Engel.  —  Correspondance  :  Date  de  la  naissance  de  Flé- 
chier.  —  Chronique.  —  Académie  des  Inscriptions. 


206.  —  Olympia  und  Umgegend,  zwei  Karten  und  ein  Situationsplan  ge- 
zeichnet  von  Kaupert  und  Dœrpfeld,  herausgegebenvon  E.  Curtius  und  F.  Adler, 
Berlin,  Weidmann,  1882,  8°,  48  pages.  4  mark. 

Les  résultats  des  fouilles  entreprises  à  Olympie  par  le  gouvernement 
allemand  ont  été  publiés,  année  par  année,  dans  un  important  ouvrage  en 
cinq  volumes,  intitulé  die  Ausgrabungen  \u  Olympia,  Uebersicht  der 
Arbeiten  und  Funde  von  1875-81.  Un  second  ouvrage  est  annoncé 
où  ces  résultats,  au  lieu  d'être  présentés  suivant  la  succession  des  décou- 
vertes, seront  classés  dans  un  ordre  systématique,  propre  à  mettre  en 
lumière  les  faits  nouveaux  acquis  à  l'histoire  de  l'art  et  des  institutions 
helléniques.  En  attendant,  MM.  Curtius  et  Adler  ont  cru  qu'il  serait 
intéressant  d'offrir  au  public  un  plan  de  YAltis  et  deux  cartes  du  pays 
environnant,  d'après  les  levés  et  les  dessins  de  MM.  Kaupert  et  Dôrp- 
feld.  Ces  trois  planches  sont  précédées  d'un  texte  explicatif. 

Planche  I.  Carte  d'ensemble  de  la  région  d' Olympie  au  1/100000. 
Les  données  sont  celles  de  la  carte  de  l'Etat-major  français;  mais  une 
coloration  polychrome  distingue  nettement,  à  côté  des  localités  moder- 
nes, les  principaux  points  de  la  topographie  antique. 

Cette  carte  a  pour  but  de  faire  comprendre  le  caractère  du  pays  et 
d'expliquer  son  histoire.  La  notice,  due  à  la  plume  élégante  de  M.  C, 
nous  décrit  rapidement  cette  contrée  que  les  anciens  appelaient  Pisaiis, 
les  deux  grands  fleuves,  l'Alphée  et  le  Kladeos,  qui  l'arrosent,  leurs 
bords,  riches  d'alluvions,  et  toutes  ces  hauteurs,  dont  les  pentes,  cou- 
vertes de  verdure,  s'abaissent  doucement  vers  la  plaine.  Cette  contrée 
pittoresque  et  fertile,  d'un  abord  assez  facile  du  côté  de  la  mer,  et  d'au- 
tre part  ouverte,  grâce  aux  vallées  qui  y  débouchent,  aux  habitants  de 
toutes  les  provinces  du  Péloponnèse,  semblait  préparée  par  la  nature 
pour  devenir  le  rendez-vous  pacifique  de  la  Grèce. 

Planche  II.  Olympie  et  ses  environs  immédiats,  au  i/i25ooo.  La  carte 
et  la  notice  sont  de  M.  Kaupert.  Elles  sont  l'une  et  l'autre  destinées  à 
Nouvelle  sûric,  XIV.  i5 


278  REVUE   CRITIQUE 

faire  connaître  en  détail  la  topographie  de  la  région.  Les  niveaux  sont 
indiqués  par  des  courbes,  la  nature  du  terrain  (vignes,  bois,  pâturages, 
grèves,  sources)  par  des  signes  conventionnels  et  des  teintes  plates  diver- 
sement colorées,  les  ruines  antiques  par  des  traits  et  des  noms  en  rouge. 
M.  K.  signale  l'action  exercée  par  les  deux  fleuves,  dont  les  alluvions 
combinées,  en  exhaussant  le  sol  au  confluent,  ont  fini  par  enfouir  les 
monuments  d'Olympie  sous  une  couche  de  limon  de  cinq  mètres  en- 
viron. Ces  alluvions  considérables  s'expliquent  par  la  constitution  géo- 
logique des  montagnes  voisines  et,  à  ce  propos,  M.  K.  renvoie  le  lecteur 
à  un  article  du  docteur  Biicking  dans  le  Compte  rendu  mensuel  de  l'A- 
cadémie des  sciences  de  Berlin  (3  1  mars  188 1),  Vorlœuftger  Bericht 
uber  die  geologische  Untersuchung  von  Olympia. 

Planche  III.  Olympie\  état  du  teraain  après  la  5e  et  la  6e  campa- 
gne de  fouilles,  au  20  mars  188 1.  par  M.  Dorpfeld.  Echelle  i/i5oo. 
Une  coloration  jaune  clair  distingue  les  parties  du  sol  qui  n'ont  pas  été 
fouillées  de  celles  qui  l'ont  été  :  celles-ci  sont  laissées  en  blanc.  Dans 
l'espace  déblayé,  il  était  impossible  de  toujours  marquer  l'âge  relatif  des 
nombreuses  ruines  découvertes;  on  s'est  contenté  des  signes  suivants: 
les  constructions  de  la  belle  époque  grecque  sont  en  traits  noirs,  les  mo- 
numents plus  récents  sont  ou  dessinés  avec  des  hachures  ou  simplement 
tracés  sans  hachures,  la  place  des  murs  byzantins  sont  marqués  par  une 
ligne  en  pointillé.  Les  différents  niveaux  ont  été  cotés  par  comparaison 
avec  le  bord  supérieur  du  stylobate  du  temple  de  Zeus,  et  suivant  que 
chacun  d'eux  est  plus  ou  moins  élevé  que  ce  stylobate,  le  chiffre  de  la 
cote,  écrit  en  bleu,  est  précédé  du  signe  plus  ou  du  signe  moins. 

M .  Adler,  qui  a  rédigé  la  notice,  y  fait  une  courte  description  des  ruines 
les  plus  importantes  et  cherche  à  orienter  le  lecteur  au  milieu  de  tous 
ces  monuments.  Il  commence  par  les  constructions  situées  à  l'extérieur 
de  l'enceinte  sacrée  de  VAltis  ou  adossées  au  mur  de  cette  enceinte 
même,  le  Gymnase  avec  les  portiques  et  la  palestre  qui  s'y  ratta- 
chent, le  Bouleutérion,  le  Léonidaion,  le  Stade,  les  Trésors,  le  Pry- 
tanée.  Puis  il  nous  conduit  dans  VAltis  même,  nous  promène-  dans 
cette  Agora,  autrefois  pleine  de  statues  dont  les  piédestaux  seuls  sub- 
sistent encore,  et  passe  successivement  en  revue  l'autel  de  Zeus,  le  Pé- 
lopion,  le  Métroon,  YHéraion  *,  enfin  le  temple  de  Zeus.  Il  termine 
par  quelques  mots  sur  le  système  ingénieux  de  canalisation  qui  permet- 
tait, en  utilisant  les  pentes,  d'alimenter  les  nombreuses  fontaines  dont 
VAltis  devait  être  pourvu,  et  d'ouvrir  aussi  à  l'excès  des  eaux  une  issue 
vers  le  fleuve.  Cette  double  catégorie  de  conduits  est  figurée  sur  la  carte 
par  des  lignes  bleues,  tantôt  simples  tantôt  doubles,  suivant  qu'il  s'agit 
de  ceux  par  où  l'eau  arrive  ou  de  ceux  par  où  l'eau  s'en  va.  Toutes  les 

L  loqîu  :  ijnat 

I.  Cest  la  qu  a  ete  retrouve  \  Hermès  de  Praxitèle,  dont  on  peut  voir  le  moulage 

expose  au  musée  de  sculpture  comparée  du  Trocadero. 

r  >ni  -Jli-jb  . 


D'HISTOIRE    ET   DE   LITTERATURE  ^79 

fois  qu'il  y  a  lieu,  M.  Adler  prend  soin  de  nous  renvoyer,  par  des  indi- 
cations précises,  à  la  grande  publication  des  Ausgrabungen. 

Pour  ceux  qui  n'ont  pas  eu,  comme  nous,  l'heureuse  chance  de  visi- 
ter les  travaux  d'Olympie,  et  de  prendre  par  eux-mêmes  une  impression 
du  pays,  cette  brochure  est  un  guide  excellent,  propre  à  donner  de 
cette  région  et  des  fouilles  importantes  dont  elle  a  été  le  théâtre,  une 
idée  juste  et  nette. 

Jules  Martha. 


207. —  Ai-istoplianis  Plutus  recensuit  Adolphus  von  Velsen.  Leipzig,  Teubner, 
1881.  Un  vol.  in-8°  de  vi-85  pages. 

Aristoplianls  Comocdiœ.  Annotatione  critica,  commentario  exegetico,  et  scholiis 
graecis  instruxit  Fredericus  H.  M.  Blaydes.  PARS  IV,  AVES.  Halis  Saxonum,  in 
Orphanotrophei  libraria  1882.  Un  vol.  in-8°  de  xX-5io  pages. 

„  _  - 1 
Dans  de  précédents  articles  »,  nous  avons  indiqué  quel  était  le  carac- 
tère général  des  deux  nouvelles  éditions  d'Aristophane,  publiées  à  la  fois 
par  M.  Ad.  von  Velsen  et  par  M.  Fr.  H.  M.  Blaydes;  nous  n'avons  au- 
jourd'hui qu'à  examiner  quelques  points  particuliers  aux  deux  pièces  qui 
viennent  de  paraître,  le  Plutus  et  les  Oiseaux. 

Le  texte  du  Plutus  a  été  constitué  par  M.  A.  von  V.  à  l'aide  de  qua- 
tre manuscrits  :  le  Ravennas,  le  Venetus,  l'Urbinas  U  et  le  Parisinus  A. 
De  toutes  les  pièces  d'Aristophane,  le  Plutus  est  celle  dont  nous  avons 
peut-être  le  plus  de  reproductions  manuscrites;  sans  doute,  beaucoup 
de  ces  mss.  ne  sont  que  la  copie  d'originaux  que  nous  possédons  encore  ; 
il  est  donc  nécessaire  de  laisser  de  côté  ces  non-valeurs  ;  mais  peut-être 
M.  V.  est-il  allé  trop  loin  dans  cette  voie,  et  a-t-il  négligé  des  té- 
moignages qui  avaient  de  l'importance.  Il  n'eût  pas  été  inutile  de  con- 
naître les  leçons  du  Laurentianus  0,  surtout  celles  de  TAmbrosianus. M. 
Après  ce  que  M .  V.  avait  dit  de  ce  dernier  ms.  dans  la  préface  des  Che- 
valiers et  des  Grenouilles  2,  on  a  peine  à  comprendre  qu'un  tel  secours 
ait  pu  être  négligé.  Pour  les  quatre  manuscrits  dont  M.  V.  nous  donne 
les  leçons,  ils  ont  été  été  étudiés  avec  tout  le  soin  désirable;  l'apparat 
critique  du  Plutus  est  peut-être  un  peu  restreint,  mais  il  a  été  dressé 
avec  la  même  précision,  la  même  rigueur  que  l'apparat  des  pièces  précé- 
demment publiées;  voici  les  seules  observations  que  nous  avons  à  faire 

■  "  \\h'l 

"aiiBO  b1  i  ~~  aTirïâv 

■  i.  Revue  critique,  n03  du  21. mars,  du  9  mai  18S1,  du  3  juillet  1SS2. 

2.  «  is  liber  diliyeniissime  pictus,  gravissimi  in  constituendis  poeUe  v,rbis  est 
momenti  :  utpote  qui  genuinam  Aristophanis  manum  saepe  servaverit  solus  cun; 
Ravennate,  interdum  quamvis  raro  solus.  »  Préface  des  Chevaliers,  p.  vin.  —  «  Hune 
codicem  in  Ranarum  fabula  certe  e  Ravennate  non  transcriptum  esse  docentj 
vv.  201,  208,  274,  alii.»  Préface  des  Grenquilles,  p.  vi.  Faut-il  conclure  de  ce  dernier 
passage  que,  pour  le  Plutus,  l'Ambrosianus  dérive  directement  du  Ravennas >  Cela 
mentait  bien  la  peine  d  être  indiqué. 


i8s  aaim  nàrri  j  aa  ts  hhiotzih'ci 

280  -  •vswtv^cps  'CCO  ^^È-CRïfft^Ï3^^  ?^6A 

-ih'io  noiîBUJDrioq  fil  é  y  no  noiïibà  aîn^zèiq  bI  znsb  jiaalsV  .M 

-W  §Bfeî  feàte >ss-  4ue  nous  avons  examinés,  ceux  û^Çavenn^ft 
^^ep^g.  j^nir  Ie  ms-  de  Ravenne,  nous  n'avons  qu'un  passage  à  si- 
gnaler :  421,  le  ms.  a  dbtoXÂXàTGv,  M.  V.  donne  dtaoXiàXaTiov,  ce  qui  n'est 
probablement  qu'une  faute  d'impression  '.  —  Pour  le  ms.  de  Venise,  les 
endroits  où  l't  muet  est  omis  n'ont  pas  toujours  été  exactement  relevés. 
Ainsi  :  6,  sa,  —  9,  ôîc^twosî,  —  19,  çpàaY]ç,  —  22,  Xutîyjç, .  Aux  passages 
suivants  :  4,  y.£xrr,[j.év(»>.  —  8,  Xo^ta.  —  40,  xeôsy).  Le  point  final  peut-il 
être  considéré  comme  représentant  un  t?  C'est  le  cas  pour  le  ms.  de  Ra- 
venne,  mais  nous  ne  croyons  pas  qu'il  en  soit  ainsi  pour  le  ms.  de  Ve- 
nise. '1 

Plusieurs  des  conjectures  proposées  par  M.  V.  méritent  d'être  signa- 
lées :  v.  49,  «  nescio  an  pro  ^vôvat  sçribendum  sit  cpàv  ».  Cela  est  très  ac- 
ceptable, Yvwvai  paraît  bien  n'être  qu'une  glose  qui  a  fini  par  s'intro- 
duire dans  le  texte.  —  La  conjecture  piévc,  v.  i85,  nous  semble  excel- 
lente; le  Ravennas  porte  en  cet  endroit  uivcv,  les  autres  mss.  p.évo?.  Le 
sens  que  donne  [j.cvct  à  la  phrase  est  bien  préférable,  et  on  comprend  qu'à 
côté  de  outoç  èxtxaôiiftrat,  ce  mot  ait  pu  être  changé  en  jj.évov  ou  \j.ovoq.  — 
^j^jg^a^çhe,  la  correction  /wXcv  au  lieu  de  t^wAov,  v.  267,  nous  plaît 
moins  ;  après  l'énumération  de  toutes  les  misères  de  Plutus,  le  mot  -/wXs; 
tp^aJLjt  faible  ;  les  premiers  mots  de  la  phrase  oqjwc.  os  vt]  tov  cùpavov  indi- 
.^u^n^uja.  défaut  moins  visible  que  celui  exprimé  par  le  mot/wXcç;  le 
n^$Ç.^^6v  offre  sans  doute  quelque  difficulté;   cf.    cependant  Cheva- 
liers, 964.  —  La  correction  du  v.  422  est  très  ingénieuse;  l'on  écrivait 

M.  V.  corrigea  d'abord  2  jxàv  fàp  en  jj.ouvac,  puis  M.  Alb.  von  Bamberg  3 
compléta  la  correction  en  mettant  w  ypqû  au  lieu  de  à/pi;  on  a  donc  : 

Le  vers,  ainsi  corrigé,  est  certainement  plus  satisfaisant  que  la  vul- 
gate  ;  je  ne  sais  cependant  s'il  s'accorde 'bien  avec  le  vers  suivant.  Le 
passage  est  si  désespéré  que  peut-être  vaut-il. mieux  s'en  tenir  à  ce  que  dit 
M.  Meineke  4  :  «  Nihil  de  his  omnibus  mihi  Aristophanes  scripsisse  vi- 
detur  .praeter  au  o'eï  Ttç;  cetera  quae  frustra  viri  docti  vel  explicare  vel 
emendare  conati  sunt  (Velsenus  wxpà  [xaivàç  sîvat)  stulti  interpolatorisma- 
nus  adjecit,  qui  integrum  trimetrum  requireret  ».  —  La  correction  de 
ir/vcov  en  icr/và,  v.  544,  est  très  plausible;  les  copistes  ont  pu  ignorer 
qu'a  était  long  devant  p,  ce  qui  les  a  amenés  à  corriger  une  leçon  qu'ils 
croyaient  fautive.  —  Au  v.  704,  M.  V.  a  renoncé  à  une  conjecture  qu'il 
avait  déjà  faite  et  que  Meineke  avait  approuvée  : 

, 1 , 1 :v{07";  SiieVI  .1 

1.  Nous   .profitons  de  l'occasion  pour  signaler  d'autres  fautes^  jle  içe,  §Ç$*Ç  ^f^-fy 
ïhi'JÏÏzpoç,  477.  tHtt  au  lieu  de  oti.  .  : 'zz  bv  ,v(6o.'rh  '00  bv 

2.  Symbola  philol.  Bonn,  1864,  p.  413.  joJ  eâiqA  .«  vàSi  XUO  370  sdcsfl  JUOT  [YV 

3.  Alb.  von  Bamberg,  De  Ravennate  et    Vaneio  AristopkaniSieQ&iAHfh%#ty#B> 
i865,  p.  4. 

4.  Aug.  Meineke,  Vindiciarum  Aristophanearum  liber.  Leipzig,  i865,  p.  212. 


d'histoire  et  de  littérature  281 

Aùxc;  &'!*/.sT\^y$ j^gy-  .jjux  <àf  oùo'  èfpévttffèv.  0g£ 

M.  Velsen,  dans  la  présente  édition,  est  revenu  à  la  ponctuation  ordi- 
naire. —  Parmi  les  autres  conjectures  dignes  d'être  sigrraîéei,  ^^  $*- 
tcrons  :  769,  Y.pzûw  au  lieu  de  èya),  —  839,  oOv  toiç  cr/.îua^ftrç  ilï "fiéu^tfb 
«ov  :ûv  cxsuaptov,  etc.  d  ,  1  *#:  lakng 

es!  ,381113/  sd  .zm  si  uioS  <.  jnarndldBdoiq 

^feft  Itt  volume  que  nous  donne  M.  Fr.  H.  M.  Blaydes  ;  cette 
édition  des  Oiseaux  a  plus  de  5oo  pages  in-8°  très  pleines  et  très  serrées. 
La  disposition  est  la  même  que  dans  les  précédents  volumes;  il  y  a  deux 
sortes  de  notes,  les  unes,  critiques,  au  bas  des  pages,  les  autres,  explica-  . 
tives,  à  la  fin  du  volume. 

Les  notes  critiques  contiennent  les  leçons  des  manuscrits  et  un  relevé 
des  conjectures  et  des  observations  faites  par  les  critiques  sur  les  diffé- 
rents passages.  M.  B.  dit  qu'il  a  collationné  Verbatim  et  accurate  deux 
des  mss.  de  Paris  (les  nos  2712  et  2715),  et  le  Venetus  475.  Pour  le  ms. 
de  Ravenne,  M.  B.  dit  cette  fois  :  «  Passim,  non  tamen  Verbatim  con- 
tuli  R.  »  Nous  avons  déjà  eu  l'occasion  de  montrer  quelle  valeur  il  fal- 
lait attacher  aux  collations  de  M.  B.;  nous  ne  reviendrons  pas  sur  ce 
sujet.  uo&b^ôp 

Le  relevé  des  conjectures  déjà  faites  sera  très  utile;  il  est  malheureu- 
sement incomplet,  surtout  pour  ce  qui  regarde  les  travaux  publiés  dans 
ces  dernières  années.  Ainsi  il  semble  que  M.  B.  n'a  pas  connu  le  travail 
de  O.  Bachmann,  Conjecturarum  observationumque  Aristophane  arum 
spécimen  I,  Gôttingue,  1878.  Des  conjectures  comme  relles-ci,  Oiseaux, 
208,  ep,6a'.v£;  r  169,  xpoaOst  au  lieu  de  ècôeï;  122  3,  oto(oicîiv  au  lieu  de 
TOioiaiv,  etc.,  méritaient  d'être  signalées.  L'article  publié  par  M.  E.  Pic- 
colomini  dans  la  Rivista  di  Filologia,  fasc.  V,  1876,  Osserva\ioni  so- 
pra  alcuni  luoghi  degli  Uccelli  di  Aristofane,  a  aussi  échappé  à 
M.  B.;  il  aurait  pu  y  recueillir  quelques  corrections  intéressantes. 

Quant  aux  corrections  que  l'éditeur  propose  lui-même,  ceux  qui  con- 
naissent M.  B.  ne  seront  pas  surpris  d'apprendre  qu'elles  sont  très 
nombreuses  ;  il  semble  cependant  qu'il  y  a  cette  fois  une  certaine  modé- 
ration. Le  procédé  est  d'ailleurs  le  même  :  tel  passage  étant  altéré,  il  s'a- 
git de  deviner  quand  même  quel  est  le  mot  qui  pourrait  bien  aller  ;  c'est 
une  vraie  gageure;  il  est  certain  que  plus  on  proposera  de  mots,  plus  on 
aura  des  chances  de  trouver  le  bon.  C'est  un  peu  comme  à  la  loterie, 
plus  on  prend  de  billets,  plus  on  a  des  chances  pour  gagner.  Ainsi,  au 
v.  i5o,  nous  trouvons  huit  conjectures  '  pour  le  même  passage,  nous  en 

trouvons  cinq  au  v.  177,  etc. 

ip  3iù)Dd(i  ut  JnoiiiyoTD 

"TiïTîïïv'ïï 

1.  Nous  croyons  devoir  citer  ce  passage  :  «  Ipse  tentabam  wç  oùx,  lÔwv,  vel  cca 
*fo3y.  tBibv,  vel  où*  eiffièùv  (Aesch.,  II,  82),  vel  gçov  f'towv,  vel  ocra  \>:c\  sicrtocov, 
vel  5a'  staiâwv,  vel  6cr'  OU/,  è[AU>V  aut  èpeîv  (modo  non  valens),  vel  denique  ô^rf]  ; 
Vï)  TOÙç  Oeoùç  5ti  où/,  lâibv  ».  Après  toute  cette  série  de  vel,  le  mot  denique,  qui 
vient  après  le  dernier,  fait  sérieusement  plaisir. 

.^   q  .cô8i 
.sis  .q  t5d8i  ,§isqbJ  .tsdïi  RMtb^H&A^oUitk  ntu;u>s3]fcsiW  ,34tenfoM   gu/ 


282  RKVUi.    CRITiQUiHIOTZIH'a 

-££t£s^8tême  est  d'autant  plus  fâcheux  que  M.  B  possède  comme  criti- 
que des  qualités  dont  on  ne  peut  pas  ne  pas  tenir  compte;  beaucoup  de 
ses  observations  sont  très  justes  et  très  sensées.  Il  lui  arrive  assez  sou- 
vent même  de  proposer  des  conjectures  qui  méritent  d'être  examinées  ; 
nous  en  citerons  quelques-unes  :  v.  159,  écrire  a-f^oiai  au  lieu  de  y.rfrc: 
Ta,  —  v.  281,  la  leçon  du  ms.  est  outoç  jjiv  !<rci,  ce  qui  fait  un  vers  faux  ; 
il  manque  une  syllabe.  Brûnck  avait  ajouté  àXV  devant  etneç,  correction 
qui  avait  été  généralement  adoptée;  celle  que  M.  B.  propose,  oo7&(rô  |xév 
èdti,  est  plus  simple  et  paraît  plus  acceptable.—  V.  283,  y.aO'  au  lieu  de 
y.࣠ ;  la  préposition  è£  ne  s'explique  guère  ici. 

Les  notes  explicatives,  commentarius,  forment  la  partie  la  plus  déve- 
loppée du  volume;  elles  comprennent  les  scolies  dont  M.  B.  corrige  ou 
complète  les  explications.  Ce  commentaire  est  riche  surtout  en  rappro- 
chements; il  peut  rendre  des  services  aux  critiques  et  aux  grammairiens; 
à  côté  de  telle  expression  du  comique,  sont  citées  les  expressions 
analogues  qui  se  trouvent  dans  les  différents  auteurs  ;  la  liste  des  passa- 
ges ainsi  cités  est  très  complète  ;  elle  indique  chez  M .  B.  une  grande  pra- 
tique de  la  littérature  grecque.  Pour  ce  qui  touche  à  l'histoire,  aux  ins- 
titutions, en  un  mot  aux  antiquités  proprement  dites,  le  commentaire 
des  Oiseaux,  comme  celui  des  autres  comédies  éditées  par  M.  Blaydes, 
est  insuffisant. 

noJ  si  gifirn  <<  ;  no  Albert  Martin. 

e-b  limq  Dnob  _ 

Jn93ijjbè-j  àtëh< 

-sb  Z'uuu  g  geviiB'iub  es! 

ïrj^J  — Àltlateinisclie  Studlen  (Das  Arvallied  und  die  Salischen  Fragmente.  — 
Zur  Semasiologie  der  indogermanischen  Stammbildung.  —  Beitrtege  zur  Erklae- 
rung  des  Templum  von  Piacenza.)  Von  Dr.  Michael  Ring,  Professor  an  der  kœn. 
Akademie  in    Pressburg.    Pressburg  und   Leipzig.  Verlag  von  Sigmund  Stejner. 

1882.  143  p.  m-8°. 

- 

Une  ou  deux  pages  d'analyse  renseignent  mieux  qu'une  appréciation. 

Pour  éclaircir  le  chant  des  Arvales  et  les  fragments  des  chants  des 
Saliens,  M.  Ring  demande  de  la  lumière  au  saturnien  du  bronze  du  lac 
Fucin,  Doivom  (h)dtôi  (h)erpattîa  pro  Ifegiojnibus  Martses.  Dans 
Doivom  hatoi  herpattîa  il  y  a  deux  datifs,  et  l'ensemble  de  la  formule 
équivaut,  sauf  l'ampleur  poétique,  à  l'ombrien  Jovies  hostatir.  Hatôi 
est  un  datif  comme  trifô(i),  analogue  aux  génétifs  dotnôs,  enôs.  Hâtus 
signifie  admission,  de  la  racine  indogermanique  gha,  désirer;  les  formes 
existantes  indiquent  un  mot  latin  du  type  dheseve. 

Un  surcroît  de  lumière  se  tire  de  l'inscription  du  vase  à  trois  goulots 
de  Dvenos.  Le  premier  goulot  demande  :  Qui  (au  féminin,  car  la  mesure  est 
qui)  pourrait  me  présenter  à  Jupiter  et  aux  deux  Sat(urnes)?  c'est-à-dire  : 
aux  trois  Lares  saturniens  Jov(o)s  (Satur),  Satrius  et  Saturnus,  lesquels 
sont  entre  eux  comme  père,  premier  fils  et  second  fils  d'après  le  principe 
de  l'onomatologie  sacrale,  mais  comme  trois  frères  dans  la  pratique  ri- 


d'histoire  et  DE  LITTÉRATURE  283 

tuelle,  parce  que  Mars  Satur,  dont  Satrius  et  Saturnus  sont  des  émana- 
tions, est,  en  qualité  de  «  mouton  »,  hors  d'état  d'avoir  des  descendants. 
—  Le  second  goulot  du  vase  répond  au  premier  :  Nulle  vierge,  si  elle 
doit  compter  parmi  les  pures;  mais  le  troisième  fait  une  concession  : 
A  moins  de  se  concilier  Ops  Toitesia.  Une  vierge  ne  peut  entrer  en 
contact  avec  les  Lares  châtrés,  les  moutons,  car  la  communication  avec 
des  !  divinités  infécondes  pourrait  la  rendre  inféconde,  et  l'infécondité  de 
la  femme  témoigne  contre  sa  pureté. 

Nous  voici  arrivés  p.  4.  L'explication  du  chant  des  Àrvales  commence. 
Une  altération  de  la  prononciation  latine  a  obscurci  l'assonance  d'aï- 
temei  avec  conctos,  et  le  graveur  de  l'inscription  ne  se  rendait  plus 
compte  que  pleorls  assone  avec  sins,  etpleorês  avec  sers.  Les  variantes, 
dans  la  triple  répétition  de  chaque  ligne,  sont  d'ailleurs  fondées  en  raison. 
A  mesure  qu'on  récite,  le  ton  monte,  de  sorte  que  luaerve  devient 
luerve,  sêmunis  devient  sîmunis,  et  alternei  devient  alternie.  Le  débit 
s'accélère  en  même  temps,  de  sorte  que  de  sali  sta  on  passe  à  sdjisja. 
Sait  est  sd-sdî  pour  sâ-sdjé;  dans  la  troisième  ligne  i  est  bref,  c'est-à-dire 
que  c'est  un  e  relevé  par  le  ton  udâttara  ;  en  phonétique  latine,  i  exclut  j, 
donc  ji  est  non  contracte,  et  sajisja  (i  long  par  position,  parce  que  s  =  gg]) 
est  le  résultat  d'une  séparation  des  syllabes  provoquée  par  la  gradation 
udâttara,  sd\dj*isd-jd,  prononcez  sddj-itf-jd,  saj-is-jd.  — M  arma  est 
le  génitif  du  féminin  Marmôr;  on  attendrait  Marmâros,  mais  le  ton 
plus  élevé  a  produit  une  syncope  de  la  finale;  il  faut  donc  partir  de 
Marmdrs.  Les  voyelles  longues  avec  un  ton  udâtta  non  brisé  réduisent 
les  duratives  à  la  fin  des  syllabes,  ïr  a  donc  disparu  dans  Marmdrs  de- 
vant s  sourde,  comme  dans  fa(r)stigium  et  te(r)stism;  puis  \'s  est  tombée 
à  son  tour.  —  L'enclitique  serns  est  peut-être  pour  sersn(o)s,  comme 
l'indiquerait  Sarsina,  Sassina.  D'ailleurs  s(v)êr%  (pour  svôrf),  forme 
svarita  de  sfvje'ros,  dont  il  nous  faut  partir,  a  pu  facilement  sigmatiser 
Ys  du  nominatif.  —  Comme  les  Lases  sont  deux  personnes  et  Marmôr 
une,  l'unité  supérieure  constituée  par  la  réunion  des  Lases  et  de  Marmôr, 
la  triumpos,  contient  trois  personnes,  comme  son  nom  le  dit  clairement, 
car  triumpos  équivaut  à  «  unissant  trois  »,  et  diffère,  par  l'accent  et  la 
signification,  de  Op(-Fa^oç  —  ipi-Fa^tpoç,  «  unis  par  trois,  unis  en  tri- 
nité  ».  Dans  le  chant  des  Arvales  triumpos  est  féminin,  parce  qu'il  se 
rapporte  à  enô,  grand'  mère  (la  dea  Dia)  ;  c'est  donc  un  reste  d'adjectifs 
italiques  analogues  aux  adjectifs  grecs  en  oç,  ov 

Nous  n'en  sommes 'encore  qu'à  la  p.  9,  mais  déjà  le  lecteur  peut  ss 
faire  une  idée  de  l'ouvrage. 

Louis  Havet. 

Î83  31U83rfl  BllBO,f 

isiib-É-îEa'-j^UcjsruO  

ebupzsl  j2umu3c2  ïo  zu'W:  ■.  i 

aqbnhq  ai  ?Mqs,'b  elft  bnoD3è  1  5  trios 

-h  supiJmq  tsI  zrifib  zsiéiï  *iô"tî  orn 


284  REVUE   CRITIQUE 

209.  ■—  Englische  Philologie.  Anleitung  zum  wissenschaftlichen  Studium  der 
englischen  Sprache  von  Johan  Storm,  ord.  Professor  der  romanischen  und 
englischen  Philologie  an  der  Universitaet  Christiania.  Vom  Verfasser  fur  das 
deutsche  Publicum  bearbeitet.  I.  Die  lebende  Sprache.  Heilbronn.  Verîag  von 
Gebr.  Henninger.  1881.  In-8,  xvi-468  p.  9  mark.jga'o  giefli  ;  .rt  .1  .M  azoq 

\0liSJi  avBqàa  t>m 
«  Je  me  propose,  dans  ce  livre,  de  donner  un  guide  (et  une  méthode) 
pour  l'étude  scientifique  de  l'anglais  ;  destiné  avant  tout  aux  philologues 
qui  débutent,  il  pourra  n'être  pas  inutile  aussi  à  un  cercle  plus  étendu 
de  lecteurs.  Le  manque  sensible  d'un  manuel  bien  fait  et  en  rapport 
avec  Pétat  actuel  de  la  science  fera,  je  l'espère,  qu'une  pareille  entreprise 
ne  sera  pas  inutile,  même  en  Allemagne.  »  La  critique  qu'il  a  faite  des 
tentatives  de  ses  précurseurs  justifie  pleinement  l'espoir  exprimé  ici  par 
M.  J.  Storm;  mais  si  son  livre  peut  et  doit  être  le  bienvenu  même  de 
l'autre  côté  des  Vosges,  à  combien  plus  forte  raison  devrait-il  l'être  en 
France,  où  l'on  a  à  peine  l'idée  d'une  œuvre  pareille,  laquelle  seule  ce- 
pendant pourrait  contribuer  à  fonder  ce  qui  manque  presque  complète- 
ment chez  nous,  l'enseignement  scientifique  d'un  idiome  germanique  ! 
En  remaniant  son  livre  pour  le  public  allemand,  tandis  qu'il  n'a  point 
songé  à  le  faire  pour  les  lecteurs  français,  M.  J.  S.  nous  a-t-il  cru  inca- 
pables ou  incurablement  insoucieux  d'atteindre  à  une  connaissance  ap- 
profondie ou  rationnelle  de  l'anglais?  A-t-il  pensé  que  son  appropriation 
ne  rencontrerait  pas  assez  de  sympathie  pour  être  tentée  chez  nous?  C'est 
une  question  que  je  ne  veux  pas  résoudre;  mais,  puisque  la  Philologie 
anglaise  est  écrite  dans  un  idiome  étranger,  il  me  semble  que  c'est  une 
raison  de  plus  pour  essayer  d'en  donner  une  idée  aussi  complète  et  exacte 
que  possible  aux  lecteurs  de  la  Revue.  ,\  [Brn  ijovjs  Jîfiifiq 

Après  une  courte  introduction,  où  il  expose  le  but  de  son  ouvrage  et 
les  moyens  d'arriver  à  une  connaissance  scientifique  de  l'anglais  parlé, 
M.  J.  S.  traite  d'abord  de  la  prononciation  ;  mais  avant  d'arriver  à  celle 
de  la  langue  dont  l'étude  est  l'objet  spécial  de  son  livre,  il  passe  en  re- 
vue, dans  un  chapitre  substantiel  et  écrit  avec  une  rare  compétence,  les 
travaux  qui  ont  été  faits  dans  ces  derniers  temps  sur  la  phonétique  géné- 
rale ;  c'est  un  maître,  un  savant  versé  depuis  de  longues  années  dans 
l'étude  des  idiomes  germaniques  et  romans  qui  juge  ici  ceux  qui  l'ont 
précédé;  il  y  a  profit  aussi  à  lire  la  critique  pénétrante  qu'il  a  faite  en 
particulier  des  ouvrages  de  Merkel,  Brùcke,  Sievers,  Bell,  Ellis,  Sweet, 
etc.,  ces  fondateurs  de  la  théorie  scientifique  du  langage  parlé.  Ce  n'est 
pas  d'ailleurs  un  simple  jugement  que  M.  J.  S.  se  borne  à  porter  sur  ses 
devanciers;  chemin  faisant,  il  expose  ses  propres  vues  sur  la  matière, 
propose  des  corrections,  et  cette  marche  qu'il  a  suivie  dans  les  différentes 
parties  de  son  étude  en  double  l'intérêt  et  la  valeur.  Je  suis,  en  phoné- 
tique, d'accord  avec  M.  J.  S.  sur  presque  tous  les  points;  il  en  est  deux 
ou  trois  cependant  où  je  ne  puis  partager  sa  manière  de  voir.  En  ce  qui 
concerne  les  nasales  françaises,' par  exemple,  j'admets  quel^de^^^oit 

a^bi  ïis«  H  s>MÇ  :  Isa  ascirlq  3lloD  .£ 


MTTOIT'  RD  ,  £°S  or 

d'histoire   i<:t    DE    UTTKRATURK  2cO 

1*  de  pâte  ■,  l'o  de  |  un  o  analogue  à  celui  de  V^3^%S^  le 
son  ch  de  peuple  et  que  17  de  in  se  rapproche  de  1V/ ;  toutefois, je  ne 
pense  pas  que  cet  a,  pas  plus  que  l'o  de  on,  soit  aussi  ouvert  que  le  sup- 
pose M.  J.  S.  ;  mais  c'est  au  sujet  de  la  valeur  même  des  nasales  que  je 
me  sépare  surtout  du  savant  linguiste;  il  ne  leur  en  accorde  ou  ne  paraît 
leur  en  accorder,  comme  on  le  l'ait  d'ordinaire  d'ailleurs,  qu'une  seule; 
je  ne  puis  me  ranger  à  cette  manière  de  voir;  comment  ne  pas  distinguer, 
en  effet,  entre  Yan  de  dent  (dan)  et  celui  de  dents  (dân)  entre  l'on  de  son 
et  celui  de  sons  (son),  entre  17  ou  l'a  de  vin  et  celui  de  vingt.  P.  38, 
M.  J.  S.  dit  que  les  nasales  françaises  deviennent  dentales  devant  deux 
dentales,  cela  me  paraît  assez  vraisemblable  ;  mais  en  note,  il  cite  cette 
observation  de  M.  L.  Havet  dans  la  Romania  (VIII,  94),  «  après  une 
voyelle  nasale  les  muettes  se  changent  purement  et  simplement  en  na- 
sales, »  ce  qui  est  également  vrai  et  n'est  qu'en  apparence  en  opposition 
avec  sa  propre  manière  de  voir;  seulement  M.  J.  S.  ne  me  paraît  pas 
avoir  compris  l'explication  de  M.  L.  Havet,  quand  il  suppose  qu'il  pro- 
nonce vàn-do,  tandis  qu'il  admet  lui  comme  «  très  fréquente  »  la  pro- 
nonciation veind-du'2  ;  cette  dernière  prononciation  est,  en  effet,  ordi- 
naire; quant  à  vân-do  3,  il  est  évident  que  ce  n:est  pas  celle  dont,  parle 
M.  L.  Havet,  mais  bien  vànn-deû;'û  n'aurait  point  dit  sans  cela  que  les 
dentales  se  changent  en  nasales  ;  il  y  a  là  une  simple  assimilation,*  en 
vertu  de  la  loi  de  moindre  effort;  mais  il  n'y  a  point  en  cela,  comme  pa- 
raît le  croire  M.  J.  S.  dans  une  note  de  la  p.  428,  de  «  différences  dia- 
lectales »  ;  c'est  tout  simplement  pour  moi  quelque  chose  d'analogue  à 
la  différence  de  prononciation  entre  quatre  et  quatte.  Si  M.Is.  me 
paraît  avoir  mal  interprété  une  explication  fort  claire  cependant  de  M."  L. 
Havet,  son  oreille  l'a  trompé  aussi,  je  crois,  quand  il  affirme  que  leTg« 
français  est  tout  diffèrent  du  gn  italien  ou  du  h  espagnol,  et  MM.  G. 
Paris  et  A.  Darmesteter  seront  sans  doute  un  peu  surpris  d'apprendre 
que,  au  lieu  d'un  n  mouillé,  il  faut  entendre  un  n  dans  Espagne,  tan- 
dis qu'ils  doivent  évidemment  faire  entendre  le  premier  de  ces  sons  dans 
Espana.  Si  nous  n'avons  pas  ou  n'avons  plus  d7  mouillé,  nous  avons 
toujours  Yn  mouillé,  seulement  quelques  patois  nasalisent  les  voyelles 
qui   précèdent,  ainsi   dans   le   normand   du    Cotentin   on  dit  singne 
à  la  place  de  signe.  Dans   le  parler   parisien,  on   tend   plutôt  à    rem- 
placer gn  par  n  simple;  que  de  gens,  par  exemple,  ne  disent  plus  que 
Compiène  et  regardent  comme  fautive  la  prononciation  Compiègne! 
P.  62,  M.  J.  S.,  corrigeant  une  erreur  de  Ellis  '<,  dit  que  faire  entendre 

1.  Toutefois,  dans  certains  patois,  comme  ceux  du  Bessin  et  du  Cotentin,  Va  de  an 
paraît  être  plutôt  a  que  a.  Quant  à  la  prononciation  an  de  an,  elle  n'est  point  rro- 
pre  à  la  Picardie,  c'est  en  particulier  celle  du  Bocage  normand. 
yxi!^h21?.P0  représente  deu  ;  mais   Y  eu   de  deux  étant  long,  on   comprend  qu'il   vaut 
mieux  écrire  dcû  que  do. 

3.  Je  doute  qu'aucun  Français,  fût-il  Suisse,  puisse  prononcer  van-do  ou  ven-do, 
malgré  ce  qu'en  dit,  d'après  M.  J.  S  ,  M.  Sievers. 

4.  Cette  phrase  est  :  que  je  me  repente,  M.  J.  S.  dit  qu'il  faut  la  prononcer  kéj'tnë 


i 


286  REVUE    CRITIQUE 

Ye  finale  de  repente  (r'penf)  serait  une  prononciation  méridionale;  un 
méridional  donne  à  Ye  muet  final  le  son  ô —  vit  6  (vite);  —  il  n'en  est 
pas  de  même  sans  doute  en  français,  mais  il  nous  est  cependant  impossi- 
ble de  prononcer  une  muette  ou  une  chuintante  finale  sans  faire  enten- 
dre, non  le  son  o,  il  est  vrai,  mais  une  demi-muette;  voilà  ce' que 
M.  J.  S.  n'a'pas  vu  et  ce  que  souvent  les  étrangers  ne  comprennent 
pas  '.  Je  ne  m'explique  pas  non  plus  que  M.  J.  S.,  qui  distingue  avec 
tant  de  raison  Ye  obscur  allemand  de  Ye  muet  français,  ne  le  distingue 
pas  aussi  bien  de  notre  é  fermé  et  paraisse  (p.  66)  donner  raison  aux 
linguistes  qui  les  identifient;  Yé  fermé  ne  diffère  pas  moins  que  Ye  muet 
de  Ye  obscur  germanique,  lequel  n'est  point  d'ailleurs  étranger  aux 
idiomes  français;  j'en  ai  constaté  la  présence  en  particulier  dans  le  pa- 
tois du  Bessin,  où  je  l'avais  pris  d'abord,  il  est  vrai,  pour  un  é  fermé  2„ 

Après  la  «  phonétique  générale  »,  M.  J.  S.  aborde  la  «  prononciation 
anglaise  »  ;  dans  le  chapitre  consacré  à  ce  sujet  délicat,  il  suit  la  même 
méthode  que  dans  son  examen  de  la  phonétique,  et,  tout  en  passant  en 
revue  les  ouvrages  de  B.  Schmitz,  Ed.  Màtzner,  J.  Walker,  B.-H. 
Smart,  P. -A.  Nuttall,  P. -H.  Phelp,  etc.,  il  en  prend  occasion  pour  pro- 
poser sa  propre  manière  de  voir,  et  réformer  ou  compléter  au  besoin  les 
théories  de  ces  divers  grammairiens.  Enfin,  il  arrive  (p.  129)  aux  dic- 
tionnaires. Ici  sa  critique  prend  de  plus  grandes  proportions;  ce  n'est 
plus  une  appréciation  succincte,  c'est  soit  une  discussion  prolongée  des 
sens  donnés  à  quelques  vocables  rares  un  peu  usités  parles  auteurs  qu'il 
cite,  soit  une  liste  de  mots  curieux  qu'ils  ont  oubliés;  que  de  renseigne- 
ments précieux,  par  exemple,  p.  152-164,  sur  ^e  "  slanS  »  et  Ie  ((  cant  B> 
dont  l'étude  fait  suite  à  l'examen  des  dictionnaires  et  en  est  comme  le  com- 
plément! M.  J.  S.  y  fait  preuve  non-seulement  de  la  connaissance  la  plus 
approfondie  de  l'anglais,  mais  encore  de  la  lecture  la  plus  étendue. 
Après  l'examen  des  dictionnaires  vient  celui  des  «  livres  de  référence  », 
des  encyclopédies,  etc.,  en  un  mot,  de  tous  les  moyens  pratiques  qui 
peuvent  servir  à  apprendre  l'anglais.  Parler  et  lire  sont  les  deux  moyens 
les  plus  sûrs  pour  y  arriver.  De  là  les  renseignements  destinés  à  guider 
l'étudiant  à  cet  égard.  Dans  une  double  étude  nourrie  de  faits,  remplie 
dHndications  précieuses  et  de  préceptes  utiles,  M.  J.  S.  nous  fait  connaî- 
tre dans  ses  caractères  généraux  d'abord  (pp.  206-259)  la  langue  de  la 
conversation,  puis  (pp.  259-299)  l'idiome  vulgaire.  N'excluant  aucun 
- 

r'pant',    cela    est  exact,    mais   il  serait  tout  aussi    exact    de    prononcer  Zr'  je  m' 
repant',  et  il  va  de  soi  que  dans  le  style  élevé  il  faudrait  dire  kè  je  vie  râpant'. 

1.  J'ai  été  longtemps,  quand  j'ai  appris  l'allemand,  avant  de  pouvoir  prononce'r  un 
mot  finisssant  par  une  muette  ou  une  chuintante,  sans  le  terminer  par  un  e  mi- 
muet.  I    1 

2.  Je  crois,  au  contraire,  que  l'e  final  Scandinave  se  rapproche  beaucoup  de  notre 
e  fermé.  J'aurais  aussi  plus  d'une  observation  à  faire  au  sujet  de  la  valeur  de  IV  (p. 
98),  je  me  bornerai  à  une  remarque  :  IV  des  idiomes  du  sud  de  la  Norvège  et  de  la 
Suède  me  paraît  dental,  tandis  que  le  nôtre  est  uvulairc.  ^"-lËn! 


d'histoire  et  de  littérature  287 

dialecte  du  champ  de  ses  observations,  il  a  accordé  une  grande  place 
à  l'anglais  tel  qu'on  le  parle  en  Amérique,  et  le  paragraphe  où  il  traite 
des  américanismes  (pp.  3oi-338)  est  certainement  un  des  plus  curieux 
-deisûCL  livre. 

aupMaisfc (quels  ouvrages  doit  lire  celui  qui  veut  apprendre  à  fond 
J d'anglais?  On  comprend  l'importance  de  la  question,  et  l'on  ne  doit 
pas  être  surpris  que  M.  J.  S.  y  réponde  longuement.  Les  conseils  qu'il 
donne  sont  excellents  et  la  connaissance  profonde  de  la  littérature  an- 
glaise dont  ils  témoignent  leur  donne  une  incontestable  autorité.  Parmi 
les  pages  qui  traitent  de  ce  sujet,  quelques-unes  des  plus  intéressantes 
sont,  sans  contredit,  celles  où  M.  J.  S.  compare  la  langue  du  xvnr3  siècle 
à  la  langue  actuelle;  on  est  surpris  des  changements  profonds  qui  se 
sont  faits  dans  l'anglais  en  un  si  court  espace  de  temps  :  quelle  différence 
quand  on  passe,  je  ne  dira;  pas  de  Pope  ou  d'Addison,  mais  de  Gold- 
smith  même  à  Dickens  ou  àThackeray  !  On  lira  avec  autant  de  plaisir  que 
de  profit  les  pages  consacrées  à  Shakespeare,  en  particulier  les  remarques 
ingénieuses  qu'a  suggérées  à  M.  J.  S.  l'édition  critique  de  Macbeth  par 
Clarke  et  Wright.  La  source  d'informations  la  plus  précieuse  avec  Sha- 
kespeare pour  pénétrer  dans  la  connaissance  intime  de  l'anglais,  c'est  la 
traduction  de  l'ancien  et  du  nouveau  testament,  en  particulier  YAutho- 
ri^ed  version  of  the  bible  ;  M.  J.  S.  ne  pouvait  manquer  aussi  d'en 
parler;  il  a  fait  plus,  il  a  donné  (p.  401)  toute  une  série  d'explications 
du  plus  grand  intérêt  sur  des  formes  vieillies  ou  rares  de  cette  traduction 
célèbre. 

Après  la  pratique,  après  les  lectures,  l'étude  théorique  et  grammati- 
cale de  la  langue  est  destinée  à  en  compléter  et  en  assurer  la  connais- 
sance; c'est  à  l'examen  des  ouvrages  qui  en  traitent  qu'est  consacré  le 
dernier  chapitre  de  M.  J.  S.;  Mœtzner,  Koch,  Latham,  Marsh,  etc., 
pour  ne  parler  que  des  auteurs  les  plus  connus,  y  sont  appréciés  avec  sa 
compétence  habituelle,  et  cet  examen  rapide  termine  dignement  cette 
vaste  étude,  si  remplie  de  faits,  si  riche  en  aperçus  nouveaux  et  où  rien 
ne  manque  de  ce  qui  peut  conduire  à  une  connaissance  rationnelle  de 
l'anglais  parlé  aujourd'hui  '.  Resterait  à  faire  l'histoire  de  cet  idiome  si 
simple  et  à  la  fois  si  puissant  ;  c'est  sans  doute  ce  que  tentera  bientôt 
M.  J.  Storm,  et  s'il  apporte,  comme  il  n'en  faut  pas  douter,  dans  cette 
entreprise  nouvelle,  la  même  sûreté  et  la  même  abondance  d'informa- 
tions, une  critique  aussi  pénétrante  et  aussi  sûre,  il  peut  être  certain  que 
la  seconde  partie  de  son  œuvre  ne  sera  pas  accueillie  avec  moins  de  fa- 
veur que  celle  dont  je  viens  d'essayer  de  donner  une  idée  aux  lecteurs 
de  la  Revue.  C.  J. 

, — | 

1.  Ce  dernier  chapitre  est  suivi  d'une  double  table,  la  première  renfermant  le  nom 
de  tous  les  auteurs  et  de  tous  les  ouvrages  cités  dans  la  Philologie  anglaise,  l'autre 
qui  donne  une  liste  très  complète  de  toutes  les  formes,  de  tous  les  mots  curieux 
étudiés  par  l'auteur;  on  y  trouvera,  en  s'y  reportant,  plus  d'un  vocable  qui  manque 
dans  des  dictionnaires  anglais  regardés  comme  complets. 


Amri  -m'a 

l    j?^8-t^rr  ,.  REVUE    CRITIQUE 

•Bçttw-iiov  trq  b  no  Jnob  asJ  v  ^   ^.  . 

jq2Îto3£nil5é>i*i8evue  de  Bayonno  de  1  JSOîS  'et  la  qjne3t&h*9âe  'Va^aW- 
«îM-tliélemy,  d'après  les  archives    de   Simancas,  par  M.    F.    Combes,  professeur 

de 


d'histoire  à  l'université  de  Bordeaux  (sic).  Paris,  Fischbacher,  1882.  gr.  in-8° 

^     ,      ,  .  »***>  zitn 

On  s  est  beaucoup  occupe,  en  France  et  à  l'étranger,  du  mémoire  de 

l.  Combes.  Lu  d'abord  en  avril   1881  par  l'auteur,  à  la  Sqrbûrme, 


8i/n 
Jn  s'est  beaucoup  occupe,  en  France  et  à  l'étranger,  du  mén 

M. 

devant  les  sociétés  savantes  réunies,  ce  mémoire  fut  très  applaudi.  On 
l'apprécia  beaucoup  aussi,  quelques  jours  plus  tard,  à  V Académie  des 
sciences  morales  et  politiques,  où  «  le  grand  historien  national  », 
M.  Henri  Martin,  en  donna  lecture.  Divers  critiques  n'ont  pas  été  moins 
favorables  au  travail  du  professeur  d'histoire  à  la  Faculté  des  lettres  de 
Bordeaux  que  l'auditoire  de  la  Sorbonne  et  de  l'Institut  :  ils  ont  redit 
avec  lui  (p.  19)  :  «  La  vérité  est  faite,  et  iUn'y  aura  plus  à  y  revenir... 
Les  nuages  sont  dissipés;  le  sphinx  n'a  plus  d'énigmes,  il  est  vaincu  et 
découvert.  »  Pour  moi,  tout  en  rendant  hommage  au  mérite  des  recher- 
ches de  M.  C.,.je  ne  pensais  pas  qu'il  eût  répandu  la  plus  éclatante  lu- 
mière sur  l'entrevue  de  Catherine  de  Médicis  et  de  Charles  IX  avec  le 
duc  d'Albe  et  la  cour  d'Espagne.  Il  me  semblait  que  ni  dans  l'argumen- 
tation, ni  dans  les  Pièces  justificatives  ',  rien  n'est  de  nature  à  justifier 
les  paroles  attribuées  (Avis  de  l'éditeur)  à  un  de  nos  plus  savants  acadé- 
miciens, que  mémoire  et  documents  «  lui  paraissaient  trancher  définiti- 
o/Hj?«era^p,ttfidans  le  sens  d'un  concert  ancien  et  d'une  préméditation  évi- 
vJ  ubdeurtt^'ia;  question  toujours  brûlante  de  la  Saint-Barthélémy*.  »  La 
grande  autorité  des  juges  qui  avaient  approuvé  les  conclusions  de  M.  C. 
me  faisant  douter  de  ma  propre  opinion,  je  crus  devoir  consulter  un 
érudit  profondément  versé  dans  la  connaissance  des  choses  du,  xvie  siè- 
cle, M.  de  La  Ferrière.  L'éditeur  des  Lettres  de  Catherine  de  Médi- 
cis 3  voulut  bien  m'apprendre  que  lui  non  plus  n'avait  pas  été  convaincu 
par  la  lecture  des  pièces  trouvées  à  Simancas  4.  Bientôt  diverses  revues 

1.  Ces  pièces,  qui  remplissent  plus  de  la. moitié  de  la  brochure,  sont  au  nombre 
de  sept;  chacune  d'elles  est  accompagnée  de  la  traduction  française.  La  plus  impor- 
tante des  sept  pièces  est  la  lettre  de  Philippe  II  au  cardinal  Pacheco,  datée  du  Bois 
de  Ségovie,  le  24  avril  1 56b. 

2.  Ces  paroles  sont  d'autant  plus  remarquables,  qu'elles  auraient  été  dites  par  un 
converti,  car,  il  y  a  quelques  années,  le  même  critique  avait  vivement  et  solidement 
combattu,  dans  le  Journal  des  savants,  la  thèse  de  la  préméditation. 

Si  II  n'a  pas  été  rendu  compte  ici  du  premier  volume  de  ce  recueil  (1880).  Répé- 
tons, du  moins,  ce  qu'en  a  dit  un  digne  émule  de  M.  de  La  Ferrière,  M.  A.  de  Ru- 
ble  (Antoine  de  Bourbon  et  Jeanne  d'Albret,  t.  I,  1881,  préface,  p.  x,  note.  1)  :  «  Au 
moment  où  nous  écrivons,  M.  le  comte  de  La  Ferrière  publie  le  premier  volume 
d'un  ouvrage  impatiemment  attendu,  la  correspondance  de  Catherine  de  Médicis. 
Cet  ouvrage,  fruit  de  recherches  immenses,  poursuivies  depuis  près  de  vingt  ans 
dans  tous  les  dépôts  scientifiques  de  l'Europe,  sera  l'œuvre  capitale  de  notre  temps 
sur  1  histoire  du  xvie  siècle.  » 

4.  Relevons,  à  ce  propos,  une  erreur  de  M.  Combes,  li  £ip|en1efp?^mi  Philippe  H 
comme  le  fondateur  des  archives  de  Simancas.  Ce  fut  Charles-Quint  qui  les  établit, 
comme  M.  Gachard  l'a  rappelé  (Correspondance  de  Philippe  ïl,\  T,'  pv'%' 


d'histoire  et  de  littérature  289 

allemandes,  anglaises,  belges,  dans  des  articles  dont  on  à  pu  voir  l'ana- 
lyse  (Périodiques),  déclarèrent  avec  ensemble  que  les» documents  pu- 
bliés par  M.  C.  peuvent  bien  être  intéressants,  curieux,  mais  qu'ils  ne 
prouvent  nullement  que  Catherine  de  Médicis  et  le  duc  d'Albe  se  soient 
mis  d'accord,  en  juin  1 565,  à  Bayonne,  au  sujet  de  regorgement  des 
*  iMsfâëtiôts.  Comme  on  l'a  fait  justement  remarquer,  tout  le  système  de 
n  ^l 'C1/ repose  sur  une  phrase  de  la  lettre  écrite  de  Saint-Sébastien,  le 
4*  juillet  1 565,  par  don  Fr.  de  Alava  au  ministre  d'Etat  Fr.  de  Eraso 
(p.  37)  :  «  Y  lo  que  anteveo  que  an  de  martillar  estos  eresiarcas  »,  phrase 
dont  M.  C.  donne  cette  traduction  :  Je  prévois  qu'on  doit  marteler 
ces  hérésiarques.  Mais  la  traduction  est  infidèle,  et,  tout  au  contraire, 
il  faut  lire  :  Je  prévois  que  ces  hérésiarques  la  martèleront,  c'est-à- 
dire  qu'ils  mettront  le  martel  en  tête  à  la  reine  Catherine,  et  c'est  pour 
cela  que  le  bon  Espagnol  s'inquiète.  Se  serait-il  donc  inquiété  du  reste? 
Le  contre-sens  étant  incontestable  %  l'édifice  si  ingénieusement  dressé 
par  M.  Combes  n'a  plus  de  base  et  s'écroule  lamentablement. 

De  cette  aventure,  tirons  deux  leçons  :  la  première,  c'est  qu'en  ma- 
tière difficile,  il  ne  faut  pas  se  hâter  de  conclure;  la  seconde,  c'est  qu'il 
ne  faut  pas  se  hâter  d'approuver  des  conclusions  téméraires. 

V"n'J"  snab'-in 
ib  tetai 

Bj.        211.  —  JVotiee    biographique     sur     l,n    Bruyère,  par  M.    Gustave  Servois. 

/  3gar^ .Hachette,  1882.  In-8°  de  exc  p.  Complément  du  tome  Ier  de  l'édition  du  La 

Bruyère  de  la  collection  :  Les  grands  écrivains  de  la  France.:  je  3K1-JR- 
uu  isilulndo  ïiovsb  ° 

La  Notice  de  M.  G.  Servois  est  tout  un  ouvrage.  Cet  ouvrage  est  di- 
visé en  sept  chapitres  intitulés  :  La  famille  de  la  Bruyère  et  le  peu 
que  Ion  sait  de  sa  jeunesse;  La  Bruyère  trésorier  gênerai  des  fi- 
nances; La  Bruyère  dans  la  maison  de  Condé;  Les  Caractères;  La 
Bruyère  à  l'Académie  ;  Les  amies  et  les  amis  de  la  Bruyère;  Les 
dernières  années  de  la  Bruyère.  Les  sept  chapitres  sont  suivis  d'un 
Tableau  généalogique  de  la  famille  de  la  Bruyère  et  des  Pièces  jus- 
tificatives que  voici  :  Acte  de  baptême  de  Jean  de  la  Bruyère  ;  Ex- 
trait d'un  Compte  à  l'amiable  rendu  [le  14  octobre  \6y6}'par  damoi- 
selle  Elisabeth  Hamonyn,  veuve  de  Ma  Louis  de  la  Bruyère,  à  Jean  de 
laBruyère,  etc.  ;  Vol  commis  dans  la  chambre  de  la  Bruyère.  Plainte 
et   information;    Chansons   et  épigrammes   sur    la   réception  de   la 


la  Bruyère;  Acte  de  décès  de  la  Bruyère. 


Bruyère  à  l'Académie  française:  Inventaires  faits  après  la  mort  de 

ornul,.  »  u  x 


H'hv    3D    2jm    §ji      -, 

naj  ôiiofV aD'srei        plaisamment  (p.  i5)  :  «  Nous  savons  tous  un  peu  l'espagnol.  »  Il  n  a 

pas  été  seul  pourtant  à  trahir  le  texte  de  Fr.  de  Alava  :  il  nomme   le  collaborateur 

','jiiid(i'a"a's  dhe  le  complice)  qui  l'a  aidé  «  avec  son   autorité  dans  tout  ce  qui  concerne 

,'Jb)Ij  CJ#  ^ttéràturé  eVla'  langue  espagnole.»  Ai-je  besoin  d'ajouter  que  ce  philologue  n'est 

point  notre  collaborateur  M.  A.  Morel-Fatio  ': 


29O  REVUE   CRITIQUE  -»'<i 

On  peut  dire  que  tout  ce  qu'il  était  possible  de  trouver  sur  l'auteur 
des  Caractères,  M.  S.  l'a  trouvé.  «  La  vie  de  la  Bruyère,  »  dit-il  (p.  xiip,° 
«  s'est  cachée  aux  yeux  mêmes  de  ses  contemporains,  et  les  récits  sém^-1 
maires  qu'ils  nous  ont  laissés  ne  contiennent  guère  que  des  renseigne- 
ments vagues  et  indécis.  »  Le  nouveau  biographe  rappelle  que  Sainte- 
Beuve  a  écrit  en  i836  (Portraits  littéraires)  :  «  On  ne  sait  rien  ou 
presque  rien  de  la  vie  de  la  Bruyère...  Tout  le  rayon  du  siècle  est  tombé 
juste  sur  chaque  page  du  livre,  et  le  visage  de  l'homme  qui  le  tenait  ou- 
vert à  la  main  s'est  dérobé.  »  Il  ajoute  (Ibid.)  :  «  Depuis  18 36, 
MM.  Walckenaer,  Destailleur,  Jal,  Chatel,  Edouard  Fournier,  d'autres 
encore,  ont  ajouté,. ceux-ci  quelques  lignes,  ceux-là  quelques  pages  à  la 
biographie;  mais,  en  dépit  des  recherches  les  plus  persévérantes  ou  les 
plus  ingénieuses,  elle  demeure  bien  pauvre  et  imparfaite  sur  divers 
points,  et,  tout  naturellement,  le  roman  s'y  est  parfois  mêlé,  comme  par 
compensation.  » 

Si  M.  S.  n'a  pu  «  combler  toute  lacune  et  dissiper  toute  obscurité,  » 
il  a,  du  moins,  soumis  à  une  révision  bien  nécessaire  «  les  chapitres 
dont  se  compose  aujourd'hui  l'histoire  traditionnelle  de  la  Bruyère,  »  et, 
de  plus,  il  a  apporté,  à  son  tour,  «  de  nouveaux  et  authentiques  rensei- 
gnements soit  sur  lui-même,  soit  sur  sa  famille,  au  milieu  de  laquelle 
se  sont  écoulés  près  des  trois  quarts  de  sa  vie.  »  Personne  ne  reprochera 
sans  doute  à  M.  S.  d'avoir  trop  «  scrupuleusement  recueilli  de  minimes 
détails,  »  car,  comme  il  le  dit  bien  (p.  xm),  «  les  minuties  même  ont 
ici  leur  prix  :  il  est  permis  de  ne  les  point  négliger,  lorsqu'il  s'agit  d'un 
philosophe  qui,  pour  avoir  été  le  plus  pénétrant  observateur  et  le  péift^  * 
tre  le  plus  illustre  des  mœurs  de  ses  contemporains,  n'en  est  pas  moins 
le  plus  inconnu  des  grands  écrivains  de  son  époque.  » 

Mentionnons  rapidement  quelques-unes  des  additions  et  rectifications 
introduites  par  l'habile  chercheur  dans  la  biographie  de  la  Bruyère  :  «  On 
l'a  fait  gentilhomme  d'origine,  et  l'on  s'est  trompé.  Il  se  considéra,  selon 
l'usage,  comme  anobli  par  la  charge  de  trésorier  de  France,  qu'il  acheta 
mais  son  père,  Louis  de  la  Bruyère,  contrôleur  général  des  rentes  de 
l'hôtel-de-ville,  était  un  bourgeois  de  Paris  '.  »  —  «  Dans  la  Comédie  de 
J.  de  la  Bruyère,  Ed.  Fournier  se  montre  disposé  à  croire  que  la  Bruyère 
fit,  en  1666  et  en  1667,  un  voyage  en  Italie,  et  à  lui  attribuer  une  relation 
conservée  au  département  des  manuscrits  de  la  Bibliothèque  nationale 
(F.  F.  n°  6o5i).  Cette  relation  est  signée  l'abbé  de  la  Bruière...  J'ai 
lu  quelque  part,  a  écrit  le  P.  Adry  en  parlant  de  la  Bruyère,  qu'il  avait 

1.  P.  xm.  Le  trisaïeul  paternel  de  l'auteur  des  Caractères,  Jean  de  la  Bruyère, 
était  apothicaire  dans  la  rue  Saint-Denis.  Cet  apothicaire  et  son  fils,  Mathias  de  la 
Bruyère,  lieutenant  civil  de  la  prévôté  et  vicomte  de  Paris,  furent  au  nombre  des 
plus  ardents  promoteurs  de  la  Ligue,  comme  on  peut  le  voir  dans  Palma  Gayet, 
Pierre  de  l'Estoile,  J.  A.  de  Thou,  etc.  M.  S.  a  retrouvé  dans  les  dossiers  de  quelques 
études  de  notaires  force  renseignements  sur  la  famille  du  moraliste.  Toute  cette 
partie  de  la  Notice  est  des  plus  neuves.  r.jhuua-jLl  sab  Jo  yrJyuia  bI  w 


O'HISTOIKK    Kl     DK    LITTÉRATURE  29 1 

été  quelque  temps  ecclésiastique;  nul  autre  renseignement  ne  confirme 
ce  vague  témoignage.  La  Bruyère  eût-il  été  d'ailleurs  ecclésiastique  en 
1Ô66  et  1667,  encore  ne  pourrait-on  le  considérer  comme  l'auteur  de 
cet^e  lettre  -,  la  forme  et  le  fond  ne  le  permettraient  pas.  Elle  n'est  pas 
davantage  de  son  frère,  qui,  en  1666,  avait  quatorze  ans  '.  »  —  «  Nous 
venons  de  montrer  la  Bruyère  achetant  son  titre  de  trésorier;  mais  l'a- 
t-il  vraiment  payé  de  ses  deniers?  Racine  obtint  le  sien  de  la  protection 
de  Colbert  et  de  la  libéralité  du  roi  :  ami  de  Bossuet,  la  Bruyère  n'au- 
rait-il point  dû  à  l'intervention  de  l'illustre  évêque  la  concession  gra- 
tuite de  son  office?...  Nous  trouvons  ces  conjectures  dans  la  biographie 
la  plus  complète  de  la  Bruyère  [celle  d'Ed.  Fournier].  La  Bruyère,  à 
notre  avis,  est  devenu  trésorier  à  la  suite  d'un  contrat  avec  un  particu- 
lier qui  ne  lui  fit  aucun  abandon  du  prix  de  la  charge...  2  »  —  «  C'est 
d'après  ces  deux  portraits,  de  Saint-Simon  et  de  l'abbé  d'Olivet,  que  la 
postérité  s'est  représenté  la  Bruyère.  Celui  de  l'abbé  d'Olivet  est  un  peu 
de  convention  :  la  Bruyère  avait  moins  de  sérénité.  J'ose  dire  que  la 
passion  anima  souvent  ce  philosophe,  dont  quelques  critiques„se  sont 
plu,  un  peu  trop,  croyons-nous,  à  adoucir  la  physionomie,  et  qui,  pour 
être  un  sage,  ne  laissait  pas  de  se  montrer  sensible  aux  blessures  de  l'a- 
mour-propre, et  capable  d'élans  de  généreuse  indignation  3.  » 

Je  pourrais  citer  bien  d'autres  passages  d'un  vif  intérêt,  mais  j'aime 
mieux  renvoyer  le  lecteur  à  la  notice  même.  Chacun  déclarera  certaine- 
ment avec  moi  qu'elle  abonde  en  particularités  curieuses,  recueillies  avec 
autant  de  soin  que  de  sagacité,  et  qu'elle  est  l'œuvre  d'un  homme  dont 
l'érudition  est  des  plus  sûres  4,  dont  le  goût  est  des  plus  purs,  et  dont  la 
plume  est  des  plus  fines  5. 

T.  de  L-ooni  zijlq 
■:>rmil,ruUivn  t.o  an, , 

nQ 

i.  P.  xxx,  note  2. 

i'/p'.^'XLV.  Conférez  la  note  1  de  la  page  xlvi.  Un  peu  plus  loin,  M.  S.  combat 
encore  la  parodoxale  opinion  de  M.  Ed.  Fournier  sur  VArténice  des  Caractères 
(p.  cxxxvi).  Il  nous  annonce  (p.  cxxxvu)  qu'  «  un  érudit,  familiarisé  avec  la  société 
dans  laquelle  vécut  la  Bruyère,  M.  Allaire,  doit  nous  révéler,  dans  une  prochaine 
publication,  le  nom  véritable  d'Arténice,  que  l'on  a  eu  tort,  à  son  sentiment,  de 
confondre  avec  Ricanète,  et  qui,  à  ses  yeux,  est  la  duchesse  de  Bourbon.  » 

3.  P.  lxxxix.  N'oublions  pas  de  noter  que  M.  S.  a  donné  le  premier  (p.  LXir),  d'a- 
près les  registres  de  comptes  de  la  maison  de  Condé  conservés  aux  archives  du  châ- 
teau de  Chantilly,  la  date  précise*  de  l'entrée  de  la  Bruyère  dans  ses  fonctions  de 
professeur  d'histoire  du  jeune  duc  de  Bourbon  (i5  août  1684)  et  le  chiffre  de  son 
traitement  (i,5oo  livres). 

4.  Je  ne  trouve  à  relever  qu'un  nom  (p.  cxli,  note  1)  qui  n'est  pas  écrit  comme 
l'écrivait  celui  qui  le  portait  :  l'abbé  Le  Clerc,  ainsi  que,  plus  tard,  son  homonyme, 
le  savant  doyen  de  la  faculté  des  lettres  de  Paris,  donnait  deux  syllabes  à  son  nom, 
M.  S.  aurait  pu  compléter  la  note  sur  la  Bibliothèque  de  Richelet,  en  consultant 
l'excellente  monographie  de  M.  l'abbé  L.Bertrand  :  Vie,  écrits  et  correspondance  lit- 
téraire de  Laurent  Josse  Le  Clerc  (Paris,  1878,  in-8°,  pp.  186  et  suiv.). 

5.  Avec  la  Xoticc  on  a  distribué  un  Album  où  l'on  remarque  deux  beaux  portraits 
de  la  Bruyère  et  des  fac-similés  d'autographes. 


29%qqilidq    èddB'i  , ,.  «EVUKCIUTIQUE 

212.  — ■  Couvres   nouvelles  de    Oe«  Forges  Maillard,  publiées  avec  notes, 

introduction  et  étude  biographique,  par  Arthur  de  la  Borderie  et  René  Kervile^.3^ 
•    Tome  II  Lettres  nouvelles.  Nantes,  Société  des  bibliophiles  bretons  et  de  l'histoire 

de  Bretagne.   1882.   In-8"  de  237  p. 

MM.  de  la  Borderie  et  Kerviler  comptaient  faire  tenir  les  Œuvres 
nouvelles  de  Paul  Des  Forges  Maillard  dans  un  seul  volume  \  ce)8vor-  n 
lume  s'est  trouvé  rempli  par  les  Œuvres  en  prose,  c'est-à-dire  par  iei^ 
lettres  seules.  Les  poésies  qui,  comme  le  rappellent  les  éditeurs,  se  cpfft1-^ 
posent  pour  la  plupart  de  fines  épigrammes,  n'occuperont  qu'une  cin- 
quantaine de  pages.  Mais,  ainsi  qu'ils  nous  en  avertissent,  «  l'étude  bio-' 
graphique,  bibliographique  et  littéraire  servant  d'introduction,  ne  peut 
avoir  d'intérêt  sans  prendre  quelque  développement  :  la  vie  de  notre  au- 
teur, très  peu  connue,  étant  curieuse  à  examiner,  à  restituer  dans  le  dé- 
tail, avec  les  nouveaux  documents  que  nous  avons  rassemblés.  »  On  a 
donc  été  obligé  de  scinder  la  publication  en  deux  volumes.  De  même, 
j'examinerai  en  deux  articles  séparés  l'édition  de  MM.  de  la  B.  et  K., 
espérant  bien  que  le  tome  ier  ne  tardera  pas  à  suivre  le  tome  II. 

Ce  tome  II  est  fort  agréable  à  lire.  Pas  une  des  pièces  dont  il  se  com- 
pose ne  figure  dans  les  diverses  éditions  de  la  fausse  Mlle  Malcrais  de  la 
Vigne  imprimées  jusqu'ici,  et  leur  titre  de  Lettres  nouvelles  est  des 
mieux  justifié.  De  ces  lettres,  les  unes  sont  entièrement  inédites  et  ont 
été  prises  sur  les  autographes  de  l'auteur  '  ;  les  autres,  pour  me  servir 
des  pittoresques  expressions  des  éditeurs,  «  sont  exhumées  de  divers  re- 
cueils du  temps,  dont  les  collections  sont  rares,  certains  même  à  peu 
près  inconnus  et  d'ailleurs  dépourvus  de  tables  :  elles  gisaient  donc  là, 
perdues  dans  la  fosse  commune.  »  MM.  de  la  B.  et  K.  ont  cru  devoir 
rectifier  l'orthographe  par  trop  bizarre  de  ces  dernières  lettres,  orthogra- 
phe dont  Des  Forges  Maillard  n'est  pas  responsable,  et  ils  ont  eu,  de 
plus,  la  chance  d'y  introduire  assez  souvent  d'heureuses  variantes,  pri- 
ses sur  des  originaux  ou  sur  d'excellentes  copies  anciennes. 

Le  volume  renferme  44  lettres ,  une  lettre  adressée  de  Marseille  à 
MllG  de  Malcrais,  le  12  août  1733,  et  43  lettres  écrites  par  elle,  depuis 
le  3  janvier  1726  jusqu'au  3o  avril  1766,  la  plupart  du  Croisic,  quel- 
ques-unes de  Paris,  de  Marseille,  de  Montbrison,  de  Nantes,  de  Belle- 
Isle-en-Mer,  de  Poitiers,  des  Sables-d'Olonne.  Les  correspondants  sont 
le  P.  du  Cerceau  2,  Voltaire,  René  Chevaye,  le  bibliophile  de  Nantes  3, 

1.  Les  éditeurs  ont  scrupuleusement  reproduit  l'orthographe  de  leur  auteur,  con- 
formément au  vœu  qu'il  avait  exprimé  dans  une  lettre  du  3i  mars  1749  (p.  ig3)  : 
«  Je  voudrois  bien  que  l'on  n'employât  point  l'ortographe  moderne,  qui  réduit  l'é- 
criture à  l'usage  de  la  prononciation,  mais  qu'on  se  servît  de  la  mienne,  autant 
qu'il  ne  me  sera  pas  échapé  de  fautes  contre  le  rituel  ordinaire.  Je  n'aime  point  du 
tout  la  nouvelle  ortographe;  peut-être  ai-je  tort,  mais  chacun  a  sa  marote.  » 

2.  Voir  (p.  3)  une  gaie  et  aimable  lettre  du  bon  Père  en  réponse  à  des  vœux  de 
bonne  année  qui  lui  avaient  été  exprimés  à  la  fois  en  prose  et  en  vers  par  Des  Fôt- 
ges  Maillard.  ^     ,,/'      . 

3.  Des  Forges  Maillard  en  parle  ainsi  (le  26  août  1744,  p.  io3j  :  «  J'arrive  de  Uis- 


d'histoire  et  de  littérature  293 

Titon  du  Tillet,  le  président  Bouhier,  Mme  de  Hallay,  l'abbé  Philippe 

de  Prétot,  éditeur  des  Amusements  du  cœur  et  dé  réipiïtyte'pïitodem 

de  Robiën,  fondateur  de  l'archéologie  en  Bretagne,  le  docteur 'BdhWriiy;1 

enfin  le  directeur  du  Journal  de  Verdun.  Les  lettres  de  Des  Forges 

Maillard-sont  fort  spirituelles,  et  il  eût  été  vraiment  dommage  qu'elles 

n'eussent  pas  été  recueillies  et  publiées  avec  autant  de  soin.  A  chaque 

page  on  trouve  des  traits  ingénieux,  et,  ce  qui  vaut  mieux  encore,  des 

particularités  intéressantes.  Ainsi,  dans  la  lettre  à  unpoète  qui  avait  été 

volé  (juin  1732),  au   milieu  de  plaisanteries  qui  font  penser  au  célèbre 

distique  ? 
■oie?  30IJJ0 1  j>     1.        .  ,         _      .      ,  .  .,       . 

L  on  vient  de  me  voler  —  Que  je  plains  ton  malheur! 

Tous  mes  vers  manuscrits  —  Que  je  plains  le  voleur  ! 

b  sijon  tu .  . 

on  rencontre  (p.  7)  un  éloge  inattendu  d'un  savant  ne,  comme  Des 

Forges  Maillard,  au  Croisic,  «  M.  Bouguer,  ce  mathématicien  fameux 
«  que  FAcadémie  des  sciences,  qui  l'a  couronné  trois  fois,  a  reçu  au 
«  nombre  de  ses  membres...  »  À  côté  de  cet  éloge  d'un  «  illustre  ami  >  », 
citons  (p.  8)  une  oraison  funèbre  d'un  membre  de  l'Académie  française, 
Houdart  de  la  Motte,  auquel  l'auteur  refuse  avec  raison  le  titre  de  poète. 
Indiquons  en  cette  même  lettre  (p.  7)  divers  renseignements  auto-bio- 
graphiques 2.  Les  admirateurs  de  Montaigne  liront  avec  plaisir  (pp.  i3- 
i5)  une  vive  et  moqueuse  protestation  de  M1]e  de  Malcrais  contre  le  bi- 
zarre projet  qu'avait  quelqu'un  de  mettre  les  Essais  en  style  moderne- 
Ce  quelqu'un,  d'après  une  note  des  éditeurs  (p.  i5),  ne  serait  autre  que 
l'abbé  Trublet.  L'idée  était  bien  digne  du  ridicule  compilateur  que  les 
plaisanteries  de  Voltaire  ont  rendu  fameux.  Parmi  les  personnages  dont 
il  est  question  dans  les  lettres  suivantes,  mentionnons  (p.  20)  le  poète  Se- 
necé,  que  Des  Forges  Maillard  vit  «  presque  centenaire  »  à  Mâcon  et  qui, 
dans  ce  grand  âge,  conservait  un  esprit  «  encore  assez  agréable,  »  le  pré- 
sident Bouhier  (p.  20),  «  qui  est  maître  de  la  plus  belle  bibliothèque  que 
puisse  avoir  en  propre  un  particulier  3  »,  Brossette,  le  commentateur  de 
Boileau  (p.  20),  Titon  du  Tillet,  «  le  patron  des  Muses  françaises», 
(p.  3o)  4,  l'évêque  de  Nantes,  Turpin  de  Crissé  de  Sanzay  (p.  37), 
l'abbé  d'Olivet,  dont  Des  Forges  Maillard  raconte  (pp.  44-45)  un  terri- 
ble accès  de  colère  d'une  façon  d'autant  plus  plaisante,  qu'il  mêle  à  son 
récit  un  ironique  éloge  de  «  la  douceur  balsamique  et  melliflue  du  ca- 

son,  où  j'ai  passé  dix  ou  douze  jours  chez  mon  ancien  ami,  M.  Chevaye,  auditeur 
des  Comptes,  grand  homme  de  lettres,  grand  homme  d'esprit  et  grand  homme  de 
bien.  Voilà,  ce  me  semble,  celui  que  l'on  doit  appeler  le  véritable  Trismégiste.  » 

1.  Voir  divers  autres  passages  sur  l'inventeur  de  l'héliomètre   (pp.  29,  3o,  etc.). 

2.  Voir  d'autres  renseignements  auto-biographiques,  pp.  }§,  in,  2 4-'-! 4  (sur  la 
métamorphose  de  l'auteur  en  demoiselle),  pp.  i5t-iô3  (sur  son  mariage),  pp.  i63- 
1 65  (encore  sur  son  mariage),  etc. 

3.  Le  nom  du  grand  bibliophile  revient  souvent  dans  le  volume.  On  regrette  que 
les  éditeurs  n'aient  pas  joint  à  leur  Table  analytique  une  Table  alphabétique  des  noms 
de  personnes  et  de  lieux:°'1,<J  ": 

■ài&biï§ti&1?1*>  s^r  Titon  du  Tillet>  PP-  6o>  6l>  88>  Io6>  ^-iç?»'  etc- 


294  REVUE   CRITIQUE       ?alH  a 

ractère  de  l'abbé  »,  lequel,  comme  le  remarquent  les  éditeurs  (p.  47) 
«  était  connu  pour  l'un  des  plus  grincheux  personnages  de  France;  et  de 
Navarre,  »  Néricault  des  Touches  (p.  1 17),  de  La  Condamine  (p.  168), 
Duclos  (p.  170),  l'abbé  Desfontaines  (p.  170),  l'abbé  Goujet  (p.  177),  etc. 
Il  faut  encore  signaler  une  lettre  sur  Racan  (pp.  1 27-1 35),  lettre  dont 
les  éditeurs  ont  dit  bien  justement  (p.  1 36 ,  note  9)  que  c'est  «  un  excel- 
lent morceau  de  critique  littéraire1,»  une  lettre  sur  René  Gentilhomme, 
sieur  de  TEspine,  poète  croisicais  (pp.  172-188),  une  lettre  sur  un  vers 
de  Saint- Amant,  où  est  aussi  agréablement  que  paradoxalement  défendu 
contre  Boileau  le  vers  fameux  du  Moïse  sauve  : 

Les  poissons  ébahis  le  regardent  passer  2, 
une  lettre  sur  la  fête  du  roi  Grallon,  à  Quimper  (pp.  21  i-2i3),  une  let- 
tre sur  la  rencontre  du  duc  d'Aiguillon  et  d'un  monstre  marin  au  Croi- 
sic  (pp.  214-219),  enfin  une  lettre  sur  diverses  singularités  physiologi- 
ques (pp.  221-226). 

Il  est  inutile  de  déclarer  que  les  notes,  fort  nombreuses,  des  éditeurs 
sont  telles  qu'on  pouvait  les  attendre  de  deux  des  plus  savants  bibliophi- 
les et  des  meilleurs  travailleurs  de  toute  la  Bretagne  3.  Le  beau  volume 
(papier  vergé),  si  bien  imprimé  par  MM.  V.  Forest  et  E.  Grimaud,  ren- 
ferme, sans  parler  de  mille  ornements  d'un  goût  exquis,  deux  vues  très 
habilement  dessinées  d'après  nature  par  M.  Kerviler,  l'une  du  manoir 
de  Brederac,  à  quatre  lieues  du  Croisic,  manoir  que  Des  Forges  Mail- 


■ 

1.  Reproduisons  cet  hommage  rendu  par  Des  Forges  Maillard  en  si  bons  termes 
à  nos  vieux  poètes  (p.  128)  :  «  Tout  ce  qui  nous  reste  de  ces  hommes  immortels 
n'est  point  à  négliger.  On  retrouve  dans  leurs  moindres  ouvrages  les  vestiges  de  la 
flamme  divine  dont  ils  étaient  animés.  » 

2.  En  revanche,  Des  Forges  Maillard  critique  le  vers  de  Racine  : 

Le  flot  qui  l'apporta  recule  épouvanté. 
«  Jl  ne  paraît,  »  dit-il  (p.  208),  «  guère  raisonnable  de  personnifier  un  flot,  et  j'ad- 
mire l'imagination  du  poète  qui  inspire  à  la  mer  un  effroi  si  prodigieux  à  l'aspect 
d'un  monstre  qu'elle  avait  nourri  dans  son  sein  et  auquel  elle  devait  être  accoutu- 
mée. »  A  cette  spirituelle  critique,  j'ajouterai  cette  judicieuse  observation  d'un  marin 
qui  me  disait,  un  jour,  au  bord  de  l'Océan  :  Racine  a-t-il  donc  oublié  que  le  flot  au- 
rait reculé  tout  naturellement,  quand  même  il  n'aurait  pas  apporté  le  monstre? 

3.  Même  si  je  m'arme  de  ma  loupe  la  plus  grossissante,  je  trouve  tout  au  plus 
à  relever  en  tant  de  notes  deux  légères  inexactitudes.  On  lit  (p.  35,  note  8)  :  «  Me- 
lon, ou  plutôt  Melun,  était  conseiller  au  parlement  de  Bordeaux.  »  L'auteur  de  l'Es- 
sai politique  sur  le  commerce  (1734,  in-12)  ne  s'est  jamais  appelé  Melun  et  n'a  jamais 
été  conseiller  au  parlement  de  Bordeaux.  »  Jean-François  Melon  fut  inspecteur-gé- 
néral des  fermes  à  Bordeaux,  et  plus  tard,  successivement  premier  commis  du  car- 
dinal Dubois,  de  Law,  et  secrétaire  du  Régent.  On  lit  (p.  146,  note  1):  «  La  Grange- 
Chancel  (Joseph  de),  poète  satirique,  né  à  Périgueux,  en  i6j5,  mort  en  1758.  » 
L'auteur  des  Philippiques  naquit  deux  ans  plus  tard,  le  Ier  janvier  1677,  comme 
l'a  établi,  d'après  des  documents  authentiques,  M.  A.  Dujarric-Descombes,  le  der- 
nier éditeur  des  terribles  stances  (Périgueux,  1878).  Les  plus  intéressantes  de  toutes 
les  autres  notes  sont  les  notes  sur  R'ené  Ghevaye  (p.  21),  Titon  du  Tillet  (p.  42), 
le  président  Bouhier  (p.  46),  M-"  du  Hallay  (p.  58),  le  président  de  Robien  (p.  119), 
René  Gentilhomme  (p.  179).  le  docteur  Bonamy  (p.  216).  iw^uS.  «AoihnQ.  .1 


d'hISTOIHK    El     DR    UTTÉRATURK  2g5 

lard  appelait  sa  case  champêtre,  et  où  il  passait,  tous  les  ans,  la  belle 
saison;  l'autre  du  pavillon  où,  au  Croisic,  il  écrivait  ses  vers  et  sa  prose. 
Cette  dernière  gravure  me  semble  particulièrement  remarquable.     t£VBT/î 

attifai  .q  T.  de  L,  buO 

jnob  3im\ 

-hoxo  nu  ». 

2i3uW><»«b  Volksschausplel  Doctor  Johann  Faust,  herausgegeben  mit 
gcschichtlichen  Nachrichten  von  Karl  Engel,  zweite  umgearbeitete  und  vielfach 
ergsenzte  Auflage.  Oldenburg,  Schulze.  1882.  In-8°,  iv  et  264  p.  4  mark. 

Johann  Faust,  ein  allegorisches  Drama,  gedruckt  1775,  ohne  Angabe  des  Ver- 
fassers  und  ein  nûrnberger  Textbuch  desselben  Dramas.  gedruckt  1777,  heraus- 
gegeben von  Karl  Engel,  zweite  durch  das  nûrnberger  Textbuch  vermehrte 
Auflaga.  Oldenburg,  Schulze  1882.  In-8°,  vi  et  79  p.  * 

Dans  le  premier  de  ces  volumes,  M.  K.  Engel  donne  une  seconde  édi- 
tion de  la  pièce  populaire  le  docteur  Faust  qu'il  avait  publiée  déjà  en 
1874,  dans  le  premier  fascicule  de  son  recueil  de  comédies  à  marionnet- 
tes '  (pp.  197-250).  Il  a  fait  précéder  ce  texte  intéressant  d'une  longue 
étude  (pp.  1-J96)  sur  Faust  et  son  histoire  littéraire  et  théâtrale.  Dans 
le  chapitre  intitulé  «  Geschichtliche  Nachrichten  tiber  den  Tràger 
der  Faustsage  »  (pp.  1-26),  on  remarquera  nombre  de  renseignements 
nouveaux  qui  font  honneur  au  zèle  investigateur  de  M.  E.,  et,  entre 
autres  informations  jusqu'ici  peu  ou  nullement  connues,  la  suivante 
(p.  17);  elle  est  tirée  de  la  Zimmerîsche  Chronik,  récemment  publiée  en 
seconde  édition  par  le  bibliothécaire  de  Strasbourg,  M.  Barack,  et  men- 
tionne le  wunderharlicher  nigromanta,  du  nom  de  Faust,  qui  mourut 
vers  1 541  à  Staufen,  petite  ville  du  Brisgau,  ou  non  loin  de  là,  dans  un 
âge  avancé  (ist  ein  ait er  Mann  worden).  Le  chapitre  suivant,  qui  a  pour 
titre  :  Buhnengeschichte  des  Faust  (pp.  27-191),  contient  aussi  de  nom- 
breux détails  importants  et  curieux  sur  les  représentations  de  Faust  de- 
puis le  xvie  siècle  jusqu'à  nos  jours  ;  beaucoup  de  ces  détails  sont  inédits 
ou  empruntés  à  des  ouvrages  peu  connus  ou  peu  accessibles;  c'est  ainsi 
que  M.  E.  communique  le  passage  tiré  du  Journal  du  conseiller 
G.  Schrôder  (qu'il  reproduit  d'après  le  manuscrit  de  Danzig,  année 
1669,  p.  33-35),  des  affiches  du  xvme  siècle,  le  récit  de  Nicolai 
(1781)  etc.;  en  un  mot,  on  a  là,  grâce  à  de  patientes  et  minutieuses  re- 
cherches, une  histoire  presque  complète  de  la  vieille  comédie  allemande 
de  Faust  ainsi  que  des  représentations  du  Faust  de  Gœthe  ;  il  est  seule- 
ment regrettable  que  M.  E.  ait  voulu  faire  œuvre  de  littérateur;  il  n'a 
pas  réussi  à  classer  et  à  ordonner  ces  précieux  matériaux,  rassemblés 
avec  tant  de  peine.  N'eût-il  pas  mieux  fait  de  nous  donner  ces  docu- 
ments tels  quels,  en  ne  les  reliant  que  par  de  brèves  notices?  Il  y  a  trop 
de  confusion  et  de  désordre  dans  toute  la  partie  du  volume  relative  à 
l'histoire  théâtrale  de  Faust. 

Le   deuxième  volume,  récemment   publié  par   M.   E.,   renferme  la 

— — ! _____ 

j.  Deutsche  Puppenkomœdien,  en  huit  petits  volumes. 


296  RBVDK    CRITIQOB 

deuxième  édition  d'un  Jean  Faust,  drame  allégorique  en  cinq  actes, 
publié  en  1775  à  Munich,  et  dont  l'auteur  a  gardé  l'anonyme;  on  l'a- 
vait attribué  sans  raison  àLessing;  plusieurs  prétendent  qu'il  est,  soit 
de  Weidmann,  soit  de  Schink.  M.  Engei  a  réimprimé,  avec  ce  texte,  un 
opuscule  paru  à  Nuremberg  en  1777  sous  le  titre  :  Arien  aus  dem  aile- 
gorischen  Drame,  Johann  Faust  von  der  Moserischen  Gesellschaft 
abgesungen. 

C. 


CORRESPONDANCE 

A  propos  de  l'article  sur  la  jeunesse  de  Fléchier. 

Un  ami,  qui  est  en  même  temps  un  ami  de  la  Revue  critique,  notre 
savant  collaborateur  M.  Defrémery,  appelle  mon  attention  sur  la  faute 
d'impression  qui,  dans  le  compte-rendu  de  l'ouvrage  de  M.  l'abbé  Fabre 
(n°  du  4  septembre,  p.  184),  a  fait  asseoir  l'évêque  dCAire  Fromentières 
sur  le  siège  d'Aix.  Tous  nos  lecteurs  auront  certainement  corrigé  une 
faute  que  leur  dénonçait  l'impossibilité  de  voir  un  évêque  là  où,  comme 
à  Aix,  existe  un  archevêché.  Aussi  n'aurais-je  pas  relevé  la  coquille 
de  notre  excellent  imprimeur,  si  je  n'avais  eu  à  vous  fournir  un  petit 
supplément  à  mon  article  sur  la  jeunesse  de  Fléchier.  Je  tire  ce  supplé- 
ment d'une  communication  fort  intéressante  qui  a  été  provoquée  par 
une  question  d'un  des  plus  grands  curieux  qu'il  y  ait  au  monde,  com- 
munication due  à  un  patient  et  habile  chercheur  du  Comtat-Venaissin, 
M.  de  Joannis.  C'est  dans  la  Provence  à  travers  champs  des  10  et 
17  juin  dernier  que  M.  de  Joannis  a  parfaitement  prouvé,  d'après 
l'acte  de  baptême  de  Fléchier,  conservé  aux  archives  municipales  de 
Pernes,  et  d'après  le  Livre  de  raison  du  père  du  futur  évêque  de  Nî- 
mes, que  l'illustre  orateur  naquit  le  18  juin  16Z2  et  fut  baptisé  le  len- 
demain, M.  l'abbé  Fabre  a  donc  eu  tort  de  prétendre  (tome  I,  p.  1)  que 
Fléchier  naquit  le  10  juin,  et  d'ajouter  en  note  :  «  M.  l'abbé  Delacroix 
fait  naître  Fléchier  le  19  juin;  Ménard  et  Ducreux  fixent  le  10  juin  : 
ces  deux  biographes  de  l'évêque  de  Nîmes  sont  si  bien  informés  qu'il 
est  difficile  de  ne  pas  s'en  rapporter  à  eux.  »  Le  terrible  questionneur 
dont  je  parlais  tout  à  l'heure,  questionneur  auquel  ses  amis  ont  donné 
pour  emblème  un  point  d'interrogation  accompagné  de  cette  devise  : 

Tes  pourquoi,  dit  le  Dieu,  ne  finiront  jamais  ! 
avait  ainsi  prévu  (Provence  à  travers  champs  du  29  avril  1882)  la 
réponse  qui  devait  lui  être  faite  :  «  Je  demande  la  permission  d'objecter 
à  M.  l'abbé  Fabre  que  le  renseignement  donné  par  l'abbé  Delacroix 
(Histoire  de  Fléchier,  i865,  in-8°)  a  été  emprunté  à  Y  Histoire  de 
Pernes  par  le  docteur  Jean-Julien  Giberti,  concitoyen  de  Fléchier,  his- 
toire dont  le  manuscrit  original  appartient  à  la  bibliothèque  de  Car- 
pentras.  Pourquoi  Giberti,  qui  écrivait  en   1748  l'histoire  idei*#vHtè 

<J  ,H  -M    l€q  rs$mfc    ;nû8i«oM  1i>l 
é  'j/alà  B'ia*  snomuHom  nU  — 


aupirmo  sovau  5çs 

f23J3B  pnb  ns  supiio^MtoroiRB  et  de  littérature       noiîrbè  smâixf^j^ 

'rfa't^,  tÎTOTOH  pas  été  mieux  informé  que  Ménard  et^uMkfe 
qui  trancherait  le  débat,  ce  serait  le  registre  des  baptêmes  de  la  paroisse 
de  Pernes  pour  l'année  i632.  »  Le  débat  est  tranché,  et  il  ne  reste  plus 
a^rYTâbb^Fabre  qu'à  s'incliner  devant  la  bonne  date  trouvée,  il  y  a 
dix-sept  ans,  par  M.  l'abbé  Delacroix. 

Ph.  Tamizey  de  Larroque. 


CHRONIQUE 


FRANCE.  —  La  Société  nationale  et  centrale  d'horticulture  ouvre  un  concours  pour 
la  rédaction  des  meilleurs  travaux  sur  les  noms  patois  des  plantes,  principalement  des 
plantes  cultivées,  mis  en  regard  avec  les  noms  réels  ou  scientifiques.  Deux  médailles 
d'or  et  deux  médailles  d'argent  offertes  par  M.  Lavallée,  président  de  la  Société,  seront 
attribuées  par  un  jury  spécial  comme  premiers  et  seconds  prix  de  concours.  La  Société 
désire  recevoir  des  travaux  analogues  à  ceux  que  la  science  doit  à  Gouan  pour  la  flore 
de  Montpellier,  à  Des  Etangs  pour  celle  de  l'Aube,  etc.  (adresser  les  manuscrits  au 
président  de  la  société,  84,  rue  de  Grenelle,  avant  la  fin  de  l'année  i883. 

—  Nous  avons  donné  récemment,  d'après  les  journaux,  la  traduction  française  de 
l'inscription  italienne  gravée  sur  la  maison  où  Montaigne  demeura  à  Rome;  les  jour- 
naux auxquels  nous  avons  emprunté  cette  information,  ont  commis  un  contre-sens, 
en  appelant  Montaigne  l'auteur  du  «  livre  des  sages  »;  il  faut  évidemment  lire  «  livre 
des  essais  »  ;  en  italien  essais  se  dit  saggi ;  ce  qui  a  donné  lieu  à  la  bévue. 

ALLEMAGNE.—  Deux  nouveaux  fascicules  des  Historische  Studien,  dirigées  par 
M.  W.  Arndt  (Leipzig,  VeitJ,  ont  paru  :  le  Ve  das  Kœnigsgericht  $ur  Zeit  der  Me- 
rowinger  u.  Karolinger,  par  M.  V.  Barchewitz  et  le  VIe,  der  Reichstag  unter  den 
Hohenstaufen,  par  M.  C.  Wacker;  deux  autres  doivent  prochainement  paraître  :  le 
VIIe,  Politische  Geschichte  Genuas  und  Pisas  im  XII.  Jahrhundert,  par  M,  O.  Lan- 
ger, et  le  VIIIe,  Die  Schlacht  bei  Reutlingen  am  14  mai  i3-]j,  par  M.  Joh. 
Jacobsen. 

—  M.  Théophile  Zolling,  directeur  de  la  Gegenwart,  prépare  une  édition  (la  pre- 
mière édition  critique)  des  œuvres  complètes  de  Henri  de  Kleist  et  prie  quiconque 
posséderait  des  lettres  ou  des  manuscrits  du  poète  de  les  lui  communiquer. 

—  Nous  apprenons  que  M.  Karl  Woermann,  professeur  à  la  Kunstakademie  ou 
académie  des  beaux-arts  de  Dusseldorf,  a  été  nommé  directeur  de  la  galerie  de 
Dresde. 

ANGLETERRE.  —  Une  nouvelle  revue  anglaise,  publiée  par  les  éditeurs  Long- 
mans  sous  le  titre  Longmans  Magasine,  paraîtra  tous  les  mois,  à  partir  de  novem- 
bre (100  à  128  pages;  prix  du  numéro,  six  pence);  les  collaborateurs  du  Long- 
man's  Magasine  sont  MM.  Grant  Allen,  Anstey,  W.  Black,  Freeman,  Froude, 
Th.  Hardy,  Howells,  Huxley,  Tyndall,  Smiles,  Stevenson,  Sturgis  et  M03  Ingelow 
et  Oliphanttàrî  sh  n^joihn 

—  Les  nouveaux  volumes  de  la  collection  des  «  english  men  of  letters  »  (Lon- 
dres, Macmillan),  seront  Swift  par  M.  Leslie  Stephenj  Macaulay,  par  M.  J.  Cot- 
ter  Morison;  Sterne,  par  M.  H.  D.  Traill;  Sheridan,  par  Mrs.  Oliphant. 

—  Un  monument  sera  élevé  à  Longfellow  dans  l'abbaye  de  Westminster. 


2g8  REVUE   CRITIQUE 

AUTRICHE.—  On  lit  dans  quelques  journaux  :  «  L'empereur  d'Autriche  vient  de 
décerner  à  M.  Julian  Klaczko  la  grande  médaille  pro  litteris  et  artibus.  M.  Klaczko 
doit  cette  distinction,  fort  rare  en  Autriche,  à  son  dernier  travail,  les  Causeries 
florentines ,  couronné  par  l'Académie  française.  » 

—  La  ville  de  Vienne  doit  célébrer,  l'année  prochaine,  le  deuxième  centenaire  de  la 
grande  victoire  remportée  sur  Kara  Mustapha  le*  12  septembre  i683  par  Sobieski  et 
le  duc  Charles  V  de  Lorraine;  cette  victoire  délivra,  comme  on  sait,  la  capitale  de 
l'Autriche  assiégée  par  les  Turcs  et  défendue  par  le  comte  Ernest  Rudiger  de  Star- 
hemberg.  A  cette  occasion,  un  monument  sera  élevé  à  Starhemberg,  et  la  commune 
publiera  un  livre  où  sera  retracée  l'histoire  du  siège  et  de  la  délivrance  de  Vienne. 
Déjà  le  comte  A.  Thûrheim,  connu  par  ses  publications  sur  de  grands  généraux  autri- 
chiens, a  fait  paraître  chez  l'éditeur  Braumûller  un  ouvrage  consacré  à-  Starhemberg 
et  intitulé  Feld-marschall  Ernst  Riidiger  Graf  von  Starhemberg,  16 83  Wiens 
ruhmvoller   Vertheidiger. 

BELGIQUE.  —  Dans  la  séance  du  7  août  de  l'Académie  royale  de  Belgique 
M.  Kervyn  de  Lettenhove  a  lu  une  note  sur  Charles  IX  et  le  Tasse  ;  vers  les  der- 
niers mois  de  l'année  1 566,  l'abbé  de  Saint-Gildas,  envoyé  en  mission  à  Rome  près 
de  l'ambassadeur  de  France,  M.  de  Tournon,  reçut  ordre  de  s'arrêter  à  Ferrare;  on 
lit  dans  ses  instructions  :  «  Sa  Majesté  a  aussi  très  agréable  de  conserver  le  sieur 
Torquato  soubs  sa  protection,  comme  elle  désire  et  veult  et  entend  que  Mr.  de 
Tournon  face  pour  luy  tous  les  bons  offices  et  que  partout  là  où  il  soit  besoing,  soit 
à  l'endroit  du  Pape  ou  ailleurs,  qu'il  le  porte  et  favorise  comme  serviteur  advoué  de 
Sadicte  Majesté,  auquel  elle  a  accordé  trois  mille  livres  de  pension,  dant  elle  envoyé 
présentement  andit  sieur  de  Tournon  le  brevet  pour  luy  bailler,  avec  asseurance 
que,  s'offrant  l'occasion  de  l'honorer  davantage,  il  ne  sera  oublié  de  Sadicte  Ma- 
jesté.  » 

—  Le  conservateur  du  Musée  de  Namur,  M.  A.  Bequet,  a  publié  un  exposé  dé- 
taillé des  fouilles  exécutées  par  la  Société  archéologique  de  Namur  en  1880.  C'est 
surtout  à  Franchimont,  non  loin  de  ia  voie  antique  de  Trêves  à  Bavay,  que  les  fouil- 
les ont  été  fructueuses;  au  lieu  dit  le  Tombois,  on  a  reconnu  l'emplacement  de  1 65 
sépultures,  dont  10 1  avaient  été  pillées,  et  dans  le  cimetière,  dit  au  Tombeau,  de 
220  tombes,  dont  cinquante  à  peine  restées  intactes;  ces  tombes  appartiennent  toutes 
à  l'époque  franque. 

—  M.  J.  Stecher  a  publié  le  discours  qu'il  avait  prononcé,  le  10  mai  de  cette  an- 
née, dans  la  séance  publique  de  la  classe  des  lettres  de  l'Académie  royale  et  qui  avait 
pour  sujet  Anton  Reinhard  Falck  et  le  Musée  des  sciences  et  des  lettres  de  Bruxelles 
en  1S27.  Falek  fut  secrétaire  d'Etat  et  confident  du  roi  Guillaume  de  Hollande;  il 
occupa  à  Bruxelles  le  poste  de  ministre  plénipotentiaire  et  envoyé  extraordinaire  des 
Pays-Bas;  avant  i83o  il  protégea  efficacement  le  haut  enseignement  de  la  Belgique, 
et  c'est  sur  ses  conseils  que  furent  créés  en  1826  les  cours  publics  et  gratuits  du  Mu- 
sée des  sciences  et  dés  iettres  de  Bruxelles,  d'où  est  sortie  plus  tard  l'Université  de 
Bruxelles. 

—  Depuis  le  mois  de  juillet  dernier  le  Bulletin  mensuel  de  numismatique  et  d'archéo- 
logie dirigé  par  MM.  C.  A.  et  R.  Serrure,  est  entré  dans  la  deuxième  année  de  son 
existence;  les  éditeurs  de  cette  très  estimable  revue  se  félicitent  du  bienveillant  ac- 
cueil  que  le  public  a  fait  à  leur  publication,  dont  «  la   vie  est  désormais  assurée  ». 

—  Nous  avons  annoncé  récemment  que  M.  Alph.  Vandenpeëreboom  avait  publié  le 
sixième  volume  de  son  Ypridna,  sous  le  titre  Cornélius  Jansenius,  septième  évoque 
d'  Ypres,  sa  mort,  son  testament,  ses  épitaphes  (Bruges,  De  Zuttere.  In-8°,  273  pp.). 
M.  V.  a  exposé,  d'après  des  documents   authentiques  et  pour  la   plupart  inédits,  les 


D  HISTOIRE    KT    DE    LITTERATURE  29g 

événements  de  la  vie  de  Jar.senius,  depuis  sa  nomination  à  l'évêché  d'Ypres.  Il 
montre  que  Jansenius,  mort  de  la  peste  le  6  mai  i638,  n'a  pas  été,  comme  on  l'a 
dit,  la  première  victime  du  fléau  — qui  sévissait  à  Ypres  depuis  deux  ans —  qu'il  ne 
fut  pas  délaissée  ses  derniers  instants  par  ses  amis,  qu'il  mourut  sans  se  préoccu- 
per de  son  Augustinus  que,  d'après  quelques  biographes,  il  aurait  ordonné  de 
détruire.  M.  V.  publie  pour  la  première  fois  le  testament  de  Jansenius.  Il  prouve 
que  l'impression  de  V Augustinus  ne  souleva  d'abord  aucune  opposition,  puisque  la 
première  édition  parut  en  1640,  à  Louvain,  avec  l'autorisation  de  Sa  Majesté  catho- 
lique. Il  fait  l'histoire  de  l'épitaphe  placée  sur  la  tombe  de  Jansenius  dans  la  cathé- 
drale d'Ypres  ;  tout  ce  récit  que  nous  ne  pouvons  résumer  et  auquel  se  mêlent  les 
noms  de  François  de  Robles,  de  l'internonce  Airoldi,  du  chanoine  Maes,  etc.,  est 
très  curieux  ;  une  première  épitaphe,  qui  louait  magnifiquement  les  vertus  et  la 
science  de  Jansenius,  fut  enlevée  en  i655,  malgré  les  protestations  des  chanoines, 
par  ordre  de  l'évêque  Robles;  une  seconde  épitaphe,  mise  en  1672  pendant  une 
vacance  du  siège  épiscopal  et  ne  contenant  que  le  nom  de  l'évêque  et  ces  mots  Satis 
dixî,  fut,  après  bien  des  pourparlers  des  chanoines  avec  l'internonce  Airoldi  et  le 
conseil  privé  de  Flandre,  enlevée  le  24  avril  1673;  «  aujourd'hui,  dit  M.  Vanden- 
peereboom,  dans  le  chœur  de  notre  ancienne  cathédrale,  au  milieu  de  mausolées 
splendides  et  de  grandes  pierres  tombales  couvertes  d'inscriptions  pompeuses,  gît 
encore,  presque  inaperçue  et  incomprise  par  le  vuigaire,  devant  le  maître-autel, 
une  modeste  pierre,  timide  hommage  rendu  à  la  mémoire  d'un  évêque  célèbre.  Pas 
d'épitaphe,  pas  même  un  nom.  Au  centre,  une  petite  croix  ;  dans  chaque  angle,  un 
chiffre  :  1-6-3-8  ;  comme  si  la  réunion  de  ces  chiffres  séparés  avait  pu,  en  formant 
une  date,  révéler  un  mystère  redoutable  ». 

—  Le  24  juillet  dernier  est  mort  à  Courcelies,  près  Charleroi,  Pierre  Constant  Van 
der  Elst  (néà  Bruxelles  le  12  mai  1807).  11  avait  fondé  la  Société  archéologique  de 
l'arrondissement  de  Charleroi,  dont  il  fut  longtemps  le  président,  et  publié  en 
!&47  Zevtn  brieven  van  on\e  vaderlandsche  geschiedenis,  et,  en  i856,  un  volume  de 
3oo  pages  intitulé  Le  protestantisme  belge  avant,  pendant  et  après  les  troubles  du 
xvi°  siècle. 

COLOMBIE.  —  L'Académie  de  Colombie  a  récemment  célébré  le  centenaire  de 
Bello,  le  poète  qui  l'avait  fondée.  Bello  (né  dans  la  vallée  de  Caracas  le  29  novem- 
bre 1781,  mort  à  Santiago  du  Chili  en  i865)  avait  débuté  dans  les  lettres  par  Un 
sonnet  qui  fut  très  remarqué,  sur  la  capitulation  de  Baylen;  il  a  composé  des  poé- 
sies lyriques,  des  fables,  un  fragment  d'épopée,  et  une  grammaire  espagnole  ;  une 
étude  de  Bello  sur  le  poème  du  Cid  est  restée  inédite,  mais  paraîtra  dans  la  collec- 
tion de  ses  œuvres  complètes  dont  on  annonce  la  prochaine  publication. 

CHINE.  —  Depuis  le  4  juin,  par  décret  impérial,  la  Galette  de  Péking,  le  plus 
ancien  journal  du  monde,  paraît  en  trois  éditions  différentes;  la  irc,  sur  papier 
jaune,  est  nommée  la  «  feuille  d'affaires  »  et  renferme  diverses  nouvelles  commercia- 
les, elle  a 8,000  abonnés;  la  2%  sur  papier  jaune,  est  la  véritable  «  Gazette  de  Péking  »  ; 
la  feuille  officielle  (3, 000  abonnés);  la  3e,  destinée  aux  provinces,  contient,  sur  pa- 
pier rouge,  un  court  extrait  de  la  ire  et  de  la  2e  édition  (2,000  abonnés);  la  rédac- 
tion des  trois  éditions  est  confiée  à  six  membres  de  l'Académie  des  sciences  (han- 
lin). 

ETATS-UNIS.  —  La  correspondance  de  Carlyle  et  d'Emerson  sera  prochainement 
publiée  par  M.  le  professeur  Norton,  de  l'Université  de  Harvard. 

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300  REVUE    CRITIQUE   D'HISTOIRE    ET    DE   LITTÉRATURE 

ACADÉMIE   DES   INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  15  septembre  1882. 

M.  de  Wailly  lit  une  note  additionnelle  à  son  Mémoire  sur  la  langue  de  Joinville, 
publié  il  y  quelques  années,  Répondant  à  la  critique  qui  a  été  adressée  par  quelques 
érudits,  sur  ce  qu'il  n'avait  pas  cherché  à  corriger,  dans  le  texte  de  Joinville,  les 
irrégularités  graphiques  du  manuscrit  et  à  établir  une  orthographe  uniforme,  M.  de 
Wailly  s'attache  à  prouver  que  cette  tâche  était  impossible.  Les  clercs  de  la  chancel- 
lerie de  Joinville,  qui  étaient  toujours  d'accord  pour  l'observation  des  règles  de  la  dé- 
clinaison et  ce  qu'on  peut  appeler  l'orthographe  grammaticale,  n'avaient  au  con- 
traire aucune  doctrine  fixe  sur  l'orthographe  d'usage,  celle  des  mots  eux-mêmes. 
De  toutes  les  chartes  françaises,  dressées  au  nom  de  Joinville,  qui  nous  sont  par- 
venues, il  n'en  est  pas  une  seule  dans  laquelle  on  ne  trouve  au  moins  un  mot  écrit 
deux  fois  de  deux  façons  différentes,  à  quelques  lignes  de  distance.  M.  de  Wailly 
cite  plusieurs  exemples  de  ces  variations,  qui  prouvent  que  la  notion  de  l'orthogra- 
phe, telle  que  nous  l'entendons  aujourd'hui,  était  inconnue  à  cette  époque. 

M.  Barbier  de  Meynard  lit  au  nom  de  M.  Derenbourg  un  mémoire  intitulé  : 
V Immortalité  de  Vâme  che\  les  Juifs.  L'objet  de  ce  mémoire  est  de  réfuter,  la  thèse 
soutenue  par  M.  Halévy,  dans  une  lecture  faite  récemment  à  l'Académie,  d'après  la- 
quelle la  croyance  à  l'immortalité  de  l'âme  aurait  été  répandue  dès  l'époque  la  plus 
ancienne  chez  les  Juifs  aussi  bien  que  chez  les  autres  peuples  de  l'antiquité.  M.  De- 
renbourg reconnaît  que  quelques  passages  de  la  Bible,  comme  ceux  qui  prohibent  la 
nécromancie  ou  le  récit  de  l'évocation  de  Samuel  par  la  pythônisse  d'Endor,  prou- 
vent qu'il  y  avait  parmi  les  Israélites  des  hommes  qui  croyaient  à  une  continuation 
de  l'existence  après  la  mort.  Mais,  selon  lui,  c'était  là  une  croyance  commune  à 
Israël  et  aux  peuples  voisins,  et  non  proprement  juive.  Peu  importent,  dit-il,  les 
croyances  des  païens  qui  habitaient  la  Palestine,  ou  les  croyances  populaires  des 
Juifs  eux-mêmes,  au  temps  où  ils  inclinaient  vers  les  usages  du  paganisme;  les  pré- 
dications des  prophètes  seules  représentent  le  vrai  judaïsme.  Or,  celles-ci  sont  com- 
plètement étrangères  à  l'idée  d'une  vie  future,  d'une  existence  après  la  mort.  De 
plus,  la  croyance  aux  ombres  des  morts,  telle  qu'elle  a  pu  exister  aux  plus  anciens 
temps  du  judaïsme  parmi  les  classes  superstitieuses  de  la  population,  différait  de 
notre  manière  actuelle  de  concevoir  l'immortalité  de  l'âme,  en  ce  qu'elle  ne  compor- 
tait aucune  idée  de  peine  ou  de  récompense.  Cette  dernière  notion  n'a  pénétré  dans 
le  monde  juif  que  plus  tard,  sous  l'influence  de  la  philosophie  platonicienne,  in- 
troduite parmi  les  Juifs  d'Egypte  après  la  conquête  d'Alexandre. 

M.  Delaunay  lit  un  mémoire  de  M.  Amélineau  sur  le  Papyrus  gnostique  de  Bruce. 
Ce  papyrus,  en  langue  copte,  conservé  à  Oxford,  nous  est  malheureusement  parvenu 
en  très  mauvais  état  et  ne  peut  être  déchiffré  qu'en  partie.  M.  Amélineau  y  a  reconnu 
deux  ouvrages  gnostiques,  intitulés,  l'un  le  Livre  des  Gnoses  invisibles,  l'autre,  le 
Livre  du  Grand  Logos.  Ces  livres  paraissent  avoir  été  connus  de  Clément  d'Alexan- 
drie. Il  ont  donc  été  écrits,  au  plus  tard,  au  commencement  ou  au  milieu  du  11e  siè- 
cle de  notre  ère. 

M.  Dieulafoy  continue  sa  communication  sur  le  monument  de  Meched  Mourgab, 
en  Perse,  connu  sous  le  nom  de  Gabre  Madère  è  Soleiman  ou  tombeau  de  la  mère  de 
Salomon.  Il  apporte  de  nouveaux  arguments  contre  l'opinion  qui  voit  dans  Meched 
Mourgab  l'ancienne  Fasargade  et  dans  le  Gabre  Madère  è  Soleiman  le  tombeau  de 
Cyrus.  Selon  lui,  c'est  le  tombeau  de  la  mère  de  Cyrus,  Mandane;  la  tradition  popu- 
laire, qui  veut  que  ce  soit  le  tombeau  de  la  mère  d'un  roi,  est  donc  exacte,  le  nom 
seul  du  roi  a  été  changé.  Quant  à  Pasargade,  M.  Dieulafoy  est  d'avis  qu'il  faut  en 
chercher  le  site  à  Fessa,  au  sud-est  de  Persépolis.  On  ne  peut  expliquer  qu'ainsi 
le  fait  qu'Alexandre,  revenant  de  l'Inde,  passa  par  Pasargade  avant  d'arriver  à  Per- 
sépolis. Pour  aller  de  l'Inde  à  Persépolis  par  Meched  Mourgab,  il  lui  aurait  fallu 
traverser  un  désert  où  aucun  voyageur  n'oserait  se  risquer  aujourd'hui,  et  que  tout 
le  monde  considère  comme  infranchissable.  —  M.  Dieulafoy  met  sous  les  yeux  des 
membres  de  l'Académie  un  plan  et  des  dessins  du  Gabre  Madère  è  Soleiman  et  fait 
remarquer  le  caractère  de  l'architecture  de  cel  édifice,  qui  n'est  pas  purement  perse, 
mais  imitée  de  l'architecture  grecque. 

M.  Oppert  dit  qu'il  est  persuadé  depuis  longtemps  que  Meched  Mourgab  n'est  pas 
Pasargade  et  que  le  Gabre  Madère  è  Soleiman  ne  peut  être  que  le  tombeau  d'une 
femme.  Il  est  heureux  de  voir  cette  thèse  recevoir  des  recherches  de  M.  Dieulafoy  une 
nouvelle  confirmation. 

Ouvrages  présentés,  de  la  part  des  auteurs,  par  M.  Barbier  de  Meynard  :  —  i°  Bas- 
set (René),  fitudes  sur  l'histoire  d'Ethiopie  (extrait  du  Journal  asiatique)  ;  —  20  Sau- 
vaike  (H.),  Etudes  sur  le  droit  musulman,  traduction  du  40  livre  du  Moultaga. 

Julien  Havet. 

Le  Puy,  imprimerie  Marckcssou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  23. 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

N°  42  -  16  Octobre  —  1882 


Sommaire  s  214.  Mispoulet,  Les  institutions  politiques  des  Romains,  I.  —  2i5 
Chastel,  Histoire  du  christianisme,  I  et  IL  —  216.  Chéruel,  Histoire  de  France 
sous  le  ministère  de  Mazarin,  I.  —  217.  Jonas,  Christian  Gottfried  Kœrner. — 
Chronique.  —  Académie  des  Inscriptions. 


214.  —  J.-B.  Mispoulet,  Les  Institutions  politiques  des  Romains,  t.  Ier,  La 
constitution.  Paris,  Durand  et  Pedone-Lauriel.  In-8  de  xvi-392  p. 

Les  manuels  de  droit  public  romain  ne  manquent  pas.  L'Allemagne 
possède,  dans  les  recueils  de  Puchta,  de  Rudorff,  de  Bethmann-Hollweg. 
deWalter  surtout,  d'excellents  résumés,  que  Ton  lit  et  que  l'on  consulte 
encore,  même  après  l'admirable  traité  de  MM.  Mommsen  et  Marquardt. 
La  Belgique  nous  a  donné  le  précis  de  M.  Willems;  la  traduction  de 
l'ouvrage  de  M.  Madvig  va  bientôt  le  rendre  populaire  dans  nos  facultés. 
Malheureusement,  dans  cette  brillante  série  de  publications,  aucune 
n'appartient  à  la  France  :  il  est  triste  d'aller  toujours  demander  à  l'é- 
tranger de  nous  instruire.  Le  livre  de  M.  Mispoulet  nous  épargnera 
souvent  ce  regret  :  s'il  ajoute  peu  à  ceux  qui  l'ont  précédé,  s'il  ne  com- 
plète pas  la  science  des  institutions  romaines,  il  comble  au  moins  une 
lacune  de  l'érudition  française. 

Cet  ouvrage  n'est  pas  un  simple  abrégé  des  travaux  allemands. 
M.  M.  les  connaît  bien  :  peut-être  même  a-t-il  le  tort  de  s'en  tenir  à  eux 
presque  exclusivement,  comme  s'il  oubliait  que  certaines  éludes  parues 
en  France  méritent,  elles  aussi,  d'être  citées  et  discutées  '.  Ces  travaux 
sont  constamment  ses  guides,  il  s'en  sert  comme  de  cadres.  Mais  il  a 
pris  soin  de  contrôler  chaque  assertion,  d'examiner  tous  les  textes.  Il 
n'échappe  pas  aux  erreurs  de  détail  *  :  pourtant  elles  sont  rares.  Et,  en 

1.  Par  exemple,  celles  de  M.  Fustel  de  Coulanges  sur  la  réforme  de  Servius  Tul- 
lius  (Cité  antique,  4,  7),  sur  la  monarchie  romaine  (Institutions  politiques,  2,  1)  ; 
de  M.  Paul  Guiraud  sur  la  réforme  des  comices  centuriates  au  111e  siècle  av.  J.-C. 
(Revue  historique,  XVII,  p.  1). 

2.  Entre  autres  :  si,  dans  les  tables  alimentaires,  la  tribu  des  praedia  de  Velleiaeu 
des  Ligures  n'est  point  citée,  c'est  que  chaque  ville  était  inscrite  dans  une  seule  et 
même  tribu  (p.  41,  n.  7);  —  les  vingt  magistrats  créés  en  237  par  le  sénat  ne  sont 
pas  le  moins  du  monde  chargés  de  gouverner  l'empire,  mais  simplement  des  com- 
missaires nommés  pour  fortifier  les  villes  de  l'Italie  et  les  défendre  contre  Maximin 
(p.  274,  n.  1)  ;  —  la  limitation  des  pouvoirs  du  prcefectus  urbi  à  un  rayon  de  cent 
milles  autour  de  Rome  n'existe  pas  dans  les  deux  premiers  siècles  de  l'empire 
(p.  284)  ;  —  le  chef  des  bureaux  des  magistrats  s'appelle  ou  princeps  ou  primiscri- 
nius  :  le  cornicularius  et  Yadjutor  ne  viennent  qu'en  sous-ordre  (p.  3 12);  —  les  textes 

Nouvelle  série,  XIV.  16 


302  REVUE   CRITIQUE 

outre,  le  nombre  assez  considérable  de  points  sur  lesquels  M.  M.  attaque, 
par  exemple,  M.  Mommsen  %  prouve  la  bonne  foi  et  l'indépendance  de 
l'auteur. 

Le  premier  volume  de  M.  Mispoulet  traite  uniquement  de  la  consti- 
tution; le  second  sera  consacré  à  l'administration.  L'auteur  s'excuse 
(p.  xi)  d'avoir  réservé  pour  ce  dernier  le  chapitre  relatif  à  la  classifica- 
tion des  personnes.  Elle  «  ne  pouvait  être  bien  comprise,  dit-il,  que 
lorsqu'on  aurait  connu  préalablement  l'organisation  territoriale.  »  C'est 
là  une  assertion  des  plus  étranges.  Sans  doute  les  cités  étaient  divisées 
en  villes  romaines,  latines,  alliées  ou  soumises;  mais  l'explication  de 
ces  titres,  la  définition  de  la  cité  sans  suffrage,  l'exposé  des  privilèges 
de  l'ordre  équestre  et  de  la  noblesse  sénatoriale,  tout  cela  va  parfaitement 
sans  l'étude  des  provinces,  sans  l'examen  des  pouvoirs  du  proconsul  ou 
du  légat.  La  vérité,  au  contraire,  c'est  que  les  attributions  des  gouver- 
neurs et  des  magistrats  en  général  ne  peuvent  être  expliquées  si  l'on 
ignore  la  condition  sociale  des  personnes  placées  sous  leurs  ordres.  Par 
exemple,  l'administration  de  l'Italie,  sous  la  république,  a  varié  avec  les 
droits  de  ses  habitants  :  c'est  donc  précisément  l'organisation  territoriale 
qui  ne  saurait  se  comprendre  sans  l'étude  des  différentes  classes  de 
citoyens.  Cette  étude  a  sa  place  marquée  en  tête  de  tout  livre  sur  la 
constitution  romaine.  C'est  pour  i'avoir  d'abord  négligée  que  M.  M.  est 
sans  cesse  contraint  d'y  revenir,  mal  à  propos  et  d'une  façon  fort  insuffi- 
sante. Dans  la  période  royale,  il  est  bien  obligé  de  parler  des  patriciens, 
de  la  clientèle,  des  plébéiens  :  il  ne  le  fait  qu'après  s'être  occupé  des 
tribus,  des  curies  et  des  gentes.  Sous  la  république,  il  fait  intervenir,  au 
sujet  de  chaque  magistrature,  la  lutte  entre  les  plébéiens  et  les  patri- 
ciens :  lutte  qui  n'a  aucun  sens,  du  moment  qu'il  n'est  pas  dit  que  la 
révolution  de  509  a  été  purement  aristocratique  et  a  maintenu  les  dis- 
tinctions sociales.  De  Tordre  équestre,  un  des  éléments  les  plus  impor- 
tants de  la  constitution  romaine,  il  est  à  peine  question  dans  ce  livre  :  il 
en  est  fait  mention  à  propos  des  comices  centuriates  ;  un  chapitre  lui 
est  consacré  à  la  suite  des  curatelles  et  des  préfectures  du  temps  de  l'em- 
pire. La  noblesse  des  clarissimes  du  bas  empire  est  étudiée  immédiate- 
ment après  le  consulat  et  les  magistratures  dites  sénatoriales.  Ce  sont 
autant  de  contre-sens  historiques,   conséquences   du   plan  adopté  par 


que  M.  M.  cite  (p.  323)  comme  se  rapportant  au  vicarius  prcefecti  urbi  (Cod.  Th., 
1,6,2.  3;  11,  3o,  36;  Cassiodore,  Variae,  6,  i5)  concernent  tous  le  vicarius 
prœfectorum  prcetorio  in  urbe  Roma  (cf.  Symmaque,  Relationes,  23,  éd.  Meyer). 
1.  Toutefois,  il  nous  semble  que  M.  Mommsen,  sauf  pour  certains  points  de  la 
constitution  impériale,  a  toujours  raison  contre  M.  Mispoulet  et  les  auteurs 
que  suit  ce  dernier  :  par  exemple,  au  sujet  du  caractère  primitif  des  tribus, 
réel  selon  M.  Mommsen,  topique  suivant  M.  Mispoulet  (p.  40);  —  de  la  distinction 
à  faire  entre  les  actes  censoriaux  liés  au  lustrum  et  ceux  qui  en  étaient  indépendants, 
distinction  que  M.  Mispoulet  n'admet  pas  (p.  109);  —  des  droits  que  le  peuple  se 
réservait  (Reservatrechte),  et  dont  M.  Mispoulet  nie  l'existence  (p.  i36)  ;  etc. 


D'HISTOIRE    ET   DE   LITTERATURE  3o3 

M.  M.  pour  l'ensemble  de  son  ouvrage.  Aussi  le  livre,  décousu  et  désor- 
donné, gêne  et  déroute  le  lecteur. 

L'idée  générale  que  se  fait  M.  M.  delà  constitution  romaine  excuserait 
peut-être  le  peu  d'importance  qu'il  semble  attacher  à  la  question  des 
classes.  Malheureusement  il  ne  cherche  pas  lui-même  cette  excuse;  en 
outre,  cette  idée  se  trouve  toujours  à  l'arrière-plan,  placée  dans  le  cours 
d'une  discussion,  reléguée  parfois  au  bas  d'une  note  ;  enfin  il  faudrait  la 
défendre  et  la  prouver  mieux  que  ne  fait  l'auteur.  «  C'est  à  tort,  dit-il 
(p.  214;  cf.  p.  57),  que  certains  auteurs  considèrent  le  gouvernement  de 
la  république  romaine  comme  démocratique  et  le  peuple  comme  souve- 
rain ;  le  véritable  souverain,  c'est  le  magistrat  revêtu  de  ïimperium... 
En  principe,  il  a  tous  les  pouvoirs  ;  seulement,  pour  certains  actes,  il 
est  tenu  d'obtenir  le  concours  des  comices  ou  du  sénat.  »  Ailleurs 
(p.  247,  n.  1 2),  il  représente  le  pouvoir  impérial  comme  ne  reposant  pas 
sur  la  souveraineté  du  peuple.  Cette  théorie  est  en  contradiction  avec 
celle  de  MM.  Mommsen  et  Madvig,  et,  ce  qui  est  plus  grave,  avec  les 
idées  des  Romains  eux-mêmes.  Les  magistrats  sont  bien,  à  la  rigueur, 
des  souverains  ;  mais  c'est  du  peuple  qu'ils  tiennent  cette  souveraineté, 
et  c'est  au  nom  du  peuple  qu'ils  l'exercent  :  ils  s'appellent  magistratus 
populi  romani.  Tous  les  pouvoirs  émanent  du  peuple,  disait  Cicéron  : 
Omnes  potestates,  imperia,  curiationes,  ab  universo  populo  romano 
proficisci  convertit  '.  Et  Cicéron  ne  faisait  que  reproduire  la  pensée  des 
anciens  Romains  qui  est  devenue,  sous  l'empire,  celle  de  tous  les  juris- 
consultes, depuis  Tacite  2  jusqu'à  Tribonien  ;  au  temps  de  Justinien, 
alors  que  la  puissance  impériale  était  tout  autrement  absolue  que  n'avait 
jamais  pu  l'être  celle  des  consuls  ou  celle  du  roi,  on  disait  encore  que  la 
souveraineté  de  l'empereur  résultait  de  ce  que  le  peuple  abdiquait  entre 
ses  mains  tous  ses  droits  et  tous  ses  pouvoirs  :  Omne  jus  omnisque  po- 
testas  populi  romani  in  imper atoriam  translata  sunt  potestatem  3,  dit 
la  préface  du  Digeste. 

Si,  de  l'examen  du  plan  et  de  la  théorie  générale,  on  passe  à  l'étude 
des  différents  chapitres,  on  sera  également  frappé  du  peu  de  relief  que 
présentent  les  idées  principales,  ou.  plutôt,  de  l'incertitude  qui  règne 
dans  la  pensée  de  l'auteur.  Cela  est  frappant  quand  il  s'occupe  des  insti- 
tutions primitives.  Il  n'y  a  guère.que  deux  façons  de  les  exposer  :  s'en 
tenir  aux  textes  d'Aulu-Gelle,  de  Denys,  de  Tite-Live  et  de  Festus,  ne 
point  chercher  à  concilier  ce  qu'ils  ont  de  contradictoire,  reconnaître, 
en  un  mot,  l'ignorance  absolue  où  nous  sommes  et  où  étaient  déjà  les 
anciens  au  sujet  de  l'organisation  première  du  peuple  romain;  ou  bien, 
accepter  le  système  qui  concilie  le  mieux  les  textes,  admettre  que  la  cité 


r.  Cicéron,  De  lege  agraria,  2,  7,  17;  cf.  Festus,  v°  cum  imperio  (Ep.,  p.  5o)  j 
Varron,  De  lingita  latina,  b,  87. 

2.  Tacite,  Annales,  1,  1  ;  Histoviae,  1,  1  ;  Dion  Cassius,  53,  17. 

3.  Cf.  Justinien,  Institutiones,  1,  2,  6;  Gaius,  Itist.,  1,  5. 


304  REVUE  CRITIQUE 

était  uniquement  patricienne,  qu'il  n'y  avait  que  des  patriciens  dans  le 
sénat,  que  les  curies  étaient  des  réunions  de  gentes  patriciennes.  M.  M. 
ne  peut  se  décider.  Tantôt  (p.  154)  il  suit  «  la  tradition,  lorsqu'elle  af- 
firme qu'il  y  a  eu,  à  cette  époque,  des  sénateurs  plébéiens  ■  »  ;  tantôt  il 
s'en  écarte  (p.  ni,  n.  8)  et  déclare  qu'  «  il  est  impossible  d'admettre 
avec  les  historiens  anciens  que  les  premiers  tribuns  étaient  élus  par  les 
curies,  d'où  étaient  exclus  les  plébéiens  2.  » 

Cette  incertitude  fait  que  M.  M.  se  trouve  souvent  en  opposition, 
comme  malgré  lui,  avec  ses  propres  intentions.  L'une  des  meilleures 
qu'il  ait,  assurément,  est  celle  de  prouver  qu'il  n'y  a  pas  de  solution 
de  continuité  entre  ce  qu'on  est  convenu  d'appeler  le  principat  et 
le  bas  empire.  Dioclétien  et  Constantin  (p.  298)  se  seraient  unique- 
ment «  bornés  à  achever  l'œuvre  commencée  dans  la  période  pré- 
cédente, œuvre  qui  consistait  à  mettre  en  harmonie  les  formes  du 
gouvernement  avec  son  principe.  »  M.  M.  est  le  premier  qui, 
dans  un  traité  de  droit  romain,  ait  insisté  avec  force  sur  cette  très  juste 
idée.  Le  malheur  est  que,  dans  sa  manière  de  parler,  M.  M.  se  fait  l'es- 
clave des  vieilles  habitudes  :  si  l'on  s'en  tient  à  ses  expressions,  l'histoire 
de  l'empire  romain  comprend  toujours  deux  périodes,  l'une  avant,  l'au- 
tre après  Dioclétien.  Par  exemple,  a  dans  la  période  précédente,  la  di- 
gnité impériale,  comme  celle  de  César,  étaient,  en  théorie  du  moins, 
conférées  par  le  sénat.  A  partir  de  Dioclétien,  le  principe  subsiste  » 
(p.  3o5).  M.  M.  met  sur  le  compte  de  Dioclétien  un  certain  nombre  de 
réformes  qu'aucun  texte  ne  lui  attribue  :  s'il  était  conséquent  avec  lui- 
même,  il  en  ferait  l'œuvre  des  réformes  accomplies  pendant  le  111e  siècle. 
Parmi  les  «  procédés  »  employés  par  Dioclétien  et  Constantin  pour  réor- 
ganiser l'empire  (p.  299),  M.  M.  place  la  séparation  des  pouvoirs  civil 
et  militaire  :  et  cela  n'est  vrai  que  pour  la  préfecture  du  prétoire  ;  il  suf- 
fit de  lire  l'Histoire  auguste  pour  voir  que  le  principe  de  cette  sépara- 
tion, de  ce  «  procédé  »  date  des  premières  années  du  111e  siècle  :  en  ce 
qui  concerne  le  gouvernement  des  provinces,  il  semble  que  dès  Sévère 
Alexandre  le  commandement  des  soldats  fut  séparé  de  l'administration 
civile  3. 

Cette  indécision  est  générale  :  elle  se  rencontre  à  propos  des  faits  les 
plus  connus  et  des  questions  les  plus  certaines.  Nous  ne  trouvons  nulle 
part  une  discussion  serrée,  où  la  pensée  de  M.  M.  se  détache  nettement 
de  celle  de  son  adversaire  :  souvent  même  les  expressions  de  M.  M.  don- 
nent à  cette  dernière  une  obscurité  qu'elle  n'a  réellement  pas.  Ce  qui  est 

1.  Titc-Live,  5,  t%\  cf.  Madvig,  2,  9;  en  sens  contraire,  Willems,  Le  sénat  ro- 
main, I,  p.  60;  Fustel  de  Coulanges,  La  cité  antique,  4,  5. 

2.  Denys,  6,  89;  g,  41  ;  Tite-Live,  2,  56;  on  sait  que  Denys  considère,  9,  46,  le 
principe  des  comitia  curiata  comme  démocratique;  cf.  Staatsrecht,  II,  (2'  éd.), 
p.  260;  en  sens  contraire,  Madvig,  2,  5;  3,  3. 

3.  C'est  la  théorie  de  Borghesi,  Œuvres,  III,  p.  277;  V,  pp.  397-403,  d'après 
Lampride,  V.Alex.,  24. 


D'HISTOIRE   ET  DE   LITTÉRATURE  3o5 

plus  fâcheux  encore,  c'est  l'absence  complète  de  netteté  dans  les  défini- 
tions, c'est  cette  perpétuelle  tendance,  qui  se  retrouve  dans  le  détail 
comme  dans  l'ensemble  de  l'ouvrage,  de  supposer  les  choses  déjà  con- 
nues du  lecteur.  M.  M.  ne  cesse  de  parler  de  Yimperium  consulaire  : 
nulle  part  il  n'en  donne  une  définition  complète  et  satisfaisante;  et, 
pourtant,  on  trouve,  dès  les  premières  pages,  cette  phrase  qui  est  au 
moins  fort  bizarre  (p.  32)  :  «  Le  caractère  principal  du  pouvoir  royal, 
dont  les  limites  ne  nous  sont  pas  connues,  c'est  Yimperium  consulaire, 
sans  les  restrictions  qui  lui  ont  été  imposées  sous  la  république.  » 

Il  y  a  peu  de  livres  où  l'incorrection  typographique  soit  si  grande.  On 
se  console  aisément  des  coquilles  du  texte  français  :  on  pardonne  bien 
moins  volontiers  celles  des  citations  latines,  qui  ont  le  malheur  de  res- 
sembler à  des  solécismes.  Il  faudrait  aussi  que  M.  M.  se  décidât  entre 
deux  orthographes,  pomerium  ou  pomœrium,  qu'il  eût  un  système  fixe 
dans  la  transcription  des  titres  d'ouvrage,  et  qu'il  ne  les  abrégeât  pas  à 
l'excès  :  ce  qui  rend  les  notes  ou  très  fatigantes  à  lire  ou  impossibles  à 
déchiffrer.  Une  condition  sine  qua  non  pour  qu'un  livre  ait  une  appa- 
rence sérieuse,  c'est  que  les  mots  grecs  soient  accentués  :  il  est  même 
étrange  et  pénible  qu'on  ait  à  faire  ici  cette  remarque.  Mais  il  vaudrait 
mieux  négliger  absolument  de  le  faire  que  d'écrire  'Po^atwv  (p.  46), 
irspt  âpyw  (p.  56),  cTp«TYj*fôç  auioxpaxwp  (p.  1 35).  On  a  encore  le  droit  de 
reprocher  à  M.  M.  de  n'avoir  pas  cité  les  inscriptions  publiées  dans 
les  recueils  d'Orelli-Henzen  et  de  Wilmanns  suivant  le  numéro  qu'elles 
ont  dans  le  Corpus,  quand  on  voit  M.  Madvig  lui-même  regretter  et 
s'excuser  de  n'avoir  pu  le  faire. 

Nous  avons  tenu  à  insister  sur  les  défauts  de  ce  livre,  moins  pour  dé- 
conseiller de  s'en  servir  que  pour  engager  l'auteur  à  le  revoir,  à  le  rema- 
nier. Car  il  renferme  une  somme  considérable  de  travail  et  de  bon 
travail  :  ce  serait  un  grand  dommage  si  elle  se  trouvait  perdue.  M.  M. 
n'a  plus  à  chercher  ses  textes  ni  à  étudier  les  auteurs  de  seconde  main  : 
il  doit  s'étudier  lui-même.  Certaines  parties  où  il  n'a  pas  eu  de  devan- 
ciers, comme  son  étude  sur  le  sénat  du  bas  empire^  sont  bien  traitées. 
Des  théories,  où  il  a  su  ne  point  s'écarter  de  l'idée  maîtresse,  comme 
celle  sur  la  lex  regia,  sont  clairement  exposées.  M.  M.  a,  de  plus,  l'avan- 
tage d'avoir  reçu  une  instruction  à  la  fois  juridique  et  épigraphique, 
d'avoir  étudié  en  même  temps  la  science  des  institutions  et  du  droit  ro- 
main ;  les  travaux  de  M.  Cuq  ont  récemment  montré  quel  profit  ces 
deux  sciences  peuvent  tirer  l'une  de  l'autre.  On  doit,  en  particulier,  lui 
savoir  un  gré  infini  d'avoir,  le  premier  peut-être  en  France,  dans  un 
livre  sur  les  institutions  romaines,  utilisé  le  magnifique  traité  de  M.  de 
Jhering  '  sur  l'esprit  du  droit  romain.  Ce  n'est  donc  pas  le  fonds  qui 
manque  à  l'ouvrage  de  M.  Mispoulet.  Camille  Jullian. 

1.  Geist  des  rœmischen  Rechts,  Leipzig,  1854  (dernière  édition  1874- 1877),  traduit 
par  M.  de  Meulenaere,  Paris  et  Gand,  1877,  4  vol.  in-8.  Pourquoi  M.  M.  s'obstine- 
t-il  à  écrire  Jehring  i 


3û6  REVUE   CRITIQUE 

2lb.  —  Histoire  du  christianisme  depuis  son  origine  Jusqu'à  nos 
jours,  par  Etienne  Chastel,  professeur  de  théologie  historique  à  l'université  de 
Genève.  Paris,  G.  Fischbacher,  1882.  grand  in-8°.  Tome  I,  de  xiu  et  464  pp.  Pre- 
mière période,  Le\christianisme  avant  Constantin,  et  tome  II,  de  63 1  pp.  Seconde 
période,  delà  conversion  de  Constantin  à  l'hégire  de  Mahomet. 

On  ne  saurait  mieux  faire,  pour  donner  une  idée  de  cet  ouvrage,  que 
de  mettre  en  lumière  l'esprit  dans  lequel  il  a  été  conçu.  M.  Chastel  n'a 
voulu  écrire  ni  une  de  ces  chroniques  dans  lesquelles  on  s'est  si  souvent 
contenté  de  rapporter  les  événements  saillants  de  l'histoire  ecclésiastique, 
sans  en  montrer  l'enchaînement  historique,  et  sans  marquer  les  antécé- 
dents de  chacun  d'eux,  ni  un  de  ces  plaidoyers  inspirés  par  des  intérêts 
ou  des  préoccupations  dogmatiques,  et  destinés  à  prouver,  au  mépris  de 
la  vérité  historique,  que  l'enseignement  de  telle  ou  de  telle  Eglise  est  le 
seul  conforme  à  la  prédication  primitive  du  christianisme.  Ce  qu'il  s'est 
proposé,  il  nous  le  dit  lui-même,  c'est  sans  doute  de  raconter  les  divers 
événements  qui  se  sont  produits  dans  l'Eglise,  et  de  faire  connaître  les 
différentes  conceptions  théologiques  qui  y  ont  été  proposées  et  qui  y  ont 
eu  des  fortunes  fort  diverses,  mais  aussi  d'en  rechercher  les  antécédents 
et  les  causes,  de  les  discuter,  et  d'en  indiquer  les  conséquences  ;  c'est 
encore  de  marquer  nettement  les  diverses  tendances  qui  s'y  sont  dessi- 
nées, selon  les  temps  et  les  lieux,  dans  la  manière  de  comprendre  et 
de  pratiquer  le  christianisme,  non  pour  condamner  les  unes  ou  les 
autres,  mais  pour  les  expliquer,  en  montrant  d'où  elles  viennent,  et 
ce  qui  les  a  provoquées  ;  c'est  enfin  de  se  placer  entre  les  partis  religieux 
qui  se  sont  disputé,  qui  se  disputent  encore  la  prépondérance,  non 
pour  donner  toujours  exclusivement  raison  à  l'un  d'entre  eux,  mais 
pour  faire  voir  ce  qu'il  y  a  de  fondé  dans  leurs  prétentions  respectives, 
impartialité  raisonnée  et  appuyée  sur  les  faits,  qui  a  cet  avantage  sur 
la  controverse  que,  autant  celle-ci  prolonge  et  envenime  les  débats, 
autant  celle-là  les  abrège  et  les  tempère,  en  reconnaissant  au  passé  son 
ancienne  raison  d'être,  et  à  l'avenir  ses  raisons  légitimes  pour  succéder 
au  passé. 

Ces  principes  dont  s'est  inspiré  M.  C,  sont  de  nature  à  nous  faire 
espérer  d'avoir  enfin  dans  notre  langue  une  histoire  ecclésiastique  ré- 
pondant à  toutes  les  exigences  de  la  science  moderne.  C'est  d'après  eux 
qu'ont  été  écrits  les  deux  premiers  volumes  que  nous  avons  déjà  entre 
les  mains,  et  que  le  seront  certainement  aussi  ceux  qui  doivent  les 
suivre  '. 

De  ces  deux  volumes,  consacrés  à  présenter  le  tableau  de  ce  que 
M.  C.  appelle  le  premier  âge  du  christianisme,  le  premier  contient 
l'histoire  des  trois  premiers  siècles  de  l'église  chrétienne.  Après  avoir 


1.  Le  troisième  volume  traitera  de  l'Eglise  pendant  le  moyen  âge,  et  le  quatrième 
et  le  cinquième  des  diverses  vicissitudes  du  christianisme  depuis  l'origine  de  la 
Réformation  jusqu'à  nos  jours. 


d'histoire  et  de  littérature  307 

tracé  le  tableau  de  la  naissance  et  des  premiers  progrès  de  la  religion 
chrétienne  et  ensuite  celui  des  persécutions  qui  en  frappèrent  les  adhé- 
rents, sans  réussir  à  en  arrêter  la  propagation,  M.  C.  fait  connaître 
quelle  fut  l'organisation  des  églises  dans  le  principe  indépendantes  les 
unes  des  autres  ;  comment,  pour  opposer  une  résistance  plus  solide  aux 
sectes  rivales,  elles  se  liguèrent  entre  elles,  et  en  vinrent  bientôt  à  une 
fédération  universelle  qui  forma  ce  qu'on  appela  la  grande  Eglise, 
l'Eglise  catholique  (ch.  n).  Il  est  parlé  dans  le  chapitre  suivant  du  culte 
qui  était  d'une  grande  simplicité,  et  dans  le  ive  de  la  discipline  ecclé- 
siastique. Le  chap.  ve  est  consacré  à  l'histoire  des  écrivains  chrétiens 
des  trois  premiers  siècles.  Le  vie  enfin  traite  de  la  doctrine  et  occupe  à 
peu  près  le  tiers  du  volume.  Ce  qui  s'explique  par  l'importance  extrême 
du  sujet. 

On  ne  saurait  lire  ce  volume  sans  éprouver  quelque  étonnement  de  la 
rapidité  avec  laquelle  les  enseignements  du  maître  furent  altérés.  Jésus 
avait  constamment  réprouvé  quiconque  s'érige  en  directeur  des  conscien- 
ces ;  ce  qui  n'empêcha  pas  cependant  un  clergé  de  se  mettre  à  la  tête  des 
églises  déjà  au  milieu  du  second  siècle,  et  de  former  une  hiérarchie  sa- 
cerdotale qui  se  rendit  de  jour  en  jour  plus  puissante.  Les  chrétiens 
s'habituèrent  de  bonne  heure  à  attribuer  aux  cérémonies  les  effets  et  les 
vertus  qui  n'appartiennent  qu'au  changement  intérieur,  dont  les  sacre- 
ments ne  sont  que  des  symboles  (T.  I,  pp.  141,  142,  157,  1 58).  L'ascé- 
tisme prima  bientôt  le  travail  moral  (t.  I,  pp.  185-192).  Un  sentiment 
respectable  sans  doute,  mais  de  dangereuse  conséquence,  fit  établir  des 
fêtes  en  l'honneur  des  martyrs.  Tertullien  et  Cyprien  en  parlent  comme 
de  coutumes  généralement  reçues  de  leur  temps.  Cet  usage  eut  pour 
effet  de  faire  considérer  les  martyrs  comme  des  demi-dieux,  et  d'in- 
troduire dans  le  culte  chrétien  des  rites  empruntés  au  paganisme 
(t.  I,  p.  177). 

Ces  altérations  et  bien  d'autres  du  même  genre  furent  provoquées,  en 
grande  partie,  par  les  besoins  du  moment;  ainsi  les  luttes  dans  lesquelles 
la  religion  chrétienne  se  trouva  engagée,  en  se  propageant,  mirent  en 
vue  ceux  qui  en  prirent  la  défense  et  leur  assignèrent  une  place  à  part 
au-dessus  du  commun  des  fidèles  ;  mais  elles  furent  dues  principalement 
aux  habitudes  d'esprit  des  populations  gréco-latines,  parmi  lesquelles  le 
christianisme,  à  partir  du  second  siècle,  se  fit  exclusivement  de  nou- 
veaux partisans.  Il  était  impossible  que  la  religion  nouvelle  se  propageât 
dans  ce  milieu,  sans  en  subir  une  réaction  plus  ou  moins  profonde. 

En  même  temps,  ce  qui  n'avait  été  qu'une  foi  simple  et  naïve  pour 
les  premières  générations  chrétiennes  devint  un  thème  de  spéculations 
métaphysiques,  dès  que  le  christianisme  eut  trouvé  des  disciples  parmi 
les  hommes  qui  avaient  fréquenté  les  écoles  philosophiques  de  cette 
époque.  Le  tableau  que  les  récits  évangéliques  tracent  des  destinées  de 
Jésus,  fit  place  à  des  conceptions  abstraites,  on  pourrait  peut-être  même 
dire  mythologiques,  sur  la  nature  et  la  vie  du  fondateur  de  la  nouvelle 


3o8  RBVCJH   CRITIQUE 

religion  (t.  I,  pp.  379-391)-  M  n'est  une  seule  des  croyances  et  des  espé- 
rances chrétiennes,  dans  laquelle  des  hommes  amenés  au  christianisme 
d'ordinaire  par  le  platonisme  tel  qu'on  le  concevait  à  celte  époque,  ne 
trouvent  matière  à  des  discussions  philosophiques.  Ils  veulent  savoir 
quelle  est  l'origine  du  péché,  quels  sont  le  pourquoi  et  le  comment  de  la 
rédemption,  quel  était  le  séjour  où  les  âmes  se  rendent  immédiatement 
après  la  mort,  quelle  serait  la  nature  des  rétributions  qui  devaient  suivre 
le  jugement  dernier. 

Ces  altérations  du  christianisme  qui  se  produisirent  pendant  les  trois 
premiers  siècles,  s'étendirent,  s'accentuèrent  depuis  la  conversion  de 
Constantin,  et  c'est  en  raison  de  ce  fait  que  M.  C.  considère  comme  une 
période  du  premier  âge  de  l'Eglise  chrétienne  l'époque  qui  s'étend  de 
cette  date  jusqu'à  la  fin  du  vie  siècle  ou  au  commencement  du  vne.  Ce 
n'est  pas  que  de  nouvelles  altérations  ne  se  soient  encore  produites  de- 
puis ;  mais,  en  Un  certain  sens,  elles  dérivent  pour  la  plupart  des  précé- 
dentes, et,  en  somme,  l'Eglise  était  à  ce  moment  assise  sur  des  principes 
qu'elle  n'aura  plus  qu'à  développer  jusqu'à  leurs  dernières  conséquences. 

A  peine  échappée  aux  persécutions,  pressée  avant  tout  d'en  prévenir 
le  retour,  elle  cherche  à  se  rendre  importante  par  le  nombre.  Le  pouvoir 
qui  l'opprimait,  maintenant  la  protège;  elle  profite  avec  ardeur  d'un 
privilège  qui  pourrait  n'être  que  passager.  Les  souverains  eux-mêmes, 
non-seulement  l'y  encouragent,  mais  en  quelque  sorte  l'y  obligent.  Pour 
mieux  retenir,  pour  s'incorporer  plus  solidement  les  multitudes  hâtive- 
ment enrôlées,  elle  s'attribue,  elle  revendique  de  l'Etat  de  nouveaux 
pouvoirs.  Hors  d'elle,  point  de  salut;  dans  cette  vie,  punitions  sévères, 
dans  l'autre,  éternelle  condamnation  pour  quiconque  lui  échappe  par  la 
rébellion,  par  l'hérésie  ou  par  le  schisme.  Pour  rendre  son  autorité  plus 
active  et  plus  forte,  elle  la  concentre  tout  entière  dans  les  mains  du 
clergé,  qu'elle  revêt  d'un  caractère  divin  et  unit  par  les  liens  d'une  puis- 
sante hiérarchie. 

Elle  s'empresse  en  même  temps  d'en  finir  avec  les  discussions  de  doc- 
trines qui  avaient  joui  d'une  certaine  liberté  dans  le  11e  et  le  111e  siècle. 
Elle  fixe  la  doctrine  de  la  Trinité  ;  elle  met  fin  aux  controverses  christo- 
logiques,  soulevées  par  suite  de  la  doctrine  de  la  Trinité  ;  elle  impose 
silence  à  la  controverse  pélagienne  et  à  la  controverse  semi-pélagienne  ; 
elle  fixe  la  doctrine  sur  la  vie  future.  La  partie  de  l'ouvrage  de  M.  Chas- 
tel  qui  se  rapporte  à  la  dogmatique  ecclésiastique  (t.  II,  pp.  424-612), 
présente  un  puissant  intérêt  et  est  écrite  avec  une  clarté  rare  en  ces  ma- 
tières abstraites. 

M.  N. 


D  HISTOIRE    ET    DE   LITTERATURE  300, 

2  1 6.  —  Histoire  de  IFi-anee  sous  le  ministère  de  Mnzai'In  (i65l-l66l), 
par  A.  Chéruel,  recteur  honoraire  et  inspecteur  général  honoraire  de  l'Univer- 
sité, membre  du  comité  des  travaux  historiques  et  des  sociétés  savantes.  Tome  I. 
Paris,  librairie  Hachette,  1882.  In-8°  de  xn-447  p.  Prix  :  7  fr.  5o. 

«  L'histoire  de  France  pendant  les  dernières  années  du  ministère 
de  Mazarin,  »  dit  M.  Chéruel  (Avertissement,  p.  1),  «  est  le  complément 
nécessaire  de  l'ouvrage  que  j'ai  publié  sur  la  minorité  de  Louis  XIV. 
L'Académie  française,  qui  a  accueilli  mon  travail  historique  avec  tant 
de  bienveillance  et  lui  a  accordé  deux  fois  une  récompense  si  honorable !, 
m'a  encouragé  à  le  continuer  jusqu'à  l'époque  où  commence  réellement 
le  gouvernement  personnel  du  jeune  roi.  C'est  surtout  pour  repondre  à 
cet  appel  que  j'entreprends  de  compléter  l'histoire  du  ministère  de  Ma- 
zarin. »  La  Revue  critique,  qui  plusieurs  fois  a  signalé  le  grand  mérite 
de  V Histoire  de  France  pendant  la  minorité  de  Louis  XIV,  et  qui  a 
instamment  demandé  à  l'auteur  la  suite  de  ce  beau  travail,  est  heureuse 
de  voir  le  lauréat  de  l'Institut  continuer  à  marcher  dans  une  voie  où 
l'attendent  de  nouveaux  succès. 

M.  C.  n'a  plus,  pour  se  guider  pendant  la  période  de  i65i  à  166 r,  les 
carnets  du  cardinal,  lesquels  s'arrêtent  en  février  i65o,  mais,  fait- il  re- 
marquer (p.  n),  «  sa  correspondance,  conservée  dans  les  divers  dépôts 
des  Affaires  étrangères,  de  la  Bibliothèque  nationale,  des  Archives  na- 
tionales, de  la  Bibliothèque  mazarine,  etc.,  est  une  source  féconde  pour 
les  dernières  années  de  son  ministère.  Elle  sert  à  rectifier  et  à  compléter 
les  mémoires  du  temps  ».  M.  C.  examine  tour  à  tour  (pp.  ni-vi)les  prin- 
cipaux de  ces  mémoires,  ceux  du  cardinal  de  Retz,  de  Mlle  de  Montpen- 
sier,  de  Mms  de  Motteville,  de  la  duchesse  de  Nemours,  de  Monglat,  et 
il  indique  quelques-unes  des  erreurs  que  la  correspondance  de  Mazarin 
y  fait  découvrir.  Il  eût  été  trop  long  de  relever  les  passages  des  Mémoires 
du  cardinal  de  Retz  où  éclate  «  l'audace  de  ses  réticences  et  de  ses  men- 
songes »,  mais  voici  un  certain  nombre  d'assertions,  empruntées  à  divers 
autres  mémoires,  qui  sont  formellement  démenties  par  les  documents 
d'où  M.  C.  a  tiré  la  trame  de  son  histoire  :  «  Mllc  de  Montpensier  ra- 
conte, avec  un  naïf  orgueil,  son  entrée  à  Orléans,  et  ses  succès  oratoires 
dans  le  conseil  des  principaux  habitants  de  cette  ville.  Elle  n'attribue 
qu'à  son  influence  et  à  son  action  personnelle  les  résultats  qu'elle  obtint. 
Les  lettres,  écrites  par  les  conseillers  qu'on  lui  avait  adjoints,  sont  con- 
servées dans  les  papiers  de  Mazarin,  et  prouvent  que  les  émissaires  du 
parti  de  la  Fronde  avaient  gagné  le  peuple  par  des  distributions  d'argent, 
et  préparé  les  faciles  victoires  de  cette  princesse.  »  —  Mme  de  Motteville 
raconte,  d'après  l'autorité  des  ennemis  secrets  du  cardinal  (le  maréchal 
de  Villeroi,  le  secrétaire  d'Etat  Brienne,  le  marquis  de  Senneterre), 
«  qu'en  novembre  1 65 1  la  reine  s'opposait  au  retour  de  Mazarin,  au 
moment  même  où  les  lettres  du  maréchal  du  Plessis-Praslin,  écrites  au 


1.  Le  grand  prix  Gobert  (t  880  et  1881) 


3lO  REVUE   CRITIQUE 

nom  d'Anne  d'Autriche,  rappelaient  le  cardinal  avec  les  plus  vives  ins- 
tances, et  où  la  reine  lui  envoyait  la  Cardonnière  avec  toutes  les  ins- 
tructions et  recommandations  nécessaires  pour  son  retour  ».  —  «  Com- 
ment s'étonner,  lorsque  Mme  de  Motteville  se  trompe  sur  les  sentiments 
véritables  de  la  reine,  des  erreurs  d'autres  contemporains,  qui  vivaient 
loin  de  la  cour?  La  duchesse  de  Nemours,  dans  ses  spirituels  mémoires, 
présente  le  prince  Thomas  de  Savoie-Carignan  comme  un  rival  que  les 
ennemis  du  cardinal  avaient  voulu  lui  opposer,  et  il  résulte,  au  con- 
traire, des  lettres  de,  Mazarin,  que  ce  prince  lui  était  sincèrement  dévoué, 
et  soutenait,  dans  le  conseil  du  roi,  les  avis  suggérés  par  ce  ministre.  » 
—  «  Monglat,  qui  a  une  réputation  incontestée  d'exactitude,  raconte 
qu'un  certain  nombre  de  courtisans,  entre  autres  le  commandeur  de 
Souvré  et  Roquelaure,  affectèrent,  lorsque  Mazarin  rentra  en  France, 
en  janvier  1662,  de  lui  témoigner  de  la  froideur  et  du  mépris,  tandis 
que  les  lettres  mêmes  de  Souvré  attestent  que  ce  fut  le  cardinal  qui,  à 
son  arrivée  à  Poitiers,  montra  une  hauteur  et  un  dédain,  qui  ne  lui 
étaient  pas  habituels,  envers  ceux  dont  il  connaissait  les  mauvaises  dis- 
positions et  la  conduite  suspecte  l.  » 

Le  récit  des  préparatifs  des  deux  partis  pour  la  troisième  guerre  civile 
de  la  Fronde  (septembre-octobre  i65i)  ouvre  le  volume,  que  ferme  le 
tableau  de  la  situation  de  la  France  en  i653.  Nous  ne  possédions  pas 
encore  une  histoire  aussi  détaillée  de  cette  période  de  deux  années  et 
quatre  mois  marquée  principalement  par  la  campagne  de  Saintonge 2,  les 
revers  de  Condé,  le  retour  de  Mazarin  en  France,  la  guerre  en  Guienne 
et  sur  la  Loire,  le  progrès  du  parti  monarchique  à  Paris,  les  violences  et 
la  décadence  de  la  fronde  parisienne,  le  second  exil  de  Mazarin,  la  perte 
de  Dunkerque,  le  rappel  du  roi  par  la  bourgeoisie  parisienne,  l'entrée 
de  Louis  XIV  à  Paris  et  le  retour  définitif  de  Mazarin.  Sur  tous  ces  évé- 
nementsM.  C.  est  aussi  abondaamment  que  sûrement  informé3.  Bien  des 


1.  M.  C.  ajoute  (p.  vi)  que  ces  erreurs  des  contemporains  se  retrouvent  dans  les 
historiens  modernes  de  la  Fronde  les  plus  dignes  d'éloges,  tels  que  le  comte  de 
Sainte-Aulaire,  «  dont  l'ouvrage  est  si  justement  estimé,  »  M.  Bazin,  «  dont  on  ne 
saurait  trop  louer  la  science  et  la  sagacité.  »  On  voit  jusqu'où  va  l'exquise  politesse 
de  M.  C.  à  l'égard  de  devanciers  qui,  jugés  sérieusement,  laissent  tant  à  désirer,  le 
premier  surtout. 

2.  Cette  guerre  de  Saintonge,  dit  M.  C.  (p.  35,  note  1),  «  a  été  racontée  par  plu- 
sieurs contemporains  du  parti  de  Condé  (Mémoires  de  Chouppes,  de  la  Rochefou- 
cauld, de  Lenet,  de  Balthazar,  du  prince  de  Tarente).  Nous  avons  comparé  à  ces 
mémoires  les  ouvrages  de  La  Barde,  de  Priolo,  de  Monglat  et  surtout  les  rapports 
adressés  à  Mazarin  par  ses  correspondants.  »  M.  C.  attache  avec  raison  beaucoup 
d'importance  aux  récits  de  La  Barde,  qui  reste  le  meilleur  de  tous  les  anciens  histo- 
riens des  premières  années  du  règne  de  Louis  XIV.  En  revanche,  il  tient  infiniment 
peu  de  compte  des  récits  du  colonel  Balthazar  qui,  si  l'on  en  croyait  ses  gasconnades, 
dit-il  (p.  48,  note  3),  se  serait  illustré  par  de  continuelles  victoires.  Voir  (p.  i5i) 
une  note  où  M.  C.  se  moque  encore  de  Balthazar  «  emphatique  et  vaniteux  ». 

3.  Mes  observations  se  réduisent  à  bien  peu  de  chose.  Le  petit  discours  de  Condé 
sur  son  épée,  rapporté  p.  4,  ne  me  paraît  pas  authentique.  Il  ne  nous  a  été  conservé 


D'HISTOIRE    ET    DE   LITTÉRATURE  3  I  I 

particularités  nouvelles  y  frappent  l'attention.  On  remarquera  l'étude 
consacrée  (pp.  22-25)  à  une  femme  peu  connue  qui,- mêlée  à  toutes  les 
intrigues  de  la  Fronde,  fut  un  des  principaux  agents  des  négociations 
entre  Condé  et  Mazarin  et  qui  exerça  autour  d'elle  une  grande  influence, 
Mme  de  Puisieux.  On  remarquera  plus  encore  les  pages  sur  la  réaction 
contre  la  Fronde  qui  se  produisit  à  Paris  en  septembre  et  en  octobre  i652, 
et  qui  assura  le  triomphe  de  la  royauté  sur  le  parti  des  princes,  énergi- 
que mouvement  ou,  pour  mieux  dire,  courant  irrésistible  dont  ni  Sainte- 
Aulaire,  ni  Bazin,  ni  les  historiens  postérieurs,  n'ont  le  moins  du  monde 
semblé  s'apercevoir  (p.  3 12  et  suiv.).  Outre  les  rectifications  indiquées 
déjà,  signalons  la  réfutation  (pp.  257-265)  de  ce  que  M.  d'Haussonville, 
dans  l'Histoire  de  la  réunion  de  la  Lorraine  à  la  France,  avait  avancé  au 
sujet  des  bandes  de  pillards  allemands  qui  auraient  été  appelées  en  nos 
provinces  et  jusqu'aux  portes  de  Paris  par  Mazarin.  M.  C.  dit,  à  cette 
occasion  (p.  255,  note  1)  :  «  Je  m'efforce,  dans  cette  histoire,  de  rester 
impartial.  »  Il  faut,  en  effet,  rendre  hommage  à  la  parfaite  impartialité 
de  l'auteur,  et  déclarer  que  parmi  toutes  ses  qualités,  celle-là  brille  d'un 
éclat  particulier. 

On  trouve,  à  Y  Appendice  (pp.  405-438)  un  exposé  des  questions  de 
politique  intérieure  qui  préoccupaient  la  reine  et  Mazarin  en  jan- 
vier 1 653  et  les  lettres  d'Anne  d'Autriche  à  Mazarin  en  janvier  i653, 
lettres  déjà  publiées  par  Victor  Cousin,  d'après  les  autographes  de  la 


que  par  Priolo,  qui  aime  beaucoup  les  mots  à  effet,  les  situations  théâtrales,  et  qui 
est  un  brillant  improvisateur  dont  on  ne  saurait  trop  se  méfier.  —  M.  C.  ne  sait 
(p.  21)  s'il  doit  appeler  le  gouverneur  du  château  de  Vayres,  pendu  aux  halles  de 
Libourne  «  Richon  ou  Richou.  »  Richon  est  la  forme  donnée  par  tous  les  meilleurs 
documents  imprimés  ou  manuscrits.'  —  L'auteur  ne  sait  (ibid.)  s'il  doit  appeler  Canol 
ou  Canolles  le  capitaine  de  l'armée  royale,  qui  fut  pendu  par  les  frondeurs  bordelais 
en  représailles  de  l'exécution  de  Richon.  C'était  un  membre  de  la  vieille  famille 
périgourdine  de  Canolle,  dont  la  généalogie  figure  au  tome  III  de  YHistoire  des 
pairs  de  France  par  le  chevalier  de  Courcelles,  et  dà*ns  le  tome  II  du  Nobiliaire  de 
Guienne  et  de  Gascogne,  par  O'Gilvy.  Notons,  en  passant,  que  Dom  Devienne  (His- 
toire de  la  ville  de  Bordeaux,  p.  402)  a  donné  à  cet  officier  le  nom  de  Canot.  — 
L'Histoire  de  Tancrède  de  Rohan  est  trop  incontestablement  du  P.  Griffet,  pour 
qu'on  puisse  se  contenter  de  dire  (p.  61,  note  3)  qu'elle  lui  est  attribuée.  —  M.  C. 
me  semble  bien  timide  quand  il  insinue  (p.  65,  note  4)  que  certaines  pièces  publiées 
dans  les  Lettres,  mémoires  et  négociations  de  M.  le  comte  d'Estrades,  «  ont  dû  être 
altérées  par  les  auditeurs  ».  Les  altérations  sont  évidentes,  comme  je  l'ai  fait  remar- 
quer dans  mon  édition  de  la  Relation  inédite  de  la  défense  de  Dunkerque  par  le  ma- 
réchal ^'Estrades  (1872).  —  M.  C.  exprime  le  regret  (p.  102)  de  ne  pouvoir  citer  le 
texte  complet  des  lettres  de  Gabriel  Naudé  relatives  à  la  vente  de  la  bibliothèque  de 
Mazarin,  conservées  aux  Archives  des  affaires  étrangères.  Qu'il  se  console  en  appre- 
nant que  ces  curieuses  lettres  ont  été  publiées  in  extenso  dans  le  Bulletin  de  la 
Société  de  V histoire  de  Paris.— On  s'étonne  de  ne  voir  citer  nulle  part  par  M.  C.  les 
Souvenirs  du  règne  de  Louis  XIV,  du  comte  de  Cosnac,  où  surabondent  les  rensei- 
gnements et  les  documents  relatifs  à  la  Fronde.  J'ai  d'autant  plus  le  droit  de  repro- 
cher à  M.  C.  ce  péché  d'omission,  que  j'ai  eu  l'occasion  de  reprocher  ailleurs  à  M.  de 
Cosnac  de  n'avoir  pas  cité,  de  son  côté,  l'important  ouvrage  de  M.  Chéruel. 


3l2  RKVUE   CRITIQUE 

collection  Clairembault,  à  la  fin  du  volume  intitulé  Madame  de  Haute- 
fort.  M.  C.  a  tenté  de  donner  une  explication  de  la  partie  politique  de 
ces  lettres,  laquelle  avait  paru  inintelligible  à  Cousin,  et,  sans  prétendre 
avoir  dissipé  toutes  les  obscurités,  il  a  pu  se  flatter  à  bon  droit  d'avoir 
saisi  le  sens  des  principaux  passages  de  ces  documents  où  l'on  n'avait 
bien  nettement  vu,  avant  lui,  que  l'expression  des  sentiments  passionnés 
de  la  reine  pour  le  cardinal.  L'interprétation  des  Lettres  d'Anne  d'Au- 
triche, certaine  sur  deux  points  (la  conduite  du  garde  des  sceaux  Mathieu 
Mole  à  l'égard  des  quatre  conseillers  au  parlement  de  Paris  exilés,  puis 
rappelés,  et  la  négociation  de  l'évêque  de  Saintes  avec  le  comte  du  Dau- 
gnon),  ingénieuse,  mais  hypothétique  sur  un  troisième  point  (la  lieute- 
nance  de  roi  du  gouvernement  de  la  Fère  à  enlever  à  Manicamp),  cette 
interprétation,  dis-je,  fait  le  plus  grand  honneur  à  la  sagacité  de  M.  Ché- 
ruel,  et  montre  une  fois  de  plus  que  les  futurs  historiens  de  la  France 
ne  pourront,  pour  tout  ce  qui  regarde  l'époque  de  Mazarin,  suivre  un 
meilleur  guide  que  lui. 

T.  de  L. 


217. —  Christian  Cïottfi-ietl  Kœrncr,  biographische  Nachrichten  ûber  ihn 
uncl  sein  Haus,  aus  den  Quellen  zusammengestellt  von  Dr.  Fritz  Jouas.  Berlin, 
Weidmann,  1882.  In-8°,  406  pp.  5  mark. 

M.  Jonas  a  voulu  écrire  la  biographie  de  ce  Christian  Gottfried 
Kôrner  qui  fut  l'intime  ami  de  Schiller  et  le  père  de  Théodore  Kôrner 
(le  chasseur  de  Lûtzow  et  l'auteur  de  Leier  und  Schwert).  Il  divise 
naturellement  son  livre  en  chapitres,  mais  il  a  le  tort  de  ne  pas  donner 
de  titre  à  aucun  de  ces  chapitres,  et  de  ne  pas  même  dresser  une  table 
avec  des  sommaires  ;  nous  le  ferons  donc  à  sa  place.  Dans  le  premier  cha- 
pitre (pp.  i-38),  M.  J.  raconte  l'enfance  et  la  jeunesse  de  son  héros,  ses 
études  universitaires,  ses^fiançailles  avec  Dorothée  Stock,  son  enthou- 
siasme pour  les  premières  œuvres  de  Schiller,  et  l'amitié  qui  l'unit  de 
loin  avec  le  jeune  poète  de  Mannheim  ;  le  11e  chapitre  (pp.  38-56)  retrace 
les  relations  de  Schiller  et  de  Kôrner  à  Leipzig  et  à  Dresde,  et  le 
iiic  (pp.  D7-79),  la  vie  et  les  études  de  Kôrner  à  Dresde  depuis  le  départ 
de  Schiller  à  Weimar  jusqu'à  l'année  1790  où  il  est  nommé  «  Appella- 
tionsrath  »;  le  ive  (pp.  78-125)  est  consacré  aux  jugements  de  Kôrner 
sur  Gœthe,  Humboldt  et  ses  contemporains  et  à  ses  lettres  à  Schiller 
qui  «  sont  sans  contredit  ce  qu'il  a  écrit  de  mieux  et  de  plus  important  » 
(p.  99)  ;  la  jeunesse  de  Théodore  et  l'intérieur  de  la  famille  Kôrner  font 
l'objet  du  ve  chapitre  (pp.  126-174);  le  vie  (pp.  175-255)  expose  la  vie 
fougueuse  et  un  peu  folle  que  Théodore,  après  avoir  quitté  l'école  des 
mines  de  Freyberg,  mena  à  l'Université  de  Leipzig,  son  séjour  à  Berlin 
et  à  Vienne,  l'éveil  de  son  génie  poétique,  ses  premières  œuvres  lyriques 
et  dramatiques;   le  vu0   chapitre  (pp.  256-348),  sa  haine  patriotique 


d'histoire  et  de  littérature  3i3 

contre  les  Français,  ses  aventures  dans  le  corps  franc  de  Liitzow,  ses 
poésies  guerrières  et  sa  mort  -,  dans  le  vme  et  dernier  chapitre  (pp.  349- 
382),  on  voit  Chr.  G.  Kôrner  établi  à  Berlin  et  consacrant  ses  derniers 
jours  à  la  musique,  à  la  littérature  et  à  ses  fonctions  de  conseiller  d'état. 
On  lit  avec  intérêt  l'ouvrage  de  M.  J.  ;  mais  on  pourrait  lui  repro- 
cher d'avoir  trop  «  laissé  parler  les  sources  elles-mêmes  »  (p.  387)  ;  son 
livre  n'est  pas  un  livre,  à  proprement  parler,  mais,  pour  emprunter  son 
second  titre,  une  suite  de  «  nouvelles  biographiques  sur  Kôrner  et  sa 
maison  »  ;  il  y  a,  dans  le  courant  du  récit,  trop  de  lettres  et  de  docu- 
ments; M.  J.  s'est  contenté  de  reproduire  la  correspondance  de  ses 
personnages  au  lieu  d'en  extraire  ou  d'en  résumer  les  passages  les  plus 
importants.  C'est  ainsi  qu'il  ne  nous  décrit  pas  du  tout  l'intérieur  de  la 
famille  Kôrner  (pp.  r45  sq.)  ;  il  dit  bien  qu'il  «  sied  de  montrer  au 
lecteur  la  mère,  la  tante  Dora  et  la  sœur  Emma  »  ;  mais  il  se  hâte  d'a- 
jouter qu'on  connaîtra  mieux  ces  personnages  en  lisant  leurs  lettres  ; 
suivent  aussitôt  ces  lettres  qui  occupent  près  de  trente  pages  ;  avouons- 
le,  c'est  rendre  trop  aisée  la  besogne  du  biographe.  M.  J.  emploie  la 
même  méthode,  si  méthode  il  y  a,  dans  le  récit  des  années  1 8 1 2  et  1 8 1 3  ; 
ce  récit  n'est  qu'une  suite  des  lettres  échangées  entre  Théodore,  sa 
famille  et  son  plus  cher  ami,  son  futur  historien,  Frédéric  Foerster  ;  et 
la  plupart  de  ces  lettres  ne  sont  même  pas  reliées  par  quelques  mots 
d'explication.  Rien  d'étonnant  que  Christian  Gottfried  Kôrner,  dont  le 
nom  est  le  titre  du  volume  et  qui  doit  être  le  personnage  marquant  et  le 
plus  en  relief,  disparaisse  parmi  ces  trop  nombreux  documents  ;  il  est 
constamment  rejeté  dans  l'ombre  ;  l'intérêt  se  concentre  dans  la  pre- 
mière partie  du  livre  sur  Schiller,  dans  la  seconde,  sur  Théodore  Kôr- 
ner. Encore,  dans  la  première  partie,  les  rapports  de  Schiller  et  de 
Chr.  G.  Kôrner  ne  sont-ils  pas  aussi  nettement,  aussi  profondément 
marqués  qu'on  le  voudrait  ;  on  apprend  bien  que  Kôrner  exerça  sur  son 
ami  une  grande  influence,  mais  cette  influence  n'est  pas  assez  longue- 
ment exposée;  M.  J.  n'a  pas  tout  dit  sur  cet  important  sujet  qui  exige 
d'ailleurs  des  connaissances  philosophiques,  et  trop  souvent  il  se  borne, 
là  encore,  à  reproduire  des  passages  connus  de  la  correspondance  des 
deux  amis.  Et  dans  la  seconde  partie,  était-il  si  nécessaire  de  raconter 
les  escapades  de  Théodore  à  Leipzig  et  de  tant  insister  sur  les  épisodes 
de  sa  vie  de  franc-tireur  ?  Puisque  le  livre  est  consacré  au  père  et  non  au 
fils,  il  fallait  nous  montrer  toujours  au  premier  plan  Chr.  G.  Kôrner  ; 
ce  n'est  pas  l'impétueuse  ardeur  et  le  bouillant  patriotisme  de  Théodore 
que  M.  J.  devait  nous  exposer  ;  il  eût  mieux  valu  retracer  et  mettre  en 
pleine  lumière  —  sans  citer  si  complaisamment  les  lettres  de  Théodore  à 
Mme  de  Pereira  —  l'indignation  que  ressentait  le  vieux  Kôrner,  les 
conseils  qu'il  donnait  à  son  fils  et  où  se  mêlent  le  père  et  le  patriote,  les 
avis  courageux  qu'il  donnait  au  peuple  allemand  dans  ses  Deutsch- 
lands  Hoffnungen,  etc.  Tout  cela,  je  le  sais  bien,  se  trouve  dans  le  livre 
de  M.  J.,  mais  perdu  et  comme  noyé  au  milieu  des  lettres  de  Théodore, 


3  14  REVUE   CRITIQUE 

de  Fœrster  et  d'autres.  Le  loyal  et  savant  Saxon  est  ainsi  éclipsé  par 
tout  son  entourage  ;  pourquoi  M.  J.  n'a-t-il  pas,  au  moins,  analysé  et 
apprécié  ses  ouvrages  et  opuscules,  au  lieu  de  n'en  donner  ordinaire- 
ment que  le  titre  ?  Il  renvoie,  dans  les  dernières  lignes  de  son  volume,  à 
la  publication  récente  de  M.  Ad.  Stern  (C.  G.  Kôrners  gesammelte 
Schriften.  Leipzig,  Grunow)  ;  mais  le  devoir  du  biographe  n'est-il  pas 
de  joindre  au  récit  de  la  vie  de  son  héros  l'appréciation  de  ses  œuvres  ? 
L'ouvrage  de  M.  J.  a  cependant  une  assez  grande  valeur  '  ;  les  docu- 
ments qu'il  reproduit  sont  intéressants;  quelques-uns  sont  tirés  des 
revues  et  de  recueils  peu  connus;  d'autres,  appartenant  au  Kornermu- 
seum  (papiers  de  Fœrster),  à  deux  familles  de  Berlin,  Streckfuss  et 
Parthey,  et  à  M.  Ulrich,  sont  inédits;  on  remarquera  surtout  les  juge- 
ments que  Kôrner  a  portés  sur  Schiller,  Gœthe  et  les  écrivains  de  son 
temps,  la  lettre  dramatique  où  Fœrster  raconte  que,  la  nuit,  dans  les 
rues  de  Dresde,  au  milieu  d'un  tourbillon  de  neige,  il  a  indiqué  à  Na- 
poléon, revenant  de  sa  désastreuse  campagne  de  Russie,  la  maison  de 
l'ambassadeur  français,  M.  de  Serra  ~,  et  la  lettre  où  le  même  Fœrster 


i.  P.  217,  ligne  5,  lire  nach  ihrem  (et  non  «  nach  ihren  »). 

2.  P.  258,  déjà  imprimé  dans  la  Deutsche  Pandora  (Stuttgart,  1840,  I,  pp.  3-86). 
«  A  mon  écriture  tremblante  tu  reconnaîtras  dans  quelle  agitation  je  t'écris,  et  je 
me  demande  encore  si  ce  que  j'ai  vu  était  une  illusion  de  la  nuit  ou  la  réalité.  Il 
était  une  heure  du  matin  ;  je  courais  vers  le  pont  de  l'Elbe,  à  pas  rapides,  poussé 
par  un  tourbillon  de  neige  ;  car,  comme  tu  sais,  je  demeure  dans  la  Ville  Neuve. 
Devant  la  maison  du  docteur  Segert,  j'entends  des  jurons  en  allemand  et  en  français; 
un  postillon  soufflait  dans  son  cor  comme  s'il  y  avait  le  feu.  Malgré  la  bourrasque 
je  m'avance  curieusement  et  je  vois  l'ami  Segert  en  robe  de  chambre  et  en  bonnet 
de  nuit,  regardant  à  la  fenêtre;  il  criait  :  «  Ce,  n'est  pas  che\  moi,  moi  je  suis  le 
docteur  Segert  et  vous  cherche^  M.  Serra  ».  Il  ajouta  en  allemand,  mais  vertement 
et  à  sa  façon  :  «  Que  diable,  laissez-moi  tranquille  pendant  la  nuit  et  n'exigez  pas 
que  j'aille  faire  le  métier  de  messager  par  vingt-cinq  degrés  de  froid!  »  11  ferma  la 
fenêtre,  et  le  bonnet  de  nuit  disparut.  Alors  du  traîneau,  on  m'appela,  et  comme  je 
savais  déjà  ce  que  demandaient  les  voyageurs,  je  dis  :  «  N'est-ce  pas  ?  Vous  cherche^ 
l'hôtel  de  l'ambassadeur  français,  M.  de  Serra?  Suivez-moi  !  »  C'était  ce  qu'ils 
désiraient,  et  comme  Serra  demeure  juste  au  coin  dans  la  Kreuzgasse  au  palais  Loos, 
j'arrivai  bientôt,  suivi  du  traîneau,  à  l'endroit  souhaité.  Aussitôt  un  domestique  ou 
quelque  esprit  officieux  se  dégagea  des  chancelières  et  agita  avec  violence  la  sonnette 
de  l'ambassadeur,  comme  s'il  appartenait  lui-même  à  la  maison.  Le  portier  ouvrit; 
il  y  avait  encore  de  la  lumière  en  haut,  et  durant  ce  temps  deux  autres  Moines 
bourrus,  tout  emmiloufnés,  étaient  sortis,  dans  leurs  peaux  de  loup,  des  chanceliè- 
res. Le  premier  était  un  homme  vigoureux,  imposant,  mais  il  avait  les  mains  et  les 
pieds  si  raides  et  si  gelés  qu'il  s'efforçait  vainement  de  soutenir  et  d'aider  à  descen- 
dre son  camarade  encore  plus  gauche.  A  la  fois  par  complaisance  et, par  curiosité,  je 
m'approchai  et  aussitôt  l'homme  de  neige,  tout  froid,  me  met  son  gant  sur  l'épaule; 
il  me  sembla  qu'un  ours  blanc  m'avait  touché  de  sa  patte  ;  le  gant  tomba,  mais  je 
soutins  l'homme  de  mon  bras  et  le  conduisis  à  la  porte.  Celle-ci  s'ouvrit  ;  deux  do- 
mestiques avec  des  bougies,  l'ambassadeur  lui-même,  un  candélabre  dans  la  main, 
vinrent  au  devant  de  nous;  la  lumière  tomba  en  plein,  comme  un  éclair,  sur  le 
visage  de  l'étranger  dont  la  main  me  retenait  encore,  mais  on  ne  voyait  que  ses 
yeux  et  son  nez.  Je  les  reconnus  aussitôt  ces  étoiles  de  feu,  que  j'avais  vues  au 


d'histoire  et  de  LITTÉRATURE  3  1  5 

écrit  qu'il  a  rencontré  à  Meissen  Gœthe,  coiffé  d'une  casquette  militaire 
et  enveloppé  dans  un  manteau  de  général  russe  à  collet  rouge  (pp.  2g3- 
295).  On  a  vivement  critiqué  la  tiédeur  apparente  de  Goethe  pendant  la 
«  guerre  de  la  délivrance  »  ;  M.  J.  raconte  même,  d'après  Arndt,  que 
Gœthe  avait  dit  alors  au  vieux  Kôrner  :  «  Secouez  vos  chaînes,  vous  ne 
les  briserez  pas,  Napoléon  est  trop  grand  pour  vous!  »  (p.  291),  que 
Kôrner  même  trouvait  Gœthe  très  froid  et  fermé  à  toute  espérance, 
etc.  J  ;  le  jeune  Fœrster  croyait  au  patriotisme  de  Gœthe  ;  il  s'approcha 
de  la  voiture  et  pria  le  grand  poète,  dont  il  regardait  la  rencontre  comme 
un  heureux  présage,  de  bénir  ses  armes  et  celles  de  ses  compagnons,  les 
chasseurs  noirs.  «  Je  lui  tendis  fusil  et  couteau  de  chasse,  il  leva  la  main 
et  dit  :  «  Allez  avec  Dieu,  et  que  le  succès  soit  accordé  à  votre  courage 
allemand  »  ;  nous  criâmes  encore  une  fois  :  «  Vive,  vive  Gœthe,  le  poète 
des  poètes  »,  et  il  partit  en  nous  faisant  un  salut...  En  chemin,  un  vif 
débat  s'engagea  sur  Gœthe  entre  mes  camarades  et  moi.  Ils  pensaient 
que  Gœthe  n'était  pas  un  poète  populaire,  le  poète  de  la  liberté  et  de  la 
patrie.  Mais  je  leur  répondis  :  «  Je  ne  connais  pas  d'enthousiasme  plus 
élevé  pour  la  liberté  que  celui-  d'Egmont  ;  je  ne  connais  pas  de  nature 
plus  vigoureusement  allemande  que  Gœtz  de  Berlichingen  ;  et  si  vous 
voulez  savoir  ce  qu'il  faut  à  l'Allemagne,  souvenez-vous  des  beaux  vers 
à'Hermann  et  Dorothée  »,  et  il  cite  le  passage  où  Hermann  déclare 
qu'il  veut  «  mourir  pour  la  patrie  et  donner  aux  autres  un  digne  exem- 
ple ».  —  Il  faut  louer  la  peine  que  M.  Jonas  a  prise  pour  rassembler 
toutes  les  informations  qui  remplissent  son  livre,  louer  le  soin  avec 
lequel  il  a  lu  tout  ce  qui  se  rapporte  à  son  sujet,  louer  sa  consciencieuse 
exactitude  et  le  choix  des  lettres  qu'il  a  reproduites,  car  il  a  donné  les 
plus  instructives  et  les  plus  curieuses,  et  quelques-unes  n'étaient  pas 
connues  avant  sa  publication.  Néanmoins,  son  livre  est  moins  une 
biographie  qu'un  recueil  de  lettres  ;  il  renferme  des  matériaux  abon- 


printemps  dernier  briller  si  souvent  de  très  près;  —  c'était  l'empereur  Napoléon 
dont  la  main  était  dans  la  mienne,  et  je  puis  dire  maintenant  que  le  destin  de  l'Eu- 
rope s'est  reposé  une  fois  sur  mes  épaules.  Ami,  quelles  pensées  se  pressent  main- 
tenant dans  mon  cerveau  ;  il  me  semble  avoir  un  mauvais  rêve,  comme  dans  un 
accès  de  fièvre.  Le  journal  avec  son  vingt-neuvième  et  fatal  bulletin  est  là  sur  ma 
table;  la  Grande  Armée  est  anéantie,  entièrement  anéantie;  hier  seulement  nous 
avons  reçu  la  nouvelle.  N'ai-je  pas  cru  tout  à  l'heure  tirer  de  mon  manteau  un 
poignard,  et  en  criant  :  «  Europe,  je  te  donne  la  paix  ».  l'enfoncer  dans  le  cœur  de 
l'ennemi  mortel  de  la  patrie  et  de  la  liberté?  Mais  non,  Brutus,  je  ne  t'envie  pas  ton 
action.  César,  tu  tomberas,  mais  non  sous  la  main  lâche  du  meurtrier  ;  nous  voulons 
te  combattre  en  loyaux  chevaliers,  te  donner  selon  l'usage  la  juste  mesure  et  parta- 
ger également  avec  toi  le  vent  et  le  soleil;  ainsi  s'accomplira  sur  toi  le  vrai  juge- 
ment de  Dieu!  » 

1.  Voir  encore  la  lettre  de  Mme  Kolhrausch  à  Mm«  Parthey  (p.  292),  d'après  laquelle 
Gœthe,  ce  «  grand  poète  si  peu  allemand  »  aurait  alors  porté  très  ostensiblement 
l'ordre  de  la  Légion  d'honneur,  ce  «  signe  de  honte  »  et  reçu  des  soufflets  de 
Golloredo  ;  tout  cela  n'est  évidemment  que  Klatscherei. 


3l6  REVUE    CRITIQUE 

dants,  mais  trop  peu  mis  en  œuvre  ;  on  lui  appliquera  ce  mot  familier  à 
la  critique  de  son  pays  :  Ein  gutes,  aber  nicht  gut  angelegtes 
Buch. 

A.  C. 


CHRONIQUE 


FRANCE.  —  M.  Ph.  Tamizey  de  Larroque  a  fait  paraître  la  5e  série  de  ses  Corres- 
pondants de  Peires.c;  cette  5e  série  renferme  des  lettres  inédites  de  Claude  de 
Saumaise  écrites  de  Dijon,  de  Paris  et  de  Leyde  à  Peiresc,  162 0-1637.  (Dijon,  Daran- 
tière.  ln-8°,  182  p.  Extrait  des  Mémoires  de  l'Académie  de  Dijon;  tiré  à  120  exem- 
plaires). On  ne  possède  qu'un  très  petit  nombre  des  lettres  que  le  grand  savant 
bourguignon  écrivit  au  grand  savant  provençal;  le  recueil  de  Clément  (Leyde, 
r656)  ne  contient  que  cinq  lettres  de -Saumaise  à  Peiresc.  M.  T.  de  L. ,  après  de 
longues  recherches,  en  a  seulement  retrouvé  quinze  autres  qui  n'avaient  pas  encore 
été  publiées  et  qui  proviennent  toutes  du  département  des  manuscrits  de  la  Biblio- 
thèque Nationale;  il  n'a  rien  découvert  à  la  bibliothèque  Méjanes,  à  Aix,  et  à  la  bi- 
bliothèque Inguimbert,  à  Carpentras,  et  cependant,  que  de  lettres  ont  dû  être  échan- 
gées entre  Saumaise  et  le  «  procureur-général  de  la  littérature  »  du  2  février  1620, 
date  du  premier  document  inédit  publié  par  M.  T.  de  L.  au  22  janvier  i633,  date  du 
second  de  ces  mêmes  documents  ?  Les  lettres  qui  voient  le  jour,  grâce  à  M.  T.  de  L. , 
sont  remarquables  par  l'érudition  que  Saumaise  se  plaît  à  y  étaler  ;  «  c'est  avec  une 
sorte  de  coquetterie  qu'il  déploie  devant  Peiresc  toutes  les  ressources,  tout  le  luxe 
de  son  prodigieux  savoir;  quelques-unes  de  ses  lettres  sont  de  véritables  disserta- 
tions »,  on  sait  d'ailleurs  la  fécondité  de  Saumaise  duquel,  disait  Gabriel  Naudé, 
nous  voyons  tous  les  mois  quelques  gros  livres.  Dans  un  appendice  (pp.  96-176) 
M.  T.  de  L.  joint  à  ces  lettres,  qui  «  traitent  des  sujets  généralement  bien  ardus  », 
des  lettres  d'un  tout  autre  caractère,  adressées  par  Saumaise  à  son  ami  Jacques  du 
Puy;  ces  épîtres  familières  effleurent  les  matières  les  plus  diverses;  Saumaise  y  re- 
trace ses  aventures  de  voyage  ou  ses  querelles,  ses  «  coups  de  fleuret  »  avec  Daniel 
Heinsius,  il  y  cause  des  événements  du  jour,  de  la  guerre  en  Hollande  et  en  Bourgo- 
gne, de  Descartes,  de  Grotius,  de  Ronsard  (dont  il  dit,  à  propos  de  l'ode  à  la  louange 
de  l'Hospital  :  «  noz  poètes  d'aujourdhuy  qui  le  desprisent  se  mordroient  bien  les 
ongles  avant  que  de  pouvoir  monter  leur  chanterelle  si  hault  sans  la  rompre  »  (p.  i5o), 
etc.  On  remarquera  parmi  ces  lettres  souvent  assaisonnées  de  malice  et  de  sel  bour- 
guignon, et  que  M.  T.  de  L.  considère  justement  «  comme  des  fragments  d'une  at- 
tachante autobiographie  »,  la  plaisante  histoire  du  Croate  qui  se  fait  élire  à  l'abbaye 
de  Citeaux  général  de  l'ordre  par  ses  camarades  assemblés  en  chapitre  (pp.  14D- 
14b),  le  récit  du  séjour  de  Saumaise  à  Brielle  où  il  descend,  sans  le  vouloir,  dans 
«  le  plus  infâme  lieu  de  la  ville  »  (pp.  i58-i6i),  de  l'orgie  du  duc  de  Bouillon  et  de 
ses  hôtes  à  la  Haye  (pp-  167-168),  etc.  L'éditeur  a  mis  au  bas  des  pages  des  notes 
instructives;  il  relève  avec  soin  les  expressions  et  les  mots  rares  ou  que  le  Diction- 
naire de  Littré  et  d'autres  recueils  n'ont  pas  cités  :  circonstancié  et  particularisé 
(p.  i3),  caocerver  (p.  24),  mettre  en  cervelle  (p.  35,  <t  le  sieur  Elichman  me  met  en 
cervelle  »),  affamé  (p.  75,  lettre  «   qui  ne  peut  estre  qu'affamée  »,  brève),  vanner 


D'HISTOIRE    KT    DE    LITTÉRATURK  3  I7 

(p,  98  «  où  il  est  mené  et  vanné  comme  il  fault  »),  supinité  (p.  gp,  dans  le  sçns  de 
stupidité),  emballe  (p.  101  «  qui  servait  d'emballé  et  d'enveloppe  »),mauvaistie  (p.  106 
«  la  mauvaistie  de  l'air  »),  bigearre  (p.  n5,  qu'on  employait  alors  aussi  bien  que 
«  bizarre  »),  carrioler  (p.  i38,  «  une  femme  et  des  petitz  enfants,  qu'il  me  fault  car- 
rioler  avec  moy  »),  p ieça  (p.  147,  il  y  a  pièce,  il  y  a  longtemps),  adultérines  (p.  i5i, 
il  est  question  de  certaines  odes  d'Horace),  odelette  (p.  i56,  «  le  mot  avait  été  em- 
ployé au  xvme  siècle,  dit  M.  T.  de  L.  et  au  xvie  siècle;  il  nous  manquait  un  exemple 
pour  le  xvne  siècle;  désormais  la  série  est  complète  »),  masticoter  (p.  i58,  «  qui 
masticotoit  un  peu  de  françois  »,  damoy selle  (p.  166,  dans  le  sens  de  suivante),  de- 
culper  (p.  175).  Dans  une  note,  M.  T.  de  L.  remercie  deux  collaborateurs,  M.  Alfred 
Jacob,  qui  s'est  occupé  de  la  révision  de  tout  le  grec  contenu  dans  les  lettres  de  Sau- 
maise  et  M.  Léopold  Delisle,  qui  lui  a  fourni  une  notice  sur  l'histoire  des  papyrus 
mentionnés  dans  une  des  lettres  de  l'érudit  bourguignon  à  Du  Puy;  cette  notice 
«neuve  et  importante  »  est  reproduite  à  la  fin  du  volume  (pp.  177-182). —  Nous  nous 
associons  volontiers  au  vœu  que  forme  M.  T.  de  L.  en  offrant  son  livre  au  public; 
il  souhaite  qu'un  vaillant  chercheur  publie  un  recueil  complet  des  lettres  inédites  de 
Saumaise  ;  «  on  en  trouverait  beaucoup  à  l'étranger,  notamment  à  la  bibliothèque  de 
l'Université  de  Leyde,  mais  on  en  trouverait  plus  encore  dans  les  collections  de  la 
Bibliothèque  nationale.  Si  en  tête  de  ce  recueil  était  placée  sa  biographie  inédite, 
rédigée  par  son  compatriote  Philibert  de  la  Mare  (fonds  Bouhier,  85),  on  comblerait 
les  vœux  de  tous  les  amis  de  Saumaise  ». 

ALLEMAGNE.  —  La  librairie  Teubner,  de  Leipzig,  publiera  prochainement  un  Lexi- 
con  Pindaricum,  de  M.  Joh.  Rumpel;  une  édition  des  Enneades  de  Plotin,  par  M.  R. 
Volkmann  (en  deux  volumes)  ;  un  recueil  destiné  aux  conférences  universitaires  de 
philologie  latine  et  renfermant  un  choix  de  documents  du  vieux  latin,  de  l'osque  et  de 
l'ombrien,  par  M.  Engelbert  Schneider  (Altitalische  Sprachdenkmœler  %um  Ge- 
brauch  fur  Vorlesungen)  ;  une  édition  complète  d'Aristophane,  en  trois  volumes, 
par  M.  Ad.  de  Velsen  (1er  vol.  :  Prolégomènes,  Acharniens,  Chevaliers,  Nuées  ;  — 
II«vpl.  :  Guêpes,  Paix,  Oiseaux,  Lysistrata;  --  IIIe  vol.  :  Thesmophoriazusae,  Gre- 
nouilles, Assemblée  des  femmes,  Plutus.) 

—  Un  Américain,  M.  W.  M.  Griswold,  sous-bibliothécaire  de  la  Bibliothèque 
nationale  des  Etats-Unis(Library  of  Congress)  à  Washington,  vient  de  publier,  à 
Bangor,  dans  l'état  du  Maine,  chez  l'éditeur  O.P.  Index  (nom  prédestiné)  une  ta- 
ble des  matières  de  la  Deutsche  Rundschau,  du  Ier  au  XXIXe  volume  ((Autoren  und 
Sachregister  der  deutschen  Rundschau) .  Il  a  en  treize  pages,  chacune  de  trois  colon- 
nes, donné  complètement  le  sommaire  de  14,000  pages;  son  travail,  dit  la  deut- 
sche  Rundschau,  à  la  fois  étonnée  et  ravie  de  cette  table  des  matières  qui  lui  arrive 
de  l'autre  côté  de  l'Océan,  son  travail  est  un  modèle  de  soin  et  d'exactitude,  et  en 
son  genre,  une  petite  œuvre  géniale;  c'est  un  guide  absolument  sûr  et  qui  nous 
mène  sans  erreur  possible.  Il  paraît  que  M.  Griswold  s'est  fait  un  nom  en  Améri- 
que par  les  tables  de  matières,  qu'il  a  déjà  publiées,  de  la  Nation,  de  V Atlantic,  de 
Y  International  Review,  et  d'autres  revues  des  Etats-Unis. 

—  La  librairie  Bruns,  de  Minden,  publie  une  deuxième  édition  de  la  traduction 
allemande  de  VHistoire  de  Napoléon  Ier,  de  Lanfrey  ;  cette  traduction  est  due  à 
M.  C.  von  Glûmer  et  précédée  d'une  introduction  d'Ad.  Stahr;  mais  elle  a  été  revue 
par  M.  C.  von  Kalckstein  qui  ajoutera  aux  cinq  volumes  déjà  parus  deux  autres 
volumes,  le  VIe  et  le  VIP,  destinés  à  terminer  l'ouvrage,  malheureusement  inachevé, 
de  l'historien  français. 

HOLLANDE.  —  Il  paraît  à  Amsterdam,  chez  Fr.  Muller,  un  nouveau  journal  con- 
sacré à  l'histoire  des  beaux-arts,  Oud  Holland,  rédigé  par  MM.  de  Vries  et  de  Roe- 


3l8  REVUE  CRITIQUE 

ver;  les  rédacteurs  veulent  faire  pour  Amsterdam  ce  que  M.  van  der  Willigen  a 
fait  pour  Harlem;  la  ire  livraison  contient  des  informations  inédites  sur  la  vie  et 
les  eaux-fortes  de  Rembrandt,  une  notice  sur  Philippe  de  Koning,  la  reproduction 
d'un  portrait  jusqu'ici  inconnu  du  navigateur  Willem  Barents,  des  fac-similés  d'es- 
tampes rares  ou  de  signatures,  etc.  (un  fascicule  par  trimestre;  prix  de  l'abonnement 
annuel,  8  à  10  florins). 

ITALIE. —  Il  se  publie  à  Milan  (Ottino)une  édition  des  œuvres  complètes  de  Zen- 
drini  ;  le  Ier  vol.  renferme  une  introduction  de  Tullo  Massarini,  Bernardino  Zen- 
drini  nella  vita  e  nell'arte,  et  le  2e  vol.,  des  essais  de  Zendrini  (Giulio  Cesare,  Ne- 
rone  artista,  Petrarca  e  Laura,  Lodovico  Ariosto,  etc.);  cinq  autres  volumes  (Poésie; 
Il  cancanière  di  Enrico  Heine,  seguito  da  uno  studio  su  Heine  e  i  suoi  traduttori; 
Epistolaria,  avec  une  étude  de  M.  Rizzo),  doivent  paraître  prochainement. 

—  La  traduction  italienne,  due  à  M.  RafFaele  Marino,  de  l'ouvrage  de  Gregoro 
vius,  Atenaide,  storia  di  una  impératrice  bi^antina,  versione  del  tedesco,  —  ouvrage 
dont  notre  recueil  rendra  compte  prochainement  —  a  été  condamnée  et  proscrite  par 
un  décret  de  la  congrégation  de  l'Index  du  10  juillet  en  même  temps  que  YEcclé- 
siaste  traduit  de  l'hébreu  avec  une  étude  sur  l'dge  et  le  caractère  du  livre,  de 
M.'  Ernest  Renan. 

—  Le  cardinal  Pitra  a  publié  dans  le  VIII*  volume  des  Analecta  sacra  Spicilegio 
Solesmensi parafa  (Jouby  et  Roger,  in-8°,  xxih  et  614  pp.)  les  Nova  sanctae  Hilde- 
gardis  opéra  ou  œuvres  inédites  de  Sainte  Hildegarde;  ce  sont  la  deuxième  partie  de 
grand  ouvrage  mystique  de  la  sainte  (l'ouvrage  comprenant  trois  parties,  i"  Scivias, 
pour  «  scito  vias  [Domini]  »,  imprimé  en  i5i3;  20  Liber vitae  meritorum;  3°  Liber 
divinorum  operum,  publié  par  Mansi  en  1761  dans  la  réimpression  des  «  Miscella- 
nea,  de  Baluze);  —  un  commentaire  sur  les  Evangiles,  145  lettres  nouvelles,  des 
pièces  liturgiques,  une  compilation  médicale  tirée  par  le  cardinal  d'un  manuscrit 
de  Copenhague.  L'appendice  renferme  de  longs  extraits  d'un  poème  rythmique  com- 
posé par  Guibert  de  Gemblours  en  l'honneur  de  saint  Martin  et  contenant  un  éloge 
de  l'abbaye  Marmoutiers  et  de  l'église  Saint-Martin  de  Tours  (ms.  de  la  bibliothèque 
royale  de  Bruxelles.) 

RUSSIE.  —  Nous  avons  rendu  compte,  dans  notre  numéro  du  3  juillet  (p.  19), 
d'un  recueil  de  morceaux  choisis  des  auteurs  français  destiné  aux  lecteurs  du  Portu- 
gal. M.  J.  Bastin,  dont  l'on  connaît  les  nombreux  travaux  sur  la  grammaire  fran- 
çaise, nous  envoie  un  recueil  semblable,  intitulé  Morceaux  de  lecture  et  exercices 
de  mémoire  et  de  traduction  en  vers  et  en  prose  ou  Etude  pratique  de  la  langue  fran- 
çaise (Saint-Pétersbourg,  Trenké  et  Fusnot.  In-8",  xiv  et  242  -]-  94  p.).  Ce  recueil 
comprend  des  Morceaux  de  lecture  en  prose  (pp.  1-190)  et,  sous  le  titre  d'Exercices 
de  mémoire,  des  morceaux  de  poésie  (pp.  191-242);  il  est  suivi  d'un  Tableau  des 
verbes  irréguliers  et  d'un  vocabulaire  français-russe.  L'ouvrage  de  M.  Bastin  est  un 
des  livres  employés  en  Russie  dans  les  classes  des  gymnases  (de  la  quatrième  à  la 
septième;  dans  la  huitième  ou  dernière  année  d'études,  on  laisse  de  côté  les  mor- 
ceaux choisis,  pour  lire  exclusivement  un  classique  français).  Le  recueil  de  M.  Bas- 
tin est  arrivé  à  sa  troisième  édition  ;  il  tient  compte  des  changements  orthographi- 
ques admis  par  l'Académie  française  dans  la  septième  édition  de  son  dictionnaire. 
Nous  pensons,  comme  l'auteur,  que  ce  choix  de  morceaux,  fait  avec  goût  et  compé- 
tence, «  sera  lu  et  étudié  avec  plaisir  et  profit  par  la  jeunesse  russe  »,  à  laquelle  il 
s'adresse. 

—  M.  Tikhourakov,  de  Moscou,  doit  publier  prochainement  une  Histoire  du  théâ- 
tre russe  de  1672  a  ij25 ;  cette  Histoire  renfermera  un  choix  d'œuvres  dramati- 
ques, originales  ou  traduites,  tirées  des  bibliothèques  et  des  collections  russes;  cha- 


D'HISTOIRE    ET   DE    LITTERATURE  3lO, 

que  pièce  reproduite  sera  accompagnée  de  notes  relatives  à  l'origine  de  l'œuvre 
et  ses  destinées;  dans  une  introduction  détaillée,  l'auteur  exposera  l'histoire  du 
théâtre  russe  pendant  les  cinquante  premières  années  de  son  existence. 

—  M.  Maxime  Kovalevsky,  de  Moscou,  travaille,  d'après  des  documents  qu'il  a 
découverts  au  Record  Office  et  au  British  Muséum,  à  une  Histoire  des  rapports  de 
V Angleterre  et  de  la  Russie  au  temps  de  Pierre  le  Grand. 


ACADEMIE   DES   INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  22  septembre  1882. 

M.  R.  Mickiewicz,  employé  au  bureau  de  bienfaisance  du  xix°  arrondissement,  si- 
gnale, dans  une  maison  de  la  rue  d'Allemagne,  n°  177,  deux  dalles  qui  portent  des 
fragments  d'inscription.  L'une,  placée  dans  le  couloir  d'entrée  de  la  maison,  est  cou- 
verte de  chiffres  disposés  en  forme  de  table  de  Pythagore;  l'autre,  dans  la  cour, 
porte  des  lettres  aujourd'hui  presque  effacées.  Ces  deux  pierres,  au  rapport  du  gé- 
rant de  la  maison,  ont  été  trouvées  dans  le  sol  il  y  a  quelques  années.  M.  Mickiewicz 
n'a  pu  se  rendre  compte  de  la  nature  des  inscriptions  et  ignore,  par  conséquent,  si 
elles  méritent  d'arrêter  l'attention,  mais  il  a  cru  que,  dans  le  doute,  il  était  bon  de 
les  signaler  aux  personnes  qui  pourraient  être  tentées  de  les  examiner. 

M.  Oppert  commence  la  lecture  d'un  mémoire  intitulé  :  le  Prétendu  tombeau  de 
Cyrus.  11  s'agit  du  monument  dont  il  a  été  question  dans  deux  communications 
précédentes  faites  à  l'Académie  par  M.  Dieulafoy,  ingénieur,  et  qui  se  trouve  à  Mur- 
ghâb,  au  nord  de  Persépolis.  On  a  voulu  reconnaître  dans  ce  monument  le  tombeau 
de  Cyrus,  et,  par  suite,  dans  Murghâb,  l'ancienne  ville  de  Pasargade,  où  l'histoire 
rapporte  que  se  trouvait  ce  tombeau.  On  alléguait  à  l'appui  de  cette  opinion  l'exis- 
tence, sur  le  territoire  de  Murghâb,  de  cinq  piliers,  visiblement  contemporains  du 
tombeau,  qui  portent  chacun  un  génie  perse,  avec  cette  inscription  en  trois  langues  : 
«  Je  suis  Cyrus,  le  roi  achéménide.  »  M.  Oppert  fait  remarquer  que  cet  argument 
est  insuffisant;  ces  inscriptions  prouvent  seulement  que  le  monument  a  été  élevé  par 
ordre  de  Cyrus,  mais  il  peut  renfermer  la  sépulture  d'une  personne  de  sa  famille 
aussi  bien  que  la  sienne  propre.  Or,  la  forme  du  tombeau,  terminé  en  dos  d'âne,  in- 
dique la  sépulture  d'une  femme.  C'est  un  usage  reçu  en  Orient,  depuis  une  très 
haute  antiquité,  de  donner  cette  forme  aux  tombeaux  des  femmes,  tandis  que  les  sé- 
pultures des  hommes  se  terminent  par  une  couverture  ronde  ou  carrée.  Les  habitants 
du  pays,  aux  temps  modernes,  ne  s'y  sont  pas  trompés;  ils  ont  donné  au  monument 
de  Murghâb,  le  nom  de  «  tombeau  de  la  mère  de  Salomon  ».  M.  Dieulafoy  a  pensé 
qu'il  y  avait  lieu  de  tenir  compte  de  cette  indication  traditionnelle,  en  n'y  changeant 
que  le  nom  propre,  et  d'admettre  que  la  personne  ensevelie  à  Murghâb  devait  être  la 
mère  de  Cyrus,  Mandane.  M.  Oppert  ne  trouve  pas  cette  conjecture  suffisamment 
fondée  et  serait  plutôt  disposé  à  penser  à  Cassandane,  femme  de  Cyrus.  En  tout  cas,  il 
relève  dans  la  communication  de  M.  Dieulafoy  un  nouvel  argument  contre  l'identifi- 
cation du  monument  avec  le  tombeau  de  Cyrus  lui-même.  Ce  tombeau  a  été  décrit  par 
Arrien  et  Strabon,  et  le  témoignagede  ces  auteursne  concorde  aucunement  avec  l'état 
de  l'édifice  de  Murghâb,  tel  que  l'a  vu  M.  Dieulafoy.  —  Dans  la  suite  de  ce  mémoire, 
M.  Oppert  se  propose  d'examiner,  au  point  de  vue  géographique,  la  situation  de  Pa- 
sargade et  de  montrer  qu'il  est  impossible  de  placer  cette  ville  au  lieu  où  se  trouve 
aujourd'hui  Murghâb. 

M.  Barbier  de  Meynard  présente,  au  nom  de  M.  le  baron  d'Avril,  ministre  pléni- 
potentiaire de  France  à  Santiago-de-Chili,  le  second  volume  des  œuvres  de  feu  An- 
dré Bello,  publiées  aux  frais  du  gouvernement  chilien,  et  communique  une  notice 
de  M.  d'Avril  sur  les  études  de  Bello  relatives  au  poema  del  Cid,  contenues  dans  ce 
volume.  11  résulte  de  cette  notice  que,  dans  ses  travaux  sur  le  poème  du  Cid,  Bello 
s'est  surtout  occupé  de  faciliter  l'intelligence  du  texte  qu'il  étudiait,  qu'il  a  fait  œuvre 
de  vulgarisateur  plus  que  de  critique  et  a  écrit  pour  les  lettrés  plutôt  que  pour  les 
érudits.  Cette  tendance  de  son  œuvre  ne  l'a  pas  empêché  d'y  montrer  les  quali- 
tés d'un  véritable  philologue,  et  on  doit  savoir  gré  au  gouvernement  du  Chili  d'a- 
voir donné  au  public  cette  œuvre  remarquable. 

M.  Maspero  rend  compte  des  fouilles  exécutées  sous  sa  direction  en  Egypte  depuis 
un  an.  —  Au  sud  de  Gizeh,  on  a  commencé  à  fouiller  deux  pyramides  dont  l'inté- 
rieur n'avait  pas  encore  été  exploré,  du  moins  depuis  l'antiquité.  Ces  pyramides,  dont 
une  partie  a  été  démolie  à  une  époque  inconnue,  ont  dû  avoir  jadis  des  dimensions 
égales  à  celles  de  la  grande  pyramide  de  Gizeh.  On  n'est  encore  parvenu  qu'au  tiers 


320  REVUE    CRITIQUE   D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

de  la  distance  à  parcourir  pour  arriver  à  l'intérieur.  Le  travail  des  explorateurs  est 
rendu  très  difficile  par  la  solidité  exceptionnelle  de  la  construction,  composée  tout 
entière  de  gros  blocs  et  non,  comme  ailleurs,  d'un  noyau  de  moellons  entouré  d'un 
revêtement  de  gros  blocs.  —  Plus  au  sud,  on  a  fouillé  une  pyramide  de  briques.  Une 
tranchée  a  été  pratiquée  depuis  le  sommet  jusqu'à  la  base.  On  a  reconnu  qu'aucune 
chambre  ne  se  trouve  à  l'intérieur  de  la  pyramide.  On  suppose  qu'il  doit  y  en  avoir 
une  au-dessous,  mais  il  semble  qu'il  n'existe  pas  de  couloir  pour  y  parvenir,  ce  qui 
serait  un  fait  sans  précédent.  —  À  Kafrlitch,  on  a  examiné  une  pyramide  de  pierre 
en  partie  démolie.  On  a  constaté  que  cette  démolition  était  le  fait  des  Romains,  qui 
ont  pris  des  pierres  à  la  pyramide  pour  la  construction  d'un  fort  élevé  par  eux  dans 
le  voisinage.  —  A  Meydoun  est  une  pyramide  attribuée  au  roi  Snefo.  On  a  reconnu 
à  l'intérieur  la  présence  d'une  masse  de  roc  naturel  qui  en  remplit  la  plus  grande 
partie.  Ce  n'est  donc  pas  une  pyramide  proprement  dite,  construite  de  main  d'homme 
depuis  la  base  jusqu'au  sommet,  c'est  un  rocher  recouvert  d'un  revêtement  en  forme 
de  pyramide.  Il  n'y  a  pas  de  chambre  à  l'intérieur.  —  Non  loin  de  là  est  un  groupe 
de  tombeaux  presque  tous  inachevés.  M.  Maspero  explique  ainsi  ce  fait.  Un  roi  avait 
choisi  ce  lieu  pour  sa  sépulture  et  avait  commencé  à  y  construire  son  tombeau.  Les 
courtisans,  suivant  son  exemple,  se  firent  construire  des  tombeaux  autour  de  celui 
du  maître.  Mais  celui-ci  mourut,  sans  doute,  avant  l'achèvement  de  la  nécropole  et 
son  successeur  choisit  pour  sa  propre  sépulture  un  autre  emplacement.  Ceux  qui 
avaient  commencé  leurs  tombeaux  auprès  de  celui  du  roi  mort  les  abandonnèrent 
alors  pour  s'en  faire  faire  d'autres  à  1  endroit  préféré  par  le  nouveau  roi.  C'est  par 
une  raison  analogue  qu'il  nous  est  parvenu  deux  tombeaux,  mais  ceux-là  complète- 
ment achevés  l'un  et  l'autre,  d'un  même  personnage,  le  roi  Ai;  l'un  avait  été  cons- 
truit par  Ai  quand  il  était  encore  simple  fonctionnaire,  sous  le  règne  d'Améno- 
phis  IV,  et  près  du  tombeau  de  ce  roi  ;  l'autre  fut  élevé  quand  Aï  fut  devenu  roi  à  son 
tour,  dans  un  emplacement  de  son  choix.  —  Le  gouvernement  égyptien  a  décidé 
d'opérer  le  déblaiement  complet  du  temple  de  Louqsor.  Les  travaux  commenceront 
prochainement.  Ce  sera  une  opération  considérable,  car  il  faudra  déplacer  une  popu- 
lation d'environ  trois  mille  personnes,  qui  habitent  aujourd'hui  des  logements  cons- 
truits parmi  les  ruines.  —  A  Thèbes,  on  a  reconnu  un  assez  grand  nombre  de  puits, 
plus  ou  moins  profonds,  qui  ne  mènent  à  rien.  M.  Maspero  pense  qu'ils  ont  été 
creusés  uniquement  pour  égarer  et  dépister  les  chercheurs  et  protéger  ainsi  la  ca- 
chette où  avaient  été  renfermés  un  grand  nombre  de  sarcophages  royaux,  et  qui  n'en 
a  pas  moins  été  mise  au  jour,  malgré  cette  précaution,  l'année  dernière.  Au  fond  d'un 
autre  puits,  très  profond  (35  m.),  on  a  trouvé  un  très  beau  sarcophage  couvert  d'hié- 
roglyphes. C'est  la  sépulture  de  la  reine  Nitocris,  de  la  XXVIe  dynastie.  Malgré  ce 
résultat,  M.  Maspero  est  d'avis  que  Thèbes  n'est  pas  un  point  ou  il  convienne  de 
pousser  activement  les  recherches,  à  moins  d'avoir  des  ressources  pécuniaires  très 
considérables,  qui  permettent  de  faire  une  exploration  méthodique  et  complète.  Avec 
les  ressources  modestes  dont  on  dispose  pour  le  moment,  le  succès  dans  cette  région 
est  trop  incertain.  —  Parmi  les  découvertes  curieuses  au  point  de  vue  historique, 
M.  Maspero  mentionne  celle  de  quelques  procès -verbaux  de  scellage  des  tombes  roya- 
les, gravés  à  l'entrée  de  ces  tombes,  lors  de  l'ensevelissement  de  chaque  roi.  A  côté 
de  ces  actes,  on  a  trouvé  les  sceaux  mêmes  dont  ils  relatent  l'apposition.  Il  est  à  re- 
marquer que  ces  procès-verbaux  sont  datés  de  l'année  du  règne  du  roi  dont  elles  men- 
tionnent la  sépulture.  Les  rois  étaient  donc  censés  régner  encore  après  leur  mort,  au 
moins  jusqu'au  temps  de  leurs  funérailles.  Or,  celles-ci  pouvaient  avoir  lieu  parfois 
plusieurs  mois  après  la  mort.  C'est  un  fait  dont  il  faudra  tenir  compte  pour  l'établis- 
sement de  la  chronologie  des  règnes.  —  En  dehors  du  domaine  de  l'égyptologie  pro- 
prement dite,  il  faut  mentionner  la  découverte  des  restes  d'une  église  chrétienne  du 
vie  siècle,  dans  l'île  de  Philce.  Parmi  les  pierres  employées  au  dallage  de  cette  église, 
il  s'en  trouve  qui  avaient  été  empruntées  à  l'ancien  temple  d'Isis  de  Philce,  comme  en 
font  foi  des  inscriptions  païennes  gravées  sur  quelques-unes  d'entre  elles.  —  Enfin 
des  fouilles  ont  été  faites,  sans  aucun  résultat,  à  Alexandrie,  sur  la  foi  de  deux  ha- 
bitants européens  qui  avaient  signalé  l'existence  d'un  prétendu  couloir  antique  me- 
nant à  une  série  de  tombes.  Leurs  déclarations,  confirmées  par  les  propriétaires  des 
maisons  signalées,  ont  été  reconnues  dénuées  de  tout  fondement.  C'est,  dit  M.  Mas- 
pero, une  manœuvre  que  pratiquent  volontiers  les  individus  qui  se  livrent  au  com- 
merce des  antiquités.  Les  fouilles  fournissent  à  ces  individus  1  occasion  de  se  procu- 
rer aisément  et  sans  frais  une  quantité  de  ces  menus  fragments  qu'on  trouve  partout 
où  on  creuse  la  terre  à  Alexandrie  et  qui  font  l'objet  de  leur  commerce.  C'est  pour- 
quoi ils  ne  se  font  pas  scrupule  de  provoquer  des  fouilles  par  tous  les  moyens  et 
même  par  des  révélations  fausses. 

M.  Desjardins  communique  une  lettre  de  M.  Monceaux,  membre  de  l'Ecole  fran- 
çaise d'Athènes.  Cette  lettre  annonce  la  mort  d'un  des  plus  jeunes  membres  de  l'E- 
cole, M.  Bilco,  dont  les  premiers  travaux  avaient  été  très  remarqués. 

Julien  Havet. 

„ ! — — ___ 

Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  23. 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

2lo  43  _  23  Octobre  —  1882 


Sommaire  »  21 8.  Opéra  patrum  apostolicorum  II,  p.  p.  Funk.  —  21  g.  Overbeck, 
De  l'histoire  du  Canon.  —  220.  Madvxg,  La  constitution  romaine,  trad.  par  Ch. 
Morel.  —  221.  Wille,  Philippe  de  Hesse  et  Ulric  de  Wurtemberg.  —  222.  Let- 
tres françaises  de  Scaliger,  p.  p.  Tamizey  de  Larroq.ue. —  223.  Guerrier,  Madame 
Guyon,  sa  vie,  sa  doctrine  et  son  influence.  —  Chronique.  —  Société  des  anti- 
quaires de  France.  —  Académie  des  Inscriptions. 


218.  —  Opéra  Patrum  apostolicorum.  Textum  recensuit,  adnotationibus 
criticis,  exegeticis,  historicis  illustravit,  versionem  latinam,  prolegomena,  indices 
addidit  Franc.  Xavierus  Funk,  ss.  theologite  in  universitate  Tubingense  profess. 
volumen  II.  Tubingae,  Henr.  Laupp,  1881,  in-8°,  de  lviii  et  371  pp. 

Le  second  volume  de  cette  utile  publication  vient  de  paraître.  Il  con- 
tient les  deux  épitres  de  saint  Clément  sur  la  virginité,  le  récit  de  son 
martyre,  les  Epitres  d'Ignace,  les  trois  récits  de  son  martyre,  les  frag- 
ments de  Papias,  les  passages  d'anciens  presbytres  cités  par  Irénée,  et  la 
vie  de  Polycarpe.  Ces  différents  textes  sont  accompagnés  de  notes  criti- 
ques, exégétiques  et  historiques,  placées  au  bas  des  pages,  et  sont  pré- 
cédés de  prolégomènes  étendus,  qui  en  font  connaître  les  manuscrits,  les 
éditions,  les  traductions,  etc. 

M.  Funk  a  pris  pour  modèle  le  Corpus  apologetarum  christianorum 
sœculi  secundi  de  M.  le  chevalier  de  Otto.  Son  travail  sera  d'un  grand 
secours  à  quiconque  a  besoin  d'étudier  ces  antiques  documents  de  la  lit- 
térature chrétienne. 


219. —  Znr  Gescliichte  des  Kanone.  Zwei  Abhandlungen  von  Franz  Overbeck, 
prof.  derTheol.  an  der  Universitaet  Basel.  Chemnitz,  Ernst  Schmeitzner,  1880,  in- 
8°  de  142  p. 

Les  deux  mémoires  réunis  dans  ce  petit  volume  sont  consacrés  à  dé- 
montrer cette  thèse  assez  singulière,  que  tous  les  écrits  qui  composent 
le  Nouveau-Testament  avaient  cessé  d'être  compris  au  moment  qu'ils 
furent  admis  dans  le  canon,  ou,  en  d'autres  termes,  qu'un  voile  épais 
s'était  déjà  étendu  sur  leur  origine  et  sur  leur  sens  primitif,  quand  cha- 
cun d'eux  fut  placé  dans  la  sphère  supérieure  d'une  norme  éternelle  pour 
l'Eglise.  Dans  le  premier- qui  porte  ce  titre:  «  La  tradition  de  l'an- 
cienne Eglise  sur  l'Epitre  aux  Hébreux,  »  M.  Overbeck  s'est  servi  de 
l'histoire  de  la  canonisation  de  cette  Epître  comme  d'un  exemple  en  fa- 
Nouvelle  série,  XIV.  17 


322  ,  REVUE    CRITIQUE 

veur  de  sa  thèse,  et  dans  le  second  qui  est  intitulé  «  Le  canon  du  Nou- 
veau Testament  et  le  fragment  de  Muratori,  »  et  dans  lequel  il  examine 
et  combat  des  opinions  émises  dernièrement  sur  ce  sujet  par  M.  A.  Har- 
nack  (dans  la  Zeitschrift  fur  kirchl.  Geschichte,  t.  III,  p.  358  et  suiv., 
et  t.  IV,  p.  595  et  suiv.)  ;  il  la  défend  et  la  développe  par  de  nouvelles  con- 
sidérations. 

Ces  deux  mémoires  sont-ils  destinés  à  jeter  quelque  nouvelle  lumière 
sur  la  question,  jusqu'ici  fort  obscure,  du  mode  de  canonisation  des 
divers  écrits  du  Nouveau  Testament  ?  C'est  possible  ;  mais  rien  ne  pa- 
raît pour  le  moment  moins  certain.  M.  N. 


220.  —  J.-N.  Maovig.  I.'état  romain,  sa  constitution  et  son  administra- 
tion, traduit  par  Ch.  Morel,  Paris,  Vieweg,  1882,  t.  I«r,  in-8°  de  xx-2g6  p. 
(contenant  les  chapitres  1,  II,  III,  pages  1-279  de  l'édition  allemande). 

En  annonçant  ce  livre,  la  Revue  critique  1  a  transcrit  les  passages  de 
la  préface  où  M.  Morel  exposait  les  règles  qu'il  a  suivies  dans  sa  traduc- 
tion. Il  s'est  efforcé  avant  tout  d'alléger  le  style,  de  débarrasser  la  langue 
de  l'auteur.  L'allemand  du  premier  traducteur  de  M.  Madvig  était  sin- 
gulièrement pénible  et  lourd  :  le  français  de  M.  Morel  a  toute  la  sou- 
plesse, toute  la  vivacité  désirable  ;  le  livre  se  lit  sans  fatigue  et  sans 
ennui,  ce  qui  est  le  principal  mérite  d'une  traduction. 

M.  M.  a  rejeté  au  bas  des  pages  les  renvois,  les  Citations,  les  explica- 
tions d'une  certaine  étendue.  Dans  l'original,  elles  se  trouvaient  presque 
toujours  intercalées  dans  le  texte.  La  traduction  a  sur  lui  l'avantage 
qu'elle  permet  de  suivre  la  succession  des  idées  de  l'auteur,  sans  être  arrêté 
par  les  digressions  et  les  développements  complémentaires.  L'apparatus 
scientifique  est  tout  entier  conservé,  mais  il  se  trouve  mis  à  sa  vraie 
place.  M.  M.  a  donc  fait,  et  avec  le  plus  grand  soin,  une  besogne  in- 
dispensable pour  le  lecteur  français  et  fort  utile  à  l'ouvrage  même. 

Enfin,  M.  M.  a  ajouté  quelques  notes  au  texte  de  M.  Madvig.  En 
principe,  on  ne  rend  pas  le  traducteur  responsable  des  opinions  ou  des 
erreurs  qu'il  traduit,  et  il  n'est  nullement  tenu  à  réfuter  les  unes  et  à 
relever  les  autres.  Mais  la  publication  de  ce  livre  est  destinée  moins  à  nous 
faire  connaître  les  théories  de  M.  Madvig  qu'à  offrir  au  public  français 
un  manuel  d'institutions  romaines  aussi  exact,  aussi  complet  que  possi- 
ble :  M.  M. -a  donc  bien  fait  d'assumer  la  tâche  d'ajouter  à  la  pensée  de 
l'auteur  ou  de  la  rectifier.  Seulement,  les  notes  qu'il  a  mises  sont-elles 
bien  celles  que  l'on  était  en  droit  d'attendre,  et  ont-elles  toutes  une 
égale  utilité  et  la  même  valeur? 

Les  annotations  qui  s'imposaient  tout  d'abord  au  traducteur,  M.  Mad- 
vig les  avait  presque  indiquées  dans  sa  préface  :  «  On  pardonnera  à  l'au- 
teur, dit-il,  de  n'avoir  pas  toujours  cité  les  sources  de  la  même  façon 

1.  N°  du  3i  juillet  1882. 


d'histoire  et   dk   LITTÉRATURE  32  3 

(que  la  science  allemande)  et  de  n'avoir  pas  fait  vérifier...  si  telle  ou  telle 
inscription  citée  d'après  d'autres  sources  a  déjà  trouvé  place  dans  le  Cor- 
pus inscriptionum.  »  «  J'ai  complètement  renoncé,  dit-il  ailleurs,  à  citer 
les  ouvrages  modernes;  de  pareilles  indications...  m'eussent  obligé  à  une 
polémique  continuelle  contre  des  assertions  à  mon  sens  erronées  ou  sans 
utilité...  Bien  qu'en  thèse  générale  je  me  sois  abstenu  de  citer  les  au- 
teurs modernes,  je  n'ai  pu  m'empêcher  en  quelques  endroits  de  rappe- 
ler des  opinions  opposées  aux  miennes...  Naturellement  ces  observa- 
tions, lorsqu'elles  ne  concernent  pas  des  erreurs  remontant  à  des  temps 
plus  éloignés,  sont  le  plus  souvent  à  l'adresse  de  Niebuhr  et  de  Momm- 
sen.  »  La  tâche  que  M.  Madvig  a  dû  négliger  n'aurait  certes  pas  été  in- 
digne du  traducteur.  Il  aurait  pu,  à  côté  des  inscriptions  mentionnées 
d'après  Orelli-Henzen  et  Wilmanns  ou  des  textes  cités  d'après  une  an- 
cienne numérotation,  ajouter  la  numérotation  du  Corpus  ou  des  éditions 
allemandes  modernes  :  ce  qui  ne  demande  pas  trop  de  temps,  quoi  qu'il 
en  paraisse  au  premier  abord.  11  était  inutile,  évidemment,  de  dresser,  à 
propos  de  chaque  question,  une  bibliographie  détaillée  :  «  de  pareilles 
indications,  dit  M.  Madvig  lui-même,  se  trouvent  ailleurs  en  abondance, 
surtout  dans  Marquardt,  »  et  M.  M.  a  eu  raison  de  s'en  abstenir.  Maison 
eût  aimé,  quand  M.  Madvig  combat  telle  ou  telle  théorie  de  M.  Mommsen 
ou  de  Niebuhr,  à  savoir  l'endroit. précis  où  cette  théorie  se  trouve  expri- 
mée, à  rencontrer  dans  la  traduction  les  renvois  de  détail  que  l'auteur 
n'a  pas  eu  le  temps  de  nous  fournir.  De  même,  lorsque  M .  Madvig  critique 
les  faiseurs  d'hypothèses  qui  s'étendent  sur  les  institutions  militaires  de 
la  royauté,  qui  cherchent  à  établir  une  théorie  du  justitium,  quand  il 
combat  les  opinions  de  quelques  savants  modernes  sur  l'ordre  équestre, 
il  eût  été  aisé  de  dire  quels  étaient  ces  savants,  de  mentionner,  ne  fût-ce 
que  par  un  renvoi,  les  livres  où  se  trouvent  ces  hypothèses.  En  un  mot, 
on  aurait  pu  compléter  Y instrumentum  du  livre,  ce  qui  aurait  rendu 
service  à  l'auteur,  puisqu'il  s'excuse  de  ne  l'avoir  point  fait  et  qu'il 
pourrait  en  profiter  pour  une  nouvelle  édition  ;  on  aurait  surtout  aidé 
les  lecteurs  de  ce  manuel  :  tout  en  se  nourrissant  de  la  pensée  de 
M.  Madvig,  ils  auraient  eu  entre  les  mains  les  moyens  de  connaître  celle 
de  ses  adversaires.  C'est  ce  genre  de  notes  dont  nous  regrettons  l'absence 
dans  la  traduction  de  M.  Morel. 

Passons  aux  notes  qui  s'y  trouvent.  Les  unes  sont  destinées  (p.  ix)  «  à 
faire  mieux  comprendre  la  pensée  de  l'auteur.  »  De  celles-ci,  quelques- 
unes  expriment  des  idées  trop  générales  et  dans  une  forme  trop  voisine 
du  texte  qu'elles  sont  chargées  de  commenter,  pour  n'être  point  super- 
flues. «  Les  anciens  ne  connaissaient  pas  d'autre  forme  de  l'état  que  celle 
de  la  cité,  »  dit  en  note  M.  M.  ;  l'auteur  ne  dit  guère  autre  chose  et  se 
sert  presque  des  mêmes  termes  :  «  Comme  chez  les  Grecs,  l'état  ne  com- 
prenait (chez  les  Romains)  que  la  ville  et  sa  banlieue  '  ».  Dans  d'autres, 

i.  P.  16,  n.  i  ;  de  même,  p.  16,  n.  2j  p.  23,  n.  2  ;  p.  34,  n.  2  ;  p.  171,  n.  10  ; 
p.   144,  n.  28;  p.   i85.  n.  22. 


KKVUE    CRITiQUB 

M.  M.  complète  heureusement  la  pensée  de  M.  Madvig,  mais  il  ne  cite 
point  les  textes  ou  les  ouvrages  de  seconde  main  qui  expliquent  ou 
justifient  son  intervention  '.  La  plupart  d'ailleurs  de  ces  notes  ont  leur 
utilité  ;  tantôt  elles  ajoutent  aux  citations  faites  par  M.  Madvig,  d'au- 
tres, assez  importantes,  qu'il  a  cru  devoir  négliger  :  par  exemple,  des  pas- 
sages de  la  loi  coloniale  de  Julia  Genetiva  2,  qui  permettent  d'intéressan- 
tes comparaisons  entre  la  condition  des  sénateurs  romains,  et  celles  des 
décurions  municipaux.  Tantôt  M.  M.  développe,  à  propos  de  certaines 
règles  de  droit  administratif,  les  conséquences  que  M.  Madvig  n'a  fait 
qu'indiquer.  Ainsi,  au  sujet  des  assemblées  populaires,  M.  M.  insiste,  avec 
une  grande  justesse,  sur  ce  que,  dans  les  votes,  le  résultat  du  scrutin  ne 
dépendait  pas  essentiellement  des  suffrages  individuels. Tel  candidat  pou- 
vait être  élu  par  la  majorité  des  centuries  ou  des  tribus  sans  avoir  re- 
cueilli un  nombre  de  voix  personnelles  supérieur  à  celui  que  ses 
adversaires  avaient  obtenue  :  il  n'y  a  aucune  comparaison  à  établir 
entre  le  système  de  suffrage  «  égalitaire  »,  tel  qu'on  le  pratique  en  France, 
et  celui  des  Romains,  qui,  même  aux  plus  beaux  jours  delà  démocratie, 
continuait  à  donner  aux  votes  des  riches  et  des  propriétaires,  dans  les 
comices  centuriates  et  dans  les  comices  par  tribus,  une  influence  pré- 
pondérante *. 

La  seconde  catégorie  de  notes  est  destinée,  dit  M.  M.,  «  à  relever  de  lé- 
gères erreurs  de  détail  ».  Or,  nous  ne  trouvons  qu'une  seule  erreur  de  fait 
mentionnée  dans  les  notes  de  M.  M.  :  «  La  ville  de  Malaga,  dit-il,  n'é- 
tait pas  (comme  le  dit  M.  Madvig),  un  municipe  romain,  mais  bien  un 
municipe  latin  4.  »  Est-ce  donc  là  une  erreur  véritable  ?  La  latinité  de 
Malaga  n'est  pas  le  moins  du  monde  un  fait  incontestable  et  incontesté  : 
sans  doute,  la  plupart  des  savants  y  croient,  depuis  les  habiles  et  curieu- 
ses recherches  de  M.  Mommsen  ■'.  Mais  rien,  absolument  rien,  dans 
la  lex  malacitana,  ne  la  prouve  d'une  manière  irréfutable  :  il  ne  serait 
même  pas  difficile  d'y  relever  des  indices  qui  autorisent  la  conclu- 
sion de  M.  Madvig.  Ses  adversaires  pourront  la  traiter  d'erronée  : 
mais  erreur  et  conclusion  erronée  sont  choses  toute  différentes.  — 
M.  M.  relève  chez  M.  Madvig  un  certain  nombre  d'idées  qu'il  croit  faus- 
ses :  ce  sont  cependant  des  opinions  fort  vraisemblables,  et  qui,  en  tout 
cas,  peuvent  être  aussi  bien  soutenues  que  l'opinion  contraire.  M.  Madvig 

i.  P.  25,  n.  6  ;  p.  34,  n.  1  ;  p.  64,  n.  36;  p.  68,  n.  i3  (qu'est-ce  qui  justifie  la 
correction  complures  nostris...  auspiciis,  Cincius  dans  Festus,  p,  241,  éd.  Mùller; 
cf.  Mommsen,  Staatsrcclit,  1  (18761,  p.  96,  n.  2);  p.    io3,  n.  4;  p.  161,  n.  25. 

2.  P.  1 58,  n,  9  ;  p.  207,  n.  14;  de  même,  p.  43,  n.  4;  p.  52,  n.  43  ;  p.  204.,  n.  21  ; 
p.  281,  n.  38. 

3.  P.  278  et  n.  25;  p.  279  et  n.  3o.  M.  M.  n'aurait-il  pas  pu,  cependant,  mettre 
en  note  toutes  ses  observations?  Le  texte  de  l'auteur  n'est-il  pas  inviolable  i 

4.  P.  73,  n.  3i,  M.  M.  parle  d'une  «  double  erreur  ».  La  seconde  erreur  disparait, 
si  l'on  admet,  avec  M.  Madvig,  que  Malaga  était  une  cité  romaine. 

5.  Die  Stadtr édite  der  latinischen  Gemeinden  Salpensa  und  Malaca  in  der  Provins 
Baetica,  Leipzig,  i855,  in-4. 


t>  HISTOIRE    ET    DE    LITTERAIUUE  02D 

pense  que  le  droit  de  «  cité  sans  suffrage  »  (civitas  sine  suffi-agio) 
excluait  le  jus  conubii  etlejus  commercii  ;  M.  M.  pense,  au  contraire, 
avec  M.  Marquardt  et  bien  d'autres  que  la  civitas  sine  suffragio  «  con- 
férait le  conubium  avec  les  citoyens  romains  '  ».  Mais,  comme  nous 
manquons  à  peu  près  complètement  de  textes  concernant  la  civitas  sine 
suffragio,  les  deux  opinions  sont  également  plausibles.  —  «  M.  M. 
admet,  dit  une  autre  note,  que  dès  Servius  Tullius  il  y  eut  trente  tribus, 
opinion  qui  s'appuie  sur  quelques  auteurs  anciens,  mais  qui,  contredite 
par  d'autres,  est  rejetée  par  la  plupart  des  savants  modernes  2  ».  Cette 
phrase  semble  donner  tort  à  M.  Madvig  :  or,  l'opinion  de  ce  dernier  a 
pour  elle,  cependant,  Denys  d'Halicarnasse  et  Varron,  dont  l'autorité  est 
au  moins  égale  à  celle  deTite-Live,  d'Aurelius  Victor  et  de  Paul  Diacre  ; 
et,  si  ces  derniers  ont  été  suivis  par  Huschke  et  M.  Mommsen,  dont  les 
idées  ont  été  chaudement  défendues  par  M.  Belot  3,  M.  Madvig  est  de 
l'avis  de  Niebuhr  et  de  Walter  f,  M.  M.  condamne  trop  vite  5. 
Certes,  il  peut  et  il  doit  même,  dans  des  discussions  de  ce  genre, 
prendre  la  parole  :  nul  n'a  plus  que  lui  le  droit  et  les  moyens  de  le  faire. 
Mais  il  y  a  une  différence  entre  plaider  une  cause  et  prononcer  un  arrêt. 
La  traduction  de  M.  Morel  a  sa  place  marquée  dans  toutes  les  biblio- 
thèques de  nos  facultés  de  lettres  et  de  droit,  et  elle  ne  sera  pas  déplacée 
même  dans  celles  des  lycées  et  des  collèges.  Il  faut  donc  le  remercier  et 
le  féliciter  d'avoir  entrepris  une  publication  qui  ne  manquera  pas  d'a- 
voir une  sérieuse  et  durable  influence  sur  l'érudition  française,  et, 
souhaitons-le  aussi,  sur  notre  enseignement  secondaire.  Une  bonne  part 
d'éloges  revient  à  l'éditeur,  M.  Vieweg,  qui  en  a  été  le  promoteur,  et 
qui  a  su  donner  au  livre  une  élégance  typographique  qui  en  rend  la 
lecture  aussi  agréable  que  facile. 

Camille  Jullian. 


i.  P.  5i,  n.  42;  cf.  p.  74,  n.  36;  Marquardt,  Staatsverwaltung,  1,  p.  29. 

2.  P.  m,  n.  3  ;  p.  112. 

3.  Huschke,  Die  Verfassung  des...  Servius  Tullius,  p.  73  sqq.;  Mommsen, 
Die  rœmischen  Tribus,  p.  6;  Belot,  Histoire  des  chevaliers  romains,  I,  p.  41, 
et  p.  394  sqq. 

4.  Niebuhr,  Rœm.  Gesch.,  I,  p.  462;  Walter,  Gesch.  d.  rœm.  Rechts,  28,  I  (1861), 
p.  46. 

5.  M.  M.,  dans  so,n  étude  sur  \cjus  Latii,  1,  8,  omet  de  citer  le  passage  de  Gaius 
relatif  au  majus  et  au  minus  Latium,  passage  déchiffré  en  1868,  par  M.  Studemund 
(Gaius,  1,  97).  «  Il  est  singulier,  dit  en  note  M.  M.  (p.  76,  n.  47),  qu'une  découverte 
aussi  importante...  ait  pu  échapper  aux  deux  principaux  savants  qui  se  sont  occupés 
de  la  question,  M.  Marquardt  {Rœmische  Staatsverwaltung,  I,  p.  b-j)  et  M.  Madvig.  » 
Il  n'est  nullement  prouvé  que  M.  Madvig  ait  ignoré  ce  texte  et  rie  l'ait  pas  négligé 
à  dessein,  puisqu'il  cite  Gaius  et  les  passages  les  plus  récemment  déchiffrés. 
D'autre  part,  M.  Marquardt  le  cite  et  le  commente  longuement,  précisément  à  la 
page  57  de  la  seconde  édition  (1881)  de  sa  Rœmische  Staatsverwaltung,  la  seule  que 
j'aie  sous  les  yeux. 


32Ô  REVUK    CR1T1Q0K 

OOO.  —  I»hilipp    «1er    flrossuiûthige    von    Hesscn    und    die    destitution 

Ulrichs'  von  wlrtemberg,  (1  «»0-l*î3îï)  von  Dr.  Jakob  Wille,  Universi- 
taets-Bibliothekar  in  Heidelberg.  Tûbingen,  Laupp,  1882,  VI,  345  p.  8°.  Prix  : 
7  fr.  5o. 

Les  travaux  détaillés  ne  manquent  pas  sur  l'histoire  du  Wurtemberg. 
On  peut  même  dire  qu'il  est  peu  de  territoires  allemands  dont  la  litté- 
rature historique  soit  aussi  riche  en  ouvrages  de  mérite.  Dès  le  siècle 
dernier,  les  nombreux  volumes  in-quarto  de  Sattler  ont  réuni  une 
quantité  de  documents  considérable  sur  la  période  traitée  par  le  jeune 
bibliothécaire  de  Heidelberg.  Ranke  a  examiné  en  détail  l'histoire  de  la 
réintégration  du  duc  Ulric  dans  le  duché  dont  une  sentence  impériale 
l'avait  banni,  dans  le  troisième  volume  de  sa  belle  Histoire  de  l'Alle- 
magne au  xvie  siècle.  Les  historiographes  spéciaux  de  nos  jours,  Staelin, 
Heyd,  Kugler,  Ulmann,  Rommel  dans  son  Histoire  de  Philippe  de 
Hesse,  Bucholz  dans  l'Histoire  de  Ferdinand  IeV,  avaient  apporté 
chacun  son  contingent  de  renseignements  nouveaux  et  parfois  contra- 
dictoires, au  sujet  en  question.  Néanmoins  le  travail  de  M.  Wille  est 
loin  d'être  inutile.  Cela  tient,  d'une  part,  aux  pièces  diplomatiques, 
encore  inconnues,  qu'il  a  su  trouver  dans  les  archives  de  Munich,  de 
Weimar  et  surtout  de  Marbourg,  d'autre  part,  à  la  façon  dont  il  a  conçu 
le  plan  de  son  ouvrage.  Ce  n'est  pas  tant  le  fait  même  du  retour  d' Ulric 
dans  ses  états  et  l'histoire  de  la  campagne  heureuse  qui  se  termine  par 
le  traité  de  Cadan,  en  1 534,  qui  l'occupent  le  plus.  Il  a  traité  ces  faits 
comme  un  épisode  dans  les  combinaisons  plus  vastes  auxquelles  se  livrait 
en  ce  moment  le  chef  intellectuel,  sinon  officiel,  de  la  ligue  de  Smal- 
kalde,  le  landgrave  Philippe  de  Hesse.  Les  années  de  i52Ô  à  1 538  sont, 
on  le  sait,  la  période  militante,  par  excellence,  des  états  protestants  de 
l'Allemagne^  qui,  menacés  sans  cesse  de  la  colère  de  Charles-Quint, 
devaient  essayer  tout  naturellement  de  s'unir  et  de  se  liguer  au  dehors 
avec  les  ennemis  de  l'empereur  et  avec  les  amis  de  la  foi  nouvelle.  C'est 
à  Philippe  que  revient  surtout  l'honneur  d'avoir  tenté  cette  alliance 
universelle  des  adhérents  aux  dogmes  nouveaux,  qui,  constituée  d'une 
façon  durable,  aurait  brisé,  dès  le  xvie  siècle,  la  force  de  la  maison  de 
Habsbourg.  Charles-Quint  se  rendait  parfaitement  compte  du  danger 
qui  le  menaçait.  Sa  diplomatie  ne  cessa  de  travailler  à  brouiller  entre 
eux  les  éléments  nécessaires  à  la  fixité  d'une  ligue  pareille.  Les  querelles 
entre  luthériens  et  réformés  le  servirent  à  merveille,  et  le  triomphe  de 
sa  politique  —  triomphe  momentané  seulement,  il  est  vrai  —  fut  d'a- 
mener un  instant  les  luthériens  de  l'empire  à  partir  en  guerre  avec  lui, 
contre  François  Ier,  qui  s'était  offert  à  les  secourir  autrefois.  Dépité  de 
se  voir  abandonné  par  eux,  le  roi  de  France  les  abandonna  lui-même,  à 
son  tour,  quand  Charles-Quint  détruisit  la  ligue  de  Smalkalde  en  1546 
et  1  547,  et  Philippe  de  Hesse  vit  ainsi  s'écrouler  d'une  façon  définitive 
les  grands  projets  qu'il  avait  conçus.  Le  volume  de  M.  W.  ne  nous 
amène  point  jusqu'à  cette  catastrophe  de  la  ligue  protestante.  Il  nous 


d'histoire  et  de  littérature  327 

raconte,  au  contraire,  l'épisode  de  ces  longues  luttes  diplomatiques  et 
militaires,  qui  marque  peut-être  le  plus  haut  degré  d'influence  atteint 
par  elle  et  son  chef.  Charles-Quint  avait  porté  un  coup  fort  habile  au 
protestantisme  allemand  en  donnant  le  Wurtemberg,  dont  le  prince 
était  mis  au  ban  de  l'empire,  à  son  frère  cadet,  le  roi  Ferdinand.  Les 
possessions  des  Habsbourg  au  sud  de  l'Allemagne  s'arrondissaient  ainsi 
d'une  façon  notable  et  la  conversion  religieuse  de  ces  contrées,  déjà. 
commencée  depuis  peu,  était  entravée  d'une  façon  presque  complète. 
Philippe  comprit  le  danger  qui  menaçait  ses  coreligionnaires.  Il  ne 
voulut  point  permettre  la  pose  de  ce  «  verrou  »  qui  fermerait  les  com- 
munications avec  les  protestants  suisses,  et,  pendant  une  série  d'années, 
les  efforts  les  plus  considérables  furent  tentés  par  lui  pour  amener  la 
ligue  à  agir  et  pour  lui  gagner  des  alliés  au  dehors.  Ce  sont  ces  négo- 
ciations diplomatiques,  le  rôle  qu'y  jouèrent  les  différents  princes  de 
l'Allemagne,  la  Saxe,  la  Bavière,  etc.,  qui  forment  le  gros  du  volume  de 
M.  Wille.  On  lira  également  avec  intérêt  le  second  chapitre  du 
deuxième  livre,  qui  s'occupe  particulièrement  des  relations  avec  la 
France,  avant  et  après  la  visite  presque  clandestine  que  Philippe  de 
Hesse  fit  à  François  Ier,  au  château  de  Bar-le-Duc,  en  janvier  1 5  34  '.  Le 
roi  de  France  aurait  voulu  pousser  la  campagne  plus  loin  qu'elle  ne  fut 
menée  par  les  alliés.  Il  voulait  attaquer  les  provinces  héréditaires  de 
Ferdinand,  mais  Philippe  ne  se  souciait  pas  de  se  brouiller  à  mort  avec 
les  Habsbourg  d'abord,  puis  aussi  d'exciter  la  jalousie  de  ses  collègues 
princiers  et  spécialement  de  l'électeur  de  Saxe,  uniquement  pour  plaire 
aux  Valois.  Il  lui  manquait  l'élan  d'un  Bernard  de  Weimar  ou  d'un 
Richelieu,  pour  tenter  une  agression  dont  les  conséquences  heureuses 
eussent  été  incalculables,  mais  qui  pouvait  tout  aussi  bien  se  changer  en 
catastrophe  pour  lui.  Le  traité  de  Cadan,  signé  dans  les  derniers  jours 
de  juin  1 534,  ne  réalisa  point  les  espérances  avec  lesquelles  on  s'était 
mis  en  campagne.  On  arrachait  le  Wurtemberg  à  Ferdinand,  on  le 
regagnait  au  protestantisme,  mais  le  succès  s'arrêtait  là,  se  localisait  pour 
ainsi  dire,  et  même  le  duc  Ulric  ne  rentrait  dans  son  territoire  qu'après 
avoir  prêté  l'hommage  féodal  au  rival  malheureux  qui  l'avait  occupé 
jusque-là.  M.  Wille  promet  de  continuer  ses  recherches  et  de  nous  en 
donner  le  résultat  dans  quelque  autre  ouvrage.  On  ne  peut  que  l'atten- 
dre avec  intérêt,  et  le  consulter  avec  confiance.  A  un  langage  sobre,  un 
peu  trop  incolore  peut-être,  Fauteur  de  notre  volume  unit  un  jugement 
calme,  une  appréciation  généralement  équitable  des  hommes  et  des 
partis,  et  les  historiens  du  xvie  siècle  consulteront  son  livre  avec  fruit, 
pour  les  dix  années  qu'embrasse  son  récit. 

R. 


1.  Une  série  de  pièces  inédites  relatives  aux  négociations  avec  la  France,  se 
trouve  en  appendice,  pp.  255-268.  Nous  remarquerons,  à  ce  propos,  que,  pp.  1 56, 
198,  etc.,  il  faut  lire  Langres  au  lieu  de  Langer. 


328  REVUE  CRITIQUE 

222.  —  I,etti*es  françaises  inédites  de  Joseph  Scaliger*  publiées  et  an- 
notées par  Philippe  Tamizey  de  Larroque,  corresp.  de  l'Institut.  Agen,  Michel  et 
Médan  ;  Paris,  Alph.  Picard,  1881,   i  vol.  in-8°  de  428  p. 

La  publication  des  lettres  françaises  de  Scaliger  a  été  accueillie  avec 
joie  par  tous  ceux  qu'intéresse  l'histoire  de  l'érudition.  Si  la  Revue  cri- 
tique n'en  a  pas  parlé  plus  tôt,  c'est  qu'elle  a  perdu  les  deux  collabora- 
teurs à  qui  revenait  de  droit  l'honneur  d'en  rendre  compte,  Charles 
Thurot  et  Charles  Graux.  Le  premier  avait  déjà  présenté  le  livre  à  l'A- 
cadémie des  inscriptions  comme  un  monument  durable  élevé  à  la  mé- 
moire du  plus  grand  des  philologues  français.  Il  ne  tenait  qu'à  M.  Ta- 
mizey de  Larroque  d'agrandir  les  proportions  du  monument,  s'il  avait 
voulu  nous  donner  toutes  les  lettres  et  tous  les  billets  écrits  en  français 
par  Scaliger.  Il  n'y  a  pas  d'homme  avant  Scaliger  qui  ait  entretenu  au- 
tant de  correspondances.  Les  originaux  ou  les  copies  en  sont  conservés 
en  grand  nombre,  particulièrement  à  la  Bibliothèque  nationale  dans  la 
Collection  Dupuy.  M.  T.  de  L.  a  cru  devoir  se  borner  à  publier  presque 
exclusivement  les  lettres  inédites  autographes,  en  donnant  des  analyses 
et  des  extraits  des  simples  copies  ou  des  lettres  déjà  imprimées  dans  divers 
recueils  l.  Malgré  cette  élimination,  sa  publication  n'en  comprend  pas 
moins  de  124  lettres,  qui  vont  du  8  nov.  1571  au  28  août  1608,  et  sont 
presque  toutes  adressées  aux  trois  meilleurs  amis  de  Scaliger,  Pierre  Pi- 
thou,  Claude  Dupuy  et  J.-Aug.  de  Thou.  Ces  trois  amis  s'occupent 
non-seulement  de  le  fournir  de  livres  et  de  manuscrits  et  de  le  tenir  au 
courant  du  mouvement  de  la  librairie  parisienne  et  étrangère,  mais  en- 
core ils  ont  mission  de  surveiller  l'impression  de  ses  ouvrages.  Aussi 
Scaliger  leur  fait-il  ses  confidences  ;  à  eux  seuls,  par  exemple,  il  révèle 
son  pseudonyme  d'Yvo  Villiomarus,  emprunté  en  1 585  pour  répondre 
à  Robert  Titius.  Ecrites  dans  tout  l'abandon  de  l'intimité  sur  les  sujets 
les  plus  chers  à  ces  hommes  illustres,  leurs  livres  et  leur  études,  ces  let- 
tres contiennent  une  foule  de  renseignements  précieux  et  de  faits  nou- 
veaux, où  les  travailleurs  de  diverses  spécialités  auront  à  puiser  désor- 
mais; elles  intéressent  à  la  fois  la  philologie  classique,  la  philologie 
française  et  l'histoire  littéraire. 

Si  l'on  veut  connaître  avec  quels  secours  les  anciens  philologues  ont 
établi  leurs  textes  et  quelle  méthode  ils  ont  portée  dans  la  constitution 
de  leurs  éditions,  c'est  à  leurs  correspondances  qu'il  convient  de  recourir. 
Mieux  que  dans  les  préfaces  et  dans  les  commentaires,  nous  y  surpre- 
nons les  secrets  de  leur  bibliothèque,  leurs  recherches  et  leurs  incerti- 
tudes. Les  opinions,  les  pressentiments  d'un  génie  comme  celui  de  Sca- 
liger méritent  notamment  d'être  recueillis  par  les  philologues  modernes. 
Ces  lettres  nous  le  montrent,  au  milieu  des  livres,  occupé  de  préparer 

1.  Je  ne  vois  point  mentionnées  les  «  Copies  de  lettres  écrites  au  sieur  de  Castel- 
franc,  par  Joseph  de  l'Escale,  de  Leyde  en  Hollande,  1604,  1606,  1608  »,  qui  sont 
au  n°  13040  du  fonds  français. 


d'histoire  et  de  littérature  329 

ses  éditions  et  ces  merveilleux  travaux  dont  un  seul  suffirait  à  la  gloire 
d'une  vie;  on  l'entend  donner  son  avis  sur  les  manuscrits  dont  il  se  sert, 
sur  ceux  qu'il  désire  consulter,  sur  les  livres  qui  paraissent  à  la  foire  de 
Francfort  et  que  des  courriers  trop  irréguliers  lui  portent  dans  ses  di- 
verses résidences.  On  le  surprend  dans  ses  déchiffrements  épigraphiques, 
surveillant  avec  un  intérêt  jaloux  les  recueils  d'inscriptions  que  publient 
ses  confrères  (pp.  260,  264,  271).  Veut-on  savoir  quels  secours  il  a  reçus 
et  à  quelles  sources  il  a  puisé  pour  former  son  recueil  des  Catalectes? 
c'est  aux  lettres  à  Pithou  qu'il  faut  s'adresser  (pp.  10,  19,  237).  Plus 
loin,  nous  constatons  depuis  quelle  époque  il  songe  à  ses  commentaires 
sur  Manilius  (pp.  21,  63,  69),  ce  qu'il  pense  de  l'état  fâcheux  du  texte 
de  Josèphe  de  son  temps  (p.  226),  avec  quelle  conscience  de  sa  valeur  il 
parle  du  De  emendatione  temporum  (p.  123),  par  quels  moyens  il  pré- 
pare son  édition  d'Eusèbe  (pp.  235,  239,  376),  etc.  Nous  trouvons  trace 
de  plusieurs  projets  longtemps  mûris,  puis  abandonnés  par  Scaliger, 
tels  que  cette  édition  d'Aulu-Gelle,  Macrobe  et  Censorinus,  dont  il  est 
si  souvent  question  (pp.  21,  25,  41,  83,  91).  On  le  voit  appliquant  sur 
tous  les  objets  ses  aptitudes  universelles,  s'occupant  dès  1578  des  Tables 
Eugubines  dont  Dupuy  avait  rapporté  une  copie  d'Italie  (p.  85),  recon- 
naissant, bien  avant  les  travaux  de  l'égyptologie  moderne,  l'identité  de 
la  langue  copte  et  l'égyptien,  cherchant  à  se  procurer  l'Alcoran,  le  texte 
arabe  d'Avicenne,  un  Nouveau  Testament  arménien  et  divers  livres  hé- 
breux par  l'intermédiaire  des  correspondants  de  Pinelli  à  Constantinople. 
Pour  la  philologie  française,  les  Lettres  de  Scaliger  fournissent  une 
foule  de  renseignements  intéressants.  La  langue  de  Scaliger,  mêlée  de 
latinismes  et  de  gasconismes  (le  mot  est  de  lui),  est  hardie,  imagée,  ca- 
pricieuse. Les  expressions  proverbiales,  les  tournures  archaïques  qui  se 
rencontrent  sous  sa  plume  ont  été  notées  avec  grand  soin  par  son  savant 
éditeur  et  compatriote,  et  rapprochées  des  autres  textes  qui  les  fournissent. 
Plus  d'une  fois  M.  T.  de  L.  a  pu  compléter  Littré:  tantôt  un  exemple  de 
Scaliger  vient  attester  l'antiquité  d'un  mot  ou  d'une  expression  que  Littré 
a  rencontré  seulement  bien  plus  tard,  tantôt  il  comble  la  lacune  que 
constatait  implicitement  le  lexicographe  entre  les  exemples  du  moyen  âge 
et  ceux  du  xvir5  siècle.  Comme  spécimens  de  ces  contributions  à  l'histoire 
de  la  langue,  je  me  contenterai  de  citer  une  acception  métaphorique  du 
mot  tirer  (p.  97),  le  verbe  coquiner  (—  mendier)  pris  comme  verbe  actif 
(p.  118),  et,  p.  72,  la  présence  du  mot  philologie  dans  une  lettre  datée 
de  1577,  alors  que  Littré  a  trouvé  son  plus  ancien  exemple  dans  Rollin. 
M.  T.  de  L.  relève  aussi  des  particularités  curieuses  d'orthographe,  et  je 
crois  qu'il  y  a  encore  à  faire  après  lui.  Malheureusement  sa  lecture,  au 
moins  pour  les  copies,  n'est  pas  toujours  irréprochable.  Ainsi,  dans  la 
copie  de  la  lettre  à  M.  de  Buzenval  (pp.  342-343;,  il  faut  lire  :  «  il  n'f  a 
rien  —  quant  au  stile  —  soit  au  langage  — faute  d'adresse  —  don  Car- 
ies est  couronné  —  M.  de  Beze  est  presque  réduit  en  infantilage1.  » 

1.  il  est  regrettable  que  l'impression  du  grec  ait  été  fort  négligée;  l'imprimeur 


33o  REVUE    CRITIQUE 

C'est  surtout  au  point  de  vue  de  l'histoire  littéraire  et  des  biographies 
du  xvie  siècle  que  la  publication  de  M.  T.  de  L.  est  importante.  Elle 
emprunte  une  grande  partie  de  sa  valeur  à  une  annotation  abondante, 
tout  instructive  et  précise,  évitant  de  répéter  ce  qu'on  trouve  ailleurs  et 
donnant  une  foule  de  détails  inédits  sur  les  hommes  et  les  faits  dont  il 
est  question.  Personne  n'a,  au  même  degré  que  le  savant  éditeur,  cette 
sûreté  et  cette  universalité  d'information,  qui  rend  la  lecture  de  son 
commentaire  perpétuel  aussi  attachante  que  celle  du  texte.  Une  pre- 
mière série  de  renseignements  est  fournie  à  l'histoire  littéraire  par  les  ap- 
préciations de  Scaliger  sur  les  livres  et  la  science  de  ses  contemporains. 
On  s'attend  avec  raison  à  des  jugements  ordinairement  durs  et  mépri- 
sants, relevés  par  une  jolie  verve  gasconne.  Tels  sont  les  jugements  sur 
Achille  Statius  et  son  commentaire  des  Elégiaques  (pp.  43,  45,  48),  sur 
Palmerius  (p.  108),  sur  Carrion  (p.  112),  et  même  sur  S.  du  Bois 
(p.  109}.  Ils  sont  plus  piquants  encore  que  les  propos  du  Scaligerana,  car 
c'est  une  pensée  directement  exprimée  que  nous  recueillons,  sans  l'inter- 
médiaire des  secrétaires  et  des  copistes.  Il  faut  voir  comment  Scaliger  traite 
ses  adversaires  François  de  Nsle  et  Jean  de  Frégeville,  plus  tard  Clavius 
et  Viète,  et  ce  pauvre  Italien  Titius,  qui  «  n'est  qu'un  asne  »,  excepté 
pour  ceux  de  sa  nation,  laquelle  «  admire  plus  tost  une  mouche  de  delà 
les  Mons,  qu'un  beuf  de  deçà  »  (p.  207).  Je  ne  parle  pas  du  trop  fameux 
Scioppius,  à  qui,  malgré  le  conseil  de  De  Thou,  dont  nous  trouvons  ici 
le  témoignage,  Scaliger  rendit  publiquement  injure  pour  injure. 

La  biographie  du  grand  philologue  s'enrichit  de  faits  qui  éclairent 
certaines  années  de  sa  vie.  Les  lettres  de  1 585,  par  exemple,  nous  révè- 
lent un  Scaliger  peu  connu,  Scaliger  propriétaire,  et  nous  montrent  avec 
quel  courage  et  quelle  noble  fierté  il  supporta  la  spoliation  légale  dont 
il  fut  victime  à  la  suite  de  l'édit  de  juillet.  Ses  affaires  de  famille  tiennent 
peu  de  place  dans  cette  correspondance  ;  cependant  on  y  trouve  trace  de 
ses  démêlés  avec  son  frère.  A  propos  de  la  réponse  faite  par  Scaliger  aux 
adversaires  du  De  emendatione,  sous  le  pseudonyme  à'Antoni  La  Coste, 
il  est  parlé  d'une  seconde  réponse,  qui  ne  parut  pas,  et  qui  doit  avoir 
passé  en  manuscrit  dans  les  papiers  du  président  de  Thou.  Ce  n'est  pas 
seulement  la  biographie  de  Scaliger  qui  se  complète,  mais  encore  celle 
de  ses  amis,  de  J.-A.  de  Thou,  de  Cujas.  Pour  Cujas  particulièrement, 
on  ne  pourra  s'occuper  de  lui  sans  feuilleter,  au  moyen  de  l'excellent 
index  qui  termine  le  volume,  les  lettres  où  il  est  mentionné.  Le  caractère 
de  Cujas  n'est  pas  aussi  inattaquable  que  son  génie;  il  eut  des  torts  en- 

agenais,  indigne  de  pratiquer  l'art  d'Henri  Estienne,  voyait  du  grec  pour  la  première 
fois.  V.,  par  ex.,  pp.  66,  227,  a53,  256,  269,  278,  282,  Soi,  320,  où  l'accentuation 
est  jetée  au  hasard.  P.  igg,  je  lirais  èjxjJLsXsîç,  P-  35o,  1QMÇ.  •/."uc^âxcov.  Signalons,  en 
passant,  quelques  fautes  d'impression  inévitables  dans  un  texte  aussi  difficile  que  ce- 
lui des  lettres  et  des  notes  :  p.  3i,  note  2,  il  faut  lire  i5j4  pour  i5yg;  p.  176, 
n.  3,  Bemays  pour  Bernard;  p.  264  (texte),  Smettius;  p.  406,  Guillandin;  p.  220, 
ligne  1,  il  faut  une  virgule  avant  tant  s'enfault,  pour  rendre  la  phrase  intelligible. 


d'histoire  et  de  littérature  33 I 

vers  Scaliger  (pp.  258,  268),  et  donna  occasion  à  celui-ci  d'écrire  une 
lettre  qui  fait  plus  d'honneur  à  l'élève  qu'au  maître.  A  ce  propos,  qu'il 
me  soit  permis  d'exprimer  le  vœu  qu'un  de  nos  jurisconsultes  contempo- 
rains, respectueux  de  son  grand  ancêtre,  s1occupe  enfin  de  la  publication 
des  lettres  de  Cujas  conservées  à  la  Bibliothèque  et  dont  Berriat  Saint- 
Prix  s'est  servi  avec  beaucoup  trop  de  discrétion  pour  son  Histoire  de 
Cujas. 

J'ai  peu  d'observations  à  faire  sur  l'annotation  de  M.  T.  de  L.,  dont 
l'exactitude  égale  l'abondance.  Cependant,  p.  289,  il  s'étonne  à  tort  de 
l'inquiétude  témoignée  par  Scaliger  dans  une  lettre  du  25  sept.  i5c)i, 
écrite  du  château  de  Preuilly  pendant  les  excès  des  ligueurs.  Il  y  avait 
grandement  lieu  de  s'inquiéter,  et  Scaliger  avait  été  averti  des  dangers  cou- 
rus par  son  imprimeur  et  ami  Pâtisson,  dans  une  lettre  de  P.  d'Elbène  : 
«  M.  d'Emery...  m'a  asseuré  que  M.  Pithou  l'a  retenu  et  sauvé,  lorsque 
le  povre  Pâtisson  fut  prins  prisonnier  «  {Epistres  françoises...  à  Morts2 
Joseph  Juste  de  la  Scala...  mises  en  lumière  par  laques  de  Rêves.  Har- 
derwyck,  1624^.384). — P.  189,  à  côté  des  trois  lettres  du  «bonhomme» 
Vinet,  le  vaillant  principal  du  collège  de  Bordeaux,  publiées  dans  les 
Archives  hist.  de  la  Gironde,  il  convient  de  rappeler  les  deux  lettres  à 
Buchanan,  écrites  en  i58i  et  imprimées  dans  Buchanani  opéra  omnia 
(Leyde,  1725;  t.  II);  j'en  connais  deux  autres  inédites  parmi  la  curieuse 
correspondance  d'Henri  deMesmes  (B.  Nat.,  fonds  lat.  10327,  ^  I27 
etsqq.). 

P.  65,  aux  renseignements  copieux  fournis  sur  François  de  Saint- 
Vertunien,  sieur  de  Lavau,  il  eut  été  utile  d'ajouter  l'indication  des  let- 
tres de  cet  important  personnage,  que  renferme  le  n°  712  de  la  coll. 
Dupuy.  M.  de  la  Vau  avait  vécu  dans  l'intimité  de  Scaliger  chez 
MM.  Chasteigner  de  la  Rocheposay,  et  c'est  à  lui  qu'on  doit  le  premier 
Scaligerana.  Ses  lettres  à  P.  Dupuy  s'étendent  longuement  sur  son 
illustre  ami,  alors  à  Leyde,  et  sont  à  ce  titre  précieuses  pour  nous.  Dans 
sa  lettre  datée  de  Poitiers,  2  juillet  1602  (7/2,  f.  38),  M.  de  la  Vau  ra- 
conte avec  quelle  facilité  admirable  Scaliger  faisait  des  vers  :  «  Ce  grand 
personnage  là  ne  se  soucie  aucunement  de  ses  vers,  et  jamais  il  ne  les 
garde...  Nous  estions  tous  deux  retirez  à  Touffou,  maison  de  feu  M.  de 
la  Rochepozay  à  4  lieues  de  ceste  ville,  pour  la  ire  guerre  de  la 
Ligue,  1577,  durant  les  premiers  Estats  de  Blois,  où  couchant  en  sa 
chambre  pour  m'exercer  à  la  langue  grecque,  il  me  dist  qu'il  n'y  avoit 
rien  de  meilleur  que  de  faire  des  versions  de  l'une  langue  en  l'autre... 
Tous  les  soirs,  s'allant  coucher,  me  tournoit  verbo  ad  verbum  un  ou 
deux  des  épigrammes  du  7  de  l'Anthologie,  pour  luy  rendre  le  lende- 
main en  vers  latins.  »  Pour  Scaliger,  ajoute  le  narrateur,  il  faisait  les 
vers  lui-même  le  lendemain  en  s'éveillant  et  sans  le  moindre  tâtonne- 
ment. Il  faut  rapprocher  cette  lettre,  dans  laquelle  il  y  a  encore  beaucoup  à 
prendre,  des  lettres  XVI  et  suivantes  du  recueil  de  M.  T.  de  L.,  écrites  de 
Touffou,  pendant  le  séjour  que  rappelle  ici  M.  de  la  Vau.  Je  signale  en- 


332  REVUE   CRITIQUE 

A 

core  la  lettre  du  même  datée  de  Poitiers,  26  février  1606,  qui  roule  sur 
la  polémique  de  Scaliger  et  deGuillandin,  et  s'étend  sur  l'origine  illustre 
de  «  M.  de  Lascale  ». 

La  biographie  de  Scaliger  doit-elle  être  refaite  aujourd'hui?  Je  ne  le 
crois  pas.  Il  y  a  lieu;  sans  doute,  de  compléter  les  bons  travaux  de  Bernays 
et  de  M.  Ch.  Nisard;  mais  une  traduction  du  livre  de  Bernays,  dont  le 
plan  est  excellent,  pourrait  suffire  et  serait  bien  accueillie  en  France,  si 
le  traducteur  y  ajoutait  une  annotation  nouvelle  empruntée  en  partie 
aux  Lettres  françaises  de  Scaliger.  Je  ne  puis  que  joindre  mes  souhaits 
à  ceux  de  [M.  T.  de  L.  pour  qu'il  se  rencontre  ce  traducteur  de  bonne 
volonté,  qui  mettra  à  la  portée  d'un  plus  grand  nombre  de  travailleurs 
la  remarquable  monographie  du  savant  allemand.  En  attendant,  c'est  à 
M.  T.  de  L.  lui-même  de  tenir  au  plus  tôt  la  promesse  qu'il  nous  fait  de 
réimprimer,  avec  additions  et  commentaires,  le  curieux  recueil  de  Jac- 
ques de  Rêves,  dont  j'ai  transcrit  plus  haut  le  titre.  Cette  réimpression 
formera  le  pendant  du  présent  livre,  qui,  par  l'intérêt  du  sujet,  l'utilité 
des  documents  publiés,  l'abondance  des  commentaires,  est  un  des  plus 
importants  travaux  de  M.  Tamizey  de  Larroque. 

Pierre  de  Nolhac. 


223.  —  Madame  Gnyon,  sa  vie,  sa  doctrine  et  son  influence,  d'après  les 
écrits  originaux  et  des  documents  inédits,  par  L.  Guerrier,  professeur  au  lycée 
d'Orléans,  docteur  ès-lettres.  Paris,  Didier,  1881,  in-8°  de  bi5  p.  prix  :  7  fr.  5o. 

«  Il  y  a  bientôt  deux  cents  ans  que  Mme  Guyon  est  célèbre  ;  elle  n'est 
pas  encore  connue.  »  Ainsi  débute  la  Préface  de  M.  Guerrier.  L'auteur 
continue  en  ces  termes  :  «  On  sait  généralement  que  ce  fut  une  mysti- 
que, qui  parut  à  la  fin  du  xvir8  siècle,  et  qui  entraîna  Fénelon.  Quant 
aux  événements  si  variés  de  sa  vie,  à  ses  pensées  intimes,  à  ses  écrits,  à 
son  influence,  on  ne  les  connaît  pas.  »  Il  ajoute  que  ces  choses,  intéres- 
santes en  elles-mêmes,  le  sont  davantage  encore  par  la  place  qu'elles  oc- 
cupent dans  le  développement  des  idées  mystiques,  dans  les  préoccupa- 
tions de  la  fin  dn  grand  siècle  et  dans  l'histoire  religieuse  du  temps.  » 
On  aura  tout  de  suite  le  diapason  de  l'enthousiasme  du  biographe  dans 
cette  phrase  (p.  1)  :  «  Aussi  nous  a-t-il  semblé  utile  d'écrire  la  vie  de 
cette  sainte  et  noble  femme,  et  de  rendre  enfin  à  sa  mémoire  une  justice 
trop  longtemps  refusée  à  ses  vertus.  »  M.  G.,  résumant  son  livre  dans 
sa  Préface,  nous  montre  Mme  Guyon  édifiant  d'abord  sa  ville  natale 
«  par  une  piété  ardente  et  une  inépuisable  charité,  »  puis,  quittant  son 
pays  et  sa  famille  «  pour  s'en  aller  faire  aimer  Dieu  en  de  lointains  pays 
[en  Savoie,  au  bord  du  lac  de  Genève,  à  Turin,  à  Grenoble,  à  Verceil],  » 
et,  après  cinq  ans  d'une  vie  errante,  s'établissant  à  Paris  et  y  exerçant 
son  apostolat;  séduisant  chacun  «  par  son  esprit  et  sa  beauté  '  dans  sa 

1.  M.  G.  parle  très  souvent  de  l'extrême  beauté  de  Mm*  Guyon.  On  regrette  qu'il 


d'histoire  et  de  littérature  333 

jeunesse;  plus  tard,  par  sa  patience  inaltérable,  sa  simplicité,  sa  dou- 
ceur, ses  vives  lumières,  et  sa  parole  enflammée  ;  se  faisant  aimer  tour  à 
tour  de  Mme  de  Montbazon,  de  la  reine  d'Angleterre,  de  la  duchesse  de 
Longueville,  de  la  duchesse  de  Béthune,  de  Mmc  de  Maintenon,  des 
trois  filles  de  Colbert,  de  Mme  de  Miramion,  des  ducs  de  Beauvillier  et 
de  Chevreuse,  de  Fénelon,  en  un  mot,  selon  l'expression  de  M.  G. 
(p.  3),  «  de  ce  qu'il  y  avait  de  plus  grand  et  de  plus  vertueux  à  Paris  et  à 
la  cour  '.  » 

Reproduisons  ici  un  chaleureux  passage  de  la  Préface  (p.  3)  : 
«  Quand  vinrent  les  persécutions  et  les  mauvais  jours,  Vincennes  et  la 
Bastille,  ses  amis,  sûrs  de  sa  foi  et  de  ses  vertus,  lui  restèrent  fidèles  ;  et 
Fénelon,  plutôt  que  de  l'abandonner,  n'hésita  point  à  affronter  cette 
mémorable  controverse  qui  devait  tenir,  pendant  deux  années  entières, 
Rome,  Versailles,  la  France  et  l'Europe  en  suspens.  On  est  à  se  deman- 
der si  Thistoire  offre  un  autre  exemple  d'une  si  éclatante  et  si  solennelle 
discussion.  C'est  de  l'amour  de  Dieu  qu'on  dispute  :  quel  sujet  !  Et  quels 
adversaires  !  Au  premier  rang,  Fénelon  et  Bossuet  ;  derrière  eux,  Leib- 
nitz2  et  Malebranche,  avec  Nicole,  le  P.  Lami,  Bourdaloue,  La  Bruyère 
et  Fléchier;  le  roi,  la  cour,  presque  tous  les  évêques  dans  un  camp;  tous 
les  cœurs  dans  l'autre  ;  Rome  prise  pour  juge  et  restant  deux  ans  pour 
décider  ;  et  pour  finir,  la  gloire  au  vaincu.  » 

M.  G.  nous  apprend  (p.  5)  que  l'analyse  des  doctrines  et  des  discus- 
sions a  été  faite  sur  les  écrits  mêmes  de  Mme  Guyon,  de  Molinos,  de  Fé- 
nelon et  de  Bossuet,  qu'il  a  énoncé  la  doctrine.de  l'Eglise  d'après  les 
écrits  les  plus  autorisés  et  que  de  savants  théologiens  l'ont  éclairé  de 
leurs  lumières  aux  endroits  particulièrement  délicats.  Pour  les  faits,  il  a 
eu  recours  aux  livres  de  Mme  Guyon,  aux  journaux  et  aux  mémoires  du 
temps,  principalement  aux  correspondances.  Il  déclare  avoir  trouvé  de 
précieux  documents  dans  les  Archives  départementales  du  Loiret,  dans 
les  manuscrits  de  la  bibliothèque  d'Orléans,  dans  les  collections  de  l'Ar- 
senal, de  la  Bibliothèque  nationale  et  surtout  du  séminaire  de  Saint- 
Sulpice. 

La  préface  se  termine  ainsi  (p.  6)  :  «  Quant  à  l'auteur,  il  n'a  qu'un 
mot  à  dire  :  c'-est  qu'il  a  cherché  à  faire,  sur  un  important  et  difficile 
sujet,  un  livre  sérieux,  dont  la  lecture  ne  fût  pas  trop  fatigante  ;  il  a 

n'ait  pas  donné,  en  tête  du  volume,  une  reproduction  de  son  portrait  de  jeune  femme, 
conservé  au  musée  de  Montargis.  On  le  regrette  d'autant  plus,  que,  pour  me  servir 
des  propres  expressions  du  biographe  (p.  32,  note  i),  «  le  portrait  gravé  dans  la  suite 
d'Odieuvre,  et  qui  la  représente  à  l'âge  de  44  ans,  ne  donne  plus  l'idée  de  ce  qu'elle 
avait  été  dans  sa  jeunesse.  » 

1.  M.  G.  vante  surtout  en  Mmc  Guyon  (p.  4)  «  cette  mystérieuse  sérénité  qui  lui 
faisait  dire,  au  milieu  des  plus  terribles  épreuves  :  Le  ciel  est-il  plus  paisible  que 
moi? 

2.  Sic.  Le  t  est  de  trop.  Le  grand  philosophe  signait  toujours  :  Leibni^.  Plus  loin, 
l'auteur  adopte  cette  dernière  orthographe.  Puisque  nous  en  sommes  aux  minuties, 
demandons-lui  pourquoi  il  écrit  (p.  i5i)  Havlai  pour  Harlay? 


334  REVUE  CRITIQUE 

cru,  après  de  grands  maîtres,  que  l'histoire  est  une  œuvie  d'art  autant 
que  d'érudition.  » 

Le  livre  de  M.  G.  est  à  la  fois  une  étude  d'histoire  et  de  philosophie 
religieuse.  Je  toucherai  le  moins  possible  aux  questions  théologiques,  ne 
voulant  pas  me  fourvoyer  dans  un  pays  qui  m'est  inconnu,  et  je  donne- 
rai toute  mon  attention  au  récit  de  la  vie  de  «  la  grande  mystique  du 
xvne  siècle  en  France.  » 

Jeanne-Marie  Bouvier  de  La  Motte  naquit  à  Montargis  le  i  3  avril 
1648.  M.  G.  décrit  fort  bien  la  jolie  ville  qui  fut  le  berceau  de  son  hé- 
roïne, les  divers  couvents  où  s'écoula  son  enfance  (Bénédictines,  Ursu- 
lines,  Dominicaines).  Il  ne  décrit  pas  moins  bien,  en  s'aidant  des  sincè- 
res et  curieux  mémoires  rédigés  par  Mme  Guyon  pour  son  confesseur  ', 
le  caractère  de  la  jeune  fille  (p.  17)  :  «  cette  âme  ardente  et  agitée, 
pleine  de  dons  éclatants,  d'aspirations  généreuses  et  de  vertus,  mais  ou- 
verte à  toutes  les  influences,  et  emportée  à  tous  les  vents  du  ciel,  parce 
qu'on  aura  négligé  de  développer  en  elle  ces  facultés  maîtresses,  qui 
sont  à  la  fois  la  lumière,  la  force  et  la  dignité  de  la  vie  :  la  raison  et  la 
volonté.  »  Après  nous  avoir  fait  connaître  la  jeune  fille,  il  nous  fait  con- 
naître la  jeune  femme.  Jeanne  fut  mariée  (janvier  1664)  avec  un  riche 
gentilhomme  de  Montargis,  Jacques  Guyon,  écuyer,  seigneur  de  Ghes- 
noy  et  de  Champoulet.  Elle  n'avait  pas  encore  seize  ans,  et  il  en  avait 
trente-huit.  Ce  mariage  ne  devait  pas  être  heureux.  L'époux  «  rude  et 
lourd  »  n'était  en  aucun  point  digne  de  la  jeune  fille  si  distinguée  et  si 
spirituelle  qui  lui  avait  été  confiée.  Il  y  avait,  en  outre,  dans  la  maison 
de  la  rue  du  Four-Dieu,  une  belle-mère  «  bizarre,  irritable  et  dure,  avec 
qui  personne  ne  put  jamais  s'accorder.  »  M.  G.  retrace  avec  une  sym- 
pathie communicative  les  tourments  des  tous  les  instants  qu'eut  à  subir 
la  jeune  femme,  ces  continuels  coups  d'épingle  qui  sont,  à  la  longue, 
plus  intolérables  que  des  coups  de  poignard.  Avec  lui,  nous  plaignons 
de  tout  notre  cœur  Mme  Guyon,  et  nous  maudissons  sans  réserve  son 
mari  et  surtout  sa  belle-mère,  ï'injusta  noverca  de  Virgile.  Aux  détails 
sur  la  jeune  mariée  succèdent  les  détails  sur  son  séjour  à  Paris,  sur  sa 
grave  maladie  2,  sur  sa  liaison  avec  la  duchesse  de  Béthune-Charost, 
sœur  du  surintendant  Foucquet,  internée  à  Montargis,  comme  Marie 
de  Meaupeou,  leur  mère,  sur  l'entrée  de  Mme  Guyon  dans  la  vie  mysti- 
que, sur  ses  austérités  3,  sur  son  nouveau  voyage  à  Paris,  sur  la  petite 

i.  La  vie  de  MweJ.  M.  B.  de  La  Motte-Guion  (sic),  écrite  par  elle-même,  Cologne, 
1720. 

2.  M.  G.  s'indigne  plaisamment  (p.  35)  contre  les  médecins  de  Mœe  Guyon  qui  la 
saignèrent  à  outrance  :  «  Les  médecins  s'employèrent  avec  énergie;  ils  lui  tirèrent 
quarante-huit  palettes  de  sang  en  sept  jours.  Elle  n'en  avait  plus  qu'ils  en  voulaient 
tirer  encore,  et,  l'ayant  presque  tuée,  ils  déclarèrent  qu'il  n'y  avait  plus  d'espoir.  » 
Voir  sur  l'abus  que  de  tout  temps  les  médecins  français  ont  fait  de  la  saignée  la  Cor- 
respondance littéraire  (édition  de  M.  Maurice  Tourneux,  t.  IV,  p.  120).  Grimm  dé- 
clare que  nos  médecins  «  sont  décriés  pour  cela  dans  toute  l'Europe.  » 

3.  Nous  lisons  (pp.  42-43)  :«  Mm>  Guyon  s'était  aisément  détachée  du  monde,  et 


D  HISTOIRE    ET    DE    I.ITTKR  \TURK 


3^5 


vérole  qui  lui  enleva  toute  la  beauté  dont  elle  était  si  fière  ',  sur  le  P.  La 
Combe,  Barnabite,  natif  de  Thonon,  au  diocèse  de  Genève,  qui  fut  son 
directeur,  et  qui  occupa  une  si  grande  place  dans  sa  vie,  sur  la  mort  de 
son  mari  (21  juillet  1676),  sur  son  séjour  à  Gex,  à  Thonon  2,  à  Turin,  à 
Grenoble  \  à  Marseille,  à  Alexandrie,  à  Gênes,  à  Verceil,  sur  le  Moyen 
court,  petit  livre  écrit  à  Thonon  avant  les  Torrents,  imprimé  à  Greno- 
ble au  commencement  de  168 5,  dont  cinq  éditions  s'enlevèrent  en  peu 
de  jours,  et,  à  cette  occasion,  sur  la  doctrine  renfermée  dans  les  deux 
opuscules,  sur  le  quiétisme  représenté  par  Falconi,  par  Malaval  et  par 
Molinos,  sur  l'arrivée  à  Paris  de  Mme  Guyon  *,  sur  son  entrevue  avec 
M.  de  Harlay,  archevêque  de  Paris,  sur  son  emprisonnement  et  sa  mise 
en  liberté,  sur  ses  premières  relations  avec  Fénelon  et  Mme  de  Mainte- 
non,  sur  son  influence  à  Saint-Cyr,  sur  ses  entretiens  avec  Nicole,  l'abbé 
J.-J.  Boileau,  Bossuet  et  sur  les  conférences  d'Issy,  sur  la  seconde  cap- 


surtout  de  son  mari  ;  elle  mit  plus  de  temps  à  se  détacher  d'elle-même.  Pourtant  elle 
ne  s'épargnait  pas.  Elle  se  donnait  tous  les  jours  la  discipline,  avec  des  instruments 
armés  de  fer;  elle  portait  des  ceintures  de  crin,  se  fouettait  avec  des  orties,  se  dé- 
chirait avec  des  ronces,  mettait  des  pierres  dans  ses  souliers,  de  l'absinthe  dans  sa 
bouche,  de  la  coloquinte  dans  s'a  nourriture  :  elle  n'en  avait  jamais  assez.  » 

1.  Mme  Guyon  s'accusait  de  trop  tenir  à  cette  beauté,  mais  ses  confesseurs,  dit- 
elle,  loin  de  la  blâmer,  nattaient  cette  faiblesse.  «  Ils  savaient  sans  doute,  »  ajoute 
agréablement  M.  G.  (p.  4.S),  «  excuser  un  peu  de  vanité,  dans  une  si  belle  pénitente, 
tant  ils  en  connaissaient  d'autres,  qui  étaient  plus  vaines,  sans  aucun  motif.  » 

2.  MraB  Guyon  resta  plus  de  deux  ans  chez  les  Ursulines  de  Thonon.  Ce  fut  là, 
comme  elle  le  déclare  elle-même,  qu'elle  écrivit  son  livre  des  Torrents,  au  commen- 
cement de  i683.  Michelet  (Le  prêtre,  la  femme  et  la  famille,  ch.  vu),  s'est  double- 
ment trompé  en  faisant  composer  ce  livre  «  à  Annecy,  aux  Nouvelles  Converties.  » 
Les  Nouvelles  Converties  étaient  à  Gex,  et  Mm   Guyon  ne  résida  jamais  à  Annecy. 

3.  M.  G.  consacre  de  piquantes  pages  à  l'évêque  Etienne  Le  Camus  et  à  son 
clergé  (pp.  82,  83).  Là,  il  s'est  servi  de  la  correspondance  de  Le  Camus  avec  M.  de 
Pontchâteau.  Ce  fut  à  Grenoble  qu'en  quelques  mois  M"1'  Guyon  écrivit  (p.  87)  son 
explication  sur  l'Ecriture-Sainte,  publiée  depuis  en  vingt  volumes.  M.  G.  emprunte 
à  l'auto-biographie  de  son  héroïne  diverses  informations  sur  la  manière  dont  elle 
écrivait  ses  inspirations,  «  la  main  ne  pouvant  presque  suivre  l'esprit  qui  dictait,  » 
et  la  vitesse  étant  si  grande  «  que  le  bras  m'enfla  et  devint  tout  roide.  »  Que  l'on 
s'étonne,  après  cela,  du  nombre  effrayant  de  volumes  laissés  par  M"'  Guyon  et  que 
M.  G.  a  eu  le  mérite  de  lire  jusqu'au  bout  ! 

4.  Cette  arrivée  est  du  21  juillet  1686.  Le  cardinal  de  Bausset  (Histoire  de  Féne- 
lon) fait  à  tort  revenir  M™'  Guyon  en  1687.  Michelet  (Louis  XIV  et  la  révocation 
de  Pédit  de  Nantes)  place  le  séjour  de  Mme  Guyon  à  Paris  entre  les  années  1670  et 
1680.  Il  en  fait,  à  ce  moment,  «  une  veuve  de  vingt  ans,  »  quand  elle  en  avait  trente- 
huit.  Plusieurs  écrivains  ont  ainsi  notablement  rajeuni  Mm*  Guyon.  M.  G.  reprend 
plusieurs  fois  encore  le  cardinal  de  Bausset  et  Michelet  (toujours  de  compagnie). 
C'est  ainsi  que  (p.  284),  il  substitue,  pour  le  sacre  de  Fénelon,  la  date  du  10  juillet 
à  la  date  du  10  juin,  donnée  par  le  premier,  et,  comme  prélat  assistant,  l'évêque  d'A- 
miens, à  l'évêque  de  Chartres,  désigné  par  le  second.  De  même  (p.  457),  il  rappelle 
que  de  Bausset  fait  mourir  le  P.  La  Combe  dès  iôgq  et  que  Michelet  le  fait  mourir 
plus  vite  encore  (Le  prêtre,  la  femme  et  la  famille,  ch.  vu).  La  vérité  est  que  le  Père 
La  Combe  ne  mourut  qu'en  ï 715,  à  jb  ans. 


336  REVUK    CRITIQUE 

tivité  de  Mme  Guyon  ',  sur  la  lutte  entre  l'évêque  de  M  eaux  et  l'arche- 
vêque de  Cambrai,  lutte  à  propos  de  laquelle  l'auteur  signale  des  écrits 
et  des  circonstances  jusqu'à  présent  négligés  ou  inconnus  et  complète, 
sans  les  reproduire,  les  récits  qu'on  peut  lire  ailleurs,  sur  les  persécu- 
tions qu'eurent  à  subir  le  P.  La  Combe  (mis  à  Vincennes),  Mme  Guyon 
(mise  à  la  Bastille),  les  principaux  amis  de  Fénelon  (exilés  de  la  cour), 
enfin  sur  les  dernières  années,  la  maladie  et  la  mort  (9  juin  171 7)  de 
celle  à  qui  Ton  peut  reprocher  bien  des  imprudences  et  des  exagérations, 
mais  qui  doit  nous  trouver  profondément  indulgents,  car,  suivant  le  joli 
mot  de  la  fin  (p.  5i5),  «  il  est  juste,  après  tout,  de  pardonner  quelque 
chose  à  ceux  dont  le  seul  tort  est  de  vouloir  trop  aimer  Dieu.  » 

M.  Guerrier  nous  avait  promis  une  étude  sérieusement  faite  et  qui  ne 
fût  pas  d'une  pénible  lecture  2.  Il  a  tenu  parole  et  tous  ses  lecteurs  pen- 
seront —  ou  plutôt  ont  déjà  pensé  (car  le  présent  article  paraît  trop  tard 
pour  prédire  un  succès  déjà  constaté)  —  tous  ses  lecteurs,  dis-je,  ont  déjà 
pensé  qu'il  n'y  a  pas  dans  son  livre  moins  d'art  J  que  d'érudition  K 

T.  de  L. 

1.  De  Vincennes,  Mme  Guyon  fut  transportée  chez  les  Filles  de  Saint-Thomas  à 
Vaugirard  où  elle  fut  cruellement  traitée.  Voir  la  description  de  ses  souffrances  tirée 
d'une  de  ses  lettres  inédites  au  duc  de  Ghevreuse  (p.  32 1,  note  2).  Ces  lettres,  comme 
beaucoup  d'autres  documents  dont  M.  G.  a  tiré  parti  le  premier,  appartiennent  à  la 
bibliothèque  de  Saint-Sulpice. 

2.  Loin  d'être  aride,  l'étude  de  M.  G.,  généralement  attrayante,  devient  même 
parfois  amusante.  L'auteur  mêle  à  ses  récits  une  foule  de  mots  heureux,  spirituels. 
Citons-en  quelques-uns  :  «  Les  religieuses  étaient  sous  le  charme...,  les  religieux 
encore  plus...  »  {Préface,  p.  2).  —  Le  prédicateur  Séraphin  «  bon  homme  au  fond, 
qui  mangeait  et  buvait  largement,  pour  mieux  prêcher  la  pénitence,  et  dévora,  pen- 
dant un  carême,  plus  de  cent  pistoles  à  l'archevêque  de  Paris  »  (p.  145).  —  Sachet, 
curé  de  Saint-Gervais,  «  le  directeur  préféré  des  âmes  tendres.  Etait-il  menacé  de 
l'apparence  d'un  rhume,  toutes  les  dévotes  se  mettaient  à  lui  préparer  un  bouillon, 
et  il  allait  en  prendre  un  peu  partout,  afin  de  ne  pas  faire  de  jalouses  »  (p.  i53).  — 
Le  futur  cardinal  Le  Camus  «.  manœuvra  avec  une  habileté  sans  égale,  tendant 
amoureusement  sa  voile  à  tous  les  vents  qui  lui  venaient  de  Rome,  et  abaissant, 
jusqu'à  le  cacher,  le  pavillon  des  libertés  gallicanes,  sur  le  vaisseau  qui  portait  sa 
fortune»  (p.  243).  —  «  Le  scandale  [de  l'intimité  de  M5r  de  Harlay  avec  la  duchesse 
de  Lesdiguières]  était  plus  grand  que  le  péché,  à  l'âge  où  était  l'archevêque  »  (p.  286). 
—  «  Une  créature...  qui  vous  porte  le  poing  sur  la  hanche,  quand  elle  ne  vous  le 
met  pas  sous  le  nez...  »  (p.  021,  note  2).  —  Je  ne  retrouve  pas  la  page  où,  à  propos 
de  l'opuscule  de  Mme  Guyon,  M.  G.  a  mis  (peut-être  sans  préméditation)  cet  autre 
bon  mot  :  «  Les  Torrents  se  répandirent  plus  librement.  » 

3.  Ùart,  en  certains  passages,  se  montre  un  peu  trop.  La  phrase  affecte  parfois  la 
forme  du  vers,  comme  celle-ci  (p.  84)  :  «  tout  ce  que 

Le  temps  jaloux  emporte  ou  flétrit  de  son  aile.  » 
C'est  sans  doute  une  faute  d'impression  qui,  dans  la  même  page,  place  Mme  Guyon 
«  au  milieu  de  la  verdure  des  fleurs.»  Je  suppose  que  l'auteur  a  voulu  dire  :  au  mi- 
lieu de  la  verdure  et  des  fleurs.  A  côté  de  quelques  taches,  brillent  des  morceaux 
remarquables,  tels  que  l'éloge  de  Mme  de  Maintenon  (p.  191),  l'éloge  de  Fénelon 
vaincu  et  acceptant  si  noblement  la  défaite  qui  devient  plus  glorieuse  qu'une  vic- 
toire (p.  467).  M.  G.  dit,  au  sujet  de  la  mort  de  Fénelon  (p.  48g)  :  «  Le  monde 
perdait  une  des  plus  belles  âmes  qui  aient  jamais  paru  sur  la  terre.  » 

4.  Indiquons  deux  ou  trois  fautes  d'impression  :  Juillet  1671  pour  juillet   1 68 1 


D'HISTOIRE    ET    Dlï    LITTÉRATUKB  337 

CHRONIQUE 

FRANCE.  —  Ernest  Bersot  avait  désiré  que  M.  Edmond  Scherer  tirât  de  ses 
écrits  deux  volumes;  le  premier  a  déjà  paru  et  renferme  les  Qiiestions  d'enseigne- 
ment; le  second  paraît  aujourd'hui,  sous  un  titre  que  Bersot  avait  lui-même  indi- 
qué et  qui  en  marque  bien  le  caractère  (Un  moraliste,  études  et  pensées  d'Ernest 
Bersot.  Hachette.  In-8°,  lxxxviii  et  38o  p.  avec  une  photographie  de  Bersot).  «  Pour 
cet  ouvrage  comme  pour  le  précédent,  dit-  M.  Scherer,  j'ai  eu  le  concours  le  plus 
précieux,  celui  de  M.  Delérot,  que  le  défunt  avait  lui-même  associé  à  ma  tâche  et 
qui  en  a  partagé  tous  les  soins  avec  moi.  «L'ouvrage  est  précédé  d'une  Notice  sur  la 
vie  et  les  travaux  de  Bersot,  due  à  M.  Scherer;  on  trouve  réunis  dans  cette  notice  les 
souvenirs  épars  dans  les  notices  parues  au  lendemain  de  la  mort  de  Bersot,  ainsi  que 
des  renseignements  que  la  famille  a  mis  à  la  disposition  de  M.  Scherer  ;  on  y  remar- 
quera les  lettres  dans  lesquelles  Bersot,  avant  et  après  son  admission  à  l'Ecole  nor- 
male, racontait  à  ses  parents  les  événements  de  sa  studieuse  existence,  ses  impressions 
et  ses  projets,  des  extraits  de  sa  correspondance  avec  Cousin,  etc.  ;  à  la  fin  de  sa  no- 
tice, M.  Scherer  a  reproduit  le  récit  des  derniers  jours  de  Bersot,  fait  par  M.  Paul 
Reclus.  Les  morceaux  contenus  dans  le  volume  sont  les  suivants  :  Du  bonheur  (à 
propos  de  la  «  Philosophie  du  bonheur  »  de  M.  Janet,  pp.  1-28);  Du  plaisir  et  de  la 
douleur  (pp.  28-43)  ;  La  chrétienne  de  nos  jours  (à  propos  de  l'ouvrage  du  même  titre, 
de  l'abbé  Bautain.  pp.  44-81);  M.  Ernest  Renan  (pp.  82-  101);  De  la  médecine  en 
littérature  (pp.  jo2-i33);  Michelet  (à  propos  du  livre  «  La  Mer  »,  pp.  1 84+1 5a); 
Jean-Jacques  Rousseau  et  Saint-Marc  Girardin  (extrait  de  l'introduction  au  livre 
posthume  de  Saint-Marc  Girardin  intitulé  a  J.-J.  Rousseau,  sa  vie  et  ses  œuvres  », 
pp.  153-170)  ;  Voltaire  (à  propos  des  «  Lettres  inédites  »  recueillies  par  M.  de  Cay- 
rol, pp.  171-210);  Montaigne  (extrait  d'un  rapport  sur  un  concours  ouvert  en  1868 
par  l'Académie  des  sciences  morales  et  politiques,  pp.  21 1-225)  ;  Versailles  (pp.  226- 
238)  ;  Arcachon  (pp.  239-230);  Excursion  dans  le  Midi  (pp.  251-274);  Lettre  sur  la 
botanique  (pp.  275-291);  Discours  prononcé  au  banquet  des  anciens  élèves  du  lycée 
de  Bordeaux  (pp.  292-296);  Charles  de  Rémusat  (pp.  296003);  Michelet  (pp.  304- 
3i3);  Arnold  Scherer  (pp.  3i4-3ig);  Pensées  (pp.  321-379). 

—  Le  8e  fascicule  du  Dictionnaire  des  antiquités  grecques  et  romaines,  publié  sous 
la  direction  de  MM.  Ch.  Daremberg  et  Edm.  Saglio  (Hachette,  pp.  1121-1280,  avec 
gravures),  va  de  la  fin  du  mot  chorus  au  mot  cena;  il  renferme  les  articles  sui- 
vants :  chous,  chrysographia,  chytra,  chytrinda,  ciborium,  ciconia,  cilicium,  cilliba, 
cinctus,  cingula,  cingulum,  circinus,  circitor,  citharista,  citharoedus,  clathri,  clava, 
clementia,  clibanus,  coactilia,  coccum,  cochlea,  cochlear,  cochlearium,  codicilli  (E. 
Saglio);  chronographia  (Ch.  Em.  RueUe);  chrysargyrum,  circumscriptor,  civitas, 
classis,  cliens,  cloacarium,  codex  accepti  et  depensi  (G.  Humbert)  ;  chrysocolla  et 


(p.  63);  de  Bermans,  gouverneur  de  la  Bastille,  pour  de  Besmaux  (p.  1 55,  note  1); 
Dubens,  pour  Dutens  (p.  385,  note  1).  Voici  la  seule  erreur  de  quelque  gravité  que 
je  relève  en  tout  le  livre  :  M.  G.  (p.  I*5a)  fait  rédiger  par  l'abbé  Boileau  les  ordon- 
nances de  M«r  de  Harlay.  Cet  abbé  rédigea  seulement  les  ordonnances  du  successeur 
de  Mcr  de  Harlay,  le  cardinal  de  Noailles.  Voir  les  Mémoires  de  l'abbé  Legendre, 
p.  217;  YEssai  sur  la  vie  et  les  ouvrages  de  J.-J.  Boileau,  p.  10.  On  pourrait  trou- 
ver trop  sévères  certaines  appréciations  (pp.  3oo  et  suiv.)  de.la  conduite  de  Bossue t 
dans  l'affaire  du  quiétisme,  mais  je  me  suis  interdit  toute  incursion  sur  ce  ter- 
rain. 


338  REVUE    CRITIQUE 

cinnabaris  (Alfred  Jacob);  chrysophoria  (P.  Foucart)  ;  cibaria  (pp.  1141-1169;  cet 
art.,  le  plus  considérable  du  fascicule,  sur  la  manière  dont  se  nourrissaient  les  an- 
ciens, a  pour  auteur  M.  le  Dr  Eug.  Fournier);  cibaria  militum  et  clamor  (Masque- 
lez);  cilicarcha  (G.  Perrot)  ;  cisium  et  clabularis  (G.  Lafaye);  cista  (Emm,  Fernique); 
cista  mystica  et  cistophori  (Fr.  Lenormant);  cisterna  et  cloaca  (Ed.  Guillaume);  clas- 
siarius  centurio  et  classis  (A.  Héron  de  Villefosse);  clavus  (L.  Heuzey);  clipeus 
(Maurice  Albert);  codex  Justinianeus,  codex  Theodosianus,  Codices  Gregovianus  et 
Hermogenianus  (F.  Baudry)  ;  l'art,  circus  est  signé  de  trois  noms,  ceux  de  MM.  J.  !.. 
Pascal,  Bussemaker  et  E.  Saglio;  l'art,  chorus,  terminé  dans  les  premières  pages  de 
ce  vme  fascicule,  est  de  MM.  F.  Castets  et  Gaston  Boissier;  deux  directeurs  de  la 
«  Revue  critique  »,  trop  tôt  enlevés  à  la  science  et  à  leurs  amis,  Ch.  Graux  et  C.  de 
la  Berge,  ont  donné  deux  articles  à  ce  fascicule  :  chrysographia  (Gh.  Graux)  et  clas- 
siarii  (C.  de  la  Berge). 

—  M.  Julien  Vinson  a  fait  paraître  dans  la  «nouvelle  collection  illustrée»  que  publie 
l'éditeur  Léopold  Cerf,  un  volume  sur  Les  Basques  et  le  pays  basque  (in-8°,  vin  et 
148  p.,  1  franc).  Ce  volume  n'est,  comme  le  dit  M.  V.,  qu'un  tableau  sommaire, 
une  esquisse  à  larges  traits  ;  l'auteur  a  voulu  faire  «  une  œuvre  de  vulgarisation,  né- 
cessairement écourtée,  inévitablement  incomplète  et  rapide  »  (p.  vin)  ;  nous  le  re- 
commandons néanmoins  à  nos  lecteurs,  car  il  est  fort  intéressant,  et  renferme,  mal- 
gré sa  brièveté,  une  foule  de  détails  curieux;  M.  Vinson  a  passé  douze  ans  dans  le 
pays  basque,  il  connaît  la  langue,  il  y  a  recueilli  beaucoup  de  chansons  populaires 
inédites  et  il  prépare  un  volume  sur  la  Littérature  orale  basque.  Le  livre  se  divise 
en  sept  chapitres  :  dans  le  premier  (pp.  9-3o),  M.  Vinson  décrit  l'aspect  du  pays  bas- 
que et  nous  renseigne  sur  ses  productions,  ses  cultures,  son  industrie,  sa  population 
(955,886  personnes),  sur  l'émigration  des  Basques  vers  l'Amérique  du  Sud.  Le 
deuxième  chapitre  (pp.  3 1-60)  renferme  un  aperçu  de  l'histoire  religieuse,  civile  et 
politique  du  pays  basque;  M.  Vinson  y  ajoute  quelques  pages  sur  les  fueros.  Il  est 
question,  dans  le  troisième  chapitre  (pp.  61-69),  de  la  langue  du  pays;  M.  V.  esquisse 
d'une  façon  générale  les  principaux  faits  de  la  grammaire  basque.  Dans  le  quatrième 
chapitre  (pp.  70-81),  M.  V.  examine  le  type,  le  caractère  et  les  aptitudes  des  Bas- 
ques; il  laisse  de  côté  le  problème  de  l'origine  de  la  race  euscarienne,  a  qui  demeure 
tout  entier  irrésolu  ».  Il  décrit  dans  le  cinquième  (pp.  82-uo)  les  habitations,  les 
mœurs,  les  coutumes,  les  cérémonies,  les  jeux  et  les  danses,  les  pastorales  des  Bas- 
ques. Vient  ensuite  un  chapitre  (vr,  pp.  111-122)  sur  la  religion,  la  superstition  et 
la  sorcellerie;  on  y  trouvera  le  résumé  des  détails  de  la  procédure  faite  par  le  con- 
seiller Pierre  de  Lancre  et  le  président  d'Espaignet  contre  les  sorciers  du  Labourd 
en  1609.  Le  dernier  chapitre  concerne  la  littérature  basque  (pp.  123-145);  M.  Vin- 
son y  donne  la  traduction  de  trois  contes  :  les  Trois  Vérités,  le  Curé  et  la  Tabatière,  et 
de  trois  chansons  populaires.  Blanche  palombe,  Sérénade  et  la  Couturière  ;  la  traduction 
de  ces  chansons,  aussi  littérale  que  possible  et  faite  d'après  les  variantes  les  plus 
complètes  et  les  plus  vulgaires,  est  suivie  d'une  imitation  libre  en  vers  français,  qui 
peut  être  chantée  sur  les  mélodies  originales;  M.  Vinson  donne  trois  des  airs  les 
plus  populaires  et  reproduit  le  texte  basque  des  premiers  couplets.  Une  liste  des 
principaux  livres  à  consulter  sur  le  pays  basque  (au  lieu  de  Landde,  lire  «  Lande  ») 
termine  le  volume. 

—  'Une  nouvelle  revue  mensuelle,  dont  le  titre  est  L'enseignement  secondaire  des 
jeunes  filles,  paraît  à  la  librairie  Léopold  Cerf  (Paris,  rue  de  Médicis,  i3).  Elle  «traite 
tout  ce  qui  intéresse,  à  quelque  degré  que  ce  soit,  l'enseignement  des  jeunes  filles- 
Nôtre  premier  devoir  —  lisons-nous  dans  le  programme  de  ce  recueil  —  sera  de 
fournir  à  nos  lecteurs  les  documents  officiels  et  de  les  tenir  au  courant  des  eiïorts 


d'histoire  et  de  littérature  339 

faits  pour  l'exécution  de  la  loi.  Nous  n'oublierons  pas  la  revue  des  examens,  ni  la 
monographie  des  établissements  spéciaux.  Nous  ferons  une  grande  place  à  ces  déli- 
cats problèmes  de  pédagogie  féminine  qui  préoccupent  si  justement  l'opinion  publi- 
que. Nous  nous  sommes  assuré  sur  ce  point  le  concours  des  personnes  les  plus 
compétentes.  La  discussion  des  programmes  et  des  questions  de  personnes  ne  nous 
laissera  pas  indifférents.  Désireux  aussi  d'être  immédiatement  utiles  à  ceux  qui  nous 
liront,  nous  comptons  publier  sur  des  matières  spéciales  et  particulièrement  diffici- 
les, telles  que  l'économie  domestique,  l'hygiène  appropriée  à  la  femme,  les  questions 
juridiques  qui  l'intéressent,  des  cours  susceptibles  de  servir  de  modèle.  Nous  ne 
nous  interdirons  pas  non  plus  l'étude  des  questions  historiques  qui  se  rattachent  à 
notre  sujet,  et  de  toutes  les  entreprises  faites  à  l'étranger.  Chaque  numéro  contien- 
dra un  compte-rendu  bibliographique  à  l'usage  des  jeunes  filles.  »  Le  directeur  de  la 
Revue  est  M.  Camille  Sée,  assisté  d'un  comité  consultatif  qui  se  compose  de 
MM.  Carnot,  E.  Legouvé,  Henri  Martin  et  Germain  Sée.  Les  quatre  premiers  fasci- 
cules de  la  Revue  (juillet-août-septembre-octobre)  renferment  les  articles  suivants  : 
juillet  (pp.  i-56):  Raoul  Frary,  Les  premiers  résultats;  Maurice  Vernes,  La  durée  des 
études  d'après  la  loi  et  le  conseil  supérieur;  E.  Dally,  Cours  d'éducation  corporelle; 
H.  Marion,  Les  motifs  du  conseil  supérieur;  P.  Dupuy,  L'Ecole  normale  de  Sèvres; 
G.  W.,  Un  préjugé  sur  l'enseignement  des  langues  étrangères  en  France;  P.  D.,  Le 
certificat  d'aptitude  à  l'enseignement  secondaire  dans  les  lycées  et  collèges  des  jeunes 
filles  et  sa  valeur;  L.  A.,  Des  lycées  de  jeunes' filles  en  Italie.  —  Août  (pp.  57-i36)  : 
Cam.  Sée,  Ce  qu'a  voulu  le  législateur;  P.  Dupuy,  L'Ecole  normale  de  Sèvres; 
E.  Dally,  Cours  d'éducation  corporelle  (suite);  H.  Marion,  Les  motifs  du  conseil 
supérieur  (second  rapport);  M.  S..  L'éducation  des  jeunes  filles  à  Port-Royal  ;  Louis 
Enault,  Les  arts  industriels,  exposition  de  l'Union  centrale.  —  Septembre 
(pp.  137-200)  :  Charles  Bigot,  Le  but  de  l'instruction;  P.  Dupuy,  L'Ecole  normale 
de  Sèvres  ;  Mlle  C.  Ladreyt,  L'enseignement  secondaire  des  jeunes  filles  au  concours 
Pereire  (fragment  d'un  mémoire  couronné);  Brédif,  Allocution  prononcée  aux  cours 
secondaires  de  jeunes  filles,  à  Grenoble;  Louis  Enault,  Les  arts  industriels;  L.  A., 
Des  lycées  de  jeunes  filles  en  Italie.  —  Octobre  (pp.  201-296)  :  Ch.  Bigot,  Le  but  de 
l'instruction  ffin);  A.  M.,  Le  lycée  de  jeunes  filles  de  Rouen;  Hippeau,  L'enseigne- 
ment secondaire  des  jeunes  filles  au  concours  Pereire;  René  Samuel,  L'école  Char- 
lotte à  Berlin.  —  Le  prix  de  l'abonnement  est  de  9  francs  pour  toute  la  France; 
chaque  numéro  sera  vendu  séparément  1  franc. 


SOCIÉTÉ  NATIONALE  DES  ANTIQUAIRES  DE  FRANCE 


Séance  du  4  octobre  1882. 

M.^  Guillaume  informe  la  Société  qu'il  a  découvert  des  substructions  sous  la  salle 
des  Cariatides,  au  Louvre  ;  ces  substructions  paraissent  remonter  à  Charles  V. 

M.  Flouest,  associé  correspondant,  communique,  de  la  part  de  M.  Cournault,  asso- 
cié correspondant,  le  dessin  d'un  casque  et  d'une  boucle  d'oreille  de  l'époque  gauloise  ; 
ces  objets  ont  été  trouvés  à  Breuvannes  (Haute-Marne). 

M.  de  Marsy,  associé  correspondant,  lit  une  note  de  M.  Hugo  Loersch,  professeur 
à  l'université  de  Bonn,  sur  une  cloche  municipale  d'Aix-la-Chapelle.  Cette  cloche  est 
datée  du  18  février  12S1  ;  elle  est  sortie  des  ateliers  de  Jacques  de  Croiselles,  fondeur 
artésien. 

ACADÉMIE   DES   INSCRIPTIONS  ET  BELLES- LETTRES 


Séance  du  ig  septembre  1882. 
M.  Oppert  continue  la  lecture  de  son  mémoire  sur  le  prétendu  tombeau  de  Cyrus 


34°  REVUE    CRITIQUE    DHIST01RE   ET    DE   LITTÉRATURE 

et  la  situation  de  l'antique  Pasargade.  Il  développe  les  raisons  qui  empêchent  de 
placer  Pasargade  à  Murghâb  et  qui  obligent,  selon  lui,  à  chercher  l'emplacement  de 
cette  ville  au  sud-est,  et  non  au  nord,  de  Persépolis  (Istâkhr).  Les  détails  qui  nous 
ont  été  transmis  sur  la  campagne  d'Alexandre  dans  l'Inde  et  particulièrement  sur  le 
chemin  suivi  par  lui  au  retour  ne  peuvent  s'expliquer  autrement.  Les  historiens  rap- 
portent qu'Alexandre,  revenant  de  l'Inde,  passa  à  Pasargade  avant  d'arriver  à  Persé- 
polis. C'est  le  contraire  qui  aurait  dû  arriver,  si  Pasargade  était  Murghâb. 

M.  Germain  communique  à  l'Académie  un  chapitre  encore  inédit  de  son  Histoire 
de  l'Université  de  Montpellier,  concernant  la  faculté  de  théologie.  Cette  faculté  ne 
figure  pas  dans  la  bulle  d'érection  des  écoles  de  Montpellier  en  Université,  donnée 
par  le  pape  Nicolas  IV,  en  date  du  26  octobre  1289;  cette  bulle  n'embrasse  que  les 
facultés  de  droit,  de  médecine  et  des  arts.  Mais  la  théologie  n'en  était  pas  moins  en- 
seignée dans  les  cloîtres,  et  particulièrement  dans  ceux  des  moines  mendiants.  Le 
pape  Martin  V,  afin  de  contrebalancer  par  la  diffusion  des  idées  orthodoxes  l'influence 
toujours  persistante  de  l'hérésie  albigeoise,  au  sein  d'une  population  où  l'activité  in- 
tellectuelle, développée  plus  qu'ailleurs  par  un  contact  incessant  avec  le  personnel 
des  écoles,  lui  semblait  offrir  certains  dangers,  conféra,  par  une  bulle  du  17  décem- 
bre 1421,  l'institution  canonique  à  la  faculté  de  théologie.  En  fait,  l'existence  de  cette 
faculté  remontait  plus  haut;  le  roi  Jean,  pendant  une  visite  à  Montpellier,  en  1 35 1, 
l'avait  le  premier  honorée  de  sa  protection.  Le  pape,  en  sanctionnant  officiellement 
l'existence  de  la  nouvelle  faculté,  l'incorpora  à  l'école  de  droit  fondée  vers  i36o,  à 
Montpellier  par  le  jurisconsulte  Placentin.  On  professait  à  la  fois,  dans  cette  école, 
en  vertu  d'un  privilège  dont  ne  jouissait  pas  encore  l'Université  de  Paris  elle-même, 
le  droit  civil  et  le  droit  canonique.  Légistes  et  décrétistes  devaient  trouver  profit  à 
cette  union,  à  une  époque  où  le  clergé  mêlait  assidûment  aux  études  théologiques 
les  études  juridiques.  «  Nous  ordonnons,  porte  la  bulle  de  Martin  V,  que  ladite  faculté 
de  théologie  ne  fasse  qu'une  seule  et  même  université  avec  les  facultés  de  droit  civil 
et  de  droit  canonique  de  Montpellier,  un  seul  et  même  corps,  ayant'  pour  chef  un 
recteur,  dont  l'élection  continuera  d'avoir  lieu  conformément  aux  anciens  statuts  uni- 
versitaires. Nous  prescrivons  également  que  les  maîtres,  docteurs,  licenciés,  bache- 
liers et  étudiants  de  la  faculté  de  théologie  soient  soumis  à  la  juridiction  que  confè- 
rent au  recteur  les  statuts  et  coutumes  duement  approuvés;  qu'ils  obéissent  à  ses 
monitions  et  mandements,  comme  les  docteurs,  les  licenciés,  les  bacheliers  et  les  étu- 
diants en  droit  canonique  et  en  droit  civil,  et  que,  toutes  les  fois  que  ladite  faculté  de 
théologie  y  aura  intérêt,  ils  participent  aux  assemblées  et  aux  délibérations,  de  con- 
cert avec  les  autres  docteurs,  licenciés  bacheliers  et  étudiants;  sous  la  réserve  ex- 
presse, néanmoins,  que,  de  même  que  les  docteurs  en  droit  canonique  ou  en  droit 
Civil  ne  peuvent  être  recteurs,  les  maîtres  en  théologie  ne  pourront  le  devenir  à  leur 
tour,  non  plus  que  les  religieux  des  ordres  mendiants,  de  quelque  grade  ou  condi- 
tions qu'ils  soient...  Donné  à  Rome,  à  Saint-Pierre,  le  seizième  jour  avant  les  calen- 
des de  janvier,  la  cinquième  année  de  notre  pontificat.  »  N'est-il  pas  piquant,  dit 
M.  Germain,  de  voir  une  faculté  de  théologie,  au  lieu  de  primer  comme  ailleurs  en 
France,  subordonnée  ainsi,  à  Montpellier,  à  une  école  de  droit,  de  par  le  pape  lui- 
même?  —  Théologiens  et  juristes  firent,  aux  premiers  jours,  selon  les  dipositions  de 
la  bulle  pontificale,  assez  bon  ménage.  Mais  des  conflits  ne  tardèrent  pas  à  se  pro- 
duire, et  il  fallut,  dans  l'intérêt  des  études,  s'entendre  sur  les  droits  respectifs  des 
deux  facultés.  De  cet  accommodement  résulta,  en  1428,  un  ensemble  de  statuts,  qui 
devint  pour  la  faculté  de  théologie  une  sorte  de  code  spécial.  Elle  y  apparaît  repré- 
sentée par  son  doyen,  lequel  prêtait  serment,  une  fois  élu,  au  recteur  de  l'université 
de  droit.  Il  veillait  sur  les  privilèges,  libertés  et  honneurs  de  sa  Faculté,  et  y  exer- 
çait, en  outre,  une  censure  dogmatique.  Il  avait  le  pas  sur  le  prieur  de  la  faculté  de 
droit  dans  tous  les  actes  concernant  la  faculté  de  théologie;  mais  le  prieur  de  la  fa- 
culté de  droit  primait,  à  son  tour,  dans  tous  les  exercices  de  la  faculté  de  droit.  Dans 
les  solennités  universitaires  ou  autres,  le  prieur  de  la  faculté  de  droit  et  le  doyen  de 
faculté  de  théologie  alternaient,  chaque  année,  pour  la  préséance.  Les  provinciaux  des 
ordres  mendiants  ne  venaient  qu'après  eux.  M.  Germain  analyse  et  explique  le  texte 
encore  inédit  de  ces  statuts  de  1428,  qu'il  regarde  comme  un  des  plus  curieux  règle- 
ments scolaires  du  moyen  âge,  et  n'hésite  pas,  dit-il,  à  y  découvrir  «  une  des  plus 
amples  victoires  qui  aient  été  alors  universitairement  remportées  sur  les  ordres 
mendiants.  » 

Ouvrage  présenté,  de  la  part  de  l'auteur,  par  M.  Alexandre  Bertrand  :  —  Decombe 
(Lucien),  Trésor  du  jardin  de  la  pré  fecture  à  Rennes  (Rennes,  1882,  in-8°). 

Julien  Hayet. 


Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 


Le  Puy,  imprimerie  Marckessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  a3 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 


N»  44  —  30  Octobre  —  1882 

Sommaire  s  224.  Loth,  Essai  sur  le  verbe  néoceltique. —  225.  Villari,  Machiavel 
et  son  temps.  —  226.  D'Haussonville,  Le  salon  de  Mm0  Necker.  —  227.  Hirzel, 
Albert  de  Haller.  —  Chronique.  —  Académie  des  Inscriptions. 


224.  —  Essai  sur  le  verbe  néoceltique  en  irlandais  ancien  et  dans 
les  dialectes  modernes,  son  caractère  et  ses  transformations,  par  J.  Loth, 
agrégé  de  l'Université,  élève  diplômé  de  l'Ecole  des  Hautes-études.  Paris,  Leroux, 
1882.  In-8°,  vi-92  pages. 

Dans  ce  mémoire  on  trouve  réunies  pour  la  première  fois  les  formes  si 
variées  que  la  conjugaison  nous  offre  dans  les  dialectes  néo-celtiques,  de- 
puis les  temps  les  plus  anciens  jusqu'à  nos  jours.  On  y  voit  rangés  en  bon 
ordre  un  grand  nombre  de  renseignements  curieux  empruntés  aux  dia- 
lectes modernes  et  qu'on  chercherait  inutilement  dans  la  Grammatica  ceU 
tica.  La  facilité  qu'offre  à  l'étude  ce  méthodique  ensemble  de  documents 
fera  bien  accueillir  le  travail  de  M.  Loth,  même  par  ceux  qui  ne  parta- 
geraient pas  complètement  et  sur  tous  les  points  ses  doctrines. 

M.  L.  a  été  frappé,  avec  raison,  de  la  ressemblance  qu'offrent  avec  cer- 
taines formes  du  pronom  personnel  certaines  désinences  verbales  bre- 
tonnes. Ainsi,  en  vannetais,  «  de  moi  »  se  dit  ahan-an,  «  que  j'aime  »  e 
câr-an;  a  de  nous  »  ahan-amb,  a  que  nous  aimions  »  e  câr-amb]  ;  le 
pronom  personnel  suffixe  de  la  première  personne,  pronom  complé- 
ment, est,  au  singulier  et  au  pluriel,  identique  à  la  désinence  corres- 
pondante de  l'indicatif  présent  de  la  conjugaison  dite  personnelle;  il  n'y 
a  de  différence  ni  au  point  de  vue  consonantique  ni  au  point  de  vue  vo- 
calique. 

Voici  d'autres  exemples  où  la  ressemblance  persiste  entre  les  pro- 
noms suffixes  et  les  désinences  correspondantes  de  la  conjugaison  dite 
personnelle,  mais  où  les  voyelles  diffèrent  : 

i°  ah-anasv.  de  toi  »,  e  câr-es  «  que  tu  aimes  »;  ïs  caractéristique  du 
pronom  suffixe  de  la  seconde  personne  du  singulier  termine  la  seconde 
personne  du  singulier  du  présent  de  l'indicatif; 

2*  ahan-oh  «de  vous»,  e  car-  eh  que  vous  «aimiez»;  Vh  finale  du  pro- 
nom suffixe  de  la  seconde  personne  du  pluriel  paraît  à  la  désinence  de 
la  seconde  personne  du  pluriel  de  l'indicatif  imparfait  ; 

3°  int,  «  eux,  ils  »,  pronom  absolu  ou  sujet  de  la  troisième  personne 
du  pluriel,  e  cârant  «  qu'ils  aiment  »,  e  cârent  «  qu'ils  aimaient  », 

I.  Guillome,  Grammaire  française-bretonne,  Vannes,  i836,  p.  3o,  63. 

Nouvelle  série,  XIV.  18 


342  RKVUli    CRITIQUE 

e  câreint  «  qu'ils  aimeront  »  ;  le  pronom  se  termine  en  nt  comme  la 
personne  correspondante  de  la  conjugaison  dite  personnelle  '. 

Il  y  là  un  sujet  fécond  d'études.  On  ne  peut  trop  féliciter  M.  L.  de 
l'avoir  abordé.  Toutefois,  il  me  semble  en  avoir  quelque  peu  exagéré 
l'importance  quand  il  a  écrit  : 

«  La  vue  et  le  sens  net  de  l'élément  pronominal  dans  le  verbe  est 
«  un  besoin  impérieux  chez  tous  les  peuples  ario-européens.  Ce  qui 
«  nous  paraît  caractérisque  chez  les  néo-celtes,  c'est  que  cet  élément 
«  semble  simplement  agglutiné  au  verbe,  qu'ils  peuvent  le  préfixer,  le 
«  suffîxer,  le  séparer,  l'employer  à  différents  cas  avec  la  plus  grande  fa- 
ce cilité;  c'est  qu'ils  ont  une  sorte  de  prédilection  pour  la  construction 
«  verbale  qui  consiste  à  faire  du  thème  verbal  le  sujet  et  du  pronom 
«  l'objet  »  (p.  33). 

Ces  doctrines  sont,  à  mon  avis,  trop  absolues.  Si  la  vue  et  le  sens  net 
de  l'élément  pronominal  dans  le  verbe  était  un  besoin  impérieux  pour 
tous  les  peuples  ario-européens,  il  devait  par  exemple  être  senti  par  les  La- 
tins. Or,  chez  les  Latins,  il  ne  pouvait  être  que  bien  rarement  satisfait. 
Chez  eux,  à  l'exception  de  quelques  premières  personnes  du  singulier 
en  m,  les  désinences  verbales,  comme  celles  d'amo,  amas,  amat,  amamus, 
amatis,  amant,  ne  correspondent  en  rien  aux  pronoms  des  première, 
seconde  et  troisième  personnes  au  singulier  ni  au  pluriel.  Les  Irlan- 
dais du  ixe  siècle  ne  devaient  guère  être  plus  heureux.  Je  vais  mettre  en 
regard  des  formes  de  l'indicatif  présent  de  la  première  conjugaison  les 
pronoms  correspondants  : 
Conjugaison  conjointe  :  Conjugaison  absolue  :  Pronoms  : 

Porter. 
Sing.  ire  p.       dobiur,  berimm,  me,  «  moi.  » 

beri,  tê,  «  toi  » 

berid,  ê  «  il,  »  si  «  elle,  » 

ed  au  neutre 
PI.      ire  p.       doberam,  bermme,  ni,  «  nous  » 

berthe,  sib  «  vous  » 

berit,  ê  «  ils  »  2. 

De  ces  douze  formes,  une  seule,  la  première  personne  du  singulier  de  la 
conjugaison  absolue,  offre  «  la  vue  et  le  sens  net  de  l'élément  pronomi- 
«  nal  dans  le  verbe...  besoin  impérieux  chez  tous  les  peuples  ario  euro- 
ce  péens.  »  La  désinence  de  berimm  «  je  porte  »  offre  avec  le  pronom 


1.  Guillome,  ibid.,  p.  3i,  33,  63.  Cet  auteur  donne  pour  le  pronom  pluriel  de  la 
3*  personne  l'orthographe  ind,  forme  dialectale  moderne  du  plus  ancien  int  ou  intt, 
comme  l'écrit  Larmery,  Dictionnaire  français-breton,  La  Haye,  1756,  p.  ipt,  col. 
2,  au  mot  «  il  ».  Le  moderne  ind  se  trouve  déjà  du  reste  chez  Larmery  au  mot 
«.  eux  »,  p.  146,  col.  2. 

i.  Les  formes  abrégées  que  revêtent  ces  pronoms  quand  d'absolus  ils  deviennent 
suffixes  sont  ;  sing.  ire  p.  m,  2e  p.  r,  3  p.  d,  t,  u,  i,  e;  pluriel  ir0  p.  »,  2e  p.  ib, 
3*  au  datif  ib,  à  l'accusatif  u.  o. 


Doni 

ner. 

ire  p. 

dobiur, 

2e  p. 

dobir, 

3e  p. 

dobeir, 

ire  p. 

doberam, 

2e  p. 

doberid, 

3e  p. 

doberat. 

d'histoire  et  de  littérature  343 

mê,  «  je,  moi  »  une  ressemblance  évidente.  Pour  les  onze  autres  dési- 
nences verbales,  l'analogie  avec  les  pronoms  est  au  moins  douteuse.  La 
ressemblance  que  la  désinence  de  la  troisième  personne  du  singulier  de 
la  conjugaison  absolue,  berid,  offre  avec  le  pronom  neutre  correspon- 
dant, ed,  ne  peut  être  considérée  que  comme  fortuite  '. 

Presque  tous  les  éléments  de  cette  conjugaison  appartiennent  au  do- 
maine commun  de  la  conjugaison  indo-européenne,  comme  plusieurs 
savants,  et  en  dernier  lieu  M.  Windisch,  l'ont  clairement  démontré.  Les 
flexions  personnelles  spéciales  aux  langues  celtiques  et  empruntées  clai- 
rement aux  pronoms  n'apparaissent  en  vieil  irlandais  que  dans  la  con- 
jugaison d'une  des  racines  du  verbe  substantif,  et  à  une  seule  personne, 
la  seconde  :  at  «  tu  es  »,  comparez  tu  «  toi  »  ;  adib,  «  vous  êtes  »,  com- 
parez sib,  «  vous  ».  Le  pronom  pluriel  suffixe  de  la  première  personne, 
omp  en  léonard,  amb  en  vannerais,  le  pronom  pluriel  absolu  de  la  troi- 
sième personne,  tat  en  irlandais,  int,  ind  en  vannetais,  wynt  en  gallois, 
que  l'analogie  a  fait  tirer  chacun  de  la  désinence  verbale  correspondante, 
sont  de  formation  moderne  ;  ils  ne  se  rencontrent  pas  dans  les  monu- 
ments néo-celtiques  les  plus  anciens. 

Ainsi  le  rôle  considérable  de  l'élément  pronominal,  dans  le  verbe  néo- 
celtique moderne  est  de  date  récente.  Suivant  moi  M.  L.  a  raison  de 
constater  le  rôle  prédominant  de  cet  élément  dans  la  conjugaison 
actuelle,  il  n'a  pas  établi  l'existence  de  cet  élément  dans  l'ancienne  con- 
jugaison du  verbe  néo-celtique. 

Je  ne  considère  pas  non  plus  comme  démontrée  la  prédilection  que 
M.  L.  attribue  aux  Néo-celtes  pour  la  construction  verbale  qui  «  con- 
«  siste  à  faire  du  thème  verbal  le  sujet  et  du  pronom  l'objet.  »  C'est  à 
cette  thèse  que  se  rattache  une  doctrine  nouvelle  de  M.  Loth.  Suivant  lui, 
le  passif  celtique  n'est  autre  chose  qu'un  substantif  formé  à  l'aide  du  suf- 
fixe -dri,  -ôri  (pp.  85-86).  En  vannetais,  le  passif  se  construit  avec 
le  pronom  suffixe  ou  complément,  qui  alors  devient  infixé,  exem- 
ple :  em  garer  (lisez  em  harer),  hin  garer,  hi  garer  (lisez  hi 
harer),  je  suis  aimé,  il  est  aimé,  elle  est  aimée.  M.  L.  propose  pour 
les  autres  dialectes  bretons  une  formation  analogue  qui  don- 
nerait suivant  lui  :  am  gareur  «  je  suis  aimé,  »  hen  gareur  «  il 
est  aimé  »,  hi  gareur  «  elle  est  aimée  »;  lisez  am  c'hareur  «  je  suis 
aimé,  »  et  non  am  gareur;  he  c'hareur  «  elle  est  aimée  »  et 
non  hi  gareur  :  les  lois  phonétiques  du   breton  l'exigent  ainsi  2.  Ce 


i.  On  pourrait  cependant  soutenir  que  la  désinence  de  la  troisième  personne  ab- 
solue du  singulier,  berid,  est  étymologiqueraent  identique  au  d  qui  est  une  des 
formes  du  pronom  suffixe  à  la  même  personne  du  même  nombre.  La  correspondance 
entre  la  désinence  verbale  et  le  pronom  existerait  dans  deux  formes  sur  douze. 

2.  Il  y  a  déjà  dans  la  Vie  de  sainte  Nonne,  xve  siècle,  des  exemples  de  cette  com- 
binaison du  verbe  passif  avec  un  pronom  infixe,  Grammatica  celtica,  2e  édition, 
pp.  074,  375,  53o.  Pour  ce  qui  concerne  l'action  exercée  aujourd'hui  parles  pronoms 
infixés  de  la  première  personne,  am,  et  de  la  troisième  personne  du  féminin  hi,  lie, 


344  REVUE   CRITIQUA 

qu'il  y  a  aussi  de  certain,  c'est  qu'on  trouve  le  passif  conjugué  avec  le 
pronom  absolu  :  me  a  garer,  me  a  gareur  ',  et  que  là  le  pronom  a  dû, 
au  moins  à  l'origine,  avoir  valeur  du  sujet. 

Aux  yeux  de  M.  L.,  ce  qui  prouve  que  le  verbe  passif  est,  dans  les 
langues  néo-celtiques,  un  substantif  (p.  85),  c'est  que  ce  verbe  en  bre- 
ton n'a  pour  chaque  temps  qu'une  forme,  celle  qui,  dans  l'opinion  reçue, 
est  la  troisième  du  singulier.  Mais  cette  doctrine  de  M.  L.  se  heurte  à  de 
graves  difficultés.  L'une  est  que  dans  le  vieil  irlandais  le  passif  a  deux 
formes  pour  chaque  temps,  et  que  de  ces  deux  formes,  l'une  pour  le  sin- 
gulier carthir  =s  *  caratir  «  il  est  aimé,  »  l'autre  pour  le  pluriel  caritir 
r=*  carantir  «  ils  sont  aimés  »,  la  seconde  se  distingue  de  la  première 
par  une  modification  de  désinence  qui  appartient  à  la  conjugaison  et 
non  à  la  déclinaison. 

Une  autre  difficulté  est  que  le  déponent  du  vieil  irlandais  a  les  flexions 
du  passif  avec  trois  personnes  et  deux  nombres  à  chaque  temps,  d'où  il 
y  a  lieu  de  conclure  qu'originairement  le  passif  irlandais  a  eu  aussi  à 
chaque  temps  trois  personnes  et  deux  nombres  à  chaque  personne.  Sui- 
vant M.  L.,  le  verbe  déponent  irlandais  est  une  création  grammaticale 
postérieure  à  la  date  où  l'irlandais  s'est  séparé  du  breton.  Mais  cette 
hypothèse  est  contredite  par  le  déponent  gallois  gwyr  «  il  sait  »  (Gram- 
matica  celtica,  2e  édition,  p.  602),  en  comique  gwor  (ibidem,  p.  6o3), 
en  moyen  breton  goar  (ibidem,  p.  604),  de  la  racine  vid,  dont,  en  vieil 
irlandais,  le  futur  àénontntfessur  «  je  saurai  »  et  le  parfait  déponent 
fetar  «  je  sais  »  sont  d'usage  si  fréquent 2. 

Il  n'est  donc  pas  établi  à  nos  yeux  que  l'on  doive  reconnaître  un  subs- 
tantif dans  la  forme  verbale  bretonne  que  les  grammairiens  ont  jusqu'ici 
considérée  comme  la  troisième  personne  du  singulier  du  passif. 

Ainsi  je  ne  partage  pas  sous  tous  points  les  doctrines  de  M.  Loth  qui 
me  paraît  avoir  subi  un  peu  trop  profondément  l'influence  du  vanne- 
tais,  c'est-à-dire  du  dialecte  breton  qu'il  a  eu  le  précieux  avantage  de 
parler  dès  son  enfance.  Mais  j'ai  été  heureux  de  trouver  dans  son  mé- 
moire, outre  un  tableau  complet  du  verbe  néo-celtique  qui  nous  man- 
quait jusqu'ici,  une  foule  d'observations  intéressantes  et  justes  sur  l'his- 
toire de  ce  verbe,  surtout  aux  époques  rapprochées  de  nous.  C'est  ce  qui 
fait  la  valeur  principale  de  son  travail.  Quant  aux  théories,  suivant  moi 
un  peu  absolues,  que  je  critique,  elles  perdraient  la  plupart  du  temps,  je 
crois,  ce  caractère,  si  l'auteur  avait  donné  plus  de  développement  à  l'ex- 


sur  la  consonne  initiale  du  verbe  suivant,  voyez  :  Guillome,  Grammaire  française- 
bretonne,  p.  1 3  i  ;  Le  Gonidec,  Grammaire  bretonne,  édition  La  Villemarqué,  p.  10, 
n  ;  Rotrenen,  Grammaire  française  celtique.  Rennes,  1738.  p.  i3. 

1.  Le  Gonidec,  Grammaire  bretonne,  e'dition  La  Villemarqué,  p.  37,  note  **;  cf. 
p.  53. 

2.  B.  Gueterbock  et  R.  Thurneysen,  Indices  glossarum  et  vocabulorum  hibemi- 
corum  quœ  in  Grammaticœ  Celticœ  editionc  altéra  explananiur,  p.  1 14,  aux  mots 
ro-fetar,  finnad. 


d'histoire  et  de  littérature  345 

pression  de  sa  pensée  en  évitant  l'excessive  concision  de  formules  trop 
courtes  avec  lesquelles  l'inexactitude  est  un  résultat  presque  inévitable. 
Qu'à  l'avenir  il  donne  à  son  exposition  plus  d'ampleur  '  et  il  n'aura  pas 
de  peine  à  justifier  les  espérances  que  les  amis  des  études  celtiques  font 
reposer  sur  son  début. 

H.  d'ARBOis  deJubainville. 


225. —  Pasquale  VlLLARI.  Rliccolo  Machiavclli  e  i  suoi  tempi  illustrât! 
con  nuuvi  document!.  Firenze,  successori  Le  Monnier.  1877-1882.  3  vol. 
in-8°. 

De  nombreuses  publications  relatives  à  Machiavel  ont  paru  dans  ces 
derniers  temps,  surtout  en  Italie  :  le  concours  ouvert  à  Florence  en 
1869,  à  l'occasion  des  fêtes  du  4e  centenaire  de  la  naissance  de  Machiavel, 
y  a  été  pour  quelque  chose,  mais  il  faut  chercher  la  cause  véritable  de 
l'intérêt  qui  s'attache  au  secrétaire  de  la  République  florentine  dans  la 
gravité  même  des  problèmes  politiques  et  sociaux  qui  se  posent  aujour- 
d'hui à  tous  les  esprits  sérieux  ;  on  a  senti  plus  fortement  le  besoin 
d'étudier  à  fond  les  actes  et  les  pensées  d'un  homme  dont  les  théories 
politiques  et  morales  ont  excité  à  la  fois  tant  de  séduction  et  tant  de 
répulsion.  Ces  théories,  il  faut  le  reconnaître,  quelque  jugement  qu'on 
porte  sur  elles,  ont  rompu  avec  toutes  les  traditions  du  moyen  âge  et 
préparé  la  conception  de  l'Etat  moderne.  C'est  à  un  point  de  vue  de 
critique  politique,  en  même  temps  que  de  critique  historique,  que 
M.  Pasquale  Villari  a  composé  son  ouvrage  sur  Machiavel,  dont  nous 
sommes  heureux  de  saluer  aujourd'hui  l'achèvement. 

Quel  est  le  point  de  vue  fondamental  de  l'ouvrage  de  M.  Villari?  C'est 
que,  pour  juger  avec  équité  le  caractère  politique  et  moral  de  Machiavel, 
il  faut  l'étudier  dans  ses  relations  avec  son  temps,  et,  si  je  pais  dire,  le 
replacer  dans  son  milieu.  Il  est  nécessaire  de  savoir  quelle  in- 
fluence ont  exercée  sur  son  esprit  les  conditions  politiques  et  morales 
de  son  temps  et  de  son  pays,  par  quels  actes  se  sont  manifestés  son 
génie  propre  et  ses  tendances  personnelles.  Les  moralistes  peuvent 
juger  ce  qu'il  a  pu  y  avoir  de  juste  ou  d'injuste,  de  louable  ou  de  blâ- 
mable dans  ses  doctrines  ;  le  philosophe  et  le  critique  trouvent  plus 
intéressant  d'étudier  les  causes  historiques  ou  psychologiques  qui  les  ont 
formées  et  les  expliquent.  C'est  ce  qu'a  fait  M.  V.,  et,  à  mon  sens,  avec 
une  réelle  supériorité.  Son  livre  n'est  ni  une  simple  biographie,  ni  un 
livre  d'apologie  ou  de  polémique  ;  c'est  une  œuvre  de  haute  critique  his- 


1.  Je  pourrais  aussi  lui  donner  le  conseil  de  s'adresser  à  un  imprimeur  plus  at- 
tentif à  la  corection  des  épreuves.  Jamais  je  n'ai  vu  une  collection  de  lettres  cassées 
comparable  à  celle  qu'offrent  les  pages  60  et  61.  Une  grande  partie  de  la  page  61  est 
littéralement  illisible. 


346  REVUE    CRITIQUE 

torique,  où  Machiavel  est  étudié  à  fond,  où  sa  vie,  ses  œuvres,  le  milieu 
où  il  s'est  développé  sont  soumis  à  un  minutieux  examen.  Il  est  vrai  que, 
sur  plus  d'un  point,  cette  étude  aboutit  à  une  justification  ;  dans  sa  con- 
clusion, l'auteur  exprime,  en  termes  enthousiastes,  sa  sympathie  pour  son 
héros  ;  l'étude  des  faits  n'en  est  pas  moins  conduite  avec  une  rigoureuse 
impartialité.  On  pourra  différer  de  jugement  avec  M.  V.,  mais  quicon- 
que  lira  attentivement  son  livre,  lui  reconnaîtra  le  mérite  d'avoir  placé 
Machiavel  dans  son  vrai  jour  ;  d'avoir  permis  à  chacun  de  se  former  un 
jugement  raisonné  sur  son  compte,  et  d'avoir  dissipé  un  certain  nombre 
de  préjugés  contraires  à  la  vérité  historique. 

L'ouvrage  s'ouvre  (t.  I,  i-3oo)  par  une  longue  introduction  sur  la 
Renaissance  italienne  examinée  au  point  de  vue  politique,  moral  et 
littéraire.  Cette  introduction  se  divise  en  quatre  chapitres.  Après  un 
aperçu  général  sur  la  Renaissance  (ch.  1),  l'auteur  étudie  successivement 
le  rôle  politique  et  social  de  chacun  des  principaux  Etats  italiens  :  Milan, 
Florence,  Venise,  Rome  et  Naples(ch.  11)  ;  puis  il  expose  le  mouvement 
littéraire  de  Pétrarque  à  Machiavel  (ch.  m.  M.  V.  aurait  dû  placer  ici  le 
tableau  du  mouvement  artistique,  qu'il  a  inséré  au  début  du  IIe  volume, 
et  qui  interrompt  fâcheusement  l'exposé  de  la  vie  de  Machiavel);  enfin  il 
résume  la  situation  politique  de  l'Italie  à  la  fin  du  xve  siècle  (ch.  iv). Cette 
introduction  est  déjà  un  livre,  qui,  à  lui  seul,  ferait  honneur  à  un  écri- 
vain. L'auteur  a  tenu  compte  de  toutes  les  recherches  récentes  dont  les 
événements  de  cette  période  ont  été  l'objet,  il  a  groupé  les  faits  dans  un 
tableau  lumineux,  et  les  a  jugés  avec  l'élévation  et  la  sérénité  d'esprit 
d'un  vrai  critique. 

On  a  reproché  à  cette  introduction  d'être  hors  de  proportion  avec 
le  reste  de  l'ouvrage  et  de  n'avoir  que  peu  de  rapports  avec  la  bio- 
graphie de  Machiavel.  Je  ne  partage  pas  cette  opinion.  L'objection 
aurait  de  la  force  si  M.  V.  n'avait  voulu,  faire  qu'une  simple  bio- 
graphie. 11  n'en  est  point  ainsi  :  son  plan  est  plus  large  et  plus 
complexe  :  cette  grande  étude  préliminaire  fournit  la  base  même  des 
jugements  qui  peuvent  être  portés  sur  Machiavel  comme  homme, 
comme  homme  d'état,  comme  écrivain. 

En  dehors  de  l'introduction,  l'ouvrage  se  compose  de  deux  livres 
correspondant  aux  deux  grandes  époques  de  la  vie  de  Machiavel  :  l'épo- 
que de  son  activité  politique  et  l'époque  de  son  activité  littéraire.  Le 
premier  livre,  comprenant  seize  chapitres,  contient  la  biographie  de 
Machiavel  depuis  sa  naissance  jusqu'à  la  restauration  du  gouvernement 
médicéen  en  i5  12,  restauration  qui  eut  pour  conséquence  la  destitution 
de  Machiavel  de  son  office  de  secrétaire  de  la  République,  et  son  éloi- 
gnement  des  affaires  publiques.  Le  second  livre,  comprenant  dix-huit 
chapitres,  s'étend  de  1 5 12  à  la  mort  de  Machiavel,  et  contient  l'examen 
des  ouvrages  politiques,  historiques  et  littéraires  composés  par  lui  dans 
cette  seconde  période  de  sa  vie;  période  d'inaction  au  point  de  vue  po- 
litique ;  période  malheureuse  pour  Machiavel,  mais  heureuse  pour  nous  ; 


d'histoire  et  de  littératurk  347 

c'est  elle  qui  a  donné  aux  lettres  italiennes  et  à  la  science  politique  un 
grand  écrivain  qui,  sans  ces  funestes  circonstances,  serait  resté  simple- 
ment le  fidèle  secrétaire  adjoint  d'une  république  destinée  à  périr. 

Je  n'ai  point  l'intention  de  faire  une  minutieuse  analyse  de  l'ou- 
vrage de  M.  V.  au  point  de  vue  des  faits  historiques  ;  car  tout  ce  qui  se 
rapporte  à  la  vie  et  aux  temps  de  Machiavel  est  généralement  connu  ;  je 
dirai  seulement  de  quelle  manière  M.  V.  a  apprécié  le  caractère  et  les 
œuvres  de  Machiavel  ;  aussi  bien  est-ce  là  ce  qui  fait  l'intérêt  principal 
de  son  livre. 

Les  tendances  politiques  de  Machiavel  ont  commencé  à  se  manifester 
dans  ses  ambassades.  M.  V.  les  expose  en  détail.  Il  met  en  lumière 
l'esprit  d'observation  de  Machiavel,  et  sa  disposition  à  ramener  ses  expé- 
riences à  des  théories  générales.  Son  ambassade  de  Romagne  en  i5o3, 
auprès  du  duc  de  Valentinois,  a  exercé  sur  son  esprit  une  influence 
particulièrement  forte.  M.  V.  démontre  (I,  405)  combien  il  est  faux  que 
Machiavel  ait  inspiré  les  cruautés  de  César  Borgia  ;  mais  il  est  vrai  qu'il 
fut  fortement  impressionné  par  l'énergique  volonté  de  ce  jeune  tyran,  qui 
ne  connaissait  point  d'obstacles  et  trouvait  toujours  pour  les  surmonter 
quelque  moyen,  bon  et  pervers,  mais  toujours  efficace.  Machiavel,  ayant 
toujours  devant  les  yeux  le  but  idéal  qu'il  se  proposait,  sans  se  préoccu- 
per de  la  perversité  des  moyens  employés  (personne,  d'ailleurs,  ne  s'en 
scandalisait  alors)  vit  en  César  «  le  type  représentatif  »  du  principe  li- 
bérateur de  l'Italie.  Nous  appelons  l'attention  des  lecteurs  sur  l'analyse 
que  M.  V.  a  donnée  dans  le  dernier  chapitre  du  1.  I  (II,  204  ss.)  de 
la  correspondance  échangée  par  Machiavel  avec  Francesco  Vettori,  créa- 
ture des  Médicis,  alors  ambassadeur  florentin  à  Rome.  Cette  correspon- 
dance a  la  plus  grande  importance,  non-seulement  pour  connaître  l'état 
d'âme  de  Machiavel  dans  les  douloureuses  disgrâces  qui  l'avaient  frappé, 
mais  aussi  pour  se  rendre  compte  de  la  fiévreuse  activité  d'esprit  avec 
laquelle  il  cherchait  constamment  la  solution  des  plus  grands  problè- 
mes politiques. 

Le  second  livre  commence  par  l'examen  des  principaux  écrits  politi- 
ques de  Machiavel.  L'auteur  expose,  à  ce  propos  (ch.  1),  quelques  consi- 
dérations sur  la  littérature  politique  du  moyen  âge  et  de  la  Renaissance  ; 
un  des  passages  les  plus  remarquables  est  le  parallèle  entre  Machiavel  et 
Guichardin,  écrivains  politiques. 

L'un  et  l'autre,  dans  l'examen  et  le  jugement  des  choses  humaines, 
ont  suivi  une  méthode  positive  et  ont  eu  un  but  pratique.  Mais  Ma- 
chiavel eut,  en  outre,  d'après  M.  V.,  une  qualité  qui  manqua  à  Guichar- 
din :  celle  de  «  voir  les  faits  sociaux  s'ordonner  en  un  admirable  unité 
organique  ;  d'en  considérer  toujours  le  côté  général,  de  les  synthétiser,  et 
de  les  ramener  à  un  système;  en  somme,  il  eut  un  idéal  objectif,  lequel 
fut  le  but  suprême  de  ses  observations  et  de  ses  théories  »  (II,  81,  82, 
92,  248,  etc.) 

Guichardin,  au  contraire,  est  un  observateur  peut-être  plus  précis, 


348  REVUE   CRITIQUE 

plus  patient,  plus  analytique  que  Machiavel  ;  c'est  un  grand  esprit  et  un 
penseur  puissant,  mais  il  ne  se  proposait  aucune  synthèse  générale  et 
n'avait  aucun  idéal  politique  vaste  et  absolu.  Sa  recherche  constante 
était  la  solution  utile  et  pratique  des  difficultés  qui  se  présentaient  mo- 
mentanément dans  la  vie  publique  ou  dans  la  vie  privée,  sans  du  tout 
s'occuper  d'un  passé  ou  d'un  avenir  éloignés  ;  et,  c'était  surtout  pour 
servir  ses  intérêts  personnels  qu:il  usait  des  préceptes  que  lui  avaient 
dictés  ses  longues  méditations  et  son  expérience  (II,  249). 

J'ajouterai  à  ces  observations  de  M.  V.  qu'il  est  encore  une  chose  qui 
dut  avoir  une  grande  influence  sur  les  idées  des  deux  écrivains  et  qui 
explique  fort  bien  leur  manière  différente  de  comprendre  la  politique  : 
c'est  la  dissemblance  de  leurs  conditions  sociales. 

Guichardin,  riche,  noble,  homme  de  cour,  gouverneur  de  province, 
fut  plus  à  même  d'étudier  le  monde  réel,  et  il  dut  souvent  reconnaître, 
dans  le  maniement  des  affaires,  l'inanité  des  théories  abstraites  et 
absolues.  Machiavel,  lui,  vivant  au  sein  d'une  société  beaucoup  plus 
restreinte  et  plus  ordinaire,  n'eut  d'autre  champ  d'observation  que  celui 
qu'il  se  créa  par  ses  propres  recherches  et  ses  propres  études.  —  En 
somme,  Guichardin  fut  surtout  homme  d'Etat,  tandis  que  Machiavel 
était  un  penseur  solitaire  et  spéculatif. 

Dans  le  chapitre  11,  M.  V.  fait  l'exposé  des  Discours  sur  les  Décades 
de  Tite-Live  ;  et,  dans  le  chapitre  m  qui  est  d'une  importance  capitale, 
il  fait  la  critique  de  ces  discours  ;  enfin,  dans  les  chapitres  iv  et  v 
qui  terminent  le  second  volume,  il  traite  du  Prince  et  des  jugements 
rendus,  à  propos  de  cet  ouvrage,  par  les  critiques  anciens  et  mo- 
dernes. 

Quelques  critiques  ont  cru  que  Machiavel  s'était  inspiré  principale- 
ment de  la  Politique  d'Aristote  ,•  mais  M.  V.  nous  démontre  (II,  275  et 
suivantes)  que  cette  opinion  est  en  partie  fausse,  et  en  partie  exagérée. 
Les  Grecs  et  les  Romains,  nous  dit-il,  se  faisaient  de  l'Etat  une  idée 
très  différente.  D'après  la  théorie  des  Grecs,  qui  est  celle  d'Aristote, 
toute  activité,  toute  morale  publique  ou  privée,  dépendait  de  l'Etat.  Les 
Romains,  eux,  tout  en  considérant  l'Etat  comme  une  grande  puissance, 
supérieure  à  tout  intérêt  particulier,  bornaient  son  activité  au  champ  de 
la  politique  et  de  la  guerre  ;  ils  en. excluaient  la  morale  privée  et  faisaient 
une  distinction  entre  celle-ci  et  le  droit  public.  La  conception  que 
Machiavel  se  fait  de  l'Etat  est  la  même  que  celle  des  Romains  ; 
il  est  très  important  de  le  savoir  pour  juger  équitablement  ses  théo- 
ries, lesquelles  ont  pour  unique  objet  l'art  de  gouverner  un  état, 
et  ne  prétendent  pas  être  des  préceptes  de  morale  ou  de  vertu. 
De  plus,  tandis  qu'Aristote  et  Machiavel  s'entendent  pour  étudier 
l'organisation  de  l'Etat,  au  moyen  de  la  méthode  historique  et  positive, 
et  considèrent  l'existence  de  cet  Etat  comme  un  fait  naturel,  et  non 
comme  une  prédétermination  divine,  ils  diffèrent  dans  le  résultat  de 
leurs  observations  :  «  Aristote,  lui,  cherche  ce  que  les  hommes  et  ceux 


d'histoire  et  de  littérature  349 

qui  les  gouvernent  devraient  être  ;  Machiavel  déclare  cette  recherche 
inutile,  et  veut  savoir  plutôt  ce  qu'ils  sont,  ou  ce  qu'ils  peuvent  être, 
sans  sortir  de  la  réalité  »  (II,  279). 

La  moralité  de  la  politique  de  Machiavel  est  une  question  qui  a  tou- 
jours soulevé  de  nombreuses  discussions,  et  que  les  pures  théories  de  la 
morale  abstraite  ne  pourront  jamais  résoudre.  Pour  nous,  il  nous 
semble  que  M.  V.  l'a  traitée  avec  une  rare  pénétration,  et,  si  nous  ne 
pouvons  affirmer  qu'il  ait  dit  le  dernier  mot  à  ce  sujet  (nous  ne 
savons  pas  si  jamais  quelqu'un  le  dira  après  lui),  la  faute  en  est  plus  au 
problème  qu'à  celui  qui  cherche  à  le  résoudre. 

M .  V.  ne  nie  pas  l'immoralité  d'un  grand  nombre  des  préceptes  de 
Machiavel  ;  il  ne  se  dissimule  pas  la  répugnance  qu'ils  excitent  souvent 
dans  la  conscience  des  honnêtes  gens.  Mais  il  recherche  la  cause  histori- 
que de  ces  théories,  et  veut  qu'elles  soient  jugées  d'après  elle.  —  11  est 
bien  évident  que  Machiavel  a  été  mû  par  un  sentiment  élevé  et  patrio- 
tique; il  désirait  ardemment  l'unité  de  l'Etat  et  l'organisation  de  la 
patrie.  Le  premier,  il  a  entrevu  ridée  de  l'Etat  moderne;  il  aurait  voulu 
mettre  un  terme  aux  théories  obscures  de  la  scolastique,  à  la  supréma- 
tie théocratique,  et  à  l'anarchie,  plaies  du  moyen  âge  ;  et  c'est  là  son 
plus  réel  et  plus  grand  mérite.  Mais  Machiavel,  par  suite  de  sa  condition 
dans  l'époque  de  transition  où  il  a  vécu,  est  tombé  dans  une  grave 
erreur  qui  eut  aussi  pour  cause  la  méthode  trop  étroite  et  trop  systéma- 
tique qu'il  a  suivie  dans  les  spéculations  de  sa  pensée.  Il  a  cru  que  la 
formation  d'un  Etat  était,  non  pas  le  résultat  nécessaire  d'une  évolution 
naturelle  et  inconsciente,  mais  pouvait  être  l'œuvre  personnelle  d'un 
législateur.  Celui-ci,  d'après  Machiavel,  n'est  pas  un  homme  ordinaire, 
mais  un  être  prédestiné  dont  la  mission  surpasse  de  beaucoup  celle  des 
autres  hommes;  aussi,  pour  juger  ses  actions,  ne  faut  il  pas  se  placer 
au  point  de  vue  de  la  morale  privée  ;  il  faut  les  regarder  comme  bonnes 
ou  mauvaises,  selon  qu'elles  sont  plus  ou  moins  propres  à  atteindre  le  but 
suprême  que  doit  avoir  tout  législateur,  c'est-à-dire  la  fondation  et  la 
conservation  de  l'Etat. 

J'ai  indiqué  ici  brièvement  ce  que  M.  V.  expose  en  plusieurs  pages 
qui  sont  un  admirable  essai  de  critique  positive.  Quelle  autre  chose 
pourrais-je  ajouter,  qui  ne  vienne  spontanément  à  l'esprit  de  tout 
lecteur?  Tous,  nous  voudrions  espérer  que  l'accord  de  la  morale  et 
de  la  politique  est  indissoluble  ;  mais  en  est-il  véritablement  toujours 
ainsi  ?  est-il  possible  qu'il  en  soit  ainsi?  Les  histoires  de  tous  les  temps 
et  de  tous  les  pays  abondent  en  contradictions,  souvent  inévitables, 
entre  la  raison  politique  et  la  morale  privée.  Il  faut  être  juste  :  ce  n'est 
pas  Machiavel  qui  a  inventé  cette  théorie.  Nous  le  considérons  comme 
un  grand  coupable  et  nous  nous  scandalisons  fort  ;  mais  qu'a-t-il  fait? 
Il  a  traduit  d'une  façon  crue  les  théories  qu'ont  adoptées,  quand  ils  en 
ont  eu  besoin,  avec  l'approbation  du  ciel  et  des  hommes,  presque  tous 
les  fondateurs  ou  gouverneurs  d'Etats,  et  cela,  tout  en  gravissant  les 


350  REVUE   CRITIQUE 

marches  des  autels,  ou  en  entonnant  des  hymnes  à  la  morale,  à  la  re- 
ligion, à  la  fraternité. 

Au  moins,  à  toutes  les  accusations  portées  contre  Machiavel,  on  ne 
pourra  pas  ajouter  celle  d'hypocrisie;  et,  par  le  but  élevé  auquel  il  a 
tendu,  il  mériterait  d'être  justifié  de  bien  d'autres  accusations  encore. 
L'amour  de  la  patrie,  de  la  liberté,  de  la  grandeur  de  l'Etat  était 
profondément  gravé  dans  son  cœur,  et  il  considérait  tout  intérêt  indi- 
viduel comme  bien  inférieur  ;  ce  fut  là  l'objet  final  de  tous  ses  écrits  et 
le  guide  constant  de  sa  politique. 

Lorsque,  après  la  chute  de  Soderini,  il  chercha  si  instamment  un 
emploi  auprès  des  Médicis  victorieux  (ce  qui  donna  lieu  contre  lui  à 
beaucoup  d'accusations  dont  M.  V.  le  défend  énergiquement  (II,  p.  1 85 
et  suivantes),  il  ne  renia  aucun  de  ses  principes,  et  exprima  toujours 
ouvertement  l'opinion  que  le  nouveau  gouvernement  médicéen,  rendu 
nécessaire  par  les  changements  de  la  situation  intérieure  et  extérieure, 
devait  s'appuyer  sur  le  peuple  et  sur  la  liberté.  En  1 5 1 5,  sur  l'ordre  du 
pape  Léon  X,  et  du  cardinal  Jules  de  Médicis  (plus  tard  pape,  sous  le 
nom  de  Clément  VII),  il  écrivit  un  discours  sur  les  Réformes  à  faire 
dans  l'Etat  de  Florence  ;  quoique,  d'après  M.  V.  (III,  6i),  le  dis- 
cours ait  peu  de  valeur  pratique  ou  scientifique,  il  a  cela  de  remarqua- 
ble que  l'auteur  s'efforce  d'y  réconcilier  la  prépondérance  des  Médicis 
avec  la  forme  républicaine,  et  qu'il  exhorte  les  chefs  actuels  à  restituer  au 
peuple,  à  leur  mort,  sa  pleine  et  entière  liberté.  Utopie  de  penseur 
idéaliste,  mais  qui  fait  honneur  au  caractère  de  l'homme  et  de  l'écrivain, 
ainsi  que  l'intégrité  et  la  loyauté  qu'il  conserva  toujours  dans  toutes  les 
fonctions  qu'il  remplit  ;  cela  prouve  combien  est  injuste  l'accusation  de 
perversité,  portée  avec  un  ton  solennel  et  tranchant  contre  Machiavel, 
par  l'illustre  marquis  Gino  Capponi  {Histoire  de  la  république  floren- 
tine, II,  368). 

Le  dialogue  De  l'art  de  la  guerre,  que  M.  V.  étudie  dans  le  chapi- 
tre vin,  est  un  complément  nécessaire  au  livre  du  Prince  et  aux  Dis- 
cours. La  profonde  influence  que  le  monde  romain  de  l'antiquité  avait 
exercée  sur  l'esprit  de  Machiavel,  se  fait  encore  sentir  dans  ce  traité, 
apologie  de  la  légion  romaine  qu'il  compare  à  l'infanterie  nationale, 
dont  il  souhaitait  vivement  la  réorganisation.  De  nos  jours,  des  hommes 
très  compétents  ont  reconnu  un  vrai  mérite  à  la  plupart  des  principes 
de  tactique  générale  de  Machiavel,  et  le  major  allemand  Jaehns  n'a  pas 
hésité  à  l'appeler  «  le  premier  classique  moderne  de  l'art  militaire  ». 
A  notre  avis,  le  traité  de  l'Art  de  la  guerre  a  principalement  une 
importance  politique,  surtout  lorsqu'on  le  rapproche  des  deux  traités 
dont  nous  avons  déjà  parlé. 

M.  V.  insiste  sur  cette  idée,  que  les  trois  ouvrages  répondent  à  une 
seule  et  même  conception  et  forment  un  grand  tout.  Dans  le  Prince, 
Marchiavel  montre  de  quelle  manière  un  conquérant  ou  un  législateur 
peut  fonder  l'unité  de  l'Etat;  dans  les  Discours  il  dit  quelles  vertus 


o'histoirk   kt   de  LITTÉRATURE  35  I 

conviennent  au  peuple  qui  veut  maintenir  dans  sa  patrie  la  liberté  et  la 
prospérité;  enfin,  dans  V  Art  de  la  guerre,  il  déclare  que  ce  sont  les 
armées  nationales  et  populaires  qui  peuvent  rendre  stables  les  libertés. 
«  Tel  est  le  progrès  que  suit  la  pensée  de  Machiavel  dans  ces  diffé- 
rents ouvrages.  Si  on  les  sépare  l'un  de  l'autre,  on  ne  sent  plus  leur 
unité,  et  on  perd  de  vue  leur  but  réel,  ce  qui  donne  lieu  aux  plus  fausses 
interprétations  »  (III,  38 1). 

Dans  les  chapitres  xn,  xm,  xiv,  M.  V.  a  consacré  aux  Histoires  flo- 
rentines, une  étude  longue  et  détaillée,  dont  nous  nous  contenterons 
de  donner  une  courte  idée.  Les  Histoires  florentines  de  Machiavel 
n'ont  rien  de  commun  avec  les  Chroniques  ou  les  Annales,  et  ne  sont 
pas  non  plus  une  pure  œuvre  d'art,  comme  les  autres  histoires  des  hu- 
manistes du  xve  siècle.  Nous  sommes  en  présence  d'une  nouvelle  con- 
ception. Machiavel  a  raconté  l'histoire  de  Florence  à  un  point  de 
vue  politique,  en  étudiant  les  raisons  et  les  conséquences  des  faits  ;  et  en 
cela  consistent  les  mérites  et  les  défauts  de  l'œuvre.  Il  puise  sans  scru- 
pule dans  les  récits  d'autres  écrivains,  tels  que  Flavio  Biondo  ou  Caval- 
canti,  et  les  copie  même  parfois,  mais  l'esprit  de  l'ouvrage,  et  la  forme, 
toujours  admirable,  sont  siens.  Il  est  certain,  pourtant,  que  Machiavel 
ne  se  contentait  pas  de  chercher  l'inspiration  auprès  de  ces  écrivains,  il 
étudiait  aussi  les  documents  historiques;  mais  il  s'assimilait  leur  contenu 
à  sa  guise,  supprimant,  changeant,  embellissant,  et  se  préoccupant  fort 
peu  de  l'exactitude  des  détails.  Mais  ces  défauts  historiques  sont  rache- 
tés par  une  narration  toujours  claire  et  pleine  de  vie,  où  tout  est  admira- 
blement adapté  pour  faire  ressortir  l'idée  de  l'auteur  sur  Futilité  politique 
de  l'histoire. 

Ceci  nous  ramène  à  une  nouvelle  comparaison  entre  Machiavel  et 
Guichardin,  comme  historiens.  M.  V.,  cette  fois,  n'hésite  pas  à  donner  la 
palme  au  second,  et  nous  croyons  qu'il  a  raison.  En  réalité,  VHis~ 
toire  d'Italie,  de  Guichardin,  bien  que  considérée  comme  aride  et  obs- 
cure par  un  grand  nombre  de  lecteurs,  est  une  œuvre  inimitable  par  la 
largeur  de  la  conception,  par  la  grande  connaissance  des  faits,  et  par  un 
examen  approfondi  de  la  réalité  des  choses.  Il  est  vrai  que  Ranke,  dans 
ses  études  critiques,  met  en  doute  l'autorité  historique  de  Guichardin, 
mais  M.  V.  répond  à  ses  accusations  d'une  façon  irréfutable,  dans  une 
excellente  note  qui  se  trouve  à  la  fin  du  volume  III,  pages  435  et  sui- 
vantes. 

L'étendue,  déjà  trop  longue,  de  cet  article,  ne  me  permet  pas  de  suivre 
M.V.  dans  l'étude  des  œuvres  littéraires  de  Machiavel;  mais  je  réclamerai 
encore  l'attention  du  lecteur  sur  le  jugement  de  la  comédie  La  Man- 
dragore (chapitre  x)  qui  est,  encore  aujourd'hui,  une  des  productions 
les  plus  originales  et  les  plus  caractéristiques  du  théâtre  italien.  Cette 
pièce  a  une  valeur  littéraire  et  dramatique  que  n'ont  pas  les  autres  comé- 
dies de  Machiavel,  et,  d'après  M.  V.,  elle  a,  grâce  à  son  caractère  social, 
une  importance  majeure.  Elle  est,  comme  on  l'a  dit,  «  la  comédie  d'une 


352  REVUE  CRITIQUE 

société  dont  le  Prince  est  la  tragédie  ».  C'est  un  tableau  de  mœurs 
palpitant  et  vivant,  où  le  réalisme  le  plus  grossier  est  racheté  par  une 
forme  exquise  et  par  un  grand  art. 

Disons  encore  deux  mots  à  propos  des  documents  publiés  en  appen- 
dice à  chacun  des  trois  volumes  de  M.  Villari,  ils  sont  au  nombre  d'en- 
viron i5o,  répartis  en  78  numéros,  presque  tous  inédits,  beaucoup  d'une 
réelle  valeur.  Notons  dans  le  premier  volume  une  lettre  de  Piero  Ala- 
manni,  ambassadeur  florentin  à  Milan  (3 1  mars  1494)  où  est  insérée  une 
phrase  qui  lui  fut  dite  par  Ludovic  le  Maure,  phrase  qui  peint  au  vif  le 
sentiment,  si  souvent  mis  en  doute,  de  ce  tyran  sur  les  choses  italiennes: 
«  Vous  me  parlez  toujours  de  l'Italie,  mais  moi  je  ne  l'ai  jamais  vue.  » 

Plusieurs  lettres,  écrites  à  Machiavel  par  des  employés  de  la  Chancel- 
lerie florentine,  pendant  qu'il  était  auprès  du  duc  de  Valentinois,  ren- 
ferment, en  un  langage  familier  et  souvent  peu  décent,  la  petite  chroni- 
que de  la  bureaucratie  florentine.  On  trouve  encore  dans  ce  premier  vo- 
lume deux  lettres  fort  intéressantes  d'Agostino  Vespucci,  écrites  de  Rome 
en  i5oi,  qui  renferment  une  peinture  très  vive  de  la  ville  des  Borgia,  et 
décrivent  en  un  style  ému  la  corruption  de  la  cour  et  de  la  cité. 

Dans  le  volume  II,  il  faut  noter  les  lettres  adressées  à  Machiavel  par 
Francesco  Vettori  (Rome.  i5i3-i5i5),  qui  font  pendant  à  d'autres  let- 
tres de  Machiavel  lui-même,  déjà  publiées  dans  ses  œuvres.  Nous  cite- 
rons encore  une  lettre  du  fameux  Micheletto  de  Coreglia,  le  vieux  sicaire 
de  César  Borgia,  dont  Machiavel  s'était  servi  pour  l'organisation  militaire 
du  territoire  florentin  (i5o8),  et  une  autre  du  cardinal  Jean  de  Médicis» 
sur  le  sac  de  Prato  Ci  5 1 2);  mais  le  document  le  plus  curieux  de  ce  vo- 
lume est  les  annotations  autographes  de  l'ex-reine  Christine  de  Suède, 
et  une  traduction  française  du  Prince  écrites  en  marge  d'une  édition 
de  i683. 

Dans  le  volume  III,  nous  avons  été  heureux  de  trouver  réimprimée 
dans  son  texte  original  une  lettre  de  Marietta  Corsini,  femme  de  Ni- 
colas Machiavel,  écrite  à  son  mari  absent  de  Florence  ;  cette  lettre,  la 
seule  qu'on  possède,  fait  honneur  au  caractère  affable  et  à  la  vertu  do- 
mestique de  cette  femme  qui  a  été  si  injustement  calomniée.  D'autres 
lettres  de  parents  ou  d'amis  complètent  la  biographie  intime  de  Machia- 
vel, et  font  désirer  que  sa  correspondance  privée  soit  publiée  en  entier, 
et  dans  une  forme  meilleure  que  celle  des  éditions  ordinaires. 

C.  Paoli. 


226.  —  Vicomte  cï'Haussonville,  ancien   député.    Le    salon    de   Mme  niecker, 

d'après  des  documents  tirés  des  archives  de  Coppet.  Pans,  C.  Lévy,  1882,  2  vol. 
in-18  de  36i  et  3o5  p.  Prix  :  7  fr. 

Louons  tout  d'abord  et  sans  réserve  la  pensée  qui  a  inspiré  ce  livre. 
Tandis  que  presque  tous  les  descendants  des  personnages  célèbres  du 
xvme  siècle  s'efforcent  de  décourager,  par  leur  inertie  ou  leur  mauvais 


d'histoire  et  de  littérature  35  3 

vouloir,  les  travailleurs  soucieux  de  remettre  en  lumière  le  nom  ou  les 
œuvres  de  leurs  ancêtres,  M.  le  vicomte  Othenin  d'Haussonvillen'a  pas 
hésité  à  tirer  des  archives  deCoppet  un  livre  dont  le  titre  indique  le  plan. 
Dans  un  cadre  ingénieux,  l'auteur  a  groupé  tous  ceux  qui  ont  tenu  un 
rang  dans  les  affections  de  Mme  Necker  ou  simplement  même  traversé 
son  salon.  Sans  doute,  le  rôle  politique  et  les  travaux  de  publiciste  de 
M.  Necker,  l'enfance,  les  débuts  dans  le  monde  et  le  mariage  de  Ger- 
maine Necker  fournissent  quelques  chapitres  à  M.  d'H.,  mais  c'est  bien 
Sophie  Curchod  de  Nasse,  devenue,  en  1764,  Mmc  Necker,  ce  sont  bien 
les  amitiés,  et,  qui  le  croirait  ?  les  passions  qu'elle  inspira  dans  sa  jeunesse, 
ce  sont  surtout  les  volumineuses  correspondances  reliées  à  Coppet  en 
vingt-sept  volumes  (dit  M.  d'H.,  t.  I,  p.  4),  qui  prêtent  à  ce  livre  un 
intérêt  soutenu.  On  y  trouve  tour  à  tour  des  lettres  inédites  de  Gibbon 
qui,  par  un  jeu  piquant  du  sort,  fut  le  premier  soupirant  de  Mme  Necker, 
et  le  dernier  ami  à  qui  elle  survécut,  de  la  duchesse  d'Enville,  de  Mar- 
montel,  de  Morellet,  de  Grimm,  de  Diderot,  de  d'Alembert,  de  Mlle  de 
Lespinasse,  de  Galiani,  de  Bernardin  de  Saint-Pierre,  de  Dorât,  de 
Mme  de  Vermenoux,  de  Mme  Geoffrin,  de  la  duchesse  de  Lauzun,  de 
Mme  de  La  Ferté-Imbault,  de  Mme  de  Marchais,  de  Mme  d'Houdetot,  de 
Moultou,  de  Buffon,  de  Thomas,  de  Mme  de  Choiseul,  du  maréchal  de 
Mouchy,  du  comte  de  Tressan,  de  Mme  d'Epinay,  de  la  marquise  de  Cré- 
quy,  de  Cambon,  évêque  de  Mirepoix,  de  Boisgelin  de  Cucé,  archevêque 
d'Aix,  de  Vergniaud,  de  l'abbé  Maury,  etc.,  etc. 

J'ai  suivi  dans  cette  énumération  l'ordre  même  des  chapitres,  afin  de 
montrer  tout  ce  que  le  lecteur  y  trouvera  de  nouveau  et  de  curieux;  le 
commentaire  qui  accompagne  ces  révélations,  parfois  tronquées  (comme 
le  sont  notamment  les  lettres  de  Diderot),  est  délicat  et  piquant,  mais  le 
plus  souvent  mélancolique.  On  devinerait,  si  l'auteur  ne  le  disait  lui- 
même,  que  ce  livre  a  été  écrit  dans  la  tourelle  des  archives  de  Coppet, 
devant  les  portraits  de  famille,  à  deux  pas  du  tombeau  des  deux  époux 
et  de  leur  fille.  De  là  le  charme  intime  du  récit,  de  là  aussi  l'embarras  du 
narrateur  quand  il  se  trouve  en  présence  des  contradictions  de  caractère 
si  fréquentes  chez  son  aïeule  ;  mais,  comme  l'a  dit  Sainte-Beuve,  «  ap- 
précier Mine  Necker  n'est  pas  une  étude  sans  difficulté.  Ses  défauts  sont 
de  ceux  qui  choquent  le  plus  aisément  en  France,  ce  ne  sont  pas  des  dé- 
fauts français;  et  ses  qualités  sont  de  celles  qui  ne  viennent  trop  souvent 
dans  le  monde  qu'après  les  choses  de  tact  et  de  goût,  car  elles  tiennent  â 
l'âme  et  au  caractère  ». 

En  insistant  sur  l'agrément  littéraire  de  certaines  pages  de  ce  livre, 
telles  que  le  début  (sur  le  charme  de  l'inédit  à  notre  époque)  ou  cette 
apostrophe  aux  femmes  du  xvur3  siècle  (t.  I,  p.  289),  qui  rappelle  pres- 
que un  de  ces  «  couplets  »  où  Sainte-Beuve  excellait,  je  craindrais  de 
sortir  du  rôle  assigné  à  la  Revue  critique.  J'y  reviens,  en  indiquant  à 
M.  d'H.  quelques  menues  erreurs  que  les  errata  de  chacun  de  ses  deux 
volumes  n'ont  point  relevées. 


354  REVUE   CRITIQUE 

Tome  I,  p.  128,  Si  la  Biographie  universelle  ne  fait  pas  mention  du 
financier  Montauron,  M.  d'H.  eût  trouvé  quelques  détails  sur  ce  per- 
sonnage dans  l'excellente  édition  de  Corneille,  due  à  M.  Ch.  Marty-La- 
veaux,  t.  III,  p.  369. 

P.  i3o.  Marmontel  n'est  pas  mort  à  Paris,  mais  à  Habboville,  com- 
mune de  Saint-Aubin-sur-Gaillon  (Eure),  le  3i  décembre  1799. 

P.  184.  M.  d'H.  attribue  à  Dorât  (j'ignore  en  vertu  de  quelle  autorité) 
un  livre  intitulé  l'Esprit  de  Caraccioli,  et  qui,  d'après  cette  note,  aurait 
été  écrit  en  l'honneur  de  l'ambassadeur  de  Naples!  Or,  ce  livre  (Liège  et 
Dunkerque,  1774,  in- 12)  est  tout  simplement  un  extrait  des  innombra- 
bles rapsodies  de  Louis-Antoine  Caraccioli,  l'auteur  de  la  Jouissance  de 
soi-même,  du  Langage  de  la  raison,  des  Lettres  récréatives,  etc.,  et, 
bien  que  la  préface  se  propose  «  d'honorer  la  mémoire  »  d'un  écrivain 
qui  avait  «  immortalisé  ses  talents  »  par  la  défense  de  la  religion,  Dorât 
est  certainement  étranger  à  une  compilation  qui  revient  de  plein  droit  à 
celui  qu'elle  célébrait.  L.-A.  Caraccioli  n'était  point  mort  à  cette  date, 
comme  la  phrase  citée  pourrait  le  faire  croire  :  il  ne  cessa  d'écrire  qu'en 
i8o3.  Son  homonyme  l'avait  précédé  de  quatorze  ans  dans  la  tombe. 

P.  226.  Besenval  n'a  pas  laissé  deux,  mais  quatre  volumes  de  Mé- 
moires dont  la  publication,  par  les  soins  du  vicomte  A.  J.  P.  de  Ségur, 
son  exécuteur  testamentaire,  ne  laissa  pas  que  de  causer  une  vive  con- 
trariété à  sa  famille.  On  trouve  ce  sujet  dans  la  Décade  philosophique 
(t.  XLVII,  p.  126)  une  lettre  de  MM.  U.  A.  J.  de  Besenval  et  Besenval 
le  jeune,  datée  de  Soleure,  27  septembre  180  5. 

P.  32 1 .  A  propos  de  la  Visite  de  Hérault  de  Séchelle  à  Buffon,  M.  d'H. 
est  tombé  dans  une  erreur  déjà  commise  jadis  par  M.  Flourens  *.  «  Pu- 
bliée, dit-il,  au  lendemain  de  la  mort  de  Buffon,  elle  contient  d'intéres- 
sants détails  mêlés  à  des  assertions  qui  paraissent  calomnieuses.  »  Buffon 
est  mort  le  16  avril  1788  et  la  Visite  en  question  (Paris,  1785,  in-8, 
53  pp.)  est  datée,  sur  le  titre  :  Septembre  1785,  et  à  la  dernière  page  : 
«  Ecrit  dans  les  allées  de  Bréaux  près  du  couvent,  octobre  1785,  »  ce  qui 
prouve  surabondamment  que  cette  brochure  fut  rédigée  au  lendemain 
même  des  entretiens  du  jeune  avocat  avec  le  brillant  naturaliste.  Les 
détails  que  donne  Hérault  de  Séchelles  sur  certaines  particularités  de  la 
vie  privée  de  Buffon,  égalent,  s'ils  ne  les  dépassent,  les  plus  effrontés 
«  reportages  »  actuels.  Mais,  au  moment  de  leur  mise  au  jour,  ces  «  in- 
formations »  semblent  avoir  été  tolérées  par  celui-là  même  qui  en  était 
l'objet,  et  sa  famille  songea  si  peu  à  s'en  affecter  qu'Hérault  de  Séchelles 
fut,  en  1793,  un  des  témoins  de  Buffon  fils  lorsqu'il  épousa  en  secondes 
noces  Betzy  Daubenton. 

Tome  II,  p.  80.  La  note  sur  la  compilation  bien  connue  intitulée  : 


1.  Les  manuscrits  de  Buffon  (Garnier  frères,  1860,  in-18),  p.  lxxiv.  M.  Flourens 
ajoute  que  le  récit  d'Hérault  de  Séchelles  fut  publié  en  cette  même  année  1785  par 
le  Magasin  encyclopédique,  —  dont  la  première  série  ne  parut  qu'en  1792. 


d'histoire  et  de  littérature  355 

Paris,  Versailles  et  les  provinces  au  xvme  siècle,  aurait  pu  être  com- 
plétée par  un  détail  qui  n'avait  rien  d'oiseux  :  la  première  édition  (Lyon 
et  Paris,  1809,  2  vol.  in-8)  contient  sur  M.  Necker  des  anecdotes  qui 
disparurent  des  éditions  subséquentes  (3  vol.  in-8)  à  la  prière  du  libraire 
Nicolle,  l'un  des  éditeurs  de  Mme  de  Staël. 

Terminons  ces  chicanes  par  un  vœu  que  tous  les  lettrés  souhaiteraient 
de  voir  exaucé.  Puisque  M.  d'Haussonville  a  entr'ouvert  la  porte  si 
longtemps  close  des  archives  de  Coppet,  et  qu'il  y  signale  l'existence  de 
la  correspondance  «  à  peine  classée  »  de  Mmo  de  Staël,  il  devrait  quelque 
jour  rendre  à  la  fille  le  même  hommage  qu'à  la  mère,  et  remettre  en 
lumière,  par  la  publication  intégrale  de  ces  documents,  ce  mâle  talent  et 
ce  noble  caractère. 

Maurice  Tourneux. 


227.  —  Albreclit  von  Hallers  Gedichte  herausgegeben  und  eingeleitet  von 
Dr.  Ludwig  Hirzel,  ord.  Professor  der  deutschen  Literatur  an  der  Universitaet  zu 
Bern.  FrauenfekL  Huber.  In-8°,  xn,  dxxxvi  et  423  p.  12  mark. 

La  publication  de  M.  Louis  Hirzel  (qui  forme  le  IIIe  volume  delà 
«  Bibliothèque  des  anciennes  œuvres  de  la  Suisse  allemande  »  dirigée 
par  MM.  Fritz  Baechtold  et  Ferd.  Vetter)  renferme  deux  parties  : 
i°  l'introduction  consacrée  à  la  vie  et  aux  œuvres  de  Haller  ;  20  le  texte 
des  poésies  du  grand  Bernois.  —  L'introduction  est  le  travail  le  plus 
complet  et  le  mieux  fait  qui  ait  encore  paru  sur  Haller  ;  elle  comprend 
plus  de  la  moitié  du  volume  et  renferme  une  foule  de  détails  et  de 
documents  jusqu'ici  inconnus  ou  passés  presque  inaperçus.  M.  Hirzel  a 
consulté  et  mis  en  œuvre  l'autobiographie  composée  par  Haller  en  1732 
(qui  se  trouve  à  la  Bibliothèque  de  la  Brera  à  Milan,  ainsi  qu'une  partie 
de  sa  bibliothèque  vendue  après  sa  mort  par  ses  fils  à  l'empereur 
Joseph  II  qui  la  distribua  aux  villes  de  Milan,  de  Padoue  et  de  Pavie); 
le  journal  du  voyage  que  Haller,  alors  étudiant  à  Leyde,  fit  en  1726 
dans  la  Basse-Allemagne,  en  compagnie  de  Marlot  et  de  Diesbach  ;  les 
notes  de  son  séjour  à  Paris  et  à  Londres;  les  impressions  qu'il  recueillit 
de  sa  grande  excursion  dans  les  Alpes  en  1728;  sa  correspondance 
(aujourd'hui  à  la  Bibliothèque  de  la  ville,  à  Berne)  qui  renferme  en  plus 
de  60  volumes  1 3, 000  lettres  adressées  à  Haller  dans  les  années  1724- 1777 
par  plus  de  1,200  correspondants.  Parmi  les  lettres  insérées  par 
M.  Hirzel  dans  le  cours  de  sa  belle  étude  sur  le  grand  poète  suisse, 
signalons  de  suite  une  lettre  de  Gottsched,  de  Grimm,  de  Jérusalem,  de 
Pyra,  de  Voltaire,  de  Wieland,  un  fragment  d'une  lettre  de  Klopstock, 
etc.  Mais  les  lettres  mêmes  de  Haller  ne  manquent  pas  ;  citons  parmi 
les  plus  remarquables  celles  qu'il  écrit  à  son  fils,  et  sa  correspondance 
avec  Gemmingen  et  Bodmer  '.  Mais,  outre  ces  documents  nouveaux, 

1.  La  correspondance  avec  Gemmingen  est  surtout  importante;  cp.  les  jugements 


356  RKVUR    CRITIQUE 

M.  Hirzel  a  reproduit  dans  son  introduction  un  grand  nombre  de  faits 
intéressants  et  habilement  groupés,  concernant  la  vie  même  de  Haller, 
les  influences  qu'il  a  subies  et  ses  relations  avec  ses  contemporains.  On 
lit  avec  grand  intérêt  le  récit  des  années  que  Haller  passa  à  Berne  et  à 
Biel  dans  son  enfance,  à  Tubingue  où  le  jeune  étudiant  en  médecine 
s'indignait  déjà  contre  le  despotisme  du  duc  de  Wurtemberg,  à  Leyde 
où  son  esprit  avide  de  s'instruire  trouva,  comme  disait  son  ami  Gmelin, 
son  paradis,  où  il  admira  l'industrie,  la  simplicité,  le  sérieux  des  Hol- 
landais, où  il  fut  l'élève  enthousiaste  de  Boerhave  et  d'Albinus,  à  Lon- 
dres où  il  loua  les  honneurs  rendus  par  la  nation  à  ses  savants,  à  Paris 
où  il  eut  pour  maîtres  Winslôw  et  Le  Dran,  à  Bâle  où  il  suit  le  cours 
de  mathématiques  de  Bernoulli  et  se  lie  avec  Drollinger  et  Stâhelin,  à 
Berne  où  il  s'établit  comme  médecin  et  commence  les  grands  travaux 
scientifiques  qui  lui  valent  sa  nomination  à  l'Université  de  Gœttingue 
récemment  fondée.  On  remarquera  ensuite  les  pages  relatives  à  la  société 
bernoise  dont  Haller  châtia  dans  ses  vers  la  corruption  et  les  vices 
(Verdorbene  Sitten);  M.  Hirzel  fait  très  bien  voir  tout  ce  qu'avait 
d'arrogant,  d'exclusif  et  de  despotique  le  gouvernement  oligarchique  de 
Berne;  il  cite,  en  passant,  de  nombreux  témoignages  dee  contemporains 
attestant  l'ignorance,  l'égoïsme  et  la  tyrannie  des  quelques  familles 
patriciennes  auxquelles  appartenait  l'autorité  ;  il  rappelle  les  noms  de 
Samuel  Henzi  et  de  Samuel  Kônig  bannis,  après  la  pétition  hardie  de 
1744,  par  l'aristocratie  bernoise.  Pourtant  Haller  aimait  Berne  ;  il  n'y 
fut  jamais  apprécié  comme  il  méritait  de  l'être;  mais  son  plus  ardent 
souhait  était  d'y  revenir,  d'y  occuper  une  place  dans  le  conseil  des 
Deux  Cents,  et  d'arriver  au  pouvoir.  Même  lorsqu'il  était  à  Gœttingue 
un  des  professeurs  les  plus  considérés  et  les  plus  fêtés  de  la  Georgia 
Augusta,  et  voyait  accourir  à  son  cours  une  foule  de  jeunes  gens  venus 
de  tous  les  points  de  l'Europe,  sa  pensée  se  reportait  toujours  vers 
Berne.  M.  Hirzel  insiste  là-dessus  avec  raison;  il  met  pour  la  première 
fois  dans  tout  leur  jour  les  motifs  puissants  qui  déterminèrent  l'illustre 
savant  et  poète  à  quitter  Gœttingue  pour  Berne,  et,  après  qu'il  eut  été 
nommé  membre  du  grand  conseil,  à  abandonner  sa  chaire  pour  un 
poste  qui  semblait  fort  modeste,  celui  de  bailli  de  l'hôtel  de  ville 
[Rathhausammann  ou,  comme  on  disait  par  dérision,  jani tor  du. conseil)  ; 
mais,  cinq  ans  après,  Haller  devenait  directeur  des  salines  de  la  Répu- 
blique, et  son  titre  de  membre  du  conseil  assurait  l'existence  de  sa 
famille,  ouvrait  à  ses  fils  l'accès  des  grands  emplois  et  le  mènerait  peut- 
être  lui-même  —  ce  qui  n'arriva  pas  —  aux  fonctions  si  lucratives  de 
Landvogt.  —  Mais  il  y  a  dans  cette  introduction  deux  autres  points 
importants  fort  savamment  traités  par  M.  Hirzel  :  l'accueil  fait  aux 


de  Haller  sur  Lavater  et  sur  la  littérature  allemande  en  1777  :  «  von  der  Vielsei- 
tigkeit  von  Hallers  Interessen  gibt  der  Briefwechsel  mit  Gemmingen  den  yorzûg- 
lichsten  Begriff  »  (p.  cdlxxxix). 


d'histoire  et  de  littérature  357 

poésies  de  Haller  et  sa  collaboration  aux  Gbttingische  gelehrte  An\ei- 
gen.  M.  Hirzel  examine  successivement  les  onze  éditions  des  vers  de 
Haller  ;  il  indique  les  retouches  et  les  remaniements  que  Haller  ne  cessa 
de  faire  à  ses  poèmes,  soit  pour  retrancher  des  provincialismes  et  des 
expressions  choquantes,  soit  pour  adoucir  un  blâme  ou  une  critique,  soit 
pour  calmer  les  scrupules  des  orthodoxes,  etc.  ;  il  montre  d'où  venaient 
l'animosité  de  Gottsched  contre  les  poésies  de  Haller  et  cette  inimitié  de 
l'école  saxonne  qui  ne  désarma  pas,  qui  allait  même  jusqu'à  citer  tou- 
jours les  vers  de  Haller  d'après  les  premières  éditions,  sans  tenir  compte 
des  changements  ultérieurs  faits  par  le  poète.  Haller  avait  dirigé  une 
critique  assez  acerbe  contre  un  article  dont  l'auteur  anonyme  était 
Mme  Aldegonde  Gottsched  ;  de  là  comme  disait  Bodmer,  la  colère  de  la 
femme,  de  son  mari  et  de  toute  la  clique  (p.  cxix).  Cette  querelle,  mar- 
quée par  l'intervention  de  Breitinger  et  de  Pyra,  est  minutieusement 
exposée  par  M.  Hirzel  dans  un  chapitre  spécial  intitulé  «  attaque  et 
défense  »  [Anfeindungen  und  Vertheidigungen,  pp.  cxcu-ccxxv).  — 
Mais  la  partie  la  plus  originale  de  l'introduction  et  qui  montre  Haller 
sous  un  aspect  tout  nouveau,  est  celle  qui  traite  des  comptes-rendus  de 
Haller  dans  les  «  Annonces  savantes  de  Gœttingue  y>  ;  à  Gœttingue,  à 
Berne,  à  Roche,  durant  plus  de  trente  ans,  Haller  n'a  cessé  de  collaborer 
au  journal  qu'il  avait  fondé  et  de  lui  envoyer  des  articles  sur  toute  sorte 
de  sujets,  sur  la  littérature  et  la  philosophie  comme  sur  la  médecine  et 
les  sciences  naturelles,  sur  les  œuvres  innombrables  de  Voltaire  comme 
sur  les  productions  anglaises  et  allemandes.  M.  Hirzel  admire  justement 
cette  incroyable  activité,  ce  savoir  si  varié  et  si  étendu;  il  cite  les  prin- 
cipales «  recensions  »  de  Haller,  ses  jugements  sur  Herder,  Wieland, 
Gcethe,  etc.  ;  il  prouve  par  des  extraits  de  ces  articles  que  Haller  a  été  un 
des  premiers  critiques  de  l'Allemagne,  qu'il  a  semé  dans  ces  comptes- 
rendus  une  foule  de  remarques  judicieuses  ou  fines,  de  vues  élevées  et 
pénétrantes,  que  ses  observations  sur  le  Laocoon,  par  exemple,  ne  méri- 
taient pas  de  tomber  dans  l'oubli,  qu'il  a  été  plus  impartial  qu'on  le 
croit  ordinairement  dans  ses  appréciations  sur  les  écrivains  de  la  période 
d'orage.  Enfin  relevons  encore  dans  l'excellent  travail  de  M.  Hirzel  les 
pages  sur  la  vie  de  Haller  à  Gœttingue  et  à  Berne,  sur  sa  polémique 
avec  Voltaire,  sur  ses  rapports  avec  J.-J.  Rousseau  à  qui  il  ne  voudrait 
accorder  de  liberté  que  s'il  donnait  caution  de  ne  plus  écrire  que  sous  la 
censure  d'un  corps  sensé  de  théologiens  (p.  cccxc),  sur  sa  prédilection 
pour  la  poésie  et  le  caractère  des  Allemands  (qui  s'exprime  surtout 
dans  la  préface  de  l'ouvrage  de  Rôsel  sur  les  grenouilles),  sur  les  romans 
de  ses  dernières  années,  Usong,  Alfred,  Fabius  et  Caton,  sur  l'admi- 
ration que  des  écrivains  postérieurs,  Matthison,  Herder,  Schiller  ont 
exprimée  pour  le  poète  des  Alpes  (voir  le  chapitre  qui  a  pour  titre 
«  Stimmen  der  Nachn/elt),  etc.  —  Il  faut,  à  côté  de  cette  longue 
et  substantielle  notice,  tout  à  fait  remarquable  par  la  richesse  des  infor- 
mations qu'elle  renferme  autant  sur  la  littérature  du  xvme  siècle  que 


358  REVUE    CRITIQUE 

sur  Haller  même,  mentionner  aussi  l'édition  des  poésies  que  M.  Hirzel 
a  jointe  à  sa  biographie.  Nous  avons  là  un  recueil  complet,  reprodui- 
sant les  vers  de  Haller  sous  la  dernière  forme  que  le  poète  leur  a  don- 
née ;  M.  Hirzel  ajoute  à  ce  texte  quelques  pièces  de  vers  antérieures, 
une  bibliographie  complète  des  diverses  éditions  et  des  manuscrits  (avec 
les  dédicaces  et  les  préfaces),  enfin  la  liste  des  variantes  et  plusieurs  ap- 
pendices d'assez  grande  valeur,  accompagnés  de  notes  très  utiles  :  seize 
lettres  de  Haller  à  Bodmer,  des  morceaux  en  prose  qui  datent  de  la 
jeunesse  du  poète,  entre  autres  le  «  sermo  academicus  »  sur  les  anciens  et 
les  modernes  (quantum  antiqui  eruditione  et  industriel  antecellant 
modernos),  et  la  célèbre  lettre  à  Gemmingen,  renfermant  la  comparai- 
son entre  Hagedorn  qui  buvait  volontiers  un  verre  de  vin  et  goûtait 
toutes  les  joies  de  la  vie,  et  Haller  qui  renonça  au  vin  dès  l'âge  de 
dix-neuf  ans  et  ne  trouvait  son  plaisir  que  parmi  les  livres  ou  devant 
une  tasse  de  thé.  —  Cette  publication  à  laquelle  la  librairie  Huber  a 
donné  tous  ses  soins,  a  déjà  reçu  de  très  vifs  éloges  de  la  critique  alle- 
mande ;  elle  les  mérite,  car  l'édition  des  poésies  de  Haller,  telle  que  l'a 
donnée  M.  Hirzel,  est  sans  rivale,  et  l'introduction  qu'il  a  mise  en  tête 
du  Versuch  schwei\erischer  Gedichte  épuise  presque  le  sujet  et  laisse 
à  peine  après  elle  quelques  modifications  de  détail  à  faire  ',  Nous  ne 
parlons  évidemment  que  de  la  partie  biographique;  pour  la  partie 
purement  littéraire,  pour  l'appréciation  du  talent  poétique  de  Haller,  de 
son  style,  de  ses  modèles,  de  ses  imitateurs,  on  peut  encore  trouver  dans 
le  livre  récemment  publié  par  M.  A.  Frey,  seulement  sur  quelques 
points,  plus  de  détails  que  dans  l'étude  de  M.  Hirzel.  Il  ne  nous  reste 
que  plusieurs  vœux  à  faire  :  que  M.  Hirzel  publie  à  part  et  son  intro- 
duction et  son  édition  des  poésies  de  Haller  (en  mettant,  s'il  est  possible, 
les  variantes  au  bas  des  pages  et  non  à  la  fin  du  volume)  ;  qu'il  fasse 
paraître  et  l'autobiographie  de  Haller,  et  un  choix  de  ses  articles  dans  les 
«  Annonces  savantes  de  Gcettingue  »,  et  un  recueil  renfermant  ses 
lettres  et  celles  de  ses  correspondants  qui  intéressent  la  littérature  et  les 
sciences  ;  que  lui  et  ses  amis  obtiennent  de  la  ville  de  Berne  que  la  statue 
de  celui  que  Gœthe  appelait  «  l'immortel  Haller  »  soit  érigée  sur  la 
terrasse  de  la  cathédrale  en  face  de  ces  Alpes  que  le  poète  a  célébrées  en 
beaux  vers2. 

A.  Chuquet. 


i.  Relevons  p.  cdiii  et  p.  cdxvi  deux  légères  erreurs;  pp.  cdiii  et  422,  il  faut  lire 
Trudaine  et  non  Trudain;  p.  cdxvi,  le  nom  de  l'auteur  de  YEssai  sur  l'éducation 
nationale  est  La  Chalotais  et  non  «  La  Chotolais  »  (manque  à  la  table);  p.  877, 
pour  la  note  sur  Bussy-Rabutin,  voir  Lair,  Louise  de  La  Vallière,  p.  134,  iro  édi- 
tion;   p.  404,  note  2,  lire  Aigueperse  et  non  «  Aigne-Perse  ». 

2.  Cp.,  p.  dv,  note  i  ;  Haller  n'a  pas  Je  statue  à  Borne,  et  l'on  ne  sait  même  pas 
où  sont  ses  restas. 


d'histoire  et  de  littérature  359 

CHRONIQUE 


FRANCE.  —  M.  Ph.  Tamizey  de  Larroque  vient  de  reéditer  l' Oraison  funèbre  de 
Pierre  Gassendi  par  Nicolas  Taxil,  prononcée  dans  l'église  cathédrale  de  Digne  le 
14  novembre  i655.  (Bordeaux,  Chollet.  94  p.  Extrait,  à  cent  exemplaires,  des  «  An- 
nales des  Basses-Alpes,  bulletin  de  la  Société  scientifique  et  littéraire  de  Digne.  ») 
Cette  pièce,  des  plus  curieuses  et  des  plus  rares,  qui  manque  aux  collections  de  la 
Bibliothèque  Nationale  comme  à  la  plupart  des  collections  provençales,  a  été  copiée, 
par  ordre  de  l'évêque  de  Digne,  M«r  Meirieu,  sur  l'exemplaire  du  discours  que  pos- 
sède la  bibliothèque  de  la  ville  de  Digne.  M.  T.  de  L.  a  reproduit  cette  copie  qu'il 
nous  dit  «  très  fidèle  »,  en  l'entourant  de  documents  d'un  intérêt  local;  il  réserve 
pour  la  grande  publication  qu'il  consacre  à  Peiresc  et  à  ses  amis,  les  lettres  françai- 
ses inédites  de  Gassendi  qu'il  a  recueillies  en  grand  nombre  et  à  Paris  et  en  Pro- 
vence. Au  texte  (pp.  1  i-5g)  de  cette  oraison  funèbre  «  prononcée  il  y  a  225  ans  par  un 
admirateur  dont  la  naïveté  a  quelque  chose  de  touchant  »,  M.  T.  de  L.  a  joint  di- 
verses notes  et  divers  documents,  qui  lui  ont  été  remis  par  trois  prêtres  de  Digne, 
MM.  les  abbés  Aubert,  Cruvellier  et  Feraud,  et  qui,  «  relatifs  aux  procès  que  le  Pré- 
vôt soutînt  au  nom  de  ses  confrères,  permettent  d'ajouter  à  sa  biographie  un  chapitre 
intitulé  Gassendi  plaideur.  »  Parmi  ces  communications,  on  trouvera  quelques  ex- 
traits d'un  mémoire,  sous  forme  de  lettre,  où  Gassendi  discute  l'histoire  des  anciens 
évêques  de  Digne,  mémoire  conservé  parmi  les  manuscrits  de  Peiresc,  dans  la  biblio- 
thèque d'Inguimbert,  à  Carpentras  (pp.  60-94). 

—  Nous  avons  reçu  de  M.  E.  Charvériat  une  note  intéressante  sur  la  Politique 
d'Urbain  Vilipendant  la  guerre  de  Trente  Ans  (note  lue  à  l'Académie  des  sciences, 
belles-lettres  et  arts  de  Lyon.  XXIIe  vol.)  Cette  note  a  été  écrite  à  propos  de  l'ouvrage 
récent  de  M.  Grégorovius,  Urban  VIII  im  Widerspruch  \u  Spanien  und  dem  Kai- 
ser. «  La  politique  du  pape,  dit  M.  Charvériat,  lorsqu'elle  repoussait  la  domination 
austro-espagnole,  était  à  peu  près  la  même  que  celle  de  la  France;  elle  en  différait 
seulement  en  ce  que  Richelieu,  pour  combattre  cette  domination,  n'hésita  pas  à  s'al- 
lier avec  Gustave  Adolphe  et  les  protestants,  tandis  que  Urbain  VIII  se  bornait  à  re- 
fuser des  subsides  à  l'Autriche.  » 

—  La  3e  livraison  du  tome  II*  des  Mémoires  de  la  Société  historique  du  Cher  (3e  sé- 
rie, pp.  293-406)  renferme  les  articles  suivants  :  de  M.  H.  Boyer,  Les  origines  de  San- 
cerre  (l'auteur  «  apprécie  toute  la  justesse  des  vues  »  émises  par  M.  de  Certain  dans 
un  article  de  la  «  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes  »  sur  l'assimilation  de  Sancerre 
avec  Château-Gordon);  de  M.  A.  Boulé,  une  notice  sur  Louis  marquis  d'Arpajon, 
gouverneur  du  Berry  (1669-1715-1736);  de  M.  D.  Mater,  le  Catalogue  descriptif  de 
quelques  séries  monétaires  du  musée  de  Bourges  (c'est  au  musée  de  Bourges  qu'a 
été  déposé  le  trésor  dit  du  Port  ou  de  Mereau-Massay,  trouvé  en  1873  et  renfermant 
3,885  pièces,  dont  5g  appartiennent  au  monnayage  royal  et  3. 809  au  monnayage 
seigneurial,  Bretagne  et  surtout  Berry);  de  M.  Hippolyte  Boyer,  une  étude  sur  Le 
corps  des  marchands  à  Bourges  «  association  des  plus  gros  marchands  du  pays, 
formée  dans  le  but  d'accaparer  le  commerce  et  de  disputer  aux  membres  anoblis  de 
l'ancienne  marchandise  le  privilège  des  places  et  des  offices  ». 

—  M.  Jules  Le  Petit  prépare  une  Bibliographie  des  éditions  originales  d'auteurs 
français  du  xve  au  xvin*  siècle;  cet  ouvrage  est  mis  en  souscription  chez  E.  Maillet, 

20,  rue  de  la  Pépinière,  au  prix  de  3o  francs. 

—  On  trouvera  dans  le  n°  3g  du  Courrier  de  l'art  des  documents  intéressants,  re- 


360  REVUE    CRITIQUE    ÛHISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

latifs  à  Rubens  et  tirés  par  M.  Eug.  Mûntz,  des  archives  et  des  bibliothèques  de 
l'Italie;  ce  sont  i°  des  extraits  de  cinq  lettres  de  Peiresc  (1624  et  1628),  20  une  lettre 
du  chevalier  del  Pozzo  racontant  sa  visite  au  palais  du  Luxembourg  nouvellement 
décoré  (7  juin  IÔ25);  3°  une  notice  biographique  de  Rubens  rédigée  vers  i63o,  par 
Mancini,  le  médecin  et  critique  d'art  siennois. 


ACADEMIE   DES   INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  6  octobre   1882. 

M.  Oppert  continue  sa  lecture  sur  la  ville  perse  de  Pasargade.  Les  inscriptions  cu- 
néiformes du  roi  Darius  lui  fournissent  de  nouvelles  preuves  contre  l'identification 
de  cette  ville  avec  Murghâb.  Une  de  ces  inscriptions  dit  que  Gomatès  le  mage,  le  pre- 
mier faux  Smerdis,  sortit  de  Pasargade  (Paisiyâuvâdâ),  ville  située  près  d'une  mon- 
tagne; il  n'y  a  pas  de  montagne  près  de  Murghâb.  Ailleurs  est  racontée  la  guerre  de 
Darius  contre  un  autre  imposteur,  le  second  faux  Smerdis.  On  voit  dans  cette  rela- 
tion que  les  hostilités  eurent  lieu  dans  le  voisinage  de  Pasargade  et  vers  les  frontières 
orientales  de  la  Perse.  Pasargade  devait  donc  être  située  à  l'est,  et  non,  comme 
Murghâb,  au  nord  de  Persépolis. 

M.  Germain  termine  la  lecture  de  son  étude  historique  sur  la  faculté  de  théologie 
de  Montpellier.  Au  xve  siècle,  comme  on  l'a  vu  à  la  dernière  séance,  un  statut  uni- 
versitaire avait  exclu  les  religieux  mendiants  des  dignités  scolaires  et  leur  avait  inter- 
dit d'aspirer  à  la  prééminence  dans  la  faculté.  Au  xvie  siècle,  les  protestants  suppri- 
mèrent momentanément  toutes  les  institutions  catholiques  de  la  ville.  Les  guerres  de 
religion  terminées,  les  dominicains  rétablirent  à  leur  profit  la  faculté  de  théologie. 
En  prenant  l'initiative  du  relèvement  de  l'école,  ils  comptaient  en  rester  les  maîtres, 
c'était  comme  une  revanche  de  l'abaissement  de  leur  ordre  au  moyen  âge.  Mais  ils 
rencontrèrent  de  nouveaux  adversaires,  les  jésuites,  qui  réussirent  d'abord  à  se  faire 
une  place  à  côté  d'eux,  ensuite  à  les  supplanter  tout  à  fait.  En  16S6,  Louis  XIV  con- 
féra à  la  Compagnie  le  monopole  de  l'enseignement  théologique  à  Montpellier.  Les 
dominicains  protestèrent  contre  cet  acte,  qu'ils  traitaient  d'usurpation.  Ils  renouvelè- 
rent leur  protestation  tous  les  trois  ans,  pour  maintenir  leur  droit,  jusqu'à  l'année 
1762,  où  les  jésuites  furent  chassés  de  France.  Le  parlement  de  Toulouse  remit  alors 
les  dominicains  en  possession  de  la  faculté.  Mais  l'évêque  intervint  à  son  tour,  au 
profit  du  clergé  séculier;  en  1767,  il  réussit  à  enlever  aux  religieux  toutes  les  chaires 
et  à  les  conférer  à  des  prêtres  diocésains. Ceux-ci  les  gardèrent  jusqu'à  la  Révolution, 
qui  supprima  définitivement  la  faculté  de  théologie  de  Montpellier. 

M.  le  comte  Maurice  de  Pange  communique  une  dissertation  sur  une  question  obs- 
cure de  l'histoire  de  Lorraine.  Simon  II,  duc  de  Lorraine  à  la  fin  du  xu»  siècle,  eut- 
il  pour  successeur  immédiat,  aux  premières  années  du  xme,  son  neveu  Ferri  II  de 
Bitche?  Ou  son  frère,  Ferri  Ior  de  Bitche,  père  de  Ferri  II,  succéda-t-il  d'abord  à 
Simon,  pour  céder  quelque  temps  après  le  duché  à  Ferri  IL'  La  première  opinion  est 
celle  des  anciens  historiens  lorrains,  la  seconde  a  été  émise  pour  la  première  fois 
par  dom  Calmet  et  adoptée  depuis  par  divers  écrivains.  M.  de  Pange  est  d'avis  qu'il 
faut  en  revenir  à  l'avis  des  anciens  auteurs.  Il  est  vrai  que  Ferri  I«r,  sous  le  règne 
même  de  Simon  II,  soutint  une  guerre  contre  celui-ci  et  qu'au  cours  de  cette  guerre 
il  usurpa  un  moment  le  titre  de  duc  de  Lorraine.  Ce  titre  lui  est  aussi  donné,  soit 
dans  des  documents  postérieurs,  rédigés  par  des  personnes  qui  avaient  sous  les  yeux 
des  pièces  du  temps  de  sa  tentative  usurpatrice,  soit  dans  des  chartes  reconnues  au- 
jourd'hui apocryphes.  Mais  M.  de  Pange  croit  pouvoir  affirmer  que  jamais,  ni  de 
droit  ni  de  fait,  Ferri  Ier  n'a  régné  sur  le  duché  de  Lorraine  et  que  Ferri  II  a  bien 
succédé  immédiatement  à  son  oncle  Simon. 

Ouvrages  présentés  :  —  par  l'auteur  :  Le  Blant  (Edmond),  les  Actes  des  martyrs, 
supplément  aux  Acta  sincera  de  dom  Ruinart  (extrait  des  Mémoires  de  l'Académie 
des  inscriptions  et  belles-lettres)  ;  —  par  M.  Barbier  de  Meynard  :  Halévy  (Joseph), 
Dccuments  religieux  de  l'Assyrie  et  de  la  Babylonie,  textes  assyriens,  traduction 
et  commentaire,  ire  partie;  —  par  M.  Delisle,  au  nom  de  M.  Hauréau  :  Crié  (L.), 
Pierre  Belon  et  la  Nomenclature  binaire;  —  par  M.  Gaston  Paris/.  [Giry  (A.),]  Jules 
Quicherat  (extrait  de  la  Revue  historique  et  de  la  Bibliothèque  de  l'École  des  chartes.) 

Julien  Havet. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 

Le  l'uy,  imprimerie  Marchessoû  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  2 3 


REVUE    CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

N»  45  —  6  Novembre  —  1882 


Sommaire  s  228.  Vie  de  Polycarpe,  p.  p.  Duchesne.  —  229.  Hitzigrath,  Les 
écrits  sur  la  paix  de  Prague  de  i635.  —  23o  Bengesco,  Bibliographie  des  œuvres 
de  Voltaire.  I. —  Lettre  de  M.  Léger.  —  Chronique.  —  Académie  des  Inscriptions. 


228.  —  Vlta  sanctl  ï*olycarpt  Smyrnaeoium  episcopi  auctore  Pionio  pri- 
mum  graece  édita  a  L.  Duchesne.  Parisiis  apud  C.  Klincksieck,  1881.  40  pages 
in-8°.  Prix  :  2  francs. 

M.  Duchesne,  en  publiant  ce  petit  écrit,  ne  prétend  pas  fournir  aux 
biographes  de  Polycarpe  un  document  nouveau.  Cette  Vie  de  Polycarpe 
est  connue  déjà  par  une  traduction  latine,  faite  d'après  le  ms.  même 
d'où  M.  D.  tire  aujourd'hui  le  texte  grec,  et  insérée  dans  les  Actes  des 
Saints  (janvier,  t.  II,  p.  695)  ;  M.  D.,  d'ailleurs,  ne  la  croit  pas  antérieure 
au  ive  siècle,  et  n'y  voit  qu'un  tableau  de  la  vie  religieuse  de  cette  épo- 
que, trop  peu  connue  en  ce  qui  concerne  justement  les  églises  d'Asie 
(préf.,  p.  11). 

Est-il  bien  prouvé  que  cette  Vie  de  Polycarpe,  dans  sa  forme  actuelle, 
soit  du  iv°  siècle?  Je  n'oserais  soutenir  une  discussion  sur  ce  point  avec 
M.  Duchesne.  Mais  il  me  reste  des  doutes.  La  note  du  Martyre  de 
Polycarpe  (chap.  xxm  et  xxiv),  où  Pionius  est  mentionné,  parle  de  divers 
remaniements  successifs  de  ce  document.  N'y  a-t-il  pas  là  un  aveu  ap- 
plicable aussi  à  la  Vie  de  Polycarpe?  M.  D.  lui-même  semble  le  croire 
(préf.,  p.  8  et  9).  Macarius  Magnes,  et  même  les  Ménologes,  peuvent 
avoir  puisé  à  la  même  source  que  notre  auteur  les  traits  qu'ils  ont  en 
commun  avec  lui.  Le  style  n'est  certainement  pas  celui  de  Syméon  le 
Métaphraste,  à  qui  M.  D.  a  raison  de  ne  vouloir  pas  songer  (préf.,  p.  7; 
L.  Allatius,  de  Symeonum  scriptis,  ne  parle  même  pas  de  cette  Vie). 
Mais  tout  le  récit  est  bien  dans  le  ton  le  plus  banal  de  l'époque  où  les 
Vies  des  saints  se  fabriquaient  en  grand.  A  la  page  3i,  1.  10,  au  lieu  de 
Lebedos,  on  lit  toiç  OepjwTç  GSaci  <jot<£>  x.aXo'j[jivoiç  ÀeôeBtotç,  ce  qui 
semble  indiquer  que  Lebedos  n'existait  plus.  Or,  on  croit  que  cette  ville 
a  duré  jusqu'au  vie  siècle  au  moins  (parce  que  Hierocles  la  mentionne, 
Itineraria,  éd.  Wesseling,  p.  660). 

M.  D.  nous  apprend  que  cette  publication  lui  a  été  pour  ainsi  dire 
arrachée.  On  doit  se  féliciter  de  ce  qu'il  s'est  laissé  faire  violence.  Mais 
on  peut  regretter,  une  fois  qu'il  prenait  la  chose  en  mains,  qu'il  n'ait 
pas  apporté  à  son  œuvre  quelques  perfectionnements  importants.  D'a- 
bord un  index  des  noms  propres,  des  faits  et  des  expressions  remarquables, 
des  mots  très  rares  ou  qui  manquent  au  Thésaurus  (p.  18,  1.  22, 
Nouvelle  série,  XIV.  19 


362  REVUE    CRITIQUE 

lY*a6opiJ.ao)  ;  l.  28,  xaTOxéXXco;  p.  20,  1.  3,  GTCe£avax<opéu)  ;  I.  12,  àzepifiXln- 
to)ç;  p.  32,  1.  10,  àvcuafféXtaTOç),  et  des  formes  insolites  (p.  16,  1.  i3, 
àTrsy.axécTTïjjev  ;  p.  26,  1.  24,  épj/^vsuev  ;  p.  27,  1.  6,  cuviouutv  de  cuvi'yjjjli  ; 
1.  26,  èicpovo^ffavtô  ;  p.  3o,  1.  io,  eiseveYxa^Yjv  ;  1.  12,  xaôctXac  pour 
xaOeXeiv;  p.  3i,  1.  3,  oïoa-ce,  à  côté  de  icte  04,  25  et  35,  3o;  p.  32,  1. 
22,  xoijjLacrai,  etc.).  Puis,  l'indication  des  passages  d'où  sont  tirées  les 
citations  assez  nombreuses  de  la  Bible.  Enfin,  et  surtout,  une  révision 
plus  sévère  du  texte,  dont  l'état  est  déplorable  dans  le  ms.  (Bibl.  nat., 
fonds  grec  1452,  xe  siècle).  M.  D.  y  a  apporté  quelques  corrections  heu- 
reuses, il  a  signalé  un  grand  nombre  de  lacunes  et  en  a  comblé  plusieurs 
d'une  manière  très  probable.  Mais  il  reste  beaucoup  à  faire.  Ce  sera 
peut-être  rendre  service  à  quelques  lecteurs  du  prétendu  Pionius  de 
consigner  ici  les  corrections  dont  la  nécessité  m'a  le  plus  frappé.  Je  les 
transcris  en  suivant  l'ordre  des  pages,  sans  me  demander  si  je  corrige 
des  fautes  d'impression,  des  fautes  de  copie  de  M.  D.,  ou  des  fautes  du 
ms.  même.  Un  point  d'interrogation  marquera  les  conjectures  dont  je 
ne  suis  pas  bien  sûr  moi-même  et  que  je  donne  surtout  pour  rendre 
attentif  à  des  difficultés. 

Page  i3,  ligne  12  (les  lignes,  malheureusement,  ne  sont  pas  numéro- 
tées), èv  SixûpvYj,  en  note  :  Mendum  cubât:  codex habet  elq  apûpvvj  :  pour- 
quoi donc  mettre  dans  le  texte  une  correction  qu'on  reconnaît  insuffi- 
sante? Je  vais  plus  loin  d'ailleurs.  Dans  une  édition  qui  n'est  destinée  ni 
à  des  écoliers  ni  à  des  amateurs,  et  particulièrement  dans  une  édition 
princeps,  j'estime  que  le  texte  ne  devrait  représenter  que  la  tradition  la 
plus  ancienne  :  tout  ce  qui  tient  de  la  conjecture,  même  l'indication  des 
lacunes,  tout  ce  qui  est  restitution,  fût-ce  d'une  seule  lettre,  et  la  correc- 
tion parût-elle  évidente,  devrait  être  relégué  dans  les  notes  au  bas  de  la 
page.  —  Ici,  il  faut  croire  que  quelques  mots  sont  perdus,  probablement 
entre  eiç  et  S|x6pv»j.  P.  i3,  1.  14,  E&vetxYjç,  1.  18,  Eùvefour)  :  lisez  Eùvbajç, 
Eùvix'»),  dans  le  texte  même,  si  l'on  veut,  car  pour  le  copiste  du  xe  siècle 
t  et  si  ou  y),  ai  et  e,  0  et  w,  etc.,  sont  à  peu  près  identiques;  le  témoignage 
de  la  tradition  ne  porte  pas  là-dessus  :  «  'IcpaYjXsÏTai  et  'IspaYjXÏTac,  non 
sunt  uariae  lectiones  sed  una  atque  eadem  lectio  »  (Cobet,  jpraef.  N.  T., 
p.  lvi).  Il  est  vrai  qu'un  écrivain  du  vme  siècle,  par  exemple,  et  même 
du  ive,  à  la  rigueur,  pouvait  écrire  Eùvebo).  Mais  comment  savoir  s'il  l'a 
fait?  La  tradition  existe  en  ce  qui  concerne  les  accents  et  les  esprits, 
mais  très  imparfaitement,  et  ce  serait  pousser  trop  loin  le  scrupule  que 
de  reproduire  ces  signes  d'après  les  mss.;  ainsi,  p.  i3,  1.  16,  Iv  cot  :  lisez 
èv  coi.  P.  i3,  I.  i5,  supprimez  la  virgule,  et  p.  14,  1.  1,  le  point.  La 
ponctuation  est  défectueuse  en  bien  des  endroits.  P.  i3,  1.  19,  toùç  ovraç 
•maToùç  :  ne  faudrait-il  pas  t.  0.  èxst  rc.  ?  P.  14,  1.  3  à  8,  les  mots  'EvrauÔa... 
eiaYYéXtov  ont  tout  l'air  d'une  réflexion  ajoutée  par  un  lecteur.  P.  14, 
1.  7,  il  faut  des  virgules  après  à^û^wv,  et  après  tcsvtyjxogttîç  :  à^û^wv,  ndr/a, 
-svxiQy.o<ro5ç,  ce  sont  les  trois  mots  à  àvi^acev  (p.  1 3, 1.  20  et  14,  1.  1)  xupwv 
xb  sùa-fY-éXiov.  P.  14,  1.  18,  tcuXyjv  :  lisez  tojXyjv.  P.  14,  1.  22,  (xstà  csaux?)  : 


d'histoire  et  de  littérature  363 

lisez  [jl.  ssowrîjç.  P.   i5,  1.  22,  8xav...  è^çaivsi  :  lisez  8xav...  èjAçaivYj;  de 
même,  p.  26,1.  10,  Sxav...xaA7)  et  1.  16,  à^xat  (à  moins  qu'ici  la  tournure 
particulière  ne  permette  d'attribuer  le  solécisme  à  l'auteur  ;  de  même 
p.  35, 1.  21  èxsiBàv  SeoC^yjv...  xpocavacpépc)  parait  être  de  lui);  p.  19,  1.  16, 
5xav...  àvaxaixfaei,  etc.,  s'explique  par  le  fait  que  l'indicatif  futur  et  le 
subjonctif  de  l'aoriste  sont  équivalents  pour  les  écrivains  de  la  basse 
époque  (Lobeck,  Phryn.,  p.  722);  rien  n'empêcherait  cependant  d'écrire 
les  trois  verbes  par  yj  au  lieu  de  si.  P.  i5,  1.  22,  SiwS^uév  :  StotSïjcév  du  ms. 
peut  bien  être  de  l'auteur  (Lobeck,  Phryn.,  p.  i53).  P.  i5,  1.  23,  èvex(- 
xAaxo  :  lisez  £V£xi|ji.xXaxo,  comme  p.   17,  20.  P.  i5,  1.  25,  èxeîvoiç  :  lisez 
èxeîvoç.  P.  1  5 ,  1.  29  et  3o,  xat  xi  6au[/acxbv  rrçç  {j.s"Y;aXoupf£aç  xoiï  xuptou  '1. 
Xp.  èrfércso ;  0  [aèv  yàp  :  lisez  xa(  xt  ôaujxactov  175?  [j..  t.  x.  '1.  Xp.  è^Aeicr  6  [x.  f. 
,  P.  16, 1.  20,  ir\q  xaxà  xr,v  dcYaOïjv  xoXtxdav  :  lisez  xtjçxaxà  xb  àyaObv  xoXix£iaç. 
P.  16,  1.  21,  xat  xyjç  àvaxoXtxïjç  piÇrjç...  àv6oç  :  lisez  xat  xt  (le  ms.  xyj  que 
M.  D.  retranche)  x9}ç  à.  p.  ...à  P.  16,  1.  28,  au  lieu  de  çi/p)  ou  otx^atfjt,oç 
(M.   D.),  on  pourrait  suppléer  ££vy]  (p.    35,  16);  diuersorium  AA.  SS. 
(Cette  traduction  n'est  pas  mauvaise  ;   on  y  trouve   quelques   bonnes 
émendations.)  P.  17,  1.   3,  Ypacpatç  :  lisez  Ypaçaîç.  P.  17,  1.  6,  ctxtotç  T£ 
fàp  xotç  [xb  xapouat  :  il  faudrait  a.  [/.èv  yàp  x.  iç.  (7  ÈaÔTJxi  Se).  On  se  de- 
mande seulement  d'où  viendrait  la  faute.  Peut-être  jxev  est-il  mis  par 
erreur  pour  àel,  devant  xapouat,  après  quoi  on  aurait  remplacé  le  premier 
(xèv  par  xe?  P.  17,  1.  7,  'iy^tfo  :  lisez  iyjprpo.  P.    17,  1.  26,  XExâcôat  : 
lisez  xExâaOat.   P.  17,  1.  3o,  ôyjpaç  :  lisez  Ovjpaç.  P.  1.8,  j.  3 ,  <rxpé(3Xoi>  :  lisez 
axpe^Xou.  P.  18,  1.  10,  àxpaxxa  :  lisez  àxpaxa.  P.  18,  1.  il,  crfyj.  T^  xuXyj  : 
lisez  à.  iriq  xûXyjç  (?).  P.  18,  1.  i3,  xvjç  u>paç  :  lisez  x^ç  y.Yjpaç,  le  singulier 
s'expliquant  comme  xwcpaaxei  et  xou  Se  (1.  9)  après  £uXocp6pouç  (?).  P.  18, 
1.  i5,  èxexoiGei  ttjv  Q£0cé(ktav  :  ou  bien  hc.  est  fautif,  ou  bien  x.  0.  faisait 
partie  d'une  incidente  dont  le  reste  est  perdu.  P.  18,  1.  17,  àxapa^xéSiaTov  : 
lisez  àxap£[xx6o"taxov.  P,  18, 1.  18,  oç  xy)v...£Ùx£xyj  Y)£icoxai  xoXtxEtav  (xyj  xaxa- 
axti^svoç  :  lisez  ot  xyjv...  eùxpEXï)  rétamai  xoXtxEÔEaQat  xoXixeiav  [xrj  xaxauxw- 
|j.evoi;  autrement  il  faudrait  admettre  une  lacune  avant  oç.  P.  18,  1.  25, 
si  Se  cwçpovsï  (s&cppov  e?  le  ms.)  :  lisez  cdixppwv  eïy)  (comp.,  1.  24,  Et  [aèv 
àcwxoç  £tY]);  y)  a  peut-être  laissé  une  trace  dans  £X£xo[jt.xrçaôai,  pour  xs- 
xouvrrrçcGat,  qui  suit  dans  le  ms.  P.  18, 1.  28,  àxb  x&v  uxoupaviwv  xaxwxEtXEV  : 
lisez  (avec  le  ms.)  à.  x.  èxoupavtwv  x.  (abstrahere  a  caelestibus,  A  A.  SS.). 
P.  19,  1.  5,  3i£Aâ(AJ3av£v  :  supprimez  le  point,  et  1.  8  la  virgule.  P.  19, 
1.  12,  àvaxpivojiivou  xe  (àvaxptvayivou  x£  le  ms.)  :  lisez  àvaxipva^évou  hï  (?). 
P.  19, 1.  18,  aùxbv  ...xEptaxapY]  :  lisez  aùxio  ...xapaaxapYj(?).  P.  19, 1.  3o,  fi>v  : 
lisez  ouv  (?).  P.  19, 1.  3i,  èxi  xb  :  lisez  èxt  xw.  P.  20,  1.  1,  ratifie  xbv  :  lisez 
r,u.s(Ékxo  xbv.  P.  20,  1.   3,  vivé^svcç  '•  ^sez  suYYivop.£voç  (?).   P.  20,  1.  14, 
après  xxwxoùç  il  y  a  sans  doute  une  lacune;  il  manque  pour  le  moins  un 
mot  tel  que  axouSrçç,  mais  probablement  davantage.  P.  20,  1.  21,  autre 
lacune,  dans  laquelle  Bucolus  devient  sujet,  et  après  laquelle  il  n'y  a 
peut-être  pas  lieu  de  changer  xoXXaç  en  xoXXâ  (M.  D.).  P.  20,  1.  3o,  ouv 
èv  :  lisez  ouv  è^évExo  èv.  P.  21,  l.  1,  remplacez  la  virgule  par  un  point  en 


3Ô4  REVUE    CUITJQUE 

haut.  Ib.  xsx<i>pY)YY]fjivo<;  :  lisez  xexopv)*p}^yoç.  P.  21,  1.  2,  effacez  la  virgule. 
P.  21,  1.  4,  lacune  après  Ircsiae  (?).  P.  21,  1.  i2,ux'aÙT0u  :  lisez  èx  aùxou. 
P.  2i,l.  14,  supprimez  yj.  P.  21,  1.  18,  i'Stov  X6-pv  mbv  :  lisez  i'Siov  ulbv. 
P.  2i,  1.  20,  o)vX5yoç  :  lisez  Xo^oç  (5  Xi^oç  le  ms.,  interpolation  motivée 
parcelle  de  la  ligne  18).  P.  22,  1.  8,  wç  yjv  :  rétablir  y.cà  rp  (ms.)  et  admet- 
tre une  lacune;  wç  ne  ressemble  pas  à  v.a\  (si  ce  n'est  en  abréviation,  fré- 
quente pour  xat,  mais  inusitée  pour  wç  dans  des  ouvrages  de  cette  nature), 
et  pour  y]v  il  faudrait  luttv.  P.  22,  1.  i5,  Bavaxouv  :  périmant  AA.  SS., 
c'est-à-dire  Oavaxouaiv.  Ces  mots  :  x.at  yàp...  àaxouvreç  semblent  être  une 
parenthèse  de  l'auteur  (ou  d'un  autre?),  qui  propose  une  nouvelle  éty- 
mologie  de  7iap6evta  (itup  6avaxouatv).  P.  22,  1.  18  et  21,  supprimez  les  vir- 
gules. P.  22,  1.  24,  xivwv  Bè  XsYévxwv  'EXXyjvwv  aùx^  :  on  ne  voit  pas 
pourquoi  tivûv  aurait  pris  cette  place  inaccoutumée,  ni  ce  qui  l'aurait 
fait  changer  en  xtveç  (ms.).  Encore  ici,  il  sera  donc  plus  prudent 
d'admettre  une  lacune.  P.  22,  1.  25,  âûvasôat.  paraît  être  de  trop. 
P.  23,  1.  10  à  /2  «  locus  corruptus  »  (M.  D.)  :  j'admettrais  plutôt  une 
lacune  après  fiy.piç.  P.  23,  l.  19,  remplacez  le  point  par  une  virgule. 
P.  24,  1.  26,  zspticTaaOm  :  lisez  7:ap(aTa<T0at  (?).  P.  25, 1.  i,  %\'^peq  :  lisez 
fripée.  P.  25, 1.  3,  effacez  la  première  virgule.  Ib.  twv  x.aT<i>  ÉcTYjyixwv  : 
on  ne  peut  guère  s'expliquer  ce  génitif  que  par  une  nouvelle  lacune.  Il 
faut  croire  qu'un  des  mss.  par  où  ce  récit  a  passé,  et  qui  était  lacéré  ou 
rendu  illisible  d'une  manière  extraordinaire  (M.  D.,  préf.,  p.  11,  note), 
l'était  tout  particulièrement  à  cet  endroit.  P.  25,  1.  4,  supprimez  zpbç(?). 
P.  25,  1.  17,  a  ajouté  par  M.  D.  :  très  bien  au  point  de  vue  paléographi- 
que ;  mais,  en  mettant  à  pour  jwu  oûç,  l'auteur  aurait  affaibli  la 
parole  de  l'apôtre  (Gai.,  4,  19).  P.  25,  1.  26,  supprimez  où/,  (ajouté 
par  M.  D.),  et  placez  la  lacune  avant  ôpô-Tjç  kpy..  plutôt  qu'après. 
P.  25,  1.  28,  Tîjç  eixrn'sXiou  cpwvrçç  :  lisez  t.  eixrftekou  <p.  (?).  P.  25,  1.  3o 
et  28,  1.  9,  cçpaffôa  :  lisez  cçpaYtâa.  Il  est  vrai  que  jamais  dans 
des  mss.  hagiographiques  je  n'ai  vu  accentué  ainsi  ce  mot,  qu'on 
y  rencontre  pourtant  bien  souvent.  Mais  encore  au  ine  siècle  en- 
viron ap.  J.-C.  une  inscription  (G.  I.  G.  3272,  comp.  Kaibel,  Epi- 
grammata  gr.,  314,  11),  termine  un  hexamètre  par  cçpaYsto'eç  stc^XOov. 
P.  26,  1.  7,  xbv  Trpoç'/jTYjv  :  lisez  xtva  twv  ^poçïîxwv  (twv  zpoçvjTwv,  le  ms.). 
P.  26,  1.  3o,  cxo(y)  :  nsez  33C&fr).  P-  27,  1.  7,  Xpfaxov  :  lisez  Xptcxbv.  P.  27, 
1.  20,  àxovs[A£Îv  :  lisez  âbcovépsiv.  P.  27,  1.  32,  etcovto  :  lisez  eiTcovro.  P.  28, 
1.  r,  irspt  :  lisez  xapà.  P.  28,  1.  12,  Tîtov  :  lisez  Ttxov.  P.  28,  1.  27, 
Xpyjatv  :  lisez  ypTccv  (?).  P.  28,  1.  28,  paya  :  lisez  ^éyav.  P.  28,  1.  3o,  to 
paraît  être  le  reste  d'une  phrase  perdue  ;  en  tout  cas,  ce  ne  peut  être  l'ar- 
ticle s'accordant  avec  [xépoç.  P.  29,  1.  2,  il  faut  un  point  après  ?o(3ov. 
P.  29,  1.  6,  àyt'wv  :  lisez  xwv  àft'uv,  ou  mieux,  xat  aYtwv.  Ib.  xposéxa^E  : 
lisez  TrpoaéTaaac(xpoc£Taa£,  le  ms.,  comme  p.  35,  25,  à7caXXaa£<j6ai).  P.  29, 
1.  19,  àvirpMci'av  :  lisez  àwp.aXov  (camp.  1.  29).  P.  29,  1.  28,  xat  èsTt  :  lisez 
%a\  Icm.  P.  3o,  1.  r,  è:cav(s<yav,  et  p.  33,  1.  21,  y.axteaav  :  il  n'est  pas  impos- 
sible que  cette  orthographe  remonte  jusqu'aux  auteurs  de  certains  écrits 


o'histoikk  bt  uk  littérature  365 

des  derniers  siècles  ;  mais  alors  il  faudrait  la  suivre  partout,  et  p.  34, 
3o,  on  lit  àxifjeaav.  P.  3o,  1.  9,  èv  :  lisez  si  èv.  P.  3o,  1.  10,  èxixeÎTat  :  lisez 
èx{xeiT<xi.  P.  3o,  1.  17,  èv(ouç  :  lisez  èvfotç  (?  comp.  1.  19).  P.  3o,  1.  18, 
5tî  8eï  (ots  8yj  ms.)  :  lisez  5t  'ISei.  P.  3o,  1.  19,  èxtXaOo^évouç  :  lisez  èxiXa- 
Oo^évoiç  (ms.  ;  à  moins  qu'il  n'y  ait  erreur  de  lecture,  uç  liés  étant  pris 
pour  tç,  ce  qui  arrive  facilement).  P.  3o,  1.  22,  xapeOevTO  :  lisez  xape6é[jt.Yjv 
(ms.)  ;  pourquoi  ne  serait-ce  pas  aussi  bien  l'auteur  qu'un  copiste  qui 
aurait  changé  ce  mot  (Luc,  12,  48),  puisqu'il  a  changé  aussi  r.okh  en  to 
xXetov?  P.  3o,  1.  23,  àxatTYjcoxjiv  :  lisez  àxatTYjcouaiv  (?  voyez  ci-dessus 
l'observation  sur  p.  i5,  22).  P.  3i,  1.  10,  toÎç  GepjxoTç  xSci  :  lisez  t.  6. 
uSaffi.  Ib.  xaXouixévoiç  :  lisez  toiç  xaXou^évotç.  Ib.  Ae^aSbiç  :  lisez  Ae(kB(oiç. 
P.  3i,  1.  26,  touto  :  lisez  toutw.  P.  32,  1.  5,  aùxw  est  de  trop,  et  èv  SoxtjjLY) 
TtoXkri  ne  se  comprend  guère.  Il  est  probable  qu'il  manque  quelques  mots 
avant  aù-no.  P.  32,  1.  22,  xai  :  lisez  v.cà  vuv  (?).  Ib.  xoi|xâaat  :  lisez  xoi^acat 
(sur  cette  forme,  comp.  Winer,  Gramm.  d.  N.  T.  Sprachidioms, 
§  i3,  2  b.)  Ib.  xàxetvoç  èxofet  dcYpurcveTv  ne  donne  pas  de  sens;  peut- 
être  faut-il  lire  xàxetvo  ce  xoiei  de.,  après  une  lacune.  En  tout  cas,  ô  8e 
Yjaùxauev  doit  se  rapporter  à  Polycarpe  (siluit  Polycarpus,  AA.  SS.). 
P.  32, 1.  3i,  ux'  :  lisez  àx\  P.  33,  1.  r,  (3oXyj  :  lisez  (3oX^v  (?).  P.  33,  1.  11, 
àxofiXYjceaOai  :  lisez  dcTco^Vjarscîôat.  P.  34,  1.  i5,  jjlyjS'  oOev  xptaiTO  :  lisez  jj.yjô' 
5ôev  xpi'atTO.  P.  34,  1.  26,  oôpavoùç  :  lisez  l§  ou  <xx'  owpavou.  P.  34,  1.  27, 
to^oiou^évouç  :  lisez  ô^otou^évouç.  P.  35,  1.  1,  eivac  :  lisez  et  xat.  P.  35, 
1.  3,  après  à^iwcavxwv,  lacune.  P.  35,  1.  8,  atrrjcat  :  lisez  çXvfoaX  ae. 
P.  35,  1.  9,  supprimez  la  virgule  après  cùpavou.  P.  35,  1.  12,  aùxou  toÏç  : 
lisez  àxoxciç.  P.  35,  1.  18,  è^amov  :  lisez  èfxauTw  (?  la  faute  pourrait 
bien  être  dans  oéàwxa).  P.  35,  1.  19,  àxooueaôat  :  lisez  àxoXôeaOat.  P.  35, 
1.  24,  xpbç  tov  :  lisez  xpcç  aùxbv  (sans  lacune).  P.  35,  1.  26,  cu^Ypa?'']?  • 
lisez  auvxapaxîjç  (?  le  mot  ne  se  trouve  pas  dans  le  Thésaurus  ;  mais  il  est 
aussi  bien  formé  que  ciaïap  tv/j)  qu'on  trouve  chez  Plutarque).  P.  35,  1. 
28,  supprimez  IIoAux,àpxou.  P.  36,  1.  5,  t^xeXç  :  lisez  u^eiç.  P.  37,1.  8,  sup- 
primez àjj/rjv  (ajouté  par  étourderie  après  eiç  toùç  aiwvaç  twv  aùôvcov). 
P.  37,  1.  22  à  25  ne  sauraient  être  de  l'auteur;  xal  xâvxeç  èSô^aÇov 
xbv  ôebv  tov  xoiouvTa  Oaujxaaia  est  la  formule  ordinaire  pour  clore  un  récit 
de  miracles  tronqué,  et  les  doxologies  varient  d'un  ms.  à  l'autre  suivant 
l'humeur  du  copiste  et  suivant  l'espace  dont  il  dispose.  Celle-ci  est  d'un 
scribe  très  hérétique  ou  très  distrait  :  tov  Oeov...  to  yj  té^a  aùv  tw  xaxpt  xal 
Tw  utu>  xal  tw  âyiiù  xveûjxaTi  ! 

Les  pages  qui  précèdent  étaient  depuis  quelque  temps  entre  les  mains 
de  la  rédaction,  quand  l'auteur  apprit,  par  un  compte  rendu  de  M.  R. 
A.  Lipsius  (Deutsche  Litteratur\eitung  du  12  août  1882),  qu'il  existe 
déjà  une  seconde  édition  de  la  Vie  de  Polycarpe,  dans  le  t.  II  des  Pères 
apostoliques  de  M.  Funk.  On  fit  aussitôt  des  démarches  pour  se  mettre 
en  mesure  d'entretenir  les  lecteurs  de  la  Revue  critique  des  deux  éditions 
à  la  lois.  Mais  il  était  trop  tard  ;  l'article  était  composé.  On  reviendra 
sur  le  sujet,  s'il  y  a  lieu.  M.\x  Bonnet. 


366  REVUE   CRITIQUE 

229.  —  Die    Paibllclsttk    des   Prager    Frledens    (163K)   von  Dr  Heinrich 
Hitzigrath.  Halle,  Niemeyer,  1880,  134  p.  8°.  Prix:  4  fr.  5o. 

Cette  dissertation  fait  suite,  en  quelque  sorte,  à  celle  de  M.  Griin- 
baum,  sur  la  littérature  politique  en  Allemagne  de  1626  à  162g, 
et  sort,  comme  elle,  du  séminaire  historique  de  M.  Droysen,  à  Halle. 
Elle  traite  des  nombreux  écrits  éclos  le  lendemain  de  la  paix  de  Prague, 
signée  en  1 635  par  l'électeur  Jean-George  de  Saxe,  avec  l'empereur 
Ferdinand  II,  après  la  défaite  de  Noerdlingen,  subie  par  les  Suédois  et 
les  protestants  sous  Gustave  Horn  et  Bernard  de  Weimar.  Effrayé  par 
le  désastre  de  ses  coreligionnaires,  le  triste  prince  qui  régnait  alors  à 
Dresde,  et  dont  les  courtisans,  voire  même  le  prédicateur  de  cour,  étaient 
à  la  solde  des  Habsbourg,  n'hésita  pas  à  passer  du  côté  du  vainqueur, 
entraînant  de  la  sorte  la  soumission  de  la  plupart  des  petits  dynastes  de 
l'Allemagne  du  Nord.  Le  coup  fut  rude  pour  le  chancelier  suédois  et  les 
autres  princes  protestants  encore  en  armes  ;  leur  colère  se  mesura  natu- 
rellement à  leurs  craintes,  à  leurs  déceptions,  et  leurs  organes  politi- 
ques, leurs  diplomates  et  leurs  publicistes,  firent  entendre  des  plaintes 
fort  vives,  et  lancèrent  des  attaques  virulentes  contre  la  perfidie 
saxonne.  M.  Hitzigrath  a  choisi  dans  cette  littérature  quelques-unes  des 
brochures  les  plus  remarquables,  et  s'arrête  particulièrement  aux  Vindi- 
ciœ  in  pacem  Pragensem,  attribuées  à  Chemnitz  et  à  la  Deploratio  de 
Stella,  écrites  l'une  dans  l'intérêt  de  la  Suède,  l'autre  dans  celui  de  la 
France.  Naturellement  les  Saxons  et  la  cour  de  Vienne  ne  restèrent 
pas  muets  et  trouvèrent,  eux  aussi,  des  arguments  plus  ou  moins  pro- 
bants, en  faveur  de  leur  manière  d'agir.  Il  me  semble  qu'il  y  a  quelque 
confusion  dans  ce  que  l'auteur  dit  sur  la  personne  de  Stella.  S'il  entend 
réellement  attribuer  la  paternité  de  la  Deploratio  à  M.  Stella  de  Mori- 
mont,  le  résident  de  Louis  XIII  à  Strasbourg,  il  est  inexact  de  dire  qu'il 
était  de  Deux-Ponts  et  qu'il  s'était  fait  catholique;  il  est  faux  également 
qu'il  vécût  encore  en  1649.  Le  résident  strasbourgeois  était  Bâlois  d'o- 
rigine, et  mourut  à  Strasbourg  vers  1646,  sans  s'être  jamais  converti  au 
catholicisme.  Nous  croyons  aussi  que  M.  Hitzigrath,  tout  en  accentuant 
avec  raison  l'importance  des  brochures  qu'il  examine  de  plus  près,  au- 
rait pu  étendre  un  peu  le  cercle  des  pièces  examinées,  en  restreignant  la 
place  faite  à  chacune  '.  Le  style  est  quelquefois  un  peu  négligé  (par 
exemple,  ein  simpler  Edelmann)  et  sent  la  fréquentation  trop  assidue  de 
l'allemand  détestable  du  xvn9  siècle. 

R. 


1 .  Nous  ne  voyons  pas,  par  exemple,  qu'il  ait  cité  la  brochure  :  Clypeus  adver- 
sus  tela  obtrectorum,  oder  Diseurs  von  den  Laesterem  so  den  Pragischen  Frie- 
denschluss  ançutasten  sich  gelùsten  (1637),  signée  J.  Achtzennicht,  ce  qui  est  pro- 
bablement un  pseudonyme. 


d'histoire  et  de  littérature  367 

23o.  —    Voltaire.    Dlbllographle    de   se»    œuvres»  par  Georges  Bengesco. 
Paris,  Ed.  Rouveyre  et  G.  Blond,  1882.  Tome  I,  xrx-494  p.  Prix  :  25  fr. 

Jusqu'à  ce  jour  la  Bibliographie  voltairienne  de  Quérard  avait  été 
considérée  comme  le  seul  travail  sérieux  dont  les  œuvres  du  grand  pen- 
seur eussent  été  l'objet,  car  on  ne  peut  citer  que  pour  mémoire  les  Re- 
cherches sur  les  ouvrages  de  Voltaire,  par  Gabriel  Peignot  (Paris, 
1817,  in-8),  pamphlet  de  circonstance  sans  valeur  littéraire  et  où  sont 
sommairement  décrites  quelques  éditions  de  ses  œuvres  complètes  pu- 
bliées au  xvni8  siècle.  Cependant  Quérard  lui-même  ne  dissimulait  pas 
qu'il  s'était,  à  peu  de  chose  près,  borné  à  classer  les  indications  recueillies 
par  Beuchot  et  à  en  dresser  quatre  tables.  «  Or,  dit  M.  Bengesco,  Beu- 
chot,  livré  tout  entier  à  son  travail  d'éditeur,  n'a  accordé  dans  les  Aver- 
tissements et  dans  les  Notes  de  son  édition  qu'une  place  tout  à  fait 
secondaire  à  la  bibliographie;  il  a  énuméré,  sans  les  décrire,  les  deux  ou 
trois  premières  éditions  de  chaque  ouvrage  de  Voltaire  et,  pour  les  écrits 
qui  n'ont  pas  été  imprimés  séparément  (pièces  de  théâtre,  poésies  diver- 
ses, lettres,  etc.),  il  a  très  rarement  pris  la  peine  d'indiquer  dans  quelle 
feuille  périodique,  dans  quel  recueil  du  temps,  dans  quelle  édition  des 
Œuvres  complètes,  chacune  avait  paru  pour  la  première  fois.  Enfin  * — 
et  c'est  là  une  des  lacunes  les  plus  considérables  du  travail  de  Beuchot 
et  de  Quérard,  —  ni  l'un  ni  l'autre  ne  s'est  attaché  à  distinguer  les  édi- 
tions données  avec  la  participation  de  Voltaire  des  éditions  auxquelles  il 
est  demeuré  étranger,  et  c'est  ce  qui  fait  qu'aujourd'hui  encore,  malgré 
tout  le  mérite  des  éditions  de  Beuchot  et  de  M.  Moland,  le  texte  authen- 
tique de  Voltaire  n'est  pas  définitivement  établi.  » 

L'auteur  de  cette  nouvelle  Bibliographie,  étranger  d'origine,  mais 
élevé  en  France  et  plein  de  zèle  pour  notre  littérature,  a  pensé  que  Vol- 
taire méritait,  autant  que  Molière  et  que  Corneille,  et  assurément  plus 
que  Restif,  les  honneurs  d'une  monographie  détaillée;  il  a  donc  recueilli 
toutes  les  éditions  qui  lui  tombaient  sous  la  main,  collationné  tous  les 
exemplaires  de  la  collection  voltairienne  de  Beuchot,  acquise  en  1 868  par 
la  Bibliothèque  nationale  et  vérifié  ses  notes  tant  au  British  Muséum  qu'à 
la  Bibliothèque  impériale  de  Vienne  ou  chez  divers  amateurs.  Renonçant 
aux  divisions  et  subdivisions  adoptées  par  Quérard,  il  est  revenu  à  l'ordre 
beaucoup  moins  compliqué  suivi  par  Beuchot  :  théâtre,  poésies,  histoire, 
Dictionnaire  philosophique,  romans,  mélanges,  correspondances,  et  qui 
avait,  selon  le  savant  éditeur,  l'avantage  de  faire  suivre  au  lecteur  «  la 
marche  même  de  l'esprit  de  Voltaire  '  ».  Le  premier  volume  de  M.  B. 

1.  Cette  question  de  classement  avait  fort  préoccupé,  paraît-il,  un  savant  voué  à  de 
toutes  autres  études.  «  Mon  père,  dit  M.  Gaston  Paris,  rêvait  une  édition  des  œuvres 
de  Voltaire  conçue  sur  un  plan  biographique,  dans  laquelle  chaque  ouvrage  aurait 
été  inscrit  à  sa  date  sans  distinction  de  genres,  de  manière  à  offrir  un  tableau  com- 
plet de  cette  étrange  et  multiple  activité  de  soixante-dix  ans.  Il  disait  qu'il  y  avait 
encore  beaucoup  à  faire  pour  la  critique  des  œuvres  de  Voltaire,  qu'on  lui  en  attri- 


368  REVUE   CRITIQUA 

comporte  les  cinq  premières  séries;  le  second  renfermera  les  mélanges, 
la  correspondance,  les  œuvres  complètes  et  choisies,  enfin  les  apocryphes. 
M.  B.  a  également  réuni  les  éléments  d'un  troisième  volume  consacré 
aux  traductions  et  aux  ouvrages  relatifs  aux  écrits  et  à  la  personne  de 
Voltaire.  Nous  souhaitons  vivement  que  cette  dernière  partie,  dont 
Quérard  a  donné  une  esquisse  fort  arriérée,  soit  mise  au  jour.  Voltaire 
est,  avec  Molière,  l'écrivain  français  dont  le  nom  et  les  œuvres  ont  pro- 
voqué le  plus  d'apologies  et  de  diatribes. 

Fidèle  à  son  plan,  M.  B.  a  décrit  non-seulement  tout  ce  qui  a  été 
publié  en  volume,  mais  il  a  recherché  où  avaient  paru  d'abord  et  où 
avaient  été  réimprimées  toutes  les  poésies  de  Voltaire  :  pour  cela,  il  s'est 
constamment  servi  des  sept  éditions  des  Œuvres  complètes  publiées  avec 
la  participation  de  l'auteur  :  celle  de  Ledet  ou  Desbordes  (Amst.,  1738- 
1745,  5  vol.);  celles  dites  de  Dresde  dues  à  G.  C.  Walther,  1 748-1 754, 
10  vol.  in-8  ou  1752-1770,  10  vol.  in-12;  celle  de  Lambert  à  Paris 
(175  1-1758,  i3  vol.  petit  in-8,  s.  n.  de  ville),  que  Voltaire  déclarait  «  de 
toutes  la  plus  passable  »;  celles  de  Cramer,  1756-1774,  58  vol.  in-8  et 
table,  1768- 1790,  45  vol.  in-4  avec  figure  de  Gravelot,  enfin  l'édition 
dite  encadrée  (1775,  37  vol.  in-8,  plus  trois  volumes  de  pièces  déta- 
chées) ;  c'est  celle-ci  dont  Voltaire  avait  annoté  un  exemplaire  qui  fut 
communiqué  à  Beaumarchais,  Panckouke,  Ruault  et  Decroix  pour 
l'édition  de  Kehl.  Quant  aux  ouvrages  imprimés  séparément,  à  défaut  de 
rubriques  sérieuses,  qui  manquent  à  la  plupart  d'entre  eux,  M.  B.  s'est 
livré  à  une  comparaison  attentive  des  fleurons,  culs-de-lampe,  lettres  ini- 
tiales et  autres  ornements  typographiques  qui  lui  a  permis  de  reconnaître 
de  quelle  presse  chacun  de  ses  ouvrages  est  sorti  '  :  c'est  ainsi  qu'il  est 
parvenu  à  débrouiller  victorieusement,  selon  nous,  l'énigme  bibliogra- 
phique de  la  véritable  édition  originale  de  Candide.  La  question  sou- 
levée en  1870  dans  /' Intermédiaire  avait  provoqué  une  réponse  motivée 
(col.  25 1);  l'auteur  de  cette  réponse,  signée  P.  R.,  tenait  pour  originale 
une  édition  de  237  p.,  plus  3  ff.  non  chiffrés  pour  la  table  des  chapitres, 
cotée  à  la  Bibliothèque  Y2  75 1  A  (Réserve)  et  sur  laquelle  Jamet  le  jeune 
a  inscrit  un  «  achevé  de  lire  »  du  27  mars  1759.  «  Mais,  dit  avec  raison 
M.  B.,  de  ce  que  Jamet  a  achevé  de  lire  Candide,  le  27  mars  1759,  s'en- 
suit-il que  son  exemplaire  appartienne  à  l'édition  princeps  du  chef-d'œu- 

buait  peut-être  dont  il  n'était  pas  l'auteur,  et  qu'en  revanche  on  n'avait  pas  reconnu 
sa  paternité  pour  plus  d'un  opuscule  qu'il  s'était  bien  gardé  de  revendiquer.  Il  pen- 
sait que  de  tous  nos  grands  écrivains,  c'est  celui  dont  il  y  a  le  plus  d'intérêt  à  étudier 
les  éditions  originales,  et  il  avait  commencé  à  les  rechercher.  »  (Catalogue  de  la 
bibliothèque  de  M.  P.  Paris,  préface,  p.  x).  A  cette  vente  figurait,  sous  le  n°  3344, 
un  exemplaire  de  la  Bibliographie  voltairicnne ,  chargé  de  notes;  il  a  été  acquis  par 
M.  G.  Bengesco. 

1.  M.  B.  s'est  astreint  à  indiquer  soigneusement  la  cote  de  chacun  des  volumes  qu'il 
a  décrits;  tous  ceux  qui  savent  combien  il  est  parfois  difficile  d'obtenir  à  la  Biblio- 
thèque tel  exemplaire  ou  telle  édition  d'un  livre  lui  sauront  certainement  gré  de 
cette  innovation. 


d'histoire  et  de  littérature  369 

vre  de  Voltaire?  »  Après  avoir  déterminé,  précisément  par  l'examen  des 
fleurons,  que  l'exemplaire  deJamet  appartient  à  une  édition  de  Paris  im- 
primée pour  Lambert,  en  même  temps  que  Socrate,  ouvrage  dramati- 
que, M.  B.  établit  que  la  seule  et  réelle  édition  originale  est  un  in- 12  de 
299  fl.,  avec  signatures  A-N4;  entre  autres  preuves  concluantes,  il  indique 
divers  fleurons  fréquemment  employés  dans  l'imprimerie  des  Cramer  et 
très  différents  de  ceux  qu'on  retrouve  dans  les  deux  éditions  de  même 
date,  également  de  299  p.,  mais  imprimées,  selon  M.  B.,  l'une  à  Lon- 
dres et  l'autre  à  Paris  ;  les  six  autres  ayant  le  même  titre  et  la  même  date 
comportent  237,  21 5  et  166  pages;  plusieurs  d'entre  elles  ont  quelques 
fleurons  identiques. 

Cet  exemple  suffira,  je  pense,  à  prouver  quel  soin  M.  B.  apporte  dans 
toutes  ses  investigations,  et  il  n'est  point  de  chapitre  de  son  livre  qui  ne 
soit  digne  d'un  tel  éloge.  Avant  d'aborder  les  points  fort  peu  nombreux 
sur  lesquels  on  pourrait  souhaiter  plus  de  précision  ou  ajouter  un  détail 
complémentaire,  il  nous  faut  chercher  querelle  à  l'auteur  pour  une  la- 
cune toute  matérielle,  mais  qui,  dans  un  travail  de  cette  nature,  n'est  pas 
sans  importance.  Un  seul  titre  courant  pour  492  pages,  par  suite  aucune 
séparation  apparente  entre  les  diverses  sections,  point  de  table  alphabé- 
tique des  œuvres  décrites;  n'est-ce  pas  exiger  du  lecteur  qu'il  sache  d'a- 
vance le  titre  exact  de  telles  stances,  de  telle  ode,  de  telle  épigramme  (et, 
certes,  l'auteur  et  ses  éditeurs  ne  se  sont  point  fait  faute  de  le  modifier), 
ou  la  date  de  leur  composition ,  ce  qui  est  encore  moins  admissible  ?  Nous 
serions  plutôt  en  droit  de  demander  à  M.  B.  une  table  spéciale  pour 
chaque  volume,  outre  la  table  générale  qui  devra  terminer  le  tome  IIIe. 

Les  remarques  que  m'a  suggérées  l'examen  le  plus  attentif  portent 
moins  sur  les  descriptions  dont  j'ai  pu  constater  la  scrupuleuse  rigueur 
que  sur  diverses  additions  sans  grande  importance. 

P.  79.  M.  B.  s'étonne  que  Grimm  ait  pu,  dans  sa  lettre  du  Ier  janvier 
1772,  citer  l'approbation,  en  date  du  y  février,  délivrée  par  Crébillon 
fils  aux  Pélopides.  Cet  anachronisme  apparent  s'explique,  comme  j'ai 
déjà  eu  occasion  de  le  dire  ici  même  \  par  ce  fait  que  la  Correspondance 
littéraire  était  souvent  rédigée  à  une  date  postérieure  à  celle  que  por- 
taient ces  cahiers,  et  notamment  en  1772,  aussitôt  après  un  séjour  assez 
prolongé  de  Grimm  en  Angleterre. 

P.  i53.  V Impromptu  fait  à  un  souper  dans  une  cour  d'Allemagne, 
est-il  bien  de  1750,  comme  le  dit  M.  G.  Avenel,  et  comme  le  ferait  sup- 
poser le  classement  chronologique  adopté  par  M.  Moland?  M.  Clogenson 
estimait  que  ces  stances  avaient  dû  être  composées  à  Cirey,  entre  le 
i5  octobre  et  le  i5  décembre  1734,  et  les  deux  derniers  vers  : 

Or,  dès  l'instant  que  j'aimai  ma  Sylvie, 
Sans  trop  chercher  j'ai  trouvé  tout  cela, 

seraient  déjà  un  argument  assez  probant  en  faveur  de  cette  opinion,  mais 
1.  Voir  la  Revue  critique  du  14  août  1882,  p.  1 33. 


370  RXVUE   CRITIQUE 

voici  qui  est  plus  décisif:  Mme  Du  Châtelet  a  cité  dans  ses  Réflexions 

sur  le  bonheur  ',  les  troisième  et  quatrième  vers  du  premier  quatrain  : 

Il  faut  aimer,  c'est  ce  qui  nous  soutient, 
Car  sans  l'amour  il  est  triste  d'être  homme. 

Mmc  du  Châtelet  est  morte  le  10  septembre  1749,  et  les  Réflexions  n'ont 
pu  être  écrites  dans  les  derniers  mois  si  troublés  de  son  existence.  Parmi 
les  reproductions  contemporaines  de  ces  stances,  M.  B.  a  omis  de  men- 
tionner celle  qu'en  a  donnée  Diderot  dans  sa  lettre  à  Mlle  Volland,  du  3  no- 
vembre 1759.  Elles  y  présentent  même  d'assez  notables  variantes.  Il  est 
plus  que  probable  que  Diderot  les  citait  de  mémoire;  il  les  avait  intitu- 
lées les  11  faut;  on  les  trouve  tantôt  sous  le  titre  indiqué  par  M.  B.,  tan- 
tôt sous  celui  du  Bonheur  ou  de  V Usage  de  la  vie. 

P.  i65.  A  propos  du  poème  de  la  Bataille  de  Fontenoy,  M.  B.  dit 
posséder  un  exemplaire  sur  lequel  est  écrit  un  envoi  qui  n'est  pointautogra- 
phe.  J'ai  eu  sous  les  yeux,  il  y  a  quelques  années,  un  autre  exemplaire  qui 
présentait  la  même  particularité,  et  cela  n'a  rien  de  surprenant  si  l'on  se 
reporte  à  un  billet  de  Voltaire  à  Panckouke,  publié  par  M.  Ch.  Nisard 
et  non  recueilli  par  M.  Moland2  :  le  poète  prie  son  libraire  «  de  faire  tenir 
des  exemplaires  à  tous  ceux  qui  sont  nommés  dans  le  poème  et  dans  les 
notes,  et  de  bien  vouloir  mettre  à  la  marge  de  la  première  page  :  De  la 
part  de  votre  très  humble  et  très  obéissant  serviteur,  Voltaire  ». 

P.  281 .  L1 Impromptu  fait  dans  les  jardins  de  Cirey  en  se  promenant 
au  clair  de  lune,  a  bien  été  reproduit  par  les  éditeurs  de  Kehl,  mais  il 
a  été  éliminé  par  Beuchot  qui  a  fait  observer  que  ce  quatrain  était  du 
P.  Lemoyne,  auteur  d'un  poème  sur  Saint  Louis  (Avertissement  des 
Poésies  mêlées,  t.  X,  p.  465  de  l'édition  Garnier  frères). 

P.  372.  Aux  éditions  et  traductions  de  l'Histoire  de  Charles  XII, 
cataloguées  par  M.  B.,  je  puis,  grâce  à  une  bienveillante  communication 
de  M.  E.  G.  Klemming,  conservateur  de  la  Bibliothèque  royale  de 
Stockholm,  ajouter  l'indication  de  deux  réimpressions,  les  seules  dont, 
chose  curieuse,  ce  livre  ait  été  l'objet  en  Suède:  Histoire  de  Char- 
les XII,  par  Voltaire,  avec  un  commentaire  à  l'usage  des  écoles.  Nor- 
copie,  N.  Schmidt,  i83i,  in-8,  284  p.  —  La  même,  med  grammatika- 
liska  anmârkningar  och  odforhalingar  af  Y.  Nyberg  (Ph.  Mag.),  adjuntet 
vid  Upsala  Kathedral-Skola.  Upsal,  1860,  in-8,  296  p. 

P.  398.  M.  B.  a  soigneusement  établi  les  diverses  phases  de  la  prépa- 
ration, delà  rédaction  et  de  la  mise  au  jour  de  V Histoire  de  Vempire 
de  Russie  sous  Pierre  le  Grand.  L'enfantement  fut  laborieux  et  le 
livre  faillit  être  contrefait  avant  d'avoir  paru.  M.  B.,  qui  fixe  à  octobre 
1760  la  date  approximative  de  la  circulation  des  premiers  exemplaires, 


1.  Imprimées  pour  la  première  fois  par  l'abbé  Bourlet  de  Vauxcelles,  dans  les  Opus- 
cules philosophiques  et  littéraires,  la  plupart  posthumes  ou  inédites  (sic).  Paris,  imp. 
Chevet,  1796,  in-8.  Les  vers  de  Voltaire  se  trouvent  p.  28. 

2.  Mémoires  et  correspondances  historiques  et  littéraires  inédits  (Michel  Lévy, 
i858,  in-8,  p.  57). 


d'histoire  et  de  littérature  371 

aurait  pu  mentionner,  comme  preuve  à  l'appui,  un  assez  long  passage 
d'une  lettre  de  Diderot  à  Mlle  Volland  (20  octobre  1760)  où  il  lui  rend 
compte  de  l'histoire  du  czar,  que  lui  avait  communiquée  Damilaville. 
Ce  fut  en  1745  que  Voltaire  songea,  pour  la  première  fois,  à  écrire  ce 
livre,  et  M.  B.  a  rappelé  dans  une  note  une  lettre  au  comte  d'Alion,  am- 
bassadeur de  France  à  Saint-Pétersbourg,  qui  fixe  nettement  l'origine 
de  ses  relations  avec  la  cour  de  Russie;  mais,  ce  que  M.  B.  n'a  pas  eu 
sans  doute  le  loisir  de  dire,  ce  sont  les  étranges  mutilations  qu'a  subies  le 
texte  de  cette  lettre  :  on  me  pardonnera  de  les  faire  connaître  ici,  car  elles 
sont  un  nouveau  témoignage  de  ce  qui  reste  à  faire  encore  aujourd'hui 
pour  rétablir  dans  son  intégrité  la  majeure  partie  de  la  correspondance. 
En  1839,  M.  S.  Poltoratzky  fit  imprimer  à  i5o  ex.  cette  lettre  publiée, 
disait-il,  pour  la  première  et  unique  fois  en  1807,  dans  un  journal  russe, 
le  Courrier  de  l'Europe,  et  restée  inconnue  à  tous  les  éditeurs  de  Vol- 
taire. Or,  sept  ans  avant  la  mise  en  vente  de  l'opuscule  de  M.  Polto- 
ratzky, cette  lettre,  ou  plutôt  ces  deux  lettres,  avaient  été  imprimées 
dans  l'Histoire  de  la  Régence,  de  Lemontey  (i832,  t.  II,  p.  393);  mais 
elles  y  étaient  si  bien  enfouies  que  ni  M.  Poltoratzky,  ni  MM.  de  Cay- 
rol et  François,  ni  M.  Avenel,  ni  M.  Moland  ne  se  sont  avisés  de  les  y 
aller  chercher.  Je  ne  donne  ci-dessous  que  les  passages  omis  et  j'imprime 
en  italiques  les  mots  changés  ou  supprimés  par  le  Courrier  de  l'Europe. 

TEXTE   DE    1807. 

Je  vous  supplie,  monsieur,  de  présenter  à  Sa  Majesté  impériale  un 
exemplaire  de  ma  Henriade,  et  de  lui  faire  remarquer  le  petit  envoi  qui 
accompagne  ce  livre  et  qui  est  à  la  première  page. 

Ce  n'est  pas  tout,  monsieur,  et  c'est  ici  qu'il  faut  encore  que  le  nom 
de  M.  le  marquis  d'Argenson  parle  pour  moi.  Je  vous  envoie  un  exem- 
plaire d'un  livre  sur  la  Philosophie  de  Newton.  [Tout  le  reste  du  pa- 
ragraphe est  conforme  jusqu'à  :  et  qui  V égale  par  ses  autres  vertus!  Il 
s'agit  de  l'impératrice  Elisabeth.] 

TEXTE    DE   LEMONTEY. 

Les  bontés  dont  M.  le  marquis  d'Argenson  m'honore  depuis  l'enfance, 
monsieur,  me  serviront  d'excuses  auprès  de  vous.  Je  n'en  ai  pas  besoin 
pour  la  liberté  que  je  prends  de  vous  envoyer  le  poème  sur  la  victoire 
du  roi  notre  maître1.  C'est  un  tribut  que  je  vous  dois,  et  celui  qui  soutient 
si  bien  les  intérêts  du  royaume  a  des  droits  sur  les  ouvrages  consacrés  à 
sa  gloire.  Mais  je  pense  que  j'ai  besoin  de  la  protection  de  M.  d'Argenson 
pour  les  autres  libertés  que  je  vais  prendre  avec  vous. 

Premièrement,  je  vous  supplie  de  présenter  un  exemplaire  de  ce  poème 
à  Sa  Majesté  impériale,  si  vous  trouve^  que  cela  soit  convenable.  J'ose 
ensuite  mettre  sous  votre  protection  cet  exemplaire  de  la  plus  belle  édi- 
tion de  la  Henriade,  le  seul  qui  reste  à  Paris,  et  que  je  vous  supplie  de 


1.  Le  poëme  sur  Fontenoy. 


372  REVUE    CRITIQUE 

vouloir  bien  présenter  à  Sa  Majesté  en  lui  montrant  le  petit  envoi  qui 
accompagne  le  livre  et  qui  est  à  la  première  page. 

Ce  n'est  pas  tout,  monsieur,  et  c'est  ici  qu'il  faut  encore  que  le  nom  de 
M.  d'Argenson  parle  pour  moi.  J'ajoute  à  cet  énorme  paquet  deux 
exemplaires  d'un  livre  sur  la  philosophie  de  Newton...  Mon  projet  était 
de  voir  sa  cour  *  quand  j'étais  à  celle  de  Berlin.  Mais  je  n'ai  pu  avoir  cet 
honneur  et  j'ai  été  réduit  à  l'admirer  de  loin.  Soyez  persuadé,  monsieur, 
que  je  conserverai  toute  ma  vie  la  reconnaissance  que  je  devrai  à  vos 
bontés.  Je  suis,  etc. 

Voltaire. 
A  Paris,  16  juin  1745. 

A  cette  première  lettre  était  jointe  celle-ci. 

Depuis  ma  lettre  écrite,  monsieur,  j*ai  pensé  que  si  vous  daignez  vous 
charger  de  présenter  à  Sa  Majesté  impériale  la  Henriade  et  le  poème 
sur  la  bataille  de  Fontenoy,  que  je  prends  la  liberté  de  lui  adresser,  vous 
aurez  sans  doute  la  bonté  de  lui  parler  de  moi.  Mon  nom  ne  lui  est  pas 
absolument  inconnu,  puisqu'on  m'a  assuré  qu'elle  prenait  quelque  plai- 
sir à  voir  représenter  mes  pièces  de  théâtre,  et  c'est  probablement,  mon- 
sieur, une  obligation  que  je  vous  ai.  Je  me  flatte  donc  que  je  pourrais 
vous  en  avoir  encore  une  autre.  J'ai  écrit,  il  y  a  quelques  années  Y  His- 
toire de  Charles XII.  [Texte  conforme  jusqu'à  :] 

Ma  façon  de  penser  me  détermine  plus  vers  cet  empereur  que  vers  le 
roi  de  Suède.  Le  premier  a  été  un  législateur,  il  a  fondé  des  villes  et, 
j'ose  le  dire,  son  empire.  Charles  XII  a  presque  détruit  son  royaume.  Il 
était  un  plus  grand  soldat,  mais  je  crois  l'autre  un  plus  grand  homme. 

Texte  de  180  / . 

Ma  façon  de  penser  me  détermine  vers  cet  empereur  qui  a  été  un  légis- 
lateur, qui  a  fondé  des  villes  et,  j'ose  le  dire,  son  empire. 

Si  la  digne  fille  de  l'empereur  Pierre  le  Grand...  [Textes  conformes.] 
Texte  de  Lemontey. 

Voilà  bien  des  grâces,  monseigneur,  que  j'ose  vous  demander,  la  pre- 
mière fois  que  j'ai  l'honneur  de  vous  écrire.  Mais  elles  regardent  toutes 
le  progrès  des  arts  et  la  gloire  de  plus  d'un  grand  homme  en  est  l'objet. 
Je  vous  réitère,  monseigneur,  ma  très  respectueuse  reconnaissance. 

V. 

Lemontey  avait  évidemment  copié  cette  lettre  aux  Archives  du  minis- 
tère des  affaires  étrangères  qui  lui  avaient  été  ouvertes  par  les  ordres  de 
Napoléon  Ier. 

La  minutie  même  des  remarques  que  je  soumets  à  l'auteur  et  à  mes  lec- 
teurs est  la  meilleure  garantie,  je  pense,  des  éloges  que  mérite  ce  premier 
volume.  Lorsque  les  fonctions  diplomatiques  de  M.  B.  lui  auront  permis 
de  nous  donner  les  tomes  II  et  III,  l'ensemble  constituera  une  mono- 


1.  Celle  de  l'impératrice  Elisabeth. 


d'histoire  kt  de  uttkraturk  373 

graphie  bibliographique  qui  ne  se  ressentira  en  rien  de  l'aridité  habi- 
tuelle à  ces  sortes  de  travaux.  Il  n'est  peut-être  pas,  en  effet,  une  seule 
pièce  de  théâtre,  un  seul  conte  en  vers  ou  en  prose,  une  seule  de  ces 
minces  brochures  que,  durant  vingt  années,  la  manufacture  de  Ferney, 
selon  le  mot  de  Grimm,  répandit  par  le  monde,  qui  n'ait  été  pour  Fau- 
teur la  cause  de  luttes,  de  terreurs  puériles  ou  justifiées,  et,  disons-le,  de 
mensonges.  Une  bibliographie  raisonnée  de  Voltaire,  c'est  donc,  à  pro- 
prement parler,  l'histoire  même  de  sa  vie;  remercions  M.  Bengesco  de 
nous  la  faire  relire,  car  cette  histoire,  cent  fois  contée  et  toujours  nou- 
velle, ne  laissera  jamais  indifférents  ni  les  adversaires  ni  les  admirateurs 
du  «  patriarche  ». 

Maurice  Tourneux. 


CORRESPONDANCE 


a    m  .    gaston    paris 

Mon  cher  Directeur, 
Voulez-vous  me  permettre  quelques  observations  en  réponse  à  votre 
article  sur  mes  Contes  slaves  (Revue  critique  du  2  octobre)?  Mon  seul  but, 
dans  le  volume  auquel  vous  avez  bien  voulu  vous  intéresser,  était  de 
donner  une  idée  du  conte  populaire  chez  les  différents  peuples  slaves,  de 
présenter  une  sorte  de  florilegium  où  les  idiomes  les  plus  divers  seraient 
représentés  au  moins  par  un  ou  deux  spécimens.  Je  suis  loin  de  nier  l'in- 
térêt du  recueil  comparatif  dont  vous  esquissez  le  plan  ;  mais  ce  recueil 
eût  pu  difficilement  entrer  dans  le  cadre  restreint  tracé  par  l'éditeur  ;  et, 
d'autre  part,  c'eût  été  un  travail  de  plusieurs  années  pour  lequel  le  loisir 
me  fait  absolument  défaut  en  ce  moment.  Le  domaine  des  études  slaves 
est  immense;  je  suis  obligé  d'être  à  la  fois  linguiste,  voyageur,  archéo- 
logue, historien,  mythographe  et  folkloriste.  Permettez  à  un  vieux  et  — 
salva  modestia —  laborieux  collaborateur  de  la  Revue,  d'invoquer  une 
fois  de  plus  l'adage  :  Vita  brevis,  ars  longa.  D'ailleurs,  vous  l'avoue- 
rai-je?  en  ces  matières  si  neuves  et  si  délicates,  je  me  défie  de  moi-même 
et  je  crois  qu'il  convient  à  un  novice  d'être  très  réservé.  Si  je  me  suis 
trompé  dans  le  choix  de  mes  contes,  ce  n'est  qu'à  la  suite  d'hommes  fort 
compétents,  et  je  m'empresse  de  m'abriter  derrière  eux.  La.  Fille  du  doge 
a  été  arrangée  par  feu  Siegfried  Kapper,  qui  était  un  des  plus  fins  con- 
naisseurs de  la  littérature  serbo-croate.  Je  l'ai  traduite  d'après  sa  version 
tchèque  —  la  seule  que  je  connaisse.  Les  détails  que  j'ai  supprimés 
eussent  été  absolument  inintelligibles  pour  le  lecteur  français  ;  le  narra- 
teur s'amuse  à  faire  parler  russe  à  un  Cosaque,  magyar  à  un  Hongrois, 
etc....  Le  Berger  et  le  dragon  est  cité  comme  conte  populaire  non-seu- 
lement dans  le  recueil  slovaque  auquel  je  l'ai  emprunté,  mais  encore 
dans  le  recueil  tchèque  intitulé  Perly  c^eské,  Prague,  i855,  recueil  au- 

■ 


374  REVUE    CRITIQUB 

quel  des  folkloristes  comme  Erben  ont  collaboré.  Les  notes  qui  l'ac- 
compagnent dans  cette  édition  insistent  même  sur  certaines  superstitions 
slovaques  que  je  n'ai  pas  eu  l'occasion  de  contrôler-  moi-même,  n'étant 
jamais  allé  dans  la  Hongrie  septentrionale.  Quant  à  Blanche  Neige, 
c'est,  dites- vous,  un  prétendu  conte  russe  et  une  fiction  de  lettré.  Voici 
ce  qui  résulte  de  mes  recherches.  Sniegourka  (mot  intraduisible  qui 
vient  de  Snieg,  neige)  a  été  d'abord  publié  par  Maximovitch,  un  des 
fondateurs  du  folklore  russe  ;  il  a  été  reproduit  ensuite  par  Erben,  un 
excellent  mythographe,  dans  son  recueil  de  cent  contes  slaves,  ouvrage 
classique  s'il  en  fut.  Afanasiev,  dans  son  grand  ouvrage  de  folklore  com- 
paré {Vues  des  Slaves  sur  la  nature,  3  vol.  in-8°,  Moscou,  1868),  s'oc- 
cupe, à  plusieurs  reprises,  de  ce  personnage.  Tome  II,  p.  497,  il  est  ap- 
pelé Sniejevinotchka  (Neigeotte?),  rattaché  à  un  mythe  solaire  ;  plus  loin, 
pp.  639-641,  Afanasiev  donne  deux  variantes  de  notre  conte,  dont  l'une 
est  celle  de  Maximovitch,  et  il  compare  Sniegourka  au  Schneekind  de  la 
mythologie  de  Grimm.  Suit  l'interprétation  du  conte.  Vous  voyez  donc 
que  si  je  me  suis  trompé  ici,  c'est  en  bonne  et  nombreuse  compagnie.  Il 
serait  bien  étrange,  d'ailleurs,  que  la  neige  ne  jouât  pas  un  rôle  dans  le 
folklore  d'un  peuple  qui  vit  avec  elle  la  moitié  de  l'année. 

En  ce  qui  concerne  le  Petit  Poucet  russe,  votre  traduction  et  la 
mienne  diffèrent  sur  quelques  points.  Il  en  est  un  sur  lequel  je  confesse 
volontiers  un  péché  d'omission  ;  un  autre  sur  lequel  je  ne  me  sens  pas 
suffisamment  éclairé.  Il  s'agit  d'un  mot,  suivant  vous  bien  rabelaisien, 
mais  pour  lequel  aucun  dictionnaire  ne  fournit  de  suffisante  explication. 
Je  tenais  d'ailleurs  à  donner  ce  conte,  bien  que  traduit  autrefois  par 
vous,  pour  offrir  une  idée  aux  lecteurs  de  ma  chrestomathie  de  la  façon 
dont  certains  sujets  étaient  traités  par  le  folklore  russe.  Il  est  des 
choses  classiques  qui  se  répètent  fatalement  dans  toutes  les  chrestoma- 
thies. 

Agréez,  je  vous  prie,  etc. 

L.  Léger. 

M.  Léger  m'assure  qu'il  n'a  pas  inventé  les  contes  dont  je  lui  ai  reproché  l'admis- 
sion, mais  qu'il  les  a  pris  dans  des  recueils  slaves;  c'est  précisément  ce  que  j'ai  dit, 
en  regrettant  qu'il  n'ait  pas  appliqué  à  ces  recueils  une  critique  assez  sévère.  Que 
le  personnage  de  Sniegourka  soit  populaire,  je  n'en  doute  pas,  mais  que  le  conte 
traduit  par  M.  Léger  ait  été  recueilli  dans  le  peuple,  je  n'en  crois  rien,  et  je  suis  sûr 
qu'une  enquête  ouverte  à  ce  sujet  mettrait  le  fait  hors  de  doute.  Dans  un  recueil 
aussi  restreint  que  celui  de  M.  Léger,  il  valait  mieux  ne  pas  admettre  des  contes  déjà 
traduits  en  français,  et  il  est  fâcheux  de  constater,  dans  la  traduction  du  Petit  Pou- 
cet, l'omission  au  moins  d'un  trait  intéressant.  Le  mythographe,  mis  en  méfiance, 
n'osera  pas  se  servir  des  versions  de  M.  Léger  pour  établir  la  classification  des  for- 
mes d'un  conte.  Je  renouvelle  le  vœu  que  notre  savant  collaborateur  nous  donne 
bientôt  quelque  nouveau  recueil  de  contes  slaves,  conçu  et  exécuté  d'une  manière 
tout  à  fait  scientifique. 

G.  P. 


d'histoire  et  de  littérature  375 

CHRONIQUE 


FRANCE.  —  Le  XXXI  Im»  volume  de  la  «  Bibliothèque  orientale  elzévirienne  »  pu- 
bliée par  l'éditeur  Ernest  Leroux  est  intitulé  L'encre  de  Chine,  son  histoire  et  sa  fa- 
brication, d'après  des  documents  chinois  traduits  par  M.  Maurice  Jametel,  élève  de 
l'Ecole  spéciale  des  langues  orientales  vivantes  (xxx  et  94  pages,  avec  vingt-sept  gra- 
vures d'après  des  originaux  chinois,  5  fr.).  M.  J.  a  traduit  dans  ce  volume  le  Manuel 
élémentaire  du  fabricant  d'encre  de  Chine,  parChen-ki-souen,de  Sou  tchéou(i3o,8); 
ce  Manuel  est  une  véritable  rareté  dans  la  littérature  chinoise,  et  «  son  esprit,  l'ab- 
sence complète  de  recherche  dans  son  style,  l'attention  que  prend  son  auteur  à  énumé- 
rer  toutes  les  phases  de  la  fabrication  sans  omettre  aucun  détail  rappellent  bien  plu- 
tôt les  conceptions  positivistes  de  l'Europe  moderne  que  les  rêveries  philosophiques 
de  l'Asie  ».  Il  est  vrai  que  l'ouvrage  de  Chen-ki-souen  manque  de  méthode  et  offre 
parfois  des  obscurités;  mais  M.  J.  a  changé  l'ordre  des  paragraphes,  pour  rendre  le 
traité  moins  diffus,  et  reproduit  sans  changement  les  passages  obscurs,  afin  de  con- 
server, autant  que  possible,  le  texte  original  dans  son  intégrité.  Il  a,  en  outre,  dans 
son  introduction,  fourni  de  curieuses  informations  sur  la  partie  historique  du  sujet, 
complètement  laissée  de  côté  par  Chen-ki-souen  ;  il  a  consulté  les  principaux  traités 
sur  l'encre  de  Chine  écrits  par  les  érudits  chinois  et  en  donne  un  court  résumé. 

—  La  «  Bibliothèque  slave  elzévirienne  »  que  publie  le  même  éditeur,  s'est  enrichie 
d'un  quatrième  volume,  dont  nous  rendrons  prochainement  compte  ;  il  renferme  la 
relation  de  la  Missio  moscovitica  ou  delà  mission  en  Russie  du  P.  Antoine  Posse- 
vino,  chargé  par  le  pape  Grégoire  XIII  en  ib82  de  rétablir  la  paix  entre  Ivan  le  Ter- 
rible et  le  roi  de  Pologne  Batory,  et  de  ramener  la  Moscovie  au  catholicisme;  le  texte 
de  cette  relation  est  édité  par  le  P.  Pierling  qui  y  a  joint  un  index  et  un  commen- 
taire. 

—  L'éditeur  Klincksieck  vient  de  publier  un  volume  nouveau  dans  sa  «  collection 
à  l'usage  des  classes»;  c'est  la  traduction,  par  M.  O.  Riemann,  d'un  opuscule  de 
M.  H.  Schiller  sur  les  Mètres  lyriques  d'Horace  d'après  les  résultats  de  la  critique 
moderne  (i883,  iv  et  80  pp.).  Cet  opuscule  formera  un  complément  utile  de  la  Mé- 
trique grecque  et  latine  de  M.  Lucien  Mùller  dont  la  traduction  a  été  récemment  pu- 
bliée, dans  la  même  collection,  par  M.  Legouëz.  M.  Riemann  juge  les  théories  [de 
M.  H.  Schiller  souvent  bien  hypothétiques,  mais  il  lui  semble  que  la  manière  de 
scander  les  vers  d'Horace,  exposée  par  M.  H.  Schiller,  est  toujours  préférable  à  la 
manière  traditionnelle;  «  il  y  .a  avantage  à  faire  connaître  aux  élèves  une  explication 
des  mètres  d'Horace  qui  est  intéressante,  qui  forme  un  ensemble  logique  etbien  coor- 
donné, qui,  enfin,  au  point  de  vue  pratique,  est  plus  simple  et  plus  facile  à  retenir  que 
la  manière  ordinaire,  assez  compliquée  et  assez  confuse,  de  scander  ces  mètres  ». 
M.  Riemann  a  d'ailleurs  ajouté  quelques  notes  aux  passages  principaux  où  il  ne  par- 
tageait pas  d'avis  de  M.  Schiller;  il  a  fait  précéder  sa  traduction  de  quelques  notions 
élémentaires  de  musique  appliquées  à  la  métrique. 

—  Le  volume  que  M.  Jules  Loiseleur  vient  de  publier  sous  le  titre  «  Trois  énig- 
mes historiques  »  (Pion.  In-8°,  xm  et  324  pp.  3  fr.  5o)  et  dont  nous  comptons  par- 
ler prochainement,  est  consacré  à  la  préméditation  de  la  Saint- Barthélémy  (pp.  1- 
i33)  ;  M.  L.  s'attache  surtout  à  répondre  aux  arguments  de  M.  Bordier  et  ne  croit 
nullement  à  un  «  vaste  plan  d'extermination  concerté  avec  l'Espagne,  médité,  pré- 
paré sans  relâche  pendant  tant  d'années  »;  —  à  Yaffaire  des  poisons  (pp.  135-224); 
M.  L.  essaie  de  «  fournir  aux  lecteurs  un  fil  qui  puisse  les  conduire  dans  les  dédales 


376  REVUE   CRITIQUE 

de  l'immense  procédure  dont  cette  affaire  fut  l'objet,  de  dresser  un  tableau  d'ensem- 
ble des  principales  incriminations,  de  dégager  le  rôle  joué  par  Mn,e  de  Montespan 
dans  ces  ténébreuses  manœuvres  et  de  préciser  la  part  qu'elle  prit  à  certains  atten- 
tats médités  ou  accomplis  contre  ses  rivales  et  contre  Louis  XIV  lui-même  »  ;  —  au 
masque  de  fer  (pp.  225-322),  «  problème  beaucoup  plus  curieux  qu'important  »  et  où 
«  il  n'y  pas  d'autre  mystère  que  celui  qui  pesait  indistinctement  sur  tous  les  prison- 
niers soumis  au  secret  absolu  ;  stimulée  par  l'étrangeté  de  ce  masque,  précaution 
moins  anormale  qu'on  ne  le  suppose  généralement,  l'imagination  populaire,  en  con- 
centrant sur  une  seule  tête  des  particularités  propres  à  divers  prisonniers,  a  revêtu 
du  caractère  légendaire  un  de  ces  drames  obscurs  si  fréquents  dans  les  anciennes 
prisons  d'Etat.  » 

—  Le  tome  XIIIe  des  Archives  de  la  Bastille,  documents  recueillis  et  publiés  par 
M.  Fr.  Ravaisson,  conservateur  adjoint  à  la  Bibliothèque  de  l'Arsenal  (Pedone-Lau- 
riel.  In-8°,  11-259  P-  I0  fr-)  est  consacré  aux  années  171 1  à  1725  et  comprend  par 
conséquent  les  dernières  années  du  règne  de  Louis  XIV,  la  Régence  et  les  neuf 
premières  années  du  règne  de  Louis  XV.  Parmi  les  documents  que  renferme  ce  tome, 
on  remarquera  ceux  qui  sont  relatifs  aux  janénistes,  aux  libellistes,  aux  personnages 
impliqués  dans  la  conspiration  de  Cellamare,  etc. 

—  Le  P.  Emile  Regnault,  de  la  Compagnie  de  Jésus,  a  réuni  en  deux  volumes 
les  articles  qu'il  avait  publiés  dans  un  recueil  périodique  de  Lyon,  les  «  Etudes  re- 
ligieuses, philosophiques  et  littéraires  »  sur  Christophe  de  Beaumont,  archevêque  de 
Paris,  1703-1781  (chez  Lecoffre). 

—  Un  volume  nouveau  de  la  «  Nouvelle  collection  illustrée  »  publiée  par  la  librai- 
rie Léopold  Cerf,  a  paru  :  Y  Arménie  et  les  Arméniens ,  par  M.  J.  A.  Gattevrias, 
élève  diplômé  de  l'Ecole  des  langues  orientales.  Le  volume  raconte,  en  huit  chapitres, 
l'histoire  de  l'Arménie;  le  ve  chapitre  (pp.  67-79)  est  r<^latïf-  à  l'invention  de  l'alpha- 
bet arménien  par  l'évêque  Mesrob,  aux  «  premiers  traducteurs  »,  disciples  de  Mes- 
rob  et  du  patriarche  Sahag,  à  la  littérature  et  aux  écrivains  de  l'Arménie.  Dans  l'ap- 
pendice on  remarquera  l'exposé,  d'après  le  lazariste  Eugène  Borey,  de  la  doctrine  de 
l'église  arménienne  et  l'historique  des  causes  qui  ont  provoqué  sa  séparation  de  l'é- 
glise romaine  (pp.  1 21-129)  et  quelques  pages  relatives  aux  mékhitaristes  et  aux 
études  arméniennes,  en  Europe  et  en  France  (pp.  1 35-141). 

—  La  librairie  Hachette  a  publié  des  Eléments  d'économie  publique,  par  M.  Emile 
de  Laveleye  (In-8°,  iv  et  297  p.).  Ce  traité  élémentaire,  destiné  à  l'enseignement, 
s'écarte  assez  souvent  de  la  marche  habituellement  suivie;  M.  de  Laveleye  a  rattaché 
intimement  son  sujet  à  celui  des  autres  branches  des  «  études  humanitaires  »  (phi- 
losophie, morale,  histoire,  géographie);  il  a  joint  à  l'énoncé  de  chaque  principe  un 
exemple,  un  fait,  une  maxime;  il  a  développé  particulièrement  les  chapitres  qui  trai- 
tent de  problèmes  importants  et  débattus  chaque  jour,  du  socialisme,  du  crédit,  des 
crises  commerciales  et  de  la  population.  L'ouvrage  est  divisé  en  quatre  livres  :  I.  No- 
tions préliminaires .  IL  La  production  des  biens.  III.  La  répartition  et  la  circula- 
tion des  biens.  IV.  La  consommation  des  biens. 

—  On  annonce  la  publication  prochaine  d'un  ouvrage  posthume  de  Proudhon,  Le 
césarisme  et  l'histoire. 

—  L'Académie  des  beaux-arts  a  mis  au  concours  le  sujet  suivant  :  «  Etude  sur  les 
maîtres  graveurs  français  du  xvn"  siècle  depuis  Jean  Morin  et  Pierre  Pesne,  jusqu'à 
Gérard  Audran  inclusivement.  Etablir  leur  importance  relative  par  des  indications 
biographiques,  par  la  succession  chronologique  de  leurs  travaux,  et  par  les  carac- 
tères de  leurs  talents.  » 

—  Le  Musée  de  Cluny  vient  d'acquérir  de  belles  tapisseries  de  haute  lice  qui  dé- 


o'HISTOIKK    Kl     DR    LITTÉRATUKh  3j7 

coraient  la  grande  salle  de  la  sous-préfecture  de  Boussac;  elles  seront  placées  dans 
une  nouvelle  salle  du  musée. 

—  Les  moulages  de  trois  bas-reliefs  de  Mino  da  Fiesole  (la  Foi,  l'Espérance,  la 
Charité)  dont  les  originaux  sont  dans  la  crypte  du  Vatican,  ont  été  offerts  au  Musée 
du  Trocadéro  par  M.  Alessandro  Castellani. 

—  Lu  dans  le  Figaro  du  vendredi  20  octobre  :  «On  nous  prie  de  démentir  un 
on-dit  répété  par  plusieurs  nouvellistes,  d'après  lequel  sir  Edward  Malet,  représen- 
tant de  l'Angleterre  en  Egypte,  serait  le  petit-fils  de  Malet,  de  Pau  »  (sic,  pour 
Mallet  du  Pan). 

ALLEMAGNE.  —  Le  prochain  ouvrage  de  M.  Schliemann  sur  les  résultats  de  ses 
fouilles  à  Hissarlik,  paraîtra  à  la  fois  en  anglais  et  en  allemand  ;  il  renfermera  un 
chapitre,  dû  à  M.  Karl  Blind,  sur  l'ethnographie  troyenne. 

—  M.  Mendelssohn,  l'éditeur  d'Appien,  professeur  à  l'Université  de  Dorpat,  vient 
de  mettre  sous  presse  une  édition  critique  de  Y  Histoire  romaine  d'Hérodien.  Cette 
édition,  qui  paraîtra  à  la  librairie  Teubner,  contiendra  pour  la  première  fois  un  appa- 
ratus  complet. 

—  La  collection,  publiée  par  l'éditeur  Otto  Schulze,  de  Leipzig,  et  qui  a  pour 
titre  «  Die  grossen  Religionen  und  Glaubensbekenntnisse  des  Ostens  »  doit  s'augmen- 
ter de  plusieurs  volumes  :  ZoroaStre,  par  M.  K.  Geldner;  Mahomet,  ipar  M.  Lu- 
dolf  Krehl  ;  la  seconde  partie  de  la  traduction  allemande  du  Bouddhisme  de  M.  Kern, 
etc. 

—  Parmi  les  livres  qui  doivent  prochainement  paraître  chez  l'éditeur  Hirzel,  de 
Leipzig,  nous  signalerons  :  de  M.  L.  Keller,  Ein  Apostel  der  Wiedertceufer,  Hans 
Denck  ;  de  M.  B.  Gûterbock,  Iris che  Lehnwœrter  ;  de  M.  C.  Hegel,  Verfassungsge- 
schichte  von  Main\,  etc. 

—  L'attention  s'est  portée,  depuis  quelque  temps,  sur  les  petits  récits,  légendes, 
nouvelles,  contes  (quelques-uns  d'après  la  Disciplina  clericalis)  de  l'Islande  du 
moyen-âge.  M.  Hugo  Gering  a  recherché  ces  récits  et  légendes  dans  les  manuscrits 
de  la  Bibliothèque  de  Copenhague,  et  vient  d'en  publier  quelques-uns  dans  le  texte 
original,  sous  le  titre  Islend\k  Aeventyri,  Islœndische  Legenden,  Novellen  und 
Mœrchen.  (Halle,  Waisenhaus.  In-8°,  xxxvin  et  314  p.)  Le  second  volume  renfer- 
mera les  remarques,  les  recherches  entreprises  par  M.  Gering  sur  les  sources  de  ces 
contes  islandais  et  un  glossaire.  Un  de  nos  collaborateurs  rendra  compte  de  la  pu- 
blication de  M.  Gering,  lorsque  ce  second  volume  aura  paru. 

—  La  librairie  Koebner,  de  Breslau,  publiera  très  prochainement  un  nouveau  vo- 
lume de  Neumann,  Das  Zeitalter  der  punischen  Kriege,  édité  par  M.  G.  Faltin  et 
Launegild  und  Garethinx,  contribution  à  l'histoire  du  droit  germanique,  par 
M.  Pappenheim  (collection  des  ouvrages  relatifs  à  l'histoire  du  droit  allemand,  diri- 
gée par  O.  Gierke). 

—  L'éditeur  Konegen,  de  Vienne,  annonce  une  Sanskrit-Grammatik.  de  M.  G. 
Bùhler,  une  étude  de  M.  Hugo  Gleditsch,  Die  Cantica  der  sophokleischen  Tragœ- 
dien  nach  ihrem  rhythmischen  Bau  betrachtet;  et  une  collection  intitulée  Wiener- 
Neudrucke,  dirigée  par  M.  Aug.  Sauer  (Ier  vol.  :  Auf,  auf,  ihr  Christen  !  d'Abraham 
a  Santa  Clara;  IIU  vol.  :  Der  Hausball,  récit  de  V***). 

—  A  la  librairie  Trûbner,  de  Strasbourg,  paraîtront  bientôt  une  étude  de  M.  Rich. 
Schwemer,  Innocent  III  und  die  deutsche  Kirche  wœhrend  des  Thronsireites  1  ig8- 
1208  ;  un  travail  de  M.  O.  Winckelmann,  Die  Be^iehungen  Karls  IV  %um  Kœnig- 
reich  Arelat,  et  deux  fascicules  nouveaux  de  la  collection  «  Quellen  und  Forschun- 
gen  »  XLVIII  :  Die  Accente  in  Otfrieds  Evangelienbuch,  par  M.  N.  Sobel  ;  XL1X  : 
Ueber  Georg  Greflinger  von  Regensburg  als  Ditchter,  Historiker  und  Ueberset\er. 


378  REVUE   CRITIQUE 

—  La  23-  réunion  de  la  Commission  historique  a  eu  lieu  à  Munich,  du  29  sep- 
tembre au  2  octobre.  Depuis  la  réunion  de  l'an  dernier,  on  a  achevé  l'impression  du 
2«  volume  des  Chroniques  de  Mayence,  du  ier  vol.  des  lettres  du  palatin  Jean  Casi- 
mir (éditeur,  M.  Fr.  de  Bezold),  des  livraisons  LXVII-LXXVl  de  VAllgemeine 
deuische  Biographie,  du  XXIIe  vol.  des  Forschungen  fur  deutschen  Geschichte,  de 
la  première  partie  des  Reichstagsacten  sous  le  roi  Robert  (éditeur,  M.  Jul.  Weiz- 
Sjecker),  de  la  deuxième  partie  du  3e  vol.  des  «  Lettres  et  actes  pour  l'histoire  du 
xvie  siècle  »,  contributions  à  l'histoire  de  l'empire,  i552  (éditeur,  M.  Aug.  de  Druf- 
fel).  UHistoire  de  l'historiographie,  de  M.  de  Wegele,  sera  publiée  l'année  pro- 
chaine. Le  XVIIIe  volume  des  «  chroniques  des  villes  allemandes  »  est  presque  ter- 
miné et  sera  bientôt  distribué;  il  termine  les  chroniques  de  Mayence;  à  la  fin  de  ce 
vol.,  M.  Hegel  donne  l'histoire  de  la  constitution  de  cette  ville.  Les  chroniques  de 
Mayence  seront  suivies  des  Chroniques  de  Lùbeck,  dont  la  publication  a  été  confiée 
à  M.  Koppmann;  le  premier  volume  paraîtra  dans  le  cours  de  l'année  prochaine. 
MM.  S.  Riezler,  H.  Grauert  et  J.  Petz  ont  fait  à  Rome  d'heureuses  recherches 
pour  la  publication  d'un  recueil  .de  documents  relatifs  aux  Wittelsbach  de  1180  à 
1347;  ils  ont  pu  prendre  copie,  soit  en  entier,  soit  en  extraits,  d'un  grand  nombre 
de  pièces  concernant  l'histoire  de  l'empereur  Louis.  Sont  à  l'impression  le  6e  vol. 
du  recueil  des  Hansereces se  (éditeur,  M.  Koppmann);  le  second  et  dernier  volume 
des  Jahrbûcher  de  Charlemagne  (éditeur  M.  Simson);  les  Jahrbûcher  du  roi  Kon- 
rad  III  (éditeur,  M.  Bernhardi;  le  VIIIe  vol.  des  Reichstagsacten,  sur  l'époque  du  roi 
Sigismond  (éditeur,  M.  Kerler),  etc. 


ACADEMIE   DES   INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du    i3  octobre  1882. 

M.  le  ministre  de  l'instruction  publique  adresse  à  l'Académie  la  copie  d'un  rap- 
port de  M.  Maspero  sur  les  travaux  des  membres  de  l'École  française  du  Caire.  Ren- 
voyé à  l'examen  en  commission. 

M.  de  Laigue  adresse  l'estampage  d'une  inscription  latine  sur  lame  de  plomb  qui 
lui  a  été  envoyée  de  Sardaigne  et  sur  laquelle  il  sollicite  l'opinion  de  l'Académie. 

L'Académie  procède  à  l'élection  de  trois  commissions  chargées  de  désigner  des  ques- 
tions à  mettre  au  concours  pour  les  divers  prix.  Il  y  a  à  donner,  pour  le  prix  ordi- 
naire et  le  prix  Bordin,  quatre  sujets,  dont  deux  tirés  des  études  d  antiquité  classique 
et  deux  des  études  relatives  au  moyen  âge;  pour  [le  prix  Brunet  (bibliographie),  un 
sujet  d'érudition  orientale.  Le  sujet  du  prix  Delalande  Guérineau  devra  appartenir 
aux  études  sur  le  moyen  âge.  Les  commissions  devront  proposer  pour  chaque  con- 
cours trois  sujets  différents,  entre  lesquels  l'Académie  choisira.  Ces  commissions 
sont  ainsi  composées  : 
Pour  l'antiquité  classique,  MM.  Egger,  Léon  Renier,  H.  Weil,  Albert  Dumont  ; 
Pour  le  moyen  âge,  MM.  L.  Delisle,  Ch.  Jourdain,  Hauréau,  Siméon  Luce; 
Pour  l'Orient,  MM.  Renan,  Schefer,  Barbier  de  Meynard,  Senart. 
M.  Georges  Perrot  lit  un  mémoire  sur  des  Sceaux  hittites,  de  terre  cuite,  apparte- 
nant à  M.  G.  Schlumberger.  Le  peuple  des  Héthéens,  Hittites  ou  Khétas,  dont  il  est 
question  dans  l'Ancien  Testament,  dans  quelques  auteurs  classiques  et  dans  un  grand 
nombre  de  textes  hiéroglyphiques  et  cunéiformes,  occupait,  dans  une  antiquité  recu- 
lée, la  région  septentrionale  de  la  Syrie,  le  pays  où  sont  aujourd'hui  les  villes  d'Alep 
et  de  Hamath.  Sa  principale  place  de  guerre  était  Qadech,  sur  l'Oronte.  Les  Hittites 
soutinrent  contre  les  Egyptiens  de  longues  guerres  sur  lesquelles  les  documents  hié- 
roglyphiques fournissent  des  détails  circonstanciés  ;  un  traité  de  paix,  conclu  entre 
leur  roi  et  Ramsès  II  et  cimenté  par  un  mariage,  n'interrompit  ces  hostilités  que  pour 
un  temps.  Plus  tard,  le  roi  Salomon  rechercha  l'alliance  des  Hittites  ;  puis,  ils  eurent 
à  se  défendre  contre  de  nouveaux  ennemis,  les  Assyriens.  Malgré  leur  courageuse 
résistance,  les  Hittites  furent  enfin  complètement  défaits  par  les  conquérants  nini- 
vites;  vers  le  vin*  siècle  avant  notre  ère,  ils  disparaissent  définitivement  de  l'hisioire. 


d'histoirk  et  dk  littérature  379 

Le  rôle  qu'ils  y  avaient  joué  n'était  pas  sans  éclat;  ils  avaient  un  moment  étendu  leur 
domination,  d'une  part,  à  travers  toute  l'Asie  Mineure,  jusqu'à  la  mer  Egée,  de  l'autre 
jusqu'à  l'Euphrate  et  à  la  frontière  méridionale  de  la  Syrie.  Ce  qui  attache  surtout  sur 
ce  peuple,  en  ce  moment,  l'attention  des  historiens  de  l'antique  Orient,  c'est  que  les 
Hittites  paraissent  être  les  inventeurs  d'un  des  systèmes  primitifs  d'écriture  de  l'anti- 

3uilé.  Ils  avaient  un  alphabet,  composé,  comme  celui  des  Egyptiens  et  celui  des  Chal- 
éens,  d'hiéroglyphes  idéographiques;  c'est  de  cette  écriture  que  paraît  être  dérivé  le 
caractère  syllabique  employé,  pour  écrire  le  grec,  dans  les  inscriptions  cypriotes.  Depuis 
une  quinzaine  d  années,  on  a  relevé,  dans  diverses  parties  de  l'Asie  Mineure  et  de  la 
Syrie  et  surtout  dans  la  région  d'Alep  et  de  Hamath,  un  assez  grand  nombre  d'inscrip- 
tions en  caractère  hittite.  Nul  n'est  parvenu  jusqu'ici  à  les  déchiffrer.  11  ne  faut  pas 
s'en  étonner  ;  on  ignore  à  la  fois  l'alphabet  et  la  langue  de  ces  textes,  et  l'on  ne  sait 
même  pas  s'ils  sont  tous  dans  la  même  langue.  Pour  essayer  un  déchiffrement,  il  fau- 
drait avant  tout  pouvoir  comparer  le  plus  grand  nombre  de  textes  possible.  M.  W.  Har- 
ry  Rylands,  président  de  la  Société  d'archéologie  biblique  de  Londres,  vient  de  pu- 
blier dans  le  tome  VII  des  Transactions  de  cette  société  un  recueil  qui  comprend 
presque  toutes  les  inscriptions  hittites  connues.  M.  Georges  Perrot  se  propose  de  four- 
nir un  premier  supplément  à  ce  recueil  en  publiant  des  sceaux  hittites,  au  nombre  de 
18,  qui  ont  été  rapportés  de  Constantinople  par  M.  Schlumberger  et  qui  n'ont  pas  en- 
core été  étudiés  jusqu'à  ce  jour. 

Ouvrages  présentés,  de  la  part  des  auteurs,  par  M.  Egger  :  —  i°  Rochas  d'Aiglun 
(A.  de),  Pensées  et  Mémoires  politiques  inédits  de  Vauban  (extrait  du  Journal 
des  Économistes,  1882);  —  2»  Bailly(A.),  le  Verbe  téu,V£lv  dans  le  serment  d'Hip- 
pocrate  (extraits  des  Mémoires  de  l'Académie  des  sciences,  belles-lettres  et  arts  d'Or- 
léans, 1882). 

Séance  du  20  octobre  1882. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret  pour  entendre  les  rapports  des  commissions 
chargées  de  proposer  des  sujets  de  prix. 

La  séance  publique  est  reprise  à  quatre  heures  et  demie. 

M.  Alexandre  Bertrand  met  sous  les  yeux  des  membres  de  l'Académie  deux  cro- 
quis exécutés  par  M.  Raoul  Gaignard  et  rapportés  par  M.  Ferdinand  Delaunay,  qui 
représentent  les  ruines  romaines  mises  au  jour  par  les  fouilles  du  P.  de  la  Croix,  à 
Sanxay  (Vienne),  à  28  kil.  de  Poitiers.  M.  Bertrand  a  visité  ces  ruines  et  en  a  re- 
connu l'importance  considérable.  On  a  trouvé  un  théâtre,  des  bains,  un  sacellum,  un 
grand  édifice  qui  est  peut-être  un  temple,  tout  cela  en  pleine  campagne;  de  menus 
objets  en  petit  nombre,  ustensiles,  médailles  gauloises  et  romaines,  enfin  deux  frag- 
ments d'inscription,  l'un  comprenant  trois  lettres  de  om20  de  hauteur  et  omi6  de  lar- 
geur, POL  (Apollo  ?),  l'autre  où  on  lit  : 

TI  

ECR  [cons]ecr[avit\  .... 

V  v[otum  solvitj    .... 

M.  Delisle  communique,  de  la  part  de  M.  De  Witte,  un  extrait  d'une  lettre  de 
M.  Lenormant,  qui  rend  compte  des  résultats  de  son  voyage  archéologique  dans  la 
Basilicate  et  la  Calabre.  M.  Lenormant,  en  compagnie  de  M.  Barnabei,  a  visité  Lu- 
cera  (Luceria),  Ascoli  (Asculum  Appulum),  Ordona  (Herdonia),  Melfi,  Rapolla,  Ve- 
*  nosa  (  Venusium),  Banzi  (Bantia),  Acerenza  (Acheruntia),  Potenza  (Potentia),  Méta- 
ponte,  Tarente,  Rossano,  Catanzaro  et  les  ruines  voisines  des  Castra  Hannibalis, 
Teriolo,  Nicastro  et  le  site  probable  de  Terina,  Pizzo,  Monteleone  (Hipponion,  Vibo 
Valentia),  Mileto,  Nicotera,  le  site  de  Medma,  Palmi  et  Reggio.  Dans  plus  de  la  moi- 
tié de  ces  localités,  dit-il,  il  n'avait  été  précédé  par  aucun  archéologue.  Il  a  recueilli 
plus  de  200  inscriptions  latines  inédites,  une  trentaine  de  grecques.  Il  a  réuni  de 
nouveaux  renseignements  pour  la  détermination  du  site  précis  de  Terina  et  a  dé- 
couvert les  ruines  encore  inconnues  de  Medma  (avec  une  fontaine  mentionnée  par 
Strabon  et  un  théâtre)  et  à' Hipponion.  Il  a  recueilli  «  de  nouveaux  et  importants  do- 
cuments sur  l'existence  d'une  poterie  apulienne  à  décors  géométriques,  qui  offre  avec 
celle  de  Chypre  une  ressemblance  extrêmement  étroite.  »  Au  point  de  vue  de  l'ar- 
chéologie préhistorique,  M.  Lenormant  a  reconnu  que  plusieurs  des  lieux  colonisés 
par  les  Grecs,  comme  Métaponte  et  Hipponion,  avaient  été  déjà  des  stations  impor- 
tantes dans  l'âge  de  la  pierre  polie,  et  il  a  retrouvé  des  débris  de  la  poterie  noire 
italique  primitive,  dont  la  fabrication  s'est  étendue  sur  tout  le  midi  de  la  péninsule. 
Enfin,  il  a  relevé  des  traces  nombreuses  et  intéressantes  de  la  civilisation  et  surtout 
de  l'architecture  du  temps  des  Normands  et  des  Hohenstaufen. 

M.  Casati  commence  la  lecture  d'un  travail  sur  l'état  actuel  de  la  science  histori- 
que en  ce  qui  concerne  les  Etrusques.  Il  s'attache  à  redresser  certaines  erreurs  qui 
ont  cours  parmi  les  savants.  En  effet,  malgré  les  travaux  très  remarquables  de  plu- 
sieurs érudits,  Otfried  Mûller,  Noël  des  Vergers,  Fabretti,  Conestabile,  Deecke,  mal- 
gré des  découvertes  récentes  fort  importantes,  on  n'a  pas  beaucoup  avancé  depuis 
Gori  et  Lanzi,  qui  vivaient  au  siècle  dernier.  Ainsi  on  continue  de  dire  et  d'écrire 
que  les  mots  étrusques  lar  et  lucumon  étaient,  l'un  un  titre  de  noblesse,  l'autre  un 
titre  royal,  que  l'Etrurie  se  divisait  en  plusieurs  lucumonies  ou  royaumes.  M.  Casati 


380  REVUE    CRITIQUE    D'HISTOIRE    ET    DE    LITTERATURE 

présente  divers  arguments  pour  établir  que  ces  mots  étaient  des  prénoms  et  non  des 
titres.  Le  prénom  Lar  faisait  au  féminin  Larthia,  comme  un  autre  prénom,  Arnth, 
faisait  au  féminin  Arnthia.  Quant  à  Lucumon,  ou  plutôt  Luchmu,  c'était  le  prénom 
du  premier  roi  étrusque  de  Rome,  Tarqjin;  les  Romains  l'ont  latinisé  en  Lucius. 
C'est  parce  que  ce  prénom  était  celui  d'un  roi  étrusque  que  les  Romains  en  ont  fait 
le  titre  des  rois  de  l'Etrurie,  de  la  même  façon  que,  plus  tard,  le  nom  propre  Ca'esar 
a  fini  par  devenir  un  nom  commun  signifiant  empereur. 

La  séance  publique  annuelle  de  l'Académie  est  fixée  au  1 7  novembre. 

Ouvrage  présenté,  de  la  part  du  traducteur,  par  M.  Ravaisson  :  le  Livre  des  Morts 
des  anciens  Egyptiens,  traduction  complète  d'après  le  papyrus  de  Turin  et  les  ma- 
nuscrits du  Louvre,  accompagnée  de  notes  et  suivie  d'un  index  analytique,  par  Paul 
Pikrret. 

Séance  du  2  y  octobre  1882. 

M.  Heuzey  donne  lecture  de  l'introduction  et  de  la  conclusion  d'un  volume  qu'il 
va  faire  paraître  et  qui  formera  le  tome  Ier  d'un  Catalogue  des  figurines  de  terre 
cuite  du  Louvre.  Ce  volume  traitera  des  origines  orientales  de  l'industrie  des  terres 
cuites  et  notamment  des  figurines  de  fabrication  assyrienne,  chaldéenne,  babylo- 
nienne, phénicienne,  cypriote  et  rhodienne.  —  Dans  la  première  partie  de  sa  lecture 
(introduction  du  volume),  M.  Heuzey  présente  des  considérations  sur  les  terres  cuites 
vernissées  d'Egypte,  improprement  dites  faïences  égyptiennes.  Ces  terres  cuites  et 
les  imitations  qu'en  firent  les  Phéniciens,  répandues  par  le  commerce  dans  tout  le 
bassin  de  la  Méditerranée,  donnèrent  naissance  à  plusieurs  des  types  qui  furent 
adoptés  par  l'art  grec.  11  en  résulta  que,  par  l'intermédiaire  de  l'art,  la  mythologie 
égyptienne  exerça  une  influence  sensible  sur  la  mythologie  grecque.  La  Grèce  crut 
aux  dieux  dont  les  images  lui  arrivaient  d'Egypte  et  leur  donna  une  place  dans  son 
panthéon;  mais  elle  ne  comprit  pas  toujours  ces  images,  et  de  là  d'étranges  altéra- 
tions des  mythes  primitifs.  Ainsi  les  Egyptiens  avaient  représenté  Horus  naissant, 
symbole  du  soleil  levant,  sous  la  forme  d'un  enfant  qui  se  suce  le  doigt,  geste  fami- 
lier aux  enfants  en  bas  âge.  Les  Grecs  se  méprirent  sur  ce  geste,  et,  d'Horus  enfant, 
ils  firent  Harpocrate,  génie  du  silence.  De  Ptah-embryon,  figure  grotesque  d'un  fétus, 
à  la  tête  aplatie,  aux  jambes  courbées  qui,  dans  le  principe,  représentait  encore  le 
soleil,  au  moment  où  il  va  se  lever,  les  Grecs  tirèrent  le  mythe  d'Héphestos,  enfant 
difforme  et  boiteux.  —  Dans  la  seconde  partie  de  sa  communication  (conclusion  du 
volume),  ML  Heuzey  insiste  sur  l'importance  de  la  fabrication  rhodienne  dans  l'his- 
toire des  débuts  de  l'industrie  de  la  terre  cuite  en  Grèce.  On  a  vu  dans  les  figurines 
de  terre  cuite  fabriquées  à  Rhodes  des  imitations  de  celles  de  la  Phénicie.  M.  Heuzey 
croit  pouvoir  établir  que  c'est  le  contraire  qui  a  eu  lieu.  L'industrie  rhodienne  avait, 
à  l'époque  archaïque,  une  importance  de  premier  ordre.  Le  commerce  en  portait  les 
produits,  non-seulement  dans  toute  la  Grèce,  mais  jusqu'en  Sicile  et  en  Italie.  Ce 
sont  ces  produits  que  les  Phéniciens  se  mirent  à  imiter,  et  on  leur  a  fait  un  honneur 
immérité  en  prenant  leurs  imitations  pour  des  créations  originales.  Quand,  plus  tard, 
le  monde  grec  à  son  tour  imita  les  poteries  phéniciennes,  il  ne  fit  en  quelque  sorte 
que  reprendre  à  l'Asie  ce  qu'il  lui  avait  donné. 

L'Académie  décide  que  la  seconde  partie  de  cette  communication  de  M.  Heuzey 
sera  lue  à  la  séance  publique  annuelle,  qui  doit  avoir  lieu  le  17  novembre. 

M.  Desjardins  rend  compte  de  l'examen  d'une  inscription  communiquée  à  l'Acadé- 
mie dans  une  séance  précédente.  Cette  inscription  avait  été  envoyée  de  Sardaigne  à 
M.  de  Laigue,  consul  de  France  à  Livourne,  qui  en  avait  adressé  un  estampage  à 
l'Académie,  en  demandant  l'opinion  des  épigraphistes  sur  le  valeur  de  ce  document. 
M.  Desjardins  croit  pouvoir  répondre  avec  certitude  que  l'inscription  n'est  pas  au- 
thentique. L'emploi  du  plomb,  pour  une  inscription  funéraire,  serait  un  fait  sans 
exemple.  La  forme  des  lettres  n'est  pas  ancienne.  Les  points  destinés  à  séparer  les 
mots  sont  placés  au  bas  des  lettres,  comme  dans  la  typographie  moderne,  au  lieu 
d'être  à  mi-hauteur,  suivant  la  règle  des  inscriptions  antiques.  Il  y  a  des  points  à  la 
fin  des  lignes,  tandis  qu'il  ne  devrait  y  en  avoir  que  dans  l'intérieur  des  lignes,  pour 
séparer  les  mots.  Enfin,  quelques-unes  des  formules  et  des  abréviations  employées 
sont  insolites.  On  doit  des  remerciements  à  M.  de  Laigue  pour  sa  communication; 
grâce  à  son  empressement  à  soumettre  au  jugement  de  l'Académie  l'inscription  qu'il 
venait  de  recevoir,  on  a  pu  en  constater  tout  de  suite  la  non-authenticité,  et  le  public 
savant  est  mis  en  garde  contre  un  document  apocryphe  qui  n'a  encore  eu  le  temps 
de  tromper  personne. 

M.  Cuq  commence  la  lecture  d'une  étude  sur  le  Consilium  principis,  d'Auguste  à 
Dioctétien . 

Ouvrage  présenté,  de  la  part  de  l'auteur,  par  M.  Geffroy  :  Mùntz  (Eug.),  les  Arts  à 
lacour  des  papes,  3e  partie  (pontiricat  de  Sixte  IV,  1471-1484). 

Julien  Havet. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 
Le  Puy,  imprimerie  Marchessau  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  2 3 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 


N»  46  —  13  Novembre  —  1882 

Sommaire  t  23i.  Windisch,  L'influence  grecque  sur  le  théâtre  hindou.  —  232. 
Lucius,  t/essénisme. —  233.  Baschet,  Les  comédiens  italiens  à  la  cour  de  France. 
—  234.  W.  Buchner,  Ferdinand  Freiligrath.  — Chronique.  —  Académie  des  Ins- 
criptions. 


23 1.  — E.  Windisch.    Dcr    griecliisclie     Einfluss    im    Intlisclien     Drauia. 

Separat-Abdruckaus  den  Abhandlungen  des  fûnfien  internationalen  Orientalisten- 
Congresses  gehalten  zu  Berlin  im  September  1881.  Berlin,  A.  Asher  und  C°.  1882. 
106  p.  in-8° 

Ce  mémoire  de  M.  Windisch,  lu  au  congrès  des  Orientalistes  de  Ber- 
lin, n'est  pas  seulement  le  travail  le  plus  substantiel  qui  ait  été  fait  de- 
puis longtemps  sur  le  théâtre  hindou  ;  il  doit  encore  être  compté  parmi 
les  études  de  littérature  comparée  les  plus  ingénieuses  et  les  plus  inté- 
ressantes qui  aient  été  publiées  au  cours  de  ces  dernières  années.  Per- 
sonne ne  lira  sans  plaisir  ni  sans  fruit  ces  rapprochements  multiples 
faits  avec  autant  de  goût  que  de  savoir  entre  les  drames  de  l'Inde  et  la 
comédie  classique,  et  le  plus  sceptique  sera  reconnaissant  à  l'auteur 
d'avoir  bien  voulu  discuter  à  fond  un  parallèle  que  d'autres  avaient  in- 
diqué déjà,  mais  que  personne,  jusqu'ici,  ne  s'était  attaché  à  poursuivre 
dans  le  détail.  Pour  ma  part,  je  suis  d'autant  plus  heureux  de  pouvoir 
louer  sans  réserve  la  partie  purement  comparative  de  ce  travail,  que 
l'auteur  n'a  pas  réussi  à  me  convaincre  de  la  justesse  de  la  conclusion 
historique  qu'il  en  tire,  celle  d'une  influence  profonde  et  nettement  ap- 
préciable de  la  comédie  grecque  sur  le  drame  hindou. 

A  première  vue,  il  est  vrai,  la  thèse  de  M.  W.  séduit  par  la  modestie 
de  ses  prétentions.  Il  se  garde  bien  de  vouloir  dériver  d'une  pièce  le 
théâtre  des  Hindous  de  celui  des  Grecs.  Il  accorde  à  l'Inde  la  création 
parfaitement  indépendante  d'un  premier  drame  demi-héroïque,  demi- 
religieux,  dont  rien  du  reste  ne  nous  est  parvenu.  Il  écarte  aussi  du 
problème  la  tragédie  et  l'ancienne  comédie,  si  inséparablement  liées 
l'une  et  l'autre  aux  conventions  et  à  l'appareil  scéniques  d'Athènes.  Ce 
serait  la  nouvelle  comédie  de  Philémon  et  de  Ménandre,  ce  théâtre  si 
éminemment  propre  à  l'adaptation  qu'Athènes  a  légué  à  Rome,  qui  au- 
rait servi  de  modèle  aux  Hindous  et  leur  aurait  donné  l'idée  du  drame 
d'intrigue  et  d'amour.  Réduite  à  ces  proportions,  la  thèse  de  M.  W.  ne 
soulèverait  pas  de  graves  objections.  On  sait  que  des  tragédies  d'Euri- 
pide ont  été  représentées  à  la  cour  des  rois  Parthes  et  on  peut  présumer 
que  les  princes  indo-grecs  entretenaient  également  des  troupes  de  co- 

Nouvclle  série,  XIV.  20 


382  REVUE   CRITIQUE 

médiens.  Il  est  donc  fort  probable  que  des  prédécesseurs  de  Kâlidâsa, 
avec  un  peu  de  bonne  volonté,  ont  pu  assister  à  la  représentation  de 
drames  grecs.  Mais  M.  W.  ne  se  contente  pas  de  cette  parenté  toute 
générale  et  un  peu  abstraite  :  il  prétend  la  vérifier  dans  le  détail  et  en 
produire  des  preuves  directes.  Il  passe  en  revue  et  accepte  successivement 
comme  telles  les  nombreuses  analogies  que  présentent  les  deux  théâtres,  de- 
puis les  personnages  communs  tels  que  le  soldat  fanfaron,  le  parasite,  le 
valet  confident,  à  la  fois  fripon  et  dévoué,  la  matrone,  la  courtisane, 
jusqu'aux  procédés  d'exposition  et  aux  moyens  scéniques,  tels  que  le 
prologue,  le  dialogue  rapide,  les  signes  de  reconnaissance.  Le  résultat 
de  l'enquête  finit  ainsi  par  dépasser  singulièrement  la  proposition  si 
modeste  du  début.  Il  ne  va  pas  à  moins  qu'à  faire  de  tout  ou  de  pres- 
que tout  ce  qui  nous  reste  du  théâtre  hindou,  un  reflet  direct,  une  sorte 
d'adaptation  du  théâtre  grec  de  l'époque  macédonienne. 

Ce  résultat,  nous  ne  pouvons  l'admettre,  sans  être  d'ailleurs  plus  à 
même  d'en  prouver  la  fausseté  que  ne  l'a  été  M.  W.  d'en  établir  l'évi- 
dence. Il  y  a  des  choses  qui  ne  se  démontrent  pas.  Mais  il  en  est  de  plus 
ou  moins  probables,  et,  à  notre  sentiment,  la  conclusion  de  M.  W.  ne 
l'est  guère.  Il  faut,  en  effet,  envisager  aussi  l'autre  face  du  problème,  et, 
à  côté  des  analogies,  ne  pas  oublier  les  différences.  Il  faut  se  représenter 
combien,  en  dépit  de  ces  rencontres,  d'ailleurs  toutes  explicables  sans 
qu'on  sorte  pour  cela  de  l'Inde,  ce  théâtre,  qui  serait  sous  tant  de  rap- 
ports une  reproduction  si  minutieuse  de  modèles  étrangers,  est  profon- 
dément hindou.  Il  n'y  a  là  pas  une  note  qui  détonne,  pas  une  réminis- 
cence directe.  L'imitation  n'eût  porté  que  sur  des  conceptions  pour 
ainsi  dire  abstraites  :  tout  le  reste  eût  été,  jusqu'à  la  dernière  trace,  dé- 
naturé et  assimilé. 

L'histoire  littéraire  nous  montre  des  cas  d'influence  semblable,  à  la 
fois  si  profonde  et  si  discrète.  Nous  savons  parfaitement  que  l'Egmont  de 
Goethe  eût  été  tout  autre,  si  Shakspeare  et  Racine  n'avaient  point  écrit. 
Mais  ces  exemples  appartiennent  à  une  époque  de  large  éclectisme,  où 
le  poète  est  doublé  d'un  historien  et  d'un  critique,  et  où,  d'autre  part, 
la  conception  d'une  littérature  nationale  est  nettement  formulée.  Avant, 
nous  n'en  trouvons  pas.  Nous  voyons,  au  contraire,  que  s'inspirer  d'une 
littérature  étrangère  qui  apporte  un  idéal  supérieur,  revient  à  l'imiter 
franchement,  à  la  copier,  parfois  à  la  traduire,  et  que  nulle  part,  pour 
des  raisons  faciles  à  trouver,  cette  imitation  n'est  moins  déguisée  qu'au 
théâtre.  Le  drame  hindou  tel  que  l'explique  M.  W.,  quelque  indirecte 
d'ailleurs  qu'on  suppose  l'imitation,  en  quelque  nombre  qu'on  imagine 
des  intermédiaires  entre  l'original  et  la  copie,  serait  un  fait  unique  dans 
toute  l'histoire  des  lettres. 

En  résumé,  nous  croyons  devoir  séparer  dans  le  mémoire  de  M.  Win- 
disch  deux  éléments  d'inégale  valeur  :  une  étude  de  littérature  comparée 
très  méritoire  et  digne  d'attirer  l'attention  de  tous  ceux  qui  aiment  à  se 
rendre  compte  comment  des  peuples  de  génie  divers  expriment,  chacun 


d'histoirk   et  DK  LITTÉRATURE  383 

de  son  côté,  des  réalités  analogues  ;  et  une  thèse  historique  sur  le 
théâtre  hindou  très  ingénieuse  dans  le  détail,  mais  qui,  prise  comme 
ensemble,  a  contre  elle  la  vraisemblance. 

A.  Barth. 


2 3z,  —    &>ei*  Ëssenismus  îu  seincm  Veriiseltniss  xuin    .Budenllium,  von 

P.  Lucius.  Strassburg,  Trûbner.  1882,  in-8°  de  i3i  pp, 

Des  nombreux  écrits  qui  ont  paru  sur  l'essénisme  ou  qui  en  ont 
traité,  celui  dont  nous  venons  de  transcrire  le  titre  nous  paraît,  sous 
beaucoup  de  rapports,  un  des  plus  satisfaisants.  Cette  secte  n'est  connue 
que  par  ce  qu'en  rapportent  le  théosophe  judéo-alexandrin  Philon, 
l'historien  juif  Josèphe  et  Pline  qui  n'a  pu  en  parler  que  par  ouï-dire  et 
en  faire  mention  qu'à  titre  de  curiosité  historique.  M.  Lucius  a  eu 
l'heureuse  idée  de  commencer  son  travail  par  un  examen  critique  de  ces 
trois  sources.  Ce  n'est  pas  avec  moins  de  raison  qu'il  a  fait  bonne  jus- 
tice des  origines  impossibles  et  incroyables  qu'on  a  assignées  à  cette  as- 
sociation religieuse.  Nous  sommes  disposé  à  penser  avec  lui  qu'il  faut 
en  chercher  la  cause  dans  l'histoire  même  du  judaïsme.  La  famille  d'Is- 
raël, depuis  son  retour  de  Babylone,  fut  fermée,  du  moins  dans  la 
Palestine,  à  toute  influence  étrangère;  ce  fut  l'effet  du  triomphe  défini- 
tif du  monothéisme  dans  son  sein,  en  même  temps  que  l'excessive  va- 
nité nationale  que  lui  inspira  la  croyance  qu'elle  était  le  seul  peuple 
de  l'Eternel.  Qu'aurait-elle  voulu  accepter  de  nations  étrangères  dans 
lesquelles  elle  ne  voyait  que  des  pécheurs? 

M.  Ed.  Reuss,  le  premier,  a  montré  dans  l'essénisme  une  secte  sépa- 
ratiste. Cette  opinion  nous  paraît  incontestable;  M.  Lucius  l'a  adoptée. 
Il  a  dû,  dès  lors,  rechercher  pour  quelles  raisons  et  à  quelle  époque  un 
certain  nombre  de  Juifs  avaient  pu  se  résoudre  à  se  séparer  de  l'ensem- 
ble de  leurs  coreligionnaires,  et  à  ne  plus  prendre  part  au  culte  public, 
tout  en  restant  attachés  à  la  loi  mosaïque. 

Il  est  d'avis  que  cette  séparation  dut  se  produire  dans  cette  période 
de  désordre  qui  s'écoula  de  la  déposition  illégale  du  grand  prêtre  Onias 
(175  av.  J.-C.)  à  l'établissement  de  Simon  dans  les  fonctions  de  grand 
prêtre  en  140  av.  J.-C.  Pendant  cette  période,  la  souveraine  sacrificature, 
mise  à  l'encan  par  les  rois  de  Syrie,  fut  exercée  pardes  hommes  indignes  tels 
que  Jason,  Ménélas  et  Alcime,  le  sanctuaire  fut  profané,  et  les  sacrifices 
interrompus  pendant  trois  années  entières.  On  sait  qu'un  grand  nom- 
bres de  Juifs  se  virent  alors  obligés  de  se  retirer  dans  le  désert  (1  Mac- 
chabées, 1,  53).  Us  y  formèrent  entre  eux  des  réunions  de  piété;  ces 
associations  ne  furent  pas  sans  doute  étrangères  à  la  naissance  de  l'es- 
sénisme. 

Dans  tous  les  cas,  des  Juifs  pieux  durent  regarder  comme  une  profa- 
nation la  nomination  de  grands  prêtres  qui  n'appartenaient  pas  à  la  des- 


084  RfcVUE   CRITIQUE 

cendance  d'Aaron,  dont  plusieurs  n'étaient  même  pas  de  la  tribu  de 
Lévy.  Le  culte  lévitique  perdit  par  cela  même  à  leurs  yeux,  non  pas 
seulement  sa  sainteté,  mais  encore  sa  légalité.  Rompre  avec  un  culte 
ainsi  profané  leur  sembla  un  devoir  de  conscience. 

On  a  supposé  plus  d'une  fois  que  les  esséniens  avaient  embrassé  le 
christianisme,  après  la  ruine  de  Jérusalem.  On  ne  saurait  citer  un  seul 
fait  en  faveur  de  cette  hypothèse.  Il  est  bien  plus  probable  que,  la  Cité 
sainte  et  le  temple  détruits  et  le  culte  lévitique  devenu  impossible,  il  n'y 
avait  plus  de  raison  pour  eux  de  rester  séparés  de  l'ensemble  du  peu- 
ple juif. 

M.  N. 


233.  —  Les  comédiens  Stulîcns  ù  lu  tour  «Se  France,  sous  Clinrles  IX.» 
EScnri  Bflï,  Henri  IV  et  louis  XBBï,  d'après  les  lettres  royales,  la  corres- 
pondance originale  des  comédiens,  les  registres  de  la  trésorerie  de  l'épargne  et 
autres  documents,  par  Armand  Baschet.  Paris,  Pion,  1882,  in-8e  carré  de  xv- 
367P. 

M.  A.  Baschet  disait,  en  1866,  dans  une  note  du  chapitre  x  de  son 
charmant  ouvrage  Le  Roi  che^la  Reine,  chapitre  intitulé  Les  divertisse- 
ments de  Louis  XIII,  que  ses  récentes  recherches  en  Italie  lui  avaient 
fait  rencontrer,  entre  autres  choses  piquantes  et  curieuses,  nombre  de 
lettres  de  comédiens  italiens  venus  en  France,  successivement  appelés 
parles  rois  Henri  III,  Henri  IV  et  Louis  XIII.  Il  citait  les  noms  de 
Tristano  Martinelli  [Y Arlequin  de  ces  temps-là),  de  Pier  Maria  Cec- 
chini  (le  Fridelin),  de  Giovanni  Battista  Andreini  (Lelio).  Il  annonçait 
beaucoup  de  choses  qu'il  déclarait  vouloir  publier  comme  matériaux  de 
prix  pour  servir  à  l'histoire  du  théâtre  en  France  à  la  fin  du 
xvie  siècle  et  au  commencement  du  xvne.  «  Depuis  lors,  »  dit- il  dans  son 
vif  et  agréable  Avant-propos  (p.  vin),  «  mes  rencontres  se  sont  faites 
plus  nombreuses.  Après  même  que  j'avais  cru  mon  siège  fait  et  mon 
travail  terminé,  j'ai  eu  matière  à  produire  un  chapitre  tout  particulier 
au  règne  de  Charles  IX.  La  consultation  des  registres  de  la  chancellerie 
de  Marie  de  Médicis  a  comblé  aussi  diverses  lacunes.  D'autres  textes 
d'information  —  papiers  de  finances,  lettres  de  personnages  du  temps, 
mille  riens  qui  permettent  de  tant  dire  — ont  rempli  d'autres  vides.  En- 
fin, peu  à  peu,  laissant  la  chose  un  jour,  la  reprenant  un  autre,  la  dé- 
laissant de  nouveau,  y  revenant  encore,  j'ai  formé  un  ensemble  avec 
les  moissons  faites,  et  sur  cet  ensemble,  un  récit  tout  rempli  de  preu- 
ves, qui  est  l'ouvrage  ici  présenté.  » 

L'aimable  écrivain  ajoute  (p.  x)  :  «  On  connaît  par  le  menu  l'histoire 
des  comédiens  italiens  établis  en  France  avec  des  privilèges  sous 
Louis  XIV;  on  ne  la  connaît  que  par  des  généralités,  avec  accompagne- 
ment  de  beaucoup  d'erreurs,  pour  les  temps  qui  précédèrent.  Alors,  ces 


d'histoire  et  de  littérature  385 

comédiens  n'étaient  point  établis.  Ils  venaient  et  séjournaient  comme 
s'ils  eussent  été  des  troupes  ambulantes.  L'hôtel  de  Bourgogne,  la  salle 
de  Bourbon,  étaient  le  lieu  de  leurs  réunions,  lorsqu'avec  la  permission 
du  roi,  qui  les  avait  appelés  à  Paris,  ils  jouaient  ailleurs  qu'à  la  cour, 
c'est-à-dire  à  la  ville  et  pour  la  ville.  Je  m'en  suis  tenu  à  ces  temps- là, 
et  je  les  ai  explorés,  ne  m'arrêtant  qu'à  des  sources  bien  sûres.  » 

Ces  sources  sont  principalement  les  belles  archives  de  l'ancienne  mai- 
son de  Gonzague,  à  Mantoue,  qui  ont  déjà  fourni  à  M.  B.  tant  de 
documents  précieux  relatifs  aux  beaux-arts,  aux  belles-lettres  et  à  l'his- 
toire, archives  dont  il  parle  (pp.  xi-xv)  avec  la  plus  chaleureuse  reconnais- 
sance. Autour  des  textes  tirés  de  la  collection  où  déjà  l'heureux  cher- 
cheur avait  trouvé  les  lettres  d'Aide  Manuce  et  de  Rubens,  ont  été 
réunis  tous  les  renseignements  imaginables  extraits,  les  uns,  des  ma- 
nuscrits de  nos  archives  et  de  nos  bibliothèques,  ainsi  que  des  minutes 
de  divers  notaires  parisiens,  les  autres,  d'une  foule  de  livres  français  ou 
étrangers.  Aussi  c'est  avec  une  abondance  en  quelque  sorte  inépuisable 
que  M.  B.  nous  entretient,  en  huit  chapitres,  des  comédiens  italiens 
en  France  et  pendant  le  règne  de  Charles  IX,  sous  le  règne  de  Henri  III, 
sous  celui  de  Henri  IV,  sous  la  régence  de  Marie  de  Médicis,  enfin  sous 
le  règne  de  Louis  XIII,  joignant  à  mille  particularités  sur  ces  comé- 
diens mille  informations  sur  des  sujets  divers,  notamment  sur  les  trois 
publications  originales  (deux  en  français,  une  en  italien]  de  la  descrip- 
tion de  l'Entrée  du  roi  Henri  II  et  de  la  reine  Catherine  de  Médicis  à 
Lyon,  en  1548  (pp.  7-10),  sur  les  ouvrages  relatifs  à  la  comédie  italienne 
(pp.  1 1-12},  sur  le  château  de  Nogent-le-Roi  (p.  7),  sur  les  voyages  du 
roi  Charles  IX  (pp.  27-29),  sur  le  séjour  à  Paris  en  1572  du  comte  de 
Lincoln,  grand  amiral  d'Angleterre,  ambassadeur  extraordinaire  de  la 
reine  Elisabeth  (pp.  40-41),  sur  les  ouvrages  relatifs  à  l'histoire  de  l'an- 
cien théâtre  français  (p.  48),  sur  le  séjour  du  roi  Henri  III  à  Venise 
(pp.  56-59)  ',  sur  les  dissertations  littéraires  dont  Henri  III  voulut  qu'on 
le  régalât  à  Blois,  en  1576,  pendant  ses  repas  (p.  66)  2,  sur  Filippo  Ca- 
vriana,  médecin  de  Catherine  de  Médicis,  homme  d'un  esprit  et  d'un 
savoir  des  plus  remarquables  (p.  6y),  sur  l'exemplaire  unique  à  Paris 
(Bibliothèque  Sainte-Geneviève)  de  la  Fiammella,  pastorale  de  Bartolo- 
meo  Rossi  publiée  chez  Abel  l'Angelier  en  1584  (p.  92),  sur  le  sieur  Jac- 

1.  A  ce  propos,  annonçons  à  nos  lecteurs  une  bonne  nouvelle  en  citant  cette  note 
de  M.  B.  (p.  56)  :  «  Nous  avons  formé  depuis  longtemps  un  recueil  de  pièces  con- 
sidérables, de  pièces  toutes  relatives  au  voyage  et  séjour  de  Henri  III  à  Venise  et 
copiées  sur  les  originaux  répartis  dans  les  séries  d'archives  les  plus  diverses.  Elles 
sont  les  pièces  justificatives,  aussi  étendues  que  variées,  sources  officielles  et  parti- 
culières, de  l'ouvrage  spécial  que  nous  devons  publier  sur  ce  très  curieux  épisode 
de  la  vie  de  ce  Valois  qui  fut  reçu  à  Venise  comme  jamais  prince  ne  l'avait  été  au- 
paravant et  ne  le  fut  depuis.  » 

2.  M.  B.  reproduit,  à  cet  égard,  un  témoignage  fort  curieux  consigné  dans  une  dé- 
pêche de  l'ambassadeur  de  Mantoue,  Ferrante  Guisoni.  Nulle  autre  part,  dans  les 
récits  du  temps,  on  ne  trouve  semblable  mention. 

înara 


386  REVUE    CRITIQUE 

ques  de  Fonteny,  traducteur  (1608)  des  Bravacheries  du  capitaine 
Spavente  par  Fraucesco  Andreini,  traducteur  dont  le  nom  ne  figure 
dans  aucun  recueil  biographique  (pp.  174-175),  sur  l'abbé  Louis  Ruc- 
cella'ï  (pp.  261-270)  ',  sur  le  séjour  de  Louis  XIII  à  Lyon  (pp.  21 5-3 17), 
sur  les  œuvres  dramatiques  et  poétiques  de  Giovanni-Battista  Andreini 
(pp.  319-320). 

Parmi  les  documents  insérés  par  M.  B.  dans  son  intéressant  volume, 
on  distinguera  :  une  lettre  du  roi  Henri  IV  à  Arlequin  (p.  106),  datée 
de  Paris,  le  21  décembre  1599,  et  qui  n'était  pas  connue  en  France,  car 
elle  n'a  été  retrouvée  que  récemment  aux  archives  d'Etat,  à  Florence,  et 
n'a  été  publiée  qu'en  1880  [Introdu\ione  aux  Scenari  inediti  par 
M.  Adolfo  Bartoîi)  ;  une  autre  lettre  du  même  roi  (p.  157)  qui  manque 
au  recueil  général  de  ses  missives,  adressée  de  Fontainebleau,  le  10  no- 
vembre 1606,  au  futur  cardinal  de  Gonzague,  et  tirée  des  archives  de 
Mantoue  2  ;  une  série  de  lettres  de  Marie  de  Médicis  (pp.  159-284),  une 
lettre  d'Anne  ^'Autrich:  (p.  283),  deux  lettres  de  Louis  XIII,  une  du 
8  août  1621,  écrite  de  Tonneins  (p.  299),  l'autre,  du  10  octobre  1622, 
écrite  du  camp  devant  Montpellier  (p.  3i3).  Tous  ces  derniers  docu- 
ments, qui  étaient  inédits,  proviennent  des  archives  de  Mantoue.  Men- 
tionnons encore  un  Appendice  où  l'on  trouve  d'excellentes  indications 
sur  les  Registres  des  comptes  de  la  Trésorerie  de  V Espar gne  (p.  339) 
et  sur  les  Registres  de  la  chancellerie  de  la  reine  Marie  de  Médicis 
(p.  34i). 

L'ouvrage  est  terminé  par  un  Index  alphabétique  (très  copieux)  des 
?ioms  cités  et  des  matières  traitées  dans  l'ouvrage  (pp.  343-356),  et  par 
une  table  analytique  intitulée  Sommaires  des  chapitres  (pp.  ïSj-lbj). 
On  voit  que  M.  Baschet  n'a  rien  négligé  pour  rendre  toutes  les  recher- 


1.  A  tout  ce  que  M.  B.  raconte  de  ce  singulier  personnage,  j'ajouterai  ce  qu'en 
dit  Chapelain  dans  une  lettre  (encore  inédite)  à  l'abbé  Marucelli,  à  Florence  :  «  J'ay 
veu  en  cette  cour,  pendant  la  régence  de  la  reyne  Marie  de  Médicis.  un  abbé  de  cette 
race  d'un  éclat  égal  à  celuy  des  premiers  du  royaume  et  je  luy  ay  veu  disputer  de  la 
faveur  avec  le  duc  d'Espernon  et  le  cardinal  de  Richelieu.  La  statue  équestre  ou  du 
moins  le  cheval  de  la  place  Royale  est  un  présent  qu'il  fit  à  Sa  Majesté  lorsqu'il 
était  icy.  »  Cette  révélation  de  Chapelain  complète  et  rectifie  le  récit  de  M.  Anatole 
de  Montaiglon  (Notice  sur  V ancienne  statue  équestre  de  Louis  XIII,  pp.  3o, 
3i). 

2.  M.  B.  a  raison  de  dire  (p.  1 56)  que  le  roi  «  prit  sa  meilleure  plume  »  et  écri- 
vit «  sur  ce  ton  jovial,  sur  ce  ton  qui  est  si  plein  d'agrément  pour  sa  mémoire  au- 
près de  tout  Français  resté  bon  Gaulois.  »  Citons  cette  jolie  phrase  :  «  Par  cette  oc- 
casion je  vous  ferè  ressouvenyr  de  moy  et  de  la  France  et  vous  pryrè  de  me  mander 
si  vous  avez  point  de  regret  et  ne  vous  amusez  tant  à  dyre  vostre  brevyère  que 
quelquefois  il  ne  vous  prenne  envye  de  m'escripre...  »  A  propos  des  lettres  de 
Henri  IV,  M.  B.  corrige  (p.  145)  une  erreur  de  Berger  de  Xivrey  qui  ft.  VII,  p.  176) 
a  donné  à  une  lettre  de  1604  la  date  de  1607.  On  trouvera  çà  et  là  d'autres  notes  rec- 
tificatives, par  exemple  pp.  8,  19,  40.  De  la  note  où,  dans  cette  dernière  page.  M.  B. 
relève  une  erreur  de  M.  de  la  Saussaye,  il  faut  rapprocher  une  note  (p.  68)  qui  ren- 
ferme un  grand  éloge  de  Y  Histoire  du  château  dé  Blois. 


d'histoire  et  de  littérature  387 

ches  faciles  dans  un  livre  qui  est  un  des  plus  attrayants  de  tous  ceux  que 
l'on  doit  à  sa  plume  si  savante  et  si  spirituelle  '. 

T.  de  L. 


234.  —  Ferdinand    Freiligreih,    ein    Dichterleben    in    Briefen,   von  Wilhelm 
Buchner.  Lahr,  M.  Schauenburg.  2  volumes  in-8°.  vu  et  439  p.,  5o6  p. 

Selon  Fauteur  de  cet  ouvrage,  M.  W.  Buchner,  Freiligrath  a  été  «  le 
plus  remarquable  des  lyriques  de  rAllemagne  depuis  cinquante  ans  »  ; 
il  vaut  mieux  dire,  pour  ne  pas  être  taxé  d'exagération,  l'un  des  plus 
remarquables.  Quoiqu'il  en  soit,  M.  B.  a  connu  intimement  Freilig- 
rath; la  veuve  du  poète  a  mis  à  sa  disposition  la  plus  grande  partie  de 
la  correspondance  de  Freiligrath  avec  ses  parents  et  ses  amis;  les  propres 
souvenirs  du  biographe  et  les  lettres  nombreuses  qu'il  a  eues  entre  les 
mains  lui  ont  donc  permis  de  remplir  de  détails,  aussi  intéressants  qu'a- 
bondants, les  deux  volumes  qu'il  consacre  à  l'auteur  du  Lowenritt.  On 
peut  même  dire  que  cet  ouvrage  est,  à  certains  égards,  moins  un  livre 
qu'un  recueil  épistolaire  ;  M.  B.  cite,  presque  à  chaque  page,  les  lettres  de 
son  héros  et  de  ses  correspondants.  Mais  il  a  bien  fait  d'adopter  cette 
méthode  ;  les  lettres  de  Freiligrath  nous  renseignent  complètement  sur 
sa  vie  intime;  elles  sont  pleines  d'abandon;  le  poète  y  montre  avec  la 
plus  entière  sincérité  son  noble  caractère,  son  âme  loyale  et  franche  ;  il  a 
de  l'esprit,  de  la  verve,  de  la  gaieté  et  ce  que  les  Allemands  nomment 
Schalkhaftigkeit  ;  les  sentiments  tantôt  nobles  et  élevés,  tantôt  affec- 
tueux et  tendres,  qu'il  exprime,  se  mêlent  à  des  pensées  piquantes,  à  de 
vives  saillies,  à  des  plaisanteries  charmantes,  à  des  idées  folâtres  et  drôles 
qui  témoignent  d'une  bonne  humeur  et  d'un  entrain  qu'on  ne  s'atten- 
dait guère  à  trouver  chez  un  homme  qui  eut  bien  des  soucis  et  des 
chagrins  et  chez  un  poète  ordinairement  grave,  et  assez  épris  du  fantas- 
tique et  de  l'horrible  2.  Freiligrath  s'épanchait  volontiers  dans  ses  lettres; 


1.  M.  B.,  qui  est  le  plus  courtois  des  critiques,  dit  (note  de  la  p.  19),  à  propos 
d'une  date  inexactement  indiquée  par  M.  Campardon  (Les  comédiens  du  roi  de  la 
troupe  italienne  pendant  les  deux  derniers  siècles)  :  «  Le  cas  n'est  point  pendable. 
L'auteur  réparera  cela  dans  une  seconde  et  non  moins  belle  édition  de  son  ou- 
vrage. »  J'emprunterai  à  M.  B.  sa  gracieuse  formule  et  je  dirai  que  dans  une  seconde 
et  non  moins  belle  édition  de  son  ouvrage,  il  devra  réparer  deux  petits  torts.  Il  fau- 
dra qu'il  abandonne  (p.  45)  l'étymologie  de  Ganache  proposée  par  M.  Edouard  Four- 
nier,  dont  l'érudition  était  plus  ingénieuse  que  solide,  et  que  dans  la  phrase  où 
apparaît  (p.  2  38)  l'illustre  Peiresc  «  écrivant  à  un  sieur  de  Valavoir,  son  ami,  »  il 
substitue   Valaveç  à  Valavoir  et  les  mots  son  frère  aux  mots  son  ami. 

2.  Voir,  par  exemple,  dans  le  IIe  volume  la  lettre  divertissante  à  Geibel.  sur  les 
pages  de  laquelle  Freiligrath  avait  collé  des  étiquettes  de  vin  de  Champagne;  voir 
aussi  les  noms  comiques  qu'il  donne  à  ses  amis,  à  Eichmann,  à  Schùcking,  etc., 
et  toutes  ses  poésies  de  circonstance,  sous  le  titre  de  Scher\haftes  dans  le  IVe  vo- 
lume de  ses  œuvres  complètes. 


388  REVUE    CRITIQUE 

sa  correspondance  a  le  ton  d'une  conversation  libre,  familière  et  en- 
jouée; quoiqu'il  se  dise  tvtsschreibfaul,  il  laisse  trotter  sa  plume,  il  ne 
cache  à  ses  correspondants  aucune  de  ses  impressions,  aucun  des  senti- 
ments qui  l'agitent  au  moment  même  où  il  écrit  -,  chacune  de  ses  lettres 
est  une  véritable  effusion  de  cœur,  Her^enserguss;  jamais,  certes,  il  n'a 
pensé  qu'elles  pourraient  être  imprimées  un  jour. 

Pour  retracer  la  vie  de  Freiligrath,  M.  B.  a  donc  évoqué  Freiligrath 
lui-même  ;  mais  il  ne  faudrait  pas  croire  qu'il  s'est  borné  à  des  citations  ; 
cette  correspondance  est  reliée  par  quelques  mots  d'explication,  et,  dans 
chaque  chapitre,  les  lettres  groupées  d'après  l'ordre  chronologique  sans 
désordre  ni  confusion,  .sont  toujours  précédées  d'un  aperçu  bref,  mais 
complet,  des  événements  exposés  dans  la  correspondance  du  poète,  ainsi 
que  d'une  appréciation  rapide  des  œuvres  qu'il  a  composées  dans  cette 
période  de  sa  vie.  M.  B.,  en  un  mot,  a  su  mettre  en  œuvre  les  nom- 
breux matériaux  dont  il  disposait;  la  biographie  de  Freiligrath  est, 
comme  l'indique  le  second  titre  de  l'ouvrage,  une  biographie  exposée  par 
les  lettres  mêmes  de  Freiligrath,  ein  Dichterleben  in  Brie/en  ;  mais 
c'est  un  récit  bien  ordonné,  et  Ton  doit  féliciter  M.  B.  d'avoir  renoncé 
à  ridée  qu'il  avait  eue  un  instant,  de  publier  les  lettres  de  Freiligrath 
comme  Strodtmann  a  publié  celles  de  Bûrger  :  on  y  aurait  perdu  et  le 
récit  —  qui  précède  chaque  chapitre  —  de  la  vie  agitée  de  Freiligrath,  et 
les  jugements  que  M.  B.  porte  en  passant  sur  ses  poésies  et  où  il  a  mis, 
outre  d'heureuses  citations  et  la  reproduction  de  vers  inédits,  du  goût, 
de  la  finesse,  surtout  une  grande  impartialité,  quoiqu'il  ne  soit  pas  dans 
les  meilleures  conditions  pour  être  impartial. 

Le  premier  volume  comprend  deux  livres  :  I.  Les  années  de  jeunesse 
(Jugendjahre,  i8io-i832,  pp.  3-88);  II.  L'âge  mûr  [Mannesjahre, 
1832-1842,  pp.  91-433)  li  Dans  le  premier  livre,  M.  B.  nous  raconte  les 
premières  années  du  poète,  son  enfance  qu'il  passa  dans  sa  ville  natale, 
à  Detmold  (qui  est  aussi  la  patrie  de  Grabbe),  son  départ  pour  Soest  où 
il  alla,  à  l'âge  de  quinze  ans,  apprendre  le  commerce  chez  son  oncle. 
Freiligrath  n'acheva  donc  pas  entièrement  ses  études,  et  toute  sa  vie  il 
regretta  de  n'avoir  pas  suivi  les  cours  de  l'université  ;  mais  il  emporta 
du  gymnase  une  bonne  provision  ;  il  avait  une  connaissancedes  langues 
classiques  qu'il  approfondit  encore  ;  il  posséda  parfaitement  plusieurs 
langues  modernes  ;  rarement  poète  eut  l'esprit  mieux  meublé,  et  la 
correspondance  que  publie  M.  B.,  abonde  en  citations  tirées  des  auteurs 
anciens.  Il  avait  déjà  un  goût  très  vif  pour  la  poésie;  M.  B.  a  retrouvé 
dans  les  vieilles  collections  du  Soester  Wochenblatt  et  du  Mindener 
Sonntagsblatt  les  premiers  vers  de  son  héros  ;  la  plupart  de  ces  pièces 


i .  Le  premier  livre  renferme  deux  chapitres  :  I.  Les  années  d'enfance,  Detmold 
(pp.  3-33);  IL  Les  années  de  jeunesse,  Soest  (pp.  34-88)  ;  et  le  deuxième  livre, 
quatre  chapitres  :  III.  Amsterdam  (pp.  91-173);  IV.  Soest  et  Barmen  (pp.  174-323); 
V.  Unkel  (pp.  324-395);  VI.  Darmstadt  (pp.  3g6-433). 


d'histoire  et  de  littérature  389 

ont  été  reniées  plus  tard  par  le  poète  et  ne  figurent  pas  dans  l'édition 
complète  de  ses  œuvres;  quelques-unes  ne  sont  cependant  pas  sans 
mérite,  même  le  Tiger  und  Wàrter  que  Chamisso  blâma  sévèrement. 
Ce  qui  frappe  le  lecteur,  et  ce  que  M.  B.  met  en  relief,  c'est  l'étonnante 
précocité  du  génie  poétique  de  Freiligrath  ;  la  pièce  de  vers,  Moos-Thee, 
composée  après  une  maladie  de  poitrine  dont  il  guérit,  date  de  sa 
seizième  année,  et  c'est  de  vingt-un  à  vingt-trois  ans  qu'il  a  fait  quel- 
ques-uns de  ses  morceaux  les  plus  connus,  comme,  par  exemple,  «  les 
compagnons  menuisiers  »,  «  les  émigrants  »  qui  valurent  plus  tard  à 
leur  auteur  un  hommage  bien  touchant  ',  «  la  vengeance  des  fleurs  » 
[Die Schreinergesellen,  Die  Auswanderer,  der Blwnen  Rache),  etc.,  etc. 
Le  deuxième  livre  traite  de  Y  âge  mûr.  Freiligrath  resta  près  de  sept  ans 
à  Soest;  il  s'y  fiança  avec  Caroline  Schwollmann,  mais  il  y  avait  dans 
son  affection  pour  Lina,  d'ailleurs  bien  plus  âgée  que  lui,  plus  de  recon- 
naissance que  d'amour;  le  mariage  projeté  n'eut  pas  lieu.  En  janvier 
i832,  Freiligrath  quitta  Soest  pour  Amsterdam  où  on  lui  offrait,  dans 
une  grande  maison  de  change,  un  emploi  plus  lucratif.  11  mena  en 
Hollande  une  vie  assez  solitaire;  mais  il  fut  transporté,  comme  dit  son 
biographe,  du  cercle  étroit  d'une  petite  ville  de  Westphalie  sur  le  bord 
de  la  mer  et  au  milieu  de  la  vie  animée  d'un  grand  port  (p.  172),  et 
c'est  là  qu'il  composa  les  poésies  qui  le  rendirent  célèbre  en  Allemagne  2. 
Bientôt  son  patron  qui  d'abord  le  faisait  asseoir  au  bas  bout  de  la  table, 
lui  donna  la  place  d'honneur  à  côté  de  sa  femme  qui  s'entretenait  avec 
Freiligrath  de  Jean  Paul  et  de  l'éternité  du  sentiment  (p.  94).  Freiligrath 
avait  envoyé  quelques-unes  de  ses  poésies  (Scipio,  Lœwenritt,  Moosthee, 
et  Anno  Dominï]  à  Chamisso  et  à  Schwab  qui  dirigeaient  Y Almanach 
des  Muses.  La  correspondance  qui  s'engagea,  à  cette  occasion,  entre 
Freiligrath  et  les  deux  directeurs  de  ce  recueil  poétique  est  très  atta- 
chante; parmi  les  lettres  que  publie  M.  B.,  on  remarquera  celle  où  le 
jeune  homme  racontait  sa  vie  et  ses  projets  à  Gustave  Schwab  (pp.  148- 
149);  il  y  dit  comment  il  «  passa  des  Muses  à  Mercure  »  au  moment 
même  où  il  lisait  avec  passion  les  romans  de  Walter  Scott  et  ne  pensait 
qu'aux  bruyères  de  l'Ecosse;  il  se  plaint  du  métier  qu'ila  dû  prendre  et 
qui,  plus  que  tout  autre,  «  enchaîne  le  poète  ».  La  réponse  de  Schwab 
mériterait  d'être  citée  en  entier  (pp.  i5i-i52):  «  Chamisso  m'écrit  qu'il 
faut  vous  tendre  une  main  fraternelle  et  vous  prévenir  contre  le  genre 
maniéré  (yor  Manier  yvarnen)  ;  et  je  vous  préviens  aussi  contre  le  choix 
incessant  de  sujets  trop  effrayants  et  trop  fantastiques;  je  vous  avertis  de 

1.  A  Londres,  mai  i852  :  en  visitant  un  vaisseau  avec  son  fidèle  Eichmann,  Frei- 
ligrath vit  deux  jeunes  Allemands  qui  lui  demandèrent  son  nom  ;  ils  lui  prirent  les 
mains  ;  quel  bonheur  pour  eux  de  voir  le  poète  des  Emigrants!  Ils  appelèrent  les 
femmes  et  les  enfants  ;  tous  voulaient  serrer  la  main  à  Freiligrath;  voilà,  dit  le  poète 
à  Eichmann,  voilà  qui  fait  du  bien  au  cœur,  même  quand  on  a  été  chassé  de  sa 
patrie,  II,  p.  246. 

•2.  Le  premier  recueil  de  ses  vers  parut  en  i838. 


:>g°  RKVUE   CRIT1QUK 

ne  pas  sacrifier  le  goût  aux  dépens  du  gigantesque  et  de  l'aventureux  et 
des  contrastes  tranchés,  de  ne  pas  abuser  des  bouts-rimes  consistant  en 
noms  propres  géographiques  et  historiques;  n'étouffez  pas  votre  talent 
sous  les  bagatelles  de  la  forme,  etc.  »  Schwab  avait  mis  le  doigt  sur  les 
principaux  défauts  de  Freiligrath,  défauts  que  M.  B.  a  peut-être  trop 
indulgemment  palliés  et  dont  le  poète  ne  s'est  pas  entièrement  corrigé  : 
il  a  trop  aimé  les  tours  de  force,  il  a  trop  recherché  —  quoique  M.  B. 
prétende  qu'il  ne  faut  pas  employer  le  mot  gesucht  en  parlant  .de 
Freiligrath  (II,  p.  480) —  les  expressions  bizarres;  ses  images  sont 
parfois  outrées  ;  dans  quelques-uns  de  ses  poèmes,  on  sent  l'effort,  un 
effort  puissant,  mais  trop  continuel. 

Fatigué  d'être  à  la  fois  «  poète  et  marchand  »  et  voulant  n'être  que 
poète,  Freiligrath  quitta  la  maison  d'Amsterdam  à  laquelle  il  était  atta- 
ché depuis  cinq  ans;  il  revint  en  Allemagne.  Nous  ne  ferons  que  men- 
tionner en  passant  son  voyage  en  Westphalie  et  sur  les  bords  du  Rhin, 
son  mariage  avec  Ida  Melos  (1841),  son  séjour  à  Barmen,  à  Darmstadt 
où  il  connut  Karl  Buchner  (le  père  de  M.  W.  B.),  la  pension  de  trois 
cents  thalers  que  lui  fit  le  roi  de  Prusse,  etc.  Cette  dernière  partie  du 
volume  renferme  un  grand  nombre  de  lettres  intéressantes,  entre  autres 
celle  où  Freiligrath  parle  du  voyage  d'études  qu'il  voudrait  faire  dans 
les  mers  du  Nord,  sur  le  vaisseau  de  guerre  hollandais  qui  accompagne 
la  flotte  des  pêcheurs  de  hareng,  et  dans  le  Levant  pour  en  rapporter 
«  ein  goîdenes  Liedervliess  »,  une  toison  d'or  de  chants  (p.  '216).  Signa- 
lons aussi  ses  lettres  à  Immermann,  à  Wolfgang  Mûller,  à  M.  Carrière, 
à  Kûnzel,  à  Levin  Schûcking  «  aux  yeux  de  fantôme  »  avec  qui  il  com- 
posa la  Westphalie  ■pittoresque  et  romantique,  à  Simrock,  ou,  comme 
il  l'appelle,  Simrath,  avec  qui  il  publiait  le  Rheinisches  Jahrbuch  et  qu'il 
représente,  l'Iwein  ou  le  Parzival  à  la  main,  dirigeant  ses  vendangeurs 
et  faisant  jeter  du  fumier  sur  ses  couches  d'asperges  (p.  392),  à  sa  fiancée 
(voir  la  charmante  idylle  de  Monra,  pp.  382-385),  etc.,  etc. 

Nous  arrivons  au  second  volume  qui  comprend  trois  livres,  le  IIIe,  le 
IVe  et  le  Ve  de  l'ouvrage.  Le  III0  livre  est  consacré  aux  années  d'orage 
et  de  voyage  (Sturm-und  Wanderjahre,  pp.  3-241)  *.  Freiligrath  s'éta- 
blit avec  sa  jeune  femme  sur  les  bords  du  Rhin,  à  Saint-Goar,  où  il  fait 
la  connaissance  de  Longfellow  et  de  Geibel  ;  c'est  alors  qu'il  écrit  son 
livre  sur  Immermann  et  qu'il  publie  ses  premières  poésies  politiques. 
M.  B.  montre  comment  Freiligrath  se  laissait  peu  à  peu  aller  à  l'oppo- 
sition; comment,  après  avoir  désapprouvé  la  conduite  du  gouvernement 
hanovrien  envers  les  sept  professeurs  de  Gœttingue,  il  arriva  à  composer 


1.  Voici  les  divisions  de  ce  second  volume  :  VII.  Saint-Goar  (pp.  3- n 2)  ;  VIII. 
Ostende  et  Bruxelles,  Meyenberg  et  Zurich,  Londres  (pp.  113-207);  IX.  Dûsseldorf, 
Cologne,  Bilk  (pp.  208-237);  X.  Deuxième  séjour  à  Londres  (pp.  241-384);  XL 
Stuttgart,  Cannstatt  (pp.  385-466);  XII.  Résumé  (pp.  467-483).  L'ouvrage  compte 
donc  douze,  et  chaque  volume,  six  chapitres. 


d'histojrk  et  dk  littéhature  Sqi 

les  poésies  qui  forment  sa  «  profession  de  foi  »  (Glaubensbekenntniss)  et 
qui  firent  de  lui  «  le  porte-drapeau  poétique  du  libéralisme  »,  ou,  comme 
il  disait  assez  emphatiquement,  le  héraut  et  le  prophète  delà  révolution; 
comment,  après  avoir  dit  que  le  poète  «  est  sur  un  observatoire  plus 
élevé  que  les  créneaux  d'un  parti  »  ',  après  avoir  vertement  réprimandé 
le  fougueux  Herwegh,  il  renonça  à  la  pension  que  lui  faisait  le  roi  de 
Prusse  \  Ce  ne  fut  donc  pas  après  la  nuit  qu'il  passa  à  Coblenz  avec 
Hoffmann  de  Fallersleben  à  sabler  le  Champagne,  qu'il  devint  whig  3  ;  il 
Pavait  toujours  été  ;  mais  il  eut  alors  pleine  conscience  d'être  whig,  ou, 
comme  il  dit  encore,  il  se  proclama  girondin  tandis  que  Herwegh  se 
prétendait  montagnard  (cp.  p.  101). 

Freiligrath  dut  quitter  l'Allemagne  après  la  publication  de  son  «  Glau- 
bensbekenntniss »  ;  il  fit  un  court  séjour  à  Bruxelles,  puis  à  Zurich  où  il 
composa  le  Ça  ira,  et  se  retira  en  Angleterre  (juillet  1846-mai  1848  4). 
Il  y  redevint  employé  dans  une  maison  de  commerce  (Huth  et  Cie),  tan- 
dis que  sa  femme  donnait  des  leçons  d'allemand.  Il  restait  donc  toujours, 
selon  son  expression,  Tagelœhner  und  Poet,  à  la  fois  journalier  et  poète. 
Les  événements  de  1848  le  rappelèrent  en  Allemagne  ;  il  alla  demeurer 
à  Dusseldorf.  Il  prit  part  au  congrès  démocratique  de  Francfort;  son 
poème  Die  Todten  an  die  Lebenden,  «  les  morts  aux  vivants  »  (il  repré- 
sente les  combattants  de  mars  qui  sont  tombés  excitant  les  vivants  à  un 
dernier  et  sanglant  soulèvement  pour  la  liberté),  le  fit  traduire  devant  le 
jury  de  Cologne,  le  premier,  dit  M.  B.,  qui  eut,  dans  la  Prusse  rhénane, 
à  juger  un  délit  politique  (II,  p.  210);  il  fut  acquitté  au  milieu  de 
l'enthousiasme  du  public.  Il  était  alors  très  populaire  dans  la  province 
du  Rhin  ;  un  commissionnaire,  apprenant  qu'il  portait  la  malle  de 
Freiligrath,  refusait  l'argent  du  poète  et  ajoutait  qu'il  n'oublierait  de  sa 
vie  l'honneur  que  lui  avait  fait  Freiligrath.  Un  joueur  d'orgue  venait 
naïvement  lui  demander  une  chanson  qui  «  empoigne  et  fasse  frémir  »  et 
lui  offrait  un  thaler  et  même  deux  thalers  pour  sa  peine;  Freiligrath 
répondait  en  souriant  qu'il  n'avait  pas  le  temps,  mais  qu'il  connaissait 
de  meilleurs  poètes  que  lui  à  Dusseldorf,  et  il  renvoyait  le  joueur  d'or- 
gue à  Wolfgang  Muller  qui,  pour  deux  thalers,  se  chargerait  volontiers 
de  la  besogne  »  (II,  p.  21 3).  Mais  Cologne  était  le  centre  du  mouvement 
démocratique  ;  Freiligrath  s'y  transporta  avec  les  siens  ;  il  collaborait  à 
la  Neue  rheinische  Zeitung  dirigée  par  Karl  Marx  ;  il  donna  à  ce  jour- 


1.  On  connaît  ces  deux  vers  si  souvent  cités  : 

Der  Dichter  steht  auf  einer  hœhern  Warte 
Als  auf den  Zinnen  der  Partei. 

2.  Voir  sa  lettre  au  ministre  Eichhorn,  publiée  par  M.  B.  (II,  p.  ia5). 

3.  Lire  la  lettre  qu'il  écrit  à  Brockhaus  à  l'occasion  de  la  nouvelle  édition  du 
Conversationslexicon,  et  où  il  proteste  contre  cette  a  fable  »  ;  la  lettre  est  d'ailleurs 
très  importante  ;  c'est  un  long  article  biographique  sur  Freiligrath,  —  depuis  ses 
premières  années  jusqu'en  i852  —rédigé  par  Freiligrath  lui-même  (II,  pp.  260-264). 

4.  Cp.  la  pièce  de  vers  nach  England,  II,  p.  184. 


3Q2  RRVUK   CRITIQUE 

nal  les  poésies  :  Wien,  Blum,  Ungarn,  Reveille,  les  vers  contre  Cavai- 
gnac,  etc.  ;  il  était  devenu  le  poète  officiel  de  la  démocratie  radicale  ;  il 
célébrait  «  le  drapeau  rouge  flottant  sur  les  barricades  ».  Mais  les  rédac- 
teurs du  journal  furent  expulsés  ;  lui-même,  mis  au  ban  de  la  société  de 
Cologne,  revenu  à  Dusseldorf,  menacé  par  la  police,  prit  la  résolution 
de  se  réfugier  en  Angleterre;  le  12  mai  i85i,  il  partit  pour  Londres; 
c'était  son  second  exil  qui  dura  dix-sept  ans.  Mais  bien  lui  en  prit  de 
s'enfuir  à  temps  ;  quelques  jours  plus  tard  un  double  mandat  d'arrêt 
était  lancé  contre vlui;  il  eût  été  acquitté,  nous  dit  M.  B.,  mais  il  aurait 
fait,  comme  ses  amis,  dix-huit  mois  de  prison  préventive. 

La  vie  que  Freiligrath  mena  en  Angleterre  (mai  i85i-juin  1868),  est 
racontée  par  M.  B.  dans  le  quatrième  livre  de  son  ouvrage,  intitulé 
Verbannungsjahre  ou  «  années  d'exil  »  (pp.  241-384).  Le  poète  fut 
d'abord  commis  chez  un  marchand  de  foulards  des  Indes,  nommé 
Oxford  ;  mais  son  traitement  n'était  pas  suffisant  ;  au  bout  de  trois  ans 
d'un  travail  ingrat  —  qui  ne  fut  interrompu  que  par  un  voyage  en 
Ecosse  '  —  il  quitta  la  maison  Oxford  et  se  résigna  à  vivre  uniquement 
de  sa  plume.  Il  avait  découvert,  écrivait-il  à  Karl  Buchner,  qu'il  écrivait 
un  anglais  très  pardonnable  et  qui  pouvait  s'imprimer  (II,  p.  3oo);  il 
écrivit  pour  Y Athenaeum  des  articles  sur  la  littérature  allemande  ;  il 
traduisit  le  Chant  d'Hiawatha,  de  Longfellow  (1 856).  Heureusement  il 
fut  nommé  «  manager  »  d'une  entreprise  fondée  par  le  Genevois  James 
Fazy,  la  «  banque  générale  suisse  ».  Mais  ses  fonctions  étaient  assujet- 
tissantes, et,  durant  dix  années,  le  poète  ne  produisit  que  fort  peu,  Lon- 
don,  bankand  business,  comme  il  disait,  Londres,  la  banque,  les  affai- 
res, le  fatiguaient  «  diaboliquement  »  (II,  p.  3i3);  ah  !  ces  distances,  ce 
tumulte,  cette  éternelle  escrime  avec  la  vie  (II,  p,  3 1  5)  !  Il  ne  fréquentait 
pas  les  réfugiés  allemands  dont  les  stériles  querelles  l'écœuraient  ;  il  s'était 
fait  naturaliser  anglais  (1 858)  et  refusait  de  revenir  en  Allemagne,  même 
après  l'amnistie  générale  de  186 1  ;  il  aurait  dû  adresser  à  l'autorité  une 
demande  en  grâce;  il  ne  voulait  rentrer  dans  sa  patrie  que  par  un  décret. 
M.  B.  nous  donne  de  nombreux  détails  sur  la  vie  domestique  de  Freilig- 
rath à  Londres;  les  documents  ne  lui  manquent  pas;  Rodenberg  qui 
dirige  aujourd'hui  la  Deutsche  Rundschau,  Bodenstedt,  Bayard  Taylor, 
Gottfried  Kinkel,  etc.,  venaient  rendre  visite  au  poète,  et  ont  décrit  la 
maison  de  Freiligrath,  son  travail  infatigable  pendant  la  semaine, 
l'accueil  hospitalier  qu'il  faisait  à  ses  amis  le  dimanche,  le  seul  jour  où  il 
ne  peinait  pas  et  ne  luttait  pas  pour  les  siens.  (Il  avait  cinq  enfants.) 
Un  des  passages  les  plus  curieux  que  cite  M.  B.  est  tiré  d'un  discours  où 
G.  Kinkel  a  décrit  cette  «  petite  maison  amicale  »  que  le  poète  habitait  à 
Hackney  dans  un  faubourg  silencieux  et  «  vert  de  feuillage  »  ;  cette  a  île 


i.  Il  parcourut  avec  émotion  «  les  champs  que  Robert  Burns  avait  labourés  et 
chantés  derrière  la  charrue  »  (été  de  1854);  cp.  la  poésie  inachevée  que  communique 
M.  B.,  hinauf,  hinab  den  lusCgen  Doon,  11,  p.  286. 


d'histoire  et  de  littérature  393 

pacilique  et  radieuse  du  dimanche  »  si  éloignée  des  bçumes  et  du  tapage 
de  Londres,  ce  «  long  jardin  étroit  »  où  Freiligrath  se  promenait  en 
devisant  avec  ses  hôtes  (II,  p.  245)  '. 

Mais  en  1 865,  la  banque  dont  Freiligrath  était  le  principal  agent,  fut 
supprimée;  le  poète  se  trouva  un  instant  dans  de  grands  embarras  ;  du 
reste,  il  avait  été  presque  toujours,  comme  il  dit  familièrement,  «  mit 
seinen  Finanzen  ein  wenig  derangirt  »  (I,  p.  341).  Mais,  après  les 
événements  de  1866,  une  souscription  s'organisa  en  son  honneur;  tout 
le  mérite  de  cette  «  Dotation  Freiligrath  »,  qui  fait  un  singulier  con- 
traste avec  les  dotations  de  Bismarck  et  des  généraux  vainqueurs  de  1866, 
revient,  comme  le  prouve  M.  B.,  aux  amis  que  le  poète  comptait  à  Bar- 
men  2.  La  souscription  rapporta  58,63 1  thalers  3  ;  Freiligrath  revint  en 
Allemagne,  il  s'établit  d'abord  à  Stuttgart,  puis  à  Canstatt. 

Le  Ve  et  dernier  livre  de  l'ouvrage  de  M.  B.  a  pour  titre  «  les  années 
de  repos»  [Rnhejahre,  1868-1876,  pp.  387-466),  Le  poète,  revenu  d'un 
long  exil,  répondit  au  don  et  aux  hommages  de  l'Allemagne  par  les  vers 
sur  la  forêt  de  Teutoburg  (II,  p.  391);  il  salue  les  montagnes  de  sa 
patrie,  a  la  vieille  forêt  et  la  vieille  bruyère  »,  les  lieux  qu'il  a  vus  dans 
sa  jeunesse  et  qui  conservent  toujours  le  même  aspect  ;  revenu  dans 
l'endroit  d'où  il  est  parti,  il  réfléchit  à  ses  efforts  passés,  conclut  qu'il 
n'  «  a  pas  peiné  en  vain  »  et  bénit  son  destin  :  «  Etre  aimé  de  son  peuple, 
le  plus  beau  but  du  poète...  Vous  voulez  donc  me  tresser  une  couronne  ! 
eh  bien,  je  la  tiens  fièrement  dans  ma  main,  cette  couronne  qu'il  vous  a 
plu  de  me  tresser...  Et  maintenant,  je  saisis  joyeux  la  coupe  et  la  rem- 
plis jusqu'au  bord,  et  la  lève,  buveur  ému,  et  la  tiens  en  l'air  d'une  main 
ferme,  et  crie  aussi  loin  que  je  puis  voir  un  pays  allemand,  oui,  je  le  crie 
bien  haut  du  sommet  de  la  montagne  :  ma  patrie,  je  te  remercie  L  » 

Freiligrath  célébra  les  victoires  de  l'Allemagne  en  1870  [Le  Trom- 
pette de  Gravelotte,  Hurrah  Germania,  etc.).  Nous  n'insistons  pas  sur 
cette  partie  du  volume;  nous  y  relevons  toutefois,  parmi  les  lettres  que 
publie  M.  B.,  un  passage  assez  curieux  (p.  410)  ;  le  poète,  alors  à 
Stuttgart,  emballait  déjà  ses  livres  et  ses  objets  les  plus  précieux  pour  les 
mettre  en  lieu  sûr  ;  il  ne  respira  qu'après  Wissembourg  et  Wcerth.  11 
est  mort  à  Canstatt  le  18  mars  1876. 

L'ouvrage  de  M.  B.  se  termine  par  un  aperçu  [Ueberschau)de  la  vie  et 
des  œuvres  de  Freiligrath.  On  y  trouve  d'intéressants  détails  sur  le 
caractère,  les  manières,  le  genre  de  vie  du  poète.  M.  B.  montre  que 
Freiligrath  n'était  pas,   comme  on  l'a  cru,  un  «  autodidacte  »,  puis- 

1.  Voir  la  pièce  devers  inédite  et  inachevée  de  Freiligrath,  An  der  Weltstadt 
nœrdlichem  Saum,  etc.  (II,  p.  242J. 

•2.  Cp.  le  poème  de  Rittershaus,  Auch  cine  Dotation,  paru  dans  la  «  Gartenlaube  » 
(1867,  n°  17)  et  reproduit  par  M.  B.  (II,  p.  357). 

3.  Les  villes  qui  donnèrent  le  plus  furent,  en  Allemagne,  Barmen,  Berlin,  Dresde, 
Francfort,  Hambourg,  Cologne,  Leipzig,  Stuttgart  et  Vienne;  à  l'étranger,  Londres 
et  Bradford,  New-York,  Saint-Louis  et  Chicago. 


394  REVUE   CRITIQUE 

qu'il  possédait  une  grande  culture  classique.  Il  divise  —  un  peu  subti- 
lement, mais  non  sans  justesse  —  la  carrière  poétique  de  Freiligrath  en 
trois  périodes  :  la  première  est  celle  du  lyrisme  épique  ;  la  seconde  est 
celle  de  la  poésie  d'actualité,  de  celle  qui  tire  sa  matière  et  son  souffle 
des  événements  contemporains;  la  troisième,  enfin,  est  la  période  des 
poésies  de  circonstance.  Enfin,  M.  B.  apprécie  une  dernière  fois  le  génie 
de  Freiligrath  ;  il  loue  beaucoup  ses  traductions  de  l'anglais  (Coleridge, 
Thomas  Moore,  Burns,  Félicia  Hemans,  Bret  Hart,  Whitman),  qui 
«  donnent  l'impression  de  l'original  par  la  vérité  simple  et  le  vigoureux 
naturel  de  l'expression  »  (II,  p.  483)  '. 

En  résumé,  la  publication  de  M.  W.  Buchner  sera  accueillie  avec 
reconnaissance  par  tous  ceux  qui  s'intéressent  au  mouvement  poétique 
et  littéraire  de  l'Allemagne  dans  ces  cinquante  dernières  années,  aussi 
bien  que  par  les  amis  et  admirateurs  de  Freiligrath.  Ces  derniers  surtout 
seront  heureux  de  lire  cette  correspondance  qui  leur  apprend  tant  de 
choses  nouvelles  sur  le  grand  lyrique.  Ecrite  par  un  homme  de  goût  et 
de  savoir  qui  a  connu  personnellement  Freiligrath,  pleine  d'informations 
et  de  détails  de  toute  sorte  sur  la  vie  et  les  œuvres  de  l'écrivain,  cette 
belle  biographie  où  reloge  n'a  d'ailleurs  rien  d'exagéré  et  où  l'on  ne  sent 
pas  trop  l'empressement  de  l'amitié,  sera  consultée  plus  tard  avec  grand 
profit  par  les  historiens  de  la  littérature  allemande  du  xixa  siècle.  Elle 
fait  revivre  et  l'homme  et  le  poète,  un  des  plus  illustres  poètes  de 
l'Allemagne  contemporaine  et  un  homme  ferme,  loyal,  incapable  d'une 
mauvaise  action,  toujours  fidèle  à  son  devoir,  manquant  de  souplesse, 
il  est  vrai,  opiniâtre  dans  ses  convictions,  passionné  et  irritable,  mais 
bon,  obligeant,  gardant  parmi  ses  tribulations  beaucoup  d'humour  et 
une  gaieté  robuste  et  mâle,  aimant  mieux  faire  le  rude  métier  de  com- 
mis que  d'éparpiller  et  de  gâter  son  talent  poétique,  acceptant  la  servi- 
tude du  comptoir  pendant  le  jour  pour  donner  le  soir  à  la  muse  sa  pleine 

liberté  2. 

A.  Chuquet. 

CHRONIQUE 

ALLEMAGNE.  —  La  librairie  Brockhaus,  de  Leipzig,  publiera  prochainement  un 
récit  du    Voyage  en  Abyssinie  de  M.  Gerhard  Rohlfs  et  un   grand  ouvrage  de 

1.  On  ne  doit  pas  oublier  que  Freiligrath  a  traduit  un  grand  nombre  des  poésies 
de  Victor  Hugo  (i836  et  1845.  Francfort  sur  le  Main,  Sauerlaender). 

2.  Le  I"  volume  renferme  en  appendice  l'indication  de  toutes  les  sources  manuscri- 
tes consultées  par  M.  B.,  une  bibliographie  des  œuvres  de  Freiligrath,  un  arbre 
généalogique;  le  IIe  volume,  une  lisie  des  personnes  —  au  nombre  de  77  —  qui  ont 
écrit  ou  reçu  des  lettres  publiées  par  M.  Buchner  (chaque  nom  est  accompagné  d'une 
courte  notice  biographique),  et  une  table  des  noms  propres.  —  Entête  de  chaque  vo- 
lume est  un  beau  portrait  de  Freiligrath. 


D1HISTOIRE    ET    DK    LITTERATURE  3g5 

M.  Ed.  Sachau  sur  son  récent  voyage  d'études  en  Asie-Mineure  et  en  Mésopotamie. 

—  Le  Ier  volume  d'une  deuxième  édition  des  Lettres  de  Gcethe  à  Mmt  de  Stein 
(Gcethe's  Briefe  an  Frau  von  Stein) publiées  par  Ad.  Schcell,  vient  de  paraître  parles 
soins  de  M.  Wilh.  Fielitz,  à  la  librairie  littéraire  de  Francfort  sur  le  Main,  chez 
Rùtten  et  Loening.  (In-8\  xn  et  5o8  pp.  9  mark.) 

—  La  Ire  partie  de  la  réimpression  des  Frankfurter  gelehrte  An^eigen  de  l'année 
1772  vient  de  paraître  à  la  librairie  Henninger,  de  Heilbronn  (VII0  vol.  de  la  col- 
lection des  «  Deutsche  Literaturdenkmale)  »;  la  deuxième  paatie  paraîtra  dans  quel- 
que temps  et  renfermera  une  introduction  de  M.  W.  Scherer,  ainsi  que  des  remar- 
ques sur  l'établissement  du  texte  de  cette  réimpression  et  un  index,  par  le  directeur 
de  la  collection,  M.  B.  Seuffert. 

—  La  36e  assemblée  des  philologues  et  pédagogues  allemands  a  eu  lieu  à 
Carlsruhe,  du  27  au  3o  septembre.  Dans  la  première  journée,  ont  été  lus  des 
mémoires,  de  M.  Wendt  sur  les  rapports  de  Schiller  avec  l'antiquité;  de  M.  Hettner, 
sur  la  civilisation  de  la  Gaule  et  de  la  Germanie  sous  la  domination  romaine  ;  de 
M.  Max  Koch,  sur  les  relations  de  la  littérature  allemande  et  de  la  littérature  an- 
glaise au  xvine  siècle.  L'assemblée  se  partagea  ensuite  en  sections;  dans  la  section 
des  germanistes  et  romanistes,  qui  comptait  52  membres,  M.  Bartsch  lut  un  rap- 
port sur  l'histoire  de  la  section  et  sur  les  membres  morts  depuis  la  dernière  assem- 
blée, ainsi  qu'un  mémoire  sur  la  fondation  de  «  séminaires  »  des  langues  germani- 
ques et  romanes  et  sur  la  méthode  des  exercices  critiques;  d'autres  lectures  furent 
faites  par  MM.  Bechstein  (Floia,  le  plus  ancien  poème  macaronique  de  la  littéra- 
ture allemande),  Armitage  (Déclinaison  des  parasyllabiques  masculins  avec  trois 
finales  en  provençal)  ;  E.  Wûlcker  (Luther  et  la  chancellerie  saxonne),  Max  Rieger 
(le  Goldener  Hahn  de  Klinger),  H.  Fischer  (le  vocalisme  du  dialecte  souabe),  Kluge 
(de  l'étymologie  allemande).  La  section  pédagogique  entendit  une  lecture  de 
M.  Bilher  sur  la  méthode  actuelle  de  l'enseignement  du  français,  et  la  section  des 
langues  modernes,  un  rapport  de  M.  Gutersohn  sur  l'état  présent  de  la  grammaire 
de  l'anglais  dans  les  écoles.  —  La  prochaine  assemblée  aura  lieu  en  septembre  i883 
à  Dessau  et  sera  présidée  par  MM.  Zacher  et  Elze. 

—  Un  comité  s'est  formé  à  Wissem bourg  pour  l'érection  d'une  statue  du  moine 
Otfrid. 

—  L'assemblée  générale  des  sociétés  historiques  d'Allemagne,  réunie  à  Cassel,  a 
décidé  de  prendre  d'énergiques  mesures  pour  faire  recueillir  les  anciens  Volkslieder 
dans  les  contrées  où  l'on  n'a  pas  encore  tenté  de  rassembler  les  chants  populaires 
du  passé. 

—  L'Union  des  architectes  et  des  ingénieurs  allemands  fait  un  appel  à  la  nation  en 
faveur  de  la  restauration  du  château  de  Heidelberg. 

—  Le  3o  septembre  est  mort  à  Erlangen  Jean-Jacques  Herzog,  l'éditeur  bien  connu 
de  la  Real-Encyclopœdie  fur  protestantische  Théologie  und  Kirche.  Il  était  né  à 
Bâle  en  i8o5,  étudia  à  Bâle  et  à  Berlin,  fut  professeur  de  théologie  historique  à  l'A- 
cadémie de  Lausanne  ;  c'est  alors  qu'il  composa  sa  Vie  d'Œcolampade  (1843). 
Nommé  professeur  à  l'Université  de  Halle,  puis  chargé  par  le  gouvernement  prus- 
sien de  rechercher  les  documents  relatifs  à  l'histoire  des  Vaudois,  il  publia,  en 
i853,  son  ouvrage  Die  romanischen  Waldenser .  L'année  suivante  commença  la  pu- 
blication de  la  Real-Encyclopœdie  qui  renferme  18  volumes,  outre  quatre  volumes 
supplémentaires  (1854-1868).  Une  seconde  édition  de  ce  grand  ouvrage  est  arrivée 
au  dixième  volume.  Herzog  avait  quitté  Halle  pour  Erlangen  et  publié,  de  1876  à 
1882,  en  trois  volumes,  un  Abriss  der  gesammten  Kirchengeschichte. 

—  Karl  von  Halm  est  mort  le  5  octobre  dans  sa   soixante-quatorzième  année.    Il 


396  REVUE   CRITIQUE 

passa  presque  toute  sa  vie  à  Munich;  il  y  naquit  et  y  fut  élevé,  d'abord  au  gymnase, 
puis  à  l'Université  sous  Thiersch;  il  y  revint  après  avoir  professé  à  Spire  et  à 
Hadamar,  pour  diriger  le  nouveau  gymnase  Maximilien;  en  i856,  il  était  nommé 
directeur  de  la  Bibliothèque  de  Munich  et  professeur  ordinaire  de  l'Université. 
C'était  un  des  meilleurs  latinistes  de  notre  temps,  et  qui  connaissait  aussi  bien  les 
pères  de  l'Eglise  que  Cicéron  et  Quintilien.  On  cite  de  Halm  des  éditions  critiques 
des  Discours  de  Cicéron,  des  Fables  d'Esope,  des  Rhetores  laiini  minores,  de 
Quintilien,  de  Corn.  Nepos,  de  Tacite,  de  Velleius  Paterculu s,  etc. 

ANGLETERRE. —  Un  volume,  composé  d'essais  et  d'études  sur  Aristote  et  dont 
les  auteurs  sont  des  professeurs  d'Oxford,  paraîtra  prochainement  chez  les  éditeurs 
Rivington  :  M.  Case  y  traitera  de  YOrganon;  M.  Nettleship,  de  la  Métaphysique; 
M.  W.  Wallace,  du  De  Caelo  et  de  la  Physique;  M.  Bradley,  de  l'Ethique  ;  M.  E. 
Walla.ce,  du  De  anima;  et  M.  Evelyn  Abbott,  à  qui  est  confiée  la  publication  du  re- 
cueil, de  la  Poétique. 

—  M.  Gunyon  Rutherford,  de  Saint-Paul's  School,  l'éminent  éditeur  du  nouveau 
Phrynichus,  achève  l'impression  d'une  édition  de  Babrius  qui  semble  destinée  à 
épuiser  ce  sujet.  Le  texte  est  fondé  sur  une  nouvelle  collation  du  manuscrit  du 
mont  Athos  et  sur  le  Vaticanus,  longtemps  perdu,  et  récemment  retrouvé  par  Pius 
Knoell  :  le  Vaticanus  contient  plusieurs  des  fables  qui  manquent  dans  le  manuscrit 
de  l'Athos.  Le  texte  est  accompagné  de  notes  critiques  en  latin  et  d'un  commen- 
taire philologique  en  anglais.  L'introduction  renferme  quatre  dissertations  :  une 
sur  Babrius,  dont  M.  Rutherford  fixe  l'âge;  une  sur  l'histoire  de  la  fable  en  Grèce  ; 
une  sur  la  langue  de  Babrius;  une  dernière  sur  l'état  du  texte.  Le  volume  contient 
un  index  complet  de  la  grécité  de  Babrius.  Il  paraît  chez  Macmillan  ;  c'est  la 
premier  volume  d'une  collection  en  deux  volumes,  intitulé  :  Scriptores  Fabularum 
Graeci. 

—  M.  Ad.  Michaelis,  le  professeur  d'archéologie  de  l'Université  de  Strasbourg, 
vient  de  publier  un  volume  en  anglais,  intitulé  Ancient  marbles  in  Great  Britain 
described  (Londres  et  Strasbourg,  Trùbner,  XXVII  et  834  P-  avec  gravures; 
42  mark). 

—  M.  Skeat  aura  bientôt  terminé,  pour  1'  «  Early  English  Text  Society  »,  son 
glossaire  de  la  Vision  of  Piers  the  Plowman,  qui  formera  le  cinquième  volume  de 
son  édition  des  trois  versions  différentes  du  poème  et  complétera  cette  importante 
publication. 

—  Un  ouvrage  sur  don  Juan  d'Autriche,  en  deux  volumes  in-folio,  dont  l'auteur 
est  feu  sir  William  Stirling  Maxwell,  paraîtra  prochainement  chez  les  éditeurs  Long- 
mans,  de  Londres. 

—  M.  Edm.  Gosse  qui  a  récemment  publié  dans  la  collection  «  English  men  of  let- 
ters  »,  de  Macmillan,  un  remarquable  travail  sûr  Gray,  entreprend  pour  la  même 
librairie  la  première  édition  complète  des  œuvres  du  poète;  M.  Gosse  prie  quicon- 
que posséderait  des  manuscrits  de  Gray  ou  tout  autre  document  inédit  se  rapportant 
à  l'élégiaque  anglais,  de  les  lui  communiquer  (adresse  de  M.  Gosse  :  Londres,  De- 
lamere  Terrace,  W.  29). 

—  Il  va  paraître,  en  dix  volumes,  une  nouvelle  édition  de  l'Histoire  d'Angleterre 
(History  of  England)  de  Lingard;  cette  édition  est  publiée  par  la  librairie  Nimmo  et 
Bain,  de  Londres. 

—  Une  nouvelle  collection  de  biographies,  consacrées  aux  femmes  célèbres,  «  emi- 
nent  women  »  est  annoncée  par  l'éditeur  David  Bogue;  dans  cette  collection,  dirigée 
par  M.  John  H.  Ingram,  ne  paraîtront  que  des  volumes  écrits  par  des  femmes;  parmi 
les  volumes  qui  doivent  être  prochainement  publiés  et  où  l'on  trouvera,  dit-on,  nombre 

laaï  anu  k  c 


d'histoire  et  de  littérature  397 

de  docu  ments  inédits  et  de  détails  intéressants,  nous  citerons  :  George  Eliot,  par 
miss  Mathilde  Blind;  Emily  Broniê,  par  miss  Mary  Robinson;  George  Sand,  par 
miss  Bertha  Thomas;  Mary  Lamb,  par  Mrs.  Gilchrist;  Maria  Edgeworth,  par 
miss  Helen  Zimmern. 

—  Le  19  octobre  a  eu  lieu  l'assemblée  générale  de  VHellenic  Society;  M.  Sayce  a 
lu  un  mémoire  intitulé  Explorations  in  Aeolis,  et  M.  A.  S.  Murray,  une  étude  qui 
a  pour  titre  :  A  new  statuette  of  Heraklés. 

—  Le  catalogue  de  la  Bibliothèque  municipale  de  Cantorbéry  deviendra  légendaire. 
D'après  YAthenaeum,  le  théâtre  de  Shakspeare,  placé  sous  la  rubrique  a.  fiction  » 
est  attribué  à  Edmond. Malone,  l'éditeur  de  Shakspeare  en  1790;  Robinson  Crusoé 
ligure  parmi  les  biographies  ;  les  Dépêches  de  Wellington  sont  inscrites  au  chapitre 
des  «  mœurs  et  coutumes.  »  Pendennis  et  Henry  Esmond  sont  les  auteurs  des  oeu- 
vres de  Thackeray  ;  Virgile  est  Maro,  et  Horace,  Flaccus,  etc.,  etc. 

—  Le  dernier  n°  de  V Athenaeum  (28  octobre)  contient  une  notice  émue  de 
M.  R.  Rost  sur  l'éminent  indianiste  A.  C.  Burnell,  enlevé  le  12  octobre,  par  un 
mal  subit,  après  des  années  de  souffrance  et  de  santé  chétive,  à  sa  résidence  de  West 
Stratton,  Hants.  M.  Rost  a  su  rendre  justice  non-seulement  au  savant,  mais  aussi  à 
l'homme,  car  le  savant  et  l'homme  ne  faisaient  qu'un  chez  Burnell,  et  le  désintéres- 
sement, la  franchise,  l'ardeur  généreuse,  la  modestie  vraie  qu'il  apportait  dans  l'é- 
tude, se  retrouvait  chez  lui  dans  tous  les  actes  de  la  vie.  Nul  savant  de  notre 
génération  n'a  laissé  une  trace  plus  lumineuse,  nul  n'a  abattu  plus  de  préjugés,  et 
n'a  su  conserver,  dans  des  études  souvent  atteintes  de  sentimentalisme  et  de  pédan- 
tisme,  un  esprit  plus  libre,  Uniquement  attentif  à  l'essentiel,  à  ce  qu'il  considérait 
comme  useful.  Nul  aussi  n'a  été,  plus  que  lui,  digne  d'avoir  des  amis  et  d'être  sin- 
cèrement regretté.  Burnell,  qui  est  mort  littéralement  victime  de  ses  travaux  dans 
l'Inde,  avait  à  peine  quarante-deux  ans.  —  Sa  nombreuse  bibliothèque  de  livres 
rares  et  de  manuscrits,  sera  vendue  dans  quelques  mois,  conformément  à  sa  der- 
nière volonté,  par  MM.  Solleby,  Wilkinson  et  O,  de  Wellington  Street,  Strand. 

BELGIQUE.  —  M.  Ch.  Rahlenbeck  a  fait  paraître,  dans  une  utile  collection  nommée 
la  Bibliothèque  Gilon  et  publiée  à  Verviers  par  l'éditeur  Gilon,  un  petit  volume  in- 
titulé La  Belgique  et  les  garnisons  de  la  Barrière.  Il  y  fait  l'histoire  de  l'interven- 
tion des  Provinces  Unies  dans  les  Pays-Bas  catholiques  depuis  la  paix  de  Westphalie 
jusqu'au  traité  de  la  Barrière  (i5  nov.  iji5)  et  de  l'occupation  de  plusieurs  villes 
belges  par  les  troupes  hollandaises  en  vertu  de  ce  traité  de  la  Barrière  (jusqu'en 
1782.  époque  du  démantèlement  des  forteresses  occupées).  M.  Rahlenbeck  justifie 
le  traité  de  la  Barrière,  qui  «  protégea  le  territoire  belge,  presque  sans  défenses  na- 
turelles ou  autres.  »  Quelques  pages  du  volume  sont  relatives  à  l'exercice  du  culte 
protestant  dans  les  villes  de  la  Barrière  et  aux  contestations  qui  surgirent  à  celte  oc- 
casion. 

—  Une  brochure  de  M.  Théodore  Juste  (Bruxelles,  Muquardt.  In-8°,  80  p.)  ren- 
ferme une  notice  biographique  de  Nothomb,  rédigée  par  M.  Juste,  sur  l'invitation 
de  la  classe  des  lettres  de  l'Académie  royale  de  Belgique  et  destinée  à  figurer  dans 
l'annuaire  de  i883  de  cette  société.  La  notice  a  pour  titre  :  Souvenirs  du  baron  No- 
thomb et  fait  suite  au  travail  étendu,  que  M.  Juste  avait  déjà  publié  sur  ce  diplo- 
mate dans  sa  «  Galerie  des  fondateurs  de  la  monarchie  belge.  »  M.  Juste  s'est  servi, 
dans  sa  notice,  des  lettres  de  Nothomb  qui  fut  son  ami  et  correspondit  avec  lui 
pendant  trente  ans;  parmi  ces  lettres  on  remarquera  celle  qui  concerne  les  négocia- 
tions du  traité  des  dix-huit  articles  ;  celle  où  Nothomb  apprécie  le  régent  de  Belgi- 
que, Surlet  de  Chokier.  («  Il  ne  croyait  pas  à  l'indépendance  belge;  la  foi  nationale 
lui  manquait.  Il  n'était  pas  orangiste;  il  n'aurait  jamais  prêté  la  main  à  une  restau- 


398  RICVUE   CRITIQUE 

ration.  .  Il  comptait  revoir  ce  qu'il  avait  vu,  la  réunion  à  la  France;  il  rêvait  pour 
lui-même  la  patrie  française...  Sa  magnifique  chevelure  et  sa  stature  imposante  ont 
beaucoup  contribué  à  sa  réputation.  Il  a  maintenu  l'union,  c'est-à-dire  la  trêve  entre 
les  libéraux  et  les  catholiques.  Le  comte  Félix  de  Mérode  était  plus  digne  d'être  ré- 
gent; cependant  j'ai  voté  pour  le  baron  Surlet,  l'union  était  à  ce  prix...  »;;  celle  où 
Nothomb  juge  la  Vie  de  lord  Palmerston   publiée  par  sir  Henry  Bulwer  («  Bulwer 

démasque  Talleyrand Talleyrand  ne  voulait  pas  l'indépendance  de  la  Belgique;  il 

voulait,  il  espérait  le  partage.  C'est  ce  que  le  prince  Léopold  nous  a  révélé  à  M.  De- 
vaux  et  à  moi  dans  notre  première  entrevue  à  Londres,  8  juin  i83i...  Je  n'ai  ren- 
contré que  deux  Français  acceptant  l'indépendance  de  la  Belgique,  Louis-Philippe  et 
Guizot;  aussi  n'étaient-ils  pas  réputés  être  des  Français.  On  leur  trouvait  un  air 
étranger,  ils  respectaient  les  droits  d'autrui.  Faire  manquer  toute  élection,  toute  can- 
didature, mettre  la  Belgique  dans  l'impossibilité  de  se  constituer,  laisser  pour  issue 
le  partage,  tel  était  le  plan  secret  de  Talleyrand.  Mais  il  n'avait  pas  pour  complice  le 
roi  Louis-Philippe.  Benedetti  à  Berlin  savait  qu'il  répondrait  à  la  pensée  secrète  de 
Napoléon  III.  Il  avait  l'empereur  pour  complice  »);  les  lettres  relatives  à  la  publica- 
tion de  la  dernière  édition  de  l'ouvrage  de  Nothomb,  YEssai  historique  et  politique 
sur  la  révolution  belge  ;  des  extraits  du  journal  que  tenait  Nothomb,  alors  qu'il  était 
ministre  à  Berlin,  etc. 

—  La  Bibliothèque  royale  de  Bruxelles  est  maintenant  éclairée  à  la  lumière  élec- 
trique et  ouverte  le  soir  de  sept  heures  à  dix  heures   et  demie. 

BULGARIE.  —  Nous  recevons  de  Sofia  les  deux  premiers  fascicules  de  la  Revue 
{Perioditckesko  Spisanie)  publiée  dans  cette  ville  par  la  Société  de  littérature  bul- 
gare. Quand,  il  y  a  quatre  ans,  les  Russes  ont  occupé  Sofia,  cette  ville  n'avait  jamais 
eu  d'imprimerie.  Elle  est  aujourd'hui  le  siège  d'une  société  littéraire  dont  les  tra- 
vaux font  déjà  autorité.  Signalons  dans  ces  deux  volumes  qui  font  honneur  à  l'im- 
primerie du  jeune  état  bulgare  :  les  études  de  M.  J(rsczek  sur  le  tsar  Stratsimir  de 
Viddin,  sur  l'étude  géographique  de  la  Bulgarie,  la  géographie  et  l'épigraphie  de  la 
Bulgarie,  les  proverbes  recueillis  par  M,  Slaveïkov,  des  contes,  des  chants  populai- 
res, etc. 

DANEMARK.  —  Noire  collaborateur  Joh.  Steenstrup,  auteur  d'importants  tra- 
vaux sur  l'histoire  des  Normands  et  d'une  étude  considérable  sur  le  cadastre  du  roi 
Valdemar,  a  été  nommé  professeur  d'histoire  à  l'Université  de  Copenhague,  à  la 
place  du  professeur  Paludan-Mûller,  décédé. 

—  M.  Karl  Verner,  «  custos  »  de  la  bibliothèque  de  l'Université  de  Halle, 
ira,  le  i*r  janvier,  occuper  à  l'Université  de  Copenhague  la  chaire  de  langues  et 
littératures  slaves. 

HOLLANDE.  —  MM.  van  Vloten  et  P.  N.  L\nd  viennent  de  publier  le  premier 
volume  de  leur  édition  des  œuvres  complètes  de  Spinoza  {Benedicti  de  Spinoza 
opéra  quotquot  reperla  sunt.  La  Haye,  Nijhoff.  In-8°,  xi  et  36o  pp.).  Ce  premier 
volume  renferme  le  Tractatus  de  intellectus  cmendatione,YEthica,  le  Tractatus  po- 
Ikicus,  et  le  Tractatus  tlieologico-politicus  avec  les  notes  marginales  de  Spinoza  à 
ce  dernier  traité.  Le  second  volume  renfermera  les  lettres  du  philosophe. 

—  Le  sixième  congrès  international  des  Orientalistes  aura  lieu  à  Leyde,  le  iôsep- 
tembre  i883;  le  comité  d'organisation  est  ainsi  composé  :  M.  Dozy,  président . 
M.  Kuenen,  vice-président;  M.  de  Goeje,  premier  secrétaire;  M.  Tiele,  second 
secrétaire;  M.  Pleyte,  trésorier.  Y  a-t-il,  dit  à  ce  propos  YAcademy,  une  seule  de 
nos  universités  anglaises  qui  pourrait  offrir  des  noms  aussi  distingués  dans  chaque 
branche  des  sciences  orientales  que  cette  petite  ville  de  Hollande  ? 


d'histoire  et  de  littérature  399 

ACADÉMIE   DES   INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  3  novembre  1882. 

M.  Edouard  Cuq  achève  la  lecture  de  son  mémoire  sur  le  consilium  principis,  d'Au- 
guste à  Dioclétien.  Jusqu'ici,  on  a  étudié  surtout  ce  conseil  impérial  sous  sa  dernière 
forme,  le  consistorium  du  Bas-Empire,  au  sujet  duquel  on  trouvait  des  renseigne- 
ments abondants  dans  le  code  théodosien.  Pour  l'époque  antérieure  à  Constantin,  il 
a  été  admis  à  peu  près  universellement  jusqu'ici,  parmi  les  érudits,  qu'aucune  règle 
précise  ne  présidait  alors  à  l'organisation  du  conseil  de  l'empereur.  L'étude  des  mo- 
numents épigraphiques  et  juridiques  a  conduit  M.  Cuq  à  une  conclusion  opposée. 
Sous  les  premiers  Césars,  il  est  vrai,  le  consilium  n'est  encore  qu'une  commission  de 
délégués  du  sénat  et  ne  forme  pas  à  proprement  parler,  un  corps  constitué.  Mais,  à  par- 
tir d'Hadrien,  il  a,  tout  au  moins  comme  haute  cour  de  justice,  une  existence  officielle. 
On  peut  alors  en  décrire  l'organisation,  dit  M.  Cuq,  «  dans  la  plupart  de  ses  détails. 
«  On  connaît  bon  nombre  des  affaires  soumises  à  ses  délibérations.  On  peut  suivre 
«  les  discussions  qui  s'élevaient  entre  ses  membres,  retrouver  les  mobiles  qui  ont 
«  dicté  aux  empereurs  telle  ou  telle  décision.  Conseillers  en  service  ordinaire  ou  ex- 
«  traordinaire,  maîtres  des  requêtes,  greffiers,  archivistes,  expéditionnaires,  revivent 
«  sous  nos  yeux  dans  l'exercice  de  leurs  fonctions.  »  Le  mémoire  lu  aux  deux  séan- 
ces du  27  octobre  et  du  3  novembre  est  un  fragment  du  travail  étendu  que  M.  Cuq 
a  entrepris  sur  ce  sujet. 

A  la  fin  du  111e  siècle  de  notre  ère,  on  voit  le  consilium  principis,  devenu  le  con- 
sistorium, supplanter  presque  entièrement  pour  la  conduite  des  affaires  de  l'empire  le 
sénat,  réduit  au  rôle  d'une  assemblée  municipale  de  la  ville  de  Rome.  Pour  pouvoir 
conférer  ainsi  à  leur  conseil  l'exercice  de  l'autorité,  les  empereurs  avaient  dû  com- 
mencer par  concentrer  entre  leurs  mains  tous  les  pouvoirs  qui  ne  leur  appartenaient 
pas  primitivement.  L'un  de  ces  pouvoirs,  celui  qui  a  formé  longtemps  la  principale 
attribution  du  consilium,  c'est  le  droit  de  rendre  la  justice. 

On  affirme  parfois  que,  dès  Auguste,  l'empereur  a  pu  recevoir  des  appels  des  sen- 
tences des  juges  et  réformer  les  jugements  qui  lui  étaient  soumis.  M.  Cuq  croit  que 
ce  droit  d'appel  ne  s'est  établi  que  plus  tard  et  par  degrés.  Sous  Auguste,  tous  les 
jugements  étaient  encore  rendus  par  des  juges  privés,  choisis  par  les  parties  elles- 
mêmes.  11  n'y  avait  pas  d'appel  des  sentences  de  ces  juges.  On  pouvait  quelquefois 
prendre  le  juge  même  à  partie,  mais  ce  nouveau  procès  était  soumis  à  un  nouveau 
juge  choisi  comme  le  premier.  Quand  Suétone  dit  qu'Auguste  déléguait  au  préteur 
urbain  les  appellationes  urbanorum  litigatorum  et  à  des  viri  consulares  les  appella- 
tiones  des  provinciaux,  cela  doit  s'entendre  uniquement  du  recours  formé  auprès 
d'un  magistrat  pour  que,  par  son  intercessio,  il  casse  un  décret  d'un  autre  magistrat; 
cela  ne  peut  s'entendre  d'un  appel  judiciaire,  qui  était  alors  chose  inconnue. 

Il  n'y  avait  qu'un  cas  où  le  droit  romain  primitif  admît  l'appel  proprement  dit, 
d'une  autorité  inférieure  à  une  autorité  supérieure;  c'est  quand  un  magistrat  avait 
délégué  son  autorité.  Alors  les  actes  du  délégué  pouvaient  toujours  être  réformés  par 
le  magistrat  de  qui  il  tenait  sa  délégation.  Pour  être  en  mesure  d'intervenir  dans  les 
décisions  de  la  justice,  les  empereurs  s'appliquèrent  donc  à  multiplier  les  cas  où  les 
magistrats  pouvaient  être  considérés  comme  leurs  délégués,  et  à  substituer  aux  juges 
choisis  par  les  parties  des  juges  nommés  par  le  magistrat,  ses  délégués  par  consé- 
quent. Cette  réforme,  introduite  peu  à  peu  dans  la  pratique,  ne  tut  entièrement  ac- 
complie que  sous  Septime-Sévère  pour  la  juridiction  criminelle  et  au  111e  siècle  seule- 
ment pour  la  juridiction  civile.  Alors  enfin  il  fut  admis  en  principe  que  toute  justice 
n'était  rendue  que  par  délégation  de  l'empereur,  ce  qui  donnait  à  celui-ci  le  droit  de 
réviser  toutes  les  sentences  judiciaires. 

Dans  la  pratique,  l'exercice  de  cette  juridiction  suprême  n'était  possible  qu'à  la 
condition  de  créer  une  hiérarchie  judiciaire,  qui  ne  laissât  parvenir  les  appels  à 
l'empereur  qu'après  l'épreuve  d'une  ou  plusieurs  instances  intermédiaires.  Pour  éta- 
blir cette  hiérarchie,  les  empereurs  instituèrent  ce  qu'on  appela  les  vice  sacra  judi- 
cantes.  C'était  des  délégués  spéciaux  que  le  prince  commettait  pour  juger,  en  son 
Heu  et  place,  les  affaires  que  l'on  portait  devant  lui.  Ces  délégués  recevaient  donc 
l'appel  clés  sentences  des  tribunaux  ordinaires  et  les  réformaient  ou  les  confirmaient; 
mais  leurs  décisions  à  leur  tour  pouvaient  être  frappées  d'appel,  et  c'était  alors  l'em- 
pereurqui  jugeait  en  dernier  ressort. 

Ainsi  l'empereur  avait  acquis  le  droit  positif,  le  pouvoir  matériel  d'intervenir  dans 
les  procès  et  de  réformer  les  sentences  de  la  justice.  Mais  ce  n'était  pas  tout,  il  fal- 
lait assurer  à  la  justice  princière  l'autorité  morale.  Ce  fut  le  rôle  du  consilium  prin- 
cipis. Aux  sénateurs  qui  composaient  seuls  ce  conseil  sous  Auguste  et  Tibère,  les 
césars  suivants  avaient  ajouté  des  membres  de  l'ordre  équestre  :  Hadrien  y  introdui- 
sit^ une  section  spéciale  de  jurisconsultes  de  profession.  Dès  lors  le  consilium  cessa 
d'être  un  simple  conseil  privé  du  prince,  sans  existence  officielle,  et  fut  reconnu,  au 
moins  dans  l'ordre  judiciaire,  comme  un  des  organes  réguliers  de  la  constitution  de 
l'empire. 


400  REVUE    CRITIQUE    D  HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

M.  le  Dr  Hamy,  conservateur  du  musée  ethnographique  du  Trocadéro,  expose  les 
résultats  de  l'étude  qu'il  vient  de  faire  d'un  intéressant  monument  découvert  à  Téo- 
tihuacan,  près  de  Mexico,  par  M.  le  Dr  Charnay,  Ce  monument  de  pierre,  haut  de 
in,33,  large  de  i^oS,  épais  de  omi5,  reproduit  assez  bien  l'image  d'une  croix  trapue, 
portant,  sur  une  de  ses  faces,  un  bandeau  latéralement  tordu  en  forme  de  grecque 
émoussée;  de  la  base  sortent  quatre  cônes  en  relief.  C'est,  selon  M.  Hamy,  le  sym- 
bole antique  du  dieu  Tlaloc,  la  plus  ancienne  des  divinités  mexicaines,  qui  présidait 
aux  orages  et  à  la  pluie.  C'est  par  la  simplification  graduelle  de  cette  croix  de  la  pluie 
que  les  Mexicains,  les  Mayas,  etc.,  en  étaient  arrivés  à  adorer,  au  xvie  siècle,  une 
sorte  de  croix,  très  voisine  de  la  croix  chrétienne.  Les  conquérants  espagnols,  trou- 
vant dans  toute  la  Nouvelle-Espagne  un  grand  nombre  de  ces  croix  et  n'en  compre- 
nant pas  la  signification,  avaient  vu  dans  ces  monuments  les  traces  d'une  ancienne 
prédication  apostolique,  attribuée  à  saint  Thomas;  ils  reconnaissaient  ce  saint  dans 
Quetzalcoatl,  le  civilisateur  toltèque.  Cette  explication  ne  peut  plus  être  prise  au  sé- 
rieux aujourd'hui. 

M.  Delisle,  au  nom  de  M.  le  baron  De  Witte,  communique  une  lettre  écrite  de 
Naples  par  M.  François  Lenormant,  qui  vient  de  terminer  son  voyage  archéologique 
dans  la  Calabre  et  la  Basilicate.  Les  résultats  de  ce  voyage,  qui  ont  déjà  en  partie 
été  annoncés  à  une  séance  précédente,  ont  dépassé  les  espérances  de  l'explorateur. 
Depuis  l'époque  de  sa  dernière  lettre,  M.  Lenormant  a  visité  la  via  Aquilia  dans 
toute  sa  longueur.  11  a  reconnu  que  le  ponte  di  Silla,  qui  passe  pour  romain,  est  une 
construction  ogivale,  de  l'époque  des  derniers  Normands  et  des  Hohenstaufen.  Il  a 
découvert  les  ruines  de  Consilinum,  absolument  inconnues  jusqu'ici.  Il  a  examiné 
celles  de  Velia,  «  les  plus  importantes,  dit-il,  et  les  mieux  conservées  de  l'Italie  mé- 
«  ridionale,  avec  celles  de  Guathia  et  après  celles  de  Poestum.  »  On  peut  encore  y 
suivre  le  tracé  des  rues  et  des  places.  M.  La  Cava  est  parti  pour  en  dresser  le  plan. 
M.  Lenormant  rapporte,  en  outre,  des  copies  d'inscriptions  inédites  ou  mal  connues, 
des  antiquités  diverses,  des  spécimens  des  matériaux  de  construction  particuliers  à 
telle  ou  telle  région,  etc. 

M.  de  Vogué  rend  compte,  en  quelques  mots,  des  premiers  résultats  de  l'examen 
de  l'inscription  trouvée  à  Palmyre  par  le  prince  S.-Abamelek.  Lazarew.  On  se  rap- 
pelle que  cette  inscription  est  écrite  en  deux  langues,  en  palmyrénien  (araméen)  et 
en  grec,  et  que  ie  texte  grec  a  déjà  été  étudié  par  M.  Waddington,  qui  y  a  reconnu 
un  règlement  sur  la  perception  d'un  droit  de  douane  municipale  ou  d'octroi.  Les 
deux  textes  sont,  l'un  et  l'autre,  fortement  endommagés.  La  partie  la  mieux  con- 
servée du  texte  araméen  se  trouve  correspondre  exactement  avec  la  partie  la  mieux 
conservée  du  texte  grec,  en  sorte  que  ce  qu'on  a  pu  déchiffrer  jusqu'ici  dans  la  ver- 
sion araméenne  n'ajoute  rien  à  ce  qu'on  avait  déjà  lu  dans  le  grec,  mais  permet 
seulement  de  vérifier  ou  de  corriger  les  détails  de  la  lecture.  M.  de  Vogué  commu- 
nique un  essai  de  traduction  ou  plutôt  de  mot-à-mot  du  commencement  du  texte 
araméen.  Il  ne  présente  cet  essai  que  comme  tout  à  fait  provisoire;  il  espère  pouvoir 
bientôt  le  compléter  et  le  mettre  plus  au  net.  Le  document  entier  est  intitulé  :  «  Décret 
du  sénat  du  8  de  nisan  de  l'année  448  (—  1 35  de  notre  ère),  sous  la  présidence  de 
Bonna,  fils  de  Bonna,  fils  de  Hairan,  étant  secrétaire  Alexandre,  fils  d'Alexandre, 
fils  de  Philopalor,  secrétaire  du  sénat  et  du  peuple,  et  sous  l'archontat  de  Malkou, 
fils  d'Olaii,  fils  de  Moqimou,  et  de  Zebeida,  fils  de  Nesa  ».  On  lit  ensuite  que  le  sé- 
nat, «  assemblé  conformément  à  la  loi  »,  a  pris  en  considération  les  disputes  fré- 
quentes qui  se  produisaient  entre  les  marchands  et  les  fermiers  des  douanes,  en  rai- 
son de  l'incertitude  des  tarifs.  Les  droits  à  payer  pour  chaque  article  avaient  été 
autrefois  fixés  par  une  loi,  mais  cette  loi  était  incomplète,  et  beaucoup  de  marchan- 
dises n'y  étaient  pas  prévues.  Pour  celles-ci,  la  «  coutume  »  avait  établi  une  sorte  de 
tarif  complémentaire,  et  l'on  inscrivait  le  chiffre  des  droits  à  percevoir  dans  les  baux 
qu'on  passait  avec  les  fermiers  des  douanes;  mais  cette  fixation  n'avait  pas  un  carac- 
tère légal,  et  l'autorité  n'en  était  pas  toujours  admise  sans  conteste.  C'est  pourquoi 
«  il  a  paru  bon  au  sénat,  aux   archontes  présents  et  aux  décemvirs  »  de  faire  rédi- 


promulgué  devait  faire  seul  foi  a  1  avenir,  et  le  décret  porte 
fense  expresse  à  toute  personne  de  percevoir  d'autres   droits  que  ceux  qui  y  sont 
inscrits. 

Ouvrages  présentés,  de  ia  part  des  auteurs  ou  éditeurs  :  —  par  M.  Delisle  : 
i°  Souvenirs  de  la  Flandre  wallonne,  collection  complète  de  cette  publication  depuis 
l'origine;  20  Baschet  (Armand),  Les  comédiens  italiens  à  la  cour  de  France  sous 
Charles  IX,  Henri  III,  Henri  IV  et  Louis  XIII;  —  par  M.  Gaston  Paris  :  le  Li- 
vre de  l  Epervier,  cartulaire  de  la  commune,  de  Millau  (Aveyrotï,  suivi  d'autres  do- 
cuments relatifs  au  Rouergue,  publié  par  Constans  (publication  de  la  Société  pour 
l'étude  des  langues  romanes).  Julien  Havet. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 
Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  23 


REVUE    CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

N°  47  -    20  Novembre  —  1882 


Sommaire  *  235.  La  Chronique  de  Joshué  le  Stylite,  p.  p.  Wright.  —  236. 
Evers,  Les  sources  de  Diodore.—  237.  Lossen,  La  guerre  de  Cologne,  i565-i58i  . 
—  238.  Beauvois,  Claude  Bouton,  seigneur  de  Corberon. —  239.  Chantelauze, 
Saint- Vincent  de  Paul  et  les  Gondi.  —  240.  Sanders,  Dictionnaire  complémen- 
taire de  la  langue  allemande.  —  Chronique.  —  Académie  des  Inscriptions.  —  So- 
ciété des  antiquaires  de  France. 


235.  —  Xlie  Chi-onicle  of  Josliua  the  stylite,  composed  in  syriac  A.  D.  5o7, 
\rith  a  translation  into  english  by  W.  Wright,  LL.  D.,  professor  of  arabic  in  the 
University  of  Cambridge.  Cambridge,  1882,  in-8°,  préface  i~x,  trad.  et  index  1-84 
p.,  texte  syr.  1-92  p. 

La  Chronique  de  Josué  le  Stylite  a  eu  certainement  autrefois  son 
heure  de  fortune  :  elle  a  été  mise  à  contribution  par  l'auteur  de  la  chro- 
nique d'Edesse  '  et  elle  a  été  insérée  tout  entière  dans  la  grande  chroni- 
que de  Denys  de  Telmahrê,  grâce  à  laquelle  elle  est  parvenue  jusqu'à 
nous  dans  un  manuscrit  unique  du  Vatican.  Elle  emprunte  un  intérêt 
particulier  aux  événements  qui  signalèrent  la  courte  période  des  douze 
années  qu'elle  embrasse,  495-506  de  J.-C,  mais  elle  se  recommande 
surtout  à  l'attention  des  historiens  par  l'exactitude  de  ses  récits,  Fau- 
teur ayant  été  témoin  des  divers  épisodes  qui  signalèrent  la  guerre  des 
Romains  et  des  Perses  à  cette  époque,  et  des  fléaux  de  toute  sorte  qui  dé- 
solèrent la  Mésopotamie,  avant  et  pendant  la  guerre. 

L'analyse  détaillée  que  Joseph  Assemani  fit  de  cette  chronique  dans 
le  premier  volume  de  sa  Bibliotheca  orientalis  la  tira  de  l'oubli  des 
temps  et  fit  ressortir  son  importance.  Ce  n'est  cependant  qu'en  1876 
qu'une  édition  complète  du  texte  syriaque  accompagné  d'une  traduc- 
tion française,  fut  publiée  par  M .  l'abbé  Martin  dans  le  VI'  volume 
des  Abhandlungen  de  la  Société  orientale  allemande.  Cette  publication 
trouva  un  accueil  bienveillant  auprès  des  orientalistes  ;  M,  le  professeur 
Nœldeke  lui  consacra  une  étude  critique  dans  le  Journal  oriental  al- 
lemand, vol.  XXX,  p.  35  r  et  suivantes.  En  dehors  de  sa  valeur  comme 
document  historique,  elle  se  révélait  encore  comme  un  des  rares  livres 
syriaques  marqués  d'un  cachet  original.  Elle  se  distingue,  en  effet,  des 

1.  Comp.  les  passages  relatifs  aux  années  810-814  de  l'ère  macédonienne  dans  As- 
semani, B.  O.  I.  p.  406-407,  avec  les  chapitres  33,  34,  .'-'7,  38,  47,  5o,  53  et  69  de 
la  présente  édition  de  Josué  le  Stylite.  Le  phénomène  céleste  arrivé  au  mois  de  Kâ- 
noun  II  de  l'an  811,  d'après  le  chapitre  37,  est  rapporté  par  inadvertance  à  l'année 
810  dans  la  chronique  d'Edesse. 

Nouvelle  série,  XIV.  -i 


402  REVUE   CRITIQUE 

textes  traduits   du  grec  et  des  compositions  religieuses;  de  plus,  elle 
échappe  par  sa  date  à  toute  suspicion  d'influence  arabe.  Malgré  ses  nom- 
breuses incorrections,  elle  offrait  un  nouveau  champ  pour  l'étude  de  la 
langue  syriaque.   Ces  incorrections,  signalées  en  partie  par  M.  l'abbé 
Martin,  apparaissaient  au  premier  abord,  soit  comme  des  singularités 
d'un  style  peu  châtié  ou  d'une  orthographe  négligée,  soit  comme  des  fau- 
tes de  copiste  imputables  à  l'auteur   du  manuscrit.   Il  appartenait  à 
M.  W.  de  soupçonner  que  la  plupart  d'entre  elles  étaient  étrangères  au 
manuscrit  et  qu'elles  provenaient  des  difficultés  de  lecture  que  présente 
ce  dernier,  un  palimpseste  pour  la  majeure  partie.  C'est  dans  cette  pen- 
sée qu'il  pria  M.  le  professeur  Ignazio  Guidi  de  Rome  de  collationner 
le  texte  imprimé  sur  l'original.   Les  résultats  ont  dû  dépasser  son  at- 
tente; il  n'est  guère  de  page,  où  une  ou  plusieurs  leçons  fautives  ne 
soient  corrigées,  où  un  mot  omis  ne  soit  rétabli  à  sa  place;  des  lignes  en- 
tières même  avaient  été  sautées,  comme  dans  les  passages  suivants  : 
p.  25,  1.  3,  p.  5o,  1.  2,  p.  89,  1.  9,  qui  restituent  :  l'un,  deux  lignes;  le 
second,  une  ligne  ;   et  le  dernier,  trois  lignes.   Rendons  hommage  à  la 
bienveillante  intention  de  M.  W.  qui  s'est  abstenu  de  relever  ces  défauts 
de  la  première  édition.  Dans  ces  conditions,  au  lieu  d'une  liste  d'errata, 
il  devenait  plus  pratique  de  faire  une  seconde  édition  du  livre  ;  ce  pro- 
cédé avait  encore  l'avantage  de  laisser  toute  latitude  au  critique  pour 
expliquer  par  une  nouvelle  traduction  et  dans  des  notes  les  passages  qui 
prêtaient  à  une  autre  interprétation. 

Quoique  la  collation  de  M.  Guidi  ait  confirmé  la  plupart  des  conjec- 
tures proposées  par  divers  savants  et  notamment  par  M.  Nœldeke  dans 
l'étude  mentionnée  ci-dessus,  il  reste  encore  quelques  leçons  douteuses 
appartenant  réellement  au  manuscrit  :  telle  est  celle  de  la  page  22,  1.  i5, 
qui,  selon  M.  Nœldeke,  devrait  être  lue  :  bc  schouqê  *élâyê  «  dans  les 
marchés  supérieurs.  »  M.  W.,  tout  en  acceptant  cette  interprétation,  re- 
marque qu'il  serait  conforme  au  texte  de  lire  :  b°  schouq  «allât^â  «  dans 
le  marché  aux  grains  »,  mais  il  ne  s'arrête  pas  à  cette  hypothèse  ,  calldthd 
a  partout,  en  effet,  dans  Josué  le  Stylite  le  sens  de  récoltes  et  non  de 
grains,  et  il  est  toujours  écrit  avec  deux  lâmad.  On  pourrait  plutôt  lire  : 
ba  schouq  cldthd  «  dans  la  place  de  l'Autel  »,  c'est-à-dire,  dans  la  place 
située  au  milieu  d'Edesse  et  ou  se  trouvait  le  grand  autel  consacré  aux 
idoles  de  la  ville,  v.  The  doctrine  of  Addai  the  apostle,  pp.  26  et  34  du 
texte  syriaque  et  pp.  26  et  32  de. la  traduction.  Alors  même  que  cet  autel 
n'eût  plus  existé  au  temps  de  Josué,  la  place  où  il  s'élevait  aurait  pu  en 
garder  le  souvenir. 

Les  nuances  qui  distinguent  le  parfait  du  participe  soit  seul,  soit  com- 
posé avec  (h)wâ,  sont  bien  faibles  dans  Josué,  quand  l'action  peut-être 
envisagée  en  même  temps  comme  un  fait  accompli  et  comme  un  état. 
Que  l'on  compare,  par  exemple,  mèn  dafrah  «  après  avoir  volé,  »  33^  7, 
avec  mèn  dampîs  «  après  avoir  sollicité,  »  76,  22  ;  voy.  aussi  :  sdcrdn 
(h)wai,  72,  17,  ydqdin  (h)wauzi  dâckâ  (h)jpât\  j5,  1  et  2,  mpîs  {h)wd, 


d'histoire  et  de  littérature  403 

76,  ao.  Est-il  alors  bien  nécessaire  de  chercher  des  parfaits  dans  des 
passages  analogues,  en  supposant  des  formes  de  la  3e  pers.  fém.  plur. 
terminées  par  le  suffixe  emdont  le  youd  aurait  été  laissé  de  côté?  Ainsi 
M.  W.  ponctue  dafqacèn,  p.  2S,  note  5,  jxfacbadhèn,p.  35,  note  7,  dmî- 
thèn,  p.  37,  note  2.  Si  dmithen  a  pour  lui  l'analogie  du  masc.  dmïtXy  qui 
se  rencontre  quatre  lignes  plus  bas,  le  participe  fém.  dmtthân  se  justifie 
par  des  exemples  du  participe  masc.  dmîtHn,  70,  6  et  73,  6. 

La  conjecture yârourê  «  chacals  »,  p.  37,  note  1,  ne  vaut  pas  celle 
de  schardoudê  «  squelettes  »,  proposée  par  M.  l'abbé  Martin;  comme 
terme  de  comparaison  pour  des  corps  amaigris  par  la  faim,  cette  der- 
nière expression  est  assurément  typique  —  Kadh  mfarschïân,  3j,  16, 
est  mieux  traduit  par  «  tout  nus  »  dans  l'édition  de  M.  l'abbé  Martin, 
que  par  «  exposed  »  dans  celle  de  M.  W. —  p.  66,  1 2,pdthourê  dbboitrkthâ 
«  des  tables  du  pain  d'autel  »  donnerait  un  sens  acceptable,  comp.  B. 
O.  III,  I,  248  b,  lig.  6,  où  il  s'agit  des  tables  sur  lesquelles  on  préparait 
le  pain  azyme  pour  le  sacrifice  de  la  messe. 

Il  existe  un  certain  nombre  de  cas,  où  un  waw  final  est  ajouté  au  ra- 
dical verbal  delà  3e  pers.  masc.  sing.  du  parfait,  M.  l'abbé  Martin,  conser- 
servant  cette  écriture,  l'explique  par  la  particule  intensive  (h)ou  con- 
tractée avec  le  verbe.  M.  Wright,  au  contraire,  regarde  ce  waw  comme 
oisif  et  le  fait  disparaître  du  texte,  tout  en  donnant  en  note  la  leçon 
du  manuscrit.  M.  l'abbé  Martin  a  cependant  raison,  il  y  a  là  un 
fait  grammatical  qui  ne  doit  pas  être  supprimé;  le  point  inférieur  dont 
ce  waw  est  quelquefois  marqué,  indique  qu'il  était  articulé.  En  dehors 
de  Josué  le  Stylile,  on  en  trouve  des  exemples  dans  des  auteurs  anciens  h. 

La  locution  bâfarsdnâ  «  en  délibération  »  se  trouve  pp.  88,  i5  et  21, 
comp.  aussi  Julianos  der  Abtruennige  146,  26;  194,  24;  ig5,  5  ;  211, 
12.  Il  semble  donc  que  la  ligne  10  de  la  p.  76,  devrait  être  traduite  : 
«  excepté  le  duc  Nonnosus  qui  n'était  pas  avec  eux  à  la  délibération.  » 

Par  les  soins  consciencieux  et  éclairés  que  le  célèbre  professeur  de 
Cambridge  a  apportés  à  cette  nouvelle  édition,  la  Chronique  de  Josué  le 
Stylite  devient  désormais  un  livre  classique  pour  l'étude  du  syriaque.  Le 
plan  d'Edesse  et  la  carte  du  théâtre  de  la  guerre  qui  terminent  le  volume, 
forment  deux  appendices  utiles,  surtout  le  plan  d'Edesse  que  l'on  ne 
trouve  que  dans  des  ouvrages  spéciaux. 

Rubens  Duval. 


1.  Aux  citations  données  dans  notre  Traité  de  grammaire  syriaque,  p.  288,  §  298 
d,  et  p.  290,  note  1,  ajout.  Spicileg.  syr.,  11,  t,  et  Julianos  der  Abtruennige,  j5, 
i3  ;  i3o,  10  ;  146,  7;  187,  1;  218,  6;  225,  23.  Tuliberg  a  également  supprimé  ce 
waw  dans  son  édition  de  la  première  partie  de  la  Chronique  de  Denys. 


4<H  REVUE   CRITIQUB 

236.— E.  Evers,  Ein  Beitrag  znr  Untereuchung   der    Qnellenbenutzting 

bel  oiodop.  (Festschrift  zu  dem  5o  jashrigen  Jubilaeum  der  Kœnigstœdtischen 
Realschule  zu  Berlin,  tirage  à  part),  1882,  Berlin,  Winckelmann  et  fils,  in-8  de 
52  p. 

L'étude  des  sources  de  Diodore  donne,  chaque  année,  naissance  en 
Allemagne  à  près  d'une  demi-douzaine  de  dissertations.  On  peut  les 
classer  en  deux  groupes  :  les  uns  veulent  prouver  que,  dans  chacune  des 
grandes  divisions  dont  se  compose  sa  Bibliothèque,  Diodore  n'a  jamais 
consulté  qu'un  seul  auteur  ;  s'il  lui  arrive  de  citer  d'autres  ouvrages  que 
celui  de  sa  source  unique,  c'est  qu'il  les  a  connus  indirectement,  et  par  le 
moyen  de  cette  dernière.  Les  autres  prétendent,  au  contraire,  que  Diodore 
a  utilisé  plusieurs  écrits  à  la  fois,  tantôt  fondant  deux  récits  en  un  seul, 
tantôt  les  reproduisant  l'un  à  côté  de  l'autre;  souvent  enfin,  il  a  ajouté  à 
ses  sources  ce  que  lui  avaient  appris  ses  voyages.  Ces  derniers  font  une 
œuvre  de  «  démolition  »  ;  les  autres  cherchent  à  «  reconstruire  •  »  l'ou- 
vrage perdu  dont  les  livres  de  Diodore  nous  présentent  une  sorte  d'image. 
Grâce  aux  recherches  de  MM.  Volquardsen  2  et  Collmann  3,  la  théorie 
de  1'  «  unité  de  source  »  était  à  peu  près  partout  acceptée.  Depuis  quatre 
ans,  une  réaction  violente  s'est  produite  contre  elle  :  elle  a  subi  de  vio- 
lentes attaques,  auxquelles  ses  défenseurs  ont  faiblement  répondu. 

M.  Evers,  —  qui  s'attache  aux  premiers  livres  de  Diodore,  —  est  un 
adversaire  décidé  de  MM.  Volquardsen  et  Collmann.  Il  faut  croire  Dio- 
dore, dit-il,  lorsqu'il  affirme  avoir  passé  trente  années  de  sa  vie  à  réunir 
les  matériaux  de  son  ouvrage  et  à  le  composer;  nous  n'avons  aucun 
motif  de  l'accuser  de  mensonge  :  tout,  dans  le  détail  comme  dans  l'en- 
semble, révèle  la  pluralité  des  sources.  Cela  est  très  juste  et  ne  saurait 
être  trop  répété.  Mais,  quand  M.  E.  prétend  retrouver  les  emprunts  que 
Diodore  a  faits  à  Posidonius  ou  à  Evhémère,  dont  il  ne  nous  reste  à  peu 
près  rien,  nous  ne  le  suivrons  pas  dans  ce  travail  dedéchiquetage,  travail 
inutile  puisqu'il  ne  présente  aucune  garantie  sérieuse.  M.  Bauer  4  avait 
réuni  un  certain  nombre  de  passages  de  Diodore  où  il  semblait  s'être  servi 
d'Hérodote.  M.  E.  a  tenu  à  compléter  cette  liste.  A  quoi  bon?  Les  textes 
cités  par  M.  Bauer  sont  fort  peu  concluants;  ceux  qu'ajoute  M.  E.  ne 
le  sont  pas  davantage.  M.  E.  rapproche  l'une  de  l'autre,  par  exemple, 
les  descriptions  que  font  Diodore  et  Hérodote  de  la  pyramide  de  Chéops. 

1.  Les  deux  mots  sont  de  M.  Mommsen,  Rœmische  Forschungen,  II,  p.  289.  Lui- 
même  offre  un  modèle  de  restauration  ingénieuse  et  brillante  en  s'efforçant  de  re- 
trouver dans  les  récits  de  Diodore  l'ouvrage  de  Q.  Fabius  Pictor,  Fabius  und  Diodor, 
{Hermès,  V  et  XIII),  Die  gallische  Katastrophe  (Hermès,  XIII),  articles  réimprimés, 
avec  additions  importantes,  dans  le  2°  volume  des  Rœmische  Forschungen,    1879. 

2.  Untersuchungen  ùber  die  Queîlen  der  griech.  und  sicil.  Geschichte  bei  Diodor. 
Kiel,  1868. 

3.  De  Diodori  Siculi fontibus  .-Leipzig,  i86q. 

4.  Die  Benut^ung  Herodots  durch  Ephorus  bei  Diodor,  Jahrbùcher  de  Fleckeisen, 
Supplementband,  X,  p.  281,  sqq.  La  théorie  de  M.  Bauer  est  que  le  récit  historique 
d'Hérodote  n'a  été  directement  consulté  par  Diodore  que  dans  quelques  passages. 


d'histoire  et  de  littérature  4©5 

Il  cite,  entre  autres,  ce  détail  que  donne  Diodore  :  «  On  grava  sur  la 
pyramide  le  montant  des  sommes  dépensées  pour  fournir  aux  ouvriers 
des  légumes  et  des  raiforts,  et  l'inscription  indique  que  l'on  a  dépensé 
plus  de  seize  cents  talents.  »  Ce  renseignement  n'a  pu,  dit  M.  E.,  être 
emprunté  qu'à  Hérodote  :  «  On  grava  sur  la  pyramide,  en  caractères 
égyptiens,  combien  on  a  dépensé  en  raiforts,  en  oignons  et  en  aulx  à  l'u- 
sage des  ouvriers-,  et  celui  qui  m'interpréta  cette  inscription  m'a  dit, 
autant  que  je  m'en  souviens,  que  cette  dépense  se  montait  à  seize  cents 
talents  d'argent l.  »  Mais  Diodore  n'est-il  pas  allé  lui-même  en  Egypte, 
n'a-t-il  pas  vu  la  pyramide,  un  guide  ne  lui  aura-t-il  pas  traduit  Tins 
cription?  Peut-on  admettre,  d'ailleurs,  que  les  voyages  des  Grecs  en 
Egypte  étaient  si  rares  que  Diodore  n'ait  pu  consulter  d'autre  relation 
que  celle  d'Hérodote?  De  tous  les  rapprochements  auxquels  se  livrent 
MM.  Bauer  et  Evers,  il  résulte  seulement  qu'il  y  a  des  ressemblances 
entre  Hérodote  et  Diodore  ;  il  y  a  aussi  des  différences  :  il  se  peut  que 
Diodore  ait  consulté  Hérodote;  il  est  très  possible  qu'il  y  ait  entre  eux 
un  ou  plusieurs  intermédiaires.  Conclure  de  ces  ressemblances  qu'Héro- 
dote est  l'autorité  de  Diodore,  et  de  ces  différences  que  Diodore  a  tra- 
vaillé avec  indépendance  sur  les  auteurs  qu'il  a  consultés,  c'est  construire 
une  conjecture  sur  une  hypothèse.  Il  y  a  du  danger  à  vouloir  prouver 
coûte  que  coûte.  Il  fallait  se  borner  à  mettre  en  relief  le  travail  acharné 
et  l'étendue  des  connaissances  de  Diodore  ;  il  fallait  aussi  insister  sur  ses 
frivolités  et  ses'  négligences.  Le  seul  rôle  qui  convienne  à  l'avocat  du 
«  plus  pitoyable  des  scribes2  »,  c'est  de  plaider  les  circonstances  atté- 
nuantes, et  elles  ne  manquent  pas. 

Camille  Jullian. 


237.  —  Der  Koelnlsche  Krieg  von  Max  Losson.  Erslci-  Band  1  Vorge- 
•chlchte  (1K68- 1881).  Gotha,  Perthes,  1882,  xvi,  780  p.  8°.  Prix  :  ib  fr.  75. 

Tandis  que  la  réforme  allemande  a  trouvé  de  nombreux  historiens, 
qui  nous  ont  raconté  son  développement  politique  et  religieux,  jusqu'à 
la  paix  d'Augsbourg;  tandis  que  la  guerre  de  Trente-Ans  a  rencontré 
plus  de  narrateurs  encore  et  voit  leur  nombre  s'accroître  de  jour  en  jour, 

1.  Diodore,  1,  64,  3.  Hérodote,  2,  ii5. 

'EiriYéYpaTTTai  Se xb  x)^-  2eaY][j.avxac  Se  Ypajj^âxwv  Atyimfov 

6oç  xo>v  àvaXwOévxwv  xp^àxwv  Wç  elq  èv  rfl  w>pa[j.i5t  oca  eç  xe  cupjjiafyv  xal 
Xa^ava  /.ai  aup^ai'av  xoTç  èpYaxaiç  y,at  %p6\).\uxx.  xx\  axépoOa  àvat<jt[J.u)ÔY]  xoT<n 
txïjvuexai  Sià  xîfe  Ypaap^ç  xaXavxa  SeSa-  èpYaÇouivoisi  •  xat  wç  è[j.è  eu  y.eprç- 
::avr,c6ai  TvXeiw  twv  yj."kiw  xat  è£axo-  aOat  xà  ô  éppjveùç  \>.oi  èmX6^é(j£V0Ç  xà 
^wv-  Ypâ^axa  içy)  è^axoata  xat  xCkiat.  xa- 

Xavxa  àpYupiou  xexeXéaGxt. 

2.  Mommsen,  Rœmische  Chronologie,  2*  éd.,  p.  125. 


4©6  REVUE    CRITIQUE 

la  période  intermédiaire,  qui  va  de  1 555  à  1 568,  n'a  été  traitée  jusqu'ici 
que  d'une  façon  passablement  dédaigneuse  par  les  érudits  allemands  en 
quête  de  sujets. 

Il  n'y  a  point  lieu  de  s'en  étonner  outre  mesure.  Comme  toutes 
les  époques  de  transition,  c'est  une  époque  d'un  intérêt  médiocre, 
pour  qui  veut  rester  à  la  surface.  La  lutte  entre  les  deux  églises  s'y  pour- 
suit d'une  façon  continue,  mais  secrètement  d'abord,  pour  ainsi  dire,  et 
même  quand  les  conflits  ouverts  reprennent  après  une  vingtaine  d'années 
de  tranquillité  relative,  la  lutte  reste  sans  éclat,  les  personnalités  mar- 
quantes font  défaut  de  part  et  d'autre  et  l'attraction  de  la  grande  lutte 
trentenaire  empêche  l'historien  de  s'arrêter,  autant  qu'il  le  devrait  peut- 
être,  à  ces  stations  intermédiaires  de  l'histoire  germanique.  On  en  con- 
naît quelques  points  culminants,  la  rébellion  de  Guillaume  de  Grum- 
bach,  la  question  d'Aix-la-Chapelle,  la  lutte  dans  l'archevêché  de 
Cologne,  la  guerre  des  évêques  en  Alsace,  au  sujet  du  siège  de  Stras- 
bourg, la  question  de  la  succession  de  Juliers,  et  voilà  tout.  Et,  quand 
nous  disons  qu'on  connaît  ces  questions,  l'on  peut  dire  que  la  plupart 
ne  sont  encore  connues  que  par  à  peu  près,  et  que  les  recherches  scien- 
tifiques nécessaires  pour  approfondir  le  sujet,  sont  encore  à  faire  dans 
bien  des  cas.  Les  quatre  volumes  de  M.  Ortloff  sur  les  querelles  de 
Grumbach,  la  publication  de  M.  Ritter  sur  la  question  de  Juliers,  dans 
la  série  des  Documents  relatifs  à  la  guerre  de  Trente  Ans,  édités 
sous  les  auspices  de  l'Académie  de  Munich,  montrent  pourtant  que,  de- 
puis quelques  années  déjà,  l'attention  se  porte  sur  ces  dernières  années, 
si  longtemps  négligées,  du  xvie  et  sur  les  premières  du  xvne  siècle.  On  a 
compris  que  la  paix  de  religion  de  1 55 5  ne  fut  pas  une  paix,  au  sens 
véritable  du  mot,  mais  tout  au  plus  une  trêve,  mal  observée,  des  deux 
parts,  et  que  les  origines  de  la  grande  lutte  du  xvne  siècle  remontent 
bien  au-delà  de  la  rébellion  de  Bohême.  Il  faut  donc  s'orienter  à  neuf 
dans  ces  querelles  théologiques  souvent  obscures,  dans  ces  longues  et 
âpres  rivalités  entre  les  familles  régnantes  du  protestantisme  allemand 
qui  faciliteront  si  singulièrement  la  tâche  à  la  réaction  catholique. 
Parmi  ceux  qui  se  sont  le  plus  pénétrés  de  la  nécessité  de  ces  études,  on 
doit  compter  assurément  l'auteur  du  présent  volume.  M.  Max  Lossen 
avait  débuté  autrefois  dans  la  littérature  historique  par  une  intéressante 
étude  sur  l'occupation  de  Donauwoerth  par  la  Bavière,  en  1611,  oc- 
cupation qui  fut  l'un  des  signes  précurseurs  de  la  tempête  générale  qui 
devait  éclater  bientôt.  Depuis  de  longues  années,  le  nom  de  l'auteur  n'a- 
vait plus  été  prononcé;  nous  apprenons  aujourd'hui  pourquoi.  Voici 
dix  ans  que  M.  L.,  suivant  les  conseils  de  M.  le  .professeur  Cornélius, 
de  Munich,  son  maître,  s'était  mis  à  l'étude  de  la  guerre  de  Cologne, 
c'est-à-dire  de  la  lutte  qui  s'entama  autour  de  ce  siège  archiépiscopal, 
après  l'avènement  de  Gebhard  Truchsess  de  Waldbourg  et  après  sa  con- 
version aux  doctrines  réformées.  Cette  étude,  il  l'a  poursuivie  de  la  fa- 
çon la  plus  approfondie  ;  aujourd'hui  encore,  ce  n'est  que  l'introduction 


d'histoire  et  de  littérature  407 

(Vorgeschichte)  à  son  sujet  proprement  dit,  qu'il  nous  offre,  et  pour 
laquelle  nous  lui  devons  de  sincères  remercîments.  En  effet,  ce  conflit 
de  Cologne,  sans  être  attrayant  par  les  hommes  qu'il  nous  montre  ou  les 
événements  grandioses  qu'il  nous  ferait  connaître,  a,  dans  l'histoire  d'Al- 
lemagne, une  importance  majeure.  Le  moment  où  il  éclate  est  aussi  le 
moment  précis  où  se  pose  la  question  de  savoir  si  la  couronne  impériale 
restera  aux  Habsbourg,  ou  du  moins  au  catholicisme.  Si,  contraire- 
ment à  ce  qui  arriva,  Gebhard  de  Cologne  avait  pu  se  maintenir  sur 
son  siège,  le  collège  électoral  aurait  été  en  majorité  protestant  et  l'abro- 
gation du  réservât  ecclésiastique  aurait  bien  vite  fait  disparaître,  sous 
un  empereur  protestant,  ce  qui  restait  encore  de  principautés  ecclésias- 
tiques, non-sécularisées  dans  l'empire.  Les  rares  représentants  du  catho- 
licisme parmi  les  princes  laïques  plus  importants  de  l'Allemagne,  les 
ducs  de  Bavière  et  de  Juliers,  savaient  bien  pourquoi  ils  luttaient  avec 
tant  d'acharnement,  afin  de  faire  arriver  leurs  parents  sur  les  sièges 
épiscopaux  de  l'Allemagne  du  nord-ouest.  Si  l'exemple  de  Gebhard  avait 
trouvé  des  imitateurs,  s'il  avait  seulement  trouvé  tout  autour  de  lui 
des  indifférents  au  lieu  d'ambitieux  compétiteurs,  c'en  était  fait  du 
catholicisme  en  Allemagne,  comme  puissance  politique  s'entend.  Ce 
sont  les  prodromes  de  cette  guerre  de  Cologne,  que  M.  L.  nous  ra- 
conte dans  un  style  simple,  avec  une  grande  modération  de  pensée, 
avec  un  luxe  de  détails  inconnus,  d'après  les  documents  inédits  d'une 
quinzaine  d'archives  et  de  bibliothèques  publiques ,  dont  Munich , 
Dùsseldorf  et  Marbourg  ont  fourni  le  contingent  principal.  Dans  ce 
premier  volume,  nous  voyons  se  dérouler  devant  nous  l'histoire  de 
l'archevêché  sous  l'électeur  Salentin  d'Isenbourg,  le  prédécesseur  de  Geb- 
hard, et  les  premières  années  de  la  propre  administration  de  ce  dernier, 
c'est-à-dire  de  1577  à  1 585.  Grâce  à  son  travail,  nous  suivons  tous  les 
menus  détails  des  intrigues  infatigables  par  lesquelles  les  Wittelsbach 
de  Bavière  réussissent  à  s'implanter  dans  les  évêchés  voisins,  en  visant 
sans  cesse  à  s'élever  encore.  Nous  voyons  une  réaction  toujours  crois- 
sante se  manifester  à  la  cour  de  Vienne,  après  l'avènement  de  Rodol- 
phe II,  tandis  que  sur  les  frontières  de  l'archevêché,  la  lutte  entre  l'Es- 
pagne et  les  Pays-Bas  révoltés  sollicite  l'attention.  Le  récit  de  M.  Lossen 
s'arrête  pour  le  moment  à  l'année  1 585 .  Le  prochain  volume,  que  nous 
espérons  voir  paraître  bientôt,  nous  racontera  le  commencement  de  la 
lutte  elle-même  qui  ne  tarde  point  à  éclater.  R. 


238.  —  Un  agent  politique  de  Chardcs-Qulnt,  le  bourguignon  Claude 
Bouton,  seigneur»  de  Corberon.  Notice  sur  sa  vie  et  ses  poésies  avec  le  texte 
de  son  Miroir  des  dames  et  des  pièces  justificatives  pour  la  plupart  inédites,  par 
M.  E.  Beauvois.  Publication  de  la  Société  d'histoire,  etc.,  de  Beaune.  Paris,  Ernest 
Leroux,  1882,  1  vol.  in-18  de  16-0x011-229  p. 

M.  Beauvois  énumère  ainsi  (Introduction,  p.  1)  les  principaux  titres  et 


408  REVUE  CRITIQUE 

qualités  de  Claude  Bouton  :  il  fut  seigneur  de  Corberon  et  de  Saint- 
Beury en  Bourgogne,  de  Melin  en  Brabant  et  de  Weert  en  Flandre,  che- 
valier, capitaine  des  hallebardiers  de  Philippe  le  Beau ,  conseiller  et 
chambellan  de  Charles-Quint,  grand  écuyer,  plus  tard  premier  et  grand 
maître  d'hôtel  de  l'archiduc  Ferdinand,  roi  de  Bohême  et  de  Hongrie, 
grand  écuyer  de  la  reine  Marie  de  Hongrie,  tuteur  de  Guillaume  le  Ta- 
citurne. On  voit  que  ce  fut  un  personnage  considérable,  mais,  à  côté  de 
ses  fonctions  officielles  et  permanentes,  comme  parle  son  biographe 
(p.  3),  il  en  exerça  d'autres  qui,  pour  être  transitoires  et  confidentielles, 
n'en  avaient  que  plus  d'importance.  Initié  à  la  politique  de  Charles- 
Quint,  il  fut,  pendant  quarante  ans,  Pun  de  ses  agents  les  plus  infatiga- 
bles. Ce  fut  ce  prince  qui  (p.  3)  «  l'introduisit  sur  la  scène  de  la  haute 
politique,  en  le  chargeant  de  solliciter  en  sa  faveur  l'appui  de  Henri  VII  f 
pour  l'élection  de  l'Empire  (i  5 1 9).  Quelques  années  plus  tard,  il  l'en- 
voya en  ambassade  auprès  du  même  prince  (i52Ô)  et  deux  autres  fois 
en  France  (1 5  3 1  et  1 53g).  C'est  surtout  dans  les  affaires  spéciales  aux 
Pays-Bas  que  la  reine  Marie  l'employa  à  plusieurs  reprises  (1 533-36  et 
1542-43).  »  La  vie  de  Claude  Bouton  fut,  du  reste,  très  mouvementée. 
S'il  sut  briller  à  la  cour,  il  ne  fut  pas  déplacé  dans  les  champs  de  bataille 
et  put  même  (p.  6)  porter  à  son  actif  quelques  beaux  faits  d'armes.  In- 
trépide chevaucheur,  il  alla  cinq  fois  des  Pays-Bas  en  Espagne,  trois 
fois  dans  l'Ile-de-France,  une  fois  au  moins  en  Autriche,  sans  parler  de 
ses  voyages  moins  lointains  et  de  ses  navigations  entre  l'Espagne,  l'An- 
gleterre et  la  Belgique.  Ajoutons  que  ce  courtisan,  ce  guerrier,  ce  diplo- 
mate, mérite  aussi  notre  attention  comme  écrivain,  et  que  le  côté  moral 
de  sa  vie  surtout  est  digne  de  remarque,  car  M .  B.  a  pu  louer  en  lui 
(p.  7)  l'excellent  père  de  famille,  le  tuteur  intègre,  l'ami  dévoué,  le  ga- 
lant homme,  en  un  mot,  «  fils  de  ses  œuvres,  s'élevant  lentement  de  la 
position  la  plus  humble  à  l'une  des  plus  éminentes,  sans  intrigues  et 
sans  autre  recommandation  que  sa  bonne  conduite  et  son  travail  persé- 
vérant. » 

Malgré  tout  cela,  les  historiens  ont  toujours  négligé  Claude  Bouton. 
«  Ceux  qui  le  rencontraient  sur  leur  passage,  »  dit  (p.  3)  M.  B.,  «  l'ex- 
pédiaient en  peu  de  lignes,  se  bornant  à  citer  une  ou  deux  de  ses  qualifi- 
cations avec  quelques  dates.  »  Nul  ne  semble  s^tre  douté  de  son  impor- 
tance historique.  Son  nom,  continue  l'auteur  (p.  3),  «  ne  figure  dans 
aucun  recueil  de  biographies  ',  pas  même  dans  celle  des  Bourguignons, 
et  là  volumineuse  biographie  nationale  de  la  Belgique  le  passe  sous  si- 
lence, bien  qu'elle  parle  d'autres  hommes  marquants  nés,  comme  lui,  en 
dehors  des  Pays-Bas,  mais  y  ayant  joué  un  rôle.  Le  vieux  Palliot,  qui 
écrivait  une  centaine  d'années  après  la  mort  de  Cl.  Bouton,  était,  avant 


1.  L'assertion  est  trop  absolue  :  le  nom  du  seigneur  de  Corberon  figure  dans  le 
Dictionnaire  de  Moreri(t.  Il,  1769,  p.  ao3).  Les  auteurs  de  ce  Dictionnaire  renvoient 
à  l'Histoire  des  grands  officiers  de  la  Couronne,  par  le  P.  Anselme. 


D'HISTOIRE    ET    DE    l.l'I  'TÉRATUKE  4O9 

cet  essai,  le  seul  qui  ait  tenté  de  donner  une  notice  sur  lui  *'.  » 
Si  les  imprimés  ne  permettent  d'avoir  qu'une  idée  très  incomplète  de 
Cl.  Bouton,  les  sources  manuscrites  sont,  au  contraire,  des  plus  abon- 
dantes. Les  vastes  recherches  de  M.  B.  ont  été  surtout  fructueuses  dans 
les  Archives  départementales  du  Nord,  où  sont  conservés  les  registres  de 
la  Chambre  des  Comptes  de  Lille.  Il  a  encore  consulté  avec  grand  profit 
divers  documents  des  Archives  générales  de  Belgique,  des  archives  pri- 
vées de  la  maison  d'Orange,  à  La  Haye,  des  Archives  départementales 
de  la  Côte-d'Or,  des  Archives  nationales,  de  la  Bibliothèque  nationale, 
du  British  Muséum  2.  De  tous  ces  documents  interrogés  avec  autant  de 
patience  que  de  sagacité,  M.  B.  a  fait  jaillir  assez  de  lumière  pour  avoir 
le  droit  de  dire  (p.  8)  :  «  Il  y  a  peu  d'hommes  de  l'entourage  de  Charles- 
Quint,  même  parmi  les  plus  importants,  dont  la  biographie  nous  soit 
aussi  bien  connue  jusque  dans  les  détails  de  la  vie  privée.  » 

Je  ne  suivrai  pas  le  zélé  biographe  dans  les  divers  chapitres  où  il  s'é- 
tend sur  l'origine  et  les  débuts  de  Cl.  Bouton,  sur  ses  premières  missions 
en  Angleterre  et  sur  son  séjour  en  Allemagne,  sur  sa  défense  du  Luxem- 
bourg et  sur  ses  nouvelles  missions  en  Angleterre,  sur  ses  missions  en 
France  et  dans  les  Pays-Bas,  sur  ses  missions  en  Frise  et  en  Lorraine, 
sur  ses  derniers  actes  politiques,  sur  son  mariage  et  sur  ses  enfants,  sur 
ses  biens  patrimoniaux,  sur  son  testament,  son  décès  et  sa  sépulture,  en- 
fin sur  son  Miroir  des  dames  et  sur  son  An  des  sept  dames.  J'indiquerai 
seulement  quelques-uns  des  renseignements  rectificatifs  que  l'on  trouve 
dans  une  notice  faite,  comme  le  déclare  Fauteur  (p.  16),  con  amore,  mais 
sine  studio  :  L'éminent  historien  de  Charles  Quint,  M.  Henné,  a  cru 
sans  preuve  que  Cl.  Bouton  fut  capitaine  des  5o  archers  de  la  garde  de 
l'archiduc  Charles  (p.  xvm)  3.  -~  L'ambassadeur  de  Venise,  Seb.  Giusti- 
niani,  a  confondu  Cl.  Bouton  avec  le  comte  Barthélémy  Tatiano,  et  sa 
méprise  a  été  reproduite  par  M.  R.  Brown  (p.  xxxvi).  —  J.  S.  Brewer, 
le  savant  éditeur  des  Letters  andpapers,  a  commis  une  erreur  en  signa- 
lant la  présence  en  Angleterre,  au  7  mai  1 5 1 9,  de  Cl.  Bouton  qui  était 


1.  Histoire  généalogique  des  comtes  de  Chamilly,  i67i,in-f°.  M.  B.  dit  (p.  9)  : 
«  Le  généalogiste  des  Bouton  a  totalement  ignoré  les  ambassades  de  Claude,  ses  ex- 
ploits militaires  et  son  Miroir  des  dames.  Sa  notice  sur  celui  que  les  Belges  appe- 
laient communément  le  seigneur  de  Corbaron,  notice  dont  nous  ne  voudrions  pour- 
tant pas  médire,  parce  qu'elle  nous  a  guidé  dans  nos  investigations,  est  plutôt  remplie 
de  phrases  que  de  faits.  » 

2.  M.  B.  dit  (p.  11)  que  «  cet  admirable  établissement,  que  toutes  les  nations 
peuvent  envier  à  l'Angleterre,  »  lui  «  a  offert  des  facilités  particulières  pour  vérifier 
dans  les  imprimés  une  multitude  de  faits  et  de  dates,  »  Parmi  les  érudits  qui  ont 
prêté  leur  concours  à  M.  B.,  je  citerai  feu  M.  Charles  Paillard,  de  Maroilles,  dont 
j'ai  souvent  eu  l'occasion  de  louer  ici  les  excellents  travaux.  M.  B.  rend  hommage 
(p.  12)  à  l'habileté  du  paléographe,  comme  à  la  générosité  des  sentiments  de 
l'homme. 

3.  Cf.  p.  lxxix  pour  quelques  anachronismes  de  la  belle  Histoire  de  Charles- 
Quint. 


4'0  KlïVUK    CRITlQUh. 

alors  à  Malines  (p.  xxxvm)  '.  —  F.  B.  von  Bucholtz,  en  son  Histoire 
du  règne  de  Ferdinand  7or,  a  transformé  le  nom  du  diplomate  bourgui- 
gnon en  celui  de  Claudius  de  Guttan  (p.  xliv).  —  Tout  un  passage  de  la 
Chronique  du  bourgeois  de  Valenciennes,  Robert  Macquereau  (liv.  VII, 
ch.  xvi),  est  ainsi  refait  (p.  lvi)  :  «  D'abord  Cl.  Bouton  ne  demeura  pas 
longtemps  à  Londres  puisque,  arrivé  Je  14  novembre,  il  annonçait,  dès 
le  19  du  même  mois,  son  départ  pour  le  lendemain;  il  partit,  en  effet, 
le  20  ;  il  n'allait  pas  en  Espagne,  mais  bien  dans  les  Pays-Bas,  et  il  se 
borna  à  écrire  à  Charles-Quint  deux  lettres  dont  l'une,  celle  du  19  no- 
vembre, nous  est  parvenue  ;  au  lieu  de  les  expédier  lui-même,  il  les 
laissa  à  son  collègue,  George  de  Themiseke,  prévôt  de  Cassel,  qui  les 
mit  sous  enveloppe  et  les  adressa  à  Wolsey,  le  priant  de  les  faire  venir  à 
destination  par  l'évêque  d'Ascoli  et  de  Worcester,  Jérôme  de  Ghinucci, 
auditeur  de  la  chambre  apostolique,  qui  allait  en  Espagne  comme  en- 
voyé d'Henri  VIII  2  »  —  Les  historiens  ne  sont  pas  d'accord  sur  le  jour 
où,  en  juillet  1544,  René  de  Nassau,  prince  d'Orange,  mourut  des  sui- 
tes d'une  blessure  reçue  au  siège  de  Saint-Dizier.  Martin  du  Bellay  et 
Gollut  ne  précisent  pas;  Wagenaar  place  le  décès  sous  le  18  juillet; 
M.  Henné  au  21  du  même  mois.  La  vraie  date  (i5  juillet)  est  fournie 
par  le  certificat  du  secrétaire  Bave,  mentionné  dans  un  document  d'un 
registre  de  la  Chambre  des  Comptes  (p.  xcv)  \  —  Les  éditeurs  des  State 
Papers  (Henri  VIII,  t.  IX,  pp.  268-9)  ont  eu  tort  d'identifier,  au  sujet 
des  négociations  entre  les  commissaires  anglais  et  français  pour  la  dé- 
limitation du  Boulonnais,  en  1546,  le  sieur  de  Courtbaron  et  d'Hon- 
vaulx  avec  Cl.  Bouton  (p.  cvn).  —  Mentionnons  encore  le  redressement 
d'une  erreur  de  Palliot  touchant  l'origine  de  la  devise  de  Cl.  Bouton  : 
Souvenir  tue  (p.  cxvi),  d'une  autre  erreur  du  même  attribuant  à  Phi- 
lippe II  des  lettres  de  légitimation  d'un  bâtard   de  Bouton  délivrées 
par  François  Ier  (p.  cxviii),  etc. 

Il  y  aurait  à  indiquer,  dans  le  livre  de  M.  B.,  bon  nombre  de  rensei- 
gnements curieux.  En  voici  quelques-uns  qui  intéressent  surtout  les 
amateurs  de  tableaux  (p.  lxxvi)  :  «  Ce  portrait  [le  portrait  de  Bouton  à 
lui  demandé  par  la  reine-régente  Marie  pour  la  célèbre  galerie  de  Mali- 
nes] fut  exécuté  avant  le  12  septembre  1 536,  avec  ceux  de  l'empereur  et 

1.  En  revanche,  M.  B.  approuve  (p.  lxii)  l'argumentation  par  laquelle  cet  éditeur 
cherche  à  établir,  contre  le  sentiment  de  la  plupart  des  historiens  anglais  et  français, 
que  ce  ne  fut  pas  Anne  Boleyn,  mais  sa  sœur  Marie,  qui  accompagna  en  France, 
comme  dame  d'honneur,  la  dernière  femme  de  Louis  XII,  Marie  d'Angleterre. 

2.  Sur  une  autre  erreur  de  R.  Macquereau,  voir  p.  cxxix. 

3.  C'est  là,  ajoute  M.  B.,  un  exemple  de  l'importance  des  comptes  pour  la  fixation 
des  dates.  Il  avait  déjà  dit  {Introduction,  p.  14)  :  «  Ce  sont  des  sources  de  premier 
ordre  pour  la  fixation  des  dates,  des  itinéraires  des  souverains  et  du  rôle  de  leurs 
agents  politiques,  sans  parler  des  autres  ;  on  doit  les  prendre  pour  base  de  toute 
chronologie  précise  et  détaillée,  et  la  présente  monographie  n'éût-elle  d'autre  résul- 
tat que  d'appeler  l'attention  des  historiens  sur  ces  trésors  en  grande  partie  négligés, 
que  nous  ne  regretterions  pas  le  temps  et  les  sacrifices  qu'elle  nous  a  coûtés.  » 


d'histoihk  kt  dk  littératurk  41  ! 

de  deux  de  ses  sœurs,  les  reines  Marie  de  Hongrie  et  Eléonore  de  France, 
le  tout  pour  huit  livres.  Il  ne  faut  pas  être  étonné  de  la  modicité  du 
prix  :  le  tableau  du  couronnement  de  Charles-Quint  par  Grégoire  Vel- 
lemans  ne  fut  payé  que  deux  livres;  le  célèbre  Bernard  d'Orley  faisait  des 
tableaux  au  prix  courant  de  quinze  à  trente  livres,  et  même  des  portraits  en 
pied  de  grandeur  naturelle  pour  vingt-cinq  livres  '.  »  Citons  cette  parti- 
cularité touchant  la  naissance  du  premier  des  enfants  de  Cl.  Bouton  et 
de  Jacqueline  de  Lannoy  (p.  exi)  :  «  Dans  son  neuvième  Compte,  pour 
1 5 1 5 ,  le  receveur  général  Jean  Micault  déclare  avoir  dépensé,  par  man- 
dement particulier,  soixante  deux  livres  dix  sols  pour  une  couppe  d'ar- 
gent que  mondit  seigneur  [l'archiduc  Charles]  a  aussi  donnée  au  bap- 
tisement  du  fil%,  dont  la  femme  de  son  maistre  d'ostel  Boutton  estoit 
accouchée,  lequel  il  a  faict  lever  sujr  les  saint%  fond\  de  baptesme  et 
luy  donner  son  nom  de  Charles.  Le  futur  empereur  avait  bien  voulu 
être  parrain  de  l'enfant,  de  même  que  son  trisaïeul,  Philippe  le  Bon, 
Pavait  été  de  Philippe  Bouton;  mais  l'archiduc  fut  moins  généreux  que 
le  duc;  au  lieu  d'un  quignot  de  vaisselle  plate  d'une  valeur  de  deux  mille 
livres,  il  donna  une  simple  coupe  d'argent,  de  soixante-deux  livres; 
peut-être  songeait-il  déjà  à  rendre  redit  de  i53i,  par  lequel  il  était  dé- 
fendu d'accepter  des  présents  à  l'occasion  des  baptêmes,  sous  peine  d'une 
amende  double  delà  valeur  du  don.  »  —  Signalons  enfin  le  chapitre  sur 
le  Miroir  des  dames  où  ce  poème  est  successivement  rapproché  de  plu- 
sieurs ouvrages  du  xve  siècle  qui  roulent  sur  le  même  sujet,  tels  que 
r Apologia  mulierum  (publié  par  P.  Heyde),  YEloge  des  dames  (publié 
par  Van  Hasselt),  le  Mirouer  des  dames  (ms.  du  British  Muséum, 
achevé  le  9  juillet  1428),  le  Mirouer  des  dames  et  damoiselles  et  l'exem- 
ple de  tout  le  sexe  féminin  (ms.  de  la  Bibliothèque  Nationale,  n°  197 
du  fonds  français),  le  Parement  des  dames  d'Olivier  de  la  Marche. 
M.  B.  se  garde  bien  de  surfaire  le  mérite  du  Miroir  des  dames.  Si  l'au- 
teur  ne  lui  paraît  pas  inférieur  à  la  plupart  des  rimeurs  contemporains, 
il  reconnaît  aussi  que  ce  n'est  pas  là  dire  beaucoup  2.  Il  ajoute  qu'en  lui 
le  prosateur  vaut  mieux  que  le  poète,  sinon  par  la  correction,  au  moins 
par  la  sève  et  par  la  naïveté.  Dans  ce  chapitre  d'histoire  littéraire,  no- 
tons (p.  clxxxiii)  une  vigoureuse  tirade  contre  Cornélius  Agrippa,  «  ce 
cuistre  d'Allemagne  »,  «  ce  lourd  pédant  »,  qui  osa  dédier  un  livre  où 
les  faits  anatomiques  sont  exposés  dans  les  termes  les  plus  crus,  où  les 
phénomènes  physiologiques  sont  décrits  avec  les  détails  les  plus  répu- 
gnants (Declamatio...  Anvers,   1629),  à  la  régente  Marguerite,  qu'il 


1.  M.  B.  donne  en  note,  d'après  les  Comptes  des  Archives  départementales  du 
Nord,  d'autres  détails  inédits  «  qui  montrent  que  les  peintures,  même  des  grands 
artistes,  étaient  alors  payées  à  l'aune  ». 

2.  L'An  des  sept  darnes,  réédité  en  1867  par  MM.  Ruelens  et  Scheler,  atteste,  se- 
lon l'observation  de  M.  B.  (p.  cxci),  «une  imagination  plus  fertile,  plus  juvénile  », 
mais  il  est  «  parsemé  de  gravelures  comme  si  un  poète  du  nom  de  Bouton  eût  né- 
cessairement dû  s'inspirer  du  Roman  de  la  Rose.  » 


412  RI'.VUK   CRITIQUE 

qualifie  de  divine  princesse,  à  cette  même  princesse  qui,  dans  une  de 
ses  lettres  ',  comme  dans  un  de  ses  rondeaux  2,  fit  l'éloge  de  Cl.  Bou- 
ton. 

La  seconde  partie  du  volume  renferme  :  i°  le  Mirouer  des  dames, 
composé  entre  i5  17  et  i523,  édité  d'après  le  ms.  n°  10557  de  la  collée 
tion  de  Bourgogne  à  la  Bibliothèque  royale  de  Bruxelles  (pp.  i-3o)  3; 
20  120  pièces  justificatives  disposées  par  ordre  chronologique  (pp.  3i- 
173);  3°  la  liste  alphabétique  des  ouvrages  cités  (pp.  174-193);  40  l'In- 
dex alphabétique  (pp.  195-217)  ;  5°  la  Table  alphabétique  (pp.  219-229). 

Le  recueil  de  M.  Beauvois,  préparé  avec  un  soin  que  l'on  ne  saurait 
trop  louer,  est  d'une  valeur  exceptionnelle,  et  il  faut  cordialement  féli- 
citer la  modeste  Société  d'histoire  de  Beaune  d'avoir  publié  cette  mono- 
graphie qui  ferait  honneur  aux  plus  célèbres  de  nos  sociétés  savantes. 

T.  de  L. 


23g.  —  Saint- Vincent  de  Paul  et  les  Gondi,  d'après  de  nouveaux  documents 
par  R.  Chantelauze.  Paris,  Pion,  1882,  grand  in-8°  de  423  p.  7  fr.  5o- 

V Avant-propos  de  M.  Chantelauze  (pp.  1-14)  est  une  revue  analyti- 
que des  principaux  documents  imprimés  et  manuscrits  qui  peuvent  être 
consultés  sur  saint  Vincent  de  Paul.  Les  documents  imprimés  surtout 
sont  fort  nombreux,  comme  l'auteur  le  rappelle  en  ces  termes  (p.  1)  : 
«  Depuis  plus  de  deux  siècles,  il  serait  difficile  de  citer  un  homme  illus- 
tre, si  grande  que  soit  sa  renommée,  dont  la  vie  ait  été  écrite  aussi  sou- 
vent et  en  autant  de  langues  que  celle  de  saint  Vincent  de  Paul.  C'est  qu'il 
n'en  est  pas  un  dont  le  souvenir  soit  plus  cher  à  la  mémoire  des  hom- 
mes que  celui  qui  fut,  dans  les  temps  modernes,  le  premier  apôtre  de  la 
charité,  le  vrai  créateur  et  le  plus  grand  organisateur  de  l'assistance  pu- 
blique. »  M.  C.  énumère  et  apprécie  successivement  les  quatre  grandes 
biographies  publiées,  les  deux  premières,  par  deux  prêtres  de  la  Mission, 
Fournier  (1664) 4  et  Collet  (1748),  les  deux  dernières,  par  deux  de  nos 


1.  «  Nous  avons  icy  Bouton  qu'est  bien  saige  et  adroit  gentilhomme.  »  (Lettre  de 
Marguerite  à  l'empereur  Maximilien,  i5i3.  Correspondance  publiée  par  Le  Glay, 
t.  II,  p.  i5g.) 

2.  «  Ung  bouton  cuilliz  a  esté 
Florissant  yver  et  esté 

En  odeur  de  vertus  flagrable, 

A  tous  véans  moult  delictable 

Et  plain  de  toute  honnesteté.  » 
{Albums  et   œuvres  poétiques  de  Marguerite   d'Autriche  publiés  par   E.  Gachet 
pp.  27-28.) 

3.  M.  B.  a  mis  de  très  bonnes  notes  au  bas  des  pages  du  Mirouer  des  dames. 
J'en  citerai  surtout  une  fort  étendue  et  fort  savante  sur  les  sibylles  (pp.  5-7). 

4.  On  obtint  de  Louis  Abelly,  évêque  de  Rodez,  ancien  ami  du  saint,  qu'il  donne- 
rait son  nom  à  la  Vie  du  vénérable  serviteur  de  Dieu,  Vincent  de  Paul.  M.  C.  rap- 


d'histoire  et  de  littérature  41 3 

contemporains,  M.  l'abbé  Maynard  (1860),  M.  Arthur  Loth  (1880") l.  Il 
n'oublie  pas  de  signaler  et  de  vanter,  à  côté  de  ces  ouvrages,  le  livre 
d'Alphonse  Feillet,  «  qui  n'était  qu'un  chapitre  de  la  vie  de  Vincent, 
mais  un  chapitre  plein  de  révélations  inattendues  »,  La  misère  au 
temps  de  la  Fronde  et  saint  Vincent  de  Paul.  Il  insiste  enfin  sur 
l'importance  des  lettres  du  saint,  dont  les  RR.  PP.  Lazaristes  viennent 
de  publier  un  recueil  à  leur  usage,  en  quatre  volumes  in-8°  (Paris, 
1880  2).  A  l'étude  de  toutes  ces  publications,  M.  C.  a  eu  le  bonheur 
d'ajouter  la  connaissance  de  bon  nombre  de  pages  puisées  à  des  sources 
inédites.  «  Pendant  mes  longues  recherches  sur  le  cardinal  de  Retz  et 
les  Gondi,  que  de  fois,  saisi  de  respect,  »  dit-il  (p.  11),  «  j'ai  vu  se  dresser 
devant  moi  la  vénérable  figure  de  Vincent,  qui  fut  leur  commensal  pen- 
dant douze  années  !  Ce  fut  sous  leur  toit  que,  l'année  même  de  son  en- 
trée chez  eux,  il  vit  naître  le  terrible  élève  qui  devait  si  mal  profiter  de 
ses  leçons  et  de  ses  exemples.  Jamais,  on  peut  le  dire,  le  génie  du  bien 
ne  fut  plus  impuissant  à  lutter  contre  le  génie  du  mal.  »  L'auteur 
ajoute  que  «  ce  fut  par  les  Gondi,  uniquement  par  les  Gondi,  qu'il  fut 
donné  à  Vincent  de  fonder  et  de  constituer  tous  ses  établissements,  de- 
puis le  premier  jusqu'au  dernier,  sans  exception.  »  Il  constate  (p.  12) 
que  le  cardinal  de  Retz,  «  qui  avait  conservé  pour  son  ancien  instituteur 
le  plus  tendre  respect,  même  au  milieu  de  ses  conspirations  et  de  ses 
plus  folles  aventures,  se  montra  toujours  très  empressé  à  lui  prêter  son 
puissant  appui.  Voilà  pourquoi,  »  continue-il,  «  il  nous  a  paru  particu- 
lièrement intéressant  d'étudier  non-seulement  les  relations  de  Vincent 
avec  les  Gondi,  mais  encore  d'esquisser  les  traits  des  membres  de  cette 
famille  qui,  par  leur  bienveillante  protection  et  leur  fortune,  fécondè- 
rent toutes  ses  bonnes  œuvres.  » 

Le  R.  P.  Pémartin,  secrétaire  général  de  la  congrégation  de  la  Mis- 
sion, a  fourni  à  M.  C.  divers  documents,  ainsi  que  le  R.  P.  Ingold,  «  le 
dernier  et  savant  bibliothécaire  de  l'Oratoire.  »  De  plus,  quelques  dépê- 
ches de  nos  ambassadeurs,  déposées  dans  les  archives  du  ministère  des 
affaires  étrangères,  ont  permis  à  l'auteur  «  de  raconter  avec  de  nouveaux 
détails  plus  précis,  les  rigueurs  dont  Vincent  de  Paul  et  les  prêtres  de  la 


pelle  (p.  3,  note  1)  que  ce  prélat  est  l'auteur  d'un  ouvrage  latin,  autrefois  estimé,  La 
moelle  théologique,  et  il  ajoute  :  «  Comme  il  n'était  pas  janséniste,  BoPeau,  pour  ce 
motif,  a  essayé  de  le  tourner  en  ridicule  dans  son  Lutrin  : 

Que  chacun  prenne  en  main  le  moelleux  Abelly.  » 
11  ne  suffisait  pas  de  n'être  pas  janséniste  pour  être  attaqué  par  Boileau.  Le  vers  cité 
par  M.  C.  n'est  qu'une  inoffensive  boutade  où  le  jansénisme  n'a  rien  à  voir  et  qui 
n'a  peut-être  été  amenée  que  par  le  besoin  d'une  rime  en  i.  Qui  donc  était  moins 
janséniste  que  Louis  XIV  et  qui  pourtant  l'a  jamais  plus  et  mieux  loué  que  Boileau? 
11  serait  trop  facile  de  continuer  à  combattre  le  sentiment  de  M.  Chantelauze. 

1.  La  Vie  de  saint  Vincent  de  Paul,  par  Capefigue,  n'a  pas  paru  à  M.  C.  mériter 
l'honneur  d'une  mention.  Je  ne  lui  reprocherai  pas  son  dédain. 

:.  Un  choix  en  deux  volumes  a  été  mis  à  la  disposition  du  public  (Paris,  Dumou- 
lin, 1882). 


414  REVUE   CRITIQUE 

Mission,  à  Rome,  furent  l'objet,  par  ordre  de  Louis  XIV  et  de  Maza- 
rin,  pour  avoir  donné  asile  au  cardinal  de  Retz  fugitif  '.  » 

Tirant  un  heureux  parti  de  toutes  ces  ressources,  M.  C.  a  donné  une 
complète  histoire  des  relations  de  saint  Vincent  de  Paul  avec  la  famille 
de  Gondi,  surtout  avec  le  père,  la  mère  et  la  tante  (marquise  de  Maigne- 
lais)  du  cardinal  de  Retz  et  avec  ce  dernier  personnage  2;  il  a  donné 
aussi  une  complète  biographie  de  l'illustre  saint,  résumant,  perfection- 
nant tous  les  travaux  antérieurs  et  rajeunissant,  autant  par  l'agrément 
du  style  que  par  l'adjonction  de  faits  nouveaux,  un  sujet  si  souvent 
traité.  Si  M.  C.  a  eu  le  mérite  d'ajouter  à  ce  que  nous  avaient  raconté 
ses  devanciers,  il  a  eu  aussi  le  mérite  de  retrancher  quelque  chose  de 
leurs  récits.  Je  veux  parler  de  deux  légendes  impitoyablement  sabrées 
par  lui,  la  légende  du  forçat  que  Vincent  aurait  délivré  à  Marseille  pour 
se  mettre  à  sa  place  (pp.  123-137),  et  la  légende  du  saint  apôtre  parcou- 
rant pendant  la  nuit  les  rues  et  les  carrefours  de  Paris,  pour  y  recueillir 
dans  ses  bras  les  enfants  trouvés  (pp.  261-267).  La  première  légende 
nous  vient  du  xvir3  siècle,  mais  elle  a  été  considérablement  embellie  de 
notre  temps.  Ainsi,  par  exemple,  dit  avec  une  spirituelle  vivacité  M.  C. 
(p.  1 33),  «  je  vois  dans  une  excellente  histoire  du  saint,  qu'il  se  préci- 
pita sur  les  fers  du  forçat,  qu'il  les  baisa,  les  détacha  et  se  les  posa  lui- 
même  au  pied,  et  le  savant  biographe  oublie  que  ces  fers  pesaient  cin- 
quante kilogrammes,  qu'ils  étaient  rivés,  et  que,  par  conséquent  ils  ne 
se  détachaient  pas  aussi  facilement  que  des  jarretières.  »  Toute  la  dis- 
cussion est  menée  à  merveille  et  je  suis  assuré  que  tout  lecteur  non- 
seulement  «  pardonnera  »,  mais  appréciera  ce  que  l'auteur  appelle  «  la 
longueur  de  cette  digression  3.  »  La  seconde  légende  est  beaucoup  plus 
récente  :  elle  est  née  de  nos  jours  et  Capefigue  (c'est  tout  dire)  semble 
bien  en  être  le  père.  MM.  l'abbé  Maynard  et  Arthur  Loth  en  ont  été 
les  parrains.  Voici  comment,  au  nom  du  bon  sens  et  de  la  vérité,  M.  C. 
repousse  ces  «  pures  inventions  »  (p.  263)  :  «  A  l'époque  où  l'on  place 

1.  M.  C.  n'a  malheureusement  pu  découvrir  toute  la  correspondance  particulière 
de  Vincent  de  Paul  avec  le  général  des  galères,  Philippe-Emmanuel  de  Gondi,  dont 
M.  l'abbé  Maynard  a  révélé  l'existence. 

2.  M.  C.  nous  promet  (p.  84)  de  nous  raconter,  un  jour,  l'histoire  de  l'orageuse 
jeunesse  du  cardinal  de  Retz  :  «  Les  25o  premières  pages  in-40  des  Mémoires  auto- 
graphes de  Retz,  dans  lesquelles  il  racontait  ses  folles  aventures  de  jeunesse,  ont 
été  déchirées  par  une  main  trop  scrupuleuse;  et  d'un  autre  manuscrit  de  ces  mêmes 
mémoires  aujourd'hui  disparu,  un  éditeur  de  17 19  n'a  pu  sauver  de  ce  commence- 
ment que  quelques  fragments  mutilés.  Au  point  de  vue  littéraire,  c'est  une  perte  à 
jamais  déplorable  et  irréparable  ;  au  point  de  vue  historique  et  biographique,  il  n'est 
pas  impossible  de  combler  cette  lacune.  C'est  ce  que  nous  tenterons  quelque  jour, 
à  l'aide  de  nombreux  documents  inédits.  »  M.  C.  nous  promet  encore  (p.  417)  de  re- 
venir quelque  jour  sur  la  mystérieuse  fin  du  cardinal  de  Retz. 

3.  J'ai  sous  les  yeux  une  brochure  intitulée  :  D'une  erreur  historique  à  propos 
de  saint  Vincent  de  Paul  et  dcson  voyage  à  Marseille  en  1622,  par  Casimir 
Bousquet  (Paris,  1861,  in-18).  M.  C.  a  rendu  évident  ce  que  M.  Bousquet  avait 
déjà  commencé  à  rendre  bien  clair. 


d'histoire  et  de  littérature  415 

ces  prétendus  épisodes,  Vincent  avait  de  soixante-douze  à  soixante- 
quinze  ans  ;  il  pouvait  à  peine  se  tenir  sur  ses  jambes  endolories  et  cou- 
vertes de  plaies,  et,  déplus,  il  était  en  proie  à  la  fièvre  quarte,  qui  l'obli- 
geait, afin  d'en  calmer  les  accès,  à  garder  le  lit  chaque  nuit,  afin  de 
provoquer  la  sueur.  Comment  concilier  ces  faits  précis  avec  ses  préten- 
dues courses  nocturnes  ?  » 

Je  résumerai  d'un  mot  tous  les  éloges  que  l'on  peut  donner  au  livre  de 
M.  Chantelauze  :  c'est,  à  tous  égards,  la  meilleure  histoire  que  nous 
ayons  de  saint  Vincent  de  Paul  '. 

T.  de  L. 


240.  —  Ergœnzungewœrterbucli  dei*  deutsehen  Spraclie.  Eine  Vervoll- 
staendigung  und  Erweiterung  aller  bishér  erschienenen  deutsch  sprachlichen 
Wcertei  bûcher,  eïnschliesslich  der  Grimm'schen,  mit  Belegen  von  Luther  bis  auf 
die  neueste  Gegenwart,  von  Prof.  Dr.  Daniel  Sanders.  Berlin,  Libr.  Abenheim. 
Livraisons  6  à  22,  Blau-Meinen, 

La  publication  de  cet  important  dictionnaire  complémentaire,  dont 
nous  avons  annoncé  l'an  dernier  les  cinq  premières  livraisons,  se  con- 
tinue sans  interruption.  Comme  un  grand  dictionnaire  ne  peut  jamais 
être  complet,  l'auteur  a  eu  l'heureuse  idée  d'imprimer  sur  la  couverture 
des  livraisons  un  appel  à  tous  ceux  qui  s'occupent  de  lexicographie,  pour 
leur  demander  de  fournir  des  contributions  à  son  œuvre.  Nous  croyons 
nous  conformer  aux  vœux  exprimés  par  M.  Sanders  en  donnant  ici 
quelques  mots  et  significations  qui  lui  ont  échappé,  et  nous  espérons 
qu'ils  figureront  dans  un  supplément  à  la  fin  du  volume. 

Hermchenou  HermjEnnchen, synonyme  de  Wiesel  (la  belette)  ;  v.  Brehm, 
Saugethiere ,  vol.  II,  p.  81.  Ce  mot  se  rencontre  çà  et  là  dans  des  contes 
populaires.  Il  se  rattache,  ainsi  que  Hermelin  (hermine,  la  grande  be- 

4.  M.  C.  a  eu  la  bonne  fortune  d'être  aidé  par  le  R.  P.  Pémartin,  a  qui  a  fait  une 
étude  critique  très  approfondie  de  l'histoire  de  l'illustre  Fondateur  de  son  ordre,  »  et 
qu'il  remercie  deux  fois  {Avant-propos  et  p.  267)  de  son  assistance.  Aussi,  ne  trou- 
vera-t-on  guère  d'inexactitudes  dans  un  livre  revu  par  un  aussi  savant  spécialiste. 
C'est  par  inadvertance  que  (p.  17)  est  mentionnée  «  l'église  de  Bidackers,  près  de 
Bayonne.  11  s'agit  là  de  Bidache,  dont  les  Gramont  ont  rendu  le  nom  célèbre.  —  Je 
ne  crois  pas  que  l'histoire  des  généraux  des  galères,  par  Antoine  de  Ruffi,  ait  ja- 
mais été  imprimée,  quoiqu'en  dise  M.  Chantelauze  (p.  1 33).  —  Le  biographe  de  saint 
Vincent  de  Paul  me  paraît  avoir  manqué  de  charité  et  même  de  justice  à  l'égard  de 
Pierre  de  Marca.  En  vain,  pour  écraser  le  successeur  du  cardinal  de  Retz  à  l'arche- 
vêché de  Paris,  il  dit  deux  fois  (p.  04.3  et  p.  410)  que  Bossuet  a  tracé  de  ce  prélat 
un  portrait  d'une  effrayante  vérité.  Dans  ce  portrait,  remarquons-le  bien,  l'auteur 
de  la  Défense  des  libertés  de  l'église  gallicane  reproche  surtout  à  Marca,  dont  il 

admire  le  très  beau  génie,  d'avoir  été  ultramontain  et de  ne  l'avoir  pas  toujours 

été.  Il  y  a  des  portraits  plus  noirs.  Je  voudrais  que,  dans  la  prochaine  édition  de 
son  livre,  M.  C.  traitât  moins  durement  un  homme  qui,  certes,  ne  fut  pas  sans  dé- 
fauts, mais  qui  vaut  beaucoup  mieux  que  la  réputation  que  ses  ennemis  ont  voulu 
lui  faire. 


41  6  REVUE   CRITIQUE 

lette),  au  moyen  haut  allem.  harm,  ancien  haut  ail.  hartno;  l'allemand 
moderne  Harm,  dans  le  sens  de  «  hermine  »,  est  rare  (Grimm). 

Au  mot  Gabler,  il  manque  la  signification  assez  fréquente  de  Gabel- 
weih? (milan  noir);  v.  Brehm,  Thierleben. —  Die  Vôgel,  Leipzig,  vol.  I, 
p.  684. 

Hûfter,  synon.  de  Brachpiper  ou  Stôppling  =  le  pipi  champêtre 
(Anthus  campestris)  ;  v.  Brehm,  ib.,  II,  254. 

Hûster,  synon.  de  Wiesenpiper —  \&  pipi  des  prés  (Anthus  pratensis); 
v.  Brehm,  ibn  II,  249. 

Hûsik,  synon.  de  Graufliegenfànger  zz  le  gobe-mouche  gris  (Musci- 
capa  grisola);  v.  Brehm,  ib.,  II,  517. 

Girlitz  rs  le  cini  x  (Fringilla  serinus).  Ce  petit  oiseau  est  fort  commun 
dans  certaines  parties  de  l'Allemagne,  et  y  porte  encore  quelques  autres 
noms,  suivant  la  contrée,  p.  ex.  Heckenbrunelle,  en  Bavière,  etc,  :  Der 
in  Deutschland  heimische  Vertreter  der  Sippe  ist  der  Girlit\,  Brehm, 
ib.,  II,  332.  Im  Taurus  gesellt  sich  ihm  der  von  hier  und  dem  Kaucasus 
ûber  Persien  und  Turkestan  bis  Ladak  verbreitete,  auch  in  Sùdeuropa 
vorkommende  Goldstirn-girlitz  (Serinus  pusillus  und  aurifrons,  etc), 
an,  welcher  der  etwas  làngern  Flûgel  halber  auch  wohl  als  Vertreter  einer 
besondern  Untersippe,  der  Zeisig-girlitze,  angesehen  wird;  ib., 
p.  333. 

Blaje,  synon.  de  Blahe,  Plane,  Wagendecke,  —  bâche  :  Es  wurde 
also  mein  Bett  und  sonstige  Effecten  auf  einen  Wagen  geladen,  der  mit 
einem  von  Reifen  getragenen  Tuch,  Blaje  genannt,  uberspannt  war; 
Christoph  Hoffmann,  Mein  Weg  nach  Jérusalem,  Erinnerungen  aus 
meinem  Leben.  Stuttgart  und  Jérusalem  1881  ;  vol.  I,  p.  139.  —  Com- 
posé :  zu  welcher  die  ganze  Familie  Paulus  den  Weg  nach  Stuttgart  in 
einem  jener  primitiven  Fuhrwerke,  die  man  BLAJEwâGELCHEN  nannte, 
machte;  ib.,  p.  622. 

Parmi  les  composés  de  Kohle,  il  manque  Gries-Kohle  œ  menu  char- 
bon, en  anglais  «  dust  »  ;  Tage-Kohle  =  charbon  d'affleurement. 

Môllern  ==  préparer  des  lits  de  fusion  des  minerais;  Môller-bett,  lit 
de  fusion;  cf.  Môller-haus;  Môller-boden;  Môllerung  =  i°  prépara- 
tion des  lits  de  fusion  des  min.  ;  20  lit  de  fusion. 

1.  Le  mot  cini,  quoique  l'oiseau  soit  très  répandu  en  France,  manque  également 
jusqu'ici  dans  tous  les  dictionnaires  français.  Je  profite  de  l'occasion  pour  signaler  à 
l'attention  des  lexicographes  français  deux  autres  mots  très  répandus  qui  n'ont  pas 
encore  l'honneur  de  figurer  dans  les  dictionnaires  ;  ce  sont  :  clapotement,  substantif 
verbal  de  clapoter,  et  le  verbe  écoper.  Chose  incroyable,  la  plupart  des  dictionnaires 
donnent  le  subst.  écope,  mais  le  verbe  écoper,  malgré  ses  deux  significations  con- 
nues de  tout  le  monde,  a  toujours  été  omis.  Citons  encore,  pour  la  même  raison,  l'adj. 
gourmeux  (atteint  de  la  gourme),  et  le  subst.  plur.  très  intéressant  rappeaux,  cris  de 
la  caille,  qui  est  à  rappeler  ce  que  appeau  est  à  appeler  ;  il  est  usité  dans  le  nord 
comme  dans  le  midi  de  la  France  (rappaou).  De  même  qu'on  dit  «  le»  rappeaux  de 
la  caille  »,  on  dit  aussi  «  la  caille  rappelle  »;  cette  dernière  signification  ne  se  trouve 
pas  non  plus  dans  les  dictionnaires. 


d'histoire  et  de  littérature  417 

DRUSE(fcm.),  minéral  =  géode,  c'est-à-dire  cristaux  situés  à  l'intérieur 
d'une  pierre. 

Alfred  Bauer. 


CHRONIQUE 


ETATS-UNIS.  —  M.  F.  Poole,  de  Chicago,  a  terminé  la  nouvelle  édition  de  son 
Index  to  periodical  literature;  elle  paraîtra  à  Londres,  chez  Trûbner. 

—  Un  mulâtre,  M.  Williams,  qui  a  occupé  dans  l'Etat  d'Ohio  des  fonctions  im- 
portantes, prépare  une  Histoire  de  la  race  nègre  en  Amérique. 

—  M.  Max  Mûller  a  été  invité  à  faire,  en  i863,  une  série  de  conférences  sur  la 
science  du  langage,  à  l'Institut  Lowell,  de  Boston. 

INDES.  —  Les  Parsis  établis  à  l'île  d'Aden  viennent  de  fonder  un  temple  du  feu. 
II  sera  inauguré  au  commencement  de  l'année  prochaine  par  Firoûz,  fils  du  grand- 
prêtre  de  Bombay,  Jamaspji,  l'auteur  du  Dictionnaire  jpehlvi-gu\rati-anglais.—  La 
polémique  suscitée  par  l'admission  dans  l'église  parsie  de  non-zoroastriens,  sans  la 
pénible  cérémonie  du  Bareshnûm  (purification  avec  l'urine  de  vache)  est  plus  vive 
que  jamais.  L'initiative  hardie  du  Destour  Jamaspji  a  été  attaquée  par  le  Destour 
JPsèhotunji  et  défendue  par  le  Herbed  Tamaspji.  Le  Destour  Jamaspji  prépare  lui- 
même  une  brochure  sur  ce  sujet.  Nous  rendrons  compte  de  cette  polémique. 

ITALIE.— Nous  avons  reçu  de  l'ancien  directeur  de  la  Bibliothèque  Vittorio  Emanuele 
de  Rome,  M.  Castellani,  une  lettre  où  il  appelle  notre  attention  sur  un  article  pu- 
blié par  la  Perseverança  de  Milan  In"  8169).  D'après  cet  article,  écrit  en  français  et 
malheureusement  en  mauvais  français,  le  tribunal  correctionnel  de  Rome  aurait  ab- 
sous MM.  Castellani  et  Podestà  de  l'accusation  de  négligence  portée  contre  eux. 
«  L'enquête  a  beaucoup  contribué  à  abaisser  la  réputation  de  notre  pays  en  deçà  et  au 
delà  des  Alpes...  Et  cependant  il  fallait  reconnaître  que  jamais  un  plus  grand  nom- 
bre de  livres  n'avait  été  transporté  avec  plus  de  promptitude  et  d'exactitude.  Du  jour 
où  les  bibliothèques  monastiques  furent  consignées  au  ministère  de  l'instruction  pu- 
blique, pas  un  seul  des  5oo,ooo  volumes  environ  qui  avaient  été  consignés,  a  été 
égaré.  Le  Procureur  du  roi  même  dans  son  réquisitoire  a  dû  se  restreindre  à  accu- 
ser MM.  Castellani  et  Podestà  pour  l'égarement  d'une 'lettre  autographe  du  cardinal 
Mastai  avant  de  devenir  pape,  d'un  livre  imprimé,  II  Processo  degli  Untori  di  Mi- 
lano,  estimé  par  les  experts  5o  francs,  et  de  io,3  brochures  trouvées  à  Florence 
avec  des  signes  qu'on  a  supposé  être  de  la  Bibliothèque  Vittorio  Emmanuele,  d'une 
valeur  approximative  de  10  francs.  Ces  égarements  mêmes  n'ont  pas  été  exacte- 
ment constatés,  mais  en  tout  cas  ils  auraient  eu  lieu  après  l'ouverture  de  la  biblio- 
thèque. D'ailleurs,  si  lès  faits  de  cette  nature  suffisaient  à  traduire  devant  les  tribu- 
naux des  bibliothécaires  sous  l'imputation  de  négligence,  il  faut  reconnaître  que 
pas  un  seul  de  cette  honorable  classe  pourrait  se  sauver.  Heureux  ceux  qui,  dans 
l'exercice  de  leurs  nobles  fonctions,  n'ont  pas  eu  des  contrariétés  majeures  !  Du  reste, 
à  part  la  lettre  du  cardinal  Mastai,  qu'on  suppose  être  plutôt  égarée  que  volée,  rela- 
tivement au  Processo  degli  Untori  et  aux  ig3  brochures,  il  fallait  vérifier  aupara- 
vant s'il  y  en  avait  en  bibliothèque  d'autres  exemplaires,  car  s'ils  étaient  des  dou- 
bles, ils  auraient  été  écartés  régulièrement.  »  La  Perseveranja  ajoute  que  les 
«  résultats  de  l'enquête  et  du  procès  ont  été  les  suivants  :  pour  abattre  un  homme 


4l8  REVUE   CRITIQUE 

politique,  on  l'a  d'abord  calomnié,  lui  et  son  œuvre;  ce  but  ayant  échoué,  on  s'est 
borné  à  calomnier  d'honnêtes  et  utiles  employés.  » 

—  M.  Luigi  A.  Michelangeli,  qui  vient  de  publier  une  édition  critique  d'Anacréon 
(Bologne,  Zanichelli),  prépare  un  travail  sur,le  poète  grec  et  ses  traducteurs  et  imi- 
tateurs en  Italie. 

POLOGNE.  —  Dans  le  dernier  article  qu'il  vient  de  publier  dans  la  «  deutsche 
Rundschau  »,  sous  le  titre  «  Polnische  Belletrisiik  in  den  let^ten  ^wan^ig  Jahren  ». 
(La  littérature  polonaise  dans  ces  vingt  dernières  années),  M.  OuoHausner,  membre 
du  Reichsrath  autrichien,  dit  que  de  1876  à  188 1  il  a  paru  en  polonais  296  ouvra- 
ges de  belles-lettres  {schœngeistig),  dont  192  en  Pologne,  80  en  Galicie  et  24  dans 
les  autres  provinces  —  ce  qui  caractérise  la  fin  de  la  vie  littéraire  autrefois  si  active 
en  Posnanie  et  la  complète  cessation  de  la  littérature  émigrée.  Le  nombre  actuel  de 
ceux  qui  parlent  polonais  est  de  plus  de  i3  millions  (plus  de  8  millions  en  Russie, 
2,600,000  en  Prusse  et  3, 200, 000  en  Autriche);  chaque  année  11  paraît  donc  dans 
les  pays  parlant  polonais  une  œuvre  littéraire  par  2,000  âmes.  On  peut,  à  ce  propos, 
citer  les  chiffres  suivants  qui  sont  curieux  ;  il  paraît  une  œuvre  littéraire  par 
2,800  Allemands,  par  2,200  Italiens,  par  2,000  Suédois,  par  1,900  Hollandais  ou 
Danois  et  Norvégiens,  par  1,800  Anglais,  par  x, 600  Français,  par  10,000  Russes. 

RUSSIE.  —  Le  22  juin  est  mort  McrMacaire  Boulgakov,  métropolitain  de  Moscou  ; 
il  avait  composé  une  Histoire  de  l'académie  de  Kiev  (1843),  une  Histoire  du  christia- 
nisme en  Russie  avant  Vladimir  (i856),  une  Théologie  dogmatique  orthodoxe  (1802, 
trad.  en  français  en  1857-1859  et  qui  obtint  le  grand  prix  Demidoff),  une  Histoire 
du  rascol  russe  (i855),  et  une  Histoire  de  l'église  russe  en  onze  volumes,  son  ou- 
vrage le  plus  important.  • 

—  Le  P.  Martinov  vient  de  publier  dans  les  Monuments  de  l'ancienne  littérature 
(Pamiatniki  drevnei  pismennosti)  édités  par  la  Société  russe  des  anciens  textes  un 
ms.  slavon  conservé  à  la  Bibliothèque  de  Gand  et  qui  avait  jusqu'ici  échappé  à  l'at- 
tention des  spécialistes.  Ce  ms.  est  curieux  à  plusieurs  égards.  Il  est  d'origine  bul- 
gare, il  a  été  écrit  à  Viddin  en  i36o  par  la  tsarine  Anne,  femme  du  prince  bulgare 
Jean  Stratsimir.  Il  renferme  des  Vies  des  saintes  martyres,  récits  déjà  connus  et 
dont  le  P.  Martinov  n'a  donné  que  quelques  fragments  et,  ce  qui  est  plus  intéres- 
sant, une  description  des  Lieux  Saints  de  Jérusalem.  Une  traduction  latine  de  ce  do- 
cument due  au  P.  Martinov  paraîtra  prochainement  dans  les  Archives  de  l'Orient 
latin.  L'édition  est  accompagnée  de  fac-similés  et  précédée  d'une  préface  où  sont  si- 
gnalées les  principales  particularités  du  texte.  Rappelons  à  ce  propos  que  notre  re- 
gretté collaborateur,  Ch.  Graux,  a  découvert  à  la  bibliothèque  de  Grenade  un  ms.  sla- 
von qui  n'a  pas  encore  trouvé  d'éditeur.  Il  serait  à  désirer  que  la  Société  des  anciens 
textes  russes  pût  le  faire  examiner  et,  s'il  en  vaut  la  peine,  le  publier. 

SLAVES  MÉRIDIONAUX.  —  M.  Danicic  vient  de  terminer  le  premier  volume  de 
son  grand  dictionnaire  serbo-croate  (A.-C).  Nous  reviendrons  prochainement  sur  cet 
ouvrage. 

SUÈDE  ET  NORVÈGE.  —  Notre  collaborateur,  G.  Cederschiceld,  professeur  à 
l'Université  de  Lund,  a  été  nommé  directeur  de  l'école  supérieure  des  jeunes  filles 
de  Gœteborg. 

—  Le  premier  fascicule  de  VArkiv  for  nordiste  filologi,  dont  nous  avons  récem- 
ment annoncé  la  fondation,  vient  de  paraître.  L'Arkiv  est  consacré,  comme  l'indique 
son  titre,  à  l'étude  de  la  langue  et  de  la  littérature  des  trois  pays  Scandinaves;  il  est 
publié  quatre  fois  par  an,  au  prix  de  six  krones.  Le  directeur  de  la  Revue  est  M.  Gus- 
tave Storm,  assisté  de  MM.  Sophus  Bugge,  Nicolas  Ltnder,  etc.  Le  recueil  admet 
des  articles  rédigés  en  allemand  et  en  anglais,  et  ce  premier  fascicule  renferme,  en 


D  HISTOIRE    ET    DE   LITTERATURE  419 

effet,  un  article  en  allemand  de  M.  E.  Mogk,  sur  feu  Edzardi  ;  on  y  remarquera  une 
Bibliographie  des  ouvrages  relatifs  au  norois,  dressée  par  M.  Stjernstrcem  et  un  ar- 
ticle, le  premier  du  fascicule,  par  Sophus  Bugge,  sur  la  Rosomonorum  gens  dont 
parle  Jordanis. 

SUISSE.—  M.  A.  Bernus,  pasteur  à  Bâle,  vient  de  publier  une  Notice  bibliographi- 
que sur  Richard  Simon  (Bâle,  Georg.  in-8°,  48  p.)  On  sait  que  Richard  Simon  (i638- 
1712)  fut  en  1678  exclu  de  la  congrégation  de  l'Oratoire  pour  avoir  publié  son  His- 
toire critique  du  Vieux  Testament,  et  qu'il  a  ouvert  de  nouvelles  voies  à  la  critique 
biblique  et  à  l'étude  de  l'histoire  des  églises  orientales;  son  humeur  agressive,  ses 
opinions  hardies  lui  suscitèrent  beaucoup  d'adversaires.  Sa  bibliographie  était  encore 
à  faire;  ce  qui  la  rendait  difficile,  c'était  le  nombre  de  pseudonymes  sous  lesquels  il 
se  cachait  aussi  bien  que  l'indication  fausse  du  lieu  d'impression  de  ses  ouvrages. 
M.  Bernus  a  cherché  à  faire  une  bibliographie  des  publications  de  Richard  Si- 
mon aussi  complète  et  aussi  exacte  que  possible  (296  numéros);  il  donne  [d'abord 
sommairement  la  liste  chronologique  de  ces  publications;  il  indique  entre  pa- 
renthèses, après  le  titre  des  ouvrages  de  Simon,  les  principaux  comptes-rendus 
détaillés  donnés  par  les  journaux  littéraires  du  temps;  il  mentionne  les  publi- 
cations des  adversaires  de  Richard  Simon,  afin  de  mieux  faire  connaître  l'ac- 
tion que  le  savant  Dieppois  exerça  sur  son  siècle;  etc.  Cette  bibliographie,  faite 
avec  soin  et  patience,  et  qui  rendra  des  services,  ne  peut  manquer  d'être  accueillie 
avec  reconnaissance.  M.  Bernus  y  a  joint  les  ouvrages  projetés  par  Simon  ou  fausse- 
ment attribués  à  l'ancien  oratorien,  les  notices  et  écrits,  soit  manuscrits,  soit  im- 
primés, sur  l'auteur  de  V Histoire  critique  du  Vieux  Testament,  et  un  utile  index  des 
noms  propres. 

—  Le  tome  XXXVI  des  Mémoires  et  documents,  publiés  par  la  Société  d'histoire 
de  la  Suisse  Romande,  vient  de  paraître  à  Lausanne  (Georges  Bridel.  In-8°,  414  pp.). 
Ce  volume,  outre  un  essai  d'Histoire  monétaire  de  Lausanne  (1273-1354),  dû  à 
M.  A.  Morel-Fatio,  renferme  des  extraits  considérables  tirés  des  Manuaux  du  con- 
seil de  Lausanne  (i5i2-i536),  publiés  et  annotés  par  M.  Ernest  Chavannes.  Cette 
publication  avait  été  commencée  déjà  dans  le  tome  XXXV.  —  La  période  à  laquelle 
se  rapportent  ces  extraits  est  d'une  grande  importance  pour  l'histoire  de  la  Suisse 
Romande.  C'est  une  période  d'agitation  et  de  troubles,  causés  par  les  idées  nouvelles 
de  la  Réformation.  Il  est  intéressant  de  suivre,  dans  cette  publication,  les  hésitations 
politiques  de  la  ville  de  Lausanne,  siège  d'un  évêché,  dont  le  titulaire  était  loin  de 
vivre  toujours  en  bonne  intelligence  avec  les  bourgeois.  Précisément,  deux  des  extraits 
les  plus  intéressants, intitulés  :  Mœurs  lausannoises  entre  i5z8  et  1  534,  relatent  lon- 
guement, le  premier,  les  plaintes  de  l'évêque  et  du  clergé  contre  les  citoyens  de  Lau- 
sanne; le  second,  les  plaintes  des  citoyens  de  Lausanne  contre  l'évêque  et  le  clergé. 
Ces  deux  pièces  sont  en  français,  et  la  naïveté  du  style,  émaillé  de  locutions  patoises 
et  d'expressions  du  terroir,  prête  beaucoup  de  charme  au  récit  des  méfaits  commis, 
au  dire  des  bourgeois,  par  les  chanoines  de  Saint-Maire,  ou  vice-versa,  par  les  bour- 
geois, si  l'on  veut  écouter  les  chanoines. 


ACADÉMIE  DES   INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  10  novembre  1882. 
M.  Jamard,  consul  de  France   à  Brousse,  envoie  la  copie  d'une  inscription  grecque 


420  REVUE    CRITIQUE   D  HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

trouvée  près  d'Adernas.  —  M.  de  Laigue,  consul  à  Livourne,  envoie  une  nouvellle 
copie  d'inscription. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  M.  Renan  donne  quelques  détails  sur  deux 
monuments  dont  les  photographies  ont  été  transmises  à  la  commission  des  inscrip- 
tions par  M.  Salomon  Reinach,  membre  de  l'école  française  d'Athènes.  L'un  est  un 
graffilo  araméen,  de  l'époque  d'Hadrien,  trouvé  à  Athènes;  l'écriture  en  est  très  dif- 
ficile à  lire,  et  M.  Renan  n'ose  encore  proposer  une  traduction.  L'autre  monument  a 
été  trouvé  à  Edesse.  C'est  un  fragment  de  pierre,  renfermant,  dans  une  sorte  de  ni- 
che, un  buste  assez  grossièrement  sculpté,  d'une  exécution  lourde,  qui  rappelle  celle 
des  sculptures  les  plus  récentes  ;de  Palmyre  ;  les  cheveux,  tous  rebroussés  d'un  seul 
côté,  présentent  un  aspect  étrange.  «  On  croit  dans  le  pays,  dit  une  note  jointe  à  la 
photographie,  que  la  tête  représente  le  frère  de  la  femme  d'Abraham.  »  Cette  lé- 
gende, dont  il  n'y  a  d'ailleurs  aucun  compte  à  tenir,  indique  du  moins  que  cette 
pierre  est  connue  depuis  assez  longtemps  et  donne  lieu  de  présumer  qu'elle  était  pos- 
sédée par  des  mulsumans.  A  côté  du  buste,  à  droite,  se  voit  un  fragment  d'inscription 
syriaque,  du  ve  ou  vi6  siècle  de  notre  ère.  Il  y  a  quatre  lignes  d'écriture;  les  trois 
premières,  en  grosses  lettres  et  fortement  interlignées.,  paraissent  former  une  sorte 
de  titre;  la  quatrième  était  sans  doute  la  première  du  texte  proprement  dit,  dont  le 
reste  est  perdu.  Nous  n'avons  que  la  partie  gauche  ou  la  fin  de  chaque  ligne.  Dans 
les  trois  premières,  seules  déchiffrées  jusqu'ici,  on  lit  : 

de  Notre-Seigneur 

et  adorable 

d'Edesse 

M.  Cuq  termine  sa  lecture  sur  le  consilium  principis  sous  le  haut  empire  romain, 
d'Auguste  à  Dioclétien.  Dans  cette  seconde  partie  de  son  mémoire,  il  décrit  en  détail 
l'organisation  du  conseil,  telle  que  les  documents  nous  la  font  connaître,  à  partir  du 
temps  d'Hadrien;  il  distingue  les  diverses  catégories  de  membres  qui  le  composaient, 
les  sénateurs,  les  amis  ou  familiers  du  prince,  les  jurisconsultes;  les  conseillers  en 
service  ordinaire,  consiliarii,  et  en  service  extraordinaire,  adsumpti  in  consilium;  il 
énumère  les  divers  fonctionnaires  attachés  au  conseil,  les  employés  des  bureaux,  les 
greffiers,  notarii,  qui  dressaient  les  procès-verbaux  des  séances,  les  expéditionnaires, 
commentarii,  qui  transcrivaient  les  actes  et  les  mettaient  au  net,  ceux  qui  les  con- 
servaient dans  les  Archives  du  conseil,  tabularium  Caesaris,  etc. 

Ouvrages  présentés  :  —  par  M.  d'Hervey  de  Saint-Denys  :  Rosny  (Léon  de),  Essai 
de  déchiffrement  de  récriture  hiératique  de  l'Amérique  centrale,  3e  et  4e  livraisons  ;  — 
par  M.  Desjardins,  Bulletin  trimestriel  des  antiquités  africaines,  recueillies  par  les 
soins  de  la  Société  de  géographie  et  d'archéologie  de  la  province  d'Or  an,  2'  fascicule; 

—  par  M.  Delisle  :  Beaucourt  (G.  du  Fresne  de),  Histoire  de  Charles  VII,  tome  II; 

—  par  M.  de  Rozière  :  Leroux  (Alfred),  Recherches  critiques  sur  les  relations  politi- 
ques de  la  France  avec  l'Allemagne  de  1 2Q2  à  13^8  (5o°  fascicule  de  la  Bibliothèque 
de  l'Ecole  des  hautes  études,  sciences  philologiques  et  historiques);  —  par  M.  Bréal  : 
i°  Tamizey  de  Larroque  (Philippe),  les  Correspondants  de  Peiresc  V,  Claude  de  Sau- 
maise;  20  Henrï  (V.),  Esquisses  morphologiques,  considérations  générales  sur  la  na- 
ture et  l'origine  de  la  flexion  indo-européenne. 

Julien  Havet. 


SOCIÉTÉ  NATIONALE  DES  ANTIQUAIRES  DE  FRANCE 


Séance  du  18  octobre  1882. 

M.  Le  Blant  donne  des  détails  sur  les  fouilles  entreprises  près  de  Pompéi,  sur  la 
rive  droite  du  Sarno.  Ce  ruisseau,  fangeux  et  profond,  arrêta  dans  leur  fuite  une  partie 
des  habitants  de  Pompéi,  qui  périrent  avant  de  parvenir  à  le  traverser.  Ces  fugitifs, 
dont  on  trouve  les  cadavres  en  grand  nombre,  étaient  chargés  de  bijoux  d'or,  de 
pièces  de  monnaie  et  d'autres  objets  précieux. 

M.  Guillaume  entretient  la  Société  des  restes  de  constructions  anciennes  décou- 
vertes pendant  les  travaux  qui  s'exécutent  sous  la  salle  des  Cariatides  au  Louvre. 
Sous  la  salle  moderne,  construite  par  Pierre  Lescot  et  achevée  par  Percier  et  Fon- 
taine, subsistent  les  ruines  de  salles  ogivales,  jadis  carrelées  de  carreaux  émaillés,  qui 
paraissent  dater  du  règne  de  Philippe-Auguste. 

Les  retombées  de  voûtes  sont  encore  conservées,  et  dans  les  déblais  se  rencontrent 
des  fragments  de  culs  de  lampes  ornés  de  figures. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 

1 ; — ■ .    .- 

Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

N°  48  —  27  Novembre  —  1882 


Sommaire  s  241.  Rieu,  Catalogue  des  manuscrits  persans  du  British  Muséum,  II. 
—  242.  Christ,  Démosthène,  l'e'dition  d'Atticus.  —  243.  C.  Mùller.  Lutte  de 
Louis  de  Bavière  et  de  la  curie  romaine.—  Exploit  de  M.  Mary  Lafon.  —  Lettre 
de  M.  Ch.  Morel.  —  Chronique.  —  Académie  des  Inscriptions.  —  Société  asia- 
tique. 


241.  —    Catalogue  of  lue  Persian  Sîanusci'ipts  in  lue  British  Sîusaum, 

by  Charles  Rieu,  volume  II,  London,  1881,  in-40  vu  et  433-877  p. 

Le  tome  second  de  ce  catalogue  est  exécuté  sur  le  même  plan  que  le  pre- 
mier et  mérite  les  mêmes  éloges.  Nous  ne  pouvons  donc  que  nous  référer 
à  ce  que  nous  avons  dit  déjà  à  cet  égard,  tout  en  maintenant  la  distinction 
que  nous  avons  établie  entre  un  catalogue  proprement  dit  et  un  recueil 
de  notices,  et  que  le  savant  rédacteur  n'a  pas,  à  nos  yeux,  toujours  assez 
observée.  Ce  n'est  pas  un  reproche,  quoi  qu'on  en  ait  dit,  et  nous  som- 
mes les  premiers  à  reconnaître  que  dorénavant  le  travail  considérable 
de  M.  Rieu  devra  être  considéré  comme  l'œuvre  fondamentale  à  la- 
quelle tout  catalogue  de  mss.  persans  devra  taire  les  plus  nombreuses 
références. 

Le  tome  II  décrit  n 28  volumes  consacrés  aux  sciences,  à  la  poésie, 
à  la  philologie  et  aux  belles-lettres;  une  dernière  division  comprend 
les  volumes  renfermant  des  matières  diverses.  Nous  approuvons  fort  ri- 
dée de  faire  une  section  à  part  pour  les  mss.  de  ce  genre  ;  c'est  préféra- 
ble, selon  nous,  au  rangement  qui  est  décidé  par  la  nature  de  la  pre- 
mière pièce,  ou  à  l'importance  plus  grande  attribuée  à  l'une  ou  à  l'autre 
des  pièces.  Un  correctif  paraît  cependant  nécessaire  :  pourquoi,  dans 
chacune  des  classes  où  doit  figurer  tel  ou  tel  morceau,  ne  pas  le  faire 
entrer  sous  forme  de  renvoi  ?  La  remarque  que  nous  faisons  ne  vient 
pas  de  nous  :  c'est  là  le  système  qu'a  suivi,  par  exemple,  M.  Pertsch 
dans  les  catalogues  de  Gotha. 

Les  innombrables  poètes  dont  les  œuvres  figurent  dans  la  collection 
de  Londres  suffisent  à  montrer  à  l'homme  le  plus  étranger  aux  études 
orientales  combien  la  poésie  est  cultivée  en  Perse  et  dans  les  pays  de 
langue  persane,  où  le  premier  venu,  sans  études  préalables  de  métrique 
ou  de  poésie,  a  l'oreille  assez  délicate  pour  pouvoir  composer  en  mètres 
de  toute  sorte.  Il  faut  bien  ajouter  que  la  plupart  de  ces  poésies,  pour 
ne  pas  dire  toutes,  sont  loin  de  valoir,  pour  nous  Européens,  la  ving- 
tième partie  de  ce  que  nous  a  légué  l'antiquité  classique,  et  que  leur 
étude  n'est  pas  près  de  procurer  les  mêmes  jouissances  que  la  connais- 
Nouvell*  sérié,  XIV.  22 


422  REVUE   CRITIQUE 

sance  de  celle-ci.  Toujours  est-il  que  nous  relevons  ici  les  œuvres  assez 
rares  de  plusieurs  des  poètes  les  plus  anciens,  par  exemple,  le  Yoûsouf 
ou  Z ouleyhha  de  Firdawsi  (p.  545)  et  un  fragment  de  Vis  ou  Ramin 
(p.  822  a).  Il  est  en  ce  moment  question  de  la  publication  du  premier  de 
ces  poèmes,  dont  le  sujet  a  si  souvent  excité  la  verve  orientale.  Le  se- 
cond a  été  publié  dans  la  Bibliotheca  Indien,  mais  d'après  un  seul  ms., 
et  cette  édition  laisse  assez  à  désirer  ;  il  serait  à  souhaiter  que  quelque 
orientaliste  collationnât  le  texte  imprimé  avec  les  fragments  existant  à 
Londres,  avec  ceux  qui  figurent  dans  d'autres  œuvres  (Rieù,  /.  /.)  et 
avec  l'exemplaire  delà  Bibliotheca Sprengeriana  (n°  1378),  qui  doit  être 
maintenant  à  Berlin  '.  Des  poésies  dans  un  dialecte  kurde  ont  été  l'objet 
d'une  étude  spéciale  de  la  part  de  M.  R.  et  lui  ont  fourni  (p.  728)  la  ma- 
tière de  tout  un  mémoire  sur  la  phonétique  et  la  grammaire  de  la  langue 
des  Gourân. 

Conformément  au  plan  qu'il  s'est  tracé,  le  savant  rédacteur  reprend 
la  discussion  concernant  l'époque  de  la  naissance  de  Sacdi,  mais  pour 
tomber  à  peu  près  d'accord  avec  MM.  Defrémery  2  et  Bâcher,  et  la  fixer 
vers  680  environ.  Mais  lui  aussi  a  passé  sous  silence  un  passage  impor- 
tant du  Gulistan  et  qui,  s'il  était  pris  au  pied  de  la  lettie,  ne  permet- 
trait pas  d'accepter  cette  date  3.  Nous  ne  parlerons  pas  d'un  passage  du 
Pend  Nâmek  où  l'auteur  parle  de  son  âge,  car  M.  R.  paraît  peu  disposé 
à  admettre  l'authenticité  de  ce  poème.  Dans  aucun  des  exemplaires  du 
Koulliyyât  existant  à  Londres,  pas  plus  que  dans  ceux  de  Paris,  cet 
ouvrage  n'a  en  effet  été  admis,  et  il  n'en  est  rien  dit  dans  le  catalogue 
qui  nous  occupe  à  l'article  Sacdi  ;  c'est  ailleurs  (p.  865  b,  n°  m)  qu'il 
faut  aller  le  chercher.  On  peut  dire  pourtant  qu'il  figure  dans  l'édition 
de  Calcutta  aussi  bien  que  dans  unms.  de  Paris(Suppl.  pers.,  n°  3  18)  ren- 
fermant, en  outre,  le  Gulistan  et  le  Bostân;  M.  Sprenger  n'a  fait  non 
plus  aucune  objection  à  cette  attribution  4,  et  nous  ne  voyons  pas  de 
preuves  bien  déterminantes  pour  en  refuser  la  paternité  au  célèbre  mo- 
raliste. 

On  sait  qu'il  ne  manque  pas,  chez  les  Arabes  et  les  Persans,  de  chro- 
niques générales  dont  le  compilateur  prend  la  création  comme  point  de 
départ  et  poursuit  le  récit  des  événements  jusqu'à  son  époque.  Mais 
Dieu  sait  si  tous  ces  chroniqueurs  se  font  faute  de  se  copier  les  uns  les 
autres,  et  d'ailleurs  bien  peu  nombreuses  sont  celles  de  ces  œuvres  qui 
ne  sont  pas  parvenues  jusqu'à  nous.  Il  en  est  tout  autrement  des  chroni- 
ques qui  ne  traitent  que  d'une  province  ou  d'une  dynastie  ;  le  nombre 
en  est  bien  moindre  et  nos  collections  d'Europe  n'en  renferment  que 


1.  Les  exemplaires  en  sont  rares,  car  déjà  le  Beharisidn  déclare  que   cet  ouvrage 
est  perdu,  et  Hammer  {Gesch.  d.  sch.  Red.  Persiens,  104)  en  disait  autant. 

2.  M.  R.  oublie  de  citer  la  préface  de  la  traduction   du  Gulistan,  où  ce  savant  a 
discuté  la  question  le  plus  au  long. 

3.  Cf.  Revue  crit.,  sept.  1S79,  P-  ->7' 

4.  Catal.of  Oudh,  p.  548;  Bibl.  Sprenger.,  W  i5og,  p.  64. 


d'histoire  et  de  littérature  423 

peu.  Nous  relevons  dans  le  présent  volume,  entre  autres  ouvrages  de  ce 
genre,  une  chronique  consacrée  à  la  dynastie  des  Kara  Khitay  du  Ker- 
mân  (p.  849  a).  L'histoire  des  Seldjoukides,  celle  surtout  des  sultans 
d'Iconium,  présente  encore  bien  des  points  obscurs,  et  nous  ne  connais- 
sons que  les  titres  de  plusieurs  Seldjoûk  ndtneh,  tels,  par  exemple,  que 
celui  que  composa  leur  contemporain  ^anici  '.  A  la  page  848  b,  il  en 
est  décrit  un,  qui  ne  paraît  pas  d'ailleurs  présenter  un  très  grand  inté- 
rêt; on  retrouve  ailleurs  le  nom  de  l'auteur  (p.  769  b)  sous  une  forme 
légèrement  différente. 

L'existence  d'une  version  persane  des  mémoires  de  Bâber  par  Zeyn 
ed-Dîn,  l'un  des  familiers  du  conquérant,  a  été  déjà  signalée  2;  en  voici 
encore  une  autre,  la  troisième  en  tout,  restée  jusqu'à  ce  jour  inconnue 
(p.  799  b.  II  [lisez  VI]).  M.  Rieu  fait  à  ce  propos  un  renvoi  «  see  Or. 
1999  »  à  un  volume  qu'il  nous  a  été  impossible  de  retrouver.  Nous 
avons  parlé  autrefois  de  l'inconvénient  que  présente  l'absence  d'une 
numérotation  suivie  des  volumes  :  or  celui  qui  contient,  à  notre  con- 
naissance, un  fragment  de  la  version  de  Zeyn  ed-Dîn  est  porté  dans  le 
t.  I,  p.  246,  sous  le  n°  Add.  26202;  le  n°  Or.  1999  en  serait  donc,  si 
ce  renvoi  est  exact,  un  second  exemplaire? 

La  littérature  populaire,  nous  voulons  dire  ces  recueils  de  contes 
dont  l'origine  indienne  est  certaine  dans  le  plus  grand  nombre  des  cas, 
et  qui  ont  dû  passer  par  la  Perse  avant  d'arriver  jusqu'aux  Arabes, 
cette  littérature  n'est  représentée  qu'assez  maigrement  à  Londres,  et 
l'on  peut  en  dire  autant  de  Paris.  Il  est  assez  remarquable  qu'en  dehors 
des  récits  dont  quelques-uns  ont  eu  en  Europe  la  prodigieuse  fortune 
que  l'on  sait,  on  ne  trouve  presque  plus  rien  qui  vaille  la  peine  d'être 
traduit;  au  moins  tout  ce  que  nous  avons  pu  en  lire  est  à  ce  point  pué- 
ril, vulgaire  ou  obscène  qu'un  lecteur  européen  ne  peut  guère  que  se 
détourner.  Toujours  est-il  que  nous  n'avons  encore  en  Occident,  sem- 
ble-t-il,  qu'un  trop  faible  nombre  des  monuments  de  ce  genre  de  litté- 
rature pour  que  l'on  puisse  de  sitôt  songer  à  en  présenter  un  tableau  à 
peu  près  complet. 

Nous  relèverons  encore  les  recueils  de  modèles  d'écriture  3  et  de  des- 



1.  Le  même  jKanici  est  auteur  de  la  version  poétique  de  Kalila  et  Dimna  portée 
sous  le  n°  Add.  7766,  p.  582  b,  dont  l'existence  même  n'avait  pas,  croyons-nous,  été 
encore  signalée. 

2.  Rev.crit.  ju.il.  1881,  p.  42. 

3.  Nous  ignorons  pourquoi  M.  R.  n'emploie  pas  pour  les  désigner  le  mot  mo- 
rakka'a,  qui,  pour  n'être  pas  dans  les  dictionnaires,  est  cependant  d'un  usage  fré- 
quent et  répond  assez  bien  à  notre  mot  a  album  ».  Nous  avons  remarqué  aussi  qu'à 
propos  d'aucun  de  ces  volumes  qu'il  décrit  avec  tant  de  soin,  il  ne  relève  le  nom  du 
génie  auquel  obéissent  les  vers,  nom  orthographié  le  plus  souvent  sous  la  forme 
Kaykahidj ;  les  invocations  qui  lui  sont  adressées  et  que  l'on  rencontre  si  souvent 
sur  les  feuillets  de  garde,  ont  pour  but  de  réclamer  sa  protection  contre  les  ravages 
qu'exercent  trop  souvent  les  rongeurs  ses  sujets. 


►ïflUTÀflàtTIJ    aa    T3    3fllOT2JH  a 
424      tfim    D3    23*3DBlq  ZS'lMs]     RTiVUE   CRITlQ|OfticjjpiBm    felî   ^BlVUOfHj'b 

sins  qui  sont  assez  nombreux;  la  plupart  sont,  bien  entendu,  d'origine 
indienne,  et  paraissent  être  des  plus  soignés.  Il  y  aurait  là  de  quoi  tenter 
un  orientaliste  qui  serait  en  même  temps  au  courant  des  questions  d'art 
et  qui  voudrait  retracer  l'histoire  de  l'enluminure  chez  les  musulmans. 
C'est  un  sujet  sur  lequel  nous  ne  connaissons  guère  que  quelques  pages 
publiées  par  M.  Sachau,  il  y  a  sept  ou  huit  ans,  dans  YŒsterreichische 
Wochenschrift. 

Voici  encore  quelques  remarques  que  nous  avons  faites  en  lisant  ce 
nouveau  tome  : 

P.  5oi  a,  1.  1,  et  5 10  dt,  1.  5  in  fin.,  c'est  sans  doute  une  erreur  typo- 
graphique qui  a  laissé  subsister  Tatavi,  ethnique  dérivé  du  nom  de  la 
ville  de  Tattah,  et  qui  est  imprimé  correctement,  p.  ex.,  p.  669  a,  846  a, 
865  b,  etc. 

Même  observation  sur  le  nom  Balaban,  écrit  tantôt  sous  cette  forme 
(p.  595  b,)  et  ailleurs  Balban  (p.  609  b,  618  a,  etc.). 

P.  773  b,  Add.  7675  :  le  Neh  Marner  a  été  traduit  en  français  et 
publié  à  Gênes  par  Lescallier  en  1808,  8°  de  i65  p. 

P.  814,  n°  xi  :  YAriîs  el-'ochchâk  a  été  traduit  par  M.  Cl.  Huart  et 
forme  le  28e  fascicule  de  la  collection  de  l'Ecole  des  hautes  Etudes,  Paris 
187.S,  8°  de  1  jo  p. 

P.  823  a,  in  med.  un  lapsus  calami  a  fait  écrire  Langlès,  Bibliothè- 
que universelle,  au  lieu  de  Biographie  universelle  ;  et  à  la  p.  861  a, 
Journal  des  Savants,  t.  XIV,  au  lieu  de  Notices  et  Extraits,  t.  XIV. 

E.  Fagnan.  iJflBxioji 
'W.  "  *        ibni 

làrlîeom 

-  ucb 

242.  —    I>Ie   AtticusauBguke  des  Demostlienesj  ein  Beitrag  zur  Textesge- 

schichte  des  Autors  (Mit  1  Tafel».  Von  W.  Christ.  Aus  den  Abhandlungen  der  k. 

bayer.  Académie  der  Wiss.  I  Cl.  XVI  Bd,  III  Abth.  Mûnchen  1882.  82  p.  in-4. 
29JID  ,,->Q 

On  sait  que,  dans  plusieurs  manuscrits  de  Démosthène,  la  plupart 
des  discours  se  trouvent  suivis  d'indications  stichométriques.  Ces  chif- 
fres, identiques  dans  les  divers  manuscrits,  ne  répondent  pas  au  nombre, 
d'ailleurs  très  variable,  des  lignes  que  chaque  discours  occupe  dans  ces 
manuscrits,  mais  se  rapportent  évidemment  à  quelque  manuscrit  mo- 
dèle ;  aussi  ces  chiffres  sont-ils  figurés,  non  pas  d'après  le  système 
ordinaire,  mais  d'après  une  méthode  plus  ancienne,  la  même  que  Ton 
voit  dans  les  inscriptions  attiques.  En  les  comparant  entre  eux,  on  a 
trouvé  que  les  documents  insérés  dans  le  discours  de  la  Couronne  et 
ailleurs  n'entraient  pas  dans  le  compte,  et  que  la  rédaction  plus  concise 
de  la  troisième  Philippique,  qui  se  trouve  dans  le  vieux  manuscrit  de 
notre  Bibliothèque  nationale  (2),  y  répondait  mieux  que  la  rédaction 
vulgate. 

Les  copistes  ne  se  contentaient  pas  de  marquer  le  total  des  lignes  à  la  fin 


d'histoire  et  de  littérature  425 

d'un  ouvrage,  ils  marquaient  aussi  par  des  lettres  placées  en  marge  les 
sommes  partielles,  A  indiquant  la  première  centaine,  B  deux  cents,  et 
ainsi  de  suite.  M.Scbanza  récemment  signalé  ces  lettres  stichométriques 
dans  quelques  manuscrits  de  Platon.  M.  Christ  les  a  retrouvées  dans  un 
des  manuscrits  de  Démosthène  que  possède  la  bibliothèque  de  Munich, 
celui  qu'on  appelle  Bavaricus ou  B.  Il  faut  dire  que  ces  lettres  marginales 
n'avaient  pas  tout  à  fait  échappé  à  l'attention  des  savants.  Reiske  les 
avait  déjà  remarquées  et  signalées  dans  son  édition  de  Démosthène  ; 
mais,  comme  il  n'en  avait  pas  deviné  la  signification,  la  chose  resta 
inaperçue.  On  peut  donc  dire  que  c'est  M.  C.  qui  les  a  vraiment  décou- 
vertes. Il  s'attendait  à  trouver  les  mêmes  lettres  dans  le  manuscrit  F  de  laf 
bibliothèque  de  Saint-Marc,  plus  ancien  que  celui  de  Munich,  et  qui 
passait  pour  en  être  l'original.  Comme  elles  ne  s'y  trouvent  pas,  il  faut 
croire  que  les  deux  manuscrits,  d'ailleurs  très  semblables,  ont  été  copiés 
sur  le  même  archétype.  Mais  M.  Lebègue,  élève  de  l'Ecole  des  Hautes- 
Etudes,  a  relevé  dans  S,  et  particulièrement  dans  la  Midienne  et  dans  le 
discours  de  la  Couronne,  les  mêmes  lettres  stichométriques  aux  mêmes 
endroits.  On  comprend  que  ces  signes  placés  à  de  courtes  distances, 
offrent  à  la  critique  des  données  plus  précises  que  n'avaient  fait  les 
sommes  totales.  Mais  examinons  d'abord  à  quel  exemplaire  ancien  on 
peut  attribuer  les  unes  et  les  autres.  Jusqu'ici  on  avait  pensé  que  les 
lignes  en  question  étaient  celles  des  copies  conservées  dans  la  bibliothè- 
que d'Alexandrie.  M.  C.  n'est  pas  de  cet  avis.  Denys  d'Halicarnasse 
(Démosth.,  ch.  lvii)  rapporte  que  Démosthène  laissa  cinquante  mille  ou 
soixante  mille  lignes.  Or,  en  prenant  pour  point  de  départ  les  stiques 
indiqués  dans  nos  manuscrits,  on  arrive  pour  toute  l'œuvre  de  Dé- 
mosthène à  un  chiffre  qui  ne  s'élève  pas  beaucoup  au-dessus  de  quarante- 
deux  mille.  M.  C.  en  tire  la  conséquence  que  la  somme  donnée  par 
Denys,  et  probablement  empruntée  aux  Pinakes  de  Callimaque,  se 
rapporte  à  un  autre  exemplaire  de  format  plus  petit,  et  que  le  manuscrit 
modèle  auquel  remonte  la  stichométrie  traditionnelle  est  postérieur  à 
Denys.  Peut-on  savoir  quel  était  ce  manuscrit?  Certaines  copies  dites 
d'Atticus  ('AxTixtava)  faisaient  autorité  pour  le  texte  de  Démosthène, 
comme  pour  celui  d'Eschine,  de  Platon,  peut-être  d'autres  auteurs 
encore  :  on  le  sait  par  Lucien  et  Harpocration.  De  plus,  les  manuscrits 
F  et  B  portent  à  la  fin  de  la  dernière  Philippique  cette  souscription  : 
AtwpQunai  àzb  Buo  'ATiaiavwv  '.  Il  est  donc  assez  vraisemblable  que  les 
stiques  en  question  sont  ceux  des  iVroxiava.  Faut-il  penser  au  célè- 
bre ami  de  Cicéron  qui  avait,  nous  le  savons,  un  grand  nombre  d'esclaves 
copistes  et  une  fabrique  de  manuscrits?  Tel  était  l'avis  de  Schneidewin, 
avis  partagé  par  Birt  (Antikes  Buchwesen,  p.  284).  Il  est  vrai  que 
Lucien  (Àdv.  indoctum,  ch.  11  et  xxiv)  traite  cet  Atticus  de  simple  copiste, 

1.  Charles  Graux  (Rev.  dephilol.,  187g.  p.  i3)  avait  déjà  donne  la  bonne  lecture  de 

6es  mots  abrégés  par  les  copistes.  ,      , 

0      r  v  .OÎBglIJV 

jb  Ibîoî  al  isupisrri  sb  8cq  JtnsijsJnsînoo  22  sn  gsîeiqos  zsJ 


5ÎÎÎI?  'I0T2IH0 

420  REVUE   CRITIQUE 

(3i6}vto-/pa?°Ç ;  mais  Lucien  avait  plus  d'esprit  que  d'exactitude.  M.  C. 
adopte  donc  cette  conjecture,  en  la  modifiant  toutefois  quelque  peu  :  il 
suppose  que  la  fabrique  d'Atticus  continua  d'exister  sous  le  même  nom 
après  la  mort  de  son  fondateur  et  que  les  'Arcatava  de  Démosthène 
furent  écrits  sous  les  Césars  successeurs  d'Auguste. 

Le  point  essentiel,  c  est  que  les  indications  stichometriques  venues 
jusqu'à  nous  ne  proviennent  pas  de  Callimaque  et  de  la  bibliothèque 
d'Alexandrie,  mais  ont  une  origine  plus  récente.  On  verra  que  ce  fait  a 
son  importance  pour  la  critique  du  texte.  Les  lettres  marginales  ont 
permis  à  M.  G.  de  constater  que  les  documents  du  discours  de  la  Cou- 
ronne, de  la  Midienne  et  des  autres  discours,  ne  se  trouvaient  pas  dans 
les  exemplaires  d'Atticus.  Il  faut  cependant  excepter  le  plaidoyer  contre 
Néère,  dont  les  chiffres  ne  s'expliquent  qu'en  comprenant  les  documents 
dans  le  nombre  des  lignes.  Il  en  est  de  même  de  la  loi  de  Timocrate, 
im.  §  39,  et  peut-être  aussi  des  autres  lois  que  l'accusateur  rapproche  de 
celle-ci  dans  les  §§  42-63 .  D'un  autre  côté,  les  Attikiana  ne  contenaient  pas 
la  grande  lettre  de  Philippe  à  laquelle  la  dernière  Philippique  est  censée 
répondre,  ni  les  vers  de  Sophocle  et  de  Solon  cités  dans  l'Ambassade, 
§§  247  et  256,  ni  les  épigrammes  auxquelles  l'orateur  se  réfère  dans 
YHalonnèse,  §40,  et  dans  la  Couronne,  §  289.  Laissons  de  côté  lestrimè- 
tres  de  VAntigone  et  l'élégie  de  Solon,  morceaux  connus  et  qu'il  était 
facile  d'ajouter;  n'insistons  pas  non  plus  sur  l'épigramme  des  guerriers 
morts  à  Chéronée,  au  sujet  de  laquelle  les  critiques  ne  sont  pas  d'accord; 
mais  arrêtons-nous  à  l'inscription  de  l'autel  de  Zeus  citée  dans  l'Halon- 
nèse,  pièce  plus  difficile  à  procurer  et  certainement  authentique.  Qu'elle 
soit  tirée  d'exemplaires  plus  anciens  que  ceux  d'Atticus,  ou  qu'elle  ait 
été  ajoutée  en  marge  par  un  commentateur,  elle  suffit  pour  prouver  que 
l'omission  d'une  pièce  justificative  dans  l'exemplaire  auquel  remontent 
les  indications  stichometriques  ne  suffit  pas  à  elle  seule  pour  rendre 
cette  pièce  suspecte.  —  Plusieurs  plaidoyers  civils,  contre  Lakritos, 
contre  Makartatos,  contre  Stephanos,  contiennent  des  documents  qu'il 
est  difficile  de  suspecter  et  dont  plusieurs  ne  sont  pas  de  nature  à  être 
conservés  dans  un  dépôt  public.  M.  C.  suppose  avec  raison  que  le  logo- 
graphe  avait  inséré  ces  documents  dans  les  discours  écrits  qu'il  remit 
aux  plaideurs  et  que  ces  documents  passèrent  de  ces  exemplaires  dans  les 
manuscrits  de  Démosthène  plus  anciens  que  les  Attikiana.  —  La  troi- 
sième Philippique  fournit  aussi  la  preuve  que  la  tradition  de  nos  ma- 
nuscrits remonte  quelquefois  plus  haut  que  l'édition  d'Atticus,  je  veux 
dire  l'édition,  quel  que  soit  le  nom  que  l'on  doive  lui  donner,  d'où 
provient  le  texte  de  2.  La  vulgate  offre  en  plusieurs  endroits  un  texte 
plus  long,  qui  a  donné  lieu  à  beaucoup  de  discussions.  J'ai  essayé  de 
prouver  que  ce  dernier  texte,  inadmissible  si  on  le  regarde  comme  une 
autre  rédaction,  a  été  formé  de  deux  rédactions  juxtaposées,  celle  de  2  et 
une  autre  qui  n'est  pas  moins  autorisée.  M.  C.  adopte  cette  manière  de 
voir   et  il  attribue  les  variantes  de  la  seconde  rédaction,  sinon  à  Dé- 


d'histoire  et  be  littérature  427 

mosthène  lui-même,  du  moins  aux  amis  qui  publièrent  cette  harangue 
après  la  mort  de  l'orateur. 

Je  conclus  de  ce  qui  précède  que,  pour  juger  de  l'authenticité  des  docu- 
ments insérés  dans  Démosthène,  il  faut  soumettre  chacun  d'eux  à  un 
examen  spécial;  qu'un  document  ne  doit  pas  être  considéré  comme 
suspect  parce  qu'il  est  omis  dans  le  calcul  stichométrique,  encore  moins 
pour  être  omis  dans  le  texte  de  2.  En  effet,  ce  manuscrit  contient  les 
pièces  les  plus  évidemment  apocryphes  du  discours  de  la  Couronne,  et 
il  ne  donne  pas  les  pièces  authentiques  de  plusieurs  plaidoyers  civils,  ni 
la  plupart  des  pièces  poétiques  mentionnées  plus  haut. 

Je  dépasserais  les  limites  d'un  article  si  je  voulais  rendre  compte  de 
tous  les  détails  intéressants  que  renferme  le  mémoire  de  M.  Christ.  Il 
énumère  brièvement  les  passages  de  la  Midienne  précédés  dans  B  et  F, 
comme  dans  1,  du  signe  critique  de  l'obel  :  j'en  ai  parlé  dans  un  autre 
endroit.  M.  Christ  s'efforce  aussi,  en  se  servant  de  certains  indices,  de 
retrouver  Tordre  d'après  lequel  se  suivaient  les  discours  de  Démosthène 
dans  l'édition  d'Atticus,  et  comment  ils  y  étaient  distribués  en  volumes. 
N'oublions  pas  de  signaler  la  planche  photolithographique  qui  reproduit 
deux  textes  du  Bavaricus. 

H    W 

«6mî 


243. —  Der  Kanipf  Ludwlgs  des  Baiern  mit  der  rœmischcn  Curie,  ein 
Beitrag  zui*  klrchlicben   Geschiclite   des   XIV.    Jnhrliuridei-ti»,  von 

Lie.  Dr  Garl  Mùller,   Répètent   in  Tûbingen.  Tûbingen,   Laupp,  1879-1881,.  xx, 
407;  xii,  38o  p.  8e.  Prix  :  20  fr. 

Les  luttes  politico-religieuses  de  l'Allemagne  à  notre  époque  ont  rendu 
quelque  actualité  aux  grands  débats  qui  troublèrent  l'empire  et  la  pa- 
pauté au  xive  et  au  xve  siècle.  Plusieurs  écrivains  de  mérite  ont  été  ame- 
nés ainsi  à  reprendre,  en  ces  derniers  temps,  un  sujet  qui,  ne  pouvant 
intéresser  par  le  talent  ou  le  génie  des  hommes  qui  y  figurent,  fournis- 
sait au  moins  la  genèse  de  la  grande  crise  du  siècle  suivant.  Après  les 
travaux  récents  de  Riezler  et  de  Hoefler,  voici  le  volumineux  ouvrage 
de  M.  C.  Mùller,  qui  vient  reprendre  dans  tous  ses  détails  le  tableau  de 
la  lutte  entre  Louis  de  Bavière  et  les  pontifes  qui  occupèrent  le  Saint- 
Siège  pendant  les  deux  quarts  du  xive  siècle.  M.  M.  n'a  point  eu  l'inten- 
tion de  retracer  le  côté  politique  de  cette  lutte  ;  il  s'en  est  tenu  au  côté 
religieux,  sans  pouvoir  échapper,  naturellement,  à  la  nécessité  de  résu- 
mer également  les  faits  les  plus  marquants  de  l'époque,  tant  sur  le  ter- 
rain diplomatique  que  sur  le  terrain  militaire.  Son  récit  commence  à 
l'élection  de  Louis  IV,  en  1314,  et  se  poursuit  jusqu'à  sa  mort,  en  1347. 
Mais  l'auteur  ne  nous  présente  point  une  narration  suivie  ;  il  a  cru  de- 
voir employer  une  méthode  d'investigation  plus  sûre  peut-être,  plus  apte 
à  donner  des  résultats  satisfaisants  au  point  de  vue  de  la  critique,  mais 


428  REVUE   CRITIQUE 

qui  ne  laisse  pas  d'embarrasser  terriblement  la  trame  du  récit.  Pour  bien 
nous  montrer  le  détail  de  la  lutte  que  Louis  eut  à  soutenir  contre  la  pa- 
pauté, depuis  Jean  XII  jusqu'à  Clément  VI,  il  a  partagé  l'histoire  de  son 
règne  en  cinq  périodes  distinctes,  et,  pour  chacune  de  ces  périodes,  il  re- 
prend, un  à  un,  tous  les  évêchés  de  l'empire  d^llemagne,  nous  racon- 
tant sous  quel  aspect  la  lutte  s'est  manifestée  sur  le  territoire  de  chaque 
évêque,  quel  rôle  chacun  d'eux  a  joué  dans  la  bataille,  etc.  M.  M.  arrive 
à  grouper  de  la  sorte  une  foule  de  détails,  sur  l'utilité  desquels  je  ne  lui 
chercherai  point  chicane,  et  qui  n'auraient  point  trouvé  de  place  dans 
un  récit  plus  homogène;  mais  il  sacrifie,  plus  qu'il  n'est  bon,  l'ensemble 
de  son  sujet.  A  la  fin  de  chaque  période,  ce  sont  des  récapitulations,  des 
résumés,  qui  ne  contribuent  point  à  rendre  plus  lucide  un  livre  peu  at- 
trayant en  lui-même,  grâce  à  l'interminable  détail  des  controverses  juri- 
diques et  théologiques  dont  il  est  rempli  et  aux  notes  infinies  qui  vien- 
nent alourdir  encore  le  récit. 

Ces  graves  objections  de  forme  ne  doivent  pas  nous  rendre  injuste  ce- 
pendant pour  le  mérite  réel  de  l'auteur.  Si  l'on  ne  peut  guère  appeler 
son  travail  un  livre,  dans  le  sens  que  nous  attachons  à  ce  mot,  c'est  un 
recueil  de  documents,  des  plus  estimables  et  des  plus  consciencieux. 
M.  M.  a  dépouillé  avec  une  patience  dont  il  faut  lui  savoir  gré  la  litté- 
rature peu  récréative  du  sujet,  ces  interminables  factums  que  les  théolo- 
giens impériaux  et  pontificaux  lançaient  l'un  contre  l'autre,  pour  établir 
la  suprématie  de  leurs  maîtres,  et  qui  tous  ne  sont  pas  aussi  curieux  que 
le  Defensor  pacis  de  Marsile  de  Padoue,  ou  tel  autre  écrit  plus  connu 
de  l'époque.  Ce  n'est  pas  tout;  le  jugement  de  l'auteur  est  sûr;  il  reste 
toujours  modéré  et  circonspect  dans  ses  appréciations,  et  l'on  ne  saurait 
prétendre  qu'il  se  passionne  pour  l'un  ou  l'autre  des  partis  ou  des  cham- 
pions en  présence.  Il  est  vrai  que  ce  serait  le  plus  souvent  difficile,  étant 
donnés  les  héros  de  son  récit.  De  très  nombreux  appendices  discutent 
avec  compétence  certains  points  chronologiques  et  autres,  que  M.  Mill- 
ier n'a  pu  caser  dans  ses  notes,  si  largement  semées  partout.  Il  y  a  même 
ajouté  quelques  documents  inédits  qui  ne  laissent  pas  de  présenter  de 
l'intérêt  pour  les  rapports  du  pouvoir  temporel  et  de  l'Eglise  d'alors.  En 
somme,  quelque  pénible  que  soit  la  lecture  de  l'ouvrage  et  bien  qu'on 
doive  regretter  que  l'auteur  n'ait  point  su  agencer  d'une  façon  plus  sa- 
tisfaisante les  matériaux  si  patiemment  recueillis  par  lui,  son  travail 
restera  comme  un  manuel  indispensable  à  tous  ceux  qui  s'occupent  de 
l'histoire  religieuse  et  politique  de  l'Allemagne  ou  de  la  papauté  au 
xive  siècle. 

R. 


suoiti 
d'histoire  et  de  littérature  429 

'O'JI  iJb  ^friBTf  fil  )fl9JTl 

EXPLO,T  DE  M  MARY  LAFOI¥ 

L'an  rail  huit  cent  quatre-vingt-deux,  le  trente-un  octobre. 

A  la  requête  de  M.  Mary  Lafon,  homme  de  lettres,  demeurant  à 
Montauban  (Tarn-et-Garonne), 

J'ai,  Charles-Marin  Monet,  huissier  près  le  tribunal  civil  de  la  Seine, 
demeurant  à  Paris,  rue  de  Provence,  n*  59, 

Fait  sommation  à  Monsieur  le  directeur  gérant  du  journal  La  Revue 
critique  en  ses  bureaux  à  Paris,  rue  Bonaparte,  n°  28,  où  étant  et  par- 
lant à  un  employé  dudit  journal,  ainsi  déclaré  : 

De,  dans  le  plus  prochain  numéro  de  la  Revue  critique,  insérer  la  let- 
tre suivante  de  mon  requérant,  sous  peine  de  s'y  voir  contraint  par 
toutes  les  voies  de  droit  et  sous  l'offre  que  fait  le  requérant  de  payer 
l'impression  de  tout  ce  qui  excéderait,  dans  sa  réponse,  le  double  de  la 
longueur  de  l'article  auquel  elle  est  faite,  le  tout  conformément  à  l'arti 
cle  n  de  la  loi  du  25  mars  i852. 
«  Monsieur, 

«  Vous  avez  publié,  le  vingt-cinq  septembre  dernier,  un  article  signé 
«  P.  M.  qui,  dans  une  forme  que  je  ne  qualifierai  pas,  constitue,  à  chaque 
«  ligne,  une  insulte  personnelle  plutôt  qu'une  critique  de  l'Histoire  lit- 
«  ter  aire  du  Midi  de  la  France.  Un  pareil  langage  et  de  tels  procédés  ne 
«  méritent  que  le  dédain.  Si  j'use  donc  du  droit  de  défense,  c'est  pour 
«  ceux  de  vos  lecteurs  qui  préfèrent  les  faits  aux  allégations,  et  les  rai- 
«  sons  aux  injures. 

«  Le  tableau  de  la  littérature  gallo-latine,  présente  en  70  pages,  est 
«  jugé  par  votre  critique  sur  des  titres  courants.  Il  ne  m'appartient 
«  pas  de  répéter  ici  les  éloges  accordés  à  ce  travail  par  des  hommes  plus 
«  compétents,  mais  que  les  lecteurs  sérieux  voient  et  jugent  à  leur  tour. 

«  Je  ne  connaissais  pas  le  manuscrit  d'Oxford  du  Gérard  de  Roussil- 
«  Ion,  dont  le  début  fut  publié  en  1869  par  la  Revue  de  Gascogne,  et 
«  en  i853,  c'est-à-dire  16  ans  avant,  je  demandais  au  Comité  des  monu- 
«  ments  écrits  de  l'histoire  de  France  les  moyens  d'aller  transcrire  ce  ma- 
«  nuscrit  de  la  bibliothèque  Bodléienne  Canonici  n»  94  et  celui  du 
«  musée  Britannique  de  Londres,  bibliothèque  Harléienne  n°  1334. 

«  A  ce  propos,  je  pourrais  demander  à  ce  critique  si  tranchant,  s'il 
«  connaît  bien  le  quatrième  manuscrit  du  Gérard  conservé  à  Bruxelles 
«  dans  la  Bibliothèque  de  Bourgogne  et  décrit  en  ces  termes  sous  les 
«  nos  1450  et  1441,  dans  l'inventaire  de  Bruges  :  ung  autre  grand  volume 
«  couvert  de  cuir  rouge  à  deux  petits  cloants  de  léton,  intitulé  le  livre  de 
«  Gérard  de  Roussillon,  rimé  en  Gascoing. 

«  A  cepropos,  si  c'est  pour  me  donner  une  leçon  que  M.  P.  M.  affecte 
«  d'écrire  Girart,  il  me  permettra  de  lui  rappeler  que,  dans  notre  manus- 
«  crit  à  nous  7991  (124  fonds  Cangé),  ce  nom  historique  est  générale- 
«  ment  orthographié  Gérar,  Gérars  et  Gérart. 


430  REVUK    CRITIQUh 

«  Je  n'ai  tenu  nul  compte  des  travaux  récents  et  notamment,  quel 
«  crime!  de  ceux  de  M.  P.  M.  Cela  est  parfaitement  vrai.  Il  y  a  dans  les 
«  romanisants  deux  catégories  :  celle  du  Midi,  qui  parle  la  langue  mère, 
«  et  qui  peut  l'entendre  et  l'écrire  dans  ses  divers  dialectes,  et  celle  du 
«  Nord  qui  l'apprit  comme  on  apprend  le  sanscrit  et  dont  les  pontifes 
«  sont  appelés,  de  ce  côté  de  la  Loire,  des  savants  de  Dictionnaire.  De 
«  ceux-là  j'avoue  volontiers  n'avoir  jamais  lu  une  ligne. 

«  Mais  M.  P.  M.  prétend  que  mes  traductions  fourmillent  de  contre  - 
«  sens.  Eh  bien,  je  le  mets  au  défi  d'en  signaler  un  seul,  dans  les  ioo  ou 
«  i5o  pages  traduites.  Il  serait,  du  reste,  bien  posé  pour  cela,  lui  qui  tra- 
«  duisait  un  adverbe,  foras,  par  une  paire  de  ciseaux,  bévue  légendaire 
t  dans  le  Midi,  et  dont  le  Progrès  libéral,  un  ;des  bons  journaux  de 
«  Toulouse,  égaya  bien  ses  lecteurs  il  y  a  quinze  ans.  J'ai  traduit  quel- 
«  ques  pièces  en  vers,  et  quels  vers!  ajoute  le  critique.  Je  pourrais  me 
«  contenter  de  sourire,  car  nous  sommes  ici  sur  le  terrain  purement  lit- 
«  téraire  où  M.  P.  M.  ne  prétend  pas  sans  doute  me  donner  des  leçons, 
«  mais  que  répondre  à  quelqu'un  qui,  en  présence  d'une  découverte  lit— 
«  téraire  assez  importante,  vous  dit  du  bout  des  lèvres  :  M.  Mary  Lafon 
«  parle  du  Bréviaire  d'amor,  pour  dire  seulement  que  le  Dante  y  a  puisé 
«  l'idée  de  la  Divine  Comédie? 

«  Je  n'en  ai  pas  dit  davantage  en  effet  et  me  suis  borné  à  le  prouver 
«  en  citant  le  passage  qui  révèle  ce  fait  si  glorieux  pour  notre  nation, 
«  et  si  peu  digne  d'attention  aux  yeux  de  M.  P.  M... 

«  Voilà,  Monsieur,  le  moins  qu'on  puisse  répondre  à  des  apprécia- 
«  tions  aussi  injustes  et  aussi  virulentes.  Je  ne  regrette  qu'une  chose 
«  en  finissant,  c'est  d'avoir  été  forcé,  par  votre  refus  d'insérer  ma  lettre, 
«t  d'invoquer  l'aide  de  la  loi.  J'ai  l'honneur  de  vous  saluer. 

«  Signé.  Mary   Lafon.  » 

A  ce  que  le  susnommé  n'en  ignore,  je  lui  ai,  en  parlant  comme  dessus, 
laissé  la  présente  copie. 

Coût  neuf  francs  trente-cinq  centimes.  Employé  pour  la  copie  une 
feuille  de  timbre  à  un  franc  20  c. 

Cn.  Monet. 

Cette  réponse  ne  répond  à  aucune  de  nos  critiques  :  bien  au  contraire, 
elle  les  confirme.  La  direction  de  la  Revue  l'avait  refusée  une  première  fois, 
et  nous  croyons  que  M.  Mary  Lafon  n'y  eût  point  perdu.  Mais  M.  L. 
insiste  et  se  fait  seconder  d'un  huissier  :  qu'il  soit  fait  selon  sa  volonté. 

M.  L.  dit  que  j'ai  jugé  son  tableau  de  la  littérature  gallo-latine  sur  des 
titres  courants.  La  vérité  est  que  j'ai  cité  les  premiers  de  ces  titres  courants 
pour  en  faire  apprécier  l'étrangeté.  J'aurais  pu,  assurément,  montrer  que  le 
texte  n'était  pas  moins  étrange.  Je  ne  l'ai  pas  fait.  Est-ce  de  cela  que  M.  L. 
se  plaint?  —  J'ai  reproché  à  M.  L.  d'avoir  ignoré  qu'on  possédait,  dans 
un  ms.  d'Oxford  maintenant  publié,  le  début  du  poème  de  Girart  de  Rous- 
sillon,  début  qui  manque  au  ms.  de  Paris,  seul  indiqué  par  M.  Lafon.  Mon  ad- 


o'HISTOIRK    BT    DK    LITTÉKATUHh  43  1 

versaire  me  répond  qu'en  i853  il  a  sollicité  une  mission  à  l'effet  d'aller  copier 
ce  ms.  d'Oxford.  Mais  en  quoi  ce  détail  infirme-t-il  ma  critique?  M.  L. 
parle,  dans  son  livre,  du  poème  de  Girart  de  Roussillon  comme  d'un  texte 
incomplet.  Je  lui  dis  qu'il  se  trompe,  que  ce  texte  est  complet  et  peut  être 
consulté  partout,  puisqu'il  est  imprimé.  M.  L.  contestera-t-il  qu'il  ignorait 
que  le  ms.  d'Oxford  fût  publié?  Ai-je  tort?  Pour  le  dire  en  passant, 
M.  L.  se  trompe  absolument  en  parlant  d'un  quatrième  ms.  de  Girart  de 
Roussillon  qui  serait  conservé  à  Bruxelles.  Il  n'y  a  pas  à  Bruxelles  de  ms.  de 
ce  poème,  j'en  ai  la  certitude  absolue.  Le  texte,  tiré  d'un  ancien  inventaire, 
que  cite  M.  L.  se  rapporte  à  un  ms.  perdu.  On  a  bien  d'autres  mentions 
de  mss.  perdus  du  même  poème.  J'en  donne  toute  une  série  dans  l'introduc- 
tion, actuellement  sous  presse,  de  ma  traduction  de  cette  chanson  de  geste. 
—  M.  L.  se  fait  un  mérite  de  ne  point  lire  mes  travaux.  Libre  à  lui!  Seu- 
lement, comme  un  certain  nombre  d'œuvres  fort  importantes  de  la  littéra- 
ture du  midi  de  la  France  ne  peuvent  se  lire  que  dans  mes  éditions,  il  faut 
que  M.  L.  se  résigne  à  passer  ces  œuvres  sous  silence  et,  par  conséquent, 
à  laisser  des  lacunes  considérables  dans  son  Histoire  littéraire  du  midi  de  la 
France.  C'est  là  le  principal  reproche  que  je  lui  ai  adressé.  Habemus  confi- 
tentem  reum.  Notons,  en  outre,  que  je  ne  suis  pas  le  seul  érudit  mis  à  l'in- 
dex par  M.  Lafon.  Il  paraît  disposé  à  ne  tenir  compte  que  de  la  caté- 
gorie de  romanisants  «  qui  parle  la  langue  mère  et  qui  peut  l'entendre  et 
«  l'écrire  en  ses  divers  dialectes.  *  Le  malheur  est  que  cette  catégorie,  qui 
est,  je  crois,  fort  peu  nombreuse,  n'a  contribué  que  pour  une  faible  part  à  la 
mise  au  jour  de  la  littérature  du  midi  de  la  France.  Depuis  Raynouard  et 
Rochegude,  l'immense  majorité  des  éditeurs  de  textes  méridionaux  se  com- 
pose de  Français  du  nord  (de  Franchiman,  comme  on  dit  dans  le  Midi)  et 
d'Allemands.  Tous  ces  éditeurs  et  leurs  éditions  étant  uniformément  ignorés 
de  M.  L.,  il  me  semble  que  j'ai  pu  dire  avec  quelque  apparence  de  rai- 
son que  M.  L.  «  ne  sait  de  la  littérature  provençale  que  le  peu  qu'on  en 
«  savait  il  y  a  cinquante  ans.  »  J'ajoute  ici  que  ce  peu,  il  le  sait  fort  mal.  Du 
reste,  si  M.  L.  a  un  profond  mépris  pour  les  «  savants  de  dictionnaire,  » 
il  ne  peut  ignorer  que  ceux-ci  ne  sont  pas  en  reste  à  son  égard,  car  il  a  pu 
remarquer  que  ses  écrits  ne  sont  pas  souvent  cités  dans  les  livres  d'érudition 
de  notre  temps.  Si  du  moins  il  trouvait  une  compensation  dans  l'approba- 
tion des  romanisants  de  la  première  catégorie,  ceux  du  Midi  !  Mais  non  ! 
c'est  lui-même  qui  en  fait  mélancoliquement  l'aveu  :  «  J'avais  tout  sacrifié 
«  au  Midi,  »  dit-il  à  la  p.  xin  de  sa  préface,  «  et,  bien  qu'il  n'en  ait  jamais 
«  témoigné  la  moindre  reconnaissance  à  son  historien,  je  continuai  l'œuvre 
u  entreprise  sans  broncher  d'un  pas.  »  M.  L.  en  reste  donc  réduit  à  son 
propre  et  unique  suffrage. 

Je  ne  relèverai  pas  le  défi  que  me  lance  M.  L.  de  signaler  «  un  seul  con- 
tre-sens »  dans  les  traductions  qui  constituent  une  bonne  part  de  son  livre. 
La  Revue  critique,  n'a  pas  de  place  pour  des  corrigés  de  versions  élémen- 
taires. Que  M.  L.  veuille  bien  se  tenir  pour  satisfait  des  charitables  avis 
que  je  lui  ai  donnés  en  d'autres  occasions  sur  la  manière  de  traduire  les  tex- 


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432  REVUE    CRITIQUfc  ri    *       l 

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tes  provençaux  '.  J'ai  assez  de  fois  démontré  qu'il  n'était  pas  en  état  d'entendre 
les  textes  les  plus  faciles  pour  que  la  preuve  ne  soit  plus  à  faire.  Quant  à 
foras  traduit  par  «  paire  de  ciseaux  »,  si  un  journal  a  jugé  à  propos  d'en 
égayer  ses  lecteurs,  tout  ce  que  je  puis  dire,  c'est  que  ce  journal  a  été  inspiré 
par  un  homme  bien  ignorant.  Il  s'agit  d'un  passage  du  poème  de  la  croisade 
albigeoise  (v.  5o6j  où  il  y  aforsa,  non  foras,  et  forsa  signifie  en  effet  une 
paire  de  grands  ciseaux  qu'on  appelle  encore  forces.  J'ai  expliqué  ce  passage, 
sur  lequel  M.  L.  seul  était  capable  de  se  méprendre,  dans  la  Revue  criti- 
que de  1868,  t.  II,  p.  3ig.  —  Enfin  M.  L.  m'en  veut  de  n'avoir  pas  fait 
ressortir  la  «  découverte  littéraire  assez  importante  »  qu'il  aurait  faite  en  pré- 
tendant que  «  le  Dante  »  a  puisé  dans  le  Breviari  d'amor  l'idée  de  la  Divine 
Comédie.  Voilà  du  moins  pour  terminer,  une  amusante  bévue.  Je  n'ai  point 
vu  dans  l'assertion  de  M.  L.  une  «  découverte  »  :  j'y  ai  vu  ce  qu'il 
y  fallait  voir,  une  idée  absurde.  M.  L.  l'avait  déjà  émise  dans  urv/^r^,^ 
cèdent  ouvrage,  et,  à  cette  occasion,  M.  Gabriel  Azaïs  (un  savant  du  M i4fa> m 
dont  M.  Lafon  serait  mal  venu  à  contester  l'autorité)  en  a  surabondam-j,^ 
ment  démontré  l'inanité  dans  son  introduction  au  Breviari  d'amor,  PP-;  ifcx>5-3n 

LXVI'  Paul  Meyer3'31  ^b  3li:> 

loiq  luoq  ,iO 

..: b  noaijn  uo  ie'j  sup  33 

iuoftuz  la  »i   ^màrn-idl  §iv 

LETTRE      DE     M.      Cil.     HOKEL 

bnaîsiq  ,»:    M  001  sgsq 

Messieurs  les  Rédacteurs  de  la  Revue  critique, 
Je  viens  vous  remercier  bien  sincèrement  des  articles  que  vous  avez 
consacrés  à  ma  traduction  de  Y  Etat  romain  de  M.  Madvig  et  qui  étaient 
empreints  de  la  plus  grande  bienveillance.  Je  suis  particulièrement  re- 
connaissant à  M.  Camille  Jullian  d'avoir  pris  la  peine  d'examiner  toutes 
les  petites  notes  que  j'ai  cru  devoir  ajouter;  je  ne  puis  voir  qu'avec  plai- 
sir la  Revue  suivre  ses  traditions  d'impartialité  et  critiquer  en  toute 
franchise,  même  un  de  ses  fondateurs.  Cest  dire  que  je  ne  prétends  point 
à  l'indulgence  et  que  j'accepte  très  volontiers  les  observations  générales 
qui  me  sont  faites  par  M.  Jullian.  Comme  lui,  je  regrette  de  n'avoir  pas 
eu  le  temps  de  rechercher  dans  le  Corpus  Inscriptionum  les  inscriptions 
citées  dans  l'ouvrage  d'après  Orelli  et  Wilmanns;  quant  aux  passages 
où  M.  Madvig  fait  de  la  polémique  avec  Mommsen,  Niebuhr,  Huschke 
et  d'autres,  j'ai  cru  me  conformer  aux  intentions  de  l'auteur  en  laissant 
à  ses  critiques  leur  caractère  impersonnel  *. 

Si,  en  deux  endroits  seulement,  j'ai  intercalé  deux  phrases  dans  le 
texte  entre  crochets  et  en  prévenant  le  lecteur  en  note,  je  ne  pense  pas 


1.  Bibliothèque  de  l'École  des  Chartes,   b°  série,  t.  II  (186 1),   pp.  63  et  64;  Fla- 
menca (i865),  pp.  xli-xliii;  Revue  critique,  1868,  article  17g. 

2.  Combattre  Niebuhr  en  le  nommant,  mais  sans  citer  ses  ouvrages,  n'est  point  faire 
de  la  critique  impersonnelle. 


d'histoire  et  de  littérature  433 

qu'avec  de  telles  précautions  on  puisse  me  reprocher,  comme  le  fait 
M.  J.,  d'avoir  manqué  à  «.  l'inviolabilité  du  texte  ». 

Mais  il  est  un  autre  genre  d'observations  que  je  ne  puis  laisser  sans  ré- 
ponse ;  elles  ont  trait  à  quelques  rares  endroits  où  j'ai  cru  pouvoir  rele- 
ver «  de  légères  erreurs  de  détail  »  ;  je  reconnais  que  ces  endroits  ne  sont 
pas  nombreux  —  il  y  en  a  quatre,  à  mon  avis;  —  mais  je  n'ai  pas  parlé 
dans  mon  avant-propos,  comme  semble  me  le  faire  dire  M.  J.  d'une  (se- 
conde) catégorie  de  notes  de  ce  genre,  à  quoi  il  ajoute  «  or  nous  ne 
trouvons  qu'une  seule  erreur  mentionnée,  etc.  »  Cela  importe  peu;  mais 
ce  qui  me  paraît  exiger  une  réponse,  c'est  l'appréciation  de  M.  J.  d'après 
laquelle  je  «  condamne  trop  vite  »,  je  «  rends  des  arrêts  »  et  je  relève 
des  erreurs  qui  n'existent  pas;  il  me  semble  que  c'est  un  peu  m'accuser 
d'outrecuidance'et  de  légèreté.  Voyons  de  quoi  il  s'agit. 

D'abord,  j'ai  contesté  que  Malaga  fût  un  municipe  romain,  comme  le 
disait  M.  Madvig,  et  j'ai  ajouté  qu'il  y  avait  une  seconde  erreur  dans  le 
même  passage,  puisqu'il  parlait  de  Latins  au  lieu  de  parler  d'incolae.  — 
M.  J.  me  répond  que  «  rien,  absolument  rien,  dans  la  lex  malacitana 
ne  prouve  »  la  latinité  de  cette  ville  et  qu'il  «  ne  serait  même  pas  diffi- 
cile d'y  relever  des  indices  qui  autorisent  la  conclusion  de  M.  Madvig.  » 
Or,  pour  prouver  à  M.  J.  qu'il  s'agit  bien  d'une  inadvertance  de  l'auteur 
et  que  j'ai  eu  raison  de  la  relever,  il  me  suffit  de  le  renvoyer  à  M.  Mad- 
vig lui-même,  tome  II  de  l'édition  allemande,  page  44,  et  surtout 
page  100  :  «  In  diesen  eigentlich  latinischen  Stàdten'.  »  M.  J.  prétend 
ensuite  que,  si  l'on  admet  que  Malaga  était  un  municipe  romain,  la  se- 
conde erreur  tombe  d'elle-même;  or  tel  n'est  point  le  cas,  et,  pour  s'en 
assurer,  il  suffit  de  lire  l'article  LUI  de  la  Lex  malacitana,  cité  par 
M.  Madvig,  qui  est  intitulé  :  In  qua  caria  incolae  suffragium  fe- 
rant  et  qui  prescrit  que  pour  les  élections  :  ex  curiis  sorte  ducito  unam, 
in  qua  incolae  qui  cives  Romani  Latinive  cives  erunt  suffragium  fe- 
rant.  Ce  sont  donc  les  incolae,  c'est-à-dire  les  habitants  non  originaires 
de  Malaga,  tant  latins  que  romains,  qui  votent  dans  une  curie  unique, 
tandis  que  les  citoyens  romains  ou  latins  originaires  de  la  ville  sont  ré- 
partis dans  plusieurs  curies  2. 

Ailleurs  j'ai  dit  que  le  texte  définitif  du  passage  de  Gaius,  I,  96,  tel 
qu'il  a  été  rétabli  d'après  le  palimpseste  de  Milan  par  M.  Studemund 
avait  échappé  aux  deux  principaux  savants  qui  se  sont  occupés  de  la 


1.  M.  Madvig  regardait,  dans  son  premier  volume,  Malaga  comme  un  municipe  ro- 
main :  il  en  parle,  dans  son  second,  comme  d'une  cité  latine.  L'une  et  l'autre  opinion 
peuvent  se  soutenir  :  aucune  ne  constitue  une  erreur.  Le  second  volume  de  YEtat 
romain  paraissait  à  peine  à  Leipzig  quand  le  compte-rendu  des  premiers  chapitres 
traduits  par  M.  Morel  s'imprimait  à  Paris. 

2.  L'auteur  parlait  du  droit  que'pouvaient  avoir  des  latins  de  voter  dans  une  as- 
semblée romaine;  il  citait  à  ce  propos  ce  texte  de  la  loi  de  Malaga,  où  les  incolae  la- 
tins, aussi  bien  que  les  incolœ  romains,  étaient  admis  à  voter  dans  les  assemblées  de 
la  ville  municipe  romain ..  Quelle  erreur  y  a-t-il  là? 


434  REVUE   CniTIQUR  rOT8IHra 

question,  M.  Marquardt  et  M.  Madvig.  Je  suis  fort  heureux  d'appren- 
dre que,  dans  sa  seconde  édition,  M.  Marquardt  a  corrigé  ce  qu'il  avait 
mis  dans  la  première  (tome  I,  p.  57);  cette  seconde  édition  a  paru  en 
1881,  et  je  ne  l'ai  pas  eue  sous  les  yeux;  peut-être  le  compte-rendu  que 
j'ai  publié  sur  la  première  édition  dans  la  Revue  critique  n'est-il  pas 
étranger  à  cette  rectification.  Quant  à  M.  Madvig,  je  dois  avouer  que, 
dans  le  comble  de  mon  outrecuidance,  j'ai  voulu  atténuer  ses  torts  et 
violé  quelque  peu  le  texte  original.  En  effet,  je  me  suis  permis  de  subs- 
tituer le  texte  authentique  de  Gaius  à  la  note  suivante  de  l'auteur  : 

«  Nous  n'avons  pas  à  tenir  compte  de  la  distinction  entre  un  Latium 
«  majus  et  un  Latium  minus  que,  par  une  fausse  conjecture,  Niebuhr  a 
«  voulu  introduire  dans  le  texte  de  Gaius,  1, 96,  nous  pouvons  aussi  passer 
«  sous  silence  toutes  les  déductions  qu'il  prétendait  en  tirer.  Dans  ce 
«  passage  de  Gaius,  il  est  question  de  l'accès  au  droit  de  cité  qui  est  moins 
ce  facile  (minus  latum)  à  obtenir  en  revêtant  une  magistrature  dans  une 
«  ville  latine  que  par  d'autres  moyens  dont  disposaient  les  Latini  Ju- 
if niani.  » 

Evidemment,  si  M.  Madvig  avait  eu  connaissance  du  texte  authenti- 
que qui  corroborait  la  correction  de  Niebuhr  au  moins  sur  le  point  du 
minus  Latium,  et  s'il  n'avait  pas  voulu  en  tenir  compte,  il  aurait  dit  ses 
raisons  ;  il  n'aurait  pas  parlé  d'une  fausse  conjecture.  Evidemment  en- 
core, si  M.  J.  s'était  reporté  au  texte  allemand  de  M.  Madvig,  il  n'aurait 
pas  dit  que  ce  dernier  «  omet  de  citer  le  passage  de  Gaius  »  et  se  serait 
évité  de  dire  :  «  Il  n'est,  nullement  prouvé  que  M.  Madvig  ait  ignoré  ce 
texte  et  ne  l'ait  pas  négligé  à  dessein  r.  » 

Je  crois  qu'en  voilà  assez.  Je  ne  veux  pas  allonger  cette  lettre,  bien 
que  j'eusse  encore  quelques  observations  à  faire  au  sujet  du  conubium 
et  du  commercium  des  cives  sine  suffragio. 

Quant  à  la  différence  que  fait  M.  Jullian  entre  une  conclusion  erro- 
née et  une  erreur,  je  ne  puis  la  comprendre  qu'en  ce  sens  qu'une  erreur 
n'est  pas  toujours  une  conclusion,  mais  qu'une  conclusion  erronée  con- 
tient toujours  une  erreur.  Dès  lors,  je  ne  vois  pas  bien  à  quoi  peut  servir 
une  distinction  de  ce  genre. 

Veuillez,  Messieurs,  agréer  l'expression  de  mon  entier  dévouement. 
Genève,  26  octobre  1882. 

Ch.  Morel. 

Il  y  a  quelques  imperfections  de  détail  dans  le  livre  det>l.  Madvig.  Mais  elles  s'ex- 
pliquent parce  que  l'ouvrage  remonte  en  partie  à  plusieurs  années,  parce  que  les  cha- 
pitres en  ont  été  composés  à  des  dates  différentes,  surtout,  parce  que  l'auteur  n'a 
malheureusement  pas  toujours  pu  en  faire  lui-même  la  révision  :  «  Si  j'ai  ignoré  telle 


r.  Cette  note  ayant  disparu  dans  la  traduction,  et  rien  n'en  avertissant  le  lecteur,  il 
ne  pouvait  s'aviser  de  recourir  au  texte.  Elle  prouve  d'ailleurs,  jusqu'à  l'évidence, 
qu'à  l'époque  où  M.  Madvig  rédigea  ce  chapitre,  il  n'avait  pas  encore  eu  connaissance 
de  la  découverte  faite  par  M.  Studemund  (1868). 


CHRONIQUE 


d'histoire  et  de  littérature  435 

ou  telle  inscription,  dit-il,  dans  la  préface  de  son  second  volume,  cela  tient  aux  con- 
ditions dans  lesquelles  je  travaille  depuis  six  années.  » 

Il  est  donc  dur  de  lui  reprocher  des  erreurs  formelles  ;  M.  Morel  se  sert,  dans  sa 
lettre,  du  mot  d'inadvertance  :  il  suffit  quand  il  s'agit  de  l'immense  érudition  et  du 

nom  vénéré  de  M.  Madvig. 

Camille  Jullian. 



js  eîtoî  > 
-zduz'oh  ziavi 

muttt/I  nu  . 
js  iriqd: 

■ 

ALLEMAGNE.  —  Deux  nouvelles  éditions  de  Kudrun  vont  paraître;  l'une  par  les 
soins  de  M.  Svmons  (Ve  vol.  de  l'«  Altdeutsche  Texbibliothek  »);  l'autre,  par  les  soins 
de  M.  E.  Martin. 

—  M.  Richard  Mahrenholtz  va  publier  à  la  librairie  Henninger,  de  Heilbronn,  une 
nouvelle  édition,  mais  considérablement  diminuée,  de  son   Molière  (prix,  4  mark). 

AUTRICHE.  —  Il  vient  de  paraître  à  Vienne  une  petite  étude  de  16  pages  sur 
Madame  Ackermann;  l'auteur  de  cette  «  literarhistorische  Skizze  »  est  M.  Karl 
Merwart.  On  dit  que  l'étude  de  M.  Merwart  était  d'abord  plus  étendue,  mais  que  l'ex- 
position du  système  philosophique  de  Mme  Ackermann  ayant  déplu  au  gouvernement 
autrichien,  M.  Merwart  a  dû  supprimer  nombre  de  passages. 

HOLLANDE.  —  M.  S.  A.  Wijnne,  professeur  à  l'Université  d'Utrecht,  a  publié 
le  Ier  vol.  des  Négociations  du  comte  d'Avaux,  ambassadeur  extraordinaire  à  la  cour 
de  Suède  pendant  les  années  i6g3,  i6g-]  et  i6g8  (Utrecht,  Kemink;  23e  numéro 
des  volumes  nouv.  série,  publiés  par  la  «  historisch  genootschap  »,  d'Utrecht.)  Les 
documents  que  publie  M.  Wijnne  sont  tirés  d'un  manuscrit  de  la  bibliothèque  de 
l'Arsenal;  chacun  d'eux  est  précédé  d'un  résumé;  résumés  et  notes,  ainsi  que  l'intro- 
duction du  volume,  sont  écrits  en  français.  Nous  souhaitons  à  cette  publication  inté- 
ressante et  soignée  prompte  continuation  et  grand  succès. 

ITALIE.  —  Le  22  octobre  est  mort  à  Bozzolo,  à  l'âge  de  3j  ans,  Napoléon  Caix, 
dont  l'on  connaît  les  importants  ouvrages  de  philologie  romane,  entre  autres,  Studi 
di  etimologia  italiana  e  romança  (1868),  Le  origini  délia  lingua  poetica  italiana 
(1880),  etc. 


■ 

ACADÉMIE   DES   INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  publique  annuelle  du  17  novembre  1882. 

M.  Jules  Girard,  président,  prononce  un  discours  dans  lequel  il  annonce  les  prix 
décernés  en  1882  et  rend  compte  des  travaux  des  membres  des  écoles  françaises  d'A- 
thènes et  de  Rome.  Il  termine  par  un  hommage  rendu  à  la  mémoire  des  académi- 
ciens qui  sont  morts  depuis  un  an,  MM.  Dulaurier,  de  Longpérier,  Thurot  et  Guessard. 

M.  Wallon,  secrétaire  perpétuel,  lit  une  Notice  historique  sur  la  vie  et  les  travaux 
de  M.  Paulin  Paris,  membre  de  l'Académie. 

M.  Léon  Heuzey,  membre  de  l'Académie,  lit  une  Introduction  au  Catalogue  des 
figurines  de  terre  cuite  du  musée  du  Louvre.  Cette  introduction  est  intitulée  :  Sur 
les  origines  de  Vindustrie  des  terres  cuites. 


436 


REVUE    CRITIQUE 

JUGEMENT  DES  CONCOURS 


Prix  ordinaire.  —  L'Académie  avait  proposé  la  question  suivante  :  Faire  connaître 
les  versions  de  la  Bible  en  langue  d'oïl,  totales  ou  partielles,  antérieures  à  la  mort 
de  Charles  V.  Etudier  les  rapports  de  ces  versions  entre  elles  et  avec  le  texte  latin. 
Indiquer  toutes  les  circonstances  qui  se  rattachent  à  l'histoire  de  ces  versions  (le  temps, 
le  pavs,  le  nom  de  l'auteur,  la  destination  de  l'ouvrage,  etc.).  L'Académie  décerne 
le  prix  à  M .  Samuel  Berger,  secrétaire  de  la  faculté  de  théologie  protestante  de  Paris, 
auteur  du  mémoire  inscrit  sous  le  n°  3.  Elle  accorde,  en  outre,  une  récompense  de 
mille  francs  à  M.  Jean  Bonnard,  auteur  du  mémoire  inscrit  sous  le  n°  2. 

Antiquités  de  la  France.  —  L'Académie  décerne  trois  médailles  :  La  1"  à  M.  J. 
Guiffrey,  pour  son  Histoire  générale  de  la  tapisserie  (Paris,  1878,  in-f°  avec  plan- 
ches); la  2e  à  MM.  Héron  de  Villefosse  et  Thédenat,  pour  leurs  Notes  sur  quelques 
cachets  d'oculistes  romains  (Paris,  1882,  in-8°)  ;  la  3°  à  M.  Kohlér,  pour  son  Etude 
critique  sur  le  texte  de  la  Vie  latine  de  sainte  Geneviève  de  Paris  (Paris,  1881, 
48e  fascicule  de  la  Bibliothèque  de  l'école  des  hautes  études).  L'Académie  accorde,  en 
outre,  six  mentions  honorables  ;  la  ire  à  M.  Héron,  pour  sa  publication  des  Œuvres 
de  Henri  d'Andeli,  trouvère  normand  du  xiue  siècle  (Paris,  1881,  in-8°)  ;  la  20  à 
M.  Charles  Molinier,  pour  son  ouvrage  :  l'Inquisition  dans  le  midi  de  la  France  au 
xin"  et  au  xiv°  siècle  (Paris,  1881,  in-8°j  ;  la  3°  à  M.  Perroud,  pour  ses  Origines  du 
premier  duché  d' Aquitaine  (in-8°);  la  4.'  à  M.  de  la  Ghauvelays,  pour  son  Etude  sur 
les  armées  des  trois  premiers  ducs  de  Bourgogne  (Paris,  1 881 ,  in-8°)  ;  la  5e  à  M.  Ch. 
Fierville,  pour  ses  Documents  inédits  sur  Philippe  de  Commynes  (Paris,  1881,  in-8°)  ; 
la  6B  à  M.  Pagart  d'Hermansart,  pour  son  Etude  sur  les  anciennes  communautés 
d'arts  et  métiers  à  Saint-Omer  (Saint-Omer,  1879,  1881,  in-8°). 

Prix  de  numismatique.  —  Le  prix  biennal  fondé  par  Mme  veuve  Duchalais  et  destiné 
au  meilleur  ouvrage  de  numismatique  du  moyen  âge  a  été  décerné  cette  année  à 
M.  Stanley  Lane  Poole,  pour  le  cinquième  volume  de  son  catalogue,  intitulé  :  Coins 
ofthe  Moors  o/Africa  and  Spain  in  the  British  Muséum  (Londres,  in-8°). 

Prix  Gobert,  pour  le  travail  le  plus  savant  et  le  plus  profond  sur  l'histoire  de 
France  et  les  études  qui  s'y  rattachent.  —  Le  premier  prix  a  été  décerné  à  M.  Paul 
Viollet,  pour  son  édition  des  Etablissements  de  saint  Louis  (Paris,  1881,  2  vol.  in-8); 
le  second  prix  à  M.  Frédéric  Godefroy,  pour  son  Dictionnaire  de  l'ancienne  langue 
française  et  de  tous  ses  dialectes  du  ix"  au  xv«  siècle,  tome  Ier  (Paris,  1881,  in-40). 

Prix  Bordin.  —  L'Académie  avait  proposé  la  question  suivante  :  Etudier  les  do- 
cuments géographiques  et  les  relations  de  voyage  publiés  par  les  Arabes  du  111e  au 
vme  siècle  de  l'hégire  inclusivement;  faire  ressortir  leur  utilité  au  point  de  vue  de  la 
géographie  comparée  au  moyen  âge.  L'Académie  ne  décerne  pas  le  prix,  mais  elle 
accorde,  à  titre  d'encouragement,  une  récompense  de  i,5oo  fr.  à  l'auteur  de  l'unique 
mémoire  envoyé  au  concours,  M.  Marcel  Devic,  professeur  d'arabe  à  la  faculté  des 
lettres  de  Montpellier. 

Prix  Brunet,  pour  un  ouvrage  de  bibliographie  savante.  —  L'Académie  avait  pro- 
posé le  sujet  suivant  :  Bibliographie  aristotélique  ou  bibliographie  descriptive,  et, 
autant  que  possible,  critique,  des  éditions,  soit  générales,  soit  spéciales,  de  tous  les 
ouvrages  qui  nous  sont  parvenus  sous  le  nom  d'Aristote ;  des  traductions  qui  en  ont 
été  faites  avant  ou  après  la  découverte  de  l'imprimerie,  des  biographies  anciennes  ou 
modernes  d'Aristote,  des  commentaires  et  dissertations  dont  les  divers  écrits  qu'on 
lui  attribue  ont  été  l'objet  depuis  l'antiquité  jusqu'à  nos  jours,  etc.  Le  prix  est  décerné 
à  M.  Moïse  Schwab,  employé  à  la  Bibliothèque  nationale. 

Prix  Stanislas  Julien,  pour  le  meilleur  ouvrage  relatif  à  la  Chine.  —  L'Académie 
partage  le  prix  entre  M.  Léon  de  Rosny  (les  Peuples  orientaux  connus  des  anciens 
Chinois)  et  M.  Imbault-Huart  (Recueil  de  documents  sur  l'Asie  centrale) . 

Prix  Delalande-Guérineau,  pour  l'ouvrage  jugé  le  meilleur  par  l'Académie.  — 
L'Académie  avait  décidé  qu'en  1882  elle  décernerait  le  prix,  s'il  y  avait  lieu,  à  des 
travaux  sur  la  philologie  antique,  comprenant  l'étude  des  monuments  écrits  de  toute 
nature.  Le  prix  est  décerné  à  M.  Louis  Havet,  pour  son  ouvrage  :  De  saturnio  Lati- 
norum  versu  (Paris,  1880,  in-8°). 

annonce  des  concours  dont  les  termes  expirent  en  i883,  1884  et  188b. 

Prix  ordinaire  de  l'Académie.  —  L'Académie  avait  prorogé  à  l'année  1882  le  su- 
jet suivant,  qui  avait  été  d'abord  proposé  pour  1879  :  Etude  sur  les  institutions  po- 
litiques, administratives  et  judiciaires  du  règne  de  Charles  V.  Un  seul  mémoire  a 
été  envoyé  au  concours.  L'Académie  ne  décerne  pas  le  prix;  elle  retire  la  question 
et  la  remplace  par  le  sujet  suivant  :  Exposer  la  méthode  d'après  laquelle  doit  être 
étudié,  préparé  pour  V impression  et  commente  un  ancien  obituaire .  Appliquer  les  rè- 

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d'histoire  et  de  littérature  437 

gies  de  la  critique  à  l'étude  d'un  obituaire  rédigé  en  France  avant  le  xnr*  siècle.  Mon- 
trer le  parti  qu'on  peut  tirer  de  l'obituaire  pris  comme  exemple,  pour  la  chronologie, 
pour  Vhistoire  des  arts  et  des  lettres  et  pour  la  biographie  des  personnages  dont  le 
nom  appartient  à  Vhistoire  civile  ou  à  l'histoire  ecclésiastique .  Les  mémoires  devront 
être  déposés  au  secrétariat  de  l'Institut  le  3i  décembre  1884.  —  L'Académie  avait 
aussi  prorogé  à  l'année  1882  la  question  suivante  :  Classer  et  identifier  autant  qu'il 
est  possible  les  noms  géographiques  de  l'Occident  de  l'Europe  qu'on  trouve  dans  les 


déposés  au  secrétariat  de  l'Institut  le  3i  décembre  i883.  —  L'Académie  rappelle 
qu'elle  a  prorogé  à  l'année  1884  le  sujet  suivant,  qu'elle  avait  déjà  prorogé  à  l'année 
1880  :  Traiter  un  point  quelconque  touchant  l'histoire  de  la  civilisation  sous  le  Kha- 
lifat.  Les  mémoires  devront  être  déposés  au  secrétariat  de  l'Institut  le  3i  décembre 
i883.  —  Elle  rappelle  aussi  qu'elle  a  proposé  :  —  i°  Pour  le  concours  de  i883  : 
Fair,    ' 

M 

même  latins.  Les  mémoires  devront  être  dépos 
cembre  1882.  —  20  Pour  le  concours  de  1884  :  I.  Examen  historique  et  critique  de 
la  Bibliothèque  de  Photius.  II.  Etude  grammaticale  et  historique  de  la  langue  des  ins- 
criptions latines,  comparée  avec  celle  des  écrivains  romains,  aepuis  le  temps  des  guer- 
res puniques  jusqu'au  temps  des  Antonins.  Les  mémoires  devront  être  déposés  au 
secrétariat  de  l'Institut  le  3i  décembre  i883.  —  L'Académie  propose,  en  outre,  pour 
l'année  i885  le  sujet  suivant  :  Etude  sur  l'instruction  des  femmes  au  moyen  âge. 
Constater  l'état  de  cette  instruction  dans  la  société  religieuse  et  dans  la  société  civile 
en  ce  qui  regarde  la  connaissance  des  lettres  profanes  et  des  genres  divers  de  littéra- 
ture vulgaire.  Apprécier  sommairement  le  caractère  et  le  mérite  relatif  des  écrits 
composés  par  les  femmes,  particulièrement  du  xie  siècle  au  xve  siècle.  Les  mémoires 
devront  être  déposés  au  secrétariat  de  l'Institut  le  3i  décembre  1884.  —  Chacun  de 
ces  prix  est  de  la  valeur  de  deux  mille  francs. 

Antiquités  de  la  France.  —  Trois  médailles  de  la  valeur  de  cinq  cents  francs  cha- 
cune seront  décernées  aux  meilleurs  ouvrages  manuscrits  ou  publiés  dans  le  cours 
des  années  188 1  et  1882  sur  les  antiquités  de  la  France,  qui  auront  été  déposés  au 
secrétariat  de  l'Institut  avant  le  Ier  janvier  i883.  Les  ouvrages  de  numismatique  ne 
sont  pas  admis  à  ce  concours. 

Prix  de  numismatique.  —  I.  Le  prix  annuel  de  numismatique  fondé  par  M.  Allier 
de  Hauteroche  sera  décerné,  en  i883,  au  meilleur  ouvrage  de  numismatique  qui 
aura  été  publié  depuis  le  mois  de  janvier  1881.  Ce  concours  est  ouvert  à  tous  les  ou- 
vrages de  numismatique  ancienne.  Le  prix  est  de  la  valeur  de  quatre  cents  francs. 
—  II.  Le  prix  biennal  de  numismatique  fondé  par  M"'"  veuve  Duchalais  sera  décerné, 
en  1884,  au  meilleur  ouvrage  de  numismatique  du  moyen  âge  qui  aura  été  publié 
depuis  le  mois  de  janvier  1881.  Le  prix  est  de  la  vafeur  de  huit  cents  francs.  —  Les 
ouvrages  devront  être  déposés  au  secrétariat  de  l'Institut,  pour  le  premier  concours, 
le  3i  décembre  1882;  pour  le  dernier,  le  3i  décembre  i883. 

Prix  fondés  par  le  baron  Gobert.  —  Pour  l'année  i883,  l'Académie  s'occupera, 
à  dater  du  Ier  janvier,  de  l'examen  des  ouvrages  qui  auront  paru  depuis  le  Ier  jan- 
vier 1882,  et  qui  pourront  concourir  aux  prix  annuels  fondés  par  le  baron  Gobert. 
En  léguant  à  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  la  moitié  du  capital  pro- 
venant de  tous  ses  biens,  après  l'acquittement  des  frais  et  des  legs  particuliers  in- 
diqués dans  son  testament,  le  fondateur  a  demandé  :  «  que  les  neuf  dixièmes  de 
l'intérêt  de  cette  moitié  fussent  proposés  en  prix  annuel  pour  le  travail  le  plus 
savant  et  le  plus  profond  sur  l'histoire  de  France  et  les  études  qui  s'y  rattachent,  et 
l'autre  dixième  pour  celui  dont  le  mérite  en  approchera  le  plus  :  déclarant  vouloir, 
en  outre,  que  les  ouvrages  couronnés  continuent  à  recevoir,  chaque  année,  leur  prix 
jusqu'à  ce  qu'un  ouvrage  meilleur  le  leur  enlève,  et  ajoutant  qu'il  ne  pourra  être 
présenté  à  ce  concours  que  des  ouvrages  nouveaux.  »  —  Tous  les  volumes  d'un 
ouvrage  en  cours  de  publication  qui  n'ont  point  encore  été  présentés  au  prix  Gobert 
seront  admis  à  concourir,  si  le  dernier  volume  remplit  toutes  les  conditions  exigées 
par  le  programme  du  concours.  —  Sont  admis  à  ce  concours  les  ouvrages  composés 
par  des  écrivains  étrangers  à  la  France.  Sont  exclus  de  ce  concours  les  ouvrages  des 
membres  ordinaires  ou  libres  et  des  associés  étrangers  de  l'Académie  des  inscriptions 
et  belles-lettres.  —  L'Académie  rappelle  aux  concurrents  que,  pour  répondre  aux 
intentions  du  baron  Gobert,  qui  a  voulu  récompenser  les  ouvrages  les  plus  savants 
et  les  plus  profonds  sur  l'histoire  de  France  et  les  études  qui  s'y  rattachent,  ils 
doivent  choisir  des  sujets  qui  n'aient  pas  encore  été  suffisamment  éclairés  ou  appro- 
fondis par  la  science.  Telle  serait  une  histoire  de  province  où  l'on  s'attacherait  à 
prendre  pour  modèle  la  méthode  et  l'érudition  de  dom  Vaissète  :  l'Ile-de-France,  la 
Picardie,  etc.,  attendent  encore  un  travail  savant  et  profond.  L'érudition  trouverait 


438  REVUE   CRITIQUE    r8ÎMC 

aussi  une  mine  féconde  à  exploiter  si  elle  concentrait  ses  recherches  sur  un  règne 
important  :  il  n'est  pas  besoin  de  proposer  ici  d'autre  exemple  que  la  Vie  de  saint 
Louis,  par  Le  Nain  de  Tillemont.  Enfin  un  bon  dictionnaire  historique  et  critique 
de  l'ancienne  langue  française  serait  un  ouvrage  d'une  haute  utilité,  s'il  rappelait  le 
monument  élevé  par  Du  Gange  dans  son  Glossaire  de  la  latinité  du  moyen  âge.  — 
Tout  en  donnant  ces  indications,  l'Académie  réserve  expressément  aux  concurrents 
leur  pleine  et  entière  liberté.  Elle  a  voulu  seulement  appeler  leur  attention  sur 
quelques-uns  des  sujets  qui  pourraient  être  mis  en  lumière  par  de  sérieuses  recher- 
ches ;  elle  veut  faire  de  mieux  en  mieux  comprendre  que  la  haute  récompense 
instituée  par  le  baron  Gobert  est  réservée  à  ceux  qui  agrandissent  le  domaine  de  la 
science  en  pénétrant  dans  des  voies  encore  inexplorées.  —  Six  exemplaires  de  cha- 
cun des  ouvrages  présentés  à  ce  concours  devront  être  déposés  au  secrétariat  de 
l'Institut  avant  le  Ier  janvier  i883,  et  ne  seront  pas  rendus. 

PrixBordin.  —  M.  Bordin,  notaire,  voulant  contribuer  aux  progrès  des  lettres,  des 
sciences  et  des  arts,  a  fondé  par  son  testament  des  prix  annuels  qui  sont  décernés  par 
chacune  des  cinq  Académies  de  l'Institut.  —  L'Académie  avait  prorogé  à  l'année  1882 
le  sujet  suivant,  qu'elle  avait  d'abord  proposé  pour  l'année  1880  :  Etude  historique 
et  critique  sur  la  vie  et  les  œuvres  de  Christine  de  Pisan.  Un  seul  mémoire,  insuf- 
fisant, ayant  été  déposé,  l'Académie  proroge  de  nouveau  la  question  et  la  remet  au  con- 
cours pour  l'année  1884.  Les  mémoires  devront  être  déposés  au  secrétariat  de  l'Insti- 
tut le  3i  décembre  i883.  —  L'Académie  avait  aussi  prorogé  à  l'année  1882  le  sujet 
suivant,  qu'elle  avait  d'abord  proposé  pour  l'année  1879  :  Etude  d'histoire  littéraire  sur 
les  écrivains  grecs  qui  sont  nés  ou  qui  ont  vécu  en  Egypte,  depuis  la  fondation  d'A- 
lexandrie jusqu'à  la  conquête  du  pays  par  les  Arabes,  etc.  Un  seul  mémoire  ayant  été 
déposé  et  n'ayant  pas  été  jugé  digne  du  prix,  l'Académie  retire  la  question  du  concours 
en  la  remplaçant  par  le  sujet  suivant  :  Etude  critique  sur  les  œuvres  que  nous  possédons 
de  l'art  étrusque .  Origines  de  cet  art;  influence  qu'il  a  eue  sur  l'art  romain.  Les  mé- 
moires devront  être  déposés  au  secrétariat  de  l'Institut  le  3i  décembre  1884.  —  L'Aca- 
démie rappelle  qu'elle  a  prorogé  à  l'année  i883  le  sujet  suivant  qui  avait  été  d'abord 
proposé  pour  l'année  1881  :  Etude  sur  les  opérations  de  change,  de  crédit  et  d'assu- 
rance pratiquées  par  les  commerçants  et  banquiers  français  ou  résidant  dans  les  limi- 
tes de  la  France  actuelle  avant  le  xvc  siècle.  Les  mémoires  devront  être  déposés  au 
secrétariat  de  l'Institut  le  3  1  décembre  1 882.  —  L'Académie  rappelle  aussi  qu'elle  a  pro- 
posé :  —  i°  Pour  l'année  i883  : 1.  Présenter  un  tableau  aussi  complet  que  possible  de  la 
numismatique  de  Samos  ;  en  expliquer  les  types  à  l'aide  des  textes  ;  en  tirer  toutes  les 
données  religieuses  et  historiques  que  comporte  cette  élude;  montrer  quelle  influence 
ont  pu  exercer  les  types  du  numéraire  samien  sur  ceux  des  colonies  de  cette  île. 
II.  Etudier  à  l'aide  des  documents  d'archives  et  de  textes  littéraires  le  dialecte  parlé 
à  Paris  et  dans  l'Ile-de-France  jusqu'à  l'avènement  des  Valois.  Comparer  ce  dialecte, 
d'après  les  résultats  obtenus,  à  la  langue  française  littéraire,  et  rechercher  jusqu'à 
quel  point  le  dialecte  parisien  était  considéré  au  moyen  âge  comme  la  langue  ItîTé- 
raire  de  la  France.  Les  mémoires  devront  être  déposés  au  secrétariat  de  l'Institut  le 
3i  décembre  1882.  —  2e  Pour  l'année  1884  :  I.  Etudier  la  Râmayana  au  point  de  vue 
religieux.  Quelles  sont  la  philosophie  religieuse  et  la  morale  religieuse  qui  y  sont 
professées  ou  qui  s'en  déduisent?  Ne  tenir  compte  de  la  mythologie  qu'autant  qu'elle 
intéresse  la  questiou  ainsi  posée.  II.  Etude  sur  la  langue  berbère  sous  le  double  point 
de  vue  de  la  grammaire  et  du  dictionnaire  de  cette  langue,  —  inrister  particulière- 
ment sur  la  formation  des  racines  et  sur  le  mécanisme  verbal,  —  s'aider  pour  cette 
étude  des  inscriptions  libyques  recueillies  dans  ces  dernières  années,  —  indiquer 
enfin  la  place  du  berbère  parmi  les  autres  familles  linguistiques.  Les  mémoires  de- 
vront être  déposés  au  secrétariat  de  l'Institut  le  3r  décembre  i883.  —  L'Académie 
propose,  en  outre,  pour  l'année  i885,  la  question  suivante:  Examiner  et  apprécier 
les  principaux  textes  épigraphiques,  soit  latins,  soit  grecs,  qui  éclairent  l'histoire 
des  institutions  municipales  dans  l'empire  romain,  depuis  la  chute  de  la  République 
jusqu'à  la  fin  du  règne  de  Septime  Sévère.  Les  mémoires  devront  être  déposés  au 
secrétariat  de  l'Institut  le  3i  décembre  1884.  —  Chacun  de  ces  prix  est  de  la  valeur 
de  trois  mille  francs. 

Prix  Louis  Fould.  —  Le  prix  fondé  par  M.  Louis  Fould,  pour  l'Histoire  des  arts 
du  dessin  jusqu'au  siècle  de  Périclès,  sera  décerné,  s'il  y  a  lieu,  en  1884.  L'auteur 
de  cette  fondation,  amateur  distingué  des  arts  de  l'antiquité,  a  vouluengager  les  sa- 
vants à  en  éclairer  l'histoire  dans  sa  partie  la  plus  reculée  et  la  moins  connue.  11  a 
mis  à  la  disposition  de  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lottres  une  somme  de 
vingt  mille  francs,  pour  être  donnée  en  prix  à  l'auteur  ou  aux  auteurs  de  la  meil- 
leure Histoire  des  arts  du  dessin  :  leur  origine,  leurs  progrès,  leur  transmission  che^ 
les  différents  peuples  de  l'antiquité  jusqu'au  siècle  de  Périclès.  Par  les  arts  du  des- 
sin, il  faut  entendre  la  sculpture,  la  peinture,  la  gravure,  l'architecture,  ainsi  que  les 
arts  industriels  dans  leurs  rapports  avec  les  premiers.  Les  concurrents,  tout  en  s'ap- 
puyant  sans  cesse  sur  les  textes,  devront  apporter  le  plus  grand  soin  à  l'examen  des 
œuvres  d'art  de  toute  nature  que  les  peuples  de  l'ancien  monde   nous  ont  laissées, 


d'histoire  et  de  littérature  439 

et  s'efforcer  d'en  préciser  les  caractères  et  les  détails,  soit  à  l'aide  de  dessins,  de^  cal- 
ques ou  de  photographies,  soit  par  une  description  fidèle  qui  témoigne  d'une  étude 
approfondie  du  style  particulier  à  chaque  nation  et  à  chaque  époque.  Les  ouvrages 
envoyés  au  concours  seront  jugés  par  une  commission  composée  de  cinq  membres  : 
trois  de  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres,  un  de  celle  des  sciences,  un  de 
celle  des  beaux-arts.  Le  jugement  sera  proclamé  dans  la  séance  publique  annuelle  de 
l'Académie  des  inscriptions  et  belles  lettres  de  l'année  1884.  A  défaut  d'ouvrages 
ayant  rempli  toutes  les  conditions  du  programme,  il  pourra  être  accordé  un  accessit 
de  la  valeur  des  intérêts  de  la  somme  de  vingt  mille  francs  pendant  les  trois  an- 
nées. Le  concours  sera  ensuite  prorogé,  s'il  y  a  lieu,  par  période  triennale.  Tous  les 
savants  français  et  étrangers,  excepté  les  membres  regnicoles  de  l'Institut,  sont  ad- 
mis au  concours. 

Prix  La  Fons-Mélicocq.  —  Un  prix  triennal  de  dix-huit  cents  francs  a  été  fondé 
par  M.  de  la  Fons-Mélicocq,  en  faveur  du  meilleur  ouvrage  sur  l'histoire  et  les  anti- 
quités delà  Picardie  et  de  l'Ile-de-France  (Paris  non  compris).  L'Académie  décer- 
nera ce  prix,  s'il  y  a  lieu,  en  1884;  elle  choisira  entre  les  ouvrages  manuscrits  ou 
imprimés  en  1881,  1882  et  i883,qui  lui  auront  été  adressés  avant  le  3i  décembre 
i883. 

Prix  Brun  et.  —  M.  Brunet,  par  son  testament  en  date  du  14  novembre  1867,  a 
fondé  un  prix  triennal  de  trois  mille  francs  pour  un  ouvrage  de  bibliographie  savante 
que  l1  Académie  des  inscriptions,  qui  en  choisira  elle-même  le  sujet,  jugera  le  plus  di- 
gne de  cette  récompense.  L'Académie  propose,  pour  le  concours  de  1 885,  la  question 
suivante  :  Relever  sur  le  grand  catalogue  de  bibliographie  arabe  intitulé  Fihrist 
toutes  les  traductions  d'ouvrages  grecs  en  arabe;  critiquer  ces  données  bibliographi- 
ques d'après  les  documents  imprimés  ou  manuscrits.  Les  ouvrages  pourront  être  im- 
primés ou  manuscrits  et  devront  être  d'une  date  postérieure  à  la  clôture  du  dernier 
concours.  Les  mémoires  devront  être  déposés  au  secrétariat  de  l'Institut  avant  le 
3i  décembre  1884. 

Prix  Stanislas  Julien.  —  Par  son  testament  olographe,  en  date  du  26  octobre 
1872,  M.  Stanislas  Julien,  membre  de  l'Institut,  a  légué  à  l'Académie  des  inscriptions 
et  belles-lettres  une  rente  de  quinze  cents  francs  pour  fonder  un  prix  annuel  en  faveur 
du  meilleur  ouvrage  relatif  à  la  Chine.  Les  ouvrages  devront  être  déposés,  en  double 
exemplaire,  au  secrétariat  de  l'Institut,  le  3x  décembre  1882. 

Prix  Delalande-Guérineau.  —  M**  Delalande,  veuve  Guérineau,  par  son  testament 
en  date  du  16  mars  1872,  a  légué  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  une 
somme  de  vingt  mille  francs  (réduite  à  dix  mille  francs)  dont  les  intérêts  doivent  être- 
donnés  en  prix  tous  les  deux  ans,  au  nom  de  M.  Delalande-Guérineau  à  la  personne 
qui  aura  composé  l'ouvrage  jugé  le  meilleur  par  l'Académie.  L'Académie  décernera 
ce  prix,  s'il  y  a  lieu,  en  1884,  au  meilleur  ouvrage  de  critique  sur  les  documents  im- 
primés ou  manuscrits  relatifs  à  l'histoire  ecclésiastique  ou  à  l'histoire  civile  du 
moyen  âge.  Les  ouvrages  destinés  au  concours  devront  être  déposés,  en  double 
exemplaire,  s'ils  sont  imprimés,  au  secrétariat  de  l'Institut,  le  3t  décembre  i883. 

Prix  Jean  Reynaud. —  Mmo  veuve  Jean  Reynaud,  «  voulant  honorer  la  mémoire  de 
«  son  mari  et  perpétuer  son  zèle  pour  tout  ce  qui  touche  aux  gloires  de  la  France  », 
a,  par  un  acte  en  date  du  23  décembre  1878,  fait  donation  à  l'Institut  d'une  rente  de 
dix  mille  francs  destinée  à  fonder  un  prix  annuel  qui  sera  successivement  décerné 
par  chacune  des  cinq  Académies.  Conformément  au  vœu  exprimé  par  la  donatrice, 
«  ce  prix  sera  accordé  au  travail  le  plus  méritant,  relevant  de  chaque  classe  de  J'Ins- 
«  titut,  qui  se  sera  produit  pendant  une  période. de  cinq  ans. 11  ira  toujours  aune  œu- 
«  vre  originale,  élevée  et  ayant  un  caractère  d'invention  et  de  nouveauté.  Les  mem- 
«  bres  de  l'Institut  ne  seront  pas  écartés  du  concours.  Le  prix  sera  toujours  décerné 
«  intégralement.  Dans  le  cas  où  aucun  ouvrage  ne  paraîtrait  le  mériter  entièrement, 
«  sa  valeur  serait  délivrée  à  quelque  grande  infortune  scientifique,  littéraire  ou  artis- 
te tique.  Il  portera  le  nom  de  son  fondateur  Jean  Reynaud.  »  Ce  prix  sera  décerné 
pour  la  seconde  fois  par  l'Académie  "des  inscriptions  et  belles-lettres  en  i885. 

Prix  de  La  Grange.  —  M.  le  marquis  de  la  Grange,  membre  de  l'Académie,  par 
son  testament  en  date  du  4  août  1871,  a  légué  à  l'Académie  des  inscriptions  et  bel- 
les-lettres une  rente  annuelle  de  mille  francs  destinée  à  fonder  un  prix  en  faveur 
de  la  publication  du  texte  d'un  poème  inédit  des  anciens  poètes  de  la  France  ;  à  dé- 
faut d'une  œuvre  inédite,  le  prix  pourra  être  donné  au  meilleur  travail  sur  un  poème 
déjà  publié,  mais  appartenant  aux  anciens  poètes.  Ce  prix  sera  décerné,  s'il  y  a  lieu, 
en  i883.  Les  ouvrages  devront  âtre  déposés  au  secrétariat  du  l'Institut  le  3i  décem- 
bre 1882. 

Conditions  générales  des  concours..  —  Les  ouvrages  envoyés  aux  différents  con- 
cours ouverts  par  l'Académie  devront  parvenir  francs  de  port  et  brochés,  au  secréta- 
riat de  l'Institut,  avant  le  Ier  janvier  d&  l'année  où  le  prix  doit  être  décerné.  — 
Ceux  qui  seront  destinés  aux  concours  pour  lesquels  les  ouvrages  imprimes  ne  sont 


440  REVUE    CRITIQUE    D'HISTOIRE    Et    DE    LITTÉRATURE 

point  admis  devront  être  écrits  en  français  ou  en  latin.  Ils  porteront  une  épigraphe 
ou  devise,  répétée  dans  un  billet  cacheté  qui  contiendra  le  nom  de  l'auteur.  Les 
concûrents  sont  prévenus  que  tous  ceux  qui  se  feraient  connaître  seront  exclus 
du  concours;  leur  attention  la  plus  sérieuse  est  appelée  sur  cette  disposition.  — 
L'Académie  ne  rend  aucun  des  ouvrages  imprimés  ou  manuscrits  qui  ont  été  sou- 
mis à  son  examen  ;  les  auteurs  des  manuscrits  ont  la  liberté  d'en  faire  prendre  des 
copies  au  secrétariat  de  l'Institut. 

DÉLIVRANCES  DES    BREVETS   D'ARCHIVISTES    PALÉOGRAPHES 

En  exécution  de  l'arrêté  de  M.  le  ministre  de  l'instruction  publique  rendu  en  1 833  » 
et  statuant  que  les  noms  des  élèves  de  l'école  des  chartes,  qui,  à  la  fin  de  leurs  étu- 
des, ont  obtenu  des  brevets  d'archiviste  paléographe,  devront  être  proclamés  dans  la 
séance  publique  de  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  qui  suivra  leur  pro- 
motion, l'Académie  déclare  que  les  élèves  de  l'école  des  chartes  qui  ont  été  nommés 
archivistes  paléographes  par  décret  du  16  février  1882,  en  vertu  de  la  liste  dressée 
par  le  conseil  de  perfectionnement  de  cette  école,  sont  MM.  de  Ghaine  de  Bourmont 
(Marie-Adolphe-  Armand-Charles-Henri-Amédée);  Lecestre  (Alexandre-Joseph-Jules- 
Léon);  Moris  (Charles-Henri-Louis-Marie)  ;  Berthelé  (François-Marie-Joseph);  hors 
concours,  comme  appartenant  à  la  promotion  de  l'année  précédente,  MM.  Guilhier- 
moz  (PaulÉmilien)  ;  Mortet  (François-Auguste-Paul). 


SOCIÉTÉ    ASIATIQUE 


Séance  du  10  novembre. 

M.  Oppert  annonce  la  découverte  au  British  Muséum  d'un  cylindre  de  Nabonid 
fort  important  en  ce  qu'il  nous  fournit  la  date  de  Naramsin.  Ce  roi  aurait  régné 
38  siècles  avant  J.-C. 

M.  Halévy  signale  dans  la  langue  dite  accado-sumérienne  une  série  d'expression, 
tellement  empreintes  du  génie  sémitiques  qu'elles  ont  pu  lui  servir  à  restituer  plu- 
sieurs passages  altérés  de  la  Bible. 


Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 


Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  s3 


REVUE    CRITIQUE 

oIi/e'I  ab  mon   ai  Bibni» 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

-oo8  àlà   ino  iu\. 

,      ■      M      I  I  

N°  49  -4  Décembre  —  1882 


Sommaire  î  243.  Couat,  La  poésie  alexandrine  sous  les  trois  premiers  Ptolé- 
mées.  —  244.  Dalton,  Jean  Laski.  —  245.  De  Bouteiller  et  Hepp,  Correspon- 
dance adressée  au  magistrat  de  Strasbourg  par  ses  agents  à  Metz,  i5g4-i683.  — 
Lettre  de  M.  Joh.  Storm.  —  Variétés  :  Gaidoz,  Bibliographie  créole,  note  supplé- 
mentaire. —  Chronique.  —  Académie  des  Inscriptious. 


eiorl  ;  (dqssol 
243.  —    A.  Couat.    ï^j»  poésie  Alexandrine  sous  les  (rois  premiers  *»io- 
lémées  (394-9S9    av.   J.-C).  Un  vol.  in-8°  de  xm-525  pages.  Paris,    Ha- 
chette, 1882.  7  fr.  5o. 

M.  A.  Couat  s'est  fait  d'abord  connaître,  en  1875,  par  une  Etude  sur 
Catulle.  C'était  une  thèse  de  doctorat.  Les  lecteurs  compétents  y  avaient 
relevé,  à  côté  de  quelques  imperfections  naturelles  dans  un  début,  bien 
des  pages  où  un  savoir  précis  s'alliait  à  un  sentiment  littéraire  juste, 
délicat  et  très  personnel.  C'est  Catulle  qui  a  conduit  M.  C.  vers  les 
Alexandrins;  du  disciple,  l'historien  est  remonté  jusqu'aux  maîtres.  La 
poésie  alexandrine  est,  en  effet,  comme  un  trait  d'union  entre  la  poésie 
classique  de  la  Grèce  et  celle  de  Rome.  M.  C,  dans  la  préface  de  son 
nouvel  ouvrage,  montre  très  bien  cette  situation  intermédiaire  des 
Alexandrins.  Caractériser  leur  œuvre,  c'est  donc,  dans  l'histoire  litté- 
raire de  l'antiquité,  déterminer  un  moment  décisif  de  l'évolution  des 
idées  et  renouer  la  chaîne  des  faits  entre  la  Grèce  ancienne  et  Rome. 
Une  des  difficultés  principales  de  cette  tâche  intéressante  vient  de  l'état 
fragmentaire  dans  lequel  la  littérature  alexandrine  nous  est  parvenue. 
Il  en  résulte  une  foule  d'obscurités  et  d'incertitudes,  si  bien  que  l'étude 
littéraire,  en  ce  sujet,  doit  presque  nécessairement,  pour  qui  veut  faire 
œuvre  solide,  se  compliquer  et  s'embarrasser  de  recherches  érudites  de 
toute  sorte.  M.  C.  a  courageusement  entrepris  cette  double  tâche,  et  il 
l'a  exécutée  avec  détail,  avec  ampleur,  avec  précision,  en  même  temps 
qu'avec  un  sentiment  très  vif  et  très  pénétrant  du  genre  de  qualités  et 
de  défauts  propres  aux  écrivains  qu'il  étudiait.  L'ouvrage,  en  tant  qu'é- 
tude d'ensemble,  est  nouveau,  et  ne  peut  manquer  d'intéresser.  Je  ne 
puis  mieux  faire,  pour  rendre  à  ce  travail  savant  et  distingué  la 
justice  qui  lui  est  due,  que  d'en  présenter  une  rapide  analyse,  au  cou- 
rant de  laquelle  prendront  place  çà  et  là  quelques  observations  complé- 
mentaires et  quelques  critiques. 

Le  premier  chapitre  renferme  une  description  de  l'antique  Alexandrie. 
Il  est  excellent.  La  description  lopographique  de  la  ville,  empruntée  aux 
meilleures-  sources,  est^rrrtpkiê'^^arfui  ori- 

Nouvelle  «crie,  XiV.  a3 


442  REVUE   CRITIQUE 

ginal  du  Musée  est  vivement  rendu  :  on  pressent  tout  d'abord  quelle 
sera  dans  ses  principaux  traits  la  littérature  qui  doit  éclore  en  cette 
«  volière  des  Muses  »,  comme  disait  le  satirique  Timon.  Un  second 
chapitre,  qui  achève  l'Introduction  générale  de  l'ouvrage,  est  consacré  à 
discuter  et  à  établir  la  chronologie  des  premiers  poètes  et  bibliothécaires 
d'Alexandrie.  C'est  là,  je  n'ai  pas  besoin  de  le  dire,  un  chapitre  de  pure 
érudition  et  de  discussion  souvent  subtile.  Il  ne  pouvait  en  être  autre- 
ment, et  l'érudition,  même  un  peu  rébarbative,  était  ici  inévitable.  Celle 
de  M.  C.  me  semble  au  total,  dans  ces  difficiles  recherches,  à  la  fois  in- 
génieuse et  sensée,  habile  à  discerner  les  faits  certains  et  à  établir  avec 
prudence  un  certain  de  conclusions  vraisemblables.  Je  signalerai  pour- 
tant tout  de  suite  en  quelques  passages  deux  défauts,  de  pure  forme,  il 
est  vrai,  mais  qui  reparaissent  encore  plusieurs  fois  dans  le  reste  de  l'ou- 
vrage, et  qu'un  savant  capable  de  très  bien  écrire,  comme  l'est  M.  C, 
devrait,  à  mon  sens,  s'interdire  absolument.  Le  premier,  emprunté  aux 
habitudes  de  l'érudition  allemande,  est  de  mêler  sans  scrupule,  au  cou- 
rant même  de  l'exposition,  des  citations  grecques  et  latines  non  tradui- 
tes, assez  longues  parfois,  et  dont  la  présence  n'est  justifiée  par  aucun 
intérêt  scientifique  ou  littéraire  tel  qu'un  simple  renvoi  n'eût  pu 
suffire  :  cela  produit  une  bigarrure  peu  agréable.  Passe  encore 
dans  une  dissertation  spéciale,  exclusivement  réservée  aux  hellé- 
nistes de  profession  ;  mais  dans  un  livre,  et  dans  un  livre  bien 
écrit,  cela  n'est  vraiment  pas  admissible,  du  moins  en  France, 
et  j'avoue  que,  sur  ce  point,  je  n'aperçois  aucune  raison  de  changer 
nos  habitudes  nationales.  Le  second  reproche  que  je  veux  faire 
à  M.  C.  est  d'avoir  eu  quelquefois  peut-être  trop  de  conscience; 
je  veux  dire  par  là  que,  de  peur  sans  doute  d'être  taxé  de  légèreté, 
il  lui  est  arrivé  de  discuter  trop  minutieusement  des  choses  qui,  à 
mon  sens,  ne  méritaient  pas  tant  d'honneur;  par  exemple,  aux  pages 
5o  et  suivantes,  un  texte  de  Suidas  où  personne  n'a  jamais  rien  compris 
par  la  raison  qu'il  est  incompréhensible.  C'est  bien  aussi  ce  qu'en  dit 
M.  C,  mais  pourquoi  nous  faire  passer  en  revue  une  foule  de  ces  con- 
jectures stériles  dont  l'érudition  parfois  est  si  prodigue?  Nous  l'aurions 
volontiers  cru  sur  parole.  M.  Thiers  écrivait  un  jour  dans  une  let- 
tre :  «  J'aime  la  vérité  promptement  dite.  »  Mot  charmant,  et  plein  de 
sens,  que  l'érudition  française,  si  j'ose  le  dire,  devrait  bien  prendre  pour 
devise. 

Après  cette  introduction  nécessaire,  M.  C.  arrive  à  ce  qui  est  propre- 
ment son  sujet  :  la  poésie  alexandrine.  Il  étudie,  en  cinq  livres  :  i°  la 
poésie  élégiaque,  avec  Philétas,  Hermésianax,  Phanoclès,  Alexandre 
d'Etolie,  et  enfin  Callimaque;  2°  la  poésie  lyrique,  avec  les  hymnes  du 
même  Callimaque;  3°  la  poésie  épique,  avec  les  Argonautiques  d'A- 
pollonius, les  Messéniennes  de  Rhianus,  et  encore  Callimaque,  pour 
Hécalé;  4°  la  poésie  pastorale,  avec  Théocrite;  5°  la  poésie  didacti- 
que, avec  les  Phénomènes  d'Aratus.  Enfin,  dans  une  dernière  partie,  le 


d'histoire  et  de  littérature  443 

récit  de  la  querelle  de  Callimaque  et  d'Apollonius  donne  à  M.  C.  l'occa- 
sion de  caractériser  les  tendances  diverses  qui  se  sont  trouvées  en  oppo- 
sition dans  l'école  alexandrine,  et  de  porter  un  jugement  d'ensemble  sur 
le  rôle  de  toute  l'école. 

C'est  là,  comme  on  le  voit,  un  sujet  singulièrement  vaste  et  com- 
plexe. M.  C.  n'a  pas  cherché  à  introduire  daiis  son  étude  l'ordre  chro- 
nologique. Je  crois  qu'il  a  eu  raison,  et  que  la  division  par  genres  poé- 
tiques est,  en  effet,  très  acceptable  dans  l'histoire  d'une  littérature  dont 
le  développement  est  tout  artificiel.  Tout  au  plus  regretterai-je  peut-être 
que,  dans  ce  système,  il  n'ait  pas  cru  devoir  donner  davantage  au  cha- 
pitre chronologique  de  son  Introduction  l'importance  d'une  sorte 
d'Histoire  intérieure,  comme  disent  les  Allemands,  ou,  en  français, 
d'une  Histoire  générale  de  la  poésie  alexandrine.  Au  lieu  d'en  faire  es- 
sentiellement un  catalogue  de  bibliothécaires,  peut-être  aurait-il  été  utile 
d'en  faire  une  véritable  esquisse  de  tout  l'ensemble  du  mouvement  litté- 
raire de  ce  siècle.  Les  études  de  détail  auraient  eu  ensuite  plus  de  clarté, 
et  surtout  la  physionomie  de  chacun  des  poètes  d'Alexandrie  se  serait 
dégagée  à  nos  yeux  d'une  manière  plus  vive. 

Quoi  qu'il  en  soit,  il  faut  d'abord jremercier  M.  C.  de  l'attention  vrai- 
ment infatigable  et  de  la  conscience  scrupuleuse  avec  laquelle  il  a  lu 
pour  nous,  non-seulement  tous  les  fragments  des  Alexandrins,  mais 
aussi  presque  tout  ce  qui  a  été  écrit  d'utile  sur  cette  matière;  son  livre 
est,  à  cet  égard,  une  mine  précieuse  d'informations  exactes.  Il  faut  aussi 
le  remercier  d'avoir  su  exposer  dans  un  style  simple,  sobre,  élégant,  les 
résultats  de  ses  longues  recherches,  et  surtout  d'avoir  semé  en  maint  en- 
droit des  pages  charmantes,  très  françaises  et  très  délicates,  sur  les  ques- 
tions de  goût  et  d'art  qui  se  posent  sans  cesse  à  propos  de  ces  poètes 
qu'il  connaît  si  bien.  Mais  ceci  même  me  ramène  au  grief  que  j'expri- 
nais  tout  à  l'heure  :  M.  C.  est,  quand  il  le  veut,  un  lettré  des  plus  fins  : 
c'est  pourquoi  j'ai  tant  de  peine  à  lui  pardonner  de  hérisser  quelquefois 
les  abords  de  ses  meilleures  pages  un  peu  plus  qu'il  n'était  strictement 
nécessaire. 

Je  vais  plus  loin.  Je  crois  que,  même  au  point  de  vue  scientifique,  son 
livre  eût  gagné  parfois  à  s'élever  plus  littérairement  au-dessus  du  menu 
détail  pour  arriver  à  nous  rendre  ce  qui  est  le  but  suprême  de  toutes  les 
recherches  érudites,  je  veux  dire  l'âme  vivante  du  passé,  l'érudition  elle- 
même  n'étant  que  la  route  souvent  âpre  et  désagréable  par  où  l'on  tend 
à  ce  but.  Par  exemple,  à  propos  du  style  de  Philétas,  M.  C,  à  la  page  79 
de  son  livre,  nous  donne,  dans  son  texte  même,  une  liste  de  locutions 
grecques  rangées  sous  certains  chefs.  J'aurais,  sur  plusieurs  de  ces  locu- 
tions, des  réserves  à  faire  :  ainsi,  l'emploi  métaphorique  de  oàpjjt.axov 
n'est  pas,  à  proprement  parler,  alexandrin,  il  est  simplement  poétique. 
Mais  peu  importe  :  ce  que  je  veux  dire,  c'est  q.u'au  milieu  de  tous  ces  dé- 
tails, dont  plusieurs  prêtent  à  la  discussion,  l'idée  générale,  qui  est 
juste,  risque  de  s'effacer,  et  que  le  tout  serait  plus  net  si  l'auteur  avait 


444  REVUE   CRITIQUE 

simplement  exprimé  dans  le  corps  même  de  son  livre  une  impression 
d'ensemble  précise  et  simple,  avec  quelques  exemples  choisis  rejetés  en 
note.  J'en  dirai  autant  de  la  page  94,  qui  est  surtout  un  recueil 
de  matériaux.  De  même  encore,  en  plusieurs  passages  (page  104,  entre 
autres),  M.  C,  étudiant  la  versification  de  ses  poètes,  s'attache  trop,  se- 
lon moi,  à  des  statistiques  de  césures  et  de  fins  de  vers  qui,  par  elles- 
mêmes,  ne  signifient  pas  grand  chose  :  ce  qui  serait  intéressant,  ce  serait 
de  voir  ce  qui  résultait  de  tout  cela  quant  à  l'effet  produit  sur  des  ima- 
ginations grecques  du  111e  siècle;  car,  pour  les  césures  elles-mêmes,  que 
nous  importe  de  les  connaître,  si  ce  n'est  afin  d'arriver  par  là  encore  à 
quelque  chose  de  vivant  et  de  concret? 

Voici,  pour  en  finir  avec  ces  critiques,  deux  ou  trois  autres  observa- 
tions. A  propos  de  l'épigramme  (pp.  171  et  suiv.),  M.C.  nous  dit  qu'elle 
n'est  plus,  chez  les  Alexandrins,  ce  qu'elle  a  été  dans  les  âges  classiques 
de  la  Grèce.  Soit,  mais  cela  reste  obscur  ;  il  était  indispensable  de  marquer 
plus  nettement,  en  quelques  traits,  en  quoi  consiste  cette  évolution  :  les 
éléments  de  la  réponse  à  cette  question  se  trouvent  à  peu  près  dans  les 
pages  suivantes,  mais  épars;  il  était  nécessaire  de  les  condenser.  Sur 
l'hymne  également,  la  filiation  historique  du  genre  depuis  Homère  jus- 
qu'à Callimaque  aurait  dû  être  tracée  dès  que  le  sujet  même  de  l'hymne 
alexandrin  est  abordé  (pp.  197  et  suiv.),  au  lieu  d'être  rejetée  au  chapitre 
suivant,  où  l'on  ne  voit  même  pas  bien  non  plus  comment  ce  genre  de 
composition  s'exécutait  au  temps  des  Ptolémées.  Les  hymnes  de  Calli- 
maque sont  minutieusement  analysés  un  à  un  et  replacés  par  des  induc- 
tions ingénieuses  dans  leur  ordre  chronologique.  Tout  cela  est  bien  étu- 
dié et  vraisemblable.  Le  danger  était  surtout  de  tomber  dans  la  re- 
cherche subtile  des  allusions.  M.  C.  me  paraît  s'en  être,  en  général,  très 
bien  gardé,  sauf  en  deux  ou  trois  circonstances  :  je  lui  signalerai  notant 
ment  les  pages  209-210,  puis  la  note  de  la  page  235,  que  je  ne  puis 
accepter. 

Sauf  ces  réserves,  et  à  part  un  petit  nombre  de  détails  sans  impor- 
tance sur  lesquels  je  pourrais  différer  d'avis  avec  lui,  je  n'ai  plus  guère 
qu'à  louer,  soit  au  point  de  vue  de  l'exactitude  matérielle  des  recherches, 
soit  quant  à  la  finesse  et  à  la  pénétration  de  l'étude  morale  et  littéraire 
qui  était  la  conclusion  naturelle  de  ces  recherches.  Les  chapitres  sur  les 
Argonautiques  d'Apollonius  de  Rhodes  et  sur  les  Messéniennes  de 
Rhianus  me  semblent  particulièrement  dignes  d'éloge.  Mais  il  n'y  en  a 
pas  un  seul,  sur  les  quatorze  ou  quinze  dont  se  compose  ce  substantiel 
volume,  où  il  ne  fût  aisé  de  noter  des  vues  justes,  originales,  et  expri- 
mées avec  cette  précision  délicate  qui,  en  matière  de  critique  littéraire, 
est  la  marque  même  du  talent.  Sur  la  description  de  la  beauté  féminine 
dans  la  poésie  (pp.  i5i-i52),  sur  la  nature  du  sentiment  de  l'amour  chez 
Callimaque  (pp.  154,  1 56,  159),  sur  la  peinture  du  bonheur  aux  diffé- 
rentes époques  de  la  poésie  (p.  266),  sur  Théocrite  comparé  à  George 
Sand  (p.  401),  sur  la  poésie  populaire  des  pâtres  de  Sicile  (p.  433),  je  lis 


d'histoire  et  de  littérature  445 

dans  l'ouvrage  de  M.  C.  des  pages  charmantes  et  achevées.  Je  cite  ces 
morceaux  entre  bien  d'autres;  il  serait  aisé  d'allonger  cette  liste;  mais 
ce  n'est  pas  un  inventaire  que  je  dresse  :  ce  sont  seulement  quelques  in« 
dications  notées  au  courant  de  la  plume.  Voilà  donc,  au  total,  un  bon 
et  savant  livre.  J'espère  que  M.  Couat,  soit  qu'il  continue  ses  travaux 
sur  les  Alexandrins,  soit  qu'il  aborde  d'autres  parties  de  la  littérature 
grecque,  nous  donnera  prochainement  d'autres  volumes.  Je  souhaite  seu- 
lement qu'il  ose  de  plus  en  plus  être  lui-même,  c'est-à-dire  que,  tout  en 
gardant  ses  habitudes  d'investigation  patiente  et  consciencieuse,  il  ait 
assez  le  sentiment  de  ses  forces  pour  dominer  de  plus  haut  ses  propres 
recherches,  et  pour  laisser  l'écrivain  qui  est  en  lui  se  dégager  plus  har- 
diment l» 

Alfred  Croiset. 


244. —  Joliannes  a  Lasco,  Beitrag  zur  Reformationsgeschichte  Polens,  Deutsch- 
lands  und  Englands  von  Hermanns  Dalton.  Mit  Portraet.  Gotha,  Perthes,  1881, 
xxvm-576  p.  8°. 

L'histoire  de  la  Réforme  en  Pologne  est  un  sujet  qui,  pour  des  raisons 


1.  Je  complète  les  observations  générales  qui  précèdent  par  un  petit  nombre  d'an- 
notations particulières  :  ce  ne  sont,  bien  entendu,  que  de  fort  menus  détails. 

Bien  que  l'impression  soit,  en  général,  très  correcte,  j'ai  noté,  p.  20,  n.  2  :  [xupiaoeç 
pour  jiupiaSeç;  p.  124  (milieu)  :  ohugu.01  pour  oîxiqjwf  ;  p.  26g,  n.  3  :  à~ sip'^atvj 
pour  oVretpsato). 

L'expression  suspecte  Yjpiov  bfAiiyaei  est  donnée  comme  ayant  pour  équivalent  lit- 
téral en  français  (p.  to8,  note  1)  les  mots  (le  cadavre)  grossira  le  tombeau,  en  latin  :  in- 
flabit  iumulum  ;  je  traduirais  plutôt  par  onerabit,  chargera.—  Page  201.  Je  ne  suis  pas 
convaincu  que  la  correction  sùôu  pour  sùpu,  dans  Callimaque  (Hymn.,  I,  85),  soit 
nécessaire  ni  même  utile.  Je  ne  vois  pas  non  plus  qu'il  y  ait  rien  à  suppléer  après  le 
vers  86.  Dans  les  vers  suivants,  en  effet,  il  s'agit  non  de  la  sagesse  du  roi,  comme  le 
dit  M.  C,  mais,  selon  moi,  de  sa  puissance,  de  telle  sorte  que  les  idées  se  suivent 
fort  bien.  —  Page  2  3o.  Dans  un  passage  de  Callimaque  (Hymn.,  II,  68),  M.  C.  s'ap- 
puie sur  le  pluriel  YJjASxépotç  (iaciXeuatv  pour  démontrer  que  l'hymne  fut  composé 
à  la  fin  du  règne  de  Philadelphe,  quand  Cyrène  eut  à  la  fois,  pour  maître  effectif, 
Philadelphie,  qui  l'avait  conquise,  et,  pour  roi  éventuel,  Evergète,  fiancé  de  Bérénice. 
L'ensemble  du  morceau  me  fait  croire  qu'il  s'agit  là  tout  simplement  de  la  suite  des 
rois  de  Cyrène,  y  compris  Ptolémée  Philadelphe,  que  la  conquête  a  mis  en  posses- 
sion de  leurs  droits  fondés  sur  les  oracles,  et  que  le  poète  confond  habilement  avec 
la  dynastie  légitime  et  quasi-divine.  —  Page  028.  M.  C.  parle  des  Perses  d'Eschyle 
comme  si  cette  pièce  avait  été  certainement  rattachée  aux  autres  parties  de  la 
trilogie  par  un  lien  logique  étroit  :  rien  n'est  moins  prouvé,  et  d'excellents 
juges  (M.  Weil  entre  autres)  croient  positivement  le  contraire.  —  Page  45o,  note  3. 
M.  C.  voit  très  bien  que  le  vers  460  des  Phénomènes  d'Aratus,  donné  sans  ponctua- 
tion après  h(6),  n'a  aucun  sens;  mais  pourquoi  semble-t-il  hésiter  à  prendre  la  li- 
berté d'écrire  :  oùxéxt  Qapaa^écç  xeivwv  h(&'  Spxtoç  eltjv  —  dbtXavéâft  tsc  tô  %6xXa 
Tût  t'  aïôépi  G^u,ai'  àvtffltetV?  Une  difficulté  que  l'on  peut  lever  avec  une  simple 
modification  de  la  ponctuation  traditionnelle  n'est  vraiment  pas  une  difficulté  sé- 
rieuse. 


446  REVUE   CRITIQUE 

très-diverses,  n'a  point  encore  attiré  beaucoup  l'attention  des  historiens. 
Les  Polonais  eux-mêmes,  bons  catholiques,  ne  s'intéressent  guère  au 
succès  momentané  de  l'hérésie  dans  leur  pays  et  les  protestants  d'Alle- 
magne connaissent  généralement  trop  peu  la  langue  polonaise  pour  en- 
treprendre des  travaux  approfondis  sur  la  matière.  Cette  histoire  pré- 
sente pourtant  des  chapitres  intéressants  à  bien  des  égards,  et  nous  fait 
connaître  des  hommes  ayant  joué  dans  leur  patrie  un  rôle  ecclésiastique 
et  politique  considérable,  des  personnages  dont  l'influence  s'est  fait  sen- 
tir au  loin  dans  l'Europe  protestante  d'alors.  L'un  des  plus  marquants 
de  ces  hommes,  Jean  Laski,  est  le  héros  du  livre  de  M.  Dalton.  Nous 
disons  héros,  car  l'ouvrage  du  pasteur  de  Saint-Pétersbourg  est  un  pa- 
négyrique chaleureux  et  convaincu,  plus  encore  qu'une  page  d'histoire. 
Jean  Laski,  né  en  1499  dans  la  petite  ville  de  Lask,  dont  ses  ancêtres 
étaient  seigneurs,  appartenait  à  la  haute  noblesse  polonaise.  Son  père 
était  woywode  du  palatinat  de  Sieradz,  son  oncle  archevêque  de  Gnesen 
et  l'un  des  hommes  les  plus  influents  du  royaume.  Laski  fit  ses  études 
successivement  à  Bologne,  à  Paris,  à  Bâle,  apprit  à  y  connaître  les  idées 
de  la  Réforme,  mais  sans  les  partager  d'abord.  Agent  dévoué  de  Jean 
Zapolya  dans  ses  tentatives  pour  se  procurer  la  couronne  de  Hongrie, 
après  la  défaite  de  Mohacz,  il  fut  récompensé  de  son  zèle  par  le  siège 
épiscopal  de  Vesprim.  En  1 538,  son  oncle  le  fit  appeler  comme  archi- 
diacre à  Varsovie,  avec  promesse  d'un  évêché  considérable,  à  l'une  des 
premières  vacances.  Mais,  à  ce  moment,  Laski  sentit  le  besoin  d'avouer 
hautement  les  opinions  nouvelles  qu'il  s'était  faites.  Il  partit  pour  l'é- 
tranger, et,  après  avoir  voyagé  quelque  temps,  fut  appelé  à  Embden 
pour  organiser  les  églises  de  la  Frise  orientale,  dans  le  sens  des  idées  cal- 
vinistes. Il  s'y  était  acquis  une  grande  réputation  de  sagesse  et  de  piété 
quand  Y  Intérim  de  1548  le  força  de  quitter  son  poste.  Edouard  VI 
d'Angleterre  lui  offrit  un  refuge  à  Londres  où  il  acquit  bientôt  une  haute 
influence,  et  devint  le  surintendant  des  communautés  réfugiées  de  l'An- 
gleterre. A  la  mort  d'Edouard  et  à  l'avènement  de  Marie  Tudor,  il  dut 
fuir  en  toute  hâte  pour  ne  point  partager  le  sort  de  son  ami  Cranmer. 
Des  discussions  théologiques  sans  cesse  renaissantes,  grâce  à  la  haine 
des  luthériens  pour  les  calvinistes,  le  chassèrent  des  différentes  villes  où 
il  chercha  vainement  un  abri  durable.  Il  se  décida  enfin  à  retourner  en 
Pologne,  où  il  travailla,  de  concert  avec  le  prince  Radziwill,  à  l'organi- 
sation des  églises  réformées  du  pays.  Il  eut  à  lutter,  d'une  part,  contre 
l'opposition  des  catholiques,  excités  et  conduits  par  l'énergique  et  habile 
cardinal  Hosius;  d'autre  part,  contre  les  dissidents  anti-trinitaires,  alors 
fort  nombreux  en  Pologne.  Il  mourut  au  milieu  de  ces  rudes  labeurs  en 
janvier  i56o.  Son  souvenir  est  à  peu  près  effacé  dans  sa  patrie,  mais  il 
survit  en  Angleterre  et  dans  les  contrées  frisonnes.  C'est  un  théologien 
hollandais,  M.  Abraham  Kuyper,  qui  a  contribué  à  rappeler  l'attention 
publique  sur  Laski,  en  publiant,  il  y  a  une  vingtaine  d'années,  ses  œuvres 
complètes  et  sa  correspondance.  M.  D.  achève  de  remettre  en  lumière 


d'histoire  et  de  littérature  447 

cette  personnalité  trop  effacée  et  qui  mérite  d'avoir  sa  page  dans  l'his- 
toire de  la  Réforme.  Ceux-là  même  qui  ne  s'intéressent  pas  au  tableau, 
souvent  peu  récréatif,  des  querelles  religieuses,  suivront  avec  intérêt  le 
gentilhomme  polonais  dans  ses  missions  diplomatiques  en  Transylvanie, 
en  Allemagne,  en  Angleterre,  etc.  M.  D.,  nous  l'avons  dit,  est  plus 
qu'un  historien  sympathique,  c'est  un  admirateur  convaincu.  Son  en- 
thousiasme sincère  se  communiquera,  sinon  à  tous  ses  lecteurs,  du 
moins  u  ceux  qui  se  trouvent  en  communion  d'idées  avec  lui.  Mais  au 
point  de  vue  de  la  critique  sérieuse,  on  peut  lui  reprocher  mainte  page 
qui  tient  de  l'imagination  du  littérateur  plus  que  de  la  réserve  prudente 
de  l'historien.  Quand  il  emploie,  p.  ex.,  quatre  pages  pour  nous  dire 
quelles  rues  de  Londres  traversait  Laski,  pour  aller  voir  son  ami,  l'ar- 
chevêque Cranmer,  à  Lambeth,  ou  que,  cinq  pages  durant,  il  nous  fait 
assister  à  l'un  des  prêches  des  réformateurs  polonais,  on  ne  peut  s'em- 
pêcher de  trouver  de  pareilles  descriptions  légèrement  fantaisistes  et  dé- 
placées dans  un  récit  aux  allures  scientifiques1.  Le  style  de  M.  D.  est 
animé,  mais  souvent  incorrect,  plus  souvent  même  légèrement  am- 
poulé 3.  Il  conserve  par  moments  quelques  tournures  qui  rappellent  l'o- 
rigine anglaise  de  l'auteur  \  Quoique  pasteur  à  Saint-Pétersbourg  et 
sujet  russe,  les  sympathies  de  M.  Dalton  sont  tout  allemandes;  l'alle- 
mand est  devenu  la  langue  maternelle  de  l'ancien  citoyen  anglais.  Nous 
ne  songeons  point  à  lui  en  faire  un  reproche,  nous  regrettons  seulement 
qu'il  ait  cru  nécessaire,  pour  les  affirmer,  de  répéter  je  ne  sais  quelle  ri- 
dicule anecdote  sur  le  «  chauvinisme  français  »  et  de  se  «  réjouir  de  la 
victoire  de  Sedan  *  »,  dans  un  ouvrage  consacré  à  un  théologien  polo- 
nais du  xvie  siècle. 

R. 


245. —  E.  de  Bouteiller  et  Eug.  Hepp.  Correspondance  politique  adressée 
au  magistrat  de  Strasbourg  pnr  ses   agents   à   Metz  (1SS94-18S3), 

tirée  des  archives  municipales  de  Strasbourg  et  publiée  pour  la  première  fois  avec 
notes  explicatives,  etc.  Paris.  Berger-Levrault,  1882,  xvn-463  p.  8°.  Prix  :  10  fr. 

Le  volume  publié  par  les  soins  de  MM.  de  Bouteiller  et  Hepp  ne  ren- 
ferme pas,  comme  on  pourrait  le  croire,  de  correspondances  diplomati- 
ques, adressées  au  magistrat  de  la  petite  république  rhénane  par  ses  am- 


1.  Pp.  338  et  38o. 

2.  Ainsi,  p.  440,  la  comparaison  de  Laski  avec  une  lionne,  etc.  Bien  peu  de  per- 
sonnes comprendront,  p.  429,  la  métaphore  de  «  l'écho  qui  viendrait  retentir  contre 
les  rochers  du  synode  missourien.  » 

3.  C'est  ainsi  qu'on  lit,  p.  412  :  «  Es  felhte  ein  Stock glaubiger  Maenner.  »  L'au- 
teur, évidemment,  songeait  à  l'anglais  stock  =  noyau,  centre,  et  non  au  mot  alle- 
mand identique,  qui  signifie  canne. 

4.  Pp.  335  et  376 


448  REVUE  CRITIQUE 

bassadeurs  ou  plénipotentiaires  à  l'étranger.  A  l'époque  où  commencent 
les  lettres  réunies  ici,  Metz  appartenait  depuis  près  d'un  demi-siècle  à  la 
France  et  Savait  plus  de  relations  officielles  d'aucun  genre  à  entretenir 
au  dehors.  Les  pièces  tirées  des  archives  de  Strasbourg,  sont  des  galet- 
tes, des  nouvelles  à  la  main,  sur  la  politique  générale  de  l'Europe,  en- 
voyées aux  gouvernants  de  la  ville  par  des  particuliers  habitant  Metz  et 
chargés,  contre  un  fort  modeste  salaire,  de  recueillir  toutes  les  nouvel- 
les, tous  les  bruits  du  dehors  parvenant  à  leurs  oreilles.  Strasbourg  n'a- 
vait point  alors  de  résident  à  la  cour  de  France,  et,  désireux  pourtant  de 
savoir  ce  qui  se  passait  dans  les  contrées  au-delà  de  la  Lorraine,  les  ma- 
gistrats de  la  république  essayaient  de  s'orienter  de  la  sorte  sur  les  me- 
nées de  la  politique  occidentale.  Ces  renseignements  ne  valaient,  natu- 
rellement, qu'en  raison  du  discernement  des  personnes  chargées  de  les 
recueillir  et  ne  pouvaient  jamais  réclamer  la  confiance  due  à  des  révéla- 
tions diplomatiques,  vu  le  caractère  tout  privé  des  correspondants  de 
Strasbourg.  Ni  le  bon  gentilhomme  picard,  M.  de  Flavigny,  qui  rédige 
ces  lettres  de  1594  à  1626,  ni  l'avocat  Jalon,  qui  les  reprend  de  1579  à 
i583,  n'avaient  —  on  n'a  qu'à  les  lire  pour  s'en  convaincre  —  de  rela- 
tions ouvertes  ou  cachées  avec  le  gouvernement  français  et  ne  pouvaient 
donc  communiquer  des  secrets  d'Etat  à  leurs  correspondants  d'Alsace. 
Aussi  n'est-ce  point  dans  cette  direction  qu'il  faut  chercher  l'intérêt  du 
présent  volume.  Il  nous  représente  bien  plutôt  une  correspondance  spé- 
ciale, parisienne  et  messine  à  la  fois,  qui  porte,  à  jour  fixe,  les  mille  bruits 
et  faits  divers  de  la  capitale,  jusqu'au  fond  des  provinces.  Ces  rapports  heb- 
domadaires ou  mensuels  mêlent  le  vrai  au  vraisemblable,  et  parfois  au 
mensonge,  tâchant  de  dégager  les  probabilités  de  la  politique  du  jour  des 
assertions  contradictoires  qui  se  croisaient  en  public,  ne  dédaignant  pas, 
par  moment,  quand  la  haute  politique  est  en  souffrance,  le  simple  fait- 
divers,  et  racontant  alors  la  femme  assassinée,  mise  dans  une  malle  et  je- 
tée à  la  rivière,  le  fils  de  famille  endetté,  dont  on  dégage  les  habits  chez 
le  tailleur,  etc.  A  ce  point  de  vue,  la  lecture  de  ce  volume  est  instruc- 
tive et  amusante  à  la  fois.  On  y  voit  se  tramer,  par  le  menu,  les  faits  et 
gestes  de  l'histoire  diplomatique  et  militaire  contemporaine,  que  nous 
ne  voyons  d'ordinaire  que  sous  un  aspect  plus  sévère.  On  y  peut  étudier 
surtout  la  physionomie  morale  de  la  cité  messine  dans  le  premier  siècle 
après  sa  conquête,  et  c'est  donc  plus  encore  une  contribution  à  l'histoire 
de  Lorraine  qu'à  celle  d'Alsace  que  nous  recevons  ici.  Avec  quel  soin  ne 
recherche-t-on  pas  aujourd'hui  les  derniers  débris  des  gazettes  du 
xvne  siècle?  En  voici  tout  un  riche  fascicule  qui  sera  le  bienvenu  pour 
tout  amateur  historique  sérieux,  et  dont  on  tirera  d'utiles  données,  sinon 
pour  l'histoire  politique  de  la  France  et  de  l'Allemagne,  au  xvne  siècle, 
du  moins  pour  l'histoire  générale  de  la  civilisation  à  cette  époque.  Il 
faut  seulement  avertir  le  lecteur  —  et  le  titre  ne  le  dit  pas  —  que  cette 
correspondance  est  perdue  pour  toutes  les  années  de  (627  à  1679,  ainsi 
pendant  plus  d'un  demi-siècle,  si  réellement  elle  s'est  continuée  durant 


d'histoire  et  de  littérature  449 

toute  cette  époque.  Car  Flavigny  meurt  en  1626;  Jalon  ne  commence 
ses  communications  qu'en  1679,  ou,  pour  mieux  dire,  en  1681,  puis- 
qu'il n'existe  plus  qu'une  seule  lettre  antérieure  à  cette  dernière  date. 

Un  inconvénient  assez  sérieux  pour  l'utilisation  du  recueil,  c'est  l'or- 
thographe très  fantaisiste  des  correspondants  strasbourgeois,  de  M.  de 
Flavigny  surtout.  Les  .éditeurs  ont  scrupuleusement  respecté  cette  ortho- 
graphe. Je  n'ai  garde  de  leur  en  faire  un  reproche,  mais  ils  devaient 
mettre  en  note  les  corrections  nécessaires,  et  ne  pas  se  borner  de  recti- 
fier dans  la  table  des  matières  seulement.  Comment  trouver  maintenant 
de  quelle  personne  il  s'agit,  quand  on  n'est  pas  soi-même  assez  perspi- 
cace pour  corriger  l'erreur,  avant  même  de  consulter  la  table?  Un  au- 
tre inconvénient  de  cette  dernière,  c'est  qu'on  y  a  réuni  pêle-mêle  tous 
les  personnages  portant  le  même  nom,  laissant  au  lecteur  le  soin  de  se 
débrouiller  à  sa  guise.  Ainsi,  au  nom  de  Mansfeld,  les  renvois  s'appli- 
quent successivement  au  prince  gouverneur  du  Luxembourg,  Pierre- 
Ernest,  mort  en  1597,  à  Ernest,  son  bâtard,  le  célèbre  condottiere  de  la 
guerre  de  Trente-Ans,  mort  en  1626,  au  comte  Wolfgang  de  Mansfeld, 
résident  de  l'empereur  à  la  cour  de  France,  du  temps  de  la  capitulation 
de  Strasbourg.  Signalons,  en  terminant,  quelques  erreurs  de  peu  d'im- 
portance qui  déparent  les  notes  finales.  P.  397,  lisez  Hubert  Languet 
pour  Longuet.  —  P.  419.  L'Union  protestante  fut  signée  à  Ahausen 
ou  Aschhausen,  pas  Aufhausen. —  P.  404.  Joseph  Jundt,  né  en  1601, 
ne  pouvait  être,  en  16 16,  syndic  de  la  ville  de  Strasbourg.  Aussi  est-ce 
1661  qu'il  faut  lire.  —  P.  429.  Le  beau-frère  de  Gûntzer  s'appelait 
Kaempfer  et  non  Kimpfer.  —  P.  433.  Claude  le  Laboureur,  premier 
président  du  Conseil  souverain  d'Alsace,  n'était  point  d'une  famille 
strasbourgeoise.  Le  fait  seul  qu'il  était  fervent  catholique  aurait  pu  aver- 
tir les  éditeurs  de  leur  méprise.  —  P.  92.  Il  est  question  des  «  Etats  de 
Laussnitz  »  en  Silésie;  il  s'agit  des  Etats  de  la  province  de  Lusace 
(dans  le  royaume  de  Saxe  actuel)  et  non  d'une  ville  de  Laussnitz,  qui 
figure  à  la  table  des  matières,  mais  dans  aucun  manuel  de  géogra- 
phie. Mais  ce  sont  là  des  rectifications  de  détail  qui  ne  doivent  point 
nous  rendre  injustes  pour  le  mérite  réel  du  travail  fourni  par  les  édi- 
teurs at  pour  sa  valeur  au  point  de  vue  historique. 

R. 


LETTRE     DE     M.     JOH.     STOR1H 


En  rendant  compte,  avec  une  bienveillance  extrême,  de  ma  Philolo- 
gie anglaise  (n°  41),  M.  Joret  a  indiqué  quelques  points  de  phonétique 
française  sur  lesquels  il  diffère  de  moi.  Je  tiens  à  constater  que,  dans 
plusieurs  cas,  ce  désaccord  n'est  qu'apparent  ;  en  d'autres  termes,  je  discu- 
terai ses  critiques.  M.   J.  n'a  pas  toujours  bien  saisi  le  sens  de  mes  ob- 


45  O  REVUE   CRITIQUE 

servations.  Une  fois,  il  se  dit  d'accord  avec  moi,  quand  nous  ne  le  som- 
mes pas  ;  d'autres  fois,  il  me  fait  différer  de  lui,  quand  nous  sommes 
d'accord.  Dans  ce  qui  suit,  je  suivrai  l'ordre  des  critiques  de  M.  Joret. 

M.  J.  admet,  dit-il,  que  j'ai  raison  de  dire  que  u  de  un  a  le  son 
eu  de  peuple  ;  or,  j'ai  dit,  p.  59  :  un  son  plus  ouvert  que  celui  dépeuple, 
voyelle  que  je  retrouve  dans  le  Scandinave  l. 

Ce  qui  prouve  que  i  de  vin  se  rapproche  de  à  (Va  anglais  de  mari)  et 
souvent  l'atteint 2,  c'est  que  très  souvent  les  étrangers  le  prennent  pour  un 
a  ;  par  exemple,  le  mot  médecin  sonne  à  peu  près  comme  med-sa  pour 
eux,  surtout  pour  ceux  qui  ne  connaissent  pas  les  voyelles  nasales.  Il 
faut  avoir  une  connaissance  très  intime  des  sons  étrangers  pour  se  faire 
une  idée  exacte  de  l'impression  que  produisent  les  sons  français,  si  dif- 
férents de  tous  les  autres,  sur  les  oreilles  des  étrangers. 

Il  est  vrai  que  je  Raccorde  aux  voyelles  nasales  qu'une  seule  qualité  ; 
quant  à  la  quantité,  j'admets  au  contraire  qu'elle  varie;  c'est,  je  crois, 
la  seule  différence  entre  dent  (a  *  bref)  et  dents  [a  long) 3;  seulement  je  ne 
suis  pas  entré  dans  ce  détail,  parce  que  je  n'étais  pas  sûr  que  cette 
distinction  fût  générale  et  constante.  C'est  aux  phonétistes  français  de 
vérifier  cela.  Quant  à  la  différence  entre  chant  (bref)  et  chante  (long),  je 
l'ai  toujours  admise. 

Mon  critique  me  fait  supposer  que  M.  Havet  prononce  vingt-deux 
comme  vàn-dô,  ce  qu'il  corrige  en  vdrin-deû.  Ici  il  y  a  un  double  mal- 
entendu4. M.  Havet  a  dit  non  pas  que  in  de  vingt  change,  mais  bien 
que  t  (d)  devient  n.  Moi,  j'ai  représenté  (p.  38,  note  2)  cette  prononcia- 
tion très  fidèlement  par  la  notation  vên-dô  c'est-à-dire  vin  (voyelle 
nasale  ê)  -f-  un  n  dental,  tout  en  faisant  observer  que  vend-do  (vè  -f-  n 
dental  -j-  d)  me  paraît  la  prononciation  usuelle,  comme  l'admet 
aussi  M.  Joret. 

Quant  à  la  prononciation  du  gn  français,  ce  n'est  que  du  gn  du 
nord  et  surtout  de  Paris  que  j'ai  dit  qu'il  diffère  par  une  nuance  assez 
sensible  du  gn  italien  et  du  h  espagnol,  en  ce  qu'il  est  moins  palatal  que 
ceux-ci,  mais  plus  palatal  que  le  ng  ou  n  guttural  germanique,  auquel  il 
est  très  ressemblant5.  Cela  est  tellement  vrai  que  la  plupart  des  Français 
prononcent  l'anglais  singcommt  leur  signe,  sans  se  douter  d'aucune 
différence6.  Je  n'ai  donc  pas  dit  que  «  le  gn  français  est  tout  différent  du 
gn  italien7»,  encore  moins  «  qu'il  se  prononce  comme  n8»,  ce  qui  serait 
absurde.  Je  ne  sais  pas  même  où  M.  J.  prend  cet  n,  dont  je  n'ai  pas  dit  un 
mot,  à  moins  qu'il  ne  confonde,  comme  la  plupart  de  ses  compatriotes,  Yn 
guttural  avec  un  n  dental.  En  effet9,  les  Français  du  nord  prononcent  le 
venga  du  midi  comme  venne-ga.  Si  les  Français  ne  saisissent  pas  ces 
nuances,  c'est  qu'ils  ne  connaissent  pas  assez  à  fond  les  prononciations 


*  Notre  imprimerie  n'ayant  pas  pour  le  moment  de  voyelles  tildées,  nous  rem- 
plaçons le  tilde  indiqué  par  l'auteur,  et  qui  marque  la  nasalité  des  voyelles,  par  un 
accent  circonflexe.  —  Réd. 


d'histoire  et  de  littérature  45 1 

étrangères  et  se  contentent  d'un  à  peu  près.  En  fait,  l'italien  gn  de 
segno  diffère  même  en  deux  points  du  gn  parisien  de  signe,  produit 
plus  avant  dans  la  bouche  :  i°  en  ce  qu'il  est  plus  palatal  ;  20  en  ce  qu'il 
est  plus  composé,  le  son  ;  se  faisant  entendre  non-seulement  fondu  à  l'rc, 
mais  souvent  indépendamment  après  ïn  palatal  10. 

Un  point  sur  lequel  je  me  range  à  l'avis  de  M.  J.,  c'est  que  l'e  final 
français  est  souvent  prononcé,  même  après  une  seule  consonne,  comme 
«  une  demi-muette  ».  J'ai  cru  remarquer  ce  son  depuis  vingt  ans;  sï 
je  n'en  ai  pas  parlé,  c'est  que  je  ne  croyais  pas  que  cette  prononciation 
fût  reconnue  ;  les  phonétistes  français  auxquels  j'en  ai  parlé  l'ont  niée 
absolument.  Je  suis  heureux  d'être  d'accord  sur  ce  point  avec  M.  J.,  et 
désormais  j'en  parlerai  avec  plus  d'assurance,  d'autant  que  dans  ces 
dernières  années  j'ai  pu  vérifier  par  des  observations  nouvelles  l'existence 
de  ce  son  n.  M.  J.  dit  à  ce  propos  :  «  Voilà  ce  que  souvent  les  étran- 
gers ne  comprennent  pas  »  12  :  comment  veut-il  qu'ils  comprennent 
ce  que  les  phonétistes  français  (à  l'exception  de  M.  J.)  ne  semblent  pas 
reconnaître  ? 

Je  suis  loin  d'identifier  l'e  obscur  allemand  avec  l'e  fermé13;  j'y  ai 
reconnu  (p.  66  fin),  au  contraire,  un  son  intermédiaire  entre  eu  et  é.  Je 
n'ai  pas  donné  raison  aux  linguistes  qui  le  confondent  avec  e',  mais 
j'ai  cité  l'effet  qu'il  fait  aux  Français  comme  preuve  qu'il  diffère 
de  Ve  dit  muet  du  français,  qui  se  rapproche  plus  de  eu.  Je  parle  ici  de 
la  prononciation  ordinaire  de  l'allemand.  Quant  à  Ye  final  Scandinave, 
il  est  absolument  identique  à  Ye  final  allemand  du  nord,  et  ne  se  rap- 
proche nullement,  comme  le  croit  M.  J.,  de  l'e  fermé,  son  bien  connu 
des  langues  Scandinaves  14. 

D'autre  part,  il  existe  des  dialectes  Scandinaves  et  allemands  qui  rap- 
prochent l'e  final  de  Yé  fermé. 

M.  J.  dit  :  «  L'r  des  idiomes  du  sud  de  la  Norvège  et  delà  Suède  me 
paraît  dental,  tandis  que  le  nôtre  est  uvulaire  ».  La  première  de  ces 
assertions  est  une  erreur.  Nous  pouvons  constater  tous  les  jours  que  cet 
r  est  bien  uvulaire,  mais  il  diffère  du  son  français  en  ce  qu'il  est  moins 
distinct,  moins  vibrant,  plus  «  spirantîsch  »  ;  dans  le  grasseyement 
français,  la  luette  semble  être  poussée  plus  avant  sur  le  dos  de  la  lan- 
gue 15. 

Je  ne  me  serais  pas  étendu  si  longuement  sur  ces  petites  divergences, 
si  je  ne  croyais  pas  que  le  sujet  même  a  un  certain  intérêt.  En  outre, 
je  n'ai  pas  voulu  paraître  plus  en  désaccord  que  besoin  n'était  avec 
M.  J.,  chez  lequel  je  reconnais  une  grande  compétence  dans  la  lin- 
guistique germanique  et  romane,  et  auquel  je  suis  très  reconnaissant 
du  jugement  général,  si  flatteur  pour  moi,  qu'il  a  porté  sur  mon 
livre. 

Si  je  n'ai  pas  fait  une  édition  française  de  mon  livre,  c'est  qu'il  m'a 
semblé  que  le  public  français  s'intéresse  peu  à  cette  sorte  de  recherches  lc. 
Témoin  le  fait  étonnant  qu'une  revue  comme  la  Romania,  une  des 


452  REVUE   CRITIQUE 

premières  revues  scientifiques  du  monde  et  qui  traite  de  l'ancienne  langue 
du  pays  même,  n'a  que  deux  ou  trois  cents  abonnés  payants  (dont  une 
grande  partie  sont  des  étrangers),  et  ne  pourrait  pas  subsister  sans  le 
secours  du  gouvernement,  qui  en  achète  un  certain  nombre  d'exemplai- 
res pour  les  distribuer  gratuitement. 

Je  terminerai  ces  observations,  déjà  trop  longues,  par  le  vœu  qu'un 
phonétiste  français  compétent  fasse  bientôt  la  phonologie  de  la  langue 
parlée  actuelle  du  nord  de  la  France  et  surtout  de  Paris.  Il  est  des 
particularités  et  des  traits  distinctifs  dont  les  indigènes  ne  s'aperçoivent 
pas  ;  sur  ces  points,  l'opinion  des  phonétistes  étrangers  n'est  pas  à  dé- 
daigner 17.  D'autre  part,  il  y  a  un  grand  nombre  de  faits,  de  tendances 
et  d'habitudes  qu'il  faut  être  indigène  pour  connaître  à  fond.  En  réunis- 
sant les  recherches  et  les  observations  de  tous,  on  finirait  par  faire  une 
œuvre  complète. 

Christiania,  le  20  octobre  1882. 

Joh.  Storm. 

(1)  J'ai  eu  tort,  je  le  reconnais,  de  dire  que  M.  Storm  attribuait  à  l'a  de  un  la  même 
valeur  qu'à  Veu  de  peuple  ;  seulement  je  doute  un  peu  que  cet  u  soit  plus  ouvert  que 
l'eu  du  mot  peuple. 

(2)  Je  n'ai  jamais  dit  le  contraire;,  seulement  M.  S.  me  permettra  de  faire  remar- 
quer que  les  étrangers  «  qui  ne  connaissent  pas  les  voyelles  nasales  »  sont  très 
mauvais  juges  de  leur  valeur  véritable  et  les  prononcent,  par  suite,  un  peu  à  l'aventure. 

(3)  Je  suis  très  content  qu'un  phonétiste  aussi  autorisé  que  M.  S.  partage  ma 
manière  de  voir  sur  ce  point  et  je  suis  heureux  de  lui  avoir  donné  l'occasion  de 
se  prononcer  sur  une  question  de  phonétique  très  mal  étudiée,  je  crois,  et  très  mal 
résolue  chez  nous. 

(4)  Il  y  a  là,  en  effet,  un  malentendu  qui  est  maintenant  éclairci;  je  m'étais  mépris 
sur  la  valeur  de  la  notation  de  M.  Storm.  Quant  à  l'approbation  que  j'ai  paru  donner 
à  sa  manière  de  voir  au  sujet  de  la  valeur  dentale  de  Fn  de  vingt-deux,  je 
la  retire  décidément;  je  crois  qu'il  n'y  a  que  deux  manières  possibles  de  prononcer 
vingt-deux  :  vê-t-dœ  qui  est  la  prononciation  générale  dans  le  nord  de  la  France, 
ou  vèn'dx  qui  est,  je  crois,  la  prononciation  de  M.  L.  Havet.  [M.  Havet  entend  la 
prononciation  de  ce  mot  conformément  à  la  notation  de  M.  Storm.  —  Réd.] 

(5)  Je  crois  que  le  gn  italien,  le  h  espagnol  et  le  gn  français  sont  identiques,  et 
c'est  aussi,  il  me  semble,  l'opinion  de  M.  Havet;  je  ne  puis  donc  admettre  que  notre 
gn  soit  «  très  ressemblant  au  ng  germanique  »;  M.  S.  dit  lui-même,  p.  37,  que  ce 
dernier  son  nous  est»  entièrement  étranger  et  incompréhensible  (ein  gan%  fremder 
und  unbegreiflicher  haut),  ce  qui  est  vrai  ;  mais  comment  en  pourrait-il  en  être  ainsi, 
si  nous  avions  dans  notre  langue  un  son  qui  lui  fût  «  très  ressemblant  »? 

(6)  De  ce  que  «  la  plupart  des  Français  prononcent  l'anglais  sing  comme  signe  » 
cela  ne  prouve  nullement  qu'ils  ne  a  se  doutent  d'aucune  différence  entre  ces  deux 
sons  »  ;  cela  prouve  seulement  qu'ils  ne  veulent  pas  se  donner  la  peine  de  prononcer 
le  premier. 

(7)  M.  S.  a  dit,  p.  47,  que  notre  gn  est  un  ng,  non  un  n  mouille,  ce  que  je  crois  de 
tout  point  inexact. 

(8)  Certainement;  aussi  n'ai-je:  pas  attribué  cette  opinion  à  M.  Storm.  Ne  pouvant 
me  servir  du  signe  qu'il  emploie  (et  que  je  représente  ici  par  ng),  j'avais  écrit  h 
surmonté  d'un  pointa  la  place  du  dernier;,  on  a  imprimé  un  «  simple,  ce  qui  n'a 
plus  de  sens  :  Pro  solo  puncto,  etc.  On  me  croira  d'autant  plus  facilement  qu'à  la 
même  ligne  on  a  imprimé,  ce  qui  me  rend  presque  inintelligible,  il  faut  au  lieu  de 
Us  font. 


d'histoire  et  be  littérature  45  3 

(9)  Je  n'ai  pas  besoin  de  dire  que  je  ne  confonds  nullement  Yn  guttural  et  Vit  dental. 

(10)  Je  doute  beaucoup  de  la  première  de  ces  affirmations;  quant  à  la  seconde,  elle 
est  en  grande  partie  vraie  et  prouve  que  IV.  mouillé  tend  à  se  transformer  en  n 
simple,  comme  cela  arrive,  je  l'ai  dit,  dans  certains  mots. 

(11)  Je  n'ai  pas  besoin  de  dire  combien  je  suis  aise  de  voir  M.  S.  se  ranger  si 
complètement  à  mon  avis  sur  ce  point. 

(12)  En  disant  cela,  je  faisais  allusion  à  l'auteur  —  un  Suédois  — d'un  petit  dic- 
tionnaire du  patois  normand  du  val  de  Saire,  dans  lequel  tous  les  mots,  qu'ils  soient 
terminés  par  une  explosive  ou  par  une  chuintante,  sont  écrits  sans  e  muet  ou  sans 
apostrophe  qui  indique  que  la  voix  ne  doit  pas  tomber  immédiatement  après  la  con- 
sonne. 

(i3)  J'ai  dit  que  M.  S.  distinguait  avec  raison  Ye  obscur  allemand  de  Ye  muet  fran- 
çais ;  je  me  suis  étonné  seulement  qu'il  parût  admettre  que  cet  e  sonnât  à  nos  oreil. 
les  comme  un  e  fermé. 

(14)  Je  ne  puis  dire  qu'une  chose,  c'est  que  j'ai  été  frappé,  il  y  a  deux  mois,  de  la 
ressemblance  qu'il  y  a  entre  Ye  final  Scandinave  et  Ye  fermé  de  mon  pays. 

(i5)  Ce  que  je  sais,  c'est  que  pour  arriver  à  prononcer  IV  Scandinave,  je  m'effor- 
çais de  former  l'articulation  près  de  la  racine  des  incisives  supérieures,  ce  qui  est  le 
caractère  de  IV  dental,  d'après  M.  S.  lui-même  qui  cite,  p.  3g,  pour  exemple  d'un  r 
dental  le  norv.  tre,  «  dans  lequel  r,  dit-il,  est  formé  à  la  même  place  que  le  t  ». 

(16)  Je  crois  que  M.  S.  n'a  pas  eu  tort  de  ne  point  faire  une  édition  française  de 
son  livre,  par  la  raison  fort  simple  qu'il  n'en  aurait  pas  vendu  dix  exemplaires;  il  au- 
rait dû  voir  que  la  critique  est  dirigée  contre  nous  et  ne  s'adresse  nullement  à  lui. 

(17)  C'est  évident,  et  voilà  pourquoi  il  y  a  tant  à  prendre,  même  pour  la  connais- 
sance de  notre  langue,  dans  le  livre  de  M.  S.,  qui  témoigne  à  la  fois  d'une  observa- 
tion si  patiente  et  si  juste  et  d'une  connaissance  si  approfondie  des  idiomes  germa- 
niques et  romans.  Je  terminerai  ces  observations  à  mon  tour  par  un  vœu,  c'est 
qu'on  arrive  enfin  à  créer  un  alphabet  uniforme  pour  désigner  les  différents  sons,  et 
que  les  signes  employés  se  trouvent  dans  toutes  les  imprimeries  sérieuses. 

C.  J. 


VARIÉTÉS 


BIBL.IOGRA.PHIE     CRÉOLE 

Nouvelle  note  additionnelle. 

Depuis  la  publication  de  notre  essai  de  bibliographie  créole  (Revue 
critique  des  29  août  et  7  novembre  1881),  nous  avons  retrouvé  quelques 
notes  qui  se  rapportent  à  ce  sujet.  Comme  les  matériaux  de  cette 
branche  de  la  linguistique  sont  peu  connus,  même  des  spécialistes,  il  ne 
nous  paraît  pas  inutile  de  donner  ici  ces  quelques  titres. 

Une  variété  de  créole  n'a  pas  été  signalée  par  M.  Coelho;  c'est  : 

U1  Anglo-Indou . 

The  Anglo-Indian  Tongue,  article  du  Blackwood's  Magasine  de 
mai  1877.  —  VAcademy,  en  annonçant  cet  article,  disait  :  «  The 
Anglo-Indian  Tongue  »  is  a  paper  to  be  commended  alike  to  the  curious 
in  the  local  slang  of  ail  nations  as  an  etymological  problem,  and  to  the 
Indian  officers  and  civil  servants,  who  find  their  account  in  accommo- 


454  REVUE   CRITIQUE 

dating  themselves  in  a  great  measure  to  the  languageofthe  country,  the 
peculiarities  of  which,  whether  in  the  culinary,  complimentary,  légal, 
or  objurgatory  lines,  are  cleverly  set  forth  in  this  article.  » 

Spécimen  of  Hindu  English,  article  du  Chambers  Journal  d'a- 
vril 1878. 

Le  journal  le  Times,  dans  son  numéro  du  11  avril  1882,  a  publié 
sous  le  titre  de  Baboo-English  un  article  sur  l'Anglo-Indou  ;  mais  il  y 
est  question  moins  de  la  langue  parlée  que  de  l'anglais  assez  idioma- 
tique, et  avec  saveur  du  terroir,  des  lettrés  indous,  quand  ceux-ci  écri- 
vent en  anglais. 

Anglo-nègre  de  Surinam  (Coelho,  p.  62). 

L'auteur  de  la  «  Kurzgefasste  Neger-Englischè  Grammatik.  Bautzen, 
1854  »,  signalée  par  M.  C,  est  L.  Weiss. 

Ajouter  le  titre  suivant  : 

Van  Dyk,  P.,  onderwyzinge  in  het  Bastert-Engels  of  Neeger-Engels, 
in  de  Hollandsze  Golonien  (Surinam).  Amsterdam  (17..)  112  p.  in-8. 

Anglo-nègre  des  Etats-Unis. 

Slave-songsof  the  United  States,  precededby  an  account  of  thèse  Songs 
and  an  Essay  on  the  Negro  Dialects  observed  at  Port  Royal  by  Prof. 
W.  F.Allen,  of  the  University  of  Wisconsin,  in-8,  1875,  1  doll.  5o  c. 
New  York,  office  of  the  Nation. 

W.  Owens  :  Folk-Lore  of  the  Southern  Negroes,  dans  le  Lippincott's 

Magasine  de  décembre J'ai  oublié  de  noter  l'année  :  ce  doit  être 

entre  1875  et  1880. 

Anglo-Indien  de  VOregon  (Etats-Unis  d'Amérique). 

Cette  langue,  que  M.  C.  mentionne  en  passant  (p.  62),  a  été  l'objet 
d'une  publication  spéciale  : 

Gibbs,  G.,  Dictionary  of  the  Chinook  Jargon  (chinook-engl.  and 
engl.-chin.)  or  Trade  Language  of  Oregon.  in-8.  Washington,  Smith- 
sonian  Institute,  i863. 

Nous  ignorons  à  quelle  variété  anglaise  se  rapporte  l'article  suivant  : 
A.  A.  Hayes,  Jr.  :  Pidgin  English,  dans  le  Scribner's  Monthly  de  jan- 
vier  (entre  j  875  et  1880). 

Lingoa  Gérai. 

A  la  bibliographie  donnée  par  M.  G.,  p.  27,  ajouter  : 

On  the  lingoa  gérai,  by  Prof.  Hart,  of  Cornell  University,  dans  les 
Transactions  of  the  American  Philological  Society  (cf.  YAcademy, 
i5  juillet  1873,  p.  2o3). 

Ph.  de  Martins,  dans  son  Ethnographie  de  l'Amérique  et  en  parti- 
cnlier  du  Brésil,  parle  aussi  de  la  lingoa  gérai. 

Enfin,  à  notre  propre  bibliographie  du  créole  français,  nous  ajoute- 
rons aujourd'hui  : 

Jacob  de  Cordemoy.  Les  refrains  populaires  à  la  Réunion,  dans  les 
Bulletins  de  la  Société  des  sciences  et  arts  de  l'Ile  de  la  Réunion. 
Saint-Denis,  in-8°,  année  1874,  pp.  90-106.  •       H.  Gaidoz. 


d'histoire  et  de  littérature  455 

CHRONIQUE 

FRANCE.  —  M.  Albert  Réville,  professeur  d'histoire  des  religions  au  Collège  de 
France,  va  faire  paraître  à  la  librairie  Fischbacher  un  ouvrage  en  deux  volumes  sur 
les  Religions  des  peuples  non  civilisés . 

—  Vient  de  paraître  à  la  librairie  Hachette  :  C.  Valeri  Catulli  liber.  Les  poésies 
de  Catulle.  Traduction  en  vers  français  par  Eugène  Rostand.  Texte  revu  d'après  les 
travaux  les  plus  récents  de  la  Philologie,  Avec  un  commentaire  critique  explicatif  par 
E.  Benoist,  Professeur  de  Poésie  Latine  à  la  Faculté  des  Lettres  de  Paris.  Ouvrage 
couronné  par  l'Académie  française  au  concours  du  prix  Jules  Janin.  Lyon,  impri- 
merie Louis  Perrin.  Le  tome  premier  donne,  en  regard  du  texte,  la  traduction  en 
vers;  il  contient  en  outre  une  Préface  et  une  Vie  de  Catulle  signées  de  M.  Rostand. 
Le  tome  second,  dont  la  première  moitié  a  seule  paru,  est  consacré  au  commentaire 
critique  [et  explicatif  de  M.  Benoist,  qui  a  jugé  nécessaire  de  donner  sans  retard  au 
public  «  tout  ce  qui  était  suffisamment  achevé  ».  Ce  premier  fascicule  s'arrête  après 
la  pièce  lxiii  {Super  alta  vectus  Attis).  L'autre  moitié  du  tome  II  paraîtra  dans  le 
courant  de  l'année  et  alors  la  Revue  rendra  compte  de  cette  publication  importante. 

—  Notre  collaborateur  M.  Eug.  Mûntz  a  publié  en  brochure  les  Lettres  inédites  de 
savants  français  à  leurs  confrères  ou  amis  d'Italie,  xvue-xixe  siècles.  Le  Puy,  Mar- 
chessou.  In-8",  24  p.)  qu'il  avait  fait  paraître  dans  notre  recueil;  on  se  rappelle  que 
ces  lettres  ont  été  tirées  par  M.  Mûntz  des  bibliothèques  d'Italie  (Barberini,  Corsini, 
Vaticane,  archives  d'Etat  de  Florence,  Marucelliana),  et  que  parmi  elles  figurent 
quatre  lettres  de  Paul-Louis  Courier  à  Gaetano  Marini. 

—  Deux  lettres  inédites  de  Henri  IV  viennent  d'être  publiées  par  M.  A.  Germain, 
doyen  honoraire  de  la  Facultédes  lettres  de  Montpellier;  ellesontété  imprimées  dans  le 
tome  VII  des  mémoires  de  l'Académie  de  Montpellier  et  tirées  à  part';  toutes  deux,  l'une 
du  8  nov.  1576,  l'autre,  du  12  décembre  1584,  sont  adressées  par  le  roi  de  Navarre  à 
l'Université  de  Montpellier;  le  Béarnais  demande  à  la  Faculté  de  garder  auprès  de  lui, 
comme  médecin,  d'abord  Jean  Saporta,  puis  Nicolas  Dortoman,  tous  deux  professeurs 
de  l'Université. 

—  La  seconde  partie  de  la  Pucelle  de  Chapelain  vient  d'être  publiée  par  M.  H.  Her- 
luison  dans  la  collection  que  cet  éditeur  fait  paraître  sous  le  titre  de  «  Bibliothèque 
orléanaise  »  (Jean  Chapelain,  les  dou\e  derniers  chants  du  poème  de  la  Pucelle 
publiés  pour  la  première  fois  sur  les  manuscrits  de  la  Bibliothèque  nationale. 
Orléans,  H.  Herluison.  In-160,  c  et  391  p.  10  fr.;  tiré  à  279  exemplaires  numérotés). 
«  Editeur  soucieux  de  ce  qui  a  été  dit  et  fait  pour  l'honneur  de  Jeanne  d'Arc,  dit 
M.  Herluison,  nous  sommes  heureux  de  pouvoir  ajouter  à  la  Bibliothèque  orléanaise 
l'œuvre  ignorée  de  Chapelain.  »  Outre  le  texte  des  douze  derniers  chants  du  poèmes, 
M.  H.  a  reproduit  la  préface  de  Chapelain,  qui  n'est  pas  sans  quelque  mélancolie,  comme 
le  prouvent  les  premières  lignes  :  «  ce  que  j'avais  prévu  des  malignes  influences  que 
mon  poème  devait  essuyer  à  son  entrée  dans  le  monde  ne  s'est  que  trop  vérifié  par 
l'événement.  L'envie  qui  est  naturellement  contraire  aux  entreprises  élevées,  a  fait  le 
même  accueil  à  la  mienne  qu'à  celles  des  anciens  qui  ont  le  plus  éclaté  ».  Le  volume 
renferme  encore  une  notice  sur  Chapelain  par  le  président  de  la  Société  des  sciences, 
belles-lettres  et  arts  d'Orléans,  M.  Gabriel  Baguenault  de  Viéville,  et  une  Etude  sur 
le  poème  de  la  Pucelle,  de  notre  collaborateur  M.  René  Kerviler,  étude  extraite,  avec 
quelques  modifications  et  additions,  de  l'ouvrage  publié  par  cet  érudit  sur  la  0  Bre- 
tagne et  l'Académie  française  au  xvne  siècle  ». 

—  L'éditeur   Charpentier    a    mis    en    vente   le    Ier    volume   de     l'ouvrage    que 


456  REVUE   GRITIQUB 

M.  E.  Michaud,  professeur  à  l'Université  de  Berne,  publie  sur  Louis  XIV  et  Inno- 
cent XI,  d'après  les  correspondances  diplomatiques  inédites  du  ministère  des 
affaires  étrangères  de  France.  Cet  ouvrage  aura  quatre  volumes.  Le  premier  traite 
d'Innocent  XI  et  de  sa  cour  (in-8°,  58o  pages).  Le  second,  qui  paraîtra  dans  quel- 
ques semaines,  traite  de  la  politique  générale  de  ce  pape,  de  ses  relations  avec  les 
principales  puissances  de  l'Europe,  et  particulièrement  de  son  hostilité  contre  la 
France.  Le  troisième  exposera  le  conflit  politico-ecclésiastique  de  cette  époque 
(1676-1689),  et  le  quatrième  les  débats  ecclésiastiques  et  théologiques  :  révocation 
de  l'édit  de  Nantes,  condamnation  de  Molinos,  du  P.  Maimbourg,  jésuite,  du 
P.  Noël  Alexandre,  dominicain,  les  quatre  articles  de  1682,  l'infaillibilité  du 
pape,  etc. 

—  Parmi  de  récentes  publications  parues  en  province,  nous  avons  à  signaler  de 
M.  Ch.  Aubertin,  des  Recherches  historiques  sur  les  anciennes  écoles  et  le  collège 
de  Beaune  (Beaune,  Batault,  In-8°,  i5a  pp.;  on  y  trouve  d'intéressants  détails  sur 
l'instruction  donnée  par  les  Oratoriens  qui  dirigeaient  depuis  1 624  le  collège  de  Beaune, 
sur  les  Oratoriens  eux-mêmes,  parmi  lesquels  le  futur  terroristeJoseph  Lebon,  etc.): 
—  de  M.  A.  Dujarric-Descombes,  une  Etude  sur  Pierre  Lafon  de  la  Comédie  Fran- 
çaise, 1  773-1846  (Bergerac,  Boisserie.  In-8°,  18  p.);  —  de  M.  René  Fage,  une 
étude  sur  un  épisode  de  la  Fronde  en  province,  la  Tentative  de  translation  à  Limo- 
ges du  parlement  de  Bordeaux,  i652  (Limoges,  Chapouland.  In-8°,  22  pp.)  et  une 
notice  sur  Le  point  de  Tulle  (Tulle,  Chauffon.  In-8",  24  p.  M.  Fage  montre  que 
le  tulle  fut  fabriqué  dès  i655  dans  la  capitale  du  Bas-Limousin  et  introduit  à  la 
cour  par  Et.  Baluze)  ;  —  de  MM.  Magen  et  G.  Tholin,  Deux  montres  d'armes  au 
xve  siècle.  (In-8°,  23  p.,  liste  des  hommes  d'armes  passés  en  revue  en  i568  et  en 
1 569  à  Bordeaux  et  à  Grenade,  où  l'on  trouvera  près  de  deux  cents  noms,  dont 
cent  cinquante  appartenant  à  la  région  du  Sud-Ouest);  —  de  M.  Ch.  Pradel,  une 
Notice  sur  l'imprimerie  à  Castres,  etc. 

—  Dans  un  volume  qui  a  pour  titre  «  Essais  d'histoire  et  de  critique  »  (Paris, 
Pion.  In-8°,  295  p.,  3  fr.  5o),  M.  Alb.  Sorel  a  réuni  des  études,  composées  à  diffé- 
rentes époques  et  sur  des  sujets  divers;  en  voici  les  titres  Metternich  (pp.  3-54),  'V11 
ne  fut,  dit  M.  S.,  qu'un  diplomate,  mais  un  diplomate  de  premier  ordre,  «  l'empi- 
risme politique  n'a  jamais  exercé  ce  prestige,  atteint  cette  gravité la  grande  co- 
médie du  monde,  l'intrigue  supérieure  de  la  scène  européenne  n'ont  jamais  rencontré 
un  auteur  si  fertile  et  un  acteur  si  consommé  »  ;  —  Talleyrand  au  congrès  de  Vienne 
(pp.  b5-94);  —  L'alliance  russe  et  la  Restauration  (pp.  95-1 15),  étude  dans  laquelle 
M.  S.  résume  les  renseignements  fournis  par  M.  de  Viel-Castel,  sur  le  grand  dessein 
de  M.  de  Polignac,  sur  la  légende  d'après  laquelle  la  Restauration  aurait,  en  i83o, 
contracté  avec  la  Russie  une  alliance  intime  qui  aurait  rendu  à  la  France  les  fron- 
tières du  Rhin;  —  Les  Mirabeau  (pp.  1 17-130);  —  Bernis  et  l'alliance  autrichienne 
de  ij56  (pp.  131-149;  la  publication  des  Mémoires  et  de  la  correspondance  de 
Bernis,  dit  M.  S.,  corrige  et  rétablit  certains  détails,  certaines  nuances  assez  impor- 
tantes; mais  l'ensemble  du  tableau  reste  ce  qu'il  était;  si  la  responsabilité  de  Bernis 
est  en  partie  dégagée,  celle  de  Louis  XV  et  de  ses  conseillers  n'en  paraît  que  plus 
lourde  ;  notre  rôle,  écrit  Bernis,  a  été  extravagant  et  honteux  ;  l'arrêt  est  juste,  et 
l'histoire  l'a  confirmé;  —  La  diplomatie  secrète  de  Louis  XV  (pp.  i53-i6g) ;  M.  S. 
complète  l'étude  qu'il  a  commencée  à  propos  de  Bernis;  il  montre  par  l'histoire  du 
Secret  du  roi  «  à  quel  funeste  paradoxe  on  aboutit  lorsqu'on  voulut  faire  de  l'alliance 
autrichienne,  faussée  dans  son  objet  et  dénaturée  dans  ses  applications,  le  principe 
d'un  nouveau  système  de  politique»,  —  La  tsarine  Elisabeth  (pp.  171-190,  d'après 
1»  livre  récent  de  M.  Vandal);  —  Catherine  II  et  la  Révolution  française  (pp.  191- 


d'histoire  et  de  littérature  457 

204);  —  L'Angleterre  et  V émigration  de  1794  à  1801  (pp.  2o5-232;  récit  de  l'échec 
de  la  mission  confiée  par  Pitt  à  Wickham  et  à  lord  Macartney)  ;  —  Les  colonies 
prussiennes  (pp.  233-247),  art.  sur  les  «  Etudes  sur  l'histoire  de  Prusse  »,  de  M.  Er- 
nest Lavisse;  notre  recueil  n'ayant  pas  rendu  compte  de  ce  livre  remarquable, 
nous  citerons  le  jugement  de  M.  S.  :  «  M.  Lavisse  a  été  puiser  aux  sources  mêmes, 
dans  les  bibliothèques  et  les  archives  de  Prusse,  les  éléments  de  son  ouvrage.  Il  est 
érudit  et  critique;  mais  sa  science  n'est  nullement  lourde  et  refroidie.  11  sait  faire 
revivre  le  passé,  et  sans  chercher  des  rapprochements  et  des  allusions  qui  feraient 
tache  en  une  œuvre  sérieuse  comme  la  sienne,  il  conserve  le  sentiment  très  vif  des 
choses  présentes...  L'histoire  du  développement  parallèle  de  l'état  des  Margraves  et 
de  l'éiat  des  Teutoniques  est  la  partie  la  plus  neuve  du  livre...  »:  —  La  politique 
française  en  1866  (pp.  249-264)  et  L'affaire  du  Luxembourg  (pp.  265-280);  ces 
deux  études  ont  été  ipspirées  à  M.  S.  par  la  lecture  des  deux  ouvrages  que  vient  de 
publier  M.  Rothan,  «  La  politique  française  en  1866  »  et  «  L'affaire  du  Luxembourg  ». 
Dans  le  premier  de  ces  ouvrages,  dit  M.  S..  M.  Rothan  a  voulu  montrer  les  causes 
d'une  guerre  qui  a  été  si  désastreuse  pour  nous,  et  il  les  a  recherchées  dans  la  crise 
qui  a  précédé  et  suivi  Sadowa.  Le  lien,  en  effet,  est  intime  entre  les  événements  qui 
ont  amené  le  traité  de  Prague  et  ceux  qui  ont  amené  le  traité  de  Francfort;  on  y 
suit  les  conséquences  progressives  des  mêmes  fautes  initiales;  la  politique  de  1866 
avait  creusé  l'abîme  sous  les  pieds  de  la  France,  la  politique  de  1870  l'y  précipita. 
Quant  à  «  l'affaire  du  Luxembourg  »,  si  peu  étudiée  jusqu'ici  et  presque  ignorée  du 
public,  elle  est  «  le  prologue  instructif  et  malheureusement  inutile  de  la  catastrophe 
de  1870...  mais  M.  de  Moustier  a  tenu  le  gouvernail  et  donné  le  coup  de  barre 
qui  sauve  de  l'écueil  ».  Le  volume  se  termine  par  un  art.  sur  La  diplomatie  et  le 
progrès. 

—  La  librairie  Léopold  Cerf  vient  de  publier  un  petit  livre  utile,  le  Manuel  prati- 
que pour  V  application  de  la  loi  sur  l'instruction  obligatoire,  par  MM.  Edm.  Benoit- 
Lévy  et  F.  B.  Bocandé,  avocats  à  la  cour  d'appel  de  Paris  (avec  une  préface  par 
M.  Jean  Macé,  président  de  la  Ligue  de  l'enseignement).  Ce  Manuel  contient  le  ré- 
sumé des  débats  parlementaires,  le  commentaire  de  la  loi,  les  circulaires,  arrêtés  et 
décrets  relatifs  à  son  application,  et  une  table  alphabétique  détaillée.  (In-8°,  vin  et 
144  p.  1  fr.). 

—  La  Société  historique  —  le  premier  cercle  fondé  à  Paris  qui  se  soit  donné  pour 
but  de  réunir  les  hommes  d'étude,  professeurs,  écrivains  et  amis  des  lettres  —  a 
tenu  samedi  soir,  1 1  novembre,  une  assemblée  générale  dans  les  salons  du  Cercle, 
2i5,  boulevard  Saint-Germain.  Le  président,  M.  G.  Monod,  a  rendu  compte  des 
travaux  de  la  Société.  Elle  compte  aujourd'hui  plus  de  400  membres  et  devra,  dès 
l'année  prochaine,  agrandir  son  local.  Elle  publiera,  dès  le  mois  de  décembre,  un 
Bulletin  destiné  à  tenir  tous  les  membres  au  courant  des  affaires  et  des  actes  de  la 
Société,  et  a  commencé  le  2  5  novembre  une  série  de  conférences  bi-mensuelles.  Les 
premières  seront  faites  par  MM.  A.  Sorel  (Etat  des  esprits  en  France  avant  la 
Révolution),  G.  Paris. (le  Parzival),  Cordier  {le  Tonkin),  Renan,  etc.  La  salle  des 
Revues  compte  actuellement  plus  de  80  recueils  périodiques,  et  la  salle  des  jour- 
naux, tous  les  journaux  politiques  français  et  un  grand  nombre  d'étrangers,  YAllge- 
meine  Zeitung,  la  Kœlnische  Zeitung,  la  Neue  freie  Presse,  le  Times,  le  New  York 
Herald,  la  Epoca,  etc.  Le  cercle  de  la  Société  historique  a  été  baptisé  Cercle  Saint 
Simon;  la  maison  où  il  est  installé  se  trouve  justement  au  coin  du  boule- 
vard Saint  Germain  et  de  la  rue  Saint-Simon. 

— M.  Jules  Simon  a  été  nommé,  le  1  1  novembre,  secréiaire  perpétuel  de  l'Académie 
des  sciences  morales  et  politiques,  en  remplacement  de  M.  Mignet,   démissionnaire. 


458  REVUE   CRITIQUE 

ALLEMAGNE.  —  Nous  avons  donné,  dans  un  de  nos  précédents  numéros  (n°  46, 
p.  3g5),  sur  le  36°  congrès  des  philosophes  allemands,  des  renseignements  que  nous 
complétons  aujourd'hui.  Le  congrès  qui  a  eu  lieu  à  Carlsruhe,  comptait  près  de 
53o  membres,  parmi  lesquels  MM.  Eckstein,Urlichs,  E.Gurtius,  Nissen,  Studemund, 
R.  Schoell,  Wachsmuth,  Zangemeister,  von  Duhn,  Hartel,  Hug,  Christ,  Herzog, 
Clemm,  Schiller,  etc.  La  session  s'ouvrit  le  mercredi  27  septembre;  M.  Genthe,  de 
Hambourg,  exposa  dans  cette  journée  les  rapports  des  Grecs  et  des  Romains  avec  la 
mer  Baltique.  Le  lendemain,  M.  Studemund,  de  Strasbourg,  fit  une  lecture  sur  Deux 
comédies  parallèles  de  Diphile  (l'original  de  la  Vidularia  est,  comme  celui  du  Ru- 
dens,  une  comédie  deDiphile)  et  M.  E.  Curtius  parla  près  de  deux  heures  sur  les 
fouilles  d'Olympie.  Le  29  septembre,  M.  Hettner,  de  Trêves,  lut  un  mémoire  sur  la 
civilisation  en  Gaule  et  en  Germanie  sous  la  domination  romaine  ;  et  M.  Bœckel,  de 
Carlsruhe,  une  notice  sur  Hermann  Kœchly.  Le  samedi,  3o  septembre,  M.  Ziegler, 
de  Bade,  traita  des  commencements  de  la  philosophie  alexandrine  et  M.  Soltau,  de 
Saverne,  de  l'origine  du  census  et  de  la  censure  à  Rome.  Telles  sont  les  lectures 
principales  faites  dans  les  quatre  séances  de  l'assemblée  générale^  mais  il  faut  citer 
encore  les  différents  travaux  des  sections  :  i°  section  pédagogique,  discours  de 
M.  Schiller,  de  Giessen,  sur  l'enseignement  du  grec  d'après  la  réforme  des  gymnases 
en  Prusse  et  le  «  scriptum  »  grec  dans  l'examen  de  maturité  :  20  section  archéolo- 
gique, mémoire  de  M.  H.  Blùmner,  de  Zurich,  sur  le  «  nudus  talo  incessens  »  de 
Polyclète;  de  M.  Urlichs,  de  Wurzbourg,  sur  Phidias  à  Rome;  de  M.  Holm,  de 
Palerme,  sur  la  retraite  des  Athéniens  après  le  siège  de  Syracuse  ;  de  M.  E.  Cur- 
tius, sur  la  restitution  du  fronton  oriental  du  temple  d'Olympie;  3°  section  philo- 
logique, mémoire  de  M.  Hug,  de  Zurich  sur  la  critique  des  manuscrits  de  la  Cyro- 
pédie  de  Xénophon;  de  M.  Hanssen,  de  Strasbourg,  sur  la  collection  des  Anacreontea 
contenue  dans  le  codex  Palatinus;  de  M.  May,  d'Offenbourg,  sur  l'usage  des  auteurs 
classiques  chef  certains  chroniqueurs  du  moyen-âge;  etc.;  40  section  romane  et 
germanique  (voir  Revue  critique,  n°  46,  p.  3g5).  Sur  la  proposition  de  M.  Eckstein, 
l'assemblée  a  désigné  Dessau  comme  siège  de  la  prochaine  session. 

—  Le  Ier  volume  des  Commentationes  philo  logae  Jenenses  (Leipzig,  Teubner. 
In-8°,  îv  et  2  38  p.  5  mark)  ou  dissertations  de  philologie  publiées  par  les  direc- 
teurs du  séminaire  philologue  de  l'Université  d'Iéna,  renferme  les  études  suivantes  : 
de  M.  Gundermann,  De  Julii  Frontini  strategematon  libro  qui  fertur  quarto  ;  de 
M.  Sarrazin,  de  Theodoro  Lectore  Theophanis  fonte  praecipuo  ;  de  M.  Sauerbrei* 
une  étude  sur  les  sources  du  XlVe  et  du  XV"  livre  de  Zonaras. 

—  Outre  l'édition  d'Hérodien,  par  M.  L.  Mendelssohn,  que  nous  avons  récemment 
annoncée,  la  librairie  Teubner,  de  Leipzig,  fera  prochainement  paraître  les  ouvrages 
suivants  :  Nektar  und  Ambrosia,  driite  Vorarbeit  %u  einem  Lexikon  der  griech.  u. 
rœmischen  Mythologie,  par  M.  W.  Roscher;  le  Ier  vol.  d'une  Geschichte  und  System 
der  rœmischen  Staatsverfassung,  par  M.  E.  Herzog  (paraîtra  en  août  i883  et  trai- 
tera de  la  constitution  sous  les  rois  et  la  république)  ;  une  4»  édition  du  Tacite,  de 
feu  Halm  ;  une  édition  de  la  Thébaïde,  par  M.  Ph.  Kohlmann  (YAchilléide  a  paru  en 
1879);  une  édition  de  YAlexiade,  d'Anne  Comnène,  par  M.  Aug.  Reifferscheid  (en 
deux  volumes). 

—  Parmi  d'autres  livres  sur  le  point  de  paraître,  on  nous  cite,  de  M.  A.  Bastian, 
I.  Vœlkerstœmme  am  Brahmaputra  u.  verwantschaftliche  Nachbarn;  II.  Inselgrup 
peu  Océaniens  (Berlin,  Dûmmler);  de  M.  A.  Bœtticher,  Olympia,  das  Fest  und  seine 
Stœtte  nach  den  Berichten  der  Alten,  Ergebnissen  der  deutschen  Ausgrabungen 
(Berlin,  Springer);  de  M.  Humbert,  Molière  in  Deutschland ;  de  M.  Heinr. 
Korting,    Corneilles    religiœse  Dichiungen    (Oppeln,  Frank);  de  M.  G.  Koehler, 


d'histoire  et  de  uttératurk  459 

Die  Schlachten  von  Nicopoli  und  Warna  (Breslau,  Koebner),  etc.;  de  M.  Bernh. 
Sepp,  die  Zeuss'sche  Hypothèse  ùber  die  Herkunft  der  Baient  (Munich,  Ackermann); 
de  M.  Kuno  Fischer,  Kant  und  seine  Lehre  (Munich,  Bassermann). 

—  Nous  avons  parlé  autrefois  d'une  collection  d'écrits  pédagogiques,  devenus  rares, 
du  xvi»  et  du  xvne  siècle,  que  M.  Aug.  Israël  publie  à  Zschopau,  chez  l'éditeur  Ra- 
schke;  nous  avons  donné  les  titres  des  trois  premiers  fascicules;  depuis,  six  autres 
fascicules  ont  paru;  ce  sont  les  suivants  :  IV.  Wie  man  die  jugendt  in  guten  sitten 
und  christenlicher  %ucht  ufer^iehen  uund  leeven  scelle,  ettliche  kurt\e  underwysung, 
durch  huldrychen  Zvinglin  beschrieben;  —  V.  1.  Eine  Predigt  Martin  Luther' s, 
das  man  Kinder  \ur  Schulen  halten  solle ;  2.  Von  Schulen,  letzter  Abschnitt  aus  dem 
Unterricht  der  Visitatorn  ...jtzt  durch  D.  Martin  Luther  corrigiert;—  VI.  1.  Leon- 
hardi  Aretini  de  studiis  et  litteris  ad  illustrent  dominam  Baptistam  de  Malatesta 
Tractatulus  ;  2.  Jacobi  Purliliarum  comitis  de  generosa  liberorum  educatione  libel- 
lus  ;  —  VII.  Sieben  bœse  Geister,  welche  heutigen  Tages  guten  Theils  die  Kùster 
oder  so  genandte  Dorjf-Schulmeister  regieren,  mit  angefûgten  sieben  Kùster-  Tu- 
genden;  —  VIII.  Des  durchlauchtigen  Hochgebornen  Fùrsten  und  Herren,  Herren 
Augusti,  Her\ogen  %u  Brunswyg  und  Lùneburg pp.  Schul-Ordnung;  —  IX.  Ein 
schrifft  Philippi  Melanchtonis  an  ein  erbare  Stadt,  von  anrichtung  der  Latinischen 
Schuel. 

—  M.  W.  Mûller  s'est  fait  connaître  honorablement  par  les  volumes  qu'il  publie 
depuis  1867  sous  le  titre  «Histoire  politique  du  présent  ».  L'ouvrage  qu'il  fait  paraître 
aujourd'hui  sur  «  l'histoire  et  la  politique  de  l'Europe  de  1871  à  1881  »  (Europœis- 
che  Geschichte  und  Politik,  1871-1881,   3erlin,  Springer.  In-8°,  XVI  et  304  p. 
4  mark)  est  un  résumé  clair  et  intéressant  des  événements  qui  se  sont  accomplis 
dans  l'espace  de  ces  dix  années;  M.  M.  n'a  eu  besoin,  pour  composer  ce  récit,  que 
de  coordonner,  en  les  abrégeant,  les  informations  qu'il  a  rassemblées  dans  les  volu- 
mes de  sa  Politische  Geschichte  der  Gegemvart.  Comme  ces  volumes,  son  livre  ex- 
pose successivement  l'histoire  de  chaque  nation;  d'abord  l'empire  allemand  (pp.  1- 
87),  et,  à  la  suite  des  pages  consacrées  à  l'Allemagne,  le  récit  de  «  la  crise  orientale  » 
(pp.  88-147)  jusqu'à   la   bataille  de  Tell-el-Kebir  ;  puis  la  France  (pp.  148-179); 
l' Autriche-Hongrie  (pp.  180-201);  la  Grande-Bretagne  et  l'Irlande  (pp.  202-223);  la 
Russie  (pp.  224-237);  l'Italie  (pp.  238-25o);  l'Espagne  et  le  Portugal  (pp.  25 1-266); 
la  Belgique  et  la   Hollande    (pp.  267-276);  les  pays   Scandinaves  (pp.  277-283);  la 
Suisse  (pp.  286-293)  ;  les  Etats  non  européens  (pp.  294004).  Ce  volume  de  M.  W.  Mûl- 
ler rendra  de  grands  services,  et  nous  le  recommandons  à  tous  ceux  qui  étudient 
l'histoire  contemporaine  et  qui  ont  besoin  d'un  manuel   renfermant  les  dates  des 
événements  et  un  récit  d'ensemble  net  et  précis..  Mais  que  dire  des  expressions  «  den 
hohen  Grad  von  Unverschœmtheit   und   Hochmuth  »,  à  propos  des  «  débuts  »  des 
députés  de  l'Alsace-Lorraine   au   Reichstag  (p.  43)?  A  la  même  page,  on  apprend 
avec  étonnement  que,  sur  ces  quinze  députés,  dix  étaient  cléricaux  et  cinq  seule- 
ment partisans  de  la  protestation!  P.  45,  est-il  exact  que  «  les  visites  que  l'empe- 
reur fit  en  Alsace  aboutirent  favorablement  »  (fielen  gûnstig  aus),  et  qu'  «  il  fut  reçu 
avec  enthousiasme  par  les  habitants  du  Landkreis  de  Strasbourg?  »  P.   172,  pour- 
quoi  ne  pas   nommer  les   trois    ministres  soumis  à  l'influence  de  M.  Gambetta? 
P.  177,  pourquoi  ne  citer  que  la  nomination  du  général  de  Miribel  (et  non  Miribel 

tout  court),  et  oublier  celle  de  M.  Weiss,  qui  fit  plus  de  bruit  encore?  P.  162,  lisez 

de  Rochebouêt  et  non  «  De  la  Rochebouet  ». 

AUTRICHE.  —  Il  a  paru  à  la  librairie  Gerold,  de  Vienne,  un  volume  intitulé 
«  Extraits  des  papiers  de  Wilhelm  de  Tegethoff  »  (Aus  Wilhelm  von  Tegethoffs 
Nachlass.   In-8°,  371  pp.  7  mark  60).  Ce  volume  renferme  une  biographie  du  vain- 


460  REVUE    CRITIQUE   D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

queur  de  Lissa,  par  M.  Adolf  Béer  (89  p.)  ;  puis  des  extraits  de  la  correspondance 
privée  Je  Tegethoff  (en  grande  partie,  des  lettres  à  son  père)  ;  enfin  des  rapports 
de  l'amiral  à  l'archiduc  Ferdinand  Max. 


ACADEMIE   DES   INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  2  a  novembre  1882. 

M.  le  ministre  de  l'instruction  publique  écrit  à  l'Académie  pour  l'informer  que 
M.  Geffroy  a  pris  la  résolution  de  quitter  la  direction  de  l'école  française  de  Rome. 
Le  ministre  insiste  sur  les  regrets  que  lui  cause  cette  détermination  et  prie  la  com- 

gagnie  de  lui  présenter  deux  candidats  pour  les  fonctions  de  directeur  de  l'école.  — 
.envoyé  à  la  commission  des  écoles  françaises  d'Athènes  et  de  Rome. 

M.  de  Puymorin,  lieutenant-colonel  du  16e  régiment  d'infanterie,  président  de  la 
commission  archéologique  du  Kef  (Tunisie),  envoie  des  inscriptions,  accompagnées 
de  lettres  explicatives,  qu'il  a  reçues  de  M.  le  Dr  de  Balthazar,  de  Bordj  Messaoudi. 
M.  Hauréau  dépose  sur  le  bureau  un  autre  envoi  de  M.  de  Puymorin,  comprenant 
un  nombre  considérable  d'inscriptions  recueillies  autour  du  Kef,  Ces  divers  docu- 
ments seront  examinés  par  M.  Léon  Renier. 

M.  Lefebvre,  notaire  à  Paris,  adresse  à  l'Académie  un  extrait  du  testament  de 
M.  Lazare-Eusèbe  Lefèvre-Deumier,  propriétaire,  décédé  à  Paris  le  23  juillet  1882. 
Par  cet  acte,  M.  Lefèvre-Deumier  a  légué  à  l'Académie  des  inscriptions  et  belles-let- 
tres et  à  l'Académie  des  sciences  morales  et  politiques  une  rente  annuelle  et  perpé- 
tuelle de  4,000  fr.,  pour  fonder  un  prix  de  20,000  fr.  qui  sera  décerné,  tous  les 
cinq  ans,  «  à  l'ouvrage  le  plus  remarquable  sur  les  mythologies,  philosophies  et  re- 
ligions comparées.  »  Le  prix  sera  décerné  alternativement  par  les  deux  Académies,  le 
tour  de  chacune  revenant  ainsi,  tous  les  dix  ans;  le  premier  tour  appartiendra  à  l'A- 
cadémie des  sciences  morales  et  politiques.  Les  Académies  n'entreront  en  jouissance 
de  ladite  rente  que  quinze  ans  après  le  décès  du  testateur.  —  Renvoyé  à  la  commis- 
sion des  travaux  littéraires. 

M.  Oppert  fait  une  communication,  sous  ce  titre  :  la  plus  ancienne  date  chaldéenne 
connue  jusqu'ici.  La  chronologie  chaldéenne  est  fort  incertaine,  surtout  pour  les 
époques  les  plus  éloignées  de  nous.  La  découverte  d'un  document  qui  fixe  la  date 
d'un  des  plus  anciens  rois  de  Chaldée  est  donc  précieux  au  point  de  vue  historique. 
M.  Pinches,  assistant  au  British  Muséum,  vient  de  lire,  sur  un  cylindre  conservé  au- 
jourd'hui dans  cet  établissement  et  qui  a  été  trouvé  à  Abou-Habba,  le  site  de  la 
ville  antique  de  Sippara,  une  inscription  du  roi  Nabonid,  qui  régna  de  555  à  538 
avant  notre  ère.  Ce  roi  y  parle  de  fouilles  entreprises  par  son  ordre  au  temple  du 
Soleil  d'Agarde  et  à  Sippara  et  raconte  comment  ces  fouilles  ont  mis  au  jour  une 
inscription  du  roi  Naram  Sin  :  «  L'inscription  de  Naram  Sin,  fils  de  Sargon,  dit-il, 
que  depuis  3200  ans  aucun  roi  parmi  nos  prédécesseurs  n'avait  vue,  Samas,  le 
grand  seigneur  de  Tparra,  le  séjour  de  son  cœur  joyeux,  me  l'a  révélé.  »  Ainsi  Na- 
bonid comptait,  depuis  Naram-Sin,  jusqu'à  lui,  3200  ans.  Si  donc  cette  indication 
est  exacte  (ce  qu'il  nous  est  malheureusement  impossible  de  vérifier),  Naram-Sin 
dut  régner  vers  l'an  3y5o,  et  Sargon,  son  père,  environ  vers  l'an  38oo  avant  notre 
ère.  Ces  deux  rois  étaient  déjà  connus  par  plusieurs  textes,  mais  on  ignorait  à  quelle 
époque  ils  avaient  vécu.  Le  plus  curieux  des  documents  que  nous  possédons  sur 
Sargon  est  un  texte  où  il  raconte  comment  il  avait  été,  dans  son  enfance,  exposé 
sur  les  eaux  dans  une  corbeille  et  sauvé  par  un  paysan  ;  c'est  un  récit  assez  sembla- 
ble à  celui  de  la  Bible  sur  Moïse. 

M.  Benoist  commence  la  lecture  d'un  mémoire  intitulé  :  De  l'interpolation  qu'on  a 
cru  reconnaître  dans  Horace 

Ouvrages  présentés  :  —  par  M,  Alfred  Maury  :  Œuvres  de  A.  de  Longpérier,  réu- 
nies et  mises  en  ordre  par  Gustave  Schlumberger,  t.  I  ;  —  par  M.  Miller  :  Harrisse 
(Henry),  Jean  et  Sébastien  Cabot,  leur  origine  et  leurs  voyages,  etc.  (Recueil  de  voya- 
ges et  de  documents  pour  servir  à  l'histoire  de  ta  géographie,  etc.,  t.  I;  —  par  M.  Le 
Blant  :  Corblet  (l'abbé  Jules.,  Histoire  dogmatique,  liturgique  et  archéologique  du 
sacrement  du  baptême,  2  vol.,  —  par  M.  Heuzey  :  Reinach  (Salomon),  Description 
des  antiquités  du  musée  impérial  de  Constantmople ;  —  par  M.  Delisle  :  Robert 
(Ulysse),  Inventaire  sommaire  des  manuscrits  des  bibliothèques  de  France  dont  les 
catalogues  n'ont  pas  été  imprimés,  3'  fascicule  (de  Dijon  à  Èice). 

Julien  Havet. 

Le  Provriétaire-Gérani  :  ERNEST  LEROUX. 


Le  Puy,  imprimerie  Marcnessou  nls,  boulevard  Saint- Laurent,  z3 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

N°  50  —  11  Décembre  —  1882 


Sommaire  î  246.  Hovelacque,  Les  races  humaines.  —  247.  Funk,  Vie  de  Poly- 
carpe.  —  248.  Ruelens,  Le  peintre  Adrien  de  Vries.  —  249.  Le  P.  Joseph  Bou- 
gerel,  prêtre  de  l'Oratoire.  —  25o.  Correspondance  littéraire,  philosophique  et 
critique  par  Grimm,  Diderot,  Raynal,  Meister,  p.  p.  Tourneux.  —  Chronique.  — 
Académie  des  Inscriptions. 


246.  —  Les  races  lmnaaines.  par  Abel  Hovelacque.  professeur  à  l'Ecole  d'An- 
thropologie. Paris,  Cerf,  1882,  i5g  p.  in-12.  Prix  :  1  fr. 

On  a  dit  souvent  que  la  science  consiste  à  savoir  ignorer  beaucoup  de 
choses  :  mais  bien  rares  sont  les  savants  qui  savent  borner  leurs  préten- 
tions, reconnaître  les  lacunes  de  nos  connaissances  (et  surtout  des  leurs), 
s'abstenir  de  dogmatisme  et  d'ambitieuses  affirmations.  C'est  surtout 
dans  tout  ce  qui  touche  l'histoire  de  la  race  humaine  que  ces  défauts  sont 
frappants;  on  veut  ramener  la  variété  à  l'unité  d'une  classification 
complète,  et  l'on  prétend  reconstruire  l'arbre  généalogique  des  races 
humaines.  La  confusion  s'augmente  lorsque  —  et  jusqu'ici  c'a  été  géné- 
ralement le  cas  —  on  ne  distingue  pas  nettement  entre  les  données  de 
la  linguistique  et  celles  de  l'anthropologie.  L'unité  et  la  parenté  des 
langues  ne  préjugent  en  aucune  façon  l'unité  et  la  parenté  des  êtres 
humains  qui  les  parlent,  souvent  même  il  y  a  contradiction  absolue. 

Si  nous  rappelons  ces  règles  de  la  méthode  en  ethnographie  qu'on 
voit  si  rarement  observées,  c'est  pour  dire  que  M.  Hovelacque  les  a 
fidèlement  suivies,  —  ce  qui  est  encore  une  nouveauté  —  et  que  son 
livre  est  une  œuvre  d'excellente  critique.  Etant  à  la  fois  linguiste  et 
anthropologiste,  il  a  su  (mérite  rare)  distinguer  les  données  de  deux 
sciences  qu'il  pratique  également.  Il  a  su  en  même  temps  s'abstenir  de 
vouloir  faire  une  classification  des  races  humaines,  ambition  prématurée 
dans  l'état  actuel  de  la  science,  et  il  a  simplement  présenté  les  faits  dans 
leur  variété  naturelle,  sans  théories  et  sans  hypothèses. 

Dès  la  première  ligne,  M.  H.  établit  ces  antinomies  de  l'ethnographie 
en  termes  excellents  et  nous  croyons  utile  de  les  reproduire  parce  qu'il 
s'agit  de  préjugés  très  répandus  dans  les  livres  et  par  les  livres  :  «  C'est  un 
procédé  fort  vicieux  que  celui  qui  consiste  à  diviser  les  races,  comme  on 
l'a  fait  souvent,  en  races  blanches,  jaunes,  noires  :  c'est  faire  abstraction 
de  caractères  tout  aussi  importants  que  celui  de  la  couleur  de  la  peau.  Il 
y  a,  par  exemple,  des  différences  profondes  entre  le  Noir  du  Soudan  et 
le  Noir  des  Iles  Andaman,  entre  le  Noir  du  sud  de  l'Inde  (Dravidien)  et 
le  Papou  de  la  Nouvelle-Guinée.  Les  caractères  tirés  de  la  nature  des 

Nouvelle  série,  XIV.  24 


462  REVUE   CRITIQUE 

cheveux,  de  la  forme  crânienne,  de  la  taille  sont  également  des  caractè- 
res de  premier  ordre,  mais  ils  ne  peuvent  servir  de  bases,  eux  non  plus, 
à  une  classification  ethnographique.  Il  suffit  de  se  rappeler  que  certai- 
nes races  noires  ont  les  cheveux  raides,  d'autres  les  cheveux  crépus  ; 
que  certaines  de  ces  mêmes  races  ont  la  tête  allongée  et  que  d'autres 
l'ont  relativement  arrondie  '. —  Même  impossibilité  d'adopter  un  grou- 
pement linguistique.  En  effet,  une  seule  et  même  famille  linguistique 
est  propre,  bien  souvent,  à  des  peuples  très  différents  les  uns  des  autres  : 
exemple,  les  Lapons  et  les  Finnois,  si  divers  par  la  race,  et  parlant  deux 
idiomes  qui  appartiennent  à  une  seule  et  même  souche...  Il  n'y  a  pas 
un  critérium  unique  pour  la  classification  des  races  humaines.  »  M.  H. 
revient  plus  d'une  fois  sur  cette  idée  (pp.  io5,  m,  145,  149);  et  il  a 
raison,  car  le  préjugé  né  de  cette  confusion  est  fortement  enraciné,  et 
n'est  pas  près  encore  de  disparaître. 

Lorsqu'on  s'abtient  de  classification,  on  est  pourtant  forcé  d'adopter 
certain  ordre  pour  l'exposition  des  faits.  C'est  ce  qu'a  fait  M.  H.  ;  mais 
le  lecteur  était  prévenu  et  il  savait  simplement  lire  une  description  des 
races  existantes,  tenant  compte  de  tous  les  faits  scientifiquement  consta- 
tés, mais  absolument  dégagée  de  théories  et  d'hypothèses.  M.  H.  s'est 
attaché  surtout  aux  races  inférieures  :  «Pou.  les  peuples  sémitiques  et 
pour  les  peuples  européens,  dit-il,  nous  avons  été  d'une  grande  conci- 
sion. Cela  a  été  voulu.  Il  nous  a  semblé  utile  d'insister  plus  particuliè- 
rement sur  la  description  des  populations  le  moins  connues  ». 

Le  livre  de  M.  H.  étant  le  résumé  d'un  immense  sujet,  nous  n'en  pou- 
vons donner  l'analyse  :  nous  nous  bornerons  à  louer  la  bonne  disposition 
des  matières,  la  sobriété  de  l'exposition  et  la  précision  du  style.  Comme 
exemple  de  sa  manière,  nous  citerons  seulement  le  portrait  qu'il  trace 
du  Juif.  «  L'Hébreu,  conservateur  lui  aussi  [M.  H.  vient  de  parler  de 
l'Arabe],  a  un  amour-propre  remarquable.  Il  a  l'esprit  ouvert,  facile, 
excessivement  souple,  et  se  plie  à  toutes  les  nécessités  sociales.  Les 
besoins  de  l'existence,  telle  qu'il  la  comprend,  en  ont  fait  l'homme  le 
moins  propagandiste  qui  soit  au  monde  :  il  est,  avant  tout,  l'homme  de 
la  tradition  familiale.  Il  vit  dans  la  civilisation  européenne  et  demeure, 
malgré  tout,  fidèle  à  ses  opinions  particulières  :  il  se  contente  de  les 

1.  Qu'il  nous  soit  permis  de  rappeler  qu'il  y  a  longtemps  déjà,  dans  un  article  sur 
l'ethnographie  générale,  nous  avons  exprimé  les  mêmes  critiques  sur  les  théories  en 
honneur  chez  les  anthropologistes.  Notre  conclusion  était  celle-ci  :  «  L'anthropolo- 
gie n'aura  une  langue  vraiment  scientifique  que  lorsqu'elle  adoptera  une  notation 
analogue  à  celle  de  la  chimie,  et  qu'au  lieu  de  parler  de  race  celtique,  ou  de  race 
germanique  ou  de  race  slave,  termes  chimériques  et  faux,  elle  représentera  dans  un 
monogramme  de  lettres  et  de  chiffres  le  crâne,  l'angle  facial,  les  cheveux,  les  os 
longs,  etc.,  de  la  race  humaine  qu'elle  veut  déterminer,  comme  le  chimiste  représente 
par  un  monogramme  de  lettres  et  de  chiffres  la  nature  d'un  composé  chimique.  Tant 
que  les  anthropologistes  n'en  viendront  pas  là,  les  ethnographes  auront  le  droit  de 
leur  dire  qu'ils  ne  font  qu'embrouiller  l'ethnographie  avec  des  entités.  »  Feuilleton 
de  la  République  Française  du  10  juillet  1874- 


D'HISTOIRE    Et    DE    LITTÉRATURE  46 3 

soustraire,  dans  la  mesure  du  possible,  à  l'investigation  des  étrangers  :  la 
religion  du  Juif  est,  à  l'heure  actuelle,  sa  nationalité.  » 

Nous  terminerons  par  quelques  observations  de  détail. 

«  Le  profil  du  vrai  type  juif,  dit  M.  H.  (p.  139)  rappelle  le  profil 
accentué  du  bouc.  Mais  à  côté  de  ce  type  fin,  il  se  rencontre  un  type 
plus  grossier,  à  cheveux  fort  ondulés  ou  un  peu  crépus,  à  lèvres  assez 
grosses,  à  nez  beaucoup  plus  large.  »  M.  H.  omet  de  dire  que  cette 
dualité  de  type  correspond  à  la  division  de  la  race  juive  (au  moins  d'Eu- 
rope) en  deux  branches,  les  Sephardim  et  les  Aschkenasim . 

Il  nous  paraît  fâcheux  d'employer  le  terme  indien  pour  «  habitant  de 
l'Inde  »  :  ce  nom,  par  une  erreur  trop  ancienne  dans  la  langue  pour 
qu'on  puisse  la  déraciner,  éveille  plutôt  l'idée  d'habitant  de  l'Amérique. 
C'est  sans  doute  par  distraction  que  M.  H.  l'emploie  p.  8,  car,  ailleurs, 
il  se  sert  (avec  justesse,  selon  nous)  du  nom  d'Hindous. 

Ce  volume  est  orné  d'un  certain  nombre  d'illustrations  ;  elles  sont 
utiles  quand  elles  mettent  sous  les  yeux  du  lecteur  des  types  nettement 
caractérisés  par  la  conformation  physique  ou  par  des  déformations 
traditionnelles.  Mais  à  des  «  images  »  qui  représentent  un  campement 
de  Bédouins  ou  une  Grecque  ou  une  Italienne,  nous  préférerions  quel- 
ques cartes  donnant  d'un  coup  d'ceil  la  distribution  géographique  des 
races  que  décrit  l'auteur.  C'est  la  seule  lacune  que  nous  signalerons 
dans  l'excellent  résumé  de  M.  Hovelacque  '. 

H.  Gaidoz. 


247.  —  Vita  et  conuersatio  I*olycai'pi  (Opéra  patrum  apostolicorum  rec.  ill. 
F.  X.  Funk,  Tubingue,  Laupp.  1881,  t   II,  p.  3 1 5  à  357)  2. 

M.  Funk  partage  l'opinion  de  M.  Duchesne  sur  l'époque  où  cette  Vie 
a  dû  être  écrite  et  sur  la  valeur  qu'il  convient  de  lui  attribuer.  Mais  il 
doute  qu'elle  soit  du  même  auteur  que  le  Martyre  de  Polycarpe,  qui 
la  suit  dans  le  ms.  Il  est  certain  que  l'interprétation  des  premières  lignes 
de  la  Vie,  sur  laquelle  on  fonde  cette  identification,  est  erronée.  Mais  la 
place  que  les  deux  documents  occupent  dans  le  ms.  ne  prouve  pas  grand 
chose  non  plus,  et  l'épilogue  au  moins  du  martyre  pourrait  bien  être 
précisément  de  celui  qui  a  composé  la  présente  Vie. 

M.  F.  accompagne  le  texte  grec  de  la  traduction  latine  que  Bolland  a 
insérée  dans  les  Actes  des  saints.  Il  indique  au  bas  des  pages  les  passages 
bibliques.  Mais  il  n'y  a  pas  d'index.  Quant  au  texte,  M.  F.  annonce 
qu'il  a  voulu  le  corriger  le  moins  possible,  cum  prauitas  sermonis  non 
tam  librario  alicui  quam  auctori  scripturœ  tribuenda  esse  uidcatar. 

1.  Dans  le  prochain  tirage,  il  faudra,  p.  23,  1.  10,  écrire  :  ils  l'introduisent  —  au 
lieu  de  :  ils  les  introduisent... 

2.  Comp.  Revue  critique,  1882,  t.  II,  p.  36i  (6  novembre). 


464  RKVUE    CRITIQUE 

Je  crois  pourtant  que  si  M.  F.  veut  bien  parcourir  mon  précédent  ar- 
ticle, il  adoptera  la  plupart  des  corrections  que  je  propose.  Et  cependant 
je  n'ai  tenté  que  les  émendations  les  plus  faciles  ;  je  n'ai  pas  touché  à 
plusieurs  altérations  des  plus  graves.  M.  F.  lui-même  a  corrigé, 
outre  plusieurs  fautes  d'impression  (accents,  ponctuation,  etc.),  une 
dizaine  de  passages  où  il  est  évident  que  l'auteur  n'a  pu  écrire  ce  qu'on 
lit  dans  le  ms.  Je  suis  heureux  de  me  rencontrer  avec  M.  F.  dans  quatre 
émendations,  pp.  i5,  25  (Duchesne)  =r  3  18,  34  (Funk)  ';  22,  i5  ==  33o, 
23  ;  29,  19  ==  342,  21  ;  33,  j  i  —  348,  3i,  dans  trois  desquelles  d'ail- 
leurs Bolland  nous  a  précédés  tous  deux.  Pour  le  reste,  je  ne  m'accor- 
derais pas  également  avec  M.  Funk.  P.  14,  9  r=  3 16,  19  ^exà  hï  ttjv  tou 
àTOcrxôXou  âçiÇiv  SteBécjaTO  6  Expaxafaç  rrçv  SiSaaxaXiav  xai  xiveç  twv  \xex  'auxcv,  aJv 

là  [ih  ov6[xaTa àva^pa^o^at;  il  est  difficile  de  croire  que  l'auteur  se  soit 

si  mal  exprimé.  Mais  la  correction  de  M.  F.,  jjlsx  'aùxou  (alii  quidam 
cum  ipso,  AA.  SS.),  ne  satisfait  pas  non  plus;  on  s'attendrait  plutôt 
à  xat  tivsç  [j.£T  'aùxbv  àXXot,  £>v.  16,  21  =  320,  25,  h.  pour  tyj  :  je  préfère 
Ttj  17,  24  r:  324,  21,  xal  &|AiXeTv  pour  xatO'  o^iXetv  :  y.<x\  xa6oy,iXsïv  de 
M.  D.  me  paraît  préférable.  P.  20,  4  =  326,  i9,Xé*fovxaç  ms.,  XeYOfjiivouç 
M.  Funk,  qui,  dans  la  préface,  incline  à  adopter  la  correction  de  M.  D., 
àst  ovtocç  :  je  ne  comprends  ni  Tune  ni  l'autre;  l'altération  du  texte  me 
paraît  être  bien  plus  étendue.  Enfin,  3j,  18  =  356,  16,  Sbç...  aTcépixaia 
Tô  cTrstpovu  (au  semeur,  en  général)  pour  (îwefpavTt  (celui  qui  a  semé,  cette 
année)  n'est  pas  précisément  nécessaire,  bien  qu'on  y  gagne  une  antithèse 
plus  complète  avec  àpxov  dq  ppwatv. 

Je  profite  de  cette  occasion  pour  signaler  encore  une  lacune  p.  16,  7 
=  320,  1 1,  après  xapaxsXeusaOai,  et  pour  souligner  le  point  d'interroga- 
tion à  la  correction  19,  12,  qui  est  insuffisante. 

Max  Bonnet. 


248,  —  Notices    et    documents,    Le    peintre    Adrien     de    Vries»  par  C. 

Ruelens.  Anvers,  imprimerie  veuve  Backer,  1882.  Brochure  grand  in-8°  de  60  p. 
(Extrait  du  Bulletin  Rubens}. 

La  chroniqe  de  la  Revue  a  eu  soin  d'appeler  l'attention  sur  la  création 
du  Bulletin-Rubens.  Annales  de  la  commission  officielle  instituée  par- 
le conseil  communal  de  la  ville  d'Anvers  pour  la  publication  des  do- 
cuments relatifs  à  la  vie  et  aux  œuvres  de  Rubens.  Trois  livraisons  du 
Bulletin  ont  déjà  paru  et  ont  pleinement  justifié  les  espérances  mises 
tout  d'abord  en  un  recueil  rédigé  par  une  commission  formée  de  quel- 

1.  M.  D.  avait  adopté  la  division  en  paragraphes  des  AA.  SS.,  sans  les  chapitres, 
M.  F.  donne  les  chapitres  sans  les  paragraphes,  mais  avec  des  subdivisions  nou- 
velles, de  sorte  qu'on  a  la  plus  grande  peine  à  se  retrouver  d'une  édition  à  l'autre.  On 
ne  saurait  nssez  protester  contre  cette  mauvaise  habitude  des  éditeurs  de  rendre  les 
recherches  plus  compliquées  par  une  chose  qui  n'a  d'utilité  que  si  elle  les  simplifie. 


t>'HISTO[RE    KT   DE    LITTÉRATUUh  4Ô5 

queS  uns  des  meilleurs  travailleurs  de  la  Belgique,  présidée  par  un  émi- 
nent  érudit  tel  que  M.  Gachard  et  ayant  pour  secrétaire  un  homme  dont 
le  zèle,  l'activité,  les  connaissances  si  vastes  et  si  variées  sont  des  plus 
remarquables,  M.  Ruelens.  La  plus  importante  des  communications 
faites  jusqu'à  ce  jour  au  Bulletin  est  due  à  ce  dernier  :  c'est  l'étude  sur 
Adrien  de  Vries,  laquelle  se  compose  d'une  intéressante  notice  et  d'in- 
téressants documents  inédits. 

La  notice,  je  me  hâte  de  le  dire,  n'est  pas  complète,  définitive.  M.  R. 
a  rappelé  ce  que  l'on  savait  du  peintre  flamand  ;  il  a  introduit  dans  la 
biographie  de  ce  peintre  un  grand  nombre  de  faits  nouveaux.  Mais,  mal- 
gré toutes  ses  recherches,  l'obscurité,  l'incertitude  subsistent  encore  sur 
quelques  points,  et  ce  qui  rend  les  difficultés,  sinon  invincibles,  du 
moins  fort  considérables,  c'est  l'existence  de  plusieurs  artistes  du  même 
nom,  Abraham  de  Vries,  Vredeman  de  Vries,  Jean  Renier  de  Vries.  On 
a  attribué  aux  quatre  homonymes  les  œuvres  des  uns  et  des  autres  :  dans 
les  recueils  biographiques,  comme  dans  les  catalogues  des  musées,  règne 
un  confus  chassé-croisé.  M.  R.  a  diminué,  autant  qu'il  était  possible,  un 
imbroglio  si  compliqué.  Il  a,  d'une  main  sûre,  planté  des  jalons  qui  gui- 
deront les  futurs  chercheurs,  et  s'il  n'a  pas,  du  premier  coup,  trouvé 
toute  la  vérité,  on  peut  dire  qu'il  a,  du  moins,  très  bien  préparé  la  voie 
pour  ceux  qui  s'efforceront  de  le  dépasser. 

Les  documents  dont  la  notice  est  accompagnée  sont  au  nombre  de  dix- 
huit.  11  y  a  là  une  lettre  adressée  par  de  Vries  à  Peiresc  dans  les  der- 
niers jours  de  l'année  i63o  *,  tirée  de  la  Bibliothèque  nationale  (F.  F. 
9542),  et  dix-sept  lettres  adressées  par  Peiresc  à  de  Vries,  du  i3  mai 
1625  au  18  janvier  i63o,  tirées  de  la  bibliothèque  de  Carpentras.  Dans 
ces  dix-sept  lettres,  le  savant  magistrat  provençal  s'occupe  surtout  des 
portraits  de  divers  personnages  célèbres  dont  il  serait  heureux  d'enrichir 
sa  belle  collection  et  qu'il  demandait  à  l'habile  pinceau  du  compatriote 
de  Rubens.  Tantôt  il  réclame  le  portrait  de  Guillaume  de  Catel,  con- 
seiller au  parlement  de  Toulouse,  l'auteur  de  Y  Histoire  des  comtes  de 
Toulouse  et  des  Mémoires  sur  l'histoire  du  Languedoc  ;  tantôt  il  ré- 
clame le  portrait  de  François  Rancjiin,  «  professeur  en  médecine  »  à 
Montpellier,  l'auteur  du  Traité  de  la  peste  2.  Ailleurs,  il  charge  son 
protégé  de  peindre  le  cardinal  de  Sourdis,  archevêque  de  Bordeaux,  dont 
il  veut  loger  le  portrait  «  auprès  de  celui  de  N.  S.  P.  le  Pape  [Ur- 


1.  Cette  lettre  ne  porte  pas  de  date,  mais  comme  de  Vries  y  annonce  à  Peiresc 
que  «  M.  Rubens  s'est  remarié  avec  une  fille,  dit-on,  de  dix-sept  ans  »,  et  comme  le 
second  mariage  du  grand  peintre  fut  célébré  le  6  décembre  i63o,  on  voit  qu'elle  a 
dû  être  écrite  quelques  jours  après  l'événement. 

2.  C'est,  dit  Peiresc  (p.  49),  «  le  plus  curieux  personnage  qui  soit  en  ce  pais-là. 
J'ay  esté  si  malheureux  de  ne  l'avoir  jamais  rencontré  d'une  infinité  de  foys  que  je 
suis  allé  pour  le  voir,  que  je  le  désire  en  portraict  pour  l'amour  que  je  porte  à  sa 
vertu  et  à  son  mérite  ».  Le  portrait  de  Ranchin  fut  envoyé  à  Peiresc  l'année  sui- 
vante (p.  49).  Ce  dernier  ajoute  (p.  5o)  que  «  chacun  le  tient  en  chef-d'œuvre  ». 


466  RKVUfi   CRITlQUh 

bain  VIII]  et  de  ceux  des  cardinaux  Barberini  et  de  Sainte-Suzanne  »  '. 
Ailleurs  encore  sont  mentionnés,  entre  autres  desiderata  du  fervent 
collectionneur,  les  portraits  du  cardinal  de  Richelieu,  de  Claude  de  Sau- 
maise  appelé  (p.  24)  «  un  des  plus  doctes  hommes  de  l'Europe  »,  du 
P.  Sirmond,  du  secrétaire  d'Etat,  Henri-Auguste  de  Loménie,  seigneur 
de  la  Ville-aux-Clercs,  d'un  autre  secrétaire  d'Etat,  Charles  de  Beauclerc, 
que  ses  contemporains  ont  souvent  appelé  le  Beauclerc,  de  Nicolas  Ri- 
gault,  etc.  Signalons  dans  la  correspondance  de  Peiresc  avec  de  Vries 
divers  curieux  détails  sur  Rubens  2,  Van  Dyck,  Finsonius  \  Simon 
Vouet;  sur  divers  autres  peintres  moins  illustres,  tels  que  le  sieur  de 
Chalette,  qu'il  faut  sans  doute  identifier  avec  l'artiste  auquel  M.  Ros- 
chach  a  consacré  une  monographie  intitulée  :  Jean  Chalette  de  Troyes, 
■peintre  de  V hôtel-de-ville  de  Toulouse  (Troyes,  1868,  in-8°)  4,  Faveau, 
Vignon  ;  sur  la  veuve  du  peintre  Bunel  ;  sur  un  amateur  dont  s'est  oc- 
cupé feu  M.  Clément  de  Ris  dans  le  Bulletin  du  Bibliophile  de  janvier 
1875,  Claude  Maugis,  abbé  de  Saint-Ambroise,  aumônier  de  Marie  de 
Médicis  ;  sur  M.  de  Lorme,  trésorier  de  France  à  Bordeaux,  un  des  cor- 
respondants de  Balzac,  qui  lui  donne  aussi  le  titre  de  médecin  ordinaire 
du  Roy  5,  sur  l'archéologue  d'Aix,  Boniface  Borrilly,  qui,  jaloux  de  la 
beauté  de  la  copie  faite  par  Rubens  du  camée  dont  nous  avons  déjà 


1.  Voici  la  suscription  de  cette  lettre  (8  juin  1626)  :  «  A  Monsieur  de  Vris,  excel- 
lent peintre  flamand,  à  Bordeaux  ».  On  y  lit  un  magnifique  éloge  (p.  5i)  de  la  copie 
faite  par  Rubens  du  fameux  camée,  dit  de  la  Sainte-Chapelle,  aujourd'hui  ornement 
incomparable  du  Cabinet  des  médailles  de  la  Bibliothèque  nationale.  Peiresc  déclare 
que  cette  peinture  «  est  merveilleusement  bien  digne  de  son  auteur  »,  et  digne  aussi 
«  de  la  plus  belle  pierre  précieuse  qui  ait  jamais  esté  au  monde  ».  Sur  le  portrait  du 
cardinal  de  Sourdis,  que  Peiresc  trouva  «  très  bien  faict  »,  voir  la  lettre  du  26  août 
1627  (p.  12). 

2.  Peiresc  félicite  de  Vries  (p.  16)  du  plaisir  qu'il  aura,  en  un  voyage  projeté  à  An- 
vers, «  de  voir  le  travail  de  M.  Rubens  et  de  ces  autres  grands  hommes  de  vostre 
vocation  qui  y  sont  et  qui  y  naissent  journellement  ».  Pouvait  on  mieux  célébrer 
l'inépuisable  fécondité  de  la  ville  d'Anvers  considérée  comme  la  patrie  de  tant  d'ad- 
mirables peintres? 

3.  Ce  fut  moy,  dit  Peiresc  (p.  29),  «  qui  addrcssay  feu  M.  Finsonius  à  feu  M.  de 
Vie  ». 

4.  Le  nom  de  ce  peintre,  auquel  Peiresc  écrivit,  le  8  mai  1G27,  une  lettre  que  j'ai 
sous  les  yeux  (A  M.  de  Chalette,  peintre  du  Roy,  à  Tholose),  a  été  (p.  5o)  changé  en 
celui  de  Challet.  M.  R.  a  bien  raison  de  dire  (p.  11)  que  les  minutes  des  lettres  de 
Peiresc  à  de  Vries  «  sont  en  petite  écriture,  assez  difficile  à  déchiffrer  ».  Aucun  de 
ceux  qui  ont  vu  les  hiéroglyphes  tracés  par  tels  et  tels  des  secrétaires  de  Peiresc  ne 
reprochera  quelques  fautes  de  lecture  au  savant  conservateur  des  manuscrits  de  la 
bibliothèque  royale  de  Bruxelles  (par  exemple,  p.  12,  M.  le  Bernoliev  pour  M.  le 
Beauclerc,  et  «  vous  y  estes  desja  attendu  en  bonne  direction  »,  pour  «  vous  y  estes 
desja  attendu  en  bonne  dévotion  »).  En  voyant  un  paléographe  aussi  expérimenté  et 
aussi  renommé  commettre  ces  petites  fautes,  je  me  persuade  qu'on  sera  d'autant  plus 
indulgent  pour  les  fautes  plus  graves  que  ne  manquera  pas  de  commettre  le  futur 
éditeur  de  la  correspondance  de  Peiresc. 

5.  Œuvres,  i665.  in-f",  p.   367. 


d'histoire  et  de  littéuaturk  467 

parlé,  a  vouloit  jeter  tout  son  cabinet  par  la  fenestre,  de  dépit  de  n'avoir 
rien  de  comparable  à  cela  *  '. 

Il  ne  me  reste  plus  qu'à  reproduire  quelques  passages  d'une  lettre 
inédite  de  Peiresc,  laquelle  complète  soit  ce  que  ce  grand  homme  a  dit 
du  mystérieux  peintre  flamand,  en  le  recommandant  avec  une  si  chaude 
cordialité  aux  frères  Du  Puy  2,  soit  ce  qu'il  lui  a  si  aimablement  dit  à 
lui-même  dans  les  documents  publiés  par  M.  Ruelens.  Voici  comment, 
le  i3  mai  1625,  Peiresc  vantait  le  talent  et  le  caractère  d'Adrien  de 
Vries  à  M.  de  Maran,  conseiller  au  parlement  de  Toulouse  8  :  «  Mon- 
sieur, vous  recepvrez  ceste  lettre  par  les  mains  de  M.  Vris  qui  est  pain- 
tre  de  sa  profession,  mais  excellent  et  d'ailleurs  bien  dotté  et  de  la  plus 
grande  connoissance  qui  se  puisse  voir.  Il  a  demeuré  quelque  temps  en 
ceste  ville  [Aixj  où  il  a  laissé  une  trez  bonne  odeur  et  une  infinité  d'a- 
miz  et  n'a  pas  voulu  faire  sa  retraicte  sans  aller  voir  la  célèbre  ville  de 
Thoulouse.  Je  vous  supplie  de  Faymer  pour  l'amour  de  moy  et  luy  des- 
partir vostre  favorable  adsistance  pour  le  faire  cognoistre  par  voz  amis. 
Certainement  M.  Vris  excelle  à  faire  des  pourtraictz  au  naturel  heureu- 
sement ressemblantz  et  artistement  elabourez,  son  dessein  [sic]  estant 
grandement  hardi,  son  relief  fort  apparent  et  son  coloris  des  plus  beaux 
et  non  subject  à  aulcun  changement.  Il  réussit  encores  trez  bien  cez 
grands  tableaux  à  grandz  personnages,  qui  est  ce  qu'on  estime  le  plus  en 
sa  profession,  et  a  si  bien  estudié  et  dressé  son  humeur  qu'il  est  grande- 
ment recommandable  et  digne  d'estre  aymé,  comme  je  m'assure  que 
vous  ferez.  » 

T.  de  L. 


249. —  Petite  bibliothèque  orotorienne.  II.  I.e  pèi*e  Joseph  Bougerel, 
prêtre  de  l'Oratoire.  Notice  biographique  et  bibliographique,  d'après  des 
documents  inédits.  Paris,  1882,  imprimerie  Téqui,  in-t8  de  161  p.  Tiré  à  5o 
exemplaires  numérotés. 

Comme  le  dit  (p.  5)  l'auteur  de  l'excellent  petit  volume  sur  lequel  je 
viens  appeler  l'attention,  «  parmi  les  littérateurs  qui,  aux  siècles  passés, 
ont  illustré  la  congrégation  de  TOratoire,  le  père  Joseph  Bougerel  mé- 


1.  Peiresc  (Ibid.)  donne  cet  autre  pittoresque  éloge  à  «  la  peinture  de  M.  Rubens  » 
«  J'ay  esté  constrainct  de  la  mettre  en  un  lieu  où  elle  est  toute  seule,  car  elle  tuo 
tout  ce  qui  en  approchoit  ». 

2.  Les  trois  lettres  écrites  par  Peiresc  en  faveur  de  son  ami  de  Vries  ont  été  pu- 
bliées par  M.  Ludovic  Lalanne,  le  3o  juin  1861,  dans  le  Journal  des  Beaux-Arts 
dirigé  par  M.  Ad.  Siret.  M.  R.,  qui  les  cite  (pp.  6-7)  d'après  ce  recueil,  mentionne 
aussi  (p.  8)  un  article  sur  ces  mêmes  lettres,  inséré  dans  le  même  recueil  (n°  du 
i5  décembre)  et  communiqué  par  M.  Julius  Hubner,  le  conservateur  du  musée  de 
Dresde. 

3.  Bibliothèque  de  Garpentras,  registre  des  minutes  S-X,  f°  70 1. 


468  RKVUK    CRITIQUk 

rite  une  place  d'honneur,  peut-être  moins  à  cause  des  ouvrages  qu'il 
publia  de  son  vivant,  que  par  le  nombre  et  l'importance  des  manuscrits 
qu'il  a  laissés.  »  Ces  manuscrits,  qui  ont  été  précieusement  conservés, 
ont  été  communiqués  à  l'auteur.  Le  plus  curieux  de  tous  est  une  auto- 
biographie dont  les  extraits  remplissent  les  45  premières  pages  du  vo- 
lume '.  On  trouve  là,  avec  les  plus  minutieux  détails  sur  la  jeunesse  de 
Bougerel  (son  récit  s'arrête  malheureusement  à  l'année  1720)  2,  d'inté- 
ressants renseignements  sur  le  cardinal  Jérôme  Grimaldi,  archevêque 
d'Aix  (p.  7),  sur  Daniel  de  Cosnac,  d'abord  évêque  de  Valence,  puis 
archevêque  d'Aix  (p.  9),  sur  divers  jésuites  et  oratoriens  plus  ou  moins 
célèbres  (p.  12  et  suivantes),  sur  l'évêque  de  Grasse  M.  de  Mesgrigny, 
qui  est  le  héros  d'une  fort  piquante  historiette  (pp.  3i-33),  sur  le  futur 
cardinal  de  Fleury  (p.  37),  sur  la  peste  de  Marseille  (pp.  40-41),  etc. 

Les  mémoires  de  Bougerel  sont  suivis  de  quelques-unes  de  ses  lettres 
aux  pères  Lebrun  et  Desmolets  (pp.  46-62),  au  président  Bouhier 
pp.  63-io3).  Mille  sujets  y  sont  traités.  Dans  la  lettre  au  savant  biblio- 
thécaire de  l'Oratoire,  le  p.  Desmolets,  lettre  qui  appartient  au  marquis 
de  Clapiers,  il  est  question  surtout  de  deux  archéologues  provençaux 
dont  la  gloire  a  singulièrement  pâli,  Claude  Terrin,  qui  prouva  le  pre- 
mier que  la  statue  d'Arles  était  une  Vénus,  et  Laurens  Gravier,  de  Mar- 
seille, «personnage  aussi  estimable  par  sa  droiture  et  sa  probité  que  par 
sa  grande  connaissance  de  l'antiquité  et  par  son  goût  exquis  pour  les 
beaux-arts.  »  Les  lettres  à  Bouhier,  tirées,  moins  une,  communiquée 
par  M.  de  Clapiers,  de  la  collection  qui,  à  la  Bibliothèque  nationale, 
portait  autrefois  le  nom  de  l'illustre  érudit  bourguignon  3,  abondent  en 
indications  sur  le  jurisconsulte  Luc  de  Penna,  sur  le  maréchal  de 
France  J.  B.  d'Ornano,  sur  le  chevalier  Perrin,  l'infidèle  éditeur  des 
lettres  de  Mm-  de  Sévigné,  sur  Mathieu  Marais,  sur  le  président  de  Ma- 
zaugues,  sur  Barthélémy  de  Chasseneuz  *,  etc.  A  côté  de  ces  indications, 
signalons  les  nombreuses  nouvelles  littéraires  dont  Bougerel  entretient 
son  docte  correspondant,  nouvelles  relatives  aux  écrits  de  la  Motte,  de 
Voltaire,  de  Pope,  de  Boulainvilliers,  de  Villefore,  de  Gibert,  de  l'abbé 


i.  La  première  partie  de  l'autobiographie  (cahier  de  16  feuilles  in  f°)  appartient  à 
Mme  de  Mainvielle,  née  de  Bougerel.  La  seconde  partie  (cahier  de  1 1  feuillets  in-40) 
appartient  au  marquis  de  Clapiers.  « 

2.  Nous  ignorons,  dit  (p.  47)  le  biographe  de  Bougerel,  si  l'autobiographie  fut 
jamais  continuée,  ou  bien,  dans  le  cas  où  il  y  aurait  eu  une  suite,  ce  qu'elle  a  pu 
devenir. 

3.  L'auteur  du  volume,  dans  une  note  sur  Jean  Bouhier  (p.  63)  nous  donne  cette 
bonne  nouvelle  :  «  Outre  les  lettres  de  Bougerel,  sa  correspondance  (Bibl.  nat., 
FF.  24,  409  et  suiv.)  contient  plusieurs  autres  lettres  d'oratoriens  que  nous  nous 
proposons  de  publier  un  jour.  » 

4.  L'auteur,  dans  sa  note  sur  ce  personnage,  a  oublié  de  citer  la  remarquable  mo- 
nographie de  M.  Henri  Pignot  :  Un  jurisconsulte  au  xvi"  siècle.  Barthélémy  de 
Chassetieu^,  premier  commentateur  de  la  coutume  de  Bourgogne  et  président  du 
parlement  de  Provence,  su  vie  et  ses  œuvres.  Paris,  L.  Larose,  1880.,  in-8"). 


d'histoire  et  de  littérature  469 

Duguet,  de  Fénelon,  de  Dom  Rivet,  de  Titon  de  Tillet,  de  Le  Sage,  de 
l'abbé  Le  Beuf,  de  l'abbé  Sallier,  de  l'abbé  Terrasson,  de  l'abbé  de  La- 
varde,  etc. 

Le  soigneux  biographe,  après  avoir  consacré  un  chapitre  spécial  aux 
ouvrages  imprimés  du  P.  Bougerel,  étudie  les  manuscrits  du  savant 
oratorien,  et  surtout  le  plus  considérable  de  ses  manuscrits,  son  œuvre 
capitale,  à  laquelle  il  travailla  sans  interruption  pendant  plus  de  qua- 
rante ans,  le  recueil  des  Vies  des  hommes  illustres  de  Provence  (pp.  1 1 1- 
121).  La  description  de  ce  recueil  que  possède  la  famille  de  Bougerel,  et 
dont  une  copie  est  entre  les  mains  de  M.  de  Clapiers,  est  tellement  sé- 
duisante, que  tous  les  amis  de  l'érudition  répéteront  avec  le  biographe 
(p.  120)  :  «  Il  serait  bien  à  désirer  que  quelque  savant  pût  mettre  en 
œuvre  ces  précieux  manuscrits  et  en  tirer  les  trésors  de  choses  ignorées 
qu'ils  doivent  contenir.  '  » 

Les  autres  manuscrits  énumérés  sont  les  suivants  :  Faits  concernant 
la  Provence  et  les  Provençaux  (en  5  vol.  in-40),  sorte  de  journal  des 
événements  arrivés  en  Provence  que  le  P.  Bougerel  notait,  en  y  joignant 
des  extraits  de  toutes  les  publications  ayant  trait  à  son  pays  natal 
(pp.  121-222);  Vie  du  P.  Joseph  Marrot  (in-12  de  378  p.),  vie  à  la- 
quelle le  biographe  a  emprunté  des  citations  qui  aident  à  mieux  connaî- 
tre l'histoire  religieuse  de  la  France  au  xvne  siècle  (pp.  223-1 38);  Bi- 
bliothèque des  écrivains  de  V Oratoire  (en  2  vol.,  in-40),  ouvrage 
malheureusement  perdu,  mais  dont  l'auteur  du  volume  a  retrouvé  quel- 
ques feuilles  sur  lesquelles  il  nous  fournit  de  curieuses  particularités 
(pp.  138-145)  ;  le  Parnasse  provençal,  manuscrit  conservé  à  la  Biblio- 
thèque d'Aix,  d'où  le  même  auteur  extrait  une  lettre  d'Antoine  Godeau, 
évêque  de  Vence,  adressée,  le  1"  septembre  1669,  à  MM-  G.  Venel  et 
de  Chazelles  qui  l'avaient  choisi  pour  arbitre  dans  une  discussion  sur 
quelques  expressions  d'un  sonnet  (pp.  145-152). 

Le  petit  volume,  qui,  comme  on  le  voit,  est  si  plein  de  choses,  et  de 
choses  nouvelles,  se  termine  par  l'éloge  du  P.  Bougerel,  tiré  du  manus- 
crit du  P.  Bicaïs  2.  L'auteur  ne  s'étant  pas  nommé,  je  ne  crois  pas  de- 

1.  L'ouvrage  comprend  en  tout  461  vies  et  3Ô23  pages.  Aux  notices  biographiques 
il  faut  ajouter  divers  morceaux  comme  le  discours  préliminaire,  qui  renferme  l'his- 
toire de  Marseille,  une  dissertation  sur  la  patrie  de  Pétrone,  une  autre  sur  la  patrie 
du  poète  Gallus,  une  troisième  sur  la  patrie  de  Cassien,  une  autre  encore  sur  la  pa- 
trie de  J.  B.  d'Ornano,  une  enfin,  très  importante,  de  62  pages,  qui  a  pour  titre  : 
Justification  de  Jean  Meynier  baron  d'Oppede...  où  Von  trouvera  l'existence  des  Vau- 
dois  de  Cabrières  et  de  Mirandol  et  la  vraie  cause  de  la  mort  funeste  de  l'avocat  gé- 
néral Guérin,  inconnue  jusqu'à  présent.  Mentionnons,  de  plus,  une  Histoire  de  V  Aca- 
démie d'Arles  (en  5o  pages). 

2.  Indiquons,  à  l'Appendice,  une  Table  alphabétique  des  principaux  noms  cités.  A 
propos  de  ces  noms,  disons  que  quelques-uns  ont  été  défigurés  dans  le  volume  par 
des  fautes  d'impression.  Ainsi  (p.  5g)  l'académicien  Moreau  de  Mautour  devient  Mo- 
reau  de  Nantour,  et  (p.  11 5)  le  gentilhomme  d'Aix  Galaup  de  Chasteuil  devient 
Galoup  de  Lasteuil.  Citons,  au  sujet  des  fautes  d'impression,  cette  phrase  d'une  let- 
tre de  Bougerel  à  Bouhier,  phrase  que  presque  tous,  que  moi  surtout,  nous  pouvons 


47°  REVUR   CRITIQUE 

voir  le  nommer  moi-même,  mais  tous  ceux  qui  liront  son  volume  recon- 
naîtront facilement  en  lui  un  des  plus  laborieux  et  des  plus  savants 
confrères  et  successeurs  du  P.  Bougerel. 

T.  de  L. 


25o.  —  Correspondance  littéraire,  philosophique  et  critique  par 
Giiinm,  niderot,  Bayiial,  Meister,  etc.,  revue  sur  les  textes  originaux 
comprenant  outre  ce  qui  a  été  publié  à  diverses  époques  les  fragments  supprimés 
en  i8i3  par  la'censure,  les  parties  inédites  conservées  à  la  bibliothèque  ducale  de 
Gotha  et  à  l'Arsenal  à  Paris.  Notices,  notes,  table  générale,  par  Maurice  Tour- 
neux._Paris,  Garnier  frères,  1877-1882.  16  vol.  in-8°  dont  le  dernier  de  755  p. 

La  Correspondance  littéraire  fut  publie'e  pour  la  première  fois  en 
1812-1813  :  la  première  partie  (1753-1770)  eut  pour  éditeurs  Michaud 
aîné  et  Chéron  ;  Salgues  s'occupa  de  la  seconde  partie  (1771-1782)  et 
Suard  de  la  troisième  (1782-1790).  Un  supplément  fut  donné,  en  1814, 
par  A. -A.  Barbier,  et  le  tout  forma  dix-sept  volumes  in-8°.  M.  Jules 
Taschereau  présida  (1829)  à  la  seconde  édition,  composée  de  quinze  vo- 
lumes, auxquels  il  faut  joindre  deux  volumes  supplémentaires  publiés 
(la  même  année)  par  MM.  Chéron  et  Thory.  La  seconde  édition  était  de 
beaucoup  supérieure  à  la  première  l;  la  troisième  est,  pour  le  texte 
comme  pour  l'annotation,  incomparablement  supérieure  à  la  seconde. 
M.  Tourneux,  qui  avait  été  l'excellent  collaborateur  et  continuateur  de 
feu  J.  Assézat  dans  la  publication  des  Œuvres  complètes  de  Diderot 
(vingt  volumes  in-8°),  était  naturellement  désigné  pour  préparer  l'édi- 
tion définitive  de  la  Correspondance  littéraire.  Il  est,  sans  contredit, 
celui  de  tous  les  érudits  de  notre  temps  qui  connaît  le  mieux  le  xvnr3  siè- 
cle devenu,  en  quelque  sorte,  son  domaine  spécial  et  réservé.  Je  ne  puis, 
on  le  comprend  bien,  rendre  minutieusement  compte  des  seize  volumes 
de  la  collection.  Je  me  contenterai  d'indiquer  les  principaux  mérites  et 
aussi  quelques-unes  des  imperfections  d'un  travail  qui,  en  raison  de  son 
étendue  même,  ne  pouvait  pas  être  entièrement  irréprochable. 

C'est  à  l'aide  des  manuscrits  originaux  du  Musée  ducal  de  Gotha,  si- 
gnalés dès  le  commencement  de  l'année  1867  par  un  recueil  périodique 
de  Strasbourg,  Le  bibliographe  alsacien,  publié  sous  la  direction  de 
M.  Charles  Mehl,  que  M.  T.  a  pu  combler  la  majeure  partie  des  lacunes 
qui  déparent  les  éditions  de  18 13  et  de  1829.  D'assez  nombreuses  pages 
inédites  de  la  correspondance  ont  encore  été  retrouvées  dans  les  frag- 

si  bien  nous  appliquer  :  «  Je  vous  aurois  obligation  si  vous  vouliez  me  marquer  les 
noms  propres  que  j'ay  estropiez.  Il  m'est  arrivé  ce  qui  arrive  à  toute  personne  qui 
est  remplie  de  son  sujet  :  j'ay  cru  lire  dans  l'épreuve  ce  que  j'avais  dans  la  tête  ». 

1.  Ni  Brunet,  dans  le  Manuel  du  libraire,  ni  Quérard,  dans  la  France  littéraire, 
ne  nous  avaient  appris,  comme  le  fait  M.  Tourneux  (Avertissement,  p.  11),  que 
M.  A.  Chaude  avait  aidé  M.  Taschereau  dans  la  réimpression  de  1829  et  avait  même 
publié  seul  les  quatre  derniers  volumes. 


d'histoire  et  de  littérature  471 

ments  donnés  à  M.  Charles  Nisard  par  feu  le  marquis  de  la  Rochefou- 
cauid-Liancourt  et  offerts  à  la  bibliothèque  de  l'Arsenal  par  le  savant 
auteur  des  Ennemis  de  Voltaire.  «  Ces  fragments,  »  dit  M.  T.  (Aver- 
tissement, p.  11),  «  considérés  quelquefois  et  à  tort  comme  provenant 
du  portefeuille  de  Suard,  renferment  plusieurs  passages  supprimés  par 
la  censure  impériale  qui  ne  font  point  double  emploi  avec  le  volume 
publié  en  1829  par  MM.  Chéron  et  Thory,  mais  principalement  des  ar- 
ticles dont  les  éditeurs  d'alors  n'appréciaient  pas  la  valeur,  tels  que  les 
comptes-rendus  des  salons  de  1785,  1787,  1789,  etc.  Par  une  coïnci- 
dence curieuse,  le  manuscrit  de  Gotha  est  notablement  incomplet  en  ce 
qui  concerne  la  fin  de  la  Correspondance.  Ce  n'est  pas  tout  :  M.  A. 
Chaude  avait  pris  la  peine  de  relever  sur  son  propre  exemplaire  les  cor- 
rections et  additions  dont  il  nous  a  été  donné  de  prendre  copie.  Quel- 
ques-unes portent  précisément  sur  des  passages  et  des  membres  de  phra- 
ses qui  avaient  pu  inquiéter  la  police  de  Napoléon  ;  mais  d'autres 
suppressions,  volontairement  pratiquées  dans  les  séries  nouvelles,  prou- 
vent que  MM.  Taschereau  et  Chaude  craignirent  d'éveiller  les  mêmes 
craintes  chez  les  censeurs  de  Charles  X  et  que  le  sous-titre  de  leur  pu- 
blication x  manquait  tout  au  moins  d'exactitude.  Cette  collation,  nous 
l'avons  refaite  à  nouveau  sur  le  manuscrit  de  Gotha  et  nous  avons  réta- 
bli minutieusement  les  épithètes  aussi  bien  que  les  phrases  entières  ou 
incidentes  inconnues  jusqu'à  ce  jour  2  ». 

On  ne  saurait  donner  trop  d'éloges  aux  soins  qu'a  pris  M.  T.  pour 
l'établissement  du  texte  de  la  Correspondance  littéraire.  Son  travail,  à 
cet  égard,  ne  laisse  absolument  rien  à  désirer.  En  constatant  que  plu- 
sieurs milliers  de  pages  ont  été  l'objet  d'une  révision  des  plus  attentives, 
on  est  saisi  d'admiration  pour  les  qualités  de  patience,  de  courage,  de 
dévouement  déployées  par  l'infatigable  éditeur. 

Etablir  aussi  scrupuleusement  un  texte  aussi  considérable,  c'était  déjà 
bien  mériter  des  amis  du  xvnr3  siècle.  Le  travail  du  commentateur,  s'il 
n'est  pas  à  l'abri  de  tout  reproche,  a  droit  encore  à  leur  plus  vive  recon- 
naissance. 

Mais,  avant  de  nous  occuper  de  l'annotation  de  la  Correspondance 
littéraire,  examinons  rapidement  ce  recueil  même  tel  que  l'a  constitué 
le  nouvel  éditeur. 

M.  T.,  ayant  reconnu  que  la  pensée  première  de  ce  journal  secret 
appartient  à  l'abbé  Raynal,  n'a  pas  voulu  passer  sous  silence  la  période 
rédigée  par  l'auteur  de  l'Histoire  philosophique  et  politique  des  éta- 

1.  a  Nouvelle  édition  où  se  trouvent  rétablies  pour  la  première  fois  les  phrases 
supprimées  par  la  censure  impériale.  » 

2.  Si  M.  T.  a  beaucoup  ajouté,  il  a  aussi  beaucoup  retranché.  Pouvait-il  conserver 
des  morceaux  aussi  répandus  que  le  Pauvre  diable,  Y  Homme  aux  quarante  écus  et 
autres  petits  chefs-d'œuvre?  Il  n'a  conservé,  en  dehors  des  articles  de  Diderot,  que 
des  pièces  rares  ou  même  inédites  de  conteurs  aussi  spirituels  que  Piron,  Voisenon, 
etc. 


472  REVUE    CRITIQUE 

blissements  des  Européens  dans  les  deux  Indes,  encore  que  cette  pé- 
riode fût  incomplète  des  années  1752,  1753  et  d'une  partie  de  1754". 
Les  Nouvelles  littéraires  de  Raynal,  qui  proviennent  de  la  bibliothè- 
que de  Gotha,  s'étendent  de  1747  à  1755;  elles  remplissent  presque 
tout  le  premier  volume  (pp.  71-492) 2  et  une  partie  du  second  (pp.  3-225). 
Ce  journal  est  précédé  d'une  notice  dont  voici  les  dernières  lignes  : 
«  Dans  les  Nouvelles  littéraires,  le  goût  et  le  savoir  de  l'auteur  se  mon- 
trent librement;  la  variété  des  renseignements  qu'elles  révèlent  sur  les 
livres,  les  théâtres,  les  beaux-arts  d'une  période  pour  laquelle  il  n'existe 
aucun  recueil  aussi  complet,  suffirait  à  justifier  leur  publication,  alors 
même  que  nous  n'aurions  pas  pour  garantie  de  leur  valeur  propre  l'o- 
pinion de  Voltaire  ». 

La  Correspondance  littéraire  commence  (mai  1753)  au  milieu  du 
second  volume  (p.  241)  et  ne  s'achève  qu'au  milieu  du  seizième  volume 
(p.  208).  Le  reste  du  dernier  volume  est  occupé  :  i°  par  des  extraits  de 
la  continuation  que  donna  Meister,  en  1794,  à  la  gazette  de  Grimm, 
déjà  continuée  par  lui  presque  exclusivement-  de  mars  1773  à  la  fin  de 
1774,  extraits  réunis  sous  le  titre  de  :  Les  dernières  années  de  la  Cor- 
respondance littéraire  (pp.  209-246) 4  ;  20  par  les  Opuscules  et  lettres  de 


1.  M.  T.,  après  avoir  dit  (p.  ni)  qu'il  n'existe,  en  ce  qui  concerne  Raynal,  ni  té- 
moignage contemporain  de  quelque  valeur,  ni  récit  autobiographique  et  qu'à  sa  mort 
parut  une  brochure  déclamatoire  dont  l'histoire  n'a  presque  rien  à  tirer  (Eloge 
philosophique  de  G.-T.-F.  Raynal,  par  Chérhal  de  Montréal,  Paris,  an  VI,  in-8°), 
ajoute  :  «  Il  faut  donc  demander  les  traits  caractéristiques  de  cette  personnalité  re- 
muante à  des  mémoires  comme  ceux  de  Malouet,  qui  l'a  bien  connu  sur  son  déclin; 
aux  souvenirs  de  D.  Thiébault;  aux  lettres  de  Diderot  à  Mlle  Volland.  Quant  aux  da- 
tes précises,  il  suffira  de  rappeler  que  Raynal  est  né  à  Saint-Geniés  (Aveyron),  le 
11  mars  1700,  et  qu'il  est  mort  à  Chaillot  le  6  mai  1796  ».  Observons  que  ces  deux 
dates  diffèrent  quelque  peu  de  celles  qui  sont  consignées  dans  le  Dictionnaire  histo- 
rique de  la  France  par  M.  L   Lalanne  :  «  12  avril  1713-6  mars  1796  ». 

2.  Avant  les  Nouvelles  littéraires,  on  trouve  (pp.  1-16)  une  notice  de  J.-H.  Meis- 
ter  écrite  en  1808  sur  celui  dont  il  fut  le  secrétaire  et  le  collaborateur  assidu,  no- 
tice intitulée  :  le  baron  de  Grimm,  «  document  qui  a  fourni,  depuis  soixante  ans,  les 
éléments  de  toutes  les  biographies  de  Grimm  »,  et  (pp.  17-68)  un  récit,  imprimé  en 
1868  dans  le  tome  II  du  Recueil  de  la  Société  historique  russe,  sous  ce  titre  :  Mé- 
moire historique  sur  l'origine  et  les  suites  de  mon  attachement  pour  l'impératrice  Ca- 
therine Il  jusqu'au  décès  de  Sa  Majesté  impériale.  Ge  mémoire,  comme  le  fait  re- 
marquer M.  T.,  «  nous  montre  Grimm  sous  un  jour  nouveau,  puisque  le  zélateur 
des  plus  hardis  philosophes  du  siècle  y  gémit  sur  l'abolition  de  droits  qui  subsis- 
taient depuis  des  siècles,  tout  comme  les  volontaires  de  l'armée  de  Condé  dont  il  par- 
tageait la  mauvaise  fortune  ».  M.  T.  a  fait  suivre  la  notice  de  Meister  (p.  i3)  de 
deux  documents  officiels  sur  la  mort  et  les  obsèques  de  Grimrn.  D'après  l'extrait  du 
registre  mortuaire  de  l'église  ducale  du  château  de  Gotha,  Grimm,  né  le  28  septem- 
bre 1723  à  Ratisbonne,  mourut  le  19  décembre  1807,  à  l'âge  de  quatre-vingt-quatre 
ans  et  trois  mois. 

3.  Lettre  à  Darget,  du  21  avril  1750.  M.  T.  s'amuse  (p.  67)  «  de  la  redondance 
toute  méridionale  »  du  style  de  l'abbé  Raynal. 

4.  On  y  remarque  une  Copie  des  tablettes  de  Diderot  (p.  218),  une  Notice 
historique  sur  Sedaine  envoyée  à  Meister  par  Mme  de  Vandeul,   née  Diderot  (p.  2 '4). 


DHISTOMUî.    Kl     DK    LIT!  'ÉHATURK  473 

Grimm,  déjà  rassemblés  par  Barbier  en  i8i4et  reproduits  par  MM.  Tas- 
chereau  et  Chaude,  mais  augmentés  ici  de  plusieurs  morceaux  intéres- 
sants (pp.  269-502)  ;  3°  par  les  lettres  adressées  à  Grimm  (pp.!5o7-54i)  ; 
40  par  une  très  curieuse  étude  de  l'éditeur  sur  La  bibliothèque  et  les 
papiers  de  Grimm  pendant  et  après  la  Révolution  (pp.  542-562); 
5°  par  les  Additions  et  corrections  (pp.  563-572);  6°  enfin  par  une 
Table  générale  des  noms  propres  et  des  titres  cités  dans  la  Correspon- 
dance littéraire  (pp.  573-750),  table  qui  est  une  des  meilleures  que  je 
connaisse  parmi  celles  dont  on  a  enrichi,  en  ces  derniers  temps,  de 
volumineux  recueils,  et  à  laquelle  j'appliquerais  volontiers  l'éloge  donné 
par  Quérard  à  la  Table  analytique  de  l'Encyclopédie  dressée  par  Mou- 
chon   (Pierre)  :  «  chef-d'œuvre  de  patience  et  d'exactitude  »  ". 

Les  notices  et  notes  de  M.  T.  sont  généralement  excellentes.  C'est 
parce  que  l'éditeur  de  la  Correspondance  littéraire  est  un  annotateur 
d'un  mérite  peu  ordinaire,  que  je  lui  reprocherai  d'avoir  été  parfois  trop 
avare  d'éclaircissements.  Les  Nouvelles  littéraires,  par  exemple,  ne 
sont  accompagnées  que  d'assez  rares  et  assez  brèves  notes  bibliographi- 
ques. M.  T.  s'est  presque  toujours  contenté  de  rétablir  les  titres  des 
livres,  si  souvent  estropiés  et  quelquefois  même  omis  par  Raynal.  Ce 
n'est  pas  assez.  Raynal  raconte  beaucoup  d'anecdotes,  les  unes  vraies,  les 
autres  fausses,  de  troisièmes  moitié  vraies  et  moitié  fausses.  N'aurait-il 
pas  fallu  tantôt  une  note  confirmative,  tantôt  une  note  rectificative, 
surtout  quand  les  anecdotes  concernent  des  personnages  tels  que  Boi- 
leau,  Fontenelle,  La  Fontaine,  Racine,  Voltaire,  etc.  ?  2  J'aurais  aussi 
voulu  que  l'origine  des  citations  enchâssées  dans  le  texte  fût  toujours 
indiquée.  M.  T.  a  oublié  de  rechercher  (t.  I,  p.  84)  quel  est  l'auteur  de 
l'épigramme  qu'estimait  tant  Boileau  : 

Gi-git  ma  femme.  Ah  !  qu'elle  est  bien 
Pour  son  repos  et  pour  le  mien  3! 

Il  ne  nous  dit  pas  non  plus  (t.  II,  p.  224)  que  ce  fut  Mmc  du  Deffand  qui 
lança  contre  le  beau  livre  de  Montesquieu  ce  bon  mot  si  connu  :  C'est 
de  l'esprit  sur  les  lois.  —  Sous  le  nom  des  auteurs  d'ordre  secondaire 
cités  par  Raynal  et  par  ses  continuateurs,  il  eût  été"  bon  de  rappeler 
l'époque  et  le  lieu  de  naissance,  l'époque  et  le  lieu  de  décès.  Ce  sont  des 

1.  Cet  éloge  est  cité  {£,  XII,  p.  334)  Par  M.  T.  qui  fait  observer  que  Quérard  est 
«si  volontiers  injuste  pour  ses  devanciers  ».  Indépendamment  de  la  table  finale, 
chaque  volume  possède,  sous  la  forme  de  sommaires,  une  table  analytique  et  chro- 
nologique où  l'éditeur  n'a  rien  laissé  échapper.  r 

2.  Je  ne  puis  laisser  passer  sans  protestation  cette  assertion  de  Raynal  (t.  I, 
p.  292)  au  sujet  de  la  toile  d'araignée  qu'après  dix  ans  Balzac  retrouva  chez  Chape- 
lain que  le  chroniqueur  appelle  «  l'homme  de  notre  littérature  le  plus  décrié  ». 
A  Balzac  il  faut  substituer  Ménage  et  à  la  toile  d'araignée  des  tisons.  Voici  le  récit 
du  Menagiana  (édition  de  1 71 5,  t.  II,  p.  3 1)  :  «  Je  vis  encore  à  la  cheminée  de 
M.  Chapelain  les  mêmes  tisons  que  j'y  avais  vus  il  y  avait  douze  ans  ». 

3.  On  n'est  pas  sûr  que  le  distique  soit  de  Jacques  Dulorens.  Voir  Revue  critique 
du  6  mars  1882,  p.  198,  note  1. 


474  KKVUK    CRITIQUE 

jalons  commodes  pour  tout  le  monde,  car  si  tous  les  lecteurs  ne  sont  pas 
des  érudits,  tous  les  érudits  n'ont  pas  une  mémoire  infaillible.  Prenons 
un  exemple  :  Raynal  annonce  (t.  1,  p.  74)  la  publication  des  Lettres 
morales  et  critiques  du  marquis  d'Argens.  Pourquoi  ne  pas  nous  rappe- 
ler que  Jean-Baptiste  de  Boyer,  marquis  d'Argens,  naquit  à  Aix  le 
27  juin  1703  '  et  qu'il  mourut  près  de  Toulon  le  1 1  juin  1 771  ? 

Les  notes  sont  plus  nombreuses  au  bas  des  pages  de  la  Correspon- 
dance littéraire,  mais  la  plupart  sont  empruntées  à  l'édition  de 
M.  Taschereau.  L'auteur  du  Manuel  du  libraire  déclare  que  toutes  les 
notes  de  M.  Taschereau  sont  loin  d'être  bonnes.  La  vérité  veut  que 
j'avoue  qu'il  aurait  été  possible  d'en  améliorer  un  grand  nombre  2. 
M.  T.  a  très  bien  rectifié  (t.  II,  pp.  491-492)  le  récit  de  l'ancien  admi- 
nistrateur de  la  Bibliothèque  nationale  sur  les  derniers  moments  de 
Montesquieu  3.  Pourquoi  n'a-t-il  pas  plus  souvent  corrigé  les  erreurs  de 
son  devancier?  Ce  qu'il  y  avait  de  mieux  dans  le  commentaire  de  l'édi- 
tion précédente,  c'était  la  partie  purement  bibliographique  qui  avait  été 
fournie  à  M.  Taschereau  par  trois  parfaits  connaisseurs  de  livres  en  gé- 
néral, de  livres  du  xvme  siècle  en  particulier,  A.  A.  Barbier,  Beuchot  et 
M.  Ravenel.  Les  notes  de  M.  T.  relatives  à  l'histoire  littéraire  ne  souf- 
frent pas  d'un  aussi  dangereux  voisinage.  Je  citerai,  entre  tous  les  ren- 
seignements qui  viennent  de  lui,  les  renseignements  relatifs  aux  œuvres 
de  Mlle  de  Lussan  (t.  III,  p.  25);  à  V Eléphant  triomphal,  brochure  de 

1.  Et  non  le  24  juin  1704,  comme  le  répètent  tous  les  biographes.  J'emprunte  la 
bonne  date  à  Roux  Alpheran  (Les  rues  d'Aix,  1847,  t.  I,  p.  40).  Le  consciencieux 
auteur  a  recueilli  cette  date  dans  les  registres  de  baptêmes  de  la  paroisse  Sainte- 
Magdelaine  d'Aix.  Combien  d'erreurs  de  ce  genre  il  y  aurait  à  corriger  dans  nos 
meilleurs  recueils  biographiques  !  Des  chercheurs  aussi  patients  et  aussi  habiles 
que  M.  T.  ne  devraient  négliger  aucune  occasion  de  purger  peu  à  peu  ces  recueils 
de  leurs  inexactitudes  sans  cesse  renouvelées.  A  ce  propos,  demandons  à  M.  T.  s'il 
est  sûr  de  ce  qu'il  avance  touchant  la  naissance  de  l'abbé  d'Artigny  en  1704  (t.  I, 
p.  320).  Je  vois  qu'ailleurs  on  fait  naître  l'auteur  des  Nouveaux  mémoires  d'histoire  et 
de  littérature  en  1706  (le  8  novembre). 

2.  Quelques-unes  sont  écrites  en  un  singulier  français,  celle-ci  particulièrement 
(t.  III,  p.  416)  :  a  Ce  curé  de  Saint-Sulpice,  qui  du  reste  passait  pour  susceptible  de 
sacrifices  en  faveur  des  pauvres,  etc.  ».  L'emploi  du  mot  susceptible  en  ce  sens  est 
presque  aussi  ridicule  que  l'emploi  du  mot  équitable  pour  juste  dans  cette  phrase 
dont  se  moque  l'auteur  de  la  Correspondance  littéraire  (t.  X,  p.  212)  :  «  Vous  avez 
là  des  bottes  bien  équitables  ».  Pour  revenir  au  curé  de  Saint-Sulpice,  comment 
M.  Taschereau,  qui  mentionne  en  sa  note  la  statue  de  Notre-Dame  de  Vieille- 
Vaisselle,  n'a-t-il  pas  raconté  la  plaisante  anecdote  du  vase  d'argent  incorporé  par 
le  zèle  indiscret  de  l'abbé  Languet  dans  cette  statue,  à  la  faveur  d'un  si  joli  mot? 

3.  M.  T  aurait  pu  ajouter  à  sa  victorieuse  citation  une  autre  citation  non  moins 
décisive  qui  lui  aurait  été  fournie  par  V Histoire  de  Montesquieu  de  M.  Louis  Vian 
(Paris,  1878,  in-8°,  chapitre  intitulé  :  Derniers  moments,  religion  et  mort  de  Mon- 
tesquieu (pp.  325-335).  M.  T.  a  rapproché  (Avertissement,  p.  vi)  M.  Vian  et 
M.  Desnoiresterres  dans  cette  phrase  dictée  par  la  reconnaissance  la  plus  vive  : 
«  Voltaire  et  Montesquieu  ont  enfin  rencontré  des  biographes  dignes  d'eux  dans 
MM.  G.  Desnoiresterres' et  Louis  Vian  qui  nous  ont  maintes  fois  communiqué  le 
résultat  des  immenses  lectures  d'où  sont  sortis  deux  livres  h  tant  d'égards  définitifs.  » 


IM-MSTOIKK    Kl     Oli    UTTKKAtUKh  47  ^ 

Ribart  de  Chamoust  tellement  rare  que  M.  T.  la  surnomme  un  des 
merles  blancs  des  collections  sur  Paris  (t.  III,  p.  5  i  5)  ;  à  la  mort  du 
comte  de  Bonneval  (t.  IV,  p.  3/5);  à  la  pièce  intitulée  l'Humanité,  ou 
le  Tableau  de  ITndigence,  attribuée  par  Grimm  à  un  certain  abbé  Ri- 
chard, dont  il  déclare  n'avoir  jamais  entendu  parler,  et  dont  personne 
n'a  jamais  plus  entendu  parler  que  lui  (t.  IV,  p.  398)  ;  au  roman  qui  a 
pour  titre  La  petite  maison  (in-18,  1762)  et  où  sont  énumérés  divers 
artistes  parisiens  aujourd'hui  bien  oubliés  (t.  V,  p.  47)  ;  aux  lettres  de 
l'abbé  d'Olivet  au  président  Bouhier,  lesquelles  montrent  chez  l'acadé- 
micien une  sensibilité  que  ses  contemporains  lui  refusaient  (t.  VIII, 
p.  205)  ;  à  la  biographie  de  Charles  Théveneau  de  Morande,  l'auteur  du 
Ga^etier  cuirassé  et  de  tant  d'autres  ignobles  sottisiers  et  pamphlets 
parmi  lesquels  on  a  mis  à  tort  les  Anecdotes  secrètes  sur  la  comtesse  du 
Barry,  qui  sont  de  Pidansat  de  Mairobert  (t.  X,  p.  225)  ;  à  la  biogra- 
phie de  Mlle  de  Lespinasse,  dont  M.  Eugène  Asse  a  retrouvé  l'état  civil 
en  1877  (t.  XI,  p.  263);  aux  entreprises  d'un  hardi  novateur,  Mamnès- 
Claude  Catherine  Pahin  Champlaix  de  la  Blancherie,  ressuscité  par 
Bellier  de  La  Chavignerie  dans  la  Revue  universelle  des  arts  (t.  XII, 
p.  101)  ;  à  la  biographie  de  Michel  Guillaume  Jean  de  Crèvecœur,  l'au- 
teur des  Lettres  d'un  cultivateur  américain,  reconstituée  d'après  des 
notes  fournies  par  la  famille  (t.  XIV,  p.  88);  à  un  conte  {Le  cheval  et 
la  fille)  recueilli  dans  toutes  les  éditions  des  poésies  de  Boufflers  et  qui 
pourtant  est  de  J.  T.  Massinot,  comme  le  prouve  une  lettre  inédite  de 
ce  dernier  trouvée  par  M.  T.  parmi  les  manuscrits  de  la  Bibliothèque 
nationale  (F.  F.  12768)  et  qu'il  reproduit  avec  des  vers  du  même  Mas- 
sinot  qui  donne  pour  épigraphe  à  son  poétique  plaidoyer  pro  Pegaso  suo 
la  citation  si  chère  à  tous  les  poètes  qui  se  disent  pillés  :  Hos  ego  versi- 
culosfeci,  tulit  alter  honores  (t.  XII,  pp.  124-126);  au  catalogue  des 
tableaux,  estampes,  bronzes,  porcelaines,  etc.,  du  baron  d'Holbach 
(t.  XV,  pp.  419-420)  '  ;  à  la  mort  de  Beaurepaire,  le  commandant  de 
Verdun,  mort  où  Meister  voit  un  généreux  suicide,  ce  qui  lui  fournit 
l'occasion  de  parler  du  «  dévouement  de  Curtius  se  précipitant  dans  un 
gouffre  »,  mais  où  M.  T.  est  fort  tenté  de  voir  un  assassinat 2. 

A  côté  de  ces  notes  qui  défient  la  critique  la  plus  impitoyable,  nous 
en  citerons  quelques-unes  moins  dignes  de  l'approbation  de  tous. 

M.  T.  (t.  III,  p.  25)  n'a  donné  aucun  éclaircissement  au  sujet  de 
cette  assertion  de  Grimm  :  «  L'illustre  président  de  Montesquieu,  après 
avoir  travaillé  plusieurs  années  à  VHistoire  de  Louis  XI,  la  jeta  au  feu 
par  distraction,  lorsqu'elle  fut  achevée.  Quelle  perte!  C'était  bien  à  lui 

1.  Voir  [Ibid.,  pp.  422-425)  une  excellente  note  de  Chaude  renfermant  la  liste 
minutieusement  exacte  des  nombreux  ouvrages  du  baron  d'Holbach. 

2.  M.  T.  nous  renvoie  à  Y  Amateur  d'autographes  de  novembre  1862  où  l'on 
trouve  une  intéressante  lettre  de  M.  Léon  de  la  Sicotière  sur  ce  sujet  et  au  n°  d'août- 
septembre  1880  du  même  recueil,  où  l'on  trouve  un  article  de  M.  Th.  Luillier  qui 
reprend  et  complète  cette  discussion. 


47^  KKVUK    CKfTtQUfc 

à  peindre  ce  roi.  »  Ce  que  l'on  a  raconté  du  manuscrit  et  de  sa  fin  tragi- 
que n'est  qu'une  légende,-  comme  je  l'ai  jadis  dit  ici  d'après  des  rensei- 
gnements communiqués  par  la  famille  même  de  Montesquieu  K  —  Ne 
trouve-t-on  pas  insuffisante  cette  note  d'une  ligne  (t.  III,  p.  3 60)  sur 
l'évêque  d'Autun,  nommé  en  1757  membre  de  l'Académie  française? 
«  De  Montazet,  depuis  archevêque  de  Lyon.  Il  fut  reçu  le  14  mars.  » 
L'ample  généalogie  de  la  maison  Malvin  de  Montazet  insérée  par 
d'Hozier  dans  l'Armoriai  généralyde  France  aurait  fourni  à  M.  T.  les 
renseignements  les  plus  précis  sur  le  prélat  académicien  2.  —  On  remar- 
que (t.  IV,  pp.  163-172),  sous  la  date  du  i5  décembre  1759,  des  Ob- 
servations sur  quelques  auteurs  d'histoire  naturelle,  par  M.  Bonnet, 
de  Genève,  auteur  de  quelques  ouvrages  estimés.  Dans  cette  lettre  iné- 
dite écrite  à  Grimm,  «  l'illustre  Charles  Bonnet,  »  comme  s'exprime 
M.  T.,  décoche  à  Buffon  cette  épigramme  (p.  169)  :  «  Cette  Histoire 
naturelle  est-elle  assez  naturelle?  »M..  T.  dit  en  note  :  «  Bonnet  fait  là 
une  sorte  de  calembour  de  tout  temps  attribué  à  Voltaire.  ».  Je  me  sou- 
viens d'avoir  vu  souvent  le  mot  porté  au  compte  de  dAlembert  qui, 
devant  quelqu'un  vantant  beaucoup  l'Histoire  naturelle,  se  serait 
écrié  :  «  Oh! pas  si  naturelle.  »  —  Le  commentateur  n'a  pas  rappelé,  à 
propos  des  Mémoires  de  Charles  Perrault  (t.  IV,  p.  178),  l'édition 
qui  en  a  été  donnée  par  M.  Paul  Lacroix  (Paris,  Gosselin,  1842)  avec 
une  attachante  notice  complétée,  trente-six  ans  plus  tard,  par  une  nou- 
velle Notice  sur  les  Mémoires  de  Perrault  et  sur  les  dernières  années 
de  sa  vie  littéraire  3.  —  Quand  Grimm,  rendant  compte  des  Mémoires 
sur  la  vie  de  M.  de  Pibrac  (t.  IV,  p.  399)  prétend  qu'on  y  prouve  «  que 
M.  de  Pibrac  n'a  pas  été  l'amant  de  la  reine-mère,  comme  c'était  le 
bruit  et  l'opinion  du  temps,  »  il  prouve  lui-même  qu'il  n'a  pas  daigné 
lire  le  mémoire  où  l'on  cherche  à  établir  que  l'auteur  des  Quatrains 
n'aima  pas  la  fille  de  la  reine-mère,  Marguerite  de  Valois.  Je  regrette 
que  M.  T.  n'ait  pas  relevé  la  bévue  de  son  auteur.  Je  regrette  aussi  que 
l'imprimeur,  dédoublant  l'écrivain  qui  s'appelait  Charles-Joseph  de  Les- 
pine  de  Grainville,  lui  ait  fait  dire  (note  2  de  la  même  page)  que  le  Mé- 
moire sur  la  vie  de  Pibrac  avait  été  écrit  par  Lespine  et  Grainville. 
—  Dans  la  note  sur  Masson,  dit  de  Pe^ay  (t.  XII,  p.  3o)  n'a  pas  été 
mentionnée  une  excellente  notice  de  M.  Rodolphe  Reuss,  un  de  nos  plus 
savants  collaborateurs  :  Le  marquis  de  Pe\ay  (Mulhouse,  1876,  grand 
in-8  de  52  pages)  *. 

1.  N°  du  27  avril  1878,  p.  27g.  Grimm  a  donné  d'autres  détails  inexacts  sur  les 
manuscrits  laissés  par  Montesquieu  (t.  VII,  pp.  3o3-3o4). 

2.  A  la  Table  générale  on  a  imprimé  (p.  6g3)  Maloin  pour  Malvin.  Il  est  plusieurs 
fois  question,  dans  la  Correspondance  littéraire  (t.  V,  p.  3g2  ;  t.  XI,  p.  225  ;  t.  XIV, 
p.  3o5)  du  prélat,  du  galant  prélat,  faudrait-il  dire,  si  l'on  attachait  quelque  impor- 
tance à  une  épigramme  rapportée  par  Meister  et  à  une  anecdote  racontée  par  Cham- 
fort. 

3.  Imprimé  par  D.  Jouaust  pour  le  bibliophile  Jacob.  Janvier  1878,  3o  pages. 

4.  Voir  Revue  critique  du  9  septembre  1876',  pp.  164-166.  —  En  regard  du  péché 


d'histoire  et  dk  littérature  477 

M.  T.  ne  dit  pas  (t.  XII,  p.  1 3 1 )  que  la  question  de  savoir  si  la  mort 
de  Rousseau  fut  naturelle  ou  volontaire  est  aujourd'hui  tranchée  dans 
le  premier  sens.  Il  cite  seulement  sur  la  question  si  longuement  débat- 
tue Stanislas  Girardin  et  Musset-Pathay,  et  il  ajoute  :  «  M.  de  Musset 
conclut  des  différentes  circonstances  de  la  mort  qu'elle  fut  volontaire.  » 
Qu'il  me  permette  de  le  renvoyer  aux  Souvenirs  d'un  nonagénaire  si 
bien  publiés  par  M.  C.  Port  (Paris,  1880,  2  vol.  in-8°)  '■  :  il  y  verra 
(t.  II,  pp.  1-20)  que  le  témoignage  de  F. -Y.  Besnard  s'ajoute  à  tous  les 
témoignages,  déjà  si  considérables,  qui  établissent  que  la  mort  de  Jean- 
Jacques  ne  peut  être  attribuée  au  suicide.  —  M.  T.  n'a  pas  mis  de  note 
sous  ce  passage  (t.  XII,  p.  2Ô4):«  Chrétiens  à  la  messe,  païens  à  l'Opéra, 
nous  ressemblons>  dit  M.  de  Voltaire,  à  l'abbé  Pellegrin  : 

Le  matin  catholique  et  le  soir  idolâtre, 
Déjeunant  de  l'autel  et  soupant  du  théâtre.  » 

Il  aurait  fallu  rappeler  que  ces  deux  vers  si  souvent  cités  sont  du  plus 
inconnu  des  poètes,  d'un  certain  Rémi,  qui  n'a  jamais  fait  de  bon  que 
ce  distique.  Aussi  ne  doit-on  pas  lui  en  laisser  enlever  la  paternité.  Ne 
volons  personne,  mais  surtout  ne  volons  pas  les  pauvres  2. 


d'omission  de  M.  T.,  il  convient,  pour  être  juste,  de  mettre  cette  observation,  que 
toujours  il  a  soin  de  citer  les  monographies  qui,  de  notre  temps,  ont  été  consacrées 
à  tels  ou  tels  écrivains.  C'est  ainsi  qu'à  une  indication  de  la  France  littéraire  (s'il 
se  sert  beaucoup  de  «  l'inappréciable  »  recueil,  il  ne  s'en  sert  pas  avec  une  aveugle 
confiance),  il  oppose  le  silence  gardé  sur  les  Bigarrures  philosophiques,  par 
M.  Georges  Mancel,  dans  sa  notice  sur  le  médecin  Tiphaigne  de  la  Roche,  Gaen, 
1845,  in-8°  (t.  IV,  p.  127).  Pour  ne  pas  sortir  du  t.  IV,  en  d'autres  notes  (pp.  68- 
36i)  on  trouvera  la  preuve  que  M.  T.  a  consulté  la  Notice  sur  Chevrier,  par  M.  Gil- 
let  (Nancy,  1864,  in-8°),  la  Notice  sur  la  Beaumelle,  par  M.  Maurice  Angliviel  (Pa- 
ris, i856,  in- 12).  Il  serait  trop  long  d'énumérer  les  monographies  alléguées  dans  tous 
les  autres  volumes. 

1.  J'en  ai  rendu  compte  dans  la  Revue  critique  du  second  semestre  de  1880, 
pp.  430-434. 

2.  Pour  d'autres  citations,  nous  avons  dans  les  notes  de  M.  T.  toutes  les  lumières 
désirables.  Ainsi  (t.  IV,  p.  366)  il  n'a  pas  manqué  de  restituer  à  Diderot  l'épitaphe 
épigrammatique  à  laquelle  donna  lieu  le  désir  exprimé  par  le  comte  de  Caylus  d'a- 
voir pour  tombeau  une  urne  antique,  épigramme  souvent  attribuée  à  Marmon- 
tel  : 

Ci-gît  un  antiquaire  acariâtre  et  brusque  ; 

Oh  !  qu'il  est  bien  logé  dans  cette  cruche  étrusque. 

La  note  (t.  X,  p.  480)  sur  le  fameux  quatrain  fait  pour  l'éventail  donné  à  Marie-An- 
toinette : 

Au  milieu  des  chaleurs  extrêmes, 

Heureux  d'amuser  vos  loisirs, 
Je  saurai  près  de  vous  amener  les  Zéphyrs  ; 

Les  Amours  y  viendront  d'eux-mêmes 
est  tout  un  petit  mémoire  bien  curieux  :  a  Ce  quatrain,  également  attribué  au  comte 
dArtois  et  au  comte  de  Provence,  est  restitué  par  M.  Jules  Cousin  au  marquis 
Ph.-L.  Orry  de  Fulvy  (Revue  universelle  des  Arts,  t.  XX,  p.  i58).  Lemierre  l'a  fait 
figurer  dans  ses  propres  œuvres  dès  1810,  mais  il  se  retrouve,  avec  d'autres  madri- 
gaux, à  la  suite  d'une  édition  plusieurs  fois  réimprimée  de  la  Relation  d'un  voyage 
à  Bruxelles  et  à  Coblent^  par  Louis  XVIII  (1823,  in- 18).»  Il  ne  manque  à  cette  note 


47^  REVUE   CRITIQUE 

Je  n'ai  pas  d'autres  observations  à  présenter.  Mais  un  de  mes  amis  qui 
sait  très  bien  une  foule  de  choses,  notamment  en  ce  qui  regarde  le  xvme  siè- 
cle, M.  Gustave  Mouravit,  que  M.  T.  (t.  XII,  p.  475)  appelle,  avec  tous 
ceux  qui  le  connaissent,  «  un  chercheur  des  plus  érudits  et  des  plus  dé- 
licats »,  a  bien  voulu  me  communiquer  quelques  notes  prises  dans  une 
rapide  lecture  de  la  Correspondance  littéraire.  J'ajoute  donc  sa  petite 
moisson  à  la  mienne. 

Sur  l'abbé  Thyrel  de  Boismont,  le  prédicateur-académicien  dont  il 
est  question  aussi  bien  dans  l'abbé  Raynal  (t.  I,  p.  469)  que  dans  Grimm 
(t.  III,  pp.  87,  1^7,  etc.),  on  aurait  pu  citer  (aux  Additions  et  correc- 
tions) une  intéressante  notice  du  Bulletin  du  bibliophile  de  1 88 1 ,  p.  127 
et  p.  220.  —  La  Lettre  sur  les  aveugles  de  Diderot,  mentionnée  par 
Raynal  (t.  I,  pp.  3n,  475)  fut  de  bonne  heure  rare  et  recherchée, 
comme  toutes  les  pièces  exposées  aux  poursuites  de  la  censure.  M.  T. 
n'a-t-il  pas  connu  une  lettre  autographe  de  d'Alembert  à  Cramer,  du 
12  février  1760,  sur  la  difficulté  qu'il  y  avait  à  trouver  la  brochure  de 
Diderot? —  Le  nouvel  éditeur  de  la  Correspondance  littéraire,  en  citant 
(t.  VI,  p.  373)  le  célèbre  écrit  de  Bollioud-Mermet  sur  la  Bibliomanie, 
n'en  fait  pas  une  publication  distincte  de  l'ouvrage  du  même  auteur  sur 
la  lecture.  C'est  une  erreur.  Voici  le  titre  de  cette  dernière  production  : 
Essai  sur  la  lecture.  Amsterdam  et  Lyon,  1765,  in-8°.  —  A  propos 
des  poésies  de  Mme  d'Houdetot  (t.  XII,  p.  426),  il  aurait  fallu  rappeler 
qu'il  existe  d'autres  poésies  de  cette  femme  célèbre,  poésies  sur  lesquelles 
on  peut  voir  la  Correspondance  de  La  Harpe,  t.  II,  p.  227,  et  l'édition 
des  Mémoires  de  Mme  d'Epinay,  publiée  par  M.  P.  Boiteau  (Appen- 
dice du  tome  II).  —  Il  est  question  (t.  XIV,  pp.  58,  206)  de  MmeSaint- 
Huberty,  la  fameuse  cantatrice  qui  mit  en  si  grande  liesse  les  Marseil- 
lais, lesquels  le  lui  rendirent  bien  dans  ces  interminables  fêtes  qui  ont 
été  décrites  par  Castil-Blaze.  Comment  M.  T.  n'a-t-il  pas  cité  cet  écri- 


qu'une  référence  :  M.  T.  ne  s'est  pas  souvenu  d'un  passage  de  l'Esprit  des  autres 
dans  lequel  Edouard  Fournier  assure  (5e  édition,  1879,  p.  202)  que  Lemierre  écri- 
vit le  joli  quatrain  sur  la  lame  d'ivoire  de  l'éventail  de  Mrao  ***,  et  que  Louis  XVIII 
eut  la  faiblesse  de  se  le  laisser  donner.  —  Meister  rapporte  (t.  XI,  p.  245)  le  mot 
d'un  philosophe  :  «  Nous  avons  abattu  une  forêt  immense  de  préjugés  »  et  la  vive 
riposte  d'une  femme  du  monde  :  «  Voilà  donc  d'où  nous  viennent  tant  de  fagots  ». 
M.  T.,  réunissant  ses  informations  à  celles  de  Beuchot  et  de  Taschereau,  retrace 
ainsi  l'histoire  complète  des  opinions  exprimées  sur  le  nom  de  l'auteur  de  l'heu- 
reuse plaisanterie  :  «  Mme  du  Deffand  dit  à  Horace  Walpole,  dans  une  lettre  du 
3  avril  1768,  qu'on  lui  attribue  ce  bon  mot,  dont  elle  ne  se  souvient  pas,  mais 
qu'elle  adopte  volontiers.  La  Correspondance  secrète  (de  Métra),  t.  III,  p.  77,  et 
les  Mémoires  de  Bachaumont  (26  mai  1776)  l'attribuent  à  la  marquise  de  Fleury. 
Grimm  avait  cité  cette  repartie  comme  étant  de  Mmc  de  Buffon;  voir  t.  VIII,  p.  204.  » 
Pour  moi,  je  parierais  pour  M""  de  Fleury.  Elle  a  déjà  deux  témoignages  en  sa  fa- 
veur. Si  ma  mémoire  ne  me  trompe,  on  peut  encore  en  invoquer  un  troisième,  car 
il  me  semble  bien  avoir  lu  dans  quelque  récit  du  xvme  siècle  que  ce  fut  elle  qui  ré- 
pondit à  d'Alembert  :  «  Je  ne  suis  plus  étonnée  si  vous  nous  débitez  tant  de  fa- 
gots. » 


d'histoirk  kt  dk  utthraturk  479 

vain?  Il  est  plus  excusable  de  n'avoir  rien  dit  de  la  toute  récente  mono- 
graphie consacrée  à  Mme  Saint-Huberty  par  M.  de  Concourt.  —  A  pro- 
pos de  Campion,  directeur  général  des  fermes  à  Marseille  (t.  XIV,  p.  206), 
il  y  aurait  eu  à  citer  une  curieuse  notice  publiée  sous  un  pseudonyme 
par  M.  de  Carné,  le  gendre  de  l'heureux  possesseur  du  précieux  manus- 
crit autographe  des  poésies  dudit  Campion,  manuscrit  orné  des  dessins 
originaux  du  poète.  —  Dans  la  Notice  sur  la  bibliothèque  et  les  pa- 
piers de  Grimm  (t.  XVI,  pp.  542  et  suiv.),  quelques  anonymes  ne  sont 
pas  dévoilés.  Ainsi,  n°  53  (p.  546),  les  Réflexions  sur  la  poésie  et  la 
peinture  sont  de  l'abbé  Dubos,  sur  lequel  on  peut  voir  le  témoignage  de 
Jordan  (Voyage  littéraire,  1736,  in-12,  p.  100)  et  d'A.  Morel  [Etude 
sur  l'abbé  Dubos,  Beauvais,  1849,  in-8°).  Ainsi,  n°  123  (p.  549),  les 
Pièces  intéressantes  et  peu  connues  sont  d'Antoine  de  la  Place.  Une 
indication  (n°  83,  p.  547)  est  incomplète.  M.  T.  se  contente  de  dire  : 
œuvres  de  Rabelais,  édition  de  B.  (sic).  Le  sic  pouvait  être  avantageu- 
sement remplacé  par  le  mot  Bruxelles.  La  désignation  du  format  (in-8°) 
est  erronée.  Il  aurait  fallu  dire  in-12.  C'est  d'ailleurs  un  double  de 
l'exemplaire  qui  figure  au  n°  40  (p.  545).  Il  y  a  d'autres  doubles  dans  la 
liste  produite  par  M.  Tourneux.  Ainsi  le  n°  12  [Traité  de  musique  par 
Bemetzrieder)  se  retrouve  sous  le  n°  134  (p.  55o). 

On  voit  que  ni  mon  collaborateur  ni  moi  nous  n'avons  eu,  en  somme, 
de  bien  grosses  querelles  à  faire  à  M.  Tourneux.  Aussi  sommes-nous, 
l'un  et  l'autre,  fort  désireux  de  voir  l'éditeur  de  la  Correspondance  lit- 
téraire devenir,  à  son  retour  de  Saint-Pétersbourg,  d'où  il  va  rapporter 
toute  sorte  de  nouveaux  trésors,  l'éditeur  de  ces  Mémoires  de  Bachau- 
mont  dont  il  regrette  que  la  publication,  si  bien  commencée  par  M.  Ra- 
venel,  n'ait  pas  été  continuée  par  cet  habile  érudit.  Nul  ne  peut  nous 
dédommager  de  l'abandon  du  projet  formé  par  M.  Ravenel  mieux  que 
M.  Tourneux,  et  il  faut  que  tout  le  monde  lui  demande  instamment 
avec  nous  une  édition,  abondamment  annotée,  de  ces  Mémoires  secrets 
pour  servir  à  l'histoire  de  la  république  des  lettres,  qui  ne  sont  pas 
moins  importants  pour  la  connaissance  de  la  seconde  moitié  du  xvmc  siè- 
cle que  la  Correspondance  littéraire  elle-même. 

T.  de  L. 


CHRONIQUE 


FRANCE.  —  M.  Jules  Tardif,  chef  de  la  section  administrative  aux  Archives  na- 
tionales, est  décédé  le  3o  novembre  dernier,  à  la  suite  d'une  très  courte  maladie.  Né 
à  Coutances  en  1827,  il  sortit  de  l'Ecole  des  chartes  en  i85o,  et  entra  aux  Archives 
en  i856.  C'est  en  qualité  d'archiviste  à  la  section  historique  qu'il  publia  en  1866, 
sous  le  titre  de  Monuments  historiques,  l'inventaire  de  la  collection  connue  sous  le 
nom  de  cartons  des  rois.  M.  L.  Delisle  en  a   rendu  un  compte  très  détaillé  dans  la 


480  REVUE    CRITIQUE    D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

Revue  critique.  (1867,  art.  y3'.  J.  Tardif,  qui  était  doué  d'un  esprit  patient  et  pers- 
picace, s'était  attaché  à  des  études  variées,  ayant  pour  caractère  commun  d'offrir 
des  problèmes  difficiles  à  résoudre.  Il  s'occupa  d'abord  du  déchiffrement  des  notes  ti- 
roniennes,  et  sa  thèse  sur  ce  sujet  lui  valut,  en  i85o,  la  première  médaille  au  con- 
cours des  antiquités  nationales.  Il  passa  ensuite  à  l'interprétation  des  neumes,  et  pu- 
blia sur  ce  sujet  en  i853,  dans  la  Bibliothèque  de  YEcole  des  Chartes,  un  essai  fort 
remarqué.  L'œuvre  capitale  de  sa  vie  devait  être  une  Histoire  des  institutions  politi- 
ques et  administratives  de  la  France.  Une  première  partie  (qui  n'est  qu'un  demi  vo- 
lume de  224  pages)  de  cet  ouvrage  a  paru  l'an  dernier  (Paris,  |A.  Picard).  Elle  traite 
de  la  période  mérovingienne.  C'est  un  travail  remarquable  par  la  précision  des  idées 
et  la  concision  de  l'exposé,  non  moins  que  par  l'étendue  de  l'information.  J.  Tardif 
s'était  aussi  beaucoup  occupé  des  langues  de  l'Inde.  Nous  ne  croyons  pas  qu'il  ait  rien 
publié  sur  ce  sujet. 


ACADÉMIE   DES   INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  ier  décembre  1882. 

L'Académie  accepte  provisoirement  le  legs  de  M.  Lefèvre-Deumier  (voir  la  séance 
précédente).  L'acceptation  définitive  ne  pourra  avoir  lieu  qu'après  l'accomplissement 
des  formalités  légales. 

L'Académie  se  forme  en  comité  secret. 

A  la  reprise  de  la  séance  publique,  l'Académie  procède  au  scrutin  pour  la  dési- 
gnation de  deux  candidats  aux  fonctions  de  directeur  de  l'Ecole  française  de  Rome. 
Sont  présentés  :  en  première  ligne,  M.  Le  Blant,  membre  de  l'Académie;  en  seconde 
ligne,  M.  Homolle. 

M.  Léon  Renier  rappelle  qu'il  y  a  douze  ans,  lors  de  la  découverte  de  l'amphi- 
théâtre romain  de  la  rue  Monge,  l'Académie  se  préoccupa  de  la  conservation  de  ce 
monument,  le  plus  ancien  de  Paris,  et  que,  par  un  vote  unanime,  le  8  avril  1870, 
elle  chargea  son  secrétaire  perpétuel  d'écrire  au  préfet  de  la  Seine,  pour  le  prier  de 
prendre  les  mesures  nécessaires  afin  de  sauvegarder  les  restes  de  l'amphithéâtre.  Les 
événements  de  l'année  1870  détournèrent  l'attention  des  autorités  sur  d'autres  su- 
jets, et,  malgré  le  vœu  de  l'Académie,  auquel  s'étaient  associées  un  grand  nombre  de 
sociétés  savantes,  la  partie  de  l'amphithéâtre  qui  avait  été  découverte  fut  enfouie 
sous  les  bâtiments  élevés  par  la  compagnie  générale  des  omnibus.  Une  autre  partie, 
qui  n'a  jamais  été  mise  au  jour,  se  trouve  sous  les  jardins  d'un  immeuble  voisin. 
Aujourd  hui,  un  projet,  porté  à  la  connaissance  du  public  par  des  affiches,  est  mis 
en  avant,  pour  le  percement  d'une  rue  nouvelle,  et  ce  projet  menace  de  destruction 
cette  seconde  partie  de  l'amphithéâtre  romain.  M.  Renier  propose  à  l'Académie  de 
renouveler  son  vote  du  8  avril  1870  et  d'adresser  des  lettres  au  préfet  de  la  Seine 
et  au  conseil  municipal,  pour  demander  la  conservation  de  l'amphithéâtre  romain 
de  Paris. 

MM.  Hauréau,  Jourdain,  Maury,  de  Rozière,  Renan  et  Ad.  Régnier  échangent  di- 
verses observations.  Ces  messieurs  s'associent  unanimement  au  vœu  de  M.  Renier 
pour  la  conservation  des  restes  de  l'amphithéâtre.  Il  conviendrait  seulement,  avant 
d'agir,  d'avoir  des  renseignements  plus  précis  sur  le  projet  en  question,  qui  n'est 
qu'imparfaitement  connu  de  l'Académie. 

Sur  la  proposition.de  M.  de  Rozière,  l'Académie  délègue  les  membres  du  bureau  et 
M.  Léon  Renier  pour  prendre  des  informations  et  lui  soumettre,  s'il  y  a  lieu,  une 
proposition  à  la  prochaine  séance. 

Julien  Havet. 


Le  Propriétaire-Gérant  :  ERNEST  LEROUX. 


Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  jils,  boulevard  Saint- Laurent,  i3 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

N»  51  —  18  Décembre  —  1882 


Sommaire  »  25 1.    R.  Foerster,  Des  manuscrits  et  de  l'histoire  de  la  philologie. 

—  252.  Bouché-Leclercq,  Histoire  de  la  divination  dans  l'antiquité,  IV.  —  253. 
Châtelain,  Lexique  latin-français.  —  254.  De  Miranda,  Richard  de  Cornouailles 
et  Aix-la-Chapelle.  —  255.  Roget,  Histoire  de  Genève,  IV.  —  256.  Vaucher, 
Esquisses  d'histoire  suisse.  —  257.  Pierling,  La  mission  de  Possevino  en  Russie. 

—  258.  Alb.  Duruy,  L'instruction  publique  et  la  Révolution. —  259.  W.  Scherer, 
Histoire  de  la  littérature  allemande,  I-VI  —  260.  Ribbeck,  Ritschl,  II.  —  Chro- 
nique. —  Académie  des  Inscriptions.  —  Société  nationale  des  antiquaires  de 
de  France.  —  Société  asiatique. 


25 1. —  R.  Fœrster,  Zur  Ilandschriftcnkunde  und  Geschichte  dcr  Phi- 
lologie. (Tirage  à  part  du  Rheinisches  Muséum  XXXVII,  p.  485-495). 

Intéresse  tous  les  érudits  par  une  liste  générale  de  tous  les  catalogues 
de  livres  dressés  au  moyen- âge  et  connus  de  l'auteur.  Ajouter  à  cette 
liste  le  Catalogue  de  la  bibliothèque  de  l'abbé  Adson  de  Montier-en- 
Der  (992)  publié  par  M.  Omont  dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des 
Chartes,  t.  XLII. 


252. —  Histoire  de  la  divination  dans  l'antiquité*  par  A.  Bouché- Leclercq.. 
Tome  IV.  Paris,  Ernest  Leroux.  1882,  in-8,  406  pages, 

Nous  croyons  avoir  assez  indiqué,  dans  deux  articles  précédents  ',  la 
valeur  de  l'ouvrage  de  M.  Bouché-Leclercq,  pour  qu'il  suffise  aujour- 
d'hui de  signaler  le  quatrième  et  dernier  volume,  qui  traite  de  la  divina- 
tion italique.  L'auteur  y  étudie  successivement  les  procédés  divinatoires 
des  Etrusques,  ceux  des  Latins,  des  Sabins  et  des  Ombriens,  enfin  la 
divination  officielle  des  Romains,  dont  il  conduit  l'histoire  jusqu'à  la  fin 
du  règne  de  Théodose.  On  y  trouvera  la  même  exactitude  d'informa- 
tions que  dans  les  volumes  précédents,  le  même  art  de  grouper  et  de 
coordonner  les  témoignages,  le  même  esprit  philosophique  qui  domine 
les  faits  pour  s'élever  aux  idées  qui  les  expliquent. 

M.  B.-L.  a  rendu  service  à  la  science  des  antiquités  latines,  en  ajou- 
tant en  appendice  :  i°  les  Fastes  auguraux  —  travail  qui  n'avait  été  fait 
par  Bardt  que  pour  la  période  comprise  entre  218  et  167  ;  20  les  Fastes 
du  collège  des  duumvirs,  des  décemvirs,  des  quindécemvirs  ;  3°  une 

1.  Revue  critique,  nouvelle  série,  t.  VIII  (1879),  p.  433;  t.  XIII  (1882),  p.  3oi. 
Nouvelle  série,  XIV.  ïb 


482  REVUE   CRITIQUE 

liste  d'haruspices.    Le  volume  se  termine  par  un  Index  général,  très 
complet,  qui  rendra  les  recherches  faciles. 

Ainsi  se  trouve  heureusement  achevé  cet  ouvrage  considérable,  dont 
l'utilité  est  manifeste.  La  divination  a  tenu,  en  Grèce  et  à  Rome,  une 
si  large  place,  que  quiconque  s'applique  à  l'étude  de  l'antiquité  classique 
ne  pourra  se  dispenser  d'avoir  souvent  recours  à  M.  Bouché-Leclercq. 
Il  serait  à  souhaiter  que,  pour  toutes  les  parties  de  l'histoire  ancienne, 
on  eût  toujours  à  sa  disposition  un  guide  aussi  sûr. 

P.  D. 


253.  —  Lexique  latin-français  rédigé  conformément  au  décret  du  19  juin  1880 
à  l'usage  des  candidats  au  baccalauréat  ès-lettres,  par  Emile  Châtelain.  Paris, 
Hachette,  1882,  iv-841  p.  petit  in-8  à  deux  colonnes.  Prix  :  5  fr. 

Suivant  la  remarque  de  l'auteur,  «  il  sera  peut-être  utile  aux  profes- 
seurs et  aux  philologues  de  rencontrer  réunis,  sous  un  petit  volume, 
tous  les  mots  latins  avec  l'indication  de  la  quantité.  »  C'est  à  ce  titre 
que  je  signale  ce  lexique,  bien  imprimé  et  rédigé  avec  grand  soin.  On 
trouve  corrigées  là  de  vieilles  erreurs,  comme  Yi  long  si  souvent  attri- 
bué kpisum. 

Voici  quelques  observations  sur  des  détails.  Rien  ne  prouve  que  Yo 
soit  long  dans  rumpotinus,  ni  Yi  bref  dans  cis  (la  première  est  toujours 
longue  dans  citra,  citro).  Vilipendo  doit  avoir  la  seconde  longue  et  non 
brève;  vili est  un  ablatif  de  prix,  comme parvi  dans  parvipendo  est  un 
génitif  de  prix.  Le  second  a  d'aliuta  peut  être  marqué  bref  d'après  l'ana- 
logie à'ita.  Faleria  a  proprement  l'e  bref,  c'est  pourquoi  il  alterne  avec 
Yi  deFaliscietse  transcrit  par  s.  dans  (PaTipiov  ;  l'allongement  admis  par 
Rutilius  est  une  licence  excusable  pour  le  temps,  et  d'ailleurs  indispen- 
sable au  poète.  Cilo  et  d'autres  noms  propres  ont  Yi  long  d'après  les  in- 
scriptions. Tegillum  dans  l'exemple  de  Plaute,  Rud.  2,  7,  18,  qui'est 
unique,  a  Ye  long  comme  tegula,  et  non  bref.  Nequinont  d'Andronicus 
a  l+i  long  comme prodinunt  d'Ennius. —  Il  est  inconséquent  de  noter  la 
longueur  par  nature  danssceptrum,  alors  que  l'article  lustrum  confond 
deux  mots  dont  l'un  avait  Yu  long  et  l'autre  Vu  bref. 

Profitons  de  l'occasion  pour  remarquer  que  Yo  long  de  praestolor , 
qui  inspirait  des  scrupules  à  M.  Quicherat  dans  son  Thésaurus,  est  mis 
hors  de  doute  par  Plaute,  Epid.  2,  2,  37. 

L.  Havet. 


254.  —  Richard  von  Cornwallls  und  sein  Verhaeltniss  zur  Kroenungstadt 
Aachen,  urkundlich  dargestellt  von  Armin  de  Miranda.  Aachen,  Gremer,  s.  dat. 
(1880),  36  p.  in-8  av.  planches. 

Richard  de  Cornouailles,  frère  du  roi   Henri   III  d'Angleterre,  fut 


d'histoire  et  de  littérature  483 

élu  roi  d'Allemagne  le  i3  janvier  1257,  dans  les  environs  de  Francfort 
et  couronné,  le  17  mai  suivant,  à  Aix-la-Chapelle.  Il  octroya  de  grands 
privilèges  à  cette  ville  pour  la  récompenser  du  chaleureux  accueil  qu'elle 
lit  à  sa  souveraineté,  mal  vue  par  tant  d'autres  Etats  de  l'empire.  Quel- 
ques années  plus  tard,  en  1262,  Richard  fit  une  seconde  apparition  à 
Aix-la-Chapelle  et  y  donna  le  duché  d'Autriche  en  fief  à  Ottocar  de 
Bohême.  A  cette  occasion,  il  fit  cadeau  de  ses  insignes  royaux  à  la  cité  et 
fit  bâtir,  soit  en  entier,  soit  en  partie  du  moins,  l'Hôtel-de- Ville,  dont 
quelques  vestiges  seulement  subsistent  aujourd'hui.  Tels  sont,  scrupu- 
leusement résumés,  les  faits  historiques  au  récit  desquels  est  consacré 
le  travail  de  M.  de  Miranda.  On  voit  qu'ils  ne  prêtent  guère  matière  à 
des  discussions  scientifiques,  qui  d'ailleurs  ne  seraient  pas,  je  le  crains, 
de  la  compétence  de  l'auteur,  feuilletonniste  et  romancier  de  profession, 
comme  il  nous  le  dit  lui-même.  Les  quelques  chartes,  tirées  des  archi- 
ves de  Hamm,  Lippstadt,  Soëst  et  Dortmund,  contiennent  des  privilè- 
ges accordés  par  Richard  à  ces  villes,  mais  ne  nous  fournissent  aucun 
renseignement  nouveau  sur  le  règne  de  ce  souverain.  Elles  doivent 
montrer,  sans  doute,  que  l'auteur,  lui  aussi,  a  pénétré  dans  les  sanctuai- 
res de  la  science.  En  somme,  travail  d'amateur,  sans  aucune  utilité  scien- 
tifique. Les  photolithographies  du  Rathhaus  d'Aix-la-Chapelle  sont  bien 
faites.  * 

R. 


2bb.  —  Histoire    du    peuple    de  Genève,   depuis   1»    Reforme  jusqu'à 
l'Escalade,  par  Amédée   Roget.    Tome    IV.   Genève,  J.  Jullien,   1881,    327  p 


L'ouvrage  de  M.  Roget  avance  bien  lentement  mais  sûrement,  selon 
le  plan  tracé  par  l'auteur,  et  voici  la  cinquième  fois  déjà  que  nous  ve- 
nons le  signaler  dans  la  Revue.  Nos  lecteurs  en  connaissent  depuis 
longtemps  les  mérites.  Aussi  suffira-t-il  de  dire  ici  que  ce  sixième  vo- 
lume renferme  l'historique  des  années  qui  s'écoulèrent  depuis  la  pafte  de 
Cateau-Cambrésis,  en  1 55g,  jusqu'à  la  paix  d'Amboise,  signée  en  mars 
1 563.  C'est  donc  à  peine  une  période  de  trois  années  que  le  chroniqueur 
embrasse  dans  ce  nouveau  volume.  Je  dis  le  chroniqueur,  et  non  Y  histo- 
rien, car  il  me  semble  que  M.  R.  se  laisse  aller,  un  peu  trop  peut-être, 
influencé  comme  il  l'est  par  la  nature  de  ses  sources,  à  traiter  l'histoire 
à  la  manière  de  nos  aïeux.  A  la  fin  de  chaque  année,  il  nous  donne  les 
élections  municipales,  les  réceptions  de  bourgeois,  le  chiffre  des  naissan- 
ces et  des  décès,  etc.,  détails  intéressants  à  coup  sûr  pour  l'histoire  lo- 
cale, mais  qui  n'en  coupent  pas  moins  d'une  façon  gênante  le  fil  du 
récit.  Je  vois  un  autre  danger  à  signaler  à  l'auteur.  Il  entre,  avec  les 
pages  que  nous  annonçons,  dans  la  période  mouvementée  des  guerres  de 
religion  en  France.  Assurément  le  rôle  moral  de  Genève  a  été  considéra- 


484  REVUE    CRITIQUE 

ble  dans  l'histoire  des  huguenots,  mais  je  crois  cependant  que  M.  R. 
fera  bien  de  ne  pas  s'étendre  outre  mesure  sur  tant  d'événements  direc- 
tement étrangers  à  sa  ville  natale.  Il  les  raconte  trop  bien  pour  qu'on 
puisse  lui  reprocher  bien  vivement  de  nous  en  donner  le  récit,  mais  je 
me  permettrai  cependant  de  souhaiter  que,  pour  les  volumes  suivants, 
cette  Histoire  de  Genève  se  développe  un  peu  moins  en  dehors  de 
Genève  même,  sans  quoi  ce  ne  seront  pas  dix  ou  quinze  volumes,  ce 
seront  cinquante  volumes  au  moins  que  M.  Roget  devra  nous  fournir 
encore  pour  arriver  au  but  qu'il  s'est  posé  lui-même  et  que  nous  dési- 
rons si  vivement  le  voir  atteindre. 

R. 


2  56.  —  Esquisses  d'histoire  suisse,  par  Pierre  Vaucher.  Lausanne,  Mignot. 
in-8°,  vin  et  196  pages. 

L'histoire  des  origines  de  la  Confédération  suisse  et  des  principaux 
faits  qui  s'y  rattachent  dans  les  xive  et  xv°  siècles  a  été  renouvelée  par 
les  nombreuses  investigations  dont  elle  a  été  l'objet  de  nos  jours.  Mais 
elle  formait  encore  un  domaine  à  part  presque  exclusivemant  réservé 
aux  érudits;  les  résultats  acquis  à  la  critiqne  n'avaient  pas  pénétré  dans 
le  public.  M.  Vaucher  a  entrepris  de  les  coordonner  dans  un  récit  simple 
et  clair  et  de  leur  assigner  ainsi  leur  place  dans  les  annales  de  la  Suisse. 
La  difficulté  pour  lui  n'était  pas  de  se  rendre  maître  de  son  sujet  ; 
comme  critique,  comme  champion  dans  plus  d'une  controverse,  il  le 
possédait  entièrement.  Mais  il  voulait  concilier,  dans  la  narration,  la  ra- 
pidité et  la  concision  avec  une  exactitude  minutieuse,  car  sur  ce  point 
M.  V.  ne  se  contente  pas  facilement;  c'était  là  la  grande  difficulté,  il  l'a 
surmontée.  Ainsi  que  dans  une  esquisse  bien  faite  chaque  trait  est  né- 
cessaire, dans  son  récit  chaque  phrase  a  sa  valeur  et  ne  pourrait  être 
supprimée  sans  provoquer  une  véritable  lacune.  Nous  avons  dit  le  mot  : 
M.  V.  a  tracé  des  esquisses.  Les  origines  de  la  confédération,  la  forma- 
tion de  la  confédération  des  huit  cantons,  la  conquête  de  l'Argovie,  la 
guerre  de  Zurich,  la  guerre  de  Bourgogne,  les  troubles  qui  la  suivent 
sont  ainsi  esquissés:  aucun  trait  ne  manque  :  non-seulement  les  faits, 
mais  encore  les  causes  et  les  effets,  les  vues  générales  sont  en  substance 
dans  ces  quelques  pages.  Dans  la  seconde  partie  du  volume,  M.  V.  nous 
fait  assister  à  l'établissement  de  la  réforme  à  Zurich  et  aux  luttes  qui 
en  résultent  dans  le  sein  de  la  confédération  ;  il  termine  par  un  «  écrit 
de  lecture  courante  »  sur  Calvin  et  les  Genevois  dans  lequel  il  résume 
les  recherches  faites  depuis  vingt  ans  sur  ce  sujet. 

Enfin,  dans  un  appendice,  se  trouvent  reproduits  et  traduits  les  cinq 
ou  six  textes  du  xv°  siècle,  nécessaires  à  qui  veut  se  rendre  compte  de  la 
formation  des  traditions  nationales  suisses. 

Tout  cela  est  excellent.  L'auteur  a  écarté  tout  appareil  scientifique 


d'histoire  et  de  littérature  485 

qui  eût  pu  effrayer  le  lecteur  ;  néanmoins,  il  cite,  chemin  faisant,  les 
nombreuses  sources  auxquelles  il  a  puisé  et  ses  notes  forment  une  véri- 
table petite  bibliographie  suisse  :  a  Je  ne  me  suis  point  fait  scrupule, 
«  dit-il,  d'emprunter  çà  et  là  à  des  amis  ce  qui,  dans  leurs  écrits,  pou- 
«  vait  le  mieux  servir  mon  dessein,  ou  de  leur  redemander  ce  que  je 
«  leurs  avais  moi-même  fourni  dans  de  précédentes  occasions.  »  Ce 
n'est  pas,  en  effet,  l'originalité  des  recherches,  mais  la  nouveauté  de  la 
forme  qui  distingue  ce  volume.  Le  public  lettré,  auquel  il  s'adresse, 
trouvera  dans  ces  deux  cents  pages  les  résultats  de  la  critique  la  plus  sé- 
vère exposés  dans  un  récit  concis  et  attachant  ;  l'historien  y  aura  recours 
comme  à  un  guide  sûr  ;  enfin,  pour  beaucoup,  ce  sera  un  modèle  à  sui- 
vre qui  prouve  qu'une  saine  critique  et  une  exactitude  parfaite,  n'ex- 
cluent pas  nécessairement  un  récit  limpide  et  une  bonne  composition. 
Nous  croyons  sans  peine  M.  Vaucher  lorsqu'il  nous  dit  qu'il  a  mis  «  à 
«  rédiger  ce  petit  livre,  plus  de  temps  qu'il  n'en  aurait  fallu  pour  prépa- 
«  rer  un  gros  ouvrage  »,  mais  qu'il  ne  le  regrette  pas,  l'effort  n'aura  ja- 
mais été  que  pour  lui  ;  il  a  bien  atteint  le  but  qu'il  se  proposait. 

Edouard  Favre. 


257.  —  Antonii  Possevinl  missio  moscovltlcn,  ex  annuis  litteris  societatis 
Jesu  excerpta  et  adnotationibus  illustrata  curante  Paulo  Pierling  S.  J.  un  vol. 
in-18  de  iîo  p.  Paris,  Leroux,  1882. 

J'ai  déjà  signalé  ici  même  les  travaux  du  P.  Pierling  sur  Rome  et 
Demetrius  (le  faux  Dmitri)  et  sur  Pierre  le  Grand  et  la  Sorbonne.  Le 
savant  jésuite  qui  appartient  à  la  nationalité  russe  s'est  surtout  appli- 
qué à  étudier  l'histoire  de  son  pays  dans  ses  rapports  avec  le  catholi- 
cisme. Il  nous  annonce,  pour  paraître  prochainement,  un  ouvrage  inti- 
tulé Rome  et  Moscou  (i5^.j'i5yg).  En  attendant,  il  remet  en  lumière 
un  personnage  dont  le  nom,  un  peu  oublié  en  France,  est  fort  célèbre 
dans  les  annales  de  la  Pologne  et  de  la  Russie,  Je  père  Antoine  Posse- 
vino.  Ce  religieux  italien,  qui  vivait  au  xvieàsiècle,  fut  chargée  par  la  cour 
de  Rome  de  plusieurs  missions  importantes  en  Suède,  en  Pologne  et  en 
Russie.  Le  pape  Grégoire  XIII  espérait  pouvoir  ramener  la  Russie  à 
l'unité  catholique.  En  1282,  Ivan  le  Terrible,  en  guerre  avec  le  roi  de 
Pologne,  Batory,  sollicita  sa  médiation.  Le  pontife  s'empressa  d'envoyer 
comme  légat  Antoine  Possevino  et  l'habile  jésuite  réussit  en  effet  à  faire 
conclure  une  paix  avantageuse  aux  deux  parties.  Il  fut  reçu  avec  de 
grands  honneurs  par  Ivan,  eut  de  fréquentes  entrevues  avec  lui,  des 
controverses  avec  le  clergé  orthodoxe,  mais  ne  réussit  pas  à  ramener  la 
Moscovie  au  catholicisme.  Tous  les  documents  concernant  cette  missio 
moscovitica  n'ont  pas  encore  été  publiés.  La  relation  de  la  Missio  a  été 
imprimée  à  Rome  dans  les  Annuae  litlerae  Societatis  Jesu  et  n'a  pas 
été  réimprimée  depuis.  Elle  se  compose  de  deux  parties-,  Tune  où  est 


486  REVUE    CRITIQUE 

racontée  la  mission  politique  de  Possevino-,  l'autre  qui  fournit  quelques 
détails  sur  la  Russie  au  xvie  siècle.  Ces  détails  sont  généralement  exacts, 
mars  les  noms  propres  sont  horriblement  défigurés.  On  aurait  quelque 
peine  à  reconnaître  un  Potemkine  sous  la  forme  Pochionleim.  L'édi- 
teur a  ajouté  au  texte  un  index  explicatif  et  des  notes  qui  ajoutent  au 
prix  de  cette  curieuse  et  élégante  publication,  ainsi  qu'un  mémoire  iné- 
dit du  cardinal  de  Côme,  mémoire  non  daté,  mais  postérieur  à  la  mort 
de  Grégoire  XIII,  c'est-à-dire  à  l'année  1  585,  «t  appréciant  Possevino 
et  son  voyage  à  Moscou. 

L.  Léger. 


258.  —  L'instruction  publique    et    la    Révolution,    par  M.  Albert  DuRUY. 
1  vol.  in-8°  de  5o2  p.  Paris,  Hachette,  1882.  7  fr.  5o. 

L'histoire  de  l'instruction  publique  en  France  pendant  la  Révolution 
est  à  l'ordre  du  jour  depuis  quelques  années,  et  les  particuliers  commen- 
cent à  l'étudier  pendant  qu'une  commission  nommée  par  le  gouverne- 
ment se  dispose  à  publier  tous  les  documents  relatifs  à  l'enseignement 
primaire,  secondaire  ou  supérieur  de  1789  à  1808.  Mais  il  est  bien  dif- 
ficile de  faire  l'histoire  d'une  époque  aussi  profondément  troublée  que 
celle  de  la  Révolution  ;  les  uns  prétendent  qu'elle  a  tout  créé  en  fait 
d'éducation  nationale,  les  autres  l'accusent  de  n'avoir  accumulé  que  des 
ruines  ;  d'autres  enfin,  voulant  se  montrer  équitables,  disent,  comme 
M.  Duruy,  que  «  la  vérité,  naturellement,  tient  le  milieu  entre  ces  opi- 
nions violentes  ,  et  plus  passionnées  peut-être  que  raisonnables  ».  Mais 
ceux-là  même  sont  entraînés  par  la  passion,  et,  si  l'on  peut  adresser  un 
reproche  au  remarquable  ouvrage  de  M.  D.  c'est  précisément  que  c'est 
une  œuvre  de  parti,  ou  tout  au  moins  de  parti  pris.  M.  D.  n'a  pas  plus 
cherché  que  M.  Taine  à  se  faire  une  opinion  sur  les  hommes  et  sur  les 
choses  de  la  Révolution  ;  son  siège  était  fait  quand  il  a  commencé  à 
travailler,  et  ses  conclusions  ne  sont  que  des  prémisses  transformées. 
M.  D.  a  composé  son  livre  pour  prouver  que  l'ancien  régime  valait  en- 
core mieux  que  la  Révolution,  et  que  cette  dernière,  après  avoir  tout 
détruit  «  pour  en  arriver,  après  dix  ans  de  tâtonnements  et  d'efforts,  à  de 
si  pauvres  résultats  (p.  256)  »  a  laissé  tout  à  faire  au  génie  ciéateur 
de  Napoléon.  Aussi  l'ouvrage  de  M.  D.  a-t-il  été  et  sera-t-il  de  plus  en 
plus  discuté  avec  une  vivacité  qui  témoigne  à  tout  le  moins  de  son  im- 
portance. 

M.  D.  commence  par  montrer  en  5o  pages  ce  que  l'ancien  régime 
avait  fait;  cette  introduction  fort  intéressante  «  n'a  pas  la  prétention 
d'être  complète  (p.  2)  »  et,  en  effet,  il  y  a  là  de  quoi  faire  un  gros  livre. 
Ensuite  M.  D.,  arrivant  au  cœur  de  la  question,  fait 'trois  parts  dans 
l'œuvre  pédagogique  de  la  Révolution  :  la  part  des  destructions,  —  la 
part  des  essais  et  des  projets,  —  la  part  des  œuvres  et  des  résultats.  C'est 


d'histoire  et  de  littérature  487 

donc  bien  une  histoire  complète  de  l'instruction  publique  pendant  )a 
Révolution  française  que  M  D.  a  voulu  faire,  mais  une  pareille  histoire 
ne  pouvait  pas  se  faire  en  quelques  années.  M.  D.  s'est  trop  hâté;  il  n'a 
pas  vu  que  les  documents  à  consulter  sur  cette  importante  question  se 
comptent  par  centaines  de  mille,  et  son  ouvrage  présente  de  ce  chef  des 
lacunes  considérables,  en  même  temps  que  des  erreurs  de  fait  assez  nom- 
breuses. 

M.  D.  cherche  d'abord  à  démontrer  que  la  France  «  ne  croupissait 
pas  absolument  dans  les  ténèbres  (p.  48)  »  avant  1789  ;  la  preuve  en  est, 
dit-il  ailleurs,  que  les  hommes  de  la  Révolution  étaient  instruits.  Il  me 
semble  que  la  question  n'est  pas  bien  posée;  il  ne  s'agit  pas  de  savoir 
s'il  y  avait  ou  non,  avant  1789,  des  écoles  et  des  collèges;  tout  le 
monde  sait  qu'il  y  en  avait.  Mais  y  en  avait-il  partout,  et  pour  tout  le 
monde,  ou  simplement  pour  un  certain  nombre  de  privilégiés?  Que  fai- 
saient, pour  l'éducation  nationale,  l'Etat  et  les  municipalités?  Si  l'on 
pose  ainsi  la  question,  on  est  obligé  de  répondre,  avec  M.  de  Salvandy 
cité  par  M.  D.  (p.  6),  que  l'Etat  n'enseignait  pas.  Or  la  Révolution  a 
prétendu,  et  cela  dès  1790,  que  l'Etat  devait  enseigner,  et,  pour  substi- 
tuer l'action  de  l'Etat  à  l'initiative  plus  ou  moins  intelligente  des  con- 
grégations ou  des  particuliers  elle  a  commencé  par  faire  table  rase.  Les 
petites  écoles  étaient  nombreuses  en  1789,  dit  M.  D.  qui  le  prouve  en 
donnant  la  statistique  de  quelques  provinces.  C'est  le  procédé  de 
M.  Taine;  mais  ces  énumérations  incomplètes,  qui  frappent  l'imagina- 
tion des  gens  du  monde,  n'ont  aucune  valeur  scientifique,  et  aux  cal- 
culs optimistes  de  M.  D.  j'opposerai  les  affirmations  désolantes  des  con- 
temporains. L'abbé  Grégoire,  dans  une  circulaire  adressée  à  toutes  les 
municipalités,  demandait  entre  autres  choses  :  «  Chaque  village  est-il 
pourvu  de  maîtres  et  de  maîtresses  d'école?  »  et  voici  quelques-unes  des 
réponses  qui  lui  parvinrent  de  toutes  les  parties  de  la  France,  en  1 790  : 
Aveyron.  L'éducation  est  plus  négligée  dans  ce  département  que  par- 
tout ailleurs.  —  Languedoc.  Il  y  a  des  maîtres  et  maîtresses  d'école 
presque  partout.  —  Gers.  Il  n'y  a  peut-être  pas  une  seule  maîtresse  d'é- 
cole dans  tous  les  villages  du  département  du  Gers  ;  il  y  en  a  peu  où  il  y 
ait  des  maîtres,  et,  s'il  y  en  a,  ce  sont  toujours  les  prêtres.  —  Gironde.  Il 
n'y  a  que  les  gros  bourgs  qui  soient  pourvus  de  maîtres  d'école.  —  Lan- 
des. Un  seul  maître  d'école  dans  quelques  paroisses,  et  point  dans 
quelques  autres.  —  Puy-de-Dôme.  De  vingt  villages,  un  seul  possède 
un  maître  qui  sait  à  peine  épeler.  —  Drôme.  Les  villages  un  peu  consi- 
dérables ont  des  maîtres  d'école  depuis  la  Toussaint  jusqu'au  printemps. 
—  Saône -et-Loire.  Il  n'y  a  point  de  maîtres  d'école  dans  nos  villages, 
etc.,  etc.  •. 

Que  dire  aussi  des  statistiques  comparées  de  la  p.  25?  En  1789, 
pour  2  5  millions  d'habitants,  il  y  avait  562  collèges  et  72,000  élèves; 

1.  V.  Lettres  à  Grégoire  sur  les  patois  de  France,  Paris,  Pedone  Lauriel,  1880. 


488  RiCVUE    CKITIQUE 

aujourd'hui,  pour  38  millions  d'habitants,  nous  avons  38o  lycées  ou 
collèges  et  79,000  élèves.  Il  est  vrai,  ajoute  M.  D.,  que,  pour  être  juste,  il 
faudrait  compter  les  petits  séminaires  ;  j'ajouterai  les  grands  séminaires, 
qui  ont  en  première  année  une  classe  de  philosophie.  M.  D.  oublie 
d'ajouter  que  la  plupart  des  collèges,  dont  quelques-uns  n'avaient  pas 
douze  élèves,  étaient  des  établissements  libres,  et  que,  par  conséquent, 
pour  être  juste,  il  faudrait  mettre  en  ligne  de  compte  les  établissements 
libres  si  nombreux  de  nos  jours.  M.  D.  prétend  (p.  1 1)  que  la  majeure 
partie  des  écoles  publiques  dans  les  villes  étaient  tenues  par  les  frères 
des  écoles  chrétiennes,  ou  frères  ignorantins.  C'est  *une  erreur;  j'ai  sous 
les  yeux  un  mémoire  dressé  par  ces  frères,  en  1789,  pour  demander  à 
l'Assemblée  nationale  leur  conservation  '  ;  en  voici  les  premiers  mots  : 
«  Les  frères  des  Ecoles  chrétiennes  forment  dans  le  royaume  une  associa- 
tion d'environ  1,000  individus  répandus  en  116  maisons  (dont  5  hors 
de  France)  ».  Ils  n'avaient  à  Paris  qu'une  seule  maison,  située  rue 
Notre -Dame-des-Champs.  On  voit  que  c'est,  en  somme,  une  minorité 
infime. 

Voilà  pour  l'introduction.  Si  maintenant  nous  arrivons  à  la  première 
partie  du  livre,  les  Destructions,  M.  D.  a  cent  fois  raison  de  dire  que 
la  Révolution  est  allée  beaucoup  trop  vite,  et  qu'elle  a  eu  le  tort  de 
renverser  l'édifice  de  fond  en  comble  avant  même  de  savoir  sur  quel 
plan  elle  le  reconstruirait.  M.  Taine  l'avait  dit  avant  M.  D.  et  mille 
autres  avant  M.  Taine.  Ainsi,  dans  un  rapport  fait  au  Conseil  des  An- 
ciens, le  3o  ventôse  an  IV,  Barbé-Marbois  (un  ci-devant  suspect  de 
royalisme),  après  avoir  montré  sous  les  couleurs  les  plus  sombres  l'état 
de  l'instruction  publique,  disait  avec  l'assentiment  de  tous  ses  collègues  : 
«  Telles  furent  les  conséquences  d'une  destruction  opérée  comme  par 
«  l'explosion  d'un  volcan,  tandis  qu'il  ne  fallait  rien  épargner  pour 
«  prévenir  les  malheurs  d'une  éruption  subite  et  imprévue.  Que  dirait- 
«  on  aujourd'hui  si  l'on  eût  incendié  toutes  les  fermes,  toutes  les 
«  granges,  brisé  tous  les  instruments  aratoires,  chassé  et  dispersé  les 
«  laboureurs,  sous  prétexte  que  notre  agriculture  était  vicieuse  et 
«  routinière?...  Les  maîtres  sont  réduits  à  la  moitié,  et  peut-être  au 
«  tiers  du  nombre  ancien;  et,  de  jour  en  jour,  il  est  plus  difficile  de 
«  remplacer  ceux  qui  viennent  à  manquer.  Le  nombre  des  enfants  qui 
«  sortent  de  ces  écoles  instruits  dans  Vart  d'écrire  et  de  calculer 
«  n'est  pas  aujourd'hui  égal  à  la  moitié  de  ce  qu'il  était  autrefois...  » 
L'année  précédente,  c'est-à-dire  en  1795,  dans  un  très  curieux  Coup- 
d'œil  politique  sur  la  France,  imprimé  par  ordre  de  la  Convention, 
Joseph  Faure  disait  :  «  N'y  avait-il  pas  des  maîtres  d'école  répandus 
«  dans  nos  campagnes,  et  qui  ne  coûtaient  rien  à  l'Etat?  N'y  avait-il 
«  pas  des  universités,  des  collèges  grands  ou  petits  répandus  dans  les 
«  villes  et  les  campages  ;  il  ne  s'agissait  que  de  réformer  l'instruction 

1.  Idée  générale  de  l'Institut  des  frères  des  écoles  chrétiennes,  la  p.  in-8*. 


D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE  489 

«  et  non  de  la  détruire.  La  police  ancienne  surveillait  tout  cela  mieux 
«  que  n'a   fait  le  terrorisme;  il  atout  anéanti,  et  il  nous  à,  à  force 
«  d'atrocités,  réduits  aux  siècles  de  l'ignorance...  Il  fallait  laisser  les 
«  universités,  les  collèges  particuliers,  les  instituteurs  privés,  se  conten- 
«  ter  de  veiller  sur  leurs  livres  d'instruction,  et  attendre  un  temps  plus 
«  calme...  »  La  Constituante  et  la  Législative  n'avaient  détruit  ni  les 
écoles,  ni  leaicollèges;  M.  D.  le  reconnaît  (p.  64)  et  Y Almanach  national 
pour  1793  nous  montre  que  les  collèges  de  Paris  étaient  encore  ouverts 
à  la  fin  de  1792.  La  convention  détruisit  tout  en  août  J793,  elle  eut  le 
tort  de  faire  place  nette  ;  mais  elle  avait  à  cœur  de  réparer  cette  faute  le 
plus  tôt  possible.  La  marche  foudroyante  des  événements  ne  le  permit 
pas  ;  la  guerre  étrangère  et  l'affreuse  guerre  de  Vendée  appelèrent  aux 
armes  ceux  qui  auraient  pu  instruire  la  jeunesse  ;  il  fallut  courir  au 
plus  pressé.  Nous  nous  vantons  avec  raison  de  ce  que  nous  avons  fait 
depuis  1870  pour  la  propagation  des  lumières,  mais  qu'avons-nous  fait 
durant  Tannée  1871  ?  Or,  en  1793,  année  comparable  à  celle-là,  il  y 
avait  un  comité  d'instruction  publique  dont  l'activité  dévorante  a  été 
justement  célébrée.  Les  hommes  de  tête  et  de  cœur  qui  en  faisaient  par- 
tie, Lakanal,  Grégoire  et  quelques  autres,  travaillaient  avec  ardeur,  ils 
préparaient  en  silence  ce  décret  du  3  brumaire  an  IV  que  M.  D.  a  la 
bonne  foi  d'appeler  (p.  137)  l'œuvre  capitale  de  la  Convention  en  fait 
d'instruction  publique.   Sans  la  recrudescence  de  la  Terreur,  amenée 
par  la  politique  de  Robespierre,  les  écoles  fermées  à  la  fin  de   1793  au- 
raient pu  se  rouvrir  dès  les  premiers  jours  de  1794.  Délivrée  du  tyran  et 
de  ses  complices,  comme  n'ont  pas  cessé  de  les  appeler  des  républicains 
ardents,  la  Convention  employa  ses  dernières  séances,  non  plus  à  dé- 
truire, mais  à  réédifier,  et  M.  D.  a  raison  de  consacrer  à  ce  qu'il  appelle 
Les  œuvres  la  plus  grande  partie  de  son  travail.  Il  semble  toutefois  que 
cet  examen  des  projets  et  des  œuvres  ait  été  fait  avec  trop  de  précipita- 
tion, et  qu'il  laisse  un  peu  à  désirer  au  point  de  vue  de  la  méthode.  On 
va  sans  cesse  de  la  Convention  au  Directoire,  et  réciproquement  ;  on 
dirait  que  M.  D.  s'est  égaré  parfois  dans  ce  labyrinthe  qu'on  appelle  les 
Archives  nationales.  Il  a  trouvé  çà  et  là  quelques  documents  précieux 
dont  on  ne  saurait  trop  le  remercier;  mais  beaucoup  d'autres  lui  ont 
échappé,  surtout  parmi  les  documents   imprimés,  presque  aussi  rares 
souvent  que  des  mss.   L'appendice  qui  fait  suite  à  l'ouvrage  est  fort 
curieux  ;  il  est  trop  court,  et  je  constate  dans  le  corps  de  l'ouvrage  bien 
des  omissions.  Ainsi  M.  D.  analyse  et  critique  rapidement  les  fameux 
projets  de  Mirabeau,  de  Talleyrand,  de  Condorcet,  de  Lanthenas,  de 
Lakanal,  de   Lepelletier-Robespierre  et  de  Romme;  il  fait  trop  bon 
marché  des  autres,  et  Dieu  sait  s'il  y  en  a!  «  Qu'importe  à  la  postérité, 
«  dit-il  p.  97,  l'opinion  d'un  Raffron  ou  d'un  Couppé?  Les  inepties  de 
«  si  minces  personnages  ne  valent  pas  qu'on  les  tire  de  l'oubli  où  elles 
«  dorment.  »  Passe  pour  Raffron,  Couppé,   Duval,   Lequinio,  Wande- 
laincourt   et.  autres,   mais   Daunou,  mais    Fourcroy,    Andrieux,  Ma- 


490  REVUE    CRITIQUE 

suyer  et  vingt  autres,  fallait-il  les  envelopper  dans  le  même  dédain? 
Fallait-il  aussi  confondre  la  Convention  terrorisée  de  Robespierre  et 
la  Convention  de  1795?  M.  D.  ne  tient  pas  compte  de  la  différence  des 
temps,  et  il  en  résulte  des  confusions  regrettables. 

Mais  il  est  impossible  de  suivre  M.  D.  pas  à  pas  et  de  discuter  une  à 
une  toutes  ses  assertions  ;  ce  compte-rendu  sommaire  deviendrait  lui- 
même  un  volume.  Souvent  M.  D.  a  raison  ;  ce  qu'il  dit  de  la  stupide 
intolérance  du  Directoire,  de  ce  gouvernement  violent  et  tracassier  qui 
prenait  à  tâche  de  détruire  l'œuvre  réparatrice  de  la  Convention  finis- 
sante, me  paraît  on  ne  peut  plus  juste  '.  M.  D.  a  également  bien  vu  ce 
qu'il  y  a  eu  d'admirable  dans  la  conduite  de  nos  pères  en  1795.  On  sait 
qu'ils  rétablirent  le  culte  dans  36,ooo  paroisses,  sans  rien  demandera 
l'Etat  dont  ils  respectaient  sincèrement  les  lois  ;  ils  avaient  accepté  à  la 
même  époque,  avec  le  même  patriotisme,  la  séparation  de  l'école  et  de 
l'Etat.  Les  écoles  publiques  étaient  insuffisantes;  nos  pères  savaient 
l'Etat  obéré  à  la  suite  des  guerres  que  nous  connaissons  tous;  ils  s'im- 
posèrent de  grands  sacrifices  pour  faire  élever  leurs  enfants,  et  les  insti- 
tutions particulières,  dirigées  souvent  par  un  clergé  républicain,  eurent 
beaucoup  de  succès  2. 

M.  D.  est  sévère  pour  l'Ecole  normale  de  1795  «  qu'il  ne  faut  pas, 
dit-il,  confondre  avec  la  grande  école  de  1808.  »  Barbé-Marbois  et 
Fourcroy  étaient  plus  justes,  lors  même  qu'ils  constataient  l'insuccès  de 
cette  institution.  Après  avoir  parlé  d'un  plan  d'instruction  qui  devait 
embrasser  toutes  les  branches  des  connaissances  humaines,  Fourcroy 
disait  le  11  germinal  an  IV  :  «  Un  des  premiers  points  de  ce  plan  était 
l'établissement  d'une  école  normale,  mais  conçu,  il  faut  le  dire  ici,  avec 

d'autres  vues  que  celle  qui  ont  dirigé  son  exécution Osons  prévoir, 

ajoutait-il,  que  cette  idée  d'une  école  normale  sera  représentée  aux 
méditations  des  législateurs  et  qu'établie  sur  d'autres  bases  que  celles 
qu'on  lui  avait  données  dans  ce  premier  essai,  elle  deviendra  la  véritable 
et  seule  pépinière  des  instituteurs  des  écoles  primaires,  et  même  des  pro- 
fesseurs des  écoles  centrales.  »  Sommes-nous  si  loin  de  la  grande  école 
de  1808? 


1.  Aussi  le  18  brumaire  a-t-il  été  au  début  jngé  avec  indulgence,  même  parmi 
les  partisans  du  coup  d'état  de  fructidor.  Si  le  premier  consul  avait  maintenu  dans 
son  intégrité  la  constitution  de  l'an  VIII,.  il  serait  anjourd'hui  le  Washington  de  la 
P'rance.  On  connaît  le  mot  de  Paul  Louis  :  «  Etre  Bonaparte  et  se  faire  sire,  il 
aspire  à  descendre.  » 

2.  J'ai  sous  les  yeux  un  document  curieux  que  M.  D.  ne  paraît  pas  connaître, 
c'est  le  prospectus  du  Pensionnat-écoles  chrétiennes  de  Senones,  imprimé  en  1796 
par  l'évêque  constitutionnel  Maudru.  Ce  pensionnat,  commandité  par  de  très  riches 
industriels,  entre  autres  le  propriétaire  de  Baccarat,  était  ouvert  à  tous,  sans  distinc- 
tion de  culte,  et  la  liberté  des  opinions  religieuses  y  était  absolue.  On  y  inspirait 
aux  enfants  l'amour  de  la  République;  on  leur  enseignait  le  latin,  l'allemand,  la 
géographie,  l'histoire  et  les  sciences.  Les  exercices  militaires  et  les  leçons  de  choses 
y  tenaient  une  place  considérable.  Il  est  à  présumer  que  Napoléon  s'empressa  de 
détruire  un  pareil  établissement. 


DHI5TOJRK    KX     DR    UTTÉUATUKh  49  I 

Les  écoles  centrales  ont  beaucoup  occupé  M.  D.,  et  avec  raison;  mais 
là  encore,  suivant  le  procédé  habituel  à  M.  Taine,  M.  D.  conclut  trop 
vite  de  quelques  exemples  particuliers;  il  néglige,  ou,  pour  mieux  dire, 
il  ignore  un  certain  nombre  de  documents  qui  ne  lui  permettraient  pas 
de  conclure  comme  il  le  fait  (p.  236).  J'en  ai  sous  les  yeux  de  fort  cu- 
rieux ;  il  est  certain  que  les  écoles  centrales  ont  été  florissantes  à  Paris 
et  dans  un  assez  grand  nombre  de  départements,  surtout  dans  l'Est. 
La  preuve  qu'on  trouvait  moyen  de  s'instruire  en  1 800,  c'est  que  les 
hommes  de  la  Restauration,  ceux  qui  avaient  dix  ans  en  1795,  n'étaient 
pas  inférieurs  à  ceux  qui  les  ont  précédés  ou  suivis. 

M.  D.  commet  une  erreur  plus  grave  quand  il  accuse  la  Convention  et 
l'abbé  Grégoire  en  particulier  de  niaiserie  et  d'immoralité.  C'est  à  propos 
des  ouvrages  élémentaires,  dont  les  sujets  avaient  été  mis  au  concours, 
sur  les  indications  de  Grégoire,  le  4  pluviôse  an  II.  M.  D.  prétend  que 
l'évêque  de  Blois,  oubliant  le  vers  de  Juvénal  maxima  debetur ; . .  aurait 
proposé  de  composer  à  l'usage  des  enfants  de  huit  à  dix  ans  de  petits 
traités  d'hygiène  conjugale  (p.  107)  ;  il  ajoute  (p.  171)  que  la  Convention 
fit  imprimer  et  mit  entre  les  mains  des  enfants  des  livres  comme  celui 
de  Saucerotte  sur  la  conservation  des  enfants  pendant  la  grossesse,  etc. 
«  Voilà,  dit-il,  représentée  par  ses  produits  les  plus  authentiques  et  les 
«  plus  originaux,  la  nouvelle  pédagogie.  »  M.  D.  triomphe  trop  facile- 
ment; premièrement  le  livre  dont  il  parle  ne  fut  pas  imprimé  par  ordre 
de  la  Convention,  et  en  outre  ce  livre  de  médecin,  jugé  digne  d'une  ré- 
compense, était  destiné  aux  parents  et  aux  maîtres  ;  c'était  un  de  ces 
livres  élémentaires  qu'on  appelle  à  présent  partie  du  maître,  et  les  en- 
fants ne  devaient  pas  plus  l'avoir  entre  les  mains  qu'ils  n'ont  aujour- 
d'hui entre  les  mains  des  corrigés  d'exercices  ou  des  solutions  de  pro- 
blèmes. M.  D.  n'aurait  pas  commis  cette  erreur  s'il  avait  lu  le  rapport 
imprimé  de  Barbé-Marbois,  lu  au  conseil  des  anciens  le  3o  ventôse 
an  IV,  sous  le  Directoire;  la  commission  des  livres  élémentaires  con- 
cluait à  l'impression  de  trois  ouvrages,  et  celui  de  Saucerotte,  dont  il  est 
question  à  la  p.  20  du  rapport,  n'est  pas  du  nombre. 

Le  chapitre  vi,  consacré  aux  Fêtes  nationales,  est  bien  incomplet,  et 
d'ailleurs  c'est  un  véritable  hors-d'œuvre.  Sans  doute  les  Fêtes  natio- 
nales se  rattachaient  par  un  certain  côté  à  l'instruction  publique,  mais 
le  théâtre  aussi,  et  M.  D.  n'a  pas  cru  devoir  faire  une  histoire,  même 
très  sommaire,  du  théâtre  pendant  la  Révolution. 

Mais  cet  examen  du  livre  de  M.  D.  est  déjà  bien  long;  concluons  en 
répétant  que,  comme  ouvrage  de  recherches,  il  est  excellent.  M.  D.  a 
étudié  sérieusement  la  question  qu'il  traite  ;  mais  il  n'a  pas  tout  vu,  il 
s'en  faut  de  beaucoup,  et  sa  conclusion  n'est  pas  suffisamment  justifiée. 
M.  D.,  à  la  fin  de  son  livre,  cherche  à  être  équitable  ;  il  consent  à  plai- 
der pour  la  Révolution  les  circonstances  atténuantes.  Il  eût  été  plus 
juste  pour  ceux  qui,  au  cours  des  événements  les  plus  terribles  de  no- 
tre histoire,  ont  examiné,  pesé,  essayé,  rendu  possible  une  organisation 


492  KKVUK    CRITIQUE 

de  l'enseignement  public  en  France,  s'il  avait  évité,  suivant  le  précepte 
de  Descartes,  la  précipitation  d'une  part,  et  la  prévention  de  l'autre. 
Cela  est  d'autant  plus  évident  que  M.  Duruy  dit  lui-même,  à  la  p.  296 
de  son  livre  :  «  Quiconque  aborde  un  point  quelconque  de  la  Révolu- 
«  tion  avec  ses  tendances  personnelles  est  perdu.  » 

A.  Gazier. 


2  5g.  —  Wilhelm  Scherer.  Geechlclite  dei*  deutschen    Litteratur.  Livrai- 
sons I-VI.  Berlin,  Weidmann,  1880-1882.  464  pages.  1  mark  la  livraison. 

La  sixième  livraison  de  YHistoire  de  la  littérature  allemande  de 
M.  Wilhelm  Scherer  a  paru;  il  ne  manque  plus  que  deux  livraisons 
pour  compléter  l'ouvrage,  et  l'on  peut,  dès  maintenant,  se  faire  une 
idée  du  plan  général  et  du  but  de  l'auteur. 

L'histoire  de  M.  S.  est  un  livre  de  lecture  courante.  Elle  n'est 
point  faite  pour  les  recherches  spéciales.  C'est  un  récit  tout  uni,  qui 
s'étend  ou  se  resserre  selon  l'importance  des  sujets,  mais  qui  ne  s'inter- 
rompt jamais  pour  la  discussion.  Pas  une  note  au  bas  des  pages  ;  pas  un 
renvoi  aux  sources.  C'est  une  simplicité  d'allure  qui  n'est  pas  habituelle 
à  la  science  allemande.  Mais  il  n'est  pas  besoin  de  dife,  lorsqu'il  s'agit 
d'un  écrivain  comme  M.  S.,  que,  sous  la  forme  toute  littéraire  de 
l'ouvrage,  se  cache  une  grande  connaissance.  Les  jugements  sont  sou- 
vent neufs  et  ingénieux.  Le  style  a  de  la  vivacité,  de  l'éclat;  certaines 
pages,  surtout  dans  les  premières  livraisons,  sont  des  modèles  de  conci- 
sion élégante  et  pittoresque.  Quelquefois  le  mouvement  oratoire  entraîne 
l'écrivain  et  lui  arrache  une  louange  banale;  mais,  en  général,  sa  pensée 
se  traduit  dans  une  langue  ferme  et  mesurée.  Enfin  la  division  est  claire 
et  méthodique,  et  le  développement  littéraire  est  habilement  rapproché 
du  mouvement  politique  et  religieux  de  l'Allemagne. 

On  pardonne  aisément  à  M.  S.  certaines  dissonnances  de  détail,  qui 
ne  sont  que  l'exagération  de  ses  qualités.  Il  aimé  à  rendre  les  choses 
sensibles  par  la  comparaison,  et  ses  comparaisons  sont  parfois  forcées. 
C'est  ainsi  qu'il  appelle  les  ménestrels  du  moyen  âge  des  journalistes 
ambulants,  et  il  tient  tellement  à  cette  dénomination  qu'il  l'inscrit  en 
tête  d'un  chapitre.  «  On  peut  comparer  le  poète  du  xme  siècle,  dit-il 
(p.  60),  à  une  feuille  illustrée;  l'illustration,  c'est  sa  personne  ».  Il 
arrive  aussi  que  M.  S.,  poussé  par  le  besoin  de  généraliser,  surfait  la 
valeur  d'un  écrivain  pour  personnifier  en  lui  toute  une  époque.  Ainsi 
Wolfram  d'Eschenbach  devient  pour  lui  le  représentant  de  la  chevalerie 
poétique,  non-seulement  en  Allemagne,  mais  dans  toute  l'Europe  du 
moyen  âge.  On  s'était  accoutumé,  au  temps  de  la  critique  romantique, 
à  voir  citer  Shakespeare  et  Gœthe  à  propos  de  Wolfram  :  aujourd'hui, 
rapprocher  le  Parcival  du  Faust,  c'est  plus  qu'une  faute  de  goût.  Il  faut 
espérer  qu'un  jour  viendra  où   la  littérature  française  mieux  connue 


d'hISTOIRK    KT   DE    LITTÉRATURE  49^ 

jettera  une  lumière  décisive  sur  certains  ouvrages  que  les  Allemands 
comptent  parmi  les  «  classiques  du  moyen  âge  ». 

Le  seul  défaut  sensible  de  l'ouvrage  et  qui  gâte  le  plaisir  de  la  lecture, 
ce  sont  des  jugements  inspirés  par  un  patriotisme  trop  restreint;  et  l'on 
remarquera  qu'en  disant  ceci  nous  nous  plaçons  au  point  de  vue  alle- 
mand. Pour  M.  S.,  la  littérature  allemande  prise  dans  son  ensemble  se 
partage  en  deux  groupes  :  la  littérature  épique  et  chevaleresque  du 
xiu°  siècle,  contemporaine  de  l'empire  des  Hohenstaufen,  et  la  littéra- 
ture du  xviii0  siècle,  qui  suit  dans  sa  marche  ascendante  la  monarchie 
des  Hohenzollern.  La  première  date  surtout  des  expéditions  de  Frédéric 
Brrberousse  en  Italie;  la  seconde  fut  principalement  suscitée  par  la 
guerre  de  Sept-Ans  et  la  bataille  de  Rosbach.  Un  tel  rapprochement  peut 
se  justifier  pour  la  première  période.  Que  les  empereurs  de  la  maison  de 
Souabe,  qui  recevaient  à  leurs  cours  des  poètes  et  des  ménestrels  de  toute 
nation,  aient  puissamment  contribué  au  développement  de  la  poésie 
chevaleresque  en  Allemagne,  qui  le  nierait?  Encore  ne  faut-il  pas 
oublier,  dans  le  réveil  littéraire  du  xiir8  siècle,  la  part  qui  revient  à  la 
Bavière,  à  la  Thuringe,  aux  contrées  du  Rhin.  Mais  n'y  a-t-il  pas  une 
exagération  évidente  à  mettre  sous  le  patronage  des  Hohenzollern  une 
littérature  à  laquelle  les  Allemands  eux-mêmes  ont  souvent  reproché 
d'être  trop  cosmopolite  ? 

Dans  le  chapitre  intitulé  Les  commencements  de  la  littérature  mo- 
derne, un  rôle  important  est  déjà  attribué  au  premier  roi  de  Prusse. 
«  11  sembla  pendant  quelque  temps,  dit  M.  S.,  que  Berlin  fût  destiné  à 
être  le  centre  de  la  littérature  nouvelle  imitée  de  la  France.  »  Et  quels 
sont  les  poètes  que  Frédéric  Ier  réunissait  autour  de  lui  et  qui  faisaient 
concevoir  de  si  grandes  espérances  ?  C'étaient  «  Canitz,  Besser  et  Neu- 
kirch  »  (p.  368). 

L'œuvre  de  Frédéric  Ier  est  continuée  par  son  petit-fils.  On  connaît 
l'opinion  de  Frédéric  II  sur  la  littérature  allemande  de  son  temps  ;  mais 
on  ne  se  doutait  pas,  malgré  un  passage  célèbre  de  Goethe  dans  le 
VIIe  livre  de  Poésie  et  Vérité,  que  les  dédains  de  Frédéric  II  étaient  le 
plus  puissant  des  encouragements.  «  S'il  réunissait  autour  de  lui  des 
écrivains  français  et  s'il  se  défiait  de  la  capacité  littéraire  de  ses  compa- 
triotes, le  dépit  que  ceux-ci  en  éprouvaient  n'était  qu'un  stimulant  de 
plus  qui  les  poussait  à  rassembler  toutes  leurs  forces  pour  prouver  au 
roi  qu'il  les  jugeait  mal  »  (p.  394).  Enfin  Frédéric  II  encouragea  les 
lettres  par  son  exemple.  «  Ses  oeuvres  historiques  tiennent  un  rang 
élevé  dans  l'historiographie  de  tous  les  temps  et  de  toutes  les  nations  » 
(p.  417).  Comme  poète,  il  a  de  l'affinité  avec  Horace  (Ramier  aussi  est 
appelé  un  Horace  prussien,  p.  443).  Parmi  les  Allemands,  on  peut  le 
comparer  à  Hagedorn,  mais  il  a  plus  de  profondeur.  Après  l'avoir  fait 
grand  poète  et  grand  historien,  M.  S.  est  près  de  faire  de  lui  un  grand 
philosophe,  <a  également  distingué  dans  la  contemplation  et  dans  l'ac- 
tion ».  Il  remarque  même  que  sa  philosophie  n'était  pas,  comme  on  se 


494  KEVUE    CRITIQUE 

l'imagine,  l'épicurisme  mondain  du  xvme  siècle,  mais  qu'au  fond  il 
était  stoïcien.  Bref,  «  les  Allemands  eurent  en  lui  un  classique,  mais, 
hélas,  ajoute  mélancoliquement  M.  S.,  un  classique  en  langue  fran- 
çaise! »  (pp.  417-418). 

Tout  ce  qui  tient  de  près  ou  de  loin  à  Frédéric  II  et  à  la  Prusse  est 
arbitrairement  grandi.  Tandis  que  les  Chants  d'un  grenadier  ramènent 
la  poésie  lyrique  au  ton  populaire,  «  un  littérateur  de  sixième  ou  de 
dixième  rang,  mais  né  Prussien.  »  fonda  le  roman  allemand  (p.  45o). 
C'est  Hermès,  à  qui  est  attribué  ici  l'un  des  mérites  les  moins  contesta- 
bles de  Wieland.  Mais  pourquoi  aussi  Wieland  n'est-il  pas  né  Prussien! 

Lessing  lui-même  ne  reçoit  sa  vraie  direction  que  de  son  séjour  à 
Berlin.  Lessing  n*est  qu'un  Frédéric  II  littéraire;  jamais  écrivain  n'a 
reproduit  comme  lui  l'esprit  du  grand  roi.  «  Lessing  demandait  à  l'his- 
torien de  raconter  surtout  les  événements  de  son  temps  :  Frédéric  a 
exécuté  ce  programme.  Lessing  a  exercé  le  haut  commandement  dans  la 
littérature,  comme  Frédéric  II  dans  la  guerre  et  dans  la  paix.  Lessing  a 
combattu  pour  la  cause  nationale,  aussi  bien  que  Frédéric  ;  il  a  livré, 
lui  aussi,  sa  bataille  de  Rosbach  contre  la  France;  il  a  fait,  lui  aussi,  un 
Anti-Machiavel  contre  les  mauvais  princes.  Jamais  deux  hommes  n'ont 
été  aussi  bien  faits  l'un  pour  l'autre  »  (p.  455).  Et  si  Frédéric  II  n'a  rien 
fait  pour  fixer  Lessing  à  Berlin,  c'est  qu'il  se  souvenait,  dit  M.  S.,  des 
méchants  propos  de  Voltaire.  Il  était  donc  bien  accessible  à  la  médi- 
sance, tout  stoïcien  qu'il  était?  Nous  ne  savons  ce  que  les  Prussiens  de 
maintenant  penseront  d'une  telle  façon  d'arranger  l'histoire  littéraire, 
mais  il  est  probable  que  Frédéric  II,  même  en  l'absence  de  son  ami 
Voltaire,  en  aurait  un  peu  ri. 

Voilà  donc  la  littérature  allemande  prussianisée,  dans  un  livre  où  il 
y  a  du  savoir  et  du  talent,  et  qui  sera  beaucoup  lu.  Récemment  déjà, 
un  disciple  de  M.  Scherer,  M.  Otto  Brahm,  nous  prouvait  dans  un 
opuscule  que  Gœthe  était  beaucoup  redevable  de  sa  gloire  à  Berlin, 
quoique  la  grande  ville  ait  attendu  «  jusqu'en  1790»  pour  le  goûter. 
Les  Allemands  nous  avaient  enseigné  jusqu'ici  que  la  Prusse  n'avait 
joué  qu'un  rôle  fort  effacé  dans  le  développement  de  leur  littérature  :  il 
faudra  désormais,  si  nous  voulons  les  en  croire,  réformer  tous  nos 
jugements.  En  tout  cas,  s'il  faut  absolument  qu'une  littérature  ait  une 
teinture  politique,  il  se  trouvera  des  publicistes  d'ordre  inférieur  qui  se 
chargeront  de  la  lui  donner;  mais  nous  aimerions  mieux  voir  la  science 
garder  sa  sereine  impartialité  et  se  tenir  à  la  hauteur  qui  lui  convient. 

A.  Bossert. 


260.  —  Friedrich  wlllielm  Ritschl.  Ein  Beitrag  zur  Geschichte  der  Philo- 
logie von  Otto  Ribbeck.  Zweiter  Band,  mit  einem  Bildniss  Ritschls.  Leipzig, 
Teubner,  1881.  x-5gt  p.  in-8. 

Graux  a  rendu  compte  dans  la  Revue  critique (1881,  I,  p.  66  ss.)  du 


O'HISTOIRK    El     DK    LITTÉRATURE  4g5 

premier  volume  de  cet  ouvrage.  Le  second  et  dernier  volume  fait  con- 
naître la  vie  de  Ritschl  depuis  1839  jusqu'à  sa  mort.  Il  est  divisé  en 
trois  parties  :  Bonn,  première  période,  1 839-1 848.  Bonn,  seconde 
période,  1848-1865.  Leipzig,  1865-1876.  Il  contient  cent  pages  de  piè- 
ces justificatives  et  un  index  alphabétique  des  deux  volumes. 


CHRONIQUE 


FRANCE.  —  L'Ecole  française  d'Athènes  qui  a  perdu,  il  y  trois  mois,  M.  Bilco, 
vient  d'être  de  nouveau  cruellement  frappée.  M.  Veyries  vient  de  mourir  à  Smyrne 
des  suites  d'une  fièvre  typhoïde.  Sorti  de  l'Ecole  Normale  il  y  a  un  ans,  ses  pre- 
miers travaux  donnaient  les  plus  belles  promesses  d'avenir  et  sa  mort  sera  vivement 
sentie  par  tous  ceux  qui  l'ont  connu.  —  On  s'est  ému  en  voyant  deux  jeunes  sa- 
vants enlevés  coup  sur  coup  à  leur  famille  et  à  la  science  et  on  s'est  demandé  s'il 
n'y  aurait  pas  quelque  chose  à  réformer  dans  le  système  qui  fait  exécuter  en  plein 
été  des  voyages  et  des  fouilles  dans  des  pays  souvent  malsains  par  des  jeunes  gens  à 
peine  acclimatés.  Quelques  personnes  ont  surtout  demandé  que  les  élèves  de  l'Ecole 
d'Athènes  fussent  autorisés  à  revenir  passer  un  mois  en  France  chaque  année.  Il  ne 
nous  semble  pas  que  ce  soit  sur  ce  point  que  la  réforme  doive  porter.  La  vraie  cause 
de  la  mauvaise  distribution  du  travail  pour  les  élèves  de  l'Ecole  d'Athènes  ne  vient- 
elle  pas  plutôt  du  règlement  qui  les  oblige  à  envoyer,  dès  la  première  année,  un  mé- 
moire à  l'Institut  ?  Ils  y  travaillent  à  Athènes  pendant  l'hiver  —  et  ils  ne  sont  libres 
pour  entreprendre  des  voyages  qu'en  mai  ou  juin,  quand  la  saison  devient  plus  dange- 
reuse. Ne  vaudrait-il  pas  bien  mieux  que  les  voyages  se  fissent  en  hiver,  la  rédaction 
des  mémoires  en  été?  A  quoi  bon  demander  un  mémoire  chaque  année  quand  le 
Bulletin  de  Correspondance  Hellénique  permet  aux  élèves  de  donner  immédiatement 
la  preuve  qu'ils  travaillent?  Sont-ils  d'ailleurs  capables,  dès  la  première  année, 
d'exécuter  un  travail  où  ils  donnent  leur  mesure?  Au  reste,  la  plus  grande  partie  du 
premier  hiver  se  passe  pour  eux  à  acquérir  les  connaissances  nécessaires  pour  tra- 
vailler avec  fruit.  Ce  travail  préparatoire  se  ferait  bien  plus  utilement  à  Paris  qu'à 
Athènes.  Nous  voudrions  que  les  élèves  de  l'Ecole  Normale  qui  doivent  se  rendre 
à  Athènes  commençassent  par  travailler  un  an  à  Paris.  Ils  iraient  au  bout  d'un  an  en 
Grèce,  pourraient  entreprendre  immédiatement  des  voyages,  et  ne  seraient  tenus  de 
fournir  un  mémoire  qu'au  commencement  de  l'hiver  suivant. 

—  Les  journaux  ont  annoncé  la  création  de  l'Ecole  du  Louvre  (cour  Lefuel,  an- 
cienne cour  Caulairtcourt);  les  professeurs  de  l'Ecole  sont  MM.  Alex.  Bertrand, 
Pierret,  Révillout  et  Ledrain.  M.  Alex.  Bertrand,  membre  de  l'Institut,  conser- 
vateur du  Musée  de  Saint-Germain,  traite  de  l'archéologie  nationale  depuis  les  temps 
les  plus  reculés  jusqu'à  la  mort  de  Clovis  (cours  d'archéologie  nationale);  M.  Pierret, 
conservateur  du  Musée  égyptien,  étudie  les  monuments  de  l'ancien  empire  (cours 
d'archéologie  égyptienne)  ;  M.  Révillout,  conservateur  adjoint  du  Musée  adjoint,  étu- 
die les  documents  démotiques  du  Louvre  et  en  dresse  le  syllabaire  (cours  de  langue 
démotique),  il  étudie  également  le  droit  et  l'économie  politique  d'après  les  papyrus 
du  Louvre  (cours  de  droit  égyptien);  M.  Ledrain,  attaché  à  la  conservation  des  anti- 
quités orientales,  expose  les  éléments  des   grammaires   hébraïque  et  phénicienne 


496  REVUE    CRITIQUE 

(cours  d'épigraphie  sémitique),  et  explique  les  inscriptions  cunéiformes  de  l'époque  des 
Achéménides  (cours  d'archéologie  assyrienne);  M.  Ravaisson,  conservateur  des  anti- 
quités grecques  et  romaines,  doit  faire  aussi  des  conférences  sur  l'art  antique.  —  Bien 
que  nous  soyons  peu  favorables  en  principe  à  toutes  les  créations  d'Ecoles  spéciales 
qui  nous  éloignent  du  but  auquel  nous  tendons,  la  réunion  de  tous  les  cours  d'en- 
seignement supérieur  dans  une  grande  Université,  nous  applaudissons  toutes  les 
fois  que  nous  voyons  offrir  à  la  jeunesse  des  moyens  nouveaux  d'instruction.  Mais 
dans  un  pays  qui  est  aussi  loin  que  le  nôtre  d'être  organisé  comme  il  le  faudrait  au 
point  de  vue  de  l'enseignement  supérieur,  il  importe  de  ne  disperser  ni  les  forces  in- 
tellectuelles ni  les  ressources  financières.  Nous  ne  nous  rendons  pas  exactement 
compte  du  but  auquel  répond  la  nouvelle  Ecole  du  Louvre.  Nous  comprendrions  que 
les  conservateurs  et  attachés  du  Louvre  fussent  chargés,  moyennant  une  indemnité, 
de  faire  régulièrement,  sur  les  monuments  même  confiés  à  leur  garde,  des  confé- 
rences pratiques  d'archéologie  et  d'histoire  de  l'art  s'adressant  à  la  fois  aux  sa- 
vants et  aux  artistes;  mais  on  se  demande  s'il  était  urgent  de  créer  des  cours  théo- 
riques de  linguistique,  d'assyriologie,d'égyptologie  ou  d'hébreu  qui  sont  déjà  professés 
ailleurs,  au  Collège  de  France  et  à  l'Ecole  des  Hautes  Etudes.  Le  cours  de  M.  Ber- 
trand sera  très  utile  sans  doute;  mais  ne  serait-il  pas  mieux  placé  au  Collège  de 
Erance  qu*au  Louvre ?.  C'est  l'archéologie  nationale  après  Clovis  qui  devrait  figurer 
surtout  à  l'Ecole  du  Louvre.  Le  cours  de  M.  Ravaisson  rentre  mieux  dans  l'ensei- 
gnement qui  pourrait  être  professé  spécialement  au  Louvre,  mais  il  est  remis  à  une 
époque  indéterminée.  Enfin,  nous  ne  voyons  pas  sans  inquiétude  le  budget  du 
Louvre  chargé  de  dépenses  dont  l'urgence  ne  nous  paraît  pas  démontrée,  alors  que 
nos  musées  nationaux  sont  constamment  battus,  faute  d'argent,  dans  les  enchères 
internationales;  alors  que  les  travaux  les  plus  pressants,  catalogues,  calcographie, 
missions,  sont  entravés,  faute  d'argent.  On  nous  dit  que  les  cours  nouveaux  sont  plus 
richement  dotés  que  la  plupart  des  cours  d'enseignement  supérieur.  Nous  en  som- 
mes très  heureux,  et  nous  espérons  que  l'exemple  de  Tadministration  des  Beaux- 
Arts,  piquera  d'émulation  celle  de  l'Instruction  publique;  mais,  si  cette  dépense 
était  faite  sur  les  fonds  déjà  insuffisants  du  Louvre,  nous  la  verrions  avec  regret; 
si  elle  doit  être  couverte  par  une  augmentation  du  budget  des  Beaux-Arts,  nous  pen- 
serions encore  qu'il  y  avait  des  dépenses  plus  urgentes,  des  augmentations  de  crédit 
pour  nos  Musées  plus  nécessaires.  Quoi  qu'il  en  soit,  nous  souhaitons  le  succès  des 
nouveaux  cours  ;  ils  peuvent  créer  une  salutaire  émulation,  et  ils  ont  été  inspirés  par 
une  conception  élevée  des  connaissances  que  doit  avoir  et  des  services  que  doit  ren- 
dre le  personnel  de  nos  musées.  Un  jour  peut-être  viendra  où  l'on  réunira,  pour  le 
plus  grand  bien  de  la  science,  dans  une  grande  université,  les  enseignements  qu'on 
disperse  aujourd'hui  aux  quatre  coins  de  Paris. 

—  M.  l'abbé  S.  A.  Cuoq,  prêtre  de  Saint-Sulpice,  a  publié  un  Lexique  delà  lan- 
gue iroquoise  (avec  notes  et  appendices.  Montréal,  Chapteau  et  fils.  In-120,  2i5  p.) 
Ce  Lexique  comprend  quatre  parties  ;  la  première  est  consacrée  aux  racines  de  la 
langue  et  la  seconde,  aux  dérivés  et  composés  ;  la  troisième  renferme  des  notes  sup- 
plémentaires sur  les  termes  d'origine  obscure;  et  la  quatrième,  des  appendices  trai- 
tant de  divers  points  d'histoire. 

—  En  1601  Philippe  III  d'Espagne  dirigea  contre  Alger  une  flotte  de  70  galères 
et  une  armée  de  plus  de  10,000  hommes  sous  le  commandement  du  prince  Andrettino 
Doria.  Mais  l'expédition  était  mal  conçue.  Le  premier  instigateur  du  projet,  un  capi- 
taine français,  nommé  Roux,  avait  proposé  un  plan  qui  pouvait  réussir  :  cinq  cents 
hommes  résolus,  déguisés  en  matelots  de  vaisseau  marchand,  débarquaient  un  soir 
dans  le  port  d'Alger,  à  la  saison  où  la  ville  était  sans  défense  ;  ils  égorgeaient  le 


D  HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE  497 

poste  de  la  marine,  pétardaient  la  porte  et  se  jetaient  dans  la  ville  en  appelant  aux 
armes  les  20,000  esclaves  chrétiens  qui  s'y  trouvaient.  Mais  Doria  modifia  le  plan 
de  Roux;  au  lieu  de  confier  au  capitaine  français  les  cinq  cents  hommes  qu'il  de- 
mandait et  d'attendre  aux  Baléares  avec  toutes  ses  forces  le  succès  du  mouvement, 
il  voulut  appuyer  la  surprise  par  une  flotte  et  une  armée.  Il  arriva  naturellement 
que  la  concentration  de  ses  troupes  entraîna  des  retards,  que  cette  armada  prit  le 
mer  au  su  et  au  vu  de  tout  le  monde,  que  par  conséquent  la  surprise  fut  manquée 
et  se  transforma  en  une  attaque  régulière,  que  l'ennemi  prévenu  empêcha  même 
l'entreprise  :  on  n'avait  embarqué  qu'un  mois  de  vivres;  il  fallut  revenir  sur  ses  pas 
et  les  dépenses  énormes  qu'avait  coûtées  l'expédition  ne  servirent  à  rien.  On  ne 
connaît  guère  cette  malheureuse  tentative  de  l'Espagne  pour  prendre  Alger;  de  Thou 
est  chez  nous  le  seul  qui  en  dise  quelques  mots  (Histoire  universelle,  tome  XVII, 
p.  627),  et  on  lit  dans  les  lettres  de  Guillaume  du  Vair,  premier  président  du  par- 
lement de  Provence,  que  Roux,  d'ailleurs  écarté  tout  d'abord  par  le  Génois  Doria, 
fut,  à  son  retour  en  France,  traité  comme  suspect  et  jeté  en  prison.  Le  seul  docu- 
ment qui  raconte  avec  grand  détail  cette  expédition  est  une  lettre  de  l'historien  gé- 
nois Ieronymo  Franchi  de  Conestaggio,  datée  de  Gênes  le  5  novembre  1661  et 
adressée  à  «  Nicolo  Petroccino,  proveditor  di  Casa  d'India  ».  Cette  lettre,  imprimée 
à  Gênes,  chez  Gioseppe  Pavoni,  fut  réimprimée  à  Venise  chez  Ciotti,  à  l'enseigne 
de  l'Aurore  en  1602.  Elle  se  divise  en  deux  parties,  dont  la  première  renferme  une 
histoire  succincte  de  la  ville  d'Alger,  et  la  seconde,  l'historique  de  l'expédition  ;  elle 
semble  conçue  dans  un  esprit  favorable  à  Doria  et  tente  de  le  justifier  des  accusa- 
sations  dont  il  fut  l'objet.  Cette  lettre  curieuse,  jusqu'ici  non  traduite  en  français  et, 
à  ce  qu'il  paraît,  inconnue  encore,  vient  d'être  traduite  par  M.  H.  de  Grammont 
(Relation  des  préparatifs  faits  pour  surprendre  Alger,  par  Ieronimo  Conestaggio. 
Alger,  Jourdan.  In-8°,  28  p.).  M.  de  Grammont  a  annoté  ce  curieux  document;  ce 
commentaire  était  tout  à  fait  nécessaire,  surtout  dans  la  première  partie  de  la  lettre 
de  Conestaggio,  où  il  y  a  beaucoup  d'erreurs  sur  la  fondation  de  la  régence.  Tel 
qu'il  est,  ce  document  mérite  d'éveiller  l'attention  de  tous  ceux  qui  s'intéressent  à 
l'histoire  de  l'Algérie. 

—  On  ne  lira  pas  sans  intérêt  lesEtudes  de  pédagogie  morale  que  vient  de  publier 
M.  E.  Labbé,  professeur  de  sixième  au  lycée  Saint-Louis.  (Paul  Dupont.  In-8°, 
102  p.).  L'auteur  y  traite  surtout  des  mœurs  universitaires  et  des  institutions  péda- 
gogiques; il  y  exprime  avec  chaleur  et  conviction  un  grand  nombre  de  vues  utiles 
et  judicieuses;  on  sent  qu'il  aime  ses  élèves  et  leur  consacre  avec  joie  toutes  ses 
forces  (p.  36);  tâchons,  dit-il  dans  sa  conclusion,  autant  que  nous  le  pourrons,  de 
faire  sortir  de  notre  expérience,  comme  je  l'ai  essayé  du  fond  de  ma  petite  classe,  la 
moralité  utile  à  notre  pays;  on  peut  se  tromper,  mais  on  ne  s'égare  pas  loin  quand 
on  y  met  toute  sa  conscience  et  l'on  a  la  chance  au  moins  de  faire  un  pas  vers  le 
mieux. 

—  La  librairie  Hachette  a  publié  un  deuxième  Supplément  à  la  5e  édition  du 
Dictionnaire  universel  des  contemporains  de  Vapereau  ;  supplément  qui  rectifie, 
complète  et  remplace  le  précédent.  Il  porte  la  date  du  Ier  mars  1882  et  renferme 
54  pages.  Motivé  par  les  élections  législatives  des  21  août  et  4  septembre  1881  et 
par  les  élections  sénatoriales  du  8  janvier  1882,  il  a  pour  objet  spécial  de  mettre  le 
dictionnaire  au  courant  du  renouvellement  du  Parlement  français;  les  noms  nou- 
veaux sont  marqués  d'un  astérisque.  Accessoirement,  ce  Supplément  contient  la 
nécrologie  générale  depuis  la  publication  de  l'édition  dernière  ;  diverses  notices, 
françaises  ou  étrangères,  d'après  des  renseignements  tardivement  obtenus;  enfin  la 
rectification  de  quelques  erreurs. 


498  REVUE   CRITIQUE 

—  M.  Maspero,  de  retour  à  Boulaq,  écrit  qu'il  ne  manque  pas  au  musée  un  seul 
objet.  Les  bijoux  avaient  été  tirés  de  leur  cachette  et  remis  en  place  deux  ou  trois 
jours  avant  son  arrivée.  Le  Catalogue  sera  terminé  au  mois  de  janvier  prochain  et 
imprimé  en  février. 

—  M.  -Grauck  met  la  dernière  main  au  monument  de  l'amiral  Coligny  qui  doit 
être  placé  derrière  l'Oratoire  de  la  rue  de  Rivoli,  près  du  Louvre,  dans  la  partie 
entourée  de  grilles;  Coligny  est  représenté  en  grand  costume  d'amiral  ;  sur  les  côtés 
sont  placées  des  figures  allégoriques. 

—  Une  traduction  française  des  Principles  of  comparative  philology  de  M.  Sayce 
paraîtra  bientôt;  l'auteur  est  M.  E.  Iow. 

—  V Academy  a  donné,  dans  un  de  ses  plus  récents  numéros,  la  liste  des  cours 
professés  à  l'Ecole  des  langues  orientales  vivantes  ;  elle  ajoute  cette  réflexion  :  «  les 
intérêts  de  l'Angleterre  en  Orient  ne  sont  certainement  pas  moindres  que  ceux  de 
la  France  ;  mais  qu'avons-nous  à  opposer  à  cette  institution?  » 

ALLEMAGNE.  —  Après  sa  grande  publication  d'ensemble  sur  la  guerre  de 
1870,  l'état-major  allemand  a  décidé  de  faire  paraître  une  foule  de  monographies 
détaillées  qui  traiteront  avec  plus  de  détail  des  événements  isolés  [Kriegsgeschichtli- 
che  Ein^elschriften)  et  seront  publiées  à  des  intervalles  indéterminés  par  la  librairie 
militaire  de  E.  S.  Mittler  et  fils,  à  Berlin.  Parmi  les  travaux  qui  sont  sous  presse, 
nous  signalerons  les  suivants,  dont  nous  traduisons  les  titres  :  Le  détachement 
Boltenstern  dans  la  vallée  de  la  Loire  aux  26  et  27  décembre  1870.  —  La  surprise 
de  Fontenoy  du  22  janvier  187 1 .  —  Marche  de  la  sixième  division  de  cavalerie  en 
Sologne  du  6  au  i5  décembre  1870.  —  L'artillerie  au  combat  de  Loigny-Poupry. 

—  De  i 'influence  que  la  forteresse  de  Langres  a  exercée  durant  la  guerre  de  1870. 

—  Ces  monographies  n'auront  pas  seulement  pour  sujet  les  opérations  militaires  de 
la  guerre  franco-allemande  d'il  y  a  douze  ans  ;  elles  pourront  traiter  des  mouve- 
ments et  des  combats  des  guerres  antérieures  ;  c'est  ainsi  que  la  librairie  Mittler 
annonce  encore  les  études  suivantes  :  Les  mouvements  des  troupes  prussiennes  en 
180  5.—  Journal  du  major  de  Wienskowski  du  Ie'  bataillon  de  la  garde  pendant  les 
préparatifs  de  la  guerre  de  i8o5.  —  Détails  sur  la  Prusse  et  sa  grande  catastrophe 
(de  1806;  publication  importante  d'un  manuscrit  inédit  du  général  de  Clausewitz). 

—  La  campagne  de  Bavière  en  180 g.  —  Les  régiments  prussiens  étaient-ils  désignés 
par  des  numéros  au  temps  de  la  guerre  de  Sept  Ans  ?  —  Biographie  du  général  de 
Fink.  L'état-major  général  fait  appel  aux  officiers  de  l'armée  allemande  et  leur 
promet  d'accueillir  dans  cette  collection  les  études  où  «  ils  auront  mis  leurs  souve- 
nirs de  guerre,  leurs  considérations  critiques  ou  leurs  recherches  sur  les  sources  de 
l'histoire  militaire  ».  Pour  ce  qui  concerne  les  guerres  antérieures  à  1870,  il  rappelle 
que  ses  archives  renferment  un  grand  nombre  de  documents  dont  la  publication 
«  ouvrira  de  nouvelles  vues  sur  la  guerre  et  provoquera  un  jugement  plus  juste, 
plus  profond  des  événements  et  des  personnes  qui  y  ont  pris  part.»  Les  officiers  qui 
traiteront  de  la  guerre  de  1870,  devront  «  donner  surtout  des  renseignements  sur  les 
questions  les  plus  importantes  relatives  au  maniement  des  troupes,  sur  l'usage  et 
les  services  des  différentes  armes,  sur  la  composition,  l'équipement ,  la  nourriture 
des  armées,  etc.,  etc.  ». 

—  En  octobre  i883  commencera  l'impression  d'une  édition  critique  de  toutes  les 
œuvres  qui  portent  le  nom  de  Notker  ;  l'éditeur  est  M.  Johann  Kelle,  professeur  à 
Prague.  Les  deux  premiers  volumes  renferment  les  textes  avec  indication  des  sour- 
ces; le  troisième  volume,  un  glossaire;  le  quatrième,  une  grammaire,  des  recherches 
sur  l'auteur,  etc. 

—  M.  Otto  Brahm  travaille  à  une  monographie  sur  Henri  de  Kleist. 


d'histoire  et  de  littérature  499 

ACADÉMIE   DES    INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  8  décembre  1882. 

L'Académie  procède  à  l'examen  de  la  liste  de  ses  correspondants,  afin  de  constater 
les  vacances  qui  se  sont  produites  depuis  un  an.  Il  résulte  de  cet  examen  qu'il  va 
lieu  de  pourvoir  au  remplacement  de  quatre  correspondants,  savoir  :  MM.  Henri  Weil 
et  Albert  Dumont,  Français,  élus  membres  ordinaires  de  l'Académie,  et  MM.  Cha- 
bas,  Français,  et  Muir,  étranger,  décédés.  Deux  commissions  sont  formées  pour 
présenter  des  candidats",  l'une  aux  trois  places  de  correspondants  français,  l'autre  à 
la  place  de  correspondant  étranger.  Sont  élus  membres  de  la  première  MM.  Renan, 
Delisle,  Georges  Perrot  et  Gaston  Paris,  de  la  seconde  MM.  Adolphe  Régnier,  Bréal, 
Barbier  de  Meynard  et  Schefer. 

M.  Foucart  annonce  un  nouveau  malheur  qui  vient  de  frapper  l'Ecole  française 
d'Athènes.  M.  Alphonse  Veyries,  membre  de  première  année  de  l'Ecole,  est  mort  à 
Smyrne  le  mardi  5  décembre.  Ses  camarades  et  tous  ceux  qui  l'ont  connu  sentent 
les  plus  vifs  regrets  de  cette  perte,  et  les  premiers  travaux  qu'il  avait  eu  le  temps  de 
produire  donnent  lieu  de  juger  que  la  science  aussi  perd  beaucoup  en  lui. 

L'Académie,  après  délibération  en  comité  secret,  décide  qu'une  lettre  sera  adressée 
en  son  nom  à  M.  le  préfet  de  la  Seine  pour  exprimer  le  vœu  que  ce  qui  reste  de 
l'amphithéâtre  romain  de  la  rue  Monge  ne  soit  pas  détruit. 

M.  Ernest  Desjardins  communique  les  principaux  résultats  de  l'examen  qui  a  été 
fait,  par  M.  Charles  Tissot,  des  copies  d'inscriptions  envoyées  par  M.  le  lieutenant- 
colonel  de  Puymorin,  président  de  la  commission  archéologique  du  Kef  (Tunisie). 
L'envoi  de  M.  de  Puymorin  comprenait  à  la  fois  les  monuments  recueillis  par  lui  et 
par  plusieurs  officiers  placés  sous  ses  ordres,  notamment  par  MM.  Balthazar,  Dacri 
et  Robora.  Tous  ces  messieurs  ont  relevé  des  inscriptions  intéressantes.  M.  Desjar- 
dins signale  particulièrement  les  découvertes  de  M.  Balthazar,  médecin  aide-major, 
âui  a  exploré  les  ruines  de  Henschir-ed-Douamis,  à  20  kil.  environ  au  nord  de 
ordj-Messaoudi.  En  ce  lieu  a  été  trouvé  un  temple,  avec  une  inscription  qui 
prouve  qu'il  était  dédié  à  Esculape.  Quatre  autres  inscriptions,  relevées  par  M.  Bal- 
thazar, établissent  l'identité  de  Henschir-ed-Douamis  avec  l'une  des  deux  villes  men- 
tionnées par  Pline  (V,  4)  sous  le  nom  d'Oppida  Ulcitana  duo,  celle  qu'il  distingue  par 
le  surnom  de  Majus.  Ces  inscriptions  donnent  le  même  nom,  sous  une  forme  un 
peu  différente.  La  plus  ancienne  est  du  temps  d'Alexandre  Sévère;  elle  est  ainsi 
conçue  : 

M-  ATTIO 

CORNELIANO 

PRAEFECTOPRAE 

TORIEMINENTISSIMO 

VI  R  O  C I  V I E  T  PAT  RONO 

OBI  NCOM  PARA  BILEM 

E  RGAPAT  R I AM  E  TCIVES 

A  M  O  R  E  M  R  E  S  PVB  L  ICA 

COLON  I A  E  M  ARI  AN  AEAV 

GVSTAEALEXANDRIANAE 

VCH ITANORVM  MAIORVM 
La  seconde,  qui  est  du  règne  d'Aurélien,  nomme  également  la  res  publica  coloniae 
Marianae  Augustae  Alexandrinae  Uchit.  Majorum.  La  troisième,  du  temps  de 
Constantin,  donne  ce  nom  en  abrégé  :  R.  P.  col.  V.  M.  Enfin,  la  dernière  est  du 
temps  de  Valens;  par  une  anomalie  singulière,  elle  commence  par  les  mots  doniinis 
nostris,  au  pluriel,  et  ne  nomme  ensuite  qu'un  seul  empereur  : 

DDNNFLAVIO 

VALENT1VICTO 

RIACTRIVMFA 

TORI-  SEMPER 

A  V  G  V  S  T  O 

R-PCOL-VCHI 

TANORVMMA 

IORVMDEVO 
TA 
En  terminant  cette  communication,  au  nom  de  M.  Ch.  Tissot,  M.  Desjardins  insiste 
sur  les  remerciments  dus  aux  officiers  qui  ont  recherché  et  découvert  ces  monu- 
ments. Il  exprime  en  même  temps  quelque  regret  de  ce  que  l'envoi  de  M.  de  Puy- 
morin contient  beaucoup  plus  de  copies  que  d'estampages.  Les  copies  d'inscriptions 
donnent  plus  de  peine  à  faire  que  les  estampages  de  papier,  et  elles  rendent  moins 
de  services. 

Julien  Havet. 


500  RRVUE    CRITIQUE    DHIST01RE    ET    DE    LITTERATURE 

SOCIÉTÉ  NATIONALE  DES  ANTIQUAIRES  DE  FRANCE 


Séance  du  8  novembre  1882. 

Cette  séance  a  été  consacrée  à  des  questions  administratives  et  à  l'élection  de 
M.  l'abbé  Thédenat  comme  membre  résidant. 

Séance  du  1 5  novembre. 

M.  Flouest,  associé  correspondant,  présente  une  superbe  épée  en  bronze,  apparte- 
nante la  période  dite  «  âge  du  bronze  »,  qui  a  été  trouvée  près  de  Langres,  dans  un 
ancien  lit  de  la  Marne,  et  qui  appartient  aujourd'hui  au  musée  de  Saint-Germain. 
Elle  aurait  sans  doute,  conformément  à  un  usage  mentionné  par  un  auteur  ancien, 
été  jetée  dans  les  eaux  à  titre  d'offrande  aux  divinités. 

M.  Mowat  annonce  qu'il  possède  une  épée  trouvée  dans  des  conditions  analogues, 
dans  le  lit  de  la  Vilaine. 

M.  Gaidoz  rapproche  certains  usages  religieux  de  la  Rome  ancienne,  de  la  France 
et  du  Congo,  et  s'élève  contre  le  système  qui  fait  venir  de  l'Asie  toutes  les  croyances 
et  toutes  les  pratiquas  religieuses  des  peuples  européens. 

Séance  du  22  novembre. 

M.  Héron  de  Villefosse  lit  une  note  de  M.  Castan,  associé  correspondant,  sur  un 
anneau  en  bronze  doré  du  musée  de  Besançon;  le  chaton,  simple  tablette  de  cristal 
de  roche,  est  accosté,  d'un  côté  d'un  écusson  surmonté  de  la  tiare  pontificale 
et  renfermant  les  deux  clefs  en  sautoir,  de  l'autre  d'un  saint  Georges  à  cheval 
perçant  de  sa  lance  le  dragon.  Sur  les  cartouches  en  biseau  que  le  chaton  surmonte, 
on  lit,  d'un  côté  P.  N.,  de  l'autre  DVX,  les  clefs  en  sautoir  sont  les  armoiries  person- 
nelles du  pape  Nicolas  V,  dont  les  initiales  se  lisent  sur  un  des  cartouches,  le  titre 
de  Dux  et  le  saint  Georges  appartiennent  au  doge  de  Gênes.  Or  Nicolas  V  avait 
cédé  au  Génois  Luigi  Fregoso  ses  droits  souverains  sur  la  Corse;  celui-ci  les  rétro- 
céda aussitôt  à  la  République  de  Gênes;  qui  en  remit  la  jouissance  à  la  fameuse 
compagnie  appelée  «  l'office  de  Saint-Georges  ».  M.  Castan  reconnaît  dans  l'anneau 
du  musée  de  Besançon  l'anneau  par  lequel  l'office  de  Saint-Georges  fut  investi  en 
1433  de  la  seigneurie  de  la  Corse  au  double  nom  de  Nicolas  V,  suzerain  de  l'île,  et 
du  précédent  feudataire,  le  doge  de  Gênes. 

M.  Rayet  lit  une  note  sur  un  fragment  de  table  iliaque  trouvé  par  M.  Thierry  à 
Tivoli,  et  sur  lequel  sont  représentés  en  abrégé  certains  épisodes  de  la  guerre  de 
Troie,  empruntés  à  la  Destruction  de  Troie,  par  Sèschore,  et  à  l'Ethiopide  d'Arctinos 
de  Milet. 

M.  Renot  informe  la  Société  que  la  seconde  moitié  des  Arènes  de  Lutèce,  dont  la 
première  partie,  découverte  en  1870,  est  actuellement  cachée  sous  des  bâtiments 
élevés  par  la  Compagnie  des  omnibus,  est,  à  son  tour,  menacée  de  destruction  par 
un  projet  de  percement  de  rue.  Sur  son  invitation,  la  Société  renouvelle  sa  délibé- 
ration du  6  avril  1870  tendant  à  la  conservation  de  ces  restes  intéressants  du  plus 
ancien  monument  du  Paris  romain,  et  décide  que  son  président  fera  en  ce  sens  une 
démarche  auprès  du  conseil  municipal. 

M.  Nicard  rectifie  quelques  erreurs  contenues  dans  la  partie  du  tome  II  de  Y  In- 
ventaire général  des  richesses  d'art  de  la  ville  de  Paris  qui  concerne  les  vitraux  de 
Saint-Etienne-du-Mont.  Un  vitrail  représentant  le  Pressoir  mystique  et  attribué  par 
l'inventaire  à  Robert  Vinaigrier,  peintre  verrier  de  la  première  moitié  du  xvie  siècle, 
est  simplement  la  copie  faite  par  Nicolas  Vinaigrier,  qui  vivait  au  xvne  siècle,  d'une 
verrière  peinte  par  Robert  pour  Saint-Hilaire  de  Chartres;  cela  avait  été  déjà  dit  par 
Emeric  David  en  1823  dans  un  article  de  la  Biographie  universelle  de  Michaud. 

Le  secrétaire  :  O.  Rayet. 

SOCIÉTÉ   ASIATIQUE 

Dans  sa  séance  du  10  novembre,  la  Société  asiatique  a  renouvelé  la  commission  de 
son  Journal.  Ont  été  élus  membres  de  cette  commission  MM.  Defrémery,  Barbier 
de  Meynard,  E.  Senart,  Stanislas  Guyard  et  Bergaigne.  —  M.  Bergaigne  a  fait  en- 
suite une  intéressante  communication  sur  un  hymne  védique  relatif  à  la  descente 
du  Borna  porté  sur  un  aigle.  M.  Roth  avait  eu  recours,  pour  expliquer  un  passage 
obscur  de  cet  hymne,  à  des  corrections  du  texte.  M.  Bergaigne  repousse  ces  correc- 
tions et  montre  qu'en  maintenant  l'intégrité  du  texte  on  parvient  à  une  interpré- 
tation qui  confirme  le  système  développe  par  lui  dans  ses  travaux  sur  la  rhétorique 
du  Rigvéda.  —  M.  Halévy  annonce  qu'il  a  réussi  à  déchiffrer  les  inscriptions  Thamoû- 
dites  découvertes  en  Arabie  par  M.  Huber.  On  sait  que  les  Thamoûdites  sont  une 
de  ces  peuplades  antiques  de  l'Arabie  que  cite  le  Coran  comme  ayant  été  détruites 
par  un  châtiment  céleste. 

Le  t'uy,  imprimerie  Marchessou  /ils,  boulevard  Saint-Laurent,  i3 


REVUE    CRITIQUE 
D'HISTOIRE   ET   DE    LITTÉRATURE 

N°  52  -  25  Décembre  —  1882 


Sommaire  s  261.  Bartholomae,  Recherches  aryennes.  —  262.  E.  Curtius,  Anti- 
quité et  présent,  II.  —  263.  De  Ruble,  Antoine  de  Bourbon  et  Jeanne  d'Albret, 
II.  —  264.  Breucker,  La  cession  de  la  Poméranie  à  la  Suède.  —  2Ô5.  Valfrey, 
Hugues  de  Lionne  et  la  paix  des  Pyrénées.  —  Chronique.  —  Académie  des  Ins- 
criptions. —    Société    nationale   des  antiquaires  de  France. 


261.  —  Arische  Forschungen,  von  Christian  Bartholomae.  Is  Heft.  pp.  vi-178. 
in-8.  Halle,  1882. 

Ces  nouvelles  études  de  M.  Bartholomae  se  divisent  en  deux  parties 
très  différentes  de  nature,  l'une  grammaticale  et  l'autre  exégétique  et 
critique.  La  première  partie  se  subdivise  également  en  deux  sections. 
Dans  Tune,  M.  B.  traite  des  représentants  aryaques  des  moyennes 
aspirées  -f-  t  et  des  mêmes  moyennes  -f-  s;  dans  l'autre,  il  analyse  le  sys- 
tème de  la  déclinaison  des  thèmes  en  r,  n,  m,j  (i)  et  v  (m). 

Discutant  d'abord  la  première  de  ces  questions,  M.  B.  pose,  comme 
fondement,  les  formes  sanscrites  g*  h  -j-  t,  th  =  gdh  (et  semblables)  et 
g1  h~\-t,  th  —  dh  (de  "(dh);  puis,  comparant  le  sanscrit  dabdha  (de 
dabh  -\-  ta)  avec  l'avestique  dapta,  il  se  demande  quelle  est  la  forme  indo- 
iranienne qui  a  précédé  l'une  et  l'autre.  Il  regrette  et  l'explication  d'As- 
coli,  qui  établit  la  progression  dabh  ta  —  dabtha  —  dabdha,  et  celle  de 
Schleicher,  qui  admet  un  indo-européen  dabh-ta  et  la  théorie  générale- 
ment admise  de  l'amollissement  des  consonnes  en  avestique. 

Il  pose  en  principe  que  le  groupe  indo-européen  gh  -f-  t  est  devenu 
d'abord  gdh  aryaque  et  de  là  gh  dh  iranien. 

Par  une  même  suite  de  raisonnements,  il  établit  également  que  le 
groupe  g"-  h  -f-  s  est  en  iranien  gh{',  g\  et  indo-iranien  gfh,  et  que 
g1  h  -f-  s  se  montre,  en  iranien,  sous  la  forme  %>  dans  va^'h. 

Dans  la  seconde  section,  M.  B.  expose,  en  suivant  l'ordre  des  cas, 
toutes  les  formes  que  revêtent  les  radicaux  unis  aux  suffixes  de  flexion 
selon  qu'elles  ont  pour  base  le  thème  renforcé  (par  exemple,  an),  le 
thème  simple  ou  aminci  ou  que  le  suffixe  flexionel  a  disparu. Il  discute, 
à  cette  occasion,  la  chronologie  de  ces  formes  et  la  légitimité  de  quelques- 
unes  d'entre  elles. 

On  ne  peut  contester  que  la  discussion  soit  conduite  d'une  manière 
vraiment  scientifique.  L'auteur  cherche  à  établir  ses  théories  sur  des 
raisons  sérieuses  et  vise  à  la  plus  stricte  exactitude.  Naturellement,  en 
Nouvelle  sJrie,  XIV.  z6 


502  REVUE    CRITIQUE 

ces  matières,  on  est  souvent  réduit  à  des  conjectures  et  c'est  déjà  beau- 
coup quand  ces  conjectures  sont  toutes  plausibles. 

Je  ne  puis  entrer  dans  tous  les  détails  que  comporte  le  sujet  ;  je  dois 
me  borner  à  quelques  remarques  faites  au  courant  de  la  lecture.  M.  B. 
rejette,  avec  raison,  la  forme  dabta  admise  par  M.  Geldner  et  i'e  sylla- 
biquequeM.  Fick  voit  en  dademaidê ;  aogda  me  semble  bien  être  un 
amollissement  d'aokhta  quand  il  signifie  «  il  dit  »  ;  pour  écarter  cette 
forme,  il  ne  me  semble  pas  suffisant  de  dire  qu'elle  est  altérée. 

Vaghdhanem  est  bien  interprété  comme  provenant  de  vag2h  et  du 
suffixe  tana. 

M.  B.  fait  dériver  (ni)  uru\dotema  et  ma\dâo  de  rudh  et  madh,  comme 
je  l'avais  fait  précédemment.  Je  ne  puis  naturellement  que  l'approuver 
en  ceci.  —  A^débis'  est  évidemment  le  produit  d'un  amollissement  du 
thème  ast,  asta.  Pour  ce  cas  du  moins,  comme  pour  aokhta,  l'amollis- 
sement ne  me  paraît  pas  contestable. 

Il  est  assez  difficile  d'admettre  que  la  forme  a  du  nominatif  des  noms 
ennour  soit  la  plus  ancienne  ',  ou  que  sakhi  provienne  de  saski  par 
redoublement  de  la  racine  sak2.  Il  faudrait  pour  cela  d'autres  exemples 
de  sk\  z=.  kh.  Ne  serait-ce  pas  le  radical  saky  qui  a  engendré  sakh  ?  En 
revanche,  l'origine  attribuée  aux  accusatifs  en  dm,  dm  de  jpanthdm,  gâm 
etc.,  est  certainement  la  vraie.  Ce  sont  les  nominatifs  en  as  qui  en  ont 
entraîné  la  formation.  Le  son  mouillé  attribué  à  la  sifflante  sh  (Justi)  est 
assez  bien  justifié  par  les  exemples  shu  =  shyu  ;  shâti  —  shydti ; yum  est 
bien  le  vocatif  de  yuvan  ;  comme  je  l'ai  expliqué  depuis  longtemps 
(Avesta  traduit,  Yesht  xxii).  —  L'auteur  rapproche  très  heureusement 
les  suffixes  ur,  us  des  troisièmes  personnes  du  pluriel  en  sanscrit,  avec 
ceux  en  ares  des  parfaits  avestiques,  de  même  que  le  génitif  sanscrit  en 
us  de  la  forme  ars.  Les  génitifs  sakhyus,  patyus,  etc.,  forment  encore 
une  difficulté.  —  D'autre  part,  il  semble  peu  probable  que  l'ablatif  et  le 
génitif  du  singulier  aient  été  originairement  identiques  et  qu'on  ne  les 
aient  distingués  par  la  suite  qu'à  la  seule  déclinaison  des  noms  en  d,  d'où 
la  forme  nouvelle  {d,  t,  ad)  se  serait  étendue  aux  autres  radicaux,  en  latin 
et  en  avcstique  uniquement.  Je  croirais  plus  facilement  que  ce  suffixe 
s'appliquait  d'abord  à  tous  les  mots,  sans  toutefois  être  arrivé  à  la  fusion 
complète  si  ce  n'est  dans  la  flexion  des  mots  en  a  où  la  forme  du  génitif 
{asya)  s'appliquait  difficilement  à  l'ablatif. 

Les  Gâthâs  n'ont  point  le  suffixe  d  (ad)  dans  les  autres  déclinaisons, 
cela  est  vrai  ;  toutefois,  la  forme  bûnoiî,  Y.  lu,  7,  n'en  serait-elle  point 
un  reste?  M.  B.  penche  à  la  corriger  en  bûnois\  Il  peut  avoir  raison, 
mais  ce  n'est  point  sûr.  —  M.  B.  distingue  avec  beaucoup  de  raison  les 
cas  où  le  rythme  demande  un  élargissement  des  mots  de  ceux  où  la  cor- 
rection est  exigée  par  la  grammaire.  Les  premiers  peuvent  très  bien  ne 
représenter  qu'un  usage  poétique.  Il  rejette  la  théorie  reçue  qui  admet 


Ii  Même  remarque  quant  au  génitif  en  es,  os,  des  radicaux  -j,  -u. 


d'histoire  et  de  littérature  5o3 

dans  la  langue  avestique  l'altération  des  sons  fermés  en  spirées  entre 
deux  voyelles  et  ne  voit  dans  gâthum,  par  exemple,  qu'une  extension 
par  analogie  du  th  de  gâthwâ.  Mais  les  formes  coithat,  cithit,  dadhâm 
(da,  donner)  et  semblables  paraissent  favorables  à  l'explication  ordinaire, 
bien  que  celle  de  M.  B.  donne  plus  de  régularité  à  la  langue.  La  solu- 
tion de  cette  question  dépend  du  plus  ou  moins  d'extension  que  l'on 
accorde  à  l'influence  de  la  fausse  analogie. 

C'est  aussi  avec  juste  raison  que  M.  B.  raie  de  la  lexicographie  avesti- 
que les  locatifs  en  ô  des  radicaux  en  i,  comme  je  Pavait  fait  antérieure- 
ment (V.  mon  Manuel,  p.  5o)  Hu\âmitô  est  un  nominatif-accusatif  plu- 
riel comme  le  prouve  le  vers  yâ  vispâo  hâirishias,  hu^âmito  dadhaiti 
(Y.  lxiv  2)  «  qui  fait  toutes  les  femelles  ayant  d'heureux  enfantements, 
enfantant  heureusement.  »  De  même  au  Yt.  xnr,  i5,  hu\âmitù  (nom.), 
\i\anahti. 

Yuto  (à  Vend.,  V,  55)  est  membre  d'un  composé  féminin  yuto- 
hvaretha,  yuto-gdtus  ;  ou  bien  c'est  un  nominatif  masculin  employé 
dans  une  formule  usuelle,  bien  qu'il  s'agisse  ici  d'une  femme. 

Gaoddyô  est  bien  certainement  un  accusatif  neutre  (comp.  mon 
Avesta  traduit,  p.  3 18).  Il  en  est  de  même  de  sénghô,  Y.  xxxn,  6. 
Neréus*  vient  bien,  je  pense,  de  nerans',  neréns'  (Cp.  mon  Manuel, 
p.  368  init.) 

La  seconde  partie  consacrée  à  la  critique  et  à  l'exégèse  est  aussi  très  di- 
gne d'attention.  Elle  contient  le  texte  (restitué  selon  le  système  de  l'au- 
teur) et  la  traduction  desYeshts  xix  (8-96)  et  I,  5-j,  9-12,  16.  18.  19; 
des  notes  explicatives  et  justificatives  accompagnent  la  version. 

La  restauration  du  texte  consiste  en  la  reconstruction  de  strophes  ré- 
gulières de  4  ou  de  3  vers,  chacun  de  8  syllabes,  et  en  l'élimination  des 
mots,  membres  de  phrases  ou  strophes  qui  troublent  l'harmonie  des 
strophes  et  des  vers. 

Les  fragments  retranchés  du  texte  traditionnel  du  Y.  xix  sont  ajou- 
tés en  colonnes  parallèles  au  texte  restitué,  mais  sans  traduction.  Les  re- 
tranchements plus  considérables  fait  au  texte  manuscrit  du  Y.  1  sont 
complètement  omis. 

Je  n'ai  rien  à  redire  à  la  manière  dont  M.  B.  traite  le  texte  du  Y.  xix. 
On  voit  même  de  cette  façon  comment  ces  interpolations  se  sont  pro- 
duites. Tantôt  c'est  le  défaut  de  mémoire  des  rédacteurs  qui  les 
a  induits  à  transférer  un  passage  d'un  endroit  à  un  autre;  tantôt  c'est 
une  préoccupation  religieuse.  Ainsi,  cette  mention  que  l'on  retrouve  aux 
§§  36  et  38,  anyô  Zarathus'trd,  provient  de  la  sollicitude  de  l'interpo- 
lateur  pour  la  grandeur  du  prophète,  supérieure,  à  ses  yeux,  à  celle  de 
tout  autre  humain'.  Cette  interpolation  ne  prouverait-elle  pas  que  le 
fond  de  ce  chant  est  antérieur  à  la  réforme  zoroastrienne? 

Il  n'y  aurait  ici  à  regretter,  si  tout  le  monde  suivait  cet  exemple,  que 
l'absence  complète  d'explication  ou  de  traduction  des  mots  et  phrases 
rejetés  du  texte.  Ce  sont,  malgré  tout,  des  mots  iraniens,  et  leur  rejet  pur 


5  04  REVUE   CRITIQUE 

et    simple    appauvrirait    considérablement    notre    lexique    avestique. 
Cette  remarque  s'applique  surtout  à  la  restauration  du  texte  du  Y.  i, 
d'où  elle  fait  disparaître  des  fragments  considérables;  soit  2  3  paragra- 
phes sur  33. 

N'est-il  pas  à  présumer  que,  dans  des  morceaux  de  ce  genre,  la  prose 
et  les  vers  se  mêlaient,  se  succédaient  alternativement,  ou  bien  qu'ils  sont 
composés  de  la  réunion  de  divers  morceaux  séparés,  les  uns  en  prose,  les 
autres  rythmés  ? 

Je  ne  puis,  en  général,  qu'approuver  la  traduction  de  M.  B.,  laquelle 
concorde  généralement  avec  la  mienne,  même  en  certains  points  obscurs, 
par  ex.  sahvâre,  asengdus,  as^vindra,  cinmâni paitibar,  du\hvahdru. 
Voici  les  seules  remarques  que  j'aurais  à  faire  : 

N'est-il  pas  plus  naturel  de  lire  ughrem  Kâvayem  huarnô,  que  ugka- 
rem  k.  h.?  de  même pouru,  vohuca,  sriraca,  plutôt  que  pouru,  vohu, 
sîraraca  (de  srira)  ?  —  Dans  ahêaya  hvarnanhaca  tem  ya\âi  [tem  se 
rapportant  à  hvarnô),  ne  vaut-il  pas  mieux  voir  une  formule  générale 
appliquée  ici  au  hvarenô  sans  souci  de  l'accord  grammatical?  Toutefois 
l'identité  de  forme  de  avem  [aom]  hvarenô  autorise  certainement  l'ex- 
plication de  M.  Bartholomae. 

La  correction  du  §  12,  aom  cithemca  astemca,  est  excellente,  et  donne 
un  très  bon  sens  à  la  phrase. 

Le  mot  abda  est  encore  obscur,  ni  dbâd,  ni  abdân;  ni  apadha  (cf. 
frabda)  ne  me  paraissent  fournir  la  solution  définitive;  mais  abddn  est  le 
mot  le  plus  rapproché  de  abda.  —  Aiviama,  supérieur  en  force,  accolé  à 
bernât,  élevé,  est  une  bonne  correction  de  aiwydma;  de  même  Kâvayem 
(royal)  de  Kâvayem. 

Au  §  17,  le  pluriel  dans humataèshu,  hûkhtaêshu,  etc.,  semblerait  indi- 
quer qu'il  s'agit  des  pensées,  paroles  et  actions  et  que  le  v.  merthwehtem 
garônmânem  a  été  ajouté  après  coup,  alors  que  l'on  eût  inventé  les 
3  parvis  du  ciel,  humatem,  etc.,  dont  parle  le  Yt.  xxn. —  Marekhstar  après 
dâtar  n'indique-t-il  pas  l'acte  de  celui  qui  polit,  perfectionne  une  statue, 
un  objet  quelconque  qu'il  vient  de  former  —  Aux  §§  3 1  -33 ,  on  pourrait 
conserver  presque  tous  les  mots  retranchés  en  commençant  avec  le  §  3i 
les  strophes  de  4  vers  (cfr.  mon  Manuel,  pp.  160,  161  ;  excepté  le  dernier 
vers).  —  Il  me  semble  que  dans  les  mots  vdraghna,  \arathustrâ,  etc., 
le  rythme  permet  de  prononcer  parfois  vdrghna,  Zarthustra. 

M.  B.  ramène  souvent,  et  avec  raison,  les  génitifs  écrits  en  andm  à 
la  forme  dm;  le  sens  qu'il  donne  à  Vyâkhmainyata,  réfléchir,  penser  en 
soi,  est  le  bon  ;  cela  ne  prouve-t-il  pas  que  Vyakhna  ne  vient  pas  de 
vyac  et  ne  signifie  pas  rassembléur?  Au  §  39,  rdhwô\ahga  peut-il  signifier 
autre  chose  que  «  ayant  la  jambe  dressée  »,  toujours  debout  (vigilant)? 
Cela  concorde  très  bien  avec  le  mot  suivant  ahvafnîya,  sans  sommeil. — 
g  41,  Pathanya  ne  peut-il  être  formé  du  suffixe  anya?  Cela  me  semble 
bien  possible.  —  J'ai  traduit fra^ushta  comme  l'équivalent  du  sanscrit 
prajushta  (cela  me  paraît  meilleur  que  legeliebt  de  Justi)  et  barô^ushta, 


d'histoire  et  de  littérature  5o5 

qui  se  plaît  à  la  guerre,  en  comparant  à  baro  le  bhara  védique.  Je  vois 
dans  *akhshashrem  un  dérivé  de  %akhsh=jaksh,  avaler.  —  §  52,  M.  B. 
lit  atha  urunô  «  pour  l'âme  »  et  non  athaurunô.  Le  sens  est  meilleur; 
mais  le  mot  râtanâm,  offrandes,  n'indique-t-il  pas  qu'il  s'agit  des  prêtres 
et  des  offrandes  que  Ta  vesta  engage  à  leur  faire?  Gela  est  bien  dans  l'esprit 
du  livre.  L'auteur  voit  dans  Yagha  daoilhri  du  g  5j  une  formule  magi- 
que funeste  et  considère  les  mots  suivants  itha,  itha,  etc.,  comme  étant 
cette  formule,  sans  signification  réelle.  Cela  paraît  très  vraisemblable, 
vu  surtout  la  gradation  des  3  cris  de  Franrasyan,  Paitishâ  peut  aussi 
venir  depahti  kisha,  comme  le  suppose  l'auteur. —  Vaoçirem  ou  vao\a- 
rem,  qu'il  lit  vao^rem,  est  à  ses  yeux  une  forme  verbale  semblable  au 
sanscrit  asxgram.  C'est  incontestablement  un  rapprochement  ingé- 
nieux ;  mais  le  mètre  ne  demande  pas  la  suppression  de  i  (a)  et  va\  ap- 
pliqué aux  terres  ne  me  paraît  pas  en  place.  Mais  cette  forme  am  pour 
an  ne  nous  explique-t-elle  pas  ashâum,  yum  pour  ashdun,  yun?  Ma- 
yâo  me  semblent  être  les  opérations  magiques  «  die  Wunderthaten  »,  et 
les  Jainis,  non  point  simplement  «  les  femmes»,  mais  des  génies  femelles, 
magiciens  comme  les  Yâtus,  leurs  compagnons  au  vd.  xx,  10,  que  cite 
très  à  propos  M.  Bartholomae.  M.  B.  voit  dans  vaêjo  (§  92)  une  arme, 
mais  ne  dit  pas  pour  quel  motif;  et  rend  vaèdhîm  par  «  maniant  ». 

En  résumé,  l'œuvre  de  M.  B.  est  vraiment  savante  et  contient  nombre 
d'innovations  heureuses.  Les  quelques  observations  que  je  me  suis  per- 
mis de  faire  n'en  diminuent  nullement  la  valeur  ;  ce  sont  toutes  matières 
à  controverse  et  les  diverses  opinions  se  valent  l'une  l'autre  le  plus  sou- 
vent. 1 

Je  me  plais  à  signaler,  en  terminant,  dans  cet  écrit  de  M.  Bartholomae 
une  parfaite  convenance  dans  la  discussion.  On  voit  que  la  science  n'y 
perd  rien. 

C.  de  Harlez. 


262. —  Alterthnm  nnd  Gegenwart,  von  Ernst  Curtius.  Zweiter  Band.  Berlin, 
Wilhelm  Hertz,  1882.  In-8°,  347  p.  Prix  :  4  mark. 

Ce  volume  est,  comme  celui  qui  l'a  précédé,  un  volume  de  mélanges, 
composé  de  discours,  de  conférences  et  d'articles  l,  que  ni  M.  E.  Cur- 
tius ni  son  éditeur  n'ont  voulu  laisser  perdre.  Malgré  le  titre,  le  présent 
y  tient  peu  de  place  2;  c'est  de  l'antiquité,  et  de  l'antiquité  grecque  qu'il 

1.  Les  discours  ont  été  prononcés,  soit  dans  VAula  de  l'université  de  Berlin  aux 
jours  solennels  —  le  dernier  en  date  est  celui  que  M.  C.  a  prononcé  le  i5  octobre 
1881,  en  prenant  possession  du  Rectorat  —  soit  aux  séances  publiques  de  l'Acadé- 
mie des  sciences.  Les  conférences  ont  été  faites  devant  la  Société  des  sciences  de 
Gcettingue,  l'Association  scientifique  et  la  Société  archéologique  de  Berlin.  Enfin  les 
articles  proviennent  des  Preussische  Jahrbûcher. 

2.  Une  trentaine  de  pages  en  trois  morceaux  :  Le  régime  de  paix  de  l'empereur 


5o6  REVUE   CRITIQUE 

est  surtout  question.  Les  morceaux,  assez  variés,  qui  s'y  rapportent, 
peuvent  cependant  se  ranger  en  un  petit  nombre  de  groupes.  C'est  ainsi 
que  les  trois  conférences  sur  Olympie  permettent  de  suivre  facilement 
l'histoire  de  la  campagne  de  fouilles  entreprise  et  menée  à  bonne  fin  par 
les  savants  prussiens,  sur  les  bords  de  l'Alphée.  Un  autre  groupe  est 
formé  par  les  articles  biographiques.  On  lira  surtout  avec  intérêt  le  récit 
des  derniers  jours  d'Otfried  Millier,  et  la  notice  sur  le  colonel  Leake, 
rédigée  d'après  des  mémoires  de  famille,  imprimés  à  petit  nombre  et  non 
mis  dans  le  commerce  «. 

L'histoire  religieuse,  qui  a  plus  d'une  fois  attiré  l'esprit  curieux  et 
pénétrant  de  M.  C,  est  ici  représentée  par  deux  études.  L'une,  sur  le 
Sacerdoce  che\  les  Grecs,  fait  surtout  ressortir,  en  quelques  pages 
fermes  et  brillantes,  l'heureuse  action  qu'a  exercée  le  collège  sacerdotal 
de  Delphes.  La  seconde,  plus  développée  et  qui  a  pour  titre  :  La  science 
des  divinités  grecques  au  point  de  vue  historique,  mérite  une  attention 
particulière.  Bien  que  M.  George  Perrot  en  ait  donné,  il  y  a  quelques 
années,  dans  la  Revue  archéologique  2,  une  analyse  très  fidèle,  il  ne 
sera  pas  inutile  d'y  revenir  ;  car  l'auteur  y  soulève  et  essaie  d'y  résoudre 
une  question  de  méthode  des  plus  importantes. 

M.  C.  reproche,  et  avec  raison,  à  la  méthode  comparative  d'avoir 
borné  ses  investigations  aux  peuples  de  la  famille  arienne,  sans  tenir 
compte  des  influences  qu'ont  subies  les  Hellènes,  depuis  le  jour  où  ils 
sont  entrés  en  relations,  directes  ou  indirectes,  avec  les  Sémites  3.  On  a 
eu  tort,  dit-il,  d'attribuer  aux  conceptions  religieuses  la  même  persis- 
tance qu'à  la  langue.  En  fait,  nulle  religion  antique  n'a  pu  se  soustraire 
à  l'action  des  cultes  voisins,  quand  ces  cultes  frappaient  vivement  les 
yeux  et  l'imagination.  Ce  qui  est  arrivé  en  Perse  où  l'on  voit,  sous 
Artaxercès  Memnon,  s'introduire  dans  la  religion  officielle,  à  côté  du 
grand  dieu  iranien  Ahura  Mazda,  la  déesse  sémitique  Anahit,  est  arrivé 
nécessairement  ailleurs,  et  à  des  époques  très  reculées.  Nul  ne  conteste, 
par  exemple,  que  le  culte  d'Aphrodite  ait  été  importé  de  bonne  heure  en 
Grèce  par  les  Phéniciens.  Mais  Aphrodite  est-elle  la  seule  étrangère  de 
l'Olympe  ?  Les  divinités  orientales  n'ont-elles  suivi  d'autres  routes  que 
celles  de  Cypre  et  de  Cythère  pour  aborder  aux  côtes  de  Grèce?  Grâce 
aux  récents  progrès  de  l'assyriologie,  on  commence  à  mieux  connaître  la 
nature  de  la  grande  divinité  féminine  des  religions  sémitiques,  de  celle 
qui  s'appelait  Annat  en  Chaldée,  Bélit  ou  Mylitta  à  Babylone,  Istar  en 


Guillaume  (22  mars  1871).  —  Frédéric  II  et  les  arts  plastiques.  —  Du  développe- 
ment de  l'Etat  prussien  d'après  les  analogies  de  F  histoire  ancienne. 

1.  Brief  memoir  of  the  l if e  and  writings  0/  the  late  lieutenant-colonel  W.  Martin 
Leake,  London,   1864.  For  private  circulation  only. 

2.  T.  XXX  (1875),  pp.  408-414. 

3.  M.  C,  qui  cite  Gerhard  et  Welcker,  paraît  oublier  qu'il  y  a  plus  de  vingt  ans, 
M.  Alfred  Maury  avait  consacré  à  l'étude  de  ces  influences  asiatiques  la  plus  grande 
partie  du  troisième  volume  de  son  Histoire  des  religions  de  la  Grèce. 


d'histoire  et  de  littérature  507 

Assyrie.  Or,  si  l'on  trouve  en  Arménie,  en  Phrygie,  dans  le  Pont,  sur  le 
sol  de  peuples  ariens,  des  traces  certaines  du  culte  de  cette  divinité,  est-il 
admissible  que  cette  transmission  se  soit  arrêtée  sur  les  confins  des  tribus 
grecques  établies  au  bord  de  la  mer  Egée  ?  Tout  le  long  de  cette  côte, 
s'élevaient  des  sanctuaires  de  divinités  féminines  qui,  malgré  les  chan- 
gements de  formes  et  de  noms  que  les  Grecs  leur  ont  imposés,  représen- 
tent toutes,  d'après  M.  G.,  la  même  conception  :  celle  de  la  déesse- 
nature,  mère  et  nourrice  féconde  des  êtres.  Ce  type  divin,  originaire  de 
la  Chaldée  ou  de  la  Babylonie,  a  gagné  de  proche  en  proche  l'Assyrie, 
les  provinces  centrales  et  les  côtes  d'Asie-Mineure  ;  il  a  franchi  la  mer 
pour  venir  en  Grèce.  Et  M.  C.  conclut  que  les  principales  déesses  de 
l'Olympe,  Aphrodite  et  Héra,  Athèna  et  Artémis,  Déméter  et  Corè,  ne 
sont  que  les  formes  variées,  diversifiées  par  le  génie  hellénique,  de  ce 
type  fondamental. 

Cette  conclusion,  qui  sera  peut-être  un  jour  démontrée  vraie,  est-elle 
suffisamment  justifiée  dès  aujourd'hui  par  les  faits? Il  nous  a  paru  que 
M.  C.  apporte  à  l'appui  de  sa  thèse  plutôt  des  indices  que  des  preuves  et 
ces  indices  ne  sont  pas  tous  d'égale  valeur. 

L'auteur  voulant  établir  que  le  culte  de  la  déesse  du  Sipyle  a  été 
importé  très  anciennement  en  Grèce,  prétend  que  «  dans  le  Péloponèse 
on  connaissait  les  plus  anciens  sanctuaires  de  Cybèle  et  qu'on  savait 
qu'ils  avaient  été  fondés  par  les  Tantalides  '  ».  Le  texte  unique  de 
Pausanias  auquel  se  réfère  M.  C.  n'a  pas  la  portée  qu'il  lui  prête.  Pau- 
sanias  (III,  22)  dit  simplement  :  les  habitants  d'Acriae  assurent  que  leur 
statue  delà  mère  des  dieux  est  l'image  la  plus  ancienne  de  cette  déesse 
qui  soit  dans  les  sanctuaires  du  Péloponèse  —  (du  Péloponèse  seule- 
ment) —  caries  Magnésiens  du  Sipyle  en  possèdent  une  qui  est  la  plus 
ancienne  de  toutes  et  qu'ils  attribuent  à  Brotéas,  fils  de  Tantale.  — 
Est-il  possible,  je  le  demande,  de  déduire  logiquement  de  ce  texte  que  ce 
sont  les  Pélopides  qui  ont  introduit  en  Grèce  le  culte  de  la  Grande  Mère? 
Faut-il  même  en  croire,  sur  la  haute  antiquité  de  cette  image,  l'amour- 
propre  local  des  gens  d'Acriae? 

On  conviendra  bien  volontiers,  avec  M.  C.  que  l' Artémis  éphésienne 
et  l'Héra  samienne  offrent  de  remarquables  analogies  avec  la  déesse- 
mère  de  l'Assyrie.  Mais  le  type  divin  d' Athèna  n'est-il  qu'une  variante 
de  celui  de  la  déesse  asiatique?  Pour  le  prouver,  M.  C.  accumule  des 
raisons  qui  ne  sont  pas  toutes  convaincantes.  Faut-il  attacher,  par 
exemple,  quelque  importance  à  ce  fait  que  certains  sanctuaires  d'Athènes 
étaient  situés  dans  des  terrains  marécageux  (p.  62)  ?  A  Marathon,  sans 
doute,  le  temple  d'Athèna  était  voisin  d'un  marais;  mais  à  Sunium,  à 
Egine,  à  Athènes  et  ailleurs,  ses  sanctuaires  s'élevèrent  sur  un  terrain 
sec  ou  même  sur  le  rocher.  Ce  n'est  point  là  un  argument.  —  M.  C. 
essaie  ensuite  de  prouver  que  chez  Athèna,  le  caractère  antique  et  pri- 

1.  P.  58. 


5û8  REVUE   CRITIQUE 

mitif  de  mère  ne  s'est  pas  complètement  effacé,  bien  que  celui  de  vierge 
soit  devenu  prédominant.  L'assertion  est  assez  nouvelle  pour  n'être  pas 
acceptée  sans  discussion.  «  Athèna,  nous  dit  l'auteur  (p.  63),  était  la 
mère  nourricière  de  la  jeunesse  attique,  une  déesse  du  mariage  et  des 
phratries.  A  Athènes,  à  Elis,  et  ailleurs,  elle  était  honorée  sous  le  titre 
de  mère  ».  A  cela  on  peut  répondre  :  qu'Athèna  est  en  rapport  avec  les 
enfants,  en  tant  qu'elle  est  Athèna-Nikè,  la  victoire  qui  procure  la  paix 
et  assure  ainsi  la  libre  croissance  de  la  jeunesse  1  ;  qu'elle  ne  préside 
nullement  au  mariage,  car,  si,  à  Trézène,  les  jeunes  filles,  avant  de  se 
marier,  lui  consacraient  leur  ceinture  2,  cette  offrande  s'adressait  évi- 
demment à  la  déesse-vierge  qui  avait  jusqu'alors  protégé  leur  virginité, 
et  non  à  une  déesse  de  l'hymen  3  ;  qu'Athèna  est  une  déesse  <ppaxpia  en 
vertu  simplement  de  son  caractère  de  déesse  Poliade  ;  enfin,  que  si 
Athéna  était  surnommé  MifJT/jp  à  Elis  —  à  Elis  seulement,  quoi  qu'en 
dise  M.  G.  —  c'est  là  un  fait  isolé,  l' Athèna- Mèter  d'Elis  pouvant 
d'ailleurs  se  résoudre,  comme  le  veut  Welcker,  en  une  Athèna-Nikè, 
xoupoTpéçoç. 

Un  fait  plus  grave  est  celui-ci.  Sur  les  monnaies  d'Athènes,  le  crois- 
sant de  la  lune  est,  avec  la  chouette,  le  symbole  constant  d'Athèna.  Or, 
ce  symbole  est  un  des  signes  caractéristiques  de  la  déesse  asiatique  de  la 
nature.  Le  rapprochement  ne  saurait  être  contesté,  et,  puisque  le  crois- 
sant lunaire  des  monnaies  athéniennes  n'a  pas  été  expliqué  jusqu'ici, 
M.  C.  est  dans  son  droit  quand  il  s'en  fait  un  argument  en  faveur  de  sa 
thèse.  La  lune,  dit-il,  était  le  symbole  de  la  fécondité  de  la  nature, 
d'après  ce  préjugé  accrédité  chez  les  anciens  que  les  nuits  de  clair  de 
lune  sont  abondantes  en  rosée  et  favorisent  la  végétation  des  plantes. 
Nous  n'y  contredisons  pas;  mais  c'est  là  une  interprétation,  contestable 
comme  la  plupart  des  interprétations.  Peut-être  la  lune  et  le  hibou 
d'Athèna  permettent-ils  simplement  de  conclure  que  la  déesse  était  en 
rapport  avec  la  nuit  et  les  phénomènes  nocturnes. 

Ces  objections  de  détail  ne  nous  empêchent  pas  de  reconnaître  que 
l'étude  de  M.  C.  abonde  en  vues  ingénieuses  et  en  curieux  rapproche- 
ments qui,  s'ils  n'entraînent  pas  la  conviction,  forcent  du  moins  à  la 
réflexion  ceux  qui  ne  peuvent  accepter  sa  thèse  tout  entière.  M.  C.  pose 
d'ailleurs  très  nettement  le  problème  qui  reste  à  résoudre,  à  savoir 
quelles  étaient  les  conceptions  religieuses  des  Grecs  avant  leurs  rapports 
avec  les  peuples  sémitiques,  et  il  indique  la  méthode  à  suivre  pour 
obtenir  de  ce  problème  une  solution,  qui  ne  sera  sans  doute  jamais 


i .  Cf.  Eirènè,  xoupoxpéçoç. 

2.  Pausan.,  II,  33,  i. 

3.  On  trouve,  il  est  vrai,  citée  chez  Gerhard  et  chez  Welcker,  une  Athèna  feveçfttç 
qui,  d'après  son  nom,  serait  en  rapport  avec  la  génération.  Vérification  faite,  cette 
épithète  ne  se  rencontre  que  chez  un  écrivain  anonyme  publié  jadis  par  Creuzer 
dans  ses  Meletemata,  et  encore  la  lecture  du  mot  n'est-elle  pas  certaine. 


d'histoire  et  de  littérature  509 

qu'approximative.  Il  faudra  procéder  par  voie  d'élimination,  rechercher 
et  découvrir  tous  les  éléments  assyriens  et  phéniciens  qui  se  sont  intro- 
duits dans  la  religion  hellénique.  Ensuite,  mais  seulement  ensuite, 
l'étude  comparée  des  plus  anciens  monuments  de  la  race  arienne  per- 
mettra peut-être  de  dresser  l'inventaire  du  patrimoine  religieux  propre 
aux  Hellènes.  —  La  méthode  est  excellente  ;  l'application,  à  ne  s'en 
tenir  même  qu'à  la  première  partie  de  la  tâche,  fort  difficile.  Malgré  les 
progrès  de  nos  connaissances  dans  le  domaine  de  l'art  et  des  religions  de 
l'Asie,  il  est  permis  de  croire  qu'il  est  encore  trop  tôt  pour  écrire  cette 
histoire  des  origines  asiatiques  de  la  religion  grecque,  dont  M.  Curtius 
n'a  retracé  qu'une  vive  et  courte  esquisse. 

P.  Decharme. 


2Ô3.  —  Antoine  de  Bourbon  et  Jeanne  d'Albret,  suite  de  Le  mariage 
de  Jeanne  d'Albret,  par  le  baron  Alphonse  de  Ruble.  T.  Il,  Paris,  Labitte, 
1882.  Grand  in-8  de  5o6  p. 

Déjà  deux  fois  de  suite  je  me  suis  ici  trop  étendu  sur  le  mérite  de 
l'ouvrage  de  M.  de  Ruble  l,  pour  que,  négligeant  les  répétitions,  je  ne  me 
contente  pas  de  dire  que  l'auteur  reste  toujours  égal  à  lui-même,  et 
d'indiquer  brièvement  le  contenu  du  troisième  volume  de  l'histoire  de 
Jeanne  d'Albret.  Ce  volume  contient  le  récit  des  événements  accomplis 
depuis  la  mort  de  Henri  II  jusqu'à  la  mort  de  François  II  (10  juillet 
i559-5  décembre  i56o),  événements  parmi  lesquels  le  nouvel  histo- 
rien s'est  surtout  occupé  du  mariage  d'Elisabeth  de  Valois  avec  Phi- 
lippe II,  de  la  conjuration  d'Amboise,  et  des  progrès  de  la  Réforme  en 
Béarn  et  en  Guyenne.  Sur  ces  divers  points,  M.  de  R.  a  multiplié  lesplus 
exacts  renseignements,  tirés  parfois  de  nos  vieux  annalistes,  de  Bellefo- 
rest,  par  exemple,  mais  surtout  tirés  des  documents  inédits  des  archives 
nationales  et  de  la  Bibliothèque  nationale. 

En  ce  qui  regarde  le  mariage  d'Elisabeth  de  Valois,  la  monographie  con- 
sacrée à  cette  princesse  par  le  marquis  Du  Prat  est  complétée  de  la  manière 
la  plus  heureuse  (pp.  64-94  2).  Le  tableau  de  la  conjuration  d'Amboise 
n'avait  pas  encore  été  retracé  avec  autant  de  fidèles  développements.  A 
tout  ce  que  l'on  savait  déjà  sur  ce  dramatique  épisode  du  règne  de  Fran- 
çois II  3,  M.  de  R.  a  su  ajouter  bien  des  particularités  nouvelles,  et,  à  l'a- 

1.  N°  du  ier  septembre  1877,  pp.  120-124  et  n°  du  iermai  1882,  pp.  347-35i. 

2.  M.  de  R.  refuse  d'attribuer  à  la  fille  de  Catherine  de  Médicis  (p.  79)  les  vers 
que  le  marquis  Du  Prat  n'a  pas  hésité  à  publier  sous  le  nom  de  la  future  reine 
d'Espagne.  —  Voir  (pp.  70-71)  d'intéressantes  observations  sur  les  portraits  espa- 
gnols de  Philippe  II  et  d'Elisabeth. 

3.  Il  serait  injuste  de  ne  pas  rappeler  qu'un  excellent  travailleur,  trop  tôt  enlevé 
aux  sciences  historiques,  M.  Charles  Paillard,  avait  donné  à  la  Revue  historique 
1880)  une  étude  très  neuve,  très  importante  sur  la  conjuration  d'Amboise.  M.  de  R. 
n'a  pas  manqué  de  citer  et  de  louer  les  recherches  de  son  devancier  (pp.  159,  188, 
etc.) 


5  10  REVUE    CRITIQUE 

venir,  pas  un  sérieuxhistorienduxvr3  siècle  ne  pourra  se  dispenser  de  lui 
emprunter  les  résultats  d'une  étude  aussi  bien  faite.  Les  plus  récents  et  les 
meilleurs  auteurs  protestants  eux-mêmes  ne  nous  avaient  pas  donné  sur 
les  choses  de  la  Réforme,  pendant  le  règne  de  François  II,  à  Pau,  à 
Montauban,  à  Millau,  à  Villefranche  de  Rouergue,  à  Bordeaux,  à  Ba- 
zas,  à  la  Réole,  à  Agen,  à  Monheurt  (M.  de  R.  écrit  Monhurt,  comme 
on  écrivait  autrefois  *),  à  Villeneuve-d'Agen,  à  Dax,  à  Bayonne,  à  Ber- 
gerac, à  Sainte-Foy,  à  Cognac,  à  Angoulême,  à  la  Rochelle,  à  Niort,  à 
Châteilerault,  les  détails  si  abondants  que  nous  trouvons  dans  le  neu- 
vième chapitre  de  l'ouvrage  (pp.  229-3o3).  Les  récits  de  Théodore  de 
Bèze  sont  tantôt  confirmés,  tantôt  démentis,  toujours  complétés  à  l'aide 
des  plus  sûrs  documents  imprimés  ou  manuscrits.  On  a  souvent  ex- 
primé le  regret  de  ne  pas  posséder  une  édition  plantureusement  anno- 
tée de  ['Histoire  ecclésiastique  des  églises  réformées  au  royaume  de 
France.  Rien  ne  sera  désormais  plus  facile  que  de  préparer  la  partie  de 
cette  édition  qui  correspond  à  la  période  touchant  laquelle  M.  de  R. 
a  recueilli  et  a  discuté  tous  les  témoignages.  Ajoutons  que  le  nouvel 
historien  raconte  et  juge  les  faits  avec  la  plus  ferme  impartialité  et  que 
ses  appréciations  ne  sont  pas  moins  consciencieuses  que  ne  Pont  été  ses 
recherches. 

Le  volume  de  M.  de  R.,  qui  complète  ou  rectifie  tant  d'ouvrages  2,  ne 
pourra  guère  être  complété  ni  rectifié.  Indiquons  toutefois  une  omission 
à  réparer  et  deux  passages  :  l'un,  qui  n'est  pas  assez  exact,  à  retoucher; 
l'autre,  qui  est  entièrement  inexact,  à  supprimer.  —  Sur  la  décapitation 
à  Bordeaux  du  gentilhomme  périgourdin  Denis  Daytz,  seigneur  de 
Memy  ou  plutôt  Maymi,  il  y  aurait  eu  mieux  à  citer  (p.  283)  qu'un  ré- 
cit de  Mézeray  :  M.  de  R.  aurait  pu  rapporter  de  curieuses  lignes  d^ne 
lettre  d'Antoine  de  Noailles  à  Jeanne  d'Albret 3.  —  Louis  de  Lorraine, 
cardinal  de  Guise,  est  jugé  d'une  façon  aussi  insuffisante  que  pittores- 
que dans  la  phrase  où  l'on  nous  apprend  (p.  n)  qu'il  fut  «  célèbre  par 


i.  M.  de  R.  se  sert  encore  (p.  119)  d'une  appellation  inusitée,  quand  il  nous 
montre  «  le  roi  de  Navarre  au  Mas  d'Agen,  près  de  Nérac.  »  Il  s'agit  là  du  Mas- 
d'Agenais,  chef-lieu  de  canton  de  l'arrondissement  de  Marmande,  et  bien  plus  rap- 
proché de  cette  dernière  ville  que  de  Nérac.  Signalons,  pendant  que  nous  en  som- 
mes aux  noms  propres,  une  autre  petite  méprise  :  Le  sénéchal  de  Poitiers,  gendre 
d'Honorat  de  Savoie,  s'appelait  non  Melchior  de  Lettes  (p.  383),  mais  Melchior  des 
Pre%.  Voir,  à  ce  sujet,  les  Vieux  papiers  du  château  de  Cau^ac  (Agen,  1882,  p.  3, 
note  1). 

2.  Voir  notamment  les  observations  de  l'auteur  sur  l'Histoire  de  V administration 
monarchique  en  France  par  M.  Chéruel  (pp.  17,  3i8),  sur  Davila  (p.  25),  sur  plu- 
sieurs historiens,  quant  à  la  date  (18  septembre)  du  sacre  de  François  II  (p.  53),  sur 
Dom  Devienne  (pp.  80,  81),  sur  Palma  Cayet  (p.  83),  sur  La  Planche  et  sur  La  Po- 
pelinière  (p.  141),  sur  La  Planche  et  de  Thou  (pp.  23g,  371,  377),  sur  M.  Dareste, 
à  propos  de  François  Hotman  (pp.  148,  3 16),  sur  M.  de  LaFerrière  (p.  148),  sur 
d'Aubigné  (p.  199),  sur  M.  le  duc  d'Aumale  (p.  216),  etc. 

3.  Antoine  de  Noailles  à  Bordeaux,  1878,  pp.  80-81. 


D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE  5  I  I 

sa  gourmandise.  »  J'ai  essayé  de  montrer  que  ce  prélat  a  eu  de  meil- 
leurs titres  à  l'attention  de  la  postérité  '.  —  Quand  M.  de  R.  croit 
(p.  26 3)  que,  dans  la  commission  désignée  par  le  parlement  de  Bor- 
deaux, à  la  fin  de  mai  i56o,  pour  aller  apaiser  les  troubles  survenus  à 
Tonneins,  composée  du  président  Fronton  de  Berault  et  du  conseiller 
Montaigne,  se  trouvait,  en  la  personne  de  ce  dernier  magistrat,  l'auteur 
des  Essais,  il  se  trompe.  Effaçons  donc  la  triomphante  note  ainsi  con- 
çue :  «  La  présence  de  Montaigne  à  Bordeaux  au  milieu  de  i56o  est  un 
fait  nouveau,  car  tous  les  biographes  le  font  résider  à  la  cour  à  cette 
date.  Voyez  Grun,  la  Vie  publique  de  Montaigne,  in-8°,  i855,  chap.  m. 
Sa  participation  à  une  commission  dirigée  contre  les  séditieux  est  un 
fait  encore  plus  nouveau.  »  La  trouvaille  de  M.  de  Ruble  disparaît  de- 
vant ce  fait  bien  constaté  que  le  conseiller  au  parlement  de  Bordeaux 
envoyé  à  Tonneins  était  l'oncle,  en  même  temps  que  le  confrère  du 
plus  spirituel  des  moralistes,  et  s'appelait  Raymond  Eyquem  de  Mon- 
taigne, Sieur  de  Bussaguet  2. 

T.  de  L. 


264. —  Die  Abtrctung  Vorpommerns  an  Sehweden  und  die  Entacliae- 

dfgung  Kurbrandenburg's,  ein  Beitrag  zur  Geschichte  des  "Westphaelischen 
Friedens,  von  Dr.  Gustav  Breucker.  Halle,  Niemeyer,  1880.  94  p.  8°. 

Le  présent  travail  sort  de  la  plume  d'un  débutant  et  ne  repose  point 
sur  des  sources  nouvelles.  C'est,  dans  son  ensemble,  une  apologie  de  la 
politique  brandebourgeoise  de  1641  à  1648,  politique  qui  se  distingua 
de  celle  des  autres  états  de  l'empire,  au  dire  de  l'auteur,  en  ce  qu'elle 
fut  à  la  fois  nationale-allemande  et  personnellement  désintéressée.  On 
sait  que  pour  Frédéric-Guillaume,  le  grand  Electeur,  il  s'agit  surtout, 
aux  négociations  de  Munster,  d'obtenir  le  duché  de  Poméranie,  dont  la 
famille  régnante  était  éteinte,  et  qui  devait  lui  revenir  en  vertu  d'anciens 
traités  de  famille.  La  Suède,  de  son  côté,  poursuivant  son  rêve  de  faire 
de  la  Baltique  un  lac  suédois,  n'entendait  pas  renoncer  aux  territoires 
dont  elle  avait  pris  possession  depuis  des  années  déjà.  M.  Breucker  a 
longuement  exposé  ces  négociations  d'après  les  recueils  bien  connus  du 


r.  Lettres  inédites  du  cardinal  d'Armagnac,  1874,  p.  72,  note  1. 

2.  Parmi  les  Pièces  justificatives  (p.  445-5oo),  citons,  au  milieu  de  diverses  lettres 
simplement  analysées,  les  lettres  reproduites  in  extenso  d'Antoine  de  Bourbon,  des 
officiers  du  roi  de  la  ville  de  Dax,  de  l'ambassadeur  Chantonay,  de  Claude  de  l'Au- 
bespine,  d'Elisabeth  de  Valois,  de  d'Escars,  de  Buric,  de  Paule  de  Thermes,  de 
Montpezat,  de  Janus  Frégose,  évêque  d'Agen.  Toutes  ces  lettres,  quoi  qu'en  dise 
M.  de  Ruble  (p.  445,  note  1)  ne  sont  pas  inédites,  et,  pour  ma  part,  j'en  ai  déjà 
publié  deux  au  moins,  la  lettre  de  Buric,  dans  le  tome  X  des  Archives  historiques 
du  département  de  la  Gironde  (1868,  p.  3i5),  et  la  lettre  de  J.  Frégose  dans  mon 
petit  recueil  des  Lettres  de  ce  prélat  (1873,  p.  12). 


5  12  REVUE    CRITIQUE 

xvne  et  du  xvine  siècle,  les  Acta  pacis  de  Meyern,  Chemnitz,  Pufendorf, 
les  Négociations  secrètes  du  traité  de  Munster,  la  Friedenskan^lei 
de  Gaertner,  etc.,  puis  d'après  la  collection  des  Urkunden  und  Akten- 
stiicke  relatifs  au  grand  Electeur,  en  cours  de  publication  d'après  Geijer 
et  Odhner,  le  plus  récent  travail  d'ensemble  sur  la  politique  suédoise  à 
cette  époque.  Il  a,  chemin  faisant,  rectifié  quelques  dates,  mal  impri- 
mées dans  les  recueils  cités  '  ;  pour  le  fond,  nous  ne  voyons  pas  trop  en 
quoi  son  récit  pourrait  changer  la  manière  de  voir  antérieure  sur  la 
question.  Frédéric-Guillaume,  semblable  en  ce  point  à  tous  ses  collègues 
couronnés,  représentés  au  congrès  de  Munster  et  d'Osnabriick,  a  tâché 
de  réclamer  autant  que  possible,  afin  d'obtenir,  en  fin  de  compte,  au  moins 
quelque  chose.  Son  obstination  à  ne  rien  céder  de  ses  prétentions  venait 
à  coup  sûr  plutôt  de  l'ennui  qu'il  éprouvait  à  diminuer  le  patrimoine  de 
sa  maison  que  de  la  douleur  de  voir  passer  des  parcelles  de  terre  alle- 
mande entre  les  mains  de  l'étranger.  Cette  obstination  faillit  lui  coûter 
la  Poméranie  tout  entière  ;  et,  si  cela  n'arriva  point,  c'est  à  l'habile  et 
énergique  intervention  du  comte  d'Avaux,  jaloux  de  la  Suède,  qu'il  le 
dut  en  bonne  partie.  Après  cet  aveu,  deux  fois  répété  (pp.  82,  87),  on 
ne  s'explique  pas  bien  pourquoi  l'auteur  nous  parle  si  souvent  de  «  l'ou- 
trecuidance française  »,  de  «  la  jalousie  et  l'envie  des  Français,  »  etc.  Il 
me  semble  que  parler  ainsi,  c'est  un  peu  forcer  la  note  et  devancer  consi- 
dérablement l'histoire;  en  1648,  le  roi  de  France  n'avait  pas  à  jalouser 
le  margrave  de  Brandebourg.  En  tout  cas,  l'indignation  de  M.  Breucker 
serait  mieux  à  sa  place,  si,  au  lieu  de  la  tourner  contre  la  diplomatie 
française,  qui  faisait  en  somme  son  métier,  il  la  dirigeait  contre  le  comte 
de  Trautmannsdorf,  le  représentant  de  l'empereur;  c'est  lui  qui  offrit 
Brème,  Verden  et  la  Poméranie  aux  Suédois,  afin  de  sauver  la  Silésie 
aux  Habsbourgs. 

La  fin  du  travail  est  consacrée  au  récit  des  négociations  qui  donnèrent 
à  l'Electeur  les  évêchés  de  Minden,  Halberstadt  et  l'archevêché  de  Mag- 
debourg,  en  échange  delamoitiéde  la  Poméranie,  qui  restait  à  la  Suède. 

R. 


•265.  —  La  diplomatie  française  au  XVII*  siècle.  Hugues  de  Lionne,  ses 
ambassades  en  Espagne  et  en  Allemagne,  la  paix  des  Pyrénées,  d'après  sa  corres- 
pondance conservée  aux  archives  du  ministère  des  Affaires  étrangères,  par  J.  Val- 
frey.  Un  vol.  in-8°  de  cxxxi-33o  pages.  Paris,  Didier,  1881.  Prix  :  7  fr.  5o. 

Ce  nouvel  ouvrage  de  M.  Valfrey  est  bien  supérieur  au  précédent  (Hu- 
gues de  Lionne,  ses  ambassades  en  Italie,  1  vol.  in-8"),  dont  il  a  été 
rendu  compte  ici  même  il  y  a  cinq  ou  six  ans.  Stimulé  peut-être  par  les 
vives  critiques  dont  son  livre  avait  été  l'objet,  M.  V.  a  fait  cette  fois 
œuvre  de  véritable  historien,  et  les  trois  mémoires  ou  chapitres  qu'il 


1.  P.  5g  lisez  Forstnerus,  pour  Fostnerus. 


d'histoire  et  de  littérature  5i3 

vient  de  réunir  en  un  volume  sont  excellents;  on  est  heureux  de  pou- 
voir les  louer  presque  sans  réserves. 

Le  titre  qu'a  choisi  M.  V.  n'est  pas  celui  qui  convient  le  mieux  à  son 
livre  :  Hugues  de  Lionne,  dont  M.  V.  paraît  vouloir  faire  le  centre  de 
son  étude,  ne  joue  un  rôle  prépondérant  que  dans  la  première  partie,  à 
Madrid  ;  partout  ailleurs  il  est  relégué  au  second  plan,  et  c'est  Mazarin 
qui  dirige  les  négociations.  Cette  critique  tomberait  d'elle-même  si  le 
livre  eût  été  intitulé  :  la  paix  des  Pyrénées,  ses  préliminaires,  sa  con- 
clusion (i656-i659).  L'ouvrage  est  divisé  en  3  parties  distinctes,  en 
3  livres  :  i°  les  conférences  secrètes  de  Madrid  (i656);  20  l'élection 
de  l'empereur  Léopold  Ier  et  constitution  de  la  ligue  du  Rhin  (i658); 
3°  la  paix  des  Pyrénées  (1658-1659);  une  longue  exposition,  néces- 
saire, comme  le  dit  M.  V.,  pour  conduire  le  lecteur  au  seuil  de  ces  négo- 
ciations importantes,  permet  de  voir  nettement  quelle  était,  depuis  i635, 
la  situation  respective  de  la  France  et  de  l'Espagne.  Le  premier  livre 
est  d'un  très  grand  intérêt,  et  M.  V.  puisant  à  pleines  mains  dans  les 
archives  des  affaires  étrangères,  montre  bien  ce  qu'il  y  a  de  merveil- 
leuse habileté  dans  cette  lutte  de  Lionne  contre  don  Luis  de  Haro; 
grâce  à  notre  ambassadeur,  Arras  et  Perpignan  étaient  assurés  à  la 
France  dès  i656.  Tout  ce  premier  livre  pourrait  être  inséré  sans  chan- 
gement dans  une  monographie  de  Lionne,  monographie  que  M.  V.  aura 
sans  doute  à  cœur  de  composer. 

Il  n'en  est  pas  de  même  du  second  livre;  Lionne  est  à  Francfort  avec 
le  maréchal  de  Gramont;  c'est  le  maréchal  qui  a  le  titre  d'ambassadeur, 
et  l'on  ne  voit  pas  très  bien  quelle  est  la  part  de  son  illustre  second 
dans  les  négociations  qui  aboutissent,  après  un  échec  grave,  à  la  consti- 
tution de  la  ligue  du  Rhin,  en  1 658- 

Au  troisième  livre,  c'est  Mazarin  qui  négocie  en  personne,  et  cette 
dernière  partie  de  l'ouvrage  est  un  excellent  chapitre  d'histoire  générale; 
M.  V.  y  met  en  pleine  lumière  le  génie  diplomatique  de  Mazarin,  et 
prouve  surabondamment  que  ce  ministre  tant  décrié  pouvait  dire  avec 
raison  :  «  Mon  cœur  est  français,  si  mon  langage  ne  l'est  pas.  »  M.  V, 
rend  un  véritable  service  aux  études  historiques  en  faisant  ainsi  connaî- 
tre par  le  détail  cette  glorieuse  négociation  et,  si  l'on  pouvait  regretter 
quelque  chose  en  lisant  cette  histoire,  ce  serait  de  n'y  pas  trouver  en 
assez  grande  abondance  les  documents  que  M.  V.  emprunte  aux  archi- 
ves des  affaires  étrangères  ;  il  eût  été  avantageux  de  lire  en  note  au  bas  des 
pages  ou  en  appendice  à  la  fin  du  volume  les  importantes  dépêches  dont 
M.  V.  n'a  donné  que  des  fragments.  Il  faut  espérer  que  M.  Valfrey,  en- 
couragé par  le  succès,  continuera  ses  travaux  et  nous  donnera  enfin  une 
savante  biographie  de  Hugues  de  Lionne. 

A.  Gazier. 


5  14  REVUE    CR1TIQUK 

CHRONIQUE 


FRANCE.  —  M.  Gustave  Schlumberger  vient  de  publier  chez  M.  Leroux  le  premier 
volume  des  Œuvres  d'Adrien  de  Longpérier.  La  collection  des  œuvres  éparses  de 
l'illustre  académicien  comprendra  cinq  volumes.  Le  premier  qui  vient  de  paraître  est 
consacré  aux  mémoires  concernant  l' Archéologie  orientale  antique  et  les  Monuments 
arabes.  Les  deux  volumes  suivants  seront  réservés  aux  questions  d'antiquité  clas- 
sique, gauloise,  grecque  et  romaine.  Les  deux  derniers  contiendront  des  travaux  sur 
le  moyen  âge  et  la  Renaissance.  La  collection  complète  comprendra  plus  de  trois 
cents  articles  et  mémoires  disséminés  dans  une  foule  de  Revues  et  de  publications 
savantes  de  la  France  et  de  l'étranger.  Beaucoup  parmi  ces  mémoires  seraient  in- 
trouvables aujourd'hui.  La  première  et  plus  grande  partie  de  ce  premier  volume  est, 
consacrée  aux  questions  d'archéologie  orientale,  c'est-à-dire  d'archéologie  égyptienne, 
assyrienne,  chaldéenne,  perse,  juive,  parthe,  phénicienne,  Iycienne,  'bactrienne, 
arménienne,  himyaritique,  éthiopienne,  eic,  jusqu'aux  antiquités  chinoises  et 
japonaises  dans  leurs  rapports  avec  celles  de  l'ancien  monde.  Une  seconde  division 
est  réservée  aux  travaux  de  M.  de  Longpérier  sur  les  antiquités  arabes  ou  coufiques 
de  toutes  sortes.  En  tout,  le  volume  contient  cinquante-cinq  mémoires  dont  plu- 
sieurs fort  considérables.  Pour  donner  une  idée  de  la  variété  et  de  l'importance  des 
sujeis  traités  par  ce  maître  que  M.  Schlumberger  traite  avec  raison  dans  sa  préface 
d'archéologue  universel,  il  faudrait  reproduire  ici  la  table  entière  de  ce  premier  vo- 
lume. Toutes  les  branches  de  l'archéologie  y  figurent.  Les  questions  de  numis- 
matique occupent  naturellement  une  place  importante,  mais  dans  cette  section 
même  il  se  trouve  autant  à  glaner  pour  les  archéologues  qui  ne  font  pas  de  l'étude 
des  monnaies  le  sujet  de  leurs  préoccupations  exclusives.  L'épigraphie,  la  philologie, 
l'archéologie  monumentale  et  figurée  sont  largement  représentées.  Nous  citerons 
parmi  les  articles  les  plus  importants  contenus  dans  ce  premier  volume  les  travaux 
sur  les  monnaies  des  rois  parthes,  des  rois  de  Bactriane,  des  rois  des  Omanes,  des 
rois  de  la  Characène,  des  rois  d'Ethiopie,  des  villes  de  Lycie,  des  princes  himyarites, 
des  khalifes  de  Bagdad,  des  rois  de  Caboul,  des  Arabes  d'Espagne,  des  princes 
maures  de  Tanger,  des  petits  dynastes  sarrasins,  sur  les  monnaies  arabes  à  légen- 
des latines,  sur  celles  des  princes  chrétiens  à  légendes  arabes,  les  mémoires  si  im- 
portants sur  les  premières  antiquités  assyriennes  rapportées  au  Louvre  par  Botta, 
sur  les  antiquités  chaldéennes  anciennement  ou  récemment  retrouvées,  sur  le  fameux 
vase  dit  d'Artaxercès,  sur  des  coupes  sassanides  et  assyriennes,  sur  des  miroirs 
arabes,  des  coupes  arabes,  des  vases  arabes,  des  lampes  arabes,  sur  la  découverte  des 
monuments  de  Ptérie,  sur  l'introduction  des  noms  perses  en  Occident,  sur  des  vases 
juifs,  des  sceaux  juifs,  des  inscriptions  juives,  sur  l'écriture  juive  carrée,  sur  des 
inscriptions  phéniciennes,  sur  les  fameux  bronzes  de  Van,  sur  l'emploi  des  caractè- 
res arabes  dans  l 'ornementation  des  peuples  d'Occident,  sur  l'écriture  dite  baberi,, 
les  inscriptions  arabes,  etc.,  etc.  De  nombreuses  planches  et  vignettes  ornent  ce 
beau  volume.  M.  Schlumberger  a  mis  en  tête  la  notice  très  complète  et  très  détaillée 
de  la  vie  et  des  travaux  de  M.  de  Longpérier  qu'il  a  rédigée  pour  la  Société  des 
antiquaires  de  France. 

—  M.  Clermont-G^nneau  vient  de  publier  dans  le  tome  IX  (3me  série)  des  Archives 
des  missions  sciejitifiques  et  littéraires,  quatre  premiers  rapports  sur  une  mission  en- 


d'histoire  et  de  littérature  5i5 

treprise  par  lui  en  1881  en  Palestine  et  en  Phénicie  L  Atteint  [du  typhus  à  Jafï'a, 
presque  au  début  de  cette  nouvelle  série  d'explorations,  M.  C.-G.  a  malheureusement 
perdu  plusieurs  mois  et  n'a  pu  exécuter  complètement  le  programme  qu'il  s'était 
tracé.  Néanmoins,  M.  C.-G.  a  fait,  cette  fois  encore,  d'importantes  trouvailles  parmi 
lesquelles  nous  signalerons  :  une  statue  d'épervier  colossal,  symbole  du  dieu  phé- 
nicien Reseph,  découverte  à  Arsouf,  ville  dénommée  d'après  ce  dieu,  et  plusieurs 
inscriptions  phéniciennes  et  hébraïques  archaïques,  dont  une  trouvée  au  Mont  Carmel, 
et  une  autre  gravée  sur  une  statuette  représentant  l'Astarté,  déesse  des  Sidoniens; 
un  chapiteau  à  inscription  bilingue  grecque  et  hébraïque  archaïque,  auquel  il  consa- 
cre une  longue  dissertation;  un  nouvel  exemplaire  des  textes  grecs  et  hébreux  gra- 
vés sur  broches  et  marquant  le  périmètre  de  Gezer;  un  fragment  de  bas-relief  éta- 
blissant que  les  anciens  avaient  positivement  connu  la  ferrure  à  clous  pour  les 
chevaux;  un  assez  grand  nombre  d'inscription  hébraïques  carrées,  grecques,  judéo- 
grecques  et  romaines  qui  viennent  enrichir  l'épigraphie  si  pauvre  de  la  Palestine  ; 
plusieurs  monuments  des  Croisés,  notamment  une  magnifique  épitaphe,  en  français 
(avec  les  armoiries),  d'un  sire  Gauthier  Meineabeuf  et  de  sa  femme,  morts  à  Acre  en 
1278;  une  porte  inconnue  dans  l'enceinte  du  Haram  (ancien  temple  juif),  à  Jérusalem, 
où  M.  C.-G.  a  décidé  les  Turcs  à  entreprendre  eux-mêmes  des  fouilles;  divers  ob- 
jets antiques  de  différentes  époques,  en  terre  cuite,  verre,  bronze,  marbre,  calcaire, 
pierres  dures,  etc., —  notamment  une  belle  tête  de  statue  colossale  en  marbre  prove- 
nant de  Sébaste  (Samarie),  un  grand  plat  juif  en  bronze  massif,  orné  de  curieuses 
décorations,  un  ciseau  en  jadéite,  provenant  de  Baabelk,  spécimen  de  l'âge  de  pierre, 
d'une  rare  perfection,  etc..  —  Dans  un  cinquième  et  dernier  rapport,  qui  paraîtra 
dans  le  tome  suivant  de  la  même  publication,  M.  C.-G.  donnera  une  relation 
des  localités  de  Palestine  et  de  Phénicie  qu'il  a  explorées  ou  visitées  au  cours 
de  cette  dernière  mission  avec  un  relevé  des  découvertes  ou  des  observations  topo- 
graphiques qu'il  y  a  faites,  et  le  catalogue  des  monuments  qu'il  y  a  recueillis  soit  en 
originaux,  soit  en  reproductions  (dessin,  photographies,  estampages,  moulages 
et  empreintes).  Les  monuments  de  cette  dernière  catégorie,  au  nombre  d'une 
centaine  environ,  rapportés  en  France  par  M.  C.-G.  pour  le  compte  de  l'Etat, 
sont  actuellement  déposés  au  Louvre  jusqu'à  ce  qu'il  soit  statué  sur  leur  destination 
définitive. 

ALLEMAGNE.  —  M.  Hermann  Brunnhofer,  bibliothécaire  du  canton  d'Aarau, 
rient  de  publier  un  grand  ouvrage  sur  Giordano  Bruno  {Giordano  Bruno's  Weltan- 
schaunng  und  Verhcengniss,  aus  den  Quellen  dargestellt.  Leipzig,  Fues.  In-8°, 
8  mark).  L'ouvrage  comprend  deux  parties;  I.  La  vie  et  les  œuvres  de  Bruno;  II.  sa 
doctrine. 

—  La  même  librairie  publie  une  sixième  édition  du  Sachsenspiegel,  donnée  autre- 
fois, d'après  le  plus  ancien  manuscrit  de  Leipzig  par  Jul.  Weiske  et  revue  par  M.  Rud. 

HlLDEBRAND. 

—  Le  IIe  vol.  de  1'  ce  Histoire  de  l'Allemagne  au  xixe  siècle.  »  (Deutsche  Ge- 
schichte  ï,n  neun^ehnten  Jahrhundert  (Leipzig,  Hirzel.  In-8°,  9  mark),  de  M.  H.  de 
Treitschke,  vient  de  paraître;  il  est  consacré  aux  «  commencements  de  la  confédé- 
ration germanique  »  {Die  Anfœnge  des  deutschen  Bundes)  de  18 14  à  181  g  et  se  di- 
vise ainsi  :  III.  Geistige  Strœmungen  der  ersten  Friedensjahre  ;  IV.  Die  Erœffnung 
des  deutschen  Bundestages ;  V.  Die  Wiederherstellung  des  preussischen  Staates  ;  VI. 
Sùddeutsche  Verfassungskcempfe;  WU.  Die  Barschenschaft ;  VIII.  Der  Aachener  Con- 


1.  En  tirage  à  part  chez  Maisonneuve   25,  quai   Voltaire. 


5  I  6  RXVUK    CKITIQUE 

gress  ;    IX.    Die  Karlsbader    Beschlûsse  ;   X.    Der    Umschwung  am  preussischen 
Hofe. 

—  Le  7e  fascicule  de  Y  Histoire  de  la  littérature  allemande  de  M.  W.  Scherer  (Ber- 
lin, Weidmann.  In-8°,  pp.  465-544)   renferme  la  suite  du   xie  chapitre  consacré  au 

siècle  de  Frédéric  le  Grand  »,  et  les  premières  pages  du  [xne  chapitre,  intitulé 
«  Weimar  ». 

—  Le  14  nov.  est  mort  à  Zurich,  à  l'âge  de  67  ans,  Gottfried  Kinkel.  Il  était  né  à 
Oberkassel  près  de  Bonn  (181D);  il  fit  ses  études  à  l'Université  de  Bonn  et  y  devint 
«  privat-docent  »  de  théologie  (i836);  il  faisait  des  cours  sur  l'histoire  de  l'art  chré- 
tien. Il  voyag-ea  en  Italie  (1837),  et,  à  son  retour  à  Bonn,  se  lia  intimement  avec 
Simrock,  Freiligrath,  etc.  En  i83g  il  se  maria  avec  l'épouse  divorcée  d'un  libraire, 
Johanna  Mathieux;  Johanna  avait  fondé  à  Bonn  le  Maikœferbund  ou  «  union  du 
hanneton  »  qui  réunit  des  amis  de  la  poésie,  Simrock,  Kaufmann,  Schlœnbach,  Bec- 
ker.  Devenu  pasteur  de  la  communauté  évangélique  de  Cologne  ,  Kinkel  déplut  aux 
orthodoxes;  il  renonça  à  la  théologie  (1843),  et  enseigna  l'histoire  de  l'art  d'abord 
comme  privat-docent,  puis  comme  professeur  (1846).  En  1848,  il  fut  membre  de 
l'Assemblée  nationale  prussienne;  après  la  dissolution  de  la  chambre,  il  s'attacha  au 
parti  républicain,  prit  part  à  l'attaque  de  l'Arsenal  de  Siegburg  et  à  l'insurrection  du 
Palatinat  et  de  Bade;  blessé,  et  fait  prisonnier,  puis  enfermé  à  Spandau,  il  fut  déli- 
vré par  un  étudiant,  Ch.  Schurz,  'depuis  sénateur,  ambassadeur  et  ministre 
des  Etats-Unis)  qui  réussit  à  tromper  ses  gardiens.  Il  alla  vivre  en  Angle- 
terre; en  1866,  il  fut  appelé  au  «  Polytechnikum  »  de  Zurich  pour  y  professer 
l'histoire  de  l'art.  Il  a  composé  des  poésies,  une  épopée  Otto  der  Schiitç  (1841),  des 
Récits,  etc.  ;  un  ouvrage  spécial  de  Kinkel  qui  rentre  dans  le  cadre  de  notre  recueil, 
est  sa  Geschichte  der  bildenden  Kûnste  bei  den  christlichen  Vœlkern. 

ANGLETERRE.  —  M.  Edmund  W.  Gosse  doit  éditer  pour  1'  «  HunterianS  ociety  » 
les  œuvres  d'un  poète  du  temps  d'Elisabeth,  Thomas  Lodge. 

—  Miss  Phipson,  membre  de  la  «  New  Shakspere  Society  »,  publiera  au  printemps 
prochain  un  ouvrage  intitulé  :  The  Animal-Lore  of  Shaksperé's  Time. 

—  Il  va  se  fonder  à  Edimbourg,  sur  le  modèle  de  1'  «  Early  English  Text  So- 
ciety »  une  «  Early  Scottish  Text  Society;  dans  une  réunion  préliminaire  qui  a 
eu  lieu  le  17  novembre  et  à  laquelle  assistaient  M.  Aeneas  J,  G.  Mackay,  prési- 
dent de  l'assemblée,  le  Rev.  Walter  Gregor,  M.  Arthur  Mitchell  et  les  bibliothécai- 
res de  toutes  les  grandes  bibliothèques  d'Edimbourg,  on  a  communiqué  la  liste 
des  futurs  membres  de  la  Société,  dont  le  nombre  s'élève  déjà  à  deux  cents  ;  dès 
que  la  société  comptera  trois  cents  membres,  elle  se  constituera.  MM.  Skeat,  Fur- 
nivall,  Murray  et  d'autres  érudits,  appartenant  à  F  «  Early  English  Text  Society,  » 
se  sont  offerts  à  la  Société  d'Edimbourg  comme  éditeurs  de  textes.  Les  premières 
publications,  sur  lesquelles  on  peut  compter,  seront  celles  des  Œuvres  de  Jac- 
ques I"  (éditeur,  M.  Skeat)  et  des  Œuvres  de  Dunbar  (éditeur,  M.  Small,  biblio- 
thécaire de  l'Université  d'Edimbourg).  M.  W.  Gregor  a  été  nommé  secrétaire  hono- 
raire de  la  Société;  MM.  W.  Blackwood  et  fils  en  seront  les  éditeurs. 

—  L'  «  English  Dialect  Society  »  publiera  l'année  prochaine  :  I.  un  Glossary  of 
West  Worcestershire  Words,  par  Mrs.  Chamberlain;  II.  le  Book  of  Husbandry  de 
Fitzherbert  (1534),  édité  avec  introduction,  notes  et  glossaire  par  M.  Skeat; 
III.  Devonshire  Plant-Names,  par  M.  H.  Friend;  IV.  la  2'  partie  du  Glossary  of 
the  Lancashire  Dialect  (F.-Z.),  par  MM.  Nodal  et  George  Milner. 

—  Mrs.  Mark  Pattison  prépare  une  Biographie  de  Joseph  Scaliger,  qui  sera  le 
complément  de  l'ouvrage  qu'elle  a  publié  en  1874  surlsaac  Casaubon. 

—  Une  Encyclopaedia  of  biblical,  historical  and  practical  theology  doit  paraître  à 


d'histoire  et  de  littérature  5 17 

Edimbourg,  chez  les  éditeurs  Clark.  Elle  est  conçue  sur  le  même  plan  que  la  Real- 
Encyclopaedie  de  Herzog,  et  en  reproduit  les  articles  les  plus  importants;  mais  elle 
renfermera  de  nouveaux  articles,  dus  à  des  savants  d'Angleterre  et  des  Etats-Unis  ; 
elle  comprendra  trois  volumes  ;  le  directeur  de  l'entreprise  est  le  professeur  Schaff. 

—  On  annonce  la  prochaine  publication  de  la  grande  édition  de  Keats,  depuis 
longtemps  annoncée  par  M.  Buxton  Forman. 

—  Un  dictionnaire  de  la  langue  behari  doit  paraître  prochainement,  par  les  soins 
de  MM.  Grierson  et  Hoernle. 

—  Le  prof.  Palmer,  dont  on  a  récemment  appris  l'assassinat,  aura  bientôt  une 
biographie,  un  memoir  dont  l'auteur  est  M.  Walter  Besant  ;  ce  dernier  accueillera 
avec  reconnaissance  tous  les  documents  et  renseignements  qu'on  pourra  lui  fournir 
sur  Palmer;  l'adresse  de  M.  Besant  est  :  «  The  United  Universities  Club,  Suffolk 
Street,  Pall  Mail.  » 

—  Il  vient  de  paraître  à  Londres  chez  l'éditeur  Trùbner,  sous  le  titre  de 
«  The  Vaçîr  of  Lankurdn  »  une  véritable  curiosité  littéraire.  Le  Vizir  de  Lankurân  est 
une  comédie  persane  en  quatre  actes  dans  laquelle  sont  très  vivement  peintes  les 
mœurs  des  Iraniens  modernes.  Le  style  en  est  fort  intéressant,  car  il  nous  offre  un 
spécimen  du  persan  tel  qu'il  est  parlé  de  nos  jours.  Les  éditeurs,  MM.  W.  H.  D.  Hag- 
gard  et  G.  Le  Strange,  ont  joint  à  ce  texte,  capital  pour  l'étude  de  l'idiome  de  Téhéran, 
une  excellente  traduction,  des  notes  expliquant  les  néologismes  et  les  allusions  aux 
coutumes,  et  un  vocabulaire  complet  qui  forme  une  importante  contribution  à  la 
lexicographie  persane.  Dans  une  introduction,  ils  s'étendent  sur  la  prononciation  ac- 
tuelle de  Téhéran  et  sur  quelques  particularités  de  grammaire  et  de  syntaxe.  MM.  Hag- 
gard  et  Le  Strange  ayant  passé  plusieurs  années  en  Perse,  leurs  observations  en  acquiè- 
rent une  valeur  toute  particulière.  Nous  recommandons  chaudement  à  nos  lecteurs  cet 
ouvrage,  l'un  des  plus  importants  qui  aient  paru  depuis  longtemps  sur  la  Perse  et  le 
persan.  Le  texte  est  généralement  très  correct.  Tout  au  plus  y  relèvera  t-on  quelques 
fautes  d'impression,  comme  ândjdm  pour  end] dm  (p.  3);  befarmdîd  pour  befarmdyîd 
(p.  10);  harf par  un  h  doux,  et  tavîkè  pour  tavilè  (p.  11),  etc.  Nous  consacrerons  d'ail- 
leurs un  article  à  cette  utile  et  intéressante  publication. 

BELGIQUE.  —  Le  second  volume  de  l'ouvrage  de  M.  Willems,  Le  sénat  de  la  ré- 
publique romaine,  a  paru  (Louvain,  Peeters.  In-8°,  784  p.);  il  a  pour  sous-titre  :  Les 
attributions  du  sénat;  en  voici  les  divisions  :  Le  sénat  durant  la  vacance  du  pouvoir 
exécutif  ou  des  magistratures  patriciennes,  l'interregnum.  —  Les  rapports  du  sénat 
et  des  magistrats.  —  Le  sénat  conseil  du  pouvoir  administratif  et  exécutif.  —  Les  dé- 
partements de  l'intérieur  et  de  la  justice.  —  Le  département  du  culte.  —  Le  dépar- 
tement des  finances  et  des  travaux  publics.  —  Le  département  des  affaires  étrangères. 
—  Le  département  de  la  guerre.  —  L'administration  de  l'Italie  et  des  provinces.  — 
Les  pouvoirs  et  le  rôle  du  sénat  pendant  la  dernière  période  de  la  République. 

—  M.  Henri  Hymans,  conservateur  du  cabinet  des  estampes  à  la  Bibliothèque  royale 
de  Bruxelles,  publiera  prochainement  une  traduction  française  du  Livre  des  peintres, 
de  Van  Mandez  avec  une  introduction  historique  et  des  notes. 

—  Dans  sa  séance  du  6  novembre,  la  classe  des  lettres  de  l'Académie  royale  de  Bel- 
gique a"voté  l'impression,  dans  ses  Mémoires,  d'un  travail  de  M.  Alph.  Willems,  qui 
a  pour  titre  :  Notes  et  corrections  à  VHippolyte  d'Euripide,  et  entendu  la  lecture 
d'une  notice  de  M.  Thonissen  sur  la  justice  criminelle  en  France  de  1  826  à  1880. 

—  La  Société  pour  le  progrès  des  études  philologiques  et  historiques  a  tenu  séance 
le  29  octobre;  M.  Brants  a  fait  une  lecture  sur  la  condition  du  travailleur  libre  à 
Athènes  ;  M.  Hegener,  sur  les  distributions  de  prix;  MM.  Motte  et  Thomas,  sur 
l'Ecole  normale  supérieure  de  Paris.  M.  Motte  devait  encore  faire  une  lecture  sur  le 


5l8  RKVUR   CRtTIQUR 

prêta  Sparte;  mais,  vu  l'heure  avancée,  cette  lecture  a  été  renvoyée  à  la  session  de 
Pâques  t883. 

—  La  commission  royale  d'histoire  a,  dans  sa  séance  du  6  novembre,  en- 
tendu une  notice  de  M.  Devillers  sur  le  Hainaut  sous  le  règne  de  Maximilien 
d'Autriche  de  1483  à  1485;  cette  notice  s'appuie  sur  des  documents  tirés  des  comp- 
tes et  registres  du  conseil  de  Mons  et  des  Etats  de  Hainaut,  ainsi  que  sur  des  mé- 
moires de  la  ville  de  Valenciennes  par  Jean  Cocqueau. 

—  Ceux  de  nos  lecteurs  qui  ont  suivi  attentivement  les  détails  du  procès  Bernays 
auront  remarqué,  parmi  les  amis  de  l'avocat  anversois  qui  ont  déposé  devant  la 
cour  d'assises  de  Bruxelles,  le  nom  d'un  chef  d'escadrons  de  hussards  prussiens,  le 
baron  d'ARDENNE.  Bernays  et  M.  d'Ardenne  avaient  conçu  le  plan  d'un  grand  ouvrage 
historique  sur  les  destinées  des  troupes  de  la  Confédération  du  Rhin;  ils  avaient 
déjà  rassemblé  les  matériaux  relatifs  au  contingent  de  Francfort.  Ce  sont  ces  docu- 
ments que  M.  d'Ardenne  a  publiés  et  mis  en  œuvre  dans  le  livre  qui  vient  de  paraî- 
tre à  Berlin,  chez  Mittler,  sous  le  nom  de  Guillaume  Bernays  et  qui  a  pour  titre  : 
Schicksale  des  Grossher^ogthums  Frank furt  und  seiner  Truppen,  eine  culturhisto- 
rische  und  militœrische  Studie  aus  der  Zeit  des  Rheinbundes.  (In-8%  489  pp. 
10  mark.)  On  trouvera  dans  cet  ouvrage  de  nombreux  détails,  souvent  très  instruc- 
tifs, sur  les  opérations  militaires  des  troupes  francfortoises;  elles  combattirent  bra- 
vement, de  1806  à  181 3,  pour  Napoléon,  en  Espagne,  en  Russie  et  dans  Danzig  as- 
siégé; on  sait  que  Dalberg,  prince-primat  de  la  Confédération  du  Rhin,  possédait 
alors  en  toute  souverainté  Francfort-sur-le-Mein,  et  en  fut  nommé  grand-duc  dans 
l'année  1810. 

BOHÊME.  —  Depuis  le  mois  de  mars  paraît  à  Prague  une  revue  hebdomadaire, 
la  Deutsche  Hochschule  ;  «  organe  des  étudiants  allemands  »,  publiée  par  M.  Max 
Anton,  avec  la  collaboration  d'Em.  Kuh.  La  Deutsche  Hochschule  ou  P  «  Université 
allemande  »  est  une  réponse  aux  derniers  événements  de  Bohême,  à  l'incident  de 
Kuchelbad,  à  la  division  de  l'Université  de  Prague  en  université  allemande  et  uni- 
versité tchèque  ;  aussi  se  publie-t-elle  à  Prague  même,  «  cette  ancienne  pépinière 
de  la  science  allemande,  cette  forteresse,  si  menacée,  de  la  culture  allemande  »;  elle 
est  l'organe,  non -seulement  des  étudiants  allemands  de  Prague,  mais  de  tous  les 
étudiants  d'Allemagne  ;  elle  se  donne  la  tâche  «  de  défendre  avec  tout  le  feu  de 
l'inspiration  universitaire,  avec  une  juvénile  intrépidité,  et  le  caractère  de  l'univer- 
sité allemande  de  Prague,  et  l'Allemagne  universitaire,  VAkademisches  Deutschthum, 
partout  où  elle  prospère  ou  lutte  pour  la  perfection,  malgré  les  obstacles  et  les  en- 
traves ».  Outre  de  fréquents  appels  au  patriotisme  allemand,  ce  journal  renferme  des 
correspondances,  non-seulement  de  Vienne,  de  Gratz  et  de  Prague,  mais  aussi  des 
autres  universités  allemandes  ;  ainsi  que  des  articles  amusants,  des  feuilletons  hu- 
moristiques, et  même  des  études  sérieuses  et  scientifiques,  comme,  par  exemple,  de 
Félix  Dahn  sur  Sidney,  sur  Locke,  sur  les  écoles  de  droit,  de  Max  Grûnert  sur  les 
proverbes  et  dictons  orientaux,  etc.;  Anzengruber,  Baumbach,  Eckstein,  Franzos, 
Hamerling  et  autres  ont  promis  à  la  «  Deutsche  Hochschule  »  leur  collaboration. 

—  Le  24  octobre  est  mort  à  Prague,  sa  ville  natale,  dans  sa  82e  année,  le  poète 
Karl  Egon  Ebert.  Après  avoir  fait  ses  études  à  Vienne  et  à  Prague,  Ebert  vécut 
quelque  temps  à  Donaueschingen,  où  il  était  bibliothécaire-archiviste  du  prince  de 
Fûrstenberg;  il  passa  le  reste  de  sa  vie  à  Prague.  Il  a  composé  deux  drames,  une 
idylle  en  cinq  chants,  das  Kloster  (i833),  des  «  poésies  »  (1824  et  1845),  etc.  ;  son 
œuvre  la  plus  connue  est  Wlasta,  «  épopée  nationale  et  bohémienne  en  trois  livres  », 
qui  parut  en  1829. 


O'MISTOIRR    ET    DR    LITTÉRATURK  5  I9 

ESPAGNE.  —  Une  chaire  de  grammaire  catalane  a  été  récemment  fondée  à  l'Uni- 
versité de  Barcelone. 

ÉTATS-UNIS.  —  Depuis  longtemps  on  se  plaint  du  droit  d'entrée  établi  aux 
Etats-Unis  sur  les  livres,  brochures,  revues,  etc.  ;  ce  droit  d'entrée  s'élève  à  25  0/0 
de  la  valeur;  beaucoup  de  libraires  et  de  lettrés  en  réclament  la  suppression;  à  la 
tête  du  mouvement  qui  s'organise  en  ce  moment,  est  la  librairie  E.  Steiger,  de  New- 
York. 

ITALIE.  —  M.  Lancia.ni  écrivait  récemment  à  V Athenaeum  que  le  Forum  ressem- 
blait en  ce  moment  à  un  champ  de  bataille.  «  Des  maisons  et  des  murs  renversés, 
des  travaux  de  mines,  de  longues  lignes  de  charrettes,  des  centaines  d'hommes  en 
mouvement,  voilà  l'image  vivante  de  l'activité  qui  règne  dans  les  quartiers  archéolo- 
giques de  Rome.  Le  projet  du  commandeur  Guido  Baccelli,  ministre  de  l'Instruction 
publique,  est  de  comprendre  dans  un  même  groupe  archéologique  la  vallée  du  Co- 
lisée,  celle  du  Forum,  le  palais  des  Césars  et  des  parties  du  Velabrum  et  du  Circus 
Maximus.  Mais  il  est  nécessaire  d'ouvrir  de  nouvelles  lignes  de  communication  entre 
les  quartiers  populaires  de  la  Suburra  et  du  Transtevere,  d'acheter  et  de  démolir  des 
propriétés  privées  de  grande  valeur,  d'enlever  trois  millions  et  demi  de  mètres  cubes 
de  terre  et  de  décombres.  Si  M.  Baccelli  reste  ministre  pendant  trois  ans  encore,  ce 
qui  semble  aujourd'hui  le  rêve  d'un  esprit  exalté  deviendra  une  réalité.  » 

—  La  «  Libreria  Dante  »,  de  Florence,  publie  une  Collezione  di  opérette  inédite  0 
rare,  dont  chaque  volume,  à  deux  cents  exemplaires  numérotés,  ont  paru  :  I.  Com- 
media  di  dieci  Vergine,  testo  inedito  del  quatrocento  (3  fr.),  et  II.  Index  Mediceae 
Bibliothecae,  le  premier  catalogue  de  la  Laurentiana  (1  fr.  5o).  Paraîtront  prochai- 
nement :  III.  Strambotti  di  Luigi  Pulci;  IV.  Carmina  goliardica;  V.  Canqonette  ram- 
mentate  ncl  Decamerone  ;  VI.  Laudi  di  Jacopone  da  Todi.  Chacun  de  ces  volumes 
est  accompagné  de  notes  explicatives. 

—  Une  nouvelle  revue  paraîtra  à  Florence;  c'est  leMuseo  italiano  di  antichità  clas- 
siche,  qui  contiendra  des  articles  d'archéologie  et  de  philologie  classiques,  avec  plan- 
ches; M.  D.  Comparetti  est  le  directeur  de  ce  recueil. 

.  RUSSIE.  —  Mœe  de  Novikoff  prépare  une  biographie  du  général  Skobeleff. 


ACADÉMIE  DES   INSCRIPTIONS  ET  BELLES-LETTRES 


Séance  du  i5  décembre  1882. 

M.  Jules  Girard,  président,  annonce  la  mort  de  M.  Cherbonneau,  correspondant  de 
l'Académie. 

Quelques  membres  demandent  s'il  n'y  a  pas  lieu  de  pourvoir  au  remplacement  de 
M.  Cherbonneau  en  même  temps  qu'aux  autres  places  laissées  vacantes  par  les  cor- 
respondants morts  pendant  l'année  1882.  D'autres  membres  font  observer  que  la  liste 
des  places  à  pourvoir  parmi  les  correspondants  a  été  close  à  la  dernière  séance  et  que 
le  règlement  ne  permet  pas  de  la  rouvrir.  L'élection  du  successeur  de  M.  Cherbon- 
neau ne  pourra  donc  avoir  lieu  qu'à  la  fin  de  l'année  prochaine. 

M.  Geftroy  donne,  dans  une  lettre  adressée  au  président  de  l'Académie,  quelques 
détails  sur  la  cérémonie  de  la  remise  de  la  médaille  d'or  frappée  en  l'honneur  de 
M.  de  Rossi,  qui  a  eu  lieu  lundi  1 1  courant,  à  Rome,  dans  la  grande  galerie  des 
sarcophages  du  musée  de  Latran.  Des  discours  ont  été  prononcés  par  le  P.  Bruzza, 
.fondateur  de  la  Société  d'archéologie  chrétienne,  qui  présidait  la  séance,  puis  par 
M.  Henzen,  au  nom  de  l'institut  archéologique  allemand  ;  un  troisième  discours, 
envoyé  par  M.  GefFroy,  a  été  lu  en  son  nom  par  M.  Dienl,  doyen  des  membres  de 
l'école  française. 


520  REVUE   CRITIQUE   D'HISTOIRE   ET    DE   LITTÉRATURE 

L'académie  se  forme  en  comité  secret. 

La  séance  étant  redevenue  publique,  M.  Ad.  Régnier  présente,  de  la  part  de  M.  A. 
Bergaigne,  son  rapport  sur  les  inscriptions  du  Cambodge  données  à  la  Société  asia- 
tique par  M .  Aymonier.  Ce  rapport,  avant  d'être  imprimé,  avait  été  lu  tout  entier  à 
l'Académie.^  M.  Régnier  annonce,  à  cette  occasion,  que  M.  Aymonier,  depuis  qu'il 
est  retourné  au  Cambodge  avec  une  mission  du  gouvernement,  a  déjà  fait  plusieurs 
nouveaux  envois  d'estampages  et  de  monuments  divers. 

M.  Oppert  fait  part  à  l'Académie  d'une  découverte  qui  vient  d'être  faite  au  Vatican 
et  dont  il  doit  la  connaissance  à  M.  Edmond  Le  Blant.  M.  Descemet,  dit-il,  a  com- 
niqué  à  notre  confrère  trois  calques  de  documents  rapportés  de  Mossoul  par  le  P. 
Ryllo,  de  la  Société  de  Jésus.  Les  fragments  que  cet  ecclésiastique,  qui  s'est  beau- 
coup intéressé  aux  antiquités  assyriennes,  avait  donnés  au  Vatican  y  sont  restés  ou- 
bliés pendant  près  de  trente  ans.  Les  quelques  échantillons  que  nous  avons  sous  les 
yeux  témoignent  de  leur  importance.  Deux  de  ces  fragments  sont  des  inscriptions 
de  Sargon,  en  assyrien.  Le  troisième  appartient  à  cette  catégorie  de  documents  d'un 
genre  tout  nouveau,  de  la  Syrie  et  des  bords  de  l'Euphrate,  qu'on  appelle  hOmathi- 
tes  ou  hittites  et  qui  ont  jusqu'ici  bravé  les  efforts  des  interprètes.  L  interprétation 
des  textes  hittites,  ajoute  M.  Oppert,  ouvrira  un  champ  de  recherches  nouveau  et 
éclairera  d'une  lumière  inespérée  l'histoire  si  obscure  de  l'antique  Syrie;  mais  ils 
ressemblent,  à  l'heure  qu'il  est,  aux  héros  russes  et  polonais  dont  Byron  dit  qu'ils 
seraient  illustres,  si  l'on  pouvait  prononcer  leurs  noms.  Si  l'on  trouvait  parmi  ces 
restes  du  Vatican  des  fragments  de  textes  bilingues,  la  découverte  serait  une  des 
trouvailles  les  plus  fécondes  que  l'archéologie  orientale  pût  faire.  Il  existe  encore  au 
Vatican  des  tablettes  ninivites,  dont  la  publication  serait  du  plus  haut  intérêt. 

Ouvrages  présentés  :  —  par  M.  de  Rozière  :  i°  Lagrèze  (G.  Bascle  de),  la  Na- 
varre française  ;  20  Wxllems,  le  Sénat  de  la  république  romaine,  t.  II  ;  3°  Inventaire 
sommaire  des  archives  du  département  des  affaires  étrangères  :  mémoires  et  docu- 
ments, France;  —  par  M.  Maury  :  Rayet  (O.),  Monuments  de  l'art  antique,  IV;  — 
par  M.  G.  Perrot  :  Morillot.  Thémis  et  les  divinités  de  la  justice  (cour  d'appel  de 
Besançon,  audience  solennelle  de  rentrée  du  3  novembre  1882,  discours  de  l'avocat 
général);  —  par  M.  Oppert,  divers  ouvrages  de  son  frère,  M.  Gustave  Oppert, 
professeur  de  sanscrit  à  l'université  de  Madras;  —  par  M.  le  baron  de  Witte  :  Wau- 
ters  (Alphonse),  Table  chronologique  des  chartes  et  diplômes  imprimés  concer- 
nant l'histoire  de  la  Belgique,  vol,  VI,  i28o-i3oo  ;  id.,  la  Belgique  ancienne  et  mo- 
derne, arrondissement  de  Louvain,  canton  de  Glabbeek,  etc. 

Julien  Havet. 

SOCIÉTÉ  NATIONALE  DES  ANTIQUAIRES  DE  FRANGE 


Séance  du  6  décembre  1882. 

La  Société  constitue  son  bureau  pour  ï883.  Sont  élus  :  président,  M.  Duplessis; 
vice-président,  MM.  Demay  et  Edmond  Guillaume;  secrétaire,  M.  Mûntz. 

M.  Mowat  communique  des  dessins  envoyés  par  M.  Decombe,  d'épées  et  débou- 
cles en  bronze  trouvées  à  Rennes,  dans  un  ancien  lit  de  la  Vilaine. 

M.  Courajod  présente  le  moulage  d'un  masque  en  marbre  du  xve  siècle,  conservé 
au  musée  de  l'hôpital  de  Villeneuve-lez-Avignon.  Ce  masque,  plat  par  derrière,  de 
manière  à  pouvoir  être  posé  sur  un  coussin  ou  adopté  à  une  coiffure,  représente  le 
visage  d'une  jeune  fille.  M.  Courajod  y  retrouve  de  grandes  analogies  de  facture  avec 
un  buste  de  femme  inconnue  du  Louvre,  un  autre  appartenant  à  M.  G.  Dreyfus,  un 
troisième  conservé  au  Musée  d'Ambros  à  Vienne,  celui  de  Battista  Sforza  au  Bar- 
gella  de  Florence  et  deux  de  Marietta  Strozzi,  dont  l'un  est  au  musée  de  Berlin  et 
l'autre  chez  M.  Castellani  à  Rome.  Il  reconnaît  dans  les  regards  pudiquement  bais  • 
ses  et  comme  endormis,  dans  les  yeuxven  coulisse,  dans  la  construction  chinoise 
des  paupières  des  particularités  de  technique  provenant  d'une  interprétation  fantai- 
siste et  individuelle  et  décelant  une  individualité  artistique  dont  on  peut,  dès  à  pré- 
sent, marquer  la  place  dans  le  xv°  siècle  italien  sans  être  encore  en  état  de  lui  assi- 
gner un  nom. 

M.  Heuzey  remarque  que  l'obliquité  des  yeux  dans  les  œuvres  de  l'art  grec  primi- 
tif tient  pareillement  à  des  traditions  d'école;  il  cite  à  ce  sujet  un  passage  de  son 
catalogue  des  terres  cuites  antiques  du  Louvre,  dont  le  premier  volume  sera  pro- 
chainement publié. 

M.  Flouest  présente  des  clous  trouvés  dans  les  ruines  de  Vertillum  (Côted'Or)  et 
étonnamment  conservés,  puisqu'ils  proviennent  de  maisons  consumées  par  un  feu 
violent.  D'après  les  expériences  de  Cailletet,  la  préservation  du  métal  est  due  à  la 
pellicule  d'oxyde  magnétique  qui  s'est  formée  à  sa  surface. 

Le  secrétaire  :  O.  Rayet. 

Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  23 


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pléant à  la  Faculté  des  lettres  de  Toulouse,  docteur  ès-lettres.  Etude  histori- 
que sur  la  philosophie  de  la  Renaissance  en  Italie  (Cesare  Cremonini). 
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de  la  librairie  sous  Malesherbes.  —  Galiani.  —  Diderot.  —  Le  théâtre  de  la  Ré- 
volution.).! vol. 

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Lacroix  (Jules).  Les  satires  de  Juvénal  traduites  en  vers  français.  Ouvrage 
couronné  par  l'Académie  française  en  1867.  Nouvelle  édition  revue  et  corrigée. 
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Lichteneerger  (Ernest),  professeur  suppléant  de  littérature  étrangère  à  la  Faculté 
des  lettres  de  Paris.  Etude  sur  les  poésies  lyriques  de  Gcethe.  Ouvrage 
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Luce  (Siméon),  membre  de  l'Institut.  Histoire  de  Bertrand  du  Guesclin  et  de 
son  époque.  Ouvrage  qui  a  obtenu  de  l'Académie  des  inscriptions  et  belles  let- 
tres le  grand  prix  GÔbert.  La  jeunesse  de  Bertrand  (1 320-1364).  2°  édition, 
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Cette  nouvelle  édition  de  V Histoire  des  Romains,  par  M.  Victor 
Duruy,  formera  sept  volumes  in-8  jésus,  d'environ  800  pages  chacun. 
Elle  contiendra  plus  de  3ooo  gravures  d'après  l'antique,  100  cartes  ou 
plans,  et  paraît  par  livraisons.  Chaque  livraison,  composée  de  16  pages 
et  protégée  par  une  couverture,  se  vend  5o  centimes.  Il  paraît  une  li- 
vraison par  semaine  depuis  le  9  mars  1878. 


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moins  une  gravure  et  une  carte  tirée  en  couleurs,  et  plusieurs  cartes  insérées  dans  le 
texte,  se  vend  5o  centimes.  Il  paraît  une  livraison  par  semaine  depuis  le  8  mai  1876. 


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N°  27  Seizième  année  3  Juillet  1882 


REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE   PUBLIÉ   SOUS   LA    DIRECTION 

dk  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Ghuquet 


,  Prix  d'abonnement  : 
Un   an,  Paris,  20  fr.  —   Départements,   22   fr.   —   Etranger,   25  tr. 


PARIS 


ERNEST    LEROUX,    EDITEUR 

libraire    de   la    société    asiatique 

de    l'école    des   langues   orientales    vivantes,    etc. 

28,    RUE    BONAPARTE,    28 


Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


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Tome  IV.  Un  beau  volume  in-4,  avec  figures  et  onze  planches i5    » 

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lophore.  —  P.  Regnaud.  Le  Pantchatantia.  —  Edkins.  La  Religion  en  Chine. 
Exposé  des  trois  religions  des  Chinois.  Traduit  par  de  Milloué. 

T  CÇ  TD/^T  VMTCICMC  *eur  or'§'ne>  leurs  migrations,  leur  lan- 
LLJ  1  \~J  L.  I  lN  J201  CLN  O  gage,  etc.,  par  le  Dr  A.  Lesson.  Tome  III, 
fort  volume  in-8  de  5o6  pages  avec  une  carte  de  la  Nouvelle-Zélande.     .    .       i5    » 

LA  PICARDIE.  SAINT-QUENTIN   £j& 

son  histoire,  sa  population,  ses  rues,  ses  maisons  et  leurs  propriétaires  au  xvne  siè- 
cle, ses  enseignes.  Nécrologe  de  son  chapitre.  Ses  maires.  Par  Ch.  Desmaze,  conseil- 
ler à  la  Cour  d'appel 3     » 

.ft  VALEUR   PHONÉTIQUE  DE  L'AL- 

rjTj  a  r\  T""~r  T  A  TTvr  principalement  d'après  les  grammairiens  de 
r  nADL  1  .L-TV  1  UN  l'époque  impériale,  par  Martin  Schweisthal.  — 
In-8 5     » 


PERIODIQUES 

The  Academy,  n°  527,  10  juin  1882  :  Blunt,  The  future  of  Islam. 
(Badger.) — The  pi  aise  a.  blâme  of  love,  with  other  verse.  —  A  sé- 
lection of  cases  from  the  state  trials,  vol.  II,  parts  la.  II.  1660-81 ,  by 
Willis-Bund.  —  Some  books  of  travel.  —  James  Thomson.  —  The 
only  engiish  proclamation  ol  Henry  III.  (W.  Skeat.)  —  A  letter  from 
Gh.  Darwin.  —  Henry  III's  proclamation  in  engiish  (Hall).  —  Primi- 
tive belief.  (Keary.)  —  The  title-page  of  Waltons  «  compleat  Angler  » 
(Eliiot  Stock).  —  Hittite  inscriptions.  —  Blanchard  Jerrold,  The  life  of 
George  Cruikshank.  (Wedmori.)  —  The  pictures  of  Prof.  Costa.  (Mon- 
khouse.)  —  Notes  from  Rome  (Barnabei).  —  The  art  of  coins  and  me- 
dals,  II. 

N°  528,  17  juin  1882  :  Floyer,  Unexplored  Baluchistan,  a  survey  of 
a  route  through  Mekran,  Bashkurd,  Persia,  Kurdistan  a.  Turkey.  — 
In  Memoriam,  Ralph  Waldo  Emerson,  recollections  of  his  visits  to 
England  in  i833,  1847-48,  1872-73  a.  extracts  from  unpublished  let- 
ters,  by  Alex.  Ireland.  —  Gardner,  Quatre  Bras,  Ligny  a.  Waterloo. 
(Stephens  :  livre  écrit  dans  un  style  aisé  et  qui  mérite  d'être  lu  par  ceux 
qui  n'ont  pas  le  temps  d'étudier  le  Waterloo  de  Charras  et  les  Waterloo 
Lectures  de  Chesney,  ou  qui  n'ont  pas  la  patience  de  lire  le  diffus  Si- 
borne  ou  qui  sont  mécontents  du  récit  partial  de  Gleig  et  de  Thiers.)  — 
Boulger,  History  of  China,  vol.  II.  (Douglas.)  —  The  viking-skip  dis- 
covered  at  Gokstad  in  Norway,  described  by  Nicolaysen.  Christiania. 
(Powell.)  —  Some  classical  books  (Thirteen  satires  of  Juvenal  trans- 
lated  into  engiish,  by  Strong  a.  Leeper  ;  Tacitus,  by  Church  a.  Bro- 
dribb;  The  Nicomachean  Ethics  of  Aristotle,  books  I-IV  a.  Book  X, 
chapt.  vi-ix,  p.  p.  HAWKiNs;The  Republic  of  Plato,  books  I  a.  II,  p.  p. 
Wells;  The  Catiline  a.  Jugurthe  of  Sallust,  transi,  by  Pollard;  The 
fourth  book  of  méditations  of  Marcus  Aurelius  Antoninus,  p.  p.  Cross- 
ley;  Aristophanis  Plutus,  rec.  Velsen.)  —  Reinhold  Pauli  —  The  ori- 
gin  of  the  indian  alphabets.  (Burnell.) — -Arabie  journalism.  —  Gari- 
baldi  in  the  fourteenth  century.  —  Was  Roger  de  Montgomery  at 
Senlac.  (Freeman.)  —  The  Pôle  family.  —  The  title-page  of  the  «  com- 
pleat angler  »  —  M.  Valer.  Martialis  epigrammaton  librum  primum, 
rec.  Flach.  (Sonnenschein.)  —  Hebrew  «  n  »  a.  the  nasal  guttural  con- 
sonant.  (L.  L.  Bonaparte.) 

The  Athenaeum,  n°  285o,  10  juin  1882  :  Anecdota  oxoniénsia,  Aryan 
séries.  Vol.  I.  Part  1.  Buddhist  texts  from  Japan,  edit.  by  Max  Muller. 
Oxford,  Clarendon  Press.  —  A.  W.  Ward,  Dickens.  [Engiish  men  of 
letters].  Macmillan.  —  Pedes  finium  or  fines,  relating  to  the  county  of 
Norfolk,  levied  in  the  King's  court  from  the  third  year  of  Richard  I  to 
the  end  of  the  reign  of  John,  edit.  by  Walter  Rye.  —  Books  of  Travels 
and  adventure.  —  The  lite  of  Dr.  Wagstaffe.  (Norman  Moore.)  — 
Cromwell  (Peacock).  —  Dr.  Reinhold  Pauli.  —  Notes  from  Rome  (Lan- 
ciani). 

N°  285 1,  17  juin  1882  :  The  records  of  St.  Michael's  parish  church, 
bishop's  Startford,  edit.  by  Glasscock.  —  Livres  sur  Manitoba.  — 
Barth,'  The  religions  of  India,  authorized  translation  by  Wood. 
(«  M.  Barth  modestly  calls  it  a  résumé,  and  that  it  is,  no  doubt,  in  the 
best  sensé  of  the  word,  since  it  gives,  in  a  necessarly  condensed  but  ne- 
vertheless  most  attractive  form,  enhanced  by  the  charms  of  a  lucid  and 
vigorous  style,  the  latest  results  of  inquiry  in  ail  the  provinces  of  this 
vast  domain.  »  —  Notes  from  Oxford.  —  Tempysons  «  new  »  song. 
(W.  Wilson.)  —  The  educational  endowments  (Scotland)  bill.  (David 
Lewis.)  —  Shelley's  house  at  San  Terenzio  (Enthoven).  —  A  manus- 
cript  of  Marco  Polo.  (Yule.)  —  Notes  from  Rome  (Lanciani). 


Literarisches  Centralblatt,  n°  24,  10  juin  1882  :  Bonwetsch,  die  Ge- 
schichte  des  Montanismus.  —  Historisches  Taschenbuch,  hrsg.  v.  Mau- 
renbrecher.  6e  Folge,  Ier  Jahrgang.  —  Planta,  die  curràtischen  Her- 
schaften  in  der  Feudalzeit.  I  et  II  (Travail  tout  à  fait  solide).  —  Zur 
Geschichte  der  strassburger  Capitulation  von  1681   (Rien  de  nouveau). 

—  Brosch,  Geschichte  des  Kirchenstaates  II,  1700- 1870  (Tableau  d'en- 
semble sous  une  forme  agréable).  —  Weitére  Beitrâge  u.  Nachtrâge  zu 
den  Papieren  des  Ministers  u.  Burggrafen  von  Marienburg  Theodor 
von  Schôn.  —  Mucke,  der  Friede  zwischen  Staat  u.  Kirche.  —  Loth, 
Leben  u.  Werke  d.  Abdallah  ibn  ul  Mu'tazz  (Premier  travail  du  re- 
gretté Loth,  publié  par  M.  Aug.  Mûller,  et,  au  dire  de  Fleischer,  «  réel- 
lement précieux  »).  —  Johannis  Gazaei  tabulae  mundi  et  Anacreontea 
(Utile).  —  Culmann,  Umschau  auf  dem  Gebiete  d.  griech.  u.  latein. 
Grammatik,  ein  Beitrag  zur  Aufklârung  grammat.  Geheimnisse  (De 
nouveau  un  «  curiosum  »  du  trop  productif  écrivain).  —  PlautiTrucu- 
lentus  rec.  Fr.  Schoell  (Très  louable).  —  Kluge,  Etymolog.  Worter- 
buch  d.  deutschen  Sprache,  I  (Première  livraison  d'un  ouvrage  qui  sera 
d'une  très  grande  utilité).  —  Deneken,  De  Theoxeniis.  —  H.  Riemann, 
Musik-Lexikon,  Théorie  u.  Geschichte  der  Musik. 

Philologische  Wochenschrift,  n°  20,  20  mai  1882  :  J.  Dupuis,  Le  nombre 
géométrique  de  Platon,  interprétation  nouvelle.  Hachette.  1 88 1  (Hel- 
ler  :  un  nouvel  examen  par  un  mathématicien  est  à  désirer,  mais,  pour 
un  philologue,  il  semble  que  M.  Dupuis  ait  eu  le  bonheur  de  casser  en- 
fin cette  noix  rebelle;  il  a,  en  tout  cas,  groupé  tous  les  matériaux,  sauf 
un  passage  d'Hieronymus  Mûller;  quelques  termes  techniques  sont  mal 
traduits  ;  l'accentuation  du  grec  est  fautive  à  faire  dresser  les  cheveux). 

—  Hermann  Weissenborn,  Die  Uebersetzungen  des  Euklid  durch 
Campano  und  Zamberti  ,  eine  mathematisch-historiche  Studie  (Max 
G.  P  Schmidt  :  solide,  mais  trop  long).  —  L.  Kuhlmann,  De  Sallustii 
codice  Parisino  5oo  (J.  H.  Schmalz).  — Tabellarisches  Verzeichnis  der 
hauptsachlichsten  lateinischen  Wôrter  von  schwankender  Schreibweise 
nach  den  neuesten  Ergebnissen  zusammengestellt.  Gotha,  F.  A.  Perthes 
(Schmalz  :  bon).  —  The  American  Journal  of  Philology,  edited  by  Ba- 
sil L.  Gildersleeve,  professor  of  Greek  in  the  John  Hopkins  University; 
Baltimore,  the  editor,  New-York  and  London,  Macmillan;  Leipzig, 
Brockhaus  ;  t.  II  (n°  8,  à  4  nos  par  tome)  ;  chaque  n°  coûte  1  dollar,  on 
souscrit  pour  3  dollars  aux  4  nos  d'une  année  ;  traite  de  philologie  clas- 
sique, comparative  et  orientale.  —  Périodiques,  bibliographie,  nouvelles 
personnelles  (dans  sa  séance  du  20  avril,  l'Académie  royale  des  sciences 
de  Berlin  a  élu  M.  Gaston  Paris,  professeur  au  Collège  de  France,  mem- 
bre correspondant  de  la  classe  de  philosophie  et  d'histoire).  —  Nécrolo- 
gie :  Joseph  von  Aschbach. 

N°  21,  27  mai  1882  :  M.  Schmitz,  Quellenkunde  der  romischen  Ge- 
schichte bis  auf  Paulus  Diaconus;  Arnold  Schaefer,  Abriss  der  Quel- 
lenkunde der  griechischen  und  romischen  Geschichte  (Wilh.  Soltau  :  le 
livre  de  Schmitz  n'est  qu'une  compilation  allant  jusqu'au  plagiat;  ce- 
lui de  Schaefer  est  bon  ;  quelques  critiques.)  —  Hans  Brendicke,  Genea- 
logieen  sàmmtlicher  griechischer  Gotter  und  Heroen  (Paul  Stengel  :  ex- 
plications dans  ce  goût  :  Kilix,  «  calix  verre  [en  Cilicie],  année  se 
comptait  par  verres  ou  le  verre  est  le  monde  »).  —  Udalricus  de  Wila- 
mowitz-Moellendorf  ,  De  Euripidis  Heraclidis  commentatiuncula 
(H.  Gloël).  —  G.  Curtius,  Griechische  Schulgrammatik,  i5,  unter  Mit- 
wirkung  von  B.  Gerth  verbesserte  Aufiage,  ramenée  à  l'orthographe  al- 
lemande officielle  (J.  Sitzler  :  art.  détaillé  de  8  1/2  colonnes).  —  Karl 
Meissner,  Lateinische  Phraséologie  fur  die  obern  Gymnasialklassen  ; 
E.  Wilhelm,  Ueber  lateinische  Phraseologien  (J.   H.  Schmalz).  —  Re- 


gister  zu  Mitteilungen  des  deutschen  archaeologischen  Instituts  in 
Athen,  Band  I-V.  Athen,  Karl  Wilberg.  1881.  —  Périodiques,  etc.  Let- 
tre de  Cambridge. 

Philologische  Rundschau,  n°  24,  10  juin  1882  :  K.  Riedel,  Der  gegen- 
wàrtige  Stand  der  Sapphofrage  (Lôwner  :  vaut  d'être  lu).  — Joh.  R.  Pom- 
tow,  De  oraculis  quae  exstant  Graecis  trimetro  iambico  compositis 
(Hendess  :  peu  de  nouveau,  mais  enfin  il  y  en  a).  —  Fr.  Rau,  De  Aris- 
tophanis  versibus  Equit.  5o5,  5o6  non  reiciendis  (Ernst  Ziegeler  :  les  vers 
sont  authentiques,  l'explication  de  Rau  inadmissible).  —  H.  Boblentz, 
Kritische  Anmerkungen  zu  Lysias  Reden  gegen  Theomnestos,  Eratos- 
thenes,  Agoratos  (Karl  Fuhr  :  Fauteur  n'est  pas  au  courant) .  —  Grégoire 
Saenger.  Neskolko  popravok  k  tekstu  Goracïa  (cf.  Revue  critique,  1881, 
II,  p.  485),  Estche  neskolko  sametok  o  trudnykh  mestakh  u  Goracïa, 
Novyia  dogadki  o  portchennykh  tchtenïakh  u  Goracïa,  Kiev  1878, 
1879,  1881  (Herman  Haupt  :  liste  des  conjectures  sur  Horace,  et 
pp.  752-753  sur  Cicéron  [Rep.  et  Legg.],  l'Enéide,  Pétrone,  Stace,  Pe- 
ruig.  Veneris,  Lucain ,  Silius,  Claudien,  Festus  ;  expression  d'une 
grande  considération  pour  l'auteur,  d'une  confiance  médiocre  dans  ses 
conjectures).  —  Georgius  Luebbert,  De  amnestia  anno  ccccm  a.  ch.  n. 
ab  Atheniensibus  décréta  (Kolster  :  très  bon).  —  G.  Egelhaaf,  Verglei- 
chung  der  Berichte  des  Polybios  und  Livius  ûber  den  Italischen  Krieg 
der  Jahre  218-2  \y  bis  zur  Schlacht  am  Trasimener  See  (A.  Kannengies- 
ser  :  art.  élogieux).  — P.  Krause,  Appian  als  Quelle  fur  die  Zeit  von  der 
Verschworung  gegen  Caesar  bis  zum  Tode  des  Decimus  Brutus  (Her- 
mann  Haupt  :  art.  élogieux).  —  Gustav  Teichmueller,  Litterarische 
Fehden  im  vierten  Jahrhundert  vor  Christ. 

Gœttingische  gelehrte  Anzeigen,  nos  22  et  2  3,  3i  mai  et  7  juin  1882  :  lon- 
gue réponse  de  M.  H.  Zimmer  aux  articles  de  M.  d'Arbois  de  Jubainville 
{Revue  critique,  188 1,  n°  45)  et  de  M.  Whitley  Stokes  [Revue  celtique, 
V,  255-265)  sur  les  «  Keltische  Studien  ». 

Nàchrichten  v.  d.  Kœnig.  Gesellschaft  der  Wissenschaften  u.  d.  Georg-Augusts- 
Universitaet  zu  Gœttingen,  n°  9  :  Fr.  Wieseler,  Ueber  die  Biehler'sche  Gem- 
mensammlung  (Longue  étude,  accompagnée  de  remarques  et  de  rectifi- 
cations intéressantes,  sur  la  belle  collection  de  pierres  gravées  de  M.  Bieh- 
ler). 

N«  10  :  Sauppe,  Ein  Kapitel  aus  Xenophons  Hellenika.  (Il  s'agit  du 
chap.  11  du  livre  VII  où  Xénephon  exprime  son  admiration  et  sa  sympa- 
thie pour  les  habitants  de  Phlionte.) 

Archiv  fur  slavische  Philologie,  t.  VI,  2me  cahier  :  Ueber  den  Einfluss 
der  altcechischen  Sprache  und  Literatur  auf  die  altpolnische  (Nehring). — 
Anecdota  palaeopolonica  (Kalina).  —  Pripegala  (A.  Brûckner  :  note 
intéressante  sur  un  dieu  des  Slaves  de  l'Elbe  jusqu'ici  négligé  des  my- 
thographes).  —  Zur  Berichtigung  der  altruss.  Texte  (Jagic). —  Der  Le- 
norenstoff  in  der  slavischen  Volkspoesie  (Wollner  :  intéressante  étude 
de  littérature  populaire  où  l'auteur  a  fait  entrer  également  les  éléments 
albanais  et  grecs.)  —  Etymologies.  —  Bibliographie  :  Litauische  Volks- 
lieder  und  Mârchen  gesammelt  von  A.  Leskien  und  K.  Brugman.  —  Pu- 
blications de  MM.  Pypine,  Beaudouin  de  Courtenay,  Appel,  Brandt, 
Malinowski,  Miklosich,  Kulakovsky,  Patera,  Suman,  Klaic.  —  L.  Lé- 
ger, Esquisse  sommaire  de  la  mythologie  slave.  Leroux  («  Essai  digne 
d'être  lu  et  qui  témoigne  d'une  connaissance  étendue  et  intime  des  litté- 
ratures slaves  »]. 


Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23. 


N°  28  Seizième  année  10  Juillet  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE   PUBLIÉ   SOUS   LA   DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.  PARIS 
Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 

Prix  d'abonnement  : 

Un   an,  Paris,  20  fr.  —   Départements,   22  fr.   —   Étranger,   25  fr. 


PARIS 

ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

libraire   de   la    société    asiatique 

de    l'école    des    langues    orientales   vivantes,    etc. 

28,    RUE   BONAPARTE,    28 

Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


TV/Ï  UTV/T/^VTD  EC     sur  *a  Chronologie  et  l'Iconographie  des  Rois  Parthes  Ar- 

1V1 C IVl \^J  1  lx  C O     sacides,   par  A.   de  Longpérier.  Un  beau  volume  in-4, 

avec  18  planches  sur  cuivre 25    » 


■■  yrTT)    a  -pv  t     xt  *  TV/TUL-I     publié  pour  la  première  fois  d'après  le  ma-- 
IVII  lv.f\lJJ      iNrVlVlJCO     nuscrit  ouïgour  de  la  Bibliothèque  Nationale. 
Traduit  et  annoté  par  A,  Pavet  de  Courteille.  Un  beau  vol.  gr.  in-8,  avec  chro- 
molithographie et  fac-similé i5» 


T  A  TV /T     TT  T     \T  ï  NT  \J1     ou  *e  ^ivre  ^es  Phrases  de  Trois  Caractères,  avec 

1  -A.1V1       1  U      JA-llNll     le    grand   Commentaire   de  Vuon-tan-Thong. 

Texte,  transcription  annamite  et  chinoise,  explication  littérale  et  traduction  complète, 

par  Abel  des  Michels.  Un  fort  volume  gr.  in-8 20    » 


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PÉRIODIQUES 

Deutsche  Literaturzeitung,  n°  23,  10  juin  1882  :  Fischer,  Bonifatius,  der 
Apostel  der  Deutschen  (K.  Mûller  :  manque  trop  souvent  de  profon- 
deur, de  méthode  et  de  soin).  —  Dembowski,  Quaestiones  aristotelicae 
(Rien  de  nouveau  et  d'utile).  —  James  Sully,  Illusions,  a  psychological 
study.1 —  Prantl,  Aristotelis,  de  caeli  et  de  generatione  et  corruptione; 
Aristotelis  quae  feruntur  de  coloribus,  de  audibilibus  physiognomica. 

—  Daub,  Studien  zu  den  Biographica  des  Suidas  (Boysen  :  peu  de  ré- 
sultats). —  Dorothea  v.  Schlegelgeb.  Mendelssohn  u.  deren  SôhneJ.  u. 
Ph.  Veit,  p.  p.  Reich,  ein  Briefwechsel (Brahm  :  public,  soignée  et  mé- 
ritoire). —  A.  Morel-Fatio,  Calderon,  revue  critique  des  travaux  d'éru- 
dition publiés  en  Espagne  à  l'occasion  du  2e  centenaire  de  la  mort  du 
poète  (Vollmôller  :  très  intéressant  et  juste  dans  ses  jugements).  —  Ta- 
dra,  Cancellaria  Arnesti,  Formelbuch  des  ersten  Prager  Erzbischofs 
Arnest  von  Pardubic  (Wattenbach).  —  Elze,  Die  Mtinzen  Bernhards, 
Grafen  von  Anhalt,  Herzogs  von  Sachsen.  —  Das  goldene  Spiel  von 
Meister  Ingold,  hrsg.  v.  Edw.  Schrôder  (v.  d.  Linde).  —  GàTSCHENBER- 
ger,  Geschichte  der  aufgeklàrten  Selbstherrschaft  u.  d.  Wiedergeburt  der 
Sitten  (Horawitz  :  livre  attachant,  à  recommander  à  tous  ceux  qui  détes- 
tent la  barbarie  et  Fégoïsme  et  souhaitent  à  l'humanité  des  institutions 
de  plus  en  plus  libres  et  humaines).  —  La  Selve,  Le  pays  des  nègres, 
Voyage  à  Haiti.  —  Blûmner,  Laocoonstudien,  I,  ueber  den  Gebrauch 
der  Allégorie  in  den  bildenden  Kûnsten.  —  Fontes  juris  romani  anti- 
qui,  éd.  Bruns,  éd.  IV.  supplem.  éd.  Mommsen.  —  v.  Reitzenstein,  die 
Armengesetzgebung  Frankreichs  in  den  Grundzùgen  ihrer  histor. 
Entwickl.  (Popper  :  bon  travail  d'ensemble).  —  Dum,  Die  Baukunst  der 
Griechen  (Bohn). 

Theologische  Litteraturzeitung,  n°  12,  17  juin  1882  :  Krummel,  Die  Reli- 
gion der  Arier  nach  den  indischen  Vedas.  (W.  Baudissin  :  ne  domine 
pas  le  sujet.)  —  Novum  Testamentum  graece  et  germanice,  das  Neue 
Testament  griechisch  nach  Tischendorfs  letzter  Recension  u.  deutsch 
nach  dem  revidirten  Luthertext  mit  Angabe  abweichender  Lesarten 
beider Texte  u.  ausgewâhlten  Parallelstellen,  hrsg.  v.  Oskar  von  Ge- 
bhardt.  (Bertheau  :  excellente  publication  qui  n'est  plus  à  recomman- 
der.) —  Opéra  patrum  apostolicorum,  textum  rec.  Funk;  Duchesne 
(L.),  Vita  Sancti  Polycarpi  Smyrnaeorum  episcop.i  auctore  Pionio,  pri- 
mum  graéce  édita.  —  Heliand,  Christi  Leben  u.  Lehre,  nach  dem  alt- 
sàchs.  von  K.  Simrock.  3e  Auflage  (Braune  :  publication  magnifique). 

—  Pastor,  Die  kirchlichen  Reunionsbestrebungen  wâhrend  der  Regie- 
rung  Karls  V,  aus  den  Quellen  dargestellt.  (Brieger  :  compilation  sans 
habileté,  mais  où  Fauteur  a  dépensé  beaucoup  de  peine.) 

Philologische,  Wochenschrift,  n°  22,  3  juin  1882  :  Rud.  Adamy,  Archi- 
tektonik  auf  historischer  und  aesthetischer  Grundlage  (J.  Matz  :  mau- 
vais). —  A.  Motte,  La  paix  de  Cimon.  Gand.  1880  (G.  J.  Schneider  : 
ne  dit  pas  le  dernier  mot,  mais  est  scientifique  et  utile  ;  on  devrait  dire 
paix  de  Périclès,  ou  paix  de  Callias).  —  Victor  Cucheval,  Histoire  de 
l'éloquence  latine  depuis  l'origine  de  Rome  jusqu'à  Cicéron,  d'après  les 
notes  de  M.  Adolphe  Berger.  2e  éd.  Hachette  (à  lire  de  suite  plutôt 
qu'à  consulter  -,  ne  s'adresse  proprement  ni  aux  érudits  ni  au  grand  pu- 
blic; peu  de  nouveau  ou  d'original;  exposition  facile,  pleine  de  goût, 
animée;  «  geist-  und  geschmackvolles  Buch  »).  —  P.  Grossen,  Die  Tro- 
pen  und  Figuren  (H.  Draheim).  —  Georg.  Lukas,  Das  hàusliche  Leben 
in  Athen  zu  den  Zeiten  des  Aristophanes  (Lôwner  :  clair,  sérieusement 
fait).  —  M.  Petschar,  De  Horatîi  poèsi  lyrica  (Lôwner  :  sans  valeur). 

—  Josef  Steiner,  Ueber  Ziel,  Auswahl  und  Einrichtung  der  Horaz- 


Lektûre  (Lowner).  —  Sammlung  von  Schulreden  und  Ansprachen  he- 
rausgegeben  von  Philipp  Brunner.  —  Nouvelles  de  Paris  (En  français; 
plusieurs  fautes  d'impression;  ce  qui  est  dit  sur  l'Académie  des  inscrip- 
tions fait  double  emploi  avec  les  comptes-rendus  empruntés  par  la  Wo- 
chenschrift  à  la  Revue  critique).  —  Périodiques,  etc. 

Philologische  Rundschau,  n°  25,  17  juin  1882  :  Ueber  den  Ursprung 
der  Homerischen  Gedichte  von  J.  P.  Mahaffy,  Ueber  die  Sprache 
der  Homerischen  Gedichte  von  A.  H.  Sayce,  Autorisierte  Ùeber- 
setzung  von  J.  Imelmann  (J.  Oberdick  :  à  lire,  surtout  Sayce;  sur  le  ni- 
veau des  études  homériques  en  Angleterre,  on  eût  été  mieux  renseigné 
par  les  écrits  de  Paley,  qui  a  montré,  durchaus  richtig  und  wahr,  que 
Pindare  et  les  tragiques  ne  connaissaient  pas  notre  Homère).  —  E.  Rei- 
chenhart,  Die  subordinierenden  kausalen  Konjunktionen  bei  Lucretius, 
quod,  quia,  quando,  quandoquidem,  quatinus  (Kannengiesser).  —  K. 
Kappes,  Vergils  Aeneide  fur  den  Schulgebrauch  erlaiïtert  (Guthling  : 
l'auteur  de  l'article  tient  Sunt  lacrimae  rerum  pour  corrompu).  — 
L'abbé  Beurlier,  Tacite,  Agricola,  nouvelle  édition.  Paris,  Société 
générale  de  la  librairie  catholique  (Eussner  :  beau  papier,  beaux  carac- 
tères, cartes,  illustrations  ;  citation  d'éditions  nombreuses,  parmi  les- 
quelles celles  de  Gantrelle  et  Andresen  ont  seules  été  mises  à  profit; 
liste  de  variantes  extraite  d'Andresen,  avec  des  méprises;  appendice  épi- 
graphique,  moins  exclusivement  pris  d'Andreten,  et  fait  en  se  reportant 
aux  recueils  principaux  ;  notes  de  fond  satisfaisantes  quant  à  l'étendue  et 
à  l'exactitude;  notes  de  grammaire  insuffisantes  et  fautives;  rapproche- 
ments de  littérature  et  d'histoire  moderne  superflus  ;  impression  correcte 
quant  au  texte  même;  E.  indique  des  perfectionnements  pour  la  pro- 
chaine édition).  —  Deecke  et  Pauli,  Etruskische  Forschungen  und 
Studien,  II.  Heft  (-a-  :  Deecke,  qui  niait  que  l'étrusque  fût  indogerma- 
nique, l'admet  maintenant,  mais  se  fourvoie;  cf.  Rev.  crit.,  1882,  I, 
p.  341  ss.).  —  MATzet  von  Duhn,  Antike  Bildwerke  in  Rom  mit  Aus- 
schluss  der  grôsseren  Sammlungen  (Heydemann  :  le  3e  volume  est  digne 
des  précédents,  ;  il  contient  de  bons  index).  —  Fr.  Hoffmann,  Die 
Akustik  im  Theater  der  Griechen.  Genève,  Theodor  Mûller  (Gûnther  : 
dès  le  temps  de  Lucien  on  avait  perdu  le  secret  de  l'acoustique  théâtrale  ; 
opuscule  de  valeur  mêlée). 

Athenaeum  belge,  n°n,  ier  juin  1882  :  Nys,  Le  droit  de  la  guerre  et  les 
précurseurs  de  Grotius.  (Van  der  Rest  :  intéressante  et  substantielle 
étude.)  —  Fornelli,  L^nsegnamento  pubblico  ai  nostritempi  ;  Dreyfus- 
Brissac,  L'éducation  nouvelle,  études  de  pédagogie  comparée;  M.  Bréal, 
Excursions  pédagogiques  ;  P.  Fredericq.  De  l'enseignement  supérieur 
de  l'histoire;  Voituron,  Les  idées  premières  dans  l'enseignement;  Del- 
bœuf,  Le  latin  et  l'esprit  d'analyse  (P.  Thomas). 

N°  12,  i5  juin  1882  :  Juste,  L'élection  de  Léopold  I,  d'après  des  docu- 
ments inédits.  (Banning.)  —  P.  de  Felice,  Lambert  Daneau,  de  Beau- 
gency-sur-Loire,  pasteur  et  professeur  de  théologie.  i53o-i5g5,  sa  vie, 
ses  ouvrages,  ses  lettres  inédites.  (Fredericq  :  recherches  neuves,  de 
Pérudition).  —  L'histoire  économique  en  Italie  en  1882.  (Brants.)  — 
Correspondance  de  Paris,  (Lewis  Recueil  des  bons  mots  des  Grecs  et  des 
Romains;  Mézières,  Shakspeare,  son  œuvre  et  ses  critiques;  Vandal, 
Louis  XV  et  Elisabeth  de  Russie;  Wallon,  Histoire  du  tribunal  révo- 
lutionnaire, III,  IV  et  V;  Ricard,  Lamennais  et  Gerbet;  P.  Albert, 
Poètes  et  poésies;  Reclus,  L'Asie  orientale;  Picard,  Discours  parié- 
taires.) 

Nachrichten  v.  d.  Kœnigl.  Gesellschaft  d.  Wissenschaften  (de  Gôttingue) ,  n°  1 1  : 
Pauli,  Gervasius  von  Tilbury. —  Stern,  Nachtrag  zu  den  Mittheilungen 
ûber  die  preussische  Landesreprâsentation  181 2-1 5. 


H.  REUTHER,  ÉDITEUR,  A  CARLSRUHE  ET  LEIPZIG 


VIENT  E>E   PARAITRE 


STRACK,  Dr  H.  L. 

DIE   SPRÙCHE    DER   VÀTER 

Ein  ethischer  Mischna-Traktat. 
Mit  kurzer  Einleitung,  Anmerkungen  und  Wortregister.     .M.     i   20 


PORTA  LINGUARUM  ORIENTALIUM 

SIVE 

ELEMENTA  LINGUARUM 

I.  HEBRAICAE  V.  SYRIAGAE 

IL  CHALDAICAE  VI.  ARMENIACAE 

III.  SAMARITANAE  VII.  AETHIOPICAE 

IV.  ARABICAE  VIII.  PERSIGAE 

STUDIIS  ACADEMICIS  ACCOMMODATA 

EDIDERUNT 

J.  H.  PETERMANN,  E.  NESTLE,  S.  LANDAUER,  H.  STRACK  e.  a. 

Tome      L  Grammatica   hebruica   par  J.   H.   Petermann.     ...       M.       2  5o 

—  IL  Grammatica   chaldaica  —  —  4     » 

—  III.  Grammatica   samaritana         —           —               4      » 

—  IV.  Grammatica  arabica                  —           —               4  5o 

—  V.  Grammatica  syriaca  par  le  Dr.  E.  Nestlé 5  40 

—  VI.  Grammatica  armeniaca  par  J.  H.  Petermann 4     » 


En  préparation  et  pour  paraître  prochainement  : 
Tome  VIL  Grammatica  persica  par  le  Dr.  S.  Landauer.  Strasbourg. 
—  L  Grammatica  liebraica  3e  édition  sous  le  titre  :  Hebrseische  Grain- 

matik  mit  Uebungsbuch  von  Prof.  Dr.  H.  Strack.  Berlin. 


NIELSEN,  FRED.  Professor  a.  d.  Universitât  Kopenhagen 

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Im  neunzehnten  Jahrhundert.  L  Autorisirte  deutsche  Ausgabe 
von  A.  Michelsen.  Ca M.      5    » 


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N°  29  Seizième  année  17  Juillet  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE   PUBLIÉ   SOUS   LA   DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.  PARIS 
Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 

Prix  d'abonnement  : 
lin   an,   Paris,   20   fr.  —    Départements,    22   fr.   —   Etranger,    25   fr. 


PARIS 
ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

libraire   de    la    societe    asiatique 

de    l'école    des    langues    orientales   vivantes,    etc. 

28,    RUE   BONAPARTE,    28 

Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


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JV1 J  I\  A.1J  J  ,  IN  r\lVlilJrl  nuscrit  ouïgour  de  la  Bibliothèque  Nationale. 
Traduit  et  annoté  par  A,  Pavet  de  Courteille.  Un  beau  vol.  gr.  in-8,  avec  chro- 
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1  AlVl       1U      ivUN-rl     le    grand  Commentaire  de  Vuon-tan-Thong. 

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par  Abel  des  Michels.  Un  fort  volume  gr.  in-8 20    » 


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PÉRIODIQUES 

The  Academy,  n°  529,  24  juin  1882  :  Leslie  Stephen,  The  science  of 
ethics.  —  Sweet,  An  anglo-saxon  primer,  with  grammar,  notes  a.  a. 
glossary.  —  Two  Coulumiers  of  Normandie  (J.  E.  Tardif,  Le  très  an- 
cien coutumier  de  Normandie  ;  Laur.  de  Gruchy,  L'ancienne  coutume 
de  Normandie).  —  Sumir  and  accad  (J.  Halévy).  —  Was  Roger  of 
Montgomery  at  Senlac?  (Howorth).  —Gabriel  Peignot's  works.  — The 
tittle-page  of  Walton's  «  Complet  Angler  »  (Elliot  Stock).  —  Scandina- 
vian  antiquities  at  South  Kensington.  —  Archaeological  notes  on  the 
terra  d'Otrante,  V  (Fr.  Lenormant).  —  Theshield  of  Achilles  (Barnabei). 

N°  53o,  ier  juin  1882  :  Mosley,  Réminiscences  chiefly  of  Oriel  Col- 
lège and  the  Oxford  Movement  (Mark  Pattison).  —  J.  Add.  Symonds, 
Animi  figura.  —  Ch.  G.  Walpole,  A  short  history  of  the  Kingdom  of 
Ireland  (M.  Stokes  :  ouvrage  qui  est  une  compilation).  —  Vaccarone, 
Le  pertuis  du  Viso,  étude  historique  (Freshfield).  —  The  Ashburnham 
ms.  of  the  York  Mystery  Plays.  —  Was  Roger  of  Montgomery  at  Sen- 
lac? (Freeman).  —  The  only  english  proclamation  of  Henry  III,  octo- 
ber  18,  1258  (Ellis).  —  The  sumerian  and  accadian  dialects  (Terrien  de 
la  Couperie). —  A  Garibaldi  in  the  eighth  century  (Morison).  —  Gabriel 
Peignot's  works  (Timmins).  —  «The  martyrdom  of  Madeline  »  (Robert 
Buchanan).  —  Some  dictionaries  and  grammars  (Palmer,  Simplified 
grammar  of  Hindustani,  persian  a.  arabic,  etc. 

Litterarisches  Centralblatt,  n°  25,  17  juin  1882  :  Gebhardt,  Thûringi- 
sche  Kirchengeschichte  —  Urkundenbuch  der  Stadt  Hildesheim,  p.  p. 
Doebner.  I  u.  IL —  Beauvois,  Un  agent  politique  de  Charles-Quint, 
le  Bourguignon  Claude  Bouton,  seigneur  de  Corberon.  (Travail  fait 
avec  un  soin  minutieux,  surtout  d'après  les  archives  belges  et  hollan- 
daises; intéressant  pour  l'histoire  de  Charles  Quint.)  —  Marchstaller, 
eine  Reise  nach  Rom,  unternommen  in  Jahre  1625,  bearb.  v.  Schroll. 
— *  Berichte  des  Grafen  Friedrich  Lothar  Stadion  ûber  die  Beziehungen 
zwischen  Oesterreich  u.  Baiern,  1807- 1809,  hrsg.  v.  Wertheimer. 
(27  rapports  de  l'ambassadeur  d'Autriche  à  Munich,  montrent  que  la 
Bavière,  depuis  Tilsit  même,  croyait  à  une  nouvelle  guerre  avec  l'Autri- 
che, que  le  roi  était  rebuté  de  sa  situation  de  vassal  de  Napoléon  I, 
que  les  événements  d'Espagne  faisaient  une  impression  profonde,  que 
l'héritier  du  trône  était  un  adversaire  décidé  du  système  de  Mongelas  et 
des  Français.)  —  Hiort-Lorenzen,  Annuaire  généalogique  des  maisons 
princières  régnant  en  Europe  depuis  le  commencement  du  xixe  siècle, 
avec  des  notes  sur  les  mariages  morganatiques.  Première  année.  Berlin, 
Puttkammer  u.  Mûhlbrecht.  —  Administrativcarte  von  Niederôster- 
reich.  —  Ôeri,  Beitrâge  zum  Verstândniss  der  Trachinierinnen  des  So- 
phokles.  —  Aulularia,  rec.  Gôtz.  — A.  [Jansen,  J.-J.  Rousseau,  frag- 
ments inédits.  Recherches  biographiques  et  littéraires.  —  Arbok  hins 
islenzka  fornleifafélags  1880  og.  1881.  Reykjavik.  —  Shakespeare  Mu- 
séum, eine  Sammlung  alter  u.  neuer,  eigener  u.  fremder,  poetischer  u. 
prosaischer  Beitrâge  zur  Shakespeare-Literatur,  hrsg.  v.  Max  Moltke. 
(Renferme  des  art.  et  des  travaux  originaux  qui  seront  acueillis  avec 
reconnaissance  par  les  amis  de  Shakespeare.)  —  Gœthe's  Reineke  Fuchs 
nach  dem  erstenDruck  vom  Jahre  1794,  hrsg.  v.  Bieltng.  —  Hoffmann 
(Franziska),  Das  Orakelwesen  im  Alterthume.  («  Si  l'ouvrage  était  com- 
posé par  un  homme,  on  dirait  simplement  qu'il  est  au-dessous  de  la 
critique;  mais  les  égards  que  l'on  doit  aux  dames,  même  à  celles  qui 
écrivent,  nous  défendent  de  porter  un  jugement  semblable  et  nous  font 
un  devoir  de  nous  abstenir  de  toute  critique;  nous  nous  contenterons 
de  citer  quelques  extraits  de  ce  livre  »;  suit  une  série  de  citations  ré- 


jouissantes.)  —  Boutkowski,  Dictionnaire  numismatique,  tome  I, 
vol.  II.  —  La  Mara,  Musikalische  Studienkôpfe.  —  Durm,  Handbuch 
der  Architektur.  —  Berlin  anno  1690,  zwanzig  Ansichten  aus  Joh. 
Stridbeck's  des  Jûngeren  Skizzenbuch,  p.  p.  Erman. 

N°  26,  24  juin  1882  :  Kapff,  Lebensbild  von  Sixt  Cari  v.  Kapff.  -— 
Hermann,  Lexicon  der  allgemeinen  Weltgeschichte.  (N'est  pas  mau- 
vais.) —  Vita  sanctorum  Stephani  régis  et  Emerici  ducis,  p.  p.  Floria- 
nus.  —  Bahrfeldt,  Der  Bracteatenfund  von  Michenfund,  ein  Beitrag 
zur  brandenburg.  Mûnzenkunde  d.  XII.  Jahrhunderts.  —  Erler, 
Deutsche  Geschichte  v.  der  Urzeit  bis  zum  Ausgang  des  Mittelalters  in 
den  Erzâhlungen  deutscher  Geschichtschreiber.  (Utile.)  —  Turmair's, 
gen.  Aventinus,  annales  ducum  Boiriae,  hrsg.  v.  Siegm.  Riezler.  I,  \, 
—  Baumgarten,  Vor  der  Bartholomàusnacht.  (Cherche  la  clef  de  l'énig- 
matique  événement  dans  les  faits  des  années  1 570-1 572;  a  fouillé  sur- 
tout la  correspondance  de  Philippe  II  et  de  ses  envoyés  et  arrive  à  un 
résultat  important  :  les  questions  compliquées  des  mariages  royaux  et  la 
paix  de  Saint-Germain  avaient  rendu  les  relations  de  la  France  et  de 
l'Espagne  extrêmement  tendues;  mais  l'insuccès  du  projet  de  mariage 
entre  Elisabeth  et  le  duc  d'Alençon,  l'échec  de  Louis  de  Nassau,  l'oppo- 
sition de  l'Angleterre  aux  plans  de  la  France  sur  les  Pays-Bas,  l'indo- 
lence des  protestants  d'Allemagne  rejetèrent  la  cour  vers  le  parti  espa- 
gnol et  catholique;  Catherine  voulut  se  débarrasser  de  Coligny,  dans 
l'espoir  que  le  meurtre  retomberait  sur  les  Guises  ou  sur  Albe;  le  coup 
manqua,  et,  les  huguenots  prenant  une  attitude  menaçante,  il  fallut  re- 
courir au  massacre.)  —  Von  Helfert,  Der  Wiener  Parnass  im  Jahre 
1848.  —  Ausgewàhlte  Reden  des  Fursten  von  Bismarck,  III  Band, 
Reden  aus  den  Jahren  1878-188 1.  — Wickes,  a  treatise  on  the  accen- 
tuation of  the  three  socalled  poetical  books  of  the  Old  Testament, 
Psalms,  Proverbs  a  Job.  (Travail  excellent.)  —  Koechly,  Akademische 
Vortrâge  u.  Reden.  hrsg.  v.  Bartsch.  —  Elis  saga  ok  Rosamundu,  mit 
Einleitung,  deutscher  Uebersetz.  u.  Anmerk.  hrsg.  v.  Kôlbing.  (Edi- 
tion faite  avec  grand  soin,  traduction  fidèle.)  —  Schneider,  Die  St.  Pau- 
lus-Kirche  zu  Worms,  ihr  Bau  u.  ihre  Geschichte.  —  v.  Huber-Liebe- 
nau,  Das  deutsche  Haus  zur  Zeit  der  Renaissance.  (Simple  conférence, 
mais  remplie  d'erreurs  et  d'absurdités.)  —  Israël,  ûbersichtl.  Catalog 
der  Musikalien  der  stand.  Landesbibliothek  zu  Cassel.  —  BàUMKER, 
Zur  Geschichte  der  Tonkunst  in  Deutschland,  von  den  erten  Anfàn- 
gen  bis  zur  Reformatioa.  —  Rûhlman.n,  Die  Geschichte  der  Bogen- 
instrumente.  —  Reissmann,  G.  Fr.  Haendel,  sein  Leben  u.  seine 
Werke. 

Deutsche  Literaturzeitung,  n°  24,  17  juin  1882  :  Panek,  Commentarius 
in  epistolam  Pauli  apostoli  ad  Hebraeos.  —  Le  page  Renouf,  Vorles. 
ûber  Ursprung  u.  Entwickel.  der  Religion  der  alten  Aegypter.  Leipzig, 
Hinrichs.  (Pietschmam)  —  Juskevicz,  Lietuviskos  dajnos  (Bezzenber- 
ger  :  le  plus  vaste  recueil  de  dainos  qui  ait  paru  jusqu'ici).  —  Corn. 
Taciti  dialogus  de  oratoribus,  recogn.  Baehrens.  (Prammer  :  de  grands 
défauts,  néanmoins  édition  indispensable  au  philologue).  —  Clemm,  De 
breviloquentiaetaciteaequibusdamgeneribus.  (Prammer  :  utile.)  — Brief- 
wechsel  zwischen  Schiller  u.  Gœthe,  4e  aufl.  —  Zeitschrift  fur  Ortho- 

Îraphie,  hrsg  v.  Victor.  (Seemûller  :  très  recommandable  entreprise.)  — 
an  te  Winkel,  Bladzijden  uit  de  Geschiedenis  der  nederlandsche  letter- 
kunde,  I.  Joan  Blasius  als  vertegenwordiger  van  de  romantische  rich- 
tung  onzer  letterkunde  in  de  zeventiende  eeuw.  II.  Vondel  aïs  treur- 
speldichter.  (J.  Frank.)  —  Ch.  Thurot,  De  la  prononciation  française 
depuis  le  commencement  du  xvr3  siècle  d'après  les  témoignages'  des 
grammairiens.  (Koschwitz  :  source  inestimable  d'instruction  sur  la  pho- 


nétique  du  français  moderne.)  —  Wenck,  Clemens  V  u.  Heinrich  VII, 
die  Anfânge  d.  franz.  Papsttums,  ein  Beitrag  zur  Geschichte  des  XIV. 
Jahrhunderts.  (Th.  Lindner  :  soigné  et  agréable  à  lire)  —  Politische  Cor- 
respondenz  Friedrichs  des  Grossen,  Bande  VI,  u.  VII  (Posner.)  — 
Brosien,  Lexikon  der  deutschen  Geschichte,  die  Vôlker,  Lànder,  histor- 
ischen  Personen  u.  Stàtten  Deustchlands  mit  Einschluss  der  german. 
Stâmme  Oesterreichs,  Burgunds,  der  Niederlande  u.  d.  Schweiz  bis  zu 
ihrer  Abtrennung.  (K.  Rieger  :  à  recommander  aux  «  laïques  ».)  —  De 
la  Jonquière,  Histoire  de  l'empire  ottoman.  (Manuel  digne  d'éloges  : 
témoigne  de  connaissances  acquises  sur  les  lieux  mêmes;  nombreux  faits 
habilement  rassemblés)  —  Kappler,  Hollàndisch  Guiana,  Erlebnisse  u. 
Erfahr.  wâhrendeines  43  jâhrigen  Aufenthalts  in  der  Kolonie  Surinam. 

—  G.  Meyer,  Die  Verleihung  des  Kônigsbannes  u.  das  Dingen  bei  mark- 
grâflicher  Huld.  —  Jomini,  Abriss  der  Kriegskunst  erlâutert  durch 
von  Boguslawski. 

Philologische  Wochenschrift,  n°  23,  10  juin  1882  :  Anton  Krichenbauer, 
Théogonie  und  Astronomie  (Paul  Stengel  :  folies  sur  Homère).  —  Chr. 
von  Husens,  Odyssée- Bilder,  Nausikaas  Verschiittung  (roman  agréable). 

—  H.  W.  Stoll,  Anthologie  griechischer  Lyriker  fur  die  obersten  Klassen 
der  Gymnasien  (Sitzler  :  5e  édition  de  la  ire  division,  élégies  et  épigram- 
mes;  très  recommandé;  critiques.de  détail).  —  R.  Y.  Tyrrell,  The 
Troades  of  Euripides,  with  Revision  of  Text,  and  Notes  chiefly  inten- 
ded  for  Schools,  Dublin,  Browne  and  Nolan  (H.  Gloël).  —  Ch.  Graux, 
Plutarque,  Vie  de  Cicéron.  Hachette  (Heller  :  «  Nous  prenons  ce  petit 
volume  avec  tristesse,  regrettant  qu'une  mort  prématurée  ait  enlevé  à 
son  œuvre  et  à  la  science  ce  jeune  savant  plein  d'espoir.  On  pouvait  es- 
pérer qu'il  remplacerait  par  une  édition  critique  nouvelle  des  Vies  celle 
de  Sintenis,  très  méritoire,  mais  un  peu  arriérée  maintenant  par  suite 
de  diverses  découvertes,  comme  celle  du  Seitenstettensis  et  celle  du  Ma- 
tritensis,  que  Graux  lui-même  a  collationné  le  premier.  Si  déjà  nous 
avions  pu  rendre  hommage  à  sa  vie  de  Démosthène,  notre  douleur 
s'augmentera  en  reconnaissant,  dans  la  façon  dont  il  a  traité  la  Vie  de 
Cicéron,  «  wie  sich  Graux  mehr  und  mehr  in  seine  Aufgabe  hineinlebte  »; 
car,  sur  tous  les  points,  en  particulier  dans  les  parties  préliminaires,  elle 
nous  montre  un  progrès  important...  Beaucoup  plus  riche  d'idées  et 
plus  instructif  est  le  chapitre  de  12  pages  qui  traite  en  détail  des  sources 
de  Plutarque  pour  la  biographie  de  Cicéron.,.  Nous  tenons  ce  chapitre 
non-seulement  pour  le  plus  important,  mais  pour  celui  qui,  par  l'expo- 
sition simple  et  modeste  des  résultats  assurés  et  des  résultats  douteux, 
caractérise  le  mieux  le  «  sens  objectif  »  du  savant  défunt.  »  Article  très 
détaillé.  Cf.  Rev.  crit.,  10  avril  1882,  pp.  289  ss.).  —  Joh.  E.  Dassen- 
bacher,  Schematismus  der  ôsterreichischen  Mittelschulen.  —  Jahresbe- 
richt  des  Vereines  «  Mittelschule  »  in  Wien.  —  Périodiques,  etc. 

Gœttingische  gelehrte  Anzeigen,  n°  24,  14  juin  1882  :  Bartholomae,  Ar- 
ische  Forschungen.  I  Heft.  (Pischel.) 

N°  25,  21  juin  1882  :  Rehmke,  Die  Welt  als  Wahrnehmung  und 
Begriff,  eine  Erkenntnisstheorie.  (Wundt.)  —  Langwerth  von  Sim- 
mern,  Oesterreich  und  das  Reich.  (Bôthlingk  :  essaie  de  donner,  au 
point  de  vue  autrichien,  un  exposé  de  l'époque  de  1789  a  181 5;  écrit 
avec  talent,  mais  la  tâche  dépassait  les  forces  de  l'auteur.)  —  Hicks,  A 
manual  of  greek  historical  inscriptions.  (Blass  :  sera  utile  et  en  Angle- 
terre et  ailleurs.)  —  Bechtel,  Bartholomâus  Willent's  litauische  Ue- 
bersetzung  des  Luther'schen  Enchiridions  u.  d.  Episteln  u.  Evan- 
gelien.  (Bechtel.) 

La  Puy,  imprimerie  Marchesson  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23. 


N°  30  Seizième  année  24  Juillet  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ   SOUS   LA   DIRECTION 

dk  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 
Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 

Prix  d'abonnement  : 

Un    an,   Paris,   20   fr.  —    Départements,    22    fr.    —    Étranger,    25   fr. 


PARIS 

ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

libraire    de    la    société    asiatique 

du    l'école    des    langues    orientales    vivantes,    etc. 

28,    RUE    BONAPARTE,     28 

Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


1\/l  t71\/ï /'"MD  UC     sur  'a  Chronologie  et  l'Iconographie  des  Rois  Parthes  Ar- 

1V1  C 1VI  V_/ 1 1\  C ^     sacides,   par  A.   de   Longpérier.  Un  beau  volume  in-4, 

avec  18  planches  sur  cuivre.     . 25     » 


ÉTUDES  SUR  L'HISTOIRE  D'ETHIOPIE 

par  M.  René  Basset.  Un  volume  in-8  de  320  pages -.     i5     » 

L5r?lYT/">  r>  T-.     1-NT7     •">  tj  t  'NT  r?        son  histoire,  ses  procédés  de  fabri- 
ElN  V>lx.C     VJC,     v^llJiNC,     cation,    etc.,  par  Maurice   Jametel. 
In-18,  orné  de  27  gravures 5     » 

LE  ROYAUME  DU  CAMBODGE  t&Sï, 

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Paraît  en  3o  livraisons  à  1  franc.  Les  livraisons  1  à  5  sont  en  vente. 


PÉRIODIQUES 

Litterarisches Centralblatt,  n°  27, 1"  juillet  1882  :  Harnack,  dieUeberliefe- 
rungd.  griech.  Apostel  des  zweiten  Jahrhunderts  in  der  alten  Kirche  u. 
im  Mittelalter.  —  Deisenberg,  Theismus  u.  Pantheismus.  —  Richter 
(Alb.j,  Bilderausderdeutschen  Kulturgeschichte,  I,  1,  I. —  FriedlSnder, 
die  italienischen  Schaumûnzén  des  XV.  Jahrhunderts,  1430- i53o. 
III  Heft.  (Suite  de  cette  très  solide  et  très  précieuse  publication.) —  Lorck, 
Handbuch  der  Geschichte  der  Buchdruckerkunst.  I,  Erfindung,  Verbrei- 
tung,  Blûthe,  Verfall,  1450- 1750.  (Excellent  livre  à  recommandera  tout 
le  monde;  renferme  tous  les  résultats  certains.)  — Aus  demhandschriltli- 
chen  Nachlasse  Westenrieder's,  v.  Aug.  Kluckhohn.  I,  Denkwûrdig- 
keiten  u.  Tagebûcher.  (Intéressant.)  —  Brugsch,  Hieroglyphisclwiemo- 
tisches  Wôrterbuch,  enthaltend  in  wissenschaftlicher  Anordnung  u. 
Folge  den  Wortschatz  der  Heiligen-und  der  Volkssprache  und  der 
Schrift  der  alten  Aegypter,  nebst  Eiklârung  der  einzelnen  Stâmme. 
Bd  V-VII.  (Ouvrage  entièrement  indispensable  à  tout  égyptologue, 
mais  qui  coûte  trop  cher,  400  mark  !  L'auteur  ajoute  à  tous  les  servi- 
ces qu'il  a  déjà  rendus  à  la  science,  le  plus  grand  et  le  plus  important.) 
—  Ceci,  Scritti  glottologici.  Fascicolo  I;  il  dativo  plurale  greco;  le  voci 
greche  [juv  v£v  ;  il  latino  amentum  (Ceci  est  «  entré  bien  armé  dans  l'arène 
linguistique  »  et  s'est  heureusement  acquitté  de  la  tâche  difficile,  de 
connaître  tout  ce  qui  s'est  publié  su  rie  domaine  de  la  grammaire  com- 
parée; beaucoup  de  soin  et  d'érudition  dans  ce  nouveau  travail  du  sa- 
vant italien;  mais  trop  d'attaques  contre  G.  Curtius  et  polémique  trop 
vive).  —  Eyssenhardt,  Romisch  u.  romanisch.  (Beaucoup  d'obscurités,  et 
d'opinions  insoutenables,  mais  soulève  de  nouveau  une  question  im- 
portante; mérite  de  trouver  des  lecteurs.)  —  Fabricius,  De  architectura 
graeca  commentationes  epigraphicae.  (Travail  d'un  jeune  savant  qui 
unit  une  profonde  culture  philologique  à  de  grandes  connaissances  en 
architecture.) 

Deutsche  Literaturzeitung,  n°  25,  24  juin  1882  :  Reuss,  die  Geschichte 
der  heiligen  Schriften  alten  Testaments.  (Wellhausen  :  est  à  un  tout  autre 
et  bien  plus  haut  niveau  que  les  travaux  de  Keil,  Bleek,  etc.)  —  Bon- 
wetsch,  Die  Geschichte  des  Montanismus.  (Holtzmann  :  bon,  l'auteur 
renvoie  au  compte-rendu  de  Weizsâcker,  n°  4  de  la  «  Theologische  Lite- 
raturzeitung  ».)  —  Sigwart,  Kleine  Schriften,  2  vols.  (Cohen.)  —  Fi- 
scher, u.  Wiedmann,  Ueber  babylonischea  Talismane  »,Cylinder  u.  an- 
dere  Formen  aus  d.  hist.  Muséum  im  steirisch  ■  landschaftlichen 
Johanneum  zu  Graz.  (Schrader.) —  Les  harangues  de  Demosthène,  texte 

frec  p.  p.  H.  Weil.  (A.  v.  Bamberg  :  très  remarquable.)  —  Deffner, 
akonischeGrammatik.  (Rangabé  :  malgré  quelques  fautes,  cet  ouvrage 
est  digne  d'être  recommandé,  et,  lorsqu'il  sera  terminé,  formera  une  im- 
portante contribution  à  la  connaissance  des  dialectes  grecs.)  —  Bayard 
Taylor,  Die  Dichtung  in  Bildern,  literarische  Studien.  Ausgewahlte 
Schriften,  I.  (Er.  Schmidt  :  bons  essais.)  —  Beowulf,  hrsg.  v.  Holder. 
—  Einhardi  vita  Karoli  imperatoris,  hrsg.  v.  Holder.  —  Elie  Berger, 
Les  registres  d'Innocent  IV,  recueil  des  bulles  de  ce  pape  publiées  ou 
analysées  d'après  les  mss.  originaux  du  Vatican  et  de  la  Bibliothèque  na- 
tionale. Fasc.  I,  II,  III.  Ewald  :  public,  qui,  en  son  ensemble,  peut  être 
regardée  comme  un  modèle  des  publications  de  ce  genre,  édition  faite 
avec  soin  et  conscience.)  —  H.  M.  i<ichter,  Geschichte  der  deutschen 
Nation  nach  den  Grundziigen  ihrer  Entwickelung.  (Rudloff  :  n'est  pas 
destiné  aux  savants,  mais  est  accessible  par  sa  forme  agréable  à  tous  les 
«  Gebildeten  »;  bonne  disposition  du  sujet;  chaud  enthousiasme  pour  la 
grandeur  politique  de  l'Allemagne.)  —  Historisches  Taschenbuch,  hrsg. 
v.   Fr.  Raumer,  hrsg.  v.  Maurenbrecher.   VI  Folge,  I    Jahrgang  (R. 


Pauli).  — -  Munch,  Samlede  Afhandlinger,udgivneefteroffenlig  foranstalt- 
ning  af  Gustaf  Storm.  I-IV  Bi.  Christiania.  (Recueil  des  articles  et  tra- 
vaux les  plus  remarquables,  dispersés  dans  des  recueils  divers,  du  grand 
historien  norvégien.)  — Pfizmayer,  Zwei  Reisen  nachdem  Westen  Japans. 
—  Woermann,  Kunst-und  Naturskizzen  aus  Nord-und  Siideuropa,  ein 
Reise-Tagebuch.  —  Hugo  Riemann,  Musik-Lexicon,  Théorie  u.  Ge- 
schichte  der  Musik,  die  Tonkiinstler  alter  u.  neuer  Zeit  mit  Angabe  ihrer 
Werke. 

N°  26,  Ier  juillet  1882  :  Ph.  Strauch,  Margaretha  Ebner  u.  Heinrich 
v.  Nôrdlingen,  ein  Beitrag  zur  Geschichte  der  deutschen  Mystik.  (De- 
nifle  :  «  eine  wahre  Musterarbeit.  ») — Kawerau,  Kaspar  Gûttel,  ein  Le- 
bensbild  aus  Luthers  Freundeskreise.  (W.  Mûller  :  étude  très  attachante 
sur  ce  partisan  convaincu  de  Luther.)  —  Ern.  Laas,  Idealismus  u.  Po- 
sitivismus.  —  Vishunusmritih,   the  Institutes  of  Vishnu  together  vvith 
extracts  from  the  sanscrit  commentary  of  Nanda   Pandita  called  Vai- 
jayanti  edited  with  critical    notes,  an  Anukramanikâ  and  indexes  of 
words  a~   mantras  by  Julius  Jolly.  I,  II.  [Bibliotheca  Indica,  a  collec- 
tion of  oriental  works  published  by  the  Asiatic  Society  of  Bengal.]  Cal- 
cutta. (A.  Weber  :  travail  vraiment  critique  où  il  y  a  quelques  fautes 
d'impression,  mais  dont  le  texte  ert  constitué  d*après  des  principes  fixes 
et  scientifiques.)  —  Haller,  Geschichte  der  russischen  Literatur.  (Krek  : 
pas  de  recherches  originales,  remaniement  et  traduction  à  la  fois  du  ma- 
nuel de  Petrov,  mais  sera  évidemment  le  plus  utile  des  ouvrages  alle- 
mands sur  la  matière;  bien  préférable  au  livre  de  Honegger  par  le  sa- 
voir et  le  tact  critique.)  —  Rich.  Arnoldt,  Der  Chor  im  Agamemnon  des 
Aeschylus  scenisch  erlautert.  (Wilamowitz  :   «  livre  écrit  avec  clarté  et 
concision,  par  quelqu'un  qui  aime  sincèrement  la  vieille  poésie  et  qui  ne 
prononce  pas  seulement  du  bout  des  lèvres,  mais  avec  le  cœur,  le  nom 
de  Gottfried  Hermann.  *)  —  C.  Meissner,  Die  Cantica  des  Terenz  u. 
ihre  Eurhytmie.   (Léo  :  n'avance  pas  du  tout  la  question,  erreurs  et 
manque  de  méthode.)  —   Visio  Tnugdali  latein.    u.  altdeutsch  hrsg.  v. 
Albr.  Wagner.  Erlangen,  Deichert.  (A.  Schônbach  :  publication  de  tex- 
tes qu'il  est  très  commode  et  agréable  de  posséder  réunis.)  —  P.  Noack, 
eine  Geschichte  der  relativen  Pronomina  in   der  englischen  Sprache. 
(Wissmann  :  l'histoire  des  pronoms  relatifs  en  anglais  reste  encore  à 
écrire.)  —  Leop.  v.  Ranke,  Weltgeschichte,  II.  Theil.  Die  rômische  Re- 
publik  u.  ihre  Weltherrschaft.  («  Commence  à  la  fondation  de  Rome  et 
va  jusqu'à  Auguste  ;   on  admirera  encore  la  force  et  la  puissance  de  cet 
esprit  qui  a  su  pénétrer  ce  grand  et  vaste  sujet  et  en  présenter  un  ta- 
bleau plein  de  vie  ;  érudits  et  laïques  liront  cette  seconde  partie  de  l'ou- 
vrage avec  le  même  plaisir  que  la  première  et  en  tireront  maint  ensei- 
gnement nouveau  ;  puisse  la  faveur  du  destin  accorder  au  maître,  de 
mener  à  fin  cette  histoire  universelle,  qui  sera  un  monumentum  aère  pe- 
rennius.  »)  — M.  Baumann,  Die  Handelsprivilegien  Lubecks  im  XII,  XIII 
u.  XIV  Jahrhundert,  eine  Vorarbeit  fur  den  Verfasser  einer  Handelsge- 
schichte  Lubecks.  (Hohlbaum  :  non,   ce  n'est  pas  un   travail  prélimi- 
naire, réellement  scientifique,  pour  une  Histoire  du  commerce  de  Lu- 
beck.)  —  Politische  Correspondenz  der  Stadt  Strassburg  im  Zeitalter 
der  Reformation.  I.  1 5 17-1650,   p.  p.  Hans  Wirck.  (Hollander  :  tra- 
vail méritoire  qui  sera  le  bienvenu  de  tous  ceux  qui  étudient  l'histoire 
de  la  Réforme.)  —  Anderson,  Scotland  in  early  Christian  times.  Second 
séries.  (Bellesheim  :  sujet  traité  avec  soin  et  épuisé  ;  enthousiasme,  tem- 
péré par  la  réserve  et  la  circonspection  nécessaires  dans  un  domaine  où 
l'hypothèse  arbitraire  est  si  tentante  ;  conférences  sur  les  travaux  en  mé- 
tal des  anciens  Celtes,  les  travaux  sur  pierre,  l'art  des  monuments,  les 
symboles  des  monuments,  les  inscriptions  des  monuments  en  oghams  et 
en  runes.)  —  Kappeyne  van  de  Coppello,  Over  im  facere  vin  het  inter- 


dictum  uti  possidetis.  (Mériterait  d'être  traduit,  contribution  de  haute 
valeur  au  droit  romain,  grande  précision.) 

Philologische  Wochenschritt,  n°  24,  17  juin  1882  :  Upax-rwà  iftç  h  'A6fr 
vaiç  àp/atoXo  Yr/.r,ç  exaiptaç  àitb  'Iavcuapicu  1881  [xé/pt  'Iavouapicu  1882, 
Athènes,  typogr.  Angelopoulo  (Chr.  B.  :  sur  des  fouilles  à  Athènes  et 
Tanagra,  le  principal  article  sur  les  fouilles  du  théâtre  d'Epidaure,  le 
plus  beau  et  le  mieux  conservé  de  la  Grèce).  — Alexandro  Tartara, 
Dalla  battaglia  délia  Trebbia  a  quella  del  Trasimeno.  Turin,  Lcescher 
(P.  Meyer  :  éloge  mêlé  de  quelques  critiques).  —  Aug.  Mueller,  De 
auctoribus  rerum  a  M.  Claudio  Marcello  in  Sicilia  gestarum  (Soltau  : 
médiocre).  —  L.  Lange,  De  diebus  ineundo  consulatui  solemnibus  in- 
terregnorum  causa  mutatis  (Soltau  :  essaie  en  vain  de  réfuter  Unger).  — 
Vahlen,  Ueber  zwei  Elegien  des  Propertius  (Gustafsson  :  modèle  de 
saine  méthode).  — G.  A.  Euler,  Die  hohe  Karlsschule.  —  Périodiques, 
etc.  Fouilles  romaines  aux  environs  de  Metz. 

Philologische  Rundschau,  n°  26,  24  juin  1882  :  N.  Wecklein,  Die  Tra- 
gôdien  des  Sophokles  zum  Schulgebrauche. ..,  Oedipus  in  Kolonos 
(Gerh.  Heinr.  Mûller  :  éloge,  discussion  sur  des  détails).  —  Babrii  fabulas 
recensuit  M.  Gitlbauer  (manque  de  méthode  et  d'exactitude,  texte  mo- 
difié avec  légèreté;  pas  en  arrière  après  Eberhard  ;  donne  une  idée  fâ- 
cheuse de  la  jeune  école  philologique  autrichienne).  —  G.  Fischer,  Die 
Elegien  des  Albius  Tibullus  in  modernen  Rhythmen  (Chalybaeus  :  ar- 
ticle diffus).  —  Aug.  Herzog,  Stati  Epithalamium  (Silv.  I,  2)  (Paul 
Mohr).  —  H.  T.  Karsten,  Elocutio  rhetorica,  qualis  invenitur  in  An- 
nœi  Senecae  suasoriis  et  conrroversiis.  Rotterdam  (Phil.  Thielmann  : 
utile,  mais  demande  encore  du  travail).  —  G.  Francaroli,  Saggio  sopra 
la  genesi  délia  metrica  classica,  Firenze,  188 1  (G.  Stier  :  intéressant.)  — 
Cari  Neumann,  Geschichte  Roms  wàhrend  des  Verfalles  der  Republik 
(Faltin  :  publication  posthume  très  intéressante,  surtout  pour  l'époque 
des  Gracques  :  négligence  de  la  part  de  l'éditeur  E.  Gothein).  —  A.  Herr- 
mann,  Darstellung  der  Beziehungen  zwischen  Rômern  und  Parthern 
von  der  Uebernahme  der  Herrschaft  durch  Augustus  bis  zu  Tiridates 
Belehnungdurch  Nero  (Durr).  — Adalbert  Ziegler,  Die  Regierung  des 
Kaisers  Claudius  (Herman  Haupt  :  très  bon). 

Columnalui  Traian,  nos  4-5,  avril-mai  1882  :  Hasdeu,  Etudes  de  linguis- 
tique (suite) .  —  I.  Bianu,  Notice  sur  un  manuscrit  roumain  d'Eustrate  le 
logothète,  de  i632  (compilation  juridique).  —  N.  Densu,sian,  Docu- 
ments sur  le  pays  de  Fogaras  (suite).  —  Brandza,  Nomenclature  botani- 
que roumaine  (suite).  —  I.  Bianu,  Compte-rendu  des  Rumunische  Un- 
tersuchungen  de  Miklosich.  —  S.  FI.  Marian,  De  pocitura,  chant 
recueilli  en  Bucovine.  —  Hasdeu,  description  d'un  manuscrit  roumain 
de  1574  (suite).  —  Hasdeu,  Etymologie  de  zglobiu,  pétulant  (du  slavon 
zlobivu).  —  Climescu,  Curpan,  Petrov  et  Pat,  Coutumes  juridiques  du 
district  de  Bacâu  (suite).  —  Marian,  Fabrication  de  la  couleur  jaune  en 
Bucovine,  fragment  d'une  chromatique  du  peuple  roumain.  —  Chro- 
nique inédite  roumaine  des  années  1800-1821,  en  prose  et  en  vers,  écrite 
par  «  Zilot  Romanul  »  (pseudonyme),  conservé  aux  archives  de  l'Etat 
(transcription  en  romain  d'un  original  en  cyrillique).  —  G.  Chitsu,  Les 
noms  roumains  des  mois,  nomenclature  savante  et  nomenclature  popu- 
laire. —  P.  Ispirescu,  Conte  populaire.  —  Marian,  Incantations  de  Bu- 
covine. —  Negoescu,  Chant  populaire.  —  Chronique. 


Le  Fuy,  typ.  et  lith.  Marchesseu  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  ai 


N«  31  Seizième  année  31  Juillet  1882 


— 


REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE   PUBLIÉ   SOUS   LA   DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  xMONOD,  G.  PARIS 

Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 

Prix  d'abonnement  : 
Un   an,  Paris,  20  fr.  —   Départements,   22  fr.   —   Étranger,   25  fr. 


PARIS 

ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

libraire   de   la    societe   asiatique 

de    l'école    des    langues    orientales   vivantes,    etc. 

28,    RUE   BONAPARTE,    28 

A  dresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 
(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


TV/l"t7  A/T/^VTD  Û7C     sur  la  Chronologie  et  l'Iconographie  des  Rois  Parthes  Ar- 

ÎVI il  1V1  V_y  1  In  L, O     sacides,   par  A.   de  Longpérier.  Un  beau  volume  in-4, 

avec  18  planches  sur  cuivre 25    » 


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par  M.  René  Basset.  Un  volume  in-8  de  32o  pages i5    » 

Ljt-'Tv T/'^'D  L7     T\ET     ^UrTMIT       son  histoire,  ses  procédés  de  fabri- 
.CrNv_>Iv.C     lJC     V>J~lliNJD?     cation,    etc.,  par  Maurice  Jametel. 
In-18,  orné  de  27  gravures 5     » 

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PÉRIODIQUES 

, 

Literarisches  Centralblatt,  n°  28,  8  juillet  1882  :  Scholten,  Das  pauli- 
nische  Evangelium.  •—  Mehlis,  Studien  zur  àltesten  Geschichte  der 
Rheinlande,  V,  der  Grabfund  von  Kirchheim.  —  Kuchimeister's 
nûwe  casus  monasterii  sancti  Galli,  neu  hrsg.  v.  Meyer  v.  Knonau.  — 
Mûller,  Erzbischof  Aribo  von  Mainz;  P.  Meyer,  Die  Fortsetzer 
Hermann's  von  Reichenau.  —  Graf,  Roma  nella  memoria  e  nelle  ima- 
ginazioni  del  medio  evo.  (Livre  de  grand  mérite  qui  mérite  le  même 
accueil  favorable  que  l'ouvrage  de  Comparetti.)  —  Kawerau,  Gaspar 
CûtteL  ein  Leb'ensbild  aus  Luther's  Freundeskreise.  (Travail  intéres- 
sant et  bien  fait  sur  les  commencements  de  la  Réforme.)  —  Stieler's 
Schulatlas;  61e  Aufi.  vollstândig  neu  bearb.  v.  Berghaus.  —  Meister, 
Die  griechischen  Dialekte  auf  Grundlage  von  Ahrens'  Werk  «  de 
graecae  linguae  dialéetis  »  dargestellt.  I.  Asiatisch-àolisch,  bôotisch, 
thessalisch.  (Excellent  livre  qni  ne  doit  manquer  dans  aucune  bibliothè- 
que philologique  ou  linguistique.)  —  Aly,  Die  Quellen  des  Plinius  im 
achten  Buch  der  Naturgeschichte.  (Travail  précieux  par  la  comparai- 
son des  termes  de  Pline  avec  ceux  des  auteurs  qu'il  a  consultés;  il  se- 
rait plus  utile,  s'il  était  moins  concis.)  —  Brandes,  Die  Literatur  des 
neunzehnten  Jahrhunderts  in  ihren  Hauptstrômungen  dargest.  I.  Die 
Emigrantenliteratur.  (Suite  d^esquisses  spirituelles,  faites  avec  soin  et 
entièrement  réussies;  quelques  objections  à  faire  çà  et  là.)  —  Langbehn, 
Fliigelgestalten  der  iiltesten  griechischen  JKunst.  (Travail  sur  «  les  créa- 
tures du  monde  de  Fart  grec,  qui  sont  issues  entièrement  ou  en  partie 
de  la  réalité,  mais  qui  portent,  contre  nature,  des  ailes  »,  ex.  les  Har- 
pyes,  Pégase  ;  l'étude  la  plus  intéressante  est  consacrée  à  TArtémis  ailée 
et  à  la  Gorgone;  remarques  de  détail  à  faire.)  —  Hultsch,  Heraion  u. 
Artemision ,  zwei  Tempelbauten  Ioniens.  —  Blumner,  Laokoon- Stu- 
dien, I  Heft,  ueber  den  Gebrauch  der  Allégorie  in  den  bildenden  Kûn- 
sten.  (Recherches  d'un  style  clair  et  facile  à  comprendre.)  —  Feuerbach 
(Anselm),  ein  Vermachtniss  (Ecrit,  dont  la  iro  partie  renferme  une  au- 
tobiographie de  l'artiste;  lecture  qui  émeut  et  élève  l'âme.) 

n°  29,  i5  juillet  1882  :  Lucius,  der  Essenismus  in  seinem  Verhâltniss 
zumJudentum. — Chn.  Meyer,  Geschichte  des  Landes  Posen.  (Livre 
que  l'auteur  aurait  mieux  fait  de  ne  pas  écrire  ;  ne  connaît  pas  les  tra- 
vaux récents  des  historiens  polonais;  manque  de  sens  historique  ;  trop 
hostile  de  parti-pris  à  la  Pologne.)  —  Holder,  Germanischer  Bûcher- 
schatz.  (La  Germania  de  Tacite,  Einhard,  Nithard.)  —  Kindler  v. 
Knobloch,  Der  alte  Adel  im  Oberelsass.  (Notices,  par  ordre  alphabéti- 
que, sur  l'histoire  de  la  noblesse  de  la  Haute-Alsace;  mais  les  sources 
ne  sont  pas  indiquées.)  —  Rogge,  Geschiedenisder  stedelijke  boekerij  van 
Amsterdam.  (Histoire  instructive  et  attachante  de  la  bibliothèque  de  la 
ville  d'Amsterdam.)  —  Huber,  Matthias  von  Neuenburg  u.  Jacob  von 
Mainz.  —  Lattes,  Nuovo  saggio  di  giunte  e  correzioni  al  lessico  talmu- 
dico  (Lévy-Fleischer).  Roma,  Salviucci.  (Travail  dont  la  valeur  consiste 
surtout  dans  la  partie  relative  aux  particules.)  —  Pseudolysiae  oratio 
funebris,  éd.  Mart.  Erdmann.  —  Ovidii  libellus  de  medicaminefaciei,  p. 
p.  Kunz.  (Travail  très  soigneux  et  très  habile.)  —  Spéculum  regale,  ein 
altnorweg.  Dialog  hrsg.  v.  Brenner.  (Edition  qui  a  coûté  à  son  auteur 
beaucoup  de  soin  et  de  labeur.)  —Album  von  Hernstein,  Illustrationen 
zu  Hernstein  in  Niederosterreich. 

Philologische  Wochenschrift,  n°  25,  24  juin  1882  :  Julius  Grimm,  Der  rô- 
mische  Brùckenkopf  in  Kastel  bei  Mainz  und  die  dortige  Rômerbrûcke 
(Gustav  Becker  :  le  pont  est  romain  et  non  carolingien).  —  Clemm,  De 
breviloquentiae  Taciteae  quibusdam  generibus  (Andresen  :  mauvais  la- 


tin,  travail  soigné  pour  le  fond).  —  Poekel,  Philologisches  Schriftstel- 
ler- Lexikon  (utile  quoique  très  insuffisant;  précieux  renseignements  sur 
les  érudits  anglais.)  —  Périodiques,  etc. 

Philologische  Rundschau,  n°  27,  ier  juillet  1882  :  J.  A.  Stewart,  The 
English  Mss.  of  the  Nicomachean  Ethics.  Oxford,  Clarendon  Press 
(J.  Cook  Wilson  :  bon).  —  Rassow,  De  Plauti  substantivis,  cf.  Rev. 
crit.,  12  juin  1882  (K.  E.  Georges  :  rectifications  de  détail).  —  Lucre- 
tius,   deutsch  von  Max  Seidel  (Max  Schlierbach)  (A.  Kannengiesser). 

—  J .  Gantrelle,  Ciceronis  philippica  secunda,  cf.  Rev.  crit.,  3  avril  1882, 
p.  166  (Rud.  Klussmann  :  édition  élégante,  d'un  savant  belge  célèbre 
jusqu'en  Allemagne,  repose  surtout  sur  les  éditions  classiques  de  Halm 
et  Koch-Eberhard;  commentaire  un  peu  concis,  éclaircissant  le  fond 
plus  que  la  grammaire;  certaines  notes  de  grammaire  seraient  inutiles 
pour  des  élèves  allemands;  d'autres  manquent;  Klussmann  énumère  les 
explications  neuves  et  en  discute  une;  peu  de  fautes;  texte  fondé  sur 
Halm,  avec  comparaison  d'ailleurs  peu  féconde  d'un  ms.  de  Bruxelles 
et  deux  mss.  de  Paris;  orthographe  arriérée  ;  mauvaises  corrections,  em- 
pruntées en  grande  partie  à  Cobet,  etc.,  autres  corrections  négligées  à 
tort;  les  illustrations  moins  élégantes  que  le  reste;  le  caractère  admis 
pour  les  notes  ne  semble  pas  bien  choisi).  —  H.  Koechly,  Caesar  und 
die  Gallier,  2.  Aufl.  (Saalfeld  :  applaudit  à  cette  réimpression;  la  pre- 
mière publication  est  de  1871,  ce  qui  explique  les  allusions  patrioti- 
ques). —  H.  Nohl,  Analecta  Vitruvian.a  (K.  E.  Georges  :  bon).  — 
H.  Weissenborn,  Die  Uebersetzungen  des  Euklid  durch  Gampano  und 
Zamberti  (Gûnther  :  à  consulter).  — Strack,  VollstàndigesWôrterburch 
zu  Xenophons  Kyropâdie  (Vollbrecht  :  utile  malgré  des  défauts).  —  Ed. 
v.  Hartmann,  Das  religiôse  Bewusstsein  der  Menschheit  im  Stufengang 
seiner  Entwickelung  (Ziegeler  :  deux  chapitres  intéressent  les  philolo- 
gues :  Die  âsthetische  Verfeinerung  des  Monotheismus  im  Hellenentum, 
et  Die  utilitarische  Sâkularisierung  des  Monotheismus  im  Rômertum.) 

—  Karl  Boysen,  Bibliographische  Ueber'siçht  ûber  die  die  griech.  und 
latein.  Autoren  betreffenden  Litteratur  der  Jahre  1867- 1876  (Rud. 
Klussmann  :  mauvais,  utile  pourtant). 

Nachrichten  von  der  koenigl.  Gesellschaft  der  Wissenschaften,  n°  i3,  18  juin 
1882  :  De  Lagarde,  Woher  stammt  das  x  der  Mathematiker  ?  (Il  vient, 
en  tout  cas,  dexei  =  cosa);  —  Sixtus  =  Xystus  (Xystus  est  devenu  dans 
la  bouche  des  Italiens  Sisto,  d'où  est  né  Sixtus). 

N°  14,  Preisaufgaben  der  Wedekindschen  Preisstiftung  fur  deutsche 
Geschichte. 

N°  i5  :  J.  Gildemeister,  Ueber  arabisches  Schiffswesen.  —  Erklâ- 
rung.  (Paul  de  Lagarde  :  M.  Hommel  accuse  dans  diverses  revues 
M.  Paul  Haupt  d'avoir  été  dans  son  étude  sur  «  un  dialecte  du  sumé- 
rien »  le  plagiaire  de  M.  Fr.  Lenormant;  mais  M.  Lenormant  déclare 
dans  une  lettre  :  «  il  ne  saurait  y  avoir  de  la  part  de  M.  Haupt  aucun 
plagiat  de  travaux  qu'il  ne  connaissait  pas  et  ne  pouvait  pas  connaître; 
je  reconnais  l'entière  originalité  de  sa  découverte.   ») 

Gœttingische  gelehrte  Anzeigen,  nos  26  et  27,  28  juin  et  5  juillet  1882  : 
Delitzsch,  Wo  lag  das  Paradies?  (Oppert  :  long  art.  défavorable.)  — 
Sedlmayr,  Kritischer  Kommentar  zu  Ovids  Heroiden  (Birt).  —  Hjelt, 
Elias  Lonnrot  (Husemann). 

—  N°  28,  12  juillet  1882  :  Wlassak,  Edict.  u.  Klageform,  eine 
romanistische  Studie(G.  Hartmann). —  Erlauer  Spiele,  sechs  altdeutsche 
Mysterien  nach  einer  Handschrift  des  XV.  Jahrhunderts  zum  ersten  Mal 
hrsg.v.  Kummer  (Schônbach  :  «  travail  dont  il  faut  remercier  l'auteur 
et  qui  est  indispensable  au  specialforscher  »).  — Andresen,  Sprachgeb- 
rauch  u.  Sprachrichtigkeit    (Sauer  :  livre  de  grande  valeur). 


Deutsche  Rundschau,  juillet  1882  :  Haeckel,  Indische  Reisebriefê,  IV. 
Kaduwella,  Peradenia,  Kandy.  —  Paulsen,  Arthur  Schopenhauer,  der 
Zusammenhang  seiner  Philosophie  mit  seiner  Personlichkeit.  —  Stras- 
burger,  Der  Unterschied  zwischen  Thier  und  Pfïanze.  —  Hausner, 
Polnische  Belletristik  in  den  letzten  zwanzig  Jahren.  —  Zur  deutschen 
Culturgeschichte.  (A  propos  de  l'ouvrage  de  Bidermann,  a  Deutschland 
in  achtzehnten  Jahrhundert  ».)  —  Literarische  Notizen. 

Columna  lui  Traian,  n°  6,  juin  1882  :  Chronique  inédite  de  Zilot  Roma- 
nul  (suite).  —  Marian,  Incantations  populaires  de  Bukovine  (suite). 
—  Densusianu,  Documents  sur  le  pays  de  Fogaras  (suite).  —  Marie- 
nescu,  Ballades  populaires.  — Hasdeu,  Manuscrit  de  1574  (suite).  — 
Chitsu,  Domnu  domna,  dominus  domina.  —  Hasdeu,  ghiocet  sglavoc  ; 
un  doublet  gréco-latin  (noms  du  bleuet,  de  yXocuk6ç  ;  l'auteur  naturalise 
judicieusement  le  terme  technique  doublet).  —  Climescu,  Curpan, 
Petrov,  et  Pat,  Coutumes  juridiques  (suite). 

Archivio  storico  per  Trieste,  Tlstria  ed  ilTrentino,  Maggio  1882,  fascicolo  IV 
(Termine  la  première  année  de  «  l'Archivio  »)  :  Grion,  Re  Berengario 
I  in  Istria.  —  Combi,  Un  discorso  inedito  di  Pier  Paolo  Vergerio  il  Se- 
niore  da  Capodistria.  —  Ambrosi,  Di  Castellaro  trentino,  oggi  Castel 
d'Ario  mantovano,  ricordi  storici.  —  Orsi,  Un  gruppo  di  aes  gravi 
trovati  a  Trento.  —  Cipolla,  Maestro  Martino  da  Stenico.  —  Berto- 
lotti,  Curiosità  storiche  istriane,  dalmate  e  trentine  negli  archivi  di 
Roma.  —  Luciani,  Scoperta  paletnologica  in  Istria.  —  Orsi,  Epigrafe 
capodistriane.  —  Rassegna  bibliografica  :  Malfatti,  Statuti  ed  ordina- 
menti  per  i  Battuti  di  Trento,  pubblicati  da  C.  Schneller.  —  Sal- 
violi,  La  legge  romana  udinese,  per  Franc.  Schupfer.  —  Zenatti,  Le 
relazioni  tra  Trieste  e  Venezia  sino  al  1 38 1 ,  per  G.  Cesca.  —  Morpurgo, 
Saggio  di  cartografia  délia  regione  veneta.  —  Salvadori,  L'archeographo 
triestino,  anno  VIII  (1881-82).  —  Annunzi  bibliografici. —  Publica- 
zioni  periodiche. 

Revue  de  rinstruction  publique  (supérieure  et  moyenne)  en  Belgique, 
tome  XXV,  3e  livraison  :  Crutzen,  L'origine  maternelle  et  la  nais- 
sance de  Marguerite  de  Parme,  régente  des  Pays-Bas  (M.  Raw- 
don  Brown  a  prétendu  que  Marguerite  était  née  à  Valladolid  en 
1 533,  qu'elle  avait  pour  mère  une  des  filles  du  comte  Hieronymo. 
de  Nogarola,  noble  vénitien,  et  que  cette  fille  avait,  en  1524,  changé 
son  nom  en  celui  de  Van  Geste.  L'auteur  de  l'art,  s'en  tient  aux.  idées 
énoncées  avant  lui  par  Serrure,  Vander  Meersch,  Gachard  et  Reu- 
mont  :  vers  la  fin  de  i52i,  Charles  le  Quint  mit  le  siège  devant  Tour- 
nai; à  Audenarde  d'où  il  surveillait  les  opérations,  il  fit  la  connaissance 
de  Jeanne  Van  der  Gheenst,  fille  du  manant  Gilles  Vander  Gheenst  et 
de  F  ex-bourgeoise  Jeanne  Vander  Coye;  Jeanne  était  servante  chez  le 
gouverneur  d' Audenarde;  elle  accoucha,  vers  le  milieu  de  l'année  sui- 
vante, d'une  fille  qui  fut  baptisée  dans  l'église  de  Pamele  sous  le  nom 
de  Marguerite;  Marguerite  fut  élevée  à  la  cour  de  sa  grand'tante,  Mar- 
guerite d'Autriche,  et  de  sa  tante  Marie  de  Hongrie;  à  l'âge  de  neuf  ans 
elle  passa  en  Italie  où,  dans  la  suite,  elle  épousa  Alexandre  de  Médicis, 

{mis  Octave  Farnèse;  c'est  en  i55q  que  Philippe  II  l'appela  à  gouverner 
es  Pays-Bas).  —  Quelques  observations  sur  le  programme  d'enseigne- 
ment de  l'anglais.  —  Grafé,  L'école  normale  de  Pise  et  les  écoles  de  ma- 
gistère en  Italie,  I.  —  Gantier,  La  conquête  de  la  Belgique  par  Jules 
César  (ouvrage  remarquable).  —  Cam.  Lemonnier,  Histoire  des  beaux- 
arts  en  Belgique. 


Le  Fuy,  typ.  et  lith.  Marchesseu  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  a3 


N°  32  Seizième  année  7  Août  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ    SOUS    LA    DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 
Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 

Prix  d'abonnement  : 
Un   an,  Paris,  20  fr.  —   Départements,   22   fr.   —   Étranger,   25  tr. 


PARIS 
ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

libraire   de   la    societe   asiatique 

de    l'école    des   langues   orientales   vivantes,    etc. 

28,    RUE   BONAPARTE,    28 

Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 
(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


T\  T  UA/T/^VTD  CC      sur  ^a  Chronologie  et  l'Iconographie  des  Rois  Parthes  Ar- 

IVl  .ClVl  V_/ 1 1\  C  O     sacides,   par  A.    de   Longpérier.   Un   beau   volume   in-4, 

avec  18  planches  sur  cuivre 25     » 


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par  M.  René  Basset.  Un  volume  in-8  de  320  pages i5    » 


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J2lNv->l\J2      Dïl     V_> il  1  IN  C. ?     cation,    etc.,   par  Maurice   Jametel. 
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PÉRIODIQUES 

The  Academy,  n°  53i,  8  juillet  1882:  Pollock,  Essays  in  jurispru- 
dence and  ethics.  —  The  Temple,  sacred  poems  and  private  ejacula- 
tions,  by  Mr.  George  Herbert,  first  édition  1 633,  fascimile  reprint, 
with  introductory  essay  bySHORTHousE.  —  Lear,  Henri  Dominique  La- 
cordaire,  a  biographical  sketch.  (Simcox.)  —  English  dialect  glossaries  : 
Five  original  glossaries,  isle  of  Wight ,  Oxfordshire,  Cumberland, 
North  Lincolnshire,  and  Radnorshire,  by  various  authors;  Glossary  of 
the  Lancashire  dialect,  by  Nodal  a.  Milner,  Part  II  (fîo  z).  —  Maspero, 
Les  contes  populaires  de  l'ancienne  Egypte  ,  traduits  et  commentés. 
(Amelia  B.  Edwards  :  «  charming  little  volume.  »)  —  Theological  lite- 
rature.  (Cheyne,  Micah,  with  notes  a.  introduction;  Lowe,  The  he- 
brew  student's  commentary  on  Zechariah,  Hebrew  a.  LXX;  Commen- 
tary  on  Erzra  a.  Nehemiah,  by  Rabbi  Saadiah,  edited  by  Mathew  ; 
Sorley,  Jewish  christians  a.  judaism  ;  de  Lagarde,  The  question  whe- 
ther  marriage  with  a  deceased  wife's  sister  is  or  is  not  prohibited  in  the 
mosaic  writings ;  SteLhlin,  Justin  der  Mârtyrer  u.  sein  neuester  Beur- 
theiler  ;  Strack,  Pirqe  Aboth,  die  Sprûche  der  Vâter,  ein  ethischer 
Mischna-traktat  mit  kurzer  Einleit.,  Anmerk.  u.  einem  Wortregister  ; 
Harnack,  Die  Ueberliefer.  der  griech.  Apologeten  d.  II  Jahrhunderts  in 
der  alten  Kirche  u.  im  Mittellalter.)  —  Chaucer  and  the  eastern  counties. 

—  The  endowment  of  research  at  Edinburgh.  —  Was  Roger  of  Mont- 
gomery  at  Senlac  ?  (Howorth.)  —  The  neo-celtic  «  p  *  in  Prof.  Skeat's 
dictionary.  (Mayhew.)  —  Carlyle's  translation  of  Fausfs  «  Curse  » 
(Eug.  Oswald).  —  County  record  offices.  (Turner.)  —  Vinaya  texts, 
part  I,  the  Patimokkha  a.  the  Mahâvagga,  I-IV,  translated  from  the 
pâli  by  Rhys  Davids  a.  Oldenberg  (Morris).  —  Récent  contributions 
to  catullian  criticism.  (Ellis  :  sur  les  «  Animadversiones  in  locos  nonnullos 
Valeri  Catulli  et  Titi  Livi,  par  Tartara.  »)  —  Joseph,  Khu-en-Aten 
and  Amenhotep  IV.  (Am.  B.  Edwards.)  —  Art  books  (Smith  a.  Slater, 
Architecture,  classic  a.  early  Christian  ;  etc.).  —  The  excavations  in  the 
forum  romanum.  (Westropp.) 

N°  532,  i5  juillet  1882  :  Natural  religion,  by  the  author  of  «  Ecce 
homo  ».  —  Marvin,  The  russian  advance  towards  India  (Keane).  — 
Blackie,  Altavona,  fact  a.  fiction  from  my  life  in  the  highlands.  (Gray). 

—  Birt,  Das  antike  Buchwesen.  (Haverfield  :  très  important.)  —  Was 
Roger  of  Montgomery  at  Senlac?  (Freeman  a.  Howorth.)  —  Chaucer  a. 
the  eastern  counties.  (Round.)  —  Sumir  a.  accad  (P.  de  Lagarde  et 
Sayce).  —  Written  a.  unwrîtten  chinese  laws.  (Gardner.)  —  Bowes,  Ja- 
panese  marks  a.  seals.  (Monkhouse.)  —  Botticelli's  «  Assumption  ». 
(Fisher.) 

N°  533,  22  juillet  1882  :  Villiers  Stuart,  The  funeral  tent  of  an 
egyptian  queen.  (Am.  B.  Edwards.)  —  Gosse,  Gray  «  English  men  of 
letters  »  (Dowden  :  la  vie  la  meilleure  et  la  plus  complète  de  Gray,  œu- 
vre à  la  fois  de  critique  et  de  biographie).  —  Miss  Ellen  M.  Taylor, 
Madeira,  its  scenery  a.  how  to  see  it.  (Burton.)  —  Kemble,  Records  of 
later  life.  2  vols.  —  Shakspere's  tragedy  of  Hamlet,  edit._  by  Elze. 
(Furnivall  :  édition  qui  sera  la  bienvenue,  notes  très  soignées.)  — 
Spiers,  The  school  System  of  the  Talmud.  (Bail.)  —  Roosevelt,  The 
naval  war  of  1812.  (Temple  :  travail  très  impartial.)  —  School  books. 

—  The  late  Prof.  Lotze  (Cook  Wilson).  —  Chaucer  a  the  hérons.  (Fur- 
nivall.) —  The  Pôle  family.  (Round.)  —  Sumer  a.  akkad. 

Philologische  Wochenschrift,  n°  26,  ier  juillet  1882  :  Luigi  A.  Michangeli, 
Anacreonte,  edizione  critica.  Bologna,  Zanichelli  (Sitzler  :  édition  soi- 
gnée et  bonne  des  Anacreontea,  avec  traduction  italienne;  idées  fausses 


sur  leur  date  et  sur  la  métrique).  —  Richard  Engelmann,  Beitrâge  zu 
Euripides,  Alkmene  (Wecklein  :  démontre  qu'Alcmène,  condamnée  au 
feu,  était  sauvée  par  un  orage  miraculeux).  —  O.  Podiaski,  Quomodo 
Terentius  in  tetrametris  iambicis  et  trochaicis  verborum  accentus  cum 
numeris  consociaverit  (Schlee  :  bon).  —  Baehrens,  Poetae  latini  minores, 
III  (Hugo  Magnus  :  fourmille  de  fautes,  mais  est  et  sera  longtemps  indis- 
pensable).  —  Otto  Richter,  Die  Befestigung  des  Janiculum  (Wecklein  :  ' 
50n).  _  Sammlung  von  Schulreden  und  Ansprachen,  herausgegeben 
von  Philipp  Brunner,  i.  Sammlung,  2.  Aufl.  (Cf.  n°  22).  —  Périodi- 
ques, etc.  Zeitschrift  fur  das  Gymnasialwesen  :  on  s'est  bien  trouvé  de- 
puis'1875,  au  gymnase  de  Schleitz,  de  supprimer  le  grec  en  quarta 
(sixième)  et  d'en  faire  faire  sept  heures  par  semaine  en  tertia  (cinquième). 
Analyse  détaillée  de  la  revue  des  écoles  secondaires  (Kôzepiskolai  Szemle) 
publiée  à  Arad. 

Nos  27-28,  8  juillet  1882  :  G.  Th.  Gerlach,  Der  alten  Griechen 
Gôtterlehre,  Mythen  und  Heldensagen  (Paul  Stengel  :  détestable).  — 
R.  Methner,  De  tragicorum  Graecorum  minorum  et  anonymorum 
fragmentis  observationes  criticae  (Wecklein  :  bon).  —  H.  Lentz,  Der 
Epitaphius  pseudepigraphus  des  Demosthenes  (Albrecht  :  article  dé- 
taillé). —  Hermann  Cremer,  Biblisch-theologisches  Wôrterbuch  der 
Neutestamentlichen  Gracitât  (jette  beaucoup  de  lumière  sur  la  langue 
de  Plutarque,  Lucien,  etc.).  —  Richter,  Hrabanus  Maurus  (Strenge  : 
instructif  sur  la  pédagogie  du  ixe  siècle).  —  Johannes  Muhl,  Zur  Ge- 
schichte  der  alten  attischen  Komôdie  (Lowner  :  du  soin  ;  diffus).  — 
J.  Soergel,  Demosthenische  Studien  (Lowner  :  à  lire  pour  les  gens  du 
monde  et  les  élèves).  —  Hasper,  Die  Feinheit  der  Oekonomie  und  der 
Charakterzeichnung  in  den  einzelnen  Dramen  des  Sophokles,  und  der 
Kern  der  sittlichen  Anschauungen  desselben  (Lowner  :  bon).  —  Anton 
Kerer,  Ueber  die  Abhângigkeit  des  C.  Silius  Italicus  von  Livius  (Low- 
ner :  catalogue  utile  de  passages).  —  Périodiques,  etc. 

Philologische  Rundschau,  n°  28,  8  juillet  1882  :  Sophocle,  Œdipe  roi  pu- 
blié par  Wunder,  editio  V.  quam  curavit  N.  Wecklein.  —  Hilgenfeld, 
Hermae  Pastor,  éd.  altéra  (Rônsch  :  bon;  démontre  que  le  Pasteur 
contient  3  parties  hétérogènes).  —  List,  Das  Buch  des  Horaz  ûber  die 
Dichtkunst  ins  Deutsche  ûbersetzt(Krah).  —  L.  Polster,  Quaestionum 
Propertianarum  spécimen  (Rossberg  :  du  bon  et  du  mauvais  ;  ni  Polster 
ni  Rossberg  ne  paraissent  forts  en  prosodie).  —  Peskett,  Gai  Julii  Cae- 
saris  de  bello  Gallico  commentarius  VIL  Cambridge  (Menge  :  nom- 
breuses critiques).  —  Holtze,  Syntaxis  fragmentorum  scaenicorum  poe- 
tarum  Romanorum  adumbratio  (Georges  :  ouvrage  posthume,  composé 
après  l'apparition  de  la  seconde  édition  de  Ribbeck,  mais  d'après  la  pre- 
mière; utile  malgré  ses  défauts).  —  Dressel,  Lexikalische  Bemerkun- 
gen  zu  Firmicus  Maternus  (Georges  :  bon  ;  Georges  indique  de  nom- 
breuses additions).  —  Josef  Bass  ,  Dionysios  I.  von  Syrakus  (Bachof  : 
insuffisant;  réhabilitation  juste  mais  exagérée).  —  Friedlaender,  Dar- 
stellungen  aus  der  Sittengeschichte  Roms,  5.  Aufl.,  3.  Theil 
(Jung).  —  De  Ceuleneer,  Notice  sur  un  diplôme  militaire  de  Trajan 
trouvé  aux  environs  de  Liège.  Berlin,  Mayer  et  Mûller  (Jung  :  l'article 
donne  la  bibliographie  du  sujet). 

Theologische  Literaturzeitung,  n°  i3,  icr  juillet  1882  :  Annales  du  Musée 
Guimet,  tome  IL  (Baudissin.) — Ebers  u.  Guthe,  Palâstina  in  Wort 
u.  Bild.  —  Godet,  Commentar  zu  dem  Brief  an  die  Rômer,  deutsch 
bearb.  v.  Wunder.  —  Orose,  p.  p.  Zangemeister.  (Lipsius  :  excellente 
édition.)  —  Koch,  Die  frûhesten  Niederlassungen  Jder  Minoriten  im 
rechtsrheinischen  Bayern  ;  im  Rheingebiet  u.  ihre  Wirk.  auf  d.  Icirchl. 
u.  polit,  Leben.  (Karl  Muller.)  —  Werder,  Zwingli  als  politisctier  Re- 


formator  (Zoepffel  :  petit  écrit  attachant.)  —  Zahn,  die  Ursachen  des 
Niederganges  derreformirten  Kirche  in  Deutschland.  (Ritschl.)  —  Kapff, 
Lebensbild  von  Sixt  Karl  v.  Kapff;  Zûndel,  Pfarrer  Blumhardt.  — 
Fischer,  Discussions  in  history  a.  theology.  (Lemme.) 

Athenaeum  belge,  n°  i3,  ior  juillet  1882  :  Combes,  L'entrevue  de 
Bayonne;  Segesser,  Ludwig  von  Pfyffer  u.  seine  Zeit;  Baumgarten, 
vor  der  Bartholomâusnacht.  (Philippson  :  I.  de  tous  les  documents 
contenus  dans  l'opuscule  de  Combes,  deux  présentent  un  intérêt  réel  ; 
une  lettre  de  don  Frances  de  Alava  et  une  dépêche  de  Philippe  II.  Mais 
M.  Combes  traduit  le  passage  de  la  lettre  d'Alava  :  «  y  lo  que  anteveo 
que  an  de  martillar  estos  eresiarcos  »  par  «  'je  prévois  qu'on  doit  marte- 
ler ces  hérésiarques  »  tandis  qu'il  faut  entendre  :  «  je  prévois  que  ces 
'hérésiarques  la  martèleront  »,  c'est-à-dire  «  mettront  martel  en  tête  à 
Catherine  ».  C'est  pourtant  sur  l'explication  erronée  des  mots  d'Alava 
que  M.  Combes  base  tout  son  système  ;  marteler  les  hérésiarques,  voilà 
pour  lui  l'annonce  de  la  Saint-Barthélémy.  2.  L'ouvrage  de  M.  de  Se- 
gesser sur  Louis  Pfyffer  et  son  temps  apprécie  pour  la  première  fois  à  sa 
juste  valeur  l'action  de  l'infanterie  et  surtout  des  Suisses  dans  les  guer- 
res de  religion;  il  atteste  des  études  très  étendues,  des  idées  neuves  et 
vraies,  une  critique  historique  sérieuse  et  intelligente;  mais  l'auteur 
montre  une  certaine  prédilection  pour  la  cause  catholique,  il  acquitte 
complètement  le  duc  de  Guise  dans  le  massacre  de  Vassy,  il  affirme  que 
Colignya  indubitablementcausé  l'assassinat  de  Guise  par  Poltrot;  toute- 
fois il  montre  bien  les  causes  de  la  Saint-Barthélémy,  la  colère  de  Ca- 
therine contre  l'amiral,  sa  peur  d'une  guerre  avec  l'Espagne  et  d'un 
soulèvement  général  des  Huguenots,  après  l'attentat  non  réussi  contre 
Coligny.  3.  L'ouvrage  de  M.  Baumgarten  qui  s'appuie  de  préférence  sur 
les  rapports  italiens,  écarte  définitivement  toute  idée  de  longue  prépara- 
tion delà  Saint-Barthélémy).  —  Ovidii  Ibis,  p.  p.  Ellis.  (P.  Thomas  : 
édition  qui  marque  un  sensible  progrès  sur  les  éditions  antérieures.)  — 
Geldner,  Studien  zum  Avesta  (De  Harlez  :  quelques  conjectures  ingé- 
nieuses, mais  beaucoup  d'injures  et  de  contre-vérités).  —  Max  Rooses, 
Nieuw  Schetsenboek.  —  Public,  allemandes  (Kôlbing,  Elis  saga  ok 
Rosamundu;  Behaghel,  Heinrichs  von  Veldeke  Enéide  :  très  remar- 
quable édition;  Mahrenholtz,  Molières  Leben  u.  Werke  :  ouvrage 
consciencieux  et  complet;  Gleim,  preussische  Kriegslieder  von  einem 
Grenadier,  p.  p.  Sauer;  Faust,  ein  Fragment  von  Goethe,  p.  p.  Seuf- 
fert;  Schrôer,  Faust,  zweiter  Theil  :  indispensable;  Kôrting,  Gedan- 
ken  u.  Bemerk.  ûber  den  Unterricht  der  neueren  Sprachen).  —  Rott, 
Henri  IV,  les  Suisses  et  la  Haute- Italie.  (Démêle  l'écheveau  compliqué 
des  négociations  multiples  engagées  pendant  les  dix  premières  années 
du  xvne  siècle.)  —  Chantelauze,  Vincent  de  Paul  et  les  Gondi  (très  in- 
téressant et  par  endroits  neuf).  —  Histoire  d'Henriette  d'Angleterre, 
par  Mmc  de  Lafayette,  p.  p.  France  (Très  bonne  édition).  —  Shaks- 
peare,  Macbeth  et  Byron,  Childe  Harold,  p.  p.  James  Darmesteter 
(deux  vol.  qui  méritent  d'être  placés  au  premier  rang  des  éditions  clas- 
siques d'auteurs  étrangers  publiées  en  France;  solide  érudition;  sûreté, 
discernement,  sobriété  dans  les  annotations  et  les  introductions)  —  Mo- 
reira  de  Sa,  Selecta  franceza  para  uso  dos  lyceus  (utile). 

N°  14,  1 5  juillet  1882  :  Die  Chronica  pontificum  leodiensium,  eine 
verlorene  Quellenschrift  des  XIIL  Jahrhunderts,  nebst  einer  Probe  der 
Wiederherstellung,  p.  p.  Fr.  Franz  (Bormans  :  importante  dissertation, 
faite  avec  le  plus  grand  soin).  —  Schoppe,  Ueber  Metrum  u.  Assonanz 
der  Chanson  de  geste  Amis  und  Amiles;  Gôrlich,  die  sùdwestl.  Dia- 
lecte der  langue  d'oïl.  Poitou,  Aunis,  Saintonge  u.  Angoumois.  (Sche- 

ler  :  deux  bons  travaux.)  —  Champier,  l'année  artistique  illustrée. 

Le  Fuy,  typ.  et  lith.  Marchesseu  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  2 3 


N°  33  Seizième  année  14  Août  1882 


REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE   PUBLIÉ   SOUS    LA    DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 
Un   an,  Paris,  20   fr.  —   Départements,   22   fr.   —   Etranger,   25  fr. 


PARIS 


ERNEST  LEROUX,  EDITEUR 

libraire    de    la    societe    asiatique 

de    l'école    des    langues    orientai,  es    vivantes,    k  t  c  . 

28,    RUE    BONAPARTE,     28 


Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 
(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


HISTOIRE  DE  L'HELLÉNISME  tS£^S. 

çais  sous  la  direction  de  M.  A.  Bouché-Leclercq.  3  forts  volumes  in- 8°.     .     3o     » 

Tome  I.  Histoire  d'Alexandre-le-Grand. 

Tomes  II  et  III.  Les  successeurs  d'Alexandre. 

L'ouvrage    paraît    en    3o   fascicules   à    1    fr.    25. 

Le  fascicule  I  vient  de  paraître. 

L'HISTOIRE      DE     L^ELLÉMSME      DE     J.-G.     DROYSEN     FORME     LA      SUITE     ET    LE 
COMPLÉMENT    DE  L^ISTOIRE  GRECQUE  DE  CURTIUS. 


LES  MOUVEMENTS  DU  SOL  ~£$V£ 

France   et     particulièrement    dans    le    golfe     normanno-  breton,    par    Alexandre 
CHÉVR.r.-xio.  r.  Un  beau  volume  gr.  in-8°,  illustré  de  14  planches  en  couleur.     i5     » 
Ouvrage   honoré    d'une   récompense    par  l'Académie  des   Sciences   et  d'un  rapport 
favorable  de  M.  Alfred  Maury  de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 


IF      T  |VP  R      HRQ      MHRTQ     des  anciens  Egyptiens.  Traduc- 
JLC      LlVlxE,     L/LJ     IVlV^iX  1  O     tion     complète    avec     notes    et 
index,  par  Paul  Pierret,  conservateur  du  Musée  égyptien  du  Louvre.  Un  fort  vo- 
lume in-18  de  65o  pages 10    » 


PERIODIQUES 

The  Athenaeum,  n°  2852,  24  juin  1882  :  Leslie  Stephen,  The  science 
ofethics;  Pollock,  Essays  in  jurisprudence  a.  ethics.  —  Mozley,  Ré- 
miniscences, chiefly  of  Oriel  Collège  a.  the  Oxford  Movement.  —  Mac- 
kay,  A  concise  practical  treatise  on  the  law  of  property.  —  Toru  Dltt, 
Ancient  ballads  a.  legends  of  Hindustan,  with  an  introd.  memoir  by 
Gosse.  —  Partons's  St.  Giles  (F.  G.  Bayard).  —  Shelley's  house  at  San 
Terenzo.  —  Norton,  Historical  studies  ofchurch  building  in  the  middle 
âges,  Venice,  Siena,  Florence.  —  The  Tower  of  London.  —  Notes  from 
Athens  (Lambros). 

N°  2853,  1"  juillet  1882  :  Carlyle,  Réminiscences  of  my  irish  jour- 
ney  in  1849  with  a  préface  by  Froude.  —  Dobson,  Eighteenth  century 
essays,  selected  a.  annotated.  —  Floyer,  Unexplored  Baluchistan.  — 
Keary,  Outlines  of  primitive  belief  among  the  indo-european  races.  — 
Blackie,  Altavona,  fact  u.  fiction  from  my  life  in  the  Highlands.  — 
Historical  a.  antiquarian  publications.  —  Notes  from  Cambridge.  — 
Horne  Tooke's  copy  of  Junius  (Solly).  —  The  palaeographical  society. 

—  Sanscrit  mss.  in  Japan  (Max  Millier).  —  The  folk-lore  society.  — 
Dollman,  The  priory  of  St.  Mary  Overie,  Southvvark.  —  Notes  from 
Rome  (Lanciani). 

N°  2854  :  Kemble,  Records  of  later  life.  —  The  Sarva  Dars'ana  Sam- 
graha,  or  review  of  the  différent  Systems  of  hindu  philosophy,  by  Ma- 
dhava  Acharya,  translated  by  Cowell  a.  Gough  (Trad.  entièrement 
fidèle).  —  Jervis,  The  gallican  church  a.  the  Révolution,  a  sequel  to 
the  history  of  the  church  of  France  from  the  concordat  of  Bologna  to 
the  Révolution  (Traite  de  la  période  de  l'empire,  fait  avec  soin  et  savoir). 

—  Birt,  Das  antike  Buchwesen  (Livre  de  grand  intérêt  et  de  très  h  .ute 
valeur).  —  Martial,  livre  1,  p.  p.  Flach  (Edit.  allemande,  «  shows  con- 
sidérable learning  and  industry,  but  his  jugement  is  not  always  remar- 
kable  »).  —  The  scottish  éducation  bill  (Donaldson).  —  Lettre  inédite 
d'Emerson  à  Carlyle.  —  County  record  offices  (Turner).  —  «  An  ho- 
nour  to  London  »  (Pièces  de  vers  inédite).  —  Cripps,  Collège  a.  corpo- 
ration plate.  —  Notes  from  Athens  (Lambros). 

N°  2855,  i5  juillet  1882  :  Marvin,  The  russian  advance  towards  In- 
dia  (On  trouvera  dans  ce  vol.  nombre  de  conversations  qu'a  eues  l'auteur, 
avec  plusieurs  des  généraux  et  des  hommes  d'état  les  plus  distingués  de 
la  Russie  sur  la  question  de  l'Asie  centrale  ;  on  remarquera  surtout  les 
entretiens  avec  Skobeleff).  —  Anstey,  Vice  versa,  or  a  lesson  to  fathers. 

—  Nadal,  Essays  at  home  and  elsewhere.  —  Lieut.  Col.  Fergusson, 
Henry  Erskine,  his  kinsfolk  and  times  («  As  exercised  a  wise  discrétion 
in  adopting  for  his  monograph  the  form  of  chatty  memoirs  rather  than 

of  a  connected  biography an  excellent  contribution  to  the  literature 

of  scottish  life  and  humour  »).  —  School-books  (Horace,  odes,  livre  III, 
p.  p.  Page).  —  Law-books  (Ch.  Sweet,  A  dictionary  of  english  law, 
etc.).  —  Dr.  Haas  (Rost).  —  Talks  with  Trelawny  (W.  M.  Rossetti  : 
passages  tirés  du  Journal  de  M.  Rossetti  et  relatifs  à  l'ami  de  Shelley  et 
de  Byron,  homme  «  très  singulier  et  intéressant  »).  —  Wyclif's  works 
(J.  Gairdner).  —  Karaite  manuscripts  (Shapira).  —  Lucy  Phillimore,  Sir 
Christopher  Wren,  his  family  and  his  times,  1 585-1723;  A.  W.  Taylor, 
The  towers  and  steeples  designed  by  sir  C.  Wren.  —  The  architectural 
history  of  the  city  of  Rome  abridged  from  Parker's  «  archaeology  of 
Rome  ». —  Matz  u.  von  Duhn,  Antike  Bildvverke  in  Rom,  2  vols.  — 
Rosenberg,  Rubensbriefe,  gesamm.  u.  erlautert.  —  Goluishef,  Album 
des  antiquités  russes  de  la  province  de  Vladimir. 

N°  2856,  22  juillet    1882  :  Swinburne,  Tristram  of  Lyonesse  and 


others  poems.  (Le  vol.  de  vers  le  plus  varié  et  le  plus  important  qu'ait 
publié  le  grand  poète  et  qui  sera,  selon  toute  probabilité,  le  plus  popu- 
laire.) —  Skeat,  An  etymological  dictionary  of  the  english  language, 
arranged  on  an  historical  basis,  et  A  concise  etymological  dictionary  of 
the  english  language.  (Le  grand  dictionnaire  de  M.  Skeat  est  achevé;  il 
fournit  la  preuve  d'une  vaste  érudition  et  d'un  labeur  énorme;  il  est 
indispensable  à  tous  ceux  qui  veulent  étudier  à  fond  la  langue  anglaise 
et  son  origine  scientifique  et  historique;  ce  n'est  pas  seulement  un 
abondant  résumé  des  recherches  de  la  philologie  moderne  dans  ce  do- 
maine qui  a  été  cultivé  avec  soin  et  succès;  il  ajoute  aux  travaux  d'au- 
trui  les  résultats  des  propres  études  de  M.  Skeat;  mais  l'ouvrage  est 
inégal  et  renferme  quelques  omissions;  toutefois  les  mérites  de  cette 
publication  en  compensent  les  défauts;  l'auteur  n'est  pas  un  savant  de 
la  force  de  Grimm  ou  de  Littré,  mais  c'est  un  philologue  «  scientifique» 
et  un  lexicographe  instruit;  son  œuvre  est  «  a  very  solid  pièce  of  work 
throughout.  »  —  Le  petit  dictionnaire  du  même  auteur  offre  parfois  un 
arrangement  bizarre,  mais  rendra  de  très  grands  services;  il  est  vérita- 
blement instructif.)  —  Dorsey  Gardner,  Quatre-Bras,  Ligny  a.  Water- 
loo, a  narrative  of  the  campaign  in  Belgium,  r  8 1 5.  (Bon  ouvrage  qui 
expose  les  grandes  inexactitudes  de  Thiers  qui  est  connu  au  reste,  non 
comme  historien  dans  le  vrai  sens  du  mot,  mais  comme  «  writer  of 
military  romances  ».)  —  Samuelson,  Roumania,  past  and  présent.  — 
Theological  books  (De  Lagarde,  The  question  whether  marriage  with  a 
deceased  wifefs  sister  is  or  is  not  prohibited  in  the  mosaic  writings; 
Gheyne,  Micah,  etc.)  —  The  Rev.  Thomas  Mozley  a.  Mr.  Herbert 
Spencer.  (Herbert  Spencer.)  —   More  Karaite  manuscripts  (Shapira). 

—  Deux  lettres  inédites   d'Emerson  à  Carlyle.   —  Bowes,   Japanese 
#  marks  and  seals.  —  Antiquities  of  Ionia,  published  by  the  society  of 

Dilettanti,  part.  IV.  —  Champier,  L'année  artistique,  1881-1882.  —  A 
portrait  of  Carlyle. 

Literarisches  Centralblatt,  n°  3o,  22  juillet  1882  :  Steude,  Ein  Problem 
der  allgemeinen  Religionswissenschaften  u.  ein  Versuch  seiner  Lôsung. 

—  Wetzel,  die  Translatio  S.  Alexandri,  eine  kritische  Untersuchung. 

—  Steinwenter,  Studien  ûber  Geschichte  der  Leopoldiner  (Sur  les  qua- 
tre fils  du  duc  Léopold  III  d'Autriche,  tué  à  Sempach  en  1 386,  et  sur- 
tout sur  Ernest  «  le  duc  de  fer  »  et  la  lutte  engagée  pour  la  possession 
du  Frioul  et  d'Udine).  —  Wenck,  Clemens  V  u.  Heinrich  VII,  die  An- 
fange  des  franz.  Papstthums.  (Un  des  épisodes  les  plus  curieux  de  l'his- 
toire du  moyen  âge).  —  Frommann,  Aufsatze  zur  Geschichte  des  Buch- 
handels  ira  XVI.  Jahrhundert.  II  Heft.  —  Stûve,  Geschichte  des 
HochstiftsOsnabrûck,  III.  1623-1648  (Histoire  de  l'évêché  d'Osnabruck 
pendant  la  guerre  de  Trente-Ans;  très  important).  —  Roeder,  Ueber 
Cobets  Emendationen  der  attischen  Redner,  insbesond.  des  Isaios  (On 
applaudira  aux  efforts  que  fait  l'auteur  pour  défendre  la  tradition  con- 
tre une  critique  souvent  arbitraire  et  peu  circonspecte;  mais  lui  aussi 
garde  trop  peu  de  mesure  ;  recherches  pleines  de  soin  et  de  diligence).  — 
Leuchtenberger,  dispositive  Inhaltsùbersicht  der  drei  olynthischen 
Reden  des  Demosthenes  (utile).  —  Ovidii  Ibis,  hrsg.  v.  Ellis.  Oxford, 
Clarendon  Press  (Travail  de  très  grand  mérite,  commentaire  très  dé- 
taillé et  très  savant).  —  Hofmann  (KLonrad),  Altburgundische  Ueberset- 
zung  der  Predigten  Gregor's  ûber  Ezechiel  aus  der  Berner  Handschrift. 

—  Camoens'  sâmmtliche  Gedichte,  IV  Band  :  Buch  der  Canzonen  u. 
Idyllen.  —  Thode,  Die  Antiken  in  den  Stichen  Marcanton's,  Agostino 
Veneziano's  u.  Marco  Dente's.  —  Braumbach,  Das  Tonsystem  u.  die 
Tonarten  des  christlicheft  Abendlandes  im  Mittelalter,  ihre  Bezieh.  zur 
griechisch-rômischen  Musik  u.  ihre  Entwickel.  bis  auf  die  Schule  Gui- 


dos  von  Arezzo,  mit  einer  Wiederherstell.  d.  Musiktheorie  Berno's  v. 
d.  Reichenau  nach  einer  Karlsruher  Handschrift.  —  B^ehr,  das  Ton- 
system  unserer  Musik,  nebst  einer  Darstellung  der  griechischen  Tonar- 
ten  u.  der  Kirchentonarten  des  Mittelalters. 

Deutsche  Literaturzeitung,  n°  27,  8  juillet  1882  :  Ebrard,  Bonifatius, 
der  Zerstôrer  des  columbanischen  Kirchentums  .  auf  dem  Festlande. 
(K.  Mûller  :  l'auteur  ne  connaît  pas  les  bons  travaux  sur  le  sujet  :  sa 
polémique  est  indigne  et  révoltante.)  —  Kern,  Grundriss  der  Pâdago- 
gik  ;  Zeschwitz,  Lehrbuch  der  Pâdagogik.  —  Spiegel,  die  altpersischen 
Keilinschriften,  im  Grundtexte  mit  Uebersetzung,  Grammatik  u.  Glos- 
sar.  (Justi  :  travail  excellent  ;  toujours  la  même  critique  et  la  même  ré- 
flexion; pas  une  vue  qui  ne  puisse  être  regardée  comme  certaine  d'après 
les  règles  de  la  science  ;  parfois  même  trop  de  réserve.)  —  'ASa^avucu 
KopotY]  17.  [xsxà  6avaiov  sùpeôévTa  au^Ypan^aTia,  p.  p.  Mamoukas.  (Lambros  : 
Ier  vol.  des  œuvres  complètes  de  Gorai,  renfermant  les  matériaux  inédits 
d'un  dictionnaire  français-grec.)  —  Olfrids  Evangelienbuch,  p.  p. 
Erdmann  et  Piper  (L'édit.  d'Erdmann  est  excellente,  celle  de  Piper  ne 
peut  guère  être  la  bienvenue  des  étudiants). —  Kelle,  Otfrids  von  Weis- 
senburg  Evangelienbuch,  III  Band ,  Glossar  der  Sprache  Otfrids. 
(Seemûller  :  très  bon  glossaire.) — Arm.  de  Bourbon,  traité  de  la  comédie 
et  des  spectacles,  p.  p.  Vollmôller.  (Edition  faite  avec  grand  soin.)  — 
Neumann,  Geschichte  Roms  wâhrend  des  Verfalles  der  Republik,  vom 
Zeitalter  des  Scipio  Aemilianus  bis  zu  Sullas  Tode,  hrsg.  v.  Gothein. 
(Seeck  :  il  faut  moins  blâmer  le  maître,  Neumann,  que  l'élève, 
Gothein,  qui  par  trop  de  zèle  a  livré  à  la  publicité  une  œuvre  insuffi- 
sante.)—  H.  v.  Sybel,  Geschichte  des  ersten  Kreuzzuges,  2e  neu  bearb. 
Auflage.  (Nouvelle  édition  de  ce  bel  ouvrage  ;  toute  la  question  des 
sources  a  été  reprise  et  éclaircie  avec  soin  et  pénétration.) —  Die  Ghro- 
niken  der  mittelrheinischen  Stâdte,  Mainz,  I  Band. —  Lund,  Das  tâg- 
liche  Leben  in  Scandinavien  wâhrend  des  XVI.  Jahrhunderts,  eine 
culturhistorische  Studie  iiber  die  Entwickelung  u.  Einrichtung  d. 
Wohnungen.  (Slomann  :  livre  très  instructif  et  riche  en  idées.)  — 
v.  Nordenskiôld,  die  Umsegelung  Asiens  u.  Europas  auf  der  Vega 
1 878-1880.  (Œuvre  remarquable  à  tous  égards.)  — Th.  v.  Bernhardi, 
Friedrich  der  Grosse  als  Feldherr.  2  vols.  (Un  des  ouvrages  les  plus 
considérables  de  la  récente  littérature  militaire.) 

Theologische  Litteraturzeitung,  n°  14,  i5  juillet  1882  :  Kaulen,  Einleit- 
ung  in  die  heilige  Schrift  Alten  und  Neuen  Testaments,  II  Hâlfte,  I. 
Besondere  Einleit.  in  das  Alte  Testament.  — •  Strack,  die  Sprûche  der 
Vâter,  ein  ethischer  Mischna  Traktat.  (Schûrer  :  édition  qui  sera  la 
bienvenue,  même  après  beaucoup  d'autres.)  —  Das  Neue  Testament, 
ûbers  v.  WEizsâcKER.  II.  —  Schegg,  Das  Todesjahr  des  Kônigs  Herodes 
u.  das  Todesjahr  Jesu  Chiisti,  eine  Streitschrift  gegen  Florian  Riess. 
(Schûrer  :  malgré  l'appareil  d'érudition  que  déploie  Fauteur,  manque  de 
justesse  et  de  «  l'acribie  »  nécessaire.)  —  Hôniger,  Der  schwarze  Tod  in 
Deutschland.  (Long  art.  de  Karl  Mûller  sur  cet  ouvrage  intéressant  et 
«  vielseitig  anregend  ».)  —  Rogge,  Samuel  Wilhelm  Rogge,  ein  Lebens- 
Amts-und  Familienbild  aus  einem  schlesischen  Landpfarrhause. 

Gœttingische  gelehtre  Anzeigen,  n°  29,  19  juillet  1882  :  Overbeck, 
Geschichte  der  Griechischen  Plastik,  vierter  Halbband.  (Conze.)  — 
Jodl,  Geschichte  der  Ethik  in  der  neueren  Philosophie.  I.  (Gyzicki.)  — 
Hofmann-Wellenhof,  Michael  Denis.  (Sauer  :  «  ein  gut  angelegtes,  aber 
kein  gutes  Buch.  ») 


Le  fuy,  typ.  et  lith.  Marchessou  pis.  boulevard  Saint-Laurent,  23 


N°  34  Seizième  année  21  Août  1882 

REVUE  CRITIQUE  . 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE   PUBLIÉ    SOUS    LA    DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.  PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 
Un   an,   Paris,  20  fr.  —   Départements,   22   fr.   —   Etranger,    25  fr. 


PARIS 


ERNEST    LEROUX,    EDITEUR 

libraire   de   la    société    asiatique 

de    l'école    des    langues    orientales   vivantes,    etc. 

28,    RUE    BONAPARTE,    28 


Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 
(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  EDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


HISTOIRE  DE  L'HELLÉNISME  ffiSSwS: 

çais  sous  la  direction  de  M.  A.  Bouché-Leclercq.  3  forts  volumes  in-8°.     .     3o    » 

Tome  I.  Histoire  d'Alexandre- le-Grand. 

Tomes  II  et  III.  Les  successeurs  d'Alexandre. 

L'ouvrage    paraît    en    3o   fascicules    à    i    fr.    25. 

Le  fascicule  I  vient  de  paraître. 

L'HISTOIRE     DÉ    L'HELLÉNISME      DE    J.-G.     DROYSEN    FORME    LA      SUITE    ET    LE 

COMPLÉMENT   DE  L'HISTOIRE  GRECQUE  DE  CURTIUS. 


LES  MOUVEMENTS  DU  SOL  m££r*"t 

France  et    particulièrement    dans    le    golfe     normanno- breton,    par    Alexandre 
Chévremont.  Un  beau  volume  gr.  in-8°,  illustré  de  14  planches  en  couleur.     i5    » 
Ouvrage  honoré    d'une  récompense   par  l'Académie  des  Sciences   et  d'un  rapport 
favorable  de  M.  Alfred  Maury  de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 


TF     ï  TVP  F     HPQ     MORTQ    des  anciens  Egyptiens.  Traduc- 
L-jC     .La  Y  I\JC     -L/EO     Drlv^/lx  1  O    tion     complète    avec    notes   et 
index,  par  Paul  Pierret,  conservateur  du  Musée  égyptien  du  Louvre.  Un  fort  vo- 
lume in- 18  de  65o  pages 10    » 


PÉRIODIQUES 

The  Academy,  n°  534,  29  juillet  1882  :  Two  books  on  Iceland,  Coles, 
Summer  travelling  in  Iceland;  Oswald.  By  fell  and  fjord.  — Jevons, 
The  state  in  relation  to  labour.  —  Macray,  Notes  from  the  muniments 
of  Magdalen  Collège.  Oxford.  —  Rud.  Henning,  Das  deutsche  Haus  in 
seiner  historischen  Entwickelung.  (Keary  :  «  The  largest  and  by  far  the 
most  important  >  de  la  collection  des  «  Sources  et  recherches  »  publiée 
chez  Trubner  par  Ten  Brink,  Martinet  Scherer).  —  Shetland  notes. 
—  Hamlet's  «  too  too  sallied  flesh  »  (Furnivall).  —  What  is  a  «  cleaca  » 
(Davidson).  —  Berosus-Genesis.  (Whitehouse.)  —  A  comprehensive 
commentary  on  the  Qurân,  comprising  Sale's  translation  a.  prelimi- 
nary  discourse,  with  additional  notes  a.  emendations,  together  with  a 
complète  index  to  the  text,  preliminary  discourse  a.  notes,  by  WHERRy. 
(Badger.)  —  Audsley,  Outlines  of  ornament.  (Monkhouse.)  —  Excava- 
tion at  Ephesus  (Souscription  publique  pour  la  reprises  des  fouilles 
commencées  à  Ephèse  sur  l'emplacement  du  temple  de  Diane).  —  Prof. 
Maspero  («  La  situation  périlleuse  de  M.  Maspero  est  une  source  d'an- 
xiété croissante  pour  ses  nombreux  amis  et  ses  frères  scientifiques  d'Eu- 
rope. Miss  Am.  B.  Edwards  nous  envoie  un  passage  d'une  lettre  de 
M.  Rhoné  qui  a  quitté  l'Egypte  le  4  juillet  :  «  Les  dernières  dépêches  de 
M.  Maspero  annoncent  sa  résolution  de  demeurer  à  son  poste,  quoi 
qu'il  arrive,  afin  de  sauver  de  la  destruction  le  musée  de  Boulaq.  »  deux 
français  de  l'Ecole  du  Caire  sont  restés  avec  M.  Maspero,  à  bord  d'un 
steamer,  en  face  du  musée  »).  —  A  New  Trojan  Inscription  (Sayce). 

The  Athenaeum,  n°  2857,  29  juillet  1882  :  Natural  religion,  by  the  au- 
thor  of  «  Ecce  homo  ».  —  L.  Perey  et  G.  Maugras,  La  jeunesse  de 
Mme  d'Epinay.  (Ouvrage  d'une  lecture  très  intéressante  pour  tous  ceux 
qui  aiment  et  étudient  le  xvme  siècle;  le  caractère  le  plus  curieux  du  livre 
est  celui  du  comte  de  Preux  ;  c'est  une  «  hearty  and  healthy  figure,»  qui 
a  plus  d'attrait  que  sa  nièce  et  ses  amours,  son  neveu  et  ses  débauches, 
et  toute  la  coterie  de  philosophes  et  de  mondains  avec  ses  intrigues  et 
ses  petites  querelles.)  —  The  Prince,  by  Niccolo  Machiavelli,  translated 
from  the  italian.  —  Renan,  L'Ecclésiaste,  traduit  de  l'hébreu,  avec  une 
étude  sur  l'âge  et  le  caractère  du  livre.  (Art.  où  l'on  fait  l'éloge  du  style 
«  admirable  »  de  M.  Renan  ;  mais  l'auteur  ne  justifie  pas  la  date  qu'il 
assigne  à  la  composition  de  l'Ecclésiaste  ;  il  prétend  qu'il  n'y  a  pas 
d'héllénismes  et  que  le  livre  est  purement  sémitique  ;  ce  qui  n'est  pas 
vraisemblable.  Il  dit  aussi  que  l'Ecclésiaste  est  l'œuvre  de  quelque  riche 
juif  sceptique  ;  ce  qui  est  très  poétique  et  ferait  de  l'effet  dans  un  drame 
philosophique,  mais  n'est  pas  à  sa  place  dans  un  livre  sérieux,  par  la 
simple  raison  que  ce  n'est  pas  vrai  ;  non  content  de  cette  peinture  de 
l'auteur  de  l'Ecclésiaste,  M.  Renan  fait  de  lui  un  «  Stock  Exchange 
Jew  »  ;  dont  la  richessse  est  la  vraie  récompense  et  qui  recommande  de 
diviser  les  chances  de  pertes  et  de  varier  les  placements  ;  cette  interpré- 
tation est  contraire  à  l'hébreu  ;  on  comprendrait  que  Voltaire  donnât  un 
sens  semblable  à  ces  lignes  de  l'Ecclésiaste  (xi,  1 ,  2)  mais  on  ne  l'atten- 
drait pas  d'un  «  hebrew  scholar  ».  En  général,  M.  Renan  est  très  arbi- 
traire dans  sa  traduction.  Sûrement  l'auteur  de  l'Ecclésiaste  ne  se  recon- 
naîtrait pas  lui-même  dans  la  translation  de  M.  Renan.)  —  Gosse, 
Gray  «  English  men  of  letters  »  (La  meilleure  vie  de  Gray  qui  ait  jamais 
été  publiée).  —  Ogam  inscription  in  Scotland.  (Southesk) —  Talks  with 
Trélawny.  IL  (Suite  du  Journal  où  W.  M.  Rossetti  a  pris  note  de  ses 
conversations  avec  l'ami  de  Byron  et  de  Shelley.)  —  Transitional  forms  in 
folk-lore.  (Gomme.)  —  The  etymology  of  «  trifle  »  (Skeat).  —  Ancient 
scottish  weapons,  drawn  by  James  Drummond,  with  an  introd.  a.  notes 
by  Jos.  Anderson.  —  Niven,  Illustration^  of  Old  Staffordshire  houses. 


Deutsche  Litteraturzeitung,  n°  28,  i5  juillet  1882  :  Wickes,  a  treatise  on 
the  accentuation of  the three  socalled  poetical  books  of  the  Old Testament, 
Psalms,  Proverbs  and  Job(Baethgen).  —  Ehses,  Geschichte  der  Packschen 
Hàndel,  ein  Beitrag  zur  Geschichte  der  deutschen  Reformation  (Zoepiïel). 

—  Pfleiderer,  Arnold  Geulinxals  Hauptvertreter  der  occasionalistichen 
Metaphysik  und  Ethik  (Zeller).  —  Schack,  physiognomische  Studien,  aus 
dem  dànischen  ûbersetzt  von  Liebich  (Spitta  :  c'est  dommage  que  l'au- 
teur ait  consacré  à  ce  travail  ingrat  tant  de  peine  et  de  temps  ;  il  s'ef- 
force, par  exemple,  de  trouver  des  ressemblances  entre  la  tête  de  certains 
hommes  et  celle  des  animaux;  il  compare  Kleber  et  le  lion,  Bernadotte 
et  l'aigle,  Voltaire  et  le  singe,  Talleyrand  et  le  renard,  Charles  II,  roi 
d'Espagne,  et  la  brebis  ;  des  personnes  de  sa  propre  connaissance  n'é- 
chappent pas  à  ces  comparaisons  ;  il  trouve  que  telle  actrice  ressemble  à 
une  chatte,  telle  détaillante  à  un  bouledogue,  et  un  bénédictin  à  un 
porc).  —  Abraham  u.  Wilhelm  Singer,  Hamadrich,  talmudische  Chrea- 
tomathie  fur  den  ersten  Unterricht  im  Talmud  (J.  Barth  :  excellent 
manuel).  —  v.  Christ,  Die  sachlichen  Widerspruche  der  Ilias,  ein  Bei- 
trag zur  Lôsung  der  homerichen  Frage  (Renner  :  quelques  résultats  in- 
téressants obtenus  par  un  esprit  pénétrant).  —  Babrii  fabulae  rec.  Gitl- 
bauer  (Kaibel  :  édition  pour  laquelle  on  ne  peut  être  très  indulgent  ; 
beaucoup  de  fautes).  —  Ovidii  libellus  de  medicamine  faciei,  p.  p.  Kunz 
(Léo  :  travail  solide  et  remarquable).  —  Heintze,  Die  deutschen  Fami- 
liennamen  geschichtlich,  geographisch,  sprachlich  ;  Knorr,  Die  Fami- 
liennamen  des  Fûrstentums  Lûbeck  (Edw.  Schrôder).  —  Muller- 
Fraureuth,  Die  deutschen  Lûgendichtungen  bis  auf  Mùnchhausen 
(Lichtenstein  :  sujet  traité  avec  zèle  et  savoir,  mais  sans  méthode  criti- 
que, et  d'une  façon  absolument  sèche  et  aride).  —  Miklosich,  Rumu- 
nische  Untersuchungen,  I.  Istro-und  macedo-rumunische  Denkmâler  et 
Beitràge  zur  Lautlehre  der  rumunischen  Dialecte.  Vocalismus,  I,  II 
(Gaster  :  travaux  excellents,  pleins  de  sagacité,  de  pénétration  et  d'une 
lumineuse  clarté  ;  on  ne  peut  qu'en  souhaiter  la  continuation).  —  Roth, 
Griechischte  Geschichte  nach  den  Quellen  erzâhlt,  3e  Aufl.  hrsg.  v. 
Westermayer.  —  W.  Arnold,  Deutsche  Geschichte,  II  Band,  frànkis- 
che  Zeit,  I  Hàlfte  (Krusch  :  travail  de  valeur,  qui  offre  au  lecteur  érudit 
une  agréable  lecture  et  qui  oriente  facilement  le  «  laïque  »).  —  K.  Rie- 
ger,  Die  Immunitâtspriviiegien  der  Kaiser  aus  dem  sâchsischen  Hause 
fur  italien.  Bistûmer  (H.  Bresslau).  — Wilhelm  Muller,  Historische 
Frauen.  2*  Aufl.  (Winter  :  ajoute  une  nouvelle  biographie,  celle  de 
Marie-Antoinette;  ces  biographies  sont  d'ailleurs  intéressantes  et  instruc- 
tives, et  à  la  hauteur  des  recherches  actuelles).  —  K.  v.  Holtei,  Fûrst- 
bischof  und  Vagabund,  Erinnerungsblàtter  (Zorn  :  l'auteur  raconte  avec 
chaleur  et  piété  ses  rapports  personnels  avec  le  prince  évêque  de  Bres- 
lau,  Henri  Forster).  —  Der  Orient,  Hauptrouten  durch  Aegypten,  Pa- 
làstina,  Syrien,  Tûrkei,  Griechenland,  2  vols.  «  Meyers  Reisebûcher  ». 

—  V.  Taysen,  zur  Beurteilung  des  siebenjâhrigen  Krieges  (Précieuse 
contribution  à  l'histoire  de  la  guerre  de  sept  ans,  complément  de  l'ou- 
vrage de  Bernhardi,  tout  à  fait  indispensable). 

N°  29,  22  juillet  1882  :  Keil,  Commentar  ueber  das  Evangelium  des 
Johannes.  —  Melzer,  Historisch-kritische  Beitràge  zur  Lehre  von  d. 
Autonomie  d.  Vernunft  in  den  Systemen  Kants  und  Gûnthers.  —  Dene- 
ken,  De  Theoxeniis  (Furtwaengler  :  travail  soigné  sur  un  domaine  de- 
puis trop  longtemps  négligé  en  Allemagne  ;  les  principaux  résultats  sont 
entièrement  assurés).  —  Buchholz,  das  ôffentliche  Leben  d.  Griechen 
im  heroischen  Zeitalter,  auf  Grundlage  der  homerischen  Dichtungen 
dargestellt  (Renner  :  beaucoup  de  peine  dans  ce  travail,  d'ailleurs  très 
complet,  très  solide,  et  d'un  style  sain,  parfois  agréable).  —  Anemuller, 
Dramatische  Auffuhrungen  in  den  Schwarzburg-rudolstàdtischen  Schu- 


len,  vornehmlich  im  XII  u.  XVIII  Jahrh.,  ein  Beitrag  zur  Geschichte 
Schul-komôdie  (E.  Schmidt).  —  Morley,  Of  english  literature  in  the 
reign  of  Victoria  (Livre  qui  mérite  d'êtrelu  et  répandu  le  plus  possible; 
nombre  extraordinaire  de  documents  biographiques  et  bibliographiques 
sous  la  forme  la  plus  concise).  —  Luis'  de  Camoens  sàmmtliche  Ge- 
dichte,  deutsch  v.  Storck.  III  Band  :  Buch  der  Elegien,  Sestinen,  Oden 
u.  Octaven,  nebst  einer  Beilage  «  Camoens  in  Deutschland  »  ;  IV  Band  : 
Buch  der  Canzonen  und  Idyllen  (Excellente  traduction,  fruit  d'une 
grande  application,  d'un  soin  durable  et  d'un  art  habile).  —  Festgabe 
fur  Wilhelm  Crecelius  zur  Feier  der  fûnfundzwanzigjâhrigen  Tâtigkeit 
(Intéressant  pour  tous  les  spécialistes  ;  nous  reparlerons  plus  longuement 
de  ce  recueil  dans  notre  Chronique).  —  Fastorum  civitatis  Tauromeni- 
tanae  reliquiae  descriptae  et  editae  a  Bormann  (Holm  :  travail  qui  est  un 
modèle  par  la  prudence  de  Fauteur,  par  la  sûreté  de  son  argumentation 
et  la  clarté  de  son  exposition).  —  Heidemann,  Die  Mark  Brandenburg 
unter  Jobst  von  Mâhren  (Très  intéressant).  —  Berlin  anno  1690,  zwan- 
zig  Ansichten  aus  Johann  Stridbecks  des  Jûngeren  Skizzenbuch,  p.  p. 
Erman  (A  recommander  à  quiconque  s'intéresse  à  l'histoire  du  vieux 
Berlin).  —  Talleyrands  Briefwechsel  mit  Kônig  Ludwig  XVIII  wàhrend 
des  Wiener  Congresses,  p.  p.  Pallain;  autoris.  deutsche  Ausgabe  v.  P. 
Bailleu  (Erdmannsdôrffer  :  traduction  excellente).  —  Schwarz  (Bernh.), 
Algérien,  Kiiste,  Atlas  und  Wûste,  nach  fûnfzig  Jahren  franzôsischer 
Herrschaft  (Gerland  :  esquisses  élégantes,  mais  rien  de  nouveau  et  de 
profondément  pensé).  —  Lionardo  da  Vinci,  Das  Buch  der  Malerei, 
hrsg.  ûbersetzt  u.  erlâutert  von  Heinrich  Ludwig.  — Leist,  zur  Ge- 
schichte der  rômischen  Societas  (Eck  :  explications  instructives  et  dignes 
d'attention).  —  E.  Hermann,  ueber  die  Entwickel.  des  altdeutschen 
Schôffengerichts  (Laband  :  des  choses  excellentes,  mais  aussi  des  choses 
insoutenables).  —  Montégut,  Le  maréchal  Davout,  son  caractère  et  son 
genre  (Hinze  :  «  peu  original,  mais  bien  écrit,  intéressant;  donne  une 
idée  claire  de  Davout  comme  homme  »). 

Gôttingische  gelehrte  Anzeigen,  n°  3o,  26  juillet  1882:  Michelis,  Ka- 
tholische  Dogmatik,  2  Theile.  —  Richard  u.  Robert  Keil,  Gœthe,  Wei- 
mar  u.  Jena  im  Jahre  1806.  (Minor.) 

n°  3i,  2  août  1882  :  Andréas,  The  book  of  the  Mainyo-i-khard. 
(Nôldeke  :  un  des  morceaux  les  plus  importants  de  la  littérature  des 
Parsis  du  moyen  âge,  et  dans  lequel  un  sage  reçoit,  d'un  être  céleste, 
l'esprit  de  la  raison,  une  réponse  à  ses  questions  sur  toute  sorte  de  points 
concernant  l'éthique  et  la  dogmatique  ;  reproduction  la  plus  conscien- 
cieuse possible  du  manuscrit  de  Copenhague.)  —  Retzius,  Finland  : 
Nordiska  Museet;  Hazelius,  Minnen  fran  Nordiska  Museet.  (F.  Lie- 
brecht.) 

Theologische  Litteraturzeitung,  n°  i5,  29  juillet  1882  :  Renouf  (Le  Page), 
Vorlesungen  ûber  Ursprung  u.  Entwickelung  der  Religion  erlâutert  an 
der  Religion  der  alten  Aegypter,  autoris.  Uebersetz.  (Baudissin).  — 
Steude,  Ein  Problem  der  allgemeinen  Religionswissenschaft  und  ein 
Versuchseiner  Lôsung.  —  Wickes,  A  treatise  on  the  accentuation  of  the 
tîiree  socalled  poetical  books  of  the  Old  Testament,  Psalms,  Proverbs 
a.  Job(Kautzsch).  —  Schmidt  (Karl),  Die  Apostelgeschichte,  unter  dem 
Hauptgesichtspunkte  ihrer  Glaubwûrdigkeit  (Long  art.  de  Schûrer).  — 
Lehner,  Die  Marien-verehrung  in  den  ersten  Jahrhunderten  (Schultze  : 
critiques  de  détail,  mais  le  travail  est  soigné  et  presque  complet;  il  se- 
rait à  souhaiter  qu'il  fût  poursuivi  jusque  dans  le  moyen  âgej.  —  Fins- 
ler  ,  Geschichte  der  theologisch-kirchlichen  Entwickelung  in  der 
deutsch-reformirten  Schweiz  seit  den  dreissiger  Jahren  (Kattenbusch). 

Le  Puy^  typ.  et  litk.  Marchess&u  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  2jf 


N°  35  Seizième  année  28  Août  1882 


REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ   SOUS   LA    DIRECTION 

dk  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 
Un    an,   Paris,   20   fr.  —    Départements,    22   fr.    —    Etranger,    zb  fr. 


PARIS 

ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

libraire    de    la  'société    asiatique 

de    l'école    des    langues    orientales    vivantes,    etc. 

28,    RUE    BONAPARTE,    28 


Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  EDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


HISTOIRE  DE  L'HELLÉNISME  £***£ 


i'SEN, 

fran- 
çais sous  la  direction  de  M.  A.  Bouché-Leclercq.  3  forts  volumes  in-8°.     .     3o    » 
Tome  I.  Histoire  d'Alexandre-le-Grand. 
Tomes  II  et  III.  Les  successeurs  d'Alexandre. 
L'ouvrage    paraît    en    3o   fascicules    à    i    fr.    ib. 
Le  fascicule  I  vient  de  paraître. 
l'histoire    de  l^ellénisme    de  j.-g.    droysen  forme   la    suite   et  le 
complément  de  l'histoire  grecque  de  curtius. 


LES  MOUVEMENTS  DU  SOL  'l™,'"'" 

France   et    particulièrement    dans     le    golfe     normanno- breton,    par    Alexandre 
Chévremont.  Un  beau  volume  gr.  in-8°.  illustré  de  14  planches  en  couleur.     i5     » 
Ouvrage  honoré    d'une  récompense   par  l'Académie  des  Sciences   et  d'un  rapport 
favorable  de  M.  Alfred  Maury  de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 


TE      T  TA7D  C     r\CC      A/T^DT^C     des  anciens  Egyptiens   Traduc- 
Lt      LIVKC     VïlO     m\Jl\\.0    tion     complète    avec     notes    et 
index,  par  Paul  Pierret,  conservateur  du  Musée  égyptien  du  Louvre.  Un  fort  vo- 
lume in-18  de  65o  pages.     .     . 10    » 


les  recherches  les  plus  intéressantes  sur  les  écrits  d'Euclide  et  leur  des- 
tinée ;  l'auteur  a  tout  consulté  ;  son  étude  est  à  recommander  et  aux  philo- 
logues, et  aux  mathématiciens  qui  veulent  connaître  l'histoire  de  leur 
science.  —  Beowulf,  hrsg.  v.  Holder,  Germanischer  Bûcherschatz.  (Tant 
que  Holder  ne  donnera  pas  d'explications  sur  les  principes  qui  l'ont  guidé 
dans  son  édition,  elle  sera  de  peu  d'utilité.)  —  Wachsmuth,  Studien  zu 
den  griechischen  Florilegien.  (Cinq  dissertations  instructives,  qui  font 
souhaiter  que  Wachsmuth  nous  donne  beintôt  une  nouvelle  édition 
critique  de  Stobée  et  des  Florilegia  grecs  qui  servent  à  le  compléter.  — 
Schiaparelli,  Il  libro  dei  funerali  degli  anlichi  Egiziani,  tradotto  e 
commentato.  (G.  E.  :  traduction  exacte  en  son  ensemble;  présent  utile 
et  précieux  fait  à  la  science;  contribution  importante  et  à  l'histoire  re- 
ligieuse et  à  la  connaissance  de  la  langue  de  l'ancienne  Egypte.)  —  Ber- 
tolotti,  Artisti  Lombardi  a  Roma  nei  secoli  XV,  XVI  e  XVII,  studi  e 
ricerchi  negli  archivi  romani.  (Communications  importantes  pour  l'his- 
toire de  l'art  et  de  la  «  Cultur  ».)  —  Camillo,  Ueber  Erziehung  u. 
Erhaltung  der  Stimme.  —  Klaunig,  Das  preussische  Volksschulwesen 
im  Geltungsbereich  d.  allgem.  Landrechts  in  seinen  ausseren  Beziehun- 
gen.  —  Findel,  Die  Grundsâtze  der  Freimaurerei  im  Vôlkerleben.  — 
Morselli,  Der  Selbstmord.  (Trad.  allemande  de  ce  remarquable  ou- 
vrage, plein  de  docnments;  l'auteur  a  étudié  600,000  cas  de  suicide; 
même  point  de  vue  que  Quételet  et  Ad.  Wagner). 

Deutsche  Litteraturzeituiig,  n°  3o,  29  juillet  1882  :  Gass,  Geschichte  der 
christlichen  Ethik.  I.  Bis  zur  Reformation  (Zoepffel  :  livre  très  instruc- 
tif). —  Steudel,  Philosophie  im  Umriss.  II.  —  Svod  zakonuv  slo- 
vanskych  zporadal  Hermenegild  Jirecek  (Volumen  legum  slavicarum 
collegit  H.  J.).  Prag,  Tempsky  (Jagic).  —  Galeni  qui  fertur  de  parti- 
bus  philosophae  libellus,  primum  edidit  Wellmann  (Iwan  Mûller  : 
donne  plus  que  le  titre).  —  Kluge,  Etymologisches  Wôrterbuch  der 
deutschen  Sprache,  Ie  Lieferung  (Roediger  :  entreprise  qu'il  faut  recom- 
mander chaudement;  la  tâche  difficile,  que  s'est  donnée  l'auteur,  a  été 
habilement  entamée).  —  Briefe  von  Zimmermann,  Wieland  u.  Haller 
an  Tscharner,  hrsg.  v.  R.  Hamel  (Pas  de  notes  et  d'éclaircissements, 
par  suite  d'une  trop  «  commode  modestie  »).  —  Arnold  Hug,  Studiea 
aus  dem  classischen  Alterthum  (Wilamowitz  :  renferme  quatre  disserta- 
tions; I.  Districts,  communes  et  droit  des  citoyens  en  Attique;  II.  Dé- 
mosthène  comme  penseur  politique;  III.  La  question  de  la  double  lec- 
ture dans  l'assemblée  athénienne  et  la  formule  dite  probuleumatique; 
IV.  Antioche  et  la  révolte  de  l'an  887.  L'art.  III  réfute  Hartel  ;  l'art.  II 
donne  un  tableau  «  réussi  »  de  la  théorie  politique  qui  était  pour  Dé- 
mosthène  et  son  parti  une  sainte  conviction).  —  Milesios,  Beschreibung 
des  deutschen  Hauses  in  Venedig,  aus  einer  Handschrift  in  Venedig 
hrsg.  v.  G.  M.  Thomas  (De  grande  importance  pour  l'histoire  du  com- 
merce méridional  et  des  conséquences  qui  en  résultèrent  pour  l'Allema- 
gne et  l'Italie).  —  Reinhardt,  Valdemar  Atterdag  og  hans  Kongegj'er- 
ning  (Hasse  :  «  quelques  points  manques,  d'autres  plus  ou  moins 
contestables,  mais  d'autres  aussi  à  recommander  à  la  plus  vive  attention 
et  aux  mûres  méditations  des  chercheurs  »).  —  Fùrst  Alexander  Niko- 
lajewitsch  Galitzin  und  seine  Zeit,  aus  den  Erlebnissen  des  Geheimrats 
Peter  von  Goeze  (Caro  :  quelques  détails  intéressants,  surtout  sur  la 
conjuration  de  Décembre  et  sur  la  scène  de  la  place  de  l'Amirauté).  — 
Ad.  Held,  Zwei  Bûcher  zur  socialen  Geschichte  Englands,  aus  dem 
Nachlass  hrsg.  v.  Knapp  (Léser).  —  Beitrâge  zur  Geschichte  der  oster- 
reichischen  Kavallerie,  die  ôsterr.  Kavallerie  in  Feldzûgen  des  XVIII 
Jahrhunderts  u.  jenen  der  neuesten  Zeit,  i85q  u.  1866.  —  Antiquari- 
sche  Funde  in  Italien  (Lettre  adressée,  comme  l'étaient  les  précédentes 
lettres,  par  M.  H.  Dressel). 


PÉRIODIQUES 

The  Academy,  n°  535,  5  août  1882  :  Swinburne,  Tristram  of  Lyonesse 
and  other  poems.  —  Cox,  The  mythology  of  the  aryau  nations.  (Max 
Miiller  :  nouvelle  édition  d'un  livre  très  utile.)  —  Baillie  Grohman, 
Camps  in  the  Rockies,  being  a  narrative  of  life  on  the  frontier  and 
sport  in  the  Rocky  Mountains,  with  an  account  of  the  Cattle  Ranches 
of  the  West.  —  Essays  from  the  «  Critic  ».  —  Peter,  Chronologieal 
tables  of  greek  history,  translated  by  Chawner.  (Richards.)  —  Car- 
rent literature  (Scudamore  France  in  the  east  ;  Trollope,  Lord  Palmer- 
ston,  etc.).  —  The  late  col.  Chester's  papers.  —  A  new  hittite  inscription 
discovered,  at  Tyana  by  M.  W.  M.  Ramsay  (Sayce).  —  Trùbner's 
«  simplifiée!  grammars  ».  (Brandreth.)  —  «  Cleaca  »  (Nevill).  — A  nor- 
wegian  professor  on  posijivism  :  Monrad,  Denkrichtungen  der  neueren 
Zeit,  deutsche  vom  Verfasser  selbst  besorgte  Bearbeitung.  (James  Sully.) 
—  The  Journal  of  Hellenic  Studies,  vol.  III,  n°  I.  (Monro  :  renferme, 
de  M.  Ramsay,  Studies  in  Asia  Minor;  de  M.  Mahaffy,  On  the  site  and 
antiquity  of  the  Hellenic  Ilion;  de  M.  Jebb,  on  Pindar,  etc.).  —  The 
alleged  heresy  in  the  Palmieri  Botticelli.  —  In  Memoriam,  François 
Joseph  Chabas.  (Am.  B.  Edwards).  —  Philology  notes  (Geldner,  âtu- 
dien  zum  Avesta,  I  Heft  :  indications  précieuses  pour  l'explication  de 
mots  difficiles). 

The  Athenaeum,  n°  2858,  5  août  1882  :  Broadley,  The  least  punie 
war,  Tunis  past  and  présent,  with  a  narrative  of  the  french  conquest  of 
the  regency  (Des  détails  intéressants).  —  Edm.  Scherer,  Etudes  sur  la 
littérature  contemporaine  (Recommande  surtout  les  études  sur  Word- 
sworth,  sur  Zola  et  sur  Taine).  —  Letters  a.  papers  foreign  and  domes- 
tic,  ofthe  reign  of  Henry  VIII,  preserved  in  the  Record  office,  the  Bri- 
tish  Muséum,  and  elsewhere  in  Engiand,  arranged  a.  catalogued  by  J. 
Gairdner.  Vol.  VI.  — Jevons,  The  english  citizen;  the  state  in  relation 
to  labour.  —  Col.  Ramsay,  Rough  recollections  of  milkary  service  and 
society.  —  More  Karaite  manuscripts.  [Shapira.)  —  Piracy  at  the  anti- 
pods  (D.  Blair).  —  Talks  with  Trelawny.  (Fin  du  Journal  des  conver- 
sations ex  rapports  de  M.  W.  M.  Rossetti  avec  l'ami  de  Byron  et  de 
Shelley).  —  The  hallof  Pembroke  Collège.  —  Le  Roy  de  Sainte-Croix, 
Vie  et  ouvrages  de  Roubillac,  sculpteur  lyonnais.  —  Royal  archaeologi- 
cal  institute  at  Carlisle.  —  Subterranean  villages  in  Cappadocia.  (C. 
W.  Wilson.) 

Literarisches  Centralblatt,  n°  3i,  29  juillet  1882  :  Bestmann,  Die  histo- 
rische  Wissenschaft  u.  die  Ritschl'sche  Schule.  —  Theodori  episcopi 
Mopsuesteni  in  epistolas  B.  Pauli  commentarii,  the  latin  version  with 
the  greek  fragments,  p.  p.  4  Sweet.  —  Jung,  Die  rômischen  Landschaf- 
ten  des  rômischen  Reiches,  Studien  ûber  die  inneren  Entwickelungen  in 
der  Kaiserzeit.  (Ouvrage  trop  commodément  fait,  pas  d'ensemble,  nom- 
breuses et  peu  utiles  digressions;  toutefois,  beaucoup  d'enthousiasme 
pour  le  sujet,  et  des  recherches  très  minutieuses;  mais  l'auteur  n'a  pas 
le  sens  historique;  erreurs  de  détail,  qui  «  feraient  honneur  à  un  rédac- 
teur du  Gaulois  ».)  —  v.  Gonzenbach,  Der  General  Hans  Ludwig  von 
Erlach  von  Castelen.  28  vol.  (Nouveaux  documents  sur  la  guerre  de 
Trente  Ans.)  —  Kong  Christian  den  Tjerdes  egenhaendige  Brève, 
Hefte  2  og  3.  r 6 3 3 - 1 6 3 5 .  —  Dalton,  Johannes  a  Lasco,  Beitrag  zur 
Reformationsgeschichte  Polens,  Deutschlands  u.  Englands.  (Voici  en- 
fin un  livre  où  tout  le  monde,  chercheurs  et  «  laïques  »  trouveront  une 
joie  sincère  et  sans  mélange;  excellente  biographie,  pleine  de  vie  et  d'a- 
nimation; en  même  temps,  tableau  de  la  réforme  en  Europe.)  —  Anna- 
les du  Musée  Guimet,  tome  II.  —  Heiberg,  Literargeschichtliche  Stu- 
dien ûber  Euklid.  (Travail  de  l'infatigable  érudit  danois  où  Ton  trouvera 


Pûilologische  Rundschau,  n°  29,  i5  juillet  1882  :  J.  Winter,  De  oratione 
quaeest  inter  Demosthenicas  XVIlaet  inscribitur  :  rcepi  tu>v  xpoç  ÂXéÇav- 
Spov  auv6Y)y.ôv  (Fox  :  à  lire).  —  Xenophons  Anabasis,  Fur  den  Schulge- 
brauch  erklârt  von  Ferdinand  Vollbrecht,  Buch  I— III,  7.  Auflage 
(Hansen  :  la  meilleure  édition  de  classe).  —  H.  Schoemann,  Apollonius 
von  Perga  (Gûnther  :  donne  une  idée  juste  de  ce  mathématicien).  —  G. 
F.  Unger,  Der  sogenannte  Cornélius  Nepos  (C.  W.  :  il  n'est  pas  cer- 
tain que  l'auteur  du  De  excellentibus  ducibus  soit  un  Julius  Hyginus, 
mass  Unger  prouve  avec  évidence  que  ce  n'est  pas  Népos).  —  Franc. 
Seck,  De  Pompei  Trogi  sermon e  (Georges).  —  Eichert,  Vollstândiges 
Wôrterbuch  zur  Philippischen  Geschichte  des  Iustinus  (Georges  :  bon 
pour  lire  Justin,  insuffisant  pour  des  recherches  de  langue;  cf.  Revue 
critique,  1882,  p.  43,  n°  29).  —  Eyssenhardt,  Roemisch  und  Roma- 
nisch  (Saalfeld,  appréciation  élogieuse,  éloignée  de  celle  de  la  Revue 
critique,  1882,  I,  p.  3i  n°  28).  —  D.  Reichling,  Johannes  Murmel- 
lius,  sein  Leben  und  seine  Werke.  ld.,  Ausgewàhlte  Gedichte  von 
Johannes  Murmellius  (Baeumker  :  bon). 

N°  3o,  22  juillet  1882  :  O.  Hempel,  Quaestiones  Theocriteae 
(Zettel  :  analyse  approbative).  —  Biblioteca  scolastica  di  scrittori 
latini,  Q.  Valerii  Gatulli  et  S.  Propertii  carmina  selecta,  Torino- 
Roma-Firenze-Milano,  Paravia  et  comp.  (Heydenreich  :  sans  valeur 
pour  le  public  allemand).  —  Cornélius  Nepos,  fur  Schiller  herausgege- 
ben  von  Joh.  Sibelis,  10.  Auflage  besorgt  von  Max  Jancovius  (C.  W.).  — 
Tartara,  Animadversiones  in  locos  nonnullos  Valeri  Catulli  et  Titi 
Livi,  Romae,  Mûller  (Egelhaaf,  seulement  sur  ce  qui  concerne  Tite- 
Live  :  éloges  et  critiques).  —  G.  F.  Hertzberg,  Geschichte  des  rômi- 
schen  Kaiserreichs  (Egelhaaf  :  soigné,  mais  omet  systématiquement  de 
renvoyer  aux  travaux  modernes).  —  P.  L.  Lemière,  Les  Celtes  et  les 
Gaules.  Paris,  Maisonneuve,  et  Saint-Brieuc  (Hansen  :  du  travail,  mais 
ni  critique  ni  connaissance  des  travaux  antérieurs).  —  L.  Hollaender, 
De  militum  coloniis  ab  Augusto  in  Italia  deductis  (Vollmer).  —  Chr. 
Schroener,  Ueber  die  Titulaturen  der  romischen  Kaiser  (Gruppe  :  soi- 
gné, mais  peu  sûr)^.  —  Teichmueller,  réponse  à  l'article  sur  les  Littera- 
rische  Fehden  im  vierten  Jahrhundert  vor  Christ,  n°  du  10  juin. 

Philologische  Wochenschrift,  n°  29,  22  juillet  1882  :  Eug.  Abel,  Joannis 
Gazaei  descriptio  tabulae  mundi  et  anacreontea  (Sitzler  :  bonne  édition). 
—  Gust.  Brandes,  Ein  griechisches  Liederbuch,  Verdeutschungen  aus 
griechischen  Dichtern*  —  J.-Ff.  Schmalz,  C.  Sallusti  Crispi  de  Catilinae 
coniuratione  liber,  fur  den  Schulgebrauch  erklart  (Eussner  :  désaccord 
sur  la  méthode). —  Alfred  Kirchhoff,  Thiiringen  doch  Hermunduren- 
land  (Frick  :  analyse).  —  Périodiques,  etc. 

N°  3o,  29  juillet  1882  :  Lehrbuch  der  Geschichte  fur  die  oberen  Klas- 
sen  hôherer  Lehranstalten  von  Dr.  Friedrich  Hofmann,  2.  Heft,  Rômi- 
sche  Geschichte  (Hermann).  —  Aurel  Baszel,  Biographies  (en  hongrois) 
des  philologues  des  xvi«  et  xvne  et  de  la  irc  moitié  du  xvni0  siècle.  —  Id., 
Les  principaux  traits  caractéristiques  des  anciens  Grecs  (en  hongrois).  — 
Ernest  Curtius,  Die  Altàre  von  Olympia  (Gloël  :  important  pour  la 
connaissance  des  antiquités  religieuses).  —  Transactions  of  the  Cam- 
bridge Philological  Society,  vol.  I,  from  1872  to  1880,  edited  by  J.  P. 
Postgate.  London,  Trûbner.  —  Périodiques,  etc. 


Le  Puy,  imprimerie  de  Marchessou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  23. 


N*  36  Seizième  année      4  Septembre  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE   PUBLIÉ   SOUS    LA   DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 
Un   an,  Paris,  20  fr.  —    Départements,   22   fr.    —    Étranger,   2$  fr. 


PARIS 


ERNEST    LEROUX,    EDITEUR 

libraire   de    la    société    asiatique 

de    l'école    des   langues   orientales   vivantes,    etc, 

28,    RUE   BONAPARTE,    28 


Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


HISTOIRE  DE  L'HELLÉNISME  SuitK' 

çais  sous  la  direction  de  M.  A.  Bouché-Leclercq.  3  forts  volumes  in-8°.     .     3o    » 

Tome  I.  Histoire  d'Alexandre- le-Grand. 

Tomes  II  et  III.  Les  successeurs  d'Alexandre. 

L'ouvrage    paraît    en    3o   fascicules    à    i    fr.    20. 

Le  fascicule  1  vient  de  paraître. 

L'HISTOIRE     DE    L'HELLÉNISME      DE    J.-G.     DROYSEN    FORME    LA      SUITE    ET    LE 

COMPLÉMENT   DE  l'hISTOIRE  GRECQUE  DE  CURTIUS. 


LES  MOUVEMENTS  DU  SOL  ~££éïït 

France   et    particulièrement    dans    le    golfe     normanno- breton,    par    Alexandre 
Chévremont.  Un  beau  volume  gr.  in-8°,  illustré  de  14  planches  en  couleur.     i5    » 
Ouvrage   honoré    d'une   récompense    par  l'Académie  des   Sciences  et  d'un  rapport 
favorable  de  M.  Alfred  Maury  de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 


TF     ï  TVR  F     HF^      MORT^     deS  anciens  Égyptiens.  Traduc- 
L«.C      Ll  V  l\C     l_/JCO     lVlv^/f\  i  Cj    tion     complète    avec    notes   et 
index,  par  Paul  Pierret,  conservateur  du  Musée  égyptien  du  Louvre.  Un  fort  vo- 
lume in-18  de  65o  pages 10    » 


PÉRIODIQUES 

The  Academy,  n°  536,  12  août  1882  :  The  poetical  v.orks  of  William 
Wordsworth,  edited  by  W.  Knight.  I  a.  II  (Dowden  :  édition  très  sa- 
tisfaisante). —  Hughes,  Memoir  of  Daniel  Macmillan.  —  Ihne,  His- 
tory  of  Rome,  en'glish  édition,  vols.  IV  a.  V  (Warr).  —  Broadley,  The 
last  punie  war;  Tunis,  past  and  présent.  —  Réminiscences  of  an  irish 
journey  in  1849,  by  Thomas  Carlyle.  —  Chants  populaires  espagnols, 
quatrains  et  séguidilles,  avec  accompagnement  pour  piano,  dessins  de 
Santiago  de  Arcos,  par  Achille  Fouquier  (W.  Webster).  —  Some  anti- 
quarian  books.  —  Mr.  Lyall's  arabic  translations  (Lyall,  Translations 
from  the  Hamâseh).  —  A  new  interprétation  of  the  «  Yi  King  »  by 
J.  Legge  (Douglas).  —  Vinc.  Robinson,  Oriental  carpets  (Monkhousej. 

—  Royal  archaeological  institute,  Carlisle  meeting. 

The  Athenaeum,  n°  2859,  12  août  1882  :  Sélections  from  the  writings 
of  Landor,  arranged  a.  edited  by  Sidney  Colvin.  —  Wilson  a.  Felkin, 
Uganda  a.  thé  Egyptian  Soudan.  —  Catholicon  Anglicum,  an  english- 
latin  wordbook,  dated  1483,  with  introd.  a.  notes  by  Herrtage,  with  a 
préface  by  Wheatley.  —  Forbes-Leith,  The  scots  men-at-arms  and 
lifeguards  in  France.  2  vols.  Edinburgh,  Paterson  (Relatif  à  l'établisse- 
ment des  soldats  écossais  en  France  et  à  leurs  rapports  avec  la  cour  de 
France;  Fauteur  traite  son  sujet,  comme  un  épisode  de  l'histoire 
d'Ecosse  qui  jette  beaucoup  de  lumière  sur  l'histoire  des  familles  écos- 
saises ;  la  grande  valeur  du  livre  consiste  dans  le  soin  avec  lequel  l'au- 
teur a  recueilli  les  «  muster  rolls  »  des  compagnies  écossaises).  —  Lenor- 
mant,  Les  origines  de  l'histoire  d'après  la  Bible,  vol.  II  (L'auteur  est 
toujours  intéressant,  instruit  et  suggestif;  mais  son  second  volume  dé- 
sappointe un  peu  après  le  premier  ;  il  est  tout  aussi  digne  d'études  ; 
néanmoins,  s'il  abonde  en  «  learning  and  happy  illustrations  »,  il 
contient  fort  peu  de  choses  nouvelles).  —  The  angel-saxon  chronicle 
(Howorth).  —  Mr.  Mozley^  «  réminiscences  »  (Jenkyns).  —  The  Sun- 
derland  library.  —  Education  in  Saxony  (Mahaffy).  —  Milton's  Bible. 

—  The  russian  «  Uncle  Tom's  Cabin  ».  —  Barry,  Lectures  on  archi- 
tecture delivered  at  the  Royal  Academy.  —  Overbeck,  Geschichte  der 
griechischen  Plastik,  part.  III  a.  IV.  —  Royal  archaeological  institute 
at  Carlisle.  —  Pohl,  Joseph  Haydn,  IIe  vol. 

Literarisches  Gentralblatt,  n°  32,  5  août  1882  :  Kleyn,  Het  leven  van 
Johannes  van  Telia  door  Elias,  syrische  texten  nederlandsche  vertaling. 
(Donne  un  bon  témoignage  de  la  science  de  son  auteur.)  —  Dahn,  Ur- 
geschichte  der  germanischen  und  romanischen  Vôlker.  II  Band,  III 
Liefer.  (Fin  du  IIe  volume  de  l'ouvrage;  comprend  l'histoire  extérieure 
des  peuples  de  la  Germanie  occidentale  et  de  ceux  du  Danube  jusqu'à 
la  fin  du  ve  siècle;  bon  chapitre  sur  l'influence  des  Germains  dans  l'ar- 
mée, l'administration  et  la  cour  des  empereurs;  excellentes  pages  sur 
le  «  limes  »,  sur  les  routes  romaines,  sur  le  système  militaire,  etc.;  on  a 
ici  réunis  pour  la  première  fois,  en  un  tableau  complet,  une  foule  de  dé- 
tails dispersés  dans  les  revues.)  —  Pommerellisches  Urkundenbuch , 
bearb.  von  Perlbach.  II  Abth.  (De  1283  à  i3i5.)  —  Leist,  Aus  Fran- 
kens  Vorzeit,  kleine  Culturbilder.  (Parfois  intéressant,  souvent  maigre 
et  insuffisant.)  —  von  Kalchberg,  mein  politisches  Glaubensbekennt- 
niss.  —  Heller,  Geschichte  der  Physik  von  Aristoteles  bis  auf  die 
neueste  Zeit  I.  Von  Aristoteles  bis  Galilei.  (Nombreux  défauts,  détails 
erronés,  etc.,  et  pourtant  on  ne  peut  condamner  l'ouvrage,  car  certains 
chapitres  sont  très  réussis,  par  ex.  sur  Platon,  Aristote,  Roger  Bacon, 
Keppler  et  Galilée.)  —  Von  Taysen,  zur  Beurtheilung  des  siebenjahri- 
gen  Krieges.  —  Anecdota  oxoniensia,  I.   Buddhist  texts  from  Japan, 


pp.  Max  Muli.er.  —  Frigell,  Epilegomena  ad  T.  Livii  librum  vicesi- 
mum  primum.  (excellente  contribution  à  la  critique  de  Tite  Live.)  — 
ScHàFFNER,  Lord  Byron's  Cainund  seine  Quellen.  (Intéressant.)  —  Bar- 
bours's  des  schottischen  Nationaldichters  Legendensammlung  nebst 
den  Fragmenten  seines  Trojanerkrieges,  zum  ersten  Maie  hrsg.  v. 
Horstmann.  I  Band.  (Rien  ne  prouve  encore  que  le  recueil  de  légendes 
ait  Barbour  pour  auteur;  grands  mérites.) —  Brendicke,  Genealogieen 
sàmmtlicher  griechischer  Gôtter  und  Heroen  in  18  Uebersichtstafeln. 
(Compilation,  «  Sammelsurium  »  faite  sans  plan  et  sans  choix;  que  pas 
un  maître  ne  donne  ces  tables  généalogiques  à  ses  élèves.) 

Deutsche  Litteraturzeitimg,  n°  3i,  5  août  1882  :  Klostermann,  Correctu- 
ren  zur  bisherigen  Erklârung  des  Rgmerbriefes.  —  Loewe,  Lehrbuch 
der  Logik.  —  Bindel,  Hilfsmittel  fur  den  deutschen  Unterricht  in  der 
Tertia.  —  Frohwein,  Verbum  homericum,  die  homer.  Verbalformen 
zusammengestellt.  (Hinrichs  :  beaucoup  de  soin,  redresse  les  fautes  et 
comble  les  lacunes  de  l'Index  Homericus  de  Seber.)  —  Die  althochdeut- 
schen  Glossen,  ges.  u.  bearb.  von  Steinmeyer  u.  Sievers,  II  Band,  Glos- 
sen  zu  nichtbiblischen  Schriften.  (Heyne  :  2e  vol.  de  cette  œuvre  monu- 
mentale.) —  Linnig,  Bilder  zur  Geschichte  der  deutschen  Sprache. 
(Schroder  :  du  zèle,  de  bonnes  intentions,  mais  ébranlera  la  confiance 
dans  la  science  de  la  langue  allemande  plutôt  qu'elle  ne  l'affermira.)  — 
v.  Reden-Esbeck,  Caroline  Neuber  u.  ihre  Zeitgenossen.  Lichten- 
stein  :  (des  documents  importants,  mais  manque  de  méthode,  la  biogra- 
phie de  la  Neuber  est  encore  à  faire.)  —  Das  Lied  von  King  Horn  hrsg. 
v.  Wissmann  (Hausknecht  :  mérite  tous  les  éloges).  —  Leroux,  Re- 
cherches critiques  sur  les  relations  politiques  de  la  France  avec  l'Al- 
lemagne 1292-1378.  (Winkelmann  :  publication  solide  qui  fait] honneur 
à  l'école  de  G.  Monod  ;  il  est  à  regretter  que  l'auteur  de  cette  loua- 
ble étude  n'ait  pas  connu  quelques  travaux  allemands.)  —  Janssen, 
Geschichte  des  deutschen  Volkes  seit  dem  Ausgang  des  Mittelalters, 
III  Band.  (Beger  :  livre  de  parti,  l'auteur  croit  que  la  réforme  n'était 
pas  historiquement  nécessaire,  et  qu'elle  fut  un  malheur  pour  l'Al- 
lemagne; tait  ou  laisse  dans  l'ombre  tous  les  faits  qui  parlent  pour 
les  protestants.)  —  K.  Enler,  Friedrich  Ludwig  Jahn,  sein  Leben  u. 
Wirken.  (lsaacsohn  :  la  première  biographie  du  «  Turnvater  »  qui 
épuise  le  sujet,  remaniement  de  l'ouvrage  de  Prôhle.)  —  Schutt,  Rei- 
sen  im  sûdwestlichen  Becken  des  Congo,  p.  p.  Linderberg.  —  Las- 
peyres,  Die  Kirchen  der  Renaissance  in  Mittel-Italien.  (Bohn.)  — 
Hirschfeld,  Kônig  Lear,  ein  poetisches  Leidensbild  von  Shakspeare. 
(Sander  :  prouve  la  finesse  d'observation  et  l'exactitude  des  descrip- 
tions du  grand  poète.)  —  Lorck,  Handbuch  der  Geschichte  der  Buch- 
druckerkunst.  I.  Erfindung,  Verbreitung,  Blute,  Verfall.  1450-1750. 
(L.  Mûller  :  travail  très  méritoire,  rempli  d'indications  nombreuses  et 
utiles.)  —  Erzherzog  Karl,  militarische  Schriften.  p.  p.  WaldstStten. 
—  Vischer,  Lyrische  Gange.  —  Antiquarische  Fundein  Italien  (commu- 
nie, de  Dressel). 

Philologische  RuHdschau,  n°  3e,  29  juillet  1882  :  A.  G.  Engelbrecht, 
De  scoliorum  poesi  (Sitzler  :  analyse  détaillée).  —  Adolf  Busse,  De 
praesidiis  Aristotelis  Politica  emendandi  (Baeumker  :  bon,  polémique 
impolie).  —  Victor  Ryssel,  Ueber  den  textkritischen  Wert  der  syris- 
chen  Uebersetzungen  griechischer  Klassiker  (bon).  —  Alexandri 
Tartara,  Animadversiones  in  locos  nonnullos  Valeri  Catulli  et  Titi 
Livi,  iterum  emendatiores  editae,  Romae  ex  ofhcina  «  dell'  Opinione  » 
(Rossberg  :  critiques  assez  vives).  —  Van  den  Berg,  Petite  histoire  des 
Grecs  depuis  les  origines  jusqu'à  la  conquête  de  la  Grèce  par  les  Ro- 
mains.   Hachette,    1880   (Schaefer  :    ni   nouveaux  points  de   vue  ni 


nouveaux  détails;  expression  nette,  bonne  distribution;  l'auteur 
ne  tient  pas  compte  des  travaux  non  français,  sauf  quelques  livres 
allemands  indispensables;  vues  arriérées;  emploi  insuffisant  des  inscrip- 
tions ;  l'addition  des  cartes  et  illustrations  est  louable,  le  choix  en  est 
contestable  et  l'exécution  défectueuse).  —  Steinmeyer,  Betrachtungen 
ûber  unserklassisches  Schulwesen,  eineEntgegnung(Rothfuchs:  défense 
de  l'éducation  classique).  —  Annonce  de  H.  Bruell,  Entwicklungsgang 
der  griechischen  Philosophie. 

Deutsche  Rundschau,  août  1882  :  Hausner,  La  littérature  polonaise  dans 
les  vingt  dernières  années  (conclusion).  — Aus  der  Pfalz  und  aus  Baden, 
1849,  Ériefe  eines  preussischen  Generalstabsofficiers.  I.  —  Rodenberg, 
Nûrnberg  u.  die  bayrische  Landssausstellung.  —  Literarische  Rund- 
schau :  Kaufmann,  Deutsche  Geschichte  bis  auf  Karl  den  Grossen.  Leip- 
zig, Duncker  u.  Humblot.  I.  Die  Germanen  der  Urzeit  ;  II.  Von  dem 
rômischen  Weltreiche  zu  der  geistlich-weltlichen  Universalmonarchie 
des  Mittelalters.  419-814.  (Livre qui  repose  sur  des  recherches  étendues; 
d'ailleurs  bien  composé.)  —  Arnold,  Deutsche  Geschichte.  II  Band. 
Frankische  Zeit,  erste  Hâlfte.  (Peu  satisfaisant,  cette  fois).  —  Neue  Li- 
teratur  ûber  Russland  :  Russische  Wandlungen,  Neue  Beitràge  zur  rus- 
sischen  Geschichte  von  Nicolaus  I  zu  Alexander  III;  Lose  Bliitter  aus 
dem  Geheimarchiv  der  russischen  Regierung.  —  Literarische  Notizen 
(Die  Tragodien  des  Aeschylos,  ûbers.  v.  Bruch  ;  Die  Perser,  ûbers.  v. 
Kochly;  —  Des  Aristophanes  Werke,  ûbers.  v.  J.  Droysen  ;  —  Gœthe's 
Werke,  illustrirt  von  ersten  deutschen  Kûnstlern  hrsg.  v.  Dûntzer  ; 
—  Lenau's  sâmmtliche  Werke,  2  Bande;  —  Haller's  Gedichte,  hrsg.  u. 
erlautert  v.  Ludwig  Hirzel;  —  Hillebrand,  Zeiten,  Vôlker  u.  Mens- 
chen,  VI.  Zeitgenossen  u.  Zeitgenossisches.) 

Athenaeum  belge,  n°  i5,  icraoût  1882  :  Relations  politiques  des  Pays- 
Bas  et  de  l'Angleterre  sous  le  règne  de  Philippe  II,  p.  p.  Kervyn  de 
Lettenhove.  Tome  I  (Juste  :  recueil  précieux).  —  De  Goncourt,  L'art 
au  xvnie  siècle.  II;  Lebon,  L'Angleterre  et  l'émigration  française  de 
1794  à  1801  :  récit  vif  et  animé,  une  des  meilleures  études  qu'on  ait 
publiées  depuis  quelque  temps  sur  l'histoire  extérieure  de  la  Révolution  ; 
Montégut,  Le  maréchal  Davout,  etc.  —  De  Ceuleneer,  Le  Portugal, 
notes  d'art  et  d'archéologie.  —  Crutzen,  L'origine  maternelle  et  la 
naissance  de  Marguerite  de  Parme,  gouvernante  des  Pays-Bas  (Travail 
fait  avec  beaucoup  de  discernement). 

Theologische  Litteraturzeitung,  n°  16,  12  août  1882  :  Konig,  Der  offen- 
barungsbegriff  des  Alten  Testaments.  —  De  Lagarde,  The  question  : 
whether  marriage  with  a  deceased  wife's  sister  is,  or  is  not,  prohibited 
in  the  mosaic  writings,  answered.  (Nestlé  :  important.)  —  Merrill, 
East  of  the  Jordan,  a  record  of  travel  and  observation  in  the  countries 
of  Moab,  Gilead  and  Bashan  during  the  years  1875- 1877.  —  Schultze 
(Vict.),  Die  Katacomben,  die  altchristlichen  Grabstiitten,  ihre  Geschichte 
u  .ihre  Monumente.  (Karnack  :  compendium  qui  sera  très  utile  et 
qui  atteint  parfaitement  son  but.)  —  Rieks,  Geschichte  der  christlichen 
Kirche  und  des  Papstthums.  (Harnack  :  écrit  de  parti,  du  parti  des  vieux 
catholiques,  dirigé  contre  la  papauté.) 


l.e  Puy,  typ.  et  lii't.  Marchessau  /Us,  boulevard  Saint-Laurent,  33 


N°  37  o'Uudii      Seizième  année     11  Septembre  1882 

^^^^^         ... , ,,  ■ 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE   PUBLIÉ    SOUS   LA   DIRECTION 

pe  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.   Chuquet 

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Prix  d'abonnement  : 
Un    an,   Paris,   20   fr.  —   Départements,    22   fr.    —   Etranger,    25   ir. 


PARIS 


ERNEST    LEROUX,    EDITEUR 

libraire    de    la    société    asiatique 

de    l'école    des    langues    orientales   vivantes,    etc. 

28,    RUE    BONAPARTE,    28 


A  dresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquei 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  EDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


HISTOIRE  DE  L'HELLÉNISME  Éa^S 

çais  sous  la  direction  de  M.  A.  Bouché-Leclercq.  3  forts  volumes  in-8°.     .     3o     » 

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Tomes  II  et  III.  Les  successeurs  d'Alexandre. 

L'ouvrage    paraît    en    3o   fascicules    à    i    fr.    25. 

Le  fascicule  I  vient  de  paraître. 

l'histoire    de  l'hellénisme    de   j.-g.    droysen   forme   la    suite   et  le 

complément  de  l'histoire  grecque  de  curtjus. 


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favorable  de  M.  Alfred  Maury  de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 


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JLE.     Ll  Vl\L     .L/EO     lVlv_yi\  1  O    tion     complète    avec    notes   et 
index,  par  Paul  Pierret,  conservateur  du  Musée  égyptien  du  Louvre.  Un  fort  vo- 
lume in-18  de  65o  pages io    » 


PERIODIQUES 

Literarisches  Centralblatt,  n°  33,  12  août  1882  :  Horst,  Leviticus  XVII- 
XXVI  u.  Hezechiel,  ein  Beitrag  zur  Pentateuch-Kritik .  —  Bickell, 
Carmina  veteris  Testamenti  metrice,  notas  criticas  et  dissertationem  de 
re  metrica  Hebraeorum  adj.  (Welhausen  :  l'auteur  aurait  bien  fait  de  ne 
présenter  au  public  que  quelques-unes  de  ses  remarques;  il  a  tort  de  ti- 
rer les  conséquences  les  plus  extrêmes  et  d'élever  un  système,  qui  doit 
exciter  la  défiance.)  —  Klimke,  Diodorus  Siculus  und  die  rômische  An- 
nalistik.  (Polémique  contre  Mommsen,  âpre  et  mordante:  des  argu- 
ments qui  sont  souvent  d'un  grand  poids).  —  Urlichs,  Die  Schlacht  am 
Berge  Graupius,  eine  epigraphische  Studie.  (Etude  sur  la  situation  mi- 
litaire de  la  Grande-Bretagne  pendant  le  gouvernement  d'AgricoIa;  re- 
dresse et  complète  les  assertions  de  Hûbner  dans  le  «  Hermès  »  sur 
l'armée  romaine  en  Grande-Bretagne.  —  Nopp,  Geschichte  der  Stadt 
Philippsburg  von  ihrem  Entstehen  bis  zum  Anfalle  desselben  an  Ba- 
den  (utile).  — Urkunden  des  Klosters  Kamenz,  hrsg.  v.  Pfotenhauer. 
—  Schwicker,  Die  Deutschen  in  Ungarn  und  Siebenbùrgen.  (Mille  dé- 
tails rassemblés  en  un  vaste  tableau  très  réussi  ;  ouvrage  qui  se  fera  lire 
du  grand  public;  bonnes  indications  des  sources.)  —  Suman,  Die  Slove- 
nen.  (N'est  pas  tout  entier  de  Suman;  Hubad  a  décrit  les  «  mœurs  et 
usages  »  ;  Fasching  a  tracé  une  a  esquisse  historique  des  pays  habités  par 
les  Slovènes  »  ;  Simonie  a  parlé  de  «  la  littérature  Slovène  »,  et  avec  tant 
de  détail  que  cette  partie  sera  la  plus  attachante  pour  le  spécialiste;  cet 
ouvrage  comme  celui  de  Schwicker,  fait  partie  de  la  collection  des 
«  peuples  de  l1  Autriche-Hongrie  »  publiée  par  l'éditeur  de  Teschen,  Pro- 
chaska  ;  malheureusement  toute  cette  collection  n'est  que  fragment  ;  le 
côté  physique  du  peuple,  le  fonds  géographique  n'est  pas  traité.  — 
Reitzenstein,  Die  Armengesetzgebung  Frankreichs  in  den  Grundzûgen 
ihrer  historischen  Entwickelung.  (Le  meilleur  travail  publié  en  Alle- 
magne sur  le  sujet.)  —  Bâcher,  Abraham  ibn  Esra  als  Grammatiker. 
(Travail  très  soigné.) — Pappageorg,  Kritische  und  paiàographische  Bei- 
tràge  zu  den  alten  Sophokles-Scholien.  (Ecrit  fait  avec  soin,  et  sur  le- 
quel on  ne  peut  porter  qu'un  jugement  favorable  ;  l'auteur  devrait 
publier  une  nouvelle  édition  des  scholies  de  Sophocle.)  —  Stati  Epitha- 
lamium  (Silv.  I,  2)  denuo  editum,  adnotavit,  quaestionesque  adiecit 
archaeologicas  Car.  Herzog.  (Travail  qui  témoigne  de  labeur  et  de  ré- 
flexion.) —  Tartara,  Animadversiones  in  locos  nonnullos  Valeri  Ca- 
tulli  et  Titi  Livi.  (N'écrit  pas  sans  application  ni  sagacité,  mais  ne 
connaît  pas  la  littérature  du  sujet,  ne  sait  pas  distinguer  et  séparer  les 
arguments  importants  des  preuves  insignifiantes.)  —  Straub,  Le  cime- 
tière gallo-romain  de  Strasbourg.  (Edité  avec  beaucoup  de  luxe  et  de 
goût  ;  l'époque  à  laquelle  appartient  le  cimetière,  serait  la  fin  du  111e  et 
le  commencement  du  ive  siècle.)  —  Birt,  Das  antike  Buchwesen  in  sei- 
nem  Verhàltniss  zur  Literatur,  mit  Beitragen  zur  Textgeschichte  des 
Theocrit,  Catull,  Properz  u.  a.  Autoren.  (Long  art.  sur  cet  ouvrage 
qui  doit  être  recommandé  à  l'étude  de  tous  les  philologues  ;  recherches 
vastes  et  menées  avec  autant  d'érudition  que  de  pénétration  ;  des  résul- 
tats importants  et  inattaquables  qui  jettent  une  nouvelle  lumière  sur 
le  format,  l'étendue  et  la  publication  des  livres  et  qui  montrent  com- 
bien la  littérature  antique  fut  influencée  par  le  livre.)  —  Mûller  (So- 
phus),  Die  Tier-Ornamentik  im  Norden,  ûbers.  v.  Mestorf. 

Deutsche  Litteraturzeitung,  n°  32,  12  août  1882  :  Opéra  patrum  aposto- 
licorum,  p.  p.  Funk.  I.  Epistulae  Barnabae,  Clementis  Romani,  Ignatii, 
Polycarpi,  anonymi  ad  Diognetum,  Ignatii  et  Polycarpi  martyria, 
Pastor  Hermae;  II.  Clementis  rom.  epistulae  de  virginitate  ejus- 
demque   martyrium  7  epistulae   Pseudoignatii,   Ignatii    martyria  tria, 


Vaticanum  a  St.   Metaphraste  conscriptum    Papiae  et  seniorum  apud 
Irenaeum  fragmenta,   Polycarpi  Vita.  (Lipsius.)  —  Kant's  critique  of 
pure  reason  translatée!  in  english  by  Max  Mûller,  with  an   introd.  by 
Noire.  (Vaihinger  :  a  cette  traduction  est  une  grande  action  de  notre  cé- 
lèbre compatriote»)))  —  Çâçvata's  Anekârthasamuccaya,  ein  homonym. 
Sanskrit-Wôrterbuch,  hrsg.  v.  Zachariae.    (Weber    :  bonne  publica- 
tion )  —  Cornuti  theologiae  graecae  compendium,  rec.  Car.  Lang  (Sten- 
der  :  texte  non  encore  établi  d'une  façon  définitive,  mais  on  se  rappro- 
che du  but.)  —  J.  Macci  Plauti  Menaechmi,  p.  p.  Vahlen.  (Sevffert  :) 
—  Minor,  Die  Leiche  und  Lieder  des  Schenken  Ulrich  von  Winterstet- 
ten.  (Wilmanns  :    le  besoin  de  cette  nouvelle  édition  ne  se  faisait  pas 
sentir;  changements  de  peu  d'importance  ou  non  justifiés  ;  trop  de  po- 
lémique contre  von  der  Hagen  ;  remarques  de  valeur  dans  l'introduc- 
tion.) —  Lûbben,  Mittelniederdeutsche  Grammatik  nebst  Chrestomathie 
und  Glossar.  (Strauch  :  sera  sûrement  très  utile).  —  Gcethe's  Reinecke 
Fuchs  nach  dem  ersten  Druck,  p.  p.  Bieling.  (Sauer  :  sera  le  bienvenu 
auprès  des  maîtres  et  des  élèves.)  —  Schaefer,  Geschichte  der  deutschen 
Literatur  des  XVIII.  Jahrhunderts,  2e  Aufl.  p.  p.   Muncker.  (Minor  : 
nouvelle  édition,  peu  remaniée  du  reste.) —  Brill,  Schets  der  geschiede- 
nis  van  het  israelitische  Volk.  (Wellhausen  :  ouvrage,  en  hollandais, 
sur  l'histoire  d'Israël;  l'auteur  est  tout  à  fait  incompétent;  «  unberu- 
fen  »).  —  Anemûller,  Geschichte  der  Verfassung  Mailands  in  den  Jah- 
ren  1095-1117,  nebst  einem  Anhange  tiber  das  Consulat  zu  Cremona; 
—  Journal  d'une  bourgeoise  pendant  la  Révolution,  1791-1793,  publié 
par  son  petit-fils  Edouard  Lockroy.  (Koser  :  «  un  compendium  de  l'his- 
toire de  la  Révolution  sous  une  forme  très  attachante  ».)  —  Gardiner  a. 
Bass  Mullinger,  Introduction  to  the  study  of  english  history.  (Pauli  : 
le  travail  de  Gardiner  est  un  modèle,  et  représente  dans  une  langue  con- 
cise et  frappante  les  causes  et  les  effets,  les  forces  qui  se  sont  unies  pour 
le  développement  national  de  l'Angleterre;  le  travail  de  Mullinger  inti- 
tulé «  Authorities  »  n'est  pas  à  la  même  hauteur;  manque  d'exactitude  sur- 
tout dans  l'indication  des  sources  du  moyen-àge.)  —  Szujski,  Die  Polen 
und  Ruthenen  in  Galizien.  (Tomaschek  :  fait  bien  connaître  la  situation 
en  Galicie  et  fournit  d'abondants  matériaux,  d'ailleurs  mis  en  œuvre  avec 
talent).  —  Rechtslexikon,  Encyclopâdie  der  Rechtswissenschaft  in  al- 
phabetischer  Bearbeitung,  hrsg.  unter  Mitwirkung  vieler  Rechtsgelehr- 
ter  v.  Fr.  v.  Holtzendorff,  3e  Auflage.  —  Feldzûge  des  Prinzen  Eugen 
von  Savoyen,  nach  den  Feldakten  und  anderen  authentischen  Quellen 
hrsg.  v.  der  Abtheilung  fur  Krieeseeschichte  des  k.  k.  Kriegs-archivs. 
Vols.  I-VIII. 

Gœttingische  gelehrte  Anzeigen,  n°  32  :  Karl  Kôrner,  Einleitung  in  das 
Studium  des  angelsàchsischen,  11e  Theil;  angelsàchsische  Texte,  mit 
Uebersetzungen,  Anmerkungen  u.  Glossar.  (Sievers  :  fournit  au  lecteur 
déjà  armé  de  l'esprit  critique,  plus  d'une  information  remarquable, 
mais  ne  peut  être  recommandé  au  commençant.)  —  Boltz,  Die  helle- 
nischeoder  neugriechische  Sprache.  (Hatzidakis  :  «  écrit  avec  un  grand 
amour  du  sujet,  contribuera  à  augmenter  en  Allemagne  l'intérêt  pour 
les  Hellènes  et  pour  la  connaissance  de  leur  langue,  puisse  l'auteur 
continuer  ses  études  beaucoup  d'années  encore  avec  le  même  amour, 
afin  de  produire  des  fruits  plus  abondants  et  plus  mûrs  ».) 

Nos  33  et  34,  16  et  23  août  1882  :  Dittrich,  Regesten  und  Briefe  des 
Cardinals  Gaspero  Contarini,  1483- 1542  (v.  Druffel).  —  Die  Leiche 
und  Lieder  des  Schenken  Ulrich  von  Winterstetten  hrsg.  v.  Minor. 
Wien,  Konegen  (Bartsch  :  fait  quelques  critiques).  —  Spiegel,  Ver- 
gleichende  Grammatik  der  alteranischen  Sprachen  (Justi  :  comme  tou- 


jours,  recherches  profondes  et  méthode  réfléchie;  ordonnance  pleine  de 
clarté).  —  Johann  Faust,  ein  allegor.  Drama,  p.  p.  Engel  (Godeke). 

Athenaeum  belge,  n°  16,  i5  août  1882  :  Pirenne,  Sedulius  de  Liège 
(Bormans  :  bon  travail,  cp.  Revue  critique,  n°  3i).  —  Spiegel,  Verglei- 
chende  Grammatik  der  alteranischen  Sprachen  (De  Harlez  :  sera  bien- 
venu de  quiconque  s'occupe  de  linguistique  et  de  grammaire  comparée  ; 
c'est  plutôt  une  grammaire  comparée  des  anciennes  langues  eraniennes 
et  du  sanscrit  ;..  parfaite  courtoisie  dans  la  polémique  ;..  l'auteur  prouve 
que  PAvesta  n'est  pas  très  ancien  et  qu'il  appartient  au  nord-ouest  de 
l'Eran,  et  non  à  la  Bactriane  ;  il  renonce  au  terme  vieux  bactrien  pour 
désigner  le  zend,  et  s'arrête,  comme  De  Harlez,  au  mot  «  avestique  ») . 
—  Morley,  The  life  of  Richard  Cobden  (Carlier:  œuvre  creusant  le  su- 
jet jusqu'à  l'épuiser  ;  il  y  a  peu  d'écrits  qui  aient  atteint  dans  ces  derniè- 
res années  cette  ampleur  de  pensée  et  d'exposition  vraiment  magistrale; 
il  n'a  guère  paru  de  biographie  meilleure  que  celle-ci  depuis  la  classique 
biographie  de  Johnson  par  Boswell,  mais  le  style  de  M.  Morley  est  au- 
trement littéraire  et  élevé  que  celui  de  Boswell).  —  Fouilles  de  M.  Schlie- 
mann  à  Troie. 


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LE  ROYAUME  DU  CAMBODGE  TrLns0Z: 

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ANTONII    POSSEVINI    MISSIO    MOS- 

^^NTTTrpTi^  i  ex  annuis  litteris  Societatis  Jesu  excerpta  et  adnotatio- 
V-'V^y  V  J  1  Iv^/V.  nibus  illustrata  curante  Paulo  Pierling,  S.  J.  In-18, 
elzévir .    .    .    2  5o 

Cet  ouvrage  forme  le  tome  IV  de  la  Bibliothèque  slave  el\évirienne . 


HISTOIRE   GÉNÉRALE 


DE    LA 


LITTÉRATURE  DU  MOIN  AGE  EN  OCCIDENT 

Par    A.    EBERT 

Traduite  de  l'allemand,  par  MM.  Joseph  Aymeric  et  James  Condamin. 

3  forts  volumes  in-8 3o    » 

La  première  livraison  à  t  fr.  2  5  est  en  vente. 


Le  Puy,  imprimerie  Marchessoufils,  boulevard  Saint-Laurent,  23 


N°  38  Seizième  année    18  Septembre  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIE    SOUS    LA    DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 
Un    an ,   Paris,   20   fr.  —    Départements,    22    fr.    —    Etranger,    25  fr. 


PARIS 


ERNEST    LEROUX,    EDITEUR 

LIBRAIRE     DE     LA      SOCIETE     ASIATIQUE 

ofc    l'école    des    langues    orientales    vivantes      etc 
28,    RUE    BONAPARTE,    28 


Adresser  le"  communications  concernant  la  rédaction  «  M.  A.  Chuquet 
(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


HISTOIRE  DE  L'HELLÉNISME  Z*£^2 

eais  sous  la  direction  de  M.  A.  Bouché-Leclercq.  3  forts  volumes  in-8°.     .     3o    » 

Tome  I.  Histoire  d'Alexandre-le-Grand. 

Tomes  II  et  III.  Les  successeurs  d'Alexandre. 

L'ouvrage    paraît    en    3o  fascicules   à    1    fr.    25. 

Le  fascicule  I  vient  de  paraître. 

L'HISTOIRE      DE     L^ELLENISME      DE     J.-G.     DROYSEN     FORME     LA      SUITE     ET    LE 
COMPLÉMENT   DE  L1HISTOIRE  GRECQUE  DE  CURTIUS. 


LES  MOUVEMENTS  DU  SOL  su^ÏVu~ 

France   et    particulièrement    dans     le    golfe     normanno- breton,    par    Alexandre 
Chévremont.  Un  beau  volume  gr.  in-8°,  illustré  de  14  planches  en  couleur.     i5     » 
Ouvrage  honoré    d'une  récompense   par  l'Académie  des  Sciences  et  d'un  rapport 
favorable  de  M.  Alfred  Maury  de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 


TF     T  TVR  F     HF^     MORT's    dCS  anciens  Égyptiens.  Traduc- 
*-<J-»     L.1  V  1\E     LJLLO     lyxKJ X\  1  »J    tion    complète    avec    notes    et 
index,  par  Paul  Pierret,  conservateur  du  Musée  égyptien  du  Louvre.  Un  fort  vo- 
lume in- 18  de  65o  pages 10    n 


PÉRIODIQUES 

The  Academy,  ne  537,  l9  a°ût  1882  :  Allaroyce,  Mernoir  of  G.  Keith 
Elphinstone,  Viscount  Keith  a.  admirai  of  the  red.  (H.  M.  Stephens  : 
très  intéressant.)  —  Cotterill,  An  introduction  to  the  study  of  poetry. 
(Morshead  :  l'auteur  craint  que  ces  études  ne  paraissent  au  lecteur 
«  crude,  superfkial  and  incohérent  »  ;  elles  ne  sont  ni  «  crude  »  ni  «  su- 
perficial  »,  mais  elles  sont  «  incohérent  »,  «  ill-compacted  and  hard  to 
lollow  ».)  —  Leland,  The  Gypsies.  (Groome  :  quelques  chapitres  d'une 
valeur  réelle;  quelques  autres  ne  reproduisant  que  ce  qu'on  sait  depuis 
longtemps,  en  somme,  livre  «  always  delightful  reading  ».)  —  Holland, 
Logic  and  life  with  other  sermons.  —  Lyte,  Dunster  and  its  lords, 
1066-1881. —  Ang.de  Gubernatis,  La  mythologie  des  plantes  ou  les 
légendes  du  règne  végétal.  (Friend  :  le  tome  Ier  a  paru  en  1878,  le  tome 
second  vient  de  paraître;  sujet  charmant  et  important  très  bien  traité; 
si  l'on  ne  peut  accepter  toutes  les  théories  de  l'auteur,  on  fera  néanmoins 
dans  son  livre  une  riche  moisson.)  —  The  Trieste  Exhibition.  (Bur- 
ton.)  —  The  etymology  of  Dionysos.  (R  Brown.)  —  Early  italian  cas- 
ting  (Westmacott).  —  Some  récent  linguistic  works.  (Keane  :  parle, 
entre  autres  ouvrages,  de  celui  de  v.  d.  Gabelentz  et  A.  B.  Meyer 
«  Beitràge  zur  Kenntniss  der  melanesischen,  mikronesischen  undpapua- 
nischen  Sprachen.)  —  Clarke,  Report  of  the  investigations  at  Assos 
1881.  (Murray).  —  Latest  news  of  Prof.  Maspero.  (Am.  B.  Edwards  : 
donne  la  traduction  d'une  lettre  de  M.  Rhoné  ;  M.  Maspero  a  quitté 
Boulaq,  sur  l'ordre  du  Ministre  des  Travaux  publics,  en  confiant  le 
musée  au  vieux  et  fidèle  Circassien  Kourschid-Effendi,  que  Mariette 
estimait  spécialement  pour  son  énergie  et  sa  droiture;  au  moment  où 
paraîtront  ces  lignes,  M.  Maspero  sera  depuis  longtemps  à  Paris.)  — 
Terrien  de  la  Couperie,  The  silver  coinage  of  Tibet.  (Yule.)  —  Disco- 
very  of  buddhist  relies  at  Bassein,  near  Bombay. 

The  Athenaeum,  n°  2860,  19  août  1882  :  The  british  association  for  the 
advancement  of  science  at  Southampton.  —  Willis-Bund,  A  sélection 
of  cases  from  the  state  trials.  —  Hughes,  Memoir  of  Daniel  Macmillan. 

—  Demofilo,  Coleccion  de  contes  flamencos.  Séville.  —  Pinches,  Texts 
in  the  babylonian  wedge-criting.  («  When  we  say  thaf  Mr.  Pinches  is 
the  author  of  the  work,  its  value  will  be  recognised  by  ail  assyrian 
scholars  ;  his  àccuracy  of  eye  in  reading  a  cuneiform  text  is  unequalled  »). 

—  Œuvres  inédites  de  Bossuet ,  cours  royal  complet  sur  Juvenal, 
vol.  I.  Découvertes  et  publiées  par  A.  L.  Ménard.  (La  préface  est  écrite 
sur  un  ton  enthousiaste  et  passionné;...  il  est  faux  que  Bossuet  ait  été 
précepteur  du  dauphin  en  1684,  date  du  manuscrit  que  publie  l'éditeur; 
il  avait  cessé  quelques  années  auparavant  son  enseignement  ;  après  «  a 
blunder  of  such  magnitude  »  on  peut  croire  que  l'œuvre  n'est  pas  de 
Bossuet  et  que  M.  Ménard  n'a  aucune  idée  de  l'évidence  littéraire.  Lors 
même  que  l'œuvre  appartiendrait  à  Bossuet,  elle  n'ajouterait  rien  à  sa 
gloire;  c'est  un  «  rambling,  most  unscholarlike  commentary  on  Juve- 
nal »,  et  non  une  «  admirable  interprétation  »  ;  on  est  surpris  de  voir 
des  éditeurs  comme  MM.  Didot  publier  quelque  chose  d'aussi  «  bad, 
inaccurate  and  valueless  ».)  —  Ireland,  Ralph  Waldo  Emerson.  (Ce 
qu'il  y  a  de  plus  intéressant  dans  ce  vol.,  c'est  la  correspondance  avec 
Carlyle;  on  y  remarquera  une  lettre  de  1864,  qui  renferme  un  passage 
curieux  sur  la  guerre  civile.)  —  Me  Crindle,  Ancient  India  as  descri- 
bed  by  Ktesias  the  Knidian,  reprinted  with  additions,  from  the  «  Indian 
Antiquary  ».  —  Theological  books.  (Marshall,  The  latin  prayer  book 
of  Charles  II,  or  an  account  of  the  liturgia  of  Dean  Durel  ;  Mathews, 
Commentary  on  Ezra  and  Nehemiah,  etc.)  —  Historical  and  antiqua- 
rian  publications.  —  The  hall  of  Pembroke  Collège,  Cambridge.  (J. 


W.  Clark.)  —  Caxton's  «  Four  sons  of  Aymon  »  (Blades).  —  The 
Quarterly  Review  on  Swift.  —  Not.  nécrol.  sur  M.  Stanley  Jevons.  — 
VilliersS-ruART,  The  funeral  tentof  an  egyptian  queen.  —  J.  B.  Giraud, 
Les  arts  du  métal,  recueil  descriptif  et  raisonné  des  principaux  objets 
ayant  figuré  à  l'exposition  de  1880  de  l'Union  centrale  des  beaux-arts. 

Deutsche  Litteraturzeitung,  n°  38,  19  août  1882  :  Bredenkamp,  Gesetz  und 
Propheten.  (ftowack  :  instructif.)—  Ludw.  Keller,  Die  Gegenreforma- 
tion  in  Westfalen  und  am  Niederrhein,  I.  1  5 55- 1 585 -  (Kolde.) —  Max 
Mûller,  Essays.  II  Band.  Beitrâge  zur  vergleichenden  Mythologie  und 
Ethologie,  mit  ausfûhrichem  Regisrer  zum  I  u.  II  Band,  28  vermehrte 
Auflage  besorgt  v.  O.  Francke.  —  Hôhne,  Kants  Pelagianismus  u.  No- 
mismus.  (Pfleiderer.)  — G.  A.  Mûller,  Geschichte  des  Friedrichs-Wer- 
derschen  Gymnasiums  zu  Berlin.  (E.  Fischer  :  important  pour  l'his- 
toire de  Berlin  et  pour  celle  de  l'instruction  publique  et  de  l'érudition 
en  Prusse.)  —  L.  Ewald,  Grammatik  der  thai-oder  siamesischen  Spra- 
che.  (Schott  :  travail  très  méritoire.)  —  Hesychii  Milesii  Onomatologi 
quae  supersunt  cum  prolegomenis éd.  j.  Flach  (Gropius  :  au  moins,  on 
a  là  réunis  des  matériaux  qui  seront  utiles  à  consulter.)  —  Werner, 
Lessings  Emilia  Galotti  (L.  Hirzel  :  du  savoir  et  de  la  sagacité).  —  C. 
Bayer,  Deutsche  Poetik,  theoretisch-praktisches  Handbuch  der  deut- 
schen  Dichtkunst.  (Seemûller  :  beaucoup  d'amour  du  sujet,  beaucoup  de 
soin  et  de  patience,  grand  zèle  de  compilation,  mais  il  manque  à  cet  ou- 
vrage le  caractère  scientifique,  la  méthode  historique.)  —  Baumgarten, 
Vor  der  Bartholomàusnacht.  (Kluckhohn  :  le  sujet  méritait  d'être  sou- 
mis de  nouveau  à  un  examen  critique  approfondi;  Baumgarten  a  ac- 
compli cette  tâche  avec  le  soin  et  la  pénétration  qui  lui  sont  propres,  et 
il  a  pris  un  chemin  qui  seul  pouvait  le  mener  à  une  solution  certaine  de 
Ténigme  tant  discutée;  les  nouveaux  documents  qu'il  a  consultés  lui  ont 
servi  à  prouver  par  une  démonstration  aussi  claire  qu'exacte  et  qui  est 
un  véritable  modèle,  qu'il  ne  peut  plus  être  sérieusement  question  d'une 
longue  préméditation  de  la  Saint-Barthélémy;  en  même  temps  de  nou- 
velles et  surprenantes  lumières  sur  la  politique  de  l'époque,  etc.)  — 
Rott,  Henri  IV,  les  Suisses  et  la  Haute-Italie  («sehr  fleissig,  aber  nicht 
sehr  geschickt.  »;  beaucoup  de  remarques  précieuses,  mais  les  détails 
importants  ne  sont  pas  assez  mis  en  relief  et  disparaissent  au  milieu  des 
détails  insignifiants.)  —  Rott,  Méry  de  Vie  et  Padavino  (Schirren  :  ren- 
ferme deux  essais,  l'un  «  les  anciennes  alliances  franco-suisses  et  le  re- 
nouvellement de  1602  />,  l'autre,  «  Venise  et  les  ligues  grises,  l'alliance 
de  Davos  »);  l'auteur  a  su  mettre  en  pleine  lumière  d'une  façon  excel- 
lente les  deux  traités  de  Soleure  et  de  Davos  qui  marquent  la  première 
phase  de  la  lutte  pour  les  Alpes  à  la  veille  de  la  guerre  de  Trente  Ans.) 
—  Dielitz,  Die  Wahl-und  Denksprûche,  Feldgeschreie,  Losungen, 
Schlacht-und  Volksrufe  besonders  des  Mittelalters  und  der  Neuzeit  ge- 
sammelt,  alphabetisch  geordnet  und  erlautert.  (Commencement  d'une 
publication  très  intéressante  et  plus  complète  que  les  publications  anté- 
rieures sur  la  même  matière.) —  J.  E.  Thorold  Rogers,  A  history  of 
agriculture  and  priées  in  England  from  the  year  after  the  Oxford  Par- 
liament  (i25g)  to  the  commencement  of  the  continental  war  (1793) 
compiled  entirely  from  original  and  contemporaneous  records.  III  a. 
IV.  1401:1582.  (Inama  :  suite  de  cette  œuvre  monumentale  sur  l'his- 
toire économique  de  l'Angleterre.) 

Zeitschrift  fur  deutsches  Altertum  und  deutsche  Litteratur.  1882.  Ier  fascicule  : 
Lichtenstein,  Zu  den  deutschen  Dichtungen  von  Tristan  und  Isolde  : 
1.  Anticritische  Bemerkungen  zum  Texte  von  Eilharts  Tristrant  ;  2. 
Das  Fiechter  Bruchstûck  von  Eilharts  Tristrant;  3.  Eilhart  und  Vel- 
deke  4.  Nachtragliche  Bemerkung  zum  Prosaroman  von  Tristrant  und 


Isalde;  et  Zum  Volksschauspiel  von^  Doctor  Faust.  —  Schônbach, 
Sanct  Christophorus.  —  Bickel,  Schwa'zer  Bruchstûck  der  Kaiserchro- 
nik.  —  Hôfer,  Quellennachweise  zu  Wernher  von  Elmendorf.  — 
ZARncke,  Zu  der  rhythmischen  Version  der  Légende  von  Placidas  Eus- 
thatius.  —  Zingerle,  Himelstele.  —  Baechtold,  zu  Niklaus  Manuel. 
Anzeiger  :  Weinhold,  Lamprecht  von  Regensburg,  sanct  Francisken 
Leben  u.  Tochter  »Syon.  (Strauch  :  très  bonne  publication.)  —  Fabre 
d'Envieu,  Le  dictionnaire  allemand  enseigné  par  l'analyse  étymologi- 
que des  noms  propres  individuels,  familiaux,  ethniques  et  géographi- 
ques et  par  l'explication  de  quelques  noms  franco-tudesques.  (Feit  : 
on  ne  peut  mettre  dans  ce  livre  la  pointe  d'une  aiguille  sans  y  tomber 
sur  des  passages  qui  prouvent  la  complète  incompétence  de  l'auteur.) — 
Niedner,  Das  deutsche  Turnier  im  XII.  u.  XIII.  Jahrhundert.  (Lichten- 
stein  :  très  instructif,  fort  bon  coup  d'essai.)  —  Linde  (v.  d.),  Quellen- 
studien  zur  Geschichte  des  Schachspiels.  (Rottmanner  :  livre  excellent  et 
qui  ne  peut  trouver  un  juge  compétent,  car  personne  ne  possède  une 
connaissance  aussi  profonde  du  développement  historique  du  jeu  d'é- 
chec et  de  ses  règles,  que  l'auteur  llui-même.) —  Kawcynzski,  Studien  zur 
Literaturgeschichte  des  XVIII.  Jahrhunderts,  (Très  long  art.  d'Alois 
Brandi  sur  un  livre  qu'on  ne  lira  pas  sans  profit  ni  sans  instruction,  mais 
qui  a  besoin  de  nombreux  correctifs.)  —  Homers  Odyssée  von  J.  H. 
Voss,  Abdruck  der  ersten  Ausgabe  von  1781  mit  Einl.  v.  Berna ys.  (Er. 
Schmidt  :  édition  faite  avec  le  soin  habituel  de  l'éditeur  et  précédée  très 
heureusement  d'une  longue  introduction  pleine  d'informations  et  de  dé- 
tails intéressants.) 

2e  fascicule  :  Baumgarten,  Die  Chronologie  der  Gedichte  Friedrichs 
von  Hausen.  —  Stosch,  Nachtrâgliches  ûber  Wolframs  Titurellieder. 
—  Werner,  Eine  Parallèle  zu  Schillers  Handschuh  et  Pesther  Fragment 
des  Wàlschen  Gastes.  —  Bickel,  Schwazer  Parcival-fragment.  —  Pirig, 
Zwei  Blâtter  einer  Handschrift  des  Rennewart.  —  Keinz,  Ein  neues 
Fragment  der  Wessobrunner  Predigten.  —  Henning  u.  Hoffory,  Zur 
Textkritik  der  Islendingabok.  —  Hirzel,  Romantisch.  —  Brahm,  Eine 
Episode  in  Gœthes  Wahlverwandtschaften.  —  Seiler,  Noch  einmal  der 
Rhytmus  von  Placidas.  —  Eustathius.  —  Schroder,  Reimpredigt. 

Anzeiger  :  Schultz,  Hôfisches  Leben  zur  Zeit  der  Minnesinger,  vol. 
II.  (Lichtenstein  :  matériaux  abondants,  rassemblés  sur  un  sujet  peu 
traité  jusqu'ici;  des  points  de  vue  nouveaux;  quelques  endroits  faibles, 
mais  aussi  beaucoup  de  recherches  pleines  de  soin;  en'somme,  livre  très 
instructif  et  très  suggestif.)  —  Horstmann,  Altenglische  Legenden,  neue 
Folge,  mit  Einleit.  u.  Anmerk.  hrsg.  (Schroder  :  peu  de  sciences  peu- 
vent se  glorifier  d'un  aussi  robuste  et  persévérant  travailleur  que  l'est 
Horstmann  pour  la  philologie  anglaise.)  —  Jacob  van  Maerlants  stro- 
phische  gedichten  p.  p.  Verwijs.  24-26  Liefer.  der  Bibliotheek  van  mid- 
delnederlandsche  letterkunde.  (Franck)  —  Herbst,  Gœthe  in  Wetzlar. 
(Minor  :  bon  travail  qui  se  recommande  à  tous  par  le  ton  calme  et  vrai- 
ment historique  du  récit  et  par  l'élégance  de  la  forme;  sujet  difficile  et 
délicat  traité  avec  grande  habileté.)  —  Nachtrag  ûber  die  Mannheimer 
Gesellschaft.  (SeufTert.)  —  Kilian  Brustfleck.  (E.  Schmidt.)  —  Egerer 
Fronleichnamsspiel,  p.  p.  Milchsack.  (Schônbach.) 


Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23. 


N°  39  Seizième  année    25  Septembre  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ    SOUS    LA    DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction   :  M.  A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 

Un    an,   Paris,   20   fr.  —    Départements,    22   n\    —    Etranger,    zb  ir. 


PARIS 


ERNEST    LEROUX,    EDITEUR 

libraire    de    la    societe    asiatique 

de    l'école    des    langues   orientales    vivantes      etc. 

28,    RUE    BONAPARTE,     28 


Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  EDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


HISTOIRE  DE  L'HELLÉNISME  ZLZTZ'- 

çais  sous  la  direction  de  M.  A.  Bouché-Leclercq.  3  forts  volumes  in-8°.     .     3o    » 

Tome  I.  Histoire  d'Alexandre- le-Grand. 

Tomes  II  et  III.  Les  successeurs  d'Alexandre. 

L'ouvrage    paraît    en    3o   fascicules   à    1    fr.    25. 

Le  fascicule  1  vient  de  paraître. 

l'histoire    de  l'hellénisme    de  j.-g.   droysen  forme   la    suite  et  le 

complément  de  l'histoire  grecque  de  curtjus. 


LES  MOUVEMENTS  DU  SOL  TilSSVT 

France   et     particulièrement    dans     le    golfe     normanno- breton,    par    Alexandre 
Chévremont.  Un  beau  volume  gr.  in-8°,  illustré  de  14  planches  en  couleur.     i5     » 
Ouvrage   honoré    d'une   récompense    par  l'Académie  des   Sciences   et  d'un  rapport 
favorable  de  M.  Alfred  Maury  de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 


T  C     T  TVP  P     HPÇ.     AAHRTQ    des  anciens  Egyptiens.  Traduc- 
l-J--     JLlVlVE     JL/.CO     1V1v_/I\  1  O    tion     complète    avec    notes    et 
index)  par  Paul  Pierret,  conservateur  du  Musée  égyptien  du  Louvre.  Un  fort  vo- 
lume in-18  de  65o  pages < 10    » 


PÉRIODIQUES 

The  Athenaeum,  n°  2861,  26  août  1882  :  Mallock,  Social  equality,  a 
study  in  a  missing  science.  —  Freeman,  The  reign  of  William  Rufus 
and  the  accession  of  Henry  I.  (On  retrouve  ici  «  ail  the  wealth  of  détail, 
ail  the  vividness  of  narrative,  ail  the  fullness  of  local  and  personal 
knowledge  »,  qui  marquent  l'histoire  de  la  conquête  normande,  du 
même  auteur).  —  Stack,  Six  months  in  Persia.  —  Panton,  Country 
sketches  in  black  and  white.  —  Anderson,  History  of  shorthand,  with 
a  review  of  its  présent  condition  and  prospects  in  Europa  and  America 
(ouvrage  sur  la  sténographie,  contribution  importante  à  la  littérature 
du  sujet).  —  Me.  Theal,  Kaffir  Folklore,  or  a  sélection  from  the  tradi- 
tional  taies  current  among  the  people  living  on  the  eastern  border  of 
the  Cape  Golony.  (Livre  à  recommander  aux  amis  du  folklore.)  — 
Allardyce,  Memoir  of  G.  K.  Elphinstone,  Viscount  Keith,  admirai  of 
the  Red.  (A  mettre,  aussi  bien  que  la  vie  de  Nelson,  de  Southey, 
entre  les  mains  des  cadets  à  bord  du  Britannia,  à  Darmouth).  —  The 
archaeological   societies.  —  Caxton^  «   four  sons  of  Aymon.  »  (Lee). 

—  Shakspeare  in  Greece.  (Lambros.)  —  British  archaeological  associa- 
tion. 

N°  2862,  2  septembre  1882  :  Sala,  America  revisited.  —  The  history 
and  antiquities  of  Colchester  Castle.  —  Ihne,  The  history  of  Rome, 
english  édition,  vols.  IV  a.  V.  (Ces  deux  volumes  de  Ihne  terminent 
l'histoire  de  la  république  romaine  ;  mêmes  mérites  que  dans  les  volu- 
mes précédents;  grande  connaissance  du  sujet;  mais  excuse  tropSylla  et 
suspecte  trop  Salluste).  —  Salaman,  Jews  asthey  are.  —  Davidson,  Ros- 
mini's  philosophicai  System.  —  Ottoman  poems,  translated  into  english 
verse  in  the  original  forms,  with  introduction,  biographical  notices  and 
notes  by  Gibb.  —  Chap-books  of  the  eighteenth  Century  ;  with  fac-simi- 
lés, notes  a.  introd.  by  Aston.  —  Diocesan  historiés.  —  Parsons  and 
playwrights  before  the  commonwealth.  (Bullen.)  —  The  Preston  guild 
merchant.  —  The  Sunderland  library.  —  Baber,  Travels  and  researches 
in  Western  China,  printed  for  the  royal  geographical  society.  — 
Ephrussi,  Albert  Durer  et  ses  dessins.  (Travail  digne  de  son  sujet.)  — 
British  archaeological  association. 

N°  2863,  9  septembre  1882  :  C.  G.  Walpole,  A  short  history  of  the 
Kingdom  of  Ireland  from  the  earliest  times  to  the  Union.  («  As  a  fait* 
and  readable  popular  history  of  Ireland  this  work  is  a  most  useful  and 
timely  contribution  ;  it  is  not,  what  indeed  it  does  not  attempt  nor  pré- 
tend to  be,  an  explanation  of  how  and  why  the  facts  it  relates  came 
about,  nor  a  picturesque  description  of  bygone  men   and  manners  »). 

—  Encyclopaedia  britannica,  vol.  XIV.  (Suite  de  cette  excellente  publi- 
cation; beaucoup  d'art,  intéressants,  entre  autres  ceux  de  Swinburne 
sur  Keats  et  Landor,  de  Sidney  Colvin  sur  Léonard  de  Vinci,  de  Kegan 
Paul  sur  Kingsley,  de  James  Sully  sur  Lewes,  de  Saintsbury  sur  La  Fon- 
taine et  Xesage,  de  Fraser  sur  Locke,  de  Sime  sur  Lessing,  de  Garnett 
sur  Leopardi,  etc.).  —  Réminiscences  of  an  old  Bohemian  —  The  na- 
mes  of  herbes,  by  William  Turner,  a.  d.  1548,  edited  by  James  Brit- 
ten. —  The  sacred  booksofthe  east  :  VIII.  The  Bhagavadgita,  with 
the  Sanatsugatiya  and  the  Anugita,  translated  by  Kashinath  Trimbak 
Telang;  XII.  The  Satapatha  Brahmana  according  to  the  text  of  the 
Madhyandina  school,  translated  by  Eggeling.  I.  —  Mary-Lafon,  Cin- 
quante ans  de  vie  littéraire.  (Ce  livre  est  intéressant  ;  ce  qui  lui  fait  tort 
et  ce  qui  le  gâte,  c'est  la  tendance  constante  de  l'auteur  à  mettre  en 
avant  sa  personnalité  et  ses  mérites;  comme  livre  à  feuilleter,  «  it  has 
considérable  attraction  »  à  cause  des  anecdotes  qui  remplissent  le  vo- 


lume,  mais  qu'il  faut  accepter  avec  quelque  réserve.)  —  A  library  of  the 
fathers;  5.  Cyril  :  five  tomes  against  Nestorius,  Scholia  on  the  Incarna- 
tion, Christ  is  one,  Fragments  against  Diodore  of  Tarsus,  Théodore  of 
Mopsuestia,  the  Synousiasts  ;  Bright,  Notes  on  the  canons  of  the  fîrst 
four  gênerai  concils  ;  Dale,  The  synod  of  Elvira  and  Christian  life  in 
the  fourth  century;  Gwatkin,  Studies  of  arianism,  chiefly  referring  to 
the  charakter  and  chronology  of  the  reaction  which  followed  the  council 
of  Nicaea.  —  The  flfth  annual  meeting  of  the  library  association.  (Ter- 
rien de  Lacouperie).  —  Tuer,  Bartolozzi  and  his  works.  —  Presuhn, 
Pompeii,  die  neuesten  Ausgrabungen  von  1874  bis  1881  fur  Kunst-und 
Alterthumsfreunde.  — The  Worcester  Exhibition. 

Literarisches  Centralblatt,  n°  34,  19  août  1882  :  Libri  Danielis,  Ezrae 
et  Nehemiae,  textum  masoreticum  p.  Baer.  —  Kûbel,  Ueber  den  Un- 
terschied  zwischen  der  positiven  u.  der  liberalen  Richtung  in  der  mo- 
dernen  Théologie.  —  Rickenbach,  Die  Insel  Sardinien  vor  der  Herr- 
schaft  der  Rômer  (Compte-rendu  de  l'ouvrage  de  M.  Pais  «  La  Sardegna 
prima  del  dominio  romano  »).  —  Muller  (P.  L.),  Regesta  Hannonen- 
sia,  lijst  van  oorkonden  betreffende  Holland  en  Zeeland  1299-1345.  — 
Alfr.  Leroux,  Recherches  critiques  sur  les  relations  politiques  de  la 
France  avec  l'Allemagne  de  1292  à  1378  (Vaste  et  fort  bon  travail;  on 
regrettera  que  l'auteur  n'ait  pas  consulté  tous  les  travaux  allemands  sur 
le  sujet).  —  Kopp,  Geschichte  der  eidgenôssischen  Bûnde.  V.  2.  Ludwig 
der  Baier  u.  seine  Zeit  i33o-i336,  I.  i33o-i334.  bearb.  v.  Lûtolf, 
hrsg.  v.  Rohrer.  —  Naeher,  Land  und  Leute  in  der  brasilianischen 
Provinz  Bahia.  —  Trûbner's  catalogue  of  dictionaries  and  grammars  ; 
of  oriental  a.  linguistic  publications.  —  Pertsch  ,  Die  arabischen 
Handschriften  zu  Gotha,  III,  2.  —  Kreysstg,  literarische  Studien  und 
Charakteristiken,  nachgelassenes  Werk,  p.  p.  J.  Rodenberg  (Essais  qui 
témoignent  d'une  connaissance  parfaite  du  sujet,  entre  autres  un  pa- 
rallèle entre  Heine  et  Musset,  Diderot  et  les  encyclopédistes,  Beaumar- 
chais et  l'élément  gaulois  dans  la  littérature  française,  etc.). 

Zeitschrift  fur  deutsches  Altertum,  1882,  2e  fascicule  (suite)  : 
Litteraturnotizen  :  Baragiola,  Del  tedesco  médiévale,  Der  Arme  Hein- 
rich,  von  Hartmann  von  Aue.  Il  povero  Enrico,  versione  in  prosa.  — 
Bethge,  Wirnt  von  Gravenberg,  eine  literarhistorische  Untersuchung. 
(E.  Martin).  —  Creizenach,  Die  Bûhnengeschichte 'des  Goetheschen 
Faust.  (Werner). —  Deutsches  Wôrterbuch,  N  bis  Nachtigallstimme,  von 
Lexer.  (Gombert.)—  Gôtzinger,  Reallexicon  der  deutschen  Altertumer. 
I-VIII  Liefer.  —  Holder,  Germanischer  Bûcherschatz,  Heft  I-V.  — 
Look,  Der  Partonopier  Konrads  von  Wûrzburg  und  der  Partonopeus 
von  Blois.  —  Meyer-Markau,  Der  Parzival  Wolframs  von  Eschenbach. 

—  Schoch,  ueber  Boners  Sprache.  (Schônbach  :  témoigne  de  zèle  et  de 
connaissances).  —  Staub  u.  L.  Tobler,  Schweizerisches  Idiotikon,  I. 
(Lichtenstein  :  plein  de  promesses,  fait  honneur  aux  études  allemandes 
en  Suisse,  on  doit  souhaiter  à  cette  publication  une  continuation  heu- 
reuse et  de  nombreux  lecteurs).  —  Seldner,  Lessings  Verhàltniss  zur 
altrômischen  Komôdie.  —  Wegener,  Volkstùmliche  Lieder  aus  Nord- 
deutschland.  (Chants  du  pays  de  Magdebourg  et  du  Holstein). 

3e  fascicule  :  Seemûller,  Die  Zwergensage  im  Ortnit.  —  Zupitza, 
Kritische  Beitràge  zu  den  Blickling  homilies  u.  Blickling  glosses.  — 
Schrôder,  Alte  Bruchstûcke  der  Kaiserchronik.  —  Roediger,  In  Sachen 
der  Trierer  Bruchstûcke.   —  Wagner,  Erlanger  Fragment  der   Heidin. 

—  E.  Schmidt,  Aus  dem  Nachleben  des  Peter  Squenz  u.  des  Doctor 
Faust.  —  Seuffert,  Der  junge  Goethe  u.  Wieland.  —  Duncker,  die 
Grimmelshausen  ein  thûringisches  Adelsgeschlecht.  —  Warner,  Hans 
Wursts  Hochzeit.  —  Wackernell,  Swalwen  zagel. 


Ànzeiger  :  Techmer,  Zur  vergleichenden  Physiologie  der  Stimme  u. 
Sprache.  (Hoffory  :  des  défauts  considérables,  mais  compensés  par  de 
grandes  qualités;  beaucoup  de  détails  importants  et  neufs;  indispensa- 
ble.) —  Elis  saga  ok  Rosamundu,  p.  p.  Kôlbing.  (Heinzel  :  ne  se  rallie 
pas  aux  principaux  résultats  de  Kôlbing  sur  la  «  Tristrams  saga  »,  mais 
fait  de  grands  éloges  de  l'introduction  et  de  l'édition.)  —  Die  Kindheit 
Jesu  von  Fussesbrunnen,  hrsg.  v.  Kochendôrffer.  (Strauch.)  ■—  Lut- 
wins  Adam  und  Eva,  hrsg.  v.  K.  Hofmann  u.  W.  Meyer.  (Stein- 
meyer.)  —  Hugo  von  Montfort  mit  Abhandl.  zur  Geschichte  der  deut- 
schen  Literatur,  Sprache  u.  Metrik  im  XIV.  u.  XV.  Jahrhundert 
(Henrici).  —  Trebnitzer  Psalmen  hrsg.  v.  Pietsch.  (Kochendôrffer.)  — 
Minor  u.  Sauer,  Studien  sur  Gœthe-Philologie.  (Werner  :  beaucoup  de 
soin  et  de  savoir.)  —  Minor,  Hamann.  (Werner  :  très  fin,  très  complet, 
très  agréable  à  lire.)  —  Raich,  Dorothea  von  Schlegel  geb.  Mendelssohn 
u.  deren  Sôhne.  Joli.  u.  Philipp  Veit,  Briefwechsel.  (Minor),  —  Fûnf 
Bûcher  Epigramme  von  Konrad  Celtes,  hrsg.  v.  Hartfelder.  (Watten- 
bach.) 

Litteraturnotizen  :  Simrock,  Heliand  Christi  Lehre  u.  Leben  nach  dem 
altsachs.  3e  Aufiage. —  Steiff,  Der  erste  Buchdruck  in  Tûbingen. — 
Wenker,  Sprachatlas  von  Nord-und  Mitteldeutschland.  (Publication 
très  méritoire  dont  il  faut  souhaiter  le  succès.) 

Athenaeum  belge,  n°  17,  ier  septembre  1882  :  Renan,  L'Ecclésiaste  tra- 
duit de  l'hébreu  avec  une  étude  sur  l'âge  et  le  caractère  du  livre.  (Ou- 
verleaux  :  il  sera  fort  difficile  à  l'auteur  de  faire  admettre  partout  ses 
opinions,  mais  il  n'a  voulu  faire  œuvre  ni  d'apologiste  ni  de  théologien  ; 
il  écrit  moins  pour  les  savants  que  pour  le  grand  public,  et  l'esprit  et  le 
paradoxe  sont  de  grands  éléments  de  succès;  la  traduction  est  moins 
incohérente  que  toutes  les  traductions  antérieures).  —  Bulletin.  — 
Fouilles  de  la  Société  archéologique  de  Namur  en  1880. 

Revue  de  l'instruction  publique  supérieure  et  moyenne,  en  Belgique,  tome  XXV, 
4K  livraison  :  L,  R.  Le  nouveau  programme  des  gymnases  en  Prusse. 
—  Grafé,  L'école  normale  de  Pise  et  les  écoles  de  magistère  en  Italie  (suite 
et  fin).  —  Comptes-rendus  :  Pirenne,  Sedulius  de  Liège.  —  Actes  offi- 
ciels. —  Varia  :  plan  d'études  des  écoles  supérieures  de  Prusse. 


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LA   SEMAINE    PHILOLOGIQUE 
répertoire   des  études  classiques 

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REVUE  DES  ÉTUDES  CLASSIQUES 

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N°  40  Seizième  année  2  Octobre  1882 


REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ    SOUS    LA    DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.   Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 
Un   an,   Paris,  20   fr.  —   Départements,    22    fr.    —    Etranger,    25  tr. 


PARIS 
ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

libraire    de    la    société    asiatique 

de    l'école    des    langues   orientales   vivantes      ktc. 

28,    RUE    BONAPARTE,    28 


Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquk  î 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  EDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  2) 


HISTOIRE  DE  L'HELLÉNISME  S»°& 

çais  sous  la  direction  de  M.  A.  Bouché-Leclercq.  3  forts  volumes  in-8°.     .     3o    » 

Tome  I.  Histoire  d'Alexandre-le-Grand. 

Tomes  II  et  III.  Les  successeurs  d'Alexandre. 

L'ouvrage    paraît    en   3o  fascicules   à    1    fr.    25. 

Le  fascicule  I  vient  de  paraître. 

l'histoire    de  l'hellénisme    de  j.-g.   droysen  forme  la    suite  et  le 

complément  de  l'histoire  grecque  de  curtius. 


LES  MOUVEMENTS  DU  SOL  ™l^Tlt~ 

France   et    particulièrement    dans     le    golfe     normanno- breton,    par    Alexandre 
Chévremont.  Un  beau  volume  gr.  in-8°,  illustré  de  14  planches  en  couleur.     i5     » 
Ouvrage   honoré    d'une   récompense    par  l'Académie  des   Sciences   et  d'un  rapport 
favorable  de  M.  Alfred  Maury  de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 


TFT  TVR  F   fiF^    MORTQ  des  anciens  Egyptiens  Traduc- 

JLJZ.  JL1  V  1\J2  L/CO  lVlv_yl\  1  O  tion  complète  avec  notes  et 
index,  par  Paul  Pierret,  conservateur  du  Musée  égyptien  du  Louvre.  Un  fort  vo- 
lume in-18  de  65o  pages 10    » 


PÉRIODIQUES 

Literarisches  Centralblatt,  n°  35,  26  août  1882  :  Woernhardt,  Figura 
Hierosolymae  tempore  Jesu  Christi  existentis  illustrata  et  in  carta 
speciali  adjecta  adlineata;  et  Jérusalem  zur  Zeit  Jesu  Christi.  —  Fa- 
leucci,  Il  Mare  Morto  e  la  Pentapoli  del  Giordano.  (Très  savant,  mais 
l'auteur  n'a  pas  tout  consulté  et  n'a  pas  été  sur  les  lieux.)  —  Scheele, 
Theologische  Symbolik,  aus  dem  schwedischen  ûbers.  v.  Zôckler.  — 
Dalton,  Evangelische  Strômungen  in  der  russischen  Kirche  der  Ge- 
genwart.  —  Leibniz,  La  monadologie,  publiée  d'après  les  mss.  de  la 
bibliothèque  de  Hanovre  avec  introd.,  notes  et  suppléments,  par  Henri 
Lachelier.  («  Eine  niedliche  und  élégante  Ausgabe...  die  Einleitung 
ist  mit  Verstândniss  und  Sachkenntniss  geschrieben,  die  Anmerkungen 
concis  und  treffend...  »)  —  Mainzer,  Die  kritische  Epoche  in  der 
Lehre  von  der  Einbildungskraft  aus  Hume's  und  Kant's  theoretischer 
Philosophie  nachgew.  —  Neumann,  Geschichte  Roms  wâhrend  des 
Verfalls  der  Republik  vom  Zeitalter  des  Scipio  Aemilianus  bis  zu  Sul- 
la's  Tode,  hrsg.  v.  Gothein.  (Il  faut  se  souvenir  que  le  livre  a  été  écrit 
il  y  a  plus  de  dix  ans,  mais  ce  livre  est  d'un  historien.)  —  Villari 
(Pasquale),  Niccolo  Machiavelli  u.  seine  Zeit,  durch  Documente  be- 
leuchtet,  ûbers.  v.  Hensler.  IIe  volume,  (art.  d'analyse;  la  traduction 
est  excellente.)  —  Preussen  im  Bundestag  von  i85i  bis  i85g,  Docu- 
mente hrsg.  v.  Poschinger.  II  Theil.  18^4-1856.  (Traite  presqueexclu- 
sivement  de  la  guerre  de  Crimée  et  de  l'attitude  de  la  Prusse  durant 
cette  période;  mais  Bismarck,  qui  joue  un  rôle  si  important  dans  le 
icr  volume,  se  borne  ici  à  contrecarrer  l'Autriche  autant  que  possible; 
la  plus  importante  révélation  est  celle-ci  :  la  France  aurait,  au  com- 
mencement de  i855,  sérieusement  pensé  à  faire  passer  ses  troupes  par 
l'Allemagne  du  Sud  avec  le  consentement  de  l'Autriche;  on  remarquera 
aussi  deux  lettres  remarquables  de  Bismarck  à  Manteuffel  et  qui  sont 
comme  un  programme-ministre.)  —  Chavanne  (Jos.),  Afrika  im  Lichte 
unserer  Tage,  Bodengestalt  u.  geologischer.  Bau.  —  Larrinaga  (de), 
Die  wirthschaftliche  Lage  Cuba's.  —  Pognon,  L'inscription  de  Bavian, 
texte,  trad.  et  comm.  philologique.  IIe  partie.  (Publication  qu'on  ne 
quittera  pas  sans  y  avoir  trouvé  beaucoup  d'instruction  et  de  profit.)  — 
Reinisch,  Die  Bilin-Sprache  in  Nordost-Afrika.  (Très  bon  et  très  utile.) 
—  Hermann's  (Gottfried)  lateinische  Briefe  an  seinen  Freund  Volk- 
mann,  hrsg.  v.  Volkmann.  (Correspondance  très  intéressante  et  ren- 
fermant un  petit  roman  à  la  Werther.)  —  Blochwitz,  Kulturge- 
schichtliche  Studien.  (Lecture  agréable;  il  est  surtout  question  de  my- 
thologie). —  Jaeger,  Die  Gymnastik  der  Hellenen,  neue  Bearbeitung. 
1 881.  (La  ire  édition  a  paru  en  i85o,  mais  le  livre  n'a  guère  gagné; 
l'ouvrage  de  Grasberger  a  été  consulté;  mais  la  publication  de  Jaeger 
reste  une  œuvre  de  tendance  et  d'agitation;  c'est  une  protestation  con- 
tre la  gymnastique  actuelle,  et  en  style  bizarre.)  —  Jaennicke,  Die  ge- 
sammte  keramische  Literatur,  ein  zuverlassiger  Fûhrer  fur  Liebhaber, 
u.  s.  w.  (Livre  d'un  dilettante  qui  se  donne  de  la  peine.)  —  Report  of 
the  commissioner  of  éducation  for  the  year  1879.  I.  IL  Washington.  — 
Zeitfragen  aus  dem  Gebiete  der  Turnkunst. 

N°  36,  2  septembre  1882  :  Bôhl,  Christologie  des  alten  Testamentes 
oder  Auslegung  der  wichtigsten  messianischen  Weissagungen  (Repré- 
sente un  point  de  vue  vieilli  et  insoutenable).  —  Westerburg,  Unter- 
suchung  der  Sage  dass  Seneca  ein  Christ  gewesen  sei  (Recherches  où  il 
y  a  de  la  finesse  et  de  la  nouveauté).  —  Frôhlich,  Die  Gardetruppen 
der  rômischen  Republik  (Beaucoup  de  soin  et  de  pénétration,  maint  dé- 
tail important).  —  Marczali,  Ungarns  Geschichtsquellen  im  Zeitalter 
der  Arpaden  (Publication  dont  les  résultats  sont  excellents,  très  bonne 


méthode).  —  Kronks,  Grundriss  der  osterreichischen  Geschichte,  ein 
Compendium  fiir  Universitàtshorer.  IV.  1 701- 1878,  vom  spanischen 
Erbfolgekrieg  bis  zur  Gegenwart  (Trop  concis  dans  l'exposition,  mais 
liste  abondante  des  sources  et  des  ouvrages  historiques  sur  la  matière). — 
Ranke,  Sâmmtliche  Werke,  42-48  Band  (Suite  de  la  publication  des 
œuvres  complètes  du  grand  historien  ;  le  42e  vol.  est  relatif  à  l'histoire 
de  Venise;  le  43e  et  le  44e  sont  intitulés  «  la  Serbie  et  la  Turquie  au 
xix°  siècle  »  ;  le  45e  donne  le  livre  connu  «  source  et  commencement 
des  guerres  de  la  Révolution,  179 1 -1792  »  ;  les  vol.  46-48,  le  récit  his- 
torique ajouté  par  Ranke  aux  Mémoires  de  Hardenberg  sous  le  titre 
«  Hardenberg  et  l'histoire  de  l'état  prussien  de  1793  à  18 1 3  »). —  Haus- 
knecht's  Routen  im  Orient  i865- 1869,  nach  dessen  Originalskizzen  re- 
digirt  von  Kiepert.  —  Mac  Curdy,  aryo-semitico  speech ,  a  study  in 
linguistic  archaeology  (Trop  arbitraire  dans  la  comparaison  des  racines). 
—  Petzoldt,  Catalogus  bibliothecas  Dantae  Dresdensis  a  Philalethe  re- 
lictae.  —  Brinckmeier  ,  Die  provenzalischen  Troubadours  als  lyrische 
u.  politische  Dichter,  mit  Proben  ihrer  Dichtungen  (Ne  peut  être  re- 
commandé à  aucun  égard,  la  forme  est  négligée,  et  l'auteur  montre  un 
manque  étonnant  de  savoir  sérieux).  —  Wegener,  Aufsatze  zur  Litera- 
tur  (Essais  qui  ont  quelque  valeur,  sur  la  Fiancée  de  Messine,  le  Merlin 
d'Immermann,  le  drame  symbolique  et  allégorique,  George  Neumark, 
Fr.  Aug.  Stàgemann). —  Dumont  et  Chaplain,  Les  céramiques  de  la 
Grèce  propre,  vases  peints  et  terres  cuites;  Ir0  partie,  vases  peints  (Art. 
de  discussion).  —  Weber,  gastronomische  Bilder,  Beitrage  zur  Ge- 
schichte der  Speisen  u.  Getranke,  der  Tischsitten  u.  Tafelfreuden 
verschiedener  Vôlker  u.  Zeiten  (Causerie  légère,  mais  qui  décèle  une  as- 
sez grande  connaissance  des  sources). 

Deutsche  Litteraturzeitung,  n°  34,  26  août  1882  :  Orose,  p.  p.  Zange- 
mkister.  (Holtzmann.)  —  Wendt,  Die  christliche  Lehre  von  d.  menschl. 
Vollkommenheit.  —  Barth  u.  Niederley,  Die  Schulwerkstatt.  — 
Lotze,  Grundzûge  der  Psychologie;  Grûndzuge  der  praktischen  Philo- 
sophie. —  Pfleiderer,  Lotzes  philosoph.  Weltanschauung.  —  Li- 
tauische  Volkslieder  u.  Marchen  aus  dem  preuss.  u.  russ.  Litauen  ge- 
samm.  v.  Leskien  u.  Brugman.  I.  Gegend  von  Wilkischken.  II.  aus 
Godlewa.  III.  (Bechtel.)  —  Birt,  Das  antike  Buchwesen  in  seinem 
Verhaltniss  zur  Literatur.  (Keil  :  plein  d'instruction  et  suggestif.)  — 
Geier,  Altdeutsche  Tischzuchten.  —  Hugo  von  Montfort,  p.  p.  Wac- 
kernell.  (Lichtenstein  :  exposition  agréable,  travail  très  méritoire  qui 
épuise  presque  toutes  les  questions  philologiques  et  historiques  sur  le 
sujet.)  —  Brandes,  Moderne  Geister,  literariscne  Bildnisse  aus  dem  XIX. 
Jahrhundert.  (Er.  Schmidt  :  suite  d'essais  pleins  d'esprit,  de  sagacité  et 
souvent  de  profondeur;  le  meilleur  est  l'essai  sur  Tegner.)  —  Zupitza, 
Alt-und  mittelenglisches  Uebungsbuch.  (Varnhagen  :  excellent.)  — 
Malchow,  Geschichte  des  Lûbecker  Domcapitels.  —  Turmairs  genannt 
Aventinus  Annales  Ducum  Boiariae,  hrsg.  v.  Riezler.  —  v.  Schon, 
Weitere  Beitrage  u.  Nachtràge.  (Isaacsohn  :  mieux  eût  valu  que  le  livre 
ne  fût  pas  publié.)  —  v.  Schulenburg,  Wendisches  Volkstum  in  Sage, 
Brauch  u.  Sitte.  (Krek  :  très  intéressant.) 

N°  35,  2  septembre  1882  :  Gessner,  Das  hohe  Lied  Salomonis  erklart 
und  ûbersetzt.  (Nowack  :  «  quand  on  ne  tient  pas  en  ;bride  l'imagina- 
tion, quand  on  manque  de  toute  culture  lingustique,  comme  c'est  le 
cas  ici,  on  ne  recueille  que  des  fruits  monstrueux,  ungeheuerliche 
Frûchte.  »  —  Ludewig,  Geist  und  Stoff.  —  Plumacher,  der  Kampf  ums 
Unbewusste.  — Abdo  Iwahid  al  Marreskoshi,  History  of  the  Almoha- 
des,  edited  by  Dozy,  20  edit.  revised  a.  corrected.  (Wellhausen  :  an- 
noncer cette  2e  édition  suffirait  au  critique,  mais  il  veut  montrer  qu'il 


a  lu  le  livre  avec  intérêt  ;  introduction  pleine  de  finesse.)  —  The  Prota- 
goras  of  Plato,  with  an  introd.  a.  critical  a.  planatory  notes  by  Sihler. 
New-York,  Harper.  (Heitz  :  bon.)  —  Oscar  Weise,  Die  griechischen 
Wôrter  im  Latein.  (Thurneysen  :  tâche  remplie  avec  beaucoup  d'habi- 
leté et  de  circonspection  ;  résultats  à  approuver  presque  partout;  expo- 
sition claire,  tableau  excellent  des  diverses  et  profondes  influences  de  la 
civilisation  grecque  sur  Rome  et  sa  langue.)  —  Hugo  Busch,  Die  ur- 
sprûnglichen  Lieder  vom  Ende  der  Nibelungen.  (Schônbach  :  du  soin, 
des  résultats  souvent  incontestables.)  —  Erlauer  Spiele,  sechs  altdeut- 
sche  Mysterien,  zum  ersten  Maie  hrsg.  v.  Kummer.  (Peter  :  Très  inté- 
ressant pour  les  amis  de  l'ancienne  littérature  allemande.)  —  Un- 
gedruckte  Jugendbriefe  des  Wandsbecker  Boten,  p.  p.  Redlich. —  Jonas, 
Christian  Gottfried  Kôrner.  — »  Fastenrath,  Calderon  in  Spanien. 
(Baist.)  —  Floigl,  Geschichte  des  semitischen  Alterthums.  (Schrader  : 
Tableau  chronologique  qui  sera  utile.)  —  Weidling,  Schwedische  Ge- 
schichte im  Zeitalter  der  Reformation.  (Beger  :  intéressant,  de  nou- 
veaux documents,  de  nouveaux  points  de  vue,  d'utiles  rectifications.)  — 
Gardiner,  The  fall  of  the  monarchy  of  Charles  I.  2  vols.  1637-1642. 
(Pauli  :  excellent.)  —  Lettres  de  Henriette  Marie  de  France,  reine  d'An- 
gleterre, à  sa  sœur  Christine,  duchesse  de  Savoie,  p.  p.  Ferrero.  Turin, 
Bocca.  (Philippson  :  141  lettres  inédites  de  la  reine  d'Angleterre  à  «  Ma- 
dame Royale  »,  mais  très  peu  sont  intéressantes  pour  l'histoire.)  — 
Pommerellisches.  Urkundenbuch,  p.  p.  Perlbach.  —  Bastian,  Stein- 
sculpturen  aus  Guatemala. 

Gœttingische  gelehrte  Anzeigen,  n°  35,  3o  août  1882  :  Bernays,  Phokion 
u.  seine  Beurteiler.  (Blass  :  ouvrage  où  Ton  retrouve  l'exactitude  minu- 
tieuse de  l'auteur.)  —  Albrecht  von  Hallers  Gedichte,  p.  p.  L.  Hirzel 
(Sauer  :  publication  qu'il  faut  accueillir  avec  la  plus  chaude  recon- 
naissance.) —  XVI  11er  Jahresbericht  der  schlesischen  Gesellschaft  fur 
vaterlândische  Cultur.  —  v.  Wietersheim,  Geschichte  der  Vôlkerwan- 
derung.  II.  (Kaufmann  :  2e  édition  revue  et  remaniée  par  Dahn,  IIe  vo- 
lume, mais  remaniements  souvent  peu  louables.) 

Nos  36  et  3y,  6  et  i3  septembre  1882  :  Krause,  Vorlesungen  ûber 
Aesthetik.  (Seydel.)  —  Lauth,  Die  aegyptische  Chronologie  gegenùber 
der  historischen  Critik  des  Herrn  Alf.  v.  Gutschmid.  (Erman.) 


S.  CALVARY  &  Cie,  LIBRAIRIE,  A  BERLIN 


L'ANNÉE  ARCHÉOLOGIQUE  ET  PHILOLOGIQUE 
revue  des  études  classiques 

(Jahresbericht    ûber    die    Fortschritte    der 
classischen  Alterthumswissenschaft  ) 

La  collection   forme   28  vol.    gr.    in-8. 

Prix  :  240  Mark. 

L'abonnement  :  3o  Mark  par  année. 


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répertoire    des  études  classiques 

(Philologische  Wochenschrift.) 
Deux  feuilles  gr   in-4  par  semaine. 

La  première  anne'e  est  fournie  au  prix  de 

18  Mark  aux  souscripteurs  de  la  suite. 

Abonnement  :  6  Mark  pour  3  mois. 


Franco  dans  tous  les  Etats  qui  font  partie  de  l'Union  postale. 

Des  prospectus  et  numéro  spécimen  gratis  et  franco  à  la  disposition  de  tous  ceux 

qui  les  demanderont. 

Le  Pny,  imprimerie  Marckessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23. 


N°  41  Seizième  année  9  Octobre  1882 


REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET    DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ    SOUS    LA    DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :   M.  A.   Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 
Un    an,   Paris,  20   fr.  —    Départements,    22   fr.    —    Etranger,    25  tr, 


PARIS 
ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

libraire    de    la    société    asiatique 

de    l'école    des    langues   orientales   vivantes      etc. 

28,    RUE   BONAPARTE,    28 


Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  EDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


HISTOIRE  DE  L'HELLÉNISME  £!£ÏS: 

çais  sous  la  direction  de  M.  A.  Bouché-Leclercq.  3  forts  volumes  in-8°.     .     3o     » 

Tome  I.  Histoire  d'Alexandre-le-Grand. 

Tomes  II  et  III.  Les  successeurs  d'Alexandre. 

L'ouvrage    paraît    en    3o   fascicules   à    i    fr.    25. 

Le  fascicule  I  vient  de  paraître. 

l'histoire    dé   l'hellénisme    de   j.-g.    droysen   forme   la    suite   et  le 

complément  de  l'histoire  grecque  de  curtius. 


LES  MOUVEMENTS  DU  SOL  'TJ?%T 

France   et     particulièrement    dans    le    golfe     normanno- breton,    par    Alexandre 
Chévremont.  Un  beau  volume  gr.  in-8°.  illustré  de  14  planches  en  couleur      i5     * 
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favorable  de  M.  Alfred  Maury  de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 


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Traduc- 
îplète  avec  notes  et 
indexi  par  Paul  Pierret,  conservateur  du  Musée  égyptien  du  Louvre.  Un  fort  vo- 
lume in-18  de  65o  pages 10    » 


PÉRIODIQUES 

The  Athenaeum,  n°  2864,  16  septembre  1882  :  Brassey,  The  britisb  navy, 
its  strength,  resources  and  administration.  Vol.  III.  —  Records  of  the 
english  province  of  the  Society  of  Jésus,  vol.  VII,  part  I,  by  Foley.  — 
Books  about  Japan  and  China.  (Genji  Monogatari,  the  most  celebrated 
of  the  classical  japanese  romances,  transi,  by  Suyematz  Kenchio  ;  Beal, 
Abstractof  four  lectures  on  buddhist  literature  in  China;  Balfour,  The 
divine  classic  of  Nan-hua  being  the  works  of  Chuang-tsze,  taoist  philo- 
sopher ;  Giles,  Historié  China  and  other  sketches  ;  Douglas,  Chine.  — 
Leland,  The  gypsies.  (Curieux  et  amusant.)  —  Hicks,  Manual  of  greek 
historical  inscriptions.  («  Excellent  and  scholarly  volume.  »)  —  G.  Se- 
ton,  Memoir  of  Alexander  Seton,  earl  of  Dunfermline.  —  Maskell,  The 
ancient  liturgy  of  the  church  of  England  according  to  the  uses  of  Sa- 
rum,York,  Hereford,  a.  Bangor  a.  the  roman  liturgy;  et  Monumenta 
ritualia  ecclesiae  anglicanas,  the  occasional  offices  of  the  church  of  En- 
gland  according  to  the  old  use  of  Salisbury,  the  prymer  in  English  and 
other  prayers  and  forms.  —  Our  library  table  (Arth.  Trollope,  Lord 
Palmerston  ;  Sergeant,  William  Pitt  ;  Maclagan,  Scottish  myths).  — 
The  fifth  annual  meeting  of  the  library  association.  —  The  «  Quarterly 
Review  »  on  Swift.  —  Bengali  translations  of  sanskrit  texts.  —  Rainsbo- 
rough  —  Lolo  and  Vei  characters.  (Hyde  Clarke.)  —  «  The  four  sons 
of  Aymon  »  (Blades).  —  «  Bartolozzi  and  his  works  »  (Tuer). 

N°  2865,  23  sept.  1882  :  Jenkinson,  Amazulu,  The  Zulus,  their  past 
history,  manners,  customs  and  language,  with  observations  on  the 
country  and  its  productions,  climate,  etc.,  the  Zulu  war  and  Zululand 
since  the  war.  —  A.  de  Gubernatis,  La  mythologie  des  plantes  ou  les 
légendes  du  règne  végétal,  tome  II.  (De  nombreux  matériaux  rassemblés 
de  toutes  parts  pour  le  profit  de  la  mythologie  comparée  et  de  l'étude  du 
folklore.)  —  C.  Abel,  Linguistic  Essays.  (Dix  essais  sur  divers  sujets.) 
—  Stepniak,  La  Russia  sotterranea,  profili  e  bozzetti  revoluzionari  dal 
vero,  with  a  préface  by  Lavroff.  Milan,  Trêves.  —  Ch.  J.  Robinson,  A 
register  of  trie  scholars  admitted  into  Merchant  Taylor's  school  from 
A.  d.  i562to  1874.  —  Dr.  Pusey.  —  The  «  Yh  King  ».  —  Rainsbo- 
rough.  —  Lolo  and  Vei  characters.  (Terrien  de  Lacouperie.)  —  The 
coming  publishing  season.  —  Bonnaffé,  Le  surintendant  Foucquet. 

Theologische  Literaturzeitung,  n°  17,  26  août  1882  :  Lippert,  die  Reli- 
gionen  der  europâischen  Culturvôlker,  der  Litauer,  Slaven,  Germanen, 
Griechen  und  Rômer,  in  ihrem  geschichtl.  Ursprunge  (Baudissin  :  du 
savoir,  mais  on  ne  voit  que  rarement  où  l'auteur  l'a  puisé.)  —  Bruston, 
Histoire  critique  de  la  littérature  prophétique  des  Hébreux  depuis  les 
origines  jusqu'à  la  mort  d'Isaie.  (Baudissin  :  souhaitons  d'avoir  bientôt 
la  suite  de  cet  ouvrage  qui  n'est  pas  seulement  utile  à  la  théologie  fran- 
çaise). —  Destinon,  Die  Quellen  des  Flavius  Josephus,  I.  (Schûrer  :  long 
art.  sur  cet  ouvrage  dont  les  résultats  diffèrent  de  ceux  de  Bloch  et 
qui  a  une  plus  grande  valeur  que  le  travail  de  Bloch) .  —  Davidson,  An 
introduction  to  the  study  of  the  New  Testament  critical,  exegetical  a. 
theological,  2e  éd.  —  Golubinskij,  Geschichte  der  russischen  Kirche.  I. 
Erste,  Kiewsche  oder  mongolische  Période.  I  u.  IL  [en  russe].  (Bon- 
wetsch  :  promet  de  devenir  le  meilleur  ouvrage  sur  l'histoire  ecclésiasti- 
que delà  Russie  et  dépasse  le  seul  travail,  jusqu'ici  important,  de  Ma- 
karij). 

N°  18,  9  septembre  1882  :  Vernes,  Mélanges  de  critique  religieuse. 
(Baudissin  :  recueil  d'articles  et  d'essais  où  il  y  a  beaucoup  de  «  Ge- 
schick  »  et  de  «  Sachkenntniss  »,  d'habileté  et  de  compétence.)  —  Deane, 
Sophia  Salomon,  the  book  of  wisdom,  the  greek  text,  the  latin  vulgate 


and  the  authorized  english  version.  —  Spiess,  Das  Jérusalem  des  Jose- 
phus,  ein  Beitrag  zur  Topographie  der  heiligen  Stadt.  (Schtirer  :  travail 
soigné,  mais  pourquoi  se  borner  uniquement  à  Josèphe?)  —  Seydel, 
Das  Evangelium  von  Jesu  in  seinen  Verhàltnissen  zu  Buddha-Sage  und 
Buddha-Lehre.  —  Grafe,  Ueber  Veranlassung  und  Zweck  des  Romer- 
briefes.  —  Loofs,  Antiquae  Britonum  Scotorumque  ecclesiae  quales 
fuennt  mores,  quae  ratio  credendi  et  vivendi,  quae  controversiae  cum 
romana  ecclesia  causa  atque  vis.  (Lechler  :  Dissertation  de  Leipzig  pour 
la  licence  en  théologie;  savoir  très  remarquable,  étude  profonde  des 
sources,  fait  bien  augurer  de  l'auteur.)  —  Lindner,  Geschichte  des 
deutschen  Reiches  vom  Ende  des  XIV  Jahrhunderts  bis  zur  Reforma- 
tion. I,  2,  IL  Unter  Kônig  Wenzel.  (Tschackert  :  mêmes  mérites  que 
dans  le  volume  précédent.)  —  Bickell,  Synodi  Brixinenses  saeculi  XV. 
(Tschackert  :  actes  inédits  de  six  conciles  provinciaux  tenus  à  Brixen. 
dans  le  Tyrol,  au  xve  siècle.) 

,  Gôttingische  Gelehrte  Anzeigen,  n°  38,  20  septembre  1882  :  Zeuner,  Die 
Sprache  des  kentischen  Psalters,  ein  Beitrag  zur  angelsàchs.  Grammatik 
(Sweet  :  travail  qui  fait,  en  l'ensemble,  la  meilleure  impression).  —  Der 
Pentateuch,  Commentar  des  R.  Samuel  ben  Meïr  p.  p.  Rosin.  (D. 
Kaufmann).  —  Schober,  Johann  Jak'ob  Wilhelm  Heinse  (Minor  :  assez 
bon). 

—  Nos  39  et  40,  27  septembre  et  4  octobre  1882  :  H.  von  Sybel, 
Entstehung  des  deutschen  Kônigthums.  (Ehrhardt  :  discussion  sur  quel- 
ques points,  mais  cette  2e  édition  est  tout  à  fait  au  courant  des  derniers 
travaux,  et  même  aux  endroits  où  l'on  contredit  l'auteur,  on  lui  doit  en- 
core profit  et  instruction  ;  Sybel  a  exercé  sur  le  développement  de  l'étude 
des  antiquités  germaniques  une  très  utile  influence).  —  Lôffler,  Ge- 
schichte der  Festung  Ulm. 

Nachrichten,  n°  19  :  Bechtel,  Lituanica.  I.  Zur  Kritik  aelterer  Spra- 
chdenkmàler;  IL  Giefme  ape  prikelima  Pona  Christaus  suguldita  nug 
Baltramejaus  Willenta. 

Deutsche  Rundschau,  septembre  1882:  Haeckel,  Indische  Reisebriefe.  — 
Friedrich  Léo,  Venantius  Fortunatus,  der  letzte  rômische  Dichter.  — 
Aus  der  Pfalz  und  aus  Baden  1849,  Briefe  eines  preussischen  General- 
stabs-offiziers.  (Fin.)  —  Ehlert,  Wagner's  Parsifal.  —  Rohlfs,  Zur 
Lage  in  Aegypten  —  Gerland,  Stieler's  Atlas. 

Literarische  Rundschau  :  Caroline  und  ihre  Freunde.—  Fontane's  Wan- 
derungen.  —  Literarische  Notizen. 

Vor  Ungdom,  tidsskrift  for  opdragelse  og  undervisning,  udgivet  at  Jean 
Pio,  H.  Trier  og  P.  Voss  (Copenhague,  Philipsen).  —  Ier  et  2e  fascicu- 
les :  Frederiksen,  Fichte  som  pœdagog.  —  Birch,  Den  hœjere  Lasrer- 
stands  pœdagogiske  Uddannelse,  betaenkning,  afgivet  til  Kirke  og 
Undervisningsministeriet. —  Hoff,  Om  den  lœrde  skoles  reform. —  Kleis- 
dorff,  Bemaerkninger  i  Anl.  af  Undervisningsministeriets  circulaire  af 
i3  Oct.  1881.  —  Vestergaard,  Vor  Folkesskoles  reform.  — Voss,  Sko- 
len  og  fremmedordene.  —  Sanne,  Om  sangundervisningen  i  skolerne. 
—  J.  Paludan,  Oplysningsperiodens  indflydelse  paa  daet  laerde  skolevaesen 
i  Danmark  og  Norge.  —  Rovsing,  Niels  Hemmingsens  skoletid. 

3me  fascicule  :  Hoffding,  Den  graeske  ethiks  historié.  (A  propos  de  la 
ire  partie  de  la  Geschichte  der  Ethik  »  de  M.  Th.  Ziegler.)  —  Trier,  Om 
Bœrns  Morskabslassning.  —  Kragball,  Nogle  bemaerkninger  om  sko- 
leundervisningen,  naermest  med  henblik  paa  Kjoebenhavnske  pigesko- 
ler.  —  Erna  Juel-Hansen,  Om  en  reform  af  pigeskolen.  —  Anderssen. 
Om  den  historiske  undervisning  i  gymnasierne.  —  J.  Paludan,  Oplys- 
ningsperiodens indflydelse  paa  det  laerde  skolevaesen  i  Danmark  og 
Norge.  IL 


4me  Fascicule  :  To  andragender  til  ministeren  for  kirke-og  undervis- 
ningsvaesenet.  —  Hoff,  Fooslag  tilforandring  iden  laerde  skolesplan. — 
Holm,  Om  dansk  stil  for  viderekomne.  —  Hakonson-Hansen,  Sund- 
hedslaeren  i  skolen.  —  Theodorus,  en  anmeldelse  (Giersing.  om  kristelig 
•opdragelsei  skole  og  hjem).  —  Johansen,  Om  opdragelse  i  forhold  til  de 
fysiologiske  og  psychologiske  ejendommeligheder.  —  J.  Paludan, 
Oplysriingsperiodens  indflydelse  paa  det  laerde  skolevaesen  i  Danmark 
og  Norge.  III. 

Archivio  per  lo  studio  delli  tradizioni  popolari,  rivista  trimes triale,  diretta 
di  G.  Pitre  e.  Salom.  Marino,  vol.  I,  fasc.  III,  juillet-septembre  1882 
(Palerme,  Pedone-Lauriel)  Pitre,  Motti  popolari  applicati  a  suoni 
délie  campane.  —  Sal.  Marino,  Canti  popolari  siciliani  transcritti  nei 
secoli  xvi,  xvii  e  xvm.  —  Mango,  Poésie  popolare  infantile  in  Calabria. 
—  Gianandrea,  Indevinelli  marchigiani.  —  Rodrig.  Marin,  El  juego 
de  las  chinas.  —  Cannizzaro,  Le  dodici  parole  délia  verita.  —  Arietti, 
Pitre,  La  storia  del  re  Crin,  novella  popolare  piemontese.  —  Siciliano, 
Credenze  ed  usi  popolari  toscani.  —  Tiraboschi,  Usi  pasquali  nel  Ber- 
gamasco.  —  J.  de  Villemory,  Le  folk-lore.  —  Pitre,  Saggio  di  voci  di 
venditori  ambulanti.  —  Miscellanea  :  S.  Marino,  Garibaldi  e  le  tradi- 
zioni popolari;  Savini,  I  côntadini  pretuziani;  Nerucci,  Ancora  degli 
Zingari  ;  Pitre,  Il  giuoco  fanciulesco  délia  «  nanna  pigghia  cincu.  —  Ri- 
vista bibliografica  (entre  autres,  la  «  Faune  populaire  de]  la  France  », 
de  M.  Rolland;  le  «  Recueil  de  contes  populaires  grecs  »,  de  M.  Le- 
grand;  les  «  Contes  albanais  »  de  M,  Dozon),  etc. 

Athenaeum  belge  (i') ,  n°  18,  i5  septembre  1882  :  Iung,  Lucien  Bona- 
parte et  ses  mémoires,  1775-1840,  d'après  les  papiers  déposés  aux  ar- 
chives étrangères  et  dautres  documents  inédits.  (Juste.)  —  Franzôsische 
Studien.  (Scheler  :  analyse  et  apprécie  très  favorablement  les  études  de 
Schlickum  Klapperich  et  Karl  Muller.)  —  Fouilles  exécutées  par  la  So- 
ciété archéologique  deNamur  en  1880.  (Suite.)  —  Rapport  de  M.  Alvin 
sur  la  situation  de  la  Bibliothèque  royale  en  1881. 


S.  CALVARY  &  Cie,  LIBRAIRIE,  A  BERLIN 


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classischen  Alterthumswissenschaft  ) 

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L'abonnement  :  3o  Mark  par  année. 


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18  Mark  aux  souscripteurs  de  la  suite. 

Abonnement  :  6  Mark  pour  3  mois. 


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Des  prospectus  et  numéro  spécimen  gratis  et  franco  à  la  disposition  de  tous  ceux 

qui  les  demanderont. 

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A0  42  Seizième  année  16  Octobre  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ    SOUS    LA    DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 
Un    an,   Paris,   20   fr.  —    Départements,    22   fir.    —    Etranger,    i5  fr. 


PARIS 


ERNEST    LEROUX,    EDITEUR 

libraire    de    i.  a    société    asiatique 

de    l'école    des    langues    orientales   vivantes      etc. 

28,    RUE    BONAPARTE,    28 


Adresse)'  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuqueï 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


HISTOIRE  DE  L'HELLÉNISME  à&ÏSË 

çais  sous  la  direction  de  M.  A.  Bouché-Leclercq.  3  forts  volumes  in-8°.     .     3o    » 

Tome  I.  Histoire  d'Alexandre-le-Grand. 

Tomes  II  et  III.  Les  successeurs  d'Alexandre. 

L'ouvrage    paraît    en   3o  fascicules   à    1    fr.    ib. 

Le  fascicule  I  vient  de  paraître. 

L'HISTOIRE     DÉ    L'HELLÉNrSME     DE    J.-G.     DROYSEN    FORME    LA      SUITE    ET    LE 

COMPLÉMENT   DE  L'HISTOIRE  GRECQUE  DE  CURTIUS. 


LES  MOUVEMENTS  DU  SOL  su^£Vu~ 

France  et    particulièrement    dans    le    golfe     normanno-breton,    par    Alexandre 
Chévremont.  Un  beau  volume  gr.  in-8°,  illustré  de  14  planches  en  couleur.     i5     » 
Ouvrage   honoré    d'une   récompense    par  l'Académie  des   Sciences   et  d'un  rapport 
favorable  de  M.  Alfred  Maury  de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 


TC     T  nm  c     nrr      A/fHRTQ     des  anciens  Egyptiens.  Traduc- 
L.E     Ll  VlXL,     L/L/J     lVlv_/r\  1  D    tion     complète    avec    notes    et 
index,  par  Paul  Pierret,  conservateur  du  Musée  égyptien  du  Louvre.  Un  fort  vo- 
lume in-18  de  65o  pages :     :  .  .    .    .     10    » 


PÉRIODIQUES 

The  Academy,  n°  538,  26  août  1882  :  Blunt,  The  reformalion  of  the 
church  of  Englands,  its  history,  principles  and  results.  Vol.  IL  1547- 
1662.  (Littledale.)  —  Sélections  from  ihe  writings  ofWalter  Savage 
Landor  p.  p.  Sidney  Colvin.  —  Fergusson,  The  honourable  Henry 
Erskine,  lord  advocate  for  Scottand.  —  Me  Call  Theal,  Kaffir  folk- 
lore (Ravenstein  :  intéressant  recueil  de  contes  cafres).  —  Mme  de  La- 
fayette,  Histoire  d'Angleterre  de  France,  p.  p.  An.  France  (Morison  : 
Tintroduction  a  un  grand  mérite,  elle  renferme  de  brillants  aperçus.)  — 
Coloridge's  early  commonplace-book.  (A.  Brandi.)  —  A  broadside  men- 
tion of  Shakspere  in  1866.  (Furnivall.)  —  M.  Lenormant  and  Herr 
Rôhl.  (J.  de  Witte.)  — Skeat,  An  etymological  dictionary  of  the  en- 
glish  language.  (Sweet  :  «  an  inexhaustible  mine  of  quotations,  réfé- 
rences and  happy  suggestions.  »)  —  A.  Bastian,  Der  Buddhismus  in 
seiner  Psychologie;  E.  Senart,  Le  Mahâvastu,  texte  sanscrit  publié 
pour  la  première  fois,  vol.  I  ;  Oldenberg,  ueber  den  Zalita  Vistara  et 
Budha,  sein  Leben,  seine  Lehre  u.    seine  Gemeinde.  (Rhys  Davids). 

—  Thausing,  Albert  Durer,  his  life  and  works,  translated  from  the  ger- 
man,  edited  by  Eaton.  —  Another  fragment  of  the  métopes  of  the  Par- 
thenon.  (C.  T.  Newton.)  —  A  waif  from  Dayr-el-Baharee.  (Am.  B. 
Edwards.)  —  Excavations  in  the  forum  romanum  (Parker). 

N°  539,  2  septembre  1882  :  Récent  egyptian  books  (The  copting  mor- 
ning  service  for  the  lord's  Day,  transi,  in  english  by  John  marques  of 
Bute;  Gorringe,  Egyptian  obelisks;  Rhoné,  Mariette  esquisse  de  sa  vie, 
et  de  ses  travaux  ;  Deseille,  Les  débuts  de  Mariette-Pacha  ;  Hope- 
Edwardes  ,  Eau-de-Nil,  a  chronicle.  —  Samuelson,  Roumania,  past 
and  présent.  (Minchin  :  utile.)  —  Harwood,  The  coming  democracy. 

—  The  theological  and  philosophical  works  of  Hermès  Trismegistus, 
Christian  neoplatonist,  translated  by  Chambers.  (Simcox.)  —  Steens- 
trup,  Normannerne,  III.  a.  IV.  «  Danske  og  norske  riger  paa  de  Brit- 
tiske  er  :  Danevaeldens  tisalder  »  and  «  Danelag  »  (Powell  :  fin  de  cette 
remarquable  étude  sur  les  Normands  et  leurs  colonies  aux  ixe,  x°  et 
xie  siècles,  livre  qui  devra  être  traduit;  dans  ces  volumes,  comme  dans 
les  précédents,  profond  savoir,  style  simple  et  clair,  etc.),  — Current 
literature  (Spencer  Walpole,  Foreign  relations  ;  Fowler,  Shaftesbury 
and  Hutcheson  ;  Edgcumbe,  Edward  Trelawny,  etc.)  —  The  annual 
meeting  of  the  library  association.  —  The  Bodleian  library.  —  Mr. 
Bullen's  collection  of  old  plays.  —  The  Dublin  Exhibition.  —  Corres- 
pondence  :  «  the  last  supper  »  at  Tongerloo.  (Dolan.)  —  «  Restora- 
tion  »  at  the  Tower  of  London.  (Wise.)  —  Anecdota  Oxoniensia,  vol. 
I,  2.  Nonius  Marcellus,  Harleian  ms.  2719,  collated  by  unions.  (Nett- 
leship.)  —  The  codex  Amiatinus  or  the  latin  bible  (Paul  de  Lagarde.) 

—  The  books  of  the  ancients.  (Haverfield.)  —  Thausing,  Albert  Durer, 
his  life  and  works  translated  from  the  german,  by  Eaton.  —  The 
Paris  Muséum  of  mediaeval  sculpture  (Conway). 

N°  540,  9  septembre  1882  :  Stack,  six  months  in  Persia.  (Keane.)  — 
Tuke,  Chapters  in  the  history  of  the  insane  in  the  british  isles.  —  Records 
of  the  english  province  of  the  Society  of  Jésus,  vol.  VII,  part  I,  by  Foley. 

—  The  kentish  garland,  edited  by  Julia  De  Vaynes,  with  notes  a  illus- 
trations by  Ebsworth.  (Hewlett  :  recueil  de  ballades  et  autres  poèmes  du 
pays  de  Kent.)  —  W.  Wallace,  Kant.  (Coupland.)  —  Biliotti  et  Cot- 
tret,  L'île  de  Rhodes.  (Calvert  :  travail  méritoire.)  —  Current  Theology. 

—  Mountague  Bernard  (Stubbs).  —  The  society  of  finnish  literature.  — 
M.  Lenormant  and  the  «  Hermès  ».(F.  Lenormant.)  —  Kaffir  folk-tales 
(Lang).  — Walter  Savage  Landor.    (Oswald.)  —  Philological  books 


(Newman,  Libyan  vocabulary;  C.  Abel,  Linguistic  essays;  Brunnhofer, 
Ueber  den  Geist  der  indischen  Lyrik;  Wûrdter,  Kurzgefasste  Geschichte 
Babyloniens  u.  Assyriens). 

The  A.thenaeum,  n°  2866,  3o  septembre  1882  :  Leslie  Stephen,  Swift, 
coll.  des  «  english  men  of  letters  ».  Londres,  Macmillan.  (On  est  un  peu 
désappointé  en  lisant  ce  livre;  il  est  vrai  que  la  tâche  n'était  pas  ai- 
sée.) —  Tayler,  Thirty-eight  years  in  India,  frorri  Juganath  to  the  Hi- 
malaya mountains.  —  Lyte,  Dunster  and  its  lords.  1 066-1 881.  — 
Edw„  Thomas,  The  indian  Balharâ  and  the  arabian  intercourse  with  In- 
dia in  the  ninth  and  following  centuries.  —  Plutarclrs  Morals,  theoso- 
phical  essays,  translated  by  King.  —  «  Merchant  Taylors  »  school  re- 
gister.  (Ch.  J.  Robinson.)  —  The  «  Quarterly  Review  »  on  Swift. 
(Schrumpf.)  —  The.  «  Yh-King.  ».  (Terrien.de  Lacouperie.)  —  The  life 
and  works  of  the  Chevalier  Noverre,  edited  by  Ch.  Edwin  Noverre.. 

Deutcsae  Literaturzeitimg'.,  n°  36,9  septembre  1882  :  Novum Testamentum 
graece  et  germanice,,p.  p.  O.  de  Gebhardt  (Nowack). —  Seydel,  das  Evan- 
gelium  von  Jesu  in  seinen  Verhâltnissen  zu  Buddha-Sage  und  Buddha- 
Lehre  (Kern). —  Bastian,  Der  Buddhismusin  seiner  Psychologie.  — Schwe- 
gler,  Geschichte  der  griechischen  Philosophie,  hrsg.  v.  Kôstlin  ;  3e  édi- 
tion (Freudenthal  :  livre  remarquable  par  la  clarté  de  l'exposition  et  le 
j ugement  réfléchi  de  Fauteur).  —  Lycophronis  Alexandra,  rec.  Scheer-. 
Vol.  I.  (Wilamowitz  :  publication  très  méritoire;  on  peut  enfin  lire 
Lycophron  ;  ici  le  texte  est  assuré;  œuvre  philologique,  en  somme,  fort 
remarquable).  —  Oekonomides,  Chants  populaires  de  l'Olympe  (Ran- 
gabé).  —  Die  historisch-politischen  Volkslieder  des  dreissigjâhrigen 
Krieges,  aus  fliegenden  Blattern,  sonstigen  Druckwerken  u.  hand- 
schriftl.  Quellen  gesamm.  v.  Ditfurth,  hrsg.  v.  K.  Bartsch  (L.  Mill- 
ier :  recueil  du  plus  haut  intérêt).  —  Appell,  Werther  und  seine  Zeit 
(R.  M.  Werner  :  3e  édition  d'un  ouvrage  fait  avec  grand  soin  et  ins- 
tructif). —  Prôlss,  Geschichte  des  neueren  Dramas,  Il  Band,  II  Hâlfte, 
das  neuere  Drama  der  Englânder  (Mosen  :  suite  d^n  ouvrage  soigné  et 
méritoire,  digne  du  même  accueil  empressé  qui  a  été  fait  aux  précédents 
volumes).  —  Bornmûller  ,  Biographisches  Schriftsteller-Lexicon  der 
Gegenwart,  die  bekanntesten  Zeitgenossen  auf  dem  Gebiete  der  Natio- 
nallitteratur  aller  Vôlker,  mit  Angabe  ihrer  Werke  (Livre  de  grande 
valeur  ;  la  masse  des  détails,  rassemblés  d'ailleurs  avec  tant  de  peine  et 
de  temps,  doit  faire  excuser  les  erreurs  légères  qui  se  rencontrent  çà  et 
là).  —  v.  Wietersheim,  Geschichte  der  Vôlkerwanderung,  2e  Aufi.  bes. 
v.  F.  Dahn  (Bresslau  :  ouvrage  qui  aura  une  place  durable  dans  l'histo- 
riographie allemande).  —  Tomek,  Jean  Ziska,  Versuch  einer  Biographie 
desselben,  ûbersetzt  von  Prochaska  (Krones  :  comble  une  lacune  dans 
l'histoire  de  l'hussitisme;  recherches  menées  avec  grand  soin;  exposition 
claire,  sobre  et  consciencieuse;  rectifie  nombre  d'erreurs  légendaires).  — 
Russische  Wandlungen,  neue  Beitrâge  zur  russischen  Geschichte  von 
Nicolaus  I  zu  Alexander  III  (Caro  :  des  documents  intéressants  et  de 
curieux  détails  qui  rectifient  ou  élargissent  nos  vues  sur  la  Russie  ac- 
tuelle). —  Hiort-Lorenzen,  Annuaire  généalogique  des  maisons  prin- 
cières  régnant  en  Europe  depuis  le  commencement  du  xixe  siècle,  avec 
des  notes  sur  les  mariages  morganatiques.  ire  année  (Berlin,  Puttkam- 
mer  et  Mûhlbrecht).  —  Verhandlungen  des  ersten  deutschen  Geogra- 
phentages  zu  Berlin  am  7  und  8  Juni  1881.  —  Die  Terracotten  von 
Pompeji,  bearb.  v.  Herm.  v.  Rohden,  nach  Zeichnungen  von  Ludwig 
Otto  (Kôrte).  —  Jahresbericht  ûber  die  Verànderungen  und  Fort- 
schritte  im  Militârwesen,  VII  Jahrgang,  1881,  hrsg.  v.  Lôbell. 

Theologische  Literaturzeitung,  n°  19,  a3  sept.   1882  :  Ranke,  Weltge- 


schichte,  I  u.  II.  (Harnack  :  art.  très  élogieux.)  —  Wùnsche,  Bibliotheca 
rabbinica,  eine  Sammlung  alter  Midraschim,  ubers.  9-16  Lieferung.  — 
Lemme,  Das  echte  Ermahnungsschreiben  des  Apostels  Paulus  an  Timo- 
theus.  —  Theodori  episcopi  Mopsuesteni  in  epistolas  B.  Pauli  Commen- 
tarii,  the  latin  version  with  the  greek  fragments,  by  Swete.  —  Zitzlaff, 
Luther  auf  der  Koburg,  ein  Lebens-und  Charakterbild,  nach  Luthers 
eigenen  Briefen  gezeichnet.  (Kolde  :  ouvrage  bien  fait.)  —  Dalton, 
Johannes  a  Lasco.  (Wachtler  :  de  nouveaux  documents,  et  de  nom- 
breuses informations  importantes;  travail  intéressant  pour  l'histoire  de 
la  Réforme  dans  les  pays  où  vécut  Laski.)  —  Mûhlenberg,  Patriarch 
des  lutherischen  Kirche  Nordamerika's,  Selbstbiographie  1711-1743, 
p.  p.  Germann. 

Deutsche  Rundschau,  octobre  1882  :  Conr.  Ferd.  Meyer,  Page  Leubel- 
fing.  (Nouvelle  qu'on  nous  permettra  d'annoncer  ici,  parce  qu'elle  ren- 
ferme un  portrait  de  Gustave-Adolphe  et  une  peinture  de  l'armée  sué- 
doise avant  Lûtzen.)  —  Hoffmann,  Ein  Stiick  nationaler  Arbeit  im 
deutschen  Verkehrswesen. —  Reyer,  Elba,  eine|Studie,  I,  Porto  Ferrajo, 
11.  Osta  Elba.—  Ernst  Haeckel,  Naturanschauung  von  Darwin,  Gœthe 
u.  Lamarck.  —  Flaminio,  Zur  Geschichte  der  rômischen  Frage  u.  des 
Garantiengesetzes.  — Aus  zwei  annectirten  Lândern  Erzâhlungen  ei- 
nes  deutschen  Officiers,  I.  II.  (Commencement  d'un  récit  intéressant; 
impressions  d'enfance  ;  1'  «  officier  allemand  »  raconte  qu'il  naquit  et 
fut  élevé  dans  le  Hanovre,  qu'il  vit  d'assez  près  la  guerre  du  Sleswig- 
Holstein  en  1848  ;  souvenirs  relatifs  à  Ernest  Auguste  et  au  roi  aveugle 
Georges  V.) 


S.  CALVARY  &  Cie,  LIBRAIRIE,  A  BERLIN 


L'ANNEE  ARCHEOLOGIQUE  ET  PHILOLOGIQUE 

REVUE  DES  ÉTUDES  CLASSIQUES 

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classischen  Alterthumswissenschaft  ) 

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L'abonnement  :  3o  Mark  par  année. 


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Le  Puy,  imprimerie  de  Marchessou  fils,  boulevard  Saint-Laurent,  23. 


N°  43  Seizième  année  23  Octobre  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

'      RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ    SOUS    LA    DIRECTION 

m.  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONO!),  G.    PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :   M.  A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 
Un    an,   Paris,   20   fr.  —    Départements,    22    fr.    —    Etranger,    -ib   tr. 


PARIS 


ERNEST    LEROUX,    EDITEUR 

libraire   de    la.  société    asiatique 

de    l'école    des    langues    orientales    vivantes      etc. 

28,    RUE    BONAPARTE,    28 


Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 
t  (Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


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çais  sous  la  direction  de  M.  A.  Bouché-Leclercq.  3  forts  volumes  in-â®.     .     3«    » 

Tome  I.  Histoire  d'Alexandre-le-Grand. 

Tomes  II  et  III.  Les  successeurs  d'Alexandre. 

L'ouvrage    paraît    en    3o   fascicules   à    1    fr.    2  3. 

Le  fascicule  I  vient  de  paraître. 

l'histoire    dé   l'hellénisme    de   j.-g.    droysen   FORME   LA    SUITE   et  le 

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index,  par  Paul  Pikrret,  conservateur  du  Musée  égyptien  du  Louyre.  Un  fort  vo- 
lume in-18  de  65o  pages .  .    .    .     10    » 


PÉRIODIQUES 

The  Academy,  ne  541,  16  septembre  1882  :  Kuenen,  National  religions 
and  universal  religions.  (Fairbain  :  livre  instructif  et  suggestif,  exemple 
remarquable  de  conférences  à  la  fois  scientifiques  et  populaires,  faites 
par  un  savant  éminent  qui  n'a  pas  oublié  l'art  d'une  exposition  aisée  et 
agréable.)  —  Mallock,  Social  equality,  a  short  study  inamissing  science. 

—  Hewlett,  Notes  on  dignities  in  the  peerage  of  Scotland  which  are 
dormant  or  hâve  been  forfeited.  — Hilton,  Chronograms,  i5oo  and 
more  in  number.  —  Actos  ineditos  de  siete  concilios  espaholes,  por  el 
R.  P.  Fidel  Fita.  (W.  Webster.)  —  Récent  Shakspeare  literature  (Hal- 
liwell-Philipps,  Outlines  of  the  life  of  Shakespeare;  Ingleby,  Occa- 
sional  papers  on  Shakespeare  ;  etc.)  —  Trad.  en  vers  anglais  de  trois 
sonnets  de  Camoens.  —  Mr.  Henry  Kendall  (Not.  nécrol.  sur  le  poète 
australien).  —  The  Cambridge  meeting  of  the  library  association.  — 
Tombs  of  british  officers  at  Alexandria.  (Rogers  :  inscriptions  latines 
gravées  sur  les  tombeaux  de  quatre  officiers  anglais  morts  devant 
Alexandrie  au  commencement  de  ce  siècle.)  —  Correspondance.  «  Eus- 
karian  »  or  «  neolithic  »  (Grant  Allen).  —  Merton  collège  and  the 
Jews  (S.  L.  Lee).  —  «  —  Y  final  »  in  Shakspere  (Furnivall).  —  Dr. 
Brinkmeier's  «  Troubadours  ».  (Nicksteed  :  signale  les  traductions  alle- 
mandes de  l'auteur  qui  fourmillent  des  plus  grosses  erreurs  «  with  the 
grossest  blunders  »). —  Delbruck,  Introduction  to  the  study  ol  language, 
authorised  translation,  with  a  préface  by  the  author.  (Sayce  :  l'histoire 
d'une  science  n'a  jamais  été  faite  d'une  façon  plus  claire,  plus  complète  et 
plus  succincte  que  celle  de  la  philologie  comparée  en  Allemagne  par 
M.  Delbruck;  le  caractère  le  plus  frappant  du  livre,  c'est  son  impartia- 
lité). —  Orientalia  antiqua.  —  Etruscan  jottings.  (Sur  le  nouveau  vo- 
lume de  Pauli  et  sur  la  découverte  de  Magliano,  en  Toscane).  —  The 
«  liber  studiorum  »  of  J.  M.  W.  Turner,  reproduced  in  faesimile 
by  the  autotype  process,  with  notices  of  each  plate  by  Stopford  Brooke. 

—  Dorn,  Collections  scientifiques  de  l'institut  des  langues  orientales 
du  ministère  des  affaires  étrangères  «  Inventaire  des  monnaies  des  khali- 
fes orientaux  et  de  plusieurs  autres  dynasties  ».   (Stanley  Lane  Poole.) 

—  Pontormo's  picture  from  Hamilton  palace  in  the  National  Gallery 
(J.  P.  Richter). 

—  N°  542,  23  septembre  1882  :  The  poetical  works  of  Percy 
Bysshe  Shelley,  edited  by  Forman.  2  vols.  (Caine.)  —  Cobbe,  The  peak 
in  Darien,  with  some  other  enquiries  touching  concerns  of  the  soûl  and 
the  body.  —  Seton,  Memoir  of  Alex.  Seton,  earl  of  Dunfermline.  — 
Tibetan  taies,  translated  Irom  the  tibetan  by  Schiefner,  done  into  en- 
glish  from  the  german,  with  introd.  by  Ralston.  —  Strack,  Einleitung 
in  das  alte  Testament.  (Cheyne.)  —  Current  literature  (Réminiscences 
of  and  old  bohemian;  Essays  of  John  Dryden,  éd.  by  Yonge;  etc.)  — 
Dr.  Pusey.  —  «  This  is  how  the  war  began  »  (Viator).  —  Correspon- 
dence  :  Mr.  Ramsay  and  the  greek  professorship  at  Edinburgh.  (Ram- 
say.)  —  The  lost  médical  workof  Marat.  (Morse  Stephens  :  l'auteur  de 
la  note  a  découvert  un  exemplaire  de  l'ouvrage  depuis  lontemps  recher- 
ché et  qu'on  ne  connaissait  que  par  son  titre  :  «  An  enquiry  into 
the  nature,  cause  and  cure  of  a  singular  disease  of  the  eyes  »,  de 
Marat;  l'ouvrage  est  intéressant  parce  qu'il  nous  fait  connaître  les 
idées  scientifiques  de  Marat  et  la  chronologie  de  sa  vie;  Marat  cite  cer- 
taines opérations  qu'il  a  faites;  on  peut  conclure  qu'il  n'était  pas  profes- 
seur de  français,  comme  on  l'a  prétendu,  mais  médecin.)  —  Philologi- 
cal  books  (Tiele,  History  of  the  egyptian  religion,  translated  by 
Ballingal;  Rob.  Brown,  The  law  of  kosmic  order;  etc.)  —  The  princi- 
pe of  analogyin  the  évolution  of  speech.  (Keane).  —  Leader  Scott, 


Ghiberti  and  Donatello,  with  other  early  italian  sculptors.  —  The  Boo- 
lak  Muséum  (Am.  B.  Edwards). 

The  Athenaeum,  n°  2867,  7  octobre  1882  :  A  Lang,  Helen  of  Troy.  — 
Graetz,  Kritischer  Kommentar  zu  den  Psalmen,  nebst  Text  und  Ue- 
bersetzung.  —  Capello  a.  Ivens,  From  Benguella  to  the  territory  of 
Yacca,  description  of  a  journey  into  Central  and  West  Africa.  — 
Archaeological  Survey  of  India  :  report  of  Tours  in  the  Central  Doab 
and  Gorakhpur  in  1874-74  and  1875-76.  Vol.  XII.  —  Baker,  The 
history  of  Scarbrough  from  the  earliest  date.  —  The  Vinaya  Pita- 
kam,  edit.  by  Oldenberg.  III  a.  IV;  Vinaya  Texts,  translated  from 
the  Pâli  by  Rhys  Davids  a.  Oldenberg.  I.  —  Leibnitz's  plan  for  an 
egyptian  expédition.  —  Education  in  Hungary,  I.  (Mahaffy.)  —  The 
sacred  hawk  of  Reseph  al  Arsuf.  (C.  Clermont-Ganneau.)  —  The 
Prince's  visit  to  the  Holy  Land.  —  Perry,  Greek  and  roman  sculpture, 
a  popular  introduction  to  the  history  of  greek  and  roman  sculpture.  — 
Blanchard  Jerrold,  The  life  of  George  Cruikshank,  in  two  epochs. 
2  vols.  —  Notes  from  Rome.  (Lanciani.) 

Deutsche  Literaturzeitung,  n°  37,  16  septembre  1882  :  Thoma,  die  ?Gene- 
sis  des  Johannes-Evangeliums ,  ein  Beitrag  zu  seiner  Auslegung, 
Geschichte  und  Kritik.  (Wendt  :  «  gross  angelegtes  und  mit  Breite  und 
Eleganz  ausgefûhrtes  Werk  »).  —  W.  Meyer,  Die  Geschichte  des  Kreuz- 
holzes  vor  Christus.  (W.  Meyer  fait  suivre  rapidement  son  édition  de 
«  la  Vita  Adae  et  Evae  »  d'un  travail  excellent  sur  la  légende  de  l'his- 
toire du  bois  de  la  croix  avant  Jésus  ;  son  travail  repose  sur  des  maté- 
riaux étendus  et  en  partie  difficilement  accessibles  et  par  là  rejette  déjà 
dans  l'ombre  les  études  méritoires  de  Piper  et  de  Mussafia.)  —  Michelis, 
Platons  Theâtet.  (Heitz  :  doit  être  compté  parmi  les  livres,  qui  ont 
donné  cours  à  cette  opinion,  que  les  Allemands  sont  plutôt  en  état 
d'écrire  beaucoup  de  livres  que  d'écrire  un  bon  livre;  de  la  pénétration, 
mais  méthode  purement  scolastique  et  «  selbstinfallibilitât  »,  nombre 
incroyable  de  légèretés.)  —  Ziegler,  Die  Ethik  der  Griechen  und  Rô- 
mer.  I .  (Gizycki  :  du  soin  ;  l'ouvrage  repose  sur  le  grand  travail  de 
Zeller,  auquel  il  est  dédié,  mais  reste  bien  loin  derrière  sonjmodèle  ;  ceux 
qui  étudient  l'éthique  devront  lire  plutôt  Zeller  que  Ziegler;  des  con- 
tradictions, et  parfois  de  bonnes  pensées,  mais  qui  ne  sont  pas  aussi  origi- 
nales que  le  croit  l'auteur).  —  Mhan-su-faer,  Die  Notwendigkeit  u. 
Môglichkeit  einer  kraftigeren  Zusammenwirkung  der  Volker  auf  dem 
Gebiete  der  Kindererziehung ,  speciell  des  Volksschulwesens.  (Sall- 
wûrk  :  l'auteur  étranger  qui  vit  à  Bonn,  demande  une  réforme  pédagogi- 
que opérée  par  un  congrès  international.)  —  Le  livre  de  Sibawaihi,  traité 
de  grammaire  arabe  par  Sibouya  dit  Sibawaihi,  texte  arabe  d'après  les  mss. 
du  Caire,  de  l'Escurial,  d'Oxford,  de  Pétersbourg  et  de  Vienne  p.  p. 
Hartwig  Derenbourg.  I.  (Siegm.  Frânkél  :  cette  publication  était  depuis 
longtemps  un  vif  souhait  des  arabisants  ;  l'édition  actuelle  répond  entiè- 
rement, pour  la  correction  et  le  soin,  à  toutes  les  exigences  ;  puisse  venir 
bientôt  la  seconde  partie.)  —  Polak,  Ad  Odysseam  ejusque  scholiastas 
curae  secundae.  (Hinrichs  :  l'auteur,  élève  de  Cobet,  a  des  connaissan- 
ces solides  et  sûres,  une  méthode  soignée  et  prévoyante;  grand  savoir, 
diligence  très  louable,  pénétration  et  exactitude  ;  en  un  mot,  une  foule 
de  contributions  importantes  à  la  connaissance  de  la  langue  et  du  style 
de  Didyme,  d'Hérodien,  de  Porphyre,  etc.)  —  Engelbrecht,  De  scolio- 
rum  poesi.  (Hiller  :  travail  digne  de  louange.)  —  K.  Weinhold,  Die 
deutschen  Frauen  in  dem  Mittelalter.  (Roediger  :  2e  édition  d'un  livre 
qui  a  gagné  en  toutes  choses,  pour  le  fond  et  la  forme,  et  qui  mérite 
d'être  consulté  plus  assidûment  que  jamais.)  —  Briefe  von  Charlotte 
von  Kalb  an  Jean  Paulu.  dessen  Gattin,p.  p.  NERRLiCH(Urlichs  :  édition 


bienvenue.)  —  R.  v.  Gottschall,  Die  deutsche  Nationallitteratur  des 
neunzehnten  Jahrhunderts.  (Er.  Schmidt  :  5e  édition  en  quatre  volu- 
mes dont  le  premier  n'a  aucun  mérite  ;  quant  aux  trois  autres,  ils  por- 
tent la  marque  de  la  hâte  et  de  l'incertitude;  ne  comprend  pas  Novalis; 
ne  sait  rien  de  l'école  historique  de  J.  de  Mûller  à  Duncker  ;  etc.,  etc.  ; 
erreurs  nombreuses  ;  oublis  choquants  ;  style  négligé  ou  emphatique  ; 
l'auteur  dit  de  Rûckert  :  «  le  chameau  de  sa  sagesse  marche  à  travers 
maint  désert,  mais  il  est  chargé  des  outres  les  plus  fraîches  »,  et  de 
Schall  «  les  manches  retroussées,  il  puise  avec  sa  grande  cuiller  dans  la 
terrine  fumante  de  la  soupe  de  la  vie  sociale  et  en  sort  quelques  mor- 
ceaux d'exquise  humour  » ,  il  est  vrai,  quelques  bons  mots,  quelques 
critiques  saines,  mais  il  y  a  dans  ce  livre  trop  de  mauvais  et  trop  peu 
de  bon.)  —  Sanders,  Neue  Beitrâge  zur  deutschen  Synonymik.  (Heyne  : 
(t  ein  im  ganzen  recht  gutes  Bûchelchen  »,  petit  livre  fort  bon  comme 
tout  ce  que  fait  Sanders.)  —  Shakespeares  Selbstbekenntnisse,  nach  zum 
Theil  noch  unbenutzten  Quellen  hrsg.  v.  Fritz  Krauss.  (Al.  Schmidt  : 
titre  qui  promet  beaucoup  ;  l'ouvrage  montre  quelles  routes  dangereuses 
a  prises  la  critique  shakespearienne;  c'est  un  tissu  de  fausses  supposi- 
tions, de  contre-sens,  etc.;  on  croirait  presque  que,  comme  l'écrit  de 
Vinning  sur  Hamlet,  le  livre  de  Krauss  est  une  satire  de  la  «  shakespearo- 
logie  »  contemporaine.) —  Hooft  van  Iddekinge,  Friesland  en  de  Friesen 
in  de  middeleeuwen.  (Gallée  :  l'auteur,  mort  depuis,  voulait  donner  un 
exposé  détaillé  de  l'histoire  des  monnaies  en  Frise  au  moyen-âge  ;  beau- 
coup de  fausses  conjectures  sur  l'histoire  proprement  dite  ;  mais  ouvrage 
de  grande  valeur  pour  l'histoire  monétaire.)  —  Chéruel,  Histoire  de 
France  sous  le  ministère  Mazarin.  I.  (Schirren  :  suite  excellente  de  l'ou- 
vrage du  même  auteur  sur  la  minorité  de  Louis  XIV.)  —  Kluckhohn 
Aus  dem  handschriftlichen  Nachlasse  L.  Westenrieders.  I.  Denkwûr- 
digkeiten  und  Tagebûcher  (Th.  H.).  —  Liv.  —  Est  —  und  Curlândi- 
sches  Urkundenbuch,  begrûndet  von  Bunge,  fortges.  v.  Herm.  Hilde- 
brand.  VII.  1423-1429.  —  Theodosius,  de  situ  Terrae  Sanctae  im 
echten  Text  u.  der  Breviarius  de  Hierosolyma,  vervollstândigt  p.  p. 
Gildemeister,  (Furrer  :  édition  critique  fort  remarquable.) 

Philologische  Rundschau,  n°  32,  5  août  1882  :  Ad.  Faust,  Homerische 
Studien  (Dûntzer  :  erreurs.)  —  Lueck,  De  comparationum  et  transla- 
tionum  usu  Sophocleo  (Metzger  :  suite  d'un  travail  soigné).  — '  Koechly, 
Akademische  Vortràge  und  Reden,  neue  Folge  (Sôrgel.)  —  Mewes, 
De  codicis  horatiani,  qui  Blandinius  Vetustissimus  (V)  vocatur,  natura 
atque  indole  (Kukula  :  source  de  déceptions).  —  Kloucek,  Vergiliana 
(Glaser  :  utile).  —  Koch,  Schulwôrterbuch  zur  Aeneide.  —  P.  Devaux, 
Études  politiques  sur  les  principaux  événements  de  l'histoire  romaine, 
Hachette  (posthume;  à  lire  malgré  les  défauts  ;  longueurs  sur  les  temps 
mythiques;  critique  ultra -conservatrice  en  matière  d'histoire  romaine; 
rex,  consul,  etc.,  tirés  du  [celte;  idées  neuves  sur  les  motifs  de  l'expédi- 
tion d'Hannibal.)  —  Fr.  Haase,  Vorlesungen  iiber  lateinische  Sprachwis- 
senschaft,BandII,hgg.vonH.Peter  (Saalfeld:  utile).  —  Schmfxzer,  Grie- 
chische  Syntax  fur  die  Oberklassen  (Gidionsen).  —  Schneegans,  Abt 
Johannes  Trithemius  und  Kloster  Sponheim  (Reichling  :  médiocre  va- 
leur scientifique).  — Seldner,  Lessings  Verhàltnis  zur  altrômischen  Ko- 
môdie  (Steinhoff  :  quelques  passages  concernent  Plaute ,  Amph., 
Gapt.  et  Trin.) 


Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23. 


fi*  44  Seizième  année  30  Octobre  4882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ    SOUS    LA    DIRECTION 

M  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.  PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.   A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 

Un   an,   Paris,   20   fr.  —    Départements,    22    fr.    —    Etranger,    25  fr. 


PARIS 


ERNEST    LEROUX,    EDITEUR 

libraire    de    la    société    asiatique 

de    l'école    des    langues    orientales   vivantes      etc. 

28,    RUE    BONAPARTE,    28 


Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 


HISTOIRE  DE  L'HELLÉNISME  ££ï"- 

çais  sous  la  direction  de  M.  A.  Bouché-Leclercq.  3  forts  volumes  in-8°.     .     3o    » 

Tome  I.  Histoire  d'Alexandre- le-Grand. 

Tomes  II  et  III.  Les  successeurs  d'Alexandre. 

L'ouvrage    paraît    en    3o  fascicules   à    i    fr.    25. 

Le  fascicule  1  vient  de  paraître. 

l'histoire    dé   l'hellénisme    de   j.-g.    droysen   forme   la    suite   et  le 

complément  de  l'histoire  grecque  de  curt1us. 


LES  MOUVEMENTS  DU  SOL  !i T 

France   et    particulièrement    dans    le    golfe     normanno- breton,    par    Alexandre 
Chévremont.  Un  beau  volume  gr.  in-8°,  illustré  de  14  planches  en  couleur.     i5    » 
Ouvrage  honoré   d'une  récompense   par  l'Académie  des  Sciences  et  d'un  rapport 
favorable  de  M.  Alfred  Maury  de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 


TP     T  ÏVR  F     HPÇ     MORTQ     des  anciens  Egyptiens.  Traduc- 
L.JC     L.1  Y  IV  Er     LJJZZ)     iVl^/lX  1  O    tion     complète    avec    notes    et 
index)  par  Paul  Pierret,  conservateur  du  Musée  égyptien  du  Louvre.  Un  fort  vo- 
lume in-18  de  65o  pages .  .    .    .     îo    » 


PÉRIODIQUES 

The  Academy,  n°  543,  3o  septembre  1882  :  Leslie  Stephen,  Swift. 
(Dowden.)  —  Capello  a.  Ivens,  From  Benguella  to  the  territory  of 
Yacca,  description  of  a  journey  into  Central  and  West  Africa.  — 
Thornton,  Foreign  secretaries  of  the  nineteenth  century,  vol.  III. 
(Courtney  :  beaucoup  de  bienveillance,  pas  un  «  foreign  secretary  »  qui 
n'ait  été  digne  de  ses  hautes  fonctions,  quelques  points  contestables.)  — 
Eug.  Rolland,  Faune  populaire  de  la  France,  tome  V  ;  les  mammi- 
fères domestiques,  deuxième  partie  (Ralston).  —  «  Euskarian  »  or 
«  neolithic  »  (Webster). —  The  folio  alterers  of  »  Shakspere's  text.  (Fur- 
nivall).  —  A  gipsy  letter.  —  An  anglo-saxon  dictionary,  based  on 
the  ms.  collections  of  the  late  Joseph  Bosworth,  edited  a.  enlarged  by 
T.  Northcote  Toller.  I  a.  II.  (Skeat  :  ouvrage  très  important  auquel  il 
faut  souhaiter  une  prompte  continuation.)  —  The  Yi-King.  (Legge.) 

—  N°  544,  7  octobre  1882  :  A.  Lang,  Helen  of  Troy.  — 
Laurie,  The  training  of  teachers  and  other  educational  papers.  —  A 
register  of  the  scholars  admitted  into  Merchant  Taylor's  School.  I.  1 562- 
1699  by  C.  J.  Robinson.  (Round).  —  Opéra  patrum  apostolicorum, 
éd.  Funk.  Vol.  II.  démentis  Rom.  Epistulae  de  Virginitale  ejusdem- 
que  Martyrium,  Epistulae  Pseudo-Ignatii,  Ignatii  Martyrii  tria,  Vatica- 
num,  a  Simeone  Metaphrasta  conscriptum,  Latinum;  Papiae  et  senio- 
rum  apud  Irenaeum  Fragmenta;  Polycarpi  Vita.  (Bellesheim  :  sera  uti- 
lement consulté  par  tous  ceux  qui  étudient  l'histoire  ecclésiastique.)  — 
In  Memoriam  Evelyn  Philips  Shirley.  (Edm.  Ch.  Waters).  —  A  compé- 
tition of  basque  improvisatores  (Wentworth  Webster  :  très  intéressant 
récit  d'un  concours  d'improvisation  poétique  entre  Basques,  qui  a  eu  lieu 
le  lundi  1 1  septembre  à  Sare,  dans  les  Basses-Pyrénées.)  —  Correspon- 
dence  :  Thomas  Wedgwood  (Julia  Wedgwood).  —  The  octavo  «  bree- 
ches  »  New  Testament  of  1575.  (Dore).  —  The  etymology  of  «  Kestrel  » 
(Skeat).  —  «  Euskarian  »  (Vinson  et  Harrison).  —  University  Col- 
lège, Bristol.  (Ramsay.)  —  Lenormant,  Les  origines  de  l'histoire  d'après 
la  Bible.  Vol.  II.  (Sayce  :  même  clarté  d'exposition,  même  savoir 
étendu,  moins  d'intérêt  que  dans  le  premier  volume,  mais  la  faute  en 
est  au  sujet,  et  non  à  Fauteur.)  —  Foreign  translations  of  the  Society 
for  promoting  Christian  knowledge.  —  The  Yih  King  (Douglas).  — 
The  psychology  of  buddhism.  (Bastian)  —  A.  Michaelis,  Ancient  mar- 
bles  in  Great  Britain,  translatée!  from  the  german  by  Fennell.  —  The 
Copts  of  Egypt  and  their  churches.  III.  (J.  Henry  Middleton.) 

The  Athenaeum,  n°  2868,  14  octobre  1882  :  Holland,  Stories  from  Ro- 
bert Browning.  —  Kuenen,  National  religions  and  universal  religions. 

—  Anatole  Leroy- Beaulieu,  L'empire  des  tsars  et  les  Russes,  tome  II, 
les  institutions.  (Digne  du  premier  volume  et  mérite  les  mêmes  éloges.) 

—  Hilton,  Chronograms.  —  Oriental  literature.  (Revue  de  l'Extrême 
Orient,  publiée  sous  la  direction  de  M.  Henri  Cordier,  I  et  II  :  pre- 
miers numéros  qui  sont  pleins  de  promesses,  articles  de  grande  valeur, 
mélanges  bien  choisis,  bibliographie  très  complète  et  qui,  continuée  avec 
soin,  sera  du  plus  grand  secours;  Lanzone,  Dizionario  di  mitologia  egi- 
zia.  I-II.)  —  «  Tylney  Hall  »  (Tegg).  —  Roby's  «  traditions  of  Lan- 
cashire  »  (Trestrail).  —  Education  in  Hungary,  II.  (Mahaffy.) — Baron 
de  Cosson  a.  W.  Burges,  Ancient  helmets  and  examples  of  mail. 

Deutsche  Litteraturzeitung,  n"  38,  23  septembre  1882  :  Kraus,  Lerhbuch 
der  Kirchengeschichte  fur  Studierende  (Fund  :  2e  édition  de  cet  ouvrage 
qui  n'a  pas  besoin  d'être  recommandé).  —  S.  J.  Herzog,  Abriss  der  ge- 
sammten  Kirchengeschichte.  III.  Das  Zeitalter  der  Reformation,  etc.  — 
Rud.  Hirzel,  Untersuchungen  zu  Ciceros  philosoph.  Schriften,  II.  De 


finibus,  de  Officiis  (Wellmann  :  trop  long,  exposition  un  peu  confuse, 
mais  beaucoup  de  détails  instructifs  et  dignes  de  remarque).  —  J.  Na- 
than, Kants  logische  Ansichten  und  Leistungen  (Vaihinger  :  la  tâche 
était  trop  vaste  pour  un  débutant).  —  Nathanis  Chytraei  Ludi  litterarii 
ab  amplissimo  senatu  Rostochiensi  in  civium  suorum  utilitatem  nuper 
aperti  Sciographia.  Rostochii  i58o,  hrsg.  v.  Gustav  Timm  (Paulsen).  — 
Carmina  veteris  testamenti  metrice,  notas  criticas  et  dissertationem  de  re 
metrica  Hebraeorum  adj.  G.  Bickell  et  Dichtungen  der  Hebràer,  zum 
ersten  Maie  iibers.  v.  G.  Bickell.  I.  (Baethgen).  —  Niese,  Die  Entwic- 
kelung  der  homerischen  Poésie  (Hinrichs  :  livre  depuis  longtemps  pro- 
mis, et  qui  désappointe,  ne  donne  pas  une  solution  acceptable  de  la 
question  homérique).  —  Plutarque,  Vie  de  Cicéron,  p.  p.  Graux  (édi- 
tion qui  a  une  valeur  scientifique).  —  Burchard  Waldis,  Esopus  hrsg. 
v.  Tittmann  (Baechtold  :  édition  très  soignée).  —  Duntzer,  Lessings 
Leben  (A  Noël  1879,  une  Vie  de  Gœthe  ;  à  Noël  1880,  une  Vie  de  Schil- 
ler; à  Noël  1881,  une  Vie  de  Lessing,  c'est  aller  vite,  même  pour  un 
vétéran  de  la  science;  mais  pourquoi  écrire  contre  Duntzer;  il  est  trop 
facile  de  relever  les  faiblesses  de  ce  micrologue,  et  personne  ne  conver- 
tira son  obstination  ;  pourtant  il  faut  répéter  que  Duntzer  manque  de 
goût,  qu'il  ne  sait  pas  distinguer  l'important  et  le  superflu,  que  le  talent 
d'exposition  lui  fait  défaut.  Il  travaille  avec  ardeur,  mais  on  ne  lit  pas 
ses  ouvrages  sans  un  indicible  ennui,  ce  sont  à  peine  des  livres  utiles  à 
consulter;  partout  du  «  krimskrams  »,  pas  d'idée  nouvelle,  des  regestes, 
des  matériaux  non  dégrossis,  etc.;  tout  cela  n'empêchera  pas  Duntzer 
d'immoler  à  Noël  1882  un  quatrième  classique).  — Gœthes  Dichtung  u. 
Wahrheit,  erlâutert  von  Duntzer  (Lichtenstein  :  ce  second  commen- 
taire, après  celui  de  Loeper,  était-il  bien  utile?)  —  Schôll,  Gœthe  in 
Hauptzûgen  seines  Lebens  und  Wirkens  (L.  Hirzel  :  en  son  ensemble, 
le  livre  le  plus  nourri  et  le  plus  profond  qui  ait  été  écrit  sur  Gœthe).  — 
Sybel  (H.  von),  Entstehung  des  deutschen  Kônigtums  (Kaufmann  : 
2e  édition  qui  paraît  38  ans  après  la  première;  elle  est  remaniée  dans 
toutes  ses  parties  et  essentiellement  améliorée;  l'adversaire  même  ne 
quittera  pas  le  livre  «  ohne  manigfaltige  Anregung,  Belehrung  und  viel- 
fàltigen  Genuss  »).  —  Arnold  Ruge,  Geschichte  unserer  Zeit  von  den 
Freiheitskriegen  bis  zum  Ausbruche  des  deutsch-franzôsischen  Krieges 
(Koser).  —  Summa  Gerhardi,  ein  Formelbuch  aus  der  Zeit  Kônigs  Jo- 
hann von  Bôhmen,  1 3 36- 1345,  hrsg.  v.  Tadra.  —  Domke,  Die  Viril- 
Stimmen  im  Reichsfûrstenrat  von  1495- 1654. 

—  N°  39,  3o  sept.  1882  :  Holtzmann  et  Zoepfel,  Lexikon  fur 
Théologie  u.  Kirchenwesen.  (Pfleiderer  :  très  bon  guide  à  recom- 
mander et  aux  théologiens  et  aux  laïques).  —  Joannis  Calvini 
opéra  quae  supersunt  omnia,  p.  p.  G.  Baum,  Ed.  Cunitz,  Ed.  Reuss. 
Vol.  XXIII.  Corpus  Reformatorum,  vol.  LI.  (Kolde  :  commence  la  3e 
partie  des  œuvres  de  Calvin,  qui  renfermera  les  œuvres  exégétiques  et 
homilétiques). —  Rolph,  Biologische  Problème.  —  V.  Egger,  La  parole 
intérieure.  (A.  Riehl  :  intéressant  pour  le  psychologue  et  le  linguiste 
observations  exactes,  réflexions  pénétrantes  et  profondes).  —  L.  Mabil- 
leau,  Etude  historique  sur  la  philosophie  de  la  Renaissance  en 'Italie, 
Cesare  Cremonini.  (F.  Schultze  :  travail  fait  avec  un  grand  soin).  —  Die 
Universitàt  Freiburg  seit  dem  Regierungsantritt  Sr.  Kônigl.  Hoheit  d. 
Grossherzogs  Friedrich  v.  Baden.  —  Winers  chaldàische  Grammatik  flir 
Bibel  und  Targumim,  3e  Aufl.  pp.  Bernh.  Fischer.  (J.  Barth  :  travail 
déplorable,  livre  qui,  sous  cette  forme,  n'a  aucune  valeur  et  sera  nuisible 
à  l'étudiant).  —  P.  Girard,  L'Asclépieion  d'Athènes.  (Wilamowitz  :  art. 
de  discussion).  — V.  Cucheval,  Histoire  de  l'éloquence  latine  depuis  l'o- 
rigine de  Rome  jusqu'à  Cicéron,  d'après  les  notes  de  M.  Ad.  Berger. 


(Reifferscheid  :  au  dessous  du  niveau  qu'ont  atteint  aujourd'hui  en 
France  les  études  de  l'antiquité).  — Jebb,  Bentley.  Londres,  Macmillan, 
(F.  Léo  :  récit  très  attachant,  fait  avec  un  sens  philologique  clair  et  beau- 
coup de  finesse  ;  c'est  bien  là  la  puissante  personnalité  scientifique  de 
Bentley,  obscurcie  par  des  petitesses  et  des  violences  de  langage).  —  Th. 
Zahn,  Cyprian  von  Antiochien  u.  die  deutsche  Faustsage.  (Zoepffel  . 
préfère  la  première  partie  à  la  seconde).  —  Das  Volksschauspiel  Doctor 
Johann  Faust,  hrsg.  v.  K.  Engel.  —  Goethes  Faust,  ein  Fragment,  p.  p. 
Holland  et  Seuffert.  (D.  Jacoby).  —  Creizenach,  Die  Bûhnengeschichte 
des  Doctor  Faust.  (Seuffert  :  bon  travail).  —  Thomas  ot  Erceldoune 
hrsg.  v.  A.  Brandl.  (Ten  Brink  :  édition  instructive).  —  Luigi  Tansillo, 
poésie  liriche,  p.  p.  Fiorentino  (A.  Tobler).  —  Tartara,  dalla  battaglia 
délia  Trebbia  e  quella  dal  Trasimeno  (Holm  :  mérite  grande  attention). 
—  Preussen  u.  Frankreich  von  1795  bis  1807,  p.  p.  BAiLLEu(Iraacsohn  : 
publication  de  grande  valeur  et  de  grand  intérêt).  —  Andraeas,  der  Or- 
den  der  Odd-Fellows.  —  Nachtigal,  Sahara  u.  Sûdân.  II.  —  Ed.  de  La 
Fontaine,  Luxemburger  Sagen  und  Legenden.  (E.  H.  Meyer  :  recueil 
fait  avec  soin,  mais  les  légendes  n'ont  pas  une  grande  valeur).  —  Lord 
Ronald  Gower,  Die  Schàtze  der  grossen  Gemàlde-Gallerien  Englands. 
Ie  Lief.  —  Al.  Franken,  Romanisten  und  Germanisten.  —  F.  Mangold, 
der  Bûrgerkrieg  in  den  Vereinigten  Staten,  Der  Feldzug  in  Nordvirgi- 
nien  im  August  1862.  (L'ouvrage  le  plus  remarquable  qui  ait  paru  sur 
la  guerre  de  la  sécession. 

Theologische  Literaturzeitung,  n°  20,  7  octobre  1882  :  Theodosius,  de 
situ  Terrae  Sanctae,  éd.  Gildemeister  (Furrer  :  très  grand  soin,  nom- 
breuses explications  intéressantes).  —  Vilmar,  Collegium  biblicum, 
Êrakt.  Erklàr.  der  heiligen  Schrift  Alten  u.  Neuen  Testaments.  IL  Das 
uch  Josua  bis  Esther.  (Holtzmann.)  —  Menegoz,  Le  péché  et  la  ré- 
demption d'après  saint  Paul.  (Wendt.)  —  Kraus,  Lehrbuch  der  Kir- 
chengeschichte  fur  Studierende.  (Harnack  :  2e  édition,  le  livre  n'a  pas 
été  modifié.)  —  Zahn,  Cyprian  von  Antiochien  u.  die  deutsche  Faust- 
sage.  (Bonwetsch.) —  Friedrich,  Beitrâge  zur  Geschichte  des  Jesuiten- 
ordens.  (Môller.)  —  Brosch,  Geschichte  des  Kirchenstaates.  IL  1700- 
1870.  (Benrath  :  très  intéressant  et  instructif.)  —  Braun,  Protestantismus 
u.  Sekten.  —  ScHàFER,  Bibel  und  Wissenschaft.  (Thônes.)  —  Riehm, 
Religion  u.  Wissenschaft. 

Athenaeum  belge,  n°  19,  ier  octobre  1882  :  Wauters,  Table  chronolo- 
gique des  chartes  et  diplômes  imprimés  concernant  l'histoire  de  la  Bel- 
gique. Introduction  au  tome  VI.  1881.  (Bruxelles,  Hayez.)  —  Corresp. 
de  Paris  (Fabre,  La  jeunesse  de  Fléchier;  de  Magnienville,  Le  maré- 
chal d'Humières;  Campardon,  Les  prodigalités  d'un  fermier-général; 
Nauroy,  Le  secret  des  Bourbons  ;  G.  Augustin  Thierry,  Le  capitaine 
Sans-Façon;  Macaulay,  Essais,  VIII,  trad.  par  G.  Guizot.)  —  Fouilles 
exécutées  parla  société  archéologique  de  Namur  en  1880.  III.  —  Ju- 
les César  et  les  Eburons.  (Rapport  du  général  Liagre  sur  le  travail  de 
M.  Henrard)  —  L'institut  de  droit  international.  —  Chronique  (No- 
tices sur  les  fondations  pieuses  et  charitables  des  marchands  flamands 
en  Espagne).—  Philippson,  Westeuropa  im  Zeitalter  von  Philipp  II, 
Elisabeth  u.  Heinrich  IV.) 


Le  Puy,  imprimerie  Marckessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23. 


A0  45  Seizième  année       6  Novembre  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ    SOUS   LA    DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 

Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.   Chuquet 

Prix  d'abonnement  : 
Un    an,   Pans,   20   fr.  —   Départements,    22   fr.    —   Etranger,    25  fr 

PARIS 

ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

libraire   de   la    société    asiatique 

de    l'école    des    langues    orientales    vivantes      etc. 

28,    RUE    BONAPARTE,    28 

Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  À  M.  A.  Chuquet 
(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 

ERNEST  LEROUXTeIMTE^ 

RECUEIL  DE  VOYAGES  ET  DE  DOCUMENTS  POUR  SERVIR 

A    L'HISTOIRE    DE     LA     GÉOGRAPHIE 

DEPUIS  LE  XIIIe   SIÈCLE  JUSQU'A    LA     FIN   DU    XVIe    SIÈCLE 

Sous  la  direction  de  M.  SGHEFER,  membre  de  l'Institut,  et  de  M.  H.  CORDIER. 

Cette  collection,  imprimée  avec  le  plus  grand  soin  sur  très  beau  papier,  est  tirée  à 
25o  exemplaires ,  plus  25  sur  papier  vergé  de  Hollande. 

I.  JEAN  ET  SÉBASTIEN  CABOT,  " 

leurs  voyages.  Etude  d'histoire  critique,  suivie  d'une  cartographie,  d'une  biblio- 
graphie et  d'une  chronologie  des  voyages  au  Nord-Ouest,  de  1497  à  i56o,  d'après 
des  documents  inédits,  par  M.  Henry  Harrisse.  i  beau  vol.  grand  in-8,  avec  un 
portulan  reproduit  en  fac-similé  par   Pilinski 2  5  fr. 

—  Le  même,  sur  grand  papier  de  Hollande 40  fr. 

II.  LE  VOYAGE  DE  LA  SAINCTE  CYTÉ 

DUïCDTÎC  A  T  EA/I  fait  l'an  mil  quatre  cens  quatre  vingtz. 
E  111Jl,I\U  jA  L-ClVl,  estant  le  siège  du  Grand  Turc  à  Rhodes 
et  régnant  en  France  Loys  unziesme  de  ce  nom.  Publié  par  M.  Schefer.  i  beau 
vol.  gr.  in-8 16  fr. 

—  Le  même,  sur  grand  papier  de  Hollande 25  fr. 

III.  LES  CORTE  REAL  ET  LEURS  VOYA- 
GES AU  NOUVEAU  MONDE,  ^STJt 

veaux  ou  peu  connus,  tirés  des  archives  de  Portugal  et  d'Italie,  suivi  du  texte  inédit 
d'un  récit  de  la  troisième  expédition  de  Gaspard  Corte  Real  et  d'une  carte  portu- 
gaise de  l'année  ibo2,  reproduite  ici  pour  la  première  fois  en  photogravure  et  en 
chromolithographie.  1  vol.  et  une  carte  en  étui 2.5  fr. 


PÉRIODIQUES 

The  Academy,  nG  545,  14  octobre  1882  :  Farrar,  The  early  days  of 
christianity.  (Drummond.)  —  The  friendships  of  Mary  Russell  Mitford, 
as  recorded  in  letters  from  her  literary  correspondents,  edited  by 
L'Estrange.  (Dowden.)  —  Ornsby,  York.  «  Diocesan  historiés  »  (Fow- 
ler).  —  Sarborn,  Henry  D.  Thoreau.  «  American  men  of  letters  ». 
(Désappointe,  parle  trop  de  Concord  et  pas  assez  de  Thoreau,  livre  mal 
proportionné.)  —  Perret,  Les  Pyrénées  françaises.  (W.    Webster.)  — 

—  Some  foreign  books  of  history  (Baumgarten,  Vor  der  Bartholomaus- 
nacht;  Combes,  L'entrevue  de  Bayonne  ;  Morosi,  L'invito  di  Eudos- 
sia  a  Gensenio  ;  Scheffer-Boichorst,  Aus  Dante's  Verbannungszeit  ; 
Hubert,  La  condition  des  protestants  en  Belgique  de  Charles  Quint  à 
Joseph  II).  —  Popular  names  of  fishes  (Houghton).  —  Euskarian. 
(Isaac  Taylor.)  — The  origin  of  the  Roumanians  (Fairfield).  —  The 
Merchant  Taylor's  registers.  —  The  New  Testament  of  i5y5  (Zupitza). 

—  P.  Vergilii  Maronis  Opéra,  with  an  introd.  a.  notes  by  Papil- 
lon. 2  vols.  (Wilkins  :  ce  n'est  pas  l'idéal  d'un  commentaire  de  Vir- 
gile, mais  cette  édition  approche  de  l'idéal  plus  que  toute  autre  édition 
anglaise.)  —  Dr.  Schliemann's  «  Ilios  ».  —  The  Copts  of  Egypt  and 
their  churches.  III.  (Middleton.) 

Literarisches  Centralblatt,  n°  37,  9  septembre  1882  :  Stier,  Kurzgef.  he- 
brâische  Grammatik.  —  Hoffmann,  Bibelforschungen,  I.  —  Kôrner, 
Tezel,  der  Ablassprediger  (très  soigné).  —  Kolber  ,  Schopenhauer's 
Erlosungslehre.  —  Duboc,  Der  Optimismus  als  Weltanschauung.  — 
Heidemann,  Die  Mark  Brandenburg  unter  Jobst  von  Mâhren  (Travail 
très  utile  qui  dissipe  tout  le  romanesque  introduit  par  Klôden  dans 
l'histoire  de  ce  temps-là).  —  Leist,  Urkundenlehre,  Katechismus  der 
Diplomatik,  Palaographie,  Chronologie  u.  Sphragistik  (Ouvrage  qui  ré- 
pond à  un  besoin  sensible  et  qui  sera  un  guide  bienvenu  aux  commen- 
çants.)—  Pernwerth  von  BâRNSTEiN,  Beitrâge  zur  Geschichte  11.  Litera- 
tur  des  deutschen  Studententhums  (Intéressant).  —  Schlagintweit, 
Indien  in  Wort  und  Bild.  —  Loehnis,  Die  wichtigsten  Ergebnisse  ei- 
ner  Informationsreise  in  die  Levante  an  Bord  des  Dampfers  Lucifer.  — 
Brûlcke,  Die  Entwickl.  der  Reichsstandschaft  der  Stàdte,  ein  Beitrag 
zur  Geschichte  der  Reichstage  von  der  Mitte  des  XIII.  bis  ziirn  Ende 
des  XIV.  Jahrhunderts.  —  Calmann,  Etymolog.  Grundsàtze  und  Auf- 
sàtze.  —  Celtes1  fûnf  Bûcher  Epigramme,  hrsg.  v.  Hartfelder  (Bonne 
édition  avec  notes).  —  Gregorius  von  Hartmann  von  Aue,  u.  Der  arme 
Heinrich,  hrsg.  v.  Paul  (Très  louable).  —  Schmelzer,  Vom  hôheren 
Schulwesen.  —  Rollett,  Die  Gœthe-Bildnisse,  III. 

N°  38,  16  septembre  1882  :  Ableiter,  hebrâisches  Vokabularium  in 
alphab.  Ordnung.  —  Orelli,  die  alttestamentl.  Weissagung  v.  d.  Vol- 
lendung  des  Gottesreiches  in  ihrer  geschichtl.  Entwickelung.  —  Heman, 
Die  Erscheinung  der  Dinge  in  der  Wahrnehmung.  —  Plumacher, 
Der  Kampf  um's  Unbewusste.  —  Czerny,  Der  erste  Bauernaufstand  in 
Oesterreich  i525  (très  bon  travail  d'un  chanoine,  bibliothécaire  de 
Saint-Florian).  —  Reissenberger,  Prinzessin  Maria  Christierna  von 
Innerôsterreich.  1 574-1631.  (Histoire  d'une  princesse  qui  fut,  elle  aussi, 
une  malheureuse  victime  de  la  politique;  elle  était  mariée  à  l'impuissant 
Sigismond  Bathory). —  Doehn.  Die  Administration  der  Pràsidenten  U. 
S.  Grant  und  R.  B.  Hayes.  (Recueil  d'essais  vieillis  qui  ne  se  distin- 
guent ni  par  l'originalité  de  la  pensée  ni  par  la  fraîcheur  de  l'expression  ; 
à  quoi  bon  rééditer  ces  correspondances  de  la  tante  Voss  et  de  «  Unsere 
Zeit  »,  où  il  n'y  a  pas  une  idée  neuve  ;  ce  livre  ressemble  à  du  foin  en- 
fermé et  semé  dans  un  bel  album  ;  tant  pis  pour  le  papier  qui  est  ma- 


gniJique).  —  Braune  (Th.),  observationes  grammaticae  et  criticae  ad 
usum  ita  sic  tam  {tamen)  adeo  particularum  Plautinum  ac  Terentium 
spectantes.  (Latin  médiocre,  n'épuise  pas  le  sujet,  beaucoup  de  choses  té- 
méraires ou  insuffisantes).  —  Messire  Thibaut,  Il  romanz  de  la  poire, 
p.  p.  Stehlich.  (L'auteur  a  trop  présumé  de  ses  forces  et  n'a  pas  fait,  du 
reste,  tout  ce  qu'il  pouvait  faire).  —  Morel-Fatio,  Calderon,  revue  criti- 
que des  travaux  d'érudition  publiés  en  Espagne  à  l'occasion  du  second 
centenaire  de  la  mort  du  poète.  (Communications  précieuses  d'un  con- 
naisseur très  estimé  de  la  littérature  espagnole). —  Gcethe'sDichtung  u. 
Wahrheit,  erlàutert  v.  Dûntzer  (En  ce  qui  concerne  le  commentaire, 
tout  à  fait  inutile  à  qui  possède  l'édition  de  Loeper,  mais  la  Ire  partie, 
qui  renferme  l'introduction,  contient  beaucoup  d'informations  intéres- 
santes). —  Lasaulx,  Die  Bausteine  des  Kôlner  Dômes.  —  Das  Nibe- 
lungenlied,  in  der  Octave  nachgedichtet  von  Adalbert  Schroeter.  (Le 
poète  s'est  brillamment  acquitté  de  sa  tâche  ;  il  y  a  dans  ses  vers  une  har- 
monie et  dans  sa  diction  un  éclat  que  l'on  ne  rencontre  aujourd'hui 
que  chez  peu  de  poètes  ;  publication  de  très  haute  valeur  qu'il  faut 
répandre  dans  le  grand  public). 

Philologische  Wochensehrift,  n°  3i,  5  août  1882  :  K.  L.  Roth,  Griech- 
ische  Geschichte,  3.  Aufl.  v.  Westermeyer  (G.  J.  Schneider  :  bon,  mais 
ne  convient  pas  à  la  lecture  en  classe.)  —  Trzesohlavy,  sur  des  contra- 
dictions réelles  ou  prétendues  dans  le  premier  chant  de  l'Enéide,  en 
tchèque  (Neudoerfl).  —  C.  Taciti  de  moribus  Germanorum  libellus, 
édition  revue,  etc.,  par  M.  E.  Dupdv.  Delalain.  1881  (ne  donne  pas, 
comme  le  promet  la  préface,  «les  résultats  de  l'érudition  moderne»;  l'au- 
teur ignore  Gantrelle,  exploite  mal  Orelli,  Halm,  Nipperdey,  Mûl- 
lenhoff;  orthographe  défectueuse;  erreurs  de  critique 'verbale,  de  géo- 
graphie; l'intention  de  comparer  les  Germains  aux  Romains  est 
méconnue.)  —  Deecke,  Etruskische  Forschungen  und  Studien 
(Gruppe  :  la  méthode  n'est  pas  celle  de  Champollion  ou  de  Grotefendj. 

N°  32,  12  août  1882  :  Lucian  Mueller,  Zwôlf  Oden  und  Epoden  des 
Horaz,  im  Versmass  der  Urschrift  ûbersetzt  (Hirschfelder) .  —  Pluess, 
Horazstudien,  alte  und  neue  Aufsâtze  ûber  Horazische  Lyrik  (Hirsch- 
felder :  chaude  recommandation.)  —  Schindler,  Observationes  criticae 
et  historicae  in  Terentium  (Draheim  :  sensé).  —  Viliiers  Stuart,  The 
funeral  tentof  an  Egyptian  queen,  printed  in  colours  from  the  author's 
drawings  taken  at  Boulak  (H.  Bfrugsch]  :  l'auteur  n'est  pas  du  métier, 
mais  décrit  agréablement). 

N°  33,  19  août  1882  ;  Pierret,  Le  décret  trilingue  de  Canope.  Le- 
roux, 1881  (H.  :  mauvais).  — '  Kraffert,  Beitrâge  zur  Kritik  und  Er- 
klàrung  lateinischer  Autoren.  —  Braune,  Observationes  grammaticae 
et  criticae  ad  usum  «  ita  sic  tam  tamen  adeo  »  particularum  Plautinum 
ac  Terentianum  spectantes  (Mosbach  :  article  détaillé).  —  Dietrich,  Dr. 
Hermann  Warschauers  Uebungsbuch  zum  Uebersetzen  aus  dem  Deut- 
schen  in  das  Lateinische,  Vokabularium  im  Anschluss  an  Dr.  H.  War- 
schauers Uebungsbuch.  / 

Philologische  Rundschau,  n°  33,  12  août  1882  :  Maerkel,  Platos  Idealstaat 
dargestellt  und  mit  besonderer  Rûcksicht  auf  die  moderne  Zeit  beurteilt 
(éloge).  —  Leuchtenberger,  Dispositive  Inhaltsûbersicht  der  drei  Olyn- 
thischen  Reden  des  Demosthenes  (Sôrgel  :  diffus). —  Roeder,  Ueber  C.  G. 
Cobets  Emendationen  der  attischen  Redner,  insbesondere  des  Isaios 
(Zurborg  :  bonne  défense  de  la  tradition  dans  une  quinzaine  de  passages). 
—  Albii  Tibulli  carmina  selecta.  Torino,  stamp.  Paravia  (Rossberg  : 
nulle  valeur  scientifique;  ne  serait  pas  à  imiter  en  Allemagne).  —  Vah- 


len,  Ueber  zwei  Elegien  des  Propertius  (Heydenreich  :  bonne  défense 
de  l'ordre  traditionnel  des  vers,  contre  Lachmann).  —  The  life  of  Agri- 
cola  and  Germany,  by  P.  Cornélius  Tacitus,  edited  by  W.  F.  Allen. 
Boston,  Ginn,  HeathandCo.,  1881  (Eussner  :  des  défauts,  mais  «  gesch- 
mackvoll  und  irri  Ganzen  brauchbar  »).  —  Hillen,  Die  alttestamentli- 
che  Chochma,  der  platonisch-philonische  Logos  und  der  chinesische 
Tao  (H.  F.  Mûller  :  catholique;  si  Lao-Tse  connaît  la  Trinité,  c'est 
que,  dans  leur  migration  après  le  déluge,  les  Chinois  en  ont  emporté  la 
notion,  révélée  dans  le  Paradis-à  Adam  et  Eve,  et  transmise  dans  les  fa- 
milles des  justes  jusqu'au  déluge).  —  Ziemer,  Junggrammatische  Streif- 
zûge  im  Gebiete  der  Syntax  (Kautzmann  :  histoire  manquée  de  la  jeune 
école  linguistique;  les  théories  sont  à  lire).  —  Woltjer,  Oratio  de  summi 
philologi  imagine  cuique  philologiae  studioso  spectanda.  Groni  ngae, 
Wolters  (Muff  :  éloges).  —  Poelchau,  Das  Bûcherwesen  im  Mittel  alter 
(Hamann  :  a  pu  plaire  à  l'auditoire  dans  l'aula  du  gymnase  municipal 
de  Riga,  mais  ne  doit  pas  être  imprimé  impunément  en  Allemagne).  — 
Heussner,  Johann-Heinrich  Voss  als  Schulmann  in  Eutin  (méthode  ri- 
goureuse employée  dans  l'enseignement  par  le  célèbre  traducteur-poète; 
son  dédain  pour  les  exercices  d'école  en  langue  latine).  —  Annonce 
d'une  réimpression  de  feu  Baumstark,  Cornelii  Taciti  Germania,  plai- 
dant les  circonstances  atténuantes  pour  ses  vivacités  de  polémique. 

N°  34,  19  août  1882  :  C.  Rothe,  De  vetere,  quem  ex  Odyssea  Kirch- 
hoffius  eruit,  N02TQI  (Gemoll  :  12  pages  seulement  sur  29  ont  de  la  va- 
leur; latin  peu  cicéronien).  —  Keck,  Ein  kleiner  Beitrag  zur  Erklârung 
und  Verbesserung  von  Sophokles1  Antigone  (Metzger).  —  Schûtz,  Q.  Ho- 
ratius  Flaccus  Satiren  (article  de  10  colonnes  :  un  peu  trop  savant  pour 
les  classes).  —  Kolster,  Vergils  Eklogen  in  ihrer  strophischen  Gliede- 
rung  nachgewiesen  mit  Kommentar  (Glaser  :  procède  «  à  la  Prokustes  » 
[sic]).  —  Bernstaedt,  Tibulls  Elegieen  in  das  Deutsche  ûbersetzt  (Ross- 
berg).  —  Thomé,  De  Flori  rerum  scriptoris  elocutione  (Georges  :  appro- 
fondi; soutient  l'identité  avec  Florus  le  poète,  et  avec  Florus  auteur  du 
fragment  sur  Virgile  orateur  ou  poète).  —  Hamann,  Weitere  Mitteilun- 
gen  aus  dem  Breviloquus  Benthemianus,  enthaltend  Beitrâge  zur  Text- 
kritik  der  Vulgata,  nebst  einem  Anhang  :  Abschnitte  aus  dem  Liber  de- 
rivationum  des  Ugutio  von  Pisa  (Rônsch  :  précieux  ;  emploi  regrettable 
des  Glossaria  Labbaei).  —  O.  Wolff,  Quaestiones  Iophonteae  (Metz- 
ger :  résultat  non  proportionné  au  travail  ;  l'action  intentée  contre  So- 
phocle serait  une  fiction  d'un  comique). 

Theologische  Literaturzeitung,  nr  21,  21  octobre  1802  :  Zôckxer,  Hand- 
buch  der  theologischen  Wissenschaften  in  encyclopàdischer  Darstellung 
mit  besond.  Rûcksicht  auf  die  Entwickelungs-geschichte  der  einzelnen 
Disciplinen.  (Nestlé  :  ce  commencement  de  l'ouvrage  est  assez  bon,  mais 
n'est  pas  destiné  à  faire  avancer  la  science  théologique.)  —  Kûhn.  Eze- 
chiels  Gesicht  vom  Tempel  der  Vollendungszeit.  —  The  New  Testa- 
ment in  the  original  greek,  the  text  revised  by  Westcott  a.  Hort. 
(Long  art.  de  Bertheau.)  —  Buss,  Winfrind-Bonifacius,  aus  dem  literar. 
Nachlasse,  hrsg.  v.  R.  von  Scherer.  (Zoepffel  :  le  texte  de  Buss  n'en- 
richit pas  la  science,  mais  les  remarques  de  Scherer  méritent  la  plus 
grande  attention  et  apprennent  bien  plus  que  la  plupart  des  monogra- 
phies contemporaines  sur  Boniface.)  —  Pfahler,  St  Bonifacius  u. 
seine  Zeit.  (Zoepffel  :  très  louable.)  —  Engelbach,  Die  Frauen  der  heili- 
gen  Schrift,  dem  deutschen  Hause  gewidmet.  (Strack.) 


Le  Puy,  imprimerie  Marchessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23. 


N0  46  Seizième  année     13  Novembre  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ    SOUS    LA    DIRECTION 

o»  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PAKIS 

Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 

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Un    an,   Paris,   20   fr.  —    Départements,    22  Tr.    —    Etranger,    zb   fr 

PARIS 
ERNEST    LEROUX,    ÉDITEU R 

LIBRAIRE     DE     LA      SOCIÉTÉ     ASIATIQUE 

Dfc     I.  'ÉCOLE      DES     LANGUES     ORIENTALES     VIVANTES         ETC. 

28,    RUE    BONAPARTE,    28 

Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 
(An  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 

ÈRNEST~LEROUX,  É D ITE  U  R,  2 8,  RUE  BO NÀP A RT eT^T 

RECUEIL  DE  VOYAGES  ET  DE  DOCUMENTS  POUR  SERVIR 

A    L'HISTOIRE    DE     LA     GÉOGRAPHIE 

DEPUIS  LE  XIIIe   SIÈCLE  JUSQU'A    LA     FIN    DU    XVIe    SIECLE 

Sous  la  direction  de  M.  SCHEFER,  membre  de  l'Institut,  et  de  M.  H.  CORNER. 

Cette  collection^  imprimée  avec  le  plus  grand  soin  sur  très  beau  papier,  est  tirée  à 
25 o  exemplaires,  plus  É5  sur  papier  vergé  de  Hollande. 

I.  JEAN  ET  SEBASTIEN  CABOT,  %<t 

leurs  voyages.  Etude  d'histoire  critique,  suivie  d'une  cartographie,  d'une  biblio- 
graphie et  d'une  chronologie  des  voyages  au  Nord-Ouest,  de  1497  à  i56o,  d'après 
des  documents  inédits,  par  M.  Henry  Harrisse.  i  beau  vol.  grand  in-8,  avec  un 
portulan  reproduit  en  fac-similé  par  Pilinski 25  fr. 

—  Le  même,  sur  grand  papier  de  Hollande 40  fr. 

II.  LE  VOYAGE  DE  LA  SAINCTE  CYTÉ 

Drj  TJTCDT  TC  A  T  T7T\/T  fait  l'an  mil  quatre  cens  quatre  vingtz, 
L,  lll  JtliX  U  Or\  LJClVl  ,  estant  le  siège  du  Grand  Turc  à  Rhodes 
et  régnant  en  France  Loys  unziesme  de  ce  nom.  Publié  par  M.  Schefer.  i  beau 
vol.  gr.  in-8 16  fr. 

—  Le  même,  sur  grand  papier  de  Hollande 2  5  fr. 

III.  LES  CORTE  REAL  ET  LEURS  VOYA- 
GES AU  NOUVEAU  MONDE,  ££££ 

veaux  ou  peu  connus,  tirés  des  archives  de  Portugal  et  d'Italie,  suivi  du  texte  inédit 
d'un  récit  de  la  troisième  expédition  de  Gaspard  Corte  Real  et  d'une  carte  portu- 
gaise de  l'année  i5o2,  reproduite  ici  pour  la  première  fois  en  photogravure  et  en 
chromolithographie.  1  vol.  et  une  carte  en  étui 2.5  fr. 


PÉRIODIQUES 

The  Academy,  n°  546,  21  octobre  1882  :  HoLLAND,Stories  from  Brow- 
ning. —  Cory,  A  guide  to  modem  english  history.  II,  i83o-i835.  — 
The  Roxburghe  Ballads,  éd.  by  Ebsworth.  IV,  1.  —  Schmidt,  Die 
Ethik  der  aken  Griechen.  (Richards  :  recueil  de  matériaux,  très  utile 
pour  l'histoire  de  l'éthique  grecque,  manque  trop  de  clarté,  pas  de  li- 
gnes générales.)— Récent  school  books. —  Obituary.  Dr.  A.  C.  Burnell 
(Max  Mûller).  —  A  new  celtiberian  inscription.  (Fita.)  —  Darwin's  re- 
ligion. (Ingleby.) —  A  passage  in  the  «  laery  queen.  »  (Mayhew).  — 
The  spelling  of  romany.  (Liiiengro.)  —  The  nationality  of  the  Rou- 
mains. (Keary.)  — The  New  Testament  ol  1 575  (Dore).  —  «  The  Digby 
Mysteries  ».  (Furnivall.)  — A  catalogue  of  the  sanskrit  mss.  at  Puna. 
—  Brentano,  Troja  und  Neu-Ilion.  (Mahaffy).  —  Tbe  destruction  of 
Cairo.  —  The  painter  Pieter  Claesz,  of  Harlem.  (S.  Colvin.) 

The  Athenaeum,  n°  2869,  21  oct.  1882  :  The  friendships  of  Mary  Rus- 
sell  Mitford,  as  recorded  in  letters  from  her  liîerary  correspondents, 
edited  by  L'Estrange.  (Correspondance  qui  renferme  des  passages  cu- 
rieux.) —  Saintsbury,  A  short  history  of  french  literature.  (Travail 
excellent  qui  fait  grand  honneur  à  son  auteur;  à  certains  égards  «  a 
masterpiece  »  ;  traite  le  sujet  de  première  main;  récit  clair  et  limpide;  à 
la  fois  bref  et  complet;  plan  ingénieux,  etc.;  quelques  défauts,  M.  Saints- 
bury est  le  dernier  romantique.)  —  Madvig,  Die  Verfassung  und 
Verwaltung  des  romischen  Staates.  (Ne  fera  pas  époque  dans  l'étude  de 
l'histoire  romaine;  peu  de  nouveau  et  trop  souvent  conservateur  et  dog- 
matique de  ton;  mais  savoir  étendu,  pas  d'hypothèses  aventureuses,  pas 
de  fausses  analogies,  œuvre  très  utile.) —  De  Vere,  The  Foray  of  Queen 
Meave  and  other  legends  of  Ireland's  heroic  âge.  —  The  Historye  of 
the  Bermudaes  or  Summer  Islands,  edited  from  a  ms.  in  the  Sloane 
collection,  British  Muséum,  by  gênerai  sir  J.  Henry  Lefroy.  Hakluyt 
Society.  —  Compulsory  registration  of  book  titles.  (Hoog.)  —  Helen  in 
the  Iliad  and  Odyssey.  (Lang.)  —  Prof.  Karl  von  Halm.  —  «  The  Com- 
pleat  Angler  ».  (Satchell.)  —  Thomas  Lodge  at  school  (Gosse).  —  Dr. 
Abel's  linguistic  essays.  —  Notes  from  Athens.  (Lambros.) 

Literarisches  Gentralblatt,  n°  39,  23  septembre  1882  :  Kaulen,  Einlei- 
tung  in  die  heilige  Schrift  alten  u.  neuen  Testaments.  II,  1.  —  Kopf- 
stein,  Die  Asaph-Psalmen  hist.  crit.  untersucht.  —  Rôntsch,  Jesus- 
Messias,  der  Herr  und  sein  Volk,  ein  pragmat.  Abriss  der  evangel. 
Geschichte.  (Ne  renferme  rien  de  nouveau.)  —  Festschrift  der»  XXXI 
Generalversamml.  des  Gesammtvereins  der  deutschen  Geschichts-und 
Alterthumsvereine  zur  Begrûssung  dargebracht  vom  Verein  fur  hes- 
sische  Geschichte  und  Landeskunde.  —  F.  Wagner,  Berichtigungen  u. 
Nachtrage  zu  Minutoli  :  das  Kaiserlich  Buch  des  Markgrafen  Albrecht 
Achilles.  —  Wiilib.  Mûller,  Geschichte  der  Hauptstadt  Olmûtz.  (A 
recommander  beaucoup.)  —  W.  Mûller,  Geschichte  der  Gegenwart, 
das  Jahr  j  88 1 .  (Manuel  commode  dont  nous  avons  rendu  compte.)  — 
Loehnis,  Beitràge  zur  Kenntniss  der  Levante.  —  O.  Schwebel,  Cultur- 
historische  Bilder  aus  der  deutschen  Reichshauptstadt.  (Agréable  à  lire.) 
—  Nisikânta  Chattopadhyaya,  The  Yâtrâs,  or  the  popular  dramas  of  Ben- 
gal.  (Donne  de  nouvelles  lumières  sur  les  rapports  intimes  du  drame 
indien,  mérite  qui  compense  les  côtés  faibles  de  l'ouvrage.)  —  Meister 
Ingold,  das  goldene  Spiel,  hrsg.  v.  Edw.  Schroder.  (Publication  faite 
avec  grand  soin.)  —  C.  G.  Korner's  gesammelte  Schritten,  p.  p.  Stern; 
et  Jonas,  C.  G.  Koerner  (Grand  éloge  de  ces  deux  publications  dont 
l'une  renferme  les  œuvres  complètes,  et  l'autre,  la  biographie  de  Chris- 
tian Gottfried  Koerner.)  —  Héron  de  Villefosse  et  Thédenat,  Cachets 
d'oculistes  romains.  (De  bonnes  choses  dans  les  éclaircissements,  cor- 


rections  de  mainte  erreur,  un  peu  trop  de  développements.)  —  Meitzen, 
Das  deutsche  Haus  in  scinen  volksthûm lichen  Formen  ;  Henning,  Das 
deutsche  Haus  in  seiner  historischen  Entwickelung.  —  Dreyfus-Brisac, 
L'éducation  nouvelle,  étude  de  pédagogie  comparée.  (Intéressant  et  vi- 
vement écrit.) 

N°40,  3o  septembre  1882  :  Kloeper,  Der  Brief  an  die  Colosser.  — 
Lohmeyer,  Geschichte  von  Ost-und  Westpreussen.  I.  —  Acten  der  Er- 
furter  Universitât,  p.  p.  Weissenborn.  I.  —  Rhamm,  Hexenglaube  u. 
Kexenprocesse,  vornehml.  in  den  braunschweig.  Landen.  (Très  méri- 
toire.) —  Petzholdt,  Johann  Paul  Freiherr  von  Falkenstein,  nach  sei- 
nen  eigenen  Aufzeichn.  (Surtout  des  souvenirs  de  la  vie  privée.)  — 
L.  Havet,  De  saturnio  Latinorum  versu.  («  Fruit  d'études  pénétrantes  et 
de  sérieux  travail  »  ;  discussion  sur  la  mesure  du  saturnien.)  —  Scheffer- 
Boichorst,  Aus  Dante's  Verbannung,  literar.  Studien.  (Travail  impor- 
tant qu'on  ne  peut  recommander  assez  chaudement  à  tous  les  amis  de 
Dante.)  —  Linnig,  Bilder  zur  Geschichte  der  deutschen  Sprache.  (De 
bonnes  intentions,  mais  faible,  de  dix  ans  en  arrière).  —  Briefwechsel 
zwischen  J.  u.  W.  Grimm  aus  der  Jugendzeit,  p.  p.  Hinrichs.  (Bien  in- 
téressant) —  Gcethe's  Werke,  I,  Gedichte,  i .  p.  p.  Loeper.  2e  Auflage. 
—  O.  E.  Hartmann,  Der  rômische  Kalender,  aus  dem  Nachlasse  des 
Verfassers  hrsg  v.  L.  Lange  (Exposition  claire,  matériaux  rassemblés 
avec  soin,  conclusions  qui  témoignent  de  réflexion  et  de  sagacité.) 

Gœttingische  gelehrte  Anzeigen,  n°  41,  11  octobre  1882  :  Gildemeister, 
Theodosius,  de  situ  terrae  sanctae  im  àchten  Text  u.  der  Breviarius  de 
Hierosolyma  (Socin  :  défend  Gildemeister  contre  l'article  de  Molinier, 
voir  notre  recueil,  n°  du  24  avril  1882,  p.  328).  —  Ph.  v.  Segesser, 
Ludwig  Pfyfer  u.  seine  Zeit.  I  (Bezold  :  travail  très  soigné  et  très  déve- 
loppé, fort  utile  pour  la  connaissance  des  guerres  de  religion).  —  Pro- 
chaska,  Codex  epistolaris  Vitoldi.   Magni  ducis  Lithuaniae  1 376-1430. 

N°  42,  18  octobre  1882  :  Karl  Schmidt,  Die  Apostelgeschichte  unter 
dem  Hauptgesichtspunkt  ihrer  Glaubwùrdigkeit  krit.  exeget.  bearbeitet. 
I  (Overveck).  —  von  Vloten  et  Land,  Spinoza,  opéra  quotquot  reperta 
sunt.  I  (Sigwart). 

N°  43,  25  octobre  1882  :  Windelband,  Die  Geschichte  der  neueren 
Philosophie  in  ihrem  Zusammenhange  mit  der  allgemeinen  Cultur  u. 
den  besonderen  Wissenschaften.  I.  Von  der  Renaissance  bis  Kant.  IL 
Von  Kant  bis  Hegel  und  Herbart  (Sigwart  :  ouvrage  fort  bien  fait).  — 
M.  Tullii  Ciceronis  de  natura  deorum  libri  très  éd.  Mayor  (Iwan  Mill- 
ier :  «  édition  méritoire  qui,  d'une  part,  enrichit  nos  connaissances  sur  la 
destinée  qu'aura  eue  le  texte  du  «  De  natura  deorum  »  du  moyen-âge  jus- 
qu'au xvi°  siècle,  et,  d'autre  part,  apporte  d'instructives  contributions  à 
l'intelligence  de  ce  texte  »).  —  Strack,  die  Sprûche  der  Vâter,  ein  ethi- 
scher  Mischna-Traktat  mit  kurzer  Einleitung,  Anmerk.  u.  einem  Wort- 
register  (Siegfried). 

Nos44et45,  ier  et  8  novembre  1882  :  von  Wegele,  Geschichte  der 
Universitât  Wirzburg  (Waitz  :  travail  d'une  valeur  durable).  —  For- 
mulae  merowingici  et  carolini  aevi,  éd.  Zeumer.  L  (Zeumer).  —  Schmitz, 
Monumenta  tachygraphica  codicis  Parisiensis  latini  2718  (Zeumer).  — 
Wright,  The  chronicle  of  Joshua  the  Stylite  (Nestlé  :  texte  «  tolerably 
correct  »  et  traduction  fidèle). 

Deutsche  Litteraturzeitung,  n°  40,  7  octobre  1882  :  Rade,  Damasus, 
Bischof  von  Rom.  (Holtzmann  :  pour  la  forme  et  le  fond;  satisfait 
l'attente  du  lecteur  ;  œuvre  de  mérite.)  —  Grube,  Joh.  Busch,  Augus- 
tinerpropst  zu  Hildesheim,  ein  kathol.  Reformator  des  XV  Jahrhun- 
derts.  (K.   Muller  :  travail  bon  et  instructif.)  —  Cassel,  Die  Symbolik 


des  Blutes  und  der  arme  Heinrich  von  Hartmann  von  Aue.  (Edw. 
Schrôder  :  rien  de  nouveau,  étymologies  et  «  combinaisons  »  réjouis- 
santes.) —  Krause,  Vorlesungen  ûber  Aesthetik,  p.  p.  Hohlfeld  u. 
Wùnsche.  —  Bain,  John  Stuart  Mill,  a  criticism,  with  personal  recol- 
lections. (Laas  :  souvenirs  personnels  intéressants.)  —  Sammlung  selten 
gewordener  pâdagogischer  Schriften  des  XVI.  u.  XVII.  Jahrhunderts, 
p.  p.  Aug.  Israël.  (Paulsen,)  —  Gommentarium  in  Pentateuchum  v. 
H.  Samuel  Ben  Meïr,  p.  p.  Rosin.  (Siegm.  Fraenkel  :  édition  critique 
qui  est  un  modèle  de  soin.)  —  Spiegel,  Vergleichende  Grammatik  der 
alteranischen  Sprachen.  (Justi  :  œuvre  remarquable.)  —  Wachsmuth, 
Studien  zu  den  griechischen  Florilegien.  (Freudenthal  :  excellent  tra- 
vail qui  a  coûté  des  peines  infinies  à  son  auteur.)  —  Hertz,  zur  Kritik 
von  Ciceros  Rede  fur  den  P.  Sestius.  (Eberhard  :  de  jolies  remarques.) 

—  Frauer,  Neuhochdeutsche  Grammatik.  (Seemûller  :  utile.)  —  Klop- 
stocks  Wingolf,  krit.  Ausgabe  nebst  Commentar  von  Jaro  Pawel.  (Ou- 
vrage d'un  «  Stûmper  »  qui  ferait  bien  auparavant  d'apprendre  l'alle- 
mand.)—  Schipper,  Altenglische  Metrik.  I.  (Rendra  des  services.)  — 
Stengel,  La  canc'un  de  Saint  Alexis  u.  einige  kleinere  altfranzôsische 
Gedichte  des  XI.  u.  XII.  Jahrhunderts.  (Koschwitz  :  édition  dont  les 
romanistes  tireront  grand  profit.)  —  Jordanis  Romana  et  Getica  rec. 
Mommsen  [Monumenta  Germaniae  historica,  V,  I.]  Jordanis  de  origine 
actibusque  Getarum  p.  p.  Holder.  (Schirren  et  Rûdiger.)  —  Formen- 
tini,  La  dominazione  spagnuola  in  Lombardia.  (Bernhardi  :  histoire 
intérieure  de  Milan  de  1 536  à  1584.)  —  K.  B.  Stark,  Nach  dem  grie- 
chischen Orient.  (Impressions  de  voyage  qui  auront  encore  pendant 
longtemps  une  grande  valeur.)  —  Barros  Arana,  Histoire  de  la  guerre 
du  Pacifique.  1 880-1 881.  II.  (De  la  prise  d'Arica  presque  à  la  fin  de  la 
guerre,  clair  et  intéressant.)  —  Dupré,  Dictionnaire  des  marines  étran- 
gères, cuirassés,  croiseurs,  avisos  rapides.  (Ouvrage  qui  sera  utile.) 

Philologische  Rundschau  n°  35,  26  août  1882  :  Hasper,  Die  Feinheit 
der  Oekonomie  und  der  Charakterzeichnung  in  den  einzelnen  Dramen 
des  Sophokles  und  der  Kern  der  sittlichen  Anschauung  desselben,  2. 
Teil  (Thiele  :  devrait  être  réimprimé  sous  forme  de  livre.)  —  Franz 
Arnold,  Quaestionum  de  fontibus  Appiani  spécimen  (Godt  :  la  source 
d'Appien  pour  la  guerre  de  Mithridate  serait  Théophane  de  Mitylène). 

—  P.  Ovidii  Nasonis  Ibis  éd.  Ellis.  Oxford,  Clarendon  Press.  1881 
(Ant.  Zingerle  :  très  bon).  — Wrampelmeyer,  Codex  Wolfenbuttelanus 
n.  2o5  primum  ad  complures  Ciceronis  orationes  collatus  (Rubner  : 
renseignements  précieux).  —  Thewrewk  de  Ponor,  Festus-Studien 
(Georges).  —  Cartault,  De  causa  Harpalica.  Thorin,  1881  (Fox  :  ré- 
sumé clair  et  précis  des  travaux  antérieurs;  nouvel  examen,  approfondi 
et  solide,  parfois  avec  des  longueurs;  accord  avec  Rohrmoser  pour  Tes- 
sentiel  ;  vues  bien  motivées  pour  la  plupart  ;  bon  travail  en  latin  clair, 
sinon  précisément  classique,  par  lequel  Fauteur  a  bien  mérité  de  la 
philologie,  de  même  que  par  sa  Trière  athénienne,  qui  a  paru  «  pres- 
que »  à  la  même  date.)  —  Vita  s.  Willibrodi  archiepiscopi  Ultraiccten- 

"sis  a  Thiofride  abbate  Epternacensi  versibus  conscripta,  primum  éd. 
R.  Decker  (Rossberg  :  long  errata). —  Annonce  de  J.  Gabula,  Latein- 
ische  Aufsàtze,  4  Aufl. 

Athenaeum  belge,  n°  20,  1 5  octobre  1882  :  v.  Ravensburg,  Rubens  et 
l'antique  (H.  Hymans).  —  J.  F.  de  Bastide  à  Bruxelles.  —  Le  droit  de 
la  guerre  :  Honoré  Bonet  et  Christine  de  Pisan.  —  Chronique.  —  Socié- 
tés savantes. 


Le  Puy,  imprimerie  Marcliessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  '23. 


N°  47  Seizième  année      20  Novembre  1882 


REVUE  CRITIQUE- 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ    SOUS    LA    DIRECTION 

(»k  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.    PARIS 
Secrétaire  de  la  rédaction   :   M.   A.   Chuquet 

Prix  d'abonnement  : 

Un    un.   Pans,   20    fr.   —    Départements,    22    fr.    —    Etranger,    2b  fr. 

PARIS 

ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

LIBRAIRE     DE     LA      SOCIÉTÉ     ASIATIQUE 

i>K      1.  'ÉCOLE      DES     LANGUES     ORIENTALES     VIVANTES         ETC. 

28,    RUE    BONAPARTE,     28 

Aiit  e.ssc?  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M  .  A.  Chuquet 
(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 

ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 

RECUEIL  DE  VOYAGES  ET  DE  DOCUMENTS  POUR  SERVIR 

A      L'HISTOIRE      DE       LA     GEOGRAPHIE 

DEPUIS  LE  XIIIe    SIÈCLE  JUSQU'A    LA     FIN    DU    XVIe    SIÈCLE 

Sous  la  direction  de  M.  SCHEFER,  membre  de  l'Institut,  et  de  M.  H.  CORDIER. 

Cette  collection^  imprimée  avec  le  plus  grand  soin  sur  très  beau  papier,  est  tirée  à 
2>o  exemplaires,  plus  25  sur  papier  vergé  de  Hollande. 


I.  JEAN  ET  SÉBASTIEN  CABOT,  '*»*£ 

leurs  voyages.  Etude  d'histoire  critique,  suivie  d'une  cartographie,  d'une  biblio- 
graphie et  d'une  chronologie  des  voyages  au  Nord-Ouest,  de  1497  à  i56o,  d'après- 
des  documents  inédits,  par  M.  Henry  Harrisse.  1  beau  vol.  grand  in-8,  avec  un 
portulan  reproduit  en  fac-similé  par   Pilinski 2  5  fr. 

—  Le  même,  sur  grand  papier  de  Hollande 40  fr 

II.  LE  VOYAGE  DE  LA  SAINCTE  CYTÉ 

Dn  TJTCDTTC  A  I  T'A/!  fait  l'an  mil  quatre  cens  quatre  vingtz, 
C  ni  Cl\U  JA  LClVl  ,  estant  le  siège  du  Grand  Turc  à  Rhodes 
et  régnant  en  France  Loys  unziesme  de  ce  nom.  Publié  par  M.  Schefer.  i  beau 
vol.  gr.  in-8 16  fr- 

—  Le  même,  sur  grand  papier  de  Hollande 25  fr 

liL  LES  CORTE  REAL  ET  LEURS  VOYA- 
GES AU  NOUVEAU  MONDE,  S?;^" 

veaux  ou  peu  connus,  tirés  des  archives  de  Portugal  et  d'Italie,  suivi  du  texte  inédit 
d'un  récit  de  la  troisième  expédition  de  Gaspard  Corte  Real  et  d'une  carte  portu  - 
gaisc  de  l'année    ibo2,  reproduite  ici  pour  la  première  fois  en  photogravure  et  en 
chromolithographie,  par  M.  Henrj  Marrisse.    i   vol    et  une  carie  en  étui  .       a 5  ft 


PÉRIODIQUES 

The  Academy,  nc  547,  28  octobre  1882  :  Caine,  Recollections  of  Dante 
Gabriel  Rossetti.  —  Keane,  Asia,  with  ethnological  appendix.  —  Mar- 
tineau,  A  study  of  Spinoza. —  Leskien  u.  Brugman,  Litauische  Volks- 
lieder  u.  Mârchen  aus  dem  preuss.  u.  russ.  Litauen.  —  Some  foreign 
books  (Bornmûller,  Biograph.  Schriftsteller  Lexicon  ;  Engel,  Geschichte 
der  franz.  Litteratur;  Stepniak,  La  Russia  sotterranea;  Hillebrand, 
Zeiten,  Vôlker  und  Menschen,  VI;  Beauvois,  Un  agent  politique  de 
Charles-Quint).  —  J.  Arany.  —  Darwin's  religion  (Creighton).  —  The 
end  of  Shakspere's  playhouses  (Furnivall).  —  Popular  flower-names 
(Friend).  —  Miss  Mitford's  letters  (Hamilton).  —  Spenser's  use  of  «  in  » 
(Herford).  —  Wharton,  Etyma  Graeca  (Haverfield).  —  The  bronze 
ornaments  of  the  palace  gâtes  of  Balawat,  with  introd.  by  Birch  a.  des- 
criptions a.  translations  by  Pinches  (Murray). 

The  Athenaeum,  n°  2870,  28  oct.  1882  :  D'Haussonville,  The  salon  of 
Madame  Necker.  (Il  y  a  dans  ces  deux  vol.  tant  de  détails  nouveaux  que 
tout  ce  qu'on  savait  auparavant  semble  insignifiant,  mais  l'auteur  n'a 
pas  su  animer  ces  documents;  il  n'est  ni  Sainte-Beuve,  ni  Cousin,  ni 
Caro.)  —  Hosell,  Tasso.  —  Kreitner,  Im  lernen  Osten.  —  Early 
spring  in  Massachusetts,  from  the  journai  ol  Thoreau;  Sanborn,  Henry 
D.  Thoreau.  —  The  registration  of  titles  (Besant).  —  Dr.  Burnell  (Rost). 
—  Fielding's  portrait.  (Dobson.)  —  Ram  Mohun  Roy.  —  Notes  from 
Rome  (Lanciani).  —  The  art  treasures  of  Nuremberg.  (Atkinson.) 

Literarisches  Centralblatt,  n°  41,  7  octobre  1882  :  Das  Oupnek  hat,  die 
aus  den  Veden  zusammengesetzte  Lehre  von  dem  Brahm,  aus  der  sans- 
krit-persischen  Uebersetzung  des  Fûrsten  Mohammed  Daraschekoh  in 
das  latein.  von  Anquetil  Duperron,  in  das  deutsche  tibertragen  von 
Mischel.  (Traduction  allemande  de  la  traduction  latine  de  la  traduction 
persane  de  l'original  sanscrit  !).  —  Gzerny,  Aus  dem  geistlichen  Ge- 
schàftsleben  in  Ôberôsterreich  im  XV.  Jahrhundert.  —  Spinoza ,  opéra 
quotquot  reperta  sunt,  p.  p.  van  Vloten  u.  Land.  Vol.  prius.  —  Cham- 
balu,  De  magistratibus  Flaviorum,  adj.  est  appendix  de  Titi  nomine 
imperatoris.  (Beaucoup  de  soin,  fixe  des  points  nouveaux  et  jusqu'ici 
douteux).  —  Urkunden  der  Markgrafen  von  Meissen  u.  Landgrafen  von 
Thùringen  948-1099,  hrsg.  v.  Posse.  —  Opitz,  Maria  Stuart,  nach  den 
neuesten  Forschungen  dargestellt.  IIme  vol.  (Tout  le  monde  admet 
qu'Elisabeth  a  usé  de  perfidie  envers  Marie,  mais  Opitz  va  trop  loin, 
il  trace  de  Marie  un  portrait  idéal,  il  appelle  Elisabeth  l'Astarté  mo- 
derne, il  ne  parle  qu'avec  la  plus  vive  indignation  de  l'espionnage  de 
Walsingham,  et  passe  sous  silence  les  intrigues  de  Marie).  —  Will. 
Muller,  Josef  von  Sonnenfels  (travail  très  satisfaisant).  —  Thielmann 
Das  Verbum  dare  im  lateinischen  als  Reprâsentant  der  indoeuropài- 
schen  Wurzel  dha.  (Brugman  :  recherches  manquées  quant  au  point  de 
départ  et  au  point  principal,  mais  les  matériaux  sont  clairement  groupés, 
mainte  réflexion  fine  ;  en  un  mot,  importante  contribution  au  «  lexique 
de  l'avenir  »).  —  W.  Meyer,  Die  Geschichte  des  Kreuzholzes  von  Chris- 
tus  et  der  Ludus  de  Antichristo  u.  ùber  die  latein.  Rhythmen.  (Le  pre- 
mier travail  ne  laissera  guère  de  détails  à  recueillir  après  tous  ceux  que 
l'auteur  a  réunis  ;  le  second  est  très  vaste,  très  étendu  et  jamais  on  n'a- 
vait consacré  aux  rythmes  du  moyen-âge  latin  une  étude  d'ensemble 
aussi  détaillée).  —  Schade,  Altdeutsches  Wôrterbuch,  2e  umgearb.  u. 
vermehrte  Auflage.  (Très  utile ,  très  remarquable,  fruit  des  recherches 
les  plus  consciencieuses  et  du  soin  le  plus  assidu).  —  Weinachtslieder 
u.  Krippenspieleaus  Oberôsterreich  u.  Tirol,  gesamm.  u.  hrsg.  v.  Pail- 
ler. I.  —  Bayard  Tyalor,  Gcethes  Faust,  erster  u.  zweiter  Theil,  Er- 
làuterungen  u.  Bemerk.  dazu.  (Trad.  allemande  d'un  ouvrage  qui,  en 


somme ,  n'est  pas  superflu,  car  il  contient  bien  des  remarques  excel- 
lentes). —  Schulze,  Die  Katakomben,  die  altchristliehen  Grabstàtten, 
ihre  Geschichte  u.  ihre  Monumente.  —  Ludw.  Meyer,  die  rômischen 
Katakomben.  72  p.  (Petit  ouvrage  qui  a  sa  valeur).  —  Encyclopâdie  des 
gesammten  Erziehungs-und  Unterrichtswesens.  V,  1.  20  Aufl.  —  Gœ- 
the's  Briefe  an  Frau  von  Stein,  hrsg.  v.  Schôll.  2e  Auflage. 

Deutsche  Literaturzeitun g,  n°  41,  14  octobre  1882  :  Scholz,  Commentar 
zum  Bûche  des  Propheten  Hoseas  (Himpel  :  recherches  étendues).  — 
Horst,  Leviticus  XVII-XXVI  und  Hezekiel.  —  Hermae  Pastof,  p.  p. 
Hilgenfeld.  (Holtzmann,)  —  Benseler,  Der  Optimismus  des  Socrates 
bei  Xenophon  u.  Platon  gegenûber  den  pessimistischen  Stimmen  in  der 
âlteren  griechischen  Litteratur.  (Heitze).— Natorp,  Descartes'  Erkennt- 
nisstheorie.  (B.  Erdmann.)  —  Fornelli,  L'insegnamento  pubblico  ai 
tempi  nostri.  —  Rothe,  De  vetere  quem  ex  Odyssea  Kirchoffius  eruit 
v6(jTo>.  (Hinrichs  :  développe  clairement  mainte  observation  remarqua- 
ble.) —  Anacreonte,  edizione  critica  di  Luigi  A.  Michelangeli.  (Hiller  : 
ne  manque  pas  de  jugement  et  de  goût,  conservateur,  n'est  pas  assez  fa- 
milier avec  la  langue  et  la  métrique,  la  valeur  scientifique  de  l'œuvre  ne 
répond  pas  au  temps  et  à  la  peine  que  ce  travail  a  coûtés  à  l'auteur, 
toutefois  répertoire  utile  aux  philologues.)  —  Thielmann,  Das  ver- 
bum  «  dare  »  im  latein.  als  Repràsentant  der  indoeurop.  Wur- 
zel  dha.  (Thurneysen  :  une  erreur  fondamentale  dès  le  début,  mais 
comme  «  contribution  au  lexique  »  excellente  étude  de  nombreux  et 
variés  exemples.)  —  Die  Gedichte  Walthers  von  ders  Vogelweide  hrsg. 
v.  Paul  (Schonbach  :  louable).  —  Braun,  Schiller  u.  Goethe  im  Ur- 
theileihrer  Zeitgenossen,  Zeitungskritiken,  Berichte  u.  Notizen  Schiller 
u.  Goethe  betreffend.  (Minor  :  complètement  manqué;  encore  une  heu- 
reuse pensée,  une  vue  louable  que  fait  échouer  la  maladresse  de  l'exécu- 
tion.) —  Bartsch,  Clemens  Brentano,  Lied  von  eines  Studenten  Ankunft 
in  Heidelberg.  —  Eyssenhardt,  Rômisch  u.  romanisch.  (Grôber  :  in- 
croyablement superficiel,  une  foule  d'assertions  qui  étonnent  et  quelque- 
fois indignent  par  leur  témérité;  rien  d'utile  pour  la  grammaire  ro- 
mane.) —  Samling  af  Kongens  Rettertings  Domme  udgivne  af  Sécher. 
l-III.  (Hasse.)  —  Opitz,  Maria  Stuart.  (On  ne  peut  discuter  avec  un 
aussi  enthousiaste  admirateur  de  Marie  et  l'on  a  peine  à  croire  l'auteur, 
lorsqu'il  se  dit  protestant.)  —  Oncken,  Das  Zeitalter  Friedrichs  des 
Grossen.  I  Band.  (Wiegand  :  intéressant  et  habilement  composé.)  — 
Von  Holtzendorff,  Schottische  Reisenskizzen.  —  Perrot  et  Chipiez, 
Histoire  de  l'art  dans  l'antiquité.  1.  L'Egypte  (Erman  :  «  sera  salué  avec 
joie  par  les  amis  de  l'antiquité  égyptienne  ;  personne  n'avait  osé  entre- 
prendre cette  tâche  si  difficile  et  si  vaste;  il  faut  se  réjouir  que  la  pre- 
mière exécution  de  ce  travail  soit  tombée  en  des  mains  si  habiles  ;  beau- 
coup de  questions  discutées  jusqu'ici  sont  définitivement  résolues  »).  — 
Nys,  Le  droit  de  la  guerre  et  les  précurseurs  de  Grotius.  —  Villard,  His- 
toire du  prolétariat  ancien  et  moderne  (Inama). 

Philologische  Wochenschrift,  n°  34,  26  août  1882  :  Paul  Girard,  L'Asclé- 
piéion  d'Athènes,  Thorin  (Trendelenburg  :  sujet  heureusement  choisi  ; 
exécution  satisfaisante  sur  quelques  points  seulement;  l'auteur  a  cher- 
ché en  largeur  plus  qu'en  profondeur,  et  a  donné  plus  de  champ  à  l'i- 
magination qu'à  la  réflexion,  ce  qui  l'a  conduit  à  trop  d'hypothèses  ex- 
posées trop  longuement;  en  général,  la  brièveté  précise  fait  défaut;  très 
intéressant  néanmoins,  comme  en  témoigne,  suivant  la  remarque  du  cri- 
tique, l'étendue  même  de  son  article;  excellentes  héliogravures  de  Du- 
jardin).  —  Madvig,  Die  Verfassung  und  Verwaltung  des  rômischen 
Staats  (Genz  :  le  second  volume  est  digne  du  premier;  grande  netteté  et 
grande  rigueur).—  Ziegler,  Das  alte  Rom,  18  Tafeln  in  Farbendruck  und 


5  Holzschnitte  mit  erlàuterndem  Texte,  billige  Schulausgabe  der  Illus- 
trationen  zur  Topographie  des  alten  Rom  (excellent  pour  les  élèves  et 
pour  les  voyageurs).  —  Anton  Zingerle,  Kleine  philologische  Abhand- 
lungen  (analyse  et  recommandation  ;  «  Besonders  wohlthuend  ist  der 
milde,  ruhige,  von  aller  Herbigkeit  freie  Ton,  in  welchem  die  entge- 
genstehenden  Ansichten  widerlegt  werden  :  môchte  der  Herr  Verfasser 
auch  hierin  recht  viele  Nachfolger  finden  !  »). 

N°  35,  2  septembre  1882  :  Rheinhard,  Album  des  klassischen  Alter- 
tums,  eine  Galletie  von  76  Tafeln  in  Farbendruck,  2  Aufl.  (Trendelen- 
burg  :  spéculation  éhontée  de  la  Hoffmannsche  Verlagsbuchhandlung 
[A.  BleilJ  à  Stuttgart;  prix  18  mk). —  Sorof,  De  ratione,  quae  inter  eos 
codices  recentiores,  quibus  Aeschyli  fabulae  Prometheus,  Septem  adv. 
Thebas,  Persae  continentur,  et  codicem  Laurentianum  intercédât  (Wec- 
klein  1  l'auteur  établit,  contre  l'opinion  qui  a  été  autrefois  celle  du  cri- 
tique, que  les  variantes  des  recentiores  sont  sans  valeur).  —  Ehrhardt, 
De  Aristophanis  fabularum  interpolatione  (Joh.  Wagner  :  nombreux 
défauts).  —  Helmreich,  Griechisches  Vokabular.  —  Venediger,  Latei- 
nische  Exercitien. 

N°  36,  9  septembre  1882  :  Kiepert.  Nuova  carta  générale  dell'  Italia 
Méridionale  et  Neue  Generalkarte  von  Unter-Italien  mit  den  Insein  Si- 
cilien und  Sardinien  (Hermann  :  excellent).  —  Postgate,  Select  élégies 
of  Propertius.  London,  Macmillan  (Hugo  Magnus  :  article  étendu  -/tra- 
vail solide).  —  Schenkl,  Griechisches  Elementarbuch,  1 1  Aufl.  (excel- 
lent). —  'ÀSa^avxfou  Kopah  -à  \).exà  tov  Gavaxov  e'jpsOévxa  <7UYYPalJL[JL(*'ua> 
è'TCiue'Xeîa  'A.  Z.  Mamoyka  auWe^ioi.^  xà\xoq  l  xepiéxwv  uXr,v  YaXXoYpanux,ou 
Xe^y.ou  v.cà  xàç  èv  tÇ>  Xecjato  Trçç  yc&Kki%fa  'AxaS.  iBiovpaçouç  xou  Koparj  ctyj- 
[j,£iw(jstç,  Athènes,  Iléppiç  frères,  1881  (Heller  :  article  élogieux).  —  Del- 
brueck,  Einleitung  in  das  Sprachstudium,  ein  Beitrag  zur  Geschichte 
und  Methodik  der  vergleichenden  Sprachforschung. 

Vor  Ungdom,  5te  Haefte  :  Voss,  J.  anlodning  af  en  paataenkt  revision  af 
den  hœiere  almenskoles  ordning  i  Norge.  —  Svendsen,  Et  ord  om  reli- 
gionsundervisningen.  —  Frederiksen,  Den  danske  landsbyskole.  —  Jo- 
hansen,  Om  opdragelse  i  forhold  til  de  fysiologiske.  og  psychologische 
ejendommeligheder.  —  Pariser-Universitetet  i  middelalderen ,  efter 
P.  Lacroix  ved.  cand.  theol.  Th.  Ruschke. 

Athenaeum  belge,  n°  21,  ipr  novembre  1882  :  V.  Egger,  La  parole  in- 
térieure. (Delboeuf  :  beaucoup  à  louer  et  à  critiquer.) — Wauters,  Table 
chronologique  des  chartes  et  diplômes  imprimés  concernant  l'histoire  de 
la  Belgique.  VI.  —  L'enseignement  de  l'économie  politique  dans  les 
universités  allemandes  (James.) 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,    28,  RUE  BONAPARTE 

LE  ROYAUME  DU  CAMBODGE  f^sToi. 

gr.  in-8,  richement  illustrés 3o    » 

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Le  Puy,  imprimerie  de  Marckessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent. 


N°  48  Seizième  année     27  Novembre  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ   SOUS   LA    DIRECTION 

dk  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  IviONOD,  G.   PARIS 
Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 

Un    an,   Pans,   20   fr.  —    Départements,    22    fr.    —    Etranger,    %b  fr. 

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Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 

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HISTOIRE  DE  L'ÉCOLE  ANGLAISE  DE 

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des  notes,  par  Henri  Cordier.  Tome  I.  In-8 12  fr.  5o 


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PÉRIODIQUES 

The  Acadeiny,  n°  548,  4  novembre  1882  :  Traill,  Sterne  (Caine  : 
«  Mr.  Traill  has  done  his  work  well  ;  his  book  is  admirable  in  writing, 
reliable  and  welldigested  as  to  facts,  and  interestingand  valuable  in  cri- 
ticism  »).  —  Ashton,  Social  life  in  the  reign  of  queen  Anne.  2  vols 
(CourtneyJ.  —  Guest,  A  history  of  english  rhythms,  a  new  édition  by 
Skeat  (Minto).  —  Ravenstein,  A  map  of  eastern  equatorial  Africa.  — 
Edzardi.  —  Burnell  (Nicholson).  —  Darwin's  religion.  —  Râm  Mohun 
Roy.  —  Bedd  Gebert  (Beal).  —  The  word  «  rose  »  (Mayhew).  —  Eus- 
karian  (Vinson).  —  Oriental  Philology  (Geiger,  Ostiranische  Cultur  im 
Alterthum;  Jamaspji,  Pahlavi,  gujarati  a.  english  dictionary,  III;  trad. 
hollandaise,  par  M.  van  der  Vliet,  du  Mâlavi  Kâgnimitra).  —  Falk- 
ner,  A  pilgrimage  to  the  shrine  of  our  lady  of  Loreto  (Middleton).  — 
An  ancient  monument  at  Samos  described  by  Herodotus  (Dennis).  — 
More  treasure-trove  from  Dayr-el-Baharee  (Am.  Edwards).  —  The 
Sloane  collection,  British  Muséum  (Perceval). 

The  Athenaeum,  ne  2871,  4  nov.  1882  :  Senior,  Conversations  a.  jour- 
nals  in  Egypt  a.  Maka.  —  Caine,  Recollections  of  Dante  Gabriel  Ros- 
setti.  —  Kern,  Der  Buddhismus  u.  seine  Geschichte  in  Indien,  ûbers. 
v.  Jacobi.  —  Richard  Barnfield's  poems,  p.  p.  Arber.  —  The  works  of 
Henry  Fielding,  with  a  biographical  essay  by  L.  Stephen.  10  vols. 
(Très  belle  édition,  introduction  admirable,  c'est  ce  qu'on  a  écrit  de 
mieux  sur  Fielding)  —  English  authors  a.  american  publishers.  —  Fiel- 
ding's  portrait.  —  The  history  of  the  Matice  Czeska.  I.  —  A  hebrew 
deed  dated  Colchester  1 258  (Neubauer).  —  Cap.  Gill.  (Le  compagnon  de 
M.  Palmer,  not.  nécrol.)  —  Art  notes  from  Italy.  —  Antiquities  at  Na- 
blus.  (Mervill.) 

Literarisches  Gentralblatt,  n°  42,  14  oct.  1882  :  The  revisers  and  the 
greek  text  of  the  New  Testament,  by  two  members  of  the  New  Testa- 
ment Company.  —  Bibliotheca  rabbinica,  ûbers.  v  Wunsche.  i5  u.  16 
Lief.  —  Frey,  Die  Schicksale  des  kôniglichen  Gutes  in  Deutschland 
unter  den  letzten  Staufern  seit  Konig  Philipp.  (Excellent  travail.)  — 
Borch,  Das  Schloss  der  Karolinger  an  der  Elbe.  (Ce  serait  Gommern, 
mais  les  expressions  vagues  de  la  Chronique  de  Moissac  ne  permettent 
pas  d'arriver  à  un  résultat  certain.)  —  Sternfeld,  Das  Verhâltniss  des 
Arelats  zu  Kaiser  u.  Reich  vom  Tode  Friedrichs  I  zum  lnterregnum. 
(Ouvrage  de  grande  importance.) —  Volk,  Hexen  in  der  Landvogtei 
Ortenau  und  Reichstadt  Offenburg.  —  Gindely,  Geschichte  des  dreis- 
sigjâhrigen  Krieges.  I.  Der  bôhmische  Aufstand  und  seine  Bestrafung. 
16 1 8-1 62 1.  (  ier  volume  d'une  nouvelle  édition,  destinée  au  grand  pu- 
blic, de  «  l'Histoire  de  la  guerre  de  Trente  Ans  »,  de  Gindely.)  —  Ferd. 
Muller,  Unter  Tungusen  u.  Jakuten..  —  Varnhagen,  Ein  indisches 
Mârchen  auf  seiner  Wanderung  durch  die  asiat.  u.  europ.  Literaturen. 
(Se  lit  avec  plaisir.)  —  Bossuet,  œuvres  inédites,  p.  p.  L.  Ménard, 
tome  I  :  Le  cours  royal  complet  sur  Juvénal.  (Ce  qu'il  y  a  de  plus  in- 
téressant dans  cette  belle  publication,  c'est  le  portrait  de  Bossuet  ;  le 
commentaire  de  l'évêque  (?)  n'offre  rien  à  la  science.)  —  Ruodlieb, 
hrsg.  v.  Seiler.  (Edition  pleine  de  soin  et  de  réflexion.)  — -  La  cancun 
de  Saint  Alexis  u.  einige  kleinere  altfranz.  Gedichte  d.  XI  u.  XII. 
Jahrhunderts,  p.  p.  Stengel.  II8  Liefer.  Wôrterbuch.  (Manuel  indis- 
pensable à  ceux  qui  font  de  la  philologie  française.)  —  Islendzk  Aeven- 
tyri,  p.  p.  Gering.  I.  —  Otfrids  Evangelienbuch,  p.  p.  Erdmann  et  Pi- 
per. —  Jacob  Grimm,  Recensionen  u.  vermischte  Aufsâtze.  III.  — 
Mentzel,  Geschichte  der  Schauspielkunst  in  Frankfurt  a.  M.  (Un  des 
meilleurs  livres  qui  aient  paru  sur  l'histoire  du  théâtre  allemand.)  — 


Schnorr  von  Carolsfeld,  Katalog  der  Handschriften  der  Kônigl. 
offentl.  Bibliothek  zu  Dresden.  I.  —  Homer's  Odyssée  von  Voss,  Ab- 
druck  der  ersten  Ausgabe  vom  Jahre  1781  mit  einer  Einleitung  v. 
Bernays.  (Introduction  très  savante.)  -  Koenig,  Die  Mannszucht  in 
ihrer  Bedeutung  fur  Staat,  Volk  und  Heer. 

N°  43,  21  octobre  1882  :  Warren,  Liturgy  a.  ritual  of  the  celtic 
church  (Intéressant  pour  l'histoire  de  l'église  presque  autant  que  pour 
celle  de  la  liturgie).  —  Bergk,  zur  Geschichte  u.  Topographie  der 
Rheinlande  in  rômischer  Zeit  (Recueil  d'art  et  d'études  utiles).  —  Jul. 
Grimm,  Der  rômische  Brûckenkopf  in  Kastel.  —  Wieseler,  Untersu- 
chungen  zur  Geschichte  u.  Religion  der  alten  Germanen  in  Asien  und 
Europa  (Ouvrage  d'un  germanomane,  plein  de  choses  monstrueuses,  et 
qu'on  ne  peut  que  juger  durement).  —  Beda,  hrsg.  v.  Holder  (Bien- 
venu).— Weinhold,  Die  deutschen  Frauen  in  dem  Mittelalter  (2e  édit. 
de  cet  excellent  ouvrage).  —  Evers,  Analecta  ad  fratrum  minorum  his- 
toriam.  —  Horne,  Geschichte  von  Frankfurt  am  Main  in  gedràngter 
Darstellung  (2e  édition).  —  Haartd,  Wandkarte  der  Alpen.  —  Démos- 
thène  (Les  Harangues  de),  texte  grec,  p.  p.  Henri  Weil  (2e  édition,  qui 
a  reçu  beaucoup  d'améliorations  et  d'enrichissements).  —  Arkiv  for  nor- 
disk  filologi.  —  Erlauer  Spiele,  sechs  altdeutsche  Mysterien  p.  p.  Kum- 
mer  (Edition  faite  avec  grand  soin). —  Albrecht,  Die  Leipziger  Mund- 
art,  Grammatik  u.  Worterbuch  der  leipziger  Volkssprache ,  mit 
Vorwort  von  Rud  Hildebrand  (Plein  d'intérêt).  —  Rollett,  Die  Gœ- 
the-Bildnisse,  IV. 

Deutsche  Litteraturzeitung,  n°  42,  21  octobre  1882  :  Zahn,  zur  Geschichte 
des  neutestam.  Kanons.  —  Simplicii  in  Aristotelem  physicorum  libros 
quattuor  priores  ed,  Diels;  de  anima  éd.  Hayduck.  (Heitz.)—  Die  Sprû- 
che  der  Vâter,  ein  ethischer  Mischna-Traktat,  mit  Einl.,  Anmerk.  u. 
Wortregister  von  Strack.  (Steinschneider.)  —  K.  Geldner,  Studien  zum 
Avesta.  (Geiger  :  mainte  difficulté  résolue  ou  approchée  de  la  solution, 
trop  de  mépris  pour  les  devanciers  et  les  collègues  de  l'auteur.) —  Hart- 
mann, Der  rômische  Calender,  hrsg.  v.  Lange  (Soltau  :  trop  de  choses 
insoutenables)  —  Lettres  françaises  inédites  de  Joseph  Scaliger  publiées 
et  annotées  par  Tamizey  de  Larroque  (Horawitz  :  édition  remarquable, 
notes  biographiques  et  bibliographiques  abondantes.)  —  Gleim,  preuss- 
ische  Kriegslieder  ;  Briefe  an  Kleist.  III,  p.  p.  Sauer.  (Suphan).—  Vôl- 
cker,  Register  zu  W.  von  Maltzahns  Deutschem  Bûcherschatz. —  Van 
Vloten,  Het  nederlandsche  Kluchtspel  von  de  14e  tôt  de  18e  eeuw. 
I-III.  2e  edit.  —  Lyoner  Ysopet,  hrsg.  v.  W.  Foerster.  (Tobler.)  — 
Sathas,  Documents  inédits  relatifs  à  l'histoire  de  la  Grèce  au  moyen-âge. 
Tome  III.  (Lambros.) — Pflugk-Harttung,  Die  Urkunden  der  papstli- 
chen  Kanzlei  vom  X  bis  XIII  Jahrhundert.  (P.  Ewald.)  —  Schmidt 
Phiseldeck,  Die  Siegel  des  herzoglichen  Hauses  Braunschweig  und  Lû- 
neburg.  —  Reiber,  Etudes  gambrinales,  histoire  et  archéologie  de  la 
bière  et  principalement  de  la  bière  de  Strasbourg.  (L.  Mûller  :  beaucoup 
de  savoir,  et  aussi  d'humour  aimable,  grand  nombre  de  citations  poéti- 
ques et  de  réflexions  spirituelles.)  —  Tre  lettere  de  Christoforo  Colombo 
ed  Amerigo  Vespucci,  p.  p.  Zeri.  Roma.  —  Kiepert,  Neue  Generalkarte 
von  Unter  Italien,  mit  Sicilien  u.  Sardinien.  —  Pohl,  Joseph  Haydn. 
I,  1  et  2. 

Philologische  Wochenschrift,  n°  37,  16  septembre  1882  :  Heydemann,  Gi- 
gantomachie  auf  einer  Vase  aus  Altamura  (Trendelenburg  :  le  sixième 
des  programmes  annuels  publiés  par  H.  pour  l'anniversaire  de  Winc- 
kelmann;  article  détaillé). —  Rosenberger,  Die  Geschichte  der  Physik 
in  Grundziigen  mit  synchronistischen  Tabellen  der  Math.,  der  Chemie 


und  beschreib.  Naturwiss.,  sowie  der  allg.  Gesch.,  I.  Tl.,  Altertum  und 
Mittelalter  (Max  C.  P.  Schmidt  :  ouvrage  de  vulgarisation,  par  un  ma- 
thématicien). —  Blaydes,  Aristophanis  Aves  (Joh.  Wagner,  critique 
très  vive  sur  cette  «  marchandise  anglaise  sous  pavillon  allemand  »). 
—  PaulNÎEYERaus  Zurich,  Untersuchungûber  die  Fragedes  Briefwech- 
selsCicero  ad  Brutum  (travail  que  le  critique  croit  définitif,  concluant 
à  une  fabrication,  qui  peut-être  remonterait  au  temps  d'Auguste  ou  de 
Tibère).  —  Votsch,  Lateinische  Syntax  in  Musterbeispielen. 

N°  38,  23  septembre  1882  :  Roeder,  Ueber  C.  G.  Cobets  Emendatio- 
nen  der  attischen  Redner,  insbesondere  des  Isaios  (Albrecht  :  défend  la 
tradition  contre  Cobet,  en  général  avec  l'approbation  du  critique).  — 
Appendix  artis  Dionysii  Thracis  ab  G.  Uhligio  recensitae  (Galland  : 
instructif  et  important).  —  A.  von  Reumont,  Vittoria  Colonna  ;  Leben, 
Dichten,  Glauben  im  XVI.  Jahrhundert  (Horawitz  :  instructif,  mais 
sans  plan  et  sans  sujet  défini).  —  Steinmeyer,  Betrachtungen  ûber  unser 
klassisches  Schulwesen,  eine  Entgegnung;  Genthe,  Grammatik  und 
Schrifsteller-lektûre  im  altsprachlichen  Unterrichte.  —  Quousque  tan- 
den,  Der  Sprachunterricht  muss  umkehren  !  ein  Beitrag  zur  Ueberbûr- 
dungsfrage. 

N°  39,  3o  septembre  1882  :  Dejob,  Marc-Antoine  Muret,  un  profes- 
seur français  en  Italie  dans  la  seconde  moitié  du  xvie  siècle.  Thorin, 
1881  (Horawitz  :  a  ignoré  les  travaux  d'ailleurs  peu  connus  de  Vitrac, 
Lundblad  et  Marées  sur  Muret  ;  on  a  plaisir  à  voir  cités  des  livres  alle- 
mands ;  travail  étendu  et  plein  de  recherches  ;  montre  dans  la  peinture 
du  héros  «  une  certaine  objectivité  dans  le  meilleur  sens  »;  terrible  pro- 
lixité, habituelle  aux  Français  même  en  matière  scientifique  ;  il  est  chi- 
mérique de  se  donner  tant  de  mal  pour  ne  pas  reconnaître  le  vice  que 
Muret  avait  en  commun  avec  Balbi,  Filelfo  et  beaucoup  d'humanistes  ; 
livre  en  somme  instructif  et  attrayant,  pièces  justificatives  précieuses, 
belle  exécution  typographique).  —  E.  Bertrand,  Un  critique  d'art  dans 
l'antiquité,  Philostrate  et  son  école,  Thorin,  1882  (Julius  :  s'adresse 
moins  aux  érudits  qu'aux  artistes  et  au  grand  public;  érudition  trop  en 
gros,  mais  intelligence  des  choses  d'art  et  bon  sens;  complaisance  excu- 
sable pour  Philostrate  ;  bon  rapprochement  avec  Diderot  ;  rien  de  neuf 
pour  qui  a  étudié  Philostrate;  il  est  honteux  aux  Allemands  de  se  faire 
redire  par  un  étranger  ce  que  leur  ont  dit  en  vain  un  Welcker  et  un 
Brunn  ;  conclusion  en  faveur  de  l'authenticité  des  tableaux,  auprès  de 
laquelle  la  conclusion  contraire  de  Kalkmann  paraît  naïve;  ce  qui  con- 
cerne les  successeurs  de  Philostrate  est  superficiel  et  sans  critique).  — 
Hasper,  Die  Feinheit  der  Oikonomie  und  der  Charakterzeichnung  in 
den  einzelnen  Dramen  des  Sophokles  und  der  Kern  der  sittlichen  Ans- 
schauung  desselben  (Muff  :  intéressant).  —  Saalfeld,  Julius  Caesar, 
sein  Verfahren  gegen  die  gallischen  Stâmme  vom  Standpunkte  der  Ethik 
und  Politik  (le  critique  n'a  jamais  lu  un  livre  d'un  savant  allemand  mo- 
derne où  se  manifeste  une  ignorance  si  complète  des  règles  de  la  critique 
historique).  —  Fraccaroli,  Saggio  sopra  la  genesi  délia  metrica  classica, 
Firenze,  1881  (Gustafsson).  —  Dr.  M.  Seyfferts  Hauptregeln  der  griech. 
Syntax,  als  Anhang  der  griech.  Formenlehre  von  Dr.  C.  Franke,  bearb. 
v.  Dr.  A.  v.  Bamberg,  14.  Aufl.  (Sitzler). 


Le  Puy,  imprimerie  de  Marchessou  fils,  boulevard  Saint-Laurevt. 


N°  49  Seizième  année        4  Décembre  1882 


REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ    SOUS    LA    DIRECTION 

ok  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 
Un    an,   Paris,   20   fr.  —   Départements,    22   fr,    —   Etranger,    25  fr 


PARIS 


ERNEST    LEROUX,    EDITEUR 

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de   l'école    des   langues   orientales   vivantes      ktc. 

28,    RUE   BONAPARTE,    28 


Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  À  M.  A.  Chuquet 
(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 

LIBRAIRIE  FURNE 
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SON  HISTOIRE,  SES  EXPLOITS,  SES  AVENTURES 
Par  ALFRED   BARBOU 

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Dessinées  par  ■■:.  BlfARD,  COUTURIER,  Adrien  MARIE 
Charles  u««ri.  VOCEL. 

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Gulliver  (Chez  les   nains    et  chez    les 
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La  Flûte  enchantée  et  Bouton  d'or. 


Les  aventures  du  baron  de  Mùnch 
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Robinson  Crusoé  (Aventures  de). 
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Casse-Noisettes  et  du  roi  des  souris. 

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PÉRIODIQUES 

The  Acacîemy,  n°  549,  11  novembre  1882  :  OTJonovan,  The  Merv  Oa- 
sis.—  Senior,  Conversations  a.  Journals  in  Egypt  a  Malta.  —  Mar- 
shall, Oxford  «  Diocesan  Historiés  ».  —  Current  Literature  (Hatton, 
Journalistic  London  ;  Mrs.  Butler,  Life  of  Oberlin,  etc.)  —  In  memo- 
riam  :  Capt.  Gill.  —  Aitch-bone  or  Edge-bone  (Skeat).  —  Who  wrote 
«  The  Whole  Duty  of  Man  »  ?  (Doble).  —  Couat,  La  poésie  alexandrine 
(Ellis  :  écrit  avec  soin,  plein  de  curieux  renseignements).  —  Thomson, 
The  life  a.  works  of  Thomas  Bewick.  —  A  postscript  on  Pieter  Claesz. 

Tae  Athenaeum,  n°  2872,  1 1  novembre,  1882  :  Memoir  of  Aug.  de  Mor- 
gan, by  his  wife.  —  Household  stories  from  the  collection  of  the  bro- 
thers  Grimm,  transi,  by  L.  Crâne.  —  Reade,  Readiana.  —  Farrar, 
The  early  days  of  christianity.  —  The  late  Prof.  Palmer  (Besant.)  — 
Notes  from  Oxford.  —  The  Jews  of  Colchester.  —  The  Hamilton  ma- 
nuscripts.  —  Notes  from  Naples.  —  The  disappearance  of  ancient  walls 
(Selah  Merrill). 

Literarisches  Centralblatt,  n°  44,  28  octobre  1882  :  Chiapelli,  Délia  in- 
terpretazione  panteistica  di  Platone  (très  bon).  —  Schwarcz,  Die  Dé- 
mocratie, I,  2,  III  et  IV;  Schwicker,  Schwarcz  u.  seine  Schriften.  — 
Kirchhoff,  Thùringen  doch  Hermundurenland.  (Beaucoup  de  nouveau 
en  peu  de  pages).  —  Lossen,  Der  côlnische  Krieg  (très,  même  trop  dé- 
taillé).—  Thûmmel,  Kriegstage  aus  Saalfed's  Vergangenheit.  (Conféren- 
ces utiles).  —  Muhammed  in  Médina,  das  ist  Vakidi's  Kitab  al  Maghazi 
in  verkùrzter  deutscher  Wiedergabe  hrsg.  v.  Wellhausen.  —  Niese, 
Die  Entwickl.  der  homer.  Poésie.  (Bien  écrit,  clair  et  pénétrant.)  — 
Lechner,  De  pleonasmis  homericis.  (Etude  de  valeur).  —  Poestion,  Ein- 
leit.  in  das  Studium  des  Altnord.  (N'est  pas  scientifique.)  —  Flos  unde 
Blankflos,  p.  p.  Waetzoldt.  —  Heliand,  p.  p.  Behaghel  (édition  très 
louable).  — Stern,  Lexicon  der  deutschen  Nationalliterratur  (Profitable). 

—  Landsberger,  Das  Buch  Hiob  u.  Gcethe's  Faust.  (Exact,  mais  long, 
peu  profond.) 

Deutsche  Literaturzeitung,  n°  43,  28  octobre  1882  :  Beyschlag,  Kritisch- 
exeget.  Handbuch  ueber  den  Brief  des  Jakobus.  —  Rouget,  Une  église 
calviniste  au  xvi«  siècle.  i55o-i58o,  Histoire  de  la  communauté  réfor- 
mée de  Sainte-Marie-aux-Mines,  p.  p.  Mùhlenbeck.  (Krauss.)  —  Os- 
termann  u.  Wegener,  Lehrbuch  der  Paedagogik.  —  Loth,  Ueber  Le- 
beri  u.  Werke  des  Abdallah  ibn  ul  Mu'tazz.  (Wellhausen.)  —  Cato  de 
agri  cultura,  p.  p.  Keil.  (Jordan  :  «  la  main  ferme  et  exercée  de  Keil  a 
posé  pour  toujours  le  fondement  des  recherches  dont  le  texte  de  Caton 
sera  l'objet  »).  — G.  Hermanns  latein.  Briefe  an  Volkmann,  hrsg.  v. 
A.  B.  Volkmann  (Léo).  —  Schober,  Heinse.  (Sauer  :  bon,  mais  diffus.) — 
Caroline  u.  ihre  Freunde,  von  Waitz.  —  Buchner,  Freiligrath.  (Wer- 
ner  :  excellent.)  —  Verwijs  en  Verdam,  Middelnederlandsch  Woorden- 
bock.  (2  premières  livraisons  d^n  ouvrage  qu'on   doit  bien  accueillir.) 

—  Shakspeare's  Julius  Caesar  erklârt  von  A.  Schmidt.  (Bon.)  —  Jansen, 
J.-J.  Rousseau.  (A  consulter  pour  les  «  Confessions  »).  —  Frieûlënder, 
Darstell.  aus  der  Sittengeschichte  Roms.  (5e  édition,  augmentée.)  — 
Krones,  Grundriss  der  ôsterreicbischen  Geschichte.  (Rieger  :  très  bon.) 

—  Schwebel,  Kulturhistor.  Bilder  aus  der  deutschen  Reichshaupt- 
stadt.  (Heidemann).  —  Chavanne,  Physikal.  Wandkarte  von  Africa. 

—  N°  44,  4  novembre  1882  :  Volter,  Die  Entstehung  der  Apo- 
calypse. —  Escher,  Die  Glaubensparteien  in  der  Eidgenossenschaft 
u.  ihre  Bezieh.  zum  Ausland,  vornehmlich  zum  Hause  Habs- 
burg  u.  zu  den  deutschen  Protestanten.   i527-i53i.  (Nippold  :  bon.) 

—  W.  Schneegans,  Abt  Johannes  Trithemius  u.  Kloster  Sponheim.  — 


Leop.  Schmidt,  Die  Ethik  der  alten  Griechen.  I  u.  II.  (Gyzicki  :  tra- 
vail important.)  —  Jodl,  Geschichte  der  Ethik  fin  der  neueren  Philoso- 
phie. I.  (Gyzicki  :  le  meilleur  travail  sur  le  sujet.)  —  Ziemer,  Jung- 
grammat.  Streifzûge  im  Gebiet  der  Syntax,  (Collitz  :  art.   défavorable.) 

—  Happel,  Die  altchines.  Reichsreligion  vom  Standpunkte  der  ver- 
gleich.  Religionsgeschichte.  (W.  Sch.  :  petit  travail  de  grande  valeur.)  — 
Pluss,  Horazstudien,  alte  u.  neue  Aufsâtze  liber  horazische  Lyrik. 
(Très  instructif.)  —  Horawitz,  Erasmus  u.  Martinus  Lipsius,  ein  Bei- 
trag  zur  Gelehrtengeschichte  Belgiens.  (G.  Voigt  :  renferme  99  lettres, 
dont  17  d'Erasme,  inédites.)  — ^Des  Minnesangs  Frûhling,  3e  Aufl.  v. 
F.  Vogt.  (Roediger.)  —  Johann  Faust,  ein  allegor.  Drama  gedruckt 
1775,  hrsg.  v.  K.  ÉNGEL.(Werner.) —  Bossert,  Gœthe,  ses  précurseurs  et 
ses  contemporains.  (Seuffert  :  livre  écrit  avec  beaucoup  d'agrément  et 
qu'on  ne  lira  pas  sans  plaisir  et  sans  profit.) —  Goethe-Jahrbuch,  hrsg. 
v.  Geiger.  III.  —  Gôrlich,  Die  sûdwestl.  Dialekte  der  Langue  d'Oïl. 
(Ulrich  :  du  soin.)  —  M.  Lehmann,  Preussen  u.  die  kathol.  Kirche 
seit  1640.    (Koser.)  —  Alex.    Bain,  James   Mill,  a   biography  (Pauli). 

—  Gneist,  Englische  Verfassungsgeschichte.  (Gierke  :  grand  travail 
d'ensemble.)  —  Burckhardt  Biedermann,  Das  rômische  Theater  zu 
Augusta  Raurica. 

N°  4.5,  11  nov.  1882  :  Bender,  Dippel.  —  Raebiger,  zur  theolog. 
Encyclopàdie.  —  Soury,  Philosophie  naturelle.  (Riehl  :  darwinisme 
demi-scientifique.)  —  Leibniz,  p.  p.  Gerhard,  tome  V.  —  J.  Mûller, 
Quellenschriften  u.  Geschichte  des  deutschsprachlichen  Unterrichts  bis 
zur  Mitte  des  XVI.  Jahrhunderts.  (Matériaux  abondants.)  —  The 
chronicle  of  Joshua  the  Stylite  p.  p.  Wright.  — Appiani  historia  ro- 
mana  ed  Mendelssohn.  (Niese  :  très  bon.)  —  Hermann,  Lehrbuch  der 
griech.  Altertùmer,  3e  édit.  p.  p.  Blûmner.  —  Pôkel,  Philologische 
Schriftsteller.  —  Lexicon  (Incomplet).  —  Buttmann,  Die  Schicksalsidee 
in  Schillers  Braut  von  Messina  (vague).  —  Ad.  Kuhn,  Schiller,  Zerstreu- 
tes  als  Bausteine  zu  einem  Denkmale  gesammelt.  (Minor  :  toujours  des 
extraits  et  des  réimpressions  !)  —  Ad.  Stern,  Lexicon  der  deutschen  Na- 
tionalliteratur.  (Utile.)  — Hotz,  On  the  use  of  the  subjunctive  mood 
in  anglo-saxon.  (Napier  :  soigné,  rien  de  nouveau,  mauvais  anglais.)  — 
Wûstenfeld,  Die  Geschichtsschreiber  der  Araber  u.  ihre  Werke.  (Lan- 
dauer  :  très  pratique,  à  recommander  à  toutes  les  bibliothèques.)  — 
Hansisches  Urkundenbuch,  p.  p.  Hôhlbaum.  III,  1.  —  Kantecki,  Die 
neapolitanischen  Summen,  ein  histor.  Essay,  ûbers.  v.  Lôwenfeld.  (Il 
s'agit  de  l'héritage  de  la  reine  Bona  Sforza.)  —  Rhamm,  Hexenglaube  u. 
Hexenprocesse.  (Surtout  dans  le  Brunswick.)  —  Baisch,  J.  Chr. 
Reinhart  u.  seine  Kreise.  —  Béer,  Aus  Tegethoffs  Nachlass. 

Philologische  Wochenschrift  n°  40,  7  octobre  1882  :  Adolf  Bauer,  die 
Kyrossage  und  Verwandtes  (G.  J.  Schneider  :  très  intéressant).  —  Ma- 
rius  Fontane,  Histoire  universelle;  les  Iraniens,  Zoroastre,  Lemerre, 
1881  (Justi  :  aucune  valeur  historique;  quelques  vues  justes  sur  les 
doctrines  de  l'Avesta).  —  Benseler,  Der  Optimismus  des  Sokrates  bei 
Xenophon  und  Platon  gegenûber  den  pessimistischen  Stimmen  in  der 
alteren  griechischen  Litteratur  (Belger  :  à  lire;  diverses  critiques). — 
E.  F.  Fritsche,  Leitfaden  der  Mythologie  der  Griechen  und  Rômer  fur 
hôhere  Lehranstalten  (P.  Stengel  :  ne  peut  servir  aux  classes  sous  la 
forme  actuelle).  —  Friedrich  Schlegel  1 794-1 802,  seine  prosaischen 
Jugendschriften  herausgegeben  von  J.  Minor,  L,  zur  griechischen  Lite- 
raturgeschichte  (fait  connaître  l'enthousiasme  de  Fr.  Schlegel  jeune 
pour  l'antiquité  jeune,  enthousiasme  dont  plus  tard  il  effaça  les  traces). 
—  Jos.  Walter,  M.  Tullii  Ciceronis  philosophia  moralis,  II,  iv  (Lôw- 
ner  :  soigné). 


N°  41,  14  oct.  1882  :  Edwin  Wallace,  Aristotle's  Psychology  in 
Greek  and  English,  Cambridge,  University  Press  (Susemihl  :  la  partie 
faible  est  la  critique;  il  y  a  des  choses  excellentes  dans  l'introduction  et 
le  commentaire).  —  Inaugural-dissertationen  de  l'université  de  Greif- 
swald  :  Halfpap  nom.  Klotz  :  Quaestiones  Servianae  (solide  ;  rattache 
le  pseudo-Servius  aux  scholies  de  Vérone)  ;  Paul  Voigt,  Sorani  Ephesii 
liber  de  etymologiis  corporis  humani  quatenus  restitui  possit  (critiques 
diverses)  ;  Liman,  Foederis  Boeotici  instituta  (de  la  reconstruction  de 
Thèbes  par  Cassandre  à  l'occupation  romaine  :  obscur,  aventuré,  incor- 
rect) ;  Joannes  de  Arnim,  De  prologorum  Euripideorum  arte  et  interpo- 
latione.  —  Seyss,  Ueber  den  Plural  der  substantiva  abstracta  in  Vergils 
Aeneis  (Lôwner  :  ni  complet  ni  neuf). 

N°  4'i,  21  octobre  1882  :  Simplicii  in  libros  Aristotelis  de  anima  com- 
mentaria  éd.  Hayduck  ;  Simplicii  in  Aristotelis  Physicorum  libros  IV 
priores  commentaria  éd.  Diels  ;  Diels,  Zur  Textgeschichte  der  aristote- 
lischen  Physik  (Susemihl  :  commencement  d'une  collection  des  com- 
mentateurs d'Aristote  qui  est  une  entreprise  gigantesque;  travaux  très 
utiles).  —  Dettweiler,  Ueber  den  freieren  Gebrauch  der  zusammen- 
gesetzten  Adjektiva  bei  Aeschylus  (redresse  de  vieilles  erreurs  d'inter- 
prétation). —  Klouckvek,  Vergiliana  (Lôwner  :  utile  malgré  des  détails 
contestables). 


A.  QUANTIN,    IMPRIMEUR-EDITEUR,  A  PARIS 

7,       RUE       SATNT-BENOIT,       J 

LE   LIVRE 

REVUE   DU    MONDE    LITTÉRAIRE 
ARCHIVES    DES    ÉCRITS    DE    CE    TEMPS 

Rédacteur    en    chef    :     M.     OCTAVE    UZANNE 


Cette  importante  Revue  paraît  le  ÎO  de  chaque  mois.  Elle  est  de   format  grand 

in-8°  et  contient  des  illustrations  dans  le  texte  et  hors  texte.  La  première  partie  est 

consacrée  aux  études  littéraires.  La  seconde  comprend  des  correspondances  de  tous 

les  pays  de  l'Etranger  et  l'examen  critique  de  tous  les  ouvrages  nouvellement  parus. 

Le  mouvement  intellectuel  y  est  suivi  jusque  dans  les  principaux  articles  des  revues 

et  des  journaux  et  tous  les  événements  qui  s'y  rapportent  y  sont   consignés.  C'est 

une  encyclopédie  permanente  et  indispensable  aux  écrivains,  aux  amateurs,  aux  gens 

du  monde  soucieux  de  se  tenir  au  courant   des  manifestations  de  l'esprit  littéraire 

universel. 

/    Paris 40  fr. 

UN   AN     ij     Province 42  fr. 

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Les  trois  premières  usées  (1880,  1881  et  1882),  formant  chacune  deux  volumes, 
se  vendent  séparément  60  francs. 

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N°  50  Seizième  année      11  Décembre  1882 


REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE   PUBLIÉ    SOUS   LA   DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 
Un   an,   Pans,  20   fr.  —    Départements,   22   fr.   —    Etranger,    25  fr. 


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ERNEST    LEROUX,    EDITEUR 

LIBRAIRE     DE     LA      SOCIÉTÉ     ASIATIQUE 

u  g    l'école    des    langues    orientales    vivantes      etc. 
28,    RUE    BONAPARTE,    28 


Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  28,  RUE  BONAPARTE,  28 

E  A.  DE 


Membre  de  l'Institut. 

RÉUNIES    ET    MISES    EN    ORDRE    PAR     G.     SCHLUMBERGER 

Membre  résidant  de  la  Société  des  Antiquaires  de  France 

"Tr^MïT    DDÏÏA/IÏÏÏD    archéologie  orientale,  numisma- 

lUlVlC  rKjCiVllcK  TIQUE.  MONUMENTS  ARABES.  Un  beau 
vol  in-4  de  55o  pages,  illustré  de  nombreux  dessins  dans  le  texte  et  de  II  plan- 
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et  de  planches  sur  cuivre.  Chaque  volume 20  fr. 


EN   PREPARATION 


TOMES  IV  ET  V 


MOYEN - 
AGE 


Tous  les  mémoires  disséminés  par  M.  de  Longpérier  dans  un  grand  nombre  de  revues  et  de 
publications  diverses  figureront  dans  cette  édition  des  œuvres  éparses.  //  serait  impossible  de 
retrouver  aujourd'hui  dans  les  Bibliothèques  tous  ces  mémoires  de  l'illustre  archéologue  qui, 
pendant  plus  de  quarante  ans,  a  été  une  des  gloires  de  la  science  française.  Nous  espérons  que 
cette  publication,  qui  remet  sous  les  yeux  des  savants  tant  de  travaux  importants,  figurera  dans 
toutes  les  Bibliothèques  où  sa  place  est  marquée. 


X    PÉRIODIQUES 

The  Academy,  n°  5  5o,  18  novembre  T882  :  Lyall,  Asiatic  studies,  re- 
ligious  a.  social.  —  Doyle,  The  English  in  America,  Virginia,  Mary- 
land  a.  the  Carolinas  (Sainsbury).  —  Whitman,  Spécimen  days  a.  col- 
lect.  —  Cagnat,  Les  impôts  indirects  chez  les  Romains  (Macdonell  : 
rendra  de  grands  services).  —  Palmer  (Stanley  Lane  Poole).  —  Who 
wrote  «  The  whole  duty  of  man  »  ?  (Doble).  —  Copyright  in  titles  (Gib- 
bon). —  Jean  Cousine  «  Livre  de  fortune  »  (Heaton).  —  The  Botticelli 
«  Petrarch  »  in  the  Sunderland  Sale.  —  Prof.  Jebb  on  the  ruins  of 
Troy  (Sayce).  —  The  flower-wreaths  of  the  Pharaohs  (Am.  B.  Ed- 
wards). 

The  Athenaeum,  n°  2873,  18  novembre  1882  :  O'  Donovan,  The  Merv 
Oasis.  —  Bedae  Historia  ecclesiastica  gentis  Anglorum,  p.  p.  Holder. 
t*«-  Traill,  Sterne  («  brillianty  writen  and  picturesque  »).  —  Copy- 
right in  titles  (Gibbon).  —  The  Cambridge  University  extension  scheme. 

—  Fielding's  portrait.  —  Female  éducation  in  India  (Monier  Wil- 
liams). —  Notes  from  Berlin  (P.  Lindau).  —  The  Sunderland  sale.  — 
Notes  from  Rome  (Lanciani). 

Litterarisches  Centralblatt,  n°  45,  4  novembre  1882  :  Realencyclopàdie 
der  christl.  Altertûmer,  p.  p.  Kraus.  I.  A-H.  —  Diepolder,  Théologie 
u.  Kunst  im  Urchristententhum  oder  die  ersten  provisor.  Blàtter  zu 
einer  systemat.  Geschichte  der  christl.  Monumentaltheologie.  —  Briefe 
des  Pfalzgrafen  Johann  Casimir  p.  p.  Bezold.  I.  1576-1582. —  TtiR- 
heim,  Feldmarschall  Ernst  Rûdiger  Graf  Starhemberg.  1638-1701. 
(Intéressant,  comble  une  lacune.)  —  Haberlandt,  Zur  Geschichte  ei- 
niger  Personalausgànge  bei  den  thematischen  Verben  im  indogerman. 
(Des  faiblesses,  mais  du  talent,  des  résultats  acceptables.)  —  Platzmann, 
Glossar  der  feuerlând  Sprache.  (Véritable  et  très  précieux  travail  de  pion- 
nier.) —  Ring,  altlatein.  Studien.  (Manque  de  méthode,  de  réflexion  et 
de  savoir.)  —  Brinckmeier,  Floresta  de  satiras,  fabulas  literarias,  letril- 
las  sonettos  burlescos.  —  Walz,  Gârel  von  dem  blûhenden  Thaï.  (Edi- 
tion bienvenue.)  —  Bethge,  Wirnt  von  Gravenberg.  (Travail  définitif.) 

—  Toischer,  Ueber  die  Alexandreis  Ulrichs  von  Eschenbach.  (Bon.)  — 
Helber's  Teutsches  Syllabierbûchlein,  i5q3,  hrsg.  v.  Roethe.  —  De- 
dekind's  Grobianus  verdeutscht  von  Kasper  Scheidt,—  Muller  (Conr.), 
Beitràge  zum  Leben  u.  Dichten  Lohenstein's.  (Utile.)  —  Schulenburg, 
Wendisches  Volkstum  in  Sage,  Brauch  u.  Sitte.  (Très  recommandable.) 

—  Madden,  The  international  numismata  orientalia.  II.  Coins  of  the 
Jews.  —  Pohl,  Joseph  Haydn. 

N°  46,  n  novembre  1882  :  Weiss,  das  Leben  Jesu.  2  vols.  —  Re- 
flexionen  Kant's  zur  Anthropopologie,  p.  p.  Erdmann.  —  Droysen, 
Athen  u.  der  Westen  vor  der  Sicil.  Expédition.—  Wacker,  Der  Reichs- 
tag  unter  den  Hohenstaufen.  (Solide.)  —  Kantecki,  Die  neapolitan.  * 
Summen,  ûbers.  v.  Lôwenfeld.  (Trop  long,  mal  traduit.)  —  Stieler's 
Handatlas.  —  Domke,  die  Viril-Stimmen  im  Reichs-Fiirstenrat  von 
1495-1654.  —  Biese,  Die  Entwickl.  d.  Naturgefuhls  bei  den  Griechen. 
(Détaillé,  assez  bon.)  —  Der  Codex  Teplensis,  enthaltend  «  die  Schrift 
des  newen  Gezeuges  »,  aelteste  deutsche  Handschrift,  welche  den  im 
XV.  Jahrh.  gedruckten  deutschen  Bibeln  zu  Grund  gelegen.  —  Wen- 
ker,  Sprachatlas  v.  Nord.  u.  Mitteldeutschand.  I  :  (Travail  immense 
qu'on  ne  recommencera  pas  de  longtemps.)  —  Krisper,  Die  Kunstmusik 
in  ihrem  Principe. 

Deutsche  Litteraturzeittmg,  n°  46,  18  novembre  1882  :  Bréal,  Excursions 
pédagogiques  (Bertram  :  pénétrant).  —  Brunnhofer,  Ueber  den  Geist 
der  indischen  Lyrik;  v.  Schrôder, Ueber  die  Poésie  des  indischen  Mittel- 


altcrs.  (Kaegi  :  à  recommander  non  seulement  aux  spécialistes,  mais  à 
tous  les  amis  delà  littérature.)  — Inscriptionesgraecae  antiquissimae 
praeter  atticas  in  Attica  repertas  éd.  Roehl.  (Hinrichs  :  l'éloge  est  inu- 
tile.) —  Ruodlieb,  p.  p.  Seller  (Voigt  :  profond  et  méthodique.)  — 
Frischbier,  Preussisches  Worterbuch.  I,  1-6.  (Kossinna  :  des  défauts, 
mais  beaucoup  de  choses  utiles  et  estimables.)  —  Suphan,  Gcethe  u.  Spi- 
noza, 1783-86.  (Jacoby  :  très  bon  )  —  Duncker,  Geschichte  des  Alter- 
tums.  VI.  (A.  Schaefer.)  —  Marczali,  Ungarns  Geschichts-Quellen  im 
Zeitalter  der  Arpaden.  (Krones.)  —  Ebers,  Durch  Gosen  zum  Sinai.  — 
Hasse,  Die  Venus  von  Milo.  (Kekulé  :  des  connaissances  anatomiques, 
mais  cela  ne  suffit  pas). 

Tbeologische  Literaturzeitung,  n°  22, 4  nov.  1882  :  ZiMMER,Galaterbrief  u. 
Apostelgeschichte.  —  Lactantii  liber  de  mortibus  persecutorum,  p.  p. 
Fr.  Dûbner.  1879.  (Brieger  :  sans  valeur).  —  Ebrard,  Bonifatius,  der 
Zerstôrer  des  columbanischenKirchenthums  auf  dem  Festlande  (Zoepf- 
fel  :  méthode,  pénétration,  soin,  tout  a  été  mis  à  la  défense  d'une  hypo- 
thèse qui  a  contre  elle  tous  les  documents).  —  Jansen,  an  meine  Kriti- 
ker.  (Kolde  :  premier  art.).  —  De  Felice,  Lambert  Daneau,  pasteur  et 
professeur  en  théologie,  i53o-i5g5,  (Schott  :  travail  fait  avec  un  grand 
soin). 

Philologische  Rundschau,  n°  36,  2  septembre  1882  :  Mekler,  Euripidea, 
Textkritische  Studien  (Gloël  :  bon).  —  Platonis  opéra  éd.  Schanz, 
Symposion  (Schultess  :  excellent).  —  Fragmenta  philosophorum  Grae- 
corum  coll.,  rec,  vertit  Mullach,  III,  Platonic.et  Peripat,  Didot,  188 1 
(Schanz  :  travail  à  refaire).  —  G.  H.  Mueller,  Horati  metra  (Venedi- 
ger  :  in  puerorum  usum),  —  Englmann,  Cornélius  Nepos  mit  Anmer- 
kungen  fur  Schûler.  —  T.  Livii  hist.  rom.  lib.  I  éd.  Purser,  London, 
Simpkin,  Marshall  and  Co.,  1881  (Schrôder  :  compilation  bien  faite). 
—  G.  Curtii  Rufi...  libri  superstites  cum  supplementis  Freinshemii  et 
adnotationibus  Thomae  Vallaurii,  ed  altéra,  1882,  Torino-Roma-Fi- 
renze-Milano,  Paravia  (Krah  :  on  ne  peut  plus  arriéré).  — Gustafsson, 
Fragmenta  Veteris  Testamenti  in  Latinum  conversi  e  palimpsesto  Va- 
ticano  eruta,  Helsingfors  1881  (Rônsch  :  intéressant  pour  l'histoire  de 
la  Vulgate).  —  Stolte,  De  chori,  qualis  in  perfecta  Graecorum  tragoe- 
dia  apparet,  ratione  et  indole  (Muff  :  arriéré  de  vingt  ans).  —  Klaucke, 
Aufgaben  zum  Uebersetzen  aus  dem  Deutschen  ins  Lateinische,  3.  Aufl. 
(Gebhardi,  article  de  9  colonnes).  —  Schroeter,  Geschichte  der  deut- 
schen Homer-Uebersetzung  im  XVIII.  Jahrhundert.  —  G.  Th.  Ger- 
lach,  Der  alten  Griechen  Gôtterlehre,  Mythen  und  Heldensagen  (Illisi- 
ble, «  glûcklicherweise  ») 

Archiv  fur  Slavische  Philologie.  Tome  VI.  3  :  Die  Magdeburger  Urtheile 
(étude  sur  une  traduction  polonaise  des  lois  allemandes  rédigée  au 
xve  siècle.  A.  Brùckner).  —  Neue  Beitrâge  zur  Geschichte  der  Salo- 
monssage  (A.  Wesselovsky  :  M.  W.  est  l'auteur  d'un  livre  classique  en 
russe  sur  la  légende  de  Salomon).  —  Revue  critique.  Etudes  de  dialec- 
tologie polonaise  (Hanusz).  —  Revue  de  la  Société  littéraire  bulgare  et 
Golumna  lui  Traianu  (Syrku).  —  Matériaux  pour  servir  à  l'histoire  de 
la  philosophie  slave  (Correspondance  de  Dobrowsky  et  de  Kopitar  pen- 
dant Tannée  18 10).  —  Bulletin  bibliographique,  sommaire  des  revues 
slaves. 

Athenaeum  belge,  n°  22,  i5  novembre  1882  :  Hubert,  Les  protestants 
en  Belgique  depuis  Charles-Quint  (Juste).  —  H.  de  Villefosse  et 
Thedenat,  Cachets  d'oculistes  romains:  I.  (de  Ceuleneer).  —  Les  poésies 
de  Catulle,  trad.  p.  Rostand;  pensées  sur  l'éducation  de  Locke,  trad.  p. 
Compayré  ;  Baschet,  Les  comédiens  italiens  à  la  cour  de  France;  Mo- 
lière, tome  VII,  p.  p.  Mesnard;  Notice  sur  La  Bruyère  par  Servois.' 


LIBRAIRIE    DE    L'ART 

J.     ROUAM 

IMPRIMEUR-ÉDITEUR 

PARI 'S,    SS,    avenue    de    l'Opéra,    S  S,    PARIS 
ÉTRENNES    DE    1883 

PARIS  PITTORESQUE 

Par  M.  de  CHAMPEAUX 

Inspecteur  des  Beaux-Arts  à  la  Préfecture  de  la  Seine 
Album  in-40  grand  colombier,  illustré  de  nombreuses  gravures  dans  le  texte  et  hors 

texte,  avec  10  grandes  eaux  fortes  originales  par  Lucien  Gautier. 
Riche  reliure  à  biseaux.  Prix 25  fr. 

A  TRAVERS  VENISE 

Par  M.  Jules  GOURDAULT 

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avec  i3  eaux  fortes  par  les  premiers  artistes. 
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ARTISTES  ANGLAIS  CONTEMPORAINS 

Par     M.     Ernest     CHESNEAU 

Ancien  inspecteur  des  Beaux-Arts. 

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avec  i3  eaux  fortes  par  les  premiers  artistes. 
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BIBLIOTHÈQUE  IKURNATIOMLE  DE  L'ART 

Sous  la  direction  de  M.  Eugène  MÙNTZ 
Tous  les  ouvrages  de  cette  bibliothèque  sont  tirés  à  très  petit  nombre. 

Ludovic  Lalahne,  Le  livre  de  Fortune,  Recueil  de  deux  cents  dessins  inédits  de 
Jean  Cousin,  d'après  le  manuscrit  conservé  à    la  bibliothèque  de  l'Institut.  Prix, 

broché,  3o  fr.  Riche  reliure  à  biseaux 35  fr. 

2.5  exemplaires  numérotés,  sur  papier  de  Hollande,  à  5o  fr. 

Davillier  (le  baron).  Les  Origines  de  la  Porcelaine  en  Europe,  les  fabriques 
italiennes  du  xv*   au  xvn"   siècle.  1  vol.  in-40  raisin  illustré.  Prix  broché  20  fr. 

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25  exemplaires  numérotés,  sur  papier  de  Hollande,  à  40  fr. 
Bonnaffé  (Edmond).  Les  amateurs  de  l'ancienne  France  :  Le  surintendant 
Foucquet.    1     vol.    in-40    raisin    illustré.    (Épuisé    broché.    Riche    reliure    à 

biseaux 1 5  fr. 

Il  reste  quelques  exemplaires  numérotés,  sur  papier  de  Hollande,  à  25  fr. 
Mûntz  (Eugène).    Les  Précurseurs    de   la   Renaissance.  1  vol.  in-4°  raisin, 

illustré,  de  2  56  pages.  Prix,  broché,  20  fr..  relié 25  fr. 

Il  reste  quelques  exemplaires  numérotés,  sur  Hollande,  au  prix  de  5o  fr. 

Le  Puy,  imprimerie  de  Marchessou  fils,  boulevard  Sainl-laurert. 


N°  51  Seizième  année      18  Décembre  1882 


REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE    PUBLIÉ   SOUS   LA   DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.   PARIS 


Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 


Prix  d'abonnement  : 
Un   an,  Paris,  20   fr.  —   Départements,   22   fr.   —   Etranger,    2$  fr. 


PARIS 

ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

libraire    de    la    societe    asiatique 

de    l'école    des    langues    orientales   vivantes      etc. 

28,    RUE   BONAPARTE,    28 


A  dresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M .  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 


LIBRAIRIE  H.  OUDIN,  EDITEUR 
Paris,  5i,  rue  Bonaparte.  —  4,  rue  de  l'Eperon,  Poitiers 

BELLES  PUBLICATIONS  B'ÉTREMES 

LES    PYRÉNÉES    FRANÇAISES 

PREMIÈRE  PARTIE 

Lourdes.—  Argelez.—  Cauterets.—  Luz.—  Saint-Sauveur.— Barèges. 

Par  Paul  PERRET,  illustrations  de  E.  SADOUX 

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LES  PYRÉNÉES  FRANÇAISES 

DEUXIÈME  PARTIE 

LE     PAYS     BASQUE 

ET    l_A    BASSE    NAVARRE 

PAR    LES   MÊMES 

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LES  PYRÉNÉES  FRANÇAISES 

TROISIÈME  ET  DERNIÈRE  PARTIE 

Bagnéres-de-Bigorre.     Luchon.     Tarbes.     Saint-Grirons.     Aulus.    Foix. 

Ussat-les-Bains.  Ax.  Mont-Louis.  Urgels.  Amélie-les-Bains . 


PÉRIODIQUES 

The  Academy,  n°  55 1,  25  novembre  1882  :  Yriarte,  History  of  Flo- 
rence, transi,  by  Pitman.  —  The  Epie  of  Kings,  stories  retold  from  Fir- 
dusi,  by  Helen  Zimmern,  with  a  pref.  poem  by  Gosse.  —  Fitzgerald, 
Duk.es  a.  princesses  of  the  family  of  George  III.  —  Hay,  Brighter  Bri- 
tain  or  Settler  a.  Maori  in  Northern  New  Zealand.  —  In  Memoriam, 
E.  H.  Palmer  (C.  E.  Wilson).  —  Who  wrote  «  The  whole  duty  of 
man  »  III.  (Doble).  —  Some  booksof  philosophy  (Courtney,  Studies; 
Loomans,  De  la  connaissance  de  soi-même  ;  Mayor,  Sketch  of  ancient 
philosophy).  —  Bûchler's  Sanskrit  Grammar  (Max  Mûller).  —  Davil- 
lier,  Les  origines  de  la  porcelaine  en  Europe.  (Fortnum) .  —  Prof. 
Jebb  on  the  ruins  of  Troy.  (Jebb). 

The  Athenaeum,  n°  2874,  25  novembre  1882  :  Ashton,  Social  life  in 
the  reign  of  Queen  Anne;  Molloy,  Court  life  below  stairs  or  London 
under  the  fi rst  Georges.  —  Lyall,  Asiatic  studies,  religions  a.  social.  — 
Thornton,  Foreign  secretaries  of  the  nineteenth  century.  III.  —  The 
Roxburghe  Ballads,  p.  p.  Ebsworth,  part  x,  vol.  IV.  —  Facsimiles  of 
national  manuscrits  of  Ireland,  part  IV.  —  English  authors  a.  ame- 
rican  publishers.  —  The  courts  of  justice.  —  A  pair  of  ancient  chalices. 
(Butler). 

Literarisches  Gentralblatt,  n°  47,  18  novembre  1882  :  Holtzmann  u. 
Zôpffel,  Lexikon  fur  Théologie  u.  Kirchenwesen.  —  Fremy,  Arnaud, 
du  Ferrier.  —  Franz,  Die  chronica  pontincum  Leodinensium.  —  Cita- 
della,  L/Italia  nelle  sue  discordie.  (Œuvre  de  publiciste,  et  non  d'his- 
torien.)—  Kirchhoff,  Schulgeographie  (très  bon).  —  Commentationes 
philologae  ienenses.  I.  —  Plauti  Menaechmi  p.  p.  Vahlen.  — Wil- 
manns,  Leben  u.  Dichten  Walther's  von  der  Vogelweide.  (Excellent  tra- 
vail d'ensemble.)  —  Schrôder,  das  Anegenge.  —  Fussenbrunnen,  die 
Kindheit  Jesu,  hrsg.  v.  Kochendôrffer.  —  Der  arme  Heinrich  u.  die 
Biichlin,  hrsg.  v.  M.  Haupt.  2e  Aufl.  bes.  v.  E.  Martin. 

Deutsche  Literaturzeitung,  n"  47,  25  novembre  1882  :  Das  Neue  Testa- 
ment, ûbers.  v.  WEizsâCKER.  —  Wôrmer,  Die  Lehre  Jesu.  —  Biese, 
Die  Entwickl.  des  Naturgefûhls  bei  den  Griechen  u.  Rômern  (Renner  : 
profond  et  frappant).  —  Koechly,  Opuscula  philologica,  I,  p.  p.  G.  Kin- 
kel;  II,  p.  p.  Bôckel;  Akadem.  Vortràge  u.  Reden,  p.  p.  Bartsch 
(Dittenberger).  —  Hahns  althochd.  Grammatik,  5°  Aufl.  p.  p.  Strobl 
(Roediger  :  était  inutile,  ou  peu  s'en  faut).  —  Keil,  Gœthe,  Weimar  u. 
Iena  im  Jahre  1806  (E.  S.  :  de  l'inédit).  —  Lichtenberger,  Etude  sur  les 
poésies  lyriques  de  Gœthe,  2e  édit.  (Jacoby.)  —  Graf,  Roma  nelle  me- 
moria  e  nelle  imaginazione  del  medio  evo  (Schrôder  :  beaucoup  de  ma- 
tériaux, peu  de  critique).  —  Featherman,  Social  history  of  the  races  of 
mankind.  —  W.  Mûller,  Geschichte  der  Stadt  Olmûtz.  —  Reimann, 
Neuere  Geschichte  d.  preuss.  Stats  (Isaacsohn  :  très  bon).  —  Clarke, 
Report  on  the  investigations  of  Assos  (Conze). 

N°  48,  2  décembre  1882  :  Preger,  Ueber  die  Anfânge  des  kirchenpo- 
lit.  Kampfes  unter  Ludwig  dem  Baier.  —  Schlottmann,  Der  deutsche 
Gewissenskampf  gegen  den  Vaticanismus.  —  Bardenhewer,  Die  pseudo- 
aristotelische  Schrift  «  ueber  das  reine  Gute  »  bekannt  unter  dem  Na- 
men  Liber  de  Causis.  —  Hauri,  der  Islam,  in  seinem  Einfluss  auf  das 
Leben  seiner  Bekenner  (S.  Fraenkel  :  rien  de  nouveau  pour  le  spécia- 
liste, mais  bon  exposé  d'ensemble).  —  Spengel,  Reformvorschlaege  zur 
Metrik  der  lyrischen  Versarten  bei  Plautus  u.  den  ûbrigen  latein.  Sce- 
nikern  (Seyffert  :  recherches  de  grande  valeur).  —  Herder,  Denkmal 
Johann  Winckelmanns,  eine  ungekrônte  Preisschrift  aus  1778,  p.  p. 


Alb.  Duncker  (Suphan).  —  Zolling,  H.  von  Kleist  in  der  Schweiz 
(Seuffert  :  trop  diffus,  documents  utiles).  —  Sievers,  Angelsàchsische 
Grammatik  (Wissmann  :  travail  très  remarquable).  —  G.  Sand,  Corres- 
pondance 1812-1876.  I  u.  II.  —  A.  von  Reumont,  Vittoria  Colonna, 
Leben,  Dichten,  Glauben  im  XVI.  Jahrhundert  (W.  Bernhardi  :  tableau 
fidèle,  curieux,  soigné  dans  toutes  ses  parties;  contribution  importante 
à  l'histoire  des  tentatives  de  la  Réforme  en  Italie  dans  la  première  moi- 
tié du  xvie  siècle  jusqu'au  concile  de  Trente).  —  Preussen  im  Bundestag 
i85i  bis  1859,  Documente  der  preuss.  Bundestags-Gesandtschaft  hrsg. 
v.  Poschinger.  3  vols  (Koser).  —  I.  L.  Bird,  Unbetretene  Reisepfade  in 
Japan.  —  Bernays,  Schicksale  des  Grossherzogthums  Frankfurt  u.  sei- 
ner  Truppen  (Hinze  :  intéressant  et  instructif). 

Theologische  Literaturzeitung,  n°  2  3,  18  nov.  1882  :  Weiss,  Das  Leben 
Jesu  I.  (Weizsàcker)  —  Janssen,  An  meine  Kriti-ker.  (Kolde  :  2e  ar- 
ticle). —  Dittrich,  Regesten  u.  Briefedes  Cardinals  Gasparo  Contarini. 
J483-1.542.  (Brieger.)  —  Harless,  Jacob  Bôhme  u.  die  Alchymisten; 
Martensen,    Jacob    Bôhme,    theosophische    Studien,    ûbers.    v.    Mi- 

CHELSEN. 

Philologische  Rundschau,  n°  37,  9  septembre  1882  :  Leop.  Schmidt,  Die 
Ethik  der  alten  Griechen,  1.  Band  (Ziegeler,  article  de  12  colonnes).  — 
L,  Schmidt,  Zehn  Horaz-Oden  in  freier  Uebertragung  (Storch).  —  Resl, 
Utrum  dialogus,  qui  inscribitur  de  oratoribus,  Tacito  adscribi  possit 
necne,  quaeritur  (Eussner  :  mauvais).  —  Rufi  Festi  Avieni  prognostica 
éd.  Breysig  (Bitschofsky  :  contient  les  v.  1326  à  1878).  —  Weise,  Die 
griechischen  Worter  im  Latein  (Saalfeld  :  très  bon).  —  August,  Zur 
Frage  der  Verwertung  der  Etymologie  in  der  Schale  (Zirwik). 

Deutsche  Rundschau,  novembre  1882  :  Haeckel,  Indische  Reisebriefe, 
VII.  —  Aus  zwei  annectirten  Làndern  Erzâhl.  eines  deutschen  Offi- 
ciers, III,  IV.  —  Reyer,  Elba  :  III.  Aelteste  Geschichte  von  Elba  ;  IV. 
West.  Elba;  V.  Marciana,  Land  und  Leute.  —  Du  Bois  Reymond,  Die 
zwei  undfûnfzigste  Versammlung  der  britischen  Naturforscher.  —  In- 
dividualismus  in  den  Vereinigten  Staaten,  eine  Stimme  aus  Amerika. 
—  W.  Sckerer,  Neue  Faust  Commentare  (Marbach,  Schreyer  et 
Schrôer).  —  Literarische  Notizen. 

_  Gœttingische  gelehrte  Anzeigen,  n°  47,  22  nov.  1882  :  Aristides  Quinti- 
lianus  de  musica,  p.  p.  Alb.  Jahn.  (Sauppe  :  toute  notre  reconnais- 
sance au  diligent  et  savant  éditeur.)  —  Veldeke's  Enéide,  hrsg.  v. 
Behaghel  (Braune  :  bon).  —  Harnack,  Die  Ueberliefer.  der  griech. 
Apologeten.  (Bonwetsch.)  —  Haller,  Geschichte  der  russ.  Literatur  ; 
Kroatische  Revue  ;  Singer,  Beitrâge  zur  Lit.  der  Kroat.  Volkspoesie  ; 
Lukaszewski  u.  Mosbach,  Polnisch-deutsches  et  deutsch-poln.  Wôr- 
terbuch  (Nehring). 

Athenaeum  belge,  n°  23,  ier  décembre  1882  :  Baes,  La  peinture  flam- 
mande  et  le  régime  des  corporations.  (Wauters  :  de  bonnes  idées.)  — 
The  Hamilton  Palace  Collection.  —  D'Ideville,  Le  maréchal  Bugeaud, 
IL  —  Gautier,  Etudes  sur  la  liste  civile  en  France;  Duc  d'ALMAZAN,  La 
guerre  d'Italie,  campagne  de  1859;  Roux,  La  littérature  contempo- 
raine en  Italie,  i8i3-i833.  —  L'association  internationale  africaine  et 
le  comité  d'études  du  Haut-Congo. 

Revue  de  l'instruction  publique  supérieure  et  moyenne  en  Belgique,  tome  XXV, 
5e  livr.  :  De  Block,  Étude  sur  les  inscriptions  sépulcrales  des  Grecs.  — 
I,  Le  39e  congrès  des  philologues  allemands.  —  Studemund,  Deux  comé- 
dies parallèles  de  Diphile.  —  Comptes  rendus  :  Descailles,  Histoire  des 
concours  généraux  de  l'enseignement  primaire,  moyen  et  supérieur  en 
Belgique. 


LIBRAIRIE    DE   FIRMIN-DIDOT   ET  Cie 

IMPRIMEURS   DE    i/lNSTITUT,   RUE    JACOB,    56 

NOUVELLE  PUBLICATION 


L'ALGERIE 

HISTOIRE 
CONQUÊTE  ET  COLONISATION 

PAR  PAUL  GAFFAREL 

DOYEN    DE    LA   FACULTÉ  DES  LETTRES   DE  DIJON 

OUVRAGE  ILLUSTRÉ 

De  -4  chromolithographies,  S    belles  cartes  en  couleur 
et    tle    plus     «le    SOO     gravures     sur    bols 

(dont  22  hors  texte). 

Broché 30  fr. 

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tres tranches  ébarbées 40  fr. 

DICTIONNAIRE 

DE  L'ART 

DE    LA    CURIOSITÉ    ET    DU    BIBELOT 

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ERNEST    BOSC 

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et  de  4  chromolithographies. 

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Le  Puy,  imprimerie  de  Marchessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent. 


N°  52  Seizième  année      25  Décembre  1882 

REVUE  CRITIQUE 

D'HISTOIRE    ET   DE    LITTÉRATURE 

RECUEIL    HEBDOMADAIRE   PUBLIÉ   SOUS   LA   DIRECTION 

de  MM.  S.  GUYARD,  L.  HAVET,  G.  MONOD,  G.  PARIS 

Secrétaire  de  la  rédaction  :  M.  A.  Chuquet 

Prix  d'abonnement  : 
Un   an,  Pans,  20  fr.  —   Départements,   22   fr.   —   Etranger,    25  ir. 

PARIS 

ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

libraire    de   la    société    asiatique 

de    l'école    des    langues   orientales   vivantes      etc. 

28,    RUE    BONAPARTE,    28 

Adresser  les  communications  concernant  la  rédaction  à  M.  A.  Chuquet 

(Au  bureau  de  la  Revue  :  rue  Bonaparte,  28). 

ERNEST  LEROUX,  ÉDITEUR,  RUE  BONAPARTE,  28. 
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LES  ARTS  MÉCONNUS 

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L'EMPIRE  JAPONAIS 

ParL   METCHNIKOFF 

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LES  MOUVEMENTS  DU  SOL 

Par  A.  CHÉVREMONT 

Un  beau  volume  in-8,  avec  14  cartes  en  couleur 1 5  fr . 


PÉRIODIQUES 

The  Academy,  n°  552,  2  décembre  1882  :  Reg.  Stuart  Poole,  Cities  of 
Egypt.  (Am.  B.  Edwards).  —  Memoir  of  Annie  Keary,  by  her  sister. — 
Nathan  der  Weise,  a  dramatic  poem  by  Lessing,  edited  by  Buchheim. 
(Cheetham.) —  MacGregor,  WanderingsinBalochistan.  — François  Vil- 
lon and  two  latin  hymns.  (Symonds.)  —  The  history  of  opium  in 
China.  (Edkins.)  —  The  ruins  at  Hissarlik.  (Jebb.)  —  Thielmann, 
Das  verbum  dare  im  latein.  als  Reprâsentant  der  indo-europàischen 
Wurzel  Dha.  (Postgate  :  «  a  contribution  to  the  lexicon  of  the  future, 
which,  if  based  on  such  contributions,  will  be  immeasurably  superior 
to  the  lexicons  of  the  présent...  his  method  is  a  truly  lexicologicai  one; 
and may  be confidently  recommended  to  etymologers  ».)  —  Correspon- 
dance :  the  language  of  Bihar  (Grierson).  —  Le  livre  de  fortune,  recueil 
de  deux  cents  dessins  inédits  de  Jean  Cousin. 

The  Athenaeum,  n°  2875,  2  décembre  1882  :  Réminiscences  of  court  a. 
diplomatie  life,  by  Georgiana,  baroness  Bloomfield.  —  Hardwick,  On 
some  ancient  battle-fields  in  Lancashire  a.  their  histoncal,  legendary  a. 
aesthetic  associations.  —  Mac  Gregor,  Wanderings  in  Balochistan.  — 
SErvois,  La  Bruyère,  «  Les  grands  écrivains  de  la  France  ».  Hachette. 
(Excellent;  M.  Servois  «  is  diligent  in  noting  variants,  in  tracing  and, 
if  necessary,  completing  quotations,  in  explaining  allusions,  in  identi- 
fying  minor  historical  particulars.  »)  —  The  history  of  the  Matice 
Czeska,  II.  (Wratislaw.)  —  Sterne  as  a  plagiarist  (Wilkinson).  —  En- 
glish  authors  a.  american  publishers.  — A.  H.  Palmer,  Samuel  Palmer, 
a.  memoir.  —  Sh.  Scott,  Ghiberti  a.  ûonatello  a.  other  early  italian 
sculptors. — The  mosque  at  Hebron.  (Fergusson.) —  The  ruins  at  His- 
sarlik. (Jebb.)  —  Notes  from  Rome  (Lanciani). 

Literarisches  Centralblatt,  n»  48,  25  nov.  1882  :  Ebrard,  Bonifatius  der 
Zerstôrer  des  columban.  Kirchenthums  auf  dem  Festlande.  —  Benoer, 
Dippel.  —  Kaltner,  Konrad  v.  Marburg  u.  die  Inquisition  in  Deut- 
schland  .  —  Preger,  Anfànge  des  kirchenpolit.  Kampfes  unter  Lud- 
wig  dem  Baier.  —  Rohrmann,  Die  Procuration  Ludwig's  von  Baiern. 
—  Hesychii  Milesii  onomatologi  quae  supersunt,  p.  p.  Flach  (Très  soi- 
gné).—  M.  Minucii  Felicis  Octavius,  rec.  Cornelissen.  (D'excellentes 
conjectures.)  —  Balschan,  zur  roman.  Dialektologie.  I.  Ueber  den  jû- 
disch-spanischen  Dialekt  als  Beitrag  zur  Aufhell.  der  Aussprache  im 
Altspan.  (Intéressant.)  —  Carigiet,  râtoroman.  Wôrterbuch.  (Traite  du 
dialecte  de  Disentis  ou  Mustèr.)  —  Fr.  Schlegel,  seine  prosaischen  Ju- 
gendschriften,  hrsg.  v.  Minor  (Bienvenu).  —  Prosch,  Klingers  philo- 
soph.  Romane.  (Attachant.)  —  Baumgartner,  Gœthe's  Lehr.  u.  Wan- 
derjahre  in  Weimar  u.  Italien.  (CEuvre  de  tendance.)  —  Johann  Faust, 
ein  allegor.  Drama  gedruckt  1775,  p.  p.  Engel.  —  Geyer,  Der  Mu- 
senhof  in  Lôbichau.  —  Grans,  Gœthe's  Tasso.  (Ecrit  par  un  acteur 
pour  des  acteurs.)  —  Fischer  u.  Wiedemann,  ùber  babylon.  Talismane.  — 
Curtius  u.  Adler,  Olympia  u.  Umgegend.  —  J.  Schmidt,  Darstell.  der 
âlteren  Bau-und  Kunstdenkmàler  d.  Kreises  Sàngerhausen. 

Goettingische  gelehrte  Anzeigen,  n°  48,  24  novembre  1882.  Sancti 
Ephraem  Syri  hymni  et  sermones,  éd.  Th.  J.  Lamy,  I.  (Nôldeke.)  — 
Schuppe,  Erkenntnisstheoretische  Logik.  (Ueberhorst.) 

N°  49,  6  décembre  1882  :  Birst,  Das  Antike  Buchwesen.  (Rohde  : 
excellent).  —  Scholl,  Gcetge  in  Hauptzûgen  seines  Lebens  u.  Wirhens. 
(Miner  :  recueil  d'essais  dont  quelques-uns  importants). 


Librairie  HACHETTE  et  O,  boulevard  Saint-Germain,  79,  Paris. 

ÉDITIONS 

A  L'USAGE  DES  PROFESSEURS 

DES  PRINCIPAUX  CLASSIQUES  GRECS  ET  LATINS 
TEXTES 

PUBLIÉ*    D'APRÈS    LES    TRAVAUX    LES    PLUS    RÉGENTS 
DE    LA    PHILOLOGIE 

AVEC  DES  COMMENTAIRES  CRITIQUES  ET  EXPLICATIFS 

DES    INTRODUCTIONS    ET    DES    NOTICES 
Format  graud  in-8. 


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VIRGILE  publié  par  M.  E.  Benoist, 
professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de 
Paris.  3  vol. 

On  vend  séparément  chacun  des  trois 
volumes.  Les  Bucoliques  et  les  Gkor- 
giques,  2e  édit.  1  volume,  7  fr.  00.  — 
L'Enéide;  2  e  tirage,  2  volumes.  i5  fr. 
Chaque  volume^  7  fr.  5o 

TACITE  :  Annales,  suivies  du  Testa- 
ment politique  d'Auguste  (inscription 
d'Ancyre),  publiées  par  M.  Emile 
Jacob,  professeur  de  rhétorique  au 
lycée  Louis-le-Grand.  2  vol.         i5  fr. 

CORNELIUS  NEPOS,  publié  par  M.Mon- 
ginot,  prof,  au  lycée  Fontanes,  20  édit. 
1  vol.  6  fr. 

DÉMOSTHÈNE:  les  harangues,  publiées 
par  M.  H.  Weil,  membre  de  l'Institut, 
maître  de  conférences  à  l'Ecole  nor- 
male supérieure;  2e  édition.  1  vol.  8  fr. 

Ce  volume,  outre  les  Philippiques  et  les 
Olynthiennes,  comprend  les  harangues  : 
Sur  les  classes,  pour  la  liberté  des  Rho- 
diens,  pour  les  Mégalopolitains,  sur  la 
paix,  sur  l'Halonèse,  sur  la  Chersonèse, 
sur  la  lettre  de  Philippe,  sur  les  réformes 
.  et  sur  le  traité  avec  Alexandre. 


-   LES     PLAIDOYERS    POLITIQUES,     Ir 

par  M.  H.  Weil.   1  volume, 


série 
8  fr. 


Ce  volume  comprend  les  plaidoyers  contre  la 
loi  de  Leptine,  contre  Midias,  sur  les 
prévarications  de  l'ambassade  et  sur  la 
couronne. 


EURIPIDE  :    Sept    tragédies,   publiées 
par   M.    H.   Weil;   20    édition.  1    fort 


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Chacune  des  sept  tragédies  comprises  dans 
ce  volume  se  vend  séparément,  2  fr.  5o 

Ouvrage  couronné  par  l'Association  pour 
l'encouragement  des  études  grecques. 

HOMÈRE  :  Iliade,  publiée  par  M.  Alexis 
Pierron.  2  volumes,  16  fr. 

Ouvrage  couronné  par  l'Association  pour 
l'encouragement  des  études  grecques. 

—  Odyssée,  publiée  par  le  même.  2  vo- 
lumes, 16  fr. 

SOPHOCLE  :  Tragédies,  publiées  par 
M.  E.  Tournier,  maître  de  conférences 
à  l'Ecole  normale  supérieure,  docteur 
ès-lettres  ;  20  édition.  1  fort.  vol.  12  fr. 

Chacune  des  sept  tragédies  comprises  dans 
ce  volume  se  vend  séparément,  2  fr.  5o 

Ouvrage  couronné  par  l'Association  pour 
l'encouragement  des  études  grecques. 

EN  PRÉPARATION  : 
CÉSAR,  par  M.  E.  Benoist. 

SALLUSTE,  par  M.  Lallier,  professeur 
à  la  Faculté  des  lettres  de  Toulouse. 

TACITE,  tomes  III  et  IV,  par  M.  E.  Jacob. 

TITE-LIVE,  par  M.  Riemann,  maître 
de  conférences  à  la  Faculté  des  lettres 
de  Paris. 

DÉMOSTHÈNE  :  Plaidoyers  politiques, 
2e  série,  par  M.  H.  Weil. 

THUCYDIDE,  par  M.  Alfred  Croiset, 
maître  de  conférences  à  la  Faculté  des 
lettres  de  Paris. 


Librairie  HACHETTE  et  Cic,  boulevard  Saint-Germain,  79,  Paris. 
NOUVELLE  PUBLICATION 

ATLAS  MAI!  M  IlOllMÎ'Il  1HIIII1I 

CONTENANT  54  CARTES  IMPRIMÉES  EN  COULEURS 

UNE  LIVRAISON  PAR  MOIS  A  PARTIR  D'OCTOBRE  1882 

L'ouvrage  complet  en  9  livraisons  à  3  francs,  sera  mis  en  vente 
en  juin  ,1883  et  coûtera,  cartonné,  32  francs. 


Nous  avons  mis  en  vente,  le  19  octobre  1882,  la  première  livraison  de  l'Atlas  ma- 
nuel annoncé  ci-dessus.  Chaque  livraison,  du  prix  de  3  francs,  contient  six  cartes, 
dont  deux  doubles. 

Cet  atlas  est  une  édition  française  d'un  ouvrage  qui  a  obtenu  en  Allemagne  un  im- 
mense succès.  Le  fond  de  l'ouvrage  a  été  conserve,  sauf  remplacement  de  quelques 
cartes  détaillées  d'Allemagne,  par  des  cartes  détaillées  de  France,  etc.;  les  noms  ont 
été  traduits  par  une  réunion  de  géographes,  de  professeurs  et  de  spécialistes,  et  cette 
cette  traduction  a  été  faite  pour  chaque  pays,  autant  que  possible,  sur  des  cartes 
écrites  dans  la  langue  même  du  pays.  De  la  sorte,  nous  présentons  au  public,  non 
point  un  atlas  simplement  transcrit,  mais  une  véritable  édition  française, 

L'édition  originale,  publiée  dans  un  pays  où  les  bons  atlas  sont  communs,  y  a  ob- 
tenu un  succès  extraordinaire;  nous  ne  doutons  pas  que  notre  nouvel  ouvrage  n'ob- 
tienne, en  France,  un  succès  analogue  auprès  de  tous  ceux  qui  veulent  avoir  à  leur 
disposition  un  volume  de  format  commode  et  de  prix  modéré,  qui  soit  exact  et  clair. 

Parla  rapidité  de  sa  publication,  par  la  modicité  relative  de  son  prix,  par  sa  valeur 
scieniifique,  nous  espérons  que  notre  nouvel  atlas  rendra  un  véritable  service  aux 
études  géographiques  dans  notre  pays.  Nous  comptons  qu'il  sera  bien  accueilli  àlà 
fois  par  les  professeurs  et  par  ce  nombreux  public  qui  ne  savait  où  se  procurer  jus- 
qu'à présent  un  atlas  qui  le  satisfit  réellement  pour  le  fond,  pour  l'exécution  et  pour 
le  prix 

LISTE  DES  CARTES  COMPOSANT  L'ATLAS  MANUEL 

(Les  cartes  doubles  sont  précédées  dun  signe  * ) 


1, 

'2. 

3. 

4. 

•5. 

6. 

7. 
♦8. 

9. 

10. 

12. 

13. 
•14. 

15. 

Ï6. 
*17. 

18. 

19. 
*20. 

21. 

22. 
'23. 

24. 

25. 
♦2(5. 

27. 


Système  planétaire.  —  Lune. 

Terre  en  deux  hémisphères. 

Volcans  et  coraux. 

Pôle  antarctique.  —  Archipels  de  Poly- 
nésie. 

Pôle  arctique. 

Océan  Atlantique. 

Grand  Océan. 

Europe  politique. 

Europe  physique  hypsométrique.  — 
Massif  du  Mont-Blanc. 

Côtes  méditerranéennes  de  la  France.— 
Bassie  de  Paris. 

France  physique  hypsométrique. 

France  (partie  Nord-Ouest). 

France  (partie  Nord-Est). 

France  politique. 

France  (partie  Sud-Ouest). 

France  (partie  Sud-Est). 

Grande-Bretagne  et  Irlande 

Pays-Bas. 

Belgique  et  Luxembourg. 

Allemagne  politique. 

Danemark. 

Suède  et  Norvège. 

Suisse, 

Italie  du  Nord. 

Italie  du  Sud. 

Espagne  et  Portugal. 

Méditerranée  occidentale. 


28.  Méditerranée  orientale. 
♦29.  Presqu'île  de  Balkans. 

30.  Grèce. 

31.  Hongrie. 

*32.  Monarchie  austro-hongroise. 

33.  Alpes  franco-italiennes. 

34.  Caucasie. 

*35.  Russie  d'Europe. 

36.  Pologne. 

37.  Asie  Mineure  et  Perse. 
'38.  Asie  physique  et  politique. 

39.  Chine  et  Japon. 

40.  Indo-Chine  et  Malaisie. 
*41.  Asie  centrale  et  Inde. 

42.  Palestine. 

43.  Région  du  Nil. 

*44.  Afrique  physique  et  politique. 

15.  Algérie. 

46.  Sénégambie.   —    Côte     de    Guinée.     — 

Afrique  du  Sud. 
'47.  Amérique  du  Nord. 

48.  Amérique     du      Sud     (  feuille     septen- 

trionale) 

49.  Amérique  du  Sud  (feuille  méridionale). 
*50.  Etats-Uuis  d'Amérique. 

51.  Etats-Unis  (partie  occidentale). 

52.  Etats-Unis  (partie  orienlale) 
*53.  Australie  et  Nonvelle-Zélande. 

54.  Amérique  centrale  el  Antilles.  —  Isthme 
de  Panama. 


/>  Puy,  imprithertC  Marchessou  fils,  boulevard  Saint- Laurent,  23. 


1*& 


Revue  critique  d'histoire  et 
de  littérature 


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